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Full text of "Histoire naturelle, générale et particulière, avec la description du Cabinet du roy Volume 27"

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HISTOIRE 

NATURELLE 

DES  MINÉRAUX. 

Par  M,  le  Comte  de  B  Vffon,  Intendant  du 
Jardin  &  du  Cabinet  du  Roi,  de  V Académie 
Fraîîçoife ,  de  celle  des  Sciettces ,  b'c. 


Tome   Troifième. 


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A     PARIS, 

LM  M  P  R  ï  M  E  R  I  E    ROYALE. 


M.     D  C  C  L  X  X  X  V. 


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TABLE  DES  ARTICLES 

Contenus  dans  ce  Volume. 

MJ  E  l'Argent Page  i 

Du  Cuivre 50 

De  l'Étain 123 

Du  Plomb 164. 

Du  AIercure 211 

De  l'Antimoine 271 

Du    B  ISMUTH z%^ 

Du  Zinc 295 

De  la  Platine 316 

Du  Cobalt 359' 

Du  Nickel 377 

De  la  Mangan èse 385 

De  l'Arsenic 393 

Des  Cimens  de  nature 413 

Des  Cristallisations 425 

Des  Stalactites  vitreuses 435 

Des  Stalactites  cnflaUlfces  du  Quarti-aiftal 
de  Roche , 440 


Améthyste 4^7 

Cristaux-topazes 47^ 

Chrysolite 475 

Aigu  E-MARiNE 47^ 

Des  Stalactites  criflallifécs  du  Feld-fpath.  480 

Saphir  d'Eau 4^3 

Feld-Spath  de  Russie  ou  Pierre  de 
Labrado R 4^5 

Œ  IL    DE    Ch  AT.  .  • 487 

(El L  DE  Poisson 489 

Œil  de  Loup 491 

aventu  ri  n  e 492 

Opale 493 

Pierres  éri s ées \ 500 

Des  Stalactites  crïflallïfêes  du  Sclwd,  .  .    502 

Emeraude 503 

PÉ R  I dot 523 

Saphir  du  Brésil 525 

Œil  de  Chat  noir  ou  noirâtre 526 

BÉRYL 528 

Topaze  èr  Rubis  du  Brésil 530 

Topaze   de   Saxe 536 

G  RE  N  AT r3o 


HyAC  INTHE 5  53 

tou  r  malin  e 559 

Pierres  de  Croix 567 

Des  Stalactites  vitreuses  non  cri flallï fées.  569 

A  G  AT  ES 577 

Cornaline 585 

Sardo  IN  E 588 

Frase 589 

Onyx ^ 591 

Calcédoine 595 

Pje RRE  Hydrophane ,  Oculus  mundi .  598 

PÉTRO-SILEX. 605 

Arrangement  méthodique  des  Minéraux..  609 


HISTOIRE 


HISTOIRE 

NATURELLE 

DES    MINÉRAUX. 


DE    L  A  R  G  E  N  T. 

IN  ous  avons  dit  que  dans  la  nature  primitive ,  i'Argent 
&  l'Or  n'ont  fait  généralement  qu'une  mafle  commune, 
toujours  compofce  de  l'un  &  l'autre  de  ces  métaux, 
qui  même  ne  fè  font  jamais  complètement  féparés , 
mais  feulement  atténués ,  divifés  parles  agens  extérieurs, 
&  réduits  en  atomes  fi  petits,,  que  l'or  s'eft  trouvé  d'un 
côté  ,  &  a  laifTc  de  l'autre  la  plus  grande  partie  de 
l'argent  ;  mais  malgré  cette  féparation  d'autant  plus  natu- 
relle qu'elle  efl  plus  mécanique,  nulle  part  on  n'a  trouvé 
de  l'or  exempt  d'argent,  ni  d'argent  qui  ne  contînt  un 
peu  d*or.  Pour  la  Nature ,  ces  deux  métaux  font  du  même 
Minéraux ,  Tome  IIL  A 


2  Histoire  Natup elle 

ordre,  &l  elle  les  a  cloués  de  plufieurs  attributs  communs; 
car  quoique  leur  denfiié  foit  très-différente  (û) ,  leurs 
autres  propriétés  eflentielles  font  les  mêmes  ;  ils  font 
également  inaltérables ,  &  prefque  indeflrucflibles ,  l'un 
&  l'autre  peuvent  fubir  i'a6tion  de  tous  les  élémens 
fans  en  être  altérés  ;  tous  deux  fe  fondent  &.  fe  fubliment 
à  peu-près  au  même  degré  de  feu  (b) ;  ils  n'y  perdent 

(û)  «  Un  pied  cube  d'argent  pèfe  720  livres  ;  un  pied  cube  d'or, 
5j  1  348  livres.  Le  premier  ne  perd  dans  l'eau  qu'un  onzième  de  fon 
poids,  &  l'autre  entre  un  dix-neuvième  &  un  vingtième  ».  Diélionnaire 
de  Chimie ,  articles  de  l'Or  Ù"  de  l'Argent.  J'obferverai  que  ces  propor- 
tions ne  font  pas  exades,   car  en  fuppofant  que  l'or  perde  un  dix- 
neuvième  &  demi  de  fon  poids ,   &  que   l'argent   ne   peiàe   qu'un 
onzième,  fi  le  pied  cube  d'or  pèfe  i  348  livres  ,  le  pied  cube  d'argent 
doit  pefer  'jCo  livres  feize  trentièmes.  M.  Bomare ,  dans  fon  Didion- 
naire  d'Hifloire  Naturelle ,  dit  que  le  pouce  cube  d'argent  pèfe  6  onces 
5  gros  26  grains,  ce  qui  ne  feroit  qu'un  peii  plus  de  7  i  8  livres  le 
pied  cube,   tandis  que  dans  fa  Minéralogie,   tome  II ,  page  2  j  0 ,   il 
dit  que  le  pied  cube  d'argent  pèfe    i  1  523  onces  ,  ce  qui  fait   720 
iivres  3  onces   pour  le  pied  cube.    Les   eflimations  données  par  M. 
Briffbn  font  plus  jufles  ;  le  pied  cube  d'or  à  24  karats  ,  fondu  &  non 
battu  pèfe,  félon  lui ,  1  348  livres  i   once  41  grains,  &  le  pied  cube 
d'or  à  24  karats ,  fondu  &  battu  pèfe  1355  livres  5  onces  60  grains; 
le  pied  cube  d'argent   à    12  deniers,  fondu  &  non  battu,  pèfe  733 
iivres  3  onces  i  gros  52  grains,  &  le  pied  cube  du  même  argent  à 
J2  deniers,  c'eft-à-dire,  aufll  pur  qu'il  eft  pofllble ,  pèfe,  lorfqu'il 
€ft  forgé  ou  battu  ,735  livres    1  i   onces  7  gros  43  grains. 

(b)  Nota.  On  eft  alTuré  de  cette  fublimation  de  l'or  &  de  l'argent, 
non-feulement  par  mes  expériences  au  miroir  ardent,  mais  auITj  par  Ja 
quantité  que  l'on  en  recueille  dans  les  fuies  des  fourneaux  d'affinage 
des  Monnoies. 


DES  Minéraux,  3 

guère  plus  l'un  que  l'autre  (c) ;  ils  réfiftent  à  toute  fa 
violence,  fans  fe  convertir  en  chaux  (d);  tous  deux  ont 
aulTi  plus  de  du(flilité  que  tous  les  autres  métaux  ;  (èu- 
iement  l'argent  plus  foible  en  denfité  &  moins  compa6le 
que  l'or ,  ne  peut  prendre  autant  d'extenfion  fe) ;  &.  de 

(c)  Kunckel  ayant  tenu  de  i'or  &  de  l'argent  pendant  quelques 
femaines  en  fufion ,  afl'ure  que  i'or  n'avoit  rien  perdu  de  Ton  poids  ; 
mais  il  avoue  que  l'argent  avoit  perdu  quelques  grains.  Il  a  mal-à- 
propos  oublié  de  dire  fur  quelle  quantité. 

(d)  L'argent  tenu  au  foyer  d'un  miroir  ardent ,  fè  couvre  comme 
l'or  d'une  pellicule  vitreufe  ;  mais  M.  Macquer  qui  a  fait  cette  expé- 
rience ,  avoue  qu'on  n'efl  pas  encore  afluré  fi  cette  vitrification  pro- 
vient des  métaux,  ou  de  la  poufTière  de  l'air.  Diâionnaire  de  Chimie  » 
article  Argent, 

(e  )  «  Un  fil  d'argent  d'un  dixième  de  pouce  de  diamètre  ,  ne  fou- 
tient,  avant  de  rompre,  qu'un  poids  de  270  livres,  au  lieu  qu'un  « 
pareil  fil  d'or  foutient  500  livres.  .  .  On  peut  réduire  un  grain  « 
d'argent  en  une  lame  de  trois  aunes,  c'efl-à-dire  de  126  pouces  « 
de  longueur  fur  2  pouces  de  largeur ,  ce  qui  fait  une  étendue  de  « 
2  5  2  pouces  carrés ,  &  dès-lors  avec  une  once  d'argent ,  c'eft-à-  « 
dire  576  grains,  on  pourroit  couvrir  un  efpace  de  504  pieds  <c 
carrés  ,  Expériences  de  Mujfchenbroek.  »  Nota.  Il  y  a  certainement 
ici  une  faute  d'impreflion  qui  tombe  fur  les  mots  deux  pouces 
de  larcreur,  ce  fil  d'argent  n'avoit  en  effet  que  2  lignes  &  non 
pas  2  pouces,  &  par  conféquent  26  pouces  carrés  d'étendue,  au 
lieu  de  126;  d'après  quoi  l'on  voit  que  576  grains  ou  i  once 
d'argent,  ne  peuvent  en  effet  s'étendre  que  fur  104  &  non  pas  fur 
504  pieds  carrés,  <Sc  c'eft  encore  beaucoup  plus  que  la  denfité 
de  ce  métal  ne  paroît  l'indiquer ,  puifqu'une  once  d'or  ne  s'étend 
que  fur  106  pieds  carrés;  dès-lors,  en  prenant  ces  deux  faits  pour 
vrais ,  la  dudilité  de  l'argent  eft  prefque  aulTi  grande  que  celle  de 

A  ij 


4  Histoire  Naturelle 

même,  quoiqu'il  ne  foit  pas  fufceptible  d'une  véritable 
rouille  par  Jes  imprefTions  de  i'air  &  de  l'eau,  il  oppofe 
moins  de  réfiflance  à  l'adion  des  acides,  &  n'exige 
pas ,  comme  l'or  ,  la  réunion  de  deux  puilfances  aétives 
pour  entrer  en  difTolution  ;  le  foie  de  foufre  le  noircit  & 
le  rend  aigre  &  cafTant  ;  l'argent  peut  donc  être  attaqué 
dans  le  fein  de  la  terre  plus  fortement,  &  bien  plus 
fréquemment  que  l'or ,  &  c'eft  par  cette  raifon  que  l'on 
trouve  affez  communément  de  l'argent  minéraiifé  (f), 
tandis  qu'il  eft  extrêmement  rare  de  trouver  l'or  dans 
cet  état  d'altération  ou  de  minéralifation. 

L'argent,  quoiqu'un   peu  plus  fufible  que  l'or,  eft 


l'or,  quoique  fa  denfité  &  fa  ténacité  foient  beaucoup  moindres. 
IJ  y  a  auiïî  toute  apparence  qu'Alphonfe  Barba  fe  trompe  beaucoup 
en  difant  que  l'or  eft  cinq  fois  plus  dudile  que  l'argent;  il  aflure 
qu'une  once  d'argent  s'étend  en  un  fil  de  2400  aunes  de  longueur; 
que  cette  longueur  peut  être  couverte  par  6  grains  &  demi  d'or , 
&  qu'on  peut  dilater  l'or  au  point  qu'une  once  de  ce  métal  cou- 
vrira plus  de  dix  arpens  de  terre.  (Métallurgie  d'Alphovfe  Barba, 
tome  I ,  page  1  0  2  J. 

(f)  te  On  rencontre  de  l'argent  natif  en  rameaux  ,  entrelafics  & 
>■>  comprimés ,  quelquefois  à  la  fuperficie  des  gangues  fpathiques  & 
»  quartzeufes  ;  on  en  trouve  de  crifîallifé  en  cubes,  il  y  en  a  en 
»  pointes  ou  filets  qui  provient  de  la  décompofition  des  mines 
»  d'argent  rouges  ou  vitreuies ,  &  quelquefois  des  mines  d'argent 
»  grifes ,  &c.  Il  eft  aflez  ordinaire  de  trouver  fous  cet  argent  en 
35  filets  des  portions  plus  ou  moins  fenfibles  de  lamine  fulfureufe, 
à  la  décompofition  de  laquelle  il  doit  fon  origine  ».  Lettres  de  M. 
Demejle  à  Al.   Bernard ,   tome   II ,  page  ^j"  o. 


DES    Minéraux.  5 

cependant  un  peu  plus  dur  &  plus  fonore  (g) ;  le  blanc 
éclatant  de  fa  furface  fe  ternit,  <Sc  même  fe  noircit,  dès 
qu'elle  efl  expofée  aux  vapeurs  des  matières  inflammables, 
telles  que  celles  du  foufre ,  du  charbon ,  &  à  la  fumée 
des  fubftances  animales  ;  fi  même  il  fubit  long  -  temps 
i'impreflion  de  ces  vapeurs  fulfureufès,  il  fe  minéralife, 
&  devient  femblable  à  la  mine  que  Ton  connoît  fous 
le  nom  ^argent  vitré. 

Les  trois  propriétés  communes  à  Tor  &  à  Targent 
qu'on  a  toujours  regardés  comme  les  feuls  métaux 
parfaits ,  font  la  dudilité ,  la  fixité  au  feu  &  Tinaltéra- 
bilité  à  l'air  &  dans  Teau.  Par  toutes  les  autres  qualités 
l'argent  diffère  de  l'or ,  &  peut  foufîrir  des  changemens 
&  des  altérations  auxquels  ce  premier  métal  n'eft  pas 
fujet.  On  trouve,  à  la  vérité,  de  l'argent  qui,  comme 
Tor,  n'efl  point  minéralife,  mais  c'eft  proportionnellement 
en  bien  moindre  quantité:  car  dans  iès  mines  primor- 
diales, l'argent,  toujours  allié  d'un  peu  d'or,  eft  très- 
fbuvent  mélangé  d'autres  matières  métalliques,  &  parti- 
culièrement de  plomb  &.  de  cuivre  ;  on  regarde  même 
comme  des  mines  d'argent,  routes  celles  de  plomb  ou 
de  cuivre  qui  contiennent  une  certaine  quantité  de  ce 
métal    (h);    &  dans    les   mines   fècondaires   produites 

(gj  Cramer,  cité  pour  ce  fait  dans  le  Didionnaire  de  Chimie; 
article  de  /'Argent. 

(h)  La  plupart  des  mines  d'argent  de  Hongrie ,  ne  font  que  des, 
mines  de   cuivre  tenant  argent,  dont  ]es  plus  riches  ont  donné   i  j 


6  Histoire    Natu relle 

par  la  fliilation  èi.  le  dépôt  des  eaux,  l'argent  fe  trouve 
fou\'ent  attaqué  par  les  Tels  de  la  terre,  &  fe  prcfente 
dans  l'état  de  minéralifation  fous  différentes  formes  : 
on  peut  voir  par  les  liiles  des  Nomenclateurs  en 
minéralogie,  &.  particulièrement  par  celle  que  donne 
Vallérius ,  combien  ces  formes  font  variées ,  puifqu'il 
en   compte    dix  fortes    principales,    &   quarante  -  neuf 

ou  20  marcs  d'argent  par  quintal  <5c  beaucoup  plus  de  cuivre  ;  «  011 
»  fe'pare  ces  métaux,  dit  M.  de  Morveau  ,  par  les  procédés  fui  vans. 
»Dans  un  four  conftruit  exprès  pour  fe  rendre  maître  du  degré 
»  de  feu ,  on  arrange  l'un  à  côté  de  l'autre  les  tourteaux  de  cuivre  noir 
»  tenant  argent,  auxquels  on  a  mêlé  environ  un  quart  de  plomb,  fuivant 
«  la  quantité  d'argent  que  tient  la  mafîè  de  cuivre  ;  on  met  alors  le 
»  feu  dans  le  four,  on  place  des  charbons  jufque  fur  les  tourteaux  ; 
>»  ces  pièces  s'affaiflent,  le  plomb  qui  fe  fond  plus  aifément  que  le 
»  cuivre  &  qui  a  plus  d'affinité  avec  l'argent,  s'en  charge  &  s'écoule 
M  à  travers  les  pores  du  cuivre ,  tandis  qu'il  eft  encore  folide  ;  le  plomb 
»  &  l'argent  fe  réuniffent  dans  la  partie  inférieure  des  plaques  de  fer  ; 
»  on  raffemble  tout  le  plomb  riche  en  argent,  au  moyen  d'un  fécond 
ïi  feu  un  peu  plus  fort  où  l'on  fait  rejfuer  la  mafle  de  cuivre  ;  il  eft 
M  aifé  après  cela  de  paffer  cet  argent  à  la  coupelle ,  de  refondre  le  cuivre 
»  en  lingots ,  &  par-là  la  mine  fe  trouve  épurée  de  tout  ce  qu'elle 
»  contenoit  fans  aucune  perte. 

«  Lorfque  le  plomb  contient  de  l'argent,  on  coupelle  en  grand 
»  le  plomb  provenant  de  la  première  fonte  ,  &  on  le  convertit  en 
M  litarge  fur  un  foyer  fait  de  cendres  lefFivées  ;  on  lui  donne  un  fécond 
j>  affinage  dans  de  vraies  coupelles ,  &  les  débris  de  ces  vaifTeaux  , 
»  ainfi  que  des  fourneaux ,  &  même  là  litarge  qui  ne  feroit  pas  reçue 
M  dans  le  commerce ,  font  remis  au  fourneau  pour  en  revivifier  le 
plomb  î>.  Élémens  de  Chimie,  par  M.  de  Morveau,  tome  I,  pages  2^0 


D  E  s     M  J  N  É  R  AU  X,  7 

variétés  dans  ces  dix  fortes  ;  je  dois  cependant  obfèrver 
qu'ici  comme  dans  tout  autre  travail  des  Nomen- 
clateurs,  il  y  a  toujours  beaucoup  plus  de  noms  que 
de  chofes. 

Dans  la  plupart  des  mines  fecondaires,  l'argent  fe 
préfente  en  forme  de  minerai  pyriteux ,  c'eft-à-dire , 
mêlé  &  pénétré  des  principes  du  foufre,  ou  bien 
altéré  par  le  foie  de  foufre ,  &.  quelquefois  par 
l'arfenic  (i). 

L'acide  nitreux  difîbut  l'argent  plus  puiiTamment 
qu'aucun  autre  ;  l'acide  vitriolique  le  précipite  de  cette 
diflblution,  &  forme  avec  lui  de  très-petits  criftaux  qu'on 
pourroit  appeler  du  vitriol  d'argent:  l'acide  marin  qui 
le  diffout  auffi  ,  en  fait  des  criftaux  plus  gros  dont  la 
maffe  réunie  par  la  fufion  fe  nomme  argent  corné ^  parce 
qu'il  efl  à  demi-tranfparcnt  comme  de  la  corne. 

La  Nature  a  produit  en  quelques  endroits  de  l'argent 

(i )  «  La  mine  d'argent  rouge  eft  minéralifée  par  l'arfenic  &  le 
foufre  ;  elle  eft  d'un  rouge  plus  ou  moins  vif,  tantôt  tranfparente  « 
comme  un  rubis ,  tantôt  opaque  &  plus  ou  moins  obfcure  ;  elle  « 
eft  criftallifée  de  plufieurs  manières ,  la  plus  ordinaire  efl  en  prifmes  « 
hexaèdres ,  terminés  par  des  pyramides  obtufes  ».  Lettres  de  AI. 
Demejle  y  tome  II ,  page  -^/j.  —  Nota.  J'obferverai  que  c'efi:  à  cette 
mine  qu'il  faut  rapporter  la  féconde  variété  que  M.  Demefle  a  rap- 
portée à  la  mine  d'argent  vitreux,  puifqu'il  dit  lui-même,  que  ce 
n'efl  qu'une  modification  de  la  mine  d'argent  rouge ,  &  que  cette 
mine  vitreufe  contient  encore  un  peu  d'arfenic;  qu'elle  s'égraine  fous 
le  couteau  ,  loin  de  s'y  couper.  Voye-^  idem,  page  ^^  (i. 


8  Histoire   Natu relle 

fous  cette  forme ,  on  en  trouve  en  Hongrie ,  en  Bolième 
&  en  Saxe ,  où  il  y  a  des  mines  qui  offrent  à  la  fois 
l'argent  natif,  l'argent  rouge,  l'argent  vitré  à.  l'argent 
corné  (k):  lorfque  cette  dernière  mine  n'efl  point  altérée, 
elle  eft  demi  -  tranfparente  &  d'un  gris  -  jaunâtre  ; 
mais  fi  elle  a  été  attaquée  par  des  vapeurs  fulfureufes 
ou  par  le  foie  de  foufre ,  elle  devient  opaque  &  d'une 
couleur  brune;  l'argent  minéralifé  par  l'acide  marin,  fe 
coupe  prefque  aufTi  facilement  que  de  la  cire;  dans  cet 
état  il  efl  très-fufible,  une  partie  fe  volatilife  à  un  certain 
degré  de  feu,  ainfi  que  Targent  corné  fait  artificiellement, 
&  l'autre  partie  qui  ne  s'efl  point  volatilifée  fe  revivifie 
très-promptement  (IJ. 

Le  foufre  difTout  l'argent  par  la  fufion  &  le  réduit 
en  une  maffe  de  couleur  grife ,  6l  cette  maffe  reffemble 


(k)  Les   mines    riches   de  Saint  "  André njherg ^    font  comporees 
d'argent  natif  ou  vierge  ,  de  mine  d'argent  rouge  ,  &  de  mine  d'argent 
vitré  :    on    vend    fur   le   pied  de  la   taxe   ou  évaluation  ,    ce  qu'on 
trouve  d'argent  vierge  &  fans  mélange  ;  ou  bien  on  le  fait  imbiber 
dans  le  plomb  d'un  affinage.   Comme  ces  fortes  de  mines  riches  fe 
trouvent  aufli  fort  fouvent  mêlées  avec  des  mines  ordinaires  ,  &  qu'un 
quintal  de  ce  mélange  contient    jufqu'à  cinquante   marcs   d'argent , 
on  fe  contente   de  piler  ces   fortes   de  mines  à  (qc  ^  &.  on  les  fond 
enfuite  crues  ou  fans  les  griller.  .....    A  JoachimJIal  en  Bohème, 

on  trouve  de  temps  en  temps  parmi  les  mines,  des  lamines  d'argent 
rouge,  &  de  l'argent  vierge.  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter, 
traduit  par  M.  Hellot,  tome  II ,  in-^'  pages  2j^  &  2  ()  6 . 

(IJ   Lettres  de  M.   Demefle  ,  tome  II,  page  4^2, 

beaucoup 


D  E  s    M  I  N  L  n  AU  X,  e> 

beaucoup  à  la  mine  d'argent  vitré,  qui,  comme  celle 
de  l'argent  corné,  efl  moins  dure  que  ce  métal,  & 
peut  fe  couper  au  couteau  (l).  L'or  ne  fubit  aucun 
de  ces  changemens;  on  ne  doit  donc  pas  être  étonné 
qu'on  le  trouve  fi  rarement  fous  une  forme  minéralifée, 
&  qu'au  contraire  dans  toutes  les  mines  de  féconde 
formation ,  où  les  eaux  &  les  fëls  de  la  terre  ont  exercé 
leur  aétion,  l'argent  fe  préfente  dans  diiîérens  états  de 
minéralifation  &  fous  des  formes  plus  ou  moins  altérées  ; 
il  doit  même  être  fouvent  mêlé  de  plufieurs  matières 
étrangères  métalliques  ou  terreufes ,  tandis  que  dans 
fon  état  primordial  il  n'eft  allié  qu'avec  l'or,  ou  mêlé 
de  cuivre  &  de  plomb  ;  ces  trois  métaux  font  ceux  avec 
lefquels  l'argent  paroît  avoir  le  plus  d'affinité  ;  ce  font  du 
moins  ceux  avec  lefquels  il  fe  trouve  plus  fouvent  uni  dans 
fbn  état  déminerai  (m) ;  il  efl  bien  plus  rare  de  trouver 


(l)  Élëmens  de  Chimie  ,  par  M.  de  Morveau,  tome  I ,  page  2l^^<, 

(m)  m.  La  mine  d'argent  grife  ou  blanche,  n'efl:,  dit  M.  Demefle, 
qu'une  mine  de  cuivre  tenant  argent  ».  Cette  aflertion  efl  trop  gé- 
nérale ,  puifque  dans  le  nombre  des  mines  d'argent  grifes ,  il  y  a 
peut-être  plus  'de  mines  de  ploinb  que  de  cuivre  tenant  argent.  «  Il  y 
a  de  ces  mines  grifes  &  blanches,  continue- t- il,  qui  font  d'un* 
gris  -  clair  &  brillant ,  répandues  en  petites  maflfes  lamelleules,  «c 
rarement  bien  diAindes  dans  les  gangues  quartzeufes  ,  fouvent  u 
mêlées  de  pyrites  aurifères;  dans  les  mines  de  Hongrie,  on  en  tire  •« 
2,0  à  2.  j  marcs  d'argent  par  quintài  «.  Lettra  de  M,  Demejle, 
tome  II ,  -page  ^42. 

Minéraux,  Tome  II L  B 


lo  Histoire   Naturelle 

i'argent  uni  avec  le  mercure,  quoiqu'il  ait  aufTi  avec  ce 
fluide  métallique  une  affinité  très-marquée. 

Suivant  M.  Geller,  qui  a  fait  un  grand  travail  fur 
l'alliage  des  métaux  &.  des  demi-métaux,  celui  de  l'or 
avec  l'argent  n'augmente  que  très  -  peu  en  pefanteur 
fpécitique  ;  il  n'y  a  donc  que  peu  ou  point  de  péné- 
tration entre  ces  deux  métaux  fondus  enfèmble  ;  mais 
dans  l'alliage  de  l'argent  avec  le  cuivre,  qu'on  peut 
faire  de  même  en  toute  proportion ,  le  compofé  de 
ces  deux  métaux  devient  fpéciiiquement  plus  pefant, 
tandis  que  l'alliage  du  cuivre  avec  l'or  l'efl  fenfiblement 
moins;  ainfi  dans  l'alliage  de  l'argent  &  du  cuivre, 
le  volume  diminue  &  la  maffe  fe  rcfTerre,  au  lieu  que 
le  volume  augmente  par  l'extenlion  de  la  maffe  dans 
celui  de  l'or  &  du  cuivre.  Au  relie ,  le  mélange  du 
cuivre  rend  également  l'argent  &  l'or  plus  fonores  & 
plus  durs ,  fans  diminuer  tle  beaucoup  leur  duétilité  ; 
on  prétend  même  qu'il  peut  la  leur  conferver  lorfqu'on 
ne  le  mêle  qu'en  petite  quantité ,  &  qu'il  défend  ces 
métaux  contre  les  vapeurs  du  charb.on  qui,  félon  nos 
Chimifles,  en  attaquent  &  diminuent  la  qualité  dudlile; 
cependant,  comme  nous  l'avons  déjà  remarqué  à  l'article 
de.  l'or,  on  ne  s'aperçoit  guère  de  cette  diminution 
de  dudilité  caufée  par  la  vapeur  du  charbon;  car  il  efl 
d'ufage  dans  les  monnoies,  lorfque  \es  creufcts  de  fer, 
qui  contiennent  jufqu'à  2^00  marcs  d'argent,  font 
prefque  pleins  de  la  matière  en  fofion ,  il  eft,  dis-je,  d'ufage 


DES    Minéraux.  h 

d'enlever  les  couvercles  de  ces  creufets  pour  achever  de 
les  remplir  de  charbon,  &  d'entretenir  la  chaleur  par  de 
nouveau  charbon  dont  le  métal  efl:  toujours  recouvert, 
fans  que  l'on  remarque  aucune  diminution  de  dudilité 
dans  les  lames  qui  rcfultent  de  cette  fonte  ('îij , 

L'argent  allié  avec  le  plomb  ainfi  qu'avec  l'étain, 
devient  fpécifiquement  plus  pefant  ;  mais  l'étain  enlève 
à  l'argent  comme  à  l'or,  fa  du6lilité  :  le  plomb  entraîne 
l'argent  dans  la  fufion  &  le  fépare  du  cuivre  ;  il  a  donc 
plus  d'affinité  avec  l'argent  qu'avec  le  cuivre.  M.  Geller, 
&  la  plupart  des  Chimifles,  après  lui,  ont  dit  que  le  fer 
s'allioit  aulfi  très-bien  à  l'argent  :  ce  fait  m'ayant  paru 
douteux  ,  j'ai  prié  M.  de  Morveau  de  le  vérifier  ;  il 
s'efl  affuré  par  l'expérience  qu'il  ne  fe  fait  aucune 
union  intime,  aucun  alliage  entre  le  fer  &  l'argent,  & 
j'ai  vu  moi-même,  en  voulant  faire  de  l'acier  damaffé,  que 
ces  deux  métaux  ne  peuvent  contrarier  aucune  union. 

On  fait  que  tous  les  métaux  imparfaits  peuvent  ie 
calciner  &  fe  convertir  en  une  forte  de  chaux,  en  \c^ 
tenant  long-temps  en  fufion,  &  les  agitant  de  manière 
que  toutes  leurs  parties  fondues  fë  préfentent  fucceffi- 
Vement  à  l'air  ;  on  fait  de  plus ,  que  tous  augmentent 
de  volume  &  de   poids  en  prenant  cet  état  de  chaux. 

Nous  avons  dit  <5l  répété  (o) ,  que  cette  augmentation 

^ . .^ I  ■ 

(ïï)    Obfervdiion  communiquée  par  M.  Tillet  ,   en  Avril  i y  8 1 , 

(o)   Voyez  ie  Dilcours  qui  fert  d'imrodudioa  à  l'Hifloire  des 
Miiierauxi 

Bij 


12  HiSTOi  RE    Nature  LLE 

de  quantité  provenoit   uniquement  des  particules   d'air 
fixées    par   ie   feu,  &:  réunies  à  la  fubftance  du  métal 
qu'elles  ne  font  que  mafquer,  pui/qu'on  peut  toujours 
iuf  rendre  fon  premier  ^t  en  préfentant  à  cet  air  fixé 
quelques  matières  inflammables  avec  lefquelles  il  ait  plus 
d'affinité  qu'avec    le  métal;    dans    ia  combuflion  cette 
matière  inflammable  dégage  l'air  fixé ,  l'enlève ,  &  lailTe 
par  conféquent  le  métal  (bus  fa  première  forme.  Tous 
ies  métaux  imparfaits  &  les  demi -métaux  peuvent  ainfi 
fe  convertir  en  chaux  ;  mais  l'or  &  l'argent  fè  /ont  tou- 
jours   refufés    à    cette    efpèce    de    converfion  ,    parce 
qu'apparemment  ils  ont  moins   d'affinité  que  les  autres 
avec  l'air,  &  que  malgré  la  fufion  qui  tient  leurs  parties 
divifées ,  ces   mêmes    parties    ont   néanmoins  entr'elies 
encore  trop  d'adhérence  pour  que  l'air  puiffie  les  féparer 
&    s'y   incorporer  :   &   cette   réliftancc  de   l'or   &    de 
j'argent  à   toute  aélion  de  l'air,   donne   le  moyen  de 
purifier  ces  deux  métaux  par  la  feule  force  du  feu,  car 
il  ne  faut  pour  les  dépouiller  de  toute  autre  matière, 
qu'en  agiter  la  fonte,  afin  de  préfenter  à  fa  furface  toutes 
ks  parties  des  autres  matières  qui  y  font  contenues,  & 
qui    bientôt  par  leur  calcination   ou   leur  combufiion , 
îaifferont   l'or  ou  Targent  feuls  en  fiifion  &  fous  leur 
forme  métallique.    Cette   manière    de'  purifier  l'or  & 
i'argent  étoit  anciennement  en  ufage ,  mais  on  a  trouvé 
une  façon  plus  expéditive  en  employant  le  plomb  qui, 
dans  la  fonte  de  ces  métaux,  détruit,  ou  plutôt  fépare 


DES  Minéraux.  ij 

&  réduit  en  fcories  toutes  les  autres  matières  métal- 
liques (p),  dont  ils  peuvent  être  mêlés;  &:  le  plomb 
iui-même  fe  fcorifiant  avec  les  autres  métaux  dont  il 
s'cft  faifi,  il  les  fépare  de  Tor  &  de  Targent,  les  entraîne, 
ou  plutôt  les  emporte  &.  s'élève  avec  eux  à  la  furface 
de  la  fonte  où  ils  fe  calcinent,  &  fe  fcorihent  tous  en- 
femble  par  le  contad  de  l'air,  à  mefure  qu'on  remue 
la  matière  en  fufion,  &.  qu'on  en  découvre  fucceffive' 
ment  la  furface  qui  ne  fe  fcorifieroit  ni  ne  fe  calcineroit, 
fi  elle  n'étoit  inceffamment  expofée  à  i'aélion  de  l'air 
libre  ;  il  faut  donc  enlever  ou  faire  écouler  ces  fcories 
à  mefure  qu'elles  fè  forment ,  ce  qui  fè  fait  aifément , 
parce  qu'elles  furnagent  &  furmontent  toujours  l'or  & 
l'argent  en  ^{low.  cependant  on  a  encore  trouvé  une 
manière  plus  facile  de  fe  débarraffer  de  ces  fcories , 
en  fe  fervant  de  vaiffeaux  plats  &.  évafés  qu'on  appelle 
coupelles,  &.  qui  étant  faits  d'une  matière  sèclie ,  poreufè 
&  réfiflante  au  feu,  abforbe  dans  fes  pores  les  fcories, 
tant  du  plomb  que  des  autres  minéraux  métalliques  à 
mefure  qu'elles  fe  forment ,  en  forte  que  les  coupelles 
ne  retiennent  &.  ne  confervent  dans  leur  capacité  exté- 
rieure, que  le  métal  d'or  ou  d'argent,  qui,  par  la  forte 
attraction  de  leurs  parties  conflituantes ,  fe  forme  &  fè 

(p)  Nota,  II  n'y  a  que  le  ïtx  qui  ,  coiiune  nous  Wyons  dit  à 
l'article  de  l'or,  ne  fe  fcpare  pas  en  entier  par  le  moyen  du  plomb, 
il  faut,  fuivant  M.  Poerner,  y  ajouter  du  bifmuth  pour  achever  de 
icorifier  le  fer. 


14  Histoire   Naturelle 

.  préfente  toujours  en  une  maiïe  globuleufè  appelée 
hûuton  de  fin  ;  il  faut  une  plus  forte  clialeur  pour  tenir 
ce  métal  fin  en  flifion  que  lorfqu'il  étoit  encore  mêlé 
de  plomb  ;  car  le  bouton  de  fin  /è  confolide  prefque 
fabitement  au  moment  que  l'or  ou  l'argent  qu'il  con- 
tient, font  entièrement  puritiés  ;  on  le  voit  donc  tout- 
à -coup  briller  de  l'éclat  métallique,  &  ce  coup  de 
lumière  s'appelle  coriifcatlon  dans  l'art  de  TAfîineur  dont 
nous  abrégeons  ici  les  procédés ,  comme  ne  tenant 
pas  dire6tement  à  notre  objet. 

On  a  regarde  comme  argent  natif  tout  celui  qu'on 
trouve  dans  le  fein  de  la  terre  fous  fà  forme  de 
métal;  mais  dans  ce  fens  il  faut  en  diflinguer  de  deux 
fortes,  comme  nous  l'avons  fait  pour  l'or;  la  première 
forte  d'argent  natif,  efl  celle  qui  provient  de  la  ilifion 
par  le  feu  primitif,  &  qui  fe  trouve  quelquefois  en 
grands  morceaux  (q) ,  mais  bien  plus  fbuvent  en  filets 


(q)  «  II  y  a  dans  le  Cabinet  du  "Roi  de  Danemarck  ,  deux  très- 
»  grands  morceaux  de  mine  d'argent,  tous  deux  dans  une  j?i erre 
V  blanche ,  plus  dure  que  le  w^/Z'/v  (  c'efl-à-dire  dans  du  quartz).  Le 
>ï  plus  grand  de  ces  jnorceaux  a  cinq  jjieds  fix  pouces  de  longueur, 
>»&  le  fécond  quatre  pieds,  tous  deux  en  forme  de  folives  ;  on 
»  eflime  qu'il  y  a  trois  quarts  d'argent ,  fur  un  quart  de  pierre,  & 
le  premier  morceau  pcfe  560  livres  m.  Journal  étranger,  mois  de  juin 
17^8.—  On  aflure  que  dans  le  Hartz,  on  a  trouvé  un  morceau 
d'argent  fi  confidérable ,  qu'étant  battu  on  en  fit  une  table  autour 
de  laquelle  pouvoient  fe  tenir  vingt- quatre  perfonnes.  Dïdïomairc 
4'Hipïre  Naturelle ,  par  Al.  de  Bomare,  article  Argent. 


DES    Minéraux,  ij 

ou  en  petites  maiïes  feuilletées  &  ramifices  clans  le  quartz 
Si.  autres  matières  vitreufes  ;  la  féconde  forte  d'argent  natif, 
eft  en  grains,  en  paillettes  ou  en  poudre,  c'eft-à-dire, 
en  débris  qui  proviennent  de  ces  mines  primordiales, 
&  qui  ont  été  détachés  par  les  agens  extérieurs  , 
ôi  entraînés  au  loin  par  le  mouvement  des  eaux  :  ce  font 
ces  mêmes  débris  raflemblés ,  qui,  dans  certains  lieux, 
ont  formé  des  mines  fecondaires  d'argent ,  où  fouvent 
il  a  changé  de  forme  en  fe  minéralifant. 

L'argent  de  première  formation  efl  ordinairement 
incruflé  dans  le  quartz  ;  fouvent  il  efl  accompagné 
d'autres  métaux  &.  de  matières  étrangères  en  quantité 
fi  confidérable  ,  que  les  premières  fontes  ,  même 
avec  le  fecours  du  plomb,  ne  fuffifent  pas  pour  le 
purifier. 

Après  les  mines  d'argent  natif,  les  plus  riches  font 
celles  d'argent  corné  &  d'argent  vitré  ;  ces  mines  font 
brunes ,  noirâtres  ou  grifes  ,  elles  font  flexibles  ,  & 
même  celle  d'argent  corné  efl  extenfible  fous  le  mar- 
teau, à  peu-pres  comme  le  plomb;  les  mines  d'argent 
rouge  au  contraire  ,  ne  font  pas  extenfibles ,  mais 
cafTantes  ;  ces  dernières  mines  font  comme  leè  pre- 
mières ,  fort  riches  en  métal. 

Nous  allons  fuivre  le  même  ordre  que  dans  l'article 
de  l'or,  pour  l'indication  des  lieux  où  fe  trouvent  les 
principales  mines  d'où  l'on  tire  l'argent.  En  France  on 
connoifToit  affezi  anciennement  celles  des  montagnes  des 


i6  H I STO IRE   Naturelle 

Vofges  ouvertes  dès  le  dixième  fiècle  (r) ,  &  d'autres 
dans   pluiieurs  provinces,   comme  en  Languedoc  (f), 

en 

^r)  ce  Dès  le  dixième  fiède  ,  il  y  avoit  plus  de  trente  puits  de  mines 
»  ouverts  dans  les  montagnes  des  Vofges  ,  depuis  les  fources  de  la  Mo- 
3>  Telle  jufqu'à  celles  de  ia  Sarre;  on  en  tiroit  de  l'argent  <Sc  du  cuivre  : 
»  on  a  renouvelé  avec  fuccès ,  en  différentes  époques ,  plufieurs  de 
»  ces  anciennes  mines;  loin  d'être  épuilées^  elles  paroifîent  encore 
5j  très-riches.  On  peut  croire  que  dans  toute  cette  chaîne  de  mon- 
»  tagnes ,  tous  les  rochers  renferment  également  dans  leur  fein  ces 
»  riches  minéraux ,  puifque  ces  rochers  font  généralement  de  la  même 
nature  &  la  plus  analogue  aux  produdions  métalliques.  Mais  pour- 
quoi offrir  aux  hommes  les  vaines  «Se  cruelles  riche/îès  que  recèle 
»  la  terre;  les  vrais  tréfors  font  fous  nos  pas;  tel  qui  fauroit  ajouter 
»  un  grain  à  chaque  épi  qui  jaunit  dans  nos  champs  ,  feroit  à  l'œil 
5»  du  Sage  un  plus  beau  préfent  au  monde  ,  que  celui  qui  découvrit 
le  Potofi  ».  Hïjioire  de  Lorraine ,  far  JVI.  l'Abbé  Bexon^  page  64, 
—  La  mine  de  Saint- Pierre  qui  n'eil  pas  éloignée  de  Giromagny , 
prcfente  de  grands  travaux;  le  minéral  ell  d'argent  mêlé  d'un  peu  de 
cuivre.  .  .  .  Vis-à-vis  la  mine  de  Sainte-Barbe ,  dans  la  montagne  du 
Balon,  il  y  a  un  filon  de  mine  d'argent.  .  .  .  On  connoît  auffi  deux 
filons  de  mine  d'argent  dans  la  vallée  de  Saint -Amarin ,  celui  de 
Vercholti  &  celui  de  Saint- Antoine.  Exploitation  des  mines ,  par  M, 
de  Genfanne :  Mémoires  des  Savons  étrangers,  tome  IV,  pages  14.1 
«y  fuivantes. 

(f)  Dans  le  douzième  ficelé  les  mines  d'argent  du  Languedoc  étoieiit 
travaillées  très-utilement  par  les  Seigneurs  des  terres  où  elles  fe  trou- 
voient  ;  toutes  ces  mines ,  ainfi  que  plufieurs  autres  qui  font  aban- 
données ,  ne  font  néanmoins  pas  entièrement  épuifées  ,  d'autant  plus 
que  les  Anciens  n'ayant  pas  l'ufage  de  la  poudre,  ne  pouvoient  pas 
faire  éclater  les  rochers  durs  ;  ils  ne  pouvoient  que  les  calciner  à 
force  de  bois  qu'ils  arrangeoicm  dans  ces  fouteriains,  &  auquel  ils 

meiioiem 


\D  E  s    M  I  A'  L  R  A  U  X.  \j 

en  Gévaiidan  &  en  Rouergue  (t) ,  dans  le  Maine  &  dans 

».       — ■  — .^ ■  " 

mettoient  le  feu;  &  lorfque  fe  rocher  trop  dur,  ne  le  brifoit  pas  après 

cette  calcination,  ils  abandonnoient  le  filon Il  paroît  aufii  par 

les  Annales  de  l'abbaye  de  Villeniagne,  &.  par  d'anciens  titres  des  feig- 
neurs  de  Beaucaire,  qu'à  la  fin  du  quatorzième  fiècle,  les  mines- de 
France  ctoient  encore  aufîi.  riches  qu'aucune  de  l'Europe.  Afcmoires 
de  l' Académie  des  Sciences ,  année  i  jj  S  ,  fciges  i  ^  ^  &  fiiivdntes, 
—  «Sur  les  montagnes  noires  en  Lancaiedoc  ,  ii  y  a,  dit  Coelinr 
Arcon  (en  i  66j  ),  une  mine  d'argent  ,  à  laquelle  le  feigneur  de  « 
Cannelle  fit  travailler  jufqu'à  ce  qu'elle  fût  inondée.  Il  y  en  a  une  ce 
aune  à  Lanet ,  dont  lept  quintaux  de  minerai  donnoient  un  quintal  oc 
de  cuivre  &  (juatre  marcs  d'argent;  mais  au  bout  de  cin"j  ans  on  <c 
Tabandonna  à  caufe  de  la  mauvaise  odeur.  Il  y  a  d'autres  filons  «5 
dans  la  même  montagne;  il  y  a  aufli  une  mine  à  Davefan,  dont  te 
on  tiroit  par  quintal  de  matières  ,  dix  onces  d'argent  &  un  peu  de  « 
plomb.  ...  On  a  fait  autrefois  de  grands  tra\aux  dans  le  })ays  de  « 
Corbières,  pour  cultiver  des  minerais  de  cuivre,  de  plomb  &:  " 
d'antimoine.  .  .  .  On  y  a  trouvé  quelques  rognons  mctalliques  de  ce 
fix  à  fept  quintaux  chacun,  qui  donnoient  dix  onces  d'argent  par  « 
quintal,  avec  un  peu  de  plomb  &  de  cuivre  w.  Barba;  yVléiallurgic , 
tome  II,  pages  26 S  &  2y6. 

(l)  On  voit  par  les  regillres  de  l'Hàtel-de-vilIe  de  Ville-franche 
en  Rouergue ,  qu'il  y  a  eu  anciennement  des  mines  d'argent  ouvertes 
aux  environs ,  auxquelles  on  a  travaillé  juique  dans  le  leizicme  fiècle. 
Defcrtpt'ion  de  la  France,  par  Piganiol  ;  Paris,  i  y  i  S ,  tome  IV, 
page  20  S. —  Strabon  ,  qui  vivoit  du  temps  d'Augufte,  dit  que  les 
Romains  tiroient  de  l'ar^jent  du  Gcvaudan  &  du  Rouertrue ,  & 
qu'ils  creufcrent  âu(îx  dans  les  Pyrénées,  pour  en  tirer  ce  métal  aind 
que  l'or.  Il  ajoute  que  le  pays  fitué  entre  les  Pyrénées  &  les  Alpes, 
avoit  fourni  beaucoup  de  ce  dernier  méial ,  &  que  l'or  devint  plus 
commun  à  Rome  ajirès  la  conquête  des  Gaules.  .  .  .  Célar,  dans 
Tes  Commentaires,  dit  que  les  mines  avoieiu  été  travaillées  même  avant 

Alménmx  j  Tome  II L  C 


i8  Histoire  Naturelle 

l'Angoumois  (^u) ;  ^  nouvellement  on  en  a  trouvé  en' 
Dauphinc  ,  qui  ont  prcfenté  d'abord  d'affez  grandes- 
richeffcs.  M.  de  Genfànne  en  a  reconnu  quelques  autres 
dans  le  Languedoc  (x)  ;  mais  le  produit  de  la  plupart 

la  conquête,  ôc  il  falloit  qu'il  y  eiJt  en  effet  beaucoup"  d'or  dans  les 
Gaules,  vu  la  quaniitc  que  Ce(ar  eu  fit  pafier  en  Italie,  &  qui  y 
fut  vendu  à  bas  prix;  (  i  500  petits  Teflerces  le  marc,  ce  qui  ne 
revient,  ielon  Budt'e,  qu'à  62  livres  10  fous  de  notre  monnuit). 
Alémoircs  de  l' Académie  des  Sciences,  année  ijj6,  p-iges  j ^ ^  d/ 
fuivantes. 

(u)  Il  falloit  qu'il  y  eut  autrefois  des  mines  d'or  (Se  d'argent  dans 
le  Maine  ,  puifque  l'article  LXX  de  la  coutume  du  Maine  ,  porte 
que  la  fortune  d'or,  trouvée  en  mine  appartient  au  Roi,  &  la  for- 
tune d'afgent,  pareillement  trouvée  en  mine,  au  Comte  Vicomte 
de  Beaumont,  &  Baron.  Idem,  page  lyS.  —  Oji  a  découvert  à 
Montmeroil  proche  Aiigoulême  ,  une  mine  d'argent  ,  mais  on  ne 
fa  pas  exploitée.  Voyage  hijîor'ique  de  l'Europe  ;  Pans,  j  6  () ^ ^ 
tome  1,  page   8  S. 

(x)  Au-deffous  du  château  deTournel,  on  nous  a  fait  voir  aupics 
du  moulin  qui  efl  fur  le  bord  de  la  rivière,  un  très  -  beau  filon  de 
mine  de  plomb  &  argent.  Cette  mine  qui  n'a  point  été  touchée 
mériteroit  d'être  exploitée,  parce  que  la  veine  fe  fuit  très-bien;  on 
y  remarque  fur  la  tête  qui  paroît  au  jour ,  de  la  pyrite  mêlée  avec 
de  la  mine  de  plomb,  lur   toute   fa   longueur,   ce  qui   en  carac^érife 

l:i   bonté Il  y    a  auprès   du    village   de  Mataval ,   un    filon  de 

mine  de  plomb  &  argent ....  A  une  demi -lieue  de  Bahours,  on 
trouve  au  fond  d'uu  vallon  ,  une  mine  de  plomb  qui  rend  depuis 
lept  jufqu'à  neuf  onces  d'argent  par  quintal  de  minerai  ;  le  filon 
traverfe  le  ruifleau  &  fe  prolonge  des  deux  côtés  dans  l'intérieur,  & 
le  long  des  montagnes  oppofées.  HiJIoire  Naturelle  du  Languedoc , 
par  M.  de  Genfmne  ^  tome  II,  pages  :i2  ,  240  &  24S  .  .  .  .  Au- 
deffous  de  la  paroifle  de  Saint-André,  diocèfe  d'Uzcs,  au  lieu  appelé 


D  E  s     Aï  I  N  É  R  A  U  X,  19 

de  CCS  mines  ne  payeroit  pas  la  dcpenfe  de  leur  travail, 
&  dans  un  pays  comme  la  France ,  où  l'on  peut 
employer  les  hommes  à  des  travaux  vraiment  utiles  , 
on  feroit  un  bien  réel  en  défendant  ceux  de  la  fouille 
des  mines  d'or  &  d'argent ,  qui  ne  peuvent  produire 
qu'une  ricliefTe  fi6tive  &  toujours  décroiflante. 

En  Efpagne ,  la  mine  de  Gnadalcanal  dans  la  Sierra 
Moraia  ou  montagne  Noire,  efl  l'une  des  plus  fameufes; 
elle  a  été  travaillée  dès  le  temps  des  Romains  (y) , 
enfuite  abandonnée,  puis  reprife  &  abandonnée  de 
nouveau ,  &  enfin  encore  attaquée  dans  ces  derniers 
temps  :  on  affure  qu'autrefois  elle  a  fourni  de  très- 
gnndes  richeffes ,  &  qu'elle  n'eft  pas  à  beaucoup  près 
cpuifée;  cependant  les  dernières  tentatives  n'ont  point 

Y Ejhade ,  il  y  a  un  très -bon  filon  de  mine  d'argent  grife.  Hïjlo'irc 
Naturelle  du  Languedoc,  par  AL  de  Genfanne ,  tome  I,  page  16 j. 
< — Il  y  a  dans  la  montagne  appelée  les  Cacarnes ,  diocci'e  de  Pons, 
une  mine  de  plomb  &  argent  fort  riche;  mais  le  minerai  n'y  efl 
'  })as  abondant  ;  il  y  a  une  autre  mine  femblable ,  mais  moins  riche 
Cil  argent,  au  lieu  appelé  Brïoun,  le  tout  dans  le  territoire  de  Rioufet. 
Idem,  tome  II,  page  2  0  j) .  —  En  remontant  de  Colombières  vers 
Donts,  on  trouve  près  de  ce  dernier  endroit  de  iiès-bonnes  mines 
de  plomb  &  argent.  Idem,  tome  II,  page  21  j.  — Aux  Corteilles  , 
diocèfe  de  Narbonne,  il  y  a  un  très  -  beau  filon  de  mine  d'argent, 
ijièk'e  de  blende.  Idem,   tome  II,  page  1S8. 

(y)  Pline  dit  que  l'argent  le  plus  pur  fe  tiroit  de  l'Efpagne ,  & 
que  l'on  y  exploitoit  des  mines  d'or  qui  avoient  été  ouvertes  par 
A.nnibal,  &  néanmoins  n'étoient  pas  encore  à  beaucoup  près  épuifces. 
t'mc  XXX,  chapitre  xxvil. 


20  Histoire  Natu relle 

eu  de  fuccès,  &  peut-être  fera-t-on  forcé  cfe  renoncer 

aux  cfpcrances    que   Jonnoit    Ton    ancienne   &    grande 

célébrité,  ^c   Les    fommcts    des    montagnes   autour    de 

"  Guadalcanal ,   dit    M.   Bowles  ,   font  tous  arrondis,   ôl 

»  par-tout    à  peu- près  de  ia  même  hauteur;    les  pierres 

»  en  font  fort  dures,  &  reffcmblent  au  grès  de  Turquie 

»  (  Cûs  Turcica) li  y   a  deux    liions  du    levant   au 

"  couchant,    qui  fe    rendent  à  la    grande    veine   dont  la 

»  direction   elt   du    nord  au  fiid  ;  on   peut    la  fuivre  de 

>^  l'œil  dans   un   efpace  de  plus  de  deux  cents  pas  à    la 

»  fuperficie  ;    a    une    lieue    &    demie    au    couchant    de 

'^  Guadalcanal,  il  y  a  une  autre  mine  dans  un  roc  élevé; 

3'  la  veine   efl   renverfée ,  c'cil-à -dire  ,  qu'elle    eft    plus 

■  riche  à  la  fiipcrficie  qu'au  fond  ;  tWt  peut  avoir  feize 

^>  pieds  d'épaiifeur,  &  elle  eft,  comme  les   précédentes, 

>>  compofée    de   quartz   &    de  fpath.   A  deux   lieues    au 

5>  levant  de  la  même  ville,  il  y  a  une  autre  mine  dont 

31  la    veine  eft   élevée  de   deux  ])ieds  hors  de  terre ,    & 

>>  qui  n'a  que  deux  pieds  d'épaifteur.  Au  refte,  ces  mines, 

?i  qui    fe    préfentent  avec   de   fi   belles  apparences ,  font 

"  ordinairement    trompeufès;    elles    donnent  d'abord   de 

î>  l'argent  ;    mais  en  defcendant   plus    bas  on  ne   trouve 

plus  que  du  plomb.   »  Ce  Naturalifte  parle  auffi  d'une 

mine  d'argent  fans  plomb,  fituée  au  midi  &  à  quelques 

lieues  de  diftance  de  Zalamea.  Il  y  a  une  mine  d'argent 

dans  la  montagne  qui   eft  au   nord   de   Lografo  (i) ,  & 

(tJ  Bïjloirc  Naturelle  d'Efpagne,  par  M.   Bowles,  pages  6 ^  & 


DES    Minéraux,  21 

piufieurs  autres  dans  les  Pyrénées ,  qui  ont  été  travaillées 
par  les  Anciens,  &  qui  maintenant  font  ahandonnées  ^a^ ; 
il  y  en  a  auiïi  dans  ic^  Alpes  &  en  piufieurs  endroits 
de  la  SuifTe.  M."  Scheuchzer,  Cappeler  &i  Guettard 
en    ont   fait  mention    (l^) ,   &  ce  font    fans   dout^    ces 


fuïv.  Cet  Auteur  parle  aufTi  de  quelques  autres  miaes  dumcnie  canton, 
où  l'on  trouve  de  l'argent   vierge,  de  l'argent  vitré,  (Sec. 

(d)  L'avarice  a  cté  fouvent  trompce  par  le  fuccès  des  exploitations 
faites  par  les  Phéniciens,  les  Carthaginois  &.les  Romains.  Les  premiers, 
au  rapport  de  Diodore  de  Sicile  ,  trouvèrent  tant  d'or  &  d'argent 
dans  les  Pyrénées ,  qu'ils  en  mirent  aux  ancres  de  leurs  vai/leaux  ; 
on  tiroit  en  trois  jours  un  talent  eubo'K|ue  en  argent,  ce  cjui  montoit 
à  huit  cents  ducats  ;  enflammés  par  ce  récit ,  des  j^articuliers  ont 
tenté  des  recherches  dans  la  partie  feptentrionaie  des  Pyrénées  ;  ils 
femblent  avoir  ignoré  que  le  côté  méridional  a  toujours  été  regardé 
comme  le  ])Ius  riche  en  métaux.  Tite-Live  parle  de  l'orbe  de  l'argent 
que  les  mines  de  i/i/^rf 'fournifloient  aux  Romains;  les  monts  qui 
s'alongent  vers  le  nord  jufqu'à  Pampelune ,  font  fameux,  fuivant 
Alphonfe  Barba,  par  la  quantité  d'argent  qu'on  en  a  tirée;  ils 
s'étendent  aufli  vers  l'Ebre  ,  dont  la  richefle  ell  vantée  par  Ariftote 
&  par  Claudien:/n  Jheriâ  narrant  combujiis  aliquando  a  pafor'ibus  Jilvis, 
calenteque  ex  ïgnibus  terra ,  manifejtatum  argentum  dejluxi[je.  Ciimque 
pojlmodiim  terrœ  motus  fupervenijfent ,  eruptis  hintibus  magnam  copitvn 
(ircrenti  Jîmul  coUeâam,  Arifîot.  de  Mirab.  aufcult.  —  L'Hidoire  ne 
cite  point  les  mines  que  les  Anciens  ont  exploitées  du  côté  de 
France,  ce  qui  prouve  qu'elles  leur  ont  paru  moins  utiles  que  les 
mines  d'Efpagne  ;  aulTi  avons -nous  remarqué  que  les  entreprifes 
tentées  dans  cette  }>artie  ont  iMefque  toujours  été  ruineufes.  EJfais 
fur  la  minéralogie  des  Pyrénées ,  in-^.'  page  2^^. 

(b)  M.  Scheuchzer  dit  qu'il  y  a  une  mine  d'nrgent  à  Jchanneherg, 
à  BaranvaU M.  Capptler  dit  que  le  cuivre  mêlé  à  l'argent  le 


22  H 1 STO IRE    Naturelle 

hautes  iiu)iU3gnes  des  P3  renées  &  des  Alpes  ,  qui 
renferment  les  mines  primordiales  d'or  (5c  d'argent, 
dont: on  trouve  les  débris  en  paillettes  dans  les  eaux 
qui  en  découlent  ;  toutes  les  mines  de  féconde  forma- 
tion font  dans  les  lieux  inférieurs  au  pied  de  ces 
montagnes,  &  dans  les  collines  formées  originaire- 
ment par  le  mouvement  &  le  dépôt  des  eaux  du  vieil 
Océan. 

Les  mines  d'argent  qui  nous  font  les  mieux  connues 
en  Europe  ,  font  celles  de  l'Allemagne  ;  il  y  en  a 
piufieurs  que  l'on  exploite  depuis  très-long-temps,  dL 
l'on  en  découvre  affez  fréquemment  de  nouvell(*^s. 
?vl.  de  Jufli  ,  fivant  Minéralogifle,  dit  en  avoir  trouvé 
fix  en  175  I,  dont  deux  font  fort  riches,  &  font  fituées 
fur  les  frontières  de  la  Styrie  ('cj.  Selon  lui,  ces  mines 


jiiomre   de    toutes   parts    dans   le    mont    Sj/in    au  -  de  (Tu  s    de    Zill'ts. 
yilémoires  de    AI.   Cuettanl  dans    ceux   de    i Académie   des  Sciences 
iinnce  17^2,  page  S -3-  —  On  a  découvert  en   creufant   le   baffin 

de   Kriembach,  qu'une  pierre   bleuâtre  lenfennoit   de  l'argent 

Il   y  a   aufli    de    l'argent    dans    le   canton   d  Underwald Les 

environs  de  Bex   &  du  lac  Léman  ^  renferment  des  veines  d'argent. 
Jdiw ,  pages  j'j'j»   &  ^^6. 

(c)^^  La  plus  riche  refîemble  à  une  pierre  brune  tirant  furie  rouge, 
?5  &  l'autre  relTemble  à  une  pierre  blanche,  &  fe  trouve  près   d'An- 

V  naberg,  cette  pierre  blanche  ne  paroît  être  qu'une  pierre  calcaire; 
j>  l'eau  agit  fur  elle,  après  avoir  été  calcinée,  comme  fur  une  pierre 

V  à  chaux,  &  elle  ne  contient  ni  foufre,  ni  arfenic  ni  aucun  métal: 
^>  l'on  n'y  aperçoit  que  l'argent  fous  une  forme  métallique  au  moyen 


Ù  £  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  2  -» 

font  mt-Ices  de  fubftances  calcaires  en  grande  quaiuitc, 
êi.  cependant  il  ailure  qu'elles  ne  perdent  rien  de  leur 
poids  lorfcju'elles  font  grillées  par  le  feu,  &  qu'il  ne 
s'en  élève  pas  la  moindre  fumée  ou  vapeur  pendant  la 
calcination  ;  ces  afiertions  font  difficiles  à  concilier;  car 
il  ell  certain  que  toute  fubftance  calcaire  perd  beaucoup 
de  fon  poids  lorfqu'elle  ell  calcinée,  âc  que  par  cou- 
féquent  cette  mine  d'Awjûltr^,  dont  parle  M.  de  Juili, 
doit  perdre  en  poids  à  proportion  de  ce  qu'elle  contient 
de  fdbftancc  calcaire.  Ce  fa\ant  Minéralogifle,  affure  qu'il 
exiile  un  très-grand  nombre  de  mines  d'argent  mincralifc 
par  l'alka'i ,  mais  cette  opinion  doit  être  interprétée,  car 
l'alkaii  feul  ne  pourroit  opérer  cet  effet;  tandis  que  je  foie 
de  foufre  ,  c'c(t-à-dirc,  les  principes  du  foufre  réunis  à 
l'alkaii  peuvent  le  produire  ;  &  comme  M.  de  Julli  ne 
parle  pas  du  foie  de  foufre,  mais  de  l'alkaii  fimple  ,  fès 
expériences  ne  me  paroiffent  pas  concluantes  ;  car 
falkali  minéral  feul  n'a  aucune  aétion  fur  l'argent  en 
maffe:  &  nous  pouvons  très-bien  entendre  la  formation 
de  la  mine  blanche  de  Schemnitz  par  l'intermède  du  foie 


d'une  loupe.  .  .  .  Dès  le  commencement  elle  rendoit  une,  deux  t« 
&  trois  livres  d'argent  par  quintal;  à  peine  les  Ouvriers  eurent-ils  <:< 
creufé  à  une  brafle  c\  demie  de  profondeur,  c[ue  la  mine  rendoit  ce 
jufqu'à  vingt-quatre  marcs  par  quintal.  .  ..  On  y  rencontre  même  ic 
des  morceaux  de  mines  d'argent  blancfies  &  rouges ,  &  il  le  trouve  c< 
aulîî  de  l'argent  maiht  ».  Nouvelles  vérités  h  l'avantage  de  la  Phyfique^ 
jjar  Al.  de  Jujfi ;  Jvurnal  étranger,  Odobre    iyj4> 


24-  H/STO/RE     Naturelle 

de  foufre  :  la  Nature  ne  parok  donc  pas  avoir  faît 
cette  oj)cratioii  de  la  manière  dont  le  prétend  M.  de 
Jufii  (d) ;  car  quoiqu'il  n'ait  point  reconnu  de  foufre 

dans 

(d)  Cette  mine  efl:  extrcnienieiit  riche;  car  fa  mine  commune 
contient  ordinairement  trois,  quatre,  julqu'à  fix  marcs -d'argent  pnr 
quintal  ;  la  bonne  en  rend  julqu'à  vingt  marcs  ,  &  l'on  en  lire 
encore  davantage  de  quekjues  morceaux  ;  on  a  même  trouve  à  cette 
mine  à' Annaberg ,  des  malTes  d'argent  natif,  du  jK-)ids  de  plufieurs 
livres  ....  M.  de  Jufti  prétend  que  tout  ce  c[ui  n'efl:  pas  d'argent 
natif  dans  cette  mine,  a  cté  mineralife  par  un  fel  alkalin,  <5c  voici 
fes  preuves. 

Les  plus  riches  morceaux  de  la  mine  font  toujours  ceux  qui , 
tirant  fur  le  blanc,  font  mous  &  cafîàns,  qui  paroident  compofe's 
par-tout  de  parties  homogènes,  «Se  dans  lefquels,  ni  la  fmij^le  vue 
ni  le  fecours  du  microfcope  ,  ne  font  apercevoir  aucune  particule 
d'argent  fenfible.  Il  faut  donc  que  l'argent  y  foit  mèlc  intimement 
avec  une  fubllance  qui  le  prive  de  fa  forme  métallique  ,  &  comme 
il  n'y  a  dans  cette  mine  ni  foufre  ni  arfenic  ,  mes  expériences 
dcmontreront  que  ce  ne  peut   être  que  l'alkali  minerai. 

Dans  les  parties  de  la  mine  qui  font  moins  riches  ,  la  dureté  de 
la  matière    efl:   à   peu -près   égale   à   celle    du    marbre    commun,    &. 

l'on   y  voit   des   parcelles  d'argent  dans   leur  forme   de  métal 

Et  ce  qui  démontre  c{ue  cette  mine  riche  &  molle  a  été  vcritable- 
nient  produite  par  l'union  de  l'alkali  avec  l'argent,  c'efl  qu'on  obtient 
un  vrai  _/ô/V  de  fovfrc ,  Idrjqu'à  une  partie  de  la  mine  en  quellion, 
on  ajoute  la  moitié  de  foufre,  &  que  l'on  fait  fondre  ces  deux 
Tnaiicres  dans   un  vailleau   fermé  .... 

Depuis  que  j'ai  été  convaincu  par  la  mine  d' Annaberg ,  qu'il  y  a 
dans  la  Narure  des  mines  véritar;Iement  alkalines  ,  j'en  ai  encore 
découvert  dans  d'autres  endroits  :  à  Schemniti  en  Hongrie ,  on  4 
trouvé  depuis  long  -  ter.qis  que   les  mines  riches  qu'on  y  exploite, 

ctojeat 


DES    Minéraux.  25 

clans  cette  mine,  le  foie  de  foufrc  qui  eft,  pour  ainfi 
dire,  répandu  par-tout,  doit  y  exiger  comme  il  exifle 
non  -  feulement  dans  les  matières  terreufes,  mais  dans 
les  fubdances  calcaires,  &  autres  matières  qui  accom- 
pagnent les  mines  de  féconde  formation. 

En  Bohème ,  les  principales  mines  d'argent  font 
celles  de  Saint-Joachïm  ;  les  filons  en  font  affez  minces, 
&  la  matière  en  efl  très-dure,  mais  elle  eft  abondante 
en  métal;  les  mines  de  Kut tenbcrg  ïowi  mêlées  d'argent 
&  de  cuivre ,  elles  ne  font  pas  fi  riches  que  celles  de 
Saint- Joachim  ('e).  On  peut  voir  dans  les   Ouvrages 

» ■^■.-        ■  I.      ■■-■■■—■     I         ■  ■■—■,1  I  iiiB^...!         I  I  III  ^^^^— —a 

ctoient  accompagnces  d'une  fubftance  minérale,  nioJle ,  blanche,  & 
de  la  nature  de  la  craie.  Cette  fubftance  qui,  à  eau fe  de  la  fubtilité 
de  Tes  parties  &  du  peu  de  folidité  de  fa  inafle,  blanchit  les  mains 
comme  de  la  craie,  a  été  pendant  très-longtemps  jetce  comme  une 
matière  inutile  ;  on  s'eft  enfin  avifé  de  l'edayer ,  &  on  a  trouvé, 
par  les  cfTais  ordinaires  qu'elle  contenoit,  dix  marcs  d'argent  par 
quintal ....  Et  fi  l'on  y  veut  faire  attention  on  trouvera  peut-être 
fréquemment  cette  mine  alkaiine  dans  le  voifinage  des  carrières  de 
marbre  &  de  pierre  à  chaux 

Toute  la  montagne  où  fe  trouve  la  mine  d' Annaherg^  n'eft  com- 
pofce  que  d'une  pierre  à  chaux  ou  d'une  efpèce  de  marbre  commun, 
&  l'on  m'a  envoyé  de  Siléfie ,  une  efpèce  de  marbre  qui  venoit  de 
la  montagne  appelée    le  Zotembcrg,   ôc  dont  j'ai   tiré   par  l'analyfe  , 

deux    onces  &   demie  d'argent  par  quintal M.  L/ieman   m'a 

afluré  avoir  vu  un  marbre  qui  contenoit  jufqu'à  trois  onces  &  demie 
d'argent  par  quintal.  Nouvelles  vérités  a  l'avantage  de  la  Phyfique ,  par 
M.  de  Jujli;  Journal  étranger,  mois  de  Mai  i  7/  6 ,  pages  y  i  &  fiiiv. 

(e)  Grifelius ,  dans  les  Éphémérides  d'Allemagne  depuis  l'annco 
1670  à  I  68  6. 

Minéraux ,  Tome  IIL  D 


z6         Histoire  Naturelle 

des  Mincraiogi/les  Allemands,  la  dcfcription  des  mines 
<Je  plufieiirs  autres  provinces,  &  notamment  de  celles 
de  Tranfilvanie,  de  la  Hefle  &  de  Hongrie;  celles  de 
Schemnitz  (f),  contiennent  depuis  deux  jufqu'à  cinq 
gros  d'argent,  &  depuis  cinq  jufqu'à  fèpt  deniers  d*or 
par  marc,  non  compris  une  once  &  un  gros  de  cuivre 
qu'on  peut  en  tirer  auiïi  (g). 

Mais  il  n'y  a  peut-être  pas  une  mine  en  Europe, 
où  l'on  ait  fait  d'auffi  grands  travaux  que  dans  celle  de 
SallLerg  en  Suède,  fi  la  defcription  qu'en  donne  Rcgnard 
n'eft  point  exagérée  ;  il  l'a  décrit  comme  une  ville 
fouterraine ,  dans  laquelle  il  y  a  des  maifons ,  des  écuries 
êL  de  vafles  emplacemens  (hj . 
^  -  ■  ■    .  ■  I      ■        ,    .  .    ■■  .  . , 

(fj  Par  les  Mémoires  de  M.  Ferber,  fur  les  mines  de  Hongrie, 
il  paroît  que  la  mine  de  Schemnitz  eft  fort  riche  ;  que  celle  de 
Kremnitz  a  fourni,  depuis  1749  jufqu'en  1759,  en  or  &  en  argent, 
ïa  valeur  de  42,498,009  florins,  c'eft-à-dire ,  plus  de  84  millions 
de  notre  monnoie  ;  &  que  depuis  1^48  ,  celle  de  Fclfobania  fournit 
par  an  environ  100  marcs  d'or,  3000  marcs  d'argent,  3000  quin- 
taux de  plomb,  &  i  joo  quintaux  de  htharge ,  fans  compter  les 
mines  de  cuivre  &  autres.  Alémoires  imprimés  à  Berlin  en  lyS  0, 
in- 8 .*  Extraits  dans  le  Journal  de phyfiquey  Août  iy8 1 ,  page  i  C i. 

(g)  Traité  de  la  fonte  des  Mines  de  Schlutter,  tome  II,  page  s  o^f. 

(h)  Regnard  ajoute  à  la  defcription  des  excavations  de  ia  mine, 
ïa  manière  dont  on  l'exploite.  «  On  fait,  dit -il,  fécher  les  pierres 
ï»  qu'on  tire  de  la  mine  fur  un  fourneau  qui  brûle  lentement ,  & 
»  qui  fépare  l'antimoine  ,  l'arfenic  &  le  foufre  d'arec  la  pierre ,  le 
»  plomb  &  l'argent  reftent  enfemble.  Cette  première  opéradon 
welt  fuivie  d'une  féconde,  ^  ces  pierres  féchccs,  foAt  jetées  dans 


DES  Minéraux.  27 

rc  En  Pologne,  dit  iM.  Guettard,  les  forets  de  Leib'ni 
font  riches   en   veines  de   métaux  ,    indiquées   par    les  " 
travaux  qu'on  y  a  faits  anciennement;  il  y  a  au  pied  de  '^ 
ces  montagnes ,  une  mine  d'argent  découverte  du  temps  ^' 
de  Charles  XII  (i) .  » 

Le  Danemarck,  la  Norwège  (k)  &  prefque  toutes 

des  trous  où  elles  font  pilées  &  réduites  en  boue,  par  le  moyen  ul 
des  gros  marteaux  que  l'eau  fait  agir  ;  cette  boue  efl:  délayée  dans  « 
une  eau  qui  coule  incelTamment  fur  une  planche  mife  en  glacis ,  •« 
&  qui  emportant  le  plus  grolfier,  lai/le  l'argent  &  le  plomb  dans  k 
le  fond  fur  une  toile.  La  troificme  opération  fépare  l'argent  d'avec  « 
le  plomb  qui  fond  en  écume ,  &  la  quatrième  fert  enfin  à  le  per-  «< 

feétionner,  &  à  le  mettre  en  état  de  fouffrir  le  marteau On  « 

me  fit,  dit  l'Auteur,  prcfent  d'un  morceau  d'amiante,  dont  on  oc 
avoir  trouvé  plufieurs  dans  cette  mine,  m  dEuvrcs  de  Regnard;  Paris, 
JJ-^2  ,  tome  /,  pages  2.  o^  &  fuiv. 

(i)  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences  de  Paris,  année  iy6 2, 
page  s  i^. 

(k)  En  Norwège,  il  y  a  plufieurs  mines  d'argent  où  il  fe  trouve 
quelquefois  des  morceaux  de  ce  métal  qui  font  d'une  grandeur 
extraordinaire:  on  en  conferve  \n\  dans  le  Cabinet  du  roi  de 
Danemarck,  du  poids  de  onze  cents  vingt  marcs.  On  tire  des 
pièces  entières  d'argent  pur  des  mines  de  Kongfberg.  La  profondeur 
perpendiculaire  d'une  de  ces  mines,  eft  de  cent  trente  toiles;  cti 
mines  font  fans  fuite ,  &  néanmoins  il  n'y  a  peut-êire  que  celles  du 
Potofi  qui  rendent  davantage.  Hijloire  Naturelle  de  Norwège ,  par 
Pontoppidan ;  Journal  étranger,  mois  d'Août  ij^^-  M.  Jars  vient 
de  donner  une  defcription  plus  détaillée  de  ces  mines  de  Kongfberg; 
elles  ont  été  découvertes  par  des  filets  d'argent  qui  fe  manifefioient 
au  jour.  .  ..  On  évalue  le  produit  annuel  de  toutes  les  mines  de 
ce  département  ,332  ou  3  3  millQ  marcs  d'argent Tous  le* 


iS  Hl  SrO  IRE    NATU  RELLE 

les  contrées  du  nord,  ont  auiïi  des  mines  d'argent  dont 
quelques-unes  font  fort  riches,  &  nous  avons  au  Cabinet 
de  Sa  Majeflé,  de  très-beaux  morceaux  de  mine  d'argent, 


rochers  de  cette  partie  de  la  Norwcge  font  très-compacts ,  6c  fi  durs 
qu'on  eÙ.  oblige'  d'employer  fe  feu  pour  les,  abattre  ....  Les  veines 
principales  les  })Ius  riches  ,  font  prelque  toutes  dans  des  rochers 
ferrugineux  ,  £<  ces  inines  s'appauvrident  toutes  à  melure  que  l'on 
delcend,  en  forte  qu'il  ell  très-rare  de  trouver  du  minerai  d'argent, 
lorfqu'on  eft  defcendu  jul'qu'au  niveau  de  la  rivière  qui  coule  dans  la 
vallée  au-delTous  de  ces  rochers.  Les  veines  minérales  renfermées  dans 
les  filons  principaux  font  fort  étroites  ;  il  ert:  rare  qu'elles  aient  au-deiïùs 
d  un  pied  d'épaiffeur,  elles  n'ont  même  trcs-fouvent  qu'un  pouce 
ou  quelques  lignes;  ces  veines  ne  produilent  généralement  point 
d  argent  minéralilé  ,  fi  l'on  en  excepte  quelques  morceaux  de  mines 
d'argent  vitreufes  que  le  hafard  fait  rencontrer  quelquefois,  encore 
moins  de  la  mine  d'argent  rouge,  mais  toujours  de  l'argent  viero-e 
ou  natif,  exnèmement  varié  dans  (es,  configurations;  elles  font 
remplies  de  différentes  matières  pierreufes ,  qui  (ervent  comme  de 
matrice  à  ce  métal ,  &  forment  un  compofé  de  fpath  calcaire ,  d'un 
autre  fufible  couleur  d'amcthyde,  d'un  fpath  verdàtre,  &  d'un  autre 
encore  d'un  blanc  tranfparent ,  reffembiant  affez  à  une  félénite ,  & 
fou  vent  recouvert  de  cuir  foOlle  ou  de  montagne  ,  qui  tous  font 
unis  à  de  l'argent  vierge,  &  en  contiennent  eux-mêmes;  ce  métal 
fe  trouve  encore  dans  un  rocher  de  couleur  grife ,  qui  pourroit 
être  regardé  comme  le  toit  &  ie  mur  defdits  filons;  on  le  rencontre 
aufîi ,  mais  plus  rarement  avec  du  mica. 

Dans  tout  ce  mélange  on  n'aperçoit  aucune  partie  de  quartz ,  mais 

bien  dans   les  filons  principaux  où  l'on  trouve  même  de  la  pyrite 

riche  en  argent ,  dans  laquelle  ce  métal  fe  maniferte  quelquefois ,  «5c 

où  l'on  voit  des  criOallifations  de  fpath  &  de  quartz ....  Ces  filons 

ontiennent  auffi  de  la  blende. 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  ic^ 

que  le  roi  de  Danemarck,  a(5luellement  régnant,  a  en  la 
bonté  de  nous  envoyer.  Il  s'en  trouve  aufTi  aux  îles  de 

Féroë  &  en  Ifîande  f/J. 

, —— —  ■■ — — 

L'argent  eft  toujours  maiïjf  dans  Je  rocher  &  prefque  pur,  c'efl- 

à-dire   avec    peu  de   mélange Plufieurs   fois   on  eu   a  détaché 

des  morceaux  qui  pelbient  depuis  20  juiqu'à  80  marcs.  Dans  la 
principale  mine  de  Cottes  h i If  in  der  riQth ,  fituée  fur  le  filon  de  la 
montagne  moyenne  ,  .  .  .  On  trouva  il  y  a  prcs  de  fept  ans ,  à  cent 
trente -cinq   toiles  au  -  deflbus   de   la  fuiface   de    la  terre,    un   feul 

morceau  d'argent  vierge  prefque  pur ,  qui  peloit  4 1 9   marcs 

Cependant  la  forme  la  plus  commune  où  l'on  trouve  ce  métal,  ell 
celle  d'un  fil  plus  ou  moins  gros ,  prenant  toutes  fortes  de  courbes 
&.  fio-ures ,  quelques-uns  ont  un  pied  &  plus  de  longueur;  d'autres 
ont  la  fineflè  des  cheveux ,  feuls  ou  réunis  enl'emble  en  grande 
quantité  par  un  feul  point  d'où  ils  partent ,  mais  ordinairement 
mêlés  à  du  fpath  eu  du  rocher;  d'autres  encore  forment  difiérentes 
branches  de  ramifications  de  diverfes  grofleurs,  dont  la  blancheur 
&  le  brillant  annoncent  toute  la  pureié  du  métal  lorfqu'il  efl  ratfuié. 

On  en  trouve  auffi  en  feuilles  ou  lames;  c'eft  communément  à 
travers  ou  entre  les  lits  d'un  rocher  gris  fchifleux ,  de  manière  que 
dans  un  de  ces  morceaux  qui  pourroit  avoir  quatre  pouces  d'épaifleur, 
on  rencontre  quelquefois  une  ,  deux  &  même  trois  couches  ,  pénétrées 
de  cet  arcrent  qui ,  quand  on  les  fépare ,  préfentent  à  chaque  furface 
des  feuilles  irès-blanches  &  trcs-minccs. 

Il  efl  de  ces  veines  enfin  ,  où  l'argent  efl  tellement  divifé  dans 
ie  fpath  &;  le  rocher,  quoique  vierge,  qu'on  a  bien  de  la  peine  à 
Je  reconnoître;  dans  d'autres  on  ne  le  dillingue  point  du  tout;  il 
en  efl;  de  même  du  quatrième  filon.  Ai.  Jars ,  Mcmoircs  des  Savans 
Étrangers  j  tome  IX ,  pages  4//  c^  Juiv. 

(l)  Selon  Horrebow,  les  Iflandois  ont  trouvé  dans  leurs  montagnes, 
du  métal  qui  étant  fondu ,  s'eft  trouvé  être  du  bon  argent.  H'ifloirc 
générale  des  Voyages,  tome  XVI U,  page  s  (>' 


30  Histoire  Naturelle 

Dans  les  parties  feptentrionales  de  J'Afie,  les  mines 
d'argent  ne  font  peut-être  pas  plus  rares  ni  moins  riches 
que  dans  celles  du  nord  de  l'Europe:  on  a  nouvellement 
public  à  PcterlLourg ,  un  Tableau  des  mines  de  Sibérie, 
par  lequel  il  paroît  qu'en  cinquante-huit  années  on  a  tiré, 
d'une  feule  mine  d'argent,  douze  cents  feize  mille  livres 
de  ce  métal ,  qui  tenoit  environ  une  quatre  -  vingtième 
partie  d'or.  Il  y  a  aufTi  une  autre  mine  dont  l'exploitation 
n'a  commencé  qu'en  ly^fS,  &  qui  depuis  cette  époque 
ju/qu'en  1-7-71,3  donné  qiiatre  cents  mille  livres  d'argent, 
dont  on  a  tiré  douze  mille  fèpt  cents  livres  d'or  (m). 
Al."  Gmclin  tSc  Muller  font  mention  dans  leurs  Voyages, 
des  mines  d'argent  qu'ils  ont  vues  à  Argiinsk,  à  quelque 
dillance  de  la  rivière  Ar^um  ;  ils  di/cnt  qu'elles  /but  dans 
une  terre  molle  &à  une  petite  profondeur,  que  la  plupart 
fè .  trouvent   fituées   dans   des    plaines    environnées   de 
montagnes  (n) ,  &.  qu'on  rencontre  ordinairement  au- 
deffus  du  minerai  d'argent,   m\t  efpèce  de   chaux  de 
plomb,  compofée  de  plus  de  plomb  que  d'argent. 

ïi  y  a  au/Ti  plufieurs  mines  d'argent  à  la  Chine, 
fur-tout  dans  les  provinces  de  Junnan  &  de  Sechuen  (0) , 
on   en   trouve   de    même   à    la  Cochinchine   (p),    «Se 

(m)  Journal  de  Politique  &  de  Littérature.  FcnUr  lyvâ,  article 
Paris. 

(n)  Hiacire  générale  des  Voyages,  tome  XVI JI ,  page  2ij, 

(0)  Idem,  tome  VI,  page  ^8^. 

(n)  Suivant  Mendez  Pinto,  il  y   a  aux  eiivirons  de  Quanjû^ar^ 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  V  X.  31 

celles  du  Japon  paroiffent  être  les  plus  aborxJantes  cfc 
toutes  ((j) .  On  connok  aufii  quelques  mines  d'argent 
dans  l'intérieur  du  continent  de  i'Afie.  Chardin  dit 
qu'il  n'y  a  pas  beaucoup  de  vraies  mines  d'argent  en 
Pcr/è ,  mais  beaucoup  de  mines  de  plomb  qui  contiennent 
de  l'argent  ;  il  ajoute  que  celle  de  Renan  ^  à  quatre 
lieues  d'Ifpahan,  &.  celles  de  Kirman  <Sc  de  Mazanderan, 
n'ont  été  négligées  qu'à  caufe  de  la  dilëtte  du  bois  qui , 
dans  toute  la  Perfe,  rend  trop  di/J^endieux  le  travail 
des  mines  (r) , 

Nous  ne  connoifTons  guère  les  mines  d'argent  de 
l'Afrique,  les  Voyageurs  qui  fe  font  fort  étendus  fur  les 
mines  d'or  de  cette  partie  du  monde,  paroiffent  avoir 
négligé  de  faire  mention  de  celles  d'argent  ;  ils  nous 
difent  feulement  qu'on  en   trouve  au    cap   Vert   (f), 

dans  l'anfe  de  la  Cochinchine ,  ées  mines  d'argent  dont  o\\  tire  une 
fort  graride  quantité  de  ce  nietaJ.  Hijloire  générale  des  Voyages , 
tome  JX ,  page  ^  S ^. 

(q)  Oi\  ne  connoît  guère  d'autres  mines  d'argent  dans  toute 
I'Afie  que  celles  du  Japon,  dont  Jes  relations  vantent  l'abondance. 
Cependant  Mindez  Pinto ,  dit  qu'il  y  en  a  de  ïon  abondantes  fur 
îes  bords  du  lac  de  Chiamuy,  d'où  o\\  le  tranfporte  dans  d'autres 
provinces  de  J'Afie.  Jdem ,  tome  X,  page  ^2  S.  —  'Là  province  de 
Bungo  au  Japon,  a  des  mines  d'argent;  Kattami,  lieu  fitué  au  nord 
de  cet  Empire,  en  a  de  plus  riches  encore.  L'argent  du  Japon  pafîe 
pour  le  meilleur  du  monde,  autrefois  on  i'échangeoit  à  U  Chine, 
poids  pour  poids  contre  de  l'or.  Idem ,  page  éj^s 

(rj  Voyage  de  Chardin.  Tome  II,  page  22. 

(f)  On  alTure  que  d^is  \ï\q  Saint- Anîom ,  au  cap  Vert;  W  ^  ^ 


^2  Histoire  Natu relle 

au  Congo  {tj,  au  Bambuk  (uj ,  &  jufque  Jans  le  pays 
des  Hottemots  (x) .  ■ 

Mais  c'eft  en  Amérique  où  nous  trouverons  un  trcs- 

grand   nombre  de  mines  d'argent,   plus  étendues,  plus 

abondantes ,  &  travaillées   plus   en  grand  qu'en  aucune 

autre  partie  du  monde.  La  plus  fameufe  de  toutes,  efl 

celle  de  Potofi  au  Pérou:  «  Le  minerai,  dit  M.  Bowles, 

„  en  eft  noir,  &  formé  dans  la  même  forte  de  pierre  que 

,,  celle  de  Freiberg  en  Saxe  ;  ce  Naturalise  ajoute  que  la 

3)  mine  appelée  Roficle,  dans   le  Pérou ,  efl  de  la  même 

„  nature  que   celle  de   RotligitUeti  -  eri  &  de  AnJrcûJherg 

dans   le  Hartz,  &  de  Sainte -Marie -aux -mines  dans  les 

Vo/ges  (y)  ». 

Les  mines  de  Potofi  flirent  découvertes  en  1545,  & 
l'on  n'a  pas  cefTé  d'y  travailler  depuis  ce  temps,  quoiqu'il 
y  ait  quantité  d'autres  mines  dans  cette  même  contrée 


une   mine  d'argent ,   mais  qui    n'eft    pas   encore    exploitée.  Hijlolrg 
générale  des  Voyages ,  tome  II ,  page  ^i  S. 

(i)  On  trouve  des  mines  d'argent  dans  la  province  de  Bamba ,  au 
Congo,  qui  s'ctendent  jufque  vers  Angole.  Idem ,  tome  IV,  page  6 1  y. 

(u)  II  y  a  des  mines  d'argent  dans  le  Bambuk  en  Afrique. 
Idna,  tome  II ,  page  iT^^.  .  .  .  II  y  a  aufli  des  mines  d'argent  dans 
les  terres  A' Angoykayango  en  Afrique.  Idem ^  tome  IV,  page  ^8 S . 

(x)  On  a  auffi  découvert  au  commencement  de  ce  /Iccfe,  une 
mine  d'argent  dans  les  colonies  Hoilandoifes,  au  pays  des  Hottentots  ; 
mais  on  n'en  a  pas  continué  l'exploitation.  Kolbe ,  dans  VHijioïu 
générale  des  Voyages ,  tome    V,  page   //J» 

(y)  Hiftoire  Naturelle  d'Efpagne,  page  2  y» 

du 


DES    Minéraux,  33 

du  Pérou.  Frézier  afTure  que  de  Ton  temps,  les  mines 
d'argent  les  plus  riches  ctoient  celles  (ÏOriero ,  à  quatre- 
vingts  lieues  A'Arica  ^  &  il  dit  qu'en  i  y  1 2  on  en 
découvrit  une  auprès  de  Cufco,  qui  d'abord  a  donné 
près  de  vingt  pour  cent  de  métal ,  mais  qui  a  depuis 
beaucoup  diminué  aind  que  celle  de  Potofi  (zj-  ^^ 
temps  d'Acofla,  c'efl  -  à -dire,  au  commencement  de 
i'autre  fiècle,  cette  mine  de  Potofi,  étoit  fans  comparai/on 
la  plus  riche  de  toutes  celles  du  Pérou  ;  elle  efl  fituée 
prefque  au  fommet  des  montagnes  dans  la  province  de 
Charcas,  &.  il  y  fait  très-froid  en  toute  faifon.  Le  foi 
de  la  montagne  efl  fèc  &  ftérile,  elle  efl;  en  forme  de 
cône ,  &.  furpafle  en  hauteur  toutes  les  montagnes 
voifnies  ;  éXc  peut  avoir  une  lieue  de  circonférence  à 
la  bafe,  <&.fon  fommet  eft  arrondi  &  convexe.  Sa  hauteur, 
au-deffus  des  autres  montagnes  qui  lui  fervent  de  bafe, 
efl:  d'environ  un  quart  de  lieue.  Au-deffous  de  cette 
plus  haute  montagne,  il  y  en  a  une  plus  petite  où  l'on 
trouvoit  de  l'argent  en  morceaux  épars  ;  mais  dans  la 
première,  la  mine  efl  dans  une  pierre  extrêmement  dure  ; 
on  a  creufé  de  deux  cents  jladcs,  ou  hauteur  d'homme 
dans  cette  montagne,  fans  qu'on  ait  été  incommodé 
des  eaux;  mais  ces  mines  ctoient  bien  plus  riches 
dans  les  parties  fupérieures,  &  elles  fe  font  appauvries 
au  lieu  de  s'ennoblir  en  defcendant  (a) .  Parmi  les  autres 

^— ■  ■»     ■  ■■■■  —  — 1^»^— ^— ^  ■■■■_■■■  Il  ■  ■  ■       ■    ■  -■—■.,■  I»  I  I      B^^B^ 

(■^)  Hiftoire  géncrale  des  Voyages,  tome  XIII,  page  ^8^, 

(a)  Ce  roc  de  Potofi,  comieiii  quatre  veines  principales;  la  v'iche , 

ATméraux ,  Tome  III.  E 


34  Hi STO IRE  Naturelle 

mines  d'argent  du  Pérou  ,  celle  de  Turco ,  dans  le 
corrégiment  de  Cavanga,  eft  très -remarquable,  parce 
que  le  métal  forme  un  ti/Tu  avec  la  pierre  très-apparent 
à  l'oeil  ;  d'autres  mines  d'argent  dans  cette  même  con- 
trée, ne  font  ni  dans  la  pierre  ni  dans  les  montagnes; 
mais  dans  le  fable  où  il  fuffit  de  faire  une  fouille  pour 
trouver  des  morceaux  de  ce  métal ,  fans  autre  mélange 
qu'un  peu  de  fable  qui  s'y  cft  attaché  (h) . 

Frézier,  Voyageur  très-intelligent,  a  donné  une  affez 
bonne  defcription  de  la  manière  dont  on  procède  au 
Pérou,  pour  exploiter  ces  mines  &  en  extraire  ie  métal. 
On  commence  par  concaïïer  le  minerai,  c'eft-à-dire, 
les  pierres  qui  contiennent  le  métal  ;  on  les  broie  enfliite 
dans  un  moulin  fait  exprès:  on  crible  cette  poudre,  & 
l'on   remet  fous  la  meule   les  gros  grains   de   minerai 


le  centcno,  celle  d'étain  &  celle  de  Alend'ietû.  Ces  veines  font  en  la 
partie  orientale  de  la  montagne ,  &  on  nen  trouve  point  en  la 
partie  occidentale,  elles  courent  nord  &  fud.  .  .  .  Elles  ont  à  l'en- 
droit le  plus  large  fix  pieds,  &  au  plus  étroit  une  palme:  ces  veines 
ont  des  rameaux  qui  s'étendent  de  côté  &  d'autre.  .  .  .  Toutes  ces 
mines   font  aujourd'hui  (en    1589)  fort  profondes,  à  quatre-vingts , 

cent,    ou  deux   cents  fiades,    ou   hauteur   d'homme On  a 

reconnu    par    expérience,  que    plus    haut   eft   fituée   la    veine  à    la 

fuperficie  de  la  terre,  plus  elle  eft   riche  &  de  meilleur  aloi 

On  tire  le  minerai  à  coups  de  marteaux  ,  parce  qu'il  eft  dur  à  peu- 
près  comme  le  caillou.  Hijloire  Naturelle  des  Indes,  par  Acojîa.  Paris j 
j  6  0  0  ,  page  1 3  j  &  fuiv. 

(b)  Hidoire  générale  des   Voyages,  tome  XIII ,  page  ^00. 


DES    Minéraux.  ^  r 

qui  refteiu  fur  le  crible,  6l  lor/que  le  minerai  /è  trouve 
mêlé  de  certains  minéraux  trop  durs  qui  rempéchent 
de  fe  pulvérilèr,  on  le  fait  calciner  pour  le  piler  de 
nouveau;  on  le  moud  avec  de  Teau,  &.  on  recueille  dans 
un  ré/èrvoir  cette  boue  liquide  qu'on  laiiïe  fécher,  & 
pendant  qu'elle  efl  encore  molle  on  en  fait  des  caxons^ 
c'eft-à-dire,  de  grandes  tables  d'un  pied  d'épaiffeur,  & 
de  vingt-cinq  quintaux  de  pefanteur  ;  on  jette  fur  chacune 
deux  cents  livres  de  iû  marin  qu'on  laiffe  s'incorporer 
pendant  deux  ou  trois  jours  avec  la  terre;  enfuite  on 
l'arrofe  de  mercure  qu'on  fait  tomber  par  petites  gouttes  ; 
il  en  faut  une  quantité  d'autant  plus  grande  que  le 
minerai  efl  plus  riche,  dix,  quinze  &  quelquefois  vingt 
livres  pour  chaque  table.  Ce  mercure  ramafle  toutes 
les  particules  de  l'argent.  On  pétrit  chaque  table  huit 
fois  par  jour,  pour  que  le  mercure  les  pénètre  en 
entier ,  &  afin  d'échauffer  le  mélange  ;  car  un  peu 
de  chaleur  efl  néceffaire  pour  que  le  mercure  fè  fàififîe 
de  l'argent ,  &  c'efl  ce  qui  fait  qu'on  efl  quelquefois 
obligé  d'ajouter  de  la  chaux  pour  augmenter  la  chaleur 
de  cette  mixtion  ;  mais  il  ne  faut  ufer  de  ce  fecours 
qu'avec  grande  précaïuion;  car  fi  la  chaux  produit  trop 
de  chaleur,  le  mercure  fe  volatili/e,  &  emporte  avec 
jui  une  partie  de  l'argent.  Dans  les  montagnes  froides, 
comme  à  Lipès  &  à  Potofi ,  on  efl  quelquefois  obligé 
de  pétrir  le  minerai  pendant  deux  mois  de  fuite ,  au 
Jieu  qu'il  ne  faut  que  huit  ou  dix  jours  dans  les  contrées 

Ei; 


36  Histoire  N aturelle 

pius  tempérées  :  on  el1:  même  forcé  de  fè  fervir  Je 
fourneaux  pour  échaufîèr  le  mélange  &  preffer  l'amal- 
game du  mercure,  dans  ces  contrées  où  le  froid  efl 
trop  gronJ  ou  trop  conilaiit. 

Pour  rcconnoître  fi  le  mercure  a  fait  tout  fbn  efîèt, 
on  prend  une  petite  portion  de  la  grande  table  ou 
caxon,  on  la  délaie  &  lave  dans  un  baffin  de  bois,  la 
couleur  du  mercure  qui  refle  au  fond  indique  fbn  efiet; 
s'il  efl  noirâtre  on  juge  que  le  mélange  efl  trop  chaud, 
&  on  ajoute  du  fel  au  caxon  pour  le  refroidir  ;  mais 
fi  le  mercure  c(l  blanchâtre  ou  blanc,  on  peut  préfumer 
que  l'amalgame  efl  fait  en  entier,  alors  on  tranfJ3orte  la 
matière  du  caxon  dans  des  lavoirs  où  tombe  une  eau 
courante;  on  la  lave  jufqu'à  ce  qu'il  ne  rcfle  que  le 
métal  fur  le  fond  des  lavoirs  qui  font  garnis  de  cuir- 
Cet  amalgame  d'argent  &  de  mercure,  que  l'on  nomme 
pel/d ,  doit  être  mis  dans  des  chauffes  de  laine  pour 
laiffer  égoutter  le  mercure  ;  on  ferre  ces  chauffes ,  &  on 
les  preffe  même  avec  des  pièces  de  bois  pour  l'en  faire 
fortir  autant  qu'il  efl  poffible ,  après  quoi  ,  comme  il 
refle  encore  beaucoup  de  mercure  mêlé  à  l'argent ,  on 
verfe  cet  amalgame  dans  un  moule  de  bois  en  forme 
de  pyramide  tronquée  à  huit  pans,  &  dont  le  fond  efl 
une  plaque  de  cuivre  percée  de  plufieurs  petits  trous. 
On  foule  &  preffe  cette  matière  pella ,  dans  ces  moules 
pour  en  faire  des  maffes  qu'on  appelle  pignes.  On  lève 
eniuite  le  moule,  «Sl  l'on  met  la  pign€  avec  ià  bafe  de 


DES    Minéraux.  37 

cuivre  fur  un  grand  vafe  de  terre  rempli  d'eau,  &.  fous 
un  chapiteau  de  même  terre,  fur  lequel  on  fait  un  feu 
de  charbon,  qui  fait  fortir  en  vapeurs  le  mercure  contenu 
dans  la  pigne  ;  cette  vapeur  tombe  dans  l'eau  &  y 
reprend  la  forme  de  mercure  coulant  :  après  cela  la 
pigne  n'eft  plus  qu'une  maffe  poreufe ,  friable  &  corn- 
pofëe  de  grains  d'argent  contigus,  qu'on  porte  à  la 
monnoie  pour  la  fondre  (cj. 

Frézier  ajoute  à  cette  defcription  dont  je  viens  de 
donner  l'extrait,  quelques  autres  faits  intéreffans  fur  la 
différence  des  mines  ou  minerais  d'argent;  celui  qui 
ell  blanc  &  gris,  mêlé  de  taches  rouffes  ou  bleuâtres, 
eft  le  plus  commun  dans  les  minières  de  Lipès;  on  y 
diftingue  à  l'œil  hmple,  des  grains  d'argent  quelquefois 
difpofés  dans  la  pierre  en  forme  de  petites  palmes. 
Mais  il  y  a  d'autres  minerais  où  l'argent  ne  paroît  point, 
entr'autres  un  minerai  noir  dans  lequel  on  n'aperçoit 
l'argent  qu'en  raclant  ou  entamant  fa  furface  ;  ce  minerai 
qui  a  fi  peu  d'apparence,  &  qui  fouvent  efl  mêlé  de 
plomb,  ne  laifle  pas  d'être  fouvent  plus  riche,  &  coûte 
moins  à  travailler  que  le  minerai  blanc  ;  car  comme  il 
contient  du  plomb  qui  enlève  à  la  fonte  toutes  les 
impuretés,  l'on  n'elt  pas  obligé  d'en  faire  l'amalgame 
avec  le  mercure:  c'étoit  de  ces  minières  d'argent  noir 
que   les  anciens  Péruviens   tiroient  leur  argent.   Il  y  a 


(c)  Frézier,  HUloire  générale  des  Voyages,  tome  XII J,  page  jp. 


38  Histoire  Naturel  le 

d'autres  minerais  d'argent  de  couleurs  diiTércntes  ,  un 
qui  eft  noir,  mais  devient  rouge  en  ie  mouillant  ou  le 
graitant  avec  du  fer;  il  eft  riche,  &l  l'argent  qu'on  en 
tire  eil  d'un  haut  aloi.  Un  autre  brille  comme  du  talc, 
mais  il  donne  peu  de  métal;  un  autre  qui  n'en  contient 
guère  plus  eft  d'un  rouge-jaunâtre  :  on  le  tire  aifément 
de  fa  mine  en  petits  morceaux  friables  &  mous  ;  il  y  a 
aufti  du  minerai  vert  qui  n'eft  guère  plus  dur,  &  qui 
paroît  être  mêlé  de  cuivre  ;  enfin  on  trouve  de  l'argent 
pur  en  plufieurs  endroits  ;  mais  ce  n'eft  que  dans  la 
feule  mine  de  Cotamito,  aftcz  voifine  de  celle  de  Potofi, 
où  l'on  voit  des  fils  d'argent  pur,  entortillés  comme 
ceux  du  galon  brtilé. 

Il  en  eft  donc  de  l'argent  comme  de  Tor  &  du  fer; 
leurs  mines  primordiales  font  toutes  dans  le  roc  vitreux, 
&L  ces  métaux  y  font  incorporés  en  plus  ou  moins 
grande  quantité,  dès  le  temps  de  leur  première  fùfion 
ou  fublimation  par  le  feu  primitif;  &  les  mines  fecon- 
daires,  qui  fe  trouvent  dans  les  matières  calcaires  ou 
fchifteufes ,  tirent  évidemment  leur  origine  des  pre- 
mières. Ces  mines  de  féconde  &  de  troifième  formation, 
qu'on  a  quelquefois  vu  s'augmenter  fènfiblement  par 
l'addiiion  du  minerai  charié  par  les  eaux,  ont  fait  croire 
que  les  métaux  fe  produifoient  de  nouveau  dans  le 
fein  de  la  terre  ;  tandis  que  ce  n'eft  au  contraire  que 
de  leur  décompofition  <Si.  de  la  réunion  de  leurs  détri- 
mens,  que  toutes  ces  mines  nouvelles  ont  pu  &:  peuvent 


DES    Minéraux.  39 

encore  être  folpiées  ;  &  fans  nous  éloigner  de  nos  mines 
d'argent  du  Pérou,  il  s'en  trouve  de  cette  efpèce  au 
pied  des  montagnes  &:  dans  les  excavations  des  mines 
même  abandonnées  depuis  long-temps  ^JJ . 


(d)  Dans  la  montagne  du  Potofi ,  l'on  a  tant  creufe  en  diiïcrens 
endroits,  que  plufieurs  mines  fe  ibnt  abîmées,  «&  ont  oiTeveli  les 
Indiens  qui  travailloient ,  avec  leurs  outils  &  étançons.  Dans  la  fuite 
des  temps  on  efl  venu  refouiller  les  mêmes  mines,  &  l'on  a  trouvé  dans 
le  bois,  dans  les  crânes  &  autres  os  humains,  des  filets  dtùvgewi  qui 
les  pénètrent.  C'eft  encore  un  fait  indubitable  qu'on  a  trouvé  beau- 
coup d'argent  dans  les  mines  de  Lipcs ,  d'où  on  en  avoit  tiré  long- 
temps auparavant.  Je  fais  qu'on  répond  à  cela  qu'au trefqi^  elles  étoient 
fi  riches  qu'on  négligeoit  les  petites  quantités  ;  mais  je  doute  que 
lorfqu'il  n'en  coûte  guère  plus  de  travail  on  perde  volontiers  ce  que 
l'on  tient.  Si  à  ces  faits  nous  ajoutojîs  ce  que  nous  avons  dit  des 
lavoirs  d^ Adacoll  Sx.  de  la  montagne  de  Saint- Jofeph  où  fe  forme  le 
cuivre,  on  ne  doutera  plus  que  l'argent  «Se  les  autres  métaux  ne  fe 
forment  tous  \cs  jours  dans  certains  lieux.  .  .  ,  Les  anciens  Philo- 
fophes  &  quelques  modernes ,  ont  attribué  au  foleil  la  formation  des 
métaux ,  mais  outre  qu'il  efl;  inconcevable  que  fa  chaleur  puilîe 
pénétrer  jufqu'à  des  profondeurs  infinies ,  on  peut  fe  dé/abufer  de 
cette  opinion,  en  failant  attention  à   un  fait  inconteflable  que  voici: 

Il  y  a  environ  trente  ans  que  h  foudre  tomba  fur  la  montagne 
d'IIimani ,  qui  ell  au-defius  de  la  Pa7^e ,  nmr ement  C/wçuiiigo ,  ville 
du  Pérou,  à  quatre-vingts  lieues  d'Arica;  elle  en  abattit  un  morceau, 
dont  les  éclats  qu'on  trouva  dans  la  ville  &  aux  environs,  étoient 
pleins  d'or  ;  néanmoins  celte  montagne ,  de  temps  immémorial ,  a 
toujours  ctc  couverte  de  neige;  donc  la  chaleur  du  foleil  qui  n'a 
pas  allez  de  force  j)Our  fondre  la  neige ,  n'a  [)as  dû  avoir  celle 
de  former  de  for  qui  étoit  delTous ,  &.  qu'elle  a  couvert  l'dns 
interruption....    D'ailleurs   la    j)lupart  des   mines  du   Pérou  &   du 


40  Histoire  Naturelle 

Les  mines  d'argent  du  Mexique  ne  fcmt  guère  moins 
fameufcs  que  celles  du  Pérou.  M.  Bowles  dit  que  dans 
celle  appelée  VûUadora,  le  minerai  le  plus  riciie  donnoit 
cinquante  ^i^•res  d'argent  par  quintal,  le  moyen  vingt- 
cinq  livres,  &  le  plus  pauvre  huit  livres,  &.  que  fouvent 
on  irouvoit  dans  cette  mine  des  morceaux  d'argent 
vierge  (e).  On  eflime  même  que  tout  l'argent  qui  fe 
tire  du  canton  de  Sainte- Pécaqiie,  eft  plus  fin  que  celui 
du  Pérou  (f):  fuivant  Gemelli  Carreri  la  mine  de  Sauta- 
Crux  avoit  en  1697,  plus  de  fept  cents  pieds  de  pro- 
fondeur; celle  de  Navaro  plus  de  {\\  cents,  &  l'on  peut 
compter,  4it-il,  plus  de  mille  ouvertures  de  mines  (g) , 

Chily,  font  couvertes  de  neige  pendant  huit  mois  de  l'année.  Fré^ier, 
Voyage  à  la  mer  du  fud ;  Paris,    1732,  page  146  à^  fuiv. 

(e)  Hiftoire  Naturelle  d'Efpagne,  pages  2^  &  24. 

(f)  Hiftoire  géncrale  des  Voyages,  tome  XI,  page  ^  8 p. 

(g)  C'efl:  une  obfervation  importante  &  qui  n'avoit  pas  échappé 
au  génie  de  Pline:  «  Qu'on  ne  trouve  guère  un  filon  feul  &  ifolé; 
3j  mais  que  lorfqu'on  en  a  découvert  x\x\  on  efl:  prefque  fiir  à^ew 
rencontrer  plufieurs  autres  aux  environs  ».  Ub'icumque  vna  inventa 
verra  ejl ,  non  procul  invenitur  alla  (  Lib.  XXX,  cap.  xxvil  ).  «  La 
3»  fublimation  ou  la  chute  des  vapeurs  métalliques,  une  fois  déter- 
5>  minée  vers  les  grands  fommets  vitreux,  dut  remplir  à  la  fois  les 
55  différentes  fentes  perpendiculaires  ouvertes  dès-lors  dans  ces  mafles 
5»  primitives  ;  &  c'efl  dans  un  fens  relatif  à  cette  production  ou  prc- 
55  cipitation  fimultanée,  que  le  même  Naturalise  interprète  le  nom 
3»  latin  originairement  grec  ,  des  métaux  (  U'na?.\a.  quafi  /xtr'a»^uy  )  ; 
»  comme  pour  défigner  des  matières  ramaffées  <Sc  rafiemblées  aux 
55  mêmes  lieux ,  ou  des  fubflances  produites  en  même  temps  & 
difpofees  enfemble  x».  JVote  communiquée  par  AI.  iabbc  Bexon, 

dans 


Ù  E  s    AI  J  N  É  R  A  U  X.  41 

dans  un  efpace  de  fix  lieues  autour  de  Santa-Crux  (h). 
Celles  de  la  Trinité  ont  été  fouillées  jufqu'à  huit  cents 
pieds  de  profondeur;  les  gens  du  pays  affurèrent  à  ce 
Voyageur ,  qu'en  dix  ou  onze  années  ,  depuis  1 6?>n 
jufqu'en  1697,  ^"  ^^  ^^^^^  ^•''^  quarante  millions  de 
marcs  d'argent.  Il  cite  auffi  la  mine  de  Saint-AIatihieii , 
qui  n'efl  qu'à  peu  de  diflance  de  la  Trinité,  &  qui 
n'ayant  été  ouverte  qu'en  1689,  étoit  fouillée  à  quatre 
cents  pieds  en  1697;  '^  ^'^  4"^  ^^^  pierres  métalliques 
en  font  de  la  plus  grande  dureté ,  qu'il  faut  d'abord  les 
perarJer  &  les  bri/èr  à  coups  de  marteau  ;  que  l'on 
diflingue  &  fépare  les  morceaux  qu'on  peut  faire  fondre 
tout  de  fuite ,  de  ceux  qu'on  doit  auparavant  amalgamer 
avec  ie  mercure.  On  broie  ces  pierres  métalliques , 
propres  à  la  fonte,  dans  un  mortier  de  (er ,  &  après 
avoir  féparé  par  des  lavages ,  la  poudre  de  pierre  autant 

(h)  En  Amérique,  îes  mines  d'argent  fe  trouvent  commune'ment 
dans  les  montagnes  &  rochers  très-hauts  &  dëferts  ....  Il  y  a  des 
mines  de  deux  fortes  différentes ,  les  unes  qu'ils  appellent  égarées , 
&  les  autres  Jîxes  &  arrêtées.  Les  égarées  lont  des  morceaux  de 
métal  qui  fe  trouvent  amafles  en  quelques  endroits ,  lefquels  étant 
tirés  &  enlevés,  il  ne  s'en  trouve  pas  davantage;  mais  les  veines 
fixes  font  celles  qui,  en  profondeur  &  longueur,  ont  une  fuite  con- 
tinue en  façon  de  grandes  branches  &  rameaux  ,  &  quand  on  en  a 
trouvé  de  cette  elpèce ,  on  en  trouve  ordinairement  plufieurs  autres 
au  même  lieu....  Les  Américains  favoient  fondre  l'argent;  mais 
ils  n'ont  jamais  employé  le  mercure  pour  le  féparer  du  minerai. 
mjlûire  Naturelle  des  Indes ,  par  AcoJIa;  Paris,  160  0  y  page  /J/. 

Minéraux,  Tome  JIL  F 


42  HisTOinE  Naturelle 

qu'il  eftpoffible,  on  mcle  le  minerai  avec  une  certaine 
quantité  de  plomb,  &  on  ies  fait  fondre  enfemble,  on 
enlève  ks  fcories  avec  un  croc  de  fer ,  tandis  que  par 
le  bas  on  laifTe  couler  l'argent  en  lingots  que  Ton  porte 
dans  un  autre  fourneau ,  pour  le  refondre  &.  achever 
d'en  féparer  le  plomb.  Chaque  lingot  d'argent  eft  d'en- 
viron quatre-vingts  ou  cent  marcs ,  &  s'ils  ne  fe  trouvent 
pas  au  titre  prefcrit,  on  les  fait  refondre  une  féconde 
fois  avec  le  plomb  pour  les  affiner.  On  fait  auffi  l'effai 
de  la  quantité  d'or  que  chaque  lingot  d'argent  peut  con- 
tenir, &  on  l'indique  par  une  marque  particulière;  s'il 
s'y  trouve  plus  de  quarante  grains  d'or  par  marc  d'argent, 
on  en  fait  le  départ.  Et  pour  les  autres  parties  du  minerai 
que  l'on  veut  traiter  par  l'amalgame,  après  les  avoir 
réduites  en  poudre  très-fine ,  on  y  mêle  le  mercure  & 
l'on  procède,  comme  nous  l'avons  dit,  en  parlant  du 
traitement  des  mines  de  Potofi  ;  le  mercure  qu'on  y 
emploie  vient  d'Efpagne  ou  du  Pérou,  il  en  faut  un 
quintal  pour  féparer  mille  marcs  d'argent.  Tout  le  pro- 
duit des  mines  du  Mexique  &  de  la  nouvelle  E/pagne, 
doit  être  porté  à  Mexico  ,  &  l'on  affure  qu'à  la  fin 
du  dernier  fièclc,  ce  produit  étoit  de  deux  millions  de 
marcs  par  an ,  fans  compter  ce  qui  palfoit  par  des  voies 

indireéles   fi). 

_ . , — _ — __ , — , — .  — — ^ 

(i)   Hiftoire  générale  des  Voyages,  tome  XI ,  pages  j 3  0  &  fu'iv» 

Les   cantons  de    Tlafco  âc  de  Maltepeque ,  à  l'oueft  du  Mexique, 

font  aufll  fort  célèbres  par  Uurs  mines  d'argent;  CuaPiimango ,  du 


DES  Minéraux,  4} 

H  y  a  aufil  plufieurs  mines  d'argent  au  Chili ,  fur- 
tout  dans  le  voifinagc  de  Co<^mmho  (kj ,  &  au  Brefif, 
à  quelque  diflance  dans  les  terres  voifmes  de  la  baie 
de  tous  les  Saints  (l);  Ton  en  trouve  encore  dans  plu- 
fieurs autres  endroits  du  continent  de  l'Amérique  & 
même  dans  les  Illes  :  les  anciens  Voyageurs  citent  en 

côte  du  nord,  ne  l'eft  pas  moins  par  les  Tiennes,  avec  onze 
autres  dans  ce  même  canton;  &  dans  fa  province  de  Guaxaga ,  il 
y  en  a  un  aufîi  grand  nombre.  Les  mines  de  Guanaxat'i  &  de 
Talpuyaga  font  deux  autres  mines  célèbres,  la  première  eft  à  vingt- 
huit  lieues  de  Valladolid  au  nord,  &  l'autre  à  vingt -quatre  lieues 
de  Mexico.  Une  montagne  fort  haute  &  inacceffible  aux  voitures,  6c 
même  aux  bêies  de  charge ,  qui  eft  placée  dans  la  province  de 
Guadalajara,  vers  les  Zacaùqucs,  renferme  quantité  de  mines  d'argent 
&  de  cuivre  mêlées  de  plomb.  La  province  de  Xalifco,  conquife  en 
1554.,  efl:  une  des  plus  riches  de  la  nouvelle  Efpagne,  par  Tes 
mines  d'argent,  autour  defquelles  il  s'efl:  formé  des  habitations  nom- 
breufes,  avec  des  fonderies,  des  moulins,  &c  ....  Celle  de  Calnacana 
contient  aufll  des  mines  d'argent.  Les  Zacaùques  ou  Zacuîecas,  font 
un  grand  nombre  de  petits  cantons  qui  forment,  fous  ce  nom  commun, 
la  plus  riche  province  de  la  nouvelle  Efpagne  ;  on  y  compte  douze 
ou  quinze  mines  d'argent ,  dont  neuf  ou  dix  font  fort  célèbres , 
fur-tout  celle  del  Frefnillo  qui  paro/t  inépuifable.  La  province  de  la 
nouvelle  Bifcaie,  contient  les  mines  à'Eude ,  de  Saint- Jean  &  de 
Sainte-Barbe,  qui  font  d'une  grande  abondance,  &  voifmes  de  plu- 
fieurs mines  de  plomb.  Les  montagnes  qui  féparent  le  Honduras  de 
la  province  de  Nicaragua,  ont  fourni  beaucoup  d'or  &  d'argent  aux 
Efpagnols.  La  province  de  Colla  Ricca,  fournit  aufll  de  l'or  &  de 
l'argent.  Hijioire  générale  des  Voyages ,  tome  XII,  pages  (j^S  &  fuiv^ 

(k)  Idem,  tome  XIII ,  page  412, 

(l)  Voyages  de  M.  de  Gemies  ;  Paris ^  i^^S,page  i^j. 

Fij 


4.4-         Histoire    Naturelle 

particulier  celle  de  Saint-Domingue  f?nj ,  mais  la  culture 
&  le  produit  du  fucre  &  des  autres  denrées  de  confoni- 
mation  que  l'on  tire  de  cette  île  font  des  tréfors  bien 
plus  réels  que  ceux  de  fes  mines. 

Après  avoir  ci-devant  expofé  les  principales  propriétés 
de  l'argent,  &  avoir  enfuite  parcouru  les  différentes 
contrées  où  ce  métal  fe  trouve  en  plus  grande  quantité , 
il  ne  nous  refte  plus  qu'à  faire  mention  des  principaux 
faits,  <&  des  obfèrvations  particulières  que  les  Phyficiens 
&  les  Clîimifles  ont  recueillis  en  travaillant  l'argent  & 
en  le  foumettant  à  un  nombre  infini  d'épreuves  ;  je 
commencerai  par  un  fait  que  j'ai  reconnu  le  premier.  On 
étoit  dans  Topinion  que  ni  l'or  ni  l'argent  mis  au  feu 
&  même  tenu  en  fufion ,  ne  perdoient  rien  de  leur 
fubilance  ;  cependant  il  efl  certain  que  tous  deux  fe 
réduifent  en  vapeurs  &  fe  fubliment  au  feu  du  fbleil  à  un 
degré  de  chaleur  même  affez  foible.  Je  l'ai  obfervé,  lorf^ 
qu'en  1747  j'ai  fait  ufage  du  miroir  que  j'avois  inventé 
pour  brûler  à  de  grandes  diftances  |^;7y';  j'expofài  à  40, 
^o  &.  jufqu'à  60  pieds  de  diflance,  des  plaques  &.  des 
affiettes  d'argent,  je  les  ai  vues  fumer  long- temps  avant 
de  fe  fondre,  &  cette  fumée  étoit  affez  épaiffe  pour  faire 
une  ombre  très-fenfible  qui  fè  marquoit  fur  le  terrein. 
On  s'eft  depuis  pleinement  convaincu  que  cette  fumée 
■  — .^ — _ —  ■  ■■ 

(m)    Hifloire  générale  des   Voyages ,  tome  XII,  page  218. 
(nj  Yoyei  les  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences ,  année  174?' 


DES    Minéraux.  4- 

étoit  vraiment  une  vapeur  mcialiique ,  elle  s'attachoit  aux 
corps  qu'on  lui  prélëntoit  &  en  argentoit  la  iurface ,  & 
puifque  cette  fublimaiion  fe  fait  à  une  chaleur  médiocre 
par  le  feu  du  foleil,  il  y  a  toute  raifon  de  croire  qu'elle 
fe  fait  aufli  &  en  bien  plus  grande  quantité  par  la  forte 
chaleur  du  feu  de  nos  fourneaux ,  lorique  non-fèulement 
on  y  fond  ce  métal ,  mais  qu'on  le  tient  en  fufion 
pendant  un  mois,  comme  l'a  fait  Kunckel  :  j'ai  déjà  dit 
que  je  doutois  beaucoup  de  Texadlitude  de  ïon  expé- 
rience ,  6l  je  fuis  perfuadé  que  Targent  perd  par  le  feu 
une  quantité  fenfible  de  fa  iubflance,  &  qu'il  en  perd 
d'autant  plus  que  le  feu  eil  plus  violent  ôi  appliqué  plus 
long-temps. 

L'argent  offre  dans  fès  diffolutions  différens  phéno- 
mènes dont  il  eft  bon  de  faire  ici  mention  ;  lor/qu'il 
efl  diflbus  par  l'acide  nitreux,  on  obfèrve  que  fi  l'argent 
efl  à  peu-près  pur,  la  couleur  de  cette  difîblution,  qui 
d'abord  efl  un  peu  verdâtre,  devient  enfuite  très-blanche, 
&  que  quand  il  efl  mêlé  d'une  petite  quantité  de  cuivre 
elle  efl  conflamment  verte. 

Les  diffolutions  des  métaux  font  en  général  plus 
corrofives  que  l'acide  même  dans  lequel  ils  ont  été 
difTous ,  mais  celle  de  l'argent  par  l'acide  nitreux , 
i'efl  au  plus  haut  degré ,  car  elle  produit  des  criflaux  fi 
caufliques,  qu'on  a  donné  à  leur  maffe  réunie  par  la 
fufion,  le  nom  de  Phrre  infernale.  Pour  obtenir  ces 
triftaux,   il   faut    que  l'argent  &.  l'acide  nitreux    aient 


4.6  Histoire  Naturelle 

été  employés  purs  ;  ces  criftaux  fe  forment  Jans  h 
diffolution  par  le  feiil  refroidifTement  ;  ils  nont  que 
peu  de  coiififlaiice,  &  font  blancs  &  aplatis  en  forme  de 
paillettes;  ils  fe  fondent  très-aifément  au  feu  &  long- 
temps avant  d'y  rougir;  &  c'eft  cette  mafTe  fondue  & 
de  couleur  noirâtre  qui  eft  la  pierre  infernale. 

Il  y  a  plufieurs  moyens  de  retirer  l'argent  de  û 
diffolution  dans  l'acide  nitreux  :  la  feule  adlion  du  feu, 
long-temps  continuée,  fuffit  pour  enlever  cet  acide;  on 
peut  auffi  précipiter  le  métal  par  les  autres  acides,  vitrio- 
lique  ou  marin,  par  les  alkalis  &  par  les  métaux  qui, 
comme  le  cuivre,  ont  plus  d'affinité  que  l'argent  avec 
facide  nitreux. 

L'argent,  tant  qu'il  efl  dans  l'état  de  métal,  n*a  point 
d'affinité  avec  l'acide  marin;  mais  dès  qu'il  efl  diffous, 
il  fe  combine  aifément,  &  même  fortement  avec  cet 
acide  ;  car  la  mine  d'argent  cornée  paroît  être  formée 
par  l'adion  de  l'acide  marin  (o) ;  cette  mine  fe  fond 
très-aifément,  &  même  fe  volatilife  à  un  feu  violent  (p). 


(o)  ÉIcmens  de  Chimie,  par  M.  de  Morveau,  tome  I,  page  1 1 ^> 

(p)  «  On  retire  de  la  Lune-cornée,  l'argent  bien  plus  pur  que  celui 
y>  de  la  coupelle  ;  mais  l'opération  efl  laborieufe ,  &  préfente  un 
»  phénomène  intéreflant.  L'argent  qui ,  comme  l'on  Tait  ,  eft  une 
>■>  fubllance  très-fixe,  y  acquiert  une  telle  volatilité  qu'il  eft  capable 
»  de  s'élever  comme  le  mercure ,  de  percer  les  couvercles  des 
V*  creufets ,  &c  .  . .  .  Il  faut  aulîl  qu'il  éprouve  dans  cet  état ,  une 
»  Torte  d'âtiraâioa  de  iranfmiflioa  au  travers  des  pores  de^  vaiflTçavix 


DES    Minéraux.  47 

L'acide  viiriolique  attaque  l'argent  en  maiïe  au  moyen 
de  la  chaleur  ;  il  le  difTout  même  complètement ,  &  en 
faifànt  diftiller  cette  diffolution,  l'acide  pafTe  dans  le  réci- 
pient, &  forme  un  fel  qu'on  peut  appeler  vitriol  d'argent. 

Les  acides  animaux  &.  végétaux,  comme  Tacide  des 
fourmis  ou  celui  du  vinaigre,  n'attaquent  point  l'argent 
dans  fon  état  de  métal ,  mais  ils  difToIvent  très-bien  fes 
jnécipités  (q) , 

Les  alkalis  n'ont  aucune  adionfur  l'argent,  ni  même 
fur  fes  précipités  ;  mais  lorfqu'ils  font  imis  aux  principes 
du  foufre ,  comme  dans  le  foie  de  fbufre ,  ils  agiffent 
puifTamment  fur  la  fubflance  de  ce  métal  qu'ils  noir- 
ci/fent  &  rendent  aigre  &  caffant. 

Le  foufre  qui  facilite  la  Rifion  de  l'argent,  doit  par 
conféquent  en  altérer  la  flibftance  ;  cependant  il  ne 
l'attaque  pas  comme  celle  du  fer  &  du  cuivre  qu'il 
transforme  en  pyrite  ;  l'argent  fondu  avec  le  fbufre  peut 
en  être  féparé  dans  un  inftant,  par  l'addition  du  nitre 
qui,  après  la  détonation,  lai/Te  l'argent  fans  perte  fèn- 
fible  ni  diminution  de  poids.  Le  nitre  réduit  au  con- 
traire le  fer  &  le  cuivre  en  chaux,  parce  qu'il  a  une 
a6lion  dired:e  fur  ces  métaux  &.  qu'il  n'en  a  point  fur 
J 'argent. 

les  plus  compares ,  puifque  l'on  trouve  une  quantité  de  grenailles  « 
d'argent  difleminées  jufque  dans  la  tourte  qui  fupportoit  le  creufet  ». 
ÉUmens  de  Chimie ,  par  M.  de  Morveau ,  tome  /,  page  220, 
(q)  Idem,  tomt  JJ,  page    1  y,  &  tome  JJJ,  page  1  ^, 


^.S  Histoire  Naturelle 

La  farface  de  l'argent  ne  fe  convertit  point  en  rouille 
par  i'impreflion  des  ciémens  humides;  mais  elle  efl  fujette 
à  fe  ternir,  fe  noircir  &l  fe  colorer;  on  peut  même  lui 
donner  l'apparence  &  la  couleur  de  l'or  en  l'expofànt 
à  certaines  fumigations ,  dont  on  a  eu  raifon  de  profcrire 
i'ufage  pour  éviter  la  fraude. 

On  emploie  utilement  l'argent  battu  en  feuilles  minces 
pour  en  couvrir  les  autres  métaux,  tels  que  le  cuivre 
&  le  fer:  il  fuffit  pour  cela  de  bien  nettoyer  la  furface 
de  ces  métaux  &l  de  les  faire  chauffer  ;  les  feuiiles  d'argent 
qu'on  y  applique  s'y  attachent  6c  y  adhèrent  fortement. 
Mais  comme  les  métaux  ne  s'uniffent  qu'aux  métatLx , 
&  qu'ils  n'adhèrent  à  aucune  autre  fubflance  ;  il  faut,  lorf- 
qu'on  veut  argenter  le  bois  ou  toute  autre  matière  qui 
n'eft  pas  métallique ,  fe  fèrvir  d'une  colle  faite  de  gomme 
ou  d'huile,  dont  on  enduit  le  bois  par  plufieurs  couches 
qu'on  laiffe  fécher  avant  d'appliquer  la  feuille  d'argent 
fur  la  dernière  ;  l'argent  n'eft  en  effet  que  collé  fur 
l'enduit  du  bois ,  &  ne  lui  eft  uni  que  par  cet  intermède 
dont  on  peut  toujours  le  féparer  fans  le  fecours  de  la 
fiifion ,  &  en  faifant  feulement  brûler  la  colle  à  laquelle 
il  étoit  attaché. 

Quoique  le  mercure  s'attache  promptement  &  affez 
fortement  à  la  furface  de  l'argent,  il  n'en  pénètre  pas 
la  maffe  à  l'intérieur;  il  faut  le  triturer  avec  ce  métal 
pour  en  faire  l'amalgame. 

11  nous  refte  encore  à  dire  un  mot  du  fameux  arbre 

de 


i>ES  Minéraux.  49 

cle  Diane,  dont  les  Charlatans  ont  fi  fort  abufé,  en 
faifant  croire  qu'ils  avoient  le  fecret  de  donner  à  l'or 
&  à  l'argeni  la  faculté  de  croître  &  de  végéter  comme 
les  plantes;  néanmoins  cet  arbre  métallique  n'eft  qu'un 
aiïemblage  ou  accumulation  des  crifîaux  produits  par  le 
travail  de  l'acide  nitreux  fur  l'amalgame  du  mercure  & 
de  l'argent';  ces  crifîaux  fè  groupent  fucceffivement  les 
uns  fur  les  autres,  &.  s'accumulant  par  fuperpofition ,  ils 
repréfentem  groffièremeut  la  figure  extérieure  d'une 
végétation  (^rj. 

{"rj  Pour  former  l'arbre  de  Diane,  on  fait  difToudre  enfemble  ou 
ft-parément ,  quatre  gros  d'argent  &  deux  gros  de  mercure,  dans 
l'eau  forte  précipitée,  on  étend  cette  diiïoiution  par  cinq  onces  d'eau 
diftillée ,  on  verfe  le  mélange  dans  une  petite  cucurbite  de  verre , 
dans  laquelle  on  a  mis  auparavant  fix  gros  d'amalgame  d'argent, 
en  confiftance  de  beurre ,  &  on  place  le  vaifieau  dans  un  endroit 
tranquille  ,  à  l'abri  de  toute  commotion  ;  au  bout  de  quelques  heures  , 
il  s'élève  de  la  mafle  d'amalgame,  un  buifTon  métallique  avec  de 
belles  ramifications.  Elémens  de  Chimie,  par  M.  de  Ahrveau,  tome  III, 
pngfs  4^4  &  4SJ' 


Mhicraus  t  Tome  IIL 


50  Histoire  Naturelle 


DU    CUIVRE. 

UE  la  même  manière  &  Jans  ie  même  temps  que 
les  roches  primordiales  de  fer  fe  font  réduites  en  rouille 
par  l'imprefîion  des  élémens  humides ,  les  mafles  du 
cuivre  primitif  fe  font  décompofées  en  vert  -  de  -  gris , 
qui  efl  la  rouille  de  ce  métal,  &  qui,  comme  celle  du 
fer ,  a  été  iranfportée  par  les  eaux ,  <Sc  difféminée  fur  la 
terre  ou  accumulée  en  quelques  endroits ,  où  elle  a  formé 
des  mines  qui  fe  font  de  même  dépofées  par  alluvion , 
Si.  ont  enfuite  produit  les  minerais  cuivreux  de  féconde 
&.  de  troifième  formation  ;  mais  le  cuivre  natif  ou  de 
première  origine  a  été  formé  comme  l'or  &  l'argent 
dans  les  fentes  perpendiculaires  des  montagnes  quart- 
zeufes,  6l  il  fe  trouve,  foit  en  morceaux  de  métal  malTif, 
foit  en  veines  ou  fiions  mélangés  d'autres  métaux.  li  a 
été  liquéfié  ou  fuhlimé  par  le  feu,  &  il  ne  faut  pas 
confondre  ce  cuivre  natif  de  première  formation  avec 
le  cuivre  en  flalaélites ,  en  grapes  ou  filets,  que  nos 
Chimifles  ont  également  appelés  aiirres  natifs  (a) ,  parce 
qu'ils  fe  trouvent  purs  dans  le  fein  de  la  terre  ;  ces  der- 
niers cuivres  font  au  contraire  de  troifième  &  peut-être 
de  quatrième  formation;  la  plupart  proviennent  d'ime 
cémentation  naturelle  qui  s'efl  faite  par  l'intermède  du 

(a)  Lettres  de   M.  Demefte  au  dodeur  Bernard,  tome  II,  paoc 


DES    Minéraux,  51 

fer  auquel  le  cuivre  dccompofc  s'efl  attaché  après  avoir 
été  clifTous  par  les  fels  de  la  terre.  Ce  cuivre  rétabli 
dans  fou  état  de  métal  par  la  cémentation,  auiîi-bien 
que  le  cuivre  primitif  qui  fubfifle  encore  en  ma  (Tes 
métalliques ,  s'efl  offert  le  premier  à  la  recherche  des 
hommes  :  <&  comme  ce  métal  efl  moins  difficile  à  fondre 
que  le  fer ,  il  a  été  employé  long-temps  auparavant  pour 
fabriquer  les  armes  &  les  inflrumens  d'agriculture.  Nos 
premiers  pères  ont  donc  ufé  ,  confommé  les  premiers 
cuivres  de  l'ancienne  nature;  c'efl,  ce  me  femble,  par 
cette  raifon,  que  nous  ne  trouvons  prefque  plus  de  ce 
cuivre  primitif  dans  notre  Europe  non  plus  qu'en  Ahe, 
il  a  été  confommé  par  i'ufage  qu'en  ont  fait  les  habitans 
de  ces  deux  parties  du  monde  très-anciennement  peu- 
plées &  policées ,  au  lieu  qu'en  Afrique,  &  fur-tout  dans 
le  continent  de  l'Amérique,  où  les  hommes  font  plus 
nouveaux  &  n'ont  jamais  été  bien  civilifés ,  on  trouve 
encore  aujourd'hui  des  blocs  énormes  de  cuivre  en 
maffe  qui  n'a  hefoin  que  d'une  première  fufion  pour 
donner  un  métal  pur,  tandis  que  tout  le  cuivre  miné- 
ralifé  &  qui  fe  préfente  fous  la  forme  de  pyrites,  demande 
de  grands  travaux,  plufieurs  feux  de  grillage,  &  même 
plufieurs  fontes  avant  qu'on  puiffe  le  réduire  en  bon 
métal  ;  cependant  ce  cuivre  minéralifé  eft  prefque 
le  feul  que  l'on  trouve  aujourd'hui  en  Europe  ;  le 
cuivre  primitif  a  été  épuifé,  &  s'il  en  refle  encore, 
ce  n'cfl  que  dans  l'intérieur  des  montagnes  oii  nous 

G  i; 


52         Histoire   Naturelle 

n'avons  pu  fouiller,  tandis  qu'en  Amérique  il  fc  préfente 
à  nu,  non -feulement  fur  les  montagnes,  mais  jufque 
dans  les  plaines  &  les  lacs  ,  comme  on  le  verra 
dans  l'énumération  que  nous  ferons  des  mines  de  ce 
métal ,  &  de  leur  état  aduel  dans  les  différentes  parties 
du  monde. 

Le  cuivre  primitif  étoit  donc  du  métal  prefque  pur, 
incrufté  comme  i'or  &  l'argent  dans  les  fentes  du  quartz, 
ou  mêlé  comme  le  fer  primitif  dans  les  mafles  vi- 
treufcs  ;  &  ce  métal  a  été  dépofé  par  fufion  ou  par  iubli- 
mation  dans  les  fentes  perpendiculaires  du  Globe  dès 
le  temps  de  fa  confolidation  ;  l'aélion  de  ce  premier  feu 
en  a  fondu  &  fliblimé  la  matière,  &.  l'a  incorporée  dans 
les  rochers  vitreux;  tous  les  autres  états  dans  lefquels 
fe  préfènte  le  cuivre,  font  poftérieurs  k  ce  premier  état, 
&.  les  minerais  mêlés  de  pyrites ,  n'ont  été  produits , 
comme  les  pyrites  elles-mêmes,  que  par  l'intermède 
des  élémens  humides  :  le  cuivre  primitif  attaqué  par  l'eau, 
par  les  acides,  les  fels,  &  même  par  les  huiles  des  végé- 
taux dccompofés ,  a  change  de  forme;  il  a  été  altéré, 
minéralifé,  détérioré,  &  il  a  fu])i  un  û  grand  nombre 
de  transformations  qu'à  peine  pourrons- nous  le  fuivre 
dans  toutes  lès  dégradations  &.  décompofitions. 

La  première  &  la  plus  fimple  de  toutes  les  décom- 
pofitions du  cuivre  eft  ià  converfion  en  vert-de-gris 
ou  verdet  ;  l'humidité  de  l'air  ou  le  plus  léger  acide, 
fuilifem  pour  produire  cette  rouiik  verte;  ainfi  dès  les 


D  E  s     M  I  N  É  R  A  U  X,  53 

premiers  temps ,  après  ia  chute  des  eaux ,  toutes  les 
furfaces  des  blocs  du  cuivre  primitif  ou  des  roches 
vitreufès  dans  le/quelles  il  étoit  incorporé  &  fondu, 
auront  plus  ou  moins  fubi  cette  altération  ;  la  rouille 
verte  aura  coulé  avec  les  eaux,  &  fe  fera  difTéminée 
fur  la  terre  ou  dépofée  dans  les  fentes  &l  cavités  où  nous 
trouvons  le  cuivre  fous  cette  forme  de  verdet.  L'eau ,  en 
s'infiltrant  dans  les  mines  de  cuivre,  en  détache  des 
parties  métalliques ,  elle  les  divife  en  particules  fi  ténues 
que  fbuvent  elles  font  invifibles ,  &  qu'on  ne  les  peut 
reconnoître  qu'au  mauvais  goût  &l  aux  effets  encore 
plus  mauvais  de  ces  eaux  cuivreufès,  qui  toutes  décou- 
lent des  endroits  où  giffent  les  mines  de  ce  métal ,  & 
communément  elles  font  d'autant  plus  chargées  de  parties 
métalliques  qu'elles  en  font  plus  voifmes  :  ce  cuivre 
diïïbus  par  les  fels  de  la  terre  &.  des  eaux ,  pénètre  les 
matières  qu'il  rencontre  ;  il  fe  réunit  au  fer  par  cémenta- 
tion ,  il  fe  combine  avec  tous  les  fels  acides  &l  alkalins  ; 
&  fe  mêlant  auffi  avec  les  autres  fubflances  métalliques , 
il  fe  préfente  fous  mille  formes  différentes ,  dont  nous  ne 
pourrons  indiquer  que  les  variétés  les  plus  confiantes. 

Dans  fes  mines  primordiales ,  le  cuivre  eft  donc  fous 
fa  forme  propre  de  métal  natif,  conune  l'or  &  l'argent 
vierge;  néanmoins  il  n'eft  jamais  auffi  pur  dans  fon  état 
de  nature  qu'il  le  devient  après  avoir  été  rafHné  par 
notre  art;  dans  cet  état  primitif  il  contient  ordinairement 
une  petite  quantité  de  ces  deux  premiers  métaux  ;   ils 


54-  Histoire   N atu re lle 

paroifTcnt    tous  'trois    avoir  été    fondus    enfèmble   ou 
fublimés  prefque  en  même  temps  dans  les  fentes  de  la 
roche  du  Globe  ;  mais  de  plus,  le  cuivre  a  été  incor- 
poré <&  mêlé,  comme  le  fer  primitif,  avec   la  matière 
vitreufe  :  or,  l'on  fait  que  le  cuivre  exige  plus  de  feu  que 
l'or  &  Targent  pour  entrer  en  fufion,  &  que  le  fer  en  exige 
encore  plus  que  le  cuivre;  ainfi  ce  métal  tient  entre  les 
trois  autres  le  milieu  dans  Tordre  de  la  lufion  primitive, 
puifqu'il  fe  préfente  d'abord  comme  l'or  &  l'argent,  fous 
la  forme  de  métal  fondu,  &  encore  comme  le  fer,  /bus 
la  forme  d'une  pierre  métallique.  Ces  pierres  cuivreufès 
font  communément  teintes  ou  tachées  de  vert  ou  de  bleu, 
la  feule  humidité  de  l'air  ou  de  la  terre  donne  aux  par- 
ticules cuivreufès  cette  couleur  verdâtre ,  &  la  plus  petite 
quantité   d'aikali   volatil    la  change  en   bleu  ;    ainfi    cqs 
maffes  cuivreufès  qui  font  teintes  ou  tachées  de  vert  ou 
de  bleu>  ont  déjà  été  attaquées  par  les  élémens  humides 
ou  par  les  vapeurs  alkalines. 

Les  mines  de  cuivre  tenant  argent,  font  bien  plus 
communes  que  celles  qui  contiennent  de  l'or  ;  &  comme 
le  cuivre  efl  plus  léger  que  l'argent,  on  a  obfervé  que 
dans  les  mines  mêlées  de  ces  deux  métaux ,  la  quantité 
d'argent  augmente  à  mefure  que  l'on  defcend  ;  en  forte 
que  le  fond  du  filon  donne  plus  d'argent  que  de  cui\Te, 
&  quelquefois  même  ne    donne  que  de    f  argent  (b) , 

(h)  Le  cuivre  le  forme  près  de  l'or  &  de  l'argent,  dans  des  pierres 
mincrales  de    difFc'rentes    couleurs ,   quoique    toujours   marqut'es    de 


DES    Minéraux.  55 

tandis  que  dans  fa  partie  fupérieure  ii  n'avoit  ofîert  que 
du  cuivre. 

En  général ,  les  mines  primordiales  de  cuivre  font 
afTez  fouvent  voifmes  de  celles  d'or  &  d'argent,  &  toutes 
font  fituées  dans  les  montagnes  vitreufes  produites  par 
le  feu  primitif;  mais  les  mines  cuivreufès  de  féconde 
formation  &  qui  proviennent  du  détriment  des  premières, 
giffent  dans  les'  montagnes  fchiiîeufes ,  formées  comme 
les  autres  montagnes  à  couches ,  par  le  mouvement  &. 
le  dépôt  des  eaux.  Ces  mines  fecondaires  ne  font  pas 
auffi  riches  que  les  premières  :  elles  font  toujours  mé- 
langées de  pyrites  &  d'une  grande  quantité  d'autres 
matières  hétérogènes  (c  ). 

bleu  &  de  vert.  En  fuivant  les  veines  de  cuivre  pur ,  on  rencontre 
quelquefois  de  riches  échantillons  d'or  très  -  fin  ;  jnais  il  ell  plus 
ordinaire  de  trouver  de  l'argent:  quand  on  aperçoit  quelqu'échan- 
tilfon  d'argent  fur  Ja  luperficie  des  veines  de  cuivre,  le  fond  a  coutume 
d'être  riche  en  argent.  ...  La  luperficie  de  la  mine  d'OJIologué  au 
pays  de  Lipes ,  étoit  de  cuivre  pur;  mais  à  mefure  qu'on  creufoit 
elle  fe  transformoit  en  argent ,  julqu'à  devenir  argent  pur,  AJctal- 
lurgie  d' Alphovfe  Barba ,  tome  I ,  page  i  oy. 

(c)  Dans  \qs  montagnes  à  couches,  le  cuivre  e/l  ordinairement 
dans  un  compofé  d'ardoife  gris  ,  noir  ou  bleuâtre ,  dans  lequel  il  y  a 
fouvent  des  pyrites  cuivreufès,  du  vert-de-gris,  ou  du  bleu  de  cuivre 

parfenié   très  -  finement Les  ardoifes  cuivreufès ,   qu'on  trouve 

communément  dans  les  montagnes  à  couches,  lont  puiflantes  depuis 
quelques  pouces  jufqu'à  un  pied  <Sc  demi ,  &  rarement  j)Ius  ;  elles 
font  aufll  très-pauvres  en  métal ,  ne  donnent  que  deux  ou  trois  livres 
de  cuivre  par  quintal  ;  mais  ce  cuivre  efl:  très-bon.  Injlruâicn  fur  ks 
îninesj  par  AI.  Delius ,  tome  I ,  pages  Sy  &  S  S, 


56        Histoire    Naturelle 

Les  mines  Je  troifième   formation  gifTent,  comme 
les  feconJes,  dans  les  montagnes  à  couches,  &l  fe  trou- 
vent non-feulement  dans  les  fchifles ,  ardoifès  &  argiles , 
mais  auiïi  dans  les  matières  calcaires  ;  elles  proviennent 
du  détriment  des  mines  de  première  &  de  féconde  for- 
mation, réduites  en  poudre  ou  diflbutes  &l  incorporées 
avec  de  nouvelles  matières.    Les  Minéralogiftes  leur  ont 
donné  autant  de  noms  qu'elles  leur  ont  préfenté  de  dif- 
férences. La  chryfocolle  ou  vert  de  montagne,  qui  n'efl 
que  du  vert-de-gris   très-atténué ,  la  chryibcolle  bleue 
qui  ne  diffère  de  la  verte'  que  par   la  couleur  que  les 
alkalis  volatils  ont  fait  changer  en  bleu  ;  on  l'appelle  au/fi 
ûliir ,  lorfqu'il  efl  bien  intenfè ,    &  il  perd  cette   belle 
couleur  quand  il  efl  expofé  à  l'air,  &  reprend  peu  à 
peu    fa    couleur    verte  ,    à    mefure   que   l'alkali    volatil 
s'en    dégage  ;   il  reparoît   alors ,  comme  dans  fon  pre- 
mier état,  fous  la  forme  de  chryfocolle  verte,   ou  fous 
celle  de  malachite  :  il  forme  auffi  des   criftaux  verts  & 
bleus  fuivant  les  circonflances  ,  &  l'on  prétend  même 
qu'il  en  produit  quelquefois  d'auffi  rouges  &  d'auffi  tranf^ 
parens,  que  ceux  de  la  mine  d'argent  rouge:  nosChimifles 
récens  en   donnent  pour  exemple,    les   criftaux  rou^^es 
qu'on  a  trouvés  dans  les  cavités  d'un  morceau  de  métal 
enfoui  depuis  plufieurs  fiècles  dans  le  fein  de  la  terre; 
ce  morceau  eft  une  partie  de  la  jambe  d'un  cheval  de 
bronze,  trouvée  à  Lyon  en   1771;  mon  favant  ami,  M. 
de  Morveau,  m'a  écrit  qu'en  examinant  au  microfcope 

les 


D  E  s     AI  I  N  É  R  A  U  X.  57 

les  cavités  de  ce  morceau,  il  y  a  vu  non  -  feulement 
des  criftaux  d'uu  rouge  de  rubis,  mais  aufTi  d'autres  criflaux 
d'un  beau  vert  d'cmeraudc  &  tran/j^arens  dont  on  n'a  pas 
parié  ,  &  il  me  demande  qu'cfl-ce  qui  a  pu  produire 
ces  criftaux  (dj  f  M.  Demefte  dit  à  ce  Tujet,  que  l'azur 
&  le  vert  du  cuivre,  ainfi  que  la  malachite  &  les  criftaux 
rouges  qui  fè  trouvent  dans  ce  bloc  de  métal ,  ancienne- 
ment enfoui  ,  font  autant  de  produits  des  différentes 
modifications  que  le  cuivre,  en  état  métallique,  a  fubies 
dans  le  fein  de  la  terre  (e) ;  mais  cet  habile  Chimifte  me 
paroît  fe  tromper,  en  attribuant  au  cuivre  feul  f origine 
de  ces  petits  cr'ijhmx  qui  font ,  dit-il ,  trcs-cclatans,  &  d'une 
vùiic  rouge  de  cuivre  tranfparente ,  comme  la  plus  belle  mine 
d'argent  rouge  :  car  ce  morceau  de  métal  n'étoit  pas  de 
cuivre  pur,  mais  de  bronze,  comme  il  le  dit  lui-mcme, 

(d)  Lettres  de  M.  de  Morveau  à  M.  de  Buffon.  Dijon ,  le  2  8 
Août  lySi. 

(e)  «  Rien  n'efl  plus  propre  ,  dit-il ,  à  démontrer  le  paflâge  du 
cuivre  natif  aux  mines  fecondaires ,  que  la  jambe  d'un  cheval  « 
antique  de  bronze,  trouvée  dans  une  fouille  faite  à  Lyon  en  i  771  :  « 
cette  jambe  qui  avoit  été  dorée  ,  offroit  non-leulement  de  la  mala-  ce 
chite  &  de  ra7ur  de  cuivre;  mais  on  y  remarquoit  aufli  plufieurs  « 
cavités  dont  l'intérieur  étoit  tapifle  de  petits  criftaux  très-éciatans ,  «c 
de  mine  rouge  de  cuivre,  tranfparente  comine  la  plus  belle  mine  te 

d'argent  rouge On  peut  donc  avancer  que  l'azur  &  le  vert  « 

de  cuivre,  ainfi  que  les  criftaux  rouges  qui  s'y  rencontrent,  font  « 
autant  de  produits  des  différentes  modifications  que  le  cuivre  en  «: 
ctat  métallique ,  a  fubies  dans  le  fein  de  la  terre  ».  Lettres  dt 
M.    Demejle  ,  &c.  tome  II,  pages  j/7  à"  ^j8. 

ATinéraux,  Tome  IIL  H 


5?  Histoire  Naturelle 

c'efl-à-dire  de  cuivre  mclé  d'étain,  &  dès-iors  ces  criflaux 
row^ts  peuvent  être  regardés  comme  des  criflaux  pro- 
duits  par  l'arfenic,  qui  refle  toujours  en  plus  ou  moins 
grande  quantité  dans  ce  métal.  Le  cuivre  feu!  n'a  jamais 
produit  que  du  vert  qui  devient  bleu  quand  ii  éprouve 
i'adion  de  l'alicali  volatil. 

M.  Demede  dit  encore  «  que  l'azur  de  cuivre  ou  les 

»  fleurs  de  cuivre  bleues,  reffemblent  aux  criilaux  d'azur 

»  artificiels  ;  que  leur  paflage  à  la  couleur  verte ,  lorfqu'elles 

r>  fc  dccompofent ,  ell  le  même ,  &.  qu'elles  ne  dilf  èrent 

qu'en  ce  que  ces   derniers  l'ont  folubles   dans  l'eau.  » 

Mais  je  dois  obferver  que  néanmoins  cette  différence  eft 

telle  qu'on  ne  peut  plus  admettre  la  même  compofition , 

&  quil  ne  refle  ici  qu'une  reffemblance  de  couleur.  Or, 

le  vitriol  bleu  pré/ènte  ia  même  analogie ,  &.  cependant 

on  ne  doit  pas  le  confondre  avec   le  bleu  d'azur.  M. 

Demede  ajoute,  avec  toute  raifon  ce  que   l'alkali  volatil 

»  efl  plus   commun  qu'on  ne  croit  à  la  furface  &  dans 

^>  l'intérieur  de  la  terre qu'on  trouve   ces  cri/laux 

»  d'azur  dans  les  cavités  des  mines  de  cuivre  déeompofées, 
»  à.  que  quelquefois  ces  petits  crirtaux  font  très-éclatans 
»  &  de  l'azur  le  plus  vif;  que  cet  azur  de  cuivre  prend 
»  le  nom  de  à/eu  de  înonmgne  lorfqu'il  efl  mélangé  à  des 
»  matières  terreufes  qui  en  affoiblilfent  la  couleur,  &  qu'enfin 
»  le  bleu  de  montagne ,  comme  l'azur,  font  également  fuf^ 
ceptibles  de  fe  décompofer  en  paffant  lentement  à  l'état 
^>  de  malachite ....  que  la  malachite,  le  vert  de  cuivre  ou 


»j 


DES    Minéraux.  ^9 

fleurs  de  cuivre  vertes,  rcfulteiu  fouvent  de  l'altération  « 
fpoîitanée  de  l'azur  de  cuivre,   mais  que  ce  vert  efl  aufTi  « 
produit  par  la  dccompofition  du  cuivre  natif  (Si:  des  mines  « 
de  cuivre ,  à  la  furface  dc/queiles  on   le    rencontre  en  " 
malachites  ou  mafles  plus  ou  moins  confidcrables  <Sl  ma-  « 
melonnées,  &  que  ce  font  de  vraies  (laiadites  de  cuivre,  « 
comme  l'iiématite  en  eft  une  de  fer  (f);  »  tout  ceci 
efl;  très-vrai,  &  c'efl  même  de  cette  manière   que  les 
malachites  font  ordinairement  produites  ;  la  fimple  dé- 
compofition  du  cuivre  en   rouille  verie,  entraînée  par 
la  filtration  des  eaux,   forme  des   flalaélites  vertes,   &. 
cette  combinaifon  efl  bien  plus  fimple  que  celle  de  l'al- 
tération de  l'azur  (Se  de  fa  réduclion  en  fialadites  vertes 
ou  malachites  :  il  en  efl:  de  même  du  vert  de  montagne  ; 
il  efl  produit  plus  communément  par  la  hmple  décom- 
pofition  du  cuivre  en  rouille  verte:  ai  l'habile  Chimifle 
que  je  viens  de  citer  me  paroît  fe  tromper  encore  en 
prononçant  exclufivement,  «  que  le  vert  de  montagne 
efl  toujours  un  produit  de  la  décompofition  du  bleu  de  « 
montagne  ou  de  celle  du  vitriol  de  quwxg  (g) .  »  H  me 
femble  au  contraire  que~  c'efl  le  bleu  de  montagne  qui 
iui-méme  efl   produit  par  l'altération  du   vert    qui  fe 
change  en  bleu;  car  la  Nature   a  les  mêmes  moyens 
que  TArt,  &i  peut  par  conféquent  faire,  comme  nous, 
du  vert  avec  du  bleu,  Ôa  changer  le  bleu  en  vert  fans 

(f)  Lçtires  de   M.    Demefle  ,   &c.  tome  II,  pages  ^  S j)  &  fuh, 
(a)  Id€in,  tome  II,   page  ^70, 

H  i/ 


6o        Histoire    Naturelle 

qu*il   foit  néceffaire  Je  recourir   au   cuivre  natif  pour 
produire  ces  effets. 

Quoique  le  cuivre  foit  de  tous  les  métaux  celui  qui 
approche  le  plus  de  l'or  &  de  l'argent  par  fès  attributs 
généraux,  il  en  diiîère  par  pludeurs  propriétés  efTen- 
tielles  ;  fa  nature  n'efi:  pas  aufîi  parfaite ,  fà  fubflance  eft 
moins  pure,  fa  denlité  &.  fa  duétilité  moins  grandes; 
&  ce  qui  démontre  le  plus  l'imperfection  de  fon  effencc, 
c'cfl  q-.i'il  ne  réfiffe  pas  à  l'impreffion  des  élémens  hu- 
mides; l'air,  l'eau,  les  huiles  &  les  acides  l'altèrent  & 
le  convertifTent  en  verdet  ;  cette  efpèce  de  rouille  pé- 
nètre, comme  celle  du  fer,  dans  l'intérieur  du  métal,  & 
avec   le  temps  en  détruit  la  cohérence  &  la  texture. 

Le  cuivre  de  première  formation  étant  dans  un  état 
métallique,  &  ayant  été  fublimé  ou  fondu  par  le  feu 
primitif,  fe  refond  aifément  à  nos  feux;  mais  le  cuivre 
minéralifé,  qui  efl  de  féconde  formation,  demande  plus  de 
travail  que  toute  autre  minerai  pour  être  réduit  en  métal; 
il  efl  donc  à  préfumer  que  comme  le  cuivre  a  été 
empto)  é  plus  anciennement  que  le  fer ,  ce  n'efl  que  de 
ce  premier  cuivre  de  nature  dont  les  Égyptiens,  les  Grecs 
&  les  Romains  ont  fait  ufage  pour  leurs  inff rumens  & 
leurs  armes  (7/;,  &  qu'ils  n'ont  pas  tenté  de  fondre  les 


(h)  Les  Anciens  fe  fervoient  beaucoup  plus  de  cuivre  que  de 
fer;  Jes  babitans  du  Pérou  &  du  Mexique,  empfoyoient  le  cuivre 
à  tous  les  ufages  auxquels  nous  employons  le  fer.  Métallurgu 
d'Alphonfe  Barba ,  tome  I ,  page  i  q6. 


DES    Minéraux,  6i 

minerais  cuivreux  qui  demandent  encore  plus  d'art  ôl  de 
travail  que  les  mines  de  fer;  ils  favoient  donner  au  cuivre 
un  grand  degré  de  dureté,  ioit  par  la  trempe,  foit  par  Je 
mélange  de  l'étain  ou  de  quelqu'autre  minéral ,  (5c  ils 
rendoient  leurs  inilrumens  &  leurs  armes  de  cuivre 
propres  à  tous  les  ufàges  auxquels  nous  employons  ceux 
de  fer.  Ils  allioient  aufii  le  cuivre  avec  les  autres  mé- 
taux, &  fur-tout  avec  l'or  ôl  l'argent.  Le  fameux  airain 
de  Corinthe,  fi  fort  eflimé  des  Grecs  fij,  ctoit  un  mé- 
lange de  cuivre ,  d'argent  &  d'or ,  dont  ils  ne  nous  ont 
pas  indiqué  les  proportions,  mais  qui  fai/bit  un  alliage 
plus  beau  que  l'or  par  la  couleur ,  plus  fonore ,  plus 
élaflique,  &  en  même  temps  aufTi  peu  fufceptibie  de 
rouille  &  d'altération  :  ce  que  nous  appelons  airain  ou 
bronze  aujourd'hui ,  n'eft  qu'un  mélange  de  cuivre  & 
d'étain ,  auxquels  on  joint  fouvent  quelques  parties  de 
zinc  &  d'antimoine. 

Si  on  mêle  le  cuivre  avec  le  zinc,  fa  couleur  rouge 
devient  jaune ,  ôl  l'on  donne  à  cet  alliage  le  nom  de  anrrâ 
jaune  ou  laiton;  il  efl  un  peu  plus  denfe  que  le  cuivre 
pur  (k) ,  mais  c'eft  lorfque  ni  l'un  ni  l'autre  n'ont  été 

(ï)  yEr'i  corinthio  pretium  ante  argentum ,  ac  pcnc  etiam  ante  auruirip 
Plin.  lib.  XXXIV,  ch.  i. 

(k)  Selon  M.  Brilîbn  ,  le  pied  cube  de  cuivre  rouge  fondu  Se 
non  forge',  ne  pèfe  que  545  livres  2,  onces  4  gros  35  grains, 
tandis  qu'un  pied  cube  de  ce  même  cuivre  rouge  païïe  à  h  filière ,. 
pèfe  6i\   livres  7  onces  7  gros  26  grains.  Cette  grande  diâerence 


dz  Histoire  Natu relle 

comprimés  ou  battus ,  car  il  devient  moins  denfe  que 
k  cuivre  rouge  après  la  compre/Tion;  le  cuivre  jaune 
efl  auffi  moins  fujet  à  verdir,  &  fuivant  les  différentes 
dofes  du  mélange,  cet  alliage  efl  plus  ou  moins  blanc, 
jaunâtre ,  jaune  ou  rouge  ;  c  eft  d'après  ces  différentes 
couleurs  qu'il  prend  les  noms  àç.  fimilor ,  àç,  peïnchebcc 
&  de  métal  de  Prince  ;  mais  aucun  ne  reflemble  plus  à 
l'or  pur  par  le  brillant  &l  la  couleur  que  ie  laiton  bien 
poli,  &  fait  avec  la  mine  de  zinc  ou  pierre  calaminaire, 
comme  nous  l'indiquerons  dans  la  fuite. 

Le  cuivre  s'unit  très-bien  à  l'or,  &.  cependant  en 
diminue  la  dcnfité  au-delà  de  la  proportion  du  mélange, 
ce  qui  prouve  qu'au  lieu  d'une  pénétration  intime ,  il 
n'y  a  dans  cet  alliage  qu'une  cxtenfion  ou  augmentation 
de  volume  par  une  fmiple  addition  de  parties  interpo/écs , 
iefquelles,  en  écartant  un  peu  les  molécules  de  l'or,  &  fe 
logeant  dans  les  intervalles ,  augmentent  la  dureté  <ft 
rélalliciié  de  ce  métal  qui,  dans  fon  état  de  pureté,  a 
plus  de  molieffe  que  de  r^ffort. 

L'or,  l'argent  &.  le  cuivre  fe  trouvent  fouvent  alliés 


demoiiire  que  de  tous  les  métaux  ,  fe  cuivre  eft  celui  qui  fe  com- 
prime le  plus;  &  la  compreffioii  par  la  filière,  efl  plus  grande  que 
celle  de  la  percufllon  par  le  marteau.  M.  Geller  dit  que  la  denfité 
de  l'alliage,  à  parties  égales  de  cuivre  &  de  zinc,  eft  à  celle  du 
cuivre  pur  comme  878  font  à  874.  Chimie  mitallurgique ,  tome  I, 
page  26 y  —  Mais  M.  BrifTon  a  reconnu  que  ie  pied  cuhe  4e  cuivre 
jaune  fundu  &  noa  for^é,  pèfç  5Ç7  livres. 


DES   Minéraux,  63 

par  la  Nature  dans  les  mines  primordiales,  &  ce  n*efl 
que  par  plufieurs  opérations  réitérées  &  difpendieufès, 
que  l'on  parvient  à  les  fcparer  ;  il  faut  donc,  avant  d'en- 
ueprendre  ce  travail,  s'afTurer  que  la  quantité  de  ces 
deux  métaux,  contenue  dans  le  cuivre,  efl  aiïez  confi- 
dérable,  <Sl  plus  qu'équivalente  aux  frais  de  leur  féparation, 
il  ne  faut  pas  même  s'en  rapporter  à  des  effais  faits  en 
petit,  ils  donnent  toujours  un  produit  plus  fort,  &  fe 
font  proportionnellement  à  moindres  frais  que  les  travaux 
en  grand. 

On  trouve  rarement  le  cuivre  aîlié  avec  l'étain  dan& 
le  féin  de  la  terre,  quoique  leurs  mines  foient  fouvent 
très-voifmes ,  &  même  fuperpofées,  c'eft-à-dire,  l'étain 
au-defilis  du  cuivre  ;  cependant  ces  deux  métaux  ne 
laiffent  pas  d'avoir  entr'eux  une  affinité  bien  marquée; 
le  petit  art  de  i'étamage  efl  fondé  fur  cette  affinité  ; 
l'étain  adhère  fortement  &  fans  intermède  au  cuivre, 
pourvu  que  la  fiirface  en  foit  affez  nette  pour  être  touchée 
dans  tous  les  points  par  l'étain  fondu;  il  ne  faut  pour 
cela  que  le  petit  degré  de  chaleur  néceffaire  pour 
dilater  les  pores  du  cuivre  &  fondre  l'étain,  qui  dès- 
lors  s'attache  à  la  furface  du  cuivre  qu'on  enduit  de 
réfme  pour  prévenir  la  calcination  de  l'étain. 

Lorfqu'on  fond  le  cuivre  &  qu'on  y  mêle  de  l'étain, 
l'alliage  qui  en  réfùite,  démontre  encore  mieux  l'affinité 
de  ces  deux  métaux  ,  car  il  y  a  pénétration  dans  leur 
mélange;  la  denfité  de  cet  alliage,  connu  fous  les  noms 


64  Histoire  Nature lle 

à' airain  ou  de  ùroni<;,  efl  plus  grande  que  celle  du  cuivre 
&  de  i'ctain  pris    enfemble,  au  lieu  que  la  denfité  des 
alliages  du  cuivre  avec  l'or  &  l'argent  efl  moindre ,  ce 
qui  prouve  une  union  bien  plus  intime  entre  le  cuivre 
&  l'étain  qu'avec  ces  deux  autres  métaux ,   puifque  le 
volume   augmente   dans   ces   derniers  mélanges ,  undis 
qu'il  diminue  dans  le  premier;  au  refle,  l'airain  eft  d'autant 
plus  dur,  plus  aigre  &  plus  fonore  que  Ja  quantité  d'étain 
efl  plus  grande,  &.  il  ne  faut  qu'une  partie  d'ctain  fur  trois 
de  cuivre  pour  en  faire  di/paroître  la  couleur,  &  même 
pour  le  défendre  à  jamais  de  /à  rouille  ou  vert-de-gris , 
parce  que  l'étain  efl,  après   Tor  &  l'argent,    le   métal 
ie  moins  fufceptible  d'altération  par  les  éiémens  humides; 
&  quand  par  la  fucce/fion  d'un  temps  très -long,  W  fe 
forme  fur  Tairain  ou  bronze,  une  efpèce  de  rouille  ver- 
dâtre,  c'eft,  à  la  vérité,  du  vert-de-gris,  mais  qui  s'étani 
formé  très-lentement,  &  fe  trouvant  mêle  d'une  portion 
d'étain,  produit  cet  enduit  que  Ton  appelle  paiine^  fur 
les  flatues  <Sc  les  médailles  antiques  fij. 

Le  cuivre  &  ie  fer  ont  enièmble  une  afHnité  bien 
marquée,  &  cette  affinité  efl  i\  grande  6l  fi  générale  qu'elle 
fe  montre  non  -  feulement  dans  les  produélions  de  la 
Nature,  mais  aufîi  par  les  produits  de  l'art.  Dans  le 
nombre  infini  de  mines  de  fer  qui  fe  trouvent  à  la  furface 

— ■  ■  - 

(l)  Cet  enduit  o\i patine  ^e^  ordinairement  verdatre,  «Se  quelquefois 
bieuâtre,  &  il  acquiert  avec  le  temps  une  fi  grande  dureté  qu'il 
rcfjfte  au  burin.  Lettres  de  M.  Demcfe ,  tome  II,  page  ^7^. 

OU 


DES    Minéraux,  65 

ou  dans  l'intérieur  de  la  terre,  il  y  en  a  beaucoup  qui 
font  mêlées  d'une  certaine  quantité  de  cuivre,  &  ce 
mélange  a  corrompu  l'un  &  l'autre  métal  ;  car  d'une 
part  on  ne  peut  tirer  que  de  très-mauvais  fer  de  ces 
mines  chargées  de  cuivre,  ôl  d'autre  part  il  faut  que  la 
quantité  de  ce  métal  foit  grande  dans  ces  mines  de  fer, 
pour  pouvoir  en  extraire  le  cuivre  avec  profit.  Ces 
métaux  qui  femblent  être 'amis ,  voifms,  &  même  unis 
dans  le  fein  de  la  terre ,  deviennent  ennemis  dès  qu'on 
les  mêle  enfemble  par  le  moyen  du  feu;  une  feule  once 
de  cuivre  jetée  dans  le  foyer  d'une  forge,  fuffit  pour 
corrompre  un  quintal  de  fer. 

Le  cuivre  que  l'on  tire  des  eaux  qui  en  font  chargées, 
&  qu'on  connoît  fous  le  nom  de  cuivre  de  cémentation , 
efl  du  cuivre  précipité  par  le  fer  ;  autant  il  fe  difTout 
de  fer  dans  cette  opération,  aiuant  il  adhère  de  cuivre 
au  fer  qui  n'ell  pas  encore  diffous ,  &  cela  par  fmiple 
attraction  de  contact:  c'eft  en  plongeant  des  lames  de 
fer  dans  les  eaux  chargées  de  parties  cuivreufès ,  qu'on 
obtient  ce  cuivre  de  cémentation,  &  l'on  recueille  par 
c^  moyen  facile  une  grande  quantité  de  ce  métal  en 
peu  de   temps    (m).   La    Nature   fait   quelquefois   une 

(m)  A  Saint-Bel ,  l'eau  qui  iraverfe  \ti  mines  de  cuivre  fe  fature 
en  quelque  forte  de  vitriol  de  cuivre  naturel ,  il  luffit  de  jeter  dans 
Jes  baflîns ,  où  on  reçoit  cette  eau,  une  quantité  de  vieilles  ferrailles; 
on  y  trouve  peu  de  jours  après,  un  cuivre  rouge  pur;  c'eft  ce 
qu'on  appelle  cuivre  de  cémentation,  Elémens  de  Chimie ,  par  AI.  ds 
/^orveaii ,  tome  II ,  page  ^  i . 

MiticrauXj  Tome  IIL  I 


dd  Histoire  Naturelle 

opération  afTez  fcmblable  ;  il  faut  pour  cela  que  le  cuivre 
diflbus  rencontre  des  particules  ou  des  petites  mafles 
ferrugineufes,  qui  foient  dans  l'état  métallique  ou  pre/que 
métallique,  &.  qui  par  confcquent  aient  fubi  la  violente 
adion  du  feu  ;  car  cette  union  n'a  pas  lieu  lorfque 
les  mines  de  fer  ont  été  produites  par  l'intermède  de 
Teau,  &  converties  en  rouille,  en  grains,  &c,  ce  n'eft 
donc  que  dans  de  certaines  circonflances  qu'il  fe  forme 
du  cuivre  par  cémentation  dans  l'intérieur  de  la  terre; 
par  exemple,  il  s'opère  quelque  cliofè  de  femblable  dans 
la  production  de  certaines  malachites ,  &.  dans  quelques 
autres  mines  de  féconde  &  de  troifième  formation,  où 
Je  vitriol  cuivreux  a  été  précipité  par  le  fer ,  qui  a  plus 
que  toute  autre  métal ,  la  propriété  de  féparer  &.  de  pré- 
cipiter le  cuivre  de  toutes  fes  diffolutions. 

L'affinité  du  cuivre  avec  le  fer ,  efl  encore  démontrée 
par  la  facilité  que  ces  deux  métaux  ont  de  fe  fbuder 
enfemble  ;  il  faut  feidement  en  les  tenant  au  feu ,  les 
empêdier  de  fe  calciner  &  de  brûler,  ce  que  l'on 
prévient  en  les  couvrant  de  borax  ou  de  quelques  autres 
matières  fufibles ,  qui  les  défende  de  l'action  du  Àe\x 
animé  par  l'air  :  car  ces  deux  métaux  fouffrent  toujours 
beaucoup  de  déchet  &.  d'altération  par  le  feu  libre , 
lorfqu'ils  ne  font  pas  parfaitement  recouverts  &.  défendus 
du  contaél  de  l'air. 

Il  n'y  a  point  d'affinité  apparente  entre  le  mercure 
&  le  cuivre  ;  puifqu'il  faut  réduire  le  cuivre  en  poudre 


D  E  s     M  I  N  É  R  A  U  X.  dy 

&  les  triturer  enfembie  fortement  &  long-temps,  pour 
que  le  mercure  s'attache  à  cette  poudre  cuivreufe  ;  ce- 
pendant il  y  a  moyen  de  les  unir  d'une  manière  plus 
apparente  &  plus  intime  ;  il  iaut  pour  cela  plonger  du 
cuivre  en  lames  dans  le  mercure  difFout  par  l'acide 
nitreux  ;  ces  lames  de  cuivre  attirent  le  mercure  difTout, 
&  deviennent  au/Ti  blanches,  à  leur  furface ,  que  les 
autres  métaux  amalgamés  de  mercure. 

Quoique  le  cuivre  puifTe  s'allier  avec  toutes  les  ma- 
tières métalliques,  &  quoiqu'on  le  mêle  en  petite  quantité 
dans  les  monnoies  d'or  &  d'argent  pour  leur  donner  de 
la  couleur  ik.  de  la  dureté,  on  ne  fait  néanmoins  des 
ouvrages  en  grand  volume  qu'avec  deux  de  ces  alliages  ; 
le  premier  avec  l'étain  pour  les  ftatues ,  les  cloches , 
les  canons  ;  le  fécond  avec  la  calamine  ou  mine  de 
zinc  pour  les  chaudières  &  autres  uftenfiles  de  ménage: 
ces  deux  alliages ,  l'airain  &  le  laiton ,  font  même  devenus 
auffi  communs  &  peut-être  plus  néceflaires  que  le  cuivre 
pur ,  puifque  dans  tous  deux  la  qualité  nuifible  de  c«  métal, 
dont  l'ulage  eft  très -dangereux,  fè  trouve  corrigée;  car 
de  tous  les  métaux  que  l'homme  peut  employer  pour 
fbn  fervice,  le  cuivre  efl  celui  qui  produit  les  plus 
foneflcs  effets. 

L'alliage  du  cuivre  &  du  zinc  n'efl  pas  aigre  &  caffant 
comme  celui  du  cuivre  6l  de  l'étain  ;  le  laiton  conferve 
de  la  dudilité ,  il  réfifte  plus  long-temps  que  le  cuivre 
pur,  à  l'aétion  de  l'air  humide  &  des  acides  qui  produifent 


68         Histoire    Naturelle 

le  vert -de -gris,  &  il  prend  l'étamage  aufTi  facilement. 
Pour  faire  du  beau  &  bon  laiton,  il  faut  trois  quarts 
de  cuivre  &  un  quart  de  zinc,  mais  tous  deux  doivent 
être  de  la  plus  grande  pureté.  L'alliage  à  cette  dofe  eft 
d'un  jaune  brillant,  &  quoiqu'en  général  tous  les  alliages 
foient  plus  ou  moins  aigres ,  &  qu'en  particulier  le  zinc 
n*ait  auctme  ductilité,  le  laiton  néanmoins,  s'il  efl  faic 
dans  cette  proportion,  efl  aufTi  dudile  que  le  cuivre 
même;  mais  comme  le  zinc  tiré  de  fa  mine  par  la  fufion, 
n'efl  prefque  jamais  pur,  &  que  pour  peu  qu'il  foit  mêlé 
de  fer  ou  d'autres  parties  hétérogènes,  il  rend  le  laiton 
aigre  &  cafTant  ;  on  fe  fert  plus  ordinairement  &  plus 
avantageufement  de  la  calamine  qui  efl  une  des  mines  du 
zinc  ;  on  la  réduit  en  poudre ,  on  en  fait  un  cément  en 
la  mêlant  avec  égale  quantité  de  poudre  de  charbon 
humeétée  d'un  peu  d'eau  ;  on  recouvre  de  ce  cémenî 
les  lames  de  cuivre ,  &  l'on  met  le  tout  dans  une  caiffe 
ou  creufèt  que  l'on  fait  rougir  à  un  feu  gradué,  jufqu'à 
ce  que  les  lames  de  cuivre  foient  fondues.  On  laifTe 
cnfuite  refroidir  le  tout  &  l'on  trouve  le  cuivre  change 
en  laiton  &  augmenté  d'un  quart  de  fon  poids  fi  l'on 
a  employé  un  quart  de  calamine  fiir  trois  quarts  de 
cuivre,  &  ce  laiton  fait  par  cémentation  a  tout  autant 
de  dudilité  à  froid  que  le  cuivre  même  :  mais  comme 
le  dit  très  -  bien  M.  Alacquer  fnj,  \\  n'a  pas  la  même 


(n)  Dii^iowwire  dç  Chimiç,  à  l'anicle  du  Cuivre  Jaune, 


D  E  s    Af  I  N  É  R  A  U  X.  6^ 

malléabilité  à  chaud  qu'à  froid,  parce  que  le  zinc  fe 
fondant  plus  vîte  que  le  cuivre ,  Talliagc  alors  n'efl  plus 
qu'une  e/pèce  d'amalgame  qui  efl  trop  mou  pour  fouiîfrir  la 
percu/fion  du  marteau.  Au  refte,  il  paroît  par  le  procédé 
&.  par  le  produit  de  cette  forte  de  cémentation ,  que  le 
zinc  contenu  dans  la  calamine  eft  réduit  en  vapeurs  par  le 
feu ,  &  qu'il  efl  par  conféquent  dans  fà  plus  grande  pureté 
lor/qu'il  entre  dans  le  cuivre  ;  on  peut  en  donner  la  preuve 
en  faifànt  fondre  à  feu  ouvert  le  laiton ,  car  alors  tout  le 
zinc  s'exhale  luccefTivement  en  vapeurs  ou  en  tiammes ,  8l 
emporte  même  avec  lui  une  petite  quantité  de  cuivre. 

Si  l'on  fond  le  cuivre  en  le  mêlant  avec  l'ar/ènic, 
on  en  fait  une  efpèce  de  métal  blanc  qui  diffère  du 
cuivre  jaime  ou  laiton ,  autant  par  la  qualité  que  par  la 
couleur,  car  il  eft  aufli  aigre  que  l'autre  eft  duétile;  &. 
fi  l'on  mcle  à  différentes  dofes  le  cuivre,  le  zinc  & 
J'arfenic,  l'on  obtient  des  alliages  de  toutes  \cs  teintes 
du  jaune  au  blanc  &  de  tous  les  degrés  de  duélilité 
du  liant  au  caffant. 

Le  cuivre  en  fufion  forme ,  avec  le  fbufre ,  une  efpèce 
de  matte  noirâtre,  aigre  &  caffante,  affez  femblabie  à 
celle  qu'on  obtient  par  la  première  fonte  des  mines 
pyriteufës  de  ce  métal  :  en  le  pulvcrifànt  &  le  détrem- 
pant avec  un  peu  d'eau,  on  obtient  de  même  par  fon 
mélange  avec  le  foufre  auffi  pulvérifé ,  une  maffe  folide 
affez  femblabie  à  la  matte  fondue. 

Un  fil  de  cuivre  d'un  dixième  de  pouce  de  diamètre^ 


70  Histoire  Naturelle 

peut  foutenir  un  poids  d'environ  trois  cents  livres  avant 
de  (c  rompre;  &  comme  fà  denfité  n'efl  tout  au  plus 
que  de  fix  cents  vingt-une  livre  &  demie  par  pied  cube, 
on  voit  que  fa  ténacité  efl  proportionnellement  beaucoup 
plus  grande  que  fa  denfité.  La  couleur  du  cuivre  pur  efl 
d'un  rouge-orangé ,  &  cette  couleur  quoique  fauffe ,  eft 
plus  éclatante  que  le  beau  jaune  de  l'or  pur.  Il  a  plus 
d'odeur  qu'aucun  autre  métal,  on  ne  peut  lefentir  fans  que 
l'odorat  en  foit  défagréablement  affeété ,  on  ne  peut  le 
toucher  fans  s'infeder  les  doigts ,  &.  cette  mauvaifè  odeur 
qu  il  répand  &  communique  en  le  maniant  &  le  frottant, 
efl;  plus  permanente  &  plus  difficile  à  corriger  que  la 
plupart  des  autres  odeurs.  Sa  faveur  plus  que  répugnante 
au  goût,  annonce  fes  qualités  funefles  ;  c'efl  dans  le 
règne  minéral  le  poifbn  de  nature  le  plus  dangereux 
après  Tarfenic. 

Le  cuivre  efl;  beaucoup  plus  dur  &  par  conféquent 
beaucoup  plus  élaflique  &.  plus  fonore  que  l'or,  duquel 
néanmoins  il  approche  plus  que  les  autres  métaux  im- 
parfaits, par  fa  couleur  (&  même  par  fa  dudilité,  car  il 
efl:  prefque  auffi  dudile  que  l'argent  :  on  le  bat  en 
feuilles  auffi  minces  &  on  le  tire  en  filets  très-déliés. 

Après  le  fer,  le  cuivre  efl;  le  métal  le  plus  difficile 
à  fondre  ;  expofé  au  grand  feu  il  devient  d'abord  cha- 
toyant &  rougit  long-temps  avant  d'entrer  en  fiifion  ;  il 
faut  ime  chaleur  violente  &l  le  faire  rougir  à  blanc  pour 
qu'il  fe  liquéfie,  à.  lorfqu'il  eft  bien  fondu  il  bout  6c 


DES    Minéraux,  j\ 

diminue  de  poids  s'il  efl  expofc  à  l'air,  car  /à  furlace 
fe  bride  &  fe  calcine  dès  qu'elle  n'eft  pas  recouverte ,  & 
qu'on  néglige  de  faire  à  ce  métal  un  bain  de  matières 
vitreufes ,  &  même  avec  cette  précaution  il  diminue  de 
maffe  &  fouffre  du  déchet  à  chaque  fois  qu'on  le  fait 
rougir  au  feu  :  la  fumée  qu'il  répand  efl  en  partie  métal- 
lique ,  &  rend  verdâtre  ou  bleue  la  flamme  des  charbons , 
&  toutes  les  mat/ères  qui  contiennent  du  cuivre  donnent 
à  la  flamme  ces  mêmes  couleurs  vertes  ou  bleues  :  néan- 
moins fa  fubflance  efl  affez  fixe ,  car  il  réfifle  plus  long- 
temps que  le  fer,  le  plomb  &  l'étain  à  la  violence  du 
feu  avant  de  fe  calciner  ;  lorfqu'il  efl  expofé  à  l'air  libre 
(Se  qu'il  n'efl  pas  recouvert,  il  fe  forme  d'abord  à  fà 
furface  de  petites  écailles  qui  furnagent  la  maffe  en 
fulion  ;  ce  cuivre  à  demi -brûlé,  a  déjà  perdu  fa  duc- 
tilité &  fbn  brillant  métallique,  &  fe  calcinant  cnfuite 
de  plus  en  plus  il  fe  change  en  une  chaux  noirâtre  qui , 
comme  les  chaux  du  plomb  &.  des  autres  métaux , 
augmente  très-confidérablement  en  volume  &.  en  poids 
par  la  quantité  de  i'air  qui  fe  fixe  en  fe  réuniffant  à 
leur  fubflance.  Cette  chaux  efl  bien  plus  difficile  à  fondre 
que  le  cuivre  en  métal ,  &  lor/qu'elie  fubit  l'adion  d'un 
feu  violent ,  elle  fe  vitrifie  &  produit  un  émail  d'un 
brun  chatoyant  qui  donne  au  verre  blanc  une  très-belle 
couleur  verte;  mais  fi  l'on  veut  fondre  cette  chaux  de 
cuivre  feule  en  la  pouffant  à  un  feu  encore  plus  violent, 
elle  fe  brûle  en  partie  &  laiffe  un  réfidu  qui  n'efl  qu'une 


72  Histoire  Naturelle 

erpèce  de  fcorie  vitrcufe  &l  noirâtre,  dont  on  ne  peut 
enfùite  retirer  qu'une  très-petite  quantité  de  métal. 

En  laiffant  reiroidir  très  -  lentement  &  dans  un  feu 
o-radué  le  cuivre  fondu ,  on  peut  le  faire  criflallifer  en 
crillaux  proéminens  à  fa  furface  &  qui  pénètrent  dans 
fou  intérieur;  il  en  efl:  de  même  de  l'or,  de  l'argent  &. 
de  tous  les  autres  métaux  &  minéraux  métalliques  ;  ainfi 
la  criftallifation  peut  s'opérer  également  par  le  moyen 
du  feu  comme  par  celui  de  l'eau  ;  &.  dans  toute  ma- 
tière liquide  ou  liquéfiée  il  ne  faut  que  de  i'e/pace ,  du 
repos  &  du  temps  pour  qu'il  fe  forme  des  cridallifations 
par  l'attradion  mutuelle  des  parties  homogènes  <Sc 
fnnilaires. 

Quoique  tous  les  acides  puiffent  diffoudre  le  cuivre, 
il  faut  néanmoins  que  l'acide  marin  &  fur-tout  l'acide 
vitriolique  foient  aidés  de  la  chaleur,  fans  quoi  la  dif- 
folution  feroit  excefTivement  longue,  l'acide  nitreux  le 
diffout  au  contraire  très-promptement,  même  à  froid  ; 
cet  acide  a  plus  d'affinité  avec  le  cuivre  qu'avec  l'argent, 
car  l'on  dégage  parfaitement  l'argent  de  fa  diffolution, 
&  on  le  précipite  en  entier  &  fous  fa  forme  métallique 
par  l'intermède  du  cuivre.  Comme  cette  diffolution  du 
cuivre  par  l'eau-forte,  fe  fait  avec  grand  mouvement  & 
forte  elîèrvefcence ,  elle  ne  produit  point  de  crifîaux, 
mais  feulement  im  fel  déliquefcent ,  au  lieu  que  les  dif^ 
folutions  du  cuivre  par  l'acide  vitriolique  ou  par  l'acide 
marin  fè  faifant  lentement  &  fans  cbullition,  donnent  de 

gros 


TiES  Minéraux.  73 

gros  criflaux  d'un  beau  bleu  qu'on  appelle  viir'iol  de 
Chypre  ou  vïinol  bleu  j  ou  des  criflaux  en  petites  aiguilles 
d'un  beau   vert. 

Tous  les  acides  végétaux  attaquent  auffi  le  cuivre; 
c'efl  avec  l'acide  du  marc  des  raifnis  qu'on  fait  le  vert- 
de-gris  dont  fe  fervent  les  peintres  ;  le  cuivre  avec  l'acide 
du  vinaigrq,  donne  des  criflaux  que  les  Chimifles  ont 
nommés  cr'iflaux  de  Vénus.  Les  huiles,  le  fuif  (Si.  les  graiffes 
attaquent  auffi  ce  métal ,  car  elles  produifent  du  vert-de- 
gris  à  la  furface  des  vaifleaux  &  des  uflenfdes  avec  lefquels 
on  les  coule  ou  les  verfe.  En  général ,  on  peut  dire  que 
le  cuivre  efl;  de  tous  les  métaux  celui  qui  fe  laifTe  en- 
tamer ,  ronger,  dilfoudre  le  plus  facilement  par  un  grand 
nombre  de  fubflances  ;  car  indépendamment  des  acides , 
des  acerbes ,  des  fels ,  des  bitumes ,  des  huiles  &  des 
graiffes,  le  foie  de  foutre  l'attaque  &  i'alkali  volatil 
peut  même  le  diffoudre  ;  c'eft  à  cette  difTolution  du 
cuivre  par  I'alkali  volatd  qu'on  doit  attribuer  l'origine 
des  malachites  de  féconde  formation.  Les  premières 
malachites,  c'cfl-à-dire ,  celles  de  première  formation, 
ne  font,  comme  nous  l'avons  dit,  que  des  flala6lites  du 
cuivre  diffous  en  rouille  verte  ;  mais  les  fécondes  peuvent 
provenir  des  diffolutions  du  cuivre  par  I'alkali  volatil, 
lorfqu'elles  ont  perdu  leur  couleur  bleue  <Sl  repris  la 
couleur  verte,  ce  qui  arrive  dès  que  I'alkali  volatil  s'eil 
diffipé.  «  Lorfque  I'alkali  volatil ,  dit  M.  Macquer, 
a  diffous  le  cuivre  jufqu'à  faturation,  ref}3èce  de  fel  << 
Mmcraux,  Tome  IIL  K 


74-  Histoire  Naturelle 

métallique  qui  rtfulte  Je  cette  combinaifon ,  forme  des 
criftaux  d'un  bleu-1'oncé  &  des  plus  beaux  ;  mais  par 
l'expofitioii  à  l'air,  l'alkali  fe  fepare  &l  fe  difTipe  peu-à- 
peu  ;  la  couleur  bleue  des  crifîaux ,  dans  icfquels  il  ne 
refle  prefque  que  du  cuivre,  fe  change  en  un  très-beau 
vert,  &  le  compofc  relTemble  beaucoup  à  la  malachite; 
il  efl  très  -  po/î'ibie  que  le  cuivre  contenu  dans  cette 
pierre  ait  précédemment  été  difTous  par  l'alkali  \olatil, 
&  réduit  par  cette  matière  faline  dans  l'état  de  mala- 
chite ( o  ) .  ^^ 

Au  rcfle,  les  huiles,  les  graifTes  &  les  bitumes  n'at- 
taquent le  cuivre  que  par  les  acides  qu'ils  contiennent; 
«Si.  de  tous  les  alkalis,  l'alkali  volatil  eft  celui  qui  agit  le 
plus  puiffamment  fur  ce  métal;  ainh  l'on  peut  afîurer 
qu'en  général  tous  les  fèls  de  la  terre  &  des  eaux,  foit 
acides,  foit  alkalins,  attaquent  le  cuivre  &  le  diffolvent 
avec  plus  ou  moins  de  promptitude  ou  d'énergie. 

Il  eft  aifé  de  retirer  le  cuivre  de  tous  les  acides  qui 
le  tiennent  en  diffolution ,  en  les  faifant  fimplement  éva- 
porer au  feu  ;  on  peut  auffi  le  féparer  de  ces  acides 
en  employant  les  alkalis  fixes  ou  volatils,  &  même  les 
fubflances  calcaires  ;  les  précipités  feront  des  poudres 
vertes,  mais  elles  feront  bleues  fi  les  alkalis  font  cauftiques 
comme  ils  le  font  en  effet  dans  les  matières  calcaires 
lorfqu'elles  ont  été  calcinées.   Il  ne  faudra  qu'ajouter  à 


(o)  Didionnaire  de  Chimie  ,  article  Cuhre. 


DES  Minéraux,  y^ 

ce  précipité  ou  chaux  de  cuivre ,  comme  à  toute  autre 
chaux  métallique,  une  petite  quantité  de  matière  inflam- 
mable pour  la  réduire  en  métal  :  &  fi  l'on  fait  fondre 
cette  chaux  de  cuivre  avec  du  verre  blanc,  on  obtient 
des  émaux  d'un  très-beau  vert;  mais  on  doit  obferver 
qu'en  général  les  précipités  qui  fe  font  par  les  alkalis 
ou  par  les  matières  calcaires,  ne  fe  préfentent  pas  /bus 
leur  forme  métallique ,  &  qu'il  n'y  a  que  les  précipités 
par  un  autre  métal,  où  les  réfidus  après  l'évaporation  des 
acides  foient  en  effet  fous  cette  forme,  c'eft-à-dire, 
en  état  de  métal,  tandis  que  les  autres  précipités  font 
tous  dans  l'état  de  chaux. 

On  connoît  la  violente  adion  du  foufre  fur  le  fer, 
&  quoique  fa  puiffance  ne  fbit  pas  auffi  grande  fur  le 
cuivre  ,  il  ne  laiffe  pas  de  l'exercer  avec  beaucoup  de 
force  fpj;  on  peut  donc  féparer  ce  métal  de  tous  les 
autres  métaux ,  par  l'intermède  du  foufre  qui  a  plus 
d'affinité  avec  le  cuivre  qu'avec  l'or,  l'argent,  l'étaiii 
&  le  plomb,  &  lorfqu'il  eft  mêlé  avec  le  fer,  le  foufre 
peut  encore  les  féparer,  parce  qu'ayant  plus  d'affinité 
avec  le  fer  qu'avec  le  cuivre,  il  s'empare  du  premier 
&  abandonne  le  dernier.  Le  foufre  agit  ici  comme 
ennemi;  car  en  accélérant  la  fufion  de  ces  deux  métaux, 

(p)  Les  lames  de  cuivre  Ilratitiees  avec  le  loufie  ,  forment  une 
efpèce  de  marte  aigre  ,  cafTante ,  de  couleur  de  fer ...  .  Cette  ope'- 
ration  réuflit  également  par  la  voie  humide,  en  employant  le  cuivre 
en  limaille,  &  en  détrempant  le  mélange  avec  un  peu  d'eau.  ElémcnS 
de  Chimie ,  par  Ai,  de  Morve  au ,  tome  II ,  page  j  j». 

Kij 


76  Histoire  Naturelle 

il  ies  dénature  en  même  temps ,  ou  plutôt  il  les  ramène 
par  force  à  leur  état  de  minéralifation,  &  cl -ange  ces 
met. ux  e^i  mnérais  ;  car  le  cuivre  &  le  fer  fondus 
avec  le  foufre,  ne  font  plus  que  des  pyrites  fcmblables 
aux  minerais  pyriteux  ,  dont  on  tire  ces  métaux  dans 
leurs  m'-nes  de  féconde  formation. 

Les  filons  où  le  cuivre  fè  trouve  dans  l'état  de 
métal,  font  les  feules  mines  de  première  formation. 
Dans  les  mines  fecondaires,  le  cuivre  fe  préfente  fous 
la  forme  de  minerai  pyriteux,  &  dans  celles  de  troi^ 
ficme  formation,  il  a  palfé  de  cet  état  minéral  ou  pyriteux, 
à  l'état  de  rouille  verte,  dans  lequel  il  a  fubi  de  nouvelles 
altérations ,  &  mille  comi^inaifons  diverfes  par  le  conta6l 
&  Taélion  des  autres  fubflances  falines  ou  métalliques. 
Il  n'y  a  que  les  mines  de  cuivre  primitif,  que  Ton  puiffe 
fondre  fans  les  avoir  fait-  griller  auparavant  ;  toutes  celles 
de  féconde  formation ,  c'eff -à-dire,  toutes  celles  qui  font 
dans  un  état  pyriteux  demandent  à  être  grillées  plufieurs 
fois;  &  fouvent  encore. après  plufieurs  feux  de  grillage, 
elles  ne  donnent  qu'une  matte  cuivreufe  mêlée  de  foufre, 
qu'il  faut  refondre  de  nouveau,  pour  avoir  enfin  du  cuivre 
noir  dont  on  ne  peut  tirer  le  cuivre  rouge  en  bon  métal, 
qu'en  faifant  paffer  &  fondre  ce  cuivre  noir  au  feu  violent 
&  libre  des  charbons  enflammés ,  où  il  achève  de  fe  fépa- 
rer  du  foufre,  du  fer  &  des  autres  matières  hétérogènes 
qu  il  contenoit  encore  dans  cet  état  de  cuivre  noir. 

Ces  mines  de  cuivre  de  féconde  formation  peuvent 


DES    Minéraux.  yy 

fe  réduire  à  deux  ou  trois  fortes;  la  première  eft  la  pyrite 
cuivreule ,  qu'on  appelle  aufTi  improprement  marcajfite , 
qui  contient  une  grande  quantité  de  foufre  &  de  fer, 
&  dont  il  efl  très  -  difficile  de  tirer  le  peu  de  cuivre 
qu'elle  renferme  (q) ;  la  féconde  efl  la  mine  jaune  de 
cuivre,  qui  efl  aulfi  une  pyrite  cuivreufe,  mais  moins 
chargée  de  foufre  &  de  fer  que  la  première;  la  troifième 
eft  la  mine  de  cuivre  grife,  qui  contient  de  l'arfenic  avec 
du  foufre ,  &.  fotivent  un  peu  d'argent  :  cette  mine  grifè 
paroît  blanchâtre ,  claire  &  brillante  lorfque  la  quantité 
d'argent  efl  un  peu  confidérable ,  &  fi  elle  ne  contient 
point  du  tout  d'argent,  ce  n'cft  qu'une  pyrite  plutôt 
arfenicale  que   cuivreufe  (r) . 

(q)  La  inarcafîjte  ou  pyrite  cuivreufe,  efl:  très-pauvre  en  métal  de 
cuivre;  mais  elie  contient  beaucoup  de  fer,  de  foufre,  &.  quelquefois 
même  un  peu  d'arfenic.  .  .  .  elie  eft  fi  dure  qu'elle  donne  des  étincelles 
avec  le  briquet.  Lettres  de  M.  Demejle ,  tome  II,  page  ^6 y. 

(r)  Ces  différentes  mines  de  cuivre  grifes  ,  éprouvent  dans  le  fein 
de  la  terre ,  divers  degrés  d'altération ,  à  proportion  que  leurs  miné- 
ralifateurs  fe  volatilifent  ,  elles  paflent  alors  par  divers  états  fuccefllfs 
de  dfccompofition ,  auxquels  on  a  donné  les  noms  de  m'im^s  de  cuivre 
vitreufe  hépat'ique  ,  violette  ou  apurée ,  de  mine  de  cuivre  vitreufe  couleur 
de  poix,  d'azur  &  de  vert  de  cuivre,  de  malachite,  ôc  enfin  de  bleu  Ù" 
de  vert  de  montagne.  .  .  .  Les  couleurs  rougeâtre,  pourpre,  violette, 
azurée ,  le  chatoyement  de  l'efpèce  de  glacé  qu'on  obferve  à  la  fur- 
face  de  la  mine  de  cuivre  hépatique,  violette  ou  azurée,  font  dues 
à  la  di^îxpation  plus  ou  moins  confidérable  des  fubflances  arfénicales 
&  fulfureufes.  ...  Si  la  décompofuion  efl  plus  avancée,  les  couleurs 
vives  font  remplacées  par  une  teinte  d'un  brun  -  rougeâtre  foncé. 
Lettres  de  AL  Demejle,  tome  11^  pages  ^^4  àr  j^j» 


78  Histoire    N atv relle 

Pour  donner  une  idée  nette  des  travaux  qu'exigent 

ces  minerais  de  cuivre  avant  qu'on  ne  puifle  les  réduire 

en  bon  métal,  nous   ne   pouvons  mieux   faire   que   de 

rapporter  ici  par  extrait  les  obfervations  de  feu  M.  Jars, 

qui  s'ell:  donné  la  peine  de  fuivre  toutes  les  manipulationé 

&  préparations   de  ces   mines ,    depuis   leur   extraélion 

jufqu'à  leur  converfion  en  métal  rafiné.  «  Les  minéraux 

»  de  Saint-Bel  &  de   Cheflcy  dans  le  Lyonnois ,    font, 

j>  dit-il,  des  pyrites  cuivreufes,  auxquelles  on  donne  deux, 

trois  ou  quatre  grillages    avant  de  les   fondre   dans  un 

fourneau  à  manclie ,   où  elles  produifènt  des  mattes  qui 

doivent  être  grillées  neuf  à  dix  fois  avant  que  de  donner 

par  la  fonte  leur  cuivre  noir  :  ces  mattes  font  des  maffes 

régulines,  contenant  du  cuivre,  du  fer,  du  zinc,   une 

très-petite  quantité  d'argent  &  des  parties  terreufès ,  le 

5>  tout  réuni  par  une  grande  abondance  de  foufre. 

»       Le  grand  nombre  de  grillages  que  l'on  donne  à  ces 

»  mattes  avant  d'obtenir  le  cuivre  noir,  a  pour  but  de  faire 

»  brûler  &  volatilifer  le  foufre ,  &  de  défunir  les  parties 

»  terreftres  d'avec  les  métalliques  ;  on  fait  enfuite  fondre 

»  cette  matte  en  la  Gratifiant  à  travers  les  cbarbons,  &  les 

»  particules  de  cuivre  fe  réunifTent  entr'elles  par  la  fonte, 

&  vont  par  leur  pefanteur  fpécifique  occuper  la  partie 

inférieure  du  baffm  delliné  à  les  recevoir. 

Mais  lorfqu'on  ne  donne  que  très-peu  de  grillage  à 
>>  ces  mattes ,  il  arrive  que  les  métaux  qui  ont  moins 
?>  d'affinité  avec  le  foufre,  qu'il  n'en  a  lui-même  avec  les 


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» 


DES    Minéraux.  79 

autres  qui  compofent  la  mafTe  rcguline,  ie  précipitent 
ies  premiers  ;  on  peut  donc  conclure  que  Targent  doit 
fe  précipiter  le  premier,  enfuitc  le  cuivre,  &  que  le 
foufre  refle  uni  au  fer.  Mais  l'argent  de  ces  mattes 
paroît  être  en  trop  petite  quantité  pour  fe  précipiter  fèul  ; 
d'ailleurs  il  eft  impofTible  de  failir  dans  les  travaux  en 
grand,  le  point  précis  du  rôtiflage  qui  fcroit  nccelTaire 

pour  rendre   la  féparation  exacfte &  il  ne  ih  fait 

aucune  précipitation,  fur -tout  par  la  voie  sèche,  fans 
que  le  corps  précipité  n'entraîne  avec  lui  du  précipitant 
&  de  ceux  auxquels  il  étoit  uni  (^/J .  » 

Ces  mines  de  Saint-Bel  &  de  ChelTey,  ne  contiennent 
guère  qu'une  once  d'argent  par  quintal  de  cuivre , 
quantité  trop  petite  pour  qu'on  puiiïe  en  faire  la  fépa- 
ration avec  quelque  profit.  Leur  minerai  efl:  une  pyrite 
cuivreufe  mêlée  néanmoins  de  beaucoup  de  fer.  Le  mi- 
nerai de  celles  de  Chelley  contient  moins  de  fer  & 
beaucoup  de  zinc,  cependant  on  les  traite  toutes  deux 
à  peu-près  de  la  même  manière.  On  donne  à  ces  pyrites , 
comme  le  dit  M.  Jars ,  deux,,  trois  &  ju/qu'à  quatre  feux 
de  grillage  avant  de  les  fondre.  Les  mattes  qui  pro- 
viemient  de  la  première  fonte ,  doivent  encore  être 
grillées  neuf  ou  dix  fois  avant  de  donner,  par  la  fufion, 
ieur  cuivre  noir  :  en  général ,  le  traitement  des  mines  de 

ffj  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences,  année  J /y o,  pciges 


So-         Histoire  Naturelle 

cuivre  cft  d'autant  plus  difficile  &  plus  long,  qu'elles 
contiennent  moins  de  cuivre  &  plus  de  pyrites ,  c'eft- 
à-dire,  de  foufre  &  de  fer,  &  les  procédés  de  ce  trai-. 
renient  doivent  varier  fuivant  la  qualité  ou  la  quantité  des 
dilïcrens  métaux  &.  minéraux  contenus  dans  ces  mines. 
Nous  en  donnerons  quelques  exemples  dans  lYnumé- 
ration  que  nous  allons  faire  des  principales  mines  de 
cuivre  de  l'Europe  &  des  autres  parties   du  Monde. 

En  France,  celles  de  Saint-Bel  &  de  Cheiïey,  dont 
nous  venons  de  parler ,  font  en  pleine  &.  grande  exploi- 
tation, cependant  on  n'en  tire  pas  la  vingtième  partie 
du  cuivre  qui  fe  confomme  dans  le  royaume.  On  exploite 
auiïi  quelques  mines  de  cuivre  dans  nos  provinces  voi- 
fmes  des  Pyrénées  &  particulièrement  à  Baygory  dans  la 
baffe  Navarre  (t) .  Les  travaux  de  ces  mines  font  dirigés 
par  un  habile  Minéralogifle,  M.  Hettlinger,  que  j'ai  déjà 
eu  occafion  de  citer,    &  qui  a  bien   voulu   m'envoyer 

pour 

(t)  Dans  la  bafTe  Navarre,  à  Baygori  ,  on  découvrit  en  174^, 
cinq  cents  trente  -  trois  ])ieds  de  fiions  ,  fuivis  par  trois  galeries  <3c 
par  trois  puits;  ces  filons  avoient  un,  deux  &  trois  pieds  de  largeur. 
Le  minerai ,  tant  pur  que  celui  qu'il  faut  piler  &'  laver ,  y  ell  enve- 
loppé dans  une  gangue  blanche,  du  genre  des  quartz  vitrifiabies; 
&  il  efl.  à  remarquer  que  la  plupart  des  mines  de  cuivre  de  cette 
contrée,  font  mêlées  de  fer  dans  leur  minerai,  &  que  celle  de 
Baygori ,  eft  la  feule  qui  n'en  contienne  pas. 

Ce  minéral  de  Baygori ,  efl  jaune  quand  on  le  tire  d'un  endroit 
fec  du  filon  ,  <Sc  pour  peu  qu'il  y  ait  d'humidité ,  il  prend  toutes 
fortes  de  belles  couleurs.  .  .  .  Mais  ces  couleurs  s'effacent  en  moins 

de 


DES    Minéraux.  8i 

pour  le  Cabinet  du  Roi,  quelques  échantillons  des 
minéraux  qui  s'y  trouvent,  &  entr'autres  de  la  mine 
de  fer  en  écailles  qui  eft  très  -  fingulière ,  &  qui  fe 
forme  dans  les  cavités  d'im  filon  mêlé  de  cuivre  &  de 
fer  (u), 

11  y  a  aufîl  de  riches  mines  de  cuivre  &  d'argent  à 
Gîromagny  ÔL  au  Puy  dans  la  haute  Aliace  ;  on  en  a  tiré 
en  une  année  fèize  cents  marcs  d'argent  &  vingt-quatre 
milliers  de  cuivre  :  on  trouve  auiïi  d'autres  mines  de 
cuivre  à  Stehnbach ,  à  Saint  -  Nicolas  dans  le  Val  de 
Lehenhal ,   &  à   AJlenbach  (x) . 

En  Lorraine,  la  mine  de  la  Croix  donne  du  cuivre, 
du  plomb  &  de  l'argent  ;  il  y  a  aulTi  une  mine  de  cuivre 
à  Fraife ,  &.  d'autres  aux  villages  de  Sainte-Croix  &  de 
Z/Z/J^  qui  tiennent  de  l'argent;  d'autres  à  la  montagne 

de  deux  ans  à  l'air,  &  dirparoiflent  même  pour  peu  qu'on  chauffe 
le  minerai. .  .  . 

En  1752,  on  de'couvrit  dans  la  même  montagne,  un  filon  de 
minéral  gris,  prefque  maffif,  contenant  cuivre  &  argent;  on  en  a 
vu  un  morceau  qui  pefoit  vingt-fej;t  livres  fans  aucune  gangue,  qui, 
par  l'effai  qu'en  fit  M.  Hellot ,  donna  dix-fept  livres   de  cuivre  & 

trois  marcs   deux  onces   trois  gros  d'argent  par  qumtal  fi(fcif 

Hellot,   Mémoires  de  l'Académie  des   Sciences,  année  ^75^»  P^i^^ 

(u)  Lettres  de  M.  Hetilinger  à  M.  de  Buffon.  Baygori ,  le  i  ^ 
Juin  1774* 

(x)  Traite'  de   la  fonte  des   mines  de   Schlutter,   tome  I ,  pages 

II  à"  12. 

Mittéraupc ,  Tome  IIL  L 


82  Histoire  Naturelle 

du  Tillot  j  au  Val-de-licvre ,  à  Vaudrevangcs ,  ÔL  enfin 
plufieurs  autres  à   Saime - Mûrie-mix-inmcs  (y). 

En  Franche-comté,  à  Plûncher-lès-mhws ^  il  y  a  aufiî 
des  mines  de  cuivre,  &  auprès  de  Cliatedu-Lajjihcn  W 
s'en  trouve  quatre  veines  placées  l'une  fur  l'autre, 
&  l'on  prétend  que  cette  mine  a  rendu  depuis  'vingt 
jufqu'à  cinquante   pour   cent  de  cuivre  (i) . 

On  a  au/Ti  reconnu  plufieurs  mines  de  cuivre  dans 
le  \J\mo{\VL  (,i) ,  en  Dauphiné  ,  en  Provence,  dans  le 
Vi^•arais ,  le  Gévaudan  &  les  Cevcnnes  (b) ;  en  Auvergne 


^^  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter,  tome  I ,  pages  i 
&  j?. 

(-J  Idem,  page   /j-. 

(a)  Dans  le  bas  Limofni ,  au  comté  d'Ayen,  il  y  a  plufieurs 
filons  de  cuivre  en  verdet  &  en  terre  verte ,  qui  donnent,  l'un  dix-fept 
&  l'autre  vingt-deux  livres  de  métal  par  quintal.  Une  autre  mine  que 
j'ai  découverte  eft  jilus  abondante  que  les  précédentes  ;  le  cuivre 
y  eft  combiné  avec  le  plomb,  &  donne  vingt-trois  livres  de  cuivre 
par  quintal.  Quoique  ces  mines  foient  médiocrement  riches ,  elles 
peuvent  être  exploitées  avec  profit;  elles  ne  font  que  des  fuors, 
procédant  de  la  décoir.pofition  des  mines  primitives,  &  infiltrées  dans 
des  mafTes  de  gros  fable  quartzeux  ,  qui  ont  été  entraînées  des 
montagnes  du  haut  IJmofin.  Lettres  de  M,  le  chevalier  Grignon  ; 
Paris,  2^   Juillet  lySi. 

(h)  En  Dauphiné,  il  y  a  une  mine  de  cuivre  dans  Ja  montagne 
de  la  Coche ,  au  revers  de  la  vallée  du  Grefivaudan ,  du  côté  de 
L oif an  ,  dovïx  l'exploitation  eft  abandonnée,  à  caufe  de  la  difficulté: 
des  chemins  ....  If  y  a  une  autre  mine  de  cuivre  fur  la  montagne 
des  Hyercs,  à  cinq  lieues  du  bourg  d'Oiian,  elle  eft  mCltt:  d'ocrc 


DES      Aï  I   N  É    R   A    U   X.  83 

près  de  Saint  -  Amancl  ;  en  Touraine  à  l'abbaye  de 
Noyers  ;  en  Normandie  près  de  Briquebec  ,  dans 
le  Cottentin ,  &.  à  Carrolet  dans  le  diocèfe  d'A- 
vranciies  fc). 

En  Languedoc   ((JJ,  M.  de    Gcnlanne   a   reconnu 

•■  ■      ■    Il    ■-  ■■■■■■  ■■         ■m^sM^^     I        ■  ■        _^^*^         !■■  ^  ^^^^^B  ■  ^^tm^^  I  Hia^nB.M_i_B^i^a^^ 

de  quartz  &  de  pyrite  fiilfureufe  ;  le  filon  a  treize  pouces  de  large  .... 
Dans  la  même  province,  il  y  a  une  autre  mine  de  cuivre  au-deniis 
des  lacs  de  BelUdonne  .  ...  Se  des  lacs  de  BranJe ....  Une  autre  aux 
Acles ,  au-delTus  de  Plawpïnes  dans  le  Briançonnois;  cette  dernière 
mine  ell:  un  mélange  de  cuivre  &  de  fer,  difious  par  un  acide  ful- 
fureux  que  l'air  a  développé,  el'e  a  rendu  cinquante  pour  cent  de 
beau  cuivre  rofette  ....  Une  autre  au-deflus  des  bains  du  Moneftier 
de  Briançon  ,  qui  a  donné  quinze  livres  un  quart  de  cuivre  pour 
cent.  .  .  .    Celle  d'Hue^^  en  haut  Dauphiné ,  efl:  fulfureufè  &  ferru- 

gineufe ,  <5c   donne    treize  livres   de   cuivre    par  quintal 11  y  a 

encore  beaucoup  d'autres  mines  de  cuivre  dans  la  même  province  .... 

En  Provence,  au  territoire  d'Yères,  il  y  a  une  mine  de  cuivre 
tenant  argent  &  un  peu  d'or  ....  Une  autre  au  territoire  de  la  Roque  : 
&  dans  celui  de  Sifleron,  il  fe  trouve  aufîl  du  cuivre,  ainfi  qu'auprès 
de  la  ville  de  Digne 

Dans  le    Vivarais  ,   il   y  a  des    pyrites  cuivreuses   au    vallon    de 

Pourchajje ,    à  deux  lieues  de  Joyeufe à  Allier  en   Gévaudan  , 

à  lept  quarts  de  lieue  de  Bayard ,  il  y  a  des  pyrites  blanches  arfe- 
nicales  qui  contiennent  du  cuivre 

A  Lodève  près  des  Cevennes,  il  y  a  une  mine  de  cuivre  tenant 
argent....  une  autre  à  la  Roquette  aux  Cevennes,  à  quatre  lieues 
&  demie  d'Andufe.  De  la  fonte  des  mines,  par  Schlutter,  traduit  par 
AI.  Hellot ,  tome  I ,  pages  i  6  &  fuiv. 

(c)  Idem,  pûges  6 o  ,    6^    &  CS. 

(d)  En  revenant  du  Puits  -  Saint- Pons  vers  Riots  &  Oulargueg 
(dioccle  de  Pons  );  nous  avons  ijouvé  au  lieu  de  Cafiltac ,  une  mine 

L  ij 


8^  H ISTO  I  RE    NATU  RELLE 

plufieurs  mines  de  cuivre  qu'il  a  très-bien  obfcrvées  & 

de  cuivre  fort  confidcrable;   on   y  a  ù\i  quelque    travail Le 

minéral  y  efl  répandu  par  petits  blocs  difperfés  dans  toute  la  niafle 
de  la  veine  qui  a  plulieurs  toiles  de  largeur ,  &  qui  paroît  au  jour 
fur  l'étendue  d'un  bon  quart  de  lieue  de  longueur;  le  minerai  y  efl 
très-drlenical ,  &  cojuient  depuis  vingt-deux  julqu'à  vingt- cinq  livres 
de  cuivre  au  quintal ....  Le  inincral  efl  de  la  nature  des  mines  de 
cuivre  griies,   vulgaiiement  appelées  Ja/erts, 

Il  y  a  une  autre  veine  de  cuivre  au  lieu  appelé  Lasfonts ,  paroifîe 
de  Mas  de  l'Eglile....  peu  éloignée  de  celle  de  Cafîlllac.  Hijhire 
JVaîurelle  du  Languedoc,  par  M,  de  Genfanne ,  tome  II ,  page  21  ^. 

—  A  une  lieue  de  la  ville  de  Marvejols  en  Gévaudan ,  dans  le  terri- 
toire de  Saint- Léger-de- Poire ,  on  trouve  plufieurs  Tources  d'eau 
cuivreufe,  propre  à  donner  du  cuivre  par  cémentation;  elles  coulent 
dans  un  vallon  à  demi-quart  de  lieue  de  Saint-Léger.  Les  habitans 
de  ce  canton  ont  l'imprudence  de  boire  de  ces  eaux  pour  fe  purger, 
idem,  tome  II ,  page  2^0. 

A  la  montagne  de  Fraifînei  (  diocèfe  d'Uzès  ),  il  y  a  deux  filons 
de  mine  de  cuivre.,..  Le  minéral  ell  jaune,  mêlé  de  mine  hépa- 
tique; il  ell  de  bonne  qualité  &  pallablement  riche  en  argent, 
idem ,  tome  I ,  page  16^..,,  A  la  montagne  de  la  Garde,  il  y  a 
une  veine  confidérable  de  mine  de  cuivre  bitumineufe,  connue  en 
Allemagne,  fous  le  nom  de  Pcch-erti:  cette  efpéce  de  mine  efl 
fort  elHmée  par  la  quantité  du  cuivre  qu'elle  donne;  parce  qu'outre 
fa  grande  dudilité,  il  a  une  très-belle  couleur  d'or,  ibidem,  page  i  6 j. 

—  Il  y  a  deux  fiions  de  mine  de  cuivre  à  la  montagne  du  Fort, 
idem,  page  i  6 6 .  -^  Une  autre  à  la  montagne  de  Dévèle;  deux 
autres  filons  qui  p.;  ent  fous  Vilietort,  &  deux  autres  qui  traverlent 
la  rivière  immédiatement  au  -  defTus  du  pont,  idem,  ibidem.  —  Au- 
defTus  de  Saint- André  de  Cap-feze  ,  il  y  a  de  fort  bonnes  mines  de 
cuivre,  idem,  page  i6y.^  Au -defTus  du  village  de  Galuzières , 
dans  le  dioccfe  d'Alais,  en  montant  diredement  au-defllis  du  château,' 


DES  Minéraux.  8; 

décrites  ;  il  a  fait  de  femblales  recherches  en  Alface  (e). 

il  y  a  un  filon  confidcrable  de  mine  de  cuivre  &  argent,  qui  a  plus 
de  quatre  toifes  d'epaiffeur,  &  qui  s'étend  de  i'ouefl:  à  l'eft  fur  une 
longueur  de  près  d'une  demi  -  lieue.  On  aperçoit  dans  ce  filon , 
plufieurs  efpèces  de  mine  de  cuivre  ;  il  y  en  a  de  la  jaune ,  de  la 
grife ,  de  bleu  d'azur ,  de  la  malachite ,  de  Thépatique  &  autres  , 
H'tjîoire  Naturelle  du  Languedoc ,  par  Aï.   de   Cenfanne ,    tome  II , 

page  22^ Aux   environs  de   Saint  -  Sauveur ,  au   lieu  appelé 

Low  -  camp  -  des  -  Hùns ,  il  y  a  un  gros  filon  de  cuivre  &  argent, 
dont  la  gangue  ou  matrice  a  près  de  cinq  toifes  de  largeur ,  idem , 
page  2^0.  —  Dans  le  diocèfe  de  Narbonne,  il  y  a  des  mines  de 
cuivre  &  argent,  aux  lieux  appelés  la  Cunale  &  Peyre  -  couverte  ,  & 
celles  de  JaJht-d'Empo'ix  font  fort  riches  en  argent:  il  y  a  un  autre 
filon  d'argent  &  cuivre  à  Peyfegut,  idem ,  page  i  S  y,  —  Dans  toutes 
ces  montagnes ,  on  trouve  en  général  beaucoup  de  cuivre  en  azur. 
idem ,  ïh'id.  —  Vers  Buifle ,  il  y  a  plufieurs  filons  de  très-bonne  mine  de 
cuivre  qu'on  avoit  ouverte  il  y  a  une  quarantaine  d'années,  &  qu'on  a 
abandonnée  en  même  temps  que  celte  de  Meifibux ....  Le  minéral 
de  ce  canton  renferme  beaucoup  de  cette  efpèce  de  mine  que  les 
Allemands  appellent  Pech-ert:^^  &  que  nous  pouvons  nommer  mine 
de  cuivre  bitum'meufe ;  elle  reflemble  en  efl^et  au  jayet,  Se  palTe  pour 
donner  le  plus  beau  cuivre  connu.  On  y  trouve  auffi  de  la  mire 
de  cuivre  pyriteufe  jaune,  &  également  de  la  mine  de  cuivre  azur, 
idem  ,  pages  i  p  2  &  i  $  s  '  —  ^^  avoit  fait  il  y  a  quelques  années , 
plufieurs  ouvertures  fur  une  mine  de  cuivre  au  lieu  de  Thines 
(  diocèfe  du  Vivarais  )  ;  mais  outre  qu'elle  eîl  très-pauvre ,  c'efl  que 
le  défaut  de  bois  n'en  permettoit  pas  l'exploitation,  idem,  tome  III, 
pages  I  8 2  à"  18 ^.  —  Au  bas  du  village  de  Saint-Michel,  on  voit 
un  filon  de  mine  de  cuivre,  idem ^  page  i $7»  —  En  delcendant  des 
montagnes  vers  Ecouflains,  on  trouve  près  de  ce  dernier  endroit,, 
d'alîez  belles   veines  de    cuivre^   idem  ^  page  2(tj, 

(e)  Dans  la  montagne,  du    côté  de  Giromagny,  eft  la  mine  de 
Saint- Daniel f  qui  a  plus  de  deux  cents   pieds  de  profondeur.  Le 


86  Histoire  Naturelle 

Et  M.    le    Monnicr,    premier   Médecin    ordinaire    du 
Roi,    a   obfcrvé  celles  du  Roufîillon   (fj   &  celle  de 


minerai  domine  en  cuivre ,  il  rend  un  peu  de  plomb  ôi  d'argent  ; 
ce  filon  de  Saint-Daniel  eft  traverfé  par  un  autre,  où  les  Anciens 
ont  fait  des  tra\  oux.  Le  minerai  efi:  la  plupart  de  mine  d'argent .... 
En  remontant  vers  le  Ib  met  de  la  montagne  àe  Saint  -  Antoine , 
il  y  a  un  filon  de  mine  jaune  de   cuivre  &  de  malachites  .... 

Toutes  les  montagnes,  qui  féparent  Plancher-les-mines  en  Franche- 
comte  ,  de  Giromagny,  font  entrelaflees  d'un  nombre  prodigieux  de 
différens  filons  qui  les  traverfent  en  tous  fens  :  toutes  ces  mines 
donnent  du  cuivre  ,   du  plomb  &  de  l'argent  .... 

A  droite  du  village  d'Orùey  e(ï  Saint- Jofeph ,  où  l'on  tire  de  très- 
belles  mines  de  cuivre  de  toutes  elpèces  ;  une  entr'autres  efl  d'un 
pourpre  vif,  tigré  de  jaune,  &  d'une  inaùère  blanche  qu'on  prendroit 
pour  du  fpath  ,  &  qui  eH  cependant  de  la  pure  mine  de  cuivre. 
Le  filon  efi:  accompagne  quelquefois  d'une  efpèce  de  quartz  feuilleté 
blanc  très  -  réfradaire ,  &  qui ,  quoique  pefant ,  ne  tient  poitit  de 
métal. 

On  trouve  du  cuivre  dans  plufieurs  autres  endroits  des  environs 
d'Orbey,  comme  à  Slorkenfon ,  à  la  montagne  de  Steingraben  ;  celui-ci 
çfl:  enferme  dans  un  roc  d'une  efpèce  de  quartz  vert  aulTi  dur  que 
de  l'acier;  la  mine  efl:  partie  bleu  de  montagne,  quelque  peu  de 
mine  de  cuivre  jaune,  &  la  plus  grande  partie  de  mine  de  cuivre 
bitumineule.  Le  fommet  du  filon  efl  une  mine  ferrugineufe  brûlée, 
toute  femblable  au  mâchefer;  &  l'on  voit  aiïez  fouvent ,  pendant 
la  nuit,  fortir  de  grofles  flammes  de  cet  endroit:  ce  filon  efl  tra- 
verfé par  un  autre  filon  de  mine  de  cuivre  malachite  &  jaune,  & 
quelquefois  d'une  belle  couleur  de  rofe  &  de  lilas;  elle  contient  quel- 
quefois un  peu  d'or.  Sur  l'exploitation  des  mines ,  par  M.  de  Genfanne , 
A'Icwoires  des  Savons  Étrangers ,  tome  IV,  pages  1 41  &  fuiv, 

(f)  Les  montagnes  dont  la  plaine  du  Roufilllon  eft  environne'e, 
fyr-tout  celles  c^ui  tiennent  à  la  chaîne  de^  Pyrénées,  font  garnies 


DES    Minéraux.  87 

Corail,  dans  ia  partie  des  Pyrénées,    fiiuécs   entre    la 
France  &  l'Efpagne  (^) . 


pour  la  plupart ,  de  mines  dans  leur  intérieur.  Il  y  a  quelques  mines 
de  fer;  mais  les  plus  communes  font  celles  de  cuivre,  &  on  ea 
exploite  quelques-unes  avec  lucccs  ....  Il  y  a  une  autre  veine  de 
cuivre  fort  riche  au  pied  de  la  montagne  d'Albert,  tout  proche  du 
village  de  Soredde  ....  Cette  veine  fi  abondante  étoit  accompagnée 
de  feuillets  de  cuivre  rouge  très-dudile,  &.  formé  tel  parla  Nature; 
on  les  trouvoit  répandues  parmi  le  gravier  ,  ou  plaquées  entre  des 
pierres,  &  même  ie  cuivre  efl:  ramifié  dans  d'autres  en  forme  de 
dendrites  ....  M.  le  Monnier  a  obfervé  qis  la  mine  drée  du  puits 
Sainte  -  Barbe ,  étoit  mêlée  avec  une  pyrite  jaune  -  pâle  qui  paroîc 
fulfureufe  &  arfenicale.  Celle  du  puits  Saint-Louis,  qui  efl  voifine 
du  premier  ,  quoiqu'un  peu  moins  pefante  que  celle  du  puits  Sainte' 
Barbe,  paroît  meilleure  &  inoins  embarraffée  de  pyrites  arfénicales, 
&  elle  ell  engagée  dans  une  efpèce  de  quartz  qui  la  rend  trcs-aifée 
à  fondre  ;  enfin  celle  du  Corail  femble  être  la  meilleure  de  toutes , 
elle  eft  de  même  intimement  unie  à  du  quartz  fort  dur.  Obfervatioa 
d'Hijioire  Naturelle  ,  par  Aï.  le  Aïonnler ;  Paris,  i7S9>  P^^es 
^  0  p   Ù'  Juiv. 

(g)  Les  mines  de  cuivre  de  Catalogne ,  ne  font  qu'à  une  lieue 
de  Corail ....  Celle  qui  donne  du  cuivre  plus  eilimé  que  celui  de 
Corail,  fe  trouve  fituée  précifément  dans  la  colline  de  Bernadelle^ 
fous  la  montagne  qui  fépare  la  France  d'avec  l'Efpagne,  entre  la 
ville  d'Autez  &  celle  de  Campredon.  Il  y  a  dans  cette  mine  d'an- 
ciens &  grands  travaux ,  &  l'on  voit  dans  les  galeries  &  dans  les 
chambres  auxquelles  elles  aboutifi'ent ,  des  taches  bleues  &  vertes , 
&  même  des  incruflations  de  vert-de-gris,  &  aufîj  des  filets  de  cuivre 
qui  forment  un  réfeau  de  différentes  couleurs,  rouges,  violettes,  <5:c, 
&  ce  réfeau  métallique  s'obferve  dans  toute  l'étendue  des  galeries; 
«  je  ni'attendois  ,  dit  M.  le  Monnier  ,  à  voir  quelques  filoiis  cuivreux;; 
mais   il  paroû  qu'il  n'eu  a  jamais  exillé  d'autres  dan^  cette  mine,  «« 


88  Histoire  Natu pelle 

Depuis  la  découverte  de  l'Amérique,  les  mines  de 
cuivre,  comme  celles  d'or  &.  d'argent,  ont  été  négligées 
en  Efpagne  <54.  en  France ,  parce  que  Ton  tire  ces 
métaux  du  nouveau  monde  à  moindres  frais,  6l  qu'en 
général,  les  mines  les  plus  riches  de  l'Europe  &  les 
plus  aifées  à  extraire,  ont  été  fouillées,  &  peut-être 
épuifées  par  les  Anciens  ;  on  n'y  trouve  plus  de  cuivre 
en  métal  ou  de  première  formation,  &  on  a  négligé 
les  minières  des  pyrites  cuivreufès  ou  de  féconde  for- 
mation, par  la  difficulté  de  les  fondre,  &  à  caufe  des 
grands  frais  que  leur  traitement  exige.  Celles  des  envi- 
rons  de   Molina  dont   parle  M.    Bowle  (h),  &  qui 

paroi  ffent 

>î  que  ce  refeau  métallique  que  j'ai  vu  prefque  par-tout Toute 

»  cette  mine  ,  qui  eft  d'une  étendue  très-confidérable,  eft  dans  une 
»  pierre  dure  qu'il  faut  faire  éclater  à  la  poudre  ;  &  il  y  a  dans  quelques 
»  cavités  de  cette  pierre ,  du  cuivre  vert  &  foyeux ,  &  dans  quelques 
5>  autres  ,  il  y  avoit  une  poudre  grumelée  d'un  très-  beau  bleu  d'outre- 
mer >♦.  Ohfervation  d'HiJIoire  Naturelle ,  par  M.  le  Adonnier;  Paris, 
1739,  P^gfs  20 p  &  fuîv. 

(h)  «  A  quelques  lieues  de  Molina,  il  y  a  une  montagne  appelée 
»  îa  Platilla;  on  voit  au  fommet   des  roches  blanches  qui  font  de 

y*  pierre  à  chaux  ,  mêlées  de  taches  bleues  &  vertes Dans  les 

»  galeries  de  la  mine  de  cuivre ,  on  voit  que  toutes  les  pierres  font 
»  fendillées  &  laiflênt  découler  de  l'eau  chargée  de  matière  cuivreufe , 
»  &  les  fentes  font  remplies  de  minéral  de  cuivre  bleu ,  vert  &  jaune , 
y  mêlé  de  terre  blanche  calcaire.  Ce  minerai  formé  par  ftillation  efl: 
7»  toujours  compofé  de  lames  très-minces  &  parallèlement  appliquées 
»  les  unes  contre  les  autres ...  La  matière  calcaire  s'y  trouve  toujours 
»  mêlée  avec  le  minéral  de  cuivre  de  quelque  couleur  qu'il  foit. .  .  . 

Il 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  89 

paroifTent  être  de  troifième  formation  ,  font  également 
négligées;  cependant,  indépendamment  de  ces  mines  de 
Molina  en  Arragon,  il  y  a  d'autres  mines  de  cuivre 
à  fix  lieues  de  Madrid,  &  d'autres  dans  la  montagne  de 
Guadeloupe ,  dans  lerquelles  on  fait  aujourd'hui  quelques 
travaux;  celles-ci,  dit  M.  Bowles,  font  dans  une  ardoife 
jafpec  de  bleu  &  de  vert  (ï) . 

En  Angleterre ,  dans  la   province  de   Cornouailles , 


II  fe  forme  fouvent  en  petits  criftaux  dans  les  cavités  du  minéral  ce 
même,  &  ces  crillaux  font  verts,  bleus  ou  blancs.  ...  Le  minéral  « 
commence  par  être  fluide  &  diflous ,  ou  au  moins  en  état  de  mu-  <c 
cilage  qui  a  coulé  très-lentement ,  &  que  les  eaux  pluviales  diflolvent  <c 
de  nouveau  &  entraînent  dans  les  fentes  ou  cavités  où  elles  tombent  <c 
goutte  à  goutte  &  forment  la  (laladlite.  .  .  .  Lamine  bleue  ne  fe  mêle  « 
point  avec  le  relie,  &  elles  font  d'une  nature  très-diftinde  ;  car  je  « 
trouvai  que  le  bleu  de  cette  mine  contient  un  peu  d'arfenic  ,  d'argent  ce 
&  de  cuivre,  &.  le  produit  de  fa  fonte  efl  une  forte  de  métal  de  ce 
cloche.  La  mine  verte  ne  contient  pas  le  moindre  atome  d'arfenic,  «c 
&  le  cuivre  fe  minéralife  avec  la  terre  blanche  fufdite ,  fans  qu'il  y  ce 
ait  la  moindre  partie  de  fer.  Cette  luine  de  la  Platilla  étant  une  mine  ce 
de  chariage  ou  d'alluvion ,  elle  ne  peut  être  bien  profonde,  m  Hijîoirc 

Naturelle  d'Efpagne , par  M.  Bowks ,  page  i ^i  à"  fuiv Nota.  Je 

dois  obferver  que  cette  mine  décrite  par  M.  Bowles,  efl  non-feule- 
ment d'alluvion ,  comme  il  le  dit ,  &  comme  le  démontre  le  mélange 
du  cuivre  avec  la  matière  calcaire,  mais  qu'elle  eft  encore  de  flillation, 
c'ell-à-dire,  d'un  temps  pollérieur  à  celui  des  alluvions ,  puifqu'elle 
fe  forme  encore  aujourd'hui  par  le  fuintement  de  ces  matières  dans 
les  fentes  des  pierres  quartzeufes  où  fe  trouve  ce  minéral  cuivreux 
qui  fe  réunit  aufîi  en  ftal^dites  dans  les  cavités  de  la  roche. 

(i)   Hiftoire   Naturelle  d'Efpagne , /;^^^j  28   &   6  y. 

ATméraux,  Tome  II I.  M 


90  Histoire  Natu relle 

fameufè  par  fès  mines  d'ctain,  on  trouve  des  mines  Je 
Cuivre  en  filons,  dont  quelques-uns  Ibnt  trcs-voifins 
des  filons  d'ctain,  &  quelquefois  même  font  mêlés  de 
ces  deux  métaux  ;  comme  la  plupart  de  ces  mines  font 
dans  un  état  pyriteux ,  elles  font  de  féconde  formation , 
quelques-unes  néanmoins  font  exemptes  de  pyrites,  & 
paroifTent  tenir  de  près  à  celles  de  première  formation; 
M.  Jars  les  a  décrites  avec  fon  exa6litude  ordinaire  (k). 

(k)  Les  filons  de  cuivre  de  la  province  de  Coi'noudilies  font  dans 
une  efpcce  de  fchifte  nomme  k'illas ,  dont  la  couleur  eft  difîcrcnte  du- 
fchifte  qui  contient  le  filon  d'étain;  avec  Tétain  ce  killas  efl  brun  ^ 
noir  &  bleuâtre ,  mais  avec  les  mine'raux  de  cuivre  il  eft  plutôt  gri- 
fàtre,  blanchâtre  &  rougeâtre.  Il  efl  très-commun  de  rencontrer  des 
filons  qui  produil'ent  du  minéral  de  cuivre  &  de  celui  d'étain  en  même 
temps,  mais  il  y  en  a  toujours  un  qui  domine. 

Les  matières   qui   accompagnent    &  annoncent   les    minéraux   de 
cuivre  &  qui  eu  contienrjent  Ibuvent  elles-mêmes,   confiflent  proche 
la  furface  de  la  terre,  en  une  efpèce  de  minéral  de  fer  décompolé  en 
partie  ou  fubllance  ocreufe,  mêlée  de  quartz  ou  d'un  rocher  bleuâtre; 
mais  dans  la  profondeur,  ces  matières  font  un  compote  de  quartz  ,  de 
mica  blanc  fur  une  pierre  en  roche  d'un  bleu-clair;  afTez  fouvent  de 
Ja  pyrite  ,  tantôt  blanche  ,  tantôt  jaune,  quelquefois  le  tout  efl  parfemé 
avec  des  taches  de  minéral  de  cuivre.  Obfervations  fur  les  in'ines,  par  M. 
Jars  ;  Mémoires  de  l'Acoiiémie  des  Sciences^  année  i  y  y  o  ,  page  j  40.  — 
Au-defTus  de  la  ville  de  Redruts ,  on  exploite  une  mine  de  cuivre  très- 
abondante.  ...  fon  filon  efl  peu  éloigné  de  celui  de  fa  mine  d'étain 
de  Peduandrea;  il  lui  efl  parallèle.  ...  La  largeur  commune  du  filon 
peut  être  de  quatre  à  cinq  pieds;  il  efl  compofe  d'un  beau  minera 
jaune  ou  pyrite  cuivreufe,   point  de  blende,  afièz  fouvent  du  quartz 
&  de  la  pyrite^   fur-tout  de  la  blanche  qui  eft  arfenicale.  .  .  quelque- 
fois du  criflaf  de  roche  qu'on  nomme  diamant  de  Cornouailles ...  Ou 


DES      AI  I  N  É   R  A   V   X.  91 

En  Italie,  dans  leVicentin,  «on  fabrique  annuelle- 
ment ,  dit  M.  Ferher ,  beaucoup  de  cuivre ,  de  foufre  ^* 
&  de  vitriol.  La    lefTive  vitriolique   eft   très  -  riche    en  « 
cuivre,  que  Ton  en  tire  par  cémentation  &  en  y  mettant  « 
des  lames  de  fer  fl)   ».  Ces  mines  font,   comme  l'on 
voit,  de  dernière  formation.  On  trouve  au/Ti  de  pareilles 
mines  de  cuivre  en  SuifTe ,   dans   le  pays   des  Grifons 
&:  dans   le  canton  de  Berne,    à  fix  lieues  de  Romam- 
Moutier  (m). 

En   Allemagne,  dit   Schliitter,    on    compte   douze 

trouve  quelquefois  du  cuivre  natif  dans  la  partie  fupcrieure  du  filon 
&  dans  les  endroits  où  il  n'efl:  pas  riche.  ...  Le  filon  efl  renfermé 
dans  le  rocher  fchifteux  nommé  killas .  ...  Le  côté  du  mur  du  fiJon 
elt  tendre,   fouvent  il  efl:  compofe  d'une  matière  jaune  &  poreufe , 
fouvent  aufli  d'une  efpèce    d'argile.  .  .  .  Le  filon  efl  très -riche  & 
abondant  dans  la  plus  grande  profondeur  qui  efl:  de  foixante  &  quel- 
ques toifes.  .  A  cinq  milles  de  Redruth ,  on  exploite  encore  plufieurs 
filons  qui  font  de  ia  même  nature  «Se  dans  une  roche  de  même  efpèce.. 
H  y  a  entr'autres  dans  ce  pays  une  mine  de  cuivre  vitrée  extrêmement 
riche,  mais  très-peu  abondante.  .  .  .  On  trouve  dans  tout  ce  terrein 
une  très-grande  quantité  de  puits  jufqu'à  Sainte-Agnès,  où  particu- 
lièrement près  de  la  mer  les  filons  de  cuivre  ne  font  qu'en  petit  nombre , 
en  comparaifon  des  fiions  d'étain  qui  y  font  beaucoup  plus  nombreux, 
tandis  que  c'étoit  le  contraire  du  côté  de  Redruth.   Obfervations  fur 
les  mines  ,  par  Al.  Jars ,  dans  Us  Aiémoïres  de  C  Académie  des  Sciences, 
/innée  1770  >  page  J40. 

(l)   Lettres  fur  la  Minéralogie,  par  M.  Ferber , /jj^/ri  ^7^"  ^8. 
(m)   Mémoires  de  M.  Guettard,    dans   ceux  de   l'Académie  des 
Sciences,  année  17J2  ,  page  $2^, 

M  ij 


92  Hjstoire  Naturelle 

fortes  Je  mines  de  cuivre  (iij ,  dont  cependant  aucune 

(n)  Ces  douze  fortes  de  mines  de  cuivre  font  i ."  le  cuivre  natif 
ou  jnine  de  cuivre  fous  forme  métallique;  il  efl  rare  &  reflemble  à 
celui  qui   a   été   rafiné. 

2.°  Le  cuivre  azur  ou  mine  de  cuivre  vitrée,  elle  tient  de  farfenic 
&  un  peu  de  fer. 

3.°  La  mine  de  cuivre  jaune,  qui  efl  une  efpèce  de  pyrite  com- 
pofée  de  foufre  ,  de  beaucoup  de  fer  &  de  peu  de  cuivre. 

4.°  La  mine  de  cuivre  fauve,  qui  tient  du  foufre,  de  l'arfenic , 
de  l'argent  &  du  cuivre  en  plus  grande  quantité  cjue  la  fuivante. 

5.°   Autre  mine  de  cuivre  différente  de  la  précédente. 

6°  La  mine  de  cuivre  bleue,  d'Outre- mer  ^wZ/ra  marina),  qui 
n'efl  autre  chofe  que  du  cuivre  diflbus  par  les  acides,  &  précipitée 
&  pénétrée  parTaîkali  volatil.  Comme  elle  ne  tient  ni  foufre  ni  arfenic, 
elle  n'a  pas  befoin,  à  la  rigueur,  d'être  calcinée,  non  plus  que  U 
mine  de  cuivre  verte,  appelée  malachite  ;  au  petit  effai  on  ne  les 
rôtit  pas,  pour  la  fonte  en  grand  on  les  rôtit  fort  peu. 
7.°   La  mine  de  cuivre  verte ,  nommée  malachite. 

8.°  La  mine  de  cuivre  en  fable ,  qui  efl  compofée  de  cuivre  & 
d'arfenic ,    mêlé   de  fable. 

Cf°  La  mine  d'argent,  blanche  (  ou  grife  )  tenant  plus  de  cuivre 
que  d'argent;  mais  les  mines  portent  ordinairement  le  nom  du  métal, 
qui,  étant  vendu,  produit  une  plus  grande  fomme  d'argent  que 
l'autre ,    quoiqu'en    plus   grande   quantité. 

10."  La  mine  de  cuivre  en  ardoife  ou  écailles  cuivreufes;  elle 
donne  peu  de  cuivre   aux  effais  ,   aufli-bien  que  la  précédente. 

1  1 .  Prefque  routes  les  pyrites  un  peu  colorées ,  parce  qu'il  n'y  en  a 
prefque  point  qui  ne  contienne  une  ou  deux  livres  de  cuivre  par  quintal. 

12.     Le  vitriol  bleu-verdâtre  natif,   fe  met  au  rang  des  mines  de 
cuivre  ,   parce  que  ce  métal  y  fert  en  partie  de  bafe  à  l'acide  qufi  s'eft 
criftallifé  avec  lui  &  avec  un  peu  de  fer.    Traité  de  la  fonte  des  mines 
de  Schlutlcr,  tome  J ,  pages  i  (^  9  ir    i^i^ 


DES      Mll^ÉRAUX,  93 

n'eft  aiifli  riche  en  métal  que  les  mines  de  plomb , 
(l'ctain  &  de  fer  de  ces  mêmes  contrées.  Comme  Ja 
plupart  de  ces  mines  de  cuivre  contiennent  beaucoup 
de  pyrites ,  il  faut  les  griller  avec  foin ,  fans  cela  le 
cuivre  ne  fe  réduit  point,  &  l'on  n'obtient  que  de  la 
matte.  Le  grillage  eft  ordinairement  de  fept  à  huit 
heures ,  &  il  eft  à  propos  de  laifTer  refroidir  cette 
mine  grillée,  de  la  broyer  &  griller  de  nouveau  trois 
ou  quatre  fois  de  fuite  en  la  broyant  à  chaque  fois  ; 
ces  feux  interrompus  la  défoufrent  beaucoup  mieux 
qu'un  feu  continué.  Les  mines  riches,  telles  que  celles 
d'azur  &  celles  que  les  ouvriers  appellent  mines  pourries 
ou  évejitées ,  n'ont  pas  befoin  d'être  grillées  autant  de 
fois  ni  fi  long  -  temps  ;  cependant  toutes  les  mines  de 
cuivre,  pauvres  ou  riches,  doivent  fubir  le  grillage ,  car 
après  cette  opération  elles  donnent  un  produit  plus 
prompt  &  plus  certain  ;  &.  fouvent  encore  le  métal  pur 
eft  difficile  à  extraire  de  la  plupart  de  ces  mines  grillées. 
En  général,  les  pratiques  pour  le  traitement  des  mines 
doivent  être  relatives  à  leur  quahté  plus  ou  moins  riche , 
&  à  leur  nature  plus  ou  moins  fufible.  La  plupart  font 
fj  pyriteufes  qu'elles  ne  rendent  que  très  -  difficilement 
leur  métal  après  un  très-grand  nombre  de  feux.  Les 
plus  rebelles  de  toutes  font  les  mines  qui ,  comme  celles 
de    RammellLerg    &    du  haut  Hartz  (  o )  ^  font  non^ 

1.  — ■■     ■ .  ■  ■         ■    -    ■  ■      ■  ■——  ■  ■        ■  ■  I  ■  .1        ■       ■  I  ■        —  . ■  I  ■  I.        ■   » ■  g» 

(q)  Les  miues  de  cuivre  de  Rammelfberg  &  celles  du  haut  Harti,, 


94-  Histoire   Naturelle 

feulement  mêlées  de  pyrites,  mais  de  beaucoup  de 
mines  de  fer;  il  s'cll  paffé  bien  du  temps  avant  qu'on 
ait  trouvé  les  moyens  de  tirer  le  cuivre  de  ces  mines 
pyriteufes  &.  ferrugineufcs. 

Les  Anciens,  comme  nous  l'avons  dit,  n*ont  d'abord 
employé  que  le  cuivre  de  première  formation,  qui  fe 
réduit  en  métal  dès  la  première  fonte,  &  enfuite  ils  ont 
fait  ufage  du  cuivre  de  dernière  formation  qu'on  fè 
procure  aifément  par  la  cémentation;  mais  les  mines 
de  cuivre  en  pyrites  ,  qui  font  prefque  les  feules  qui 
nous  refient,  n'ont  été  travaillées  av€c  fuccès  que  dans 
ces  derniers  temps,  c'ell-à-dire,  beaucoup  plus  tard  que 
les  mines  de  fer ,  qui ,  quoique  difficiles  à  réduire  en 
métal,  le  font  cependant  beaucoup  moins  que  ces  mines 
pyriteufes  de  cuivre. 

Dans  le  bas  Hartz,  les  mines  de  cuivre  contiennent 
du  plomb  &  beaucoup  de  pyrites  ;  il  leur  faut  trois  feux 
de  grillage,  &  autant  à  la  matte  qui  en  provient;  on 
fond  enfuite  cette  matte  qui ,  malgré  les  trois  feux 
qu'elle  a  fubis  ne  fe  convertit  pas  toute  entière  en 
métal  ;  car  dans  la  fonte  il  fe  trouve  encore  de  la  matte 


ne  font  que  des  pyrites  cuivreufes ,  &  il  n'eft  pas  étonnant  qu'on 
ait  ignoré  i\  long  -  temps  l'art  d'en  tirer  le  cuivre  :  il  y  a  peu  de 
mines  auxquelles  il  faille  donner  un  aufîi  grand  nombre  de  feux 
pour  les  griller ,  &  qui  dans  la  fonte  foient  aufll  chaudes  &  auffi 
rougeâtres.  Schlutter,  Traité  de  k  fonte  des  fnineSj  &c.  tome  II ^ 
pûge  ^26. 


DES    Minéraux,    *       95 

qu'on  eft  obligé  de  féparer  du  métal  &  de  faire  griller 
de  nouveau  pour  la  refondre  ( p)- 

Dans  le  haut  Hartz,  la  plupart  des  mines  de  cuivre 
font  auiïi  pyriteufes  ,  &.  il  faut  de  même  les  griller 
d'autant  plus  fort  &  plus  de  fois  qu'elles  le  font  davan- 
tage. Aux  environs  de  Clauflhal,  il  y  en  a  de  bonnes, 
de  médiocres  &  de  mauvaifes  ;  ces  dernières  ne  font  pour 
ainfi  dire  que  des  pyrites  ;  on  mcle  ces  mines  enfemble 
pour  les  faire  griller  une  première  fois  à  un  feu  qui 
dure  trois  ou  quatre  femaines  ;  après  quoi  on  leur 
donne  un  fécond  feu  de  grillage  avant  de  les  fondre  , 
&  l'on  n'obtient  encore  que  de  la  matte  crue ,  qu'on 
foumet  à  cinq  ou  fix  feux  fuccefTifs  de  grillage ,  félon 
que  cette  matte  eft  plus  ou  moins  fulfiireufe.  On  fond 
de  nouveau  cette  matte  grillée  ,  &  enfin  on  parvient 
à  obtenir  du  cuivre  noir  en  alfez  petite  quantité ,  car 
cent  quintaux  de  cette  matte  grillée  ne  donnent  que 
huit  à  dix  quintaux  de  cuivre  noir ,  &.  quarante  ou 
cinquante  quintaux  de  matière  moyenne  entre  ia  matte 
brute  &  le  cuivre  noir;  on  fait  griller  de  nouveau 
cinq  ou  fix  fois  cette  mûtte  moyenne  avant  de  la  jeter 
au  fourneau  de  fufion;  elle  rend  à-peu-près  la  moitié 
de  fon  poids  en  cuivre  noir,  &  entre  un^tiers  &  un 
quart  de  matière  qu'on  appelle  matte  firnple ,    que  l'on 


(■p)   Traité   de  la  foate  àzs  mines   de   Schlutter,  tomt  II,  pages 


96       ^Histoire  Naturelle 

fait  encore  griller  de  nouveau  fept  à  huit  fois  avant  de 
la  fondre,  &  cette  matte  fimple,  ne  fe  convertit  qu'alors 
en  cuivre  noir  (q). 

Les  mines  de  cuivre  qui  font  plus  riches  &  moins 
pyriteufes ,  rendent  dès  la  première  fonte  leur  cuivre 
noir,  mêlé  d'une  matte  qu'on  n'efl  obligé  de  griller 
qu'une  feule  fois,  pour  obtenir  également  le  cuivre 
noir  pur  ;  les  mines  feuilletées  ou  en  ardoifes,  du  comté 
de  Mansfeld ,  quoique  très-peu  pyriteufes  en  apparence, 
ne  donnent  fouvent  que  de  la  matte  à  la  première  fonte, 
&.  ne  produifent  à  la  féconde  qu'une  livre  ou  deux  de 
cuivre  noir  par  quintal.  Celles  de  R'ie^elfdorf ^  qui  font 
également  en  ardoife ,  ne  donnent  que  deux  à  trois 
livres  de  cuivre  par  quintal;  mais  comme  il  fuffit  de 
les  griller  une  feule  fois  pour  en  obtenir  le  cuivre 
noir ,  on  ne  lailTe  pas  de  trouver  du  bénéiice  à  les 
fondre  ,  quoiqu'elles  rendent  fi  peu,  parce  qu'une  feule 
fonte  fuffit  auffi  pour  réduire  le  cuivre  noir  en  bon 
métal  f^r) , 

On  trouve  dans  la  mine  de  A^eydenhek,  du  cuivre  en 
métal  mclé  avec  des  pyrites  cuivreufes  noires  &  vertes  ; 
cette  mine  paroît  donc  être  de  première  formation, 
feulement  une   partie  du  cuivre    primitif  a  été  décom- 

pofée  dans    la  mine  même,   par  l'aélion  des    élémens 

—  I  »  »      ,      • -.___—____ . 

(q)  Traite  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter,  tome  II ,  page  2  0^, 
(r)   Idem,   ibidem ,  ^^^f  ^(f/. 

humides, 


DES    Minéraux.  97 

humides  ;  mais  malgré  cette  altération ,  ces  minerais 
font  peu  dénaturés,  &.  ils  peuvent  fe  fondre  feuls:  on 
mcle  les  minerais  noir  &  vert  avec  le  cuivre  natif,  & 
ce  mélange  rend  fon  métal  dès  la  première  fonte,  &: 
même  affez  pur,  pour  qu'on  ne  fbit  pas  obligé  de  le 
raffiner  CfJ. 

En  Hongrie,  il  fè  trouve  des  mines  de  cuivre  de 
toutes  les  nuances  &  qualités  ;  celle  de  Horngromid  e(l 
d'une  grande  étendue,  tWç,  efl  en  larges  filons  &.  fi 
riche  qu'elle  donne  quelquefois  jufqu'à  cinquante  & 
fbixante  livres  de  cuivre  par  quintal  ;  elle  eft  compofée 
de  deux  fortes  de  minerais,  l'un  jaune  ,  qui  ne  contient 
que  du  cuivre  ;  l'autre  noir ,  qui  contient  du  cuivre 
&  de  l'argent  ;  ces  mines,  quoique  fi  riches,  font 
néanmoins  très-pyriteufès  ,  &  il  faut  leur  faire  fubir 
douze  ou  quatorze  fois  l'adtion  du  feu  avant  de  les 
réduire  en  métal.  On  tire  avec  beaucoup  moins  de 
frais  le  cuivre  des  eaux  cuivreufes  qui  découlent  de 
cette  mine  au  moyen  des  lames  de  fer  qu'on  y  plonge , 
&  auxquelles  il  s'unit  par  cémentation.  En  général , 
c'ell  dans  les  montagnes  de  fchifte  ou  d'ardoifè  que 
{è  trouvent,  en  Hongrie,  les  plus  nobles  veines  de 
cuivre  (t). 

<c  II  y  a  en  Pologne,  dit  M.  Cuettard,  fur  les  confins 

(f)  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter,  tome  II,  page  ^j?  /. 
{ t)    Delius ,  fur  l'art  des   mines.  Traduéîion  françoife ,  tome  J , 
page  S 2» 

Minéraux,  Toinc  JIL  N 


98  Histoire  Naturelle 

de   la   Hongrie  &   du    comté   de  Speis ,  une  mine  de 

cuivre  tenant  or  &    argent Cette   mine    cfl   d'un 

jaune  doré  avec  des  taches  couleur  de  gorge  de  pigeon , 
&  elle  efl  mêlée  de  quartz;  il  y  en  a  uiire  autre  dans 

les  terres  du  Starofle  de  Bulkow J'en   ai  vu  un 

morceau  qui  étoit  un  quartz  gris-clair,  parfemé  de  points 
cuivreux  ou  de  pyrites  cuivreufes  d'un  jaune  doré  (u)^^. 

En  Suède,  les  mines  de  cuivre  font  non-feulement 
très  -  nombreufes ,  mais  auïïi  très  -  abondantes  &  très- 
riches  ;  la  plus  fameufè  efl  celle  du  cap  Ferherg  :  on  en 
prendroit  d'abord  le  minerai  pour  une  pyrite  cuivreufè, 
&  cependant  il  n'efl  que  peu  fulfureux,  &.  il  efl  mclé  d'une 
pierre  vitreule  &  fufible  ;  il  rend  fon  cuivre  dès  la  pre- 
mière fonte  ;  il  y  a  plufieurs  autres  mines  qui  ne  font  pas 
fi  pures  &  qui  néanmoins  peuvent  fè  fondre  après  avoir 
été  grillées  une  feule  fois;  il  n'efl  pas  même  nécelfaire 
d'y  ajouter  d'autres  matières  pour  en  faciliter  la  fufion, 
il  ne  faut  que  quelques  fcories  vitreufès  pour  leur  faire 
un  bain  &  les  empêcher  de  fe  calciner  à  la  fonte  (x). 

En  Danemarck  &  en  Norwège ,  félon  Pontop- 
pidan ,  il  y  a  des  mines  de  cuivre  de  toute  efpèce  ; 
celle  de  Rorûas  efl  la  plus  renommée  ;  trois  fourneaux 
qui  y  font  établis  ont  rendu,  en  onze  années,  quarante 


(u)   Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences,  année  17^2,   page 
(x)  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter,  tome  II,  page  4p^, 


(C 


<c 


DES    Minéraux.  99 

mille  neuf  cents  quarante-quairc  quintaux  de  cuivre  (^yj. 
M*.  Jars  dit  «  que  cette  mine  de  Romas  ou  de  Relatif, 
ell  une  mine  immenfc  de  pyrites  cuivreufès,  fi  près 
de  ia  lùrface  de  la  terre,  que  Ton  a  pu  facilement  y 
pratiquer  des  ouvertures  affez  grandes  pour  y  faire  entrer  " 
&  fbrtir  des  voitures  qui  en  tranfportent  au-dehors  les  '' 
minerais ,  &  que  cette  mine  produit  annuellement  douze  '* 
mille  quintaux  &.  plus  de  cuivre  (i^  ». 

On  trouve  aulFi  des  indices  de  mine  de  cuivre  en 
Lapponie,  à  foixante  lieues  de  Torneâ,  &  en  Groenland  ; 
l'on  a  vu  du  vert-de-gris  &  des  paillettes  cuivreufes  dans 
des  pierres ,  ce  qui  démontre  affez  qu'il  s'y  trouve  auffi 
des  mines  de  ce  métal  faj. 

En  Ilîande,  il  y  a  de  même  des  mines  de  cuivre, 
les  unes  à  fëpt  milles  de  dillance  de  la  ville  de  Wiclow; 
d'autres  dans  ia  montagne  de  Crone-Bawn ,  qui  font  en 
exploitation,  &  dont  les  foffes  ont  depuis  40,  50  & 
ju/qu'à  60  toifes  de  profondeur  (b).  Le  Réiateur 
obfèrve  :  «  Que  les  Ouvriers  ayant  laiffc  une  pelle 
de  fer  dans  une  de  ces   mines  de  cuivre,  où  il  coule 

(y)   Journal  étranger,  mojj- ^'.^oiir  tJSS' 

(l)   Mémoires  des  Savans  étrangers,  (orne  IX,  page  4S ^' 

(a)  Hiftoire  générale  des  Voyages,  tome  XIX ,  page  ^  o. 

(b)  Le  premier  minéral  qu'on  y  trouve  en  cieufant,  efl:  une  pierre 
ferrugineufe;  au-deflous  on  découvre  une  mine  de  plomb  qui  femble 
être  mêlée  avec  de  l'argile,  mais  qui  donne  beaucoup  de  plomb  & 
peu  d'argent,  &  plus  bas  une  riche  mine  pierreufe  &  brillante  qui 

N  ij 


sitas 


WBL\OTHtCA 


100        Histoire   Naturelle 

»  de  l'eau ,  cette   pelle  fe   trouva   quelque  temps    après 
-  toute  incruftée  de    cuivre  ,    &   que    c'eft  d'après    ce 
"fait,   que   les    habitans    ont   pris    l'idce    de  tirer    ainfi 
>>  le  cuivre  de  ces  eaux  ,  en  y  plongeant  des  barres  de 
»  fer  ;  il  ajoute  que  non-feulement  le  cuivre  incrufte   le 
»  fer,  mais  que  cette  eau  cuivreufe  le  pénètre  &  femble 
'>  le  convertir  en  cuivre ,  que  le  tout  tombe  en  poudre 
»  au  fond  du  réfervoir  où  l'on  contient  cette  eau  cuivreufe; 
»  que  les  barres  de  fer  contra6lent  d'abord  une  efpèce  de 
»  rouille  qui,   par  degrés,  confomme  entièrement  le  fer; 
»  que  le  cuivre  qui  efl  dans  ïem  étant  ainfi  continuelle- 
»  ment  attiré  6l  fixé  par  le  fer  ,  il  fe  précipite  au  fond 
«  en  forme  de  fédiment,  qu'il  faut  pour  cela  du  fer  doux, 
'>  &  que    l'acier  n'efl  pas  propre  à  cet  effet  ;    qu'enfin 
ce  fédiment  cuivreux  eft  en  poudre  rougeâtre  ».  Nous 
obferverons  que  c'efl  non  -  feulement  dans    ces   mines 
d'illande,  mais  dans  pKifiewrs  autres,  comme  dans  celles 
de  Suède,  du  Hartz,  &c.  que  l'on  trouve  de  temps  en 
temps ,  ÔL  en  certains  endroits  abandonnés  depuis  long- 
temps, des  fers  incruflés  de  cuivre,  &  des  bois  dans 
lefquels  ce  métal  s' eft  infmué  en  forme  de  végétation,. 

Wl  I  I  I  <        I  II  ■  ■ 

rend  foixante-quinze  onces  d'argent  par  tonne  de  mine,  &  en  outre 
une  grande  quantité  de  plomb  îe  plus  fin  :  après  avoir  percé  quelques 
toifès  plus  bas  on  arrive  à  la  veine  de  cuivre  qui  efl  très -riche,  & 
qu'on  peut  fuivre  jufqu'à  une  certaine  profondeur.  Journal  étranger, 
mois  de  Décembre  jyj^,  pages  Jiy,  pjques  &  compris  pag& 
1 2  (r> 


DES    Minéraux.  ioi 

qui  pénètre  entre  les  fibres  du  bois  &  en  remplit  les 
intervalles  (cj;  mais  ce  n'efl  point  une  pénétration 
intime  du  cuivre  dans  Je  fer,  comme  le  dit  le  Relateur, 
&  encore  moins  une  converfion  de  ce  métal  en  cuivre. 

Après  cette  énumération  des  mines  de  cuivre  de 
l^Europe,  il  nous  refle  à  faire  mention  de  celles  des 
autres  parties  du  monde;  &  en  commençant  par  TAfie, 
il  s'en  trouve  d'abord  dans  les  îles  de  l'Archipel  ;  celle 
de  Chalcuïs,  aujourd'hui  C/mlcéj  avoit  même  tiré  fon 
nom  du  cuivre  qui  s'y  trouvoit.  L'île  à'Eubée  en 
fourniiïbit  aufTi  (d ) ;  mais  la  plus  riche  de  toutes  en 
cuivre,  eft  celle  de  Chypre;  les  Anciens  l'ont  célébrée 
fous  le  nom  ^(Erofa,  &  ils  en  tiroient  une  grande 
quantité  de  cuivre   &  de  zinc    (e) . 

Dans  le  continent  de  i'Afie,  on  a  reconnu  &  tra- 
vaillé des  mines  de  cuivre  :  en  Per/è  (f)^  «  le  cuivre, 
dit  Chardin,  fe  tire,  principalement  à  Sary,  dans   les 


(c)  Bibliothèque  raifonnée,  tome  XLIII ,  page  y  o, 

(d)  Les  premiers  ouvrages  d'airain  avoient ,  fuivant  ia  tradition  des 
Grecs,  été  travaillés  en  CEubée,  dans  la  ville  de  Chakis  f  qui  en  avoit 
tiré  fon  nom.  Solin ,  chap.  XI, 

(e)  Defcription  de  l'Archipel,  par  Dapper,  pages  ^2^0"  445' 

(f)  W  y  a  des  mines  de  cuivre  aux  environs  de  la  ville  de  Cacfiem. 
en  Perfe ,  où  l'on  fait  commerce  de  ce  métal.  Voyage  de  Struys , 
tome  I,  page  2yy.  —  A  quelques  lieues  de  la  ville  de  Tauris  ,  on 
trouve  une  mine  de  cuivre  qui  rapporte  beaucoup  au  Roi.  Voyage 
de  Cerne  m  Carrer  i,  tome  II ,  page  4j, 


102  Histoire   Natu relle 

»  montagnes  de  Miiiemkrm;  il  y  en  a  aulfi  à  Badriam 
„  &  vers  Cajhïn;  tous  ces  cuivres  Ibnt  aigres,  &  pour 
„  les  adoucir,  les  Perfans  les  allient  avec  du  cuivre  de 
„  Suède  &  du  Japon,  en  en  mettant  une  partie  fur  vingt 

du  leur  (^)  '->' 

M."  Gmelin  &  Muller  ont  reconnu  &  obfervé  plu- 
fieurs  mines  de  cuivre  en  Sibérie  ;  ils  ont  remarqué 
que  toutes  ces  mines,  ainfi  que  celles  des  autres  métaux, 
font  prefque  à  la  (urface  de  la  terre.  Les  plus  riches 
en  cuivre  font  dans  les  plus  hautes  montagnes  près  de 
la  rive  occidentale  du  Jénifca;  on  y  voit  le  cuivre  à 
la  furface  de  la  terre ,  en  mines  rougeâtres  ou  vertes , 
qui  toutes  produifent  quarante-huit  à  cinquante  livres 
de  cuivre  par  quintal  (h).  Ces  mines  iituées  au  haut  des 
montagnes,  font  fans  doute  de  première  formation,  la 
mine  verte  a  feulement  été  un  peu  altérée  par  les  élé- 
mens  humides.  De  toutes  les  autres  mines  de  cuivre, 
dont  ces  Voyageurs  font  mention,  la  moins  riche  eft 
celle  de  Ptchtama-Gora,  qui  cependant  donne  douze 
pour  cent  de  bon  cuivre;  il  y  a  cinq  de  ces  mines  en 
exploitation,  &  Ton  voit  dans  plufieurs  autres  endroits 
de  cette  même  contrée,  les  veftiges  d'anciens  travaux, 
qui  démontrent  que  toutes  ces  montagnes  contiennent 

de  bonnes  mines  (i).  Celles  des  autres  parties  de  la 

■  ■  f  — — 

(g)    Voyage  de  Chardin,  tome  II ,  page  2^. 

(h)   HiRoire  générale  des  Voyages,   terne  XVIII ,  page  ^  je, 

(i)  Idem,  ibid. 


DES    Minéraux,  J03 

Sibérie  font  plus  pauvres;  la  plupart  ne  donnent  que 
deux,  trois  ou  quatre  livres  de  cuivre  par  quintal  (k) : 
on  trouve  fur  la  croupe  &  au  pied  de  plufieurs  mon- 
tagnes, différentes  mines  de  cuivre  de  féconde  &  de 
troifième  formation  ;  il  y  en  a  dans  les  environs  de 
Cazan ,  qui  ont  formé  des  flalaélites  cuivreufes ,  &  des 
malachites  très-belles  &  aifées  à  polir;  on  peut  même 
dire  que  c'efl  dans  cette  contrée  du  nord  de  l'Afie,  que 
les  malachites  fe  trouvent  le  plus  communément,  quoi- 
qu'il y  en  ait  auffi  en  quelques  endroits  de  l'Europe, 
&  particulièrement  en  Saxe ,  dans  plufjcurs  mines  de 
cuivre  de  troifième  formation  ;  ces  concrétions  cui- 
vreufes ou  malachites ,  fe  préfentent  fous  différentes 
formes;  il  y  en  a  de  fibreufes  ou  formées  en  rayons, 
comme  fi  elles  étoient  criftallifées ,  &  par  -  là  elles 
reffemblent  à  la  zéolite  ;  il  y  en  a  d'autres  qui  paroiffent 
formées  par  couches  fucceffives  ;  mais  qui  ne  diffèrent 
des  premières  que  par  leur  apparence  extérieure.  Nous 
en  donnerons  des  notions  plus  précifes  lorfque  nous 
traiterons  des  flalaélites  métalliques. 

Les  mines  de  Souxon  en  Sibérie  font  fort  confidé- 


(k)  A  cinquante-deux  verHes  de  Catherinbourg  fe  trouve  la  mine 
de  Polewai  qui  n'eft  pas  dirpofee  par  couches,  mais  par  chambres ^ 
&  qui  ne  donne  qu'environ  trois  livres  de  cuivre  par  quintal.  Hijl. 
générale  des  Voyages ,  tome  XVIII ,  page  i  o  iJ*.  —  Celles  de  W^erchoturic 
ne  rendent  que  deux  pour  cent,  le  minerai  eft  une  pyrite  de  cuivre 
Diêlee  de  veines  irrégulières  de  quartz  noirâtre.  Idem,  page  ^(j  o. 


104        Histoire    Naturelle 

râbles ,  &  s'étendent  à  plus  de  trente  lieues  ;  elles  font 
fituées  dans  des  collines  qui  ont  environ  cent  toifes 
de  hauteur,  &  paroifTent  en  (iiivre  la  pente;  toutes  ne 
donnent  guère  que  quatre  livres  de  cuivre  par  quintal; 
ces  mines  de  Souxon,  font  de  troifièmc  &  dernière 
formation  ;  car  on  les  trouve  dans  ie  fable ,  &  même  dans 
des  bois  fofTiles  qui  font  tachés  de  bleu  &  de  vert ,  & 
dans  l'intérieur  defquels  la  mine  de  cuivre  a  formé  des 
criftaux  (l).  Il  en  eft  de  même  des  mines  de  cuivre 
des  monts  Riphces;  on  ne  les  exploite  qu'au  pied  des 
montagnes ,  où  le  minerai  de  cuivre  fe  trouve  avec  des 
matières  calcaires,  &  fuit,  comme  celles  de  Souxon,  la 
pente  des  montagnes  jufqu'à  la  rivière  (m). 

Au  Kamtfchatka,  où  de  temps  immémorial  les  habitans 
étoient  auiïl  fauvages  que  ceux  de  l'Amérique  fepten- 
trionale,  il  fe  trouve  encore  du  cuivre  natif  en  maffes 
&  en  débris  (n) ,  &  une  des  îles  voifmes  de  celle  de 
Bering)  où  ce  métal  fe  trouve  en  morceaux  fur  le 
rivage,  en  a  pris  ie  nom  d'ik  de  Cuivre  (o). 
La 

(l)   Hifloire  générale  des  Voyages ,  tome  XIX,  page  4y^> 

(m)   Idem,  ihid.  page  4jy- 

(n)  «  Dans  quelques  endroits  du  Kamtfchatka,  on  trouve  dans  fe 
a»  fable  une  fi  grande  quantité  de  petits  morceaux  de  cuivre  natif, 
qu'on  pourroit  en  charger  des  charretes  entières,  jj  Le  fieur  Schercr, 
cité  dans  le  Journal  de  Phyfique  y  Juillet   i  yS  i ,  pages  41  &  fuiv» 

(0)  Alednoi-ojlroff  o\x  l'île  de  cuivre  qui  fe  voit  de  l'île  de  Bering, 
*fl  ainfi  appelée  à  caufe  des  gros  morceaux  de  cuivre  natif  qu'on 

trouve 


DES  Minéraux,  105 

La  Chine  eft  peut  -  ctre  encore  plus  riche  que  la 
Sibérie  en  bonnes  mines  de  cuivre,  c'efl  fur-tout  Jans 
la  province  iïYun-naii  qu'il  s'en  trouve  en  pius  grande 
quantité  ;  &  il  paroît  que  quoiqu'on  ait  très-ancienne- 
ment fouillé  ces  mines ,  elles  ne  font  pas  épuifées ,  car 
on  en  tire  encore  une  immenfe  quantité  de  métal.  Les 
Chinois  diflinguent  trois  e/pèces  de  cuivre  qu'ils  pré- 
tendent fè  trouver  naturellement  dans  leurs  différentes 
mines,  i.  le  cuivre  rouge  ou  cuivre  commun,  &.  qui 
eft  du  cuivre  de  première  formation  ou  de  cémentation  ; 
2.  le  cuivre  blanc  qu'ils  affurent  avoir  toute  fa  blancheur 
au  fortir  de  la  mine,  &  qu'on  a  peine  à  diftinguer  de 
l'argent  lorfqu'il  eft  employé.  Ce  cuivre  blanc  eft  aigre, 
&  n'eft  vrai/èmblablement  qu'un  mélange  de  cuivre  & 
d'arfenic  ;  3.  le  tombac  qui  ne  paroît  être  au  premier 
coup-d'œil  qu'une  fimple  mme  de  cuivre ,  mais  qui  eft 
m«iée  d'une  aflez  grande  quantité  d'or  (p) :  il  fe  trouve 
une  de    ces  mines  de  tombac  fort  abondante  dans   la 

trouve  fur  la  grève.  .  .  .  fur-tout  à  la  pointe  oueft  de  la  bande  mé- 
ridionale. Maleviskoi  en  recueillit,  entre  les  roches  &  la  mer,  fur  une 
grève  d'environ  douze  verges ,  idem ,  ibïd. 

(p)  L'aurïchalcum  de  Pline,  paroît  être  une  efpèce  de  tombac, 
qu'il  défigne  comme  un  cuivre  naturel ,  d'une  qualité  particulière  & 
plus  excellente  que  le  cuivre  commun  ,  mais  dont  les  veines  étoient 
déjà  depuis  long-temps  épuifées  :  In  Cypro  prima  œr'is  inventio  ;  mox 
vilitas  ,  reperto  in  aliis  terris  prœjtantiore ,  maxime  aurichalco  ,  quod prœ- 
cipuum  bonitatem  admirationemque  dià  obiinuit  ;  vec  repcritur  longo  jarn 
îempore  eff'œtâ  tellure.   Lib.  XXXIV,  cap.  II. 

Minéraux ,  Tome  III.  O 


io6        Histoire  Naturelle 

province  de  Hn-quang.  On  fait  de  très-beaux  ouvrages 
avec  ce  tombac,  &  en  général,  on  ne  confomme  nulle 
part  plus  de  cuivre  qu'à  la  Chine,  pour  les  canons,  les 
cloches,  les  inflrumens ,  les  monnoics,  &c.  (q) ;  cepen- 
dant le  cuivre  eft  encore  plus  commun  au  Japon  qu'à 
ia  Chine;  les  mines  les  plus  riches,  &  qui  donnent 
le  métal  le  plus  tin  &  le  plus  dudile  ,  font  dans  la 
province  de  Kïjnok  &  de  Snrunga  (r) ,  &.  cette  dernière 
doit  être  regardée  comme  une  mine  de  tombac , 
car  elle  tient  une  bonne  quantité  d'or.  Les  Japonois 
tirent  de  leurs  mines,  une  fi  grande  quantité  de  cuivre 
que  les  Européens  &  particulièrement  les  Hollandois, 
en  achetteni  pour  le  tran/porter  &  en  faire  commerce  (fj; 
mais  autant  le  cuivre  rouge  efl  commun  dans  ces  îles 
du  Japon,  autant  le  cuivre  jaune  ou  laiton  y  efl  rare, 
parce  qu'on  n'y  trouve  point  de  mine  de  zinc,  &  qu'on 
efl  obligé  de  tirer  du  Tunquin  ou  d'encore  plus  loin, 
la  calamine  ou  le  zinc  néceffaire  à  cet  alliage  (r). 

Enfin,  pour  achever  l'énumération  des  principales 
mines  de  cuivre  de  l'Afie,  nous  indiqutrons  celles  de  l'île 
Formofe,  qui  font  fi  abondantes,  au  rapport  des  Voya- 
geurs,  qu'une  feule  de  ces  mines  pourroit  fùffire  à  tous 


(q)   Hifloire  générale  des  Voyages,   tome  V,  page  484. 
(r)    Idem  ,    tome  X ,  page  6 ^ ^. 

(f)   Hifloire  Naturelle  du  Japon,  par  Koeinpfer,  tome  I ,  page  p^, 
(tj   Idem ,  ibid. 


DES    Minéraux.  107 

les  befoins  &  ufages  de  ces  Infulaires  ;  la  plus  riche 
cil  celle  de  Peorko;  le  minerai  eft  du  cuivre  rouge  (uj , 
&.  paroît  être  de  première  formation. 

Nous  ne  {(dxons  que  citer  celles  de  MacafTar  dans 
les  îles  Célèbes  (x) ;  celles  de  l'île  de  Timor  (y) ^  & 
enfin  celles  de  Bornéo  dont  quelques-unes  font  mêlées 
d'or  &  donnent  du  tombac  ,  comme  celles  de  la 
province  de  Siiran^a  au  Japon,  &.  de  Hu-quang  à  la 
Chine  (i) . 

En  Afrique  ,  il  y  a  beaucoup  de  cuivre  ,  &  même 
du  cuivre  primitif  Marmol  parle  d'une  mine  riche ,  qui 
étoit  il  y  a  près  de  deux  fiècles ,  en  pleine  exploitation 
dans  la  province  de  Sus  au  royaume  de  Maroc,  &  il 
dit  qu'on  en  tiroit  beaucoup  de  cuivre  &  de  laiton 
qu'on  tranfportoit  en  Europe:  il  fait  aufTi  mention  des 
mines  du  mont  Atlas  dans   la  province  de  Zahara,  où 

(u)   Defcription  de  l'ije  Formofe;  Amjlerdam ,  i  y  o  j ,  page  i^S. 

(x)    Hifloire  générale  des  Voyages ,  tome  X,  page  >f  /  8. 

(y)   Idem  ,  tome  A'/,  pûge  -2j  2. 

(tJ  Idem,  tome  V ,  page  48^;  &  tome  IX,  page  j"  07.  «  Le 
tombac,  dit  Ovington,  efl:  ion  recherche  aux  Indes  orientales;  oï\  « 
croit  que  c'efl:  un  mélange  naturel  d'or,  d'argent  &  de  cuivre,  <c 
qui  eft  de  bon  aloi  dans  de  certains  endroits,  comme  à  Bornéo,  ce 
&  de  beaucoup  plus  bas  aloi  dans  d'autres ,  comme  à  Siam.  »  Voyage 
de  Jean  Ovington,  tome  II,  page  21  ^.  —  Le  tombac  de  Siam  &  de 
Bornéo,  ne  nous  laifle  pas  douter  qu'il  n'y  ait  dans  ces  contrées 
plufieurs  autres  mines  de  cuivre ,  dont  les  Voyageurs  ont  néglige 
de  faire  mention. 

O   ij 


io8  Histoire  Naturelle 

l'on  fabriquoit  des  vafes  de  cuivre  &  de  laiton  (aj.  Ces 
mines  de  la  Barbarie  &  du  royaume  de  Maroc,  four- 
niflent  encore  aujourd'hui  une  très-grande  quantité  de 
ce  métal  que  les  Africains  ne  fe  donnent  pas  la  peine 
de  raffiner,  =&  qu'ils  nous  vendent  en  cuivre  brut.  Les 
montagnes  des  îles  du  cap  Vert  contiennent  aufli  des 
mines  de  cuivre  ;  car  il  en  découle  plufieurs  fources 
dont  les  eaux  font  chargées  d'une  grande  quantité  de 
parties  cuivreufès  qu'il  efl;  aifé  de  fixer  &  de  recueillir 
par  la  cémentation  (b).  Dans  la  province  de  Bambuck, 
fi  abondante  en  or,  on  trouve  auffi  beaucoup  de  cuivre, 
&  particulièrement  dans  les  montagnes  de  Radfch'inkadbar 
qui  font  d'une  prodigieufe  hauteur  (c).  Il  y  a  auffi  des 
mines  de  cuivre  dans  plufieurs  endroits  du  Congo  & 
à  Benguela;  l'une  des  plus  riches  de  ces  contrées  eft 
celle  de  la  baie  des  Vaches  dont  le  cuivre  efl  très-fin  (d) ; 

(a)  L'Afrique  de  Marmol;  Paris,  i66yytome  II ,  page  S ^  ;  & 
tome  III t  page  S. 

(b)  II  y  a  ^Qs  mines  de  cuivre  dans  les  îles  du  cap  Vert ,  &  parti- 
culièrement dans  l'île  Saint- Jean  ,  où  le  Voyageur  Roberts  a  remarqué 
des  eaux  cuivreufès ,  dans  lefquelles  il  fuffifoit  de  tenir  la  lame  d'un 
couteau  pendant  une  minute  ou  deux,  pour  que  cette  lame  fût  iii- 
cruftée  de  cuivre  d'une  belle  couleur  jaune. ...  Il  remarqua  plufieurs 
fontaines  dont  \t^  eaux  produifoient  le  même  effet,  qui  étoit  toujours 
plus  marqué  à  mefure  qu'on  s'approchoit  de  la  fource.  Hijlo'ire  gé- 
Tiérale  des  Voyages,  tome  II ,  page  S 9 9- 

(c)  Hifloire  générale  des  Voyages,  tome  II ,  page  i^^;  &  tomt 
IV,  page  ^S S, 

(d)  Idem  ,  tome  IV,  page  ^S^  ;  &  tome  V,  page  S(. 


DES    Minéraux,  109 

on  trouve  de  même  des  mines  de  ce  métal  en  Guince, 
au  pays  des  Infijejfe  (e)  ,  &  enfin  dans  les  terres  des 
Hoitentois.  Koibe  fait  mention  d'une  mine  de  cuivre 
qui  n'eft  qu'à  une  lieue  de  diftance  du  Cap ,  dans  une 
très-haute  montagne,  dont  il  dit  que  le  minéral  efl  pur 
&  très  -  abondant  (f).  Cette  mine  fuuée  dans  une  li 
haute  montagne,  eft  fans  doute  de  première  formation 
comme  celles  de  Bambuk ,  &  comme  la  plupart  des 
autres  mines  de  cuivre  de  l'Afrique  ;  car  quoique  les 
Maures,  les  Nègres,  &  fur-tout  les  Abyiïins,  aient  eu 
de  temps  immémorial  des  inftrumens  de  ce  métal  (g) , 
leur  art  ne  s'étend  guère  qu'à  fondre  le  cuivre  natif  ou 
celui  de  troifième  formation,  &  ils  n'ont  pas  tenté  de 
tirer  ce  métal  des  mines  pyriteufes  de  féconde  formation, 
qui  exigent  de  grands  travaux  pour  être  réduites  en 
métal. 

Mais  c'efl  fur  -  tout  dans  ie  continent  du  nouveau 
monde,  &  particulièrement  dans  les  contrées,  de  tout 
temps  inhabitées,  que  fè  trouvent  en  grand  nombre  les 
mines  de  cuivre  de  première  formation  ;  nous  avons 
déjà  cité  quelques  lieux  de  l'Amérique  feptentrionale , 

(e)  Hifloire  générale  ^q'î>  Voyages,  tome  IV >  page  ^4-4' 

^f)   Idem,  tome  V,  page  i  8 C. 

(g)  II  y  a  des  mines  de  cuivre  très-abondantes  dans  im  lieu  nommé 
Soudi ,  qui  n'eft  pas  loin  à!Alï[fina.  Les  forgerons  nègres  fe  rendent 
à  Soudi  vers  le  mois  de  feptembre  &  s'occupent  à  ie  fondre  jufqu'au 
mois  de  mai.    Idem,  tome  IV,  page  ^ ^ 2, 


;io       Histoire   Naturelle 

ou  l'on  a  rencontre  de  gros  blocs  de  cuivre  natif  <Sc 
prefque  pur,  on  en  trouvera  beaucoup  plus  à  mefure 
que  les  bommes  peupleront  ces  déferts;  car  depuis  que 
ies  Espagnols  fe  font  babitués  au  Pérou  &  au  Cbily,  on 
en  a  tiré  une  imnienfe  quantité  de  cuivre;  par  -  tout 
on  a  commencé  par  les  mines  de  première  formation 
qui  font  les  plus  aifées  à  fondre.  Frézier,  témoin  judi- 
cieux, rapporte   «   que  dans  une   montagne    qui    efl  à 

„  douze  lieues  de  Pampas  du  Paraguay  Si  à  cent  lieues 
de  la  Conception,  l'on  a  découvert  des  mines  de  cuivre 
fi  fmgulieres  qu'on  en  a  vu  des  blocs  ou  pépites  de 
plus  de  cent  quintaux  ;  que  ce  cuivre  efl  fi  pur  que  d'un 
feul  morceau  de  quarante  quintaux,  on  en  a  fait  fix 
canons  de  campagne  de  bx  livres  de  balle  cbacun 
pendant  qu'il  étoit  à  la  Conception;  qu'au  refte,  il  y  a 

„  dans  cette  même  montagne  du  cuivre  pur  &  du  cuivre 
imparfait ,  &  en  pierres  mêlées   de  cuivre  (h)   ». 

C'eft  aux  environs  de  Coquhnbo  que  les  mines  de 
cuivre  font  en  plus  grand  nombre,  &  elles  font  en 
même  temps  {\  abondantes  qu'une  feule,  quoique  tra- 
vaillée depuis  long  -  temps ,  fournit  encore  aujourd'hui 
tout  le  cuivre  qui  fe  confomme  à  la  côte  du  Ghily  &. 
du  Pérou.  Il  y  a  aulTi  plufieurs  autres  mines  de  cuivre 
à  Carabaya  &  dans  le  corrégiment  de  Copiago  (ï) ;  ces 

(h)   Voyage  à  la  mer  du  Sud;    Paris,   1 7S  2  ,  pages  j6  &  jj* 
(i)   Hifloire  générale   des   Voyages,    tome  XIII,   pages    ^12. 


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DES      Af  I  N   É  R  A  V  X.  r  i  [ 

mines  de  cuivre  du  Pérou  font  prefque  toujours  mélaes 
d'argent,  en  forte  que  fouvent  on  leur  donne  le  nom 
de  mhies  d'argent,  Sl  ïon  a  obfervé  qu'en  général,  toutes 
les  mines  d'argent  du  Pérou  font  mêlées  de  cuivre, 
&.  que  toutes  celles  de  cuivre  le  font  d'argent  CâJ;  mais 
ces  mines  de  cuivre  du  Pérou  font  en  affez  petit  nombre, 
&  beaucoup  moins  riches  que  celles  du  Chily  ;  car 
M.  Bowles  les  compare  à  celles  qu'on  travaille  aduelle- 
ment  en  Efpagne  ("/).  Dans  le  Mexique,  au  canton  de 
Kol'tma,  il  fe  trouve  des  mines  de  deux  fortes  de  cuivre, 
l'une  fi  molle  &.  fi  ducftile  que  les  habitans  en  font  de 
très -beaux  vafes,  l'autre  fi  dure  qu'ils  l'emploient  au 
lieu  de  fer  pour  les  inftrumens  d'agriculture  (m):  enlin 
l'on  trouve  des  mines  de  cui\'re  à  Saint-Domingue  (n) , 
ÔL  du  cuivre  en  métal  &  de  première  formation  au 
Canada  fo)  &.  dans  les  parties  plus  Septentrionales  de 

fkj   Barba  métallurgie,  iome  1 ,  pages  i  o y  &   i  o  S. 

(l)  La  mine  de  cuivre  de  Carabaya ,  dans  le  Pérou,  contient  le 
même  quartz  ^  la  même  marcaOlte  &  la  même  matrice  d'améthille  que 
la  nouvelle  mine  de  cuivre  que  l'on  travaille  à  Colmcnaoviejo ,  à  fix 
lieues  de  Madrid.  —  Celle  de  cuivre  verte  de  Moquagna^  dans  le 
Pérou,  efl  prefque  la  même  que  celle  de  Molina  d'Arragon.  Hijïoire 
Naturelle  d' Efpagne  ,  par  M.  Bowles ,  page  2  S . 

(m)    Hifloire  générale  des  Voyages,  tome  XII ,  page  6 ^S. 

(n)    Idem,  ibid.  page  218. 

(0)  Sur  les  bords  du  lac  Erié  au  Canada ,  on  a  vu  des  blocs  de 
cuivre  ruuge  tout  régulilé  &  qu'on  a  employé  fans  aucune  prépa- 
ration :  on  foupço.me  que  cette  mine  ell  dans  le  lac  même.  AI. 
Cuetlard;  Mémoires  de  l' Académie  des  Sciences,  année  i  yj  2,  p.  216. 


112        Histoire  N atu r elle 

l'Amérique,  comme  chez  les  Michillimakinac  (p) ,  &  aux 
environs  de  la  rivière  DdiWoKe,  à  la  baie  d'Hud/bn  f^); 
il  y  a  d'autres  mines  de  cuivre  de  féconde  formation, 
aux  Illinois  (rj  &  aux  Sioux  (fj;  &  quoique  les  Voya- 
geurs ne  difent  pas  qu'il  fe  trouve  en  Amérique,  des 
mines  de  tombac  comme  en  Afie  &  en  Afrique,  cepen- 
dant les  habitans  de  l'Amérique  méridionale  ont  des 
anneaux ,    des    bracelets    &   d'autres    ornemens    d'une 

(p)  II  y  a  du  cuivre  prefque  pur  &  en  grande  quantité'  aux  environs 
d'un  grand  lac,  au  pays  des  Alichillimakinac ,  &  même  dans  les  petites 
îles  de  ce  lac  ;  on  a  travaille'  de  ce  cuivre  à  la  miffion  du  faut  Sainte- 
Alarie.  Hijloire  de  la  nouvelle  France ,  par  Charlevoîx ,  tome  III ,  p.  2  S  i . 

(q)  Aux  environs  de  la  rivière  Danoife ,  à  la  haie  d'Hudfon  ,  il 
y  a  une  mine  de  cuivre  rouge,  fi  abondante  &  fi  pure,  que  fans 
le  pafler  par  la  forge,  les  Sauvages  ne  font  que  le  frapper  entre  deux 
pierres,  tel  qu'ils  le  recueillent  dans  la  mine,  &  lui  font  prendre  la 
forme  qu'ils  veulent  lui  donner.  Voyage  de  Robert  Lade.  Traduâion; 
Paris ,  I  744 ,  tome  II ,  page  ^16. 

(r)  Il  y  a  auffi  une  mine  de  cuivre  au  pays  des  Illinois,  qui 
efl  jointe  à  une  mine  de  plomb,  à  lames  carrées;  la  parde  cuivreufe 
eft  en  verdet,  &  le  total  eft  mêlé  d'une  terre  jaunâtre  qui  paroît 
ferrugineufe.  M.  Guettard;  Mémoires  de  V Académie  des  Sciences, 
année  1  y ^  2  ,  page  216. 

(f)  Charlevoix  rapporte  que  le  Sueur  avoit  découvert  une  mine 
de  cuivre  très -abondante  dans  une  montagne  près  d'une  rivière  au 
pays  de  Sioux,  dans  l'Amérique  feptentrionale ,  &  qu'il  en  avoit  fait 
tirer  en  vingt-deux  jours  trente  livres  pelant  ;  il  ajoute  que  la  terre  de 
cène  mine  eft  verte  &  furmontée  d'une  croûte  noire  &  aufll  dure 
que  le  roc.  Hijloire  àr  Defcription  de  la  nouvelle  France  ;  Paris,  1744, 
tome  II ,  page  41  ^. 

matière 


T^  E  s    Minéraux.  r  i  5 

matière  métallique  qu'ils  nomment  caracoli ,  &  que  les 

.Voyageurs  ont  regarde  comme  un  mélange  de  cuivre, 

d'argent    &    d'or    produit    par  la   Nature  ;  il   efl   vrai 

que    ce    caracoli    ne  fe  rouille  ni  ne  fe  ternit  jamais; 

mais  il    cft  aigre ,  grenu  <Sc   cafTant  ;    on   efl   obligé  de 

le  mêler  avec  de  Tor  pour  le  rendre  plus  doux  &  plus 

iraitable;  il   efl  donc  entré  de   l'arfenic  ou   de    l'étain 

dans  cet  alliage;  &  fi  le  caraco/i  neR  pas  de  la  platine, 

ce  ne    peut    être  que    du   tombac   altéré    par   quelque 

minéral  ,   d'autant  que   le   Relateur  ajoute  :  «  Que  les 

Européens  ont  voulu  imiter  ce  métal  en  mêlant  fix  parties  « 

d'argent ,  trois  de  cuivre    &   une   d'or  ;   mais  que   cet  « 

alliage  n'approche  pas  encore  de  la  beauté  du  caracoli  « 

des   Indiens,  qui    paroît  comme  de    l'argent  fur -doré  « 

légèrement  avec  quelque  chofe  d'éclatant,  comme  s'il  «< 

étoit  un^  peu  enflammé  frj   ».  Cette  couleur   rouge  & 

brillante  n'eft  point  du  tout  celle  de  la  platine,  &  c'efl 

ce  qui  me  fait  préfumer  que  ce  caracoli  des  Américains» 

cil  une  forte  de  tombac ,  un  mélange  d'or ,  d'argent  & 

de  cuivre,   dont  la  couleur   s'cfl  peut-être  exaltée  par 

i'arfenic. 

Les    régioiis   d'où    l'on  tire    aétuellement    la    plus 

grande    quantité  de   cuivre  font  le   Chily,    le  Mexique 

6l  le  Canada  en  Amérique  ;  le   royaume  de  Maroc  & 

ies  autres  provinces  de  Barbarie  en  Afrique;  le  Japon 
»■ — ■  ■  ■  '% 

(t)   Nouveau   Voyage  aux   îles  de  l'Amérique  j   Paris,   iyz2f 
tome  II ,  page  2  i . 

Aiiuéraux  j  Tome  IIL  P 


114        Histoire  Natv relle 

èi  la  Chine  en  Afie ,  &.  la  Suède  en  Europe:  par-tout 
on  doit  employer  pour  extraire  ce  métal,  des  moyens 
différens,  fuivant  la.différence  des  mines  ;  celles  du  cuivre 
primitif  ou  de  première  formation  par  le  feu,  ou  celtes 
de  dècompofition  par  l'eau,  &qui  toutes  font  dans  l'ctat 
métallique,  n'ont  befoin  que  d'être  fondues  une  (èulefois 
popr  être  réduites  en  très-fjon  métal  ;  elles  donnent  par 
conféquent  un  grand  produit  à  peu  de  frais:  après  les 
mines  primordiales  qui  coijtcnt  le  moins  à  traiter,  on 
doit  donc  s'attacher  à  celles  où  le  cuivre  fe  trouve 
très-atténué ,  très-divifé,  &  où  néanmoins  il  confcrve 
fon  état  métallique  ;  telles  font  les  eaux  chargées  de 
parties  cuivreufes  qui  dccouient  de  la  plupart  de  ces 
mines.  Le  cuivre  charié  par  l'eau  y  efl  difTous  par 
i'acide  vitriolique,  &.  cet^ acide  s'attachant  au  fer  qu'on 
plonge  dans  cette  eau,  &  le  détruifant  peu-à-peu,  quitte 
en  même  temps  le  curvre  &  le  lai(fe  à  la  place  du  fer:  on 
peut  donc  facilement  tirer  le  cuivre  de  ces  eaux  qui  en 
font  chargées  en  y  plongeant  des  lames  de  fer,  fur  lefquelles 
il  s'attache  en  atomes  métalliques,  qui  forment  bientôt 
des  incruflaîions  maffives.  Ce  cuivre  de  cémentation 
donne  dès  la  première  fonte ,  un  métal  '  aufTl  pur  que 
celui  du  cuivre  primitif:  ainfi  l'on  peut  affurcr  que  de 
toutes  les  mines  de  cuivre  ,  celles  de  première  &  celles 
de  dernière  formation ,  font  les  plus  aifées  à  traiter 
&  aux  moindres  frais. 

Lorfqu'ii    fe    trouve   dans   le    courant  de  ces   eaux 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X.  115 

cuivreufês  des  matières  ferrugineufes  aimantées  ou  atti- 
rables  à  l'aimant,  &  qui  par  confcquent  font  dans  i'état 
métallique  ou  prefque  métallique,  il  fe  forme  à  la  furface  de 
ces  maffes  ferrugineufes  une  couche  plus  ou  moins  épaifïè 
de  cuivre;  cette  cémentation  faite  par  la  Nature,  donne 
un  produit  femblable  à  CNelui  de  la  cémentation  artilicielle; 
c'eft  du  cuivre  prefque  pur,  &  que  nos  Minéralogiftes 
ont  aufTi  appelé  cuivre  naiif  (u) ,  quoique  ce  nom  ne  doive 
s'appliquer  qu'au  cuivre  de  première  formation  produit 
par  le  feu  primitif  Au  refte,  comme  il  n'exifte  dans  le 
fein  de  la  terre  que  très-peu  de  fer  en  état  métallique, 
ce  cuivre,  produit  par  cette  cémentation  naturelle,  n'eft. 
auiïi  qu'en  petite  quantité,  &  ne  doit  pas  être  compté 
au  nombre  des  mines  de  ce  métal. 

Après  la  recherche  des  mines  primitives  de  cuivre 
&.  des  eaux  cuivreufês  qui  méritent  préférence,  par  la 
facilité  d'en  tirer  le  métal ,  on  doit  s'attacher  aux  mines 
de  troifième  formation,  dans  lefquelles  le  cuivre  décom- 
pofé  par  les  élémens  humides,  eft  plus  ou  moins  féparé 
des  parties  pyriteufes,  c'eft-à-dire,  du  foufre  &  du  fer 
dont  il  eft  furchargé  dans  tous  fcs  minerais  de  féconde 
formation.  Les  mines  de  cuivre  vitreufes  &  foyeufcs, 

(u)  Lorfque  ces  eaux  qui  tiennent  du  vitriol  bleu  en  diflolution, 
rencontrent  des  molécules  ferrugiiieufes  (  fans  doute  dans  iVtat  métal- 
lique ou  très- voifines  de  cet  état),  il  en  réfulte  une  efpèce  de 
cémentation  naturelle  qui  donne  naillance  à  du  cuivre  uat'if.  Lettres 
de  AI.  Demejle  au  Doéleur  Bernard,  tome  11,  page  ^6 S. 

Pij. 


ii6        Histoire   Naturelle 

celles  d'azur  &  de  malachite ,  celles  de  bleu  &  de  vert 
de  montagne ,  &:c.  font  toutes  de  cette  troifième  forma- 
lion  ;  elles  ont  perdu  la  forme  pyriteufe ,  &  en  même 
temps  une  partie  du  foufre  &  du  fer  qui  efl  la  bafe  de 
toute  pyrite;  la  Nature  a  fait  ici,  par  la  voie  humide  & 
à  l'aide  du  temps,  cette  féparatton  que  nous  ne  faifons 
que  par  le  moyen  du  feu  ;  &  comme  la  plupart  de  ces 
mines  de  troifième  formation  ne  contiennent  qu'en  petite 
quantité  des  parties  pyriteufes,  c'e(t-à-dire,  des  principes 
du  foufre,  elles  ne  demandent  auffi  qu'un  ou  deux  feux 
de  grillage ,  &  fe  réduifent  enfuite  en  métal  dès  la  pre- 
mière fonte. 

Enfin,  les  plus  rebelles  de  toutes  les  mines  de  cuivre^ 
îes  plus  difficiles  à  extraire,  les  plus  difJDendieufes  à  traiter, 
font  les  mines  de  féconde  formation,  dans  lefquelles  le 
minerai  efl  toujours  dans  un  état  plus  ou  moins  pyriteux; 
toutes  contiennent  une  certaine  quantité  de  fer ,  &  plus 
elles  en  contiennent  plus  elles  font  réfraétaires  (xj ;  & 
malheureufement  ces  mines  font  dans  notre  climat  les 
plus  communes,  les  plus  étendues  &.  fouvent  les  feules 


(x)  Nota.  Toutes  les  mines  de  cuivre  fulfureufes  ou  arfenicafes 
contiennent  toujours  plus  ou  moins  de  fer.  .  .  .  L'arfenic  ne  refte  Ci 
opiniâtrement  uni  au  cuivre  que  parce  qu'il  ell  joint  avec  lefer.  .  .  .  II 
faut  donc  ,  pour  avoir  du  bon  cuivre  „féparer,  autant  qu'il  eft  pofllble, 
toutes  les  parties  du  fer  qui  peuvent  s'y  trouver,  &  c'eft  par  Je 
jnoyen  du  fafFre  qu'on  peut  faire  cette  féparation.  Voyc^  Delins ,  cité 
dans  k  Journal  de  Phyfique ;  JuilUi  jySQfpages  ^s  à^  f^iV' 


DES  Minéraux.  117 

qui  fe  prcfentent  à  nos  recherches  :  il  faut,  comme  nous 
l'avons  dit ,  plufieurs  torréfactions  avant  de  les  jeter  au 
fourneau  de  fufion ,  &l  fouveni  encore  plufieurs  autres 
feux  pour  en  griller  les  mattes  avant  que  par  la  fonte 
elles  fe  réduifent  en  cuivre  noir,  qu'il  faut  encore  traiter 
au  feu  pour  achever  d'en  faire  du  cuivre  rouge.  Dans 
ces  travaux ,  il  fe  fait  une  immenfe  confommation  de 
matières  combuflibles  ;  les  foins  multiplies,  les  dépenfes 
exceffives  ont  fouvent  fait  abandonner  ces  mines  ;  ce 
n'efl  que  dans  les  endroits  où  les  combuflibles,  bois 
ou  charbon  de  terre  abondent,  ou  bien  dans  ceux  où 
le  mmérai  de  cuivre  efl  mêlé  d'or  ou  d'argent,  qu'on 
peut  exploiter  ces  mines  pyriteufes  avec  profit  ;  & 
comme*  l'on  cherche,  avecraifbn,  tous  les  moyens  qui 
peuvent  diminuer  la  dépen/è,  on  a  tenté  de  réunir  les 
pratiques  de  la  cémentation  ôl  de  la  lefTive  à  celle  de 
la  torréfadion  (jyj. 


(y)  Quand  on  veut  avoir  le  cuivre  des  mines  fans  les  fondre  ^  il 
faut  les  griller  &.  les  porter  toutes  rouges,  ou  au  moins  très-chaudes, 
dans  une  cuve  où  l'on  aura  mis  un  peu  d'eau  auparavant,  pour  em- 
pêcher qu'elles  ne  s'allument ,  ce  qui  arrive  quand  elles  lont  fulfu- 
reules.  .  .  .  Comme  la  mine  s'y  met  prefque  rouge,  l'eau  s'échauffe 
&  elle  détache  mieux  la  partie  cuivreufe  difloute  par  l'acide  du  loufre , 
ce  qu'elle  fait  en  moins  de  deux  jours  fi  la  mine  a  e'té  bien  grillée,  car 
celle  qui  ne  l'a  point  été  n'abandonne  pas  fon  cuivre.  Pour  avoir  encore 
ce  qui  peut  être  refté  de  cuivre  dans  la  mine ,  après  cette  première  opé- 
ration ,  on  la  grille  une  féconde  fois  &  même  on  lui  <Jonne  deux  feux, 
parce  qu'étant  humide  &  prefque  réduite  en  boue ,  un  premier  feu  la 


ii8         Histoire  Natu  re  l  le 

Nous  ne  donnerons  point  ici  le  détail  des  opérations 


grille  mal;  lorfqu'elle  eft  bien  grillce ,  on  la  remet  dans  la  cuve  fur 
la  première  ieffive  ;  quand  on  veut  l'avoir  j)lus  forte  ou  plus  chargée 
de  cuivj» ,   on  l'y  laifle  quarante-huit  heures. 

On  peut  emj)loyei  cette  leflive  à  deux  ufages  ;  i  '  en  l'évaporant 
en  faire  du  vitriol  bleu;  2."  à  en  précipiter  le  cuivre.  .  .  .  Quand  la 
leflive  s'efl:  chargée  de  cuivre,  on  la  letire  de  delTus  Ton  marc,  A 
on  la  fait  chauffer  dans  une  chaudière  de  plomb.  On  a  dans  une 
cuve  plufieurs  barres  de  fer  arrangées  verticalement ,  &  toutes  féparées 
les  un  s  des  autres.  ...  on  y  verle  enluite  la  lelîive  toute  chaude,  <5c 
on  couvre  !a  cuve  pour  en  conferver  la  chaleur,  car  plus  long-temj)S 
elle  refte  chaude,  plutôt  le  cuivre  s'y  précipite;  &  s'il  y  a  allez  de 
fer  ddus  la  cuve  ,  tout  le  cuivre  peut  s'y  précipiter  dès  la  première 
fois,  fans  quoi  il  faudroit  chauffer  de  nouveau  la  leflive;  car  quoique 
le  cuivre  fe  précipite  auffi  dans  la  lelîive  froide,  la  précipiiatioii  en 
ell  beaucoup  plus  lente    .  .  . 

Pour  connoître  fi  tout  le  cuivre  a  été  précipité,  on  trempe  dans 
la  leflive  une  lame  de  fer  polie  &  qui  ne  foit  point  graffe,  &  on  l'y 
tient  quelque  temps  ;  fi  cette  lame  fe  couvre  d'un  enduit  rouge,  c'ert: 
une  preuve  qu'il  y  a  encore  du  cuivre  dans  M  leflive;  fi  elle  n'y 
change  pas  de  cou  eur  tout  le   cuivre  efl  précipité. 

Lorfque  tout  le  cuivre  s'efl  précipité ,  on  fait  couler  la  leflive  dans 
des  baquets,  en  débouchant  les  trous  qui  font  à  diflfe'rentes  hauteurs 
le  long  d'un  des  côtés  de  la  cuve,  afin  de  ne  pas  déranger  les  barres 
de  fer;  il  faut  prendre  garde  aufll ,  lorfqu'on  a  débouché  les  trous 
d'en-bas  ,  que  l'eau  n'entraîne  avec  elle  le  limon  cuivreux.  Cette  leflive 
coulée  &  reçue  dans  les  baquets ,  peut  être  employée  à  faire  la  cou- 
peiofe  verte,  puifqu'elle  contient  du  fer  diffous. 

Tant  que  les  barres  de  fèr  ne  font  pas  entièrement  rongées  ,  elles 
peuvent  toujours  fervir  à  précipiter ,  &  il  n'eft  pas  nécefl"aire  de  les 
forùr  louvent  de  h  cuve  pour  les  nettoyer  :  ainfl  l'on  peut  verfer  de 


"^(^ 


D  E  s'  M  I  N  É  R  A  U  X,  119 

du  raffinage  de  ce  métal  (ij ,  ce  feroit  trop  s*éloigner 
de  notre  objet,  &  nous  nous  contenterons  feulement 
d'obferver    que    le    déchet    au    raffinage    efl    d'autant 


la  nouvelle  leflîve  chaude  jufqu'à  ce  qu'elles  foient  prefque  dc'truites; 
après  quoi  on  les  retire ,  on  les  racle  &  l'on  met  la  matière  cuivreufe 
qui  en  tombe  dans  de  l'eau  claire.  On  pourroit  mettre  d'abord  ces 
barres  de  fer  dans  la  chaudière  de  plomb  où  l'on  fait  bouillir  la  lefljve 
cuivreule ,   la  précipitation  fe  feroit  encore  plus  vite. 

La  matière  cuivreufe  qui  vient  de  cette  précipitation ,  contient 
beaucoup  de  fer  qu'on  peut  en  ièparer  en  partie  par  le  lavage;  mais 
comme  le  cuivre  elT:  réduit  en  un  limon  fort  fin,  il  faut  bien  prendre 
garde  que  l'eau  ne  l'emporte  avec  elle.  Lorfqu'on  a  rallèmblé  allez 
de  ce  limon  pour  en  faire  une  fonte  ,  on  le  grille  fi  l'on  veut,  quoique 
cela  ne  foit  pas  nc-ceflaire  ,  mais  comme  il  faut  le  sécher  exadement 
avant  de  le  fondre ,  on  le  met  fur  une  aire  couverte  de  charbon 
qu'on  allume  pour  qu'il  rougiflé  :  on  répète  cette  manœuvre  deux  fois, 
parce  qu'ainli  grillé  il  fe  fond  plus  ailément. 

Ce  cuivre  ainfi  précipité  ,  eft  la  même  chofe  que  le  cément  de 
Hongrie ,  &  on  le  fond  avec  addition  de  fcories  qui  ne  rendent 
point  de  mattes ,  «Se  mieux  encore  avec  des  fcories  de  refonte  de 
litharge  ;  alors  on  ne  retire  de  la  fonte  que  du  cuivre  noir  &  point" 
de  matte. 

Cette  manière  de  retirer  le  cuivre  de  fes  mines ,  fe  fait  avec  des 
frais  peu  confidérables  ,  mais  elle  n'en  fépare  jamais  tout  le  cuivre,  & 
le  minéral  qui  reftff ,  en  contient  encore  allez  pour  mériter  d'être 
fondu.  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter ,  traduit  par  He Ilot , 
tome   II ,  pages  ^  0  2  &  fuiv. 

(jj  Le  déchet  au  raffinage  du  cuivre  noir  de  Saint- Bel,  efl  de 
huit  à  neuf  pour  cent.  Mémoires  de  Ad.  Jars. —  Le  déchet  des  cuivres 
bruts  de  Barbarie  &  de  Mogador,  n'eft  que  de  cinq  ou  fjx  pour  cent. 
Aie  moire  s  de  AI.  Limare. 


120       Histoire     Naturelle 

moindre  (d) ,  que  la  quantité  qu'on  raffine  à  la  fois  eft 
plus  grande,  &:  cela  par  une  raifon  générale  &.  très- 
fimple,  c'eft  qu'un  grand  volume  offrant  à  proportion 
moins  de    furiace   qu'un  petit ,    l'adiion   deflrudlive  de 


(a)  Un  raffinage  de  cinquante  quintaux  de  cuivre  noir ,  rend 
ordinairement  quarante-cinq  à  quarante-fix  quintaux  de  cuivre  rofette, 
ce  qui  fait  un  dcchet  de  huit  où  neuf  pour  cent,  niais  ce  déchet  n'eft 
qu'apparent ,  puifque  par  des  eiïàis  réitérés ,  on  a  reconnu  que  Ton 
déchet  réel  n'étoit  que  de  quatre  &:  demi  pour  cent,  parce  qu'il  refle 
toujours  beaucoup  de  cuivre  dans  les  crafles  ;  on  fait  que  dans  quelques 
fourneaux  que  ce  foit ,  \qs  fcories  provenant  du  raffinage  ,  font  toujours 
riches  en  cuivre  :  il  efl  prouvé  que  le  cuivre  fait  environ  un  pour 
cent  moins  de  déchet  dans  le  fourneau  à  manche  que  fur  les  petits 
foyers ,  &.  on  peut  attribuer  cette  différence  à  ce  que  l'on  perfec- 
tionne dans  une  feule  opération  ,  une  quantité  de  cuivre  qui  en 
exige  au  moins  vingt  fur  le  petit  foyer;  on  fait  que  l'on  ne  peut 
raffiner  du  cuivre  fans  qu'il  n'y  en  ait  toujours  un  peu  qui  fe  fcorifie 
avec  les  matières  qui  lui  font  étrangères;  plus  le  volume  e(l  grand, 

plus  la  quantité  qui  fe    fcorifie   efl  petite  à  proportion Il  eft 

prouvé  que  la  dépenfe  du  grand  fourneau  efl  moindre  de  deux  tiers 
de  celle  qu'exige  en  charbon  le  raffinage  fur  les  j^etits  foyers.  ..  . 
Le  fourneau  de  Chefey  dans  le  Lyonnois ,  à  raffiner  le  cuivre,  a 
plus  de  chaleur  que  n'en  ont  ceux  d'Allemagne.  .  .  Celui  de  Gruen- 
thaï  en  Saxe,  conlomme  quatre  cents  trente-huit  pieds  cubes  de  bois 
de  corde,  &  environ  vingt-quatre  pieds  de  cl^^rbon  pour  raffiner 
quarante  quintaux  de  cuivre  noir  ;  à  Tayoba  en  Hongrie,  on  con- 
fomme  deux  cents  vingt  pieds  cubes  de  bois  de  corde  pour  raffiner 
cinquante  quintaux  de  cuivre  noir,  auxquels  on  ajoute  trois  ou  quatre 
quintaux  de  plomb  qui  fe  fcorifie  en  pure  perte  :  on  fait  encore  que 
dix  livres  de  plomb  fcorifient  environ  une  livre  de  cuivre.  M.  Jars, 
Miin.  de  l'Académie  des  Sciences,  année  1 76 ^  >  pages  6  02  &  6 o^- 

l'air 


D  E  s   M  I  N  É  R  A  U  X.  121 

l*air  &.  du  feu  qui  porte  immédiatement  flir  îa  furfacc 
du  métal,  emporte,  calcine  ou  brûle  moins  de  parties 
de  la  mafTe  en  grand  qu'en  petit  volume:  au  rede,  nous 
n'avons  point  encore  en  France  d'afTez  grands  fourneaux 
de  fonderies  pour  raffiner  le  cuivre  avec  profit  ;  les 
Anglois  ont  non-feulement  établi  plufieurs  de  ces  four- 
neaux fb),  mais  ils  ont  en  même  temps  conflruit  des 
machines  pour  laminer  le  cuivre  afin  d'en  revêtir  leurs 
navires.  Au  moyen  de  ces  grands  fourneaux  de  raffinage, 
ils  tirent  bon  parti  des  cuivres  bruts  qu'ils  achettent  au 
Chily,  au  Mexique,  en  Barbarie  &  à  Mogador;  ils  en 
font  un  commerce  très  -  avantageux ,  car  c'efl  d'An- 
gleterre que  nous  tirons  nous-mêmes  la  plus  grande 
partie  des  cuivres  dont  on  fe  fert  en  France  6l  dans 
nos  Colonies  ;  nous  éviterons  donc  cette  perte ,  nous 
gagnerons  même  beaucoup  fi  l'on  continue  de  protéger 

(b)  On  raffine  aujourd'hui  le  cuivre  dans  de  grands  fourneaux  de 
réverbère,  à  l'aide  du  vent  d'un  foufliet  qu'une  roue  hydraulique  fait 
mouvoir;  on  n'y  emploie  (jue  du  charbon  de  terre  naturel.  Chaque 
raffinage  eft  de  quatre  vingts  quintaux,  &  dure  quinze  à  feize  heures. 
On  fait  ordinairement  trois  raffinages  de  fuite  dans  le  même  ïourne2iu  , 
par  feniaine;  on  le  laiffe  refroid  r  ,  &  on  le  réjiare  pour  la  feinaine 
fuivante.  Quand  les  opérations  font  confidcrables ,  il  f.ut  avoir  trois 
de  ces  fourneaux ,  dont  un  eft  toujours  en  réparation  lorfque  les  autres 
font  en  feu.  En  fe  bornant  à  mille  quintaux  de  fabrication  par  mois, 
il  fuffit  d'un  de  ces  fourneaux  à  réverbère.  A4é  moire  fur  r  établi  Ifement 
d'une  fonderie  ù"  d'un  laminoir  de  cuivre ,  communiqué  à  Ai.  de^  Buffon , 
par  Af.  de  Limare. 

Minéraux ,  Tome  ÎIL  Q 


122        Histoire  N atu relle 

J'étabJj/Tement  que  M.  Je  Limare  fcj,  l'un  de  nos 
plus  habiles  Mctallurgiiles  vient  d'entreprendre  fous  les 
auf]3ices  du  Gouvernement. 

^  ■     ■       ■■         ■"         — — — — — ■ — — • - — — -■■   —  ■'   "  * 

fc)  Les  ordres  du  Aiini/îre  pour  doubler  /es  Vai/Tcaux  en  cuivre, 
dit  M.  de  Limare ,  font  prendre  le  parti  d'établir  des  fourneaux 
de  fonderie  &  des  laminoirs  à  Nantes  ,  où  l'on  feroit  amener  de 
Cadix  les  cuivres  bruts  du  Chili  &  de  toute  rAméj"ique  ,  ainfi  que 
ceux  de  JMogador  &  de  la  Barbarie;  on  pourroit  même  tirer  ceu:^ 
du  Levant  qui  viennent  à  Marfeille  ;  car  Nantes  efl  le  port  du  royaume 
qui- expédie  &  qui  reçoit  le  plus  de  Navires  de  Cadix,  de  la  Ruflle 
&  de  l'Amérique  feptentrionale  ;  il  e(l  aufîi  le  plus  à  portée  des  mines 
de  charbon  de  terre  &  des  débouchés  d'Orléans  &.  de  Paris,  ainfi 
que  des  arl'enaux  de  Rochefort,    de  l'Orient  &.  de  Breft. 

La  confommation  du  cuivre  ne  peut  qu'accroître  avec  le  temps , 
par  la  quantité  de  nitricres  qu'on  établit  dans  le  royaume ,  par  le 
doublage  des  Navires  que  l'on  commence  à  faire  en  cuivre ,  &c.  par 
ies  expéditions  que  l'on  pourra  faire  pour  l'Inde,  de  planches  de 
cuivre  coulé  ;  par  la  fourniture  des  arfenaux  d'Elpagne  pour  le 
doublement  de  leurs  Vailîèaux ,  en  payement  de  laquelle  on  pren- 
droit  des  cuivres  bruts  du  Mexique,  dont  le  Roi  d'Efpagne  s'efl 
réfervé  la  polTeflion,  &  qui  ne  perdent  que  fix  à  fept  pour  cent 
dans  l'opération  du  raffinage  .... 

l^es  cuivres  bruts  de  Barbarie  ne  coûteront  pas  davantage ,  foit 
qu'on  les  tire  diredeiiient  de  Mogador  &  de  Larrache ,  par  les 
Navires  hoUandois,  foit  que  l'on  prenne  la  voie  de  Cadix  par  les 
Vaifleaux  même  de  Nantes,  qui  font  fouvent  le  cabotage,  en  attendant 
leur  chargement  en  retour  pour  France,  D'ailleurs  ces,  cuivres  de  Barbarie 
ne  donnent  que  cinq  à  fix  pour  cent  de  déchet  au  raffinage. 

On  pourra  auffi  fe  procurer  des  cuivres  bruts  de  la  Ruflle,  de 
la  Hongrie,  &  fur-tout  de  l'Amérique  feptentrionale,  qui  a  fourni 
jufqu  à  fte  jour  la  majeure  partie  des  raffineries  Ang\o\(es.  Alémoïrc 
(ommuniqué  par  AI.  de  Limare  à  M.  de  Bufon,  en  T^ovmbre  lySo, 


DES  Minéraux.  123 

DE    LÉ  T  A  I  N. 

v>E  métal,  le  plus  léger  de  tous  fi^J,  n'efl  pas  à 
beaucoup  près  aulTi  répandu  que  les  cinq  autres  ;  il 
paroît  affe(5ter  des  lieux  particuliers,  &l  dans  lefquels  il 
fè  trouve  en  grande  quantité  ;  il  ell  au/Ti  très-rarement 
mêlé  avec  l'argent,  &  ne  fè  trouve  point  avec  l'or; 
nulle  part  il  ne  fe  préfcnte  fous  fà  forme  métallique  (1>J , 
&.  quoiqu'il  y  ait  d'alTez  grandes  variétés  dans  Tes  mines, 
elles  font  toutes  plus  ou  moins  mêlées  d'arfenic.  On 
en  connoît  deux   fortes  principales  ;   la  mine  en  pierre 

(a)  Le  pied  cube  d'étaia  pur  de  Cornouailles  fondu  &  non  battu  , 
pèle,  fuivant  M.  BrifTon,  jio  livres  6  onces  2  gros  68  grains,  & 
lorlque  ce  même  e'tain  ell  battu  ou  ccroui ,  fe  pied  cube  pèle  5  i  o 
livres  i  5  onces  2  gros  45  grains;  ce  qui  démontre  que  ce  métai 
n'eft  que  peu  Tufceptibie  de  comjuelîlon.  L'ctain  de  Melac  ou  de 
Alalaca,  fondu  &  non  battu,  pèle  le  pied  cube  510  livres  1  i  onces 

6  gros  6 1   grains  ;  &  lorfqu'il  eft  battu  ou  écroui ,  il  pcfe  5  i  i  livres 

7  onces  2  gros  1 7  grains  ;  ainfi  cet  ctain  de  Maiaca  peut  fe  com- 
primer un  peu  plus  que  i'étain  de  Cornouailles.  La  pefanteur  fpé- 
cifique  de  I'étain  fin  &.  de  I'étain  commun,  eft  beaucoup  plus  grande, 
jiarce  que  ces  étains  font  plus  ou  moins  aliits  de  cuivre  &  de  plomb. 

(h)  Quelques  auteurs  ont  écrit  qu'on  avoit  trouvé  des  morceaux 
d'étain  natif  dans  les  mines  d'étain  de  Bohème  &  de  Saxe ,  mais 
cela  ell  très-douteux  ;  &  I'étain  que  l'on  voit  dans  les  Cabinets  , 
fous  le  nom  d\'tûin  natif,  qui  a  une  figure  de  ftaladite  non  cylin- 
drique,  mais  ondulée  ou  bouillonnée  &  argentine,  &  qu'on  prétend 
qui  fe  trouve  dans  la  prefqu'île  de  Maiaca,  nous  paroît  formé  par 
le  fea  des  volcans.  Bomare;  Alinéralog'te ,  tome  JJ ,  article  de  /'Etain. 


X2j^  Histoire   Naturelle 

vitrcufc  ou  roche  quartzcufe  ,  clans  laquelle  l'crain  cfl 
difTéminc,  comme  le  fer  l'cfl  clans  Tes  mines  primordiales; 
&  la  mine  crifialliféc  qui  eft  ordinairement  plus  riche 
que  la  première. 

Les  criflaux  de  ces  mines  d'c-tain  font  très-apparcns, 
très-diftinds ,  <Sc  ont  quelquefois   plus    d'un  pouce    de 
longueur.    Dans    chaque   minière,    &  fouvent    dans    la 
même ,  ils    font   de  couleurs   diilfcrentcs  ;    il  y  en  a  de 
noirs ,  de  hlancs ,  de  jaunes ,  &  de  rouges  comme    le 
grenat  ;  les  criflaux  noirs  font  les  plus  communs  &.  les 
plus  riches  en   métal  :    il  paroît  que  le   foie  de  foufre, 
qui  noircit  la  furface   de  l'étain,  a  eu  part  à  la  mlné- 
ralifation  de  ces  mines  en  criflaux  noirs  ;  quelques-unes 
de  ces  mines  donnent  foixante  -  iïw ,  &  ju/qu'à  quatre- 
vingts  livres  d'étain  par  quintal  (c) .  Les  criflaux  blancs 
pèfènt  plus    qu'aucun  des   autres,    &  cependant   ils   ne 
rendent  que    trente  ou    quarante   livres    de   métal    par 
cent;  dans   les  mines  de   Saxe,    les  criflaux  rouges  & 
les  jaunes  font    plus  rares  que  les  noirs  &   les  bJancs; 
toutes   ces    mines   en   criflaux  fè  réduifènt  aifément  en 
étain ,    par    la    hmple   addition    de    quelques    matières 
inflammables ,  ce  qui  démontre  que  ce  ne  font  que  des 
chaux,  c'efl-à-dire  du  métal  calciné,  &  qui  s'efl  tnÇmit 
criflallifé  par  l'intermède  de  i'eau. 

Dans  la  féconde  forte  de  mines  d'étain,  c'efl-à-d;»re. 


(c)   Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Sclilutier,  terne  I,page.2i  j. 


DES    Minéraux.  125 

dans  celles  qui  font  en  pierre  ou  roche,  le  meta!,  ou 
plutôt  la  chaux  de  l'étain,  eft  li  intimement  incorporée 
avec  la  pierre,  que  ces  mines  font  très  -  dures  &  très- 
difficiles  à  fondre.  La  plupart  des  mines  de  Cornouailles 
en  Angleterre,  celles  de  Bohème  &  quelques-unes  de 
ia  Saxe ,  font  de  cette  nature  ;  elles  fe  trouvent  quelque- 
fois mêlées  de  mines  en  crillaux  ;  mais  d'ordinaire  ces 
mines  en  pierre  font  feules  &  fe  trouvent  en  liions ,  en 
couches,  en  rognons ,  en  grenailles;  fbuvent  le  roc  qui 
les  renferme  eft  fi  dur  qu'on  ne  peut  le  faire  éclater 
qu'en  le  petardant  avec  la  poudre,  &  qu'on  eft  quel- 
quefois  ohligc  de  le  calciner  auparavant  pour  l'attendrir, 
en  faifant  un  grand  feu  pendant  plufieurs  jours  dans 
l'excavation  de  la  mine  ;  enfuite  loriqu'on  en  a  tiré  les 
blocs,  on  eft  obligé  de  les  faire  griller  avant  de  les  broyer, 
fous  le  bocard  où  la  mine  fe  lave  en  même  temps  qu'elle 
fe  réduit  en  poudre  ;  &  il  faut  encore  faire  griller  cette 
poudre  métallique  avant  qu'on  ne  puifte  la  réduire  en 
métal. 

Si  la  mine  d'ctain  ,  ce  qui  eft  aftez  rare ,  fe  trouve 
mêlée  d'argent,  on  ne  peut  féparer  ces  deux  métaux 
qu'en  faifant  vitrifier  l'étain  (éJ) ;    fi   elle  eft   mêlée  de 

(d)  De  tous  les  moyens  que  l'on  indique  pour  féparer  l'argent 
de  l'ttain ,  le  meilleur  &  le  plus  fimple  ell  d'employer  le  ter.  M. 
Grofle  a  trouvé  ce  moyen  en  eflayant  une  (oiie  de  plomb,  pour  voir 
s'il  pouvoit  être  employé  aux  Coupelles;  car  un  s'étoit  aperçu  qu'il 
étoit  allié  d'étain.  Il  jeta  defîus  de  la  limaille  de  fer  &  donna  un  bon 


120  Histoire  Naturelle 

minerai  de  cuivre,  la  miiic  cl'étain,  plus  pc/ànte  que 
celle  de  cuivre,  s'en  fépare  par  le  lavage;  mais  lorA 
qu'elle  cfl  mêlée  avec  la  mine  de  fer,  on  n'a  pas  trouve 
d'autre  moyen  de  fcparer  ces  deux  métaux  qu'en  les 
broyant  à  fec ,  &  en  tirant  enfuite  le  fer  au  moyen 
de  l'aimant. 

Après  que  le  minerai  d'étain  a  été  grillé  &  lavé , 
on  le  porte  au  fourneau  de  iiifion  qu'on  a  eu  foin  de 
bien  chauffer  auparavant;  on  le  remplit  en  parties  égales 
de  charbon  &  de  mine  bumeélée  ;  on  donne  le  feu 
pendant  dix  ou  douze  heures,  après  quoi  l'on  perce  le 

feu.  .  .  .  En  peu  de  temps  le  plair.b  Ce  couvrit  d'une  nappe  formce 
par  l'étain  &.  le  fer  ;  alors  il  efl  boa  d'ajouter  un  peu  de  fel  aikali 
fixe  pour  faciliter  la  fe'paration  de  ces  fcories  d'avec  le  rtgule.  Cette 
pratique  peut  être  ejnployée  à  féparer  l'étain  de  l'argent;  mais  avant 
d'y  ajouter  le  fer,  il  faut  y  mettre  le  plomb,  fans  quoi  la  fonte  fe 
feroit  difficilement  &  même  imparfaitement,  parce  que  l'étain  fe 
calcineroit  fans  fe  féparer  de  l'argent.  II  n'y  a  point  de  meilleur  moyen 
de  remédier  aux  coupelles  dont  le  plomb  fe  héri/îè  ou  végette  à 
J'occafion  de  l'étain. 

Mais  fi  on  avoit  de  l'or  &  de  l'argent  allies  d'étain  ,  il  fau droit 
calciner  vivement  ces  métaux  dans  un  creufet  afin  de  vitrifier  l'étain, 
&  enfuite  pour  enlever  ce  verre  d'étain,  ou  même  pour  perfedionner 
fa  vitrification  ,  il  Tuffiroit  de  jeter  dans  le  creufet  un  peu  de  verre 
de  plomb.  Af.  Grojfe ,  cité  par  M.  Hellot  dans  le  Traité  de  la  fonte 
des  mines  de  Schlutter ,  tome  I ,  page  226.  Nota.  Ce  procédé  pour 
la  calcination  de  l'étain  ne  peut  fe  faire  dans  un  creufet  que  très- 
lentement  &  par  une  manœuvre  pénible ,  au  lieu  que  cette  opération 
fe  fait  facilement,  prompteinent  &  compUtemem  fur  un  teft  à  rôtir. 
Note  communiquée  par  M.  de  Morveau. 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X,  ]  27 

creufet  du  fourneau  pour  laifTer  couler  l'ctain  qu'on 
reçoit  clans  des  lingotières;  on  recueille  aufTi  les  fcories 
pour  les  refondre  &  en  retirer  le  métal  qu'elles  ont 
retenu,  &  qu'on  ne  peut  obtenir  en  entier  que  par 
plufieurs  fudons.  En  Saxe,  l'on  fond  ordinairement 
dix -huit  ou  vingt  quintaux  de  mines  en  vingt -quatre 
heures,  mais  il  efl  très-néceilaire  de  faire  h'icn  griller 
&  calciner  le  minerai  avant  de  le  porter  au  fourneau 
de  fufion ,  afui  d'en  faire  fubiimer ,  autant  qu'il  efl 
pofTible  ,  l'arfenic  qui  s'y  trouve  fi  intimement  mêlé 
qu'on  n'a  pu  trouver  encore  les  moyens  de  l'enlever 
en  entier  &  de  le  féparer  parfaitement  de  i'étain  ; 
&  comme  les  mines  de  ce  métal  font  toutes  plus  ou 
moins  ar/ènicales ,  il  faut  non-fèulement  les  griller,  les 
broyer  &  les  laver  une  première  fois  ;  mais  réitérer 
ces  mêmes  opérations,  deux,  trois  &  quatre  fois,  félon 
que  le  minerai  efl  plus  ou  moins  chargé  d'arfenic,  qui 
dans  l'état  de  nature,  paroît  faire  partie  conflituante  de 
ces  mines  ;  ainfi  I'étain  <&  l'arfenic ,  dès  les  premiers 
temps  de  la  formation  des  mines  par  l'aclion  du  feu 
primitif,  ont  été  incorporés  enfcmble  ;  &  comme  il  ne 
faut  qu'un  très  -  médiocre  degré  de  chaleur  pour  tenir 
J'étain  en  fudon,  il  aura  été  entièrement  calciné  par  la 
violente  chaleur  du  feu  primitif,  &  c'eft  par  cette  raifon 
qu'on  ne  le  trotive  nulle  part  dans  le  fein  de  la  terre 
fous  fà  forme  métallique  ;  &  comme  il  a  plus  d'affinité 
avec  l'arfenic  qu'avec  toute  autre  matière,  leurs  parties 


128  Histoire  Naturelle 

calcinées  &  leurs  vapeurs  fublimces ,  fe  feront  mutuelle- 
ment faifics,  &  ont  forme  les  mines  primordiales  dans 
lefquclies  l'ctain  n'efl  mêlé  qu'avec  Tar/ènic  fèul  ;  celles 
qui  contiennent  des  parties  pyriteufes  font  de  féconde 
formation,  &  ne  fë  (ont  établies  qu'après  les  premières; 
elles  doivent ,  comme  toutes  les  mines  pyriteufes  ,  leur 
formation  &  leur  polition  à  l'action  &  au  mouvement  des 
eaux  :  les  premières  mines  d'ctain  fè  trouvent  par  celte 
raifon  en  filons  dans  les  montagnes  quartzeufes  produites 
par  le  feu ,  &  les  fécondes  dans  les  montagnes  à  couches 
formées  par  le  dépôt  des  eaux. 

Lorfque  l'on  jette  la  mine  d'étain  au  fourneau  de 
fufion,  il  faut  tâcher  de  la  faire  fondre  le  plus  vite 
qu'il  efl  poffible  ,  pour  empêclier  la  calcination  du 
métal  fej  qu'on  doit  auffi  avoir  foin  de  couvrir  de  poudre 

(e)  Les  Anglois  font  rôtir  trois  fois  la  mine  d't'tain  ,  &  la  lavent 
jufcju'à  ce  qu'il  n'y  paroiffe  plus  rien  de  terreux  ;  enfuite  ils  la  chauffent 
une  quatrième  fois  jufqu'à  la  faire  bien  rougir.  Ils  la  pèfent  pour  favoir 
ce  qu'elle  a  perdu  au  lavage  îk  à  la  calcination  :  à  une  partie  de  cette 
mine,  ainfi  préparée  ,  ils  joignent  trois  parties  dejlux  noir;  ils  mettent 
ce  mélange  dans  un  creufet  &  le  couvrent  de  fel  commun.  Ils  fondent 
à  un  feu  vif  &  prompt ,  &  n'y  lailTent  le  creufet  que  le  temps  nécef- 
faire  pour  faire  fondre  i'étain;  tant  parce  qu'il  fe  brûle  aifément,  que 
parce  que  les  feis  en  fufion  le  rongent  &  en  dérobent. 

Quelquefois  ils  fubflituent  au  flux  noir  la  même  quantité  de  charbon 
de  terre  en  poudre  ;  ils  le  mêlent  &  conduifent  la  fonte  comme  par 
le  flux  noir.  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter ,  traduit  par  M^ 
JJeliot ,  tome  J ,  page  221. 

de 


DES    Minéraux.^         129 

de  charbon  au  moment  qu'il  eft  réduit  en  fonte  ;  car 
à  peine  eft-ii  en  fufion  que  la  furface  fè  change  en  chaux 
grife,  qui  devient  blanche  en  continuant  le  feu.  Cette 
chaux,  dans  le  premier  état,  s'appelle  cendre  d'éui'm,  & 
dans  le  fécond  on  la  nomme  potée.  Lorfque  cette  der- 
nière chaux  ou  potée  d'étain  a  été  bien  calcinée ,  elle 
efl  aufii  réfraélaire  au  feu  que  les  os  calcinés  ;  on  ne 
peut  la  fondre  feule  qu'à  un  feu  long  &  très  -  violent* 
elle  s'y  convertit  en  un  verre  laiteux  femblable  par  la 
couleur  à  la  calcédoine,  &  lorfqu'on  la  mêle  avec  du 
verre ,  elle  entre  à  la  vérité ,  dans  l'émail  qui  réfulte  de 
cette  fufion,  mais  fans  être  vitrifiée  (f);  c'eft  avec  cette 
potée  d'étain ,  mêlée  de  matières  vitrifiables,  que  l'on 
fait  l'émail  le  plus  blanc  de  nos  belles  faïences. 

Lorfque  les  mines  d'étain  contiennent  beaucoup 
d'arfenic ,  &  qu'on  ell  obligé  de  les  griller  &  calciner 
à  plufieurs  reprifes ,  on  recueille  l'arfenic  en  faifant 
palTer  la  fumée  de  cette  mine  en  calcination ,  par 
des   cheminées   fort    inclinées.    Les    parties   arfenicales 


(f)  Si  on  mêle  la  potée  d'étain  ,  au  moyen  de  la  fufion ,  avec 
du  verre  blanc  tranfparent,  bien-tôt  il  devient  opaque,  &  paiïe  à  l'état 
d'émail  par  l'interpofition  des  molécules  de  cette  chaux  invitrifiable, 
même  par  l'intermède  du  verre  de  plomb;  aulîi  empêche -t- elle  la 
coupellation  en  nageant  à  la  furface  du  plomb  fondu  ;  &  lorfqu'on 
veut  coupeller  quelque  matière  métallique  qui  contient  de  i'étain, 
il  faut  par  une  calcination  préliminaire  en  extraire  ce  dernier  métal. 
Lettre  de  M.  Demejfe  a  M.  Bernard,   tome  II ,  page  40 S, 

AïuiérauXj  Tome  IIL  R 


130        Histoire    Natu relle 

s'attachent  aux    parois  de   ces    cheminées,  dont    il    efl 
enfuite  aifé  de  les   détacher  en   les  raclant. 

On  peut  imiter  artificiellement  ces  mines  d'étain  fg), 
en  mêlant  avec  ce  métal  de  l'arienic  calciné,  &  même 
.ce  minerai  ne  manque  jamais  d'opérer  la  calcination  de 
j'étain,  &  de  fe  mêler  intimement  avec  fà  chaux  lorf- 
qu'on  le  traite  au  feu  avec  ce  métal  (h) ,  ce  qui  nous 
prouve  que  c'eft  de  cette  manière  que  la  Nature  a 
produit  ces  mines  d'étain ,  &  que  c'eft  à  la  calcination 
de  ces  deux  fubftances ,  par  le  feu  primitif,  qu'eft  due 
leur  origine  ;  les  parties  métalliques  de  l'étain  fe  feront 
réunies  avec  l'arfenic,  6l  de  la  décompofition  de  ces 
mines  par  les  élémens  humides,  ont  rélulté  les  mines  de 
féconde  formation  ,  qui  toutes  font  mêlées  de  pyrites 
décompofées  &  d'arfénic;  ainfi ,  dans  toutes  ces  mines, 
l'étain  n'eft  ni  dans  fon  état  de  métal ,  ni  même  miné- 
ralifc  par  les  principes  du  foufre  ;  il  eft  toujours  dans 
fon  état  primitif  de  chaux  ,  &  il  eft  fimplement  uni  avec 

(g)  M.  Monnet  fait  entrer  du  fer  en  quantité  dans  la  conipofition 
de  la  mine  artificielle  d'étain.  On  pourroit  donc  croire,  avec  quelque 
fondement,  qu'il  en  efl:  de  l'étain  comme  du  cuivre,  &  que  l'arfenic 
ne  leur  adhère  fi  fortement  que  par  le  fer  que  les  mines  de  ces  deux 
métaux  contiennent. 

(h)  Une  demi -once  de  rognures  de  feuilles  d'étain,  acquit  par 
cette  calcination,  dans  une  cucurbite  de  verre,  vingt -fix  grains 
d'augmentation  de  poids,  quoique  la  chaleur  eût  été  afiez  modérée, 
pour  que  l'arienic  fe  fublimât  iàns  faire  entrer  le  métal  en  tufiont 
Elémens  de  Chimie ,  jjar  Al,  de  Aloryeau ,  tome  II ,  page  Jjo, 


DES  Minéraux,  131 

l'arfenic.  Dans  les  mines  de  féconde  formation,  la  chaux 
d'ctain  efl;  non-fculcment  mclée  d'ar/enic ,  mais  encore 
de  fer  &  de  quelques  autres  matières  métalliques,  telles 
que  le  cuivre,    le  zinc  &  le  cobalt. 

La  Nature  n'ayant  produit  Téiain  qu'en  chaux  ,  <Sc 
point  du  tout  fous  fà  forme  métallique,  c'efl  unique- 
ment à  nos  recherches  &  à  notre  art  que  nous  devons 
la  connoiflance  &  la  jouiffance  de  ce  métal  utile  ;  il  eft 
d'un  très-beau  blanc,  quoique  moins  brillant  que  l'argent; 
il  a  peu  de  dureté,  il  eft  même,  après  le  plomb,  le 
plus  mou  des  métaux  ;  on  efl  obligé  de  mêler  un  peu 
de  cuivre  avec  l'étain ,  pour  lui  donner  la  fermeté 
qu'exigent  les  ouvrages  qu'on  en  veut  faire  ;  par  ce 
mélange ,  il  devient  d'autant  plus  dur  qu'on  augmente 
davantage  la  proportion  du  cuivre  ;  &  lorfqu'on  mêle 
avec  ce  dernier  métal  une  certaine  quantité  d'étain, 
i'alliage  qui  en  réfulte ,  auquel  on  donne  le  nom  (ïû'irci'm 
ou  de  bronze,  efl  beaucoup  plus  dur,  plus  élaflique  & 
plus    fonore  que   le  cuivre  même. 

Quoique  tendre  &  mou  lorfqu'il  efl:  pur,  l'étain  ne 
laiffe  pas  de  confèrver  un  peu  d'aigreur,  car  il  efl 
moins  duélile  que  les  métaux  plus  durs,  &  il  fait  entendre 
lorfqu'on  le  plie,  un  petit  cri  ou  craquement  qui  n'eft 
produit  que  par  le  frottement  entre  fes  parties  confli- 
tuantes,  &.  qui  fèmble  annoncer  leur  défunion;  cependant 
on  a  quelque  peine  à  le  rompre ,  &.  on  peut  le  réduire 
en  feuilles    affez    minces ,    quoique   la    ténacité  ou  la 

R  ij 


132        Histoire  Naturelle 

cohérence  de  fcs  parues  ne  foit  pas  grande  ;  car  un  fil 
d'ctain  d'un  dixième  de  pouce  de  diamètre,  fe  rompt  fous 
moins  de  cinquante  livres  de  poids;  fà  denfité,  quoique 
moindre  que  celle  des  cinq  autres  métaux,  efl  cependant 
proportionnellement  plus  grande  que  /à  ténacité  ;  car 
un  pied  cube  d'étain  pèfe  ^10  ou  ^  i  i  livres.  Au  refte 
Ja  pefanteur  fpécifique  de  l'étain  qui  efl  dans  le  com- 
merce ,  varie  fuivant  les  différens  endroits  où  on  le 
fabrique  ;  celui  qui  nous  vient  d'Angleterre  efl  plus 
pefant   que   celui  d'Allemagne   &  de  Suède. 

L'étain  rend  par  le  frottement  une  odeur  dé/à- 
gréable;  mis  fur  la  langue  fà  faveur  efl  déplaifànte:  ces 
deux  qualités  peuvent  provenir  de  i'arfènic  dont  il  efl 
très-rare  qu'il  foit  entièrement  purgé  ;  l'on  s'en  aperçoit 
bien  par  la  vapeur  que  ce  métal  répand  en  entrant  en 
fufion;  c'efl  une  odeur  à  peu  -  près  femblable  à  celle 
de  l'ail,  qui,  comme  l'on  fait,  caradérife  l'odeur  des 
vapeurs   arfenicales. 

L'étain  réfjfle  plus  que  les  autres  métaux  imparfaits 
à  l'aélion  des  élémens  humides  ;  il  ne  fe  convertit  point 
en  rouille  comme  le  fer,  le  cuivre  <Sl  le  plomb,  & 
quoique  fa  fùrface  fe  teruiffe  à  l'air,  l'intérieur  demeure 
intad,  &  fa  fuperiicie  fe  ternit  d'autant  moins  qu'il  efl 
plus  épuré;  mais  il  n'y  a  point  d'étain  pur  dans  le 
commerce,  celui  qui  nous  vient  d'Angleterre  efl  tou- 
jours méic  d'un  peu  de  cuivre  ,  &  celui  que  l'on 
appelle  éiain  fit  ne  laiffe  pas  d'ctre  mclé  de   plomb. 


D  E  s   M  1  N  È  R  A  V  X.  13^ 

Quoique  l'étain  foit  le  plus  léger  des  métaux  ,  fa 
mine,  clans  laquelle  il  efl  toujours  en  état  de  chaux, 
eft  fpéciiiquement  plus  pefante  qu'aucune  de  celles  des 
autres  métaux  minéraiifcs ,  &.  il  paroît  que  cette  grande 
pefanteur  provient  de  fon  intimité  d'union  avec  l'arfenic; 
car  en  traitant  ces  mines,  on  a  obfervé  que  les  plus 
pefantes  font  celles  qui  contiennent  en  efiet  une  plus 
grande  quantité  de  ce  minéral.  Les  minerais  d'étain, 
foit  en  pierre,  foit  en  criflaux,  foit  en  poudre  ou  fablon, 
font  donc  toujours  mêlés  d'arfènic  ,  mais  fou  vent  ils 
contiennent  aujiïi  du  fer;  ils  font  de  différentes  cou- 
leurs, les  plus  communs  font  les  noirs  <Sc  les  blancs; 
mais  lorfqu'on  les  broie ,  leurs  couleurs  s'exaltent  &  ils 
deviennent  plus  ou  moins  rouges  par  cette  comminu- 
tion.  Au  refle,  les  fables  ou  poudres  métalliques  qu'on 
trouve  fouvent  dans  les  mines  d'étain  n'en  font  que  des 
détrimens,  &  quelquefois  ces  détrimens  font  fi  fort 
altérés  qu'ils  ont  perdu  toute  confiflance,  &.  prefque 
toutes  les  propriétés  métalliques.  Les  Mineurs  ont 
appelé  immdick,  cette  pou/fjère  qu'ils  rejettent  comme 
trop  appauvrie ,  &  dont  en  effet  on  ne  peut  tirer ,  avec 
beaucoup  de  travail,  qu'ime  très-petite  quantité  d'étain, 
îa  fubflance  de  ce  mundick  n'eft  pour  la  plus  grande 
partie  que  de  l'arfenic  décompofé  (i) . 

(i)  On  diftingue  aifément  le  mundick  des  autres  mines  par  fa 
couleur  brillante,  jnais  cependant  brune  &  iale,  &  dont  elle  teijit 
les  doigts ....  Les  mineurs  afîurent  qu'ils  ne  trouvent  que  peu  ou 


1^4        Histoire  Naturelle 

Comme  l'ctain  ne  fe  trouve  qu'en  quelques  contrées 
particulières,  &  que  fes  mines  en  général,  font  aiïcz 
difficiles  à  extraire  &  à  traiter,  on  peut  croire  avec 
fondement ,  que  ce  métal  n'a  été  connu  &  employé 
que  long-temps  après  l'or,  l'argent  &  le  cuivre,  qui  fe 
font  préfentés  dès  les  premiers  temps  fous  leur  forme 
métallique;  on  peut  dire  la  même  chofe  du  plomb  & 
du  fer  ;  ces  métaux  n'ont  vraifemblablement  été  em- 
ployés que  les  derniers  ;  néanmoins  la  connoiffance  & 
l'ufage  des  fix  métaux,  date  de  plus  de  trois  mille  cinq 
cents  ans  ;  ils  font  tous  nommés  dans  les  Livres  facrés  ; 
les  armes  d'Achilles ,  faites  par  Vulcain,  étoient  de 
cuivre    allié  d'étain  (k) ;    les   Hébreux    &.    les    anciens 

point  d'étain  dans  les  endroits  où  ils  rencontrent  du  mundick .... 
Et  il  efl:  fur  que  fi  on  laifle  du  mundick  parmi  l'étain  qu'on  veut 
fondre,  il  le  rend  épais  &  moins  ducTiile.  .  .  .  Les  mineurs  regardent 
cette  fubftance,  mundick,  comme  un  poifon ,  &  croient  que  c'eft 
une  efpèce  d'arfenic.  ...  II  en  fort  en  effet  une  puanteur  très-dan- 
gereufe  lorfqu'on  le  brûle  pour  le  féparer  de  l'étain.  Aferret ,  Collec- 
tion académique ,  partie  éirangcre ,   tome  II ,  pages  ^8  o  &  fuïv 

On  diftingue  aiféinent  ce  mundick  du  minerai  d'étain,  car  le  mundick 
s'attache  aux  doigts  &  les  falit  ;  cette  matière,  fi  elle  refte  avec  l'étain, 
le  gâte ,  lui  ôte  fun  éclat  &  le  rend  cafTant.  Le  feu  diflipe  le  mundick 
&  l'odeur  en  eft  pernicieufe,  M.  Hellot  ayant  examiné  cette  matière, 
l'a  trouvée  prefque  en  tout  femblable  à  une  mine  bitumineufe  d'arfenic, 
qui  fut  envoyée  de  Sainte-Marie-aux-Mines.  Minéralogie  de  AI.  de 
Bomare  ,  tome  II ,  pages  i  i  i  &  fuiv. 

(k)    Homère  nous    dit  aufli  que  les  Héros  de  Troie,  couvroient 
de  plaques  d'étain  la  tète  des  chevaux  attelés  à  Içur  char  de  bataille; 


D  E  s     AI  I  N  É  R  AU  X,  13  y 

Grecs  ont  Jonc  employé  ce  dernier  métal  (!),  &. 
comme  les  grandes  Indes  leur  étoient  inconnues ,  (Se 
qu'ils  n'avoient  commerce  avec  les  Nations  étrangères 
que  par  les  Phéniciens  {rftj ,  il  eft  à  préfumer  qu'ils 
tiroient  cet  étain  d'Angleterre  ,  ou  qu'il  y  a\oit  dans 
ce  temps ,  des  mines  de  ce  métal  en  exploitation  dans 
i'Afie mineure,  lefquelles  depuis  ont  été  abandonnées  (nj, 
Aéluellement  on  ne  connoît  en  Europe,  ou  plutôt  on 
ne  travaille  les  mines  d'étain  qu'en  Angleterre  &  en 
quelques  provinces  de  l'Allemagne  ;  ces  mines  font  très- 
abondantes  &  comme  accumulées  les  unes  auprès  des 
autres  dans   ces  contrées  :   ce  n'efl  pas  qu'il  n'y  en  ait 


mais  il  ne  paroît  pas  qu'au  temps  du  fiége  de  Troie ,  les  Grecs  fe 
ferviflent  de  vafes  d'étain  fur  leur  table;  car  Homère  fi  iidèle  à  re- 
préfenter  toutes  les  coutumes,  ne  dit  rien  à  ce  fujet ,  tandis  qu'il  fait 
plus  d'une  fois  mention  des  chaudrons  d'airain  dans  lefquels  les 
Capitaines  &  les  Soldats  faifoient  cuire  leur  viande. 

(l)  Les  anciens  Romains  fe  fervoient  de  miroirs  d'étain  que  Von 
fabriquoit  à  Brindes ,  &  il  y  a  toute  apparence  que  cet  étain  étoit 
mêlé  de  bifmuth.  Spécula  ex  Jlanno  laudatijfima  Brundufii  temperabantur, 
donec  argenu'is  uli  cœpere  &  ancïllœ.  Plin.  lib.  XXXIV,  cap.  xvil. 

(m)  Le  prophète  Ezéchiel,  en  s'adreflant  à  la  ville  de  Tyr,  lui 
dit,  les  Cathaginois  trafiquoient  avec  vous,  ils  vous  apportoient  toutes 
fortes  de  richelfes,  &  rempliflbient  vos  marchés  d'argent,  de  plomb 
&  d'étain.    Chap.   XXVII  ^  v.  12. 

(n)  Nota.  Woodward  prétend,  peut-être  pour  l'honneur  de  fa 
nation  ,  que  les  anciens  Bretons  faifoient  commerce  avec  les  Phéni- 
ciens ,  &  leur  fourniObient  de  l'étain  dès  la  plus  haute  antiquité;  mais 
ce  favant  Naturalise  ne  cite  pas  les  garans  de  ce  fait. 


136  Histoire  Natu relie 

ailleurs ,  mais  elles  font  {\  pauvres  en  comparai/bn  Je 
celles  de  Cornouailles  en  Angleterre,  &  de  celles  de 
Bohême  &  de  Saxe ,  qu'on  les  a  négligées  ou  tout-à- 
fait  oubliées. 

En  France,  on  a  reconnu  des  mines  d'étafn  dans  la 
province  de  Bretagne,  &  comme  ç\\t  n'efl  pas  fort 
éloignée  de  Cornouailles ,  il  paroît  qu'on  pourroit  y 
chercher  ces  mines  avec  efpérance  de  fuccès  ;  on  en  a 
auffi  trouvé  des  indices  eu  Anjou ,  au  Gévaudan  &  dans 
Je  comté  de  Foix  (o).  On  en  a  reconnu  en  Suiffe  (p) ; 
mais  aucune  de  ces  mines  de  France  &  de  Saifle,  n'ont 
été  fuivies  ni  travaillées.  En  Suède,  on  a  découvert  ai 
exploité  deux  mines  d'étain  qui  fe  font  trouvées  aflez 
riches   en  métal  (q);  mais   ies    plus  riches   de  toute 

l'Europe, 

».i  ■—■■■■■■.  —  ■    ■  >  »  -  .1.         ■--      ■■  .1  ■  — —       III  -  - , , 

(0)  Dans  le  Gévaudan,  i[  y  a  dans  la  paroiffe  de  Veuren ,  félon 
Al.de  yl'IurvUle,  une  mine  d'étain  qu'on  pourroit  traiter  avec  fuccès... 
Suivant  yMalus,  il  y  a  de  l'étain  dans  les  montagnes  de  la  vallée  d'UJlon 
au  comté  de  Foix.  ...  Et  en  Anjou,  fuivant  P/gûnioI,  il  y  a  dans 
la  paroifle  de  Courcelles  des  mines  d'argent ,  de  plomb  <5c  d'étain. 
Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter ,  tome  I ,  pages  2^,  ^i  à'  é  ], 

(p)  La  moniagne  Aubr'ig ,  dans  le  canton  de  Schwit^  en  Sui/Te, 
renferme  de  l'étain  qui  eft  mêlé  de  pierres  lenticulaires  &  de  peignes. 
M.  Guettard;  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences,  année  17J2, 
page  SS°' 

(q)  On  a  découvert  dans  la  province  de  Danmora  une  mine 
d'étain  mêlée  de  fer,  dont  M.  Richman  a  donné  fa  defcription  ;  elle 
cft  plus  dure  &  moins  pefante  que  les  mines  d'étain  de  Saxe  &  moins 
abondante  en  étain,  M.  Brandt  ea  ajoute  une  autre  découverte  auprès 

de 


DES    Minéraux,  137 

l'Europe,  font  celles  des  provinces  de  Cornouaiiles  (r) 

de  Wejlaufors  dans  la  \f  erflmanie  ,  elle  a  encore  moins  d'etaiu  ,  moins 
de  pefanteur  Tpécifique  &  plus  de  fer.  Bibliothcque  raifonnée ,  tome 
XLI ,  page  2y. 

(r)    Les  mines  de  Cornouaiiles  font  de  couleurs  différentes  ;  il  y 
en  a  de  fix  fortes,  de  la  pâle,  de  la  grile,  de  la  blanche,  de  la  brune, 
de  la  rouge  &  de  la  noire  :  cette  dernière  efl  la  plus  riche  &  la  meil- 
leure ,  &  cependant  les  plus  riches  de  toutes  ne  donnent  que  cinquante 
pour  cent;   on  trouve  dans  [q  fparr ,  qui  fait  fouvent  la  gangue  de 
cette  mine,  des  criftaux  aflez  durs  pour  couper  le  verre,  lefquels  font 
quelquefois  d'un  rouge-iranfparent ,  &  ont  l'éclat  du  rubis.    Sur  ce 
fparr  on  trouve  aufli  une  autre  forte  de  fubflance  femblable  à  une  pierre 
blanche ,  tendre ,   que  les  mineurs  appellent  kelum  ,    qui   laifle   une 
ccunie  blanche  lorfqu'on  la  lave  dans  l'eau  en  fortant   de  la  mine: 
il  femble  que  ce  foit  la  même  matière  que  le  fparr,    &  qu'elle  n'en 
diffère  que  par  le  degré  de  pétrification   criftailine.  .  ,  .  &  à  l'égard 
des  criflaux  d'étain ,  on  peut  afîurer  qu'ils  font  toujours  mêlés  d'ar- 
fenic ,  dont  ils  répandent  l'odeur  &  même  des  particules  ftrineufes 
par  ime  fiiiiple  calcination  fur  une  pèle  à  feu.  ,  .  .  Les  criflaux  blancs 
font  ceux    qui  font  le  plus  mêlés  d'arfenic ,   ils  font  les  plus  réfrac- 
taires  au  feu,  &  ce  font  les  plus  rares.   Il  y  a  d'autres  criflaux  d'étain 
d'un  jaune  d'or  qui   font  aufîî  afîez  rares ,  autre  part  que    dans  la 
Hefle.  D'autres  criflaux  qui  font  d'une  couleur  rouge  tirant  communé- 
ment fur  celle  du  fpath  rofe  ou  du  petit  rubis;  ils  font  pour  l'ordinaire 
Vin  peu  tranfparens  ;  il  y  a  aufTl  des  criflaux   d'étain  tranfparent  de 
couleur  violette  ;  ils  produifent  abondamment  dans  la  fonte  ;  on  en 
trouve  en  Hongrie,  dont  la  figure  efl  prelque  cubique,  &  accom- 
pagnée quelquefois  de  pyrites  fulfureufes  ;  il   y  a  aufli  des  criflaux 
bruns  qui  ont  fouvent  une  figure  fort  bizarre ,  leur  couleur  efl  afl^ez 
femblable  à  celé  des  grenats  bruts  ordinaires;  il  y  en  a  aufîi  de  verts 
qui  ne  pèfent  pas  autant  que  les  bruns  ,    &  qui  cependant  rendent 
beaucoup  à  la  fonte;  ils  forment  des  elpèçes  de  quilles  à. huit  paiiç, 

Minéraux ,  Tome  II L  S 


138        Histoire   Naturelle 

&  Je  Dévon  en  Angleterre,  &  néanmoins  ces   mines 
paroiffent  ctre  de  féconde  ou  de  troifième  formation  (f) ; 


d'un  brun-noirâtre  en-dehors,  fort  durs  &  d'un  vert  chatoyant  mte'- 
rieurement  comme  le  fpath  vitreux  &  écailieux.  Minéralogie  de 
Bomare ,  tome  II,  pages  i  j  i   &  fuivanîes. 

(f)  L'étain  ed  fi  abondant  dans  le  pays  de  Cornouailles  ,  qu'il 
eft  répandu  prefque  par-tout,  &  que  même  les  filons  de  cuivre  les 
plus  abondans  contiennent  de  l'étain  dans  leur  partie  fupérieure, 
c'eft-à-dire,  proche  la  furface  de  la  terre;  ce  métal  y  efl  même 
afîez  abondant  pour  mériter  l'extracfiion.  D'autres  fois  le  minéral  de 
cuivre  &  celui  d'étain  fe  trouvent  dans  le  même  filon ,  quoique 
féparément ,  ce  qui  ne  continue  pas  ordinairement  dans  la  profondeur. 

Prefque  joignant  la  ville  de  Redrath ,  on  exploite  une  mine  d'étain 
très-confidérable  ,  nommée  peduandrea.  Cette  mine  fut  d'abord  com- 
mencée comme  mine  de  cuivre  ;  on  y  a  extrait  une  très  -  grande 
quantité  de  minéral;  on  y^travailloit  alors  deux  fiions  parallèles  qui 
fe  touchoient  prefque  l'un  l'autre,  de  forte  qu'ils  n'en  formoient 
qu'un  feul ,  l'un  produifoit  du  minéral  jaune  de  cuivre  ou  pyrite 
cuivreufe ,  &  l'autre  du  minéral  d'étain.  Le  premier  étoit  joignant 
ie  toit,  «5c  le  fécond  joignant  le  mur  ou  rocher  inférieur;  mais  en  allant 
dans  la  profondeur  le  minéral  de  cuivre  a  ce.ï^é  ^  de  forte  qu'il  ne 
refte  plus  que  le  filon  d'étain  qui  eft  fort  abondant  :  cette  mine  a 
de  cinquante  à   foixante  toiles  de  profondeur. 

A  Godûlphin-bûll  fe  trouve  la  mine  d'étain  fa  plus  e'tendue  qu'il  y 
aït  dans  le  pays  de  Cornouailles La  diredion  des  filons  eft  tou- 
jours de  l'elt  à  l'oueft  comme  dans  toutes  les  mines  de  ce  pays,  & 
fon  inclinaifon  au  nord-eft  d'environ  70  degrés.  Cette  mine  a,  dit-on  , 
quatre-vingt-dix  toifes  de  profondeur  perpendiculaire.  .  .  On  coinpte 
cinq  filons  parallèles  fur  cinquante  à  foixante  toifes  d'étendue  ,  mais 
qui  ne  (ont  point  exploités  également.  ...  il  n'y  a  que  le  principal 
qu'on  exploite  en  totalité. 


DES  Minéraux.  139 

car  on  y  a  trouvé  des  débris  de  végétaux,  &.  même 
des  arbres  entiers  (t) ;  elles  font  en  couches  ou  veines 
très-voifines,  &  d'une  longue  étendue,  toutes  dans  la 
même  direélion  de  l'eft  à  l'oued  (  u) ,  comme  font 
auffi  toutes  les  veines  de  charbon  de  terre  &  autres 
matières    anciennement   entraînées    &    dcpofées   par   le 


Ces  filons  font  renfermés  dans  un  granit  à  gros  grains,  très-dur, 
mais  il  n'en  eft  pas  ici  comme  en  Saxe  &  en  Bohème  ;  l'etain  ne 
fe  trouve  jamais  réuni  &  confondu  dans  cette  pierre ,  mais  dans  une 
efpèce  de  rociie  bleuâtre  qui  paroît  être  la  matrice  ge'nérale  du  plus 
grand  nombre  des  mines  d'etain  de  Cornouaiiies.  On  rencontre 
communément  le  long  du  filon,  joignant  le  mur,  ce  qu'on  nomme 
le  guide  ;  c'cfl  un  quartz  mêlé  quelquefois  de  mica,  lequel  le  rend 
peu  folide.  Le  filon  confille  lai-même  en  un  quartz  fort  dur,  qui 
n'eft;  pas  toujours  parfaitement  blanc ,  mais  qui  a  un  œil  bleuâtre  ; 
il  efl;  réuni  à  la  roche  bleue  dans  laquelle  fe  trouve  le  minéral  d'étain , 
mais  prefque  toujours  en  petits  grains  criftaliifes  comme  des  grenats. 
On  y  trouve  aufli  quelquefois  du  quartz  criflallifé  en  hexogone  ;  il 
y  a  des  endroits  du  filon  qui  font  très-riches,  mais  fort  tendres:  ce 
minéral  eft  pari'emé  de  beaucoup  de  mica  &  de  petits  grains  de  minéral 
d'étain,  comme  de  grenats;  ce  filon  a  2  ,  3  ,  4,  5  pieds  de  large, 
plus  ou  moins.  Obfervations  fur  les  mines ,  par  Ai.  Jars  ;  Aïémoires  de 
r Académie  des  Sciences ,  année  lyyo. 

(t)    Voyages  hiltoriques  de  l'Europe;    Paris,    i  (f p ^ ,   tome  IV, 
page  104. 

(u)  Les  veines  d'étain  de  Cornouaiiies  ont  une- dire<^ion  très- 
étendue  ,  puifqu'on  rencontre  plulleurs  mines  d'étain  dans  les  îles  de 
Seilly,  qui  font  fituées  dans  les  mêmes  diredion  &  latitude  que  la 
province  de  Cornouaiiies.  Ai.  Jars;  Alemoircs  de  l'Académie  des 
Sciences,  année  lyyo,  page  j"/^. 

s  \] 


140  Histoire  Naturelle 

mouvement  des  mers;    &    ces    veines    d'étaiii   courent 
pour  la  plupart  à  la  furface  du  terrein,  &  ne  defcendent 
guère  qu'à  quarante  ou  cinquante  toifts  de  profondeur; 
elles  gifTent  dans  des  montagnes  à  couciies  de  médiocre 
hauteur,  &  leurs  débris  entraînés  par  les  eaux  pkniales, 
fe  retrouvent    dans   les   vallons  en   fi   grande  quantité, 
qu'il  y  a    fouvent   plus  de    profit  à    les   ramaffer  qu'à 
fouiller  les  mines  dont  ils  proviennent  (x).  Ces  veines 
très-longues  en  étendue,  n'ont  que  peu  de  largeur;  il 
y  en  a  qui  n'ont  que  quelques  pouces,  &  les  plus  larges 
n'ont  que  fix  ou  fèpt  pieds  (y) ;  elles  font  dans  un  roc 

(x)  Dans  les  environs  de  la  ville  de  Saint- Aujf le ,  province  de 
Cornouaiiles ,  on  a  travaillé  anciennement  beaucoup  de  mines  d'étain  ; 
mais  il  y  en  a  peu  en  exploitation  aujourd'hui,  on  fe  contente  de 
prendre  les  terreins  qui  font  dans  le  fond  des  vallons,  «Si  de  les  laver 
pour  en  retirer  les  morceaux  de  minerai  d'étain  cjui  y  lont  répandus 
&  dont  les  angles  font  arrondis  comme  ayant  été  roulés ,  &  proba- 
blement détachés  des  filons  d'étain  des  montagnes  voifines;  ces  miné- 
raux d'étain  font  répandus  dans  les  vallons  lur  de  grandes  étendues  ; 
ils  peuvent  provenir  auflj  des  détrimens  ou  déblais  des  mines  ancien- 
nement exploitées ,   &  qui  auront  été   entraînées  &  dépofées  par    \qs 

eaux  des  pluies Il   y  a   toujours  des  filons  fur  les    éminences 

voifines ,  dont  le  minerai  efl  de  la  même  nature  que  celui  que  l'on 
trouve  répandu  dans  les  vallons.  .  .  .  Il  eft  fi  commun  dans  les  mines 
d'étain  que  le  m.inéral  fe  préfente  jufqu'à  la  fijrface  de  la  terre  ;  il  y 
en  a  qui  fijnt  en  pierre  très-dure  ,  mais  il  y  en  a  auffi  près  de  Saint- 
Auftle  qui  eft  en  roche  très-tendre.  AI.  Jars  ;  Aîémoires  de  l'Aca^ 
dtmie  des  Sciences ,   année  lyyo,  pages  j^o  cf  fuiv. 

(y)    Merret  qui  a  écrit  en  1678  ,   dit  que  \^s  pierres  du  pays  de 
Cornouaiiles,  d'où  l'on  tire  l'étain,  fe  trouvent  quelquefois  à  un  ou 


DES  Minéraux,  14,1 

dur,  clans  lequel  on  trouve  quelquefois  des  criflaux  blancs 
&  tranfparens,  qu'on  nomme  improprement  d'ianums  de 
CornouaiJles.  M.  Jars  &  M.  le  baron  de  Dietrich,  qui 
ont  obfervé  la  plupart  de  ces  mines ,  ont  reconnu  qu'elles 
étoient  quelquefois  mêlées  de  minerais  de  cuivre  (i) ^ 
ôi  que  fouvent  les  mines  de  cuivre  font  voifines  de  celles 
d'ctain  f^ij;  &  on  a  remarqué  de  plus,   que,    comme 

deux  pieds  au-deflous  de  la  furface  de  la  terre,  le  plus  fouvent 
difpofées  en  veines  entre  deux  murs  de  rocher,  couleur  de  rouille > 
qui  ne  paroiiTent  avoir  que  très-peu  d'aflinitc  avec  i'ctain.  Les  veines 
ont  depuis  quatre  jufqu'à  dix  -  huit  pouces  environ  de  largeur ,  & 
elles  font  le  plus  fouvent  dirigées  de  l'eft  à  l'oueft.  .  .  .  Les  folTes 
ont  quarante,  cinquante  &  quelquefois  (o^xante  brafles  de  profondeur. 
CoUeâion  acûdémique  ,  partie  étrangère  ,   tome  II ,  pages  ^S  o  ù'  fui  - 

(1^)  M.  le  baron  de  Dietrich  qui  a  féjourné  pendant  plufieurs 
mois  en  Cornouailles,  dit  (jue  la  Nature  elle-même  a  mclc  enfemble 
îe  cuivre  &  i'étain ....  qu'il  n'y  a  guère  que  les  mines  d'èiain  roulc'es 
par  les  torrens ,  &  celles  qui  fe  trouvent  dans  le  quartz  granuleux 
qui  renferme  du  fchori ,  qui  ne  foient  pas  mêlées  avec  de  la  mine 
de  cuivre.    Journal  de  Phyfique ,    mal   lyS  o,  page  ^82. 

(a)  Aux  environs  de  la  ville  de  Alaraijon ,  on  exploite  plufieurs 
fiions  de  minéral  de  cuivre  &  de  celui  d'étain,  à  peu-près  de  la 
nature  &  dans  la  même  roche  fchirteufe ,  nommée  killas ,  que  ceux 
des  environs  de  la  ville  de  Redenth.  ...  II  y  a  aufîi  des  minéraux 
d'étain  dans  le  granit  ,  entr'autre  dans  le  rocher  qui  compofe  fe 
Alont  Saint- Michel ,  qui  n'eft  féparé  de  Marazion  que  par  un  petit 
bras  de  mer  :  on  aperçoit  dans  ce  rocher  une  fort  grande  quantité 
de  filons   d'un  fort  bon  minéral   d'étain .... 

On  eflime  le  produit  en  étain  de  cette  province  à  la  valeur  de 
cent  quatre-vingt-dix  à  deux  cents  mille  livres  fterling  chaque  année , 


/ 


ii 


142         Histoire  Naturelle 

toutes  les  mines  d'ctain  contiennent  de  J'ar/enic  ,  les 
vapeurs  qui  s'élèvent  de  leurs  fofTes  font  très-nuifibles, 
Si  quelquefois  mortelles   [6J. 

De  temps  immémorial,  les  Anglois  ont  fu  tirer  grand 
parti  de  leurs  mines  d'étain;  ils  favent  les  traiter  pour 
le  plus  grand  profit,  ils  ne  font  pas  de  commerce,  ni 
peut-être  d'ufage  de  i'étain  pur  ;  ils  le  mêlent  toujours 
avec  ime  petite  quantité  de  plomb  ou  de  cuivre. 
«  Lorfque  la  mine  d'ctain,  dit  M.  Geoffroy,  a  reçu 
j>  toutes  les  préparations  qui  doivent  la  diipofèr  à  être 
fondue  ,   on    procède  à  cette  dernière  opération  dans 

»  un  fourneau  à  manche on  refond   cet  étain,  qui 

»  efl  en  gâteaux ,   pour  le    couler  dans   des    moules    de 
55  pierre   quarrés   ôl  obiongs ,   <5c  ce(i  ce    qu'on    appelle 

i'>fnuînons Ces  fàumons   font  plus   ou  moins    fins, 

fuivant  les   endroits  où  Ton  en  coupe   pour  faire  des 
épreuves;  le  defiTus  ou  la  crème  du  faumon  efl  très-douce 
&  fi  pliante  qu'on  ne  peut  la  travailler  feule  ;    on  efl 
3>  obligé  d'y  mêler  du  cuivre  dont  elle  peut  porter  jufqu'à 


&  qu'il  fe  vend  du  minerai  de  cuivre  pour  cent  quarante  mille  livres 
fleriing.  Oùfervationsjur  les  mines  ,  pur  Af.  Jars;  Mémoires  de  l'Aca- 
démie des  Sciences ,  année  i  yy  0 ,  pages  j^.o  Ù"  fuivantes. 

(h)  Lorfque  la  mine  efl:  riche ,  on  trouve  la  veine  à  dix  brades 
de  profondeur,  &  au-defibus  on  trouve  une  cavité  vide  ou  fente 
de  quelques  pouces  d'ouverture  ;  il  fort  de  ces  fouterrains  des  vapeurs 
nuifibles  &  même  mortelles.  ColleOion  académique ,  partie  étrangère, 
tome  II ,  pages  ^S  0  &  fuiyanles. 


5> 


» 


>ï 


DES    Minéraux.  14.^ 

trois  livres  fur  cent ,  &.  quelquefois  jufqu'à  cinq  livres.  « 
Le  milieu  du  faumon  efl  plus  dur ,  &.  ne  peut  porter  ** 
que  deux  livres  de  cuivre,  &  le  fond  efl  fi  aigre  qu'il  « 
y  faut  joindre  du  plomb  pour  le  travailler.  L'étain  ne  « 
fort  point  d'Angleterre  dans  fa  pureté  naturelle  ou  tel  « 
qu'il  a  coulé  dans  le  fourneau;  il  y  a  des  défcnfes  très-  « 
rigoureufes  de  'le  tranfportcr  dans  les  pays  étrangers ,  « 
avant  qu'il  ait  reçu  l'alliage  porté  par  la  loi  (^c)  ». 

Quelques-uns  de  nos  habiles  Chimiftes,  &.  particu- 
{ièrement  M.'^  Bayen  &  Clwrlard ,  ont  fait  un  grand 
nombre  d'expériences  fur  les  différens  étains  qui  font 
dans  le  commerce;  ils  ont  reconnu  que  l'étain  d'An- 
gleterre en  gros  faumons,  ainfi  qu'en  petits^  lingots ,  mis 
dans  une  retorte,  ou  dans  un  vailTeau  clos  pour  fubir 
l'adion  du  feu,  laifTe  échapper  une  petite  quantité  de 
matière  blanche  qui  s'attache  au  col  de  la  retorte,  & 
qui  ne  fi  point  du  tout  arfenicak ,  ils  ont  trouvé  que  cet 
étain  n'efl  pas  allié  de  cuivre  pur,  mais  de  laiton;  car 
ils  en  ont  tiré  non  -  feulement  un  fel  à  bafè  de  cuivre, 
mais  un  nitre  à  bafè  de  zinc  :  cette  dernière  remarque 
de  M."  Bayen  &  Charlard,  s'accorde  très  -  bien  avec 
l'obfèrvation  de  M.  Jars,  qui  dit,  qu'outre  le  plomb 
&  le  cuivre,  les  Ouvriers  mêlent  quelquefois  du  zinc 
avec  i'étain,    &  qu'ils   préfèrent  la  limaille   du  laiton,, 

•^i— — — ^— ^M^— ^^i»^— ^—  ■        ■  — ^i^—  I  II  -  ■  PI-  »!  W  I    ■■     I     ■■     ■!■    I— ^^—— 

(c)   Recherches  chimiques  fur  l'etain,  par  M/'  Bayen  &  Cbarlard,. 
jpages  c)  ^  &  I  0  Q , 


144-        Histoire  Naturelle 

qu'il  n'en  faut  qu'une  demi-livre  fur  trois  cenrs  pefant 
d'étain,  pour  ic  dégraifler,  c'e(t-à-dire ,  pour  le  rendre 
facile  à  planer  (d) ;  mais  je  ne  puis  me  perfuadcr  que 
celte  poudre  blanche  ,  que  l'ctain  iaiffe  échapper  ,  ne 
foit  point  du  tout  arfenicalc,  puifqu'elle  s'efl  fublimée , 
&  que  ce  n'eft  point  une  fimple  chaux  ;  &.  quand  mcme 
ce  ne  feroit  qu'une  chaux  d'étain ,  elle  conticndroit 
toujours  de  l'arfenic  ;  d'ailleurs,  en  traitant  cet  étain 
d'Ano-Ieterre  avec  l'eau  régale,  ou  feulement  avec  l'acide 
marin,  ces  habiles  Chimifles  ont  trouvé  qu'il  contenoit 
une  petite  quantité  d'arfcnic  ;  ceci  paroît  donc  infirmer 
leur  première  affertion  fur  cette  iiiûticre  blanche  qui  s  ai- 
tache  an  col  de  la  rctortc,  ir  qu'Us  dijcut  n  are  nullement 
arÇenicale.  Quoi  qu'il  en  foit,  on  leur  a  obligation,  d'avoir 
recherché  quelle  pouvoit  être  la  quantité  d'arfenic 
contenue  dans  l'étain  dont  nous  faifons  ufage  ;  ils  fe 
font  alTurcs  qu'il  n'y  en  a  tout  au  plus  qu'un  grain  fur 
une  once,  ^  l'on  peut  en  fuivant  leurs   procédés  (e) , 

connoître 

■  —  • 

(d)  Alemoires  de  M.  Jars;  Acadcmie  des  Sciences,  année  lyyo, 

(e)  Le  vrai  moyen  de  bien  connoître  la  portion  de  l'arfenic  mêlé 
à  l'eiain,  efl:  de  faire  difi'oudre  ce  dernier  métal  dans  l'acide  marin 
très-pur;  s'il  ne  relie  rien  lorfque  la  difloluiion  eft  faite,  l'étain  efl 
ians  arfenic  ;  s'il  refte  un  peu  de  poudre  noire ,  il  faut  la  féparer 
avec  loin,  la  laver,  la  faire  fécher  &:  en  jeter  fur  des  charbons  ardens 
pour  reconnoître  fi  elle  ed  arfenica'e  ou  non:  L'efl-elle!  qu'on 
i'expofe  à  un  degré  de  feu  capable  d'opérer  la  fublimation  de  l'arfenic; 
fi  çlle  s'exhale  en  entier,  elle  eft  de  pur  régule  d'arfenic;  s'il  refte 


DES   Minéraux.  14^ 

connoître  au  julle  la  quantité  d'arfenic  que  tout  étain 
contient. 

Les  mines  d*étain  de  Saxe,  de  Mifnie,  de  Bohème 
&  de  Hongrie ,  giiïent ,  comme  celles  d'Angleterre , 
dans  les  montagnes  à  couches,  &  à  une  médiocre  pro- 
fondeur ;  elles  ne  font  ni  auffi  riches  ni  aufTi  étendues 
que  celles  de  Cornouailles  ;  i'étain  qu'on  en  tire  efl 
néanmoins  au/fi  bon,  &  même  les  Allemands  prétendent 
qu'il  efl  meilleur  pour  l'étamage  ;  on  peut  douter  que 
cette  prétention  foit  fondée ,  &.  le  peu  de  commerce 
qui  fe  fait  de  cet  étain  d'Allemagne,  prouve  affez  qu'if 
n'eft  pas  fupérieur  à  celui  d'Angleterre. 

Les  cantons  où  fe  trouvent  les  meilleures  mines  de 
Saxe ,  font  les  montagnes  de  Majlerherg  vers  Boles-fchau ; 
les  veines  font  à  vingt-quatre  toifes  de  profondeur  dans 
des  rochers  d'ardoifè,  elles  n'ont  qu'une  toife  en  lar- 
geur. Une  de  ces  mines  d'étain  efl  couchée  fur  une 
mine  très  -  riche  de  cuivre ,  que  l'on  en  fépare  en  la 
cafTant  ;  une  autre  à  Breyienhrun  vers  la  ville  de  Geor- 
genjiatt ,  qui  efl  fort  riche  en  étain,  efl  néanmoins  mêlée 

un  peu  de  poudre  dans  le  teft  qu'on  enij)Ioie  à  l'opération ,  qu'on 
la  pèfe  s'il  efl  pofllbie ,  ou  qu'on  l'évalue,  &  on  faura  ce  qu'une 
quantité  donnée  d'étain  quelconque  contient  réellement  d'arfenic 
fous  forme  réguiine.  .  .  .  On  dit  fous  forme  réguline ,  parce  qu'en 
effet  la  chaux  d'arfenic  ne  peut  fe  combiner  avec  l'étain  ,  tandis  qu'au 
contraire  fon  régule  s'y  unit  avec  la  plus  grande  facilité.  Recherches 
fur  l'étmn,  par  M."  Bayen  ù'  Char  lard,  pages  1 1  8  éf  fuîv. 

Aline raux.  Tome  III.  T 


14-6        Histoire  Natu relle 

d'une  grande  quantité  de  fer,  que  I*on  en  tire  au  moyen 
de  i'aimant  après  l'avoir  réduite  en  poudre:  ie  canton 
de  FiirJIcmberg  efl  entouré  de  mines  d'étain,  &  dans  le 
centre  de  cette  même  contrée,  il  y  a  des  mines  d'ar- 
gent (fj.  Les  mines  d'étain  à' Eibenjiûk,  s'éitnàtïïi  dans 
une  longueur  de  quelques  lieues,  &  fè  fouillent  à  d\\ 
toifes  de  profondeur;  elles  font  mêlées  de  fer,  &  on 
y  a  quelquefois  trouvé  des  paillettes  d'or.  Toute  la 
montagne  de  Goyer  eft  remplie  de  mines  d'étain;  mais 
Je  roc  qui  les  renferme  efl  fi  dur,  qu'on  eft  obligé  de 
ie  faire  calciner  par  le  feu  avant  A'cxi  tirer  les  blocs. 
On  trouve  auffi  des  mines  d'étain  à  Schiéeberg;  enfin 
à  Anerjherg,  la  plus  haute  montagne  de  toute  la  Saxe, 
il  y  en  a  une  à  vingt  -  huit  toifes  de  profondeur  flir 
trois  toifes  de  largeur ,  dans  un  rocher  d'ardoifè  ; 
cette  mine  a  produit  en  174.1,  cinq  cents  quintaux 
d'étain  (g). 

En  Bohème,  à  trois  quarts  de  lieue  de  Plareîi ^  if 
fe  trouve  une  mine  d'étain  voifine  d'une  mine  de  fer, 
qui  toutes  deux  font  dans  un  banc  de  grès  à  gros 
grains  (h) ;  &  comme  le  minerai  d'étain  efl  mêlé  de 
parties  ferrugineufes ,  on  le  fait  griller  après  l'avoir 
broyé  pour  en  féparer  le  fer  au  moyen  de   l'aimant; 

(f)  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Sciilutter,  traduit  jpar  M. 
Hdlot ,  tome  II ,  page  j  8 j , 

(g)  Idem ,  ibid,  page  ^88, 

(h)  Voyages  métallurgiques  de  M.  Jars ,  page  jr. 


DES   Minéraux.  14.7 

il  fe  troi'.ve  auiïi  des  mines  d'étain  dans  le  diflriél 
A*  FJli'hdgen  &  dans  celui  de  Saline t  ;  une  autre  à  Sclilac- 
Kenwald,  qui  s'enfonce  afTez  profondément  (i) ,  Enfin, 
il  y  a  aulîi  quelques  veines  d'ctain  dans  Jes  mines  de 
Hongrie  (k) ;  on  aflfure  de  même  qu'il  s*en  trouve  en 
Pologne;  mais  nous  n*avons  aucune  notice  afTez  cir- 
conftanciée  de  ces  mines  pour  pouvoir  en  parler. 

L' Afie  efl  peut-être  plus  riche  que  l'Europe  en  étain  ; 

il   s*en    trouve    en   abondance    à   la  Chine    (l) ,    au 

■'    '  1  ■  .  . 

(ï)   Ephémérides  d'Allemagne,  année  i6S6, 

(k)   On  trouve  des   mines    d'étain    dans    plufieurs    contrées   de 
l'Europe,   en  Saxe,  en  Mifnie ,  comme  à  Stolberg,  Goyer,  Anne- 
berg,  Altemberg  ,  Freiberg  ,  dans  la  montagne  de  Saint-André  de  la 
forêt  noire.  En  Bohème,  dans  les  mines  de  Groupe  près  de  Toplitz, 
dans  celles  d'Aberdam,  deSchoufeld,  &c.  Dans  la  Hongrie,   aux 
mines  de  Schonmitz  &  du  comté  de  LyptoW.  M.  Geoffroi  ;  Mémoires 
de  l'Académie  des  Sciences,   année  ij^8,  page  i  o^.  —  L'une  des 
plus  fameufes  de  toutes  les  mines  d'Allemagne,  efl  celle  à'Attemberg; 
on  n'en  trouve  point  de  femblables  dans  toute  l'hiftoire  des  mines... 
elle  fournit  de  la  mine  d'étain ,  depuis  la  fuperficie  jufqu'à  cent  cin- 
quante toifes  de  profondeur  perpendiculaire.  Ces  fortes  de  filons  en 
mafles  n'ont  que  rarement  une  direction  réglée  ,  mais  ils  ont  leurs 
bornes  qui  quelquefois  eft  une  pierre  sèche  ,  quelquefois  un  roc  que 
les   mineurs  appellent  le  féparateur.   Traité  de  la  fonte  des  mines  dt 
Schlutter ,  tome  II ,  pages  ^  S  j  ù"  fuivantes, 

(l)   On  tiroit  autrefois  à  la  Chine  beaucoup  d'étain  aux  environs 

de  la  ville  àHU-fi,  .  .  .  L'étain  eft  fi  commun  dans  cet  empire ,  que 

le  prix  en  eft  fort  modique.  Hijhire  générale  des  Voyages ,  tome  VI, 

page  4<?4.— On  voit  à  Dehiy  aux  Indes,  un  certain  métal  appelé 

utunac,  qui  approche  de  l'étais ,  mais  qui  efl  beaucoup  plus  beau  <Sc 

Tij 

V 


148        Histoire    Naturelle 

Japon  (m)  &  à  Siam  ^?i) ;  il  y  en  a  aufTi  à  MacafTar  (oj , 
à  Malaca  (p),  Banca,  &c.  cependant  les  Afiatiques  ne 
font  pas  de  ce  métal  autant  d'ufàge  que  les  Européens  ; 
ils  ne  s'en  fervent  guère  que  pour  étamer  le  cuivre  (^) , 

plus  fin,  &  fouvent  on  le  prend  pour  de  l'argent;  ce  métal  s'apporte 
de  la  Chine.   Thévenoî ,  Voyage  au  Levant  ;  Paris  ^  1  66^,  tome  III , 
page  ijS. 

(m)  La  province  de  Bungo  au  Japon,  produit  de  i'etain  fi  blanc 
&  fi  fin ,  qu'il  n'eft  guère  inférieur  à  l'argent ,  mais  les  Japonois  i\\n. 
font  prefque  aucun  ufage.  Hifloire  générale  des  Voyages ,  tome  X, 
page  e^j. 

(n)  Les  Siamois  travaillent  depuis  très-long  temps  à^s  mines  d'étain 
&  de  plomb  fort  abondantes.  .  .  .  Leur  étain  fe  débite  dans  toutes 
ies  Indes.  Il  eft  mou  &  mal  purifié  &  tel  qu'on  le  voit  dans  des 
boîtes  à  thé  qui  viennent  des  régions  orientales;  &  pour  le  rendre 
plus  dur  &  plus  blanc,  ils  y  mêlent  de  la  calamine,  efpèce  de  pierre 
minérale  qui  fe  réduit  facilement  en  poudre,  &  qui  étant  {oixdxxe. 
avec  le  cuivre  fert  à  le  rendre  jaune  ;  mais  elle  rend  l'un  &  l'autre 
de  ces  deux  métaux  plus  caiïant  &  plus  aigre.  Idem,  tome  IX, 
page  s  oy. 

(0)  Quelques  provinces  de  MacafTar,  dans  l'île  Célèbes,  ont  des 
mines  d'étain.    Idem,  tome  X ,  page  ^j  8. 

(p)  On  trouve  de  l'étain  dans  quelques  endroits  des  Indes  orien- 
tales ,  comme  au  royaume  de  Quidday,  entre  Tanafieri  &  le  détroit 
de  Malaca.  M.  Geoffroi  ;  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences ,  année 
'  73  ^  >  PW  I  03-  —  Les  Hollandois  apportent  des  Indes  orientales 
des  efpèces  d'étain  qui  paflent  pour  étain  fin  ;  celui  de  Alalac  ou 
Malaca  <Sc  celui  de  Banca,  qui  n'eft  pas  aufii  parfait  que  celui  de 
Malaca  qu'on  emploie  de  préférence  pour  les  teintures  en  écarlate  & 
pour  étamer  les  g'aces.    Idem  ,  page  i  j  i. 

(q)   Il  n'y  a  guère  de  mit>es  d'argent  en  Afie,  fi  ce  n'efi  au  Japon; 


DES    Minéraux.  149 

ou  faire  de  Tairain  en  alliant  ces  deux  métaux  enfemble  ; 
mais  ils  font  commerce  de  Tétain  avec  nous,  &  cet 
étain  qui  nous  vient  des  Indes,  efl  plus  fin  que  celui 
que  nous  tirons  de  l'Angleterre,  parce  qu'il  efl  moins 
allié;  car  l'on  a  obfervé  que  dans  leur  état  de  pureté, 
ces  étains  d'Angleterre  &.  des  Indes ,  font  également 
fouples  Si  difficiles  à  rompre  :  cette  flexibilité  tenace 
donne  un  moyen  facile  de  reconnoître  fi  Tétain  eft  purgé 
d'arfènic  ;  car  dès  qu'il  contient  une  certaine  quantité 
de  cette  mauvaife  matière,  il  fe  rompt  facilement. 

Ainfi  rétain,  comme  tous  les  métaux,  efl  un  dans 
la  Nature,  &  les  étains  qui  nous  viennent  de  difîcrens 
pays ,  ne  diffèrent  entr'eux  que  par  le  plus  ou  moins 
de  pureté  ;  ils  feroient  abfolument  les  mêmes  s'ils  étoient 
dépouillés  de  toute  matière  étrangère  ;  mais  comme  ce 
métal,  lorfqu'il  efl  pur,  ne  peut  être  employé  que  pour 
i'étamage ,  &  qu'il  efl  trop  mou  pour  pouvoir  le  planer 
&  le  travailler  en  lames;  on  efl  obligé  de  l'allier  avec 
d'autres  matières  métalliques  pour  lui  donner  de  la  fer- 
meté, &  c'efl  par  cette  raifon  que  dans  le  commerce 
il   n'y  a  point  d'éiain  pur  frj. 

mais  on  a ,  dit  Tavernier ,  découvert  à  Dabgore ,  à  Sangore ,  à  Bor- 
dalon  &  à  Bâta  des  mines  très  -  abondantes  d'étain,  ce  quâ  Jl  fait 
beaucoup  de  tort  aux  Anglois,  parce  qu'on  n'a  plus  befoin  de  leur 
étain  en  A  fie  ;  au  refle ,  ce  métal  ne  fert  en  ce  pays-là  qu'à  étamer 
les  pots ,  marmites  &  autres  uftenfiles  de  cuivre.  Voyage  de  Tavernkr; 
Rouen  ,   i  y  i  ^  ,  tome  JV,  page  (/  i . 

(r)   Nous  croyons  donc  pouvoir  conclure  que  les  étains  de  Banca, 


ICO        Histoire    Naturelle 

Nous  n'avons  que  peu  ou  point  de  connoiflfances 
des  mines  d'étain  qui  peuvent  fe  trouver  en  Afrique; 
les  Voyageurs  ont  feulement  remarqué  quelques  ouvrages 
d'étain  chez  les  peuples  de  la  côte  de  Natal  (f) ,  & 
il  e(l  dit ,  dans  les  Lettres  édifiantes,  qu'au  royaume  de 
Qjieba,  il  y  a  de  Tétain  aufli  blanc  que  celui  d'Angleterre, 
mais  qu'il  n'en  a  pas  la  folidité,  &  qu'on  en  fabrique 
des  pièces  de  monnoie,  qui  pèfent  une  livre  &  ne  valent 
que  fept  fous  (t) ;  cet  étain  qui  n'a  pas  la  folidité  de 
celui  d'Angleterre,  efl  fans  doute  de  i'étain  dans  fon 
état  de  pureté. 

En  Amérique,   les  Mexicains   ont  autrefois   tiré   de 

de  Malaca  &  d'Angleterre,  doux,  lorfqu'ils  fortent  du  magafin  d'un 
honnête  marchand,  font  purs  ou  privés  de  tout  alliage  naturel  ou 
artificiel ,  qu'ils  font  parfaitement  égaux  entr'eux ,  c'eft-à-dire  ,  qu'ils 
font  l'un  à  l'égard  de  l'autre,  comme  de  l'or  à  vingt-quatre  karats  ou 
de  l'argent  à  douze  deniers  tires  d'une  mine  d'Europe  ,  feroient  à 
de  l'or  ou  de  l'argent  aux  mêmes  titres  des  mines  de  l'Amérique 
méridionale. 

Cependant  ces  étains  fi  purs  ne  peuvent  être  d'aucune  utilité  dans 
nos  ménages  ;  leur  mollefle ,  leur  flexibilité  y  met  un  obftacle  infur- 
montable  ;  il  faut  donc  que  l'art  leur  donne  uwe  certaine  roideur , 
un  certain  degré  de  folidité  qui  les  rendent  propres  à  conferver 
toutes  les  formes  que  la  nccefllté  ou  \t%  circonftances  obligent  le 
potier  à  donner  à  ce  métal;  or  pour  parvenir  à  ce  but,  on  a  eu 
recours  à  difFérens  alliages.  Recherches  fur  l' étain ,  par  MI'  Baycn  ^ 
Charlard ,  page  p  j. 

(f)   Hiftoire  générale  des  Voyages  ,  tome  I ,  page  2j, 

(t)   Lettres  édifiantes,  XJ.'  Recueil,  page  i6j. 


DES    Minéraux.  151 

l'étain  des  mines  de  leur  pays  (^nj;  on  en  a  trouvé  au 
Chily  dans  le  Corrégiment  de  Copiago  (x).  Au  Pérou, 
les  Incas  en  ont  fait  exploiter  cinq  mines  dans  le  diftri£t 
de  Charcas.  «  Il  s'eft  trouvé  quelquefois,  dit  Alphonfè 
Barba,  des  minerais  d'argent  dans  les  mines  d'étain,  &tou-  < 
jours  quantité  de  minerais  de  cuivre  :  il  ajoute  qu'une  des  < 
quatre  principales  veines  de  la  mine  de  Potoji  s'appelle  < 
étû'in,  à  caufe  de  la  quantité  de  ce  métal  qu'on  trouve  < 
fur  la  fuperficie  de  la  veine ,  laquelle  peu-à-peu  devient  < 
tout  argent  (y)  ».  On  voit  encore  par  cet  exemple  que 
i'étain ,  comme  le  plus  léger  des  métaux ,  les  a  prefque 
toujours  furmontés  dans  la  fufion  ou  calcination  par  le 
feu  primitif,  &  que  les  mines  primordiales  de  ce  métal 
fervent  pour  ainfi  dire  de  toit  ou  de  couvert  aux  mines 
des  autres  métaux  plus  pefàns. 

L'étain  s'allie  par  la  f-ifion  avec  toutes  les  matières 
métalliques,  il  gâte  l'argent  &.  l'or  fur -tout,  en  leur 
ôtant  leur  dudlilité ,  &  ce  n'eft  qu'en  le  calcinant  qu'on 
peut  le  féparer  de  ces  deux  métaux;  il  diminue  auiïi  la 
duélilité  du  cuivre,  &  rend  ces  trois  métaux  aigres, 
fonores  &  caffans  ;  il  donne  au  plomb  de  l'aigreur  & 
de  la  fermeté,  il  s'unit  très -bien  au  fer  chauffé  à  un 
degré  de  chaleur  médiocre  ;  &  lorfqu'on  le  mêle  par  la 
^  ■  ■     . — — — 

(u)  Hifloire  générale  des  Voyages,  tome  XII ,  page  6jo^ 

(x)  Idem,  tome  XIII ,  page  414- 

(y)  Métallurgie  d'AIphonfe  Barba,  tome  I,  page  114, 


152         Histoire    Natu relle 

fufion  avec  le  fer,  il  ne  le  rend  pas  fenfiblement  plus 
aigre.  Les  métaux  les  plus  ductiles  font  ceux  dont  Tétain 
détruit  le  plus  facilement  la  ténacité  ;  A  ne  faut  qu'une 
très  -  petite  dofè  d'étain  pour  altérer  l'or  &  l'argent , 
tandis  qu'il  faut  le  mêler  en  affez  grande  quantité  avec 
le  cuivre  &  le  plomb ,  pour  les  rendre  aigres  &  caffans  ; 
en  fondant  l'étain  à  partie  égale  avec  le  plomb ,  l'alliage 
efl  ce  que  les  Plombiers  appellent  de  la  foudiire,  &  ils 
l'emploient  en  effet,  pour  fouder  leurs  ouvrages  en 
plomb  :  au  refte ,  cet  alliage  mi-parti  de  plomb  &.  d'étain 
ne  laifTe  pas  d'avoir  un  peu  de  ductilité. 

L'étain  mêlé  par  la  fufion  avec  le  bi/muth  qui  fè 
fond  encore  plus  aifément  que  ce  métal,  en  devient 
plus  folide ,  plus  blanc  &  plus  brillant,  &  c'efl  proba- 
blement cet  alliage  de  bifmuth  &  d'étain  que  l'on 
connoît  aux  Indes  fous  le  nom  de  tmunac. 

Le  régule  d'antimoine  donne  à  l'étain  beaucoup  de 
dureté,  &  le  rend  en  même  temps  très-caffant;  il  n'en 
faut  qu'une  partie  fur  trois  cents  d'étain  pour  lui  donner 
de  la  rigidité,  &.  l'on  ne  peut  employer  ce  mélange  que 
pour  faire  des  cuillers,  fourchettes,  &  autres  ouvrages 
qui  ne  vont  point  fur  le  feu. 

L'alliage  de  l'étain  avec  le  zinc ,  eft  d'une  pefanteur 
fpécilique,  moindre  que  la  fomme  du  poids  des  deux; 
tandis  que  l'alliage  du  zinc  avec  tous  les  autres  métaux, 
efl  au  contraire  d'une  pefanteur  /pccifique,  plus  grande 
que  celle  des  deux  matières  prifes  enfemble, 

L'étain 


D  E  s    Ai  I  N  É  R  A  U  X,  153 

L*éiain  s'unit  avec  l'arfenic  &  avec  le  cobalt,  il 
devient  par  ces  mélanges  plus  dur ,  plus  fonore  &  plus 
cafTant  ;  M."  Bayen  &.  Charlard  afïïirent  qu'il  ne  faut 
qu'une  deux  cent  cinquante  -  fixième  partie  d'arfenic , 
fondue  avec  l'étain,  pour  le  rendre  aigre  &  hors  d'état 
d'être  employé  par  les  Ouvriers  (^):  fi  Von  mêle  une 
partie  d'arfenic  fur  cinq  d'étain  pur,  l'alliage  efl  fi 
fragile  qu'on  ne  peut  l'employer  à  aucun  ufage ,  &  une 
partie  far  quinze,  forme  un  alliage  qui  préfente  de  grandes 
facettes  aflez  femblables  à  celles  du  bifmuth,  &.  qui  efl 
plus  friable  que  le  zinc,  &  moins  flifible  que  l'étain. 

Ainfi  l'étain  peut  s'allier  avec  tous  les  métaux  & 
Jes  demi-métaux,  &l  l'ordre  de  fès  affinités  efl  le  fer,  le 
cuivre,  l'argent  &  l'or;  &.  quoiqu'il  fe  mêle  très-bien 
par  la  fufion  avec  le  plomb ,  il  a  moins  d'affinité  avec 
ce  métal  qu'avec  les  quatre  autres. 

L'étain  n'a  auffi  que  peu  d'affinité  avec  le  mercure, 
cependant  ils  adhèrent  enfemble  dans  l'étamage  des 
glaces ,  le  mercure  refte  interpofé  entre  la  feuille  d'étain 
&  le  verre;  il  donne  aux  glaces  la  puiffance  de  réfléchir 
la  lumière  avec  autant  de  force  que  le  métal  le  mieux 
poli  :  cependant  il  n'adhère  au  verre  que  par  fimple 
conta(5l,  &  Ion  union  avec  la  feuille  d'étain  efl  affez 
fuperacielle  ;  ce  n'efl  point  un  amalgame  auffi  parfait 
que  celui    de  l'or    ou   de  l'argent  ,   &.    les    boules  de 


(■^)    Recherches  chimiques  fur  l'étain,  page  ^S, 
Miner  AUX ,  Toiiie  II L  U 


154        Histoire    Naturelle 

mercure  (a)  auxquelles  on  attribue  la  propriété  de  purifier 
i'eau,  font  moins  un  alliage  ou  un  amalgame,  qu'un 
mélinge  iimple  &  peu  intime  d'étain  &  de  mercure. 

L'ctain  s'unit  au  foufre  par  la  fufion,  &  le  compofé 
qui  réfulte  de  cette  mixtion ,  efl  plus  difficile  à  fondre 
que  l'étain  ou  le  foufre  pris  féparcment. 

Tous  les  acides  agiffcnt  fiir  Tctain,  &  quelques-uns 
le  diffolvent  avec  la  plus  grande  énergie  ;  on  peut  même 
dire  qu'il  eft  non  -  feulement  diflbus ,  mais  calciné  par 
l'acide  nitreux,  &  cet  exemple,  comme  nombre  d'autres, 
démontre  affez  que  les  acides  n'agiffent  que  par  le  feu 
qu'ils  contiennent  (b) ,  Le  feu  de  l'acide  nitreux  exerce 


(a)  Trois  parties  de  mercure  ajoutées  à  douze  parties  d'étain  de 
Malac  ,  fondues  dans  une  marmite  de  fer  ,  &  coulées  dans  des  moules 
fphériques  ,  forment  les  boules  de  mercure ,  auxquelles  on  attribue  la 
vertu  de  purifier  J'eau  ,  à.  de  faire  périr  les  infedcs  qu'elle  contient  ; 
elles  acquièrent,  en  fe  refroidiflant,  aflez  de  folidité  pour  être  tranf- 
portées  :  lorfqu'on  veut  s'en  fervir,  on  les  met  dans  un  nouet  que 
l'on  fufpend  dans  l'eau ,  &  on  la  fait  bouillir  un  infiant.  Élémeus 
de  Chimie  ,  par  Al.  de   Morve  au  y    tome  III ,  pages  2  ^6  &  ^^a. 

(h)  Nota.  Je  ne  dois  pas  diOlmuler  que  la  raifon  des  Chinnfles 
efl  ici  bien  différente  de  la  mienne  ;  ils  difent  que  c'eft  en  prenant 
le  phlogiftique  de  l'étain  que  l'acide  nitreux  le  calcine ,  &  ih  pré- 
tendent le  prouver  ,  parce  que  dans  cette  opération  l'acide  prend  les 
mêmes  propriétés  que  lui  donne  le  charbon ,  &  que  l'éiain  qui  a 
pafTé  dans  l'acide  nitreux ,  quoique  non  dilTous ,  ne  fe  lailTe  pl^is 
difioudre,  &  que  par  conféquent  en  fuppofant  dans  cette  opération 
que  l'étain  fût  calciné  par  le  feu  de  l'acide,  il  devroit  brûler  de 
nouveau,  <5c  que  cependant  if  efl  de   fait  que   fa  chaux  d'étain  & 


D  E  s    Aï  I  N  É  R  A  U  X,  I  5  5 

fon  adion  avec  tant  de  violence  fur  l'étain  qu*ii  le 
fait  paffer ,  fans  fufion ,  de  ion  état  de  métal  à  celui 
d'une  chaux  tout  aufîi  l)lanche  &  tout  auiïi  peu  flifible 
que  la  potée ^  ou  chaux  produite  par  l'aélion  d'un  feu 
violent;  &  quoique  cet  acide  f.mble  dévorer  ce  métal, 
il  le  rend  néanmoins  avec  autant  de  facilité  qu'il  s'en 
cft  faid  ;  il  l'abandonne  en  s'élevant  en  vapeurs,  &  il 
conferve  fi  peu  d'adhéîion  avec  cette  chaux  métallic^uc» 
qu'on  ne  peut  pas  en  former  un  fel.  Le  nitre  projeté 
fur  l'étain  en  fufion  s'enflamme  avec  lui ,  &.  hâte  ià 
calcination,  comme  il  hâte  auffi  celle  des  autres  métaux 
qui  peuvent  fe  calciner  ou  brûler. 

L'acide  vitrioiique  au  contraire ,  ne  diflbut  l'érain 
que  lentement  &.  /ans  effervefcence  ;  il  faut  même  qu'il 
(bit  aide  d'un  peu  de  chaleur  pour  que  la  dilfolution 
commence,  &.  pendant  qu'elle  s'opère,  il  fe  forme  du 
foufre  qui  s'élève  en  vapeurs  blanches,  6l  qui  quelque- 
fois fumage  la  liqueur  comme  de  l'huile,  &.  fe  précipite 
par  le  refroidiffement.  Cette  diflblution  de  l'étain  par 
l'acide  vitrioiique,  donne  un  fel  compofé  de  criftaux 
en   petites  aiguilles  entrelaffées. 

l'acide  nitreux  n'ont  pli!s  aucune  a(îlion  l'un  fur  l'autre.  Cette  raifon 
des  Chimirtes  efl:  tirée  de  leur  ryllème  fur  le  phlogiflique  qu'ils 
mettent  enjeu  par -tout,  &  lors  même  qu'il  Ji'en  eft  nul  befoin. 
L'étain  contient  Çnns  doute  du  feu  &  de  l'air  fixe,  comme  tous  les 
autres  métaux;  mais  ici  le  feu  contenu  dans  l'acide  nitreux  fumt , 
comme  tout  autre  feu  étranger,  pour  produire  la  calcination  de  cç 
métal  fans  rien  emprunter  de  fon  phlogiftique. 

u  ij 


156        Histoire    N atu re lle 

L'acide  marin  exige  plus  de  chaleur  que  Tacicîc 
vitriolique  pour  difToudre  l'étaiii  ;  il  faut  que  ce  premier 
acide  foit  fumant;  les  vapeurs  qui  s'élèvent  pendant  cette 
diifolution  affez  lente,  ont  une  odeur  arfenicale;  la 
liqueur  de  cette  diffolution  eft  iàns  couleur,  &  limpide 
comme  de  l'eau,  elle  fe  cliange  prefque  toute  entière 
en  criftaux  par  le  refroidiiïement.  «  L'ctain,  dit  M.  de 
Morveau ,  a  une  plus  grande  affinité  avec  l'acide  marin 
que  plufieurs  autres  fubflances  métalliques ,  &:  même 
que  l'argent,  le  mercure  &  l'antimoine,  puifqu'il  décom- 
pofe  leurs  fels.  L'étain,  mêlé  avec  le  fùblimé  corrofif, 
dégage  le  mercure,  même  fans  le  fecours  de  la  chaleur, 
&.  l'on  tire  de  ce  mélange  à  la  diftillation,  un  efpric 
de  it\  très -fumant,  connu  fous  le  nom  de  liqueiit  de 
Libav'ms  (c)  ».  Aurefte,  les  crillaux  qui  fe  forment  dans 
la  diffolution  de  l'étain  par  l'acide  marin,  fe  réfolvent 
en  liqueur  par  la  plus  médiocre  chaleur,  &  même  par 
celle  de  la  température  de  l'air  en  été. 

L'eau  régale  n'a  pas  befoin  d'être  aidée  de  la  chaleur 
pour  attaquer  l'étain ,  elle  le  diffout  même  en  grande 
quantité  ;  une  eau  régale ,  faite  de  deux  parties  d'acide 
ifttreux  &  d'une  partie  d'acide  marin,  difîbut  très-bien 
moitié  de  fon  poids  d'étain  en  grenailles  (d) ,  même  à 

(c)  Elémens  de  Chimie,  par  M.  de  Morveau,  tome  II ,  pages 
2^8  &  ^S 9' 

(d)  Idein,  page  S73-  "  Cette  diiïblution ,  ajoute  ce  favant  Chi- 
»  niifte ,  fournit  quelquefois  des  criftaiiU  en  aiguilles  par  une  ^vapo- 
ration  trcs-Iente  ». 


DES   Minéraux.  1^7 

froid;  en  délayant  cette  difToIution  dans  une  grande 
quantité  d'eau ,  l'étain  fe  fépare  de  i'acide  fous  la  forme 
d'une  chaux  bianche  ;  Sl  lorfqu'on  méie  cette  difToIution 
avec  une  difToIution  d*or ,  faite  de  même  par  l'eau 
régale,  &  qu'on  les  délaie  dans  une  grande  quantité 
d'eau,  il  fe  forme  un  précipité  couleur  de  pourpre, 
connu  fous  le  nom  de  pourpre  de  Caffius,  &  précieux 
par  i'ufage  qu'on  en  fait  pour  les  émaux;  Tétain  a  donc 
non  -  feulement  la  puifTance  d'altérer  l'or  dans  fon  état 
de  métal,  mais  même  d'en  faire  une  ef]:)èce  de  chaux 
dans  fà  difToIution,  ce  qu'aucun  autre  agent  de  la 
Nature,  ni  même  l'Art,  ne  peuvent  faire.  C'eft  auiïi 
avec  cette  difToIution  d'étain  dans  l'eau  régale ,  que  Ton 
donne  aux  étoffes  de  laine  la  couleur  vive  &  éclatante 
de  l'écarlate  ,  fans  cela  le  cramoifi  &  le  pourpre  de  la 
cochenille  &  de  la  gomme  laque,  ne  pourroient  s'exalter 
en  couleur  de  feu. 

Les  acides  végétaux  agiffent  aufTi  fur  l'étain,  on  peut 
même  le  diffoudre  avec  le  vinaigre  diflillé  ;  la  crème 
de  tartre  l'attaque  plus  foiblement;  l'alkali  fixe  en  corrode 
la  furface  à  Taide  d'un  peu  de  chaleur  ;  mais ,  félon 
M.  de  Morveau,  il  réfifle  confiamment  à  l'aétion  de 
l'alkali  volatil  (e). 


(e)  L'étain  nous  a  paru  conflarnment  réfifter  à  l'adion  de  l'alkali 
volatil  cauftique  ,  malgré  que  quelques  Chimiftes  aient  avance'  que 
dans  la  dccompofition  du  vitriol  ammoniacal  par  l'étain  ,  l'alkali  volatil 


158        Histoire    Natv  relle 

Conficlérant  maintenant  les  rapports  de  l'ctain  avec 
les  autres  métaux,  nous  verrons  qu'il  a  tant  d'affinité 
avec  ie  fer  &.  le  cuivre,  qu'il  s'unit  &  s'incorpore  avec 
eux,  fans  qu'ils  foient  fondus  ni  même  rougis  à  blanc; 
ils  retiendront  Tétain  fondu  dès  que  leurs  pores  feront 
ouverts  par  la  chaleur,  &  qu'ils  commenceront  à  rougir; 
l'étain  enduira  leur  fiirface,  y  adhérera,  &  même  il  la 
pénétrera  &  s'unira  à  leur  fubftance  plus  intimement 
que  par  un  fimple  conta6l;  mais  il  faut  pour  cela  que 
leur  fuperiicie  foit  nette  &  pure,  c'efl-à-dire,  nettoyée 
de  toute  craiïe  ou  matière  étrangère;  car  en  générai 
les  métaux  ne  contradlenr  d'union  qu'enir'eux  &.  jamais 
avec  les  autres  fubflances;  il  faut  de  même  que  l'étain 
qu'on  veut  appliquer  à  la  furface  du  fer  ou  du  cuivre, 
foit  purgé  de  toute  matière  hétérogène,  &  qu'il  ne 
fbit  que  fondu  &  point  du  tout  calciné  ;  &.  comme 
le  degré  de  chaleur  qu'on  donne  au  fer  &  au  cuivre 
pour  recevoir  l'étamage  ,  ne  laifferoit  pas  de  calciner 
les  parties  de  l'étain  au  moment  de  leur  contaél,  on 
enduit  ces  métaux  avec  de  la  poix  réfme  ou  de  la 
graiffe  qui  revivifie  les  parties  calcinées ,  &  confèrve  à 
l'étain  fondu,  fon  état  de  métal  affez  de  temps  pour 
qu'on  puiffe  l'étendre  fur  toute  la  furface  que  l'on 
veut  étamer. 


entraîne  un  peu  de  ce  métal  qui  s'en  fépare  à  Ja  longue  ,  ou  qui 
eft  précipité  par  un  acide.  Éiémens  dt  Chimie,  par  M.  de  A/oryeau , 
tome  III,  page  s!.^6. 


DES   Minéraux,  159 

Au  rcfte,  cei  art  de  l'étamage,  quoiqu'auffi  imiver- 
fellement  répandu  qu'anciennement  ufité  (fj ,  &  qu'on 
n'a  imagine  que  pour  parer  aux  effets  funefles  du  cuivre, 
devroit  néanmoins  être  profcrit ,  ou  du  moins  fournis 
à  un  règlement  de  police,  fi  l'on  avoit  plus  de  foin 
de  la  famé  des  hommes  ;  car  les  Ouvriers  mêlent 
ordinairement  un  tiers  de  plomb  dans  l'ctain  pour  faire 
leur  étamage  fur  le  cuivre,  que  les  graiffes,  les  beurres, 
ies  huiles  &.  les  fels  changent  en  vert-de  -  cfris  :  or,  le 
plomb  produit  des  effets  à  la  vérité  plus  lents ,  mais  tout 
auffi  funeftes  que  le  cuivre  ;  on  ne  fait  donc  que  fubitituer 
un  mai  au  mal  qu'on  vouloit  éviter ,  &  que  même  on 
n'évite  pas  en  entier  ;  car  ie  vert-de-gris  perce  en  peu 
de  temps  le  mince  enduit  de  l'étamage ,  &  l'on  feroit 
épouvanté  fi  l'on  pouvoit  compter  le  nombre  des  viélimes 
du  cuivre  dans  nos  laboratoires  &  nos  cuifnies.  Au/îi  le 
fer  efl-il  bien  préférable  pour  ces  ufages  domeftiques, 
c'eft  ie  feul  de  tous  les  métaux  imparfaits  qui  n'ait  aucune 
qualité  funefle  ;  mais  iJ  noircit  Jes  viandes  &  tous  \çs 
autres  mets  ;  ii  lui  faut  donc  un  étamage  d'étain  pur , 
&  l'on  pourroit,  comme  nous  l'avons  dit,  s'affurer 
par   l'eau   régale   (g},  s'il    eft    exempt    d'arfenic,    & 

(fJ    Pline  en  parle  ;    Stannum   illitum  œneis  vafis  fapores  gratiores 
facït  ,    &    çompejlït    ccrugïnïs    virus.    HiH.    Nat.     lib.    XX  XIV, 
cap.  XVI. 

fg/    Les    érains  que    l'on    aj^pelle    purs,    font    encore   mélanges 
d'arfenic;  à  peine  font-iio  touches  par  l'eau  re'gale  qu'ils  fe  terniilent, 


i6o  Histoire  Naturelle 

n'employer  à  l'étamage  du  fer   que  de  i'étain  épuré  & 

éprouvé. 

On  fe  (èrt  de  réfine,  de  graiffe,  &  plus  efficacement 
encore  de  Tel  ammoniac,  pour  empêcher  la  calci- 
nation  de  l'étain  au  moment  de  fon  contad  avec  le 
fer.  En  plongeant  une  lame  de  fer  polie  dans  Tétain 
fondu,  elle  fè  couvrira  d'un  enduit  de  ce  métal;  &  l'on 
a  obfervé  qu'en  mettant  de  Tétain  dans  du  fer  fondu, 
ils  forment  enfemble  des  petits  globules  qui  décrépitent 
avec  explofion. 

Au  refle,  lorfqu'on  poufîe  l'étain,  ou  plutôt  la  chaux 
d'étain  à  un  feu  violent,  elle  s'allume  &  produit  une 
flamme  aiïez  vive  après  avoir  fumé  ;  on  a  recueilli  cette 
fiimée  métallique  qui  fe  conden/è  en  poudre  blanche. 
M.  Geoffroy  qui  a  fait  ces  ob/èrvations ,  remarque  aufîi 
que  dans  la  chaux  blanche  ou  potée  d'étain,  il  fe  forme 
quelquefois  des  parties  rouges  ;  ce  dernier  fait  me  paroît 
indiquer  qu'avec  un  certain  degré  de  feu ,  on  viendroit 
à  bout  de  faire  une  chaux  rouge  d'étain,  puifque   ce 

deviennent  noirs ,  &  fe  convertiflent  en  une  poudre  de  la  même 
couleur ,  dont  il  eft:  aifé  de  retirer  tout  l'arfenic  en  la  lavant  une  ou 
deux  fois  avec  un  peu  d'eau  diflillce ,  qui ,  diflolvant  le  fel  formé  par 
la  calcination  de  l'étain  avec  l'acide  régalifé ,  laiflera  au  fond  du  vafe 
environ  deux  grains  d'une  poudre  noire  qui  efl  du  véritable  arfenic. ,. 
L'arfenic ,  en  quelque  petite  proportion  qu'il  foit  mêlé  avec  l'étain , 
n'y  en  eût-il  que  TiTïv  ^^  nianifefte  encore  lorfqu'on  expofe  ce  mé- 
lange dans  l'eau  régale.  Recherches  Chimiques  fur  l'étain ,  par  At^* 
Bayen  &  Charlard ,  pages  ^8  àf  fuiv, 

n'eft 


DES    M  I  N  É  R  A  U  A'.  I  6  I 

n'cfl  qu'avec  un  certain  degré  de  feu  bien  détermine, 
&  ni  trop  fort  ni  trop  foible,  qu'on  donne  à  la  chaux 
de  plomb,  le  beau  rouge  du  minium. 

Nous  ne  pouvons  mieux  finir  cet  article  de  Tétain, 
qu'en  rapportant  les  bonnes  obfervations  que  M."  Bayen 
&  Cliarlard  ont  faites  fur  les  différens  étains  qui  font 
dans  le  commerce  C/i) ;  ils  en  diflinguent  trois  fortes. 


(h)  Nous  diviferons ,  difent-ils  ,  tout  IVtaia  qui  le  trouve  dans  (e 
commerce   intérieur  du  royaume. 

1."  En  étain  pur  ou  fans  aucun  mélange  artificiel,  tel  enfin  qu'il 
fort  des  fonderies;  2.°  en  t'tain  allié  dans  \e^  fonderies  m.ème  avec 
d'autres  métaux  à  des  titres  prefcrits  par  l'ul'age  ou  par  les  ioix  dn 
pays;  3."  en  étain  ouvragé  par  les  Potiers  c|ui  font  tenus  de  fe 
conformer  dans  tout  ce  qu'ils  font  concernant  leur  art ,  à  des  rè- 
glemens  anciennement  établis,   &  aujourd'hui  trop  peu  fuivis. 

L'étain  pur  ou  fans  mélange  artificiel  pourroit  nous  venir  d'An- 
gleterre, II,  à  ce  qu'on  allure",  l'exportation  nen  étoit  pas  prohibée 
parles  Ioix  du  pays.  Au  défaut  de  celui  d'Angleterre,  il  nous  en 
ell  apporté  en  allez  grande  quantité  des  Indes ....  On  nomme  ce 
dernier  éia'in  de  Banca  &  de  Aialaca ,  ou  fimplement  de  Malac  ; 
celui-ci  nous  arrive  en  petits  lingots  pefant  une  livre,  &  qui  ,  à  caufe 
de  leur  forme  ,  ont  été  appelés  petits  chapeaux  ou  écrho'ires. 

L'étain  qui  le  vend  fous  le  nom  de  Banca ,  fe  fait  diftinguer  du 
précédent ,  &  par  la  forme  de  fes  lingots  qui  font  oblongs ,  &  par 
leur  poids  qui  efk  de  quarante  -  cinq  à  cinquante  livres,  &  même 
au-defius:  du  refle,  ces  lingots  de  Banca  &  de  Malaca  n'ont  point 
l'éclat  ordinaire  à  l'étain  ,  ils  font  recouverts  d'une  forte  de  rouille 
grife  ou  craffe  ,  d'autant  plus  épailië  qu'ils  ont  féjourné  plus  long- 
temps dans  le  fond  des  Vaifleaux,  dont  ils  faifoient  vraiiemblable- 
ment  le  lefl .... 

Mincriiux ,  Tome  III.  X 


i62        Histoire  N atv relle 

1.°  l'ctaiii  tel  qu'il  fort  des  fonderies,  &  fans  mélange 
artiticiel  ;  2.°  i'étain  allié  dans  les  fonderies,  fiiivaiu 
l'ufage  ou  la  loi  des  dilîerens  pays  (ij;  3.  l'étaia 
ouvragé  par   les  Potiers  (kj .  Ces  habiles  Chimifles  ont 

II  nous  eft  arrivé  de  i'étain  pur  d'Angleterre  en  petits  morceaux 
ou  échantillons  pefant  chacun  entre  quatie  ik  cinq  onces;  leur  alped: 
annonce  qu'ils  ont  été  détachés  d'une  grofle  niafie  à  l'aide  du  ciléau 
&  du  marteau.  .  .  .  Les  côtés  par  où  ils  ont  été  coupés  ont  conferve 
l'éclat  métallique ,  tandis  que  le  côté  ou  la  fuperricie  externe  eft 
niamelonée  &  couverte  d'une  pellicule  dorée ,  qui  offre  aHez  fré- 
quemment les  différentes  couleurs   de  la  gorge   de  pigeon .... 

Nous  avons  trouvé  chez  un  marchand  de  I'étain  pur,  qu'il  nous 
affura  venir  d'Angleterre,  &  qui  en  effet  ne  différoit  en  rien  pour 
Ja  qualité  de  celui  dont  nous  vejions  de  parler,  cependant  il  avoil 
la  forme  de  petits  chapeaux  qui  pefoient  chacun  deux  livres .... 
Mais  nous  favons  que  les  marchands  font  dans  l'habitude  de  réduire 
ies  gros  lingots  en  petits,  pour  fe  faciliter  le  détail  de  I'étain...  . 
Tels  (ont  les  étains  qui  paffent  dans  le  commerce  pour  être  les  plus 
purs,  ou  ce  qui  eft  la  même  chofe,  pour  n'avoir  reçu  artificiellement 
aucun  alliage.  Recherches  Chimiques  fur  I'étain,  par  M!'  Bayen  & 
Charlard,  pages  22  &  fuivantes. 

(i)  La  féconde  claffe  de  I'étain  que  nous  examinons ,  comprend 
celui  que  nous  tirons  en  très-grande  quantité  de  l'Angleterre,  d'où 
on  nous  l'envoie  en  lingots,  d'environ  trois  cents  hvres;  nous  les 
appelons  gros  faumons.  Cet  étain  eft  d'un  grand  ufage  parmi  nous, 
&  il  le  débite  aux  differens  ouvriers  en  petites  baguettes  triangu- 
laires de  neuf  à  dix  lignes  de  pourtour,  &    d'environ    un  pied    & 

demi    de   long II  n'eft  pas  pur,  «5c   félon  M.  Geoffroy,  il  a 

reçu    en    Angleterre    même    l'alliage   prefcrit  par    la    loi    du  pays. 
Recherches  fur  I'étain  ,  &c.  pacre  2y. 

(k)   A  l'égard  de  la  troifième  claflè  ,  elle  renferme,  comme  nous 


DES    Minéraux.  163 

reconnu  par  des  comparaifons  exades  &  'multipliées, 
que  les  étains  de  Malaca  &  de  Banca,  ainfi  que  celui 
qu'ils  ont  reçu  d'Angleterre,  en  petits  cchantiilons  de 
quatre  à  cinq  onces,  &  auiïî  celui  qui  fe  yead  à  Paris, 
fous  le  nom  iïéiain  doux ,  ont  tous  le  plus  grand  & 
le  même  éclat  ;  qu'ils  réfiftent  également  <&  long-temps  , 
aux  impre/Tions  de  l'air  fans  (è  ternir  ;  qu'ils  font  les 
uns  &  les  autres  fi  du6liles  ou  extenfibles,  qu'on  peut 
aifëment  les  réduire  fous  le  marteau,  en  feuilles  au/Ti 
minces  que  le  plus  fin  papier,  fans  y  faire  de  gerçure; 
qu'on  en  peut  plier  une  verge  d'une  ligne  de  diamètre, 
quatre-vingts  fois  à  angle  droit  fans  la  rompre  ;  que  le 
cri  de  ces  étains  doux,  eft  différent  de  celui  des  étains 
aigres ,  &  qu'enfin  ces  étains  doux  de  quelques  pays 
qu'ils  viennent,  font  tous  de  la  même  denfité  ou  pefàn- 
leur  fpécifique  (l) . 


l'avons  dit,  tous  les  étains  ouvragés,  &  vendus  par  les  Potiers  d'étain  , 
fous  toutes  fortes  de  formes.  Le  premier  en  rang ,  eft  celui  qu'ils 
vendent  fous  la  marque  d'étain  fin  ;  le  fécond ,  fous  celle  d'étain 
commun ,  &  le  troificme  fous  le  nom  de  claire  étoffe  ou  fimplement 
de  claires.  Idem  ,  page  28, 

(l)   Recherches  fur  l'ctaîn,  par  M/'  Bayeii  &  Charlard,  y^^^iri 
2^  &  ^  Q' 


Xi; 


164  HisTO IRE  Naturelle 


D  U    P  L  0  Ad  B. 

JLE  PJomb ,  quoique  le  plus  clenfe  (a)  des  métaux 
après  l'or,  cft  le  moins  noble  de  tous;  il  efl  mou  /ans 
du6liiité,  &  il  a  plus  de  poids  que  de  valeur;  fes  qualités 
font  nuifiblcs  &  fes  émanations  iuneftes;  comme  ce  métal 
fc  calcine  aifément  &  qu'il  efl  prefque  auffi  fufiblc  que 
J'ctain,  ils  n'ont  tous  deux  pu  fupporter  rad;ion  du  feu 
primitif  fans  fe  convertir  en  cbaux;  auffi  le  plomb  ne  fe 
trouve  pas  plus  que  l'étain  dans  l'état  de  métal  ;  leurs 
mines  primordiales  font  toutes  en  nature  de  cbaux  ou  dans 
un  état  pyriteux;  elles  ont  fuivi  le  même  ordre,  fubi  les 
mêmes  effets  dans  leur  formation;  <&  la  différence  la 
plus  effcntielle  de  leurs  minerais ,  c'efl  q^ue  celui  du 
plomb  efl  exempt  d'arfenic ,  tandis  que  celui  de  fétain 
en  efl  toujours  mêlé,  ce  qui  femble  indiquer  q^wt  la 
formation  des  mines  d'étain  efl  poflérieure  à  celle  des 
mines  de  plomb. 

La  galène  de  plomb  efl  une  vraie  pyrite  ,  qui  peut 
le  décompofer  à  l'air  comme  les  autres  pyrites  ,  & 
dans  laquelle  efl  incorporée  la  cbaux  du  plomb  primitif, 
qu'il   faut   revivifier  par    notre  art  pour    la  réduire  en 


(o)  Selon  M.  Briflon,  le  pied  cube  de  plomb  fondu,  ccroui 
ou  non  écroui ,  pcfe  également  794  livres  1  o  onces  4  gros  44 
grains;  ainfi  ce  métal  n'eft  fufceptibie  d'aucune  comprefîlon,  d'aucun 
écrouiflement  par  la  percufljon. 


DES  Minéraux.  165 

métal  ;  on  peut  même  imiter  artificiellement  cette  pyrite 
ou  galène  en  fondant  du  foulVe  avec  le  plomb  ;  ie 
mélange  s'enfïamme  fur  le  feu,  &  laifTe  après  la  com- 
buflion  une  litharge  en  écailles,  qui  ne  fond  qu'après 
avoir  rougi,  &  fe  réunit  par  la  fufion  en  une  malTe 
noirâtre,  difpofée  en  lames  minces  &.  à  facettes,  fem- 
blables  à  celles  de  la  galène  naturelle  ;  le  foie  de  foufre 
convertit  aufii  la  cbaux  de  plomb  en  galène  ;  ainfi  l'on 
ne  peut  guère  douter  que  les  galènes  en  général  n'aient 
originairement  été  des  chaux  de  plomb,  auxquelles  l'ac- 
tion des  principes  du  foufre  aura  dopjié  cette  forme  de 
minéraliiation. 

Cette  galène  ou  ce  minerai  de  plomb  affeél:e  une  figure 
exahèdre  prefque  cubique  ;  fa  couleur  efi  à-peu-près  la 
même  que  celle  du  plomb  terni  par  l'air;  feulement 
elle  eft  un  peu  plus  foncée  &.  plus  luifante  ;  fa  pefanteur 
approche  auffi  de  celle  de  ce  métal  ;  mais  la  galène  en 
diffère,  en  ce  qu'elle  efl  cafTante  &  feuilletée  aiïez  irré- 
gulièrement ;  cWc  ne  fe  préfente  que  rarement  en  petites 
mafles  ifolées  (h)  ^  mais  pre/que  toujours  en  groupes 
de  cubes  appliqués  affez  régulièrement  les  uns  contre 
les  autres  ;  ces  pyrites  cubiques  de  plomb  varient  pour 
la  grandeur  ;   il  y  en  a  de  fi  petites  dans  certaines  mines  j 

(b)  M.  de  Grignon  m'a  dit  avoir  obfervé  dans  le  Limofin  ,  une 
niine  de  plomb,  qui  eft  en  criftaux  0(f\acdres ,  ilotes  ou  groupés 
par  une  ou  deux  faces;  cette  mine  gît  dans  du  fable  quartzeux 
Ic'gcrement  aglutinc. 


i66        Histoire  N aturelle 

qu'on  ne  les  aperçoit  qu'à  la  loupe,  &  dans  d'autres 
on  en  voit  qui  ont  plus  d'un  demi  -  pouce  en  toutes 
dimenfions  ;  il  y  a  de  ces  mines  dont  les  filons  font 
fi  minces  qu'on  a  peine  à  les  apercevoir  &  à  les 
fuivre,  tandis  qu'il  s'en  trouve  d'autres  qui  ont  plufieurs 
pieds  d'épai/Teur ,  &  c'efl  dans  les  cavités  de  ces  larges 
filons  que  la  galène  eil  en  groupes  plus  uniformes  &  en 
cubes  plus  réguliers;  le  quartz  e(t  ordinairement  mêlé 
avec  ces  galènes  de  première  formation  ;  c'efl  leur 
gangue  naturelle,  parce  que  la  fub/laiice  du  plomb  en 
état  de  chaux  a  primitivement  été  dépofée  dans  les 
fentes  du  quartz,  où  l'acide  efl  enfuite  venu  la  faifir 
h,  la  mincralifer.  Souvent  cette  fubftance  du  plomb 
s'eft  trouvée  mêlée  avec  d'autres  minerais  métalliques; 
car  les  galènes  contiennent  communément  du  fer  ik.  une 
petite  quantité  d'argent  (c) ,  &  dans  leurs  groupes  on 
voit  fbuvcnt  des  petites  maffes  interpofées  qui  font  pure- 
ment pyriteufes,  &  ne  contiennent  point  de  plomb. 

Comme  ce  métal  ie  convertit  en  chaux,  non-feulement 
par  le  feu ,  mais  au/Ti  par  les  élémens  humides ,  on  trouve 
quelquefois  dans  le  fein  de  la  terre  des  mines  en  cérufè, 
qui  n'efl;  qu'une  chaux  de  plomb  produite  par  Wcià^  de 
l'humidité;  ces  mines  en  cérufe  ne  font  point  pyriteuiès 


(c)  On  ne  connoît  gucte  que  la  mine  de  Wïllach  en  Carinthie  , 
qui  ne  contienne  point  d'argent;  &  on  a  remarqué  qu'aHez  ordi- 
nairement plus  les  grains  de  la  galène  l'ont  petits ,  &  plus  le  minerai 


ell   riche  en  argent. 


DES    Minéraux,  i  67 

comme  la  galène  ;  prefque  toujours  on  les  trouve  mêlées  de 
plufieurs  autres  matières  métalliques  qui  ont  été  clécompo- 
Tces  en  même  temps ,  &  qui  toutes  fcmt  de  troffième  for- 
mation. Car  avant  cette  déccmpolition  du  plomb  en  ccrufe, 
on  peut  compter  plufieurs  degrés  &  nuances  par  lejfquels 
la  galène  paflè  de  fou  premier  état  à  des  formes  iuc- 
ceflives;  d'abord  elle  devient  chatoyante  a  /à  iùrfàce, 
&  à  mefurc  qu'elle  avance  dans  fz  décompofition,  cWc 
perd  de  Ton  brillant,  &  prend  des  couleurs  rougeûtres 
&  verdâtres.  Nous  parlerons  dans  la  fuite  de  ces  diffé- 
rentes efpèces  de  mines,  qui  toutes  font  d'un  temps 
bien  pofléricur  à  celui  de  la  formation  de  la  galène ,  qu'on 
doit  regarder  comme  la  mère  de  toutes  les  autres  mines 
de  plomb. 

La  manière  de  traiter  ces  mines  en  galène,  quoique 
aflez  fmipk,  n'eft  peut-être  pas  encore  affez  connue. 
On  commence  par  concafîèr  le  minerai,  on  le  grille 
enfiiite  en  ne  lui  donnant  d'abord  que  peu  de  feu;  on 
l'étend  fur  l'aire  d'un  fourneau  qu'on  chauffe  graduel- 
lement; on  remue  la  matière  de  temps  en  temps,  & 
d'autant  plus  fouvent  qu'elle  eft  en  plus  grande  quantité. 
S'il  y  en  a  20  quintaux,  il  faut  un  feu  gradué  de  cinq 
ou  fix  heures;  on  jette  de  la  poudre  de  charbon  fur 
le  minerai  afin  d'opérer  la  combufîion  des  parties  fui- 
fureufes  qu'il  contient;  ce  charbon,  en  s 'enflammant , 
emporte  auffi  l'air  fixe  de  la  chaux  métallique;  elle  fe 
réduit  dès-iors  en  métal  coulant  à  mtfiire  qu'on  remue 


i68        Histoire  N atu relle 

le  minerai  &  qu'on  augmente  le  feu,  on  a  foin  Je 
recueillir  le  métal  clans  un  bafTin  où  l'on  doit  le  couvrir 
auiïi  de  poudre  de  cliarbon  pour  prcierver  fà  furface 
de  toute  calcination:  on  emploie  ordinairement  quinze 
heures  pour  tirer  tout  le  plomb  contenu  dans  vingt 
quintaux  de  mine,  &  cela  fe  fait  à  trois  reprifes  diffé- 
rentes ;  le  métal  provenant  de  la  première  coulée  qui 
fc  fait  au  bout  de  neuf  heures  de  feu ,  fe  met  à  part 
lorfque  la  mine  de  plomb  contient  de  l'argent  ;  car 
alors  le  métal  qu'on  recueille  à  cette  première  coulée, 
en  contient  plus  que  celui  des  coulées  fubféquentes.  La 
féconde  coulée  fe  fait  après  trois  autres  heures  de  feu , 
elle  efl  moins  riche  en  argent  que  la  première  ;  enfin 
la  troifième  «Se  dernière,  qui  efl  au/Fi  la  plus  pauvre  en 
argent,  fe  fait  encore  trois  heures  après;  &  cette  manière 
d'extraire  le  métal  à  plufieurs  reprifes,  efl  très-avanta- 
geufe  dans  les  travaux  en  grand ,  parce  que  Ton  concentre 
pour  ainli  dire,  par  cette  pratique,  tout  l'argent  dans 
la  première  coulée  ,  fur  -  tout  lorfque  la  mine  n'en 
contient  qu'une  petite  quantité  ;  ainfi  on  n'efl  pas  obfigé 
de  rechercher  l'argent  dans  la  maffe  entière  du  plomb, 
mais  feulement  dans  la  portion  de  cette  maiïe  qui  efl 
fondue  la  première  (à). 

Nous  avons  en  France   plufieurs  mines  de  plomb, 

(d)  Obfervatioiis  métallurgiques  de  M.  Jars;  Mémoires  de  f Aca- 
démie des  Sciences,  année   i  yyo  ,  page  J  i  J' 

dont 


D  E  s   Al  I  N  É  R  A  U  X,  169 

dont  quelques-unes  font  fort  abondantes  &  en  pleine 
exploitation:  celles  de  la  Croix  en  Lorraine,  donnent 
du  plomb,  de  l'argent  &  du  cuivre.  Celle  de  Hargenthen 
dans  la  Lorraine  -  allemande ,  efl  remarquable  en  ce 
qu'elle  fe  trouve  mêlée  avec  du  charbon  de  terre  (e): 
cette  circonftance  démontre  afTez  que  c'efl  une  mine 
de  féconde  formation.  Au  Val-Saint e- Marie ,  la  mine  a 
les  couleurs  de  l'iris ,  &  eft  en  grains  affez  gros  ;  celles 
de  Sainte  -  Marie  -  aux  -  Mines  &.  celles  de  Stenbach  en 
Al/àce,  contiennent  de  l'argent  ;  celles  du  village  à'  Au- 
xelles  n'en  tiennent  que  peu,  &  eniin  les  mines  de 
cTa/zz/  -  'Nicolas  &  à^AJlenbach ,  font  de  plomb  &  de 
cuivre  (fj. 

Dans  la  Franche-comté,  on  a  reconnu  un  filon  de 
plomb  à  Teruan,  à  trois  lieues  de  Château -Lambert; 
d'autres  à  Frêne,  à  Plancher-lès-Mines ,  àBody,  &c. 

En  Dauphiné,  on  exploite  une  mine  de  plomb  dans 
la  montagne  de  Vie?me;  on  en  a  abandonné  une  autre 
au  village  de  la  Pierre,  diocèfè  de  Gap,- parce  que  les 
filons  font  devenus  trop  petits  ;  il  s'en  trouve  une 
à  deux  lieues  du  bourg  (ÏOifans,  qui  a  donné  cin- 
quante-neuf livres  de  plomb  &  quinze  deniers  d'argent 
par  quintal   (g). 

(e)  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Scl:ilutter,  tome  I,  page  S. 

(f)  Idem,  pages  11  &  j  2* 

(g)  Idem,  tome  I ,  pages  i ^  &  fuivantes. 

ATinéraiix  f  Tome  III,  Y 


\jo        Histoire  Naturelle 

En  Provence,  on  en  connoît  trois  ou  quatre  ^/i), 
&  plufieurs  dans  le  Vivarais  (i) ,  le  Languedoc  (k), 
Je  Rouiïillon  (IJ  &  le  comté  de  Foix  (mj ,  le  pays  de 
Comminges  (n).  On   trouve  au/Ti  pluiicurs   mines  de 


(h)  En  Provence  ,  il  y  a  des  mines  de  plomb  au  territoire  de 
Ramatuelle ,  dans  celui  de  la  Roque;  à  Beaujeu  ,  au  territoire  de  la 
Nolle  ;  dans  celui  de  Luc,  diocèfe  de  Frtjus,  6iC.  Tralié  Je  la  foute 
des  ÂJines  Je   Sihluiier,   tome  I,  jniç^e  21, 

(ij   Dans  le  Vivarais,   fix  inine^  de  ploinl)  tenant  argent,  près   de 

Tournon Autres  mines  de  plomb  à  BayarJ ,  diocèfe  d'Uzès; 

dans  le  njtme  territoire  de  Ba.)ard,  il  y  a  d'autres  mines  de  j)lumb  à 
HanciJne  &  à  Saint-Loup,  .  .  d'autres  à  une  lieue  de  Nancé ,  paroiiîe 
de  Bahours ,  tenant  plomb  &  ar^^ent.  iJem,  pcigei  2  2  if  2^, 

(k/  En  Languedoc,  il  y  a  des  mines  de  plomb  à  Pierre  Cervife, 
à  Auriiic ,  à  Cofcalely  qui  donnent  du  cuivie,  du  plomb  &  de  l'an- 
timoine. ...  11  y  en  a  d'autres  daiis  ia  juonia^ne  jioire  près  la  Aallc'e 
de  Corbicres.   IJem  ,  page  2  6 . 

(l)  Dans  le  Rouflillon  ,  il  y  a  une  mine  de  plomb  entre  les  territoires 
de  Prat'cs  £•.  ceux  de  Alanere  &  Serra  Lortga.  .  .  .  Autres  mines  de 
plomb  à  rognons  dan.s  le  territoire  de  Torigna  ;  cç%  mines  foiii  en  partie 
dans  les  vignes  ,  &  on  tes  découvre  aprcs  des  pliJies  d'orage  ;  les  Paylans 
en  vendent  le  minerai  aux  Potiers.  ...  La  niême  province  renferme 
encore  d'autres  mines  femblables.  Liem  ,  pnge  j  j  . 

(m)  Dans  Je  comte  de   Foix  ,    mines    de   plomb  tenant  argent  à 

\ Afpie Autre  mine  de  plomb  dans  la  montagne  de  AiontrovjlanJ,... 

Autre    au   village  de  Pejcbe  près  Chîiteau-Verdun Autre  dans 

les  environs  d' Arques ,  qui  elt  en  feuillets  fort  ferrés  &  très-pefaus. 
JJem ,  page  4  1 . 

(n)  )J)M-\i  le  comté  de  Comminges,  il  y  a  ime  belle  mine  de 
plomb  près  JenJs,    dans  la  valke  de  Loron Uiie  autre  dans    la 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  171 

plomb  dans    le  Bigorre  fo),  le  Béarn  (^f)   &.  la  baffe 
Navarre  fi/^. 

Ces  provinces  ne  font  pas  les  feules  en  France, 
dans  lefquelles  on  ait  découvert  &  travaille  des  mines 
de    plomb ,    il  s'en    trouve    au/fi ,   &    même    de    très- 


vallée  à! Arboujî ,  tenant  argent Une  autre  tenant  anfll  argent, 

dans  la   vallée   de   Luchon ,  . . . .     &  d'autres   dans   la   ville   de  L}ge , 
&.   dans   la   montagne     Souquette  ;     cette  dernière    tient    argent    & 

or La  montagne  de    Geveiran   efl:  pleine  de   mines    de    plomb 

&  de  mines  d'argent ,  que  les  Romains  ont  travaillées  autrefois 

Il  y  a  encore  plulieurs  auires  mines  de  plomb  dans  le  même  Comté. 
Traité  de    la  fonte  des  Mines   de  Schlutter,    tome  I ,  p^^^s  ^^    Ù' 
ftiivantes. 

(0)  Dans  le  Bigorre ,   il  y  a  une  mine  de  cuivre  verte  à  Gaver'in...» 

Une  autre  à  Confrette ,    au-delîus  de  Barrage Dans  la  montagne 

de  Cajlillan    proche  Peyre-Fite ,  il  y  a  des  mines  de  plomb  <ju'on  ne 
peut  travailler  que  trois  ou  quatre  mois  de  l'année  ,  à  caule  des  neiges..., 

Autres  mines  de  plomb  à  Stnix ,  dans  la  vallée  d' Àuiun A  Por- 

chyite  fie  dans  plufieurs  autres  lieux  du  Bigorre.  Idem  , pages  ^6  &  4j. 

(p)  Dans  le  Béarn,   il  y  a  une  mine  de  plomb  fur  la  montagne 
de  Hahal ,   à  cinq  lieues   de  Larmes ,  qui  ell:  en  exploitation,   bi.  qui 

rend  cinquante  pour  cent Et  une  autre  mine  de  plomb  dans  la 

montagne  de  Alonheins.    Idem  ,  pages  j  0   ^  j  2, 

(q)    Dans  la  baiïè  Navarre,    la  montagne   à' Agella ,  qui  borne  la 

vallée  d'Aure,   renferme  plufieurs  mmes  de  plomb  tenant  argent 

Celle  (ï Avadec  contient  audi  une  mine  de   j)lomb   tenant  argent 

Dans  les   Pyrénées ,    il  y   a  de  même  des  mines   de  plomb  dans  la 

montagne  de  Belonca Dans  celle  de  Ludens de  Porlufon, 

de   Vtiran,   &.  plufieurs  autres  endroits.  Idem,  pages  j^f,   yj,  // 
^  fuiv. 


172         Histoire  Natu relle 

bonnes  dans  le  Lyonnois  (r),  le  Beauj.oIois  (f),  le 
Rouergue  (rj,  le  Limofjn  (uj,  l'Auvergne  {xj ,  le 
Bourbonnois  (y) ,  l'Anjou  (i) ,  la  province    de   Nor- 

/rj  Dans  le  Lyonnois,  il  y  a  des  mines  de  plomb  près  Sûint- 
Aldri'in  de  la  Plaine .  .  .  .  D 'autres  près  de  Tarrare ,  dont  \es  échan- 
tillons n'ont  donné  que  huit  livres  de  plomb  &  trente  grains  d'argent 
par  quintal.  Idem,  p^ge  S  ' ' 

(f)  Dans  le  Beaujolois  ,  il  y  a  des  mines  de  plomb  près  du  Rhône, 

dans  un  lieu  nommé  Guyon D'autres  à   Confens  en  Fores,    à 

Saint-Julien-  Afolïn-  Alolette .  &c.  il  y  en  a  encore  plufieurs  autres 
dans  cette  province.  Traité  de  la  fonte  des  Alines  de  Scldutter ,  tome  I , 
page  ^2. 

(t)  Idem ,  page  j»  0 . 

(u)   Dans   le    Limofin,  il  y  a  une  mine    de  j)lomb  à  Fargens ,  à 

une  demi-lieue  de  Tralage Une  autre  dans  la  paroifle  de  Vicq, 

éieclion  de  Limoges,  &  à  Saint  -  Hilaire  une  autre  mine  de  plomb 
tenant  étain  ;  il  y  a  encore  d'autres  mines  de  plomb  qu'on  foupçonne 

tenir  de  l'éiain.  Idem ,  page  j^ Les  meilleures  mines  de  plomb 

du  Limofin  font  celles  de  Glanges  ,  Alercœur  &  I(foudun  ;  cette 
dernière  donne  foixante  -  cinq  à  foixante  -  dix  livres  de  plomb  par 
quintal  de  minerai;  mais  ce  filon  eft  très -mince.  Note  communiquée 
par  AI.  de  Grignon  ,   en  Oéîobre  lySi, 

(x)  En  Auvergne,  il  y  a  une  mine  de  plomb  à  Comhres ,  à  deux 
lieues  de  Pontgibaud  ;  elle  ne  rend  que  cinq  livres  de  plomb  par 
quintal ,  mais   cent  livres  de  ce  plomb  donnent  deux    marcs  &    une 

once  d'argent;  elle  cfl:  abandonnée Il   y  a  d'autres   mines  de 

plomb  à  Chades ,  entre  Riom  &  Pontgibaud ,  &  d'autres  dans 
i'éledion  de  Riom.  Traité  de  la  fonte  des  Mines,  par  Schlutter,  tome  I, 
pages  60  &  61. 

(y)  Dans  le  Bourbonnois  ,  il  y  a  des  mines  de  plojnb  dans  l'enclos 

des  Chartreux  de  Moulins  ,  &  dans  le  village  d'Unes.  Idem  ,  page  62. 

(l)  En  An/ou,  félon  Pigaaiiol,  il  y  a  des  mines  de  plomb  dans 


DES  Minéraux.  173 

mandie  (^dj  &.  ia  Bretagne  (èj^  où  celles  de  Poînpéan  & 
de  Poidawen  font  exploitées  avec  fuccès  ;  on  peut  même 
dire  que  celle  de  Pompéan  eft  la  plus  riche  qui  foit 
en  France,  &  peut-être  en  Europe:  nous  en  avons  au 
Cabinet  du  Roi,  un  trcs-gro^Ét  très-pefant  morceau, 
qui  m'a  été  donné  par  feu  M.  le  chevalier  d'Arcy, 
de  l'Académie  des  Sciences. 

M.  de  Genfanne,  l'un  de  nos  plus  habiles  Minéra- 
logiftes,  a  fait  de  bonnes  obfervations  fur  la  plupart 
de  ces  mines;  il  dit  que  dans  le  Gévaudan  ,  on  en 
trouve  en  une  infinité  d'endroits ,  que  celle  à' Alern, 
qui  eft  à  grofles  mailles ,  efl;  connue  dans  le  pays  fous 
le  nom  de  vernis ^  parce  que  les  habitans  la  vendent  aux 
Potiers  pour  verniffer  leurs  terreries;  il  ajoute  que  les 
veines  de  cette  mine  font  pour  la  plupart  horizontales , 
&.  difperfées  fans  fuite  dans  une  pierre  calcaire  fort 
dure  (c) .  On  trouve   auffi  de  cette  mine  à  vernis  en 

\à  paro'ijfe  de  Cor  celle Une  autre  à  ATontrevaux  ;   cette  dernière 

a  été  travaillée  &  enfuite  abandonnée.  Idem ,  page  6 j^, 

(a)  En  Normandie  ,  il  y  a  une  mine  de  plomb  à  Picrreville ,  auprès 
de  Falaife.   Idem,  page  68. 

(b)  En  Bretagne  ,  il  y  a  une  mine  de  plomb  à  Pompéan;  en  1733 
&  1734»  le  minerai  donnoit  jufqu'à  foixante-dix-fept  livres  pour  cent 
de  plomb ,    &    ce   plomb    rendoit  trois  onces   au  plus  d'argent  par 

(juintal Il  y  a  encore  d'autres  mines  de  plomb  à  Borîen  y  Serw 

gnat-,  Poulûwen ,  Ploué ,  Loquefré ,  le  Prieuré,  la  FeuUlée ,  Ploué- 
Normïnais  y  Carnot ,  Plucquets  .Trebïran,  Paul  &  Melcarchais.  Traité 
àJe  la  fonte  des   Mines  de  Schlutter ,  tome  I,  page  yo. 

(c)  Hiftoire  Naturelle  du  Languedoc,  tome  III ,  page  22 j> 


174       Histoire    N  atu  r  e  lle 

grofles  lames  auprès  de  Combene ,  paroifTe  à' Iffa- 
e'UiK  (d) .  Le  dodeur  Aflruc  avoit  parlé  pluficurs  années 
auparavant,  d'une  femblable  mine  près  Aç,Durford,  dans 
le  diocèfe  d'Alais ,  qu'on  employoit  auffi  pour  verniirer 
ies  poteries  (e)  .^\.  deGenfanne  a  ob/èrvé  dans  les  mines 
de  plomb  de  P/^/vv-/.^^^  ^  diocèfe  d'Uzès,  que  l'un  des 
filons  donne  quelquefois  de  l'argent  pur  en  filigranes, 
&  qu'en  générai,  ces  mines  rendent  quarante  livres  de 
plomb ,  &  deux  ou  trois  onces  d'argent  par  quintal  ;  mais 
il  dit  que  le  minerai  eft  de  très-difficile  fufion  ,  parce 
qu'il  eft   intimement  iXi^Xè  avec  de  la  pierre  cornée. 

Dans  la  montagne  de  Mat-imèert,  il  y  a  deux  gros 
filons  de  mines  de  plomb  riche  en  argent;  ces  fiions, 
qui  ont  aujourd'hui  trois  à  quatre  toifes  d'cpaiffeur  d'un 
très  -  beau  fpath  piqueté  de  minéral ,  traverfent  deux 
montagnes,  &  paroilfent  fur  plus  d'une  lieue  de  longueur; 
il  y  a  des  endroits  où  leur  gangue  s'élève  au  -  deffus 
du  terrein  de  cinq  à  fix  toifes  de  hauteur  (fj.  Cet 
habile  Minéralogille  cite  encore  un  grand  nombre 
d'autres  mines  de  plomb  dans  le  Languedoc ,  dont 
plufieurs  contiennent  un  peu  d'argent  ,  &  dont  le 
minéral  paroît  prefque  par-tout  à  la  furface  de  la  terre. 
«  Près  des  bains  de  la  Malon ,  diocèfe  de  Béfiers  ,  on 
n  ramaffe ,  dit  -  il ,  prefque  à  la  furface  du   terrein ,   des 

(d)  Hiitoiie  Naturd/ç  du  Languedoc,  tome  III,  page  ^jS. 

(e)  Bibliothèque   raifonnée,  Juillet,  Août  &  Septembre  1759. 

(f)  Hiftuire  Naturelle   du   Languedoc,    par   M.   de  Genfanne, 
tome  II,  p^gcs  i  6 ^  &  I  6 ^1 


DES    Minéraux.  175 

morceaux  de  mine  de  plomb  difperfcs  &  enveloppés  « 
dans  un  ocre  jaunâtre  ;  il  règne  tout  le  long  de  ce  vallon,  « 
une  quantité  de  veines  de  plomb,  d'argent  &.  de  cuivre  ;  « 
ces  veines  font  la  plupart  recouvertes  par  une  cfj)èce  de  « 
minéral  ferrugineux  d'un  rouge  de  cinabre  ,  &  tout-  « 
à-fait  fèmblable  à  de   la   mine  de  mercure  fgj  ». 

Dans  le  Vivarais,  M.  de  Genfanne  indique  les  mines 
de  plomb  de  Y Are^entière  ;  celles  des  montagnes  voifincs 
de  la  rivière  de  la  Douce;  celles  de  Suhit  -  Laiircni- 
les-hams,  du  vallon  de  yî%)r^j^  &  plufieurs  autres  qui 
méritent  également  d'être  remarquées  (h) ;  il  en  a  auni 

^rr^  Hidoire  Nature''e  du  Languedoc,  par  M.  de  Cenlanne, 
tome  11 ,  pages   J  6 ^  c>"    i  6 ^. 

(h)   La  petite  ville    de  rArgenticre  en  Vivarais,    tire  Ton  nom 

des  mines  de  ploiub  &   argent  qu'on    y   exploitoit  autrefois 

]1  n'y  a  point  de  veines  réglées  ;' le  minerai  .s'y  trouve  difperfc  dans 
un  grès  très-dur  ,  ou  efpèce  de  granit ,  qui  forme  la  niafie  des  mon- 
tagnes qui  environnent  l'Argentière.  Ce  minerai  efl  à  grains  fins, 
iemblables  aux  grains  d'acier;  il  rend  au  -  delà  de  foixante  livres  de 
plomb,  6c  depuis  quatre  jufqu'à  cinq  onces  d'argent  auquirual..  .  , 
11  n'y  a  que  la  crête  de  ces  montagnes  qui  ait  tté  attaquée,  6:  il 
i.'tw  faut  bien  que  le  minerai  y  loit  épuifè Il  y  a  fur  ces  mon- 
ta unes ,  depuis  }^ûls  jufqu'à  la  rivière  de  la  Douce,  dans  la  j^aroifle 
de  Serre-mejames ,  quantité  d'indices  de  mines  de  plomb;  jiiais  un 
phénomène  bien  fmgulier,  c'eft  qu'on  trouve  fur  la  furfacc  de  ce 
terrein  des  morceaux  de  mines  de  plomb  plâtreux,  lemblables  à  de 
la  pierre  à   chaux ^     qui    renferment  des   grains   de  jjlomb    naturel, 

dont  quelques-uns  pèlent  jufqu'à  demi-once La  matière  dure 

&  terreufe  qui  renferme  ces  grains,  rend  elle-même  jufqu'au  -  delà 
de  quatre-vingts  pour  cent  de  ])lomb 


176  Histoire  Naturelle 

reconnu  quelques   autres   dans  différens  endroits  de  la 
province  du  Vélay  (i) .  En 

En  defcendant  de  ces  hautes  montagnes  dans  le  vallon  de  Sû'int^ 
Laurent-lcs-baïns ,  nous  avons  remarque  quelques  veines  de  mines 
de  ploinb.  II  y  en  a  une  fur-tout  confiderabie  au  bas  de  ce  village, 
fur  fa  furface  de  laquelle  on  Remarque  plufieurs  filets  de  Ipaih  d'une 
très-belle  couleur  d'améthyfte 

Il  y  a  peu  de  cantons  dans  le  Languedoc,  où  il  y  ait  autant  de 
minéraux  que  le  long  du  vallon  de  Alayres ,  fur-tout  aux  montagnes 
qui  font  au  midi  de  cette  vallée.  Ga  commence  à  apercevoir  les 
veines  de  ces  minéraux  auprès  de  la  Narce ,  village  fitué  fur  la  mon- 
tagne du  côté  de  la  Chajfade.    II  y  a  auprès  des  Artch une 

montagne  qui  nous  a  paru  toute  compofée  de  mines  de  plomb  &:  argent. 
On  en  trouve  des  veines  confidérables  au  pied  du  village  de  Mayres. 

En  montant  du  Chayla ,  au  bas  du  château  delà  Chaife,  oï\  trouve 
près  du  chemin  un  très  -  beau  filon  de  mine  de  plomb.  II  y  en  a 
plufieurs  de  même  nature  près  le  village  de  Saint-  /Michel. 

La  montagne  qui  s'étend  depuis  Beaulieu  à  Ethlfes ,  jufqu'au-delà 
de  Vincieux ,  eft  traverfée  par  un  grand  nombre  de  filons  de  mine 
de  plomb  ,  dont  une  grande  partie  ell  exploitée  par  M.  de  Plumefeïn , 

qui  en  a  la  conceffion  de  Sa    Majeflc Le  filon  d'Eî/i}fes  a 

environ   deux    pieds     de    largeur ,    &    efl    entre  -  mêlé    d'une    terre 

noire Le   filon  de  BrouJJîrî   eft    magnifique.  ...    II   y   a  des 

endroits  où  le  minéral  pur  a  près  de  quatre  pieds  de  largeur.  .  .  . 
Comme  ce  minéral  ne  tient  prefque  pas  d'argent ,  on  en  fépar^  le 
plus  pur  pour  les  Potiers  du  diocèfe ,  fous  le  nom  de  vernis.  Le 
furplus ,  qui  fe  trouve  mêlé  de  blende  ou  de  roche ,  eft  porté  à  la 
fonderie  de  Saint  -  Julien,  où  l'on  en  extrait  le  plomb.  ...  II  y  a 
un  autre  filon  de  mine  de  plomb  à  Baley,  paroifi'e  de  Talancieux , 
qui  n'eft  pas  riche.  Hijloire  Naturelle  du  Languedoc  par  M.  de  Gen- 
Jannc  ^    tome  III ,  pages   lyS  &  fuiv. 

(i)   On    trouve  dans    le    canton  (  de    la  paroijfe    de   Brignon    en 

Vtlay  ) 


DES  Minéraux.  177 

Ea  Franche  -  comté ,  à  Plancher  -  les  -  Mines  dans  la 
grande  moniague ,  les  mines  font  de  plomb  &  d'argent; 
elles  font  ouvertes  de  temps  immémorial ,  &  on  y  a 
fait  des  travaux  immenfès  :  on  voit  à  Baitdy  près  de 
Chute  au- Lambert,  un  filon  qui  règne  tout  le  long  d'une 
petite  plaine  fur  le  fbmmet  de  la  montagne.  Cette  veine 
de  plomb  efl  fous  une  roche  de  granit,  d'environ 
trois  toiiès  d'épaiffeur,  &  qui  reffemble  à  une  voûte 
en  pierres  sèches  qu  on  auroit  faite  exprès  ,  elle 
s*étend  fur  toute  la  longueur  de  la  plaine  en  forme  de 
crête  (k) .  Nous  obferverons  fur  cela  que  cette  roche 

^_^_.  _  Il  -  I  11  ri 

Vélay ) ,  une  très-belle  mine  de  plomb ,  dont  la  veine  efl  trcs-bieii 
carade'rifee.  .  .  .  Nous  avons  trouve  dans  les  bois  voifins  de  Verftllac, 
un  très-beau  fîlon  de  mine  de  plomb.  .  .  .  Du  côté  d'Icenjaux,  nous 
avons  reconnu  en  difFérens  endroits ,   des  marques  très-caradérifëes 

de  mine    de  plomb Vers    Saint- Alaurice- de  -  Lignan  &.  de 

Prun'ùres ,  nous  avons  trouvé  quantité  de  marques  de  mine  de  plomb 

parmi  les   rocliers   de   granits On  voit   auprès  de  Aionijlrol , 

plufieurs  anciens  travaux  fur  à^i  mines  de  plomb; celle  qu'on  appelle 
la  Bqt'u  eft  des  plus  confidérables.  Les  gens  du  pays  nous  ont 
afTuré  qu'il  y  a  beaucoup  de  minéral  dans  le  fond  des  travaux  qui 
ne  font  qu'à  vingt-cinq  toifes  de  profondeur;  mais  qu'on  avoit  été 
obligé  de  les  abandonner ,  à  caufe  de  la  quantité  d'eau  qui  s'y  trou- 
voit.  ...  A  peu  de  diftance  de  cet  endroit  eft  la  mine  de  Nant, 
dont  on  vend  le  minéral  aux  Potiers  :  la  veine  ne  donne  que  par 
rognons....  II  y  a  encore  plufieurs  autres  mines  <5c  indices  de 
mines  de  plomb  dans  ce  diocèfe.  Traité  de  la  fonte  des  mines  de 
SchuUter,  pages  2^6,  2^^,  2jf.^,   2j^6  &  24J. 

(k)   Hiftoire   Naturelle    du   Languedoc,   par  M.  de  Cenfanne^ 
tome  II,  pages  i  p   &  fuiv. 

Minéraux,  Tome  IIL  Z 


178  Histoire  Naturelle 

ne  doit  pas  être  de  granit  primitif,  mais  feulement  d'un 
eranit  formé  par  alluvion ,  ou  peut-être  même  d'un 
grès  à  gros  grains ,  que  ies  Obfèrvateurs  confondent 
fouvent  avec  le  vrai  granit. 

Et  ce  qui  confirme  ma  pré/bmption,  c'efl  que  ies 
mines  ne  fe  trouvent  jamais  dans  les  montagnes  de 
granit  primitif,  mais  toujours  dans  les  fchifles  ou  dans 
ies  pierres  calcaires  qui  leur  font  adoffées.  M.  Jas- 
kevifch  dit,  en  parlant  des  mines  de  plomb  qui  font  à 
quelque  diflance  de  Fribourg  en  Brifgau ,  que  ces 
mines  fe  trouvent  des  deux  côtés  de  la  montagne  de 
granit ,  oc  qu'il  n'y  en  a  aucune  trace  dans  le  granit 
même  (IJ. 

En  Efpagne,  M.  Bowles  a  obfervé  plufieurs  mines 
cle  plomb  dont  quelques-unes  ont  donné  un  très-grand 
produit,  &  jufqu'à  quatre-vingts  livres  par  quintal  ^m) . 

(l)  A  quelque  diflance  de  Fribourg  en  Brifgau,  il  y  a  plufieurs 
mines  qui  avoient  été  abandonnées ,  mais  que  l'on  exploite  de  nou- 
veau  La  montagne  de  Grenfem,   où  fe  trouve  plufieurs  de  ces 

mines  de  plomb  ,  eft  adofiée  à  une  montagne  de  granit.  ,  .  .  Toutes  les 
pierres  qu'on  y  trouve  font  de  vrai  granit  giilatre  ,  à  fort  petits 
grains,  avec  des  points  de  fchorl  noir,  reflemblant  beaucoup  au 
granitello  d'Italie.  Du  côté  oppofé  de  cette  montagne,  eft  une  autre 
mine  de  plomb  dont  le  minerai  efl  une  galène  ;  fa  gangue  ell  de 
fpath  calcaire.  La  montagne  gianitique  fe  trouve  donc  entre  les 
montagnes  calcaires  qui  renferment  les  mines.  Voyages  de  Ai.Jaskevïfch, 
dans  le  fuppUment  au  Journal  de  Phyfi^ue  du  mois  d'Oâobre  i  y  S  2. 

(m)  II  y  a  une  mine  de  plomb  à  deux  lieues  d'Orellana,  fur  le 
chemin  de  Zalùnica:  cette  nùne  eii  dans  une  petite  cminence.  .  ,  , 


DES    Minéraux.  179 

En  Angleterre,  celle  de  Alendlp  eft  une  galène  en 
maire  ,  iàns  gangue  &  prefqiie  pure  (n) ;  il  y  a  aulH 
de  très  -  riches  mines  de  ce  mctal  dans  la  province  de 
Darby  (o) ,  ainfi  que  dans  les  montagnes  des   comtés 

La  veine    coupe    direclement   la    pierre  d'ardoife ,    elle  efi:  dans    fe 

quartz,  HiJIoire    Naturelle  d' Efpagne ,  par  Ai.   Bowlcs,  page  ^y.  — 

Ddas  h  province  de  Jaen  en  Efpagne,   aucune  inine  ne  fe  trouve 

dans  la  pierre  calcaire,   <Sc  il  y  en  a  une  de  plomb  près  de  Limarcs, 

dans  du  granit  gris  ordinaire.  La  veine  a  dans  certains  endroits  foixante 

pieJs  de  large,   «?c    dans  d'autres  pas  plus  d'un.   Les    falbandes  qui 

enveloppent  la  veine  font  d'argile  ;   mais  ces   falbandes  font  fouvent 

à  découvert  &  le  mêlent  avec  le  granit.  .  .  .   De  ces  falbandes  qui 

accompagnent    les   mines   en   gcncral ,  l'une    foutient  le   filon   par- 

deifous  &  l'autre  le  couvre   par-defTus ,  &:  c'efl  la  plus  grofle.  .  .. 

Cette  mine  de  plomb  efl  ordinairement  en  veines,  mais  on  y  trouve 

aufîi  des  rognons.  ...  on  en  a  trouve  un  fi  abondant,  que  pendant 

quatre  ou  cinq  ans,    il  fournit  une  quantité    prodigieufe  de   plomb 

dans  un  efpace  de  foixante  pieds  de  large,  autant  de  long,  &    fur 

autant  de  profondeur.  .  .  .  C'efl;  une  véritable  galène  à  gros  grains, 

qui  donne  pour  l'ordinaire  foixante  à  quatre-vingts  livres  de  plomb 

par  quintal.  ...  &  comme  ce  plomb  ne  contient  que  trois  ou  quatre 

onces  d'argent  par  quintal,  il  ne  vaut  pas  la  peine  d'être  coupelle. 

JJem ,  pages  417  &  fuïv. 

(n)  La  mine  de  ATcndlp ,  dans  le  comté  de  Sommerfet,  ert  en 
quelcjues  endroits  en  filons  perpendiculaires,  tantôt  plus  étroits,  tantôt 
plus  larges;  cette  mine  ne  foriiie  qu'une  mafle,  &  elle  contient  du 
plomb  pur ,  excepté  à  la  furface  ,  où  elle  eft  mêlée  d'une  terre  rouge. 
Ai.  Guetlard;  Alémoires  de  l' Acadénàe  des  Sciences,  année  17^2, 
pages  ^21   &  fuiv. 

(0)  On  trouve  en  Derbyshire,  des  veines  de  plomb  très-confi- 
dcrabies,  daiis  une  pierre  à  chaux  coqujllèie,  à  laquelle  on  donne  un 

Zij 


i8o  Hi STO IRE  Naturelle 

de  Cardignan  &.  de  Cumberland  (pj ,  &.  l'on  en  connoît 
encore  d'auiïi  pures  que  celles  de  Mendip,  dans  quelques 
endroits  de  i'ÉcofTe  (q). 

M.  Guettard  a   reconnu  des  indices   de   mines  de 
plomb  en  SuifTe  (r) ^  &  il  a  ob/èrvé  de  bonnes  mines  de 

Très-beàu  poli ,  &  dont  on  fait  piufieurs  ouvrages Toutes  lei 

mines  de  cette  province  font  très -riches  en  argent,  &  font  dans 
des  montagnes  récentes  dont  les  pierres  contiennent  des  corps 
marins  ....  Cependant  en  Derbyshire,  comme  ailleurs,  la  pierre  à 
chaux  eft  pofée  fur  le  fchifle  ....  Malgré  cette  exception ,  il  n'en 
eft  pas  moins  vrai  que  les  montagnes  de  nouvelle  formation  ren- 
ferment raï^mem  de  vrais  ûlom  de  mine.  Le  ter  es  fur  la  Minéralogie, 
par  M.   Ferber;  note,  pages  ^6  &  fuiv, 

(p)  On  fait  qu'en  géne'ral,  toutes  les  montagnes  du  comté  de 
Cardignan  en  Angleterre,  font  remplies  de  mines  de  plomb  qui 
contiennent  de  l'argent. .  .  Dam  les  montagnes  de  Cumberland,  il  y  a 
du  cuivre ,  de  l'or  &  de  l'argent ,  à.  du  plomb  noir.  M.  Guettard; 
Aiémoires  de  l'Académie  des  Sciences,  année  ly^^j  page  s^ S' 

(cj)  Il  y  a  trois  fortes  de  mines  de  plomb  en  ILco^e;  la  première 
nommée  lum-lead,  efl  prefque  de  plomb  pur  ;  la  féconde  /mlling- 
lead  onfmethon,  efl  la  mine  triée;  la  troifième  la  mine  pauvre.  On 
ne  fond  pas  la  première  ni  la  Çecoaàe;  oa  les  vend  aux  Potiers  de 
terre  pour  vernir  leurs  poteries.  Jr^i// ^^  hfonîides  mines  de  Schlutter, 
tome  II ,  page  32^. 

(r)  Les  Alpes  du  canton  de  Schwitz  renferment  des  mines  de 
plomb.  Mémoires  de  V Académie  des  Sciences,  année  17^2,  page  s 3  9. 
—  Scheuchzer  dit  qu'il  y  a  une  mine  de  plomb  au-deiïus  de  Zillis 
en  Barenwald;  une  autre  de  plomb  &  de  cuivre  à  Anneber^r,  Jdem, 
P^S^  333'  —  La  vallée  de  Ferrera,  les  environs  de  Schams ,  de 
Davos  &  de  Difentis  fourniffent  du  plomb.  Idem,  ibidem.  —  Dans 
ies  environs  du  CrimfeUa  SuiOh,  il  y  a  des  veines  de  plomb.  Idem, 
page  336. 


DES    Minéraux.  i8i 

ce  méial  en  Pologne;  elles  font,  dit-il,  abondantes  & 
riches  en  argent  ("fj.  Il  dit  aujfi  que  la  mine  (ïOlkufiow, 
diocèfe  de  Cracovie,   eft  fans  matière  étrangère. 

11  y  a  dans  la  Carinthie,  des  mines  de  plomb  qui 
font  en  pleine  exploitation  ;  elles  gifTent  dans  des 
montagnes  calcaires ,  &.   l*on  en  tire  par   année   vin^t 


(f)  Il  y  a  à  Olkufifir ,  dans  le  domaine  de  i'cvêque  de  Cracovie, 
une  mine  de  plomb   fans  matière  étrangère ,   qui   eft   écaiileufe.    Ses 

cpontes  ou  falbandes  font  d'une  terre  calcaire Une  autre  mine 

de  plomb  trouvée  dans  les  Karpacs ,  eft  à  petites  écailles,  &  contient 
beaucoup  d'argent  gris  ;  une  troifième  eft  à  petites  écailles  avec  des 
veines  d'une  terre  jaune  d'ocre  ;  une  quatrième  eft  auffi  écaiileufe , 
pure  &  en  mafle,  compofée  d'efpèce  de  grains  mal  liés,  de  forte  qu'on 
diroit  que  cette  mine  a  paflc  par  le  feu  ;  ces  deux  dernières  fe  trouvent 

aufll  dans  les  Karpacs Les  mines  ù'Olkuf^  en  Pologne,   ont 

été  travaillées  dès  le  quatorzième  fiècle  ;  on  y  voit  plufieurs  puits , 
dont  quelques-uns  defcendent  jufqu'à  quatre-vingts  braïïes  de  pro- 
fondeur. Leur  fituation  eft  au  pied  d'une  petite  montagne,  qui 
s'élève  en  pente  douce.  Le  minerai  de  ces  mines  eft  la  galène 
couleur  de  plomb;  elle  eft  fans  mélange  de  cailloux  ni  de  fable,  ni 

d'aucune  autre  fubftance Le  minerai  eft  répandu  dans  une 

terre  jaunâtre ,  mêlée  d'une  pierre  femblable  à  la  calamine  ,  &  à  de  la 
pierre  à  chaux  dans  quelques  endroits  ;  cette  terre  contient  aufli  des 
fragmens  d'une  pierre  ferrugineufe ,  qui  a  été  très- utile  pour  la  fonte 

du  minerai A  la  profondeur  de  cinq  ou  fix  braffes,   on  trouve 

d'abord  une  efpèce  de  pierre  à  chaux ,  &  dès  la  dixième  brafîe  on 
rencontre  la  veine  du  minéral ,  qui ,  dans  quelques  endroits ,  n'a 
que  deux  ou   trois  pouces,  &  dans  d'autres  jufqu'à  une  demi-braiïe 

d'épaifteur On  tire  de  ce  plomb  on/e  marcs  &  demi  d'argent  ^ 

fur  (bixante  -  dix  quintaux  de  plomb.  AI.  Cuettard;  Mémoires  dr 
V Académie  des  Sciences,  année  i yC 2  ,  pogcs  ^  j  (f ,  ^21  Ù' fuht^ 


/ 


\%z  Histoire  is  atu  u  e  l  le 

mille  quintaux  de  plomb  (t) .  Les  mines  Je  plomb  que 
l'on  trouve  dans  le  Palacinat  en  Allemagne ,  fous  la 
forme  d'une  pierre  cri/lallifce,  font  exemptes  de  même 
de  toute  matière  étrangère;  ce  font  des  mines  en  chaux 
qui,  comme  cçWç^  de  plomb  blanche,  ne  contiennent 
en  effet  que  du  plomb  ,  de  l'air  &  de  l'eau,  fans  mélange 
d'aucune  autre  matière  métallique  (ii) . 

On  voit  par  cette  éniuncration  qu'il  fè  trouve  un 
gr-ûnd  nombre  de  mines  de  plomi)  dans  prefque  toutes 
les  provinces  de  l'Europe;  les  plus  remarquables,  ou 
plutôt  les  mieux  connues,  font  celles  qui  contiennent 
une  quantité  confidérable  d'argent  ;  il  y  en  a  de  toute 
efpèce  en  Allemagne  (x) ,  de  même  qu'en  Suède,  <Sc 
jufqu'en  Norwège. 


(t)  On  trouve  dans  les  mines  de  Bleyberg  en  Carinthie,  plufieurs 
fortes  de  minerais.  i.°  Le  •çXoxnhdige  ou  plomb  compade  prefque 
malléable,  couleur  de  vrai  plomb  minéralifé  avec  le  foufre  &  l'arfenic; 
2."  la  galène  de  plomb  criftallifée  en  cubes  ou  en  odaédres;  3.°  la 
craie  parfeme'e  de  petits  points  de  galène  de  plomb  qui  forment  de 
jolies  dendriies;  4.° le  plomb  fpatheux,  couleur  de  jaune-clair,  jufqu'à 
l'oranger  blanc,  couleur  de  plomb  tran (parent,  couleur  de  vert- 
pâle.  .  .  .&c.  Voyage  de  M.  Jaskevlfch ,  dans  le  fupplément  au  journal 
de  Phyfique  du  mois  d'Oâobre  de  l'année    i yS 2, 

(u)  Dans  le  haut  Palatinat  à  Fregung ,  il  y  a  une  mine  de  plomb 
qui  n'eft  mêlée  d'aucun  autre  métal,  &  parconféquent  excellente  pour 
l'ufage  de  la  coupelle  ;  elle  eft  en  partie  fous  la  forme  d'une  pierre 
criftalline  ;  le  refte  n'efl;  pas  fi  riche  en  plomb  &  paroit  plus  farineux. 
Colle dion  académique,  partie  étrangère ,  tome  II,  page  jt. 

(x)  La  mine  d?  plomb  &  d'argent  de  Ramniei/berg,  e/l  6ii  pa«ie 


DES   Minéraux»  i8<» 

On  ne  peut  guère  douter  qu'il  n'y  ait  tout  autant 
de  mines  de  plomb  en  Afie  qu'en  Europe;  mais  nous 
ne  pouvons  indiquer  que  le  petit  nombre  de  celles  qui 
ont  été  remarquées  par  les  Voyageurs,  &  il  en  eft  àt 
même  de  celles  de  l'Afrique  <Sc  de  l'Amérique.  En 
Arabie,  félon  Nieburh,  il  y  a  tant  de  mines  de  plomb 

très-pure,  &:  en  partie  mêlée  de  pyrites  cuivreufes  &  de  foufre;  <5c 
dans  le  milieu  de  ces  pyrites  on  trouve  quelques  veines  de  mines  de 
plomb  brillantes.  ...  Le  produit  de  cette  mine  efl:  en  argent,  depuis 
un  gros  jufqu'à  ime  once ,  &  en  plomb  depuis  fix  jufqu'à  quarante 
livres  par  quintal.  On  ne  peut  réduire  cette  mine  en  moindre  volume 
par  le  bocard  &  le  lavage ,  parce  que  fa  gangue  eft  trop  dure  &  trop 
pefaiite  ;  mais  elle  a  l'avantage  d'être  affez  pure;  ainft  on  peut  la  regarder 
comme  une  mine  triée  ;    à  caufe  de  fa  dureté ,  on  attend  qu'elle  ait 

reçu  trois  grillages  avant   de  l'efîayer Les  mines  qui  fe  tirent 

des  minières  de  Hal^bruche ,  ne  contiennent  par  quintal  que  depuis 
une  demi- once  jufqu'à  deux  onces  &  demie  d'argent;  mais  elles 
rendent  depuis  vingt-huit  jufqu'à  foixante-cinq  livres  de  plomb  par 
quintal;  ainfi  comme  elles  font  tendres,  on  les  grille  feules,  &  ou 
ne  leur  donne  que  deux  feux  pour  les  ajouter  enfuite  aux  autres 
dans  la  fonte  .... 

On  trouve  à  Foelgehaiigen ,  de  la  mine  de  plomb  à  gros  brillans, 
dont  le  quintal  rend  depuis  foixante-dix  jufqu'à  quatre-vingts  livres 
de  plomb,  &  depuis  fix  gros  jufqu'à  une  once  &  demie  d'argent; 
on  y  trouve  audî  de  la  mine  de  plomb  à  petits  brillans ,  contenant  un 
peu  plus  d'argent  &  moins  de  plomb:  on  trie  les  meilleurs  morceaux 
de  ces  mines ,  &  on  pile  &  lave  le  refte  ;  mais  le  tout  doit  être 
grillé  .... 

Dans  le  haut  Hartz ,  le  produit  des  mines  pilées  varie  beaucoup  ; 
il  y  en  a  dont  le  quintal  ne  tient  qu'une  demi -once  d'argent, 
d'autres  qui  en  contiennent  jufqu'à  un  marc  ....  Celles  ô.'Andrcdjltrg 


184  Histoire  Naturelle 

dans  VOmûTï,  &.  elles  font  fi  riches  qu'on  en  exporte 
beaucoup ^y.  A  Siani,  les  Voyageurs difent qu'on  travaille 
depuis  long-temps  des  mines  de  plomb  &  d'étain  Ci), 
En  Perfe,  dit  Tavernier,  on  n'avoit  ni  plomb  ni  étain 
que  celui  qui  arrivoit  des  pays  étrangers  ;  mais  ou 
a  découvert  une  mine  de  plomb  auprès  de  la  ville 
éiYerde  (n) .  M.  PeyfTonnei  a  vu  une  mine  de  plomb 
dans  l'île  de  Crète,  dont  il  a  tiré  neuf  onces  de  plomb 
fur  une  livre  &  une  très-petite  quantité  d'argent  ;  il  dit 
qu'en  creufant  un  peu  plus  profondément ,  on  découvre 
quelquefois  des  veines  d'un  minerai  de  couleur  gri/è, 
taillé  à  facettes  brillantes,  mêlé  de  fbufre  &.  d'un  peu 
d'arfenic,  &.  qu'il  a  tiré  d'une  livre  de  ce  minerai,  fept 


font  plus  riches,  parce  qu'on  y  trouve  de  l'argent  vierge  &  de  la 
minera  argent i  rubra,  dont  les  grillages  fournirent  beaucoup  d'argent; 
enfin ,  il  y  en  a  d'autres  qui ,  fans  argent  vierge  ni  même  d'argent 
rouge ,  fournirent  encore  plus  d'argent .... 

Les  mines  qu'on  tire  dans  le  comté  de  Stolberg,  à  Strelibero-, 
font  de  plomb  &  d'argent,- mêle'es  d'un  peu  de  pyrites  &  de  mine 
de  cuivre.  II  fe  trouve  aufll  dans  les  mêmes  filons ,  de  la  mine  de 
fer  jaune  «5c  blanche  qu'on  ne  peut  en  féparer  entièrement ,  ni  en 
pilant  ni  en  lavant  le  minéral  ;  ainfi  on  la  trie  le  mieux  qu'il  eft 
pofTible,  en  la  pilant  grofîièrement  «&  la  faifant  paffer  par  un  crible. 
lyaité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter ,  tome  II,  pages  162,1  S  2, 
18S,   I pS  &  32S, 

(y)  Defcription  de  l'Arabie,  page  1 2j. 

(l)   Hirtoire  générale  des  Voyages,  tome  XVIII,  page  j  07. 

(a)   Idem ,  tome  X,  page   6;  6. 

onces 


DES    Minéraux.  185 

onces  de  plomb  &  une  dragme  d'argent  (b^.  En  Sibérie, 
il  le  trouve  auili  nombre  de  mines  de  plomb,  dont 
quelques-unes  font  fort  riclies  en  argent  (c) . 

Nous  avons  peu  de  connoifTances  des  mines  de  plomb 
de  l'Afrique;  feulement  le  do6teur  Shaw  fait  mention 
de  celles  de  Barbarie  ,  dont  quelques  -  unes ,  dit  -  il , 
donnent  quatre-vingts  livres  de  métal  par  quintal  (d). 

Dans  l'Amérique  feptentrionale,  on  trouve  de  bonnes 


(h)  Hifloire  de  Crête  manufcrite,  par  M.   Peyflonel. 

(c)  A  quelque  diflance  à! Argunsk  en  Sibérie ,  &  à  quelques 
verftes  de  l'ancienne  mine  à'Ildïkim,  on  a  de'couvert  un  nouveau 
filon  d'un  beau  minéral  luifant  ,  très- foncé,  mêlé  d'un  peu  de 
gravier  qui  contient  deux  onces  d'argent,  &  plus  de  cinquante 
livres  de  plomb  par  quintal.  Il  y  a  encore  d'autres  minerais  dont 
on  tire  trois  onces  d'argent  &  foixante  -  quatorze  livres  de  plomb , 
&  l'argent  qu'il  donne  contient  de  l'or.  Hijloire  générale  des  Voyages, 
tome  XVIII ,  page  20p. 

(d)  Les  mines  de  plomb  de  Jibùel -  ris -fajf  près  d'Hamman-leef; 
celles  de  Wamarb-réefe ,  &  celles  de  Benibootateb ,  font  toutes  fort 
riches,  &  l'on  en  pourroit  certainement  tirer  de  grands  trélors  fi  elles 

ctoient  mieux  travaillées On  tire  aifément  par  le  feu  80  livres 

de  métal  d'un  feul  quintal  de  mine Il  y  en  a  aufTi  dans  les  terres 

d'Alger,  &  fur-tout  dans  une  haute  montagne  appelée  Van-naff-réefe , 
dont  le  fommet  eft  couvert  de  neige.  Après  de  grandes  pluies ,  les 
torrens  qui  découlent  de  cette  montagne  charrient  des  grains  & 
pailles  de  ce  minéral ,  lefquels  s'arrêtent  fur  ces  bords,  brillent  comme 
l'argent  à  la  lueur   du  foleil.   Voyages  de  Sha\^r,  tome  I,  pages  49 

Minéraux ,  Tome  IIL  A  a 


i86  Histoire  Naturelle 

mines  Je  plomb  aux  Illinois  (e),  au  Canada  (f),  en 
Virginie  (g);  il  y  en  a  aulTi  beaucoup  au  Mexique  (h), 
&  quelques-unes  au  Pérou,  (i) . 

Toutes  les  mines  de  plomb  en  galène,  affedent  une 


(e}  Dans  le  pays  des  Illinois,  il  y  a  des  mines  de  plomb  dont 
on  peut  tirer  foixante  -  feize  on  quatre  -  vingts  livres  de  plomb  par 
quintal.....  Ce  plomb  contient  un  peu  d'argent.  AI.  Gucttard , 
Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences ,  année  ij^i,  page  210, 

(f)  11  y  ^  ut^e  mine  de  plomb  à  la  baie  Saint- Paul ,  à  vingt -cinq 

lieues  de  Québec qui  efl  dans  une  grande  montagne. . . .  Les  filons 

de  cette  mine  de  Saint  Paul  font  places  perpendiculairement  dans  le 
rocher.  ....  Les  pierres  que  l'on  trouve  à  la  furface  ou  à  peu  de 
profondeur,  ne  font  qu'environnées  de  métal  à  la  furface  ,  &  à  mefure 
que  l'on  defcend  les  pierres  en  font  plus  pénétrées.  Les  veines  font  de 
différentes  largeurs,  &  font  peu  éloignées  les  unes  des  autres.  Idem, 
pages  2J0  Ù'  fuivantes. 

(g)  La  Virginie  a  des  mines  de  plomb  auxquelles  on  a  travaillé, 
&  qui  font  aujourd'hui  abandonnées.  Hifoire  générale  des  Voyages , 
tome  XIV ,  page  ^  6  S . 

(h)  Le  canton  d'Y:^(juiqui/paj  a  vingt-deux  lieues  de  Mexico,  abonde 
en  mines  de  plomb La  province  de  Guaxaca  renferme  la  mon- 
tagne 1f{_-qui-tepcque ,  où  il  fe  trouve  quantité  de  veines  de  plo  11b  ; 
celle  de  Guadaiajara  renferme  dans  ^^^  montagnes  beaucoup  de 
mines  d'argent  &  de  cuivre  mêlées  de  plomb.  Il  s'en  trouve  aufli  de 

plomb  &  d'argent  dans  fa  province  de  la  nouvelle  Bifcaie Et 

autrefois  on  en  tiroit  aufTi  beaucoup  de  la  province  de  Chiapa.  Idem , 
tome  XII y  page  648, 

(i)  Le  Corrégiment  de  Guanta ,  dans  le  diocèfe  de  Guamanga  au 
Pérou  ,  a  des  mines  de  plomb.  Idem  ,  page  64  8, 


DES  Minéraux,  187 

figure  exahèclre  en  lames  ccailleufes  ou  en  grains  anguleux» 
ik.  c'eft  en  etfèt  fous  cette  forme  que  la  Nature  a  établi 
ies  mines  primordiûL's  de  ce  métal  ;  toutes  celles  qui  /è 
prc/entcnt  fous  d'autres  formes,  ne  proviennent  que  de 
la  décompodtion  de  ces  premières  mines  dont  les 
détrimens,  faifis  par  les  Tels  de  la  terre,  &  mélangés 
d'autres  minéraux  ,  ont  formé  les  mines  fecondaires 
de  cérufe  ,  de  plomb  blanc  (k) ,  de  plomb  vert,  de 
plomb  rouge ,  &c.  qui  font  bien  connues  des  Natura- 
liftcs  ;  mais  M.  de  Gen/ànne  fait  mention  d'une  mine 
fingulicre  qui  renferme  des  grains  de  plomb  tout-à- 
fait  pur;  voici  l'extrait  de  ce  qu'il  dit  à  ce  fujet: 
«  Entre  Pradel  &  Vameau ,  il  y  a  une  mine  de  plomb 
dans  des  couches  d'une  pierre  calcaire  fauve,  &  fouvent  « 


(k)  La  mine  de  plomb  blanche  qui  fe  trouve  dans  celle  de  Poii- 
laouen  en  Bretagne  ,  efl:  en  afiez  gros  criflaux,  de  forme  prifmatique, 
irrégulièrement  Itrics  dans  leur  longueur,  d'un  blanc  de  nacre  tranf- 
parent,  qui  donnent  au  quintal  quatre-vingts  livres  de  plomb  tenant 

un  peu  d'argent Cetie  mine  de  plomb  blanche,  quoiqu'en  dife 

Vallerius ,  ell  parfaitement  foluoie  par  tous  les  acides Elle  ne 

contient  point  d'arlenic  ,  quoique  Vallerius    l'ait   afiuré,    ni  d'acide 

marin ,  comme    le  prétend  M.  Sage Les  mines    de    plomb 

fpathiques  font  des  mines  de  plomb  de  féconde  formation ,  que  l'on 
rencontre  difperfées  fans  ordre  &  fans  fuite  dans  les  environs  &  tou- 
jours allez  près  des  galènes  ou  mines  de  plonib  fultureufes.  La  pofi- 
tion  iXts  mines  ff)athiques,  leur  criltallifadon  diflintfle  plus  ou  moins,  \qs 
fontaifcment  reconnoître  pour  l'ouvrage  des  eaux  fouterraines  chargées 
de  la  partie  métallique  des  galènes  dcconipofées.  AUmoire  de  M.  Laborie, 
dans  ceux  des  Savûtis  étrangers ,  tome  IX,  pages  ^42  &  fuiv. 

Aa  ij 


55 


ty 


» 


3> 


3) 


188        Histoire    Naturelle 

'^  ronge  ;  le  iilon  n'a  qu'un  pouce  &  demi  ou  deux  pouces 
«  d'ëpaiïTcur ,  &  s'étend  prefque  tout  le  long  de  la  foret 
des  châtaigniers  :  c'eft  en  général  une  vraie  mine  de 
plomb  blanche  &  terreufe  ;  mais  ce  qu'il  y  a  de  fmgulier, 
>>  c'eft  que  cette  fubflance  terreu/è  renferme  dans  fon 
5^  intérieur ,  de  véritables  grains  de  plomb  tout  faits ,  ce 
>>  qui  étoit  inconnu  jufqu'ici  ;  cette  terre  minérale  qui 
"  renferme  ces  grains,  rend  jufqu'au-delà  de  quatre-vingt- 
"  dix  livres  de  plomb  par  quintal ,  &  les  grains  de  plomb 
qu'elle  renferme  font  très-purs  &  très-doux;  ils  n'afîèétent 
point  une  configuration  régulière  ,  il  y  en  a  de  toutes 
fortes  de  figures  ;  on  en  voit  qui  forment  de  petites 
>>  veines  au  travers  du  minéral  en  forme  de  filigrane,  & 
^'  qui  reffemblent  aux  taches  des  dendrites.  On  trouve 
»  du  minéral  femblable,  &  qui  contient  encore  plus  de 
"  plomb  natif,  près  du  village  de  Fayet,  Si.  de  même  près 
>^  de  Villeneuve-de-Berg ,  &  encore  dans  la  montagne 
>>  qui  efl  à  droite  du  chemin  qui  conduit  à  Aubénas,  à 
»' une  petite  lieue  de  Villeneuve-de-Berg;  les  quatre 
«  endroits  de  ces  montagnes  où  l'on  trouve  ce  minéral, 
»  font  à  plus  de  trois  lieues  de  difîance  les  uns  des 
"  autres  fur  un  même  alignement,  «&.  la  ligne  entière  a 
>>  plus  de  huit  lieues  de  longueur.  Les  plus  gros  grains  de 
>>  plomb  pur ,  font  comme  des  marrons ,  ou  de  la  groffeur 
»  d'une  petite  noix  ;  il  y  en  a  d'aplatis ,  d'autres  plus 
>>  épais  &  tout  bifcornus  ;  la  plupart  font  de  la  groffeur 
>>  d'un  petit  pois,  <St  il  y  en  a  qui  font  prefque  imper- 


DES  Minéraux,  189 

cepiibles.  La  terre  métallique  qui  les  renferme,  eft  de 
ia  même  couleur  que  la  litharge  réduite  en  poufTière 
impalpable;  cette  terre  fe  coupe  au  couteau,  mais  il 
faut  le  marteau  pour  la  caffer  ;  elle  renferme  aufli  des 
véritables  fcories  de  plomb,  &.  quelquefois  une  matière 
femblable  à  de  la  litharge  ;  cependant  ce  minéral  ne 
provient  point  d'anciennes  fonderies,  d'ailleurs,  il  efl 
répandu  dans  une  très-grande  étendue  de  terrein  ;  on 
en  trouve  fur  un  ei^jace  de  plus  d'un  quart  de  lieue, 
fans  rencontrer  de  fcories  dans  le  voifmage ,  où  l'on  n'a 
pas  mémoire  qu'il  y  ait  jamais  eu  de  fonderies  (IJ  -\ 
Ces   derniers    mots,    femblent  indiquer  que  M.  de 


(l)  Nota.  M.  de  Virly,  Préfident  à  la  Chambre  des  Comptes 
de  Dijon,  a  eu  la  bonté  de  m'apporter  un  morceau  de  cette  mine 
mêlée  de  plomb  tout  pur,  qu'il  a  trouvé  à  l'Argentière  enVivarais, 
fur  l'une  des  deux  montagnes  entre  lefquelles  cette  ville  efl  fituée;  il 
en  a  rapporté  des  morceaux  gros  comme  le  poing,  &  communément  il 
y  en  a  de  la  grofleur  d'un  œuf;  les  uns  ont  l'apparence  d'une  terre 
métallique;  ils  reflemblent  au  mafficot,  &  font  un  peu  tranfparens; 
d'autres  plus  légers  font  en  état  de  verre ,  &  renferment  des  globules 
de  métal ,  plus  ou  moins  gros ,  qui  fe  laiflent  entamer  au  couteau , 
&  font  réellement  du  plomb.  Il  y  a  beaucoup  de  mines  de  plomb 
en  galène  aux  environs  de  l'Argentière  ;  elles  ont  été  exploitées  dans 
Je  temps  des  Croifades  comme  mines  d'argent  ;  c'efl;  même ,  à  ce  que 
l'on  dit ,  ce  qui  a  donné  le  nom  à  la  ville  ;  il  n'y  a  point  de  vefliges 
d'anciens  volcans  dans  ces  deux  montagnes ,  &  ces  matières  de  plomb, 
qui  ont  évidemment  éprouvé  l'aélion  du  feu ,  font  peut-être  les  refles 
d'anciennes  exploitations ,  ou  ie  produit  de  la  fufion  des  mines  de 
galène  par  l'incendie  des  forêts  qui  couvroienc  ces  montagnes. 


190         Histoire    Naturelle 

Gcnfaniie  foupçoiine  avec  raifon ,  que  le  feu  a  eu  part  à 
la  formation  de  cette  mine  finguliere;  s'il  n'y  a  pas  eu 
de  fonderies  dans  ces  lieux,  il  y  a  eu  des  forets,  <5c 
très-probablement  des  incendies,  ou  bien  on  doit  fup- 
pofer  quelqu'ancien  volcan  dont  le  feu  aura  calciné  la 
plus  grande  partie  de  la  mine,  &  l'aura  réduite  en  chaux 
blanche,  en  fcories,  en  litharge,  dans  leiquelies  cer- 
taines parties  fè  feront  reviviiices  en  métal,  au  moyen 
des  matières  intiamniables  qui  fer  voient  d 'al  i  mens  à 
l'incendie;  cette  mine  eft  donc  de  dernière  formation; 
comme  elle  gît  en  grande  partie  fous  la  pierre  calcaire, 
elle  n'a  pas  été  produite  par  le  feu  primitif,  qui  d'ailleurs 
J'auroit  entièrement  réduite  en  chaux,  &.  n'y  auroit  pas 
laiffé  du  métal;  ce  n'efl:  donc  qu'une  mine  ordinaire, 
qui  a  feulement  été  dénaturée  accidentellement  par  le 
feu  fouterrain  d'un  ancien  volcan,  ou  par  de  grands 
incendies  à  la  farface  du  terrein. 

Et  non-feulement  le  feu  a  pu  former  ces  mines  de 
plomb  en  chaux  blanche;  mais  l'eau  peut  auHi  les 
produire  :  la  cérufè  que  nous  voyons  fe  former  à  l'air 
fur  les  plombs  qui  y  font  expofcs ,  efl  une  vraie  chaux 
de  ce  métal ,  qui  étant  entraînée ,  tranfportée  &  dépofée 
en  certains  endroits  de  l'intérieur  de  la  terre  par  la 
filiation  des  eaux,  s'accumule  en  mafles  ou  en  veines, 
fous  une  forme  plus  ou  moins  concrète.  La  mine 
de  plomb  blanche  n'eft  qu'une  cérufè  criftallifée,  éga- 
lement produite  par  l'eau;  il  ny  a  de  différence  qu'en 


DES    Minéraux,  191 

ce  que  la  cérufë  naturelle  eft  plus  mcice  de  parties 
terreufes  ;  ces  mines  de  cérufe ,  les  plus  nouvelles  de 
toutes,  fe  forment  tous  les  jours  comme  celles  du  fer 
en  rouille ,  par  ks   détrimens  de  ces  métaux. 

Les  mines  de  plomb  vitreufès  &  criflallifées ,  qui 
proviennent  de  la  dccompofition  des  galènes,  prennent 
différentes  couleurs  par  le  conta6l  ou  l'union  des  diffé- 
rentes fubflances  métalliques  qu'elles  rencontrent;  le  fer 
leur  donne  une  couleur  rouge,  6c  félon  M.  Monnet, 
il  les  colore  auffi  quelquefois  en  vert:  cet  Obfèrvateur 
dit  avoir  remarqué  dans  les  mines  de  plomb  de  la 
Croix  en  Lorraine  fffi)  ^  un  grand  nombre  de  criflaux 
de  plomb  vert  dans  les  cavités  de-  la  gangue  de  cette 
mine ,  qui  n'eft  qu'une  mine  de  fer  grifâii  e  ;  d'oii  il 
conclut  que  les  criflaux  verts  de  plomb ,  ^  peuvent  être 
formés  de  la  décompofition  de  la  galène  par  le  fer.  La 
galène  elle-même  peut  fe  régénérer  dans  les  mines  de 
plomb  qui  font  en  état  de  cérufe  ou  de  chaux  blanche  ; 
on  peut  le  démontrer,  tant  par  la  forme  lifluleufe  de 
ces  galènes  qu'on  appelle  plomb  twir,  que  par  plufieurs 
morceaux  de  mines  dans  lefquelles  la  bafe  des  crif- 
taux  efl  encore  de  plomb  blanc ,  feulement  un  peu 
rougeâire,  &.  dont  la  partie  fupérieure  efl  convertie  en 
galène. 

En  général,  les    mines  de  plomb   tiennent  prc/quc 

(m)  Obfervations  fur  une  mine  de  plomb,  par  M.  Monnet. 


J92        Histoire  Natu relle 

toutes  une  petite  quantité  d'argent;  elles  font  au/Ti  très- 
fouvent  mêlées  de  fer  &  d'antimoine  (n) ,  &  quelquefois 
de  cuivre  (o) ;  mais  l'on  n'a  qu'un  fèul  exemple  de 
mine  de  plomb  tenant  du  zinc  (p) ;  &  de  même  que 
l'on  trouve  de  l'argent  dans  prefque  toutes  les  mines 
de  plomb,  on  trouve  aufîi  du  plomb  dans  la  plupart 
des  mines  d'argent;  mais  dans  les  filons  de  ces  mines, 
le  plomb,  comme  plus  pefant,  defcend  au-de/Tous  de 
l'argent ,  &.  il  arrive  prefque  toujours ,  que  les  veines  les 
plus  riches  en  argent  fè  changent  en  plomb  à  mefure 
qu'elles  s'étendent  en  profondeur  (q) , 

Pour  connoître  la  quantité  du  métal  qu'une  mine  de 
plomb  peut  contenir,  il  faut  la  griller  en  ne  lui  donnant 
d'abord  que  peu  de  feu;  la  bien  laver  enfuite,  &  l'effayer 
avec  le  flux  noir,  &  quelquefois  y  ajouter  de  la  limaille 
de  fer  (r) ,  pour  abforber  le  foufre  que  le  grillage  n'auroit 

pas 

(n)  II  y  a  du  plomb  qui ,  dans  la  mine ,  efl:  mêitî  avec  de  l'an- 
timoine ,  &  qui  en  con^^ïst  encore  après  la  fonte.  Mémoires  de 
l'Académie  des  Sciences ,   année  ij] ^  ,  page  s  i ^. 

(o)  II  fe  trouve  des  mines  de  plomb  cuivreufes,  &  le  plomb 
qu'on  en  retire,  conferve  toujours  quelques  imprefljons  du  cuivre. 
Idem ,  ibidem. 

(p)  Il  y  après  de  Goflar,  une  mine  de  plomb  qui  contient  une 
aflTez  grande  quantité  de  zinc ....  mais  on  croit  communément  que 
c'en;  la  feule  mine  en  Europe  qui  en  contienne.  Idem,  ibidem, 

(q)  Delius,  fur  l'art  des  mines,  tome  I,  page  y^. 
(r)  On  met  fi'x  quintaux  de  flux  noir  fur  un  quintal  de  mine;  on 

mêle 


î)  E  s    Minéraux.  ïpj 

pas  tout  enlève  (f);  mais  quoique  par  ces  moyens  on 
obtienne   la  quantité  de   plomb  afTez  jufle,    i'eiïai  par 

mêle  le  tout  pour  être  inis  dans  un  creufet  que  l'on  place  au  feu: 
on  conduit  la  fonte  comme  celle  d'un  eflai  de  mine  de  cuivre, 
excepté  que  celui  de  la  mine  de  plomb  eft  fini  beaucoup  pius  tôt;  on 
peut  faire  aufîi  ces  efîàis  avec  quatre  quintaux  de  flux  noir  fur  ua 
quintal  de  mine,  &  même  avec  deux  ou  trois  quintaux  de  ce  fluXg 
pourvu  que  la  mine  foit  bien  défoufrée. 

Si  les  mines  de  plomb  contiennent  beaucoup  d'antimoine ,  on 
ajoute ,  à  i'eflai  d'un  quintal  de  ces  mines ,  vingt-cinq  ou  cinquante 
pour  cent  de  limaiKe  de  fer ,  plus  ou  moins ,   félon  que  la  mine  eft 

chargée  d'antimoine Si  on  eflaie  les   mines  lavées  >   ou  celles 

qu'on  nomme  vulgairement  pures ,  parce  qu'elles  n'ont  point,  ou 
très-peu,  de  gangues,  fans  les  faire  rôtir,  il  faut  y  ajouter  vingt-cinq 
pour  cent  de  limaille  de  fer:  le  plomb  s'en  détache  plus  aifément; 
mais  l'elîâi  eft  fouvent  incertain ,  parce  que  le  fer  donne  à  l'elîaî 
une  couleur  noire  :  quant  aux  mines  rôties ,  il  ne  faut  pas  y  ajouter 
de  fer.  Traité  de  la  fonte  des  Mines  de  Sclilutter,  tome  I,  pages  207^ 
Ù-  JZ08. 

(f)  Les  mines  de  plomb  exigent  la  torréfa(ftion  à  caufe%u  foufre 
qu'elles  contiennent;  on  ajoute  de  la  limaille  de  fer  dans  i'efîai  poiu: 
les  en  dépouiller  plus  fûrement:  quand  la  mine  tient  de  l'argent, 
ce  qui  arrive  fréquemment,  on  appelle  plomb-d'ceuvre  le  produit  de 
la  première  fonte  qui  fe  fait  à  travers  les  charbons  ou  au  feu  dâ 
réverbère ,  fur  de  la  brafque.  Ou  retire  de  l'argent  du  plomb-d'ceuvra 
par  une  efpèce  de  coupellation  en  grand ,  c'eft-à-dire ,  en  conver- 
tlHânt  le  plomb  en  litharge,  fur  un  foyer  fait  de  cendres  le/Hvées; 
on  lui  donne  un  fécond  affinage  dans  de  vraies  coupelles;  &  les 
débris  de  ces  vailîeaux,  ainfi  que  ceux  des  fourneaux,  &  même  la 
litharge  qui  ne  feroit  pas  reçue  dans  le  commerce,  font  remis  au 
fourneau  pour  revivifier  le  plomb.  Élémens  de  Chimie ,  par  M>  dc 
/hfcrveau ,  tome  I,  page  2.^1, 

Minéraux,  Tome  UL  B  b 


394        Histoire  Natup elle 

la  voie  humide  eft  encore  plus  fidèle:  voici  le  procède 
Je  M-  Bergman  (r) ;  on  puivérife  la  galène  ,  on  la  fait 
digérer  dans  l'acide  nitroux  ou  dans  i'acide  marin , 
iufqu'à  ce  que  tout  le  plomb  foit  dilTous,  &  alors  le 
foufre  minéral  fe  précipite  ;  on  s'afTurc  que  ce  foufre 
efl  pur  en  le  faifànt  diffoudre  dans  i'alkali  cauflique, 
on  précipite  le  plomb  par  l'alkali  criitallifé ,  &  cent 
trente-deux  parties  de  précipité  indiquent  cent  parties 
de  plomb  :  fi  le  plomb  tient  argent ,  on  le  fépare  du 
précipité  par  l'alkali  volatil ,  &  s'il  y  a  de  l'antimoine, 
on  le  calcine  par  l'acide  nitreux  concentre;  fi  h  galène 
lient  du  fer,  on  précipite  le  plomb  &.  l'argent  qui  peuvent 
y  être  unis,  ainfi  que  la  quantité  de  fer  qui  fe  trouve 
dans  l'acide,  en  mettant  ime  lame  de  fer  dans  la  diflb- 
lution  ;  celle  que  la  lame  de  fer  a  produite  indique 
cxadement  la  quantité  de  ce  métal  contenue  dans  la 
galène.* 

Le  plomb  extrait  de  famine  par  la  fonte,  demande 
encore  des  foins  tant  qu'il  eft  en  métal  coulant;  car  (i 
on  le  laifTe  expofé  à  l'adion  de  l'air ,  fa  furface  fe 
couvre  d'une  poudre  grife,  dont  la  quantité  augmente 
à  mefure  que  le  feu  continue ,  en  forte  que  tout  le 
métal  fe  convertit  en  chaux,  &  acquiert  par  cette  conver- 
fion,  une  augmentation  de  volume  très-confidérable  fu): 

(t)   Opufciiles ,   tome  II,  d'ijfcrtation  2^. 

(u)  Nota.  M.  Demefle  dit  que  cette  aug.mentation  de  volume  ou 
de  pefamçur  /  eft  comme  de  113  à  100. 


DES  Minéraux.  ipj 

cette  chaux  grife,  expofce  de  nouveau  à  l'adion  du 
feu,  y  prend  bientôt,  en  ia  remuant  avec  une  fpatule 
de  1er,  une  alTcz  belle  couleur  jaune,  &  dans  cet  état 
on  lui  donne  ie  nom  de  mafficot  ;  &  fi  l'on  continue 
de  ia  remuer  en  la  tenant  toujours  expofce  à  l'air,  à 
un  certain  degré  de  feu,  elle  prend  une  belle  couleur 
rouge ,  &  dans  cet  état  on  lui  donne  le  nom  de  luiuhini; 
je  dis  à  un  certain  degré  de  feu;  car  un  feu  plus  fort 
ou  plus  foible,  ne  changeroit  pas  le  mafficot  en  minium; 
&  ce  feu  confiant  &  ncceifaire,  pour  lui  donner  une 
belle  couleur  rouge,  efl  de  cent  vingt  degrés  (x) ;  car 
fi  l'on  donne  à  ce  même  minium  une  chaleur  plus 
grande  ou  moindre,  il  perd  également  fon  beau  rouge, 
redevient  jaune ,  <&  ne  reprend  cette  couleur  rouge  qu'au 
feu  de  cent  vingt  degrés  de  chaleur.  C'efl  à  M.  Geofii-oy 
qu'eft  due  cette  intéreffante  obfervation  ,  &  c'efl  à 
M.  Jars  (y)    que  nous    devons    la   connoiflance   des 


^x)   Divifioii  du   thermomètre  de  Rcaumur. 

(y)  II  y  a  deux  fabriques  de  minium  dans  le  comte'  de  Derby, 
Tune  auprès  de  Chejlerfield ,  &  l'autre  aux  environs  de  ia  ville  de 
Wiskfa^orih,  Le  fourneau  pour  cette  opération,  eft  un  réverbère  à 
deux  chauffes,  renfermées  fous  une  ieule  &   même  voûte.  .  .  .  On 

y  fait  ufdge  de  charbon  de  terre On  emploie  communément 

quinze  quintaux  ou  dix  lingots  de  plomb  dans  une  opération. . .. 

On  commence  j^ar  mettre  en-dedans,  &  devant  l'embouchure  du 
fourneau  ,  le  grollier  de  la  matière  jaune  qui  a  relié  au  fond  de  la 
balfine  dans  le  lavage  ,  ce  qui  empêche  le  plomb  de  couler  au- 
<iehors  du  fourneau.  On  introduit  le  plomb  dans  le  fourneau,  &.  dè^ 

Bb  ij 


196        Histoire   Naturelle 

pratiques  ufitées  en  Angleterre,  pour  faire  le  minium 
en  grande  quantité,  &  par  conféquent  à  moindre  frais 
qu'on  ne  le  fait  ordinairement. 

Les  Anglois  ne  fe  fervent  que  de  charbon  de  terre 
pour  faire  le  minium,  &  ils  prétendent  même  qu'on 
ne  réuffiroit  pas  avec  le  charbon  de  bois  ;  cependant, 
dit  M.  Jars,  il  n'y  auroit  d'autre  inconvénient  que  celui 

qu'il  eft  fondu  on  l'agiie  continuellement  ;  à  mefure  qu'il  fe  réduit 
en  chaux  on  fe  tire  de  côte',  &  on  continue  jufqu'à  ce  que  le  tout 
foit  converti  en  poudre  ,  ce  qui  arrive  ordinairement  au  bout  de 
quatre  ou  cinq  heures.  S'il  refte  encore  quelques  morceaux  de  plomb, 
on  les  conferve  pour  une  autre  opération.  On  donne  une  chaleur 
vive  pendant  tout  fe  temps  de  cette  converfion  ,  cependant  elle  ne 
donne  qu'un  rouge  de  cerife  très-foncé  ;  car  les  deux  ouvertures  des 
chauffes  &  l'embouchure  du  fourneau  font  toujours  ouvertes  afin  que 
Je  contad  de  l'air  accélère  la  calcination. . . . 

If  faut  pfus  que  \^s  quatre  ou  cinq  heures  qui  convertiflent  le 
plomb  en  chaux,  pour  qu'il  foit  réduit  en  poudre  jaune;  ainfi  on 
le  laiffe  encore  près  de  vingt-quatre  heures  dans  le  fourneau  ;  mais 
on  ne  fe  remue  pas  fouvent  dès  qu'il  efl  une  fois  en  poudre  ,  feu- 
îemejit  autant  qu'il  le  faut  pour  empêcher  qu'il  ne  fe  ineiie  en 
grumeaux ,  ou  ne  fe  fonde  en  maffe.  Quand  on  juge  la  chaux  de 
plomb  affez  calcinée ,  on  la  tire  hors  du  fourneau  avec  un  rable  de 
fer ,  &  on  fa  fait  tomber  fur  un  pavé  uni ,  on  fait  couler  de  l'eau 
fraîche  par-deffus  pour  divifer  la  chaux  qui  peut  être  grumelée ,  & 
îa  rendre  affez  friable  pour  paffer  au  moulin  ,  ôc  on  continue  jufqu'à 
ce  qu'elle  foit  imbibée  &  bien  refroidie;  cette  matière  étant  encore 
chaude  refTemble  beaucoup  à  fa  litharge,  &  for/qu'elle  efl  froide, 
elle  efl  d'une  couleur  jaune-fale.  Cette  matière  jaune  efl  mife  dans 
un  moulin  pour  y  être  broyée  en  y  verfant  de  l'eau  ,  &  à  mefure 
qu'elle  fe  broyé  ^\i^  tombe  dans  une  cuve  placée  pour  la  recevoir 


x^  E  s    Minéraux.         197 

Ses  éclats  de  ce  charbon  qui  pourroient  revivifier  quelques 
parties  de  la  chaux  de  plomb,  ce  qu'il  cfl  très  -  aifé 
d'éviter.  Je  ne  penfe  pas ,  avec  M.  Jars ,  que  ce 
foit-Ià  le  feul  inconvénient.  Le  charbon  de  bois  ne 
donne  pas  une  chaleur  aufli  forte  ni  auïïi  confiante  ont 
le  charbon  de  terre,   &  d'ailleurs  l'acide  fulfureux  qui 


au  bas  du  moulin  ;   mais  comme  cette   matière  n'eft  pas  également 
broye'e ,  on  la  pafTe  dans  un  tonneau  plein  d'eau  pour  y  être  lave'e 
à  l'aide  d'une  badine  de  cuivre  qu'on  remplit  à  moitié  de  chaux  de 
plomb,  &  qu'on  agite  de  manière  que  la  matière  broyée  la  plus  fine 
fe  mêle  à  toute  l'eau   du  tonneau   &  fe  précipite  au   fond ,  tandis 
que  celle  qui  n'eft  pas  divifée  fufîfifamment  refte  dans  la  bafllne,  & 
fert  pour  être  placée ,  comme  on  l'a  déjà  dit ,  devant  l'embouchure 
intérieure  du  fourneau  pour  être  calcinée  de  nouveau  avec  le  plomb. . . 
On  continue  de  procéder  de  la  même  manière  pour  le  moulin   & 
pour  le  lavage ,  jufqu'à  ce  que  toute  fa  matière  jaune  provenue  de 
la  première  calcination  ait  été  entièrement  paiïce.  Lorfque  le  lavao-e 
eft  fait ,  on  laifle  précipiter  au  fond   du  tonneau  la  matière  qui  eft 
fulpendue  dans  l'eau  par  fa  grande  divifion ,  enfuite  on  \erÇe  l'eau 
pour   retirer   le  précipité    auquel   on    donne   la  couleur  rouge  par 
l'opération  fuivante.  On  introduit  cette  matière  précipitée  ou  chaux 
de  plomb  dans  le  milieu  du  fourneau ,  on  en  forme  un  feul  tas  que 
l'on  aplatit ,  &  fur  cet  aplatiffement  on  fait  des  raies  ou  filions ,   & 
on    ne  remue    la  matière  que    pour   l'empêcher  de  s'agiutiner  ;    & 
c'eft  par  cette  dernière  opération  qu'on  lui  donne  la  couleur  rouge. 
II  faut   trente-fix  ou  quarante-huit  heures  de  feu  avec  du  charbon 
de  terre ,  comme  dans  la  première  calcination  ,   «5c  on  retire  eiîfuitc 
la  matière   toute  chaude;    elle  paroîi  alors  d'un  rouge  très- foncé; 
mais  elle    prend,    en  fe  refroidifl"ant ,   le  beau    rouge    du  minium. 
Ai.   Jars,    Mémoires   de  l'Académie    des   Sciences,    année    lyyo ,, 
pages  ^  8  ù'  fuivante  s. 


198         Histoire  Naturelle 

s'en  exhale,  &la  fumée  du  bitume  qu'il  contient,  peuvent 
contribuer  à  donner  à  la  chaux  de  plomb ,  la  belle 
couleur  rouge. 

Toutes  ces  chaux  de  plomb,  blanches,  grifes,  jaunes 
&  rouges ,  font  non  -  feulement  très  -  aifces  à  vitrifier  , 
mais  même  elles  déterminent  promptement  &  puiffam- 
mcnt  la  vitrification  de  plufieurs  autres  matières;  feules, 
elles  ne  donnent  que  de  la  litharge  ou  du  verre  jaune 
très  -  peu  folidc  ;  mais  fondues  avec  le  quartz ,  elles 
forment  un  verre  irès-folide,  alTcz  tranf|xirent,  <Sl  d'une 
belle   couleur  jaune. 

Confidérant  maintenant  les  propriétés  particulières 
du  plomb  dans  fon  état  de  métal,  nous  verrons  qu'il 
efl  le  moins  dur  «^  le  moins  élaflique  de  tous  les  métaux, 
que  quoiqu'il  fbit  très-mou,  il  efl  auffi  le  moins  duéliîe; 
qu'il  ell  encore  ie  moins  tenace,  pui/qu'un  fil  d'un 
dixième  de  pouce  de  diamètre,  ne  peut  foutenir  un 
poids  de  30  livres  fans  fe  rompre;  mais  il  efl,  après 
l'or ,  le  plus  pefant  ;  car  je  ne  mets  pas  le  mercure  ni 
la  platine  au  nombre  des  vrais  métaux  ;  fon  poids  fpé- 
cifique  cft  à  celui  de  l'eau  diflillée  comme  113^23 
font  à  10000,  &.  le  pied  cube  de  plomb  pur,  pèfe 
•794  livres  10  onces  4  gros  4.4.  grains  (i).  Son  odeur 
efl  moins  forte  que  celle  du  cuivre,  cependant  eWt  fè 
fait  fentir    défagréablcment  lorfqu'on  le   frotte  ;   il    efl 

(l)  Voyez  la  Titbie  des  pelaateurs  fpeciiîques,  par  J\l.  BrifToii. 


DES    Minéraux.  19c 

d'un  aflcz  beau  blanc  quand  il  vient  cl'éiio  fondu,  ou 
îorfqu'on  l'entame  &  le  coupe  ;  mais  rimprc/Tiou  de 
i'air  ternit  en  peu  de  temps  fa  furface  qui  fe  décompofè 
en  une  rouille  légère  de  couleur  obicure  &  bleuâtre; 
cette  rouille  efl  afFez  adhérente  au  métal,  elle  ne  s'en 
détache  pas  auiïi  facilement  que  le  vert-de  gris  fe  détache 
du  cuivre,  c'eft  une  e/pèce  de  chaux  qui  fe  revivifie  aufîi 
aifément  que  les  autres  chaux  de  plomb  ;  c'eft  une 
cérufe  commencée  ;  cette  décompofition  par  les  élémens 
humides ,  fe  fait  plus  promptement  lorfque  ce  métal 
efl  expofé  à  de  fréquentes  alternatives  de  féchcreffe 
&  d'humidité. 

Le  plomb,  comme  Ton  fait ,  fe  fond  très-facilement, 
&  lorsqu'on  le  laiffe  refroidir  lentement,  il  forme  des 
criflaux  qu'on  peut  rendre  très-apparens  par  un  procédé 
qu'indique  M.  l'abbé  Mongez  ;  c'efl  en  formant  une 
géode  dans  un  creufet,  dont  le  fond  efl  environné  de 
charbon,  &  qu'on  perce  dès  que  la  furface  du  métai 
fondu  a  pris  de  la  confiflance  :  on  obtient  de  cette 
manière,  des  criflaux  bien  formés  en  pyramides  trièdres 
ifblées,  &.  de  trois  à  quatre  lignes  de  longueur.  Je  me  fuis 
fervi  du  même  moyen  pour  criflallifcr  la  fonte  de  fer. 

Le  plomb  expofé  à  l'air  dans  fon  état  de  fufion,  fc 
combine  avec  cet  élément ,  qui  non-feulement  s'attache 
à  fa  furface,  mais  fe  fixe  dans  fa  fubflance,  la  convertit 
en  chaux ,   &  en  augmente  le  volume  &  le  poids  C^J,- 

(a)  Silon  M.  Chardenon,  un  quinul  de  plomb  donne  jufqu'à 


20O        Histoire  Naturelle 

cet  air  fixé  dans  le  métal  eft  la  feule  caufe  de  fà  con-' 
verfion  en  chaux ,  le  phlogiflique  ne  fait  rien  ici ,  &  il 
eil  étonnant  que  nos  Chimiftes  s'obfîinent  à  vouloir 
expliquer  par  l'abfence  &  la  préfence  de  ce  phlogiflique, 
les  phénomènes  de  la  calcination  &.  de  la  revivification 
des  métaux  ;  tandis  qu'on  peut  démontrer  que  le  chan- 
gement du  métal  en  chaux ,  &  fon  augmentation  de 
volume  ou  pefanteur  abfolue,  ne  viennent  que  de  Tair 
qui  y  ell  entré,  puifqu'on  en  retire  cet  air  en  même 
quantité,  &  que  rien  n'eft  plus  fnnplc  <&.  plus  aifé  à 
concevoir  que  la  rédudion  de  cette  chaux  en  métal, 
puifqu'on  peut  également  démontrer  que  l'air  ayant  plus 
d'affinité  avec  les  matières  inflammables  qu'avec  le  métal, 
il  l'abandonne  dès  qu'on  lui  préfente  quelqu'une  de  ces 
matières,  &  laifTe  par  conféquent  le  métal  dans  l'état 
où  il  l'avoit  trouvé.  La  rédudlion  de  la  chaux  des 
métaux  n'efl  donc  au  vrai  qu'une  forte  de  précipitation^ 
auffi  aifée  à  entendre,  auffi  facile  à  démontrer  que  toute 
jiutre. 

Nous  observerons  en  particulier ,  que  le  plomb  <Sc 
î'étain  font  les  deux  métaux  avec  lefquels  l'air  fe  fixe  & 
fe  combine  le  plus  promptement  dans  leur  état  de 
fufion,  mais  que  I'étain  le  retient  bien  plus  puiflamment; 
«^— ^^— »—  »— »— ^  ■ 

cent  dix  livres  de  chaux  ;  &  de  tous  les  me'taux  ,  fe  plomb  &  Tctain 
font  ceux  qui  acquièrent  (e  plus  de  pefanteur  dans  la  calcination,, 
Almoïres  de  l'Académie  de  Dijon ,   tome  I,  pages  ^  o^  O"  fuiv, 

la 


DES    Minéraux,         201 

îa  chaux  de  plomb  fe  réduit  beaucoup  plus  aifément 
en  métal  que  celle  de  i'étain  par  l'addition  des  matières 
inHammables  ;  ainfi  l'affinité  de  l'air  s'exerce  d'une 
manière  plus  iniime  avec  I'étain  qu'avec  le  plomb. 

Si  nous  comparons  encore  ces  deux  métaux  par 
d'autres  propriétés ,  nous  trouverons  que  le  plomb 
approche  de  i'étam,  non-feulement  par  la  facilité  qu'il  a 
de  fe  calciner,  mais  encore  par  la  fufibilité,  la  mollelfe, 
la  couleur,  &  qu'il  n'en  diffère  qu'en  ce  que,  comme 
nous  venons  de  le  dire ,  la  chaux  du  plomb  efl  plus  aifé- 
ment réductible ,  &  quoique  ces  deux  chaux  foient 
d'abord  de  la  même  couleur  grifè,  la  chaux  d'étain, 
par  une  plus  forte  calcination ,  devient  blanche  &  refte 
blanche ,  tandis  que  celle  de  plomb  devient  jaune ,  puis 
rouge  par  une  calcination  continuée  ;  de  plus,  celle  de 
i'étain  ne  fe  vitrifie  que  très -difficilement,  au  lieu  que 
celle  du  plomb  fè  change  en  im  vrai  verre  tran/parent 
&  pefant,  &  qui  devient  au  feu  fi  fluide  &  li  aélif,  qu'il 
perce  les  creufets  les  plus  compaéts  ;  ce  verre  de  plomb 
dans  lequel  l'air  fixe  de  fa  chaux  s'eft  incorporé,  peut 
encore  fe  réduire  facilement  en  métal  coulant ,  il  fuflic 
de  le  broyer  &  de  le  refondre  en  y  ajoutant  une  matière 
inflammable  ,  avec  laquelle  l'air  ayant  plus  d'affinité 
qu'avec  le  plomb,  fe  dégagera  en  faififl^ant  cette  matière 
inflammable  qui  l'emporte,  &  il  laiffera  par  conféquent 
le  plomb  dans  fon  premier  état  de  métal  coulant. 
Le  piomb  peut  s'allier  avec  tous  les  métaux,  à 
Minéraux,  Tome  IIL  Ce 


202  Histoire  Naturelle 

Texception  du  fer  avec  lequel  il  ne  paroît  pas  qu'il 
puiffe  coutrader  d'union  intime  (b) ;  cependant  on  peut 
les  réunir  de  très-près  en  failànt  auparavant  fondre  le 
fer.  M.  de  Morveau  a  dans  iow  Cabinet,  un  culot 
formé  d'acier  fondu  &  de  plomb  ,  dans  lequel  à  la 
vérité  ,  ces  deux  métaux  ne  font  pas  alliés ,  mais  am- 
plement adhérens  de  fi  près ,  que  la  ligne  de  féparatiou 
n'efl  prefque  pas  fenfible. 

La  chaux  de  cuivre  &  celle  du  plomb  mélangées , 
s'incorporent  &  fë  vitriiient  toutes  deux  ensemble;  le 
plomb  entraîne  le  cuivre  dans  fa  vitrification,  &  il 
rejette  le  fer  fur  les  bords  de  la  coupelle  ;  c'eft  par 
cette  propriété  particulière  qu'il  purge  l'or  &  l'argent 
de  toiite  matière  métallique  étrangère;  perfonne  n'a 
mieux  décrit  tout  ce  qui  fè  pafTe  dans  les  coupellations 
que  notre  favant  Académicien,  M.  Sage,  dans  fes 
Mémoires  fur  les   Ejfd'is. 

On  a  obfervé  que  le  plomb  &.  l'étain  mêlés  enfèmble, 

'•^^^—   ■  ■■  ■  ■■       ■  ,  ■  ,  -  ■  —         —      _    _  ^ 

(b )  «  Ce  métal  s'unit  aflez  facilement  avec  tous  les  métaux , 
30  excepté  Je  fer  avec  lequel  il  refuie  opiniâtrement  tout  alliage  ;  fou 
•y>  affinité  avec  l'argent  &  fon  antipathie  avec  le  fer  eft  fi  grande , 
3)  que  fi  l'on  fait  fondre  dans  du  plomb  de  l'argent  allié  avec  un 
T> peu  de  fer ,  le  plomb  s'empare  auili-tôi  de  l'argent,  mais  rejette 
y*  le  fer  qui  vient  nager  à  fa  furface  ».  Diâionnaire  Je  Chimie ,  par 
AI.  Alûcquer  ;  article  plomb.  —  Nota.  J'obferverai  qu'il  efl  douteux 
que  le  fer  s'allie  réellement  avec  l'argent ,  il  ne  s'unit  avec  ce  métal 
que  comme  l'acier  s'unit^ avec  le  plomb  par  une  forte  adhefiorij^ 
mais  fans  mélange  intime. 


DES    Minéraux.  203 

fe  calcinent  plus  promptement  &  plus  profonJémeat 
que  l'un  ou  l'autre  ne  fe  calcine  feul  ;  c'eft  de  cette 
chaux,  mi  partie  d'étain  &:  de  plomb ,  que  fe  fait  l'émail 
blanc  des  faïences  communes;  &.  c'eft  avec  le  verre 
de  plomb  feul  qu'on  vernit  les  poteries  de  terre  encore 
plus  communes. 

Le  plomb  femble  approcher  de  l'argent  par  quelques 
propriétés  ;  non  -  feulement  il  lui  eft  prcique  toujours 
uni  dans  fes  mines;  mais  lors  même  qu'il  eft  pur  6c 
dans  fon  état  de  métal ,  il  préfente  les  mêmes  phéno- 
mènes dans  fës  diiTolutions  par  les  acides;  il  forme, 
comme  l'argent,  avec  l'acide  nitreux,  un  fel  plus  cauf- 
tique  que  les  fels  des  autres  métaux. 

Le  plomb  a  auffi  de  l'affinité  avec  le  mercure  ;  ils 
s*amalgament  facilement,  Sl  ils  forment  enfemble  des 
criilaux;  cet  amalgame  de  plomb  a  la  propriété  fmgu- 
iière ,  de  décrépiter  très-vivement  fur  le  feu. 

L'ordre  des  affinités  du  plomb  avec  les  autres 
métaux,  fiiivant  M,  Geller,  cfl  l'argent,  l'or,  l'étain , 
le  cuivre;  cette  grande  affinité  de  l'argent  &  du  plomb 
que  l'Art  nous  démontre ,  eft  bien  indiquée  par  la 
Nature  ;  car  l'on  trouve  l'argent  uni  au  plomb  dans 
toutes  les  mines  de  première  comme  de  dernière 
formation  ;  ce  font  les  poudres  des  mines  primitives  de 
l'argent,  qui  fe  font  unies  &  mêlées  avec  la  chaux  de 
plomb,  &  ont  formé  les  galènes  ou  premiers  minerais 
de  ce  métal  ;  mais   les  affinités   du   plomb   avec   l'or, 

C  c  ij 


204         Histoire  Natu relle 

l'ctain  (5c  le  cuivre,  que  l'Art  nous  a  fait  reconnoître, 
ne  fe  manifeftent  que  par  de  légers  indices  dans  le  fcin 
de  la  terre;  ce  n'efl  point  avec  ces  métaux  que  le  plomb 
s'y  combine;  mais  c'eft  avec  les  Tels,  &  fur -tout  avec 
les  acides  qu'il  prend  des  formes  différentes  :  la  galène 
qu'on  doit  regarder  comme  le  plomb  de  première  for- 
mation ,  n'ell  qu'une  efpèce  de  pyrite  compo/ée  de  ♦ 
chaux  de  plomb,  &  de  l'acide  uni  à  la  fùbflance  du 
feu  ùxe.  L'air  &  les  fels  de  la  terre  ont  enfuite  dccom- 
pofé  ces  galènes  comme  ils  dccompo/ènt  toutes  les 
autres  pyrites  ,  &  c'eft  de  leurs  détrimens  que  fe  font 
formées  toutes  les  mines  de  féconde  &  de  troiHème 
formation;  cette  marche  de  la  Nature  efl  uniforme;  le 
feu  primitif  a  fondu,  fublimé  ou  calciné  les  métaux, 
après  quoi  les  élémens  humides,  les  fels  &  lur-tout  les 
acides,  les  ont  attaqués,  corrodés,  diffous ,  &  s'in- 
corporant  avec  eux,  par  une  union  intime,  leur  ont 
donné  les  nouvelles  formes  fous  leiquelles  ils  fe  pré- 
fentent. 

Tous  les  acides  minéraux  ou  végétaux  ,  peuvent 
entamer  ou  difToudre  le  plomb;  les  huiles  &  les  graiffes 
agiffent  aufTi  fur  ce  métal  en  raifon  des  acides  qu'elles 
contiennent  ;  elles  l'attaquent  fur  -  tout  dans  fon  état 
de  chaux  ,  &  di (Toi vent  la  cérule  ,  le  minium  &  la 
iitharge  à   l'aide  d'une  médiocre  chaleur. 

L'acide  vitriolique  doit  être  concentré  &  aidé  de  la 
chaleur   pour    difToudre    le    plomb   réduit  en  poudre 


DES     ÂllNÉRAV  X,  205 

métallique  ou  en  cliaux ,  &  cette  cii/Tolutron  produit 
un  Tel  qu'on  appelle  vuriol  de  plomb.  On  a  remarqué 
que  le  minium  réfifle  plus  que  les  autres  chaux  de 
plomb  à  cet  acide,  qu'il  ne  fe  dilfout  qu'en  partie,  c5c 
qu'il  perd  feulement  fa  belle  couleur  rouge,  &  devient 
d'im  brun  preique  noir  (c).  Les  fels  neutres  qui  con- 
tiennent de  l'acide  vitriolique  ,  agiffent  aufTi  fur  les  chaux 
de  plomb  ;  ils  les  précipitent  de  leur  diiïblution 
dans  l'acide  nitreux,  ik.  forment  avec  elles,  un  vitriol 
de  plomb. 

L'acide  nitreux,  loin  d'être  concentré  comme  le 
vitriolique,  doit  au  contraire  être  affoibli  pour  bien 
diiToudre  le  plomb  ;  &  la  difloîution ,  après  Tévapo- 
ration,  donne  des  criftaux  qui,  comme  tous  les  autres 
fels  produits  par  ce  même  métal ,  ont  plutôt  une  faveur 
fucrce  que  faline  :  au  refte ,  cet  acide  diffout  égale- 
ment le  plomb  dans  fon  état  de  métal  &.  dans  ion  état 
de  chaux,  c'efl  -  à  -  dire  ,  les  céruies,  le  maificot ,  le 
minium  &  même  les  mines  de  plomb  blanches,  vertes 
&  rouges,  &.C. 

L'acide  marin  ne  diffout  le  plomb  qu'à  l'aide  d'une 
forte  chaleur  ,  cette  dilfolution  donne  un  fel  dont  les 
criflaux  font  brillans  &l  en  petites  aiguilles  ;  cet  acide, 
ainfi  que  les  fels  qui  en  contiennent  ,  précipitent  le 
plomb  de  fa  chffolution  dans    l'acide  nitreux,  &  forme 

(c)  Élt^mens  de  Chimie,  par  M.  de  Morveau,  towe  II ,  page  j?^. 


loG        Histoire  Naturelle 

un  ftl  Dictallique  auquel  les  Chimifles  ont  donne  le 
nom  (le  plo?ub  corné ,  comme  ils  ont  auiFi  nommé  argent 
corné  ou  lune  cornet,  les  criilaux  de  la  di/Tolution  de 
l'argent  par  le  même  acide  marin. 

Le  foufre  s'unit  aifcment  avec  le  plomb  par  la  fufion, 
&  lorfqu'on  laifle  ce  mélange  expoié  à  Taétion  du  feu 
libre,  il  fe  brûle  en  partie,  &  le  rcfte  qui  eft  calciné, 
forme  une  efpèce  de  pyrite  ou  mine  de  plomb ,  fem- 
biable  à  la  galène  (d) . 

Les  acides  végétaux ,  &  en  particulier  celui  du 
vinaigre ,  attaquent  &  diffolvent  le  plomb  ;  c'efl  en 
l'expofant  à  la  vapeur  du  vinaigre  qu'on  le  convertit 
en  chaux  blanche,  &  c'efl  de  cette  manière  que  l'on 
fait  la  cérufe  qui  eft  dans  le  commerce:  cette  chaux  ou 
cérufe  fe  difTout  parfaitement  dans  le  vinaigre  concentré; 
elle  y  produit  même  une  grande  quantité  de  crifîaux 
dont  la  faveur  efl   fucrée  (e) ,  on  a  fouvent  abufé  de 

(d)  «  Le  plomb  fondu  avec  le  foufre  s'enflamme  feul  ;  il  refle 
»  une  poudre  noire  ccaiileufe,  que  l'on  appelle  yi^/owZ'  hrùlé;  cette 
»  matière  n'entre  en  fufion  qu'après  avoir  rougi;  elle  produit  une 
»  maffe  noire  ,  aigre  ,  difpore'e  à  facettes  ;  c(^?i  une  galène  ou  mine 
»  de  plomb  artificielle  «.  Elêmens  de  Chimie,  par  AI.  de  Morveau  j 
tome  II,  page   j^. 

(e)  «  L'acide  aceteux  en  vapeurs,  agit  fur  le  plomb  &  le  réduit 
»  en  chaux  ;  fi  l'on  afTujettit  dans  un  chapiteau  de  verre  des  lames 
a>  de  plomb  minces ,  que  l'on  adapte  ce  chapiteau  à  une  cucurbite 
j»  évatée  ,  dans  laquelle  on  aura  mis  du  vinaigre,  &  qu'après  avoir 
>»  lutté  un  récipient,   qïi  le  diilille  au  baiix  de  fable  pendant  dix  ou 


DES    Minéraux.  207 

cette  propriété  de  la  cérufe  &  des  autres  chaux  ou  Tels 
de  plomb  ,  pour  adoucir  le  vin  au  détriment  de  la 
famé  de  ceux  qui  le  boivent.  Au  refle,  l'on  ne  doit 
pas  regarder  la  cérufe  comme  une  chaux  de  plomb 
parfaite,  mais  comme  une  matière  dans  laquelle  le  plomb 
n'eft  qu'à  demi  diffout  ou  calciné  par  l'acide  aérien, 
&  refte  encore  plutôt  dans  l'état  métallique  que  dans 
l'état  falin;  en  forte  qu'elle  n'eft  pas  folubie  dans  l'eau 
comme  les  féls. 

Le  plomb  fe  diffout  aufli  dans  l'acide  du  tartre,  à 
l'aide  de  la  chaleur  &  d'une  longue  digeflion  ;  fi  l'on 
fait  évaporer  cette  diffolution,  elle  prend  une  confif- 
tance  vifqueufe  ,  &  donne  un  fel  criftallifé  en  lames 
quarrées  (f):  enfin,  les  acerbes  ne  laiffent  pas  d'avoir 
auffi  quelqu'aétion  fur  le  plomb,  car  la  noix  de  galle 

douze  heures,  les  lames  fe  couvrent  d'une  matière  blanche  que  l'on  « 
appelle  blanc  de  plomb  ,  &  qui ,  broyce  avec  un  tiers  ou  environ  « 
de  craie,  forme  la  cérufe....  Pour  achever  de  le  faturer  ,  on  met  «c 
!e  blanc  de  plomb  dans  un  matras ,  on  verfe  dcOus  douze  à  quinze  «< 
fois  autant  de  vinaigre  diftillé;  le  mélange  prend  une  faveur  fucrce,  « 
la  fubftance  métallique  entre  en  diffolution  ,  il  s'excite  beaucoup  «< 
de  chaleur  ;  on  phce  le  matras  fur  un  bain  de  fable  ,  &  on  laiffe  « 
le  tout  en  digeltion  pendant  un  jour.  Après  avoir  de'canté  la  « 
liqueur,  on  la  fait  évaporer  jufqu'à  pellicule,  on  la  place  dans  un  « 
iieu  frais ,  il  s'y  forme  de  petits  cridaux  groupés  en  aiguilles ,  «< 
on  les  redifiout  dims  le  vinaigre  ,  &  on  traite  de  même  cette  <c 
dilfolution  pour  avoir  le  lucre  de  Saturne  w.  Élémens  de  Chimie, 
par  M.   de  ykloneau ,   tome  III ^  pa^e   2  S, 

(f)  Idem,  ibid.  page   82 


2o8        Histoire  Naturelle 

le  précipite  de  fa  didblution  dans  l'acide  nitreiix,  & 
la  furface  de  la  liqueur  fe  couvre  en  même  temps  d'une 
peilicule  à  reflets  rouges   &  verts. 

Les  alkalis  fixes  &•  volatils,  non  plus  que  les  terres 
abforbantcs,  ne  font  pas  des  effets  bien  fenijbles  fur 
le  plomb  dans  quelqu'état  qu'il  foit;  néanmoins  ils  ont 
avec  ce  métal ,  une  affinité  bien  marquée  dans  certaines 
circonflances,  par  exemple  ils  le  précipitent  de  fa  diffo- 
li'.tion  dans  l'acide  marin,  fous  la  forme  d'une  poudre 
blanche  qui  fe  ternit  bientôt  à  l'air  comme  le  métal 
même  (g). 

En  comparant  les  mines  primordiales  des  fix  métaux, 
nous  voyons  que  l'or  feul  fè  trouve  prefque  toujours 
en  état  de  métal  dans  le  fcin  de  la  terre,  que  quoiqu'il  n'y 
foit  jamais  pur ,  mais  allié  de  plus  ou  moins  d'argent  ou 
de  cuivre,  il  ne  fè  pré/ènte  que  rarement  fous  une  forme 
minéralifée,  &  qu'il  recouvre  cSc  défend  l'argent  de  toute 

(g)  L'alkali  cauflique  n'a  prefque  point  d'acftion  fur  le  plomb  , 
mais  il  diffout,  pendant  i'éljuHition  ,  une  quantiic  très-fenfible  de 
minium  qui  nea  efl  pas  feparé  par  le  filtre,  qui  fe  dcpofe  avec  \é 
temps  dans  le  fîacon  ,  fous  forme  d'une  poudre  blanche ,  &  qui 
eft  précipitée  fur  le  champ  par  l'eau  forte.  E-.émens  de  C L'unie ,  par 
AI.  de  Alorveau ,  lome  III ,  page  a  S, 

L'alkali  volatil  cauQique  digéré  fur  la  limaille  de  plomb ,  prend 
dans  les  premiers  jours  une  couleur  légèrement  ambrée,  qui  difparoît 
enfuiie  entièrement;  une  partie  du  métal  eft;  réduite  à  l'état  de  chaux, 
une  autre  partie  efl:  tenue  en  diflblution  au  point  de  pafîer  par  le  filtre , 
elle  eft  précipitée  par  l'acide  nitreux.  I4cm ,  ibid.  page   2^6. 

altération  ; 


DES  Minéraux.  209 

altération;  on  afTurc  cependant  que  l'or  efl  vraiment 
minéralifé  dans  la  mine  de  Naghiac  (^/ij ,  &  dans  quelques 
pyrites  nouvellement  trouvées  en  Dauphiné  ;  mais 
ce  métal  ne  doit  néanmoins  fubir  aucun  changement , 
aucune  altération ,  que  par  des  combinai/bns  qui  ne 
peuvent  fe  trouver  que  très-rarement  dans  la  Nature; 
&  nous  verrons  en  traitant  de  la  platine,  que  l'or,  qui 
fait  le  fonds  de  fa  fùbftance,  y  efl  encore  plus  altéré, 
&  prefque  dénaturé;  ces  deux  exemples  font  les  feuls 
qu'on  puiffe  donner  d'un  changement  d'état  dans  l'or, 
&  Ton  ne  doit  pas  les  regarder  comme  des  opérations 
ordinaires  de  la  Nature,  mais  comme  des  accidens  fi 
rares,  qu'ils  n'ôtent  rien  à  la  vérité  du  fait  général,  que 
l'or  fe  préfente  par-tout  dans  l'état  de  métal ,  <5c  feulement 
plus  ou  moins   divifé  &.  non  minéralifé. 

L'argent  fe  trouve  affez  fbuvent,  comme  Tor,  dans 
l'état  de  métal  pur  ;  mais  il  efl  encore  plus  fouvent 
mêlé  avec  le  plomb  ou  minéralifé,  c'cfl-à-dire,  altéré 
par  les  fels  de  la  terre;  le  cuivre  réfifîc  beaucoup  moins 
à  l'imprefTion  des  élémens  humides ,  &  quoiqu'il  fe 
trouve  quelquefois  en  état  de  métal,  il  fe  préfente  ordi- 
nairement fous  des  formes  minéralifées  &  variées,  pour 

f/ij  Nota.  M.  Bergmann ,  à  qui  M.  Tungberg  a  envoyé  un 
morceau  de  cette  mine  de  Naghiac  ,  s'efl:  afTuré  qu'il  contenoit  du 
quartz  hhnc  y  une  pierre  crénaire  blancludre ,  fe  coupant  au  couteau, 
faifant  effervefcence  avec  les  acides  ,  &  de  la  manganaife.  La  formatiou 
de  cette  mine  ne   doit  donc  être  regardée  que  coinnie  accidentelle. 

Minéraux,  Tome  II L  D  d 


210       Histoire   Naturelle 

ainfi  dire,  à  l'infini:  ces  trois  métaux,  l'or,  l'argent  & 
le  cuivre,  font  ies  feuls  qui  aient  pris  dès  les  premiers 
temps ,  &  confèrvé  plus  ou  moins  ju/qu'à  ce  jour ,  leur 
état  métallique;  le  fer,  le  plomb  &  l'étain  ne  fe  trouvent 
nulle  part ,  &  même  n'ont  jamais  été  dans  cet  état 
métallique  ;  le  feu  primitif  les  a  iondus  ou  calcinés  ; 
le  fer  par  fa  fufion  s'ell  mêlé  à  la  roche  vitreufè,  &  le 
plomb  &  l'étain,  après  leur  calcination,  ont  été  faifis 
par  l'acide  ôl  réduits  en  minerais  pyriteux,  ainli  que  les 
cuivres  qui  n'ont  pas  confèrvé  leur  état  de  métal  :  tous 
ces  métaux  ont  fouvent  été  mêlés  les  uns  avec  les  aiures, 
&  dans  les  mines  primordiales  comme  dans  les  mines 
fécondai res ,  on  ies  trouve  quelquefois  tous  réunis 
enfemble. 


Ty  E  s   M  I N  É  n  AU  X.  211 


DU    MERCURE. 

IviEN  ne  reffembie  plus  à  i'étain  ou  au  plomb,  Jaus 
leur  écat  de  funoii,  que  le  Mercure  dans  Ton  état  naturel; 
au/Fi   Ta-t-on  re/rardé   comme   un    mctal    fluide   auauei 
on  a  cherche,  mais  vainement,  les  moyens  de  donner 
de  la  foliditc  ;  on  a  feulement  trouve  que  le  froid  extrême 
pouvoit  le  coaguler,  fans  lui  donner  une  folidité  confiante, 
ni  même  aufn  permanente,  à  beaucoup  près,  que  celle 
de   l'eau  glacée;  &  par  ce  rapport  unique  &  (ingulier, 
ie  mercure  femble  fe  rapprocher  de  la  nature  de  l'eau , 
autant    qu'il    approche    du    métal    par    d'autres    pro- 
priétés ,  &L  notamment  par   fà   dcnfité ,    la   plus   grande 
de  toutes  après   celle  de   l'or  f^a)  ;   mais  il    diffère   de 
tout  métal,  &  même    de   tout    minéral  métallique  ,    en 
ce  qu'il  n'a  nulle  ténacité  ,  nulle  dureté  ,  nulle  folidité, 
nulle   fixité,    &    il  fe    rcippoche    encore  de   l'eau    par 
fa  volatilité  ,   puifque  ,  comme    elle ,  il  fe    volatilife   <5c 
s'évapore  à  une  médiocre  chaleur.  Ce  liquide   minéral 
eft-il    donc    un   métal!   ou  n'efl-il    pas  une    eau   qui 
reffemble    aux    métaux   parce   qu'elle   eft    chargée   des 
parties   les  plus  denfes  de  la  terre,  avec  lefquelles  elle 

(d)  La  pefanteiir  Tpécifique  de  l'or  à  24  karars  efl  de  if>2j8r  , 
^  celle  du  plomb  de  115523.  La  pelanteur  ipécifique  du  mercure 
coulant  eft  de  1356!^!  ,  &  celle  du  cinabre  d'Almaden  efl  Ue 
102185.  yoyc\  les   Tables  de  Ai.   Brijfon, 

Dd  ij 


212       Histoire    Naturelle 

s'efl  plus  intimement  unie  que  dans  aucune  autre  matière  l 
On  fait  qu'en  général,  toute  fluidité  provient  de  la 
chaleur,  &  qu'en  particulier  le  feu  agit  fur  les  métaux 
comme  l'eau  fur  les  fels,  puifqu'il  les  liquéfie,  &  qu'il 
les  tiendroit  en  une  fluidité  confiante  s'il  étoit  tou- 
jours au  même  degré  de  violente  chaleur,  tandis  que 
les  fels  ne  demandent  que  celui  de  la  température  aduelle 
pour  demeurer  liquides  ;  tous  les  fels  fe  liquéfiant  dans 
l'eau  comme  les  métaux  dans  le  feu,  la  fluidité  du 
mercure  tient,  ce  me  femble,  plus  au  premier  élément 
qu'au  dernier  ;  car  le  mercure  ne  fe  folidifie  qu'en  fè 
glaçant  comme  l'eau;  il  lui  faut  même  un  bien  plus 
grand  degré  de  froid,  parce  qu'il  eft  beaucoup  plus 
denfe  ;  le  feu  efl  ici  en  quantité  prefque  infiniment 
petite,  au  lieu  que  ce  même  élément  ne  peut  agir  fur 
les  métaux,  comme  liquéfiant,  comme  diflblvant,  que 
quand  il  leur  efl  appliqué  en  quantité  infiniment  grande, 
en  comparaifon  de  ce  qu'il  en  faut  au  mercure  pour 
demeurer  liquide. 

De  plus,  le  mercure  fe  réduit  en  vapeurs  par  fefîèt 
de  la  chaleur,  à  peu-près  comme  l'eau,  &  ces  deux 
vapeurs  font  également  incoercibles,  même  par  les  réfif 
tances  les  plus  fortes  ;  toutes  deux  font  éclater  ou  fendre 
les  vaifTeaux  les  plus  folides  avec  explofion;  enfin,  le 
mercure  mouille  les  métaux,  comme  l'eau  mouille  les 
fels  ou  les  terres,  à  proportion  des  fèls  qu'elles  con- 
tiennent; le  mercure  ne  peut-il  donc  pas  être  confidérc 


I 


DES    Minéraux»  21^ 

comme  une  eau  denfe  &  pefante,  qui  ne  tient  aux 
métaux  que  par  ce  rapport  de  denfité  l  &:  cette  eau  plus 
denfè  que  tous  les  liquides  connus,  n'a-t-elle  pas  dû  fe 
former,  après  la  chute  des  autres  eaux  Sl  des  matières 
également  volatiles  reléguées  dans  ratmofphere,  pendant 
J'incandefcence  du  Globe  î  les  parties  métalliques  , 
terreflres,  aqueufes  &  falines ,  alors  fublimées  ou  réduites 
en  vapeurs ,  fe  feront  combinées ,  &  tandis  que  les 
matières  fixes  du  Globe  fe  vitrifioient  ou  fe  dépofoient 
fous  la  forme  de  métal  ou  de  chaux  métallique,  tandis 
que  l'eau  encore  pénétrée  de  feu  produifoit  les  acides 
&  les  fels ,  les  vapeurs  de  ces  fubftances  métalliques , 
combinées  avec  celles  de  l'eau  &  des  principes  acides, 
n'ont-elles  pas  pu  former  cette  fubflance  du  mercure 
prefque  auffi  volatile  que  l'eau,  <&  denfe  comme  le  métal! 
Cette  fubftance  liquide  qui  fe  glace  comme  l'eau,  & 
qui  n'en  diffère  effentiellement  que  par  fa  denfité, 
n'a-t-elle  pas  du  fe  trouver  dans  l'ordre  des  combi- 
naifons  de  la  Nature,  qui  a  produit  non-feulement  des 
métaux  &  des  demi-métaux ,  mais  auffi  des  terres  métal- 
liques &  falines,  telles  que  l'arfenic!  Or,  pour  compléter 
h  fuite  de  fes  opérations  n'a -i- elle  pas  dCi  produire 
au/fi  des  eaux  métalliques  telles  que  le  mercure!  L'échelle 
de  la  Nature,  dans  fes  productions  métalliques,  com- 
mence par  l'or  qui  efl  le  métal  le  plus  inaltérable,  Sl 
par  conféquent  le  plus  parfait;  enfiiite  l'argent,  qui  étant 
fujet  à  quelques  altérations,   efl  moins  parfait  que  l'or; 


214        Histoire  Natv relle 

après  quoi  le  cuivre ,  l'ctain  &:  le  plomb ,  qui  font  fuf- 
ccptibles  non  -  feulement  d'altération,  mais  de  décom- 
pofition ,  font  des  métaux  imparfaits  en  comparai/bn 
des  deux  premiers;  enfin,  le  fer  fait  la  nuance  entre  les 
métaux  imparfaits  &  les  demi -métaux;  car  le  fer  &  le 
zinc  ne  préfentcnt  aucun  caradère  effentiel ,  qui  doive 
réellement  les  faire  placer  dans  deux  claffes  difiéreiites; 
la  duélilité  du  fer  efl  une  propriété  que  l'Art  lui  donne, 
il  fe  brûle  comme  le  zinc  ;  il  lui  faut  feulement  un  feu 
plus  fort,  &c.  on  pourroit  donc  également  prendre  le 
fer  pour  le  premier  des  démi-métaux,  ou  le  zinc  pour 
le  dernier  des  métaux;  &  cette  échelle  fe  continue  par 
l'antimoine,  le  brfmutli,  &  linit  par  les  terres  métal- 
liques &  par  le  mercure,  qui  n'eft  qu'une  fubflance 
métallique  liquide. 

On  fe  familiariièra  avec  l'idée  de  cette  poÏÏlbilité,  en 
pefant  les  confidérations  que  nous  venons  de  préfenter, 
&  en  fe  rappelant  que  l'eau,  dans  fon  effence,  doit 
être  regardée  comme  un  fel  infipide  &  Huide,  que  la 
giace  qui  n'efl  que  ce  même  M  rendu  folide,  le  devient 
d'autant  plus,  que  le  froid  efl  plus  grand;  que  l'eau, 
dans  fon  état  de  liquidité,  peut  acquérir  de  la  denfité 
à  mefure  qu'elle  dilfout  les  fcls  ;  que  l'eau  purgée  d'air 
efl  incompreffible,  &  dcs-lors  Compofée  de  parties  très- 
folides  &  très-dures  ;  que  par  conféquent  elle  deviendroit 
très-denfe,  fi  ces  mêmes  parties  s'uniffoient  de  plus 
prèj;  &  quoique  nous  ne  connoilfions  pas  au  jude  le 


DES    Minéraux.  215 

moyen  que  la  Nature  a  employé  pour  faire  ce  rappro- 
chement des  parties  dans  le  mercure,  nous  en  voyons 
néanmoins  aiïez  pour  être  fondés  à  préfumer  que  ce 
minéral  fluide,  ed;  plutôt  une  eau  métallique  qu'im  vrai 
métal;  de  la  même  manière  que  l'aiTcnic  auquel  on 
donne  le  nom  de  dcnn-inctal ,  n'efl  qu'une  terre  plutôt 
fâline  que  métallique,  &  non  pas  un  vrai  demi-méial. 

On  pourra  me  reprocher  que  j'abufe  ici  des  termes, 
en  difant  que  le  mercure  mouille  les  métaux ,  puifqu'il 
ne  mouille  pas  les  autres  matières  ;  au  lieu  que  l'eau  <5c 
les  autres  liquides  mouillent  toutes  les  fubilances  qu'on 
leur  offre,  &  que  par  conféquent  ils  ont  feuls  la  faculté 
de  mouiller;  mais  en  faifant  attention  à  la  grande  denfité 
du  mercure,  &  à  la  forte  attraction  qui  unit  cntr'elles 
fes  parties  confîituantcs,  on  fèntira  aiféraent  qu'une  eau, 
dont  les  parties  s'attireroient  aufli  fort  que  celles  du 
mercure ,  ne  mouilleroit  pas  plus  que  le  mercure  dont 
les  parties  ne  peuvent  fe  dé/linir  que  par  la  chaleur,  ou 
par  une  puiffance  plus  forte  que  celle  de  leur  attraétioii 
réciproque,  &  que  dès-lors  ces  mêmes  parties  ne  peuvent 
mouiller  que  l'or,  l'argent  &.  les  autres  fubilances  qui  les 
attirent  plus  puiffamment  qu'elles  ne  s'attirent  entr'elles; 
on  fèntira  de  même  que  fi  l'eau  paroît  mouiller  indiffé- 
remment toutes  les  matières ,  c'eil  que  fès  parties  inté- 
grantes n'ayant  qu'une  foible  adhérence  entr'elles,  tout 
contad  fufiit  pour  les  féparer,  &  plus  l'attradion  étrangère 
furpaffera   i'attradion   réciproque   &.  mutuelle   de   ces 


2i6      N/sTOJRE    Naturelle 

parties  conflituantes  de  l'eau,  plus  les  matières  étrangères, 
l'attireront  puiflamment  Ôl  ih  mouilleront  profondement. 
Le  mercure,  par  fa  très -grande  fluidité,  mouilleroit  & 
pcncireroit  tous  les  corps  folides  de  la  Nature,  fi  la 
force  d'attradion  qui  s'exerce  entre  fes  parties  en  pro- 
portion de  leur  denfité,  ne  les  tenoit  pour  ainfi  dire  en 
malfe,  «Se  ne  les  empcchoit  par  conféquent  de  fe  fcparcr 
&  de  fè  répandre  en  molécules  affez  petites,  pour  pouvoir 
entrer  dans  les  pores  des  fubflances  folides;  la  feule 
différence  entre  le  mercure  <Sc  l'eau ,  dans  l'action  de 
mouiller,  ne  vient  donc  que  du  plus  ou  moins  de 
cohérence  dans  l'agrégation  de  leurs  parties  confti- 
tuantes,  tk  ne  confide  qu'en  ce  que  celles  de  l'eau  fe 
féparent  les  unes  des  autres  bien  plus  facilement  que 
celles  du  mercure. 

Ainfi  ce  minéral  fluide  comme  l'eau ,  fe  glaçant 
comme  elle  par  le  froid ,  fe  rcduifant  comme  elle  en 
vapeurs  par  le  chaud,  mouillant  les  métaux  comme  elle 
mouille  les  fels  &  les  terres,  pénétrant  mcmc  la  fuhf- 
tance  des  huiles  &  des  graiffes ,  &  entrant  avec  elles 
dans  le  corps  des  animaux,  comme  l'eau  entre  dans  les 
végétaux,  a  de  plus  avec  elle,  un  rapport  qui  fuppofe 
quelque  chofe  de  commun  dans  leur  effence  ;  c'eft  de 
répandre  comme  l'eau,  une  vapeur  qu'on  peut  regarder 
comme  humide;  c'ell  par  cette  vapeur  que  le  mercure 
blanchit  &  pénètre  Tor  fans  le  toucher,  comme  l'hu- 
midité de  l'eau  répandue  dans  l'air  pénètre  les  fels  ;  tout 

concourt 


DES   Minéraux,  217 

concourt  donc ,  ce  me  femble ,  à  prouver  que  le  mercure 
n'eft  point  un  vrai  métal ,  ni  même  un  demi  -  métal  ; 
mais  une  eau  chargée  des  parties  les  plus  denfes  de  la 
terre  ;  comme  les  demi  -  métaux  ne  font  que  des  terres 
chargées,  de  même,  d'autres  parties  denfès  &  pefantes 
qui  les  rapprochent  de  la  nature  des  métaux. 

Après  avoir  expofé  les  rapports  que  le  mercure  peut 
avoir  avec  l'eau,  nous  devons  auffi  préfenter  ceux 
qu'il  a  réellement  avec  les  métaux;  il  en  a  la  dcnfué, 
l'opacité,  le  brillant  métallique,  il  peut  de  même  être 
dilFous  par  les  acides,  précipité  par  les  alkalis;  comme 
eux,  il  ne  contra6le  aucune  union  avec  les  matières 
terreufes ,  &  comme  eux  encore ,  il  en  contraéle  avec 
les  autres  métaux  ;  &  fi  l'on  veut  qu'il  foit  métal ,  on 
pourroit  même  le  regarder  comme  un  troifième  métal 
parfait ,  puifqu'il  eft  prefque  aufîi  inaltérable  que  l'or 
&  l'argent,  par  les  imprelïions  des  élémens  humides. 
Ces  propriétés  relatives  &  communes  le  rapprochent 
donc  encore  plus  de  la  nature  du  métal  qu'elles  ne 
l'éloignent  de  celle  de  l'eau,  &  je  ne  puis  blâmer  les 
Alchimiftes ,  qui ,  voyant  toutes  ces  propriétés  dans  un 
liquide ,  l'ont  regardé  comme  l'eau  des  métaux ,  &i 
particulièrement  comme  la  bafe  de  l'or  &  de  l'argent 
dont  il  approche  par  fa  denfué,  &  auxquels  il  s'unit 
avec  un  empreflement  qui  tient  du  magnctifme,  &  encore 
parce  qu'il  n'a,  comme  l'or  &  l'argent,  ni  odeur  ni 
faveur  :  enfin ,  on  n'ell  pas  encore  bien  alTuré  que 
Minéraux ,  Tome  IIL  E  e 


2i8         Histoire  Natu-relle 

ce  liquide  fi  dcnfe  n'entre  pas  comme  principe  clans 
la  compofition  des  métaux ,  &  qu'on  ne  puiffe  le  retirer 
d'aucun  minerai  métallique.  Recherchons  donc,  fans 
préjugé,  quelle  peut  être  l'efTence  de  ce  minéral  am- 
phibie, qui  participe  de  la  nature  du  métal  c^  de  celle 
de  l'eau  ;  raflemhlons  les  principaux  faits  que  la  Nature 
nous  préfente,  &  ceux  que  l'Art  nous  a  fait  découvrir 
fur  fes  différentes  propriétés  avant  de  nous  arrêter  à 
notre  opinion. 

Mais  ces  faits  paroiffcnt  d'abord  innombrables  ;  aucime 
matière  n'a  été  plus  effayée,  plus  maniée,  plus  com- 
binée ;  les  Alchimilles  fur-tout ,  perfuadés  que  le  mercure 
ou  la  terre  mercurielle  étoit  la  bafc  des  métaux ,  & 
voyant  qu'il  avoit  la  plus  grantle  affinité  avec  l'or  <Sc 
l'argent,  ont  fait  des  travaux  immenfès  pour  tâcher  de 
ie  lixer,  de  le  convertir,  de  l'extraire  ;  ils  l'ont  cherché 
non-fèulemcnt  dans  les  mxtaux  &  minéraux ,  mais  dans 
toutes  les  fubflanccs  &  jufque  dans  les  plantes  ;  ils  ont 
voulu  ennoblir,  par  fon  moyen,  les  métaux  imparfaits, 
&  quoiqu'ils  aient  prefque  toujours  manqué  le  but  de 
Jeurs  recherches ,  ils  n'ont  pas  laiffé  de  faire  pkifieurs 
découvertes  intéreffantes.  Leur  objet  principal  n'étoit 
pas  abfolument  chimérique,  mais  peut-être  moralement 
impoffible  à  atteindre;  car  rien  ne  s'oppofe  à  l'idée  de 
ia  traniinutation  ou  de  l'ennoblifTement  des  métaux,  que 
ie  peu  de  puifîance  de  notre  Art,  en  comparaifbn  des 
forces  de  ia  Nature,  &  puifqu'eiie  peut  con,veriir  les 


DES    Minéraux.         219 

élcmens  ,  n'a-t-elle  pas  pu ,  ne  pourroit-clle  pas  encore 
iranfmuer  les  fubflaiices  métalliques!  Les  Cliimifles  ont 
cru,  pour  l'honneur  du  nom,  devoir  rejeter  toutes  les 
idées  des  Alchimiftes  ;  ils  ont  inénie  Aî^A^vffiz  d'étudier 
&  de  fuivre  leurs  procédés;  ils  ont  cependant  adopté 
leur  langue,  leurs  caradères,  &  même  quelques-unes 
des  obfcurités  de  leurs  principes;  le  phlogiflique,  fi  ce 
n'eft  pas  le  feu  iixe  animé  par  l'air;  le  minéralifateur, 
fi  ce  n'efl  pas  encore  le  feu  contenu  dans  les  pyrites 
&  dans  les  acides ,  me  paroiiTent  auffi  précaires  que  la 
terre  mercurielle  <5c  l'eau  des  métaux;  nous  croyons 
devoir  rejeter  également  tout  ce  qui  n'exifle  pas  comme 
tout  ce  qui  ne  s^entend  pas,  c'eft-à-dire,  tout  ce  dont 
on  ne  peut  avoir  une  idée  nette  ;  nous  tâcherons  donc , 
en  faifant  l'hifloire  du  mercure,  d'en  écarter  les  fables 
autant  que  les  chimères. 

Confidérant  d'abord  le  mercure  tel  que  la  Nature 
nous  l'offre,  nous  voyons  qu'il  ne  fe  trouve  que  dans 
les  couches  de  la  terre  formées  par  le  dépôt  des  eaux; 
qu'il  n'occupe  pas  comme  les  métaux,  les  fentes  per- 
pendiculaires de  la  roche  du  globe,  qu'il  ne  gh  pas 
dans  le  quartz,  &  n'en  eil  même  jamais  accompagne, 
qu'il  n'ed  point  mêlé  dans  les  minerais  des  autres  métaux; 
que  fà  mine  à  laquelle  on  donne  le  nom  de  c'inahre , 
n'efl  point  un  vrai  minerai,  mais  lui  compofé,  par 
fnnple  juxtapofition  ,  de  foufre  &.  de  mercure  réunis, 
qui  ne  fe  trouve  que   dans   les  montagnes  à  couches, 

E  e  ij 


220  Histoire   Nature lle 

Si  jamais  dans  les  montagnes  primitives  ;  que  par  confé- 
qiient  la  formation  de  ces  mines  de  mercure,  eft  pofîérieure 
à  celle  des  mines  primordiales  des  métaux,  puifqu'elle 
fiippofè  le  foufre  déjà  formé  par  la  décompoiition  des 
pyrites;  nous  verrons  de  plus  que  ce  n'eft  que  très- 
rarement  que  le  mercure  fc  préfènte  dans  un  état  coulant, 
&  que  quoiqu'il  ait  moins  d'affinité  que  la  plupart  des 
métaux  avec  le  foufre,  il  ne  s'cfl  néanmoins  incorporé 
qu'avec  les  pierres  ou  les  terres  qui  en  font  furchargées; 
que  jamais  il  ne  leur  cil  aîTcz  intimement  uni  pour 
n'en  pas  être  aifémcnt  féparé,  qu'il  n'efl  même  entré 
dans  ces  terres  fulfurcufes  que  par  une  forte  d'imbibition, 
comme  l'eau  entre  dans  les  autres  terres ,  ôl  qu'il  a  dii 
les  pénétrer  toiucs  les  fois  qu'il  s'efl  trouvé  réduit  en 
vapeurs  ;  qu'enfin  il  ne  fè  trouve  qu'en  quelques  endroits 
particuliers ,  où  le  foufre  s'efl  lui  -  mcme  trouvé  en 
grande  quantité,  &  réduit  en  foie  de  foufre  par  des 
alkalis  ou  des  terres  calcaires,  qui  lui  ont  donné  l'affinité 
nécefTaire  à  fon  imion  avec  le  mercure:  il  ne  fe  trouve 
en  effet,  en  quantité  fenfible,  que  dans  ces  feuls  endroits; 
par-tout  ailleurs,  il  n'eft  que  difféminé  en  particules  û 
tenues  qu'on  ne  peut  les  raffemblcr,  ni  même  les 
apercevoir  que  dans  quelques  circonflances  particulières. 
Tout  cela  peut  fe  démontrer  en  comparant  attentivement 
les  obfèrvations  &  les  faits,  <Sc  nous  allons  en  donner 
les  preuves  dans  le  même  ordre  que  nous  venons  de 
préfènter   ces   affertions. 


DES     Aï  I  N  E  R  A   U  X,  22  i 

Des  trois  grandes  mines  de  mercure,  &  dont  chacune 
fufFiroit  feule  aux  befoins  de  tout  l'Univers,  deux  font 
tn  Europe  &  une  en  Amérique  ;  toutes  trois  fè  pré- 
fcntcnt  fous  la  forme  folide  de  cinabre:  la  première  de 
ces  mines  efl  celle  d'Idria  dans  la  Carniole  (b) ;  elle 
efl  dans  une  ardoife  noire  furmontée  de  rochers  cal- 
caires :  la  féconde  efl  celle  ^ Almaden  en  Efpagne  (c) , 

(h )  Idria  eil  une  petite  ville  fituee  dans  la  Carniole  ,  dans  un 
vallon  très-profond,  lur  les  deux  bords  de  la  rivière  d'Idria  dont 
elle  porte  le  nom  ;  elle  efl  entourée  de  hautes  montagnes  de  pierres 
calcaires ,  qui  porte  fur  un  fcbiflc  ou  ardoife  noire,  dans  les  couches 
duquel  font  les  travaux  des  fameufes  mines  de  mercure  ;  l'èpaifleur 
de  ce  fchifte  pénètre  de  mercure  &  de  cinabre  eft  d'environ  vingt 
tûiies  d'Idria  ,  &.  fa  largeur  ou  étendue  ert  de  deux  jufqu'à  trois 
cents  toifes  ;  cette  riche  couche  d  ardoife  varie ,  foit  en  s'inclinant , 
foit  en  fe  replaçant  horizontalement  ,  fouvent  même  à  contre-fens. 
La  profondeur  des  principaux  puits  eft  de  cent  onze  toifes.  Voye^ 
la  Defcripïïon  des  mines  d'Idria,  par  AI.  Ferber  ^  publiée  en  i  7J4' 

(c)  Almaden  eft  un  bourg  de  la  province  de  la  Manche  ,  qui  eft 
environné  du  côté  du  midi  de  plufieurs  montagnes  dépendantes 
de  la  Sierra  Alorcna  ou  montagne  noire.  Ce  bourg  eft  fitué  au 
fommet  d'une  montagne  ,  fur  le  penchant  &  au  pied  de  laquelle  , 
du  côté  du  midi  ,  il  y  a  cinq  ouvertures  différentes  qui  conduifent 
par  des  chemins  fouterrains  aux  endroits  d'où  fe  tire  le  cinabre.  On 
ne  voit  point  au-dehors  de  cette  mine  ni  de  ces  terres  qui  caradé- 
rifent  par  quelque  couleur  extraordinaire  le  minéral  que  l'on  trouve 
dans  fon  fein ,  ni  de  ces  décombremens  qui  rendent  ordinairement 
leur  entrée  difficile,  ou  qui  exhalent  quelqu'odeur  fenfible....  On 
lire  li  mine  en  gros  quartiers  maffifs  ,  6:  ce  font  des  forçats  qui 
font  condamnés  à  ce  travail,  &  qui  font  emprifonnés  dans  une 
enceinte  qui   environne   l'un   des   puits  de  la  mine. . . .  Les   veines 


212.        Histoire   Natu relle 

dont  les   veines  font  dans   des   bancs   de  grès   (ilj  :   la 
troifième  eft  celle  de  Guanca-vdica ,  petite  ville  à  foixante 


qui  paroifleat  au  fond  de  l'endroit  où  les  mineurs  travaillent,  font 
de  trois  fortes,  La  plus  commune  eft  de  pure  roche  de  couleur 
grifâtreà  l'extérieur,  &  mêlée  dans  fon  intérieur  de  nuances  rouges, 
blanches  &  criftallines.  Cette  première  veine  en  contient  une  féconde 
dont  la  couleur  approche  de  celle  du  minium. 

La  troifième  efl  d'une  fubRance  compare,  très-pefante ,  dure 
&  grenue  comme  celle  du  grès,  &  d'un  rouge  mat  de  brique, 
parfemée  d'une  infinité   de  petits  brillans  argentins. 

Parmi  ces  trois  fortes  de  veines  qui  font  les  feules  utiles  ,  fe 
trouvent  différentes  autres  pierres  de  couleur  grifâtre  &  ardoifée  ,  & 
deux  fortes  de  terre  graffe  &  ondueufe  ,  blanche  &  grife  que  l'on 
rejette.  Extrait  du  Mémoire  de  M.  de  Ju(fieu ,  dans  ceux  de  l'Académie 
des  Sciences ,  année  i  yi  p  ,  pages  ^ ^  q  &  fuivantes. 

(d)  La  ville  d'AImaden  compofée  de  plus  de  trois  cents  maifons, 

avec  l'églife  ,  font  bâties  fur  le  cinabre La  mine  efl  dans  uno 

montagne  dont  le  (ommçx  eft  une  roche  nue  fur  laquelle  on  aperçoit 
quelques  petites  taclies  de  cinabre, . . .  Dans  le  refte  de  la  montagne 
on  trouve  quelques  petites  veines  d'ardoife  avec  des  veijies  de  fer, 
îefquelles  à  la  fuperficie  fuivent  la  direclion  de  la  colline....  Deux 
veines  traverfent  la  colline  en  longueur  ;  elles  ont  depuis  deux  à 
quatorze  pieds  de  large.  En  certains  endroits  il  en  fort  des  rameaux 
qui  prennent  une  diredion  différente....  La  pierre  de  cts  veines  eft 
la  même  que  celle  du  refte  de  la  colline  qui  eft  du  grès  femblable 
à  celui  de  Fontainebleau  ;  elle  fert  de  matrice  au  cinabre  qui  efl 
plus  ou  moins  abondant ,  félon  que  le  grain  efl:  plus  ou  moins  fin  ; 
quelques-uns  des  morceaux  de  la  même  veine  renferment  jufqu'à 
4ix  onces  de  vif-argent  par  livre  ,  &  d'autres  n'en  contiennent  que 
trois. . . . 

La  hauteur  de  cette  colline  d'AImaden  eft  d'environ  cent  vingt 


DES    Minéraux,      223 

Jiciies  de  Pifco  au  Pérou  ^e) .  Les  veines  du  cinabre  y 

pieds....  les  enorna:^||iriorceaux  de  rochers  de  grès  qui  compofent l'in- 
térieur de  la  monràgne,  font  divifés  par  des  fentes  verticales. . . .  Deux 
veines  de  ces  rochers  plus  ou  moins  pourvus  de  cinabre,  coupent 
la  colline  prefque  verticalement,  lefquelies,  comme  nous  l'avons  dit, 
ont  depuis  trois  jufqu'à  quatorze  pieds  de  largeur  ;  ces  deux  veines 
fe  réunifTent  en  s'cloigiiant  jufqu'à  cent  pieds  ,  &  c'efl  de-là  qu'on 
a  tiré  la  plus  riche  &  la  plus  grande  quantité  du  minéral.  Hiftoire 
Naturelle  d'Efpagne,  par  M.  Bowles,  pages  ^jufqu'à  2  p. 

(e)  Guanca  -  velica  efl:  une  petite  ville  d'environ  cent  familles, 
éloignée  de  Pifco  de  foixante  lieues;  elle  efl:  fameufe  par  une  mine 
de  vif-argent,  qui  feule  fournit  tous  les  moulins  d'or  &  d'argent  du 
Pérou. . . .  Lorfqu'on  en  a  tiré  une  quantité  fuffifante ,  le  Roi  fait 
fermer  la  mine. 

La  terre  qui  contient  le  vif- argent  efl  d'un  rouge  blanchâtre 
comme  de  la  brique  mal  cuite  ;  on  la  concalîe  &  on  la  met  dans 
un  fourneau  de  terre  dont  le  chapiteau  efl  une  voûte  en  cul-de- 
four  ,  un  peu  fphéroïde  ;  on  l'éiend  fur  une  grille  de  fer  recouverte 
de  terre ,  fous  laquelle  on  entretient  un  petit  feu  avec  de  l'herbe  Iclio 
qui  efl  plus  proj)re  «à  cela  que  toute  autre  matière  combuflible  ,  & 
c'efl  pourquoi  il  efl  défendu  d^  la  couper  à  vingt  lieues  à  la  ronde  ; 
la  chaleur  de  ce  feu  volatilii'e  le  vif-argent  en  fumée ,  &  au  moyen 
d'un  réfrigèrent  on  le  fait  tomber  dans  l'eau.  Fre^ier ,  vtyage  à  la 
mer  du  fud ,  pages  16^  &  16 ^,...  Ces  mines  de  Guanca- velica 
font  abondantes  &  en  graivd  nombre  ;  mais ,  fur  toutes  ces  mines , 
celle  qu'on  appelle  àH Amador  de  Cabrera,  autrement  des  Saints, 
efl  belle  &  remarquable  ;  c'efl  une  roche  de  pierre  très-dure  ,  toute 
femée  de  vif-argent ,  &  de  telle  grandeur  cju'elle  s'étend  à  plus  de 
quatre-vingt  vares  de  longueur^  &l  quarante  en  largeur,  en  laquelle 
mine  on  a  fait  plufieurs  puits  &  fofles  de  loixante-dix  flades  de 
profondeur. ...  La  feule  mine  de  Cabrera  efl  fi  riche  en  mercure  , 
qu'on  en  a  eflimé  la  valeur  à  plus  de  cinq  cents  mille  ducats.  C'eft 


224-        Histoire   Naturelle 

font  ou  clans  une  argile  durcie  &l  blanchâtre,  ou  cfans 
de  la  pierre  dure.  Ainfi  ces  trois  mines  de  mercure 
giflent  également  dans  des  ardoifes  ou  des  grès,  c'eft- 
à-dire,  dans  des  collines  ou  montagnes  à  couches, 
formées  par  le  dépôt  des  eaux,  &.  toutes  trois  font  fl 
abondantes  en  cinabre  qu'il  fèmble  que  tout  le  mercure 
du  Globe  y  foit  acciunulé  ('f);  car  les  petites  mines 
de  ce  minéral  que  l'on  a  découvertes  en  quelques  autres 
endroits  ,  ne  peuvent  leur  être  comparées  ni  pour 
l'étendue  ni  pour  la  quantité  de  la  matière ,  &  nous  n'en 
ferons  ici  mention  que  pour  démontrer  qu'elles  fè 
trouvent  toutes  dans  des  couches  dépofées  par  les  eaux 
de  la  mer,  &  jamais  dans  les  montagnes  de  quartz  ou  des 
rochers  vitreux,  qui  ont  été  formés  par  le  feu  primitif 
En  France,   on   reconnut  en    1739,   à  deux  lieues 

de  cette  mine  de  Guanca-veJica  dont  on  porte  le  mercure,  tant  au 
Mexique  qu'au  Potozi,  pour  tirer  l'argent  des  matières  qu'on  appeloit 
raclures  &  qu'on  rejetoit  auparavant  comme  ne  valant  pas  la  peine 
d'être  traitées  par  la  fonte.  Acojla ,  Hijlolre  naturelle  &  morale  des 
Indes ,  pages    i ^  0  &  fuïvantes. 

(f)  La  Nature  a  prodigué  les  mines  de  mercure  en  fi  grande 
quantité  à  Idrla,  qu'elles  pourroient  non-feuiement  fuffire  à  la  confom- 
mation  de  notre  partie  du  monde  ,  mais  encore  en  pourvoir  toute 
l'Amérique  'ii  on  le  vouloir ,  &  fi  on  ne  diminuoit  pas  l'extradion 
de  fa  mine  ,  pour  foutenir  ie  mercure  à  un  certain  prix.  Lettres  fur 

la  Minéralogie ,  par  AL  Ferber ,  page  i^ On  tire  tous  les  ans 

de  la  mine  d'Almaden  cinq  ou  fix  mille  quintaux  de  vif-aro-ent 
pour  le  Mexique.  Hijloire  naturelle  d'Efpagne ,  pur  M.  Eowles  , 
pages   /    àt  fui  vaut  es, 

de 


DESAIlNÉRAUX.  21^ 

de  Bourbonne-les-bains ,  deux  efpèccs  de  terre  qui  ren- 
dirent une  trois  centième  partie  de  leur  poids  en  mercure , 
elles  gifToient  à  quinze  ou  feize  pieds  de  profondeur 
fur  une  couche  de  terre  glaife  (^gj.  A  cinq  lieues  de 
Bordeaux  près  de  Langon,  il  y  a  une  fontaine  au  fond 
de  laquelle  on  trouve  affez  fouvent  du  mercure  cou- 
lant (/i);  en  Normandie,  au  village  de  la  Chapelle, 
éie6lion  de  Saint-Lo,  il  y  a  eu  quelques  travaux  com- 
mencés pour  exploiter  une  mine  de  mercure,  mais  le 
produit  n'étoit  pas  équivalent  à  la  dépenfe,  &  cette 
mine  a  été  abandonnée  (ij:  enfin  dans  quelques  endroits 
du  Languedoc ,  particulièrement  à  Montpellier ,  on  a 
vu  du  mercure  dans  l'argile  à  de  petites  profondeurs , 
&  même  à  la  furface  de  la  terre  fie), 

^  llill  ■  ■  —     i  ■  —  --■■-■Il    ■!■■       ■  — ^^^       I  Pi  -^i^^— ^■^— ^■^^■^M 

fgj  Traite  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter,  tome  I ,  page  7. 

(h)  Lettres  de  M.  l'abbé  Belley  à  M.  Hellot.  Traité  de  la  fonte 
des  mines  de  Schlutter ,  tome  l ,  page  j  i . 

(i )  Traite'  de  la  fonte  é^'^  mines  ,  &c.  tome  I ,  page   6  S . 

/k)  La  colline  fur  laquelle  efl  bâtie  la  ville  de  Montpellier, 
renferme  du  .mercure  coulant  auffi-bien  que  les  terres  des  environs  ; 
il  fe  trouve  dans  une  terre  argileufe  jaunâtre  &  quelquefois  grife. 
HiJIoire  naturelle  du  Languedoc ,  par  M.  de  Genfanne ,  tome  I , 
page  ^/^.  — Depuis  le  Mas-de-l' Églife  jufqu'à  Oulargues  &  même 
jufqu'à  Colombieres  ^  on  trouve  une  grande  quantité  d'indices  de 
mir.es  de  mercure,  &  on  aflure  qu'on  en  voit  couler  quelquefois 
d'alFez  grofiL'S  gouttes  fur  la  furface  de  la  terre.  La  qualité  du  terroir, 
au  pied  de  ces  montagnes,  confille  en  roches  ardoifées  blanchâtres; 
elles  font  entre-mêlées  de  quelques  bancs  de  granit  fort  talqueuXt 
Idem,  tome  If,  page  214. 

Minéruax,  Tome  IIL  Ff 


•" 


226  Histoire  N aturelle 

En  Allemagne  ,  il  fe  trouve  quelques  mines  de  mer- 
cure dans  les  terres  du  Palatinat  &  du  duché  de  Deux- 
Ponts  (l) ;  &  en  Hongrie,  les  mines  de  cinabre,  ainfi 
que  celles  d'Almadcn  en  E/pagne,  font  fbuvent  accom- 
pagnées de  mine  de  fer  en  rouille,  &  quelquefois  le 
fer,  le  mercure  &  le  foufre  y  font  tellement  mêlés  qu'ils 
ne  font  qu'un  même  corps  (m^. 

Cette  mine  d'Almadcn  efl  fi  riche  qu'elle  a  fait 
négliger  toutes  les  autres  mines  de  mercure  en  Efpagne; 
cependant  on  en  a  reconnu  quelques-unes  près  d'Ali- 
cante  &  de  Valence  (?i) ;  on  a  aulFi  exploité  une  mine 

(l)   Lettres  fur  la  Minéralogie,  par  M.  Ferber , /?<7^^    12. 

(m)  Hiftoiie  naturelle  d' Efpagne ,  par  M.  Bowies  ,  page  / 
iufqu'a    2(). 

(n)   A   deux  lieues   de  la  ville  d'Alicante en  une  montagne 

de  pierre  calcaire en  fouillant  du  côté  du  vallon ,  on  trouva  une 

veine  de  cinabre  ;  mais  quand  je  vis  celte  veine  difparoître  à  cent 
pieds  de  profondeur  ,   je  fis  fufpendre  l'excavaucn. 

Dans  cette  ouverture  de  la  roche ,  on  trouva  treize  onces  de  fable 
de  belle  couleur  rouge  ,  qui  par  i'effai  rendit  plus  d'une  once  de 
vif-argent  par  livre.  Ce  fable,  par  fa  dureté  &  fa  figure  angulaire, 

reflembloit  tout-à-fait  à  celui  de  la  iner A   la  fuperficie  de  cette 

montagne ,  &  près  d'un  banc  de  plâtre  couleur  de  chair ,  il  y 
avoit  des  coquilles  de  nier,  de  l'ambre  minéral  &  une  veine  comme 

un   fil  ,  de  cinabre Je  fis  creufer  au  pied  d'une  montagne  près 

de  la  ville  de  Saint  Philippe  en  Valence  ,  &  à  la  profondeur  de 
vingt -deux  pieds,  il  fe  trouve  une  terre  très -dure,  blanche  & 
calcaire  ,  dans  laquelle  on  aperçoit  plufieurs  gouttes  de  vif-  argent 
fluide;  &  ayant  fait  laver  cette   terre,  il  en  fortit  vingt-cinq  livres 


( 


DES      AI  J   N  É  R   A    V  À\  22y 

de  ce  minéral  en  Italie ,  à  fix  milles  de  la  Valle  imperhui 
près  de  Feltnno ,  mais  cette  mine  efl  a6tuellement 
abandonnée  (o) ;  on  voit  de  même  des  indices  de  mines 
de  mercure  en  quelques  endroits  de  la  Pologne  (p) . 

En  Afie,  les  Voyageurs  ne  font  mention  de  mines 
de  mercure  qu'à  la  Chine  (q)  ôl  aux  Philippines  ('rjj 
ÔL  ils  ne  di/cnt  pas  qu'il  y  en  ait  ime  feule  en  Afrique  ; 
mais  en  Amérique,  outre  la  grande  &  riche  mine  de 
Guanca-velica  du  Pérou,  on  en  connoît  quelques  antres; 

de  mercure  vierge. . . .  Un  peu  au-delTus  de  l'endroit  où  fe  trouve  le 
mercure ,  il  y  a  des  pétrifications  &  du  plâtre.  La  ville  de  Valence 
efl  traverfée  par  une  bande  de  craie  fans  pétrifications ,  qui ,  à  deux 

pieds  de   fa  fuperficie ,   efl:  remplie    de  gouttes   de  vif- argent 

HiJIoire  naturelle  d'Efpagne ,  par  AI.  Bowks ,  pages  ^  4  Ù"  fuivantes. 

(0)  Lettres  fur  la  Minéralogie,  par  M.  Ferber  ,  page  48. 

(p)  Nota.  Rzaczynski  dit ,  d'après  Belius ,  que  la  partie  des  monts 
Karpacs  qui  regarde  la  Pologne  ,  renferme  du  cinabre  &  peut-être 
des  paillettes  d'or....  &  il  dit ,  d'après  Bruckmann  ,  que  le  comté 
de  Spia  renferme  aufli  du  cinabre.  Ai.  Guettard ,  Mémoires  de 
V Académie  des  Sciences  ,  année    lyCzy  page  ^18. 

( q)  Le  Tchachd  efl:  probablement  le  cinabre  ;  le  meilleur  vient 
de  la  province  de  Houquang  ;  il  efl  plein  de  mercure,  &  l'on  afllire 
que  d'une  livre  de  cinabre  on  en  tire  une  demi-livre  de  mercure 
coulant, . . .  Lorfqu'on  laifle  ce  cinabre  à  l'air  il  ne  perd  rien  de  (a 
couleur  &  il  fe  vend  fort  cher.  Le  Père  d' Entrecolles ,  Lettres 
édifiantes,  22!   recueil ,  page  ^j8. 

(r)   L'île  de    Panamao  aux   Philippines    efl   prefque  contiguë  à 

celle  de  Leyte elle  efl  montagneufe,  arroféede  plufieurs  ruifleaux, 

&  pleine  de  mines  de  foufre  &  de  vif- argent.  Gemelli  Carîeri , 
Voyage  autour  du  monde;  Pc.ris ,    i  j i  c)  ,   tome  V ,  p(^^^   i  1  p. 

Ff  i) 


228         Histoire    Naturelle 

on  en  a  même  exploité  une  près  d'Azoque,  dans  la 
province  de  Quito  (f).  Les  Péruviens  travailloient 
depuis  long -temps  aux  mines  de  cinabre,  fans  favoir 
ce  que  c'ctoit  que  le  mercure;  ils  n'en  connoifToient 
que  la  mine  dont  ils  faifoient  du  vermillon  pour  fe 
peindre  le  corps  ou  faire  des  images;  ils  avoient  fait 
beaucoup  de  travaux  à  Guanca-velica  dans  cette  feule 
vue  (tj,  &  ce  ne  fut  qu'en  1564.,  que  les  Efpagnols 
commencèrent  à  travailler  le  cinabre  pour  en  tirer  le 
mercure  (u) .  On  voit  par  le  témoignage  de  Pline,  que 
Jes  Romains  faifoient  aulfi  grand  cas  du  vermillon ,  & 
qu'ils  tiroient  d'Efpagne,  chaque  année,  environ  dix 
mille  livres  de  cinabre  tel  qu'il  fort  de  la  mine  ,  & 
qu'ils  le  prcparoient  enfuite  à  Rome.  Théophrafle,  qui 
vivoit  quatre  cents  ans  avant  Pline,  fait  mention  du 
cinabre  d'Efpagne  ;  ces  traits  hiftoriques  femblent  prouver 
que  les  mines  d'Idria,  bien  plus  voifmes  de  Rome  que 
celles  d'Efpagne ,  n'ttoient  pas  encore  connues  ;  &  de 
fait,  l'Efpagne  étoit  policée  &  commerçante,  tandis  que 
k  Germanie  étoit  encore  inculte. 

On  voit  par  cette  énumération  des  mines  de  mer- 
cure ,  des  différentes  parties  du  monde ,  que  toutes  giffent 
dans  les  couches   de    la  terre   remuée  &  dépofée   par 

(f)  Hijîoire  générale  des  Voyages,   tome   XIII ,  page  ^^8. 
(t)  Hiftoire  naturelle  des   Indes,  par  Acofta ,  /^/z^^    /jo. 
(u)  Hiftoire  philofophique  &  politique  des  deux  Indes,  tome  III , 
page  2Sj* 


DES    Minéraux.         229 

îes  eaux ,  &.  qu'aucune  ne  fe  trouve  dans  les  montagnes 
produites  par  ie  feu  primitif,  ni  dans  les  fentes  du  quartz: 
on  voit  de  même  qu'on  ne  trouve  point  le  cinaJjre 
mêlé  avec  les  mines  des  autres  métaux  (x) ,  à  l'excep- 
tion de  celles  de  fer  en  rouille,  qui,  comme  Ton  fait, 
font  de  dernière  formation.  L'établifTcmcnt  des  mines 
primordiales  d'or,  d'argent  &  de  cuivre  dans  la  roche 
quartzeufe,  efl  donc  bien  antérieur  à  celui  des  mines 
de  mercure,  &  dès-lors  n'en  doit-on  pas  conclure  que 
ces  métaux  fondus  ou  fublimés  par  le  feu  primitif,  n'ont 
pu  faifir  ni  s'affimiler  une  matière  qui ,  par  fa  volatilité, 
étoit  alors  comme  l'eau,  reléguée  dans  ratmof]:)hère î 
que  dès-lors,  il  n'eft  pas  poffible  que  ces  métaux  con- 
tiennent un  feul  atome  de  cette  matière  volatile ,  A.  que 
par  conféquent  on  doit  renoncer  à  l'idée  d'en  tirer  le 
mercure  ou  le  principe  mercuriel  qui  ne  peut  s'y  trouver! 
Cette  idée  du  mercure,  principe  exiflant  dans  J'or  & 
l'argent,  étoit  fondée  fur  la  grande  affinité  &  l'attraélion 
très-forte,  qui  s'exerce  entre  le  mercure  &  ces  métaux; 
mais  on  doit  confidérer  que  toute  attraction ,  toute  pé- 
nétration qui  fe  fait  entre  un  folide  &  un  liquide,  eA 
généralement  proportionnelle  à  la  denfité  des  deux 
matières,  &.  que  celle  du  mercure  étant  très-grande  & 
iès  molécules  infiniment  petites,  il  peut  aifémcnt  pénétrer 

(x)    On  obferve   que  dans  les   mines  de  cinabre  d'Almaden,  il 
ïi^y   a    aucun   autre    métal.    Mitnoires  de   l'Académie  des  Sue  nus , 


230         Histoire   Natu relle 

les  pores  de  ces  métaux,  &  les  humeder  comme  l'eau 
humecte  la  terre. 

Mais  fuivons  mes  afTertions  :  j'ai  dit  que  le  cinabre 
n'étoit  point  un  vrai  minéral,  mais  un  imiple  compofé 
de  mercure  faifi  par  le  foie  de  foufre,  &  cela  me  paroît 
démontré  par  la  compofition  du  cinabre  artificiel  fait 
par  la  voie  humide  ;  il  ne  faut  que  le  comparer  avec  la 
mine  de  mercure  pour  être  convaincu  de  leur  identité 
de  fubflance.  Le  cinabre  naturel  en  maffe  eft  d'un  rouge 
très-foncé;  il  eft  compofé  d'aiguilles  luifantes  appliquées 
longitudinalement  les  unes  fur  les  autres,  ce  qui  feul 
fuffit  pour  démontrer  la  préfènce  réelle  du  foufre  :  on 
en  fait  en  Hollande  du  tout  pareil  &  en  grande  quantité  ; 
nous  en  ignorons  la  manipulation  ,  mais  nos  Chimiftes 
l'ont  à  peu-prcs  devinée  :  ils  font  du  cinabre  artificiel 
par  le  moyen  du  feu ,  en  mclant  du  mercure  au  (bufre 
fondu  fyj ,  &  ils  en  font  auiïi  par  la  voie  humide,  en 


(y)  On  fait  du  cinabre  artificiel  feniblable  en  tout  au  cinabre 
naturel. . . .  Pour  cela  on  mêle  quatre  parties  de  mercure  coulant 
avec  une  partie  de  ibufre  qu'on  a  fait  fondre  dans  un  pot  de  terre 
non  vernifTe'  ;  on  agite  ce  mélange  qui  s'unit  très-facilement  à  l'aide 
de  la  chaleur  ;  le  mercure  uni  au  foufre ,  devient  noirâtre. ...  La 
force  d'affinité  s'exerce  avec  tant  de  puiffance  entre  ces  deux  matières, 
qu'il  en  réfulte  une  coinbinaifon.. . .  On  laifTe  ce  mélange  brûler 
pendant  une  minute ,  après  quoi  on  retire  la  matière ,  on  la  pulvé- 
rilè  dans  un  mortier  de  marbre ,  &  par  cette  trituration  elle  fe  réduit 
en  une  poudre  violette. . . .  On  fait  fublimer  cette  poudre  en  la 
mettant  dans  un  matras  à  un  feu  de  fable  qu'on  augmente  graduelle- 


DES    Minéraux,  231 

combinant  le  mercure  avec  le  foie  de  foufre  fij;  ce 
dernier  procédé  paroît  être  celui  de  la  Nature;  le  foie 
de  foufre  n'étant  que  le  foufre  lui-même  combiné  avec 
les  matières  alkalincs,  c'efl-à-dire  avec  toutes  les  matières 
terreflres ,  à  l'exception  de  celles  qui  ont  été  produites 
par  le  feu  primitif,  on  peut  concevoir  aifément  que 
dans  les  lieux  où  le  foie  de  foufre  &  le  mercure  /è 
feront  trouvés  enfcmble,  comme  dans  les  argiles,  les 
grès;  les  pierres  calcaires,  les  terres  limonneufes  &  autres 

ment  jufqu'à  ce  que  le  fond  du  matras  foit  bien  rouge.  Le  fublimé 
qu'on  obtient  par  cette  opération  efl:  en  mafle  aiguillée  ,  de  couleur 
rouge-brun ,   comme  i'ed  le  cinabre   naturel  lorfqu'il  ri'eft  pas  pul- 

vériré Par  ce   procédé  donné  par    M.    Baume,  on    obtient,   à 

la  vérité  du  cinabre  ,  mais  qui  n'eft  pas  fi  beau  que  celui  c{ue  l'on 
fait  en  Hollande  où  il  y  a  des  manufacflures  en  grand  de  cinabre 
artificiel ,  mais  dont  les  procédés  ne  font  pas  connus  au  jufte. 
Diâiomiaire    de   Chimie  ,  par  AI.   Alacquer ,  article  Cinabre. 

(l)  On  peut  aufli  faire  du  cinabre  artificiel  par  la  voie  humide, 
en  ajipliquant ,  foit  au  mercure  feul ,  foit  aux  difTolutiofis  de  mercure 
par   les   acides,    mais   fur -tout   par   l'acide   nitreux  ,   les    différentes 

efpèces  de  foie  de  foufre &  l'on  doit  remarquer  que  ce  cinabre 

fait  par  la  voie  humide,  a  une  couleur  rouge  vif  de  feu,  infiniment 
plus  éclatante  que  celle  du  cinabre  qu'on  obtient  par  la  fublimation.... 
mais  cette  différence  ne  vient  que  de  ce  que  le  cinabre  fublimé  eft 
en  mafle  plus  compacte  que  l'autre ,  ce  qui  lui  donne  une  couleur 
rouge  fi  foncée  qu'il  paroit  rembruni  ;  mais  en  le  broyant  fur  un 
porphyre  en  poudre  très-fine,  il  prend  un  rouge  vif  éclatant. .. . 
Celui  qu'on  obtient  par  la  voie  humide  n'étant  point  en  malTe 
comme  le  premier,  mais  en  poudre  fine,  paroît  donc  plus  rouge 
par  cette   feule  raifon.   Idem,  ibidem. 


1-^z       Histoire   Natu re lle 

matières  formées  par  le  dépôt  des  eaux,  la  combinai/on 
du  merciu-e ,  du  foufre  &  de  i'aikali  fe  fera  faite ,  &  le 
cinabre  aura  ctc  produit.  Ce  n'efl  pas  que  la  Nature 
n'ait  pu  former  auiïi  dans  certaines  circonflances  du 
cinabre  par  le  feu  des  volcans;  mais  en  comparant  les 
deux  procédés  par  lefquels  nous  avons  fu  T imiter  dans 
cette  produdion  du  cinabre  ,  on  voit  que  celui  de  la 
fublimation  par  le  feu,  exige  un  bien  plus  grand  nombre 
de  combinaifons  que  celui  de  la  fimpîe  union  du  foie 
de  foufre  au  mercure,  par  la  voie  humide. 

Le  mercure  n'a  par  lui-même  aucune  affinité  avec 
les  matières  terreufes ,  &  l'union  qu'il  contracte  avec 
elles  par  le  moyen  du  foie  de  foufre,  quoique  pcrn:ia- 
nente,  n'efl  point  intime;  car  on  le  retire  aifément  des 
maHes  les  plus  dures  de  cinabre  en  les  expofant  au 
feu  (il).  Ce  n'efl  donc  que  par  des  accidcns  particuliers, 
&  notamment  par  l'adion  des  feux   fouterrains  que  le 

^^— ^.^-^—    ■  -  ...l.  -■■■!■  ■!■■■—    ■-■■-■■M  ■■  fcfc  ■  ■i.M..  ^,-  ■■»■  M  ^B»^ 

^a)  Il  eft  aifé  de  recomioître  fi  une  pierre  coniient  du  mercure  ; 
il  fuffit  de  la  faire  chauffer  &  de  la  mettre  toute  rouge  fous  une 
cloche  de  verre  ,  car  alors  la  fuinée  qu'elle  exhalera  fe  convertit  ea 
petites  gouttelettes  de  mercure  coulant. 

J'ai  obfervé  ,  dit  M.  de  JufFieu  ,  dans  les  endroits  même  de  la 
veine  la  plus  riche,  que  l'on  n'y  ttouve  point  de  mercure  coulant, 
&  que  s'il  en  paroît  quelquefois ,  ce  n'eft  qu'un  effet  de  la  violence 
des  coups  que  les  mineurs  donnent  fur  le  cinabre  qui  efl  en  roche 
dure  ,  ou  plus  encore  de  la  chaleur  de  la  poudre  dont  on  le  fert 
pour  pétarder  ces  mines.  Afi-moires  de  i Acadimie  des  Sciences  , 
cnnéc  lyi  ^  ,  pog^s  S^o   ù'  fuiyantes. 

mercure 


DES    Minéraux.  233 

mercure  peut  fe  féparer  de  fa  mine,  &  c'eil  par  cetic 
rai(on  qu'on  le  trouve  fi  rarement  dans  Ton  état  coulant. 
Il  n'eft  donc  entré  dans  les  matières  terreufes  que  par 
imbibition  comme  toute  autre  liquide,  &  Û  s'y  eft  uni 
au  moyen  de  la  combinaifon  de  leurs  alkalis  avec  le 
foufre;  ôi  cette  imbibition  ou  humedation  paroît  bien 
démontrée,  puifqu'il  fuffit  de  faire  chauffer  le  cinabre 
pour  le  delTécher  (âj,  c'eft- à -dire,  pour  enlever  le 
mercure,  qui  dès-lors  s'exhale  en  vapeurs,  comme  l'eau 
s'exhale  par  le  deflechement  des  terres  humeélées. 

Le   mercure   a    beaucoup    moins    d'affinité   que    la 
plupart  des  métaux  avec  le  foufre,  &  il  ne  s'unit  ordi- 
nairement avec  lui  que  par  l'intermède  des  terres  alka- 
lines  ;  c'eft  par  cette  raifon  qu'on  ne  le  trouve  dans  aucune 
mine    pyriteufe    ni    dans    les    minerais   d'aucun   métal, 
non  plus  que  dans  le  quartz  &  autres  matières  vitreufes 
produites   par    le    feu   primitif  ;    car   les   alkalis    ni    le 
foufre,    n'exiftoient    pas  encore    dans   le    temps   de    la 
formation  des  matières  vitreufes  ;  &  quoique  les  pyrites , 
étant  d'une  formation  poflérieure,  contiennent  déjà  les 
principes  du  foufre ,  c'eil-à-dire ,  i'acide  &  la  fubftance 
du  feu,  ce  foufre  n'étoit  ni  développé  ni  formé,  &  ne 


^ifj  Nota.  Ceci  ^  CKadement  vrai  pour  tout  cinabre  qui  contient  une 
bafe  terxeule  capable  de  retenir  le  foufie;  cependant  on  doit  excepter 
le  cinabre  qui  ne  feroit  uniquement  compofe  que  de  foufre  &  de 
lîiercwre  ,  car  il  fe  fubiimeroit  plutôt  que  de  fe  décompofer  ;  mais 
ce  cinabre  fans  bafe  terreufe  ne  fe  trouve  guère  dans  la  Nuture. 

Minérm.x,  Tome  III.  G  g 


234  H 1 ST  O  IRE    N  ATU  RELLE 

pouvoit  par  conféquent  fe  réunir  à  l'alkali,  qui  lui-même 
n'a  été  produit  qu'après  la  formation  des  pyrites ,  ou 
tout  au  plus  tôt  en  même  temps. 

Enfin,  quoiqu'on  ait  vu  par  l'énumération  que  nous 
avons  faite  de  toutes  les  mines  connues,  que  le  mercure  ne 
fe  trouve  en  grande  quantité  que  dans  quelques  endroits 
particuliers  ,  où  le  fbufre  tout  formé  s'efl  trouvé  réuni 
aux   terres  alkalines,  il   n'en   faut  cependant  pas   con- 
clure que  ces  /euls  endroits  contiennent  toute  la  quantité 
de  mercure  ex i fiante  ;  on  peut,  &  même  on  doit  croire 
au  contraire  qu'il  y  en  a  beaucouj)  à  la  furface  &  d?  )s 
les  premières  couches  de  la  terre  ;  mais  que  ce  minerai 
fluide    étant    par    fa   nature    iulceptible   d'une    divilioit 
prefque  infinie,  il  s'efl  diffcminé  en  molécules  fi  ténues 
qu'cilt  s  échappent  à  nos  yeux ,  &  même  à  toutes  les  re- 
cherches de  notre  Art,  à  moins  que  par  haiard,  comme 
dans  les  exemples  que  nous  avons  cités,  ces  molécules 
ne  fe  trouvent  en   afiez  grand   nombre   pour  pouvoir 
jes  recueillir  ou  les  réunir  par  la  fublimation.  Quelques 
Auteurs   ont  avancé  qu'on  a  tiré  du  mercure  coulant, 
des  racines  d'une  certaine  plante  femblable  au  doronic  (c) ; 


(c)  «Selon  M.  Manfredi ,  il  vient  dans  la  vallce  de  Lancy 
»  qui  ell  fituée  dans  les  mont.tgnes  de  Tunis  ,  une  plante  feniLiub/e 
33  au  doronic;  on  trouve  auprès  de  Tes  racines  du  mercure  coulant 
3>  en  petits  globules  ;  Ton  fuc  exprimé  à  l'air  dans  une  belle  nuit 
fournit  autant  de  mercure  qu'il  s'ell  difTipé  de  fuc  ».  Coiledion 
aciiilém'tquc ,  partie   étrangère,    tome   II,  page  p^. 


DES   Minéraux.  2.7,  y 

qu'à  la  Chine  on  en  tiroit  du  pourpier  fauvage  (JJ ; 
je  ne  veux  pas  garantir  ces  faits  ;  mais  il  ne  me  paroît 
pas  impolFible  que  le  mercure  difleminé  en  molécules 
très  -  petites ,  foit  pompé  avec  la  fève  par  les  plantes , 
puifque  nous  favons  qu'elles  pompent  les  particules  du 
fer  contenu  dans  la  terre  végétale. 

En  faifant  fuoir  au  cinabre  l'adion  du  feu  dans  des 
vaifTeaux  clos,  il  fe  fublimera  fans  changer  de  nature, 
c'ell-à-dire,  fans  fe  décompofer  ;  mais  en  Texpofant  au 
même  degré  de  feu  dans  des  vaifTeaux  ouverts ,  le  foufre 
du  cinabre  fe  brûle,  le  mercure  fe  volatilife  &  fe  perd 
dans  les  airs;  on  efl  donc  obligé  pour  le  retenir,  de 
le  fiiblimer  en  vaifTeaux  clos,  &  afin  de  le  féparer  du 
foufre  qui  ic  fublime  en  même  temps,  on  mêle  avec 
le  cinabre  réduit  en  ])oudre  ,  de  la  limaille  de  fer  fej ; 

( d)  Le  P.  cI'Eutrecoiles  rapporte  qu'à  fa  Chine  on  tire  du 
mercure  de  certaines  plantes ,  &;  fur-tout  du  pourpier  fauvage ,  que 
même  ce  mercure  ell  plus  pur  que  celui  qu'on  tire  des  mines ,  & 
qu'on  les  diftingue  à  la  Chimie  par  deux  differens  noms.  Lettres 
édifiantes  ,  22!  recueil,  page   4^J' 

(e)  Si  on  met  le  cinabre  fur  le  feu  dans  des  vaifleaux  clos,  il 
fe  fublime  en  entier  ,  fans  changer  de  nature.  Si  on  l'expofe  au 
contraire  à  l'air  libre  &  fur  le  même  f<;u,  c'eft-à-dire  dans  des  vaiffeaux 
ouverts  ,  il  fe  dccompofe ,  parce  que  le  foufre  fe  Inùle  ,  &  alors  le 
mercure  le  dégage  réduit  en  vapeurs  ;  mais  comme  il  s'en  produit 
beaucoup  par  cette  manière  ,  on  a  trouvé  moyen  de  le  féparer  du 
foufre  en  vaifleaux  clos,  en  otîrant  au  foufre  quelqu'iniermède  qui 
ait  avec  lui  plus  d'affinité  qu'il  n'en  a  avec  le  mercure... .  comme 
i'dlkali  fixe,   la  chaux,  &c.  &  même  les  métaux  &   demi -métaux, 

Gg  ij 


2^6       Histoire    Naturelle 

ce  métal  ayant  beaucoup  plus  d'affinité  que  le  mercure 
avec  le  foufre  ,  s'en  empare  à  mcfure  que  le  feu  le 
dégage ,  &  par  cet  intermède ,  le  mercure  s'élève  feul 
en  vapeurs  qu'il  efl  aifc  de  recueillir  en  petites  gouttes 
coïilantes,  dans  un  récipient  à  demi  plein  d'eau.  Lorf- 
qu'on  ne  veut  que  s'afTurer    fi  une    terre  contient  du 

fur-tout   le  fer,  le  cuivre,  l'etain  ,   le   plomb,   l'argent,    le  bifmuth 
&.  le  régule  d'antimoine  ,   qui  tous  ont  plus  d'affinité  avec  le   foufre 
que   tÏQn   a  le  mercure  ,  &   de   toutes   ces   fubflances  ,    c'elt    le  fer 
qui  eft    la  plus   commode    &  la    plus   ufitée   pour   la   décompofiiion 
du  cinabre  en  petit  ;  on  prend  deux  parties  de  cinabre  &.  une  partie 
de  limaille  de  fer  non  rouillée  ;  on  les  mêle  bien  enfemble  ;  on  met 
ce  mélange  dans  une  cornue  qu'on  place  dans  un  fourneau  à  feu  nu, 
ou  dans  une  caplule  ,  au  biiin  de  fable  ,  arrangée  de  inaiiière  qu'on 
puifTe    donner  un  feu  aflez  fort;   on  ajoute  à  la  cornue  un  récipient 
qui  contient  de  l'eau ,  &  on  procède  à  Ja  diflillation.    Le    mercure 
dégngé   du    foufre   par  l'intermède  du  fer  ,   s'élève   en   vapeurs   qui 
paOènt    dans   le  récipient,  <Sc   s'y    condenfent ,  pour  la  plus  grande 
partie,  au  fond  de  l'eau  en  mercure  coulant.  Il  y  a  aufli  une  portioa 
du  mercure  qui  relie  très-divifée  &  qui  s'arrête  à  la  furface  de  l'eau, 
à   caufe    de  la  finefle    de  fes  parties ,    fous   la  forme   d'une  poudre 
noirâtre,  qu'il  faut  rama^Ter  exactement  pour  la  mcler  avec  le  mercure 
en    mafle  ,   avec   lequel. elle    s'incorpore   facilement.    Ce    mercure, 

qu'on  paffe   enfuite  à  travers  un  linge   ferré  ,   efl  très-pur Ou 

trouve  dans  la  cornue  le  foufre  du  cinabre  uni  avec  le  fer,  ou 
l'âlkali ,  ou  telle  autre  matière  qu'on  aura  employée  pour  le  féparer 
du   mercure. ... 

Trois  livres  de  cinabre  ,  fuivant  M.  Baume  ,  donnent  deux  livres 
deux  onces  de  mercure  ;  la  limaille  de  fer  abforbe  douze  onces  & 
demie  de  foufre  ,  &  il  y  a  perte  d'une  once  &  demie.  Didionnairt 
de  Chimie ,  j^ûr  AI.  Macper ,  article  Cinabre. 


DES    Minéraux.  237 

mercure  ou  n'en  contient  pas ,  il  fufTit  de  mcler  de  la 
poudre  de  cette  terre,  avec  de  la  limaille  de  fer  fur 
une  brique,  que  l'on  couvre  d'un  \'are  <\<i  verre,  &  de 
mettre  du  feu  fous  cette  brique  ;  fi  la  terre  contient 
du  mercure,  on  le  verra  s'élever  en  vapeurs  oui  fe 
condenferont  au  haut  du  vafe  en  petites  gouttes  de 
mercure  coulant. 

Après  avoir  confidéré  le  mercure  dans  /à  mine ,  oii 
il  fait  partie  du  folide  de  la  mafTe,  il  faut  maintenant 
l'examiner  dans  fon  état  fluide  ;  il  a  le  brillant  mctailique 
peut-être  plus  qu'aucun  autre  métal,  la  même  couleur, 
ou  plutôt  le  même  blanc  que  l'argent  ;  fa  denfité  eft 
entre  celte  du  plomb  &  celle  de  l'or;  il  ne  perd  qu'un 
quatorzième  de  fon  poids  dans  une  eau  dont  le  pied 
ciibe  eft  fuppofé  pefcr  foixante  -  douze  livres,  &  par 
conféquent  le  pied  cube  de  mercure  pèfe  mille  huit 
livres.  Les  clémens  humides  ne  font  fur  le  mercure 
aucune  impreffion  fenfible;  fa  furface  même  ne  fê  ternit 
il  l'air  que  par  la  pouffière  qui  la  couvre,  &.  qu'il  eft 
îiifé  d'en  fcparer  par  un  fimple  &  léger  frottement  ;  il 
parort  fe  cJiarger  de  même  de  l'humidité  répandue 
*lans  l'air  ;  mais  en  l'efliiyant  là  furûce  reprend  ion 
premier  brillant. 

On  a  donné  le  nom  de  inercuu  vierge  à  celui  qui 
<>ft  le  plus  pur  &L  le  plus  coidant  &  qui  fe  trouve  quei- 
»quefois  dans  le  fein  de  la  terre ,  après  s'être  écoulé  de 
ia  mine  par  la  feule  commotion  ,  ou  par   un    fimplc 


238  Histoire  M aturelle 

mouvement  d'agitatioii,  fans  le  fecours  du  feu;  celui 
que  l'on  obtient  par  la  fublimation  eft  moins  pur  ;  <Sc 
l'on  pourra  reconnoître  fa  grande  pureté  à  un  efîèt  très- 
remarquable;  c'ell  qu'en  le  fecouant  dans  un  tuyau  de 
verre  ,  ion  frottement  produit  alors  une  lumière  fenfible , 
&femblable  à  l'éciair  èledriqtie;  l'cledricité  efl  en  effet 
la  caufe  de  cette  aj^parence  lumineufè. 

Le  mercure  répandu  fur  la  furface  polie  de  toute  ma- 
tière avec  laquelle  il  n'a  point  d'affinité,  forme,  comme 
tous  les  autres  liquides,  des  petites  gouttes  globuleufes  par 
la  feule  force  de  l'attraélion  mutuelle  de  fes  parties  ; 
les  gouttes  du  mercure  fe  forment  non-feulement  avec 
plus  de  promptitude,  mais  en  plus  petites  maffes ,  parce 
qu'étant  douze  ou  quinze  fois  plus  dcnfe  que  les  autres 
liquides,  fa  force  d'attraélion  ell  bien  plus  grande  &. 
produit  des  effets  plus  apparens. 

11  ne  parojt  pas  qu'une  chaleur  modérée,  quoique 
très  -  long  -  temps  appliquée ,  change  rien  à  l'état  du 
mercure  coulant  (f);  mais  lorfqu'on  lui  donne  un  degré 
de  chaleur  beaucoup  plus  fort  que  celui  de  l'eau  bouil- 
lante, l'attradion  réciproque  de   fcs   parties  n'efl  plus 


(f)  Boërhaave  a  fournis  dix-huit  onces  de  mercure  à  cinq  cents 
diftillations  de  fuite ,  &  n'y  a  remarqué  ,  après  cette  longue  épreuve , 
aucun  changement  fenfible  ,  finon  qu'il  lui  a  paru  plus  fluide ,  que 
fa  pefanteur  fpécifjque  étoit  un  peu  augmentée  &  qu'il  lui  eft 
rede  quelcjues  grain^  de  matière  fixe.  Diâionnaire  de  Chimie ,  par 
AI.    Maçquer ,   anlcU  Mercure. 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  239 

affez  forte  pour  les  tenir  réunies;  elles  fè  fcparent  ^ 
fe  volatilifeni,  fans  néanmoins  changer  d'effence  ni  même 
s'altérer,  elles  font  /èulement  divifées  &  lancées  par  la 
force  de  la  chaleur;  on  peut  les  recueillir  en  arrêtant 
cet  effet  par  la  condenlaiion  ,  ôl  elles  fè  repré/èntent 
alors  fous  la  même  forme ,  &  telles  qu'elles  étoicm 
auparavant. 

Quoique  la  furface  du  mercure  fe  charge  des  pouJf^ 
fières  de  l'air,  &  même  des  vapeurs  de  l'eau,  qui 
flottent  dans  l'atmofphère ,  il  n'a  aucune  affinité  avec 
l'eau,  &.  il  n'en  prend  avec  l'air  que  par  le  feu  de 
calcination:  l'air  s'attache  alors  à  fa  furface  &  Ce  fixe 
entre  fes  pores,  fans  s'unir  bien  intimement  avec  lui, 
Si.  même  fans  fe  corrompre  ni  s'altérer  ;  ce  qui  fcmhle 
prouver  qu'il  n'y  a  que  peu  ou  poiiit  de  feu  fixe  dans 
le  mercure,  &  qu'il  ne  peut  en  recevoir  à  cauie  de 
l'humidité  qui  fait  partie  de  fa  fubitance,  &  même  l'on 
ne  peut  y  attacher  l'air  qu'au  moyen  d'un  feu  allez 
fort  &  foutenu  pendant  pluheurs  mois;  le  mercure,  par 
cette  très  -  longue  digefîion  dans  des  vaifTeaux  qui  ne 
font  pas  exaétement  clos ,  prend  peu  -  à  -  peu  la  forme 
d'une  efpèce  de  chaux  ^g),  qui  néanmoins  eft  différente 

/o)  Par  la  digefîion  ù  un  degré  de  chaleur  très-fort  &  foutenu 
pendant  plufieujs  mois  ,  dans  un  vailTeau  qui  n'eft  pas  exadement 
clos,  le  mercure  éprouve  une  altération  plus  fenfible;  fa  furface  fe 
change  peu-à-peu  en  une  poudre  rougeâtre,  terreufe  ,  qui  n'a  plus 
aucun  brillant  métallique ,  &  qui  nage  toujours  à  la  furface  du  refte 


24.0  Histoire  Naturelle 

des  chaux  métalliques  ;  car  quoiqu'elle  en  ait  l'appa- 
rence ,  ce  n'cd  cependant  que  du  mercure  chargé  d'air 
pur,  &:  elle  diffère  des  autres  chaux  métalliques,  en  ce 
qu'elle  Te  revivilie  d'elle-même,  <Sc  fàiis  addition  d'au- 
cune matière  inflammable  ou  autre  qui  ait  plus  d'affinité 
avec  l'air  qu'il  n'en  a  avec  le  mercure  ;  il  fuffit  de 
mettre  cette  prétendue  chaux  dans  \\\\  vailTcau  bien 
clos,  &  de  la  chauffei"  à  un  feu  violent,  pour  qu'en 
fe  volatilifant  le  mercure  abandonne  l'air  avec  lequel  il 
n'étoit  uni  que  par  la  force  d'une  longue  contrainte,  &. 
fans  intimité,  puifque  l'air  qu'on  en  retire  efl  pur,  & 
n'a   contracté    aucune    des  qualités  du  mercure  ;    que 


du   mercure  fans  s'y  incorporer;  on   peut  convertir  aiiifi  en   entier 
en   poudre    rouge  ,    une    quantité   donnée    de   mercure  ,    il   ne    faut 
que    le    temps    &   les    vaifTeaux  convenables.   On  appelle   cette  .pré- 
paration du  mercure,   précipité /j^rT^' ,  6c  on   ne   peut   obtenir  cette 
poudre  rouge   ou    précipité  per  fe  qu'en  faifant    fubir  au  mercure  la 
plus  forte  chaleur  qu'il  puifle  fupporter  fans  fe  réduire  en  vapeurs. 
Ce  précipité  paroît  krç  une  vraie  chaux  de  mercure. . . .  d'autant 
qu'il  ne  s'ell  fait  que  par  le  concours  de  l'oir,  il  ne  pèfe  pas  autant 
que    le  mercure    puifqu'il   nage   à   fa    furface  ;  mais   ion  volume   ou 
pefanteur  abfolue  efl  augmentée  d'environ  — ....  on  en  peut  déo-ao-er 
i'air  auquel  eU  due  cette  augmentation  de  poids,  &  faire  la  réduction 
de  ce  précipité  ou  de  cette  chaux  fans  addition   dans  des  vaiffeaux 
clos ,  dans  lefquels  le  mercure  le  revivifie  ;  l'air  qui  fe  dégao-e  de  cette 
chaux  de  mercure,   ell   très-pur  (  ce  qui   efl   bien   diflcrent   de    l'air 
qui  fe  dégage  des  autres  chaux  métallicjues  ,  qui  efl  très-corrompu  ) , 
&  il  n'y  a  point  de  perte  de  mercure  dans  cette  rédudiou.  Didiomaïre 
4e  Chimie ,  par  AI,   Alacquer ,  ariick  Mcicure. 

d'ailleurs 


DES    Minéraux,  241 

d'ailleurs  en  pcfant  cette  chaux,  on  voit  qu'elle  rend 
par  fa  rcdu6tion  la  même  quantité,  c'efl-à-dire,  autant 
d'air  qu'elle  en  avoit  fàiii  ;  mais  lorfqu'on  réduit  les  autres 
chaux  métalliques,  c'efl  l'ai;  que  l'on  emporte  en  lui 
offrant  des  matières  inflammables ,  au  lieu  que  dans 
celles-ci  c'eft  le  mercure  qui  eft  emporté  ô>l  féparé  de 
i'air  par  fà  /èule  volatilité  (fi). 


(h)  Ayant  communique  cet  article  à  mon  favantami  M.  de  Morveau, 
aux  lumières  duquel  j'ai  la  plus  grande  confiance  ,  je  dois  avouer 
qu'il  ne  s'eft  pas  trouvé  de  mon  avis  ;  voici  ce  qu'il  m'écrit  à  ce 
fujet.  «  II  paroît  que  la  chaux  de  mercure  efl  une  vraie  chaux  métal- 
lique ,  dans  le  fens  des  Chimiftes,  Stalhiens ,  c'eft-à-dire  à  laquelle  « 
il  manque  le  feu  fixe  ou  phlogiftique  ;  en  voici  trois  preuves  diredes  « 
entre  bien  d'autres  ;  i  °  l'acide  vitriolique  devient  lulfureux  avec  <c 
le  mercure;  il  n'acquiert  cette  propriété  qu'en  prenant  du  phlo-  ce 
giflique  ;  il  ne  peut  en  prendre  que  où  il  y  en  a  ;  le  mercure  «« 
contient  donc  du  phlogiflique.  Le  précipité  per  fe  de  même  avec  ce 
l'acide  vitriolique  ne  le  rend  pas  fulfureux  ;  il  efl:  donc  privé  ce 
de  ce  principe  inflammable.  "  « 

2."  L'acide  nitreux  forme  de  l'air  nitreux  avec  toutes  les  matières  <c 
qui  peuvent  lui  fournir  du  phlogiflique  ;  cela  arrive  avec  le  mer-  ce 
cure,  non  avec  le  précipité  per  fe  ;  l'un  tient  donc  ce  principe,  &  « 
l'autre  en  efl   privé.  ce 

3.°  Les  métaux  imparfaits  traités  au  feu  en  vaifleaux  clos  avec  ce 
la  chaux  du  mercure  ,  fe  calcinent  pendant  qu'il  fe  détruit  ;  ainfi  ce 
l'un  reçoit  ce  que  l'autre  perd.  Avant  roj)ération,  le  métal  imparfait  ce 
pouvoit  fournir  au  nitre  le  phlogiflique  néceflaire  à  fa  déflagration  ;  ce 
il  ne  le  peut  plus  après  l'opération  ;  n'efl-il  pas  évident  qu'il  en  « 
a  été  privé  pendant  cette  opération  »!  Je  conviens  avec  M.  de  Morveau 
de  tous  ces  faits ,  &  je  conviendrai  aulîi  de  la  conféquence  qu'il  en 

Minéraux,  Tome  IIL  H  h 


2^2         Histoire   Naturelle 

Cette  union  de  l'air  avec  le  mercure  n  eft  donc  que 
fuDeriicielle ,  ôl  quoique  celle  du  foufre  avec  le  mer- 
cure dans  le  cinabre,  ne  /bit  pas  bien  intime,  cependant 
elle  efl  beaucoup  plus  forte  &  plus  profonde  ;  car  en 
mettant  le  cinabre  en  vaifTeaux  clos  comme  la  chaux 
de  mercure,  le  cinabre  ne  fe  dccompofe  pas,  il  fe 
fublime  fans  changer  de  nature,  &  fans  que  le  mercure 
fe  fcpare,  au  lieu  que  par  le  même  procédé,  fâ  chaux 
fe  décompofe  &  le  mercure  quitte  l'air. 

Le  foie  de  foufre  paroît  être  la  matière  avec  laquelle  le 
mercure  a  le  plus  de  tendance  à  s'unir ,  puifque  dans  le 
fein  de  la  terre  le  mercure  ne  fe  prcfente  que  fous  la  forme 
de  cinabre  ;  le  ibufre  feul,  &  fans  mélange  de  matières 
alkalincs,  n'agit  pas  auHi  puiffamment  iiir  le  mercure; 
il  s'y  mole  à  peu  -  près  comme  les  graiffes  lorfqu'on 
les  triture  enfemble ,  &  ce  mélange  où  le  mercure 
difparoît,  n'efl  qu'une  poudre  pefante  &  noire  à  laquelle 

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tire ,  pourvu  qu'on  ne  la  rende  pas  générale.  Je  fuis  bien  éloigné 
de  nier  que  le  mercure  ne  contienne  pas  du  feu  fixe  &  de  l'air 
fixe,  puifque  toutes  les  matières  métalliques  ou  terreules  en  con- 
tieni'ient;  mais  je  perfifte  à  penfer  qu'une  explication  où  l'on  n'emploie 
qu'un  de  ces  deux  élémens  ,  efi:  plus  fimple  que  toutes  les  autres 
où  l'on  a  recours  à  deux  ;  &  c'eft  le  cas  de  la  chaux  du  mercure , 
dont  la  formation  &  la  rédudion  s'expliquent  très-clairement  par 
J'union  &  la  féparation  de  l'air,  fans  qu'il  foit  néceHaire  de  recourir 
au  phlogiftique  ;  &  nous  croyons  avoir  très-fuffifamment  démontré 
que  l'accefllon  ou  la  réceffion  de  l'air  fixé  fuffiroit  pleinement  pour 
opérer  &  expliquer  tous  les  phénomènes  de  la  formation  &  de  la 
réduction  des  chaux  métalliques. 


DES  Minéraux,  243 

les  Chimirtes  ont  donné  le  nom  é^éthiops  minéral  (i) ; 
mais  malgré  ce  changement  de  couleur,  &  malgré 
l'apparence  d'une  union  afFez  intime  entre  le  mercure 
&.  le  fbufre  dans  ce  mélange  ,  il  efl  encore  vrai  qu(î  ce 
n'ell  qu'une  union  de  contaél  &  très -ftiperficielie;  car 
il  efl;  aifé  ^t\\  retirer  fans  perte,  &.  prccifément  la 
même  quantité  de  mercure  fans  la  moindre  altération; 
&.  comme  nous  avons  vu  qu'il  en  efl;  de  même  iorfqu'ou. 
revivifie   le  mercure  du    cinabre,    il    paroît   démontré 

(i)  L'éthiops  minéral  efl  une  combinaifon  de  mercure  avec  une 
aflez  grande  quantité  de  foufre  ;  il  efl  noir..,.  Il  fe  fait  ou  par  la 
fufion  ou  par  la  fimple  trituration....  On  fait  fondre  du  foufre  dans 
un  vaifTeau  de  terre  non  vernifîé  ;  aufll-tôt  qu'il  efl  fondu  on  y 
mêle  une  égale  quantité  de  mercure ,  en  retirant  le  vaifTeau  de  defTus 
le  feu.  On  agite  le  mélange  jufqu'à  ce  qu'il  foit  refroidi  &:  figé  ; 
il  refle  après  cela  une  malle  noire  &  friable  qu'on  broie  &:  qu'on 
tamife  ,    &  c'efl:  l'éthiops. 

Et  lorfqu'on  veut  faire  de  l'éthiops  fans  feu,  on  triture  le  mercure 
avec  le  foufre  dans  un  monier  de  verre  ou  de  marbre  ,  en  mettant 
deux  parties  de  mercure  fur  trois  parties  de  fleurs  de  foufre,  & 
on  triture  jufqu'à  ce  que  le  mercure  ne  foit  plus  vifible. ...  L'union 
du  mercure  &.  du  foufre  dans  l'éthiops  n'efl  pas  fi  forte  que  dans 
le  cinabre  ;  il  ne  faut  pas  croire  pour  cela  qu'elle  foit  nulle ,  & 
qu'il  n'y  ait  dans  l'éthiops  qu'un  fimple  mélange  ou  interpofition 
des  parties  des  deux  fubflances  ;  il  y  a  adhérence  &  combinaifon 
réelle,  La  preuve  en  efl  qu'on  ne  peut  les  féparer  que  par  des  inter- 
mèdes qui  font  les  mêmes  que  ceux  qu'on  emploie  pour  féparer 
le  mercure  du  cinabre ,  &  cet  éthiops  peut  aifément  devenir  ,  étant 
traité  par  les  procédés  chimiques ,  du  véritable  cinabre  artificiel, 
Dïdïmnaïre  de  Chimie ,  par  M.  Macquer ,  article  Ethiops, 

H  h  \\ 


244-         Histoire  Natu relle 

que  le  foufre  qui  altère  la  plupart  des  mciaux  ne 
cauie  aucun  changement  intérieur  dans  la  fubdancc  du 
mercure. 

Au  refle ,  lorfque  le  mercure ,  par  le  moyen  du  feu 
&  par  l'addition  de  l'air  ,  prend  la  forme  d'une  chaux 
ou  d'une  terre  en  poudre,  cette  poudre  efl  d'abord 
noire ,  &  devient  enfuite  d'un  beau  rouge  en  continuant 
le  feu  ;  elle  ofire  même  quelquefois  des  petits  crifîaux 
tranfparens  &  d'un  rouge  de   rubis. 

Comme  la  denfitc  du  mercure  eft  très  -  grande ,  & 
qu'en  même  temps  fes  parties  conftituantes  font  prefque 
infiniment  petites ,  il  peut  s'appliquer  mieux  qu'aucun 
autre  liquide  aux  furfaces  de  tous  les  corps  polis.  La 
force  de  fon  union  par  fmipie  contad;  avec  une  glace 
de  miroir,  a  été  mefurée  par  im  de  nos  plus  favans 
PhyTiciens   (kj ,  &l  se^    trouvée  beaucoup    plus    forte 


(k)  Si  l'on  met,  dit  M.  de  Morveau  ,  en  équilibre  une  balance 
portant  à  l'un  de  fes  bras  un  morceau  de  glace  taillé  en  rond , 
de  deux  pouces  &  demi  de  diamètre  ,  fufpendu  dans  une  pofition 
horizontale  ,  par  un  crochet  maRiqué  fur  la  furface  fupérieure  ,  & 
que  l'on  ïàH'e  enfuite  defcendre  cette  glace  fur  la  furface  du  mercure 
placé  au-dellbus  ,  à  très-peu  de  diftance  ,  il  faudra  ajouter  dans  le 
bafîjn  oppofé  jufqu'à  neuf  gros  dix-huit  graàus  ,  pour  détacher  la 
glace  du  mercure   &  vaincre   l'adhéfion   réfultante   du  contacl. 

Le  poids  &  la  comprefijon  de  ratmofphère  n'entrent  pour  riea 
dans  ce  phénomène,  car  l'appareil  étant  mis  fur  le  récipient  dénué 
d'air,  de  la  machine  pneumatique,  le  mercure  adherra  encore  à 
la  glace,  avec    ime   force  égale,  &    cette  adhcfion    fouiiendra   de 


DES    Minéraux.  245 

qu'on  ne  pourroit  l'imaginer  ;  cette  expérience  prouve 
encore,  comme  je  l'ai  dit,  à  l'article  de  i'étain,  qu'il 
y  a  entre  la  feuille  d'étain  &  la  glace  ,  une  couche  de 
mercure  pur,  vif  &.  fans  mélange  d'aucune  partie  d'étain, 
&  que  cette  couche  de  mercure  coulant  n'eft  adhérente 
à  la  glace  que  par  iimplc  contact. 

Le  mercure  ne  s'unit  donc  pas  plus  avec  le  ^'erre 
qu'avec  aucune  autre  matière  tcrreufc;  mais  il  s'amalgame 
avec  la  plupart  des  fiibflances  métalliques  :  cette  union 
par  amalgame ,  efl  une  humeclation  qui  fe  fait  fouvent 
à  froid  &  fans  produire  de  chaleur  ni  d'effervefcence, 
comme  cela  arrive  dans  les  diffolutions  ;  c'efl  une  opé- 
ration moyenne  entre  l'alliage  &  la  diiïolution  ;  car  la 
première  fuppofe  que  les  deux  matières  fbient  liquéfiées 
par  le  feu,  &.  la  féconde  ne  fe  fait  que  par  la  fufiou 
ou  la  calcination  du  métal  par  le  feu  contenu  dans  le 
diffolvant,  ce  qui  produit  toujours  de  la  chaleur;  mais 
dans  les  amalgames,  il  n'y  a  qu'humeéîation  &  point  de 
fufion  ni  de  diffolution:  &  même  im  de  nos  plus  iiabiles 
Chimifles  (/J,  a  obfervé  que  non- feulement  les  amal- 
games  fè  font  fans  produire  de  chaleur,  mais  qu'au 
contraire  ils  produifent  un  froid  fenlîhle  qu'on  peut 
mefùrer  en  y  plongeant  un  thermomètre. 

même  les  neuf  gros  dont  on  aura  chargé  précédemment  l'autre 
bras  de  la  balance.  Élémens  de  Chimie ,  par  Aï.  de  Aloryeau ,  tome  I , 
pages  /4  &   //, 

(l)  M.  de  Machi. 


246         Histoire  Naturelle 

On  objecflera  peut  -  être  qu'il  fe  produit  du  froid 
pendant  l'union  de  l'alkali  minéral  avec  l'acide  nitreux, 
du  fci  ammoniac  avec  l'eau,  de  la  neige  avec  l'eau, 
&  que  toutes  ces  unions  font  bien  de  vraies  diffolutions; 
mais  cela  même  prouve  qu'il  ne  fè  ])roduit  du  froid 
que  quand  la  difToiution  commence  par  l'humeélation  ; 
car  la  vraie  caufe  de  ce  froid  cfl  l'évaporation  de  la 
chaleur  de  l'eau  ,  ou  des  liqueurs  en  général  qui  ne 
peuvent  mouiller  fans  s'évaporer  en  partie. 

L'or  s'amalgame  avec  le  mercure  par  le  fimple 
conta6l,  il  le  reçoit  à  fa  furface ,  le  retient  dans  fes 
pores ,  &  ne  peut  en  être  féparé  que  par  le  moyen  du 
feu.  Le  mercure  colore  en  entier  les  molécules  de  l'or, 
leur  couleur  jaune  di/paroît,  l'amalgame  eft  d'im  gris 
tirant  fur  le  brun  fi  le  mercure  efl  fàturé.  Tous  ces 
effets  proviennent  de  rattra6lion  de  l'or  qui  efl  plus 
forte  que  celle  des  parties  du  mercure  emr'clles ,  &  qui 
par  conféquent  les  fépare  les  unes  des  autres,  &  les 
divifè  affez  pour  qu'elles  puiffent  entrer  dans  les  pores 
&  humeder  la  fubflance  de  l'or  ;  car  en  jetant  une 
pièce  de  ce  métal  dans  du  mercure ,  il  en  pénétrera 
toute  la  maffe  avec  le  temps,  &  perdra  précifémem  en 
quantité  ce  que  l'or  aura  gagné,  c'eft-à-dire,  ce  qu'il 
aura  faifi  par  l'amalgame.  L'or  efl  donc  de  tous  les 
métaux  celui  qui  a  la  plus  grande  affinité  avec  le  mer- 
cure, &.  on  a  employé  très  -  utilement,  le  moyen  de 
l'amalgame  pour  feparer  ce  métal  précieux  de  toutes 


DES    Minéraux,  i^j 

les  matières  étrangères  avec  lerqiielles  il  fe  trouve  mêle 
dans  fes  mines:  au  refle,  pour  amalgamer  prompiement 
l'or  ou  d'autres  métaux,  il  faut  les  réduire  en  feuilles 
minces  ou  en  poudre,  &  les  mêler  avec  le  mercure 
par  la  trituration. 

L'argent  s'unit  au/fi  avec  le  mercure  par  le  fnnpie 
conta6t ,  mais  il  ne  le  retient  pas  aufTi  puiffammcnt  que 
l'or,  leur  imion  eft  moins  intime;  &  comme  la  couleur 
de  l'argent  eO;  à  peu-près  la  même  que  celle  du  mer- 
cure ,  fa  furface  devient  feulement  plus  brillante  lorf- 
qu'elle  en  efl;  humectée  ;  c'eft  ce  beau  blanc  brillant 
qui  a  fait  donner  au  mercure  le  nom  de  v'if-argcnt. 

Cette  grande  affinité  du  mercure  avec  l'or  &  l'argent, 
fembleroit  indiquer  qu'il  doit  fè  trouver  dans  le  fein  de 
la  terre  des  amalgames  naturels  de  ces  métatix,  cepen- 
dant depuis  qu'on  recherche  &  recueille  des  minéraux , 
à  peine  a-t-on  un  exemple  d'or  natif  amalgamé ,  &  l'on 
ne  connoît  en  argent  que  quelques  morceaux  tirés  des 
mines  d'Allemagne,  qui  contiennent  une  quantité  aflez 
confidérable  de  mercure  pour  être  regardés  comme  de 
vrais  amalgames  (m) ;  il  eft  aifé  de  concevoir  que  cette 

(m)  M.  Sage  fait  mention  d'un  morceau  d'or  natif  de  Hongrie, 
d'un  jaune  griiâtre,  fragile,  &  dans  lequel  l'analyfe  lui  a  fait  trouver 
«ne  petite  quantité  de  mercure ,  avec  lequel  on  peut  croire  que 
cet  or  avoit  été  naturellement  amalgamé.  Ce  morceau  ne  contenant 
que  très-peu  de  mercure ,  doit  être  certainement  rangé  parmi  les 
HÙnes  d'or  ;   mais   les  amalgames  natifs   d'argent  de  Sahlberg   &  du 


248         Histoire  Naturelle 

rareté  des  amalgames  naturels  vient  de  la  rareté  même 
du  mercure  dans  (o\\  état  coulant ,  &  ce  n'cfl  pour 
ainfi  dire  qu'entre  nos  mains  qu'il  eft  dans  cet  état,  au 
lieu  que  dans  celles  de  ]a  Nature,  ii  eit  en  mafTe  fblide 
de  cinabre ,  &  dans  des  endroits  particuliers  très-diffé- 
rens,  très-éloigncs  de  ceux  où  fe  trouvent  l'or  &  l'argent 
primitifs,  puifque  ce  n'elt  que  dans  les  fentes  A\x  quartz 
&  dans  les  miontagnes  produites  par  ie  feu  que  giffent 
ces  métaux  de  première  formation;  tandis  que  c'eft 
dans  les  couches  formées  par  le  dépôt  des  eaux  que 
fè  trouve  le  mercure. 

L'or  &  l'argent  font  les  feules  matières  qui  s'amal- 
gament à  froid  avec  le  mercure;  il  ne  peut  pénétrer 
les  autres  fubflances  métalliques,  qu'au  moyen  de  leur 
fufion  par  le  feu ,  il  s'amalgame  auiïi  très  -  bien  par  ce 
même  moyen  avec  l'or  &  l'argent;  l'ordre  de  la  facilité 
de  ces  amalgames  eft  l'or,  l'argent,  l'étain,  le  plomb, 
le  bilmuth,  le  zinc  &  Tarfenic  ;  mais  il  refufe  de  s'unir 
&  de  s'amalgamer  avec  le  fer,  ainfi  qu'avec  les  régules 
d'antimoine  &l  de  cobalt.  Dans  ces  amalgames  qui  ne 
fe  font  que  par  la  fufion,  il  faut  chaufter  le  mercure 
jufqu'au  degré  où  il  commence  à  s'élever  en  vapeurs, 
&  en  même  temps  faire  rougir  au  feu,  la  poudre  des 
métaux  qu'on  veut  amalgamer  pour  la  triturer  avec  le 

Palatinat ,  contiennent  fouvent  plus  de  mercure  que  d'argent  ;  ils 
devroient  donc  être  rapportés  parmi  les  mines  de  mercure.  Lettres 
^e   M.   Demejle ,   tome   II,  page    10^. 

mercure 


DES    Aï  I  iW  É  R  A  U  X.  249 

mercure  chaud.  Les  métaux  qui ,  comme  l'étain  &.  le 
plomb ,  fe  fondent  avant  de  rougir ,  s'amalgament  plus 
aifcmcnt  &  plus  promptement  que  les  autres;  car  ils  fe 
mêlent  avec  le  mercure  qu'on  projette  dans  leur  foute, 
&  il  ne  faut  que  la  remuer  légèrement  pour  que  le 
mercure  s'attache  à  toutes  leurs  parties  métalliques. 
Quant  à  l'or,  l'argent  ôl  le  cuivre,  ce  n'efl  qu'avec 
leurs  poudres  rougies  au  feu  que  l'on  peut  amalgamer 
le  mercure;  car  li  l'on  en  verfoit  fur  ces  métaux  fondus, 
leur  chaleur  trop  forte,  dans  cet  état  de  fufion,  non- 
feulement  le  fuhlimeroit  en  vapeurs ,  mais  produiroit 
des  explofions  dangereufcs. 

Autant  l'amalgame  de  l'or  &  de  l'argent  fe  fait  aifc- 
ment ,  foit  à  chaud,  foit  à  froid,  autant  l'amalgame  du 
cuivre  efl  difficile  &  lent;  la  manière  la  plus  fûre  &  fa 
moins  longue  de  taire  cet  amalgame,  efl  de  tremper 
des  lames  de  cuivre  dans  la  diffolution  du  mercure 
par  l'acide  nitreux;  le  mercure  diffous  s'attache  au  cuivre 
&  en  blanchit  les  lames.  Cette  union  du  mercure  Si.  du 
cuivre  ne  fe  fait  donc  que  par  le  moyen  de  l'acide, 
comme  celle  du  mercure  &  du  foufre  fc  fait  par  le 
moyen  de  l'alkali. 

On  peut  verfer  du  mercure  dans  du  plomb  fondu , 
fans  qu'il  y  ait  explofion ,  parce  que  la  chaleur  qui 
lient  le  plomb  en  fufion,  efl  fort  au-deffous  de  celle 
qui  efl  néceffaire  pour  y  tenir  l'or  &.  l'argent  ; 
auffi  l'amalgame   fe  fait   très  -  aifément  avec   le   plomb 

ATuicrmiX ,  Tome  III.  I  i 


2^0       Histoire   Naturelle 

fondu  fnj;  il  en  cfl  Je  mcme  de  l'ctain  ;  mais  il  peut 
aufTi  fe  faire  à  froid  avec  ces  deux  métaux,  en  les 
rédui/ànt  en  poudre  &  les  triturant  long-temps  avec  le 
mercure,  c'efl  avec  cet  amalgame  de  plomb  qu'on  lutte 

(^nj  I ."  Partie  égale  de  mercure  &  de  plomb  forment  une  mafîe 
blanche  folide ,  dont  une  partie  du  mercure  fe  fcj^are  par  une 
exudation  occafionnée  par  la  feule  chaleur  de  i'atmo/phere ,  en  glo- 
bules infiniment  petits. 

2..°  Deux  parties  de  plomb  &  une  de  mercure  forment  une 
mafîe  blarche ,  dure ,  cafîante ,  à  petits  grains  comme  ceux  de 
l'acier ,  dont  le  mercure  ne  s'échapjie  pas  ;  ces  deux  lubrtances 
forment  alors  une   combinaifon   durable. 

3."  Trois  parties  de  plomb  &  une  de  mercure  forment  une  mafle 
plus  dudile  que  le  plomb  &  l'ctain  ;  on  en  peut  faire  des  vafes , 
&  on   la   liie  aifément  à  la  filière. 

4."  Ce  dernier  mélange  ell  d'une  fufibilité  extraordinaire;  mais 
fi  on  l'expofe  d'abord  à  un  grand  feu ,  il  éclate  avec  explofion  ; 
fi  au  contraire  on  le  liquéfie  à  une  douce  chaleur ,  on  peut  enfuite 
le  châufi^tr  au  rouge  ;  mais  il  bout  continuellement  avec  un  bruifl'e- 
ment  comme  la  graille. 

5.°  Si  l'on  continue  à  le  tenir  en  fufion,  le  mercure  fe  difllpe 
fucceflivement  &   totalement  en  vapeurs. 

6.'  La  craiïè  qui  fe  forme  à  la  furface  du  plomb  combiné  avec 
le  mercure,  expoice  feule  dans  un  Vdiffeau  rouge  de  feu,  décrépite 
comme   le  fei   marin. 

7.°  Cet  amalgame  de  mercure  &  de  plomb  fe  combine  avec 
l'or,  l'argent,  le  cuivre  rofetre  ,  ie  laiton,  le  régule  d'a^itimoine , 
le  zinc  &  le  bifmuth  ;  il  les  aigrit  tous ,  excepté  l'étain  avec  lequel 
il  produit  un  affez  beau  métal  mixte ,  blanc  &  dudile.  A^oie  couunu- 
jiiquée  par  M.  de  Crignon ,   en  Odobre  J7S2. 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X,  251 

les   bocaux  ou  vafes  de  verre,  dans  lefqueis  on  con- 
ferve  les  animaux  dans  i'efprit-de-vin. 

L'amalgame  avec  l'étain,  efl  d'un  très-grand  <Sc  très- 
agréable  uiage  pour  l'ctamage  des  glaces;  a-infi  des  (ix 
métaux  il  y  en  a  quatre,  l'or,  l'argent,  le  plomb  (Se 
Tctain,  avec  lefqueis  le  mercure  s'amalgame  naturelle- 
ment, foit  à  cbaud,  foit  à  froid;  il  ne  fe  joint  au 
cuivre  que  par  intermède,  enfin  il  reliife  abfolument 
de  s'unir  au  fer;  &.  nous  allons  trouver  les  mêmes 
diliérences  dans  les  demi  -  métaux. 

Le  bifmutb  &  le  mercure  s'uniiTent  à  froid  en  les 
triturant  enfcmbie  ;  ils  s'amalgament  encore  mieux  lorfque 
le  bifinuth  efl  en  fufion,  &  ils  forment  des  crillaux  noirs 
affez  réguliers,  &  qui  ont  peu  d'adhérence  entr'eiix; 
mais  cette  criftallifation  du  bifmuth  n'efl  pas  un  effet  qui 
lui  foit  propre  &  particulier;  car  l'on  efl  également 
parvenu  à  obtenir  par  le  mercure,  une  criflallifatipn  de 
tous  les  métaux  avec  le/quels  il  peut  s'unir  Co). 

Lorfqu'on  mêle  le  mercure  avec  le  zinc  en  Rifion, 
il  fe  fait  un  bruit  de  grcjîllemeut ,  femblable  à  celui  de 
l'huile  bouillante  dans  laquelle  on  trempe  un  corps  froid; 
cet  amalgame  prend  d'abord  une  forte  de  folidité ,  <Sc 
redevient  iluide  par  la  fimple  trituration  ;  le  même  effet 
arrive  lorfqu'on  verfe  du  mercure  dans  de  l'huile  bouil- 
lante,  il  y  prend  même   une  folidiié   plus  durable  que 

(oj  Voyez  là-defius  les  expériezices  de  M.   Sage. 


252  HISTOIRE    N  ATU  RELLE 

dans  le  ziac  fondu.  Néanmoins  cette  union  du  zinc  & 
du  mercure  paroît  être  un  véritable  amalgame  ;  car  l'un 
de  nos  plus  favans  Cliimiftes,  M.  Sage,  a  reconnu  qu'il 
fe  criflallife  comme  les  autres  amalgames,  &  d'ailleurs, 
■Je  mercure  femble  diiïbudre  à  froid  quelque  portion 
du  zinc:  cependant  celte  union  du  zinc  &  du  mercure 
paroît  être  incomplète;  car  il  faut  agiter  le  bain  qui 
e/1  toujours  gluant  &  pâteux. 

On  ne  peut  pas  dire  non  plus  qu'il  fe  faffc  un  amal- 
game dired  &  fans  intermède,  entre  le  mercure  &  le 
régule  d'arfenic  lors  même  qu'il  efl  en  fiifion;  enfin  le 
mercure  ne  peut  s'amalgamer  d'aucune  manière  avec 
l'antimoine  &  le  cobalt  :  ainfi  de  tous  les  demi- 
métaux,  le  bifmutb  ell  le  feul  avec  lequel  le  mercure 
s'amalgame  naturellement  ;  &  qui  fait  fi  cette  réfiflance 
à  s'unir  avec  ces  fubflances  métalliques ,  &  la  facilité 
de  s'amalgamer  avec  d'autres ,  &  particulièrement  avec 
l'or  &  l'argent,  ne  provient  pas  de  quelques  qualités 
communes  dans  leur  tilTu,  qui  leur  permet  de  s'hume6ter 
de  cette  eau  métallique ,  laquelle  a  tant  de  rapport  avec 
eux  par  fa  denfité  \ 

Quoi  qu'il  en  foit,  on  voit  par  ces  différentes  com- 
binaifons  du  mercure  avec  les  matières  métalliques  ,  qu'il 
n'a  réellement  d'affinité  bien  fenfible  qu'avec  l'or  &l 
l'argent,  &  que  ce  n'ell  pour  ainfi  dire  que  par  force, 
&  par  des  affinités  préparées  par  le  feu,  qu'il  fe  joint 
aux  autres  métaux,  &  que  même  il  s'unit  plus  facilement 


DES  Minéraux.  253 

&  plus  intimement  avec  les  fubflances  animales  &  végé- 
tales ,  qu'avec  toutes  les  matières  minérales ,  à  l'exception 
(le  l'or  ck.  de  l'argent. 

Au  refte,  ce  n'eft  point  un  amalgame,  mais  un  onguent 

que  forme  le  mercure  mêlé  par    la  trituration  avec  les 

huiles  végétales   &  les    graifTes    animales  ;    elles  agiffent 

fur    le   mercure    comme    le    loie   de    foufre ,   elles    le 

divifent  en  particules  prefque  infiniment  petites ,  &  par 

cette   divifion  extrême ,  cette   matière  il  denfe  pénètre 

tous  les  pores  des  corps  organifés ,  fùr-tout  ceux  où  elle 

fe  trouve  aidée   de   la   chaleur  ,  connue  dans  le  corps 

des  animaux  fur  lequel  elle  produit  des  effets  /àlutaires 

ou  funellcs ,   félon  qu'elle  eft  adminiftrée.  Cette  union 

des  grai/fes  avec   le    mercure,   paroît  même   être  plus 

intime  que  celle  de  l'amalgame  qui  fè  fait  à  froid  avec 

l'or  &.   l'argent   (^p) j  parce   que  deux    fluides  qui    ont 

enfèmble    quelqu'affinité  ,    fè    mêleront    toujours    plus 

aifément  qu'un  folide  avec  un  fluide ,    quand  même   il 

y   auroit    entr'eux  une  plus   forte    attraélion  ;    ainfi  les 

graiiïes    agiffent  peut  -  être  plus    puiffamment   que    ces 

métaux  fur   la  fubflance   du    mercure ,   parce  qu'en   fè 

(p )  Il  ne  faut  pas  regarder  le  mercure  comme  fimpleraent  didribué 
&  entre-  mêlé  avec  les  parties  de  la  graifle  dans  l'onguent  mercuriel  ; 
îl  eft  très-certain  au  contraire  qu'il  y  a  adhérence  &.  combinaifon  , 
même  très -intime,  au  moins  d'une  portion  du  mercure  avec  ia 
graifTe, ...  car  lorfcju'il  eft  fait  depuis  du  temps,  on  ne  peut  plus, 
en  le  fondant ,  retirer  tout  le  mercure  qu'on  y  avoit  mis.  Didionnairc 
de   Chimie  ,  par  M.  Mac  que  r ,  artick  Mercure. 


2)4        Histoire     N  aturelle 

rancifTant  elles  raififTent  l'acide  aérien,  qui  doit  agir  fur 
le  mercure;  &  la  preuve  en  eft  qu'on  peut  le  retirer 
fans  aucune  perte  de  tous  les  amalgames,  au  lieu  qu'en 
fondant  la  graiffe  on  ne  le  retire  pas  en  entier,  fur-tout 
fi  l'onguent  a  cié  gardé  afTez  long-temps  pour  que  la 
graiiTe  ait  exercé  toute  fon  aélion  fur  le  mercure  ((j) , 

Confidcrant  maintenant  les  effets  des  difTolvans  fur 
Je  mercure,  nous  verrons  que  les  acides  ne  le  dilTolvent 

(q)  Quoique  le  mercure  foit  fufceptible  de  fe  diviier  lorfqu'on 
le  triture  avec  une  huile  grafl'e  ,  il  ne  paroît  pas  qu'il  y  ait  rcelie- 
ment  djlîolution.. ..  Le  mercure  fe  combine  plus  facilement  avec 
îes  grailTes  animales  qui  \\z  font  néanmoins  qu'une  efpcce  d'huile 
où  l'acide  eft  plus  abondant,  &  qui  inanifeftent  d'ailleurs  les  mêmes 
affinités  que  les  autres  fubflances  huifeufes.  On  ne  doit  j)as  ne'an- 
moins  attribuer  l'adion  de  ces  graifles  fur  le  mercure,  à  l'acide 
nholphorique    qu'elles   contiennent. 

C'eft  en  combinant  la  graiiïe  avec  le  mercure  ,  que  l'on  forme 
b  pommade  mercurielle,. . .  Dans  cet  onguent,  les  parties  de  mercure 
ne  paroifient  pas  fnnpiement  diflribuées  ou  enire-mêlces  avec  les 
parties  de  la  graiffe  ;  on  efl:  fondé  à  penfer  au  contraire  qu'il  y  a 
adhérence  &  union,  même  trcs-intime,  car  cette  graille  de  l'onguent 
luercuriel  fe  rancit  très-promptement ,  comme  il  arrive  à  toutes  les 
matières  huileufes  qui   entrent  dans  quelque  combinaifon, . .. 

Lorfque  l'onguent  mercuriel  eft  vieux  ,  fi  on  le  frotte  entre 
deux  papiers  gris  ,  la  graifle  s'imbibe  dans  le  papier  f  &  l'on  ne  voit 
point  de  globules  de  mercure;  il  n'en  eft  pas  dfe  même  lorfque  cet 
onguent  ell  récent,  on  y  découvre  trcs-aifément  une  grande  quantité 
de  parties  métalliques.  Toutes  ces  obfervations  prouvent  qu'il  y  a 
liue  vraie  combinaifon,  une  union  intime  dans  ce  mélange,  lorfqu'il 
eft  vieux.  Elémens  de  Chimie,  par  M.  de  Alorveau ,  tome  III t 
pa^es  ^  S  <f    çT  Juivanies, 


DES    Minéraux,  255 

pas  également  comme  ils  clifToIvent  les  métaux,  puiique 
ie  plus  puiiîant  de  tous,  l'acide  vitriolique,  ne  l'attaque 
qu'au  moyen  d'une  forte  chaleur  (r) ;  il  en  ed  à  peu- 
près  de  même  de  l'acide  marin  ;  pour  qu'il  s'imiffe 
intimement  avec  le  mercure,  il  faut  que  l'un  &  l'autre 
foient  réduits  en  vapeurs ,  &  de  leur  ccmbinaifon  réiùlte 
un  fèl  d'tme  qualité  très-funefte,  qu'on  ^  nommé  fo/>/imé 
corrofîf;  dans  cet  état  forcé,  le  mercure  ne  lailîe  pas  de 
conferver  une  ii  grande  attraction  avec  lui -même,  qu'il 
peut  fe  furcharger  des  trois  quarts  de  fon  poids  de 
mcrcme  nouveau   (f);  &.  c'eft    en    chargeant    ainfi  le 

(r)  L'acide  vitriolique  dans  fon  état  ordinaire  ,  n'agit  point  ou 
n'agit  que  trcs-foiblement  &  trcs-iual  iur  le  mercure  en  niaile.  Ces 
deux  fubitances  ne  peuvent  le  combiner  enlcinbJe  à  moins  que 
i'acide   ne  loit  dans  le  plus  grand  degrc  de  concentration,  &  fécondé 

par  la  chaleur  la  plus  forte Lorlque  cet  acide  ell  bien  concentre, 

il  réduit  le  mercure  en  une  nulle  faline  de  couleur  blanche,  appelée 
y'itr'iol  de  mercure. 

Si  on  expofe  à  l'adion  du  feu  la  combinaifon  de  l'acide  vitriolique 
avec  ie  mercure  ,  la  plus  grande  partie  de  cet  acide  s'en  détache; 
mais  une  chofe  fort  remarquable  ,  c'efl  que  le  mercure  traité  ainil 
par  l'acide  vitriolique  loutient  une  plus  grande  chaleur  &  paroît 
par  conféquent  un  peu  plus  fixe  que  c^uand  il  ell  pur.  Cette  fixité 
ert;  une  fuite  de  fon  état  de  chaux.  Didionnaire  de  Chimie  ,  par' 
AI.   Alacqucr ,   article  Mercure. 

ff)  L'acide  marin  en  liqueur  n'agit  point  fenfiblement  fur  fe-^ 
mercure  en  maffe  ,  même  iorlcju'il  el\  aidé  de  la  chaleur  de  i'ébul— 
iition  ;  mais  lorfque  cet  acide  très-concentré,  elt  réduit  en  vapeurs  7- 
&.  qu'il  rencontre  le  mercure  réduit  audi  en  vapeurs  ,  alors  ils 
s'unifient  d'une  manière  très-intime.  Il  en  rélulte  un  fel  marin  mer- 
curiel  crirtallifé  en   aiguilles    aplaties ,   &    q^ii'on   a    nommé  fublimi 


2)6        Histoire  Naturelle 

fublimé  corrofif  de  nouveau  mercure,  qu'on  en  diminue 
la  qualité  corrofive,  &  qu'on  en  fait  une  préparation 
faiutaire,  qu'on  appelle  mercure  doux,  qui  contient  en  effet 
fi  peu  de  Tel  marin  qu'il  n'efl  pas  diffolubie  dans  l'eau; 
on  peut  donc  dire  que  le  mercure  oppo/è  une  grande 
réiiftance  à  l'aétion  de  l'acide  vitriolique  &  de  Tacide 
marin  ;  mais  l'acide  nitreux  le  diiïbut  avec  autant  de 
promptitude  que  d'énergie:  lorfque  cet  acide  cii  pur,  il 
a  la  puiflance  de  le  diifoudre  fans  le  fecours  de  la  chaleur; 
cette  diflblution.  produit  un  {ç\  blanc  qui  peut  fe  criftal- 
iifer,  &  qui  efl  corrofif  comme  celui  de  la  diffolution 
d'argent  par  cet  acide  (tj.  Dans  cette  diffolution,  le 

t^— .—       —  -■■.,--        —  .    —    ,— I.  mM"-   '  ■  —       -,.-         -■■■,i,^_..  -  I  ■        .,  ...  ,—  __,,.   ,1,,,^ 

corrofif ,  parce  que  l'on  ne  l'obtient  que  par  Ja  fubliination. . . . 
L'affinité  de  l'acide  marin  avec  le  mercure  eft  fi  grande  ,  qu'il  fe 
furcharge ,  en  quelque  forte  ,  d'une  quantité  confidérable  de  cette 
matière  métallique. ...  Le  fublimé  corrofif  peut  abforber  &  fe 
charger  peu  à  peu  ,  par  la  trituration  ,  des  trois  quarts  de  {on  poids , 
de  nouveau  mercure.  Diélionnaire  de  Chimie,  par  AI.  Alacquer , 
article  Mercure. 

( t )  L'acide"  nitreux  diOout  très-bien  le  mercure  ;  dix  onces  de 
bon  acide  fuffifent  pour  achever  (a  dilTolution  de  huit  onces  de 
ce    métal  ;    il    l'attaque    même   à  froid ,  6c  produit   effervefcence   & 

chaleur La"  diffolution    fe  colore  d'abord  en    bleu  ,    par    l'union 

du  principe  inflammable  ;  il  s'y  forme  par  le  refroidiffemeni ,  un 
fel  neutre ,  non  delicjuefcent  ,  difpofé  en  aiguilles  ;  c'efl;  le  nitre 
mercuriel.  ...  M.  Bauiné  remarque  que  la  diffolution  de  nitre 
mercuriel  ,  refroidie  fur  le  bain  de  fable ,  donnoit  àes  aiguilles 
perpendiculaires ,  &  que  refroidie  loin  du  feu  ,  elfe  donnoit  des 
aiguilles  horizontales.  Elémens  de  Chimie ,  par  M.  de  Morceau , 
tome   II f  pages    ty^    ir  fuiy. 

mercure 


DES    Minéraux,  257 

mercure  eft  en  partie  calciné  ;  car  après  la  formation 
des  criflaux,  il  fe  précipite  en  poudre  d'un  jaime-citrin 
qu'on  peut  regarder  comme  une  chaux  de  mercure.  Au 
refte,  l'acide  nitreuxqui  diffout  fi  puiffamment  le  mercure 
coulant,  n'attaque  point  le  cinabre ,  parce  que  le  mercure 
y  efl  défendu  par  le  fbufre  qui  l'enveloppe,  &  fur  lequel 
cet  acide  n'a  point  d'aélion.  Cette  ditiérence  entre  le 
mercure  &  le  foufre,  femble  indiquer  qu'autant  le  fbufre 
contient  de  feu  fixe^  autant  le  mercure  en  eft  privé, 
&.  cela  confirme  l'idée  que  l'efTencc  du  mercure  tient 
plus  à  l'élément  de  l'eau  qu'à  celui  du  feu. 

Des  acides  végétaux,  celui  du  tartre  efl  le  fèul  qui 
agiffe  fenfiblement  fur  le  mercure;  le  vinaigre  ne  l'attaque 
pas  dans  fon  état  coulant,  &  ne  s'unit  qu'avec  fa  chaux; 
mais  en  triturant  long-temps  la  crème  de  tartre  avec  le 
mercure  coulant,  on  vient  à  bout  de  les  unir  en  y 
ajoutant  néanmoins  un  peu  d'eau;  on  pourroit  donc 
dire  qu'aucim  acide  végétal  n'agit  direélement ,  &  fans 
intermède  fur  le  mercure.  Il  en  efl  de  même  des  acides 
qu'on  peut  tirer  des  animaux ,  ils  ne  diffolvent  ni  n'at- 
taquent le  mercure ,  à  moins  qu'ils  ne  foient  mêlés 
d'huile  ou  de  graiffe ,  en  forte  qu'à  tout  confidérer,  il 
n'y  a  que  l'acide  aérien  qui  agit  à  la  longue  par  l'in- 
termède des  graiffes  fur  le  mercure,  &:  l'acide  nitrcux 
qui  le  diffolve  d'une  manière  direde  &  fans  intermède: 
car  les  alkalis  fixes  ou  volatils  n'ont  aucime  aélion  fur 
le  mercure  coulant,  <5c  ne  peuvent  fe  combiner  avec 
ATmérmix  j  Tome  III.  K.k 


258        Histoire  Naturelle 

lui  que  quand  ils  le  failifTent  en  vapeurs  ou  en  ciiffoîu- 
lions;  ils  le  précipitent  alors  fous  la  forme  d'une  poudre 
ou  chaux;  mais  que  Von  peut  toujours  revivifier  fans 
addition  de  matière  charhonneufe  ou  iniiammabie  ;  on 
produit  cet  effet  par  les  feuls  rayons  du  iokil,  au  foyer 
d'un  verre  ardent. 

Une  preuve  particulière  de  l'impuiffance  des  acides 
végétaux  ou  animaux  pour  dilToudre  le  mercure,  c'ell 
que  l'acide  des  fourmis,  au  lieu  de  dilfoudrc  /à  cliaux 
Ja  revivifie,  il  ne  faut  pour  cela  que  les  tenir  enlcmble 
en  digeflion  fii)  > 

Le  mercure  n'étant  par  lui-même  ni  acide  ni  alkalin, 
ni  falin ,  ne  me  paroît  pas  devoir  être  mis  au  nombre 
des  dilfolvans,  quoiqu'il  s'attache  à  la  furface  6c  pénètre 
les  pores  de  l'or,  de  l'argent  &  de  l'étain  ;  ces  trois 
métaux  font  les  feules  matières  auxquelles  il  s'unit  dans 
fon  état  coulant,  &  c'efl  moins  une  diffolution  qu'une 
humeétation;  ce  n'eO:  que  par  addition  aux  furfaccs,  &. 
par  juxtapofuion,  &  non  par  pénétration  intime  &  dé- 
compolition  de  la  fubflance  de  ces  métaux  qu'il  fe 
combine  avec  eux. 

Non-feulement  tous  les  alkalis  ainfi  que  les  terres 
abforbantes ,  précipitent  le  mercure  de  fes  diiïblutions  & 
ie  font  tomber  en  poudre  noire  ou  grife,  qui  prend 
avec  le  temps  une  couleur  rouge ,  mais  certaines  (ubf- 


r 

(u)  EIcmens  de  Chimie,  par  M.  de  Morveau,  torm  II ,  j:oge  j y 


DES  Minéraux.  259 

tances  mctailiques  le  prccipitent  cgalemcnt;  le  cuivre, 
i'ctaiii  <Si.  l'antimoine  ne  dccompofent  pas  ces  difToIutions  ; 
&  ces  précipités,  tous  reviviiiés,  offrent  également  du 
mercure  coulant. 

On  détruit  en  quelque  forte  la  fluidité  du  mercure 
en  l'amalgamant  avec  les  métaux  ou  en  l'uniflant  avec 
les  graiiïes,  on  peut  même  lui  donner  une  demi-folidité 
en  le  jetant  dans  l'huile  bouillante,  il  y  prend  aflez  de 
conlîftancc  pour  qu'on  puifTe  le  manier,  l'étendre,  & 
en  faire  des  anneaux  &  d'autres  petits  ouvrages  ;  le 
mercure  rcfle  dans  cet  état  de  folidité,  ôl  ne  reprend 
fi  fluidité  qu'à  l'aide  d'une  chaleur  aflfez  forte. 

Il  y  a  donc  deux  circonflances  bien  éloignées  Tune 
de  l'autre,  dans  Icfquellcs  néanmoins  le  mercure  prend 
également  de  la  folidité,  &  ne  reprend  de  la  fluidité 
que  par  l'acceflion  de  la  chaleur  ;  la  première  efl:  celle 
du  très  -  grand  froid  qui  ne  lui  donne  qu'une  folidité 
prcfque  momentanée  ,  ôl  que  le  moindre  degré  de 
diminution  de  ce  froid,  c'efl- à- dire,  la  plus  petite 
augmentation  de  chaleur  liquéfie;  la  féconde  au  contraire 
n'efl;  produite  que  par  une  très  -  grande  chaleur ,  puif- 
qu'il  prend  cette  folidité  dans  l'huile  bouillante  ou  dans 
le  zinc  en  fufion,  &  qu'il  ne  peut  enfuite  fe  liquéfier  que 
par  une  chaleur  encore  plus  grande;  quelle  conféquence 
dire6le  peut -on  tirer  de  la  comparaifon  de  ces  deux 
mêmes  effets  dans  des%lrconftances  fi  oppofées,  finon 
que  le  mercure  participant  de  la  nature  de  l'eau  (Sl  de 

Kk  ij 


26o        HisToïkE   Naturelle 

celle  (lu  métal,  il  fe  gèle,  comme  l'eau  par  le  froid,  d'une 
part;  &  de  l'autre,  fe  confoJide,  comme  fait  un  métal 
en  fufion  par  la  température  aduelle,  en  ne  reprenant 
fa  fluidité,  comme  tout  autre  métal,  que  par  une  forte 
chaleur  î  néanmoins  cette  conféquence  n'efl  peut  -  être 
pas  la  vraie,  &  il  fe  peut  que  cette  fblidité  qu'acquiert 
le  mercure  dans  l'huile  bouillante  &  dans  le  zinc  fondu, 
provienne  du  changement  brufque  d'état  que  la  forte 
chaleur  occafionnc  dans  fès  parties  intégrantes  ,  &  peut- 
être  auffi  de  la  comhinaifon  réelle  des  parties  de  l'huile 
ou  du  zinc  qui  en  font  un  amalgame  folide. 

Quoi  qu'il  en  foit,  on  ne  connoît  aucun  autre  moyen 
de  fixer  le  mercure;  les  Alchimifles  ont  fait  de  vains 
&  immenfes  travaux  pour  atteindre  ce  but;  l'homme 
ne  peut  tranfmuer  \çs  fubflances,  ni  d'un  liquide  de 
nature  en  faire  un  folide  par  l'art  ;  il  n'appartient  qu'à 
la  Nature  de  changer  les  eifences  fxj,  &  de  convenir 
les  élémens  ,  &  encore  faut  -  il  qu'elle  foit  aidée  de 
i'éternité  du  temps,  qui,  réunie  à  fes  hautes  puiffances, 


(x)  Nota.  Je  ne  puis  donner  une  entière  confiance  en  ce  qui 
cfl:  rapporté  dans  les  Récréations  cliimiques  ,  par  M.  Parmentier , 
tome  I ,  poges  ^^ p  &  fu'iv.  c'eft  néanmoins  ce  que  nous  avons 
de  plus  authentique  fur  la  tranfuiutation  des  métaux;  on  y  donne 
lin  procédé  pour  convertir  le  mercure  en  or ,  réfifiant  à  toute 
épreuve ,  &  ce  ,  par  le  moyen  de  l'acide  du  t^irtre  ;  ce  procédé , 
qui  efl  de  Confîantin ,  a  été  répéta  par  Mayer  <5c  vérifié  par 
Al.  Parmentier,,  qui  a  foin  d'avancer  qu'il  n'efl  pas  fait  pour  enrichir. 


DES    Ai  I  N  il  n  AU  X,  261 

amené  toutes  les  combinaifbns  pofTibles ,  &  toutes  les 
formes  dont  la  matière  peut  devenir  ftifceptible. 

H  en  efl  à  pcu-])rès  de  même  des  grandes  recherches 
<Sl  des  longs  travaux  que  l'on  a  faits  pour  tirer  le  mercure 
des  métaux  ;  nous  avons  vu  qu'il  ne  peut  pas  exifler 
dans  les  mines  primordiales  formées  par  le  feu  primitif; 
dès-lors  il  feroit  abfurde  de  s'obftiner  à  le  rechercher  dans 
l'or,  l'argent  &  le  cuivre  primitifs ,  puifqu'ils  ont  été  pro- 
duits &L  fondus  par  ce  feu;  il  fembleroit  plus  raifonnable 
d'effayer  de  le  trouver  dans  les  matières  dont  la  for- 
mation efl  contemporaine  ou  peu  antérieure  à  la  ficnne; 
mais  l'idée  de  ce  projet  s'évanouit  encore  lorfqu'on 
voit  que  le  mercure  ne  fe  trouve  dans  aucune  mine 
métallique ,  même  de  féconde  formation ,  &  que  le  feul 
fer  décompofé  &  réduit  en  rouille,  l'accompagne  quel- 
quefois dans  fa  mine ,  oii  étant  toujours  uni  au  foufre  &. 
à  l'alkali ,  ce  n'eft,  &  ne  peut  même  être  que  dans  les 
terres  graffes  &.  chargées  des  principes  du  foufre  par 
ia  décompofition  des  pyrites ,  qu'on  pourra  fe  permettre 
de  le  chercher  avec  quelque  efpérance  de  fuccès. 

Cependant  plufieurs  Artilles ,  qui  même  ne  font 
pas  Alchimiftes ,  prétendent  avoir  tiré  du  mercure  de 
quelques  fubftances  métalliques,  car  nous  ne  parlerons 
pas  Au.  préiendu  mercure  At%  prétendus  Phïlofophes  ,  qu'ils 
difent  être  plus  pefant,  moins  volatil,  plus  pénétrant, 
plus  adhérent  aux  métaux  que  le  mercure  ordinaire , 
&  qui  leur  fert  de    bafe    commune  fluide  ou  foljdc  ; 


i()2        Histoire  N aturelle 

ce  mercure  philofophique  n'eft  qu'un  être  d'opinion, 
un  être  dont  l'cxiflence  n'eft  fondée  que  fur  l'idée 
affez  fpécicufe  ,  que  le  fonds  Ac  tous  les  métaux  eft 
une  matière  commune ,  une  terre  que  Bêcher  a  nommée 
terre  vicrciirielle ,  &.  que  les  autres  Alchimiftes  ont 
regardée  comme  la  bafc  des  métaux.  Or  il  me  paroît 
qu'en  retranchant  l'excès  de  ces  idées ,  &.  les  exami- 
nant fans  préjugés ,  elles  font  aiiiïi  fondées  que  celles 
de  quelques  autres  aduellement  adoptées  dans  la  Chimie; 
ces  êtres  d'opinion  dont  on  fait  des  principes ,  portent 
également  flir  l'obfcrvation  de  plufieurs  qualités  com- 
munes qu'on  voudroit  expliquer  par  un  même  agent 
doué  d'une  propriété  générale  ;  or  comme  les  métaux 
ont  évidemment  plufieurs  qualités  communes ,  il  n'ell 
pas  déraifonnable  de  chercher  quelle  peut  être  la  fub- 
fiance  aélive  ou  pafîive  ,  qui  ,  fe  trouvant  également 
dans  tous  les  mciaux ,  fèrt  de  bafe  générale  à  leurs 
propriétés  communes  ;  on  peut  même  donner  un  nom 
à  cet  être  idéal  pour  pouvoir  en  parler  &  s'étendre 
fiir  fes  propriétés  fuppofées  ;  c'e(l-là  tout  ce  qu'on 
doit  fe  permettre ,  le  refte  ell  un  excès ,  une  fource 
d'erreurs ,  dont  la  plus  grande  ell  de  regarder  ces  êtres 
d'opinion  comme  réellement  exiftans,  &  de  les  donner 
pour  des  fubilances  matérielles ,  tandis  qu'ils  ne  repré- 
ièntent  que  par  abftraélion  des  qualités  communes  de 
ces  fubflances. 

Nous  avons  préfenté  dans  le  premier  volume  de  nos 


DES  Minéraux.  263 

Supplémcns ,  la  grande  divifion  des  matières  qui  com- 
pofeiit  le  globe  de  la  texre;  la  première  clafFe  contient 
la  matière  vitreufè  fondue  par  le  feu  ;  la  féconde  ,  ks 
matières  calcaires  formées  par  les  eaux  ;  la  troifième  , 
la  terre  végétale  provenant  du  détriment  des  végétaux 
&.  des  animaux  ;  or  il  ne  paroit  pas  que  les  métaux 
fbient  cxprefTément  compris  dans  ces  trois  dalles  ;  car 
ils  n'ont  pas  été  réduits  en  verre  parle  feu  primitif;  ils 
tirent  encore  moins  leur  origine  des  fubflances  calcaires 
ou  de  la  terre  végétale.  On  doit  donc  les  confidérer 
comme  faifànt  une  clafle  à  part ,  &  certainement  ils 
font  compofés  d'ime  matière  plus  denfe  que  celle  de 
toutes  les  autres  fubflances  :  or  quelle  ell  cette  matière 
il  denfe  î  efl-ce  une  terre  folide  ,  comme  leur  dureté 
l'indique  î  eft-cc  un  liquide  pefànt,  comme  leur  aflinité 
avec  le  mercure  femble  auffi  l'indiquer  l  efl-ce  un 
compofé  de  folide  &  de  liquide  tel  que  la  prétendue 
terre  mcrcurielle  l  ou  plutôt  n'efl-ce  pas  une  matière 
fcmblable  aux  autres  matières  vitreufes  ,  &.  qui  nen 
diffère  effentiellement  que  par  fa  denfité  &  fa  volatilité  l 
car  on  peut  auffi  la  réduire  en  verre.  D'ailleurs  les 
métaux,  dans  leur  état  de  nature  primitive,  font  mêlés 
ëi.  incorporés  dans  les  matières  vitreuiès  ;  ils  ont  fculs 
la  propriété  de  donner  au  verre  des  couleurs  fixes  que 
le  feu  même  ne  peut  changer  ;  il  me  paroît  donc  que 
les  parties  les  plus  denfcs  de  la  matière  tcrreflre  étant 
douées,  relativement  à  leur  volume,  d'ime  plus  forte 


264         Histoire  Naturelle 

attraction  réciproque ,  elles  le  font ,  par  ceue  raifon , 
fëparces  des  autres,  &  réunies  entr'eiies  fous  un  plus 
petit  volume  ;  la  fubilance  des  métaux  prife  en  général 
ne  préfente  donc  qu'un  fèul  but  à  nos  recherches ,  qui 
feroit  de  trouver  ,  s'il  efî  polîjble,  les  moyens  d'augmen- 
ter la  denfîté  de  la  matière  vitreufè,  au  point  d'en  faire  un 
métal,  ou  feulement  d'augmenter  celle  des  métaux  qu'on 
appelle  imparfaits ,  autant  qu'il  fèroit  néceflaire  pour  leur 
donner  la  penfànteur  de  l'or  ;  ce  but  eft  peut-être  placé 
au-delà  des  limites  de  la  puiffance  de  notre  art,  mais  au 
moins  il  n'ell  pas  abfolument  chimérique ,  puifque  nous 
avons  déjà  reconnu  une  augmentation  confidérable  de  pe- 
fanteur  fpécifique  dans  plulieurs  alliages  métalliques. 

Le  Chimifte  Juncker  a  prétendu  tranfmuer  le  cuivre 
en  argent  (yj ,  &  il  a  recueilli  les  procédés  par  lefquels 

(y)  Voici  Ton  procédé  ;  011  fait  couler  en  mafîe  au  feu  de  fable , 
quatre  parties  de  feuilles  de  cuivre,  quatre  parties  de  fublimé  corroGf, 
ÔL  deux  parties  de  fel  ammoniac  ;  on  pulvcrife  ce  compofé ,  &  on 
le  lave  dans  le  vinaigre  jufqu'à  ce  que  le  nouveau  vinaigre  ne 
verdille  plus  ;  on  fond  alors  ce  qui  relie  avec  une  partie  d'argent , 
&  on  coupelle  avec  le  plomb  ;  fuivant  Juncker,  le  cuivre  fe  trouve 
converti  en  argent.  M.  Weber ,  Chimifte  Allemand,  vient  de  répéter 
jufqu'à  deux  fois  ce  procédé  ,  fur  i'affurance  que  deux  perfonnes 
lui  avoient  donnée  cju'il  leur  avoit  rculTi  ;  il  avoue  qu'il  n'a  retrouvé 
que  l'argent  ajouré  à  la  fufion  ,  &  il  remarque  ,  avec  toute  raifon  , 
que  c'efl:  opérer  affez  heureufement  &  avec  toute  exaditude  ,  lorf- 
qu'une  portion  du  métal  fin  ne  paffe  pas  par  la  cheminée  avec 
l'efpérance  de  la  tranfmutation.  Alagafin  phyjico- chimique  de  M.  Wder, 
îorne  I ,  page    121. 

on 


D  E  s    M  l  N  É  p.  AV  X,  265 

on  a  voulu  tirer  du  mercure  des  métaux;  je  fuis  perfuadé 
qu'il  n'en  exifle  dans  aucun  métal  de  première  forma- 
tion, non  plus  que  dans  aucune  mine  primordiale, 
pui/que  ces  métaux  &  le  mercure  n'ont  pu  être  produits 
enfemble.  M.  Groffe,  de  l'Académie  des  Sciences,  s'eft 
trompé  fur  le  plomb  dont  il  a  dit  avoir  tiré  du  mercure; 
car  Ton  procédé  a  été  plufieurs  fois  répété,  &  toujours 
fans  fuccès,  par  les  plus  habiles  Chimifles;  mais  quoique 
le  mercure  n'exifte  pas  dans  les  métaux  produits  par  le 
feu  primitif,  non  plus  que  dans  leurs  mines  primordiales , 
il  peut  fe  trouver  dans  les  mines  métalliques  de  dernière 
formation ,  foit  qu'elles  aient  été  produites  par  le  dépôt 
&.  la  flillation  des  eaux,  ou  par  le  moyen  du  feu  &  par 
la  fliblimation  dans  les  terreins  volcanifés. 

Plufieurs  Auteurs  célèbres,  &  entr'autres  Bêcher  & 
Lancelot,  ont  écrit  qu'ils  avoient  tiré  du  mercure  de 
l'antimoine  ;  quelques  -  uns  même  ont  avancé  que  ce 
demi -métal  n'étoit  que  du  mercure  fixé  par  une  vapeur 
arfenicale.  M.  de  Souhey,  ci-devant  Médecin-confultant 
du  Roi,  a  bien  voulu  me  communiquer  un  procédé, 
par  lequel  il  afTure  aufTi  avoir  tiré  du  mercure  de 
l'antimoine  (i).  D'autres  Chimifles  difent  avoir  augmenté 

^-^^^^-^^-^-^^-^-^  '  ■  -  — ' .■■■Il     ■     ■       I  »  ■  M^^»^^^ 

(■^)  «  Le  mercure,  dit  M.  de  Souhey,  eft  un  mixte  aqueux  &  terreux, 
dans  lequel  il  entre  une  portion  du  principe  inflammable  ou  lui-  « 
fureux  ,  &  qui  efl  chargé  jufqu'à  l'excès  de  la  troifième  terre  de  ce 
Bêcher  ;  voilà  ,  dit-il ,  la  meilleure  définition  qu'on  puifTe  donner  « 
du  mercure.  II  m'a  paru  Ç\  avide  du  principe  conftituant  les  métaux  « 

Minéraux ,  Tome  III.  Ll 


266         Histoire  Naturelle 

la  quantité   du  mercure  en  traitant  le  fîiblimé  corrofif 

5>  &  les  demi- métaux ,  que  je  fuis  parvenu  à  précipiter  ceux-ci  avec 
y>  le  mercure  ordinaire  Tous  une  forme  de  chaux  rcdudible  ,  fans 
x>  addition  ,  avec  fe  fecours  de  l'eau  &  avec  celui  du  feu  ;  j'ai  ainfî 
35  calcine'  tous  les  me'taux,  même  les  plus  parfaits ,  d'une  manière  aufli 
3ï  irrédudible  avec  du  mercure  tiré  des  demi-métaux. 
33  L'affinité  du  mercure  eft  fî  grande  avec  les  métaux  &  les  demi- 
33  métaux ,  qu'on  pourroit ,  pour  ainlî  dire  ,  afTurer  que  le  mercure 
33  eft  au  règne  minéral  ce  que  l'eau  eft  aux  deux  autres  règnes. 
33  Pour  prouver  cette  afiertion  ,  j'ai  fait  des  eflais  fur  les  demi- 
33  métaux  ,  &  j'expoiè  feulement  ici  le  procédé  fait  fur  le  régule 
73  d'antimoine;  en  fondant  une  partie  de  ce  rcgufe  avec  deux  paities 
33  d'argent  (  qui  fert  ici  d'intermède,  &  qu'on  fépare,  l'opération  finie,  ) 
33  on  réduira  cette  matière  en  poudre  qu'on  amalgamera  avec  cinq 
33  ou  fix  parties  de  mercure  ;  on  triturera  le  mélange  avec  de  l'eau 
33  de  fontaine  ,  pendant  douze  à  quinze  heures  ,  julqu'à  ce  qu'elle 
33  en  forte  blanche;  l'amalgame  lera  long-temps  brun,  &  par  les 
33  lotions  réitérées,  l'eau  entraînera  peu-à-peu  avec  elle  le  régule 
35  fous  une  forme  de  chaux  noire  entièrement  fufible  ;  celte  chaux 
33  recueillie  avec  foin,  léchée  &  mile  au  feu  dans  une  cornue,  on 
33  en  (épare  le  mercure  qui  s'y  étoit  mêlé;  en. décantant  l'eau  qui 
3J  a  fervi  à  nettoyer  l'amalgame  ,  on  ne  trouvera  que  les  deux  tiers 
33  du  poids  du  régule  qui  avoit  été  fondu  &  enfuite  amalgamé  avec 
33  le  mercure  ;  on  fépare  auflx  par  la  fublimation  celui  qui  étoit  refté 
33  avec  l'argent  ;  alors  ,  fi  l'opération  a  été  bien  faite  ,  l'argent  fera 
33  dégagé  de  tout  alliage ,  &  très-blanc  ;  le  mercure  aura  augmente 
33  fenfiblement  de  poids ,  en  tenant  compte  de  celui  qui  étoit  mêlé 
33  avec  la  chaux  du  régule  qu'on  fuppofe  avoir  été  fépare  par  la 
3)  diftillation.  On  peut  conclure  que  le  mercure  s'eft  aj)proprié  le 
33  tiers  du  poids  qui  manque  fur  la  totalité  du  régule ,  &  que  ce 
33  tiers  s'eft  réduit  en  mercure  ,  ne  pouvant  plus  s'en  féparer  ;  les 
33  deux  tiers  reftans  ,  quittent  l'état  de  chaux  fi  on  les  rétablit  par 
33  les  procédés  ordinaires    avec   le   flux  noir  ou    autre   fondant ,  & 


DES    Minéraux,  2^7 

avec  le  cinabre  d'antimoine  (a) ;  d'autres  par  des  pré- 
parations  plus    combinées ,    prétendent   avoir    converti 

quelques    portions   d'argent   en    mercure  ^l)) ;   d'autres 

'  —  ■ 

ï'expérience   peut    être   répétée    jufqu'à   ce  que   le  régule   d'auti-  <c 
moine  foit  en  entier  réduit  en  mercure.  <e 

Si  l'on  fdit  évaporer  jufqu'à  ficcité  l'eau  qui  a  fervi  aux  lotions,  « 
après  l'avoir  laiflé  dépofer,  il  reliera  une  terre  grifàtre  ayant  un  ce 
goût  falin,  &.  rougiO'ant  un  peu  au  feu  ;  cette  terre  appartenoit  au  « 
mercure  qui  l'a  dcpofée  dans  l'eau  qui  la  tenoit  en  diflolution.  « 
Le  mercure,  dans  l'opération  ci-deflus,  fait  la  fondion  du  <c 
feu  ,  &  produit  les  mêmes  effets  ;  il  a  fait  difparoître  du  régule  ce 
d'antimoine  fon  afped;  brillant ,  il  lui  a  fait  perdre  une  partie  dj  ce 
fon  poids  en  le  calcinant  d'une  manière  irrédu(5lible ,  fans  addition ,  <c 
avec  le  fecours  de  l'eau  &  de  la  trituration  ,  auflî  complètement  ce 
que  pourroit  le  faire  le  feu  j>. 

Nota.  On  peut  remarquer  dans  cet  expofé  de  M.  de  Souhey, 
que  fon  idée  fur  l'eiïence  du  mercure  qu'il  regarde  comme  une 
eau  métallique  ,  s'accorde  avec  les  miennes  ;  mais  j'obferverai  qu'il 
n'efl  pas  étonnant  que  les  métaux  traités  avec  le  mercure  fe  calcinent 
même  par  la  funpie  trituration  ;  on  fait  que  le  métal  fixe  retient  un 
peu  de  mercure  au  feu  de  diflilîation  ,  on  fait  aufli  que  le  mercure 
emporte  à  la  diftijladon  un  peu  des  métaux  fixes  ;  ainfi ,  tant  qu'on 
n'aura  pas  purifié  le  mercure  que  l'on  croit  avoir  augmenté  par  le 
mercure  d'antimoine  ,  ce  fait  ne   fera  pas  démontré. 

(a)  Voici  un  exemple  ou  deux  de  mercurification ,  tirés  de 
Vallerius  Cf.  Teichmeyer.  Si  l'on  diftille  du  cinabre  d'antimoine  fait 
par  le  fublimé  corrofif,  on  retirera  toujours  des  dillillations  après 
!a  revivification  du  mercure,  plus  de  mercure  qu'il  n'y  en  avoit 
dans  le  fublimé  corrofif.  Didionna'ire  de  Chimie ,  par  M.  Aiacquer , 
crticle  Mercure. 

( b)  Si  l'on  pre'psre  un  fublimé  corrofif  avec  l'efprit  de  fel  <S{ 

Ll  i; 


268        Histoire  Natvrelle 

ennn  aflurent  en  avoir  tire  de  la  limaille  clc  fer,  ainfi 
que  de  la  chaux,  du  cuivre,  <Sc  même  de  l'argent  & 
du  plomb  à  l'aide  de  l'acide  marin  fcj. 

C'efl  par  l'acide  marin,  &  même  par  les  fèls  qui 
en  contiennent,  que  le  mercure  eft  précipité  plus  abon- 
damment de  Tes  difTolutions,  6c  ces  précipités  ne  font 
point  en  poudre  sèche,  mais  en  mucilage  ou  gelée 
blanche ,  qui  a  quelque  confiflance  ;  c'eil  une  forte  de 
fel  mercuriel ,  qui  néanmoins  n'efl;  guère  foluble  dans 
l'eau.  Les  autres  précipites  du   mercure  par  l'alkali  à. 

\e  mercure  coulant,  A  qu'on  fubliiiie  plufieurs  fois  de  la  chaux  ou  de 
}a  limai-lie  d'argent  avec  ce  lublinic  ,  une  partie  de  l'argent  fe  changera 
en  mercure.  Dtâionnaire  de  Chimie  ,  par  AI.  Alacquer,  article  Mercure. 

(c)  La  limaille  de  fer  bien  fine  expofée  pendant  ww  an  à  l'air 
libre,  enluite  bien  triture'e  dans  un  mortier....  remife  après  ce(a 
encore  pendant  un  an  à  l'air,  &  enfin  foumiie  à  une  dillillation  dans 
une  cornue  ,  fournit  une  matière  dure  qui  s'attache  au  col  du 
vaifTeau  ,    &  avec  cette  matière  un  peu  de  mercure. 

Si  l'on  prend  de  la  cendre  ou  chaux  de  cuivre  ,  qu'on  la  niefe 
avec  du  Tel  ammoniac ,  qu'on  expofe  ce  mélange  pendant  un  certain 
temps  à  l'air,  &  qu'on  le  mette  en  dillillaiion  avec  du  favon,  on 
obtiendra   du  mercure. 

On  pre'tend  aufTi  tirer  du  mercure  du  plomb  &  de  l'argent  corn(?, 
en  le  mêlant  avec  parties  égales  d'efprit  de  fel  bien  concentre ,  en  les 
laiffant  en  digeftion  pendant  trois  ou  quatre  femaines ,  &  /àiurant 
cnfufte  ce  mélange  avec  de  l'alkali  volatil ,  &  le  remettant  en  digef- 
tion pendant  trois  ou  quatre  femaines  ;  au  bout  de  ce  temps  il 
faut  y  joindre  égale  quantité  de  flux  noir  &  de  favon  de  Venife, 
&.  mettre  le  tout  en  diflillanon  dans  une  cornue  de  verre ,  il  paflera 
du  mercure   dajis  le  récipient.   Jàm ,  ibidem. 


DESJ\IINÉRAUX,  269 

par  les  terres  abforbantcs,  font  en  poudre  de  couleurs 
différentes;  tous  ces  précipités  détonnent  avec  le  foufre: 
&  M.  Bayen  a  reconnu  qu'ils  retiennent  tous  quelques 
portions  de  l'acide  diflblvant,  &  des  fubfîances  qui  ont 
fèrvi  à  la  précipitation. 

On  connoît  en  Médecine  les  grands  effets  du  mer- 
cure mêlé  avec  les  graiffes  dans  lefquelles  néanmoins 
on  le  croiroit  éteint;  il  fuffit  de  fe  frotter  la  peau  de 
cette  pommade  mercurielle,  pour  que  ce  fiuide  (1  pefant 
foit  faifi  par  intuiïurception  &  entraîné  dans  toutes  les 
p  arties  intérieures  du  corps  qu'il  pénètre  intimement ,  & 
fur  lefquelles  il  exerce  une  adlion  violente,  qui  fe  porte 
particulièrement  aux  glandes,  &  fe  manifcflc  par  la  faii- 
vation  ;  le  mercure  dans  cet  état  de  pommade  ou 
d'union  avec  la  grailfe,  a  donc  une  très-grande  affinité 
avec  les  fubflances  vivantes ,  &  fon  action  paroit  ceffer 
avec  la  vie  ;  elle  dépend  d'ime  part  de  la  chaleur  & 
du  mouvement  des  fluides  du  corps,  &  d'autre  part  de 
l'extrême  divifion  de  fès  parties,  qui,  quoique  très-pe- 
fantes  en  elles-mêmes,  peuvent,  dans  cet  état  de  petiteffe 
extrême,  nager  avec  le  fàng,  &  même  y  furnager,  comme 
il  furnagc  les  acides  dans  fà  diffolution  en  formant  une 
pellicule  au  -  deffus  de  la  liqueur  diffolvante.  Je  ne 
vois  donc  pas  qu'il  foit  néceffaire  de  fuppofer  au  mer- 
cure un  état  falin  pour  rendre  raifon  de  fes  effets  dans  les 
corps  animés ,  pui/quc  fôn  extrême  divifion  Çu^cit  pour 
les    produire ,    fans   addition    d'aucune    autre    matière 


270        Histoire  Naturelle 

étrangère,  que  celle  de  la  graifle  qui  en  a  divifé  les 
parties ,  &  leur  a  communiqué  Ton  affinité  avec  les 
fubflances  animales;  car  le  mercure  en  mafle  coulante, 
&  même  en  cinabre,  appliqué  fur  le  corps  ou  pris 
intérieurement ,  ne  produit  aucun  effet  fenfible ,  &  ne 
devient  nuifible  que  quand  il  efl  réduit  en  vapeurs  par 
ie  feu ,  ou  divifé  en  particules  infiniment  petites  par  les 
fubfiances  qui ,  comme  \ts  graiffes ,  peuvent  rompre  les 
liens  de  l'attradtion  réciproque  de  fes  parties. 


D  E  s     Af  I  N  É  R  AU  X.  27 1 


D 


DE    L'ANTIMOINE. 


E  même  que  le  mercure  eft  plutôt  une  eau  métaU 
iique  qu'un  métal,  l'antimoine  &  les  autres  fubftances 
auxquelles  on  a  donné  le  nom  de  demi-métaux  ne  fonc 
dans  la  réalité  que  des  terres  métalliques  &  non  pas 
des  métaux.  L'antimoine ,  dans  fa  mine ,  efl  uni  aux 
principes  du  foufre  &  les  contient  en  grande  quantité, 
comme  le  mercure  dans  fa  mine  efl  de  même  abondam- 
ment mêlé  avec  le  foufre  &.  l'alkali;  il  a  donc  pu  fe 
former ,  comme  le  cinabre ,  par  l'intermède  du  foie  de 
foufre  dans  les  terres  calcaires  &  limoneufes  qui  con- 
tiennent de  l'alkali ,  &  en  général  il  me  paroît  que  le 
foie  de  foufre  a  fou  vent  aidé  plus  qu'aucun  autre  agent, 
à  la  minéralifation  de  tous  les  métaux  ;  de  plus  ,  l'anti- 
moine &  le  cinabre,  quoique  fi  difîcrens  en  apparence, 
ont  néanmoins  plufieurs  rapports  enfemble  &  une  grande 
tendance  à  s'unir.  L'efprit  de  {t\  2l  autant  d'affinité  avec  le 
mercure  qu'avec  le  régule  d'antimoine.  D'ailleurs,  quoique 
le  cinabre  diffère  beaucoup  de  l'antimoine  crud  par  la 
denfité  (a)  ;  ils  fè  relfemblent  par  la  quantité  de  foufre 
qu'ils  contiennent  ;  &  celte  quantité  de  foufre  efl  même 


(a)  La  pelameur  Ipécitîque  de  l'antimoine  crud  eft  de  40643  , 
^  celle  du  régule  d'antimoine  eft  de  67021  ;  &  de  même  la 
pelanteur  fpccilique  du  cinabre  elt  102185,  &  celle  du  mercure 
coulant  eft  de   135681. 


272        Histoire    N atu relle 

pius  grande  dans  {'antimoine,  relativement  à  fbn  régule, 
que  dans  ie  cinabre ,  relativement  au  mercure  coulant. 
L'antimoine  crud  contient  ordinairement  plus  d'un  tiers 
de  parties  fulfureufes  fur  moins  de  deux  tiers  de  parties 
qu'on  appelle  tnétalliques  ^  quoiqu'elles  ne  fe  réduifent 
point  en  métal,  mais  en  un  fnnpie  régule  auquel  on  ne 
peut  donner  ni  la  duélilité  ni  la  fixité  qui  font  deux 
propriétés  efTentielles  aux  métaux  ;  la  plupart  des  mines 
d'antimoine,  ainfi  que  celles  de  cinabre,  fe  trouvent  donc 
également  dans  les  montagnes  à  couches ,  mais  quelques- 
unes  giffent  aufli  comme  les  galènes  de  plomb  dans  les 
fentes  du  quartz  en  état  pyriteux ,  ce  qui  leur  efl  commun 
avec  plufieurs  minerais  formés  fecondairement  par  l'adion 
des  principes  minéral ifateurs  ;  auffi  les  gangues  qui  accom- 
pagnent le  minerai  de  l'antimoine  font-elles  de  diverfè 
nature  ,  félon  la  pofition  de  la  mine  dans  des  couches  de 
matières  différentes;  ce  font  ou  des  pierres  vitreufes  & 
{c\\\iit\x{ks(b)  ou  des  terres  argileufes,  calcaires,  &c.  &  il 
eft  toujours  aifé  d'en  féparer  la  mine  d'antimoine  par  une 
première  fîifion  ,  parce  qu'il  ne  lui  faut  pas  un  grand  feu 
pour  la  fondre,  &  qu'en  la  mettant  dans  des  vaifîeaux 
percés  de  petits  trous,  elle  coule  avec  fon  foufre  &  tombe 
dans  d'autres  vafes,  en  laiffant  dans  les  premiers  toute  la 
pierre  ou  la  terre  dont  elle  étoit  mêlée.  Cet  antimoine  de 

(hj  Les  mines  d'antimoine  d'Erbias ,  dans  le  Limofin ,  font  dans 
àes  mafles  de  pierres  fchifl.eures  &  vitreliibles.  Noie  communiquer  par 
M,  de  Gùgnon ,  en  Odobrc  ij8z. 

première 


DES  Minéraux.  273 

première  fiifion ,  &  qui  contient  encore  Ton  foufre , 
s'appelle  annmoine  criui ^  6l  il  efl  déjà  bien  différent  de 
ce  qu'il  étoit  dans  fa  mine  où  il  ib  préfente  fans  aucune 
forme  régulière  ni  flruélure  diftinde,  &  fouvent  en  maffes 
informes ,  qu'on  reconnoît  néanmoins  pour  des  matières 
minérales  à  leur  tiffu  ferré,  à  leur  grain  fin  comme 
celui  de  l'acier,  &.  au  poli  qu'on  peut  leur  donner  ou 
qu'elles  ont  naturellement  ;  mais  qui  s'éloignent  en  même 
temps  de  i'effence  métallique,  en  ce  qu'elles  font  caf- 
fantes  comme  le  verre ,  &  même  beaucoup  plus  friables. 
Le  minerai  d'antimoine  ie  préfènte  auffi  en  petites 
maffes  compofées  de  lames  minces  comme  celles  de 
la  galène  de  plomb ,  mais  prefque  toujours  difpofées 
d'une  manière  affez  confufè.  Toutes  ces  mines  d'anti- 
moine fe  fondent  fàiis  fe  décompofcr,  c'eft-à-dire,  fans 
fe  féparer  des  principes  minérali/àteiirs  avec  icfquels  ce 
minéral  efl  uni,  &  dans  cet  état  qii'on  obtient  aifément 
par  la  liquation ,  l'antimoine  a  déjà  pris  ime  forme  plus 
régulière  ôl  des  car^6lères  plus  décidés  ;  il  efl  alors 
d'un  gris -bleuâtre  &.  brillant,  &  (on  tiffu  efl  compofe 
de  longues  aiguilles  fines  très-diiHncles ,  quoique  pofées 
les  unes  fur  les  autres  encore  affez  irrégulièrement, 

Lorfqu'on  a  obtenu  par  la  fonte  cet  antimoine  crud, 
ce  n'efl  encore,  pour  ainfi  dire,  qu'un  minerai  d'anti- 
moine qu'il  faut  enfuite  féparer  de  fon  foufre;  pour  cela 
on  le  réduit  en  poudre  qu'on  met  dans  un  vaiffeau  de 
terre  évafé  ;  on  le  chaullc  par  degrés  en  ie  remuant 
ATinénmx j  Tome  III.  Mm 


274        Histoire  Natu relle 

continuellement  ;  le  foufre  s'évapore  peu-à-peu  ,  &  l'on 
ne  cefle  le  feu  que  quand  il  ne  s'élève  plus  de  vapeurs 
fulfareufes.  Dans  cette  calcination,  comme  dans  toutes 
ies  autres ,  l'air  s'attache  à  la  furface  des  parties  du 
minéral  qui ,  par  celte  addition  de  l'air  ,  augmente  de 
volume  ^&  prend  la  forme  (\\mt  chaux  gri/è  ;  pour 
obtenir  l'antimoine  en  régule  ,  il  faut  débarraiïer  cette 
chaux  de  l'air  qu'elle  a  fàifi  en  lui  préfentant  quelque 
matière  inflammable  avec  laquelle  l'air  ayant  plus  d'affi- 
nité ,  laifTe  l'antimoine  dans  fon  premier  état  6l  même 
plus  pur  6l  plus  parfait  qu'il  ne  l'étoit  avant  la  calci- 
nation ;  mais  fi  l'on  continue  le  feu  fur  la  chaux  d'an- 
timoine ,  fans  y  mêler  des  fubflances  inflammables ,  on 
n'obtient ,  au  lieu  de  régule ,  qu'ime  matière  compade 
&  cafTante,  d'im  jaune-rougeatre  plus  ou  moins  foncé  , 
quelquefois  tranfparente  &  quelquefois  opaque  &  noire 
fi  la  calcination  n'a  été  faite  qu'à  demi  ;  les  Chimifles 
ont  donné  le  nom  de  foie  d mitïmo'mc  à  cette  matière 
opaque ,  &  celui  de  verre  d'antimoine  à  la  première  qui 
eft  tranfparente  :  on  fait  ordinairement  pafl^er  l'antimoine 
crud  par  l'un  de  ces  trois  états  de  chaux,  de  foie  ou  de 
verre  pour  avoir  fon  régule  ;  mais  on  peut  auffi  tirer  ce 
régule  immédiatement  de  l'antimoine  crud  (c) ;  en  le 


{ c)  V.  Ce  régule  fe  tire  également  de  l'antimoine  crud,  par  une 
7»  forte  de  précipitation  par  la  voie  fèche  ;  on  le  mêle  pour  ceU 
j>  avec  des  matières  qui  ont  plus  d'affinité  avec  le  foufre  ;  le  mélange 


DES     AI  I  N  É  R  A  U  .r.  2y<y 

réJuifant  en  poudre  ,  &  le  fàifaiit  fondre  en  vaifTcaux 
clos  avec  addition  de  quelques  matières ,  qui  ont  plus 
d'afHnité  avec  le  foufre  qu'avec  l'antimoine  ,  en  forte 
qu'après  cette  rédu6lion  ,  ce  n'cft  plus  de  l'antimoine 
crud  mêlé  de  foufre,  mais  de  l'antimoine  épuré,  per- 
fectionné par  les  mêmes  moyens  que  l'on  perfedionne 
Je  ter  pour  le  convertir  en  acier  (^0/  ce  régule  d'an- 
timoine reffemble  à  un  métal  par  fon  opacité,  ià  dureté, 
fa  denfité;  mais  il  n'a  ni  dudilité,  ni  ténacité,  ni  fixité, 
&  n'en  peut  même  acquérir  par  aucun  moyen  ;  il  eft 
cafTant,  prefque  friable,  &  compofé  de  facettes  d'un 
blanc  brillant ,  quoiqu'un  peu  brun.  Ce  régule  eft  un 
produit  de    notre   art,  qui   ne  doit   fe  trouver  dans  la 

^     —  -----  —  ■    -  ■      .    -  ■  —   .  -  ■■     —        —  -  ,-     ..    —      ■■         -■        -  ■■ 

étant  diflous  par  le  feu ,  h  fluidité  met  en  jeu  ces  affinités ,  &  le  ce 
Técfule  ,  plus  pefant  que  les  fcories  fulfureules ,  forme  au  fond  « 
du  creufet,  un  beau  culot  cri  liai  1  ifc  ,  que  les  Alchimiltes  ont  pris  ce 
pour  l'étoile  des  Mages  ».  E/ûnens  de  Chimie ,  par  Al.  de  Morveau , 
tome  I ,  page  2-;^.  —  Ce  nom  même  de  régule  ,  ou  petit  Roi ,  a 
été  donné  par  eux  à  ce  culot  métallique  de  l'antimoine,  qui  fembloit, 
au  gré  de  leur  efpérance,,  annoncer  l'arrivée  du  grand  Roi ,  c'eft- 
à-dire  de   l'or. 

fdj  Cette  comparaifoii  efl  d'autant  plus  ]i\(\e ,  que  quand  on 
convertit  par  la  cémentation  le  fer  en  acier ,  il  s'élève  à  la  (urface  du 
fer  un  grand  nombre  de  petites  bourfouflures  qui  ne  font  rempîies 
que  de  l'air  fixe  qu'il  contenoit,  &  dont  le  fcu  fixe  prend  la  place; 
car  la  pefanteur  qui  feroit  diminuée  par  cette  perte  ,  fi  rien  ne  la 
compenibit,  eft  au  contraire  augmentée,  ce  qui  ne  peut  provenir 
que  de  l'addition  du  feu  fixe  qui  s'incorpore  dans  la  lubiUnce  de 
ce  fer  converti  en  acier. 

Mm  ij 


zj(i  Histoire  Naturelle 

Nature  que  par  accident  (e) ,  ôl  dans  le  voifmage  des 
feux  fouterrains  ;  c'efl  un  état  forcé  différent  de  celui 
de  rantimoine  naturel ,  âc  on  peut  lui  rendre  ce  premier 
état  en  lui  rendant  le  foufre  dont  on  Ta  dépouillé;  car  il 
fuffii  de  fondre  ce  régule  avec  du  foufre  pour  en  faire 
un  antimoine  artificiel ,  que  les  Chimiiles  ont  appelé  drui- 
iiîo'me  rcjfufcitc^  parce  qu'il  reffemble  à  l'antimoine  crud, 
&  qu'il  efl  compofé  dans  fon  intérieur  ,  des  mêmes 
matières  également  difpofées  en  aiguilles. 

Le  régule  d'antimoine  difière  encore  des  métaux  par 
la  manière  dont  il  réfifle  aux  acides  ;  ils  le  calcinent 
plutôt  qu'ils  ne  le  diffolvent ,  &  ils  n'agiflent  fur  ce 
régule  que  par  des  affinités  combinées;  il  diffère  encore 
des  métaux  par  fa  grande  volatilité;  car  fi  on  l'expofc  au 
feu  libre,  il  fe  calcine  à  la  vérité  comme  les  métaux,  en 
fe  chargeant  d'air  fixe  ;  mais  il  perd  en  mcme  temps  une 
partie  de  fa  fubflance  qui  s'exhale  en  fumée ,  que  l'on 
peut  condeiifer  &  recueillir  en  aiguilles  brillantes ,  aux- 
quelles on  a  donné  le  nom  de  fleurs  argenihies  d'aniimohie. 
Néanmoins  ce  régule  paroît  participer  de  la  nature  des 
métaux  par  la  propriété  qu'il  a  de  pouvoir  s'allier  avec 
eux;  il  augmente  la  denfité  du  cuivre  &  du  plomb,  & 

diminue  celle  de  l'ctain  &  du   fer,   il  rend  l'étain  plus 

>■  — . ^— —_ — _____^__^____________ 

(e )    On  a   découvert  depuis   peu   en    Auvergne  du  foufre  doré 
•naùf  d'antimoine  ,  qui  eft  un  coinpofc  de  régule  &  de  foufre  ,  mais 
moins  intimement  uni ,  ce  qui  n'étoit  auparavant  connu  que  comme 
une  préparation  cliimique.  Èlémens  de  Chimie ,  par  M.  de  Morveau, 
tome  I ,  pages   122   &  12^. 


DES  Minéraux,  277 

caflant  &  plus  dur;  il  augmente  aufîi  la  fermeté  du 
plomb;  &  c'eft  de  cet  alliage  de  régule  d'antimoine  Si 
de  plomb,  dont  on  fe  fert  pour  faire  les  caraéleres  d'im- 
primerie ("/);  mêlé  avec  le  cuivre  &  Tétain,  il  en  rend 
le  fbn  plus  agréable  à  Torcille  6l  plus  argentin;  mêlé 
avec  le  zinc,  il  le  rend  fpécifiquement  plus  pefânt  ;  & 
de  toutes  les  matières  métalliques  le  b'iùnmh,  &  peut-être 
ie  mercure,  font  les  feuls  avec  lefquels  le  régule  d'anti- 
moine ne  peut  s'allier  ou  s'amalgamer, 

Confidérant  maintenant  ce  minéral  tel  qu'il  exifle 
dans  ie  fein  de  la  terre  ,  nous  obferverons  qu'il  fe  pré- 
fente dans  des  états  difFérens ,  relatifs  aux  différens  temps 
de  la  formation  de  fcs  mines  &  aux  ditférentes  matières 
dont  elles  font  mélangées.  La  première  &  la  plus  an- 
cienne formation  de  ce  minéral  date  du  même  temps 
que  celle  du  plomb  ou  de  l'étain  ,  c'efl-à-dire  ,  du 
temps  de  la  calcination  de  ces  métaux  par  le  feu  pri- 
mitif &  de  la  production  des  pyrites  après  la  chute  des 
eaux  ;  auffi  les  mines  primordiales  d'antimoine  font  en 
filons  Si  en  minerais  comme  celles  de  plomb  ;  mais  on 
en  trouve  qui  font  mélangées  de  matières  ferrugineufes 
&  qui  paroiffcnt  être  d'une  formation  poflérieure.  Le 
minerai  d'antimoine  ,  comme  les  galènes  du  plomb  ,  ell 
eompofé  de  lames  minces  plus  longues  ou  plus  courtes , 

('fj  Le  régule  d'aïui.'noine  entre  dans  la  compoùùon  des  caraâïèra 
d'Imprimerie,  à  la  dol'e  d'un  huitième,  pour  corriger  la  mollellè 
du  plomb.  Jdetn ,  page  2^ ^, 


278         Histoire  Naturelle 

plus  étroites  ou  pius  larges,  convergentes  ou  divergentes, 
mais  toutes  lifTes  &  brillantes  d'un  beau  blanc  d'argent; 
quelquefois  ces  premières  mines  d'antimoine  contiennent, 
comme  celles  du  plomb ,  une  quantité  confidérable 
d'argent ,  &.  de  la  décompofition  de  cette  mine  d'an- 
timoine ,  tenant  argent ,  ii  s'efl  forme  des  mines  par 
la  flillation  des  eaux,  qui  ne  font  dès-lors  que  de  troi- 
fième  formation  :  ces  mines  qu'on  appelle  mine^  en 
-plumes ,  à  caufe  de  leur  légèreté ,  pourroient  avoir  été 
fublimées  par  l'adion  de  quelque  feu  fouterrain  ;  elles 
font  compofées  de  petits  lilets  folides  &  élafliques , 
quoique  très-déliés  &  affez  courts  ,  dont  la  couleur  efl 
ordinairement  d'un  bleu -noirâtre,  &  fouvent  variés  de 
nuances  vives  ou  plutôt  de  reflets  de  couleurs  irifées, 
commue  cela  fe  voit  fur  toutes  les  fubflances  demi- 
tranfparentes  &.  très-minces  ;  telle  eft  cette  belle  mine 
d'antimoine  de  Feljobuîiia  ^  fi  recbercliée  par  les  ama- 
teurs pour  les  cabinets  d'Hiftoire  Naturelle.  11  y  a  au/fi 
de  ces  mines  dont  les  filets  font  tous  d'une  belle  couleur 
rouge ,  &  qui ,  félon  M.  Bergman  ,  contiennent  de 
i'arfenic  (g)  ;  toutes  ces  mines  fecondaires  d'antimoine, 
grifès,  rouges  ou  variées  font  de  dernière  formation,  & 
proviennent  de   la  décompofition  des  premières. 

Nous  avons  en  France  quelques  bonnes  mines  d'an- 
timoine ,  mais  nous  n'en  tirons  pas  tout  le  parti  qu'il 


(g)   Opufcules  chimiques,  tome  II,  dijfnlation  21» 


oc 


et 


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« 


DES     M  1  N  È  R  AV  X,  279 

feroit  aifé  d'en  tirer ,  puifque  nous  faifons  venir  Je 
l'étranger  la  plupart  des  préparations  utiles  de  ce  minéral. 
Al.  le  Monnicr  ,  premier  Médecin  ordinaire  du  Roi  , 
a  particulièrement  obfervé  les  mines  d'antimoine  de  la 
haute  Auvergne  :  t'  Celle  de  Mercœur  ,  à  deux  lieues 
de  Brioude,  étoit ,  dit -il,  en  pleine  exploitation  en 
1-739  ,  &  l'on  fentoit  de  loin,  i 'odeur  du  foufre  qui 
s'exhale  des  fours  dans  lefquels  on  fait  fondre  la  mine 
d'antimoine.  La  mine  s'annonce  par  des  veines  plombées  « 
qu'on  aperçoit  fur  des  hancs  de  rochers  qui  courent  « 
à  fleur  de  terre —  Cette  mine  de  Mercœur  fournit  une 
très -grande  quantité  d'antimoine;  mais  il  y  a  encore 
une  autre  mine  beaucoup  plus  riche  au  Puy  de  la  Page ,  « 
qui  n'eft  qu'à  une  lieue  de  Mercœur  ;  elle  efl  extrême-  oc 
ment  pure,  &  rend  fouvent  foixante-quinze  pour  cent;  « 
les  aiguilles  font  toutes  formées  dans  les  filons  de  cette  « 
mine,    &  l'antimoine  qu'on  en  tire  efl   auiïi  beau  que  « 

le  plus   bel  antimoine  de  Hongrie Un  des  plus  « 

petits  filons ,  mais  des  plus  riches  de  la  mine  de  Mer-  « 
cœur,  &.  qui  n'a  que  deux  pouces  de  large,  efl  uni  du  « 
côté  du  nord  à  un  rocher  franc ,  qui  efl  une  gangue 
très-dure  parfemée  de  veines  de  marcafhte  ;  &  du  côté 
du  midi ,  il  efl  contigu  à  une  pierre  affez  tendre  <5c 
graveleufe  ....  Après  cette  pierre  fuivent  différens  lits  « 
d'une  terre  fàvonneufe,  légère,  capable  de  s'effeuilleter  « 
a  l'air,  &  dont  la  couleur  efl  d'un  jaune-citron;  cette  « 
terre  mife  fur  une  pèle  à  feu ,  exhale  une  forte  odeur  « 


c< 


<c 


« 


28o        Histoire   Naturelle 

de  foufre,  mais  elle  ne  s'embrafe  pas  ».  M.  le  Monnier 
a  bien  voulu  nous  envoyer,  pour  ie  Cabinet  du  Roi, 
un  morceau  tire  de  ce  filon,  &  dans  lequel  on  peut 
voir  ces  (ïi^ïèr exiles  matières.  11  rapporte  dans  ce  même 
Mémoire,  les  procèdes  fort  (impies,  qu'on  met  en  pra- 
tique pour  fondre  la  mine  d'antimoine  en  grand  (hj , 
&  finit  par  obicrver  qu'indépendamment  de  ces  deux 
mines  de  la  page  &  de  Mercœur,  il  y  en  a  plufieurs 
auires  dans  cette  même  province,  qui  pour  la  plupart 
font  négligées  (i) .  M.""'  Hellot  &  Guettard  font  mention 
de  celles  de  Langeac  ,   de  Cha/Tignol ,    de  Pradot,  de 


/h)  La  manière  de  fondre  la  mine  d'antimoine  eft  fort  f/mple  ; 
on  met  la  mine  dans  des  pots  de  terre  dont  le  premier  n'ed  point 
percé  (Se  dont  les  autres  font  troués  dans  le  fond  ;  on  fuperpofe 
ceux-ci  fur  le  premier,  «Se  oji  les  remplit  de  mine  d'antimoine  caflee 
par  petits  morceaux  ;  ces  pots  font  arrangés  dans  un  four  que  l'on 
chauffe  avec  des  fagots;  on  fait  un  feu  modéré  pendant  les  premières 
heures,  &  on.  l'augmente  jufcju'à  le  faire  de  la  dernière  violence; 
pendant  cette  opération,  qui  dure  environ  vingt-quatre  heures,  il  fort 
du  fourneau  une  fumée  très-épaifle  qui  répand  fort  loin  aux  environs, 
une  odeur  de  foufre  qui  cepejidant  ïieiï  pas  nuifibJe  ,  car  aucun 
des  habitans  ne  fe  plaint  d'en  avoir  été  incommodé  ;  après  l'opé- 
ration ,  on  trouve  de  l'antimoine  fondu  dans  le  pot  inférieur  ,  &  les 
fcories  reftent  au-delTus.  Quand  la  mine  efl  bien  pure,  comme  celle 
de  la  Fage ,  le  pot  inférieur  doit  fe  trouver  plein  d'antimoine  ;  maiî 
celle  de  Mercœur  n'en  produit  ordinairement  que  les  deux  tiers. 
Ob fer  valions  d' Hijlo'ire  Naturelle ,  par  M.  le  Monnier;  Paris ,  1 7^  g  , 
page  202  jufqu  'a   2  0  j . 

(i)  Idem  ,  page  20^. 

Monte! , 


D  E  s    M  I  N  É  R  AU  X.  281 

Moniel,  de  Brioiulc  (k)^  à.  de  quelques  autres  en- 
droits f/J.  Il  y  a  au/n  des  mines  d'antimoine  en  Lorraine, 
en  Alfàcc  f^^jj,  en  Poitou,  en  Bretagne,  en  Angou- 
mois  f'îij  &.  en  Languedoc  foj;  enfin,  M.  de  Genfanne 
a  obfcrvc  dans  le  Vivarais,  un  gros  lilon  de  mine 
d'antimoine  mclc  dans  une  veine  de  charbon  déterre  fp); 

f/;J    Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences,  ûnnée    lyjP' 

(l)  En  Auvcrgae ,  dit  M.  Hellot  ,  il  y  a  une  bonne  mine 
d'anilinoiiie  à  Pégu....  une  autre  auprès  de  Langeac  &.  de  Brioude.... 
une    autre,    dont  le    minéral    efl    fulfureux,    au   village   de  Prados , 

paroifle  (}i  Aly une  autre   au    village    de    Afonte/ ,- vnùme  paroifle 

d'Aly....  une  autre  dans  la  paroiile  de  Mercœur  ,  qui  donnoit  de 
l'antimoine  pareil  à  celui  de  Hongrie,  &:  dans  la  paroifle  de  Lubillac..., 
ces  deux  liions  font  épuilés  ;  mais  on  tire  encore  de  l'antimoine  dans 
la  pa^oidë  d'Aly,  à  deux  lieues  de  Mercœur.  Traité  de  la  fonte  des 
inities  de  Schlutter ,   tome   I ,  page    62. 

Iw)  En  Lorraine,  au  Vdl-dc-  Li'cvre ,  il  y  a  une  mine  d'anti- 
moine. Idem,  page  p Auprès   de   Giromagny  en  Alfjce  ,  il   y  en 

a   \\v\Q.   autre  qui   efl   mêlce  de  plomb.   Idem,  page   11. 

(v)  On  trouve  en  Angoumois  une  mine  d'antimoine  tenant  argent 
ù    A'ïûucl  près    Aiontbrun.  Idçni ,  page   y  () . 

(0)  Dans  le  comte  d'Aiais  en  Languedoc,  il  fe  trouve  à  Alalhois 

luie  mine  d'antimoine.  Idem  ,  page  2  () En  de(cend?.nt  des  Portes 

vers  Cerjfoiix ,  au  diocèfe  d'Uzès ,  on  exploite  une  mine  d'anti- 
moine. Il  y  a  trois  filons  de  ce  minéral,  à  la  vérité  peu  riches, 
mais  le  minéral  cil:  très-bon.  On  en  a  fondu  en  notre  préfence , 
&  l'antimoine  qui  en  eft  proveau  nous  a  paru  aulll  beau  que  celui 
de  Hongrie,  Hijloire  Naturelle  du  Languedçc ,  par  M.  de  Genfanne , 
tome  I ,  page    i  y^, 

(p)   En  monlant  .dn  Foufn  V'crs  les  Fonds  ,  on  trouve   dans  un 

Mincraux ,  Tome  III,  Nn 


282  Histoire   Nature lle 

ce  qui  prouve  aufTi-bien  que  la  plupart  des  exemples 
préccclens,  que  ce  minéral  fe  trouve  prcfque  toujours 
dans  les  couches  de  la  terre  remuée  &l  ilè}^oiéQ  par 
les  eaux. 

L'antimoine  ne  paroît  pas  afteéter  des  lieux  particu- 
liers comme  l'étain  &.  le  mercure;  il  s'en  trouve  dans 
toutes  les  parties  du  monde  ;  en  Europe ,  celui  de 
Hongrie   eft  le  plus  fameux  &  le  plus  recherché. 

On  en  trouve  aufîi  dans  plufieurs  endroits  de  l'Alle- 
magne ;  &  l'on  prétend  avoir  vu  de  l'antimoine  natif  en 
Italie,  dans  le  canton  de  Sainte-Flore  proche  Mana,  ce 
qui  ne  peut  provenir  que  de  l'effet  de  quelques  feux  fou- 
terrains  qui  auroient  liquélié  la  mine  de  ce  demi-métal. 

ravin   limitrophe   de   la   pareille   Saint-Julien,   un  gros  filoji   d'anti- 
moine  mêlé  de  charbon   de   terre.  Ces  deux  folliles   y  font  intime- 
ment mêle's;  phénomène  bien  fingulier  dans  la  minéralogie;  cependant 
tous  les  indices  extérieurs  annoncent  du  charbon  de  terre ,  &  il  eft 
à   préfumer   que  dans   la  profondeur    l'antimoine  difparoîtra ,  &   que 
le  charbon  de  terre  deviendra  pur.  Il  peut  même  arriver  que   dans 
la   profondeur   il    y   aura  deux   veines   contiguës ,  l'une  d'antimoine 
&  l'autre  de   charbon  ;   on    ne  peut  former  fur  tout  cela    que  des 
conjedures....  Il   y  a  des  morceaux  où  l'antimoine  prédomine,  dans 
d'autres ,  c'efl:   le  charbon  qui   efl  plus  abondant ,  &   en  calTant  ce 
dernier,  on  le  trouve  tout  pénétré  de  petites  aiguilles  d'antimoine.... 
Cette    veine  d'antimoine  efl  un  filon  très-bien  réglé  ,  &  qui  a  fon 
alignement  bien  fuivi;  il  a  une  pente  telle  que  celle  que  les  charbons 
de  terre  afFe<flent  ordinairement  vers  leurs  têtes  ;   il  fe  trouve  entre 
des  rochers  fembLbles   &   de  la  même  nature  que  ceux  qui  accom- 
pagnent   pour   l'ordinaire    ce    dernier    fofTîle.    Hijfoire     Naturelle   du 
Languedoc,  par  Ai.  de  Genfanne ,  tome  III,  pages  202   &  20^. 


DES    Minéraux,  283 

En  Afie  ,  les  Voyageurs  font  mention  de  l'antimoine 
de  Perfe  (q)  &  de  celui  de  Siam  fr) .  En  Afrique,  il 
s'en  trouve,  au  rapport  de  Léon-l' Africain,  au  pied  du 
Mont- Atlas  (f).  Enfin  AJphonfë  Barba  dit ,  qu'au  Pérou 
les  mines  d'antimoine  font  en  grand  nombre  [t) ,  & 
quelques  Voyageurs  en  ont  remarque  à  Saint  Domingue 
&  en  Virginie  (uj. 

On  fait  grand  ufage  en  Médecine  des  préparations 
de  l'antimoine,  quoiqu'on  l'ait  d'abord  regardé  comme 
poifbn  plutôt  que  comme  remède.  Ce  minéral  pris 
dans  fa  mine  &  tel  que  la  Nature  le  produit ,  n'a  que  peu 

(q)  En  Perfe  ,  il  y  a  vers  la  Carainanie ,  une  mine  d'antimoine 
fingulière  ,  en  ce  qu'après  l'avoir  fait  fondre  elle  donne  du  plomb 
fin.  Voyage  de  Chardin ,  ù'c.  Amjlerdam ,  i  yi  i  ,  tome  II ,  page  2^, 

(r)  On  a  découvert  à  Siam  une  mine  d'antimoine.  Hijloire 
générale  des   J^oyages ,   tome  IX,  page  ^oj, 

(f)  L'antimoine  fe  trouve  dans  des  mines  de  plomb  fur  les  parties 
inférieures  du  Mont-Atlas,  aux  confins  du  royaume  de  Fez.  Joann'is 
Leonis   Àfrïcanî ,  tom.  II ,  pag.    yyi' 

(t)  L'antimoine  ou  jlibium  efl:  un  minéral  fort  refTemblant  au 
fancha  ou  plomb  minéral.  Il  efl:  poreux  ,  luifant  &  friable.  II  y  en 
a  de  jaune -rougeâtre  ,  &  d'autre  tirant  fur  le  blanc  ,  d'un  grain  auffi 
menu  que  l'acier....  On  trouve  ordinairement  dans  tout  le  Pérou 
l'antimoine  mêlé  avec  les  minerais  d'argent  ,  particulièrement  avec 
ceux  appelés  négrllles.  On  le  trouve  aufîi  feul  en  beaucoup  d'endroits; 
il  fait  beaucoup  de  tort  au  minerai  ainfi  que  le  bitume  &  le  foufre. 
Barba ,  Alétallurgie  ,  tome  I ,  pages  ^  6  &  foiv. 

(u)  Hifloire  générale  des  Voyages ,  ?o//?f  XIX ,  page  ^oS. 

Nn  ij 


284       Histoire    Natu relle 

ou  point  de  propriétés  aélives;  elles  ne  font  pas  même 
développées  après  fa  fonte  en  antimoine  crud ,  parce 
au'il  e/t  encore  cnveioppé  de  ion  /oufre  ;  mais  dès 
qu'il  en  efl  dégagé  par  la  calcination  ou  la  vitrilication , 
les  qualités  fe  manifeflent  ;  la  chaux,  le  ioie  &  le  verre 
d'antimoine  font  tous  de  puilfans  cmétiques  ;  la  chaux 
eft  même  un  violent  purgatif,  &  le  régule  fe  laiffe 
attaquer  par  tous  les  fels  &  par  les  huiles;  l'alkali  dilfout 
l'antimoine  crud  ,  tant  par  la  voie  feche  que  par  la  voie 
humide  ,  &  le  kermès  minéral  /è  tire  de  cette  diffo- 
lution  :  toutes  les  fubftances  falines  ou  huileufes  dé- 
veloppent dans  l'antimoine  les  vertus  émétiques ,  ce 
qui  fèmble  indiquer  que  ce  régule  n'eft  pas  un  demi- 
métal  pur  ,  6l  qu'il  ell  combiné  avec  une  matière 
faline  qui  lui  donne  cette  propriété  aélive  ,  d'où  l'on 
peut  auffi  inférer  que  le  foie  de  foufre  a  fouvent  eu 
part  à  fa  minéralifation. 


DES  Minéraux.  285 


DU  BISMUTH  ou  ETAIN  DE  GLACE. 

X^ANS  le  rcgne  minerai,  rien  ne  fe  reffembie  plus 
que  le  régule  d'antimoine  &  le  biiinuth  par  la  flru(5iure 
de  leur  (iibflance  ;  ils  font  intérieurement  compofés  de 
lames  minces  d'une  texture  &  d'une  ligure  femblablcs  » 
&  appliquées  de  même  les  unes  contre  les  autres  ;  néan- 
moins le  régule  d'antimoine  n'efl  qu'un  produit  de  l'art, 
&  le  bifmuth  eft  une  produélion  de  la  Nature  ;  tous 
deux  ,  lorfqu'on  les  fond  avec  le  foufre  ,  perdent  leur 
flniélurc  en  lames  minces  &  prennent  la  forme  d'aiguilles 
appliquées  les  unes  fur  les  autres;  mais  il  cft  vrai  que 
le  cinabre  du  mercure  &  la  plupart  des  autres  fubilances 
dans  Icfquelles  le  fôufre  fc  combine ,  prennent  éga- 
lement cette  forme  aiguillée  ,  parce  que  c'eft  la  forme 
propre  du  foufre  qui  fe  criftallife  toujours  en  aiguilles. 

Le  bifmuth  fe  trouve  prefque  toujours  pur  dans  le 
fein  de  la  terre  ,  il  n'efl  pas  d'un  blanc  auffi  éclatant 
que  le  blanc  du  régule  d'antimoine  ;  il  efl  un  peu  j:.u- 
nâtre ,  &  il  prend  une  teinte  rougeâtre  &  des  nuances 
jrifées  par   l'impreffion   de  l'air. 

Ce  demi-métal  ell  plus  pefànt  que  le  cuivre  ,  le  fer 
&:  l'étain  (aj  ,  Sl  ,  malgré  fa  grande  denfité  ,  le  bifmuth 

fa/    La   pefanreur    Ipecifique    du   bifmuth    natif  efl    de    C)C2C2  ; 
celle   du  régule  de    bifiiuuh    de  ^-8227,    tandis    que    Ja    pefameuif 


2^6         Histoire  Naturelle 

eft  fans  ductilité  ;  il  a  même  moins  de  ténacité  que  le 
plomb  ,  ou  plutôt  il  n'en  a  point  du  tout ,  car  \\  e/l 
très-calTant  &  prefque  auiïi  friable  qu'une  matière  qui 
ne  feroit   pas   métallique. 

De  tous  les  métaux  &  demi-métaux,  le  bifmudi  eft 
le  plus  fufible;  il  lui  faut  moins  de  chaleur  qu'à  l'étain, 
&  il  communique  de  la  fulibilité  à  tous  les  métaux  avec 
Icfquels  on  veut  l'unir  par  la  fufion  ;  l'alliage  Je  plus 
fudble  que  l'on  connoiiïe,  efl,  fuivant  Ai.  Darcet,  de  huit 
parties  de  bi/inuth,  cinq  de  plomb  &  trois  d'étain  (b) ,  & 
l'on  a  obfervé  que  ce  mélange  fe  fondoit  dans  l'eau  bouil- 
lante, &  même  à  quelques  degrés  de  chaleur  au-de/Tous. 

Expofé  à  Tadion  du  feu ,  le  bifmuth  fe  volatilife  en 
partie  ,  &  donne  des  fleurs  comme  le  zinc ,  &  la  por- 
tion qui  ne  fe  volatilife  pas  fe  calcine  à  peu-près  comme 
le  plomb  ;  cette  chaux  de  bifmuth  prife  intérieurement , 
produit  les  mêmes  mauvais  effets  que  celle  du  plomb , 
elle  fe  réduit  au/fi  de  même  en  litharge  &  en  verre ,  enfin 
on  peut  fe  fervir  de  ce  demi-métal  comme  du  plomb, 
pour  purifier  l'or  &  l'argent;  \\\\\  de  nos  plus  habiles 
Chimifles  affure  même:  «  Qu'il  efl  préférable  au  plomb, 

fpécifique  du  cuivre  pafTé  à  la  filière,  c'eft-à-dire,  du  cuivre  le  plus 
comprimé,   n'efl:  que  de  88785.  Voye-^   la  Table  de  M.   Brijjon. 

(b )  La  fufibilite  de  cet  alliage  efl;  telle  que  le  compofé  qui  en 
réfulte  fe  tond  &  devient  coulant  comme  du  mercure,  non-feulement 
dans  l'eau  bouillante  ,  mais  même  au  bain-marie.  Diél'tonnaire  de 
Chimie ,  par  M.  Macquer ,  article  Alliage. 


DES   Minéraux.  287 

parce  qu'il  atténue  mieux  les  mctaux  imparfaits ,  &  « 
accélère  la  vitrilication  des  terres  &  des  chaux  »  (cj. 
Cependant  il  rapporte  dans  le  même  article  une  opinion 
contraire  :  «  Le  bifmuth ,  dit-il ,  peut  fervir  comme  le 
plomb,  à  la  purilication  de  l'or  &  de  l'argent,  parce 
l'opération  de  la  coupelle,  quoique  îiwins  bien  que  le  *< 
plomb,  fuivant  M.  Pemer  ».  Je  ne  Tais  fi  cette  dernière 
afTertion  elt  fondée  ;  l'analogie  femble  nous  indiquer 
que  le  bifimuh  doit  purifier  l'or  &  l'argent  mieux,  (Se 
non  pas  moins  bim  que  le  plomb  ;  car  le  bifmuth  atténue 
plus  que  le  plomb  les  autres  métaux ,  non  -  feulement 
dans  la  purification  de  l'or  &.  de  l'argent  par  la  fonte, 
mais  même  dans  les  amalgames  avec  le  mercure ,  puiP 
qu'il  divife  &  atténue  l'étain,  &  fur-tout  le  plomb,  au 
point  de  le  rendre,  comme  lui-même,  auHi  Huide  que 
le  mercure ,  en  forte  qu'ils  paffent  enfemble  en  entier, 
à  travers  la  toile  la  plus  ferrée  ou  la  peau  de  chamois, 
&.  que  le  mercure  ainfi  amalgamé ,  a  be/bin  d'être 
converti  en  cinabre,  &  enfui  te  revivifié  pour  reprendre 
fà  première  pureté.  Le  bifmutli  avec  le  mercure  forment 
donc  enfemble  un  amalgame  coulant,  &  c'eft  ainfi  que 
les  Droguifles  de  mauvaife  foi,  falfifient  le  mercure  qui 
ne  paroît  pas  moins  coulant,  quoique  mêlé  d'une  affez 
grande  quantité  de  bifmiuh. 

L'impreffion   de  l'air  fe  marque  affez  prompiemem 

(ç)  Didionnaire  de  Chimie  ,  par  M.  Macquer ,  article  Bifmuth. 


288  Histoire   Nature lle 

fur  le  bifinuth  par  les  couleurs  irifces  qu'elle  produit  à 
fà  (urface  ;  &  bientôt  fuccè dent  à  ces  couleurs  de  petites 
eiiiorefcences  qui  annoncent  la  décompofiùon  de  fa 
fubflance  ;  ces  eltiorefceîîces  (ont  une  forte  de  rouille 
ou  de  céru/ê  aiïez  femblable  à  celle  du  plomb  ;  cette 
ccrufe  ell  feulement  moins  blanche  &l  prefque  toujours 
jaunâtre  ;  c'efl  par  ces  efllorefcenccs  en  rouille  ou 
ccrufe  que  s'aîriionceut  les  minière»  de  bifmuth  ;  fair 
a  produit  cette  décompofition  à  la  fuperlicie  du  terrein 
qui  les  recèle  ,  mais  dans  i'mtérieur  le  bifmuth  n'a 
communément  fubi  que  peu  ou  ]K)int  d'altération  ;  on 
le  trouve  juir  ou  feulement  recouvert  de  cette  céru/è , 
&  ce  n'ell  que  dans  cet  état  de  rouille  qu'il  efl  miné- 
ralifc  ,  &  néanmoins  dans  fa  mine  ,  comme  dans  fa 
rouille  ,  il  n'efl  prefque  jamais  altéré  en  entier  fJ) ,  car 
on  y  voit  toujours  des  points  &  des  parties  très-fenfibles 
de  bifmuth  pur  &  tel  que  la  ?^Jamrc  le  produit. 

Or  cette  fubflance,  la  plus  fulible  de  toutes  les  matières 
métalliques  <Sc  en  même  temps  {\  volatile,  &  qui  /è  trouve 
dans  fon  état  de  nature  en  fijbfîance  pure  ,  n'a  pu  être 
produite  comme  le  mercure  que  très-long-temps  après 
ies  métaux  <Sc  autres  minéraux  plus  fixes  «Si.  bien  plus 
difficiles  à   fondre  ;  la  formation  à\\  bifmuth   cfl  donc 


(d)  Quoiqu'on  n'ait  pas  trouvé  en  Allemagne  de  billnuih  uni  au 
foutre,  il  efl  cependant  certain  ,  dit  M.  Bergman  ,  cju'il  y  en  a  dans 
quelques  montagnes  de  Sucdc  <!^  particulièrement  à  Hiddarliywari 
çn   Mv^eriîmaniQ, 

ù  peu-prèi 


DES    Minéraux.  289 

à-peu  près  contemporaine  à  celle  du  zinc ,  de  l'antimoine 
&  du  mercure  ;  les  matières  métalliques  plus  ou  moins 
volatiles  les  unes  que  les  autres,  &  toutes  reléguées  dans 
r atmosphère  par  la  violence  de  ia  chaleur,  n'ont  pu 
tomber  que  fucce/fivement  Sl  peu  de  temps  avant  la 
chute  des  eaux.  Le  bifmuth  en  particulier  n'eft  tombé 
que  long  -  temps  après  les  autres  &  peu  de  temps  avant 
le  mercure ,  aufTi  tous  deux  ne  fè  trouvent  pas  dans  les 
montagnes  vitreufès  ni  dans  les  matières  produites  par 
le  feu  primitif,  mais  feulement  dans  les  couches  de  la 
terre  formées  par  le  dépôt  des  eaux. 

Si  l'on  tient  le  bifinuth  en  fufion  à  i'air  libre  & 
qu'on  le  lailfe  refroidir  très -lentement  ,  il  offre  à  fa 
(iirface  de  beaux  criftaux  cubiques  &  qui  pénètrent  à 
l'intérieur;  fi ,  au  lieu  de  le  laiffer  refroidir  en  repos, 
on  le  remue  en  foutenant  ie  feu ,  il  fè  convertit  bientôt 
en  une  chaux  grife  qui  devient  enfuite  jaune  &  même 
un  peu  rouge  par  la  continuité  d'un  feu  modéré  ,  & 
en  augmentant  le  feu  au  point  de  faire  fondre  cette 
chaux ,  elle  fe  convertit  en  un  vert  jaune  -  rougeàtre 
qui  devient  brun  lorfqu'on  le  fond  avec  du  verre  blanc , 
Sl  ce  verre  de  bifmuth ,  fans  être  auffi  aélif ,  lorfqu'il 
efl  fondu,  que  le  verre  de  plomb,  ne  lailfe  pas  d'attaquer 
les  creufèts. 

Ce  demi -métal  s'allie  avec  tous  les  métaux;  mais 
il  ne  s'unit  que  très-difficilement  par  la  fufion  avec  les 
autres   demi-métaux  &   terres  métalliques  ;   l'antimoine 
Al'méraiLX  ,  Tome  IIL  O  o 


290         Histoire   Natu re lle 

<&.  le  zinc ,  ie  cobalt  &  rarfenic  fe  refurent  tous  à  cette 
union  :  il  a  en  particulier  fi  peu  d'affinité  avec  le  zinc 
que  quand  on  les  fond  enfemhle  ils  ne  peuvent  fè 
mêler;  le  bifinuth ,  comme  plus  pefant,  defcend  au  fond 
du  creufet,  &.  le  zinc  refle  au-defTus  &  le  recouvre. 
Si  on  mêle  le  bifmuth  en  égale  quantité  avec  Tor  fondu, 
il  le  rend  très-aigre  &  lui  donne  fa  couleur  blanche. 
Il  ne  rend  pas  l'argent  fi  caiïant  que  Tor  ,  quoiqu'il 
lui  donne  auiïï  de  l'aigreur  fans  changer  fa  couleur  ; 
il  diminue  le  rouge  du  cuivre  ;  il  perd  lui-même  fà 
couleur  blanche  avec  le  plomb,  6c  ils  forment  enfèmble 
un  alliage  qui  eft  d'un  gris-fombre  ;  le  bifmuth  mêlé 
en  petite  quantité  avec  i'étain  lui  donne  plus  de  brillant 
&  de  dureté  ;  enfin  il  peut  s'imir  au  fer  par  un  feu 
violent. 

Le  foufre  s'imit  auiïî  avec  le  bifmuth  par  la  fufjon , 
&  leur  compofé  fe  préfente  comme  le  cinabre  &  l'an- 
timoine crud  en  aiguilles  criflallifées. 

L'acide  vitriolique  ne  difTout  le  bifmuth  qu'à  l'aide 
d'une  forte  chaleur  ,  <Sc  c'eft  par  cette  réfiflance  à 
l'aétion  des  acides  qu'il  fe  conferve  dans  le  fein  de 
la  terre  fans  altération  ,  car  l'acide  marin  ne  l'attaque 
pas  plus  que  le  vitriolique  ;  il  faut  qu'il  /bit  fumant , 
&  encore  il  ne  l'entame  que  foiblement  &  lentement  ; 
l'acide  nitreux  feul  peut  le  diffoudre  à  froid ,  cette 
diffolution  qui  fe  fait  avec  chaleur  &  efîèrvefcence  eft 
traniparente   &  blanche   quand  le  bifmuth  eft  pur;  mais 


DES    Minéraux,  291 

elle  fc  colore  Je  vert  s'il  efl  mclé  de  nickel ,  <Sc  elle 
devient  rouge  de  rofe  &  cramoifie  s'il  eft  mélangé  de 
cobalt  ;  toutes  ces  diffolutions  donnent  un  fèl  en  petits 
criflaux  au  moment  qu'on  les  laifTe  refroidir. 

C'efl  en  ])récipitant  le  bifinuth  de  fcs  diffolutions, 
qu'on  l'obtient  en  poudre  blanche,  douce  &  luiiànte  , 
&  c'efl  avec  cette  poudre  qu'on  fait  le  fard  qui  s'applique 
fur  la  peau.  Il  faut  laver  plufieurs  lois  cette  poudre  pour 
qu'il  n'y  refle  point  d'acide,  &  la  mettre  enfuite  dans 
un  flacon  bien  bouché  ;  car  l'air  la  noircit  en  affez  peu 
de  temps,  &  les  vapeurs  du  charbon  ou  les  mauvaifès 
odeurs  des  égouts,  des  latrines,  &c.  changent  prefque 
fubitement  ce  beau  blanc  de  perle  en  gris-obfcur,  en  forte 
qu'il  efl  fbuvent  arrive  aux  femmes  qui  fc  fervent  de 
ce  fard  de  devenir  tout -à- coup  aufîi  noires  qu'elles 
vouloient  paroître  blanches. 

Les  acides  végétaux  du  vinaigre  ou  du  tartre ,  non 
plus  que  les  acerbes ,  tels  que  la  noix  de  galle  ,  ne 
diifolvent  pas  le  bifmuth,  même  avec  le  fecours  de  la 
chaleur ,  à  moins  qu'elle  ne  foit  pouffée  jufqu'à  produire 
l'ébullition  ;  les  alkalis  ne  l'attaquent  auffi  que  quand  on 
les  fait  bouillir ,  en  forte  que  dans  le  fein  de  la  terre  ce 
demi-métal  paroît  être  à  l'abri  de  toute  injure  &.  par 
conféquent  de  toute  minéralifàtion  ,  à  moins  qu'il  ne 
rencontre  de  l'acide  nitreux  qui  feui  a  la  puifîance  de 
l'entamer  ;  &  comme  les  fcls  nitreux  ne  fe  trouvent 
que  très -rarement  dans  les  mine-s ,  il  n'efl  pas  étonnant 

Oo  ij 


292         Histoire    N atu relle 

que  \t  bifmuth  qui  ne  peut  être  attaqué  que  par  cet 
acide  du  nitre  ou  par  l'adion  de  l'air  ne  Te  trouve 
que  fi  rarement  minéralifé  dans  le  fein  de  la  terre. 

Je  ne  fuis  point  informé  des  lieux  où  ce  demi-métal 
peut  fe  trouver  en  France  ;  tous  les  morceaux  que  j'ai 
eu  occadon  de  voir  venoient  de  Saxe ,  de  BoJième 
&  de  Suède  ;  il  s'en  trouve  auiïi  à  Saint-Domingue  (e) , 
&  vraifemblablement  dans  plufieurs  autres  parties  du 
monde  :  mais  peu  de  Voyageurs  ont  fait  mention  de  ce 
demi-métal ,  parce  qu'il  n'ed  pas  d'un  ufàge  néceffaire 
&  commun;  cependant  nous  l'employons  non-feulement 
pour  faire  du  blanc  de  fard  ,  mais  auffi  pour  rendre 
l'étain  plus  dur  &  plus  brillant;  on  s'en  fert  encore  pour 
polir  le  verre  (f)  &  même  pour  l'étamer  (g) ,  Si  c'efl 

{ej   Hiftoire  gcncrale  des   voyages,   tome  XII,  page  21  S, 

(f)  Tranfadions  philofophiques ,  iV."  S9^  >  I^ovembre  IJ26. 

(g)  Je  me  fuis  afTuré  ,  m'écrit  M.  de  Morveau ,  que  le  bifinuth 
fert  encore  à  iVtamage  des  petits  verres  non  polis  qui  viennent 
d'Allemagne,  en  forme  de  petits  miroirs  de  poche,  ou  du  moins 
qu'il  entre  pour  beaucoup  dans  la  compofition  de  cet  e'tamage  dont 
on  fait  un  fecret ,  car  l'ayant  recueilli  fur  plufieurs  de  ces  miroirs , 
&  pouffé  à  la  fufion ,  j'ai  obtenu  un  grain  métallique  qui  a  donné 
la  chaux  jaune  du  bifniuih  ;  ce  procédé  feroit  fort  utile  pour  étamer 
les  verres  courbes ,  peut-être  même  pour  réparer  les  taches  des 
glaces  que  l'on  nomme  rouUlées.  A  la  feule  infpedion  des  miroirs 
d'Allemagne,  on  juge  aiftment  que  cette  compofition  s'applique 
d'une  manière  bien  différente  de  l'ctamage  ordinaire ,  car  iJ  e/l 
bien  plus  épais  &  d'une  épaifleur  très-inégale  ;  on  y  remarque  des 
gouttes,  comme  fi  on  eût  pafTc  un  fer   à  fouder    pour  étendre  & 


DES   Minéraux.  293 

de  cet  ufage    qu'il    a  reçu   le  nom  A'étnm   de  glace. 

Les  expériences  que  l'on  a  faites  fur  fes  propriétés 
relatives  à  la  Médecine ,  n'ont  découvert  que  des  qua- 
lités nuifibles ,  &  fà  chaux  pri/e  intérieurement  produit 
des  effets  femblables  à  ceux  des  chaux  de  plomb,  & 
auffi  dangereux  ;  on  en  abufè  de  même  pour  adoucir 
Jes   vins  trop  acides  &  défagréables  au  goût. 

Quelques  Minéralogifles  ont  écrit  que  la  mine  de 
bifmuth  pouvoit  fervir  comme  celle  du  cobalt,  à  faire 
Je  verre  bleu  d'azur:  <«  Elle  laiife,  difent-iis  (h) ,  fuinter 


faire  couler  le  bifiiiuth  à  !a  fuiface  du  verre  ;  ce  qu'il  y  a  de 
certain  ,  c'efl:  que  l'adhérence  eft  bien  plus  forte  que  celle  de  nos 
feuilles  d'étain. 

Il  me  femble  que  le  bifmuth  entre  auiïl  dans  l'amalgame  dont 
on  fe  fert  pour  étamer  la  furface  intérieure  des  globes.  Note  commu- 
niquée par  Ad.  de   Aiorveau. 

(h)  La  mine  de  bifmuth  fert  aufîi  à  faire  le  bleu  d'azur  ;  à  feu 
ouvert  &  doux ,  elle  laifie  aifémeni  fuinter  une  fubftance  femi- 
métdllique  que  l'on  nomme  bijmuth  ou  étain  de  glace,  &  elle  laifie 
wïXQ  pierre    ou  une   terre  grile  &  fixe. 

Il  faut  féparer ,  autant  qu'il  ert  pofllble  ,  cette  mine,  fi  elle  eft 
pure  ,  du  cobalt  véritable ,  pour  en  rafl^mbler  le  bifmuth  ;  mais 
le  mélange  de  ces  deux  matières  minérales  eft  ordinairement  fî 
intime  dans  la  mine ,  que  cette  féparation  eft  prefque  impofijble  ; 
c'ell  pourquoi  l'on  trouve  fouvent ,  dans  les  pots  à  vitrifier,  une 
fubltance  réguiine  qui  s'eft  j>récipitée  ordinairement  d'une  couleur 
blanchâtre  tirant  fur  le  rouge.  Cette  fubftance  n'eft  prefque  jamais 
\\n  véritable  bifmuth  ,  &  tel  qu'on  le  retire  de  fa  mine  par  la  fonte; 
mais  elle  eft  toujours  mêlte  avec  une  matière  étrangère  qui   eft  la 


294         Histoire    Natu relle 

»  aifcment  une  fubflaiice  femi-mctalliqae,  que  l'on  nomme 
»  bipnuth  ou  cuiin  de  glace,  6c  enfuite  elle  laiife  une  terre 
o-rife  &  fixe,  qui  par  là  vitrification  donne  le  bleu  d'azur  ». 
Mais  cela  ne  prouve  pas  que  le  bifmuth  fourniffe  ce 
bleu;  car  dans  ià  mine  il  efl  très-/buvenr  mclé  de  cobalt, 
&  ce  bleu  provient  fans  doute  de  cette  dernière  matière: 
la  terre  gr'ife  à'  fixe  n'efî  pas  une  terre  de  bi/inuth;  mais 
la  terre  du  cobalt  qui  étoit  mêlé  dans  cette  mine,  & 
auquel  même  le  bifinuth  n'ctoit  pas  intimement  lié , 
parce  qu'il  s*en  fépare  à  la  première  fonte  &  à  un 
feu  très-modéré;  &.  nous  verrons  qu'il  n'y  a  aucune 
affinité  entre  le  cobalt  &  le  bifinuth,  car  quoiqu'ils  fe 
trouvent  très-fouvent  mêlés  enfemble  dans  leurs  mines, 
chacun  y  conferve  fa  nature,  &  au  lieu  d'être  intimement 
uni,  le  bifinuth  n'efl  qu'interpofc  dans  les  mines  de 
cobalt,  comme  dans  prefque  toutes  les  autres  où  il  fe 
trouve,  parce  qu'il  conferve  toujours  fon  état  de  pureté 
native. 

terre  fixe  du  cobalt.  Ainfi  on  la  pulvérife  de  nouveau  pour  fa  joindre 
à  d'autres  mélanges  de  mine ,  de  fable  &  de  fel  aikali ,  qu'on  met 
dans  les  pots  pour  les  vitrifier.  Traité  de  la  fonte  des  mines  de 
Schlutter ,  tome  I ,  page  248. 


DES    Minéraux.  295 


L 


DU    Z  I  N  C  (a). 


E  Zinc  ne  fe  trouve  pas  comme  le  bifmuth,  dans 
un  état  natif  de  mJnéral  pur,  ni  même  comme  l'ami- 
moine,  dans  une  feule  efpcce  de  mine  ;  car  on  le  tire 
également  de  la  calamine  ou  pierre  calaminaire  &  de 
la  blende  ,  qui  font  deux  matières  différentes  par  leur 
compofuion  &  leur  formation,  &  qui  n'ont  de  com- 
mun que  de  renfermer  du  zinc:  la  calamine  /è  préfènce 
en  veines  continues  comme  les  autres  minéraux  ;  la 
blende  fe  trouve  au  contraire ,  difperfte  &.  en  maffes 
féparées  dans  prefque  toutes  les  mines  métalliques  :  la 
calamine  efl  principalement  compofée  de  ziac  &  de 
fer  fh);  la  blende  contient  ordinairement  d'autres  mi- 
néraux avec  le  zinc  (c).  La  calamine  efl  d'une  couleur 

(a)  Paracelfe  efl  le  premier  qui  ait  employé  le  nom  de  zinc. 
Agricola  le  nomme  contre -feyn  ;  on  l'a  appelé  Jlannum  indicum ,  parce 
qu'il  a  été  apporté  des  Indes  en  afTez  grande  quantité  dans  le  fiècle 
dernier  ;  les  auteurs  Arabes  n'en  font  aucune  mention  ,  quoique  l'art 
de  tirer  Je  zinc  de  fà  mine  exifte  depuis  long -temps  aux  Indes 
orientales.  Voye-^  la   D'ijfer talion  de  M.    Bergman  fur  le  yjnc. 

(b)  M.  Bergman  a  fournis  à  l'analyfe  I  "^'amine  de  Hongrie,  & 
xl  a  trouvé  qu'elle  tenoit  au  quintal  quatre-vingt-quatre  livres  de 
chaux  de  zinc,  trois  livres  de  chaux  de  fer,  douze  de  filex  & 
une  d'argile ,  fur  quoi  j'obferverai  que  la  matière  de  l'argile  &  celle 
du  fdex  ne  font  qu'une  feule  &  même  fubflance  ,  puifque  le  filex 
fe  réduit  en  argile  en   fe  décompofant  par  les  élémens  humides. 

(c)  M.    Bergman   a  trouvé   que   la  blende  noire   de    Danemora 


zf)6        Histoire    Naturelle 

jaune  ou  rougeâtre ,  &  aflez  aifce  à  cliftingucr  des  autres 
minéraux  ;  ia  biende  au  contraire ,  tire  Ton  nom  de  Ton 
apparence  trompeufe  &  de  fa  forme  équivoque  (dj  : 
il  y  a  des  blendes  qui  reflemblent  à  la  galène  de 
plomb  (e);  d'autres  qui  ont  l'apparence  de  la  corne, 

& 


tenoit  au  quintal  quarante-cinq  livres  de  zinc,  neuf  de  fer,  fix  de 
plomb,  une  de  régule  d'arfenic  ,  vingt- neuf  de  foufre ,  quatre  de 
liiex  <Sc  fix  d'eau. 

(d)  Ce  mot  blende  fignifîe  dans  le  langage  des  Mineurs  Allemands 
une  fubftance  trompeufe ,  parce  qu'il  y  en  a  qui  relfemble  à  la 
galène  de  plomb.  Didionnaire  d' Hijîoire  Naturelle  ,  par  AI.de  Bomare , 
article  Blende  (  blind ,  éblouir ,  tromper  les  yeux). 

(e  )  On  a  donné  à  la  mine  de  /aie  b/anchâtre  le  nom  de  fûujfc 
galcne  ;  mais  quoique  le  tiilu  de  cette  dernière  foit  à  peu  -  près 
feuilleté  comme  celui  de  la  galène;  ie^  feuillets  qui  la  compofent 
font  cependant  moins  diftinds  &  moins  éclatans  que  ceux  de  ia 
mine  de  plomb  fulfureufe  ;  fa  pefanieur  fpécifique  efl:  d'ailleurs 
beaucoup  moins  confidérable  ;  au  refle  il  eft  aifé  de  diflinguer  la 
blende  d'avec  la  galène ,  car  fi  Ton  gratte  avec  un  couteau  le 
morceau  dont  l'apparence  eft  équivoque ,  il  s'en  dégagera  ,  fi  c'eft 
une  blende,  une  odeur  de  foie  de  foufre  des  mieux  caradérifées.... 
jM.  de  Born  nous  a  fait  connoître  une  blende  tranl'parente ,  d'un 
vert -jaunâtre  qui  fe  trouve  à  Ratieborzis  en  Bohème.  J'en  ai  vu 
des  échantillons  qui  avoient  la  tranfparence  &  la  couleur  de  h 
topafe  &  de  la  cryfolite.  Enfin  ,  quoique  le  tifl'u  de  la  blende  foit 
prefque  toujours  lamelleux  ou  feuilleté ,  il  s'en  rencontre  quelquefois 
des  morceaux  qui ,  par  leur  tiffu  fibreux  ou  ilrié ,  imitent  alfez 
bien  la  mine  d'antimoine  grife  ;  on  les  en  diflingue  facilement  à 
leur  couleur  d'un  gris-fombre  &  à  l'odeur  de  foie  de  foufre  qu'on 
en  dégage    par   le  frottement.  .  .  .  Cette  dernière  Ibrie  de  blende 

efl 


DES    AllNÉRAUX,  297 

&:  que  îes  Mineurs  Allemands  appellent  hom  -  hlcndc  ; 
d'autres  qui  font  noires  &  luifàntes  comme  la  poix, 
auxquels  ils  donnent  le  nom  de  jntch-blcîide ,  &  d'autres 
encore  qui  font  de  différentes  couleurs  grifes,  jaunes, 
brunes,  rougeâtres,  quelquefois  criflallifëes ,  &  même 
tranff)arentes  ,  mais  plus  fouvent  opaques  &.  fans  figure 
régulière.  Les  blendes  noires,  grifes  &  jaunâtres  font 
mêlées  d'arfenic  ,  les  rougeâtres  doivent  celte  couleur 
au  fer;  celles  qui  font  transparentes  &.  criflallifées ,  font 
chargées  de  foufre  &.  d'arfenic  ;  enfin  toutes  contiennent 
une  plus  ou  moins  grande  quantité  de  zinc. 

Non -feulement  ce  demi -métal  fe  trouve  dans  la 
pierre  calaminaire  &  dans  les  blendes,  mais  il  exifle 
auffi  en  affez  grande  quantité  dans  plufieurs  mines  de 
fer  concrètes  ou  en  grains,  &  de  dernière  formation; 
ce  qui  prouve  que  le  zinc  efl  difféminé  prefque  partout 
en  molécules  infenfibles ,  qui  fe  font  réunies  avec  la 
fer,  dans  la  pierre  calaminaire  &  dans  les  mines  fecon- 
daires  de  ce  métal ,  &  qui  fe  font  au/fi  mêlées  dans  les 
blendes  avec  d'autres  minéraux  &  avec  des  matières 
pyriteufes;  ce  demi-métal  ne  peut  donc  être  que  d'une 
formation  poftérieure  à  celle  des  métaux,  &  même 
poflérieure  à  leur  décompofition,  puifque  c'efl  prefque 


efl  commune  dans  les  mines  de  Pompe'an  ;  elle  a  moins  d'e'clat  que 
la  manganèfe  ,  &  ne  tache  point  les  doigts  comme  cette  fubftance. 
Lettre  du  Doâeur  Dcmejîe  ,  tome  II ,  pages  i  jC ,  l  S  0  &  j  8 1 , 

Minéraux ,  Tome  IIL  P  p 


i^S        Histoire  Naturelle 

toujours  avec  le  fer  décompofé  qu'on  le  trouve  réuni. 
D'ailleurs  comme  il  efl  très-volatil,  il  n'a  pu  fe  former 
qu'après  les  métaux  &  minéraux  plus  fixes ,  dans  Je 
même  temps  à  peu -près  que  l'antimoine,  le  mercure 
&.  l'arfenic,  ils  étoient  tous  relégués  dans  ratmofphère, 
avec  les  eaux  <5c  les  autres  fubftances  volatiles  pendant 
i'incandcfcence  du  Globe,  &  ils  n'en  font  defcendus 
qu'avec  ces  mêmes  fubflances  ;  auiïî  le  zinc  ne  fê  trouve 
dans  aucune  mine  primordiale  des  métaux,  mais  feule- 
ment dans  les  mines  fécondai res  produites  par  la  décom- 
pofuion  des  premières. 

Pour  tirer  le  zinc  de  la  calamine  ou  des  blendes, 
il  fuffit  de  les  expofer  au  feu  de  calcination,  ce  demi* 
métal  fe  fublime  en  vapeurs,  qui  par  leur  condenfation 
forment  de  petits  flocons  blancs  &  légers,  auxquels 
on  a  donné  le  nom  dejleurs  de  imc. 

Dans  la  calamine  ou  pierre  calaminaire ,  Je  zinc  eil 
fous  la  forme  de  chaux;  en  faifant  griller  cette  pierre, 
elle  perd  près  d'un  tiers  de  fon  poids  ;  elle  s'effleurii 
à  l'air ,  &  fe  préfente  ordinairement  en  malfes  irrégu- 
lières ,  quelquefois  criftallifées ,  elle  efl  prefque  toujours 
accompagnée  ou  voifine  des  terres  alumineufes  ;  mais 
quoique  la  fubflance  du  zinc  foit  difféminée  par-tout, 
ce  n'efl  qu'en  quelques  endroits  qu'on  trouve  de  Ja 
pierre  calaminaire.  Nous  citerons  tout-à-l'heure  les  mines 
les  plus  fameufes  de  ce  minéral  en  Europe,  &.  nous 
favons  d'ailleurs  que  Je  toutenagufj  qu'où  nous  apporte 


DES    Minéraux,  299 

des  Indes  orientales  ,  eft  un  zinc  mémo  plus  pur  que 
celui  d'Allemagne;  ainfi  l'on  ne  peut  douter  qu'il  n'y 
ait  des  mines  de  pierres  calaminaires  dans  plufieurs 
endroits  des  régions  orientales,  puifque  ce  n'eft  que 
de  cette  pierre  qu'on  peut  tirer  du  zinc  d'une  grande 
pureté.  ^**' 

La  minière  la  plus  fameufe   de  pierre  calaminaire, 
eft  celle  de  Calmjherg  près  d'Aix-la-Chapelle,  elle  cfl 
mêlée  avec    une  mine  de  fer  en  ocre  ;  il  y  en  a  une 
autre  qui  efl  mêlée  de   mine  de  plomb  au-deflbus  de 
Namur.   On   prétend  que  le  mot  de  Calamine,  efl  le 
nom  d'un  territoire  d'aflez  grande  étendue ,   près  des 
confins   du  duché  de  Limbourg,  qui  efl  plein   de   ce 
minéral  :   «    Tout  le    terrein ,  dit  Lémery ,  à  plus   de 
vingt  lieues  à  la  ronde  ,  efl  fi  rempli  de   pierres  cala-  et 
minaires ,  que  les  grofTes  pierres  dont  on  fè  fert  pour  « 
paver   étant  expofées  au  foleil ,  laifTent  voir  une  grande  c< 
quantité  de  parcelles  métalliques  &  brillantes  ».  M.  de 
Genfanne  en  a  reconnu  une  minière  de  plus  de  quatre 
toifes  de  largeur,  au-defTous  du  château  de  Montalet, 
diocèfe  d'Uzès:   on  y  trouve  des  pierres  calaminaires 
ferrugineufes ,  commue  à  Aix-la-Chapelle,  &  d'autres 
mêlées  de  mine  de  plomb ,  comme  à  Namur ,  &  l'on 
y  voit  auffi  des  terres  alumineufes  ;  on  en  trouve  encore 
dans  le  Berri  près  de  Bourges,  &  dans  l'Anjou  &  le 
territoire  de   Saumur,   qui  font  également  mêlées  de 
parties  ferrugineufes. 

Pp  i; 


3oa        Histoire    N atu r e lle 

En  Angleterre  on  exploite  quelques  mines  de  pierre 
calam inaire  clans  le  comté  de  5ummeriet;  la  pierre  de 
cette  mine   eft   rougeatre  à  /a  iurface,  &  d'un  jaune- 
verdâtre    à  l'intérieur;  elle   eft   très  -  pelante ,   quoique 
trouée  &  comme  cellulaire  ;  elle  e/t  au/Ti  très-dure  & 
donne  des  étincelles  ior/qu'on  la  choque  contre  1  acier; 
elle  eft   foluble  dans   les    acides  :    celle    du    comté  de 
Nottingham  en  diffère,  en  ce  qu'elle  n'eft  pas  folubie, 
&  qu'elle   ne  fait  point  feu  contre  Tacier,   quoiqu'elle 
foit    compaéte,    opaque  &.   cellulaire  comme   celle   de 
Sommer/ët  ;  cWe  en  diffère  encore  par  la  couleur  qui  eft 
ordinairement  blanche ,  &  quelquefois  d'un  vert  -  clair 
criftallifé.  Ces  ditîérences  indiquent  affez  que   la  cala- 
mine en  général ,  eft  une  pierre  compofée  de  différens 
minéraux,   &  que  fà  nature  varie  fuivant  la  quantité  ou 
k  qualité  des  matières  qui  en  conftituent  la  fubftance: 
îe  zinc  eft  la  feule  matière  qui  /bit  commune  à  toutes 
Jes  efpèces  de  calamine  ;   celle  qui   en  contient  le  plus 
eft  ordinairement  jaune;  mais  on  peut  fe  fervir  de  toutes 
pour  jaunir  le  cuivre  rouge;   c'eft  pour  cet  ufage  qu'on 
ies  recherche  &  qu'on  les  travaille ,  plutôt  que  pour  en 
faire  du  zinc  qui    ne   s'emploie  que  rarement    pur,    & 
qui  même  n'eft  pas  auifi  propre  à  faire  du  cuivre  jaune 
que  la  pierre  calaminaire  :  d'ailleurs ,  on  ne  peut  en  tirer 
le  zinc  que  dans  des  vaiffeaux    clos,  parce  que   non- 
feulement  il  eft  très  -  volatil ,   mais  encore,   parce  qu'il 
s'enfîamme  à  l'air  libre;  &  c'eft  par  la  cémentation  du 


DES   Minéraux,  301 

cuivre  rouge  avec  la  calamine ,  que  la  vapeur  cJu  zinc , 
contenu  dans  cette  pierre ,  entre  dans  le  cuivre ,  lui 
donne  la  couleur  jaune  ,  &  le  convertit  en  laiton. 

La  calamine  eft  fouvent  parfemce  de  petites  veines 
ou  filets  de  mine  de  plomb ,  die  fe  trouve  même 
fréquemment  mêlée  dans  les  mines  de  ce  meral ,  comme 
dans  celles  de  fer,  de  dernière  formation;  &  lorfqu'elle 
y  eft  très  -  abondante ,  comme  dans  la  mine  de  Ram- 
mellberg  près  de  Golîar,  on  en  tire  le  zinc  en  même 
temps  que  le  plomb,  en  faifànt  placer  dans  le  fourneau 
de  fufion,  un  vaifTeau  prefque  clos  à  l'endroit  où  l'ardeur 
du  feu  n'efl  pas  alTez  forte  pour  entiammcr  le  zinc , 
&  on  le  reçoit  en  fubflance  coulante;  mais  quelque 
précaution  que  l'on  prenne  en  le  travaillant,  même  dans 
des  vaifleaux  bien  clos  ,  le  zinc  n'acquiert  jamais  une 
pureté  entière ,  ni  même  telle  qu'il  doit  l'avoir  pour 
faire  d'auffi  bon  laiton  qu'on  en  fait  avec  la  pierre 
calaminaire,  dont  la  vapeur  fournit  les  parties  les  plus 
pures  du  zinc  ;  &.  le  laiton  fait  avec  cette  pierre  efl 
du6lile,  au  lieu  que  celui  qu'on  fait  avec  le  zinc  eft 
toujours  aigre  &  caflant. 

Il  en  eft  de  même  de  la  blende  ;  elle  donne  comme 
la  calamine  par  k  cémentation  ,  du  plus  beau  6l  du 
meilleur  laiton  qu'on  ne  peut  en  obtenir  par  le  mé- 
lange immédiat  du  zinc  avec  le  cuivre  ;  toutes  deux 
même  n'ont  guère  d'aiure  ufage ,  &  ne  font  rechercbées 
Sl  travaillées   que  pour   faire   du  cuivre  jaune;   mais. 


302  Histoire  Naturelle 

comme  je  l'ai  déjà  dit,  ce  ne  font  pas  les  deux  feules 
niaiières  qui  contiennent  du  zinc;  car  il  eft  très-géné- 
ralement répandu,  &  en  afTez  grande  quantité  dans 
plufieurs  mines  de  fer;  on  le  trouve  au/fi  quelquefois 
fous  la  forme  d'un  fel  ou  vitriol  blanc ,  &  dans  la  blende, 
il  efl:  toujours  combiné  avec  le  fer  &  le  foufre. 

Il  fè  forme  a/Tez  fouvent  dans  \t%  grands  fourneaux 
des   concrétions   qui    ont  paru   à  nos  Chimiftes    (f)^ 


(f)  «  II  y  a  des  blendes  artificielles  qui  imitent  parfaitement  les 
3»  blendes  naturelles  dans  leur  tifTu  ,  leur  couleur  &  leur  phofpho- 
3>  relcence.  .  .  .  J'en  ai  vu  un  morceau  d'un  noir  luifant  &  feuilleté 
»  provenant  des  fonderies  de  Saint- Bel.  .  .  .  \3\\  autre  morceau 
a»  venant  du  même  iieu ,  donnoit ,  outre  l'odeur  du  foie  de  foufre , 
»»  des  étincelles  lorfqu'on  le  grattoit  avec  un  couteau ,  &  n'en  donnoit 
»  point  avec  la  plume. ...  &  un  troifième  morceau  venant  des  fon- 
»>  deries  de  Saxe,  &  qui  eft  de  couleur  jaunâtre  ,  étoit  fi  phofphorique 
«  qu'en  le  frottant  de  la  plume  on  en  tiroit  des  étincelles  comme 
j>  de  la  blende  rouge  de  Schasffenberg  ».  Lettre  du  Doâeur  Danefe , 
tome  II,  pages  I  y p  Ù"  180.  —  Nota.  Je  dois  oblerver  qu'on 
trouvoit  en  effet  de  ces  blendes  artificielles  dans  les  laitiers  des 
fonderies,  mais  que  jufqu'ici  Ton  ne  favoit  pas  les  produire  à  volonté, 
&  que  même  on  ne  pouvoit  expliquer  comment  elles  s'étoient 
formées  ;  on  penfoit  au  contraire  que  l'art  ne  pouvoit  imiter  la  Nature 
dans  la  combinaifon  du  zinc  avec  le  foufre.  M.  de  Morveau  eft  le 
premier  qui  ait  donné  cette  année  1780,  »n  procédé  pour  faire 
à  volonté  l'union  direâe  du  zinc  &  du  {owixe  \  il  fuffit  pour  cela 
de  priver  ce  demi-metal  de  fa  volatilité  en  le  calcinant  ,  &  de  le 
fondre  enfuite  avec  le  foufre  ;  il  en  réfufte  une  vraie  pyrite  de 
zinc  qui  a,  comme  toutes  les  autres  pyrites,  une  forte  de  brillant 
métallique» 


DES  Minéraux.  303 

tomes  femblabies  aux  blendes  naturelles.  Cependant  il 
y  a  toute  raifon  de  croire  que  les  moyens  de  leur 
formation  font  bien  diffcrens  ;  ces  ])lendes  artificielles , 
produites  par  l'adion  du  feu  de  nos  fourneaux,  doivent 
difïërer  de  celles  qui  fe  trouvent  dans  le  fein  de  la 
terre ,  à  moins  qu'on  ne  fuppofe  que  celles  -  ci  ont  été 
formées  par  le  feu  des  volcans,  &  cependant  il  y  a 
toute  raifon  de  penfer  que  la  plupart  au  moins  n'ont 
été  produites  que  par  l'intermède  de  l'eau  (gj ,  &  que 
le  foie  de  foufre,  c'eft-à-dire,  l'alkali  mêlé  aux  prin- 
cipes du  foufre,  a  grande  part  à  leur  formation. 

Comme  le  zinc  eft  non-feulement  très-volatil,  mais 
fort  inflammable,  il  fe  brûle  dans  les  fourneaux  où  l'on 
fond  les  mines  de  fer,  de  plomb,  &:c.  qui  en  font 
mêlées  ;  cette  fumée  du  zinc  à  demi-brûlé,  fe  condenfè 
fous  une  forme  concrète,  contre  les  parois  des  fourneaux 
&  cheminées  des  fonderies  &.  affineries;  dans  cet  état 
on  lui  donne  le  nom  de  cadin'ie  des foiirnemix;  c'eil  une 
concrétion  de  fleurs  de  zinc,  qui  s'accumulent  fouvent 
au  point  de  former  un  enduit  épais  contre  les  parois 
de  ces  cheminées;  la  fubflance  de  cet  enduit  efl  dure, 
elle  jette  des  étincelles  lorfqu'on  la  frotte  rapidement 
ou  qu'on  la  choque  contre  l'acier;  les  parties  de  cette 

fg)}A.  Bergman  croit ,  comme  moi,  que  les  blendes  naturelles  ont 
été  formées  par  l'eau ,  &  il  fe  fonde  fur  ce  qu'elles  contiennent 
réellement  de  l'eau  ;  il  dit  aufîi  qu'on  peut  les  imiter  en  unilî'ant 
par  la  fufion  le  zinc ,  le  fer  &  le  foufre. 


304        Histoire    Naturelle 

cacimie  qui  Te  font  le  plus  élevées ,  &  qui  font  attachées 
au  iiaut  de  la  cJicminée,  font  les  plus  pures  &  les 
meilleures  pour  faire  du  laiton  (h) ,  parce  que  la  cadmie 
qui  s'efl:  fublimée  &  élevée  fi  haut,  y  eft  moins  mclée 
de  fer,  de  plomb,  ou  de  tout  autre  minéral  moins 
volatil  que  le  zinc  ;  au  refte  on  peut  aifémcnt  la  recueillir, 
elle  fe  lève  par  écailles  dures ,  &.  il  ne  faut  que  la  pul- 
vérifèr  pour  la  mêler  &  la  faire  fondre  avec  le  cuivre 
rouge,  &  c'eft  peut-être  la  manière  la  moins  coûteufe 
de  faire  du  laiton. 

Le  zinc,  tel  qu'on  l'obtient  par  la  fufion,  efl  d'un 
blanc  un  peu  bleuâtre  &  affez  brillant;  mais  quoiqu'il 
fe  terniffe  à  l'air  moins  vite  que  le  plomb ,  il  prend 
cependant  en  affez  peu  de  temps ,  une  couleur  terne 
■  I ■ 

/h)  On  connoifloit  très-bien  ,  dès  le  temps  de  Pline ,  la  cadmie 
des  fourneaux  &  on  avoit  déjà  remarqué  qu'elle  étoit  de  qualité  A 
de  bonté  différentes  ,  fuivant  qu'elle  fe  trouvoit  fublimée  plus  haut 
ou  plus  bas  dans  les  cheminées  des  fonderies  :  EJl  îpfe  lapis  ex  quo 
fit  ces ,  cadmia  vocatur.  .  .  .  Hic  rurfus  in  fornacibus  exijlit ,  aliamque 
nominisfui  originemrecipit  :  ft  autem  egejlâ  fammis  alque  fatu  tenuijftmâ 
parte  materiœ  ,  &  cameris  lateribufve  fornacum  pro  quantitate  levitatis 
applicatâ.  TenuiJJima  ejl  in  ipfo  fornacum  ore  qua  fammœ  eluâantur , 
appellata  capnitis ,  exujla  ù"  nimiâ  levitate  Jimi/is  favilla  :  interîor 
optima ,  cameris  dependens ,  Ù'  ab  eo  argumenta  botrytis  cognominata  ; 
tertia  ejl  in  lateribus  fornacum  ,  quœ  propter  gravitalem  ad  caméras 
pervenire  non  potuit  ;  hcec  dicitur  placitis ....  fuunt  &  ex  eâ  duo  alia 
gênera;  onychitis  ,  extra  pêne  cœrulea  ,  intus  onyckiiis  macuUs  fimilis  ; 
ojlracitis ,  tota  nigra ,  &  cceterarum  fordidijjîma .  .  .  Omnis  autem 
cadmia  in  cupri  fornacibus  optima.  Plhi.  lib.  XXXI V,  cap.  x. 


DES  Minéraux.  30; 

&  d'un  jaune- vcrdàtrc,  &  les  nuances  différentes  de 
fà  couleur  dépendent  beaucoup  de  Ton  degré  de  pureté; 
car  en  le  traitant  par  les  procédés  ordinaires,  il  con- 
ferve  toujours  quelques  petites  parties  des  niatières  avec 
lefquelles  il  étoit  mêlé  dans  h  mine  ;  ce  n'eft  que  très- 
récemment  qu'on  a  trouvé  le  moyen  de  le  rendre  plus 
pur.  Pour  obtenir  le  zinc  dans  fa  plus  grande  pureté , 
il  faut  précipiter  par  le  zinc  mcme  ion  vitriol  blanc, 
ce  vitriol  décompofé  endiite  par  l'alkali ,  donne  une 
cliaux  qu'il  fuffit  de  réduire  pour  avoir  un  zinc  pur  & 
ians   aucun  mélange. 

La  fubflance  du  zinc  efi:  dure  &  n'eft  point  caftante  ,  on 
ne  peut  la  réduire  en  poudre  qu'en  la  faifant  fondre  &  la 
mettant  en  grenailles  ;  auftl  acquiert-elle  quelque  ducliiité 
par  l'addition  des  matières  inflammables  en  la  fondant  en 
vaifteaux  clos  :  fa  dcnftté  eft  un  peu  plus  grande  que  celle 
du  régule  d'antimoine,  &  un  peu  moindre  que  celle  de 
l'étain^/^.  Indépendamment  de  ce  rapport  aftl^z  prochain 
de  denfité ,  le  zinc  en  a  plufieurs  autres  avec  J'étain  ;  il  rend 
lorfqu'on  le  plie,  un  petit  cri  comme  l'étain  (kj ,  il  rcfifte 

(i)  La  pefameur  Iptcifiqiie  du  régule  de  zinc  ell  de  71^08  ; 
celle  du  régule  d'antimoine  de  67021  ,  &  celle  de  l'étain  pur  de 
Cornouaille  de  72914;  la  pefanteur  fpécifique  de  la  blende  n'eft 
que  de  41665  ;  il  y  a  donc  à  peu-près  la  méine  proportion  dans 
les  denfités  relatives  de  la  blende  avec  le  zinc  ,  de  l'antimoine  crud 
avec  le  régule  d'antimoine  ,  &  du  cinabre  avec  le  mercure  coulant. 

fk)  Le  zinc  ,  lorfqu'on  le  rompt ,  a  le  même  cri  que  l'étain  ; 
lorlqu'on  le  mêle  avec  du  plomb  ,  cei  alliage  a  encore  le  même 
Aihicraux ,  Tome  III.  Qq 


3o6        Histoire  Natu relle 

Je  même  aux  imprcfTions  des  élcmcns  humides ,  &.  ne  fe 
convertit  point  en  rouille  ;  quelques  Minéralogiftes  l'ont 
même  regardé  comme  une  efpèce  d'étain  (ij ,  6l  il  efl 
vrai  qu'il  a  plufieurs  propriétés  communes  avec  ce  métal; 
car  on  peut  étamer  le  fer  &  le  cuivre  avec  le  zinc 
comme  avec  l'étain  ;  &  l'un  de  nos  Chimifles  a  pré- 
tendu que  cet  étamage  avec  le  zinc  {"^/jj^  qui  efl  moins 
fufible  que  l'étain,  &l  par  conféquent  plus  durable,  ed 
en  même  temps  moins  dangereux  que  l'éiamage  ordi- 
naire, dans  lequel  les  Chaudronniers  mêlent  toujours  du 
plomb  :  on  connoît  les  qualités  limefles  du  plomb ,  on 
fait  aufTi  que  l'étain  contient  toujours  une  petite  quantité 


cri  ;  les  Potiers  d'etain  emploient  le  zinc  dans  leurs  ouvrages  &  pour 
leurs   foudures.  H'foire  de  l'Académie  des  Sciences,  année   ly^i, 

(l)  Schlutter ,  dit  Al.  Hellot  ,  regarderoit  volontiers  le  zinc 
comme  une  efpèce  d'étain  ,  s'il  étoit  plus  malle'able ,  &  il  foupçonne 
que  venant  d'une  mine  auiïi  fulfureufe  que  celle  de  Rammelberg. ... 
il  conferve  encore  une  partie  de  ce  ioufre  ;  cette  idée ,  leion 
Schlutter  ,  efl  d'autant  plus  vraifemblable  que  par  le  foufre  on  peut 
rendre  aigre  le  meilleur  étain.  .  .  .  On  fait  aufîi  que  le  zinc  &  l'étain 
peuvent  également  rendre  jaune  le  cuivre  rouge  ;  il  cite  pour 
exemple  le  métal  fingulier  qu'Alonzo  Barba  a  décrit  dans  Ton  Traité 
des  mines  &  des  métaux.  Traité  de  la  fonte  des  mines ,  i/c,  tome  II , 
foge  -2/7;  mais  le  fentimem  de  Schlutter  iur  le  zinc  ne  nous 
parojt  pas  aflez  fondé ,  car  le  zinc  ne  peut  différer  de  ïéiàia  par 
ie  foufre  minéraliiateur ,   puifqu'il   n'en  contient  pas. 

(m)  M.  Malouin,  de  l'Académie  des  Sciences,  &  Médecin  de 
ia  Faculté  de  Paris. 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X.  5  07 

tl'arfenic,  &.  il  faut  convenir  que  le  zinc  en  contient 
aiiffi  ;  car  iorfqu'on  le  fait  fufer  fur  les  charbons  ardens, 
il  répand  une  odeur  arfenicaie  qu'il  faut  éviter  de  refpircr; 
&.  tout  confidéré  ,  l'étamage  avec  du  bon  ctain  doit  être 
préféré  à  celui  qu'on  feroit  avec  le  zinc  fn) ,  que  le 
vinaigre  diffout  &  attaque  même  à  froid. 

Si  ces  rapports  femblent  rapprocher  le  zinc  de 
l'étain,  il  s'en  éloigne  par  pluficurs  propriétés;  il  cfl 
beaucoup  moins  fufible;  il  faut  qu'il  fbit  chauifé  prefque 
au  rouge  avant  qu'il  puifle  entrer  en  lufion;  dans 
cet  état  de  fonte,  fà  furface  fe  calcine  ians  augmenter 
ie  feu ,  &  fe  convertit  en  chaux  grife  ,  qui  diffère  de 
celle  de  l'étain  en  ce  qu'elle  efl  bien  plus  aifément 
rédu<5tib!c ,  &  que  quand  on  les  pouffe  à  un  feu  violent, 
celle  de  l'étain  ne  fait  que  blanchir  davantage  ,  (ii  enfin 
fe  convertit  en  verre  ,  au  lieu  que  celle  du  zinc  s'en- 
flamme d'elle  -  même  &  fans  addition  de  matière  com- 
buflible.  On  peut  même  dire  qu'aucime  autre  matière, 
aucune  fubibnce  végétale  ou  animale ,  qui  cependant 
fèmblent  être  les  vraies  matières  combuflib'es,  ne  donnent 
une  flamme  auffi  vive  que  le  zinc;  cette  flamme  efl 
fans  .fumée  &  dans  une  parfaite  incandefcence  ;  elle  efl 
accompagnée  d'une  fi  grande  quantité  de  lumière  blanche, 

(n)  Cet  etamage  avec  le  zinc  a  e'tc  approuvé  par  la  Faculté  de 
Médecine  de  Paris ,  mais  condamné  par  l'Académie  des  Sciences 
&  par  la  Société  royale  de  Médecine;  &  il  a  auffi  été  démontre 
nuilLb'c,  par  les  expériences  faites  à  l'Académie  de  Dijon,  en  i77P» 

Qqij 


3o8  Histoire  Naturelle 

que  les  yeux  peuvent  à  peine  en  fupporter  l'éclat  cblouif^ 
/ànt  :  c'elt  au  mélange  de  la  limaille  de  fer  avec  du 
zinc,  que  font  dûs  les  plus  beaux  effets  de  nos  feux 
d'artifice. 

Et  non-feulement  le  zinc  eft  par  lui-mcme  très-com- 
buflible,  mais  il  eft  encore  phofphorique  ;  fa  chaux 
paroît  lumincufe  en  la  triturant,  &  fcs  Heurs  recueillies 
au  moment  qu'elles  s'élèvent,  &  placées  dans  un  lieu 
obfcur ,  jettent  de  la  lumière  pendant  un  petit  temps  foj. 

Au  rcfle,  le  zinc  n'efl  pas  le  fcul  des  minéraux  qui 
s'enflamment  loriqu'on  les  fait  rougir  ;  l'arfenic ,  le 
cuivre  &  même  l'antimoine,  éprouvent  le  même  efîct; 
le  fer  jette  aufii  de  la  flamme  lorfque  l'incandefcence 
eft  pouffée  jufqu'au  blanc  ,  &  il  ne  faut  pas  attribuer 
avec  quelques-uns  de  nos  Chimifles  (p) j,  cette  flamme 

(o)  M.  de  LafTone  ,  procédant  un  jour  à  la  déflagration  d'une 
afTez  grande  quantité  de  zinc  ,  en  recueilloit  les  fleurs  &  les  niettoit 
à  mefure  dans  un  large  vaifleau  ;  il  fut  furpris  de  les  voir  encore 
lumineufes  quekiues  minutes  après,  &  remuant  enluite  ces  fleurs 
avec  une  fpatule  ,  ayant  obfcurci  davantage  le  laboratoire ,  il  vit 
qu'elles  étoient  entièrement  pénétrées  de  cette  lumière  jjholpho- 
rique  &  difîufe  ,  qui  peu-à-peu  s'affoiblit ,  s'éteignit,  après  avoir 
fubfiflé  plus  d'une  heure.  On  peut  voir  dans  fon  Mémoire  tous 
les  rapports  qu'il  indique  entre  le  zinc  &  le  j^hofphore.  Alémoires 
de  l'Acûdémie  des  Sciences ,   année   1J-/2,  pages  ^80   &  fu'iv. 

(p)  «c  C'eft  à  la  préfence  du  zinc  contenu  dans  le  fer  qu'il  faut 
y*  attribuer  la  plupart  des  phénomènes  que  préfente  ce  fer  impur  & 
»  mélangé  ,  lequel  fe  détruit  en  partie  par  la  combuflion  ,  puifque 
»  le  déchet  du  fer  en  gueufe  eft  ordinairement  d'un  tiers.  .  .  .  C'elt 


DES    Minéraux.  3  09 

au  zinc  qu'il  contient,  ni  croire ,  comme  ils  le  diient, 
que  c'ell  le  zinc  qui  rend  la  fonte  de  fer  aigre  6k. 
cafTante  ;  car  il  y  a  beaucoup  de  mines  de  fer  qui  ne 
contiennent  point  de  zinc,  &l  dont  néanmoins  le  fer 
donne  une  Hamme  auffi  vive  que  les  autres  fers  qui 
en  contiennent;  je  m'en  fuis  aiïliré  par  plufieurs  effais, 
Si  d'ailleurs,  on  peut  toujours  reconnoître  par  la  fimple 
obfèrvation,  fi  la  mine  que  l'on  traite  contient  du  zinc, 
puifqu'alors  ce  demi-métal  en  fe  fublimant,  forme  de  la 
cadmie  au  -  delîus  du  fourneau  &  dans  les  cheminées 
des  affineries  ;  toutes  les  fois  donc  que  cette  fublimation 
n'aura  pas  lieu,  on  peut  être  afTuré  que  le  fer  ne  con- 
tient point  de  zinc,  du  moins  en  quantité  fenfible,  & 
néanmoins  le  fer  en  gueufe  n'en  eft  pas  moins  aigre 
&  caifant ,  &  cette  aigreur,  comme  nous  l'avons  dit, 
vient  des  matières  vitreufes  avec  lefquelles  la  fubflance 
du  fer  eft  mêlée ,  &  ce  verre  ih  manifefle  bien  évidem- 
ment par  les  laitiers  &  les  fcories  qui  s'en  féparent, 
tant  au  fourneau  de  fufion  qu'à  l'ailinerie  ;  enfin  cette 
fonte  de  fer  qui  ne  contient  point  de  zinc ,  ne  laiiïe 
pas  de  jeter  de  la  flamme  lorfqu'elle  eft  chaufïee  à 
blanc ,  &  dès  -  lors  ce  n'eft   point  au  zinc  qu'on  doit 

moins  le  fer  cj  le  le  zinc  contenu  dans  la  fonte,  qui  fe  brûle  ,  « 
fe  dtiruit  &  fe  volatilife ,  en  foite  que  la  perte  du  mctal  dans  « 
toutes  tes  circonllances  ,  e(ï  d'autant  plus  confidérable  que  le  fer  « 
s'y  trouve  joint  à  une  plus  grande  quantité  de  zinc  ».  Lettres 
de  AI.  Demcjk ,  tome  II ,  page  i6j. 


310        Histoire  Naturelle 

attribwer  cette  flamme,  mais  au  fer  même,  (^ui  efl  en 
effet  combuflible  lorfqu'il  éprouve  la  violente  adlion 
Ju  feu. 

.La  chaux  du  zinc,  chauffée  prefque  ju/qu'au  rouge, 
s'enflamme  tout-à-coup  &  avec  une  forte  d'explofion , 
&  en  même  temps  les  parties  les  plus  fixes  font,  comme 
nous  l'avons  dit,  emportées  en  fleurs  ou  flocons  blancs; 
leur  augmentation  de  volume  n'eft  pas  proportionnelle 
à  leur  légèreté  apparente,  car  il  n'y  a,  dit -on  ^^j) , 
qu'un  dixième  de  différence  entre  la  pefanteur  fpécifique 
du  zinc  &  celle  de  fès  fleurs  ;  mais  lorfqu'on  la  calcine 
très -lentement,  &  qu'on  l'empêche  de  fe  fublimcr  en 
{'agitant  continuellement  avec  une  fpatule  de  fer,  l'aug- 
mentation du  volume  de  cette  chaux  efl  de  près  d'un 
fixième  (r):  au  refle,  comme  la  ciiaux  du  zinc  efl  très- 
volatile,  on  ne  peut  la  vitrifier  feule;  mais  en  y  ajoutant 
du  verre  blanc,  réduit  en  poudre  &  à\x  falhi ,  on  la 
convertit  en  un  verre  couleur  à' aigue-mûrme. 

Plufieurs  Chimifles  ont  écrit  que  comme  le  foufre 
ne  peut  contraéter  aucune  union  avec  le  zinc ,  il  pouvoit 
fervir  de  moyen  pour  le  purifier;  mais  ce  moyen  ne 
peut  être  employé  généralement  pour  féparer  du  zinc 


(q)  En  féduifant  le  zinc  en  fleurs ,  le  poids  des  fleurs  furpa/Tè 
d'un  dixième  celui  de  (a  nia{îê  de  zinc  avant  d'être  re'duit  en  fleurs. 
Alitnoircs  de  l'Académie  dis  Sciences,    année    jyyz  ,  page  ^So. 

(r)  Eléiuens  de  Chimie,  par  M.  de  Morveau,  tome  I , page  2^y^ 


DES    Minéraux.  311 

tous  les  métaux,  puifque  le  foufre  s'unit  au  zinc  par 
r intermède  du  fer. 

Le  zinc  en  fufion,  &  fous  fa  forme  propre,  s'allie 
avec  tous  les  métaux  &  minéraux  métalliques ,  à  l'excep- 
tion du  bifmuth  &  du  nickel  (f).  Quoiqu'il  fe  trouve 
très-fouvent  uni  avec  la  mine  de  fer,  il  ne  s'allie  que 
très  -  difficilement  par  la  fufion  avec  ce  métal  ;  il  rend 
tous  les  métaux  aigres  &  cafTans,  il  augmente  la  denfité 
du  cuivre  &  du  plomb,. mais  il  diminue  celle  de  i'étain, 
du  fer  &.  du  régule  d'antimoine;  l'arfenic  6c  le  zinc, 
traités  enfemble  au  feu  de  fublimation  ,  forment  une 
mafle  noire,  qui  préfente  dans  fa  caffure  une  apparence 
plutôt  vitreufe  que  métallique  (tj ;  il  s'amalgame  très- 
bien  avec  le  mercure  (u):  <<  Si  l'on  verfe,  dit  M.  de 
Morveau,  le  zinc  fondu  fur  le  mercure,  il  fe  fait  un 
bruit  pareil  à  celui  que  fait  l'immerfion  fubite  d'un 
corps  froid  dans  de  l'huile  bouillante;  l'amalgame  paroît 
d'abord  folide,  mais  il  redevient  fluide  parla  trituration; 
la  criflallifation  de  cet  amalgame  laiffe  apercevoir  fes 
élémens  même,  à  la  partie  fupérieure  qui  n'eft  pas  en 
contadl  avec  le  mercure,  ce  qui  efl  différent  des  autres 


(f)  Elémens  de  Chimie ,  par  M.  de  Morveau ,  rt^wf  /,  page  2  6 ^, 

(t)  Idem  ,  tome  II ,  page  s^y. 

(u)  L'amalgame  compofé  de  quatre  parties  de  mercure  fur  une 
de  zinc  eft  bien  plus  propre  à  produire  l'élecflricité  que  l'amalgame 
de  mercure  &  d'étain»  Journal  de  Phy.Jique  ,  mois  de  JSovembre 
jyS  0  ,  page  ^y2. 


» 


312        Histoire  N atu re lle 

amalgames  ....  une  once  de  zinc  retient  deux  onces 
de  mercure  (x)  ».  J'obferverai  que  cette  foliditc  que 
prend  d'abord  cet  amalgame  ne  dépend  pas  de  !a 
nature  du  zinc  ,  puifque  le  mercure  feui ,  vcrfc  dans 
i'iîuile  bouillante,  prend  une  fblidité  même  plus  durable 
que  celle  de  cet  amalgame  de  zinc. 

Les  affinités  du  zinc  avec  les  métaux,  font,  félon 
M.  Geiler,  dans  l'ordre  fuivant;  le  cuivre,  le  fer,  l'ar- 
gent ,   l'or,   l'étain  &   le  plomb. 

Autant  la  chaux  de  plomb  cïi  îdiCWc  à  réduire,  autant 
la  chaux  ou  les  Heurs  de  zinc  font  de  difficile  réduélion, 
de-ià  vient  que  la  cérufe  ou  blanc  de  plomb  devient  noire 
])ar  la  feule  vapeur  des  matières  putrides ,  tandis  que  la 
chaux  de  zinc  conferve  fa  blancheur;  c'cil  d'après  cette 
propriété  éprou\'ée  par  la  vapeur  du  foie  de  foufre , 
que  M.  de  Morveau  a  propofë  le  blanc  de  zinc  comme 
préférable  dans  la  peinture,  au  blanc  de  plomb;  les 
expériences  comparées  ont  été  faites  cette  année  178  i, 
dans  la  féance  publique  de  l'Académie  de  Dijon;  elles 
démontrent  qu'il  fiiffit  d'ajouter  à  la  chaux  du  zinc ,  un 
peu  de  terre  d'alun  &  de  craie,  pour  lui  donner  du 
corps  &  en  faire  une  bonne  couleur  blanche,  bien 
plus  fixe  &  bien  moins  altérable  à  l'air,  que  la  cérufe 
ou  blanc  de  plomb,  qu'on  emploie  ordinairement  dans 
la  peinture  à  l'huile. 

(x)   EIcmens    de   Chimie ,   par   M,    de    Morveau ,    tome    III , 
pages  44^   à-  44^, 

Le 


D  E  s    M  IN  É  R  A  U  X.  313 

Le  zinc  eft  attaqué  par  tous  les  acides ,  &  même  la 
plupart  le  difîblvent  afTez  facilement;  l'acide  vitriolique 
n'a  pas  befoin  d'être  aide  pour  cela  par  la  chaleur,  Sl 
le  zincparoît  avoir  plus  d'affinité  qu'aucune  autre  fubf^ 
tance  métallique  avec  cet  acide;  il  faut  feulement  pour 
que   la  diffolution  s'opère   promptement,   lui   préfenter 
le   zinc  en   petites   grenailles  ou  en  lames  minces ,    & 
mêler  l'acide  avec  un  peu  d'eau ,  afin  que  le  fël  qui  fè 
forme  n'arrête  pas  la  difTolution  par  le  dépôt  qui  s'en 
fait  à  la  furface.  Cette  diflblution  laifTe  après  l'évapo- 
ration,  des  criflaux  blancs;  ce  vitriol  de  zinc  eli  connu 
fous  le  nom  de  couperofe  blaiiche,  comme  ceux  de  cuivre 
&  de  fer,  fous  les  noms  de  coupera ft  bleue  &.  de  couperofe 
verte.  Et  l'on  doit  ob/erver  que  les  fleurs  de  zinc,  quoi- 
qu'en  état   de    chaux,   offrent  les   mêmes   phénomènes 
avec  cet  acide  que  le  zinc  même,  ce  qui  ne  s'accorde 
point   avec    la   théorie   de  nos  Chimifles,   qui   veulent 
qu'en   général    les   chaux   métalliques    ne   puifTent   ê^re 
attaquées  par   les   acides.  Ce  vitriol  de  zinc  ou  vitriol 
blanc,  fc  trouve  dans  le  fein  de  la  terre  (y) ,  rarement 
en  criflaux  réguliers,  mais  plutôt  en  (lalaélites ,  &  quel- 
quefois en  filets  blancs;  il  fe  couvre  d'une  efilorefcence 
bleuâtre   s'il   contient  du  cuivre. 


(y)  On  n'a  point  encore  trouvé,  dit  M.  Bergman,  d'autres 
fels  de  zinc,  dans  le  fein  de  la  terre,  que  celui  qui  vient  de  l'acide 
vitriolique  ;  &  le  vitriol  natif  de  zinc  eft  rarement  pur  ,  mais  mêlé 
au  cuivre  ou  au  fer,  &  fouvent  à  tous  deux.  Dijfertation  fur  le  -Jne, 

Minéraux ,  Tome  III .  R  r 


3:14         Histoire  Naturelle 

L'acide  nitreux  difTout  le  zinc  avec  autant  de  rapidité 
crue  de  puiiïance ,  car  il  peut  en  difToudre  promptement 
une  quantité  égale  à  la  moitié  de  Ton  poids;  la  di/To- 
jution  faturée  n'eft  pas  limpide  comme  l'eau  ,  mais  un 
peu  obfcure  comme  de  l'huile,  &  fi  le  zinc  efî;  mêlé 
de  quelques  parties  de  fer,  ce  métal  s'en  fépare  en  /è 
précipitant  ,  ce  qui  fournit  un  autre  moyen  que  celui 
du  fbufre  pour  purifier  le  zinc  L'on  doit  encore  ob/èrver 
que  la  chaux  &  les  fleurs  de  zinc,  fè  diffolvent  dans  cet 
acide  &l  dans  l'acide  vitriolique,  &  que  par  conféquent 
cela  fait  une  grande  exception  à  la  prétendue  règle, 
que  les  acides  ne  doivent  pas  difToudre  les  chaux  ou 
terres  métalliques. 

L'acide  marin  diiïbut  aufiî  le  zinc  très  -  facilement, 
moins  pleinement  que  l'acide  nitreux  ,  car  il  ne  peut 
en  prendre  que  la  huitième  partie  de  fon  poids;  il  ne 
fe  forme  pas  de  criftaux  après  i'évaporation  de  cette 
diflbiution,  mais  feulement  un  fel  en  gelée  blanche  <St 
irès-déliquefcent ,  dont  la  qualité  eft  fort  corrofive. 

Le  zinc,  &  même  les  fleurs  de  zinc,  fe  diffolvent 
auffi  dans  l'acide  du  vinaigre,  &  il  en  réfulte  des  crif 
taux  ;  il  en  eft  de  même  de  l'acide  du  tartre  ;  ainfi  tous 
les  acides  minéraux  ou  végétaux,  <Sc  jufqu'aux  acerbes, 
tels  que  la  noix  de  gale,  agiffent  fur  le  zinc:  les  alkalis, 
&  fur  -  tout  i'alkali  volatil  le  dinx)lvent  au/fi,  &  cette 
dernière  diffoluiion  donne,  après  I'évaporation,  un  fel 
blanc  &  brillant,  qui  attire  l'humidité  de  l'air  &  tombe 
en  déliquefcen-ce. 


DES  Minéraux,  315 

Voilà  le  précis  de  ce  que  nous  favons  fur  le  zinc  : 
on  voit  qu'étant  très  -  volatil ,  il  doit  être  difleminé 
par-tout;  qu'étant  fufccptible  d'altération  &  de  diiïblu- 
lion  par  tous  les  acides  &  par  les  alkalis,  il  peut  fe 
trouver  en  état  de  chaux  oii  de  précipité  dans  le  fein 
de  la  terre  ;  d'ailleurs,  les  matières  qui  le  contiennent 
en  plus  grande  quantité ,  telles  que  la  pierre  calaminaire 
&  les  blendes  ,  font  compofées  des  détrimens  du  fer  ôl 
d'autres  minéraux  ;  l'on  ne  peut  donc  pas  douter  que 
ce  demi-métal  ne  foit  d'une  formation  bien  poftérieure 
à  celle  des  métaux. 


Rr  \] 


3i6       Histoire    Naturelle 

DE    LA     PLATINE. 

Il  n'y  a  pas  un  demi-fiècle  qu'on  connoît  la  Platine 
en  Europe,  &  jamais  on  n'en  a  trouvé  clans  aucune 
région  de  l'ancien  continent;  deux  petits  endroits  dans 
ie.  nouveau  Monde ,  l'un  dans  les  mines  d'or  de  San- 
tûfé,  à  la  nouvelle  Grenade;  l'autre  dans  celle  de  Clwco, 
province  du  Pérou,  font  jufqu'ici  les  feuls  lieux  d'où  l'on 
ait  tiré  cette  matière  métallique,  que  nous  ne  connoif- 
fons  qu'en  grenailles  mêlées  de  fablon  magnétique ,  de 
paillettes  d'or,  &  Ibuvent  de  petits  criftaux  de  quartz, 
de  topaze,  de  rubis,  &  quelquefois  de  petites  gouttes 
de  mercure;  j'ai  vu  &  examiné  de  très-près,  cinq  ou 
fix  fortes  de  platine  que  je  m'étois  procurée  par  diverfes 
perfonnes  &  en  diiférens  temps  ;  toutes  ces  fortes  étoient 
mêlées  de  fablon  magnétique  &  de  paillettes  d'or;  dans 
quelques-unes  il  y  avoit  des  petits  criflaux  de  quartz, 
de  topaze ,  cScc.  en  plus  ou  moins  grande  quantité  ; 
mais  je  n'ai  vu  de  petites  gouttes  de  mercure  que  dans 
i'une  de  ces  fortes  de  platine  (a) ;  il  fe  pourroit  donc 
que  cet  état  de  grenaille,  fous  lequel  nous  connoifTons 
la  platine,  ne  fût  point  Ion  état  naturel,  &  l'on  pourroit 


(a)  M.  Lewis  &  M.  le  Comte  de  Milly  ont  tous  deux 
reconnu  des  globules  de  mercure  dans  la  platine  qu'ils  ont  examinée. 
M.  Bergman  dit  de  même  qu'il  n'a  point  traité  de  platine  dans 
laquelle  il  n'en  ait  trouvé.  Opujcules ,  tome  II ,  page    i  8 ^. 


DES    Minéraux,  317 

croire  qu'elle  a  été  concaflce  dans  les  moulins  où  l'on 
broie  les  minerais  d'or  &  d'argent,  &  que  les  goutte- 
lettes de  mercure  qui  s'y  trouvent  quelquefois,  ne 
viennent  que  de  l'amalgame  qu'on  emploie  au  traite- 
ment de  ces  mines  ;  nous  ne  fommes  donc  pas  certains 
que  cette  forme  de  grenaille  foit  fa  forme  native^  d'autant; 
qu'il  paroît,  par  le  témoignage  de  quelques  Voyageurs, 
qu'ils  indiquent  la  platine  comme  une  pierre  métal- 
lique très-dure,  intraitable,  dont  néanmoins  les  naturels 
du  pays  avoient,  avant  les  Efpagnols ,  fait  des  haches 
&.  autres  iniirumens  tranchans  (ù)  j  ce  qui  fuppofe  né- 
ceflairement  qu'ils  la  trouvoient  en  grandes  maffes,  ou 
qu'ils  avoient  l'art  de  la  londre  fans  doute  avec  l'addi- 
tion de  quelqu'aiitre  métal;  car  par  elle-même  la  platine 
eft  encore  moins  fuhble  que  la  mine  de  fer  qu'ils 
n'avoient  pas   pu  fondre.   Les  Efpagnols  ont   auffi   fait 

(b)  Dans  le  Gouvernement  du  Marannon,  les  habitans  afTuroient 
que  dans  le  canton  des  mines  d'or ,  ils  tiroient  (ouvent  d'un  lieu 
nomnië  Picari ,  une  autre  forte  de  métal  pbs  dur  que  i'or ,  mais 
blanc,  dont  ils  avoient  fait  anciennement  des  haches  &  des  couteaux, 
&  que  ces  outils  s'cmouflant  facilement ,  ils  avoient  ceflé  d'en  faire. 

Hijiolre  générale  des  voyages ,  tome- X IV ,  page  20 M.  Ulloa, 

dans  fon  Voyage  imprime'  à  Madrid  en  1748  ,  dit  expreffément, 
qu'au  Pt rou ,  dans  le  Bailliage  de  Choeo ,  il  fe  trouve  des  mines 
d'or  que  l'on  a  été  obligé  d'abandonner  à  caufe  de  la  platine  dont 
le  minerai  eft  entre-mêlé  ;  que  cette  platine  eft  une  pierre  (  Pïedra  ) , 
{\  dure  qu'on  ne  peut  la  brifer  fur  l'enclume  ,  ni  la  calciner ,  ni 
par  conféquent  en  tirer  le  minerai  qu'elle  renferme ,  fans  un  travail 
infini. 


3i8        Histoire  Naturelle 

clifférens  petits  ouvrages  avec  la  platine  alliée  avec  d'autres 
métaux;  perfonne  en  Europe  ne  la  connoît  donc  dans 
fon  état  de  nature  ,  &  j'ai  attendu  vainement  pendant 
nombre  d'années ,  quelques  morceaux  de  platine  eu 
maffe  ,  que  j'avois  demandé  à  tous  mes  Correfpondans 
en  Amé|*ique.  M.  Bowles ,  auquel  le  gouvernement 
d'Elpagne,  paroît  avoir  donné- fà  confiance  au  fujet  de 
ce  minéral,  n'en  a  pas  abufé;  car  tout  ce  qu'il  en  diç 
ne  nous  apprend  que  ce  que  nous  fàvions  déjà. 

Nous  ne  favons  donc  rien,  ou  du  moins  rien,  au 
jufle  de  ce  que  l'Hilloire  Naturelle  pourroit  nous  ap- 
prendre au  fujet  de  la  platine ,  fmon  qu'elle  fe  trouve 
en  deux  endroits  de  l'Amérique  méridionale,  dans  des 
mines  d'or,  &  jufqu'ici  nulle  part  ailleurs;  ce  feul  fait, 
quoique  dénué  de  toutes  fes  circonftances,  fuffit,  à 
mon  avis,  pour  démontrer  que  la  platine  eft  une  matière 
accidentelle  plutôt  que  naturelle  ;  car  toute  fubflance 
produite  par  les  voies  ordinaires  de  la  Nature ,  cA  géné- 
ralement répandue  au  moins  dans  les  climats  qui  jouifTent 
de  la  même  température;  les  animaux,  les  végétaux, 
les  minéraux  font  enraiement  foumis  à  cette  rède  uni- 
verfelle;  cette  feule  confidération  auroit  dû  fufpendre 
l'empreflement  des  Chimifles,  qui,  fur  le  fimple  examen 
de  cette  grenaille,  peut-être  artificielle  &  certainement 
îiccidentelle,  n'ont  pas  héfité  d'en  faire  un  nouveau 
métal ,  &  de  placer  cette  matière  uou\e\\c  non-(eu\ement 
ail  rang  des  anciens  métaux,  mais  de  la  vanter  comme  un 


DES  Minéraux.  319 

troifième  métal  auiïi  parfait  que  l'or  &  l'argent,  fans  faire 
réflexion  que  les  métaux  fè  trouvent  répandus  dans  toutes 
les  parties  du  Globe;  que  la  platine,  fi  c'étoit  un 
métal,  feroit  répandue  de  même,  que  dès-lors  on  ne 
clevoit  la  regarder  que  comme  une  production  acciden- 
telle ,  entièrement  dépendante  des  circonflances  locales 
des   deux   endroits  où  cWe  fe  trouve. 

Cette  confidération ,  quoique  majeure,  n'eft  pas  la 
feule  qui  me  faffe  nier  que  la  platine  ibit  un  vrai  métal. 
J'ai  démontré  par  des  obfcrvations  exades  (cj j  qu'elle 
eft  toujours  attirable  à  l'aimant;  la  Chimie  a  fait  de 
vains  efforts  pour  en  féparer  le  fer ,  dont  fa  fubflance 
cfl  intimement  pénétrée  ;  la  platine  n'efl  donc  pas  un 
métal  fnnple  &  parfait,  comme  l'or  &  l'argent,  puif- 
qu'elle  efl  toujours  alliée  de  fer.  De  plus ,  tous  les 
métaux ,  &  fur-tout  ceux  qu'on  appelle  parfaits,  font 
tjès-duéliles  ;  tous  les  alliages  au  contraire  font  aigres; 
or  la  platine  efl  pltis  aigre  que  la  plupart  des  alliages, 
&  même  après  plufieurs  fontes  &  diffolutions  ,  elle 
n'acquiert  jamais  autant  de  duélilité  que  le  zinc  ou  le 
bifmuth,  qui  cependant  ne  font  que  des  demi-métaux, 
tous  plus  aigres  que  les  métaux. 

Mais  cet  alliage  où  le  fer  nous  efl  démontré  par 
J'aélion  de  l'aimant ,  étant  d'une  denfité  approchante  de 


(c)    Voyez   dans    le    premier    volume   in  -  4.°    des  Supplcmens^ 
jpage  j  0  j ,  k  Mémoire  qui  a  pour  titre  ;  Obferyaiions  fur  la  Platinf* 


-^20        Histoire     Natu  relle 

celle  de  l'or;  j'ai  cru  être  fondé  à  préfumer  que  la 
platine  n'ell  qu'un  mélange  accidentel  de  ces  deux 
métaux  très  -  intimement  unis  :  les  eflais  qu'on  a  fait 
depuis  ce  temps  pour  tiklier  de  féparer  le  fer  de  la 
platine  &  de  détruire  fon  magnétifme  ne  m'ont  pas 
fait  changer  d'opinion  ;  la  platine  la  plus  pure ,  celle 
entr'autres  qui  a  été  fi  bien  travaillée  par  M.  le  baron 
de  Sickengen  ((tJ)  ,  &  qui  ne  donne  aucun  figne  de 
magnétifme,  devient  néanmoins  attirable  à  l'aimant,  dès 
qu'elle  efl  comminuée  &  réduite  en  très-petites  parties; 
la  préfence  du  fer  ed  donc  confiante  dans  ce  minéral, 
&  la  préfence  d'une  matière  aufTi  denfe  que  l'or  y  efl 
également  &  évidemment  auffi  confiante;  &  quelle  peut 
être  cette  matière  denfe  fi  ce  n'efl  pas  de  l'or!  Il  efl 
vrai  que  jufqu'ici  l'on  n'a  pu  tirer  de  la  platine ,  par 
aucun  moyen,  l'or,  ni  même  le  fer   qu'elle  contient, 


(d)  La  platnie ,  même  la  plus  épurée,  contient  toujours  du  ïer.  M. 
ie  Comte  de  Milly,  par  une  lettre   date'e    du    18    Novembre    «781, 
me  marque  «qu'ayant  oublie'  pendant  trois  à  quatre  ans,  un  morceau 
y>  de  platine  purifiée  par  M.    le  Baron  de  Sikengen  ,  &   qu'il   avoil 
39  laiflce   dans   de    l'eau -forte    la  plus  plus   pure,    pendant  tout  ce 
55  temps  ,  il  s'y  étoit  rouillé  ,  &  que  l'ayant  retiré ,  il  avoit  étendu  la 
»  liqueur  qui  reftoit  dans  le  vafe,  dans  un  peu  d'eau  diftillce  &  <]u'y 
»  ayant  ajouté  de  l'alkali  phlogiftiqué  ,  il  avoit  obtenu   fur  h  champ 
33  un  précipité  très-aUondant ,   ce  qui  prouve   indubitablement  que  la 
»  platine  la  plus  pure  &  que  M.  de  Sikengen  afTure  être  dépouillée 
>»  de  tout  fer ,  en   contient  encore ,  6c  que  par  ^conféquent    le   fer 
entre  dans  fa  compofition  », 

& 


DES  Minéraux.         321 

&  que  pour  qu*il  y  eût  fur  TtAence  de  ce  minéral 
dcmonflration  complète,  il  faudroit  en  avoir  tiré  & 
féparc  le  fer  ôl  For ,  comme  on  fépare  ces  métaux  après 
les  avoir  allies;  mais  ne  devons-nous  pas  confidérer,  & 
ne  i'ai-je  pas  dit,  que  le  fer  n'étant  point  ici  dans  Ton 
état  ordinaire,  Sl  ne  s'étant  imi  à  l'or  qu'après  avoir 
perdu  pre/que  toutes  fes  propriétés,  à  l'exception  de 
fa  denfité  Si.  de  fon  magnctifme,  il  fè  pourroit  que  l'or 
s'y  trouvât  de  même  dénué  de  fa  duélilité  ,  &  qu'il 
n'eût  confervé,  comme  le  fer,  que  fa  feule  denfité ,  & 
dès-lors  ces  deux  métaux  qui  compofent  la  platine,  font 
tous  deux  dans  un  état  inacceffible  à  notre  art,  qui  ne 
peut  agir  fur  eux ,  ni  même  nous  les  faire  reconnoître 
en  nous  les  préfentant  dans  leur  état  ordinaire  !  Et  n'efl-ce 
pas  par  cette  raifon  que  nous  ne  pouvons  tirer  ni  le 
fer  ni  l'or  de  la  platine,  ni  par  conféquent  féparer  ces 
métaux ,  quoiqu'elle  foit  compofée  de  tous  deux  î  Le 
fer  en  effet  n'y  efl  pas  dans  fon  état  ordinaire,  mais 
tel  qu'on  le  voit  dans  le  fablon  ferrugineux  qui  accom- 
pagne toujours  la  platine  ;  ce  fablon ,  quoique  très- 
magnétique  ,  efl  infufible ,  inattaquable  à  la  rouille , 
infoiuble  dans  les  acides;  il  a  perdu  toutes  les  pro- 
priétés par  lefquelles  nous  pouvions  l'attaquer,  il  ne 
lui  eft  refté  que  fà  denfité  &.  fon  magnétifme  ,  pro- 
priétés par  lefquelles  nous  ne  pouvons  néanmoins  le 
méconnoître.  Pourquoi  l'or  que  nous  ne  pouvons  de 
même  tirer  de  la  platine,  mais  que  nous  y  reconnoilfons 
Mnétûux,  Tome  IIL  S  f 


3  22         Histoire  Naturelle 

auffi  évidemment  par  fa  denfité ,  n'auroit-il  pas  éprouvé 
comme  le   fer ,  un    changement  qui   lui  auroit    ôté  fà 
ductilité  &  fa  flifibilité  î  l'un  efl  po/Tible  comme  l'autre, 
&  ces  productions  d'accidens,  quoique  rares,  ne  peuvent- 
elles  pas  fe  trouver  dans  la  Nature!  Le  fer  en  état  de 
parfaite  duéliiité ,  eu  prcfque   infufible ,   &  ce  pourroit 
être  cette  propriété  du  fer  qui  rend  l'or  dans  la  platine 
très- refracl:aire;  nous  pouvons  auffi  légitimement  fiip- 
pofer  que  le   feu  violent  d'un  volcan,   ayant  converti 
une  mine  de  fer  en  mâchefer  &  en  fablon  ferrugineux 
magnétique,   &.  teJ  qu'il  fe  trouve  avec   la  platiïie,  ce 
feu   aura  en  même  temps,  &  par  le    même   excès  de 
force,  détruit  dans  l'or  toute  duéliliié!  Car  cette  qualité 
n'eft  pas  eflentielle  ,   ni   même  inhérente    à   ce  métal, 
puifque  la  plus    petite  quantité  d'éiain  ou  d'arfcnic  fa 
lui   enlève  ;  <&  d'ailleurs ,   fait-on  ce  que  pourroit  pro- 
duire fur  ce  métal ,   un   feu  plus   violent  qu'aucun  de 
nos  feux  connus!  Pouvons -nous  dire  fi  dans  ce  feu  de 
volcan,  qui  n'a  laiffé  au  fer  que  fon  magnétifme  &  à 
l'or  fa  denfué ,  il  n'y  aura   pas  eu  des  fumées  arfeni- 
cales  qui  auront  blanchi  l'or  &  lui  auront  ôté  toute  fa 
dudilité ,  &  fi  cet  alliage  du  fer  &  de  l'or ,  imbus  de 
îa  vapeur  d'arfenic  ,  ne  s'ell  pas  fait  par  un  feu  fupé- 
rieur  à  celui  de  notre  art!  Devons-nous  donc  être  furpris 
de  ne  pouvoir  rompre  leur  union;  &  doit-on  faire  un 
métal   nouveau,    propre  &   particulier,    une  fubflance 
fimple,  d'une  matière  qui  efl  évidemment  mixte,  d'un 


D  E  s    M  I  N  É  R  AU  X.  323 

compofé  formé  par  accident  en  deux  feuls  lieux  de  la 
terre,  d'un  compofc  qui  préfente  à  la  fois,  la  denfité  de 
l'or  &  le  magiictifme  du  fer,  d'une  fubftance  en  un 
mot  qui  a  tous  les  cara6lères  d'un  alliage,  &  aucun  de 
ceux  d'un  métal  pur! 

Mais  comme  les  alliages  faits  par  la  Nature,  font 
encore  du  refTort  de  l'Hifloire  Naturelle,  nous  croyons 
devoir,  comme  nous  l'avons  fait  pour  les  métaux, 
donner  ici  les  principales  propriétés  de  la  platine  : 
quoique  très  -  denfe  elle  eft  très  -  peu  duélile ,  prefque 
infufiblc  fans  addition,  fi  fixe  au  feu  qu'elle  n'y  perd 
rien  ou  prefque  rien  de  fon  poids,  inaltérable  &  réfiflante 
à  l'adlion  des  élémens  humides,  indiflbluble  comme 
i'or,   dans    tous    les   acides  fnnples  (e) ,   Sl  fe  laiffant 

('ej  Nota.  M.  Tillet,  l'un  de  nos  plus  fa  vans  Académiciens,  & 
très-exacH:  Obfervateur,  a  reconnu  que,  quoique  la  platine  foit 
indifloluble  en  elle-même  par  les  acides  Innples ,  elle  le  dillout  néan- 
moins par  l'dcide  nitreux  pur,  lorfqu'elle  efi:  alliée  avec  de  l'argent  ai. 
de  l'or.  Voici  la  note  qu'il  a  bien  voulu  me  communiquer  à  ce  fujet  : 
J'ai  annoncé  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences,  année  «c 
/  ;^/p  ,  que  la  platine,  foit  brute,  foit  rendue  dudile  par  les  procédés  «< 
connus,  eft  dilfuluble  dans  l'acide  nitreux  pur,  lorfqu'elle  efl  alliée  <c 
avec  une  certaine  quantité  d'or  &  d'argent.  Afin  que  cet  alliage  foit  <t 
complet,  il  faut  le  faire  par  le  moyen  de  la  coupelle,  &  en  em-  oc 
ployant  une  quantité  convenable  de  plomb.  On  traite  alors ,  par  te 
la  voie  du  départ ,  le  bouton  compofé  des  trois  métaux  ,  comme  ce 
un  mélange  fnnple  d'or  &.  d'argent;  la  diflolution  de  l'argent  &  «c 
de  la  platine  efl  complète,  la  liqueur  efl  tranfparente,  &  il  ne  refte  ce 
que  l'or  au  fond  du  matras,  foit  dans  un  état  de  divifion  fi  on  ace 

Sf  ij 


7» 
3» 


324  Histoire  Naturelle 

diffoudre  comme  lui,  par  la  double  puiffance  des  acides 
nitreux  &  marins  réunis. 

»  mis  beaucoup  d'argent,  Toit  en  forme  de  cornet  bien  conlervé 
x)  fi  on  n'a  mis  que  trois  ou  quatre  parties  d'argent  égales  à  celle 
»  de  l'or.  Il  tiï  vrai  que  fi  on  emploie  trop  de  platine  dans  cette 
»  opération,  J'or  mêlé  avec  elle  ia  défend  un  peu  des  attaques  de 
»  l'acide  nitreux ,  &  il  en  conlervé  quelques  parties.  Il  faut  un 
»  mélange  parfait  des  trois  métaux  pour  que  l'opération  réufllfle 
j>  complètement  :  s'il  fe  trouve  quelques  parues  dans  l'alliage  où 
n  il  n'y  ait  pas  affez  d'argent  pour  que  la  diOolution  ait  lieu  ,  la 
platine  réfifte,  comme  J'or,  à  l'acide  ,  &  relie  avec  lui  dans  le  pré- 
cipité ;  mais  fi  on  ne  met  dans  l'alliage  c[u'un  douzième  de  platine , 
3>  ou  encore  mieux,  un  vingt-quatrième  de  l'or  qu'on  emploie,  alors 
>»  on  parvient  à  diffoudre  le  total  de  la  platine ,  &.  for  mis  en  expé- 
»  rience  ne  conferve  exad:ement  que  Ion  poids.  Il  n'en  eft  pas  ainfi 
»  d'un  alliage  dans  lequel  il  n'entre  que  de  l'argent  «Se  de  la  platine: 
»  la  difloluiion  n'en  eft  proprement  une  que  pour  l'argent  ;  la 
»  liqueur  refte  trouble  Se  noirâtre,  malgré  une  longue  &  forte  ébulli- 
»  tien;  il  fe  fait  un  précipité  noir  &  abondant  au  fond  du  inatras, 
3»  qui  n'efl  que  de  la  platine  réduite  en  poudre  &  fubdivifce  en  une 
35  infinité  de  particules ,  comme  elle  i'étoit  dans  l'argent  avant  qu'il 
33  fut  dilfous.  Cependant  fi  on  laifle  repofer  la  liqueur  pendant 
«quelques  jours,  elle  s'éclaircit  &  devient  d'une  couleur  brune, 
»  qu'elle  doit  lans  doute  à  quelques  parties  de  la  platine  qu'elle  a 
3»  diffoutes ,  ou  qu'elle  tient  en  fufpenfion.  Il  paroît  donc  que  dans 
3)  cette  opération ,  c'ed  à  la  préfence  feule  de  l'or  qu'eft  due  la 
»  dilfolution  réelle  &  aflez  prompte  de  la  j^latine  par  l'acide  nitreux 
33  pur  ;  que  l'argent  ne  contribue  qu'indiredement  à  cette  dilfolu- 
»  tion;  qu'il  la  facilite  à  la  vérité,  mais  que  fans  l'or,  il  ne  fert  qu'à 
33  procurer  une  divifion  mécanique  de  la  platine ,  «?i  encore  cette 
divifion  n'a-t-elle  lieu  que  parce  que  l'argent  dilfout  lui-même, 
ne  peut  ]  lus  conferver  la  platine  fubdivifce  avec  laquelle  il 
faifoit  corps  33. 


39 

30 


DES     M  J  N  É  R  AU  X,  325 

L'or  mêlé  avec  ie  plomb  le  rend  aigre,  la  platine 
protluit  le  mcme  effet  ;  mais  on  a  prétendu  qu'elle  ne 
fe  fcparoit  pas  en  entier  du  plomb  comme  l'or,  dans 
la  coupelle,  au  plus  grand  feu  de  nos  fourneaux,  dès- 
iors  le  plomb  adhère  plus  fortement  à  la  platine  que 
i'or  dont  ii  fe  fcpare  en  entier,  ou  prefque  en  entier  (f); 
on  peut  même  reconnoître  par  l'augmentation  de  fon 
poids,  la  quantité  de  plomb  qu'elle  a  faifi  &  qu'elle 
retient  fi  puifTamment,  que  l'opération  de  la  coupelle 
ne  peut  l'en  féparer;  cette  quantité,  félon  M.  Schœffer, 
efl  de  deux  ou  trois  pour  cent;  cet  habile  Chimifle, 
qui  le  premier  a  travaillé  la  platine,  dit  avec  raifon, 
qu'au  miroir  ardent,  c'eft-à-dire,  à  un  feu  fupérieur  à 
celui  de  nos  fourneaux,  on  vient  à  bout  (ïtw  féparer 
tout  le  plomb  &i  de  la  rendre  pure  ;  elle  ne  diffère 
donc  ici  de  l'or  qu'en  ce  qu'étant  plus  difficile  à 
fondre,  elle  fe   coupelle  auffi  plus  difficilement. 

En  mêlant  partie  égale  de  platine  &.  de  cuivre,  on 
les  fond  prefque  auffi  facilement  que  le  cuivre  feul , 
&  cet  alliage  ell  à  peu -près  auffi  fuhble  que  celui  de 
l'or  &  du  cuivre;  elle  fe  fond  un  peu  moins  facilement 
avec  l'argent,  il  en  faut  trois  parties  fur  une  de  platine, 


/f)  «  L'or  le  plus  pur  ne  fe  fépare  jamais  parfaitement  du  plomb 
dans  la  coupelle  ;  fi  vous  faites  pafier  un  gros  d'or  fin  à  la  «c 
coupelle  dans  une  quantité  quelconque  de  plomb  ,  le  bouton  « 
d'or,  quelque  brillant  qu'il  foit ,  pefera  toujours  un  peu  plus  « 
d'un  gros  ».  Remarque  communiquée  par  M.   TilUt. 


326         Histoire  Naturelle 

6l  l'alliage  qui  refaite  de  cette  fonte,  efl  aigre  Se  dur; 
ou  peut  en  retirer  l'argent  par  l'acide  nitreux ,   &  avoir 
ainfi    la   platine   faus    mélange ,    mais   néanmoins    avec 
quelque  perte:  elle  peut  de  même  fe  [ondre  avec  les 
autres  métaux;   &  ce  qui  eu  très  -  remarquable ,    c'cH 
que   le  mélange  d'ime  très  -  petite  quantité  d'ar/ènic, 
comme  d'une  vingtième  ou  d'une  vingt-quatrième  partie, 
fuffit  pour   la  faire  fondre  prefque   auffi   aifément  que 
nous  fondons  le  cuivre  ;   il  n'eil:  pas  même  n-^ceflaire 
d'ajouter  des  fondans  à  l'arfenic,   comme  loriqu'on  le 
fond  avec  le  fer  ou  le  cuivre,  il  fuffit  feul  pour  opérer 
très-promptement  la  fuGon  de  la  platine ,  qui  cependant 
n'en  devient  que  plus  aigre  &  plus  caiïànîe  :  eniin  lorf- 
qu'on  la  mcîe   avec  l'or,    il  n'y  a  pas  moyen  de  les 
féparer  fans  intermède,  parce  que  la  platine  ik  l'or  font 
également  fixes  au  feu,  &i  ceci   prouve  encore  que  la 
nature  de  la  platine  tient  de  très -près  à  celle  de  l'or: 
ils  fe  fondent  enfemble  affez  ailèment;   leur  union  efl 
toujours  intime  6w  confiante,  <Scde  même  qu'on  remarque 
des  furfaces    dorées  dans  la  platine  qui   nous  vient  en 
grenailles,  on  voit  auffi  des  filets  ou  petites  veines  d'or 
dans  la  platine  fondue  ;  quelques  Chimifles  prétendent 
înême  que    l'or  efl  un  diffolvant  de   la  platine,    parce 
qu'en  effet,    fi    l'on    ajoute    de   l'or  à    l'eau  régale,  la 
diffolution  de  la  platine  fè  fait  beaucoup  plus  promj)te- 
jiient  &  plus  complètement,  &  ceci,  joint  à  ce  que  nous 
îîvoiis  dit  de  fa  diffolution  par  l'acide  nitreux,  efl  encore 


DES    Minéraux.  327 

une  preuve  &  un  effet  de  la  grande  affinité  de  la  platine 
avec  i*or;  on  a  trouvé  néanmoins  le  moyen  de  féparer 
i'or  de  la  platine,  en  mêlant  cet  alliage  avec  l'argent  (gj,  & 

{g)  «  Lorfqu'on  a  mêlé  de  l'or  avec  de  la  platine  ,  il  y  a  un 
moyen  fur  de  les  féparer ,  celui  du  départ ,  en  ajoutant  au  mélange  <c 
trois  fois  autant  d'argent  ou  environ  qu'il  y  a  d'or:  l'acide  nitieux  « 
diflout  l'argent  &  la  platine ,  &  l'or  tout  entier  en  efl  feparé  ;  «c 
on  verfe  enfuite  de  l'acide  marin  fur  la  lic{ueur  chargée  de  l'argent  «c 
&  de  la  platine ,  fur  le  champ  on  a  un  précipité  de  l'argent  « 
feul;  &  comme  on  a  formé  par-là  une  eau  régale,  la  platine  «< 
n'en  eft  que  mieux  maintenue  dans  la  liqueur  qui  fumage  l'argent  «< 
précipité.  Pour  obtenir  enfuite  la  platine ,  on  fait  évaporer  fur  « 
un  bdin  de  fable  la  licjueur  qui  la  contient ,  &  on  traite  le  réfidu  « 
par  le  flux  noir  ,  en  y  ajoutant  de  la  chaux  de  cuivre  propre  à  u 
ralîembler  ces  particules  de  platine  ;  on  lamine  après  cela  le  bouton  « 
de  cuivre  qu'on  a  retiré  de  l'opération  ,  di.  on  le  fait  difioudre  à  « 
froid  dans  de  l'efprit  de  nitre  affoibli  ;  la  platine  fe  précipite  au  « 
fond  du  matras  ,  &  après  un  recuit ,  elle  s'annonce  avec  les  carac-  « 
tcres  métalliques  ,  mais  avec  un  déchet  de  moitié  ou  environ ,  fur  c^ 
la  quantité  de  platine  qu'on  a  employée.  Voilà  le  procédé  que  « 
j'ai  fuivi  (k  par  lequel  on  voit  que  je  n'ai  rien  pu  perdre  par  « 
un  défaut  de  foins  ;  après  des  opérations  réitérées  on  parvient  à  « 
réduire  la  platine  à  peu  de  grains ,  &  enfin  à  la  perdre  totalement,  ce 
Ces  expériences  annoncent  que  la  platine  fe  décompofe  &  n'eA  « 
pas  un  métal  fimple  ;  la  matière  noire  &  ferrugineule  fe  montre  <c 
à  chaque  opération  ,  &  fe  trouve  mêlée  avec  celle  qui  a  confervé  « 
l'état  jnétallique  ;  cette  matière  noirâtre  qui  n'a  pu  reprendre  lès  « 
caradères  métalliques ,  eft  fort  légère  <3c  ne  fe  précipite  qu'avec  «f 
peine  ;  on  ne  croiroit  jamais  qu'elle  eût  appartenu  à  un  métal  « 
aufll  pefant  que  la  platine  ;  quatre  ou  cinq  grains  de  cette  « 
matière  décompofée  ont  le  volume  d'une  noifeite  3?.  N«tc  de 
M.  Tillet, 


?28  Histoire  Naturelle 

ce  moyen  eft  aflez  fur  pour  qu'on  ne  doive  plus  craindre 
de  voir  le  titre  de  l'or  altéré  par  le  mélange  de  la  platine. 

L'or  eft  précipité  de  fa  diiïblution  par  le  vitriol  de 
fer,  &  la  platine  ne  l'efl  pas;  ceci  fournit  un  moyen 
de  féparer  Tor  de  la  platine  s'il  s'y  trouvoit  artificielle- 
ment allié,  mais  cet  intermède  ne  peut  rien  fur  leur 
alliage  naturel.  Le  mercure  qui  s'amalgame  fi  puiiïamment 
avec  l'or,  ne  s'unit  point  avec  la  platine;  ceci  fournit 
un  fécond  moyen  de  reconnoître  l'or  falfiiié  par  le 
mélange  de  la  platine  ;  il  ne  faut  que  réduire  l'alliage 
en  poudre,  &  la  préfenter  au  mercure  qui  s'emparera 
de  toutes  les  particules  d'or,  ôl  ne  s'attachera  point  à 
celles  de  la  platine. 

Ces  différences  entre  l'or  &  la  platine,  font  peu 
confidérables  en  comparaifbn  des  rapports  de  nature 
que  ces  deux  fubftances  ont  Tune  avec  l'autre;  la  platine 
ne  s'eft  trouvée  que  dans  des  mines  d'or,  &  feulement 
dans  deux  endroits  particuliers,  &  quoique  tirée  de  la 
même  mine,  fa  fubftance  n'efl  pas  toujours  la  même; 
car  en  eflTayant  fous  le  marteau  plufieurs  grains  de  platine, 
telle  qu'on  nous  l'envoie,  j'ai  reconnu  que  quelques- 
uns  de  ces  grains  s'étendoient  affez  facilement ,  tandis 
que  d'autres  fe  brifoient  fous  une  percuffion  égale  ; 
cela  feul  fuffiroit  pour  faire  voir  que  ce  n'efl  point  un 
métal  natif  &  d'une  nature  univoque,  mais  un  mélange 
équivoque,  qui  fe  trouve  plus  ou  moins  aigre,  fclon  la 
quantité  &.  la  qualité  des  matières  alliées. 

Quoique 


DES     AI  I  N  É  R  A  U  X.  329 

Quoique  la  platine  foit  blanche  à  peu-près  comme 
l'argent ,  fa  clifToIution  efl  jaune ,  &  même  plus  jaune 
que  celle  de  l'or  ;  cette  couleur  augmente  encore  à 
mefure  que  la  clifToluiion  fe  fature,  &  devient  à  la  fois 
tout-à-fait  rouge;  cette  dernière  couleur  ne  provient-elle 
pas  du  fer  toujours  uni  à  la  platine  (hj  f  En  faifant 
évaporer  lentement  cette  difTolution,  on  obtient  un  fei 
criftallifé,  femblable  au  fel  d'or;  la  diffolution  noircit 
de  même  la  peau,  &:  laifTe  aulfi  précipiter  la  platine, 
comme  l'or,  par  l'éther  &  par  les  autres  huiles  cthérées; 
enfin  fon  fel  reprend,  comme  celui  de  l'or,  fon  état 
métallique ,  fans  addition  ni  fecours. 

Le  produit  de  la  diffolution  de  la  platine  paroît  différer 
de  l'or  di(fous,  en  ce  que  le  précipité  de  platine,  fait 
par  l'alkali  volatil  ,  ne  devient  pas  fulminant  comme 
l'or  ;  mais  auffi  peut-être  que  fi  l'on  joignoit  une  petite 
quantité  de   fer   à   la  diffolution  d'or ,    le  précipité   ne 

(h)  La  platine  ie  difi'out  dans  l'eau  rtgale ,  qui  doit  être  compofée 
de  parties  égales  dacide  nitreux  &  d'acide  marin.  II  en  faut  environ 
leize    parties    pour   une   partie  de    platine  ,    &   il    faut    qu'elle    foit 
aidée  de  la  chaleur.  .....  La  diflolution  prend   une  couleur  Jaune 

qui  pafle  au  rouge -brun- foncé  ;  il  refte  au  fond  du  vaifleau  des 
matières  étrangères  qui  étoient  mêlées  à  la  platine  ,  &  particulière- 
ment du  fable  magnétique.  La  diffolution  de  la  platine  fournit  par 
le  refroidiflement ,  de  petits  criflaux  opaques  de  couleur  jaune  & 
d'une  faveur  acre  ;  ces  criftaux  fe  fondent  imparfaitement  au  feu , 
i'acide  fe  diffipe,  &  il  refle  une  chaux  grife-obfcure.  Elémens  de 
Chimie  ,  par  Al,  de  Alorveau ,    tome  II,  pages  266  &  26 j» 

Minéraux,  Tome  IIL  Tt 


330  Histoire  Naturelle 

feroit  pas  fulminant  ;  je  préfume  de  même  qiie  c'cfl 
par  une  caufe  femblable  que  le  précipité  de  la  platine 
par  i'étain,  ne  fe  colore  pas  de  pourpre  comme  celui 
Je  Tor;  &  dans  le  vrai,  ces  différences  font  fi  légères 
en  comparaifbn  des  grands  &  vrais  rapports  que  la 
platine  a  conflamment  avec  l'or ,  qu'elles  ne  fuiii/ènt 
pas  à  beaucoup  près  pour  faire  un  métal  à  part  & 
indépendant,  d'une  matière  qui  n'efl  très  -  vraifembla- 
Liement  qu'altérée  par  le  mélange  du  fer  &.  de  quelques 
vapeurs  arfenicales  ;  car,  quoique  notre  art  ne  puifFe 
rendre  à  ces  deux  métaux  altérés  leur  première  efTence, 
il  ne  faut  pas  conclure  de  fon  impuiffance  à  rimpo/Ti- 
bilité;  ce  feroit  prétendre  que  la  Nature  n'a  pu  faire 
ce  que  nous  ne  pouvons  défaire,  &.  nous  devrions  plutôt 
nous  attacher  à  l'imiter  qu'à  la  contredire. 

Aucun  acide  fimple,  ni  même  le  fublimé  corrofif 
ni  le  foufre  n'agiffent  pas  plus  fur  la  platine  que  fur 
i'or,  mais  le  foie  de  foufre  les  diffout  également;  toutes 
les  fiibflances  métalliques  la  précipitent  comme  l'or,  & 
fon  précipité  conferve  de  mcme  fa  couleur  &  fon 
brillant  métallique;  elle  s'allie  comme  l'or  avec  tous  les 
métaux  (5l  les  demi -métaux. 

La  différence  la  plus  fenfible  qu'il  y  ait  entre  les 
propriétés  fecondaires  de  l'or  &  de  la  platine,  c*efl  la 
facilité  avec  laquelle  il  s'amalgame  avec  le  mercure,  & 
la  réfiftance  que  la  platine  oppofè  à  cette  imion  ;  il  me 
femble  que  c'eft  par  le    fer  &  par  Tarfenic,   dont  la 


DES  Minéraux.  351 

platine  efl  intimement  pénétrée,  que  Tor  aura  perdu  Ton 
attradion  avec  le  mercure  qui,  comme  l'on  fait,  ne 
peut  s'amalgamer  avec  le  fer,  &  encore  moins  avec 
i'arfenic  ;  je  fuis  donc  perfuadc  qu'on  pourra  toujours 
donner  la  raifon  de  toutes  ces  diiférences  en  convenant 
avec  moi,  que  la  piatine  efl  un  or  dénaturé  par  le 
mélange  intime  du  fer  &  d'une  vapeur  d'arfenic. 

La  platine  mêlée  en  parties  égales  avec  l'or,  exige 
un  feu  violent  pour  fe  fondre;  l'alliage  eft  blanchâtre, 
dur,  aigre  &  caflant;  néanmoins  en  le  faifant  recuire, 
il  s'étend  un  peu  fous  le  marteau;  û  on  met  quatre 
parties  d'or  fur  une  de  platine ,  il  ne  faut  pas  un  fi 
grand  degré  de  feu  pour  les  fondre,  l'alliage  conferve 
à  peu-près  la  couleur  de  l'or,  &. Ton  a  obfervé  qu'en 
général ,  l'argent  blanchit  l'or  beaucoup  plus  que  la 
platine;  cet  alliage  de  quatre  parties  d'or  fur  une  de 
platine,  peut  s'étendre  en  lames  minces  fous  le  marteau. 

Pour  fondre  la  platine  &  l'argent  mêlés  en  parties 
égales,  il  faut  un  feu  très -violent,  &  cet  alliage  efl 
moins  brillant  &  plus  dur  que  l'argent  pur,  il  n'a  que 
peu  'de  dudilité  ,  fa  fubflance  efl  grenue ,  les  grains  en 
font  affez  gros,  &  paroiffent  mai  liés;  &  lors  même 
que  l'on  met  fept  ou  huit  parties  d'argent  fur  une  de 
platine,  le  grain  de  l'alliage  efl  toujours  gro/fier;  on 
peut  par  ce  mélange  faire  criflallifer  très  -  aifément 
l'argent  en  fufion  (ij ,  ce  qui  démontre  le  peu  d'affinité 

f  -        -  — " 

(iJ  *t  Les  crinallifaiions  confiantes  de  l'argent  où  il  eft  entré  der 

Tt  i; 


332         Histoire    Naturelle 

de  ce  métal  avec  la  platine,  puifqu'il  ne  contrarie  avec 
«lie  qu'une  union  imparfaite. 

Il  n'en  eft  pas  de  même  du  mélange  de  la  platine 
avec   le  cuivre,    c'ell  de   tous  les   métaux    celui   avec 
lequel  elle  fe  fond  le  plus  facilement;  mêlés  à  parties 
égales,  l'alliage  en  efl  dur  &  caffant  ;   mais  fi  l'on  ne 
met  qu'une  huitième  ou  une  neuvième  partie  de  platine, 
l'alliage  efl  d'une  plus  belle  couleur  que  celle  du  cuivre; 
il  eil:  au/Ti  plus  dur,  &  peut  recevoir  un  plus  beau  poli, 
il   réfifle   beaucoup   mieux  à  l'imprefTion  des   élémens 
humides,  il  ne  donne  que  peu   ou  point  de  vert-de- 
gris,  &L  il  efl  afTez  du(5lile  pour  être  travaillé  à  peu-près 
comme  le  cuivre  ordinaire.  On  pourroit  donc  en  alliant 
ie   cuivre  &  la  platine  dans   cette   proportion ,  efTayer 
d'en  faire  des  vafes  de  cuifmes,  qui  pourroient  fe  pafTcr 
d'étamage,  &  qui  n'auroient  aucune  des  mauvaifcs  qualités 
du  cuivre,  de  l'étain  &l  du  plomb. 

La  platine  ,  mêlée  avec  quatre  ou  cinq  fois  autant 
de  fonte  de  fer,   donne  un  alliage  plus  dur  que  cette 

»  la  platine ,  feml^Ient  indiquer  réellement  le  peu  d'affinité  qu'il  y 
»  a  entre  ces  deux  métaux  ,  il  paroît  que  l'argent  tend  à  fe  féparer 
•>■>  de  ia  platine.  On  a  infailliblement  des  criflallifations  d'argent  bien 
35  prononcées  ,  en  fondant  huit  parties  d'argent  pur  avec  une  partie 
»  de  platine  &  en  les  paflant  à  la  coupelle.  J'ai  remis  pour  Je 
»  Cabinet  du  Roi  des  boutons  de  deux  gros  ainiî  criftalijfés  à 
»  leur  furface  ;  la  loupe  la  moins  forte  d'un  microfcope  fait  dilîinguer 
nettement  les  petites  pyrajiiides  de  l'argent  ».  Remarque  ((^mmuniquée 
far  M,   Tillet. 


DES   Minéraux.  533 

fonte,  &  encore  moins  fujet  à  la  rouille,  il  prend  un 
beau  poli  ;  mais  il  efl  trop  aigre  pour  pouvoir  être  mis 
en  Œuvre  comme  l'alliage  du  cuivre.  M.  Lewio,  au- 
quel on  doit  ces  obfervations,  dit  auiïi  que  la  platine  iè 
fond  avec  i'ctain  en  toutes  proportions,  depuis  parties 
égales  jufqu'à  vingt -quatre  parties  d'étain  fur  -une  de 
platine ,  &  que  ces  alliages  font  d'autant  plus  durs  & 
plus  aigres,  qtie  la  platine  efl  en  plus  grande  quantité, 
en  forte  qu'il  ne  paroît  pas  qu'on  puiife  les  travailler: 
il  en  efl  de  même  des  alliages  avec  le  plomb,  qui  mcme 
exigent  un  feu  plus  violent  que  ceux  avec  l'étain.  Cet 
Iiabile  Chimifte  a  encore  obfervé  que  le  plomb  & 
i'argent  ont  tant  de  peine  à  s'unir  avec  la  platine,  qu'il 
tombe  toujours  une  bonne  partie  de  la  platine  au  fond 
du  crcufet,  dans  fa  fufion  avec  ces  deux  métaux,  qui 
de  tous  ont  par  conféquent  le  moins  d'affinité  avec  ce 
minéral. 

Le  biilnutlî,  comme  Je  plomb,  ne  s'allie  qu'impar- 
faitement avec  la  platine,  &l  l'alliage  qui  en  rcfulte  efl 
caffant  au  point  d'être  friable:  mais  de  la  même  manière 
que  dans  les  métaux ,  le  cuivre  efl  celui  avec  lequel  la 
platine  s'unit  le  plus  facilement ,  il  fe  trouve  que  des 
demi-métaux,  c'efl  le  zinc  avec  lequel  elle  s'unit  auffi  le 
plus  parfaitement;  cet  alliage  de  la  platine  &  du  zinc 
ne  change  point  de  couleur,  &l  reffemble  au  zinc  pur; 
il  efl  fetdement  plus  ou  moins  bleuâtre,  félon  la  pro- 
portion plus  ou  moins  grande  de  la  platine   dans  le 


334       Histoire    Naturelle 

mélange;  il  ne  fe  ternit  point  à  l'air,  mais  il  efl  plus 
aigre  que  le  zinc  qui,  comme  l'on  fait,  s'étend  fous 
ie  marteau:  ainfi  cet  alliage  de  la  platine  &  du  zinc, 
quoique  facile,  n'offre  encore  aucun  objet  d'utilité  ;  mais 
fi  l'on  mêle  quatre  parties  de  laiton  ou  cuivre  jaune 
avec  une  partie  de  platine ,  l'union  paroît  s'en  faire  d'une 
manière  intime  ,  la  fubftance  de  l'alliage  efl  compade 
&  fort  dure,  le  grain  en  efl  très -fin  &  très -ferré,  & 
il  prend  un  poli  vif  qui  ne  fe  ternit  point  à  l'air  ;  fans 
être  bien  duélile,  cet  alliage  peut  néanmoins  s'étendre 
aflez  fous  le  marteau,  pour  pouvoir  s'en  fervir  à  faire 
des  miroirs  de  télefcope ,  &  d'autres  petits  ouvrages 
dont  le  poli  doit  réfifler  aux  impreflions  de  l'air. 

J'ai  cru  pouvoir  avancer  il  y  a  quelques  années  (k^, 
&L  je  crois  pouvoir  foutenir  encore  aujourd'hui ,  que 
Ja  platine  n'ell  point  un  métal  pur,  mais  feulement  un 
alliage  d'or  &l  de  fer,  produit  accidentellement  &  par 
des  circonllances  locales;  comme  tous  nos  Chimifics, 
d'après  M."  SchœfFer  &  Lewis ,  avoient  fur  cela  pris 
Jeur  parti ,  qu'ils  en  avoient  parlé  comme  d'un  nouveau 
métal  parfait,  ils  ont  cherché  des  raifons  contre  mon 
opinion,  &  ces  raifons  m'ont  paru  fe  réduire  à  une 
feule  obje6lion  que  je  lâcherai  de  ne  pas  laiffer  fans 
réponfe  :  «  Si  la  platine ,  dit  un  de  nos  plus  habiles 
»  Chimiftes  (l),  étoit  un   alliage  d'or   &  de  fer ,   d\t 

(k)  Supplémens,  tome  I,  ïn-^'  pages  301    Ù"  fuiv. 
(l)   M.   Macquer. 


DES    Minéraux,  335 

devroit  reprendre  les  propriétés  de  l'or  à  proportion 
qu'on  détruiroit,  &  qu'on  lui  enieveroit  une  pius  grande 
quantité  de  fon  fer,  &  il  arrive  précifément  le  contraire; 
loin  d'acquérir  la  couleur  jaune,  elle  n'en  devient  que 
plus  blanche ,  &  les  propriétés  par  lefquelles  elle  difîere 
de  l'or  n'en  font  que  plus  marquées  ».  Il  efl  très-vrai 
que  fi  l'on  niéle  de  l'or  avec  du  fer  dans  leur  état 
ordinaire ,  on  pourra  toujours  les  féparer  en  quelque 
dofe  qu'ils  foient  alliés,  &  qu'à  mefure  qu'on  détruira 
&  enlèvera  le  fer,  l'alliage  reprendra  la  couleur  de  l'or, 
&  que  ce  dernier  métal  reprendra  lui-même  toutes  fes 
propriétés  dès  que  le  fer  en  fera  féparé;  mais  n'ai -je 
pas  dit  <Sl  répété  que  le  fer,  qui  fe  trouve  fi  intimement 
uni  à  la  platine,  n'eft  pas  du  fer  dans  fon  état  ordinaire 
de  métal ,  qu'il  efl  au  contraire ,  comme  le  fàblon 
ferrugineux,  qui  fe  trouve  mclé  avec  la  platine,  prcfque 
entièrement  dépouillé  de  fès  propriétés  métalliques,  puif 
qu'il  eft  prcfque  infufible ,  qu'il  réfifîe  à  la  rouille,  aux 
acides ,  &  qu'il  ne  lui  refle  que  la  propriété  d'être 
attirable  à  l'aimant:  dès-lors  l'objedion  tombe,  pui/que 
le  feu  ne  peut  rien  fur  cette  forte  de  fer  ;  tous  les 
ingrédiens  ,  toutes  les  combinaifbns  chimiques  ,  ne 
peuvent  ni  l'altérer  ni  le  changer,  ni  lui  ôter  fà  qualité 
magnétique ,  ni  même  le  féparer  en  entier  de  la  platine 
avec  laquelle  il  refle  conflamment  &  intimement  uni  ; 
&  quoique  la  platine  conferve  fa  blancheur  &.  ne  prenne 
point  la  coideur  de  l'or,  après  toutes  les  épreuves  qu'on 


336         Histoire  Naturelle 

lui  a  fait  fubir,  cela  n*eii  prouve  que  mieux  que  i'art 
ne  peut  altérer  fa  nature;  fà  fubftance  efl;  blanche  & 
doit  l'être  en  efîèt  en  la  fuppofant,  comme  je  le  fais, 
compofce  d'or  dénaturé  par  l'arfenic,  qui  lui  donne 
cette  couleur  blanche,  &  qui,  quoique  très-voiati! ,  peut 
néanmoins  y  être  très  -  fixement  uni ,  &:  même  plus 
intimement  qu'il  ne  l'efl  dans  le  cuivre  dont  on  fait 
qu'il  efl;  très-difficile  de  le  fcparer. 

Plus  j'ai  combiné  les  obfervations  générales  &  les 
faits  particuliers  fur  la  nature  de  la  platine ,  pljus  e  me 
fuis  perfuadé  que  ce  n'efl  qu'un  mélange  accidentel  d'or 
imbu  de  vapeurs  ar/ènicales ,  &  d'un  fer  brûlé  autant 
qu'il  efl  poffible,  auquel  le  feu  a  par  conféquent  enlevé 
toutes  fes  propriétés  métalliques,  à  l'exception  de  fon 
magnétifme  ;  je  crois  même  que  les  Phyficiens ,  qui 
réfléchiront  fans  préjugé  ,  fiir  tous  les  faits  que  je  viens 
d'expofer,  feront  de  mon  avis,  &  que  les  Chimifles 
ne  s'obftineront  pas  à  regarder  comme  un  métal  pur 
&  parfait,  une  matière  qui  efl  évidemment  alliée  avec 
d'autres  fubflances  métalliques.  Cependant  voyons  encore 
de  plus  près  les  raifons  fur  lefquelles  ils  voudroient  fonder 
leur  opinion. 

En  recherchant  les  différences  de  l'or  &  de  la  platine 
jufque  dans  leur  décompofition ,  on  a  obfervé,  i.°que 
la  dilToIution  de  la  platine  dans  l'eau  régale  ne  teint 
pas  la  peau,  les  os,  les  marbres  &  pierres  calcaires  en 
couleur  pourpre,  comme  le  fait  la  diffolution  de  Tor, 

&  que 


DES    Minéraux,  337 

&  que  la  platine  ne  fe  précipite  pas  en  pouJre  couleur 
de  pourpre,  comme  l'or  précipite  par  l'étain;  mais  ceci 
doit-il  nous  furprendrc,  puifque  la  platine  eft  blanclie 
(îx.  que  l'or  c(t  jaune'  2.  L'e/prit-de-vin  &  les  autres 
huiles  efTentielles ,  ainfi  que  le  vitriol  de  fer,  précipitent 
l'or  &  ne  précipitent  pas  la  platine  ;  mais  \\  me  /èmble 
que  cela  doit  arriver ,  puifque  la  platine  eft  mêlée  de 
fer  avec  lequel  le  vitriol  martial  &  les  huiles  efTentielles 
ont  plus  d'affinité  qu'avec  l'eau  régale ,  &  qu'en  ayant 
moins  avec  l'or  elles  le  laifTent  fè  dégager  de  fà  difTo- 
lution.  3.  Le  précipité  de  la  platine  par  l'alkali  volatil,  ne 
devient  pas  fulminant  comme  celui  de  for,  cela  ne  doit 
pas  encore  nous  étonner;  car  cette  précipitation  pro- 
duite par  l'alkali,  e(l  plus  qu'imparfaite,  attendu  que 
la  diffolution  refle  toujours  colorée  &  chargée  de  platine, 
qui  dans  le  vrai,  ed;  plutôt  calcinée  que  diffoute  dans 
l'eau  régale:  elle  ne  peut  donc  pas,  comme  l'or  diffous 
&  précipité,  faidr  l'air  que  fournit  l'alkali  volatil,  ni 
par  conféquent  devenir  fulminante.  4.  La  platine  traitée 
à  la  coupelle,  foit  par  le  plomb,  le  bifmuth  ou  l'anti- 
moine ,  ne  fait  point  {'éclair  comme  l'or ,  &  femble 
retenir  une  portion  de  ces  matières,  mais  cela  ne  doit-il 
pas  néceffaircment  arriver,  puifque  fa  fufion  n'eft  pas 
parfaite ,  &l  qu'un  mélange  avec  une  matière  déjà  mé- 
langée,  ne  peut  produire  une  fubftance  pure,  telle  que 
celle  de  l'or  quand  il  fait  l'éclair  !  ainfi  toutes  ces 
différences,  loin  de  prouver  que  la  platine  efl  un  métal 
Aline  rail  X ,  Tcmc  UL  Lu 


338        Histoire   N aturelle 

fimple  &  difFctent  de  l'or ,  fembiciit  démontrer  au 
contraire ,  que  c'eft  un  or  dénaturé  par  l'alliage  intime 
d'une  matière  ferrugineufe  également  dénaturée;  &.  fi 
notre  art  ne  peut  rendre  à  ces  métaux  leur  première 
forme  ,  il  ne  faut  pas  en  conclure  que  la  fubflance  de 
la  platine  ne  fbit  pas  compofée  d'or  &l  de  fer,  pui/que 
la  préfence  du  fer  y  efl  démontrée  par  l'aimant,  &  celle 
de  l'or  par  la  balance. 

Avant  que  la  platine  fut  connue  en  Europe ,  les 
Efpagnols,  &  même  les  Américains,  l'avoient  fondue 
en  la  mêlant  avec  des  métaux,  &  particulièrement  avec 
le  cuivre  &  l'arfenic;  ils  en  avoient  lait  différens  petits 
puvrages  qu'ils  donnoient  à  plus  bas  prix  que  de  pareils 
ouvrages  en  argent  ;  mais  avec  quelque  métal  qu'on 
puifle  allier  la  platine ,  elle  en  détruit  ou  du  moins 
diminue  toujours  la  dudilité;  elle  les  rend  tous  aigres 
(Se  caflans,  ce  qui  fembie  prouver  qu'elle  contient  une 
petite  quantité  d'arfenic,  dont  on  fait  qu'il  ne  faut  qu'un 
grain  pour  produire  cet  efiet  fur  une  -maffe  confidé- 
rable  de  métal:  d'ailleurs,  il  paroît  que  dans  ces  alliages 
de  la  platine  avec  les  métaux  ,  la  combinaifon  des 
fubflances  ne  fe  fait  pas  d'une  manière  intime,  c'ell 
plutôt  une  agrégation  qu'une  union  parfaite  ,  &.  cela 
feul  fuflit  pour  produire  l'aigreur  de  ces  alliages. 

M.  de  Morveau  ,  auffi  favant  Pbyficien  qu'habile 
Chimifte,  dit  avec  raifon,  que  la  denfité  de  la  platine  (m) 

(wj    belon    M.   Briflbn  ,   h   platine    en   grenaille    ne    pèfe   que 


DES    Minéraux.  39 

n'eft  pas  confiante,  qu'elle  varie  même  fuivant  les  diffé- 
rens  procédés  qu'on  emploie  pour  la  fondre ,  quoiqu'elle 
n'y  prenne  certainement  aucun  alliage  (n) ;  ce  fait  m  ' 
démontre  t-il  pas  deux  chofesî  la  première,  que  la  denfité 
efl:  ici  d'autant  moindre  que  la  flifion  efl  plus  impar- 
faite, &  qu'elle  feroit  peut-être  égale  à  celle  de  l'or 
fi  l'on  pouvoit  réduire  la  platiue  en  fonte  parfaite  ; 
c'efl  ce  que  nous  avons  tâché  de  faire  en  en  faifant 
pafTer  quelques  livres  à  travers  les  charbons  dans  un 
fourneau    d'afjiiration   ^oj:  h   féconde ,    c'efl    que   cet 

10^2  livres  2  onces  le  j^ied  cube,  tandis  que  la  platine  tojidiie 
âc  écrouie  pèfe  1423  livres  9  onces  ,  ce  qui  furpalTe  la  denfité  de 
l'or  battu  &  e'croui,  qui  ne  pc(e  que  1355  livres  5  onces.  Si  cette 
détermination  efl  exade ,  on  doit  en  inférer  que  la  platine  fondue 
eft  fufceptible  d'une  plus  grande  coinprefîion  que  l'or. 

fn)  EIcmens  de  Chimie,   tome   I ,  page   i  i  0. 

(0)  ce  II  efl  impofîlble  de    fondre  la  platine  ou  or  blanc  dans  u» 
creufet,  fans  addition.  Il  re'fîfle  à  un  feu  aufîi  vif,  &  mêine  plus  fort  <t 

que  celui  qui  fond  les  meilleurs  creuf'ets Il  fondroit  beaucoup  ce 

plus  aife'ment  fur  les  charbons  ,  fans  creufet  ;  mais  on  ne  peut  le  ce 
traiter  ainfi  ,  c{uand  on  n'en  a  pas  une  livre  ,  &  j'ctois  dans  ce  *< 
cas.  Le  phlogirtique  des  charbons  ne  contribue  en  aucune  manière  « 
à  la  fufion  de  ce  métal  ;  mais  leur  chaleur  animée  par  le  foufïïet  « 
de  forge  efl  beaucoup  plus  forte  qu(?  celle  du  creufet  ».  Defcription 
de  l'or  blanc ,  &c.  par  AI.  Schœffer ,  Journal  étranger  ,  moh  de 
Novembre  ly^J- —  J'ai  penfé  fur  cela  comme  M.  ScliœfTer ,  &  j'ai 
Cru  que  je  viendrois  à  bout  de  fondre  parfaitement  la  platine  en 
la  faifant  pafTer  à  travers  les  charbons  ardens,  5c  en  affez  grande 
quantité  pour  pouvoir  la  recueillir  en  fonte;  M.  de  Morveau  a  bien 
voulu  conduire  cette  opération  en  ma  préfence;  pour  cela  nous  avons 

Uu  ij 


340  Histoire   Naturelle 

alliage  de  fer  <Sc  d'or,  produit  parmi  accident  de  nature, 
n'efl  pas,  comme  les  métaux,  d'ime  denfité  confiante, 

fait  coiiflruire  ,  au  mois  d'Août  dernier  17S1  ,  wne  efpcce  de  haut 
fourneau  de  treize  pieds  huit  ])ouces  de  hauteur  loiale  divifc'e  en 
cjuatre  parties  égales,  favoir  ;  ia  partie  inférieure,  de  forme  cylin- 
drique de  vingt  pouces  de  haut  fur  vingt  pouces  de  diamètre,  formée 
de  trois  dalles  de  pierre  calcaire  pofées  fur  une  pierre  de  même 
nature ,  creufée  légèrement  en  fond  de  chaudière  ,  ce  cylindre  éioit 
])ercé  vers  le  bas  de  trois  ouvertures  difpolées  aux  fommets  d'un 
triangle  équilatéral  infcrit  ;  chacune  de  ces  ouvertures  étoit  de  huit 
pouces  de  longueur  fur  dix  de  hauteur  ,  «Se  défendue  à  l'extérieur 
par  des  murs  en  brique  ,  à  la  manière  des  gardes-tirans  des  fours 
à  porcelaine. 

La  féconde  partie  du  fourneau  formée  de  dalles  de  même  pierre , 
^toit  en  cône  de  douze  j^ouces  de  hauteur ,  ayant  au  bas  vingt 
pouces  de  diamètre  &  neuf  pouces  au-delfus  ;  Jes  dalles  de  CQi 
deux  parties  écoient  entretenues  par  des  cercles  de  fer. 

La  troifième  partie  formant  un  tuyau  de  neuf  pouces  de  diamèire 
^   de  cinq  pieds  de  Jong  ,  ïni  Low'iS.xuw.Q  en  briques. 

Un  tuyau  de  tôle  de  neuf  pouces  de  diamètre  &  fix  pieds  de 
hauteur,  placé  fur  le  tuyau  de  briques,  formoit  la  quatrième  &  dernière 
partie  du  fourneau  ;  on  avoit  pratiqué  une  porte  vers  le  bas  pour 
la  commodité  du  chargement. 

Ce  fourneau  ainfi  conflruit,  on  mit  le  feu  vers  les  quatre  heures 
du  foir  ,  il  tira  d'abord  aflez  bien  ;  mais  ayant  éié  chargé  de  charbon 
jufqu'aux  deux  tiers  du  tuyau  de  briques ,  le  feu  s'éteignit ,  &  on 
eut  affez  de  peine  à  le  rallumer  «5c  à  faire  defcendre  les  charbons 
qui  s'engorgeoient  ;  l'humidité  eut  fans  doute  au/Ti  quelque  part  à 
cet  effet;  ce  ne  fui  qu'à  minuit  que  le  tirage  fe  rétablit,  on  l'en- 
treunt  jufqu'à  huit  heures  du  matin  en  chargeant  de  charbon  à  la 
hauteur  de  cinq  pieds  feulement,  &  bouchant  alrernaiivement  un 
des  tifards  pour  augmenter  l'adivité  des  deux  autres. 


DES    Minéraux.  341 

mais    d'une   denfitc    variable,   oc    rccilciiKin   clilîûcme 
fliivant  les  circoiilhnces,   en  forte  que  iclle  platine  cfl 

Alors  on  jeta  dans  ce  fourneau  treize  onces  de  jjlatiiie  inélee 
avec  quatre  livres  de  verre  de  bouteille  puiverilc  <5c  tamik' ,  &  on 
continua  de  charger  de  cliarboii  à  la  même  hauteur  de  cinq  pieds 
au-defius  du  fond. 

Deux  heures  après  o\\  ajouta  même  quantitd  de  platine  &  de  verre 
pile. 

On  aperçut  vers  le  midi  quelques  fcories  à  l'ouverture  des  lifards  ; 
elles  ctoient  d'un  verre  groflîer ,  tenace,  pâteux,  &  préfentoient  à 
leur  (urface  des  grains  de  platine  non  attaques;  oa  fit  rejeter  dans 
le  fourneau  toutes  celles  cjue  l'on  put  tirer. 

On  efîàya  de  boucher  à  la  fois  deux  tifards,  &  l'élévation  de  la 
flamme  fit  voir  que  le  tirage  en  étoit  réellement  augmenté,  mais  \e% 
cendres  qui  s'atnonceloient  au  fond  ,  arrêtant  le  tirage  ,  on  prit  le 
parti  de  faire  jouer  un  très-gros  fouiîlet  en  introduifant  la  bufe 
dans  un  des  tiiàids  ,  les  autres  bouchés,  &  pour  lors  on  enleva  le 
tuyau  de  tôle  qui  devenoit  inutile. 

On  reconnut  vers  les  cinq  heures  du  loir  que  les  cendres  étoient 
diminuées;  les  fcories  mieux  fondues  contenoient  une  infinité  de 
petits  globules  de  platine;  mais  il  ne  fut  pas  poffible  d'obtenir  un 
laitier  allez  fluide  pour  permettre  la  réunion  des  petits  culois  métal- 
liques ;   on  arrêta  le  feu  à   minuit. 

Le  fourneau  ayant  été  ouvert  après  deux  jours  de  refroidilTemenr , 
on  trouva  fur  le  fond  une  mafle  de  fcories  groflières ,  formées  des 
cendres  vitrifiées  &.  de  quelques  matières  étrangères  portées  avec 
le  charbon,  la  platine  y  étoit  dilléminée  en  globules  de  difll'erentes 
grofièurs  ,  quelques-uns  du  poids  de  vingt-cinq  à  trente  grdins , 
tous  très-attirables  à  l'aimant:  on  obfeiva  dans  quelques  parties  des 
fcories  ,  une  efpèce  de  criHallifation  en  rayons  divergens,  comme 
i'afberte  ou  l'hématite  flriée,  La   chaleur  avoit  été   fi   violente  que 


34-  Histoire  Naturelle 

plus  ou  moins  pefante  que  telle  autre,  tandis  que  dans 
tout  vrai  métal,  la  denfké  efl  égale  dans  toutes  les  parties 
de  fa  fubilance. 


dans  tout  le  pourtour  intérieur ,  la  pierre  du  fourneau  étoit  complè- 
tement calcinée  de  trois  pouces  5c  demi  d'e'paifleur  &  même  entamée 
en  quelques  endroits   par  la  vitrification. 

Les  fcories  pulvérifées  furent  débarrafTées  par  un  lavage  en  grande 
eau  ,  de  toutes  les  parties  de  chaux  &  même  d'une  portion  de  la 
terre.  On  mit  toute  la  matière  refiante  dans  un  très-grand  creufet 
de  plomb  noir  avec  une  addition  de  fix  livres  d'alkali  extemporané  ; 
ce  creufet  fut  placé  devant  les  foufflets  d'une  chaufferie  ;  en  moins 
de  fix  heures  Je  creu(èt  fut  percé  du.  côté  du  vent,  &  il  fallut 
arrêter  le  feu  parce  que  la  matière  qui  en  fortoit  couloit  au-devant 
des  foufflets. 

On  reconnut  le  lendemain  à  l'ouverture  du  creufet  que  la  maffe 
vitreufe  qui  avoir  coulé  &  qui  étoit  encore  attachée  au  creufet, 
tenoit  une  quantité  de  petits  culots  de  platine  du  poids  de  foixante 
à  quatre-vingts  grains  chacun ,  &  qui  étoient  formés  de  globules 
refondus  ;  ces  culots  éioient  de  même  rrès-magnéiiques,  &  plufieurs 
préfentoient  à  leur  furface  des  élémens  de  crifiallifation.  Le  refte 
de  la  platine  étoit  à  peine  aglutiné. 

On  pulvérifa  groflièrement  toute  la  ma/fe,  &  en  y  promenant 
le  barreau  aimanté  ,  on  en  relira  près  de  onze  onces  de  platine , 
tant  en  globules  qu'en  poufîitre  métallique  ;  cette  expérience  fut 
faite  aux  forges  de  Bnflon ,  &  en  même  temps  nous  répétâmes  dans 
mon  laboratoire  de  Mombard  l'expérience  de  la  platine  malléable; 
on  fit  clifibudre  un  globule  de  platine  dans  l'eau  régaie  ,  on  précipita 
la  diifolution  par  le  lél  ammoniac ,  le  précipité  mis  dans  un  creufet 
au  feu  d'une  petite  forge  ,  tut  promptement  revivifié  ,  quoique  fans 
fufion  complète.  Il  s'étendit  très  -  bien  Ibus  le  marteau ,  &  les 
parcelles  atténuées  &  divifées  dans  le  mortier  d'agatbe  fe  trouvèrent 
encore  ienfxbles  à  l'aimant. 


DES    Minéraux.         3  4.3 

M.  de  Morveau  a  reconnu,  comme  moi  &  avec 
moi,  que  la  platine  eft  en  elle-même  magnétique, 
indépendamment  du  fablon  ferrugineux  dont  elle  eft 
extérieurement  mêlée,  &  quelquefois  environnée;  comme 
cette  ohfervation  a  été  contredite ,  &  que  Sciiaiièr  a 
prétendu  qu'en  faifànt  feulement  rougir  Ja  platine  elle 
cefToit  d'être  attirable  à  l'aimant;  que  d'autres  Chimjiles 
en  grand  nombre  ont  dit  qu'après  la  fonte  elle  étoit 
abfolument  infenrd:)le  à  l'aétion  magnétique  ,  nous  ne 
pouvons  nous  difpenfer  \Ie  préfenter  ici  le  rcfultat  des 
expériences,  &  les  faits  relatifs  à  ces  affertions. 

M/^   Macquer    &    Baume  affurent    avoir   reconnu  : 
«  Qu'en  pouffant  à  un  très-grand  feu  pendant  cinquante 
heures  la  coupellation  de  la  platine,  elle  avoit  perdu  de  « 
fon  poids ,  ce  qui  prouve  que  tout  le  plomb  avoit  paffé  « 
à  la  coupelle  avec  quelque  matière  qu'il  avoit  enlevée,  *^ 
d'autant  que  cette   platine  pa(fée  à  cette   forte  é])reuve  ^^ 
de  coupelle  étoit  devenue  affez  duélile  pour  s'étendre  <' 
fous  le  marteau  »^  fp) .  Mais  s'il  étoit  bien  confiant  que 
la  platine  perdît  de  fon  poids  à  la  coupellation,  &  qu'elle 
en  perdit  d'autant   plus  que  le  feu  efl  plus  violent  & 
plus  long -temps   continué;  cette  coupellation  de  cin* 
quante  heures  n'étoii  encore  qu'imparfaite,  &  n'a  pas 
réduit  la  platine  à  fou  état  de  pureté:  <«  On  n'étoit  pas 
encore  parvenu  ,  dit   avec  raifon  M.    de   Morveau,  à  « 


(p)  Didionnaire  de  Chimie,  art.  Platine. 


» 


» 


» 


344         Histoire   N atu relle 

»  achever  ia  coupeliatioii  tic  la  platine  lorfque  nous  avons 
fait  voir  qu'il  étoic  polTibie  de  la  rendre  complète  au 
moyen  d'un  feu  de  la  dernière  violence,  M.  de  Bufion  a 
inlcré  dans  (es  Supplémens^</y'^  le  détail  de  ces  expériences 
>)  qui  ont  fourni  un  bouton  de  platine  pure,  &  ab/blument 
»  privée  de  plomb  &  de  tout  ce  qu'il  auroit  pu  /coriiier; 
»  &  il  faut  obferver  que  cette  platine  manifefta  encore 
»  un  peu  de  fenfibilité  à  l'aclion  du  barreau  aimante  lorf- 
»•  qu'elle  fiit  réduite  en  poudre,  ce  qui  annonce  que  cette 
»  propriété  lui  eft  effentielle,  puifqu'elle  ne  peut  dépendre 
ici    de   l'alliage  d'un  fer   étranger  (r)  »,   On   ne  doit 

donc 

(q)  Supplément  à  l'Hidoire  Naturelle ,  tome  I ,  in-^' 
(r)  Eléiiiens  de  Chimie,  tome  I,  page  21p.  «  1,1  n'efl  pas 
5»  pofllble,  dit  ailleurs  AI.  de  Morveau  ,  de  luppofer  que  ia  portion 
>5  de  platine  d'abord  traitée  par  le  nitre  (Sc^nfuiiepar  l'aciue  vitriolique, 
»  fut  un  fer  étranger  à  la  pladne  eile-même  ,  puilqu'il  efl:  tvident 
»  qu'il  auroit  clé  calciné  h  la  première  détonation  ,  &  que  nous 
3}  avions  eu  ratteniion  de  ne  loumettre  à  la  léconde  opciation  que 
î>  la  platine  qui  avoit  reçu  !e  brillant  métallique;  cette  réflexion  nous 
5>  a  engagés  à  traiter  une  troifième  fois  ies  cjnq  cents  grains  reflins, 
»  Se  le  rcfultat  a  été  encore  plus  faiisfailànt.  Le  creufet  ayant  été 
«tenu  plus  long -temps  au  feu,  la,  platine  étoit  comme  aglutinée 
»au-deirous  de  la  matière  faline,  la  lefllve  étoit  plus  colorée  & 
»  comme  verdâtre ,  &  la  poufiicre  noire  plus  abondante  ;  l'acide 
35  vitriolique  ,  bouilli  fur  ce  qui  ctoit  reQé  fur  le  filtre,  étoit  fenfi- 
«  blement  plus  chargé,  &  la  platine  en  état  de  métal,  rcduite  à 
»  trente-cinq  grains  ,  coinpris  quelques  écailles  qui  avoient  l'appa- 
»  rence  de  fer  brûlé  ,  &  qui  étoient  beaucoup  plus  larges  qu'aucun 
>7  des  grains  de  platine.  Une  autre  circonfîance  bien  digne  de 
j»  remarque ,    c'eft    que    dans   ces   trente-cinq  grains   on    découvroit 

uilément 


DES    Minéraux.  3^1.5 

donc  pas  regarder  la  platine  comme  un  métal  pur, 
funpie  &  parlait,  puifqu'en  ia  purifiant  autant  qu'il  eft 
polFibie,  elle  contient  toujours  des  parties  de  fer  qui 
la  rendent  fenfible  à  l'aimant.  M.  de  Morveau  a  fondu 
la  platine  ,  fans  addition  d'aucune  matière  métallique, 
par  un  fondant  compofé  de  huit  parties  de  verre  pu!- 
vérifé,  d'une  partie  de  borax  calciné,  &  d'une  demi- 
partie  de  poufFière  de  charbon.  Ce  fondant  vitreux  <Sc 
falin,  fond  également  les  mines  de  fer  &  celles  de  tous 
ies  autres  métaux  (f),  &  après  cette  iufion  où  il  n'entre 
ni  ter  ni  aucun  autre  métal ,  la  platine  broyée  dans  un 
mortier  d'agate  étoit  encore  attirable  à  l'aimant.  Ce 
même  habile  Chimifte  eft  le  premier  qui  foit  venu  à 
bout  d'allier  la  platine  avec  le  fer  forgé,  au  moyen  du 
fondant  que  nous  venons  d'indiquer:  cet  alliage  du  fer 
forgé  avec  la  platine,  eft  d'une  extrême  dureté,  il  reçoit 

aileinent  à  la  feule  vue,  nombre  de  paillettes  de  couleur  d'or ,  c< 
tandis  qu'auparavant  nous  n'en  avions  aperçu  aucune  ,  même  « 
avec  le   fecours  de  la  loupe «c 

Nous  avons  fait  digérer  dans  l'eau  régale  la  pouffière  noire  qui  c< 
avoit  été  féparée  par  les  lavages  ;  elle  a  fourni  une  dilToIution  u 
palTdblement  chargée,  qui  avoit  tous  les  caradères  d'une  diflolution  ec 
de  platine  ,  qui  a  donné  fur  le  champ  un  beau  précipité  jaune-  «e 
pâle  ,  par  l'addition  de  la  diflolution  du  fel  ammoniac ,  ce  qui  « 
n'arrive  pas  à  la  diflolution  de  fer  dans  le  même  acide  mixte  ;  la  «c 
liqueur  prufllenne  faturée  l'a  colorée  en  vert,  &  la  fécule  bleue  « 
a  été  plufieurs  jours  à  fe  raflembler  m.  Élémens  de  Chimie,  fat 
M.   de  Aforveûu ,  tome   II ,  pages    i  ^ }    &  Juiv* 

(f)   Idem,   tome  I ,  page  2.2J, 

ATinêmiipçj  Tome  IIL  X  x 


3^6  Histoire  Naturelle 

un  très-beau  poli  qui  ne  fe  ternit  point  à  l'air  ,  &  ce 
feroit  la  matière  la  plus  propre  de  toutes  à  faire  des 
miroirs  de  télcfcope  (t). 

Je  pourrois  rapporter  ici  les  autres  expériences  par 
Jefquelles  M.  de  Morveau  s'efl  afTuré  que  le  fer  exifte 
toujours  dans  la  platine  la  plus  purifiée  ;  on  les  lira  avec 
fatisfaélion  dans  Ion  excellent  Ouvrage  (u) ;  on  y  trou- 
vera entr'autres  chofes  utiles,  l'indication  d'un  moyen 
Tur  &  facile  de  reconnoître  fi  l'or  a  été  faldtié  par  le 
mélange  de  la  platine;  il  luilit  pour  cela  de  faire  difToudre 
dans  l'eau  régale,  une  portion  de  cet  or  fufpcél,  & 
d'y  jeter  quelques  gouttes  d'une  dilTolution  de  fel 
ammoniac,  il  n'y  aura  aucun  précipité  fi  l'or  e/l  pur, 
&  au  contraire,  il  /e  fera  un  précipité  d'un  beau  jaune 
s'il  efl  mêlé  de  platine  ;  on  doit  feulement  avoir  atten- 
tion de  ne  pas  étendre  la  dilfolution  dans  beaucoup 
d'eau  (x) ;  c'efl  en  traitant  le  précipité  de  la  platine, 
par  une  diffolution  concentrée  de  fel  ammoniac,  &  en 
lui  faifànt  fubir  un  feu  de  la  dernière  violence,  qu'on 


(tj  La  pfatine  eft  de  tous  (es  métaux  le  plus  piopre  à  faire  les 
miruirs  des  télelcopes  ,  puilqu'elle  refi/te,  auflj-bien  que  l'or,  aux 
vapeurs  de  l'air,  qu'elle  eft  cojupade  ,  fort  cJenle  ,  fans  coukvr  & 
plus  dure  que  l'or  ,  que  le  défaut  de  ces  deux  propriétés  rend  inutile 
pour  cet  ufage.  Defcriptïon  de  l'or  blanc ,  par  M.  Schœfftr ;  Journal 
étranger,  mois  de   Novembre    iy^7. 

(u)  Voyez  les  Éiéinens  de  Chimie,   tome  II ,  pages  /^  &  fuïv, 

(xj  Idem,  ihi^^m  ,  pages  26$    ù"  31^* 


DES   Minéraux.  3  47 

peut  la  rendre  aflez  dudile  pour  s'éteiiJre  /bus  le 
marteau,  mais  dans  cet  état  de  plus  grande  pureté,  lorf- 
qu'on  la  réduit  en  poudre  ,  elle  efl  encore  attirable  à 
l'aimant;  la  platine  efl  donc  toujours  mêlée  de  fer,  & 
dès-lors  on  ne  doit  pas  la  regarder  comme  un  métal 
fimple  :  cette  vérité,  déjà  bien  confiatée,  fe  confirmera 
encore  par  toutes  les  expériences  qu'on  voudra  tenter 
pour  s'en  afTurer.  M.  Margrafi  a  précipité  la  platine  par 
plufieurs  fubflances  métalliques;  aucune  de  ces  préci- 
pitations ne  iui  a  donné  la  platine  en  état  de  métal, 
mais  toujours  fous  la  forme  d'iuie  poudre  brune  ;  ce 
fait  n'ert  pas  le  moins  important  de  tous  les  faits  qui 
mettent  ce  minéral  hors  de  la  claffe  des  métaux 
fnnples. 

M.  Lewis  affure  que  Tarfenic  diffout  aifément  la 
platine;  M.  de  Morveau  ,  plus  exaét  dans  fes  expériences, 
a  reconnu  que  cette  diffolution  n'étoit  qu'imparfaite, 
&  que  l'arfénic  corrodoit  plutôt  qu'il  ne  difTolvoit  la 
platine ,  &  de  tous  les  eifais  qu'il  a  faits  fur  ces  deux 
minéraux,  joints  enfcmble,  il  conclut  qu'il  y  a  entr'eux 
une  très-grande  affinité,  «  ce  qui  ajoute,  dit-il,  aux  faits 
qui  établi fîcnt  déjà  tant  de  rapports  entre  la  platine  &  le  <« 
fer;  »  mais  ce  dernier  fait  ajoute  auffi  un  degré  de  pro- 
babilité à  mon  idée,  fur  l'exiflence  d'ime  petite  quantité 
ci'arfenic  dans  cette  ful.flance  compofée  de  fer  &  d'or. 

A  tous    ces    faits    qui   me  fcmblent   démontrer  quô 
la  platine  n'ell  point  un  métal  pur  &  f  mple ,  mais   un 

Xx  ij 


34^         Histoire  Natv relle 

niclange  de  fer  &  d'or  tous  deux  altérés ,  &  dans  lequel 
ces  deux  métaux  font  intimement  unis ,  je  dois  ajouter 
une  obfervation  qui  ne  peut  que  les  confirmer:  il  y  a 
des  mines  de  fer,  tenant  or  du  argent,  qu'il  efl  impoffible 
même  avec  (e'ize  parties  de  plomb,  de  réduire  en 
fcories  Huides  ;  elles  font  toujours  pâteufes  &  filantes , 
ik  par  conféquent  l'or  &  l'argent  qu'elles  contiennent, 
ne  peuvent  s'en  féparer  pour  fe  joindre  au  plomb.  On 
trouve  en  une  infinité  d'endroits ,  des  fables  ferrvigineux 
tenant  de  l'or  ;  mais  jufqu'à  préfent  on  n'a  pu ,  par  ia 
fonte  en  grand,  en  féparer  afTez  d'or  pour  payer  les 
frais;  le  fer  qui  fe  refiTufcite  retient  l'or,  ou  bien  l'or 
relie  dans  les  fcories  (y) ;  cette  union  intime  de  l'or 
avec  le  fer  dans  ces  fablons  ferrugineux,  qui,  tous  /ont 
très-magnétiques  &  femblables  au  fablon  de  la  platine, 
indiquent  que  cette  même  union  peut  bien  être  encore 
plus  forte  dans  la  platine  où  l'or  a  fouffert,  par  quelques 
vapeurs   arfenicales ,   une  altération  qui   l'a  privé  de  fà 


(y)  Traité  de  la  fonte  des  mines  de  Schlutter,  tome  I ,  pages  i  Sf 
if  I  8 ^.  —  Nota.  On  doit  néanmoins  obferver  que  le  procédé 
indiqué  par  M.  Hellot  ,  d'après  Schlutter,  n'eft;  peut-être  pas  Je 
meilieur  qu'on  puifTe  employer  pour  tirer  l'or  &  l'argent  du  fer. 
M.  de  Grignon  ait  qu'il  faut  fcorifier  par  le  foufre ,  rafraîchir 
par  le  plomb  &  coupeler  enluite  ;  il  aflure  que  le  fieur  Vatrin 
a  tiré  l'or  du  fer  avec  quelque  bénéfice  ,  &  qu'il  en  a  traité  dans 
un  an  quarante  milliers  qui  venoient  des  forges  de  M.  de  h  BJou;'e 
en  Nivernois  &  Berry  ,  d'une  veine  de  mine  de  fer  qui  a  cefTé 
de  fournil    de  ce  minéral  aurifère. 


DES    Minéraux.  3^9 

du6lilité  :  &  cette  union  efl  d'autant  plus  difficile  à 
rompre,  que  ni  l'un  ni  l'autre  de  ces  métaux,  n'exifle 
dans  la  platine  en  leur  état  de  nature,  puifque  tous  deux  y 
font  dénués  de  la  plupart  de  leurs  propriétés  métalliques. 
«  Toutes  les  expériences  que  j'ai  faites  fur  la  platine, 
m'écrit  M.  Tillet,  me  conduifent  à  croire  qu'elle  n'efl  « 
point  un  métal  fimple  ,  que  le  fer  y  domine ,  mais  « 
qu'elle  ne  cont'imt point  dor  >>.  Quelque  confiance  que 
j'aie  aux  lumières  de  ce  favant  Académicien,  je  ne  puis 
me  perfuader  que  la  partie  denfe  de  la  platine,  ne  foit 
pas  effentiellement  de  l'or,  mais  de  l'or  altéré,  &  auquel 
notre  art  n'a  pu  jufqu'à  prcfent  rendre  fa  première 
forme  :  ne  feroit-il  pas  plus  qu'étonnant  qu'il  exiflât  en 
deux  feuls  endroits  du  monde,  une  matière  auffi  pe/ànte 
que  l'or ,  qui  ne  fèroit  pas  de  l'or  î  &.  que  cette  matière 
fi  denfe  qu'on  voudroit  fuppofer  différente  de  l'or,  ne 
fè  trouvât  néanmoins  que  dans  des  mines  d'or  !  je  le 
répète,  fi  la  platine  fè  trouvoit,  comme  les  autres  métaux, 
dans  toutes  les  parties  du  monde,  fi  elle  fe  trouvoit 
en  mines  particulières,  &.  dans  d'autres  mines  que  celles 
d'or,  je  pourrois  penfer  alors  avec  M.  Tillet,  qu'elle 
ne  contient  point  d'or,  &  qu'il  exifle  en  effet  une  autre 
matière  à  peu-près  auffi  denfe  que  l'or  dont  elle  feroic 
compofée  avec  un  mélange  de  fer ,  &  dans  ce  cas ,  on 
pourroit  la  regarder  comme  un  feptième  métal,  fur-tout 
fi  l'on  pouvoit  parvenir  à  en  féparer  le  fer;  mais  jufqu'à 
ce  jour,   tout  me  femble  démontrer  ce  que  j'ai  ofé 


350       Histoire   Naturelle 

avancer  le  premier ,  que  ce  minéral  n'efl  point  un 
métal  fimple,  mais  feulement  un  alliage  de  fer  &  d'or. 
Il  me  paroît  même  qu'on  peut  prouver  par  un  feul  fait, 
que  cette  fiibftance  denfè  de  la  platine ,  n'ell  pas  une 
matière  particulière  cflentiellement  différente  de  l'or; 
puifque  le  foufre  ou  fa  vapeur  agit  fur  tous  les  métaux, 
à  l'exception  de  l'or,  <Sc  que  n'agiffant  point  du  tout 
fur  la  platine ,  on  doit  en  conclure  que  la  fubftauce 
àenfe  de  ce  minéral ,  efl  de  même  eflence  que  celle 
de  l'or,  ÔL  l'on  ne  peut  pas  objecter  que  par  la  même 
raifon  la  platine  ne  contienne  pas  du  fer ,  fur  lequel 
l'on  fait  que  le  foufre  agit  avec  grande  énergie,  parce 
qu'il  faut  toujours  fe  fouvenir  que  le  fer  contenu  dans 
la  platine,  n'efl  point  dans  fon  état  métallique,  mais 
réduit  en  fablon  magnétique,  &  que  dans  cet  état  le 
foufre   ne  l'attaque  pas  plus  qu'il  attaque  l'or. 

M.  le  baron  de  Sickengen,  homme  auffi  recomman- 
dable  par  fes  qualités  perfonnelles  &  fes  dignités  que  par 
lès  grandes  connoi/fances  eji  Chimie  ,  a  communiqué 
à  l'Académie  des  Sciences  en  1778,  les  obfervations 
&  les  expériences  qu'il  avoit  faites  fur  la  platine;  &  ;c 
fais  ici  volontiers  l'éloge  de  fon  travail,  quoique  je 
ne  fois  pas  d'accord  avec  lui  fur  quelques  points  que 
ncu3  avons  probablement  vus  d'une  manière  différente. 
Par  exemple ,  il  annonce  par  fon  expérience  2  i ,  que 
le  nitre  en  fufion  n'altère  pas  la  platine  ;  je  ne  puis 
m'empêcJier  de  lui  faire  obfcrvcj  que  ies  expériences 


tf  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X.  -^  Ç  T 

ides  autres  Chimiftes,  6c  en  pariiciilier  celles  de  M.  de 
Morveaii,  prouvent  le  contraire,  puilque  Ja  platine,  ainfi 
traitée,  fe  iaiire  attaquer  par  J'acide  vitrioiique  &l.  par 
l'eau-forte  (ij. 

L'Expérience  22  de  M.  le  baron  de  Sickenn-en, 
paroît  contirmer  le  fbupçon  que  j'ai  toujours  eu  que 
la  platine  ne  nous  arrive  pas  telle  qu'elle  fort  de  la  mine 
mais  feulement  après  avoir  paffe  fous  la  meule,  &  irès- 
probablement  après  avoir  été  foumi/ê  à  l'amairame;  les 
globules  de  mercure  que  M.  Schœffer  &  M.  le  comte  de 
Milly  ont  remarqué  dans  celle  qu'ils  traitoient,  viennent 
à  l'appui  de  cette  préfomption  que  je  crois  fondée. 

J'obferverai  au  fujet  de  l'Expérience  ^^  de  M.  le 
baron  de  Sickengen,  qu'elle  avoit  été  faite  auparavant, 
&  publiée  dans  une  Lettre  qui  m'a  été  adreffce  par 
M.  de  Morveau,  &  qui  eft  inférée  dans  le  Journal  de 
Phyfiqiie,  rowe  11,  pûge  jj)^;  ce  que  M.  de  Sickengen 
a  fait  de  plus  que  M.  de  Morveau,  c'elt  qu'ayant  opéré 
iix  une  plus  grande  quantité  de  platine,  il  a  pu  former 
un  barreau  d'un  culot  plus  gros  que  celui  que  M.  de 
Morveau  n'a  pu  étendre  qu'en  une  petite  lame. 

Je  ne  peux  me  di/J3enkr  de  remarquer  au/fi  que  îe 
principe  poié  pour  fèrvir  de  bafè  aux  conféquences  de 
l'Expérience  ^6,  ne  me  paroît  pas  jufle  ;  car  un  alliage 
même    fait  ])ar  notre  art,  peut  avoir  ou  acqttérir   des 

I,  —  '■        ■  •  ' — ■"  ■  ■ — "  "         ■  -"    -  ■-     •^^    -      ■-—  ■■^.         — —    - —      _,  ._       ,  ,^ 

(\)    Voyez   les    Eléinens    de    Chimie,   par   M.    de   Morveau, 


352       Histoire    Naturelle 

propriétés  dilférentes  dans  les  fubflances  alliées,   &  par 
coiilcquent  la  platine  pourroit  s'allier  au  mercure,  fans 
qu'on  pût  en  conclure  qu'elle  ne  contient  pas  de  fer, 
ÔL  même    cette  Expérience  56,  eft  peut-être  tout  ce 
qu'il  y  a  de  plus  fort  pour  prouver  au  moins  rimpoifi^ 
biiiic   de    priver   la    platine  de   tout  fer,  pui/que  cette 
platine   revivifiée   que    Ton   nous   donne  pour  la  plus 
pure,   &  qui   éprouve  une  forte  de  décompofition  par 
le  mercure,  produit  une  poudre  noire  martiale,  attirable 
à  l'aimant,  &  avec  laquelle  on  peut   faire    le  bleu  de 
PrufTe  :    or    pour    conclure  ,    comme    le    fait   l'illufîre 
Auteur    (Expérience  Jj) ) ,  que    l'analyfe    n'a   point   de 
prife  fur  la  platine,  il  auroit  fallu  répéter  fur  le  produit 
de  l'Expérience  59,  les  épreuves  fur  le  produit  de  l'Expé- 
rience ^6,  &  démontrer  qu'il  ne  donnoit  plus  ni  poudre 
noire    ni  atomes  magnétiques,  ni  bleu  dePrufFe;    fans 
cela  le  procédé  qui  fait  l'amalgame  à  chaud  ,  n'e/l  plus 
qu'un  procédé  approprié  qui  ne  décide  rien. 

J'obferve  encore  que  l'Expérience  64.,  donne  un 
réfultat  qui  eft  plus  d'accord  avec  mon  opinion  qu'avec 
celle  de  l'Auteur;  car  par  l'addition  du  mercure,  le 
fer,  comme  la  platine,  fe  fépare  en  poudre  noire,  & 
cela  feul  fuffit  pour  infirmer  les  conféquenccs  qu'on 
Voudroit  tirer  de  cette  expérience:  enfin,  fi  nous  rap- 
prochons les  aveux  de  cet  habile  Chimifîe  qui  ne  laiffe 
pas  de  convenir  :  «  Que  la  platine  ne  peut  jamais  être 
»  privée  de  tout  fer Qu'il  n'e/lpas  prouvé  qu'elle  foie 


homogène. 


DES   Minéraux.  353 

homogène Qu'elle  contient  cinq  treizièmes  de  fer  " 

qu'on   peut   retirer   progrefTivement  par  des   procédés  " 
très-compliqués;  qu^cnfin  il  faut  avant  de  rien  décider»  " 
répéter  fur  la  platine  réduite  toutes  les  expériences  qu'il  " 
a  faites  fur  la   platine  brute  ».   Il  nous  paroit  qu'il   ne 
devoit  pas  prononcer  contre  fès  propres  précomptions , 
en  afTurant,  comme  il  le  fait,  que  la  platine  n'efl  pas 
un  alliage,  mais  un  métal  fimple. 

M.  Bowles,  dans  fon  Hifloire  Naturelle  de  l'Efpagne, 
a  inféré   les  expériences  &  les  obfervations  qu'il  étoit 
plus  à  portée  que  pcrfonne  de  faire  fur  cette  matière  , 
puifque  le  Gouvernement   lui  avoit  fait   remettre   une 
grande  quantité  de  platine  pour  l'éprouver  ;  néanmoins 
il  nous  apprend  peu  de  chofes,  &  il  attaque  mon  opi- 
nion  par  de    petites   raifbns  ;   ^' en   1753,   dit -il,   le 
Miniftre  me  fit  livrer  une  quantité  fuiîifante  de  platine  « 
avec  ordre  de  fbumcttre  cette  matière  à  mes  expériences  « 
<&  de  donner  mon  avis  fur  le  bon  6l  le  mauvais  ufâge  « 
qu'on  pourroit  en  faire  ;  cette  platine  qu'on  me  remit  « 
étoit  accompagnée  de  la  note  fuivante  :  «  ^^7ns  FEvcché  « 
^e  Popayan  fiiffragaui  de  Lima  ^  il  y  a  beaucoup  de  mhus  « 
â'or,  &  une  enîr  autres  nommée  choco  ;  dans  une  parue  de  « 
///  monragrie  fe  trouve  en  grande  quantité  une  efpcce  de  fable  « 
que  ceux  du  pays  appellent  platine   ou  or  blanc  ;  en  exa-  ^«• 
minant  cette  matière,  je  trouvai  qu'elle  étoit  fort  pefante  » 

&  mclée  de  quelques  grains  d'or  couleur  de  fuie » 

Après  avoir  féparé  les  grains  d'or,  j'ai  trouvé  que  la  « 
Aline  faux.  Tome  IIL  Y  y 


354        Histoire   Naturelle 

y>  platine  étoit  plus  pcfante  que  l'or  à  20  karats  ;  en  ayant 
Ȕ  fait  battre  qtielques  grains  fous  le  marteau,  je  vis  qu'ils 
»  s'ctencloient  de  cinq  ou  fix  fois  leur  diamètre,  &  qu'ils 
»  refloient  blancs  comme  l'argent  ;  mais  les  ayant  envoyés 

»  à  un  Batteur-d'or  ,  ils  fe  bri/erent  fous  les  pilons Je 

35  voulus  fondre  cette  platine  à  un  feu  très-violent ,  mais 
»  les  grains  ne  firent  que  s'aglutiner. .  . .  J'efTayai  de  ia 
»  diffoudre    par   les    acides  ;    le    vitriolique   &  le   nitreux 
3>  ne  l'attaquèrent  point ,  mais  l'acide  marin  parut  Tenta- 
3)  mer ,  &  ayant  verfë  une  bonne  dofe  de  fel  ammoniac 
»  fur  cet  acide  ,  je  vis  toute  la  platine  (e  précipiter  en  une 
3)  matière  couleur  de  brique  ;  enfin  ,  après  un  grand  nombre 
35  d'expériences  raifonnées ,  je  fuis  parvenu  à  faire  avec  la 
»  platine,  du  véritable  bleu  de  Prujfe.  Ayant  reconnu  par 
3*  ces  mêmes  expériences,  que  la  platine  conrenoit  un  peu 
»  de  fer,   &    m'étant  fouvenu  que    dans   mes    premières 
»  opérations,  les  grains  de  platine  expofcs  à  un  feu  violent, 
»  avoient   contracté  entr'eux  une  adbérence  très-fuper- 
3)  ficielle,  puifqu'il  ne  falloit  qu*un  coup  a/fez  léger  pour 
3>  les  féparer ,  je  conclus  que  cette  adbérence  étoit  l'effet 
>ï  de  la  fufion  d'une  coucbe  déliée  de  fer  qui  les  recou- 
»>  vroir,  &  que  la  fubfîance  métallique  intérieure  n'y  avoit 
aucune  part  &  ne  contenoit  point  de  fer  ».  Nous  ne 
croyons  pas  qu'il  foit  nécefi^aire  de  nous  arrêter  ici  pour 
faire  fentir  le  foible  de  ce  raifoimem.ent ,  &  le  faux  de 
Ja   conféquence  qu'en  tire    M.   Bowles  ;    cependant    ij 
infirte,  &  fe  munifTam  de  l'autorité  des  Chimifles  qui 


DES    Minéraux.  355 

ont  regardé  la  platine  comme  un  nouveau  mcial  fimple 
&  parfait,,  il  argumente  aflez  longuement  contre  moi: 
"   Si    la  platine,  dit -il,   étoit  un   compofé  d'or  &  de 
fer,  comme  le  dit  M.  de  Buffon,  elle  devroit  conferver  « 
toutes  les  propriétés  qui  réfultent  de  cette  compoiition,  « 
&  cependant  une   foule  d'expériences  prouve  le   con-  « 
traire  ».  Cet  habile  Naturalise  n'a  pas  fait  attention  que 
j'ai   dit  expreflcment,    que   le  fer  &  l'or   de  la  platine 
n'étoient  pas  dans  leur  état  ordinaire,  comme  dans  un 
alliage  artiiiciel ,  &  s'il  eût  confidéré   fans  préjugé  fes 
propres  expériences,  il  eût  reconnu  que  toutes  prouvent 
la  préfënce  &  l'union  intime  du  fablon  ferrugineux  <Sc 
magnétique  avec  la  platine ,   &  qu'aucune  ne    peut  dé- 
montrer le  contraire.  Au  refte,  comme  les  expériences 
de  M.  Bowles,  font  prefque  toutes  les  mêmes  que  celles 
des  autres  Chimifles,  &l  que  je  les  ai  expofées  &l  difcutées 
ci-devant,  je  ne  le  fuivrai  plus  loin,  que  pour  obferver 
que  malgré  fes  objeélions  contre  mon  opinion ,  il  avoue 
néanmoins:  «  Que  quoiqu'il  foit  perfuadé  que  la  platine 
eft  un  métal  fui  gênais,  &.  non  pas  un  fimpIc  mélange  <« 
d'or  &.  de  fer,  il  n'ofe  malgré  cela  prononcer  affirma-  <« 
tivement  ni   l'un  ni   l'autre,  &   que  quoique  la  platine  « 
ait  des  propriétés  dilîcrentes  de  celles  de  tous  les  autres  « 
métaux  connus,  il  fait  trop  combien  nous  fommes  éloignés  <« 
de  connoîire  (à  véritable  nature  ». 

Au  reile,   AI.    Bowles   termine   ce   chapitre   fur  la 
platine ,  par   quelques  obfcrvations  iatéreffantes  :   «  La 

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356         Histoire  Naturelle 

»  platine,  dit-il,  que  je  dois  au  célèbre  Don  Antonio  de 
»  Ulloa,  eft  une  matière  qui  fe  rencontre  dans  des  mines 
5>  qui  contiennent  de  l'or;  elle  eft  unie  (i  étroitement  avec 
«  ce  métal  qu'elle  lui  fert  comme  de  matrice,  &  que  ce 
n'efl:  qu'avec  beaucoup  d'efforts ,  &  à  grands  coups 
qu'on  parvient  à  les  feparer;  en  forte  que  fi  la  platine 
abonde  à  un  certain  point  dans  une  mine,  on  eil  forcé 
«  de  l'abandonner,  parce  que  les  frais  &  les  travaux  né- 
ceffaires  pour  faire  la  féparation  des  deux  métaux, 
abforberoient  le  profit. 

Les  feules  mines  d'où  l'on  tire  la  platine  font  celles 
de  la  nouvelle  Grenade ,  &  en  particulier  celles  de 
Choco  6l  de  Barbacoa  font  les  plus  riches.  //  (/?  rewar- 
«  qiiable  que  cène  mature  ne  fe  trouve  dans  aucmie  auire 
»  inhie ,  fait  du  Pérou ,  foît  du  Chïly  ,  fou  du  Mexique.  Au 
55  refte ,  la  platine  fe  trouve  dans  les  fufditcs  mines ,  iion- 
i^  feulement  en  înaffe ,  mais  au/fi  en  grains  féparés  comme 
5)  des  grains  de  fable.  Enfin  il  faut  être  réfervé  à  tirer  des 
conféquences  trop  générales  des  expériences  qu'on  auroit 
faites  fur  une  pareille  quantité  de  platine  tirée  â*iin  feul 
»  endroit  de  la  mine^  expériences  qui  pourroient  être  démen- 
5>  ties  par  d'autres  expériences  faites  fur  celles  d'un  autre 

endroit   des  mêmes  mines remarquant ,   continue 

M.  Bowles ,  que  la  platine  contenoit  du  fer ,  &  que 
»  le  cobalt  en  contient  auiïi ,  qu'on  trouve  beaucoup  de 
»  grains  d'or  de  couleur  de  fliie  mêlés  avec  la  platine , 
5)  que  cette  e/pèce  nouvelle  de  fable  métallique  efi  unique 


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DES    Minéraux,  357 

dans  le  monde ,  qu*elle  fe  trouve  en  abondance  dans  « 
une  montagne  aux  environs  d'une  mine  d'or,  &.  qu'il  y  t. 
a  beaucoup  de  volcans  dans  ce  pays;  je  me  fuis  per-  « 
fuadé  que  la  montagne  renferme  du  cobalt ,  comme  « 
celle  de  la  vallée  de  Giflan,  dans  les  pyrénées  d'Arra-  « 
gou,  que  le  feu  d'un  volcan  aura  fait  évaporer  l'arfenic  a 
&  aura  formé  quelque  chofe  de  femblable  au  régule  de 
cobalt  ;  que  ce  régule  fe  fond  &  fe  mêle  avec  i'or  , 
quoiqu'il  contienne  du  fer  ,  &  que  le  feu  appliqué  pen-  « 
dant  lui  grand  nombre  de  fiècles ,  privant  la  matière  de  « 

fa  Rifibiiité  ,  aura  formé  ce  fable  métallique que  les  li 

grains  d'or  de  forme  irrégulière  &  de  couleur  de  fiiie,  « 
font   aufTi  l'effet  du  feu  d'un  volcan  lorfqu'il   s'éteint  ;  t» 
que  les  grains  de  platine  qui  contrarient  adliérence ,  à  « 
caufe  de  la  couche  légère  de  fer  étendue  à  leur  furface,  <» 
font  le  réfultat  de  la  décompofition  du  fer  dans  le  grand  « 
nombre   de   fiècles  qui  fe  font  écoulés  depuis   que  le  « 
volcan  s'eft  éteint  ;  &  que  ceux  qui  n'ont  point  cette  « 
couche  ferrugineufè ,  n'ont  pas  eu  aflez  de  temps  depuis  « 
l'extinélion  du  volcan  pour  l'acquérir.  Cela  parortra  un  « 
ibnge  à  plufieurs  ;  mais  je  fuis  le   grand  argument  de  « 
M.  de  Buiibn  (a)  ».  M.  Bowles  a  raifon  de  dire  qu'il  fuit 
mon  grand  argument;  cet  argument  confjfle  en  effet,  en 
ce  que   la  platine  n'eft  point,  comme  les  métaux,  un 
produit  primitif  de  la  Nature,  mais  une  fuuple  production 
accidentelle ,    qui    ne   fe    trouve   qu'en   deux  endroits 

(dj  Hiiloire  Naturelle  d'JElpagne ,  chapitre  de  la  Platine. 


358        Histoire   Natu relle 

dans  le   inonde  entier  ;   que   cet   accident ,   comme   je 
l'ai  dit,  a  été  produit  par  je  feu  des  volcans,  &  feule- 
ment fur   des   mines   d'or   mêlées   de   ïv.x ,    tous  deux 
dénatures  par  l'acflion  continuée  d'un  feu  très-violent; 
qu'à  ce  mélange  de  fer  &  d'or,  il  fe  fera  joint  quelques 
vapeurs  ar/ènicales ,    qui    auront   fait   perdre    à  i'or   fa 
dudilité ,   &  que  de  ces  combinaifons  très  -  naturelles , 
&  cependant   accidentelles ,    aura   réfiilté    la  formation 
de  la  platine.  Ces  dernières  obfervations  de  Al.  Bowles, 
loin    d'iniirmer    mon    opinion ,    femblent   au    contraire 
ia  confirmer  pleinement;    car    elles  indiquent  dans  la 
platine,  non-feulement  le  mélange  du  fer,  mais  la  préfcnce 
de  l'arfenic  ;  elles  annoncent  que  la  platine  d'un  endroit 
n'efl  pas  de  même  qualité  que  ccWc  d'un  autre  endroit; 
elles    prouvent   qu'elle   fe  trouve  en  maffe   dans  deux 
feules   mines  d'or,  ou  en  grains  &  grenailles  dans  des 
montagnes  toutes  compofées  du  fablon  ferrugineux,  ÔL 
toujours  près  des  mines  d'or  &.  dans  des  contrées  vol- 
canifées  :   la   vérité  de    mon  opinion   me    paroît   donc 
plus   démontrée  que  jamais,   &  je  fuis   convaincu  que 
plus  on  fera  de  recherches   fur  l'Hiftoire  Naturelle  de 
h  platine,   &.  d'expériences  fur  fa  fubflance ,  plus  on 
reconnoîtra  qu'elle  n'ell  point  un  métal  fimple  ni  d'une 
clfence  pure,  mais  un  alliage  de  fer  &  d'or  dénaturés, 
tant  par  la  violence  &  la  continuité  d'un  feu  volcanique, 
que  par  le  mélange  des  vapeurs  fulfureufes  &  arfcnicales, 
qui  auront  ôté  à  ces  métaux  la  couleur  &  leur  ductilité. 


DES    M  1  N  É  n  A  V  X.         359 


DU    COBALT. 

xJE  tous  les  minéraux  métalliques ,  le  cohalt  cfl  peut- 
être  celui  dont  la  nature  eft  la  plus  mafquée,  les  carac- 
tères les  plus  ambigus  &.  l'efTcnce  la  moins  pure  ;  les 
mines  de  cobalt,  très -différentes  entr'elles ,  n'offrent 
d'abord  aucun  caradlère  commun ,  &  ce  n'efl  qu'en 
ks  travaillant  au  feu  qu'on  peut  les  reconnoître  par  un 
effet  très-remarquable,  unique  &  qui  conffle  à  donner 
aux  émaux  une  belle  couleur  bleue.  Ce  n'efl  aulTi 
que  pour  obtenir  ce  beau  bleu  que  l'on  recherche  le 
cobalt  ;  il  n'a  aucune  autre  propriété  dont  on  puiffe 
faire  un  u/àge  utile,  fi  ce  n'efl  peut-être  en  l'alliant  avec 
d'autres  minéraux  métalliques  (a) .  Ses  mines  font  affez 
rares  &  toujours  chargées  d'une  grande  quantité  de 
matières  étrangères  ;  la  plupart  contiennent  plus  d'arfenic 
que  de  cobalt ,  &  dans  toutes  le  fer  efl  fi  intimement 
lié  au  cobalt ,  qu'on  ne  peut  l'en  féparer  ;  le  bifmutli 
fe  trouve  auffi  affez  fbuvent  interpofé  dans  la  fubflance 
de  ces  mines  ;  on  y  a  reconnu  de  l'or ,  de  l'argent , 
<Iu  cuivre ,  &.  quelquefois  toutes  ces  matières  &  d'autres 


(a)  M.  Baume  dit  daiis  fa  Chimie  expérimentale  avoir  fàit"*éntrer 
le  collait  dans  un  alliage  pour  des  robinets  de  fontaine,  que  cet 
alliage  pouvoir  fe  mouler  paifaiieraeni  &  n'e'toit  fujet  à  aucune 
«Ipèce  de  jouille. 


360      Histoire    Naturelle 

encore  s'y  trouvent  mêlées  enfembie  ,  fans  compter  les 
pyrites  qui  font  aufii  fouvent  intimement  unies  à  la 
fubflance  du  cobalt.  Le  nombre  de  ces  variétés  efl 
donc  fi  grand ,  non-feulement  dans  les  différentes  mines 
de  cobalt ,  mais  auffi  dans  une  feule  &  même  mine , 
que  les  nomenclateurs  en  Minéralogie  ont  cru  devoir 
en  faire  plufieurs  efpèces,  &  même  en  féparer  abfo- 
îument  un  autre  minéral  qui  n'étoit  pas  connu  avant 
le  travail  des  mines  de  cobalt  ;  ils  ont  donné  le  nom 
de  fîkkel  (b)  à  cette  lubflance  qui  diffère  en  effet  du 
cobalt ,  quoiqu'elle  ne  fe  trouve  qu'avec  lui.  Tous  deux 
peuvent  fe  réduire  en  un  régule  dont  les  propriétés 
font  affez  différentes  pour  qu'on  puiffe  les  regarder 
comme  deux  différentes  fortes  de  minéraux  métalliques. 

Le  régule  de  cobalt  n'affcde  guère  de  figure  régu- 
lière (c) ,  &  n*a  pas  de  forme  déterminée;  ce  régule 
efl  très-pefant,  d'une  couleur  grife  affez  brillante,  d'un 
tiffu  ferré ,  d'une  fubftance  compa(5le  tSi.  d'un  grain  fin  ; 
fà   furface  prend  en  peu  de  temps  par  Timpreffion  de 


(h)  Cronftedt  a  donné  le  nom  de  Nickel  à  cette  fubflance, 
parce  <|u'eile  fe  trouve  dans  les  mines  de  Cobalt  que  les  Aiiemands 
nomment  Kupfer-nickel.  M.  Bergman  obferve  que  quoiqu'on  trouve 
fréquemment  du  Cobalt  natif,  il  ell  toujours  uni  au  fer  ,  à  1  arfenic 
&  au  nickel.  Opufcules  chimiques  ,   tome  II ,  dijfer talion  2^. 

(c)  M.  l'abbé  Mongez  afiure  néanmoins  avoir  obtenu  un  régule 
de  cobalt  en  crilUux  compoles  de  faifceaux  réguliers.  Journal  de 
Phyjique ,    lyS  i. 

l'air 


DES  Minéraux.  361 

l'air  une  teinte  rofacce  ou  couleur  de  fleurs  de  pccher; 
il  eft  afTez  dur  &  n'eft  point  du  tout  ducflile  ;  fa  den- 
fité  eft  néanmoins  plus  grande  que  celle  de  l'étain  , 
du  fer  &  du  cuivre  ;  elle  eft  à  trcs-peu-près  égale  à  la 
denfué  de  l'acier  (d) .  Ce  régule  du  cohaft  &  celui  du 
nickel  font  après  le  bifmuth  les  plus  pefantes  des  matières 
auxquelles  on  a  donne  le  nom  de  demi  -  métaux ,  & 
l'on  auroit  certainement  mis  le  bifmuth  ,  le  cobalt  &. 
le  nickel  au  rang  des  métaux  s'ils  avoient  eu  de  la 
du6lilité  ;  ce  n'efl  qu'à  cau/è  de  fà  très-grande  denfué 
que  l'on  a  placé  le  mercure  avec  les  métaux  ,  &  parce 
qu'on  a  en  même  temps  fuppofé  que  /à  fluidité  pouvoit 
être  confidérée  comme  l'exircme  de  la  du6lilité. 

Les  minières  de  cobalt  s'annoncent  par  des  efïïo- 
refcences  à  la  fiirface  du  terrein  ;  ces  efliorefcences  font 
ordinairement  rougeâtrcb  &  afTez  fouvent  di/pofées  en 
étoiles  ou  en  rayons  divergens  qui  quelquefois  fe  croifent. 
Nous  donnerons  ici  l'indication  du  petit  nombre  de 
ces  mines  que  nos  Obfèrvateurs  ont  reconnues  en  France 
&  dans  les  Pyrénées  aux  confins  de  TEfpagne  ;  mais 
c'efl  dans  la  Saxe  &  dans  quelques  autres  provinces 
de  l'Allemagne  qu'on  a  commencé  à  travailler,  &  que 
l'on  travaille  encore  avec  fuccès  &  profit  les  mines  de 

(d)  La  pefanteur  Tpécifique  du  régule  de  cobalt  eft  de  7R1  ip; 
celle  du  régule  de  nickel  de  78070  ;  &  la  pefanteur  fpccifique  de 
l'acier  écroiii  &  trempé  eft  de  78180;  celle  du  fer  forgé  n'efl 
que   de  77880. 

Aîinéraux  f  Tome  III.  Z  z 


362       Histoire   Naturelle 

cobalt  ;  &  ce  font  les  Mincralogifles  allemands  qui  nous 
ont  donné  le  plus  de  luniicres  fur  les  propriétés  de  ce 
minéral   <Sc  fur  la  manière  dont  on  doit  le  traiter. 

Le  premier  &.  le  plus  fur  des  indices  extérieurs  fe) 
qui  peuvent  annoncer  une  mine  prochaine  de  cobalt , 
cft  donc  une  efflorefcence  minérale,  couleur  de  rofc, 
de  flruéture  radiée  à  laquelle  on  a  donné  le  nom  de 
jlcurs  de  cobalt  ;  quelquefois  cette  matière  n'cfl  point 
en  forme  de  Heurs  rouges  ,  mais  en  poudre  &  d'une 
couleur  plus  pâle  ;  mais  le  figne  le  j)lus  certain  &  par 
lequel  on  pourra  reconnoître  le  véritable  cobalt  tfl  la 
terre  bleue  qui  l'accompagne  quelquefois ,  &  au  défaut 
de  cet  indice  ,  ce  fera  la  couleur  bleue  qu'il  donne 
lorfqu'il  eft  réduit  en  verre  ;  car  fi  la  mine  qui  paroît 
être  de  cobalt  fe  convertit  en  verre  noir,  ce  ne  fera 
que  de  la  pyrite  ;  fi  le  verre  eft  d'une  couleur  roulfe ,  ce 
fera  de  la  mine  de  cuivre  ;  au  lieu  que  la  mine  de 
cobalt  donnera  toujours  un  verre  bleu  de  faphir;  c'cfl: 
probablement  par  cette  reffemblance  à  la  couleur  du 
faphir  qu'oi:^  a  donné  à  ce  verre  bleu  de  cobalt  le  nom 
de  fiphre  ou  fdffre.  Au  relie,  on  a  auffi  appelé  faffn  la 
chaux  de  cobalt  qui  e(l  en  poudre  rougeâtre  &  qui  ne 
provient  que  de  la  calcination  de  la  mine  de  cobalt;  le 
fafîre  qui  c(l  dans  le  commerce  efl  toujours  mclé  de 
fable  quartzeux  qu'on  ajoute  en  fraude  pour  en  augmenter 

(e)  Tranfâdions  philofophicjues ,   A^.'  ^p^  ,  Novembre  ijiS, 


DES    Minéraux.  ^6^ 

la  quantité  ,  &  ce  faffre  ou  chaux  rougeâtre  Je  cobalt 
doime  auiFi  par  la  fudoii  le  même  bieu  que  le  verre 
de  cobalt ,  6l  c'cft  à  ce  verre  bleu  de  falire  que  Ton 
donne  le   nom  de  fmalt. 

Pour  obtenir  ce  verre  avec  fà  belle  couleur ,  on  fait 
griller  la  mine  de  cobalt  dans  un  fourneau  où  la  Hamme 
efl  réverbérée  fur  la  matière  minérale  réduite  en  poudre 
ou  du  moins  concafTée  ;  ce  fourneau  doit  être  fur- 
monté  de  cheminées  tortueufes  dans  lefquelles  les  vapeurs 
qui  s'élèvent  puiiïent  être  retenues  en  s'attachant  à  leurs 
parois  ;  ces  vapeurs  s'y  condenfent  en  effet  &  s'y  accu- 
mulent en  grande  quantité  fous  la  forme  d'une  poudre 
blanchâtre  que  l'on  détache  en  la  raclant  ;  cette  poudre 
eft  de  l'arfenic  dont  les  mines  de  cobalt  font  toujours 
mêlées  ;  elles  en  fourniffent  en  fi  grande  quantité  par 
la  hmple  torréfaétion  ,  que  tout  Tar/enic  blanc  qui  efl 
dans  le  commerce  vient  des  fourneaux  où  l'on  grille 
des  mines  de  cobalt  ;  &  c'efl  le  premier  produit  qu'on 
en  tire. 

La  matière  calcinée  qui  refle  dans  le  fourneau,  après 
l'entière  fublimation  des  vapeurs  arfenicales ,  efl  une 
chaux  trop  réfraélaire  pour  être  fondue  feule; ,. il  faut 
y  ajouter  du  fable  vitrefcible ,  ou  du  quartz  qu'on  aura 
fait  auparavant  torréfier  pour  les  pulvérifcr;  fur  une 
partie  de  chaux  de  cobalt,  on  met  ordinairement  detix 
ou  trois  parties  de  cette  poudre  vitreufe  à  laquelle  on 
ajoute  une  partie  de  falin  pour  accéJérer  la  fufion  ;  ce 

Zz  ij 


364-        Histoire    Natu belle 

mélange  fe  met  dans  de  grands  creufets  places  dans  le 
fourneau,  &  pendant  les  d\x  ou  douze  heures  de  feu 
qui  font  néceïïaires  pour  la  vitrification ,  on  remue 
fouvcnt  la  matière  pour  en  rendre  le  mélange  plus 
égal  &  plus  intime;  6l  lorfqu'elle  efl  entièrement  & 
parfaitement  fondue,  on  la  prend  toute  ardente  &  liquide 
avec  des  cuillers  de  fer,  &  on  la  jette  dans  un  cuvier 
plein  d'eau,  où  fe  refroidiflant  iùbitement  elle  n'acquiert 
pas  autant  de  dureté  qu'à  l'air,  &.  devient  plus  aiiée  à 
pulvcrifer;  elle  forme  néanmoins  des  maffes  folides  qu'il 
faut  broyer  fous  les  pilons  d'un  bocard,  &  faire  eniuite 
pafTer  fous  une  meule  pour  la  réduire  enfin  en  poudre 
très-fine  &l  bien  lavée ,  qui  efl  alors  du  plus  beau  bleu- 
d'azur  ,  &  toute  préparée  pour  entrer  dans  les  émaux. 

Comme  les  mines  de  cobalt  font  fort  mélangées  & 
très-différentes  les  unes  des  autres,  &  que  même  l'on 
donne  vulgairement  le  nom  de  cobalt  à  toute  mine 
mêlée  de  matières  nuidbles  (f),  &  fur-tout  d'arfenic  ; 
on  efl  forcé  de  les  effayer  pour  les  reconnoître,  & 
s'aifurer  fi  elles  contiennent  en  effet  le  vrai  cobalt  qui 


(f)  La  fangue  allemande  a  même  attaché  au  mot  de  Cobalt  ou  Cobolt 
l'idée  d'un  elprit  fouterrain  ;  malfdilant  &  malifi  qui  fe  piait  à 
effrayer  &  à  tourmenter  les  Mineurs  ;  &  comme  le  minerai  de 
cobalt ,  à  raifon  de  l'arfenic  qu'il  contient ,  ronge  les  pieds  &  les 
mains  des  ouvriers  qui  le  travaillent ,  on  a  aj)pelé  en  général  Cobalto 
les  mines  dont  l'arlenic  fait  la  partie  dominante.  Alémoire  fur  le 
Cobalt ,  par  Aï.  Saur ,  dans  ceux  des  Savans  étrangers ,  tome  I. 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  V  X.  365 

donne  au  verre  le  beau  bleu.  II  faut  dans  ces  cfTais 
rendre  les  fcories  fort  Huides  &  très-neties ,  pour  juger 
de  l'imenfité  de  la  couleur  bleue  que  fournit  la  mine 
convertie  d'abord  en  cliaux  &  enluite  en  verre;  on 
doit  donc  commencer  par  la  griller  &  calciner,  pour 
la  mettre  dans  Tétat  de  chaux  ;  il  fè  trouve  à  la  vérité , 
quelques  morceaux  de  minerai  où  le  cobalt  efl  aflez 
pur  pour  n'avoir  pas  bcfoin  d'être  grillé,  &  qui  donnent 
leur  bleu  fans  cette  préparation;  mais  ces  morceaux  font 
très-rares,  &  communément  Je  minerai  de  cobalt  fe 
trouve  mêlé  d'une  plus  ou  moins  grande  quantité  d'ar- 
fenic  qu'il  faut  enlever  par  la  fublimation.  Cette  opéra- 
tion, quoique  irès-fimple,  demande  cependant  quelques 
attentions;  car  il  arrive  affez  fouvent  que  par  un  feu 
de  grillage  trop  fort,  le  minerai  de  cobalt  perd  quelques 
nuances  de  fa  belle  couleur  bleue  ;  &  de  même  il  arrive 
que  ce  jninérai  ne  peut  acquérir  cette  couleur,  s'il  n'a 
pas  été  affez  grillé  pour  l'exalter,  &  ce  point  précis  efl 
difficile  à  faifir.  Les  unes  de  ces  mines  exigent  beaucoup 
plus  de  temps  &  de  feu  que  les  autres,  ce  ne  peut 
donc  être  que  par  des  effais  réitérés  &  faits  avec  foin, 
que  l'on  peut  s'afTurer  à  peu-près  de  la  manière  dont  on 
doit  traiter  en  grand  telle  ou  telle  mine  particulière  (^g) , 

(g)  On  pèfe  deux  quintaux  qu'on  réduit  en  poudre  grcfTière  ; 
on  les  met  dans  un  tejl  a  rôtir,  fous  la  in(.uffle  du  fourneau;  on 
leur  donne  le  degré'  de  chaleur  modéré  dans  le  commencement, 
&.   de  demi-heure  en  demi- heure  on  retire  le  teft  pour  refroidir  la 


366         Histoire  Natu relle 

Dans  quelques-unes  on  trouve  une  afTez  forte  quantité 
d'argent,  &  même  d'or,  pour  mériter  un  travail  parti- 
matière  <5c  la  jiietire  en  poudre  plus  fine  ,  ce  que  Von  répète  trois 
&.  quatre  tois  ,  ou  jufqu'à  ce  qu'elle  ne  rende  plus  aucune  odeur 
d'aiienic. 

Le   caillou  qu'il   faut  joindre  à    cette  matière    pour    en    achever 
l'efiai,  doit  être  aufli  calciné.  On  choifit  le  filex  qui  devient  blanc 
par  là  calcination  ,  «Se  qui  ne  prend   point  de  couleur  tannée.   On 
peut  lui  fubftituer  un    quartz   bien  crillallin  ou  un  Table  bien  lave  , 
qu'il   faut  auffi  calciner.    On  divife  en  deux   parties   égales  le  cobalt 
calciné  ;  à  une  de  ces  parties  on    joint   deux   quintaux   de  cailloux 
ou    de   lable  ,   &    lix    quintaux    de    potafle.    Après    avoir    mclt    le 
tout  enlenible ,  on  le  met  dans  un  creulet  d'efîài ,   qtie  l'on   place 
fur  l'aire   de   la  forge    devant  le  foufflet  ;  aufTi-iôt    que   le   charbon 
dont   on  a   rempli    le  foyer  formé  avec   des   briques  ,  eQ  affaiOe  ,   & 
que    le   creufet    ell   rouge  ,    on   peut    commencer  à  foufHer ,   parce 
qu'on   ne    rifque    rien   par    rapport  au    foulèvement   du    Hux.    Dès 
qu'on    a  loufflc  près   d'une   heure  ,    on  peur  prendre  .  avec  un  fil 
de  fer  froid ,  un   edai  de  la   matière   en  fufion ,   ô*.   fi    l'on    trouve 
que  les  fcories  foient  tenaces  &  qu'elles  filent,  l'eflai  e(l  achevé.... 
on  le   laiffe  encore  au  feu  pendant  quelques    minutes.   Quand  on  a 
çafie  le   creufet,  on  prend  ces  fcories,  on  les  broyé  5t  on  les  lave 
avec  foin  pour   voir  la  couleur  qu'elles  donnent. 

Si  elle  ell  trop  intenfe  ,  on  refait  un  autre  effai  avec  le  fécond 
quintal  de  cobalt  qu'on  a  rôti  ,  &  l'on  y  ajoute  trois  quintaux  de 
cailloux  ou  de  fable.  Si  la  couleur  des  fcor  es  de  ce  fécond  elTai 
efl  encore  trop  foncée  ,  on  répète  ces  efTais  jnfqu'à  ce  qu'on  ait 
trouvé  la  jufte  proportion  du  fable  &  la  couleur  qu'on  veut  avoir. 
C'eft  par  ce  moyen  qu'on  juge  de  la  bonté  du  cobalt;  car  s'il 
colore  beaucouj)  de  fable  ou  de  cailloux  calcinés  ,  il  rend  par 
conféquent  beaucoup  de  couleur,  &  fon  prix  augmente.  Schlutier ^ 
Traité  de  la  Fonte  des  mines ,   tome   I ,  pages  z^j  &  2^^, 


DES    Minéraux.  367 

culier,  par  lequel  on  en  extrait  ces  métaux.  Il  faut  pour 
cela  ne  calciner  d'abord  la  mine  de  cobalt  qu'à  un  feu 
modéré;  s'il  étoit  violent,  l'arfenic  qui  s'en  dégageroit 
brufqucment  emporteroit  avec  lui  une  partie  de  l'argent 
<5c  de  l'or  ,  lequel  ne  s'y  trouve  qu'allié  avec  l'argent  (/ij . 
Mais  ces  mines  de  cobalt  qui  contiennent  une  affez 
grande  quantité  de  cet  argent  mêlé  d'or,  pour  mériter 
d'être  ainfi  travaillées,  font  très -rares  en  comparailbn 
de  celles  qui  ne  font  mêlées  que  d'arfcnic,  de  fer  &. 
de  bifmutb,  &.  avant  de  faire  des  eiïais  qui  ne  laiffent 
pas  d'être  coûteux ,  il  faut  tâcher  de  reconnoître  les 
vraies  mines  de  cobalt ,  &  de  les  diilinguer  de  celles 
qui  ne  font  que  des  minerais  d'arfcnic,  de  fer,  &.c. 
&.    fï    l'on    ne    peut    s'en    fier    à    cette    connoifTance 

(h)  On  met  quatre  quintaux  de  cobalt  dans  un  vaifieau  plat 
fojs  la  moufHe;  on  l'agite,  fans  dilcontinuer,  pendant  la  caicinarion  ; 
&  quand  il  ne  rend  plus  d'odeur  d'arfcnic,  on  le"pèfe  pour  con- 
noître  ce  qu'il  a  perdu  de  Ton  poids  ;  ce  dcchet  va  ordinairement 
à' vingt-cinq  ou  vingt-fix  pour  cent;  on  fait  korifier  ce  qui  refle 
avec  neuf  quintaux  de  plomb  gfenaillt"  dont  on  connoît  la  richefle 
en  argent  ;  &.  lorfque  les  fcories  font  bien  fluides  ,  on  verfe  le  tout 
dans  le  creux  demi  fphcrique  d'une  planche  de  cuivre  rouge  qu'on 
a  frotte  de  craie.  Les  fcoiies  *ant  refroidies,  on  les  détache  avec 
le  marteau  du  culot  de  plomb  ,  que  l'on  met  à  la  coupelle  ;  on 
connoît  parle  bouton  d'argent  qui  refle  iur  la  coupelle,  &  dont' 
on  a  fouflrait  l'argent  des  neif  quintaux  de  plomi)  ,  fi  ce  col>alt 
mérite  d'être  traité  p6ur  tin.  Il  convient  aufll  de  faire  le  dcpart  de 
ce  bouton  de  couj^elle,  parce  qu'ordinairement  l'argent  qu'on  trouve 
dàiis  le  cobalt,  recèle  un  peu  d'or.  Jdtm ,  page  2^ y. 


368  H ISTOIRE   N ATURELLE 

cl'infpedion,  il  ne  faut  faire  que  des  efTais  en  petit  ("ij, 
fur  lefquels  néanmoins  on  ne  peut  pas  abfblument 
compter;  car  clans  la  même  mine  de  cobalt,  certaines 
parties  du  minéral  font  fou  vent  très-ditîcrentes  les  unes 
des  autres  i    &   ne  contiennent   quelquefois    qu'une  fi 

petite 

fi)  Pour  éviter  la  dépenfe  des  eflais  en  grand,  il  faut  prendre 
une  portion  du  cobalt  que  l'on  veut  ellayer  ;  on  le  pulvérile  en 
poudre  très-fine  ;  eniuite  on  le  met  dans  un  creufet  large  d'ouver- 
ture que  l'on  met  dans   un  founeau Il  faut  que  le  feu   foit 

aflez  fort  pour  tenir  lou/ours  le  creufet  d'un  rouge  obfcur  ;  mais 
dès  que  la  matière  paroît  rouge ,  on  l'agite  de  deux  minutes  en 
deux  minutes.  .  .  .  Entre  chaque  agitation  on  iouffle  dans  le  milieu 
du  creufet  à  petits  coups  ieïïés  avec  un  foufflet  à  jnuin  ,  cojïime  on 
fouffle  lur  l'antimoine  qu'on  emploie  à  purifier  l'or.  .  .  ,  C'eft  le 
moyen  le  plus  prompt  de  chalîer  \à  fumée  blanche  arfenicale , 
fur-tout  lorfqu'on  n'a  pas  defiein  d'eflayer  dans  la  fuite  ce  cobalt 
pour  le  fin;  car  fans  le  foufflet,  l'arfenic  fèroit  fort  long-temps  à 
s'évaporer.  Quand  il  refte  un  peu  de  matière  volatile  dans  le 
creufet  ,  le  cobalt  qu'on  y  a  mis,  paroît  s'éteindre,  &  devient 
obfcur;  mais  il  faut  continuer  à  l'agiter  jufqu'à  ce  qu'il  ne  répande 
plus  de  fumée  blanche  ni  d'odeur  d'ail  ;  alors  la  calcination  eft 
finie,  .  »  .  Une  once  de  cobalt ainfi  calciné  fe  trouve  réduite  à  environ 
cinq  gros 

On  met  deux  gros  de  ce  cobalt  calciné  dans  un  petit  matras; 
on  y  verfe  une  once  d'eau-forte,  &  environ  trois  gros  d'eau  com- 
mune; on  place  le  matras  fur  des  cendres  très-chaudes....  l'eau- 
forte  fe  chargera  de  la  partie  colorante  ,  fi  ce  minéral  en  contient , 
&  prendra  en  une  heure  ou  deux  de  digèllion  ,  une  couleur 
cramoifi  laie  ;  c'eft  la  couleur  que  lui  donne  toujours  le  cobalt 
propre  à  faire  l'azur,  fur-tout  s'il  Uent  du  bifinuth.  S'il  ne  contient 

pas 


DES    Minéraux,  3  69 

petite  quantité  de  cobalt  qu'on  ne  peut  sn  faire 
ufàge  (k) . 

La  fubftance  du  cobalt  eil  plus  fixe  au  feu  que  celle 
des  demi-métaux,  même  que  celle  du  fer  &  des  autres 
métaux  imparfaits  ;  auffi  vient-on  à  bout  de  les  féparer 
du  cobalt  en  les  fublimant  &  en  les  volatilifant  par  des 
feux  de  grillages  réitérés.  La  fixité  de  cette  fubflance 
approche    de    la    fixité  de  l'or    &  de    l'argent  ;   car    le 

^^^i^-^— ^      IM^I».  ■  [■■■■■M     I^J^^—  ■     ■     I  —1-  _     ^      I       ■  ,      ■  I  !■  ■■  I      ■»»— ■     ■■      I  M  -     I  ■  ■^-^■^       ,     M  — ^^B^— 

pas  de  parties  colorantes  ,  elle  reftera  blanche  ;  s'il  tient  du  cuivre , 
elle  prendra  une  couleur  verte.  ... 

Pour  tirer  la  matière  bleue  du  fmalt ,  pi^nez  cent  grains  de 
ce  cobalt  calcine ,  deux  cents  grains  de  fable  bien  lavé  ,  deux 
cents  grains  de  Tel  de  fonde  purifie  ,  &  vingt  à  vingt-cinq  grains 
de  borax  calcine'.  Après  avoir  bien  mêlé  ces  matières  dans  un 
petit  creufet  d'efîai  bien  bouché  ,  mettez  ce  creufet  fur  l'aire  d'une 

forge,  ou   encore  mieux   dans  un  petit  fourneau  de  fonte  quarré 

Faites  agir  le  foufflet  pendant  une  bonne  demi-heure.  Il  n'y  aura 
aucune  effervefcence  fi  le  cobalt  a  été  bien  calciné;  laifîez  ce  creufet 
un  demi-quart  d'heure  dans  le  feu  après  la  parfaite  fufion ,  ians 
fouffler  ,  pour  donner  le  temps  à  la  matière  vitrifiée  de  fe  rafleoir; 
retirez  le  creufet  &  le  mettez  refroidir  à  l'air  ;  cafTez-le  quand  if 
fera  froid ,  vous  trouverez  toute  la  matière  vitrifiée  en  un  verre 
bleu  -  foncé  fi  ce  cobalt  a  donné  une  couleur  rouge  à  l'eau- forte , 
ou  au  moins  une  couleur  de  feuille-morte.  Traité  de  la  Fonte  des 
mines  de   Schlutter ,  tome  I ,  page  2^  S. 

(k)  Une  manière  courte  d'éprouver  fi  une  muie  de  cobalt 
fournira  de  beau  bleu ,  c'eft  de  la  fondre  dans  un  creufet  avec 
deux  ou  trois  fois  fon  poids  de  borax  qui  deviendra  d'un  beau 
bleu  fi  le  cobalt  efl  de  bonne  qualité.  Voyej^  V Encyclopédie  ,  article 
Cobalt. 

MhiJrauSj  Tome  IIL  A  a  a 


370       Histoire    Naturelle 

régule  Je  cobalt  n'entre  pas  dans  les  pores  de  h  cou- 
pelle, en  forte  que  fi  l'on  expofe  à  i'adion  du  feu  fur 
une  coupelle,  un  mélange  de  plomb  &  de  cobalt,  le 
plomb  feul  pénètre  les  pores  de  la  coupelle  en  fë  vitri- 
fiant ,  tandis  que  le  cobalt  réduit  en  fcories ,  refte  fur  la 
coupelle  ou  ell  rejeté  fur  fes  bords  ;  ces  fcories  de 
cobalt  étant  enfuite  fondues  avec  des  matières  vitreuies, 
donnent  le  bleu  qu'on  nomme  f^iffie^  &.  lorfqu'on  les 
mêle  à  parties  égales  avec  i'alkali  &  le  fable  vitrekible, 
elles  donnent  l'émail  bleu  qu'on  appelle  y/m//'. 

Le  régule  de  cobalt  peut  s'allier  avec  la  plupart  l\çs 
fubilances  métallt^ucs  ;  il  s'imit  intimement  avec  l'or  & 
ie  cuivre  qu'il  rend  aigres  &  caffans  ;  on  ne  l'allie  que 
difficilement  avec  l'argent  (l ) ,  le  plomb  &  même  avec 
l'arfeiiic  ,  quoique  ce  fél  métallique  fe  trouve  toujours 
mêlé  par  fa  nature  dans  la  mine  de  cobalt;  il  en  efl  de 
même  du  bifmuth  qui  fe  refufé  à  toute  union  avec  le 
régule  de  cobalt;  &l  quoiqu'on  trouve  fôuvent  le  bifmuth 
mêlé  dans  les  mines  de  cobalt ,  il  ne  lui  efl  point  uni 
d'une  manière  intime  ,  mais  (miplement  interpofé  dans 

(IJ  Si  l'on  fdit  fondre  enfeinble  deux  piirties  de  cobalt  avec 
une  partie  d'argent  ,  on  trouve  l'argent  au  bas  &  le  cobalt  au-defius , 
flmjilement  attachés  l'un  à  l'autre  ;  cependant  l'argent  devient  plus 
caliant ,  il  eft  d'une  couleur  plus  grife ,  &  le  cobalt  eft  d'une 
couleur  plus  blanche  qu'auparavant.  Le  régule  de  cobalt  ne  peut 
donc  point  s'unir  au  plomb  &  à  l'argent  en  toutes  proportions , 
mais  leuleinent  en  peute  quantité.  Chimie  mélallurgique  de  CelUr , 
tome   I ,  page    j  8^» 


I 


DES    Minéraux,  371 

la  mine  de  cobalt  fans  ia  pciictrer;  &:  au  contraire  lorfque 
le  cobalt  eft  une  fois  joint  au  ioufre  par  l'intermède 
des  alkalis,  Ton  union  avec  le  bifmuth  eft  fi  intime,  qu'on 
ne  peut  les  /éparer  que  par  les  acides ,  tandis  qu'en  même 
temps  le  cobalt  ne  contrarie  avec  le  (ôufre  qu'une  très- 
légère  union,  &.  qu'on  peut  toujours  les  Icparer  l'un  de 
l'autre,  par  un  bmple  feu  de  torréfadlion  qui  enlève  le 
foufre   &  le  réduit  en  vapeurs. 

Le  mercure  qui  mouille  i\  bien  l'or  &  l'argent,  ne 
peut  s'attacher  au  cobalt  ni  s'y  mêler  par  la  trituration 
aidée  même  de  la  chaleur  ;  aind  la  fixité  du  régule  de 
cobalt,  qui  eft  prefque  égale  à  celle  de  ces  métaux,  n'inllue 
point  fur  fon  attraction  mutuelle  avec  le  mercure. 

Tous  les  acides  minéraux  attaquent  ou  difTolvent  le 
cobalt  à  l'aide  de  la  chaleur,  &l  ils  produifent  enfemble 
différens  Tels  dont  quelques-uns  font  en  criftaux  tranfpa- 
rens  ;  l'alkali  volatil  difTout  auffi  la  chaux  du  cobalt, 
<Sc  cette  diiïblution  eft  d'un  rouge  -  pourpre  ;  mais  en 
général,  les  couleurs  dans  toutes  les  difTolutions  du 
cobalt ,  varient  non  -  feulement  félon  la  différence  des 
diffolvans ,  mais  encore  fuivant  le  plus  ou  le  moins 
de  pureté  du  cobalt,  qui  n'eft  prefque  jamais  exempt 
de  minéraux  étrangers,  &  fur -tout  de  fer  &  d'arfenic, 
dont  on  fait  qu'il  ne  faut  qu'une  très-petite  portion  pour 
altérer  ou  même  changer  abfolument  la  couleur  de  la 
diffolution. 

En  France,  on  a  reconnu  plufieurs  indices  de  mines 

A  a  a  ij 


37^  Histoire  Naturelle 

de  cobalt,  &  on  n'auroii  pas  du  négliger  ces  minières; 
par  exemple,  les  mines  d'argent  d'Almont  en  Dauphinc, 
contiennent  beaucoup  de  mines  de  cobalt  qu'on  pourroit 
réparer  de  l'argent.  M.  de  Grignon  affure  qu'on  a  jeté 
dans  les  décombres  de  ces  mines ,  peut  -  être  plus  de 
cobalt  qu'il  n'en  iaudroit  pour  fournir  toute  l'Europe 
de  faffre.  Le  cobalt  fe  trouve  mêlé  de  même  avec  la 
mine  d'argent  rouge  à  Sainte -Marie  -  aux -Mines  en 
Lorraine  (mj ,  <Sc  il  y  en  a  aufTi  dans  une  mine  de 
cuivre  azurée  au  village  à'Ojfenback  dans  les  Vofges  (n) ; 
on  n'a  fait  aucun  ufàge  de  ces  mines  de  cobalt.  M.  de 
Genfanne  dit  à  ce  fujet,  que  comme  ce  minéral  devient 
rare,  même  en  Allemagne,  il  fcroit  avantageux  pour 
nous  de  mettre  en  valeur  une  mine  conlidérable ,  qui 
fe  trouve  entre   la  Aimera  &  Notre  -Dame -de -Cor al  en 


(m)  Les  mines  de  Sa'wtt-Mar'ie'aux-Mines ,  ont  donné  il  y  a 
cjuelques  années  de  la  mine  de  cabalt  en  fi  grande  quantité  qu'on 
avoit  fait  des  dtpenfes  nécefiaires  pour  en  fabriquer  le  fmah  ;  mais 
cette  miiie  de  cobalt  s'efl;  appauvrie  à  mefure  que  celle  d'argent  a 
paru ,  de  manière  qu'on  n'en  trouve  pas  aujourd'hui  allez  pour 
fabriquer  cette  couleur.  Alémoire  fur  le  Cobalt ,  par  Ai.  Saur ,  dans 
ceux  des  Savons  étrangers ,  tome  J. 

(n)  Auprès  du  village  d'Oflenback  dans  \t%  Vofges  il  y  a  une 
mine  de  cuivre  azur;  le  filon  contient  peu  de  mine  en  cuivre, 
mais  il  rend  beaucoup  de  plomb  ;  ce  filon  eft  un  quartz  noir 
extrêmement  dur,  parlemé  de  mine  couleur  de  lapis,  avec  quantité 
de  cobalt.  Sur  l'exploitation  des  mines ,  par  Ai.  de  Genfanne ,  Afémoircs 
des   Savans  étrangers,    tome  JV ,  pages    i^i    &'  fuiv. 


DES    Minéraux,  373 

Roiifiiilon  (0);  il  y  en  a  une  autre  très -abondante  &l 
(Je  bonne  qualité,  que  les  Efpagnols  ont  fait  exploiter 
avec  quelques  fuccès ,  elle  elt  fituée  dans  la  vallée  de 
Gijîau  (p).  M.  Bowles  dit  que  cette  mine  n'a  été 
découverte  qu'au  commencement  de  ce  fiècle  {qjt  Si. 
qu'elle  n'a  encore  été  travaillée  qu'à  une  petite  pro- 
fondeur, qu'on  en  a  tiré  annuellement  cinq  à  fix  cents 
quintaux  ^r);  il  ajoute  qu'en  examinant  cette  mine  de 
Giftau,  il  a  reconnu  différens  morceaux  d'un  cobalt 
qui  avoit  le  grain  plus  fin  Si.  la  couleur  d'un  gris- 
bleu  plus  clair  que  celui  de  Saxe;  que  la  plupart  de 
ces  morceaux    étoient    contigus   à  une  forte  d'ardoife 

foj  Cette  mine  eft  fituée  auprès  du  rui/Teau  qui  defcend  de  la 
côte  qui  fait-  face  au  village  de  la  Minera.  La  veine  a  plu-s  de  deux 
toifes  d'épaifîeur,  &  paroît  au  jour  fur  plus  d'une  lieue  de  longueur; 
cette  mine  efl  de  la  même  nature  que  celle  de  San-Giomen  en 
Catalogne.  Hijfoire  Naturelle  du  Languedoc ,  par  Ai.  de  Genfanne , 
tome  II ,  page    i  6 1 . 

(p)  L'Efpagnol  qui  eft  propriétaire  de  celte  mine  a  traité  de 
ion  produit  avec  des  Ncgocians  de  Strafbourg  ,  qui  l'envoient  aux 
fonderies  de  Wirteiuberg.  ...  11  eft  étonnant  qu'aucun  particulier 
des  frontières  du  royaume  n'ait  penfé  jufqu'à  préfent  à  enlever  aux 
ATlemands  la  main-d'œuvre  de  la  préparation  de  l'azur.  Traité  de 
la  fonte   des   mines  de   Schlutter ,   tome  I ,  pages  ^8  &   ^p. 

(q)    Hiftoire   Naturelle  d'Elpagne,  pages   ^pS    é^  fuiv. 

(r)  Il  y  a  une  mine  dans  ia  vallée  de  Giftau  aux  Pyrénées 
efpagnoles  ,  dont  le  cobalt  s'eft  vendu  fortant  de  la  terre  jufqu'à 
quarante  livres  le  quintal  pour  la  fabrique  d'azur  du  Wirtcmberg. 
Traité  de  la  fonte  des  mir.:j  de  Schlutter,  tome  J ,  page  2^6. 


374         Histoire  Naturelle 

dure  &  iuifante  avec  des  taches  de  couleur  de  rofe 
sèche,  <&  qu'il  n'y  avoir  point  de  taches  iemblables  fur 
les  morceaux  de  cobalt  (f^. 

C'efl  de  la  Saxe  qu'on  a  jufqu'ici  tiré  la  plus  grande 
partie  du  faffre  qui  fë  confomme  en  Europe,  pour  les 
émaux,  la  porcelaine,  les  faïences,  &  au/îi  pour  peindre 
à  froid,  &  relever  par  l'empois  la  blancheur  des  toiles. 
La  principale  mine  efl  celle  de  Schnéeberg,  tWe  efl 
très-abondante  &  peu  profonde;  on  affure  que  le  produit 
annuel  de  cette  mine  efl  fort  conhdérable,  il  n'ert  pas 
permis  d'exporter  le  cobalt  en  nature,  <5c  c'efl  après 
l'avoir  réduit  en  iàffre,  qu'on  le  vend  à  un  prix  d'autant 
plus  haut  qu'il  y  a  moins  de  concurrence  dans  le 
commerce  de  cette  forte  de  denrée ,  dont  l'Allemagne 
a  pour  ainfi   dire   le  privilège  excluhf  (rj. 

Cependant  il  fè  trouve  des  mines  de  cobalt  en 
Angleterre,  dans  le  comté  de  Sommerfet;  en  Suède, 
la  mine  de  Tannabcrg  tÇt  d'un  cobalt  blanc  qui,  félon 
M.  Demefle,  rend  par  quintal  trente  -  cinq  livres  de 
cobalt,  deux  li>'rcs  de  fer,  cinquante-cinq  livres  d'ar- 
fenic,  &  huit  livres  de  foufre  (u) . 

Nous  fommes  auiîl  prefque  aifurés  que  le  cobalt  fe 

■■  ■     ■       ■       «  ■  ■-      ■         ■  — ^ — ■ — ■  — —     —      - .  ^— ,i..^^.  ■■  —  —  ,  -— —  ^ -^  ■    ^ 

([)    Hiftoire  Naturelle  d'Efpagne,  par  M.  ^ovf\^s  ,  page  ^ ^ p. 

(t)  On  trouve  beaucoup  de  cobalt  en  Mifnie ,  en  Boheniç, 
dans  la  vallée  de  Joachim-Stal ;  il  y  en  a  dans  le  duché  de  Wirtemberg, 
dans  le   Hartz  &  dans  plufieurs  endroits   de   l'Allemagne. 

(u)  Lettres  de  AI.   DeJKeile ,   tome  II,  p.ige  1^4. 


DES   Minéraux.  37^ 

trouve  en  Afie ,  &  fans  cloute  dans  toutes  les  parties  du 
monde ,  comme  les  autres  matières  produites  par  la 
Nature  ;  car  le  très-beau  bleu  des  porcelaines  du  Japon 
&  de  la  Chine,  démontre  que  très  -  anciennement  on 
y  a  connu  &.   travaillé  ce  minéral  (xj. 

Dans  les  morceaux  de  mine  de  cobalt  que  l'on 
raiïemble  dans  les  cabinets,  il  s'en  trouve  de  toutes 
couleurs  &  de  tout  mélange,  &.  l'on  ne  connoîi  aucun 
cobalt  pur  dans  fa  mine;  il  efl  fouvent  mêlé  de  bi(muth, 
&  toujours  la  mine  contient  du  fer  quelquefois  mélangé 
de  zinc,  de  cuivre,  &  même  d'argent  tenant  or,  & 
prefque  toujours  encore  la  mine  eft  combinée  avec  des 
pyrites  &  beaucoup  d'arfènic.  De  toutes  ces  matières 
la  plus  difficile  à  féparer  du  cobalt  eft  celle  du  fer, 
leur  union  efl  fi  intime  qu'on  efl  obligé  de  volatilifer 
le  fer  en  le  fàifam  fublimer  pluiieurs  fois  par  le  fel 
ammoniac  qui  l'enlève  plus  lacilement  que  le  cobalt  ; 
mais  ce  travail  ne   peut  fè  faire  en  grand. 

On  voit  des  morceaux  de  minerai  dans  iefquels  le 
cobalt  efl  décompofé  en  une  forte  de  cérufè  ou  de 
chaux  :  on  trouve  auffi  quelquefois  de  l'argent  pur  en 
petits   filets  ou    en  poudre    palpable  dans    la    mine   de 

m  I  r— .^   ■  M^i^^l^^l^  ,    — ^—^^  ,11   ■■,■■■■    II.       ■      I»      I    I  ■  ^^g^—      ■■■1.1  ■  ■   Ml    ^  l-^»^^— ^W 

(x)  Quelques  perfonnes  prétendent  que  c'efl:  par  un  mélange 
du  lapis- la/uli  que  les  Chinois  donnent  à  leurs  porcelaines  la  belle 
couleur  bleue.  M.  de  Boinare  eft  dans  cette  opinion.  Voye:^  fa 
Alinéralog'ie ,  tome  H ,  pages  ^6  ù'  Juiv.  mais  je  ne  la  crois  pas 
fondée  ,  car  le  lapis  en  fe  vitrifiant  ne  confer ve  pas  la  couleur. 


37^        Histoire  Naturelle 

cobalt  ;  mais  le  pfus  fouvent  ce  métal  n'y  efl  point 
apparent,  &  d'ailleurs  n'y  eft  qu'en  trop  petite  quantité 
pour  qu'on  puifTe  l'extraire  avec  profit.  On  connok 
aufli  une  mine  noire  vitreufe  de  cobalt,  dans  laquelle 
ce  minéral  eft  en  cérufe  ou  en  chaux ,  qui  paroît  être 
minéralifée  par  Taélion  du  foie  de  fbufre  dans  lequel 
le  cobalt  fe  difTout  aifément. 


DU 


DES    Minéraux,  3  77 


I 


« 


ce 


DU    NICKEL. 

L  fe  trouve  affez  fbuvent  dans  les  mines  de  cobalt 
un  minéral  qui  ne  refTeniLle  à  aucun  autre  &  qui  n'a 
été  reconnu  que  dans  ce  dernier  temps  ;  c'efl  le  nickdl. 
M.  Demefle  drt  "  que  quand  le  cuivre  &  l'arfenic  fè 
trouvent  joints  au  fer  dans  la  mine  de  cobalt ,  il  en 
réfulte  un  minéral  fnigulier  qui  dans  fa  fradure  eft  d'un  « 
gris  rougeâtre  &  qui  a  pour  ainfi  dire  fon  régule  propre,  « 
parce  que  dans  ce  régule  le  cobalt  adhère  tellement  aux  « 
fubflanccs  itiétalliques  étrangères  dont  il  eft  mêlé,  qu'on  « 
n'a  pas  héfué  d'en  faire  fous  le  nom  de' ;//V/r/ un  demi- 
métal  particulier  (a)  ».  Mais  cette  définition  du  nickel 
n'eft  point  exaéte  ,  car  le  cuivre  n'entre  pas  comme 
partie  effentielle  dans  fa  compofition,  &  même  il  ne  s'y 
trouve  que  très-rarement.  M-  Bergman  efl  de  tous  les 
Chimiftes  celui  qui  a  répandu  le  plus  de  lumières  fur 
la  nature  de  ce  minéral  qu'il  a  fournis  à  des  épreuves 
aulTi  variées  que  multipliées.  Voici  les  principaux  réfultats 
de  fes  recherches  &  de  fes  expériences. 

Hicrne,  dit>il,  eft  le  premier  qui  ait  parlé  du  kupfir- 
n'ickel ,  dans  un  Ouvrage  fur  les  minéraux ,  publié  en 
fuédois  en  1694. 

Henckel  Ta  regardé  comme  une  efpèce  de  cobalt  ou 
<i'arfenic  mêlé  de  cuivre.  (  Pyrhol.  cli.  vil  &  viii  ). 


(a)  Lettres  du   dodeur  DemeAe,  tome  JI ,  page  i^ij. 

Minéraux ,  Tome  IIL  B  b  b 


37^        Histoire  Naturelle 

Cramer  a  auiïi  placé  le  kupftr- nickel  dans  les  mines 
de  cuivre  (  Docimafl.  S- ^/^  ^  "f^^)»  ^  néanmoins 
on  «V//  ti  jiV;ii7is  tiré  un  atome  de  cuivre.  Je  dois  cepen- 
dant obferver  que  M.  Bergman  dit  enfuite  que  le  nickel 
efl  quelquefois  uni  au   cuivre. 

Cronûedt  efl:  le  premier  qui  en  ait  tiré  un  régule 
nouveau  en  175  i.  (  Aâes  de  Stocholm ) . 

M.  Sage  le  regarde  comme  du  cobalt  mclé  de  fer, 
d'arfenic  &.  de  cuivre.  (Mémoires  de  Chimie  ,  iyy2) , 

M.  Monnet  penfè  au/Ti  que  c'efl  du  cobalt  impur. 
(Traité  de  la  Dijfolmion  des  métaux ) , 

Le  kupfer-nickel  perd  à  la  calcination  près  d'un  tiers 
&  quelquefois  moitié  de  fon  poids ,  par  la  diifipation 
de  i'arfènic  &  du  foufre  ;  ce  minéral  devient  d'autant 
plus  vert  qu'il  efl  plus  riche.  Si  on  le  pulvérife  &  qu'on 
le  pouffe  à  la  fufion  dans  un  creulèt  avec  trois  parties 
de  fîux  noir ,  on  trouve  fous  les  fcories  noirâtres  & 
quelquiîfois  bleues ,  un  culot  métallique  du  poids  du 
dixième,  du  cinquième,  ou  même  près  de  moitié  de 
la  mine  crue  :  ce  régule  n'efl  pas  pur ,  il  tient  encore 
un  peu  de  foufre  &  une  plus  grande  quantité  d'arfenic , 
de  cobalt,  &  encore  plus  de  fer  magnétique. 

L'arfenic  adhère  tellement  à  ce  régule,  que  M. 
Bergman  l'ayant  fucceffivement  calciné  &  réduit  cinq 
fois ,  il  donnoit  encore  l'odeur  d'ail  à  une  fixième  cal- 
cination quand  on  y  ajoutoit  de  la  pouffière  de  charbon 
pour  favorifer  l'évaporation  de  rarfenic. 


DES    Minéraux,      379 

A  chaque  récludlion ,  il  pafTe  un  peu  de  fer  dans 
les  fcories  ;  à  ia  fixième  ,  le  régule  avoit  une  demi- 
duélilitc  ,  &  ctoit  toujours  fenfible  à  l'aimant. 

Dans  les  différentes  opérations  faites  par  M.  Bergman, 
pour  parvenir  à  purifier  le  nickel,  fbit  par  les  cal- 
cinations ,  foit  en  le  traitant  avec  le  foufre ,  il  a  obtenu 
des  régules  dont  la  denfité  varioit  depuis  7,0828  ,  juA 
qu'à  8,87^  1  fS).  Ces  régules  étoient  quelquefois  très- 
caffans,  quelquefois  aflez  dudiles  pour  qu'un  grain  d'une 
ligne  de  diamètre  formât  une  plaque  de  trois  lignes  fiir 
l'enclume;  ils  étoient  plus  ou  moins  fufibles,  ôi  fouvent 
aufli  réfra6taires  que  le  fer  forgé,  &  tous  étoient  non-fèu- 
lement  attirables  à  l'aimant,  mais  même  il  a  obfervé 
qu'im  de  ces  régides  attiroit  toutes  fortes  de  fer,  &  que 
fes  parties  s'attiroient  réciproquement;  ce  même  régule 
donne  par  l'alkali  volatil,  une  diffolution  de  couleur  bleue. 

M.  Bergman  a  aulfi  effayé  de  purifier  le  nickel  par 
le  foie  de  foufre  ,  qui  a  une  plus  grande  affinité  avec 
le  cobalt  qu'avec  le  nickel ,  &.  il  eft  parvenu  à  féparer 
ainfi  la  plus  grande  partie  de  ce  dernier  ;  le  régule  de 
nickel ,  obtenu  après  cette  diffolution  par  le  foie  de 
foufre,  ne  conferve  guère  fon  magnétifme ;  mais  on 
le  lui  rend  en  féparant  les  matières  hétérogènes  qui, 
dans   cet  état ,   couvrent  le  fer. 


fùj  Lapefanteur  fpécifique  du  régule  de  nickel ,  fuirant  M.  Briflbn, 
cft  de  78070  ,  ce  qui  eft  un  terme  moyen  entre  les  pefanteuxi 
fpédficjues  70828  &  88751  ,  données  par  M.  Bergman. 

Bbbij 


380         Histoire    Natu relle 

Il  a  de  même  traité  le  nickel  avec  le  nitre,  le 
fel  ammoniac,  l*alkali  volatil,  &  par  la  diiïblution  dans 
i'acide  nitreux,  &  la  calcination  par  le  nitre,  il  Ta  privé 
de  prefqiie  tout  fon  cobalt;  le  fel  ammoniac  en  a  féparé 
un  peu  de  fer  ;  mais  le  nickel  retient  toujours  une 
certaine  quantité  de  ce  métal  ;  &  M.  Bergman  avoue 
avoir  épuifé  tous  les  moyens  de  l'art,  fans  pouvoir  Je 
féparer  entièrement  du  fer. 

Le  régule  de  nickel  contient  quelquefois  du  bifmuth; 
mais  on  les  fépare  aifément  en  fai/ànt  difToudre  ce  régule 
dans  Tacide  nitreux,  &  précipitant  le  biliiiuth  par  l'eau. 

M.  Bergman  a  encore  obférvé  que  le  nickel  donne 
au  verre  la  couleur  d'hyacinthe,  6l  il  conclut  de  fès 
expériences  ; 

i.°  Qu'il  ell  poffihle  de  féparer  tout  l'arfenic  du 
nickel  : 

2.°  Que  quoiqu'il  tienne  quelquefois  du  cuivre,  iJ 
efl  également  facile  de  le  purifier  de  ce  mélange;  &  que 
quoiqu'il  donne  la  couleur  bleue  avec  l'alkali  volatil, 
cette  propriété  ne  prouve  pas  plus  l'identité  du  cuivre 
&  du  nickel,  que  la  couleur  jaune  des  difToliitions 
d'or  &  de  fer  dans  l'eau  régale,  ne  prouve  l'identité 
de  ces  métaux: 

3.°  Que  le  cobalt  n'efl  pas  plus  effentiel  au  nickel, 
puifqu'on  parvient  à  l'en  féparer,  &  même  que  le 
cobalt  précipite  le  nickel  de  fa  diffolution  par  le  foie 
de  foufre: 


DES   Minéraux.  381 

4.  Qu'il  n'eft  pas  pofîibie  de  le  priver  de  tout  Ton 
fer,  (5l  que  plus  on  multiplie  les  opérations  pour  l'en 
dépouiller,  plus  il  devient  magnétique  &  difficile  à 
fondre;  ce  qui  le  porte  à  penfèr  qu'il  n'efl,  comme  le 
cobalt  &  la  mangancfe ,  qu'une  modification  particulière 
du  fer:  voici  fes  termes. 

Solwn  itaque  jam  ferriitn  rejlat,  ér  fmiè  varice  eœdemqne 
non  exigiii  monienti  raiiones  fuadent  niccolnm  &  cobaltum 
&"  jîiagrifjiinn  forfan  non  aliter  ac  divcrfijjîmas  ferri  mo- 
djficdàoncs  ejfe  confidcraiidas  (c) .  On  voit  par  ce  dernier 
partage,  que  ce  grand  Chimifte  a  trouvé  par  l'anaJy/è, 
ce  que  j'avois  préfumé  par  les  analogies,  &  qu'en  effet 
le  cobalt,  le  nickel  &  la  manganèfe  ne  font  pas  des 
demi-métaux  purs ,  mais  des  alliages  de  difïerens  miné- 
raux mélangés  ,  &  fi  intimement  imis  au  fer  qu'on  ne 
peut  les   en  féparer. 

Le  cobalt,  le  nickel  &  la  manganèfe  ne  pouvant 
être  dépouillés  de  leur  fer,  reffent  donc  tous  trois 
attirables  à  l'aimant  ;  ainfi  de  la  même  manière  qu'après 
les  fix  métaux,  il  fè  pré/ènte  une  matière  nouvellement 
découverte  à  laquelle  on  donne  le  nom  de  plaiine ,  & 
qui  ne  paroît  être  qu'un  alliage  d'or,  ou  d'une  matière 
auffi  pefante  que  l'or  avec  le  fer  dans  l'état  magnétique  ; 
il  fe  trouve  de  même  après  les  trois  fubflances  demi- 
métalliques,  de  l'antimoine  ,  du  bilinuth  &  du  zinc,  il 

(c)  Dij[frl.   de  niccolo.  Oviifcul.  tom.   Il  ,  pag.  160. 


-82       Histoire  Naturelle 

fe  trouve,  dis- je,  trois  fubflances  minérales,  qui,  comme 
la  platine,  font  toujours  attirables  à  J'aimant,  &  qui  dès- 
lors  doivent  être  confidérées  comme  des  alliages  naturels 
du  fer  avec  d'autres  minéraux  ;  &  il  me  fèmble  que 
par  cette  raifon,  il  ièroit  à  propos  de  féparer  le  cobalt  f^). 
Je  nickel  &  la  manganèfe  des  demi  -  métaux  fimples , 
comme  la  platine  doit  l'être  des  métaux  purs  ;  puifque 
ces  quatre  minéraux  ne  font  pas  des  [ùbiîances  fimples, 
mais  des  compofcs  ou  alliages  qui  ne  peuvent  être  mis 
au  nombre  des  métaux  ou  des  demi  -  métaux  dont 
l'edence ,  comme  celle  de  toute  autre  matière  pure, 
confifte  dans  l'uniié  de  fubflance. 

Le  nickel  peut  s'unir  avec  tous  les  métaux  &  demi- 
métaux,  cependant  le  régule  non  purifié  ne  s'allie  point 
avec  l'argent  ;  mais  le  régule  pur  s'unit  à  parties  égales 
avec  ce  métal,  &  n'altère  ni  fa  couleur  ni  fa  dudilité. 
Le  nickel  s'unit  aifément  avec  l'or,  plus  difficilement 
avec  le  cuivre ,  &  le  compofé  qui  réfulte  de  ces  alliages 
eft  moins  duélile  que  ces  métaux,  parce  qu'ils  font 
devenus  aigres  par  le  fer,  qui  dans  le  nickel  efl  toujours 
attirable  à  l'aimant.  Il  s'allie  facilement  avec  l'étain  &  lui 
donne  aufli  de  l'aigreur  ;  il  s'unit  plus  difficilement  avec 
le  plomb,  &  rend  le  zinc  prefque  fragile:  le  fer  forgé 

devient  au  contraire  plus  dudile  lorfqu'on  l'allie  avec  le 

'  '  ■ 

(d)  Al.  Braiidt ,  Chimifte  fuedois ,  efl  ie  premier  qui  ait  placé  le 
cobalt  au  rang  des  demi-métaux  ;  auparavant  on  ne  le  regardoit  quq 
comme  une  terre  muiéraie  plus  ou  moins  friable, 


DES    M  I  N  È  n  A  U  X.  383 

nickel;  fi  on  le  fond  avec  le  foufre,  il  fe  criflallife  en 
aiguilles  (e):  enfin,  le  nickel  ne  s*anialganie  pas  plus 
que  le  cobalt  &.  le  fer  avec  le  mercure  (fj,  même  par 
le  fecours  de  la  chaleur  &  de  la  trituration. 

Au  refle,  le  minerai  du  nickel  diffère  de  celui  du 
cobalt  en  ce  qu'étant  expofé  à  l'air,  il  fe  couvre  d'une 
efflorefcence  verte ,  au  lieu  que  celle  du  cobalt  eft  d'un 
rouge-ro/àcé.  Le  nickel  fe  diffout  dans  tous  les  acides 
minéraux  &  végétaux;  toutes  fes  difTolutions  font  vertes, 
&  il  donne  avec  le  vinaigre  des  criftaux  d'im  beau 
vert. 

Le  régule  du  nickel  eft  un  peu  jaunâtre  à  rcxtérieur, 
mais  dans  l'intérieur,  fa  fubftance  cfl  d'un  beau  blanc; 
elle  ell  compofée  de  lames  minces  comme  celles  du 
bifmuth,  La  diiïblution  de  ce  régule  par  l'acide  nitreux 
ou  par  l'acide  marin ,  efl  verte  comme  les  criftaux  de 
fon  minerai ,  &.  ces  deux  acides  font  les  feuls  qui  puifTent 
<lifroudre  ce  régide;  car  l'acide  vitrioliquc,  non  plus  que 
les  acides  végétaux ,  n'ont  aucune  a(5lion  fur  lui. 

Mais,  comme  nous  l'avons  dit,  ce  régule  n'eft  pas 
un  minéral  pur,  il  efl  toujours  mclé  de  fer,  &  comme 
fes  efTlorefcences  font  vertes,  &  que  les  criftaux  de  fà 
diftbluiion   confcrvenp-  cette   même    couleur ,    on  y  a 

(e )   M.  Bergman  ,   Dî [fer tût.    de  niccolo,  —  M.  de   Morvww, 
JÉIémens  de  Chimie,   tome  î ,  page  2^2, 

{/)  Idem  ,  tom  IJI ,  page  ^^7, 


384-         Histoire  Naturelle 

fappofé  du  cuivre  qu'on  n'y  a  pas  trouvé,  tancfis  que 
le  fer  paroît  être  une  fubflance  toujours  inhérente  dans 
fà  compofition  ;  au  refle ,  ce  régule  lor/qu'il  eil  pur , 
c'efl-à-dire,  purgé  de  toute  autre  matière  étrangère, 
réfifle  au  plus  grand  feu  de  calcination,  &  'i\  prend 
feulement  une  couleur  noire  fans  fe  convertir  en  verre. 


DE 


DES    Minéraux.         385 

*     .    .  .  ■  « 

DE    LA    MANGANESE. 

J_j  A  Mangancfe  cft  encore  une  matière  minérale  com- 
pofée,  &  qui,  comme  ie  cobalt  &  le  nickel,  contient 
toujours  du  fer ,  mais  qui  de  plus  efl:  mélangée  avec 
une  afr<^z  grande  quantité  de  terre  calcaire,  &  fouvenc 
avec  un  peu  de  cuivre  (ûJ ;  c'efl  de  la  réunion  de  ces 
fubftances  que  s'efl  formée  dans  le  fèin  de  la  terre,  la 
manganèfe,  qui  mérite,  encore  moins  que  le  nickel  &  le 
cobalt ,  d'être  mife  au  rang  des  demi-métaux  ;  car  on 
^  '  ■  ~  " 

(g)  La  manganèfe....  fe  trouve  en  diverfes  contrées  d^;  l'Alle- 
mao-ne ,  auffi-hien  qu'en  Angleterre,  dans  le  Piémont  ô<.  en  jilufieurs 
autres  endroits,  tantôt  dans  des  montagnes  calcaires,  tantôt  dans  des 
mines  de  fer.  On  s'en  fert  pour  rendre  le  verre  tranfparent  &  net, 
ainfi  que  pour  compofcr  le  vernis  des  Potiers ,  tant  noir  que  rou- 
geâtre. 

Par  différentes  expériences ,  M.  Margraff  a  reconnu  que  la  man- 
ganèfe du  comté  de  Hohenjlàn  près  à^ Hcpa  ^  contenoit  ime  terre 
calcaire  &  un  i)eu  de  cuivre.  ...  Il  tira  aufîi  d'une  manganèfe  du 
Piémont ,  au  moyen  de  l'acide  du  vitriol  ,  un  fel  rougeatre  ,  qui 
ayant  été  dilîbus  dans  l'eau,  dépofa  fur  une  lame  d'acier  quelques 
particules  de  cuivre  ,  quoiqu'en  moindre  quantité  que  la  manganèfo 
de  Hohenftein.  «  On  retire,  continue  M.  Margraff,  également  du 
cuivre,  tant  de  la  manganèfe  d'Allemagne  que  de  celle  de  Piémont,  « 
en  la  mêlant  avec  parties  égales  de  foufre  pulvérifé ,  en  calcinant  ce  ^ 
mélange  pendant  quelques  heures, »à  un  feu  doux  que  l'on  augmente  «f 
enfuite  en  le  leOlvant  &  en  le  faifant  criHallifer  »,  Journal  de  Phyfiquei 
Mars  17S  0,  pages  22 j  &  fuiv. 

Mmmux,  Tome  JIL  C  c  c 


386  Histoire  Naturelle 

feroit  forcé  dès-lors  Je  recrarJer  comme  tels ,  tous  les 
mélanges  métalliques  ou  alliages  naturels,  quand  même 
ils  feroient  comj3ofcs  de  trois,  de  quatre,  ou  d'un 
nombre  encore  pfus  grand  de  matières  difiérentcs,  6c 
il  n'y  auroit  plus  de  ligne  de  fèparation  entre  les  miné- 
raux métalliques  fimples  &  les  minéraux  compofés  ; 
j'entends  par  minéraux  fuiiples  ceux  qui  le  font  par 
nature,  ou  qu'on  peut  rendre  tels  par  l'art:  les  fix 
métaux,  les  trois  demi-métaux  &  le  mercure,  font  des 
minéraux  métalliques  fmiples  ;  la  platine,  le  cobalt,  le 
nickel  &  la  majlganèfe  font  des  minéraux  compofés, 
&  fans  doute  "qu'en  obfèrvant  la  Nature  de  plus  près, 
on  en  trouvera  d'autres  peut-être  encore  plus  mélangés, 
puifqu'il  ne  faut  que  le  hafard  des  rencontres  pour 
produire  des  mélanges  &.  des  unions  en  tous  genres. 

La  manganèfe  étant  en  partie  compofée  de  fer  &  de 
matière  calcaire,  fe  trouve  dans  les  mines  de  fer  fpa- 
ihiques  mêlées  de  fubftances  calcaires ,  foit  que  ces  mines 
fe  préfentent  en  ftala6tites ,  en  écailles,  en  mafles  grenties 
ou  en  poudre;  mais  indépendamment  de  ces  mines  de 
fer  fpathiques  qui  contiennent  de  la  manganèfe,  on  la 
trouve  dans  des  minières  particulières  où  elle  fe  pré- 
fente  ordinairement  en  chaux  noire ,  &  quelquefois  en 
morceaux  folides ,  &  même  criflallifés;  fouvent  elle  efl 
mêlée  avec  d'autres  pierres  :  mais  M.  de  la  Peiroufè ,  qui  a 
iàit  de  très-bonnes  obfcrvations  fur  ce  minéral,  remarque 
avec  raifon,  que  toutes  les  fois  qu'on  verra  une  pierre 


DES    Minéraux.  3  S/ 

légèrement   teinte  de   violet,   on  peut  prcfumcr    avec 
fondcMient,  qu'elle  contient  de  la  manganc/e;  il  ajoute 
qu'il  n'y  a  peut-être  pas  de    mines  de   fer   fpathiques 
blanches,  grifes  ou  jaunâtres,  qui  n'en  contiennent  plus 
ou  moins.  «  J'en  ai,  dit-il,  coiiftammcînt  retiré  de  toutes 
celles   qiie    j'ai    eiFayées,   une    portion  plus   ou   moins" 
grande,  iclon  l'état  de  la  mine;  car  plus   les  mines  de  * 
fer   approchent  de  la   couleur  brune ,  moins  il  y  a  de  ^« 
manganèle ,  &  celles  qui   font  noires  n'en  contiennent  ^^ 
point  du  tout   fl)  ». 


(h)  La  chaux  de  mangaiicfe  bien  pure  efl  légère  ,  pulvcruleme, 
douce  au  toucher ,  <Sc  falit  les  doigts  ;  tantôt  elle  elt  en  petits  pelotons 
loges  dans  les  cavités  des  mines  ,  tantôt  elle  efl  en  couches  ,  tantôt 
en  feuillets  ;  on  la  trouve  aufîi  en  maffes  ,  dans  ce  dernier  cas  elle 
efl:  plus    lolide   de  durcie  ,    quoique    pulvérulente.    Elle  varie    pour 

la  couleur  ;    il    y  en  a  qui   elt    parfaitement  noire quelquefois 

elle  efl  brune  ,  rarement  rougeâtre.  M.  de  la  Peiroufe  a  reconnu 
pour  vraie  chaux  de  manganèle,  une  fubllance  qui  à  l'œil  a  l'éclat 
de  l'argent;  elle  fe  trouve  allez  fre'quemment  en  petites  malTes  dans 

les    cavités    des    mines    de    fer Il   compte    onze    variétés    de 

chaux  de   manganèfe Toutes   ces    chaux    ont    pour   gangues 

le  fpath  calcaire,  les  fchilles  talqueux ,  les  mines  de  fer  de  dilix'rentes 
fortes ,  &  la  manganèle  même.  La  manganèfe  folide  diffère  de  celle 
qui  efl  en  chaux,  par  fa  pelante  ur ,  par  fa  dureté  ,  par  fa  denfiîé: 
elle  a  une  plus  grande  poruon  de  phlogillique,  &  contient  prefque 
tôt  jours  du  fer;  fon  tiffu  ,  foit  feuilleté,  foit  en  maffe,  efl  com- 
pade ,  ferré  6c  amorphe  ;  <5c  c'ell  en  quoi  on  la  dillingue  de  la 
manganèfe  criftallifée:  elle  falit  les  doigts,  mais  n'efl  point  friable 
jii  pulvérulente,  comme   celle  qui  eR  eii  chaux.  M.  de  la  Peiroufe 

Ceci; 


38S         Histoire   Natu p elle 

La  manganèfe  paroît  fouvciit  criflalliice  dans  fà  mine, 
à  peu  -  près  comme  la  pierre  calaminaire,  &  c'eft  ce 
qui  a  lait  croire  à  quelques  Cliimiiies  qu'eile  contenoic 
du  zinc  (c) ;  mais  d'autres  Ciiimiiles,  &  particulière- 
ment M.  Bergman  ,  ont  démontré  par  i'analj/è  qu'il 
n'entre  point  de  zinc  dans  fa  compolition;  d'ailleurs, 
cette  forme'  des  criflallifàtions  de  ia  manganèfè  varie 
beaucoup  ;  il  y  a  des  mines  de  manganèfe  criilallifées 
en  aiguilles,  qui  relîemblent  par  leur  texture  à  cer- 
taines mines  d'antimoine,  &  qui  n'en  difièrent  à  l'œij 
que  par  leur  couleur  grife  plus  foncée  &  moins 
brillante  que  ccWe  de  l'antimoine;  ôi  ce  qu'il  y  a  de 
remarquable  &  de  fmgulier  dans  ia  forme  aiguillée  de 

en  compte  huit  variétés  ....  qui  ont  pour  gangues  le  fpath  calcaire^ 
Ja  pyrite  lulfureufe,   Jes  mines  de  fer,   &c. 

La  manganèle  criftallile  le  plus  communément  en  longues  &  fines 
aiguilles  priiinatiques ,  brillantes  &  fragiles:  elles  font  rallemblées  en 
failceaux  coniques  dont  on  peut  aifément  diftinguer  la  figure  dans 
})lufieurs  échantillons  ,  quoique  ces  faifceaux  foient  groupés.  On 
ient  bien  que  les  différentes  combinaifons  que  peuvent  avoir  entr'eux 
ces  nombreux  faifceaux,  font  varier  à    l'infini    les   divers   morceaux 

de   manganèfe   criflaliifée Il   y  en  a   qui   eft  comme    fatinée  j 

une  autre  qui  imite  parfaitement  l'hématite  fibreufe d'autres  qui 

font  ftriées,  &c.  M.  de  la  Peiroufe  compte  treize  variétés  de  ces  man- 
ganèfes  criflailifées  dans  les  mines  des  Pyrénées  ;  elles  ont  pour 
gangues  le  fpath  calcaire,  le  fpath  gypfeux ,  l'argife  martiale,  le 
jafpe  rougeâtre ,  les  mines  de  fer ,  les  hématites  &  la  inanganèfe 
même.  Journal  de  Phyfique ,  Janvier  1  y8 0  ,  pages  6 y  &  fu'ii. 

(s)  Lettres  de  M.  Demeile,  tome  II ,  page  1  8j. 


DES    Minéraux.         389 

îa  manganèfe,  c'cil  qu'il  femble  que  cette  forme  pro- 
vient (Je  fa  propre  llibÛaiice  &  non  pas  Je  celle  du  foufre  ; 
car  la  manganèfe  n'eft  point  du  tout  mélce  d'ainimoine, 
&  elle  n'exhale  aucune  odeur  fulfureufe  fur  les  cliarbons 
ardens.  Au  refle,  le  plus  grand  nombre  des  manganefes 
ne  font  pas  criihlli/ëes  ;  il  s'en  trouve  beaucoup  plus 
en  maffes  dures  &  informes  que  l'on  a  prifes  long- temps, 
&  avec  quelque  fondement,  pour  des  mines  de  fer  ("i/J: 
on  doit  auiïi  rapporter  à  la  manganèfe,  ce  que  plufieurs 
autres  ont  écrit  de  cette  fubflance  fous  les  noms  d7ié- 
m  alites  noires  ,  mamelonées ,   veloutées,  ire. 

On  trouve  des  mines  fpatbiques  de  fer ,  &  par 
confcquent  de  la  manganèfe  dans  plub-eurs  provinces 
de  France,  en  Dauphinè  ,  en  Roulfillon  ;  d'autres  à 
Baigory  &  dans  le  comté  de  Foix  ;  il  y  en  a  aufîi  une 
mine  très-abondante  en  Bourgogne  près  de  la  ville  de 
Mâcon;  cette  mine  efl  même  en  pleine  exploitation, 
&  Ton  en  débite  la  manganèfe  pour  les  verreries  & 
^  '  .    ■       .  — _ — ._ 

(d)  La  manganèfe  ell  une  mine  de  fer  pauvre,  aigre,  qui  n'a 
point  de  figure  déterminée;  tantôt  elle  eft  en  petits  grains,  &  reflemble 
à  l'aimant  de  l'Auvergne;  tantôt  elle  eft  grisâtre,  écaiileufe,  itiarqueiée, 
brillante  &  peu  folide  ;  elle  contient  toujours  un  peu  de  fer;  tantôt 
&  plus  communément,  elle  efl:  flrite ,  Lrillante,  foJide,  Si  reflemble 
à  de  l'antimoine  par  fon  éclat,  par  fa  couleur  qui  eft  d'un  gris- 
noirâtre  ,  &  par  fa  pefanteur  :  cependant  elle  efl  plus  tendre  ,  plus 
friable  ,  plus  caflante  ,  plus  graveleufe  dans  fes  fradures  ;  elle  efl 
prefque  toujours  traverfée  de  veines  ou  de  filons  blancs  «Ik  quanzeux^ 
Minéralogie  de  Bomure ,  tome  JJ ,  page  jj^. 


390         Histoire  Natu relle 

les  faïenceries  :  on  trouve  dans  cette  mine  plufreurs 
fortes  de  manganèfcs,  favoir,  Ja  mangancfe  en  chaux 
noire,  la  mangancfe  en  mafTcs  foiides  (5c  noires,  6l  Ja 
mangane/è  criflaJlifée  en   rayons  divcrgens, 

La  mine  de  mangancfe  ne  fe  réduit  que  difficilement 
en  régule ,  parce  qu'elle  eft  très  -  diliicile  à  Icmdre ,  & 
en  même  temps  très  -  di/pofce  à  pafTer  à  i'èta:  de 
verre  fe) ;  ce  régule  c(t  au  moins  aufîi  dur  que  le  fer, 
fa  flirface  eft  noirâtre  ,  &  dans  l'intérieur  W  eft  d'im 
blanc  brillant  qui  bientôt  fè  ternit  à  l'air;  fa  caifure 
préfente  des  grains  affez  groffiers  &  irréguliers;  en  le 
pulvérifant  il  devient  fenfiblement  attirable  à  l'aimant; 
un  premier  degré  de  calcination  le  convertit  en  une 
chaux  blanche  qui  fe  noircit  par  .une  plus  forte  cha- 
leur, &  fon  volume  augmente  d'un  cinquième  envi- 
ron ;  fi  l'on  met  ce  régule  dans  un  vaiffeau  bien  clos, 
il  fe  convertit  par  l'adion  du  feu  en  un  verre  jaune- 
obfcur,  &  le  fer  qu'il  contient  fe  fépare  en  partie,  & 
forme  un  petit  bouton  ou  globule  métallique. 

Le  régule  de  manganèfe  fe  diiïbut  par  les  trois  acides 

fe)  Pour  obrenir  ce  régule  il  faut  pulvérifer  la  mine,'  en  former 
une  boule  en  la  délayant  avec  de  l'huile  &  de  l'eau ,  la  mettre  dans 
un  creufet,  environnée  de  toutes  parts  de  poufljcre  de  charbon,  & 
i'expofer  à  un  feu  de  la  dernière  violence  ;  encore  ne  la  trouve-t-oïi 
pas  réunie  en  un  feul  culot,  mais  en  globules  diOéminés  qui  vont 
quelquefois  à   trente  centièmes   du  poids  de  la  mine. 

Le  régule  de  mangancfe  eft  à  l'eau  diflillée  dans  ie  rapport  de 
i^S,jo   à    1000.    Bergman,  Ojpufcuks ,  îQme  II,  dijfertai.    i p. 


DES  Minéraux,  391 

minéraux ,  &  fcs  difTolutions  font  blanches  :  la  chaux 
noire  de  manganèfe  fe  diffout  dans  l'alkali  fixe  du  tartre, 
&  lui  communique  fur  le  champ  une  belle  couleur 
bleue. 

Ce  régule  refu/e  de  s'unir  au  foufre,  &  ne  s'allie 
que  très-difficilement  avec  le  zinc,  mais  il  fe  m.éle  avec 
tous  les  autres  minéraux  n^étalliques  ;  lorfqu'on  l'allie 
dans  une  certaine  proportion  a\'ec  le  cuivre,  il  lui  ôte 
fa  couleur  rouge  fans  lui  faire  perdre  fà  ductilité  :  au 
rcfle ,  ce  régule  contient  toujours  du  fer,  &  il  eft, 
comme  celui  du  nickel,  celui  du  cobalt,  <&  comme  la 
platine ,  fi  intimement  uni  avec  ce  métal  qu'on  ne  peut 
jamais  l'en  féparer  totalement.  Ce  font  des  alliages  faits 
par  la  Nature,  que  l'art  ne  peut  détruire,  &  dont  la 
fubftance ,  quoique  compofée  ;  efl  auffi  fixe  que  celle 
des  métaux  fimplcs. 

La  manganèfe  efl  d'un  grand  u/àge  dans  les  manu- 
factures des  glaces  &  des  verres  blancs;  en  la  fondant 
avec  le  verre  elle  lui  donne  une  couleur  violette ,  dont 
l'intenfité  efl  toujours  proportionnelle  à  fà  quantité  ;  en 
forte  que  l'on  peut  diminuer  cette  couleur  violette  jufqu'à 
la  rendre  prefque  inapercevablc  ;  &  en  même  temps  la 
manganèfe  a  la  propriété  de  chafler  les  autres  couleurs 
obfcures  du  verre ,  &.  de  le  rendre  plus  blanc  lorfqu'elle 
n'efl;  employée  qu'à  la  très  -  petite  dofe  convenable  à 
cet  effet.  C'eft  dans  la  fritte  du  verre  qu'il  faut  mêler 
cette  petite  quantité  de  manganèfe;  fa  couleur  violette. 


392        HrsroinË  Naturelle 

en  s'évanouifFant ,  fait  dirparoitre  les  autres  couleurs, 
,S{.  il  y  a  toute  apparence  que  cette  couleur  violette 
qu'on  ne  peut  apercevoir  lorfque  la  manganèfe  efl  en 
très-petite  quantité,  ne  laiiïe  pas  d'exifler  clans  la  fubf- 
tance  du  verre  qu'elle  a  blanchi  ;  car  M.  Macquer  dit 
avoir  vu  un  morceau  de  verre  très-blanc,  qui  u^avoit 
befoin  que  d'être  chauffe  jusqu'à  un  certain  point,  pour 
devenir  d'un  très-beau  bleu-violet  (fj. 

Il  faut  également  calciner  toutes  les  manganèfes  pour 
leur  enlever  les  minéraux  volatils  qu'elles  peuvent  con- 
tenir; il  faut  les  fondre  fouvent  à  plufieurs  reprifes  avec 
du  nitre  purihé;  car  ce  ie\  a  la  propriété  de  développer 
&  d'exalter  la  couleur  violette  de  la  manganèfe  ;  après 
cette  première  préparation  ,  il  faut  encore  la  faire 
refondre  toujours  avec  un  peu  de  nitre,  en  la  mêlant 
avec  la  fritte  du  verre  auquel  on  veut  donner  la  belle 
couleur  violette;  il  efl  néanmoins  très-difîicde  d'obtenir 
cette  couleur  dans  toute  fa  beauté,  fi  l'on  n'a  pas  appris 
par  l'expérience  ,  la  manière  de  conduire  le  feu  de 
vitrification;  car  cette  couleur  violette  fe  change  en 
brun,  (Se  même  en  noir,  ou  s'évanouit  lorfqu'on  n'attein; 
pas  ou  que  l'on  paffe  le  degré  de  feu  convenable»  (5c 
que  l'ufage  feul  peut  apprendre  à  faifir. 

m  I  .  .,...•.  mm 

(f)  Didionnaire  de  Chimie,  article  Manganèfe.  M.  de  la  Peiroufe 
dit  aulTi  qu'on  peut  faire  difparoître  &  reparoître  à  la  flamme  d'une 
bougie  la  belle  couleur  violette  que  la  manganèfe  donne  au  verr© 
de  Borax.  Journal  dç  Phyfigue ,  Août  jy$9  ,  j^^g^S  i;6  ^  fuiV' 


DES      M  I  N  É   R  A    U  X.  39; 


DE    L'A  R  S  E  N  1  C. 

X-/ANS  l'ordre  des  minéraux,  c'efl  ici  que  finifTent 
les  fubflances  métalliques,  <&  que  commencent  les  ma- 
tières falines  ;  la  Nature  nous  préiènte  d'abord  deux 
métaux,  l'or  &  l'argent,  qu'on  a  nommés  parfaits,  parce 
que  leurs  fubflances  font  pures,  ou  toutes  deux  alliées 
l'une  avec  l'autre,  &  que  toutes  deux  font  également 
fixes,  également  inaltérables,  indeftruélibles  par  Taétiou 
des  élémens;  enfuite  elle  nous  offre  quatre  autres  métaux, 
le  cuivre,  le  fer,  l'étain  &  le  plomb,  qu'on  a  eu  raifon 
de  regarder  comme  métaux  imparfuits,  parce  que  leur 
fubltance  ne  réfifle  pas  à  l'aclion  des  élémens,  qu'elle 
fe  brûle  par  le  feu,  (Se  qu'elle  s*altère  &  même  fe 
décompofe  par  l'imprcfîion  des  acides  &  de  l'eau;  après 
ces  fix  métaux,  tous  plus  ou  moins  durs  &  folides,  011 
trouve  tout-à-coup  une  matière  fluide,  le  mercure  qui, 
par  fa  dendté  &.  par  quelques  autres  qualités ,  paroît 
s'approcber  de  la  nature  des  métaux  parfaits,  tandis  que 
par  fà  volatilité  &  par  fa  liquidité  il  fè  rapprocbe  encore 
plus  de  la  nature  de  l'eau:  enfuite  fe  prcfeiitent  trois 
matières  métalliques,  auxquelles  on  a  donné  le  nom  de 
demi-métaux j  parce  qu'à  l'exception  de  la  dudiliié  ils 
reifemblent  aux  métaux  imparfaits;  ces  demi-métaux  font 
l'antimoine,  le  bifmuth  &  le  zinc,  auxquels  on  a  voulu 
joindre  le  cobalt ,  le  nickel  &  la  manganèfe  ;  &  de  mcmc 
Minéraux ,  Tome  lîL  D  d  d 


394       Histoire     N  aturelle 

que  dans  les  métaux  ,  il  y  a  des  différences  très-marquées 
entre  les  parfaits  &  les  imparfaits,  il  fe  trouve  aufli  des 
différences très-fenfibies  entre  les  demi-métaux;  ce  nom, 
ou  plutôt  cette  dénomination,  convient  affez  à  ceux 
qui,  comme  l'antimoine,  le  bifmuth  &  le  zinc,  ne  font 
point  mixtes  ou  peuvent  être  rendus  purs  par  notre 
art;  mais  il  me  femble  que  ceux  qui,  comme  le  cobalt, 
k  nickel  &  la  manganèfe,  ne  font  jamais  purs,  &  font 
toujours  mêlés  de  fer  ou  d'autres  fubftances  difîcrentes 
de  la  leur  propre,  ne  doivent  pas  être  mis  au  nombre 
des  demi-métaux,  fi  l'on  veut  que  l'ordre  des  déno- 
minations fuive  celui  des  qualités  réelles;  car  en  appelant 
demi-métaux  les  matières  qui  ne  font  que  d'une  feule 
/iibftance,  on  doit  impofer  un  autre  nom  à  celles  qui 
font  mêlées  de  plufieurs  fubfiances. 

Dans  cette  fuite  de  métaux,  demi-métaux  &  autres 
matières  métalliques,  on  ne  voit  que  les  degrés  fuccc/îifs 
que  la  Nature  met  dans  toutes  les  claffes  de  /es  pro- 
duétions;  mais  l'arfenic  qui  paroît  être  la  dernière  nuance 
de  cette  claffe  des  matières  métalliques ,  forme  en  même 
temps  un  degré,  une  ligne  de  féparation  qui  remplit  le 
grand  intervalle  entre  les  fîibftances  métalliques  &:  les 
matières  falines.  Et  de  même  qu'après  les  métaux,  on 
trouve  la  platine  qui  n'efl  point  un  métal  pur,  &  qui  par 
ion  magnétifme  confiant  paroît  être  un  alliage  de  1er,  &. 
d'une  matière  auffi  pefante  que  l'or,  on  trouve  aufîi  après 
ies  demi -métaux,  le  cobalt,  le  nickel  &i  h  manganèfe 


D  E  s    M  1  N  É  R  A  V  X,  395 

qui,  étant  toujours  attirables  à  l'aimant,  font  par  con- 
icquent  alliés  de  fer  uni  à  leur  propre  fubihnce  ;  l'on 
doit  donc  en  rigueur  les  féparer  tous  trois  des  demi- 
métaux  ,  comme  on  doit  de  même  féparer  la  platine  des 
métaux ,  pui-fque  ce  ne  font  pas  des  fiibllances  pures , 
mais  mixtes  &  toutes  afliécs  de  fer,  quoiqu'elles  donnent 
Jeur  régule  fans  aucun  mélange  que  celui  des  parties 
métalliques  qu'elles  recèlent  ;  &  quoique  l'arfenic  donne 
de  même  fon  régule ,  on  doit  encore  le  féparer  de  ces 
trois  dernières  matières ,  parce  que  fon  effence  efl  autant 
faline  que  métallique. 

En  efïèt,  l'arfenic  qui,  dans  le  fein  de  la  terre,  /e 
préfente  en  maffes  pefaiites  &  dures  comme  les  autres 
fiibflances  métalliques,  ofîre  en  même  temps  toutes  les 
propriétés  des  matières  falines;  comme  les  fels,  il  fe 
diifout  dans  l'eau  ;  mclé  comme  les  falins  avec  les 
matières  terreufes,  il  en  facilite  la  vitrification;  il  s'unit 
par  le  moyen  du  feu  avec  les  autres  fèls  qui  ne  s'unilTent 
pas  plus  que  lui  avec  les  métaux  ;  comme  les  fels ,  il 
décrépite  &  fe  volatilife  au  feu,  &  jette  de  même  des 
étincelles  dans  l'obfcurité;  il  fufe  aulfi  comme  les  fels, 
&  coule  en  liquide  épais  fans  brillant  métailique;  il  a 
donc  toutes  les  propriétés  des  fels  ;  mais  d'autre  part  fon 
régule  a  les  propriétés  des  matières  métalliques. 

L'arfenic,  dans  fon  état  naturel,  peut  donc  être 
confidéré  comme  un  fel  métallique;  &  comme  ce  fel, 
par  fes  qualités ,  diffère  des  acides  &  des    alkalis ,   ii 

Dddij 


39^       Histoire   Naturelle 

me  feniLle  qu'on  doit  compter  trois  Tels  fimples  dans 
ia  Nature,  l'acide,  i'aikaii  &  l'arfenic,  qui  repondent 
aux  trois  idées  que  nous  nous  fommes  formées  de  leurs 
effets ,  &  qu'on  peut  défigner  par  les  dénominations 
Aç  fel  acide ^  fel  cnuft^que  Si  fcl  corrofif;  &  il  me  paroît 
encore  que  ce  dernier  fel,  i'ari^nic,  a  tout  autant  & 
peut-être  plus  d'influence  que  les  deux  autres  fur  \t% 
matières  que  la  Nature  travaille.  L'examen  que  nous 
allons  faire  des  autres  propriétés  de  ce  minéral  métallique 
&  falin,  loin  de  faire  tomber  cette  idée,  la  juftiliera 
pleinement,  &  même  la  confirmera  dans  toute  fon 
étendue. 

On  ne  doit  donc  pas  regarder  i'arfenic  naturel,  comme 
un  métal  ou  demi-métal ,  quoiqu'on  le  trouve  commu- 
nément dans  les  mines  métalliques ,  puifqu'il  n'y  exifte 
qu'accidentellement  &  indépendamment  des  métaux  ou 
demi-métaux  avec  lelquels  il  efl:  mêlé  :  on  ne  doit  pas 
regarder  de  même,  comme  une  chaux  purement  m^ 
tallique ,  l'arfenic  blanc  qui  fe  fublimc  dans  la  fonte  de 
différens  minéraux,  puifqu'il  n'a  pas  les  propriétés  de 
ces  chaux ,  &  qu'il  en  offre  <ie  contraires;  car  cet 
arfenic  qui  s'efl  volatilifé,  relie  conflamment  volatil,  au 
iieu  que  les  chaux  des  métaux  &  des  demi-métaux,  font 
toutes  conflaannent  fixes;  de  plus  cette  chaux,  ou  plutôt 
cette  rieur  d'arlenic,  eft  fbluble  dans  tous  les  acides, 
&  mcme  dans  i'eau  pure  comme  les  fels ,  tandis  qu'au- 
cune chaux  métallique  ne  fe  diffout  dans  l'eau,   &  n'eil 


DES    Minéraux,  397 

même  guère  attaquée  par  les  acides.  Cet  arfenic  , 
comme  les  fels ,  fe  diifout  &  fe  criftallife  au  moyen  de 
rébuilitioii  en  criftaux  jaunes  &  tranfparens  ;  il  répand 
lorfqu'on  le  cliaufiè,  une  très-forte  odeur  d'ail;  mis  fur 
la  langue  fà  faveur  efl  très-acre,  il  y  fait  une  corrofion, 
ÔL  pris  intérieurement,  il  donne  la  mort  en  corrodant 
i'eftomac  <&  les  inteflins.  Toutes  les  chaux  métalliques, 
au  contraire,  font  prefque  fans  odeur  &  fans  faveur; 
cet  ariènic' blanc  n'ell  donc  pas  une  vraie  chaux  métal- 
lique, mais  plutôt  un  fel  particulier  plus  actif,  plus  acre 
&.  plus  corrofif  que  l'acide  &.  l'alkali  :  enhn  cet  arfenic 
efl  toujours  très-fufible,  au  lieu  que  les  chaude  rhétalliques 
font  toutes  plus  difficiles  à  fondre  que  le  métal  même  ; 
elles  ne  contractent  «aucune  union  avec  les  matières 
terreufes ,  «Sl  i'arfcnic,  au  contraire,  s'y  réunit  au  point 
de  foutcnir  avec  elles  le  feu  de  la  vitrification,  il  entre, 
comme  les  autres  fels,  dans  la  cornpofition  des  verres  ; 
il  leur  donne  une  blancheur  qui  fe  ternit  bientôt  à  l'air, 
parce  que  l'humidité  agit  fur  lui  comme  fiir  les  autres 
fels.  Toutes  les  chaux  métalliques  donnent  au  verre 
de  la  couleur  ;  l'aricnic  ne  leur  en  donne  aucune , 
&.  reffemble  encore  par  cet  effet  aux  falins  qu'on  mcle 
avec  le  verre.  Ces  fèuls  faits  font ,  ce  me  femble ,  plus 
que  fuffifans  pour  démontrer  que  cet  arfenic  blanc  n'eft 
point  une  chaux  métallique  ni  demi-méiallique,  mais  un 
vrai  (c\ ,  dont  la  fubflance  adive  efl  d'une  nature  parti- 
culière &  différente  de  celle  de  l'acide  &  de  l'alkali. 


398  H I STOIRE   NATU  RELLE 

Cet  arfenic  blanc  qui  s'élève  par  fiibiimation  dans  h 
fonte  des  mines ,  n'étoit  guère  connu  des  Anciens  (u) , 
&.  nous  ne  devons  pas  nous  féliciter  de  cette  décou- 
verte,  car  elle  a  lait  plus  de  mal  que  de  bien;  on  auroit 
même  du  profcrire  la  rechercbe,  l'ufage  &  le  commerce 
de  cette  matière  funcfte,  dont  les  lâches  fcélérats  n'ont 
que  trop  la  facilite  d'abufcr:  n'accufons  pas  la  Nature 
de  nous  avoir  préparé  des  poifbns  &i  des  moyens  de 
deflruétion  ;  c'efl  à  nous-mêmes,  c'efl  à  notre  art 
ingénieux  pour  le  mal  qu'on  doit  la  poudre  à  canon, 
le  fiiblimé  corrodf,  l'arfenic  blanc  tout  aulTi  corrofif. 
Dans  le  fein  de  la  terre ,  on  trouve  du  fbufre  &  du 
falpétre,  mais  la  Nature  ne  les  avoit  pas  combines 
comme  l'homme,  pour  en  faire  le  plus  grand,  le  plus 
puiiTant  inilrument  de  la  mort;  elle  n'a  pas  fublimé 
l'acide  marin  avec  le  mercure  pour  en  faire  un  poifon; 
elle  ne  nous  préfènte  l'arfenic  que  dans  wn  état  où  fes 
qualités  funefles  ne  font  pas  développées;  elle  a  rejeté, 
recelé  ces  combinaifons  nuîfibles  en  même  temps  qu'elle 
ne  ceffe  de  faire  des  rapprochemens  utiles  &  des  unions 
prolifiques;  elle  garantit,  elle  défend,  elle  conferve, 
elle  renouvelle,  &  tend  toujours  beaucoup  plus  à  la  vie 
qu'à  la   mort. 


(iij  La  feule  indicatioa  prcçife  que  l'on  ait  fur  l'arlenic  fe  trouve 
dans  un  paflage  d'Aviceane  qui  vivoit  dans  le  onzième  fiècle  ; 
M.  Bergman  cite  ce  pafldge  par  lequel  il  paroit  qu'on  ne  con- 
jiOiflbii  pas  aJo;-s  rarfeaic  bUiiç   fublime. 


DES  Minéraux,  399 

L^arfenic  dans  fbn  état  de  nature  n'efl  donc  pas  un 
poifbn  comme  notre  arfenic  fadice  ("S);  il  s'en  trouve  de 
plufieurs  fortes  ôl  de  différentes  formes,  &.  de  couleurs 
diverfès  dans  les  mines  métalliques.  Il  s'en  trouve  auiïi  dans 
ies  terreins  volcanifés  fous  une  forme  différente  de  toutes 
les  autres ,  ôl  qui  provient  de  fon  union  avec  le  foufre  ; 
on  a  donné  à  cet  arfenic  le  nom  (S! orpiment  lorfqu'il  cfl 
jaune,  &  celui  de  r/^/^-^r  quand  il  efl  rouge:  au  refle,  la 
plupart  des  mines  d'arfenic  noires  &  grifes,  font  des  mines 
de  cobalt  mêlées  d'arfenic;  cependant  M.  Bergman  affure 
qu'il  (è  trouve  de  i'arfcnic  vierge  en  Bohème,  en  Hon- 
grie, en  Saxe,  <r>^c.  i&  que  cet  arfenic  vierge  contient  tou- 
jours du  fer  (c).  M.  Monnet  dit  auffi  qu'il  s'en  trouve  en 
France,  à  Sainte-Marie -aux-mines ,  &  que  cet  arfenic 
vierge  efl  une  fubflance  des  plus  pcfantes  &  des  plus  dures 
que  nous  connoifîions,  qui  ne  fe  brife  que  difficilement, 
&  qui  prcfcnte  dans  fa  fraéture  fraîche,  un  grain  brillant 
femblable  à  celui  de  l'acier,  qu'il  prend  le  poli  &  le 
brillant  métallique  du  fer,  que  fon  éclat  fe  ternit  bien 
\îte  à  l'air,  qu'il  fe  dilTout  dans  les  acides,  c^c.  (d) ,  Si 

(b )  Hoffuian  allure,  d'apics  plulieuis  expériences,  que  l'orpiment 
&  le  réalgar  naturels  ne  font  pas  des  poifons  comme  l'arfenic  jaune 
&  l'arfenic  rouge  artificiels.  DuTionnaire  de  Chimie  ,  par  AI.  Alaccjuer , 
article  Arfenic. 

(c)  Opufcules  chimiques,"  tome  II,  pages   zyS    ù"   2  S  jf. 

(d)  jM.  Monnet  ajoute  que  l'arfenic  vierge,  dans  des  vaifleaux 
fermés,  fe  fublime  fans  qu'il  foit  befoin  d'y  rien  ajouter;  que  combine' 
iveç  tous  les  autres  mttaux  ;   il  doiuie  toujours  un  tégule.,,». 


400         Histoire  Naturelle 

j'avois  moins  de  contiance  aux  lumières  de  M.  Monnet, 
je  croirois,  à  cette  defcription,  que  fou  ar/^nic  vierge 
n'eiî  qu'une  e/pcce  de  marcaffite  ou  pyrite  ar/enicale; 
mais  ne  les  ayant  pas  comparés  je  ne  dois  tout  au  plus 
que  douter,  d'autant  que  le  fàvant  M.  de  Morveau 
dit  aulTi:  ^^  Qu'on  trouve  de  i'arfenic  vierge  en  mafTe 
5>  informe,  grenue,  en  écailles  &.  friable;  de  I'arfenic  noir 
»  mclé  de  bitume,  de  i'ar/ènic  gris  teftacé,  de  l'ar/ènic 
blanc   criftallifc  en   gros   cubes  ^e);  »  mais  toutes  ces 

formes 

o-  \Jnç  propriété  de  I'arfenic  vierge  ,  dit-il ,  eft  de  s'enfla/nmer ,  (oit 
»  qu'on  le  falTe  toucher  à  des  charbons  ou  à  Ja  flamme  ;  il  brûle 
M  paifiblement  en  répandant  une  épaifle  fumée  qui  fe  condenfe  contre 
3î  les  corps  froids  en  un  fublimé  blanc.  ...  &  lorfque  I'arfenic  qui 
>»  brûle  efl  entièrement  confumé,  il  refte  un  peu  de  fcorie  terreufe 
&  ferrugineufe  jj 

Le  lieu  où  l'on  trouve  le  plus  d'arfenic  vierge  efl  Sainte-Marie- 
aux-mines  ;  il  eft  afîez  rare  par-tout  ailleurs  ;  dans  les  années  «755 
&  1760,  il  fe  trouva  à  Sainte- Marie -aux  -  mines  une  fi  grande 
quantité  d'arfenic  vierge  ,  que  pendant  plufieurs  jours  on  en  tiroit 
des  quintaux  entiers.  .  .  .  Dans  les  autres  mines,  comme  dans  celles 
de  Freyberg,  de  Saint-Andreafberg-au-Hartz  5t  dans  quelques-unes 
de  Suède,  on  en  a  trouvé  par  intervalles  quelques  morceaux.  .  .  . 
M.  Monnet  conclut  par  dire  que  I'arfenic  efl:  une  fubftance  par- 
ticulière ,  femi  -  métallique  fi  on  veut  l'envifager  par  fes  propriétés 
métalliques  ,  ou  femi  -  faline  fi  on  veut  l'envifager  par  fes  propriétés 
falines ,  qui  entre  comme  partie  contingente  dans  les  mines,  &  qui  eft 
indifîei-ente  à  l'intérieur  des  métaux.  Journal  de  Phyfiquc ,  Septembre 
'  773  '  P^g^^   ^  9  ^    à'  fiiiv. 

(e)  Elémens  de  Chimie,  tome  I ,  page  /  ^;-.  —  «  L'arfenic  ,  dit 
>»  M.  Demefte  ,  eA  une  fubflance  for:  commune  dans  les  mines  ; 

elle 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X.  40  i 

formes  pourroieiu  ctre  des  clécompofitions  d'arfcnic, 
ou  des  mélanîies  avec  du  cobalt  &l  du  fer:  d'ailleurs, 
ia  mine  d'arltiiic  en  écailles  ni  même  le  régule  d'ar- 
fenic,  qui  doit  être  encore  plus  pur  &i  plus  denfe  que 
l'arfenic  vierge,  ne  font  pas  aufli  pefans  que  le  ruppofe 
M.  Monnet  ;  car  ia  pefanteur  fpécilique  de  la  mine 
écailleufe  d'arfenic  n'cft  que  de  ^-7249,  &  celle  du 
régule  d'arfenic  de  )7^^3  3,  tandis  que  la  pefanteur 
fpécifique  du  régule  de  cobalt  efl  de  78  i  1 9,  &  celle 
du  régule  de  nickel  de  ySoyo;  il  efl  donc  certain  que 
l'arfenic  vierge  n'efl  pas  à  beaucoup  près  auiïi  pefant 
que  ces  régules  de  cobalt  &  de  nickel. 

elle  s'y  montre  tantôt  à  la  lurface  d'autres  minéraux  ,  où  elle  s'eft  « 
dcpolee,  foit  à  l'état  de  régule,  foit  à  l'état  de  chaux;  tantôt  elle  te 
s'y  trouve  minéralifée ,  <5c  tantôt  elle  exerce  elle-même  les  fondions  « 
de  mineialifateur .  ...»  Outre  le  fer  que  contient  la  pyrite  arléni- 
cale  ,  elle  renferme  aulFi  quelquefois   du   cobalt,  du  bilmuth  ,  même 

de   l'arixent  &   de  l'or Le   régule  d'arfenic  natif  elt   ordinai- 

rement  noirâtre  &  terni  par  l'a<ftion  de  l'air ,  quoique  dans  fa 
fracture  récente  il  foit  brillant  comme  de  l'acier.  Tantôt  il  foi  me  des 
maflès  écailleufes  ,  folides,  allez  compares  &  fans  figure  déterminée; 
tantôt  ce  font  des  malles  granuleules  avec  des  protubérances ,  com- 
pofées  de  lames  très-épailies  ,  pofees  en  recouvrement  les  unes  fur 
les  autres,  &  dont  les  fragmens  ont  par  conféquent  une  partie  concave 
&  une  partie  convexe.  Il  porte  alors  le  nom  d'ar/rnic  icjfacé.  Quand 
cet  arfenic  vierge  elt  pur  &  fans  mélange  ,  il  n'efl  point  afl'ez  dur 
pour  faire  feu  avec  le  briquet,  mais  il  eft  quelquefois  mêlé  d'une 
petite  quantité  de  fer  ou  de  cobalt,  &  alors  la  dureté  efl  plus 
confidérable. 

La  grande  facilité  avec  laquelle  l'arfenic  pafie  à  l'état  de  chaux  , 

Minéraux,  Tome  111.  £ee 


402        Histoire  Naturelle 

Quoi  qu'il  en  foit,  i'arfenic  fe  rencontre  dans  preique 
toutes  les  mines  métalliques,  &  fur-tout  dans  les  mines 
d'étain,  c'eft  même  ce  qui  a  fait  donner  à  I'arfenic, 
comme  au  foufre,  le  nom  de  nméralifateiir :  or  fi  l'on 
veut  avoir  ime  idée  nette  de  ce  que  fignifie  le  mot  de 
miner ûl'ifation ,  on  ne  peut  l'interpréter  que  par  celui  de 
j'altcration  que  certaines  fubfîances  a6tives  produi/ent 
fur  les  minéraux  métalliques;  la  pyrite,  ou  fi  l'on  veut 
Je  foufre  minéral,  agit  comme  un  fel  par  l'acide  qu'il 
contient;  le  foie  de  foufre  agit  encore  plus  généralement 
par  fon  alkali ,  &:  l'arlèriic  qui  cft  un  autre  {q\  fouvent 
uni  avec  la  matière  du  feu  dans  la  pyrite,  agit  avec  une 

^■•■■'  ■ —  ■  -■■  — ■  "  "  '  ■  "  '  " 

&  la  grande  volatilité  de  cette  chaux  nous  indiquent  aflez  pourquoi 
Ton  rencontre  la  chaux  de  ce  demi-me'tal  fous  la  forme  d'une  etHo- 
r^ic^act  blanche  à  Ja  furface  &  dans  les  C3i\\tés  de  certaines  mines  ; 
on  ne  peut  même  pas  douter  qu'elle  ne  puifle  réfulter  de  la  décoin- 
pofuion  ,  foit  de  la  mine  d'argent  rouge  ,  foit  des  autres  minéraux 
qui  contiennent  ce  demi-métal.  .  .  .  Cette  efflorelcence  blanche  efl 
une  chdux   d'arlenic  proprement   dite.  .  .  . 

Le  verre  natif  d'arfenic  eft  d'un  blanc  jaunâtre,  de  même  que  ïe 
verre  facftice  de  ce  demi-métal  ;  mais  le  premier  efl;  moins  iujet  à 
s'ahérar  à  l'air  que  le  dernier,  par  la  raifon  fans  doute  que  la 
coinbinaifon  des  deux  fubflances  qui  compolent  le  verre  natif,  y 
efl  plus  parfaite  &  plus  intime  qu'elle  ne  l'elt  dans  le  verre  d'arlenic 
que  nous   préparons. 

Quoi  qu'il  en  foit ,  le  verre  natif  d'arfenic  fe  rencontre  à  la  fuper- 
flcie  de  quelques  mines  de  cobalt  &  fur  quelques  produits  de  volcans, 
il  efl:  quelquefois  criflallifé  en  prifmes  minces ,  triangulaires  ,  ou  en 
aiguilles  blanches  divergentes,  &c.  LtUres  de  M,  Dmtjlt ,  tome  ÎI , 
pa^es    12  1    &  fuiv* 


DES  Minéraux.  403 

double  puifl'ance,  &  c'ell  de  i'aclioii  de  ces  trois  icls 
acides,  alkaiis  &.  arfenicaux,  que  dépend  l'altération  ou 
mincralifation  de  toutes  les  fubflances  métalliques,  parce 
que  tous  les  autres  fels  peuvent  fe  réduire  à  ceux-ci. 

L'arfenic  a  fait  impreiïion  fur  toutes  les  mines  mé- 
talliques dans  lefquelles  il  s'eft  établi  dès  le  temps  de 
h  première  formation  des  Tels,  après  la  chute  des  eaux 
&  des  autres  matières  volatiles;  il  femble  avoir  altéré 
les  métaux  à  l'exception  de  l'or;  il  a  produit  avec  le 
foufre  pyriteux  &.  le  foie  de  foiifre ,  les  mines  d'argent 
rouges,  blanches  (Si.  vitreufès ;  il  efl  entré  dans  la  plupart 
des  mines  de  cuivre  ff) ,  &  il  adhère  très -fortement 
à  ce  métal  fg);  il  a  produit  la  cridallifation  des  mines 
d'étain  &  de  celles  de  plomb  qui  fe  préfentent  en  criflaux 
blancs  &  verts  ;  enfin  il  fe  trouve  tmi  au  fer  dans  plu- 
fleurs  pyrites,  &  particidièrement  dans  la  pyrite  blanche 
que  les  Allemands  appellent  mifpikel j  qui  n'ell  qu'un 
compofé   de   mine   de    fer    &    d'une    grande   quantité 

^,  I     ■  ■  I      -    Il  ■   I  -  -  -    —  • -  —  -  — ' 

(f)  La  preuve  évidente  que  l'arfenic  peut  minéralifer  le  cuivre, 
c'eft  qu'il  le  diflout  à  froid  &  par  la  voie  humide  ,  lorfqu'on  le  lui 
prcfente  très-divifé  comme  en  feuilles  de  livret.  Elémens  de  Chimie ^ 
par  Af.  de   Aforveau  ,  tome  H ,  page  ^  2j . 

(cr)  L'arfenic  tient  très-fortement  avec  le  cuivre,  &  louvent  if 
fe  montre  dans  la  matte  ou  cuivre  noir  après  un  grand  nombre  de 
fontes  &  de  grillages  pour  tâcher  de  l'en  féparer ,  ce  qui  dans  les 
mines  d'argent  tenant  cuivre  en  rend  la  fèparation  très  -  difficile. 
Ai»  Monnet,  Journal  de  Phyfque ,  Septembre  i773- 

E  e  e  ij 


404.        Histoire  Naturelle 

d'arfenic  (h).  Les  mines  d'antimoine,  de  bifmuth,  de 
zinc,  &  fur  -  tout  celles  de  cobalt  contiennent  au/Ti  de 
l'arfenic;  prcfque  toutes  les  matières  minérales  en  font 
imprégnées  ;  il  y  a  même  des  terres  qui  font  fènfiLie- 
ment  arfenicales  ;  aucune  matière  n'eft  donc  plus  uni- 
verfcllement  répandue  :  la  grande  (Se  confiante  volatilité 
de  l'arfenic ,  jointe  à  la  fluidité  qu'il  acquiert  en  (e. 
difTohant  dans  l'eau,  lui  donnent  la  faculté  de  /è  tranf- 
porter  en  vapeurs,  &.  de  fè  dépofèr  par- tout,  foit  en 
liqueur,  foit  en  maffes  concrètes;  il  s'attache  à  toutes  les 
fubflances  qu'il  peut  pénétrer,  &  les  corrompt  prefque 
toutes  par  l'acide  corrofif  de  fon  fel. 

L'arfenic    efl:    donc    l'une    des    fiibflances    les    plus 
actives    du   règne   minéral  ;  \ts  matières  métalliques  & 

-— '  —         --  .  ■  -  .      .-■  _  —  ^ 

(h)    Le    m'ifpickd  ou  pyrite  blanche  peut  être  confidérce  comme 

une  mine  de  fer  ark-nicale  ,  ce  métal  y  étant  minéralifé  par  beaucoup 

d'ari'enic  &  un  peu  de  foufre  ;  mais  i'arfenic  étant  aufîi  une  fubftance 

métallique   particulière,  &  fa  quantité  dans   cette  pyrite  excédant  de 

beaucoup  celle  du   {'ex ,  nous  pouvons  regarder  le  mlfpicM  comme 

une    mine   d'arfenic  proprenient   dite.    On  le   rencontre  en  maffes , 

tantôt  informes  &  tantôt   crillallifées   de    diverfes   manières.  .  .  .  On 

trouve  de    fort    beaux   groupes    de  criftaux  de  mif])ickel  à  Muinig 

en  Saxe,  Lettres  de    M.  le  Doâeur  Demejfe  ,  tome  II ,  page   12 p. 

—  Et    on    obferve    même  affez  généralement  que   le  inili)ickel   en 

mafies  confufes  efl  compofé  de  petites  lames   rhomboïdales.   Llem , 

page   1^0.—   La  mine   d'arfenic  grife   (pyrite  d'orpiment)   diffère 

peu  de  la  précédente;  elle  contient  une   plus    grande    quantité    de 

Çonîte ,  ce    qui   fait    qu'en    la    calcinant   on    en   retire    du    réal^ar 

Idem,   ibidem. 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X,  ^o  J 

t^rreufes  ou  pierreufes  ne  font  en  elles-mêmes  que  des 
fubilances  paiïives;  les  Tels  feuls  ont  des  qualités  avives, 
&  le  fbufre  doit  être  confidéré  comme  un  M  ,  puifqu'il 
contient  de  l'acide  qui  efl  l'un  des  premiers  principes 
falins.  Sous  ce  point  de  vue ,  les  puiffances  actives 
fur  les  minéraux  en  général  femblent  être  rcpréfentées 
par  trois  agens  principaux,  le  foufre  pyriteux,  le  foie  de 
foufre  c^  l'arfcnic  ,  c'eft- à-dire ,  par  les  fels  acides, 
alkaiins  &  arfénicaux  ;  &  le  foie  de  foufre  qui  contient 
l'alkali  uni  aux  principes  du  foufre,  agit  par  une  double 
puiflance  &  altère  non -feulement  les  fubflances  métal- 
liques ,  mais  aufîi  les  matières  terreufès. 

Mais  quelle  caufe  peut  produire  cette  puiffance  des 
fels  ,  quel  élément  peut  les  rendre  aétifs  !  fi  ce  n'efl 
celui  du  feu  qui  efl  fixé  dans  ces  fels  ;  car  toute  aélion 
qui  dans  la  Nature  ne  tend  qu'à  rapprocher  ,  à  réunir 
les  corps,  dépend  de  la  force  générale  de  l'attradion , 
tandis  que  toute  aélion  contraire  qui  ne  s'exerce  que 
pour  féparer,  divifer  &  pénétrer  les  parties  conflituantes 
des  corps  ,  provient  de  cet  élément  qui ,  par  fa  force 
expanfive,  agit  toujours  en  fens  contraire  de  la  puiffance 
attradive ,  &  feu!  peut  féparer  ce  qu'elle  a  réuni ,  ré- 
foudre ce  qu'elle  a  combiné,  liquéfier  ce  qu'elle  a  rendu 
folide,  volatilifer  ce  qu'elle  tenoit  fixe,  rompre  en  ua 
mot  tous  \cs  liens  par  lefqucis  l'attradion  univer/èlle  tien- 
droit  la  Nature  enchaînée  &  plus  qu'engourdie,  fi  l'élé- 
ment de  la  chaleur  &.  du  feu  qui  pénètre  julque  dans  fès 


4o6        Histoire  Naturelle 

entrailles  n'y  cmretcnoit  le  mouvement  néceffaire  à  tout 
développement ,  toute  produdion  &  toute  génération. 

Mais ,  pour  ne  parler  ici  que  du  règne  minéral  ,  le 
grand  altérateur ,  le  feul  minérali/àteur  primitif  eft  donc 
le  feu  ;  le  fbufre  ,  le  foie  de  foufre  ,  l'ar/ènic  &  tous 
ies  fels  ne  font  que  fes  infîrumens  ;  toute  minérali/àtioii 
n'eft  qu'une  altération  par  divifion  ,  di/folution,  volati- 
lifation  ,  précipitation  ,  &c.  Ainfi  les  minéraux  ont  pu 
être  altérés  de  toutes  manières ,  tant  par  le  mélange 
des  matières  pa/Tives  dont  ils  font  compofés  que  par 
ia  combinaifon  de  ces  puifTances  animées  par  le  feu , 
qui  les  ont  plus  ou  moins  travaillés ,  &  quelquefois 
au  point  de  les  avoir  prefque   dénaturés. 

Mais  pourquoi,  me  dira-t-on,  cette  minéralifation 
qui,  félon  vous,  n'efi:  qu'une  altération,  (c  porte-telle 
plus  généralement  fur  les  matières  métalliques  que  fur 
les  matières  terreufcs  \  De  quelle  caufe,  en  un  mot, 
ferez-vous  dépendre  ce  rapport  fi  marqué  entre  le  miné- 
ralifateur  &  le  métal  !  Je  répondrai  que ,  comme  le 
feu  primitif  a  exercé  toute  fa  puifTance  fur  les  matières 
qu'il  a  vitrifiées,  il  les  a  dès-lors  mifcs  hors  d'atteinte 
aux  petites  adions  particulières  que  le  feu  peut  exercer 
encore  par  le  moyen  des  fels  fur  les  matières  qui  ne  fe 
font  pas  trouvées  affez  fixes  pour  fubir  la  vitrification  ; 
que  toutes  ies  fubflances  métalliques,  fans  même  en 
excepter  celle  de  l'or,  étant  fufceptibles  d'être  fublimées 
par  l'adion  du  feu  ,  elles  fe  font  Icparées  de  la  malTç 


DES    Minéraux,         407 

des  matières  fixes  qui  fe  vitrilioient;  que  ces  vapeurs 
métalliques  reléguées  dans  i'atmofphère  tant  qu'a  duré 
i'exceflive  chaleur  du  globe,  en  font  enfuite  dcfcendues 
&  ont  rempli  les  fentes  du  quartz  Ôi  autres  cavités  de 
h  roche  viireufe  ,  &.  que  par  confcquent  ces  matières 
métalliques  ayant  évité  par  leur  fuite  Si.  leur  fubiimation 
ia  plus  grande  aélion  du  feu,  il  n'eft  pas  étonnant  qu'elles 
ne  puiflent  éprouver  auctme  altération  par  l'aélion  fecon- 
daire  de  la  petite  portion  particulière  du  feu  contenue 
dans  les  fels  ;  tandis  que  les  fubflances  calcaires  n'ayant 
été  produites  que  les  dernières ,  &  n'ayant  pas  fubi 
l'action  du  feu  primitif,  font  par  cette  raifbn,  très- 
fufceptibles  d'altération  par  l'aélion  de  nos  feux ,  &.  par 
ie  foie  de  foufre  dans  lequel  la  fubllance  du  feu  eft 
réunie   avec  l'alkali. 

Mais  c'efl  affez  nous  arrêter  fiir  cet  objet  général 
de  la  minéralifation  qui  s'elt  préfenté  avec  i'arfenic^ 
parce  que  ce  fel  acre  &.  corrofif,  efl  l'tm  des  plus 
puiflans  minéralifateurs  par  l'aélion  qu'il  exerce  fur  les 
métaux  ;  non-feulement  il  les  altère  &.  les  mincrali/e  dans 
le  fein  de  ia  terre ,  mais  il  en  corrompt  la  fubflance  ; 
il  s'infmue  &  iè  répand  en  poifon  deflruéteur  dans  les 
minéraux  comme  dans  les  corps  organifés;  allié  avec 
l'or  ÔL  l'argent  en  très  -  petite  quantité  ,  il  leur  enlève 
l'attribut  e/fentiel  à  tout  métal  en  leur  ôtant  toute  duéîi- 
lité ,  toute  malléabilité  ;  il  produit  le  même  effet  fur 
le   cuivre;   il  blanchit  le  fer  plus  que  le   cuivre,  fans 


4o8         Histoire  Naturelle 

cependant  le  rendre  auffi  caiïant;  il  donne  de  même 
beaucoup  d'aigreur  à  i'ctain  &  au  plomb,  &  A  ne  fait 
qu'augmenter  celle  de  tous  les  demi -métaux;  il  en 
divife  donc  encore  les  pariics  lorsqu'il  n'a  plus  la  puif- 
fance  de  les  corroder  ou  détruire;  quelqu'épreuve  qu'on 
iui  falle  fubir,  en  qtielqu'ctat  qu'on  puifTe  le  réduire, 
l'arfenic  ne  perd  jamais  fes  qualités  pernicieu/ès;  en 
régule,  en  ticurs,  en  chaux,  en  verre,  '\\  efl  toujours 
poifon;  la  vapeur  ieule  reçue  daus  les  poumons,  fuffit 
pour  donner  la  mort,  6l  l'on  ne  peut  s'empêcher  de  gémir 
en  voyant  le  nombre  des  vidimes  immolées ,  quoique 
volontairement,  dans  les  travaux  des  mines  qui  con- 
tiennent de  l'arfenic;  ces  malheureux  Mineurs  périlfent 
prefque  tous  au  bout  de  quelques  années ,  &  les  plus 
vigoureux  font  bien-tôt  languiiTans  ;  la  vapeur,  l'odeur 
feule  de  l'arfenic  leur  altère  la  poitrine  (ij ,  &  cependant 
ils  ne  prennent  pas  pour  éviter  ce  mal  toutes  les  pré- 
cautions  néceffaires  ;    d'abord    il    s'élève   afTez   fouvent 

(i )  C'eft  à  cette  lubrtance  dangereufe  qu'efl  dCie  la  phthifie  , 
&  ces  exulcérations  des  poumons  qui  font  périr  à  la  fleur  de  l'âge 
les  ouvriers  qui  travaillent  aux  mines....  Parmi  eux  un  homme  de 
trente  cinc{  à  quarante  ans  efl  déjà  dans  la  décrépitude  ,  ce  qu'on  doit 
fur-tout  attribuer  aux  mines  qu'ils  détachent  avec  le  cileau  &  le  maillet, 
&.  qu'ils  refpirent  perpétuellement  par  la  bouche  &  par  le  nez;  il 
paroit  ([ue  fi  dans  ces  mines  on  failoit  ulage  de  la  poudre  à  canon 
pour  détacher  le  minerai ,  les  jours  de  ces  malheureux  Ouvriers 
ne  feroient  point  fi  indignement  [prodigués.  Encyclopédie ,  article 
Orpiment. 


DES  Minéraux.  409 

des  vapeurs  aiTenicales  dans  les  fbuterrains  des  mines 
dès  qu'on  y  fait  du  feu;  &  de  plus,  c'efl  en  laifànt 
au  marteau  des  tranchées  dans  la  roche  du  minéral 
pour  le  féparer  &  l'enlever  en  morceaux,  qu'ils  refpirent 
cette  poullière  arfenicale  qui  les  tue  comme  poilbn , 
(Sl  les  incommode  comme  pou/Tière  ;  car  nos  Tailleurs 
de  pierre  de  grès  font  très-fouvent  malades  du  poumon, 
quoique  cette  pouffière  de  grès  n'ait  pas  d'autres  mau- 
vai/ès  qualités  que  fà  très-grande  ténuité  ;  mais  dans  tous 
ies  ufàges ,  dans  toutes  les  circonftances  où  l'appât  du 
gain,  commande ,  on  voit  avec  plus  de  peine  qtie  de 
furprife ,  la  lanté  des  liommes  comptée  pour  rien ,  <5c 
leur  vie  pour  peu  de  cliofè. 

L'arfenic  qui  malheurcufement  fe  trotive  fi  fouvcnt 
&  fi  abondamment  dans  la  plupart  des  mines  métalliques, 
y  eil  prefque  toujours  en  fèl  cri  Hall  in  ou  en  poudres 
blanches  ;  il  ne  fe  trouve  guère  que  dans  les  volcans 
agilTans  ou  éteints  fous  la  forme  d'orpiment  ou  de 
réaigar;  on  alFure  néanmoins  qu'il  y  en  a  dans  les  mines 
de  Hongrie,  à  Kremnitz ,  à  Newibl,  &c.  La  fubUance 
de  ces  arlènics  mclés  de  foufre ,  eft  difpofée  par  lames 
minces  ou  feuillets,  &  par  ce  caradère  on  peut  tou- 
jours diftinguer  l'orpiment  naturel  de  l'artificiel  dont 
le  tilfu  eft  plus  confus.  Le  réaigar  eft  auffi  difpofé  par 
feuillets  ,  &  ne  diffère  de  l'orpiment  jaune  que  par  fa 
couleur  rouge  ;  il  eft  encore  plus  rare  que  l'orpiment  ; 
&  ces  deux  formes  fous  lefquelies  fè  préfente  l'arfenic 
MirJruiix,  Tome  IIL  Fff 


410        Histoire    N atv relle 

ne  font  pas  communes,  parce  qu'elles  ne  proviennent 
que  de  i'a6tion  du  feu ,  &  l'orpiment  &  le  rcalgar  n'ont 
été  formés  que  par  celui  des  volcans  ou  par  des  incendies 
de  forets  ;  au  lieu  que  l'arfenic  fe  trouve  en  grande 
quantité  fous  d'autres  formes  dans  prefque  toutes  \t$ 
mines ,  &.  fur-tout  dans  celles  de  cobalt. 

Pour  recueillir  l'arfenic  &  en  éviter  en  même  temps 
Jes  vapeurs  funefles,  on  confîruit  des  cheminées  inclinées 
&  longues  de  vingt  à  trente  toifes  au-de(fus  des  four- 
neaux où  l'on  travaille  la  mine  de  cobalt ,  &.  l'on  a 
obfervé  que  l'arfenic  qui  s'élève  le  plus  haut  efl  aufïi 
le  plus  pur  &  le  plus  corrofif  ;  pour  ramaffer  fans  danger 
cette  poudre  pernicieufe,  il  faut  fe  couvrir  la  bouche 
&  le  nez  ,  &.  ne  refJ3irer  l'air  qu'à  travers  une  toile  ; 
&  comme  cette  poudre  arfenicale  fë  diffout  dans  les 
graiffes  &  les  huiles  auffi-bien  que  dans  l'eau ,  &  qu'une 
très -petite  quantité  fuffit  pour  caufèr  les  plus  funefîes 
effets  ,  la  fabrication  devroit  en  être  défendue  &  le 
commerce  profcrit. 

Les  Chimifles  ,  malgré  le  danger  ,  n'ont  pas  laifTé 
que  de  foumettre  cette  poudre  arfenicale  à  un  grand 
nombre  d'épreuves  pour  la  purifier  &  la  convertir  en 
criflaux;  ils  la  mettent  dans  des  vaiffeaux  de  fer  exaéle- 
ment  fermés  où  elle  fe  fublime  de  nouveau  fur  le  feu. 

Les  vapeurs  s'attachent  au  haut  du  vaiffeau  en  criflaux 
blancs  &  tranfparens  comme  du  verre ,  &.  lorfqu'ils 
veulent  faire  de  l'arfenic  jaune  ou  rouge  femblable  au 


DES    Minéraux.  411 

rcalgar  &  à  l'orpiment,  ils  mclent  cette  poudre  d'arfenic 
avec  une  certaine  quantité  de  foufre  pour  les  fublimer 
enfèmble  ;  la  matière  fublimce  devient  jaune  comme 
l'orpiment,  ou  rouge  comme  le  rcalgar,  félon  la  plus 
ou  moins  grande  quantité  de  foufre  qu'on  y  aura  mêlée. 
Enfm  fi  l'on  fond  de  nouveau  ce  réalgar  artificiel ,  il 
deviendra  tranfparent  &  d'un  rouge  de  rubis  ;  le  réalgar 
naturel  n'efl  qu'à  demi-tranfparent,  fou  vent  même  il  efl: 
opaque  &  reflemble  beaucoup  au  cinabre  ;  ces  arfcnics 
jaunes  &  rouges  font,  comme  l'on  voit,  d'ime  formation 
bien  poftérieure  à  celle  des  mines  ar/ènicales,  puifque 
le  foufre  eft  entré  dans  leur  compofition  &  qu'ils  ont 
été  fublimés  enfèmble  par  les  feux  fouterrains.  On  affure 
qifà  la  Chine,  l'orpiment  &  le  réalgar  fe  trouvent  en  fi 
grandes  maffes  qu'on  en  a  fait  des  vafes  &  des  pagodes  ; 
ce  fait  démontre  i'exiHence  préfénte  ou  paffée  des  volcans 
dans  cette  partie  de  l'Afie. 

Pour  réduire  i'arfenic  en  régule,  on  en  mêle  la  poudre 
blanche  fublimée  avec  du  favon  noir  &  même  avec  de 
l'huile  ;  on  fait  fécher  cette  pâte  humide  à  petit  feu 
dans  un  matras ,  &  on  augmente  le  degré  de  feu  jufqu'à 
rougir  le  fond  de  ce  vaiffeau.  M.  Bergman  donne  la 
pefanteur  f])écifique  de  ce  régule  dans  le  rapport  de 
8310  a  1000  ,  ce  qui,  à  yz  livres  le  pied  cube  d'eau, 
donne  598  livres  7^;  pour  le  poids  d'un  pied  cube  de 
régule  d'arfenic  ;  ainfi  la  denfité  de  ce  régule  ed  un 
peu   plus  grande  que  celle  du  fer,  &  à  peu-près  égale 

Fff  i] 


412         Histoire  Naturelle 

à  la  clcnCitc  de  l'acier.  Ce  régule  d'arfenic  a ,  comme 
nous  l'avons  dit ,  piufieurs  j^roprictcs  communes  avec 
îes  demi-mctaux  ;  il  ne  s'unit  point  aux  terres  ;  il  ne 
fe  diffout  point  dans  l'eau ,  il  s'allie  aux  métaux  fans 
leur  ôter  l'éclat  métallique;  &  dans  cet  état  de  régule, 
l'arfenic  eft  plutôt  un  demi -métal  qu'un  fcl. 

On  a  donné  le  nom  de  t'erre  d'arfaiic,  aux  criflaux 
qui  fe  forment  par  la  poudre  fublimée  en  vaiffeaux  clos; 
mais  ces  criflaux  tranfparens  ne  font  pas  du  verre ,  puif- 
qu'ils  font  folubles  dans  l'eau  ;  &.  ce  qui  le  démontre 
encore,  c'efl  que  cette  même  poudre  blanche  d'arfenic 
prend  cet  état  de  prétendu  verre  par  la  voie  humide 
&  à  la  fimple  chaleur  de  l'eau  bouillante  (k). 

Lorfqu'on  veiu  purger  les  métaux  de  l'arfenic  qu'ils 
contiennent,  on  commence  par  le  volaiilifcr  autant  qu'il 
efl  poffible  ;  mais  comme  il  adhère  quelquefois  trcs- 
fortement  au  métal  &  fur-tout  au  cuivre,  &  que  par  le 
feu  de  fufion  on  ne  l'en  dégage  pas  en  entier,  on  ne  vient 
a  bout  de  le  féparer  de  la  matte  que  par  l'intermède 
du  fer  qui  ayant  plus  d'affinité  que  le  cuivre  avec  l'ar- 
fenic s'en  faifit  &  en  débarraffe  le  cuivre  ;  on  doit  faire 
la  même  opération  &  par  le  même  moyen  en  rafinant 
l'argent  qui  fe  tire  des  mines  arfenicales. 

(k)  11  faut  pour  cela  mettre  la  diilolution  de  cette  cliauv  dans 
quinze  parties  d'eau  bouillante,  &  laifler,  enfuite  refroidir  cette  diflb- 
lution  ;  on  obtient  alors  de  petits  criftaux  en  fegmens  d'odacdres, 
&c.  c'eft  un  verre  d'arfenic  formé  par  un  degré  de  chaleur  bien  peu 
confidérable.   Le  tires  d^  AI.  Dcmejk  ^  terne  II ,  page   iiS, 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  4I  3 

DES  CI  MENS  DE  NATURE. 

vJN  a  VU  par  l'expcfc  des  articles  préccclens ,  que 
toutes  les  matières  folides  du  Globe  terreilre,  produites 
d'abord  par  le  feu  primitif,  ou  formées  enfuite  par  l'in- 
termède de  l'eau ,  peuvent  être  comprifes  dans  quatre 
clafTes  générales. 

La  première  contient  les  verres  primitifs  &  les  matières 
qui  en  font  composées ,  telles  que  les  porphyres ,  les 
granités  &  tous  leurs  détrimens,  comme  les  grès,  les 
argiles  ,  fchifles  ,  ardoifes ,   &c. 

La  féconde  claffe  efl  celle  des  matières  calcinables , 
&  contient  les  craies,  les  marnes  ,  les  pierres  calcaires, 
les  albâtres ,  les  marbres  &  les  plâtres. 

La  troifième  contient  les  métaux ,  les  demi-métaux 
&L  les  alliages  métalliques  formés  par  la  Nature,  ainfi  que 
les  pyrites  &  tous  le^  minerais  pyriteux. 

Et  la  quatrième  eft  celle  des  réfidus  &  détrimens 
de  toutes  les  fubihnces  végétales  &  animales,  telles  que 
ie  terreau,  la  terre  végétale,  le  limon,  les  bols,  les 
tourbes  ,  les  charbons  de  terre,  les  bitumes,  &c. 

A  ces  quatre  grandes  clafTes  des  matières  dont  le 
Globe  terreftre  eft  prefque  entièrement  compofé ,  nous 
devons  en  ajouter  une  cinquième,  qui  contiendra  les 
fels  du  toutes  les  matières  falines. 

Enfin  nous  pouvons  encore  faire  une  fixième  claffe 


414-        Histoire  Naturelle 

des  fubftances  produites  ou  travaillées  par  le  feu  des 
volcans,  telles  que  les  bafaltes,  les  laves,  les  pierres- 
ponces  ,  les  pouzzolanes ,  les  foufres ,   &c. 

Toutes  les  matières  dures  &  folides  doivent  leur 
première  confiftance  à  la  force  générale  &  réciproque 
d'une  attradion  mutuelle  qui  en  a  réuni  les  parties 
conflituantes ;  mais  ces  matières  pour  la  plupart,  n'ont 
acquis  leur  entière  dureté  &  leur  pleine  folidité,  que 
par  rinterpofition  fuccelfive  d'un  ou  de  plufieurs  cimcns 
que  j'appelle  c////^//j"^£'  Nature,  parce  qu'ils  font  dificrens 
de  nos  cimens  artificiels,  tant  par  leur  effence  que  par 
leurs  effets.  Prefque  tous  nos  cimens  ne  font  pas  de 
la  même  nature  que  les  matières  qu'ils  réuniffent  ;  la 
fubUance  de  la  colle  efl  très-différente  de  celle  du  bois 
dont  elle  ne  réunit  que  les  fur  faces  ;  il  en  efl;  de  même  du 
maflic  qui  joint  le  verre  aux  autres  matières  contiguës; 
ces  cimens  artificiels  ne  pénètrent  que  peu  ou  point 
du  tout  dans  l'intérieur  des  matières  qu'ils  uniffent,  leur 
effet  fè  borne  à  une  fimple  adhéfion  aux  furfaces.  Les 
cimens  de  nature  font  au  contraire,  ou  de  la  même 
effence  ,  ou  d'une  effence  analogue  aux  matières  qu'ils 
uniffent,  ils  pénètrent  ces  matières  dans  leur  intérieur, 
&  s'y  trouvent  toujours  intimement  unis;  ils  en  aug- 
mentent la  denfité  en  même  temps  qu'ils  établiffent  la 
continuité  du  volume:  or,  il  me  femble  que  les  fix 
claffes  fous  lefquelles  nous  venons  de  comprendre  toutes 
les  matières  terreflres,  ont  chacune  leur  ciment  propre 


DES    Minéraux.  41J 

&  particulier,  que  la  Nature  emploie  dans  les  opéra- 
tions qui  font  relatives  aux  différentes  fubflances  fur 
le/quelles  elle  opère. 

Le  premier  de  ces  cimens  de  nature  efl  Je  fuc 
criftaiiin  qui  tranfude  &  fort  des  grandes  mafTes  quart- 
zeufes  ,  pures  ou  mêlées  de  fel  d-f  pat  h  ,  de  fchorl,  de 
jafpe  &  de  mica  ;  il  forme  la  fubflance  de  toutes  les 
flaladites  viireufes ,  opaques  ou  tranfparentes.  Le  fuc 
quartzeux  ,  lorfqu'il  efl  pur,  produit  le  criflal  de  roche, 
les  nouveaux  quartz ,  l'émail  du  grès ,  &c.  Celui  du  (eld- 
fpath  produit  les  pierres  chatoyantes  ,  &  nous  verrons 
que  le  fchorl,  le  mica  &  le  jafpe  ont  aufTi  leurs  flalac- 
tites  propres  &  particulières  ;  ces  flaladites  des  cinq 
verres  primitifs  fe  trouvent  en  plus  ou  moins  grande 
quantité  dans  toutes  les  fubflances  vitreufès  de  féconde 
ÔL  de  troifième  formation. 

Le  fécond  ciment,  tout  auffi  naturel  &  peut-être 
plus  abondant  à  proportion  que  le  premier,  efl  le  fuc 
fpath ique  qui  pénètre  ,  confblide  &  réunit  toutes  les 
parties  des  fubflances  calcaires.  Ces  deux  cimens  vitreux 
&  calcaire  font  de  la  même  efTence  que  les  matières 
(lir  lefquelles  ils  opèrent  ;  ils  en  tirent  auffi  chacun  leur 
origine  ,  foit  par  l'infiltration  de  l'eau ,  foit  par  l'éma- 
nation des  vapeurs  qui  s'élèvent  de  l'intérieur  des  grandes 
malles  vitreufès  ou  calcaires  ;  ces  cimens  ne  font ,  en 
un  mot,  que  les  particules  de  ces  mêmes  matières  atté- 
nuées Sl  enlevées  par  les  vapeurs  qui  s'élèvent  du  fein 


4î6        Histoire  Naturelle 

(le  la  terre  ,  ou  bien  détachées  &  entraînées  par  une 
lente  flillation  des  eaux,  &  ces  cimens  s'infinuent  dans 
tous  les  vides  &l  jufqae  dans  les  pores  des  ma/Fes  qu'ils 
reniplident. 

Dans  les  cimens  calcaires ,  je  comprends  le  fuc 
gypfeux,  plus  foible  &  moins  fblide  que  le  fuc  fpathique 
qui  reflaufTi  beaucoup  moins  que  le  ciment  vitreux;  mais 
ce  fuc  gypfeux  ell  fbuvent  plus  abondant  dans  ia  pierre 
à  pldtrc  que  le  fpath  ne  i'eft  dans  les  pierres  calcaires. 

Le  troifième  ciment  de  nature  eil  celui  qui  provient 
des  matières  métalliques ,  &  c'eft  peut-être  le  plus  fort 
de  tous.  Celui  que  fournit  le  fer  ell  le  plus  univerfel- 
lement  répandu,  parce  que  la  quantité  du  fer  eft  bien 
plus  grande  que  celle  de  tous  les  autres  minéraux  métal- 
liques ,  (Se  que  le  fer  étant  plus  fiafceptible  d'altération 
qu'aucun  autre  métal  par  l'humidité  de  l'air  &  par  tous 
les  fels  de  la  terre ,  il  ie  décompofe  très-aifément  à. 
fè  combine  avec  la  plupart  des  autres  matières  dont  il 
remplit  les  vides  &  réimit  les  parties  conftituantes.  On 
connoît  la  ténacité  &  la  folidité  du  ciment  fait  artifi- 
ciellement avec  ia  limaille  de  fer;  ce  ciment  néanmoins  ne 
réunit  que  les  i».u-faces  ,  &l  ne  pénètre  que  peu  ou  point 
du  tout  dans  l'intérieur  des  fubUances  dont  il  n'établit  que 
la  contiguïté  ;  mais  lorfque  le  ciment  ferrugineux  eft 
employé  par  la  Nature  ,  il  augmente  de  beaucoup  la 
denfité  &  la  dureté  des  matières  qu'il  pénètre  ou  réunit. 
Or  cette  matière  ferrugineufe  cil  entrée,  foit  enmafles^ 

foit 


DES    Minéraux.  417 

loit  en  vapeurs,  clans  les  jafpes,  les  porphyres,  les  gra- 
nités, les  grenats,  les  crifîaiix  colorés,  &  dans  toutes  les 
pierres  vitreufes,  fimplcs  oucompofces,  qui  pré/entent 
des  teintes  de  rouge,  de  jaune ,  de  brun,  &c.  On  recon- 
noît  auin  les  indices  de  cette  matière  ftrrugineufè  dans 
plufieurs  pierres  calcaires,  &  fur-tout  dans  les  marbres, 
les  albâtres  &  les  plâtres  colorés;  ce  ciment  ferru^rineux. 
comme  les  deux  autres  premiers  cimens,  a  pu  être  porté 
de  deux  façons  diltérentes;  la  première  par  fublimation 
en  vapeurs ,  &  c'efl  ainfi  qu'il  eft  entré  dans  les  jafpes , 
porphyres  &  autres  matières  primitives  ;  la  féconde  par 
l'innltration  des  eaux  dans  les  matières  de  formation 
poflérieure ,  telles  que  les  fchiftcs  ,  les  ardoifes ,  les 
marbres  &  les  albâtres;  l'eau  aura  détaché  ces  particules 
ferrugineufes  des  grandes  roches  de  fer  produites  par 
le  feu  primitif  dès  le  commencement  de  la  confolidation 
du  Globe;  elle  les  aura  réduites  en  rouille,  &  aura  tranf- 
porté  cette  rouille  ferrugineufe  fur  la  furface  entière  du 
Globe;  dès-lors  cette  chaux  de  fer  fe  fera  mêlée  avec 
les  terres ,  les  fables  &  toutes  les  autres  matières  qui 
ont  été  remuées  &  travaillées  par  les  eaux.  Nous  avons 
ci-devant  démontré  que  les  premières  mines  de  fer  ont 
été  formées  par  l'aétion  du  feu  primitif,  &  que  ce  n'ell 
que  des  débris  de  ces  premitres  mines  ou  de  leurs 
détrimens  décompofés  par  l'intermède  de  l'eau ,  que 
les  mines  de  fer  de  féconde  &  de  troidème  formation 
ont  été  produites. 

Minéraux,  Tome  II L  Cgg 


4i8        Histoire   Naturelle 

On  doit  rcunir  au  ciment  ferrugineux  le  riment 
pyriteux,  qui  fc  trouve  non-fculcmem  clans  les  minerais 
métalliques,  mais  auffi  clans  la  plupart  des  fchiftes  & 
dans  quelques  pierres  calcaires  ;  ce  ciment  pyriteux 
-augmente  la  dureté  des  matières  qui  ne  font  point 
expofces  à  l'humidité,  &  contribue  au  contraire  à  Jeur 
décompornion  dès  qu'elles  font  humeélées. 

On  peut  auffi  regarder  le  bitume  comme  un  quatrième 
ciment  de  nature  :  il  fe  trouve  dans  toutes  les  terres 
végétales,  ainfi  que  dans  les  argiles  &  les  fcbifles  mêlés 
de  terre  limoneufe;  ces  fchifles  limoneux  contiennent 
quelquefois  une  fi  grande  quantité  de  bitume  qu'ils  en 
font  inflammables  ;  &  comme  toutes  les  huiles  &  graiiïes 
végétales  ou  animales  fe  convertiffent  en  bitumes  par  le 
mélange  de  l'acide ,  on  ne  doit  pas  être  étonné  que 
cette  fubûance  bitumineufe  fe  trouve  dans  les  matières 
tranfportées  &  dépofées  par  les  eaux ,  telles  que  les 
argiles,  les  ardoifes,  les  fchifles  &  même  certaines  pierres 
calcaires;  il  n'y  a  que  ks  fubflances  vitreufes,  produites 
par  le  feu  primitif,  dans  lefquelles  le  bitume  ne  peut 
être  mêlé,  parce  que  la  formation  des  matières  brutes 
&  vitreufes ,  a  précédé  la  production  des  fubftances 
organifées  &  calcaires. 

Une  autre  forte  de  ciment  qu*on  peut  ajouter  aux 
précédens  ,  eft  produit  par  l'aélion  des  fels  ou  par 
leur  mélange  avec  les  principes  du  foufre;  ce  ciment 
falin  ÔL   fulfureux   exifle   dans   la   plupart  des   matières 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X,  417 

terreufes;  on  le  rcconnoît  à  la  mauvaifc  odeur  que  ccs 
matières  répandent  lorfqu'on  les  entame  ou  les  frotte , 
il  y  en  a  même  comme  la  pierre  de  porc  (a) ,  qui  ont 
une  très-forte  odeur  de  foie  de  foufre,  ôl  d'autres  qui, 
dès  qu'on  les  frotte,  répandent  l'odeur  du  bitume  (l^J. 

(a)    Ce    n'eft   qu'en   Norwcge  &  en  Suède  ,  dit   Pontoppidan , 
que    l'on    trouve  la  pierre  du    cochon,   ainfi    appelée,  parce  qu'elle 
gucrit    une   certaine   maladie   du    cochon.    Cette    pierre  ,  autrement 
nommée    lap'is  fœiidiis ,    rend    une   puanteur    affieufe   quand    on    la 
frotte  ;  elle  eft   brune  ,  luifante   &  paroît  être  une  efpcte  de  vitri- 
fication dans  la  compoiltion  de  laquelle  il  entie  beaucoup  de  foufre. 
Journal  étranger ,  mois  de  Septembre  i  7//  ,  page  21^,  —  Nota.  Nous 
ne  pouvons  nous  difpenfer  de    relever    ici  la  contradlcflion  qui  ell 
entre  ces  jnots ,   vitrif  cation  qui  contient  du  foufre ,  puifque  le  foufre 
fe  feroit  dilfipé  par  la  combuftion  ,  long-temps  avant  que  le  feu  fe 
fût  porté  au    degré  nécelTaire   à  la    vitrification.    La   pierre   de   porc 
n'ert;  point  du  tout  une  vitrification  ,  mais  une  matière  calcaire  faturt'e 
du  fuc  pyriteux  qui  lui  fait  rendre  fon  odeur  fétide  de  foie  de  loufre  ; 
combinaifon   formée ,  comme  l'on  fait ,   pr.r  l'union  de  l'acide  avec 
l'alkali ,   repréfenté   ici  par  une  terre  abforbante  ou  calcaire. 

(b)  La  pierre  de  taille  de  Méjaune  ,  dit  M.  l'abbé  de  Sauvages, 
efl  tendre ,  calcinable ,  d'un  grain  fin  ,  &  d'un  blanc  terne  ;  pour 
peu  qu'on  la  frotte,  elle  fent  le  bitume;  Mémoires  de  l'Académie  des 
Sciences,  année  i  74^  ,  p^gt  7-2/.  —  La  {iierre  puante  du  Canada, 
qui  efl:  noire  &  dont  on  fait  des  pierres  à  rafoir ,  fe  dilfout  avec 
vivacité  ,  &  refte  enfuite  fans  jeter  les  moindres  bulles  ,  d'où  il 
fembleroit  qu'on   pourroit'  conclure  qu'il  entre  dans  fa  compofition 

des  bitumes,  des  matières  animales  mêlées   à  des  parties  terreules 

Peut-être  l'odeur  forte  &  puante  de  quelques  autres  pierres  n'efl-el'e 
produite  que  par  des  parties  de  bitume  très-ténues  &  difpofées  dars 
leur  maffe ,  au  point  que  ces  parties  fe  diflblvent  entièrement  dans  les 

Gggij 


420  Histoire  Naturelle 

Enfin  le  fixième  ciment  de  nature  cfl  encore  moins 
fmiple  que  le  cinquième,  &  fouvent  aufTi  il  cfl  de  qualités 
trcs-diuérenics ,  félon  les  matières  diverfe?  iur  leiquclles 
le  feu  des  volcans  a  travaillé  avec  plus  ou  moins  de 
force  ou  de  continuité,  &  fuivanc  que  ces  matières  fè 
font  trouvées  plus  ou  moins  pures  ou  mélangées  de 
fubllances  diiiérentes  :  ce  ciment ,  dans  les  matières 
volcaniques ,  efl  fouvent  compofé  des  autres  cimcns  , 
&  particulièrement  du  ciment  ferrugineux  ;  car  tous  les 
ba/altes  &:  prcfque  toutes  les  laves  des  volcans,  con- 
tiennent une  grande  quantité  de  fer  ,  puifqu'ellcs  font 
attirables  à  l'aimant  ;  <S^  pludeurs  matières  volcanifées 
contiennent   des  foufrcs  &.  des  fèls. 

Dans  les  matières  vitreufes  \'Ci  plus  fmiples  ,  telles 
que  le  quartz  de  ikiQo\\(\c  formation  &  les  grès ,  on 
ne  trouve  que  le  ciment  crirtallin  &  vitreux;  mais  dans 
les  matières  vitreufes  compofées  ,  telles  que  les  por- 
phyres ,  granités  &  cailloux  ,  il  eft  fouvent  réuni  avec 
les  cimens  ferrugineux  ou  pyritcux  :  de  même  ,  dans  les 
matières  calcaires  fimples  &.  blanches ,  il  n'y  a  que  le 
ciment  fpathique  ;  mais  di^ns  celles  qui  font  compofées 
&.  colorées  ,  &  fur-tout  dans  les  mar!,'res ,  on  trouve  ce 
ciment  fpathique  fouvent  mêlé  du  cin.ent  ferrugineux, 

acides Les  pierres  bitumineufei  de  l'Auvergne  le  trouvent  dans 

des  endroits  qui  forment  une  fuiie  de  ;iiouiicu  es  pofcs  dans  le  même 
alij^nement;  peut- être  y  a-t-il  ailleurs  de  femblables  pitrres.  Alémoïre 
de  Al.  Guet  tard ,  dans  ceux  de  l'Ai.adéniie  dts  Sciences  ,  année  i  y^  ^' 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X,  42  I 

&.  quelquefois  du  bitumineux.  Les  deux  premiers 
cimeiis  ,  c'eft-à-dire ,  le  vitreux  &  le  fpathique  ,  dès 
qu'ils  font  abondans ,  fe  manifeflcnt  par  la  crillalli- 
lation  ;  le  bitimie  même  fe  criilallifè  lorfqu'il  eft  pur, 
&  les  cimeiis  ferrugineux  ou  pyriteux  prennent  aafîi 
fort  fouvent  une  forme  régulière  ;  les  cimens  fulfureux 
&L  falins  fe  criftallifent  non  -  feulement  par  l'intermède 
de  l'eau ,  mais  auiïi  par  l'aélion  du  feu  ;  néanmoins 
ils  paroident  aflcz  rarement  fous  cette  forme  criiJal- 
lifée  dans  les  matières  qu'ils  pénètrent,  &.  en  général 
tous  ces  cimens  font  ordinairement  difperfés  &i  inti- 
mement mêlés  dans  la  fubflance  même  des  matières 
dont  ils  lient  les  parties  ;  fouvent  on  ne  peut  les  recon- 
noître  qu'à  la  couleur  ou  à  l'odeur  qu'ils  donnent  à 
ces   mêmes   matières. 

Le  iUc  crifîailin  paroît  être  ce  qu'il  y  a  de  plus  pur 
dans  les  matières  vitreufes  ,  comme  le  fuc  fpathique  eft 
auffi  ce  qu'il  y  a  de  plus  pur  dans  les  fùbftances  calcaires; 
Je  ciment  ferrugineux  pourroit  bien  être  aulfi  l'extrait  du 
fer  le  plus  décompofé  par  l'eau  ou  du  fer  fublimié  par  le 
feu;  mais  les  cimens  bitumineux,  fulfureux  &  ialin  ne 
peuvent  guère  être  confidérés  que  comme  des  colles  ou 
c^lutens ,  qui  réuni (Tent  par  interpofition  les  parties  de  toute 
matière,  iâns  néanmoins  en  pénétrer  la  fubltance  intime, 
au  Jicu  que  les  cimens  crifiailin,  ipathique  &  ierrugineu^x 
ont  donné  ladenfité,  la  dureté  &  les  couleurs  à  toutes 
les  matières  dans  lefquelles   ils  fe  iont  incorporés. 


4-22         Histoire   Naturelle 

Le  feu  &  i'cau  pcuNcnt  cgaiement  réduire  toutes  les 
matières  à  l'homogénéité  ;  le  feu  en  dévorant  ce  qu'elles 
ont  d'impur  ,  &  l'eau  en  réparant  ce  qu'elles  ont  d'hé- 
térogène ,  &  les  divifànt  jufqu'au  dernier  degré  de  ténuité. 
Tous  les  métaux,  &  le  fer  en  particulier,  fe  cridalh/ent 
par  le  moyen  du  feu  plus  aifément  que  par  l'intermède 
de  l'eau  ;  mais  pour  ne  parler  ici  que  des  criflallifaticns 
opérées  par  ce  dernier  élément,  parce  qu'elles  ont  plus 
de  rapport  que  les  autres  avec  les  cimens  de  nature, 
nous  devons  obferver  que  les  formes  de  criftallifatioii 
ne  font  ni  générales  ni  confiantes ,  &  qu'elles  varient 
autant  dans  le  genre  calcaire  que  dans  le  genre  vitreux  ; 
chaque  contrée ,  chaque  colline  & ,  pour  ainfi  dire  , 
chaque  banc  de  pierre  ,  foit  vitreufe  ou  calcaire  offre 
des  criftallifations  de  formes  différentes:  or  cette  variété 
de  forme  dans  les  extraits ,  tant  de  la  matière  vitreufe 
que  de  la  matière  calcaire ,  démontre  que  ces  extraits  ren- 
ferment quelques  élémens  différens  entr'eux ,  qui  font 
varier  leur  forme  de  criftallifation  ;  fans  cela ,  tous  les 
criflaux,  foit  vitreux,  foit  calcaires,  auroient  chacun  une 
forme  confiante  &  déterminée,  &.  ne  différeroient  (\\.\c 
par  le  voliune  <Sc  non  par  la  figure.  C'eft  peut-être  au 
mélange  de  quelque  matière,  telle  que  nos  cimens  de 
nature,  qu'on  doit  attribuer  toutes  les  variétés  de  figure 
qui  fe  trouvent  dans  les  criflallifations;  car  une  petite 
quantité  de  matière  étrangère  qui  fe  mêlera  dans  une 
(lalaétite  au  moment  de    fa  formation ,    fuffit   pour  en 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  423 

changer  la  couleur  &  en  modifier  la  forme;  dès  -  lors 
on  ne  doit  pas  être  étonné  de  trou^'er  prcfaue  autant 
de  différentes  formes  de  criitallifation  qu'il  y  a  de  pierres 
différentes. 

La  terre  limoneu/è  produit  aufTi  des  criftallifations 
de  formes  différentes,  6l  en  affez  grand  nombre;  nous 
verrons  que  les  pierres  précieufes,  les  fpaths  pefàns  & 
la  plupart  des  pyrites,  ne  font  que  des  (laladites  de  la 
terre  végétale  réduite  en  limon,  &  cette  terre  ed  ordi- 
nairement mêlée  de  parties  ferrugineufès  qui  donnent  la 
couleur  à  ces  matières. 

Des  différens  nVplanges  &  des  combinaifons  variées 
de  la  matière  métallique  avec  les  extraits  des  fubflances 
vitreufes ,  calcaires  &  limoneufes ,  il  réfulte  non-feule- 
ment des  formes  différentes  dans  la  criftailifation ,  mais 
des  divcrfités  de  pefanteur  fpécifique,  de  dureté,  de 
couleur  Si.  de  tranfparence  dans  la  fubflance  des  ftalaélites 
de  ces  trois  fortes  de  matières. 

Il  faut  que  la  matière  vitreufe,  calcaire  ou  limoneufè 
foit  réduite  à  fa  plus  grande  ténuité  pour  qu'elle  puiffe 
fe  criflallifer  ;  il  faut  auffi  que  le  métal  foit  à  ce  même 
point  de  ténuité,  &  même  réduit  en  vapeurs,  &.  que 
le  mélange  en  foit  intime,  pour  donner  la  couleur  aux 
fubftances  criftallifées ,  fans  en  altérer  la  tranfparence  ; 
car  pour  peu  que  la  fubflance  vitreufe  ,  calcaire  ou 
limoneufè  foit  impure  &  mêlée  de  parties  grofîières, 
ou  que  le  métal  ne  foit  pas  affez  diffout,  il  en  réfulte 


424       Histoire  Naturelle 

des  fla!aditcs  opaques  &  des  concrétions  mixtes,  qui 
participent  de  la  qualité  de  chacune  de  ces  matières. 
Nous  avons  démontré  la  formation  des  flalaélites  opaques 
dans  les  pierres  calcaires ,  (Se  celle  de  la  mine  de  fer  en 
grains  dans  la  terre  limoneufe  (c) ;  on  peut  reconnoître 
le  même  procédé  de  la  Nature  pour  la  formation  des 
concrétions  vitreufes,  opaques  ou  demi-tranfparentes,  qui 
ne  diffèrent  du  criflal  de  roche  que  comme  les  flalaélites 
calcaires  opaques  diffèrent  du  fpath  tranfparent ,  &  nous 
trouverons  tous  les  degrés  intermédiaires  entre  la  pleine 
opacité  &  la  parfaite  tran/J3arence ,  dans  tous  les  extraits 
&.  dans  tous  les  produits  des  décompofitions  des  ma- 
tières terrcftres,  de  quelque  eflence  que  puiffent  être 
les  fùbftances  dont  ces  criflallifations  ou  concrétions 
tirent  leur  origine,  &.  de  quelque  manière  qu'elles  aient 
été   formées ,  foit  par  exudation  ou  par  flillation. 

(c)  Voyez  dans  le  premier  volume  de  cette  Miftoire  des  minéraux, 
l'arutle  de  K Albâlrc  &  celui  de   la   Terre  végétale. 


DES 


DES   Minéraux.  425 


nrr-  VI  Jga 


DES  CRISTALLISATIONS. 

JLjORSQ.ue  les  matières  vitreufes,  calcaires  &  limo- 
neufes  font  réduites  à  riiomogcnéitc  par  leur  clifTolutioii 
dans  l'eau ,  les  j)arties  fimilaires  fe  rapprochent  par 
leur  afîmité ,  &  forment  un  corps  folide  ordinairement 
tranfparent,  lequel  en  fè  folidifiant  par  le  defféchement, 
reffemble  plus  ou  moins  au  cridal;  &.  comme  ces  crif- 
tallifations  prennent  des  formes  anguieufès,  &  quelque- 
fois aiïez  régulières  ,  tous  les  Alinéralogiftes  ont  cru 
qu'il  étoit  néceffaire  de  défigner  ces  formes  ditiérentcs 
par  des  dénominations  géométriques  &  des  mefures 
précifes ,  ils  en  ont  même  fait  le  caraéîère  fpécifique 
de  chacune  de  ces  fubflances  :  nous  croyons  que  pour 
juger  de  la  juflefTe  de  ces  dénominations,  il  efl  nécef- 
faire de  confidérer  d'abord  les  folides  les  plus  fniiples, 
alidi  de  fè  former  enfuite  une  idée  claire  de  ceux  dont 
}a  figure  efl  plus  compofée. 

La  manière  la  plus  générale  de  concevoir  la  géné- 
ration de  toutes  les  formes  difîérentes  des  folides,  efl 
de  commencer  par  la  figure  plane  la  plus  fimple,  qui 
cft  le  triangle.  En  établiffant  donc  une  bafe  triangulaire 
équilatérale ,  &l  trois  triangles  pareils  fur  les  trois  côtés 
de  cette  bafe,  on  formera  un  tétraèdre  régulier  dont 
les  quatre  faces  triangulaires  font  égales  ;  &  en  alongear<j; 
ou  raccourciffant  les  trois  triangles  qui  portent  fur  les 

Minéraux  ,  Tome  IIL  H  h  h 


426  Histoire   Natu n e lle 

trois  côxs  de  cette  bafe,  on  aura  des  tétraèdres  aigus 
ou  obtus,  mais  toujours  à  trois  faces  fcmblablcs  lur  une 
bafc  ou  quatrième  £ce  triangulaire  cquilatcraie  :  (Se  Ç\ 
l'on  rend  cette  bafe  triangulaire  inégale  par  fes  cotés, 
on  aura  tous-  les  tétraèdres  pofllblc^,  c'cfl-à-dire ,  tous 
les  foiides  à  quatre  faces ,  réguliers  &  irréguliers. 

En  joignant  ce  tétraèdre  baie  à  bafe  avec  un  autre 
tétraèdre  femblable  ,  on  aura  un  hexaèdre  à  lîx  faces 
irianguiaires,  &l  par  conféquent  tous  les  hexaèdres  pof- 
fibles  à  pointe  triangulaire  coiiuiie  les  tétraèdres. 

Maintenant  b  nous  étabiilTons  un  quarré  pour  bafe, 
&  que  nous  élevions  lin*  chaque  lace  un  triangle,  nous 
aurons  un  pentaèdre  ou  fbiide  à  cinq  laces,  en  forme 
de  pyramide ,  dont  la  baie  elt  quarrée  &  les  quatre 
autres  faces  triangulaires:  deux  pentaèdres  de  cette  e/pèce, 
joints  l)afe  à  bafe ,  forment  un  octaèdre  régulier. 

Si  la  b?fe  n'efl  pas  un  quarré,  mais  un  lozange, 
&  qu'on  élève  de  même  des  triangles  fur  les  quatre 
côtés  de  cette  baie  en  lozange,  on  aura  auffi  un  pen- 
taèdre, mais  dont  Ls  faces  feront  inclinées  fur  la  bafe; 
&  en  joignant  !  afe  à  lafè  ces  deux  pentaèdres,  l'on 
aura  un  o(5laèdre  à  faces  triangulaires  &i  obliques  rela- 
tivement à  la    bafe. 

Si  la  bafe  ell  pentagone,  &.  qu'on  élève  des  triangles 
fur  chacun  des  côtés  d<-  cette  bafe,  il  en  réfultera  une 
pyramide  à  cinq  faces  h  lafè  pentagone,  ce  qui  fait  un 
hexaèdre  qui,  joint  bafe  à  bafe  avec  un  pareil  hexaèdre. 


DES      AI   I   N   É   R    A    U  A\  427 

pmduit  un  décaèdre  rt2:idier  dont  les  dix  faces  font 
triangulaires ,  &  ielon  que  ces  triangles  feront  plus  ou 
moins  alongcs  ou  raccourcis,  &  félon  au/Ti  que  h  ba/è 
pentagone  lera  compofëe  de  côtés  plus  ou  moins  iné- 
gaux ,  les  pentaèdres  &  décaèdres  qui  en  réfulteront 
feront  plus  ou  moins  rcp^uliers. 

Si  i'on  prend  une  bafè  hexagone,  &  qu'on  élève 
fur  les  côtés  de  cette  bafc  lix  triangles,  on  formera  un 
heptaèdre  ou  folide  à  fèpt  faces,  dont  la  bafe  fera  un 
hexagone,  &  les  lix  autres  faces  formeront  une  pyramide 
plus  ou  moins  alongée  ou  accourcie ,  félon  que  les 
triangles  feront  plus  ou  moins  aigus ,  &  en  joignant  bafe 
à  bafe  ces  deux  heptaèdres,  ils  formeront  un  dodé- 
caèdre ou  folide  à  douze  faces  triangulaires. 

En  fuivant  ainfi  toutes  les  figures  polygones  de  fcpt , 
de  huit,  de  neuf,  ôlc.  côtés,  &  en  établiffant  fur  ces 
côtés  de  la  bafe  des  triangles  &  les  joignant  enfuite 
bafe  contre  bafe  ,  on  aura  des  fblidcs  dont  le  nombre 
des  faces  fera  toujours  double  de  celui  des  triangles 
élevés  fur  cette  bafe  ,  &  par  ce  progrès  on  aura  la 
fuite  entière  de  tous  les  fblides  poffibles  qui  fe  terminent 
en  pyramides  funples  ou  doubles. 

Maintenant,  i\  nous  élevons  trois  parallélogrammes 
fur  les  trois  côtés  de  la  bafe  triangulaire,  &  que  nous 
fuppofions  une  pareille  face  triangulaire  au-deffus ,  nous 
aurons  un  folide  pentaèdre  compofé  de  trois  faces  redan- 
gulaires  ôl  de  deux  faces  triangulaires. 

H  h  h  ij 


428  Histoire   Naturelle 

Et  Je  même,  fi  /ùr  les  côtés  d'une  ba/è  quarrce, 
nous  établifiTons  des  quarrés  au  lieu  de  triang!cs ,  &  que 
nous  fuppofions  ime  bafe  quarrée  au-deiïiîs  égale  & 
/èmblablc  à  celle  du  defTous ,  l'on  aura  un  cvht  ou 
hexaèdre  à  fix  faces  quarrées  &:  égaies  ;  &  fi  la  bafe 
efl  en  lozange,  on  aura  un  Iiexaèdre  rhomboïdai  dont 
Jes  quatre  faces  font  inclinées  relativement  à  leurs 
bafes. 

Et  fi  l'on  joint  plufieurs  cubes  enl'ëmble,&  de  même 
plufieurs  hexaèdres  rhomboïdaux  par  leurs  bafes ,  on 
formera  des  hexaèdres  plus  ou  moins  alongés ,  dont  les 
quatre  faces  latérales  feront  plus  ou  moins  longues,  & 
les  faces  fupérieures  &  inférieures  toujours  égales. 

De  même,  fi  l'on  élève  des  quarrés  fur  une  bafe 
pentagone ,  &  qu'on  les  couvre  d'un  pareil  pentagone , 
on  aura  un  heptaèdre  dont  les  cinq  faces  latérales  feront 
quarrées  ,  &  les  faces  fupérieures  &  inférieures  penta- 
gones. Et  fi  l'on  alonge  ou  raccourcit  les  quarrés, 
l'heptaèdre  qui  en  réfukera ,  fera  toujours  compofé  de 
cinq  faces  rectangulaires  plus  ou  moins  hautes. 

Sur  une  bafe  bexagone,  on  fera  de  même  un  oélaèdre, 
c'eft-à-dire ,  un  folide  à  huit  faces ,  dont  les  faces  fupé- 
rieures &  inférieures  feront  hexagones,  <St  les  fix  faces 
latérales  feront  des  quarrés  ou  des  reétangles  plus  ou 
moins  longs. 

On  peut  continuer  cette  génération  de  folides  par 
des  quarrés  pofés  fur  les  côtés  d'une  bafe,  d'un  nombre 


DES     Al  J  IS'  É  R  A  U  X.  429 

quelconque  de  côtés ,  foit  fur  des  polygones  réguliers , 
foit  fur  des  polygones  irréguliers. 

Et  CCS  deux  générations  de  folides ,  tant  par  des 
triangles  que  par  des  qiiarrés  poics  fur  des  bafes  d'une 
iigurc  quelconque,  donneront  les  formes  de  tous  les 
folides  polTibles,  réguliers  ou  irréguliers,  à  l'exception 
de  ceux  dont  la  fuperficie  n'efl  pas  com])ofée  de  facts 
planes  6c  rediligncs,  tels  que  les  folides  fpliériques , 
elliptiques ,  &  autres  dont  la  furface  efl  convexe  eu 
concave,  au  lieu  d'être  anguleufe  ou  à  faces  planes. 

Or  pour  compo/er  tous  ces  /ôlidcs  anguleux,  de 
quelque  ligure  qu'ils  puifTent  être,  il  ne  faut  qu'une  agré- 
gation de  lames  triangulaires,  puifqu'a^ec  dts  triangles 
on  peut  faire  le  quarré ,  le  pentagone,  l'iiexagone  &. 
toutes  les  ligures  reélilignes  poffiblcs ,  à.  l'on  doit  fup- 
pofer  que  ces  lames  triangulaires,  premiers  éiémens  du 
folide  criflallifé,  font  très -petites  cîs.  prefque  infiniment 
minces.  Les  expériences  nous  démontrent  que  fi  l'on 
met  iùr  l'eau  des  lames  minces  en  forme  d'aiguilles 
ou  de  triangles  alongés,  elles  s'attirent  &  fe  joignent 
en  iaifant  l'une  contre  l'autre,  des  ofcillations  jufqti'à 
ce  qu'elles  fé  fixent  <&  demeurent  en  repos  au  point 
du  centre  de  gravité,  qui  efl  le  même  que  le  centre 
d'attraélion,  en  forte  que  le  fécond  triangle  ne  s'atta- 
chera pas  à  la  bafé  du  premier ,  mais  à  un  tiers  de  fa 
hauteur  perpendiculaire,  &  ce  point  ccrrefpond  à  celui 
du  centre  de  gravité,  par  conféquent  tous  \cs  folides 


4.-0        Histoire    Natu relle 

poiTibies  peuvent  être  produits  par  la  fimplc  agrégation 
des  lames  triangulaires,  dirigées  par  la  feule  force  de 
leur  attra6lion  mutuelle  &  refpeétive  dès  qu'elles  font 
mifés  en  liberté. 

Comme  ce  mécanifme  efl  le  même  &  s'exécute  par 
Ja  même  loi  entre  toutes  les  matières  homogènes  qui 
fe  trouvent  en  liberté  dans  un  fluide,  on  ne  doit  pas 
être  étonné  de  voir  des  matières  très  -  dificrentcs  fe 
criilallircr  fous  la  même  forme.  On  jugera  de  cette 
fimilitude  de  crillallifation  dans  des  fubftances  très-dilfé- 
rentes    par   la  table  ci-jointe  {^J ,  qu'on  pourroit  fans 


(a)  Table  de  la  for 

I.    Téiracdre  régulier,   &   qui 
forme  un  folide  qui  n'a  que  quatre 
face  y ,   toutes  quatre  triangulaires 
^  équilnérales. 

Spath  calcaire. 

Marcaffite. 

Mine  d'argent  grife. 
X.  Téiracdre  ir régulier. 

Spath  calcaire. 

MarcafTite. 

Mine  d'argent  grife. 

■y.  Tétraèdre  dont  les  bords  font 

tronques. 

Marcafiite. 

Mine  d'argent  grife. 

4.  Tétraèdre  dont  les  bords  font 

de  paît  &  d'autre  en  bifeau, 
Marcaflite. 


me  des  Criflallifîuions. 

Mine  d'argent  grife. 

5 .  Tétraèdre  dont  les  bords  &  les 
angles  font  tronqués. 

Marcafiite. 

Mine  d'argent  grife. 

6.  Prifme  dont  la  bafe  tf  en 
losange,  ou  f  lu  tut  hcxaedre-rhom- 
boidal. 

Spath   calcaire. 
Fcld-fpath  ou  fpath  étincelant. 
Spath  fufible. 
Grès  criftallifé. 
Marcafiite. 
Pyrite  arfénicale. 
Galène. 

7.  Solide  pyramidal  à  deux 
pointes  ,  cowpofées  de  deux  faces 
triangulaires  ifocèles;  ce  qui  forme 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X,  ^31 

doute  étendre  encore  plus  loin ,  mais  qui  fuflit  pour 
démontrer  que  la  forme  de  eri(lai!ilàtion  ne  dépend  pas 
de  l'efTence  de  chaque  matière  ,  puifqu'on  voit  le  fpath 
calcaire ,  par  exemple ,  fe  crillalli/er  fous  la  même  forme 
que  la  marcaffue,  la  mine  d'argent  grife ,  le  ftld-/patli , 
le  fpath  fufible ,  le  grès  ,  la  pyrite  arfénicale  ,  la  galène, 


di'iix  pyramides  à  fix  faces  jointes 
bafe  cl  l'dfe. 
Crilul. 

8.  Prifme  à  fx  faces  reâangles 
et  barlongues  ,  tcrwiuces  par  deux 
pyramides  <•■  fx  fuis. 

Grillai  de  roche. 

Mine  de  plomb  verte. 

p.  Prijme  à  neuf  pans  inégaux, 
terminés  par  deux  pyramides  à  trois 
faces  inégales. 

Schorl. 
Tourmaline. 

1  o.  Prifme  oânedre,  h  pans  iné- 
gaux ,   terminés   par  deux  pyra- 
mides hexaèdres  tronquées. 
Topaze  de  Saxe. 

1  I .  Cube  ou  hexaèdre  ré  soulier. 

Spath  fiifible. 
Sel  marin. 
MarcafTite  cnhique. 
Galène  ttiTulatre. 
Mine  de  fer  cubique. 
Mine  d'argent  vitreufe. 
Mine   li'irgcntcornéc. 


12.  CuLe  ,  dont  les  atgles  font 
un  peu  troncjués ,  ce  qii  fait  un 
foiuic  h  quaior-^e  fces  .  don;  fx 
Octogones  c''  l:it  triangulaires. 

Spath   fufible. 

Sel    marin. 

MaiLafllte. 

Aline  de   fer. 

G  a  h  n  e . 

Blende. 

Mine   d'argent  vitreufe. 

I  3.  Cale  tronqué ,  dont  les  an- 
gles font  tronqués  jufqu'd  la  moitié 
de  la  jace ,  &  qui  a  ,  comme  le 
précèdent,  qu  at  or  r^e  faces  dort  fx 
Jont  quarrées  à^  huit  hexaoones  ir ré- 
guliers dans  lefquels  il  y  a  trois 
longues  faces  e!^  trois  courtes. 

Spath  fufible  violet. 

Marcalfite. 

Galène. 

Mine  de  cobalt  grifc. 

14..  Cube  ,  dont  les  angles  font 

totalement  tronqués ,  ce  qui  fait  un 

folide  à  quaierr^e  faces ,  dont  fx 


43^  Histoire   Naturelle 

6l  qu'on  voit  même  le  crjilal  de  roche,  dont  la  forme 
de  criftailifation  paroît  être  la  moins  commune  &  la 
plus  confiante  ,  fe  criflallifcr  néanmoins  fous  la  même 
forme  que  la  mine  de  plomb  verte. 

La  figure  des  criflaux  ou,  fi  Ton  veut,  la  forme  de 


quarrées  &  huit  triangulaires  équi- 
latérales. 

Spath  fufible  violet. 

MarcaiTite. 

Galène. 

JVIine  de  cobalt  grife, 

I  5.  Cube  tronqué  a  vingt -fix 
faces,  dontfix  oélogenes ,  huit  hexa- 
gones &  dou-[e  reéîangles. 

Galène. 
I  6.  Oâacdre  régulier  ou  double 
tétraèdre ,  dont  les  huit  côtés  font 
égaux. 

Diamant. 

Rubis  fpinelle. 

MarcafTite. 

Fer  oif^aèdrc. 

Cuivre   odaèdre. 

Galène   odaédre. 

Etain  blanc. 

Argent. 

Or. 

1 7.  Oâaèdre  à  pyramides  égales 
tronquées  au  fommst ,  &  qui  fait 
deux  pyramides  a  quatre  faces , 
jointes  bafe  à  bafe  d/  tronquées 
par  leur  fommet. 


Topaze  d'Orient. 
Spath  fufible. 
Soufre  natif- 
Mârcaintc. 
Galène  tcfrulaire. 
Etain  blanc. 

I  8.  Oâûcdre ,  dont  les  angles 
Ù"  les  bords  font  tronqués ,  huit 
hexagones ,  fix  petits  oâogones  à" 
dou^e  reéîangles. 

Galène  tefTufaire. 
I  9 .  Oélaedre ,  dont  les  fix  anglet 
folides  font  tronqués. 

Spath  fufible. 
Alun. 
Galène. 
20.  Dodécaèdre  f  dont  les  faces 
font  en  loi^anges. 

Grenat. 
1 1 .  Pyramides  doubles  oda'tires 
réunies  par  les  bafes  tronquées  à' 
terminées  par  quatre  faces  en  la- 
langes. 

Grenat. 
22»  Solide  à  trente  fix  faces. 
Grenat. 

criflallifation , 


D  E  s    AI  I  N  É  R  A  U  X.  43  ^ 

criftallifation,  n'indique  donc  ni  la  denfité,  ni  la  dureté, 
ni  la  fudbiiité  ,  ni  l'iiomogénéité ,  ni  par  conféquenc 
aucune  des  propriétés  efTentielIes  de  la  fuhltance  des  corps, 
dès  que  cette  forme  appartient  également  à  des  matières 
très-diiTé rentes  &  qui  n'ont  rien  autre  cho/è  de  commun; 
aind  c'efl  gratuitement  &  fans  réflexion  qu'on  a  voulu 
faire  de  la  forme  de  crirtallifation  un  caractère  Ipécilique 
&  diflinélif  de  chaque  fubftance ,  puifque  ce  caradlère 
efl  commun  à  plufieurs  matières  ,  &  que  même  dans 
chaque  fubflance  particulière  ,  cette  forme  n'cil  pas 
confiante.  Tout  le  travail  des  Criftalloi^raphes  ne  fervira 
qu'à  démontrer  qu'il  n'y  a  que  de  la  variété  par -tout 
où  ils  fuppofent  de  l'uniformité  ;  leurs  obfervations  mul- 
tipliées auroient  du  les  en  convaincre  &  les  rappeler 
à  cette  métaphyfique  fi  fiinple  qui  nous  démontre  que 
dans  la  Nature  il  n'y  a  rien  d'abfolu,  rien  de  parfai- 
tement régulier.  C'efl  par  abflradion  que  nous  avons 
formé  les  figures  géométriques  &  régulières ,  &.  par 
conféquent  nous  ne  devons  pas  les  appliquer  comme 
des  propriétés  réelles  aux  productions  de  la  Nature  dont 
reffcnce  peut  être  la  même  fous  mille  formes  diliérentes. 
Nous  verrons  dans  la  fuite  qu'à  l'exception  des  pierres 
précieufes  qui  font  en  très-petit  nombre,  toutes  les  autres 
matières  tranfparentes  ne  font  pas  d'ime  feule  &  même 
effence  ,  que  leur  fubflance  n'ell  pas  homogène  ,  mais 
toujours  compofée  de  couches  alternatives  de  différente 
denfité  ,  &  que  c'efl  par  le  plus  ou  le  moins  de  force 
Miîiérdiix ,  Toîne  III.  I  i  i 


434        Histoire    Naturelle 

dans  rattraclion  de  chacune  de  ces  matières  de  difîc- 
rente  denfité  que  s'opère  la  criftallifàtion  en  angles  plus 
ou  moins  obliques ,  en  ihne  qu'à  commencer  par  le 
criftal  de  roche  ,  les  améthillcs  6i  les  autres  pierres 
vitreufes  ,  jufqu'au  fjiath  appelé  crijlûl  iïljîande ,  &  au 
gypfe ,  toutes  ces  flaladites  tranfparentes  ,  vitreufes , 
calcaires  &  gypfeufes  font  compofces  de  couches  alter- 
natives de  ditièrente  denfitc  ;  ce  qui  dans  toutes  ces 
pierres  produit  le  phénomène  de  la  double  réfraction , 
tandis  que  dans  le  diamant  &  les  pierres  précieufes  , 
dont  toutes  les  couches  font  d'une  égale  denfité,  il  n'y 
a  qu'une  fmij.ie  réfradion. 


DES   Minéraux.  43 j 


DES  STALACTITES  VITREUSES 

V_>HAQ,UE  matière  peut  fournir  Ton  extrait,  foit  en 
vapeurs,  foit  par  exudation  ou  flilJation;  cJiaaue  mafle 
folide  peut  donc  produire  des  incruflations  fiir  fà  propre 
fubftance  ou  des  flafaélites  ,  qui  d'abord  font  atiacliées 
à  fa  furface  (Se  peuvent  enfuite  s'en  fcparer  ;  il  doit  par 
confcquent  fe  former  autant  de  ftaladites  différentes  qu'il 
y  a  de  /ubdances  diver/ès;  <&.  comme  nous  avons  divifc 
toutes  les  matières  du  Globe  en  quatre  grandes  ciaffes,  nous 
fuivrons  la  même  divifion  pour  les  extraits  de  ces  ma- 
tières, &  nous  prcfenterons  d'abord  les  flaJacflites  vitreu/t'S 
dont  nous  n'avons  donné  que  de  légères  indications  en 
traitant  des  verres  primitifs  &.  des  fubftances  produites 
par  leur  décompobtion  ;  nous  expoferons  enfuite  les 
{lala6lites  calcaires  qui  font  moins  dures  &  moins  nom- 
breufès  que  celles  des  matières  vitreufès ,  &  defquelles 
nous  avons  donné  quelques  notions  en  parlant  de  ralbùtrc. 
Nous  offrirons  en  troilième  ordre  les  ftaladlites  de  la 
terre  limoneufè ,  dont  les  extraits  nous  paroi/fent  tenir 
le  premier  rang  dans  la  Nature ,  par  leur  dureté  , 
ieur  dendtc  6l  leur  homogénéité  ;  après  quoi  nous 
rappellerons  en  abrégé  ce  que  nous  avons  dit  au  fujct 
des  flaladites  métalliques,  lefquelles  ne  (ont  pas  de5 
extraits  du  métal  même,  mais  de  fcs  détrimens  ou  de 
fes  minerais,  &  qui  font  toujours  mélangées  de  parties 

1  ii  ij 


43^        Histoire    Naturelle 

vitreufes,  calcaires  ou  limoneufes  :  enfin  nous  jetterons 
un  coup-d'œi]  fur  \qs  produits  des  volcans  &  des  ma- 
tières volcanilccs  telles  que  les  laves,  lesbafàltes,  &c. 

Mais  pour  mettre  de  l'ordre  dans  les  détails  de  ces 
Jivinons ,  &  répandre  plus  de  lumière  fur  cJiacun  des 
objets  qu'elles  renferment,  il  faut  confidérer  de  nouveau, 
&  de  plus  près ,  les  propriétés  des  matières  fimples 
dont  toutes  les  autres  ne  font  que  des  mélanges  ou 
des  compofitions  différemment  combinées;  par  exemple, 
clans  la  claffe  des  matières  vitreufes,  les  cinq  verres 
primitifs  font  les  fiibflances  les  plus  fimples;  &.  comme 
chacun  de  ces  verres  peut  fournir  fon  extrait,  il  faut 
d'abord  les  comparer  par  leurs  propriétés  efîentielles 
qui  ne  peuvent  manquer  de  fe  trouver  dans  leurs  agrégats 
&  même  dans  leurs  extraits  ;  ces  mêmes  propriétés 
nous  ferviront  dès-lors  à  reconnoître  la  nature  de  ces 
extraits,  &  à  les  diftinguer  les  uns  des  autres. 

La  première  des  propriétés  effentielles  de  toute 
matière  eft  fans  contredit  la  denfité  ;  &  fi  nous  en  compa- 
rons les  rapports,  on  verra  qu'elle  ne  laiffe  pas  d'être 
fenfiblement  différente  dans  chacun  des  cinq  verres 
primitifs;  car, 

La  pcfameur  fpécifique  du  quartz  eft  d'environ 
26J00,  relativement  au  poids  fuppofé  loooo  de  l'eau 
diflillée  : 

La  pefanteur  fj^écrfique  des  jafpes  de  couleur  uni- 
forme, efl  d'environ  zyooo  : 


DES      M  J  N  É  R  A  U  X.  437 

Celle  du  mica  blanc  cft  aufTi  d'environ  lyooo,  <Sc 
celle  du  mica  noir  efl  de  29000: 

Celle  du  feld-fpath  blanc  qui  efl  un  peu  plus  pefant 
que   le  rouge,  efl  de  26466: 

Et  enfin  la  pefanteur  fpécilique  du  fchori  eft  ia  \)\\.\s 
grande  de  toutes ,  car  Je  fcjjorl  crifîalii/ë  pèfe  2  3  ou 
34000. 

En  comparant  ces  rapports ,  on  voit  que  le  quartz 
&  le  feld-fpath  ont  à  peu -près  la  même  denfiié  ,  qu'en- 
fuite  les  jafpes  &  les  micas  font  un  peu  plus  denfes , 
&  à  peu -près  dans  la  même  proportion  relativement 
aux  deux  premiers  ,  &  que  le  fchori  qui  efl  le  dernier 
des  cinq  verres  primitifs  efl  le  plus  pefànt  de  tous.  La 
différence  efl  même  fi  confidcrable  ,  que  le  mélange 
d'une  petite  quantité  de  fchori  avec  les  autres  verres, 
peut  produire  une  affez  forte  augmentation  de  poids  , 
qui  doit  fè  retrouver  &  ih  retrouve  en  eftèt  dans  les 
extraits  ou  flaiadites  des  matières  vitreufes ,  mêlées  de 
ce  cinquième   verre  de   nature. 

La  féconde  propriété  effentielle  à  la  matière  fblide,  eft 
ia  dureté;  elle  efl  à  peu-près  la  même  dans  le  quartz,  le 
feld-fpath  <^  Je  fchori  ;  eWc  eft  un  peu  moindre  dans  le 
jafpe  ÔL  affez  petite  dans  le  mica,  dont  les  parties  n'ont  que 
peu  de  cohéfion,  &  dont  les  concrétions  ou  les  agrégats 
font  pour  la  plupart  affez  tendres  &l  quelquefois  friables. 

La  troifième  propriété  ,  qu'on  peut  regarder  comme 
effentielle  à  la  fiibflance  de  chacun  des  verres  primitifs, 
efl  la  plus  ou  moins  grande  fuhbilité:  ie  fchori  &  le  feld- 


438        Histoire    Naturelle 

ipath  font  très-fufibles  ;  le  mica  &  le  ja/pe  ne  le  font 
qu'aux  feux  les  plus  violens ,  &.  le  quartz  elt  le  plus 
réfradaire  de  tous. 

Enfin  une  quatrième  propriété  tout  au/H  e/TentielIe  que 
les  trois  premières,  eft  l'homogèncité  qui  fè  marque  par 
la  fmipie  réfradlion  dans  les  corps  tranfparens  ;  le  quartz 
&  le  feld-fpath  font  plus  Hmples  que  le  jaipe  &  le  mica, 
&  le  moins  fimple  de  tous  e(l  le  fchorl. 

Ces  propriétés,  &  fur-tout  la  denfité  plus  ou  moins 
grande,  la  fufibilité  plus  ou  moins  facile,  &  la  fimple 
ou  double  réfraélion,  doivent  fe  confèr\er  en  tout  ou 
en  partie  dans  les  agrégats  fimples  &  les  extraits  trauf- 
parens,  &  même  fe  retrouver  dans  les  décompofitions  de 
toute  matière  primitive:  aufli  ces  mêmes  propriétés,  tirées 
de  la  nature  même  de  chaque  fubftance,  nous  fourni- 
ront des  moyens  qu'on  n'a  pas  employés  jufqu'ici,  pour 
reconnoître  l'effence  de  leurs  extraits,  en  comparant  ces 
extraits  avec  les  matières  primitives  qui  les  ont  produits. 

Les  extraits  qui  tranfudent  des  matières  vitreufcs  font 
plus  ou  moins  purs ,  félon  qu'elles  font  çWcs  -  mêmes 
plus  fmiples  &  plus  liomogcnes  ,  &  en  général ,  ces 
extraits  font  plus  purs  que  la  matière  dont  ils  pro- 
viennent, parce  qu'ils  ne  font  formés  que  de  fa  fubftance 
propre ,  dont  ils  nous  préfentent  l'efience  ;  le  fpatli 
n'eft  que  de  la  pierre  calcaire  épurée  ;  le  criftal  de 
roche  n'eft  proprement  &  cfTcnticllcment  que  du  quartz 
diffous  par  l'eau  &  criftallifé  après  fon  évaporation;  \ts 
fubftanccs  pures  produifent  donc  des  extraits  tout  au/B 


DES    Minéraux,  4^9 

purs;  mais  fouvcnt  d'une  matière  qui  paroît  très  impure, 
il  lort  un  extrait  en  flaladites  tranlparcmcs  ôc  pures; 
clans  ce  cas,  il  fc  fait  une  fecrction  des  parties  fiinilaircs 
<i'une  feule  forte  de  matière,  qui  fe  raffcmbicnt  &i  prc- 
fcntent  alors  une  fubftance  qui  paroit  dilîèrcnte  des 
matières  impures  dont  elle  fort;  &l  c'efl  ce  qui  arrive 
dans  les  cailloux,  les  marbres,  la  terre  limoncufe,  6c 
dans  les  matières  volcaniques  ;  comme  elles  font  elles- 
mêmes  compofèes  d'un  grand  nombre  de  fubflances 
diverfes  &l  mélangées ,  elles  peuvent  produire  des  lia- 
]a6tites  tres-diiicrentes  ,  &  qui  proviennent  de  chaque 
fubftance  diverfe   contenue  dans  ces  matières. 

Ou  peut  donc  diftinguer  les  extraits  ou  fîalaélites 
de  toute  matière  par  les  rapports  de  denfitc,  de  fufibilitc, 
d'homogénéité,  &  l'on  doit  auffi  comparer  les  degrés 
de  dureté ,  de  tranfparence  ou  d'opacité  ;  nous  trou-» 
■verons  ,  entre  les  termes  extrêmes  de  ces  propriétés, 
les  degrés  &  nuances  intermédiaires  que  la  Nature 
nous  offre  en  tout  &  par-tout;  car  fes  productions  ne 
doivent  jamais  être  regardées  comme  des  ouvrages 
ifolés  ;  mais  il  faut  les  conddérer  comme  des  fuites 
d'ouvrages  dans  lefquels  on  doit  failir  les  opérations 
fuccefîives  de  fbn  travail ,  en  partant  &.  marciiant  avec 
elle  du  plus  hmple  au  plus  compofé. 


440  H ISTOIRE      NaTU  RELLE 


STALACTITES 

CRISTALLISÉES  DU   QUARTZ, 
CRISTAL    DE    ROCHE. 

I  iF,  Crilial  de  roche  paroît  être  l'extrait  le  plus  fimple 
&  la  Haladite  la  plus  tranfparente  des  matières  vitreufcs; 
en  le  comparant  avec  le  quartz ,  on  reconnoît  aifément 
qu'il  eft  de  la  même  efTence  ;  tous  deux  ont  la  même 
denfité  fa),  &  font  à  très-pcu-prcs  de  la  même  dureté; 
ils  réijftent  également  à  l'action  du  feu  &l  a.  celle  des 
acides;    ils  ont  donc  les  mêmes  propriétés  efTcntielles , 
quoique  leur  formation  foit  très-difîérentc;  car  le  quartz 
a  tous  les  caradères  du  verre  fondu  par  le  feu,  &  le 
criftal    préfente    évidemment   ceux  d'une    flaladite   du 
même  verre   atténué  par  les  vapeurs   humides  ou  par 
l'adion  de  l'eau:  fès  molécules  très-ténues,  fe  trouvant 
en  liberté  dans  le  liuide  qui  les  a  diffous ,  fe  raffemblent 
par  leur   affinité  à  mefùre  que  l'humidité  s'évapore;  & 
comme  elles   font   hmples  &  fmilaires,  leurs   agrégats 
prennent  de  la  tranfparence  &  une  figure  déterminée. 

(a)  Le  poids  du  c^iurtz  trani'parent  efl  à  celui  de  l'eau  diftiKce 
comme  z6^^6,  &  celui  du  crirtal  de  roche  d'Europe  comme  26548 
font  à  1  0000  ;  on  peut  donc  aflurer  que  leur  denfité  efl:  la  même.  Voyez 
la  Table  des  pefanteurs  f/)€cijîçucs  que  M.  Brid'on ,  lavant  Phyficien, 
de  l'Académie  des  Sciences,  s'eft  donné  la  peine  de  faire  en  pelant  à 
la  balance  hydroftatique  toutes  les  matières  terreufes  &  métalliques. 

La 


i 


DES    Minéraux,         44.1 

La  forme  de  cridallifation  dans  cet  extrait  du  quartz, 
paroît  être  non-feulement  régulière ,  mais  plus  coniiante 
que  dans  la  plupart  des  autres  fubftances  criflallifées; 
ces  criûaux  fe  prcfentent  en  prifmes  à  fix  faces 
parallélogrammes,  furmontées  aux  deux  extrémités  par 
des  pyramides  à  fix  faces  triangulaires.  Le  criflal  de 
roche  lorfqu'il  fe  forme  en  toute  liberté,  prend  cette 
ligure  prifmatique  furmontée  aux  deux  extrémités  par 
des  pyramides  ;  mais  il  faut  pour  cela  que  le  fuc  crif- 
tallin  qui  découle  du  quartz,  trouve  im  lit  horizontal 
qui  permette  au  prifme  de  s'étendre  dans  ce  même  fens, 
&  aux  deux  pyramides  de  fe  former  à  l'ime  &  à  l'autre 
extrémité  (hj:  lorfqu'au  contraire  le  fuintement  de 
i'extrait  du  quartz  fè  fait  verticalement  ou  obliquement 
contre  les  voûtes  &  \es  parois  du  quartz  ou  dans  les 
fentes  des  rochers,  le  criflal  alors  attaché  par  fa  bafe 
n'a  de  libre  qu'une  de  fes  extrémités,  qui  prend  tou- 
jours la  forme  de  pyramide;  &  comme  cette  féconde 
pofition  cfl  infiniment  plus  fréquente  que  la  première, 
on  ne  trouve  que  rarement  des  criflaux  à  deux  pointes , 
&  très-communément  des  criftaux  en  pyramide  fimple 
ou  en  prifmes  furmontés  de  cette  feule  pyramide ,  parce 
que  la  première  pyramide  ou  le  prifme,  toujours  attachés 

fb)  On  trouve  de  petits  crirtaux  à  deux  poijites  dans  quelques 
cailloux  creux;  ils  ne  (ont  point  attache's  par  leur  bafe,  comme  les 
antres,  à  la  furface  intérieure  du  caillou,  ils  en  lont  icparés  &  on 
ïes  entend  même  balotter  dans  cette  cavité  en  fecouant  le  caillou. 

M'mcrau^ç ,  Tome  IIL  K  k  k 


44-2         Histoire    N.iTU re ll  e 

au  rocher,  n'ont  pas  perirJs  à  fa  féconde  pyramiJc  (fe  fe 
former  à  cette  extrémité  qui  ferc  de  ba/è  au  criftal. 

On  peut  même  dire  que  la  forme  primi:ive  du  criflal 
de  roche  ,  n'cd  rcel!en:iciit  compofL'e  que  des  deux 
pyramides  oppofées  par  leur  bafè,  à.  que  le  prifhie  à 
ilx  faces  qui  les  fcpare ,  efl  plutôt  accidentel  qu'elTentiel 
à  cette  forme  de  crifîallifàtion;  car  il  y  a  des  criflaux 
qui  ne  font  compofés  que  de  deux  pyramides  oppofées 
&  fans  prifne  intermédiaire  ;  en  forte  que  le  criflal 
n'eft  alors  qu'iui  (oWdQ  dodécaèdre;  d'ailleurs,  la  hauteur 
des  pyramides  efl  confiante,  tandis  que  la  longueur  du 
prifiiie  efl  très-variaLle  ;  ce  n'efl  pas  qu'il  n'y  ait  auffi 
beaucoup  de  variété  dans  les  faces  des  pyramides  comme 
dans  celles  du  prifme ,  &  qu'elles  ne  ioient  plus  étroites 
ou  plus  larges,  &  plus  ou  moins  inclinées,  fuivant  la 
dimcnfion  tranfverfale  de  la  bafe  hexagone,  qui  paroit 
être  la  fiirface  d'appui  fijr  laquelle  fe  forment  les  pointes 
pyramidales.  Cette  figuration  irrégulière  &  déformée, 
cette  inégalité  entre  l'étendue  &  l'inclinaifon  refpedive 
des  faces  du  criflal,  ne  doit  erre  attribuée  qu'aux  obflacles 
environnans ,  qui  fouvent  l'empêchent  de  fe  former  en 
toute  liberté  dans  un  efpace  affez  étendu  &  affez  libre 
pour  qu'il  y  prenne  fa  forme  naturelle. 

Les  criilatix  grands  &  petits  font  ordinairement  tous 
figurés  de  même,  &  rien  ne  démontre  mieux  que  leur 
forme  effcntielle  efl  cçWe  d'une  ou  deux  pyramides  à 
fîx  faces  ;  que    les  aiguilles  du   criflal  naiffant  dans  les 


DES   Minéraux,  44-3 

cailloux  creux  ,   elles   font  d'abord   fi   petites  qu'on  ne 
}es  aperçoit  qu'à  ia  loupe,  &  dans  cet  état  de  primeur, 
elles  n'offrent  (\\\e  leur  pointe  pyramidale,  qui  fe  con- 
ferve  en  grandifTant  toujours  dans  les  mêmes  proportions: 
néanmoins  i'accroiffement  de  cette  matière  brute  ne  (è 
fait  que  par  juxtapofition  &.  non  par  intuffufception ,  ou 
par  nutrition   comme  dans    les   êtres  organifés  ;    car  ia 
première  pyramide  n'efl  point  un  germe  qui   puifTe  fe 
développer  &  s'étendre  proportionnellement  dans  toutes 
fès  dimenfîons  extérieures  <Sc  intérieures  par  ia  mitrition, 
c'eft  feulement  une  bafe  figurée  fur  laquelle  s'appliquent 
de  tous  côtés  les  parties  luiiiiaires,  fans  en  pénétrer  ni 
développer  ia  mafle  ;  &  ces  parties  conftituantcs  du  criflal 
étant  des  lames  prefque   infiniment  minces  &  de  figure 
triangulaire,  leur    agrégat   conferve  cette  même   figure 
triangulaire  dans    ia   portion   pyramidale  ;   or  quatre  de 
ces    lames    triangulaires   en   s'unifîant    par    la    tranche, 
forment  un  quarré ,  &  fix  formeront  un  iiexagone  ;  ainfi 
la  portion  prifinatique  à  il x  laces  de  la  bafë  de  criflal , 
cfl  compofée  de  lames  triangulaires    comme   ia   partie 
pyramidale. 

Quoique  la  fubflance  du  criflal  paroiffe  continue  & 
affez  femblable  à  celle  du  beau  verre  blanc,  <^  quoi- 
qu'on ne  puiffe  diftinguer  à  l'œil  la  forme  de  fes  parties 
conflituantes ,  il  efl  néanmoins  certain  que  le  criftal  efl 
.compofé  de  petites  lames  qui  font  à  ia  vérité  bien 
moins  apparentes  que  dans  d'autres  pierres,   mais  qu! 

Klvk  ij 


44-4-        Histoire  Naturelle 

nous  font  également  démontrées  par  le  fil,  c*efl-à-dire, 
par  le  fens  dans  lequel  on  doit  attaquer  les  pierres  pour 
ies  tailler;  or  le  fil  (k  le  contre-fil  ic  reconnoifFent  dans 
ie  criftal  de  roche,  non-feulement  par  la  plus  ou  moins 
grande  facilité  de  l'entamer,  mais  encore  par  la  double 
réfraélion  qui    s'exerce  condamment  dans  le    iens   du 
fil,  &  qui  n'a  pas  lieu  dans  le  fèns  du   contre-lil  ;   ce 
dernier   fens   efl;   celui    dans    lequel    les  lames  forment 
continuité  6l  ne  peuvent  fè  féparer,  tandis  que  le  pre- 
mier fens    eiî  celui  dans   lequel   ces    mêmes    lames  /è 
féparent  le  plus  facilement;  elles  /ont  donc  réunies  de  fi 
prés  dans   le   fens   du  contre-fil ,   qu'elles  forment  une 
fiibdance  homogène  &  continue ,  tandis  que  dans  le  lens  du 
fil  elles  laiffententr'elles  un  intervalle  rempli  d'une  matière 
de  denfité  différente  qui  produit  la  leconde  réfradion. 

Et  ce  qui  prouve  que  cet  intervalle  entre  les  lames 
n'ell:  pas  vide  &  qu'il  efl  rempli  d'une  fubflance  un  peu 
moins  denfe  que  celle  des  lames ,  c'efl  que  les  images 
produites  par  les  deux  réfraétions ,  ne  diffèrent  que  peu 
par  leur  grandeur  &  leur  intenfité  de  couleurs;  la  lon- 
gueur du  fpeélre  fblaire  efl  19  dans  la  première  réfrac- 
tion, &  18  dans  la  féconde;  il  en  efl  de  même  de  la 
iargeur  de  l'image  ,  &  il  en  efl  encore  de  même  de 
i'intenfité  des  couleurs  qui  fè  trouvent  afîbiblies  dans 
h  même  proportion  ;  quelque  pure  que  nous  paroiffe 
donc  la  fubflance  du  criflal ,  elle  n'efl  pas  abfolument 
homogène  ni  d'égale  denfité  dans  toutes  lès  parties.  La 


DES    Af  I  N  Ê  R  A  U  X,  445 

lumière  cliffcremment  rcfradée  fcmble  le  démontrer , 
d'autamqiie  nous  verrons,  en  traitant  des  fpaths  calcaires, 
qu'ils  ont  non-leulement  une  double,  mais  une  triple, 
quadruple ,  (îkc.  réfradion ,  félon  qu'ils  font  plus  ou 
moins  mélanges  de  fubftances  de  dendté  dilTcrente. 

Un  autre  fait  par  lequel  on  peut  encore  prouver 
que  le  criflal  efl  compolé  de  deux  matières  de  diiTcrcnte 
denfité ,  c'efl  que  fes  furiaces  polies  avec  le  plus  grand 
foin  ne  lailTent  pas  de  préienter  des  filions,  c'eft-à-dire, 
des  éminences  &  des  profondeurs  alternatives  dans 
toute  l'étendue  de  leur  iuperficie  ;  or  la  partie  creufè 
de  ces  lillons  efl  certainement  compofce  d'une  matière 
moins  dure  que  la  partie  haute ,  puifqu'elle  a  moins 
réfiffé  au  frottement  (c)  ;  il  y  a  donc  dans  le  criflal  de 
roche  alternativement  des  couches  contiguës  de  différente 
dureté ,  dont  l'une  a  été  moins  ufée  que  l'autre  par  le 
même  frottement,  puiiqu'alternativement  les  unes  de  ces 
couches  font  plus  élevées ,  &  les  autres  plus  baffes  fur 
la  même  fijrface   polie. 

Mais  de  quelle  nature  efl  cette  matière  moins  denfè 

■I  — — — » 

/c  M.  l'abbé  de  Rochon  a  dcmoniré  cette  inégalité  de  dureté 
dans  les  tranches  du  criflal  de  roche  ,  en  mettant  fur  la  lurfdce 
polie  de  ce  crillal  uvi.  verre  objetflif  d'un  long  foyer.  Si  la  lurface 
du  criftal  étoit  parfaitement  plane  &  (ans  filions  ,  les  anneaux 
colores  produits  par  ce  moyen  feroient  réguliers ,  comme  ils  le 
font  quand  on  met  un  objedif  fur  un  autre  verre  plan  Ôl  poli,  mais 
les  anneaux  coiorcs  font  toujours  irréguliers  lur  le  crillai  le  mieux 
poli ,  ce  qui  ne  i)eut  provenir  que  des  inégalités  de  fa  lurtace. 


44-6        Histoire  N atu relle 

&  moins  dure  des  tranches  alternatives  du  criftal!  comme 
il  n'efl  guère  pollible  de  la  recueillir  /"éparément,  Vun 
de  nos  fàvans  Académiciens,  M.  l'abbc  de  Rochon,  m'a 
dit  qu'ayant  réduit  du  criftal  de  roche  en  poudre  très- 
fine  par  le  feul  frottement  d'un  morceau  de  crillal  comrç 
un  autre  morceau,  cette  poudre  s'eft  trouvée  contenir 
une  portion  afTez  conGdérable  de  fer  attirable  à  l'aimant. 
Ce  fait  m'a  paru  iingulier,  &  demande  au  moins  d'être 
confirmé    &    vérifié    far    p'ufieurs    criftaux  ;    car    il   le 
pourroit  que  ceux  qui   fe  forment  dans   les  cailloux  & 
autres  matières  où  le  quartz  ei\  mêlé  avec  des  fubfiances 
ferrugineufes ,    ou    même  avec   des    matières    vitreufès 
colorées  par  le  fer,  en  continfTent  une  petite  quantité; 
mais  je    doute    que  les   crilîaux  qui   fortent  du  quartz 
pur,  en  foient  mêlés  ni  même   imprégnés,  ou  bien  le 
quartz    même    contiendroit  auffi  wwq   certaine   quantité 
de  fer,  ce  que  j'ai  bien  de  la   peine  à  croire,  quoique 
ia  chofe   ne   foit    pas   impofiibie;   puifque  le  fer  a  été 
formé  prefque  en  même  temps  que  les  verres  primitifs, 
&  qu'il    s'eft  mêlé    avec  les    jafjjes ,    les   feld -fpaths, 
les  fchorls ,  &  même  avec  les  quartz  dont  quelques-uns 
font  colores  de  jaune  ou  de   rougeâtre. 

Quoi  qu'il  en  /oit,  la  lumière  qui  pénètre  tous  les 
corps  tranfparens ,  &  en  fort  après  avoir  fubi  des 
réfradions  &  des  difpcrhons ,  cfl  l'infîrument  le  plus 
délié ,  le  fcalpcl  le  plus  fin  par  lequel  nous  puiiïions 
fermer   l'intérieur   des    fubfiances    qui    la    reçoivent    d 


DES      M  I  N  É  n  A  U  X,  44.7 

ià  tranfiiuitent;  &  comme  cet  inftrument  ne  s'applique 
point  aux  matières  opaques ,  nous  pouvons  mieux  juger 
de  la  compofition  intérieure  des  fubfîanccs  tran/parentes 
que  de  la  texture  coniufe  des  matières  opaques  011  tout 
eft  mélangé ,  confondu  fans  apparence  d'ordre  ni  de 
régularité,  (bit  dans  la  polition,  ioit  dans  la  figure  des 
parties  intégrantes  qui  font  fbuvent  différentes  ou  diffé- 
remment pofées  ,  fans  qu'on  puiffe  le  reconnoître 
autrement  que  par  leurs  difTérens  extraits  lorfqu'ils 
prennent  de  la  tranfparence ,  c'efl-à -dire ,  de  l'ordre 
dans  la  pofition  de  leurs  parties  fmii'aires,  &  de  i'ho- 
niogénéité  par  leur  réunion  fans  mélange. 

C'efl  dans  les  cavités  &  les  fentes  de  tous  les  quartz 
purs  ou  mélangés  que  le  criftal  fé  forme ,  fbit  par 
i'exudation  de  leur  vapeur  humide,  foit  par  le  fuinte- 
ment  de  l'eau  qui  les  a  pénétrés  ;  les  granités,  les  quartz 
mixtes,  les  cailloux  &  toutes  les  matières  vitreiifes  de 
féconde  formation,  produifent  des  criflaux  de  couleurs 
différentes  ;  il  y  en  a  de  rouges,  de  jaunes  &  de  bleus 
auxquels  on  a  donné  les  noms  de  ruhïs,  de  topaze  &  de 
fapinr,  aulfi  improprement  que  l'on  applique  le  nom  de 
diamant  aux  criftaux  blancs  qui  fe  trouvent  à  Alençon, 
à  Briflol  &  dans  d'autres  lieux  où  ces  criflaux  blancs 
ont  été  dépofés  après  avoir  été  roulés  &  entraînés  par 
ies  eaux.  Les  amétbyfîes  violettes  &  pourprées  qu'on 
met  au  nombre  des  pierres  précieufes ,  ne  font  néan- 
moins que  des  criflaux  leims  de  ces  belles  couleurs; 


44-8        Histoire  N aturelle 

on  trouve  les  premiers  en  Auvergne,  en  Bohème,  &c, 
&  les  {^conds  en  Catalogne.  Les  topazes,  dites  ocàJen' 
tilles ,  &  que  l'on  trouve  en  Bohème,  en  SuifTe  &  dans 
d'autres  contrées  de  l'Europe,  ne  font  de  mcme  que 
des  criftaux  jaunes:  l'hyacinthe,  dite  de  Compojlelle,  e(è 
un  criftal  d'un  jaune  plus  rougeatre.  Les  pierres  aux- 
quelles  on  donne  le  nom  di  algues  mannes  occidentales, 
&  qui  fè  trouvent  en  plufieurs  endroits  de  l'Europe, 
&  mcme  en  France,  ne  font  de  même  que  des  criflaux 
teints  d'un  vert-bleuâtre  ou  d'un  blcu-verdâtre:  on  ren- 
contre auffi  des  criftaux  verts  en  Dauphiné,  &  d'autres 
bruns  &:  même  noirs  ;  ces  derniers  font  entièrement 
obfcurs  :  &  toutes  ces  couleurs  proviennent  des  parties 
métalliques  dont  ces  criflaux  font  imprégnés ,  particu- 
lièrement de  celles  du  fer  contenu  dans  les  granités 
&  les  quartz  mixtes  ou  colorés ,  dont  ces  flalaclites 
quartzeufcs  tirent  leur  origine. 

De  tous  les  criflaux  blancs,  celui  de  Madagafcar 
efl  le  plus  beau  &  le  plus  également  tranfparent  dans 
toutes  fes  parties  ;  il  eft  un  peu  plus  dur  que  nos 
criflaux  d'Europe,  dans  lefqucls  néanmoins  on  remarque 
auffi  quelque  différence  pour  la  dureté  ;  mais  nous  ne 
connoilTons  ce  très -beau  criflal  de  Madagafcar  qu'en 
maffes  arrondies  &  de  plufieurs  pouces  de  diamètre; 
celui  qui  nous  eil  venu  du  mcme  pays,  &  qui  efl  en 
prifme  à  double  pointe,  n'efl  pas  aufîi  beau  &  reffemblc 
plus  à  uos  criflaux  d'Europe,  dans  lefqucls  la  tranfparence 

n'eft 


DES  Minéraux.  .44.9 

n'eft  pas  aufTi  limpide,  &  qui  fouvent  font  nuageux, 
&  préfeiitein  tous  les  degrés  de  la  tranfparence  plus  ou 
moins  nette  dans  les  criflaux  blancs,  jufqu'à  la  pleine 
opacité  dans  les  criflaux  bruns  &  noirs. 

Lorfque  l'on  compare  les  petites  aiguilles  naiffantes 
du  criftal,  qu'on  aperçoit  à  peine  dans  les  cailloux 
creux,  avec  les  grofTes  quilles  qui  fe  forment  dans  les 
cavités  des  rochers  quartzeux  &.  graniteux  (d) ,  on  ne  peut 
s'empêcher  d'admirer  dans  cette  criftallifation  la  confiance 
&  la  régularité  du  travail  de  la  Nature  qui  néanmoins 
n'agit  ici  qu'en  opérant  à  la  furface,  c'efl-à-dire,  dans 
deux  dimenfions  ;  la  plus  grande  quille  ou  aiguille  de 
criflal  eft  de  la  même  forme  que  la  plus  petite  ;  la 
réunion  des  lames  prefque  infiniment  minces  dont  il 
eft  compofé  fe  faifànt  par  la  même  loi  ,  la  forme 
demeure  toujours  la  même,  fi  rien  ne  trouble  l'arran- 
gement de  leur  agrégation.  Cette  médiode  de  travail 
efl  même  la  feule  que  la  Nature  emploie  pour  augmenter 
ie  volume  des  corps  bruts,  c'efl  par  juxtapofition,  & 
en  ajoutant  pour  ainfi  dire,  furfaces  à  furfaces ,  qu'elle 
place  les  lames  très  -  minces  dont  eft  compofée  toute 
criftallifation,  toute  agrégation  régulière;  elle  ne  travaille 
donc  que  dans  deux  dimenfions,  au  lieu  que  dans  le 

fd)  M.  Bertrand  rapporte  dans  Ton  Didionnaire  univerfel  des 
foiïiles,  qu'on  a  trouvé  près  de  Vifbach  dans  le  haut  Valais,  à  neuf  ou 
dix  lieues  de  Sion,  une  quille  de  criftal,  du  poids  de  douze  quintaux; 
elle  avoit  fept  pieds  de  circonférence  &  deux  pieds  &  demi  de  hauteur. 

ATinéraiix ,  Tome  III.  L  1 1 


450        HisTOinE    Natvrëlle 

développement  des  êtres  organifés ,  elle  agit  dans  les 
trois  dimenfions    à  la  fois ,    puiique    le    volume   &.   la 
mafTe  augmentent  tous  deux,   &  confervent  la    même 
forme  &  les  mêmes  proportions,  tant  à  l'intérieur  qu'à 
l'extérieur.  L'aiguille  naiflante  d'un  criftal  ne  peut  grandir 
&  gro/Tir  que  par  des  additions  fuperhcielles,  &  par  la 
fupcrpofition  de  nouvelles   lames   minces  femblabies  à 
celles  dont  la   première  aiguille  ell:   composée  ,  &  qui 
s'arrangent   dans  le   même  ordre ,  en  forte   que   cette 
petite  aiguille  rélkle  dans  la  plus  grolîe  fans  avoir  pris 
Ja  moindre  extenlion,  tandis  que  le  germe  d'un  corps 
organifé  s'étend  en  tout  fens  par  la  nutrition,  &  prend 
de  l'augmentation  dans    toutes  fés  dimendons  &  dans 
fa  maffe  comme   dans  fon  volume. 

\\  efl  certain  que  le  criftal  ne  fe  forme  que  par 
l'intermède  de  l'eau,  &  l'on  peut  en  donner  des  preuves 
évidentes;  il  y  a  des  criftaux  qui  contiennent  de  l'eau, 
d'autres  renferment  du  mica,  àa  fcliorl,  des  particules 
métalliques,  &c.  d'ailleurs,  le  crifîal  fe  forme  comme 
ie  fpath  calcaire  &  comme  toutes  les  autres  flaladites, 
il  n'en  diffère  que  par  fà  nature  vitreufe  &  par  fa  figu- 
ration ;  il  préfente  fouvent  des  apparences  de  mouffes 
&  de  végétations  dont  la  plupart  néanmoins  ne  font 
pas  des  fubflances  réelles,  mais  de  fimples  fentes  ou 
cavités    vides  de  toute   autre  matière   (e):  fouvent  on 

(e)  Voyez  le  Mémoire  iû  par  M.  Daubenton,  de  i'Acadcaue  cies 
Sciences,   en  Avril   \yZz. 


DES    Minéraux,  451 

trouve  des  criflaux  encroûtés,  c'eft- à -dire,  donc  les 
furfaces  font  chargées  de  matières  étrangères,  &  fur- 
tout  de  terre  ferrugineufe  ;  mais  l'intérieur  de  ces  crif 
taux  n'en  eft  point  altéré,  <5c  il  n'y  a  vraiment  de 
criftal  ferrugineux  que  celui  qui  eft  coloré,  &  dans 
lequel  il  efl  entré  des  vapeurs  ou  des  molécules  de  fer 
lor/qu'il  s'eft  formé. 

La  groffeur  du  prifme  ou  canon  de  criftal  efl  afTcz 
égale  dans  toute  fa  longueur;  les  dimenfions  font  beau- 
coup moins  confiantes  dans  les  parties  pyramidales,  & 
l'on  ne  trouve  que  très-rarement  des  criflaux  dont  les 
faces  triangulaires  des  pyramides  foient  égales  ou  pro- 
portionnelles entr'elles ,  &  cette  groffeur  du  prifme 
femble  déj^endre  des  dimenfions  de  la  bafe  de  la  pyra^ 
mide ,  car  la  pointe  fort  du  rocher  la  première ,  &  la 
pyramide  y  efl  attachée  par  fa  bafe  qui  s'en  éloigne 
enfuite  à   mefure    que  le  prifme  fe  forme  &  pouffe  Ja 

pointe  au  dehors. 

La  denfité  du  criflal  de  roche  n'efl  pas,  à  beau- 
coup près,  auffi  grande  que  celle  du  diamant  &  des 
autres  pierres  précieufes.  On  peut  voir  dans  la  note 
ci-de(fous  {f),  les  rapports  de  pefanteur  des   différens 


(f)  Pieds  cubes. 

t.i*res.      Oncei.    Grsi.   Crains. 
185.      II.      2.      64. 

i85.    10.  7.   2.1. 


Criftal  de  roche  de  Madagafcar. 
>  de  roche  du  Brefil. .  .  . 


Pffiinfr-jr,  Pouces  cubes. 
Onces.  Cr.  Grcitti 

2(jî30.  I.    5.    54. 
26')z6.  I.    5.    54. 


J-llii 


4)2         HiSTO  ï  P  E     N  ATU  R  E  L  LE 

criflaux  que  M.  BrifTon  a  fournis  à  l'épreuve  Je  fa 
balance  hyciroftatique  ;  cette  pe/ànteur  fpécifiq'ie  n'eft 
pas  fenfiblemenc  augmentée  dans  les  criflaux  colorés. 
Cette  table  nous  démontre  au/Ti  que  les  aniétiiyftes,  ia 
topaze  occidentale ,  la  cbryfblite  &  l'aiguë  marine  ne 
font  que  des  criftaux  violets  ,  jaunes  &  verdâtres. 
M.   BrifTon  donne  en/iiite   la   pe/anteur  re/pecflive  des 


Pieds  cubes. 


JLmei.  Oncts.  Cm.  Craint. 


185. 


3' 


1. 

185.  7.    5.   0.1. 

185.  12,   4.    53. 

18;.  II.    o.    14. 

1^8  j.  12,  o.    18. 

I  80.  1  I.    o.    ^^. 

385.  II.  7.  x6. 

185.  15.   d.   52. 


185.  5».   3.  47. 

185.  3 .   1 .    16. 

^85.  10.    I.     2. 

185.  3 

18;.  13 


Crirtal  de  roche  d'Europe 

de  roche  irifé 

jaune   ou    topaze    de   Bo- 

nciTic  •••••••»•  •••• 

roux- brun  ou  topaze  en- 
fumée   


noir 


'  ou  faphir  d'eau.  .  .  . 
violet  ou  améthyfte 

violet-pourpré  ou  améthyfle 
de  vigne  01  de  Cariha- 
gène 

blanc  -  violet  ou  améthyfte 
blanche 


2.    2.6. 
I.   71.  I 


Quartz  criftailifé, 
laiteux.  .  , 
gras.... 
fragile .  ,  , 


Pefaitteur.  Pouces  cubes» 

Onces.  Cr.  Crt'ms. 
26548.  I.  J,  JJ. 
26497.     I.      5.      53. 

26541.  I.  j.  5j. 

26534.  I.  5.  54. 
26536.  I.  5.  55. 
26513.1.  5.  28. 


26570.  r.  5.  56. 

26513.  I.  5.  54. 

26^4.6.   I.  5.  55. 

26519.  I.  5.  54, 

2645  8.  I.  5.  52. 

26404.  1.  5.  ^0. 


D  E  s    Aï  I  N  É  R  A  U  X.  453 

différens  quartz ,  &  lews  poids  fpécifiqiies  fc  trouvent 
encore  être  les  mêmes  que  ceux  des  criftaux  de  roche, 
en  forte  qu'on  ne  peut  douter  que  leur  fubilance  ne 
foii  de   la  même  eflence. 

Toutes  les  matières  cridailifées  font  compofées  de 
petites  lames  prelque  intiniment  minces ,  &  qui  fè 
réunifTent  par  la  feule  force  de  leur  attradion  réciproque 
dès  qu'elles  fe  trouvent  en  liberté  ;  &  ces  lames  fi 
minces  dont  on  ne  doit  confidérer  que  la  furface  plane, 
peuvent  avoir  différentes  figures  dont  le  triangle  efl  la 
plus  fimple.  M.  Bourguet  avoit  ohfcrvc  avant  nous  CgJ ^ 
que  les  prifmes  hexagones ,  ainfi  que  les  pyramides  trian- 
gulaires du  criflal  de  roche,  font  également  compofées 
de  petites  lames  triangulaires  qu'on  peut  apercevoir  à  la 
loupe  à  l'extrémité  des  pyramides,  &  qui,  par  leur 
réunion,  forment  les  grands  triangles  pyramidaux,  & 
même  les  hexagones  pri/matiqucs  du  criftal  ;  car  ces 
lames  triangulaires  ne  iè  joignent  jamars  que  par  la 
tranche  (h) ,  &-  fix  de  ces  triangles,  ainfi  réunis,  forment 
un  KeMagone  ;  fi  l'on  obferve  ces  triangles  au  microf- 
cope  ,  ils  paroiffent  évidemment  composés  d'autres 
triangks  plus  petits ,  &  l'on  ne  peut  douter  que  les 
parties  élémentaires  du  criflal  ne  ibient  des  lames  trian- 
gulaires   fort    petites  ,    &.    dont    la   fiirface    plane    efl 

/gj  Lettres  philofophiqiies  lur  la  formation  des  fels,  &c.  Amjlerdam, 
172$. 

(h)  Voyez  dans  ce   volume  l'article  de  U  CriJîaUifatiop, 


4)4-         Histoire  Naturelle 

néanmoins    beaucoup    plus   étendue    que   celle    Je   la 
tranche  qui  efl  infiniment  mince. 

Quelques  Naturalises  récens,  &  entr'autres  Linnaîus 
&  Tes  Écoliers,  ont  avancé  mai  -  à  -  propos ,  que  les 
criflaux  pierreux  doivent  leur  figure  aux  fels;  nous  ne 
nous  arrêterons  pas  à  réfuter  des  opinions  auffi  peu 
fondées  :  cependant  tous  les  Phyficiens  inflruits ,  & 
notamment  le  favant  Minéralogifte  Cronfledt,  avoient 
nié  avec  raifon,  que  les  fels  euffent  aucune  part  à  la 
formation  non  plus  qu'à  la  figure  de  ces  criilaux;  \[ 
fufiit,  dit -il,  qu'il  y  ait  des  corps  métalliques  qui  fe 
criftallifent  par  la  fufion,  pour  démontrer  que  la  forme 
des  criflaux  n'eft  point  dépendante  des  fels.  Cela  ell 
très-certain;  les  fels  &  les  criftaux  pierreux  n'ont  rien 
de  commun  que  la  faculté  de  fè  criflalii/èr ,  faculté 
plus  que  commune,  puifqu'elle  appartient  à  toute  ma- 
tière non  -  feulement  faline,  mais  picrreufe,  ou  même 
métallique,  dès  que  ces  matières  font  amenées  à  l'état 
fluide,  foit  par  l'eau,  foit  par  le  feu,  parce  que  dans 
cet  état  de  liquidité,  les  parties  fnnilaircs  peuvent  ^'ap- 
procher  &l  fe  réunir  par  la  feule  force  de  l'attradion, 
&  former  par  leur  agrégation  des  crifîaux  dont  la  forme 
dépend  de  la  figure  primitive  de  leurs  parties  confli- 
tuantes,  &  de  l'arrangement  que  prennent  entr 'elles  ces 
lames  minces  en  vertu  de  leur  affinité  mutuelle  <Sc 
réciproque. 

Le  criftal  de  roche   fe   trouve   ^  croît  en   groffes 


DES  Minéraux,  4^^ 

quilles  dans  les  cavités  des  rochers  quartzeux  &  gra- 
niteux ;  ces  cavitc's  s'annoncent  quelquefois  à  l'extérieur 
par  des  éminences  ou  bourioufMurcs  dont  on  reconnoît 
Je  vide  en  frappant  le  rocher;  l'on  juge  par  le  fon 
que  l'iniérieur  en  elt  creux. 

11    le  trouve   en    Dauphiné  (  i ) ,    pluGeurs    de    ces 


(tj  Depuis  long-temps,  dit  M.  Guettard,  VOifan  (  en  Dauphiné) 
cft  ctltbre  par  les  mines  de  cnilal  ;   les  babitans  ne  celîent   pas   d'ea 
farte  la   recherche   ou  de  continuer   l'ouverture  des  criflalikeres  dont 
l'exploitation  elt  commencée.  .  .  .  L'on  a  découvert  plufieurs  mines 
de  ce  foUîle;  il    y  en   a  au  lac  de  Brandc ,  à  Maronne ,  à  la  Corde , 
\  G'irauje ,  à  V Arment'iere  ,  précifémeni  au-delTus  de  la   Romanche ,  à 
Frenay  ,   à  la  Grave,  à  Cyentor  près  le  Cbazelle  ,  à  Vuujanï ;  le  criftal 
y  efl  nuageux   &  peu   clair;  au   Sautet ,  paroiHe  du  Mont-de-lau , 
à  M'iip'in  qui  ert  au-deflus  de  cet  endroit.  .  .  .  Les  hlons  de  criftallicre 
(e  font  voir  afTez  communément  à  des  hauteurs  trcs-élevées  dans  les 
montagnes ,  quelquefois  même  ,  comme  à   la  Grave  ,  ils  louchent  ou 
font  à  j)eu   de  dillance  des   glacières,    ce  qui   en    rend   Tacccs    tou- 
jours  alTez   difficile  &    quelquefois  dangereux,   ce  c[ui   fera   toujours 
un   obllacle  réel  à   une  exploitation   régulière.   Alémoire  Jur  la   Aline' 
ralog'ie  du  Dauphiné  ,  lome  II , page  ^y6  &  jui\anies. —  De  Brandes , 
<^i  le   même  Naturalille  ,  nous   avons  monte  à   la  petite  Herpia ,   où 
il  y  a  une  criRallière  abandonnée.  Le   criftal  en  ell  beau;  le  rocher 
cft  un   Ichifte  tendre   &  dur  en    quelques  jtarties. 

De  la  petite  Herpia  on  monte  à  la  grande  Herpia  en  deux  heures 

par   un  chemin    très  -  étroit &   jour  arrivera   la  giaiide  ciif- 

tallière  ,  il  faut  monter  par  des  rochers  preiqL:e  droits....  On  y 
travaille  l'hiver  ,  &  elle  ell  ,  dit-on  ,  la  mc'e  de  toutes  les  autres 
criftallières  ,  il  y  a  un  filon  très- confidciable  de  quartz,  &  le  criltal 
elt  di  vile  en  poches  qui  patoiflcnt  très  étroites  &  qui  s'elargiflent 
à  fur  &.  à  mefure  qu'on  avance  ;  les  inctes  dçi  crilta,ux  font  aaachees 


456        Histoire  Naturelle 

rochers  creux  dont  les  cavités  /ont  garnies  de  cri/laux; 
on  donne  à  ces  cavités  le  nom  de  criflallicres  lorfqu^ellcs 
en  contiennent  une  grande  quantité.  C'efl  toujours  près 
du  fommet  des  montagnes  quartzeufes  &  graniteu/ès 
que  giflent  ces  grandes  criflallicres  ou  mines  de  crif- 
tal  ;  plufieurs  Naturaliftes ,  &  entr'autres  M."  Altman 
&   Cappeller,    ont  décrit  celles   des  montagnes  de  la 


aux  quartz  de  chaque  côté,  de  forte  que  les  aiguilles  font  tournées 
les  unes  contre  les  autres  ,  &  cet  entre-deux  eil  rempli  d'une  terre 
ocreufe  où  il  y  a  quelquefois  des  aiguilles  de  criftal  détachées; 
on  fait  jouer  la  mine  dans  le  quartz  pour  détacher  le  rocher  par 
quartiers  ,  &  en  fuite  on  fépare  avec  des  marteaux  les  crillaux  de 
ce  quartz.  Le  rocher  eft:  d'un  fchifte  tendre  qui  fe  décompofe 
facileinent.  Mémoire  fur  la  Aiinéralogie  d' Auvergne ,  tome  I ,  page  ij 
à"  fuivantes.  —  Ce  même  favant  Acadéjnicien  (  M.  Guettard  )  a 
parcouru  avec  M.  Faujas  de  Saint-Fond,  les  montagnes  de  l'Oifaa 
dans  les  Alpes,  dont  Içs  mines  font  couvertes  de  glaces  perma- 
nentes ,  &i  ont  examiné  les  mines  de  criftal  des  foffe s  de  la  Garde, 
des  Afas-fur-lcs-clos,  de  A^aronne  ,  de  Frenny,  Ils  ont  auffi  vifitc 
les  travaux  de  la  fameule  mine  de  criftal  de  la  grande  Herp'ia ,  qu'on 
a  été  forcé  d'abandonner  malgré  fa  richefte  ,  parce  qu'on  ne  peut 
y  aborder  que  pendant  un  mois  &  demi  de  l'année ,  &  qu'il  faut 
courir  les  plus  grands  rifques  en  y  efcaladant  par  des  rochers  taillés 
à  pic,  qui  ne  préfentent  que  quelques  faillies  qui  (xxfhient  à  peine 
pour  placer  la  pointe  du  pied ,  &  c'eft  au-delTus  d'un  précipice  de 
plus  de  cinq  cents  pieds  de  profondeur  qu'on  eft  obligé  de  voyager 
de  la  forte  ;  mais  on  eft  dédommagé  des  peines  &  des  dangers  en 
contemplant  cette  magnifique  criftailière  qui  préfente  à  l'œil  un  rocher 
qui  n'eft  prefqu'une  maffe  du  })lus  beau  criftal ,  6;  c'eft  pour  ceue 
raifon  que  les  gens  des  environs  l'ont  nommée  la  grande  aijlalliire. 
Journal  de  Phyfique ,  mois  de   Décembre    J  77J  ,  page  j  ly. 

SuiiTç  ; 


DES  Minéraux.  457 

Suiffe  (k) ;  elles  font  fréquentes  dans  ie  mont  Grhnfcl , 
entre  le  canton  de  Berne  &:  le  Valais,  dans  le  mont 
Scûnt  -  Gothard  &  autres  montagnes  voi fuies  ;  &  c'ell 
toujours  dans  les  cavités  du  quartz  ou  dans  les  fentes 
des  rochers  quartzeux  que  fe  forme  le  criflal ,  &  jamais 
dans  les  cavités  ou  fentes  des  rochers  calcaires.  Le 
criflal  fè  produit  auffi  dans  les  pierres  mixtes,  comme 

(k)  Sur  les  cimes  des  plus  hautes  Alpes,  on  trouve  dç.%  mines 
de  criilaux  ;  on  iait  que  cette  matière  fe  trouve  dans  les  cavités  de 
certaines  veines  métalliques  ,  &  que  le  quartz  leur  fert  de  matrice. 
Aux  Alpes,  les  veines  de  quartz  fortent  au  jour,  &  indiquent  aux 
Mineurs  où  il  faut  creul'er;  cependant  il  faut  fouvent  beaucoup  de 
temps  &  de  travail  pour  trouver  une  cavité  qui  contienne  des  criftaux. 
Dans  \q  Cr'mfelberg ,  on  découvrit  en  1719  une  mine  ue  criHaux 
plus  riche  que  toutes  celles  qu'on  avoit  déjà  découvertes.  L'un  des 
criQaux  de  cette  mine  pelbit  huit  cents  livres;  il  s'en  trouve  plufieurs 
de  cinq  cents  livres.  Les  criftaux  de  la  Suifle  font  en  général  fort 
tranfparens.  On  en  conlerve  un  de  couleur  noire  dans  la  bibliothèque 
de  Berne  ;  on  en  trouve  rarement  de  couleur  jaune  ou  brune  ou 
rouge.  M.  Altman  en  a  un  ciiez  lui  dont  la  couleur  approche  de  celle 
de  l'améthyde.  Defcripl'ion  des  montagnes  de  glaie  de  la  Suijfe ,  par 
M.  Aitman^  Journal  étranger,  Janvier  //Jj".  —  Les  indices  qui 
guident  les  Mineurs  dans  la  recherche  du  criflal  de  roche,  (ont 
des  bandes  ou  zones  blanches  de  plufieurs  toifes  d'étendue  &  de 
huit  à  dix  pouces  de  largeur,  qui  enveloppent  eu  divers  fens  les 
blocs  des  rochers;  ces  zones,  qu'ils  nomment  feurs  de  mine,  font, 
dit  M.  Cappeller,  formées  par  des  concrétions  brillantes  &  plus 
dures  que  la  fubftance  du  roc.  Les  Mineurs  examinent  auffi  avec 
foin  s'ils  ne  découvrent  pas  au  bord  de  ces  bandes  des  fuintemens 
d'eau  qui  tranfudent  par  des  efpèces  de  loupes  qui  excèdent  la 
Airfdce   du   rocher;  alors  ils  frappent  à  grands  coups  de   mafle  fur 

Ali/iJraux ,  Tome  IIL  M  m  m 


458  Histoire  Naturelle 

on  le  voit  dans  prefque  tous  les  cailloux  creux  dont 
la  fublbnce  efl  fouvent  mclée  de  différentes  matières 
vitreufes,  métalliques,  calcaires  &  limoneufes  :  mais  il 
faut  toujours  que  le  quartz  y  foit  contenu  en  plus  ou 
moins  grande  quantité  ;  fans  cela  le  criftal  ne  pourroit 
fe  produire,  puifque  fa  flibflance  eft  un  vrai  quartz, 
f^ns  mélange  apparent  d'aucune  autre  m.atière,  &  que 
quand  on  y    trouve  des  corps  étrangers ,   ils  n'y  font 


ces  éminences  ,  &  par  le  Ton  qui  réfulte  de  fa  commotion  ,  ils  jugent 
fi  le  rocher  cil  plein  ou  caverneux.  Si  ce  fon  ell  creux ,  ils  conçoivent 
de  i'efpérance  &  mettent  la  main  à  l'œuvre.  Ils  commencent  par 
fe  frayer  une  route  par  la  mine  avec  la  poudre  ;  ils  la  dirigent  en 
galerie  comme  les  autres  Mineurs  ,  &  ils  ont  grande  attention  que 
leur  mine  ne  coupe  pas  tranfverfalement  les  bandes  blanches,  au 
moins  dans  leur  plus  grande  largeur;  ce  travail  eft  pénible  &  fouvent 
de  plufieut^  années  ,  même  incertains  s'ils  parviendront  à  la  caverne 
qui  récèle  le  criftal  de  roche.  La  longueur  de  l'exécution  efl  encore 
prolongée  par  les  neiges  qui  ne  laifîent  à  découvert  les  travaux  que 
pendant    environ  trois  mois  de  l'année. . . . 

La  minière  la  plus  riche  que  l'on  ait  trouvée ,  fut  celle  que  l'on 
découvrit  en  1719  ;  la  quantité  du  criftal  que  l'on  en  tira,  fut  eftimée 
trente  mille  écus.  Les  quilles  étoient  d'un  volume  e'norme  ;  il  y  en 
avoit  une  qui  pefoit  huit  cents  livres,  plufieurs  de  cinq  cents,  & 
beaucoup  de  cent  livres.  L'on  voit  encore  deux  de  ces  belles  quilles 
dans  la  bibliothèque  de  Berne.  Tous  les  criflaux  de  cette  riche 
minière  étoient  de  la  plus  grande  régularité  &  de  la  plus  belle  eau. 
Il  s'en  trouva  très-peu  de  tannées  par  ces  taches  que  l'on  appelle 
neiges.  Dans  le  Valais ,  vers  le  canton  de  Berne  ,  dans  la  vallée  de 
Kletch ,  on  a  trouvé  une  belle  mine  de  criftal.  Voyei^  les  Mémoires 
de  AI.  CappcUer ,   Aie  de  m  a  Lucerne. 


DES    Minéraux.  459 

que  renfermés,  enveloppés  par  accident,  &  non  intime- 
ment &  réellement  mêlés. 

M.  Achard,  très-habile  Chimifte,  de  1* Académie  de 
Berlin ,  ayant  fait  i'analyfe  chimique  du  rubis  &  d'autres 
pierres  précieufes ,  &.  en  ayant  tiré  de  la  terre  alkalinc , 
a  penfé  que  le  criflai  de  roche  en  contenoit  aufTi ,  6l 
dans  cette  idée  il  a  imaginé  un  appareil  très-ingénieux 
pour  former  du  criftal  en  faifant  pafTer  l'air  fixe  de  la 
craie  à  travers  du  fable  quartzeux  &  des  diaphragmes 
d'argile  cuite.  M.  le  prince  Galitzin  qui  aime  les  Sciences 
&  les  cultive  avec  grand  fuccès ,  eut  la  bonté  de  m'en- 
voyer  au  mois  de  Septembre  i777>  un  extrait  de  la 
Lettre  que  lui  avoit  écrite  M.  Achard ,  avec  le  dcfiln  de 
fon  appareil  pour  faire  du  cridal  ;  M.  Magellan,  favant 
Phyiicien ,  de  la  Société  royale  de  Londres ,  me  fit 
voir  quelque  temps  après  un  petit  morceau  de  criflai 
qu'il  me  dit  avoir  été  produit  par  l'appareil  de  M.  Achard, 
&  enfuitc  il  préfènta  ce  même  criftal  à  l'Académie  des 
Sciences  ;  les  Commiffaires  de  cette  Compagnie  firent 
exécuter  l'appareil ,  &  effayèrent  de  vérifier  l'expérience 
de  M.  Achard  ;  j'engageai  M.  le  duc  de  Chaulnes 
&  d'autres  habiles  Phyficiens  à  prendre  tout  le  temps 
&  tous  les  foins  néccffaires  au  fuccès  de  cette  expé- 
rience ,  &  néanmoins  aucun  n'a  réuffi ,  &  j'avoue  que 
je  n'en  fus  pas  furpris ,  car  d'après  les  procédés  de 
M.  Achard,  il  me  paroît  qu'on  viendroit  plutôt  à  bout 
de  faire  un  rubis   qu'un  criftal  de  roche  ;   j'en  dirai 

Mm  m  ij 


460  Hi STO I RE  Naturel  LE 

les  raifons  lorfque  je  traiterai  des  pierres  précieufes,  dont 
la  fiibilance  ,  la  formation  &  l'origine  font ,  feJon  moi , 
irès-diiferentes  de  celles  du  criftal  de  roche.  En  atten- 
dant, je  ne  puis  qu'applaudir  aux  efforts  de  M.  Achard, 
dont  la  théorie  me  paroît  faine  &  peut  s'appliquer  à 
la  criflallifation  des  pierres  précieufes  ;  mais  leur  fiibftance 
diffère  de  celle  des  criftaux  ,  tant  par  la  denfité  que  par 
la  dureté  &:  l'homogénéité  ;  &  nous  verrons  que  c'eft 
de  la  terre  limoneufe  ou  végétale,  &  non  de  la  matière 
vitreufe  que  le  diamant  ôl  les  vraies  pierres  précieufes 
tirent  leur  origine. 

Tout  criflai ,  foit  en  petites  aiguilles  dans  les  cailloux 
creux ,  foit  en  groffes  &  grandes  quilles  dans  les  cavités 
des  rochers  quartzeux,  efl  donc  également  un  extrait, 
ime  flalaélite  du  quartz.  Les  criftaux  plus  ou  moins 
arrondis  que  l'on  trouve  dans  le  fable  des  rivières  ou 
dans  les  mines  de  féconde  formation  ,  &  auxquels  on 
donne  les  noms  impropres  de  diamans  de  Comouailles 
ou  d'Almçon,  ne  font  que  des  morceaux  de  crifîal  àt 
roche,  détachés  des  rochers  &  entraînés  par  le  mouve- 
ment des  eaux  courantes,  ils  font  de  la  même  effence, 
de  la  même  pefanteur  fpécilique  &  de  la  même  tranfpa- 
rence  ;  ils  ont  de  même  une  double  réfradion ,  &  ne  dif- 
fèrent du  criflai  des  montagnes  qu'en  ce  qu'ils  ont  été 
plus  ou  moins  arrondis  par  les  frottemens  qu'ils  ont  fubis, 
H  fe  trouve  une  grande  quantité  de  cqs  criflaux  arrondis 
dans  les  vallées  des  hautes  montagnes  &  dans  tous  les 


DES  Minéraux.         461 

torrens  &  les  fleuves  qui  en  découlent  ;  ils  ne  perdent 
ni  n'acquièrent  rien  par  leur  long  féjour  dans  l'eau  , 
l'intérieur  de  leur  mafle  n'efl  point  altéré,  leur  furface 
eft  feulement  recouverte  d'une  enveloppe  ferrugineufe 
ou  terreufe,  qui  n'efl  même  pas  fort  adhérente,  &  lorique 
cette  croûte  efl:  enlevée  ,  les  criflaux  qu'elle  recouvroit, 
préfentent  le  même  poli  &  la  même  tranfparence  que 
le  crillal  tiré  de  la  roche  où  il  fè  forme. 

Parmi  les  criflaux  même  les  plus  purs  &  les  plus 
folidcs,  il  s'en  trouve  qui  contiennent  de  l'eau  &  des 
bulles  d'air ,  preuve  évidente  qu'ils  ont  été  formes  par 
Je  fuintement  ou  la  filiation  de  l'eau.  Tavernier  dit  avoir 
vu  dans  le  cabinet  du  prince  de  Monaco,  un  morceau 
de  criflal  qui  contenoit  près  d'un  verre  d'eau  //J  ;  ce 
fait  me  paroît  exagéré  ou  mal  vu ,  car  les  pierres  qui 
renferment  une  grande  quantité  d'eau ,  ne  font  pas  de 
vrais  criflaux ,  mais  des  efpcces  de  cailloux  plus  ou 
moins  opaques.  On  connoît  fous  le  nom  à'enhyJres  (m) 
ceux  qui  font  à  demi-tranfparens  &.  qui  contiennent 
beaucoup  d'eau  ;  on  en  trouve  fouvent  dans  les  matières 
rejetées  par  les  volcans  (n)  ;  mais  j'ai  vu  plufieurs  criflaux 

r  ■  I 

(l)  Voyage  en  Turquie,  &c.  Rouen,  171  ^ ,  tome  I ,  page  ^ ^ 2, 

(m)  Cette  pierre  fut   connue  des  anciens  ^  fous  fe  même  nom. 

Pline    en  parle   &    la  décrit   bien    en  ces   termes  :  Enhydros  feniper 

rotunduatis  abfolutœ  ,  in    candore  ejl  levls ,  fed  ad  motum  Jluduat  intùs 

in  eâ  veluti   in   ovis  litjuor.  Lib.  XXXVII ,   cap,  xi. 

•   (n)  Les  enhydres  ou  cailloux  creux  font,  dit  M.  Faujas  de  Saint- 
fond  ,  àQ%  eipèces  de  pierres  caverneufes  ou  géodes ,  pieines  d'eaii-. 


462         Histoire  Naturelle 

de  roche  bien  tranfparens  &  régulièrement  criflailifcs , 
dans  lefquels  on  ^^^ercevoit  aifément  une  goutte  d'eau 
flirmontée  d'une  buile  d'air  qui  la  rendoit  fènfibfe  par 
fon  mouvement  en  s'élevant  toujours  au-deffus  de  la 
goutte  d'eau  lorfqu'on  changeoit  la  pofition  verticale 
du  morceau  de  criflal  ;  &  non -feulement  il  fe  trouve 
quelquefois  des  gouttes  d'eau  renfermées  dans  le  criflal 
de  roche,  mais  on  en  voit  encore  plus  fouvent  dans 
ies  agates  &  autres  pierres  vitreufes  qui  n'ont  qu'une 
demi  -  tran/parence.  M.  Fougeroux  de  Bondaroy ,  de 
i' Académie  des  Sciences,  a  trouve  de  l'eau  en  quantité 
très-fenfible  dans  plufieurs  agates  qu'il  a  fait  cafler  (0); 
il  efl  donc  certain  que  les  criftaux,  les  agates  &  autres 
flaladites  quartzeufes ,  ont  toutes  été  produites  par  l'in- 
termède de  l'eau. 

Comme  les  montagnes  primitives  du  Globe  ne  font 
compofées  que  de  quartz,  de  granit  &  d'autres  matières 
vitreufes,  on  trouve  par-tout  dans  l'intérieur  &.  au  pied 
de  ces  montagnes,  du  criflal  de  roche,  foit  en  petits 
morceaux  roulés,  /bit  en  pri/mes  &  en  aiguilles  attachées 

Cette  eau  efl  ordinairement  limpide  ,  fans  goût ,  fans  odeur  &  de 
la  plus  grande  pureté.  On  trouve  près  de  Vicence,  fur  une  colline 
yolcanique  ,  de  petits  cailloux  creux  ,  d'une  efpcce  de  calcédoine 
ou  d'opale,  dans  lefquels  il  y  a  quelquefois  de  Teau  :  ces  enhydres 
peuvent  fe  monter  en  bagues ,  &  comme  ils  font  d'une  fubftance 
tranfparente  ,  on  y  voit  très-diftindement  l'eau  qui  s'y  trouve  ren- 
fermée. Recherches  fur  les  volcans  éteints  ^  page  2.^  o  ,  in- fol. 

(0)  Voyez  les   Mémoires  de  l'Académie  des   Sciences  ,   annéf 


DES      Al  I  N  È  R  A  U  X.  4.6J 

aux  rochers.  Les  hautes  montagnes  de  l'Afie  en  font 
aulTi  fournies  que  les  Alpes  d'Europe.  Les  Voyageurs 
parlent  du  criftal  de  la  Chine  (p) ,  dont  on  fait  de 
beaux  vafes  &l  des  magots  ;  des  crifhux  de  Siam  (éj^ , 
de  Camboie  ,  des  Moluques  (r) ,  &.  particulièrement  de 
celui  de  Ceylan  où  ils  difeni  qu'il  efl  fort  commun  (fj. 

En  Afrique,  le  pays  de  Congo  tire  fon  nom  du 
criftal  qui  s'y  trouve  en  très -grande  abondance  ('ij  ;  il 
y  en  a  aufti  en  quantité  dans  le  pays  de  Galam  /^uj ; 
mais  l'ile  de  Madagafcar  eft  peut  -  être  de  toute  la 
terre  la  contrée  la  plus  riche  en  criftaux  ("xj ,  il  y  en  a 
de  plus  &  de  moins  tranfparens  ;  le  premier  eft  limpide 

(p)  Hiftoire  générale  des  Voyages,  tome  VI,  page  48 j. 
(q)   Idem,  tome  IX,  page  ^oj. 

(r)    Hiftoire    de    la    Conquête    des   Moluques,   par  Argenfola\ 
Amjlerdam,  lyoS ,  tome  II ,  page  ^^. 

(f)    Hiftoire    générale    des    Voyages,    tome   VIII,  page   ^4^» 

■—  Les   Romains  tiroient  du  criftal  de  l'Inde  &  en  fàifoient  grande 

eftime  ,  quoiqu'ils  fuflent  bien  que  les  Alpes  d'Italie  en  produifoient 

de  très-beau.  Oriens,  dit  V\me ^  crijlallum  mitîït,  IndkœnuUa prefcrtur,.,. 

fed  laudaia  in  Europe   Alpîum  jugis ,  lïh.   XXXVII,  cap.  II. 

(t)   Idem,   tome   IV ,  page    611, 

(u)  Idem,  tome  II,  page    644. 

(x)  Il  y  a  de  fort  beau  criftal  à  Madagafcar ,  fur-tout  dans  fa 
province  de  Galemboul  où  on  le  tire  en  pièces  de  fix  pieds  de 
Jong  &  quatre  de  large  fur  autant  d'épaifteur.  Les  Nègres  n'y  tra- 
vaillent que  le  foir ,  apparemment  parce  qu'ils  n'aiment  pas  à  le  voir 
embarquer  fur  nos  navires,  Hijloire  générale  des  Voyages,  tome  VIII, 
jpage  629, 


4<Î4        Histoire  Naturelle 

comme  l'eau,  &.  fe  préfeme,  pour  ainfi  dire,  en  mafles 
dont  nous  avons  vu  des  blocs  arrondis,  de  près  d'un 
pied  de  diamètre  en  tout  fens  ;  cependant  quoiqu'il 
foit  plus  net  &  plus  diaphane  que  le  criflal  d'Europe, 
il  efl;  un  peu  moins  denfe  fyj,  6l  fouvent  il  cfl  plus 
mclé  de  fchorl  &  d'autres  parties  hétérogènes.  Le 
fécond  criflal  de  jMadagafcar  refTemble  à  celui  d'Europe. 
Al.  l'abbé  de  Rochon  a  rapporte  de  cette  île  une  groffe 
Si  belle  aiguille  à  deux  pointes  de  ce  criflal  ;  on  peut 
la  voir  au  Cabinet  du  Roi. 

Dans  le  nouveau  continent,  le  criflal  de  roche  eft 
tout  au/Ti  commun  que  dans,  l'ancien  ;  on  en  a  trouvé 
à  Saint-Domingue  [iJ,  en  Virginie  ^-/^^  au  Mexique 
&.  au  Pérou  ("ôj^  où  M.  d'Ulloa  dit  en  avoir  vu  des 
morceaux  fort  grands  6l  très  -  nets  :  ce  favant  Natu- 
ralise marque  même  fa  furprife  de  ce  qu'on  ne  ie 
recherche  pas,  &  que  c'efl  le  hafard  fcul  qui  en  fait 
quelquefois  trouver  de  groffes  malfes  fc).  Enfin,  il 
y  a  du  crillal  dans  les  pays  les  plus  froids  comme  dans 

fyj  Dans  la  Table  de  M.  BrifToii ,  la  pefanteur  fpécifique  du 
criftal  de  Madagafcar  efl:  de  Z0530  ,  &  celle  du  ciiftal  d'Euiope 
de  26548,  relativement  à  l'eau  fuppofee  loooo.  Ainfi  le  triftaJ 
d'Europe  efl  un  peu  plus  denfe  que  celui  de  Madagalcar, 

(':^J   Hif^oire  générale  des  Voyages,  tome  XII ,  pa^c  21  S, 

(a)  Idem  ,  tome  XIV ^  page  jf.08. 

(h)   Idem  ,   tome  XII ,  page  6 ^S . 

(c)  Idem,  tome  XIV »  page   ^08, 

les 


•^1 


D  E  s    M  I  ^  È  R  AU  X.  ^6  y 

les  climats  tempérés  &  chauds  ;  on  a  recueilli  en  Lap- 
ponie  &  au  Canada ,  des  criftaux  roulés  tout  femblabici» 
à  ceux  de  Briftol,  Si  Ton  y  a  vu  d'autres  criftaux  en 
aiguilles  &  en  grofTes  quilles  f^J;  ainfi  dans  tous  les 
pays  du  monde  il  fe  produit  du  criilal ,  foit  dans  les 
cavités  des  rochers  quartzeux,  foit  dans  les  fentes  per- 
pendiculaires qui  les  divi/ènt  ;  &  celui  qui  fe  préfente 
dans  les  cailloux  creux  &  dans  les  pierres  graniteufes , 
provient  aufli  du  quartz  qui  fait  partie  de  la  fubflance 
de  ces  cailloux  &  pierres  mixtes. 

L'extrait  le  plus  pur  du  quartz  eft  donc  le  criftal 
blanc  ,  &  quoique  les  criflaux  colorés  en  tirent  également 
leur  origine ,  ils  n'en  ont  pas  tiré  leurs  couleurs  ;  elles 
leur  font  accidentelles ,  &  ils  les  ont  empruntées  des 
terres  métalliques  qui  étoient  interpofées  dans  la  maffe 
du  quartz ,  ou  qui  fe  font  trouvées  dans  le  lieu  de  la 
formation  des  criflaux  ;  mais  cela  n'empêche  pas  qu'on 
ne  doive  mettre  au  nombre  des  extraits  ou  ftaiactites 
du  quartz  tous  ces  criflaux  colorés  ;  la  quantité  des 
molécules  métalliques  dont  ils  font  imprégnés ,  &  qui 
leur  ont  donné  des  couleurs ,  ne  fait  que  peu  ou  point 
d'augmentation  à  leur  maffe;  car  tous  les  criflaux,  de 
quelque  couleur  qu'ils  foient,  ont  à  très -peu -près  la 
même    denfué    que    le    criflal    blanc.    Et    comme    les 

fd)    Voyez  la  relation   du  Pcre  Charlevoix,   &  les  Mémoires  de 
l'Acadcmie    des    Sciences,   année    j/j2  ,  pare  ipy. 

ATmérûux,   Tome  UL  N  n  n 


i^dG         Histoire  Naturelle 

améthyfles ,  la  topaze  de  Bohème,  la  chryfblite  à.  l'aiguë- 
rnarine  ont  la  même  denfité,  la  même  dureté,  la  même 
tlouble  réfradioii ,  &  qu'elles  hm  également  réfilîantes 
à  i'adion  du  feu,  on  peut  fans  héfiter  les  regarder 
comme  de  vrais  criftaux ,  &  l'on  ne  doit  pas  les  élever 
au  rang  des  pierres  prccieufes  qui  n'ont  qu'une  fimple 
réfraction  ,  &  dont  la  denfité  ,  la  dureté  &  l'origine 
font  très-différentes   de  celles  des  criflaux  vitreux. 


DES    Minéraux,  467 


lUMB  mgJTIg-^ 


A  M  É  T  H  Y  s  T  E. 

X.  OUTES  les  Amcthyrtes  ne  font  que  Jcs  cri/laiix  de 
roche  teints  de  violet  ou  de  pourpre,  elles  ont  la  même 
dcnfnéf^?J^  la  même  dureté,  la  même  double  réfradion  . 
que  le  criflal ,  elles  font  auiïi  également  réfradaircs  au  feu. 
Les  améthyflcs  violettes  font  les  plus  communes,  &  dans 
ia  plupart ,  cette  couleur  n'a  pas  la  même  intenfité 
par-tout,  fouvent  même  une  partie  de  la  pierre  e/t 
violette  &  le  reile  eft  blanc  ;  il  femble  que  dans  la 
formation  de  ce  criflaJ ,  la  teinture  métallique  qui  a 
coloré  la  pyramide,  ait  manqué  pour  teindre  le  prifme; 
au/Ti  cette  teinture  s'affoiblit  par  nuance  du  violet  au 
blanc  dans  le  plus  grand  nombre  de  ces  pierres  ;  on 
je  voit  évidemment  en  tranchant  horizontalement  une 
table  de  criftaux  d'améthyfte ,  toutes  les  pointes  font 
plus  ou  moins  colorées ,  &  les  bafcs  font  fouvent  toutes, 
blanches  comme  le   criiial. 

On  fait  que  le  violet  &  le  pourpre  font  les  couleurs 
intermédiaires  entre  le  rouge  &  l'indigo  ou  bleu-foncé  ; 
le  crillal  de  roche  n'a  donc  pu  devenir  améthyfte  que 
quand  le  quartz  qui  l'a  produit  s'efl  trouvé  imprégné  de 
particules  de  cette  même  couleur  violette  ou  pourprée; 

(a)  La  pefaïueur  fpccifique  de  l'améthyde  eft  de  26535,  celfe 
du  criftal  de  roche  d'Europe  de  2,(55^8  ,  &  celle  du  criftai  de  roch^ 
^Ê  Madagafcar  de  ^.(î^jÇ)» 


4-68  Histoire  Naturelle 

mais  comme  il  n'y  a  aucun  métal,  ni  même  aucun  minerai 
métallique  qui  produife  cette  couleur  par  la  voie  humide, 
&  que  la  manganèfe  ne  la  donne  au  verre  que  par  le 
moyen  du  teu,  il  faut  avoir  recours  au  mélange  du 
rouge  &  du  bleu  pour  la  compofition  des  améthyftes  ; 
or  ces  deux  couleurs  du  rouge  &  du  bleu  peuvent  être 
fournies  par  le  1er  feul  ou  par  le  fer  mêlé  de  cuivre: 
ainfi  les  améthyfles  ne  doivent  fe  trouver  que  dans  les 
quartz  de  féconde  formation  ,  &  qui  font  voifins  de  ces 
mines  métalliques  en  décompobtion. 

On  trouve  en  Auvergne  ,  à  quatre  lieues  au  nord 
de  Brioude,  une  minière  d'améthyfles  violettes,  dont 
M-  le  Monnier,  premier  Médecin  ordinaire  du  Ho'i, 
Si.  l'un  de  nos  favans  Naturalises  de  l'Académie ,  a 
donné  une  bonne  defcription  f/'J. 

-  ■      ■    ■  -  — 

fbj  Les  bancs  de  cette  carrière  d'amc'thyfles  ne  font  point  hori- 
zontaux ,  ils  font  au  contraire  en  tables  vertica'es  poftes  fur  leur 
champ,  &  la  matière  qui  les  fe'pare  efl;  le  criftal  d'ame'thyfte  dont  la 
dureté  furpalTe  de  beaucoup  celle  de  la  pierre  qui  efl  cependant 
une  gangue  afiez  dure. 

Chaque  veine  d'améthyfle  a  quatre  travers  de  doigt  dVpaifTeur, 
ôi  s'étend  aufîi  loin  que  le  rocher  qu'elle  accompagne  dans  une 
diredion  de  l'efl:  à  l'oueft.  Cette  veine  criftallifée  n'adhère  pas 
également  aux  deux  tables  entre  lefquelles  elle  fe  trouve  ,  elle  eft 
intimement  unie  à  l'une  des  deux,  à  peine  eft-elle  feulement  contiguë 
a  l'autre.  La  furface  qui  tient  fortement  au  rocher  eft  compofée  de 
libres  réunies  de  chaque  faifceau  qui  cotnpofe  l'améthyfle  ,  &  ce 
fâifceau  fe  termine  de  l'autre  côté  à  une  pyramide  à  cinq  ou  fix 
faces  fouvent  inégales,  hautes  d'environ  fix  lignes,  en  forte  que  la 


i 


DES    Minéraux.  469 

On  trouve  de  femblables  améthyfles  clans  les  mines 
de  Sc/iemnhi  en  Hongrie  (c) ;  on  en  a  rencontre  en 
Sibérie  (dj  Si  jufqu'au  Kamtfcliatka  ("ej;  il  s'en  trouve 
auffi  en  pluficurs  autres  régions,  &  particulièrement  en 
Efpagne  (f);  celles  de  Catalogne  ont  une  couleur 
pourprée,  &  ce  font  les  plus  cflimées  fgj;  mais  aucune 
de  ces  pierres  n'a  la  dureté,  la  denfué  ni  l'éclat  des 
pierres  précieufes ,  &.  totites  les  améthyftes  perdent  leur 

furface  de  cette  croûte  criHalline  qui  regarde  le  rocher  auquel  elle 
efl  le  moins  adhérente,  ell:  toujours  héri(îte  de  pointes  de  diamant. 
Chaque  pyramide  eft  revêtue  d'une  croûte  d'un  blanc  fale ,  mais 
l'intérieur  eft  très-fouvent  une  améthyfle  de  la  plus  belle  couleur; 
il  s'en  trouve  de  toutes  les  nuances,  &  'fen  ai  vu  qui  ctoient  au/îi 
blanches  que  le  plus  beau  criflal  de  roche.  Ces  pierres  font  beaucoup 
plus  parfaites  &  n'ont  même  de  tranljjarence  que  vers  les  pointes. 
Le  milieu  &  l'autre  extrémité  font  prefque  toujours  glaceux  ,  les 
paylans  des  environs  en  caflent  les  plus  beaux  morceaux  qu'ils 
vendent  aux  Curieux.  Obfervations  d' Hijloire  Naturelle  y  par  M.  le 
Aïonnier;  Paris,   i  7 S  9  •>  P^^g^^  ^  o  o    ù'  fuiv. 

(c)  ColJedion  académique,  partie  é i range re ,  tome  JI ,  page  2  j y, 

(d)  Voyage  de   Gmelin  en   Sibérie  ,  &c. 

(0)  Journal  de    Phyfique,  Juillet   178  i  ,  page  ^/. 

(f)  llifloire  Naturelle  d'Efpagne ,  par  M.  ViO^sX^s  ,  page  ^i  0. 

(g)  Pline,  parlant  de  l'améthyfte,  nous  apprend  en  partant  quelle 
éioit  la  véritable  teinte  de  la  pourpre  ;  «  on  s'efForçoit ,  dit-il ,  de 
lui  donner  la  belle  couleur  de  i'améthyfte  de  l'Inde ,  qui  eft ,  te 
ajoute  t-il  ,  la  première  &  la  plus  belle  des  pierres  violettes.  Son  «e 
éclat  doux  &  moelleux  femble  remplir  &.  raftafier  tranquillement  « 
la  vue  fans  la  frapper  de  rayons  pétillans  comme  fait  i'efcarboucle». 
Linc  xxxYii ,  n°  ^0, 


470         Histoire  Naturelle 

couleur  violette  ou  pourprée  lorfqu'on  les  expofe  à 
Ta^tion  du  feu:  enfin  elles  préfentent  tous  les  caradères 
&  toutes  les  propriétés  du  criflal  de  roche  ;  Ton  ne  peut 
donc  douter  qu'elles  ne  foicnt  de  la  même  eficnce,  & 
que  leur  fubdance,  à  la  couleur  près,  ne  fbit  ahfolumeni 
la  même. 

Les  Anciens  ont  compte  cinq  efpèces  d'améthyflcs 
qu'ils  diflinguoient  par  les  différens  tons  ou  degrés  de 
couleurs  ;  mais  cette  diverfité  ne  confiftc  qu'en  une 
fuite  de  nuances  qui  rentrent  les  unes  dans  les  autres, 
ce  qui  ne  peut  établir  entre  ces  pierres  une  différence 
clfentielle.  La  diflinclion  qu'en  iont  les  Joailliers  en 
orientales  &  occidentales,  ne  me  paroit  pas  bien  iowAîiç^y 
car  aucune  amétliyfte  n'offre  les  caracStères  des  pierres 
précieufes  orientales;  favoir,  la  dureté,  la  denfité  &  la 
fimple  réfra6lion.  Ce  n'efl  pas  qu'entre  les  vraies  pierres 
précieufes  il  ne  puiffe  s'en  trouver  quelques  -  unes  de 
couleur  violette  ou  pourprée ,  &  même  quelques  Ama- 
teurs fe  flattent  d'en  pofféder,  &  leur  donnent  le  nom 
^ amcthyfte  orientale.  Ces  pierres  font  au  moins  très- 
rares,  &.  nous  ne  les  regarderons  pas  comme  des  amé- 
thyfles,  mais  comme  des  rubis,  dont  en  effet  quelques- 
uns  feniblcnt  ofirir  des  teintes  d'un  rouge  mçlé  dft 
pourpre. 


DES  Minéraux.  471 


CRISTAUX-TOPAZES. 

\JN  a  mal-à-propos  donne  ie  nom  de  Topa-^cs  à  ces 
pierres  qui  fe  trouvent  en  Bohème,  en  Auvergne  & 
dans  plufieurs  autres  provinces  de  l'Europe,  &  qui  ne 
font  que  des  criflaux  de  roche  colores  d'un  jaune  plus 
ou  moins  fonce ,  &  fouvent  enfumé  :  comme  leur  forme 
de  criflallifation,  leur  dureté,  leur  denfité  font  les  mêmes 
que  celles  du  cridal ,  &  qu'elles  ont  aufTi  une  douhle 
réfradion ,  il  n'cfl  pas  douteux  que  ces  fortes  de  topazes 
ne  foient,  ainfi  que  les  améthylles,  des  crillaux  colorés. 
Ces  criflaux-topazes  n'ont  de  rapport  que  par  le  nom 
&  la  couleur  avec  la  vraie  topaze  ,  qui  efl  une  pierre 
précieufe  &  rare  qu'on  ne  trouve  que  dans  les  climats 
chauds  des  régions  méridionales,  au  lieu  que  ces  crif 
taux  -  topazes  ont  peu  de  prix ,  &  fe  trouvent  au/Ti 
communément  dans  les  contrées  du  nord  que  dans 
celles    du   midi   (a) ,    &    quoiqu'on    doraie    l'épithète 


(a)  Wolckmann,  dit  M.  Pott,  donne  l'enumération  des  lieux 
de  Sibérie  qui  fournifTent  les  topa2es  ;  tels  font  les  montagnes  des 
géans  ,  ou  Riefengehurge ,  auprès  du  grand  lac  ;  le  mont  Kommers 
ou  Gomberg ,  auprès  de  Schreiberfan  ;  ie  mont  Kinart ,  derrière  le 
château  &  au-deflbus  de  Kinart  près  de  Hernijforjl ,  à  la  colline 
nommée  Zei/igenbugel,  dans  le  voifinage  de  Schmiedeberg ,  &  dans  les 
rivières    d'Yfer  ôl  de  Zacken 

M.  Henckel  dit  qu'elle   fe  trouve  aflez  abondamment  dans    le 


jfji  Histoire  Naturelle 

d'occidentale  à  la  topaze  de  Saxe  &  à  celle  du  Brefd, 
comme  elles  font  d'une  pefanteur  fpéciiique  bien  plus 
frrande  que  celle  des  criflaux  colorés,  &  prefque  égale  à  la 
deniitédu  diamant;  leur  criftallifàtion  étant  d'ailleurs  toute 
différente  de  celle  des  criflaux  de  roche,  on  doit  les  re- 
garder comme  des  pierres  qui ,  quoiqu'inférieures  à 
la  topaze  orientale,  font  néanmoins  fupcrieures  à  nos 
criflaux-topazes,  par  toutes  leurs  propriétés  effentielles. 

Ces  criflaux -topazes  fe  trouvent  en  Bohème  (l>) ,  en 
Mifnie,  en  Auvergne ,  &  fe  rencontrent  auffi  dans  prefque 


Voigtiand  ,  à  la  montagne  nommée  Schneckemberg ,  auprès  de  la 
colline  de  Tanne b erg ,  à  deux  milles  d* Anerbach ,  où  elle  fe  lire 
d'entre  une  marne  jaune  &  le  criHal  de  roche  ,  <Sc  fe  rencontre 
dans  les  fentes  d'un  rocher  fi  dur ,  qu'on  peut  fe  fervir  des  mor- 
ceaux de  ce  rocher  pour  entamer  &  briler  même  la  topaze.  La 
couleur  de  cette  topaze  eft  plus  ou  moins  jaune  ,  à  peu- près  tirant 
fur  un  petit  vin  pâle.  Le  côté  d'en -bas  qui  efl  attaché  au  rocher, 
eft  pour  l'ordinaire  plus  trouble  &  plus  obfcur  ;  mais  vers  la  pointe, 
la  couleur  devient  plus  nette  &  plus  traniparente.  Alémolres  de 
V  Académie  de  Berlin,  année   jy^j ,  pages  jj.6  Ùf  fuiv, 

(h)  ce  La  topaze  de  Bohème,  dit  M.  Dutens,  efl:  en  criflaux 
■n  ou  canons  alfez  gros  ,  mais  d'un  poli  moins  vif  que  la  topaze 
a:)  d'Orient  ou  du  Bréfil  ;  fa  couleur  tire  fur  celle  de  l'hyacinthe  & 
»  quelquefois  fur  le  brun....  Ce  qu'on  appelle  /q;?J{^  enfumée  ^ 
35  n'efl  qu'un  criflal  de  roche  teint  de  jaune  ordinairement  terne  & 
ï>  fonibre  ;  &  ce  qu'on  nomme  topaiç  d'Allemagne  efl:  un  fpath 
»  vitreux  ou  fluor  cubique  ,  lequel  accompagne  fouvent  \es,  filons 
33  de  plomb,  &  que  l'on  croit  être,  ainfi  que  la  topaze  même, 
»  coloré  par  ce  métal  « ,  pages  ^  4   &  fuiv. 

tous 


DES    Minéraux.  4.73 

tous  ies  lieux  du  monde  où  le  criflal  de  roche  efl 
voidii  des  mines  de  fer,  l'on  a  fouvent  obfervé  que 
la  partie  par  laquelle  ils  font  attaches  au  rocher  quart- 
zeux  qui  les  produit,  efl  environnée  d'une  croûte  fer- 
rugineufè  plus  ou  moins  jaune  ;  ainfi  cette  teinture 
l^rovient  de  la  difToliuion  du.  fer  &  non  de  celle  du 
plomb,  comme  le  dit  M.  Dutens,  puifque  le  plomb 
ne  peut  donner  la  couleur  jaune  aux  matières  vitreufes 
que  lorfqu'elles  font  fondues  par  le  feu  :  &  l'on  objederoit 
vainement  que  le  fpatli  fluor  qui  accompagne  fouvent 
les  filons  des  galènes  de  plomb,  cil  teint  en  jaune, 
comme  les  criflaux-topazes;  car  cela  prouve  feulement 
que  ce  fpath  fluor  a  été  coloré  par  le  plomb  lorfqu'il 
étoit  en  état  de  chaux  ou  de  calcination  par  le  feu 
primitif 

La  pefanteur  fpécifique  des  criflaux-topazes ,  efl  pré- 
cifément  la  même  que  celle  du  criflal  de  roche  (c); 
ainfi  la  petite  quantité  de  fer  qui  leur  a  donné  de  la 
couleur,  n'a  point  augmenté  fenhblemcnt  leur  denfité; 
ils  ont  auffi  à  peu-près  le  même  degré  de  dureté ,  & 
ne  prennent  guère  plus  d'éclat  que  le  criftal  de  roche; 
leur  couleur  jaune  n'cd  pas  nette ,  elle  efl  fouvent 
mêlée  de  brun,  &  lorfqu'on  les  fait  chauffer,  ils  perdent 

fc)  La  pefanteur  rpccifique  de  Ja  topaze  de  Bohcine  eft  de 
^6541  ,  &  celle  du  criflal  de  roche  d'Europe  de  2654.8.  Tables 
de  M.  Bripn. 

Minéraux^  Tome  IL  Ooo 


474         Histoire  Naturelle 

leur  couleur  &  deviennent  blancs  comme  le  criflal.  On 
ne  peut  donc  pas  douter  que  ces  prétendues  topazes 
ne  foicnt  de  vrais  criftaux  de  roche,  colores  de  jaune 
par  le  fer  en  difTolution  qui  s'efl  mêlé  à  l'extrait  du 
îjuariz  lorfque  ces  criftaux  fe  font  formés. 


DES  Minéraux.  475 


C  H  R  Y  S  0  L  I  T  E. 

J_jES  pierres  auxquelles  on  donne  aujourd'hui  le  nom 
de  Cliryfolkej  ne  font  que  des  crijîaiix-topaies  dont  le 
jaune  efl  mêlé  d'un  peu  de  vert  ;  leur  pefanteur  ij)éci- 
fique  efl  à  peu-près  la  même  (a) j  elles  réljflent  également 
à  l'aélion  du  feu,  &  leur  forme  de  criflallifàtion  n'efl 
pas  fort  différente  (b) ,  M.  le  dodeur  Demefle  a  raifbn 
de  dire  qu'il  y  a  très-peu  de  difîérence  entre  cette  pierre 
chryfolite  &  la  topaze  de  Bohème  (c) ;  elle  n'en  diffère 
en  effet  que  par  la  nuance  de  vert  qui  teint  foiblement 
ic  jaune  fans  l'effacer  (d) ;  c'eft  par  le  plus  ou  le  moins 


(a)  La  pefanteur  fpécifique  de  la  chryfolite  du  Brefil  efl  de 
26923  ,  &  celle  du  crilUl  de  roche  de  26548.  M.  Briflon  donne 
aufli  27821  pour  pefanteur  fpécifique  d'une  autre  chryfolite,  fans 
indiquer  le  lieu  où  elle  fe  trouve  ;  mais  cette  difference-de  denfiie' 
n'eft  pas  aflez  confide'rable  pour  faire  rejeter  cette  chryfolite  du 
nombre    des   criftaux  colorés. 

(h)  La  forme  de  criflallifàtion  de  la  chryfolite  ordinaire  n'eft 
pas  ,  comme  on  le  croiroit  au  premier  coup-d'œil  abfolument  fem- 
blable  à  celle  du  criftal  de  roche;  la  pyramide  eft:  plus  obtufe ,  & 
les  arêtes  du  prifme  hexagone  font  fouvent  tronquées  &  forment 
un  dodécaèdre.  Son  tifTu  efl  fenfiblement  lameileux  parallèlement 
à  l'axe  du  prifme  ,  «S:  elle  a  plus  d'éclat  que  le  crillal  de  roche 
le  plus  pur.  Ej[a'i  de  CriJIullographie ,  jiar  M.  de  Rome  de  Lïjle , 
tome  IJ ,  r^^fs    272    àr  fuiv. 

(c)  Lettre  de  M.    Demefle,  tome   I,  prge    42p. 

(d)  Robert  de  Berquca  déâiùt  uès-bieu  la  chryfolite,   en  difant 

O  û  o  i j 


47"^       Histoire    Naturelle 

de  vert  répandu  dans  le  jaune  qu'on  peut  diftinguer 
au  premier  coup-d'ceil  la  chryfblite  du  péridot,  dans 
lequel  au  contraire  la  couleur  verte  domine  au  point 
d'eifacer  le  jaune  prefque  entièrement;  mais  nous  verrons 
que  le  péridot  diffère  encore  de  notre  chryfolite  par  des 
caraclères  bien  plus  elfentiels  que  ceux  de  la  couleur. 

La   chryfolite  des  Anciens  étoit  ia   pierre   précieu/è 

que   nous    nommons  aujourd'hui   topave  orientale,    &   à 

laquelle    le  nom    de   cliryfolhe  ou  pierre  d'or  convcnoit 

eu  eiîèt  beaucoup  (e) :  «  La  chryfolite  dans  fa  beauté, 

»  dit  Pline,   fait  pâlir  l'or  lui-même   (f)  ;  aulfi  a-t-on 

»  coutume  de  la  monter  en  tranfparent  &  fans  la  doubler 

j>  d'une  feuille  brillante  qui  n'auroit  rien  à  ajouter  à  fon 

éclat.  »  L'Ethiopie  &  l'hide,  c'ell-à-dire,  en  géwhdSy 

l'Orient,  fourniffoient  ces  pierres  précieufes  aux  Romains, 

&  leur  luxe  encore  plus  fomptueux  que  le  nôtre,  leur 

fai/bit  rechercher  toutes  les  pierres  qui  avoient  de  l'éclat; 

ils  diftinguoient  dans  les   chryfolites  plufieurs  variétés; 

ia  chryféieâre  à  laquelle,  dit  Pline,  il   falloit   la  lumière 

claire  du  matin  pour  briller  dans  tout  fon  éclat  (^) ;  la 

leucocryfe ,  d'un  jaune-blanc  brillant  (h) ;  ia  méléchryiè, 

que    fâ  couleur    efl  un  vert  iiaifTant    tirant    fur  le  jaune,    ou    ua 
vert- jaune  brillant  d'un  luftre  doré. 

(e)  Chrifos  lithos. 

(f)  Livre  XXXVII ,   n.'  42, 

(g)  IbUem ,  n."  4^. 
(h)  Ibidem  ,  n'  ^4, 


DES  Minéraux.  4.7^ 

qui,  fuivant  la  force  du  mot,  avec  un  éclat  doré,  offre 
la  teinte  rougeâtre  du  miel  (i) ;  toutes  ces  belles  pierres 
font ,  comme  l'on  voit ,  très-différentes  de  notre  chry- 
folite  moderne ,  qui  n'ell  qu'un  criflal  de  roche  coloré 
de  jaune -verdâtre. 

Les  chryfolites  que  l'on  a  trouvées  dans  les  terreins 
volcanifés  font  de  la  même  nature  que  les  chryfolites 
ordinaires  ;  on  en  rencontre  affez  fouvent  dans  les  laves 
&  dans  certains  bafaltes  :  elles  fë  prcfentent  ordinairement 
en  grains  irréguliers  ou  en  petits  fragmens  qui  ont  la 
couleur,  la  dureté  &  les  autres  caraétères  de  la  véri- 
table chryfolite,  nous  en  ferons  la  comparaifon  lor/que 
nous  parlerons  des  matières  rejetées  par  les  volcans. 


(i)   Livre  XXXYII ,  n°  4j. 


47?  Histoire  Naturelle 


A  I  G  U  E-M  A  R  I  N  E. 


L 


ES  Aigues-marines  ne  font  encore  que  des  criflaux 
quartzeux  teints  de  bleuâtre  ou  de  verdàtre  ;  ces  deux 
couleurs  font  toujours  mêlées ,  &  à  différentes  dofes 
dans  ces  pierres ,  en  forte  que  le  vert  domine  fur  le 
bleu  dans  les  unes,  &  le  bleu  fur  le  vert  dans  les  autres; 
leur  dcnfité  (a)  ôl  leur  dureté  font  les  mêmes  que  celles 
des  améthyftes,  des  criftaux  -  topazes  t^  des  chry/b- 
lites ,  qui  toutes  ne  font  guère  plus  dures  que  Je  crillal 
de  roclie  ;  elles  réfiftent  également  à  l'adion  du  feu. 
Ces  trois  caractères  effentiels  fuffifent  pour  qu*on  fait 
bien  fondé  à  mettre  l'aiguë  -  marine  au  nombre  des 
criftaux  colorés. 

La  reffcmblancc  de  couleur  a  fait  penfèr  que  le 
léo'I  des  Anciens  étoit  notre  aiguë  -  marine  ;  mais  ce 
béryl ,  auquel  les  Lapidaires  donnent  la  dénomination 
(\'ai^ue  -  viar'uie  orientale ^  eft  une  pierre  dont  la  denfité 
cft  égale  à  celle  du  diamant,  &.  dès -lors  on  ne  peut 
la  confondre  avec  notre  aigue-marine  ni  la  placer  avec 
jes  criflaux  quartzeux. 

On  trouve  les  aigues-marines  dans  plufieurs  contrées 
de  l'Europe,    &  particulièrement  en  Allemagne;  elles 

f n)  Criflal  d'Europe,  26)48;  aiguë  jjiarijie ,  2722^;  chrylolite, 
2.-j%%\  \  chryfolite  du  Erefil^  26^23.  VoycT^  la  Table  de  Ai.  Brijjon, 


DES    Minéraux.  479 

n'ont  ni  la  denfité  ,  ni  la  dureté ,  ni  l'éclat  du  béryl 
&  des  autres  pierres  qui  ne  fe  trouvent  que  daus  les 
climats  méridionaux  ;  &.  ce  qui  prou\  e  encore  que  nos 
aiguës  -  marines  ne  font  que  des  criflaux  de  roche  teints , 
c'efl  qu'elles  le  préfcntent  quelquefois  en  niOrceaux 
afTez  grands  pour  en  faire  des  vafcs. 

Au  refte,  il  fe  trouve  entre  l'aiguë  -  marine  &  le 
béryl  la  même  différence  en  pefanteur  fpéciiique  (6J 
qu'entre  les  crillaux-topazes  &  la  topaze  du  Bredl ,  ce 
qui  feul  fuftit  pour  démontrer  que  ce  font  deux  pierres 
d'effence  différente ,  &  nous  verrons  que  le  béryl  pro- 
vient  du  fchorl ,  tandis  que  l'aigue-marine  efl  un  criflal 
quartzeux. 


{bj  La  pefanteur  fpécifique  du  béryl  ou  aiguë -marine  orientale 
efl  de  3^48^,  &  celle  de  i'aiguç-marine  occidentale  ii'ell  que  de 


480  Histoire   Natu relle 


SFA  LACTITES  CRISTALLISÉES 

DU     FELD-SPATH. 

I  1 E  Fel J-fpath ,  dont  la  denfité  &  la  dureté  font  à  peu- 
près  les  mêmes  que  celles  du  quartz,  en  diflère  néan- 
moins par  des  caraclères  efTentiels,  la  fufibilité  &  la 
figuration  en  criftaux  ;  &  cette  criftalii/àtion  primitive 
du  feid-fpadî  ayant  été  produite  par  le  feu,  a  précédé 
celle  de  tous  les  criflaux  quartzeux  qui  ne  s'opère  que 
par  l'intermède  de  l'eau. 

Je  dis  que  la  cridaliifation  du  feld-fpath  a  été  produite 
par  le  feu  primitif,  &  pour  le  démontrer,  nous  pourrions 
ra])pcler  ici  toutes  les  preuves  fur  le/quelles  nous  avons 
établi  que  les  granités ,  dont  le  fcid-iJ3atIi  fait  toujours 
partie  conflituante,  appartiennent  au  temps  de  l'incan- 
deftcncc  du  Globe,  piiifque  ces  mêmes  granités,  ainfi 
que  les  verres  primitifs  dont  ils  font  compofés ,  ne 
portent  aucune  empreinte  ni  veflige  de  l'impreflion  de 
l'eau  ,  &  que  même  ils  ne  contiennent  pas  l'air  fixe 
qui  fe  tlcgage  de  toutes  les  fubftances  poiicrieurement 
formées  par  l'intermède  de  l'eau  ,  ccû-a-d'ire  de  toutes 
les  matières  calcaires  ;  on  doit  donc  rapporter  la  criflal- 
iifation  du  feld-fpatb  dans  les  granits  à  cette  époque, 
où  le  feu,  &  le  feu  feul,  pénétroit  &  travailloit  le  Globe 
avant  que  les  élémens  de  l'air  &  de  l'eau  volatilifés,  & 
encore  relégués  loin  de  fa  furface ,  n'euffent  pu  s'y  établir. 

11 


DES    Minéraux.  ^8  i 

Il  en  efl  de  même  du  fcliorl,  dont  la  criflallifation 
primitive  a  été  opérée  par  le  mcme  feu  ;  puifqu'en 
prenant  les  fchorls  en  général,  il  en  exifle  autant  & 
plus  en  forme  crifîailifée  dans  les  granités,  que  dans 
les  mafTes  fecondaires  qui  en  tirent  leur  origine. 

On  reconnoît  aifément  le  feld-fpath  &  les  matières 
qui  en  proviennent  au  jeu  de  la  lumière  qii'elles  réflé- 
chifTent  en  chatoyant ,  &  nous  verrons  que  les  extraits 
de  ce  verre  primitif  font  en  affez  grand  nombre,  mai< 
ils  ne  fe  préfentent  nulle  part  en  auffi  gros  volume  que 
les  criftaux  quartzeux  ;  les  extraits  ou  ftalaélitcs  du  feld- 
fpath  font  toujours  en  affez  petits  morceaux  ifolés , 
parce  qu'il  ne  fè  trouve  lui-même  que  très-rarement  eu 
maffes  tm  peu  confidérables. 

Dans  cette  recherche  fur  l'origine  &.  la  formation 
des  pierres  tran/jiarentes ,  je  fais  donc  entrer  les  carac- 
tères de  la  denfité ,  dureté  ,  homogénéité  &  fufibilité  , 
que  je  regarde  comme  efîentiels  &  très-diflinélifs ,  fans 
rejeter  celui  de  la  forme  de  criflallifation,  quoique  plus 
équivoque;  mais  on  ne  doit  regarder  la  couleur  que 
comme  luie  apparence  accidentelle  qui  n'influe  point 
du  tout  fur  l'effence  de  ces  pierres,  la  quantité  de  la 
matière  métallique  qui  les  colore,  étant  prefque  infini- 
ment petite,  puifque  les  criiîaux  teints  de  violet,  de 
pourpre,  de  jaune,  de  vert,  ou  du  mélange  de  ces 
couleurs  ,  ne  pèfent  pas  plus  que  le  criflal  blanc  ,  & 
que  les  diamans   couleur  de  rofë,  ou   jaunes  ou  verts, 

Minéraux,   Tome-  III.  Ppp 


4S2  Histoire  Naturelle 

font  aufTi  de  la  même  denfité  que  les  diamans  blancs. 

Et  comme  nous  ne  traitons  ici  que  des  flaladites 
traniparentcs ,  &  que  nous  venons  de  préfentcr  celles 
du  quartz  ,  nous  continuerons  cette  expofitlon  par  les 
flaladites  du  feld-fpath,  &  enfuite  par  celles  du  fciiorl: 
ces  trois  verres  primitifs  produifent  des  ftalaélites  tranf- 
parentes  ;  les  deux  autres,  fàvoir,  le  jafpe  &  le  mica, 
ne  donnent  guère  que  des  concrétions  opaques,  ou  tout 
au  plus  à  demi-tranfparentes ,  dont  nous  traiterons  après 
celles  du  quartz,  du  feld-fpath  &  du  fchorl. 


DES    Minéraux.  48 j 

SA  P  H  I  R    D'E  A  U. 

L^  E  Saphir  d'eau  eft  une  pierre  tranfparente  légèrement 
chatoyante,  &  teinte  d'un  bleu  pâle,  fa  dcnfité  approche 
de  celles  du  fcld-fpath  &.  du  cridal  de  roclie  (û) ;  il  a 
fouvent  des  glaces  &  reflets  blancs ,  &l  fouvent  aufTi 
la  couleur  bleue  manque  tout-à-coup  ou  s'affoiblit  par 
nuances,  comme  la  couleur  violette  fe  perd  <&:  s'affoiblit 
dans  l'améthyde  ;  il  paroît  feulement  par  la  différence 
de  la  pefameur  fpécihque  qui  fe  trouve  entre  ces  deux 
pierres  (l>),  que  le  faphir  d'eau  n'efl  pas  tout- à- fait 
auffi  denfe  que  Taméthyfle  &  le  criflal  de  roche,  & 
qu'il  feft  plus  que  le  feld-ipath  en  criflaux  rougeâtres  ; 
je  fuis  donc  porté  à  croire  qu'il  efl  de  la  même  effence 
que  le  feld-fpath  ,  ou  du  moins  que  les  parties  quartzeufes 
dont  il  eft  compofé  font  mélangées  de  fcld-fpath  :  on 
pourra  confirmer  ou  faire  tomber  cette  conjeélure ,  en 
éprouvant  au  feu  la  fufibilité  du  faphir  d'eau;  car  s'il 

(a)  La  pefanteur  fpccifique  du  faphir  d'eau  eft  de  25813;  celle  du 
ciidal  de  roche  eft  de  26548;  la  pefameur  fpécifique  du  feld-fpath 
blanc  eft  de  26466,  &  celle  du  feld-lpath  rougeâtre  eft  de  24378, 
en  forte  que  la  jiefanteur  fpccifique  du  faphir  d'eau  étant  de  25813, 
elle  fait  le  terme  moyen  entre  celle  de  ces  deux  feld-fpaths ,  &  c'eft 
ce  qui  me  fait  prcfuiner  que  la  fubftance  du  faphir  d'eau  eft  plutôt 
compofce   de   feld-fpath   que    de   quartz. 

fb)  La  pefanteur  fpécifique  du  faphir  d'eau  eft  de  2581  j,  (5c 
celle  de  l'amcthyfte  de   26535. 

Ppp  ij 


484        Histoire    Naturelle 

réfifle  moins  que  Je  criflal  de  roche  ou  le  quarrz  à 
i'aclion  d'un  feu  violent,  on  prononcera  fans  héfiter 
qu'il  efl  mclé  de   feld-fpath. 

Au  refle,  on  ne  doit  pas  confondre  ce  faphir  d'eau, 
qui  n'efl  qu'une  pierre  vitreufe  foiblement  colorée  de 
bleu,  avec  le  vrai  faphir  ou  faphir  d'orient,  qui  ne 
difîère  pas  moins  de  celui-ci  par  l'intenfite  ,  la  beauté 
&  le  brillant  de  fa  couleur  ,  que  par  fa  denfité ,  fà 
dureté,  &  par  tous  les  autres  caractères  de  nature  qui  le 
mettent  au  rang  des  vraies  pierres  précieu/ès. 


( 


DES  Minéraux.  485 

FELD- SPA  TH  DE  R USSIE. 

v_>*ETTE  fubdance  vitreufe  afTez  récemment  conmie, 
&  jiifqu'ici  Aénoirmiée  pierre  de  Labrador  (a) ,  parce  que 
ies  premiers  échantillons  en  ont  été  ramaflcs  fur  cette 
terre  fauvage  du  nord  de  l'Amérique,  doit  à  plus  jufte 
titre  prendre  fa  dénomination  de  la  RufTie,  où  l'on  vient 
de  trouver,  non  loin  de  Pétcrfbourg,  ce  feld  -  fpath 
en  grande  quantité.  L'augufte  Impératrice  des  Ruifies 
a  daigné  elle  -  même  me  le  faire  favoir,  &  c'efi  avec 
empreflement  que  je  faiiis  cette  légère  occafion  de  pré- 
fenter  à  cette  grande  Souveraine ,  l'hommage  univerfel 
que  ies  Sciences  doivent  à  fon  génie  qui  les  éclaire 
autant  que  fa  faveur  les  protège;  &  l'hommage  parti- 
culier que  je  mets  à  fès  pieds  pour  les  liautes  bontés 
dont  Elle  m'honore. 

Ce  beau  feld-fpath  s'efl  trouvé  produit  &:  répandu 
dans  des  blocs  de  rocher  que  l'on  a  attaques  pour  paver 
la  route  de  Péter ftourg  à  Péterholi  ;  la  maffe  de  cette 
roche  eft  unexoncrétion  vitreufe  dans  laquelle  le  fchori 
domine ,  &  oii  Ton  voit  le  feid-fpath  formé  en  petites 
tables  obliquement  inclinées,  ou  en  rhombes  criflallifés 


(a)  Feld  -  Ipath  à  couleurs  changeantes ,  connu  ibus  le  nom 
de  pierre  de  Labrador,  on  le  trouve  en  effet  en  morceaux  roulés, 
quelquefois  chargés  de  glands  de  mer  fur  les  côtes  de  cette  contrée 
feptentrionale    de  l'Amérique. 


486        Histoire  Naturelle 

d'une  manière  plus  ou  moins  didinde.  On  le  rcconnoît 
au  jeu  de  Tes  couleurs  chatoyantes,  dont  les  reflets  bleus 
&  verts  deviennent  plus  vifs  (Se  font  très  -  agréables  à 
l'œil,  iorfque  cette  pierre  efl  taillée  &  polie:  elle  a 
plus  de  denfité  que  le  feld-fpath  blanc  ou  rouge  (h) ; 
ce  feld-rpath  vert  a  donc  pris  ce  furplus  de  denfité  par 
ie  mélange  du  fcborl,  &  probablement  du  fcliorl  ^qxi 
qui  efl  le  plus  pefant  de  tous  les  fchorls  (c) . 

Au  rede  ,  cette  belle  pierre  chatoyante  qui  ctoic 
très-rare ,  le  deviendra  moins  d'après  la  découverte  que 
i'on  vient  d'en  faire  en  Ruffie,  &  peut-être  efl -elle  fa 
même  que  ce  feld-fpath  verdâtre  dont  parle  Wallerius, 
&  qu'il  dit  fe  trouver  dans  les  mines  d'or  de  Hongrie 
&  dans  quelques  endroits  de  la  Suède. 

(h  )  La  pefunteur  fpécifique  du  fpath  de  Ruflîe  ou  pierre  de 
Labrador,  efl  de  26925;  celle  du  feld-fpath  blanc  ,  de  2437S';  (Se 
celle  du  feld-fpath  en  crirtaux  rouges,  de  2.64.66.  Tables  Je  Ai, 
Brijfon. 

{ c )  'Ls.  pefanteur  fpécifique  du  fchori  olivâtre  ou  vcrt,  efl  de 
^  4. 5  I  p  ;  même  Table. 


DES  Minéraux.  487 


■ .. ... .....j  j 


ŒIL     DE    CHAT. 

X-jES  pierres  auxquelles  on  a  dcnué  ce  nom  font 
toutes  chatoyantes ,  &.  varient  non-feulement  par  \c  jeu 
de  la  lumière  <$i.  par  les  couleurs,  mais  aufîi  par  le 
cleflin  plus  ou  moins  régulier  des  cercles  ou  anneaux 
qu'elles  prcfentent.  Les  plus  belles  font  celles  qui  ont 
des  teintes  d'un  jaune  vif  ou  mordoré  avec  des  cercles 
bien  diftinds  ;  elles  font  très-rares  &  fort  eflimces  des 
Orientaux  (a);  celles  qui  n'ont  point  de  cercles  &  qui 

•^- ..  »  ■■        —      ■-■"'■■■■  ■*     ■       I    ..  — .      -■■■■■  ,  ,  ., .  _  ■  ^ 

(a)  Les  pierres  précieufes  dont  on  fait  le  plus  de  cas  dans  l'ile 
de  Ceylan  ,  &  parmi  les  Maures  &.  les  Gentils ,  font  hs  yeux  de 
chat:  on  ne  les  connoît  prefc[ue  point  en  Europe.  J'en  vis  une  de 
la  groffeur  d'un  œuf  de  pigeon  au  bras  du  prince  d'Ura  lorfqu'il 
vint  nous  voir.  Cette  pierre  étoit  toute  ronde,  &  faite  comme  une 
grofie  balle  d'arquebufe  :  ces  pierres  pèlent  plus  que  les  autres  ; 
on  ne  les  travaille  jamais,  &  on  fe  contente  de  les  laver.  Il  femble 
que  la  Nature  ait  pris  plaifir  de  raniaiïer  dans  cette  pierre  ,  toutes 
les  plus  belles  &  les  plus  vives  couleurs  que  la  lumière  puifle  pro- 
duire ,  &  que  ces  couleurs  forment  un  combat  entr'elles  à  qui 
l'emportera  pour  l'éclat  &  pour  le  brillant ,  fans  que  pas  une  ait  l'avan- 
tage fur  l'autre  ;  félon  qu'on  les  regarde ,  &  pour  peu  qu'on  change 
de  fituation  &  qu'on  remue  cette  pierre,  on  voit  briller  une  autre 
couleur ,  en  forte  que  l'œil  ne  peut  diftinguer  de  quelle  manière  fe 
fait  ce  changement:  de-là  vient  qu'on  appelle  ces  pierres  ceil  de  chat; 
outre  qu'elles  ont  des  raies  couchées  l'une  contre  l'autre ,  ce  qui  fait 
diverfité  de  couleurs ,  comme  véritablement  on  voit  que  tous  les 
yeux  de  chat  brillent  &  paroifîent  de  différentes  couleurs  fans  qu'ils 
le  retournent-  ou  qu'ils  fe  remuent.  Ces  raies  ou  fils  qui  font  dans 
les  yeux  de  chat  ne  font  jamais  en  nombre  pair;   il   y  en  a  trois  ; 


488  Histoire  Naturelle 

font   grifcs    ou   brunes ,    n'ont  que    peu  d'éclat  &   de 
valeur,   on  trouve  celles-ci  en  Egypte,  en  Arabie,  &c. 
&  les  premières  à  Ceyian.  Pline  paroît  défigner  ie  plus 
bel  œil  de  chat,  fous  le  nom  de  Icucoplualmos ,  «  lequel, 
*»  dit-il,  avec    la  figure  du  globe  blanc  &:  de  la  prunelle 
»^  noire  d'un  œil ,   brille  d'ailleurs  d'une  lumière  enflam- 
mée (h).  »   Et  dans  une  autre  notice  où  cette  même 
pierre  cH  également  reconnoi (Table  (c) ,   \\  nous  a  con- 
fervé   quelques    traces    de    la   grande   cflime   qu'on    en 
faifoit    en    Orient   dès   la   plus   haute  antiquité  :   «<  Les 
î>  Affyriens  lui   donnoient,  dit -il,  le  beau  nom  A' œil  de 
Bcliis,  &  l'avoient  confacrée  à  ce  Dieu  ». 

Toutes  ces  pierres  font  chatoyantes  ,  &  ont  à  très- 
peu-près  la  même  denfité  que  le  feld-fjoath  ^J) ^  auquel 
on  doit  par  conféquent  les  rapporter  par  ces  deux 
caradères  ;  mais  il  y  a  ime  autre  pierre,  à  laquelle  on 
a  donné  le  nom  iVcc'i!  Je  char  îioir  ou  îioh'âire,  dont  la 
denfité  c(t  bien  plus  grande,  &  que  par  cette  raifon 
nous  rapporterons  au  'îq\\ox\. 

cinq  ou  fept.  HiJIoire  de  Ceylnn ,  par  Jean  Ribeyro ,  i  y  0  i ,  page  j?. 

(b)  Leiicophtalmos  rutila   allas,   oculi  fpeciem  candïdam  n'igramque 
co-itiiiet.   Hiil.  Nar.   Lib.   XXXVli  ,  n."    61. 

(c)  Bell  Qculus  all'icans  pupïllam  cing'it  n'igrdm ,  e  medio  aurco 
fuhvrc  lafi-entem.  Hœ  ,  proptcr  fpeciem  ,  facratijftmo  AJfyr'iorum  Dco 
dicauiur.   Lib.  XXXVII  ,   n."   45. 

(d)  La  pefanteur  fpecilicjue  du  feld-fpath  blanc,   efl  de  26466;* 
celle    de   i'cx-ii    de  chat    mordoré,   efl:    de  2.66^^  \   de  l'ail  de  dut 
jaune,   25^7;;    &  de  l'œil  de    cliat  gris^  2^675, 


DES    Minéraux.         489 
(E  I  L    DE    POISSON. 

IL  me  paroît  que  l'on  doit  encore  regarder  comme 
un  produit  du  feld-fpath,  la  pierre  chatoyante  à  laquelle 
on  a  donné  le  nom  (ïœîl  de  poijjbn,  parce  qu'elle  t'a 
à  peu -près  de  la  même  pefanteur  f|3ccifique  que  ce 
verre  primitif  ('dj. 

Dans  cette  pierre  œil  Je  poijjon,  la  lumière  efl  blanche 
&  roule  d'une  manière  uniforme  ,  le  reflet  en  eft  d'un 
blanc  éclatant  &  vif  lorfqu'dle  eft  taillée  en* forme 
arrondie,  &  polie  avec  foin;  la  plupart  des  pierres  cha- 
toyantes, «  dit  très-bien  M.  Dem.efle,  ne  font  que  des 
feld-fpaths  d'im  tiffu  extrêmement  fin,  que  l'on  taille  « 
^x^  goutte  de  fuifow  en  cabochon  ,  pour  donner  à  la  pierre  « 
tout  le  jeu  dont  elle  efl  fufceptible.  »  Cette  pierre 
cei!  de  poijfon ,  quoiqu'aflez  rare,  n'efl  pas  d'un  grand 
prix  ,  parce  qu'elle  n'a  que  peu  de  dureté ,  &  qu'elle 
efl  fans  couleur  ;  cWe  paroît  laiteufe  &.  bleuâtre  lorf- 
qu'on  la  regarde  obliquement;  mais  au  reflet  direél  de 
la  lumière ,  elle  efl  d'un  blanc  éclatant  &.  très  -  intenfè  : 
à  ce  caraélère,  &  en  fe  fondant  fur  le  fens  étymo- 
logique ,    il    me    paroît    que    l'on     pourroit    prendre 

(a)  La  pefanteur  fpe'cifique  de  îa  pierre  œil  de  poijfon,  eft  de 
2.5782,  ce  qui  ed  à  peu-près  le  terme  moyen  entre  fa  pefanteur 
fpccifique  z6^66  du  feld-fpath  blaiic,  &  -4378  pefanteur  fpécifiqua 
du  feld-lpatli  rougeâtre. 

ATincraiix,  Tome  IIL  Q^^ 


490         H isTo IRE  Naturelle 

\ argywdnmas  de  Pline,  pour  notre  œil  de  poifTon;  car 
il  n'eft  aucune  pierre  qui  joigne  à  un  beau  blanc  d'argent 
plus  d'éclat  &  de  reflet,  &  qui  par  conféquent  puilfe 
à  plus  jufle  titre  ,  quoique  toujours  improprement, 
recevoir  le  nom  de  diamant  d'argent  (b):  Si.  cela  étant, 
la  pierre  galLùque  du  même  Naturalifte,  fcroit  une  variété 
de  notre  pierre  œil  de  poifTon,  pui/qu'li  la  rapporte 
lui-même  à  fon  argyrodamas  (c) .  Au  refte  cette  pierre, 
ceil  de  foijjon ,  eft  ainfi  nommée,  parce  qu'elle  reffemble 
par  fa  couleur  au  criflallin   de  l'œil  d*un  pcriflbn. 


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(b)  Argyroilamas. 

(c)  Gûllaiiti  ar^yrodamanti  finùlïs  ef,  paulb  fordid'ior;  Lib.  XXXV IL,. 

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DES   Minéraux.  49  i 

f]»  '""'■l'tiimiiiiim— iBi  ■  I  II»  ■■■  III   II  I     I  

'"  '  '  m 

ŒIL     DE    LOUP. 

1-j  A  pierre  api)clce  (EU  de  loup,  cft  Je  même  :in  pro- 
duit (lu  fckl-rpath  ;  clic  efl  chatoyante,  &  probablement 
mclce  de  parties  micacées  qui  en  augmentent  le  volume 
&  diminuent  h  ma/Te  ;  cette  pierre  ccW  de  loup ,  moins 
Aiin^c  que  \^  fcld'fpaih  (a) ,  paroît  faire  la  nuance  entre 
les  feid-fpatlis  &  les  opales  qui  font  encore  plus  mélan- 
gées de  parties  micacées;  car  l'œil  de  loup  n'étincelle 
pas  par  paillettes  variées  comme  Taventurine  ou  l'opale, 
mais  il  luit  d'une  lumière  pleine  &  /ombre  ;  Tes  reflets 
verdâtres  fèmblcnt  fortir  d'un  fond  rougeâtre,  &  on 
pourroit  prendre  cette  pierre  pour  une  variété  colorée 
de  la  pierre  œil  de  poiflbn,  ou  pour  mie  aventurine 
iàns  accident,  fans  aventure  de  couleurs,  fi  fa  denfjté 
n'étoit  pas  fort  au-deffous  de  celle  de  ces  pierres.  Nous 
îa  regarderons  donc  comme  un  des  produits  ou  flalac- 
lites,  mais  des  moins  pures  &:  des  plus  mélangées,  du 
£eld-fpadi.  Sa  teinte  foncée  <Sc  obfcure  ne  laiffe  à  fes 
reflets  que  fort  peu  d'éclat,  &  cette  pierre,  quoiqu'affez 
rare,  dont  nous  avons  au  Cabinet  du  Roi  deux  grands 

échantillons,  n'a  que  peu  de  valeur. 

* — ' ' -• 

(a)    La  pefanreur  Tpécifique  de    fa  pierre   cc'il  de  /oup .  n'ed  qu* 
4?   -^i5^7'  tandis  que   celle  de  l'œil   de   poifloa  ell  de    zjySz* 


492         Histoire  Natu relle 


r-^— u*-.iin.^i.U3s: 


a^.i  ij — r   I  iii  m  '■^-j»u.Ej  Lia, 


A  VE  N  T  U  R  I  N  E. 

i_jE  feid-fpath  &  toutes  ies  pierres  tranfparentes  qui 
Cil  tirent  leur  origine,  ont  des  reliets  cliatoyans;  mais 
il  y  a  encore  d'autres  pierres  qui  réunifTent  à  la  lumière 
flottante  &  varice  du  chatoyement,  des  couleurs  fixes, 
vives  &.  intenfes ,  telles  que  nous  les  prcfentenc  les 
aventurines  &  ies  opales. 

La  pefantcur  fpécifique  des  aventurines  efl  à  très- 
peu-près  la  même  que  celle  du  feld-fpath  (a):  la  plu- 
part de  ces  pierres,  encore  plus  brillantes  que  chatoyantes, 
paroifTent  être  femées  de  petites  paillettes  rouges,  jaunes 
&  bleues  ,  fur  un  fond  de  couleur  plus  ou  moins 
rouge;  les  plus  belles  aventurines  ne  font  néanmoins 
qu'à  demi-tranfjDarentes;  les  autres  font  plus  ou  moins 
opaques,  &.  je  ne  les  rapporte  au  feld-fpath  qu'à  cau/è 
de  leurs  reflets  légèrement  cliatoyans,  &.  de  leur  denfité 
qui  efl  à  très -peu -près  la  mcme  ;  car  ies  unes  &  ies 
autres  pourroient  bien  participer  de  la  nature  du  mica, 
dont  les  paillettes  brillantes  contenues  dans  ces  pierres , 
paroifTent  être  des   parcelles  colorées. 

(a)  Feld-fpath,  26466;  avemurine  demi-tranfparente,  26667, 
aventurine  opaque,  16^26.    Table  de  M.  Brijfon, 


DES    Minéraux.  49  3 


OPALE. 

XJ  E  toutes  les  pierres  chatoyantes  l'Opale  efl  la  plus 
Lelle;  cependant  elle  n'a  ni  la  dureté  ni  l'éclat  des  vraies 
pierres  précieufès  ;  mais  la  lumière  qui  la  pénètre , 
s'anime  des  plus  agréables  couleurs ,  &  femble  fe  pro- 
mener en  reflets  onJoyans,  &  l'œil  efl  encore  moins 
ébloui  que  flatte  de  l'effet  fuave  de  Tes  beautés.  Pline 
s^'arrcte  avec  complaifance  à  les  peindre:  «  c'eft,  dit-il, 
le  feu  de  f efcarboucle ,  le  pourpre  de  l'améthyfte,  le 
vert  éclatant  de  l'émeraude,  brillant  enfemble,  &  tantôt 
réparés ,  tantôt  unis  par  le  plus  admirable  mélange  (a)  ». 
Ce  n'eft  pas  tout  encore  :  le  bleu  &  f  orangé  viennent 
fous  certains  afpeéls  fe  joindre  à  ces  couleurs ,  &.  toutes 
prennent  plus  de  fraîcheur  du  fond  blanc  6i  lui/ânt  fur 
lequel  elles  jouent ,  &.  dont  elles  ne  femblent  fortir  que 
pour  y  rentrer  &  jouer  de  nouveau. 

Ces  reflets  colorés  font  produits  par  \c  brifement 
des  rayons  de  lumière  mille  fois  réfléchis,  rompus  & 
renvoyés  de  tous  les  petits  plans  des  lames  dont  l'opale 
efl  compofée  ;  ils  font  en  même  temps  réfraélés  au 
fortir  de  la  pierre,  fous  des  angles  divers  &  relatifs  à 
ia  pofition  des  lames  qui  les  renvoient,  &  ce  qui  prouve 

fa)  EJi  in  iis  carhunculi  î  envi  or  ignis ,  ejl  ametyfii  fidgens  purpura 
if  fmaragdi  virens  mare ,  &  cunéla  pariier  incredibili  mixlurâ  luc(ntia> 
Lib.  XXXVII ,   cap.    6. 


ce 


494-         Histoire   Naturelle 

que  ces  couleurs  mobiles  &  fugitives,  qui  fuivent  l'œif 
&.  dépendent  de  l'angle  qu'il  fait  avec  la  lumière ,  ne 
{ont  que  des  iris  ou  fpedres  colores ,  c'e/l  qu'en  cafïànc 
ia  pierre  elle  n'offre  plus  dans  fa  fracture,  ces  mêmes 
couleurs  dont  le  jeu  varié  tient  à  fà  flruéture  intérieure, 
&  s'accroît  par  la  forme  arrondie  qu'on  lui  donne  à 
l'extérieur.  L'opale  ell  donc  une  pierre  irifée  dans  toutes 
lès  parties;  elle  efl  en  même  temps  la  plus  légère  des 
pierres  chatoyantes,  &  de  près  d'un  cinquième  moins 
àeni^e  que  le  feld-fpath ,  qui  de  tous  les  verres  primitifs 
eft  le  moins  pefant  (h) ;  elle  n'a  auffi  que  peu  de  du- 
reté (c) ;  il  faut  donc  que  les  petites  lames  dont  l'opale 
eft  compofée ,  foient  peu  adhérentes ,  &  affez  féparées 
les  unes  des  autres,  pour  que  fa  denfité  &  fa  dureté 
en  foient  diminuées  dans  cette  proportion  de  plus  d'un 
cinquième  relativement  aux  autres  matières  vitreufès. 

.  Une  opale  d'un  grand  volume,  dans  toutes  les  parties 
de  laquelle  les  couleurs  brillent  cSc  jouent  avec  autant 
de  feu  que  de  variété  (i^J ,  efl  \mc  production  fi  rare 
qu'elle  n'a   plus  qu'un  prix  d'eiliiiie  qu'on  peut  porter 


(h)  La  pefanîcur  fpc'cifique  de  l'opale  eft  de  21140,  «Se  celle 
du  feld-lpath  le  plus  Jcger  de  2^.378.  Table  de  AI.  Brijjon. 

(c)  L'opaÎG  eH:  fi  tendre  que  ,  pour  la  polir  ,  on  ne  peut ,  fiijvant 
Boëcc  ,  enipîoycr  ni  l'cineril  ni  la  pote'e  ,  &  qu'on  ne  doit  fe  fervir 
que  dii  tripoii   étendu  fur  une  roue   de  bois. 

(d)  Les  plus  grandes  ,  dit  Pline  ,  ne  paffent  pas  la  grofTeur  d'une 
aveline,  7wc;s  aveHanœ  imignlludine.  Lijj.  xxxyii  ,   çaj?.  6» 


DES     Al  J  N  É  R  A  U  X,  49  5 

très-haut.  Pline  nous  dit  qu'Antoine  profcrivit  un  Séna- 
teur auquel  appartenoit  une  très-belle  opale  qu'il  avoit 
refufé  de  lui  céder;  fur  quoi  le  Naturalise  Romain  s'écrie 
avec  une  éloquente  indignation  :  «  De  quoi  s'étonner 
ici  davantage  ,  de  la  cupidité  farouche  du  tyran  qui  « 
profcrit  pour  une  bague ,  ou  de  l'inconcevable  pafTion  « 
de  l'homme  qui  tient  plus  à  fa  bague  qu'à  fa  vie  (e)f  » 

On  peut  encore  juger  de  l'eftime  que  faifoiem  les 
j\nciens  de  i'opaie,  par  la  fcrupuleufe  attention  avec  la- 
quelle ils  en  ont  remarqué  les  défauts,  <Sc  par  le  foin  qu'ifs 
ont  pris  d'en  caraélérifer  les  belles  variétés  (f).  L'opale 
en  offre  beaucoup  ,  non  -  feulement  par  les  diiîcrences 
du  jeu  de  la  lumière,  mais  encore  par  le  nombre  des 
nuances  &l  la  diverfité  des  couleurs  qu'elle  réfléchit  (g): 

(e)  Sed  mira  Antonii  ferilas  alcjne  luxurla  proptef  gemmam  profcriben^ 
t'is j  nec  m'inor  Non'ii  contuwacia profcriptionem  fuam  amantis.  Idem,  ibidi 

/  f)  y'ii'ia  opal'i ,  fi  color  in  forem  herbue  ,  quœ  vocatur  heliotropium. 
exeot ,  aut  crijîaUum  mit  grandinem:  fi  fal  interveniat  aut  fcabritia  ûut 
punâa  ocuUs  occurfantia ,  nullofque  mugis  Jndia  fimilitudine  indifcreta 
vitro  adultérât.  Experimentiim  in  foie  tantiim  ;  faifts  enitîi  contra  radios 
libratis ,  di(^ito  ac  pollice  unus  atque  idem  travjlucet  colos  infe  confumptui. 
Yeri  fidoor  fiibind}  variât  &  pliis  hue  illucque  fpavgit ,  &  fulgor  lucis 
in  di (fîtes  funditur.  Hanc  gcmmam  proptér  eximiam  gratiam  pleriquc 
cvpellavêre  pcedcrota.  Sunt  &  qui  privatum  genus  e'nis  faciiitit ,  favge- 
Tionque  ab  Indis  vocari  dicunt.  Traduntur  nafci  &  in  yEgypto  Ù"  in 
Arabid  if  vili(f'mi  in  Ponto.  Item  in  Galatiâ  ac  Thafo  if  Cypro. 
Quippe  opa/i  gratiam  habct ,  ftd  moîltus  niiet ,  raro  ncn  fcaler.  Plin, 
lib.  XXXVII  ,  cap.   G. 

(cr)  On  conngat  cj^iuuc  fortes  d'opales ,  la  première  trcs-parfaife 


49^        Histoire  Naturelle 

il  y  a  Jc5  opales  à  reflets  foiblement  colorés,  ou  fur 
un  fond  laiteux  flottent  à  peine  quelques  légères  nuances 
de  bleu.  Dans  ces  pierres  nuageufes,  laiteufes  &  prefque 
opaques,  la  pâte  opaline  femble  s'épaiiïir  &  fe  rapprocher 
de  celle  de  la  calcédoine:  au  contraire,  cette  même 
pâte  s'éclaircit  quelquefois  de  manière  à  n'offrir  plus  que 
l'apparence  vitreufe  &  les  teintes  claires  &  lumineufes 
d'un  feld  -  fj^ath  chatoyant  &  coloré  ;  &  ces  nuances , 
comme  l'a  très-bien  obfervé  Boëce,  fe  trouvent  fbuvent 
réunies  &  fondues  dans  un  feul  &.  même  morceau  d'opale 
brute.  Le  même  Auteur  parle  des  opales  noires  comme 


&  qui  imite  naïvement  l'iris  par  le  moyen  de  ces  couleurs-ci,  le 
rouge  ,  le  vert ,  le  bleu  ,  le  pourpre  &  fe  jaune.  La  faconde  qui 
au  travers  d'une  certaine  noirceur ,  envoyé  un  feu  &  un  c'clat 
d'efcarboucle  qu'on  lait  très-rare  &  très-précieufe.  La  troifième  qui 
aufli  au  travers  d'un  jaune  fait  paroître  diverfes  couleurs ,  mais  peu 
gaies  &  comme  amollies.  Et  la  quatrième  forte,  celle  qu'on  nomme 
fauffe  opale ,  laquelle  eft  diaphane  &  femblable  aux  yeux  de  poillon. . . 
La  couleur  des  plus  belles  opales  eft  un  blanc  de  lait ,  parmi  lequel 
il  e'clate  du  rouge ,  du  vert ,  du  bleu ,  du  jaune ,  du  colombin  & 
plufieurs  autres  couleurs  diffcrentes  qui  dedans  ce  blanc  furprennent 
agréablement  la  vue;  d'où  je  conclurois  facilement  que  c'eft  de  cette 
forte  que  Boëce  dit  en  avoir  vu  une  ,  de  fa  grofîêur  d'une  petite 
noix,  dont  il  fait  monter  fa  valeur  à  une  grande  fomme  de  Tfiaiers. 

Elle  croît  dans  les  Indes ^  dans  l'Arabie,  l'Egypte  &  en  Chypre. 
Et  à  i'égard  de  celles  de  Bohème ,  quoiqu'elles  foient  grandes ,  elles 
font  néanmoins  fi  peu  vives  en  couleurs ,  qu'elles  ne  font  guère 
eftimées.  MencUles  des  Indes ,  par  Robert  de  Berquen ,  pages  jf4 

des 


DES   Minéraux.  497 

^es  plus  rares  &  des  plus  fuperbes  par  l'éclat  du  feu  qui 
jaillit  de  leur  fond  fombre  (/i). 

On  trouve  des  opales  en  Hongrie  (ij ,  en  Mi/îiie  (k) 
Si  dans  quelques  îles  de  la  Méditerranée  ^/^.  Les  Anciens 
tiroient  cette  pierre  de  l'Orient,  d'où  il  en  vient  encore 
aujourd'hui,  Sl  nos  Lapidaires  diilinguent  les  opales, 
aiiifi  que  plufjeurs  autres  pierres,  en  orientales  &  en 
ccc'uientalcSj  mais  cette  diftinélion  n'eft  pas  bien  énoncée  ; 
car  ce  n'efl  que  fur  le  plus  ou  le  moins  de  beauté  de 
ces  pierres  que  portent  les  dénominations  d'orientales 
&  d'occidentales ,  &  non  fur  le  climat  où  elles  fc 
trouvent ,  puifque  dans  nos  opales  d'Europe  il  s'en  ren^ 
contre  de  belles  parmi  les  communes ,  de  même  qu'à 
Ceylan  &  dans  les  autres  conirces  de  l'Inde,  on  trouve 
beaucoup  d'opales  communes  parmi  les  plus  belles; 
îiinfi  cette  diflinélion  de  dénominations,  adoptée  par  les 

^ . : ^ 

(h)  Boëce  de  Boot  dit  avoir  eu  eu  fk  poirefllon  \x\\2  très-petite 
opale  noire  ,  &  en  avoir  vu  une  autre  de  la  groffeur  d'un  gro» 
pois  &  qui  rendoit  un  feu  comparable  à  celui  du  plus  beau  grenat. 
(  Lap'id.  &  gemm.  h'ifi.  pag.  1^2).  Nous  avouons  n'avoir  pas  vu 
&  ne  pas  connoître  cette  elpèce  d'opale,  quoiqu'après  un  témoignage 
aufll  pofjtif,  on  ne  puiiîe  pas ,  ce  femble,  douter  de  fon  exiftence. 

(ï)  Voyage  de  Tavernier ,  tome  IV ,  page  41.  Boëce  de  Boot  dit 
que  de  Coa  temps  «  la  feule  mine  que  l'on  en  connût  en  tlongrie, 
effondra  &.  fut  enfouie  fous  fes  ruines  ».  Lap'id.  à^ gemm.  hijl.  pag.  /  j?/# 

(k)    h.  Freyberg. 

(l)  L'île  de  Tajjos  appelée  aujourd'hui  Taffo  ,  produit  de  fort 
belles  opales ,  qui  font  une  forte  de  pierre  précieufe.  Defcripiion 
4.C  i Archipel ,  par  Dapper;   Ainjlerdam,    lyo],  page  1^4. 

Mmûrau'A,  Tome  UL  R  r  r 


498       Histoire    Naturelle 

Lapidaires,  cfoit  ctrc  rejetce  par  les  Naturaliftes ,  piiif- 
qu'on  pourroit  la  croire  fondée  fur  une  différence 
tfTentielIe  de  climats,  tandis  qu'elle  ne  l'efl:  que  fur  la 
différence  accidentelle  de  l'éclat  ou  de  la  beauté. 

Au  refle,  l'opaie  cfl  certainement  une  pierre  vitreufc 
de  féconde  formation,  &  qui  a  été  produite  par  l'inter- 
mède de  l'eau:  h  gangue  efl  une  terre  jaunâtre  qui  ne 
fait  point  d'effervefcence  avec  les  acides  ;  les  opales 
renferment  fbuvent  des  gouttes  d'eau.  M.  Fougeroux 
de  Bondaroy,  l'un  de  nos  favans  Académiciens,  a  facriflé 
à  fon  infîruélion  quelques  opales  ,  &  les  a  fait  caffer 
pour  recueillir  l'eau  qu'elles  renfermoient  ;  cette  eau 
s'efi;  trouvée  pure  &  limpide  comme  dans  les  cailloux 
creux  &.  les  enhydres  ^m) .  Il  fe  trouve  quelquefois  des 

(m)    Je    me    fuis   troxivé   à  portée   d'obferver  ce    fait   dans^   des- 
opales  Celles    que    j'ai    obfervces'  ont    été    tirées    du   mont 

£erico  dans  le  Vicentin ,  dont  le  terrein  offre  des  traces  de  volcan 
dans  plufieurs  endroits.  Je  n'alTure  cependant  pas  que  ces  opales 
doivent  leur  origine  à  des  volcans  ;  beaucoup  de  ces  pierres  n'offrent 
point  de-  bulles  mobiles,  &.  ce  n'eft  que.  dans  la  quantité,  lorfqu'on 
les  a  polies,  que   la   bulle  fe  voit   daiis  quelques-unes. 

Ces  efpèces  d'agates  perdent  avec  le  temps  la  bulle  qui  fixe 
jnaintenant  notre  attention;  on  pourroit  croire  que  celles-là  avoient 
quelques  (emes  ou  qu'il  s'y  eft  formé  quelques  creva/Tes  qui  donnant 
iffue  à  l'eau,  empêchoieiit  la  bulle  d'air  de  s'y  mouvoir  comme  el/e 
le  faifoit  auparavant. 

J'ai  expofé  ces  opales  où  l'on  n'apercevoit  plus  le  mouvement 
de  la  bulle,  à  une  douce  chaleur;  je  les  ai  laiffées  dans  de  Feau 
que  j'ai.ûix  long-temps  bouillir,  j'ai  fait  chauffer  une  de  ces  opales 


(■: 


DES    Minéraux.  499 

opales  dans  les  pouzzolanes  &  dans  les  terres  jetées  par 
les  volcans.  M.  Ferber  en  a  obfervc ,  comme  M.  de 
Bondaroy,  dans  les  terreins  volcanifcs  du  Vicentin  (nj; 
t:es  faits  fuffifent  pour  nous  démontrer  que  les  opales 
font  des  pierres  de  féconde  formation,  à.  leurs  reiiets 
chatoyans  nous  indiquent  que  c'eft  aux  Halaélites  du 
feld-fpath  qu'on  doit  les  rapporter. 

Quoique  plufieurs  Auteurs  aient  regardé  le  girafol 
comme  une  forte  d'opale ,  nous  nous  croyons  fondés 
à  le  féparer,  non-feulement  de  l'opale,  mais  même  de 
toutes  les  autres  pierres  vitreufes;  c'eft  en  effet  une 
pierre  précieufe  dont  la  dureté  &  la  denfué  font  prefque 
iloubles  de  celles  de  l'opale,  &  égales  à  celles  des  vraies 

pierres  précieufes  (o), 

. '  — ■  ..1. 

A  i'ai  jetée  dans  Teau  fans  être  parvenu  à  faire  reparoître  la  bulle 

J'ai  caiïe  une  de  ces  opales  qui  avoit  eu  une  buile  &l  qui  l'avoit 
perdue ,  &  j'ai  obfervé  qu'elle  étoit  creufe  &  qu'il  y  avoit  dans 
J'inte'rieur  une  -jolie  criflallifàtion ,  (nais  point  d'eau  &  aucun  conduit 
ni  fente  par  fefquels  cette  eau  auroit  pu  s'échapper. 

J'ai  rompu  une  féconde  opale  où  je  voyois  aiféineut  le  rwouve- 
ment  d'une  bulle,  &  je  me  fuis  aflliré  qu'elle  étoit  prefque  remplie 
d'une  eau  claire,  limpide,  &  qui  m'a  paru  infipide.  Atémoïres  de 
M>  Fougeroux  de  Bondaroy,  dans  ceux  de  l'Académie  des  Sciences, 
finnée   1776,  pagfs   628   Ù"  fuiv» 

(n)   Lettres  fur  la   Minéralogie,  pages  24.  &   2^. 

(0)  Voyez  l'article  de  Cïrafol  dani  le  volume  fuivant  de  ©et(« 
^illoire  des  minéraux. 


500         Histoire  Natu belle 


PIERRES    IRISÉES. 

yVpRÈs  ces  pierres  chatoyantes  dont  les  couleurs  font 
flottantes,  &  dans  lefquelies  ies  reflets  de  lumière  paroifTent 
uniformes,  W  s'en  trouve  plufieurs  autres  dont  les  cou- 
leurs variées  ne  dépendent  ni  de  ia  réflexion  extérieure 
de  la  lumière,  ni  de  fa  réfraction  dans  Tintéricur  de 
ces  pierres ,  mais  des  couleurs  irîjQes  que  produifent  tous 
les  corps  lorfqu'ils  font  réduits  en  lames  extrêmement 
minces  :  les  pierres  qui  préfèntem  ces  couleurs  font 
toutes  défedueufes  ;  on  peut  en  juger  par  le  criftal  de' 
roche  inp  qui  n'efl  qu'un  criflal  fêlé  ;  il  en  eft  de  même' 
du  feid-fpath  irifc ;  les  couleurs  qu'ils  offrent  à  l'œil,, 
ne  viennent  que  du  reiiet  de  la  lumière  fur  ies  lames 
minces  de  leurs  parties  conilituantes,  lorfqu'ellcs  ont 
été  féparées  les  unes  des  autres  par  fa  percufTion  ou: 
par  quelqu'autre  caufe.  Ces  pierres  irifées  font  éionnces, 
c'efl-à-dire,  fêlées  dans  leur  intérieur;  elles  n'ont  que 
peu  ou  point  de  valeur ,  &  on  les  diflingue  aifément 
des  vraies  pierres  chatoyantes  par  le  foible  éclat  &.  le 
peu  d'intenfité  des  couleurs  qu'elles  renvoient  à  l'œil: 
le  plus  fouvent  même  la  fêlure  ou  féparation  des  lames 
c(l  fenfible  à  la  tranche ,  &.  vifibie  jufque  dans  l'inté- 
rieur dki  morceau.  Au  refle,  il  y  a  auffi  du  criflai  irife 
feulement  à  fà  furperficie,  &  cette  iris  fuperficiefle  s*y 
produit  par  i'exfoliation  des  petites  lames  de  fa  furface. 


DES    Minéraux.  501 

tîe  même  qu'on  le  voit  dans  notre  verre  fadlice  long- 
temps expofé  aux  imprcffions  de  l'air. 

Au  relie,  la  pierre  iris  de  Pline,  qui  femblerort 
devoir  être  fpécialement  notre  criflal  irifé,  n'efl  pour- 
tant que  le  criftal  dans  lequel  les  Anciens  avoient 
ol)(èrvé  la  réfradion  de  la  lumière ,  la  divifion  des 
couleurs,  en  un  mot,  tous  les  effets  du  prifme  /^J^ 
fans  avoir  fu  en  déduire  la  théorie. 


^aj  Nota.  Seulement  il  eft  fingulier  que  Pline,  pour  nous  décrire 
cet  effet ,  ait  recours  à  un  criftal  de  la  mer  rouge  ,  tandis  que 
!a  première  aiguille  de  criftal  des  Alpes  pou  voit  également  le  lui 
offrir.  Iris  effoditur  in  quâdam  wfulâ  maris  rubri  qua  dijlat  a  Bérénice 
vrbe  fexaginta  millia ,  c cetera  fuâ  parte  crijlallus ,  iiaque  quidam  radicem 
crijlaUi  ejf'e  dixerunt.  Vecaïur  ex  argumento  iris.  Nam  fub  teâo  perçu  [fa 
foie  fpecies  &  colores  arcûs  cœlejlis  in  proximos  parie  tes  ejaculatur  g 
Jiibinde  mutcns  magna  que  varietate  admirât  ionem  fui  augens.  Sexangulum 
ejfe ,  ut  (rijfallum  ,  cenfat....  Colores  verb  non  nifi  ex  opaco  reddunt  g 
née  ut  ipfœ  habeant ,  fcd  ut  repercuffu  parietum  elidant  :  cptimaque  quot 
maxïmoi  anus  facit ,  fmillimofque  cceleJJibus.  Lib.  xxxvji,n."  5 a. 


502       Histoire   N atv relle 


STALACTITES  CRISTALLISÉES 

DU     S  C  H  O  R  L. 

JLjE  fchorl  diftère  du  qyartz,  ôl  reflembie  au  feJd- 
/padi  par  fa  fufibilité ,  &  il  furpaiïe  de  beaucoup  eu 
denfitc  les  quatre  autres  verres  primitifs;  nous  rappor- 
terons donc  au  fchorl  les  pierres  tranfparentes  qui  ont  ces 
mêmes  propriétés;  ainfi  nous  reconnoîtrons  les  produits 
du  fchorl  par  leur  deufité  &  par  leur  fufibilité,  &  nous 
verrons  que  toutes  les  matières  vitreufes  qui  font  fpé- 
citiquement  pkis  pefantes  que  le  quartz,  les  jafpes,  le 
mica  &  le  ic\à  -  /path  ,  proviennent  du  fchorl  en  tout 
ou  en  partie.  C'ell  fur  ce  fondement  que  je  rapporte 
au  fchorl  pkuôt  qu'au  feld  -  /j^ath  les  émeraudes ,  les 
péridots,  le  faphir  du  Brefd,   &c. 

J'ai  déjà  dit  que  les  couleurs  dont  les  pierres  tranf 
parentes  font  teintes,  n'influent  pas  fenfiblement  fur  leur 
pefanteur  fpécifique  ;  ainfi  l'on  auroit  tort  de  prétendre 
que  c'ell  au  mélange  des  matières  métalliques  qui  fonc 
entrées  dans  la  compofition  des  péridots ,  des  émeraudes 
&  du  fapliir  duBrefil,  quon  doit  attribuer  leur  denfité 
plus  grande  que  celle  du  criflal ,  &  dès-lors  nous  fommes 
bien  fondés  à  rapporter  ce  furplus  de  denfité  au  mélange 
du  fchorl  qui  eft  le  plus  pefant  de  tous  les  verres 
primitirs. 


'"^M 


DES    Minéraux.  503 

Les  extraits  ou  flaladlites  du  fchorl  font  donc  tou- 
jours reconnoiiïabics  par  leur  dcnfitc  ôi  leur  fufibilitc , 
ce  qui  les  diflingue  des  autres  criflaux  vitreux  avec 
Jefqueis  ils  ont  néanmoins  le  *cara£lère  commun  de  la 
double  réfracflion. 


L'i 


É  M  E  R  A  U  D  E. 

ÉMERAUDE,  qui  par  fon  brillant  éclat  &  fa  couleur 
fuave,  a  toujours  été  regardée  comme  une  pierre  pré- 
eieufè,  doit  néanmoins  être  mifè  au  nombre  des  criftaux 
du  quartz  mêlé  de  fcborl ,  i .  parce  que  fa  dcnfitc  efl 
moindre  d'un  tiers  que  celle  des  vraies  pierres  précieufes , 
&  qu'en  même  temps  elle  efl  un  peu  plus  grande  que 
celle  du  criflal  de  roche  (û):  2.  parce  que  fa  dureté 
n'efl  pas  comparable  à  celle  du  rubis  ,  de  la  topaze 
&  du  faphir  d'Orient,  puifque  i'émeraude  n'efl  guère 
plus  dure  que  le  criflal  :  3.  parce  que  cette  pierre 
mife  au  foyer  du  miroir  ardent,  fè  fond  &l  fè  convertit 
en  une  maffe  vitreufe,  ce  qui  prouve  que  fà  fubflance 
quartzeufè  efl  mêlée  de  fcld  -  fpath  ou  de  fchorl  ('bj ^ 


(a)  La  pefameur  fpécifique  de  rémeraude  du  Pc'rou  ,  eft  de  ^yy)  5, 
&  celle  du  criftal  de  roche  de  26548.    Table  de  M.  Br'ijj'on. 

(b)  L'émeraude  expofee  au  foyer  lenticulaire  s'y  efl  fondue  & 
arrondie  en  trois  minutes ,  elle  efl:  devenue  d'un  bleu  terne  avec 
quelques  taches  blanchâtres.  Cette  expérience  a  été  faite  avec  Ia> 
lentille  à  refprit-de-vin  de  M.  de  Bernières.  Voye\  la  Ca^tU  dcs> 
Ans,  du  2 y  Juin  jyj^'- 


504-  Histoire  Naturelle 

qui  l'ont  rendue  fufible  ;  mais  la  denfité  du  feld-/{3aih 
étant  moindre  que  celle  du  criflal ,  &  celle  de  l'éme* 
raude  étant  plus  grande ,  on  ne  peut  attribuer  qu'au  mé- 
lange du  fchorl  cette  fufibilité  de  l'émeraude:  4.°  parce 
que  les  énieraudes  croiffent,  comme  tous  les  criftaux  (c), 
dans  les  fentes  des  rochers  vitreux  (d):  enfin  parce 
que  l'émeraude  a,  comme  tous  ces  criitaux,  une  double 
réfracftion  ;  elle  leur  relTemble  donc  par  les  caradères 
eiïentiels  de  la  dcnfité  ,  de  la  dureté,  de  la  double 
réfra6tion;  &  comme  l'on  doit  ajouter  à  ces  propriétés 
celle  de  la  fufibilité ,  nous  nous  croyons  h\cri  fondes 
à  féparer  l'émeraude  des  vraies  pierres  précieufès,  &  à 
ia  mettre  au  nombre  des  produits  du  quartz  mêlé  de 
(chorl. 

Les  émcraudes ,  commie  les  autres  criflaux ,  font  fort 
fujettes  à  être  glaceufès  ou  nuageufes  ;  il  efl  rare  d'en 
trouver  d'un  certain  volume  qui  foient  totalement 
exemptes  de  ces  défauts;  mais  quand  cette  pierre  efl 
parfaite,  rien  n'eft  plus  agréable  que  le  jeu  de  fa  lumière, 
comme  rien  n'efl  plus  gai  que  fa  couleur  plus  amie  de 

m  ^ ■  ■  '  * 

(c)  La  odiigue  de  la  iniiie  d'of  de  MeTjjuUel  au  Mexique,  efl 
un  quartz  dans  lequel  fe  trouvent  des  crillaux  d'emeraude,  lelquels 
même  coniiennent  des  grains  d'or.  Bowles  ,  Hijhïre  Naturelle 
à'  Ejpagne. 

(dj  On  trouve  les  e'jneraudes  au  ^ong  des  rochers  où  elfes  croi/îênt, 
&  vienneut  à  peu  -  près  comme  le  criibl.  Voyagef  de  Robert  Lade ; 
Paris,  i/4'i»   lome  I,  pa^f^s  /o  t^  j-/. 

l'œil 


DES  Minéraux.  joj 

l'œil  qu'aucune  autre  fe) .  La  vue  fe  repofe,  fe  clclafTc, 
fe  récrée  dans  ce  beau  vert  qui  fcmble  otirir  la  miniature 
des  prairies  au  printemps:  la  lumière  qu'elle  lance  en 
rayons  aufii  vifs  que  doux,  femble,  dit  Pline,  brillanter 
l'air  qui  l'environne  ,  &  teindre  par  Ton  irradiation  l'eau 
dans  laquelle  on  la  plonge  (^f^:  toujours  belle,  toujours 
éclatante,  foit  qu'elle  pétille  fous  le  foleil,  foit  qu'elle 
luife  dans  l'ombre  ou  qu'elle  brille  dans  la  nuit  aux 
lumières  qui  ne  lui  font  rien  perdre  des  anrrémens  de 
fa  couleur  dont  le  vert  eft  toujours  pur  fg) . 

Auffi  les  Anciens,  au  rapport  de  Théophrafle  ^/^^ 

( e )  Une  belle  émeraude  fe  monte  fur  noir  comme  les  diamans 
blancs;  elle  tfl:  la  Çt\x\e pierre  de  couleur  qui  jouifle  de  cette  préroga- 
tive, parce  que  le  noir,  bien  loin  d'altérer  la  couleur,  la  lend  plus 
riche  &  plus  veloute'e ,  au  lieu  que  le  contraire  arrive  avec  toute 
autre  pierre  de  couleur. 

(f)  C'efl:  la  remarque  de  Thcophrafle  (lûp.  &  gemm.  n'  44), 
fur  quoi  les  Commentateurs  font  tombés  dans  une  foule  de  doutes 
&  de  mëpriles ,  cherchant  mal-à-propos  comment  l'émeraude  pouvoit 
donner  à  l'eau  une  teinture  verte  ,  tandis  que  Théophrafle  n'entend 
parler  que  du  reflet  de  la  lumière  qu'elle  y  répand. 

(g)  NuUius  coloris  afpeÛus  jucundior  ejl  ;  nam  herbas  quoque  virent  es 
frondefque  ûvidè  fpeélamus:  fmaragdos  vero  tanto  libenliùs  quoniam  nihil 

omnino  viridius  comparatum  illis  viret.  Prœiereûfoli  gemmarutn  contuitu  ocu- 
"los  implent  nccfatiant  ;  quin  Ù"  ab  intentione  aliâ  obfcurata  afpeâu  jmaragdi 

recreaîur  acies Ita    viridi    lenitate   la(fi[udinem   mulcent.   Prœlerea 

longinquo  amplificantur  vifu  infcientes  cîrca  fe  repercujfum  aéra;  non  foie 
Tnutati ,   non  umbrâ,  non  lucernis ,  fewperque  fenfm   radiantes  &  \ifum. 
admittentes.  Plin.  lib.  xxxvii,  n."    16. 
(^h)  Lapid.  &  gemm.  n.°  44. 

Minéraux,  Tome  IIL  S^i 


$q6        Histoire   Naturelle 

fe  plaifoient- iJs  à  porter  i'émeraude  en  bague,  afin  de 
s'égayer  la  vue  par  fon  éclat  Ôl  fa  couleur  /iiave  ;  ils  la 
tailloient,  /bit  en  cabochon  pour  faire  flotter  la  lumière, 
{bit  en  table  pour  la  réfléchir  comme  un  miroir ,  foit 
en  creux  régulier  dans  lequel,  fiir  un  fond  ami  de  l'œil, 
vcnoient  fe  peindre  les  objets  en  raccourci  f/J.  C'efl 
ainfi  que  l'on  peut  entendre  ce  que  dit  Pline  d'un 
Empereur  qui  voyoit  dans  une  émeraude  les  combats 
des  gladiateurs:  réfervant  rémcraude  à  ces  ufages,  ajoute 
ie  Naturalifle  Romain,  &  refpeclant  fes  beautés  natu- 
relles ,  on  fèmbloit  être  convenu  de  ne  point  l'entamer 
par  le  burin  (/:);  cependant  il  reconnoît  lui-même 
ailleurs,  que  les  Grecs  avoient  quelquefois  gravé  fur 
cette  pierre  f/J,  dont  la  dureté  n'efl  en  effet  qu'à  peu- 

f  ij  P/erùtntjue  concavi  ut  vifum  coHigant Quorum   verb  corpus 

extenjum  ejl ,  eâdcm  quâ  fpecula  ratione  fuperî  imagines  reddunt ,  Nero 
princeps  gladiatorum  pugnas  fpedabat  fmaragdo.  Idem,  ibidem. 

(k)  Quapropter  décréta  hominum   iis  parcitur  fcalpi   vetitis.  Loco  cit, 

{/J  Livre  xxxvii,   n*  j».  Il  parle  de  deux  émeraudes,  fur  cha- 
cune defqueli'es  croit  gravée  Amymone,  l'une  àt%  Danaïdes ,  &  dans 
le  même  livre  de  ^ow  Hiftoire  Naturelle,  n."  ^,  il  rapporte   la  gra- 
vure des  émeraudes  à  une  époque  qui  repond  en  Grèce,  au  règne 
du  dernier  des  Tarquins.  —  Selon  Clément  Alexandrin  ,   le  fameux 
cachet  de    Polycrate  étoit  une  cmeraude  gravée  par  Théodore   de 
Samos.  (  B,  Clem.  Alex.  Padag.  Hb.  IIL  )  —  Lorlque  Lucullus , 
ce    Romain    fi  célèbre   par  fes  richefles  &  par  fon  luxe,  aborde  à 
Alexandrie  ,    Ptolomée    occupé    du    foin   de   lui   plaire ,    ne  trouve 
rien   de  plus  précieux  à  lui  offrir  qu'une  émeraude  fur  laquelle  éioit 
gravé  le  portrait  du  Monarque   égyptien.  Plut,  in  LuculL 


\ 


D£s  Minéraux.  507 

près  égale  à  ceiie  des  belles  agates  ou  du  criflal  de  roche. 

Les  Anciens  attribuoient  auffi  quelques  propriétés 
imaginaires  à  i'émeraude;  ils  croyoient  que  fa  couleur 
gaie  la  rendoit  propre  à  chaffer  la  triflcfTe,  &  faifoit 
difparoîire  les  pbantômcs  mélancoliques,  appelés  mûuvûis 
efprits  par  le  vulgaire.  Ils  donnoient  de  plus  à  l'éme- 
raude,  toutes  les  prétendues  A'crtus  des  autres  pierres 
précieufes  contre  les  poifons  &  différentes  maladies  : 
feduits  par  l'éclat  de  ces  pierres  brillantes,  ils  s'étoicnt 
plu  à  leur  imaginer  autant  de  vertus  que  de  beauté  ;  mais 
au  phyfique  comme  au  moral ,  les  qualités  extérieures  les 
plus  brillantes  ne  ibnt  pas  toujours  l'indice  du  mérite 
le  plus  réel  ;  les  émxraudcs  réduites  en  poudre  &  prifes 
mtcrieurement ,  ne  peuvent  agir  autrement  que  comme 
des  poudres  vitreufès ,  aclion  fans  doute  peu  curative, 
&  même  peu  falutairc  :  &.  c'efl  avec  raifon  que  l'on  a 
rejeté  du  nombre  de  nos  remèdes  d'ufage,  cette  poudre 
d'émcraude  &  les  cinq  fragmens  précieux ,  autrefois  fi 
fameux  dans   la  Médecine  galénique. 

Je  ne  me  fuis  (i  fort  étendu  fur  les  propriétés  réelles 
&  imaginaires  de  Témeraude,  que  pour  mieux  démontrer 
qu'elle  étoit  bien  connue  des  Anciens,  &  je  ne  conçois 
pas  comment  on  a  pu  de  nos  jours  révoquer  en  doute 
l'exiftence  de  cette  pierre  dans  l'ancien  continent,  & 
nier  que  l'antiquité  en  eût  jamais  eu  connoi fiance  ;  c'efl 
cependant  i'afiertion  d'un  Auteur  récent  (m)  ^  qui  prétend 

(m)  '  M.   Diitens. 

Sff  ij 


5o8  Histoire  Naturelle 

que  les   Anciens  n'avoient  pas  connu  l'émeraucle,  fous 
prétexte    que  dans   ie   nombre  des  pierres,  auxquelles 
ils  ont  donné  ie  nom   de  JmaragJus,   plulieurs  ne  font 
pas  des  émeraudes  ;  mais  il  n'a  pas  penfé  que  ce  mot 
fmarûgJuSj  étoit  une  dénomination  générique  pour  toutes 
ies  pierres  vertes ,  puifque  Pline  comprend  fous  ce  nom, 
des  pierres  opaques  qui  femblent  n'être  que  des  prafès 
ou  même  des   jafpes   verts  ;   mais   cela   n'empêche  pas 
que   la    véritable  émeraude  ne  foit  du  nombre  de   ces 
fmarûgdes  des  Anciens  :  il  efl  même  affez  étonnant  que 
cet  Auteur,  d'ailleurs  très-eflimable  &  fort  inflruit,  n'ait 
pas  reconnu    la   véritable    émeraude   aux    traits   vifs  & 
brillans,  &.  aux  caractères  très  -  diflin6lifs  fous   lefquels 
Pline  a  fu  la  dépeindre.  Et  pourquoi  chercher  à  atténuer 
la  force  des  témoignages  en  ne  les  rapportant  pas  exadte- 
ment  \  par  exemple ,  l'Auteur  cite  Théophrafte  comme 
ayant  parlé  d'une  émeraude  de  quatre  coudées  de  Ion* 
gueur,  &  d'un  obélifque  d'émeraude   de  quarante  cou- 
dées ;    mais   il  n'ajoute   pas    que   le   Naturalifte   Grec, 
témoigne   fur  ces    faits   un  doute   très-marqué,   ce  qui 
prouve   qu'il    connoiffoit    affez    la    véritable  émeraude 
pour  être  bien  perfuadé  qu'on  n'en  avoit  jamais  vu  de 
cette  grandeur;   en  effet,   Théophrafte  dit  en  propres 
termes,  que  \ émeraude  ejl  rare  &  J^^  fe  trouve  jawais  en 
grand  volume  (n) ,  «  à  moins,  ajoute-t-il,  qu'on  ne  croie 


(n)   tçi  h  cr»ri'ct,  xa}  -rà  /iiyt-^oç  ^  /Afya'^H.    De  lapid.  pag.    Sj, 


DES  Minéraux.  ^09 

aux  Mémoires  Egyptiens,  qui  parient  d'émeraudes  de  « 
quatre  &.  de  quarante  coudées  :  »  A'Iûis  ce  font  cliofes, 
continue-t-il,  qu'il  faut  laijjer  fur  leur  bonne  foi  (o) ;  & 
à  l'égard  de  ia  colonne  tronquée  ou  du  cippe  d'éme- 
raude  du  temple  d'Hercule  à  Tyr,  dont  Hérodote  lait 
au/Ti  mention ,  il  dit  que  c'efl  fans  doute  nnç.  faufle 
émcraude  (p).  Nous  conviendrons,  avec  M.  Dutens  , 
que  des  dix  ou  douze  fortes  de  fmaragdes,  dont  Pline 
fait  l'énumération,  la  plupart  ne  font  en  effet  que  de 
fauifes  émeraudes  ;  mais  il  a  dû  voir  comme  nous  , 
que  Pline  en  diflingue  trois  comme  fupérieures  à  toutes 
les   aiures  (q) .  11   efl  donc  évident  que  dans  ce  grand 

(o )  Atque   liœc  quidevi   ita  ab  ipfis  referuntur.  De  lapid.  pag.  87. 
(p)    T^ifi  forù  pjeudofmaragdus  fit.   Ibidem. 

( q )  La  première  eft  l'émeraude  nommée  par  les  Anciens,  pierre 
de  Scythie  ,  ôc  qu'ils  ont  dit  être  ia  plus  belle  de  toutes.  La  féconde 
qui  nous  paroît  être  auffi  une  émeraude  véritable  ei\  Ja  badrianne , 
à  laquelle  Pline  attribue  la  même  dureté  &  le  même  éclat  qu'à 
Témeraude  fcythique ,  mais  qui ,  ajoute-t-il ,  efl:  toujours  fort  petite. 
La  troifième  qu'il  nomme  émeraude  de  Copias ,  &  qu'il  dit  être  en 
morceaux  aflez  gros  ,  mais  qui  ell  moins  parfaite  ,  moins  tranfj  arenie 
&  n'ayant  pas  le  vif  éclat  des  deux  premières.  Les  neuf  autres  lories 
étoient  celles  de  C'/^^^r^,  d'Ethiopie  y  d'Herminie,  de  Perfe ,  de  Médie , 
de  V Atiique  ,  de  Lacédémone ,  de  Cartfiage ,  &.  celle  d'Arabie,  nommée 
Cholus..  La  plupart  de  celles-ci ,  dilent  les  Anciens  eux-mêmes  ,  ne 
méritoient  pas  le  nom  d'énieraudes  ,  &  n'étoient,  iuivant  i'expreiîion  de 
Théophralle  ,  que  de  faufTes  émeraudes,  pfeudofmaragdi ,  n."'  45  &.  4^. 
On  les  trouvoit  communéjnent  dans  les  environs  des  mines  de  cuivre , 
circonftance  qui  peut  nous  les  faire  regarder  comme  des  Jîuors  verts, 
ou  peut-être  même  des  malachites. 


jio        Histoire  Naturelle 

nombre  de  pierres  auxcjiielles  les  Anciens  donnoient  le 
nom  générique  de  fmaragdcs ,  ils  avoient  néanmoins 
très-bien  fu  diftinguer  &  connoître  l'cmeraiide  véritable 
qu'ils  cara(5tcrirent,  à  ne  pas  ^'y  méprendre,  par  fa  couleur, 
fa  tranfparence  &  fon  éclat  (r) .  L'on  doit  en  efTct  ia 
fcparcr  &.  la  placer  à  une  grande  diftance  de  toutes  les 
autres  pierres  vertes,  telles  que  les  prafcs,  Jcs  fluors 
verts,  les  malacbites,  &  les  autres  pierres  vertes  opaques 
de  la  claffe  du  jafpe,  auxquelles  les  Anciens  appliquoicnt 
improprement  &  génériquement  le  nom  de  fmaragdes^ 

Ce  n'étoit  donc  pas  d'émcraudc,  mais  de  quelques- 
uns  de  ces  faux  &.  grands  fmarûgdes,  qu'étoient  faites 
les  colonnes  &  les  flatues  prétendues  d'émeraude  dont 
parle  l'Antiquité  (^f),  de  même  que  les  très  -  grands 
vafes  ou  morceaux  d'émeraudes  que  fon  montre  encore 
aujourd'hui  dans  quelques  endroits ,  tels  que  la  grande 
jatte  du   tréfbr    de   Gcnes   (t) ,  la   pierre   verte   pe/ànt 

(r)   Voyez  ThéophraQe  ,  n'  ^^;  &  Pline,  lïv.  XXXVII,  uf  i  6 . 

(f)  Telle  étoit  encore  la  rtatue  de  Minerve,  faite  d'c'meraiide , 
ouvrage  fameux  de  Dipœnus  &   Scyllis.   V.  Jun.  dt  Piél.  vet. 

( î)  M.  de  la  Condaniine  qui  s'eft  trouve  à  Gènes  avec  M."  les 
princes  Corfini,  peiiis-neveux  du  Pape  CJcnient  XII ,  a  eu  par  leur 
moyen  occafion  d'examiner  attentivement  ce  vafe  à  la  lueur  d'un 
flambeau.  La  couleur  lui  en  a  paru  d'un  vert  très-fbnce'  ;  il  n'y 
aperçut  pas  la  moindre  trace  de  ces  glaces,  pailles,  nuages  &  autres 
défauts  de  tranfparence  fi  communs  dans  les  émeraudes  &  dans  toutes 
les  jMerres  prc'cieufes  un  peu  groflcs,  même  dans  le  criftal  de  roche, 
iu^is  il  7  dirtingua  très-bien  plufieurs  petits  vides  femblables  à  des 


DES    Minéraux.         jh 

vingt-neuf  livres ,  donnée  par  Charlemagne ,  au  couvent 
de  Reichenau  près  Confiance  (^uj,  ne  font  que  des  primes 
ou  des  prafes ,  ou  même  des  verres  fadices  :  or  comme 
ces  émcraudes  fuppofées  ne  prouvent  rien  aujourd'iiui 
contre  l'exiflence  de  la  véritable  émeraude,  ces  mcmcs 
erreurs  dans  l'Antiquité  ne  prouvent  pas  davantage. 

D'après  tous  ces  faits,  comment  peut-on  douter  de 
l'exiflence  de  rémeraude  en  Italie,  en  Grèce  &  dans  les 
autres  parties  de  l'ancien  continent  avant  la  découverte 


buHes  d'ail-,  de  forme  ronde  ou  oblongue,  telles  qu'il  s'en  trouve 
'  communément  dans  les  criflaux  ou   verres  fondus ,  foit   bbncs ,  foit 
colorés 

Le  doute  de  M.  de  la  Condamine  fur  ce  vafe  foi-di(ant  d'cmeraude 
n'efl:  pas  nouveau.  II  eft  ,  dit-il,  clairement  indique  par  les  exprefîions 
qu'employoit  Guillaume ,  Archevêque  de  Tyr ,  il  y  a  quatre  ficelés, 
en  difant  qu'j  la  pr'ife  de  Céfarée ,  ce  vafe  échut  pour  une  grande 
fomme  d'argent  aux  Génois  ^uî  le  crurent  d' émeraude  &  qui  le  montrent 
encore  comme  tel  &  comme  miraculeux  aux  voyageurs.  Au  refte  ,  continue 
l'auteur  ,  il  ne  tient  qu'à  ceux  à  qui  ces  foupçons  peuvent  déplaire  , 
de  les  détruire  s'ils  ne  font  pas  fondés.  Alémoires  de  l'Académie 
des  Sciences ,   année   i yyj ,  pages  ^40   &  fuiv. 

(u)  On  me  montra  (  à  l'abbaye  de  Reicheneau  près  de  Confiance) 
une  prétendue  émeraude  d'une  prodigieufe  grandeur  ;  elle  a  quatre 
côtés  inégaux  dont  le  plus  petit  n'a  pas  moins  de  neuf  pouces  & 
dont  le  j)lus  long  a  près  de  deux  pieds ,  fon  épailTeur  efl:  d'un 
pouce,  &  fon  poids  de  vingt-neuf  livres.  Le  Supérieur  du  couvent 
J'eflime  cinquante  mille  florins;  mais  ce  prix  fe  réduiroit  à  bien  peu, 
fi  ,  comme  je  le  préfume  ,  cette  émeraude  n'étoit  autre  choie  qu'un 
fpath  fluor  tranfparent  d'un  alTez  beau  vert.  Lettres  de  AL  Vdliani 
Cûxe ,  fur  l'état  de  la  Suijfe ,  page  21» 


512       Histoire   Naturelle 

du   nouveau!    comment  d'ailleurs   fe   prêter  à  la    fup- 
pofition  forcée  que  la  Nature  ait  ré/èrvé  exclufivement 
à  l'Amérique  cette  produdtion  qui  peut  fe  trouver  dans 
tous  les  lieux  où  elle  a  formé  des  criflaux  !  &.  ne  devons- 
nous  pas  être  circonfpedls  lorfqu'il  s'agit  d'admettre  des 
faits  extraordinaires  &  ifolés  comme  le  feroit  celui-ci  î 
mais  indépendamment  de  la  multitude  des  témoignages 
anciens,  qui  prouvent  que  les  émeraudes  ctoient  connues 
&  communes  dans    l'ancien  continent  avant  la  décou- 
verte du  nouveau ,  on  fait  par  des  obfervations  récentes 
qu'il  fe    trouve    aujourd'hui    des    émeraudes   en  Alle- 
magne (xj j,  en  Angleterre,  en  Italie:  &  il  feroit  bien 
étrange  ,    quoiqu'en  difent  quelques   Voyageurs  ,    qu'il 
n'y  en  eût    point  en  Afie.  Tavernîer  &l  Chardin  ont 
çcrit  que  les    terres  de  l'Orient  ne  produifbient  poinc 
d'émeraudes,  &.  néanmoins  Chardin,  relateur  véridique, 
convient  qu'avant   la   découverte  du   nouveau   monde, 
les  Perfans  tiroient  des  émeraudes  de   l'Egypte ,  &  que 
leurs  anciens  Poètes  en  ont  fait  mention  (y) ;  que  de 

fon 

■^-^— ,  ■  I       .      .       I       I       ,     Il III  -Il  I  ■    I  -  I  in  ^  I  ■ 

( X )  II  eft  parlé  dans  quelques  Relations  d'une  taiïe  d'émeraude 
de  la  grandeur  d'une  tafl'e  ordinaire,  qui  efl:  confervt'e  à  Vienne 
dans  le  Cabinet  de  l'Empereur ,  &  que  des  morceaux  qu'on  4 
ménagés  en  creufaqt  cette  tafle,  on  en  a  fait  une  garniture  complète 
pour  l'Impératrice.  Voye-^  la  Relation  hijlorïque  du  voyage  en  Allemagne; 
Lyon,    I  6y6,  pages  ^   &  i  o. 

(y)  Sefi-couli-càn  ,  Gouverneur  d'Irivan  ,  m'apprit  que  dans  les 
Pûëtes  perfans,  les  émeraudes  de  vieille  roche  font  appelées  émeraides 

d'Egypte, 


DES   Minéral'  x.  5  \  3 


<$ 


fou  temps  on  connoifToit  en  Pcrfe,  trois  fortes  de  ce 
pierres;  favoir,  l'cmeraude  d'Egypte  qui  eft  la  plus 
belle,  cnfùite  les  émeraudes  vieilles  &  les  émeraudes 
nouvelles:  il  dit  même  avoir  vu  plufieurs  de  ces  pierres, 
mais  il  n'en  indique  pas  les  différences,  &  il  fè  con- 
tente d'ajouter  que  quoiqu'elles  foient  Ôlwwq  très-belle 
couleur  &  d'un  poli  s\î,  il  croit  en  avoir  vu  d'auïïî 
belles  qui  venoient  des  Indes  occidentales;  ceci  prou- 
veroit  ce  que  l'on  doit  prcllimer  avec  raifon,  c'ell  que 
i'émeraude  fè  trouve  dans  l'ancien  continent  auiTi-bicn 
que  dans  le  nouveau,  &  qu'elle  eft  de  même  nature  en 
tous  lieux;  mais  comme  l'on  n'en  connoît  plus  les  mines 
en  Egypte  ni  dans  l'hide,  &  que  néanmoins  il  y  avoir 
beaucoup  d'émeraudes  en  Orient  avant  la  découverte 
du  nouveau  monde,  ces  Voyageurs  ont  imaginé  que 
ces  anciennes  émeraudes  avoient  été  apportées  du  Pérou 
aux  Philippines ,  &  de  -  là  aux  Indes  orientales  &  en 
Egypte.  Selon  Tavernier,  les  anciens  Péruviens  en  fai- 
foient  commerce  (i,)  avec  les  habitans  des  îles  orientales 

d'Egypte  ,  &  qu'on  tient  qu'il  y  en  avoit  une  mine  en  Egypte , 
qui  eft  à  piélent  perdue.  Voyage  de  Chardin,  &£.  Londres,  i  Ij  S 6 , 
page  2  6 ^. 

(l^)  Pour  ce  qui  eft  enfin  de  I'émeraude ,  c'eft  une  erreur 
ancienne  de  bien  des  gens ,  de  croire  qu'elfe  (e  trouve  originai- 
rement dans  l'Orient  ,  parce  qu'avant  la  dccouvei-te  de  l'A- 
mérique l'on  n'en  pouvoit  autrement  juger;  &  même  encore 
aujourd'hui,  la  plupart  des  Joailliers  &  Orfèvres,  d'abord  qu'ifs 
voient    une   cmcraude    de   couIe.ur    haute    tirant   fur   le    noir ,    ont 

Miner  ans ,  Tome  IIL  T  1 1 


514         Histoire  Naturelle 

de  l'Afie;   &  Chardin,  en  adoptant  cette  opinion  (û) , 

accoutuirié  de  dire  que  c'eft  une  cmeraude  orientale  ;  je  crois  bien 
qu'avant  que  l'on  eût  découvert  cette  partie  du  monde  que  l'on 
appelle  vulgairement  les  Indes  occidentales,  les  émeraudes  s'apportoient 
d'Afie  en  Europe  ,  mais  elles  venoient  des  fources  du  royauuie 
du  Pérou;  car  les  Américains,  avant  que  nous  les  eufljons  connus, 
tralk[uoient  dans  les  îles  Philippines  où  ils  apporfoient  de  l'or  & 
de  l'argent ,  mais  j)lus  d'argent  que  d'or ,  vu  qu'il  y  a  plus  de 
profit  à  l'un  qu'à  l'autre  ,  à  caufe  de  la  quantité  de  mines  d'or  qui 
le  trouvent  dans  l'Orient:  aujourd'hui  encore  ce  mcme  iiégoce 
continue  ,  &  ceux  du  Pérou  pafl'ent  tous  les  ans  aux  Philippines 
i\ec  deux  ou  trois  vaifleaux  où  ils  ne  portent  que  de  l'argent  <3c 
quelcjue  peu  d'émeraudes  brutes  ,  &  même  depuis  quelques  années 
ils  cefl'ent  d'y  porter  des  émeraudes  ,  les  envoyant  toutes  en  Europe 
par  la  mer  du  nord.  L'an  1660  je  les  ai  vu  donner  à  vingt  pour 
cent  meilleur  marché  c[u'elles  ne  vaudraient  en  France.  Ces  Amé- 
ricains étant  arrivés  aux  Philippines,  ceux  de  Bengale,  d'Aracan, 
de  Pégu  ,  de  Goa  &  d'autres  lieux  y  portent  toutes  fortes  de  toiles 
&  quantité  de  pierres  en  œuvre,  comme  diamans,  rubis,  avec  plufieurs 
ouvrages  d'or  ,  étoffes  de  foie  &  tapis  de  Perfe;  mais  il  faut  remarquer 
qu'ils  ne  peuvent  rien  vendre  diredement  à  ceux  du  Pérou  ,  mais 
à  ceux  qui  réfident  aux  ManiUes  ,  &  ceux-ci  les  revendent  aux 
Américains  ;  «Se  même  fi  quelqu'un  obtenoit  la  permiffion  de  retourner 
de  Goa  en  Efpagne  par  la  mer  du  fud  ,  il  feroit  obligé  de  donner 
fon  argent  à  quatre-vingts  ou  cent  pour  cent  jufqu'aux  Philippines, 
fans  pouvoir  rien  acheter  ,  &  d'en  faire  de  mêm.e  des  Philippines 
jufqu'à  la  nouvelle  Efpagne,  C'eft  donc -là  ce  qui  fe  pratiquoit 
pour  les  émeraudes  avant  que  les  Indes  occidentales  fulTent  décou- 
vertes ;  car  elles  ne  venoient  en  Europe  que  par  cette  longue  voie 
&  ce  grand  tour  ;  tout  ce  qui  n'étoit  pas  beau  demeuroit  en  ce 
pays-là,  &  tout  ce  qui  étoit  beau  pafToit  en  Europe.  Les fix  Voyages 
de  Tavernier ,  à'c.  Rouen,  lyj^  ,  tome  IV ,  pages  42  &  fuiv. 
(a)  Les  Perfans  font  luie  dillinâion  emre  Iq^  émeraudes  cojnmc 


DES    Minéraux,  j  i  j 

dit  que  les  cmcraiidcs  qui,  de  fou  temps  Te  trouvoiciu 
aux  Indes  orientales,  en  Perfe  &  en  Egypte,  venoient 
probablement  de  ce  commerce  des  Péruviens  qui  avoient 
travcrré  ia  mer  du  Çud  long-temps  avant  que  les  E/j)a- 
gnols  euflent  fait  la  conquête  de  leur  pays  ;  mais  ctoit-il 
liécefTairc  de  recourir  à  une  fuppofition  au/Ti  peu  fondée 
pour  expliquer  pourquoi  l'on  a  cru  ne  voir  aux  Indes 
orientales,  en  t^gyinc  <5c  en  Per/c ,  que  des,  émcraudes 
des  Indes  occidentales  !  La  raifon  en  cil  bien  fnnple  ; 
c'efl  que  les  émeraudes  font  les  mêmes  par-tout,  &  que 
comme   les  anciens  Péruviens  en  avoient   ramaffé  unç 


nous  faifons  entre  les  rubis;  ils  appellent  la  plus  belle  émeraude 
d'Egypie  ,  la  (oiie  fuivante  éincraude  vieille  ,  &i  la  troificme  forte 
émeraude  nouvelle.  Avant  la  découverte  du  nouveau  iHonde  ,  les 
émcraudes  leur  venoient  d'Egypte,  plus  hautes  en  couleur,  à  ce 
qu'ils  prctendcnt,  ik  plus  dures  que  les  cmeraudes  d'occident.  \h 
m'ont  fciit  voir  plulieurs  fois  de  ces  cmeraudes  qu'ils  appellent 
:^enorûitd  Afefri  ou  de  JlTifrdino  Tancien  nom  d'Egypte ,  &  aufft 
"^enoroud  afvaric  d'afvan  ville  de  la  Thébaïde ,  nommée  Sycne  par 
les  anciens  Géogr,iphes  ;  mais  quoiqu'elles  me  jiarulfent  très-belles , 
d'un  vert  foncé  ik  d'un  polt:nent  fort  vif,  il  me  fembloic  que  j'en 
avois  vu  d'aufii  belles  des  Indes  occidentales.  Pour  ce  qui  eft  do 
la  dureté  ,  je  n'ai  jamais  eu  le  moyen  de  l'éprouver ,  <Sc  comme 
il  eft  certain  qu'on  n'entend  point  parler  depuis  long-temps  des 
mines  d'émeraude  en  Egypte  ,  il  pourroit  être  que  les  xfmeraudes 
d'Egypte  y  étoicnt  apportées  ])ar  le  canal  de  la  mer  rouge,  &  venoieiu 
ou  des  Indes  occidentales  par  \es  Philippines,  ou  du  royaume  du 
Pégu  ou  de  celui  de  Golconde  fur  la  côte  de  Coromandel  ,  d'où 
l'on  tire  journellement  à^s  émeraudes.  Voyage  de  Chardin;  AmJIerdam , 
f  yi  1  i  towe  II ,  page   2y. 

Ttt  ij 


5i6        Histoire    N  atv  re  lle 

trcs-granJe  qiian:itc,  les  E/pagnols  en  ont  tant  apporté 
aux  Incies  orientales,  cîu*eHes  ont  fait  difparoître  Je  nom 
^  l'origine  de  celles  qui  s'y  trouvoicnt  auparavant,  & 
que  par  leur  entière  &  parfaite  rcffemhlance,  ces  éme- 
raudcs  de  l'Afie,  ont  été  &  font  encore  aujourd'hui 
confondues  avec  les   émeraudcs  de  l'Amérique. 

Cette  opinion  que  nous  réfutons,  paroît  n'être  que 
le  produit  d'une  erreur  de  nomenclature  ;  les  Natura- 
liftes  récens  ont  donné  avec  les  Joailliers,  la  dénomi- 
nation de  pierres  orientales  à  celles  qui  ont  une  belle 
tranfj^arence ,  &.  qui  en  même  temps  font  aftez  dures 
pour  recevoir  un  poli  vif;  &  ils  appellent  ^/V/r^j  occi- 
dentales  (b) ,  celles  qu'ils  croient  être  du  même  genre, 
&  qui  ont  moins  d'éclat  &  de  dureté.  Et  comme 
l'émeraude  n'eft  pas  plus  dure  en  Orient  qu'en  Occident, 
ils  en  ont  conclu  qu'il  n'y  avoit  point  d'émeraudes 
orientales,  tandis  qu'ils  auroient  du  pcnfer  que  cette 
pierre  étant  par-tout  la  même,  comme  le  criftal,  l'amé- 
thyfte  ,  &c.  elle  ne  pouvoit  pas  être  reconnue  ni 
dénommée  par  la  différence  de  fon  éclat  &  de  fa 
dureté. 


(h)  Boëce  paroît  être  l'auteur  de  la  diftinction  des  emeraudes  en 
orientales  &  occidentales:  il  caraderife  les  premières  par  leur  grand 
brillant,  leur  pureté  &  leur  excès  de  dureté.  II  fe  trompe  quant 
à  ce  dernier  point ,  &  de  Laét  s'eft  de  même  trompé  d'après 
lui ,  car  on  ne  trouve  pas  entre  les  emeraudes  cette  différence  de 
dureté ,  &  toutes  n'ont  à  peu-près  que  la  dureté  du  criftal  de  roche. 


<c 


et 


ce 


ce 


ce 


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ce 


DES    Minéraux,  517 

Les  cmeraiides  étoicnt  feulement  plus  rares  &  plus 
chères  avant  la  découverte  de  l'Amérique;  mais  leur 
valeur  a  diminué  en  même  raifon  que  leur  quantité  s'efl 
augmentée.  «  Les  lieux,  dit  Jofeph  Acofta,  où  l'on  a 
trouvé  beaucoup  d'émeraudes ,  &  où  l'on  en  trouvoit  « 
encore  de  Ton  temps  en  plus  grande  quantité,  font  au 
nouveau  royaume  de  Grenade  &  au  Pérou  ;  proche  de 
Manta  &  de  Porto-vieil ,  il  y  a  un  terrein  qu'on  ap])elle 
terres  des  émeraudes ,  mais  on  n'a  point  encore  fait  la 
conquête  de  cette  terre.  Les  émeraudes  naiffent  des 
pierres  en  forme  de  criflaux  ....  j'en  ai  vu  quelques-  ce 
unes  qui  étoient  moine  blanches  &  moitié  vertes,  &  d'autres 
tontes  blanches .  .  .  .  En  l'année  ijSy,  ajoute  cet  Hiflo- 
rien  ,  l'on  apporta  des  Indes  occidentales  en  EfjDagiae,  « 
deux  canons  d'émeraude,  dont  chacun  pefoit  pour  le  « 
moins  quatre  arobes  (c).  »  Mais  je  foupçonne  avec 
raifon  que  ce  dernier  fait  efl  exagéré  ;  car  Garcilaffo 
dit  que  la  plus  groffe  pierre  de  cette  efJDèce,  que  les 
Péruviens  adoroient  comme  la  Déeffe-mère  des  éme- 
raudes, n'étoit  que  de  la  groffeur  d'un  œuf  d'autruche, 
c'eft  -  à  -  dire ,  d'environ  fix  pouces  fur  fon  grand 
diamètre  (d) :  &.  cette  pierre-mère  des  émeraudes  n'étoit 

(c)  Hiftoire  Naturelle  des  Indes,  par  Acofta;  Paris ,  i6  oo  , 
page    j  j  7  &  fuiv, 

/d)  Hiftoire  des  Incas ,  tome  I.  —  Du  temps  des  Rois  Incas, 
011  ne  trouvoit  dans  le  Pérou  que  des  turquoifes ,  des  émeraudes 
&  du  criftal  fort  net,  mais  que  les  Indiens  ne  favoient  pas  niettrs 


5i8  Histoire  Naturelle 

peut  -  ctre  el!e  -  même  qu'une  prime  crcmerauJc  qui, 
comm.e  la  prime  cl'améth)  fie ,  n'cft  qu'une  concrétion 
plus  ou  moins  confufe  de  divers  petits  canons  ou  criflaux 
de  ces  pierres.  Au  refte,  les  primes  d'émeraude  foiu 
communément  fort  nuageufes,  &.  leur  couleur  n'eft  pas 
d'un  vert  pur ,  mais  mélangée  de  nuances  jaunâtres  : 
quelquefois  néanmoins  cette  couleur  verte  efl  auiTi 
franclîc  dans  quelques  endroits  de  ces  primes  que  dans 
l'émcraude  même ,  &  Boëcc  remarque  fort  bien  que  dans 

en  œuvre.  Les  eineiaudes  viennent  dans  les  mojuagnes  qu'on  appelle 
A'innta  ,  dépendantes  de  Puerto  -  V'iejo,  II  a  été  impoflible  aux 
Efpagnois  ,  quelque  peine  qu'ils  fe  foient  données  ,  de  découvrir 
là  mine;  ainfi  l'on  ne  trouve  prefque  plus  d'émeraudes  dans  cette 
province  qui  fourniflbit  autrefois  Jes  plus  belles  Je  cet  empire.  On. 
en  a  apporte  cependant  une  fi  grande  quantité  en  Efpagne,  qu'on 
ne  les  eftime  plus.  L'émeraude  a  befoin  de  fe  mûrir  comme  le 
fruit;  elle  commence  par  être  blanche,  enfuite  elle  devient  d'un  vert- 
obfcur,  &  commence  })ar  fe  rendre  parfaite  par  un  de  fes  angles 
qui  fans  doute  regarde  le  foleii  levant ,  &  cette  belle  coulçm  Ce 
répand  enfuite  par  toute  fon  étendue.  J'en  ai  vu  autrefois  dans 
Cufco  d'auHî  groOes  que  de  petites  noix  ,  parfaitement  rondes  ôc 
percées  dans  le  milieu  ;  les  Indiens  les  préféroient  aux  turquoifes. 
Ils  coano'iiCoïem  les  perles,  mais  ils  n'en  faifoient  aucun  ufage ,  car 
les  Incas  ayant  vu  la  peine  «5c  le  danger  avec  lefquels  on  les  tiroit 
de  la  mer  ,  en  défendirent  l'ufage  ,  aimant  mieux  conferver  leurs 
fujets  qu'augmenter  leurs  richeflès.  On  en  a  pêche  une  fi  grande 
quantité  qu'elles  font  devenues  conununes.  Le  P.  Acofla  dit  qu'elles 
étoient  autrefois  fi  recommandables  qu'il  n'étoit  permis  qu'aux  "Roï^ 
&  à  leur  famille  d'en  porter,  mais  qu'elles  font  aujourd'hui  fi 
communes  que  les  Nègres  en  ont  des  chaînes  &  des  colliers.  HiJIoirç 
fffs  Incas  ;  Paris ,   1 7^^ ,   tome  II ,  pages  2S  ^  à"  fuiv. 


DES    Minéraux.  519 

un  morceau  de  prime  nébuleux  &  fans  éclat  (e) ,  il  fe 
trouve  fouvent  quelque  partie  brillante,  qui  étant  enlevée 
&  taillée  ,  donne  une  vraie  &  belle  émeraude. 

II  fèroit  afTez  naturel  de  pcnfer  que  la  belle  couleur 
verte  de  l'émeraude  lui  a  été  donnée  par  le  cuivre  ; 
cependant  M.  Demeftc  dit  (f):  «  Que  cette  pierre 
paroît  devoir  fa  couleur  verte  au  cobalt,  parce  qu'en 
fondant  des  émeraudes  du  Pérou  avec  deux  parties  de 
verre  de  borax,  on  obtient  un  émail  bleu  ».  Si  ce  fait 
fe  trouve  confiant  &  général  pour  toutes  les  émeraudes, 
on  lui  fera  redevable  de  Tavoir  obfervé  le  premier,  & 
dans  ce  cas  on  devroit  chercher,  &  on  pourroit  trotiver 
des  émeraudes  dans  le  voifmage  des  mines  de  cobalt. 

Cependant  cet  émail  bleu  que  donne  l'émeraude 
fondue  avec  le  borax,  ne  provient  pas  de  l'émeraude 
feule;  car  les  émeraudes  qu'on  a  expofées  au  miroir 
ardent  ou  au  feu  violent  de  nos  fourneaux  (g) ,  com- 
mencent par  y  perdre  leur  couleur  verte;  elles  deviennent 
friables,  &  finirent  par  fe  fondre  fans  addition  d'aucun 


c< 


(C 


(e)  II  dit  de  prafe  ,  mais  il  efl:  clair  que  fa  prafe  eft   la  prime  : 

Prafius mater  fmaragdï  muliis putatur  &  non  ïmnuritb ,  quod  altqvandb 

m  eâ   repenatur  et'iamfi  non  feniper  ;  vam  qnœ  partes  viriJiores  nhfgue 

fûvedine    &  perfpicuœ    in   prafio    reperiuntur ,  fmaragdi   rite   appellari 
pûjfunt ,   ut  illi  quorum  jia\edo  aurea  ejl ,  chryfoprafii,  Geimn.   &  fapid. 
hill.   pag.   2,3. 

(f)  Lettres  de  M.   Demefte  ,  tome   I ,  page   426, 

(ë)  '^oyez  l'article  des  Pierres  préçieufss  dans  l'Encyclopédie. 


520        Histoire  Naturelle 

fondant ,  &.  fans  prendre  une  couieur  bleue  ;  ainfi  l'éma 
bleu,  produit  par  la  fufion  de  i'émeraude  au  moyen  du 
borax,  provient  peut-être  moins  de  cette  pierre  que  du 
borax  même  qui,  comme  je  l'ai  dit,  contient  une  bafè 
métallique:  &l  ce  que  cette  fufibilité  de  Têmeraude  nous 
indique  de  plus  réel,  c'cft  que  fa  fubftance  quartzeufe 
efl  mêlée  d'une  certaine  quantité  de  {c\\oy\,  qui  la  rend 
plus  fufible  que   celle  du  criflal  de  roche  pur. 

La  pierre  à  laquelle  on  a  donne  le  nom  A'émerauJe 
duBrefd,  prcfente  beaucoup  plus  de  rapport  que  I'éme- 
raude ordinaire  avec  les  fchorls  ;  elle  leur  refTemblc 
par  la  forme ,  &  fe  rapproche  de  la  tourmaline  par  Tes 
propriétés  éle6triques  ffi);  elle  efl  plus  pefànte  <Sc  d'uu 
vert  plus  obfcur  que  I'émeraude  du  Pérou  ^ij ;  ià  couleur 
efl  à  peu-près  la  même  que  celle  de  notre  verre  à  bou- 
teilles, fes  criflaux  font  fortement  flriés  ou  canelés  dans 
leur  longueur,  &  ils  ont  encore  un  autre  rapport  avec  les 
criftaux  du  fchorl  par  la  pyramide  à  trois  faces  qui  les 
termine;  ils  croiffent,  comme  tous  les  autres  criflaux, 
contre  les  parois  &  dans  les  fentes  des  rochers  vitreux; 
on  ne  peut  donc  pas  douter  que  cette  émeraude  du 
Brefd  ne  foit,  comme  les  autres  émeraudes,  une  ftalac- 
tite  vitreufe ,  teinte  d'une  fubflance  métallique ,  &.  mêlée 

(II)  Voyez  la  Lettre    de  M.    Demefte ,   tome   1 ,  page  42-/. 

(i)    La    pefanteur    fpécifîque    de    I'émeraude    du  Brefil    eft    de 
31  ^j;,  &  ceiie  de   fetnerau^ie  du  Pérou  n'eil  que  de  27755. 

d'une 


DES    Minéraux,  521 

d'une  grande  quantité  de  fchorl  qui  aura  confidérabfe- 
ment  augmente  fa  pefànteur;  car  la  denfité  du  fcliorl 
vert  efl  plus  grande  que  celle  de  cette  émerautle  {l:J; 
ainfi  c*efl  au  mélange  de  ce  fchorl  vert  qu'elle  doit 
fà  couleur,  fbn  poids   &  fa  forme. 

L'émeraude  du  Pérou ,  qui  efl  l'émcraude  de  tout 
pays ,  n'efl  qu'un  criftal  teint  &:  mêlé  d'une  petite 
quantité  de  fchorl  qui  fuffit  pour  la  rendre  moins 
rcfractaire  que  le  criflal  de  roche  à  nos  feux;  il  faudroit 
eiïayer  fi  i'émeraude  du  Brefil,  qui  contient  une  plus 
grande  quantité  de  fchorl,  <Sl  qui  en  a  pris  fon  plus 
grand  poids  &  emprunté  fa  figuration ,  ne  fe  fondroit  pas 
encore  plus  facilement  que  I'émeraude  commune. 

Les  émeraudes,  ainfi  que  les  améthifles  violettes  ou 
pourprées,  les  crillaux-topazes ,  \qs  chryfolites  dont  \c 
jaune  efl  mêlé  d'un  peu  de  vert,  les  aiguës  -  marines 
verdâtres  ou  bleuâtres,  le  faphir  d'eau  légèrement  teint 
de  bleu,  le  feld-fpath  de  Ruffie,  &:  toutes  les  autres 
pierres  tranfparentes  que  nous  avons  ci-devant  indiquées, 
ne  font  donc  que  des  criflaux  vitreux ,  teints  de  ces 
diverfes  couleurs  par  les  vapeurs  métalliques  qui  Ce  font 
rencontrées  dans  le  lieu  de  leur  formation,  &  qui  {c^ 
font  mêlées  avec  le  fuc  vitreux  qui  fait  le  fond  de 
leur  effence;  ce  ne  font  que  des  criflaux  colorés  dont 


(k)    La  pefànteur  fpécifique    du  fchorl   vert  efl:   de   34J25),   & 
celle  de  I'émeraude  du  BrefiI   de  315;;. 

Minéraux,  Tome  IIL  Uuu 


522        Histoire  Naturelle 

la  fiibflaiice,  à  l'exception  de  la  couleur,  efl  la  mcmc 
que  celle  du  criflal  de  roche  pur,  ou  de  ce  criflal  mêlé 
de  feld-fpath  &.  de  fchorl.  On  ne  doit  donc  pas  mettre 
ks  émeraudes  au  rang  des  pierres  précieufcs ,  qui  par 
la  denfitc,  la  dureté  &  rhomojnjcnéité ,  font  d'un  ordre 
fupérieur,  &  dont  nous  prouverons  que  l'origine  efl 
toute  différente  de  ccWc  des  émeraudes  &  de  toutes  les 
autres  pierres  tranfî^arentes ,  vitreufes  ou  calcaires. 


TA'  ii-O-a  ijt:~-j*l    i-^-M  ' 


DES    Minéraux.       523 


u  ■  ,-ii-«- ■  »  ■  n    ■■»       il  "  I  1  I    r'JTTT 


P  É  R  I  D  0  T. 

Il  en  cfl  du  PériJot  comme  Je  l'émeraucle  du  Brefil; 
il  tire  également  fon  origine  du  fchorl,  &  ia  même 
différence  de  denfitc  qui  fe  trouve  entre  l'cmeraude 
du  Brefd  &  les  autres  cmeraudes ,  fe  trouve  auffi  entre 
la  chryfblite  &.  le  péridot  ;  cependant  on  n'avoit  jufqu'ici 
diflingué  ces  deux  dernières  pierres  que  par  les  nuances 
des  couleurs  jaunes  &  vertes  dont  elles  font  toujours 
teintes.  Le  jaune  domine  fur  le  vert  dans  les  cîiryfolites  , 
&  le  vert  domine  fur  le  jaune  dans  les  pcridots ,  <Sc  ces 
deux  pierres  ofil-ent  toutes  les  nuances  de  couleurs 
entre  les  topazes,  qui  font  toujours  purement  jaunes  & 
ies  émeraudes  qui  font  purement  vertes.  Mais  les  chry- 
folites  difîèrent  des  péridots  par  le  cara6tère  elTentiel 
de  la  denfité  ;  le  pcridot  pèfe  fpécifiquement  beaucoup 
plus  (n) ;  Si.  il  paroît  par  le  rapport  des  peraïueurs 
refpedives,  que  la  chryfblite,  comme  nous  l'avonë  dit, 
eft  un  extrait  du  quartz ,  un  criftal  coloré  ,  &  que  les 
péridots,    dont  la    pefanteur  fpécifique  eft    bien    plus 


faj  La  pefanteur  fpccifique  de  la  chryfolite  du  BrefiI  efl:  de 
^6()z^  ,  &  celle  de  la  chryfolite  de  l'ancien  continent  efl:  de  2782  i  ; 
ce  qui  ne  s'éloigne  pas  beaucoup  de  fa  pefanteur  26548  du  criflal 
ôi.  de  celle  de  la  topaze  de  Bohème,  qui  efl  de  26541.  Voyei 
la  Table  de  M,   Bnjjon. 

U  u  u  ij 


524  Histoire  Natu relle 

grande  (  l) ) ,  ne  peuvent  provenir  que  des  fchorfs 
également  denfes.  On  doit  donc  croire  que  les  pcridots 
font  des  extraits  du  fchori ,  tandis  que  les  chr^foiites 
font  des  criftaux  du  quartz. 

Nous  connoiiïbns  deux  fortes  de  péridots,  l'un  qu'on 
nomme  ovicmal ,  &  dont  la  denfité  efl  confidcrablement 
plus  grande  que  celle  du  pérfdot  occidental  ;  mais  nous 
connoiiïons  auffi  des  fchorls  dont  les  denfitcs  font  dans 
le  même  rapport  ;  le  fchori  criflallifé  correfpond  au 
péridot  occidental ,  &  le  fchori  fpathiquc  au  péridot 
oriental ,  &  même  cette  denfitc  du  pcridot  oriental  n'ell 
pas  encore  au/fi  grande  que  celle  du  fchori  vert  (c) ; 
&  ce  qui  confirme  ici  mon  opinion,  c'efl  que  les  péri- 
dots  fe  criilallifent  en  prifmes  ftriés  comme  la  plupart 
des  fchorls;  j'ignore  à  la  vérité,  h  ces  pierres  font 
fufibles  comme  les  fchorls ,  mais  je  crois  pouvoir  le 
pré/limer,  &.  j'invite  les  Chimifles  à  nous  l'apprendre. 

M.  l'abbé  de  Rochon  qui  a  fait  un  grand  nombre 
d'expériences  fur  la  réfraélion  des  pierres  tranfparentes, 
m'a  afluré  que  le  péridot  donne  une  double  réfraélion 

beaucoup  plus  forte  que  celle  du  cridal  de  roche  ,  & 

- — 

(b)  La  pefanteur  fpécifique  du  péridot  occidental  efl  de  30^89  , 

&   celle   du  fchori  criAailifé  eft   de  30926.    Voye^la  Table  de  M. 
Brïjfon, 

(c)  La  pefanteur  fpécifique  du  péridot  oriental  efi  de  33548  , 
celle  du  fchori  fpathrque  ert  de  33852,  &  celle  du  fchori  olivâtre 
ou  vert  ea  de  y^yx^.   Ibidem. 


DES   Minéraux,  52 j 

moindre  que  celle  du  criftal  d'Iilande  ;  de  plus ,  le 
péridot  a,  comme  le  cridal  de  roche,  un  fens  dans 
lequel  il  n'y  a  point  de  double  rélraclion  :  &  pui/qu'il 
y  a  une  différence  encore  plus  grande  dans  les  deux 
réfradions  du  pcridot  que  dans  celles  du  criflal,  on 
doit  en  conclure  que  fà  fubflance  eft  compofée  de 
couches  alternatives  d'une  denfité  plus  différente  qu'elle 
ne  l'cH  dans  celles  qui  compofent  le  crifîal  de  roclie. 


SAPHIR   DU  BRESIL. 

Une  autre  pierre  tranfparente  qui,  comme  le  péridot 
ÔL  l'émeraude  duBrefd,  nous  paroît  provenir  du  fchorl, 
efl  celle  qu'on  a  nommée  Saphir  du  Brefil ^  &  qui  ne 
diffère  que  par  fà  couleur  bleue,  de  l'émeraude  du 
même  climat  ;  car  leur  dureté  <3c  leur  denfité  {owi  à 
très-peu-près  égales  (a) ,  &  on  les  rencontre  dans  les 
mêmes  lieux.  Ce  fapliir  du  Brefd  a  plus  de  couleur  & 
un  peu  plus  d'éclat  que  notre  faphir  d'eau,  &  leur 
denfité  refj)e6tive  eft  en  même  raifon  que  celle  du, 
fclîorl  au  quartz:  cç.'i^  deux  faphirs  font  des  extraits  ou 
flaladlites  de  ces  verres  primitifs,  &  ne  peuvent  ni  ne- 
doivent  être  comparés  au  vrai  fàphir  dont  la  denfité  efl 
d'un  quart  plus  grande,  &  dont  l'origine  efl  aufî]  très- 
différente. 


(a)  La  pefanteur  ipccifique  du  faphir  du  Brefil  eft  de  31307,  & 
celle  de  l'émeraude  du  Brefil  eft  de  3  1 5  j  ; .  Tables  de  M,  Brijfon, 


J26        Histoire   Natu relle 
ŒIL    DE    CHAT    NOIR 

OVi    NOIRÂTRE, 

]\  ous  avons  rapporte  au  feld-fpath  l'œil  de  cliat  gris, 
i'œil  de  cl\r.t  jaune  &  l'œil  de  chat  mordoré ,  parce  que 
kur  denfitc  eft  à  très-peu-prcs  la  même  que  celle  de  ce 
verre  primitif;  mais  la  pierre  à  laquelle  on  a  donné  Je 
nom  à' œil  de  chat  noirâtre  efl  beaucoup  plus  dcnlé  que 
les  trois  autres  :  fa  pefanteur  fpécifique  approche  de  celle 
du  fchorl  violet  duDauphiné  (a). 

Toutes  les  pierres  vitreufès  &  tranfparemes  dont  les 
pefanteurs  fpécifiques  fe  trouvent  entre  2^  &  28  mille, 
font  des  ftaladites  du  quartz  &  du  feld  -  fpaih  dcÇç^nek 
les  denrucs  font  auffi  comprifes  dans  les  mêmes  limites; 
&  toutes  les  pierres  vitreufes  &  tranfparentes  dont  les 
pefanteurs  fpécifiques  font  entre  30  &  35  miile,  doivent 
(è  rapporter  aux  fchorls  defquels  'es  denfités  font  aufli 
comprifes  entre  30  &.  35  mille,  relativement  au  poids 
çje  l'eau  fuppofce   10   mille   (b). 

Cette  manière  de  juger  de  la  nature  des  flalaélitcs 

^a)  La  pefanteur  fpécifique  du  fchorl  violet  de  Dauphiné  eft 
de  32956  ;  celle  4e  l'oeil -de -chat  noirâtre,  de  j^jpj.  Tables  de 
M'    Briffon. 

/hj  Les  pefanteurs  fp«cifiques  des  fchorls  font:  fchorl  criftalfifc, 
50926,  fchorl  violet  du  Dauphiné,  32956;  fchorl  fpathique  | 
2^852;  fchorl  vejî  on   olivâtre,   3452^.  Jbi<;lfm% 


DES   Minéraux.  527 

Criflallifées  &  de  les  clafTer  par  le  rapport  cfe  leur  denfité 
avec  celle  Jes  matières  primitives  dont  elles  tirent  Iclî 
origine,  me  paroît,  farts  comparaifon,  la  plus  diflinde 
&  la  plus  certaine  de  toutes  les  méthodes,  &  je  m'ctonne 
que  jufqu'ici  elle  n'ait  pas  été  raifie  par  les  Naturalifîes , 
car  la  denfitc  eft  le  caradère  le  plus  intime,  &  pour  ainfi 
<lire,  le  plus  fùbflantiel  que  puiffe  ofirir  la  matière; 
c'efl  celui  qui  tient  de  plus  près  à  Ton  eflence ,  &  duquel 
dérivent  le  plus  immédiatement  la  plupart  de  fes  pro- 
priétés fecondaires.  Ce  caradère  difiindif  de  la  denfité 
ou  pefanteur  fj:)écifique  cfl  fi  bien  établi  dans  les  métaux, 
qu'il  fert  à  reconnoître  les  proportions  de  leur  mélange 
jufque  dans  l'alliage  le  plus  intime  :  or  ce  principe  fi 
fur  à  l'égard  des  métaux,  parce  que  nous  avons  rendu 
par  notre  art  leur  fubflance  homogène,  peut  s'appliquer 
de  même  aux  pierres  criflallifées  qui  font  les  extraits 
les  plus  purs  &  les  plus  homogènes  des  matières  pri- 
mitives produites  par  la  Nature. 


528        Histoire  Naturelle 

B  É  R  I  L. 

I  j  A  couleur  du  pcriclor  efl  un  verc  mclé  de  jaune, 
celle  du  bcril  efl  un  vert  mêlé  de  bleu,  &  la  nature 
de  ces  deux  pierres  nous  paroît  être  la  même.  Les 
Lapidaires  ont  donné  au  Bcril  le  nom  (Y aiguë  -  vmr'me 
orientale,  &  cette  pierre  nous  a  été  afTez  bien  màxq^ét  par 
les  Anciens:  «  Le  béril ,  difent-ils,  vient  de  l'Inde,  & 
on  le  trouve  rarement  ailleurs  :  on  le  taille  en  hexaèdre 
&  à  plufîcurs  faces,  pour  donner  par  la  réflexion  de 
la  lumière  plus  de  vivacité  à  fa  couleur,  &  un  plus 
grand   jeu  à   fon  éclat ,   qui   fans  cela  eft  foible. 

On  diflingue  plufieurs  fortes  de  bérils  :  les  plus 
cflimés  font  ceux  dont  la  couleur  efl  d'un  vert  de  mer 
pur  ,  enfuite  ceux  qu'on  appelle  chryfobcrils ,  qui  font 
d'un  vert  un  peu  plus  pâle  avec  une  nuance  de  jaune- 
doré  ....  Les  défauts  ordinaires  à  ces  pierres  font  les 
filets  &  les  taches  :  la  plupart  ont  auffi  peu  d'éclat  ;  les 
Indiens  néanmoins  en  font  grand  cas  à  caufè  de  leur 
grandeur  (a)»  »  Il  n'efl  pas  rare  en  effet  de  trouver 
d'affez  grandes  pierres  de  cette  efj)cce,  &  on  les  diftin- 
guera  toujours  de  i'aigue-marine  qui  ne  leur  reffemble 
que  par  la  couleur ,  &  qui   en  diffère  beaucoup ,  tant 

(a)   Pline,  //>.  XXXVII ,  chap.  j. 

par 


DES    Minéraux, 


S^9 


par  la  dureté  que  par  la  dendté  (b).  Le  béril,  comme 
le  péridot ,  tire  Ton  origine  des  fchorls,  Si  l'aigue-marine 
proviem  du  quartz  ;  c'efl  ce  qui  met  cette  grande  diffé- 
rence entre  leurs  denfitcs ,  &  quoique  le  béril  ne  foit 
pas  d'une  grande  dureté,  il  eft  cependant  plus  dur  que 
l'aigue-marine,  &  il  a  par  confcquent  plus  d'éclat  & 
de  jeu,  fur-tout  à  ia  lumière  du  jour;  car  ces  deux  pierres 
font  fort  peu  d'effet  aux  lumières. 

(h)  Ija  pefanteur  fpécifique  du  béril  ou  aiguë  -  marine  orientale 
eft  de  3  54-89  j  tandis  que  celle  de  l'aigue-raarjne  occidentale  n'eft 
que  de  2722.9.   Tables  de   M.   Bnjfon. 


Minéraux ,  Tome  IIL 


Xx 


53 


Histoire  Natu rëlle 


TOPAZE  ET   RUBIS  DU  BRESIL. 

Il  fe  trouve  au  Brefii,  des  pierres  tranfj^arentes  d'un 
rouge-clair,  <Sc  d'autres  d'un  jaune  très-foncé,  auxquelles 
on  a  donné  les  noms  de  Ritùis  &.  Topaies,  quoiqu'elles 
ne  reflemblent  que  par  la  couleur  aux  rubis  &  topazes 
d'Orient,  car  leur  nature  &  leur  origine  font  toutes 
différentes  :  ces  pierres  du  Brefd  font  des  criflaux  vitreux 
provenant  du  fchorl  auquel  ils  reffemblent  par  leur  forme 
de  criflallifation  (a):  elles  fe  caffcnt  tranfverfalement 
comme  les  autres  fchorls,  leur  texture  eft  femblable, 
&  l'on  ne  peut  douter  qu'elles  ne  tirent  leur  origine 
de  ce  verre  primitif,  ])uifqu'elles  fe  trouvent,  comme 
les  autres  crillaux,  implantés  dans  les  rocbers  vitreux. 
Ces  topazes  &  rubis  du  Brefd  diffèrent  effentiellement 
des  vraies  topazes  &  des  vrais  rubis,  non  -  feulement  par 
ce  caraélère  extérieur  de  la  forme,  mais  encore  par  toutes 
les  propriétés  effentielles ,  la  denfité,  la  dureté,  l'homo- 
généité &  la  fufd^ilité.  La  pefanteur  Spécifique  de  ces 
pierres   du  Brefil  (h),   efl  fort  au-deffous  de  celle  de 

(a)  La  topaze  du  Brefil  eft  en  prifmes  ftries  ou  caneles  à 
l'extérieur  comme  ceux  de  lemeraude  du  même  pays,  &  ces  prilmes 
font  ordinairement  furmonte's  d'une  pyramide  à  l'extrémité  qui  pointe 
en  avant  au  foi  tir  du  rocher  auquel  leur  bafe  efl  adhérente;  cette 
flrudure  eft  conllante ,  mais  le  nombre  de  leurs  faces  latérales 
varie  prefque  autant   que  celles    des   autres    fchorls. 

(b)    La   pefanteur  fpécifique   du   rubis   d'orient  eft    de  42838, 


DES      AI  I  N   É   R  A   U  X.  531 

ces  pierres  d'Orient:  leur  dureté,  quoiqu'un  peu  plus 
grande  que  celle  du  criflai  de  roche ,  n'approche  pas 
de  celle  de  ces  pierres  prccieufes;  ceJles-ci  n'ont,  comme 
je  l'ai  dit,  qu'une  Imiple  Sl  forte  réfraction,  au  lieu 
que  ces  pierres  du  Bredl  donnent  une  double  &  plus 
foible  réfraélion  ;  enfin  elles  font  fiifibles  à  un  feu 
violent ,  tandis  que  le  diamant  &  les  vraies  pierres 
précieufes  font  combuflibîes ,  Si.  ne  fe  réduifcnt  point 
en  verre. 

La  couleur  des  topazes  du  Brefil  efl  d'un  jaune- 
foncé  mêlé  d'un  peu  de  rouge  :  ces  topazes  n'ont  ni 
l'éclat ,  ni  la  belle  couleur  d'or  de  la  vraie  topaze 
orientale;  elles  en  dilfèrent  aufli  beaucoup  par  toutes 
les  propriétés  efieniiellcs,  &  fe  rapprochent  en  tout  du 
péridot,  à  l'exception  de  la  couleur,  car  elles  n'ont 
pas  la  moindre  nuance  de  vert;  elles  font  exadement 
de  la  même  pcfanteur  fjoécifique  que  les  pierres  aux- 
quelles on  a  donné  le  nom  de  ri/I^is  du  Brefil  (c)  :  aulTi 
la  plupart  de  ces  prétendus  rubis  ne  font-ils  que  des 
topazes  chauffées  (d) ;  il  ne  faut   pour  leur  donner  la 

&  celle  du  rubis  du  Biefil  n'eft  que  de  35311-  La  pelanteur 
fpécifique  de  la  topaze  d'orient  efl  de  40106,  &  celle  de  la  topaze 
du    DrellI  n'efl  que  de   35365.    Tahks  de  M.   Bnjfun. 

(c)  La  pelanteur   fpccii^que  du  rubis  du  Brefil  efl  de  3531  i, 
&  celle   de  la  topaze  du  Brefil  ell  de   35365.  IJcm. 

(d)  On  fait  depuis  long-temps  que  les  pierres  prccieufes  orientales 
peuvent  foulTrir  une  très-forte  aâion  du  feu  fans  que  leur  couleur 

X  XX  ij 


53-        Histoire  Natv pelle 

couleur  du  rubis-balais ,  que  les  expofer  à  un  feu  aflez 
fort  pour  les  faire  rougir  par  degrés;  elles  y  deviennent 
couleur  de  rofe,  <Sc  même  pourprées;  mais  il  efl  très- 
aifé  de  diflinguer  les  rubis  naturels  &  fa6tices  du  Brefil 
des  vrais  rubis,  tant  par  leur  moindre  poids  que  par 
leur  fauffe  coideur,  leur  double  réfradion  &.  la  foiblefTe 
de  leur  éclat. 

Ce  cbangement  tie  jaune  en  rouge  efl  une  exaltation 
de  couleur  que  le  feu  produit  daiis  prefque  toutes  les 
pierres  teintes  d'un  jaime- foncé:  nous  avons  dit,  à 
l'article    des    marbres ,    qu'en    les    chauffant    fortement 

foit  altérée  ,  &  qu'au  contraire  les  occidentales  y  perdent  en  très- 
peu  de  temps  la  leur,  <Sc  deviennent  femblables  à  du  criftal  fi  elles 
font  traniparentes  ,  ou  d'un  blanc  mat  fj  elles  font  opaques  ;  mais 
on  ignoroit  que  la  topaze  du  Brefil  ne  pouvoit  être  comprime  dans 
aucun  de  ces  deux  genres  dont  nous  venons  de  parler  ;  elle  a  la 
fîngulière  propriété  de  quitter  au  feu  la  couleur  jaune  &  d'y  devenir 
d'une  couleur  de  rôle  feinblabJe  à  celui  du  rubis-balais ,  &  d'autant 
plus  vit  que  le  jaune  de  la  pierre  étoit  plus  fale  &  plus  foncé.  Le 
procédé  efl  des  plus  fimples  ;  il  ne  s'agit  que  de  placer  la  topaze  dans 
un  petit  creufet  rempli  de  cendres  ,  &  poufl'er  le  feu  par  degrés 
jufqu'à  faire  rougir  le  creufet ,  &  après  l'avoir  entretenu  quelque 
temps  dans  cet  état ,  de  le  lai/fer  s'éteindre  ;  quand  le  tout  fera 
refroidi,  on  la  trouvera  convertie  en  un  véritable  rubis-balais;  nous 
difons  convertie  ,  car  il  n'eft  pas  poffible  d'apercevoir  la  moindre 
différence  entre  le  rubis  balais  -  naturel  &  ceux-ci.  C'eft  ce  qui 
avoit  porté  plufieurs  Joailliers  qui  favoient  ce  fecret ,  à  en  faire  un 
myftère,  &  c'efl:  à  M.  Dumelle,  Orfèvre,  qui  l'a  communiqué  à 
M.  Guettard,  que  l'Académie  en  doit  la  connoiffance.  Hijloirc  de 
l'Académie  des   Sciences,  année   ly^y  ,  page  ^ z. 


DES      AI  I   N  É   R   A   U    X.  533 

lorfqu'on  les  polit  on  fait  changer  toutes  leurs  taches 
jaunes  en  un  rouge  plus  ou  moins  clair.  La  tonaze 
tlu  Brefil  offre  ce  même  changement  Ju  jaime  en 
rouge,  ÔL  M.  de  Fontanicu,  l'un  Je  nos  Académi- 
ciens ,  obferve  qu'on  connoit  en  Bohème,  im  verre 
fufible  d'un  jaune  à  peu-près  fcmblable  à  celui  de  la 
topaze  du  Brehl,  qui  lorfqu'on  le  fait  chauffer,  prend 
une  couleur  rouge  plus  ou  moins  foncée ,  félon  le 
degré  de  feu  qu'on  lui  fait  fubir  fej.  Au  refle,  la  topaze 
du  Brefd  ,  foit  qu'elle  ait  confcrvé  fa  couleur  jaune 
naturelle  ,  ou  qu'elle  foit  devenue  rouge  par  l'adion 
du  feu ,  fe  diflingue  toujours  aifément  de  la  vraie  topaze 
&  du  rubis-balais,  par  les  caradères  que  nous  venons 
d'indiquer:  nous  fommes  donc  bien  fondes  à  les  féparer 
des  vraies  pierres  prccieufcs ,  &  à  les  mettre  au  nombre 
des  flalaélites  du  fchorl  ,  d'autant  que  leur  dcnfité 
les  en  rapproche  plus  que  d'aucun  autre  verre  pri- 
mitif (y). 

Je  préfume,  avec  l'un  de  nos  plus  favans  Chimiftes, 
M.  Sage ,  que  le  rubis  fur  lequel  on  a  fait  à  Florence 
des  expériences  au  miroir  ardent,  n'étoit  qu'un  rubis 
du  Brefd,  puifqu'il  eft  entré  en  Rifion ,  &  s'eft  ramolli 
au    point  de  recevoir  fur    fa  furface    l'imprelfion  d'un 


fej  Art  d'imiter  les  pierres  precieufes;  Pans,   jyyS ,  page  28 r 
(f)    La   pefanteur    ipccifique    du  fchorl   vert   ou   olivâtre  ell  de 
34529,  &.  celle  du  rubis    du   BrefiI  de  3  53  11» 


534        Histoire  Naturelle 

cachet,  &  qu'en  même  temps  fa  fubftance  fondue  aJhc- 
roit  aux  parois  du  creufet  :  cette  fufibiiité  provient  du 
fchorl  qui  conftitue  l'effence  de  toutes  ces  pierres  du 
Brefil  (^) ;  je  dis  de  toutes  ces  pierres ,  parce  qu'indé- 


( g)  C'efl  auiïi  le  fentiment  d'un  de  nos  meilleurs  obfervateurs 
(  M.  Rome  de  Lide  ,  dont  l'Ouvrage  vient  de  me  tomber  entre  les 
mains).  Les  topazes  brutes,  dit  -  il  ,  qui  nous  arrivent  du  Brefil, 
ne  confervent  ordinairement  qu'une  feule  de  leurs  pyramides  , 
l'autre  extrémité  efl  ordinairement  terminée  par  une  furface  plane 
rhomboïdale  qui  elT:  l'endroit  de  la  caiïure  qui  fe  fait  aifément  & 
tranfverfalement.  On  y  dillingue  facilement  le  tifiu  lamelieux  de  ces 
criflaux.  La  pofition  de  leurs  lames  eft  perpendiculaire  à  l'axe  du 
prifme  «Se  conféquemment  dans  une  direction  contraire  aux  flries  de 
la  furface  qui  font  toujours  parallèles  à  l'axe  de  ce  même  prifme. 
Souvent  les  deux  pyramides  manquent ,  mais  c'eil  toujours  par  des 
ruptures  accidentelles.  L'extérieur  de  ces  criltaux  préfente  des  cane- 
îures  parallèles  à  l'axe. 

La  topaze,  le  rubis  &  le  faphir  du  Brefil  ont  beaucoup  de  rapport 
avec  les  Ichorls  &  les  tourmalines  parleur  contexture,  leur  canelure, 
&  par  la  variation  dans  les  plans  du  prifine  &  des  pyramides ,  qui 
rend  fouvent   leur   criflallifation  indéterminée. 

La  topaze  du  Brefil  a  rarement  Ja  belle  couleur  joncjuille  de  la 
topaze  d'orient ,  mais  elle  eft  fouvent  d'un  jaune  pâle  &  même 
entièrement  blanche. 

Celle  dont  la  couleur  irès-foncce  tire  fur  i'hyacinte  ed  la  plus 
propre  à  convertir  par  le  feu  en  rubis  du  Brefil ,  mais  il  y  a 
auffi  des  rubis  du  Brefil  naturels  ,  fouvent  avec  une  légère  teinte 
de   jaune  ,    cjue   les    Portugais  appellent  topazes  rouges. 

Les  plus  beaux  lont  d'un  rouge  clair  ou  de  la  teinte  que  \\n\ 
défigne  par  le  nom  de  balais.  Ceux  qu'on  fait  en  expofant  au  feu 


DES    Minéraux.  53^ 

pendammcnt  des  émeraudes ,  faphirs ,  rubis  Si  topazes 
dont  nous  venons  de  parler,  il  fe  trouve  encore  au 
Brefil ,  des  pierres  blanches  tranlparentes  qui  font  de 
la  même  eiïence  que  les  rouges,  les  jaunes,  les  bleues 
Si  les   vertes. 


la  topaze  du  BrefiI  enfunice ,  font  d'un  rouge  violet  plus  ou  moin» 
fonce. 

Quant  aux  faphirs  du  BrefiI  ,  il  s'en  trouve  depuis  fe  Lieu 
foncé   de    l'indigo    jufqu'au    blanc-bleuâtre. 

Le  tiiïii  feuilleté  de  ces  gemmes  fait  qu'on  les  taille  aufll  quel- 
quefois de  manière  à  produire  cette  réfradion  de  la  lumière  qui 
caradérife  les  pierres  chatoyantes.  De-Ià  le  rubis  chatoyant ,  le  iàphir 
œil  de  chat  &.  les  chatoyantes  jaunes,  vertes,  brunes,  &c.  du  Brefil 
&  autres  lieux.  Crîjlallographie  par  M,  Rome  de  Lijle  y  tome  II  y 
pages  2  ^  ^   &  fuiv. 


5^ 


Histoire  Naturelle 


TOPAZE    DE    SAXE. 

i_jA  Topaze  de  Saxe  cfl  encore,  comme  ceiie  Ju 
Bref  il ,  une  pierre  vitreufe  que  l'on  doit  rapporter  au 
fchori ,  parce  qu'elle  ell  d'une  den(\tc  beaucoup  plus 
grande  que  la  topaze  de  Bohème  faj  &l  autres  cridaux 
quartzeux  avec  lefquels  il  ne  faut  pas  la  confondre.  La 
topaze  de  Saxe  &l  celle  du  Brefd  font  à  très-peu-près 
de  la  même  pefantcur  fpécilique  (b) ^  &  ne  diffèrent 
que  par  la  teinte  de  leur  couleur  jaune,  qui  efl  bien 
plus  légère ,  plus  nette  &  plus  claire  dans  la  topaze  de 
Saxe  ;  mais  dans  toutes  deux  la  denfité  excède  de  plus 
d'un  quart  celle  du  criflal  de  roche  &  du  criilal  jaime 
ou  topaze  de  Bohème  ;  ainfi  par  cette  première  pro- 
priété on  doit  les  rapporter  au  fchori ,  qui  des  cinq 
verres  primitifs  cfl  le  plus  denfe:  d'ailleurs,  la  topaze 
de  Saxe  fe  trouve  ,  comme  celle  du  Brefd ,  implantée 
dans    les    rochers    vitreux    (cj,    &   toutes   deux   font 

(û)  La  pefanteur  fpécifique  de  la  topaze  de  Saxe  eft  de  35640, 
tandis  que   celle  de  la  topaze   de  Bohème  n'eft  que  de  2(^541. 

(bj    La    pefanteur    fpécifique   de    la    topaze    du    Brefil    eft   de 

(c)  Le  fameux  rocher  de  SchneckenJIe'm  d'où  l'on  tire  les  topazes 
de  Saxe,  eft  fitué  près  de  la  vallée  de  Dannebers  à  deux  milles 
d'Amerbach  dans  le  Voigtland.  Crijlallographie  de  M.  Rome  de  Life, 
tome  H ,  page   2  6 ^ . 

fufibles , 


DES    Ml  N  É  R  A  U  X.  <^^j 

fiifibles  (J),   comme  les   fchorls,  à  un  feu  violent. 

Les  topazes  de  Saxe  (e),  quoique  d'une  couleur 
moins  foncée  que  celles  du  Brefii,  ont  néanmoins  diffé- 
rentes teintes  de  jaune  (f).  Les  plus  belles  font  celles 
d'un  jaune  d'or  pur,  &  qui  reffemblent  par  cette  apca- 
rence  à  la  topaze  orientale ,  mais  elles  en  diffèrent  beau- 
coup  par   la  denfité   &  par   la    dureté  (gj  :  d'ailleurs, 

(dj  La  topaze  de  Saxe  ne  fe  trouve  guère  avec  fes  deux  pyramides , 
parce  qu'elle  efl  fouvent  implantc'e  dans  la  roche  quartzeule  où  elle 
a  pris  nai.Tance. . . .  On  ne  les  trouve  jamais  abfolument  libres  6c 
folitaires ,  elles  font  entourées  à  leur  bafe  &  quelquefois  même 
entièrement  couvertes  d'une  argile  ircs-fine,  blanche  ou  couleur 
d'ocre ,  &.  plus  pâle  en  quelques  endroits.  Elles  ont  un  tiflu  feuilleté 
&  fe  rompent  aifément.  Le  prifme  en  eft  quelquefois  comme  articulé 
ou  compofé  de  plufieurs  pièces  entées  l'une  fur  l'autre  ,  ainfi  qu'il  arrive 
à  la  chryfolite  du  Brefil.  Crijlallograph'ie ,  de  AI,  Rome  de  Life,  tome  II, 
page  z6j. 

(e )  «  La  topaze  de  Saxe  ,  dit  M.  Dutens ,  efl  jaunâtre  ,  très- 
tranfparente  ,  dure  &.  d'un  éclat  fort  vif;  mile  au  feu  elle  y  perd  ce 
fa  couleur  «Se  refle  blanche  &  claire. . . .  On  trouve  ces  topazes  « 
dans  le  quartz  ou  parmi  les  grès  crirtallifés  &  quelquefois  entourés  ce 
d'un  limon  jaune».  Page  ^ ^. 

(f)  La  topaze  de  Saxe  varie  beaucoup  dià.i\s  /es  nuances.  Celles 
dont  la  couleur  jaune  efh  mêlée  de  vert ,  prennent  le  nom  de 
chryfûlite  de  Saxe  ,  il  y  en  a  même  d'un  bleu  verdâire  ou  dont 
Ja  couleur  tire  fur  celle  de  l'aiguë  -  marine  ;  mais  leur  couleur  efl 
communément  jaunâtre  &  quelquefois  d'un  beau  jaune  d'or,  mais 
celles-ci  font  rares  ;  il  y  en  a  aufll  de  blanches  qui  ont  beaucoup 
d'éclat.  Idem  ,  page  26 S, 

(g)  La  pelanteur  fpécifique  de  la  topaze  orientale  efl  de  J^oioC ^ 
tandis  que  celle  de  la  topaze  de  Saxe  n'efl  que  de  35640. 

Minéraux,  Tome  IIL  Yyy 


53^  H  ISrO  I  RE       N  ATU  RE  LLE 

la  lumière,  en  traverfant  ces  topazes  de  Saxe,  fe  clivi/c 
&  foufire  une  double  réfraélion ,  au  lieu  que  cette 
réfradion  ell  fimple  dans  la  vraie  topaze,  qui  étant  & 
plus  dénie  &  plus  dure ,  a  aufTi  beaucoup  plus  d'éclat 
que  ces  topazes  de  Saxe,  dont  le  poli  n'efl  jamais  aufli 
vif  ni  la  réfraélion  au/Ti  forte  que  dans  la  topaze 
d'Orient. 

La  texture  de  la  topaze  de  Saxe  eft  lamelleu/è,  cette 
pierre  eft  compofée  de  lames  très-minces  &  très-ferrées , 
fa  forme  de  criftallifation  efl  différente  de  celle  du  crifbl 
de  roche  (hj ,  6l  fe  rapproche  de  celle  des  fchorls  ;  ainfi 
tout  nous  démontre  que  cette  pierre  ne  doit  point  être 
confondue  avec  la  topaze  de  Bohème,  &  les  autres 
criftaux  quartzeux  plus  ou  moins  colorés  de  jaune. 

Et  comme  la  denfité  de  cette  topaze  de  Saxe  efl  à 
très-peu-près  la  même  que  la  denfité  de  la  topaze  du 
Brefd,  on  pourroit  croire  qu'en  faifànt  chaufîer  avec 
précaution  cette  topaze  de  Saxe,  elle  prendroit,  comme 

la  topaze  du  Brefil,  une  couleur  rougeâtre  de  rubis  balais  ; 

»<  ■ 

f/ij  Cette  pierre  fe  trouve,  entre  autres  endroits,  dans  le  Voigtiand 
fur  le  Schneckenberg  près  de  la  colline  de  Tanmberg  à  deux  milles 
^ Averbach  où  on  ia  voit  en  aflez  grande  abondance  dans  les  crevaiïes 
d'un  roc  fort  dur ,  &  elle  s'y  trouve  mêlée  avec  une  efpèce  de 
marne  jaune   &  avec   du  criftal  de  montagne.    Quant  à  fa  texture 

intérieure,  elle  efl  compade,  mais  foliée Sa  figure  eft  prifmatique 

à  quatre    angles    inégaux  ;    elfe    eft    dure    &    a   beaucoup    d'éclat. 
Margraff,   Journal  de  P hyji que ,  fuppU ment  au  mois  d'Août  J782, 
fûges  j  0  I    ù"  fuiv. 


D  E  s    M  I  N  É  R  AU  X.  5  3  (^ 

mais  Texpérience  a  démenti  cette  préfomption  ;  la  topaze 
de  Saxe  perd  fa  couleur  au  feu ,  &  devient  tout-à-fait 
blanche  ,  ce  qui  vient  fans  doute  de  ce  qu'elle  n*efl 
teinte  que  d'un  jaune  très-léger  en  comparaifon  du  jaune 
foncé  &  rougeâtre  de  la  topaze  du  Brefd. 


GRENAT. 

V^uoiQUE  la  pefanteur  fpéeifique  du  Grenat  excède 
celle  du  diamant ,  &  foit  à  peu-près  la  même  que  celle 
du  rubis  &  de  la  topaze  d'Orient  fa),  on  ne  doit  ce- 
pendant pas  le  mettre  au  rang  de  ces  pierres  précieufes  ; 
s'il  leur  reffemble  par  la  denfité,  il  en  diffère  par  la 
dureté ,  par  l'éclat  &  par  d'autres  propriétés  encore  plus 
eflemielles  ;  d'ailleurs  l'origine,  la  formation  &  la  com- 
pofuion  des  grenats  font  très-différentes  de  celles  des 
vraies  pierres  précieufes  ;  la  fubflance  de  celles  -  ci  efl 
homogène  &l  pure,  elles  n'ont  qu'une  fimple  réfradion, 
au  lieu  que  la  fubflance  du  grenat  efl  impure,  com- 
pofée  de  parties  métalliques  &.  vitreufes ,  dont  le  mélange 
fè  manifefle  par  la  double  réfraélion  &  par  une  den- 
fité  plus  grande  que  celles  des  criftaux  &  même  des 
diamans.     Le    grenat   n'efl    réellement    qu'une    pierre 

(a)  Pefanteur  fpéeifique  du  grenat  41888,  du  grenat  Syrien 
40000,  du  rubis  d'Orient  42838,  de  la  topaze  d'Orient  401 06. 
Voyei  les  Tables  de    M.  Brijfon. 

Yyy  ij 


54Û  Histoire  Nature lle 

vitreiife  mêlce  de  métal  {h);  c'efl  du  fchorl  &  du 
fer,  Ta  couleur  rouge  &  fa  fufibilité  le  dcmontrcnt; 
il  faut  à  la^^vcrité  un  feu  violent  pour  le  fondre. 
M.  Pott  e(l  le  premier  qui  l'ait  londu  fans  intermède 
&  fans  addition;  il  fe  rcduii  en  un  émail  brun  & 
noirâtre. 

Le  grenat  a  d'ailleurs  beaucoup  de  propriétés  com- 
munes avec   les  fclîorls  de  féconde  formation  ;   il  ref- 
fèmblc  par  fa  compofition  aux  émeraudcs  &  faphirs  du 
Brefd  (cj j  il  efl,  comme  le  fchorl,  fufible  fans  addition; 
ie  grenat  &  la  plupart  des  fchorls  de  féconde  formation 
font  mêlés   de  fer,   <5c  tous  Jes  grenats  en  contiennent 
une  plus  grande  quantité  que  les  fchorls  ;  plufieurs  même 
agiffent  far  l'aiguille  aimantée  :   ce  1er  contenu  dans  les 
grenats  eft  donc  dans  fon  état  métallique ,    comme    le 
fable  ferrugineux  qui   a    confervé   fon    magnétifme,    & 
i*on    ne    peut   douter  que    leur    grande    pefanteur    ne 
provienne  &  ne  dépende  de  la  quantité  confidérable  de 

(b)  Certains  Chimiftes  ont  penfé  que  la  couleur  rouge  du  grenat 
venoit  de  l'or  &  de  l'ctain  ,  parce  que  l'on  contrefait  les  rubis  & 
les  grenats  au  moyen  d'un  précipité  d'or  par  l'étain  ;  mais  on  a 
démontré  depuis,  que  les  grenats  ne  contiennent  que  du  {et  Se 
point  du  tout  d'or  ni  d'ctain.  Voye-^  le  Diûionna'ire  de  Chimie  de 
AI.   Alûcquer ,    nrticle  Mines,  page   6^0, 

(c)  La  plupart  à^i  crillailifations  du  grenat  femblent  prouver  que 
{qs  molécules  (oi\t  rhomboïdales,  de  même  qiie  celles  des  fchorls  & 
des  pierres  prccieufes  du  lîréfil.   Lettres  de  AI,  Demcjle ,  tome  /, 


DES    Minéraux,  5^1 

fer  qui  efl  entre  clans  la  compofition  de  leur  fubftance. 
Les  diitérentes  nuances  de  leur  couleur  plus  ou  moins 
rouge,  &.  de  leur  opacité  plus  ou  moins  grande,  en 
dépendent  aufli  ;  car  leur  tranfparence  efl  d'autant  plus 
grande  qu'ils  contiennent  moins  de  fer ,  &  que  les 
particules  de  ce  métal  font  plus  atténuées  ;  le  grenat 
Syrien,  qui  efl  le  plus  tranfj^arent  de  tous,  efl  en  même 
temps  le  moins  pefant ,  &  néanmoins  la  quantité  de 
fer  qu'il  contient  efl  encore  affez  grande  pour  qu'il 
agiffe  fur  l'aiguille  aimantée. 

Les  grenats  ont  tant  de  rapports  avec  les  fclioris, 
qu'ils  paroiffent  avoir  été  produits  enfèmWe  &  dans 
les  mêmes  lieux  ;  car  on  y  trouve  également  des  maffes 
de  fchorl  parfemées  de  grenats ,  &  des  maffes  de  grenat 
parfemées  de  fchorl  fd):  leur  origine  &  leur  formation 
paroiffent  être  contemporaines  &  analogues  ;  ils  fe 
trouvent  dans  les  fentes  des  rochers  graniteux,  fchifleux, 
micacés  <Sc  ferrugineux,  en  forte  que  le  grenat  pourroit 
être  mis  au  nombre  des  vrais  fchorls,  s'il  ne  contenoit 
pas  une  plus  grande  quantité  de  fer  qui  augmente  fà 
denfité  de  plus  d'un  (ixième;  car  la  pefanteur  fpccihque  . 
du  fchorl  vert,  le  plus  pefant  de  tous  les  fchorls,  n'efl 


(d)  On  voit  entre  Faiflriiz  &  Cornowitz,  des  morceaux  défachés 
de  fchorl  vert  fpathique ,  cjui  renferment  de  grands  grenats  rouges; 
quelques-uns  de  ces  morceaux  de  fchorl  font  écailleux  &.  d'un  tiHli 
micacé.  Lettres  fur  la  Alinéralogie ,  par  AL  Ferber  j  à^c.  traduites 
par  M.   le   Baron  de   Diétriçh ,  pages  p    &    i  q. 


542         Histoire   Naturelle 

que  de  34529,  tandis  que  celle  du  grenat  Syrien,  Je 
moins  pefant  &  le  plus  pur  des  grenats,  efl:  de  40000. 
Les  grenats  les  plus  opaques  contiennent  jufqu'à  vingt- 
cinq  &  trente  livres  de  fer  par  quintal,  &  les  plus 
tranfparens  en  contiennent  huit  ou  dix ,  c'eft  -  à  -  dire , 
toujours  plus  que  les  fchorls  les  plus  opaques  &.  les 
plus  pcfans  :  cependant  il  y  a  des  grenats  qui  ne  font 
que  très-peu  ou  point  fenfibles  à  Taétion  de  J'aimant, 
ce  qui  prouve  que  le  fer  dont  ils  font  mélanges,  étoit 
réduit  en  rouille  ,  &  avoit  perdu  fon  magnétifme  lorf- 
qu'il  efl  entré  dans  leur  compofition. 

Ainfi  le  fer  donne  non-feulement  la  couleur,  mais 
la  pefanteur  aux  grenats  ;  on  pourroit  donc  les  regarder 
comme  des  ftaladites  de  ce  métal ,  &  nous  ne  Jes 
rapportons  ici  à  celles  du  fchorl  qu'à  caufe  des  autres 
propriétés  qui  leur  font  communes ,  &  des  circonflances 
de  leur  formation  qui  femblent  être  les  mêmes.  La  forme 
des  grenats  varie  prefque  autant  que  celle  des  fchorls 
de  féconde  formation  ;  leur  fuhflance  vitreufe  efl  tou- 
jours mêlée  d'une  certaine  quantité  de  particules  ferru- 
gineufes,  &  les  uns  &l  les  autres  font  attirables  à  l'aimant, 
iorfque  ces  particules  de  fer  font  dans  leur  état  de 
magnétifme. 

Les  grenats,  comme  les  fchorls  de  féconde  forma- 
tion, fe  préfentcnt  quelquefois  en  affez  gros  groupes, 
mais  plus  fouvent  en  criflaux  ifolés  &  logés  dans  les 
fentes  &.  cavités  des  rochers  vitreux,  dans   les  fchifles 


DES    Minéraux.  ^^^ 

micacés  &  dans  les  autres  concrétions  du  quartz,  du 
feld-fpatli  &  du  mica  ;  &  comme  ils  font  difféminés  en 
grand  nombre  dans  les  premières  couches  de  la  terre, 
on  les  retrouve  dans  les  laves  cSl  dans  les  déjedions 
volcaniques.  La  chaleur  de  la  lave  en  fufion  change 
leur  couleur  de  rouge  en  blanc,  mais  n'eft  pas  affez 
forte  pour  les  fondre,  ils  y  confervent  leur  forme  & 
perdent  feulement  avec  leur  couleur  une  grande  partie 
de  leur  poids  (c),  ils  font  au/fi  bien  plus  rcfradaircs 
au  feu  :  la  grande  chaleur  qu'ils  éprouvent  lorfqu'ils 
font  faifis  par  la  lave  en  fufion,  fuffit  pour  brûler  le 
fer  qu'ils  contenoient,  &.  réduire  par  conféquent  leur 
denfité  à  celle  des  autres  matières  vitreufes;  car  on  ne 
peut  douter  que  le  fond  de  la  fubftance  du  greiiat  ne 
foit  vitreux,  il  étincelle  fous  le  briquet,  il  réfifte  aux 
acides,  il  a  la  caffure  vitreufe,  il  eft  auffi  dur  que  le 

(e)  La  pefanteur  fpécifique  du  grenat  volcanifé  n'eft  que  de 
2,4684;  au  lieu  que  celle  du  grenat  ordinaire  efl:  de  41888. 
Voye^^  la  Table  de  AI.  Brijfon.  —  Rien  de  plus  commun  que  les 
grenats  à  vingt-quatre  faces  dans  les  laves  &  autres  produits  volca- 
niques de  l'Italie.  Tantôt  ils  s'y  trouvent  plus  de'colorés  par  l'adion 
de  l'acide  marin  &  quelquefois  comme  à  demi  vitrifiés;  tantôt  ils 
font  encore  plus  décompofés  &  à  l'état  d'argile  blanche  ou  de  terre 
non  efFervelcente  avec  l'acide  nitreux  ;  mais  dans  l'un  ou  l'autre 
cas  ,  ils  confervent  leur  forme  granatique  ,  &  quoique  les  grenats 
femblent  avoir  fouffert  un  retrait  ou  une  légère  dépreOion  qui  rend 
i'arête  des  bords  plus  faillante  ,  leur  forme  trapézoïdale ,  loin  d'en 
être  altérée  ,  n'en  devient  que  plus  fenfible.  Lettres  du  Doùkur 
Demejle  au   D odeur  Bernard,  tome  J ,  pages  ^^^  &  fuiv. 


544-        Histoire  N atu relle 

criftal,  &  s'il  n'étoit  pas  chargé  de  fer,   il  aiiroit  toutes 
les  qualités  de  nos  verres  primitifs. 

Si  le  fer  n'entroit  qu'en  vapeurs  dans  les  grenats 
pour  leur  donner  la  couleur,  leur  pefanteur  /])ccifique 
n'en  feroit  que  trcs-pcu  ou  point  augmentée;  le  fer  y 
réfide  donc  en  parties  mafTives ,  &  c'efl  de  ce  mélange 
que  provient  leur  grande  denfué  :  en  les  expofànt  à  un 
feu  violent  &  long-- temps  foutenu,  le  fer  fe  brûle  c^ 
fe  diflipe,  la  couleur  rouge  difparoît,  &  lorfqu'on  leur 
fait  fubir  une  plus  longue  &  plus  violente  adion  du 
feu,    ils  fè   îonàcnt   Si   ih   convcrtifTent  en    une  forte 

d'émail  //). 

Quoique  les  Lapidaires  diftinguent  les  grenats  en 
orientaux  &  occidentaux,  il  n'en  eft  pas  moins  vrai  que 


/fj  Ce  n'efl:  en  effet  qu'à  un  feu  libre  &.  trcs-vioJent  ou  trcs- 
long-temps  foutenu ,  que  le  grenat  perd  fa  couleur  ,  car  on  peut 
cmailler  fur  cette  pierre  fans  qu'elle  fe  décolore  &  fans  qu'elle  perde 
foa  poli  ;  &:  je  me  fuis  aiïuré  qu'il  falloit  un  feu  xioïent  pour 
diminuer  la  denfité  du  grenat  &  brûler  le  fer  qu'il  contient.  J'ai 
prié  M.  de  Fourcroy ,  l'un  de  nos  plus  habiles  Chiniiftes ,  d'en 
ùire  l'expérience.  Il  a  expofé  dans  une  coupelle  pefant  trois  gros 
vingt-cinq  grains,  douze  grains  de  grenat  en  poudre.  Après  trois 
heures  d'un  feu  très-fort ,  pendant  lequel  on  n'a  aperçu  ni  vapeur , 
ni  flamme,  ni  décrépitation ,  ni  faùon  fenfbles  dans  la  matière,  le 
grenat  a  commencé  à  fe  ramollir  6c  à  fe  ]>ourfouffîer  légèrement.  Le 
feu  ayant  été  continué  pendant  huit  heures  en  tout  ,  le  grenat  n'a 
pas  éprouvé  une  fufion  plus  forte  ,  &  il  eH:  refté  conflamment 
dans  l'état  de  ramollilfement  déjà  indiqué.  L'appareil  refroidi  a  préfenté 
une  matière  rougeâtre ,  aglutinée ,  adhérente  à  la  coupelle. 

dans 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X.  5 4.5 

dans  tout  pays  iis  font  de  même  nature  ,  &  que  cette 
diftinclion  ne  porte  que  fur  la  différence  d'éclat  &  de 
dureté.  Les  grenats  les  plus  purs  &  les  plus  tranf])arens , 
loriqu'ils  font  polis,  font  plus  brillans  ^^  plus  durs,  &L 
ont  par  conféquent  plus  d'éclat  &  de  jeu  que  les  autres, 
&  ce  font  ceux  que  les  Lapidaires  appellent  grenats 
oncntaux ;  mais  il  s'en  trouve  de  pareils  dans  les  régions 
de  l'Occident  comme  dans  celles  de  l'Orient;  les 
grenats  de  Bohème  en  particulier  font  même  fouvent 
plus  purs ,  plus  tranfparens  &  moins  déicclueux  que 
ceux  qu'on  apporte  des  Indes  orientales  :  il  faut  néan- 
moins en  excepter  le  grenat  dont  le  rouge  eft  teint  de 
violet,  qui  nous  vient  de  l'Orient,  &  fe  trouve  parti- 
culièrement à  Surian,  dans  le  royaume  de  Pégu,  & 
auquel  on  a  donné  le  nom  de  grenat  Syrien  (g) ;  mais 
ces  grenats  les  plus  tranfparens  (Se  les  plus  purs,  ne  le 
font  cependant  pas  plus  que  le  criltal,  &  ils  ont,  de 
même  que  toutes  les  autres  pierres  vitreufes,  une  double 
réfraction. 

Quoique  dans  tous  les  grenats  le  fond  de  la  couleur 
foit   rouge,    il    s'en    trouve,   comme    l'on    voit,    d'un 

(o-^  Il  paroît  que  le  mot  fyrien  vient  de  Sun  an ,  ville  capitale 
du  royaume  de  Pcgu.  Les  Italiens  ont  donne  à  ces  grenats,  le  noni 
de  ruhïni  dï  rocca ,  <3c  cette  dénomination  n'ell  pas  mal  appliquée  , 
parce  que  Jes  grenats  Te  trouvent  en  eftet  dans  les  roches  vitreufes, 
tandis  que  les  rubis  tirent  leur  origine  de  la  terre  limoneuse  ,  &:  Te 
trouvent  iloles  dans  les  terres   &.  les   Tables. 

Mincraux ,  Tome  UI,  Zzz 


54-<5        Histoire  Naturelle 

rouge  -  pourpré  ,  d'autres  font  mêlés  de  jaune  &  ref- 
femblent  aux  hyacinthes;  ils  viennent  aufîi  des  Indes 
orientales  (h):  ces  grenats  teints  de  violet  ou  de  jaune 
font  les  plus  eflimés,  parce  qu'ils  font  bien  plus  rares 
que  les  autres,  dont  le  rouge  plus  clair  ou  plus  foncé 
efl  la  feule  couleur.  Les  grenats  d'Efpagne  /ont  com- 
munément d'un  rouge  femblable  à  celui  des  pépins  de 
la  grenade  bien  murs,  &.  c'efl  peut-être  de  cette  ref- 
femblance  de  couleur  qu'on  a  tiré  le  nom  de  grenat. 
Ceux  de  Bohème  font  d'un  rouge  plus  intenfe  (i) ,  & 

(h)  Le  grenat  fyrien  efl:  d'un  rouge  plus  ou  moins  pourpre', 
ou  charge  de  violet,  &  cette  couleur  n'efl:  jamais  claire.  Il  y  eu 
a  de  prefque  violets  ,  mais  ils  font  rares  &  n'ont  guère  cette  couleur 
que  lorfque  la  pierre  a  un  certain  volume. 

Quoique  le  grenat  fyrien  foit  afTez  commun ,  on  en  rencontre 
difficilement  de  fort  gros  ,  purs  &  parfaits  ;  en  géne'ral  fa  couleur 
en  eft  rarement  franche  &  décidée;  elle  efl  très-fouvent  fourde 
&  enfumée. 

C'ell:  le  grenat  fyrien,  lorfqu'il  efl  vif  &  bien  pourpré,  que  les 
fripons  &  les  ignorans  font  quelquefois  pafTer  pour  améihyfle  orien- 
tale ,  ce  qui  fait  croire  à  des  gens  peu  infiruits^  que  cette  dernière 
n'efl:  pas  fi  rare  qu'on  le   dit.    Note  communiquée  par  M.   Hoppé. 

(i)  Le  grenat  de  Bohème  (  appelé  vermeil  en  France  )  efl  d'un 
rouge-ponceau  foncé  ,  mais  pur  &  velouté.  La  grande  inienfité  de 
fa  couleur  ne  permet  pas  de  le  tailler  à  facettes  deffus  &  deflbus , 
comme  les  autres  pierres  ,  car  il  paroîtroii  prefque  noir  ;  mais  on 
le  cabochonne  en  deffus  &  on  le  chève  en  deffous  ;  cette  opé- 
ration l'amincit  aflez  pour  qu'on  puiffe  jouir  de  fa  riche  &  iuperbe 
couleur ,  &  lui  domie  un  jeu  grand  &  large  qui  enchante  l'ceil 
d'un  amateur. 


DES  Minéraux.  5^7 

il  y  en  a  aiifTi  de  verdâtres  (li),  de  bruns  &  de  noi- 
râtres :  ces  derniers  font  les  plus  opaques  &  les  plus 
pefans,  parce  qu'ils  contiennent  plus  de  1er  que  les 
autres. 

La  pierre  à  laquelle  les  Anciens  ont  donné  le  nom 
de  carbunculus,  &  que  nous  avons  traduit  par  le  mot 
ffciV'boucle ,  ell  vraifemblablemcnt  un  grenat  d'un  beau 
rouge  &  d'une  belle  tranfparence  ;  car  cette  pierre 
brille  d'un  feu  très  -  vif,  lorfqu'on  l'expofe  aux  rayons 
du  foleil  (l) ;  elle   conferve  même  affez  de   temps  la 

Un  grenat  de  Bohème  parfait,  d'une  certaine  grandeur ,  e(l  une 
chofe  extraordinairement  rare  ;  rien  de  plus  commun  en  très-petit 
volume. 

Les  défauts  ordinaires  des  grenats  de  Bohème ,  font  d'être  remplis 
de  points  noirs  &  de  petites  bulles  d'air,  comme  une  compofition, 
ces  petites  bulles  d'air  fe  rencontrent  encore  dans  d'autres  grenats, 
Tur-iout  dans   ceux    où    il  entre    du   jaune. 

Ce  que  l'on  appelle  grenat  de  Bohême  en  France  ,  eft  une  pierre 
très-différente  de  celle  dont  on  vient  de  parler  ;  elle  eft  plus  claire 
&  d'un  rouge  vinaigre  ou  fie  de  vin  légèrement  fjleuâtre  &  très- 
rarement  agréable.  Note  communiquée  par  AL  Happé. 

(k)  Le  grenat  varie  par  fa  couleur;  quelquefois  il  eft  du  plus 
beau  rouge  tirant  fur  le  pourpre,  c'ed  le  vrai  grenat;  d'autres  fois 
il  eft  d'un  rouge-jaunâtre  &  tire  fur  l'hyacinthe  ;  ceux  de  Bohème 
font  d'un  rouge  très-foncé.  On  en  trouve  en  Saxe  &  dans  le  Tyrol, 
qui  font  verdâtres ,  peu  ou  point  tranfparens ,  fouvent  même  entière- 
ment opaques.  Leur  gangue  ordinaire  eft  le  quartz  ou  le  feld  fpath  , 
&  fur-tout  le  mica  j'en  ai  vu  d'une  groffeur  extraordinaire,  d'un 
rouge  foncé ,  qui  étoient  ainfi  recouverts  de  mica.  Idem, 

(l)  L'efcarboucle  garamantine  des  Anciens  eft  le  véritable  grenat  des 

Zzz  i; 


54-8        Histoire   Naturelle 

lumière  dont  elle  s'imbibe,  pour  briller  enfuite  clans 
l'obfcurité  &  luire  encore  pendant  la  nuit  fmj .  Cepen- 
dant le  diamant  &  les  autres  pierres  précieufes  jouiffent 
plus  ou  moins  de  cette  même  propriété  de  conferver 
pendant  quelque  temps  la  lumière  du-  foleil ,  &  même 
celle  du  jour  c|ui  les  pénètre  &  s'y  fixe  pour  quelques 
Jieures;  mais  comme  !e  mot  latin  carbuncubis ,  indique 
une  fubfîance  couleur  de  feu,  on  ne  peut  l'appliquer 
qu'au  rubis  ou  au  grenat,  &  les  rubis  étant  plus  rares 
<5i  en  plus  petit  volume  que  les  grenats,  nous  nous 
croyons  bien  fondés  à  croire  que  i'efcarboucle  des 
Anciens  étoit  un  vrai  grenat  d'un  grand  volume,  (Si.  tel 
qu'ils    ont  décrit  leur  carbiiucidus. 

La  grandeur  des  grenats  varie  prcfque  autant  que 
celle  des  criflaux  de  roche,  il  y  en  a  de  fi  petits  qu'on 
ne  peut  les  diflinguer   qu'à  la   loupe  ,    (Si    d'autres  ont 

Alodernes.  L'expérience  fuit  voir  que  cetre  pierre  a  plus  l'apparence 
d'un  charbon  ardent  au  foleil  que  Je  rubis  ou  toute  autre  pierre  prc- 
cieufe  de  couleur  rouge.  Voye^^  Hill  fur  Théophrcifie ,  page  6  i . 

(m)  Je  ne  fais  cependant  fi  l'on  doit  accorder  une  entière  confiance 
à  ce  que  je  vais  rapporter  ici.  «  Dans  une  des  falies  du  palais  du  roi  de 
M  Ja  Chine,  il  y  a  une  infinité  de  pierreries  fans  prix: ,  &  un  ficge  ou 
33  trône  précieux  où  le  roi  s'afiled  en  niajeftc.  11  ell  fait  d'un  beau 
»  marbre  dans  lequel  il  y  a  tant  d'efcarboucles  &  d'autres  pieneries  des 
3:»  plus  rares,  ouvragées  <x  enchaffees,  que  durant  la  plus  obfcure  nuit 
»  elles  éclairent  autant  la  falle  que  s'il  y  avoit  wn  grand  nombre  de 
chandelles  allumées.  «  Recueil  des  voyages  qui  ont  fervi  à  l'étaù/ijjenient 
de  la  Compagnie  des  Indes;  Anijkrdam ,   i  jQz,  îvnie  III, page  4^Q. 


DES  Minéraux,  5^9 

pluficurs  pouces  &l  jufqu'à  un  pied  de  diamètre;  ils  ft 
trouvent  également  dans  les  fentes  des  rocliers  vitreux, 
les  petits  en  criflallifation  régulière,  ^  les  plus  gros 
en  forme  indéterminée  ou  bien  en  criftailifluion  confiife: 
en  général  ils  n'affeélcn:  fJ3écialcmcnt  aucune  forme 
particulière  ;  les  uns  font  rliomboïdaux  ;  d'autres  lont 
odlaèdres  ,  dodécaèdres  ;  d'autres  ont  quatorze ,  vin<'-t- 
quatre  &  trentc-fix  faces  (u):  ainfi  la  forme  de  criftalli- 

(n)  Il  y  a  des  grenats  teflulaires  dodccacdres,  dont  les  plans  font 
des  rhonibes. 

II  y  en  a  d'autres  336  facettes,  dont  24.  hexagones  alongc'es  plus 
.  petites  que  les  \  2  rhonibes. 

II  y  a  des  grenats  trapézoïdaux  ou  grenats  teiTuIaires  à  24.  facette?, 
dont  les  plans  font  des  trapczoïdes. 

Al.  Fauias  de  Saint-Fond  fait  mention  de  fix  varicics  de  orenats. 

La  première  d'un  rouge  couleur  de  feu  ,  décaèdre,  formée  par  un 
prifme  court  hexaèdre,  terminé  par  des  pyramides  tricdres  obtufes. 

La  féconde  à  douze  facettes  &  à  prifme  alongc ,  qui  efl:  d'un  très- 
beau  rouge,  légèrement  jaunâtre;  cette  efpèce  femble  tenir  le  milieu 
entre  le  grenat  &  l'hyacinthe,  «Se  le  rapprocher  de  celle  que  les  Italiens 
nomment  giacinto-guûrna/Iind ,  hyacinthe-grenat. 

Deux  autres  de  même  forme,  mais  dont  l'un  a  perdu  fa  couleur  6c 
efl  blanc  &.  cryflallin. 

Un  autre  à  priime  court  hexagone,  terminé  par  deux  pyramides 
pentagones  ,  dont  les  faces  font  la  plu])art  rhomboïdales  ou  à  cinq 
côtés ,  ce  qui  forme  un  grenat  à  feize  facettes.  ' 

Un  autre  avec  un  pareil  nombre  de  facettes ,  mais  dont  le  prifme 
trèsalongc  a  huit  tdces  terminées  à  chaque  bout  par  une  pyramfde 
aiguë  &.  en  pointe  des  quatre  côtés.  Recherches  fur  Us  volcans  éteints,' 
par  AL  Faujas  de  Saint- Fend. 


5)0       Histoire   Naturelle 

fation  ne  peut  fervir  à  les  faire  reconnoître  &  diflinguer 
des  autres  criflaux. 

li  y  a  des  grenats  fi  tran/j^arens  &  d'une  i\  belle 
couleur  qu'on  les  prendroit  pour  des  rubis  ;  mais  fans 
être  connoiffeur,  on  pourra  toujours  les  diflinguer  aifé- 
ment  ;  le  grenat  n'eft  pas  fi  dur  à  beaucoup  près ,  on 
peut  l'entamer  avec  la  lime,  &l  d'ailleurs  il  a,  comme 
toutes  les  autres  pierres  vitreufes,  une  double  réfraélion, 
tandis  que  le  rubis  &  les  vraies  pierres  précieufes  dont 
la  fubftance  efl  bomogène,  n'ont  qu'une  feule  réfraétion 
beaucoup  plus  forte  que  celle  du  grenat. 

Et  ce  qui  prouve  encore  que  le  grenat  efl  de  la 
même  nature  que  les  autres  pierres  vitreufes  ,  c'eft 
qu'il  fe  décompofè  de  même  par  l'adion  des  élcmens 
hiunides  (oj . 

On  trouve  des  grenats  dans  prefque  toutes  les  parties 
du  monde.  Nous  connoiffons  en  Europe  ceux  de 
Bohème,  de  Siléfie,  de  Mifiiie,  de  Hongrie,  de  Stirie; 

(o)  M.  Greifelius  dit  ( Ephéménde s  (T Allemagne ,  année  i6yo  a 
I  6  S  6)  qu'à  un  mille  de  la  vallée  de  Saint- Joachim ,  fur  X^^^  confins  de 
la  Bohème  &  de  la  Mifnie,  font  des  montagnes  de  grenats:  tout  y  ell 
plein  de  ces  pierres  ,  on  en  voit  une  grande  quantité  fur  la  furface  de  la 
terre  ,  mais  de  nulle  valleur  ,  ayant  été  calcinées  par  la  chaleur  du 
foleil.  Pour  avoir  des  grenats  de  quelque  prix  ,  il  faut  fouiller  la  terre 
de  ces  montagnes ,  car  il  paroît  qu'une  certaine  humidité  efl  néceflaire 
pour  les  conferver.  On  dit  qu'un  cent  pefant  de  ces  pierres  contiennent 
quelques  onces  d'argent  fin.  Collcdion  académique ,  Partie  étranger e , 
tome  IV,  page  i  a  i. 


DES      AI  I  N  É  R  A  U  X.  551 

il  s*cn  trouve  aufTi  dans  le  Tyrol ,  en  Suifle,  en  Ef- 
pagne  (pj^  en  Italie  &  en  France,  fur-tout  dans  les  terreins 
volcanifés  fi^J:  ceux  de  Bohème  font  les  plus  purs» 
les  plus  tranfJDarens  &.  les  mieux  colorés  f?-J.  Quelques 

^pj  Vers  la  moitié  de  ce  chemin  (de  Motril  à  Almeria)  il  y  a  une 
grande- plaine  qv»i  s'en  éloigne  à  trois  lieues;  elle  eft  fi  remplie  de 
grenats  ,  que  l'on  en  pourroit  charger  un  vaifléau  ;  le  lieu  où  l'on 
en  trouve  le  plus  eft  un  ravin  formé  par  les  eaux  &  les  orages  au  pied 
d'une  colline  balle  qui  eft:  aufli  remplie  de  ces  pierres.  Dans  le  lit  de 
ce  ruilTeau  il  y  a  beaucoup  de  pierres  rondes  avec  du  mica  blanc  ;  elles 
font  pleines  de  grenats  en  dedans  ôc  en  dehors  ,  &.  l'on  voit  qu'ils 
viennent  de  la  décompofition  de  la  colline.  Hijioire  Naturelle d' Efpagne, 
p(ïr\  Ai.  Bowles ,  page   12^. 

(q)  Il  y  a  plufieurs  années  qu'on  a  de'couvert  près  de  Salins,  une 
veine  de  grenats.  Sur  r  exploitation  des  mines ,  par  Ai,  de  Genfanne  ; 
Savans  Étrangers,  tome  IV,  page  i^i.  —  On  trouve  fur  les  bords 
d'un  ruifleau  nommé  le  Riouppenouliou  près  d'Expailly,  à  un  quart 
de  lieue  du  Puy,  des  grenats  qui  font  dans  les  matières  volcanifées .  .  ,  . 

Il  eft  fmgulier  que  dans  prefque  tous  les  pays  où  Ton  a  des  mines 
de  grenats,  tels  qu'à  Swapawari  en  Lapponie ,  en  Norwcge,  fur  les 
monts  Krapachs  en  Hongrie,  &c.  on  foit  dans  la  perfuafion  qu'ils  ont 
prefque  toujours  avec  eux  des  paillettes  d'or  ou  d'argent;  j'approuve 
fort  la  raifon  que  donne  M.  Lehmann  de  cette  croyance  «  J'ai  ima- 
giné, dit  cet  habile  Chimifte,  que  ce  qui  a  fait  croire  que  les  grenats  ce 
contiennent  une  aflez  grande  quantité  d'or  ,  vient  de  la  pierre  « 
talqueufe  &  luifante  qui  leur  fert  de  matrice.  »  Recherches  fur  Us 
Yolcans  éteints ,  par  M.  Faujas  de  Saint- Fond ,  page  i  S^  &  fuivante. 

(r)  Boëtius  de  Boot ,  donne  aux  grenats  de  Bohème  la  préférence 
fur  tous  les  autres ,  même  fur  ceux  de  l'Orient ,  à  caufe  de  leur  pureté 
&  de  la  vivacité  de  leur  couleur  qui,  félon  lui,  réfifte  au  feu.  Mais, 
fuivant  M.    Pott,  les  grenats  en   fe   fondant  au  ièu  perdent   leur 


55^         Histoire  Natu relle 

Voyageurs  affarent  en  avoir  trouve  de  très  -  beaux  en 
Groenland  &l  dans  la  Lapponie  { f) . 

En  Aiie,  les  provinces  de  Pégu,  de  Camboie,  de 
Calicut ,  de  Cananor ,  font  abondantes  en  grenats  ;  il 
s'en  trouve  zi\(ï^i  à  Golconde  &  au  Thibet  (rj. 

Les  Anciens  ont  parlé  des  grenats  d'Ethiopie,  & 
l'on  connoît  aujourd'Iuu'  ceux  de  Madagafcar;  il  doit 
s'en  trouver  dans  plufieurs  autres  contrées  de  l'Afrique: 
au  refte,  ces  grenats  apportés  de  Madagafcar  font  de 
la  même  nature  que  ceux  de  Bohème. 

Entin,  quoique  les  Voyageurs  ne  fafTcnt  pas  mention 

tranfparence  ôi.  leur  couleur  rouge.  Le  iiuine  Boëtius  dit  qu'en 
Cohcme  les  gens  de  la  campagne  trouvent  les  grenats  en  morceaux 
gros  comme  des  pois,  répandus  dans  fa  terie,  fans  ctre  attaches  à 
aucune  matrice;  ils  font  noirs  à  la  furface  ,  &  l'on  ne  peut  en  recon- 
noître  la  couleur  cpi'en  les  plaçant  entre  l'tx-il  c'k  la  lumière.  .  .  .  I^es 
grenats  de  Silefie  font  ordinairement  d'une  qualité'  très- médiocre. 
Encyclopédie ,  article  Grenat. 

(f)  M.  Crantz  met  le  grenat  de  Groenland  dans  la  clafle  du  quartz, 
parce  qu'il  fe  trouve  dans  les  lentes  des  rochers  quartzeux,  en  morceaux 
de  grandeur  &:  de  formes  inégales.  Mais  comme  il  efl:  très-dur  &  d'un 
rouge  tranlparent  qui  tire  fur  le  violet ,  les  lapidaires  le  rangent  parmi 
les  rubis.  C'efl  dommage  qu'il  foit  fi  fragile  &  qu'on  n'en  puiffe 
confèrver  que  de  \i.  grofîeur  d'une  fève  cjuand  on  le  met  en  oeuvre, 
H'ijfoire  générak  des  Voyages,   tome  XIX,  page  2^. 

( t )  Le  royaume  de  Golconde  produit  beaucoup  de  grenats.  H'ijloîre 
générale  des  Voyages,  tome  IX,  page  y  i  y.  —  Vers  les  montagnes  du 
Thibet  qui  lont  l'ancien  Caucafe  ,  dans  les  terres  d'un  Raja,  au-delà  du 
royaume  de  Cachemire  ,  o\\  connoît  trois  montngnes  dont  l'une  produit 
de:3  grenats.  Idem,  tome  X,  p^g^ ^  2.y, 

des 


D  E  s    M  I  M  É  R  A  U  A\  555 

des  grenats  d'Amérique,  on  ne  peut  guère  douter  qu'il 
ny  en  ait  dans  plufieurs  régions  de  ce  vafte  continent, 
comme  il  s'en  trouve  dans  toutes  les  autres  parties  du 
monde. 


H  VA  C  I  N  T  HE. 

-tVrès  le  grenat  fe  préfente  l'Hyacinthe  qui  approche 
de  fa  nature ,  &  qu'on  doit  auffi  regarder  comme 
un  produit  du  fchorl  mêlé  de  fubflances  métalliques. 
L'hyacinthe  fe  trouve  dans  les  mêmes  lieux  que  le 
grenat,  elle  donne  de  même  une  double  refradion,  ces 
deux  pierres  criflallifées  fe  rencontrent  fouvent  en- 
femble  dans  les  mêmes  mafTes  de  rochers  (a):  on  doit 
donc  la  rapporter  aux  criflaux  vitreux,  &  c'eft  après  le 
grenat  la  pierre  vitreufe  la  plus  denfe  (b).  Sa  couleur 

(a)  Cette  pierre  hyacinthe  aufli  commune  que  le  grenat  (  que 
(buvent  elle  accompagne  ),  peut  (ans  doute  ,  ainfi  que  celui-ci  ,  (e 
rencontrer  dans  les  deux  Indes  aulîi  fréquemment  qu'en  Europe...  Il 
y  a  des  grenats  qui  ont  la  couleur  de  l'hyacinthe ,  &  il  y  a  des  hyacinthes 
qui  ont  celle  du  grenat,  mais  ces  deux  pierres  diffèrent  beaucoup  l'une 
de  l'autre  par  la  forme  &  la  gravité  fpécifique ...  La  dureté  de  l'hyacin- 
the l'emporte  fur  celle  du  grenat,  mais  trop  peu  ;  2.°  la  gravité  fpéci- 
fique du  grenat  eft  fupérieure  à  celle  de  l'hyacinthe.  .  .  L'hyacinthe 
éft  infufible  au  degré  de  feu  qui  met  le  grenat  en  fufion.  Ejfaî  de 
Crijlallographie  y  par  M.  Rome  de  Life,  tome  JJ ,  pages  28^  & 
fuivantes. 

(h)  La  pefânteur  fpécifique  de  l'hyacinthe  eft  de  3^873,  &  celle 
du  grenat  Syrien  de  40000. 

Minéraux,  Tome II L  Aaaa 


554-        Histoire  Natu rellb 

n'eft  pas  franche,  elle  efl  d'un  rouge  pius  ou  moins 
mélc  de  jaune  ;  celles  dont  cette  couleur  orangce  ap- 
proche le  plus  du  rouge ,  font  les  pius  rares  &.  les  plus 
eftimées  ;  toutes  perdent  leur  coidcur  au  feu,  &  y 
deviennent  J3Janches,  /ans  néanmoins  perdre  leur  iranf- 
parence,  &  elles  exigent  pour  fe  fondre  un  pius  grand 
degré  de  feu  que  le  grenat  (c).  On  voit  des  hyacinthes 

(c)  Cetce  pierre  ell  d'an  rouge  tirant  lur  le  jaune,  c'efl-à-dire  , 
d'une  couleur  \)\us  ou  moins  approchante  de  celle  de  l'orangé.  Lorf- 
f]u'on  expofe  l'hyacinthe  à  l'adion  d'un  feu  alTez  violent,  eile  perd  Çd 
couleur  &  conlei  ve  fa  tranfparence  ,  ce  qui  prouve  que  la  lubflance  qui 
la  colore  eft  volatile:  fi  on  laiiïe  ces  criftaux  expofcs  trop  long-temps 
à  l'adion  du  feu  ,  ils  s'y  vitrifient  fans  intermède  ,  au  moins  à  leur 
furface  :  car  ils  adhèrent  alors  entr'eux  &  aux  parois  du  creufer.  La 
pierre  qui  porte  le  nom  de  jargcn  ,  n'efl  autre  chofe  que  l'hyacinthe 
blanchie  au  feu  pour  imiter  le  diamant.  Lettres  du  doâcur  Dewejle ,  &c. 
tome  I ,  page  ^12. —  La  couleur  de  cette  pierre  eft  d'un  rouge  tirant 
fur  le  jaune  ,  ce  qui  la  rend  plus  ou  moins  tranfparcnte  ;  elle  entre 
totalement  en  fufion  au  feu  ,  elle  efl:  plus  légère  &  plus  tendre  que  le 
grenat,  aulTi  lalime  a-t-elle  facilement  de  la  jirife  fur  elle.  On  a, 

I,*  L'hyacinthe  d'un  jaune  rougeâtre ,  ou  l'hyacinthe  oriental:  on  fa 
trouve  en  Arabie  ,  à  Cananor ,  à  Calecut  &  à  Camboye  ;  la  couleur  de 
cette  belle  hyacinthe  efl;  d'un  rouge  foible  d'écarlate  ou  de  cornaline, 
ou  de  vermillon,  tirant  lur  le  rubis  ou  plutôt  fur  le  grenat,  au  travers 
de  laquelle  on  remarque  ordinairement  une  kfgère  nuance  de  violet- 
colombin  ou  d'améthyfte,  elle  eil  très-refplendiflante,  dure,  &  reçoit 
«n  poli  vif  : 

2.°  L'hyacinthe  d'un  jaune  de  ^fran,  ou  l'hyacinthe  occiàemûe-^ 
elle  efl:  moyennement  dure  ,  d'une  couleur  plus  fafrance,  plus  orangée, 
&  bien  moms  éclatante  que  la  précédente  ;  elle  reflèmble  quelquefois 


D  E  s    M  I  M  É  n  A  U  X,  5^5 

en    très  -  grande    quanticc    dans    ies    mafTes   de    roches 
vitrcufcs,  &  autres  inaticrcs  rejetées  par  le  Véftive  (J), 

à  la  .^ur   du   louci  ou  à  lu  Heur  d'hyacinthe  ,    &.  nous   vient    du 
Portugal  ; 

3.°  L'hyacinthe  d'un  blanc  jaunâtre  :  elle  a  beaucoup  de  reflein- 
blance  avec  l'agate  ou  avec  le  fuccin  qui  efî:  d'un  blanc- jaui-^âtre  : 

4,°  L'hyacinthe  couleur  de  miel  ou  hyacinthe  niielice  :  autant  la 
précédente  relVemble  au  fuccin  ,  autant  celle-ci  reffemble  au  miel,  tant 
par  fa  couleur  que  par  Ion  éclat  cjui  efl:  foible  &  terne  :  ces  deu>: 
dernières  fortes  d'hyacinthe  font  peu  dures,  peu  iranfp-rentes,  mal 
nettes  ,  pleines  de  graine  ou  de  peiiies  taches  qui  les  font  tailler  à 
facettes  pour  en  cacher  les  défauts;  elles  fe  foutiennent  bien  moins  de 
temi)s  au  feu  que  les  orientales.  Elles  nous  viennent  de  la  Siléfie  &  de 
ia  Bohème. 

Ce  qu'on  appelle  jdrgon  d'Auvergne,  font  des  petits  criflaux  à  facettes 
&  colores,  bien  des  gens  les  regardent  comme  des  primes  d'hyacin- 
thes, ils  font  brillans  6;  très-i  edts.  On  les  rencontre  communément 
dans  le  Vivarais  j)rès  du  Puy. 

On  nous  apporte  de  CompodeHe  en  Ei pagne  ,  fous  le  nom  dliy^ 
cintJjes ,  des  pierres  ruuges-opaques ,  qui  ont  une  figure  déterminée 
&  qui  ne  font  c[ue  des  cryflaux.  A'Unéralogie  de  Bomarc ,  tome  /, 
pages  z4^  à'  fulvantcs. 

(d)  Il  y  a  des  hyacinthes  blanches  ,  foit  en  criflaux  folitaires,  foit 
en  groupes:  ces  dernières  viennent  des  bafes  de  la  Somma  en  Italie. 
La  roche  qui  fert  de  gangue  aux  hyacinthes  de  la  Somma ,  a  fouffert 
plus  ou  moins  de  l'action  du  feu  ,  mais  en  général  elle  efl  fort  peu 
dénaturée.  La  couleur  de  ces  hyacinthes  tire  plus  ou  moins  lur  le 
brun;  les  unes  font  dans  des  gangues  argiltules  micacées  plus  ou 
moins  cuires  ;  les  autres  dans  des  malfes  de  grenats  dodécaèdres  à 
bords  tronqués ,  d'autres  font  entre-mclés  de  fchorls  prifmatiques ,  de 
fchorls  dodécaèdres  &  même  de  fpath  calcaire. 

^  Aaaa  i; 


5  5^         Histoire  Naturelle 

ÔL  ces  pierres  fe  trouvent  non-feuiement  en  Italie  dans 
Jes  terreins  voicanifés,  mais  auifi  en  Allemagne,  en 
Pologne,  en  Efpagne,  en  France,  &.  particulièrement 
dans  le  Vivarais  ôl  l'Auvergne  ^e):  il  y  en  a  de  toutes 
les  teintes,  de  rouge  mêlé  de  jaune,  ou  de  jaune  mêlé 
de  brun;  il  y  en  a  même  des  blanches  qu'on  connoît 
fous   le   nom  de  jûrgon  (f).  II    s'en   trouve  aulTi  d'un 


II  y  a  au  Vefuve  des  hyacinthes  ,  les  unes  en  groupe  ,  les  autres  en 
criflaux  folitaires;  il  y  en  a  de  brunes,  de  verdâtres ,  &c.  leur  couleur 
la  plus  ordinaire  eft  un  jaune -foncé  mêlé  de  rougeâire,  mais  qui  tire 
fouvent  fur  le  verdâtre  ou  le  noirâtre. 

(^i\  Jes  trouve  non -feulement  au  Vefuve  ,  mais  encore  parmi 
certaines  éruptions  des  anciens  volcans  éteints  de  l'Italie ,  &  même 
d'autres  contrées.  .  .  . 

Elles  ne  font  point  un  produit  du  feu  des  volcans ,  comme  M.  Ferber 
le  dit  en  plufieurs  endroits  de  les  Lettres  fur  l'Italie  ,  en  confondant  ces 
hyacinthes,  tantôt  avec  les  i'chorls ,  tantôt  avec  l'émail  ou  verre  de 
volcan  fi  connu  fous  le  nom  de  pierre  ohfidîenne ;  mais  elles  faifoient 
partie  des  roches  primitives  du  fécond  ordre,  qui  fe  font  trouvées  dans 
la  fphère  d'adivité  du  foyer  volcanique. 

Il  fe  trouve  des  hyacinthes  blanches  en  croix  par  la  réunion  de  quatre 
de  leurs  criilaux  fimples  parallèlement  à  leur  longueur.  (  On  peut 
obferver  que  cette  figuration  eft  encore  un  caradère  commun  à  l'hya- 
cinthe &  au  fchori  dont  les  criftaux  fe  trouvent  fouvent  croilés  les  uns 
fur  les  autres  ).  Cr'ijlcllo graphie  par  Ai.  Rome  de  Lijle  ,  tome  H , 
pages  2S ^  &  fuivantes. 

( e )  Il  fe  trouve  des  hyacinthes  d'un  beau  rouge  de  vermeil  ou  de 
grenat.  M.  Faujas  de  Saint- Fond  les  a  trouvées  dans  un  ruiifeau  à  un 
quart  de  lieue  du  Puy  en  Vélay,  Jdem ,  page  2  S  S. 

(f)  J'ai  trouve  parmi  les  grenats  d'Expailly  (  pays  volcanique  du 


DES    Minéraux,  y^y 

jaune  affez  rouge  pour  qu'on  s'y  trompe  en  les  j)renant 
pour  des  grenats,  mais  la  plupart  font  d'un  jaune  enflimc, 
6l  même  brunes  ou  noirâtres  :  elles  fe  trou\  cnt  quel- 
quefois en  groupes,  &  fotivent  en  criflaux  ifolés  fgj; 
mais  les  unes  &  les  atures  ont  été  détachées  du  rocher 
où  elles  ont  pris  naiffance  comme  les  autres  criflaux 
vitreux.  M.  Rome  de  Lille  dit  avec  raifon  :  «  Que 
l'on  donne  quelquefois  le  nom  <S^ hyacinthe  orinuale ,  à  tt 
des  rubis  d'Orient  de  couleur  orangée,  ou  à  des  jargons  «» 
de  Ceylan,  dont  la  teinte  jaune  efl  mêlée  de  rouge, 
de  même  qu'on  donne  auiïi  quelquefois  aux  topazes 
orangées  du  Brefil,  le  nom  A' hyacinthe  occidentale  oïl  de 
Pornti^al ;  mais  l'hyacinthe  vraie  ou  proprement  dite, 
e(l  une  pierre  qui  diffère  de  toutes  les  précédentes, 
moins  par  fà  couleur  qui   eft   très- variable  ,    que   par 

Vélay  )  de  véritables  hyacinthes ,  d'un  jaune  tirant  fur  le  rouge  , 
criftallifées  à  prifines  quadrilatères  oblongs,  terminés  à  l'un  &  à  l'autre 
bout  par  une  pyramide  à  quatre  côtés.  J'en  polsède  une  qui  a  un  pouce 
de  lono^ueur  fur  fix  lignes  de  diamètre,  mais  qui  n'a  point  de  pyramide. 
On  appelle  ces  hyacinthes  ,  jargons  d'hyacinthes  du  Puy.  Recherches  fnf 
Us  Volcans  éteints,  par  M.  faujas  de  Saint- Fond ,  page  i  Sj. 

(g)  Ces  hyacinthes  jaunâtres  font  afTez  fouvent  groupées  dans  les 
cavités  des  roches  quartzeufes  ou  feld-fpaihiques  qui  ont  été  détachées 
des  entrailles  du  volcan ,  fans  avoir  trop  fouffert  de  l'acflion  du  feu. 
Cette  adion  a  bien  été  aflez  violente  pour  les  altérer  plus  ou  moins , 
mais  non  pour  les  dénaturer  entièrement.  Les  angles  des  criflaux  ont 
confervé  leur  tranchant ,  les  faces  leur  poli ,  &  le  quartz  ou  feld-fpath 
fa  blancheur  &  fa  folidité.  Lettres  du  doÛeur  Demejle ,  tome  I, 
page  41  S, 


5)8         Histoire    N atu r  elle 

fa   forme,    fa  duretc    <&    fa  gravité  fpccifiqiie  (IiJ  ». 

Et  eu  eftèt,  quoiqu*il  n'y  ait  à  vrai  dire  qu'une  feule 
&  mcme  eflcnce  clans  ]es  pierres  prccieufes,  &  que 
communément  elles  fbient  teintes  de  rouge,  de  jaune 
ou  de  bleu,  ce  qui  nous  les  fait  diftingutr  par  Jes 
noms  de  ru  lus ,  lopaics  ir  faplùrs ,  on  ne  peut  guère 
douter  qu'il  ne  fe  trouve  aufli  dans  les  climats  chauds 
des  pierres  de  mcmc  eflence  ,  teintes  de  jaune  mclc 
d'un  peu  de  rouge ,  auxquelles  on  aura  donné  la  déno- 
mination (ïhyûdnthcs  orientales;  d'autres  teintes  de  violet,  «Se 
même  d'autres  de  vert,  qu'on  aura  de  même  dénommées 
améîh'ijlcs  &  émeraiides  orientales  ;  mais  ces  pierres  pré- 
cieufes,  de  quelque  couleur  qu'elles  foient,  feront  toujours 
très-aifées  à  diilinguer  de  toutes  les  autres  par  leur 
dureté,  leur  denfité,  &  fur-tout  par  l'iiomogénéité  de 
leur  fùbilance  qui  n'admet  qu'une  feule  réfradion  ; 
tandis  que  toutes  les  pierres  vitreufes  dont  nous  venons 
de  faire  rémunération,  font  moins  dures,  moins  denfes, 
&  en  même  temps  fujettes  à  la  double  réfraélion. 

^h)  CriRallographie ,  par  M.  Rome  de  Lifle,  tome  II,  page  282, 


DES    Minéraux. 


5>9 


TOURMALINE   (a). 

V^ETTE  pierre  ctoit  peu  connue  a\ant  la  publication 
d'une  Leitre  que  Ivi.  le  duc  Je  iN03a-Caraifà  m'a  fait 
i'iionneur  de  m'ccrire  de  Naples,  ^^  qu'il  a  fait  eniuite 
iiuprimcr  à  Paris  en  175 9-  H  expcie  dans  cerie  Lettre, 
les  obiervations  <5e  les  expériences  qu  il  a  faites  iur  deux 
de  ces  pierres  qu'il  avoit  reçues  de  Ccylan:  leur  prin- 
cipale propriété  eft  de  devenir  éleclriqucs  fans  frottement 
(Si.  par  la  limple  chaleur  (h) ;  cette  éledricité  que  le 
feu  leur  communique,  fc  manileilc  par  attraélicn  fiir 
l'une  des  laces  de  cette  pierre  ,  &.  par  répulf'on  fur  la 
face  oppoiée,  comme  clans  les  corps  éleétriques  par  le 
frottement  dont  l'éleétricité  s'exerce  en  plus  ^  en  moins, 
<Sc  agit  politivement  &  négativement  fur  différentes  faces: 
mais  cette  faculté  de  devenir  électrique  fans  frottement 
&L  par  la  limple  chaleur,  qu'on  a  regardée  comme  une 

(a)  Tourmaline  ou  tire-ccndre;  cette  j^ierre  ell  ainfi  dcnomince, 
parce  qu'elle  a  la  propriété  d'attirer  les  cendres  &  autres  corps  légers , 
fans  être  frottée,  mais  feulement  chaulTce  ;  fa  forme  eft  la  mcme  que 
celle  de  certains  fchorls,  tels  que  les  peridots  &  les  t'meraudes  du 
Brefil;  elle  ne  diffère  en  effet  des  fchorls  que  par  fon  éledricité  qui 
efl:  plus  forte  &  plus  confiante  que  dans  toutes  les  autres  pierres 
de  ce  même  genre. 

fbj  Pline  parle  (  liv.  XXX  vil,  n.'  2  <)  )  d'une  pierre  violette  ou 
brune  (jonia)y  qui  échauffée  par  le  frottement  entre  les  doigts,  ou 
fimpîement  chauffée  aux  rayons  du  foleil ,  acquiert  la  propriété  d'attirçr 
les  cocps  légers.  iN'elVce  point  là  la  tourmaline: 


560        Histoire  Naturelle 

propriété  fmgulière  &  même  unique,  parce  qu'elle  n'a 
encore  été  diftindement  obfervée  que  fur  la  tourma- 
l^e ,  doit  fe  trouver  plus  ou  moins  dans  toutes  les 
pierres  qui  ont  la  même  origine;  &  d'ailleurs,  la  chaleur 
ne  produit -elle  pas  un  frottement  extérieur  &  même 
intérieur  dans  les  corps  qu'elle  pénètre ,  &  réciproque- 
ment toute  fridion  produit  de  la  chaleur?  il  n'y  a  donc 
rien  de  merveilleux  ni  de  furprenant  dans  cette  com- 
munication de  réledricité  par  l'adion  du  feu. 

Toutes  les  pierres  transparentes  font  fufceptibles  de 
devenir  éledriques,  elles  perdent  leur  éledricité  avec 
leur  tranfparence ,  &  la  tourmaline  elle  -  même  fùbit  le 
même  changement,  &  perd  au/fi  fbn  éledricité  lor/qu'elle 
eft  trop  chauffée. 

Comme  la  tourmaline  eft  de  la  même  effence  que 
les  fchorls ,  je  fuis  perfuadé  qu'en  faifant  chauffer  divers 
fchorls,  il  s'en  trouvera  qui  s'éledriferont  par  ce  moyen; 
il  faut  un  affez  grand  degré  de  chaleur  pour  que  la 
tourmaline  reçoive  toute  la  force  électrique  qu'elle  peut 
comporter,  &  l'on  ne  rifque  rien  en  la  tenant  pour 
quelques  inftans  fur  les  charbons  ardens  ;  mais  lorfqu'on 
lui  donne  un  feu  trop  violent ,  ^\\t  le  fond  comme  le 
fclîorl  (c)j  auquel  d\c  reffemble  au/fi  par  fa  forme  de 

criftallifation, 

(c)  M.  Rittman  a  obfervé  que  la  tourmaline  fe  fondoiten  un  verre 
blanchâtre ,  &  qu'en  y  ajoutant  du  borax  &  du  fpath  fufible  ,  elle  fe 
fondoit  entièrement ,  mais  que  les  acides  minéraux  ,  même  lés  plus 

forts , 


D  E  s    Aï  I  N  É  R  A  V  X.  561 

criflallifation ,  enfin  elle  efl  de  même  clenfitc  &  d'une 
égale  dureté  ((ij;  l'on  ne  peut  guère  douter,  d'après 
tous  ces  caractères  communs,  qu'elle  ne  foit  un  produit 
de  ce  verre  primitif.  M.  le  docteur  Dcmeftc  le  prcfu- 
moit  avec  raifôn ,  &  je  crois  qu'il  efl  le  premier  qui 
ait  range  cette  pierre  parmi  les  fchorls  fe). 

Toutes  les  tourmalines  font  à  demi  -  tranfparentes , 
les  jaunes  &  les  rougeâtres  le  font  plus  que  les  brunes 
&.  les  noires;  toutes  reçoivent  im  alfez  beau  poli:  leur 
fubllance,  leur  caffure  vitreufe,  &.  leur  texture  lamelleu/è 
comme  celle  du  fchorl,  achèvent  de  prouver  qu'elles 
,font  de  la  nature  de  ce  verre  primitif 

forts ,  ne  fembloient  pas  l'attaquer  ;  &  comme  les  mêmes  phénomènes 
fe  manifeftent  dans  la  ze'olite  &  le  balalte ,  il  a  conclu  que  la  tourmaline 
en  étoit  une  efpèce ,  «Se  la  vertu  éledrique  qu'il  avoit  remarquée  à  une 
efpèce  de  zéolite,  couleur  de  ponceau  ,  le  fortifia  dans  ce  fentiment.... 
Mais  toutes  ces  recherches  ne  découvrent  pas  encore  les  vrais  prin- 
cipes de  la  tourmaline.  Journal  de  Phyfique ,  fupplêment  au  mois  de 
Juillet  lySz. 

(d)  La  pefanteur  fjîccifique  de  la  tourmaline  de  Ceylan  eft  de 
30541  ,  celle  de  la  tourmaline  du  Brefil  de  30S63  ,  &  celle  du  fchorl 
crillallifé  de  3092^). 

(e)  La  tourmaline  efl  aufll  rangée  avec  les  fchorls;  en  s'échauffant 
elle  s'éledrife  d'un  côté  pofitivement ,  tandis  que  de  l'autre  côté  elle 
s'éledriie  négativement,  comme  l'a  obier vé  M.  Franklin.  Sa  couleur  efl 
rouge  ,  jaunâtre  ou  d'un  jaune-noirâtre  aflez  tranlparent  ,  elle  eft 
criftalliiée  comme  le  fchorl  de  Madagaicar,  en  prifmes  à  neuf  pans, 
fouvent  llriés ,  terminés  par  deux  pyramides  trièdres  obtufes  placées 
en  fens  contraire.  Lettres  de  M.  Demejle ,  tome  I,  in-i  2  ,  page  2  (}  1  ^ 

Miucraux  ,  Tome  IIL  B  b  b  b 


^6z       Histoire   Natu  relle 

UWc  de  Ceyian,  d'où  font  venues  les  premières 
tourmalines,  n'efl  pas  la  feule  région  qui  les  produife: 
on  en  a  trouvé  au  Brefd,  &  même  en  Europe,  parti- 
culièrement dans  le  comté  de  Tyrol  ;  les  tourmalines  du 
Brefd  font  communément  vertes  ou  bleuâtres.  M.  Gerhard 
leur  ayant  fait  fubir  différentes  épreuves ,  a  reconnii 
qu'elles  réfifloieni ,  comme  les  autres  tourmalines ,  à 
l'aétion  de  tous  les  acides ,  &  qu'elles  confèrvoient  la 
vertu  éleétrique  après  la  calcination  par  le  feu,  en  quoi, 
dit-il,  cette  pierre  diffère  des  autres  tourmalines  qui 
perdent  leur  éledricité  par  l'aélion  du  feu  (f^;  mais 
je  ne  puis  être  de  l'avis  de  cet  habile  Chimifle  fur 
î'origine  des  tourmalines  qu'il  range  avec  les  bafaltes, 
&  qu'il  regarde  comme  des  produits  volcaniques;  cette 
idée  n'efl  fondée  que  fur  quelques  reffemblances  acci- 
dentelles entre  ces  pierres  &  les  bafaltes  ;  mais  leur 
effence  &  leur  formation  font  très-difierentes,  &.  toutes 


(f)  Les  pierres  gemmes  ,  ainfi  que  la  tourmaline ,  fe  dninguent 
par  la  vertu  eledrique  qui  leur  eft  propre ,  avec  la  différence  pourtant 
que  les  premières  ont  hefoin  de  fridion  pour  exercer  leur  faculté 
attradive ,  au  lieu  que  la  féconde  ne  devient  éledrique  qu'après  avoir 
cte'  mife  fur  de  la  braife  ,  &  pofsède,  outre  la  faculté  attradive  ,  aufîi 
la  répulfive.  Le  balalte  ell  une  pierre  fufible  noirâtre,  non  éledrique, 
qui  écume  beaucoup  en  fondant  ;  6t  puifque  les  laves  o1it  les  mêmes 
principes  que  la  tourmaline  &  le  bafalte ,  on  peut  croire  avec  plulieurs 
Naturalises ,  que  ces  criftaux  doivent  leur  origine  à  des  volcans  ,  du 
moins  pour  la  plupart.  Journal  d(  Phyfique ,  fuppUmcnt  au  mois  de 
Juillet  I  jS 2. 


DESAIlNÉRAUX.  563 

les  propriétés  de  ces  pierres  nous  clcmontrent  qu'elles 
-ptoviennent  du  fchorl,  ou  qu'elles  font  elles-mêmes  des 
Ichorls. 

11  paroît  que  M.  Wilkes  eft  le  premier  qui  ail 
découvert  des  tourmalines  dans  les  montagnes  du  Tyrol. 
M.  Muller  nous  en  a  donné  peu  de  temps  après  une 
defcription  particulière  f^J:  ces  tourmalines  du  Tyrol 
^~~™— ^~'— ^— ^^■™^"™"~^"»— »— ^-^— »— "— ^*—       »— ^— »— ^— — «»— ^——i ^»»»— ^ 

{^gj  La  montagne  nommée  Greïner ,  fituee  vers  l'extrémité  de  la 
vallée  de  Zillerthal  a  fon  fommet  le  plus  élevé  couvert  de  neige  en 
tout  temps;  c'efl  fur  cette  montagne  que  M.  Mulier  dit  avoir  trouvé 
dans  leur  lieu  natal  le  talc,  le  mica  à  grandes  lames  ,  l'arbefte  ,  le  fchorl, 
le  fchorl  blende ,  les  grenats  de  fer  &  la  tourmaline  ;  en  defcendant  il 
ramafîà  une  petite  pierre  qui  avoit  quelqu'éclat  &  qu'il  prit  d'abord 
pour  un  beau  fchorl  noir  crilUlIifé  &  tranfparent  ;  il  voulut  chercher 
l'endroit  d'où  elle  provenoit ,  &  il  rencontra  bientôt  dans  les  rochers 
de  granit,  des  veines  de  talc  fin  &  de  Héatite,  qui  renfermoient  la  pierre 
qu'il  avoit  prife  pour  un  fchorl  noir;  il  fe  procura  une  bonne  quantité 
de  cette  pierre ,  qui  ayant  été  foumife  à  l'acflion  du  feu  <Sc  parvenue  à 
l'état  d'incandefcence ,  commença  à  fe  fondre  à  fa  furface ,  en  prenant 
une  couleur  blanchâtre  ;  un  petit  fragment  de  cette  pierre  mis  enfuite 
fur  de  la  cendre  chaude,  apprit  à  M.  Muller  qu'elle  avoit  une  qualité 
éledrique,  &  enfin  par  différens  effais ,  il  découvrit  que  cette  pierre 
étojt  la  vraie  tourmaline. 

Cette  tourmaline  eft  brune ,  couleur  de  fumée  ,  ou  plutôt  fa. 
tranfparence  &  fa  couleur  lui  donnent  ,  quant  à  ces  deux  qualités, 
quelque  chofe  d'approchant  de  la  colofane;  &  de  même  que  les 
tourmalines  étrangères  connues  jufqu'ici,  elle  préfente  par- tout  de 
petites  fêlures  qui  ne  fe  remarquent  cependant  que  lorfqu'elle  eft 
dégagée  de  fa  matrice.  Lettre  fur  la  tourmaline  du  Tyrol,  par  AI. 
Muller;  Journal  de  Phyfique  ,  Mars  jyS  0  ,  pages  182  ir  fuiv. 

Bbbb  ij 


564  H I ST  OIRE    NaTU  RELLE 

paroifTent  être  de  vrais  fchorls,  tant  par  leur  pefanteur 
fpécifique  &.  leur  fufibiiité  ('fi) ,  que  par  leur  forme  de 
criftalli/àtioli  (i);  elles  acquièrent  la  vertu  clecftrique 
fans    frottement    &    par    la  fimple    chaleur    (  kj ,    elles 

(h)  La  tourmaline  du  Tyrol ,  fondue  à  l'aide  d'un  chalumeau, 
bouillonne  comme  le  borax,  <Sc  alors  elle  jette  une  très -belle  lueur 
phofphorique  ;  elle  fe  fond  très-promptement,  &  refroidie,  elle  a  la 
forme  d'une  perle  blanche  &  demi  -  iranlparente.  Lettre  fur  la  tour- 
maline du  Tyrol,  par  AI,  Afuller;  Journal  de  Phyfique ,  Aîars  j  yS  0, 
pages   I  S  2  &  fuiv. 

(ï)  La  forme  de  notre  tourmaline,  dit  M.  Muller,  eft  en  général 
prilmati({ue  ;  au  moins  n'ai  -  je  encore  trouvé  que  deux  échantillons 
qui  fulîeiit  des  pyramides  parfaites  :  prcfque  toujours  les  prifmes  font 

à  neuf  pans,   &;   ils  ont  douze  faces,  fi  on  compte  leur   bafe 

Les  côtés  àQs  criflaux  de  la  tourmaline  Çonx^  tantôt  plus  larges ,  taniôt 
plus  étroits  ,  &  rarement  deux  côtés  de  la  même  largeur  fe  trouvent 
contigus  :  leurs  pointes  qui  font  émouflees  &  inégales,  ont  pour  la 
plupart  une  très  -  forte  adhérence  à  la  matière  jiierreufe  dont  ces 
criflaux  lont  environnés.  Les  côtés  des  pnlmes  ont  une  fui  face 
brillante  ....  Ces  prifmes  font  longs  de  plus  de  trois  pouces,  & 
épais  depuis  deux  julq'à  cinq  lignes  ;  la  pierre  ollaire  qui  leur  (ert 
de  matrice  efl  verdâtre  ou  tout-à  fait  blanche:  ils  y  (ont  incorporés 
les  uns  auprès  des  autres  en  tout  fens  ....  Mais  les  plus  épais  & 
\es  plus  minces  fe  rencontrent  rarement  enfemble;  ces,  prifmes  fe 
dégagent  fans  peine  de  leur  matrice  dans  laquelle  ils  laifîènt  leurs 
empreintes,  qui  font  aufli  brillantes  que  fi  on  les  avoit  ])olies  .  .  .  . 
Mais  tous  ces  prilmes  ont  des  fêlures  c|ui  empêchent  qu'on  puifî'e  fe 
les  procurer  en  entier,  parce  qu'ils  fe  cafîeni  fouvent  dans  l'endroit 
de  ces  fêlures  ....  Les  deux  nouvelles  furfaces  de  la  pierre  caffée 
prélentent  d'une  part  une  convexité,  &  de  l'autre  une  concavité, 
comme   le   verre  ,  lorfqu'on  le  brife.  Idem ,   ib\dc7n. 

(k)    Pour   peu  qu'elle    foit    chauffée,    elle    manifeUe  fa    qualita 


D  E  s    M I  N  Ê  R  A  V  X,  5(^5 

reffemblent  en  tout  à  la  tourmaline  de  Ceylan,  &  diffèrent, 
félon  M.  Muller,  de  celle  du  Brefil;  il  dit:  <c  Qu'où 
doit  rapporter  à  la  claffe  des  zcolites  les  tourmalines  ^ 
du  Tyroi  comme  celle  de  Ceylan ,  &  que  la  tourma- 
line du  Brefil  femble  approcher  du  genre  des  fchorls, 
parce  qu'étant  mife  en  liifion  à  l'aide  du  chalumeau, 
cette  tourmaline  du  Brefd  ne  produit  pas  les  mêmes 
effets  que  celle  du  Tyrol ,  qui  d'ailleurs  eli  de  couleur 
enfumée  comme  la  vraie  tourmaline,  au  lieu  que  celle 
du  Brefil  n'ed  pas  de  la  même  couleur  3).  Mais  le 
traduéteur  de  cette  Lettre  de  M.  Muller,  ohfcrve  avec 
raifon,  qu'il  y  a  des  fchorls  cletStriques  qui  ne  jettent 
pas,  comme  la  tourmaline,  un  éclat  phofphorique  lorf- 
qu'ils  entrent  en  fufion  ;  il  me  paroît  donc  que  ces 
différences  indiquées  par  M.  Muller,  ne  fuffifent  pas 
pour  féparer  la  tourmaline  du  Brefil  des  deux  autres, 
&  que  toutes  trois  doivent  être  regardées  comme  des 
produits  de  différens  fchorls  qui  peuvent  varier,  & 
varient  en  effet  beaucoup  par  les  couleurs,  la  denfité, 

ciedrique  ;  cette  vertu  augmente  jufqu'à  ce  qu'elfe  ait  acquis  à 
peu-près  le  degré  de  chaleur  de  l'eau  bouillante  ;  <S:  à  ce  degré  de 
clialeur  i'atmofphère  éledrique  s'éteadoit  des  pôles  de  la  pierre  à  la 
diftance  d'environ  un  pouce.  Notre  tourmaline,  fortement  grillée 
fous  la  moufïïe ,  ne  perd  rien  de  fon  poids  :  elfe  conferve  fa  tranf- 
parence  &  fa  qualité  éledrique ,  quoiqu'on  l'ait  fait  rougir  à  plufieurs 
reprifes ,  &  que  même  on  ait  pouni-  le  feu  au  point  de  la  faire  fondre 
à  la  fuperficie.  Lciirc  fur  la  tourmaline  du  Tyrol,  par  AI.  AlulUr; 
Journal  de  Phyftque ,  Mars  17S0  ,  pages  j  S2  cT  fuiy. 


566  Histoire  Naturelle 

la  fufibilité ,  ainfi  que  par  la  forme  de  criflailifàiion. 

Et  ce  qui  démontre  encore  que  ces  tourmalines  ont 
plus  de  rapport  avec  les  fcliorls  criflailifcs  en  prifmes 
qu'avec  les  zéolites ,  c'eft  que  M.  Muller  ne  dit  pas 
avoir  trouvé  des  zéolites  dans  le  lieu  d'où  il  a  tiré  fes 
tourmalines,  &  que  M.  Jaskevifch  y  a  trouvé  du  fchorl 
vert  (l). 

(l)  A.  quatre  portes  d'Infpruck,  il  y  a  une  mine  d'or  dans  un 
endroit  nomme  Zilkrthnl ;  la  gangue  efl  un  fchifte  dur,  verdâtre , 
iraverfé  par  le  quartz;  on  en  retire  fort  peu  d'or;  mais  cette  mine 
eft  très-fameufe  par  la  produdion  de  la  tourmaline  décrite  par  M. 
Muller.  La  gangue  de  la  tourmaline  efl  un  fchifle  verdâtre  mêle 
avec  beaucoup  de  mica.  On  a  découvert  dans  la  même  mijie  où  fe 
trouve  la  tourmaline,  dw  fchorl  vert ,  du  mica  couleur  de  cuivre  & 
de  couleur  verte  &  noire ,  en  grandes  lames ,  le  fchilie  talqueux  avec 
des  grenats,  le  vrai  talc  blanc  en  aflez  gros  morceaux.  Supplément  au, 
Journal  de   Phyfique  d'Odobre  ijSi^  pages  ^i  i  ù"  j;  i  2. 


DES    Minéraux.  567 

PIERRES    DE    CROIX. 

V/  N  obferve  clans  quelques  -  uns  des  faifctaux  ou 
groupes  criflaliifés  des  fcliorls ,  une  dirpofiuon  dans 
ieurs  aiguilles  à  fe  barrer  &  fe  croifer  les  unes  les 
autre  en  tout  fens,  en  toute  direction,  &  fous  toutes 
fortes  d'angles.  Cette  difpolition  a  fon  plein  efîèt  dans 
la  Pierre  de  croix ,  qui  n'ell  qu'un  groupe  forme  de 
deux  ou  quatre  colonnes  de  fchorl,  oppofées  &  croifces 
les  unes  fur  les  autres  ;  mais  ici ,  comme  dans  toute 
autre  forme  ,  la  Nature  n'efl  point  affervie  à  la  régula- 
rité géométrique  ;  les  axes  des  branches  croifées  de 
cette  pierre  de  croix  ne  fe  répondent  prcfque  jamais 
exa<5lement;  fes  angles  font  quelquefois  droits,  mais 
plus  fotivent  obliques  ;  il  y  a  même  plufieurs  de  ces 
pierres  en  lozange ,  en  croix  de  Saint  -  André  ;  ainfi 
cette  forme  ou  difpofition  des  colonnes  ,  dont  cette 
criflallifation  du  fchorl  efl  compofée,  n'efl  point  un 
phénomène  particulier,  mais  rentre  dans  le  fait  général 
de  l'incidence  oblique  ou  direde,  des  rayons  du  fchorl 
les  uns  fur  les  autres  :  les  prifmes ,  dont  les  branches 
de  la  pierre  de  croix  font  formées,  font  quadrangulaires, 
rhomboïdaux ,  &  fouvent  deux  de  leurs  bords  font  tron- 
qués. On  trouve  communément  ces  pierres  dans  le  fchifte 
micacé  (a) ,  ôl  la  plupart  paroiffent  incruflées  de  mica; 
(a)   Lettres  du  dodeur  Demefte ,  pa^es  2  /j?    Ù'  fuiv. 


568       Histoire  Naturelle 

peut-être  même  ce  mica  efl-il  entre  dans  leur  compo- 
fition,  &  en  a-t-ii  dcterminc  la  forme;  car  cette  pierre 
de  croix  eft  certainement  un  fchori  de  formation 
fecondaire. 

Mais  il  ne  faut  pas  confondre  ce  fchori  pierre  de 
croix  avec  la  ??îdcle ,  à  laquelle  on  a  donné  quelquefois 
ce  même  nom ,  &  que  plufieurs  Naturalises  regardent 
comme  un  fchori,  car  nous  croyons  qu'elle  appartient 
plutôt  aux  pctriiications  des  corps  organifés. 


STALACTITES 


DES    Minéraux.  569 

STALACTITES    VITREUSES 

NON    CRISTALLISEES. 

J_jES  cinq  verres  primitifs  font  les  matières  premières, 
clcic|ue!ies   feules    toutes    les   fubilauces   vitreufes  tirent 
leur  origine,  64.  de  ces  cinq  verres  Je  nature  il  y  en  a 
trois,    le   quartz,  le  IlU  -  {j)at[i   d^  le  fcliorl ,  dont  les 
extraits    font   tranfparens  ,    &    fe  présentent   en   formes 
criflailifces  ;  les  deux  autres,  /avoir,  le  mica  &:  le  jafpe 
ne  produisent  que  des  concrétions  plus  ou  moiiis  opaques, 
ci.  même  lorfquc  les  extraits  du  quartz,  du  fel d/j^ath  Si 
du  fchorl  le  trouvent  mêlés  avec  ceux   du  jafpe  Si.  du 
mica,  ils  perdent  plus  ou  moins  de  leur  tranfparence, 
&  fouvent  ils  prennent  une  entière  opacité.  Le  même 
effet  arrive  lorfque  les  extraits  tranfparens  de  ces  pre- 
miers verres  fe  trouvent  mêlés  de  matières  métalliques, 
qui  par  leur  effence  font  opaques  :   les  llaladiLes  tranf- 
parentes  du  quartz,  du  feld-fpath  &  du  fchorl,  peuNent 
Jonc  devenir  plus  ou  moins  obfcures ,    Si  tout- à- fait 
onaques,  fuivant  la  grande  ou  petite  quantité  de  matières 
étrangères  qui  s  y  feront  mêlées;  Si  comme  ks  com- 
J>inaifons  de  ces  mélanges  hétérogènes  font  en  nombre 
inlini,  nous  ne  pouvons  faifir  dans  cette  immenfe  variété 
que   les  principales  différences  de  leurs  réfukats,  &  eu 
préfenter  ici  les  degrés  les  plus  apparens  entre  lefquels 
Minéraux  ,  Tome  III,  C  c  c  c 


570  Histoire   Natu re lle 

on   pourra  fuppofcr   toutes    les   nuances   intermédiaires 
&  fuccefTives. 

En  examinant  les  matières   pierreu(es  fous  ce  point 
de  vue,   nous  remarquerons   d'abord  que  leurs  extraits 
peuvent  fe   produire   de   deux  manières    diiîérentes;    la 
première ,  par  une  exu dation  lente  des  parties  atténuées 
au   point   de  la   difTohnion  ;    &   la    féconde,    par    une 
flillation   abondante   <Sc   plus    prompte    de  leurs  parties 
moins  atténuées  &  non  difToutes;  toutes  fe  rapprochent, 
fe  réuniffent  &  prennent   de   la  /bliditc   à    meiure  que 
îeur  humidité  s'évapore;  mais  on  doit  encore  obferver 
que  toutes  ces  particules  pierreufes  peuvent  fe  dépofer 
dans  des  efpaces  vides ,  ou   dans   des    cavités  remplies 
d'eau:  fi  i'cfpace  efl  vide,  le  ixxc  pierreux  n'y  formera 
que  des  incruflations   ou  concrétions  en  couches  hori- 
zontales ou   inclinées,  fuivant  les  plans  fur   lefquels   il 
fè  dépofe;  mais  lor/que  ce  me  tombe  dans  des  cavités 
remplies  d'eau,  où  les  molécules  qu'il  tient  en  difTolu- 
tion  peuvent  fe  foutenir  &  nager  en  liberté,  elles  forment 
alors  des  criflallifations  qui,  quoique  de  la  même  effence, 
Ibnt  plus  tranfparentes   &   plus   pures  que  \es  matières 
dont  elles  font  extraites. 

Toutes  les  pierres  vitrcufes,  que  nous  avons  ci-devant 
indiquées,  doivent  être  regardées  comme  des  flala(5tites 
criftallifées  du  quartz,  du  feld-fpath  &  du  fchorl  purs, 
ou  feulement  mêlés  les  uns  avec  les  autres,  &  fouvent 
teints  de  couleurs  métalliques  :  ces  fîaladites  font  toujours 


DES  Minéraux,  571 

tranfparentes  lorfque  les  fucs  vitreux  ont  toute  leur  pureté  ; 
mais  pour  peu  qu'il  y  ait  mélange  de  matière  étrangère, 
elles  perdent  en  même  temps  partie  de  leur  tranfparence 
&  partie  de  leur  tendance  à  fe  criflallifer ,  en  forte  que 
la  Nature  paffe  par  degrés  infenfibles  de  la  criflallifàtion 
diftindte  à  la  concrétion  confufe ,  ainfi  que  de  la  par- 
faite diaphanéité  à  la  demi -tranfparence  &  à  la  pleine 
opacité  :  il  y  a  donc  une  gradation  marquée  dans  la 
fuccclTion  de  toutes  ces  nuances ,  &  bien  prononcée 
dans  les  termes  extrêmes  ;  les  ilalaélites  tranfparentes 
font  prcique  toutes  criftallifées,  &  au  contraire  la  pliîpart 
des  llaiaélites  opaques  n'ont  aucune  forme  de  criftalli- 
fuion ,  &  l'on  en  trouve  la  raifon  dans  la  loi  générale 
de  la  crillallifation  ,  combinée  avec  les  effets  particuliers 
des  diiférens  mélanges  qui  la  font  varier;  car  la  forme 
de  toute  criflallifation  efl  le  produit  d'une  attraélion 
régulière  &  uniforme  entre  des  molécules  homogènes 
&  fimilaircs;  &  ce  qui  produit  l'opacité  dans  les  extraits 
des  fucs  pierreux  ,  n'efl  que  le  mélange  de  quelque 
fubflance  hétérogène ,  &  fpécialement  de  la  matière 
métallique,  non  fnnplement  étendue  en  teinture  comme 
dans  les  pierres  tranfparentes  &  colorées,  mais  incor- 
porée c^  mêlée  en  fubdance  maifive  avec  la  matière 
pierreufe  :  or  la  puifTance  attractive  de  ces  molécules 
métalliques,  fuit  une  autre  loi  que  celle  fous  laquelle  les 
molécules  pierreufès  s'attirent  &  tendent  à  fe  joindre; 
ii  ne  peut  donc  rélulter  de  ce  mélange  qu'ime  attraclioii 

C  c  c  c  ij 


57-  H ISTO  1  R  E     N  ATU  RELLE 

confufe  dont  les  tendances  divcrfes  fe  font  réciproque- 
ment obitaclc ,  &  ne  permettent  pas  aux  molécules  de 
prendre  entr'elles  aucune  ordonnance  régulière:  &  il  en 
efl  de  même  du  mélange  des  autres  matières  minérales 
ou  terreu(ès,  trop  hétérogènes  pour  que  les  rapports 
d'attraction  puiflènt  être  les  mêmes  ou  fè  combiner 
enfemhle  dans  la  même  direciion  uns  fe  croifer ,  & 
nuire  à  l'efFet  général  de  la  cridallifation  &  de  la 
tranfparence. 

Aiin  que  la  criflallifation  s'opère,  il  faut  donc  qu'il 
y  .ait  allez  d'homogénéité  entre  les  molécules  pour 
qu'elles  concourent  à  s'unir  ibus  une  loi  d'affinité  corn- 
m.une  ,  &  en  même  temps  on  doit  leur  fup})ofcr  aiïez 
de  liberté  pour,  qu'obéiilant  à  cette  loi,  elles  puifTent 
fe  chercher,  fè  réunir  oc  fc  difpofer  entr'elles  dans  le 
rapport  combiné  de  leur  hgure  propre  avec  leur  puif- 
fance  attractive  ;  or  pour  que  les  molécules  aient  cette 
pleine  liberté,  il  leur  faut  non  -  feulement  l'e/pace,  le 
temps  &  le  repos  néceffaires ,  mais  il  leur  faut  encore 
ie  fecours,  ou  plutôt  le  foutien  d'un  véhicule  Piuide 
dans  lequel  elles  puifTent  fe  mouvoir  fans  trop  de  rélK- 
tance,  &  exercer  avec  facilité  leurs  forces  d'attradion 
réciproques:  tous  les  liquides,  &  même  l'air  &  le  feu, 
comme  fluides  ,  peitvent  fèrvir  de  foutien  aux  molé- 
cules de  la  matière  atténuée  au  point  de  la  diffolution. 
Le  feu  primitif  fut  le  fluide  dans  lequel  s'opéra  la  crif- 
lallifation du  feld-fpath  &  du  fcliorl';  la  criflallifation  des 


DES   Minéraux,  573 

régules  métalliques  s*opère  de  même  à  nos  feux,  par  le 
rapprochement  libre  des  molécules  du  métal  en  fufion 
par  le  fiuide  igné.  De  femblables  etiets  doivent  fë  pro- 
duire dans  le  fein  des  volcans  ;  mais  ca  criflalli/àtions, 
produites  par  le  feu,  font  en  trcs  -  petit  nombre  en 
comparai/on  de  celles  qui  font  formées  par  l'intermcde 
de  l'eau  :  c'efl;  en  efkt  cet  élément  qui ,  dans  l'état 
acltiel  de  la  Nature,  efl  le  grand  inflrument  &  le  véhi- 
cule propre  de  la  plupart  des  criflallifations  ;  ce  n'ell 
pas  que  l'air  &  les  vapeurs  aqueufes  ne  /oient  auffi  pour 
les  fiibftances  fufccptibles  de  fublimation,  des  véhicules 
également  propres,  &  des  liuides  très -libres  où  leur 
Griilallifàtion  peut  s'opérer  avec  toute  facilité  ;  6c  il  paroît 
cju'il  fe  fait  réellement  ainfi  un  grand  nombre  de  cril- 
tallifations  des  minéraux  renfermés  &  fublimés  dans  les 
cavités  de  la  terre;  mais  l'eau  en  produit  infiniment  plus 
encore,  &  même  l'on  peut  afTurer  que  cet  élément  feul, 
forme  aélueilement  prcfque  toutes  les  criflalli/àtions  des 
fubfîances  picrreufes ,   vitreufes  ou  calcaires. 

Mais  une  féconde  circonftance  effcntielle  à  laquelle 
il  paroît  qu'on  n'a  pas  fait  attention,  c'ell  qu'aucune 
criflaliifation  ne  peut  fe  faire  que  dans  un  bain  fluide, 
toujours  égal  &  conflamment  tranquille ,  dans  lequel  les 
molécules  diiToutcs  nagent  en  liberté  ;  &  pour  que  l'eau 
puiffe  former  ce  bain,,  il  efl  néceffaire  qu'elle  fbit  con- 
tenue en  allez  grande  quantité  &.  en  repos,  dans  des 
cavités  qui  en  fbiem  entièrement  ou  prefque  entièrement 


574  Histoire   Naturelle 

remplies.  Cette  circonftance  d'une  quantité  d'eau  qui 
puiiTe  faire  un  bain  efl  fi  néccffaire  à  la  cridaili/àtion , 
qu'il  ne  fèroit  pas  pofîible  fans  cela  d'avoir  une  k[ée 
nette  des  effets  généraux  <Sc  particuliers  de  cette  opéra- 
tion de  la  Nature;  car  la  criflalliiàtion,  comme  on  Aient 
de  le  voir,  dépend  en  général  de  l'accefTion  pleinement 
libre  des  molécules  les  unes  vers  les  autres ,  &  de  leur 
tranfport  dans  un  équilibre  affez  parfait  pour  qu'elles 
puiffcnt  s'ordonner  fous  la  loi  de  leur  puiffance  atiraélive, 
ce  qui  ne  peut  s'opérer  que  dans  un  Huide  abondant 
&  tranquille:  <Sc  de  même,  il  ne  feroit  pas  poffible  de 
rendre  raifbn  de  certains  effets  particuliers  de  la  criflal- 
lifation,  tel  par  exemple,  que  le  jet  en  tout  fens  des 
aiguilles  dans  un  groupe  de  criftal  de  rocbe ,  fans  fuppofèr 
un  bain  ou  maffe  d'eau,  dans  laquelle  puiffe  fe  fornire 
ce  jet  de  criflallifation  en  tout  fens  ;  car  fi  l'eau  tombe 
de  la  voûte,  ou  coule  le  long  des  parois  d'une  cavité 
vide,  elle  ne  produira  que  des  concrétions  ou  guhrs , 
néceffairement  étendus  &  dirigés  dans  le  /èul  fens  de 
l'écoulement  de  l'eau  qui  fe  fait  toujours  de  haut  en 
bas  ;  ainfi  cet  effet  particulier  du  jet  des  criftaux  en 
tout  fens,  auffi-bien  que  l'efîet  général  &i  combiné  de 
la  réunion  des  molécules  qui  forment  la  criflallifation, 
ne  peuvent  donc  avoir  lieu  que  dans  un  volume  d'eau 
qui  rempiiffe  prcfque  entièrement  &  pendant  un  long 
temps,  la  capacité  du  lieu  où  fe  produi/ent  les  criflaux. 
Les   Anciens  avoient  remarqué    avant  nous ,    que  les 


DES   Minéraux,  575 

grandes  mines  de  criflal  ne  fe  trouvent  que  vers  les 
liants  foinmets  des  montagnes,  près  des  neiges  &  des 
glaces,  dont  la  fonte  qui  fe  fait  contintiellement  en- 
deifous  par  la  chaleur  propre  de  la  terre,  entretient  un 
perpétuel  écoulement  dans  les  fentes  &  les  cavités  des 
rochers;  &  on  trouve  même  encore  aujourd'hui  en 
ouvrant  ces  cavités  auxquelles  on  donne  le  nom  de 
cr'ijliillicres ,  des  relies  de  l'eau  dans  laquelle  s'cfl  opérée 
la  criliallilation;  ce  travail  n'a  ceiTé  que  quand  cette  eau 
s'efl  écoulée,  &  que  les  cavités  font  demeurées  vides. 

Les  fpaths  crillailifés  dans  les  fentes  &  cavités  des 
bancs  calcaires,  fe  font  formés  de  la  même  manière  que 
les  crifiaux  dans  les  rochers  vitreux  :  la  figuration  de 
ces  fpaths  enrhombes,  leur  polition  en  tout  fens,  ainfi 
que  le  mécanifme  par  lequel  leurs  lames  fe  font  fuccef- 
livement  appliquées  les  unes  aux  autres,  n'exigent  paî> 
moins  la  fluctuation  libre  des  molécules  calcaires  dan^ 
im  fluide  qui  leur  permette  de  s'appliquer  dans  toui 
les  fens,  fuivant  les  loix  de  leur  attraélion  refpcélive; 
ainfi  toute  crillallifàtion ,  foit  dans  les  matières  vitreufès, 
foit  dans  les  fubflances  calcaires ,  fuppofe  néceffairement 
im  fluide  ambiant  &  tranquille,  dans  lequel  les  molé- 
cules diffoutes  foient  foutenues  &  puiffent  fè  rapprocher 
en  liberté. 

Dans  les  lieux  vides  au  contraire,  où  les  eaux  flillantes 
tombent  goutte  :i  goutte  des  parois  &  des  voûtes,  les 
fucs  vitreux  &  calcaires  ne  forment  ni  criflaux  ni  fpaths 


57^  Histoire  Naturelle 

réguliers,  mais  feulement  des  concrétions  ou  congela^ 
lions,  Icfquelles  n'offrent  qu'une  ébauche  &  des  rudimens 
de  criliallifation  ;  la  forme  de  ces  congélations  efî  en 
général  arrondie ,  tubuléc ,  &  ne  prcjfènte  ni  faces  planes, 
ni  angles  réguliers ,  parce  que  les  particules  dont  elles 
font  compoiccs,  ne  nageant  pas  librement  dans  le  fluide 
qui  les  charrie ,  elles  n'ont  pu  des-lors  fe  joindre  uni- 
formément, &  n'ont  produit  que  des  agrégats  confus 
fous  mi  11'.^  formes  indéterminées. 

Après  cet  expofé  que  j'ai  cru  néccifairc  pour  donner 
une  idée  nette  de  la  manière  dont  s'opère  la  criftalli/à- 
tion,  &  iaire  fèntir  en  même  temps  la  diiîcreiice  effentielle 
qui  fe  trouve  entre  la  formation  des  concrétions  &  des 
criflallifations ,  nous  concevrons  aifément  pourquoi  la 
plupart  des  ilalaclites  dont  nous  allons  donner  la  defcrip- 
tion,  ne  font  pas  des  crilialliiations,  mais  des  concrétions 
demi-tranfparentes  ou  opaques ,  qui  tirent  également  leur 
origine  du  quartz,  du  feld-fpadi  à  du  fchorl. 


AGATES, 


DES  Minéraux. 


577 


tm 


AGATES. 

Jtarmi  les  pierres  demi  -  tranfparentes ,  les  agates,  les 
cornalines  &  les  farcloines  tiennent  le  premier  rang;  ce 
font,  comme  les  criflaux,  des  ftaladites  quartzeufes,  mais 
dans  lefquelles  le  fuc  vitreux  n'a  pas  été  afTez  pur,  ou 
aflez  libre  pour  fè  criflallifer  &  prendre  une  entière 
tranfparence:  la  denfité  de  ces  pierres  fa)^  leur  dureté, 
leur  rcfiftance  au  feu  &  à  ra6tion  des  acides,  font  à 


{aj  Pefanteur  fpécifique  du  quartz. 

2644.6. 

du  criflal  de  roche  d'Europe. 

2654.8. 

de  l'agate  orientale.  26901. 

.  de  l'agate  iiue'e.  .  •  26253. 

de  l'agate  ponc^ue'e.  26070. 

de  l'agate  tachée.  .  2.6324. 

— —  de  l'agate  veme'e. .    2666y. 
—— de  l'agate  onix ...  .    26375. 

de  l'agate  herborifée.   25891. 

de  l'agate  moufleufe.    25991. 

-,  —  de  l'agate  jafpée ...    263  5  6. 
de  la  cornaline. .  .    261  37. 

—  de  la  cornaline  pâle.   26301. 

—  de   la   cornaliiie    pondluée , 

26120. 

filmé fau;<.  Tome  UL 


Pefanteur  fpécifique  de  la  corna- 
line veinée.  ...    26234. 

de  la  cornaline  onix.    26227. 

——de  la   cornaline  herborifée.; 

26133. 

de  la  cornaline  en  flaladite. 

25977. 

■  de  la  fardoine....    26025. 

de  la  fardoine  pâle.    26060. 

— —  de     la    fardoine    poni^uée.) 

2621  5. 

——— de  la  fardoine  veinée.  25951» 

de  la  fardoine  onix .    2  5949. 

— —  de   la    fardoine   herborifée.; 

25988. 

——  de    la    fardoine     noirâtre.; 

26284, 

Voyez  la  Tahk  de  M.  Brijfoni 


578        Histoire   Natu relle 

très -peu -près  les  mêmes  que  celles  du  quartz  &  du 
criftal  de  roche:  la  très-petite  différence  qui  fe  trouve 
en  moins  dans  leur  pefanteur  fpécifique,  relativement  à 
celle  du  criflal ,  peut  provenir  de  ce  que  leurs  parties 
conftituantes  n'étant  pas  aufTi  pures,  n'ont  pu  fe  rap- 
procher d'aufli  près  ;  mais  le  fond  de  leur  fubflance  efl 
de  la  même  efTence  que  celle  du  quartz  ;  ces  pierres 
en  ont  toutes  les  propriétés,  &  même  la  demi-tranf- 
parence,  en  forte  qu'elles  ne  diffèrent  des  quartz  de 
féconde  formation  que  par  les  couleurs  dont  elles  font 
imprégnées,  &  qui  proviennent  de  la  diffolution  de 
quelque  matière  métallique  qui  s'efl  mêlée  avec  le  fuc 
quartzeux  ;  mais  loin  d'en  augmenter  la  maffe  par  un 
mélange  intime,  cette  matière  étrangère  ne  fait  qu'en 
étendre  le  volume  en  empêchant  les  parties  quartzeufes 
de  fe  rapprocher  autant  qu'elles  fe  rapprochent  dans  les 
criflaux. 

Les  agates  n'afïèétent  pas  autant  que  les  cailloux  la 
forme  globuleufe  ;  elles  fe  trouvent  ordinairement  en 
petits  lits  horizontaux  ou  inclinés,  toujours  affez  peu 
épais  &  diverfement  colorés  ;  &  l'on  ne  peut  douter 
que  ces  lits  ne  fbient  formés  par  la  flillation  des  eaux; 
car  on  a  obfervé  dans  plufieurs  agates  des  gouttes  d'eau 
très-fenfibles  (bj ;  d'ailleurs,  elles  ont  les  mêmes  caractères 


(b)  A  Conftantinople,  M.  i'AmbafTadeur  me  fit  voir  des  manches 
de  couteaux  d'agate,  dont  l'un  avoit  dedans  une  eau  qui  jouoii,  & 


DES     AI  I  N  É  R  AV  X.  579 

que  tous  les  autres  fécJimens  de  la  flillaiion  des  eaux; 
on  donne  le  nom  (ïonix  à  celles  qui  préfenieut  diffé- 
rentes couleurs  en  couches  ou  zones  bien  diflindes  : 
dans  les  autres,  les  couclies  font  moins  apparentes,  & 
les  couleurs  font   plus   brouillées,  même   dans   chaque 

qui  femhloit  à  un  ver  noir  qui  fe  feroit  remué.  Voyages  de  Atori' 
conys ;  Lyon,  j^^j,  page  ^  2 (j ,  Première  partie. —  Je  conjedure  , 
dit  M.  de  Bondaroy,  que  dans  les  agates  la  furface  extt'rieure 
s'ctant  durcie  la  première  ,  l'eau  pétrifiante  %'e'ii  dépofée  inté- 
rieurement; cette  eau  a  prefque  rempli  la  capacité  de  ces  pierres, 
il  eft  reflé  une  bulle  d'air  qui  a  produit  le  même  effet  que  dans  les 
tubes  qui  fervent  de  niveau  ;  une  preuve  que  cette  bulle  efl:  de  l'air 
qui  nage  dans  l'eau,  c'eft  qu'en  tournant  la  pierre,  la  bulle  plus 
légère  que  l'eau,  monte  &  gagne  la  partie  la  plus  élevée  de  la  pierre; 
fi  vous  la  retournez,  la  bulle,  du  bas  où  vous  l'avez  portée,  remonte 
encore  à  la  partie  fupérieure  de  l'agate  ;  la  bulle  change  un  peu  de 
forme  dans  les  différens  mouvemens  qu'on  lui  fait  éprouver  ;  enfin , 
ces  pierres  produifent  le  même  eflTet  que  les  niveaux  d'eau  à  bulles 
d'air;  &  je  crois  que  ceux  qui  ont  parlé  de  ce  fait  dans  les  criftaux, 
ne  l'ont   pas  expliqué  de   cette   manière   faute  d'avoir  été  à  portée 

d'examiner  des  pierres  où  il  fe  rencontroit J'ai  vu  le  même 

fait  dans  les  morceaux  d'ambre  ;  enfin,  je  l'ai  obfervé  dans  une  partie 
de  glace  où  ii  s'éioit  rencontré  une  bulle  que  l'on  pouvoit  faire 
mouvoir .... 

Cette  eau  fe  dépofe  avec  le  temps,  &  forme  des  criftallifations 
dans  l'intérieur  des  agates,  dès-lors  le  phénomène  difparoît ,  &  je 
n'ai  plus  trouvé  d'eau  dans  les  pierres  qui  n'avoient  plus  de  bulles. . . . 
Je  crois  devoir  ajouter  ici  qu'au  lieu  de  bulles  d'air  ou  d'eau ,  je 
connois  des  agates  qui,  dans  leur  intérieur,  renferment  des  grains 
de  fable  qui  fe  meuvent  dans  ces  pierres.  Voyei  les  Mémoires  de 
V Académie  des  Sciences,  année  ijy^'T^è^^  éSyàrfuiv. 

Dddd  ij 


580        Histoire    Natu relle 

couche,  &  il  n'y  a  aucune  agate,  fï  ce  n'efl  en  petil 
volume,  dont  la  couleur  foit  uniforme  &  la  mcme  clans 
toute  Ton  cpaifTeur,  ce  qui  prouve  que  ia  matière  dont 
les  agates  font  formées  n'efl  pas  fimple,  &  que  le  quartz 
qui  domine  dans  leur  compofition ,  efl  mêlé  de  parties 
terraifès  ou  métalliques  qui  s'oppofent  à  la  criflallifàtion, 
ÔL  donnent  à  ces  pierres  les  diverfes  couleurs  &  leâ 
teintes  variées  qu'elles  nous  préfentent  à  la  furface  & 
Jans  l'intérieur  de  leur  mafTe. 

Lorfque  le  fuc  vitreux  qui  forme  les  agates  fe  trouve 
en  liberté  dans  un  efpace  vide,  il  tombe  fur  le  fol  oii 
s'attache  aux  parois  de  cette  cavité,  &  y  forme  quel- 
quefois des  maffes  d'un  aifez  grand  volume  (c) ;  il  prend 

(c)  Du  côté  de  Pinczovia  &  de  Niefvetz  en  Lithuanie,  on  trouve 
quelques  agates  onix ,  des  fardoines ,  des  calcédoines ,  &  une  pierre 
qu'on  pourroit  peut-être  regarder  comme  une  aventurine.  Le  fond 
de  cette  pierre,  dit  M.  Guettard  ,  efl:  blanc,  gris,  brun,  rouge  ou 
de  quelqu'autre  couleur,  &  parfemé  d'une  quantité  de  petites  paillettes 
argentées  ou  dorées.  J'ai  vu  de  toutes  ces  pierres  travaillées  en  taba- 
licres,  pommes  de  canne,  poignées  de  fabre,  taflès,  foucoupes,  &c, 
en  un  mot  on  fait,  dans  les  manufadlures  du  prince  Radzivil,  travailler 
ces  pierres  avec  beaucoup  de  foin,  &  on  leur  donne  un  trts-beau 
poli  ;  il  eft  depuis  peu  lorti  de  cette  manufadure ,  un  c^tbaret  à  café 
dont  le  plateau  eft  d'un  feul  morceau  d'une  de  ces  pierres  ,  &  affez 
grand  pour  qu'on  puifle  y  placer  fix  taiïes  avec  leurs  foucoupes, 
la  cafetière,  &  même  unethéyère,  qui  font  tous  d'une  pareille  pierre; 
ce  cabaret  a  été  préfenté  au  roi  de  Pologne  par  le  prince  Radzivil, 
J^.  Guettard ,  Mémoires  de  V Académie  des  Sciences,  année  17^2^ 
page  2^^, 


DES    Minéraux.         581 

les  mêmes  formes  que  premient  toutes  les  autres  con- 
crétions ou  flala<flites  ;  mais  lorfqu'il  rencontre  des  corps 
figurés  &.  poreux ,  comme  des  os ,  des  coquilles  ou 
des  morceaux  de  bois  dont  il  peut  pénétrer  la  fubfiance, 
ce  fuc  vitreux  produit,  comme  le  fuc  calcaire,  des 
pétrifications  qui  confervent  &  préfentent  tant  à  l'extérieur 
qu'à  l'intérieur,  la  forme  de  l'os  ("JJ,  de  la  coquille  & 

du  bois  (^^/. 

I  -      ■  ...      I  ■  ■  ^ 

{dj  J'ai  vu  dans  un  Cabinet  à  Livourne,  dit  M.  de  la  Condamine, 
un  fragment  de  mâchoire  d'éléphant,  pétrifié  en  agate,  pefant  près 
de  vingt  livres.  J'ai  parlé  ailleurs  d'une  dent  molaire  (  on  ne  fait  de 
quel  animal  )  du  poids  de  deux  ou  trois  livres  ,  pareillement  con- 
vertie en  agate ,  trouvée  au  Tucuman ,  dans  l'Amérique  méridionale 
où  il  n'y  a  point  d'éléphans.  Mémoires  de  l'Académie  des  Sciences, 
cnnée  17^7,  jxigi  34^- 

(e)  Ce  qui  m'a  le  plus  frappé  à  Vienne,  dans  le  Cabinet  de  l'Em- 
pereur,  dit  M.  Guettard,  eft  une  cjuantité  de  morceaux  de  bois 
pétrifié ,  qui  [font  devenus  plus  'ou  moins  agates ,  &  qui  varient  par 
les  couleurs;  les  uns  font  bruns,  d'autres  blanchâtres,  gris,  ou  autre- 
ment colorés  ;  un  de  ces  morceaux  qui  efl:  agatifié  dans  le  centre 
&  par  un  bout,  eft  encore  bois  par  l'autre  bout;  on  prétend  même 
qu'il  s'enflamme  dans  cette  partie,  nous  n'en  fimes  point  l'expérience, 
elle  fut  propofée.  Ces  bois  pétrifiés  font  ordinairement  des  rondins 
de  plus  d'un  demi-pied  ou  d'un  pied  de  diamètre;  quantité  d'autres 
ont  plufieurs  pieds  de  longueur ,  &  font  d'une  grofleur  confidérable^ 
ils  prennent  tous  un  poli  beau  &  brillant.  Idem,  année  176^, 
ipage  2rj.  —  Dans  les  terres  du  duc  de  Saxe  -  Cobourg ,  dit  M. 
Schepflin  ,  qui  font  fur  les  frontières  de  la  Franconie  &  de  la  Saxe, 
à  quelques  lieues  de  la  ville  de  Cobourg  même ,  on  a  déterré  depuis 
peu,  à  une  petite  profondeur,  des  arbres  entiers  pétrifiés,  mais  pétrifiés 
4  un  point  de  perfedion  ;  qu'en  uavaillant  on  trouve  que  cela  fait 


582      Histoire    Naturelle 

Quoique  les  Lapidaires,  <Sc  d'après  eux  nos  Naturali/îes, 
aient  avancé  qu'on  doit  diflinguer  les  agates  en  orientales 
&  occidentales,  il  efl  néanmoins  très-certain  qu'on  trouve 
dans  l'Occident,  &  notamment  en  Allemagne,  d'auffi 
belles  agates  que  celles  qu'on  dit  venir  de  l'Orient,  & 
de  même,  il  efl  très -fur  qu'en  Orient  la  plupart  des 
agates  font  entièrement  femblables  à  nos  agates  d'Europe: 
on  peut  même  dire  qu'on  trouve  de  ces  pierres  dans 
toutes  les  parties  du  monde,  &  dans  tous  les  terreins 
où  le  quartz  &  le  granit  dominent,  au  nouveau  continent 
comme  dans  l'ancien,  &.  dans  les  contrées  du  Nord 
comme  dans  celles  du  Midi  ;  ainfi  la  diflinétion  d'orien- 
tale &  d'occidentale  ne  porte  pas  fur  la  différence  du 
climat ,  mais  feulement  fur  celle  de  la  netteté  <&.  de  l'éclat 

une  pierre  aufli  belle  &  aufli  dure  que  l'agate.  Les  princes  de  Saxe 
qui  ont  pafle  ici  m'en  ont  donné  quelques  morceaux ,  dont  j'ai 
l'honneur  de  vous  envoyer  deux  pour  le  Cabinet  du  Jardin  royal: 
ils  m'ont  montré  de  belles  tabatières ,  des  couteaux  de  chafTe  &  des 
boîtes  de  toutes  fortes  de  couleurs ,  faites  de  ces  pétrifications  :  fi  les 
morceaux  ne  font  pas  de  conféquence ,  vous  verrez  pourtant  par-là 
mon  attention  à  fatisfaire  à  vos  defirs.  Lettres  de  Ai.  Schepfiin  à 
Aï.  de  Buffon ;  Strajhourg ,  2 y  Septembre  iy^6.  —  On  a  trouvé, 
dit  M.  Neret  fils,  dans  une  montagne,  qui  eft  auprès  du  village  de 
Séry,  en  creufant  à  la  fource  d'une  fontaine,  une  très-grande  quantité 
de  bois  pétrifié  qui  étoit  dans  un  fable  argileux.  Ces  bois  ne  font 
point  efFervefcence  avec  les  acides;  Oi\  y  diltingue  très-bien  l'endroit 
qui  a  été  recouvert  par  l'écorce,  il  efl  toujours  convexe,  &  confi- 
dérablement  piqué  de  vers  qui  ,  après  avoir  fiUonné  entre  l'écorce 
&  le  bois,  traverfent  toute  l'épaifleur  du  morceau,  &  y  font  agatifés. 
Journal  de  Phyfique  ;  Avril  i  y8 1 ,  page  ^  0 ^ . 


DES   Minéraux.  583 

de  certaines  agates  plus  belles  que  les  autres:  néanmoins 
i'eflence  de  ces  belles  agates  efl  la  même  que  cdk  des 
agates  communes  ;  car  leur  pefanteur  fpéciiique  &  leur 
dureté  font  auffi  à  peu-près  les  mêmes  ("fj. 

L'agate,  fuivant  Théophrafte,  prit  Ton  nom  du  fleuve 
Achates  en  Sicile,  où  fiirent  trouvées  les  premières 
agates;  mais  l'on  ne  tarda  pas  à  en  découvrir  en  diverfes 
autres  contrées,  &  il  paroît  que  les  Anciens  connurent 
les  plus  belles  variétés  de  ces  pierres,  puifqu'ils  les 
avoient  toutes  dénommées  (g) ,  &  que  même  dans  ce 
nombre,  il  en  efl  quelques-unes  qui  femblent  ne  fe  plus 
trouver  aujourd'hui  (h):  quant  aux  prétendues  agates 
odorantes,   dont    parlent  ces   mêmes  Anciens  (i) ,  ne 

(f)  Voyez  ci-deflus  la  Table  des  pefameurs  Ipccifiques  des  diverfes 
agates. 

(g)  Pha(facates ,  cerachates,  fardachatcs ,  harnachâtes ,  Uucachaies  r- 
dendrochates ,  corallochaies ,  à^c. 

(h)  Entr'auires  celle  qui,  félon  Pline,  étoit  parfemée  de  points  d'or 
(à  moins  que  ce  ne  foit  i'aventurine  ),  comme  le  lapis  (  Pline  dit  le 
faphir ;  mais  nous  verrons  ci-après  que  Ion  faphir  elt  notre  lapis), 
Ù"  fe  trouvait  abondamment  dans  l'île  de  Crète.  Celles  de  Lefios  &  de 
JVIefsene ,  ainfi  que  du  Alont  (Eta  Ù"  du  Alont  Parnajfe  qui ,  par 
l'éclatante  variété  de  leurs  couleurs ,  fembloient  le  difputer  à  l'émail  des 
Jleurs  champêtres  ;  celle  d'Arabie,  qui,  excepté  fa  dureté,  avoit  toute 
i' apparence  de  l'ivoire Ù'  en  offroit  toute  la  blancheur.  Pline,  liv.  xxxvii, 

n."  54. 

(i)  Aromatites  &  Ipfa  in  Arabiâ  traditur  gigni ,  fed &  in  ^Egypto  circa 
Pifas  ubique  lapidofa  Ù"  myrrhœ  coloris  &  odoris ,  ob  hoc  Riginis  fre- 
quentata.  Plin.  loc.  cit,  &  auparavant  il  avoit  dit,  autachates ,  cùm 
uritur,  wyrrham  redolcns. 


584        Histoire  N aturelle 

doit  -  on  pas  les  regarder  comme  des  bitumes  con- 
crets, de  la  nature  du  jayet,  auquel  on  a  quelquefois 
donné,  quoique  très  -  improprement ,  le  nom  (ï agate 
7ioire  !  ce  n'efl  pas  néanmoins  que  ces  fucs  bitumineux 
ne  puiflent  s'être  infjnués,  comme  fubflance  étrangère, 
ou  même  être  entrés,  comme  parties  colorantes,  dans 
la  pâte  vitreufe  des  agates  lors  de  leur  concrétion. 
M.  Dutens  afTure  à  ce  fujet,  que  fi  Y  on  racle  dans  Jei 
agates  herborifées  les  linéamens  qui  en  forment  i'her- 
borifation,  &  qu'on  en  jette  la  poudre  fur  des  charbons 
ardens,  éXç,  donne  de  la  fumée  avec  une  odeur  bitu- 
mineufè.  Et  à  l'égard  de  ces  accidens  ou  jeux  d'her- 
borifations,  qui  rendent  quelquefois  les  agates  fnigulières 
&  précieufès,  on  peut  voir  ce  que  nous  en  dirons 
çi-après  à  l'article  des  cailloux. 


CORNALINE. 


DES    Minéraux.  585 

CORNALINE. 

V^OMME  les  agates  d'une  feule  couleur  font  plus  rares 
que  les  autres,  on  a  cru  devoir  leur  donner  des  noms 
particuliers  :  on  appelle  Cornalines ,  celles  qui  font  d'un 
rouge  pur;  fardoincs,  celles  dont  la  couleur  ed;  jaune 
ou  d'un  rouge  mêlé  de  jaune  ;  yrafts ,  les  agates  vertes  ; 
&  calcédoines,  les  agates  blanches  ou  d'un  blanc-bleuâtre. 

Quoique  le  nom  de  cornaline ,  que  l'on  écrivoit  autre- 
fois carnéole ,  paroiffc  défigner  une  pierre  couleur  de 
chair,  &  qu'en  effet,  il  fe  trouve  beaucoup  de  ces 
agates  couleur  de  chair  ou  rougeâtres  ,  on  reconnoît 
néanmoins  la  vraie  cornaline  à  fà  teinte  A'mw  rouge  pur, 
^  à  la  tranfparence  qui  ajoute  à  fon  éclat  ;  les  plus  belles 
cornalines  font  celles  dont  la  pâte  eft  la  plus  diaphane,  & 
dont  le  rouge  a  le  plus  d'intenfitc:  &  de  ce  rouge  inten/e 
jufqu'au  rouge  -  clair  &  couleur  de  chair,  on  trouve 
toutes  les  nuances  intermédiaires  dans  ces  pierres. 

La  cornaline  n'elt  doiic  qu'une  beJJe  agare  plus  ou 
moins  rouge ,  &  la  matière  métallique  qui  iui  donne 
cette  couleur  n'augmente  pas  fa  denlité ,  &.  ne  lui  ôte 
pas  /a  tranfparence  ;  c'efl  ce  qui  la  diflingue  des  cailloux 
rouges -opaques,  qui  font  en  général  de  même  effence 
que  les  agates,  mais  dont  la  fubiiance  eft  moins  pure, 
&  a  reçu  fa  teinture  par  àt^  parties  métalliques  plus 
jrrolTières  &  moins  atténuées  :  ce  font  les  rouilles  ou 
ATméraux,  Tome  lîL  E  e  ee 


586         Histoire    Naturelle 

chaux  de  fer,  de  cuivre,  &c.  plus  ou  moins  difToutes 
qui  donnent  la  couleur  à  ces  pierres,  &  l'on  trouve 
toutes  les  nuances  de  couleur ,  &  même  toutes  les 
couleurs  différentes  dans  les  cailloux  auffi-bien  que  dans 
les  agates;  il  y  a  même  plufieurs  agates  onix ,  dont  les 
différens  lits  préfentent  fuccefTivement  de  l'agate  blanche 
ou  noire,  de  la  calcédoine,  de  la  cornaline,  &c.  on 
recherche  ces  onix  pour  en  faire  des  camées;  les  plus 
beaux  font  ceux  dont  les  reliefs  font  de  cornaline  fur 
un  fond  blanc. 

Il  en  eft  des  belles  cornalines  comme  des  belles  agates; 
elles  font  auffi  rares  que  les  autres  font  communes  :  on 
trouve  fouvent  des  ftala6lites  de  cornalines  en  mamelons 
accumulés  &  en  affez  grand  volume  ;  mais  ces  cornalines 
font  ordinairement  impures,  peu  tranfparentes ,  &  d'un 
rouge  faux  ou  terne.  On  connoît  auffi  des  agates  qui 
font  pQn(5tuées  &  comme  femées  de  particules  de  cor- 
nal'ine ,  formant  des  petits  mamelons  rouges  dans  la 
fubftance  de  l'agate  ,  &  certaines  cornalines  font  elles- 
mêmes  femées  de  points  d'un  rouge  plus  vif  que  celui 
de  leur  pâte  ;  mais  la  nature  de  toutes  ces  pierres  eft 
abfolument  la  même  ;  &  l'on  trouve  des  cornalines  dans 
ia  plupart  des  lieux  d'où  l'on  tire  les  agates,  foit  en 
Afie  (<^) ,  foit  en  Europe  &.  dans  les  autres  parties 
du  monde. 

(a)   Dans  VYémen ,  fur  le  chemin  entre  Taœs  &  le  Mont  Sumara, 
©n  voit  ia  pierre  akjk'jemani ,  qui  eft  d'un  rouge-foncc ,  ou  plutôt 


DES     Minéraux.  587 

(Tun  brun- clair,  qu'on  nomme  quelquefois  fimpleinent  yV/w^w/'  ou 
akjk ,  on  la  tire  principalement  de  la  montagne  Hirran  prés  de  la 
ville  Damar.  Les  Arabes  la  font  enchâfler,  &.  la  portent  au  doigt  ou 
au  bras,  au-deflus  du  coude,  ou  à  la  ceinture  au-devant  du  corps, 
&  on  croit  qu'elle  arrête  le  fang  quand  on  la  met  fur  la  plaie.  .  .  . 
On  trouve  louvent  des  pierres  fort  reflemblantes  à  Vakjk  ou  à  la 
cornaline,  parmi  celles  de  Camboye ,  qu'on  nomme  pierre  de  mockha, 
&  dont  on  porte  une  grande  quantité  de  Surate  ,  tant  à  la  Chine 
qu'en  Europe.  Defcr'ipîion  de  l'Arabie,  par  AI.  Niebuhr,  page  12^. 
Les  plus  belles  cornalines  font  celles  que  l'on  apporte  des  environs 
de  Babylone  ;  enluite  viennent  celles  de  Sardaigne  ;  les  dernières 
font  celles  du  Rhin,  de  Bohème  &  de  Siléfie;  pour  leur  donner  le 
plus  grand  brillant,  on  met  defibus,  en  les  montant,  une  feuille 
d'argent.  Diélionnaire  Rncydopédique  de  Chambcrs. 


E  e  e  e  i  j 


5S3        Histoire    Naturelle 


S  A  R  D  0  I  N  E. 


L 


A  Sardoine  ne  diffère  de  la  cornaline  que  par  fa 
couleur  qui  n'eft  pas  (ï\m  rouge  pur,  mais  d'un  rouge- 
orangé,  &  plus  ou  moins  mêlé  de  jaune;  néanmoins 
cette  couleur  orangée  de  la  fardoine,  quoique  moins 
vive,  efl  plus  fiiave,  plus  agréable  à  l'œil  que  ie  rouge 
dur  &  fcc  de  la  cornaline  ;  mais  comme  ces  pierres 
font  de  la  même  effence,  on  paiïe  par  nuances  de 
l'orangé  le  plus  foible  au  rouge  le  plus  intenfé,  c'efî- 
à-dire,"  de  la  fardoine  la  moins  jaune  à  la  cornaline  la 
plus  rouge  ,  &i  l'on  ne  diflingue  pas  l'une  de  l'autre 
dans  les  teintes  intermédiaires  entre  l'orangé  &  le  rouge, 
car  ces  deux  pierres  ont  la  même  tranfparence,  &  leur 
denfité,  leur  dureté  &  toutes  leurs  autres  propriétés  font 
les  mêmes  ;  enfin ,  toutes  deux  ne  font  que  de  belles 
agates  teintes  par  le  fer  en  dilTolution. 

La  fardoine  efl  très-anciennement  connue  ;  Mithri- 
date  avoit,  dit-on,  ramaffé  quatre  mille  échantillons  de 
cette  pierre,  dont  le  nom,  fuivant  certains  Auteurs, 
vient  de  celui  de  l'île  de  Sardaigne ,  où  il  s'en  trouvoit 
en  affez  grande  quantité  :  il  paroît  que  cette  pierre  étoit 
en  grande  eflime  chez  les  Anciens  (a) ;  elle  efl  en  effet 

(a)  Polycrate,  tyran  de  Samos,  croyoit  expier  fuffifamment  le 
bonheur  dont  la  fortune  s'étoit  plue  conflamment  à  le  combler ,  par 
le  facrifice  volontaire  d'une  fardoine  qu'il  jeta  dans  la  mer,  &  qui 


DES   Minéraux,  589 

plus  rare  que  la  cornaline ,  &  fe  trouve  rarement  en  aiiffi 
grand  \'oiume. 

fut  retrouvée  dans  les  entrailles  d'un  poiflbn  deiliné  pour  la  table  de 
ce  tyran.  Pline,  livre  xxxvil,  chap,   i. 


FRASE. 

V^ETTE  pierre  a  été  auffi  célébrée  par  les  Anciens; 
c'eft  une  agate  verte  ou  verclâtre  ,  fouvent  tachée  de 
blanc,  de  jaunâtre,  de  brun,  &  qui  cfl  quelquefois 
aufTi  tranfparente  que  les  belles  agates  dont  elle  ne  diffère 
que  par  le  nom:  les  Prafes  ne  font  pas  fort  communes, 
cependant  on  en  trouve  non  -  feulement  en  Afic,  mais 
en  Europe,  &  particulièrement  en  Siléfie.  M.  Lehman 
a  donne  Thifloire  &  la  defcription  de  cette  prafe  de 
Siléfie,  ainfi  que  de  la  chryfoprafe  du  même  pays,  qui 
n'efl  qu'une  prafe  dont  la  couleur  verte  eft  mêlée  de 
jaune  faj.  Ce  favant  Minéralogifle  dit  qu'on  trouve  les 
prafes  &  les  chryfoprafes  dans  une  terre  argileufe  verte, 
&  fouvent  mclée  d'opales ,  de  calcédoines  &  d'afbcfle  ; 
<Sl  comme  elles  font  à  très-peu-près  de  la  même  pefan- 
leur  fpécifique  f/>J^  &  qu'elles  ont  Ja  même  dureté,  Sl 
prennent  le  même  poli  que  les  agates,  on  doit  les  mettre 

{aj  Mémoires  de  l'Académie  de  Berlin,  ûnna  i /JJ' 
(b)  La  pefanteur  fpécifique  de  l'agate  o^entale  eft  de  250^1,  & 
celle  de  la  prafe  eft  de  2  5  8  o  5 . 


590       Histoire    Naturelle 

au  nombre  des  agates  colorées  ;  la  cornaline  l'efl  de 
rou'T-e,  la  fardoine  de  jaune-orange,  &  la  prafe  l'eft  de 
vert.  M.  Dcmefte  penfe  que  cette  couleur  verte  de  la 
prafe,  provient  du  mélange  du  cobalt,  parce  que  cette 
pierre  étant  fondue  avec  deux  parties  de  borax  elle 
produit  un  beau  verre  bleu  (c) ;  mais  peut-être  cette 
couleur  bleue  provient  du  borax  qui ,  comme  je  l'ai 
dit  (d) ,  contient  des  parties  métalliques;  on  pourroit 
s'affurer  du  fait  en  fondant  la  prafe  fans  borax,  car  fi 
elle  donnoit  également  un  verre  bleu ,  l'opinion  de 
M.  Demefle  feroit  pleinement  confirmée  ;  mais  il  efl 
à  croire  que  la  prafe  feroit,  comme  l'agate,  très-réfrac- 
taire  au  feu,  &  qu'on  ne  pourroit  la  faire  fondre  fans 
addition,  foit  du  borax  ou  d'un  autre  fondant,  &  dans 
ce  cas,  il  faudroit  employer  un  fondant  purement  falin 
qui  ne  contînt  pas ,  comme  le  borax  ,  des  parties 
métalliques. 

Au  refle,  quelques  Naturalises  ont  donné  le  nom  de 
-prafe  à  la  prime  d'émeraude  qui  n'efl  point  une  agate, 
mais  un  criflal  vert,  défectueux,  inégalement  coloré ,  & 
dont  certaines  parties  plus  parfaites  que  les  autres,  font 
de  véritables  &  belles  émeraudes  ;  le  nom  de  j^rafe  a 
donc  été  mal  appliqué  à  cette  fubftance  qui  n'eft  qu'une 


(c)  Lettres  de  M.  Demefle,  &c.  tome  I,  pages  48^  &  j^S ^ . 

(d)  Voyez  l'article  du  Borax   dans   le  fécond  volume  de  cette 
hiftoire  des  Minéraux. 


DES    Minéraux.  591 

émeraude  imparfaite  afTcz  bien  défignce  par  la  dénomi- 
nation de  prime   ou  matrice  d'émeraude. 


ONYX. 

J_jE  nom  iVOnyx  (a) ,  qu'on  a  donné  de  préférence 
aux  agates  dont  les  lits  font  de  couleurs  différentes , 
pourroit  s'appliquer  affez  généralement  atomes  les  pierres 
dont  les  couches  fuperpofées  font  de  diverfes  fubflances 
ou  de  couleurs  différentes.  Théopliraffe  a  caradcrifc 
l'onyx,  en  difant  qu'elle  eft  variée  alternativement  de 
blanc  «Se  de  brun  (b) ;  mais  il  faut  obferver  que  quel- 
quefois les  Anciens  ont  donné  improprement  le  nom 
d'^//>'X  à  l'albâtre,  &  c'efl  faute  de  l'avoir  remarqué  que 
plufieurs  iModernes  fe  font  perdus  dans  leurs  conjeétures 
au  fujet  de  l'onyx  des  Anciens ,  ne  pouvant  concilier 
des  caractères  qui  en  efîét  appartiennent  à  des  fubflanccs 
très-différentes. 

(a)  Onyx  en  Grec,  fignifie  ongle;  ik.  l'imagination  des  Grecs  n'étoit 
pas  reflce  en  défaut  fur  cette  dénomination  pour  lui  former  une 
origine  élégante  &  mythologique.  Un  jour,  difoient  -  ils ,  l'Amour 
trouvant  Venus  endormie,  lui  coupa  les  ongles  avec  le  fer  d'une  de 
Ces  flèches,  &  s'envola;  les  rognures  tombèrent  fur  le  fable  du  rivage 
de  l'Inde;  &  comme  tout  ce  qui  provient  d'un  corps  célefle  ne  peut 
pas  périr ,  les  Parques  les  ramafsèrent  foigneufement ,  &  les  chan- 
gèrent en  cette  forte  de  pierre  qu'on  appelle  onyx,  Voyez  Robert 
de  Berquen.  AlerveiHes  des  Indes,  page  (f  i , 

(h)  Lapid.  &  gemm,  n."  y  y. 


592        Histoire    Naturelle 

De  quelque  couleur  que  foieiit  les  couches  ou  zones 
dont  font  compofccs  les  onyx ,  pourvu  que  ces  mêmes 
couches  aient  ime  certaine  régularité,  la  pierre  n'en  cfl 
pas  moins  de  la  cîafTe  des  onyx  ,  à  moins  cependant 
qu'elles  ne  foient  rouges  ;  car  alors  la  pierre  prend  le 
nom  de  fardonyx  o\\  fdni aine  -onyx  (c):  ainii  la  di/po- 
fition  des  couleurs  en  couches  ou  zones  fait  le  principal 
cara6lère  des  onyx,  &:  les  diflingue  des  agates  {jmp/es 
qui  font  bien  de  la  même  nature,  &  peuvent  offrir  les 
mêmes  couleurs,  mais  confu/es,  nuces  ou  difpofées  par 
taches  &.  par  veines  irrégulières. 

Il  y  a  des  jafpcs,  des  cailloux  opaques,  &.  même  des 
pierres  à  fuld,  dans  lefquels  on  voit  des  lits  ou  des 
veines  de  couleurs  différentes ,  &  qu'on  peut  mettre  au 
jiombre  des  onyx  :  ordinairement  les  agates-onyx  qui , 
de  toutes  les  pierres  onyx  font  les  plus  belles,  n'ont 
néanmoins  que  peu  de  tranfparence ,  parce  que  les 
couches  brunes,  noires  ou  blanches  &  bleuâtres  de  ce§ 
agates  font  prefque  opaques,  &  ne  laiffent  pas  aperce- 
voir la  tranfparence  du  fond  de  la  pierre  fur  laquelle 
ces  couches  font  fuperpofées  parallèlement  ou  concen- 
triquement ,  &  prefque  toujours  avec  une  cpaiffeur  égale 
dans  toute  l'étendue  de  ces  couches.  II  y  a  auffi  des 
onyx  que  l'on  appelle  agates  œillces,  &.  que  les  Anciens 
avoient  diflinguées  par  des  dénominations   propres:    ils 

(c)  Hill.  page  12  2, 

nommoient 


D  E  s    M  I  N  É  R  A  U  X,  595 

nommoicnt  trwphtalmos  &  lycophtalmos  (d) ,  celles  qui 
préfeiitoieiu  la  forme  de  trois  ou  quatre  petits  yeux 
rouges,  &  clonnoient  le  nom  A' homimodes  (e) ,  k  une 
agate  qui  préfentoit  un  cercle  de  couleur  d'or  au  centre 
duquel  étoit  une  tache  verte. 

Les  Grecs  f/J^  qui  ont  excellé  dans  tous  les  beaux 
Arts ,  avoient  porté  à  un  haut  point  de  perfedlion  la 
gravure  en  creux  &  en  relief  fur  les  pierres  ;  ils  reclier- 
choient  les  belles  agates  onyx  pour  en  faire  des  camées; 
il  nous  rcfte  plufieurs  de  ces  pierres  gravées  dont  nos 
Connoilfeurs  ne  peuvent  fe  laffer  d'admirer  la  beauté 
du  travail,  la  correction  du  deflln,  la  netteté  Si  la  iineife 
du  trait  dans  le  relief,  qui  fe  détache  fi  parfaitement  du 
fond  de  la  pierre  qu'on  ie  croiroit  fait  à  part,  &  enfuite 
collé  fur  cette  même  pierre:  ils  choififfoient  pour  ces 
beaux  camées  les  onyx  blanches  &  rouges ,  ou  de  deux 
autres  couleurs  qui  tranchoient  fortement  l'une  fur 
l'autre.  Il  y  a  plufieurs  agates  qui  n'ont  que  deux  couches 

('(IJ   Plia.   liù.   XXXVII,  n*'  yi  &  J2. 

(e)  Idem  ,  w.*  60. 

(f)  Plufieurs  Artiftes  Grecs  s'immortalisèrent  par  îa  gravure  fur 
pierres  fines.  Pline  nomme  Apoiionide,  Cronias ,  Diofcoride  qui 
grava  la  tête  d'AuguHe,  laquelle  fervit  de  fceau  aux  Celars  ;  mais  le 
premier  de  ces  Ariirtes,  ajoute-t-il ,  fut  Pyrgotèle  ;  &  Alexandre, 
par  le  même  Édit  où  il  dêfeiidoit  à  tout  autre  qu'à  Appelle  de  le 
peindre,  &  à  tout  autre  qu'à  Lyfippe  de  modeler  faftatue,  n'accordoit 
qu'au  feul  Pyrgotèle  l'honneur  de  graver  fon  effigie.  Voyc^^  Pline , 
l'iv.   XXXVII ,   n.'  4. 

Aïinéraus ,  Tome  ÎIL  F  ff  f 


594        Histoire    Naturelle 

ou  lits  de  couleurs  différentes  ;  mais  on  en  connoit 
d'autres  qui  ont  trois  &  même  quatre  lits  bien  dif- 
tinds  (g) ,  du  brun  profond  &  noir,  du  blanc  mat,  du 
bleu-clair  &  du  jaune  -  rougeâtre  ;  ces  onyx  de  trois  & 
quatre  couleurs  font  plus  rares ,  cSl  font  en  plus  petit 
volume  que  celles  de  deux  couleurs  qui  fe  trouvent 
commimément  avec  les  autres  agates:  les  Anciens  tiroient 
de  l'Egypte  les  plus  belles  onyx,  &  aujourd'hui  \'oxi 
en  trouve  dans  pîufieurs  provinces  de  l'Orient,  &  par- 
ticulièrement en  Arabie  (h), 

(g)  Lycophtalmos  quatuor  efr  coîorum  ex  rut'ilo  ù'  fanguïneo  in  mcdio 
vigrum  candido  c'iugitur  ut  luporum  cculi ,  illis  per  omnia  fimilis.  — 
Triophtalnios  très  hominis  fimul  oculos  exprïmens.  PJin.  lib.  XXXVii  , 
n.  71  &  72.  —  Horm'inodes  ex  argumenta  viridïtatïs  in  candidâ  gemma 
vel  nigrâ  &  aliquando  p/illidâ ,  ambiente  circula  aurei  coloris  appellatur. 
Idem,  n.°  60. 

(h)  On  trouve  des  onyx  dans  VYemen  ;  on  voit  beaucoup  de  ces 
pierres  dans  /es  chemins,  entre  Tms  &  le  mont  Sumara:  Aycfcha , 
Ja  femme  bien  aimée  de  Mahomet,  avoit  un  collier  de  ces  pierres  peu 
eflimées  aujourd'hui.  Defcriptim  de  l'Arabie  ,  par  Al,  JSiebuhr . 
page  I2J, 


DES    Minéraux.  595 


l'jA.iiBJi-ii  m^i.'  'rtai 


CALCÉDOINE. 

JLi  A  Calcédoine  cfl  encore  une  agate,  mais  moins  belle 
que  la  cornaline,  la  fardoine  &  la  prafe;  elle  efl  au/Ti 
moins  tranfparente ,  &  fa  couleur  efl  indécife,  iaiteufè  & 
bleuâtre;  cette  pierre  eft  donc  fort  au-de(fous,  non-feu- 
Jement  des  cornalines  Si.  des  fardoines,  mais  même  des 
agates  qui  ne  font  point  laiteufes ,  Sl  dont  la  demi-tranf- 
parence  eft  nette;  auffi  donne-t-on  le  nom  de  calcéJoîne 
k  toute  agate  dont  la  pâte  efl  nuageufe  &  blanchâtre. 

Les  calcédoines  en  petites  maffes ,  grolTes  comme 
des  lentilles  ou  des  pois  ,  font  très  -  communes  &  fe 
trouvent  en  immenfe  quantité  ;  j'en  ai  vu  par  milliers 
dans  des  mines  de  fer  en  grains;  elles  y  étoient  elles- 
mêmes  en  petits  grains  arrondis ,  qui  paroifToient  avoir 
été  ufés  par  le  frottement  dans  leur  tranfport  par  le 
mouvement  des  eaux  ;  ia  plupart  n'étoient  donc  que  des 
débris  de  maffes  plus  grandes  ;  car  on  trouve  com- 
munément les  calcédoines  en  flaladites  d'un  affez  grand 
volume ,  tantôt  mamelonnées ,  &  tantôt  en  lames  apla- 
ties; elles  forment  fouvent  la  bafe  des  onix  dans  Icf- 
quelles  on  voit  le  lit  de  calcédoine  fiarmonté  d'un  lit 
de  cornaline  ou  de  fardoine  ;  les  calcédoines  font  auffi 
quelquefois  ondées  ou  ponduées  de  rouge  ou  d'orangé, 
&  ih  rapprochent  par-là  des  cornalines  &  des  fardoines; 
pliais  les  onix  les  plus  eflimées ,  Sl  dont  on  fait  les  plus 

Ffffi/ 


59^        Histoire  Natv relle 

beaux  camées,  font  celles  qui,  fur  un  lit  d'agate  pure- 
ment blanche,  portent  un  ou  plufieurs  lits  de  couleur 
rouge ,  orangée ,  bleue ,  brune  ou  noire ,  de  couleurs 
en  un  mot  ,  dont  les  couches  différentes  tranchent 
vivement  &  nettement  i'épaiiïeur  de  la  pierre  ;  ordi- 
nairement la  calcédoine  eft  laiteufë,  blanche  ou  bleuâtre 
dans  toute  fa  fubftance.  On  en  trouve  de  cette  forte 
de  très -gros  &  grands  morceaux,  qui  paroilfent  avoir 
fait  partie  de  couches  épaiffes  Gaffez  étendues:  les  plus 
beaux  échantillons  que  nous  en  connoiiïions,  ont  été 
trouvés  aux  îles  de  Feroë,  &  Ton  peut  en  voir  un  de 
fix  à  fept  pouces  d'épaiiïeur  au  Cabinet  du  Roi.  On 
diftingue  dans  ce  morceau ,  des  couches  d'un  blanc 
auffi  mat  &  auffi  opaque  que  de  l'émail  blanc ,  &  d'autres 
qui  prennent  une  demi  -  tranfparence  bleuâtre.  Dans 
d'autres  morceaux,  cette  pâte  bleuâtre  offre  des  reflets 
&  un  chatoyement  qui  iont  reflembler  ces  calcédoines  à 
des  girafols  (a) ^  Si  les  rapprochent  de  l'opale,  laquelle 
femble  participer  en  effet  de  la  nature  de  la  calcédoine, 
ainfi  que  nous  l'avons  dit  à  fon  article. 

^aj  Cette  eipèce  de  calcédoine  bleuâtre  &  à  reflets,  paroîi  défjgnée 
dans  la  notice  fuivante  :  «  On  tire  de  la  montagne  de  Tougas ,  des 
»  agates  de  différentes  efpèces ,  &  quelques-unes  d'extraordinairement 
j>  belles  ,  d'une  couleur  bleuâtre,  afiez  femblables  au  faphir:  on  en 
»  tire  auffi  des  cornalines  &  des  jafpes.  Cette  montagne  eft  à  l'extré- 
»  mité  feptentrionale  de  la  grande  province  d'Osju  au  Japon ,  vis-à- 
vis  du  pays  de  Yeço  w.  H'ijhire  Naturelle  du  Japon,  par  Kc£mpfer ; 
la  Haye,    i y 2  c)  ,  tome  I,  page  pj. 


DES  Minéraux.  ^ç^-j 

Au  refte ,  les  calcédoines  mélangées  de  pâte  d'agate 
commune ,  ou  les  agates  mêlées  de  calcédoine ,  font 
beaucoup  plus  communes  que  les  calcédoines  pures; 
de  même  que  les  agates,  fardoines  &  cornalines  pures, 
font  infiniment  plus  rares  que  les  agates  mêlées  & 
brouillées  de  ces  diverfes  pâtes  colorées  ;  car  la  fubf- 
tance  vitreufe  étant  la  même  dans  toutes  les  agates,  & 
les  parties  métalliques  ou  terreufes  colorantes ,  ayant  pu 
s'y  mélanger  de  mille  &  mille  manières ,  il  n'efl  point 
étonnant  que  la  Nature  ait  produit  avec  tant  de  variété 
les  agates  mêlées  de  diverfes  couleurs,  tandis  que  les 
agates  d'une  feule  couleur  pure  fans  mélange,  &  d'une 
belle  tranfparence ,  font  aflez  rares  &  toujours  en  très- 
petit  volume. 


593        Histoire  N aturelle 


PC  I  -m-  J.l-JT  ■■■■.  J-'  l. 


PIERRE   HYDROPHANE. 

V^ETTE  pierre  fc  trouvant  ordinairement  autour  de  h 
calcédoine,  doit  être  placée  immédiatement  après  q\\q\ 
toutes  deux  font  corps  enfemble  dans  le  même  bloc, 
&.  cependant  différent  l'une  de  l'autre  par  des  caradtères 
effentiels:  les  Naturalifles  modernes  ont  nommé  cette 
pierre  oculus  miuidi ,  &.  ils  me  paroifient  s'être  mépris 
lorfqu'ils  l'ont  mife  au  nombre  des  agates  ou  calcé- 
doines  ;  car  cette  pierre  hydropliane  n'a  point  de  tranf^ 
parence,  elle  eit  opaque  <Sc  moins  dure  que  l'agate,  & 
elle  en  diffère  par  la  propriété  particulière  de  devenir 
tranfparente ,  &  même  diaphane  lorfqu'on  la  laiffe  tremper 
pendant  quelque  temps  dans  l'eau;  nous  lui  donnons 
par  cette  raifbn  le  nom  de  pierre  hydropliane  :  cette 
propriété,  qui  fuppofe  i'imbibition  intime  &  prompte 
de  l'eau  dans  la  fubfîance  de  la  pierre ,  prouve  en  même 
temps  que  cette  fubftance  efl  d'une  autre  texture  que 
celle  des  agates  dont  aucune  ne  s'imbibe  d'eau;  enlin, 
ce  qui  démontre  plus  évidemment  combien  la  flruéture 
ou  la  compofition  de  cette  pierre  hydropliane  diffère  de 
celle  des  agates  ou  calcédoines,  c'efl  la  grande  diffé- 
rence qui  fe  trouve  dans  le  rapport  de  leurs  denfités  (a) , 

(a)  La  pefanteur  fpécifique  de  l'agate  eft  de  25901  ,  &  celle  de 
la  pierre  oculus  mundi  ou  hydrophane,  n'efl  que  de  22(jjc.  Voye^ 
la  Table  de  M.  Brijon. 


DES   Minéraux.  599 

celle  de  l'hydrophane  n'efl  que  d'environ  23000,  tandis 
que  celle  des  agates  &  calcédoines  eft  de  26  à  27000; 
il  eft  vrai  que  la  fub fiance  de  toutes  deux  efl  quartzeufe, 
mais  la  texture  de  i'hydroph^ne  eft  poreufe  comme  une 
éponge,  (Se  celle  des  agates  &i  calcédoines  efl  folide  & 
pleine  ;  on  ne  doit  donc  regarder  cette  pierre  hydro- 
phane  <Sc  poreufe,  que  comme  un  agrégat  de  particules 
ou  grains  quartzeux  qui  ne  fe  touchent  que  par  des 
points,  &  laifTcnt  entr'eux  des  interflices  continus  qui 
font  la  fondion  de  tu)'aux  capillaires,  &  attirent  l'eau 
jufque  dans  l'intérieur  &.  au  centre  de  la  pierre  ;  car 
fa  tranfparence  s'étend  &  augmente  à  mefure  qu'on  la 
laifTe  plus  long-temps  plongée  dans  l'eau,  elle  ne  devient 
même  entièrement  diaphane  qu'après  un  afTez  long  féjour, 
foit  dans  l'eau  pure ,  foit  dans  toute  autre  liqueur  ;  car 
le  vin,  le  vinaigre,  i'efprit-de-vin ,  &  même  les  acides 
minéraux,  produifent  fur  cette  pierre  le  même  effet  que 
l'eau  ;  ils  la  rendent  tranfparente  fans  la  diffoudre  ni 
l'entamer,  ils  n'en  dérangent  pas  la  texture,  &  ne  font 
qu'en  remplir  \es  pores  dont  enfuite  ils  s'exhalent  par 
le  feul  delféchement  ;  elle  acquiert  donc  ou  perd  du 
poids  à  mefure  que  le  liquide  la  pénétra  ou  l'abandonne 
en  s'exhalant,  &  l'on  a  obfervé  que  les  liquides,  aidés 
de  la    chaleur ,  la   pénètrent    plutôt  que    les   liquides 

froids. 

Cette  pierre   qui  n'étoit  pas  connue  des  Anciens/ 
navoit  pas  encore  de  nom  dans  le  fiècle  dernier:  ïï 


6oo         Histoire   N atu relle 

eft  dit  dans  les  Éphémérides  d'Allemagne,  année  ify2, 
qu'un  Lapidaire,   qui  avoir  trois  de  ces  pierres,  fit  prc* 
fent  d'une  au  Confui  de  Marienbourg,  &  la  lui  donna 
comme  une  pierre  précieufè  qui  n'avoit  point  de  nom; 
Tune  de  ces   pierres,    ajoute  le  Relateur,  étoit  encore 
dans    fa   gangue   de  quartz  ;    celle  qui   fut   donnée   au 
Confui    de  Marienbourg ,    n'étoit   que   de  la   groffeur 
d'un  pois  &  d'une  couleur  de  cendre;  elle  étoit  opaque, 
&  lorfqu'elle  fut  plongée  dans  l'eau,  elle  commença  au 
bout  de  ^\^  minutes ,  à  paroître  diaphane  par  les  bords  ; 
elle  devint  d'un  jaune  -  d'ambre  ;   elle   pafTa  enfuite  du 
jaune  à  la  couleur  d'améthyfte ,  au  noir,  au  blanc,  & 
enfin  elle  prit  une  couleur  obfcure,  nébuleufe  &  comme 
enfumée;  tirée  de  l'eau   elle  revint  à  fon  premier  état 
d'opacité,  après  s'être  colorée  fucceiïivement,  &  dans 
un  ordre  inver(è  des  mêmes  teintes  qu'elle  avoit  prifes 
auparavant  dans  l'eau  (b).  Je  dois  remarquer  qu'on  n'a 
pas  vu  cette  fucce/Tion  de  couleurs  fur  les  pierres  qui  ont 
été  obfèrvées  depuis  ;  elles  ne  prennent  qu'une  couleur 
&.  la  confervent  tant  qu'elles  font  imbibées  d'eau. 

M.  Gerhard,  favant  Académicien  de  Berlin,  a  fait 
beaucoup  d'obfervations  fur  cette  pierre  hydrophane  (c) , 
il  dit  avec  raifon  qu'elle  forme  l'écorce  qui  environne 

(b)  Colledion  académique.  Partie  étrangère ,  tome  III,  page  i  6j. 

(c)  Voyez  les  Mémoires  de  l'Académie  de  Berlin,  année  ijjj; 
&.  le  Journal  de  Phyficjue  de  M.  l'abbé  Rozier,  Mars  177 S. 

les 


DES    Minéraux,         6oi 

les  opales  cSc  les  calcédoines  cl'Iiîancle  &  de  Fcroc,  6c 
qu'on  Ja  trouve  également  en  Siiéfie  où  elle  conftitue 
l'ccorce  brunâtre  &  jaunâtre  de  la  cryfopmfe.  D'après  les 
expériences  chimiques  que  M.  Gerhard  a  faites  fur  cette 
pierre,  W  croit  qu'elle  eft  compofée  de  deux  tiers  d'alun 
fur  un  tiers  de  terre  vitrihable  &  de  matière  graiïe  (d) ; 
mais  ce  favant  Auteur  ne  nous  dit  pas  quelle  efl  cette 
matière  graiïe  ;  on  peut  lui  demander  fi  c'eft  de  la 
graifle,  de  l'huile  ou  de  l'eau-mère  de  fel  !  &  ces  deux 
tiers  d'alun  font- ils  de  l'alun  pur,  ou  feulement  de  la 
terre^  alumineufe  !  quoi  qu'il  en  foit ,  il  nous  apprend 
qu'il  a  fait  la  découverte  d'une  pierre  en  Silcfre  ,  qui 
préfente  les  mêmes  phénomènes  que  celle-ci:  «  Cette 
pierre,  dit-il,  efl  foiblement  tranfpa rente  ;  mais  plongée  « 
dans  l'eau  elle  le  devient  complètement  ;  il  lui  faut  ^« 
feulement  plus  de  temps  pour  acquérir  toute  ià  tranf-  « 
parcnce  (e)  ».  De  plus,  par  les  recherches  particulières 

(d)  Cette  pierre  efl  compolc'e  de  deux  tiers  d'alun,  d'un  tiers  dé 
terre  vitrifiable  «Se  de  matière  grafle.  L'efpèce  brune  de  Siléfie  contient 
aufîi  du  fer;  ce  n'ell  donc  ni  quartz,  ni  caillou,  mais  une  pierre 
grade  de  l'ordre  de  celles  qui  contiennent  de  la  terre  d'alun;  d'où 
l'Auteur  avoir  conclu  qu'il  falloir  en  faire  plutôt  une  efpcce  qu'un 
genre ,  attendu  qu'il  pouvoit  arriver  qu'on  découvrît  dés  pierres 
chatoyantes  parmi  les  pierres  grafles  qui  contiennent  la  magnéfie  du 
fel  marin.  Jmrnal  de  Pliyjîijiie  de  Af.  l'abbé  Hoiier ,  Mars  J  77S . 

(e)  ÎI  y  a  cej)endînt  une  grande  diffcrence  entre  ce  morceau  &  /es 
autres  qii'ort.avoii  auparavant  examinés;  il  faut  à  celui-ci  plufieurs 
jours  avant  qu'il  devienne  tranfparent  duns  i'eau.  M.  Gerhard  examinant 

Minéraux,  Tome  ÎIL  ^  ZZ^ 


6o2        Histoire  Naturelle 

que  M.  Gerhard  a  laites  de  ces  pierres  hydrophancs,  il 
alTiire  en  avoir  vu  qui  avoient  jufqu'à  deux  pouces  un 
quart  de  longueur  fur  un  pouce  un  huitième  de  largeur^ 
&  plus  d'un  pouce  d'épaifFcur  par  un  bout,  &  il  dit 
qu'on  les  trouve  dans  la  matière  intercalée,  entre  les 
couches  des  calcédoines  de  l'ile  de  Feroë. 

Il  eft  vrai  que  toutes  ces  pierres  bydrophanes  ne 
font  pas  également  lufceptibles  de  prendre  à  volume 
égal  le  même  degré  de  tranfparence ,  les  m*es  deviennent 
bien  plus  diaphanes,  ou  le  deviennent  en  bien  moins 
de  temps  que  les  autres;  il  y  en  a  qui  changent  de 
couleur,  &  qui  de  grifes  deviennent  jaunes  par  l'imbi- 
bition  de  l'eau;  mais  nous  avons  vu  plufieurs  de  ces 
pierres  dont  les  unes  étoient  grifes,  les  autres  rougeâtres, 
d'autres  vcrdcitres,  &  qui  ne  changeoient  pas  fenhble- 
ment  de  couleur  dans  l'eau  où  elles  prenoient  une  afTez 

cette  difFérence  ,  a  trouvé  qu'elle  confifte  uniquement  dans  une 
plus  grande  quantité  de  matière  grafle  ;  car  fi  l'on  fait  bouillir  cette 
nouvelle  efpcce  d'ocu/us  mundi  dans  du  vinaigre ,  &  encore  mieux 
dans  la  lefîive  caullique,  on  s'apercevra  qu'après  cette  opération,  H 
faut  beaucoup  moins  de  temps  pour  qu'elle  devienne  tranfparente. 
Cette  expérience  donne  lieu  de  préfumerque  toutes  les  pierres  grafles 
dans  lefquelles  la  matière  grafïè  n'eft  pas  trop  abondante,  &  qui  ne 
font  pas  trop  chargées  de  parties  martiales ,  pourroient  produire  le 
même  effet ,  d'autant  j)lus  qu'il  efl  vraifemblable  que  toutes  les  efpèces 
qui  appartiennent  à  cette  clafTe,  doivent  leur  origine,  fur  tout  à  une 
terre  glaife  ou  marneufe,  dont  le  caractère  principal  efl  de  s'imbiber 
fortement  des  principes  fluides.  Journal  de  Phyfique  de  M.  Vû^bi 
Rojier y  Mars  ijjS, 


D  E  s    M  l  N  È  R  AU  X.  60^ 

belle  tranfparence.  M.  le  dodcur  Titiiis,  favaiit  Natara- 
lifte,  &  Direéleur  du  Cabinet  d'Hifloire  Naturelle  à 
Drefde,  m'a  fait  voir  quelques-unes  de  ces  pierres, 
&  m'a  confirme  le  fait  avance  par  M.  Gerhard,  que 
\hydrophû7ie  grife  eft  m\t  matière  qui  fe  trouve  inter- 
calée entre  les  couches  de  la  calcédoine;  M.  Daubenton, 
de  l'Académie  des  Sciences,  a  vérifié  ce  fait  en  réduifant 
à  une  petite  épaifieur  quelques-unes  des  couches  opaques 
grifes  ou  blanches ,  qui  fe  trouvent  fouvent  entre  les 
couches  des  calcédoines  ;  il  y  a  auffi  toute  apparence  que 
cette  même  matière  fert  quelquefois  d'enveloppe,  & 
recouvre  la  couche  extérieure  des  calcédoines;  car  on  a 
vu  des  hydrophanes  grifes ,  qui  avoient  trop  d'épaifleur 
pour  qu'on  puifTe  les  regarder  comme  des  couches  de 
lames  intercalées  dans  la  petite  mafie  des  calcédoines  ; 
on  peut  auffi  préfumer  qu'en  recherchant  fur  les  cor- 
nalines, fardoines  &  agates  colorées,  les  couches  opaques 
qui  les  enveloppent  ou  les  traverfent ,  on  trouvera  des 
hydrophanes  de  diverses  couleurs,  rougcitrcs,  jaunâtres* 
verdâtres ,  fèmblables  à  celles  que  m'a  montrées  Ai.  Ta'ius, 
&  je  penfe  que  cette  matière  qui  fait  la  fubilance  des 
hydrophanes,  n'eft  que  la  portion  la  plus  groffière  dii 
fuc  vitreux  qui  forme  les  agates;  comme  les  parties  de 
cette  matière  ne  font  pas  affcz  atténuées ,  elles  ne  peuvent 
fe  réunir  d'afiez  près  pour  prendre  la  demi-tranfparencc 
èL  la  dureté  de  l'agate  ;  elles  forment  une  fubftance 
opaque,  porcufe  &  friable,  à  peu-près  comme  le  grès; 

Ggggij 


6o4      Histoire   Naturelle 

ce  font  en  effet  de  petits  grains  quartzeux  réunis  plutôt 
que  diffoub,  qui  laiffent  entr'eux  des  vides  continus  & 
tortueux  en  tous  fens,  &  dans  lelquels  la  lumière  s'éteint 
&  ne  peut  paifer  que  quand  ils  font  remplis  d'eau;  la 
tranfparence  n'appartient  donc  pas  a  la  pierre  hvdrophane, 
&  ne  provient  uniquement  que  de  l'eau  qui  fait  alors 
une  partie  majeure  de  fa  maffc,  &  je  luis  perfuadc  qu'en 
faifant  la  même  épreuve  fiir  des  grès  amincis ,  on  les 
rendroit  hydrophanes  par  leur  imbibiiion  dans  l'eau.  Il 
n'eft  donc  pas  ncceffaire  de  recourir  avec  j\i.  Gerhard, 
à  la  fuppoluion  d'une  terre  mêlée  de  matière  graiïe 
pour  rendre  railbn  de  la  traniparence  que  ces  pierres 
acquièrent  par  leur  immcrfion  &  leur  fé/our  dans  l'eau 
ou  dans  tout  autre  Jiquide  traniparent. 


r^^^^ 


DES  Minéraux.  605 

PÉTRO-SILEX. 

JLi  E  premier  caraclère  apparent  du  Péiro-filex  efl  une 
clen:ii-tranrparence  gralFe ,  qu'on  peut  comparer  à  celle 
du  miel  ou  de  l'huile  flgce  ;  il  me  femble  que  ce 
cara6lère  n'éloigne  pas  le  pétro  -  iilex  du  quartz  gras  ; 
mais  confidcram  toutes  Tes  autres  propriétés,  je  crois 
qu'on  peut  le  regarder  comme  un  quartz  de  féconde 
formation  mclc  d'une  certaine  quantité  de  feld -fpath; 
car  la  dendté  du  pétro-lilex  efl  prefque  exaélement  la 
même  que  celle  du  quartz  gras  &  du  feld-ipath  blanc  (aj: 
fa  dureté  efl  aufTi  la  même  que  celle  de  ces  deux  verres 
primitifs,  &  comme,  félon  M.  d'Arcet ,  le  pctro-filex 
efl  fufiblc  à  un  feu  \iolent  ,  cette  propriété  femLle 
indiquer  que  fa  fubftance  n'efl  pas  de  quartz  pur,  & 
qu'elle  efl  mêlée  d'une  certaine  quantité  de  ield-lpath 
qui ,    fans    rien  changer  à  fa    denfité,  lui   donne    cette 

fufibilitc. 

Le  pétro-filex  fe  trouve  en  petits  &  gros  blocs ,  & 
même  en  afTez  grandes  maffes  dans  les  montagnes 
quaptzcufes  &  graniteufes  :  fa  demi-tranfparence  le  dif- 
tingue  des  jafpes  avec  lefquels  il  fe  rencontre  quel- 
quefois, &  auxquels  il  reffemble  fouvent  par  les  couleurs; 

— - I  II,  -     -  -  ,     ■       - 

mm  i  ■"  '         '  ■  ■' 

(a)  La  pefanteur  fpecifique  du  quartz  gras  eft  de  26458,  celle  du 
feld-lpath  blanc  dl  de  z6^66,  ôi  celle  du  pétro-filex  blanc  eft  de 
^6^27. 


6o6        Histoire     Natv  relle 

car  il  y  a  des  pétro-filex,  comme  des  jafpes,  Je  toutes 
teintes  (b) ;  elles  font  feulement  moins  intenfes  <5c  moins 
nettes  dans  le  pctro-filex,  &  dm  poli  fans  être  gras  , 
comme  fa  tranfparence ,  n'eft  néanmoins  pas  aufïi  vif 
que  celui  des  beaux  ja/pes. 

Cette  pierre  e(l  de  féconde  formation;  elle  fe  trouve 
dans  les  fentes  6i  cavités  des  rochers  vitreux  ;  c'eft  une 
concrétion  du  quartz  mclé  de  feld-fpath ,  &  comme  ces 


(b)  Caillou  de  roch^  ;  petro-jîlex;  lapis  corneus  Germanorum,  II  eli 
compofé  de  parties  aflcz  groOlères ,  &  ne  reçoit  pas  un  beau  poli; 
jj  eil  demi-tranfparent  à   les  extrémités  &  aux  parties  minces. 

Jl  y  a   du  pétro-filex  : 

{ I  )   Couleur  de  chair  dans  la  mine  de  Caris  à  S^hlberg  : 

(2)  Jaune-blanchâtre  à  Sahia: 

(3)  Blanc;  à  la  mine  de  Chrifticnfl^erg,  dans  la  nouvelle  minç 
de  cuivre. 

(4.)   Verdàtre  ;  à  la  Fofîe  des  Prêtres  dans  Hellefors. 

On  ne  connoît  point  encore  de  caradère  diftindif  entre  le  pétro- 
fllex  &  le  jafpe;  mais  un  œil  expert  s'aperçoit  bien  que  le  pérro-fjlev, 
quand  il  eft  cafTé,  efi:  un  peu  brillant  &  demi -tranfparent ,  au  lieu 
que  le  jafpe  reflemble  à  de  la  corne,  qu'il  ell  juat  &  opaque,  comme 
une  argile  defTcchée.  Le  pétro-filex  ne  le  trouve  aufîi  qu'en  morceaux 
&  débris ,  tandis  que  le  jalpe  fait  quelquefois  les  plus  grofl'es  &  les 
plus  fpacieufes  montagnes.  II  fe  trouve  aufTl  dans  le  voifinage  de 
\à  pierre  à  chaux  ,  comme  les  filex  dans  \es  lits  de  craie  :  arec  Je 
temps  on  pourroit  peut-être  acquérir  de  plus  amples  &  de  plus 
fxades  connoiflances.  EQaï  de  Aiinéralog'ie  traduit  du  Suédois  ù"  de 
l'Allemand  de  M.  Wledman ,  par  M.  Dreax  ;  Paris,  17/1 ,  p^g^i 
p  2   &  Juiv, 


DES    Minéraux.  607 

deux  verres  primitifs  font  unis  clans  la  fubflance  des 
granités,  le  pétro-filex  doit  fe  trouver  communément 
dans  les  montagnes  graniteufes ,  telles  que  les  Vofges 
en  Lorraine,  &  les  montagnes  de  Suède,  où  \Vallerius 
dit  qu'il  y  en  a  de  blancs ,  de  gris ,  de  bruns ,  de 
rougcâtres,  de  verdâtres  &  de  noirâtres;  d'autres  qui 
font  ondes  alternativement  de  veines  brunes  &  jaunes, 
ou  griiès  &  noirâtres  ;  d'autres  irrégulièrement  tachés 
de  ces  différentes  couleurs,  &c. 


DES  Minéraux,  609 

ARRANGEMENT  DES  MINÉRAUX 

EN  TABLE  MÉTHODIQUE, 

Rédigée  d'après  la  connoiffancc  de    leurs  propriétés 

naturelles. 

V^ETTE  Table  préfente  les  Minéraux,  non-feulement 
avec  leurs  vrais  caradères ,  qui  font  leurs  propriétés 
naturelles,  mais  encore  avec  Tordre  fucceffif  de  leur 
gcnéfïe  ou  filiation  ,  félon  qu'ils  ont  été  produits  par 
l'adron  du  feu  ,  de  l'air  &l  de  l'eau  fur  l'élément  de 
la  terre. 

Ces  propriétés  naturelles  font: 

1 .  La  dendté  ou  pefantcur  fpéciiique  de  chaque 
fubdance  qu'on  peut  toujours  reconnoître  avec  précifion 
par   la  balance  hydroftatique  : 

2.  La  dureté  dont  la  connoiffancc  n'eft  pas  aufli 
précife ,  parce  que  l'effet  du  choc  ou  du  frottement 
ne  peut  fe  mefurer  auffi  exaclement  que  celui  de  la 
pefanteur  par  la  balance,  mais  qu'on  peut  néanmoins 
eflimer,  &  comparer  par  des  effais  afTez  faciles: 

3.  L'homogénéité  ou  fmpiicité  de  fubflance  dans 
chaque  matière,  qui  fe  reconnoît  avec  toute  précifion 
dans  les  corps  tranfjjarens ,  par  la  f mple  ou  double 
réfraction  que  la  lumière  foufïre  en  les  traverfant ,  & 
que  l'on   peut   connoître ,  quoique  moins  cxaétcment , 

Alinéraux,  Tome  JIL  H  h  h  h. 


6 10  Histoire  NyiTURE lle 

clans    les   corps   opaques,  en  les  foumettant  à  Tadioii 
tles  acides  ou  du  feu: 

^/^  La  fudbilitc  &  la  réfiflance  plus  ou  moins  grande 
des  diiîë rentes  matières  à  l'adion  du  feu  avant  de  /e 
calciner,  fe  fondre  ou  fè  vitritier: 

y^  La  combuftibilité  ou  dellru^tion  des  différentes 
fubilances  par  l'adion  du  feu  libre,  c'eft-à-dire ,  par 
Ja  combinailon  de  l'air  &  du  feu. 

Ces  cinq  propriétés  font  les  plus  effentiellcs  de  toute 
matière,  &  leur  connoiffance  doit  être  la  bafe  de  tout 
fyftème  minéralogique  &  de  tout  arrangement  métho- 
dique :  auffi  cette  connoiffance  ,  autant  que  j'ai  pu 
l'acquérir,  m'a  fervi  de  guide  dans  la  compofition  de 
cet  Ouvrage  fur  les  Minéraux,  dont  le  quatrième  & 
dernier  Volume  efl  aétuellement  fous  prefTe  ;  &  c'efl 
d'après  ces  mêmes  propriétés,  qui  conffituent  la  nature 
de  chaque  fubftance,  que  j'ai  rédigé  la  Table  fuivante: 


(5ir 


Mg-iJ-ii-u-i— ■i,»i.ijv«^^tiUj_i,jt^imji^t>'_i.'in.»-«.>.;u«TiXr^tUi^i»jit^n 


».mn.imi. L-1..UUI— j^ja 


TABLE    MÉTHODIQUE 

DES      MINÉRAUX. 


PREMIER        ORDRE. 

Maiïères   vhreiifes. 
Première     Classe. 

MdîVcrcs   viîreufes  produites  par  le  feu  primitif. 


I     JUL.I    riVI'IW"'"  "'""■■'  ■"    "i.iiii",  "7 


MATIERES. 


SORTES. 


Subfiances  vitreules 

iiniples.  r  r\ 

*  '    Quartz. 

Feld-fpath. 
Verres  primitifs ^  Schorl. 

Jafpe. 
Mica. 


VARIETES. 


1 


Roches  de  2, ,  3   &  4. 
lubllances  vitreules. 


Pierre  Je  Lapponic. 


rouge. 


'■■  SuLHances  compofe'es. 


Porphyre, 


brun. 

tous    deux    pondues    de| 
blanc. 


rou£re. 


Granit <  ? 


ens. 


a  gros  grains, 
à  petits  gra'ns. 


Hhhh   ij 


6i2  Table 

Deuxième      Classe, 

Matières   vitreufes  extraites  des  premières ,   &  produites  pat 

l'intermède   de  l'eau. 


PREMIERE       DIVISION. 

Produits  du   Quart^. 


MATIERES. 


Vitreufes  produites 

par  l'intermède 

de  l'eau , 

demi  -  tranlparentes. 


Quartz 

de  féconde  foniuiion 


Criflal  de  roche, 


Tranfparentes /  Amcthyfte 


Criflal-topaze 


Chryfûlithe. 


Algue-marine. 


VARIETES. 


blanchâtre. 


lougeatre. 

gras. 

feuilleté. 


grenu. 


blanc. 

nuageux. 

rougcâtre. 

bleuâtre. 

jaune. 

vert. 

l"Tun. 

noir  opaque. 

irifc. 

violette, 
pourprée. 

d'un  jaune  plus  ou  moins 
foncé  &  enfumé. 

d'un  jaune  mêlé  de  plus 
ou  moins  de  vert. 

d'un  vert  bleuâtre 

ou 

d'un  bleu  verdâtrc. 


MÉTHODIQUE.  613 

SECONDE        DIVISION. 

Produits  du   Feld-fpalh  feul ,   &  du   Qvnvli  mêlé  de   Fcld-fpath. 


MATIERES. 


SORTES. 


VARIETES. 


Tranfparentes j   Saphir  d'eau, 


Pierre  de   RufTie 

ou 

de  Labrador. 


Demi-tranfparemes. .  .  1  Q£il  de  chat, 


Toutes  chatoyantes. .  .  J  QEil  de  poifTon 


QEil  de  loup. 


Opale . 


Opaque 


A  vent  urine. 


1 


plus    ou   moins    bleuâtre 
&  à  demi-chatoyant. 

chatoyante  ,    avec    reflets 
vcrdàtres  &.  bleuâtres. 


gris. 

jaune. 

mordoré. 

blanc  intenfe. 
blanc-bleuâtre. 

brun-rougeâtre. 
brun-verdâtre, 

à  fond  blanc. 

à  fond  bleuâtre, 
là  fond  noir. 

fans  paillettes. 

femée    de   paillettes  bril 
lantes    rouges,    bleues 
(3c  d'autres  couleurs. 

rouge  plus  ou  moins  femée 
de  paillettes  brillantes 
de  4ilférentcs  couleurs. 


6i4 


Table 


TROISIEME      DIVISION. 

Produits  du  Schorl  fiul,    &  du   Qudrii  &  Fdd-fpath  mêlés  de  fchorl. 


MATIERES. 


Traiifparentcs, 


VARIETES. 


du  Pérou. 


^I, 


vert   pur  plus   ou    moins 
cidir. 

(iu  Brcfil. 

vert      plus       ou      moins 

foncé. 

)Icu. 
blanc. 


B,  \  vert-blcnâtrc. 

ervi \ 

)  bleu-verUatre. 


(  plus  ou  moins  denfe. 

<  vert  plus  ou  moins  mclc 
de  jaune. 


dEir  de   chat   noir   ou 
noiratie 


Demi-  tranfparentes 
Opaques 


Rubis   &   Topazes   diA  P^"s  ou  moins  rougcâtre. 
Brelil )  plus  ou  moins  jaune- loncc 

jaunc-dor'é. 
Topaze  de  Saxe /  jaune-clair. 

blanche. 

rouge-violct^  Syrien. 

rouge    couleur    de    feu  / 
Grenat ^      Efcarboude.  I 

rouge  brun  dcmi-tranfpa-j 
rcnt  ou  opaque. 

Hyacinthe ^  jaune  mêlée  de  plus  ou 

^       moins  de  rouge. 

Tourmaline S  «■'^"S'-'e. 


f  orangt-( 
^  noirâtr( 


Pierre  de  croix 5  ^''""^• 

)  noirâtre. 


MÉTHODIQUE.  615 

QUATRIÈME       DIVISION. 

StûlûLiites    vïtreiifes   non    crijlallifées ,  produites  par    le  mélange  du   Quart?^ 

&  des  autres  verres  primitifs. 


Demi-tranfparentes. . 


(  blanche. 
]  laitcufe. 

Agate <   veinée. 

j  ponduée. 
V  herborifée. 

C  rouge  pur  plus  ou  moins 
^-.          T.  1      intenfe. 

<-OXi-l^\me <  veinée. 

f  ponéluée. 

C  orangée. 
Sardoine <  veinée. 

/  herborifée, 

Prafe vert  plus  ou  moins  foncé. 

C  blanchâtre. 
y-^  \    .  y   •  /  bleuâtre. 

^^^^^àoxnt <rougeâtre. 

^  toujours  laiteufe, 

Tranfpareii  tes  imbibées  f  „.  i     t       i  )  m'  ^-^^ 

,,  '  >  Pierre  hydrophane. .  .<  bleuâtre. 

<^eau ^  J        ^  /rougeâtrc. 

i  blanc. 
1-k       •  r  C  1  roui;eâtre. 

Demi-tranfparentes    \  Petro-filex (de  toutes  couleurs. 

aux  parties  milices.      J  j  veiné. 

\  taché. 

C  compoTéc      de      lits     on 

Onyx \       couches   de  différentes 

/       couleurs. 

C  veinés. 
Cailloux <  œillés. 

^_  ,  /  herborifés. 

Opaques {  ) 

^  r»       T-  V^np'i's  gros  ou  plus  petits 

Poudino'ues <  -n 

1  uuuHJj^uca \         cailloux. 

r  fanguin. 
Jaf])es  de  féconde  for-1  héliotrope. 

mation i  ^*^';'''-    , 

V.  univerlel. 


6i6 


Table 


CINQUIEME       DIVISION. 

Produits  if  ûçrréirais  du  Alica   cf  du   Talc. 


Ojîaques 

& 

Demi-tranlparentes, 


C  blanchâtre. 
i^de /  verr. 

{  olivâtre. 

tachée  de  toutes  couleurs, 
verte  fans  tache. 

Serpentine /  veinée. 

librcufe. 
grenue,  . 

blanchâtre, 
verdâtre. 

Pierre  ollaire /  fcmée  de  points  talqueux. 

veinée, 
feuilletée. 

ipure. 
no'râtre-plonibée. 
melee  de  leurre, 
plombagine. 

o-           j     I      T  S  blanche, 

r terre  de  lard { 

)  rougeâtre, 

r>     •      l'-r  r  1  blanche. 

Craie  d  Lipap-ne.  .  .  .  <     .^ 

)  griie. 

r^..  ;    ,1     T)  •  )  blanche. 

L-raie  de  Jinancon.  .  .  { 

f  plus  ou  moins  fine. 

blanc. 

Talc )  ^^^rdâtre. 

jaunâtre, 
rougeâtre. 

Suite 


M  É   T  U  0    D    I  (l   U   E.  6iy 

Suite    de    la    cinquième    division. 

Produits  &  agrégats  du  Mica  &  du  Talc. 


Amiante. 


Demi-tran(parentes.  . 


Aftefte. 


Cuir  de  montagne. 


Opaques. 


Liège  de  montagne 


Minéraux,  Tome  III. 


en   filets   plus  ou  moins 
longs ,  &  plus  ou  moins 

fins. 

blanchâtre. 

jaunâtre. 

verdâtrc. 


en  epis. 

en  filets  plus   ou   moins 

courts, 
gris. 

jaunâtre, 
blanchâtre. 


plus    ou    moirts    poreux 
&.  léger. 

blanc. 

jaunâtre. 

en  lames  plates  ou  fcuil 
lets  fuperpofés. 


jaunâtre. 

blanchâtre. 

en    cornets    ou    feuillets 
contournés. 

plus  ou  moins  caverneux 
&  léger. 


lii 


1 1 


6i8  Table 

Troisième     Classe. 

Détrimens  des   Matières  vïîreiifes. 


Compofees 
des  détrimens  des  verre 
primitifs. 


Porphyres 
de  féconde  formation 


Granits 
de  féconde  formation 


Opaques. 


Grcs . 


Argiles. 


\ 


Schide  &  Ardoife. , 


vert  taché  de  blanc, 
dç  couleurs  variées. 

rougeâtre  à  gros  grains 
^   grandes  lames    ta!- 
queufes. 

rougeâtre  à  petits  grains, 
Granité  lie. 

pur. 

mêlé  de  mica. 

à  grains  plus  ou  moins  fins 

de     fubftance     plus      ou 

moins  compa(5ie. 
blanc, 
jaunâtre, 
rougeâtre. 
brun. 

grès  poreux. 
grès  à  tiltrer. 

blanche  &  pure. 

bleuâtre. 

verdâtre. 

rougeâtre. 

jaunâtre. 

noirâtre. 

grifâtre. 

bleuâtre. 

noirâtre. 

pins  ou  moins  dur,  &  en 

grains  plus    ou    moins 

fins. 


MÉTHODIQUE.  619 

Quatrième     Classe. 

Concrétions  vïîreufes  &  argilcufes  formées  par  l'intermède  de  l'eau. 


MATIERES. 


Concréiions  arorileufes 


Grès  mêlés  d'argile 


SORTES. 


Ampdite. 


Sme<^is 

ou 

Argile  à  foulon. 


Pierre  à  rafoir 


Ces 
ou  Pierres  à  aiguifer. 


VARIETES. 


plus  ou  moins  noire, 
à  grain  plus  ou  moins  fin, 


comporéc  de  couches  al- 
ternatives de  gris-blanc 
ou  jaunâtre  ,  &  d'un 
gris  brun. 


plus  ou  moins  dures. 

blanches. 

brunes, 

bleuâtres. 

jaunes. 

rougeâtres. 

grès  de  Turquie. 


l  i  i  i    ij 


620 


T    A     B 


DEUXIEME      ORDRE. 

Matières  calcaires  toutes  produites  pari  intermède  de  Veau. 
Première     Classe. 

Matières  calcaires  prlmitires  avec  leurs  Jétrimeiis  &  agrégats. 


MATIERES. 


SORTES. 


Coquilles 


Sub/laiîces 
calcaires   primitives. 


Madrépores. 


Polypieds 
de  toutes  fortes. , 


1 


Craie 


Detrimens  des  matières 
calcaires  primitives 
en  grande  marfes.       j  Pierres  calcaires 


VARIETES. 


Les  variétés  de  ces  corps 
marins  à  ÇviD?i3.ï-\ct  co- 
quilleufe  font  innom- 
brables. 


\ 


plus  ou  moins  blanche  (S;] 
plus  ou  moins  dure. 


de    première    formation. 

Pierres  coqu'illeufes. 

de  féconde  formation. 

plus  ou  moins  dures. 

à  grain  plus  ou  moins  fi«n 

blanches    ou    teintes    de 
dïiférentes  couleurs. 


MÉTHODIQUE,  6ll 

Suite    de    ia    Première    Classe. 

Matières  calcaires  primitives  avec  leurs  rlétrimens  &  agre'gats. 


VARIETES. 


Marbres. 


Détrimens  des  matières 

calcaires  primitives 

en  grandes  mafles. 


lAIMm 


de  première  rorniatron. 
Marbres  coquilleux. 

Brèches. 

I 

Poudingues  calcaires. 

de  Ççconà.Q  ïormiiXïon. 

blancs. 

de   toutes    couleurs    uni- 
formes  ou  variées. 

veiné. 

onde. 

blanchâtre. 

jaune. 

irougeâtre. 

mêlé    de    gris  ,    de  brun 
&  de  noir. 

hcrborifé. 


Plâtre. 


6ii 


Table 
Deuxième     Classe. 

Staldâites  &  concrétions   calcaires. 


MATIERES. 


SORTES. 


Produits    des    matières 
calcaires  tranlparens,    r 


Spatii  calcaire 


Demi-tranfparens 


Opaques  mêlés 
de   lublUnce  olleufe 


Perles. 


Turquoifes 


criflal  d'inande. 
fpath  blanc, 
jaune, 
rougeâtre. 

blanches.  Perles  d'huître. 

jaunâtres. 

brunâtres.  Perles  de  pa- 
telles i^  de  moules. 

de  vieille  roche. 

de  nouvelle  roche. 

d'un  bleu  plus  ou  moin 
pur  (Se  plus  ou  moins 
foncé. 

verdâtres. 


IiicruHaiions 

& 

pétrifications  calcaires. 


Tous  les  corps  orga- 
nifés  incruAcs  ou  pé- 
trifiés par  la  fijbftance 
calcaire. 

Coquilles  pétrifiées. 

Madrépores  &  autres 
corj)s  marins  iiicruftés 
&  pétrifiés. 

Bois  &  végétaux  in- 
cruftes  &  pétrifiés. 


623 


MÉTHODIQUE. 

Troisième     Classe. 

Adtitières  vitreiifes  mêlées  d'une  petite  quantité  de  fuhflances  calcaires 


MATIERES. 


Plus  vitreufes  que 
calcaires. 
Opaques. 


Demi-  iranfparentes 


Opaques. 


Tianfparentes 


SORTES. 


VARIETES. 


blanche. 
2^^'û'"'^e rougeatrc 

bleuâtre. 

bleu. 

Lapis  lazuli /  taché  de  blanc. 

mêlé  de  veines  pyriteufes 

grife. 

Pierre  a  rulil ( 

rougeâtre. 

noirâtre. 

C  plus   ou    moins    dure   & 
Pierre  meuiitre .....(        , 

j       plus  ou  moins  trouée. 

rouge  ;  faux  rubis. 

jaune  ;  fauïïe  topaze 
Spath  fluor 

^  vert;  faufTe  émeraude 

bleuj  faux  faphir. 


02^ 


Table 


TROISIEME      ORDRE. 

Matières  provenant  des  débris  if  du  détriment  des 
Animaux  if  des   Végétaux, 

Première     Classe. 

Produits  en  grandes  maffes  de  la  terre  végétale. 


r  Terre  de    jardin  plus  ou 

Terreau <       moins  décompofée    & 

/       plus  ou  moins  mélangée* 

S  Terreau  décompofé,  dont 
les  parties  font  plus  ou 
. ..,.^ moins  atténuées 

&  des  animaux ,  plus  ,  r  t-  j        i 

ou  moins  mélangées/  Terre  limoneufe  )      ?'T  r  P'"!" 

j  •         I      .       \  1  erie  iimoneuie /      font   encore    plus   de 

de     parties     heiero- J  ^      compofées. 

gènes  opâfjues 

Terre    végétale    entière 
ment  décompofée 

Bols </  ^''"" 

rouge 

gris 

vert 

Tourbe  ...  \  '^^'''■^^"   P'"s   ou    moins 
)       bitumineux. 

Mëlaneëes  de  bitume.  /  l  ^^^•^.•'e  végétale  plus  ou 

i  I      moins  bitumineufe. 

paques.  \  Charbon  de  terre..  .  .<  P'"^  ou  moins  pyriteufe. 

plus  ou  moins  mélangée 

•de    matière    calcaire  , 

fchilleufe,  &c 


Seconde 


MÉTHODIQUE,  625 

Deuxième     Classe. 

Concrétions   &  produits  de  la   Terre  limoneufe. 


Produites 
par  la  terre  limoneufe  ,L  ^      t 

phofphorefcentes      \  ^P^^^  P^^^"^' 
&.  combullibies. 


Opaques 
&  comburtibles. 


Pyrite. 


Liquides  &  concrètes; 

tranfparentes , 

demi-tranfparentes, 

opaques 

&  conibuftibles. 


Pierre  de  Bologne. 

Spath  pefant  odaèdre. 

blanc. 

cridallifé. 

mat. 

de  couleurs  différentes. 

^cubique  lifTe. 

\  cubique  flriée  à  la  furface 

Iglobuleufe  ou  elliptique. 
K  Marcaffite. 

Jplus  ou  moins  dure. 

Ê  recevant  le  poli,  <Sc  non 
V     efflorefcente. 


Soufre  minéral plus  ou  moins  décompofé 

naphte. 
pétrole, 
afphalte. 

Bitumes ^  fuccin. 

ambre  gris. 

poix  de  montagne, 

jayet. 


Minéraux,  Tome  IIL 


Kkkk 


(>zi  Table 

Suite    de    la   Deuxième    Classe. 

Concrétions   &  produits   de  la   Terre  limoneiife. 


MATIERES. 


SORTES. 


Produites 

par  la  terre  Jimoneufe  , 

tranfparentes 

&  homogcnes. 


Diamant. 


V   A 

R  1 

É  T 

E 

s. 

blanc. 

odaèdre. 

dodécaè 

drc. 

jaune. 

couleur 

de  rofe. 

vert. 

Combuftibles 


bleuâtre, 
noirâtre. 

rouge  de  feu. 

Vrai  Rubis ^  rouge  pourpre, >'W. 

rouge  clair,,  balais. 
rouge  orangé j  vermeille. 

^j.    .    rr-  \  jaune  vif. 

Vraie  Topaze. ......  ^ 

jaune  d'or  velouté. 

bleu. 

bleu-célede. 
Ibleu  foible. 
Vrai  Saphir ^  blanc. 

bleu-foncé. 

bleu  mêlé  de  rouge, 
Gyrafol, 


METHODIQUE. 


6zj 


QUATRIEME      ORDRE. 

Aiatîères  falïnes. 
Première     Classe. 

Sels  ftinples ,    Acî.Ie ,  Alkali   &   Arfcuic, 


MATIERES, 


SORTES. 


Acide  acrien. 


VARIETES. 


Produits  f         Acide  &   Sels 

de  r.cide  aérien      V  ^itrioliques 
fur  les  maticres  vitreufet.  ' 


Produits 

de  l'acide  aérien 

fur  les  fubrtances 

animales  &  végétales. 


Alkali 


Alun  de  roche. 
Alun  de  plume. 
Vitriol. 

—  en  maffcs. 

—  en  ftaladitcs. 

—  vert.    }'ltriol  ferrugi- 
neux. 

—  bleu.  Vitriol  cuivreux 

—  blanc.  Vitriolée  ^inc 
Beurre  fertile. 


Natron. 

Soude. 

Allsali  minéral. 

Alkali  fixe  végétal. 

D 


Alkali  volatil. 
Alkali  cauftique. 
Alkali  fluor. 


Kkkk  ij 


628  Table 

Suite   Je    la    Première    Classe. 

Sels  fimpJcs ,   AciJe ,   Alkali   &   Arfcnic. 


MATIERES. 


SORTES. 


Autres  produits 

de    l'acide   aérien 

liir  les  fu  bilan  ces 

animales  &.  végétales . 


Produits 

de  l'acide  aérien 

lur  les  matières 

calcaiies  &  alkalines. 


Acide  des  végétaux 
'&  des  animaux 


Acide  pholphorique. 


Acide  marin. 


Nitre, 


Produits 
de    l'acide    aérien 

liir  les  matières 

alkalines,  animales, 

végétales  &.  minérales. 


Arfênic. 


Sel  mêlé  de  parties     .  p 
métalliques,  .......)  '^^^^^' 


VARIETES. 


Vinaigre. 

Acide  du  tartre. 

Acerbes. 

Acide  des  fourmis ,  6cc. 


mclé  d'alkali. 
Sel  gemme. 
Sel  marin. 


Salpêtre  de  houfTage. 

mclé  de  parties    métalli- 
ques en  Heurs  blanches, 
criltallifé. 
mêlé  de  foufre. 
orpiment, 
réalgar. 

Tinckal  eu  borax  brut, 
d'une  confiftance  molle 
&  rougeâtre. 

d'une  confiflance  ferme, | 

grifc  ou  verdâtre. 
Sel  fedatif. 


MÉTHODIQVE.  629 

Deuxième     Classe. 

Sels  fublimés  par   le  feu. 


Subftance  du  feu 

faifie  V  Soufre 

par  l'acide  vitriolique. 


Produits  fublimés 

de  l'acide  maria 

&.  de  l'alkali  volatil. 


Sel  ammoniac 


Compofées 

de  l'acide  vitriolique 

&.  de  la  niaiiére 

du  feu  libre. 


Acide  fulfureux  volatil. 


compofé  de  l'alkali  volatil 
&  de  l'acide  marin. 

de    l'alkali   volatil    <?c    de 
l'acide  vitriolique. 

de   l'alkali  volatil    &   de 
l'acide  nitreux. 


630 


Table 
Troisième     Classa. 

Sels   compofés  par  l'intermède  de  l'eau. 


MATIERES. 


SORTES. 


VARIETES. 


C 

de  fo 


lompofces  r 

une  &.  d  alkali.     \ 


Coinpofées 
de  l'acide  vitriolique    ^  Sel  de  Clauber. 
(3c  d'alkali  minerai. 


Compofées 
de  l'acide  vitriolique    \  Sel  d'Epfoin. 
<5t  de  la  niagncTic. 


METHODIQUE. 


6>,l 


CINQUIEME      ORDRE. 

Afatières  métalliques. 
Première     Classe. 

Matières  métalliques  proiiitites  par  le  feu  primitif. 


MATIERES. 


Métalliques  fimples 

&   dans  leur   état 

de  nature. 


Métaux, 


SORTES. 


VARIETES. 


Or  primitif 
en  état  de  métal .  . 


en  filets, 
en  lames, 
en  grains- 
en  malfes. 
en  pépites, 
en  végétations. 


jaune. 

rougeâtre. 

blanchâtre. 

criftallifé  en  odacdre  par 

le  feu. 
toujours  allié  d'argent  par 

la  nature. 

en  ramification, 
en  feuilles, 
en  grains. 
Argent  primitif       /  toujours  allié  d'or  cScquel- 

en  état  de  métal \     quefois  d'autres  fubltan- 

ces  métalliques, 
criftallifé  en  odaèdre  par 
le  feu. 


Cuivre  primitif 
en  état  de  métal. .  . 


Ç  en  bloi 
l      gros. 


blocs   plus   ou  moins 


ans  les  roches 


Plomb  en  état  de  chaux.  J"^^'.^"g^,^3 

l       vitreufes. 

Étain  en  état  de  chaux  .  5  "^^'.^"g^/^n^  les  roches 

)       vitreules. 


Fer  en  ctat  de  fonte. 


mélangé  dans  les  roches 

vitreufes. 
aimant, 
émeril. 
mâchefer, 
fablon  magnétique. 


632  Table. 

Deuxième    Classe. 

Al  dû  ère  s  méîdUiques  formées  par  l'intermède  de  l'eau. 


MATIERES. 


SORTES. 


Concrétions  &  mines 

des  métaux    dans 
leur    état    d'agrégationj         * 
&.  de  minéraliration. 


VARIETES. 


Argent. 


Métaux. 


) 


Cuivre. 


en  paillettes, 
pyrite  aurifère. 

en  paillettes. 

pyrites  argentifères. 

Mine  d'argent  vitrée,  bru- 
ne, noirâtre  ou  grife. 

Mine  d'argent  cornée , 
jaunâtre,  à  dcmi-tranf- 
parente  &  opaque. 

Mine  d'argent  rouge. 

Minerais    pyriteux    du 
cuivre    ou    pyrites 
cuivreufes. 

Mine  de  cuivre  vitreufe. 

Mine  de  cuivre  cornée. 
Mine  de  cuivre  foyeufe. 
Malachite. 

Mine  cri/tallifée. 

veloutée. 

fibreufe. 
—   mamelonnée. 

Pierre  arménienne, 
azur,  bleu  de  montagne 
vert  de  montagne. 

Mine  de  cuivre   antimo- 
niale. 


Suite 


MÉTHODIQUE,  6^ 

Suite  (Je  la  D  e  u  x  i  i  m  e  Classe. 

Afdtières  métallitjues  formées  par  l'intermède  de  l'eaa. 


MATIERES. 


SORTES. 


Concrétions  &  mines  / 

des  métaux  dans 
leur   état    d'aerefratioi 
&  de  minérilifation. 


VARIETES. 


Plomb 


Étain 


Métaux 


Fer, 


galène. 

Mine  de  piomb  viîreufe 
&  crillailifee. 

—  blanche. 

—  noire. 

—  rouge. 

—  verte. 

—  jaune. 

Mine  d'étain  en  filons. 

—  en   couches. 

—  en    rognons. 

—  en   grenailles. 

—  en   criftaux. 

—  noirs. 

—  blancs. 

—  jaunâtreSt 


rouges. 


Mine  fpathique. 

—  fpéculaire. 

—  en  grains. 

—  en  géode. 

—  en  ocre. 

—  en     rouille    plus     ou 
moins  décompofée. 

hématite. 


Minéraux,  Tome  JIL 


LUI 


634  Table 

Troisième     Classe. 

Afciùères  femi-niétûîli(]ues  ou  dcnù-tnéîaux  dans  leur  état  de  nature. 


SORTES. 


Eau  métallique 


Demi-métaux, 


I 


Mercure. 


Antimoine. 


Bifmuth 


; 


Zinc, 


VARIETES. 


\ 


en  cinabre. 

en  état  coulant. 

en  minerais  blancs  &  gris. 

Mine    d'antimoine    en 
aiguilles. 

Mine    d'antimoine    en 
plume,  fouvent  niéiéc 
d'argent. 

en  état  métallique, 
mêlé  de  cobalt, 
jaunâtre. 


rougeatre. 


en  pierre  calaminaire. 
en  blende. 
—    noire. 


grife. 


—  jaunâtre. 

—  rougeatre  ,  &c. 

—  crillailifée. 

—  tranfparentc. 

—  opaque. 

en  vitriol  blanc 


METHODIQUE. 
Quatrième     Classe. 

AlHages   métalliques  faits  par  la   Nature, 


'^35 


MATIÈRES. 

SORTES. 

VARIÉTÉS, 

f 

• 

en  grenaille  toujours  mc- 

Platine é 

t 

1       lée   de  fablon   magné- 
tique ,  &.  alliée  de  fer 
dans  fa  fubflancc. 

'  toujours   plus    ou  moins 

Cobalt < 

( 

mclé     de    fer    par    un 
*      alliage  intime. 

Alliages  métalliques   j 

. 

'  mêlé  de  fer  &:  de  cobalt 

tous  mêles  de  fer ....  ^ 

Nickel ) 

par  un  alliage  intime, 
grenu. 

^ 

.  iamellcuî. 

( 

'  grife. 

\ 

1  noire. 

Manganèfe <,  .J 

i 

fcrillalliféc. 
L  non  criflallifée. 
r  toujours  mêlée  de  fer  par 
an  alliage  intime, 

< 

EBia 


LUI  ij 


6^,6        Table   méthodique. 


SIXIEME  ET  DERNIER  ORDRE. 

Produits  volcaniques. 


MATIERES. 


SORTES. 


VARIETES. 


Laves. 


Bafalte, 


Matières  fondues 
par  le  feu  des  Volcans. 


Pierre  de  touche. 


Pierre  variolite. 


Te 

par  le  fe 


rre  cuire  f 

u  des  Volcans,  ( 


.Tripoli. 


Detrimens  des 
matières  voicaniques. 


Pouzzolane. 


plus  ou  moins  compades, 
plus  ou  moins  trouées, 
noires ,    brunes    &    rou- 


ge aue  s. 


■plus  ou  moins  mêlé  de 
fer  ,  ainfi  que  les  laves 
&  de  différentes  figures, 
depuis  trois  jufqu'a  neuf 
faces  dans  fa  longueur, 
articulé  ou  non  dans 
Ton  épaiffeur. 

noirâtre. 

grifâtre. 

verdàtrc. 

à    grains  plus  ou  moins 

hns. 
noire, 
brune. 


fe. 


gri 


à  grains  plus  ou  moins 
proéminens ,  &  plus  ou 
moins  rougeâtres, 

blanc. 

jaunâtre, 

noirâtre. 

plus   ou   moins  sécFi«  & 

rude  au  toucher.- 
grife. 
rouge, 
blanchâtre,  ôcc. 


■■ 


! 


Fin  du  troifième  Volume  des  Minéraux, 


TABLE    DES    MATIERES 


Contenues  dans  ce  Volume. 


XTLGATES.  Le  fond  de  leur  fubf- 
tance  efl  de  la  même  eflence  que 
celle  du  qw^-m^page  578.  —  Elles 
font  produites  par  le  fédiment  de 
ia  ftillaiion  des  eaux  ,  579.  — 
Agates  en  grand  volume ,  leur 
formation,  j8o.  —  Variétés  dans 
les  couleurs  &  dans  ia  difpofition 
des  lits  dont  font  compolces  les 
agates,  ^7^  à"  fu'iv.  —  Elles  fe 
trouvent  dans  toutes  les  parties  du 
monde,  &  dans  tous  les  terreins 
où  le  quartz  domine  ,  582.  —  La 
pelanteur  fpécifique  des  agates  en 
général ,  ell  un  peu  moindre  que 
celle  du  criAal  de  roche,  577.  — 
Quelques  agates  contiennent  de 
i'eau  en  quantité  même  aflez  (en- 
fible  ,  &  que  l'on  peut  recueillir 
en  les  calTant,  462  &  578.  — 
Agates  œillées  ,  5 p 2.  —  Agates 
herborifées,  5  84.  —  Pétrifications 
d'os  &  de  bois  en  agates ,  j  8  i .  — 
Les  agates  onyx  font  compofées 
de  couches  ou  de  lits  de  différentes 
touleurs,  592. —  Les  plus  belles 


agates  onyx  fe  trouvent  en  Orient  j, 
&  particulièrement  en  Arabie  , 
594. 

AiGUE-MARiNE  (!')  efl:  une 
ftalâdite  du  quartz,  un  criftal  de 
roche  teint  d'un  vert- bleuâtre  ou 
d'un  bleu-verdâtre,  448  &  478. 

AlGUE-MARINE  ORIENTALE. 
Voyei  BÉRYL, 

Airain  efl;  un  alliage  de  cuivre 
&  d'ctain  ,  dans  lequel  il  ne 
faut  qu'une  partie  de  ce  dernier 
métal  iur  trois  de  cuivre,  pour  en 
faire  difparoître  la  couleur,  & 
même  pour  le  défendre  à  jamais 
de  fa  rouille  ou  vert-de-gris ,  64. 
—  L'airain  de  Corinthe  étoit  un 
alliage  de  cuivre,  d'or  &  d'argent, 
dont  les  Anciens  ne  nous  ont  pas 
indiqué  les  proportions ,  61 . 

A  L  K  A  L I  volatil  efl  plus  commun 
qu'on  ne  croit  à  la  furface  6c  dans 
l'intérieur  de  la  terre,   58. 

Amalgame.  Différences  entre 
l'amalgame  &  l'alliage,  245. 

Améthyste,  Les  amethyfl:es 
violettes  &  pourprées  ne  font  que 
des  criHâux  de  roche  teints  de  ces 


}J  Ta 

belles  couleurs,  447  &   467.— 
Elles  ont  la  même  denfitc ,  la  même 
duieLé,  la  même  double  réfradion 
que   le  ciiflal  de    roche,  &   font 
également  rcfiadaires  au  feu  ,  467. 
—  Leur  pointe  ell  toujours  colo- 
rce,  6c  fouvent  la  couleur  manque 
dans  leur  bafe,  ibïd.  —  Amethyftes 
en    Auvergne,   en  Hongrie,  en 
Sibe'rie,    à  Kamtfchatka  ,   468  ù" 
fuiv.  —  Ainethyltes  pourprées  en 
Catalogne,   4(^9. 
Antjmoine.  Formation  des  mines 
primordiales  d'antimoine,  277.— 
Formation  des  mines  fecondaires, 
ibid.  —  Mines  d'antimoine  en  plu- 
mes  &  autres  mines  antimoniales 
de   dernière   formation,    27 S.   — 
Alines  d'antimoine  en  France,  en 
Allemagne,  en  Hongrie,  en  Italie, 
en  Afie,  en  Afrique  &;  en  Amé- 
rique, 279  àf  Ju'iv,  —  Antimoine 
crud,  fa  compofition  &  fa  re'duc- 
tion   en   rcgule ,   272  à^  fuiv.  — 
Foie  &  verre  d'antimoine,  274. — 
Différence  du  régule  d'antimoine 
avec  les  me'taux,   276. —  Alliage 
du    re'Lfule   d'antimoine    avec    les 
mc-taux  ,  ibïd.  &  fuiv. 
Argent.  L'argent  &  l'or  dans  la 
nature  primitive  n'ont  fait  gcnéra- 
iement  qu'une  mafle  commune,  i. 
—    Propriétés    communes    à    ces 
deux   métaux  ;   2,  —  Pioprililés 


BLE 

différentes  de  ces  deux  métaux ,  4. 
—  Mine  d'argent  vitrée,  fa  forma- 
tion ,  5 .  —  M  ine  d'argent  cornée , 
7  &  t  5.  —  Mine  d'argent  rouge, 
1  J. — Vitriol  d'argent,  7. —  Autres 
minéralifations  de  l'argent,  9.  — 
Alliage  de  l'argent  avec  les  autres 
métaux,     lo   &  fuiv.  —  Raifons 
pourquoi  l'argent  &  l'or  ne  fe  con- 
veriiOent  point  en  chaux   comme 
les  métaux  imparfaits,   12. —  Ar- 
gent natif  de  deux  fortes,    14.  — 
Mines  d'argent  en  France,  1  6  tf 
fuiv.  —  En  Ef])agne  ,    1  9  ci^  fui^. 
—    En    Allemagne,    22.    —   Eu 
Hongrie,  2  >  &  fuiv.  —  En  Suède, 
Danemarck  ,  Norwège&  Illande, 
2.6  &  fuiv.  —  En  Pologne,  27.— 
En  Sibérie  &  dans  plulleurs  pro- 
vinces de  i'Afie ,  30  &  fuiv. -^ 
En  Afrique ,   3  i  c^  fuiv.  —  En 
Amérique,  &  particulièrement  au 
Pérou ,   à  Potolî ,  3  2  di^  fuiv.  — 
Manière  d'exploiter  les  mines  d'ar- 
gent au  Pérou ,   &L  d'en  tirer   le 
métal,    34. 

Arsenic.  Efl  une  matière  qui 
forme  une  ligne  de  féparaiion  qui 
remplit  le  grand  intervalle  entre 
les  matières  métalliques  &  \çs  ma- 
tières falines ,  3  94.  —  Son  effence 
efl  autant  faline  que  métallique  , 
395.  —  Propriétés  falines  de  l'ai^ 
feiiic^  ibid,  — Propriétésmétalliques 


iD  E  s    Ma 

<3e  fon  reguïe,  ïbid.  —  La  plupart 
des  mines d'arfetiic,  noires  &  grifes, 
font  des  mines  de  cobalt  mêlées 
d'arfenic  ;  &  l'arfeaic  vierge  efl: 
comme  le  cobalt,  toujours  mtlé 
de  fer,  399.  —  L'arfenic  fe  trouve 
dans  prefque  toutes  les  mines  mé- 
talliques ,  &  fur  -  tout  dans  celles 
de  cobalt  &  d'étain  *,  402.  — 
A  (fiions  de  l'arfenic  fur  les  mines  de 
différens  métaux,  403. —  Alliage 
de  l'arfenic  avec  les  ipctaux,  407, 
—  Manière  dont  on  recueille  l'ar- 
fenic par  fublimation,  410. 
AvENTURiNE.  Ses  rapports  avec 
le  feld-fpath  &  le  mica.  Defcrip- 
tion  de  cette  pierre  ,  qui  louvent 
cil  plus  opaque  que  iranfjiarente , 
492. 


B 


B 


É  R  Y  L.  Ses  différences  avec 
l'aiguë  -  marine  à  laquelle  il  rel- 
feinble  par  les  couleurs,  328.  — 
Les  Lapidaires  lui  ont  donné  le 
nom  à' aiguë -marine  orientale ,  ibiJ,, 
^  Différentes  fortes  de  béryls, 
leurs  défauts.  —  Le  béryl  tire  fon 
origine  du  fchorl  ,  au  lieu  que 
i'aigue-marine  provient  du  quartz , 
ibid.  &  fulv. 
Bismuth.  Se  trouve  prefque 
toujours  pur  dans  le  lein  de  la 
terre,  ^8).  —  Sa  pefanteur  eft 


T   J  E   R  E   S.  ]}; 

plus  grande  que  celle  du  cuivre, 
ibid. —  Il  eft  plus  fufi ble  qu'au- 
cune autre  fubAance  métallique , 
2  3(î.  —  Son  alliage  avec  les  mé- 
taux 6i  demi-métaux  ,  ibid.  &  290. 

—  Le  bidnuth  &  le  mercure 
forment  enfemble  un  amalgame 
coulant,  2 S 7.  —  Epoque  de  la 
première  formation  du  bifmuth  , 
289,  —  Poudre  du  précipité  de 
bifmuth  avec  laquelle  on  fait  le 
fard,  2f)  I .  —  Étaniage  des  glaces  c^ 
verres  au  moyen  du  biimuth,  292. 

Blende.  Voyei  Z  i  n  c.  —  Il  fe 
forme  allez  fouvent  dans  les  grands 
fourneaux ,  des   concrétions  fem- 
blables    aux   blendes    naturelles. 
Koyei  ibid. 

C        ' 

^ADMIE  des  fourneaux  efl  Une 
concrétion  de  fleurs  de  zinc ,  ({ui 
s'accumulent  &  s'attachent  aux 
parois  des  cheminées  des  four- 
neaux où  l'on  fond  les  mines  de 
fer  qui  contiennent  du  zinc,  303. 

—  Manière  de  faire  du  laiton  avec  la 
cadmie  des  fourneaux  ,  ibid.  Ù'jilivi 

Calamine.  Voyei  Zinc. 

Calcédoine  eO  une  agate  d'un 
blanc  bleuâtre  &  d'une  tranfpa- 
rence  laiteuiè,  55^5  &  595.  — 
Calcédoin.^s  en  pe  it  &  en  grand 
volume,  )9  5  Ù' Juiy, 


h  T  A 

C  A  R  A  C  O  L  I  ^cj-  Àmencûins ,  quelfe 
peut  être  cette  matière  métallique, 

113. 

Chrysocolle  verte  ou  veri  de 
montagne,  n'efl:  que  du  vert- de - 
gris  très -atténué. -La  chryfocolfe 
bleue  ne  diffère  de  la  verte  que 
par  la  couleur  que  les  alkalis  vola- 
tils ont  fait  changer,  56.  —  0\\ 
l'appelle  aiur  lorfque  le  bleu  eft 
bien  intente,  &  bleu  de  montagne 
lorfqu'il  l'efl  moins,  ibid. 

Chrysolite.  Les  pierres  que 
l'on  appelle  aujourd'hui  chryfolites, 
ne  font  que  des  criflaux  dont  le 
jaune  efl  mêlé  d'un  peu  de  vert , 
475.  —  Différence  de  la  chryfo- 
îite  &  du  péridot,  476.  —  Chry- 
folites des  volcans  font  de  la  même 
rature  que  les  chryfolites  ordi- 
naires ,   477. 

Chrysoprase,  efl  une  prafe  dont 
Ja  couleur  verte  efl:  mêlée  d'un 
peu  de  jaune,   589. 

C  I  M  E  N  s.  Différence  des  cimens 
naturels  &  de  nos  cimens  artifi- 
ciels ,414.  —  Le  premier  des  ci- 
mens de  nature,  eft  le  lue  vitreux 
DU  criflâllin.  —  Le  fécond  ell  le 
fiic  f])athiqueou  calcaire,  41  5. — 
Le  troificme  ell  le  ciment  métal- 
lique &  pyriteux ,  ibid.  if  fu'iv — 
Le  quatrième  e(l  le  bitume,  &c. 
418, 


BLE 

Cinabre  ell  un  compofé  de 
mercure  par  le  foie  de  foufre,  230. 
—  Produdion  du  cinabre ,  23  i  «y 
fu'iv.  —  Le  cinabre  ne  fe  trouve 
point  mêle  avec  les  mines  des 
autres  métaux  ,  à  l'exception  de 
celles  de  fer  en  rouille ,  qui  font  de 
dernière  formation,  229. 

Cobalt.  De  tous  les  minéraux 
métalliques ,  le  cobalt  efl;  peut-être 
celui  dont  la  nature  ell  la  plus 
mafquée;^on  ne  peut  le  recon- 
noitre  d'une  manière  fûre  que  par 
la  couleur  bleue  qu'il  donne  aux 
émaux,  359.  —  Les  mines  de 
cobalt  font  aflez  rares,  &  toujours 
chargées  de  matières  étrangères , 
ibid.  —  Le  cobalt  efl  toujours  mêle 
de  fer  fi  intimement,  qu'on  ne  peut 
les  féparer ,  ibid.  —  Régule  de  co- 
balt ,  fes  propriétés ,  3  60  &  ^  i .  — 
Indices  des  minières  de  cobalt, 3  6 1 
Ù'fuiv.  —  La  fubftance  du  régule  de 
cobalt  efl  plus  fixe  au  feu  que  celle 
des  demi- métaux  ,  &  même  que 
celle  du  fer  &  des  autres  métaux 
imparfaits ,  369.  —  Alliage  du  ré- 
gule, de  cobalt  avec  les  métaux  & 
demi  -  métaux,  ^yo  Ù"  fuiv.  — 
Mines  de  cobalt  en  Europe,  à  la 
Chine,  au  Japon,  &c.  372  Ù* 
fuiv. 

Cornalines  font  des  agates 

d'un   rouge   pur    &   d'une   belle 

tranfparence , 


DES  Ai  'A 
tranfparence  ,  jSj.—  If  y  en  a 
auiïî  de  moins  tranfparentcs ,  5  S  (5. 
Cristal  de  roche.  Eli  de  la  même 
elTence  que  le  quartz.  —  Sa  for- 
mation ,  44,0.  —  Pourquoi  l'on 
trouve'trcs  '  rarement  des  cridaux 
à  deux  pointes ,  &  très-commune'- 
ment  des  criftaux  en  pyramide 
fimple  ,  ou  en  prifmes  funnontcs 
de  cette  feule  pyramide,  44.1. — 
Criftaux  de  roche,  grands  &  petits, 
font  figures  de  même ,  442.  — 
Criflal  de  roclie  donne  une  doubfe 
réfraction  dans  le  fens  dnfl,  qui 
n'a  pas  lieu  dans  le  fens  du  contre-fl 
de  fa  fubftance,  444.  —  Efl:  com- 
pofé  de  deux  matières  de  différente 
denfité,  &  dont  l'une  eft  moins 
dure  que  l'autre,  ibid.  &.  445. — 
Criftaux  de  roche  de  couleurs 
différentes,  447.  —  Les  parties 
élémentaires  du  criftal  de  roche , 
font  des  lames  triangulaires  fort 
petites  ,  ôc  dont  lafurface  plane  eft 
néantnoins  beaucoup  plus  étendue 
que  celle  de  la  tranche  qui  eft  pref- 
que  infiniment  mince,  453  ù'fuiv. 
—  C'eft  toujours  près  du  fommet 
des  montagnes  quartzeufes  <Sc  gra- 
niteufes,  que  fe  trouvent  les  gran- 
des criftallières  ou  mines  decriflal, 
45  5  ^fi^iv. — Il  fe  trouve  plufieurs 
criflaux  qui  contiennent  de  l'eau  <Sc 
des  bulles  d'air  ,  46  r .  —  Le  criftal 

Mincrmx ,  Tome  UL 


T    I   E    R    E    s.  > 

fe  trouve  dans  toutes  les  montagnes 
primitives  quartzeufes  &  grani- 
teufes  en  Europe,  en  A  fie  &  dans 
toutes  les  parties  du  monde,  462 
à^  fuïv.  —  Les  criftaux  colorés  ne 
font  pas  plus  denfes  que  les  criftaux 
fans  couleurs,  4<55  <5c  487. 
Cristallisation.  Les  formes  de 
criftallifation  ,  ne  font  ni  générales 
ni  confiantes,  &  elles  varient  au- 
tant dans  le  genre  calcaire  que  dans 
le  genre  vitreux,  422.  —  Mnnière 
dont  fe  produifent  les  crifiaflifa- 
tions,  foit  par  le  moyen  du  feu, 
foit  par  l'intermède  de  l'eau,  425 
Ù' fuiv.  —  Raifon  pourquoi  des 
matières  très-différentes  peuvetit  fa 
criftallifer,  &  fe  criftallifent  en  effet 
fous  la  même  forme,  430.  —  La 
forme  de  criftallifation  n'indique 
ni  la  denfité ,  ni  la  dureté ,  ni  la 
fufibilité ,  ni  l'homogénéité  ,  ni 
aucune  des  propriétés  effentielles 
de  la  fubftance  des  corps ,  433.  — 
Elle  n'eft  point  un  caradère  ipé- 
cifique  &  diftindif  de  chaque 
fubftance  ,  ibid.  —  Dans  la  criftal- 
lifation la  Nature  n'opère  que  dans 
deux  dimenfions ,  au  lieu  que  dans 
le  développement  des  êtres  orga- 
nifés,  elle  agit  dans  les  trois  di- 
menfions à  la  fois,  449  &"  fuiv.  — 
Circonftance  efientielle  à  la  crif- 
tallifation ,  5  73-^  y^'^-  —  ^ 
Jvl  m  m  m 


yj  Ta 

crinallrfation  peut  s'opeier  égale- 
ment par  le  moyen  du  feu  comme 
par  celui  de  i'eau ,  72. 
Cuivre.  Le  cuivre  primitif  a  été 
formé  comme  l'or  &  l'argent  dans 
les  montagnes  quartzeules,  &l\[  le 
trouve,  foi t  en  morceaux  de  métal 
malllf,    foit  en   veines    ou   filons 
jnélancrés  d'autres  métaux,  50. — 
Mines  de  cuivre  de  féconde  for- 
mation ,    elles   font    plus    rébelles 
que  toutes  les  autres  à  i'adion  du 
feu ,  \  \6.  —  Elles  exigent  d'être 
grillées    plufieurs    fois    avant    de 
donner  leur  métal,  yy.  —  Mines 
de  cuivre  de  troifième  formation, 
56.  —  Cuivre  de  cémentation  fait 
par  la  Nature,  66.  — Affinité  du 
cuivre  &   du    fer,  64  &   66.  — 
Alliages  du  cuivre  avec  les  autres 
métaux,  demi-métaux  &  avec  l'ar- 
fenic,  6^.  —  Propriétés  du  cuivre, 
fa  denfité,  fa  ténacité,  fa  mauvaiie 
odeur ,    fes   qualités    funeftes ,    la 
dureté,  fon  élailicité,  fa  dudilité, 
fa  réfiftance  au  feu ,   70.  —  Chaux 
&  verre  de   cuivre  ,71.  —  Tous 
les  fels  de  la  terre  &  des  eaux ,  foit 
acides  ,  foit  alkalins ,  attaquent  le 
cuivre  &  le  difiolvent  avec  plus  ou 
moins  de  promptitude  &  d'énergie, 
74.  —  Enumeration  des  principales 
mines  de  cuivre  de  l'Europe ,  ôc 
des  autres  parties  du  monde,  80 


BLE 

&  fuiv.  —  Comme  le  cuivre  efl 
moins  difficile  à  fondre  que  le  fer, 
il  a  été  employé  long-temps  au- 
paravant, pour  fabriquer  les  armes 
&  \gs  inftrumens  d'Agriculture , 
51. —  Kailon  pourquoi  l'on  ne 
trouve  prefque  plus  de  cuivre 
primitif  en  Europe  &  en  A  fie;  & 
pourquoi  l'on  en  trouve  encore 
en  Atiique  &.  en  Amérique,  ibid. 
Converlion  du  cuivre  en  vert-de- 
gris  ou  verdet;  comment  elle  s'eft 
opérée  dès  les  premiers  temps ,  5  2, 
à^ Juiv.  —  Eaux  cuivreufes  ,53.  — 
Comparaifon  du  cuivre  avec  l'or 
&  l'argent  ,  &  leurs  diliérences 
efîentielles ,  60.  —  Les  minerais 
cuivreux  de  leconde  forination , 
demandent  encore  plus  de  temps 
&  d'art  que  les  mines  de  fer  pour 
être  réduits  en  bon  métal,  ib'id. 
de   61. 

Cuivre  jaune  ou  laiton.  Efl  un 
mélange  de  cuivre  ik  de  zinc,  qui 
ne  fe  trouve  pas  dans  la  Nature, 
61.  —  Manière  de  faire  du  bon 
laiton,  68. 

D 

.U  ISSOLUTIONS.  Les  difiolutions 
des  métaux  (ont  en  générai  plus 
corrofives  que  l'acide  même  dans 
lequel  ils  ont  été  diflous,  45. 


DES      AI  A 

E 

V 

■L  A  u  (  r  )  dans  Ton  eiïence  doit 
être  regardée  comme  un  fel  infi- 
pide  &  fluide,  &  [a  glace  qui  n'efl: 
que  ce  même  fel  rendu  folide  le 
devient  d'autant  plus  que  le  froid 
efl;  plus  grand  ,    214. 

Emeraude  doit  être  niife  au 
nombre  des  crillaux  du  quartz 
mêlé  de  fchorl  ,  503  ci^  fuïv.  — 
De'fàuts  des  emeraudes,  504.  — 
La  véritable  cjneraude  étoit  bien 
connue  des  Anciens,  5  07  &  fuiv. 
Faufles  emeraudes ,  510.  —  Lieux 
où  l'on  a  trouvé  la  plus  grande 
quantité  d'émeraudes  en  Amérique, 
j  I  7.  —  L'émeraude  efl  fufible  , 
&  {à  fufibilité  ainfi  que  fa  pefanteur 
(pécifique,  démontrent  que  fa  fubf- 
tance  quartzeufe  efl  mêlée  d'une 
certaine  quantité  de  fchorl  ,  5  20. 
—  Emeraude  du  Brefil  ,  l'es  diffé- 
rences d'avec  la  véritable  emeraude 
du  Pérou,  520.  —  Rapports  évi- 
dçns  de  cette  emeraude  du  Breill 
avec  les  fchorls  ,  ibid.  —  Ses  autres 
propriétés ,  ïbid.  —  Les  emeraudes 
étant  des  pierres  vitreufes  &.  à 
double  réfradion,  ne  doivent  pas 
être  mifes  au  rang  des  pierres 
précieufes,  qui  par  leur  àen^né  y 
leur  dureté  &  leur  homogénéité, 
font    d'un    ordre     fupérieur    & 


T    I   è    R    E   s.  vi) 

d'une    origine   didl-rente  ,    522. 

Enhydres;  c'efl  le  nom  qu'oii 
a  donné  à  des  agates  ou  cailloux 
minces  &  creux  qui  contiennent 
une  aflez  grande  quantité  d'eau, 
461 . 

E  TA  I  N.  Mines  d'étain  de  première 
forjiiation,  i  27.  —  La  mine  d'étain 
efl  plus  pefante  qu'aucune  de  celles 
•  des  autres  métaux  minéralifés,  & 
fa  plus  grande  pefanteur  provient 
de  l'arfenic  qui  y  efl  mêlé ,  135.— 
Etain,  cofiime  tous  les  autres  mé- 
taux, ell  un  dans  la  Nature,  14^, 

—  Mines  d'étain  en  roche,   125. 

—  Mines  d'étain  en  criflaux  ;  gran- 
deur &  couleurs  4p  ces  criflaux , 
1 24.  —  Produits  de  ces  mines 
d'étain  par  \à  fonte ,  ihid.  —  Etain 
peut  s'dllier  avec  tous  les  métaux 
&  demi-métaux,  153.  —  Grande 
affinité  de  l'étain  avec  le  fer  &  le 
cuivre,  158.  —  Étamage  du  fer 
préférable  à  celui  du  cuivre,  i  5p. 

—  L'étain  enlève  à  l'argent  comme 
à  l'or ,  leur  ducflilitc ,  11,  —  Eit 
après  l'or  &  l'argent ,  le  métal  le 
moins  fufceptible  d'altération  par 
les  élémens  humides ,  64.  —  Ses 
mines  paroifîent  affecter  des  lieux 
particuliers,  1:^5.  —  Nulle  part 
il  ne  fe  préfente  fous  fa  fonne 
métallique,  ibïd.  —  Mines  d'étain 
font  toujours  plus  ou  moins  mêlées 

M  m  m  m  ij 


vnj 


T  A 

d'aifenic,  123. — .  Cendre  &  potée 
d'étain,  129.  —  On  peut  faire 
artificiellement  des  mines  d'étain 
avec  de  l'ctain  &  de  l'arfenic  ,130. 

—  L'ctain  efl  après  Je  plomb  le 
plus  mou  des  métaux  ,  131.— 
On  mêle  le  cuivre  avec  i'étain 
pour  lui  donner  plus  de  fermeté, 
ibiJ.  —  Propriétés  de  l'ctain  ,  fa 
denfité  ,  (à.  ténacité  ,   &c.   îbid.  ù' 

fulv  —  II  n'y  a  point  d'étain  pur 
dans  le  commerce ,  &  il  efl  toujours 
mêlé  de  cuivre  ou  de  plomb  ,132. 

—  Mines  d'étain  en  Angleterre, 
en  Allemagne,  aux  Indes,  à  Ma- 
laca ,  Banca ,  &c.  fur  les  côtes 
orientales  de  l'Afrique  &  en  Amé- 
rique ,  I  3  5  &  fulv, 

F 

£LD-SPATH.  Caradères  par 
lefquels  il  diffère  du  quartz.  —  La 
criftâllifation  du  feld  -  fpath  a  été 
produite  par  le  feu  primitif,  &  a 
par  conféquent  précédé  toutes  les 
crillallilations  qui  le  font  faites  par 
l'intermède  de  l'eau  ;  preuve  de 
cette  allértion,  480  éfjuiv.  —  Les 
extraits  du  feld-fpaih  font  en  afléz 
grand  nombre  ;  mais  ils  ne  le  pré- 
fentent  nulle  part  en  aufli  gros 
volume  que  les  criftaux  quartzeux  ; 
ils  lont  toujours  en  alfez  petits 
morceaux  ifolés ,  parce  qu'il  ne  le 


BLE 

trouve  lui-même  que  très-rarement 
en  mafles  un  peu  confidérables , 
481. 

Feld-SPATH  de  Ruffie.  Trouvé 
nouvellement  près  de  Féterfbourg; 
fa  delcription,  fes  couleurs  «Se  les 
propriétés,  485.  —  Cette  pierre 
chatoyante  paroît  être  un  feld- 
fpath  mélangé  de  fchorl,  48  (j. 

Fer.  Il  ne  le  fait  aucune  union 
intime,  auciui  alliacre  entre  le  fer 
&.  l'argent,  11.  —  Comparaifoii 
du  fer  avec  le  zinc  ,214. 

Feu.  Le  feu  agit  fur  les  métaux, 
comme  l'eau  (ur  les  lels ,  212.  — 
Le  feu  paroît  être  dans  le  mercure 
en  quantité  prefque  infiniment 
petite ,  ibid. 

Foie  de  foufre.  A  fouvent  aidé  , 
plus  qu'aucun  autre  agent ,  à  la 
minéralifation  de  tous  les  métaux, 
2y  i . 


ALÊNE  n'efl  qu'une  efpèce 
de  pyrite  compofée  de  chaux  de 
plomb  ,  &.  de  l'acide  uni  à  la  fub- 
flance  du  feu  fixe,  204.  —  Peut 
fe  régénérer  dans  les  mines  de 
plomb  qui  font  en  état  de  cérufe 
ou  de  chaux  blanche  ,   1  p  i . 

Grenat,  (le)  Quoiqu'aufll  pelant 
que  les  pierres  précieufes,  ne  doit 
pas  être  mis  à  leur  rang,  fa  grande 


DES      'Aï  A 

pefanteur  ne  provenant  que  du  fer 
qu'il  contient  en  parties  inafTives  , 

5  39  ^  5+4-  —  Différences  du 
grenat  &  des  pierres  précieufes , 
ibid.  —  Le  grenat  eft  conipofc  de 
fchori  <3c  de  fer,  il  e(l  fufible  «Se 
donne  une  double  rtfradion,  ibid, 

6  540.  —  Ses  reflemblances  avec 
les  fchorls  de  féconde  formation , 
ibid.  —  La  plupart  des  grenats 
contiennent  aflez  de  fer  en  état 
métallique  pour  agir  fur  l'aiguilîe 
aimantée,  ibid.  —  La  forme  des 
grenats  varie  prefque  autant  que 
celle  des  fchorls,  542  &  54p.  — 
On  les  trouve  fouvent  mêlés  en- 
femble  ,  J  4  i .  —  Les  grenats  fe 
préfentent  quelquefois  en  allez 
gros  groupes ,  &  plus  fouvent  en 
criflaux  ifolés ,  J42.  —  Grenats 
volcanilés  ont  perdu  leur  couleur 
&  une  grande  partie  de  leur  poids , 
J44.  —  Les  grenats  de  tout  pays 
font  de  la  même  nature  ;  fouvent 
même  ceux  de  Bohème  font  plus 
parfaits  que  ceux  qu'on  apporte 
des  Indes  orientales,  545. — Gre- 
nat Syrien;  le  plus  beau  de  tous 
les  grenats  vient  de  Surian  dans 
le  royaume  de  Pégu,  ibid.  —  Dif- 
férentes couleurs  dans  les  grenats  , 
546  cf  fuiv.  —  L'eicarboucle  ou 
carbunculus  des  Anciens ,  eft  vrai- 
fembiabiement  un  grenat;  )-^7  ^ 


1 
tx 


T    I    E    Ti    E    S. 

fuiv.  —  Difîerences  par  lefquelles 
on  peut  diftinguer  aifément  les 
grenats  des  ruljis ,  5  jo,  —  Diffé- 
rens  lieux  où  l'on  trouve  (\ts 
grenats ,  tant  dans  l'ancien  que 
dans  le  nouveau  coniuieat ,  ibid, 
&  fuiv. 


H 


H 


Y  A  C  I  N  T  H  E  (  r  )  ajiproche  du 
grenat ,  &.  on  peut  la  regarder 
comme  un  produit  du  fchori  mêlé 
de    lubftances    métalliques,    553. 

—  Ses  caradères  communs  avec 
le  grenat  :  ces  deux  pierres  fe  ren- 
contrent fouvent  enfemble,  ibid, 

—  L'hyacinthe  elt  après  le  grenat 
la  pierie  vitreufe  la  plus  denfe , 
ibid.  —  Différentes  nuances  dans 
la  couleur  orangée  des  hyacinthes, 
5^4.  —  Elles  perdent  leur  couleur 
au  feu,  &  y  deviennent  blanches 
fans  perdre  leur  tranfparence,  ibid, 

—  Différens  lieux  où  l'on  trouve 
des  hyacinthes  ,   j  5  (5. 

Hydrophane  (  Pierre  )  ,  ocu/us 
mundi ;  cette  pierre  ie  trouve  ordi- 
nairement autour  de  la  calcédoine, 
ou  intercalée  entre  ks  couches , 
598  &.  603.  —  Leurs  différences; 
cette  pierre  hydrophane  eft  opa- 
que ,  «Se  ne  prend  de  la  tranfpa- 
rence que  quand  eWe  eft  itnbi- 
bée  d'eau,  ibid.  —  Sa  texture  eft 


X  T    A     B 

différente  de  celle  de  la  calcédoine 
&  des  autres  agates,  598.  — Elle 
devient  traniparente  ,  non  -  feule- 
ment dans  l'eau,  mais  dans  toutes 
les  autres  liqueurs,  599.  —  Ces 
pierres  ne  prennent  pas  toutes  à 
volume  égal  le  même  degré  de 
tranfparence,  6oz.  —  La  tranfpa- 
rence  n'appartient  pas  à  la  pierre 
hydrophane,  &.  ne  provient  uni- 
quement que  de  l'eau,  qui  fait  une 
partie  majeure  de  fa  mafTe  après 
l'imbibition,  604. 

L 

JLaiton.  Koyf^  Cuivre  jaune, 
6\.  —  Efl:  un  peu  plus  denfe  que 
le  cuivre  pur,  mais  c'eft  lorfque 
ni  l'un  ni  l'autre  n'ont  été  com- 
primés ou  battus  ,  car  il  devient 
moins  denfe  que  le  cuivre  rouge 
après  la  comprefTlon  ;  il  efl:  aufîl 
moins  fujet  à  verdir,  &  fuivant  les 
différentes  dofes  du  mélange ,  cet 
alliage  efl:  plus  ou  moins  blanc , 
jaunâtre  ,  jaune  ou  rouge  ;  c'efl: 
d'après  ces  différentes  couleurs 
qu'il  prend  les  noms  de  Similor , 
de  Pïnchebec  &  d^  métal  de  Prince, 
61.  &  62. 

M 

IVi ALACHITES.  Comment  elles 
font  produites   par   la  décompo- 


L  E 
fition  du  cuivre,  jS  &  59.  — 
Les  belles  malachites  fe  trouvent 
le  plus  communément  dans  les 
contrées  du  nord  de  i' A  fie,  103. 
—  Différentes  formes  fous  lef- 
quelles  fe  préfentent  les  mala- 
chites ,  ihid. 

Manganèse  efl  un  minéral 
compofé  qui  contient  toujours  du 
fer,  &  qui  efl:  mélangé  de  matière 
calcaire,  38  j.  —  La  manganè/e 
fe  trouve  principalement  dans  les 
mines  de  fer  fpathiques ,  386.  — 
Elle  a  auffi  fes  mines  particulières, 
ibid.  —  Indices  de  la  manganèfe 
par  la  couleur  violette  des  pierres 
calcaires  ,386  if  fuïv.  —  Variétés 
de  la  manganèfe  dans  fes  mines , 
390. —  Régule  de  la  manganèfe; 
les  principales  propriétés ,  ihid.  — 
Alliage  du  régule  de  la  manganèfe 
avec  les  métaux  &  demi -métaux, 
391,  —  Le  régule  de  manganèfe 
contient  toujours  du  fer ,  &  il  efl: 
fi  intimement  uni  avec  ce  métal 
qu'on  ne  peut  jamais  S'tn  féparer 
totalement ,  ihid.  —  Ufage  de  la 
manganèfe  dans  les  Manufaélures 
des  glaces  &  des  verres  blancs  ; 
elle  donne  au  verre  une  couleur 
violette ,  &  fait  difparoître  les  autres 
couleurs  lorfqu'elles  font  foibles, 
ihid. 

Massicot   efl    une   chaux  de 


DES      AI   A    T 

plomb  qui  prend  au  feu  la  cou- 
leur jaune  en  la  remuant  avec  une 
fpatule  ,195. 

Matière.  Les  propriétés  eflen- 
tielles  de  toute  matitre  font  la 
denfitc  ,  la  dureté  ,  la  plus  ou 
moins  grande  fuj^bilité  ,  i'homo- 
généïtc  <5t  la  combuniLilité  ;  ce 
font  en  même  temps  les  vrais 
caractères  par  lefquels  on  peut 
reconnoître  la  nature  &  l'oricrine 
de  chaque  fubftance  différente  , 
43<5  &  fuiv. 

Mercure  efl  plutôt  une  eau 
métallique  qu'un  vrai  métal,  2,  i  5. 

—  Raifon  pourquoi  le  mercure 
ne  mouille  que  les  métaux  ,  &.  ne 
mouille  pas  les  terres ,  ih'id.  & fuiv. 

—  Le  froid  extrême  coagule  le 
mercure  fans  lui  donner  une  foli- 
dité  confiante  ,  ni  même  auffi  per- 
manente que  celle  de  l'eau  glacée, 
2. 1  I .  —  Comparaiion  ^s  proprié- 
tés du  mercure  avec  l'eau  &  avec 
les  métaux ,  ïbïd.  —  Le  mercure 
mouille  les  métaux  ,  comme  l'eau 
mouille  les  fels  ou  les  terres  à  pro- 
portion des  fels  qu'elles  contien- 
nent, 212.  —  Rapports  du  mer- 
cure avec  l'eau,  214.  & fuiv.  — 
Rapports  du  mercure  avec  \gs 
métaux ,  2  1  7  diT'  fuh.  —  Le  mer- 
cure ne  fe  trouve  que  dans  les 
couches  de  la  terre ,  formées  par 


I    h     R    E    S.  X). 

le  dépôt  des  eaux  ;  il  n'efl  point 
mêlé  dans  les  minerais  des  autres 
métaux,  219.  —  Sa  mine  à  laquelle 
on  donne  le  nom  de  cinabre ,  n'ell 
point  un  vrai  minerai,  mais  un 
compolc  par  llmple  juxtapofîtion 
de  loufre  &  de  mercure  réunis, 
ibid. —  La  formation  des  mines  de 
mercure  efl  poflérieure  à  celle  des 
mines  primordiales  des  métaux  , 
220.  —  Le  mercure  fe  préfenie 
très-rarement  dans  un  état  coulant, 
ibid.  —  Le  cinabre  r;e  fe  trouve  que 
dans  quelques  endroits  particuliers 
où  le  loutre  s'efl  trouvé  en  grande 
quantité  ,  &  réduit  en  foie  de 
foufre  par  des  alkalis  ou  des  terres 
calcaires ,  qui  lui  ont  donné  l'afiî- 
nité  nécefîaire  à  Ion  union  avec 
le  mercure ,  ibid.  —  Des  trois 
grandes  mines  de  mercure,  & 
dont  chacune  lufïîroit  aux  befoins 
de  tout  l'Univers,  deux  font  en 
Europe  &  une  en  Amérique,  221. 
Aline  d'Idria  dans  la  Carniole  .... 
—  Mine  d' Almadcn  en  Efpagne  , 
ibid.  —  Mine  de  Guanca  Velica  au 
Pérou  ,  222.  —  Autres  petites 
mines  de  mercure  ,  tant  en  Europe 

qu'en  A  fie,  225  &  fuiv Raifon 

pourquoi  Von  trouve  fi  rarement 
le  mercure  dans  fon  état  coulant , 
^23  2.  —  Confidération  du  mercure 
dans  Ion  état  de  cinabre  ;  &  dai-!> 


a};  T  a 

\<ôn  c'tat  fTui Je ,  237,  —  Principales 
propriétés    du   mercure  ,  ïbiJ.  — 
Différence  de  la  chaux  de  mercure 
&  des  autres  chaux  métalliques  , 
2.40   ù'  yî"i'«  —   Amalgame    du 
mercure  avec  les  métaux  (?c  demi- 
métaux  ,   246  &  fuïv.  —  II  refufe 
de  s'amalgamer  avec  le  fer,  l'an- 
timoine &  le  cobalt,   248. —  Le 
mercure  ne  forme  pas  un  amalgame 
avec  les  graifl'es ,  252.  —  On  retire 
Je  mercure  fans  perte  de   tous  les 
amalgames  ;   mais   on    ne   peut  le 
retirer  en  entier  des  graifles,  254.— 
Sublimé  corrofif ,  ibid.  —  Mercure 
doux,  fa  préparation,  255. —  Le 
mercure   jeté    dans   l'huile  bouil- 
lante prend  une  forte  de  folidité, 
2J9.  —  D'où  peut  provenir  la 
folidité  que  le  mercure  prend  dans 
le  zinc  fondu  &  dans  l'huile  bouil- 
lante ,  ibid.  &  fuiv.  —  Le  mercure 
philofophique    n'eft    qu'un     être 
d'opinion,  262,  —  Comment  le 
mercure   agit   dans    le    corps    des 
animaux,  16  i). 
Al  É  T  A  U  X.  Confidérations  &  re- 
flexions fur  la  nature  des  métaux  , 
2  63   <y  fuiv.  Ordre  des  matières 
métalliques,    depuis    l'or    jufqu'à 
J'arfenic,  393*  La  rédudion  de  la 
chaux   des  métaux ,  n'efl:   dans  le 
vrai,  qti'une  forte  de  précijiitation  , 
^99'  —  Comparaifon  des   mines 


BLE 

primordiales  des  fix  métaux,  208 
Ù'  fuiv.  —  Échelle  de  la  Nature 
dans  fes  produdions  métalliques  , 
213^  fuiv. 

Minéralisation.  Comment  & 
par  quels  agens  s'opère  la  minera- 
lifation  des  matières  métalliques , 
402  &  fuiv. 

Mines.  Les  mines  primordiales 
du  fer,  de  l'or,  de  l'argent,  «Se 
même  du  cuivre ,  font  toutes  dans 
le  roc  vitreux ,  &  ces  métaux  y 
font  incorporés  en  plus  ou  moi/is 
grande  quantité,  dès  le  temps  de 
leur  première  fufion  ou  fublima- 
tion  par  le  feu  primitif,  38. —  Les 
mines  fecondaires  qui  fe  trouvent 
dans  les  matières  calcaires  ou  fchif- 
teufes ,  tirent  évidemment  leux 
origine  des  premières ,  ibid, 

M  I  N  I  u  M  efl:  une  chaux  de  plomb, 
qui  prend  la  couleur  rouge  à  un 
certain  degré  de  feu  déterminé,  qui 
eft  de  cent  vingt  degrés  ,  &  ne 
doit  être  ni  plus  fort  ni  j)lus  foible, 
195.  —  Pratiques  ufitées  en  An- 
gleterre ,  pour  faire  le  minium  eia 
grande  quantité  &  à  moindres  frais, 
196  Ù"  fuiv, 

M  u  N  D  I  c  K  efl  une  poufîlère  qui 
fe  trouve  dans  les  mines  d'étain, 
&  qui  ne  contient  qu'une  très- 
petite  quantité  de  métal,  &  c'ert 

plutôt 


D    £    s      Aî  A 

plutôt  de  l'arfenic  decompofç  que 
de  l'ctàin,   1^3. 


T    I    È    R    E    S. 


Xiij 


O 


N 


A' 


A  T  U  R  E.  Ses  produdions  ne 
doivent  pas  être  regardées  comme 
des  ouvrages  ifolcs  ;  mais  il  faut 
les  confidcrer  comme  des  fuites 
d'ouvrages  dans  lefquels  on  doit 
faifir  les  opérations  fucceflives  de 
travail ,  en  partant  &  marchant 
avec  elle  du  plus  fimple  au  plus 
compofé,  439. 

Nickel  efl  un  minéral  qui  fe 
trouve  dans  les  mines  de  cobalt, 
&  qui  n'efl  connu  que  depuis  peu 
d'années,  377.  —  Le  nickel  con- 
tient toujours  du  fer,  &  l'on  ne 
peut  l'en  féparer  entièrement  par 
aucun  moyen  ,  380.  —  II  donne 
au  verre  la' couleur  d'hyacinthe  , 
ibïd.  —  Le  nickel ,  le  cobalt  &  la 
inanganèfe  ne  font  pas  des  demi- 
métaux  purs,  mais  des  alliages  de 
différens  minéraux  mélangés  ,  &  fi 
intimement  unis  au  fer  qu'on  ne 
peut  les  en  féparer,  381.  —  Alliage 
du  nickel  avec  les  métaux  &  demi- 
métaux,  381  d/fuiv.  —  Le  nickel 
ne  s'amalgame  point  avec  le  mer- 
cure ,  383.  —  Différence  entre  le 
minerai  du  nickel  &  celui  du 
cobalt,  /^/V. 

Minéraux,  Tome  II L 


kJ  c  u  LU  s     M  u  N  D  i,    Voyfi 
Hydrophane. 

(EiL  DE  Chat.  Les  pierres  aux- 
quelles on  a  donné  ce  nom,  font 
toutes  chatoyantes;  elles  varient 
pour  le  deffin  plus  ou  moins  régu- 
lier des  cercles  ou  anneaux  qu'elles 
préfenteiit,  487.  —  Variétés  de 
ces  pierres  ,  ibid.  —  Leurs  pro- 
priétés chatoyantes ,  leurs  rapports 
avec  le  feld-fpaih  ,  488. 

<EiL  DE  Chat  noir  ou  noirâtre. 
Ses  différences  avec  les  autres 
pierres  auxquelles  on  donne  ce 
même  nom  d' œil  de  chai,  526. — 
II  provient  du  fchori ,  ibid. 

(ElL  DE  Loup.  Pierre  chatoyante 
provenant  du  feld-fpath ,  &  mêlée 
de  particules  micacées;  elle  paroît 
faire  la  nuaiice  entre  lesfeld-fpaths 
de  les  opales  ,  49  i  • 

(ElL  DE  Poisson.  Pierre  ainfi 
nommée ,  parce  qu'elle  refîeinble 
au  criftallin  de  l'œil  d'un  poilfon, 
^89.  —  Elle  ell  chatoyante,  & 
on  doit  la  rapporter  au  feld-fpath, 
fa  defcription  &  fes  propriétés,  ibid. 
&  490. 

Onyx.  Voyei  Agate,  Le  nom 
à'ofiyx  qu'on  a  donné  de  préfé- 
rence aux  agates ,  dont  les  lits  font 
de  couleurs  différentes,   pourroit 

N  n  11  n 


xlv  T  A 

s'appliquer  afTez  généralement  à 
toutes  les  pierres  dont  les  couches 
fuperpofées  font  de  diverfes  fubf- 
tànces  ou  de  couleurs  différentes, 
591. 

Opale  eft  la  plus  belle  de  toutes 
les  pierres  chatoyantes;  fa  defcrip- 
tion  ,  Ton  chatoyement,  fa  texture, 
fon  peu  de  denfité  &  fes  autres 
propriétés,  493.  —  L'opale  eft 
dans  la  réalité ,  une  pierre  irilée 
dans  toutes  fes  parties ,  elle  efl: 
beaucoup  plus  légère  que  le  feld- 
Ipath  ,  &  auflx  beaucoup  moins 
dure,  45)4.  —  Différentes  fortes 
d'opales,  ib'id.  &  fu'iv.  —  Opales 
noires,  49^-  —  La  gangue  de 
i'opale  ell  une  terre  jaunâtre  & 
vitreufe,  qui  ne  fait  point  effer- 
vefcence  sisec  \gs  acides,  498. — 
Les  opales  renferment  fou  vent  des 
gouttes  d'eau ,  \hid. 

Or.  VoycT^  Argent,  i,  2,  3  &  4. 

Orpiment.  Comment  on  dillingue 
l'orpiment  &  le  rcalgar  naturels 
de  l'orpiment  ôc  du  réalgar  arti- 
ficiels ,    409. 

P 

X  ELLA    &    PiGNE    d'ArGENT. 

Voye?^  Argent,  36. 
P  É  R  I  D  O  T  ,   tire  fon  origine  du 
fchorl ,     5  2. 3 .   —  Différences  du 
péridot  &  de  la  chryfolite ,  ïhid.  — 


BLE 

Deux  fortes  de  pcridots  ,  leurs 
difîérences  &  leur  defcripiion  , 
524.  —  Le  péridot  donne  une 
double  réfradion  plus  forte  que 
celle  du  crillal  de  roche ,  &  il  a , 
comme  ce  criftal,  un  fens  dans 
lequel  il  n'y  a  point  de  double 
réfradion  ,  ib'id.  ôc   5  2  j . 

PÉTRO-SILEX.  Son  premier  carac- 
tère apparent,  eiï  une  demi-tranf- 
parence  grafle  qu'on  peut  comparar 
à  celle  de  l'huile  figée,  605.  — 
Il  doit  être  regardé  comme  un 
quartz  mêlé  de  feld-lpath.- —  Il  eft 
fufible  à  un  feu  violent.  —  II  fe 
trouve  en  petits  &  gros  blocs ,  & 
teint  de  différentes  couleurs ,  ibid, 

Pierre  de  croix.  Cette  pieire 
n'efl  qu'un  groupe  formé  de  deux 
ou  quatre  colonnes  de  fchorl , 
oppofées  &  croifées  les  unes  fur 
les  autres ,  5  6y.  —  Variétés  dans 
la  forme  de  ces  pierres ,  &  leur 
defcription ,  ibid.  —  Ce  font  des 
fchorls  de  formation  fecondaire , 
568. 

Pierre  deLabrador,  Voyei 
Feld-spath  de  Russie. 

ViET^TiE  infernale.  Voyei  Dissolu- 
tion d'Argent,  45. 

Pierres  irifées.  Commem  fê  pro- 
duifentles  couleurs  dans  les  pierres 
irifées,  500.  —  Ce  Lbnten  général 


D  £  s    Ma 

des  pierres  fêlées  &  défedueufes , 
joo, 

Pj ERRES  précievfes.  Leur  fubdance 
diffère  de  celle  des  criHaux  de 
roche,  tant  par  la  denfitc  que  par 
la  dureté  &  l'homogéncité ,  c'ell: 
de  la  terre  limoneufe  ou  végétale, 
&  non  de  h  matière  vitreufe 
qu'elles  tirent  leur  origine,  460. 

Pierres  travfparentes.  Toutes  les 
pierres  tranlparentes  Ibnt  fufcep- 
tibles  de  devenir  éledriques,  elles 
perdent  leur  éledricité  avec  leur 
traniparence,  jéo. 

Platine.  On  n'en  a  jamais  rencon- 
tré dans  aucune  région  de  l'ancien 
continent ,  &  il  n'y  a  que  deux 
endroits  en  Amérique,  où  l'on  ait 
julqu'ici  trouvé  cette  matière  mé- 
tallique dans  des  mines  d'or,  3  i  6. 
•—  Elle  efl:  en  grenaille ,  &  mêlée 
de  fablon  ferrugineux  &  magné- 
tique, ibid.  —  Il  n'eft  pas  certain 
que  cette  forme  de  grenaille  foit 
la  forme  native  de  la  platine  ,317. 
■ —  La  platine  eft  encore  plus  ré- 
fraâiaire  au  feu  que  la  mine  de  fer, 
ibid.  —  La  platine  n'efl  point  un 
vrai  métal  fimple ,  mais  un  minéral 
dont  la  produdion  eft  accidentelle, 
3  1  8  6c  5  I  9.  —  La  platine  contient 
toujours  du  fer,  car  elle  eft  tou- 
jours attirable  à  l'aimant,  319. — 
l^a  platine  eft  toujours  aigre,   & 


T    I    E    R    E   S»  XV 

n'acquiert  que  très-peu  de  dudi- 
iité,  ibid.  —  C'eft  un  alliage  d'or  & 
de  fer  fait  par  la  Nature,  320,  — 
Raifons  pourquoi  l'on  ne  peut 
tirer  ni  l'or  ni  le  fer  de  la  platine, 
321.  —  Principales  propriétés  de 
la  platine ,  323.  —  Mélange  de  la 
platine  avec  les  métaux ,  3  2  5  di^ 
fuiv.  —  Moyens  de  reconnoître 
l'or  falfifié  par  le  mélange  de  la 
platine,  3  27  ^  fuiv.  —  La  fubi- 
tance  de  la  platine,  quoique  tirée 
de  la  même  mine ,  n'eft  pas  tou- 
jours la  iiième,  328.  —  Pourquoi 
la  platine  ne  s'amalgame  pas,  comme 
l'or,  avec  le  mercure  j  330.  — 
XJfages  utiles  qu'on  pourroit  faire 
de  l'alliage  de  la  platine  &  du 
laiton,  332  &  33  4-  —  De  tous 
les  n)étaux  ,  le  plomb  &  l'ar- 
gent font  ceux  qui  ont  le  moins 
d'affinité  avec  la  platine  ,  333.— 
La  platine  n'eft  qu'un  mélange 
accidentel  d'or  imbu  de  vapeurs 
arfenicales,  &  de  fer  brûlé  autant 
qu'il  eft  pofllble;  preuves  de  cette 
aftertion ,  334.  &  fuiv.  —  Diffé- 
rences de  la  platine  avec  l'or,  336 
(^  fuiv,  —  La  denfité  de  la  platina 
n'eft  pas  conftante ,  mais  varie 
félon  les  differens  procédés  qu'on 
emploie  pour  la  fondre,  3}9-  -^ 
XJfage  de  l'alliage  de  la  platine 
avec  le  fer  forgé,  345  Ù'Juiv,-^ 

N  n  n  n  ij 


XVJ  T   A    B 

Obfefvations  intereflaiites  fur  i'hif- 
toire  naturelle  de  la  platine,  355. 

Plomb.  Les  mines  primordiales  de 
plomb  font  toutes  en  galènes  de 
forme  hexaèdre,  &  toutes  les  mines 
qui  le  prcièntent  fous  d'autres 
formes  ne  proviennent  que  de  la 

•  décompofition  de  ces  galènes,  1  87. 
—  Mine  de  plomb  blanche,  n'efl: 
qu'une  cèrufe  ou  chaux  de  plomb 
criftallifèe,  &  produite  par  l'inter- 
mède de  Teau  ,  i  90.  —  Mines  de 
plomb  verte  ,  mine  de  plomb 
rouge,  ibid.  —  Mine  de  plomb 
ijngulière,  qui  renferme  des  grains 
de  plomb  tout- à-fait  pur,  i  87  e^ 
fuiv.  —  Mines  de  plomb  tiennent 
prefque  toutes  une  petite  quantité 
d'argent ,  &  prefque  toutes  les 
mines  d'argent  tiennent  aufFi  du 
plomb;  mais  dans  les  filons  de  ces 
mines  le  plomb  ,  comme  plus  pe- 
fant ,  defcend  au-de(Tous  de  l'ar- 
gent ,  &  il  arrive  prefque  toujours 
que  les  veines  les  plus  riches  en 
argent,  fe  changent  en  plomb  à 
mefure  qu'elles  s'étendent  en  pro- 
fondeur ,  ibid.  —  Toutes  les  chaux 
de  plomb  blanches,  grifes,  jaunes 
&  rouges  font  non-feulement  très- 
aifèes  à  vitrifier,  mais  même  déter- 
minent promptement  la  vitrification 
de  plufieurs  autres  matières,  jpS. 
,  —  Le  plomb  eft  le  moins  dur  & 


L  E 
le  moins  élaftique  de  tous  les  mé- 
taux ,  il  efl:  aufTi  le  moins  duâile 
&  le  moins  tenace,  ibid.  —  Coin- 
paraifon  de  la  chaux  de  plojub 
avec  celle  d'étain  ,  200.  —  Le 
plomb  peut  s'allier  avec  tous  les 
métaux,  à  l'exception  du  fer,  202. 

—  Mélange  du  foufre  avec  le 
plomb  par  la  fufion,  forme  une 
elpèce  de  pyrite  qui  refîemble  à 
la  galène,  206.  —  Le  plomb  ne 
fe  trouve  pas  plus  que  l'étain  dans 
l'état  de  métal,  i  64.  —  La  galène 
de  plomb  efl  une  vraie  pyrite,  ibid. 

—  Mines  de  plomb  en  galène, 
varient  beaucoup  par  la  largeur  de 
leurs  filons  ,  1  66.  —  Le  plomb  Te 
convertit  en  chaux  non-feulement 
j)ar  le  feu ,  mais  aufll  par  les  élé- 
mens  humides,  ibid. —  Les  mines 
de  plomb  en  cérufe  font  de  troi- 
fième  formation ,  1  67.  —  Décom- 
pofition naturelle  de  la  galène, 
ihid.  —  Mines  de  plomb  en  îrance  : 
celle  de  Pompéan  en  Bretagne, 
eft  la  plus  riche,  168.  —  En 
Elpagne  de  autres  provinces  de 
l'Europe,  178  &  fuiv.  —  En  Afi>e, 
I  83.  —  En  Afrique  &  en  Amé- 
rique ,  ibid.  &  fui'j. 

P  R  A  s  E.  Efl  une  agate  verte ,  fou- 
vent  tachée  de  blanc  ,  de  jaunâtre  , 
de  brun,  &  qui  efl  quelquefois 
auHi    tranfparente  que  les   belles 


DES    Ma 

sgates,  5  89.—  Les  prafes  ne  font 
pas  fort  communes ,  ibid.  —  On 
en  trouve  néanmoins  en  Siléfie , 
&  lorfque  leur  vert  efl  mêlé  de 
jaune  ,  on  leur  donne  le  nom  de 
cryfoprafcSy  589.  —  Quelques  Na- 
turalifles  ont  donné  Je  nom  de 
prafe  à  la  prime  d'émeraude ,  qui 
n'eft  point  une  agate,  mais  un 
criftal  vert  défedueux,  590. 

S 

O AFFRE.  Voye-^  Cobalt,  362  & 
370. 

Saphir  à'eau.  Ses  propriétés  natu. 
relies ,  Tes  couleurs  ,  fa  double 
réfra^ion,  &c.  48  3  &  4.84.  —  Ses 
défauts.  —  Il  tire  fon  origine  du 
feld-fpath  &  du  quartz;  preuves 
de  cette  aflertion  ,  ibid. 

Saphir  du  Brésil  provient  du 
ichorl;  Tes  rapports  avec  i'éme- 
raude  du  Brefil,  &  Tes  différences 
d'avec  le  vrai  faphir ,  5  2  j . 

SardoiNE  efl  une  agate  d'un 
rouge  mêlé  de  jaune,  ou  pure- 
ment jaune ,  585.  —  Cette  couleur 
orangée  de  la  fardoine,  eft  plus 
fuave  à  l'œil  que  le  rouge  dur  de 
ia  cornaline  ,  588. —  Les  fardoines 
font  plus  rares  que  les  cornalines , 
&  fe  trouvent  rarement  en  aufîi 
grand  volume,   5  85>. 

S  C  H  O  R  L  ,  eft  le  plus  denfe  des 
cinq  verres  primitifs,  437. —  La 


T    I    è    R    E    S.  ay)} 

criftdliifation  des  premiers  fchorls 
a  été  produite  par  le  feu  primitif, 
comme  celle  du  feldfpath,  487, 
—  Rapports  du  fcliorl  avec  le 
feld-fpath,  j 02.  —  Ses  différences 
avec  le  quartz  ,  ibid. 

Sels.  On  peut  compter  trois  fels 
fimples  dans  la  Nature ,  l'acide  , 
l'alkali  &  l'arfenic,  qui  répondent 
aux  trois  idées  que  nous  nous 
fommes  formées  de  leurs  effets , 
&  qu'on  peut  défigner  par  les 
dénominations  de  fel  acide ,  fel 
cauftique  &  fel  corrofif,  1^6. 

Smath.  Voyei  Cobalt,  ^6j  & 
370. 

T 

1  o  M  B  AC.  Mines  de  tombac  à  la 
Chine,  au  Japon  &.  à  file  de 
Bornéo,  font  des  mines  de  cuivre 
mêlées  d'une  certaine  quantité  d'or, 
105^  Juiv. 
Topazes  de  Bohème  ne  font 
que  des  criflaux  de  roche  colores 
de  jaune,  448  «3c  471.  Ces  to- 
pazes auxquelles  j'ai  cru  devoir 
donner  la  dénomination  de  crijîaux- 
topa^es ,  fe  trouvent,  comme  le 
criftal  de  roche,  dans  les  climats 
chauds ,  tempérés  &  froids ,  au 
lieu  que  les  vraies  topazes  ne  fe 
trouvent  que  dans  les  climats  \q.%. 
plus  chauds ,  471.  —  La  denfiré 
de  ces  criftaux-topazes  efl  à    très- 


xvTi/  T  À 

peu-près  égale  à  celle  du  criftal 
bfanc,  ifs  ont  auflî  le  inênie  degré 
de  dureté,  473.  —  Us  perdent 
leur  couleur,  &  deviennent  blancs 
comme  le  criftal  par  l'adion  du 
feu ,  iûiJ.  <5c  474. 

Topazes  &  Rubis  du  Brésil, 
Leur  nature  &  ieur  origine  font 
toutes  différentes  de  celle  des  rubis 
&  topazes  d'Orient,  550.  —  Ce 
font  des  criftaux  vitreux  prove- 
nans  du  fchorl;  preuve  de  cette 
aflertion,  ii^id.  —  La  plupart  des 
rubis  du  Brefil,  ne  font  que  des 
topazes  chauffées  du  même  pays, 
532. 

Topaze  de  Saxe  eft,  comme 
celle  du  BrefiI,  une  pierre  vi- 
treufe  que  l'on  doit  rapporter  au 
fchorl ,  leurs  refîembfances  &  leurs 
différences,  536.  —  La  couleur 
jaune  de  la  topaze  de  Saxe,  efh 
toujours  moins  foncée  que  celle 
de  h  topaze  du  Brefif,  557.  ^. 
Différences  de  dureté  entre  la 
topaze  de  Saxe  &  la  vraie  topaze , 
ibid.  —  La  topaze  de  Saxe  perd 
(à  couleur  jaune  au  feu  ,  &  y 
devient  tout- à -fait  blanche,  au 
lieu  que  la  topaze  du  Brefil  y 
prend  une  couleiir  rougeâtre  , 
538  iùrfuiv. 

Tourmaline.  Sa  principale 
propriété  eft  de  devenir  éledrique 
fans  frottement,  ôa   par  la  fimple 


BLÉ 

chaleur  ;  cette  électricité  que  le 
feu  lui  communique  ,  Ce  manifefte 
par  attradion,  fur  l'une  des  faces 
de  cette  pierre ,  &  par  répulfioii 
lur  la  face  oppofée,  J59. —  La 
tounnaline  perd  fon  électricité 
lorfqu'elle  eft  trop  chauffée  ,  5  60. 

—  La  tourmaline  le  fond  comme 
ie  fchorl,  à  un  feu  violent,  iùiJ, 

—  Ses  autres  rapports  avec  les 
^chorls,  $61.  —  Différentes  fortes 
de  tourmalines,  ibid.  —  Tourma- 
lines de  Ceylan ,  du  Brefil,  du 
Tyrol,  Sic.  leurs  différences,  5  62. 

TUTUNAC.  Le  métal  qu'on  appelle 
aux  Lides  orientales  tutunac ,  eft 
probablement  un  alliage  d'étain  & 
de  bifmuth  ,152. 


V, 


V 


ERMILLON.    Les    Romains 
faifoient  grand  cas  du  vermillon  , 
&:tiroient  tous  les  ans  d'Efpagne, 
environ  dix  mille  livres  de  cinabre , 
&L    les    anciens     Péruviens     em- 
ployoient   auffi   le    cinabre    pour 
faire  du  vermillon,  &  ne  connoif^ 
foient  pas  le  mercure  avant  l'arrivée 
des  Efpagnols   dans    leurs  pays, 
a82. 
Vert-degris  ou  Verdet,  eft: 
une  elpèce  de  rouille  qui  pénètre 
dans  l'intérieur  du  cuivre  ,  &  avec 
le  temps  en  détruit  la  cohérence, 
&  la  texture ,  60. 


'DES    Mât 

Vert  de  montagne.  Comment 
il  efl  produit  par  la  décompofuion 
du  cuivre,  59.  —  Voye^  Chryfe- 
cclle. 

Z 

J—i  I  N  C.  Ce  demi  -  mctal  fe  tire 
également  de  la  pierre  calaminaire 
&.  des  blendes,  295.  —  Compa- 
raifon  de  cette  pierre  calaminaire  «Se 
des  blendes ,  ïb'id.  &  fuiv.  —  Le 
zinc  exifte  non-feulement  dans  la 
pierre  calaminaire  &  les  blendes, 
mais  encore  dans  plufieurs  raines  de 
fer,  2C)7. —  La  formation  des  mines 
de  zinc  efl;  pûft^érieure  à  celle  des 
autres  mines  métalliques,  &  même 
pofle'rieure  à  leur  première  dé- 
compofition  ,  297.  —  Le  zinc  efl; 
très-volatil,  il  ne  fe  trouve  dans  au- 
cune mine  primordiale  des  métaux, 
2,^  8 .  —  Manière  de  tirer  le  zinc  des 
blendes  &  de  la  pierre  calaminaire, 
jyid,  —  Lieux  où  l'on  trouve  des 
minières  de  pierre  calaminaire , 
2.c)Cf  à^  fuiv.  —  Le  zinc  s'emploie 
rarement  pur,  &  n'efl  pas  même 
fi  propre  à  faire  du  cuivre  jaune 
ou  laiton ,  que  la  pierre  calami- 
naire,   300.  —  Manière  dont  fe 


A'Jy 


T   'È    P    E   S. 

fait  le  laiton  ou  cuivre  jaune  avec 
le  cuivre  rouge  &  la  pierre  cala- 
minaire ,  301.  —  Le  zinc  efl  non- 
feulement  très- volatil,  mais  très- 
inflammable  ,  303. —  Moyen  d'ob- 
tenir le  zinc  dans  fa  plus  grande 
pureté,    305.  —  Propriétés  natu- 
relles du  zinc  ,  fes  conformités  & 
fes  diflcrences   avec  l'étain ,  iùiJ. 
d^  fuiv.  —  Fleurs  de  zinc.  —  Con- 
verfion  de   la   chaux  de    zinc   eu 
verre  couleur  d'aigue-marine,  3  10. 
—  Le  zinc  en  fufion  &  fous  fa 
forme   propre  ,    s'allie    avec   tous 
les  métaux  &.  n>inéraux  métallicjues, 
à   l'exception  du   bifniuth  &.    du 
nickel,    311.  —  Alliage   du   zinc 
avec  les  métaux,  il  les  rend  tous 
aigres  &.  caflans,  jbid.  —  Amalgame 
du  zinc  avec  le  mercure,  efl  diffé- 
rent des  autres  amalgames,  iùiJ. — 
La  chaux  du  zinc  efl  très-diflScile 
à    réduire ,  &.  conlerve  mieux  fa 
blancheur  que  la  cérufe  ou  chaux 
de  plomb.  Il  paroît  donc  que  le 
blanc  de  zinc  feroit  préférable  au 
blanc  de  plomb  dans  la  peinture, 
312.  —  Le  vitriol  de  zinc  efl  blanc, 
&  fe  trouve  afllez  fouvent  dans  le 
fein  de  la  terre ,  ^  ^  ^' 


Fin    âe   la  Table  des   Aintïeres  du  tro'ifihne  Volume   âa 

Minéraux^ 


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