#■
■ %mF
■tHt
M^i, Vr.
w
y"
^^îkHi»
I
^
r*3^
\
Hà
- f'j
1 AKï ' '^S^h^^Kl
'^'''
"•'*^
A (é
^ . \\vvi
^Hi
-^1S
^^
5:r
1 1 m>^g\j^3
(^tkêliq,
m
^0
HISTOIRE
NATURELLE
DES MINÉRAUX.
Par M, le Comte de B Vffon, Intendant du
Jardin & du Cabinet du Roi, de V Académie
Fraîîçoife , de celle des Sciettces , b'c.
Tome Troifième.
r
warsita
W*
D E
A PARIS,
LM M P R ï M E R I E ROYALE.
M. D C C L X X X V.
6?^
#^ p^ a^ î^ a^ tm^ omo <^^ «^ ?^ <^i (jm> <^9 fM» <c^ <îw> «m' "^M* "m* '^^
IJf ÎJ« JT» ÎÇS ÎÇ* JTÎ îf» ÎÇ* 1^ Ici ÎÇ» 1^ î{* I{* ÎÇ* ÎJ» J^ ^ ^ 1^
TABLE DES ARTICLES
Contenus dans ce Volume.
MJ E l'Argent Page i
Du Cuivre 50
De l'Étain 123
Du Plomb 164.
Du AIercure 211
De l'Antimoine 271
Du B ISMUTH z%^
Du Zinc 295
De la Platine 316
Du Cobalt 359'
Du Nickel 377
De la Mangan èse 385
De l'Arsenic 393
Des Cimens de nature 413
Des Cristallisations 425
Des Stalactites vitreuses 435
Des Stalactites cnflaUlfces du Quarti-aiftal
de Roche , 440
Améthyste 4^7
Cristaux-topazes 47^
Chrysolite 475
Aigu E-MARiNE 47^
Des Stalactites criflallifécs du Feld-fpath. 480
Saphir d'Eau 4^3
Feld-Spath de Russie ou Pierre de
Labrado R 4^5
Œ IL DE Ch AT. . • 487
(El L DE Poisson 489
Œil de Loup 491
aventu ri n e 492
Opale 493
Pierres éri s ées \ 500
Des Stalactites crïflallïfêes du Sclwd, . . 502
Emeraude 503
PÉ R I dot 523
Saphir du Brésil 525
Œil de Chat noir ou noirâtre 526
BÉRYL 528
Topaze èr Rubis du Brésil 530
Topaze de Saxe 536
G RE N AT r3o
HyAC INTHE 5 53
tou r malin e 559
Pierres de Croix 567
Des Stalactites vitreuses non cri flallï fées. 569
A G AT ES 577
Cornaline 585
Sardo IN E 588
Frase 589
Onyx ^ 591
Calcédoine 595
Pje RRE Hydrophane , Oculus mundi . 598
PÉTRO-SILEX. 605
Arrangement méthodique des Minéraux.. 609
HISTOIRE
HISTOIRE
NATURELLE
DES MINÉRAUX.
DE L A R G E N T.
IN ous avons dit que dans la nature primitive , i'Argent
& l'Or n'ont fait généralement qu'une mafle commune,
toujours compofce de l'un & l'autre de ces métaux,
qui même ne fè font jamais complètement féparés ,
mais feulement atténués , divifés parles agens extérieurs,
& réduits en atomes fi petits,, que l'or s'eft trouvé d'un
côté , & a laifTc de l'autre la plus grande partie de
l'argent ; mais malgré cette féparation d'autant plus natu-
relle qu'elle efl plus mécanique, nulle part on n'a trouvé
de l'or exempt d'argent, ni d'argent qui ne contînt un
peu d*or. Pour la Nature , ces deux métaux font du même
Minéraux , Tome IIL A
2 Histoire Natup elle
ordre, &l elle les a cloués de plufieurs attributs communs;
car quoique leur denfiié foit très-différente (û) , leurs
autres propriétés eflentielles font les mêmes ; ils font
également inaltérables , & prefque indeflrucflibles , l'un
& l'autre peuvent fubir i'a6tion de tous les élémens
fans en être altérés ; tous deux fe fondent &. fe fubliment
à peu-près au même degré de feu (b) ; ils n'y perdent
(û) « Un pied cube d'argent pèfe 720 livres ; un pied cube d'or,
5j 1 348 livres. Le premier ne perd dans l'eau qu'un onzième de fon
poids, & l'autre entre un dix-neuvième & un vingtième ». Diélionnaire
de Chimie , articles de l'Or Ù" de l'Argent. J'obferverai que ces propor-
tions ne font pas exades, car en fuppofant que l'or perde un dix-
neuvième & demi de fon poids , & que l'argent ne peiàe qu'un
onzième, fi le pied cube d'or pèfe i 348 livres , le pied cube d'argent
doit pefer 'jCo livres feize trentièmes. M. Bomare , dans fon Didion-
naire d'Hifloire Naturelle , dit que le pouce cube d'argent pèfe 6 onces
5 gros 26 grains, ce qui ne feroit qu'un peii plus de 7 i 8 livres le
pied cube, tandis que dans fa Minéralogie, tome II , page 2 j 0 , il
dit que le pied cube d'argent pèfe i 1 523 onces , ce qui fait 720
iivres 3 onces pour le pied cube. Les eflimations données par M.
Briffbn font plus jufles ; le pied cube d'or à 24 karats , fondu & non
battu pèfe, félon lui , 1 348 livres i once 41 grains, & le pied cube
d'or à 24 karats , fondu & battu pèfe 1355 livres 5 onces 60 grains;
le pied cube d'argent à 12 deniers, fondu & non battu, pèfe 733
iivres 3 onces i gros 52 grains, & le pied cube du même argent à
J2 deniers, c'eft-à-dire, aufll pur qu'il eft pofllble , pèfe, lorfqu'il
€ft forgé ou battu ,735 livres 1 i onces 7 gros 43 grains.
(b) Nota. On eft alTuré de cette fublimation de l'or & de l'argent,
non-feulement par mes expériences au miroir ardent, mais auITj par Ja
quantité que l'on en recueille dans les fuies des fourneaux d'affinage
des Monnoies.
DES Minéraux, 3
guère plus l'un que l'autre (c) ; ils réfiftent à toute fa
violence, fans fe convertir en chaux (d); tous deux ont
aulTi plus de du(flilité que tous les autres métaux ; (èu-
iement l'argent plus foible en denfité & moins compa6le
que l'or , ne peut prendre autant d'extenfion fe) ; &. de
(c) Kunckel ayant tenu de i'or & de l'argent pendant quelques
femaines en fufion , afl'ure que i'or n'avoit rien perdu de Ton poids ;
mais il avoue que l'argent avoit perdu quelques grains. Il a mal-à-
propos oublié de dire fur quelle quantité.
(d) L'argent tenu au foyer d'un miroir ardent , fè couvre comme
l'or d'une pellicule vitreufe ; mais M. Macquer qui a fait cette expé-
rience , avoue qu'on n'efl pas encore afluré fi cette vitrification pro-
vient des métaux, ou de la poufTière de l'air. Diâionnaire de Chimie »
article Argent,
(e ) « Un fil d'argent d'un dixième de pouce de diamètre , ne fou-
tient, avant de rompre, qu'un poids de 270 livres, au lieu qu'un «
pareil fil d'or foutient 500 livres. . . On peut réduire un grain «
d'argent en une lame de trois aunes, c'efl-à-dire de 126 pouces «
de longueur fur 2 pouces de largeur , ce qui fait une étendue de «
2 5 2 pouces carrés , & dès-lors avec une once d'argent , c'eft-à- «
dire 576 grains, on pourroit couvrir un efpace de 504 pieds <c
carrés , Expériences de Mujfchenbroek. » Nota. Il y a certainement
ici une faute d'impreflion qui tombe fur les mots deux pouces
de larcreur, ce fil d'argent n'avoit en effet que 2 lignes & non
pas 2 pouces, & par conféquent 26 pouces carrés d'étendue, au
lieu de 126; d'après quoi l'on voit que 576 grains ou i once
d'argent, ne peuvent en effet s'étendre que fur 104 & non pas fur
504 pieds carrés, <Sc c'eft encore beaucoup plus que la denfité
de ce métal ne paroît l'indiquer , puifqu'une once d'or ne s'étend
que fur 106 pieds carrés; dès-lors, en prenant ces deux faits pour
vrais , la dudilité de l'argent eft prefque aulTi grande que celle de
A ij
4 Histoire Naturelle
même, quoiqu'il ne foit pas fufceptible d'une véritable
rouille par Jes imprefTions de i'air & de l'eau, il oppofe
moins de réfiflance à l'adion des acides, & n'exige
pas , comme l'or , la réunion de deux puilfances aétives
pour entrer en difTolution ; le foie de foufre le noircit &
le rend aigre & cafTant ; l'argent peut donc être attaqué
dans le fein de la terre plus fortement, & bien plus
fréquemment que l'or , & c'eft par cette raifon que l'on
trouve affez communément de l'argent minéraiifé (f),
tandis qu'il eft extrêmement rare de trouver l'or dans
cet état d'altération ou de minéralifation.
L'argent, quoiqu'un peu plus fufible que l'or, eft
l'or, quoique fa denfité & fa ténacité foient beaucoup moindres.
IJ y a auiïî toute apparence qu'Alphonfe Barba fe trompe beaucoup
en difant que l'or eft cinq fois plus dudile que l'argent; il aflure
qu'une once d'argent s'étend en un fil de 2400 aunes de longueur;
que cette longueur peut être couverte par 6 grains & demi d'or ,
& qu'on peut dilater l'or au point qu'une once de ce métal cou-
vrira plus de dix arpens de terre. (Métallurgie d'Alphovfe Barba,
tome I , page 1 0 2 J.
(f) te On rencontre de l'argent natif en rameaux , entrelafics &
>■> comprimés , quelquefois à la fuperficie des gangues fpathiques &
» quartzeufes ; on en trouve de crifîallifé en cubes, il y en a en
» pointes ou filets qui provient de la décompofition des mines
» d'argent rouges ou vitreuies , & quelquefois des mines d'argent
» grifes , &c. Il eft aflez ordinaire de trouver fous cet argent en
35 filets des portions plus ou moins fenfibles de lamine fulfureufe,
à la décompofition de laquelle il doit fon origine ». Lettres de M.
Demejle à Al. Bernard , tome II , page ^j" o.
DES Minéraux. 5
cependant un peu plus dur & plus fonore (g) ; le blanc
éclatant de fa furface fe ternit, <Sc même fe noircit, dès
qu'elle efl expofée aux vapeurs des matières inflammables,
telles que celles du foufre , du charbon , & à la fumée
des fubftances animales ; fi même il fubit long - temps
i'impreflion de ces vapeurs fulfureufès, il fe minéralife,
& devient femblable à la mine que Ton connoît fous
le nom ^argent vitré.
Les trois propriétés communes à Tor & à Targent
qu'on a toujours regardés comme les feuls métaux
parfaits , font la dudilité , la fixité au feu & Tinaltéra-
bilité à l'air & dans Teau. Par toutes les autres qualités
l'argent diffère de l'or , & peut foufîrir des changemens
& des altérations auxquels ce premier métal n'eft pas
fujet. On trouve, à la vérité, de l'argent qui, comme
Tor, n'efl point minéralife, mais c'eft proportionnellement
en bien moindre quantité: car dans iès mines primor-
diales, l'argent, toujours allié d'un peu d'or, eft très-
fbuvent mélangé d'autres matières métalliques, & parti-
culièrement de plomb &. de cuivre ; on regarde même
comme des mines d'argent, routes celles de plomb ou
de cuivre qui contiennent une certaine quantité de ce
métal (h); & dans les mines fècondaires produites
(gj Cramer, cité pour ce fait dans le Didionnaire de Chimie;
article de /'Argent.
(h) La plupart des mines d'argent de Hongrie , ne font que des,
mines de cuivre tenant argent, dont ]es plus riches ont donné i j
6 Histoire Natu relle
par la fliilation èi. le dépôt des eaux, l'argent fe trouve
fou\'ent attaqué par les Tels de la terre, & fe prcfente
dans l'état de minéralifation fous différentes formes :
on peut voir par les liiles des Nomenclateurs en
minéralogie, &. particulièrement par celle que donne
Vallérius , combien ces formes font variées , puifqu'il
en compte dix fortes principales, & quarante - neuf
ou 20 marcs d'argent par quintal <5c beaucoup plus de cuivre ; « 011
» fe'pare ces métaux, dit M. de Morveau , par les procédés fui vans.
»Dans un four conftruit exprès pour fe rendre maître du degré
» de feu , on arrange l'un à côté de l'autre les tourteaux de cuivre noir
» tenant argent, auxquels on a mêlé environ un quart de plomb, fuivant
« la quantité d'argent que tient la mafîè de cuivre ; on met alors le
» feu dans le four, on place des charbons jufque fur les tourteaux ;
>» ces pièces s'affaiflent, le plomb qui fe fond plus aifément que le
» cuivre & qui a plus d'affinité avec l'argent, s'en charge & s'écoule
M à travers les pores du cuivre , tandis qu'il eft encore folide ; le plomb
» & l'argent fe réuniffent dans la partie inférieure des plaques de fer ;
» on raffemble tout le plomb riche en argent, au moyen d'un fécond
ïi feu un peu plus fort où l'on fait rejfuer la mafle de cuivre ; il eft
M aifé après cela de paffer cet argent à la coupelle , de refondre le cuivre
» en lingots , & par-là la mine fe trouve épurée de tout ce qu'elle
» contenoit fans aucune perte.
« Lorfque le plomb contient de l'argent, on coupelle en grand
» le plomb provenant de la première fonte , & on le convertit en
M litarge fur un foyer fait de cendres lefFivées ; on lui donne un fécond
j> affinage dans de vraies coupelles , & les débris de ces vaifTeaux ,
» ainfi que des fourneaux , & même là litarge qui ne feroit pas reçue
M dans le commerce , font remis au fourneau pour en revivifier le
plomb î>. Élémens de Chimie, par M. de Morveau, tome I, pages 2^0
D E s M J N É R AU X, 7
variétés dans ces dix fortes ; je dois cependant obfèrver
qu'ici comme dans tout autre travail des Nomen-
clateurs, il y a toujours beaucoup plus de noms que
de chofes.
Dans la plupart des mines fecondaires, l'argent fe
préfente en forme de minerai pyriteux , c'eft-à-dire ,
mêlé & pénétré des principes du foufre, ou bien
altéré par le foie de foufre , &. quelquefois par
l'arfenic (i).
L'acide nitreux difîbut l'argent plus puiiTamment
qu'aucun autre ; l'acide vitriolique le précipite de cette
diflblution, & forme avec lui de très-petits criftaux qu'on
pourroit appeler du vitriol d'argent: l'acide marin qui
le diffout auffi , en fait des criftaux plus gros dont la
maffe réunie par la fufion fe nomme argent corné ^ parce
qu'il efl à demi-tranfparcnt comme de la corne.
La Nature a produit en quelques endroits de l'argent
(i ) « La mine d'argent rouge eft minéralifée par l'arfenic & le
foufre ; elle eft d'un rouge plus ou moins vif, tantôt tranfparente «
comme un rubis , tantôt opaque & plus ou moins obfcure ; elle «
eft criftallifée de plufieurs manières , la plus ordinaire efl en prifmes «
hexaèdres , terminés par des pyramides obtufes ». Lettres de AI.
Demejle y tome II , page -^/j. — Nota. J'obferverai que c'efi: à cette
mine qu'il faut rapporter la féconde variété que M. Demefle a rap-
portée à la mine d'argent vitreux, puifqu'il dit lui-même, que ce
n'efl qu'une modification de la mine d'argent rouge , & que cette
mine vitreufe contient encore un peu d'arfenic; qu'elle s'égraine fous
le couteau , loin de s'y couper. Voye-^ idem, page ^^ (i.
8 Histoire Natu relle
fous cette forme , on en trouve en Hongrie , en Bolième
& en Saxe , où il y a des mines qui offrent à la fois
l'argent natif, l'argent rouge, l'argent vitré à. l'argent
corné (k): lorfque cette dernière mine n'efl point altérée,
elle eft demi - tranfparente & d'un gris - jaunâtre ;
mais fi elle a été attaquée par des vapeurs fulfureufes
ou par le foie de foufre , elle devient opaque & d'une
couleur brune; l'argent minéralifé par l'acide marin, fe
coupe prefque aufTi facilement que de la cire; dans cet
état il efl très-fufible, une partie fe volatilife à un certain
degré de feu, ainfi que Targent corné fait artificiellement,
& l'autre partie qui ne s'efl point volatilifée fe revivifie
très-promptement (IJ.
Le foufre difTout l'argent par la fufion & le réduit
en une maffe de couleur grife , 6l cette maffe reffemble
(k) Les mines riches de Saint " André njherg ^ font comporees
d'argent natif ou vierge , de mine d'argent rouge , & de mine d'argent
vitré : on vend fur le pied de la taxe ou évaluation , ce qu'on
trouve d'argent vierge & fans mélange ; ou bien on le fait imbiber
dans le plomb d'un affinage. Comme ces fortes de mines riches fe
trouvent aufli fort fouvent mêlées avec des mines ordinaires , & qu'un
quintal de ce mélange contient jufqu'à cinquante marcs d'argent ,
on fe contente de piler ces fortes de mines à (qc ^ &. on les fond
enfuite crues ou fans les griller. ..... A JoachimJIal en Bohème,
on trouve de temps en temps parmi les mines, des lamines d'argent
rouge, & de l'argent vierge. Traité de la fonte des mines de Schlutter,
traduit par M. Hellot, tome II , in-^' pages 2j^ & 2 () 6 .
(IJ Lettres de M. Demefle , tome II, page 4^2,
beaucoup
D E s M I N L n AU X, e>
beaucoup à la mine d'argent vitré, qui, comme celle
de l'argent corné, efl moins dure que ce métal, &
peut fe couper au couteau (l). L'or ne fubit aucun
de ces changemens; on ne doit donc pas être étonné
qu'on le trouve fi rarement fous une forme minéralifée,
& qu'au contraire dans toutes les mines de féconde
formation , où les eaux & les fëls de la terre ont exercé
leur aétion, l'argent fe préfente dans diiîérens états de
minéralifation & fous des formes plus ou moins altérées ;
il doit même être fouvent mêlé de plufieurs matières
étrangères métalliques ou terreufes , tandis que dans
fon état primordial il n'eft allié qu'avec l'or, ou mêlé
de cuivre & de plomb ; ces trois métaux font ceux avec
lefquels l'argent paroît avoir le plus d'affinité ; ce font du
moins ceux avec lefquels il fe trouve plus fouvent uni dans
fbn état déminerai (m) ; il efl bien plus rare de trouver
(l) Élëmens de Chimie , par M. de Morveau, tome I , page 2l^^<,
(m) m. La mine d'argent grife ou blanche, n'efl:, dit M. Demefle,
qu'une mine de cuivre tenant argent ». Cette aflertion efl trop gé-
nérale , puifque dans le nombre des mines d'argent grifes , il y a
peut-être plus 'de mines de ploinb que de cuivre tenant argent. « Il y
a de ces mines grifes & blanches, continue- t- il, qui font d'un*
gris - clair & brillant , répandues en petites maflfes lamelleules, «c
rarement bien diAindes dans les gangues quartzeufes , fouvent u
mêlées de pyrites aurifères; dans les mines de Hongrie, on en tire •«
2,0 à 2. j marcs d'argent par quintài «. Lettra de M, Demejle,
tome II , -page ^42.
Minéraux, Tome II L B
lo Histoire Naturelle
i'argent uni avec le mercure, quoiqu'il ait aufTi avec ce
fluide métallique une affinité très-marquée.
Suivant M. Geller, qui a fait un grand travail fur
l'alliage des métaux &. des demi-métaux, celui de l'or
avec l'argent n'augmente que très - peu en pefanteur
fpécitique ; il n'y a donc que peu ou point de péné-
tration entre ces deux métaux fondus enfèmble ; mais
dans l'alliage de l'argent avec le cuivre, qu'on peut
faire de même en toute proportion , le compofé de
ces deux métaux devient fpéciiiquement plus pefant,
tandis que l'alliage du cuivre avec l'or l'efl fenfiblement
moins; ainfi dans l'alliage de l'argent & du cuivre,
le volume diminue & la maffe fe rcfTerre, au lieu que
le volume augmente par l'extenlion de la maffe dans
celui de l'or & du cuivre. Au relie , le mélange du
cuivre rend également l'argent & l'or plus fonores &
plus durs , fans diminuer tle beaucoup leur duétilité ;
on prétend même qu'il peut la leur conferver lorfqu'on
ne le mêle qu'en petite quantité , & qu'il défend ces
métaux contre les vapeurs du charb.on qui, félon nos
Chimifles, en attaquent & diminuent la qualité dudlile;
cependant, comme nous l'avons déjà remarqué à l'article
de. l'or, on ne s'aperçoit guère de cette diminution
de dudilité caufée par la vapeur du charbon; car il efl
d'ufage dans les monnoies, lorfque \es creufcts de fer,
qui contiennent jufqu'à 2^00 marcs d'argent, font
prefque pleins de la matière en fofion , il eft, dis-je, d'ufage
DES Minéraux. h
d'enlever les couvercles de ces creufets pour achever de
les remplir de charbon, & d'entretenir la chaleur par de
nouveau charbon dont le métal efl: toujours recouvert,
fans que l'on remarque aucune diminution de dudilité
dans les lames qui rcfultent de cette fonte ('îij ,
L'argent allié avec le plomb ainfi qu'avec l'étain,
devient fpécifiquement plus pefant ; mais l'étain enlève
à l'argent comme à l'or, fa du6lilité : le plomb entraîne
l'argent dans la fufion & le fépare du cuivre ; il a donc
plus d'affinité avec l'argent qu'avec le cuivre. M. Geller,
& la plupart des Chimifles, après lui, ont dit que le fer
s'allioit aulfi très-bien à l'argent : ce fait m'ayant paru
douteux , j'ai prié M. de Morveau de le vérifier ; il
s'efl affuré par l'expérience qu'il ne fe fait aucune
union intime, aucun alliage entre le fer & l'argent, &
j'ai vu moi-même, en voulant faire de l'acier damaffé, que
ces deux métaux ne peuvent contrarier aucune union.
On fait que tous les métaux imparfaits peuvent ie
calciner & fe convertir en une forte de chaux, en \c^
tenant long-temps en fufion, & les agitant de manière
que toutes leurs parties fondues fë préfentent fucceffi-
Vement à l'air ; on fait de plus , que tous augmentent
de volume & de poids en prenant cet état de chaux.
Nous avons dit <5l répété (o) , que cette augmentation
^ . .^ I ■
(ïï) Obfervdiion communiquée par M. Tillet , en Avril i y 8 1 ,
(o) Voyez ie Dilcours qui fert d'imrodudioa à l'Hifloire des
Miiierauxi
Bij
12 HiSTOi RE Nature LLE
de quantité provenoit uniquement des particules d'air
fixées par ie feu, &: réunies à la fubftance du métal
qu'elles ne font que mafquer, pui/qu'on peut toujours
iuf rendre fon premier ^t en préfentant à cet air fixé
quelques matières inflammables avec lefquelles il ait plus
d'affinité qu'avec le métal; dans ia combuflion cette
matière inflammable dégage l'air fixé , l'enlève , & lailTe
par conféquent le métal (bus fa première forme. Tous
ies métaux imparfaits & les demi -métaux peuvent ainfi
fe convertir en chaux ; mais l'or & l'argent fè /ont tou-
jours refufés à cette efpèce de converfion , parce
qu'apparemment ils ont moins d'affinité que les autres
avec l'air, & que malgré la fufion qui tient leurs parties
divifées , ces mêmes parties ont néanmoins entr'elies
encore trop d'adhérence pour que l'air puiffie les féparer
& s'y incorporer : & cette réliftancc de l'or & de
j'argent à toute aélion de l'air, donne le moyen de
purifier ces deux métaux par la feule force du feu, car
il ne faut pour les dépouiller de toute autre matière,
qu'en agiter la fonte, afin de préfenter à fa furface toutes
ks parties des autres matières qui y font contenues, &
qui bientôt par leur calcination ou leur combufiion ,
îaifferont l'or ou Targent feuls en fiifion & fous leur
forme métallique. Cette manière de' purifier l'or &
i'argent étoit anciennement en ufage , mais on a trouvé
une façon plus expéditive en employant le plomb qui,
dans la fonte de ces métaux, détruit, ou plutôt fépare
DES Minéraux. ij
& réduit en fcories toutes les autres matières métal-
liques (p), dont ils peuvent être mêlés; &: le plomb
iui-même fe fcorifiant avec les autres métaux dont il
s'cft faifi, il les fépare de Tor & de Targent, les entraîne,
ou plutôt les emporte &. s'élève avec eux à la furface
de la fonte où ils fe calcinent, & fe fcorihent tous en-
femble par le contad de l'air, à mefure qu'on remue
la matière en fufion, &. qu'on en découvre fucceffive'
ment la furface qui ne fe fcorifieroit ni ne fe calcineroit,
fi elle n'étoit inceffamment expofée à i'aélion de l'air
libre ; il faut donc enlever ou faire écouler ces fcories
à mefure qu'elles fè forment , ce qui fè fait aifément ,
parce qu'elles furnagent & furmontent toujours l'or &
l'argent en ^{low. cependant on a encore trouvé une
manière plus facile de fe débarraffer de ces fcories ,
en fe fervant de vaiffeaux plats &. évafés qu'on appelle
coupelles, &. qui étant faits d'une matière sèclie , poreufè
& réfiflante au feu, abforbe dans fes pores les fcories,
tant du plomb que des autres minéraux métalliques à
mefure qu'elles fe forment , en forte que les coupelles
ne retiennent &. ne confervent dans leur capacité exté-
rieure, que le métal d'or ou d'argent, qui, par la forte
attraction de leurs parties conflituantes , fe forme & fè
(p) Nota, II n'y a que le ïtx qui , coiiune nous Wyons dit à
l'article de l'or, ne fe fcpare pas en entier par le moyen du plomb,
il faut, fuivant M. Poerner, y ajouter du bifmuth pour achever de
icorifier le fer.
14 Histoire Naturelle
. préfente toujours en une maiïe globuleufè appelée
hûuton de fin ; il faut une plus forte clialeur pour tenir
ce métal fin en flifion que lorfqu'il étoit encore mêlé
de plomb ; car le bouton de fin /è confolide prefque
fabitement au moment que l'or ou l'argent qu'il con-
tient, font entièrement puritiés ; on le voit donc tout-
à -coup briller de l'éclat métallique, & ce coup de
lumière s'appelle coriifcatlon dans l'art de TAfîineur dont
nous abrégeons ici les procédés , comme ne tenant
pas dire6tement à notre objet.
On a regarde comme argent natif tout celui qu'on
trouve dans le fein de la terre fous fà forme de
métal; mais dans ce fens il faut en diflinguer de deux
fortes, comme nous l'avons fait pour l'or; la première
forte d'argent natif, efl celle qui provient de la ilifion
par le feu primitif, & qui fe trouve quelquefois en
grands morceaux (q) , mais bien plus fbuvent en filets
(q) « II y a dans le Cabinet du "Roi de Danemarck , deux très-
» grands morceaux de mine d'argent, tous deux dans une j?i erre
V blanche , plus dure que le w^/Z'/v ( c'efl-à-dire dans du quartz). Le
>ï plus grand de ces jnorceaux a cinq jjieds fix pouces de longueur,
>»& le fécond quatre pieds, tous deux en forme de folives ; on
» eflime qu'il y a trois quarts d'argent , fur un quart de pierre, &
le premier morceau pcfe 560 livres m. Journal étranger, mois de juin
17^8.— On aflure que dans le Hartz, on a trouvé un morceau
d'argent fi confidérable , qu'étant battu on en fit une table autour
de laquelle pouvoient fe tenir vingt- quatre perfonnes. Dïdïomairc
4'Hipïre Naturelle , par Al. de Bomare, article Argent.
DES Minéraux, ij
ou en petites maiïes feuilletées & ramifices clans le quartz
Si. autres matières vitreufes ; la féconde forte d'argent natif,
eft en grains, en paillettes ou en poudre, c'eft-à-dire,
en débris qui proviennent de ces mines primordiales,
& qui ont été détachés par les agens extérieurs ,
ôi entraînés au loin par le mouvement des eaux : ce font
ces mêmes débris raflemblés , qui, dans certains lieux,
ont formé des mines fecondaires d'argent , où fouvent
il a changé de forme en fe minéralifant.
L'argent de première formation efl ordinairement
incruflé dans le quartz ; fouvent il efl accompagné
d'autres métaux &. de matières étrangères en quantité
fi confidérable , que les premières fontes , même
avec le fecours du plomb, ne fuffifent pas pour le
purifier.
Après les mines d'argent natif, les plus riches font
celles d'argent corné & d'argent vitré ; ces mines font
brunes , noirâtres ou grifes , elles font flexibles , &
même celle d'argent corné efl extenfible fous le mar-
teau, à peu-pres comme le plomb; les mines d'argent
rouge au contraire , ne font pas extenfibles , mais
cafTantes ; ces dernières mines font comme leè pre-
mières , fort riches en métal.
Nous allons fuivre le même ordre que dans l'article
de l'or, pour l'indication des lieux où fe trouvent les
principales mines d'où l'on tire l'argent. En France on
connoifToit affezi anciennement celles des montagnes des
i6 H I STO IRE Naturelle
Vofges ouvertes dès le dixième fiècle (r) , & d'autres
dans pluiieurs provinces, comme en Languedoc (f),
en
^r) ce Dès le dixième fiède , il y avoit plus de trente puits de mines
» ouverts dans les montagnes des Vofges , depuis les fources de la Mo-
3> Telle jufqu'à celles de ia Sarre; on en tiroit de l'argent <Sc du cuivre :
» on a renouvelé avec fuccès , en différentes époques , plufieurs de
» ces anciennes mines; loin d'être épuilées^ elles paroifîent encore
5j très-riches. On peut croire que dans toute cette chaîne de mon-
» tagnes , tous les rochers renferment également dans leur fein ces
» riches minéraux , puifque ces rochers font généralement de la même
nature & la plus analogue aux produdions métalliques. Mais pour-
quoi offrir aux hommes les vaines «Se cruelles riche/îès que recèle
» la terre; les vrais tréfors font fous nos pas; tel qui fauroit ajouter
» un grain à chaque épi qui jaunit dans nos champs , feroit à l'œil
5» du Sage un plus beau préfent au monde , que celui qui découvrit
le Potofi ». Hïjioire de Lorraine , far JVI. l'Abbé Bexon^ page 64,
— La mine de Saint- Pierre qui n'eil pas éloignée de Giromagny ,
prcfente de grands travaux; le minéral ell d'argent mêlé d'un peu de
cuivre. . . . Vis-à-vis la mine de Sainte-Barbe , dans la montagne du
Balon, il y a un filon de mine d'argent. . . . On connoît auffi deux
filons de mine d'argent dans la vallée de Saint -Amarin , celui de
Vercholti & celui de Saint- Antoine. Exploitation des mines , par M,
de Genfanne : Mémoires des Savons étrangers, tome IV, pages 14.1
«y fuivantes.
(f) Dans le douzième ficelé les mines d'argent du Languedoc étoieiit
travaillées très-utilement par les Seigneurs des terres où elles fe trou-
voient ; toutes ces mines , ainfi que plufieurs autres qui font aban-
données , ne font néanmoins pas entièrement épuifées , d'autant plus
que les Anciens n'ayant pas l'ufage de la poudre, ne pouvoient pas
faire éclater les rochers durs ; ils ne pouvoient que les calciner à
force de bois qu'ils arrangeoicm dans ces fouteriains, & auquel ils
meiioiem
\D E s M I A' L R A U X. \j
en Gévaiidan & en Rouergue (t) , dans le Maine & dans
». — ■ — .^ ■ "
mettoient le feu; & lorfque fe rocher trop dur, ne le brifoit pas après
cette calcination, ils abandonnoient le filon Il paroît aufii par
les Annales de l'abbaye de Villeniagne, &. par d'anciens titres des feig-
neurs de Beaucaire, qu'à la fin du quatorzième fiècle, les mines- de
France ctoient encore aufîi. riches qu'aucune de l'Europe. Afcmoires
de l' Académie des Sciences , année i jj S , fciges i ^ ^ & fiiivdntes,
— «Sur les montagnes noires en Lancaiedoc , ii y a, dit Coelinr
Arcon (en i 66j ), une mine d'argent , à laquelle le feigneur de «
Cannelle fit travailler jufqu'à ce qu'elle fût inondée. Il y en a une ce
aune à Lanet , dont lept quintaux de minerai donnoient un quintal oc
de cuivre & (juatre marcs d'argent; mais au bout de cin"j ans on <c
Tabandonna à caufe de la mauvaise odeur. Il y a d'autres filons «5
dans la même montagne; il y a aufli une mine à Davefan, dont te
on tiroit par quintal de matières , dix onces d'argent & un peu de «
plomb. ... On a fait autrefois de grands tra\aux dans le })ays de «
Corbières, pour cultiver des minerais de cuivre, de plomb &: "
d'antimoine. . . . On y a trouvé quelques rognons mctalliques de ce
fix à fept quintaux chacun, qui donnoient dix onces d'argent par «
quintal, avec un peu de plomb & de cuivre w. Barba; yVléiallurgic ,
tome II, pages 26 S & 2y6.
(l) On voit par les regillres de l'Hàtel-de-vilIe de Ville-franche
en Rouergue , qu'il y a eu anciennement des mines d'argent ouvertes
aux environs , auxquelles on a travaillé juique dans le leizicme fiècle.
Defcrtpt'ion de la France, par Piganiol ; Paris, i y i S , tome IV,
page 20 S. — Strabon , qui vivoit du temps d'Augufte, dit que les
Romains tiroient de l'ar^jent du Gcvaudan & du Rouertrue , &
qu'ils creufcrent âu(îx dans les Pyrénées, pour en tirer ce métal aind
que l'or. Il ajoute que le pays fitué entre les Pyrénées & les Alpes,
avoit fourni beaucoup de ce dernier méial , & que l'or devint plus
commun à Rome ajirès la conquête des Gaules. . . . Célar, dans
Tes Commentaires, dit que les mines avoieiu été travaillées même avant
Alménmx j Tome II L C
i8 Histoire Naturelle
l'Angoumois (^u) ; ^ nouvellement on en a trouvé en'
Dauphinc , qui ont prcfenté d'abord d'affez grandes-
richeffcs. M. de Genfànne en a reconnu quelques autres
dans le Languedoc (x) ; mais le produit de la plupart
la conquête, ôc il falloit qu'il y eiJt en effet beaucoup" d'or dans les
Gaules, vu la quaniitc que Ce(ar eu fit pafier en Italie, & qui y
fut vendu à bas prix; ( i 500 petits Teflerces le marc, ce qui ne
revient, ielon Budt'e, qu'à 62 livres 10 fous de notre monnuit).
Alémoircs de l' Académie des Sciences, année ijj6, p-iges j ^ ^ d/
fuivantes.
(u) Il falloit qu'il y eut autrefois des mines d'or (Se d'argent dans
le Maine , puifque l'article LXX de la coutume du Maine , porte
que la fortune d'or, trouvée en mine appartient au Roi, & la for-
tune d'afgent, pareillement trouvée en mine, au Comte Vicomte
de Beaumont, & Baron. Idem, page lyS. — Oji a découvert à
Montmeroil proche Aiigoulême , une mine d'argent , mais on ne
fa pas exploitée. Voyage hijîor'ique de l'Europe ; Pans, j 6 () ^ ^
tome 1, page 8 S.
(x) Au-deffous du château deTournel, on nous a fait voir aupics
du moulin qui efl fur le bord de la rivière, un très - beau filon de
mine de plomb & argent. Cette mine qui n'a point été touchée
mériteroit d'être exploitée, parce que la veine fe fuit très-bien; on
y remarque fur la tête qui paroît au jour , de la pyrite mêlée avec
de la mine de plomb, lur toute fa longueur, ce qui en carac^érife
l:i bonté Il y a auprès du village de Mataval , un filon de
mine de plomb & argent .... A une demi -lieue de Bahours, on
trouve au fond d'uu vallon , une mine de plomb qui rend depuis
lept jufqu'à neuf onces d'argent par quintal de minerai ; le filon
traverfe le ruifleau & fe prolonge des deux côtés dans l'intérieur, &
le long des montagnes oppofées. HiJIoire Naturelle du Languedoc ,
par M. de Genfmne ^ tome II, pages :i2 , 240 & 24S . . . . Au-
deffous de la paroifle de Saint-André, diocèfe d'Uzcs, au lieu appelé
D E s Aï I N É R A U X, 19
de CCS mines ne payeroit pas la dcpenfe de leur travail,
& dans un pays comme la France , où l'on peut
employer les hommes à des travaux vraiment utiles ,
on feroit un bien réel en défendant ceux de la fouille
des mines d'or & d'argent , qui ne peuvent produire
qu'une ricliefTe fi6tive & toujours décroiflante.
En Efpagne , la mine de Gnadalcanal dans la Sierra
Moraia ou montagne Noire, efl l'une des plus fameufes;
elle a été travaillée dès le temps des Romains (y) ,
enfuite abandonnée, puis reprife & abandonnée de
nouveau , & enfin encore attaquée dans ces derniers
temps : on affure qu'autrefois elle a fourni de très-
gnndes richeffes , & qu'elle n'eft pas à beaucoup près
cpuifée; cependant les dernières tentatives n'ont point
Y Ejhade , il y a un très -bon filon de mine d'argent grife. Hïjlo'irc
Naturelle du Languedoc, par AL de Genfanne , tome I, page 16 j.
< — Il y a dans la montagne appelée les Cacarnes , diocci'e de Pons,
une mine de plomb & argent fort riche; mais le minerai n'y efl
' })as abondant ; il y a une autre mine femblable , mais moins riche
Cil argent, au lieu appelé Brïoun, le tout dans le territoire de Rioufet.
Idem, tome II, page 2 0 j) . — En remontant de Colombières vers
Donts, on trouve près de ce dernier endroit de iiès-bonnes mines
de plomb & argent. Idem, tome II, page 21 j. — Aux Corteilles ,
diocèfe de Narbonne, il y a un très - beau filon de mine d'argent,
ijièk'e de blende. Idem, tome II, page 1S8.
(y) Pline dit que l'argent le plus pur fe tiroit de l'Efpagne , &
que l'on y exploitoit des mines d'or qui avoient été ouvertes par
A.nnibal, & néanmoins n'étoient pas encore à beaucoup près épuifces.
t'mc XXX, chapitre xxvil.
20 Histoire Natu relle
eu de fuccès, & peut-être fera-t-on forcé cfe renoncer
aux cfpcrances que Jonnoit Ton ancienne & grande
célébrité, ^c Les fommcts des montagnes autour de
" Guadalcanal , dit M. Bowles , font tous arrondis, ôl
» par-tout à peu- près de ia même hauteur; les pierres
» en font fort dures, & reffcmblent au grès de Turquie
» ( Cûs Turcica) li y a deux liions du levant au
" couchant, qui fe rendent à la grande veine dont la
» direction elt du nord au fiid ; on peut la fuivre de
>^ l'œil dans un efpace de plus de deux cents pas à la
» fuperficie ; a une lieue & demie au couchant de
'^ Guadalcanal, il y a une autre mine dans un roc élevé;
3' la veine efl renverfée , c'cil-à -dire , qu'elle eft plus
■ riche à la fiipcrficie qu'au fond ; tWt peut avoir feize
^> pieds d'épaiifeur, & elle eft, comme les précédentes,
>> compofée de quartz & de fpath. A deux lieues au
5> levant de la même ville, il y a une autre mine dont
31 la veine eft élevée de deux ])ieds hors de terre , &
>> qui n'a que deux pieds d'épaifteur. Au refte, ces mines,
?i qui fe préfentent avec de fi belles apparences , font
" ordinairement trompeufès; elles donnent d'abord de
î> l'argent ; mais en defcendant plus bas on ne trouve
plus que du plomb. » Ce Naturalifte parle auffi d'une
mine d'argent fans plomb, fituée au midi & à quelques
lieues de diftance de Zalamea. Il y a une mine d'argent
dans la montagne qui eft au nord de Lografo (i) , &
(tJ Bïjloirc Naturelle d'Efpagne, par M. Bowles, pages 6 ^ &
DES Minéraux, 21
piufieurs autres dans les Pyrénées , qui ont été travaillées
par les Anciens, & qui maintenant font ahandonnées ^a^ ;
il y en a auiïi dans ic^ Alpes & en piufieurs endroits
de la SuifTe. M." Scheuchzer, Cappeler &i Guettard
en ont fait mention (l^) , & ce font fans dout^ ces
fuïv. Cet Auteur parle aufTi de quelques autres miaes dumcnie canton,
où l'on trouve de l'argent vierge, de l'argent vitré, (Sec.
(d) L'avarice a cté fouvent trompce par le fuccès des exploitations
faites par les Phéniciens, les Carthaginois &.les Romains. Les premiers,
au rapport de Diodore de Sicile , trouvèrent tant d'or & d'argent
dans les Pyrénées , qu'ils en mirent aux ancres de leurs vai/leaux ;
on tiroit en trois jours un talent eubo'K|ue en argent, ce cjui montoit
à huit cents ducats ; enflammés par ce récit , des j^articuliers ont
tenté des recherches dans la partie feptentrionaie des Pyrénées ; ils
femblent avoir ignoré que le côté méridional a toujours été regardé
comme le ])Ius riche en métaux. Tite-Live parle de l'orbe de l'argent
que les mines de i/i/^rf 'fournifloient aux Romains; les monts qui
s'alongent vers le nord jufqu'à Pampelune , font fameux, fuivant
Alphonfe Barba, par la quantité d'argent qu'on en a tirée; ils
s'étendent aufli vers l'Ebre , dont la richefle ell vantée par Ariftote
& par Claudien:/n Jheriâ narrant combujiis aliquando a pafor'ibus Jilvis,
calenteque ex ïgnibus terra , manifejtatum argentum dejluxi[je. Ciimque
pojlmodiim terrœ motus fupervenijfent , eruptis hintibus magnam copitvn
(ircrenti Jîmul coUeâam, Arifîot. de Mirab. aufcult. — L'Hidoire ne
cite point les mines que les Anciens ont exploitées du côté de
France, ce qui prouve qu'elles leur ont paru moins utiles que les
mines d'Efpagne ; aulTi avons -nous remarqué que les entreprifes
tentées dans cette }>artie ont iMefque toujours été ruineufes. EJfais
fur la minéralogie des Pyrénées , in-^.' page 2^^.
(b) M. Scheuchzer dit qu'il y a une mine d'nrgent à Jchanneherg,
à BaranvaU M. Capptler dit que le cuivre mêlé à l'argent le
22 H 1 STO IRE Naturelle
hautes iiu)iU3gnes des P3 renées & des Alpes , qui
renferment les mines primordiales d'or (5c d'argent,
dont: on trouve les débris en paillettes dans les eaux
qui en découlent ; toutes les mines de féconde forma-
tion font dans les lieux inférieurs au pied de ces
montagnes, & dans les collines formées originaire-
ment par le mouvement & le dépôt des eaux du vieil
Océan.
Les mines d'argent qui nous font les mieux connues
en Europe , font celles de l'Allemagne ; il y en a
piufieurs que l'on exploite depuis très-long-temps, dL
l'on en découvre affez fréquemment de nouvell(*^s.
?vl. de Jufli , fivant Minéralogifle, dit en avoir trouvé
fix en 175 I, dont deux font fort riches, & font fituées
fur les frontières de la Styrie ('cj. Selon lui, ces mines
jiiomre de toutes parts dans le mont Sj/in au - de (Tu s de Zill'ts.
yilémoires de AI. Cuettanl dans ceux de i Académie des Sciences
iinnce 17^2, page S -3- — On a découvert en creufant le baffin
de Kriembach, qu'une pierre bleuâtre lenfennoit de l'argent
Il y a aufli de l'argent dans le canton d Underwald Les
environs de Bex & du lac Léman ^ renferment des veines d'argent.
Jdiw , pages j'j'j» & ^^6.
(c)^^ La plus riche refîemble à une pierre brune tirant furie rouge,
?5 & l'autre relTemble à une pierre blanche, & fe trouve près d'An-
V naberg, cette pierre blanche ne paroît être qu'une pierre calcaire;
j> l'eau agit fur elle, après avoir été calcinée, comme fur une pierre
V à chaux, & elle ne contient ni foufre, ni arfenic ni aucun métal:
^> l'on n'y aperçoit que l'argent fous une forme métallique au moyen
Ù £ s AI I N É R A U X. 2 -»
font mt-Ices de fubftances calcaires en grande quaiuitc,
êi. cependant il ailure qu'elles ne perdent rien de leur
poids lorfcju'elles font grillées par le feu, & qu'il ne
s'en élève pas la moindre fumée ou vapeur pendant la
calcination ; ces afiertions font difficiles à concilier; car
il ell certain que toute fubftance calcaire perd beaucoup
de fon poids lorfqu'elle ell calcinée, âc que par cou-
féquent cette mine d'Awjûltr^, dont parle M. de Juili,
doit perdre en poids à proportion de ce qu'elle contient
de fdbftancc calcaire. Ce fa\ant Minéralogifle, affure qu'il
exiile un très-grand nombre de mines d'argent mincralifc
par l'alka'i , mais cette opinion doit être interprétée, car
l'alkaii feul ne pourroit opérer cet effet; tandis que je foie
de foufre , c'c(t-à-dirc, les principes du foufre réunis à
l'alkaii peuvent le produire ; & comme M. de Julli ne
parle pas du foie de foufre, mais de l'alkaii fimple , fès
expériences ne me paroiffent pas concluantes ; car
falkali minéral feul n'a aucune aétion fur l'argent en
maffe: & nous pouvons très-bien entendre la formation
de la mine blanche de Schemnitz par l'intermède du foie
d'une loupe. . . . Dès le commencement elle rendoit une, deux t«
& trois livres d'argent par quintal; à peine les Ouvriers eurent-ils <:<
creufé à une brafle c\ demie de profondeur, c[ue la mine rendoit ce
jufqu'à vingt-quatre marcs par quintal. . .. On y rencontre même ic
des morceaux de mines d'argent blancfies & rouges , & il le trouve c<
aulîî de l'argent maiht ». Nouvelles vérités h l'avantage de la Phyfique^
jjar Al. de Jujfi ; Jvurnal étranger, Odobre iyj4>
24- H/STO/RE Naturelle
de foufre : la Nature ne parok donc pas avoir faît
cette oj)cratioii de la manière dont le prétend M. de
Jufii (d) ; car quoiqu'il n'ait point reconnu de foufre
dans
(d) Cette mine efl: extrcnienieiit riche; car fa mine commune
contient ordinairement trois, quatre, julqu'à fix marcs -d'argent pnr
quintal ; la bonne en rend julqu'à vingt marcs , & l'on en lire
encore davantage de quekjues morceaux ; on a même trouve à cette
mine à' Annaberg , des malTes d'argent natif, du jK-)ids de plufieurs
livres .... M. de Jufti prétend que tout ce c[ui n'efl: pas d'argent
natif dans cette mine, a cté mineralife par un fel alkalin, <5c voici
fes preuves.
Les plus riches morceaux de la mine font toujours ceux qui ,
tirant fur le blanc, font mous & cafîàns, qui paroident compofe's
par-tout de parties homogènes, «Se dans lefquels, ni la fmij^le vue
ni le fecours du microfcope , ne font apercevoir aucune particule
d'argent fenfible. Il faut donc que l'argent y foit mèlc intimement
avec une fubllance qui le prive de fa forme métallique , & comme
il n'y a dans cette mine ni foufre ni arfenic , mes expériences
dcmontreront que ce ne peut être que l'alkali minerai.
Dans les parties de la mine qui font moins riches , la dureté de
la matière efl: à peu -près égale à celle du marbre commun, &.
l'on y voit des parcelles d'argent dans leur forme de métal
Et ce qui démontre c{ue cette mine riche & molle a été vcritable-
nient produite par l'union de l'alkali avec l'argent, c'efl qu'on obtient
un vrai _/ô/V de fovfrc , Idrjqu'à une partie de la mine en quellion,
on ajoute la moitié de foufre, & que l'on fait fondre ces deux
Tnaiicres dans un vailleau fermé ....
Depuis que j'ai été convaincu par la mine d' Annaberg , qu'il y a
dans la Narure des mines véritar;Iement alkalines , j'en ai encore
découvert dans d'autres endroits : à Schemniti en Hongrie , on 4
trouvé depuis long - ter.qis que les mines riches qu'on y exploite,
ctojeat
DES Minéraux. 25
clans cette mine, le foie de foufrc qui eft, pour ainfi
dire, répandu par-tout, doit y exiger comme il exifle
non - feulement dans les matières terreufes, mais dans
les fubdances calcaires, & autres matières qui accom-
pagnent les mines de féconde formation.
En Bohème , les principales mines d'argent font
celles de Saint-Joachïm ; les filons en font affez minces,
& la matière en efl très-dure, mais elle eft abondante
en métal; les mines de Kut tenbcrg ïowi mêlées d'argent
& de cuivre , elles ne font pas fi riches que celles de
Saint- Joachim ('e). On peut voir dans les Ouvrages
» ■^■.- ■ I. ■■-■■■—■ I ■ ■■—■,1 I iiiB^...! I I III ^^^^— —a
ctoient accompagnces d'une fubftance minérale, nioJle , blanche, &
de la nature de la craie. Cette fubftance qui, à eau fe de la fubtilité
de Tes parties & du peu de folidité de fa inafle, blanchit les mains
comme de la craie, a été pendant très-longtemps jetce comme une
matière inutile ; on s'eft enfin avifé de l'edayer , & on a trouvé,
par les cfTais ordinaires qu'elle contenoit, dix marcs d'argent par
quintal .... Et fi l'on y veut faire attention on trouvera peut-être
fréquemment cette mine alkaiine dans le voifinage des carrières de
marbre & de pierre à chaux
Toute la montagne où fe trouve la mine d' Annaherg^ n'eft com-
pofce que d'une pierre à chaux ou d'une efpèce de marbre commun,
& l'on m'a envoyé de Siléfie , une efpèce de marbre qui venoit de
la montagne appelée le Zotembcrg, ôc dont j'ai tiré par l'analyfe ,
deux onces & demie d'argent par quintal M. L/ieman m'a
afluré avoir vu un marbre qui contenoit jufqu'à trois onces & demie
d'argent par quintal. Nouvelles vérités a l'avantage de la Phyfique , par
M. de Jujli; Journal étranger, mois de Mai i 7/ 6 , pages y i & fiiiv.
(e) Grifelius , dans les Éphémérides d'Allemagne depuis l'annco
1670 à I 68 6.
Minéraux , Tome IIL D
z6 Histoire Naturelle
des Mincraiogi/les Allemands, la dcfcription des mines
<Je plufieiirs autres provinces, & notamment de celles
de Tranfilvanie, de la Hefle & de Hongrie; celles de
Schemnitz (f), contiennent depuis deux jufqu'à cinq
gros d'argent, & depuis cinq jufqu'à fèpt deniers d*or
par marc, non compris une once & un gros de cuivre
qu'on peut en tirer auiïi (g).
Mais il n'y a peut-être pas une mine en Europe,
où l'on ait fait d'auffi grands travaux que dans celle de
SallLerg en Suède, fi la defcription qu'en donne Rcgnard
n'eft point exagérée ; il l'a décrit comme une ville
fouterraine , dans laquelle il y a des maifons , des écuries
êL de vafles emplacemens (hj .
^ - ■ ■ . ■ I ■ , . . ■■ . . ,
(fj Par les Mémoires de M. Ferber, fur les mines de Hongrie,
il paroît que la mine de Schemnitz eft fort riche ; que celle de
Kremnitz a fourni, depuis 1749 jufqu'en 1759, en or & en argent,
ïa valeur de 42,498,009 florins, c'eft-à-dire , plus de 84 millions
de notre monnoie ; & que depuis 1^48 , celle de Fclfobania fournit
par an environ 100 marcs d'or, 3000 marcs d'argent, 3000 quin-
taux de plomb, & i joo quintaux de htharge , fans compter les
mines de cuivre & autres. Alémoires imprimés à Berlin en lyS 0,
in- 8 .* Extraits dans le Journal de phyfiquey Août iy8 1 , page i C i.
(g) Traité de la fonte des Mines de Schlutter, tome II, page s o^f.
(h) Regnard ajoute à la defcription des excavations de ia mine,
ïa manière dont on l'exploite. « On fait, dit -il, fécher les pierres
ï» qu'on tire de la mine fur un fourneau qui brûle lentement , &
» qui fépare l'antimoine , l'arfenic & le foufre d'arec la pierre , le
» plomb & l'argent reftent enfemble. Cette première opéradon
welt fuivie d'une féconde, ^ ces pierres féchccs, foAt jetées dans
DES Minéraux. 27
rc En Pologne, dit iM. Guettard, les forets de Leib'ni
font riches en veines de métaux , indiquées par les "
travaux qu'on y a faits anciennement; il y a au pied de '^
ces montagnes , une mine d'argent découverte du temps ^'
de Charles XII (i) . »
Le Danemarck, la Norwège (k) & prefque toutes
des trous où elles font pilées & réduites en boue, par le moyen ul
des gros marteaux que l'eau fait agir ; cette boue efl: délayée dans «
une eau qui coule incelTamment fur une planche mife en glacis , •«
& qui emportant le plus grolfier, lai/le l'argent & le plomb dans k
le fond fur une toile. La troificme opération fépare l'argent d'avec «
le plomb qui fond en écume , & la quatrième fert enfin à le per- «<
feétionner, & à le mettre en état de fouffrir le marteau On «
me fit, dit l'Auteur, prcfent d'un morceau d'amiante, dont on oc
avoir trouvé plufieurs dans cette mine, m dEuvrcs de Regnard; Paris,
JJ-^2 , tome /, pages 2. o^ & fuiv.
(i) Mémoires de l'Académie des Sciences de Paris, année iy6 2,
page s i^.
(k) En Norwège, il y a plufieurs mines d'argent où il fe trouve
quelquefois des morceaux de ce métal qui font d'une grandeur
extraordinaire: on en conferve \n\ dans le Cabinet du roi de
Danemarck, du poids de onze cents vingt marcs. On tire des
pièces entières d'argent pur des mines de Kongfberg. La profondeur
perpendiculaire d'une de ces mines, eft de cent trente toiles; cti
mines font fans fuite , & néanmoins il n'y a peut-êire que celles du
Potofi qui rendent davantage. Hijloire Naturelle de Norwège , par
Pontoppidan ; Journal étranger, mois d'Août ij^^- M. Jars vient
de donner une defcription plus détaillée de ces mines de Kongfberg;
elles ont été découvertes par des filets d'argent qui fe manifefioient
au jour. . .. On évalue le produit annuel de toutes les mines de
ce département ,332 ou 3 3 millQ marcs d'argent Tous le*
iS Hl SrO IRE NATU RELLE
les contrées du nord, ont auiïi des mines d'argent dont
quelques-unes font fort riches, & nous avons au Cabinet
de Sa Majeflé, de très-beaux morceaux de mine d'argent,
rochers de cette partie de la Norwcge font très-compacts , 6c fi durs
qu'on eÙ. oblige' d'employer fe feu pour les, abattre .... Les veines
principales les })Ius riches , font prelque toutes dans des rochers
ferrugineux , £< ces inines s'appauvrident toutes à melure que l'on
delcend, en forte qu'il ell très-rare de trouver du minerai d'argent,
lorfqu'on eft defcendu jul'qu'au niveau de la rivière qui coule dans la
vallée au-delTous de ces rochers. Les veines minérales renfermées dans
les filons principaux font fort étroites ; il ert: rare qu'elles aient au-deiïùs
d un pied d'épaiffeur, elles n'ont même trcs-fouvent qu'un pouce
ou quelques lignes; ces veines ne produilent généralement point
d argent minéralilé , fi l'on en excepte quelques morceaux de mines
d'argent vitreufes que le hafard fait rencontrer quelquefois, encore
moins de la mine d'argent rouge, mais toujours de l'argent viero-e
ou natif, exnèmement varié dans (es, configurations; elles font
remplies de différentes matières pierreufes , qui (ervent comme de
matrice à ce métal , & forment un compofé de fpath calcaire , d'un
autre fufible couleur d'amcthyde, d'un fpath verdàtre, & d'un autre
encore d'un blanc tranfparent , reffembiant affez à une félénite , &
fou vent recouvert de cuir foOlle ou de montagne , qui tous font
unis à de l'argent vierge, & en contiennent eux-mêmes; ce métal
fe trouve encore dans un rocher de couleur grife , qui pourroit
être regardé comme le toit & ie mur defdits filons; on le rencontre
aufîi , mais plus rarement avec du mica.
Dans tout ce mélange on n'aperçoit aucune partie de quartz , mais
bien dans les filons principaux où l'on trouve même de la pyrite
riche en argent , dans laquelle ce métal fe maniferte quelquefois , «5c
où l'on voit des criOallifations de fpath & de quartz .... Ces filons
ontiennent auffi de la blende.
D E s AI I N É R A U X. ic^
que le roi de Danemarck, a(5luellement régnant, a en la
bonté de nous envoyer. Il s'en trouve aufTi aux îles de
Féroë & en Ifîande f/J.
, —— — ■■ — —
L'argent eft toujours maiïjf dans Je rocher & prefque pur, c'efl-
à-dire avec peu de mélange Plufieurs fois on eu a détaché
des morceaux qui pelbient depuis 20 juiqu'à 80 marcs. Dans la
principale mine de Cottes h i If in der riQth , fituée fur le filon de la
montagne moyenne , . . . On trouva il y a prcs de fept ans , à cent
trente -cinq toiles au - deflbus de la fuiface de la terre, un feul
morceau d'argent vierge prefque pur , qui peloit 4 1 9 marcs
Cependant la forme la plus commune où l'on trouve ce métal, ell
celle d'un fil plus ou moins gros , prenant toutes fortes de courbes
&. fio-ures , quelques-uns ont un pied & plus de longueur; d'autres
ont la fineflè des cheveux , feuls ou réunis enl'emble en grande
quantité par un feul point d'où ils partent , mais ordinairement
mêlés à du fpath eu du rocher; d'autres encore forment difiérentes
branches de ramifications de diverfes grofleurs, dont la blancheur
& le brillant annoncent toute la pureié du métal lorfqu'il efl ratfuié.
On en trouve auffi en feuilles ou lames; c'eft communément à
travers ou entre les lits d'un rocher gris fchifleux , de manière que
dans un de ces morceaux qui pourroit avoir quatre pouces d'épaifleur,
on rencontre quelquefois une , deux & même trois couches , pénétrées
de cet arcrent qui , quand on les fépare , préfentent à chaque furface
des feuilles irès-blanches & trcs-minccs.
Il efl de ces veines enfin , où l'argent efl tellement divifé dans
ie fpath &; le rocher, quoique vierge, qu'on a bien de la peine à
Je reconnoître; dans d'autres on ne le dillingue point du tout; il
en efl; de même du quatrième filon. Ai. Jars , Mcmoircs des Savans
Étrangers j tome IX , pages 4// c^ Juiv.
(l) Selon Horrebow, les Iflandois ont trouvé dans leurs montagnes,
du métal qui étant fondu , s'eft trouvé être du bon argent. H'ifloirc
générale des Voyages, tome XVI U, page s (>'
30 Histoire Naturelle
Dans les parties feptentrionales de J'Afie, les mines
d'argent ne font peut-être pas plus rares ni moins riches
que dans celles du nord de l'Europe: on a nouvellement
public à PcterlLourg , un Tableau des mines de Sibérie,
par lequel il paroît qu'en cinquante-huit années on a tiré,
d'une feule mine d'argent, douze cents feize mille livres
de ce métal , qui tenoit environ une quatre - vingtième
partie d'or. Il y a aufTi une autre mine dont l'exploitation
n'a commencé qu'en ly^fS, & qui depuis cette époque
ju/qu'en 1-7-71,3 donné qiiatre cents mille livres d'argent,
dont on a tiré douze mille fèpt cents livres d'or (m).
Al." Gmclin tSc Muller font mention dans leurs Voyages,
des mines d'argent qu'ils ont vues à Argiinsk, à quelque
dillance de la rivière Ar^um ; ils di/cnt qu'elles /but dans
une terre molle &à une petite profondeur, que la plupart
fè . trouvent fituées dans des plaines environnées de
montagnes (n) , &. qu'on rencontre ordinairement au-
deffus du minerai d'argent, m\t efpèce de chaux de
plomb, compofée de plus de plomb que d'argent.
ïi y a au/Ti plufieurs mines d'argent à la Chine,
fur-tout dans les provinces de Junnan & de Sechuen (0) ,
on en trouve de même à la Cochinchine (p), «Se
(m) Journal de Politique & de Littérature. FcnUr lyvâ, article
Paris.
(n) Hiacire générale des Voyages, tome XVI JI , page 2ij,
(0) Idem, tome VI, page ^8^.
(n) Suivant Mendez Pinto, il y a aux eiivirons de Quanjû^ar^
D E s M I N É R A V X. 31
celles du Japon paroiffent être les plus aborxJantes cfc
toutes ((j) . On connok aufii quelques mines d'argent
dans l'intérieur du continent de i'Afie. Chardin dit
qu'il n'y a pas beaucoup de vraies mines d'argent en
Pcr/è , mais beaucoup de mines de plomb qui contiennent
de l'argent ; il ajoute que celle de Renan ^ à quatre
lieues d'Ifpahan, &. celles de Kirman <Sc de Mazanderan,
n'ont été négligées qu'à caufe de la dilëtte du bois qui ,
dans toute la Perfe, rend trop di/J^endieux le travail
des mines (r) ,
Nous ne connoifTons guère les mines d'argent de
l'Afrique, les Voyageurs qui fe font fort étendus fur les
mines d'or de cette partie du monde, paroiffent avoir
négligé de faire mention de celles d'argent ; ils nous
difent feulement qu'on en trouve au cap Vert (f),
dans l'anfe de la Cochinchine , ées mines d'argent dont o\\ tire une
fort graride quantité de ce nietaJ. Hijloire générale des Voyages ,
tome JX , page ^ S ^.
(q) Oi\ ne connoît guère d'autres mines d'argent dans toute
I'Afie que celles du Japon, dont Jes relations vantent l'abondance.
Cependant Mindez Pinto , dit qu'il y en a de ïon abondantes fur
îes bords du lac de Chiamuy, d'où o\\ le tranfporte dans d'autres
provinces de J'Afie. Jdem , tome X, page ^2 S. — 'Là province de
Bungo au Japon, a des mines d'argent; Kattami, lieu fitué au nord
de cet Empire, en a de plus riches encore. L'argent du Japon pafîe
pour le meilleur du monde, autrefois on i'échangeoit à U Chine,
poids pour poids contre de l'or. Idem , page éj^s
(rj Voyage de Chardin. Tome II, page 22.
(f) On alTure que d^is \ï\q Saint- Anîom , au cap Vert; W ^ ^
^2 Histoire Natu relle
au Congo {tj, au Bambuk (uj , & jufque Jans le pays
des Hottemots (x) . ■
Mais c'eft en Amérique où nous trouverons un trcs-
grand nombre de mines d'argent, plus étendues, plus
abondantes , & travaillées plus en grand qu'en aucune
autre partie du monde. La plus fameufe de toutes, efl
celle de Potofi au Pérou: « Le minerai, dit M. Bowles,
„ en eft noir, & formé dans la même forte de pierre que
,, celle de Freiberg en Saxe ; ce Naturalise ajoute que la
3) mine appelée Roficle, dans le Pérou , efl de la même
„ nature que celle de RotligitUeti - eri & de AnJrcûJherg
dans le Hartz, & de Sainte -Marie -aux -mines dans les
Vo/ges (y) ».
Les mines de Potofi flirent découvertes en 1545, &
l'on n'a pas cefTé d'y travailler depuis ce temps, quoiqu'il
y ait quantité d'autres mines dans cette même contrée
une mine d'argent , mais qui n'eft pas encore exploitée. Hijlolrg
générale des Voyages , tome II , page ^i S.
(i) On trouve des mines d'argent dans la province de Bamba , au
Congo, qui s'ctendent jufque vers Angole. Idem , tome IV, page 6 1 y.
(u) II y a des mines d'argent dans le Bambuk en Afrique.
Idna, tome II , page iT^^. . . . II y a aufli des mines d'argent dans
les terres A' Angoykayango en Afrique. Idem ^ tome IV, page ^8 S .
(x) On a auffi découvert au commencement de ce /Iccfe, une
mine d'argent dans les colonies Hoilandoifes, au pays des Hottentots ;
mais on n'en a pas continué l'exploitation. Kolbe , dans VHijioïu
générale des Voyages , tome V, page //J»
(y) Hiftoire Naturelle d'Efpagne, page 2 y»
du
DES Minéraux, 33
du Pérou. Frézier afTure que de Ton temps, les mines
d'argent les plus riches ctoient celles (ÏOriero , à quatre-
vingts lieues A'Arica ^ & il dit qu'en i y 1 2 on en
découvrit une auprès de Cufco, qui d'abord a donné
près de vingt pour cent de métal , mais qui a depuis
beaucoup diminué aind que celle de Potofi (zj- ^^
temps d'Acofla, c'efl - à -dire, au commencement de
i'autre fiècle, cette mine de Potofi, étoit fans comparai/on
la plus riche de toutes celles du Pérou ; elle efl fituée
prefque au fommet des montagnes dans la province de
Charcas, &. il y fait très-froid en toute faifon. Le foi
de la montagne efl fèc & ftérile, elle efl; en forme de
cône , &. furpafle en hauteur toutes les montagnes
voifnies ; éXc peut avoir une lieue de circonférence à
la bafe, <&.fon fommet eft arrondi & convexe. Sa hauteur,
au-deffus des autres montagnes qui lui fervent de bafe,
efl: d'environ un quart de lieue. Au-deffous de cette
plus haute montagne, il y en a une plus petite où l'on
trouvoit de l'argent en morceaux épars ; mais dans la
première, la mine efl dans une pierre extrêmement dure ;
on a creufé de deux cents jladcs, ou hauteur d'homme
dans cette montagne, fans qu'on ait été incommodé
des eaux; mais ces mines ctoient bien plus riches
dans les parties fupérieures, & elles fe font appauvries
au lieu de s'ennoblir en defcendant (a) . Parmi les autres
^— ■ ■» ■ ■■■■ — — 1^»^— ^— ^ ■■■■_■■■ Il ■ ■ ■ ■ ■ -■—■.,■ I» I I B^^B^
(■^) Hiftoire géncrale des Voyages, tome XIII, page ^8^,
(a) Ce roc de Potofi, comieiii quatre veines principales; la v'iche ,
ATméraux , Tome III. E
34 Hi STO IRE Naturelle
mines d'argent du Pérou , celle de Turco , dans le
corrégiment de Cavanga, eft très -remarquable, parce
que le métal forme un ti/Tu avec la pierre très-apparent
à l'oeil ; d'autres mines d'argent dans cette même con-
trée, ne font ni dans la pierre ni dans les montagnes;
mais dans le fable où il fuffit de faire une fouille pour
trouver des morceaux de ce métal , fans autre mélange
qu'un peu de fable qui s'y cft attaché (h) .
Frézier, Voyageur très-intelligent, a donné une affez
bonne defcription de la manière dont on procède au
Pérou, pour exploiter ces mines & en extraire ie métal.
On commence par concaïïer le minerai, c'eft-à-dire,
les pierres qui contiennent le métal ; on les broie enfliite
dans un moulin fait exprès: on crible cette poudre, &
l'on remet fous la meule les gros grains de minerai
le centcno, celle d'étain & celle de Alend'ietû. Ces veines font en la
partie orientale de la montagne , & on nen trouve point en la
partie occidentale, elles courent nord & fud. . . . Elles ont à l'en-
droit le plus large fix pieds, & au plus étroit une palme: ces veines
ont des rameaux qui s'étendent de côté & d'autre. . . . Toutes ces
mines font aujourd'hui (en 1589) fort profondes, à quatre-vingts ,
cent, ou deux cents fiades, ou hauteur d'homme On a
reconnu par expérience, que plus haut eft fituée la veine à la
fuperficie de la terre, plus elle eft riche & de meilleur aloi
On tire le minerai à coups de marteaux , parce qu'il eft dur à peu-
près comme le caillou. Hijloire Naturelle des Indes, par Acojîa. Paris j
j 6 0 0 , page 1 3 j & fuiv.
(b) Hidoire générale des Voyages, tome XIII , page ^00.
DES Minéraux. ^ r
qui refteiu fur le crible, 6l lor/que le minerai /è trouve
mêlé de certains minéraux trop durs qui rempéchent
de fe pulvérilèr, on le fait calciner pour le piler de
nouveau; on le moud avec de Teau, &. on recueille dans
un ré/èrvoir cette boue liquide qu'on laiiïe fécher, &
pendant qu'elle efl encore molle on en fait des caxons^
c'eft-à-dire, de grandes tables d'un pied d'épaiffeur, &
de vingt-cinq quintaux de pefanteur ; on jette fur chacune
deux cents livres de iû marin qu'on laiffe s'incorporer
pendant deux ou trois jours avec la terre; enfuite on
l'arrofe de mercure qu'on fait tomber par petites gouttes ;
il en faut une quantité d'autant plus grande que le
minerai efl plus riche, dix, quinze & quelquefois vingt
livres pour chaque table. Ce mercure ramafle toutes
les particules de l'argent. On pétrit chaque table huit
fois par jour, pour que le mercure les pénètre en
entier , & afin d'échauffer le mélange ; car un peu
de chaleur efl néceffaire pour que le mercure fè fàififîe
de l'argent , & c'efl ce qui fait qu'on efl quelquefois
obligé d'ajouter de la chaux pour augmenter la chaleur
de cette mixtion ; mais il ne faut ufer de ce fecours
qu'avec grande précaïuion; car fi la chaux produit trop
de chaleur, le mercure fe volatili/e, & emporte avec
jui une partie de l'argent. Dans les montagnes froides,
comme à Lipès & à Potofi , on efl quelquefois obligé
de pétrir le minerai pendant deux mois de fuite , au
Jieu qu'il ne faut que huit ou dix jours dans les contrées
Ei;
36 Histoire N aturelle
pius tempérées : on el1: même forcé de fè fervir Je
fourneaux pour échaufîèr le mélange & preffer l'amal-
game du mercure, dans ces contrées où le froid efl
trop gronJ ou trop conilaiit.
Pour rcconnoître fi le mercure a fait tout fbn efîèt,
on prend une petite portion de la grande table ou
caxon, on la délaie & lave dans un baffin de bois, la
couleur du mercure qui refle au fond indique fbn efiet;
s'il efl noirâtre on juge que le mélange efl trop chaud,
& on ajoute du fel au caxon pour le refroidir ; mais
fi le mercure c(l blanchâtre ou blanc, on peut préfumer
que l'amalgame efl fait en entier, alors on tranfJ3orte la
matière du caxon dans des lavoirs où tombe une eau
courante; on la lave jufqu'à ce qu'il ne rcfle que le
métal fur le fond des lavoirs qui font garnis de cuir-
Cet amalgame d'argent & de mercure, que l'on nomme
pel/d , doit être mis dans des chauffes de laine pour
laiffer égoutter le mercure ; on ferre ces chauffes , & on
les preffe même avec des pièces de bois pour l'en faire
fortir autant qu'il efl poffible , après quoi , comme il
refle encore beaucoup de mercure mêlé à l'argent , on
verfe cet amalgame dans un moule de bois en forme
de pyramide tronquée à huit pans, & dont le fond efl
une plaque de cuivre percée de plufieurs petits trous.
On foule & preffe cette matière pella , dans ces moules
pour en faire des maffes qu'on appelle pignes. On lève
eniuite le moule, «Sl l'on met la pign€ avec ià bafe de
DES Minéraux. 37
cuivre fur un grand vafe de terre rempli d'eau, &. fous
un chapiteau de même terre, fur lequel on fait un feu
de charbon, qui fait fortir en vapeurs le mercure contenu
dans la pigne ; cette vapeur tombe dans l'eau & y
reprend la forme de mercure coulant : après cela la
pigne n'eft plus qu'une maffe poreufe , friable & corn-
pofëe de grains d'argent contigus, qu'on porte à la
monnoie pour la fondre (cj.
Frézier ajoute à cette defcription dont je viens de
donner l'extrait, quelques autres faits intéreffans fur la
différence des mines ou minerais d'argent; celui qui
ell blanc & gris, mêlé de taches rouffes ou bleuâtres,
eft le plus commun dans les minières de Lipès; on y
diftingue à l'œil hmple, des grains d'argent quelquefois
difpofés dans la pierre en forme de petites palmes.
Mais il y a d'autres minerais où l'argent ne paroît point,
entr'autres un minerai noir dans lequel on n'aperçoit
l'argent qu'en raclant ou entamant fa furface ; ce minerai
qui a fi peu d'apparence, & qui fouvent efl mêlé de
plomb, ne laifle pas d'être fouvent plus riche, & coûte
moins à travailler que le minerai blanc ; car comme il
contient du plomb qui enlève à la fonte toutes les
impuretés, l'on n'elt pas obligé d'en faire l'amalgame
avec le mercure: c'étoit de ces minières d'argent noir
que les anciens Péruviens tiroient leur argent. Il y a
(c) Frézier, HUloire générale des Voyages, tome XII J, page jp.
38 Histoire Naturel le
d'autres minerais d'argent de couleurs diiTércntes , un
qui eft noir, mais devient rouge en ie mouillant ou le
graitant avec du fer; il eft riche, &l l'argent qu'on en
tire eil d'un haut aloi. Un autre brille comme du talc,
mais il donne peu de métal; un autre qui n'en contient
guère plus eft d'un rouge-jaunâtre : on le tire aifément
de fa mine en petits morceaux friables & mous ; il y a
aufti du minerai vert qui n'eft guère plus dur, & qui
paroît être mêlé de cuivre ; enfin on trouve de l'argent
pur en plufieurs endroits ; mais ce n'eft que dans la
feule mine de Cotamito, aftcz voifine de celle de Potofi,
où l'on voit des fils d'argent pur, entortillés comme
ceux du galon brtilé.
Il en eft donc de l'argent comme de Tor & du fer;
leurs mines primordiales font toutes dans le roc vitreux,
&L ces métaux y font incorporés en plus ou moins
grande quantité, dès le temps de leur première fùfion
ou fublimation par le feu primitif; & les mines fecon-
daires, qui fe trouvent dans les matières calcaires ou
fchifteufes , tirent évidemment leur origine des pre-
mières. Ces mines de féconde & de troifième formation,
qu'on a quelquefois vu s'augmenter fènfiblement par
l'addiiion du minerai charié par les eaux, ont fait croire
que les métaux fe produifoient de nouveau dans le
fein de la terre ; tandis que ce n'eft au contraire que
de leur décompofition <Si. de la réunion de leurs détri-
mens, que toutes ces mines nouvelles ont pu &: peuvent
DES Minéraux. 39
encore être folpiées ; & fans nous éloigner de nos mines
d'argent du Pérou, il s'en trouve de cette efpèce au
pied des montagnes &: dans les excavations des mines
même abandonnées depuis long-temps ^JJ .
(d) Dans la montagne du Potofi , l'on a tant creufe en diiïcrens
endroits, que plufieurs mines fe ibnt abîmées, «& ont oiTeveli les
Indiens qui travailloient , avec leurs outils & étançons. Dans la fuite
des temps on efl venu refouiller les mêmes mines, & l'on a trouvé dans
le bois, dans les crânes & autres os humains, des filets dtùvgewi qui
les pénètrent. C'eft encore un fait indubitable qu'on a trouvé beau-
coup d'argent dans les mines de Lipcs , d'où on en avoit tiré long-
temps auparavant. Je fais qu'on répond à cela qu'au trefqi^ elles étoient
fi riches qu'on négligeoit les petites quantités ; mais je doute que
lorfqu'il n'en coûte guère plus de travail on perde volontiers ce que
l'on tient. Si à ces faits nous ajoutojîs ce que nous avons dit des
lavoirs d^ Adacoll Sx. de la montagne de Saint- Jofeph où fe forme le
cuivre, on ne doutera plus que l'argent «Se les autres métaux ne fe
forment tous \cs jours dans certains lieux. . . , Les anciens Philo-
fophes & quelques modernes , ont attribué au foleil la formation des
métaux , mais outre qu'il efl; inconcevable que fa chaleur puilîe
pénétrer jufqu'à des profondeurs infinies , on peut fe dé/abufer de
cette opinion, en failant attention à un fait inconteflable que voici:
Il y a environ trente ans que h foudre tomba fur la montagne
d'IIimani , qui ell au-defius de la Pa7^e , nmr ement C/wçuiiigo , ville
du Pérou, à quatre-vingts lieues d'Arica; elle en abattit un morceau,
dont les éclats qu'on trouva dans la ville & aux environs, étoient
pleins d'or ; néanmoins celte montagne , de temps immémorial , a
toujours ctc couverte de neige; donc la chaleur du foleil qui n'a
pas allez de force j)Our fondre la neige , n'a [)as dû avoir celle
de former de for qui étoit delTous , &. qu'elle a couvert l'dns
interruption.... D'ailleurs la j)lupart des mines du Pérou & du
40 Histoire Naturelle
Les mines d'argent du Mexique ne fcmt guère moins
fameufcs que celles du Pérou. M. Bowles dit que dans
celle appelée VûUadora, le minerai le plus riciie donnoit
cinquante ^i^•res d'argent par quintal, le moyen vingt-
cinq livres, & le plus pauvre huit livres, &. que fouvent
on irouvoit dans cette mine des morceaux d'argent
vierge (e). On eflime même que tout l'argent qui fe
tire du canton de Sainte- Pécaqiie, eft plus fin que celui
du Pérou (f): fuivant Gemelli Carreri la mine de Sauta-
Crux avoit en 1697, plus de fept cents pieds de pro-
fondeur; celle de Navaro plus de {\\ cents, & l'on peut
compter, 4it-il, plus de mille ouvertures de mines (g) ,
Chily, font couvertes de neige pendant huit mois de l'année. Fré^ier,
Voyage à la mer du fud ; Paris, 1732, page 146 à^ fuiv.
(e) Hiftoire Naturelle d'Efpagne, pages 2^ & 24.
(f) Hiftoire géncrale des Voyages, tome XI, page ^ 8 p.
(g) C'efl: une obfervation importante & qui n'avoit pas échappé
au génie de Pline: « Qu'on ne trouve guère un filon feul & ifolé;
3j mais que lorfqu'on en a découvert x\x\ on efl: prefque fiir à^ew
rencontrer plufieurs autres aux environs ». Ub'icumque vna inventa
verra ejl , non procul invenitur alla ( Lib. XXX, cap. xxvil ). « La
3» fublimation ou la chute des vapeurs métalliques, une fois déter-
5> minée vers les grands fommets vitreux, dut remplir à la fois les
55 différentes fentes perpendiculaires ouvertes dès-lors dans ces mafles
5» primitives ; & c'efl dans un fens relatif à cette production ou prc-
55 cipitation fimultanée, que le même Naturalise interprète le nom
3» latin originairement grec , des métaux ( U'na?.\a. quafi /xtr'a»^uy ) ;
» comme pour défigner des matières ramaffées <Sc rafiemblées aux
55 mêmes lieux , ou des fubflances produites en même temps &
difpofees enfemble x». JVote communiquée par AI. iabbc Bexon,
dans
Ù E s AI J N É R A U X. 41
dans un efpace de fix lieues autour de Santa-Crux (h).
Celles de la Trinité ont été fouillées jufqu'à huit cents
pieds de profondeur; les gens du pays affurèrent à ce
Voyageur , qu'en dix ou onze années , depuis 1 6?>n
jufqu'en 1697, ^" ^^ ^^^^^ ^•''^ quarante millions de
marcs d'argent. Il cite auffi la mine de Saint-AIatihieii ,
qui n'efl qu'à peu de diflance de la Trinité, & qui
n'ayant été ouverte qu'en 1689, étoit fouillée à quatre
cents pieds en 1697; '^ ^'^ 4"^ ^^^ pierres métalliques
en font de la plus grande dureté , qu'il faut d'abord les
perarJer & les bri/èr à coups de marteau ; que l'on
diflingue & fépare les morceaux qu'on peut faire fondre
tout de fuite , de ceux qu'on doit auparavant amalgamer
avec ie mercure. On broie ces pierres métalliques ,
propres à la fonte, dans un mortier de (er , & après
avoir féparé par des lavages , la poudre de pierre autant
(h) En Amérique, îes mines d'argent fe trouvent commune'ment
dans les montagnes & rochers très-hauts & dëferts .... Il y a des
mines de deux fortes différentes , les unes qu'ils appellent égarées ,
& les autres Jîxes & arrêtées. Les égarées lont des morceaux de
métal qui fe trouvent amafles en quelques endroits , lefquels étant
tirés & enlevés, il ne s'en trouve pas davantage; mais les veines
fixes font celles qui, en profondeur & longueur, ont une fuite con-
tinue en façon de grandes branches & rameaux , & quand on en a
trouvé de cette elpèce , on en trouve ordinairement plufieurs autres
au même lieu.... Les Américains favoient fondre l'argent; mais
ils n'ont jamais employé le mercure pour le féparer du minerai.
mjlûire Naturelle des Indes , par AcoJIa; Paris, 160 0 y page /J/.
Minéraux, Tome JIL F
42 HisTOinE Naturelle
qu'il eftpoffible, on mcle le minerai avec une certaine
quantité de plomb, & on ies fait fondre enfemble, on
enlève ks fcories avec un croc de fer , tandis que par
le bas on laifTe couler l'argent en lingots que Ton porte
dans un autre fourneau , pour le refondre &. achever
d'en féparer le plomb. Chaque lingot d'argent eft d'en-
viron quatre-vingts ou cent marcs , & s'ils ne fe trouvent
pas au titre prefcrit, on les fait refondre une féconde
fois avec le plomb pour les affiner. On fait auffi l'effai
de la quantité d'or que chaque lingot d'argent peut con-
tenir, & on l'indique par une marque particulière; s'il
s'y trouve plus de quarante grains d'or par marc d'argent,
on en fait le départ. Et pour les autres parties du minerai
que l'on veut traiter par l'amalgame, après les avoir
réduites en poudre très-fine , on y mêle le mercure &
l'on procède, comme nous l'avons dit, en parlant du
traitement des mines de Potofi ; le mercure qu'on y
emploie vient d'Efpagne ou du Pérou, il en faut un
quintal pour féparer mille marcs d'argent. Tout le pro-
duit des mines du Mexique & de la nouvelle E/pagne,
doit être porté à Mexico , & l'on affure qu'à la fin
du dernier fièclc, ce produit étoit de deux millions de
marcs par an , fans compter ce qui palfoit par des voies
indireéles fi).
_ . , — _ — __ , — , — . — — ^
(i) Hiftoire générale des Voyages, tome XI , pages j 3 0 & fu'iv»
Les cantons de Tlafco âc de Maltepeque , à l'oueft du Mexique,
font aufll fort célèbres par Uurs mines d'argent; CuaPiimango , du
DES Minéraux, 4}
H y a aufil plufieurs mines d'argent au Chili , fur-
tout dans le voifinagc de Co<^mmho (kj , & au Brefif,
à quelque diflance dans les terres voifmes de la baie
de tous les Saints (l); Ton en trouve encore dans plu-
fieurs autres endroits du continent de l'Amérique &
même dans les Illes : les anciens Voyageurs citent en
côte du nord, ne l'eft pas moins par les Tiennes, avec onze
autres dans ce même canton; & dans fa province de Guaxaga , il
y en a un aufîi grand nombre. Les mines de Guanaxat'i & de
Talpuyaga font deux autres mines célèbres, la première eft à vingt-
huit lieues de Valladolid au nord, & l'autre à vingt -quatre lieues
de Mexico. Une montagne fort haute & inacceffible aux voitures, 6c
même aux bêies de charge , qui eft placée dans la province de
Guadalajara, vers les Zacaùqucs, renferme quantité de mines d'argent
& de cuivre mêlées de plomb. La province de Xalifco, conquife en
1554., efl: une des plus riches de la nouvelle Efpagne, par Tes
mines d'argent, autour defquelles il s'efl: formé des habitations nom-
breufes, avec des fonderies, des moulins, &c .... Celle de Calnacana
contient aufll des mines d'argent. Les Zacaùques ou Zacuîecas, font
un grand nombre de petits cantons qui forment, fous ce nom commun,
la plus riche province de la nouvelle Efpagne ; on y compte douze
ou quinze mines d'argent , dont neuf ou dix font fort célèbres ,
fur-tout celle del Frefnillo qui paro/t inépuifable. La province de la
nouvelle Bifcaie, contient les mines à'Eude , de Saint- Jean & de
Sainte-Barbe, qui font d'une grande abondance, & voifmes de plu-
fieurs mines de plomb. Les montagnes qui féparent le Honduras de
la province de Nicaragua, ont fourni beaucoup d'or & d'argent aux
Efpagnols. La province de Colla Ricca, fournit aufll de l'or & de
l'argent. Hijioire générale des Voyages , tome XII, pages (j^S & fuiv^
(k) Idem, tome XIII , page 412,
(l) Voyages de M. de Gemies ; Paris ^ i^^S,page i^j.
Fij
4.4- Histoire Naturelle
particulier celle de Saint-Domingue f?nj , mais la culture
& le produit du fucre & des autres denrées de confoni-
mation que l'on tire de cette île font des tréfors bien
plus réels que ceux de fes mines.
Après avoir ci-devant expofé les principales propriétés
de l'argent, & avoir enfuite parcouru les différentes
contrées où ce métal fe trouve en plus grande quantité ,
il ne nous refte plus qu'à faire mention des principaux
faits, <& des obfèrvations particulières que les Phyficiens
& les Clîimifles ont recueillis en travaillant l'argent &
en le foumettant à un nombre infini d'épreuves ; je
commencerai par un fait que j'ai reconnu le premier. On
étoit dans Topinion que ni l'or ni l'argent mis au feu
& même tenu en fufion , ne perdoient rien de leur
fubilance ; cependant il efl certain que tous deux fe
réduifent en vapeurs & fe fubliment au feu du fbleil à un
degré de chaleur même affez foible. Je l'ai obfervé, lorf^
qu'en 1747 j'ai fait ufage du miroir que j'avois inventé
pour brûler à de grandes diftances |^;7y'; j'expofài à 40,
^o &. jufqu'à 60 pieds de diflance, des plaques &. des
affiettes d'argent, je les ai vues fumer long- temps avant
de fe fondre, & cette fumée étoit affez épaiffe pour faire
une ombre très-fenfible qui fè marquoit fur le terrein.
On s'eft depuis pleinement convaincu que cette fumée
■ — .^ — _ — ■ ■■
(m) Hifloire générale des Voyages , tome XII, page 218.
(nj Yoyei les Mémoires de l'Académie des Sciences , année 174?'
DES Minéraux. 4-
étoit vraiment une vapeur mcialiique , elle s'attachoit aux
corps qu'on lui prélëntoit & en argentoit la iurface , &
puifque cette fublimaiion fe fait à une chaleur médiocre
par le feu du foleil, il y a toute raifon de croire qu'elle
fe fait aufli & en bien plus grande quantité par la forte
chaleur du feu de nos fourneaux , lorique non-fèulement
on y fond ce métal , mais qu'on le tient en fufion
pendant un mois, comme l'a fait Kunckel : j'ai déjà dit
que je doutois beaucoup de Texadlitude de ïon expé-
rience , 6l je fuis perfuadé que Targent perd par le feu
une quantité fenfible de fa iubflance, & qu'il en perd
d'autant plus que le feu eil plus violent ôi appliqué plus
long-temps.
L'argent offre dans fès diffolutions différens phéno-
mènes dont il eft bon de faire ici mention ; lor/qu'il
efl diflbus par l'acide nitreux, on obfèrve que fi l'argent
efl à peu-près pur, la couleur de cette difîblution, qui
d'abord efl un peu verdâtre, devient enfuite très-blanche,
& que quand il efl mêlé d'une petite quantité de cuivre
elle efl conflamment verte.
Les diffolutions des métaux font en général plus
corrofives que l'acide même dans lequel ils ont été
difTous , mais celle de l'argent par l'acide nitreux ,
i'efl au plus haut degré , car elle produit des criflaux fi
caufliques, qu'on a donné à leur maffe réunie par la
fufion, le nom de Phrre infernale. Pour obtenir ces
triftaux, il faut que l'argent &. l'acide nitreux aient
4.6 Histoire Naturelle
été employés purs ; ces criftaux fe forment Jans h
diffolution par le feiil refroidifTement ; ils nont que
peu de coiififlaiice, & font blancs & aplatis en forme de
paillettes; ils fe fondent très-aifément au feu & long-
temps avant d'y rougir; & c'eft cette mafTe fondue &
de couleur noirâtre qui eft la pierre infernale.
Il y a plufieurs moyens de retirer l'argent de û
diffolution dans l'acide nitreux : la feule adlion du feu,
long-temps continuée, fuffit pour enlever cet acide; on
peut auffi précipiter le métal par les autres acides, vitrio-
lique ou marin, par les alkalis & par les métaux qui,
comme le cuivre, ont plus d'affinité que l'argent avec
facide nitreux.
L'argent, tant qu'il efl dans l'état de métal, n*a point
d'affinité avec l'acide marin; mais dès qu'il efl diffous,
il fe combine aifément, & même fortement avec cet
acide ; car la mine d'argent cornée paroît être formée
par l'adion de l'acide marin (o) ; cette mine fe fond
très-aifément, & même fe volatilife à un feu violent (p).
(o) ÉIcmens de Chimie, par M. de Morveau, tome I, page 1 1 ^>
(p) « On retire de la Lune-cornée, l'argent bien plus pur que celui
y> de la coupelle ; mais l'opération efl laborieufe , & préfente un
» phénomène intéreflant. L'argent qui , comme l'on Tait , eft une
>■> fubllance très-fixe, y acquiert une telle volatilité qu'il eft capable
» de s'élever comme le mercure , de percer les couvercles des
V* creufets , &c . . . . Il faut aulîl qu'il éprouve dans cet état , une
» Torte d'âtiraâioa de iranfmiflioa au travers des pores de^ vaiflTçavix
DES Minéraux. 47
L'acide viiriolique attaque l'argent en maiïe au moyen
de la chaleur ; il le difTout même complètement , & en
faifànt diftiller cette diffolution, l'acide pafTe dans le réci-
pient, & forme un fel qu'on peut appeler vitriol d'argent.
Les acides animaux &. végétaux, comme Tacide des
fourmis ou celui du vinaigre, n'attaquent point l'argent
dans fon état de métal , mais ils difToIvent très-bien fes
jnécipités (q) ,
Les alkalis n'ont aucune adionfur l'argent, ni même
fur fes précipités ; mais lorfqu'ils font imis aux principes
du foufre , comme dans le foie de fbufre , ils agiffent
puifTamment fur la fubflance de ce métal qu'ils noir-
ci/fent & rendent aigre & caffant.
Le foufre qui facilite la Rifion de l'argent, doit par
conféquent en altérer la flibftance ; cependant il ne
l'attaque pas comme celle du fer & du cuivre qu'il
transforme en pyrite ; l'argent fondu avec le fbufre peut
en être féparé dans un inftant, par l'addition du nitre
qui, après la détonation, lai/Te l'argent fans perte fèn-
fible ni diminution de poids. Le nitre réduit au con-
traire le fer & le cuivre en chaux, parce qu'il a une
a6lion dired:e fur ces métaux &. qu'il n'en a point fur
J 'argent.
les plus compares , puifque l'on trouve une quantité de grenailles «
d'argent difleminées jufque dans la tourte qui fupportoit le creufet ».
ÉUmens de Chimie , par M. de Morveau , tome /, page 220,
(q) Idem, tomt JJ, page 1 y, & tome JJJ, page 1 ^,
^.S Histoire Naturelle
La farface de l'argent ne fe convertit point en rouille
par i'impreflion des ciémens humides; mais elle efl fujette
à fe ternir, fe noircir &l fe colorer; on peut même lui
donner l'apparence & la couleur de l'or en l'expofànt
à certaines fumigations , dont on a eu raifon de profcrire
i'ufage pour éviter la fraude.
On emploie utilement l'argent battu en feuilles minces
pour en couvrir les autres métaux, tels que le cuivre
& le fer: il fuffit pour cela de bien nettoyer la furface
de ces métaux &l de les faire chauffer ; les feuiiles d'argent
qu'on y applique s'y attachent 6c y adhèrent fortement.
Mais comme les métaux ne s'uniffent qu'aux métatLx ,
& qu'ils n'adhèrent à aucune autre fubflance ; il faut, lorf-
qu'on veut argenter le bois ou toute autre matière qui
n'eft pas métallique , fe fèrvir d'une colle faite de gomme
ou d'huile, dont on enduit le bois par plufieurs couches
qu'on laiffe fécher avant d'appliquer la feuille d'argent
fur la dernière ; l'argent n'eft en effet que collé fur
l'enduit du bois , & ne lui eft uni que par cet intermède
dont on peut toujours le féparer fans le fecours de la
fiifion , & en faifant feulement brûler la colle à laquelle
il étoit attaché.
Quoique le mercure s'attache promptement & affez
fortement à la furface de l'argent, il n'en pénètre pas
la maffe à l'intérieur; il faut le triturer avec ce métal
pour en faire l'amalgame.
11 nous refte encore à dire un mot du fameux arbre
de
i>ES Minéraux. 49
cle Diane, dont les Charlatans ont fi fort abufé, en
faifant croire qu'ils avoient le fecret de donner à l'or
& à l'argeni la faculté de croître & de végéter comme
les plantes; néanmoins cet arbre métallique n'eft qu'un
aiïemblage ou accumulation des crifîaux produits par le
travail de l'acide nitreux fur l'amalgame du mercure &
de l'argent'; ces crifîaux fè groupent fucceffivement les
uns fur les autres, &. s'accumulant par fuperpofition , ils
repréfentem groffièremeut la figure extérieure d'une
végétation (^rj.
{"rj Pour former l'arbre de Diane, on fait difToudre enfemble ou
ft-parément , quatre gros d'argent & deux gros de mercure, dans
l'eau forte précipitée, on étend cette diiïoiution par cinq onces d'eau
diftillée , on verfe le mélange dans une petite cucurbite de verre ,
dans laquelle on a mis auparavant fix gros d'amalgame d'argent,
en confiftance de beurre , & on place le vaifieau dans un endroit
tranquille , à l'abri de toute commotion ; au bout de quelques heures ,
il s'élève de la mafle d'amalgame, un buifTon métallique avec de
belles ramifications. Elémens de Chimie, par M. de Ahrveau, tome III,
pngfs 4^4 & 4SJ'
Mhicraus t Tome IIL
50 Histoire Naturelle
DU CUIVRE.
UE la même manière & Jans ie même temps que
les roches primordiales de fer fe font réduites en rouille
par l'imprefîion des élémens humides , les mafles du
cuivre primitif fe font décompofées en vert - de - gris ,
qui efl la rouille de ce métal, & qui, comme celle du
fer , a été iranfportée par les eaux , <Sc difféminée fur la
terre ou accumulée en quelques endroits , où elle a formé
des mines qui fe font de même dépofées par alluvion ,
Si. ont enfuite produit les minerais cuivreux de féconde
&. de troifième formation ; mais le cuivre natif ou de
première origine a été formé comme l'or & l'argent
dans les fentes perpendiculaires des montagnes quart-
zeufes, 6l il fe trouve, foit en morceaux de métal malTif,
foit en veines ou fiions mélangés d'autres métaux. li a
été liquéfié ou fuhlimé par le feu, & il ne faut pas
confondre ce cuivre natif de première formation avec
le cuivre en flalaélites , en grapes ou filets, que nos
Chimifles ont également appelés aiirres natifs (a) , parce
qu'ils fe trouvent purs dans le fein de la terre ; ces der-
niers cuivres font au contraire de troifième & peut-être
de quatrième formation; la plupart proviennent d'ime
cémentation naturelle qui s'efl faite par l'intermède du
(a) Lettres de M. Demefte au dodeur Bernard, tome II, paoc
DES Minéraux, 51
fer auquel le cuivre dccompofc s'efl attaché après avoir
été clifTous par les fels de la terre. Ce cuivre rétabli
dans fou état de métal par la cémentation, auiîi-bien
que le cuivre primitif qui fubfifle encore en ma (Tes
métalliques , s'efl offert le premier à la recherche des
hommes : <& comme ce métal efl moins difficile à fondre
que le fer , il a été employé long-temps auparavant pour
fabriquer les armes & les inflrumens d'agriculture. Nos
premiers pères ont donc ufé , confommé les premiers
cuivres de l'ancienne nature; c'efl, ce me femble, par
cette raifon, que nous ne trouvons prefque plus de ce
cuivre primitif dans notre Europe non plus qu'en Ahe,
il a été confommé par i'ufage qu'en ont fait les habitans
de ces deux parties du monde très-anciennement peu-
plées & policées , au lieu qu'en Afrique, & fur-tout dans
le continent de l'Amérique, où les hommes font plus
nouveaux & n'ont jamais été bien civilifés , on trouve
encore aujourd'hui des blocs énormes de cuivre en
maffe qui n'a hefoin que d'une première fufion pour
donner un métal pur, tandis que tout le cuivre miné-
ralifé & qui fe préfente fous la forme de pyrites, demande
de grands travaux, plufieurs feux de grillage, & même
plufieurs fontes avant qu'on puiffe le réduire en bon
métal ; cependant ce cuivre minéralifé eft prefque
le feul que l'on trouve aujourd'hui en Europe ; le
cuivre primitif a été épuifé, & s'il en refle encore,
ce n'cfl que dans l'intérieur des montagnes oii nous
G i;
52 Histoire Naturelle
n'avons pu fouiller, tandis qu'en Amérique il fc préfente
à nu, non -feulement fur les montagnes, mais jufque
dans les plaines & les lacs , comme on le verra
dans l'énumération que nous ferons des mines de ce
métal , & de leur état aduel dans les différentes parties
du monde.
Le cuivre primitif étoit donc du métal prefque pur,
incrufté comme i'or & l'argent dans les fentes du quartz,
ou mêlé comme le fer primitif dans les mafles vi-
treufcs ; & ce métal a été dépofé par fufion ou par iubli-
mation dans les fentes perpendiculaires du Globe dès
le temps de fa confolidation ; l'aélion de ce premier feu
en a fondu & fliblimé la matière, &. l'a incorporée dans
les rochers vitreux; tous les autres états dans lefquels
fe préfènte le cuivre, font poftérieurs k ce premier état,
&. les minerais mêlés de pyrites , n'ont été produits ,
comme les pyrites elles-mêmes, que par l'intermède
des élémens humides : le cuivre primitif attaqué par l'eau,
par les acides, les fels, & même par les huiles des végé-
taux dccompofés , a change de forme; il a été altéré,
minéralifé, détérioré, & il a fu])i un û grand nombre
de transformations qu'à peine pourrons- nous le fuivre
dans toutes lès dégradations &. décompofitions.
La première & la plus fimple de toutes les décom-
pofitions du cuivre eft ià converfion en vert-de-gris
ou verdet ; l'humidité de l'air ou le plus léger acide,
fuilifem pour produire cette rouiik verte; ainfi dès les
D E s M I N É R A U X, 53
premiers temps , après ia chute des eaux , toutes les
furfaces des blocs du cuivre primitif ou des roches
vitreufès dans le/quelles il étoit incorporé & fondu,
auront plus ou moins fubi cette altération ; la rouille
verte aura coulé avec les eaux, & fe fera difTéminée
fur la terre ou dépofée dans les fentes &l cavités où nous
trouvons le cuivre fous cette forme de verdet. L'eau , en
s'infiltrant dans les mines de cuivre, en détache des
parties métalliques , elle les divife en particules fi ténues
que fbuvent elles font invifibles , & qu'on ne les peut
reconnoître qu'au mauvais goût &l aux effets encore
plus mauvais de ces eaux cuivreufès, qui toutes décou-
lent des endroits où giffent les mines de ce métal , &
communément elles font d'autant plus chargées de parties
métalliques qu'elles en font plus voifmes : ce cuivre
diïïbus par les fels de la terre &. des eaux , pénètre les
matières qu'il rencontre ; il fe réunit au fer par cémenta-
tion , il fe combine avec tous les fels acides &l alkalins ;
& fe mêlant auffi avec les autres fubflances métalliques ,
il fe préfente fous mille formes différentes , dont nous ne
pourrons indiquer que les variétés les plus confiantes.
Dans fes mines primordiales , le cuivre eft donc fous
fa forme propre de métal natif, conune l'or & l'argent
vierge; néanmoins il n'eft jamais auffi pur dans fon état
de nature qu'il le devient après avoir été rafHné par
notre art; dans cet état primitif il contient ordinairement
une petite quantité de ces deux premiers métaux ; ils
54- Histoire N atu re lle
paroifTcnt tous 'trois avoir été fondus enfèmble ou
fublimés prefque en même temps dans les fentes de la
roche du Globe ; mais de plus, le cuivre a été incor-
poré <& mêlé, comme le fer primitif, avec la matière
vitreufe : or, l'on fait que le cuivre exige plus de feu que
l'or & Targent pour entrer en fufion, & que le fer en exige
encore plus que le cuivre; ainfi ce métal tient entre les
trois autres le milieu dans Tordre de la lufion primitive,
puifqu'il fe préfente d'abord comme l'or & l'argent, fous
la forme de métal fondu, & encore comme le fer, /bus
la forme d'une pierre métallique. Ces pierres cuivreufès
font communément teintes ou tachées de vert ou de bleu,
la feule humidité de l'air ou de la terre donne aux par-
ticules cuivreufès cette couleur verdâtre , & la plus petite
quantité d'aikali volatil la change en bleu ; ainfi cqs
maffes cuivreufès qui font teintes ou tachées de vert ou
de bleu> ont déjà été attaquées par les élémens humides
ou par les vapeurs alkalines.
Les mines de cuivre tenant argent, font bien plus
communes que celles qui contiennent de l'or ; & comme
le cuivre efl plus léger que l'argent, on a obfervé que
dans les mines mêlées de ces deux métaux , la quantité
d'argent augmente à mefure que l'on defcend ; en forte
que le fond du filon donne plus d'argent que de cui\Te,
& quelquefois même ne donne que de f argent (b) ,
(h) Le cuivre le forme près de l'or & de l'argent, dans des pierres
mincrales de difFc'rentes couleurs , quoique toujours marqut'es de
DES Minéraux. 55
tandis que dans fa partie fupérieure ii n'avoit ofîert que
du cuivre.
En général , les mines primordiales de cuivre font
afTez fouvent voifmes de celles d'or & d'argent, & toutes
font fituées dans les montagnes vitreufes produites par
le feu primitif; mais les mines cuivreufès de féconde
formation & qui proviennent du détriment des premières,
giffent dans les' montagnes fchiiîeufes , formées comme
les autres montagnes à couches , par le mouvement &.
le dépôt des eaux. Ces mines fecondaires ne font pas
auffi riches que les premières : elles font toujours mé-
langées de pyrites & d'une grande quantité d'autres
matières hétérogènes (c ).
bleu & de vert. En fuivant les veines de cuivre pur , on rencontre
quelquefois de riches échantillons d'or très - fin ; jnais il ell plus
ordinaire de trouver de l'argent: quand on aperçoit quelqu'échan-
tilfon d'argent fur Ja luperficie des veines de cuivre, le fond a coutume
d'être riche en argent. ... La luperficie de la mine d'OJIologué au
pays de Lipes , étoit de cuivre pur; mais à mefure qu'on creufoit
elle fe transformoit en argent , julqu'à devenir argent pur, AJctal-
lurgie d' Alphovfe Barba , tome I , page i oy.
(c) Dans \qs montagnes à couches, le cuivre e/l ordinairement
dans un compofé d'ardoife gris , noir ou bleuâtre , dans lequel il y a
fouvent des pyrites cuivreufès, du vert-de-gris, ou du bleu de cuivre
parfenié très - finement Les ardoifes cuivreufès , qu'on trouve
communément dans les montagnes à couches, lont puiflantes depuis
quelques pouces jufqu'à un pied <Sc demi , & rarement j)Ius ; elles
font aufll très-pauvres en métal , ne donnent que deux ou trois livres
de cuivre par quintal ; mais ce cuivre efl: très-bon. Injlruâicn fur ks
îninesj par AI. Delius , tome I , pages Sy & S S,
56 Histoire Naturelle
Les mines Je troifième formation gifTent, comme
les feconJes, dans les montagnes à couches, &l fe trou-
vent non-feulement dans les fchifles , ardoifès & argiles ,
mais auiïi dans les matières calcaires ; elles proviennent
du détriment des mines de première & de féconde for-
mation, réduites en poudre ou diflbutes &l incorporées
avec de nouvelles matières. Les Minéralogiftes leur ont
donné autant de noms qu'elles leur ont préfenté de dif-
férences. La chryfocolle ou vert de montagne, qui n'efl
que du vert-de-gris très-atténué , la chryibcolle bleue
qui ne diffère de la verte' que par la couleur que les
alkalis volatils ont fait changer en bleu ; on l'appelle au/fi
ûliir , lorfqu'il efl bien intenfè , & il perd cette belle
couleur quand il efl expofé à l'air, & reprend peu à
peu fa couleur verte , à mefure que l'alkali volatil
s'en dégage ; il reparoît alors , comme dans fon pre-
mier état, fous la forme de chryfocolle verte, ou fous
celle de malachite : il forme auffi des criftaux verts &
bleus fuivant les circonflances , & l'on prétend même
qu'il en produit quelquefois d'auffi rouges & d'auffi tranf^
parens, que ceux de la mine d'argent rouge: nosChimifles
récens en donnent pour exemple, les criftaux rou^^es
qu'on a trouvés dans les cavités d'un morceau de métal
enfoui depuis plufieurs fiècles dans le fein de la terre;
ce morceau eft une partie de la jambe d'un cheval de
bronze, trouvée à Lyon en 1771; mon favant ami, M.
de Morveau, m'a écrit qu'en examinant au microfcope
les
D E s AI I N É R A U X. 57
les cavités de ce morceau, il y a vu non - feulement
des criftaux d'uu rouge de rubis, mais aufTi d'autres criflaux
d'un beau vert d'cmeraudc & tran/j^arens dont on n'a pas
parié , & il me demande qu'cfl-ce qui a pu produire
ces criftaux (dj f M. Demefte dit à ce Tujet, que l'azur
& le vert du cuivre, ainfi que la malachite & les criftaux
rouges qui fè trouvent dans ce bloc de métal , ancienne-
ment enfoui , font autant de produits des différentes
modifications que le cuivre, en état métallique, a fubies
dans le fein de la terre (e) ; mais cet habile Chimifte me
paroît fe tromper, en attribuant au cuivre feul f origine
de ces petits cr'ijhmx qui font , dit-il , trcs-cclatans, & d'une
vùiic rouge de cuivre tranfparente , comme la plus belle mine
d'argent rouge : car ce morceau de métal n'étoit pas de
cuivre pur, mais de bronze, comme il le dit lui-mcme,
(d) Lettres de M. de Morveau à M. de Buffon. Dijon , le 2 8
Août lySi.
(e) « Rien n'efl plus propre , dit-il , à démontrer le paflâge du
cuivre natif aux mines fecondaires , que la jambe d'un cheval «
antique de bronze, trouvée dans une fouille faite à Lyon en i 771 : «
cette jambe qui avoit été dorée , offroit non-leulement de la mala- ce
chite & de ra7ur de cuivre; mais on y remarquoit aufli plufieurs «
cavités dont l'intérieur étoit tapifle de petits criftaux très-éciatans , «c
de mine rouge de cuivre, tranfparente comine la plus belle mine te
d'argent rouge On peut donc avancer que l'azur & le vert «
de cuivre, ainfi que les criftaux rouges qui s'y rencontrent, font «
autant de produits des différentes modifications que le cuivre en «:
ctat métallique , a fubies dans le fein de la terre ». Lettres dt
M. Demejle , &c. tome II, pages j/7 à" ^j8.
ATinéraux, Tome IIL H
5? Histoire Naturelle
c'efl-à-dire de cuivre mclé d'étain, & dès-iors ces criflaux
row^ts peuvent être regardés comme des criflaux pro-
duits par l'arfenic, qui refle toujours en plus ou moins
grande quantité dans ce métal. Le cuivre feu! n'a jamais
produit que du vert qui devient bleu quand ii éprouve
i'adion de l'alicali volatil.
M. Demede dit encore « que l'azur de cuivre ou les
» fleurs de cuivre bleues, reffemblent aux criilaux d'azur
» artificiels ; que leur paflage à la couleur verte , lorfqu'elles
r> fc dccompofent , ell le même , &. qu'elles ne dilf èrent
qu'en ce que ces derniers l'ont folubles dans l'eau. »
Mais je dois obferver que néanmoins cette différence eft
telle qu'on ne peut plus admettre la même compofition ,
& quil ne refle ici qu'une reffemblance de couleur. Or,
le vitriol bleu pré/ènte ia même analogie , &. cependant
on ne doit pas le confondre avec le bleu d'azur. M.
Demede ajoute, avec toute raifon ce que l'alkali volatil
» efl plus commun qu'on ne croit à la furface & dans
^> l'intérieur de la terre qu'on trouve ces cri/laux
» d'azur dans les cavités des mines de cuivre déeompofées,
» à. que quelquefois ces petits crirtaux font très-éclatans
» & de l'azur le plus vif; que cet azur de cuivre prend
» le nom de à/eu de înonmgne lorfqu'il efl mélangé à des
» matières terreufes qui en affoiblilfent la couleur, & qu'enfin
» le bleu de montagne , comme l'azur, font également fuf^
ceptibles de fe décompofer en paffant lentement à l'état
^> de malachite .... que la malachite, le vert de cuivre ou
»j
DES Minéraux. ^9
fleurs de cuivre vertes, rcfulteiu fouvent de l'altération «
fpoîitanée de l'azur de cuivre, mais que ce vert efl aufTi «
produit par la dccompofition du cuivre natif (Si: des mines «
de cuivre , à la furface dc/queiles on le rencontre en "
malachites ou mafles plus ou moins confidcrables <Sl ma- «
melonnées, & que ce font de vraies (laiadites de cuivre, «
comme l'iiématite en eft une de fer (f); » tout ceci
efl; très-vrai, & c'efl même de cette manière que les
malachites font ordinairement produites ; la fimple dé-
compofition du cuivre en rouille verie, entraînée par
la filtration des eaux, forme des flalaélites vertes, &.
cette combinaifon efl bien plus fimple que celle de l'al-
tération de l'azur (Se de fa réduclion en fialadites vertes
ou malachites : il en efl: de même du vert de montagne ;
il efl produit plus communément par la hmple décom-
pofition du cuivre en rouille verte: ai l'habile Chimifle
que je viens de citer me paroît fe tromper encore en
prononçant exclufivement, « que le vert de montagne
efl toujours un produit de la décompofition du bleu de «
montagne ou de celle du vitriol de quwxg (g) . » H me
femble au contraire que~ c'efl le bleu de montagne qui
iui-méme efl produit par l'altération du vert qui fe
change en bleu; car la Nature a les mêmes moyens
que TArt, &i peut par conféquent faire, comme nous,
du vert avec du bleu, Ôa changer le bleu en vert fans
(f) Lçtires de M. Demefle , &c. tome II, pages ^ S j) & fuh,
(a) Id€in, tome II, page ^70,
H i/
6o Histoire Naturelle
qu*il foit néceffaire Je recourir au cuivre natif pour
produire ces effets.
Quoique le cuivre foit de tous les métaux celui qui
approche le plus de l'or & de l'argent par fès attributs
généraux, il en diiîère par pludeurs propriétés efTen-
tielles ; fa nature n'efi: pas aufîi parfaite , fà fubflance eft
moins pure, fa denlité &. fa duétilité moins grandes;
& ce qui démontre le plus l'imperfection de fon effencc,
c'cfl q-.i'il ne réfiffe pas à l'impreffion des élémens hu-
mides; l'air, l'eau, les huiles & les acides l'altèrent &
le convertifTent en verdet ; cette efpèce de rouille pé-
nètre, comme celle du fer, dans l'intérieur du métal, &
avec le temps en détruit la cohérence & la texture.
Le cuivre de première formation étant dans un état
métallique, & ayant été fublimé ou fondu par le feu
primitif, fe refond aifément à nos feux; mais le cuivre
minéralifé, qui efl de féconde formation, demande plus de
travail que toute autre minerai pour être réduit en métal;
il efl donc à préfumer que comme le cuivre a été
empto) é plus anciennement que le fer , ce n'efl que de
ce premier cuivre de nature dont les Égyptiens, les Grecs
& les Romains ont fait ufage pour leurs inff rumens &
leurs armes (7/;, & qu'ils n'ont pas tenté de fondre les
(h) Les Anciens fe fervoient beaucoup plus de cuivre que de
fer; Jes babitans du Pérou & du Mexique, empfoyoient le cuivre
à tous les ufages auxquels nous employons le fer. Métallurgu
d'Alphonfe Barba , tome I , page i q6.
DES Minéraux, 6i
minerais cuivreux qui demandent encore plus d'art ôl de
travail que les mines de fer; ils favoient donner au cuivre
un grand degré de dureté, ioit par la trempe, foit par Je
mélange de l'étain ou de quelqu'autre minéral , (5c ils
rendoient leurs inilrumens & leurs armes de cuivre
propres à tous les ufàges auxquels nous employons ceux
de fer. Ils allioient aufii le cuivre avec les autres mé-
taux, & fur-tout avec l'or ôl l'argent. Le fameux airain
de Corinthe, fi fort eflimé des Grecs fij, ctoit un mé-
lange de cuivre , d'argent & d'or , dont ils ne nous ont
pas indiqué les proportions, mais qui fai/bit un alliage
plus beau que l'or par la couleur , plus fonore , plus
élaflique, & en même temps aufTi peu fufceptibie de
rouille & d'altération : ce que nous appelons airain ou
bronze aujourd'hui , n'eft qu'un mélange de cuivre &
d'étain , auxquels on joint fouvent quelques parties de
zinc & d'antimoine.
Si on mêle le cuivre avec le zinc, fa couleur rouge
devient jaune , ôl l'on donne à cet alliage le nom de anrrâ
jaune ou laiton; il efl un peu plus denfe que le cuivre
pur (k) , mais c'eft lorfque ni l'un ni l'autre n'ont été
(ï) yEr'i corinthio pretium ante argentum , ac pcnc etiam ante auruirip
Plin. lib. XXXIV, ch. i.
(k) Selon M. Brilîbn , le pied cube de cuivre rouge fondu Se
non forge', ne pèfe que 545 livres 2, onces 4 gros 35 grains,
tandis qu'un pied cube de ce même cuivre rouge païïe à h filière ,.
pèfe 6i\ livres 7 onces 7 gros 26 grains. Cette grande diâerence
dz Histoire Natu relle
comprimés ou battus , car il devient moins denfe que
k cuivre rouge après la compre/Tion; le cuivre jaune
efl auffi moins fujet à verdir, & fuivant les différentes
dofes du mélange, cet alliage efl plus ou moins blanc,
jaunâtre , jaune ou rouge ; c eft d'après ces différentes
couleurs qu'il prend les noms àç. fimilor , àç, peïnchebcc
& de métal de Prince ; mais aucun ne reflemble plus à
l'or pur par le brillant &l la couleur que ie laiton bien
poli, & fait avec la mine de zinc ou pierre calaminaire,
comme nous l'indiquerons dans la fuite.
Le cuivre s'unit très-bien à l'or, &. cependant en
diminue la dcnfité au-delà de la proportion du mélange,
ce qui prouve qu'au lieu d'une pénétration intime , il
n'y a dans cet alliage qu'une cxtenfion ou augmentation
de volume par une fmiple addition de parties interpo/écs ,
iefquelles, en écartant un peu les molécules de l'or, & fe
logeant dans les intervalles , augmentent la dureté <ft
rélalliciié de ce métal qui, dans fon état de pureté, a
plus de molieffe que de r^ffort.
L'or, l'argent &. le cuivre fe trouvent fouvent alliés
demoiiire que de tous les métaux , fe cuivre eft celui qui fe com-
prime le plus; & la compreffioii par la filière, efl plus grande que
celle de la percufllon par le marteau. M. Geller dit que la denfité
de l'alliage, à parties égales de cuivre & de zinc, eft à celle du
cuivre pur comme 878 font à 874. Chimie mitallurgique , tome I,
page 26 y — Mais M. BrifTon a reconnu que ie pied cuhe 4e cuivre
jaune fundu & noa for^é, pèfç 5Ç7 livres.
DES Minéraux, 63
par la Nature dans les mines primordiales, & ce n*efl
que par plufieurs opérations réitérées & difpendieufès,
que l'on parvient à les fcparer ; il faut donc, avant d'en-
ueprendre ce travail, s'afTurer que la quantité de ces
deux métaux, contenue dans le cuivre, efl aiïez confi-
dérable, <Sl plus qu'équivalente aux frais de leur féparation,
il ne faut pas même s'en rapporter à des effais faits en
petit, ils donnent toujours un produit plus fort, & fe
font proportionnellement à moindres frais que les travaux
en grand.
On trouve rarement le cuivre aîlié avec l'étain dan&
le féin de la terre, quoique leurs mines foient fouvent
très-voifmes , & même fuperpofées, c'eft-à-dire, l'étain
au-defilis du cuivre ; cependant ces deux métaux ne
laiffent pas d'avoir entr'eux une affinité bien marquée;
le petit art de i'étamage efl fondé fur cette affinité ;
l'étain adhère fortement & fans intermède au cuivre,
pourvu que la fiirface en foit affez nette pour être touchée
dans tous les points par l'étain fondu; il ne faut pour
cela que le petit degré de chaleur néceffaire pour
dilater les pores du cuivre & fondre l'étain, qui dès-
lors s'attache à la furface du cuivre qu'on enduit de
réfme pour prévenir la calcination de l'étain.
Lorfqu'on fond le cuivre & qu'on y mêle de l'étain,
l'alliage qui en réfùite, démontre encore mieux l'affinité
de ces deux métaux , car il y a pénétration dans leur
mélange; la denfité de cet alliage, connu fous les noms
64 Histoire Nature lle
à' airain ou de ùroni<;, efl plus grande que celle du cuivre
& de i'ctain pris enfemble, au lieu que la denfité des
alliages du cuivre avec l'or & l'argent efl moindre , ce
qui prouve une union bien plus intime entre le cuivre
& l'étain qu'avec ces deux autres métaux , puifque le
volume augmente dans ces derniers mélanges , undis
qu'il diminue dans le premier; au refle, l'airain eft d'autant
plus dur, plus aigre & plus fonore que Ja quantité d'étain
efl plus grande, &. il ne faut qu'une partie d'ctain fur trois
de cuivre pour en faire di/paroître la couleur, & même
pour le défendre à jamais de /à rouille ou vert-de-gris ,
parce que l'étain efl, après Tor & l'argent, le métal
ie moins fufceptible d'altération par les éiémens humides;
& quand par la fucce/fion d'un temps très -long, W fe
forme fur Tairain ou bronze, une efpèce de rouille ver-
dâtre, c'eft, à la vérité, du vert-de-gris, mais qui s'étani
formé très-lentement, & fe trouvant mêle d'une portion
d'étain, produit cet enduit que Ton appelle paiine^ fur
les flatues <Sc les médailles antiques fij.
Le cuivre & ie fer ont enièmble une afHnité bien
marquée, & cette affinité efl i\ grande 6l fi générale qu'elle
fe montre non - feulement dans les produélions de la
Nature, mais aufîi par les produits de l'art. Dans le
nombre infini de mines de fer qui fe trouvent à la furface
— ■ ■ -
(l) Cet enduit o\i patine ^e^ ordinairement verdatre, «Se quelquefois
bieuâtre, & il acquiert avec le temps une fi grande dureté qu'il
rcfjfte au burin. Lettres de M. Demcfe , tome II, page ^7^.
OU
DES Minéraux, 65
ou dans l'intérieur de la terre, il y en a beaucoup qui
font mêlées d'une certaine quantité de cuivre, & ce
mélange a corrompu l'un & l'autre métal ; car d'une
part on ne peut tirer que de très-mauvais fer de ces
mines chargées de cuivre, ôl d'autre part il faut que la
quantité de ce métal foit grande dans ces mines de fer,
pour pouvoir en extraire le cuivre avec profit. Ces
métaux qui femblent être 'amis , voifms, & même unis
dans le fein de la terre , deviennent ennemis dès qu'on
les mêle enfemble par le moyen du feu; une feule once
de cuivre jetée dans le foyer d'une forge, fuffit pour
corrompre un quintal de fer.
Le cuivre que l'on tire des eaux qui en font chargées,
& qu'on connoît fous le nom de cuivre de cémentation ,
efl du cuivre précipité par le fer ; autant il fe difTout
de fer dans cette opération, aiuant il adhère de cuivre
au fer qui n'ell pas encore diffous , & cela par fmiple
attraction de contact: c'eft en plongeant des lames de
fer dans les eaux chargées de parties cuivreufès , qu'on
obtient ce cuivre de cémentation, & l'on recueille par
c^ moyen facile une grande quantité de ce métal en
peu de temps (m). La Nature fait quelquefois une
(m) A Saint-Bel , l'eau qui iraverfe \ti mines de cuivre fe fature
en quelque forte de vitriol de cuivre naturel , il luffit de jeter dans
Jes baflîns , où on reçoit cette eau, une quantité de vieilles ferrailles;
on y trouve peu de jours après, un cuivre rouge pur; c'eft ce
qu'on appelle cuivre de cémentation, Elémens de Chimie , par AI. ds
/^orveaii , tome II , page ^ i .
MiticrauXj Tome IIL I
dd Histoire Naturelle
opération afTez fcmblable ; il faut pour cela que le cuivre
diflbus rencontre des particules ou des petites mafles
ferrugineufes, qui foient dans l'état métallique ou pre/que
métallique, &. qui par confcquent aient fubi la violente
adion du feu ; car cette union n'a pas lieu lorfque
les mines de fer ont été produites par l'intermède de
Teau, & converties en rouille, en grains, &c, ce n'eft
donc que dans de certaines circonflances qu'il fe forme
du cuivre par cémentation dans l'intérieur de la terre;
par exemple, il s'opère quelque cliofè de femblable dans
la production de certaines malachites , &. dans quelques
autres mines de féconde & de troifième formation, où
Je vitriol cuivreux a été précipité par le fer , qui a plus
que toute autre métal , la propriété de féparer &. de pré-
cipiter le cuivre de toutes fes diffolutions.
L'affinité du cuivre avec le fer , efl encore démontrée
par la facilité que ces deux métaux ont de fe fbuder
enfemble ; il faut feidement en les tenant au feu , les
empêdier de fe calciner & de brûler, ce que l'on
prévient en les couvrant de borax ou de quelques autres
matières fufibles , qui les défende de l'action du Àe\x
animé par l'air : car ces deux métaux fouffrent toujours
beaucoup de déchet &. d'altération par le feu libre ,
lorfqu'ils ne font pas parfaitement recouverts &. défendus
du contaél de l'air.
Il n'y a point d'affinité apparente entre le mercure
& le cuivre ; puifqu'il faut réduire le cuivre en poudre
D E s M I N É R A U X. dy
& les triturer enfembie fortement & long-temps, pour
que le mercure s'attache à cette poudre cuivreufe ; ce-
pendant il y a moyen de les unir d'une manière plus
apparente & plus intime ; il iaut pour cela plonger du
cuivre en lames dans le mercure difFout par l'acide
nitreux ; ces lames de cuivre attirent le mercure difTout,
& deviennent au/Ti blanches, à leur furface , que les
autres métaux amalgamés de mercure.
Quoique le cuivre puifTe s'allier avec toutes les ma-
tières métalliques, & quoiqu'on le mêle en petite quantité
dans les monnoies d'or & d'argent pour leur donner de
la couleur ik. de la dureté, on ne fait néanmoins des
ouvrages en grand volume qu'avec deux de ces alliages ;
le premier avec l'étain pour les ftatues , les cloches ,
les canons ; le fécond avec la calamine ou mine de
zinc pour les chaudières & autres uftenfiles de ménage:
ces deux alliages , l'airain & le laiton , font même devenus
auffi communs & peut-être plus néceflaires que le cuivre
pur , puifque dans tous deux la qualité nuifible de c« métal,
dont l'ulage eft très -dangereux, fè trouve corrigée; car
de tous les métaux que l'homme peut employer pour
fbn fervice, le cuivre efl celui qui produit les plus
foneflcs effets.
L'alliage du cuivre & du zinc n'efl pas aigre & caffant
comme celui du cuivre 6l de l'étain ; le laiton conferve
de la dudilité , il réfifte plus long-temps que le cuivre
pur, à l'aétion de l'air humide & des acides qui produifent
68 Histoire Naturelle
le vert -de -gris, & il prend l'étamage aufTi facilement.
Pour faire du beau & bon laiton, il faut trois quarts
de cuivre & un quart de zinc, mais tous deux doivent
être de la plus grande pureté. L'alliage à cette dofe eft
d'un jaune brillant, & quoiqu'en général tous les alliages
foient plus ou moins aigres , & qu'en particulier le zinc
n*ait auctme ductilité, le laiton néanmoins, s'il efl faic
dans cette proportion, efl aufTi dudile que le cuivre
même; mais comme le zinc tiré de fa mine par la fufion,
n'efl prefque jamais pur, & que pour peu qu'il foit mêlé
de fer ou d'autres parties hétérogènes, il rend le laiton
aigre & cafTant ; on fe fert plus ordinairement & plus
avantageufement de la calamine qui efl une des mines du
zinc ; on la réduit en poudre , on en fait un cément en
la mêlant avec égale quantité de poudre de charbon
humeétée d'un peu d'eau ; on recouvre de ce cémenî
les lames de cuivre , & l'on met le tout dans une caiffe
ou creufèt que l'on fait rougir à un feu gradué, jufqu'à
ce que les lames de cuivre foient fondues. On laifTe
cnfuite refroidir le tout & l'on trouve le cuivre change
en laiton & augmenté d'un quart de fon poids fi l'on
a employé un quart de calamine fiir trois quarts de
cuivre, & ce laiton fait par cémentation a tout autant
de dudilité à froid que le cuivre même : mais comme
le dit très - bien M. Alacquer fnj, \\ n'a pas la même
(n) Dii^iowwire dç Chimiç, à l'anicle du Cuivre Jaune,
D E s Af I N É R A U X. 6^
malléabilité à chaud qu'à froid, parce que le zinc fe
fondant plus vîte que le cuivre , Talliagc alors n'efl plus
qu'une e/pèce d'amalgame qui efl trop mou pour fouiîfrir la
percu/fion du marteau. Au refte, il paroît par le procédé
&. par le produit de cette forte de cémentation , que le
zinc contenu dans la calamine eft réduit en vapeurs par le
feu , & qu'il efl par conféquent dans fà plus grande pureté
lor/qu'il entre dans le cuivre ; on peut en donner la preuve
en faifànt fondre à feu ouvert le laiton , car alors tout le
zinc s'exhale luccefTivement en vapeurs ou en tiammes , 8l
emporte même avec lui une petite quantité de cuivre.
Si l'on fond le cuivre en le mêlant avec l'ar/ènic,
on en fait une efpèce de métal blanc qui diffère du
cuivre jaime ou laiton , autant par la qualité que par la
couleur, car il eft aufli aigre que l'autre eft duétile; &.
fi l'on mcle à différentes dofes le cuivre, le zinc &
J'arfenic, l'on obtient des alliages de toutes \cs teintes
du jaune au blanc & de tous les degrés de duélilité
du liant au caffant.
Le cuivre en fufion forme , avec le fbufre , une efpèce
de matte noirâtre, aigre & caffante, affez femblabie à
celle qu'on obtient par la première fonte des mines
pyriteufës de ce métal : en le pulvcrifànt & le détrem-
pant avec un peu d'eau, on obtient de même par fon
mélange avec le foufre auffi pulvérifé , une maffe folide
affez femblabie à la matte fondue.
Un fil de cuivre d'un dixième de pouce de diamètre^
70 Histoire Naturelle
peut foutenir un poids d'environ trois cents livres avant
de (c rompre; & comme fà denfité n'efl tout au plus
que de fix cents vingt-une livre & demie par pied cube,
on voit que fa ténacité efl proportionnellement beaucoup
plus grande que fa denfité. La couleur du cuivre pur efl
d'un rouge-orangé , & cette couleur quoique fauffe , eft
plus éclatante que le beau jaune de l'or pur. Il a plus
d'odeur qu'aucun autre métal, on ne peut lefentir fans que
l'odorat en foit défagréablement affeété , on ne peut le
toucher fans s'infeder les doigts , &. cette mauvaifè odeur
qu il répand & communique en le maniant & le frottant,
efl; plus permanente & plus difficile à corriger que la
plupart des autres odeurs. Sa faveur plus que répugnante
au goût, annonce fes qualités funefles ; c'efl dans le
règne minéral le poifbn de nature le plus dangereux
après Tarfenic.
Le cuivre efl; beaucoup plus dur & par conféquent
beaucoup plus élaflique &. plus fonore que l'or, duquel
néanmoins il approche plus que les autres métaux im-
parfaits, par fa couleur (& même par fa dudilité, car il
efl: prefque auffi dudile que l'argent : on le bat en
feuilles auffi minces & on le tire en filets très-déliés.
Après le fer, le cuivre efl; le métal le plus difficile
à fondre ; expofé au grand feu il devient d'abord cha-
toyant & rougit long-temps avant d'entrer en fiifion ; il
faut ime chaleur violente &l le faire rougir à blanc pour
qu'il fe liquéfie, à. lorfqu'il eft bien fondu il bout 6c
DES Minéraux, j\
diminue de poids s'il efl expofc à l'air, car /à furlace
fe bride & fe calcine dès qu'elle n'eft pas recouverte , &
qu'on néglige de faire à ce métal un bain de matières
vitreufes , & même avec cette précaution il diminue de
maffe & fouffre du déchet à chaque fois qu'on le fait
rougir au feu : la fumée qu'il répand efl en partie métal-
lique , & rend verdâtre ou bleue la flamme des charbons ,
& toutes les mat/ères qui contiennent du cuivre donnent
à la flamme ces mêmes couleurs vertes ou bleues : néan-
moins fa fubflance efl affez fixe , car il réfifle plus long-
temps que le fer, le plomb & l'étain à la violence du
feu avant de fe calciner ; lorfqu'il efl expofé à l'air libre
(Se qu'il n'efl pas recouvert, il fe forme d'abord à fà
furface de petites écailles qui furnagent la maffe en
fulion ; ce cuivre à demi -brûlé, a déjà perdu fa duc-
tilité & fbn brillant métallique, & fe calcinant cnfuite
de plus en plus il fe change en une chaux noirâtre qui ,
comme les chaux du plomb &. des autres métaux ,
augmente très-confidérablement en volume &. en poids
par la quantité de i'air qui fe fixe en fe réuniffant à
leur fubflance. Cette chaux efl bien plus difficile à fondre
que le cuivre en métal , & lor/qu'elie fubit l'adion d'un
feu violent , elle fe vitrifie & produit un émail d'un
brun chatoyant qui donne au verre blanc une très-belle
couleur verte; mais fi l'on veut fondre cette chaux de
cuivre feule en la pouffant à un feu encore plus violent,
elle fe brûle en partie & laiffe un réfidu qui n'efl qu'une
72 Histoire Naturelle
erpèce de fcorie vitrcufe &l noirâtre, dont on ne peut
enfùite retirer qu'une très-petite quantité de métal.
En laiffant reiroidir très - lentement & dans un feu
o-radué le cuivre fondu , on peut le faire criflallifer en
crillaux proéminens à fa furface & qui pénètrent dans
fou intérieur; il en efl: de même de l'or, de l'argent &.
de tous les autres métaux & minéraux métalliques ; ainfi
la criftallifation peut s'opérer également par le moyen
du feu comme par celui de l'eau ; &. dans toute ma-
tière liquide ou liquéfiée il ne faut que de i'e/pace , du
repos & du temps pour qu'il fe forme des cridallifations
par l'attradion mutuelle des parties homogènes <Sc
fnnilaires.
Quoique tous les acides puiffent diffoudre le cuivre,
il faut néanmoins que l'acide marin & fur-tout l'acide
vitriolique foient aidés de la chaleur, fans quoi la dif-
folution feroit excefTivement longue, l'acide nitreux le
diffout au contraire très-promptement, même à froid ;
cet acide a plus d'affinité avec le cuivre qu'avec l'argent,
car l'on dégage parfaitement l'argent de fa diffolution,
& on le précipite en entier & fous fa forme métallique
par l'intermède du cuivre. Comme cette diffolution du
cuivre par l'eau-forte, fe fait avec grand mouvement &
forte elîèrvefcence , elle ne produit point de crifîaux,
mais feulement im fel déliquefcent , au lieu que les dif^
folutions du cuivre par l'acide vitriolique ou par l'acide
marin fè faifant lentement & fans cbullition, donnent de
gros
TiES Minéraux. 73
gros criflaux d'un beau bleu qu'on appelle viir'iol de
Chypre ou vïinol bleu j ou des criflaux en petites aiguilles
d'un beau vert.
Tous les acides végétaux attaquent auffi le cuivre;
c'efl avec l'acide du marc des raifnis qu'on fait le vert-
de-gris dont fe fervent les peintres ; le cuivre avec l'acide
du vinaigrq, donne des criflaux que les Chimifles ont
nommés cr'iflaux de Vénus. Les huiles, le fuif (Si. les graiffes
attaquent auffi ce métal , car elles produifent du vert-de-
gris à la furface des vaifleaux & des uflenfdes avec lefquels
on les coule ou les verfe. En général , on peut dire que
le cuivre efl; de tous les métaux celui qui fe laifTe en-
tamer , ronger, dilfoudre le plus facilement par un grand
nombre de fubflances ; car indépendamment des acides ,
des acerbes , des fels , des bitumes , des huiles & des
graiffes, le foie de foutre l'attaque & i'alkali volatil
peut même le diffoudre ; c'eft à cette difTolution du
cuivre par I'alkali volatd qu'on doit attribuer l'origine
des malachites de féconde formation. Les premières
malachites, c'cfl-à-dire , celles de première formation,
ne font, comme nous l'avons dit, que des flala6lites du
cuivre diffous en rouille verte ; mais les fécondes peuvent
provenir des diffolutions du cuivre par I'alkali volatil,
lorfqu'elles ont perdu leur couleur bleue <Sl repris la
couleur verte, ce qui arrive dès que I'alkali volatil s'eil
diffipé. « Lorfque I'alkali volatil , dit M. Macquer,
a diffous le cuivre jufqu'à faturation, ref}3èce de fel <<
Mmcraux, Tome IIL K
74- Histoire Naturelle
métallique qui rtfulte Je cette combinaifon , forme des
criftaux d'un bleu-1'oncé & des plus beaux ; mais par
l'expofitioii à l'air, l'alkali fe fepare &l fe difTipe peu-à-
peu ; la couleur bleue des crifîaux , dans icfquels il ne
refle prefque que du cuivre, fe change en un très-beau
vert, & le compofc relTemble beaucoup à la malachite;
il efl très - po/î'ibie que le cuivre contenu dans cette
pierre ait précédemment été difTous par l'alkali \olatil,
& réduit par cette matière faline dans l'état de mala-
chite ( o ) . ^^
Au rcfle, les huiles, les graifTes & les bitumes n'at-
taquent le cuivre que par les acides qu'ils contiennent;
«Si. de tous les alkalis, l'alkali volatil eft celui qui agit le
plus puiffamment fur ce métal; ainh l'on peut afîurer
qu'en général tous les fèls de la terre & des eaux, foit
acides, foit alkalins, attaquent le cuivre & le diffolvent
avec plus ou moins de promptitude ou d'énergie.
Il eft aifé de retirer le cuivre de tous les acides qui
le tiennent en diffolution , en les faifant fimplement éva-
porer au feu ; on peut auffi le féparer de ces acides
en employant les alkalis fixes ou volatils, & même les
fubflances calcaires ; les précipités feront des poudres
vertes, mais elles feront bleues fi les alkalis font cauftiques
comme ils le font en effet dans les matières calcaires
lorfqu'elles ont été calcinées. Il ne faudra qu'ajouter à
(o) Didionnaire de Chimie , article Cuhre.
DES Minéraux, y^
ce précipité ou chaux de cuivre , comme à toute autre
chaux métallique, une petite quantité de matière inflam-
mable pour la réduire en métal : & fi l'on fait fondre
cette chaux de cuivre avec du verre blanc, on obtient
des émaux d'un très-beau vert; mais on doit obferver
qu'en général les précipités qui fe font par les alkalis
ou par les matières calcaires, ne fe préfentent pas /bus
leur forme métallique , & qu'il n'y a que les précipités
par un autre métal, où les réfidus après l'évaporation des
acides foient en effet fous cette forme, c'eft-à-dire,
en état de métal, tandis que les autres précipités font
tous dans l'état de chaux.
On connoît la violente adion du foufre fur le fer,
& quoique fa puiffance ne fbit pas auffi grande fur le
cuivre , il ne laiffe pas de l'exercer avec beaucoup de
force fpj; on peut donc féparer ce métal de tous les
autres métaux , par l'intermède du foufre qui a plus
d'affinité avec le cuivre qu'avec l'or, l'argent, l'étaiii
& le plomb, & lorfqu'il eft mêlé avec le fer, le foufre
peut encore les féparer, parce qu'ayant plus d'affinité
avec le fer qu'avec le cuivre, il s'empare du premier
& abandonne le dernier. Le foufre agit ici comme
ennemi; car en accélérant la fufion de ces deux métaux,
(p) Les lames de cuivre Ilratitiees avec le loufie , forment une
efpèce de marte aigre , cafTante , de couleur de fer ... . Cette ope'-
ration réuflit également par la voie humide, en employant le cuivre
en limaille, & en détrempant le mélange avec un peu d'eau. ElémcnS
de Chimie , par Ai, de Morve au , tome II , page j j».
Kij
76 Histoire Naturelle
il ies dénature en même temps , ou plutôt il les ramène
par force à leur état de minéralifation, & cl -ange ces
met. ux e^i mnérais ; car le cuivre & le fer fondus
avec le foufre, ne font plus que des pyrites fcmblables
aux minerais pyriteux , dont on tire ces métaux dans
leurs m'-nes de féconde formation.
Les filons où le cuivre fè trouve dans l'état de
métal, font les feules mines de première formation.
Dans les mines fecondaires, le cuivre fe préfente fous
la forme de minerai pyriteux, & dans celles de troi^
ficme formation, il a palfé de cet état minéral ou pyriteux,
à l'état de rouille verte, dans lequel il a fubi de nouvelles
altérations , & mille comi^inaifons diverfes par le conta6l
& Taélion des autres fubflances falines ou métalliques.
Il n'y a que les mines de cuivre primitif, que Ton puiffe
fondre fans les avoir fait- griller auparavant ; toutes celles
de féconde formation , c'eff -à-dire, toutes celles qui font
dans un état pyriteux demandent à être grillées plufieurs
fois; & fouvent encore. après plufieurs feux de grillage,
elles ne donnent qu'une matte cuivreufe mêlée de foufre,
qu'il faut refondre de nouveau, pour avoir enfin du cuivre
noir dont on ne peut tirer le cuivre rouge en bon métal,
qu'en faifant paffer & fondre ce cuivre noir au feu violent
& libre des charbons enflammés , où il achève de fe fépa-
rer du foufre, du fer & des autres matières hétérogènes
qu il contenoit encore dans cet état de cuivre noir.
Ces mines de cuivre de féconde formation peuvent
DES Minéraux. yy
fe réduire à deux ou trois fortes; la première eft la pyrite
cuivreule , qu'on appelle aufTi improprement marcajfite ,
qui contient une grande quantité de foufre & de fer,
& dont il efl très - difficile de tirer le peu de cuivre
qu'elle renferme (q) ; la féconde efl la mine jaune de
cuivre, qui efl aulfi une pyrite cuivreufe, mais moins
chargée de foufre & de fer que la première; la troifième
eft la mine de cuivre grife, qui contient de l'arfenic avec
du foufre , &. fotivent un peu d'argent : cette mine grifè
paroît blanchâtre , claire & brillante lorfque la quantité
d'argent efl un peu confidérable , & fi elle ne contient
point du tout d'argent, ce n'cft qu'une pyrite plutôt
arfenicale que cuivreufe (r) .
(q) La inarcafîjte ou pyrite cuivreufe, efl: très-pauvre en métal de
cuivre; mais elie contient beaucoup de fer, de foufre, &. quelquefois
même un peu d'arfenic. . . . elie eft fi dure qu'elle donne des étincelles
avec le briquet. Lettres de M. Demejle , tome II, page ^6 y.
(r) Ces différentes mines de cuivre grifes , éprouvent dans le fein
de la terre , divers degrés d'altération , à proportion que leurs miné-
ralifateurs fe volatilifent , elles paflent alors par divers états fuccefllfs
de dfccompofition , auxquels on a donné les noms de m'im^s de cuivre
vitreufe hépat'ique , violette ou apurée , de mine de cuivre vitreufe couleur
de poix, d'azur & de vert de cuivre, de malachite, ôc enfin de bleu Ù"
de vert de montagne. . . . Les couleurs rougeâtre, pourpre, violette,
azurée , le chatoyement de l'efpèce de glacé qu'on obferve à la fur-
face de la mine de cuivre hépatique, violette ou azurée, font dues
à la di^îxpation plus ou moins confidérable des fubflances arfénicales
& fulfureufes. ... Si la décompofuion efl plus avancée, les couleurs
vives font remplacées par une teinte d'un brun - rougeâtre foncé.
Lettres de AL Demejle, tome 11^ pages ^^4 àr j^j»
78 Histoire N atv relle
Pour donner une idée nette des travaux qu'exigent
ces minerais de cuivre avant qu'on ne puifle les réduire
en bon métal, nous ne pouvons mieux faire que de
rapporter ici par extrait les obfervations de feu M. Jars,
qui s'ell: donné la peine de fuivre toutes les manipulationé
& préparations de ces mines , depuis leur extraélion
jufqu'à leur converfion en métal rafiné. « Les minéraux
» de Saint-Bel & de Cheflcy dans le Lyonnois , font,
j> dit-il, des pyrites cuivreufes, auxquelles on donne deux,
trois ou quatre grillages avant de les fondre dans un
fourneau à manclie , où elles produifènt des mattes qui
doivent être grillées neuf à dix fois avant que de donner
par la fonte leur cuivre noir : ces mattes font des maffes
régulines, contenant du cuivre, du fer, du zinc, une
très-petite quantité d'argent & des parties terreufès , le
5> tout réuni par une grande abondance de foufre.
» Le grand nombre de grillages que l'on donne à ces
» mattes avant d'obtenir le cuivre noir, a pour but de faire
» brûler & volatilifer le foufre , & de défunir les parties
» terreftres d'avec les métalliques ; on fait enfuite fondre
» cette matte en la Gratifiant à travers les cbarbons, & les
» particules de cuivre fe réunifTent entr'elles par la fonte,
& vont par leur pefanteur fpécifique occuper la partie
inférieure du baffm delliné à les recevoir.
Mais lorfqu'on ne donne que très-peu de grillage à
>> ces mattes , il arrive que les métaux qui ont moins
?> d'affinité avec le foufre, qu'il n'en a lui-même avec les
j>
»
>i
•>•>
»
»
5>
»
DES Minéraux. 79
autres qui compofent la mafTe rcguline, ie précipitent
ies premiers ; on peut donc conclure que Targent doit
fe précipiter le premier, enfuitc le cuivre, & que le
foufre refle uni au fer. Mais l'argent de ces mattes
paroît être en trop petite quantité pour fe précipiter fèul ;
d'ailleurs il eft impofTible de failir dans les travaux en
grand, le point précis du rôtiflage qui fcroit nccelTaire
pour rendre la féparation exacfte & il ne ih fait
aucune précipitation, fur -tout par la voie sèche, fans
que le corps précipité n'entraîne avec lui du précipitant
& de ceux auxquels il étoit uni (^/J . »
Ces mines de Saint-Bel & de ChelTey, ne contiennent
guère qu'une once d'argent par quintal de cuivre ,
quantité trop petite pour qu'on puiiïe en faire la fépa-
ration avec quelque profit. Leur minerai efl: une pyrite
cuivreufe mêlée néanmoins de beaucoup de fer. Le mi-
nerai de celles de Chelley contient moins de fer &
beaucoup de zinc, cependant on les traite toutes deux
à peu-près de la même manière. On donne à ces pyrites ,
comme le dit M. Jars , deux,, trois & ju/qu'à quatre feux
de grillage avant de les fondre. Les mattes qui pro-
viemient de la première fonte , doivent encore être
grillées neuf ou dix fois avant de donner, par la fufion,
ieur cuivre noir : en général , le traitement des mines de
ffj Mémoires de l'Académie des Sciences, année J /y o, pciges
So- Histoire Naturelle
cuivre cft d'autant plus difficile & plus long, qu'elles
contiennent moins de cuivre & plus de pyrites , c'eft-
à-dire, de foufre & de fer, & les procédés de ce trai-.
renient doivent varier fuivant la qualité ou la quantité des
dilïcrens métaux &. minéraux contenus dans ces mines.
Nous en donnerons quelques exemples dans lYnumé-
ration que nous allons faire des principales mines de
cuivre de l'Europe & des autres parties du Monde.
En France, celles de Saint-Bel & de Cheiïey, dont
nous venons de parler , font en pleine &. grande exploi-
tation, cependant on n'en tire pas la vingtième partie
du cuivre qui fe confomme dans le royaume. On exploite
auiïi quelques mines de cuivre dans nos provinces voi-
fmes des Pyrénées & particulièrement à Baygory dans la
baffe Navarre (t) . Les travaux de ces mines font dirigés
par un habile Minéralogifle, M. Hettlinger, que j'ai déjà
eu occafion de citer, & qui a bien voulu m'envoyer
pour
(t) Dans la bafTe Navarre, à Baygori , on découvrit en 174^,
cinq cents trente - trois ])ieds de fiions , fuivis par trois galeries <3c
par trois puits; ces filons avoient un, deux & trois pieds de largeur.
Le minerai , tant pur que celui qu'il faut piler &' laver , y ell enve-
loppé dans une gangue blanche, du genre des quartz vitrifiabies;
& il efl. à remarquer que la plupart des mines de cuivre de cette
contrée, font mêlées de fer dans leur minerai, & que celle de
Baygori , eft la feule qui n'en contienne pas.
Ce minéral de Baygori , efl jaune quand on le tire d'un endroit
fec du filon , <Sc pour peu qu'il y ait d'humidité , il prend toutes
fortes de belles couleurs. . . . Mais ces couleurs s'effacent en moins
de
DES Minéraux. 8i
pour le Cabinet du Roi, quelques échantillons des
minéraux qui s'y trouvent, & entr'autres de la mine
de fer en écailles qui eft très - fingulière , & qui fe
forme dans les cavités d'im filon mêlé de cuivre & de
fer (u),
11 y a aufîl de riches mines de cuivre & d'argent à
Gîromagny ÔL au Puy dans la haute Aliace ; on en a tiré
en une année fèize cents marcs d'argent & vingt-quatre
milliers de cuivre : on trouve auiïi d'autres mines de
cuivre à Stehnbach , à Saint - Nicolas dans le Val de
Lehenhal , & à AJlenbach (x) .
En Lorraine, la mine de la Croix donne du cuivre,
du plomb & de l'argent ; il y a aulTi une mine de cuivre
à Fraife , &. d'autres aux villages de Sainte-Croix & de
Z/Z/J^ qui tiennent de l'argent; d'autres à la montagne
de deux ans à l'air, & dirparoiflent même pour peu qu'on chauffe
le minerai. . . .
En 1752, on de'couvrit dans la même montagne, un filon de
minéral gris, prefque maffif, contenant cuivre & argent; on en a
vu un morceau qui pefoit vingt-fej;t livres fans aucune gangue, qui,
par l'effai qu'en fit M. Hellot , donna dix-fept livres de cuivre &
trois marcs deux onces trois gros d'argent par qumtal fi(fcif
Hellot, Mémoires de l'Académie des Sciences, année ^75^» P^i^^
(u) Lettres de M. Hetilinger à M. de Buffon. Baygori , le i ^
Juin 1774*
(x) Traite' de la fonte des mines de Schlutter, tome I , pages
II à" 12.
Mittéraupc , Tome IIL L
82 Histoire Naturelle
du Tillot j au Val-de-licvre , à Vaudrevangcs , ÔL enfin
plufieurs autres à Saime - Mûrie-mix-inmcs (y).
En Franche-comté, à Plûncher-lès-mhws ^ il y a aufiî
des mines de cuivre, & auprès de Cliatedu-Lajjihcn W
s'en trouve quatre veines placées l'une fur l'autre,
& l'on prétend que cette mine a rendu depuis 'vingt
jufqu'à cinquante pour cent de cuivre (i) .
On a au/Ti reconnu plufieurs mines de cuivre dans
le \J\mo{\VL (,i) , en Dauphiné , en Provence, dans le
Vi^•arais , le Gévaudan & les Cevcnnes (b) ; en Auvergne
^^ Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome I , pages i
& j?.
(-J Idem, page /j-.
(a) Dans le bas Limofni , au comté d'Ayen, il y a plufieurs
filons de cuivre en verdet & en terre verte , qui donnent, l'un dix-fept
& l'autre vingt-deux livres de métal par quintal. Une autre mine que
j'ai découverte eft jilus abondante que les précédentes ; le cuivre
y eft combiné avec le plomb, & donne vingt-trois livres de cuivre
par quintal. Quoique ces mines foient médiocrement riches , elles
peuvent être exploitées avec profit; elles ne font que des fuors,
procédant de la décoir.pofition des mines primitives, & infiltrées dans
des mafTes de gros fable quartzeux , qui ont été entraînées des
montagnes du haut IJmofin. Lettres de M, le chevalier Grignon ;
Paris, 2^ Juillet lySi.
(h) En Dauphiné, il y a une mine de cuivre dans Ja montagne
de la Coche , au revers de la vallée du Grefivaudan , du côté de
L oif an , dovïx l'exploitation eft abandonnée, à caufe de la difficulté:
des chemins .... If y a une autre mine de cuivre fur la montagne
des Hyercs, à cinq lieues du bourg d'Oiian, elle eft mCltt: d'ocrc
DES Aï I N É R A U X. 83
près de Saint - Amancl ; en Touraine à l'abbaye de
Noyers ; en Normandie près de Briquebec , dans
le Cottentin , &. à Carrolet dans le diocèfe d'A-
vranciies fc).
En Languedoc ((JJ, M. de Gcnlanne a reconnu
•■ ■ ■ Il ■- ■■■■■■ ■■ ■m^sM^^ I ■ ■ _^^*^ !■■ ^ ^^^^^B ■ ^^tm^^ I Hia^nB.M_i_B^i^a^^
de quartz & de pyrite fiilfureufe ; le filon a treize pouces de large ....
Dans la même province, il y a une autre mine de cuivre au-deniis
des lacs de BelUdonne . ... Se des lacs de BranJe .... Une autre aux
Acles , au-delTus de Plawpïnes dans le Briançonnois; cette dernière
mine ell: un mélange de cuivre & de fer, difious par un acide ful-
fureux que l'air a développé, el'e a rendu cinquante pour cent de
beau cuivre rofette .... Une autre au-deflus des bains du Moneftier
de Briançon , qui a donné quinze livres un quart de cuivre pour
cent. . . . Celle d'Hue^^ en haut Dauphiné , efl: fulfureufè & ferru-
gineufe , <5c donne treize livres de cuivre par quintal 11 y a
encore beaucoup d'autres mines de cuivre dans la même province ....
En Provence, au territoire d'Yères, il y a une mine de cuivre
tenant argent & un peu d'or .... Une autre au territoire de la Roque :
& dans celui de Sifleron, il fe trouve aufîl du cuivre, ainfi qu'auprès
de la ville de Digne
Dans le Vivarais , il y a des pyrites cuivreuses au vallon de
Pourchajje , à deux lieues de Joyeufe à Allier en Gévaudan ,
à lept quarts de lieue de Bayard , il y a des pyrites blanches arfe-
nicales qui contiennent du cuivre
A Lodève près des Cevennes, il y a une mine de cuivre tenant
argent.... une autre à la Roquette aux Cevennes, à quatre lieues
& demie d'Andufe. De la fonte des mines, par Schlutter, traduit par
AI. Hellot , tome I , pages i 6 & fuiv.
(c) Idem, pûges 6 o , 6^ & CS.
(d) En revenant du Puits - Saint- Pons vers Riots & Oulargueg
(dioccle de Pons ); nous avons ijouvé au lieu de Cafiltac , une mine
L ij
8^ H ISTO I RE NATU RELLE
plufieurs mines de cuivre qu'il a très-bien obfcrvées &
de cuivre fort confidcrable; on y a ù\i quelque travail Le
minéral y efl répandu par petits blocs difperfés dans toute la niafle
de la veine qui a plulieurs toiles de largeur , & qui paroît au jour
fur l'étendue d'un bon quart de lieue de longueur; le minerai y efl
très-drlenical , & cojuient depuis vingt-deux julqu'à vingt- cinq livres
de cuivre au quintal .... Le inincral efl de la nature des mines de
cuivre griies, vulgaiiement appelées Ja/erts,
Il y a une autre veine de cuivre au lieu appelé Lasfonts , paroifîe
de Mas de l'Eglile.... peu éloignée de celle de Cafîlllac. Hijhire
JVaîurelle du Languedoc, par M, de Genfanne , tome II , page 21 ^.
— A une lieue de la ville de Marvejols en Gévaudan , dans le terri-
toire de Saint- Léger-de- Poire , on trouve plufieurs Tources d'eau
cuivreufe, propre à donner du cuivre par cémentation; elles coulent
dans un vallon à demi-quart de lieue de Saint-Léger. Les habitans
de ce canton ont l'imprudence de boire de ces eaux pour fe purger,
idem, tome II , page 2^0.
A la montagne de Fraifînei ( diocèfe d'Uzès ), il y a deux filons
de mine de cuivre.,.. Le minéral ell jaune, mêlé de mine hépa-
tique; il ell de bonne qualité & pallablement riche en argent,
idem , tome I , page 16^..,, A la montagne de la Garde, il y a
une veine confidérable de mine de cuivre bitumineufe, connue en
Allemagne, fous le nom de Pcch-erti: cette efpéce de mine efl
fort elHmée par la quantité du cuivre qu'elle donne; parce qu'outre
fa grande dudilité, il a une très-belle couleur d'or, ibidem, page i 6 j.
— Il y a deux fiions de mine de cuivre à la montagne du Fort,
idem, page i 6 6 . -^ Une autre à la montagne de Dévèle; deux
autres filons qui p.; ent fous Vilietort, & deux autres qui traverlent
la rivière immédiatement au - defTus du pont, idem, ibidem. — Au-
defTus de Saint- André de Cap-feze , il y a de fort bonnes mines de
cuivre, idem, page i6y.^ Au -defTus du village de Galuzières ,
dans le dioccfe d'Alais, en montant diredement au-defllis du château,'
DES Minéraux. 8;
décrites ; il a fait de femblales recherches en Alface (e).
il y a un filon confidcrable de mine de cuivre & argent, qui a plus
de quatre toifes d'epaiffeur, & qui s'étend de i'ouefl: à l'eft fur une
longueur de près d'une demi - lieue. On aperçoit dans ce filon ,
plufieurs efpèces de mine de cuivre ; il y en a de la jaune , de la
grife , de bleu d'azur , de la malachite , de Thépatique & autres ,
H'tjîoire Naturelle du Languedoc , par Aï. de Cenfanne , tome II ,
page 22^ Aux environs de Saint - Sauveur , au lieu appelé
Low - camp - des - Hùns , il y a un gros filon de cuivre & argent,
dont la gangue ou matrice a près de cinq toifes de largeur , idem ,
page 2^0. — Dans le diocèfe de Narbonne, il y a des mines de
cuivre & argent, aux lieux appelés la Cunale & Peyre - couverte , &
celles de JaJht-d'Empo'ix font fort riches en argent: il y a un autre
filon d'argent & cuivre à Peyfegut, idem , page i S y, — Dans toutes
ces montagnes , on trouve en général beaucoup de cuivre en azur.
idem , ïh'id. — Vers Buifle , il y a plufieurs filons de très-bonne mine de
cuivre qu'on avoit ouverte il y a une quarantaine d'années, & qu'on a
abandonnée en même temps que celte de Meifibux .... Le minéral
de ce canton renferme beaucoup de cette efpèce de mine que les
Allemands appellent Pech-ert:^^ & que nous pouvons nommer mine
de cuivre bitum'meufe ; elle reflemble en efl^et au jayet, Se palTe pour
donner le plus beau cuivre connu. On y trouve auffi de la mire
de cuivre pyriteufe jaune, & également de la mine de cuivre azur,
idem , pages i p 2 & i $ s ' — ^^ avoit fait il y a quelques années ,
plufieurs ouvertures fur une mine de cuivre au lieu de Thines
( diocèfe du Vivarais ) ; mais outre qu'elle eîl très-pauvre , c'efl que
le défaut de bois n'en permettoit pas l'exploitation, idem, tome III,
pages I 8 2 à" 18 ^. — Au bas du village de Saint-Michel, on voit
un filon de mine de cuivre, idem ^ page i $7» — En delcendant des
montagnes vers Ecouflains, on trouve près de ce dernier endroit,,
d'alîez belles veines de cuivre^ idem ^ page 2(tj,
(e) Dans la montagne, du côté de Giromagny, eft la mine de
Saint- Daniel f qui a plus de deux cents pieds de profondeur. Le
86 Histoire Naturelle
Et M. le Monnicr, premier Médecin ordinaire du
Roi, a obfcrvé celles du Roufîillon (fj & celle de
minerai domine en cuivre , il rend un peu de plomb ôi d'argent ;
ce filon de Saint-Daniel eft traverfé par un autre, où les Anciens
ont fait des tra\ oux. Le minerai efi: la plupart de mine d'argent ....
En remontant vers le Ib met de la montagne àe Saint - Antoine ,
il y a un filon de mine jaune de cuivre & de malachites ....
Toutes les montagnes, qui féparent Plancher-les-mines en Franche-
comte , de Giromagny, font entrelaflees d'un nombre prodigieux de
différens filons qui les traverfent en tous fens : toutes ces mines
donnent du cuivre , du plomb & de l'argent ....
A droite du village d'Orùey e(ï Saint- Jofeph , où l'on tire de très-
belles mines de cuivre de toutes elpèces ; une entr'autres efl d'un
pourpre vif, tigré de jaune, & d'une inaùère blanche qu'on prendroit
pour du fpath , & qui eH cependant de la pure mine de cuivre.
Le filon efi: accompagne quelquefois d'une efpèce de quartz feuilleté
blanc très - réfradaire , & qui , quoique pefant , ne tient poitit de
métal.
On trouve du cuivre dans plufieurs autres endroits des environs
d'Orbey, comme à Slorkenfon , à la montagne de Steingraben ; celui-ci
çfl: enferme dans un roc d'une efpèce de quartz vert aulTi dur que
de l'acier; la mine efl: partie bleu de montagne, quelque peu de
mine de cuivre jaune, & la plus grande partie de mine de cuivre
bitumineule. Le fommet du filon efl une mine ferrugineufe brûlée,
toute femblable au mâchefer; & l'on voit aiïez fouvent , pendant
la nuit, fortir de grofles flammes de cet endroit: ce filon efl tra-
verfé par un autre filon de mine de cuivre malachite & jaune, &
quelquefois d'une belle couleur de rofe & de lilas; elle contient quel-
quefois un peu d'or. Sur l'exploitation des mines , par M. de Genfanne ,
A'Icwoires des Savons Étrangers , tome IV, pages 1 41 & fuiv,
(f) Les montagnes dont la plaine du Roufilllon eft environne'e,
fyr-tout celles c^ui tiennent à la chaîne de^ Pyrénées, font garnies
DES Minéraux. 87
Corail, dans ia partie des Pyrénées, fiiuécs entre la
France & l'Efpagne (^) .
pour la plupart , de mines dans leur intérieur. Il y a quelques mines
de fer; mais les plus communes font celles de cuivre, & on ea
exploite quelques-unes avec lucccs .... Il y a une autre veine de
cuivre fort riche au pied de la montagne d'Albert, tout proche du
village de Soredde .... Cette veine fi abondante étoit accompagnée
de feuillets de cuivre rouge très-dudile, &. formé tel parla Nature;
on les trouvoit répandues parmi le gravier , ou plaquées entre des
pierres, & même ie cuivre efl: ramifié dans d'autres en forme de
dendrites .... M. le Monnier a obfervé qis la mine drée du puits
Sainte - Barbe , étoit mêlée avec une pyrite jaune - pâle qui paroîc
fulfureufe & arfenicale. Celle du puits Saint-Louis, qui efl voifine
du premier , quoiqu'un peu moins pefante que celle du puits Sainte'
Barbe, paroît meilleure & inoins embarraffée de pyrites arfénicales,
& elle ell engagée dans une efpèce de quartz qui la rend trcs-aifée
à fondre ; enfin celle du Corail femble être la meilleure de toutes ,
elle eft de même intimement unie à du quartz fort dur. Obfervatioa
d'Hijioire Naturelle , par Aï. le Aïonnler ; Paris, i7S9> P^^es
^ 0 p Ù' Juiv.
(g) Les mines de cuivre de Catalogne , ne font qu'à une lieue
de Corail .... Celle qui donne du cuivre plus eilimé que celui de
Corail, fe trouve fituée précifément dans la colline de Bernadelle^
fous la montagne qui fépare la France d'avec l'Efpagne, entre la
ville d'Autez & celle de Campredon. Il y a dans cette mine d'an-
ciens & grands travaux , & l'on voit dans les galeries & dans les
chambres auxquelles elles aboutifi'ent , des taches bleues & vertes ,
& même des incruflations de vert-de-gris, & aufîj des filets de cuivre
qui forment un réfeau de différentes couleurs, rouges, violettes, <5:c,
& ce réfeau métallique s'obferve dans toute l'étendue des galeries;
« je ni'attendois , dit M. le Monnier , à voir quelques filoiis cuivreux;;
mais il paroû qu'il n'eu a jamais exillé d'autres dan^ cette mine, ««
88 Histoire Natu pelle
Depuis la découverte de l'Amérique, les mines de
cuivre, comme celles d'or &. d'argent, ont été négligées
en Efpagne <54. en France , parce que Ton tire ces
métaux du nouveau monde à moindres frais, 6l qu'en
général, les mines les plus riches de l'Europe & les
plus aifées à extraire, ont été fouillées, & peut-être
épuifées par les Anciens ; on n'y trouve plus de cuivre
en métal ou de première formation, & on a négligé
les minières des pyrites cuivreufès ou de féconde for-
mation, par la difficulté de les fondre, & à caufe des
grands frais que leur traitement exige. Celles des envi-
rons de Molina dont parle M. Bowle (h), & qui
paroi ffent
>î que ce refeau métallique que j'ai vu prefque par-tout Toute
» cette mine , qui eft d'une étendue très-confidérable, eft dans une
» pierre dure qu'il faut faire éclater à la poudre ; & il y a dans quelques
» cavités de cette pierre , du cuivre vert & foyeux , & dans quelques
5> autres , il y avoit une poudre grumelée d'un très- beau bleu d'outre-
mer >♦. Ohfervation d'HiJIoire Naturelle , par M. le Adonnier; Paris,
1739, P^gfs 20 p & fuîv.
(h) « A quelques lieues de Molina, il y a une montagne appelée
» îa Platilla; on voit au fommet des roches blanches qui font de
y* pierre à chaux , mêlées de taches bleues & vertes Dans les
» galeries de la mine de cuivre , on voit que toutes les pierres font
» fendillées & laiflênt découler de l'eau chargée de matière cuivreufe ,
» & les fentes font remplies de minéral de cuivre bleu , vert & jaune ,
y mêlé de terre blanche calcaire. Ce minerai formé par ftillation efl:
7» toujours compofé de lames très-minces & parallèlement appliquées
» les unes contre les autres ... La matière calcaire s'y trouve toujours
» mêlée avec le minéral de cuivre de quelque couleur qu'il foit. . . .
Il
D E s AI I N É R A U X. 89
paroifTent être de troifième formation , font également
négligées; cependant, indépendamment de ces mines de
Molina en Arragon, il y a d'autres mines de cuivre
à fix lieues de Madrid, & d'autres dans la montagne de
Guadeloupe , dans lerquelles on fait aujourd'hui quelques
travaux; celles-ci, dit M. Bowles, font dans une ardoife
jafpec de bleu & de vert (ï) .
En Angleterre , dans la province de Cornouailles ,
II fe forme fouvent en petits criftaux dans les cavités du minéral ce
même, & ces crillaux font verts, bleus ou blancs. ... Le minéral «
commence par être fluide & diflous , ou au moins en état de mu- <c
cilage qui a coulé très-lentement , & que les eaux pluviales diflolvent <c
de nouveau & entraînent dans les fentes ou cavités où elles tombent <c
goutte à goutte & forment la (laladlite. . . . Lamine bleue ne fe mêle «
point avec le relie, & elles font d'une nature très-diftinde ; car je «
trouvai que le bleu de cette mine contient un peu d'arfenic , d'argent ce
& de cuivre, &. le produit de fa fonte efl une forte de métal de ce
cloche. La mine verte ne contient pas le moindre atome d'arfenic, «c
& le cuivre fe minéralife avec la terre blanche fufdite , fans qu'il y ce
ait la moindre partie de fer. Cette luine de la Platilla étant une mine ce
de chariage ou d'alluvion , elle ne peut être bien profonde, m Hijîoirc
Naturelle d'Efpagne , par M. Bowks , page i ^i à" fuiv Nota. Je
dois obferver que cette mine décrite par M. Bowles, efl non-feule-
ment d'alluvion , comme il le dit , & comme le démontre le mélange
du cuivre avec la matière calcaire, mais qu'elle eft encore de flillation,
c'ell-à-dire, d'un temps pollérieur à celui des alluvions , puifqu'elle
fe forme encore aujourd'hui par le fuintement de ces matières dans
les fentes des pierres quartzeufes où fe trouve ce minéral cuivreux
qui fe réunit aufîi en ftal^dites dans les cavités de la roche.
(i) Hiftoire Naturelle d'Efpagne , /;^^^j 28 & 6 y.
ATméraux, Tome II I. M
90 Histoire Natu relle
fameufè par fès mines d'ctain, on trouve des mines Je
Cuivre en filons, dont quelques-uns Ibnt trcs-voifins
des filons d'ctain, & quelquefois même font mêlés de
ces deux métaux ; comme la plupart de ces mines font
dans un état pyriteux , elles font de féconde formation ,
quelques-unes néanmoins font exemptes de pyrites, &
paroifTent tenir de près à celles de première formation;
M. Jars les a décrites avec fon exa6litude ordinaire (k).
(k) Les filons de cuivre de la province de Coi'noudilies font dans
une efpcce de fchifte nomme k'illas , dont la couleur eft difîcrcnte du-
fchifte qui contient le filon d'étain; avec Tétain ce killas efl brun ^
noir & bleuâtre , mais avec les mine'raux de cuivre il eft plutôt gri-
fàtre, blanchâtre & rougeâtre. Il efl très-commun de rencontrer des
filons qui produil'ent du minéral de cuivre & de celui d'étain en même
temps, mais il y en a toujours un qui domine.
Les matières qui accompagnent & annoncent les minéraux de
cuivre & qui eu contienrjent Ibuvent elles-mêmes, confiflent proche
la furface de la terre, en une efpèce de minéral de fer décompolé en
partie ou fubllance ocreufe, mêlée de quartz ou d'un rocher bleuâtre;
mais dans la profondeur, ces matières font un compote de quartz , de
mica blanc fur une pierre en roche d'un bleu-clair; afTez fouvent de
Ja pyrite , tantôt blanche , tantôt jaune, quelquefois le tout efl parfemé
avec des taches de minéral de cuivre. Obfervations fur les in'ines, par M.
Jars ; Mémoires de l'Acoiiémie des Sciences^ année i y y o , page j 40. —
Au-defTus de la ville de Redruts , on exploite une mine de cuivre très-
abondante. ... fon filon efl peu éloigné de celui de fa mine d'étain
de Peduandrea; il lui efl parallèle. ... La largeur commune du filon
peut être de quatre à cinq pieds; il efl compofe d'un beau minera
jaune ou pyrite cuivreufe, point de blende, afièz fouvent du quartz
& de la pyrite^ fur-tout de la blanche qui eft arfenicale. . . quelque-
fois du criflaf de roche qu'on nomme diamant de Cornouailles ... Ou
DES AI I N É R A V X. 91
En Italie, dans leVicentin, «on fabrique annuelle-
ment , dit M. Ferher , beaucoup de cuivre , de foufre ^*
& de vitriol. La lefTive vitriolique eft très - riche en «
cuivre, que Ton en tire par cémentation & en y mettant «
des lames de fer fl) ». Ces mines font, comme l'on
voit, de dernière formation. On trouve au/Ti de pareilles
mines de cuivre en SuifTe , dans le pays des Grifons
&: dans le canton de Berne, à fix lieues de Romam-
Moutier (m).
En Allemagne, dit Schliitter, on compte douze
trouve quelquefois du cuivre natif dans la partie fupcrieure du filon
& dans les endroits où il n'efl: pas riche. ... Le filon efl renfermé
dans le rocher fchifteux nommé killas . ... Le côté du mur du fiJon
elt tendre, fouvent il efl: compofe d'une matière jaune & poreufe ,
fouvent aufli d'une efpèce d'argile. . . . Le filon efl très -riche &
abondant dans la plus grande profondeur qui efl: de foixante & quel-
ques toifes. . A cinq milles de Redruth , on exploite encore plufieurs
filons qui font de ia même nature «Se dans une roche de même efpèce..
H y a entr'autres dans ce pays une mine de cuivre vitrée extrêmement
riche, mais très-peu abondante. . . . On trouve dans tout ce terrein
une très-grande quantité de puits jufqu'à Sainte-Agnès, où particu-
lièrement près de la mer les filons de cuivre ne font qu'en petit nombre ,
en comparaifon des fiions d'étain qui y font beaucoup plus nombreux,
tandis que c'étoit le contraire du côté de Redruth. Obfervations fur
les mines , par Al. Jars , dans Us Aiémoïres de C Académie des Sciences,
/innée 1770 > page J40.
(l) Lettres fur la Minéralogie, par M. Ferber , /jj^/ri ^7^" ^8.
(m) Mémoires de M. Guettard, dans ceux de l'Académie des
Sciences, année 17J2 , page $2^,
M ij
92 Hjstoire Naturelle
fortes Je mines de cuivre (iij , dont cependant aucune
(n) Ces douze fortes de mines de cuivre font i ." le cuivre natif
ou jnine de cuivre fous forme métallique; il efl rare & reflemble à
celui qui a été rafiné.
2.° Le cuivre azur ou mine de cuivre vitrée, elle tient de farfenic
& un peu de fer.
3.° La mine de cuivre jaune, qui efl une efpèce de pyrite com-
pofée de foufre , de beaucoup de fer & de peu de cuivre.
4.° La mine de cuivre fauve, qui tient du foufre, de l'arfenic ,
de l'argent & du cuivre en plus grande quantité cjue la fuivante.
5.° Autre mine de cuivre différente de la précédente.
6° La mine de cuivre bleue, d'Outre- mer ^wZ/ra marina), qui
n'efl autre chofe que du cuivre diflbus par les acides, & précipitée
& pénétrée parTaîkali volatil. Comme elle ne tient ni foufre ni arfenic,
elle n'a pas befoin, à la rigueur, d'être calcinée, non plus que U
mine de cuivre verte, appelée malachite ; au petit effai on ne les
rôtit pas, pour la fonte en grand on les rôtit fort peu.
7.° La mine de cuivre verte , nommée malachite.
8.° La mine de cuivre en fable , qui efl compofée de cuivre &
d'arfenic , mêlé de fable.
Cf° La mine d'argent, blanche ( ou grife ) tenant plus de cuivre
que d'argent; mais les mines portent ordinairement le nom du métal,
qui, étant vendu, produit une plus grande fomme d'argent que
l'autre , quoiqu'en plus grande quantité.
10." La mine de cuivre en ardoife ou écailles cuivreufes; elle
donne peu de cuivre aux effais , aufli-bien que la précédente.
1 1 . Prefque routes les pyrites un peu colorées , parce qu'il n'y en a
prefque point qui ne contienne une ou deux livres de cuivre par quintal.
12. Le vitriol bleu-verdâtre natif, fe met au rang des mines de
cuivre , parce que ce métal y fert en partie de bafe à l'acide qufi s'eft
criftallifé avec lui & avec un peu de fer. Traité de la fonte des mines
de Schlutlcr, tome J , pages i (^ 9 ir i^i^
DES Mll^ÉRAUX, 93
n'eft aiifli riche en métal que les mines de plomb ,
(l'ctain & de fer de ces mêmes contrées. Comme Ja
plupart de ces mines de cuivre contiennent beaucoup
de pyrites , il faut les griller avec foin , fans cela le
cuivre ne fe réduit point, & l'on n'obtient que de la
matte. Le grillage eft ordinairement de fept à huit
heures , & il eft à propos de laifTer refroidir cette
mine grillée, de la broyer & griller de nouveau trois
ou quatre fois de fuite en la broyant à chaque fois ;
ces feux interrompus la défoufrent beaucoup mieux
qu'un feu continué. Les mines riches, telles que celles
d'azur & celles que les ouvriers appellent mines pourries
ou évejitées , n'ont pas befoin d'être grillées autant de
fois ni fi long - temps ; cependant toutes les mines de
cuivre, pauvres ou riches, doivent fubir le grillage , car
après cette opération elles donnent un produit plus
prompt & plus certain ; &. fouvent encore le métal pur
eft difficile à extraire de la plupart de ces mines grillées.
En général, les pratiques pour le traitement des mines
doivent être relatives à leur quahté plus ou moins riche ,
& à leur nature plus ou moins fufible. La plupart font
fj pyriteufes qu'elles ne rendent que très - difficilement
leur métal après un très-grand nombre de feux. Les
plus rebelles de toutes font les mines qui , comme celles
de RammellLerg & du haut Hartz ( o ) ^ font non^
1. — ■■ ■ . ■ ■ ■ - ■ ■ ■ ■—— ■ ■ ■ ■ I ■ .1 ■ ■ I ■ — . ■ I ■ I. ■ » ■ g»
(q) Les miues de cuivre de Rammelfberg & celles du haut Harti,,
94- Histoire Naturelle
feulement mêlées de pyrites, mais de beaucoup de
mines de fer; il s'cll paffé bien du temps avant qu'on
ait trouvé les moyens de tirer le cuivre de ces mines
pyriteufes &. ferrugineufcs.
Les Anciens, comme nous l'avons dit, n*ont d'abord
employé que le cuivre de première formation, qui fe
réduit en métal dès la première fonte, & enfuite ils ont
fait ufage du cuivre de dernière formation qu'on fè
procure aifément par la cémentation; mais les mines
de cuivre en pyrites , qui font prefque les feules qui
nous refient, n'ont été travaillées av€c fuccès que dans
ces derniers temps, c'ell-à-dire, beaucoup plus tard que
les mines de fer , qui , quoique difficiles à réduire en
métal, le font cependant beaucoup moins que ces mines
pyriteufes de cuivre.
Dans le bas Hartz, les mines de cuivre contiennent
du plomb & beaucoup de pyrites ; il leur faut trois feux
de grillage, & autant à la matte qui en provient; on
fond enfuite cette matte qui , malgré les trois feux
qu'elle a fubis ne fe convertit pas toute entière en
métal ; car dans la fonte il fe trouve encore de la matte
ne font que des pyrites cuivreufes , & il n'eft pas étonnant qu'on
ait ignoré i\ long - temps l'art d'en tirer le cuivre : il y a peu de
mines auxquelles il faille donner un aufîi grand nombre de feux
pour les griller , & qui dans la fonte foient aufll chaudes & auffi
rougeâtres. Schlutter, Traité de k fonte des fnineSj &c. tome II ^
pûge ^26.
DES Minéraux, * 95
qu'on eft obligé de féparer du métal & de faire griller
de nouveau pour la refondre ( p)-
Dans le haut Hartz, la plupart des mines de cuivre
font auiïi pyriteufes , &. il faut de même les griller
d'autant plus fort & plus de fois qu'elles le font davan-
tage. Aux environs de Clauflhal, il y en a de bonnes,
de médiocres & de mauvaifes ; ces dernières ne font pour
ainfi dire que des pyrites ; on mcle ces mines enfemble
pour les faire griller une première fois à un feu qui
dure trois ou quatre femaines ; après quoi on leur
donne un fécond feu de grillage avant de les fondre ,
& l'on n'obtient encore que de la matte crue , qu'on
foumet à cinq ou fix feux fuccefTifs de grillage , félon
que cette matte eft plus ou moins fulfiireufe. On fond
de nouveau cette matte grillée , & enfin on parvient
à obtenir du cuivre noir en alfez petite quantité , car
cent quintaux de cette matte grillée ne donnent que
huit à dix quintaux de cuivre noir , &. quarante ou
cinquante quintaux de matière moyenne entre ia matte
brute & le cuivre noir; on fait griller de nouveau
cinq ou fix fois cette mûtte moyenne avant de la jeter
au fourneau de fufion; elle rend à-peu-près la moitié
de fon poids en cuivre noir, & entre un^tiers & un
quart de matière qu'on appelle matte firnple , que l'on
(■p) Traité de la foate àzs mines de Schlutter, tomt II, pages
96 ^Histoire Naturelle
fait encore griller de nouveau fept à huit fois avant de
la fondre, & cette matte fimple, ne fe convertit qu'alors
en cuivre noir (q).
Les mines de cuivre qui font plus riches & moins
pyriteufes , rendent dès la première fonte leur cuivre
noir, mêlé d'une matte qu'on n'efl obligé de griller
qu'une feule fois, pour obtenir également le cuivre
noir pur ; les mines feuilletées ou en ardoifes, du comté
de Mansfeld , quoique très-peu pyriteufes en apparence,
ne donnent fouvent que de la matte à la première fonte,
&. ne produifent à la féconde qu'une livre ou deux de
cuivre noir par quintal. Celles de R'ie^elfdorf ^ qui font
également en ardoife , ne donnent que deux à trois
livres de cuivre par quintal; mais comme il fuffit de
les griller une feule fois pour en obtenir le cuivre
noir , on ne lailTe pas de trouver du bénéiice à les
fondre , quoiqu'elles rendent fi peu, parce qu'une feule
fonte fuffit auffi pour réduire le cuivre noir en bon
métal f^r) ,
On trouve dans la mine de A^eydenhek, du cuivre en
métal mclé avec des pyrites cuivreufes noires & vertes ;
cette mine paroît donc être de première formation,
feulement une partie du cuivre primitif a été décom-
pofée dans la mine même, par l'aélion des élémens
— I » » , • -.___—____ .
(q) Traite de la fonte des mines de Schlutter, tome II , page 2 0^,
(r) Idem, ibidem , ^^^f ^(f/.
humides,
DES Minéraux. 97
humides ; mais malgré cette altération , ces minerais
font peu dénaturés, &. ils peuvent fe fondre feuls: on
mcle les minerais noir & vert avec le cuivre natif, &
ce mélange rend fon métal dès la première fonte, &:
même affez pur, pour qu'on ne fbit pas obligé de le
raffiner CfJ.
En Hongrie, il fè trouve des mines de cuivre de
toutes les nuances & qualités ; celle de Horngromid e(l
d'une grande étendue, tWç, efl en larges filons &. fi
riche qu'elle donne quelquefois jufqu'à cinquante &
fbixante livres de cuivre par quintal ; elle eft compofée
de deux fortes de minerais, l'un jaune , qui ne contient
que du cuivre ; l'autre noir , qui contient du cuivre
& de l'argent ; ces mines, quoique fi riches, font
néanmoins très-pyriteufès , & il faut leur faire fubir
douze ou quatorze fois l'adtion du feu avant de les
réduire en métal. On tire avec beaucoup moins de
frais le cuivre des eaux cuivreufes qui découlent de
cette mine au moyen des lames de fer qu'on y plonge ,
& auxquelles il s'unit par cémentation. En général ,
c'ell dans les montagnes de fchifte ou d'ardoifè que
{è trouvent, en Hongrie, les plus nobles veines de
cuivre (t).
<c II y a en Pologne, dit M. Cuettard, fur les confins
(f) Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome II, page ^j? /.
{ t) Delius , fur l'art des mines. Traduéîion françoife , tome J ,
page S 2»
Minéraux, Toinc JIL N
98 Histoire Naturelle
de la Hongrie & du comté de Speis , une mine de
cuivre tenant or & argent Cette mine cfl d'un
jaune doré avec des taches couleur de gorge de pigeon ,
& elle efl mêlée de quartz; il y en a uiire autre dans
les terres du Starofle de Bulkow J'en ai vu un
morceau qui étoit un quartz gris-clair, parfemé de points
cuivreux ou de pyrites cuivreufes d'un jaune doré (u)^^.
En Suède, les mines de cuivre font non-feulement
très - nombreufes , mais auïïi très - abondantes & très-
riches ; la plus fameufè efl celle du cap Ferherg : on en
prendroit d'abord le minerai pour une pyrite cuivreufè,
& cependant il n'efl que peu fulfureux, &. il efl mclé d'une
pierre vitreule & fufible ; il rend fon cuivre dès la pre-
mière fonte ; il y a plufieurs autres mines qui ne font pas
fi pures & qui néanmoins peuvent fè fondre après avoir
été grillées une feule fois; il n'efl pas même nécelfaire
d'y ajouter d'autres matières pour en faciliter la fufion,
il ne faut que quelques fcories vitreufès pour leur faire
un bain & les empêcher de fe calciner à la fonte (x).
En Danemarck & en Norwège , félon Pontop-
pidan , il y a des mines de cuivre de toute efpèce ;
celle de Rorûas efl la plus renommée ; trois fourneaux
qui y font établis ont rendu, en onze années, quarante
(u) Mémoires de l'Académie des Sciences, année 17^2, page
(x) Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome II, page 4p^,
(C
<c
DES Minéraux. 99
mille neuf cents quarante-quairc quintaux de cuivre (^yj.
M*. Jars dit « que cette mine de Romas ou de Relatif,
ell une mine immenfc de pyrites cuivreufès, fi près
de ia lùrface de la terre, que Ton a pu facilement y
pratiquer des ouvertures affez grandes pour y faire entrer "
& fbrtir des voitures qui en tranfportent au-dehors les ''
minerais , & que cette mine produit annuellement douze '*
mille quintaux &. plus de cuivre (i^ ».
On trouve aulFi des indices de mine de cuivre en
Lapponie, à foixante lieues de Torneâ, & en Groenland ;
l'on a vu du vert-de-gris & des paillettes cuivreufes dans
des pierres , ce qui démontre affez qu'il s'y trouve auffi
des mines de ce métal faj.
En Ilîande, il y a de même des mines de cuivre,
les unes à fëpt milles de dillance de la ville de Wiclow;
d'autres dans ia montagne de Crone-Bawn , qui font en
exploitation, & dont les foffes ont depuis 40, 50 &
ju/qu'à 60 toifes de profondeur (b). Le Réiateur
obfèrve : « Que les Ouvriers ayant laiffc une pelle
de fer dans une de ces mines de cuivre, où il coule
(y) Journal étranger, mojj- ^'.^oiir tJSS'
(l) Mémoires des Savans étrangers, (orne IX, page 4S ^'
(a) Hiftoire générale des Voyages, tome XIX , page ^ o.
(b) Le premier minéral qu'on y trouve en cieufant, efl: une pierre
ferrugineufe; au-deflous on découvre une mine de plomb qui femble
être mêlée avec de l'argile, mais qui donne beaucoup de plomb &
peu d'argent, & plus bas une riche mine pierreufe & brillante qui
N ij
sitas
WBL\OTHtCA
100 Histoire Naturelle
» de l'eau , cette pelle fe trouva quelque temps après
- toute incruftée de cuivre , & que c'eft d'après ce
"fait, que les habitans ont pris l'idce de tirer ainfi
>> le cuivre de ces eaux , en y plongeant des barres de
» fer ; il ajoute que non-feulement le cuivre incrufte le
» fer, mais que cette eau cuivreufe le pénètre & femble
'> le convertir en cuivre , que le tout tombe en poudre
» au fond du réfervoir où l'on contient cette eau cuivreufe;
» que les barres de fer contra6lent d'abord une efpèce de
» rouille qui, par degrés, confomme entièrement le fer;
» que le cuivre qui efl dans ïem étant ainfi continuelle-
» ment attiré 6l fixé par le fer , il fe précipite au fond
« en forme de fédiment, qu'il faut pour cela du fer doux,
'> & que l'acier n'efl pas propre à cet effet ; qu'enfin
ce fédiment cuivreux eft en poudre rougeâtre ». Nous
obferverons que c'efl non - feulement dans ces mines
d'illande, mais dans pKifiewrs autres, comme dans celles
de Suède, du Hartz, &c. que l'on trouve de temps en
temps , ÔL en certains endroits abandonnés depuis long-
temps, des fers incruflés de cuivre, & des bois dans
lefquels ce métal s' eft infmué en forme de végétation,.
Wl I I I < I II ■ ■
rend foixante-quinze onces d'argent par tonne de mine, & en outre
une grande quantité de plomb îe plus fin : après avoir percé quelques
toifès plus bas on arrive à la veine de cuivre qui efl très -riche, &
qu'on peut fuivre jufqu'à une certaine profondeur. Journal étranger,
mois de Décembre jyj^, pages Jiy, pjques & compris pag&
1 2 (r>
DES Minéraux. ioi
qui pénètre entre les fibres du bois & en remplit les
intervalles (cj; mais ce n'efl point une pénétration
intime du cuivre dans Je fer, comme le dit le Relateur,
& encore moins une converfion de ce métal en cuivre.
Après cette énumération des mines de cuivre de
l^Europe, il nous refle à faire mention de celles des
autres parties du monde; & en commençant par TAfie,
il s'en trouve d'abord dans les îles de l'Archipel ; celle
de Chalcuïs, aujourd'hui C/mlcéj avoit même tiré fon
nom du cuivre qui s'y trouvoit. L'île à'Eubée en
fourniiïbit aufTi (d ) ; mais la plus riche de toutes en
cuivre, eft celle de Chypre; les Anciens l'ont célébrée
fous le nom ^(Erofa, & ils en tiroient une grande
quantité de cuivre & de zinc (e) .
Dans le continent de i'Afie, on a reconnu & tra-
vaillé des mines de cuivre : en Per/è (f)^ « le cuivre,
dit Chardin, fe tire, principalement à Sary, dans les
(c) Bibliothèque raifonnée, tome XLIII , page y o,
(d) Les premiers ouvrages d'airain avoient , fuivant ia tradition des
Grecs, été travaillés en CEubée, dans la ville de Chakis f qui en avoit
tiré fon nom. Solin , chap. XI,
(e) Defcription de l'Archipel, par Dapper, pages ^2^0" 445'
(f) W y a des mines de cuivre aux environs de la ville de Cacfiem.
en Perfe , où l'on fait commerce de ce métal. Voyage de Struys ,
tome I, page 2yy. — A quelques lieues de la ville de Tauris , on
trouve une mine de cuivre qui rapporte beaucoup au Roi. Voyage
de Cerne m Carrer i, tome II , page 4j,
102 Histoire Natu relle
» montagnes de Miiiemkrm; il y en a aulfi à Badriam
„ & vers Cajhïn; tous ces cuivres Ibnt aigres, & pour
„ les adoucir, les Perfans les allient avec du cuivre de
„ Suède & du Japon, en en mettant une partie fur vingt
du leur (^) '->'
M." Gmelin & Muller ont reconnu & obfervé plu-
fieurs mines de cuivre en Sibérie ; ils ont remarqué
que toutes ces mines, ainfi que celles des autres métaux,
font prefque à la (urface de la terre. Les plus riches
en cuivre font dans les plus hautes montagnes près de
la rive occidentale du Jénifca; on y voit le cuivre à
la furface de la terre , en mines rougeâtres ou vertes ,
qui toutes produifent quarante-huit à cinquante livres
de cuivre par quintal (h). Ces mines iituées au haut des
montagnes, font fans doute de première formation, la
mine verte a feulement été un peu altérée par les élé-
mens humides. De toutes les autres mines de cuivre,
dont ces Voyageurs font mention, la moins riche eft
celle de Ptchtama-Gora, qui cependant donne douze
pour cent de bon cuivre; il y a cinq de ces mines en
exploitation, & Ton voit dans plufieurs autres endroits
de cette même contrée, les veftiges d'anciens travaux,
qui démontrent que toutes ces montagnes contiennent
de bonnes mines (i). Celles des autres parties de la
■ ■ f — —
(g) Voyage de Chardin, tome II , page 2^.
(h) HiRoire générale des Voyages, terne XVIII , page ^ je,
(i) Idem, ibid.
DES Minéraux, J03
Sibérie font plus pauvres; la plupart ne donnent que
deux, trois ou quatre livres de cuivre par quintal (k) :
on trouve fur la croupe & au pied de plufieurs mon-
tagnes, différentes mines de cuivre de féconde & de
troifième formation ; il y en a dans les environs de
Cazan , qui ont formé des flalaélites cuivreufes , & des
malachites très-belles & aifées à polir; on peut même
dire que c'efl dans cette contrée du nord de l'Afie, que
les malachites fe trouvent le plus communément, quoi-
qu'il y en ait auffi en quelques endroits de l'Europe,
& particulièrement en Saxe , dans plufjcurs mines de
cuivre de troifième formation ; ces concrétions cui-
vreufes ou malachites , fe préfentent fous différentes
formes; il y en a de fibreufes ou formées en rayons,
comme fi elles étoient criftallifées , & par - là elles
reffemblent à la zéolite ; il y en a d'autres qui paroiffent
formées par couches fucceffives ; mais qui ne diffèrent
des premières que par leur apparence extérieure. Nous
en donnerons des notions plus précifes lorfque nous
traiterons des flalaélites métalliques.
Les mines de Souxon en Sibérie font fort confidé-
(k) A cinquante-deux verHes de Catherinbourg fe trouve la mine
de Polewai qui n'eft pas dirpofee par couches, mais par chambres ^
& qui ne donne qu'environ trois livres de cuivre par quintal. Hijl.
générale des Voyages , tome XVIII , page i o iJ*. — Celles de W^erchoturic
ne rendent que deux pour cent, le minerai eft une pyrite de cuivre
Diêlee de veines irrégulières de quartz noirâtre. Idem, page ^(j o.
104 Histoire Naturelle
râbles , & s'étendent à plus de trente lieues ; elles font
fituées dans des collines qui ont environ cent toifes
de hauteur, & paroifTent en (iiivre la pente; toutes ne
donnent guère que quatre livres de cuivre par quintal;
ces mines de Souxon, font de troifièmc & dernière
formation ; car on les trouve dans ie fable , & même dans
des bois fofTiles qui font tachés de bleu & de vert , &
dans l'intérieur defquels la mine de cuivre a formé des
criftaux (l). Il en eft de même des mines de cuivre
des monts Riphces; on ne les exploite qu'au pied des
montagnes , où le minerai de cuivre fe trouve avec des
matières calcaires, & fuit, comme celles de Souxon, la
pente des montagnes jufqu'à la rivière (m).
Au Kamtfchatka, où de temps immémorial les habitans
étoient auiïl fauvages que ceux de l'Amérique fepten-
trionale, il fe trouve encore du cuivre natif en maffes
& en débris (n) , & une des îles voifmes de celle de
Bering) où ce métal fe trouve en morceaux fur le
rivage, en a pris ie nom d'ik de Cuivre (o).
La
(l) Hifloire générale des Voyages , tome XIX, page 4y^>
(m) Idem, ihid. page 4jy-
(n) « Dans quelques endroits du Kamtfchatka, on trouve dans fe
a» fable une fi grande quantité de petits morceaux de cuivre natif,
qu'on pourroit en charger des charretes entières, jj Le fieur Schercr,
cité dans le Journal de Phyfique y Juillet i yS i , pages 41 & fuiv»
(0) Alednoi-ojlroff o\x l'île de cuivre qui fe voit de l'île de Bering,
*fl ainfi appelée à caufe des gros morceaux de cuivre natif qu'on
trouve
DES Minéraux, 105
La Chine eft peut - ctre encore plus riche que la
Sibérie en bonnes mines de cuivre, c'efl fur-tout Jans
la province iïYun-naii qu'il s'en trouve en pius grande
quantité ; & il paroît que quoiqu'on ait très-ancienne-
ment fouillé ces mines , elles ne font pas épuifées , car
on en tire encore une immenfe quantité de métal. Les
Chinois diflinguent trois e/pèces de cuivre qu'ils pré-
tendent fè trouver naturellement dans leurs différentes
mines, i. le cuivre rouge ou cuivre commun, &. qui
eft du cuivre de première formation ou de cémentation ;
2. le cuivre blanc qu'ils affurent avoir toute fa blancheur
au fortir de la mine, & qu'on a peine à diftinguer de
l'argent lorfqu'il eft employé. Ce cuivre blanc eft aigre,
& n'eft vrai/èmblablement qu'un mélange de cuivre &
d'arfenic ; 3. le tombac qui ne paroît être au premier
coup-d'œil qu'une fimple mme de cuivre , mais qui eft
m«iée d'une aflez grande quantité d'or (p) : il fe trouve
une de ces mines de tombac fort abondante dans la
trouve fur la grève. . . . fur-tout à la pointe oueft de la bande mé-
ridionale. Maleviskoi en recueillit, entre les roches & la mer, fur une
grève d'environ douze verges , idem , ibïd.
(p) L'aurïchalcum de Pline, paroît être une efpèce de tombac,
qu'il défigne comme un cuivre naturel , d'une qualité particulière &
plus excellente que le cuivre commun , mais dont les veines étoient
déjà depuis long-temps épuifées : In Cypro prima œr'is inventio ; mox
vilitas , reperto in aliis terris prœjtantiore , maxime aurichalco , quod prœ-
cipuum bonitatem admirationemque dià obiinuit ; vec repcritur longo jarn
îempore eff'œtâ tellure. Lib. XXXIV, cap. II.
Minéraux , Tome III. O
io6 Histoire Naturelle
province de Hn-quang. On fait de très-beaux ouvrages
avec ce tombac, & en général, on ne confomme nulle
part plus de cuivre qu'à la Chine, pour les canons, les
cloches, les inflrumens , les monnoics, &c. (q) ; cepen-
dant le cuivre eft encore plus commun au Japon qu'à
ia Chine; les mines les plus riches, & qui donnent
le métal le plus tin & le plus dudile , font dans la
province de Kïjnok & de Snrunga (r) , &. cette dernière
doit être regardée comme une mine de tombac ,
car elle tient une bonne quantité d'or. Les Japonois
tirent de leurs mines, une fi grande quantité de cuivre
que les Européens & particulièrement les Hollandois,
en achetteni pour le tran/porter & en faire commerce (fj;
mais autant le cuivre rouge efl commun dans ces îles
du Japon, autant le cuivre jaune ou laiton y efl rare,
parce qu'on n'y trouve point de mine de zinc, & qu'on
efl obligé de tirer du Tunquin ou d'encore plus loin,
la calamine ou le zinc néceffaire à cet alliage (r).
Enfin, pour achever l'énumération des principales
mines de cuivre de l'Afie, nous indiqutrons celles de l'île
Formofe, qui font fi abondantes, au rapport des Voya-
geurs, qu'une feule de ces mines pourroit fùffire à tous
(q) Hifloire générale des Voyages, tome V, page 484.
(r) Idem , tome X , page 6 ^ ^.
(f) Hifloire Naturelle du Japon, par Koeinpfer, tome I , page p^,
(tj Idem , ibid.
DES Minéraux. 107
les befoins & ufages de ces Infulaires ; la plus riche
cil celle de Peorko; le minerai eft du cuivre rouge (uj ,
&. paroît être de première formation.
Nous ne {(dxons que citer celles de MacafTar dans
les îles Célèbes (x) ; celles de l'île de Timor (y) ^ &
enfin celles de Bornéo dont quelques-unes font mêlées
d'or & donnent du tombac , comme celles de la
province de Siiran^a au Japon, &. de Hu-quang à la
Chine (i) .
En Afrique , il y a beaucoup de cuivre , & même
du cuivre primitif Marmol parle d'une mine riche , qui
étoit il y a près de deux fiècles , en pleine exploitation
dans la province de Sus au royaume de Maroc, & il
dit qu'on en tiroit beaucoup de cuivre & de laiton
qu'on tranfportoit en Europe: il fait aufTi mention des
mines du mont Atlas dans la province de Zahara, où
(u) Defcription de l'ije Formofe; Amjlerdam , i y o j , page i^S.
(x) Hifloire générale des Voyages , tome X, page >f / 8.
(y) Idem , tome A'/, pûge -2j 2.
(tJ Idem, tome V , page 48^; & tome IX, page j" 07. « Le
tombac, dit Ovington, efl: ion recherche aux Indes orientales; oï\ «
croit que c'efl: un mélange naturel d'or, d'argent & de cuivre, <c
qui eft de bon aloi dans de certains endroits, comme à Bornéo, ce
& de beaucoup plus bas aloi dans d'autres , comme à Siam. » Voyage
de Jean Ovington, tome II, page 21 ^. — Le tombac de Siam & de
Bornéo, ne nous laifle pas douter qu'il n'y ait dans ces contrées
plufieurs autres mines de cuivre , dont les Voyageurs ont néglige
de faire mention.
O ij
io8 Histoire Naturelle
l'on fabriquoit des vafes de cuivre & de laiton (aj. Ces
mines de la Barbarie & du royaume de Maroc, four-
niflent encore aujourd'hui une très-grande quantité de
ce métal que les Africains ne fe donnent pas la peine
de raffiner, =& qu'ils nous vendent en cuivre brut. Les
montagnes des îles du cap Vert contiennent aufli des
mines de cuivre ; car il en découle plufieurs fources
dont les eaux font chargées d'une grande quantité de
parties cuivreufès qu'il efl; aifé de fixer & de recueillir
par la cémentation (b). Dans la province de Bambuck,
fi abondante en or, on trouve auffi beaucoup de cuivre,
& particulièrement dans les montagnes de Radfch'inkadbar
qui font d'une prodigieufe hauteur (c). Il y a auffi des
mines de cuivre dans plufieurs endroits du Congo &
à Benguela; l'une des plus riches de ces contrées eft
celle de la baie des Vaches dont le cuivre efl très-fin (d) ;
(a) L'Afrique de Marmol; Paris, i66yytome II , page S ^ ; &
tome III t page S.
(b) II y a ^Qs mines de cuivre dans les îles du cap Vert , & parti-
culièrement dans l'île Saint- Jean , où le Voyageur Roberts a remarqué
des eaux cuivreufès , dans lefquelles il fuffifoit de tenir la lame d'un
couteau pendant une minute ou deux, pour que cette lame fût iii-
cruftée de cuivre d'une belle couleur jaune. ... Il remarqua plufieurs
fontaines dont \t^ eaux produifoient le même effet, qui étoit toujours
plus marqué à mefure qu'on s'approchoit de la fource. Hijlo'ire gé-
Tiérale des Voyages, tome II , page S 9 9-
(c) Hifloire générale des Voyages, tome II , page i^^; & tomt
IV, page ^S S,
(d) Idem , tome IV, page ^S^ ; & tome V, page S(.
DES Minéraux, 109
on trouve de même des mines de ce métal en Guince,
au pays des Infijejfe (e) , & enfin dans les terres des
Hoitentois. Koibe fait mention d'une mine de cuivre
qui n'eft qu'à une lieue de diftance du Cap , dans une
très-haute montagne, dont il dit que le minéral efl pur
& très - abondant (f). Cette mine fuuée dans une li
haute montagne, eft fans doute de première formation
comme celles de Bambuk , & comme la plupart des
autres mines de cuivre de l'Afrique ; car quoique les
Maures, les Nègres, & fur-tout les Abyiïins, aient eu
de temps immémorial des inftrumens de ce métal (g) ,
leur art ne s'étend guère qu'à fondre le cuivre natif ou
celui de troifième formation, & ils n'ont pas tenté de
tirer ce métal des mines pyriteufes de féconde formation,
qui exigent de grands travaux pour être réduites en
métal.
Mais c'efl fur - tout dans ie continent du nouveau
monde, & particulièrement dans les contrées, de tout
temps inhabitées, que fè trouvent en grand nombre les
mines de cuivre de première formation ; nous avons
déjà cité quelques lieux de l'Amérique feptentrionale ,
(e) Hifloire générale ^q'î> Voyages, tome IV > page ^4-4'
^f) Idem, tome V, page i 8 C.
(g) II y a des mines de cuivre très-abondantes dans im lieu nommé
Soudi , qui n'eft pas loin à!Alï[fina. Les forgerons nègres fe rendent
à Soudi vers le mois de feptembre & s'occupent à ie fondre jufqu'au
mois de mai. Idem, tome IV, page ^ ^ 2,
;io Histoire Naturelle
ou l'on a rencontre de gros blocs de cuivre natif <Sc
prefque pur, on en trouvera beaucoup plus à mefure
que les bommes peupleront ces déferts; car depuis que
ies Espagnols fe font babitués au Pérou & au Cbily, on
en a tiré une imnienfe quantité de cuivre; par - tout
on a commencé par les mines de première formation
qui font les plus aifées à fondre. Frézier, témoin judi-
cieux, rapporte « que dans une montagne qui efl à
„ douze lieues de Pampas du Paraguay Si à cent lieues
de la Conception, l'on a découvert des mines de cuivre
fi fmgulieres qu'on en a vu des blocs ou pépites de
plus de cent quintaux ; que ce cuivre efl fi pur que d'un
feul morceau de quarante quintaux, on en a fait fix
canons de campagne de bx livres de balle cbacun
pendant qu'il étoit à la Conception; qu'au refte, il y a
„ dans cette même montagne du cuivre pur & du cuivre
imparfait , & en pierres mêlées de cuivre (h) ».
C'eft aux environs de Coquhnbo que les mines de
cuivre font en plus grand nombre, & elles font en
même temps {\ abondantes qu'une feule, quoique tra-
vaillée depuis long - temps , fournit encore aujourd'hui
tout le cuivre qui fe confomme à la côte du Ghily &.
du Pérou. Il y a aulTi plufieurs autres mines de cuivre
à Carabaya & dans le corrégiment de Copiago (ï) ; ces
(h) Voyage à la mer du Sud; Paris, 1 7S 2 , pages j6 & jj*
(i) Hifloire générale des Voyages, tome XIII, pages ^12.
n
î>
>3
•)■)
•)•>
»
DES Af I N É R A V X. r i [
mines de cuivre du Pérou font prefque toujours mélaes
d'argent, en forte que fouvent on leur donne le nom
de mhies d'argent, Sl ïon a obfervé qu'en général, toutes
les mines d'argent du Pérou font mêlées de cuivre,
&. que toutes celles de cuivre le font d'argent CâJ; mais
ces mines de cuivre du Pérou font en affez petit nombre,
& beaucoup moins riches que celles du Chily ; car
M. Bowles les compare à celles qu'on travaille aduelle-
ment en Efpagne ("/). Dans le Mexique, au canton de
Kol'tma, il fe trouve des mines de deux fortes de cuivre,
l'une fi molle &. fi ducftile que les habitans en font de
très -beaux vafes, l'autre fi dure qu'ils l'emploient au
lieu de fer pour les inftrumens d'agriculture (m): enlin
l'on trouve des mines de cui\'re à Saint-Domingue (n) ,
ÔL du cuivre en métal & de première formation au
Canada fo) &. dans les parties plus Septentrionales de
fkj Barba métallurgie, iome 1 , pages i o y & i o S.
(l) La mine de cuivre de Carabaya , dans le Pérou, contient le
même quartz ^ la même marcaOlte & la même matrice d'améthille que
la nouvelle mine de cuivre que l'on travaille à Colmcnaoviejo , à fix
lieues de Madrid. — Celle de cuivre verte de Moquagna^ dans le
Pérou, efl prefque la même que celle de Molina d'Arragon. Hijïoire
Naturelle d' Efpagne , par M. Bowles , page 2 S .
(m) Hifloire générale des Voyages, tome XII , page 6 ^S.
(n) Idem, ibid. page 218.
(0) Sur les bords du lac Erié au Canada , on a vu des blocs de
cuivre ruuge tout régulilé & qu'on a employé fans aucune prépa-
ration : on foupço.me que cette mine ell dans le lac même. AI.
Cuetlard; Mémoires de l' Académie des Sciences, année i yj 2, p. 216.
112 Histoire N atu r elle
l'Amérique, comme chez les Michillimakinac (p) , & aux
environs de la rivière DdiWoKe, à la baie d'Hud/bn f^);
il y a d'autres mines de cuivre de féconde formation,
aux Illinois (rj & aux Sioux (fj; & quoique les Voya-
geurs ne difent pas qu'il fe trouve en Amérique, des
mines de tombac comme en Afie & en Afrique, cepen-
dant les habitans de l'Amérique méridionale ont des
anneaux , des bracelets & d'autres ornemens d'une
(p) II y a du cuivre prefque pur & en grande quantité' aux environs
d'un grand lac, au pays des Alichillimakinac , & même dans les petites
îles de ce lac ; on a travaille' de ce cuivre à la miffion du faut Sainte-
Alarie. Hijloire de la nouvelle France , par Charlevoîx , tome III , p. 2 S i .
(q) Aux environs de la rivière Danoife , à la haie d'Hudfon , il
y a une mine de cuivre rouge, fi abondante & fi pure, que fans
le pafler par la forge, les Sauvages ne font que le frapper entre deux
pierres, tel qu'ils le recueillent dans la mine, & lui font prendre la
forme qu'ils veulent lui donner. Voyage de Robert Lade. Traduâion;
Paris , I 744 , tome II , page ^16.
(r) Il y a auffi une mine de cuivre au pays des Illinois, qui
efl jointe à une mine de plomb, à lames carrées; la parde cuivreufe
eft en verdet, & le total eft mêlé d'une terre jaunâtre qui paroît
ferrugineufe. M. Guettard; Mémoires de V Académie des Sciences,
année 1 y ^ 2 , page 216.
(f) Charlevoix rapporte que le Sueur avoit découvert une mine
de cuivre très -abondante dans une montagne près d'une rivière au
pays de Sioux, dans l'Amérique feptentrionale , & qu'il en avoit fait
tirer en vingt-deux jours trente livres pelant ; il ajoute que la terre de
cène mine eft verte & furmontée d'une croûte noire & aufll dure
que le roc. Hijloire àr Defcription de la nouvelle France ; Paris, 1744,
tome II , page 41 ^.
matière
T^ E s Minéraux. r i 5
matière métallique qu'ils nomment caracoli , & que les
.Voyageurs ont regarde comme un mélange de cuivre,
d'argent & d'or produit par la Nature ; il efl vrai
que ce caracoli ne fe rouille ni ne fe ternit jamais;
mais il cft aigre , grenu <Sc cafTant ; on efl obligé de
le mêler avec de Tor pour le rendre plus doux & plus
iraitable; il efl donc entré de l'arfenic ou de l'étain
dans cet alliage; & fi le caraco/i neR pas de la platine,
ce ne peut être que du tombac altéré par quelque
minéral , d'autant que le Relateur ajoute : « Que les
Européens ont voulu imiter ce métal en mêlant fix parties «
d'argent , trois de cuivre & une d'or ; mais que cet «
alliage n'approche pas encore de la beauté du caracoli «
des Indiens, qui paroît comme de l'argent fur -doré «
légèrement avec quelque chofe d'éclatant, comme s'il «<
étoit un^ peu enflammé frj ». Cette couleur rouge &
brillante n'eft point du tout celle de la platine, & c'efl
ce qui me fait préfumer que ce caracoli des Américains»
cil une forte de tombac , un mélange d'or , d'argent &
de cuivre, dont la couleur s'cfl peut-être exaltée par
i'arfenic.
Les régioiis d'où l'on tire aétuellement la plus
grande quantité de cuivre font le Chily, le Mexique
6l le Canada en Amérique ; le royaume de Maroc &
ies autres provinces de Barbarie en Afrique; le Japon
»■ — ■ ■ ■ '%
(t) Nouveau Voyage aux îles de l'Amérique j Paris, iyz2f
tome II , page 2 i .
Aiiuéraux j Tome IIL P
114 Histoire Natv relle
èi la Chine en Afie , &. la Suède en Europe: par-tout
on doit employer pour extraire ce métal, des moyens
différens, fuivant la.différence des mines ; celles du cuivre
primitif ou de première formation par le feu, ou celtes
de dècompofition par l'eau, &qui toutes font dans l'ctat
métallique, n'ont befoin que d'être fondues une (èulefois
popr être réduites en très-fjon métal ; elles donnent par
conféquent un grand produit à peu de frais: après les
mines primordiales qui coijtcnt le moins à traiter, on
doit donc s'attacher à celles où le cuivre fe trouve
très-atténué , très-divifé, & où néanmoins il confcrve
fon état métallique ; telles font les eaux chargées de
parties cuivreufes qui dccouient de la plupart de ces
mines. Le cuivre charié par l'eau y efl difTous par
i'acide vitriolique, &. cet^ acide s'attachant au fer qu'on
plonge dans cette eau, & le détruifant peu-à-peu, quitte
en même temps le curvre & le lai(fe à la place du fer: on
peut donc facilement tirer le cuivre de ces eaux qui en
font chargées en y plongeant des lames de fer, fur lefquelles
il s'attache en atomes métalliques, qui forment bientôt
des incruflaîions maffives. Ce cuivre de cémentation
donne dès la première fonte , un métal ' aufTl pur que
celui du cuivre primitif: ainfi l'on peut affurcr que de
toutes les mines de cuivre , celles de première & celles
de dernière formation , font les plus aifées à traiter
& aux moindres frais.
Lorfqu'ii fe trouve dans le courant de ces eaux
D E s M I N É R A U X. 115
cuivreufês des matières ferrugineufes aimantées ou atti-
rables à l'aimant, & qui par confcquent font dans i'état
métallique ou prefque métallique, il fe forme à la furface de
ces maffes ferrugineufes une couche plus ou moins épaifïè
de cuivre; cette cémentation faite par la Nature, donne
un produit femblable à CNelui de la cémentation artilicielle;
c'eft du cuivre prefque pur, & que nos Minéralogiftes
ont aufTi appelé cuivre naiif (u) , quoique ce nom ne doive
s'appliquer qu'au cuivre de première formation produit
par le feu primitif Au refte, comme il n'exifte dans le
fein de la terre que très-peu de fer en état métallique,
ce cuivre, produit par cette cémentation naturelle, n'eft.
auiïi qu'en petite quantité, & ne doit pas être compté
au nombre des mines de ce métal.
Après la recherche des mines primitives de cuivre
&. des eaux cuivreufês qui méritent préférence, par la
facilité d'en tirer le métal , on doit s'attacher aux mines
de troifième formation, dans lefquelles le cuivre décom-
pofé par les élémens humides, eft plus ou moins féparé
des parties pyriteufes, c'eft-à-dire, du foufre & du fer
dont il eft furchargé dans tous fcs minerais de féconde
formation. Les mines de cuivre vitreufes & foyeufcs,
(u) Lorfque ces eaux qui tiennent du vitriol bleu en diflolution,
rencontrent des molécules ferrugiiieufes ( fans doute dans iVtat métal-
lique ou très- voifines de cet état), il en réfulte une efpèce de
cémentation naturelle qui donne naillance à du cuivre uat'if. Lettres
de AI. Demejle au Doéleur Bernard, tome 11, page ^6 S.
Pij.
ii6 Histoire Naturelle
celles d'azur & de malachite , celles de bleu & de vert
de montagne , &:c. font toutes de cette troifième forma-
lion ; elles ont perdu la forme pyriteufe , & en même
temps une partie du foufre & du fer qui efl la bafe de
toute pyrite; la Nature a fait ici, par la voie humide &
à l'aide du temps, cette féparatton que nous ne faifons
que par le moyen du feu ; & comme la plupart de ces
mines de troifième formation ne contiennent qu'en petite
quantité des parties pyriteufes, c'e(t-à-dire, des principes
du foufre, elles ne demandent auffi qu'un ou deux feux
de grillage , & fe réduifent enfuite en métal dès la pre-
mière fonte.
Enfin, les plus rebelles de toutes les mines de cuivre^
îes plus difficiles à extraire, les plus difJDendieufes à traiter,
font les mines de féconde formation, dans lefquelles le
minerai efl toujours dans un état plus ou moins pyriteux;
toutes contiennent une certaine quantité de fer , & plus
elles en contiennent plus elles font réfraétaires (xj ; &
malheureufement ces mines font dans notre climat les
plus communes, les plus étendues &. fouvent les feules
(x) Nota. Toutes les mines de cuivre fulfureufes ou arfenicafes
contiennent toujours plus ou moins de fer. . . . L'arfenic ne refte Ci
opiniâtrement uni au cuivre que parce qu'il ell joint avec lefer. . . . II
faut donc , pour avoir du bon cuivre „féparer, autant qu'il eft pofllble,
toutes les parties du fer qui peuvent s'y trouver, & c'eft par Je
jnoyen du fafFre qu'on peut faire cette féparation. Voyc^ Delins , cité
dans k Journal de Phyfique ; JuilUi jySQfpages ^s à^ f^iV'
DES Minéraux. 117
qui fe prcfentent à nos recherches : il faut, comme nous
l'avons dit , plufieurs torréfactions avant de les jeter au
fourneau de fufion , &l fouveni encore plufieurs autres
feux pour en griller les mattes avant que par la fonte
elles fe réduifent en cuivre noir, qu'il faut encore traiter
au feu pour achever d'en faire du cuivre rouge. Dans
ces travaux , il fe fait une immenfe confommation de
matières combuflibles ; les foins multiplies, les dépenfes
exceffives ont fouvent fait abandonner ces mines ; ce
n'efl que dans les endroits où les combuflibles, bois
ou charbon de terre abondent, ou bien dans ceux où
le mmérai de cuivre efl mêlé d'or ou d'argent, qu'on
peut exploiter ces mines pyriteufes avec profit ; &
comme* l'on cherche, avecraifbn, tous les moyens qui
peuvent diminuer la dépen/è, on a tenté de réunir les
pratiques de la cémentation ôl de la lefTive à celle de
la torréfadion (jyj.
(y) Quand on veut avoir le cuivre des mines fans les fondre ^ il
faut les griller &. les porter toutes rouges, ou au moins très-chaudes,
dans une cuve où l'on aura mis un peu d'eau auparavant, pour em-
pêcher qu'elles ne s'allument , ce qui arrive quand elles lont fulfu-
reules. . . . Comme la mine s'y met prefque rouge, l'eau s'échauffe
& elle détache mieux la partie cuivreufe difloute par l'acide du loufre ,
ce qu'elle fait en moins de deux jours fi la mine a e'té bien grillée, car
celle qui ne l'a point été n'abandonne pas fon cuivre. Pour avoir encore
ce qui peut être refté de cuivre dans la mine , après cette première opé-
ration , on la grille une féconde fois & même on lui <Jonne deux feux,
parce qu'étant humide & prefque réduite en boue , un premier feu la
ii8 Histoire Natu re l le
Nous ne donnerons point ici le détail des opérations
grille mal; lorfqu'elle eft bien grillce , on la remet dans la cuve fur
la première ieffive ; quand on veut l'avoir j)lus forte ou plus chargée
de cuivj» , on l'y laifle quarante-huit heures.
On peut emj)loyei cette leflive à deux ufages ; i ' en l'évaporant
en faire du vitriol bleu; 2." à en précipiter le cuivre. . . . Quand la
leflive s'efl: chargée de cuivre, on la letire de delTus Ton marc, A
on la fait chauffer dans une chaudière de plomb. On a dans une
cuve plufieurs barres de fer arrangées verticalement , & toutes féparées
les un s des autres. ... on y verle enluite la lelîive toute chaude, <5c
on couvre !a cuve pour en conferver la chaleur, car plus long-temj)S
elle refte chaude, plutôt le cuivre s'y précipite; & s'il y a allez de
fer ddus la cuve , tout le cuivre peut s'y précipiter dès la première
fois, fans quoi il faudroit chauffer de nouveau la leflive; car quoique
le cuivre fe précipite auffi dans la lelîive froide, la précipiiatioii en
ell beaucoup plus lente . . .
Pour connoître fi tout le cuivre a été précipité, on trempe dans
la leflive une lame de fer polie & qui ne foit point graffe, & on l'y
tient quelque temps ; fi cette lame fe couvre d'un enduit rouge, c'ert:
une preuve qu'il y a encore du cuivre dans M leflive; fi elle n'y
change pas de cou eur tout le cuivre efl précipité.
Lorfque tout le cuivre s'efl précipité , on fait couler la leflive dans
des baquets, en débouchant les trous qui font à diflfe'rentes hauteurs
le long d'un des côtés de la cuve, afin de ne pas déranger les barres
de fer; il faut prendre garde aufll , lorfqu'on a débouché les trous
d'en-bas , que l'eau n'entraîne avec elle le limon cuivreux. Cette leflive
coulée & reçue dans les baquets , peut être employée à faire la cou-
peiofe verte, puifqu'elle contient du fer diffous.
Tant que les barres de fèr ne font pas entièrement rongées , elles
peuvent toujours fervir à précipiter , & il n'eft pas nécefl"aire de les
forùr louvent de h cuve pour les nettoyer : ainfl l'on peut verfer de
"^(^
D E s' M I N É R A U X, 119
du raffinage de ce métal (ij , ce feroit trop s*éloigner
de notre objet, & nous nous contenterons feulement
d'obferver que le déchet au raffinage efl d'autant
la nouvelle leflîve chaude jufqu'à ce qu'elles foient prefque dc'truites;
après quoi on les retire , on les racle & l'on met la matière cuivreufe
qui en tombe dans de l'eau claire. On pourroit mettre d'abord ces
barres de fer dans la chaudière de plomb où l'on fait bouillir la lefljve
cuivreule , la précipitation fe feroit encore plus vite.
La matière cuivreufe qui vient de cette précipitation , contient
beaucoup de fer qu'on peut en ièparer en partie par le lavage; mais
comme le cuivre elT: réduit en un limon fort fin, il faut bien prendre
garde que l'eau ne l'emporte avec elle. Lorfqu'on a rallèmblé allez
de ce limon pour en faire une fonte , on le grille fi l'on veut, quoique
cela ne foit pas nc-ceflaire , mais comme il faut le sécher exadement
avant de le fondre , on le met fur une aire couverte de charbon
qu'on allume pour qu'il rougiflé : on répète cette manœuvre deux fois,
parce qu'ainli grillé il fe fond plus ailément.
Ce cuivre ainfi précipité , eft la même chofe que le cément de
Hongrie , & on le fond avec addition de fcories qui ne rendent
point de mattes , «Se mieux encore avec des fcories de refonte de
litharge ; alors on ne retire de la fonte que du cuivre noir & point"
de matte.
Cette manière de retirer le cuivre de fes mines , fe fait avec des
frais peu confidérables , mais elle n'en fépare jamais tout le cuivre, &
le minéral qui reftff , en contient encore allez pour mériter d'être
fondu. Traité de la fonte des mines de Schlutter , traduit par He Ilot ,
tome II , pages ^ 0 2 & fuiv.
(jj Le déchet au raffinage du cuivre noir de Saint- Bel, efl de
huit à neuf pour cent. Mémoires de Ad. Jars. — Le déchet des cuivres
bruts de Barbarie & de Mogador, n'eft que de cinq ou fjx pour cent.
Aie moire s de AI. Limare.
120 Histoire Naturelle
moindre (d) , que la quantité qu'on raffine à la fois eft
plus grande, &: cela par une raifon générale &. très-
fimple, c'eft qu'un grand volume offrant à proportion
moins de furiace qu'un petit , l'adiion deflrudlive de
(a) Un raffinage de cinquante quintaux de cuivre noir , rend
ordinairement quarante-cinq à quarante-fix quintaux de cuivre rofette,
ce qui fait un dcchet de huit où neuf pour cent, niais ce déchet n'eft
qu'apparent , puifque par des eiïàis réitérés , on a reconnu que Ton
déchet réel n'étoit que de quatre &: demi pour cent, parce qu'il refle
toujours beaucoup de cuivre dans les crafles ; on fait que dans quelques
fourneaux que ce foit , \qs fcories provenant du raffinage , font toujours
riches en cuivre : il efl prouvé que le cuivre fait environ un pour
cent moins de déchet dans le fourneau à manche que fur les petits
foyers , &. on peut attribuer cette différence à ce que l'on perfec-
tionne dans une feule opération , une quantité de cuivre qui en
exige au moins vingt fur le petit foyer; on fait que l'on ne peut
raffiner du cuivre fans qu'il n'y en ait toujours un peu qui fe fcorifie
avec les matières qui lui font étrangères; plus le volume e(l grand,
plus la quantité qui fe fcorifie efl petite à proportion Il eft
prouvé que la dépenfe du grand fourneau efl moindre de deux tiers
de celle qu'exige en charbon le raffinage fur les j^etits foyers. .. .
Le fourneau de Chefey dans le Lyonnois , à raffiner le cuivre, a
plus de chaleur que n'en ont ceux d'Allemagne. . . Celui de Gruen-
thaï en Saxe, conlomme quatre cents trente-huit pieds cubes de bois
de corde, & environ vingt-quatre pieds de cl^^rbon pour raffiner
quarante quintaux de cuivre noir ; à Tayoba en Hongrie, on con-
fomme deux cents vingt pieds cubes de bois de corde pour raffiner
cinquante quintaux de cuivre noir, auxquels on ajoute trois ou quatre
quintaux de plomb qui fe fcorifie en pure perte : on fait encore que
dix livres de plomb fcorifient environ une livre de cuivre. M. Jars,
Miin. de l'Académie des Sciences, année 1 76 ^ > pages 6 02 & 6 o^-
l'air
D E s M I N É R A U X. 121
l*air &. du feu qui porte immédiatement flir îa furfacc
du métal, emporte, calcine ou brûle moins de parties
de la mafTe en grand qu'en petit volume: au rede, nous
n'avons point encore en France d'afTez grands fourneaux
de fonderies pour raffiner le cuivre avec profit ; les
Anglois ont non-feulement établi plufieurs de ces four-
neaux fb), mais ils ont en même temps conflruit des
machines pour laminer le cuivre afin d'en revêtir leurs
navires. Au moyen de ces grands fourneaux de raffinage,
ils tirent bon parti des cuivres bruts qu'ils achettent au
Chily, au Mexique, en Barbarie & à Mogador; ils en
font un commerce très - avantageux , car c'efl d'An-
gleterre que nous tirons nous-mêmes la plus grande
partie des cuivres dont on fe fert en France 6l dans
nos Colonies ; nous éviterons donc cette perte , nous
gagnerons même beaucoup fi l'on continue de protéger
(b) On raffine aujourd'hui le cuivre dans de grands fourneaux de
réverbère, à l'aide du vent d'un foufliet qu'une roue hydraulique fait
mouvoir; on n'y emploie (jue du charbon de terre naturel. Chaque
raffinage eft de quatre vingts quintaux, & dure quinze à feize heures.
On fait ordinairement trois raffinages de fuite dans le même ïourne2iu ,
par feniaine; on le laiffe refroid r , & on le réjiare pour la feinaine
fuivante. Quand les opérations font confidcrables , il f.ut avoir trois
de ces fourneaux , dont un eft toujours en réparation lorfque les autres
font en feu. En fe bornant à mille quintaux de fabrication par mois,
il fuffit d'un de ces fourneaux à réverbère. A4é moire fur r établi Ifement
d'une fonderie ù" d'un laminoir de cuivre , communiqué à Ai. de^ Buffon ,
par Af. de Limare.
Minéraux , Tome ÎIL Q
122 Histoire N atu relle
J'étabJj/Tement que M. Je Limare fcj, l'un de nos
plus habiles Mctallurgiiles vient d'entreprendre fous les
auf]3ices du Gouvernement.
^ ■ ■ ■■ ■" — — — — — ■ — — • - — — -■■ — ■' " *
fc) Les ordres du Aiini/îre pour doubler /es Vai/Tcaux en cuivre,
dit M. de Limare , font prendre le parti d'établir des fourneaux
de fonderie & des laminoirs à Nantes , où l'on feroit amener de
Cadix les cuivres bruts du Chili & de toute rAméj"ique , ainfi que
ceux de JMogador & de la Barbarie; on pourroit même tirer ceu:^
du Levant qui viennent à Marfeille ; car Nantes efl le port du royaume
qui- expédie & qui reçoit le plus de Navires de Cadix, de la Ruflle
& de l'Amérique feptentrionale ; il e(l aufîi le plus à portée des mines
de charbon de terre & des débouchés d'Orléans &. de Paris, ainfi
que des arl'enaux de Rochefort, de l'Orient &. de Breft.
La confommation du cuivre ne peut qu'accroître avec le temps ,
par la quantité de nitricres qu'on établit dans le royaume , par le
doublage des Navires que l'on commence à faire en cuivre , &c. par
ies expéditions que l'on pourra faire pour l'Inde, de planches de
cuivre coulé ; par la fourniture des arfenaux d'Elpagne pour le
doublement de leurs Vailîèaux , en payement de laquelle on pren-
droit des cuivres bruts du Mexique, dont le Roi d'Efpagne s'efl
réfervé la polTeflion, & qui ne perdent que fix à fept pour cent
dans l'opération du raffinage ....
l^es cuivres bruts de Barbarie ne coûteront pas davantage , foit
qu'on les tire diredeiiient de Mogador & de Larrache , par les
Navires hoUandois, foit que l'on prenne la voie de Cadix par les
Vaifleaux même de Nantes, qui font fouvent le cabotage, en attendant
leur chargement en retour pour France, D'ailleurs ces, cuivres de Barbarie
ne donnent que cinq à fix pour cent de déchet au raffinage.
On pourra auffi fe procurer des cuivres bruts de la Ruflle, de
la Hongrie, & fur-tout de l'Amérique feptentrionale, qui a fourni
jufqu à fte jour la majeure partie des raffineries Ang\o\(es. Alémoïrc
(ommuniqué par AI. de Limare à M. de Bufon, en T^ovmbre lySo,
DES Minéraux. 123
DE LÉ T A I N.
v>E métal, le plus léger de tous fi^J, n'efl pas à
beaucoup près aulTi répandu que les cinq autres ; il
paroît affe(5ter des lieux particuliers, &l dans lefquels il
fè trouve en grande quantité ; il ell au/Ti très-rarement
mêlé avec l'argent, & ne fè trouve point avec l'or;
nulle part il ne fe préfcnte fous fà forme métallique (1>J ,
&. quoiqu'il y ait d'alTez grandes variétés dans Tes mines,
elles font toutes plus ou moins mêlées d'arfenic. On
en connoît deux fortes principales ; la mine en pierre
(a) Le pied cube d'étaia pur de Cornouailles fondu & non battu ,
pèle, fuivant M. BrifTon, jio livres 6 onces 2 gros 68 grains, &
lorlque ce même e'tain ell battu ou ccroui , fe pied cube pèle 5 i o
livres i 5 onces 2 gros 45 grains; ce qui démontre que ce métai
n'eft que peu Tufceptibie de comjuelîlon. L'ctain de Melac ou de
Alalaca, fondu & non battu, pèle le pied cube 510 livres 1 i onces
6 gros 6 1 grains ; & lorfqu'il eft battu ou écroui , il pcfe 5 i i livres
7 onces 2 gros 1 7 grains ; ainfi cet ctain de Maiaca peut fe com-
primer un peu plus que i'étain de Cornouailles. La pefanteur fpé-
cifique de I'étain fin &. de I'étain commun, eft beaucoup plus grande,
jiarce que ces étains font plus ou moins aliits de cuivre & de plomb.
(h) Quelques auteurs ont écrit qu'on avoit trouvé des morceaux
d'étain natif dans les mines d'étain de Bohème & de Saxe , mais
cela ell très-douteux ; & I'étain que l'on voit dans les Cabinets ,
fous le nom d\'tûin natif, qui a une figure de ftaladite non cylin-
drique, mais ondulée ou bouillonnée & argentine, & qu'on prétend
qui fe trouve dans la prefqu'île de Maiaca, nous paroît formé par
le fea des volcans. Bomare; Alinéralog'te , tome JJ , article de /'Etain.
X2j^ Histoire Naturelle
vitrcufc ou roche quartzcufe , clans laquelle l'crain cfl
difTéminc, comme le fer l'cfl clans Tes mines primordiales;
& la mine crifialliféc qui eft ordinairement plus riche
que la première.
Les criflaux de ces mines d'c-tain font très-apparcns,
très-diftinds , <Sc ont quelquefois plus d'un pouce de
longueur. Dans chaque minière, & fouvent dans la
même , ils font de couleurs diilfcrentcs ; il y en a de
noirs , de hlancs , de jaunes , & de rouges comme le
grenat ; les criflaux noirs font les plus communs &. les
plus riches en métal : il paroît que le foie de foufre,
qui noircit la furface de l'étain, a eu part à la mlné-
ralifation de ces mines en criflaux noirs ; quelques-unes
de ces mines donnent foixante - iïw , & ju/qu'à quatre-
vingts livres d'étain par quintal (c) . Les criflaux blancs
pèfènt plus qu'aucun des autres, & cependant ils ne
rendent que trente ou quarante livres de métal par
cent; dans les mines de Saxe, les criflaux rouges &
les jaunes font plus rares que les noirs & les bJancs;
toutes ces mines en criflaux fè réduifènt aifément en
étain , par la hmple addition de quelques matières
inflammables , ce qui démontre que ce ne font que des
chaux, c'efl-à-dire du métal calciné, & qui s'efl tnÇmit
criflallifé par l'intermède de i'eau.
Dans la féconde forte de mines d'étain, c'efl-à-d;»re.
(c) Traité de la fonte des mines de Sclilutier, terne I,page.2i j.
DES Minéraux. 125
dans celles qui font en pierre ou roche, le meta!, ou
plutôt la chaux de l'étain, eft li intimement incorporée
avec la pierre, que ces mines font très - dures & très-
difficiles à fondre. La plupart des mines de Cornouailles
en Angleterre, celles de Bohème & quelques-unes de
ia Saxe , font de cette nature ; elles fe trouvent quelque-
fois mêlées de mines en crillaux ; mais d'ordinaire ces
mines en pierre font feules & fe trouvent en liions , en
couches, en rognons , en grenailles; fbuvent le roc qui
les renferme eft fi dur qu'on ne peut le faire éclater
qu'en le petardant avec la poudre, & qu'on eft quel-
quefois ohligc de le calciner auparavant pour l'attendrir,
en faifant un grand feu pendant plufieurs jours dans
l'excavation de la mine ; enfuite loriqu'on en a tiré les
blocs, on eft obligé de les faire griller avant de les broyer,
fous le bocard où la mine fe lave en même temps qu'elle
fe réduit en poudre ; & il faut encore faire griller cette
poudre métallique avant qu'on ne puifte la réduire en
métal.
Si la mine d'ctain , ce qui eft aftez rare , fe trouve
mêlée d'argent, on ne peut féparer ces deux métaux
qu'en faifant vitrifier l'étain (éJ) ; fi elle eft mêlée de
(d) De tous les moyens que l'on indique pour féparer l'argent
de l'ttain , le meilleur & le plus fimple ell d'employer le ter. M.
Grofle a trouvé ce moyen en eflayant une (oiie de plomb, pour voir
s'il pouvoit être employé aux Coupelles; car un s'étoit aperçu qu'il
étoit allié d'étain. Il jeta defîus de la limaille de fer & donna un bon
120 Histoire Naturelle
minerai de cuivre, la miiic cl'étain, plus pc/ànte que
celle de cuivre, s'en fépare par le lavage; mais lorA
qu'elle cfl mêlée avec la mine de fer, on n'a pas trouve
d'autre moyen de fcparer ces deux métaux qu'en les
broyant à fec , & en tirant enfuite le fer au moyen
de l'aimant.
Après que le minerai d'étain a été grillé & lavé ,
on le porte au fourneau de iiifion qu'on a eu foin de
bien chauffer auparavant; on le remplit en parties égales
de charbon & de mine bumeélée ; on donne le feu
pendant dix ou douze heures, après quoi l'on perce le
feu. . . . En peu de temps le plair.b Ce couvrit d'une nappe formce
par l'étain &. le fer ; alors il efl boa d'ajouter un peu de fel aikali
fixe pour faciliter la fe'paration de ces fcories d'avec le rtgule. Cette
pratique peut être ejnployée à féparer l'étain de l'argent; mais avant
d'y ajouter le fer, il faut y mettre le plomb, fans quoi la fonte fe
feroit difficilement & même imparfaitement, parce que l'étain fe
calcineroit fans fe féparer de l'argent. II n'y a point de meilleur moyen
de remédier aux coupelles dont le plomb fe héri/îè ou végette à
J'occafion de l'étain.
Mais fi on avoit de l'or & de l'argent allies d'étain , il fau droit
calciner vivement ces métaux dans un creufet afin de vitrifier l'étain,
& enfuite pour enlever ce verre d'étain, ou même pour perfedionner
fa vitrification , il Tuffiroit de jeter dans le creufet un peu de verre
de plomb. Af. Grojfe , cité par M. Hellot dans le Traité de la fonte
des mines de Schlutter , tome I , page 226. Nota. Ce procédé pour
la calcination de l'étain ne peut fe faire dans un creufet que très-
lentement & par une manœuvre pénible , au lieu que cette opération
fe fait facilement, prompteinent & compUtemem fur un teft à rôtir.
Note communiquée par M. de Morveau.
D E s AI I N É R A U X, ] 27
creufet du fourneau pour laifTer couler l'ctain qu'on
reçoit clans des lingotières; on recueille aufTi les fcories
pour les refondre & en retirer le métal qu'elles ont
retenu, & qu'on ne peut obtenir en entier que par
plufieurs fudons. En Saxe, l'on fond ordinairement
dix -huit ou vingt quintaux de mines en vingt -quatre
heures, mais il efl très-néceilaire de faire h'icn griller
& calciner le minerai avant de le porter au fourneau
de fufion , afui d'en faire fubiimer , autant qu'il efl
pofTible , l'arfenic qui s'y trouve fi intimement mêlé
qu'on n'a pu trouver encore les moyens de l'enlever
en entier & de le féparer parfaitement de i'étain ;
& comme les mines de ce métal font toutes plus ou
moins ar/ènicales , il faut non-fèulement les griller, les
broyer & les laver une première fois ; mais réitérer
ces mêmes opérations, deux, trois & quatre fois, félon
que le minerai efl plus ou moins chargé d'arfenic, qui
dans l'état de nature, paroît faire partie conflituante de
ces mines ; ainfi I'étain <& l'arfenic , dès les premiers
temps de la formation des mines par l'aclion du feu
primitif, ont été incorporés enfcmble ; & comme il ne
faut qu'un très - médiocre degré de chaleur pour tenir
J'étain en fudon, il aura été entièrement calciné par la
violente chaleur du feu primitif, & c'eft par cette raifon
qu'on ne le trotive nulle part dans le fein de la terre
fous fà forme métallique ; & comme il a plus d'affinité
avec l'arfenic qu'avec toute autre matière, leurs parties
128 Histoire Naturelle
calcinées & leurs vapeurs fublimces , fe feront mutuelle-
ment faifics, & ont forme les mines primordiales dans
lefquclies l'ctain n'efl mêlé qu'avec Tar/ènic fèul ; celles
qui contiennent des parties pyriteufes font de féconde
formation, & ne fë (ont établies qu'après les premières;
elles doivent , comme toutes les mines pyriteufes , leur
formation & leur polition à l'action & au mouvement des
eaux : les premières mines d'ctain fè trouvent par celte
raifon en filons dans les montagnes quartzeufes produites
par le feu , & les fécondes dans les montagnes à couches
formées par le dépôt des eaux.
Lorfque l'on jette la mine d'étain au fourneau de
fufion, il faut tâcher de la faire fondre le plus vite
qu'il efl poffible , pour empêclier la calcination du
métal fej qu'on doit auffi avoir foin de couvrir de poudre
(e) Les Anglois font rôtir trois fois la mine d't'tain , & la lavent
jufcju'à ce qu'il n'y paroiffe plus rien de terreux ; enfuite ils la chauffent
une quatrième fois jufqu'à la faire bien rougir. Ils la pèfent pour favoir
ce qu'elle a perdu au lavage îk à la calcination : à une partie de cette
mine, ainfi préparée , ils joignent trois parties dejlux noir; ils mettent
ce mélange dans un creufet & le couvrent de fel commun. Ils fondent
à un feu vif & prompt , & n'y lailTent le creufet que le temps nécef-
faire pour faire fondre i'étain; tant parce qu'il fe brûle aifément, que
parce que les feis en fufion le rongent & en dérobent.
Quelquefois ils fubflituent au flux noir la même quantité de charbon
de terre en poudre ; ils le mêlent & conduifent la fonte comme par
le flux noir. Traité de la fonte des mines de Schlutter , traduit par M^
JJeliot , tome J , page 221.
de
DES Minéraux.^ 129
de charbon au moment qu'il eft réduit en fonte ; car
à peine eft-ii en fufion que la furface fè change en chaux
grife, qui devient blanche en continuant le feu. Cette
chaux, dans le premier état, s'appelle cendre d'éui'm, &
dans le fécond on la nomme potée. Lorfque cette der-
nière chaux ou potée d'étain a été bien calcinée , elle
efl aufii réfraélaire au feu que les os calcinés ; on ne
peut la fondre feule qu'à un feu long & très - violent*
elle s'y convertit en un verre laiteux femblable par la
couleur à la calcédoine, & lorfqu'on la mêle avec du
verre , elle entre à la vérité , dans l'émail qui réfulte de
cette fufion, mais fans être vitrifiée (f); c'eft avec cette
potée d'étain , mêlée de matières vitrifiables, que l'on
fait l'émail le plus blanc de nos belles faïences.
Lorfque les mines d'étain contiennent beaucoup
d'arfenic , & qu'on ell obligé de les griller & calciner
à plufieurs reprifes , on recueille l'arfenic en faifant
palTer la fumée de cette mine en calcination , par
des cheminées fort inclinées. Les parties arfenicales
(f) Si on mêle la potée d'étain , au moyen de la fufion , avec
du verre blanc tranfparent, bien-tôt il devient opaque, & paiïe à l'état
d'émail par l'interpofition des molécules de cette chaux invitrifiable,
même par l'intermède du verre de plomb; aulîi empêche -t- elle la
coupellation en nageant à la furface du plomb fondu ; & lorfqu'on
veut coupeller quelque matière métallique qui contient de i'étain,
il faut par une calcination préliminaire en extraire ce dernier métal.
Lettre de M. Demejfe a M. Bernard, tome II , page 40 S,
AïuiérauXj Tome IIL R
130 Histoire Natu relle
s'attachent aux parois de ces cheminées, dont il efl
enfuite aifé de les détacher en les raclant.
On peut imiter artificiellement ces mines d'étain fg),
en mêlant avec ce métal de l'arienic calciné, & même
.ce minerai ne manque jamais d'opérer la calcination de
j'étain, & de fe mêler intimement avec fà chaux lorf-
qu'on le traite au feu avec ce métal (h) , ce qui nous
prouve que c'eft de cette manière que la Nature a
produit ces mines d'étain , & que c'eft à la calcination
de ces deux fubftances , par le feu primitif, qu'eft due
leur origine ; les parties métalliques de l'étain fe feront
réunies avec l'arfenic, 6l de la décompofition de ces
mines par les élémens humides, ont rélulté les mines de
féconde formation , qui toutes font mêlées de pyrites
décompofées & d'arfénic; ainfi , dans toutes ces mines,
l'étain n'eft ni dans fon état de métal , ni même miné-
ralifc par les principes du foufre ; il eft toujours dans
fon état primitif de chaux , & il eft fimplement uni avec
(g) M. Monnet fait entrer du fer en quantité dans la conipofition
de la mine artificielle d'étain. On pourroit donc croire, avec quelque
fondement, qu'il en efl: de l'étain comme du cuivre, & que l'arfenic
ne leur adhère fi fortement que par le fer que les mines de ces deux
métaux contiennent.
(h) Une demi -once de rognures de feuilles d'étain, acquit par
cette calcination, dans une cucurbite de verre, vingt -fix grains
d'augmentation de poids, quoique la chaleur eût été afiez modérée,
pour que l'arienic fe fublimât iàns faire entrer le métal en tufiont
Elémens de Chimie , jjar Al, de Aloryeau , tome II , page Jjo,
DES Minéraux, 131
l'arfenic. Dans les mines de féconde formation, la chaux
d'ctain efl; non-fculcment mclée d'ar/enic , mais encore
de fer & de quelques autres matières métalliques, telles
que le cuivre, le zinc & le cobalt.
La Nature n'ayant produit Téiain qu'en chaux , <Sc
point du tout fous fà forme métallique, c'efl unique-
ment à nos recherches & à notre art que nous devons
la connoiflance & la jouiffance de ce métal utile ; il eft
d'un très-beau blanc, quoique moins brillant que l'argent;
il a peu de dureté, il eft même, après le plomb, le
plus mou des métaux ; on efl obligé de mêler un peu
de cuivre avec l'étain , pour lui donner la fermeté
qu'exigent les ouvrages qu'on en veut faire ; par ce
mélange , il devient d'autant plus dur qu'on augmente
davantage la proportion du cuivre ; & lorfqu'on mêle
avec ce dernier métal une certaine quantité d'étain,
i'alliage qui en réfulte , auquel on donne le nom (ïû'irci'm
ou de bronze, efl beaucoup plus dur, plus élaflique &
plus fonore que le cuivre même.
Quoique tendre & mou lorfqu'il efl: pur, l'étain ne
laiffe pas de confèrver un peu d'aigreur, car il efl
moins duélile que les métaux plus durs, & il fait entendre
lorfqu'on le plie, un petit cri ou craquement qui n'eft
produit que par le frottement entre fes parties confli-
tuantes, &. qui fèmble annoncer leur défunion; cependant
on a quelque peine à le rompre , &. on peut le réduire
en feuilles affez minces , quoique la ténacité ou la
R ij
132 Histoire Naturelle
cohérence de fcs parues ne foit pas grande ; car un fil
d'ctain d'un dixième de pouce de diamètre, fe rompt fous
moins de cinquante livres de poids; fà denfité, quoique
moindre que celle des cinq autres métaux, efl cependant
proportionnellement plus grande que /à ténacité ; car
un pied cube d'étain pèfe ^10 ou ^ i i livres. Au refte
Ja pefanteur fpécifique de l'étain qui efl dans le com-
merce , varie fuivant les différens endroits où on le
fabrique ; celui qui nous vient d'Angleterre efl plus
pefant que celui d'Allemagne & de Suède.
L'étain rend par le frottement une odeur dé/à-
gréable; mis fur la langue fà faveur efl déplaifànte: ces
deux qualités peuvent provenir de i'arfènic dont il efl
très-rare qu'il foit entièrement purgé ; l'on s'en aperçoit
bien par la vapeur que ce métal répand en entrant en
fufion; c'efl une odeur à peu - près femblable à celle
de l'ail, qui, comme l'on fait, caradérife l'odeur des
vapeurs arfenicales.
L'étain réfjfle plus que les autres métaux imparfaits
à l'aélion des élémens humides ; il ne fe convertit point
en rouille comme le fer, le cuivre <Sl le plomb, &
quoique fa fùrface fe teruiffe à l'air, l'intérieur demeure
intad, & fa fuperiicie fe ternit d'autant moins qu'il efl
plus épuré; mais il n'y a point d'étain pur dans le
commerce, celui qui nous vient d'Angleterre efl tou-
jours méic d'un peu de cuivre , & celui que l'on
appelle éiain fit ne laiffe pas d'ctre mclé de plomb.
D E s M 1 N È R A V X. 13^
Quoique l'étain foit le plus léger des métaux , fa
mine, clans laquelle il efl toujours en état de chaux,
eft fpéciiiquement plus pefante qu'aucune de celles des
autres métaux minéraiifcs , &. il paroît que cette grande
pefanteur provient de fon intimité d'union avec l'arfenic;
car en traitant ces mines, on a obfervé que les plus
pefantes font celles qui contiennent en efiet une plus
grande quantité de ce minéral. Les minerais d'étain,
foit en pierre, foit en criflaux, foit en poudre ou fablon,
font donc toujours mêlés d'arfènic , mais fou vent ils
contiennent aujiïi du fer; ils font de différentes cou-
leurs, les plus communs font les noirs <Sc les blancs;
mais lorfqu'on les broie , leurs couleurs s'exaltent & ils
deviennent plus ou moins rouges par cette comminu-
tion. Au refle, les fables ou poudres métalliques qu'on
trouve fouvent dans les mines d'étain n'en font que des
détrimens, & quelquefois ces détrimens font fi fort
altérés qu'ils ont perdu toute confiflance, &. prefque
toutes les propriétés métalliques. Les Mineurs ont
appelé immdick, cette pou/fjère qu'ils rejettent comme
trop appauvrie , & dont en effet on ne peut tirer , avec
beaucoup de travail, qu'ime très-petite quantité d'étain,
îa fubflance de ce mundick n'eft pour la plus grande
partie que de l'arfenic décompofé (i) .
(i) On diftingue aifément le mundick des autres mines par fa
couleur brillante, jnais cependant brune & iale, & dont elle teijit
les doigts .... Les mineurs afîurent qu'ils ne trouvent que peu ou
1^4 Histoire Naturelle
Comme l'ctain ne fe trouve qu'en quelques contrées
particulières, & que fes mines en général, font aiïcz
difficiles à extraire & à traiter, on peut croire avec
fondement , que ce métal n'a été connu & employé
que long-temps après l'or, l'argent & le cuivre, qui fe
font préfentés dès les premiers temps fous leur forme
métallique; on peut dire la même chofe du plomb &
du fer ; ces métaux n'ont vraifemblablement été em-
ployés que les derniers ; néanmoins la connoiffance &
l'ufage des fix métaux, date de plus de trois mille cinq
cents ans ; ils font tous nommés dans les Livres facrés ;
les armes d'Achilles , faites par Vulcain, étoient de
cuivre allié d'étain (k) ; les Hébreux &. les anciens
point d'étain dans les endroits où ils rencontrent du mundick ....
Et il efl: fur que fi on laifle du mundick parmi l'étain qu'on veut
fondre, il le rend épais & moins ducTiile. . . . Les mineurs regardent
cette fubftance, mundick, comme un poifon , & croient que c'eft
une efpèce d'arfenic. ... II en fort en effet une puanteur très-dan-
gereufe lorfqu'on le brûle pour le féparer de l'étain. Aferret , Collec-
tion académique , partie éirangcre , tome II , pages ^8 o & fuïv
On diftingue aiféinent ce mundick du minerai d'étain, car le mundick
s'attache aux doigts & les falit ; cette matière, fi elle refte avec l'étain,
le gâte , lui ôte fun éclat & le rend cafTant. Le feu diflipe le mundick
& l'odeur en eft pernicieufe, M. Hellot ayant examiné cette matière,
l'a trouvée prefque en tout femblable à une mine bitumineufe d'arfenic,
qui fut envoyée de Sainte-Marie-aux-Mines. Minéralogie de AI. de
Bomare , tome II , pages i i i & fuiv.
(k) Homère nous dit aufli que les Héros de Troie, couvroient
de plaques d'étain la tète des chevaux attelés à Içur char de bataille;
D E s AI I N É R AU X, 13 y
Grecs ont Jonc employé ce dernier métal (!), &.
comme les grandes Indes leur étoient inconnues , (Se
qu'ils n'avoient commerce avec les Nations étrangères
que par les Phéniciens {rftj , il eft à préfumer qu'ils
tiroient cet étain d'Angleterre , ou qu'il y a\oit dans
ce temps , des mines de ce métal en exploitation dans
i'Afie mineure, lefquelles depuis ont été abandonnées (nj,
Aéluellement on ne connoît en Europe, ou plutôt on
ne travaille les mines d'étain qu'en Angleterre & en
quelques provinces de l'Allemagne ; ces mines font très-
abondantes & comme accumulées les unes auprès des
autres dans ces contrées : ce n'efl pas qu'il n'y en ait
mais il ne paroît pas qu'au temps du fiége de Troie , les Grecs fe
ferviflent de vafes d'étain fur leur table; car Homère fi iidèle à re-
préfenter toutes les coutumes, ne dit rien à ce fujet , tandis qu'il fait
plus d'une fois mention des chaudrons d'airain dans lefquels les
Capitaines & les Soldats faifoient cuire leur viande.
(l) Les anciens Romains fe fervoient de miroirs d'étain que Von
fabriquoit à Brindes , & il y a toute apparence que cet étain étoit
mêlé de bifmuth. Spécula ex Jlanno laudatijfima Brundufii temperabantur,
donec argenu'is uli cœpere & ancïllœ. Plin. lib. XXXIV, cap. xvil.
(m) Le prophète Ezéchiel, en s'adreflant à la ville de Tyr, lui
dit, les Cathaginois trafiquoient avec vous, ils vous apportoient toutes
fortes de richelfes, & rempliflbient vos marchés d'argent, de plomb
& d'étain. Chap. XXVII ^ v. 12.
(n) Nota. Woodward prétend, peut-être pour l'honneur de fa
nation , que les anciens Bretons faifoient commerce avec les Phéni-
ciens , & leur fourniObient de l'étain dès la plus haute antiquité; mais
ce favant Naturalise ne cite pas les garans de ce fait.
136 Histoire Natu relie
ailleurs , mais elles font {\ pauvres en comparai/bn Je
celles de Cornouailles en Angleterre, & de celles de
Bohême & de Saxe , qu'on les a négligées ou tout-à-
fait oubliées.
En France, on a reconnu des mines d'étafn dans la
province de Bretagne, & comme ç\\t n'efl pas fort
éloignée de Cornouailles , il paroît qu'on pourroit y
chercher ces mines avec efpérance de fuccès ; on en a
auffi trouvé des indices eu Anjou , au Gévaudan & dans
Je comté de Foix (o). On en a reconnu en Suiffe (p) ;
mais aucune de ces mines de France & de Saifle, n'ont
été fuivies ni travaillées. En Suède, on a découvert ai
exploité deux mines d'étain qui fe font trouvées aflez
riches en métal (q); mais ies plus riches de toute
l'Europe,
».i ■—■■■■■■. — ■ ■ > » - .1. ■-- ■■ .1 ■ — — III - - , ,
(0) Dans le Gévaudan, i[ y a dans la paroiffe de Veuren , félon
Al.de yl'IurvUle, une mine d'étain qu'on pourroit traiter avec fuccès...
Suivant yMalus, il y a de l'étain dans les montagnes de la vallée d'UJlon
au comté de Foix. ... Et en Anjou, fuivant P/gûnioI, il y a dans
la paroifle de Courcelles des mines d'argent , de plomb <5c d'étain.
Traité de la fonte des mines de Schlutter , tome I , pages 2^, ^i à' é ],
(p) La moniagne Aubr'ig , dans le canton de Schwit^ en Sui/Te,
renferme de l'étain qui eft mêlé de pierres lenticulaires & de peignes.
M. Guettard; Mémoires de l'Académie des Sciences, année 17J2,
page SS°'
(q) On a découvert dans la province de Danmora une mine
d'étain mêlée de fer, dont M. Richman a donné fa defcription ; elle
cft plus dure & moins pefante que les mines d'étain de Saxe & moins
abondante en étain, M. Brandt ea ajoute une autre découverte auprès
de
DES Minéraux, 137
l'Europe, font celles des provinces de Cornouaiiles (r)
de Wejlaufors dans la \f erflmanie , elle a encore moins d'etaiu , moins
de pefanteur Tpécifique & plus de fer. Bibliothcque raifonnée , tome
XLI , page 2y.
(r) Les mines de Cornouaiiles font de couleurs différentes ; il y
en a de fix fortes, de la pâle, de la grile, de la blanche, de la brune,
de la rouge & de la noire : cette dernière efl la plus riche & la meil-
leure , & cependant les plus riches de toutes ne donnent que cinquante
pour cent; on trouve dans [q fparr , qui fait fouvent la gangue de
cette mine, des criftaux aflez durs pour couper le verre, lefquels font
quelquefois d'un rouge-iranfparent , & ont l'éclat du rubis. Sur ce
fparr on trouve aufli une autre forte de fubflance femblable à une pierre
blanche , tendre , que les mineurs appellent kelum , qui laifle une
ccunie blanche lorfqu'on la lave dans l'eau en fortant de la mine:
il femble que ce foit la même matière que le fparr, & qu'elle n'en
diffère que par le degré de pétrification criftailine. . , . & à l'égard
des criflaux d'étain , on peut afîurer qu'ils font toujours mêlés d'ar-
fenic , dont ils répandent l'odeur & même des particules ftrineufes
par ime fiiiiple calcination fur une pèle à feu. , . . Les criflaux blancs
font ceux qui font le plus mêlés d'arfenic , ils font les plus réfrac-
taires au feu, & ce font les plus rares. Il y a d'autres criflaux d'étain
d'un jaune d'or qui font aufîî afîez rares , autre part que dans la
Hefle. D'autres criflaux qui font d'une couleur rouge tirant communé-
ment fur celle du fpath rofe ou du petit rubis; ils font pour l'ordinaire
Vin peu tranfparens ; il y a aufTl des criflaux d'étain tranfparent de
couleur violette ; ils produifent abondamment dans la fonte ; on en
trouve en Hongrie, dont la figure efl prelque cubique, & accom-
pagnée quelquefois de pyrites fulfureufes ; il y a aufli des criflaux
bruns qui ont fouvent une figure fort bizarre , leur couleur efl afl^ez
femblable à celé des grenats bruts ordinaires; il y en a aufîi de verts
qui ne pèfent pas autant que les bruns , & qui cependant rendent
beaucoup à la fonte; ils forment des elpèçes de quilles à. huit paiiç,
Minéraux , Tome II L S
138 Histoire Naturelle
& Je Dévon en Angleterre, & néanmoins ces mines
paroiffent ctre de féconde ou de troifième formation (f) ;
d'un brun-noirâtre en-dehors, fort durs & d'un vert chatoyant mte'-
rieurement comme le fpath vitreux & écailieux. Minéralogie de
Bomare , tome II, pages i j i & fuivanîes.
(f) L'étain ed fi abondant dans le pays de Cornouailles , qu'il
eft répandu prefque par-tout, & que même les filons de cuivre les
plus abondans contiennent de l'étain dans leur partie fupérieure,
c'eft-à-dire, proche la furface de la terre; ce métal y efl même
afîez abondant pour mériter l'extracfiion. D'autres fois le minéral de
cuivre & celui d'étain fe trouvent dans le même filon , quoique
féparément , ce qui ne continue pas ordinairement dans la profondeur.
Prefque joignant la ville de Redrath , on exploite une mine d'étain
très-confidérable , nommée peduandrea. Cette mine fut d'abord com-
mencée comme mine de cuivre ; on y a extrait une très - grande
quantité de minéral; on y^travailloit alors deux fiions parallèles qui
fe touchoient prefque l'un l'autre, de forte qu'ils n'en formoient
qu'un feul , l'un produifoit du minéral jaune de cuivre ou pyrite
cuivreufe , & l'autre du minéral d'étain. Le premier étoit joignant
ie toit, «5c le fécond joignant le mur ou rocher inférieur; mais en allant
dans la profondeur le minéral de cuivre a ce.ï^é ^ de forte qu'il ne
refte plus que le filon d'étain qui eft fort abondant : cette mine a
de cinquante à foixante toiles de profondeur.
A Godûlphin-bûll fe trouve la mine d'étain fa plus e'tendue qu'il y
aït dans le pays de Cornouailles La diredion des filons eft tou-
jours de l'elt à l'oueft comme dans toutes les mines de ce pays, &
fon inclinaifon au nord-eft d'environ 70 degrés. Cette mine a, dit-on ,
quatre-vingt-dix toifes de profondeur perpendiculaire. . . On coinpte
cinq filons parallèles fur cinquante à foixante toifes d'étendue , mais
qui ne (ont point exploités également. ... il n'y a que le principal
qu'on exploite en totalité.
DES Minéraux. 139
car on y a trouvé des débris de végétaux, &. même
des arbres entiers (t) ; elles font en couches ou veines
très-voifines, & d'une longue étendue, toutes dans la
même direélion de l'eft à l'oued ( u) , comme font
auffi toutes les veines de charbon de terre & autres
matières anciennement entraînées & dcpofées par le
Ces filons font renfermés dans un granit à gros grains, très-dur,
mais il n'en eft pas ici comme en Saxe & en Bohème ; l'etain ne
fe trouve jamais réuni & confondu dans cette pierre , mais dans une
efpèce de rociie bleuâtre qui paroît être la matrice ge'nérale du plus
grand nombre des mines d'etain de Cornouaiiies. On rencontre
communément le long du filon, joignant le mur, ce qu'on nomme
le guide ; c'cfl un quartz mêlé quelquefois de mica, lequel le rend
peu folide. Le filon confille lai-même en un quartz fort dur, qui
n'eft; pas toujours parfaitement blanc , mais qui a un œil bleuâtre ;
il efl; réuni à la roche bleue dans laquelle fe trouve le minéral d'étain ,
mais prefque toujours en petits grains criftaliifes comme des grenats.
On y trouve aufli quelquefois du quartz criflallifé en hexogone ; il
y a des endroits du filon qui font très-riches, mais fort tendres: ce
minéral eft pari'emé de beaucoup de mica & de petits grains de minéral
d'étain, comme de grenats; ce filon a 2 , 3 , 4, 5 pieds de large,
plus ou moins. Obfervations fur les mines , par Ai. Jars ; Aïémoires de
r Académie des Sciences , année lyyo.
(t) Voyages hiltoriques de l'Europe; Paris, i (f p ^ , tome IV,
page 104.
(u) Les veines d'étain de Cornouaiiies ont une- dire<^ion très-
étendue , puifqu'on rencontre plulleurs mines d'étain dans les îles de
Seilly, qui font fituées dans les mêmes diredion & latitude que la
province de Cornouaiiies. Ai. Jars; Alemoircs de l'Académie des
Sciences, année lyyo, page j"/^.
s \]
140 Histoire Naturelle
mouvement des mers; & ces veines d'étaiii courent
pour la plupart à la furface du terrein, & ne defcendent
guère qu'à quarante ou cinquante toifts de profondeur;
elles gifTent dans des montagnes à couciies de médiocre
hauteur, & leurs débris entraînés par les eaux pkniales,
fe retrouvent dans les vallons en fi grande quantité,
qu'il y a fouvent plus de profit à les ramaffer qu'à
fouiller les mines dont ils proviennent (x). Ces veines
très-longues en étendue, n'ont que peu de largeur; il
y en a qui n'ont que quelques pouces, & les plus larges
n'ont que fix ou fèpt pieds (y) ; elles font dans un roc
(x) Dans les environs de la ville de Saint- Aujf le , province de
Cornouaiiles , on a travaillé anciennement beaucoup de mines d'étain ;
mais il y en a peu en exploitation aujourd'hui, on fe contente de
prendre les terreins qui font dans le fond des vallons, «Si de les laver
pour en retirer les morceaux de minerai d'étain cjui y lont répandus
& dont les angles font arrondis comme ayant été roulés , & proba-
blement détachés des filons d'étain des montagnes voifines; ces miné-
raux d'étain font répandus dans les vallons lur de grandes étendues ;
ils peuvent provenir auflj des détrimens ou déblais des mines ancien-
nement exploitées , & qui auront été entraînées & dépofées par \qs
eaux des pluies Il y a toujours des filons fur les éminences
voifines , dont le minerai efl de la même nature que celui que l'on
trouve répandu dans les vallons. . . . Il eft fi commun dans les mines
d'étain que le m.inéral fe préfente jufqu'à la fijrface de la terre ; il y
en a qui fijnt en pierre très-dure , mais il y en a auffi près de Saint-
Auftle qui eft en roche très-tendre. AI. Jars ; Aîémoires de l'Aca^
dtmie des Sciences , année lyyo, pages j^o cf fuiv.
(y) Merret qui a écrit en 1678 , dit que \^s pierres du pays de
Cornouaiiles, d'où l'on tire l'étain, fe trouvent quelquefois à un ou
DES Minéraux, 14,1
dur, clans lequel on trouve quelquefois des criflaux blancs
& tranfparens, qu'on nomme improprement d'ianums de
CornouaiJles. M. Jars & M. le baron de Dietrich, qui
ont obfervé la plupart de ces mines , ont reconnu qu'elles
étoient quelquefois mêlées de minerais de cuivre (i) ^
ôi que fouvent les mines de cuivre font voifines de celles
d'ctain f^ij; & on a remarqué de plus, que, comme
deux pieds au-deflous de la furface de la terre, le plus fouvent
difpofées en veines entre deux murs de rocher, couleur de rouille >
qui ne paroiiTent avoir que très-peu d'aflinitc avec i'ctain. Les veines
ont depuis quatre jufqu'à dix - huit pouces environ de largeur , &
elles font le plus fouvent dirigées de l'eft à l'oueft. . . . Les folTes
ont quarante, cinquante & quelquefois (o^xante brafles de profondeur.
CoUeâion acûdémique , partie étrangère , tome II , pages ^S o ù' fui -
(1^) M. le baron de Dietrich qui a féjourné pendant plufieurs
mois en Cornouailles, dit (jue la Nature elle-même a mclc enfemble
îe cuivre & i'étain .... qu'il n'y a guère que les mines d'èiain roulc'es
par les torrens , & celles qui fe trouvent dans le quartz granuleux
qui renferme du fchori , qui ne foient pas mêlées avec de la mine
de cuivre. Journal de Phyfique , mal lyS o, page ^82.
(a) Aux environs de la ville de Alaraijon , on exploite plufieurs
fiions de minéral de cuivre & de celui d'étain, à peu-près de la
nature & dans la même roche fchirteufe , nommée killas , que ceux
des environs de la ville de Redenth. ... II y a aufîi des minéraux
d'étain dans le granit , entr'autre dans le rocher qui compofe fe
Alont Saint- Michel , qui n'eft féparé de Marazion que par un petit
bras de mer : on aperçoit dans ce rocher une fort grande quantité
de filons d'un fort bon minéral d'étain ....
On eflime le produit en étain de cette province à la valeur de
cent quatre-vingt-dix à deux cents mille livres fterling chaque année ,
/
ii
142 Histoire Naturelle
toutes les mines d'ctain contiennent de J'ar/enic , les
vapeurs qui s'élèvent de leurs fofTes font très-nuifibles,
Si quelquefois mortelles [6J.
De temps immémorial, les Anglois ont fu tirer grand
parti de leurs mines d'étain; ils favent les traiter pour
le plus grand profit, ils ne font pas de commerce, ni
peut-être d'ufage de i'étain pur ; ils le mêlent toujours
avec ime petite quantité de plomb ou de cuivre.
« Lorfque la mine d'ctain, dit M. Geoffroy, a reçu
j> toutes les préparations qui doivent la diipofèr à être
fondue , on procède à cette dernière opération dans
» un fourneau à manche on refond cet étain, qui
» efl en gâteaux , pour le couler dans des moules de
55 pierre quarrés ôl obiongs , <5c ce(i ce qu'on appelle
i'>fnuînons Ces fàumons font plus ou moins fins,
fuivant les endroits où Ton en coupe pour faire des
épreuves; le defiTus ou la crème du faumon efl très-douce
& fi pliante qu'on ne peut la travailler feule ; on efl
3> obligé d'y mêler du cuivre dont elle peut porter jufqu'à
& qu'il fe vend du minerai de cuivre pour cent quarante mille livres
fleriing. Oùfervationsjur les mines , pur Af. Jars; Mémoires de l'Aca-
démie des Sciences , année i yy 0 , pages j^.o Ù" fuivantes.
(h) Lorfque la mine efl: riche , on trouve la veine à dix brades
de profondeur, & au-defibus on trouve une cavité vide ou fente
de quelques pouces d'ouverture ; il fort de ces fouterrains des vapeurs
nuifibles & même mortelles. ColleOion académique , partie étrangère,
tome II , pages ^S 0 & fuiyanles.
5>
»
>ï
DES Minéraux. 14.^
trois livres fur cent , &. quelquefois jufqu'à cinq livres. «
Le milieu du faumon efl plus dur , &. ne peut porter **
que deux livres de cuivre, & le fond efl fi aigre qu'il «
y faut joindre du plomb pour le travailler. L'étain ne «
fort point d'Angleterre dans fa pureté naturelle ou tel «
qu'il a coulé dans le fourneau; il y a des défcnfes très- «
rigoureufes de 'le tranfportcr dans les pays étrangers , «
avant qu'il ait reçu l'alliage porté par la loi (^c) ».
Quelques-uns de nos habiles Chimiftes, &. particu-
{ièrement M.'^ Bayen & Clwrlard , ont fait un grand
nombre d'expériences fur les différens étains qui font
dans le commerce; ils ont reconnu que l'étain d'An-
gleterre en gros faumons, ainfi qu'en petits^ lingots , mis
dans une retorte, ou dans un vailTeau clos pour fubir
l'adion du feu, laifTe échapper une petite quantité de
matière blanche qui s'attache au col de la retorte, &
qui ne fi point du tout arfenicak , ils ont trouvé que cet
étain n'efl pas allié de cuivre pur, mais de laiton; car
ils en ont tiré non - feulement un fel à bafè de cuivre,
mais un nitre à bafè de zinc : cette dernière remarque
de M." Bayen & Charlard, s'accorde très - bien avec
l'obfèrvation de M. Jars, qui dit, qu'outre le plomb
& le cuivre, les Ouvriers mêlent quelquefois du zinc
avec i'étain, & qu'ils préfèrent la limaille du laiton,,
•^i— — — ^— ^M^— ^^i»^— ^— ■ ■ — ^i^— I II - ■ PI- »! W I ■■ I ■■ ■!■ I— ^^——
(c) Recherches chimiques fur l'etain, par M/' Bayen & Cbarlard,.
jpages c) ^ & I 0 Q ,
144- Histoire Naturelle
qu'il n'en faut qu'une demi-livre fur trois cenrs pefant
d'étain, pour ic dégraifler, c'e(t-à-dire , pour le rendre
facile à planer (d) ; mais je ne puis me perfuadcr que
celte poudre blanche , que l'ctain iaiffe échapper , ne
foit point du tout arfenicalc, puifqu'elle s'efl fublimée ,
& que ce n'eft point une fimple chaux ; &. quand mcme
ce ne feroit qu'une chaux d'étain , elle conticndroit
toujours de l'arfenic ; d'ailleurs, en traitant cet étain
d'Ano-Ieterre avec l'eau régale, ou feulement avec l'acide
marin, ces habiles Chimifles ont trouvé qu'il contenoit
une petite quantité d'arfcnic ; ceci paroît donc infirmer
leur première affertion fur cette iiiûticre blanche qui s ai-
tache an col de la rctortc, ir qu'Us dijcut n are nullement
arÇenicale. Quoi qu'il en foit, on leur a obligation, d'avoir
recherché quelle pouvoit être la quantité d'arfenic
contenue dans l'étain dont nous faifons ufage ; ils fe
font alTurcs qu'il n'y en a tout au plus qu'un grain fur
une once, ^ l'on peut en fuivant leurs procédés (e) ,
connoître
■ — •
(d) Alemoires de M. Jars; Acadcmie des Sciences, année lyyo,
(e) Le vrai moyen de bien connoître la portion de l'arfenic mêlé
à l'eiain, efl: de faire difi'oudre ce dernier métal dans l'acide marin
très-pur; s'il ne relie rien lorfque la difloluiion eft faite, l'étain efl
ians arfenic ; s'il refte un peu de poudre noire , il faut la féparer
avec loin, la laver, la faire fécher &: en jeter fur des charbons ardens
pour reconnoître fi elle ed arfenica'e ou non: L'efl-elle! qu'on
i'expofe à un degré de feu capable d'opérer la fublimation de l'arfenic;
fi çlle s'exhale en entier, elle eft de pur régule d'arfenic; s'il refte
DES Minéraux. 14^
connoître au julle la quantité d'arfenic que tout étain
contient.
Les mines d*étain de Saxe, de Mifnie, de Bohème
& de Hongrie , giiïent , comme celles d'Angleterre ,
dans les montagnes à couches, & à une médiocre pro-
fondeur ; elles ne font ni auffi riches ni aufTi étendues
que celles de Cornouailles ; i'étain qu'on en tire efl
néanmoins au/fi bon, & même les Allemands prétendent
qu'il efl meilleur pour l'étamage ; on peut douter que
cette prétention foit fondée , &. le peu de commerce
qui fe fait de cet étain d'Allemagne, prouve affez qu'if
n'eft pas fupérieur à celui d'Angleterre.
Les cantons où fe trouvent les meilleures mines de
Saxe , font les montagnes de Majlerherg vers Boles-fchau ;
les veines font à vingt-quatre toifes de profondeur dans
des rochers d'ardoifè, elles n'ont qu'une toife en lar-
geur. Une de ces mines d'étain efl couchée fur une
mine très - riche de cuivre , que l'on en fépare en la
cafTant ; une autre à Breyienhrun vers la ville de Geor-
genjiatt , qui efl fort riche en étain, efl néanmoins mêlée
un peu de poudre dans le teft qu'on enij)Ioie à l'opération , qu'on
la pèfe s'il efl pofllbie , ou qu'on l'évalue, & on faura ce qu'une
quantité donnée d'étain quelconque contient réellement d'arfenic
fous forme réguiine. . . . On dit fous forme réguline , parce qu'en
effet la chaux d'arfenic ne peut fe combiner avec l'étain , tandis qu'au
contraire fon régule s'y unit avec la plus grande facilité. Recherches
fur l'étmn, par M." Bayen ù' Char lard, pages 1 1 8 éf fuîv.
Aline raux. Tome III. T
14-6 Histoire Natu relle
d'une grande quantité de fer, que I*on en tire au moyen
de i'aimant après l'avoir réduite en poudre: ie canton
de FiirJIcmberg efl entouré de mines d'étain, & dans le
centre de cette même contrée, il y a des mines d'ar-
gent (fj. Les mines d'étain à' Eibenjiûk, s'éitnàtïïi dans
une longueur de quelques lieues, & fè fouillent à d\\
toifes de profondeur; elles font mêlées de fer, & on
y a quelquefois trouvé des paillettes d'or. Toute la
montagne de Goyer eft remplie de mines d'étain; mais
Je roc qui les renferme efl fi dur, qu'on eft obligé de
ie faire calciner par le feu avant A'cxi tirer les blocs.
On trouve auffi des mines d'étain à Schiéeberg; enfin
à Anerjherg, la plus haute montagne de toute la Saxe,
il y en a une à vingt - huit toifes de profondeur flir
trois toifes de largeur , dans un rocher d'ardoifè ;
cette mine a produit en 174.1, cinq cents quintaux
d'étain (g).
En Bohème, à trois quarts de lieue de Plareîi ^ if
fe trouve une mine d'étain voifine d'une mine de fer,
qui toutes deux font dans un banc de grès à gros
grains (h) ; & comme le minerai d'étain efl mêlé de
parties ferrugineufes , on le fait griller après l'avoir
broyé pour en féparer le fer au moyen de l'aimant;
(f) Traité de la fonte des mines de Sciilutter, traduit jpar M.
Hdlot , tome II , page j 8 j ,
(g) Idem , ibid, page ^88,
(h) Voyages métallurgiques de M. Jars , page jr.
DES Minéraux. 14.7
il fe troi'.ve auiïi des mines d'étain dans le diflriél
A* FJli'hdgen & dans celui de Saline t ; une autre à Sclilac-
Kenwald, qui s'enfonce afTez profondément (i) , Enfin,
il y a aulîi quelques veines d'ctain dans Jes mines de
Hongrie (k) ; on aflfure de même qu'il s*en trouve en
Pologne; mais nous n*avons aucune notice afTez cir-
conftanciée de ces mines pour pouvoir en parler.
L' Afie efl peut-être plus riche que l'Europe en étain ;
il s*en trouve en abondance à la Chine (l) , au
■' ' 1 ■ . .
(ï) Ephémérides d'Allemagne, année i6S6,
(k) On trouve des mines d'étain dans plufieurs contrées de
l'Europe, en Saxe, en Mifnie , comme à Stolberg, Goyer, Anne-
berg, Altemberg , Freiberg , dans la montagne de Saint-André de la
forêt noire. En Bohème, dans les mines de Groupe près de Toplitz,
dans celles d'Aberdam, deSchoufeld, &c. Dans la Hongrie, aux
mines de Schonmitz & du comté de LyptoW. M. Geoffroi ; Mémoires
de l'Académie des Sciences, année ij^8, page i o^. — L'une des
plus fameufes de toutes les mines d'Allemagne, efl celle à'Attemberg;
on n'en trouve point de femblables dans toute l'hiftoire des mines...
elle fournit de la mine d'étain , depuis la fuperficie jufqu'à cent cin-
quante toifes de profondeur perpendiculaire. Ces fortes de filons en
mafles n'ont que rarement une direction réglée , mais ils ont leurs
bornes qui quelquefois eft une pierre sèche , quelquefois un roc que
les mineurs appellent le féparateur. Traité de la fonte des mines dt
Schlutter , tome II , pages ^ S j ù" fuivantes,
(l) On tiroit autrefois à la Chine beaucoup d'étain aux environs
de la ville àHU-fi, . . . L'étain eft fi commun dans cet empire , que
le prix en eft fort modique. Hijhire générale des Voyages , tome VI,
page 4<?4.— On voit à Dehiy aux Indes, un certain métal appelé
utunac, qui approche de l'étais , mais qui efl beaucoup plus beau <Sc
Tij
V
148 Histoire Naturelle
Japon (m) & à Siam ^?i) ; il y en a aufTi à MacafTar (oj ,
à Malaca (p), Banca, &c. cependant les Afiatiques ne
font pas de ce métal autant d'ufàge que les Européens ;
ils ne s'en fervent guère que pour étamer le cuivre (^) ,
plus fin, & fouvent on le prend pour de l'argent; ce métal s'apporte
de la Chine. Thévenoî , Voyage au Levant ; Paris ^ 1 66^, tome III ,
page ijS.
(m) La province de Bungo au Japon, produit de i'etain fi blanc
& fi fin , qu'il n'eft guère inférieur à l'argent , mais les Japonois i\\n.
font prefque aucun ufage. Hifloire générale des Voyages , tome X,
page e^j.
(n) Les Siamois travaillent depuis très-long temps à^s mines d'étain
& de plomb fort abondantes. . . . Leur étain fe débite dans toutes
ies Indes. Il eft mou & mal purifié & tel qu'on le voit dans des
boîtes à thé qui viennent des régions orientales; & pour le rendre
plus dur & plus blanc, ils y mêlent de la calamine, efpèce de pierre
minérale qui fe réduit facilement en poudre, & qui étant {oixdxxe.
avec le cuivre fert à le rendre jaune ; mais elle rend l'un & l'autre
de ces deux métaux plus caiïant & plus aigre. Idem, tome IX,
page s oy.
(0) Quelques provinces de MacafTar, dans l'île Célèbes, ont des
mines d'étain. Idem, tome X , page ^j 8.
(p) On trouve de l'étain dans quelques endroits des Indes orien-
tales , comme au royaume de Quidday, entre Tanafieri & le détroit
de Malaca. M. Geoffroi ; Mémoires de l'Académie des Sciences , année
' 73 ^ > PW I 03- — Les Hollandois apportent des Indes orientales
des efpèces d'étain qui paflent pour étain fin ; celui de Alalac ou
Malaca <Sc celui de Banca, qui n'eft pas aufii parfait que celui de
Malaca qu'on emploie de préférence pour les teintures en écarlate &
pour étamer les g'aces. Idem , page i j i.
(q) Il n'y a guère de mit>es d'argent en Afie, fi ce n'efi au Japon;
DES Minéraux. 149
ou faire de Tairain en alliant ces deux métaux enfemble ;
mais ils font commerce de Tétain avec nous, & cet
étain qui nous vient des Indes, efl plus fin que celui
que nous tirons de l'Angleterre, parce qu'il efl moins
allié; car l'on a obfervé que dans leur état de pureté,
ces étains d'Angleterre &. des Indes , font également
fouples Si difficiles à rompre : cette flexibilité tenace
donne un moyen facile de reconnoître fi Tétain eft purgé
d'arfènic ; car dès qu'il contient une certaine quantité
de cette mauvaife matière, il fe rompt facilement.
Ainfi rétain, comme tous les métaux, efl un dans
la Nature, & les étains qui nous viennent de difîcrens
pays , ne diffèrent entr'eux que par le plus ou moins
de pureté ; ils feroient abfolument les mêmes s'ils étoient
dépouillés de toute matière étrangère ; mais comme ce
métal, lorfqu'il efl pur, ne peut être employé que pour
i'étamage , & qu'il efl trop mou pour pouvoir le planer
& le travailler en lames; on efl obligé de l'allier avec
d'autres matières métalliques pour lui donner de la fer-
meté, & c'efl par cette raifon que dans le commerce
il n'y a point d'éiain pur frj.
mais on a , dit Tavernier , découvert à Dabgore , à Sangore , à Bor-
dalon & à Bâta des mines très - abondantes d'étain, ce quâ Jl fait
beaucoup de tort aux Anglois, parce qu'on n'a plus befoin de leur
étain en A fie ; au refle , ce métal ne fert en ce pays-là qu'à étamer
les pots , marmites & autres uftenfiles de cuivre. Voyage de Tavernkr;
Rouen , i y i ^ , tome JV, page (/ i .
(r) Nous croyons donc pouvoir conclure que les étains de Banca,
ICO Histoire Naturelle
Nous n'avons que peu ou point de connoiflfances
des mines d'étain qui peuvent fe trouver en Afrique;
les Voyageurs ont feulement remarqué quelques ouvrages
d'étain chez les peuples de la côte de Natal (f) , &
il e(l dit , dans les Lettres édifiantes, qu'au royaume de
Qjieba, il y a de Tétain aufli blanc que celui d'Angleterre,
mais qu'il n'en a pas la folidité, & qu'on en fabrique
des pièces de monnoie, qui pèfent une livre & ne valent
que fept fous (t) ; cet étain qui n'a pas la folidité de
celui d'Angleterre, efl fans doute de i'étain dans fon
état de pureté.
En Amérique, les Mexicains ont autrefois tiré de
de Malaca & d'Angleterre, doux, lorfqu'ils fortent du magafin d'un
honnête marchand, font purs ou privés de tout alliage naturel ou
artificiel , qu'ils font parfaitement égaux entr'eux , c'eft-à-dire , qu'ils
font l'un à l'égard de l'autre, comme de l'or à vingt-quatre karats ou
de l'argent à douze deniers tires d'une mine d'Europe , feroient à
de l'or ou de l'argent aux mêmes titres des mines de l'Amérique
méridionale.
Cependant ces étains fi purs ne peuvent être d'aucune utilité dans
nos ménages ; leur mollefle , leur flexibilité y met un obftacle infur-
montable ; il faut donc que l'art leur donne uwe certaine roideur ,
un certain degré de folidité qui les rendent propres à conferver
toutes les formes que la nccefllté ou \t% circonftances obligent le
potier à donner à ce métal; or pour parvenir à ce but, on a eu
recours à difFérens alliages. Recherches fur l' étain , par MI' Baycn ^
Charlard , page p j.
(f) Hiftoire générale des Voyages , tome I , page 2j,
(t) Lettres édifiantes, XJ.' Recueil, page i6j.
DES Minéraux. 151
l'étain des mines de leur pays (^nj; on en a trouvé au
Chily dans le Corrégiment de Copiago (x). Au Pérou,
les Incas en ont fait exploiter cinq mines dans le diftri£t
de Charcas. « Il s'eft trouvé quelquefois, dit Alphonfè
Barba, des minerais d'argent dans les mines d'étain, &tou- <
jours quantité de minerais de cuivre : il ajoute qu'une des <
quatre principales veines de la mine de Potoji s'appelle <
étû'in, à caufe de la quantité de ce métal qu'on trouve <
fur la fuperficie de la veine , laquelle peu-à-peu devient <
tout argent (y) ». On voit encore par cet exemple que
i'étain , comme le plus léger des métaux , les a prefque
toujours furmontés dans la fufion ou calcination par le
feu primitif, & que les mines primordiales de ce métal
fervent pour ainfi dire de toit ou de couvert aux mines
des autres métaux plus pefàns.
L'étain s'allie par la f-ifion avec toutes les matières
métalliques, il gâte l'argent &. l'or fur -tout, en leur
ôtant leur dudlilité , & ce n'eft qu'en le calcinant qu'on
peut le féparer de ces deux métaux; il diminue auiïi la
duélilité du cuivre, & rend ces trois métaux aigres,
fonores & caffans ; il donne au plomb de l'aigreur &
de la fermeté, il s'unit très -bien au fer chauffé à un
degré de chaleur médiocre ; & lorfqu'on le mêle par la
^ ■ ■ . — — —
(u) Hifloire générale des Voyages, tome XII , page 6jo^
(x) Idem, tome XIII , page 414-
(y) Métallurgie d'AIphonfe Barba, tome I, page 114,
152 Histoire Natu relle
fufion avec le fer, il ne le rend pas fenfiblement plus
aigre. Les métaux les plus ductiles font ceux dont Tétain
détruit le plus facilement la ténacité ; A ne faut qu'une
très - petite dofè d'étain pour altérer l'or & l'argent ,
tandis qu'il faut le mêler en affez grande quantité avec
le cuivre & le plomb , pour les rendre aigres & caffans ;
en fondant l'étain à partie égale avec le plomb , l'alliage
efl ce que les Plombiers appellent de la foudiire, & ils
l'emploient en effet, pour fouder leurs ouvrages en
plomb : au refte , cet alliage mi-parti de plomb &. d'étain
ne laifTe pas d'avoir un peu de ductilité.
L'étain mêlé par la fufion avec le bi/muth qui fè
fond encore plus aifément que ce métal, en devient
plus folide , plus blanc & plus brillant, & c'efl proba-
blement cet alliage de bifmuth & d'étain que l'on
connoît aux Indes fous le nom de tmunac.
Le régule d'antimoine donne à l'étain beaucoup de
dureté, & le rend en même temps très-caffant; il n'en
faut qu'une partie fur trois cents d'étain pour lui donner
de la rigidité, &. l'on ne peut employer ce mélange que
pour faire des cuillers, fourchettes, & autres ouvrages
qui ne vont point fur le feu.
L'alliage de l'étain avec le zinc , eft d'une pefanteur
fpécilique, moindre que la fomme du poids des deux;
tandis que l'alliage du zinc avec tous les autres métaux,
efl au contraire d'une pefanteur /pccifique, plus grande
que celle des deux matières prifes enfemble,
L'étain
D E s Ai I N É R A U X, 153
L*éiain s'unit avec l'arfenic & avec le cobalt, il
devient par ces mélanges plus dur , plus fonore & plus
cafTant ; M." Bayen &. Charlard afïïirent qu'il ne faut
qu'une deux cent cinquante - fixième partie d'arfenic ,
fondue avec l'étain, pour le rendre aigre & hors d'état
d'être employé par les Ouvriers (^): fi Von mêle une
partie d'arfenic fur cinq d'étain pur, l'alliage efl fi
fragile qu'on ne peut l'employer à aucun ufage , & une
partie far quinze, forme un alliage qui préfente de grandes
facettes aflez femblables à celles du bifmuth, &. qui efl
plus friable que le zinc, & moins flifible que l'étain.
Ainfi l'étain peut s'allier avec tous les métaux &
Jes demi-métaux, &l l'ordre de fès affinités efl le fer, le
cuivre, l'argent & l'or; &. quoiqu'il fe mêle très-bien
par la fufion avec le plomb , il a moins d'affinité avec
ce métal qu'avec les quatre autres.
L'étain n'a auffi que peu d'affinité avec le mercure,
cependant ils adhèrent enfemble dans l'étamage des
glaces , le mercure refte interpofé entre la feuille d'étain
& le verre; il donne aux glaces la puiffance de réfléchir
la lumière avec autant de force que le métal le mieux
poli : cependant il n'adhère au verre que par fimple
conta(5l, & Ion union avec la feuille d'étain efl affez
fuperacielle ; ce n'efl point un amalgame auffi parfait
que celui de l'or ou de l'argent , &. les boules de
(■^) Recherches chimiques fur l'étain, page ^S,
Miner AUX , Toiiie II L U
154 Histoire Naturelle
mercure (a) auxquelles on attribue la propriété de purifier
i'eau, font moins un alliage ou un amalgame, qu'un
mélinge iimple & peu intime d'étain & de mercure.
L'ctain s'unit au foufre par la fufion, & le compofé
qui réfulte de cette mixtion , efl plus difficile à fondre
que l'étain ou le foufre pris féparcment.
Tous les acides agiffcnt fiir Tctain, & quelques-uns
le diffolvent avec la plus grande énergie ; on peut même
dire qu'il eft non - feulement diflbus , mais calciné par
l'acide nitreux, & cet exemple, comme nombre d'autres,
démontre affez que les acides n'agiffent que par le feu
qu'ils contiennent (b) , Le feu de l'acide nitreux exerce
(a) Trois parties de mercure ajoutées à douze parties d'étain de
Malac , fondues dans une marmite de fer , & coulées dans des moules
fphériques , forment les boules de mercure , auxquelles on attribue la
vertu de purifier J'eau , à. de faire périr les infedcs qu'elle contient ;
elles acquièrent, en fe refroidiflant, aflez de folidité pour être tranf-
portées : lorfqu'on veut s'en fervir, on les met dans un nouet que
l'on fufpend dans l'eau , & on la fait bouillir un infiant. Élémeus
de Chimie , par Al. de Morve au y tome III , pages 2 ^6 & ^^a.
(h) Nota. Je ne dois pas diOlmuler que la raifon des Chinnfles
efl ici bien différente de la mienne ; ils difent que c'eft en prenant
le phlogiftique de l'étain que l'acide nitreux le calcine , & ih pré-
tendent le prouver , parce que dans cette opération l'acide prend les
mêmes propriétés que lui donne le charbon , & que l'éiain qui a
pafTé dans l'acide nitreux , quoique non dilTous , ne fe lailTe pl^is
difioudre, & que par conféquent en fuppofant dans cette opération
que l'étain fût calciné par le feu de l'acide, il devroit brûler de
nouveau, <5c que cependant if efl de fait que fa chaux d'étain &
D E s Aï I N É R A U X, I 5 5
fon adion avec tant de violence fur l'étain qu*ii le
fait paffer , fans fufion , de ion état de métal à celui
d'une chaux tout aufîi l)lanche & tout auiïi peu flifible
que la potée ^ ou chaux produite par l'aélion d'un feu
violent; & quoique cet acide f.mble dévorer ce métal,
il le rend néanmoins avec autant de facilité qu'il s'en
cft faid ; il l'abandonne en s'élevant en vapeurs, & il
conferve fi peu d'adhéîion avec cette chaux métallic^uc»
qu'on ne peut pas en former un fel. Le nitre projeté
fur l'étain en fufion s'enflamme avec lui , &. hâte ià
calcination, comme il hâte auffi celle des autres métaux
qui peuvent fe calciner ou brûler.
L'acide vitrioiique au contraire , ne diflbut l'érain
que lentement &. /ans effervefcence ; il faut même qu'il
(bit aide d'un peu de chaleur pour que la dilfolution
commence, &. pendant qu'elle s'opère, il fe forme du
foufre qui s'élève en vapeurs blanches, 6l qui quelque-
fois fumage la liqueur comme de l'huile, &. fe précipite
par le refroidiffement. Cette diflblution de l'étain par
l'acide vitrioiique, donne un fel compofé de criftaux
en petites aiguilles entrelaffées.
l'acide nitreux n'ont pli!s aucune a(îlion l'un fur l'autre. Cette raifon
des Chimirtes efl: tirée de leur ryllème fur le phlogiflique qu'ils
mettent enjeu par -tout, & lors même qu'il Ji'en eft nul befoin.
L'étain contient Çnns doute du feu & de l'air fixe, comme tous les
autres métaux; mais ici le feu contenu dans l'acide nitreux fumt ,
comme tout autre feu étranger, pour produire la calcination de cç
métal fans rien emprunter de fon phlogiftique.
u ij
156 Histoire N atu re lle
L'acide marin exige plus de chaleur que Tacicîc
vitriolique pour difToudre l'étaiii ; il faut que ce premier
acide foit fumant; les vapeurs qui s'élèvent pendant cette
diifolution affez lente, ont une odeur arfenicale; la
liqueur de cette diffolution eft iàns couleur, & limpide
comme de l'eau, elle fe cliange prefque toute entière
en criftaux par le refroidiiïement. « L'ctain, dit M. de
Morveau , a une plus grande affinité avec l'acide marin
que plufieurs autres fubflances métalliques , &: même
que l'argent, le mercure & l'antimoine, puifqu'il décom-
pofe leurs fels. L'étain, mêlé avec le fùblimé corrofif,
dégage le mercure, même fans le fecours de la chaleur,
&. l'on tire de ce mélange à la diftillation, un efpric
de it\ très -fumant, connu fous le nom de liqueiit de
Libav'ms (c) ». Aurefte, les crillaux qui fe forment dans
la diffolution de l'étain par l'acide marin, fe réfolvent
en liqueur par la plus médiocre chaleur, & même par
celle de la température de l'air en été.
L'eau régale n'a pas befoin d'être aidée de la chaleur
pour attaquer l'étain , elle le diffout même en grande
quantité ; une eau régale , faite de deux parties d'acide
ifttreux & d'une partie d'acide marin, difîbut très-bien
moitié de fon poids d'étain en grenailles (d) , même à
(c) Elémens de Chimie, par M. de Morveau, tome II , pages
2^8 & ^S 9'
(d) Idein, page S73- " Cette diiïblution , ajoute ce favant Chi-
» niifte , fournit quelquefois des criftaiiU en aiguilles par une ^vapo-
ration trcs-Iente ».
DES Minéraux. 1^7
froid; en délayant cette difToIution dans une grande
quantité d'eau , l'étain fe fépare de i'acide fous la forme
d'une chaux bianche ; Sl lorfqu'on méie cette difToIution
avec une difToIution d*or , faite de même par l'eau
régale, & qu'on les délaie dans une grande quantité
d'eau, il fe forme un précipité couleur de pourpre,
connu fous le nom de pourpre de Caffius, & précieux
par i'ufage qu'on en fait pour les émaux; Tétain a donc
non - feulement la puifTance d'altérer l'or dans fon état
de métal, mais même d'en faire une ef]:)èce de chaux
dans fà difToIution, ce qu'aucun autre agent de la
Nature, ni même l'Art, ne peuvent faire. C'eft auiïi
avec cette difToIution d'étain dans l'eau régale , que Ton
donne aux étoffes de laine la couleur vive & éclatante
de l'écarlate , fans cela le cramoifi & le pourpre de la
cochenille & de la gomme laque, ne pourroient s'exalter
en couleur de feu.
Les acides végétaux agiffent aufTi fur l'étain, on peut
même le diffoudre avec le vinaigre diflillé ; la crème
de tartre l'attaque plus foiblement; l'alkali fixe en corrode
la furface à Taide d'un peu de chaleur ; mais , félon
M. de Morveau, il réfifle confiamment à l'aétion de
l'alkali volatil (e).
(e) L'étain nous a paru conflarnment réfifter à l'adion de l'alkali
volatil cauftique , malgré que quelques Chimiftes aient avance' que
dans la dccompofition du vitriol ammoniacal par l'étain , l'alkali volatil
158 Histoire Natv relle
Conficlérant maintenant les rapports de l'ctain avec
les autres métaux, nous verrons qu'il a tant d'affinité
avec ie fer &. le cuivre, qu'il s'unit & s'incorpore avec
eux, fans qu'ils foient fondus ni même rougis à blanc;
ils retiendront Tétain fondu dès que leurs pores feront
ouverts par la chaleur, & qu'ils commenceront à rougir;
l'étain enduira leur fiirface, y adhérera, & même il la
pénétrera & s'unira à leur fubftance plus intimement
que par un fimple conta6l; mais il faut pour cela que
leur fuperiicie foit nette & pure, c'efl-à-dire, nettoyée
de toute craiïe ou matière étrangère; car en générai
les métaux ne contradlenr d'union qu'enir'eux &. jamais
avec les autres fubflances; il faut de même que l'étain
qu'on veut appliquer à la furface du fer ou du cuivre,
foit purgé de toute matière hétérogène, & qu'il ne
fbit que fondu & point du tout calciné ; &. comme
le degré de chaleur qu'on donne au fer & au cuivre
pour recevoir l'étamage , ne laifferoit pas de calciner
les parties de l'étain au moment de leur contaél, on
enduit ces métaux avec de la poix réfme ou de la
graiffe qui revivifie les parties calcinées , & confèrve à
l'étain fondu, fon état de métal affez de temps pour
qu'on puiffe l'étendre fur toute la furface que l'on
veut étamer.
entraîne un peu de ce métal qui s'en fépare à Ja longue , ou qui
eft précipité par un acide. Éiémens dt Chimie, par M. de A/oryeau ,
tome III, page s!.^6.
DES Minéraux, 159
Au rcfte, cei art de l'étamage, quoiqu'auffi imiver-
fellement répandu qu'anciennement ufité (fj , & qu'on
n'a imagine que pour parer aux effets funefles du cuivre,
devroit néanmoins être profcrit , ou du moins fournis
à un règlement de police, fi l'on avoit plus de foin
de la famé des hommes ; car les Ouvriers mêlent
ordinairement un tiers de plomb dans l'ctain pour faire
leur étamage fur le cuivre, que les graiffes, les beurres,
ies huiles &. les fels changent en vert-de - cfris : or, le
plomb produit des effets à la vérité plus lents , mais tout
auffi funeftes que le cuivre ; on ne fait donc que fubitituer
un mai au mal qu'on vouloit éviter , & que même on
n'évite pas en entier ; car ie vert-de-gris perce en peu
de temps le mince enduit de l'étamage , & l'on feroit
épouvanté fi l'on pouvoit compter le nombre des viélimes
du cuivre dans nos laboratoires & nos cuifnies. Au/îi le
fer efl-il bien préférable pour ces ufages domeftiques,
c'eft ie feul de tous les métaux imparfaits qui n'ait aucune
qualité funefle ; mais iJ noircit Jes viandes & tous \çs
autres mets ; ii lui faut donc un étamage d'étain pur ,
& l'on pourroit, comme nous l'avons dit, s'affurer
par l'eau régale (g}, s'il eft exempt d'arfenic, &
(fJ Pline en parle ; Stannum illitum œneis vafis fapores gratiores
facït , & çompejlït ccrugïnïs virus. HiH. Nat. lib. XX XIV,
cap. XVI.
fg/ Les érains que l'on aj^pelle purs, font encore mélanges
d'arfenic; à peine font-iio touches par l'eau re'gale qu'ils fe terniilent,
i6o Histoire Naturelle
n'employer à l'étamage du fer que de i'étain épuré &
éprouvé.
On fe (èrt de réfine, de graiffe, & plus efficacement
encore de Tel ammoniac, pour empêcher la calci-
nation de l'étain au moment de fon contad avec le
fer. En plongeant une lame de fer polie dans Tétain
fondu, elle fè couvrira d'un enduit de ce métal; & l'on
a obfervé qu'en mettant de Tétain dans du fer fondu,
ils forment enfemble des petits globules qui décrépitent
avec explofion.
Au refle, lorfqu'on poufîe l'étain, ou plutôt la chaux
d'étain à un feu violent, elle s'allume & produit une
flamme aiïez vive après avoir fumé ; on a recueilli cette
fiimée métallique qui fe conden/è en poudre blanche.
M. Geoffroy qui a fait ces ob/èrvations , remarque aufîi
que dans la chaux blanche ou potée d'étain, il fe forme
quelquefois des parties rouges ; ce dernier fait me paroît
indiquer qu'avec un certain degré de feu , on viendroit
à bout de faire une chaux rouge d'étain, puifque ce
deviennent noirs , & fe convertiflent en une poudre de la même
couleur , dont il eft: aifé de retirer tout l'arfenic en la lavant une ou
deux fois avec un peu d'eau diflillce , qui , diflolvant le fel formé par
la calcination de l'étain avec l'acide régalifé , laiflera au fond du vafe
environ deux grains d'une poudre noire qui efl du véritable arfenic. ,.
L'arfenic , en quelque petite proportion qu'il foit mêlé avec l'étain ,
n'y en eût-il que TiTïv ^^ nianifefte encore lorfqu'on expofe ce mé-
lange dans l'eau régale. Recherches Chimiques fur l'étain , par At^*
Bayen & Charlard , pages ^8 àf fuiv,
n'eft
DES M I N É R A U A'. I 6 I
n'cfl qu'avec un certain degré de feu bien détermine,
& ni trop fort ni trop foible, qu'on donne à la chaux
de plomb, le beau rouge du minium.
Nous ne pouvons mieux finir cet article de Tétain,
qu'en rapportant les bonnes obfervations que M." Bayen
& Cliarlard ont faites fur les différens étains qui font
dans le commerce C/i) ; ils en diflinguent trois fortes.
(h) Nous diviferons , difent-ils , tout IVtaia qui le trouve dans (e
commerce intérieur du royaume.
1." En étain pur ou fans aucun mélange artificiel, tel enfin qu'il
fort des fonderies; 2.° en t'tain allié dans \e^ fonderies m.ème avec
d'autres métaux à des titres prefcrits par l'ul'age ou par les ioix dn
pays; 3." en étain ouvragé par les Potiers c|ui font tenus de fe
conformer dans tout ce qu'ils font concernant leur art , à des rè-
glemens anciennement établis, & aujourd'hui trop peu fuivis.
L'étain pur ou fans mélange artificiel pourroit nous venir d'An-
gleterre, II, à ce qu'on allure", l'exportation nen étoit pas prohibée
parles Ioix du pays. Au défaut de celui d'Angleterre, il nous en
ell apporté en allez grande quantité des Indes .... On nomme ce
dernier éia'in de Banca & de Aialaca , ou fimplement de Malac ;
celui-ci nous arrive en petits lingots pefant une livre, & qui , à caufe
de leur forme , ont été appelés petits chapeaux ou écrho'ires.
L'étain qui le vend fous le nom de Banca , fe fait diftinguer du
précédent , & par la forme de fes lingots qui font oblongs , & par
leur poids qui efk de quarante - cinq à cinquante livres, & même
au-defius: du refle, ces lingots de Banca & de Malaca n'ont point
l'éclat ordinaire à l'étain , ils font recouverts d'une forte de rouille
grife ou craffe , d'autant plus épailië qu'ils ont féjourné plus long-
temps dans le fond des Vaifleaux, dont ils faifoient vraiiemblable-
ment le lefl ....
Mincriiux , Tome III. X
i62 Histoire N atv relle
1.° l'ctaiii tel qu'il fort des fonderies, & fans mélange
artiticiel ; 2.° i'étain allié dans les fonderies, fiiivaiu
l'ufage ou la loi des dilîerens pays (ij; 3. l'étaia
ouvragé par les Potiers (kj . Ces habiles Chimifles ont
II nous eft arrivé de i'étain pur d'Angleterre en petits morceaux
ou échantillons pefant chacun entre quatie ik cinq onces; leur alped:
annonce qu'ils ont été détachés d'une grofle niafie à l'aide du ciléau
& du marteau. . . . Les côtés par où ils ont été coupés ont conferve
l'éclat métallique , tandis que le côté ou la fuperricie externe eft
niamelonée & couverte d'une pellicule dorée , qui offre aHez fré-
quemment les différentes couleurs de la gorge de pigeon ....
Nous avons trouvé chez un marchand de I'étain pur, qu'il nous
affura venir d'Angleterre, & qui en effet ne différoit en rien pour
Ja qualité de celui dont nous vejions de parler, cependant il avoil
la forme de petits chapeaux qui pefoient chacun deux livres ....
Mais nous favons que les marchands font dans l'habitude de réduire
ies gros lingots en petits, pour fe faciliter le détail de I'étain... .
Tels (ont les étains qui paffent dans le commerce pour être les plus
purs, ou ce qui eft la même chofe, pour n'avoir reçu artificiellement
aucun alliage. Recherches Chimiques fur I'étain, par M!' Bayen &
Charlard, pages 22 & fuivantes.
(i) La féconde claffe de I'étain que nous examinons , comprend
celui que nous tirons en très-grande quantité de l'Angleterre, d'où
on nous l'envoie en lingots, d'environ trois cents hvres; nous les
appelons gros faumons. Cet étain eft d'un grand ufage parmi nous,
& il le débite aux differens ouvriers en petites baguettes triangu-
laires de neuf à dix lignes de pourtour, & d'environ un pied &
demi de long II n'eft pas pur, «5c félon M. Geoffroy, il a
reçu en Angleterre même l'alliage prefcrit par la loi du pays.
Recherches fur I'étain , &c. pacre 2y.
(k) A l'égard de la troifième claflè , elle renferme, comme nous
DES Minéraux. 163
reconnu par des comparaifons exades & 'multipliées,
que les étains de Malaca & de Banca, ainfi que celui
qu'ils ont reçu d'Angleterre, en petits cchantiilons de
quatre à cinq onces, & auiïî celui qui fe yead à Paris,
fous le nom iïéiain doux , ont tous le plus grand &
le même éclat ; qu'ils réfiftent également <& long-temps ,
aux impre/Tions de l'air fans (è ternir ; qu'ils font les
uns & les autres fi du6liles ou extenfibles, qu'on peut
aifëment les réduire fous le marteau, en feuilles au/Ti
minces que le plus fin papier, fans y faire de gerçure;
qu'on en peut plier une verge d'une ligne de diamètre,
quatre-vingts fois à angle droit fans la rompre ; que le
cri de ces étains doux, eft différent de celui des étains
aigres , & qu'enfin ces étains doux de quelques pays
qu'ils viennent, font tous de la même denfité ou pefàn-
leur fpécifique (l) .
l'avons dit, tous les étains ouvragés, & vendus par les Potiers d'étain ,
fous toutes fortes de formes. Le premier en rang , eft celui qu'ils
vendent fous la marque d'étain fin ; le fécond , fous celle d'étain
commun , & le troificme fous le nom de claire étoffe ou fimplement
de claires. Idem , page 28,
(l) Recherches fur l'ctaîn, par M/' Bayeii & Charlard, y^^^iri
2^ & ^ Q'
Xi;
164 HisTO IRE Naturelle
D U P L 0 Ad B.
JLE PJomb , quoique le plus clenfe (a) des métaux
après l'or, cft le moins noble de tous; il efl mou /ans
du6liiité, & il a plus de poids que de valeur; fes qualités
font nuifiblcs & fes émanations iuneftes; comme ce métal
fc calcine aifément & qu'il efl prefque auffi fufiblc que
J'ctain, ils n'ont tous deux pu fupporter rad;ion du feu
primitif fans fe convertir en cbaux; auffi le plomb ne fe
trouve pas plus que l'étain dans l'état de métal ; leurs
mines primordiales font toutes en nature de cbaux ou dans
un état pyriteux; elles ont fuivi le même ordre, fubi les
mêmes effets dans leur formation; <& la différence la
plus effcntielle de leurs minerais , c'efl q^ue celui du
plomb efl exempt d'arfenic , tandis que celui de fétain
en efl toujours mêlé, ce qui femble indiquer q^wt la
formation des mines d'étain efl poflérieure à celle des
mines de plomb.
La galène de plomb efl une vraie pyrite , qui peut
le décompofer à l'air comme les autres pyrites , &
dans laquelle efl incorporée la cbaux du plomb primitif,
qu'il faut revivifier par notre art pour la réduire en
(o) Selon M. Briflon, le pied cube de plomb fondu, ccroui
ou non écroui , pcfe également 794 livres 1 o onces 4 gros 44
grains; ainfi ce métal n'eft fufceptibie d'aucune comprefîlon, d'aucun
écrouiflement par la percufljon.
DES Minéraux. 165
métal ; on peut même imiter artificiellement cette pyrite
ou galène en fondant du foulVe avec le plomb ; ie
mélange s'enfïamme fur le feu, & laifTe après la com-
buflion une litharge en écailles, qui ne fond qu'après
avoir rougi, & fe réunit par la fufion en une malTe
noirâtre, difpofée en lames minces &. à facettes, fem-
blables à celles de la galène naturelle ; le foie de foufre
convertit aufii la cbaux de plomb en galène ; ainfi l'on
ne peut guère douter que les galènes en général n'aient
originairement été des chaux de plomb, auxquelles l'ac-
tion des principes du foufre aura dopjié cette forme de
minéraliiation.
Cette galène ou ce minerai de plomb affeél:e une figure
exahèdre prefque cubique ; fa couleur efi à-peu-près la
même que celle du plomb terni par l'air; feulement
elle eft un peu plus foncée &. plus luifante ; fa pefanteur
approche auffi de celle de ce métal ; mais la galène en
diffère, en ce qu'elle efl cafTante & feuilletée aiïez irré-
gulièrement ; cWc ne fe préfente que rarement en petites
mafles ifolées (h) ^ mais pre/que toujours en groupes
de cubes appliqués affez régulièrement les uns contre
les autres ; ces pyrites cubiques de plomb varient pour
la grandeur ; il y en a de fi petites dans certaines mines j
(b) M. de Grignon m'a dit avoir obfervé dans le Limofin , une
niine de plomb, qui eft en criftaux 0(f\acdres , ilotes ou groupés
par une ou deux faces; cette mine gît dans du fable quartzeux
Ic'gcrement aglutinc.
i66 Histoire N aturelle
qu'on ne les aperçoit qu'à la loupe, & dans d'autres
on en voit qui ont plus d'un demi - pouce en toutes
dimenfions ; il y a de ces mines dont les filons font
fi minces qu'on a peine à les apercevoir & à les
fuivre, tandis qu'il s'en trouve d'autres qui ont plufieurs
pieds d'épai/Teur , & c'efl dans les cavités de ces larges
filons que la galène eil en groupes plus uniformes & en
cubes plus réguliers; le quartz e(t ordinairement mêlé
avec ces galènes de première formation ; c'efl leur
gangue naturelle, parce que la fub/laiice du plomb en
état de chaux a primitivement été dépofée dans les
fentes du quartz, où l'acide efl enfuite venu la faifir
h, la mincralifer. Souvent cette fubftance du plomb
s'eft trouvée mêlée avec d'autres minerais métalliques;
car les galènes contiennent communément du fer ik. une
petite quantité d'argent (c) , & dans leurs groupes on
voit fbuvcnt des petites maffes interpofées qui font pure-
ment pyriteufes, & ne contiennent point de plomb.
Comme ce métal ie convertit en chaux, non-feulement
par le feu , mais au/Ti par les élémens humides , on trouve
quelquefois dans le fein de la terre des mines en cérufè,
qui n'efl; qu'une chaux de plomb produite par Wcià^ de
l'humidité; ces mines en cérufe ne font point pyriteuiès
(c) On ne connoît gucte que la mine de Wïllach en Carinthie ,
qui ne contienne point d'argent; & on a remarqué qu'aHez ordi-
nairement plus les grains de la galène l'ont petits , & plus le minerai
ell riche en argent.
DES Minéraux, i 67
comme la galène ; prefque toujours on les trouve mêlées de
plufieurs autres matières métalliques qui ont été clécompo-
Tces en même temps , & qui toutes fcmt de troffième for-
mation. Car avant cette déccmpolition du plomb en ccrufe,
on peut compter plufieurs degrés & nuances par lejfquels
la galène paflè de fou premier état à des formes iuc-
ceflives; d'abord elle devient chatoyante a /à iùrfàce,
& à mefurc qu'elle avance dans fz décompofition, cWc
perd de Ton brillant, & prend des couleurs rougeûtres
& verdâtres. Nous parlerons dans la fuite de ces diffé-
rentes efpèces de mines, qui toutes font d'un temps
bien pofléricur à celui de la formation de la galène , qu'on
doit regarder comme la mère de toutes les autres mines
de plomb.
La manière de traiter ces mines en galène, quoique
aflez fmipk, n'eft peut-être pas encore affez connue.
On commence par concafîèr le minerai, on le grille
enfiiite en ne lui donnant d'abord que peu de feu; on
l'étend fur l'aire d'un fourneau qu'on chauffe graduel-
lement; on remue la matière de temps en temps, &
d'autant plus fouvent qu'elle eft en plus grande quantité.
S'il y en a 20 quintaux, il faut un feu gradué de cinq
ou fix heures; on jette de la poudre de charbon fur
le minerai afin d'opérer la combufîion des parties fui-
fureufes qu'il contient; ce charbon, en s 'enflammant ,
emporte auffi l'air fixe de la chaux métallique; elle fe
réduit dès-iors en métal coulant à mtfiire qu'on remue
i68 Histoire N atu relle
le minerai & qu'on augmente le feu, on a foin Je
recueillir le métal clans un bafTin où l'on doit le couvrir
auiïi de poudre de cliarbon pour prcierver fà furface
de toute calcination: on emploie ordinairement quinze
heures pour tirer tout le plomb contenu dans vingt
quintaux de mine, & cela fe fait à trois reprifes diffé-
rentes ; le métal provenant de la première coulée qui
fc fait au bout de neuf heures de feu , fe met à part
lorfque la mine de plomb contient de l'argent ; car
alors le métal qu'on recueille à cette première coulée,
en contient plus que celui des coulées fubféquentes. La
féconde coulée fe fait après trois autres heures de feu ,
elle efl moins riche en argent que la première ; enfin
la troifième «Se dernière, qui efl au/Fi la plus pauvre en
argent, fe fait encore trois heures après; & cette manière
d'extraire le métal à plufieurs reprifes, efl très-avanta-
geufe dans les travaux en grand , parce que Ton concentre
pour ainli dire, par cette pratique, tout l'argent dans
la première coulée , fur - tout lorfque la mine n'en
contient qu'une petite quantité ; ainfi on n'efl pas obfigé
de rechercher l'argent dans la maffe entière du plomb,
mais feulement dans la portion de cette maiïe qui efl
fondue la première (à).
Nous avons en France plufieurs mines de plomb,
(d) Obfervatioiis métallurgiques de M. Jars; Mémoires de f Aca-
démie des Sciences, année i yyo , page J i J'
dont
D E s Al I N É R A U X, 169
dont quelques-unes font fort abondantes & en pleine
exploitation: celles de la Croix en Lorraine, donnent
du plomb, de l'argent & du cuivre. Celle de Hargenthen
dans la Lorraine - allemande , efl remarquable en ce
qu'elle fe trouve mêlée avec du charbon de terre (e):
cette circonftance démontre afTez que c'efl une mine
de féconde formation. Au Val-Saint e- Marie , la mine a
les couleurs de l'iris , & eft en grains affez gros ; celles
de Sainte - Marie - aux - Mines &. celles de Stenbach en
Al/àce, contiennent de l'argent ; celles du village à' Au-
xelles n'en tiennent que peu, & eniin les mines de
cTa/zz/ - 'Nicolas & à^AJlenbach , font de plomb & de
cuivre (fj.
Dans la Franche-comté, on a reconnu un filon de
plomb à Teruan, à trois lieues de Château -Lambert;
d'autres à Frêne, à Plancher-lès-Mines , àBody, &c.
En Dauphiné, on exploite une mine de plomb dans
la montagne de Vie?me; on en a abandonné une autre
au village de la Pierre, diocèfè de Gap,- parce que les
filons font devenus trop petits ; il s'en trouve une
à deux lieues du bourg (ÏOifans, qui a donné cin-
quante-neuf livres de plomb & quinze deniers d'argent
par quintal (g).
(e) Traité de la fonte des mines de Scl:ilutter, tome I, page S.
(f) Idem, pages 11 & j 2*
(g) Idem, tome I , pages i ^ & fuivantes.
ATinéraiix f Tome III, Y
\jo Histoire Naturelle
En Provence, on en connoît trois ou quatre ^/i),
& plufieurs dans le Vivarais (i) , le Languedoc (k),
Je Rouiïillon (IJ & le comté de Foix (mj , le pays de
Comminges (n). On trouve au/Ti pluiicurs mines de
(h) En Provence , il y a des mines de plomb au territoire de
Ramatuelle , dans celui de la Roque; à Beaujeu , au territoire de la
Nolle ; dans celui de Luc, diocèfe de Frtjus, 6iC. Tralié Je la foute
des ÂJines Je Sihluiier, tome I, jniç^e 21,
(ij Dans le Vivarais, fix inine^ de ploinl) tenant argent, près de
Tournon Autres mines de plomb à BayarJ , diocèfe d'Uzès;
dans le njtme territoire de Ba.)ard, il y a d'autres mines de j)lumb à
HanciJne & à Saint-Loup, . . d'autres à une lieue de Nancé , paroiiîe
de Bahours , tenant plomb & ar^^ent. iJem, pcigei 2 2 if 2^,
(k/ En Languedoc, il y a des mines de plomb à Pierre Cervife,
à Auriiic , à Cofcalely qui donnent du cuivie, du plomb & de l'an-
timoine. ... 11 y en a d'autres daiis ia juonia^ne jioire près la Aallc'e
de Corbicres. IJem , page 2 6 .
(l) Dans le Rouflillon , il y a une mine de plomb entre les territoires
de Prat'cs £•. ceux de Alanere & Serra Lortga. . . . Autres mines de
plomb à rognons dan.s le territoire de Torigna ; cç% mines foiii en partie
dans les vignes , & on tes découvre aprcs des pliJies d'orage ; les Paylans
en vendent le minerai aux Potiers. ... La niême province renferme
encore d'autres mines femblables. Liem , pnge j j .
(m) Dans Je comte de Foix , mines de plomb tenant argent à
\ Afpie Autre mine de plomb dans la montagne de AiontrovjlanJ,...
Autre au village de Pejcbe près Chîiteau-Verdun Autre dans
les environs d' Arques , qui elt en feuillets fort ferrés & très-pefaus.
JJem , page 4 1 .
(n) )J)M-\i le comté de Comminges, il y a ime belle mine de
plomb près JenJs, dans la valke de Loron Uiie autre dans la
D E s AI I N É R A U X. 171
plomb dans le Bigorre fo), le Béarn (^f) &. la baffe
Navarre fi/^.
Ces provinces ne font pas les feules en France,
dans lefquelles on ait découvert & travaille des mines
de plomb , il s'en trouve au/fi , & même de très-
vallée à! Arboujî , tenant argent Une autre tenant anfll argent,
dans la vallée de Luchon , . . . . & d'autres dans la ville de L}ge ,
&. dans la montagne Souquette ; cette dernière tient argent &
or La montagne de Geveiran efl: pleine de mines de plomb
& de mines d'argent , que les Romains ont travaillées autrefois
Il y a encore plulieurs auires mines de plomb dans le même Comté.
Traité de la fonte des Mines de Schlutter, tome I , p^^^s ^^ Ù'
ftiivantes.
(0) Dans le Bigorre , il y a une mine de cuivre verte à Gaver'in...»
Une autre à Confrette , au-delîus de Barrage Dans la montagne
de Cajlillan proche Peyre-Fite , il y a des mines de plomb <ju'on ne
peut travailler que trois ou quatre mois de l'année , à caule des neiges...,
Autres mines de plomb à Stnix , dans la vallée d' Àuiun A Por-
chyite fie dans plufieurs autres lieux du Bigorre. Idem , pages ^6 & 4j.
(p) Dans le Béarn, il y a une mine de plomb fur la montagne
de Hahal , à cinq lieues de Larmes , qui ell: en exploitation, bi. qui
rend cinquante pour cent Et une autre mine de plomb dans la
montagne de Alonheins. Idem , pages j 0 ^ j 2,
(q) Dans la baiïè Navarre, la montagne à' Agella , qui borne la
vallée d'Aure, renferme plufieurs mmes de plomb tenant argent
Celle (ï Avadec contient audi une mine de j)lomb tenant argent
Dans les Pyrénées , il y a de même des mines de plomb dans la
montagne de Belonca Dans celle de Ludens de Porlufon,
de Vtiran, &. plufieurs autres endroits. Idem, pages j^f, yj, //
^ fuiv.
172 Histoire Natu relle
bonnes dans le Lyonnois (r), le Beauj.oIois (f), le
Rouergue (rj, le Limofjn (uj, l'Auvergne {xj , le
Bourbonnois (y) , l'Anjou (i) , la province de Nor-
/rj Dans le Lyonnois, il y a des mines de plomb près Sûint-
Aldri'in de la Plaine . . . . D 'autres près de Tarrare , dont \es échan-
tillons n'ont donné que huit livres de plomb & trente grains d'argent
par quintal. Idem, p^ge S ' '
(f) Dans le Beaujolois , il y a des mines de plomb près du Rhône,
dans un lieu nommé Guyon D'autres à Confens en Fores, à
Saint-Julien- Afolïn- Alolette . &c. il y en a encore plufieurs autres
dans cette province. Traité de la fonte des Alines de Scldutter , tome I ,
page ^2.
(t) Idem , page j» 0 .
(u) Dans le Limofin, il y a une mine de j)lomb à Fargens , à
une demi-lieue de Tralage Une autre dans la paroifle de Vicq,
éieclion de Limoges, & à Saint - Hilaire une autre mine de plomb
tenant étain ; il y a encore d'autres mines de plomb qu'on foupçonne
tenir de l'éiain. Idem , page j^ Les meilleures mines de plomb
du Limofin font celles de Glanges , Alercœur & I(foudun ; cette
dernière donne foixante - cinq à foixante - dix livres de plomb par
quintal de minerai; mais ce filon eft très -mince. Note communiquée
par AI. de Grignon , en Oéîobre lySi,
(x) En Auvergne, il y a une mine de plomb à Comhres , à deux
lieues de Pontgibaud ; elle ne rend que cinq livres de plomb par
quintal , mais cent livres de ce plomb donnent deux marcs & une
once d'argent; elle cfl: abandonnée Il y a d'autres mines de
plomb à Chades , entre Riom & Pontgibaud , & d'autres dans
i'éledion de Riom. Traité de la fonte des Mines, par Schlutter, tome I,
pages 60 & 61.
(y) Dans le Bourbonnois , il y a des mines de plojnb dans l'enclos
des Chartreux de Moulins , & dans le village d'Unes. Idem , page 62.
(l) En An/ou, félon Pigaaiiol, il y a des mines de plomb dans
DES Minéraux. 173
mandie (^dj &. ia Bretagne (èj^ où celles de Poînpéan &
de Poidawen font exploitées avec fuccès ; on peut même
dire que celle de Pompéan eft la plus riche qui foit
en France, & peut-être en Europe: nous en avons au
Cabinet du Roi, un trcs-gro^Ét très-pefant morceau,
qui m'a été donné par feu M. le chevalier d'Arcy,
de l'Académie des Sciences.
M. de Genfanne, l'un de nos plus habiles Minéra-
logiftes, a fait de bonnes obfervations fur la plupart
de ces mines; il dit que dans le Gévaudan , on en
trouve en une infinité d'endroits , que celle à' Alern,
qui eft à grofles mailles , efl; connue dans le pays fous
le nom de vernis ^ parce que les habitans la vendent aux
Potiers pour verniffer leurs terreries; il ajoute que les
veines de cette mine font pour la plupart horizontales ,
&. difperfées fans fuite dans une pierre calcaire fort
dure (c) . On trouve auffi de cette mine à vernis en
\à paro'ijfe de Cor celle Une autre à ATontrevaux ; cette dernière
a été travaillée & enfuite abandonnée. Idem , page 6 j^,
(a) En Normandie , il y a une mine de plomb à Picrreville , auprès
de Falaife. Idem, page 68.
(b) En Bretagne , il y a une mine de plomb à Pompéan; en 1733
& 1734» le minerai donnoit jufqu'à foixante-dix-fept livres pour cent
de plomb , & ce plomb rendoit trois onces au plus d'argent par
(juintal Il y a encore d'autres mines de plomb à Borîen y Serw
gnat-, Poulûwen , Ploué , Loquefré , le Prieuré, la FeuUlée , Ploué-
Normïnais y Carnot , Plucquets .Trebïran, Paul & Melcarchais. Traité
àJe la fonte des Mines de Schlutter , tome I, page yo.
(c) Hiftoire Naturelle du Languedoc, tome III , page 22 j>
174 Histoire N atu r e lle
grofles lames auprès de Combene , paroifTe à' Iffa-
e'UiK (d) . Le dodeur Aflruc avoit parlé pluficurs années
auparavant, d'une femblable mine près Aç,Durford, dans
le diocèfe d'Alais , qu'on employoit auffi pour verniirer
ies poteries (e) .^\. deGenfanne a ob/èrvé dans les mines
de plomb de P/^/vv-/.^^^ ^ diocèfe d'Uzès, que l'un des
filons donne quelquefois de l'argent pur en filigranes,
& qu'en générai, ces mines rendent quarante livres de
plomb , & deux ou trois onces d'argent par quintal ; mais
il dit que le minerai eft de très-difficile fufion , parce
qu'il eft intimement iXi^Xè avec de la pierre cornée.
Dans la montagne de Mat-imèert, il y a deux gros
filons de mines de plomb riche en argent; ces fiions,
qui ont aujourd'hui trois à quatre toifes d'cpaiffeur d'un
très - beau fpath piqueté de minéral , traverfent deux
montagnes, & paroilfent fur plus d'une lieue de longueur;
il y a des endroits où leur gangue s'élève au - deffus
du terrein de cinq à fix toifes de hauteur (fj. Cet
habile Minéralogille cite encore un grand nombre
d'autres mines de plomb dans le Languedoc , dont
plufieurs contiennent un peu d'argent , & dont le
minéral paroît prefque par-tout à la furface de la terre.
« Près des bains de la Malon , diocèfe de Béfiers , on
n ramaffe , dit - il , prefque à la furface du terrein , des
(d) Hiitoiie Naturd/ç du Languedoc, tome III, page ^jS.
(e) Bibliothèque raifonnée, Juillet, Août & Septembre 1759.
(f) Hiftuire Naturelle du Languedoc, par M. de Genfanne,
tome II, p^gcs i 6 ^ & I 6 ^1
DES Minéraux. 175
morceaux de mine de plomb difperfcs & enveloppés «
dans un ocre jaunâtre ; il règne tout le long de ce vallon, «
une quantité de veines de plomb, d'argent &. de cuivre ; «
ces veines font la plupart recouvertes par une cfj)èce de «
minéral ferrugineux d'un rouge de cinabre , & tout- «
à-fait fèmblable à de la mine de mercure fgj ».
Dans le Vivarais, M. de Genfanne indique les mines
de plomb de Y Are^entière ; celles des montagnes voifincs
de la rivière de la Douce; celles de Suhit - Laiircni-
les-hams, du vallon de yî%)r^j^ & plufieurs autres qui
méritent également d'être remarquées (h) ; il en a auni
^rr^ Hidoire Nature''e du Languedoc, par M. de Cenlanne,
tome 11 , pages J 6 ^ c>" i 6 ^.
(h) La petite ville de rArgenticre en Vivarais, tire Ton nom
des mines de ploiub & argent qu'on y exploitoit autrefois
]1 n'y a point de veines réglées ;' le minerai .s'y trouve difperfc dans
un grès très-dur , ou efpèce de granit , qui forme la niafie des mon-
tagnes qui environnent l'Argentière. Ce minerai efl à grains fins,
iemblables aux grains d'acier; il rend au - delà de foixante livres de
plomb, 6c depuis quatre jufqu'à cinq onces d'argent auquirual.. . ,
11 n'y a que la crête de ces montagnes qui ait tté attaquée, 6: il
i.'tw faut bien que le minerai y loit épuifè Il y a fur ces mon-
ta unes , depuis }^ûls jufqu'à la rivière de la Douce, dans la j^aroifle
de Serre-mejames , quantité d'indices de mines de plomb; jiiais un
phénomène bien fmgulier, c'eft qu'on trouve fur la furfacc de ce
terrein des morceaux de mines de plomb plâtreux, lemblables à de
la pierre à chaux ^ qui renferment des grains de jjlomb naturel,
dont quelques-uns pèlent jufqu'à demi-once La matière dure
& terreufe qui renferme ces grains, rend elle-même jufqu'au - delà
de quatre-vingts pour cent de ])lomb
176 Histoire Naturelle
reconnu quelques autres dans différens endroits de la
province du Vélay (i) . En
En defcendant de ces hautes montagnes dans le vallon de Sû'int^
Laurent-lcs-baïns , nous avons remarque quelques veines de mines
de ploinb. II y en a une fur-tout confiderabie au bas de ce village,
fur fa furface de laquelle on Remarque plufieurs filets de Ipaih d'une
très-belle couleur d'améthyfte
Il y a peu de cantons dans le Languedoc, où il y ait autant de
minéraux que le long du vallon de Alayres , fur-tout aux montagnes
qui font au midi de cette vallée. Ga commence à apercevoir les
veines de ces minéraux auprès de la Narce , village fitué fur la mon-
tagne du côté de la Chajfade. II y a auprès des Artch une
montagne qui nous a paru toute compofée de mines de plomb &: argent.
On en trouve des veines confidérables au pied du village de Mayres.
En montant du Chayla , au bas du château delà Chaife, oï\ trouve
près du chemin un très - beau filon de mine de plomb. II y en a
plufieurs de même nature près le village de Saint- /Michel.
La montagne qui s'étend depuis Beaulieu à Ethlfes , jufqu'au-delà
de Vincieux , eft traverfée par un grand nombre de filons de mine
de plomb , dont une grande partie ell exploitée par M. de Plumefeïn ,
qui en a la conceffion de Sa Majeflc Le filon d'Eî/i}fes a
environ deux pieds de largeur , & efl entre - mêlé d'une terre
noire Le filon de BrouJJîrî eft magnifique. ... II y a des
endroits où le minéral pur a près de quatre pieds de largeur. . . .
Comme ce minéral ne tient prefque pas d'argent , on en fépar^ le
plus pur pour les Potiers du diocèfe , fous le nom de vernis. Le
furplus , qui fe trouve mêlé de blende ou de roche , eft porté à la
fonderie de Saint - Julien, où l'on en extrait le plomb. ... II y a
un autre filon de mine de plomb à Baley, paroifi'e de Talancieux ,
qui n'eft pas riche. Hijloire Naturelle du Languedoc par M. de Gen-
Jannc ^ tome III , pages lyS & fuiv.
(i) On trouve dans le canton ( de la paroijfe de Brignon en
Vtlay )
DES Minéraux. 177
Ea Franche - comté , à Plancher - les - Mines dans la
grande moniague , les mines font de plomb & d'argent;
elles font ouvertes de temps immémorial , & on y a
fait des travaux immenfès : on voit à Baitdy près de
Chute au- Lambert, un filon qui règne tout le long d'une
petite plaine fur le fbmmet de la montagne. Cette veine
de plomb efl fous une roche de granit, d'environ
trois toiiès d'épaiffeur, & qui reffemble à une voûte
en pierres sèches qu on auroit faite exprès , elle
s*étend fur toute la longueur de la plaine en forme de
crête (k) . Nous obferverons fur cela que cette roche
^_^_. _ Il - I 11 ri
Vélay ) , une très-belle mine de plomb , dont la veine efl trcs-bieii
carade'rifee. . . . Nous avons trouve dans les bois voifins de Verftllac,
un très-beau fîlon de mine de plomb. . . . Du côté d'Icenjaux, nous
avons reconnu en difFérens endroits , des marques très-caradérifëes
de mine de plomb Vers Saint- Alaurice- de - Lignan &. de
Prun'ùres , nous avons trouvé quantité de marques de mine de plomb
parmi les rocliers de granits On voit auprès de Aionijlrol ,
plufieurs anciens travaux fur à^i mines de plomb; celle qu'on appelle
la Bqt'u eft des plus confidérables. Les gens du pays nous ont
afTuré qu'il y a beaucoup de minéral dans le fond des travaux qui
ne font qu'à vingt-cinq toifes de profondeur; mais qu'on avoit été
obligé de les abandonner , à caufe de la quantité d'eau qui s'y trou-
voit. ... A peu de diftance de cet endroit eft la mine de Nant,
dont on vend le minéral aux Potiers : la veine ne donne que par
rognons.... II y a encore plufieurs autres mines <5c indices de
mines de plomb dans ce diocèfe. Traité de la fonte des mines de
SchuUter, pages 2^6, 2^^, 2jf.^, 2j^6 & 24J.
(k) Hiftoire Naturelle du Languedoc, par M. de Cenfanne^
tome II, pages i p & fuiv.
Minéraux, Tome IIL Z
178 Histoire Naturelle
ne doit pas être de granit primitif, mais feulement d'un
eranit formé par alluvion , ou peut-être même d'un
grès à gros grains , que ies Obfèrvateurs confondent
fouvent avec le vrai granit.
Et ce qui confirme ma pré/bmption, c'efl que ies
mines ne fe trouvent jamais dans les montagnes de
granit primitif, mais toujours dans les fchifles ou dans
ies pierres calcaires qui leur font adoffées. M. Jas-
kevifch dit, en parlant des mines de plomb qui font à
quelque diflance de Fribourg en Brifgau , que ces
mines fe trouvent des deux côtés de la montagne de
granit , oc qu'il n'y en a aucune trace dans le granit
même (IJ.
En Efpagne, M. Bowles a obfervé plufieurs mines
cle plomb dont quelques-unes ont donné un très-grand
produit, & jufqu'à quatre-vingts livres par quintal ^m) .
(l) A quelque diflance de Fribourg en Brifgau, il y a plufieurs
mines qui avoient été abandonnées , mais que l'on exploite de nou-
veau La montagne de Grenfem, où fe trouve plufieurs de ces
mines de plomb , eft adofiée à une montagne de granit. , . . Toutes les
pierres qu'on y trouve font de vrai granit giilatre , à fort petits
grains, avec des points de fchorl noir, reflemblant beaucoup au
granitello d'Italie. Du côté oppofé de cette montagne, eft une autre
mine de plomb dont le minerai efl une galène ; fa gangue ell de
fpath calcaire. La montagne gianitique fe trouve donc entre les
montagnes calcaires qui renferment les mines. Voyages de Ai.Jaskevïfch,
dans le fuppUment au Journal de Phyfi^ue du mois d'Oâobre i y S 2.
(m) II y a une mine de plomb à deux lieues d'Orellana, fur le
chemin de Zalùnica: cette nùne eii dans une petite cminence. . , ,
DES Minéraux. 179
En Angleterre, celle de Alendlp eft une galène en
maire , iàns gangue & prefqiie pure (n) ; il y a aulH
de très - riches mines de ce mctal dans la province de
Darby (o) , ainfi que dans les montagnes des comtés
La veine coupe direclement la pierre d'ardoife , elle efi: dans fe
quartz, HiJIoire Naturelle d' Efpagne , par Ai. Bowlcs, page ^y. —
Ddas h province de Jaen en Efpagne, aucune inine ne fe trouve
dans la pierre calcaire, <Sc il y en a une de plomb près de Limarcs,
dans du granit gris ordinaire. La veine a dans certains endroits foixante
pieJs de large, «?c dans d'autres pas plus d'un. Les falbandes qui
enveloppent la veine font d'argile ; mais ces falbandes font fouvent
à découvert & le mêlent avec le granit. . . . De ces falbandes qui
accompagnent les mines en gcncral , l'une foutient le filon par-
deifous & l'autre le couvre par-defTus , &: c'efl la plus grofle. . ..
Cette mine de plomb efl ordinairement en veines, mais on y trouve
aufîi des rognons. ... on en a trouve un fi abondant, que pendant
quatre ou cinq ans, il fournit une quantité prodigieufe de plomb
dans un efpace de foixante pieds de large, autant de long, & fur
autant de profondeur. . . . C'efl; une véritable galène à gros grains,
qui donne pour l'ordinaire foixante à quatre-vingts livres de plomb
par quintal. ... & comme ce plomb ne contient que trois ou quatre
onces d'argent par quintal, il ne vaut pas la peine d'être coupelle.
JJem , pages 417 & fuïv.
(n) La mine de ATcndlp , dans le comté de Sommerfet, ert en
quelcjues endroits en filons perpendiculaires, tantôt plus étroits, tantôt
plus larges; cette mine ne foriiie qu'une mafle, & elle contient du
plomb pur , excepté à la furface , où elle eft mêlée d'une terre rouge.
Ai. Guetlard; Alémoires de l' Acadénàe des Sciences, année 17^2,
pages ^21 & fuiv.
(0) On trouve en Derbyshire, des veines de plomb très-confi-
dcrabies, daiis une pierre à chaux coqujllèie, à laquelle on donne un
Zij
i8o Hi STO IRE Naturelle
de Cardignan &. de Cumberland (pj , &. l'on en connoît
encore d'auiïi pures que celles de Mendip, dans quelques
endroits de i'ÉcofTe (q).
M. Guettard a reconnu des indices de mines de
plomb en SuifTe (r) ^ & il a ob/èrvé de bonnes mines de
Très-beàu poli , & dont on fait piufieurs ouvrages Toutes lei
mines de cette province font très -riches en argent, & font dans
des montagnes récentes dont les pierres contiennent des corps
marins .... Cependant en Derbyshire, comme ailleurs, la pierre à
chaux eft pofée fur le fchifle .... Malgré cette exception , il n'en
eft pas moins vrai que les montagnes de nouvelle formation ren-
ferment raï^mem de vrais ûlom de mine. Le ter es fur la Minéralogie,
par M. Ferber; note, pages ^6 & fuiv,
(p) On fait qu'en géne'ral, toutes les montagnes du comté de
Cardignan en Angleterre, font remplies de mines de plomb qui
contiennent de l'argent. . . Dam les montagnes de Cumberland, il y a
du cuivre , de l'or & de l'argent , à. du plomb noir. M. Guettard;
Aiémoires de l'Académie des Sciences, année ly^^j page s^ S'
(cj) Il y a trois fortes de mines de plomb en ILco^e; la première
nommée lum-lead, efl prefque de plomb pur ; la féconde /mlling-
lead onfmethon, efl la mine triée; la troifième la mine pauvre. On
ne fond pas la première ni la Çecoaàe; oa les vend aux Potiers de
terre pour vernir leurs poteries. Jr^i// ^^ hfonîides mines de Schlutter,
tome II , page 32^.
(r) Les Alpes du canton de Schwitz renferment des mines de
plomb. Mémoires de V Académie des Sciences, année 17^2, page s 3 9.
— Scheuchzer dit qu'il y a une mine de plomb au-deiïus de Zillis
en Barenwald; une autre de plomb & de cuivre à Anneber^r, Jdem,
P^S^ 333' — La vallée de Ferrera, les environs de Schams , de
Davos & de Difentis fourniffent du plomb. Idem, ibidem. — Dans
ies environs du CrimfeUa SuiOh, il y a des veines de plomb. Idem,
page 336.
DES Minéraux. i8i
ce méial en Pologne; elles font, dit-il, abondantes &
riches en argent ("fj. Il dit aujfi que la mine (ïOlkufiow,
diocèfe de Cracovie, eft fans matière étrangère.
11 y a dans la Carinthie, des mines de plomb qui
font en pleine exploitation ; elles gifTent dans des
montagnes calcaires , &. l*on en tire par année vin^t
(f) Il y a à Olkufifir , dans le domaine de i'cvêque de Cracovie,
une mine de plomb fans matière étrangère , qui eft écaiileufe. Ses
cpontes ou falbandes font d'une terre calcaire Une autre mine
de plomb trouvée dans les Karpacs , eft à petites écailles, & contient
beaucoup d'argent gris ; une troifième eft à petites écailles avec des
veines d'une terre jaune d'ocre ; une quatrième eft auffi écaiileufe ,
pure & en mafle, compofée d'efpèce de grains mal liés, de forte qu'on
diroit que cette mine a paflc par le feu ; ces deux dernières fe trouvent
aufll dans les Karpacs Les mines ù'Olkuf^ en Pologne, ont
été travaillées dès le quatorzième fiècle ; on y voit plufieurs puits ,
dont quelques-uns defcendent jufqu'à quatre-vingts braïïes de pro-
fondeur. Leur fituation eft au pied d'une petite montagne, qui
s'élève en pente douce. Le minerai de ces mines eft la galène
couleur de plomb; elle eft fans mélange de cailloux ni de fable, ni
d'aucune autre fubftance Le minerai eft répandu dans une
terre jaunâtre , mêlée d'une pierre femblable à la calamine , & à de la
pierre à chaux dans quelques endroits ; cette terre contient aufli des
fragmens d'une pierre ferrugineufe , qui a été très- utile pour la fonte
du minerai A la profondeur de cinq ou fix braffes, on trouve
d'abord une efpèce de pierre à chaux , & dès la dixième brafîe on
rencontre la veine du minéral , qui , dans quelques endroits , n'a
que deux ou trois pouces, & dans d'autres jufqu'à une demi-braiïe
d'épaifteur On tire de ce plomb on/e marcs & demi d'argent ^
fur (bixante - dix quintaux de plomb. AI. Cuettard; Mémoires dr
V Académie des Sciences, année i yC 2 , pogcs ^ j (f , ^21 Ù' fuht^
/
\%z Histoire is atu u e l le
mille quintaux de plomb (t) . Les mines Je plomb que
l'on trouve dans le Palacinat en Allemagne , fous la
forme d'une pierre cri/lallifce, font exemptes de même
de toute matière étrangère; ce font des mines en chaux
qui, comme cçWç^ de plomb blanche, ne contiennent
en effet que du plomb , de l'air & de l'eau, fans mélange
d'aucune autre matière métallique (ii) .
On voit par cette éniuncration qu'il fè trouve un
gr-ûnd nombre de mines de plomi) dans prefque toutes
les provinces de l'Europe; les plus remarquables, ou
plutôt les mieux connues, font celles qui contiennent
une quantité confidérable d'argent ; il y en a de toute
efpèce en Allemagne (x) , de même qu'en Suède, <Sc
jufqu'en Norwège.
(t) On trouve dans les mines de Bleyberg en Carinthie, plufieurs
fortes de minerais. i.° Le •çXoxnhdige ou plomb compade prefque
malléable, couleur de vrai plomb minéralifé avec le foufre & l'arfenic;
2." la galène de plomb criftallifée en cubes ou en odaédres; 3.° la
craie parfeme'e de petits points de galène de plomb qui forment de
jolies dendriies; 4.° le plomb fpatheux, couleur de jaune-clair, jufqu'à
l'oranger blanc, couleur de plomb tran (parent, couleur de vert-
pâle. . . .&c. Voyage de M. Jaskevlfch , dans le fupplément au journal
de Phyfique du mois d'Oâobre de l'année i yS 2,
(u) Dans le haut Palatinat à Fregung , il y a une mine de plomb
qui n'eft mêlée d'aucun autre métal, & parconféquent excellente pour
l'ufage de la coupelle ; elle eft en partie fous la forme d'une pierre
criftalline ; le refte n'efl; pas fi riche en plomb & paroit plus farineux.
Colle dion académique, partie étrangère , tome II, page jt.
(x) La mine d? plomb & d'argent de Ramniei/berg, e/l 6ii pa«ie
DES Minéraux» i8<»
On ne peut guère douter qu'il n'y ait tout autant
de mines de plomb en Afie qu'en Europe; mais nous
ne pouvons indiquer que le petit nombre de celles qui
ont été remarquées par les Voyageurs, & il en eft àt
même de celles de l'Afrique <Sc de l'Amérique. En
Arabie, félon Nieburh, il y a tant de mines de plomb
très-pure, &: en partie mêlée de pyrites cuivreufes & de foufre; <5c
dans le milieu de ces pyrites on trouve quelques veines de mines de
plomb brillantes. ... Le produit de cette mine efl: en argent, depuis
un gros jufqu'à ime once , & en plomb depuis fix jufqu'à quarante
livres par quintal. On ne peut réduire cette mine en moindre volume
par le bocard & le lavage , parce que fa gangue eft trop dure & trop
pefaiite ; mais elle a l'avantage d'être affez pure; ainft on peut la regarder
comme une mine triée ; à caufe de fa dureté , on attend qu'elle ait
reçu trois grillages avant de l'efîayer Les mines qui fe tirent
des minières de Hal^bruche , ne contiennent par quintal que depuis
une demi- once jufqu'à deux onces & demie d'argent; mais elles
rendent depuis vingt-huit jufqu'à foixante-cinq livres de plomb par
quintal; ainfi comme elles font tendres, on les grille feules, & ou
ne leur donne que deux feux pour les ajouter enfuite aux autres
dans la fonte ....
On trouve à Foelgehaiigen , de la mine de plomb à gros brillans,
dont le quintal rend depuis foixante-dix jufqu'à quatre-vingts livres
de plomb, & depuis fix gros jufqu'à une once & demie d'argent;
on y trouve audî de la mine de plomb à petits brillans , contenant un
peu plus d'argent & moins de plomb: on trie les meilleurs morceaux
de ces mines , & on pile & lave le refte ; mais le tout doit être
grillé ....
Dans le haut Hartz , le produit des mines pilées varie beaucoup ;
il y en a dont le quintal ne tient qu'une demi -once d'argent,
d'autres qui en contiennent jufqu'à un marc .... Celles ô.'Andrcdjltrg
184 Histoire Naturelle
dans VOmûTï, &. elles font fi riches qu'on en exporte
beaucoup ^y. A Siani, les Voyageurs difent qu'on travaille
depuis long-temps des mines de plomb & d'étain Ci),
En Perfe, dit Tavernier, on n'avoit ni plomb ni étain
que celui qui arrivoit des pays étrangers ; mais ou
a découvert une mine de plomb auprès de la ville
éiYerde (n) . M. PeyfTonnei a vu une mine de plomb
dans l'île de Crète, dont il a tiré neuf onces de plomb
fur une livre & une très-petite quantité d'argent ; il dit
qu'en creufant un peu plus profondément , on découvre
quelquefois des veines d'un minerai de couleur gri/è,
taillé à facettes brillantes, mêlé de fbufre &. d'un peu
d'arfenic, &. qu'il a tiré d'une livre de ce minerai, fept
font plus riches, parce qu'on y trouve de l'argent vierge & de la
minera argent i rubra, dont les grillages fournirent beaucoup d'argent;
enfin , il y en a d'autres qui , fans argent vierge ni même d'argent
rouge , fournirent encore plus d'argent ....
Les mines qu'on tire dans le comté de Stolberg, à Strelibero-,
font de plomb & d'argent,- mêle'es d'un peu de pyrites & de mine
de cuivre. II fe trouve aufll dans les mêmes filons , de la mine de
fer jaune «5c blanche qu'on ne peut en féparer entièrement , ni en
pilant ni en lavant le minéral ; ainfi on la trie le mieux qu'il eft
pofTible, en la pilant grofîièrement «& la faifant paffer par un crible.
lyaité de la fonte des mines de Schlutter , tome II, pages 162,1 S 2,
18S, I pS & 32S,
(y) Defcription de l'Arabie, page 1 2j.
(l) Hirtoire générale des Voyages, tome XVIII, page j 07.
(a) Idem , tome X, page 6; 6.
onces
DES Minéraux. 185
onces de plomb & une dragme d'argent (b^. En Sibérie,
il le trouve auili nombre de mines de plomb, dont
quelques-unes font fort riclies en argent (c) .
Nous avons peu de connoifTances des mines de plomb
de l'Afrique; feulement le do6teur Shaw fait mention
de celles de Barbarie , dont quelques - unes , dit - il ,
donnent quatre-vingts livres de métal par quintal (d).
Dans l'Amérique feptentrionale, on trouve de bonnes
(h) Hifloire de Crête manufcrite, par M. Peyflonel.
(c) A quelque diflance à! Argunsk en Sibérie , & à quelques
verftes de l'ancienne mine à'Ildïkim, on a de'couvert un nouveau
filon d'un beau minéral luifant , très- foncé, mêlé d'un peu de
gravier qui contient deux onces d'argent, & plus de cinquante
livres de plomb par quintal. Il y a encore d'autres minerais dont
on tire trois onces d'argent & foixante - quatorze livres de plomb ,
& l'argent qu'il donne contient de l'or. Hijloire générale des Voyages,
tome XVIII , page 20p.
(d) Les mines de plomb de Jibùel - ris -fajf près d'Hamman-leef;
celles de Wamarb-réefe , & celles de Benibootateb , font toutes fort
riches, & l'on en pourroit certainement tirer de grands trélors fi elles
ctoient mieux travaillées On tire aifément par le feu 80 livres
de métal d'un feul quintal de mine Il y en a aufTi dans les terres
d'Alger, & fur-tout dans une haute montagne appelée Van-naff-réefe ,
dont le fommet eft couvert de neige. Après de grandes pluies , les
torrens qui découlent de cette montagne charrient des grains &
pailles de ce minéral , lefquels s'arrêtent fur ces bords, brillent comme
l'argent à la lueur du foleil. Voyages de Sha\^r, tome I, pages 49
Minéraux , Tome IIL A a
i86 Histoire Naturelle
mines Je plomb aux Illinois (e), au Canada (f), en
Virginie (g); il y en a aulTi beaucoup au Mexique (h),
& quelques-unes au Pérou, (i) .
Toutes les mines de plomb en galène, affedent une
(e} Dans le pays des Illinois, il y a des mines de plomb dont
on peut tirer foixante - feize on quatre - vingts livres de plomb par
quintal..... Ce plomb contient un peu d'argent. AI. Gucttard ,
Mémoires de l'Académie des Sciences , année ij^i, page 210,
(f) 11 y ^ ut^e mine de plomb à la baie Saint- Paul , à vingt -cinq
lieues de Québec qui efl dans une grande montagne. . . . Les filons
de cette mine de Saint Paul font places perpendiculairement dans le
rocher. .... Les pierres que l'on trouve à la furface ou à peu de
profondeur, ne font qu'environnées de métal à la furface , & à mefure
que l'on defcend les pierres en font plus pénétrées. Les veines font de
différentes largeurs, & font peu éloignées les unes des autres. Idem,
pages 2J0 Ù' fuivantes.
(g) La Virginie a des mines de plomb auxquelles on a travaillé,
& qui font aujourd'hui abandonnées. Hifoire générale des Voyages ,
tome XIV , page ^ 6 S .
(h) Le canton d'Y:^(juiqui/paj a vingt-deux lieues de Mexico, abonde
en mines de plomb La province de Guaxaca renferme la mon-
tagne 1f{_-qui-tepcque , où il fe trouve quantité de veines de plo 11b ;
celle de Guadaiajara renferme dans ^^^ montagnes beaucoup de
mines d'argent & de cuivre mêlées de plomb. Il s'en trouve aufli de
plomb & d'argent dans fa province de la nouvelle Bifcaie Et
autrefois on en tiroit aufTi beaucoup de la province de Chiapa. Idem ,
tome XII y page 648,
(i) Le Corrégiment de Guanta , dans le diocèfe de Guamanga au
Pérou , a des mines de plomb. Idem , page 64 8,
DES Minéraux, 187
figure exahèclre en lames ccailleufes ou en grains anguleux»
ik. c'eft en etfèt fous cette forme que la Nature a établi
ies mines primordiûL's de ce métal ; toutes celles qui /è
prc/entcnt fous d'autres formes, ne proviennent que de
la décompodtion de ces premières mines dont les
détrimens, faifis par les Tels de la terre, & mélangés
d'autres minéraux , ont formé les mines fecondaires
de cérufe , de plomb blanc (k) , de plomb vert, de
plomb rouge , &c. qui font bien connues des Natura-
liftcs ; mais M. de Gen/ànne fait mention d'une mine
fingulicre qui renferme des grains de plomb tout-à-
fait pur; voici l'extrait de ce qu'il dit à ce fujet:
« Entre Pradel & Vameau , il y a une mine de plomb
dans des couches d'une pierre calcaire fauve, & fouvent «
(k) La mine de plomb blanche qui fe trouve dans celle de Poii-
laouen en Bretagne , efl: en afiez gros criflaux, de forme prifmatique,
irrégulièrement Itrics dans leur longueur, d'un blanc de nacre tranf-
parent, qui donnent au quintal quatre-vingts livres de plomb tenant
un peu d'argent Cetie mine de plomb blanche, quoiqu'en dife
Vallerius , ell parfaitement foluoie par tous les acides Elle ne
contient point d'arlenic , quoique Vallerius l'ait afiuré, ni d'acide
marin , comme le prétend M. Sage Les mines de plomb
fpathiques font des mines de plomb de féconde formation , que l'on
rencontre difperfées fans ordre & fans fuite dans les environs & tou-
jours allez près des galènes ou mines de plonib fultureufes. La pofi-
tion iXts mines ff)athiques, leur criltallifadon diflintfle plus ou moins, \qs
fontaifcment reconnoître pour l'ouvrage des eaux fouterraines chargées
de la partie métallique des galènes dcconipofées. AUmoire de M. Laborie,
dans ceux des Savûtis étrangers , tome IX, pages ^42 & fuiv.
Aa ij
55
ty
»
3>
3)
188 Histoire Naturelle
'^ ronge ; le iilon n'a qu'un pouce & demi ou deux pouces
« d'ëpaiïTcur , & s'étend prefque tout le long de la foret
des châtaigniers : c'eft en général une vraie mine de
plomb blanche & terreufe ; mais ce qu'il y a de fmgulier,
>> c'eft que cette fubflance terreu/è renferme dans fon
5^ intérieur , de véritables grains de plomb tout faits , ce
>> qui étoit inconnu jufqu'ici ; cette terre minérale qui
" renferme ces grains, rend jufqu'au-delà de quatre-vingt-
" dix livres de plomb par quintal , & les grains de plomb
qu'elle renferme font très-purs & très-doux; ils n'afîèétent
point une configuration régulière , il y en a de toutes
fortes de figures ; on en voit qui forment de petites
>> veines au travers du minéral en forme de filigrane, &
^' qui reffemblent aux taches des dendrites. On trouve
» du minéral femblable, & qui contient encore plus de
" plomb natif, près du village de Fayet, Si. de même près
>^ de Villeneuve-de-Berg , & encore dans la montagne
>> qui efl à droite du chemin qui conduit à Aubénas, à
»' une petite lieue de Villeneuve-de-Berg; les quatre
« endroits de ces montagnes où l'on trouve ce minéral,
» font à plus de trois lieues de difîance les uns des
" autres fur un même alignement, «&. la ligne entière a
>> plus de huit lieues de longueur. Les plus gros grains de
>> plomb pur , font comme des marrons , ou de la groffeur
» d'une petite noix ; il y en a d'aplatis , d'autres plus
>> épais & tout bifcornus ; la plupart font de la groffeur
>> d'un petit pois, <St il y en a qui font prefque imper-
DES Minéraux, 189
cepiibles. La terre métallique qui les renferme, eft de
ia même couleur que la litharge réduite en poufTière
impalpable; cette terre fe coupe au couteau, mais il
faut le marteau pour la caffer ; elle renferme aufli des
véritables fcories de plomb, &. quelquefois une matière
femblable à de la litharge ; cependant ce minéral ne
provient point d'anciennes fonderies, d'ailleurs, il efl
répandu dans une très-grande étendue de terrein ; on
en trouve fur un ei^jace de plus d'un quart de lieue,
fans rencontrer de fcories dans le voifmage , où l'on n'a
pas mémoire qu'il y ait jamais eu de fonderies (IJ -\
Ces derniers mots, femblent indiquer que M. de
(l) Nota. M. de Virly, Préfident à la Chambre des Comptes
de Dijon, a eu la bonté de m'apporter un morceau de cette mine
mêlée de plomb tout pur, qu'il a trouvé à l'Argentière enVivarais,
fur l'une des deux montagnes entre lefquelles cette ville efl fituée; il
en a rapporté des morceaux gros comme le poing, & communément il
y en a de la grofleur d'un œuf; les uns ont l'apparence d'une terre
métallique; ils reflemblent au mafficot, & font un peu tranfparens;
d'autres plus légers font en état de verre , & renferment des globules
de métal , plus ou moins gros , qui fe laiflent entamer au couteau ,
& font réellement du plomb. Il y a beaucoup de mines de plomb
en galène aux environs de l'Argentière ; elles ont été exploitées dans
Je temps des Croifades comme mines d'argent ; c'efl; même , à ce que
l'on dit , ce qui a donné le nom à la ville ; il n'y a point de vefliges
d'anciens volcans dans ces deux montagnes , & ces matières de plomb,
qui ont évidemment éprouvé l'aélion du feu , font peut-être les refles
d'anciennes exploitations , ou ie produit de la fufion des mines de
galène par l'incendie des forêts qui couvroienc ces montagnes.
190 Histoire Naturelle
Gcnfaniie foupçoiine avec raifon , que le feu a eu part à
la formation de cette mine finguliere; s'il n'y a pas eu
de fonderies dans ces lieux, il y a eu des forets, <5c
très-probablement des incendies, ou bien on doit fup-
pofer quelqu'ancien volcan dont le feu aura calciné la
plus grande partie de la mine, & l'aura réduite en chaux
blanche, en fcories, en litharge, dans leiquelies cer-
taines parties fè feront reviviiices en métal, au moyen
des matières intiamniables qui fer voient d 'al i mens à
l'incendie; cette mine eft donc de dernière formation;
comme elle gît en grande partie fous la pierre calcaire,
elle n'a pas été produite par le feu primitif, qui d'ailleurs
J'auroit entièrement réduite en chaux, &. n'y auroit pas
laiffé du métal; ce n'efl: donc qu'une mine ordinaire,
qui a feulement été dénaturée accidentellement par le
feu fouterrain d'un ancien volcan, ou par de grands
incendies à la farface du terrein.
Et non-feulement le feu a pu former ces mines de
plomb en chaux blanche; mais l'eau peut auHi les
produire : la cérufè que nous voyons fe former à l'air
fur les plombs qui y font expofcs , efl une vraie chaux
de ce métal , qui étant entraînée , tranfportée & dépofée
en certains endroits de l'intérieur de la terre par la
filiation des eaux, s'accumule en mafles ou en veines,
fous une forme plus ou moins concrète. La mine
de plomb blanche n'eft qu'une cérufè criftallifée, éga-
lement produite par l'eau; il ny a de différence qu'en
DES Minéraux, 191
ce que la cérufë naturelle eft plus mcice de parties
terreufes ; ces mines de cérufe , les plus nouvelles de
toutes, fe forment tous les jours comme celles du fer
en rouille , par ks détrimens de ces métaux.
Les mines de plomb vitreufès & criflallifées , qui
proviennent de la dccompofition des galènes, prennent
différentes couleurs par le conta6l ou l'union des diffé-
rentes fubflances métalliques qu'elles rencontrent; le fer
leur donne une couleur rouge, 6c félon M. Monnet,
il les colore auffi quelquefois en vert: cet Obfèrvateur
dit avoir remarqué dans les mines de plomb de la
Croix en Lorraine fffi) ^ un grand nombre de criflaux
de plomb vert dans les cavités de- la gangue de cette
mine , qui n'eft qu'une mine de fer grifâii e ; d'oii il
conclut que les criflaux verts de plomb , ^ peuvent être
formés de la décompofition de la galène par le fer. La
galène elle-même peut fe régénérer dans les mines de
plomb qui font en état de cérufe ou de chaux blanche ;
on peut le démontrer, tant par la forme lifluleufe de
ces galènes qu'on appelle plomb twir, que par plufieurs
morceaux de mines dans lefquelles la bafe des crif-
taux efl encore de plomb blanc , feulement un peu
rougeâire, &. dont la partie fupérieure efl convertie en
galène.
En général, les mines de plomb tiennent prc/quc
(m) Obfervations fur une mine de plomb, par M. Monnet.
J92 Histoire Natu relle
toutes une petite quantité d'argent; elles font au/Ti très-
fouvent mêlées de fer & d'antimoine (n) , & quelquefois
de cuivre (o) ; mais l'on n'a qu'un fèul exemple de
mine de plomb tenant du zinc (p) ; & de même que
l'on trouve de l'argent dans prefque toutes les mines
de plomb, on trouve aufîi du plomb dans la plupart
des mines d'argent; mais dans les filons de ces mines,
le plomb, comme plus pefant, defcend au-de/Tous de
l'argent , &. il arrive prefque toujours , que les veines les
plus riches en argent fè changent en plomb à mefure
qu'elles s'étendent en profondeur (q) ,
Pour connoître la quantité du métal qu'une mine de
plomb peut contenir, il faut la griller en ne lui donnant
d'abord que peu de feu; la bien laver enfuite, & l'effayer
avec le flux noir, & quelquefois y ajouter de la limaille
de fer (r) , pour abforber le foufre que le grillage n'auroit
pas
(n) II y a du plomb qui , dans la mine , efl: mêitî avec de l'an-
timoine , & qui en con^^ïst encore après la fonte. Mémoires de
l'Académie des Sciences , année ij] ^ , page s i ^.
(o) II fe trouve des mines de plomb cuivreufes, & le plomb
qu'on en retire, conferve toujours quelques imprefljons du cuivre.
Idem , ibidem.
(p) Il y après de Goflar, une mine de plomb qui contient une
aflTez grande quantité de zinc .... mais on croit communément que
c'en; la feule mine en Europe qui en contienne. Idem, ibidem,
(q) Delius, fur l'art des mines, tome I, page y^.
(r) On met fi'x quintaux de flux noir fur un quintal de mine; on
mêle
î) E s Minéraux. ïpj
pas tout enlève (f); mais quoique par ces moyens on
obtienne la quantité de plomb afTez jufle, i'eiïai par
mêle le tout pour être inis dans un creufet que l'on place au feu:
on conduit la fonte comme celle d'un eflai de mine de cuivre,
excepté que celui de la mine de plomb eft fini beaucoup pius tôt; on
peut faire aufîi ces efîàis avec quatre quintaux de flux noir fur ua
quintal de mine, & même avec deux ou trois quintaux de ce fluXg
pourvu que la mine foit bien défoufrée.
Si les mines de plomb contiennent beaucoup d'antimoine , on
ajoute , à i'eflai d'un quintal de ces mines , vingt-cinq ou cinquante
pour cent de limaiKe de fer , plus ou moins , félon que la mine eft
chargée d'antimoine Si on eflaie les mines lavées > ou celles
qu'on nomme vulgairement pures , parce qu'elles n'ont point, ou
très-peu, de gangues, fans les faire rôtir, il faut y ajouter vingt-cinq
pour cent de limaille de fer: le plomb s'en détache plus aifément;
mais l'elîâi eft fouvent incertain , parce que le fer donne à l'elîaî
une couleur noire : quant aux mines rôties , il ne faut pas y ajouter
de fer. Traité de la fonte des Mines de Sclilutter, tome I, pages 207^
Ù- JZ08.
(f) Les mines de plomb exigent la torréfa(ftion à caufe%u foufre
qu'elles contiennent; on ajoute de la limaille de fer dans i'efîai poiu:
les en dépouiller plus fûrement: quand la mine tient de l'argent,
ce qui arrive fréquemment, on appelle plomb-d'ceuvre le produit de
la première fonte qui fe fait à travers les charbons ou au feu dâ
réverbère , fur de la brafque. Ou retire de l'argent du plomb-d'ceuvra
par une efpèce de coupellation en grand , c'eft-à-dire , en conver-
tlHânt le plomb en litharge, fur un foyer fait de cendres le/Hvées;
on lui donne un fécond affinage dans de vraies coupelles; & les
débris de ces vailîeaux, ainfi que ceux des fourneaux, & même la
litharge qui ne feroit pas reçue dans le commerce, font remis au
fourneau pour revivifier le plomb. Élémens de Chimie , par M> dc
/hfcrveau , tome I, page 2.^1,
Minéraux, Tome UL B b
394 Histoire Natup elle
la voie humide eft encore plus fidèle: voici le procède
Je M- Bergman (r) ; on puivérife la galène , on la fait
digérer dans l'acide nitroux ou dans i'acide marin ,
iufqu'à ce que tout le plomb foit dilTous, & alors le
foufre minéral fe précipite ; on s'afTurc que ce foufre
efl pur en le faifànt diffoudre dans i'alkali cauflique,
on précipite le plomb par l'alkali criitallifé , & cent
trente-deux parties de précipité indiquent cent parties
de plomb : fi le plomb tient argent , on le fépare du
précipité par l'alkali volatil , & s'il y a de l'antimoine,
on le calcine par l'acide nitreux concentre; fi h galène
lient du fer, on précipite le plomb &. l'argent qui peuvent
y être unis, ainfi que la quantité de fer qui fe trouve
dans l'acide, en mettant ime lame de fer dans la diflb-
lution ; celle que la lame de fer a produite indique
cxadement la quantité de ce métal contenue dans la
galène.*
Le plomb extrait de famine par la fonte, demande
encore des foins tant qu'il eft en métal coulant; car (i
on le laifTe expofé à l'adion de l'air , fa furface fe
couvre d'une poudre grife, dont la quantité augmente
à mefure que le feu continue , en forte que tout le
métal fe convertit en chaux, & acquiert par cette conver-
fion, une augmentation de volume très-confidérable fu):
(t) Opufciiles , tome II, d'ijfcrtation 2^.
(u) Nota. M. Demefle dit que cette aug.mentation de volume ou
de pefamçur / eft comme de 113 à 100.
DES Minéraux. ipj
cette chaux grife, expofce de nouveau à l'adion du
feu, y prend bientôt, en ia remuant avec une fpatule
de 1er, une alTcz belle couleur jaune, & dans cet état
on lui donne ie nom de mafficot ; & fi l'on continue
de ia remuer en la tenant toujours expofce à l'air, à
un certain degré de feu, elle prend une belle couleur
rouge , & dans cet état on lui donne le nom de luiuhini;
je dis à un certain degré de feu; car un feu plus fort
ou plus foible, ne changeroit pas le mafficot en minium;
& ce feu confiant & ncceifaire, pour lui donner une
belle couleur rouge, efl de cent vingt degrés (x) ; car
fi l'on donne à ce même minium une chaleur plus
grande ou moindre, il perd également fon beau rouge,
redevient jaune , <& ne reprend cette couleur rouge qu'au
feu de cent vingt degrés de chaleur. C'efl à M. Geofii-oy
qu'eft due cette intéreffante obfervation , & c'efl à
M. Jars (y) que nous devons la connoiflance des
^x) Divifioii du thermomètre de Rcaumur.
(y) II y a deux fabriques de minium dans le comte' de Derby,
Tune auprès de Chejlerfield , & l'autre aux environs de ia ville de
Wiskfa^orih, Le fourneau pour cette opération, eft un réverbère à
deux chauffes, renfermées fous une ieule & même voûte. . . . On
y fait ufdge de charbon de terre On emploie communément
quinze quintaux ou dix lingots de plomb dans une opération. . ..
On commence j^ar mettre en-dedans, & devant l'embouchure du
fourneau , le grollier de la matière jaune qui a relié au fond de la
balfine dans le lavage , ce qui empêche le plomb de couler au-
<iehors du fourneau. On introduit le plomb dans le fourneau, &. dè^
Bb ij
196 Histoire Naturelle
pratiques ufitées en Angleterre, pour faire le minium
en grande quantité, & par conféquent à moindre frais
qu'on ne le fait ordinairement.
Les Anglois ne fe fervent que de charbon de terre
pour faire le minium, & ils prétendent même qu'on
ne réuffiroit pas avec le charbon de bois ; cependant,
dit M. Jars, il n'y auroit d'autre inconvénient que celui
qu'il eft fondu on l'agiie continuellement ; à mefure qu'il fe réduit
en chaux on fe tire de côte', & on continue jufqu'à ce que le tout
foit converti en poudre , ce qui arrive ordinairement au bout de
quatre ou cinq heures. S'il refte encore quelques morceaux de plomb,
on les conferve pour une autre opération. On donne une chaleur
vive pendant tout fe temps de cette converfion , cependant elle ne
donne qu'un rouge de cerife très-foncé ; car les deux ouvertures des
chauffes & l'embouchure du fourneau font toujours ouvertes afin que
Je contad de l'air accélère la calcination. . . .
If faut pfus que \^s quatre ou cinq heures qui convertiflent le
plomb en chaux, pour qu'il foit réduit en poudre jaune; ainfi on
le laiffe encore près de vingt-quatre heures dans le fourneau ; mais
on ne fe remue pas fouvent dès qu'il efl une fois en poudre , feu-
îemejit autant qu'il le faut pour empêcher qu'il ne fe ineiie en
grumeaux , ou ne fe fonde en maffe. Quand on juge la chaux de
plomb affez calcinée , on la tire hors du fourneau avec un rable de
fer , & on fa fait tomber fur un pavé uni , on fait couler de l'eau
fraîche par-deffus pour divifer la chaux qui peut être grumelée , &
îa rendre affez friable pour paffer au moulin , ôc on continue jufqu'à
ce qu'elle foit imbibée & bien refroidie; cette matière étant encore
chaude refTemble beaucoup à fa litharge, & for/qu'elle efl froide,
elle efl d'une couleur jaune-fale. Cette matière jaune efl mife dans
un moulin pour y être broyée en y verfant de l'eau , & à mefure
qu'elle fe broyé ^\i^ tombe dans une cuve placée pour la recevoir
x^ E s Minéraux. 197
Ses éclats de ce charbon qui pourroient revivifier quelques
parties de la chaux de plomb, ce qu'il cfl très - aifé
d'éviter. Je ne penfe pas , avec M. Jars , que ce
foit-Ià le feul inconvénient. Le charbon de bois ne
donne pas une chaleur aufli forte ni auïïi confiante ont
le charbon de terre, & d'ailleurs l'acide fulfureux qui
au bas du moulin ; mais comme cette matière n'eft pas également
broye'e , on la pafTe dans un tonneau plein d'eau pour y être lave'e
à l'aide d'une badine de cuivre qu'on remplit à moitié de chaux de
plomb, & qu'on agite de manière que la matière broyée la plus fine
fe mêle à toute l'eau du tonneau & fe précipite au fond , tandis
que celle qui n'eft pas divifée fufîfifamment refte dans la bafllne, &
fert pour être placée , comme on l'a déjà dit , devant l'embouchure
intérieure du fourneau pour être calcinée de nouveau avec le plomb. . .
On continue de procéder de la même manière pour le moulin &
pour le lavage , jufqu'à ce que toute fa matière jaune provenue de
la première calcination ait été entièrement paiïce. Lorfque le lavao-e
eft fait , on laifle précipiter au fond du tonneau la matière qui eft
fulpendue dans l'eau par fa grande divifion , enfuite on \erÇe l'eau
pour retirer le précipité auquel on donne la couleur rouge par
l'opération fuivante. On introduit cette matière précipitée ou chaux
de plomb dans le milieu du fourneau , on en forme un feul tas que
l'on aplatit , & fur cet aplatiffement on fait des raies ou filions , &
on ne remue la matière que pour l'empêcher de s'agiutiner ; &
c'eft par cette dernière opération qu'on lui donne la couleur rouge.
II faut trente-fix ou quarante-huit heures de feu avec du charbon
de terre , comme dans la première calcination , «5c on retire eiîfuitc
la matière toute chaude; elle paroîi alors d'un rouge très- foncé;
mais elle prend, en fe refroidifl"ant , le beau rouge du minium.
Ai. Jars, Mémoires de l'Académie des Sciences, année lyyo ,,
pages ^ 8 ù' fuivante s.
198 Histoire Naturelle
s'en exhale, &la fumée du bitume qu'il contient, peuvent
contribuer à donner à la chaux de plomb , la belle
couleur rouge.
Toutes ces chaux de plomb, blanches, grifes, jaunes
& rouges , font non - feulement très - aifces à vitrifier ,
mais même elles déterminent promptement & puiffam-
mcnt la vitrification de plufieurs autres matières; feules,
elles ne donnent que de la litharge ou du verre jaune
très - peu folidc ; mais fondues avec le quartz , elles
forment un verre irès-folide, alTcz tranf|xirent, <Sl d'une
belle couleur jaune.
Confidérant maintenant les propriétés particulières
du plomb dans fon état de métal, nous verrons qu'il
efl le moins dur «^ le moins élaflique de tous les métaux,
que quoiqu'il fbit très-mou, il efl auffi le moins duéliîe;
qu'il ell encore ie moins tenace, pui/qu'un fil d'un
dixième de pouce de diamètre, ne peut foutenir un
poids de 30 livres fans fe rompre; mais il efl, après
l'or , le plus pefant ; car je ne mets pas le mercure ni
la platine au nombre des vrais métaux ; fon poids fpé-
cifique cft à celui de l'eau diflillée comme 113^23
font à 10000, &. le pied cube de plomb pur, pèfe
•794 livres 10 onces 4 gros 4.4. grains (i). Son odeur
efl moins forte que celle du cuivre, cependant eWt fè
fait fentir défagréablcment lorfqu'on le frotte ; il efl
(l) Voyez la Titbie des pelaateurs fpeciiîques, par J\l. BrifToii.
DES Minéraux. 19c
d'un aflcz beau blanc quand il vient cl'éiio fondu, ou
îorfqu'on l'entame & le coupe ; mais rimprc/Tiou de
i'air ternit en peu de temps fa furface qui fe décompofè
en une rouille légère de couleur obicure & bleuâtre;
cette rouille efl afFez adhérente au métal, elle ne s'en
détache pas auiïi facilement que le vert-de gris fe détache
du cuivre, c'eft une e/pèce de chaux qui fe revivifie aufîi
aifément que les autres chaux de plomb ; c'eft une
cérufe commencée ; cette décompofition par les élémens
humides , fe fait plus promptement lorfque ce métal
efl expofé à de fréquentes alternatives de féchcreffe
& d'humidité.
Le plomb, comme Ton fait , fe fond très-facilement,
& lorsqu'on le laiffe refroidir lentement, il forme des
criflaux qu'on peut rendre très-apparens par un procédé
qu'indique M. l'abbé Mongez ; c'efl en formant une
géode dans un creufet, dont le fond efl environné de
charbon, & qu'on perce dès que la furface du métai
fondu a pris de la confiflance : on obtient de cette
manière, des criflaux bien formés en pyramides trièdres
ifblées, &. de trois à quatre lignes de longueur. Je me fuis
fervi du même moyen pour criflallifcr la fonte de fer.
Le plomb expofé à l'air dans fon état de fufion, fc
combine avec cet élément , qui non-feulement s'attache
à fa furface, mais fe fixe dans fa fubflance, la convertit
en chaux , & en augmente le volume & le poids C^J,-
(a) Silon M. Chardenon, un quinul de plomb donne jufqu'à
20O Histoire Naturelle
cet air fixé dans le métal eft la feule caufe de fà con-'
verfion en chaux , le phlogiflique ne fait rien ici , & il
eil étonnant que nos Chimiftes s'obfîinent à vouloir
expliquer par l'abfence & la préfence de ce phlogiflique,
les phénomènes de la calcination &. de la revivification
des métaux ; tandis qu'on peut démontrer que le chan-
gement du métal en chaux , & fon augmentation de
volume ou pefanteur abfolue, ne viennent que de Tair
qui y ell entré, puifqu'on en retire cet air en même
quantité, & que rien n'eft plus fnnplc <&. plus aifé à
concevoir que la rédudion de cette chaux en métal,
puifqu'on peut également démontrer que l'air ayant plus
d'affinité avec les matières inflammables qu'avec le métal,
il l'abandonne dès qu'on lui préfente quelqu'une de ces
matières, & laifTe par conféquent le métal dans l'état
où il l'avoit trouvé. La rédudlion de la chaux des
métaux n'efl donc au vrai qu'une forte de précipitation^
auffi aifée à entendre, auffi facile à démontrer que toute
jiutre.
Nous observerons en particulier , que le plomb <Sc
î'étain font les deux métaux avec lefquels l'air fe fixe &
fe combine le plus promptement dans leur état de
fufion, mais que I'étain le retient bien plus puiflamment;
«^— ^^— »— »— »— ^ ■
cent dix livres de chaux ; & de tous les me'taux , fe plomb & Tctain
font ceux qui acquièrent (e plus de pefanteur dans la calcination,,
Almoïres de l'Académie de Dijon , tome I, pages ^ o^ O" fuiv,
la
DES Minéraux, 201
îa chaux de plomb fe réduit beaucoup plus aifément
en métal que celle de i'étain par l'addition des matières
inHammables ; ainfi l'affinité de l'air s'exerce d'une
manière plus iniime avec I'étain qu'avec le plomb.
Si nous comparons encore ces deux métaux par
d'autres propriétés , nous trouverons que le plomb
approche de i'étam, non-feulement par la facilité qu'il a
de fe calciner, mais encore par la fufibilité, la mollelfe,
la couleur, & qu'il n'en diffère qu'en ce que, comme
nous venons de le dire , la chaux du plomb efl plus aifé-
ment réductible , & quoique ces deux chaux foient
d'abord de la même couleur grifè, la chaux d'étain,
par une plus forte calcination , devient blanche & refte
blanche , tandis que celle de plomb devient jaune , puis
rouge par une calcination continuée ; de plus, celle de
i'étain ne fe vitrifie que très -difficilement, au lieu que
celle du plomb fè change en im vrai verre tran/parent
& pefant, & qui devient au feu fi fluide & li aélif, qu'il
perce les creufets les plus compaéts ; ce verre de plomb
dans lequel l'air fixe de fa chaux s'eft incorporé, peut
encore fe réduire facilement en métal coulant , il fuflic
de le broyer & de le refondre en y ajoutant une matière
inflammable , avec laquelle l'air ayant plus d'affinité
qu'avec le plomb, fe dégagera en faififl^ant cette matière
inflammable qui l'emporte, & il laiffera par conféquent
le plomb dans fon premier état de métal coulant.
Le piomb peut s'allier avec tous les métaux, à
Minéraux, Tome IIL Ce
202 Histoire Naturelle
Texception du fer avec lequel il ne paroît pas qu'il
puiffe coutrader d'union intime (b) ; cependant on peut
les réunir de très-près en failànt auparavant fondre le
fer. M. de Morveau a dans iow Cabinet, un culot
formé d'acier fondu & de plomb , dans lequel à la
vérité , ces deux métaux ne font pas alliés , mais am-
plement adhérens de fi près , que la ligne de féparatiou
n'efl prefque pas fenfible.
La chaux de cuivre & celle du plomb mélangées ,
s'incorporent & fë vitriiient toutes deux ensemble; le
plomb entraîne le cuivre dans fa vitrification, & il
rejette le fer fur les bords de la coupelle ; c'eft par
cette propriété particulière qu'il purge l'or & l'argent
de toiite matière métallique étrangère; perfonne n'a
mieux décrit tout ce qui fè pafTe dans les coupellations
que notre favant Académicien, M. Sage, dans fes
Mémoires fur les Ejfd'is.
On a obfervé que le plomb &. l'étain mêlés enfèmble,
'•^^^— ■ ■■ ■ ■■ ■ , ■ , - ■ — — _ _ ^
(b ) « Ce métal s'unit aflez facilement avec tous les métaux ,
30 excepté Je fer avec lequel il refuie opiniâtrement tout alliage ; fou
•y> affinité avec l'argent & fon antipathie avec le fer eft fi grande ,
3) que fi l'on fait fondre dans du plomb de l'argent allié avec un
T> peu de fer , le plomb s'empare auili-tôi de l'argent, mais rejette
y* le fer qui vient nager à fa furface ». Diâionnaire Je Chimie , par
AI. Alûcquer ; article plomb. — Nota. J'obferverai qu'il efl douteux
que le fer s'allie réellement avec l'argent , il ne s'unit avec ce métal
que comme l'acier s'unit^ avec le plomb par une forte adhefiorij^
mais fans mélange intime.
DES Minéraux. 203
fe calcinent plus promptement & plus profonJémeat
que l'un ou l'autre ne fe calcine feul ; c'eft de cette
chaux, mi partie d'étain &: de plomb , que fe fait l'émail
blanc des faïences communes; &. c'eft avec le verre
de plomb feul qu'on vernit les poteries de terre encore
plus communes.
Le plomb femble approcher de l'argent par quelques
propriétés ; non - feulement il lui eft prcique toujours
uni dans fes mines; mais lors même qu'il eft pur 6c
dans fon état de métal , il préfente les mêmes phéno-
mènes dans fës diiTolutions par les acides; il forme,
comme l'argent, avec l'acide nitreux, un fel plus cauf-
tique que les fels des autres métaux.
Le plomb a auffi de l'affinité avec le mercure ; ils
s*amalgament facilement, Sl ils forment enfemble des
criilaux; cet amalgame de plomb a la propriété fmgu-
iière , de décrépiter très-vivement fur le feu.
L'ordre des affinités du plomb avec les autres
métaux, fiiivant M, Geller, cfl l'argent, l'or, l'étain ,
le cuivre; cette grande affinité de l'argent & du plomb
que l'Art nous démontre , eft bien indiquée par la
Nature ; car l'on trouve l'argent uni au plomb dans
toutes les mines de première comme de dernière
formation ; ce font les poudres des mines primitives de
l'argent, qui fe font unies & mêlées avec la chaux de
plomb, & ont formé les galènes ou premiers minerais
de ce métal ; mais les affinités du plomb avec l'or,
C c ij
204 Histoire Natu relle
l'ctain (5c le cuivre, que l'Art nous a fait reconnoître,
ne fe manifeftent que par de légers indices dans le fcin
de la terre; ce n'efl point avec ces métaux que le plomb
s'y combine; mais c'eft avec les Tels, & fur -tout avec
les acides qu'il prend des formes différentes : la galène
qu'on doit regarder comme le plomb de première for-
mation , n'ell qu'une efpèce de pyrite compo/ée de ♦
chaux de plomb, & de l'acide uni à la fùbflance du
feu ùxe. L'air & les fels de la terre ont enfuite dccom-
pofé ces galènes comme ils dccompo/ènt toutes les
autres pyrites , & c'eft de leurs détrimens que fe font
formées toutes les mines de féconde & de troiHème
formation; cette marche de la Nature efl uniforme; le
feu primitif a fondu, fublimé ou calciné les métaux,
après quoi les élémens humides, les fels & lur-tout les
acides, les ont attaqués, corrodés, diffous , & s'in-
corporant avec eux, par une union intime, leur ont
donné les nouvelles formes fous leiquelles ils fe pré-
fentent.
Tous les acides minéraux ou végétaux , peuvent
entamer ou difToudre le plomb; les huiles & les graiffes
agiffent aufTi fur ce métal en raifon des acides qu'elles
contiennent ; elles l'attaquent fur - tout dans fon état
de chaux , & di (Toi vent la cérule , le minium & la
iitharge à l'aide d'une médiocre chaleur.
L'acide vitriolique doit être concentré & aidé de la
chaleur pour difToudre le plomb réduit en poudre
DES ÂllNÉRAV X, 205
métallique ou en cliaux , & cette cii/Tolutron produit
un Tel qu'on appelle vuriol de plomb. On a remarqué
que le minium réfifle plus que les autres chaux de
plomb à cet acide, qu'il ne fe dilfout qu'en partie, c5c
qu'il perd feulement fa belle couleur rouge, & devient
d'im brun preique noir (c). Les fels neutres qui con-
tiennent de l'acide vitriolique , agiffent aufTi fur les chaux
de plomb ; ils les précipitent de leur diiïblution
dans l'acide nitreux, ik. forment avec elles, un vitriol
de plomb.
L'acide nitreux, loin d'être concentré comme le
vitriolique, doit au contraire être affoibli pour bien
diiToudre le plomb ; & la difloîution , après Tévapo-
ration, donne des criftaux qui, comme tous les autres
fels produits par ce même métal , ont plutôt une faveur
fucrce que faline : au refte , cet acide diffout égale-
ment le plomb dans fon état de métal &. dans ion état
de chaux, c'efl - à - dire , les céruies, le maificot , le
minium & même les mines de plomb blanches, vertes
& rouges, &.C.
L'acide marin ne diffout le plomb qu'à l'aide d'une
forte chaleur , cette dilfolution donne un fel dont les
criflaux font brillans &l en petites aiguilles ; cet acide,
ainfi que les fels qui en contiennent , précipitent le
plomb de fa chffolution dans l'acide nitreux, & forme
(c) Élt^mens de Chimie, par M. de Morveau, towe II , page j?^.
loG Histoire Naturelle
un ftl Dictallique auquel les Chimifles ont donne le
nom (le plo?ub corné , comme ils ont auiFi nommé argent
corné ou lune cornet, les criilaux de la di/Tolution de
l'argent par le même acide marin.
Le foufre s'unit aifcment avec le plomb par la fufion,
& lorfqu'on laifle ce mélange expoié à Taétion du feu
libre, il fe brûle en partie, & le rcfte qui eft calciné,
forme une efpèce de pyrite ou mine de plomb , fem-
biable à la galène (d) .
Les acides végétaux , & en particulier celui du
vinaigre , attaquent & diffolvent le plomb ; c'efl en
l'expofant à la vapeur du vinaigre qu'on le convertit
en chaux blanche, & c'efl de cette manière que l'on
fait la cérufe qui eft dans le commerce: cette chaux ou
cérufe fe difTout parfaitement dans le vinaigre concentré;
elle y produit même une grande quantité de crifîaux
dont la faveur efl fucrée (e) , on a fouvent abufé de
(d) « Le plomb fondu avec le foufre s'enflamme feul ; il refle
» une poudre noire ccaiileufe, que l'on appelle yi^/owZ' hrùlé; cette
» matière n'entre en fufion qu'après avoir rougi; elle produit une
» maffe noire , aigre , difpore'e à facettes ; c(^?i une galène ou mine
» de plomb artificielle «. Elêmens de Chimie, par AI. de Morveau j
tome II, page j^.
(e) « L'acide aceteux en vapeurs, agit fur le plomb & le réduit
» en chaux ; fi l'on afTujettit dans un chapiteau de verre des lames
a> de plomb minces , que l'on adapte ce chapiteau à une cucurbite
j» évatée , dans laquelle on aura mis du vinaigre, & qu'après avoir
>» lutté un récipient, qïi le diilille au baiix de fable pendant dix ou
DES Minéraux. 207
cette propriété de la cérufe & des autres chaux ou Tels
de plomb , pour adoucir le vin au détriment de la
famé de ceux qui le boivent. Au refle, l'on ne doit
pas regarder la cérufe comme une chaux de plomb
parfaite, mais comme une matière dans laquelle le plomb
n'eft qu'à demi diffout ou calciné par l'acide aérien,
& refte encore plutôt dans l'état métallique que dans
l'état falin; en forte qu'elle n'eft pas folubie dans l'eau
comme les féls.
Le plomb fe diffout aufli dans l'acide du tartre, à
l'aide de la chaleur & d'une longue digeflion ; fi l'on
fait évaporer cette diffolution, elle prend une confif-
tance vifqueufe , & donne un fel criftallifé en lames
quarrées (f): enfin, les acerbes ne laiffent pas d'avoir
auffi quelqu'aétion fur le plomb, car la noix de galle
douze heures, les lames fe couvrent d'une matière blanche que l'on «
appelle blanc de plomb , & qui , broyce avec un tiers ou environ «
de craie, forme la cérufe.... Pour achever de le faturer , on met «c
!e blanc de plomb dans un matras , on verfe dcOus douze à quinze «<
fois autant de vinaigre diftillé; le mélange prend une faveur fucrce, «
la fubftance métallique entre en diffolution , il s'excite beaucoup «<
de chaleur ; on phce le matras fur un bain de fable , & on laiffe «
le tout en digeltion pendant un jour. Après avoir de'canté la «
liqueur, on la fait évaporer jufqu'à pellicule, on la place dans un «
iieu frais , il s'y forme de petits cridaux groupés en aiguilles , «<
on les redifiout dims le vinaigre , & on traite de même cette <c
dilfolution pour avoir le lucre de Saturne w. Élémens de Chimie,
par M. de ykloneau , tome III ^ pa^e 2 S,
(f) Idem, ibid. page 82
2o8 Histoire Naturelle
le précipite de fa didblution dans l'acide nitreiix, &
la furface de la liqueur fe couvre en même temps d'une
peilicule à reflets rouges & verts.
Les alkalis fixes &• volatils, non plus que les terres
abforbantcs, ne font pas des effets bien fenijbles fur
le plomb dans quelqu'état qu'il foit; néanmoins ils ont
avec ce métal , une affinité bien marquée dans certaines
circonflances, par exemple ils le précipitent de fa diffo-
li'.tion dans l'acide marin, fous la forme d'une poudre
blanche qui fe ternit bientôt à l'air comme le métal
même (g).
En comparant les mines primordiales des fix métaux,
nous voyons que l'or feul fè trouve prefque toujours
en état de métal dans le fcin de la terre, que quoiqu'il n'y
foit jamais pur , mais allié de plus ou moins d'argent ou
de cuivre, il ne fè pré/ènte que rarement fous une forme
minéralifée, & qu'il recouvre cSc défend l'argent de toute
(g) L'alkali cauflique n'a prefque point d'acftion fur le plomb ,
mais il diffout, pendant i'éljuHition , une quantiic très-fenfible de
minium qui nea efl pas feparé par le filtre, qui fe dcpofe avec \é
temps dans le fîacon , fous forme d'une poudre blanche , & qui
eft précipitée fur le champ par l'eau forte. E-.émens de C L'unie , par
AI. de Alorveau , lome III , page a S,
L'alkali volatil cauQique digéré fur la limaille de plomb , prend
dans les premiers jours une couleur légèrement ambrée, qui difparoît
enfuiie entièrement; une partie du métal eft; réduite à l'état de chaux,
une autre partie efl: tenue en diflblution au point de pafîer par le filtre ,
elle eft précipitée par l'acide nitreux. I4cm , ibid. page 2^6.
altération ;
DES Minéraux. 209
altération; on afTurc cependant que l'or efl vraiment
minéralifé dans la mine de Naghiac (^/ij , & dans quelques
pyrites nouvellement trouvées en Dauphiné ; mais
ce métal ne doit néanmoins fubir aucun changement ,
aucune altération , que par des combinai/bns qui ne
peuvent fe trouver que très-rarement dans la Nature;
& nous verrons en traitant de la platine, que l'or, qui
fait le fonds de fa fùbftance, y efl encore plus altéré,
& prefque dénaturé; ces deux exemples font les feuls
qu'on puiffe donner d'un changement d'état dans l'or,
& Ton ne doit pas les regarder comme des opérations
ordinaires de la Nature, mais comme des accidens fi
rares, qu'ils n'ôtent rien à la vérité du fait général, que
l'or fe préfente par-tout dans l'état de métal , <5c feulement
plus ou moins divifé &. non minéralifé.
L'argent fe trouve affez fbuvent, comme Tor, dans
l'état de métal pur ; mais il efl encore plus fouvent
mêlé avec le plomb ou minéralifé, c'cfl-à-dire, altéré
par les fels de la terre; le cuivre réfifîc beaucoup moins
à l'imprefTion des élémens humides , & quoiqu'il fe
trouve quelquefois en état de métal, il fe préfente ordi-
nairement fous des formes minéralifées & variées, pour
f/ij Nota. M. Bergmann , à qui M. Tungberg a envoyé un
morceau de cette mine de Naghiac , s'efl: afTuré qu'il contenoit du
quartz hhnc y une pierre crénaire blancludre , fe coupant au couteau,
faifant effervefcence avec les acides , & de la manganaife. La formatiou
de cette mine ne doit donc être regardée que coinnie accidentelle.
Minéraux, Tome II L D d
210 Histoire Naturelle
ainfi dire, à l'infini: ces trois métaux, l'or, l'argent &
le cuivre, font ies feuls qui aient pris dès les premiers
temps , & confèrvé plus ou moins ju/qu'à ce jour , leur
état métallique; le fer, le plomb & l'étain ne fe trouvent
nulle part , & même n'ont jamais été dans cet état
métallique ; le feu primitif les a iondus ou calcinés ;
le fer par fa fufion s'ell mêlé à la roche vitreufè, & le
plomb & l'étain, après leur calcination, ont été faifis
par l'acide ôl réduits en minerais pyriteux, ainli que les
cuivres qui n'ont pas confèrvé leur état de métal : tous
ces métaux ont fouvent été mêlés les uns avec les aiures,
& dans les mines primordiales comme dans les mines
fécondai res , on ies trouve quelquefois tous réunis
enfemble.
Ty E s M I N É n AU X. 211
DU MERCURE.
IviEN ne reffembie plus à i'étain ou au plomb, Jaus
leur écat de funoii, que le Mercure dans Ton état naturel;
au/Fi Ta-t-on re/rardé comme un mctal fluide auauei
on a cherche, mais vainement, les moyens de donner
de la foliditc ; on a feulement trouve que le froid extrême
pouvoit le coaguler, fans lui donner une folidité confiante,
ni même aufn permanente, à beaucoup près, que celle
de l'eau glacée; & par ce rapport unique & (ingulier,
ie mercure femble fe rapprocher de la nature de l'eau ,
autant qu'il approche du métal par d'autres pro-
priétés , &L notamment par fà dcnfité , la plus grande
de toutes après celle de l'or f^a) ; mais il diffère de
tout métal, & même de tout minéral métallique , en
ce qu'il n'a nulle ténacité , nulle dureté , nulle folidité,
nulle fixité, & il fe rcippoche encore de l'eau par
fa volatilité , puifque , comme elle , il fe volatilife <5c
s'évapore à une médiocre chaleur. Ce liquide minéral
eft-il donc un métal! ou n'efl-il pas une eau qui
reffemble aux métaux parce qu'elle eft chargée des
parties les plus denfes de la terre, avec lefquelles elle
(d) La pefanteiir Tpécifique de l'or à 24 karars efl de if>2j8r ,
^ celle du plomb de 115523. La pelanteur ipécifique du mercure
coulant eft de 1356!^! , & celle du cinabre d'Almaden efl Ue
102185. yoyc\ les Tables de Ai. Brijfon,
Dd ij
212 Histoire Naturelle
s'efl plus intimement unie que dans aucune autre matière l
On fait qu'en général, toute fluidité provient de la
chaleur, & qu'en particulier le feu agit fur les métaux
comme l'eau fur les fels, puifqu'il les liquéfie, & qu'il
les tiendroit en une fluidité confiante s'il étoit tou-
jours au même degré de violente chaleur, tandis que
les fels ne demandent que celui de la température aduelle
pour demeurer liquides ; tous les fels fe liquéfiant dans
l'eau comme les métaux dans le feu, la fluidité du
mercure tient, ce me femble, plus au premier élément
qu'au dernier ; car le mercure ne fe folidifie qu'en fè
glaçant comme l'eau; il lui faut même un bien plus
grand degré de froid, parce qu'il eft beaucoup plus
denfe ; le feu efl ici en quantité prefque infiniment
petite, au lieu que ce même élément ne peut agir fur
les métaux, comme liquéfiant, comme diflblvant, que
quand il leur efl appliqué en quantité infiniment grande,
en comparaifon de ce qu'il en faut au mercure pour
demeurer liquide.
De plus, le mercure fe réduit en vapeurs par fefîèt
de la chaleur, à peu-près comme l'eau, & ces deux
vapeurs font également incoercibles, même par les réfif
tances les plus fortes ; toutes deux font éclater ou fendre
les vaifTeaux les plus folides avec explofion; enfin, le
mercure mouille les métaux, comme l'eau mouille les
fels ou les terres, à proportion des fèls qu'elles con-
tiennent; le mercure ne peut-il donc pas être confidérc
I
DES Minéraux» 21^
comme une eau denfe & pefante, qui ne tient aux
métaux que par ce rapport de denfité l &: cette eau plus
denfè que tous les liquides connus, n'a-t-elle pas dû fe
former, après la chute des autres eaux Sl des matières
également volatiles reléguées dans ratmofphere, pendant
J'incandefcence du Globe î les parties métalliques ,
terreflres, aqueufes & falines , alors fublimées ou réduites
en vapeurs , fe feront combinées , & tandis que les
matières fixes du Globe fe vitrifioient ou fe dépofoient
fous la forme de métal ou de chaux métallique, tandis
que l'eau encore pénétrée de feu produifoit les acides
& les fels , les vapeurs de ces fubftances métalliques ,
combinées avec celles de l'eau & des principes acides,
n'ont-elles pas pu former cette fubflance du mercure
prefque auffi volatile que l'eau, <& denfe comme le métal!
Cette fubftance liquide qui fe glace comme l'eau, &
qui n'en diffère effentiellement que par fa denfité,
n'a-t-elle pas du fe trouver dans l'ordre des combi-
naifons de la Nature, qui a produit non-feulement des
métaux & des demi-métaux , mais auffi des terres métal-
liques & falines, telles que l'arfenic! Or, pour compléter
h fuite de fes opérations n'a -i- elle pas dCi produire
au/fi des eaux métalliques telles que le mercure! L'échelle
de la Nature, dans fes productions métalliques, com-
mence par l'or qui efl le métal le plus inaltérable, Sl
par conféquent le plus parfait; enfiiite l'argent, qui étant
fujet à quelques altérations, efl moins parfait que l'or;
214 Histoire Natv relle
après quoi le cuivre , l'ctain &: le plomb , qui font fuf-
ccptibles non - feulement d'altération, mais de décom-
pofition , font des métaux imparfaits en comparai/bn
des deux premiers; enfin, le fer fait la nuance entre les
métaux imparfaits & les demi -métaux; car le fer & le
zinc ne préfentcnt aucun caradère effentiel , qui doive
réellement les faire placer dans deux claffes difiéreiites;
la duélilité du fer efl une propriété que l'Art lui donne,
il fe brûle comme le zinc ; il lui faut feulement un feu
plus fort, &c. on pourroit donc également prendre le
fer pour le premier des démi-métaux, ou le zinc pour
le dernier des métaux; & cette échelle fe continue par
l'antimoine, le brfmutli, & linit par les terres métal-
liques & par le mercure, qui n'eft qu'une fubflance
métallique liquide.
On fe familiariièra avec l'idée de cette poÏÏlbilité, en
pefant les confidérations que nous venons de préfenter,
& en fe rappelant que l'eau, dans fon effence, doit
être regardée comme un fel infipide & Huide, que la
giace qui n'efl que ce même M rendu folide, le devient
d'autant plus, que le froid efl plus grand; que l'eau,
dans fon état de liquidité, peut acquérir de la denfité
à mefure qu'elle dilfout les fcls ; que l'eau purgée d'air
efl incompreffible, & dcs-lors Compofée de parties très-
folides & très-dures ; que par conféquent elle deviendroit
très-denfe, fi ces mêmes parties s'uniffoient de plus
prèj; & quoique nous ne connoilfions pas au jude le
DES Minéraux. 215
moyen que la Nature a employé pour faire ce rappro-
chement des parties dans le mercure, nous en voyons
néanmoins aiïez pour être fondés à préfumer que ce
minéral fluide, ed; plutôt une eau métallique qu'im vrai
métal; de la même manière que l'aiTcnic auquel on
donne le nom de dcnn-inctal , n'efl qu'une terre plutôt
fâline que métallique, & non pas un vrai demi-méial.
On pourra me reprocher que j'abufe ici des termes,
en difant que le mercure mouille les métaux , puifqu'il
ne mouille pas les autres matières ; au lieu que l'eau <5c
les autres liquides mouillent toutes les fubilances qu'on
leur offre, & que par conféquent ils ont feuls la faculté
de mouiller; mais en faifant attention à la grande denfité
du mercure, & à la forte attraction qui unit cntr'elles
fes parties confîituantcs, on fèntira aiféraent qu'une eau,
dont les parties s'attireroient aufli fort que celles du
mercure , ne mouilleroit pas plus que le mercure dont
les parties ne peuvent fe dé/linir que par la chaleur, ou
par une puiffance plus forte que celle de leur attraétioii
réciproque, & que dès-lors ces mêmes parties ne peuvent
mouiller que l'or, l'argent &. les autres fubilances qui les
attirent plus puiffamment qu'elles ne s'attirent entr'elles;
on fèntira de même que fi l'eau paroît mouiller indiffé-
remment toutes les matières , c'eil que fès parties inté-
grantes n'ayant qu'une foible adhérence entr'elles, tout
contad fufiit pour les féparer, & plus l'attradion étrangère
furpaffera i'attradion réciproque &. mutuelle de ces
2i6 N/sTOJRE Naturelle
parties conflituantes de l'eau, plus les matières étrangères,
l'attireront puiflamment Ôl ih mouilleront profondement.
Le mercure, par fa très -grande fluidité, mouilleroit &
pcncireroit tous les corps folides de la Nature, fi la
force d'attradion qui s'exerce entre fes parties en pro-
portion de leur denfité, ne les tenoit pour ainfi dire en
malfe, «Se ne les empcchoit par conféquent de fe fcparcr
& de fè répandre en molécules affez petites, pour pouvoir
entrer dans les pores des fubflances folides; la feule
différence entre le mercure <Sc l'eau , dans l'action de
mouiller, ne vient donc que du plus ou moins de
cohérence dans l'agrégation de leurs parties confti-
tuantes, tk ne confide qu'en ce que celles de l'eau fe
féparent les unes des autres bien plus facilement que
celles du mercure.
Ainfi ce minéral fluide comme l'eau , fe glaçant
comme elle par le froid , fe rcduifant comme elle en
vapeurs par le chaud, mouillant les métaux comme elle
mouille les fels & les terres, pénétrant mcmc la fuhf-
tance des huiles & des graiffes , & entrant avec elles
dans le corps des animaux, comme l'eau entre dans les
végétaux, a de plus avec elle, un rapport qui fuppofe
quelque chofe de commun dans leur effence ; c'eft de
répandre comme l'eau, une vapeur qu'on peut regarder
comme humide; c'ell par cette vapeur que le mercure
blanchit & pénètre Tor fans le toucher, comme l'hu-
midité de l'eau répandue dans l'air pénètre les fels ; tout
concourt
DES Minéraux, 217
concourt donc , ce me femble , à prouver que le mercure
n'eft point un vrai métal , ni même un demi - métal ;
mais une eau chargée des parties les plus denfes de la
terre ; comme les demi - métaux ne font que des terres
chargées, de même, d'autres parties denfès & pefantes
qui les rapprochent de la nature des métaux.
Après avoir expofé les rapports que le mercure peut
avoir avec l'eau, nous devons auffi préfenter ceux
qu'il a réellement avec les métaux; il en a la dcnfué,
l'opacité, le brillant métallique, il peut de même être
dilFous par les acides, précipité par les alkalis; comme
eux, il ne contra6le aucune union avec les matières
terreufes , & comme eux encore , il en contraéle avec
les autres métaux ; & fi l'on veut qu'il foit métal , on
pourroit même le regarder comme un troifième métal
parfait , puifqu'il eft prefque aufîi inaltérable que l'or
& l'argent, par les imprelïions des élémens humides.
Ces propriétés relatives & communes le rapprochent
donc encore plus de la nature du métal qu'elles ne
l'éloignent de celle de l'eau, & je ne puis blâmer les
Alchimiftes , qui , voyant toutes ces propriétés dans un
liquide , l'ont regardé comme l'eau des métaux , &i
particulièrement comme la bafe de l'or & de l'argent
dont il approche par fa denfué, & auxquels il s'unit
avec un empreflement qui tient du magnctifme, & encore
parce qu'il n'a, comme l'or & l'argent, ni odeur ni
faveur : enfin , on n'ell pas encore bien alTuré que
Minéraux , Tome IIL E e
2i8 Histoire Natu-relle
ce liquide fi dcnfe n'entre pas comme principe clans
la compofition des métaux , & qu'on ne puiffe le retirer
d'aucun minerai métallique. Recherchons donc, fans
préjugé, quelle peut être l'efTence de ce minéral am-
phibie, qui participe de la nature du métal c^ de celle
de l'eau ; raflemhlons les principaux faits que la Nature
nous préfente, & ceux que l'Art nous a fait découvrir
fur fes différentes propriétés avant de nous arrêter à
notre opinion.
Mais ces faits paroiffcnt d'abord innombrables ; aucime
matière n'a été plus effayée, plus maniée, plus com-
binée ; les Alchimilles fur-tout , perfuadés que le mercure
ou la terre mercurielle étoit la bafc des métaux , &
voyant qu'il avoit la plus grantle affinité avec l'or <Sc
l'argent, ont fait des travaux immenfès pour tâcher de
ie lixer, de le convertir, de l'extraire ; ils l'ont cherché
non-fèulemcnt dans les mxtaux & minéraux , mais dans
toutes les fubflanccs & jufque dans les plantes ; ils ont
voulu ennoblir, par fon moyen, les métaux imparfaits,
& quoiqu'ils aient prefque toujours manqué le but de
Jeurs recherches , ils n'ont pas laiffé de faire pkifieurs
découvertes intéreffantes. Leur objet principal n'étoit
pas abfolument chimérique, mais peut-être moralement
impoffible à atteindre; car rien ne s'oppofe à l'idée de
ia traniinutation ou de l'ennoblifTement des métaux, que
ie peu de puifîance de notre Art, en comparaifbn des
forces de ia Nature, & puifqu'eiie peut con,veriir les
DES Minéraux. 219
élcmens , n'a-t-elle pas pu , ne pourroit-clle pas encore
iranfmuer les fubflaiices métalliques! Les Cliimifles ont
cru, pour l'honneur du nom, devoir rejeter toutes les
idées des Alchimiftes ; ils ont inénie Aî^A^vffiz d'étudier
& de fuivre leurs procédés; ils ont cependant adopté
leur langue, leurs caradères, & même quelques-unes
des obfcurités de leurs principes; le phlogiflique, fi ce
n'eft pas le feu iixe animé par l'air; le minéralifateur,
fi ce n'efl pas encore le feu contenu dans les pyrites
& dans les acides , me paroiiTent auffi précaires que la
terre mercurielle <5c l'eau des métaux; nous croyons
devoir rejeter également tout ce qui n'exifle pas comme
tout ce qui ne s^entend pas, c'eft-à-dire, tout ce dont
on ne peut avoir une idée nette ; nous tâcherons donc ,
en faifant l'hifloire du mercure, d'en écarter les fables
autant que les chimères.
Confidérant d'abord le mercure tel que la Nature
nous l'offre, nous voyons qu'il ne fe trouve que dans
les couches de la terre formées par le dépôt des eaux;
qu'il n'occupe pas comme les métaux, les fentes per-
pendiculaires de la roche du globe, qu'il ne gh pas
dans le quartz, & n'en eil même jamais accompagne,
qu'il n'ed point mêlé dans les minerais des autres métaux;
que fà mine à laquelle on donne le nom de c'inahre ,
n'efl point un vrai minerai, mais lui compofé, par
fnnple juxtapofition , de foufre &. de mercure réunis,
qui ne fe trouve que dans les montagnes à couches,
E e ij
220 Histoire Nature lle
Si jamais dans les montagnes primitives ; que par confé-
qiient la formation de ces mines de mercure, eft pofîérieure
à celle des mines primordiales des métaux, puifqu'elle
fiippofè le foufre déjà formé par la décompoiition des
pyrites; nous verrons de plus que ce n'eft que très-
rarement que le mercure fc préfènte dans un état coulant,
& que quoiqu'il ait moins d'affinité que la plupart des
métaux avec le foufre, il ne s'cfl néanmoins incorporé
qu'avec les pierres ou les terres qui en font furchargées;
que jamais il ne leur cil aîTcz intimement uni pour
n'en pas être aifémcnt féparé, qu'il n'efl même entré
dans ces terres fulfurcufes que par une forte d'imbibition,
comme l'eau entre dans les autres terres , ôl qu'il a dii
les pénétrer toiucs les fois qu'il s'efl trouvé réduit en
vapeurs ; qu'enfin il ne fè trouve qu'en quelques endroits
particuliers , où le foufre s'efl lui - mcme trouvé en
grande quantité, & réduit en foie de foufre par des
alkalis ou des terres calcaires, qui lui ont donné l'affinité
nécefTaire à fon imion avec le mercure: il ne fe trouve
en effet, en quantité fenfible, que dans ces feuls endroits;
par-tout ailleurs, il n'eft que difféminé en particules û
tenues qu'on ne peut les raffemblcr, ni même les
apercevoir que dans quelques circonflances particulières.
Tout cela peut fe démontrer en comparant attentivement
les obfèrvations & les faits, <Sc nous allons en donner
les preuves dans le même ordre que nous venons de
préfènter ces affertions.
DES Aï I N E R A U X, 22 i
Des trois grandes mines de mercure, & dont chacune
fufFiroit feule aux befoins de tout l'Univers, deux font
tn Europe & une en Amérique ; toutes trois fè pré-
fcntcnt fous la forme folide de cinabre: la première de
ces mines efl celle d'Idria dans la Carniole (b) ; elle
efl dans une ardoife noire furmontée de rochers cal-
caires : la féconde efl celle ^ Almaden en Efpagne (c) ,
(h ) Idria eil une petite ville fituee dans la Carniole , dans un
vallon très-profond, lur les deux bords de la rivière d'Idria dont
elle porte le nom ; elle efl entourée de hautes montagnes de pierres
calcaires , qui porte fur un fcbiflc ou ardoife noire, dans les couches
duquel font les travaux des fameufes mines de mercure ; l'èpaifleur
de ce fchifte pénètre de mercure & de cinabre eft d'environ vingt
tûiies d'Idria , &. fa largeur ou étendue ert de deux jufqu'à trois
cents toifes ; cette riche couche d ardoife varie , foit en s'inclinant ,
foit en fe replaçant horizontalement , fouvent même à contre-fens.
La profondeur des principaux puits eft de cent onze toifes. Voye^
la Defcripïïon des mines d'Idria, par AI. Ferber ^ publiée en i 7J4'
(c) Almaden eft un bourg de la province de la Manche , qui eft
environné du côté du midi de plufieurs montagnes dépendantes
de la Sierra Alorcna ou montagne noire. Ce bourg eft fitué au
fommet d'une montagne , fur le penchant & au pied de laquelle ,
du côté du midi , il y a cinq ouvertures différentes qui conduifent
par des chemins fouterrains aux endroits d'où fe tire le cinabre. On
ne voit point au-dehors de cette mine ni de ces terres qui caradé-
rifent par quelque couleur extraordinaire le minéral que l'on trouve
dans fon fein , ni de ces décombremens qui rendent ordinairement
leur entrée difficile, ou qui exhalent quelqu'odeur fenfible.... On
lire li mine en gros quartiers maffifs , 6: ce font des forçats qui
font condamnés à ce travail, & qui font emprifonnés dans une
enceinte qui environne l'un des puits de la mine. . . . Les veines
212. Histoire Natu relle
dont les veines font dans des bancs de grès (ilj : la
troifième eft celle de Guanca-vdica , petite ville à foixante
qui paroifleat au fond de l'endroit où les mineurs travaillent, font
de trois fortes, La plus commune eft de pure roche de couleur
grifâtreà l'extérieur, & mêlée dans fon intérieur de nuances rouges,
blanches & criftallines. Cette première veine en contient une féconde
dont la couleur approche de celle du minium.
La troifième efl d'une fubRance compare, très-pefante , dure
& grenue comme celle du grès, & d'un rouge mat de brique,
parfemée d'une infinité de petits brillans argentins.
Parmi ces trois fortes de veines qui font les feules utiles , fe
trouvent différentes autres pierres de couleur grifâtre & ardoifée , &
deux fortes de terre graffe & ondueufe , blanche & grife que l'on
rejette. Extrait du Mémoire de M. de Ju(fieu , dans ceux de l'Académie
des Sciences , année i yi p , pages ^ ^ q & fuivantes.
(d) La ville d'AImaden compofée de plus de trois cents maifons,
avec l'églife , font bâties fur le cinabre La mine efl dans uno
montagne dont le (ommçx eft une roche nue fur laquelle on aperçoit
quelques petites taclies de cinabre, . . . Dans le refte de la montagne
on trouve quelques petites veines d'ardoife avec des veijies de fer,
îefquelles à la fuperficie fuivent la direclion de la colline.... Deux
veines traverfent la colline en longueur ; elles ont depuis deux à
quatorze pieds de large. En certains endroits il en fort des rameaux
qui prennent une diredion différente.... La pierre de cts veines eft
la même que celle du refte de la colline qui eft du grès femblable
à celui de Fontainebleau ; elle fert de matrice au cinabre qui efl
plus ou moins abondant , félon que le grain efl: plus ou moins fin ;
quelques-uns des morceaux de la même veine renferment jufqu'à
4ix onces de vif-argent par livre , & d'autres n'en contiennent que
trois. . . .
La hauteur de cette colline d'AImaden eft d'environ cent vingt
DES Minéraux, 223
Jiciies de Pifco au Pérou ^e) . Les veines du cinabre y
pieds.... les enorna:^||iriorceaux de rochers de grès qui compofent l'in-
térieur de la monràgne, font divifés par des fentes verticales. . . . Deux
veines de ces rochers plus ou moins pourvus de cinabre, coupent
la colline prefque verticalement, lefquelies, comme nous l'avons dit,
ont depuis trois jufqu'à quatorze pieds de largeur ; ces deux veines
fe réunifTent en s'cloigiiant jufqu'à cent pieds , & c'efl de-là qu'on
a tiré la plus riche & la plus grande quantité du minéral. Hiftoire
Naturelle d'Efpagne, par M. Bowles, pages ^jufqu'à 2 p.
(e) Guanca - velica efl: une petite ville d'environ cent familles,
éloignée de Pifco de foixante lieues; elle efl: fameufe par une mine
de vif-argent, qui feule fournit tous les moulins d'or & d'argent du
Pérou. . . . Lorfqu'on en a tiré une quantité fuffifante , le Roi fait
fermer la mine.
La terre qui contient le vif- argent efl d'un rouge blanchâtre
comme de la brique mal cuite ; on la concalîe & on la met dans
un fourneau de terre dont le chapiteau efl une voûte en cul-de-
four , un peu fphéroïde ; on l'éiend fur une grille de fer recouverte
de terre , fous laquelle on entretient un petit feu avec de l'herbe Iclio
qui efl plus proj)re «à cela que toute autre matière combuflible , &
c'efl pourquoi il efl défendu d^ la couper à vingt lieues à la ronde ;
la chaleur de ce feu volatilii'e le vif-argent en fumée , & au moyen
d'un réfrigèrent on le fait tomber dans l'eau. Fre^ier , vtyage à la
mer du fud , pages 16^ & 16 ^,... Ces mines de Guanca- velica
font abondantes & en graivd nombre ; mais , fur toutes ces mines ,
celle qu'on appelle àH Amador de Cabrera, autrement des Saints,
efl belle & remarquable ; c'efl une roche de pierre très-dure , toute
femée de vif-argent , & de telle grandeur cju'elle s'étend à plus de
quatre-vingt vares de longueur^ &l quarante en largeur, en laquelle
mine on a fait plufieurs puits & fofles de loixante-dix flades de
profondeur. ... La feule mine de Cabrera efl fi riche en mercure ,
qu'on en a eflimé la valeur à plus de cinq cents mille ducats. C'eft
224- Histoire Naturelle
font ou clans une argile durcie &l blanchâtre, ou cfans
de la pierre dure. Ainfi ces trois mines de mercure
giflent également dans des ardoifes ou des grès, c'eft-
à-dire, dans des collines ou montagnes à couches,
formées par le dépôt des eaux, &. toutes trois font fl
abondantes en cinabre qu'il fèmble que tout le mercure
du Globe y foit acciunulé ('f); car les petites mines
de ce minéral que l'on a découvertes en quelques autres
endroits , ne peuvent leur être comparées ni pour
l'étendue ni pour la quantité de la matière , & nous n'en
ferons ici mention que pour démontrer qu'elles fè
trouvent toutes dans des couches dépofées par les eaux
de la mer, & jamais dans les montagnes de quartz ou des
rochers vitreux, qui ont été formés par le feu primitif
En France, on reconnut en 1739, à deux lieues
de cette mine de Guanca-veJica dont on porte le mercure, tant au
Mexique qu'au Potozi, pour tirer l'argent des matières qu'on appeloit
raclures & qu'on rejetoit auparavant comme ne valant pas la peine
d'être traitées par la fonte. Acojla , Hijlolre naturelle & morale des
Indes , pages i ^ 0 & fuïvantes.
(f) La Nature a prodigué les mines de mercure en fi grande
quantité à Idrla, qu'elles pourroient non-feuiement fuffire à la confom-
mation de notre partie du monde , mais encore en pourvoir toute
l'Amérique 'ii on le vouloir , & fi on ne diminuoit pas l'extradion
de fa mine , pour foutenir ie mercure à un certain prix. Lettres fur
la Minéralogie , par AL Ferber , page i^ On tire tous les ans
de la mine d'Almaden cinq ou fix mille quintaux de vif-aro-ent
pour le Mexique. Hijloire naturelle d'Efpagne , pur M. Eowles ,
pages / àt fui vaut es,
de
DESAIlNÉRAUX. 21^
de Bourbonne-les-bains , deux efpèccs de terre qui ren-
dirent une trois centième partie de leur poids en mercure ,
elles gifToient à quinze ou feize pieds de profondeur
fur une couche de terre glaife (^gj. A cinq lieues de
Bordeaux près de Langon, il y a une fontaine au fond
de laquelle on trouve affez fouvent du mercure cou-
lant (/i); en Normandie, au village de la Chapelle,
éie6lion de Saint-Lo, il y a eu quelques travaux com-
mencés pour exploiter une mine de mercure, mais le
produit n'étoit pas équivalent à la dépenfe, & cette
mine a été abandonnée (ij: enfin dans quelques endroits
du Languedoc , particulièrement à Montpellier , on a
vu du mercure dans l'argile à de petites profondeurs ,
& même à la furface de la terre fie),
^ llill ■ ■ — i ■ — --■■-■Il ■!■■ ■ — ^^^ I Pi -^i^^— ^■^— ^■^^■^M
fgj Traite de la fonte des mines de Schlutter, tome I , page 7.
(h) Lettres de M. l'abbé Belley à M. Hellot. Traité de la fonte
des mines de Schlutter , tome l , page j i .
(i ) Traite' de la fonte é^'^ mines , &c. tome I , page 6 S .
/k) La colline fur laquelle efl bâtie la ville de Montpellier,
renferme du .mercure coulant auffi-bien que les terres des environs ;
il fe trouve dans une terre argileufe jaunâtre & quelquefois grife.
HiJIoire naturelle du Languedoc , par M. de Genfanne , tome I ,
page ^/^. — Depuis le Mas-de-l' Églife jufqu'à Oulargues & même
jufqu'à Colombieres ^ on trouve une grande quantité d'indices de
mir.es de mercure, & on aflure qu'on en voit couler quelquefois
d'alFez grofiL'S gouttes fur la furface de la terre. La qualité du terroir,
au pied de ces montagnes, confille en roches ardoifées blanchâtres;
elles font entre-mêlées de quelques bancs de granit fort talqueuXt
Idem, tome If, page 214.
Minéruax, Tome IIL Ff
•"
226 Histoire N aturelle
En Allemagne , il fe trouve quelques mines de mer-
cure dans les terres du Palatinat & du duché de Deux-
Ponts (l) ; & en Hongrie, les mines de cinabre, ainfi
que celles d'Almadcn en E/pagne, font fbuvent accom-
pagnées de mine de fer en rouille, & quelquefois le
fer, le mercure & le foufre y font tellement mêlés qu'ils
ne font qu'un même corps (m^.
Cette mine d'Almadcn efl fi riche qu'elle a fait
négliger toutes les autres mines de mercure en Efpagne;
cependant on en a reconnu quelques-unes près d'Ali-
cante & de Valence (?i) ; on a aulFi exploité une mine
(l) Lettres fur la Minéralogie, par M. Ferber , /?<7^^ 12.
(m) Hiftoiie naturelle d' Efpagne , par M. Bowies , page /
iufqu'a 2().
(n) A deux lieues de la ville d'Alicante en une montagne
de pierre calcaire en fouillant du côté du vallon , on trouva une
veine de cinabre ; mais quand je vis celte veine difparoître à cent
pieds de profondeur , je fis fufpendre l'excavaucn.
Dans cette ouverture de la roche , on trouva treize onces de fable
de belle couleur rouge , qui par i'effai rendit plus d'une once de
vif-argent par livre. Ce fable, par fa dureté & fa figure angulaire,
reflembloit tout-à-fait à celui de la iner A la fuperficie de cette
montagne , & près d'un banc de plâtre couleur de chair , il y
avoit des coquilles de nier, de l'ambre minéral & une veine comme
un fil , de cinabre Je fis creufer au pied d'une montagne près
de la ville de Saint Philippe en Valence , & à la profondeur de
vingt -deux pieds, il fe trouve une terre très -dure, blanche &
calcaire , dans laquelle on aperçoit plufieurs gouttes de vif- argent
fluide; & ayant fait laver cette terre, il en fortit vingt-cinq livres
(
DES AI J N É R A V À\ 22y
de ce minéral en Italie , à fix milles de la Valle imperhui
près de Feltnno , mais cette mine efl a6tuellement
abandonnée (o) ; on voit de même des indices de mines
de mercure en quelques endroits de la Pologne (p) .
En Afie, les Voyageurs ne font mention de mines
de mercure qu'à la Chine (q) ôl aux Philippines ('rjj
ÔL ils ne di/cnt pas qu'il y en ait ime feule en Afrique ;
mais en Amérique, outre la grande & riche mine de
Guanca-velica du Pérou, on en connoît quelques antres;
de mercure vierge. . . . Un peu au-delTus de l'endroit où fe trouve le
mercure , il y a des pétrifications & du plâtre. La ville de Valence
efl traverfée par une bande de craie fans pétrifications , qui , à deux
pieds de fa fuperficie , efl: remplie de gouttes de vif- argent
HiJIoire naturelle d'Efpagne , par AI. Bowks , pages ^ 4 Ù" fuivantes.
(0) Lettres fur la Minéralogie, par M. Ferber , page 48.
(p) Nota. Rzaczynski dit , d'après Belius , que la partie des monts
Karpacs qui regarde la Pologne , renferme du cinabre & peut-être
des paillettes d'or.... & il dit , d'après Bruckmann , que le comté
de Spia renferme aufli du cinabre. Ai. Guettard , Mémoires de
V Académie des Sciences , année lyCzy page ^18.
( q) Le Tchachd efl: probablement le cinabre ; le meilleur vient
de la province de Houquang ; il efl plein de mercure, & l'on afllire
que d'une livre de cinabre on en tire une demi-livre de mercure
coulant, . . . Lorfqu'on laifle ce cinabre à l'air il ne perd rien de (a
couleur & il fe vend fort cher. Le Père d' Entrecolles , Lettres
édifiantes, 22! recueil , page ^j8.
(r) L'île de Panamao aux Philippines efl prefque contiguë à
celle de Leyte elle efl montagneufe, arroféede plufieurs ruifleaux,
& pleine de mines de foufre & de vif- argent. Gemelli Carîeri ,
Voyage autour du monde; Pc.ris , i j i c) , tome V , p(^^^ i 1 p.
Ff i)
228 Histoire Naturelle
on en a même exploité une près d'Azoque, dans la
province de Quito (f). Les Péruviens travailloient
depuis long -temps aux mines de cinabre, fans favoir
ce que c'ctoit que le mercure; ils n'en connoifToient
que la mine dont ils faifoient du vermillon pour fe
peindre le corps ou faire des images; ils avoient fait
beaucoup de travaux à Guanca-velica dans cette feule
vue (tj, & ce ne fut qu'en 1564., que les Efpagnols
commencèrent à travailler le cinabre pour en tirer le
mercure (u) . On voit par le témoignage de Pline, que
Jes Romains faifoient aulfi grand cas du vermillon , &
qu'ils tiroient d'Efpagne, chaque année, environ dix
mille livres de cinabre tel qu'il fort de la mine , &
qu'ils le prcparoient enfuite à Rome. Théophrafle, qui
vivoit quatre cents ans avant Pline, fait mention du
cinabre d'Efpagne ; ces traits hiftoriques femblent prouver
que les mines d'Idria, bien plus voifmes de Rome que
celles d'Efpagne , n'ttoient pas encore connues ; & de
fait, l'Efpagne étoit policée & commerçante, tandis que
k Germanie étoit encore inculte.
On voit par cette énumération des mines de mer-
cure , des différentes parties du monde , que toutes giffent
dans les couches de la terre remuée & dépofée par
(f) Hijîoire générale des Voyages, tome XIII , page ^^8.
(t) Hiftoire naturelle des Indes, par Acofta , /^/z^^ /jo.
(u) Hiftoire philofophique & politique des deux Indes, tome III ,
page 2Sj*
DES Minéraux. 229
îes eaux , &. qu'aucune ne fe trouve dans les montagnes
produites par ie feu primitif, ni dans les fentes du quartz:
on voit de même qu'on ne trouve point le cinaJjre
mêlé avec les mines des autres métaux (x) , à l'excep-
tion de celles de fer en rouille, qui, comme Ton fait,
font de dernière formation. L'établifTcmcnt des mines
primordiales d'or, d'argent & de cuivre dans la roche
quartzeufe, efl donc bien antérieur à celui des mines
de mercure, & dès-lors n'en doit-on pas conclure que
ces métaux fondus ou fublimés par le feu primitif, n'ont
pu faifir ni s'affimiler une matière qui , par fa volatilité,
étoit alors comme l'eau, reléguée dans ratmof]:)hère î
que dès-lors, il n'eft pas poffible que ces métaux con-
tiennent un feul atome de cette matière volatile , A. que
par conféquent on doit renoncer à l'idée d'en tirer le
mercure ou le principe mercuriel qui ne peut s'y trouver!
Cette idée du mercure, principe exiflant dans J'or &
l'argent, étoit fondée fur la grande affinité & l'attraélion
très-forte, qui s'exerce entre le mercure & ces métaux;
mais on doit confidérer que toute attraction , toute pé-
nétration qui fe fait entre un folide & un liquide, eA
généralement proportionnelle à la denfité des deux
matières, &. que celle du mercure étant très-grande &
iès molécules infiniment petites, il peut aifémcnt pénétrer
(x) On obferve que dans les mines de cinabre d'Almaden, il
ïi^y a aucun autre métal. Mitnoires de l'Académie des Sue nus ,
230 Histoire Natu relle
les pores de ces métaux, & les humeder comme l'eau
humecte la terre.
Mais fuivons mes afTertions : j'ai dit que le cinabre
n'étoit point un vrai minéral, mais un imiple compofé
de mercure faifi par le foie de foufre, & cela me paroît
démontré par la compofition du cinabre artificiel fait
par la voie humide ; il ne faut que le comparer avec la
mine de mercure pour être convaincu de leur identité
de fubflance. Le cinabre naturel en maffe eft d'un rouge
très-foncé; il eft compofé d'aiguilles luifantes appliquées
longitudinalement les unes fur les autres, ce qui feul
fuffit pour démontrer la préfènce réelle du foufre : on
en fait en Hollande du tout pareil & en grande quantité ;
nous en ignorons la manipulation , mais nos Chimiftes
l'ont à peu-prcs devinée : ils font du cinabre artificiel
par le moyen du feu , en mclant du mercure au (bufre
fondu fyj , & ils en font auiïi par la voie humide, en
(y) On fait du cinabre artificiel feniblable en tout au cinabre
naturel. . . . Pour cela on mêle quatre parties de mercure coulant
avec une partie de ibufre qu'on a fait fondre dans un pot de terre
non vernifTe' ; on agite ce mélange qui s'unit très-facilement à l'aide
de la chaleur ; le mercure uni au foufre , devient noirâtre. ... La
force d'affinité s'exerce avec tant de puiffance entre ces deux matières,
qu'il en réfulte une coinbinaifon.. . . On laifTe ce mélange brûler
pendant une minute , après quoi on retire la matière , on la pulvé-
rilè dans un mortier de marbre , & par cette trituration elle fe réduit
en une poudre violette. . . . On fait fublimer cette poudre en la
mettant dans un matras à un feu de fable qu'on augmente graduelle-
DES Minéraux, 231
combinant le mercure avec le foie de foufre fij; ce
dernier procédé paroît être celui de la Nature; le foie
de foufre n'étant que le foufre lui-même combiné avec
les matières alkalincs, c'efl-à-dire avec toutes les matières
terreflres , à l'exception de celles qui ont été produites
par le feu primitif, on peut concevoir aifément que
dans les lieux où le foie de foufre & le mercure /è
feront trouvés enfcmble, comme dans les argiles, les
grès; les pierres calcaires, les terres limonneufes & autres
ment jufqu'à ce que le fond du matras foit bien rouge. Le fublimé
qu'on obtient par cette opération efl: en mafle aiguillée , de couleur
rouge-brun , comme i'ed le cinabre naturel lorfqu'il ri'eft pas pul-
vériré Par ce procédé donné par M. Baume, on obtient, à
la vérité du cinabre , mais qui n'eft pas fi beau que celui c{ue l'on
fait en Hollande où il y a des manufacflures en grand de cinabre
artificiel , mais dont les procédés ne font pas connus au jufte.
Diâiomiaire de Chimie , par AI. Alacquer , article Cinabre.
(l) On peut aufli faire du cinabre artificiel par la voie humide,
en ajipliquant , foit au mercure feul , foit aux difTolutiofis de mercure
par les acides, mais fur -tout par l'acide nitreux , les différentes
efpèces de foie de foufre & l'on doit remarquer que ce cinabre
fait par la voie humide, a une couleur rouge vif de feu, infiniment
plus éclatante que celle du cinabre qu'on obtient par la fublimation....
mais cette différence ne vient que de ce que le cinabre fublimé eft
en mafle plus compacte que l'autre , ce qui lui donne une couleur
rouge fi foncée qu'il paroit rembruni ; mais en le broyant fur un
porphyre en poudre très-fine, il prend un rouge vif éclatant. .. .
Celui qu'on obtient par la voie humide n'étant point en malTe
comme le premier, mais en poudre fine, paroît donc plus rouge
par cette feule raifon. Idem, ibidem.
1-^z Histoire Natu re lle
matières formées par le dépôt des eaux, la combinai/on
du merciu-e , du foufre & de i'aikali fe fera faite , & le
cinabre aura ctc produit. Ce n'efl pas que la Nature
n'ait pu former auiïi dans certaines circonflances du
cinabre par le feu des volcans; mais en comparant les
deux procédés par lefquels nous avons fu T imiter dans
cette produdion du cinabre , on voit que celui de la
fublimation par le feu, exige un bien plus grand nombre
de combinaifons que celui de la fimpîe union du foie
de foufre au mercure, par la voie humide.
Le mercure n'a par lui-même aucune affinité avec
les matières terreufes , & l'union qu'il contracte avec
elles par le moyen du foie de foufre, quoique pcrn:ia-
nente, n'efl point intime; car on le retire aifément des
maHes les plus dures de cinabre en les expofant au
feu (il). Ce n'efl donc que par des accidcns particuliers,
& notamment par l'adion des feux fouterrains que le
^^— ^.^-^— ■ - ...l. -■■■!■ ■!■■■— ■-■■-■■M ■■ fcfc ■ ■i.M.. ^,- ■■»■ M ^B»^
^a) Il eft aifé de recomioître fi une pierre coniient du mercure ;
il fuffit de la faire chauffer & de la mettre toute rouge fous une
cloche de verre , car alors la fuinée qu'elle exhalera fe convertit ea
petites gouttelettes de mercure coulant.
J'ai obfervé , dit M. de JufFieu , dans les endroits même de la
veine la plus riche, que l'on n'y ttouve point de mercure coulant,
& que s'il en paroît quelquefois , ce n'eft qu'un effet de la violence
des coups que les mineurs donnent fur le cinabre qui efl en roche
dure , ou plus encore de la chaleur de la poudre dont on le fert
pour pétarder ces mines. Afi-moires de i Acadimie des Sciences ,
cnnéc lyi ^ , pog^s S^o ù' fuiyantes.
mercure
DES Minéraux. 233
mercure peut fe féparer de fa mine, & c'eil par cetic
rai(on qu'on le trouve fi rarement dans Ton état coulant.
Il n'eft donc entré dans les matières terreufes que par
imbibition comme toute autre liquide, & Û s'y eft uni
au moyen de la combinaifon de leurs alkalis avec le
foufre; ôi cette imbibition ou humedation paroît bien
démontrée, puifqu'il fuffit de faire chauffer le cinabre
pour le delTécher (âj, c'eft- à -dire, pour enlever le
mercure, qui dès-lors s'exhale en vapeurs, comme l'eau
s'exhale par le deflechement des terres humeélées.
Le mercure a beaucoup moins d'affinité que la
plupart des métaux avec le foufre, & il ne s'unit ordi-
nairement avec lui que par l'intermède des terres alka-
lines ; c'eft par cette raifon qu'on ne le trouve dans aucune
mine pyriteufe ni dans les minerais d'aucun métal,
non plus que dans le quartz & autres matières vitreufes
produites par le feu primitif ; car les alkalis ni le
foufre, n'exiftoient pas encore dans le temps de la
formation des matières vitreufes ; & quoique les pyrites ,
étant d'une formation poflérieure, contiennent déjà les
principes du foufre , c'eil-à-dire , i'acide & la fubftance
du feu, ce foufre n'étoit ni développé ni formé, & ne
^ifj Nota. Ceci ^ CKadement vrai pour tout cinabre qui contient une
bafe terxeule capable de retenir le foufie; cependant on doit excepter
le cinabre qui ne feroit uniquement compofe que de foufre & de
lîiercwre , car il fe fubiimeroit plutôt que de fe décompofer ; mais
ce cinabre fans bafe terreufe ne fe trouve guère dans la Nuture.
Minérm.x, Tome III. G g
234 H 1 ST O IRE N ATU RELLE
pouvoit par conféquent fe réunir à l'alkali, qui lui-même
n'a été produit qu'après la formation des pyrites , ou
tout au plus tôt en même temps.
Enfin, quoiqu'on ait vu par l'énumération que nous
avons faite de toutes les mines connues, que le mercure ne
fe trouve en grande quantité que dans quelques endroits
particuliers , où le fbufre tout formé s'efl trouvé réuni
aux terres alkalines, il n'en faut cependant pas con-
clure que ces /euls endroits contiennent toute la quantité
de mercure ex i fiante ; on peut, & même on doit croire
au contraire qu'il y en a beaucouj) à la furface & d? )s
les premières couches de la terre ; mais que ce minerai
fluide étant par fa nature iulceptible d'une divilioit
prefque infinie, il s'efl diffcminé en molécules fi ténues
qu'cilt s échappent à nos yeux , & même à toutes les re-
cherches de notre Art, à moins que par haiard, comme
dans les exemples que nous avons cités, ces molécules
ne fe trouvent en afiez grand nombre pour pouvoir
jes recueillir ou les réunir par la fublimation. Quelques
Auteurs ont avancé qu'on a tiré du mercure coulant,
des racines d'une certaine plante femblable au doronic (c) ;
(c) «Selon M. Manfredi , il vient dans la vallce de Lancy
» qui ell fituée dans les mont.tgnes de Tunis , une plante feniLiub/e
33 au doronic; on trouve auprès de Tes racines du mercure coulant
3> en petits globules ; Ton fuc exprimé à l'air dans une belle nuit
fournit autant de mercure qu'il s'ell difTipé de fuc ». Coiledion
aciiilém'tquc , partie étrangère, tome II, page p^.
DES Minéraux. 2.7, y
qu'à la Chine on en tiroit du pourpier fauvage (JJ ;
je ne veux pas garantir ces faits ; mais il ne me paroît
pas impolFible que le mercure difleminé en molécules
très - petites , foit pompé avec la fève par les plantes ,
puifque nous favons qu'elles pompent les particules du
fer contenu dans la terre végétale.
En faifant fuoir au cinabre l'adion du feu dans des
vaifTeaux clos, il fe fublimera fans changer de nature,
c'ell-à-dire, fans fe décompofer ; mais en Texpofant au
même degré de feu dans des vaifTeaux ouverts , le foufre
du cinabre fe brûle, le mercure fe volatilife & fe perd
dans les airs; on efl donc obligé pour le retenir, de
le fiiblimer en vaifTeaux clos, & afin de le féparer du
foufre qui ic fublime en même temps, on mêle avec
le cinabre réduit en ])oudre , de la limaille de fer fej ;
( d) Le P. cI'Eutrecoiles rapporte qu'à fa Chine on tire du
mercure de certaines plantes , &; fur-tout du pourpier fauvage , que
même ce mercure ell plus pur que celui qu'on tire des mines , &
qu'on les diftingue à la Chimie par deux differens noms. Lettres
édifiantes , 22! recueil, page 4^J'
(e) Si on met le cinabre fur le feu dans des vaifleaux clos, il
fe fublime en entier , fans changer de nature. Si on l'expofe au
contraire à l'air libre & fur le même f<;u, c'eft-à-dire dans des vaiffeaux
ouverts , il fe dccompofe , parce que le foufre fe Inùle , & alors le
mercure le dégage réduit en vapeurs ; mais comme il s'en produit
beaucoup par cette manière , on a trouvé moyen de le féparer du
foufre en vaifleaux clos, en otîrant au foufre quelqu'iniermède qui
ait avec lui plus d'affinité qu'il n'en a avec le mercure... . comme
i'dlkali fixe, la chaux, &c. & même les métaux & demi -métaux,
Gg ij
2^6 Histoire Naturelle
ce métal ayant beaucoup plus d'affinité que le mercure
avec le foufre , s'en empare à mcfure que le feu le
dégage , & par cet intermède , le mercure s'élève feul
en vapeurs qu'il efl aifc de recueillir en petites gouttes
coïilantes, dans un récipient à demi plein d'eau. Lorf-
qu'on ne veut que s'afTurer fi une terre contient du
fur-tout le fer, le cuivre, l'etain , le plomb, l'argent, le bifmuth
&. le régule d'antimoine , qui tous ont plus d'affinité avec le foufre
que tÏQn a le mercure , & de toutes ces fubflances , c'elt le fer
qui eft la plus commode & la plus ufitée pour la décompofiiion
du cinabre en petit ; on prend deux parties de cinabre &. une partie
de limaille de fer non rouillée ; on les mêle bien enfemble ; on met
ce mélange dans une cornue qu'on place dans un fourneau à feu nu,
ou dans une caplule , au biiin de fable , arrangée de inaiiière qu'on
puifTe donner un feu aflez fort; on ajoute à la cornue un récipient
qui contient de l'eau , & on procède à Ja diflillation. Le mercure
dégngé du foufre par l'intermède du fer , s'élève en vapeurs qui
paOènt dans le récipient, <Sc s'y condenfent , pour la plus grande
partie, au fond de l'eau en mercure coulant. Il y a aufli une portioa
du mercure qui relie très-divifée & qui s'arrête à la furface de l'eau,
à caufe de la finefle de fes parties , fous la forme d'une poudre
noirâtre, qu'il faut rama^Ter exactement pour la mcler avec le mercure
en mafle , avec lequel. elle s'incorpore facilement. Ce mercure,
qu'on paffe enfuite à travers un linge ferré , efl très-pur Ou
trouve dans la cornue le foufre du cinabre uni avec le fer, ou
l'âlkali , ou telle autre matière qu'on aura employée pour le féparer
du mercure. ...
Trois livres de cinabre , fuivant M. Baume , donnent deux livres
deux onces de mercure ; la limaille de fer abforbe douze onces &
demie de foufre , & il y a perte d'une once & demie. Didionnairt
de Chimie , j^ûr AI. Macper , article Cinabre.
DES Minéraux. 237
mercure ou n'en contient pas , il fufTit de mcler de la
poudre de cette terre, avec de la limaille de fer fur
une brique, que l'on couvre d'un \'are <\<i verre, & de
mettre du feu fous cette brique ; fi la terre contient
du mercure, on le verra s'élever en vapeurs oui fe
condenferont au haut du vafe en petites gouttes de
mercure coulant.
Après avoir confidéré le mercure dans /à mine , oii
il fait partie du folide de la mafTe, il faut maintenant
l'examiner dans fon état fluide ; il a le brillant mctailique
peut-être plus qu'aucun autre métal, la même couleur,
ou plutôt le même blanc que l'argent ; fa denfité eft
entre celte du plomb & celle de l'or; il ne perd qu'un
quatorzième de fon poids dans une eau dont le pied
ciibe eft fuppofé pefcr foixante - douze livres, & par
conféquent le pied cube de mercure pèfe mille huit
livres. Les clémens humides ne font fur le mercure
aucune impreffion fenfible; fa furface même ne fê ternit
il l'air que par la pouffière qui la couvre, &. qu'il eft
îiifé d'en fcparer par un fimple & léger frottement ; il
parort fe cJiarger de même de l'humidité répandue
*lans l'air ; mais en l'efliiyant là furûce reprend ion
premier brillant.
On a donné le nom de inercuu vierge à celui qui
<>ft le plus pur &L le plus coidant & qui fe trouve quei-
»quefois dans le fein de la terre , après s'être écoulé de
ia mine par la feule commotion , ou par un fimplc
238 Histoire M aturelle
mouvement d'agitatioii, fans le fecours du feu; celui
que l'on obtient par la fublimation eft moins pur ; <Sc
l'on pourra reconnoître fa grande pureté à un efîèt très-
remarquable; c'ell qu'en le fecouant dans un tuyau de
verre , ion frottement produit alors une lumière fenfible ,
&femblable à l'éciair èledriqtie; l'cledricité efl en effet
la caufe de cette aj^parence lumineufè.
Le mercure répandu fur la furface polie de toute ma-
tière avec laquelle il n'a point d'affinité, forme, comme
tous les autres liquides, des petites gouttes globuleufes par
la feule force de l'attraélion mutuelle de fes parties ;
les gouttes du mercure fe forment non-feulement avec
plus de promptitude, mais en plus petites maffes , parce
qu'étant douze ou quinze fois plus dcnfe que les autres
liquides, fa force d'attraélion ell bien plus grande &.
produit des effets plus apparens.
11 ne parojt pas qu'une chaleur modérée, quoique
très - long - temps appliquée , change rien à l'état du
mercure coulant (f); mais lorfqu'on lui donne un degré
de chaleur beaucoup plus fort que celui de l'eau bouil-
lante, l'attradion réciproque de fcs parties n'efl plus
(f) Boërhaave a fournis dix-huit onces de mercure à cinq cents
diftillations de fuite , & n'y a remarqué , après cette longue épreuve ,
aucun changement fenfible , finon qu'il lui a paru plus fluide , que
fa pefanteur fpécifjque étoit un peu augmentée & qu'il lui eft
rede quelcjues grain^ de matière fixe. Diâionnaire de Chimie , par
AI. Maçquer , anlcU Mercure.
D E s AI I N É R A U X. 239
affez forte pour les tenir réunies; elles fè fcparent ^
fe volatilifeni, fans néanmoins changer d'effence ni même
s'altérer, elles font /èulement divifées & lancées par la
force de la chaleur; on peut les recueillir en arrêtant
cet effet par la condenlaiion , ôl elles fè repré/èntent
alors fous la même forme , & telles qu'elles étoicm
auparavant.
Quoique la furface du mercure fe charge des pouJf^
fières de l'air, & même des vapeurs de l'eau, qui
flottent dans l'atmofphère , il n'a aucune affinité avec
l'eau, &. il n'en prend avec l'air que par le feu de
calcination: l'air s'attache alors à fa furface & Ce fixe
entre fes pores, fans s'unir bien intimement avec lui,
Si. même fans fe corrompre ni s'altérer ; ce qui fcmhle
prouver qu'il n'y a que peu ou poiiit de feu fixe dans
le mercure, & qu'il ne peut en recevoir à cauie de
l'humidité qui fait partie de fa fubitance, & même l'on
ne peut y attacher l'air qu'au moyen d'un feu allez
fort & foutenu pendant pluheurs mois; le mercure, par
cette très - longue digefîion dans des vaifTeaux qui ne
font pas exaétement clos , prend peu - à - peu la forme
d'une efpèce de chaux ^g), qui néanmoins eft différente
/o) Par la digefîion ù un degré de chaleur très-fort & foutenu
pendant plufieujs mois , dans un vailTeau qui n'eft pas exadement
clos, le mercure éprouve une altération plus fenfible; fa furface fe
change peu-à-peu en une poudre rougeâtre, terreufe , qui n'a plus
aucun brillant métallique , & qui nage toujours à la furface du refte
24.0 Histoire Naturelle
des chaux métalliques ; car quoiqu'elle en ait l'appa-
rence , ce n'cd cependant que du mercure chargé d'air
pur, &: elle diffère des autres chaux métalliques, en ce
qu'elle Te revivilie d'elle-même, <Sc fàiis addition d'au-
cune matière inflammable ou autre qui ait plus d'affinité
avec l'air qu'il n'en a avec le mercure ; il fuffit de
mettre cette prétendue chaux dans \\\\ vailTcau bien
clos, & de la chauffei" à un feu violent, pour qu'en
fe volatilifant le mercure abandonne l'air avec lequel il
n'étoit uni que par la force d'une longue contrainte, &.
fans intimité, puifque l'air qu'on en retire efl pur, &
n'a contracté aucune des qualités du mercure ; que
du mercure fans s'y incorporer; on peut convertir aiiifi en entier
en poudre rouge , une quantité donnée de mercure , il ne faut
que le temps & les vaifTeaux convenables. On appelle cette .pré-
paration du mercure, précipité /j^rT^' , 6c on ne peut obtenir cette
poudre rouge ou précipité per fe qu'en faifant fubir au mercure la
plus forte chaleur qu'il puifle fupporter fans fe réduire en vapeurs.
Ce précipité paroît krç une vraie chaux de mercure. . . . d'autant
qu'il ne s'ell fait que par le concours de l'oir, il ne pèfe pas autant
que le mercure puifqu'il nage à fa furface ; mais ion volume ou
pefanteur abfolue efl augmentée d'environ — .... on en peut déo-ao-er
i'air auquel eU due cette augmentation de poids, & faire la réduction
de ce précipité ou de cette chaux fans addition dans des vaiffeaux
clos , dans lefquels le mercure le revivifie ; l'air qui fe dégao-e de cette
chaux de mercure, ell très-pur ( ce qui efl bien diflcrent de l'air
qui fe dégage des autres chaux métallicjues , qui efl très-corrompu ) ,
& il n'y a point de perte de mercure dans cette rédudiou. Didiomaïre
4e Chimie , par AI, Alacquer , ariick Mcicure.
d'ailleurs
DES Minéraux, 241
d'ailleurs en pcfant cette chaux, on voit qu'elle rend
par fa rcdu6tion la même quantité, c'efl-à-dire, autant
d'air qu'elle en avoit fàiii ; mais lorfqu'on réduit les autres
chaux métalliques, c'efl l'ai; que l'on emporte en lui
offrant des matières inflammables , au lieu que dans
celles-ci c'eft le mercure qui eft emporté ô>l féparé de
i'air par fà /èule volatilité (fi).
(h) Ayant communique cet article à mon favantami M. de Morveau,
aux lumières duquel j'ai la plus grande confiance , je dois avouer
qu'il ne s'eft pas trouvé de mon avis ; voici ce qu'il m'écrit à ce
fujet. « II paroît que la chaux de mercure efl une vraie chaux métal-
lique , dans le fens des Chimiftes, Stalhiens , c'eft-à-dire à laquelle «
il manque le feu fixe ou phlogiftique ; en voici trois preuves diredes «
entre bien d'autres ; i ° l'acide vitriolique devient lulfureux avec <c
le mercure; il n'acquiert cette propriété qu'en prenant du phlo- ce
giflique ; il ne peut en prendre que où il y en a ; le mercure ««
contient donc du phlogiflique. Le précipité per fe de même avec ce
l'acide vitriolique ne le rend pas fulfureux ; il efl: donc privé ce
de ce principe inflammable. " «
2." L'acide nitreux forme de l'air nitreux avec toutes les matières <c
qui peuvent lui fournir du phlogiflique ; cela arrive avec le mer- ce
cure, non avec le précipité per fe ; l'un tient donc ce principe, & «
l'autre en efl privé. ce
3.° Les métaux imparfaits traités au feu en vaifleaux clos avec ce
la chaux du mercure , fe calcinent pendant qu'il fe détruit ; ainfi ce
l'un reçoit ce que l'autre perd. Avant roj)ération, le métal imparfait ce
pouvoit fournir au nitre le phlogiflique néceflaire à fa déflagration ; ce
il ne le peut plus après l'opération ; n'efl-il pas évident qu'il en «
a été privé pendant cette opération »! Je conviens avec M. de Morveau
de tous ces faits , & je conviendrai aulîi de la conféquence qu'il en
Minéraux, Tome IIL H h
2^2 Histoire Naturelle
Cette union de l'air avec le mercure n eft donc que
fuDeriicielle , ôl quoique celle du foufre avec le mer-
cure dans le cinabre, ne /bit pas bien intime, cependant
elle efl beaucoup plus forte & plus profonde ; car en
mettant le cinabre en vaifTeaux clos comme la chaux
de mercure, le cinabre ne fe dccompofe pas, il fe
fublime fans changer de nature, & fans que le mercure
fe fcpare, au lieu que par le même procédé, fâ chaux
fe décompofe & le mercure quitte l'air.
Le foie de foufre paroît être la matière avec laquelle le
mercure a le plus de tendance à s'unir , puifque dans le
fein de la terre le mercure ne fe prcfente que fous la forme
de cinabre ; le ibufre feul, & fans mélange de matières
alkalincs, n'agit pas auHi puiffamment iiir le mercure;
il s'y mole à peu - près comme les graiffes lorfqu'on
les triture enfemble , & ce mélange où le mercure
difparoît, n'efl qu'une poudre pefante & noire à laquelle
%■ I ' » !■ I- ■,,■■ ., — ■ ■ ■ ■ ■ ■! ■ Il ■■ -- !■■ ■■■I— — ^^ ■ ■ — .IW..» ■ I ■! ,. Il ■ !■»
tire , pourvu qu'on ne la rende pas générale. Je fuis bien éloigné
de nier que le mercure ne contienne pas du feu fixe & de l'air
fixe, puifque toutes les matières métalliques ou terreules en con-
tieni'ient; mais je perfifte à penfer qu'une explication où l'on n'emploie
qu'un de ces deux élémens , efi: plus fimple que toutes les autres
où l'on a recours à deux ; & c'eft le cas de la chaux du mercure ,
dont la formation & la rédudion s'expliquent très-clairement par
J'union & la féparation de l'air, fans qu'il foit néceHaire de recourir
au phlogiftique ; & nous croyons avoir très-fuffifamment démontré
que l'accefllon ou la réceffion de l'air fixé fuffiroit pleinement pour
opérer & expliquer tous les phénomènes de la formation & de la
réduction des chaux métalliques.
DES Minéraux, 243
les Chimirtes ont donné le nom é^éthiops minéral (i) ;
mais malgré ce changement de couleur, & malgré
l'apparence d'une union afFez intime entre le mercure
&. le fbufre dans ce mélange , il efl encore vrai qu(î ce
n'ell qu'une union de contaél & très -ftiperficielie; car
il efl; aifé ^t\\ retirer fans perte, &. prccifément la
même quantité de mercure fans la moindre altération;
&. comme nous avons vu qu'il en efl; de même iorfqu'ou.
revivifie le mercure du cinabre, il paroît démontré
(i) L'éthiops minéral efl une combinaifon de mercure avec une
aflez grande quantité de foufre ; il efl noir..,. Il fe fait ou par la
fufion ou par la fimple trituration.... On fait fondre du foufre dans
un vaifTeau de terre non vernifîé ; aufll-tôt qu'il efl fondu on y
mêle une égale quantité de mercure , en retirant le vaifTeau de defTus
le feu. On agite le mélange jufqu'à ce qu'il foit refroidi &: figé ;
il refle après cela une malle noire & friable qu'on broie &: qu'on
tamife , & c'efl: l'éthiops.
Et lorfqu'on veut faire de l'éthiops fans feu, on triture le mercure
avec le foufre dans un monier de verre ou de marbre , en mettant
deux parties de mercure fur trois parties de fleurs de foufre, &
on triture jufqu'à ce que le mercure ne foit plus vifible. ... L'union
du mercure &. du foufre dans l'éthiops n'efl pas fi forte que dans
le cinabre ; il ne faut pas croire pour cela qu'elle foit nulle , &
qu'il n'y ait dans l'éthiops qu'un fimple mélange ou interpofition
des parties des deux fubflances ; il y a adhérence & combinaifon
réelle, La preuve en efl qu'on ne peut les féparer que par des inter-
mèdes qui font les mêmes que ceux qu'on emploie pour féparer
le mercure du cinabre , & cet éthiops peut aifément devenir , étant
traité par les procédés chimiques , du véritable cinabre artificiel,
Dïdïmnaïre de Chimie , par M. Macquer , article Ethiops,
H h \\
244- Histoire Natu relle
que le foufre qui altère la plupart des mciaux ne
cauie aucun changement intérieur dans la fubdancc du
mercure.
Au refle , lorfque le mercure , par le moyen du feu
& par l'addition de l'air , prend la forme d'une chaux
ou d'une terre en poudre, cette poudre efl d'abord
noire , & devient enfuite d'un beau rouge en continuant
le feu ; elle ofire même quelquefois des petits crifîaux
tranfparens & d'un rouge de rubis.
Comme la denfitc du mercure eft très - grande , &
qu'en même temps fes parties conftituantes font prefque
infiniment petites , il peut s'appliquer mieux qu'aucun
autre liquide aux furfaces de tous les corps polis. La
force de fon union par fmipie contad; avec une glace
de miroir, a été mefurée par im de nos plus favans
PhyTiciens (kj , &l se^ trouvée beaucoup plus forte
(k) Si l'on met, dit M. de Morveau , en équilibre une balance
portant à l'un de fes bras un morceau de glace taillé en rond ,
de deux pouces & demi de diamètre , fufpendu dans une pofition
horizontale , par un crochet maRiqué fur la furface fupérieure , &
que l'on ïàH'e enfuite defcendre cette glace fur la furface du mercure
placé au-dellbus , à très-peu de diftance , il faudra ajouter dans le
bafîjn oppofé jufqu'à neuf gros dix-huit graàus , pour détacher la
glace du mercure & vaincre l'adhéfion réfultante du contacl.
Le poids & la comprefijon de ratmofphère n'entrent pour riea
dans ce phénomène, car l'appareil étant mis fur le récipient dénué
d'air, de la machine pneumatique, le mercure adherra encore à
la glace, avec ime force égale, & cette adhcfion fouiiendra de
DES Minéraux. 245
qu'on ne pourroit l'imaginer ; cette expérience prouve
encore, comme je l'ai dit, à l'article de i'étain, qu'il
y a entre la feuille d'étain & la glace , une couche de
mercure pur, vif &. fans mélange d'aucune partie d'étain,
& que cette couche de mercure coulant n'eft adhérente
à la glace que par iimplc contact.
Le mercure ne s'unit donc pas plus avec le ^'erre
qu'avec aucune autre matière tcrreufc; mais il s'amalgame
avec la plupart des fiibflances métalliques : cette union
par amalgame , efl une humeclation qui fe fait fouvent
à froid & fans produire de chaleur ni d'effervefcence,
comme cela arrive dans les diffolutions ; c'efl une opé-
ration moyenne entre l'alliage & la diiïolution ; car la
première fuppofe que les deux matières fbient liquéfiées
par le feu, &. la féconde ne fe fait que par la fufiou
ou la calcination du métal par le feu contenu dans le
diffolvant, ce qui produit toujours de la chaleur; mais
dans les amalgames, il n'y a qu'humeéîation & point de
fufion ni de diffolution: & même im de nos plus iiabiles
Chimifles (/J, a obfervé que non- feulement les amal-
games fè font fans produire de chaleur, mais qu'au
contraire ils produifent un froid fenlîhle qu'on peut
mefùrer en y plongeant un thermomètre.
même les neuf gros dont on aura chargé précédemment l'autre
bras de la balance. Élémens de Chimie , par Aï. de Aloryeau , tome I ,
pages /4 & //,
(l) M. de Machi.
246 Histoire Naturelle
On objecflera peut - être qu'il fe produit du froid
pendant l'union de l'alkali minéral avec l'acide nitreux,
du fci ammoniac avec l'eau, de la neige avec l'eau,
& que toutes ces unions font bien de vraies diffolutions;
mais cela même prouve qu'il ne fè ])roduit du froid
que quand la difToiution commence par l'humeélation ;
car la vraie caufe de ce froid cfl l'évaporation de la
chaleur de l'eau , ou des liqueurs en général qui ne
peuvent mouiller fans s'évaporer en partie.
L'or s'amalgame avec le mercure par le fimple
conta6l, il le reçoit à fa furface , le retient dans fes
pores , & ne peut en être féparé que par le moyen du
feu. Le mercure colore en entier les molécules de l'or,
leur couleur jaune di/paroît, l'amalgame eft d'im gris
tirant fur le brun fi le mercure efl fàturé. Tous ces
effets proviennent de rattra6lion de l'or qui efl plus
forte que celle des parties du mercure emr'clles , & qui
par conféquent les fépare les unes des autres, & les
divifè affez pour qu'elles puiffent entrer dans les pores
& humeder la fubflance de l'or ; car en jetant une
pièce de ce métal dans du mercure , il en pénétrera
toute la maffe avec le temps, & perdra précifémem en
quantité ce que l'or aura gagné, c'eft-à-dire, ce qu'il
aura faifi par l'amalgame. L'or efl donc de tous les
métaux celui qui a la plus grande affinité avec le mer-
cure, &. on a employé très - utilement, le moyen de
l'amalgame pour feparer ce métal précieux de toutes
DES Minéraux, i^j
les matières étrangères avec lerqiielles il fe trouve mêle
dans fes mines: au refle, pour amalgamer prompiement
l'or ou d'autres métaux, il faut les réduire en feuilles
minces ou en poudre, & les mêler avec le mercure
par la trituration.
L'argent s'unit au/fi avec le mercure par le fnnpie
conta6t , mais il ne le retient pas aufTi puiffammcnt que
l'or, leur imion eft moins intime; & comme la couleur
de l'argent eO; à peu-près la même que celle du mer-
cure , fa furface devient feulement plus brillante lorf-
qu'elle en efl; humectée ; c'eft ce beau blanc brillant
qui a fait donner au mercure le nom de v'if-argcnt.
Cette grande affinité du mercure avec l'or & l'argent,
fembleroit indiquer qu'il doit fè trouver dans le fein de
la terre des amalgames naturels de ces métatix, cepen-
dant depuis qu'on recherche & recueille des minéraux ,
à peine a-t-on un exemple d'or natif amalgamé , & l'on
ne connoît en argent que quelques morceaux tirés des
mines d'Allemagne, qui contiennent une quantité aflez
confidérable de mercure pour être regardés comme de
vrais amalgames (m) ; il eft aifé de concevoir que cette
(m) M. Sage fait mention d'un morceau d'or natif de Hongrie,
d'un jaune griiâtre, fragile, & dans lequel l'analyfe lui a fait trouver
«ne petite quantité de mercure , avec lequel on peut croire que
cet or avoit été naturellement amalgamé. Ce morceau ne contenant
que très-peu de mercure , doit être certainement rangé parmi les
HÙnes d'or ; mais les amalgames natifs d'argent de Sahlberg & du
248 Histoire Naturelle
rareté des amalgames naturels vient de la rareté même
du mercure dans (o\\ état coulant , & ce n'cfl pour
ainfi dire qu'entre nos mains qu'il eft dans cet état, au
lieu que dans celles de ]a Nature, ii eit en mafTe fblide
de cinabre , & dans des endroits particuliers très-diffé-
rens, très-éloigncs de ceux où fe trouvent l'or & l'argent
primitifs, puifque ce n'elt que dans les fentes A\x quartz
& dans les miontagnes produites par ie feu que giffent
ces métaux de première formation; tandis que c'eft
dans les couches formées par le dépôt des eaux que
fè trouve le mercure.
L'or & l'argent font les feules matières qui s'amal-
gament à froid avec le mercure; il ne peut pénétrer
les autres fubflances métalliques, qu'au moyen de leur
fufion par le feu , il s'amalgame auiïi très - bien par ce
même moyen avec l'or & l'argent; l'ordre de la facilité
de ces amalgames eft l'or, l'argent, l'étain, le plomb,
le bilmuth, le zinc & Tarfenic ; mais il refufe de s'unir
& de s'amalgamer avec le fer, ainfi qu'avec les régules
d'antimoine &l de cobalt. Dans ces amalgames qui ne
fe font que par la fufion, il faut chaufter le mercure
jufqu'au degré où il commence à s'élever en vapeurs,
& en même temps faire rougir au feu, la poudre des
métaux qu'on veut amalgamer pour la triturer avec le
Palatinat , contiennent fouvent plus de mercure que d'argent ; ils
devroient donc être rapportés parmi les mines de mercure. Lettres
^e M. Demejle , tome II, page 10^.
mercure
DES Aï I iW É R A U X. 249
mercure chaud. Les métaux qui , comme l'étain &. le
plomb , fe fondent avant de rougir , s'amalgament plus
aifcmcnt & plus promptement que les autres; car ils fe
mêlent avec le mercure qu'on projette dans leur foute,
& il ne faut que la remuer légèrement pour que le
mercure s'attache à toutes leurs parties métalliques.
Quant à l'or, l'argent ôl le cuivre, ce n'efl qu'avec
leurs poudres rougies au feu que l'on peut amalgamer
le mercure; car li l'on en verfoit fur ces métaux fondus,
leur chaleur trop forte, dans cet état de fufion, non-
feulement le fuhlimeroit en vapeurs , mais produiroit
des explofions dangereufcs.
Autant l'amalgame de l'or & de l'argent fe fait aifc-
ment , foit à chaud, foit à froid, autant l'amalgame du
cuivre efl difficile & lent; la manière la plus fûre & fa
moins longue de taire cet amalgame, efl de tremper
des lames de cuivre dans la diffolution du mercure
par l'acide nitreux; le mercure diffous s'attache au cuivre
& en blanchit les lames. Cette union du mercure Si. du
cuivre ne fe fait donc que par le moyen de l'acide,
comme celle du mercure & du foufre fc fait par le
moyen de l'alkali.
On peut verfer du mercure dans du plomb fondu ,
fans qu'il y ait explofion , parce que la chaleur qui
lient le plomb en fufion, efl fort au-deffous de celle
qui efl néceffaire pour y tenir l'or &. l'argent ;
auffi l'amalgame fe fait très - aifément avec le plomb
ATuicrmiX , Tome III. I i
2^0 Histoire Naturelle
fondu fnj; il en cfl Je mcme de l'ctain ; mais il peut
aufTi fe faire à froid avec ces deux métaux, en les
rédui/ànt en poudre & les triturant long-temps avec le
mercure, c'efl avec cet amalgame de plomb qu'on lutte
(^nj I ." Partie égale de mercure & de plomb forment une mafîe
blanche folide , dont une partie du mercure fe fcj^are par une
exudation occafionnée par la feule chaleur de i'atmo/phere , en glo-
bules infiniment petits.
2..° Deux parties de plomb & une de mercure forment une
mafîe blarche , dure , cafîante , à petits grains comme ceux de
l'acier , dont le mercure ne s'échapjie pas ; ces deux lubrtances
forment alors une combinaifon durable.
3." Trois parties de plomb & une de mercure forment une mafle
plus dudile que le plomb & l'ctain ; on en peut faire des vafes ,
& on la liie aifément à la filière.
4." Ce dernier mélange ell d'une fufibilité extraordinaire; mais
fi on l'expofe d'abord à un grand feu , il éclate avec explofion ;
fi au contraire on le liquéfie à une douce chaleur , on peut enfuite
le châufi^tr au rouge ; mais il bout continuellement avec un bruifl'e-
ment comme la graille.
5.° Si l'on continue à le tenir en fufion, le mercure fe difllpe
fucceflivement & totalement en vapeurs.
6.' La craiïè qui fe forme à la furface du plomb combiné avec
le mercure, expoice feule dans un Vdiffeau rouge de feu, décrépite
comme le fei marin.
7.° Cet amalgame de mercure & de plomb fe combine avec
l'or, l'argent, le cuivre rofetre , ie laiton, le régule d'a^itimoine ,
le zinc & le bifmuth ; il les aigrit tous , excepté l'étain avec lequel
il produit un affez beau métal mixte , blanc & dudile. A^oie couunu-
jiiquée par M. de Crignon , en Odobre J7S2.
D E s M I N É R A U X, 251
les bocaux ou vafes de verre, dans lefqueis on con-
ferve les animaux dans i'efprit-de-vin.
L'amalgame avec l'étain, efl d'un très-grand <Sc très-
agréable uiage pour l'ctamage des glaces; a-infi des (ix
métaux il y en a quatre, l'or, l'argent, le plomb (Se
Tctain, avec lefqueis le mercure s'amalgame naturelle-
ment, foit à cbaud, foit à froid; il ne fe joint au
cuivre que par intermède, enfin il reliife abfolument
de s'unir au fer; &. nous allons trouver les mêmes
diliérences dans les demi - métaux.
Le bifmutb & le mercure s'uniiTent à froid en les
triturant enfcmbie ; ils s'amalgament encore mieux lorfque
le bifinuth efl en fufion, & ils forment des crillaux noirs
affez réguliers, & qui ont peu d'adhérence entr'eiix;
mais cette criftallifation du bifmuth n'efl pas un effet qui
lui foit propre & particulier; car l'on efl également
parvenu à obtenir par le mercure, une criflallifatipn de
tous les métaux avec le/quels il peut s'unir Co).
Lorfqu'on mêle le mercure avec le zinc en Rifion,
il fe fait un bruit de grcjîllemeut , femblable à celui de
l'huile bouillante dans laquelle on trempe un corps froid;
cet amalgame prend d'abord une forte de folidité , <Sc
redevient iluide par la fimple trituration ; le même effet
arrive lorfqu'on verfe du mercure dans de l'huile bouil-
lante, il y prend même une folidiié plus durable que
(oj Voyez là-defius les expériezices de M. Sage.
252 HISTOIRE N ATU RELLE
dans le ziac fondu. Néanmoins cette union du zinc &
du mercure paroît être un véritable amalgame ; car l'un
de nos plus favans Cliimiftes, M. Sage, a reconnu qu'il
fe criflallife comme les autres amalgames, & d'ailleurs,
■Je mercure femble diiïbudre à froid quelque portion
du zinc: cependant celte union du zinc & du mercure
paroît être incomplète; car il faut agiter le bain qui
e/1 toujours gluant & pâteux.
On ne peut pas dire non plus qu'il fe faffc un amal-
game dired & fans intermède, entre le mercure & le
régule d'arfenic lors même qu'il efl en fiifion; enfin le
mercure ne peut s'amalgamer d'aucune manière avec
l'antimoine & le cobalt : ainfi de tous les demi-
métaux, le bifmutb ell le feul avec lequel le mercure
s'amalgame naturellement ; & qui fait fi cette réfiflance
à s'unir avec ces fubflances métalliques , & la facilité
de s'amalgamer avec d'autres , & particulièrement avec
l'or & l'argent, ne provient pas de quelques qualités
communes dans leur tilTu, qui leur permet de s'hume6ter
de cette eau métallique , laquelle a tant de rapport avec
eux par fa denfité \
Quoi qu'il en foit, on voit par ces différentes com-
binaifons du mercure avec les matières métalliques , qu'il
n'a réellement d'affinité bien fenfible qu'avec l'or &l
l'argent, & que ce n'ell pour ainfi dire que par force,
& par des affinités préparées par le feu, qu'il fe joint
aux autres métaux, & que même il s'unit plus facilement
DES Minéraux. 253
& plus intimement avec les fubflances animales & végé-
tales , qu'avec toutes les matières minérales , à l'exception
(le l'or ck. de l'argent.
Au refte, ce n'eft point un amalgame, mais un onguent
que forme le mercure mêlé par la trituration avec les
huiles végétales & les graifTes animales ; elles agiffent
fur le mercure comme le loie de foufre , elles le
divifent en particules prefque infiniment petites , & par
cette divifion extrême , cette matière il denfe pénètre
tous les pores des corps organifés , fùr-tout ceux où elle
fe trouve aidée de la chaleur , connue dans le corps
des animaux fur lequel elle produit des effets /àlutaires
ou funellcs , félon qu'elle eft adminiftrée. Cette union
des grai/fes avec le mercure, paroît même être plus
intime que celle de l'amalgame qui fè fait à froid avec
l'or &. l'argent (^p) j parce que deux fluides qui ont
enfèmble quelqu'affinité , fè mêleront toujours plus
aifément qu'un folide avec un fluide , quand même il
y auroit entr'eux une plus forte attraélion ; ainfi les
graiiïes agiffent peut - être plus puiffamment que ces
métaux fur la fubflance du mercure , parce qu'en fè
(p ) Il ne faut pas regarder le mercure comme fimpleraent didribué
& entre- mêlé avec les parties de la graifle dans l'onguent mercuriel ;
îl eft très-certain au contraire qu'il y a adhérence &. combinaifon ,
même très -intime, au moins d'une portion du mercure avec ia
graifTe, ... car lorfcju'il eft fait depuis du temps, on ne peut plus,
en le fondant , retirer tout le mercure qu'on y avoit mis. Didionnairc
de Chimie , par M. Mac que r , artick Mercure.
2)4 Histoire N aturelle
rancifTant elles raififTent l'acide aérien, qui doit agir fur
le mercure; & la preuve en eft qu'on peut le retirer
fans aucune perte de tous les amalgames, au lieu qu'en
fondant la graiffe on ne le retire pas en entier, fur-tout
fi l'onguent a cié gardé afTez long-temps pour que la
graiiTe ait exercé toute fon aélion fur le mercure ((j) ,
Confidcrant maintenant les effets des difTolvans fur
Je mercure, nous verrons que les acides ne le dilTolvent
(q) Quoique le mercure foit fufceptible de fe diviier lorfqu'on
le triture avec une huile grafl'e , il ne paroît pas qu'il y ait rcelie-
ment djlîolution.. .. Le mercure fe combine plus facilement avec
îes grailTes animales qui \\z font néanmoins qu'une efpcce d'huile
où l'acide eft plus abondant, & qui inanifeftent d'ailleurs les mêmes
affinités que les autres fubflances huifeufes. On ne doit j)as ne'an-
moins attribuer l'adion de ces graifles fur le mercure, à l'acide
nholphorique qu'elles contiennent.
C'eft en combinant la graiiïe avec le mercure , que l'on forme
b pommade mercurielle,. . . Dans cet onguent, les parties de mercure
ne paroifient pas fnnpiement diflribuées ou enire-mêlces avec les
parties de la graiffe ; on efl: fondé à penfer au contraire qu'il y a
adhérence & union, même trcs-intime, car cette graille de l'onguent
luercuriel fe rancit très-promptement , comme il arrive à toutes les
matières huileufes qui entrent dans quelque combinaifon, . ..
Lorfque l'onguent mercuriel eft vieux , fi on le frotte entre
deux papiers gris , la graifle s'imbibe dans le papier f & l'on ne voit
point de globules de mercure; il n'en eft pas dfe même lorfque cet
onguent ell récent, on y découvre trcs-aifément une grande quantité
de parties métalliques. Toutes ces obfervations prouvent qu'il y a
liue vraie combinaifon, une union intime dans ce mélange, lorfqu'il
eft vieux. Elémens de Chimie, par M. de Alorveau , tome III t
pa^es ^ S <f çT Juivanies,
DES Minéraux, 255
pas également comme ils clifToIvent les métaux, puiique
ie plus puiiîant de tous, l'acide vitriolique, ne l'attaque
qu'au moyen d'une forte chaleur (r) ; il en ed à peu-
près de même de l'acide marin ; pour qu'il s'imiffe
intimement avec le mercure, il faut que l'un & l'autre
foient réduits en vapeurs , & de leur ccmbinaifon réiùlte
un fèl d'tme qualité très-funefte, qu'on ^ nommé fo/>/imé
corrofîf; dans cet état forcé, le mercure ne lailîe pas de
conferver une ii grande attraction avec lui -même, qu'il
peut fe furcharger des trois quarts de fon poids de
mcrcme nouveau (f); &. c'eft en chargeant ainfi le
(r) L'acide vitriolique dans fon état ordinaire , n'agit point ou
n'agit que trcs-foiblement & trcs-iual iur le mercure en niaile. Ces
deux fubitances ne peuvent le combiner enlcinbJe à moins que
i'acide ne loit dans le plus grand degrc de concentration, & fécondé
par la chaleur la plus forte Lorlque cet acide ell bien concentre,
il réduit le mercure en une nulle faline de couleur blanche, appelée
y'itr'iol de mercure.
Si on expofe à l'adion du feu la combinaifon de l'acide vitriolique
avec ie mercure , la plus grande partie de cet acide s'en détache;
mais une chofe fort remarquable , c'efl que le mercure traité ainil
par l'acide vitriolique loutient une plus grande chaleur & paroît
par conféquent un peu plus fixe que c^uand il ell pur. Cette fixité
ert; une fuite de fon état de chaux. Didionnaire de Chimie , par'
AI. Alacqucr , article Mercure.
ff) L'acide marin en liqueur n'agit point fenfiblement fur fe-^
mercure en maffe , même iorlcju'il el\ aidé de la chaleur de i'ébul—
iition ; mais lorfque cet acide très-concentré, elt réduit en vapeurs 7-
&. qu'il rencontre le mercure réduit audi en vapeurs , alors ils
s'unifient d'une manière très-intime. Il en rélulte un fel marin mer-
curiel crirtallifé en aiguilles aplaties , & q^ii'on a nommé fublimi
2)6 Histoire Naturelle
fublimé corrofif de nouveau mercure, qu'on en diminue
la qualité corrofive, & qu'on en fait une préparation
faiutaire, qu'on appelle mercure doux, qui contient en effet
fi peu de Tel marin qu'il n'efl pas diffolubie dans l'eau;
on peut donc dire que le mercure oppo/è une grande
réiiftance à l'aétion de l'acide vitriolique & de Tacide
marin ; mais l'acide nitreux le diiïbut avec autant de
promptitude que d'énergie: lorfque cet acide cii pur, il
a la puiflance de le diifoudre fans le fecours de la chaleur;
cette diflblution. produit un {ç\ blanc qui peut fe criftal-
iifer, & qui efl corrofif comme celui de la diffolution
d'argent par cet acide (tj. Dans cette diffolution, le
t^— .— — -■■.,-- — . — ,— I. mM"- ' ■ — -,.- -■■■,i,^_.. - I ■ ., ... ,— __,,. ,1,,,^
corrofif , parce que l'on ne l'obtient que par Ja fubliination. . . .
L'affinité de l'acide marin avec le mercure eft fi grande , qu'il fe
furcharge , en quelque forte , d'une quantité confidérable de cette
matière métallique. ... Le fublimé corrofif peut abforber & fe
charger peu à peu , par la trituration , des trois quarts de {on poids ,
de nouveau mercure. Diélionnaire de Chimie, par AI. Alacquer ,
article Mercure.
( t ) L'acide" nitreux diOout très-bien le mercure ; dix onces de
bon acide fuffifent pour achever (a dilTolution de huit onces de
ce métal ; il l'attaque même à froid , 6c produit effervefcence &
chaleur La" diffolution fe colore d'abord en bleu , par l'union
du principe inflammable ; il s'y forme par le refroidiffemeni , un
fel neutre , non delicjuefcent , difpofé en aiguilles ; c'efl; le nitre
mercuriel. ... M. Bauiné remarque que la diffolution de nitre
mercuriel , refroidie fur le bain de fable , donnoit àes aiguilles
perpendiculaires , & que refroidie loin du feu , elfe donnoit des
aiguilles horizontales. Elémens de Chimie , par M. de Morceau ,
tome II f pages ty^ ir fuiy.
mercure
DES Minéraux, 257
mercure eft en partie calciné ; car après la formation
des criflaux, il fe précipite en poudre d'un jaime-citrin
qu'on peut regarder comme une chaux de mercure. Au
refte, l'acide nitreuxqui diffout fi puiffamment le mercure
coulant, n'attaque point le cinabre , parce que le mercure
y efl défendu par le fbufre qui l'enveloppe, & fur lequel
cet acide n'a point d'aélion. Cette ditiérence entre le
mercure & le foufre, femble indiquer qu'autant le fbufre
contient de feu fixe^ autant le mercure en eft privé,
&. cela confirme l'idée que l'efTencc du mercure tient
plus à l'élément de l'eau qu'à celui du feu.
Des acides végétaux, celui du tartre efl le fèul qui
agiffe fenfiblement fur le mercure; le vinaigre ne l'attaque
pas dans fon état coulant, & ne s'unit qu'avec fa chaux;
mais en triturant long-temps la crème de tartre avec le
mercure coulant, on vient à bout de les unir en y
ajoutant néanmoins un peu d'eau; on pourroit donc
dire qu'aucim acide végétal n'agit direélement , & fans
intermède fur le mercure. Il en efl de même des acides
qu'on peut tirer des animaux , ils ne diffolvent ni n'at-
taquent le mercure , à moins qu'ils ne foient mêlés
d'huile ou de graiffe , en forte qu'à tout confidérer, il
n'y a que l'acide aérien qui agit à la longue par l'in-
termède des graiffes fur le mercure, &: l'acide nitrcux
qui le diffolve d'une manière direde & fans intermède:
car les alkalis fixes ou volatils n'ont aucime aélion fur
le mercure coulant, <5c ne peuvent fe combiner avec
ATmérmix j Tome III. K.k
258 Histoire Naturelle
lui que quand ils le failifTent en vapeurs ou en ciiffoîu-
lions; ils le précipitent alors fous la forme d'une poudre
ou chaux; mais que Von peut toujours revivifier fans
addition de matière charhonneufe ou iniiammabie ; on
produit cet effet par les feuls rayons du iokil, au foyer
d'un verre ardent.
Une preuve particulière de l'impuiffance des acides
végétaux ou animaux pour dilToudre le mercure, c'ell
que l'acide des fourmis, au lieu de dilfoudrc /à cliaux
Ja revivifie, il ne faut pour cela que les tenir enlcmble
en digeflion fii) >
Le mercure n'étant par lui-même ni acide ni alkalin,
ni falin , ne me paroît pas devoir être mis au nombre
des dilfolvans, quoiqu'il s'attache à la furface 6c pénètre
les pores de l'or, de l'argent & de l'étain ; ces trois
métaux font les feules matières auxquelles il s'unit dans
fon état coulant, & c'efl moins une diffolution qu'une
humeétation; ce n'eO: que par addition aux furfaccs, &.
par juxtapofuion, & non par pénétration intime & dé-
compolition de la fubflance de ces métaux qu'il fe
combine avec eux.
Non-feulement tous les alkalis ainfi que les terres
abforbantes , précipitent le mercure de fes diiïblutions &
ie font tomber en poudre noire ou grife, qui prend
avec le temps une couleur rouge , mais certaines (ubf-
r
(u) EIcmens de Chimie, par M. de Morveau, torm II , j:oge j y
DES Minéraux. 259
tances mctailiques le prccipitent cgalemcnt; le cuivre,
i'ctaiii <Si. l'antimoine ne dccompofent pas ces difToIutions ;
& ces précipités, tous reviviiiés, offrent également du
mercure coulant.
On détruit en quelque forte la fluidité du mercure
en l'amalgamant avec les métaux ou en l'uniflant avec
les graiiïes, on peut même lui donner une demi-folidité
en le jetant dans l'huile bouillante, il y prend aflez de
conlîftancc pour qu'on puifTe le manier, l'étendre, &
en faire des anneaux & d'autres petits ouvrages ; le
mercure rcfle dans cet état de folidité, ôl ne reprend
fi fluidité qu'à l'aide d'une chaleur aflfez forte.
Il y a donc deux circonflances bien éloignées Tune
de l'autre, dans Icfquellcs néanmoins le mercure prend
également de la folidité, & ne reprend de la fluidité
que par l'acceflion de la chaleur ; la première efl: celle
du très - grand froid qui ne lui donne qu'une folidité
prcfque momentanée , ôl que le moindre degré de
diminution de ce froid, c'efl- à- dire, la plus petite
augmentation de chaleur liquéfie; la féconde au contraire
n'efl; produite que par une très - grande chaleur , puif-
qu'il prend cette folidité dans l'huile bouillante ou dans
le zinc en fufion, & qu'il ne peut enfuite fe liquéfier que
par une chaleur encore plus grande; quelle conféquence
dire6le peut -on tirer de la comparaifon de ces deux
mêmes effets dans des%lrconftances fi oppofées, finon
que le mercure participant de la nature de l'eau (Sl de
Kk ij
26o HisToïkE Naturelle
celle (lu métal, il fe gèle, comme l'eau par le froid, d'une
part; & de l'autre, fe confoJide, comme fait un métal
en fufion par la température aduelle, en ne reprenant
fa fluidité, comme tout autre métal, que par une forte
chaleur î néanmoins cette conféquence n'efl peut - être
pas la vraie, & il fe peut que cette fblidité qu'acquiert
le mercure dans l'huile bouillante & dans le zinc fondu,
provienne du changement brufque d'état que la forte
chaleur occafionnc dans fès parties intégrantes , & peut-
être auffi de la comhinaifon réelle des parties de l'huile
ou du zinc qui en font un amalgame folide.
Quoi qu'il en foit, on ne connoît aucun autre moyen
de fixer le mercure; les Alchimifles ont fait de vains
& immenfes travaux pour atteindre ce but; l'homme
ne peut tranfmuer \çs fubflances, ni d'un liquide de
nature en faire un folide par l'art ; il n'appartient qu'à
la Nature de changer les eifences fxj, & de convenir
les élémens , & encore faut - il qu'elle foit aidée de
i'éternité du temps, qui, réunie à fes hautes puiffances,
(x) Nota. Je ne puis donner une entière confiance en ce qui
cfl: rapporté dans les Récréations cliimiques , par M. Parmentier ,
tome I , poges ^^ p & fu'iv. c'eft néanmoins ce que nous avons
de plus authentique fur la tranfuiutation des métaux; on y donne
lin procédé pour convertir le mercure en or , réfifiant à toute
épreuve , & ce , par le moyen de l'acide du t^irtre ; ce procédé ,
qui efl de Confîantin , a été répéta par Mayer <5c vérifié par
Al. Parmentier,, qui a foin d'avancer qu'il n'efl pas fait pour enrichir.
DES Ai I N il n AU X, 261
amené toutes les combinaifbns pofTibles , & toutes les
formes dont la matière peut devenir ftifceptible.
H en efl à pcu-])rès de même des grandes recherches
<Sl des longs travaux que l'on a faits pour tirer le mercure
des métaux ; nous avons vu qu'il ne peut pas exifler
dans les mines primordiales formées par le feu primitif;
dès-lors il feroit abfurde de s'obftiner à le rechercher dans
l'or, l'argent & le cuivre primitifs , puifqu'ils ont été pro-
duits &L fondus par ce feu; il fembleroit plus raifonnable
d'effayer de le trouver dans les matières dont la for-
mation efl contemporaine ou peu antérieure à la ficnne;
mais l'idée de ce projet s'évanouit encore lorfqu'on
voit que le mercure ne fe trouve dans aucune mine
métallique , même de féconde formation , & que le feul
fer décompofé & réduit en rouille, l'accompagne quel-
quefois dans fa mine , oii étant toujours uni au foufre &.
à l'alkali , ce n'eft, & ne peut même être que dans les
terres graffes &. chargées des principes du foufre par
ia décompofition des pyrites , qu'on pourra fe permettre
de le chercher avec quelque efpérance de fuccès.
Cependant plufieurs Artilles , qui même ne font
pas Alchimiftes , prétendent avoir tiré du mercure de
quelques fubftances métalliques, car nous ne parlerons
pas Au. préiendu mercure At% prétendus Phïlofophes , qu'ils
difent être plus pefant, moins volatil, plus pénétrant,
plus adhérent aux métaux que le mercure ordinaire ,
& qui leur fert de bafe commune fluide ou foljdc ;
i()2 Histoire N aturelle
ce mercure philofophique n'eft qu'un être d'opinion,
un être dont l'cxiflence n'eft fondée que fur l'idée
affez fpécicufe , que le fonds Ac tous les métaux eft
une matière commune , une terre que Bêcher a nommée
terre vicrciirielle , &. que les autres Alchimiftes ont
regardée comme la bafc des métaux. Or il me paroît
qu'en retranchant l'excès de ces idées , &. les exami-
nant fans préjugés , elles font aiiiïi fondées que celles
de quelques autres aduellement adoptées dans la Chimie;
ces êtres d'opinion dont on fait des principes , portent
également flir l'obfcrvation de plufieurs qualités com-
munes qu'on voudroit expliquer par un même agent
doué d'une propriété générale ; or comme les métaux
ont évidemment plufieurs qualités communes , il n'ell
pas déraifonnable de chercher quelle peut être la fub-
fiance aélive ou pafîive , qui , fe trouvant également
dans tous les mciaux , fèrt de bafe générale à leurs
propriétés communes ; on peut même donner un nom
à cet être idéal pour pouvoir en parler & s'étendre
fiir fes propriétés fuppofées ; c'e(l-là tout ce qu'on
doit fe permettre , le refte ell un excès , une fource
d'erreurs , dont la plus grande ell de regarder ces êtres
d'opinion comme réellement exiftans, & de les donner
pour des fubilances matérielles , tandis qu'ils ne repré-
ièntent que par abftraélion des qualités communes de
ces fubflances.
Nous avons préfenté dans le premier volume de nos
DES Minéraux. 263
Supplémcns , la grande divifion des matières qui com-
pofeiit le globe de la texre; la première clafFe contient
la matière vitreufè fondue par le feu ; la féconde , ks
matières calcaires formées par les eaux ; la troifième ,
la terre végétale provenant du détriment des végétaux
&. des animaux ; or il ne paroit pas que les métaux
fbient cxprefTément compris dans ces trois dalles ; car
ils n'ont pas été réduits en verre parle feu primitif; ils
tirent encore moins leur origine des fubflances calcaires
ou de la terre végétale. On doit donc les confidérer
comme faifànt une clafle à part , & certainement ils
font compofés d'ime matière plus denfe que celle de
toutes les autres fubflances : or quelle ell cette matière
il denfe î efl-ce une terre folide , comme leur dureté
l'indique î eft-cc un liquide pefànt, comme leur aflinité
avec le mercure femble auffi l'indiquer l efl-ce un
compofé de folide & de liquide tel que la prétendue
terre mcrcurielle l ou plutôt n'efl-ce pas une matière
fcmblable aux autres matières vitreufes , &. qui nen
diffère effentiellement que par fa denfité & fa volatilité l
car on peut auffi la réduire en verre. D'ailleurs les
métaux, dans leur état de nature primitive, font mêlés
ëi. incorporés dans les matières vitreuiès ; ils ont fculs
la propriété de donner au verre des couleurs fixes que
le feu même ne peut changer ; il me paroît donc que
les parties les plus denfcs de la matière tcrreflre étant
douées, relativement à leur volume, d'ime plus forte
264 Histoire Naturelle
attraction réciproque , elles le font , par ceue raifon ,
fëparces des autres, & réunies entr'eiies fous un plus
petit volume ; la fubilance des métaux prife en général
ne préfente donc qu'un fèul but à nos recherches , qui
feroit de trouver , s'il efî polîjble, les moyens d'augmen-
ter la denfîté de la matière vitreufè, au point d'en faire un
métal, ou feulement d'augmenter celle des métaux qu'on
appelle imparfaits , autant qu'il fèroit néceflaire pour leur
donner la penfànteur de l'or ; ce but eft peut-être placé
au-delà des limites de la puiffance de notre art, mais au
moins il n'ell pas abfolument chimérique , puifque nous
avons déjà reconnu une augmentation confidérable de pe-
fanteur fpécifique dans plulieurs alliages métalliques.
Le Chimifte Juncker a prétendu tranfmuer le cuivre
en argent (yj , & il a recueilli les procédés par lefquels
(y) Voici Ton procédé ; 011 fait couler en mafîe au feu de fable ,
quatre parties de feuilles de cuivre, quatre parties de fublimé corroGf,
ÔL deux parties de fel ammoniac ; on pulvcrife ce compofé , & on
le lave dans le vinaigre jufqu'à ce que le nouveau vinaigre ne
verdille plus ; on fond alors ce qui relie avec une partie d'argent ,
& on coupelle avec le plomb ; fuivant Juncker, le cuivre fe trouve
converti en argent. M. Weber , Chimifte Allemand, vient de répéter
jufqu'à deux fois ce procédé , fur i'affurance que deux perfonnes
lui avoient donnée cju'il leur avoit rculTi ; il avoue qu'il n'a retrouvé
que l'argent ajouré à la fufion , & il remarque , avec toute raifon ,
que c'efl: opérer affez heureufement & avec toute exaditude , lorf-
qu'une portion du métal fin ne paffe pas par la cheminée avec
l'efpérance de la tranfmutation. Alagafin phyjico- chimique de M. Wder,
îorne I , page 121.
on
D E s M l N É p. AV X, 265
on a voulu tirer du mercure des métaux; je fuis perfuadé
qu'il n'en exifle dans aucun métal de première forma-
tion, non plus que dans aucune mine primordiale,
pui/que ces métaux & le mercure n'ont pu être produits
enfemble. M. Groffe, de l'Académie des Sciences, s'eft
trompé fur le plomb dont il a dit avoir tiré du mercure;
car Ton procédé a été plufieurs fois répété, & toujours
fans fuccès, par les plus habiles Chimifles; mais quoique
le mercure n'exifte pas dans les métaux produits par le
feu primitif, non plus que dans leurs mines primordiales ,
il peut fe trouver dans les mines métalliques de dernière
formation , foit qu'elles aient été produites par le dépôt
&. la flillation des eaux, ou par le moyen du feu & par
la fliblimation dans les terreins volcanifés.
Plufieurs Auteurs célèbres, & entr'autres Bêcher &
Lancelot, ont écrit qu'ils avoient tiré du mercure de
l'antimoine ; quelques - uns même ont avancé que ce
demi -métal n'étoit que du mercure fixé par une vapeur
arfenicale. M. de Souhey, ci-devant Médecin-confultant
du Roi, a bien voulu me communiquer un procédé,
par lequel il afTure aufTi avoir tiré du mercure de
l'antimoine (i). D'autres Chimifles difent avoir augmenté
^-^^^^-^^-^-^^-^-^ ' ■ - — ' .■■■Il ■ ■ I » ■ M^^»^^^
(■^) « Le mercure, dit M. de Souhey, eft un mixte aqueux & terreux,
dans lequel il entre une portion du principe inflammable ou lui- «
fureux , & qui efl chargé jufqu'à l'excès de la troifième terre de ce
Bêcher ; voilà , dit-il , la meilleure définition qu'on puifTe donner «
du mercure. II m'a paru Ç\ avide du principe conftituant les métaux «
Minéraux , Tome III. Ll
266 Histoire Naturelle
la quantité du mercure en traitant le fîiblimé corrofif
5> & les demi- métaux , que je fuis parvenu à précipiter ceux-ci avec
y> le mercure ordinaire Tous une forme de chaux rcdudible , fans
x> addition , avec fe fecours de l'eau & avec celui du feu ; j'ai ainfî
35 calcine' tous les me'taux, même les plus parfaits , d'une manière aufli
3ï irrédudible avec du mercure tiré des demi-métaux.
33 L'affinité du mercure eft fî grande avec les métaux & les demi-
33 métaux , qu'on pourroit , pour ainlî dire , afTurer que le mercure
33 eft au règne minéral ce que l'eau eft aux deux autres règnes.
33 Pour prouver cette afiertion , j'ai fait des eflais fur les demi-
33 métaux , & j'expoiè feulement ici le procédé fait fur le régule
73 d'antimoine; en fondant une partie de ce rcgufe avec deux paities
33 d'argent ( qui fert ici d'intermède, & qu'on fépare, l'opération finie, )
33 on réduira cette matière en poudre qu'on amalgamera avec cinq
33 ou fix parties de mercure ; on triturera le mélange avec de l'eau
33 de fontaine , pendant douze à quinze heures , julqu'à ce qu'elle
33 en forte blanche; l'amalgame lera long-temps brun, & par les
33 lotions réitérées, l'eau entraînera peu-à-peu avec elle le régule
35 fous une forme de chaux noire entièrement fufible ; celte chaux
33 recueillie avec foin, léchée & mile au feu dans une cornue, on
33 en (épare le mercure qui s'y étoit mêlé; en. décantant l'eau qui
3J a fervi à nettoyer l'amalgame , on ne trouvera que les deux tiers
33 du poids du régule qui avoit été fondu & enfuite amalgamé avec
33 le mercure ; on fépare auflx par la fublimation celui qui étoit refté
33 avec l'argent ; alors , fi l'opération a été bien faite , l'argent fera
33 dégagé de tout alliage , & très-blanc ; le mercure aura augmente
33 fenfiblement de poids , en tenant compte de celui qui étoit mêlé
33 avec la chaux du régule qu'on fuppofe avoir été fépare par la
3) diftillation. On peut conclure que le mercure s'eft aj)proprié le
33 tiers du poids qui manque fur la totalité du régule , & que ce
33 tiers s'eft réduit en mercure , ne pouvant plus s'en féparer ; les
33 deux tiers reftans , quittent l'état de chaux fi on les rétablit par
33 les procédés ordinaires avec le flux noir ou autre fondant , &
DES Minéraux, 2^7
avec le cinabre d'antimoine (a) ; d'autres par des pré-
parations plus combinées , prétendent avoir converti
quelques portions d'argent en mercure ^l)) ; d'autres
' — ■
ï'expérience peut être répétée jufqu'à ce que le régule d'auti- <c
moine foit en entier réduit en mercure. <e
Si l'on fdit évaporer jufqu'à ficcité l'eau qui a fervi aux lotions, «
après l'avoir laiflé dépofer, il reliera une terre grifàtre ayant un ce
goût falin, &. rougiO'ant un peu au feu ; cette terre appartenoit au «
mercure qui l'a dcpofée dans l'eau qui la tenoit en diflolution. «
Le mercure, dans l'opération ci-deflus, fait la fondion du <c
feu , & produit les mêmes effets ; il a fait difparoître du régule ce
d'antimoine fon afped; brillant , il lui a fait perdre une partie dj ce
fon poids en le calcinant d'une manière irrédu(5lible , fans addition , <c
avec le fecours de l'eau & de la trituration , auflî complètement ce
que pourroit le faire le feu j>.
Nota. On peut remarquer dans cet expofé de M. de Souhey,
que fon idée fur l'eiïence du mercure qu'il regarde comme une
eau métallique , s'accorde avec les miennes ; mais j'obferverai qu'il
n'efl pas étonnant que les métaux traités avec le mercure fe calcinent
même par la funpie trituration ; on fait que le métal fixe retient un
peu de mercure au feu de diflilîation , on fait aufli que le mercure
emporte à la diftijladon un peu des métaux fixes ; ainfi , tant qu'on
n'aura pas purifié le mercure que l'on croit avoir augmenté par le
mercure d'antimoine , ce fait ne fera pas démontré.
(a) Voici un exemple ou deux de mercurification , tirés de
Vallerius Cf. Teichmeyer. Si l'on diftille du cinabre d'antimoine fait
par le fublimé corrofif, on retirera toujours des dillillations après
!a revivification du mercure, plus de mercure qu'il n'y en avoit
dans le fublimé corrofif. Didionna'ire de Chimie , par M. Aiacquer ,
crticle Mercure.
( b) Si l'on pre'psre un fublimé corrofif avec l'efprit de fel <S{
Ll i;
268 Histoire Natvrelle
ennn aflurent en avoir tire de la limaille clc fer, ainfi
que de la chaux, du cuivre, <Sc même de l'argent &
du plomb à l'aide de l'acide marin fcj.
C'efl par l'acide marin, & même par les fèls qui
en contiennent, que le mercure eft précipité plus abon-
damment de Tes difTolutions, 6c ces précipités ne font
point en poudre sèche, mais en mucilage ou gelée
blanche , qui a quelque confiflance ; c'eil une forte de
fel mercuriel , qui néanmoins n'efl; guère foluble dans
l'eau. Les autres précipites du mercure par l'alkali à.
\e mercure coulant, A qu'on fubliiiie plufieurs fois de la chaux ou de
}a limai-lie d'argent avec ce lublinic , une partie de l'argent fe changera
en mercure. Dtâionnaire de Chimie , par AI. Alacquer, article Mercure.
(c) La limaille de fer bien fine expofée pendant ww an à l'air
libre, enluite bien triture'e dans un mortier.... remife après ce(a
encore pendant un an à l'air, & enfin foumiie à une dillillation dans
une cornue , fournit une matière dure qui s'attache au col du
vaifTeau , & avec cette matière un peu de mercure.
Si l'on prend de la cendre ou chaux de cuivre , qu'on la niefe
avec du Tel ammoniac , qu'on expofe ce mélange pendant un certain
temps à l'air, & qu'on le mette en dillillaiion avec du favon, on
obtiendra du mercure.
On pre'tend aufTi tirer du mercure du plomb & de l'argent corn(?,
en le mêlant avec parties égales d'efprit de fel bien concentre , en les
laiffant en digeftion pendant trois ou quatre femaines , & /àiurant
cnfufte ce mélange avec de l'alkali volatil , & le remettant en digef-
tion pendant trois ou quatre femaines ; au bout de ce temps il
faut y joindre égale quantité de flux noir & de favon de Venife,
&. mettre le tout en diflillanon dans une cornue de verre , il paflera
du mercure dajis le récipient. Jàm , ibidem.
DESJ\IINÉRAUX, 269
par les terres abforbantcs, font en poudre de couleurs
différentes; tous ces précipités détonnent avec le foufre:
& M. Bayen a reconnu qu'ils retiennent tous quelques
portions de l'acide diflblvant, & des fubfîances qui ont
fèrvi à la précipitation.
On connoît en Médecine les grands effets du mer-
cure mêlé avec les graiffes dans lefquelles néanmoins
on le croiroit éteint; il fuffit de fe frotter la peau de
cette pommade mercurielle, pour que ce fiuide (1 pefant
foit faifi par intuiïurception & entraîné dans toutes les
p arties intérieures du corps qu'il pénètre intimement , &
fur lefquelles il exerce une adlion violente, qui fe porte
particulièrement aux glandes, & fe manifcflc par la faii-
vation ; le mercure dans cet état de pommade ou
d'union avec la grailfe, a donc une très-grande affinité
avec les fubflances vivantes , & fon action paroit ceffer
avec la vie ; elle dépend d'ime part de la chaleur &
du mouvement des fluides du corps, & d'autre part de
l'extrême divifion de fès parties, qui, quoique très-pe-
fantes en elles-mêmes, peuvent, dans cet état de petiteffe
extrême, nager avec le fàng, & même y furnager, comme
il furnagc les acides dans fà diffolution en formant une
pellicule au - deffus de la liqueur diffolvante. Je ne
vois donc pas qu'il foit néceffaire de fuppofer au mer-
cure un état falin pour rendre raifon de fes effets dans les
corps animés , pui/quc fôn extrême divifion Çu^cit pour
les produire , fans addition d'aucune autre matière
270 Histoire Naturelle
étrangère, que celle de la graifle qui en a divifé les
parties , & leur a communiqué Ton affinité avec les
fubflances animales; car le mercure en mafle coulante,
& même en cinabre, appliqué fur le corps ou pris
intérieurement , ne produit aucun effet fenfible , & ne
devient nuifible que quand il efl réduit en vapeurs par
ie feu , ou divifé en particules infiniment petites par les
fubfiances qui , comme \ts graiffes , peuvent rompre les
liens de l'attradtion réciproque de fes parties.
D E s Af I N É R AU X. 27 1
D
DE L'ANTIMOINE.
E même que le mercure eft plutôt une eau métaU
iique qu'un métal, l'antimoine & les autres fubftances
auxquelles on a donné le nom de demi-métaux ne fonc
dans la réalité que des terres métalliques & non pas
des métaux. L'antimoine , dans fa mine , efl uni aux
principes du foufre & les contient en grande quantité,
comme le mercure dans fa mine efl de même abondam-
ment mêlé avec le foufre &. l'alkali; il a donc pu fe
former , comme le cinabre , par l'intermède du foie de
foufre dans les terres calcaires & limoneufes qui con-
tiennent de l'alkali , & en général il me paroît que le
foie de foufre a fou vent aidé plus qu'aucun autre agent,
à la minéralifation de tous les métaux ; de plus , l'anti-
moine & le cinabre, quoique fi difîcrens en apparence,
ont néanmoins plufieurs rapports enfemble & une grande
tendance à s'unir. L'efprit de {t\ 2l autant d'affinité avec le
mercure qu'avec le régule d'antimoine. D'ailleurs, quoique
le cinabre diffère beaucoup de l'antimoine crud par la
denfité (a) ; ils fè relfemblent par la quantité de foufre
qu'ils contiennent ; & celte quantité de foufre efl même
(a) La pelameur Ipécitîque de l'antimoine crud eft de 40643 ,
^ celle du régule d'antimoine eft de 67021 ; & de même la
pelanteur fpccilique du cinabre elt 102185, & celle du mercure
coulant eft de 135681.
272 Histoire N atu relle
pius grande dans {'antimoine, relativement à fbn régule,
que dans ie cinabre , relativement au mercure coulant.
L'antimoine crud contient ordinairement plus d'un tiers
de parties fulfureufes fur moins de deux tiers de parties
qu'on appelle tnétalliques ^ quoiqu'elles ne fe réduifent
point en métal, mais en un fnnpie régule auquel on ne
peut donner ni la duélilité ni la fixité qui font deux
propriétés efTentielles aux métaux ; la plupart des mines
d'antimoine, ainfi que celles de cinabre, fe trouvent donc
également dans les montagnes à couches , mais quelques-
unes giffent aufli comme les galènes de plomb dans les
fentes du quartz en état pyriteux , ce qui leur efl commun
avec plufieurs minerais formés fecondairement par l'adion
des principes minéral ifateurs ; auffi les gangues qui accom-
pagnent le minerai de l'antimoine font-elles de diverfè
nature , félon la pofition de la mine dans des couches de
matières différentes; ce font ou des pierres vitreufes &
{c\\\iit\x{ks(b) ou des terres argileufes, calcaires, &c. & il
eft toujours aifé d'en féparer la mine d'antimoine par une
première fîifion , parce qu'il ne lui faut pas un grand feu
pour la fondre, & qu'en la mettant dans des vaifîeaux
percés de petits trous, elle coule avec fon foufre & tombe
dans d'autres vafes, en laiffant dans les premiers toute la
pierre ou la terre dont elle étoit mêlée. Cet antimoine de
(hj Les mines d'antimoine d'Erbias , dans le Limofin , font dans
àes mafles de pierres fchifl.eures & vitreliibles. Noie communiquer par
M, de Gùgnon , en Odobrc ij8z.
première
DES Minéraux. 273
première fiifion , & qui contient encore Ton foufre ,
s'appelle annmoine criui ^ 6l il efl déjà bien différent de
ce qu'il étoit dans fa mine où il ib préfente fans aucune
forme régulière ni flruélure diftinde, & fouvent en maffes
informes , qu'on reconnoît néanmoins pour des matières
minérales à leur tiffu ferré, à leur grain fin comme
celui de l'acier, &. au poli qu'on peut leur donner ou
qu'elles ont naturellement ; mais qui s'éloignent en même
temps de i'effence métallique, en ce qu'elles font caf-
fantes comme le verre , & même beaucoup plus friables.
Le minerai d'antimoine ie préfènte auffi en petites
maffes compofées de lames minces comme celles de
la galène de plomb , mais prefque toujours difpofées
d'une manière affez confufè. Toutes ces mines d'anti-
moine fe fondent fàiis fe décompofcr, c'eft-à-dire, fans
fe féparer des principes minérali/àteiirs avec icfquels ce
minéral efl uni, & dans cet état qii'on obtient aifément
par la liquation , l'antimoine a déjà pris ime forme plus
régulière ôl des car^6lères plus décidés ; il efl alors
d'un gris -bleuâtre &. brillant, & (on tiffu efl compofe
de longues aiguilles fines très-diiHncles , quoique pofées
les unes fur les autres encore affez irrégulièrement,
Lorfqu'on a obtenu par la fonte cet antimoine crud,
ce n'efl encore, pour ainfi dire, qu'un minerai d'anti-
moine qu'il faut enfuite féparer de fon foufre; pour cela
on le réduit en poudre qu'on met dans un vaiffeau de
terre évafé ; on le chaullc par degrés en ie remuant
ATinénmx j Tome III. Mm
274 Histoire Natu relle
continuellement ; le foufre s'évapore peu-à-peu , & l'on
ne cefle le feu que quand il ne s'élève plus de vapeurs
fulfareufes. Dans cette calcination, comme dans toutes
ies autres , l'air s'attache à la furface des parties du
minéral qui , par celte addition de l'air , augmente de
volume ^& prend la forme (\\mt chaux gri/è ; pour
obtenir l'antimoine en régule , il faut débarraiïer cette
chaux de l'air qu'elle a fàifi en lui préfentant quelque
matière inflammable avec laquelle l'air ayant plus d'affi-
nité , laifTe l'antimoine dans fon premier état 6l même
plus pur 6l plus parfait qu'il ne l'étoit avant la calci-
nation ; mais fi l'on continue le feu fur la chaux d'an-
timoine , fans y mêler des fubflances inflammables , on
n'obtient , au lieu de régule , qu'ime matière compade
& cafTante, d'im jaune-rougeatre plus ou moins foncé ,
quelquefois tranfparente & quelquefois opaque & noire
fi la calcination n'a été faite qu'à demi ; les Chimifles
ont donné le nom de foie d mitïmo'mc à cette matière
opaque , & celui de verre d'antimoine à la première qui
eft tranfparente : on fait ordinairement pafl^er l'antimoine
crud par l'un de ces trois états de chaux, de foie ou de
verre pour avoir fon régule ; mais on peut auffi tirer ce
régule immédiatement de l'antimoine crud (c) ; en le
{ c) V. Ce régule fe tire également de l'antimoine crud, par une
7» forte de précipitation par la voie fèche ; on le mêle pour ceU
j> avec des matières qui ont plus d'affinité avec le foufre ; le mélange
DES AI I N É R A U .r. 2y<y
réJuifant en poudre , & le fàifaiit fondre en vaifTcaux
clos avec addition de quelques matières , qui ont plus
d'afHnité avec le foufre qu'avec l'antimoine , en forte
qu'après cette rédu6lion , ce n'cft plus de l'antimoine
crud mêlé de foufre, mais de l'antimoine épuré, per-
fectionné par les mêmes moyens que l'on perfedionne
Je ter pour le convertir en acier (^0/ ce régule d'an-
timoine reffemble à un métal par fon opacité, ià dureté,
fa denfité; mais il n'a ni dudilité, ni ténacité, ni fixité,
& n'en peut même acquérir par aucun moyen ; il eft
cafTant, prefque friable, & compofé de facettes d'un
blanc brillant , quoiqu'un peu brun. Ce régule eft un
produit de notre art, qui ne doit fe trouver dans la
^ — ----- — ■ - ■ . - ■ — . - ■■ — — - ,- .. — ■■ -■ - ■■
étant diflous par le feu , h fluidité met en jeu ces affinités , & le ce
Técfule , plus pefant que les fcories fulfureules , forme au fond «
du creufet, un beau culot cri liai 1 ifc , que les Alchimiltes ont pris ce
pour l'étoile des Mages ». E/ûnens de Chimie , par Al. de Morveau ,
tome I , page 2-;^. — Ce nom même de régule , ou petit Roi , a
été donné par eux à ce culot métallique de l'antimoine, qui fembloit,
au gré de leur efpérance,, annoncer l'arrivée du grand Roi , c'eft-
à-dire de l'or.
fdj Cette comparaifoii efl d'autant plus ]i\(\e , que quand on
convertit par la cémentation le fer en acier , il s'élève à la (urface du
fer un grand nombre de petites bourfouflures qui ne font rempîies
que de l'air fixe qu'il contenoit, & dont le fcu fixe prend la place;
car la pefanteur qui feroit diminuée par cette perte , fi rien ne la
compenibit, eft au contraire augmentée, ce qui ne peut provenir
que de l'addition du feu fixe qui s'incorpore dans la lubiUnce de
ce fer converti en acier.
Mm ij
zj(i Histoire Naturelle
Nature que par accident (e) , ôl dans le voifmage des
feux fouterrains ; c'efl un état forcé différent de celui
de rantimoine naturel , âc on peut lui rendre ce premier
état en lui rendant le foufre dont on Ta dépouillé; car il
fuffii de fondre ce régule avec du foufre pour en faire
un antimoine artificiel , que les Chimiiles ont appelé drui-
iiîo'me rcjfufcitc^ parce qu'il reffemble à l'antimoine crud,
& qu'il efl compofé dans fon intérieur , des mêmes
matières également difpofées en aiguilles.
Le régule d'antimoine difière encore des métaux par
la manière dont il réfifle aux acides ; ils le calcinent
plutôt qu'ils ne le diffolvent , & ils n'agiflent fur ce
régule que par des affinités combinées; il diffère encore
des métaux par fa grande volatilité; car fi on l'expofc au
feu libre, il fe calcine à la vérité comme les métaux, en
fe chargeant d'air fixe ; mais il perd en mcme temps une
partie de fa fubflance qui s'exhale en fumée , que l'on
peut condeiifer & recueillir en aiguilles brillantes , aux-
quelles on a donné le nom de fleurs argenihies d'aniimohie.
Néanmoins ce régule paroît participer de la nature des
métaux par la propriété qu'il a de pouvoir s'allier avec
eux; il augmente la denfité du cuivre & du plomb, &
diminue celle de l'ctain & du fer, il rend l'étain plus
>■ — . ^— —_ — _____^__^____________
(e ) On a découvert depuis peu en Auvergne du foufre doré
•naùf d'antimoine , qui eft un coinpofc de régule & de foufre , mais
moins intimement uni , ce qui n'étoit auparavant connu que comme
une préparation cliimique. Èlémens de Chimie , par M. de Morveau,
tome I , pages 122 & 12^.
DES Minéraux, 277
caflant & plus dur; il augmente aufîi la fermeté du
plomb; & c'eft de cet alliage de régule d'antimoine Si
de plomb, dont on fe fert pour faire les caraéleres d'im-
primerie ("/); mêlé avec le cuivre & Tétain, il en rend
le fbn plus agréable à Torcille 6l plus argentin; mêlé
avec le zinc, il le rend fpécifiquement plus pefânt ; &
de toutes les matières métalliques le b'iùnmh, & peut-être
ie mercure, font les feuls avec lefquels le régule d'anti-
moine ne peut s'allier ou s'amalgamer,
Confidérant maintenant ce minéral tel qu'il exifle
dans ie fein de la terre , nous obferverons qu'il fe pré-
fente dans des états difFérens , relatifs aux différens temps
de la formation de fcs mines & aux ditférentes matières
dont elles font mélangées. La première & la plus an-
cienne formation de ce minéral date du même temps
que celle du plomb ou de l'étain , c'efl-à-dire , du
temps de la calcination de ces métaux par le feu pri-
mitif & de la production des pyrites après la chute des
eaux ; auffi les mines primordiales d'antimoine font en
filons Si en minerais comme celles de plomb ; mais on
en trouve qui font mélangées de matières ferrugineufes
& qui paroiffcnt être d'une formation poflérieure. Le
minerai d'antimoine , comme les galènes du plomb , ell
eompofé de lames minces plus longues ou plus courtes ,
('fj Le régule d'aïui.'noine entre dans la compoùùon des caraâïèra
d'Imprimerie, à la dol'e d'un huitième, pour corriger la mollellè
du plomb. Jdetn , page 2^ ^,
278 Histoire Naturelle
plus étroites ou pius larges, convergentes ou divergentes,
mais toutes lifTes & brillantes d'un beau blanc d'argent;
quelquefois ces premières mines d'antimoine contiennent,
comme celles du plomb , une quantité confidérable
d'argent , &. de la décompofition de cette mine d'an-
timoine , tenant argent , ii s'efl forme des mines par
la flillation des eaux, qui ne font dès-lors que de troi-
fième formation : ces mines qu'on appelle mine^ en
-plumes , à caufe de leur légèreté , pourroient avoir été
fublimées par l'adion de quelque feu fouterrain ; elles
font compofées de petits lilets folides & élafliques ,
quoique très-déliés & affez courts , dont la couleur efl
ordinairement d'un bleu -noirâtre, & fouvent variés de
nuances vives ou plutôt de reflets de couleurs irifées,
commue cela fe voit fur toutes les fubflances demi-
tranfparentes &. très-minces ; telle eft cette belle mine
d'antimoine de Feljobuîiia ^ fi recbercliée par les ama-
teurs pour les cabinets d'Hiftoire Naturelle. 11 y a au/fi
de ces mines dont les filets font tous d'une belle couleur
rouge , & qui , félon M. Bergman , contiennent de
i'arfenic (g) ; toutes ces mines fecondaires d'antimoine,
grifès, rouges ou variées font de dernière formation, &
proviennent de la décompofition des premières.
Nous avons en France quelques bonnes mines d'an-
timoine , mais nous n'en tirons pas tout le parti qu'il
(g) Opufcules chimiques, tome II, dijfnlation 21»
oc
et
<c
«
DES M 1 N È R AV X, 279
feroit aifé d'en tirer , puifque nous faifons venir Je
l'étranger la plupart des préparations utiles de ce minéral.
Al. le Monnicr , premier Médecin ordinaire du Roi ,
a particulièrement obfervé les mines d'antimoine de la
haute Auvergne : t' Celle de Mercœur , à deux lieues
de Brioude, étoit , dit -il, en pleine exploitation en
1-739 , & l'on fentoit de loin, i 'odeur du foufre qui
s'exhale des fours dans lefquels on fait fondre la mine
d'antimoine. La mine s'annonce par des veines plombées «
qu'on aperçoit fur des hancs de rochers qui courent «
à fleur de terre — Cette mine de Mercœur fournit une
très -grande quantité d'antimoine; mais il y a encore
une autre mine beaucoup plus riche au Puy de la Page , «
qui n'eft qu'à une lieue de Mercœur ; elle efl extrême- oc
ment pure, & rend fouvent foixante-quinze pour cent; «
les aiguilles font toutes formées dans les filons de cette «
mine, & l'antimoine qu'on en tire efl auiïi beau que «
le plus bel antimoine de Hongrie Un des plus «
petits filons , mais des plus riches de la mine de Mer- «
cœur, &. qui n'a que deux pouces de large, efl uni du «
côté du nord à un rocher franc , qui efl une gangue
très-dure parfemée de veines de marcafhte ; & du côté
du midi , il efl contigu à une pierre affez tendre <5c
graveleufe .... Après cette pierre fuivent différens lits «
d'une terre fàvonneufe, légère, capable de s'effeuilleter «
a l'air, & dont la couleur efl d'un jaune-citron; cette «
terre mife fur une pèle à feu , exhale une forte odeur «
c<
<c
«
28o Histoire Naturelle
de foufre, mais elle ne s'embrafe pas ». M. le Monnier
a bien voulu nous envoyer, pour ie Cabinet du Roi,
un morceau tire de ce filon, & dans lequel on peut
voir ces (ïi^ïèr exiles matières. 11 rapporte dans ce même
Mémoire, les procèdes fort (impies, qu'on met en pra-
tique pour fondre la mine d'antimoine en grand (hj ,
& finit par obicrver qu'indépendamment de ces deux
mines de la page & de Mercœur, il y en a plufieurs
auires dans cette même province, qui pour la plupart
font négligées (i) . M.""' Hellot & Guettard font mention
de celles de Langeac , de Cha/Tignol , de Pradot, de
/h) La manière de fondre la mine d'antimoine eft fort f/mple ;
on met la mine dans des pots de terre dont le premier n'ed point
percé (Se dont les autres font troués dans le fond ; on fuperpofe
ceux-ci fur le premier, «Se oji les remplit de mine d'antimoine caflee
par petits morceaux ; ces pots font arrangés dans un four que l'on
chauffe avec des fagots; on fait un feu modéré pendant les premières
heures, & on. l'augmente jufcju'à le faire de la dernière violence;
pendant cette opération, qui dure environ vingt-quatre heures, il fort
du fourneau une fumée très-épaifle qui répand fort loin aux environs,
une odeur de foufre qui cepejidant ïieiï pas nuifibJe , car aucun
des habitans ne fe plaint d'en avoir été incommodé ; après l'opé-
ration , on trouve de l'antimoine fondu dans le pot inférieur , & les
fcories reftent au-delTus. Quand la mine efl bien pure, comme celle
de la Fage , le pot inférieur doit fe trouver plein d'antimoine ; maiî
celle de Mercœur n'en produit ordinairement que les deux tiers.
Ob fer valions d' Hijlo'ire Naturelle , par M. le Monnier; Paris , 1 7^ g ,
page 202 jufqu 'a 2 0 j .
(i) Idem , page 20^.
Monte! ,
D E s M I N É R AU X. 281
Moniel, de Brioiulc (k)^ à. de quelques autres en-
droits f/J. Il y a au/n des mines d'antimoine en Lorraine,
en Alfàcc f^^jj, en Poitou, en Bretagne, en Angou-
mois f'îij &. en Languedoc foj; enfin, M. de Genfanne
a obfcrvc dans le Vivarais, un gros lilon de mine
d'antimoine mclc dans une veine de charbon déterre fp);
f/;J Mémoires de l'Académie des Sciences, ûnnée lyjP'
(l) En Auvcrgae , dit M. Hellot , il y a une bonne mine
d'anilinoiiie à Pégu.... une autre auprès de Langeac &. de Brioude....
une autre, dont le minéral efl fulfureux, au village de Prados ,
paroifle (}i Aly une autre au village de Afonte/ ,- vnùme paroifle
d'Aly.... une autre dans la paroiile de Mercœur , qui donnoit de
l'antimoine pareil à celui de Hongrie, &: dans la paroifle de Lubillac...,
ces deux liions font épuilés ; mais on tire encore de l'antimoine dans
la pa^oidë d'Aly, à deux lieues de Mercœur. Traité de la fonte des
inities de Schlutter , tome I , page 62.
Iw) En Lorraine, au Vdl-dc- Li'cvre , il y a une mine d'anti-
moine. Idem, page p Auprès de Giromagny en Alfjce , il y en
a \\v\Q. autre qui efl mêlce de plomb. Idem, page 11.
(v) On trouve en Angoumois une mine d'antimoine tenant argent
ù A'ïûucl près Aiontbrun. Idçni , page y () .
(0) Dans le comte d'Aiais en Languedoc, il fe trouve à Alalhois
luie mine d'antimoine. Idem , page 2 () En de(cend?.nt des Portes
vers Cerjfoiix , au diocèfe d'Uzès , on exploite une mine d'anti-
moine. Il y a trois filons de ce minéral, à la vérité peu riches,
mais le minéral cil: très-bon. On en a fondu en notre préfence ,
& l'antimoine qui en eft proveau nous a paru aulll beau que celui
de Hongrie, Hijloire Naturelle du Languedçc , par M. de Genfanne ,
tome I , page i y^,
(p) En monlant .dn Foufn V'crs les Fonds , on trouve dans un
Mincraux , Tome III, Nn
282 Histoire Nature lle
ce qui prouve aufTi-bien que la plupart des exemples
préccclens, que ce minéral fe trouve prcfque toujours
dans les couches de la terre remuée &l ilè}^oiéQ par
les eaux.
L'antimoine ne paroît pas afteéter des lieux particu-
liers comme l'étain &. le mercure; il s'en trouve dans
toutes les parties du monde ; en Europe , celui de
Hongrie eft le plus fameux & le plus recherché.
On en trouve aufîi dans plufieurs endroits de l'Alle-
magne ; & l'on prétend avoir vu de l'antimoine natif en
Italie, dans le canton de Sainte-Flore proche Mana, ce
qui ne peut provenir que de l'effet de quelques feux fou-
terrains qui auroient liquélié la mine de ce demi-métal.
ravin limitrophe de la pareille Saint-Julien, un gros filoji d'anti-
moine mêlé de charbon de terre. Ces deux folliles y font intime-
ment mêle's; phénomène bien fingulier dans la minéralogie; cependant
tous les indices extérieurs annoncent du charbon de terre , & il eft
à préfumer que dans la profondeur l'antimoine difparoîtra , & que
le charbon de terre deviendra pur. Il peut même arriver que dans
la profondeur il y aura deux veines contiguës , l'une d'antimoine
& l'autre de charbon ; on ne peut former fur tout cela que des
conjedures.... Il y a des morceaux où l'antimoine prédomine, dans
d'autres , c'efl: le charbon qui efl plus abondant , & en calTant ce
dernier, on le trouve tout pénétré de petites aiguilles d'antimoine....
Cette veine d'antimoine efl un filon très-bien réglé , & qui a fon
alignement bien fuivi; il a une pente telle que celle que les charbons
de terre afFe<flent ordinairement vers leurs têtes ; il fe trouve entre
des rochers fembLbles & de la même nature que ceux qui accom-
pagnent pour l'ordinaire ce dernier fofTîle. Hijfoire Naturelle du
Languedoc, par Ai. de Genfanne , tome III, pages 202 & 20^.
DES Minéraux, 283
En Afie , les Voyageurs font mention de l'antimoine
de Perfe (q) & de celui de Siam fr) . En Afrique, il
s'en trouve, au rapport de Léon-l' Africain, au pied du
Mont- Atlas (f). Enfin AJphonfë Barba dit , qu'au Pérou
les mines d'antimoine font en grand nombre [t) , &
quelques Voyageurs en ont remarque à Saint Domingue
& en Virginie (uj.
On fait grand ufage en Médecine des préparations
de l'antimoine, quoiqu'on l'ait d'abord regardé comme
poifbn plutôt que comme remède. Ce minéral pris
dans fa mine & tel que la Nature le produit , n'a que peu
(q) En Perfe , il y a vers la Carainanie , une mine d'antimoine
fingulière , en ce qu'après l'avoir fait fondre elle donne du plomb
fin. Voyage de Chardin , ù'c. Amjlerdam , i yi i , tome II , page 2^,
(r) On a découvert à Siam une mine d'antimoine. Hijloire
générale des J^oyages , tome IX, page ^oj,
(f) L'antimoine fe trouve dans des mines de plomb fur les parties
inférieures du Mont-Atlas, aux confins du royaume de Fez. Joann'is
Leonis Àfrïcanî , tom. II , pag. yyi'
(t) L'antimoine ou jlibium efl: un minéral fort refTemblant au
fancha ou plomb minéral. Il efl: poreux , luifant & friable. II y en
a de jaune -rougeâtre , & d'autre tirant fur le blanc , d'un grain auffi
menu que l'acier.... On trouve ordinairement dans tout le Pérou
l'antimoine mêlé avec les minerais d'argent , particulièrement avec
ceux appelés négrllles. On le trouve aufîi feul en beaucoup d'endroits;
il fait beaucoup de tort au minerai ainfi que le bitume & le foufre.
Barba , Alétallurgie , tome I , pages ^ 6 & foiv.
(u) Hifloire générale des Voyages , ?o//?f XIX , page ^oS.
Nn ij
284 Histoire Natu relle
ou point de propriétés aélives; elles ne font pas même
développées après fa fonte en antimoine crud , parce
au'il e/t encore cnveioppé de ion /oufre ; mais dès
qu'il en efl dégagé par la calcination ou la vitrilication ,
les qualités fe manifeflent ; la chaux, le ioie & le verre
d'antimoine font tous de puilfans cmétiques ; la chaux
eft même un violent purgatif, & le régule fe laiffe
attaquer par tous les fels & par les huiles; l'alkali dilfout
l'antimoine crud , tant par la voie feche que par la voie
humide , & le kermès minéral /è tire de cette diffo-
lution : toutes les fubftances falines ou huileufes dé-
veloppent dans l'antimoine les vertus émétiques , ce
qui fèmble indiquer que ce régule n'eft pas un demi-
métal pur , 6l qu'il ell combiné avec une matière
faline qui lui donne cette propriété aélive , d'où l'on
peut auffi inférer que le foie de foufre a fouvent eu
part à fa minéralifation.
DES Minéraux. 285
DU BISMUTH ou ETAIN DE GLACE.
X^ANS le rcgne minerai, rien ne fe reffembie plus
que le régule d'antimoine & le biiinuth par la flru(5iure
de leur (iibflance ; ils font intérieurement compofés de
lames minces d'une texture & d'une ligure femblablcs »
& appliquées de même les unes contre les autres ; néan-
moins le régule d'antimoine n'efl qu'un produit de l'art,
& le bifmuth eft une produélion de la Nature ; tous
deux , lorfqu'on les fond avec le foufre , perdent leur
flniélurc en lames minces & prennent la forme d'aiguilles
appliquées les unes fur les autres; mais il cft vrai que
le cinabre du mercure & la plupart des autres fubilances
dans Icfquelles le fôufre fc combine , prennent éga-
lement cette forme aiguillée , parce que c'eft la forme
propre du foufre qui fe criftallife toujours en aiguilles.
Le bifmuth fe trouve prefque toujours pur dans le
fein de la terre , il n'efl pas d'un blanc auffi éclatant
que le blanc du régule d'antimoine ; il efl un peu j:.u-
nâtre , & il prend une teinte rougeâtre & des nuances
jrifées par l'impreffion de l'air.
Ce demi-métal ell plus pefànt que le cuivre , le fer
&: l'étain (aj , Sl , malgré fa grande denfité , le bifmuth
fa/ La pefanreur Ipecifique du bifmuth natif efl de C)C2C2 ;
celle du régule de bifiiuuh de ^-8227, tandis que Ja pefameuif
2^6 Histoire Naturelle
eft fans ductilité ; il a même moins de ténacité que le
plomb , ou plutôt il n'en a point du tout , car \\ e/l
très-calTant & prefque auiïi friable qu'une matière qui
ne feroit pas métallique.
De tous les métaux & demi-métaux, le bifmudi eft
le plus fufible; il lui faut moins de chaleur qu'à l'étain,
& il communique de la fulibilité à tous les métaux avec
Icfquels on veut l'unir par la fufion ; l'alliage Je plus
fudble que l'on connoiiïe, efl, fuivant Ai. Darcet, de huit
parties de bi/inuth, cinq de plomb & trois d'étain (b) , &
l'on a obfervé que ce mélange fe fondoit dans l'eau bouil-
lante, & même à quelques degrés de chaleur au-de/Tous.
Expofé à Tadion du feu , le bifmuth fe volatilife en
partie , & donne des fleurs comme le zinc , & la por-
tion qui ne fe volatilife pas fe calcine à peu-près comme
le plomb ; cette chaux de bifmuth prife intérieurement ,
produit les mêmes mauvais effets que celle du plomb ,
elle fe réduit au/fi de même en litharge & en verre , enfin
on peut fe fervir de ce demi-métal comme du plomb,
pour purifier l'or & l'argent; \\\\\ de nos plus habiles
Chimifles affure même: « Qu'il efl préférable au plomb,
fpécifique du cuivre pafTé à la filière, c'eft-à-dire, du cuivre le plus
comprimé, n'efl: que de 88785. Voye-^ la Table de M. Brijjon.
(b ) La fufibilite de cet alliage efl; telle que le compofé qui en
réfulte fe tond & devient coulant comme du mercure, non-feulement
dans l'eau bouillante , mais même au bain-marie. Diél'tonnaire de
Chimie , par M. Macquer , article Alliage.
DES Minéraux. 287
parce qu'il atténue mieux les mctaux imparfaits , & «
accélère la vitrilication des terres & des chaux » (cj.
Cependant il rapporte dans le même article une opinion
contraire : « Le bifmuth , dit-il , peut fervir comme le
plomb, à la purilication de l'or & de l'argent, parce
l'opération de la coupelle, quoique îiwins bien que le *<
plomb, fuivant M. Pemer ». Je ne Tais fi cette dernière
afTertion elt fondée ; l'analogie femble nous indiquer
que le bifimuh doit purifier l'or & l'argent mieux, (Se
non pas moins bim que le plomb ; car le bifmuth atténue
plus que le plomb les autres métaux , non - feulement
dans la purification de l'or &. de l'argent par la fonte,
mais même dans les amalgames avec le mercure , puiP
qu'il divife & atténue l'étain, & fur-tout le plomb, au
point de le rendre, comme lui-même, auHi Huide que
le mercure , en forte qu'ils paffent enfemble en entier,
à travers la toile la plus ferrée ou la peau de chamois,
&. que le mercure ainfi amalgamé , a be/bin d'être
converti en cinabre, & enfui te revivifié pour reprendre
fà première pureté. Le bifmutli avec le mercure forment
donc enfemble un amalgame coulant, & c'eft ainfi que
les Droguifles de mauvaife foi, falfifient le mercure qui
ne paroît pas moins coulant, quoique mêlé d'une affez
grande quantité de bifmiuh.
L'impreffion de l'air fe marque affez prompiemem
(ç) Didionnaire de Chimie , par M. Macquer , article Bifmuth.
288 Histoire Nature lle
fur le bifinuth par les couleurs irifces qu'elle produit à
fà (urface ; & bientôt fuccè dent à ces couleurs de petites
eiiiorefcences qui annoncent la décompofiùon de fa
fubflance ; ces eltiorefceîîces (ont une forte de rouille
ou de céru/ê aiïez femblable à celle du plomb ; cette
ccrufe ell feulement moins blanche &l prefque toujours
jaunâtre ; c'efl par ces efllorefcenccs en rouille ou
ccrufe que s'aîriionceut les minière» de bifmuth ; fair
a produit cette décompofition à la fuperlicie du terrein
qui les recèle , mais dans i'mtérieur le bifmuth n'a
communément fubi que peu ou ]K)int d'altération ; on
le trouve juir ou feulement recouvert de cette céru/è ,
& ce n'ell que dans cet état de rouille qu'il efl miné-
ralifc , & néanmoins dans fa mine , comme dans fa
rouille , il n'efl prefque jamais altéré en entier fJ) , car
on y voit toujours des points & des parties très-fenfibles
de bifmuth pur & tel que la ?^Jamrc le produit.
Or cette fubflance, la plus fulible de toutes les matières
métalliques <Sc en même temps {\ volatile, & qui /è trouve
dans fon état de nature en fijbfîance pure , n'a pu être
produite comme le mercure que très-long-temps après
ies métaux <Sc autres minéraux plus fixes «Si. bien plus
difficiles à fondre ; la formation à\\ bifmuth cfl donc
(d) Quoiqu'on n'ait pas trouvé en Allemagne de billnuih uni au
foutre, il efl cependant certain , dit M. Bergman , cju'il y en a dans
quelques montagnes de Sucdc <!^ particulièrement à Hiddarliywari
çn Mv^eriîmaniQ,
ù peu-prèi
DES Minéraux. 289
à-peu près contemporaine à celle du zinc , de l'antimoine
& du mercure ; les matières métalliques plus ou moins
volatiles les unes que les autres, & toutes reléguées dans
r atmosphère par la violence de ia chaleur, n'ont pu
tomber que fucce/fivement Sl peu de temps avant la
chute des eaux. Le bifmuth en particulier n'eft tombé
que long - temps après les autres & peu de temps avant
le mercure , aufTi tous deux ne fè trouvent pas dans les
montagnes vitreufès ni dans les matières produites par
le feu primitif, mais feulement dans les couches de la
terre formées par le dépôt des eaux.
Si l'on tient le bifinuth en fufion à i'air libre &
qu'on le lailfe refroidir très -lentement , il offre à fa
(iirface de beaux criftaux cubiques & qui pénètrent à
l'intérieur; fi , au lieu de le laiffer refroidir en repos,
on le remue en foutenant ie feu , il fè convertit bientôt
en une chaux grife qui devient enfuite jaune & même
un peu rouge par la continuité d'un feu modéré , &
en augmentant le feu au point de faire fondre cette
chaux , elle fe convertit en un vert jaune - rougeàtre
qui devient brun lorfqu'on le fond avec du verre blanc ,
Sl ce verre de bifmuth , fans être auffi aélif , lorfqu'il
efl fondu, que le verre de plomb, ne lailfe pas d'attaquer
les creufèts.
Ce demi -métal s'allie avec tous les métaux; mais
il ne s'unit que très-difficilement par la fufion avec les
autres demi-métaux & terres métalliques ; l'antimoine
Al'méraiLX , Tome IIL O o
290 Histoire Natu re lle
<&. le zinc , ie cobalt & rarfenic fe refurent tous à cette
union : il a en particulier fi peu d'affinité avec le zinc
que quand on les fond enfemhle ils ne peuvent fè
mêler; le bifinuth , comme plus pefant, defcend au fond
du creufet, &. le zinc refle au-defTus & le recouvre.
Si on mêle le bifmuth en égale quantité avec Tor fondu,
il le rend très-aigre & lui donne fa couleur blanche.
Il ne rend pas l'argent fi caiïant que Tor , quoiqu'il
lui donne auiïï de l'aigreur fans changer fa couleur ;
il diminue le rouge du cuivre ; il perd lui-même fà
couleur blanche avec le plomb, 6c ils forment enfèmble
un alliage qui eft d'un gris-fombre ; le bifmuth mêlé
en petite quantité avec i'étain lui donne plus de brillant
& de dureté ; enfin il peut s'imir au fer par un feu
violent.
Le foufre s'imit auiïî avec le bifmuth par la fufjon ,
& leur compofé fe préfente comme le cinabre & l'an-
timoine crud en aiguilles criflallifées.
L'acide vitriolique ne difTout le bifmuth qu'à l'aide
d'une forte chaleur , <Sc c'eft par cette réfiflance à
l'aétion des acides qu'il fe conferve dans le fein de
la terre fans altération , car l'acide marin ne l'attaque
pas plus que le vitriolique ; il faut qu'il /bit fumant ,
& encore il ne l'entame que foiblement & lentement ;
l'acide nitreux feul peut le diffoudre à froid , cette
diffolution qui fe fait avec chaleur & efîèrvefcence eft
traniparente & blanche quand le bifmuth eft pur; mais
DES Minéraux, 291
elle fc colore Je vert s'il efl mclé de nickel , <Sc elle
devient rouge de rofe & cramoifie s'il eft mélangé de
cobalt ; toutes ces diffolutions donnent un fèl en petits
criflaux au moment qu'on les laifTe refroidir.
C'efl en ])récipitant le bifinuth de fcs diffolutions,
qu'on l'obtient en poudre blanche, douce & luiiànte ,
& c'efl avec cette poudre qu'on fait le fard qui s'applique
fur la peau. Il faut laver plufieurs lois cette poudre pour
qu'il n'y refle point d'acide, & la mettre enfuite dans
un flacon bien bouché ; car l'air la noircit en affez peu
de temps, & les vapeurs du charbon ou les mauvaifès
odeurs des égouts, des latrines, &c. changent prefque
fubitement ce beau blanc de perle en gris-obfcur, en forte
qu'il efl fbuvent arrive aux femmes qui fc fervent de
ce fard de devenir tout -à- coup aufîi noires qu'elles
vouloient paroître blanches.
Les acides végétaux du vinaigre ou du tartre , non
plus que les acerbes , tels que la noix de galle , ne
diifolvent pas le bifmuth, même avec le fecours de la
chaleur , à moins qu'elle ne foit pouffée jufqu'à produire
l'ébullition ; les alkalis ne l'attaquent auffi que quand on
les fait bouillir , en forte que dans le fein de la terre ce
demi-métal paroît être à l'abri de toute injure &. par
conféquent de toute minéralifàtion , à moins qu'il ne
rencontre de l'acide nitreux qui feui a la puifîance de
l'entamer ; & comme les fcls nitreux ne fe trouvent
que très -rarement dans les mine-s , il n'efl pas étonnant
Oo ij
292 Histoire N atu relle
que \t bifmuth qui ne peut être attaqué que par cet
acide du nitre ou par l'adion de l'air ne Te trouve
que fi rarement minéralifé dans le fein de la terre.
Je ne fuis point informé des lieux où ce demi-métal
peut fe trouver en France ; tous les morceaux que j'ai
eu occadon de voir venoient de Saxe , de BoJième
& de Suède ; il s'en trouve auiïi à Saint-Domingue (e) ,
& vraifemblablement dans plufieurs autres parties du
monde : mais peu de Voyageurs ont fait mention de ce
demi-métal , parce qu'il n'ed pas d'un ufàge néceffaire
& commun; cependant nous l'employons non-feulement
pour faire du blanc de fard , mais auffi pour rendre
l'étain plus dur & plus brillant; on s'en fert encore pour
polir le verre (f) & même pour l'étamer (g) , Si c'efl
{ej Hiftoire gcncrale des voyages, tome XII, page 21 S,
(f) Tranfadions philofophiques , iV." S9^ > I^ovembre IJ26.
(g) Je me fuis afTuré , m'écrit M. de Morveau , que le bifinuth
fert encore à iVtamage des petits verres non polis qui viennent
d'Allemagne, en forme de petits miroirs de poche, ou du moins
qu'il entre pour beaucoup dans la compofition de cet e'tamage dont
on fait un fecret , car l'ayant recueilli fur plufieurs de ces miroirs ,
& pouffé à la fufion , j'ai obtenu un grain métallique qui a donné
la chaux jaune du bifniuih ; ce procédé feroit fort utile pour étamer
les verres courbes , peut-être même pour réparer les taches des
glaces que l'on nomme rouUlées. A la feule infpedion des miroirs
d'Allemagne, on juge aiftment que cette compofition s'applique
d'une manière bien différente de l'ctamage ordinaire , car iJ e/l
bien plus épais & d'une épaifleur très-inégale ; on y remarque des
gouttes, comme fi on eût pafTc un fer à fouder pour étendre &
DES Minéraux. 293
de cet ufage qu'il a reçu le nom A'étnm de glace.
Les expériences que l'on a faites fur fes propriétés
relatives à la Médecine , n'ont découvert que des qua-
lités nuifibles , & fà chaux pri/e intérieurement produit
des effets femblables à ceux des chaux de plomb, &
auffi dangereux ; on en abufè de même pour adoucir
Jes vins trop acides & défagréables au goût.
Quelques Minéralogifles ont écrit que la mine de
bifmuth pouvoit fervir comme celle du cobalt, à faire
Je verre bleu d'azur: <« Elle laiife, difent-iis (h) , fuinter
faire couler le bifiiiuth à !a fuiface du verre ; ce qu'il y a de
certain , c'efl: que l'adhérence eft bien plus forte que celle de nos
feuilles d'étain.
Il me femble que le bifmuth entre auiïl dans l'amalgame dont
on fe fert pour étamer la furface intérieure des globes. Note commu-
niquée par Ad. de Aiorveau.
(h) La mine de bifmuth fert aufîi à faire le bleu d'azur ; à feu
ouvert & doux , elle laifie aifémeni fuinter une fubftance femi-
métdllique que l'on nomme bijmuth ou étain de glace, & elle laifie
wïXQ pierre ou une terre grile & fixe.
Il faut féparer , autant qu'il ert pofllble , cette mine, fi elle eft
pure , du cobalt véritable , pour en rafl^mbler le bifmuth ; mais
le mélange de ces deux matières minérales eft ordinairement fî
intime dans la mine , que cette féparation eft prefque impofijble ;
c'ell pourquoi l'on trouve fouvent , dans les pots à vitrifier, une
fubltance réguiine qui s'eft j>récipitée ordinairement d'une couleur
blanchâtre tirant fur le rouge. Cette fubftance n'eft prefque jamais
\\n véritable bifmuth , & tel qu'on le retire de fa mine par la fonte;
mais elle eft toujours mêlte avec une matière étrangère qui eft la
294 Histoire Natu relle
» aifcment une fubflaiice femi-mctalliqae, que l'on nomme
» bipnuth ou cuiin de glace, 6c enfuite elle laiife une terre
o-rife & fixe, qui par là vitrification donne le bleu d'azur ».
Mais cela ne prouve pas que le bifmuth fourniffe ce
bleu; car dans ià mine il efl très-/buvenr mclé de cobalt,
& ce bleu provient fans doute de cette dernière matière:
la terre gr'ife à' fixe n'efî pas une terre de bi/inuth; mais
la terre du cobalt qui étoit mêlé dans cette mine, &
auquel même le bifinuth n'ctoit pas intimement lié ,
parce qu'il s*en fépare à la première fonte & à un
feu très-modéré; &. nous verrons qu'il n'y a aucune
affinité entre le cobalt & le bifinuth, car quoiqu'ils fe
trouvent très-fouvent mêlés enfemble dans leurs mines,
chacun y conferve fa nature, & au lieu d'être intimement
uni, le bifinuth n'efl qu'interpofc dans les mines de
cobalt, comme dans prefque toutes les autres où il fe
trouve, parce qu'il conferve toujours fon état de pureté
native.
terre fixe du cobalt. Ainfi on la pulvérife de nouveau pour fa joindre
à d'autres mélanges de mine , de fable & de fel aikali , qu'on met
dans les pots pour les vitrifier. Traité de la fonte des mines de
Schlutter , tome I , page 248.
DES Minéraux. 295
L
DU Z I N C (a).
E Zinc ne fe trouve pas comme le bifmuth, dans
un état natif de mJnéral pur, ni même comme l'ami-
moine, dans une feule efpcce de mine ; car on le tire
également de la calamine ou pierre calaminaire & de
la blende , qui font deux matières différentes par leur
compofuion & leur formation, & qui n'ont de com-
mun que de renfermer du zinc: la calamine /è préfènce
en veines continues comme les autres minéraux ; la
blende fe trouve au contraire , difperfte &. en maffes
féparées dans prefque toutes les mines métalliques : la
calamine efl principalement compofée de ziac & de
fer fh); la blende contient ordinairement d'autres mi-
néraux avec le zinc (c). La calamine efl d'une couleur
(a) Paracelfe efl le premier qui ait employé le nom de zinc.
Agricola le nomme contre -feyn ; on l'a appelé Jlannum indicum , parce
qu'il a été apporté des Indes en afTez grande quantité dans le fiècle
dernier ; les auteurs Arabes n'en font aucune mention , quoique l'art
de tirer Je zinc de fà mine exifte depuis long -temps aux Indes
orientales. Voye-^ la D'ijfer talion de M. Bergman fur le yjnc.
(b) M. Bergman a fournis à l'analyfe I "^'amine de Hongrie, &
xl a trouvé qu'elle tenoit au quintal quatre-vingt-quatre livres de
chaux de zinc, trois livres de chaux de fer, douze de filex &
une d'argile , fur quoi j'obferverai que la matière de l'argile & celle
du fdex ne font qu'une feule & même fubflance , puifque le filex
fe réduit en argile en fe décompofant par les élémens humides.
(c) M. Bergman a trouvé que la blende noire de Danemora
zf)6 Histoire Naturelle
jaune ou rougeâtre , & aflez aifce à cliftingucr des autres
minéraux ; ia biende au contraire , tire Ton nom de Ton
apparence trompeufe & de fa forme équivoque (dj :
il y a des blendes qui reflemblent à la galène de
plomb (e); d'autres qui ont l'apparence de la corne,
&
tenoit au quintal quarante-cinq livres de zinc, neuf de fer, fix de
plomb, une de régule d'arfenic , vingt- neuf de foufre , quatre de
liiex <Sc fix d'eau.
(d) Ce mot blende fignifîe dans le langage des Mineurs Allemands
une fubftance trompeufe , parce qu'il y en a qui relfemble à la
galène de plomb. Didionnaire d' Hijîoire Naturelle , par AI.de Bomare ,
article Blende ( blind , éblouir , tromper les yeux).
(e ) On a donné à la mine de /aie b/anchâtre le nom de fûujfc
galcne ; mais quoique le tiilu de cette dernière foit à peu - près
feuilleté comme celui de la galène; ie^ feuillets qui la compofent
font cependant moins diftinds & moins éclatans que ceux de ia
mine de plomb fulfureufe ; fa pefanieur fpécifique efl: d'ailleurs
beaucoup moins confidérable ; au refle il eft aifé de diflinguer la
blende d'avec la galène , car fi Ton gratte avec un couteau le
morceau dont l'apparence eft équivoque , il s'en dégagera , fi c'eft
une blende, une odeur de foie de foufre des mieux caradérifées....
jM. de Born nous a fait connoître une blende tranl'parente , d'un
vert -jaunâtre qui fe trouve à Ratieborzis en Bohème. J'en ai vu
des échantillons qui avoient la tranfparence & la couleur de h
topafe & de la cryfolite. Enfin , quoique le tifl'u de la blende foit
prefque toujours lamelleux ou feuilleté , il s'en rencontre quelquefois
des morceaux qui , par leur tiffu fibreux ou ilrié , imitent alfez
bien la mine d'antimoine grife ; on les en diflingue facilement à
leur couleur d'un gris-fombre & à l'odeur de foie de foufre qu'on
en dégage par le frottement. . . . Cette dernière Ibrie de blende
efl
DES AllNÉRAUX, 297
&: que îes Mineurs Allemands appellent hom - hlcndc ;
d'autres qui font noires & luifàntes comme la poix,
auxquels ils donnent le nom de jntch-blcîide , & d'autres
encore qui font de différentes couleurs grifes, jaunes,
brunes, rougeâtres, quelquefois criflallifëes , & même
tranff)arentes , mais plus fouvent opaques &. fans figure
régulière. Les blendes noires, grifes & jaunâtres font
mêlées d'arfenic , les rougeâtres doivent celte couleur
au fer; celles qui font transparentes &. criflallifées , font
chargées de foufre &. d'arfenic ; enfin toutes contiennent
une plus ou moins grande quantité de zinc.
Non -feulement ce demi -métal fe trouve dans la
pierre calaminaire & dans les blendes, mais il exifle
auffi en affez grande quantité dans plufieurs mines de
fer concrètes ou en grains, & de dernière formation;
ce qui prouve que le zinc efl difféminé prefque partout
en molécules infenfibles , qui fe font réunies avec la
fer, dans la pierre calaminaire & dans les mines fecon-
daires de ce métal , & qui fe font au/fi mêlées dans les
blendes avec d'autres minéraux & avec des matières
pyriteufes; ce demi-métal ne peut donc être que d'une
formation poftérieure à celle des métaux, & même
poflérieure à leur décompofition, puifque c'efl prefque
efl commune dans les mines de Pompe'an ; elle a moins d'e'clat que
la manganèfe , & ne tache point les doigts comme cette fubftance.
Lettre du Doâeur Dcmejîe , tome II , pages i jC , l S 0 & j 8 1 ,
Minéraux , Tome IIL P p
i^S Histoire Naturelle
toujours avec le fer décompofé qu'on le trouve réuni.
D'ailleurs comme il efl très-volatil, il n'a pu fe former
qu'après les métaux & minéraux plus fixes , dans Je
même temps à peu -près que l'antimoine, le mercure
&. l'arfenic, ils étoient tous relégués dans ratmofphère,
avec les eaux <5c les autres fubftances volatiles pendant
i'incandcfcence du Globe, & ils n'en font defcendus
qu'avec ces mêmes fubflances ; auiïî le zinc ne fê trouve
dans aucune mine primordiale des métaux, mais feule-
ment dans les mines fécondai res produites par la décom-
pofuion des premières.
Pour tirer le zinc de la calamine ou des blendes,
il fuffit de les expofer au feu de calcination, ce demi*
métal fe fublime en vapeurs, qui par leur condenfation
forment de petits flocons blancs & légers, auxquels
on a donné le nom dejleurs de imc.
Dans la calamine ou pierre calaminaire , Je zinc eil
fous la forme de chaux; en faifant griller cette pierre,
elle perd près d'un tiers de fon poids ; elle s'effleurii
à l'air , & fe préfente ordinairement en malfes irrégu-
lières , quelquefois criftallifées , elle efl prefque toujours
accompagnée ou voifine des terres alumineufes ; mais
quoique la fubflance du zinc foit difféminée par-tout,
ce n'efl qu'en quelques endroits qu'on trouve de Ja
pierre calaminaire. Nous citerons tout-à-l'heure les mines
les plus fameufes de ce minéral en Europe, &. nous
favons d'ailleurs que Je toutenagufj qu'où nous apporte
DES Minéraux, 299
des Indes orientales , eft un zinc mémo plus pur que
celui d'Allemagne; ainfi l'on ne peut douter qu'il n'y
ait des mines de pierres calaminaires dans plufieurs
endroits des régions orientales, puifque ce n'eft que
de cette pierre qu'on peut tirer du zinc d'une grande
pureté. ^**'
La minière la plus fameufe de pierre calaminaire,
eft celle de Calmjherg près d'Aix-la-Chapelle, elle cfl
mêlée avec une mine de fer en ocre ; il y en a une
autre qui efl mêlée de mine de plomb au-deflbus de
Namur. On prétend que le mot de Calamine, efl le
nom d'un territoire d'aflez grande étendue , près des
confins du duché de Limbourg, qui efl plein de ce
minéral : « Tout le terrein , dit Lémery , à plus de
vingt lieues à la ronde , efl fi rempli de pierres cala- et
minaires , que les grofTes pierres dont on fè fert pour «
paver étant expofées au foleil , laifTent voir une grande c<
quantité de parcelles métalliques & brillantes ». M. de
Genfanne en a reconnu une minière de plus de quatre
toifes de largeur, au-defTous du château de Montalet,
diocèfe d'Uzès: on y trouve des pierres calaminaires
ferrugineufes , commue à Aix-la-Chapelle, & d'autres
mêlées de mine de plomb , comme à Namur , & l'on
y voit auffi des terres alumineufes ; on en trouve encore
dans le Berri près de Bourges, & dans l'Anjou & le
territoire de Saumur, qui font également mêlées de
parties ferrugineufes.
Pp i;
3oa Histoire N atu r e lle
En Angleterre on exploite quelques mines de pierre
calam inaire clans le comté de 5ummeriet; la pierre de
cette mine eft rougeatre à /a iurface, & d'un jaune-
verdâtre à l'intérieur; elle eft très - pelante , quoique
trouée & comme cellulaire ; elle e/t au/Ti très-dure &
donne des étincelles ior/qu'on la choque contre 1 acier;
elle eft foluble dans les acides : celle du comté de
Nottingham en diffère, en ce qu'elle n'eft pas folubie,
& qu'elle ne fait point feu contre Tacier, quoiqu'elle
foit compaéte, opaque &. cellulaire comme celle de
Sommer/ët ; cWe en diffère encore par la couleur qui eft
ordinairement blanche , & quelquefois d'un vert - clair
criftallifé. Ces ditîérences indiquent affez que la cala-
mine en général , eft une pierre compofée de différens
minéraux, & que fà nature varie fuivant la quantité ou
k qualité des matières qui en conftituent la fubftance:
îe zinc eft la feule matière qui /bit commune à toutes
Jes efpèces de calamine ; celle qui en contient le plus
eft ordinairement jaune; mais on peut fe fervir de toutes
pour jaunir le cuivre rouge; c'eft pour cet ufage qu'on
ies recherche & qu'on les travaille , plutôt que pour en
faire du zinc qui ne s'emploie que rarement pur, &
qui même n'eft pas auifi propre à faire du cuivre jaune
que la pierre calaminaire : d'ailleurs , on ne peut en tirer
le zinc que dans des vaiffeaux clos, parce que non-
feulement il eft très - volatil , mais encore, parce qu'il
s'enfîamme à l'air libre; & c'eft par la cémentation du
DES Minéraux, 301
cuivre rouge avec la calamine , que la vapeur cJu zinc ,
contenu dans cette pierre , entre dans le cuivre , lui
donne la couleur jaune , & le convertit en laiton.
La calamine eft fouvent parfemce de petites veines
ou filets de mine de plomb , die fe trouve même
fréquemment mêlée dans les mines de ce meral , comme
dans celles de fer, de dernière formation; & lorfqu'elle
y eft très - abondante , comme dans la mine de Ram-
mellberg près de Golîar, on en tire le zinc en même
temps que le plomb, en faifànt placer dans le fourneau
de fufion, un vaifTeau prefque clos à l'endroit où l'ardeur
du feu n'efl pas alTez forte pour entiammcr le zinc ,
& on le reçoit en fubflance coulante; mais quelque
précaution que l'on prenne en le travaillant, même dans
des vaifleaux bien clos , le zinc n'acquiert jamais une
pureté entière , ni même telle qu'il doit l'avoir pour
faire d'auffi bon laiton qu'on en fait avec la pierre
calaminaire, dont la vapeur fournit les parties les plus
pures du zinc ; &. le laiton fait avec cette pierre efl
du6lile, au lieu que celui qu'on fait avec le zinc eft
toujours aigre & caflant.
Il en eft de même de la blende ; elle donne comme
la calamine par k cémentation , du plus beau 6l du
meilleur laiton qu'on ne peut en obtenir par le mé-
lange immédiat du zinc avec le cuivre ; toutes deux
même n'ont guère d'aiure ufage , & ne font rechercbées
Sl travaillées que pour faire du cuivre jaune; mais.
302 Histoire Naturelle
comme je l'ai déjà dit, ce ne font pas les deux feules
niaiières qui contiennent du zinc; car il eft très-géné-
ralement répandu, & en afTez grande quantité dans
plufieurs mines de fer; on le trouve au/fi quelquefois
fous la forme d'un fel ou vitriol blanc , & dans la blende,
il efl: toujours combiné avec le fer & le foufre.
Il fè forme a/Tez fouvent dans \t% grands fourneaux
des concrétions qui ont paru à nos Chimiftes (f)^
(f) « II y a des blendes artificielles qui imitent parfaitement les
3» blendes naturelles dans leur tifTu , leur couleur & leur phofpho-
3> relcence. . . . J'en ai vu un morceau d'un noir luifant & feuilleté
» provenant des fonderies de Saint- Bel. . . . \3\\ autre morceau
a» venant du même iieu , donnoit , outre l'odeur du foie de foufre ,
»» des étincelles lorfqu'on le grattoit avec un couteau , & n'en donnoit
» point avec la plume. ... & un troifième morceau venant des fon-
»> deries de Saxe, & qui eft de couleur jaunâtre , étoit fi phofphorique
« qu'en le frottant de la plume on en tiroit des étincelles comme
j> de la blende rouge de Schasffenberg ». Lettre du Doâeur Danefe ,
tome II, pages I y p Ù" 180. — Nota. Je dois oblerver qu'on
trouvoit en effet de ces blendes artificielles dans les laitiers des
fonderies, mais que jufqu'ici Ton ne favoit pas les produire à volonté,
& que même on ne pouvoit expliquer comment elles s'étoient
formées ; on penfoit au contraire que l'art ne pouvoit imiter la Nature
dans la combinaifon du zinc avec le foufre. M. de Morveau eft le
premier qui ait donné cette année 1780, »n procédé pour faire
à volonté l'union direâe du zinc & du {owixe \ il fuffit pour cela
de priver ce demi-metal de fa volatilité en le calcinant , & de le
fondre enfuite avec le foufre ; il en réfufte une vraie pyrite de
zinc qui a, comme toutes les autres pyrites, une forte de brillant
métallique»
DES Minéraux. 303
tomes femblabies aux blendes naturelles. Cependant il
y a toute raifon de croire que les moyens de leur
formation font bien diffcrens ; ces ])lendes artificielles ,
produites par l'adion du feu de nos fourneaux, doivent
difïërer de celles qui fe trouvent dans le fein de la
terre , à moins qu'on ne fuppofe que celles - ci ont été
formées par le feu des volcans, & cependant il y a
toute raifon de penfer que la plupart au moins n'ont
été produites que par l'intermède de l'eau (gj , & que
le foie de foufre, c'eft-à-dire, l'alkali mêlé aux prin-
cipes du foufre, a grande part à leur formation.
Comme le zinc eft non-feulement très-volatil, mais
fort inflammable, il fe brûle dans les fourneaux où l'on
fond les mines de fer, de plomb, &:c. qui en font
mêlées ; cette fumée du zinc à demi-brûlé, fe condenfè
fous une forme concrète, contre les parois des fourneaux
& cheminées des fonderies &. affineries; dans cet état
on lui donne le nom de cadin'ie des foiirnemix; c'eil une
concrétion de fleurs de zinc, qui s'accumulent fouvent
au point de former un enduit épais contre les parois
de ces cheminées; la fubflance de cet enduit efl dure,
elle jette des étincelles lorfqu'on la frotte rapidement
ou qu'on la choque contre l'acier; les parties de cette
fg)}A. Bergman croit , comme moi, que les blendes naturelles ont
été formées par l'eau , & il fe fonde fur ce qu'elles contiennent
réellement de l'eau ; il dit aufîi qu'on peut les imiter en unilî'ant
par la fufion le zinc , le fer & le foufre.
304 Histoire Naturelle
cacimie qui Te font le plus élevées , & qui font attachées
au iiaut de la cJicminée, font les plus pures & les
meilleures pour faire du laiton (h) , parce que la cadmie
qui s'efl: fublimée & élevée fi haut, y eft moins mclée
de fer, de plomb, ou de tout autre minéral moins
volatil que le zinc ; au refte on peut aifémcnt la recueillir,
elle fe lève par écailles dures , &. il ne faut que la pul-
vérifèr pour la mêler & la faire fondre avec le cuivre
rouge, & c'eft peut-être la manière la moins coûteufe
de faire du laiton.
Le zinc, tel qu'on l'obtient par la fufion, efl d'un
blanc un peu bleuâtre & affez brillant; mais quoiqu'il
fe terniffe à l'air moins vite que le plomb , il prend
cependant en affez peu de temps , une couleur terne
■ I ■
/h) On connoifloit très-bien , dès le temps de Pline , la cadmie
des fourneaux & on avoit déjà remarqué qu'elle étoit de qualité A
de bonté différentes , fuivant qu'elle fe trouvoit fublimée plus haut
ou plus bas dans les cheminées des fonderies : EJl îpfe lapis ex quo
fit ces , cadmia vocatur. . . . Hic rurfus in fornacibus exijlit , aliamque
nominisfui originemrecipit : ft autem egejlâ fammis alque fatu tenuijftmâ
parte materiœ , & cameris lateribufve fornacum pro quantitate levitatis
applicatâ. TenuiJJima ejl in ipfo fornacum ore qua fammœ eluâantur ,
appellata capnitis , exujla ù" nimiâ levitate Jimi/is favilla : interîor
optima , cameris dependens , Ù' ab eo argumenta botrytis cognominata ;
tertia ejl in lateribus fornacum , quœ propter gravitalem ad caméras
pervenire non potuit ; hcec dicitur placitis .... fuunt & ex eâ duo alia
gênera; onychitis , extra pêne cœrulea , intus onyckiiis macuUs fimilis ;
ojlracitis , tota nigra , & cceterarum fordidijjîma . . . Omnis autem
cadmia in cupri fornacibus optima. Plhi. lib. XXXI V, cap. x.
DES Minéraux. 30;
& d'un jaune- vcrdàtrc, & les nuances différentes de
fà couleur dépendent beaucoup de Ton degré de pureté;
car en le traitant par les procédés ordinaires, il con-
ferve toujours quelques petites parties des niatières avec
lefquelles il étoit mêlé dans h mine ; ce n'eft que très-
récemment qu'on a trouvé le moyen de le rendre plus
pur. Pour obtenir le zinc dans fa plus grande pureté ,
il faut précipiter par le zinc mcme ion vitriol blanc,
ce vitriol décompofé endiite par l'alkali , donne une
cliaux qu'il fuffit de réduire pour avoir un zinc pur &
ians aucun mélange.
La fubflance du zinc efi: dure & n'eft point caftante , on
ne peut la réduire en poudre qu'en la faifant fondre & la
mettant en grenailles ; auftl acquiert-elle quelque ducliiité
par l'addition des matières inflammables en la fondant en
vaifteaux clos : fa dcnftté eft un peu plus grande que celle
du régule d'antimoine, & un peu moindre que celle de
l'étain^/^. Indépendamment de ce rapport aftl^z prochain
de denfité , le zinc en a plufieurs autres avec J'étain ; il rend
lorfqu'on le plie, un petit cri comme l'étain (kj , il rcfifte
(i) La pefameur Iptcifiqiie du régule de zinc ell de 71^08 ;
celle du régule d'antimoine de 67021 , & celle de l'étain pur de
Cornouaille de 72914; la pefanteur fpécifique de la blende n'eft
que de 41665 ; il y a donc à peu-près la méine proportion dans
les denfités relatives de la blende avec le zinc , de l'antimoine crud
avec le régule d'antimoine , & du cinabre avec le mercure coulant.
fk) Le zinc , lorfqu'on le rompt , a le même cri que l'étain ;
lorlqu'on le mêle avec du plomb , cei alliage a encore le même
Aihicraux , Tome III. Qq
3o6 Histoire Natu relle
Je même aux imprcfTions des élcmcns humides , &. ne fe
convertit point en rouille ; quelques Minéralogiftes l'ont
même regardé comme une efpèce d'étain (ij , 6l il efl
vrai qu'il a plufieurs propriétés communes avec ce métal;
car on peut étamer le fer & le cuivre avec le zinc
comme avec l'étain ; & l'un de nos Chimifles a pré-
tendu que cet étamage avec le zinc {"^/jj^ qui efl moins
fufible que l'étain, &l par conféquent plus durable, ed
en même temps moins dangereux que l'éiamage ordi-
naire, dans lequel les Chaudronniers mêlent toujours du
plomb : on connoît les qualités limefles du plomb , on
fait aufTi que l'étain contient toujours une petite quantité
cri ; les Potiers d'etain emploient le zinc dans leurs ouvrages & pour
leurs foudures. H'foire de l'Académie des Sciences, année ly^i,
(l) Schlutter , dit Al. Hellot , regarderoit volontiers le zinc
comme une efpèce d'étain , s'il étoit plus malle'able , & il foupçonne
que venant d'une mine auiïi fulfureufe que celle de Rammelberg. ...
il conferve encore une partie de ce ioufre ; cette idée , leion
Schlutter , efl d'autant plus vraifemblable que par le foufre on peut
rendre aigre le meilleur étain. . . . On fait aufîi que le zinc & l'étain
peuvent également rendre jaune le cuivre rouge ; il cite pour
exemple le métal fingulier qu'Alonzo Barba a décrit dans Ton Traité
des mines & des métaux. Traité de la fonte des mines , i/c, tome II ,
foge -2/7; mais le fentimem de Schlutter iur le zinc ne nous
parojt pas aflez fondé , car le zinc ne peut différer de ïéiàia par
ie foufre minéraliiateur , puifqu'il n'en contient pas.
(m) M. Malouin, de l'Académie des Sciences, & Médecin de
ia Faculté de Paris.
D E s M I N É R A U X. 5 07
tl'arfenic, &. il faut convenir que le zinc en contient
aiiffi ; car iorfqu'on le fait fufer fur les charbons ardens,
il répand une odeur arfenicaie qu'il faut éviter de refpircr;
&. tout confidéré , l'étamage avec du bon ctain doit être
préféré à celui qu'on feroit avec le zinc fn) , que le
vinaigre diffout & attaque même à froid.
Si ces rapports femblent rapprocher le zinc de
l'étain, il s'en éloigne par pluficurs propriétés; il cfl
beaucoup moins fufible; il faut qu'il fbit chauifé prefque
au rouge avant qu'il puifle entrer en lufion; dans
cet état de fonte, fà furface fe calcine ians augmenter
ie feu , & fe convertit en chaux grife , qui diffère de
celle de l'étain en ce qu'elle efl bien plus aifément
rédu<5tib!c , & que quand on les pouffe à un feu violent,
celle de l'étain ne fait que blanchir davantage , (ii enfin
fe convertit en verre , au lieu que celle du zinc s'en-
flamme d'elle - même & fans addition de matière com-
buflible. On peut même dire qu'aucime autre matière,
aucune fubibnce végétale ou animale , qui cependant
fèmblent être les vraies matières combuflib'es, ne donnent
une flamme auffi vive que le zinc; cette flamme efl
fans .fumée & dans une parfaite incandefcence ; elle efl
accompagnée d'une fi grande quantité de lumière blanche,
(n) Cet etamage avec le zinc a e'tc approuvé par la Faculté de
Médecine de Paris , mais condamné par l'Académie des Sciences
& par la Société royale de Médecine; & il a auffi été démontre
nuilLb'c, par les expériences faites à l'Académie de Dijon, en i77P»
Qqij
3o8 Histoire Naturelle
que les yeux peuvent à peine en fupporter l'éclat cblouif^
/ànt : c'elt au mélange de la limaille de fer avec du
zinc, que font dûs les plus beaux effets de nos feux
d'artifice.
Et non-feulement le zinc eft par lui-mcme très-com-
buflible, mais il eft encore phofphorique ; fa chaux
paroît lumincufe en la triturant, & fcs Heurs recueillies
au moment qu'elles s'élèvent, & placées dans un lieu
obfcur , jettent de la lumière pendant un petit temps foj.
Au rcfle, le zinc n'efl pas le fcul des minéraux qui
s'enflamment loriqu'on les fait rougir ; l'arfenic , le
cuivre & même l'antimoine, éprouvent le même efîct;
le fer jette aufii de la flamme lorfque l'incandefcence
eft pouffée jufqu'au blanc , & il ne faut pas attribuer
avec quelques-uns de nos Chimifles (p) j, cette flamme
(o) M. de LafTone , procédant un jour à la déflagration d'une
afTez grande quantité de zinc , en recueilloit les fleurs & les niettoit
à mefure dans un large vaifleau ; il fut furpris de les voir encore
lumineufes quekiues minutes après, & remuant enluite ces fleurs
avec une fpatule , ayant obfcurci davantage le laboratoire , il vit
qu'elles étoient entièrement pénétrées de cette lumière jjholpho-
rique & difîufe , qui peu-à-peu s'affoiblit , s'éteignit, après avoir
fubfiflé plus d'une heure. On peut voir dans fon Mémoire tous
les rapports qu'il indique entre le zinc & le j^hofphore. Alémoires
de l'Acûdémie des Sciences , année 1J-/2, pages ^80 & fu'iv.
(p) «c C'eft à la préfence du zinc contenu dans le fer qu'il faut
y* attribuer la plupart des phénomènes que préfente ce fer impur &
» mélangé , lequel fe détruit en partie par la combuflion , puifque
» le déchet du fer en gueufe eft ordinairement d'un tiers. . . . C'elt
DES Minéraux. 3 09
au zinc qu'il contient, ni croire , comme ils le diient,
que c'ell le zinc qui rend la fonte de fer aigre 6k.
cafTante ; car il y a beaucoup de mines de fer qui ne
contiennent point de zinc, &l dont néanmoins le fer
donne une Hamme auffi vive que les autres fers qui
en contiennent; je m'en fuis aiïliré par plufieurs effais,
Si d'ailleurs, on peut toujours reconnoître par la fimple
obfèrvation, fi la mine que l'on traite contient du zinc,
puifqu'alors ce demi-métal en fe fublimant, forme de la
cadmie au - delîus du fourneau & dans les cheminées
des affineries ; toutes les fois donc que cette fublimation
n'aura pas lieu, on peut être afTuré que le fer ne con-
tient point de zinc, du moins en quantité fenfible, &
néanmoins le fer en gueufe n'en eft pas moins aigre
& caifant , & cette aigreur, comme nous l'avons dit,
vient des matières vitreufes avec lefquelles la fubflance
du fer eft mêlée , & ce verre ih manifefle bien évidem-
ment par les laitiers & les fcories qui s'en féparent,
tant au fourneau de fufion qu'à l'ailinerie ; enfin cette
fonte de fer qui ne contient point de zinc , ne laiiïe
pas de jeter de la flamme lorfqu'elle eft chaufïee à
blanc , & dès - lors ce n'eft point au zinc qu'on doit
moins le fer cj le le zinc contenu dans la fonte, qui fe brûle , «
fe dtiruit & fe volatilife , en foite que la perte du mctal dans «
toutes tes circonllances , e(ï d'autant plus confidérable que le fer «
s'y trouve joint à une plus grande quantité de zinc ». Lettres
de AI. Demcjk , tome II , page i6j.
310 Histoire Naturelle
attribwer cette flamme, mais au fer même, (^ui efl en
effet combuflible lorfqu'il éprouve la violente adlion
Ju feu.
.La chaux du zinc, chauffée prefque ju/qu'au rouge,
s'enflamme tout-à-coup & avec une forte d'explofion ,
& en même temps les parties les plus fixes font, comme
nous l'avons dit, emportées en fleurs ou flocons blancs;
leur augmentation de volume n'eft pas proportionnelle
à leur légèreté apparente, car il n'y a, dit -on ^^j) ,
qu'un dixième de différence entre la pefanteur fpécifique
du zinc & celle de fès fleurs ; mais lorfqu'on la calcine
très -lentement, & qu'on l'empêche de fe fublimcr en
{'agitant continuellement avec une fpatule de fer, l'aug-
mentation du volume de cette chaux efl de près d'un
fixième (r): au refle, comme la ciiaux du zinc efl très-
volatile, on ne peut la vitrifier feule; mais en y ajoutant
du verre blanc, réduit en poudre & à\x falhi , on la
convertit en un verre couleur à' aigue-mûrme.
Plufieurs Chimifles ont écrit que comme le foufre
ne peut contraéter aucune union avec le zinc , il pouvoit
fervir de moyen pour le purifier; mais ce moyen ne
peut être employé généralement pour féparer du zinc
(q) En féduifant le zinc en fleurs , le poids des fleurs furpa/Tè
d'un dixième celui de (a nia{îê de zinc avant d'être re'duit en fleurs.
Alitnoircs de l'Académie dis Sciences, année jyyz , page ^So.
(r) Eléiuens de Chimie, par M. de Morveau, tome I , page 2^y^
DES Minéraux. 311
tous les métaux, puifque le foufre s'unit au zinc par
r intermède du fer.
Le zinc en fufion, & fous fa forme propre, s'allie
avec tous les métaux & minéraux métalliques , à l'excep-
tion du bifmuth & du nickel (f). Quoiqu'il fe trouve
très-fouvent uni avec la mine de fer, il ne s'allie que
très - difficilement par la fufion avec ce métal ; il rend
tous les métaux aigres & cafTans, il augmente la denfité
du cuivre & du plomb,. mais il diminue celle de i'étain,
du fer &. du régule d'antimoine; l'arfenic 6c le zinc,
traités enfemble au feu de fublimation , forment une
mafle noire, qui préfente dans fa caffure une apparence
plutôt vitreufe que métallique (tj ; il s'amalgame très-
bien avec le mercure (u): << Si l'on verfe, dit M. de
Morveau, le zinc fondu fur le mercure, il fe fait un
bruit pareil à celui que fait l'immerfion fubite d'un
corps froid dans de l'huile bouillante; l'amalgame paroît
d'abord folide, mais il redevient fluide parla trituration;
la criflallifation de cet amalgame laiffe apercevoir fes
élémens même, à la partie fupérieure qui n'eft pas en
contadl avec le mercure, ce qui efl différent des autres
(f) Elémens de Chimie , par M. de Morveau , rt^wf /, page 2 6 ^,
(t) Idem , tome II , page s^y.
(u) L'amalgame compofé de quatre parties de mercure fur une
de zinc eft bien plus propre à produire l'élecflricité que l'amalgame
de mercure & d'étain» Journal de Phy.Jique , mois de JSovembre
jyS 0 , page ^y2.
»
312 Histoire N atu re lle
amalgames .... une once de zinc retient deux onces
de mercure (x) ». J'obferverai que cette foliditc que
prend d'abord cet amalgame ne dépend pas de !a
nature du zinc , puifque le mercure feui , vcrfc dans
i'iîuile bouillante, prend une fblidité même plus durable
que celle de cet amalgame de zinc.
Les affinités du zinc avec les métaux, font, félon
M. Geiler, dans l'ordre fuivant; le cuivre, le fer, l'ar-
gent , l'or, l'étain & le plomb.
Autant la chaux de plomb cïi îdiCWc à réduire, autant
la chaux ou les Heurs de zinc font de difficile réduélion,
de-ià vient que la cérufe ou blanc de plomb devient noire
])ar la feule vapeur des matières putrides , tandis que la
chaux de zinc conferve fa blancheur; c'cil d'après cette
propriété éprou\'ée par la vapeur du foie de foufre ,
que M. de Morveau a propofë le blanc de zinc comme
préférable dans la peinture, au blanc de plomb; les
expériences comparées ont été faites cette année 178 i,
dans la féance publique de l'Académie de Dijon; elles
démontrent qu'il fiiffit d'ajouter à la chaux du zinc , un
peu de terre d'alun & de craie, pour lui donner du
corps & en faire une bonne couleur blanche, bien
plus fixe & bien moins altérable à l'air, que la cérufe
ou blanc de plomb, qu'on emploie ordinairement dans
la peinture à l'huile.
(x) EIcmens de Chimie , par M, de Morveau , tome III ,
pages 44^ à- 44^,
Le
D E s M IN É R A U X. 313
Le zinc eft attaqué par tous les acides , & même la
plupart le difîblvent afTez facilement; l'acide vitriolique
n'a pas befoin d'être aide pour cela par la chaleur, Sl
le zincparoît avoir plus d'affinité qu'aucune autre fubf^
tance métallique avec cet acide; il faut feulement pour
que la diffolution s'opère promptement, lui préfenter
le zinc en petites grenailles ou en lames minces , &
mêler l'acide avec un peu d'eau , afin que le fël qui fè
forme n'arrête pas la difTolution par le dépôt qui s'en
fait à la furface. Cette diflblution laifTe après l'évapo-
ration, des criflaux blancs; ce vitriol de zinc eli connu
fous le nom de couperofe blaiiche, comme ceux de cuivre
& de fer, fous les noms de coupera ft bleue &. de couperofe
verte. Et l'on doit ob/erver que les fleurs de zinc, quoi-
qu'en état de chaux, offrent les mêmes phénomènes
avec cet acide que le zinc même, ce qui ne s'accorde
point avec la théorie de nos Chimifles, qui veulent
qu'en général les chaux métalliques ne puifTent ê^re
attaquées par les acides. Ce vitriol de zinc ou vitriol
blanc, fc trouve dans le fein de la terre (y) , rarement
en criflaux réguliers, mais plutôt en (lalaélites , & quel-
quefois en filets blancs; il fe couvre d'une efilorefcence
bleuâtre s'il contient du cuivre.
(y) On n'a point encore trouvé, dit M. Bergman, d'autres
fels de zinc, dans le fein de la terre, que celui qui vient de l'acide
vitriolique ; & le vitriol natif de zinc eft rarement pur , mais mêlé
au cuivre ou au fer, & fouvent à tous deux. Dijfertation fur le -Jne,
Minéraux , Tome III . R r
3:14 Histoire Naturelle
L'acide nitreux difTout le zinc avec autant de rapidité
crue de puiiïance , car il peut en difToudre promptement
une quantité égale à la moitié de Ton poids; la di/To-
jution faturée n'eft pas limpide comme l'eau , mais un
peu obfcure comme de l'huile, & fi le zinc efî; mêlé
de quelques parties de fer, ce métal s'en fépare en /è
précipitant , ce qui fournit un autre moyen que celui
du fbufre pour purifier le zinc L'on doit encore ob/èrver
que la chaux & les fleurs de zinc, fè diffolvent dans cet
acide &l dans l'acide vitriolique, & que par conféquent
cela fait une grande exception à la prétendue règle,
que les acides ne doivent pas difToudre les chaux ou
terres métalliques.
L'acide marin diiïbut aufiî le zinc très - facilement,
moins pleinement que l'acide nitreux , car il ne peut
en prendre que la huitième partie de fon poids; il ne
fe forme pas de criftaux après i'évaporation de cette
diflbiution, mais feulement un fel en gelée blanche <St
irès-déliquefcent , dont la qualité eft fort corrofive.
Le zinc, & même les fleurs de zinc, fe diffolvent
auffi dans l'acide du vinaigre, & il en réfulte des crif
taux ; il en eft de même de l'acide du tartre ; ainfi tous
les acides minéraux ou végétaux, <Sc jufqu'aux acerbes,
tels que la noix de gale, agiffent fur le zinc: les alkalis,
& fur - tout i'alkali volatil le dinx)lvent au/fi, & cette
dernière diffoluiion donne, après I'évaporation, un fel
blanc & brillant, qui attire l'humidité de l'air & tombe
en déliquefcen-ce.
DES Minéraux, 315
Voilà le précis de ce que nous favons fur le zinc :
on voit qu'étant très - volatil , il doit être difleminé
par-tout; qu'étant fufccptible d'altération & de diiïblu-
lion par tous les acides & par les alkalis, il peut fe
trouver en état de chaux oii de précipité dans le fein
de la terre ; d'ailleurs, les matières qui le contiennent
en plus grande quantité , telles que la pierre calaminaire
& les blendes , font compofées des détrimens du fer ôl
d'autres minéraux ; l'on ne peut donc pas douter que
ce demi-métal ne foit d'une formation bien poftérieure
à celle des métaux.
Rr \]
3i6 Histoire Naturelle
DE LA PLATINE.
Il n'y a pas un demi-fiècle qu'on connoît la Platine
en Europe, & jamais on n'en a trouvé clans aucune
région de l'ancien continent; deux petits endroits dans
ie. nouveau Monde , l'un dans les mines d'or de San-
tûfé, à la nouvelle Grenade; l'autre dans celle de Clwco,
province du Pérou, font jufqu'ici les feuls lieux d'où l'on
ait tiré cette matière métallique, que nous ne connoif-
fons qu'en grenailles mêlées de fablon magnétique , de
paillettes d'or, & Ibuvent de petits criftaux de quartz,
de topaze, de rubis, & quelquefois de petites gouttes
de mercure; j'ai vu & examiné de très-près, cinq ou
fix fortes de platine que je m'étois procurée par diverfes
perfonnes & en diiférens temps ; toutes ces fortes étoient
mêlées de fablon magnétique & de paillettes d'or; dans
quelques-unes il y avoit des petits criflaux de quartz,
de topaze , cScc. en plus ou moins grande quantité ;
mais je n'ai vu de petites gouttes de mercure que dans
i'une de ces fortes de platine (a) ; il fe pourroit donc
que cet état de grenaille, fous lequel nous connoifTons
la platine, ne fût point Ion état naturel, & l'on pourroit
(a) M. Lewis & M. le Comte de Milly ont tous deux
reconnu des globules de mercure dans la platine qu'ils ont examinée.
M. Bergman dit de même qu'il n'a point traité de platine dans
laquelle il n'en ait trouvé. Opujcules , tome II , page i 8 ^.
DES Minéraux, 317
croire qu'elle a été concaflce dans les moulins où l'on
broie les minerais d'or & d'argent, & que les goutte-
lettes de mercure qui s'y trouvent quelquefois, ne
viennent que de l'amalgame qu'on emploie au traite-
ment de ces mines ; nous ne fommes donc pas certains
que cette forme de grenaille foit fa forme native^ d'autant;
qu'il paroît, par le témoignage de quelques Voyageurs,
qu'ils indiquent la platine comme une pierre métal-
lique très-dure, intraitable, dont néanmoins les naturels
du pays avoient, avant les Efpagnols , fait des haches
&. autres iniirumens tranchans (ù) j ce qui fuppofe né-
ceflairement qu'ils la trouvoient en grandes maffes, ou
qu'ils avoient l'art de la londre fans doute avec l'addi-
tion de quelqu'aiitre métal; car par elle-même la platine
eft encore moins fuhble que la mine de fer qu'ils
n'avoient pas pu fondre. Les Efpagnols ont auffi fait
(b) Dans le Gouvernement du Marannon, les habitans afTuroient
que dans le canton des mines d'or , ils tiroient (ouvent d'un lieu
nomnië Picari , une autre forte de métal pbs dur que i'or , mais
blanc, dont ils avoient fait anciennement des haches & des couteaux,
& que ces outils s'cmouflant facilement , ils avoient ceflé d'en faire.
Hijiolre générale des voyages , tome- X IV , page 20 M. Ulloa,
dans fon Voyage imprime' à Madrid en 1748 , dit expreffément,
qu'au Pt rou , dans le Bailliage de Choeo , il fe trouve des mines
d'or que l'on a été obligé d'abandonner à caufe de la platine dont
le minerai eft entre-mêlé ; que cette platine eft une pierre ( Pïedra ) ,
{\ dure qu'on ne peut la brifer fur l'enclume , ni la calciner , ni
par conféquent en tirer le minerai qu'elle renferme , fans un travail
infini.
3i8 Histoire Naturelle
clifférens petits ouvrages avec la platine alliée avec d'autres
métaux; perfonne en Europe ne la connoît donc dans
fon état de nature , & j'ai attendu vainement pendant
nombre d'années , quelques morceaux de platine eu
maffe , que j'avois demandé à tous mes Correfpondans
en Amé|*ique. M. Bowles , auquel le gouvernement
d'Elpagne, paroît avoir donné- fà confiance au fujet de
ce minéral, n'en a pas abufé; car tout ce qu'il en diç
ne nous apprend que ce que nous fàvions déjà.
Nous ne favons donc rien, ou du moins rien, au
jufle de ce que l'Hilloire Naturelle pourroit nous ap-
prendre au fujet de la platine , fmon qu'elle fe trouve
en deux endroits de l'Amérique méridionale, dans des
mines d'or, & jufqu'ici nulle part ailleurs; ce feul fait,
quoique dénué de toutes fes circonftances, fuffit, à
mon avis, pour démontrer que la platine eft une matière
accidentelle plutôt que naturelle ; car toute fubflance
produite par les voies ordinaires de la Nature , cA géné-
ralement répandue au moins dans les climats qui jouifTent
de la même température; les animaux, les végétaux,
les minéraux font enraiement foumis à cette rède uni-
verfelle; cette feule confidération auroit dû fufpendre
l'empreflement des Chimifles, qui, fur le fimple examen
de cette grenaille, peut-être artificielle & certainement
îiccidentelle, n'ont pas héfité d'en faire un nouveau
métal , & de placer cette matière uou\e\\c non-(eu\ement
ail rang des anciens métaux, mais de la vanter comme un
DES Minéraux. 319
troifième métal auiïi parfait que l'or & l'argent, fans faire
réflexion que les métaux fè trouvent répandus dans toutes
les parties du Globe; que la platine, fi c'étoit un
métal, feroit répandue de même, que dès-lors on ne
clevoit la regarder que comme une production acciden-
telle , entièrement dépendante des circonflances locales
des deux endroits où cWe fe trouve.
Cette confidération , quoique majeure, n'eft pas la
feule qui me faffe nier que la platine ibit un vrai métal.
J'ai démontré par des obfcrvations exades (cj j qu'elle
eft toujours attirable à l'aimant; la Chimie a fait de
vains efforts pour en féparer le fer , dont fa fubflance
cfl intimement pénétrée ; la platine n'efl donc pas un
métal fnnple & parfait, comme l'or & l'argent, puif-
qu'elle efl toujours alliée de fer. De plus , tous les
métaux , & fur-tout ceux qu'on appelle parfaits, font
tjès-duéliles ; tous les alliages au contraire font aigres;
or la platine efl pltis aigre que la plupart des alliages,
& même après plufieurs fontes & diffolutions , elle
n'acquiert jamais autant de duélilité que le zinc ou le
bifmuth, qui cependant ne font que des demi-métaux,
tous plus aigres que les métaux.
Mais cet alliage où le fer nous efl démontré par
J'aélion de l'aimant , étant d'une denfité approchante de
(c) Voyez dans le premier volume in - 4.° des Supplcmens^
jpage j 0 j , k Mémoire qui a pour titre ; Obferyaiions fur la Platinf*
-^20 Histoire Natu relle
celle de l'or; j'ai cru être fondé à préfumer que la
platine n'ell qu'un mélange accidentel de ces deux
métaux très - intimement unis : les eflais qu'on a fait
depuis ce temps pour tiklier de féparer le fer de la
platine & de détruire fon magnétifme ne m'ont pas
fait changer d'opinion ; la platine la plus pure , celle
entr'autres qui a été fi bien travaillée par M. le baron
de Sickengen ((tJ) , & qui ne donne aucun figne de
magnétifme, devient néanmoins attirable à l'aimant, dès
qu'elle efl comminuée & réduite en très-petites parties;
la préfence du fer ed donc confiante dans ce minéral,
& la préfence d'une matière aufTi denfe que l'or y efl
également & évidemment auffi confiante; & quelle peut
être cette matière denfe fi ce n'efl pas de l'or! Il efl
vrai que jufqu'ici l'on n'a pu tirer de la platine , par
aucun moyen, l'or, ni même le fer qu'elle contient,
(d) La platnie , même la plus épurée, contient toujours du ïer. M.
ie Comte de Milly, par une lettre date'e du 18 Novembre «781,
me marque «qu'ayant oublie' pendant trois à quatre ans, un morceau
y> de platine purifiée par M. le Baron de Sikengen , & qu'il avoil
39 laiflce dans de l'eau -forte la plus plus pure, pendant tout ce
55 temps , il s'y étoit rouillé , & que l'ayant retiré , il avoit étendu la
» liqueur qui reftoit dans le vafe, dans un peu d'eau diftillce & <]u'y
» ayant ajouté de l'alkali phlogiftiqué , il avoit obtenu fur h champ
33 un précipité très-aUondant , ce qui prouve indubitablement que la
» platine la plus pure & que M. de Sikengen afTure être dépouillée
>» de tout fer , en contient encore , 6c que par ^conféquent le fer
entre dans fa compofition »,
&
DES Minéraux. 321
& que pour qu*il y eût fur TtAence de ce minéral
dcmonflration complète, il faudroit en avoir tiré &
féparc le fer ôl For , comme on fépare ces métaux après
les avoir allies; mais ne devons-nous pas confidérer, &
ne i'ai-je pas dit, que le fer n'étant point ici dans Ton
état ordinaire, Sl ne s'étant imi à l'or qu'après avoir
perdu pre/que toutes fes propriétés, à l'exception de
fa denfité Si. de fon magnctifme, il fè pourroit que l'or
s'y trouvât de même dénué de fa duélilité , & qu'il
n'eût confervé, comme le fer, que fa feule denfité , &
dès-lors ces deux métaux qui compofent la platine, font
tous deux dans un état inacceffible à notre art, qui ne
peut agir fur eux , ni même nous les faire reconnoître
en nous les préfentant dans leur état ordinaire ! Et n'efl-ce
pas par cette raifon que nous ne pouvons tirer ni le
fer ni l'or de la platine, ni par conféquent féparer ces
métaux , quoiqu'elle foit compofée de tous deux î Le
fer en effet n'y efl pas dans fon état ordinaire, mais
tel qu'on le voit dans le fablon ferrugineux qui accom-
pagne toujours la platine ; ce fablon , quoique très-
magnétique , efl infufible , inattaquable à la rouille ,
infoiuble dans les acides; il a perdu toutes les pro-
priétés par lefquelles nous pouvions l'attaquer, il ne
lui eft refté que fà denfité &. fon magnétifme , pro-
priétés par lefquelles nous ne pouvons néanmoins le
méconnoître. Pourquoi l'or que nous ne pouvons de
même tirer de la platine, mais que nous y reconnoilfons
Mnétûux, Tome IIL S f
3 22 Histoire Naturelle
auffi évidemment par fa denfité , n'auroit-il pas éprouvé
comme le fer , un changement qui lui auroit ôté fà
ductilité & fa flifibilité î l'un efl po/Tible comme l'autre,
& ces productions d'accidens, quoique rares, ne peuvent-
elles pas fe trouver dans la Nature! Le fer en état de
parfaite duéliiité , eu prcfque infufible , & ce pourroit
être cette propriété du fer qui rend l'or dans la platine
très- refracl:aire; nous pouvons auffi légitimement fiip-
pofer que le feu violent d'un volcan, ayant converti
une mine de fer en mâchefer & en fablon ferrugineux
magnétique, &. teJ qu'il fe trouve avec la platiïie, ce
feu aura en même temps, & par le même excès de
force, détruit dans l'or toute duéliliié! Car cette qualité
n'eft pas eflentielle , ni même inhérente à ce métal,
puifque la plus petite quantité d'éiain ou d'arfcnic fa
lui enlève ; <& d'ailleurs , fait-on ce que pourroit pro-
duire fur ce métal , un feu plus violent qu'aucun de
nos feux connus! Pouvons -nous dire fi dans ce feu de
volcan, qui n'a laiffé au fer que fon magnétifme & à
l'or fa denfué , il n'y aura pas eu des fumées arfeni-
cales qui auront blanchi l'or & lui auront ôté toute fa
dudilité , & fi cet alliage du fer & de l'or , imbus de
îa vapeur d'arfenic , ne s'ell pas fait par un feu fupé-
rieur à celui de notre art! Devons-nous donc être furpris
de ne pouvoir rompre leur union; & doit-on faire un
métal nouveau, propre & particulier, une fubflance
fimple, d'une matière qui efl évidemment mixte, d'un
D E s M I N É R AU X. 323
compofé formé par accident en deux feuls lieux de la
terre, d'un compofc qui préfente à la fois, la denfité de
l'or & le magiictifme du fer, d'une fubftance en un
mot qui a tous les cara6lères d'un alliage, & aucun de
ceux d'un métal pur!
Mais comme les alliages faits par la Nature, font
encore du refTort de l'Hifloire Naturelle, nous croyons
devoir, comme nous l'avons fait pour les métaux,
donner ici les principales propriétés de la platine :
quoique très - denfe elle eft très - peu duélile , prefque
infufiblc fans addition, fi fixe au feu qu'elle n'y perd
rien ou prefque rien de fon poids, inaltérable & réfiflante
à l'adlion des élémens humides, indiflbluble comme
i'or, dans tous les acides fnnples (e) , Sl fe laiffant
('ej Nota. M. Tillet, l'un de nos plus fa vans Académiciens, &
très-exacH: Obfervateur, a reconnu que, quoique la platine foit
indifloluble en elle-même par les acides Innples , elle le dillout néan-
moins par l'dcide nitreux pur, lorfqu'elle efi: alliée avec de l'argent ai.
de l'or. Voici la note qu'il a bien voulu me communiquer à ce fujet :
J'ai annoncé dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, année «c
/ ;^/p , que la platine, foit brute, foit rendue dudile par les procédés «<
connus, eft dilfuluble dans l'acide nitreux pur, lorfqu'elle efl alliée <c
avec une certaine quantité d'or & d'argent. Afin que cet alliage foit <t
complet, il faut le faire par le moyen de la coupelle, & en em- oc
ployant une quantité convenable de plomb. On traite alors , par te
la voie du départ , le bouton compofé des trois métaux , comme ce
un mélange fnnple d'or &. d'argent; la diflolution de l'argent & «c
de la platine efl complète, la liqueur efl tranfparente, & il ne refte ce
que l'or au fond du matras, foit dans un état de divifion fi on ace
Sf ij
7»
3»
324 Histoire Naturelle
diffoudre comme lui, par la double puiffance des acides
nitreux & marins réunis.
» mis beaucoup d'argent, Toit en forme de cornet bien conlervé
x) fi on n'a mis que trois ou quatre parties d'argent égales à celle
» de l'or. Il tiï vrai que fi on emploie trop de platine dans cette
» opération, J'or mêlé avec elle ia défend un peu des attaques de
» l'acide nitreux , & il en conlervé quelques parties. Il faut un
» mélange parfait des trois métaux pour que l'opération réufllfle
j> complètement : s'il fe trouve quelques parues dans l'alliage où
n il n'y ait pas affez d'argent pour que la diOolution ait lieu , la
platine réfifte, comme J'or, à l'acide , & relie avec lui dans le pré-
cipité ; mais fi on ne met dans l'alliage c[u'un douzième de platine ,
3> ou encore mieux, un vingt-quatrième de l'or qu'on emploie, alors
>» on parvient à diffoudre le total de la platine , &. for mis en expé-
» rience ne conferve exad:ement que Ion poids. Il n'en eft pas ainfi
» d'un alliage dans lequel il n'entre que de l'argent «Se de la platine:
» la difloluiion n'en eft proprement une que pour l'argent ; la
» liqueur refte trouble Se noirâtre, malgré une longue & forte ébulli-
» tien; il fe fait un précipité noir & abondant au fond du inatras,
3» qui n'efl que de la platine réduite en poudre & fubdivifce en une
35 infinité de particules , comme elle i'étoit dans l'argent avant qu'il
33 fut dilfous. Cependant fi on laifle repofer la liqueur pendant
«quelques jours, elle s'éclaircit & devient d'une couleur brune,
» qu'elle doit lans doute à quelques parties de la platine qu'elle a
3» diffoutes , ou qu'elle tient en fufpenfion. Il paroît donc que dans
3) cette opération , c'ed à la préfence feule de l'or qu'eft due la
» dilfolution réelle & aflez prompte de la j^latine par l'acide nitreux
33 pur ; que l'argent ne contribue qu'indiredement à cette dilfolu-
» tion; qu'il la facilite à la vérité, mais que fans l'or, il ne fert qu'à
33 procurer une divifion mécanique de la platine , «?i encore cette
divifion n'a-t-elle lieu que parce que l'argent dilfout lui-même,
ne peut ] lus conferver la platine fubdivifce avec laquelle il
faifoit corps 33.
39
30
DES M J N É R AU X, 325
L'or mêlé avec ie plomb le rend aigre, la platine
protluit le mcme effet ; mais on a prétendu qu'elle ne
fe fcparoit pas en entier du plomb comme l'or, dans
la coupelle, au plus grand feu de nos fourneaux, dès-
iors le plomb adhère plus fortement à la platine que
i'or dont ii fe fcpare en entier, ou prefque en entier (f);
on peut même reconnoître par l'augmentation de fon
poids, la quantité de plomb qu'elle a faifi & qu'elle
retient fi puifTamment, que l'opération de la coupelle
ne peut l'en féparer; cette quantité, félon M. Schœffer,
efl de deux ou trois pour cent; cet habile Chimifle,
qui le premier a travaillé la platine, dit avec raifon,
qu'au miroir ardent, c'eft-à-dire, à un feu fupérieur à
celui de nos fourneaux, on vient à bout (ïtw féparer
tout le plomb &i de la rendre pure ; elle ne diffère
donc ici de l'or qu'en ce qu'étant plus difficile à
fondre, elle fe coupelle auffi plus difficilement.
En mêlant partie égale de platine &. de cuivre, on
les fond prefque auffi facilement que le cuivre feul ,
& cet alliage ell à peu -près auffi fuhble que celui de
l'or & du cuivre; elle fe fond un peu moins facilement
avec l'argent, il en faut trois parties fur une de platine,
/f) « L'or le plus pur ne fe fépare jamais parfaitement du plomb
dans la coupelle ; fi vous faites pafier un gros d'or fin à la «c
coupelle dans une quantité quelconque de plomb , le bouton «
d'or, quelque brillant qu'il foit , pefera toujours un peu plus «
d'un gros ». Remarque communiquée par M. TilUt.
326 Histoire Naturelle
6l l'alliage qui refaite de cette fonte, efl aigre Se dur;
ou peut en retirer l'argent par l'acide nitreux , & avoir
ainfi la platine faus mélange , mais néanmoins avec
quelque perte: elle peut de même fe [ondre avec les
autres métaux; & ce qui eu très - remarquable , c'cH
que le mélange d'ime très - petite quantité d'ar/ènic,
comme d'une vingtième ou d'une vingt-quatrième partie,
fuffit pour la faire fondre prefque auffi aifément que
nous fondons le cuivre ; il n'eil: pas même n-^ceflaire
d'ajouter des fondans à l'arfenic, comme loriqu'on le
fond avec le fer ou le cuivre, il fuffit feul pour opérer
très-promptement la fuGon de la platine , qui cependant
n'en devient que plus aigre & plus caiïànîe : eniin lorf-
qu'on la mcîe avec l'or, il n'y a pas moyen de les
féparer fans intermède, parce que la platine ik l'or font
également fixes au feu, &i ceci prouve encore que la
nature de la platine tient de très -près à celle de l'or:
ils fe fondent enfemble affez ailèment; leur union efl
toujours intime 6w confiante, <Scde même qu'on remarque
des furfaces dorées dans la platine qui nous vient en
grenailles, on voit auffi des filets ou petites veines d'or
dans la platine fondue ; quelques Chimifles prétendent
înême que l'or efl un diffolvant de la platine, parce
qu'en effet, fi l'on ajoute de l'or à l'eau régale, la
diffolution de la platine fè fait beaucoup plus promj)te-
jiient & plus complètement, & ceci, joint à ce que nous
îîvoiis dit de fa diffolution par l'acide nitreux, efl encore
DES Minéraux. 327
une preuve & un effet de la grande affinité de la platine
avec i*or; on a trouvé néanmoins le moyen de féparer
i'or de la platine, en mêlant cet alliage avec l'argent (gj, &
{g) « Lorfqu'on a mêlé de l'or avec de la platine , il y a un
moyen fur de les féparer , celui du départ , en ajoutant au mélange <c
trois fois autant d'argent ou environ qu'il y a d'or: l'acide nitieux «
diflout l'argent & la platine , & l'or tout entier en efl feparé ; «c
on verfe enfuite de l'acide marin fur la lic{ueur chargée de l'argent «c
& de la platine , fur le champ on a un précipité de l'argent «
feul; & comme on a formé par-là une eau régale, la platine «<
n'en eft que mieux maintenue dans la liqueur qui fumage l'argent «<
précipité. Pour obtenir enfuite la platine , on fait évaporer fur «
un bdin de fable la licjueur qui la contient , & on traite le réfidu «
par le flux noir , en y ajoutant de la chaux de cuivre propre à u
ralîembler ces particules de platine ; on lamine après cela le bouton «
de cuivre qu'on a retiré de l'opération , di. on le fait difioudre à «
froid dans de l'efprit de nitre affoibli ; la platine fe précipite au «
fond du matras , & après un recuit , elle s'annonce avec les carac- «
tcres métalliques , mais avec un déchet de moitié ou environ , fur c^
la quantité de platine qu'on a employée. Voilà le procédé que «
j'ai fuivi (k par lequel on voit que je n'ai rien pu perdre par «
un défaut de foins ; après des opérations réitérées on parvient à «
réduire la platine à peu de grains , & enfin à la perdre totalement, ce
Ces expériences annoncent que la platine fe décompofe & n'eA «
pas un métal fimple ; la matière noire & ferrugineule fe montre <c
à chaque opération , & fe trouve mêlée avec celle qui a confervé «
l'état jnétallique ; cette matière noirâtre qui n'a pu reprendre lès «
caradères métalliques , eft fort légère <3c ne fe précipite qu'avec «f
peine ; on ne croiroit jamais qu'elle eût appartenu à un métal «
aufll pefant que la platine ; quatre ou cinq grains de cette «
matière décompofée ont le volume d'une noifeite 3?. N«tc de
M. Tillet,
?28 Histoire Naturelle
ce moyen eft aflez fur pour qu'on ne doive plus craindre
de voir le titre de l'or altéré par le mélange de la platine.
L'or eft précipité de fa diiïblution par le vitriol de
fer, & la platine ne l'efl pas; ceci fournit un moyen
de féparer Tor de la platine s'il s'y trouvoit artificielle-
ment allié, mais cet intermède ne peut rien fur leur
alliage naturel. Le mercure qui s'amalgame fi puiiïamment
avec l'or, ne s'unit point avec la platine; ceci fournit
un fécond moyen de reconnoître l'or falfiiié par le
mélange de la platine ; il ne faut que réduire l'alliage
en poudre, & la préfenter au mercure qui s'emparera
de toutes les particules d'or, ôl ne s'attachera point à
celles de la platine.
Ces différences entre l'or & la platine, font peu
confidérables en comparaifbn des rapports de nature
que ces deux fubftances ont Tune avec l'autre; la platine
ne s'eft trouvée que dans des mines d'or, & feulement
dans deux endroits particuliers, & quoique tirée de la
même mine, fa fubftance n'efl pas toujours la même;
car en eflTayant fous le marteau plufieurs grains de platine,
telle qu'on nous l'envoie, j'ai reconnu que quelques-
uns de ces grains s'étendoient affez facilement , tandis
que d'autres fe brifoient fous une percuffion égale ;
cela feul fuffiroit pour faire voir que ce n'efl point un
métal natif & d'une nature univoque, mais un mélange
équivoque, qui fe trouve plus ou moins aigre, fclon la
quantité &. la qualité des matières alliées.
Quoique
DES AI I N É R A U X. 329
Quoique la platine foit blanche à peu-près comme
l'argent , fa clifToIution efl jaune , & même plus jaune
que celle de l'or ; cette couleur augmente encore à
mefure que la clifToluiion fe fature, & devient à la fois
tout-à-fait rouge; cette dernière couleur ne provient-elle
pas du fer toujours uni à la platine (hj f En faifant
évaporer lentement cette difTolution, on obtient un fei
criftallifé, femblable au fel d'or; la diffolution noircit
de même la peau, &: laifTe aulfi précipiter la platine,
comme l'or, par l'éther & par les autres huiles cthérées;
enfin fon fel reprend, comme celui de l'or, fon état
métallique , fans addition ni fecours.
Le produit de la diffolution de la platine paroît différer
de l'or di(fous, en ce que le précipité de platine, fait
par l'alkali volatil , ne devient pas fulminant comme
l'or ; mais auffi peut-être que fi l'on joignoit une petite
quantité de fer à la diffolution d'or , le précipité ne
(h) La platine ie difi'out dans l'eau rtgale , qui doit être compofée
de parties égales dacide nitreux & d'acide marin. II en faut environ
leize parties pour une partie de platine , & il faut qu'elle foit
aidée de la chaleur. ..... La diflolution prend une couleur Jaune
qui pafle au rouge -brun- foncé ; il refte au fond du vaifleau des
matières étrangères qui étoient mêlées à la platine , & particulière-
ment du fable magnétique. La diffolution de la platine fournit par
le refroidiflement , de petits criflaux opaques de couleur jaune &
d'une faveur acre ; ces criftaux fe fondent imparfaitement au feu ,
i'acide fe diffipe, & il refle une chaux grife-obfcure. Elémens de
Chimie , par Al, de Alorveau , tome II, pages 266 & 26 j»
Minéraux, Tome IIL Tt
330 Histoire Naturelle
feroit pas fulminant ; je préfume de même qiie c'cfl
par une caufe femblable que le précipité de la platine
par i'étain, ne fe colore pas de pourpre comme celui
Je Tor; & dans le vrai, ces différences font fi légères
en comparaifbn des grands & vrais rapports que la
platine a conflamment avec l'or , qu'elles ne fuiii/ènt
pas à beaucoup près pour faire un métal à part &
indépendant, d'une matière qui n'efl très - vraifembla-
Liement qu'altérée par le mélange du fer &. de quelques
vapeurs arfenicales ; car, quoique notre art ne puifFe
rendre à ces deux métaux altérés leur première efTence,
il ne faut pas conclure de fon impuiffance à rimpo/Ti-
bilité; ce feroit prétendre que la Nature n'a pu faire
ce que nous ne pouvons défaire, &. nous devrions plutôt
nous attacher à l'imiter qu'à la contredire.
Aucun acide fimple, ni même le fublimé corrofif
ni le foufre n'agiffent pas plus fur la platine que fur
i'or, mais le foie de foufre les diffout également; toutes
les fiibflances métalliques la précipitent comme l'or, &
fon précipité conferve de mcme fa couleur & fon
brillant métallique; elle s'allie comme l'or avec tous les
métaux (5l les demi -métaux.
La différence la plus fenfible qu'il y ait entre les
propriétés fecondaires de l'or & de la platine, c*efl la
facilité avec laquelle il s'amalgame avec le mercure, &
la réfiftance que la platine oppofè à cette imion ; il me
femble que c'eft par le fer & par Tarfenic, dont la
DES Minéraux. 351
platine efl intimement pénétrée, que Tor aura perdu Ton
attradion avec le mercure qui, comme l'on fait, ne
peut s'amalgamer avec le fer, & encore moins avec
i'arfenic ; je fuis donc perfuadc qu'on pourra toujours
donner la raifon de toutes ces diiférences en convenant
avec moi, que la piatine efl un or dénaturé par le
mélange intime du fer & d'une vapeur d'arfenic.
La platine mêlée en parties égales avec l'or, exige
un feu violent pour fe fondre; l'alliage eft blanchâtre,
dur, aigre & caflant; néanmoins en le faifant recuire,
il s'étend un peu fous le marteau; û on met quatre
parties d'or fur une de platine , il ne faut pas un fi
grand degré de feu pour les fondre, l'alliage conferve
à peu-près la couleur de l'or, &. Ton a obfervé qu'en
général , l'argent blanchit l'or beaucoup plus que la
platine; cet alliage de quatre parties d'or fur une de
platine, peut s'étendre en lames minces fous le marteau.
Pour fondre la platine & l'argent mêlés en parties
égales, il faut un feu très -violent, & cet alliage efl
moins brillant & plus dur que l'argent pur, il n'a que
peu 'de dudilité , fa fubflance efl grenue , les grains en
font affez gros, & paroiffent mai liés; & lors même
que l'on met fept ou huit parties d'argent fur une de
platine, le grain de l'alliage efl toujours gro/fier; on
peut par ce mélange faire criflallifer très - aifément
l'argent en fufion (ij , ce qui démontre le peu d'affinité
f - - — "
(iJ *t Les crinallifaiions confiantes de l'argent où il eft entré der
Tt i;
332 Histoire Naturelle
de ce métal avec la platine, puifqu'il ne contrarie avec
«lie qu'une union imparfaite.
Il n'en eft pas de même du mélange de la platine
avec le cuivre, c'ell de tous les métaux celui avec
lequel elle fe fond le plus facilement; mêlés à parties
égales, l'alliage en efl dur & caffant ; mais fi l'on ne
met qu'une huitième ou une neuvième partie de platine,
l'alliage efl d'une plus belle couleur que celle du cuivre;
il eil: au/Ti plus dur, & peut recevoir un plus beau poli,
il réfifle beaucoup mieux à l'imprefTion des élémens
humides, il ne donne que peu ou point de vert-de-
gris, &L il efl afTez du(5lile pour être travaillé à peu-près
comme le cuivre ordinaire. On pourroit donc en alliant
ie cuivre & la platine dans cette proportion , efTayer
d'en faire des vafes de cuifmes, qui pourroient fe pafTcr
d'étamage, & qui n'auroient aucune des mauvaifcs qualités
du cuivre, de l'étain &l du plomb.
La platine , mêlée avec quatre ou cinq fois autant
de fonte de fer, donne un alliage plus dur que cette
» la platine , feml^Ient indiquer réellement le peu d'affinité qu'il y
» a entre ces deux métaux , il paroît que l'argent tend à fe féparer
•>■> de ia platine. On a infailliblement des criflallifations d'argent bien
35 prononcées , en fondant huit parties d'argent pur avec une partie
» de platine & en les paflant à la coupelle. J'ai remis pour Je
» Cabinet du Roi des boutons de deux gros ainiî criftalijfés à
» leur furface ; la loupe la moins forte d'un microfcope fait dilîinguer
nettement les petites pyrajiiides de l'argent ». Remarque ((^mmuniquée
far M, Tillet.
DES Minéraux. 533
fonte, & encore moins fujet à la rouille, il prend un
beau poli ; mais il efl trop aigre pour pouvoir être mis
en Œuvre comme l'alliage du cuivre. M. Lewio, au-
quel on doit ces obfervations, dit auiïi que la platine iè
fond avec i'ctain en toutes proportions, depuis parties
égales jufqu'à vingt -quatre parties d'étain fur -une de
platine , & que ces alliages font d'autant plus durs &
plus aigres, qtie la platine efl en plus grande quantité,
en forte qu'il ne paroît pas qu'on puiife les travailler:
il en efl de même des alliages avec le plomb, qui mcme
exigent un feu plus violent que ceux avec l'étain. Cet
Iiabile Chimifte a encore obfervé que le plomb &
i'argent ont tant de peine à s'unir avec la platine, qu'il
tombe toujours une bonne partie de la platine au fond
du crcufet, dans fa fufion avec ces deux métaux, qui
de tous ont par conféquent le moins d'affinité avec ce
minéral.
Le biilnutlî, comme Je plomb, ne s'allie qu'impar-
faitement avec la platine, &l l'alliage qui en rcfulte efl
caffant au point d'être friable: mais de la même manière
que dans les métaux , le cuivre efl celui avec lequel la
platine s'unit le plus facilement , il fe trouve que des
demi-métaux, c'efl le zinc avec lequel elle s'unit auffi le
plus parfaitement; cet alliage de la platine & du zinc
ne change point de couleur, &l reffemble au zinc pur;
il efl fetdement plus ou moins bleuâtre, félon la pro-
portion plus ou moins grande de la platine dans le
334 Histoire Naturelle
mélange; il ne fe ternit point à l'air, mais il efl plus
aigre que le zinc qui, comme l'on fait, s'étend fous
ie marteau: ainfi cet alliage de la platine & du zinc,
quoique facile, n'offre encore aucun objet d'utilité ; mais
fi l'on mêle quatre parties de laiton ou cuivre jaune
avec une partie de platine , l'union paroît s'en faire d'une
manière intime , la fubftance de l'alliage efl compade
& fort dure, le grain en efl très -fin & très -ferré, &
il prend un poli vif qui ne fe ternit point à l'air ; fans
être bien duélile, cet alliage peut néanmoins s'étendre
aflez fous le marteau, pour pouvoir s'en fervir à faire
des miroirs de télefcope , & d'autres petits ouvrages
dont le poli doit réfifler aux impreflions de l'air.
J'ai cru pouvoir avancer il y a quelques années (k^,
&L je crois pouvoir foutenir encore aujourd'hui , que
Ja platine n'ell point un métal pur, mais feulement un
alliage d'or &l de fer, produit accidentellement & par
des circonllances locales; comme tous nos Chimifics,
d'après M." SchœfFer & Lewis , avoient fur cela pris
Jeur parti , qu'ils en avoient parlé comme d'un nouveau
métal parfait, ils ont cherché des raifons contre mon
opinion, & ces raifons m'ont paru fe réduire à une
feule obje6lion que je lâcherai de ne pas laiffer fans
réponfe : « Si la platine , dit un de nos plus habiles
» Chimiftes (l), étoit un alliage d'or & de fer , d\t
(k) Supplémens, tome I, ïn-^' pages 301 Ù" fuiv.
(l) M. Macquer.
DES Minéraux, 335
devroit reprendre les propriétés de l'or à proportion
qu'on détruiroit, & qu'on lui enieveroit une pius grande
quantité de fon fer, & il arrive précifément le contraire;
loin d'acquérir la couleur jaune, elle n'en devient que
plus blanche , & les propriétés par lefquelles elle difîere
de l'or n'en font que plus marquées ». Il efl très-vrai
que fi l'on niéle de l'or avec du fer dans leur état
ordinaire , on pourra toujours les féparer en quelque
dofe qu'ils foient alliés, & qu'à mefure qu'on détruira
& enlèvera le fer, l'alliage reprendra la couleur de l'or,
& que ce dernier métal reprendra lui-même toutes fes
propriétés dès que le fer en fera féparé; mais n'ai -je
pas dit <Sl répété que le fer, qui fe trouve fi intimement
uni à la platine, n'eft pas du fer dans fon état ordinaire
de métal , qu'il efl au contraire , comme le fàblon
ferrugineux, qui fe trouve mclé avec la platine, prcfque
entièrement dépouillé de fès propriétés métalliques, puif
qu'il eft prcfque infufible , qu'il réfifîe à la rouille, aux
acides , & qu'il ne lui refle que la propriété d'être
attirable à l'aimant: dès-lors l'objedion tombe, pui/que
le feu ne peut rien fur cette forte de fer ; tous les
ingrédiens , toutes les combinaifbns chimiques , ne
peuvent ni l'altérer ni le changer, ni lui ôter fà qualité
magnétique , ni même le féparer en entier de la platine
avec laquelle il refle conflamment & intimement uni ;
& quoique la platine conferve fa blancheur &. ne prenne
point la coideur de l'or, après toutes les épreuves qu'on
336 Histoire Naturelle
lui a fait fubir, cela n*eii prouve que mieux que i'art
ne peut altérer fa nature; fà fubftance efl; blanche &
doit l'être en efîèt en la fuppofant, comme je le fais,
compofce d'or dénaturé par l'arfenic, qui lui donne
cette couleur blanche, & qui, quoique très-voiati! , peut
néanmoins y être très - fixement uni , &: même plus
intimement qu'il ne l'efl dans le cuivre dont on fait
qu'il efl; très-difficile de le fcparer.
Plus j'ai combiné les obfervations générales & les
faits particuliers fur la nature de la platine , pljus e me
fuis perfuadé que ce n'efl qu'un mélange accidentel d'or
imbu de vapeurs ar/ènicales , & d'un fer brûlé autant
qu'il efl poffible, auquel le feu a par conféquent enlevé
toutes fes propriétés métalliques, à l'exception de fon
magnétifme ; je crois même que les Phyficiens , qui
réfléchiront fans préjugé , fiir tous les faits que je viens
d'expofer, feront de mon avis, & que les Chimifles
ne s'obftineront pas à regarder comme un métal pur
& parfait, une matière qui efl évidemment alliée avec
d'autres fubflances métalliques. Cependant voyons encore
de plus près les raifons fur lefquelles ils voudroient fonder
leur opinion.
En recherchant les différences de l'or & de la platine
jufque dans leur décompofition , on a obfervé, i.°que
la dilToIution de la platine dans l'eau régale ne teint
pas la peau, les os, les marbres & pierres calcaires en
couleur pourpre, comme le fait la diffolution de Tor,
& que
DES Minéraux, 337
& que la platine ne fe précipite pas en pouJre couleur
de pourpre, comme l'or précipite par l'étain; mais ceci
doit-il nous furprendrc, puifque la platine eft blanclie
(îx. que l'or c(t jaune' 2. L'e/prit-de-vin & les autres
huiles efTentielles , ainfi que le vitriol de fer, précipitent
l'or & ne précipitent pas la platine ; mais \\ me /èmble
que cela doit arriver , puifque la platine eft mêlée de
fer avec lequel le vitriol martial & les huiles efTentielles
ont plus d'affinité qu'avec l'eau régale , & qu'en ayant
moins avec l'or elles le laifTent fè dégager de fà difTo-
lution. 3. Le précipité de la platine par l'alkali volatil, ne
devient pas fulminant comme celui de for, cela ne doit
pas encore nous étonner; car cette précipitation pro-
duite par l'alkali, e(l plus qu'imparfaite, attendu que
la diffolution refle toujours colorée & chargée de platine,
qui dans le vrai, ed; plutôt calcinée que diffoute dans
l'eau régale: elle ne peut donc pas, comme l'or diffous
& précipité, faidr l'air que fournit l'alkali volatil, ni
par conféquent devenir fulminante. 4. La platine traitée
à la coupelle, foit par le plomb, le bifmuth ou l'anti-
moine , ne fait point {'éclair comme l'or , & femble
retenir une portion de ces matières, mais cela ne doit-il
pas néceffaircment arriver, puifque fa fufion n'eft pas
parfaite , &l qu'un mélange avec une matière déjà mé-
langée, ne peut produire une fubftance pure, telle que
celle de l'or quand il fait l'éclair ! ainfi toutes ces
différences, loin de prouver que la platine efl un métal
Aline rail X , Tcmc UL Lu
338 Histoire N aturelle
fimple & difFctent de l'or , fembiciit démontrer au
contraire , que c'eft un or dénaturé par l'alliage intime
d'une matière ferrugineufe également dénaturée; &. fi
notre art ne peut rendre à ces métaux leur première
forme , il ne faut pas en conclure que la fubflance de
la platine ne fbit pas compofée d'or &l de fer, pui/que
la préfence du fer y efl démontrée par l'aimant, & celle
de l'or par la balance.
Avant que la platine fut connue en Europe , les
Efpagnols, & même les Américains, l'avoient fondue
en la mêlant avec des métaux, & particulièrement avec
le cuivre & l'arfenic; ils en avoient lait différens petits
puvrages qu'ils donnoient à plus bas prix que de pareils
ouvrages en argent ; mais avec quelque métal qu'on
puifle allier la platine , elle en détruit ou du moins
diminue toujours la dudilité; elle les rend tous aigres
(Se caflans, ce qui fembie prouver qu'elle contient une
petite quantité d'arfenic, dont on fait qu'il ne faut qu'un
grain pour produire cet efiet fur une -maffe confidé-
rable de métal: d'ailleurs, il paroît que dans ces alliages
de la platine avec les métaux , la combinaifon des
fubflances ne fe fait pas d'une manière intime, c'ell
plutôt une agrégation qu'une union parfaite , &. cela
feul fuflit pour produire l'aigreur de ces alliages.
M. de Morveau , auffi favant Pbyficien qu'habile
Chimifte, dit avec raifon, que la denfité de la platine (m)
(wj belon M. Briflbn , h platine en grenaille ne pèfe que
DES Minéraux. 39
n'eft pas confiante, qu'elle varie même fuivant les diffé-
rens procédés qu'on emploie pour la fondre , quoiqu'elle
n'y prenne certainement aucun alliage (n) ; ce fait m '
démontre t-il pas deux chofesî la première, que la denfité
efl: ici d'autant moindre que la flifion efl plus impar-
faite, & qu'elle feroit peut-être égale à celle de l'or
fi l'on pouvoit réduire la platiue en fonte parfaite ;
c'efl ce que nous avons tâché de faire en en faifant
pafTer quelques livres à travers les charbons dans un
fourneau d'afjiiration ^oj: h féconde , c'efl que cet
10^2 livres 2 onces le j^ied cube, tandis que la platine tojidiie
âc écrouie pèfe 1423 livres 9 onces , ce qui furpalTe la denfité de
l'or battu & e'croui, qui ne pc(e que 1355 livres 5 onces. Si cette
détermination efl exade , on doit en inférer que la platine fondue
eft fufceptible d'une plus grande coinprefîion que l'or.
fn) EIcmens de Chimie, tome I , page i i 0.
(0) ce II efl impofîlble de fondre la platine ou or blanc dans u»
creufet, fans addition. Il re'fîfle à un feu aufîi vif, & mêine plus fort <t
que celui qui fond les meilleurs creuf'ets Il fondroit beaucoup ce
plus aife'ment fur les charbons , fans creufet ; mais on ne peut le ce
traiter ainfi , c{uand on n'en a pas une livre , & j'ctois dans ce *<
cas. Le phlogirtique des charbons ne contribue en aucune manière «
à la fufion de ce métal ; mais leur chaleur animée par le foufïïet «
de forge efl beaucoup plus forte qu(? celle du creufet ». Defcription
de l'or blanc , &c. par AI. Schœffer , Journal étranger , moh de
Novembre ly^J- — J'ai penfé fur cela comme M. ScliœfTer , & j'ai
Cru que je viendrois à bout de fondre parfaitement la platine en
la faifant pafTer à travers les charbons ardens, 5c en affez grande
quantité pour pouvoir la recueillir en fonte; M. de Morveau a bien
voulu conduire cette opération en ma préfence; pour cela nous avons
Uu ij
340 Histoire Naturelle
alliage de fer <Sc d'or, produit parmi accident de nature,
n'efl pas, comme les métaux, d'ime denfité confiante,
fait coiiflruire , au mois d'Août dernier 17S1 , wne efpcce de haut
fourneau de treize pieds huit ])ouces de hauteur loiale divifc'e en
cjuatre parties égales, favoir ; ia partie inférieure, de forme cylin-
drique de vingt pouces de haut fur vingt pouces de diamètre, formée
de trois dalles de pierre calcaire pofées fur une pierre de même
nature , creufée légèrement en fond de chaudière , ce cylindre éioit
])ercé vers le bas de trois ouvertures difpolées aux fommets d'un
triangle équilatéral infcrit ; chacune de ces ouvertures étoit de huit
pouces de longueur fur dix de hauteur , «Se défendue à l'extérieur
par des murs en brique , à la manière des gardes-tirans des fours
à porcelaine.
La féconde partie du fourneau formée de dalles de même pierre ,
^toit en cône de douze j^ouces de hauteur , ayant au bas vingt
pouces de diamètre & neuf pouces au-delfus ; Jes dalles de CQi
deux parties écoient entretenues par des cercles de fer.
La troifième partie formant un tuyau de neuf pouces de diamèire
^ de cinq pieds de Jong , ïni Low'iS.xuw.Q en briques.
Un tuyau de tôle de neuf pouces de diamètre & fix pieds de
hauteur, placé fur le tuyau de briques, formoit la quatrième & dernière
partie du fourneau ; on avoit pratiqué une porte vers le bas pour
la commodité du chargement.
Ce fourneau ainfi conflruit, on mit le feu vers les quatre heures
du foir , il tira d'abord aflez bien ; mais ayant éié chargé de charbon
jufqu'aux deux tiers du tuyau de briques , le feu s'éteignit , & on
eut affez de peine à le rallumer «5c à faire defcendre les charbons
qui s'engorgeoient ; l'humidité eut fans doute au/Ti quelque part à
cet effet; ce ne fui qu'à minuit que le tirage fe rétablit, on l'en-
treunt jufqu'à huit heures du matin en chargeant de charbon à la
hauteur de cinq pieds feulement, & bouchant alrernaiivement un
des tifards pour augmenter l'adivité des deux autres.
DES Minéraux. 341
mais d'une denfitc variable, oc rccilciiKin clilîûcme
fliivant les circoiilhnces, en forte que iclle platine cfl
Alors on jeta dans ce fourneau treize onces de jjlatiiie inélee
avec quatre livres de verre de bouteille puiverilc <5c tamik' , & on
continua de charger de cliarboii à la même hauteur de cinq pieds
au-defius du fond.
Deux heures après o\\ ajouta même quantitd de platine & de verre
pile.
On aperçut vers le midi quelques fcories à l'ouverture des lifards ;
elles ctoient d'un verre groflîer , tenace, pâteux, & préfentoient à
leur (urface des grains de platine non attaques; oa fit rejeter dans
le fourneau toutes celles cjue l'on put tirer.
On efîàya de boucher à la fois deux tifards, & l'élévation de la
flamme fit voir que le tirage en étoit réellement augmenté, mais \e%
cendres qui s'atnonceloient au fond , arrêtant le tirage , on prit le
parti de faire jouer un très-gros fouiîlet en introduifant la bufe
dans un des tiiàids , les autres bouchés, & pour lors on enleva le
tuyau de tôle qui devenoit inutile.
On reconnut vers les cinq heures du loir que les cendres étoient
diminuées; les fcories mieux fondues contenoient une infinité de
petits globules de platine; mais il ne fut pas poffible d'obtenir un
laitier allez fluide pour permettre la réunion des petits culois métal-
liques ; on arrêta le feu à minuit.
Le fourneau ayant été ouvert après deux jours de refroidilTemenr ,
on trouva fur le fond une mafle de fcories groflières , formées des
cendres vitrifiées &. de quelques matières étrangères portées avec
le charbon, la platine y étoit dilléminée en globules de difll'erentes
grofièurs , quelques-uns du poids de vingt-cinq à trente grdins ,
tous très-attirables à l'aimant: on obfeiva dans quelques parties des
fcories , une efpèce de criHallifation en rayons divergens, comme
i'afberte ou l'hématite flriée, La chaleur avoit été fi violente que
34- Histoire Naturelle
plus ou moins pefante que telle autre, tandis que dans
tout vrai métal, la denfké efl égale dans toutes les parties
de fa fubilance.
dans tout le pourtour intérieur , la pierre du fourneau étoit complè-
tement calcinée de trois pouces 5c demi d'e'paifleur & même entamée
en quelques endroits par la vitrification.
Les fcories pulvérifées furent débarrafTées par un lavage en grande
eau , de toutes les parties de chaux & même d'une portion de la
terre. On mit toute la matière refiante dans un très-grand creufet
de plomb noir avec une addition de fix livres d'alkali extemporané ;
ce creufet fut placé devant les foufflets d'une chaufferie ; en moins
de fix heures Je creu(èt fut percé du. côté du vent, & il fallut
arrêter le feu parce que la matière qui en fortoit couloit au-devant
des foufflets.
On reconnut le lendemain à l'ouverture du creufet que la maffe
vitreufe qui avoir coulé & qui étoit encore attachée au creufet,
tenoit une quantité de petits culots de platine du poids de foixante
à quatre-vingts grains chacun , & qui étoient formés de globules
refondus ; ces culots éioient de même rrès-magnéiiques, & plufieurs
préfentoient à leur furface des élémens de crifiallifation. Le refte
de la platine étoit à peine aglutiné.
On pulvérifa groflièrement toute la ma/fe, & en y promenant
le barreau aimanté , on en relira près de onze onces de platine ,
tant en globules qu'en poufîitre métallique ; cette expérience fut
faite aux forges de Bnflon , & en même temps nous répétâmes dans
mon laboratoire de Mombard l'expérience de la platine malléable;
on fit clifibudre un globule de platine dans l'eau régaie , on précipita
la diifolution par le lél ammoniac , le précipité mis dans un creufet
au feu d'une petite forge , tut promptement revivifié , quoique fans
fufion complète. Il s'étendit très - bien Ibus le marteau , & les
parcelles atténuées & divifées dans le mortier d'agatbe fe trouvèrent
encore ienfxbles à l'aimant.
DES Minéraux. 3 4.3
M. de Morveau a reconnu, comme moi & avec
moi, que la platine eft en elle-même magnétique,
indépendamment du fablon ferrugineux dont elle eft
extérieurement mêlée, & quelquefois environnée; comme
cette ohfervation a été contredite , & que Sciiaiièr a
prétendu qu'en faifànt feulement rougir Ja platine elle
cefToit d'être attirable à l'aimant; que d'autres Chimjiles
en grand nombre ont dit qu'après la fonte elle étoit
abfolument infenrd:)le à l'aétion magnétique , nous ne
pouvons nous difpenfer \Ie préfenter ici le rcfultat des
expériences, & les faits relatifs à ces affertions.
M/^ Macquer & Baume affurent avoir reconnu :
« Qu'en pouffant à un très-grand feu pendant cinquante
heures la coupellation de la platine, elle avoit perdu de «
fon poids , ce qui prouve que tout le plomb avoit paffé «
à la coupelle avec quelque matière qu'il avoit enlevée, *^
d'autant que cette platine pa(fée à cette forte é])reuve ^^
de coupelle étoit devenue affez duélile pour s'étendre <'
fous le marteau »^ fp) . Mais s'il étoit bien confiant que
la platine perdît de fon poids à la coupellation, & qu'elle
en perdit d'autant plus que le feu efl plus violent &
plus long -temps continué; cette coupellation de cin*
quante heures n'étoii encore qu'imparfaite, & n'a pas
réduit la platine à fou état de pureté: <« On n'étoit pas
encore parvenu , dit avec raifon M. de Morveau, à «
(p) Didionnaire de Chimie, art. Platine.
»
»
»
344 Histoire N atu relle
» achever ia coupeliatioii tic la platine lorfque nous avons
fait voir qu'il étoic polTibie de la rendre complète au
moyen d'un feu de la dernière violence, M. de Bufion a
inlcré dans (es Supplémens^</y'^ le détail de ces expériences
>) qui ont fourni un bouton de platine pure, & ab/blument
» privée de plomb & de tout ce qu'il auroit pu /coriiier;
» & il faut obferver que cette platine manifefta encore
» un peu de fenfibilité à l'aclion du barreau aimante lorf-
»• qu'elle fiit réduite en poudre, ce qui annonce que cette
» propriété lui eft effentielle, puifqu'elle ne peut dépendre
ici de l'alliage d'un fer étranger (r) », On ne doit
donc
(q) Supplément à l'Hidoire Naturelle , tome I , in-^'
(r) Eléiiiens de Chimie, tome I, page 21p. « 1,1 n'efl pas
5» pofllble, dit ailleurs AI. de Morveau , de luppofer que ia portion
>5 de platine d'abord traitée par le nitre (Sc^nfuiiepar l'aciue vitriolique,
» fut un fer étranger à la pladne eile-même , puilqu'il efl: tvident
» qu'il auroit clé calciné h la première détonation , & que nous
3} avions eu ratteniion de ne loumettre à la léconde opciation que
î> la platine qui avoit reçu !e brillant métallique; cette réflexion nous
5> a engagés à traiter une troifième fois ies cjnq cents grains reflins,
» Se le rcfultat a été encore plus faiisfailànt. Le creufet ayant été
«tenu plus long -temps au feu, la, platine étoit comme aglutinée
»au-deirous de la matière faline, la lefllve étoit plus colorée &
» comme verdâtre , & la poufiicre noire plus abondante ; l'acide
35 vitriolique , bouilli fur ce qui ctoit reQé fur le filtre, étoit fenfi-
« blement plus chargé, & la platine en état de métal, rcduite à
» trente-cinq grains , coinpris quelques écailles qui avoient l'appa-
» rence de fer brûlé , & qui étoient beaucoup plus larges qu'aucun
>7 des grains de platine. Une autre circonfîance bien digne de
j» remarque , c'eft que dans ces trente-cinq grains on découvroit
uilément
DES Minéraux. 3^1.5
donc pas regarder la platine comme un métal pur,
funpie & parlait, puifqu'en ia purifiant autant qu'il eft
polFibie, elle contient toujours des parties de fer qui
la rendent fenfible à l'aimant. M. de Morveau a fondu
la platine , fans addition d'aucune matière métallique,
par un fondant compofé de huit parties de verre pu!-
vérifé, d'une partie de borax calciné, & d'une demi-
partie de poufFière de charbon. Ce fondant vitreux <Sc
falin, fond également les mines de fer & celles de tous
ies autres métaux (f), & après cette iufion où il n'entre
ni ter ni aucun autre métal , la platine broyée dans un
mortier d'agate étoit encore attirable à l'aimant. Ce
même habile Chimifte eft le premier qui foit venu à
bout d'allier la platine avec le fer forgé, au moyen du
fondant que nous venons d'indiquer: cet alliage du fer
forgé avec la platine, eft d'une extrême dureté, il reçoit
aileinent à la feule vue, nombre de paillettes de couleur d'or , c<
tandis qu'auparavant nous n'en avions aperçu aucune , même «
avec le fecours de la loupe «c
Nous avons fait digérer dans l'eau régale la pouffière noire qui c<
avoit été féparée par les lavages ; elle a fourni une dilToIution u
palTdblement chargée, qui avoit tous les caradères d'une diflolution ec
de platine , qui a donné fur le champ un beau précipité jaune- «e
pâle , par l'addition de la diflolution du fel ammoniac , ce qui «
n'arrive pas à la diflolution de fer dans le même acide mixte ; la «c
liqueur prufllenne faturée l'a colorée en vert, & la fécule bleue «
a été plufieurs jours à fe raflembler m. Élémens de Chimie, fat
M. de Aforveûu , tome II , pages i ^ } & Juiv*
(f) Idem, tome I , page 2.2J,
ATinêmiipçj Tome IIL X x
3^6 Histoire Naturelle
un très-beau poli qui ne fe ternit point à l'air , & ce
feroit la matière la plus propre de toutes à faire des
miroirs de télcfcope (t).
Je pourrois rapporter ici les autres expériences par
Jefquelles M. de Morveau s'efl afTuré que le fer exifte
toujours dans la platine la plus purifiée ; on les lira avec
fatisfaélion dans Ion excellent Ouvrage (u) ; on y trou-
vera entr'autres chofes utiles, l'indication d'un moyen
Tur & facile de reconnoître fi l'or a été faldtié par le
mélange de la platine; il luilit pour cela de faire difToudre
dans l'eau régale, une portion de cet or fufpcél, &
d'y jeter quelques gouttes d'une dilTolution de fel
ammoniac, il n'y aura aucun précipité fi l'or e/l pur,
& au contraire, il /e fera un précipité d'un beau jaune
s'il efl mêlé de platine ; on doit feulement avoir atten-
tion de ne pas étendre la dilfolution dans beaucoup
d'eau (x) ; c'efl en traitant le précipité de la platine,
par une diffolution concentrée de fel ammoniac, & en
lui faifànt fubir un feu de la dernière violence, qu'on
(tj La pfatine eft de tous (es métaux le plus piopre à faire les
miruirs des télelcopes , puilqu'elle refi/te, auflj-bien que l'or, aux
vapeurs de l'air, qu'elle eft cojupade , fort cJenle , fans coukvr &
plus dure que l'or , que le défaut de ces deux propriétés rend inutile
pour cet ufage. Defcriptïon de l'or blanc , par M. Schœfftr ; Journal
étranger, mois de Novembre iy^7.
(u) Voyez les Éiéinens de Chimie, tome II , pages /^ & fuïv,
(xj Idem, ihi^^m , pages 26$ ù" 31^*
DES Minéraux. 3 47
peut la rendre aflez dudile pour s'éteiiJre /bus le
marteau, mais dans cet état de plus grande pureté, lorf-
qu'on la réduit en poudre , elle efl encore attirable à
l'aimant; la platine efl donc toujours mêlée de fer, &
dès-lors on ne doit pas la regarder comme un métal
fimple : cette vérité, déjà bien confiatée, fe confirmera
encore par toutes les expériences qu'on voudra tenter
pour s'en afTurer. M. Margrafi a précipité la platine par
plufieurs fubflances métalliques; aucune de ces préci-
pitations ne iui a donné la platine en état de métal,
mais toujours fous la forme d'iuie poudre brune ; ce
fait n'ert pas le moins important de tous les faits qui
mettent ce minéral hors de la claffe des métaux
fnnples.
M. Lewis affure que Tarfenic diffout aifément la
platine; M. de Morveau , plus exaét dans fes expériences,
a reconnu que cette diffolution n'étoit qu'imparfaite,
& que l'arfénic corrodoit plutôt qu'il ne difTolvoit la
platine , & de tous les eifais qu'il a faits fur ces deux
minéraux, joints enfcmble, il conclut qu'il y a entr'eux
une très-grande affinité, « ce qui ajoute, dit-il, aux faits
qui établi fîcnt déjà tant de rapports entre la platine & le <«
fer; » mais ce dernier fait ajoute auffi un degré de pro-
babilité à mon idée, fur l'exiflence d'ime petite quantité
ci'arfenic dans cette ful.flance compofée de fer & d'or.
A tous ces faits qui me fcmblent démontrer quô
la platine n'ell point un métal pur & f mple , mais un
Xx ij
34^ Histoire Natv relle
niclange de fer & d'or tous deux altérés , & dans lequel
ces deux métaux font intimement unis , je dois ajouter
une obfervation qui ne peut que les confirmer: il y a
des mines de fer, tenant or du argent, qu'il efl impoffible
même avec (e'ize parties de plomb, de réduire en
fcories Huides ; elles font toujours pâteufes & filantes ,
ik par conféquent l'or & l'argent qu'elles contiennent,
ne peuvent s'en féparer pour fe joindre au plomb. On
trouve en une infinité d'endroits , des fables ferrvigineux
tenant de l'or ; mais jufqu'à préfent on n'a pu , par ia
fonte en grand, en féparer afTez d'or pour payer les
frais; le fer qui fe refiTufcite retient l'or, ou bien l'or
relie dans les fcories (y) ; cette union intime de l'or
avec le fer dans ces fablons ferrugineux, qui, tous /ont
très-magnétiques & femblables au fablon de la platine,
indiquent que cette même union peut bien être encore
plus forte dans la platine où l'or a fouffert, par quelques
vapeurs arfenicales , une altération qui l'a privé de fà
(y) Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome I , pages i Sf
if I 8 ^. — Nota. On doit néanmoins obferver que le procédé
indiqué par M. Hellot , d'après Schlutter, n'eft; peut-être pas Je
meilieur qu'on puifTe employer pour tirer l'or & l'argent du fer.
M. de Grignon ait qu'il faut fcorifier par le foufre , rafraîchir
par le plomb & coupeler enluite ; il aflure que le fieur Vatrin
a tiré l'or du fer avec quelque bénéfice , & qu'il en a traité dans
un an quarante milliers qui venoient des forges de M. de h BJou;'e
en Nivernois & Berry , d'une veine de mine de fer qui a cefTé
de fournil de ce minéral aurifère.
DES Minéraux. 3^9
du6lilité : & cette union efl d'autant plus difficile à
rompre, que ni l'un ni l'autre de ces métaux, n'exifle
dans la platine en leur état de nature, puifque tous deux y
font dénués de la plupart de leurs propriétés métalliques.
« Toutes les expériences que j'ai faites fur la platine,
m'écrit M. Tillet, me conduifent à croire qu'elle n'efl «
point un métal fimple , que le fer y domine , mais «
qu'elle ne cont'imt point dor >>. Quelque confiance que
j'aie aux lumières de ce favant Académicien, je ne puis
me perfuader que la partie denfe de la platine, ne foit
pas effentiellement de l'or, mais de l'or altéré, & auquel
notre art n'a pu jufqu'à prcfent rendre fa première
forme : ne feroit-il pas plus qu'étonnant qu'il exiflât en
deux feuls endroits du monde, une matière auffi pe/ànte
que l'or , qui ne fèroit pas de l'or î &. que cette matière
fi denfe qu'on voudroit fuppofer différente de l'or, ne
fè trouvât néanmoins que dans des mines d'or ! je le
répète, fi la platine fè trouvoit, comme les autres métaux,
dans toutes les parties du monde, fi elle fe trouvoit
en mines particulières, &. dans d'autres mines que celles
d'or, je pourrois penfer alors avec M. Tillet, qu'elle
ne contient point d'or, & qu'il exifle en effet une autre
matière à peu-près auffi denfe que l'or dont elle feroic
compofée avec un mélange de fer , & dans ce cas , on
pourroit la regarder comme un feptième métal, fur-tout
fi l'on pouvoit parvenir à en féparer le fer; mais jufqu'à
ce jour, tout me femble démontrer ce que j'ai ofé
350 Histoire Naturelle
avancer le premier , que ce minéral n'efl point un
métal fimple, mais feulement un alliage de fer & d'or.
Il me paroît même qu'on peut prouver par un feul fait,
que cette fiibftance denfè de la platine , n'ell pas une
matière particulière cflentiellement différente de l'or;
puifque le foufre ou fa vapeur agit fur tous les métaux,
à l'exception de l'or, <Sc que n'agiffant point du tout
fur la platine , on doit en conclure que la fubftauce
àenfe de ce minéral , efl de même eflence que celle
de l'or, ÔL l'on ne peut pas objecter que par la même
raifon la platine ne contienne pas du fer , fur lequel
l'on fait que le foufre agit avec grande énergie, parce
qu'il faut toujours fe fouvenir que le fer contenu dans
la platine, n'efl point dans fon état métallique, mais
réduit en fablon magnétique, & que dans cet état le
foufre ne l'attaque pas plus qu'il attaque l'or.
M. le baron de Sickengen, homme auffi recomman-
dable par fes qualités perfonnelles & fes dignités que par
lès grandes connoi/fances eji Chimie , a communiqué
à l'Académie des Sciences en 1778, les obfervations
& les expériences qu'il avoit faites fur la platine; & ;c
fais ici volontiers l'éloge de fon travail, quoique je
ne fois pas d'accord avec lui fur quelques points que
ncu3 avons probablement vus d'une manière différente.
Par exemple , il annonce par fon expérience 2 i , que
le nitre en fufion n'altère pas la platine ; je ne puis
m'empêcJier de lui faire obfcrvcj que ies expériences
tf E s M I N É R A U X. -^ Ç T
ides autres Chimiftes, 6c en pariiciilier celles de M. de
Morveaii, prouvent le contraire, puilque Ja platine, ainfi
traitée, fe iaiire attaquer par J'acide vitrioiique &l. par
l'eau-forte (ij.
L'Expérience 22 de M. le baron de Sickenn-en,
paroît contirmer le fbupçon que j'ai toujours eu que
la platine ne nous arrive pas telle qu'elle fort de la mine
mais feulement après avoir paffe fous la meule, & irès-
probablement après avoir été foumi/ê à l'amairame; les
globules de mercure que M. Schœffer & M. le comte de
Milly ont remarqué dans celle qu'ils traitoient, viennent
à l'appui de cette préfomption que je crois fondée.
J'obferverai au fujet de l'Expérience ^^ de M. le
baron de Sickengen, qu'elle avoit été faite auparavant,
& publiée dans une Lettre qui m'a été adreffce par
M. de Morveau, & qui eft inférée dans le Journal de
Phyfiqiie, rowe 11, pûge jj)^; ce que M. de Sickengen
a fait de plus que M. de Morveau, c'elt qu'ayant opéré
iix une plus grande quantité de platine, il a pu former
un barreau d'un culot plus gros que celui que M. de
Morveau n'a pu étendre qu'en une petite lame.
Je ne peux me di/J3enkr de remarquer au/fi que îe
principe poié pour fèrvir de bafè aux conféquences de
l'Expérience ^6, ne me paroît pas jufle ; car un alliage
même fait ])ar notre art, peut avoir ou acqttérir des
I, — '■ ■ • ' — ■" ■ ■ — " " ■ -" - ■- •^^ - ■-— ■■^. — — - — _, ._ , ,^
(\) Voyez les Eléinens de Chimie, par M. de Morveau,
352 Histoire Naturelle
propriétés dilférentes dans les fubflances alliées, & par
coiilcquent la platine pourroit s'allier au mercure, fans
qu'on pût en conclure qu'elle ne contient pas de fer,
ÔL même cette Expérience 56, eft peut-être tout ce
qu'il y a de plus fort pour prouver au moins rimpoifi^
biiiic de priver la platine de tout fer, pui/que cette
platine revivifiée que Ton nous donne pour la plus
pure, & qui éprouve une forte de décompofition par
le mercure, produit une poudre noire martiale, attirable
à l'aimant, & avec laquelle on peut faire le bleu de
PrufTe : or pour conclure , comme le fait l'illufîre
Auteur (Expérience Jj) ) , que l'analyfe n'a point de
prife fur la platine, il auroit fallu répéter fur le produit
de l'Expérience 59, les épreuves fur le produit de l'Expé-
rience ^6, & démontrer qu'il ne donnoit plus ni poudre
noire ni atomes magnétiques, ni bleu dePrufFe; fans
cela le procédé qui fait l'amalgame à chaud , n'e/l plus
qu'un procédé approprié qui ne décide rien.
J'obferve encore que l'Expérience 64., donne un
réfultat qui eft plus d'accord avec mon opinion qu'avec
celle de l'Auteur; car par l'addition du mercure, le
fer, comme la platine, fe fépare en poudre noire, &
cela feul fuffit pour infirmer les conféquenccs qu'on
Voudroit tirer de cette expérience: enfin, fi nous rap-
prochons les aveux de cet habile Chimifîe qui ne laiffe
pas de convenir : « Que la platine ne peut jamais être
» privée de tout fer Qu'il n'e/lpas prouvé qu'elle foie
homogène.
DES Minéraux. 353
homogène Qu'elle contient cinq treizièmes de fer "
qu'on peut retirer progrefTivement par des procédés "
très-compliqués; qu^cnfin il faut avant de rien décider» "
répéter fur la platine réduite toutes les expériences qu'il "
a faites fur la platine brute ». Il nous paroit qu'il ne
devoit pas prononcer contre fès propres précomptions ,
en afTurant, comme il le fait, que la platine n'efl pas
un alliage, mais un métal fimple.
M. Bowles, dans fon Hifloire Naturelle de l'Efpagne,
a inféré les expériences & les obfervations qu'il étoit
plus à portée que pcrfonne de faire fur cette matière ,
puifque le Gouvernement lui avoit fait remettre une
grande quantité de platine pour l'éprouver ; néanmoins
il nous apprend peu de chofes, & il attaque mon opi-
nion par de petites raifbns ; ^' en 1753, dit -il, le
Miniftre me fit livrer une quantité fuiîifante de platine «
avec ordre de fbumcttre cette matière à mes expériences «
<& de donner mon avis fur le bon 6l le mauvais ufâge «
qu'on pourroit en faire ; cette platine qu'on me remit «
étoit accompagnée de la note fuivante : « ^^7ns FEvcché «
^e Popayan fiiffragaui de Lima ^ il y a beaucoup de mhus «
â'or, & une enîr autres nommée choco ; dans une parue de «
/// monragrie fe trouve en grande quantité une efpcce de fable «
que ceux du pays appellent platine ou or blanc ; en exa- ^«•
minant cette matière, je trouvai qu'elle étoit fort pefante »
& mclée de quelques grains d'or couleur de fuie »
Après avoir féparé les grains d'or, j'ai trouvé que la «
Aline faux. Tome IIL Y y
354 Histoire Naturelle
y> platine étoit plus pcfante que l'or à 20 karats ; en ayant
Ȕ fait battre qtielques grains fous le marteau, je vis qu'ils
» s'ctencloient de cinq ou fix fois leur diamètre, & qu'ils
» refloient blancs comme l'argent ; mais les ayant envoyés
» à un Batteur-d'or , ils fe bri/erent fous les pilons Je
35 voulus fondre cette platine à un feu très-violent , mais
» les grains ne firent que s'aglutiner. . . . J'efTayai de ia
» diffoudre par les acides ; le vitriolique & le nitreux
3> ne l'attaquèrent point , mais l'acide marin parut Tenta-
3) mer , & ayant verfë une bonne dofe de fel ammoniac
» fur cet acide , je vis toute la platine (e précipiter en une
3) matière couleur de brique ; enfin , après un grand nombre
35 d'expériences raifonnées , je fuis parvenu à faire avec la
» platine, du véritable bleu de Prujfe. Ayant reconnu par
3* ces mêmes expériences, que la platine conrenoit un peu
» de fer, & m'étant fouvenu que dans mes premières
» opérations, les grains de platine expofcs à un feu violent,
» avoient contracté entr'eux une adbérence très-fuper-
3) ficielle, puifqu'il ne falloit qu*un coup a/fez léger pour
3> les féparer , je conclus que cette adbérence étoit l'effet
>ï de la fufion d'une coucbe déliée de fer qui les recou-
»> vroir, & que la fubfîance métallique intérieure n'y avoit
aucune part & ne contenoit point de fer ». Nous ne
croyons pas qu'il foit nécefi^aire de nous arrêter ici pour
faire fentir le foible de ce raifoimem.ent , & le faux de
Ja conféquence qu'en tire M. Bowles ; cependant ij
infirte, & fe munifTam de l'autorité des Chimifles qui
DES Minéraux. 355
ont regardé la platine comme un nouveau mcial fimple
& parfait,, il argumente aflez longuement contre moi:
" Si la platine, dit -il, étoit un compofé d'or & de
fer, comme le dit M. de Buffon, elle devroit conferver «
toutes les propriétés qui réfultent de cette compoiition, «
& cependant une foule d'expériences prouve le con- «
traire ». Cet habile Naturalise n'a pas fait attention que
j'ai dit expreflcment, que le fer & l'or de la platine
n'étoient pas dans leur état ordinaire, comme dans un
alliage artiiiciel , & s'il eût confidéré fans préjugé fes
propres expériences, il eût reconnu que toutes prouvent
la préfënce & l'union intime du fablon ferrugineux <Sc
magnétique avec la platine , & qu'aucune ne peut dé-
montrer le contraire. Au refte, comme les expériences
de M. Bowles, font prefque toutes les mêmes que celles
des autres Chimifles, &l que je les ai expofées &l difcutées
ci-devant, je ne le fuivrai plus loin, que pour obferver
que malgré fes objeélions contre mon opinion , il avoue
néanmoins: « Que quoiqu'il foit perfuadé que la platine
eft un métal fui gênais, &. non pas un fimpIc mélange <«
d'or &. de fer, il n'ofe malgré cela prononcer affirma- <«
tivement ni l'un ni l'autre, & que quoique la platine «
ait des propriétés dilîcrentes de celles de tous les autres «
métaux connus, il fait trop combien nous fommes éloignés <«
de connoîire (à véritable nature ».
Au reile, AI. Bowles termine ce chapitre fur la
platine , par quelques obfcrvations iatéreffantes : « La
yy ij
î)
}>
JJ
»
»
■>■)
»
5>
356 Histoire Naturelle
» platine, dit-il, que je dois au célèbre Don Antonio de
» Ulloa, eft une matière qui fe rencontre dans des mines
5> qui contiennent de l'or; elle eft unie (i étroitement avec
« ce métal qu'elle lui fert comme de matrice, & que ce
n'efl: qu'avec beaucoup d'efforts , & à grands coups
qu'on parvient à les feparer; en forte que fi la platine
abonde à un certain point dans une mine, on eil forcé
« de l'abandonner, parce que les frais & les travaux né-
ceffaires pour faire la féparation des deux métaux,
abforberoient le profit.
Les feules mines d'où l'on tire la platine font celles
de la nouvelle Grenade , & en particulier celles de
Choco 6l de Barbacoa font les plus riches. // (/? rewar-
« qiiable que cène mature ne fe trouve dans aucmie auire
» inhie , fait du Pérou , foît du Chïly , fou du Mexique. Au
55 refte , la platine fe trouve dans les fufditcs mines , iion-
i^ feulement en înaffe , mais au/fi en grains féparés comme
5) des grains de fable. Enfin il faut être réfervé à tirer des
conféquences trop générales des expériences qu'on auroit
faites fur une pareille quantité de platine tirée â*iin feul
» endroit de la mine^ expériences qui pourroient être démen-
5> ties par d'autres expériences faites fur celles d'un autre
endroit des mêmes mines remarquant , continue
M. Bowles , que la platine contenoit du fer , & que
» le cobalt en contient auiïi , qu'on trouve beaucoup de
» grains d'or de couleur de fliie mêlés avec la platine ,
5) que cette e/pèce nouvelle de fable métallique efi unique
!■>
»
^■>
»
c<
«
DES Minéraux, 357
dans le monde , qu*elle fe trouve en abondance dans «
une montagne aux environs d'une mine d'or, &. qu'il y t.
a beaucoup de volcans dans ce pays; je me fuis per- «
fuadé que la montagne renferme du cobalt , comme «
celle de la vallée de Giflan, dans les pyrénées d'Arra- «
gou, que le feu d'un volcan aura fait évaporer l'arfenic a
& aura formé quelque chofe de femblable au régule de
cobalt ; que ce régule fe fond & fe mêle avec i'or ,
quoiqu'il contienne du fer , & que le feu appliqué pen- «
dant lui grand nombre de fiècles , privant la matière de «
fa Rifibiiité , aura formé ce fable métallique que les li
grains d'or de forme irrégulière & de couleur de fiiie, «
font aufTi l'effet du feu d'un volcan lorfqu'il s'éteint ; t»
que les grains de platine qui contrarient adliérence , à «
caufe de la couche légère de fer étendue à leur furface, <»
font le réfultat de la décompofition du fer dans le grand «
nombre de fiècles qui fe font écoulés depuis que le «
volcan s'eft éteint ; & que ceux qui n'ont point cette «
couche ferrugineufè , n'ont pas eu aflez de temps depuis «
l'extinélion du volcan pour l'acquérir. Cela parortra un «
ibnge à plufieurs ; mais je fuis le grand argument de «
M. de Buiibn (a) ». M. Bowles a raifon de dire qu'il fuit
mon grand argument; cet argument confjfle en effet, en
ce que la platine n'eft point, comme les métaux, un
produit primitif de la Nature, mais une fuuple production
accidentelle , qui ne fe trouve qu'en deux endroits
(dj Hiiloire Naturelle d'JElpagne , chapitre de la Platine.
358 Histoire Natu relle
dans le inonde entier ; que cet accident , comme je
l'ai dit, a été produit par je feu des volcans, & feule-
ment fur des mines d'or mêlées de ïv.x , tous deux
dénatures par l'acflion continuée d'un feu très-violent;
qu'à ce mélange de fer & d'or, il fe fera joint quelques
vapeurs ar/ènicales , qui auront fait perdre à i'or fa
dudilité , & que de ces combinaifons très - naturelles ,
& cependant accidentelles , aura réfiilté la formation
de la platine. Ces dernières obfervations de Al. Bowles,
loin d'iniirmer mon opinion , femblent au contraire
ia confirmer pleinement; car elles indiquent dans la
platine, non-feulement le mélange du fer, mais la préfcnce
de l'arfenic ; elles annoncent que la platine d'un endroit
n'efl pas de même qualité que ccWc d'un autre endroit;
elles prouvent qu'elle fe trouve en maffe dans deux
feules mines d'or, ou en grains & grenailles dans des
montagnes toutes compofées du fablon ferrugineux, ÔL
toujours près des mines d'or &. dans des contrées vol-
canifées : la vérité de mon opinion me paroît donc
plus démontrée que jamais, & je fuis convaincu que
plus on fera de recherches fur l'Hiftoire Naturelle de
h platine, &. d'expériences fur fa fubflance , plus on
reconnoîtra qu'elle n'ell point un métal fimple ni d'une
clfence pure, mais un alliage de fer & d'or dénaturés,
tant par la violence & la continuité d'un feu volcanique,
que par le mélange des vapeurs fulfureufes & arfcnicales,
qui auront ôté à ces métaux la couleur & leur ductilité.
DES M 1 N É n A V X. 359
DU COBALT.
xJE tous les minéraux métalliques , le cohalt cfl peut-
être celui dont la nature eft la plus mafquée, les carac-
tères les plus ambigus &. l'efTcnce la moins pure ; les
mines de cobalt, très -différentes entr'elles , n'offrent
d'abord aucun caradlère commun , & ce n'efl qu'en
ks travaillant au feu qu'on peut les reconnoître par un
effet très-remarquable, unique & qui conffle à donner
aux émaux une belle couleur bleue. Ce n'efl aulTi
que pour obtenir ce beau bleu que l'on recherche le
cobalt ; il n'a aucune autre propriété dont on puiffe
faire un u/àge utile, fi ce n'efl peut-être en l'alliant avec
d'autres minéraux métalliques (a) . Ses mines font affez
rares & toujours chargées d'une grande quantité de
matières étrangères ; la plupart contiennent plus d'arfenic
que de cobalt , & dans toutes le fer efl fi intimement
lié au cobalt , qu'on ne peut l'en féparer ; le bifmutli
fe trouve auffi affez fbuvent interpofé dans la fubflance
de ces mines ; on y a reconnu de l'or , de l'argent ,
<Iu cuivre , &. quelquefois toutes ces matières & d'autres
(a) M. Baume dit daiis fa Chimie expérimentale avoir fàit"*éntrer
le collait dans un alliage pour des robinets de fontaine, que cet
alliage pouvoir fe mouler paifaiieraeni & n'e'toit fujet à aucune
«Ipèce de jouille.
360 Histoire Naturelle
encore s'y trouvent mêlées enfembie , fans compter les
pyrites qui font aufii fouvent intimement unies à la
fubflance du cobalt. Le nombre de ces variétés efl
donc fi grand , non-feulement dans les différentes mines
de cobalt , mais auffi dans une feule & même mine ,
que les nomenclateurs en Minéralogie ont cru devoir
en faire plufieurs efpèces, & même en féparer abfo-
îument un autre minéral qui n'étoit pas connu avant
le travail des mines de cobalt ; ils ont donné le nom
de fîkkel (b) à cette lubflance qui diffère en effet du
cobalt , quoiqu'elle ne fe trouve qu'avec lui. Tous deux
peuvent fe réduire en un régule dont les propriétés
font affez différentes pour qu'on puiffe les regarder
comme deux différentes fortes de minéraux métalliques.
Le régule de cobalt n'affcde guère de figure régu-
lière (c) , & n*a pas de forme déterminée; ce régule
efl très-pefant, d'une couleur grife affez brillante, d'un
tiffu ferré , d'une fubftance compa(5le tSi. d'un grain fin ;
fà furface prend en peu de temps par Timpreffion de
(h) Cronftedt a donné le nom de Nickel à cette fubflance,
parce <|u'eile fe trouve dans les mines de Cobalt que les Aiiemands
nomment Kupfer-nickel. M. Bergman obferve que quoiqu'on trouve
fréquemment du Cobalt natif, il ell toujours uni au fer , à 1 arfenic
& au nickel. Opufcules chimiques , tome II , dijfer talion 2^.
(c) M. l'abbé Mongez afiure néanmoins avoir obtenu un régule
de cobalt en crilUux compoles de faifceaux réguliers. Journal de
Phyjique , lyS i.
l'air
DES Minéraux. 361
l'air une teinte rofacce ou couleur de fleurs de pccher;
il eft afTez dur & n'eft point du tout ducflile ; fa den-
fité eft néanmoins plus grande que celle de l'étain ,
du fer & du cuivre ; elle eft à trcs-peu-près égale à la
denfué de l'acier (d) . Ce régule du cohaft & celui du
nickel font après le bifmuth les plus pefantes des matières
auxquelles on a donne le nom de demi - métaux , &
l'on auroit certainement mis le bifmuth , le cobalt &.
le nickel au rang des métaux s'ils avoient eu de la
du6lilité ; ce n'efl qu'à cau/è de fà très-grande denfué
que l'on a placé le mercure avec les métaux , & parce
qu'on a en même temps fuppofé que /à fluidité pouvoit
être confidérée comme l'exircme de la du6lilité.
Les minières de cobalt s'annoncent par des efïïo-
refcences à la fiirface du terrein ; ces efliorefcences font
ordinairement rougeâtrcb & afTez fouvent di/pofées en
étoiles ou en rayons divergens qui quelquefois fe croifent.
Nous donnerons ici l'indication du petit nombre de
ces mines que nos Obfèrvateurs ont reconnues en France
& dans les Pyrénées aux confins de TEfpagne ; mais
c'efl dans la Saxe & dans quelques autres provinces
de l'Allemagne qu'on a commencé à travailler, & que
l'on travaille encore avec fuccès & profit les mines de
(d) La pefanteur Tpécifique du régule de cobalt eft de 7R1 ip;
celle du régule de nickel de 78070 ; & la pefanteur fpccifique de
l'acier écroiii & trempé eft de 78180; celle du fer forgé n'efl
que de 77880.
Aîinéraux f Tome III. Z z
362 Histoire Naturelle
cobalt ; & ce font les Mincralogifles allemands qui nous
ont donné le plus de luniicres fur les propriétés de ce
minéral <Sc fur la manière dont on doit le traiter.
Le premier &. le plus fur des indices extérieurs fe)
qui peuvent annoncer une mine prochaine de cobalt ,
cft donc une efflorefcence minérale, couleur de rofc,
de flruéture radiée à laquelle on a donné le nom de
jlcurs de cobalt ; quelquefois cette matière n'cfl point
en forme de Heurs rouges , mais en poudre & d'une
couleur plus pâle ; mais le figne le j)lus certain & par
lequel on pourra reconnoître le véritable cobalt tfl la
terre bleue qui l'accompagne quelquefois , & au défaut
de cet indice , ce fera la couleur bleue qu'il donne
lorfqu'il eft réduit en verre ; car fi la mine qui paroît
être de cobalt fe convertit en verre noir, ce ne fera
que de la pyrite ; fi le verre eft d'une couleur roulfe , ce
fera de la mine de cuivre ; au lieu que la mine de
cobalt donnera toujours un verre bleu de faphir; c'cfl:
probablement par cette reffemblance à la couleur du
faphir qu'oi:^ a donné à ce verre bleu de cobalt le nom
de fiphre ou fdffre. Au relie, on a auffi appelé faffn la
chaux de cobalt qui e(l en poudre rougeâtre & qui ne
provient que de la calcination de la mine de cobalt; le
fafîre qui c(l dans le commerce efl toujours mclé de
fable quartzeux qu'on ajoute en fraude pour en augmenter
(e) Tranfâdions philofophicjues , A^.' ^p^ , Novembre ijiS,
DES Minéraux. ^6^
la quantité , & ce faffre ou chaux rougeâtre Je cobalt
doime auiFi par la fudoii le même bieu que le verre
de cobalt , 6l c'cft à ce verre bleu de falire que Ton
donne le nom de fmalt.
Pour obtenir ce verre avec fà belle couleur , on fait
griller la mine de cobalt dans un fourneau où la Hamme
efl réverbérée fur la matière minérale réduite en poudre
ou du moins concafTée ; ce fourneau doit être fur-
monté de cheminées tortueufes dans lefquelles les vapeurs
qui s'élèvent puiiïent être retenues en s'attachant à leurs
parois ; ces vapeurs s'y condenfent en effet & s'y accu-
mulent en grande quantité fous la forme d'une poudre
blanchâtre que l'on détache en la raclant ; cette poudre
eft de l'arfenic dont les mines de cobalt font toujours
mêlées ; elles en fourniffent en fi grande quantité par
la hmple torréfaétion , que tout Tar/enic blanc qui efl
dans le commerce vient des fourneaux où l'on grille
des mines de cobalt ; & c'efl le premier produit qu'on
en tire.
La matière calcinée qui refle dans le fourneau, après
l'entière fublimation des vapeurs arfenicales , efl une
chaux trop réfraélaire pour être fondue feule; ,. il faut
y ajouter du fable vitrefcible , ou du quartz qu'on aura
fait auparavant torréfier pour les pulvérifcr; fur une
partie de chaux de cobalt, on met ordinairement detix
ou trois parties de cette poudre vitreufe à laquelle on
ajoute une partie de falin pour accéJérer la fufion ; ce
Zz ij
364- Histoire Natu belle
mélange fe met dans de grands creufets places dans le
fourneau, & pendant les d\x ou douze heures de feu
qui font néceïïaires pour la vitrification , on remue
fouvcnt la matière pour en rendre le mélange plus
égal & plus intime; 6l lorfqu'elle efl entièrement &
parfaitement fondue, on la prend toute ardente & liquide
avec des cuillers de fer, & on la jette dans un cuvier
plein d'eau, où fe refroidiflant iùbitement elle n'acquiert
pas autant de dureté qu'à l'air, &. devient plus aiiée à
pulvcrifer; elle forme néanmoins des maffes folides qu'il
faut broyer fous les pilons d'un bocard, & faire eniuite
pafTer fous une meule pour la réduire enfin en poudre
très-fine &l bien lavée , qui efl alors du plus beau bleu-
d'azur , & toute préparée pour entrer dans les émaux.
Comme les mines de cobalt font fort mélangées &
très-différentes les unes des autres, & que même l'on
donne vulgairement le nom de cobalt à toute mine
mêlée de matières nuidbles (f), & fur-tout d'arfenic ;
on efl forcé de les effayer pour les reconnoître, &
s'aifurer fi elles contiennent en effet le vrai cobalt qui
(f) La fangue allemande a même attaché au mot de Cobalt ou Cobolt
l'idée d'un elprit fouterrain ; malfdilant & malifi qui fe piait à
effrayer & à tourmenter les Mineurs ; & comme le minerai de
cobalt , à raifon de l'arfenic qu'il contient , ronge les pieds & les
mains des ouvriers qui le travaillent , on a aj)pelé en général Cobalto
les mines dont l'arlenic fait la partie dominante. Alémoire fur le
Cobalt , par Aï. Saur , dans ceux des Savans étrangers , tome I.
D E s M I N É R A V X. 365
donne au verre le beau bleu. II faut dans ces cfTais
rendre les fcories fort Huides & très-neties , pour juger
de l'imenfité de la couleur bleue que fournit la mine
convertie d'abord en cliaux & enluite en verre; on
doit donc commencer par la griller & calciner, pour
la mettre dans Tétat de chaux ; il fè trouve à la vérité ,
quelques morceaux de minerai où le cobalt efl aflez
pur pour n'avoir pas bcfoin d'être grillé, & qui donnent
leur bleu fans cette préparation; mais ces morceaux font
très-rares, & communément Je minerai de cobalt fe
trouve mêlé d'une plus ou moins grande quantité d'ar-
fenic qu'il faut enlever par la fublimation. Cette opéra-
tion, quoique irès-fimple, demande cependant quelques
attentions; car il arrive affez fouvent que par un feu
de grillage trop fort, le minerai de cobalt perd quelques
nuances de fa belle couleur bleue ; & de même il arrive
que ce jninérai ne peut acquérir cette couleur, s'il n'a
pas été affez grillé pour l'exalter, & ce point précis efl
difficile à faifir. Les unes de ces mines exigent beaucoup
plus de temps & de feu que les autres, ce ne peut
donc être que par des effais réitérés & faits avec foin,
que l'on peut s'afTurer à peu-près de la manière dont on
doit traiter en grand telle ou telle mine particulière (^g) ,
(g) On pèfe deux quintaux qu'on réduit en poudre grcfTière ;
on les met dans un tejl a rôtir, fous la in(.uffle du fourneau; on
leur donne le degré' de chaleur modéré dans le commencement,
&. de demi-heure en demi- heure on retire le teft pour refroidir la
366 Histoire Natu relle
Dans quelques-unes on trouve une afTez forte quantité
d'argent, & même d'or, pour mériter un travail parti-
matière <5c la jiietire en poudre plus fine , ce que Von répète trois
&. quatre tois , ou jufqu'à ce qu'elle ne rende plus aucune odeur
d'aiienic.
Le caillou qu'il faut joindre à cette matière pour en achever
l'efiai, doit être aufli calciné. On choifit le filex qui devient blanc
par là calcination , «Se qui ne prend point de couleur tannée. On
peut lui fubftituer un quartz bien crillallin ou un Table bien lave ,
qu'il faut auffi calciner. On divife en deux parties égales le cobalt
calciné ; à une de ces parties on joint deux quintaux de cailloux
ou de lable , & lix quintaux de potafle. Après avoir mclt le
tout enlenible , on le met dans un creulet d'efîài , qtie l'on place
fur l'aire de la forge devant le foufflet ; aufTi-iôt que le charbon
dont on a rempli le foyer formé avec des briques , eQ affaiOe , &
que le creufet ell rouge , on peut commencer à foufHer , parce
qu'on ne rifque rien par rapport au foulèvement du Hux. Dès
qu'on a loufflc près d'une heure , on peur prendre . avec un fil
de fer froid , un edai de la matière en fufion , ô*. fi l'on trouve
que les fcories foient tenaces & qu'elles filent, l'eflai e(l achevé....
on le laiffe encore au feu pendant quelques minutes. Quand on a
çafie le creufet, on prend ces fcories, on les broyé 5t on les lave
avec foin pour voir la couleur qu'elles donnent.
Si elle ell trop intenfe , on refait un autre effai avec le fécond
quintal de cobalt qu'on a rôti , & l'on y ajoute trois quintaux de
cailloux ou de fable. Si la couleur des fcor es de ce fécond elTai
efl encore trop foncée , on répète ces efTais jnfqu'à ce qu'on ait
trouvé la jufte proportion du fable & la couleur qu'on veut avoir.
C'eft par ce moyen qu'on juge de la bonté du cobalt; car s'il
colore beaucouj) de fable ou de cailloux calcinés , il rend par
conféquent beaucoup de couleur, & fon prix augmente. Schlutier ^
Traité de la Fonte des mines , tome I , pages z^j & 2^^,
DES Minéraux. 367
culier, par lequel on en extrait ces métaux. Il faut pour
cela ne calciner d'abord la mine de cobalt qu'à un feu
modéré; s'il étoit violent, l'arfenic qui s'en dégageroit
brufqucment emporteroit avec lui une partie de l'argent
<5c de l'or , lequel ne s'y trouve qu'allié avec l'argent (/ij .
Mais ces mines de cobalt qui contiennent une affez
grande quantité de cet argent mêlé d'or, pour mériter
d'être ainfi travaillées, font très -rares en comparailbn
de celles qui ne font mêlées que d'arfcnic, de fer &.
de bifmutb, &. avant de faire des eiïais qui ne laiffent
pas d'être coûteux , il faut tâcher de reconnoître les
vraies mines de cobalt , & de les diilinguer de celles
qui ne font que des minerais d'arfcnic, de fer, &.c.
&. fï l'on ne peut s'en fier à cette connoifTance
(h) On met quatre quintaux de cobalt dans un vaifieau plat
fojs la moufHe; on l'agite, fans dilcontinuer, pendant la caicinarion ;
& quand il ne rend plus d'odeur d'arfcnic, on le"pèfe pour con-
noître ce qu'il a perdu de Ton poids ; ce dcchet va ordinairement
à' vingt-cinq ou vingt-fix pour cent; on fait korifier ce qui refle
avec neuf quintaux de plomb gfenaillt" dont on connoît la richefle
en argent ; &. lorfque les fcories font bien fluides , on verfe le tout
dans le creux demi fphcrique d'une planche de cuivre rouge qu'on
a frotte de craie. Les fcoiies *ant refroidies, on les détache avec
le marteau du culot de plomb , que l'on met à la coupelle ; on
connoît parle bouton d'argent qui refle iur la coupelle, & dont'
on a fouflrait l'argent des neif quintaux de plomi) , fi ce col>alt
mérite d'être traité p6ur tin. Il convient aufll de faire le dcpart de
ce bouton de couj^elle, parce qu'ordinairement l'argent qu'on trouve
dàiis le cobalt, recèle un peu d'or. Jdtm , page 2^ y.
368 H ISTOIRE N ATURELLE
cl'infpedion, il ne faut faire que des efTais en petit ("ij,
fur lefquels néanmoins on ne peut pas abfblument
compter; car clans la même mine de cobalt, certaines
parties du minéral font fou vent très-ditîcrentes les unes
des autres i & ne contiennent quelquefois qu'une fi
petite
fi) Pour éviter la dépenfe des eflais en grand, il faut prendre
une portion du cobalt que l'on veut ellayer ; on le pulvérile en
poudre très-fine ; eniuite on le met dans un creufet large d'ouver-
ture que l'on met dans un founeau Il faut que le feu foit
aflez fort pour tenir lou/ours le creufet d'un rouge obfcur ; mais
dès que la matière paroît rouge , on l'agite de deux minutes en
deux minutes. . . . Entre chaque agitation on iouffle dans le milieu
du creufet à petits coups ieïïés avec un foufflet à jnuin , cojïime on
fouffle lur l'antimoine qu'on emploie à purifier l'or. . . , C'eft le
moyen le plus prompt de chalîer \à fumée blanche arfenicale ,
fur-tout lorfqu'on n'a pas defiein d'eflayer dans la fuite ce cobalt
pour le fin; car fans le foufflet, l'arfenic fèroit fort long-temps à
s'évaporer. Quand il refte un peu de matière volatile dans le
creufet , le cobalt qu'on y a mis, paroît s'éteindre, & devient
obfcur; mais il faut continuer à l'agiter jufqu'à ce qu'il ne répande
plus de fumée blanche ni d'odeur d'ail ; alors la calcination eft
finie, . » . Une once de cobalt ainfi calciné fe trouve réduite à environ
cinq gros
On met deux gros de ce cobalt calciné dans un petit matras;
on y verfe une once d'eau-forte, & environ trois gros d'eau com-
mune; on place le matras fur des cendres très-chaudes.... l'eau-
forte fe chargera de la partie colorante , fi ce minéral en contient ,
& prendra en une heure ou deux de digèllion , une couleur
cramoifi laie ; c'eft la couleur que lui donne toujours le cobalt
propre à faire l'azur, fur-tout s'il Uent du bifinuth. S'il ne contient
pas
DES Minéraux, 3 69
petite quantité de cobalt qu'on ne peut sn faire
ufàge (k) .
La fubftance du cobalt eil plus fixe au feu que celle
des demi-métaux, même que celle du fer & des autres
métaux imparfaits ; auffi vient-on à bout de les féparer
du cobalt en les fublimant & en les volatilifant par des
feux de grillages réitérés. La fixité de cette fubflance
approche de la fixité de l'or & de l'argent ; car le
^^^i^-^— ^ IM^I». ■ [■■■■■M I^J^^— ■ ■ I —1- _ ^ I ■ , ■ I !■ ■■ I ■»»— ■ ■■ I M - I ■ ■^-^■^ , M — ^^B^—
pas de parties colorantes , elle reftera blanche ; s'il tient du cuivre ,
elle prendra une couleur verte. ...
Pour tirer la matière bleue du fmalt , pi^nez cent grains de
ce cobalt calcine , deux cents grains de fable bien lavé , deux
cents grains de Tel de fonde purifie , & vingt à vingt-cinq grains
de borax calcine'. Après avoir bien mêlé ces matières dans un
petit creufet d'efîai bien bouché , mettez ce creufet fur l'aire d'une
forge, ou encore mieux dans un petit fourneau de fonte quarré
Faites agir le foufflet pendant une bonne demi-heure. Il n'y aura
aucune effervefcence fi le cobalt a été bien calciné; laifîez ce creufet
un demi-quart d'heure dans le feu après la parfaite fufion , ians
fouffler , pour donner le temps à la matière vitrifiée de fe rafleoir;
retirez le creufet & le mettez refroidir à l'air ; cafTez-le quand if
fera froid , vous trouverez toute la matière vitrifiée en un verre
bleu - foncé fi ce cobalt a donné une couleur rouge à l'eau- forte ,
ou au moins une couleur de feuille-morte. Traité de la Fonte des
mines de Schlutter , tome I , page 2^ S.
(k) Une manière courte d'éprouver fi une muie de cobalt
fournira de beau bleu , c'eft de la fondre dans un creufet avec
deux ou trois fois fon poids de borax qui deviendra d'un beau
bleu fi le cobalt efl de bonne qualité. Voyej^ V Encyclopédie , article
Cobalt.
MhiJrauSj Tome IIL A a a
370 Histoire Naturelle
régule Je cobalt n'entre pas dans les pores de h cou-
pelle, en forte que fi l'on expofe à i'adion du feu fur
une coupelle, un mélange de plomb & de cobalt, le
plomb feul pénètre les pores de la coupelle en fë vitri-
fiant , tandis que le cobalt réduit en fcories , refte fur la
coupelle ou ell rejeté fur fes bords ; ces fcories de
cobalt étant enfuite fondues avec des matières vitreuies,
donnent le bleu qu'on nomme f^iffie^ &. lorfqu'on les
mêle à parties égales avec i'alkali & le fable vitrekible,
elles donnent l'émail bleu qu'on appelle y/m//'.
Le régule de cobalt peut s'allier avec la plupart l\çs
fubilances métallt^ucs ; il s'imit intimement avec l'or &
ie cuivre qu'il rend aigres & caffans ; on ne l'allie que
difficilement avec l'argent (l ) , le plomb & même avec
l'arfeiiic , quoique ce fél métallique fe trouve toujours
mêlé par fa nature dans la mine de cobalt; il en efl de
même du bifmuth qui fe refufé à toute union avec le
régule de cobalt; &l quoiqu'on trouve fôuvent le bifmuth
mêlé dans les mines de cobalt , il ne lui efl point uni
d'une manière intime , mais (miplement interpofé dans
(IJ Si l'on fdit fondre enfeinble deux piirties de cobalt avec
une partie d'argent , on trouve l'argent au bas & le cobalt au-defius ,
flmjilement attachés l'un à l'autre ; cependant l'argent devient plus
caliant , il eft d'une couleur plus grife , & le cobalt eft d'une
couleur plus blanche qu'auparavant. Le régule de cobalt ne peut
donc point s'unir au plomb & à l'argent en toutes proportions ,
mais leuleinent en peute quantité. Chimie mélallurgique de CelUr ,
tome I , page j 8^»
I
DES Minéraux, 371
la mine de cobalt fans ia pciictrer; &: au contraire lorfque
le cobalt eft une fois joint au ioufre par l'intermède
des alkalis, Ton union avec le bifmuth eft fi intime, qu'on
ne peut les /éparer que par les acides , tandis qu'en même
temps le cobalt ne contrarie avec le (ôufre qu'une très-
légère union, &. qu'on peut toujours les Icparer l'un de
l'autre, par un bmple feu de torréfadlion qui enlève le
foufre & le réduit en vapeurs.
Le mercure qui mouille i\ bien l'or & l'argent, ne
peut s'attacher au cobalt ni s'y mêler par la trituration
aidée même de la chaleur ; aind la fixité du régule de
cobalt, qui eft prefque égale à celle de ces métaux, n'inllue
point fur fon attraction mutuelle avec le mercure.
Tous les acides minéraux attaquent ou difTolvent le
cobalt à l'aide de la chaleur, &l ils produifent enfemble
différens Tels dont quelques-uns font en criftaux tranfpa-
rens ; l'alkali volatil difTout auffi la chaux du cobalt,
<Sc cette diiïblution eft d'un rouge - pourpre ; mais en
général, les couleurs dans toutes les difTolutions du
cobalt , varient non - feulement félon la différence des
diffolvans , mais encore fuivant le plus ou le moins
de pureté du cobalt, qui n'eft prefque jamais exempt
de minéraux étrangers, & fur -tout de fer & d'arfenic,
dont on fait qu'il ne faut qu'une très-petite portion pour
altérer ou même changer abfolument la couleur de la
diffolution.
En France, on a reconnu plufieurs indices de mines
A a a ij
37^ Histoire Naturelle
de cobalt, & on n'auroii pas du négliger ces minières;
par exemple, les mines d'argent d'Almont en Dauphinc,
contiennent beaucoup de mines de cobalt qu'on pourroit
réparer de l'argent. M. de Grignon affure qu'on a jeté
dans les décombres de ces mines , peut - être plus de
cobalt qu'il n'en iaudroit pour fournir toute l'Europe
de faffre. Le cobalt fe trouve mêlé de même avec la
mine d'argent rouge à Sainte -Marie - aux -Mines en
Lorraine (mj , <Sc il y en a aufTi dans une mine de
cuivre azurée au village à'Ojfenback dans les Vofges (n) ;
on n'a fait aucun ufàge de ces mines de cobalt. M. de
Genfanne dit à ce fujet, que comme ce minéral devient
rare, même en Allemagne, il fcroit avantageux pour
nous de mettre en valeur une mine conlidérable , qui
fe trouve entre la Aimera & Notre -Dame -de -Cor al en
(m) Les mines de Sa'wtt-Mar'ie'aux-Mines , ont donné il y a
cjuelques années de la mine de cabalt en fi grande quantité qu'on
avoit fait des dtpenfes nécefiaires pour en fabriquer le fmah ; mais
cette miiie de cobalt s'efl; appauvrie à mefure que celle d'argent a
paru , de manière qu'on n'en trouve pas aujourd'hui allez pour
fabriquer cette couleur. Alémoire fur le Cobalt , par Ai. Saur , dans
ceux des Savons étrangers , tome J.
(n) Auprès du village d'Oflenback dans \t% Vofges il y a une
mine de cuivre azur; le filon contient peu de mine en cuivre,
mais il rend beaucoup de plomb ; ce filon eft un quartz noir
extrêmement dur, parlemé de mine couleur de lapis, avec quantité
de cobalt. Sur l'exploitation des mines , par Ai. de Genfanne , Afémoircs
des Savans étrangers, tome JV , pages i^i &' fuiv.
DES Minéraux, 373
Roiifiiilon (0); il y en a une autre très -abondante &l
(Je bonne qualité, que les Efpagnols ont fait exploiter
avec quelques fuccès , elle elt fituée dans la vallée de
Gijîau (p). M. Bowles dit que cette mine n'a été
découverte qu'au commencement de ce fiècle {qjt Si.
qu'elle n'a encore été travaillée qu'à une petite pro-
fondeur, qu'on en a tiré annuellement cinq à fix cents
quintaux ^r); il ajoute qu'en examinant cette mine de
Giftau, il a reconnu différens morceaux d'un cobalt
qui avoit le grain plus fin Si. la couleur d'un gris-
bleu plus clair que celui de Saxe; que la plupart de
ces morceaux étoient contigus à une forte d'ardoife
foj Cette mine eft fituée auprès du rui/Teau qui defcend de la
côte qui fait- face au village de la Minera. La veine a plu-s de deux
toifes d'épaifîeur, & paroît au jour fur plus d'une lieue de longueur;
cette mine efl de la même nature que celle de San-Giomen en
Catalogne. Hijfoire Naturelle du Languedoc , par Ai. de Genfanne ,
tome II , page i 6 1 .
(p) L'Efpagnol qui eft propriétaire de celte mine a traité de
ion produit avec des Ncgocians de Strafbourg , qui l'envoient aux
fonderies de Wirteiuberg. ... 11 eft étonnant qu'aucun particulier
des frontières du royaume n'ait penfé jufqu'à préfent à enlever aux
ATlemands la main-d'œuvre de la préparation de l'azur. Traité de
la fonte des mines de Schlutter , tome I , pages ^8 & ^p.
(q) Hiftoire Naturelle d'Elpagne, pages ^pS é^ fuiv.
(r) Il y a une mine dans ia vallée de Giftau aux Pyrénées
efpagnoles , dont le cobalt s'eft vendu fortant de la terre jufqu'à
quarante livres le quintal pour la fabrique d'azur du Wirtcmberg.
Traité de la fonte des mir.:j de Schlutter, tome J , page 2^6.
374 Histoire Naturelle
dure & iuifante avec des taches de couleur de rofe
sèche, <& qu'il n'y avoir point de taches iemblables fur
les morceaux de cobalt (f^.
C'efl de la Saxe qu'on a jufqu'ici tiré la plus grande
partie du faffre qui fë confomme en Europe, pour les
émaux, la porcelaine, les faïences, & au/îi pour peindre
à froid, & relever par l'empois la blancheur des toiles.
La principale mine efl celle de Schnéeberg, tWe efl
très-abondante & peu profonde; on affure que le produit
annuel de cette mine efl fort conhdérable, il n'ert pas
permis d'exporter le cobalt en nature, <5c c'efl après
l'avoir réduit en iàffre, qu'on le vend à un prix d'autant
plus haut qu'il y a moins de concurrence dans le
commerce de cette forte de denrée , dont l'Allemagne
a pour ainfi dire le privilège excluhf (rj.
Cependant il fè trouve des mines de cobalt en
Angleterre, dans le comté de Sommerfet; en Suède,
la mine de Tannabcrg tÇt d'un cobalt blanc qui, félon
M. Demefle, rend par quintal trente - cinq livres de
cobalt, deux li>'rcs de fer, cinquante-cinq livres d'ar-
fenic, & huit livres de foufre (u) .
Nous fommes auiîl prefque aifurés que le cobalt fe
■■ ■ ■ ■ « ■ ■- ■ ■ — ^ — ■ — ■ — — — - . ^— ,i..^^. ■■ — — , -— — ^ -^ ■ ^
([) Hiftoire Naturelle d'Efpagne, par M. ^ovf\^s , page ^ ^ p.
(t) On trouve beaucoup de cobalt en Mifnie , en Boheniç,
dans la vallée de Joachim-Stal ; il y en a dans le duché de Wirtemberg,
dans le Hartz & dans plufieurs endroits de l'Allemagne.
(u) Lettres de AI. DeJKeile , tome II, p.ige 1^4.
DES Minéraux. 37^
trouve en Afie , & fans cloute dans toutes les parties du
monde , comme les autres matières produites par la
Nature ; car le très-beau bleu des porcelaines du Japon
& de la Chine, démontre que très - anciennement on
y a connu &. travaillé ce minéral (xj.
Dans les morceaux de mine de cobalt que l'on
raiïemble dans les cabinets, il s'en trouve de toutes
couleurs & de tout mélange, &. l'on ne connoîi aucun
cobalt pur dans fa mine; il efl fouvent mêlé de bi(muth,
& toujours la mine contient du fer quelquefois mélangé
de zinc, de cuivre, & même d'argent tenant or, &
prefque toujours encore la mine eft combinée avec des
pyrites & beaucoup d'arfènic. De toutes ces matières
la plus difficile à féparer du cobalt eft celle du fer,
leur union efl fi intime qu'on efl obligé de volatilifer
le fer en le fàifam fublimer pluiieurs fois par le fel
ammoniac qui l'enlève plus lacilement que le cobalt ;
mais ce travail ne peut fè faire en grand.
On voit des morceaux de minerai dans iefquels le
cobalt efl décompofé en une forte de cérufè ou de
chaux : on trouve auffi quelquefois de l'argent pur en
petits filets ou en poudre palpable dans la mine de
m I r— .^ ■ M^i^^l^^l^ , — ^—^^ ,11 ■■,■■■■ II. ■ I» I I ■ ^^g^— ■■■1.1 ■ ■ Ml ^ l-^»^^— ^W
(x) Quelques perfonnes prétendent que c'efl: par un mélange
du lapis- la/uli que les Chinois donnent à leurs porcelaines la belle
couleur bleue. M. de Boinare eft dans cette opinion. Voye:^ fa
Alinéralog'ie , tome H , pages ^6 ù' Juiv. mais je ne la crois pas
fondée , car le lapis en fe vitrifiant ne confer ve pas la couleur.
37^ Histoire Naturelle
cobalt ; mais le pfus fouvent ce métal n'y efl point
apparent, & d'ailleurs n'y eft qu'en trop petite quantité
pour qu'on puifTe l'extraire avec profit. On connok
aufli une mine noire vitreufe de cobalt, dans laquelle
ce minéral eft en cérufe ou en chaux , qui paroît être
minéralifée par Taélion du foie de fbufre dans lequel
le cobalt fe difTout aifément.
DU
DES Minéraux, 3 77
I
«
ce
DU NICKEL.
L fe trouve affez fbuvent dans les mines de cobalt
un minéral qui ne refTeniLle à aucun autre & qui n'a
été reconnu que dans ce dernier temps ; c'efl le nickdl.
M. Demefle drt " que quand le cuivre & l'arfenic fè
trouvent joints au fer dans la mine de cobalt , il en
réfulte un minéral fnigulier qui dans fa fradure eft d'un «
gris rougeâtre & qui a pour ainfi dire fon régule propre, «
parce que dans ce régule le cobalt adhère tellement aux «
fubflanccs itiétalliques étrangères dont il eft mêlé, qu'on «
n'a pas héfué d'en faire fous le nom de' ;//V/r/ un demi-
métal particulier (a) ». Mais cette définition du nickel
n'eft point exaéte , car le cuivre n'entre pas comme
partie effentielle dans fa compofition, & même il ne s'y
trouve que très-rarement. M- Bergman efl de tous les
Chimiftes celui qui a répandu le plus de lumières fur
la nature de ce minéral qu'il a fournis à des épreuves
aulTi variées que multipliées. Voici les principaux réfultats
de fes recherches & de fes expériences.
Hicrne, dit>il, eft le premier qui ait parlé du kupfir-
n'ickel , dans un Ouvrage fur les minéraux , publié en
fuédois en 1694.
Henckel Ta regardé comme une efpèce de cobalt ou
<i'arfenic mêlé de cuivre. ( Pyrhol. cli. vil & viii ).
(a) Lettres du dodeur DemeAe, tome JI , page i^ij.
Minéraux , Tome IIL B b b
37^ Histoire Naturelle
Cramer a auiïi placé le kupftr- nickel dans les mines
de cuivre ( Docimafl. S- ^/^ ^ "f^^)» ^ néanmoins
on «V// ti jiV;ii7is tiré un atome de cuivre. Je dois cepen-
dant obferver que M. Bergman dit enfuite que le nickel
efl quelquefois uni au cuivre.
Cronûedt efl: le premier qui en ait tiré un régule
nouveau en 175 i. ( Aâes de Stocholm ) .
M. Sage le regarde comme du cobalt mclé de fer,
d'arfenic &. de cuivre. (Mémoires de Chimie , iyy2) ,
M. Monnet penfè au/Ti que c'efl du cobalt impur.
(Traité de la Dijfolmion des métaux ) ,
Le kupfer-nickel perd à la calcination près d'un tiers
& quelquefois moitié de fon poids , par la diifipation
de i'arfènic & du foufre ; ce minéral devient d'autant
plus vert qu'il efl plus riche. Si on le pulvérife & qu'on
le pouffe à la fufion dans un creulèt avec trois parties
de fîux noir , on trouve fous les fcories noirâtres &
quelquiîfois bleues , un culot métallique du poids du
dixième, du cinquième, ou même près de moitié de
la mine crue : ce régule n'efl pas pur , il tient encore
un peu de foufre & une plus grande quantité d'arfenic ,
de cobalt, & encore plus de fer magnétique.
L'arfenic adhère tellement à ce régule, que M.
Bergman l'ayant fucceffivement calciné & réduit cinq
fois , il donnoit encore l'odeur d'ail à une fixième cal-
cination quand on y ajoutoit de la pouffière de charbon
pour favorifer l'évaporation de rarfenic.
DES Minéraux, 379
A chaque récludlion , il pafTe un peu de fer dans
les fcories ; à ia fixième , le régule avoit une demi-
duélilitc , & ctoit toujours fenfible à l'aimant.
Dans les différentes opérations faites par M. Bergman,
pour parvenir à purifier le nickel, fbit par les cal-
cinations , foit en le traitant avec le foufre , il a obtenu
des régules dont la denfité varioit depuis 7,0828 , juA
qu'à 8,87^ 1 fS). Ces régules étoient quelquefois très-
caffans, quelquefois aflez dudiles pour qu'un grain d'une
ligne de diamètre formât une plaque de trois lignes fiir
l'enclume; ils étoient plus ou moins fufibles, ôi fouvent
aufli réfra6taires que le fer forgé, & tous étoient non-fèu-
lement attirables à l'aimant, mais même il a obfervé
qu'im de ces régides attiroit toutes fortes de fer, & que
fes parties s'attiroient réciproquement; ce même régule
donne par l'alkali volatil, une diffolution de couleur bleue.
M. Bergman a aulfi effayé de purifier le nickel par
le foie de foufre , qui a une plus grande affinité avec
le cobalt qu'avec le nickel , &. il eft parvenu à féparer
ainfi la plus grande partie de ce dernier ; le régule de
nickel , obtenu après cette diffolution par le foie de
foufre, ne conferve guère fon magnétifme ; mais on
le lui rend en féparant les matières hétérogènes qui,
dans cet état , couvrent le fer.
fùj Lapefanteur fpécifique du régule de nickel , fuirant M. Briflbn,
cft de 78070 , ce qui eft un terme moyen entre les pefanteuxi
fpédficjues 70828 & 88751 , données par M. Bergman.
Bbbij
380 Histoire Natu relle
Il a de même traité le nickel avec le nitre, le
fel ammoniac, l*alkali volatil, & par la diiïblution dans
i'acide nitreux, & la calcination par le nitre, il Ta privé
de prefqiie tout fon cobalt; le fel ammoniac en a féparé
un peu de fer ; mais le nickel retient toujours une
certaine quantité de ce métal ; & M. Bergman avoue
avoir épuifé tous les moyens de l'art, fans pouvoir Je
féparer entièrement du fer.
Le régule de nickel contient quelquefois du bifmuth;
mais on les fépare aifément en fai/ànt difToudre ce régule
dans Tacide nitreux, & précipitant le biliiiuth par l'eau.
M. Bergman a encore obférvé que le nickel donne
au verre la couleur d'hyacinthe, 6l il conclut de fès
expériences ;
i.° Qu'il ell poffihle de féparer tout l'arfenic du
nickel :
2.° Que quoiqu'il tienne quelquefois du cuivre, iJ
efl également facile de le purifier de ce mélange; & que
quoiqu'il donne la couleur bleue avec l'alkali volatil,
cette propriété ne prouve pas plus l'identité du cuivre
& du nickel, que la couleur jaune des difToliitions
d'or & de fer dans l'eau régale, ne prouve l'identité
de ces métaux:
3.° Que le cobalt n'efl pas plus effentiel au nickel,
puifqu'on parvient à l'en féparer, & même que le
cobalt précipite le nickel de fa diffolution par le foie
de foufre:
DES Minéraux. 381
4. Qu'il n'eft pas pofîibie de le priver de tout Ton
fer, (5l que plus on multiplie les opérations pour l'en
dépouiller, plus il devient magnétique & difficile à
fondre; ce qui le porte à penfèr qu'il n'efl, comme le
cobalt & la mangancfe , qu'une modification particulière
du fer: voici fes termes.
Solwn itaque jam ferriitn rejlat, ér fmiè varice eœdemqne
non exigiii monienti raiiones fuadent niccolnm & cobaltum
&" jîiagrifjiinn forfan non aliter ac divcrfijjîmas ferri mo-
djficdàoncs ejfe confidcraiidas (c) . On voit par ce dernier
partage, que ce grand Chimifte a trouvé par l'anaJy/è,
ce que j'avois préfumé par les analogies, & qu'en effet
le cobalt, le nickel & la manganèfe ne font pas des
demi-métaux purs , mais des alliages de difïerens miné-
raux mélangés , & fi intimement imis au fer qu'on ne
peut les en féparer.
Le cobalt, le nickel & la manganèfe ne pouvant
être dépouillés de leur fer, reffent donc tous trois
attirables à l'aimant ; ainfi de la même manière qu'après
les fix métaux, il fè pré/ènte une matière nouvellement
découverte à laquelle on donne le nom de plaiine , &
qui ne paroît être qu'un alliage d'or, ou d'une matière
auffi pefante que l'or avec le fer dans l'état magnétique ;
il fe trouve de même après les trois fubflances demi-
métalliques, de l'antimoine , du bilinuth & du zinc, il
(c) Dij[frl. de niccolo. Oviifcul. tom. Il , pag. 160.
-82 Histoire Naturelle
fe trouve, dis- je, trois fubflances minérales, qui, comme
la platine, font toujours attirables à J'aimant, & qui dès-
lors doivent être confidérées comme des alliages naturels
du fer avec d'autres minéraux ; & il me fèmble que
par cette raifon, il ièroit à propos de féparer le cobalt f^).
Je nickel & la manganèfe des demi - métaux fimples ,
comme la platine doit l'être des métaux purs ; puifque
ces quatre minéraux ne font pas des [ùbiîances fimples,
mais des compofcs ou alliages qui ne peuvent être mis
au nombre des métaux ou des demi - métaux dont
l'edence , comme celle de toute autre matière pure,
confifte dans l'uniié de fubflance.
Le nickel peut s'unir avec tous les métaux & demi-
métaux, cependant le régule non purifié ne s'allie point
avec l'argent ; mais le régule pur s'unit à parties égales
avec ce métal, & n'altère ni fa couleur ni fa dudilité.
Le nickel s'unit aifément avec l'or, plus difficilement
avec le cuivre , & le compofé qui réfulte de ces alliages
eft moins duélile que ces métaux, parce qu'ils font
devenus aigres par le fer, qui dans le nickel efl toujours
attirable à l'aimant. Il s'allie facilement avec l'étain & lui
donne aufli de l'aigreur ; il s'unit plus difficilement avec
le plomb, & rend le zinc prefque fragile: le fer forgé
devient au contraire plus dudile lorfqu'on l'allie avec le
' ' ■
(d) Al. Braiidt , Chimifte fuedois , efl ie premier qui ait placé le
cobalt au rang des demi-métaux ; auparavant on ne le regardoit quq
comme une terre muiéraie plus ou moins friable,
DES M I N È n A U X. 383
nickel; fi on le fond avec le foufre, il fe criflallife en
aiguilles (e): enfin, le nickel ne s*anialganie pas plus
que le cobalt &. le fer avec le mercure (fj, même par
le fecours de la chaleur & de la trituration.
Au refle, le minerai du nickel diffère de celui du
cobalt en ce qu'étant expofé à l'air, il fe couvre d'une
efflorefcence verte , au lieu que celle du cobalt eft d'un
rouge-ro/àcé. Le nickel fe diffout dans tous les acides
minéraux & végétaux; toutes fes difTolutions font vertes,
& il donne avec le vinaigre des criftaux d'im beau
vert.
Le régule du nickel eft un peu jaunâtre à rcxtérieur,
mais dans l'intérieur, fa fubftance cfl d'un beau blanc;
elle ell compofée de lames minces comme celles du
bifmuth, La diiïblution de ce régule par l'acide nitreux
ou par l'acide marin , efl verte comme les criftaux de
fon minerai , &. ces deux acides font les feuls qui puifTent
<lifroudre ce régide; car l'acide vitrioliquc, non plus que
les acides végétaux , n'ont aucune a(5lion fur lui.
Mais, comme nous l'avons dit, ce régule n'eft pas
un minéral pur, il efl toujours mclé de fer, & comme
fes efTlorefcences font vertes, & que les criftaux de fà
diftbluiion confcrvenp- cette même couleur , on y a
(e ) M. Bergman , Dî [fer tût. de niccolo, — M. de Morvww,
JÉIémens de Chimie, tome î , page 2^2,
{/) Idem , tom IJI , page ^^7,
384- Histoire Naturelle
fappofé du cuivre qu'on n'y a pas trouvé, tancfis que
le fer paroît être une fubflance toujours inhérente dans
fà compofition ; au refle , ce régule lor/qu'il eil pur ,
c'efl-à-dire, purgé de toute autre matière étrangère,
réfifle au plus grand feu de calcination, & 'i\ prend
feulement une couleur noire fans fe convertir en verre.
DE
DES Minéraux. 385
* . . . ■ «
DE LA MANGANESE.
J_j A Mangancfe cft encore une matière minérale com-
pofée, & qui, comme ie cobalt & le nickel, contient
toujours du fer , mais qui de plus efl: mélangée avec
une afr<^z grande quantité de terre calcaire, & fouvenc
avec un peu de cuivre (ûJ ; c'efl de la réunion de ces
fubftances que s'efl formée dans le fèin de la terre, la
manganèfe, qui mérite, encore moins que le nickel & le
cobalt , d'être mife au rang des demi-métaux ; car on
^ ' ■ ~ "
(g) La manganèfe.... fe trouve en diverfes contrées d^; l'Alle-
mao-ne , auffi-hien qu'en Angleterre, dans le Piémont ô<. en jilufieurs
autres endroits, tantôt dans des montagnes calcaires, tantôt dans des
mines de fer. On s'en fert pour rendre le verre tranfparent & net,
ainfi que pour compofcr le vernis des Potiers , tant noir que rou-
geâtre.
Par différentes expériences , M. Margraff a reconnu que la man-
ganèfe du comté de Hohenjlàn près à^ Hcpa ^ contenoit ime terre
calcaire & un i)eu de cuivre. ... Il tira aufîi d'une manganèfe du
Piémont , au moyen de l'acide du vitriol , un fel rougeatre , qui
ayant été dilîbus dans l'eau, dépofa fur une lame d'acier quelques
particules de cuivre , quoiqu'en moindre quantité que la manganèfo
de Hohenftein. « On retire, continue M. Margraff, également du
cuivre, tant de la manganèfe d'Allemagne que de celle de Piémont, «
en la mêlant avec parties égales de foufre pulvérifé , en calcinant ce ^
mélange pendant quelques heures, »à un feu doux que l'on augmente «f
enfuite en le leOlvant & en le faifant criHallifer », Journal de Phyfiquei
Mars 17S 0, pages 22 j & fuiv.
Mmmux, Tome JIL C c c
386 Histoire Naturelle
feroit forcé dès-lors Je recrarJer comme tels , tous les
mélanges métalliques ou alliages naturels, quand même
ils feroient comj3ofcs de trois, de quatre, ou d'un
nombre encore pfus grand de matières difiérentcs, 6c
il n'y auroit plus de ligne de fèparation entre les miné-
raux métalliques fimples & les minéraux compofés ;
j'entends par minéraux fuiiples ceux qui le font par
nature, ou qu'on peut rendre tels par l'art: les fix
métaux, les trois demi-métaux & le mercure, font des
minéraux métalliques fmiples ; la platine, le cobalt, le
nickel & la majlganèfe font des minéraux compofés,
& fans doute "qu'en obfèrvant la Nature de plus près,
on en trouvera d'autres peut-être encore plus mélangés,
puifqu'il ne faut que le hafard des rencontres pour
produire des mélanges &. des unions en tous genres.
La manganèfe étant en partie compofée de fer & de
matière calcaire, fe trouve dans les mines de fer fpa-
ihiques mêlées de fubftances calcaires , foit que ces mines
fe préfentent en ftala6tites , en écailles, en mafles grenties
ou en poudre; mais indépendamment de ces mines de
fer fpathiques qui contiennent de la manganèfe, on la
trouve dans des minières particulières où elle fe pré-
fente ordinairement en chaux noire , & quelquefois en
morceaux folides , & même criflallifés; fouvent elle efl
mêlée avec d'autres pierres : mais M. de la Peiroufè , qui a
iàit de très-bonnes obfcrvations fur ce minéral, remarque
avec raifon, que toutes les fois qu'on verra une pierre
DES Minéraux. 3 S/
légèrement teinte de violet, on peut prcfumcr avec
fondcMient, qu'elle contient de la manganc/e; il ajoute
qu'il n'y a peut-être pas de mines de fer fpathiques
blanches, grifes ou jaunâtres, qui n'en contiennent plus
ou moins. « J'en ai, dit-il, coiiftammcînt retiré de toutes
celles qiie j'ai eiFayées, une portion plus ou moins"
grande, iclon l'état de la mine; car plus les mines de *
fer approchent de la couleur brune , moins il y a de ^«
manganèle , & celles qui font noires n'en contiennent ^^
point du tout fl) ».
(h) La chaux de mangaiicfe bien pure efl légère , pulvcruleme,
douce au toucher , <Sc falit les doigts ; tantôt elle elt en petits pelotons
loges dans les cavités des mines , tantôt elle efl en couches , tantôt
en feuillets ; on la trouve aufîi en maffes , dans ce dernier cas elle
efl: plus lolide de durcie , quoique pulvérulente. Elle varie pour
la couleur ; il y en a qui elt parfaitement noire quelquefois
elle efl brune , rarement rougeâtre. M. de la Peiroufe a reconnu
pour vraie chaux de manganèle, une fubllance qui à l'œil a l'éclat
de l'argent; elle fe trouve allez fre'quemment en petites malTes dans
les cavités des mines de fer Il compte onze variétés de
chaux de manganèfe Toutes ces chaux ont pour gangues
le fpath calcaire, les fchilles talqueux , les mines de fer de dilix'rentes
fortes , & la manganèle même. La manganèfe folide diffère de celle
qui efl en chaux, par fa pelante ur , par fa dureté , par fa denfiîé:
elle a une plus grande poruon de phlogillique, & contient prefque
tôt jours du fer; fon tiffu , foit feuilleté, foit en maffe, efl com-
pade , ferré 6c amorphe ; <5c c'ell en quoi on la dillingue de la
manganèfe criftallifée: elle falit les doigts, mais n'efl point friable
jii pulvérulente, comme celle qui eR eii chaux. M. de la Peiroufe
Ceci;
38S Histoire Natu p elle
La manganèfe paroît fouvciit criflalliice dans fà mine,
à peu - près comme la pierre calaminaire, & c'eft ce
qui a lait croire à quelques Cliimiiies qu'eile contenoic
du zinc (c) ; mais d'autres Ciiimiiles, & particulière-
ment M. Bergman , ont démontré par i'analj/è qu'il
n'entre point de zinc dans fa compolition; d'ailleurs,
cette forme' des criflallifàtions de ia manganèfè varie
beaucoup ; il y a des mines de manganèfe criilallifées
en aiguilles, qui relîemblent par leur texture à cer-
taines mines d'antimoine, & qui n'en difièrent à l'œij
que par leur couleur grife plus foncée & moins
brillante que ccWe de l'antimoine; ôi ce qu'il y a de
remarquable & de fmgulier dans ia forme aiguillée de
en compte huit variétés .... qui ont pour gangues le fpath calcaire^
Ja pyrite lulfureufe, Jes mines de fer, &c.
La manganèle criftallile le plus communément en longues & fines
aiguilles priiinatiques , brillantes & fragiles: elles font rallemblées en
failceaux coniques dont on peut aifément diftinguer la figure dans
})lufieurs échantillons , quoique ces faifceaux foient groupés. On
ient bien que les différentes combinaifons que peuvent avoir entr'eux
ces nombreux faifceaux, font varier à l'infini les divers morceaux
de manganèfe criflaliifée Il y en a qui eft comme fatinée j
une autre qui imite parfaitement l'hématite fibreufe d'autres qui
font ftriées, &c. M. de la Peiroufe compte treize variétés de ces man-
ganèfes criflailifées dans les mines des Pyrénées ; elles ont pour
gangues le fpath calcaire, le fpath gypfeux , l'argife martiale, le
jafpe rougeâtre , les mines de fer , les hématites & la inanganèfe
même. Journal de Phyfique , Janvier 1 y8 0 , pages 6 y & fu'ii.
(s) Lettres de M. Demeile, tome II , page 1 8j.
DES Minéraux. 389
îa manganèfe, c'cil qu'il femble que cette forme pro-
vient (Je fa propre llibÛaiice & non pas Je celle du foufre ;
car la manganèfe n'eft point du tout mélce d'ainimoine,
& elle n'exhale aucune odeur fulfureufe fur les cliarbons
ardens. Au refle, le plus grand nombre des manganefes
ne font pas criihlli/ëes ; il s'en trouve beaucoup plus
en maffes dures & informes que l'on a prifes long- temps,
& avec quelque fondement, pour des mines de fer ("i/J:
on doit auiïi rapporter à la manganèfe, ce que plufieurs
autres ont écrit de cette fubflance fous les noms d7ié-
m alites noires , mamelonées , veloutées, ire.
On trouve des mines fpatbiques de fer , & par
confcquent de la manganèfe dans plub-eurs provinces
de France, en Dauphinè , en Roulfillon ; d'autres à
Baigory & dans le comté de Foix ; il y en a aufîi une
mine très-abondante en Bourgogne près de la ville de
Mâcon; cette mine efl même en pleine exploitation,
& Ton en débite la manganèfe pour les verreries &
^ ' . ■ . — _ — ._
(d) La manganèfe ell une mine de fer pauvre, aigre, qui n'a
point de figure déterminée; tantôt elle eft en petits grains, & reflemble
à l'aimant de l'Auvergne; tantôt elle eft grisâtre, écaiileufe, itiarqueiée,
brillante & peu folide ; elle contient toujours un peu de fer; tantôt
& plus communément, elle efl: flrite , Lrillante, foJide, Si reflemble
à de l'antimoine par fon éclat, par fa couleur qui eft d'un gris-
noirâtre , & par fa pefanteur : cependant elle efl plus tendre , plus
friable , plus caflante , plus graveleufe dans fes fradures ; elle efl
prefque toujours traverfée de veines ou de filons blancs «Ik quanzeux^
Minéralogie de Bomure , tome JJ , page jj^.
390 Histoire Natu relle
les faïenceries : on trouve dans cette mine plufreurs
fortes de manganèfcs, favoir, Ja mangancfe en chaux
noire, la mangancfe en mafTcs foiides (5c noires, 6l Ja
mangane/è criflaJlifée en rayons divcrgens,
La mine de mangancfe ne fe réduit que difficilement
en régule , parce qu'elle eft très - diliicile à Icmdre , &
en même temps très - di/pofce à pafTer à i'èta: de
verre fe) ; ce régule c(t au moins aufîi dur que le fer,
fa flirface eft noirâtre , & dans l'intérieur W eft d'im
blanc brillant qui bientôt fè ternit à l'air; fa caifure
préfente des grains affez groffiers & irréguliers; en le
pulvérifant il devient fenfiblement attirable à l'aimant;
un premier degré de calcination le convertit en une
chaux blanche qui fe noircit par .une plus forte cha-
leur, & fon volume augmente d'un cinquième envi-
ron ; fi l'on met ce régule dans un vaiffeau bien clos,
il fe convertit par l'adion du feu en un verre jaune-
obfcur, & le fer qu'il contient fe fépare en partie, &
forme un petit bouton ou globule métallique.
Le régule de manganèfe fe diiïbut par les trois acides
fe) Pour obrenir ce régule il faut pulvérifer la mine,' en former
une boule en la délayant avec de l'huile & de l'eau , la mettre dans
un creufet, environnée de toutes parts de poufljcre de charbon, &
i'expofer à un feu de la dernière violence ; encore ne la trouve-t-oïi
pas réunie en un feul culot, mais en globules diOéminés qui vont
quelquefois à trente centièmes du poids de la mine.
Le régule de mangancfe eft à l'eau diflillée dans ie rapport de
i^S,jo à 1000. Bergman, Ojpufcuks , îQme II, dijfertai. i p.
DES Minéraux, 391
minéraux , & fcs difTolutions font blanches : la chaux
noire de manganèfe fe diffout dans l'alkali fixe du tartre,
& lui communique fur le champ une belle couleur
bleue.
Ce régule refu/e de s'unir au foufre, & ne s'allie
que très-difficilement avec le zinc, mais il fe m.éle avec
tous les autres minéraux n^étalliques ; lorfqu'on l'allie
dans une certaine proportion a\'ec le cuivre, il lui ôte
fa couleur rouge fans lui faire perdre fà ductilité : au
rcfle , ce régule contient toujours du fer, & il eft,
comme celui du nickel, celui du cobalt, <& comme la
platine , fi intimement uni avec ce métal qu'on ne peut
jamais l'en féparer totalement. Ce font des alliages faits
par la Nature, que l'art ne peut détruire, & dont la
fubftance , quoique compofée ; efl auffi fixe que celle
des métaux fimplcs.
La manganèfe efl d'un grand u/àge dans les manu-
factures des glaces & des verres blancs; en la fondant
avec le verre elle lui donne une couleur violette , dont
l'intenfité efl toujours proportionnelle à fà quantité ; en
forte que l'on peut diminuer cette couleur violette jufqu'à
la rendre prefque inapercevablc ; & en même temps la
manganèfe a la propriété de chafler les autres couleurs
obfcures du verre , &. de le rendre plus blanc lorfqu'elle
n'efl; employée qu'à la très - petite dofe convenable à
cet effet. C'eft dans la fritte du verre qu'il faut mêler
cette petite quantité de manganèfe; fa couleur violette.
392 HrsroinË Naturelle
en s'évanouifFant , fait dirparoitre les autres couleurs,
,S{. il y a toute apparence que cette couleur violette
qu'on ne peut apercevoir lorfque la manganèfe efl en
très-petite quantité, ne laiiïe pas d'exifler clans la fubf-
tance du verre qu'elle a blanchi ; car M. Macquer dit
avoir vu un morceau de verre très-blanc, qui u^avoit
befoin que d'être chauffe jusqu'à un certain point, pour
devenir d'un très-beau bleu-violet (fj.
Il faut également calciner toutes les manganèfes pour
leur enlever les minéraux volatils qu'elles peuvent con-
tenir; il faut les fondre fouvent à plufieurs reprifes avec
du nitre purihé; car ce ie\ a la propriété de développer
& d'exalter la couleur violette de la manganèfe ; après
cette première préparation , il faut encore la faire
refondre toujours avec un peu de nitre, en la mêlant
avec la fritte du verre auquel on veut donner la belle
couleur violette; il efl néanmoins très-difîicde d'obtenir
cette couleur dans toute fa beauté, fi l'on n'a pas appris
par l'expérience , la manière de conduire le feu de
vitrification; car cette couleur violette fe change en
brun, (Se même en noir, ou s'évanouit lorfqu'on n'attein;
pas ou que l'on paffe le degré de feu convenable» (5c
que l'ufage feul peut apprendre à faifir.
m I . .,...•. mm
(f) Didionnaire de Chimie, article Manganèfe. M. de la Peiroufe
dit aulTi qu'on peut faire difparoître & reparoître à la flamme d'une
bougie la belle couleur violette que la manganèfe donne au verr©
de Borax. Journal dç Phyfigue , Août jy$9 , j^^g^S i;6 ^ fuiV'
DES M I N É R A U X. 39;
DE L'A R S E N 1 C.
X-/ANS l'ordre des minéraux, c'efl ici que finifTent
les fubflances métalliques, <& que commencent les ma-
tières falines ; la Nature nous préiènte d'abord deux
métaux, l'or & l'argent, qu'on a nommés parfaits, parce
que leurs fubflances font pures, ou toutes deux alliées
l'une avec l'autre, & que toutes deux font également
fixes, également inaltérables, indeftruélibles par Taétiou
des élémens; enfuite elle nous offre quatre autres métaux,
le cuivre, le fer, l'étain & le plomb, qu'on a eu raifon
de regarder comme métaux imparfuits, parce que leur
fubltance ne réfifle pas à l'aclion des élémens, qu'elle
fe brûle par le feu, (Se qu'elle s*altère & même fe
décompofe par l'imprcfîion des acides & de l'eau; après
ces fix métaux, tous plus ou moins durs & folides, 011
trouve tout-à-coup une matière fluide, le mercure qui,
par fa dendté &. par quelques autres qualités , paroît
s'approcber de la nature des métaux parfaits, tandis que
par fà volatilité & par fa liquidité il fè rapprocbe encore
plus de la nature de l'eau: enfuite fe prcfeiitent trois
matières métalliques, auxquelles on a donné le nom de
demi-métaux j parce qu'à l'exception de la dudiliié ils
reifemblent aux métaux imparfaits; ces demi-métaux font
l'antimoine, le bifmuth & le zinc, auxquels on a voulu
joindre le cobalt , le nickel & la manganèfe ; & de mcmc
Minéraux , Tome lîL D d d
394 Histoire N aturelle
que dans les métaux , il y a des différences très-marquées
entre les parfaits & les imparfaits, il fe trouve aufli des
différences très-fenfibies entre les demi-métaux; ce nom,
ou plutôt cette dénomination, convient affez à ceux
qui, comme l'antimoine, le bifmuth & le zinc, ne font
point mixtes ou peuvent être rendus purs par notre
art; mais il me femble que ceux qui, comme le cobalt,
k nickel & la manganèfe, ne font jamais purs, & font
toujours mêlés de fer ou d'autres fubftances difîcrentes
de la leur propre, ne doivent pas être mis au nombre
des demi-métaux, fi l'on veut que l'ordre des déno-
minations fuive celui des qualités réelles; car en appelant
demi-métaux les matières qui ne font que d'une feule
/iibftance, on doit impofer un autre nom à celles qui
font mêlées de plufieurs fubfiances.
Dans cette fuite de métaux, demi-métaux & autres
matières métalliques, on ne voit que les degrés fuccc/îifs
que la Nature met dans toutes les claffes de /es pro-
duétions; mais l'arfenic qui paroît être la dernière nuance
de cette claffe des matières métalliques , forme en même
temps un degré, une ligne de féparation qui remplit le
grand intervalle entre les fîibftances métalliques &: les
matières falines. Et de même qu'après les métaux, on
trouve la platine qui n'efl point un métal pur, & qui par
ion magnétifme confiant paroît être un alliage de 1er, &.
d'une matière auffi pefante que l'or, on trouve aufîi après
ies demi -métaux, le cobalt, le nickel &i h manganèfe
D E s M 1 N É R A V X, 395
qui, étant toujours attirables à l'aimant, font par con-
icquent alliés de fer uni à leur propre fubihnce ; l'on
doit donc en rigueur les féparer tous trois des demi-
métaux , comme on doit de même féparer la platine des
métaux , pui-fque ce ne font pas des fiibllances pures ,
mais mixtes & toutes afliécs de fer, quoiqu'elles donnent
Jeur régule fans aucun mélange que celui des parties
métalliques qu'elles recèlent ; & quoique l'arfenic donne
de même fon régule , on doit encore le féparer de ces
trois dernières matières , parce que fon effence efl autant
faline que métallique.
En efïèt, l'arfenic qui, dans le fein de la terre, /e
préfente en maffes pefaiites & dures comme les autres
fiibflances métalliques, ofîre en même temps toutes les
propriétés des matières falines; comme les fels, il fe
diifout dans l'eau ; mclé comme les falins avec les
matières terreufes, il en facilite la vitrification; il s'unit
par le moyen du feu avec les autres fèls qui ne s'unilTent
pas plus que lui avec les métaux ; comme les fels , il
décrépite & fe volatilife au feu, & jette de même des
étincelles dans l'obfcurité; il fufe aulfi comme les fels,
& coule en liquide épais fans brillant métailique; il a
donc toutes les propriétés des fels ; mais d'autre part fon
régule a les propriétés des matières métalliques.
L'arfenic, dans fon état naturel, peut donc être
confidéré comme un fel métallique; & comme ce fel,
par fes qualités , diffère des acides & des alkalis , ii
Dddij
39^ Histoire Naturelle
me feniLle qu'on doit compter trois Tels fimples dans
ia Nature, l'acide, i'aikaii & l'arfenic, qui repondent
aux trois idées que nous nous fommes formées de leurs
effets , & qu'on peut défigner par les dénominations
Aç fel acide ^ fel cnuft^que Si fcl corrofif; & il me paroît
encore que ce dernier fel, i'ari^nic, a tout autant &
peut-être plus d'influence que les deux autres fur \t%
matières que la Nature travaille. L'examen que nous
allons faire des autres propriétés de ce minéral métallique
& falin, loin de faire tomber cette idée, la juftiliera
pleinement, & même la confirmera dans toute fon
étendue.
On ne doit donc pas regarder i'arfenic naturel, comme
un métal ou demi-métal , quoiqu'on le trouve commu-
nément dans les mines métalliques , puifqu'il n'y exifte
qu'accidentellement & indépendamment des métaux ou
demi-métaux avec lelquels il efl: mêlé : on ne doit pas
regarder de même, comme une chaux purement m^
tallique , l'arfenic blanc qui fe fublimc dans la fonte de
différens minéraux, puifqu'il n'a pas les propriétés de
ces chaux , & qu'il en offre <ie contraires; car cet
arfenic qui s'efl volatilifé, relie conflamment volatil, au
iieu que les chaux des métaux & des demi-métaux, font
toutes conflaannent fixes; de plus cette chaux, ou plutôt
cette rieur d'arlenic, eft fbluble dans tous les acides,
& mcme dans i'eau pure comme les fels , tandis qu'au-
cune chaux métallique ne fe diffout dans l'eau, & n'eil
DES Minéraux, 397
même guère attaquée par les acides. Cet arfenic ,
comme les fels , fe diifout & fe criftallife au moyen de
rébuilitioii en criftaux jaunes & tranfparens ; il répand
lorfqu'on le cliaufiè, une très-forte odeur d'ail; mis fur
la langue fà faveur efl très-acre, il y fait une corrofion,
ÔL pris intérieurement, il donne la mort en corrodant
i'eftomac <& les inteflins. Toutes les chaux métalliques,
au contraire, font prefque fans odeur & fans faveur;
cet ariènic' blanc n'ell donc pas une vraie chaux métal-
lique, mais plutôt un fel particulier plus actif, plus acre
&. plus corrofif que l'acide &. l'alkali : enhn cet arfenic
efl toujours très-fufible, au lieu que les chaude rhétalliques
font toutes plus difficiles à fondre que le métal même ;
elles ne contractent «aucune union avec les matières
terreufes , «Sl i'arfcnic, au contraire, s'y réunit au point
de foutcnir avec elles le feu de la vitrification, il entre,
comme les autres fels, dans la cornpofition des verres ;
il leur donne une blancheur qui fe ternit bientôt à l'air,
parce que l'humidité agit fur lui comme fiir les autres
fels. Toutes les chaux métalliques donnent au verre
de la couleur ; l'aricnic ne leur en donne aucune ,
&. reffemble encore par cet effet aux falins qu'on mcle
avec le verre. Ces fèuls faits font , ce me femble , plus
que fuffifans pour démontrer que cet arfenic blanc n'eft
point une chaux métallique ni demi-méiallique, mais un
vrai (c\ , dont la fubflance adive efl d'une nature parti-
culière & différente de celle de l'acide & de l'alkali.
398 H I STOIRE NATU RELLE
Cet arfenic blanc qui s'élève par fiibiimation dans h
fonte des mines , n'étoit guère connu des Anciens (u) ,
&. nous ne devons pas nous féliciter de cette décou-
verte, car elle a lait plus de mal que de bien; on auroit
même du profcrire la rechercbe, l'ufage & le commerce
de cette matière funcfte, dont les lâches fcélérats n'ont
que trop la facilite d'abufcr: n'accufons pas la Nature
de nous avoir préparé des poifbns &i des moyens de
deflruétion ; c'efl à nous-mêmes, c'efl à notre art
ingénieux pour le mal qu'on doit la poudre à canon,
le fiiblimé corrodf, l'arfenic blanc tout aulTi corrofif.
Dans le fein de la terre , on trouve du fbufre & du
falpétre, mais la Nature ne les avoit pas combines
comme l'homme, pour en faire le plus grand, le plus
puiiTant inilrument de la mort; elle n'a pas fublimé
l'acide marin avec le mercure pour en faire un poifon;
elle ne nous préfènte l'arfenic que dans wn état où fes
qualités funefles ne font pas développées; elle a rejeté,
recelé ces combinaifons nuîfibles en même temps qu'elle
ne ceffe de faire des rapprochemens utiles & des unions
prolifiques; elle garantit, elle défend, elle conferve,
elle renouvelle, & tend toujours beaucoup plus à la vie
qu'à la mort.
(iij La feule indicatioa prcçife que l'on ait fur l'arlenic fe trouve
dans un paflage d'Aviceane qui vivoit dans le onzième fiècle ;
M. Bergman cite ce pafldge par lequel il paroit qu'on ne con-
jiOiflbii pas aJo;-s rarfeaic bUiiç fublime.
DES Minéraux, 399
L^arfenic dans fbn état de nature n'efl donc pas un
poifbn comme notre arfenic fadice ("S); il s'en trouve de
plufieurs fortes ôl de différentes formes, &. de couleurs
diverfès dans les mines métalliques. Il s'en trouve auiïi dans
ies terreins volcanifés fous une forme différente de toutes
les autres , ôl qui provient de fon union avec le foufre ;
on a donné à cet arfenic le nom (S! orpiment lorfqu'il cfl
jaune, & celui de r/^/^-^r quand il efl rouge: au refle, la
plupart des mines d'arfenic noires & grifes, font des mines
de cobalt mêlées d'arfenic; cependant M. Bergman affure
qu'il (è trouve de i'arfcnic vierge en Bohème, en Hon-
grie, en Saxe, <r>^c. i& que cet arfenic vierge contient tou-
jours du fer (c). M. Monnet dit auffi qu'il s'en trouve en
France, à Sainte-Marie -aux-mines , & que cet arfenic
vierge efl une fubflance des plus pcfantes & des plus dures
que nous connoifîions, qui ne fe brife que difficilement,
& qui prcfcnte dans fa fraéture fraîche, un grain brillant
femblable à celui de l'acier, qu'il prend le poli & le
brillant métallique du fer, que fon éclat fe ternit bien
\îte à l'air, qu'il fe dilTout dans les acides, c^c. (d) , Si
(b ) Hoffuian allure, d'apics plulieuis expériences, que l'orpiment
& le réalgar naturels ne font pas des poifons comme l'arfenic jaune
& l'arfenic rouge artificiels. DuTionnaire de Chimie , par AI. Alaccjuer ,
article Arfenic.
(c) Opufcules chimiques," tome II, pages zyS ù" 2 S jf.
(d) jM. Monnet ajoute que l'arfenic vierge, dans des vaifleaux
fermés, fe fublime fans qu'il foit befoin d'y rien ajouter; que combine'
iveç tous les autres mttaux ; il doiuie toujours un tégule.,,».
400 Histoire Naturelle
j'avois moins de contiance aux lumières de M. Monnet,
je croirois, à cette defcription, que fou ar/^nic vierge
n'eiî qu'une e/pcce de marcaffite ou pyrite ar/enicale;
mais ne les ayant pas comparés je ne dois tout au plus
que douter, d'autant que le fàvant M. de Morveau
dit aulTi: ^^ Qu'on trouve de i'arfenic vierge en mafTe
5> informe, grenue, en écailles &. friable; de I'arfenic noir
» mclé de bitume, de i'ar/ènic gris teftacé, de l'ar/ènic
blanc criftallifc en gros cubes ^e); » mais toutes ces
formes
o- \Jnç propriété de I'arfenic vierge , dit-il , eft de s'enfla/nmer , (oit
» qu'on le falTe toucher à des charbons ou à Ja flamme ; il brûle
M paifiblement en répandant une épaifle fumée qui fe condenfe contre
3î les corps froids en un fublimé blanc. ... & lorfque I'arfenic qui
>» brûle efl entièrement confumé, il refte un peu de fcorie terreufe
& ferrugineufe jj
Le lieu où l'on trouve le plus d'arfenic vierge efl Sainte-Marie-
aux-mines ; il eft afîez rare par-tout ailleurs ; dans les années «755
& 1760, il fe trouva à Sainte- Marie -aux - mines une fi grande
quantité d'arfenic vierge , que pendant plufieurs jours on en tiroit
des quintaux entiers. . . . Dans les autres mines, comme dans celles
de Freyberg, de Saint-Andreafberg-au-Hartz 5t dans quelques-unes
de Suède, on en a trouvé par intervalles quelques morceaux. . . .
M. Monnet conclut par dire que I'arfenic efl: une fubftance par-
ticulière , femi - métallique fi on veut l'envifager par fes propriétés
métalliques , ou femi - faline fi on veut l'envifager par fes propriétés
falines , qui entre comme partie contingente dans les mines, & qui eft
indifîei-ente à l'intérieur des métaux. Journal de Phyfiquc , Septembre
' 773 ' P^g^^ ^ 9 ^ à' fiiiv.
(e) Elémens de Chimie, tome I , page / ^;-. — « L'arfenic , dit
>» M. Demefte , eA une fubflance for: commune dans les mines ;
elle
D E s M I N É R A U X. 40 i
formes pourroieiu ctre des clécompofitions d'arfcnic,
ou des mélanîies avec du cobalt &l du fer: d'ailleurs,
ia mine d'arltiiic en écailles ni même le régule d'ar-
fenic, qui doit être encore plus pur &i plus denfe que
l'arfenic vierge, ne font pas aufli pefans que le ruppofe
M. Monnet ; car ia pefanteur fpécilique de la mine
écailleufe d'arfenic n'cft que de ^-7249, & celle du
régule d'arfenic de )7^^3 3, tandis que la pefanteur
fpécifique du régule de cobalt efl de 78 i 1 9, & celle
du régule de nickel de ySoyo; il efl donc certain que
l'arfenic vierge n'efl pas à beaucoup près auiïi pefant
que ces régules de cobalt & de nickel.
elle s'y montre tantôt à la lurface d'autres minéraux , où elle s'eft «
dcpolee, foit à l'état de régule, foit à l'état de chaux; tantôt elle te
s'y trouve minéralifée , <5c tantôt elle exerce elle-même les fondions «
de mineialifateur . ...» Outre le fer que contient la pyrite arléni-
cale , elle renferme aulFi quelquefois du cobalt, du bilmuth , même
de l'arixent & de l'or Le régule d'arfenic natif elt ordinai-
rement noirâtre & terni par l'a<ftion de l'air , quoique dans fa
fracture récente il foit brillant comme de l'acier. Tantôt il foi me des
maflès écailleufes , folides, allez compares & fans figure déterminée;
tantôt ce font des malles granuleules avec des protubérances , com-
pofées de lames très-épailies , pofees en recouvrement les unes fur
les autres, & dont les fragmens ont par conféquent une partie concave
& une partie convexe. Il porte alors le nom d'ar/rnic icjfacé. Quand
cet arfenic vierge elt pur & fans mélange , il n'efl point afl'ez dur
pour faire feu avec le briquet, mais il eft quelquefois mêlé d'une
petite quantité de fer ou de cobalt, & alors la dureté efl plus
confidérable.
La grande facilité avec laquelle l'arfenic pafie à l'état de chaux ,
Minéraux, Tome 111. £ee
402 Histoire Naturelle
Quoi qu'il en foit, i'arfenic fe rencontre dans preique
toutes les mines métalliques, & fur-tout dans les mines
d'étain, c'eft même ce qui a fait donner à I'arfenic,
comme au foufre, le nom de nméralifateiir : or fi l'on
veut avoir ime idée nette de ce que fignifie le mot de
miner ûl'ifation , on ne peut l'interpréter que par celui de
j'altcration que certaines fubfîances a6tives produi/ent
fur les minéraux métalliques; la pyrite, ou fi l'on veut
Je foufre minéral, agit comme un fel par l'acide qu'il
contient; le foie de foufre agit encore plus généralement
par fon alkali , &: l'arlèriic qui cft un autre {q\ fouvent
uni avec la matière du feu dans la pyrite, agit avec une
^■•■■' ■ — ■ -■■ — ■ " " ' ■ " ' "
& la grande volatilité de cette chaux nous indiquent aflez pourquoi
Ton rencontre la chaux de ce demi-me'tal fous la forme d'une etHo-
r^ic^act blanche à Ja furface & dans les C3i\\tés de certaines mines ;
on ne peut même pas douter qu'elle ne puifle réfulter de la décoin-
pofuion , foit de la mine d'argent rouge , foit des autres minéraux
qui contiennent ce demi-métal. . . . Cette efflorelcence blanche efl
une chdux d'arlenic proprement dite. . . .
Le verre natif d'arfenic eft d'un blanc jaunâtre, de même que ïe
verre facftice de ce demi-métal ; mais le premier efl; moins iujet à
s'ahérar à l'air que le dernier, par la raifon fans doute que la
coinbinaifon des deux fubflances qui compolent le verre natif, y
efl plus parfaite & plus intime qu'elle ne l'elt dans le verre d'arlenic
que nous préparons.
Quoi qu'il en foit , le verre natif d'arfenic fe rencontre à la fuper-
flcie de quelques mines de cobalt & fur quelques produits de volcans,
il efl: quelquefois criflallifé en prifmes minces , triangulaires , ou en
aiguilles blanches divergentes, &c. LtUres de M, Dmtjlt , tome ÎI ,
pa^es 12 1 & fuiv*
DES Minéraux. 403
double puifl'ance, & c'ell de i'aclioii de ces trois icls
acides, alkaiis &. arfenicaux, que dépend l'altération ou
mincralifation de toutes les fubflances métalliques, parce
que tous les autres fels peuvent fe réduire à ceux-ci.
L'arfenic a fait impreiïion fur toutes les mines mé-
talliques dans lefquelles il s'eft établi dès le temps de
h première formation des Tels, après la chute des eaux
& des autres matières volatiles; il femble avoir altéré
les métaux à l'exception de l'or; il a produit avec le
foufre pyriteux &. le foie de foiifre , les mines d'argent
rouges, blanches (Si. vitreufès ; il efl entré dans la plupart
des mines de cuivre ff) , & il adhère très -fortement
à ce métal fg); il a produit la cridallifation des mines
d'étain & de celles de plomb qui fe préfentent en criflaux
blancs & verts ; enfin il fe trouve tmi au fer dans plu-
fleurs pyrites, & particidièrement dans la pyrite blanche
que les Allemands appellent mifpikel j qui n'ell qu'un
compofé de mine de fer & d'une grande quantité
^, I ■ ■ I - Il ■ I - - - — • - — - — '
(f) La preuve évidente que l'arfenic peut minéralifer le cuivre,
c'eft qu'il le diflout à froid & par la voie humide , lorfqu'on le lui
prcfente très-divifé comme en feuilles de livret. Elémens de Chimie ^
par Af. de Aforveau , tome H , page ^ 2j .
(cr) L'arfenic tient très-fortement avec le cuivre, & louvent if
fe montre dans la matte ou cuivre noir après un grand nombre de
fontes & de grillages pour tâcher de l'en féparer , ce qui dans les
mines d'argent tenant cuivre en rend la fèparation très - difficile.
Ai» Monnet, Journal de Phyfque , Septembre i773-
E e e ij
404. Histoire Naturelle
d'arfenic (h). Les mines d'antimoine, de bifmuth, de
zinc, & fur - tout celles de cobalt contiennent au/Ti de
l'arfenic; prcfque toutes les matières minérales en font
imprégnées ; il y a même des terres qui font fènfiLie-
ment arfenicales ; aucune matière n'eft donc plus uni-
verfcllement répandue : la grande (Se confiante volatilité
de l'arfenic , jointe à la fluidité qu'il acquiert en (e.
difTohant dans l'eau, lui donnent la faculté de /è tranf-
porter en vapeurs, &. de fè dépofèr par- tout, foit en
liqueur, foit en maffes concrètes; il s'attache à toutes les
fubflances qu'il peut pénétrer, & les corrompt prefque
toutes par l'acide corrofif de fon fel.
L'arfenic efl: donc l'une des fiibflances les plus
actives du règne minéral ; \ts matières métalliques &
-— ' — -- . ■ - . .-■ _ — ^
(h) Le m'ifpickd ou pyrite blanche peut être confidérce comme
une mine de fer ark-nicale , ce métal y étant minéralifé par beaucoup
d'ari'enic & un peu de foufre ; mais i'arfenic étant aufîi une fubftance
métallique particulière, & fa quantité dans cette pyrite excédant de
beaucoup celle du {'ex , nous pouvons regarder le mlfpicM comme
une mine d'arfenic proprenient dite. On le rencontre en maffes ,
tantôt informes & tantôt crillallifées de diverfes manières. . . . On
trouve de fort beaux groupes de criftaux de mif])ickel à Muinig
en Saxe, Lettres de M. le Doâeur Demejfe , tome II , page 12 p.
— Et on obferve même affez généralement que le inili)ickel en
mafies confufes efl compofé de petites lames rhomboïdales. Llem ,
page 1^0.— La mine d'arfenic grife (pyrite d'orpiment) diffère
peu de la précédente; elle contient une plus grande quantité de
Çonîte , ce qui fait qu'en la calcinant on en retire du réal^ar
Idem, ibidem.
D E s M I N É R A U X, ^o J
t^rreufes ou pierreufes ne font en elles-mêmes que des
fubilances paiïives; les Tels feuls ont des qualités avives,
& le fbufre doit être confidéré comme un M , puifqu'il
contient de l'acide qui efl l'un des premiers principes
falins. Sous ce point de vue , les puiffances actives
fur les minéraux en général femblent être rcpréfentées
par trois agens principaux, le foufre pyriteux, le foie de
foufre c^ l'arfcnic , c'eft- à-dire , par les fels acides,
alkaiins & arfénicaux ; & le foie de foufre qui contient
l'alkali uni aux principes du foufre, agit par une double
puiflance & altère non -feulement les fubflances métal-
liques , mais aufîi les matières terreufès.
Mais quelle caufe peut produire cette puiffance des
fels , quel élément peut les rendre aétifs ! fi ce n'efl
celui du feu qui efl fixé dans ces fels ; car toute aélion
qui dans la Nature ne tend qu'à rapprocher , à réunir
les corps, dépend de la force générale de l'attradion ,
tandis que toute aélion contraire qui ne s'exerce que
pour féparer, divifer & pénétrer les parties conflituantes
des corps , provient de cet élément qui , par fa force
expanfive, agit toujours en fens contraire de la puiffance
attradive , & feu! peut féparer ce qu'elle a réuni , ré-
foudre ce qu'elle a combiné, liquéfier ce qu'elle a rendu
folide, volatilifer ce qu'elle tenoit fixe, rompre en ua
mot tous \cs liens par lefqucis l'attradion univer/èlle tien-
droit la Nature enchaînée & plus qu'engourdie, fi l'élé-
ment de la chaleur &. du feu qui pénètre julque dans fès
4o6 Histoire Naturelle
entrailles n'y cmretcnoit le mouvement néceffaire à tout
développement , toute produdion & toute génération.
Mais , pour ne parler ici que du règne minéral , le
grand altérateur , le feul minérali/àteur primitif eft donc
le feu ; le fbufre , le foie de foufre , l'ar/ènic & tous
ies fels ne font que fes infîrumens ; toute minérali/àtioii
n'eft qu'une altération par divifion , di/folution, volati-
lifation , précipitation , &c. Ainfi les minéraux ont pu
être altérés de toutes manières , tant par le mélange
des matières pa/Tives dont ils font compofés que par
ia combinaifon de ces puifTances animées par le feu ,
qui les ont plus ou moins travaillés , & quelquefois
au point de les avoir prefque dénaturés.
Mais pourquoi, me dira-t-on, cette minéralifation
qui, félon vous, n'efi: qu'une altération, (c porte-telle
plus généralement fur les matières métalliques que fur
les matières terreufcs \ De quelle caufe, en un mot,
ferez-vous dépendre ce rapport fi marqué entre le miné-
ralifateur & le métal ! Je répondrai que , comme le
feu primitif a exercé toute fa puifTance fur les matières
qu'il a vitrifiées, il les a dès-lors mifcs hors d'atteinte
aux petites adions particulières que le feu peut exercer
encore par le moyen des fels fur les matières qui ne fe
font pas trouvées affez fixes pour fubir la vitrification ;
que toutes ies fubflances métalliques, fans même en
excepter celle de l'or, étant fufceptibles d'être fublimées
par l'adion du feu , elles fe font Icparées de la malTç
DES Minéraux, 407
des matières fixes qui fe vitrilioient; que ces vapeurs
métalliques reléguées dans i'atmofphère tant qu'a duré
i'exceflive chaleur du globe, en font enfuite dcfcendues
& ont rempli les fentes du quartz Ôi autres cavités de
h roche viireufe , &. que par confcquent ces matières
métalliques ayant évité par leur fuite Si. leur fubiimation
ia plus grande aélion du feu, il n'eft pas étonnant qu'elles
ne puiflent éprouver auctme altération par l'aélion fecon-
daire de la petite portion particulière du feu contenue
dans les fels ; tandis que les fubflances calcaires n'ayant
été produites que les dernières , & n'ayant pas fubi
l'action du feu primitif, font par cette raifbn, très-
fufceptibles d'altération par l'aélion de nos feux , &. par
ie foie de foufre dans lequel la fubllance du feu eft
réunie avec l'alkali.
Mais c'efl affez nous arrêter fiir cet objet général
de la minéralifation qui s'elt préfenté avec i'arfenic^
parce que ce fel acre &. corrofif, efl l'tm des plus
puiflans minéralifateurs par l'aélion qu'il exerce fur les
métaux ; non-feulement il les altère &. les mincrali/e dans
le fein de ia terre , mais il en corrompt la fubflance ;
il s'infmue & iè répand en poifon deflruéteur dans les
minéraux comme dans les corps organifés; allié avec
l'or ÔL l'argent en très - petite quantité , il leur enlève
l'attribut e/fentiel à tout métal en leur ôtant toute duéîi-
lité , toute malléabilité ; il produit le même effet fur
le cuivre; il blanchit le fer plus que le cuivre, fans
4o8 Histoire Naturelle
cependant le rendre auffi caiïant; il donne de même
beaucoup d'aigreur à i'ctain & au plomb, & A ne fait
qu'augmenter celle de tous les demi -métaux; il en
divife donc encore les pariics lorsqu'il n'a plus la puif-
fance de les corroder ou détruire; quelqu'épreuve qu'on
iui falle fubir, en qtielqu'ctat qu'on puifTe le réduire,
l'arfenic ne perd jamais fes qualités pernicieu/ès; en
régule, en ticurs, en chaux, en verre, '\\ efl toujours
poifon; la vapeur ieule reçue daus les poumons, fuffit
pour donner la mort, 6l l'on ne peut s'empêcher de gémir
en voyant le nombre des vidimes immolées , quoique
volontairement, dans les travaux des mines qui con-
tiennent de l'arfenic; ces malheureux Mineurs périlfent
prefque tous au bout de quelques années , & les plus
vigoureux font bien-tôt languiiTans ; la vapeur, l'odeur
feule de l'arfenic leur altère la poitrine (ij , & cependant
ils ne prennent pas pour éviter ce mal toutes les pré-
cautions néceffaires ; d'abord il s'élève afTez fouvent
(i ) C'eft à cette lubrtance dangereufe qu'efl dCie la phthifie ,
& ces exulcérations des poumons qui font périr à la fleur de l'âge
les ouvriers qui travaillent aux mines.... Parmi eux un homme de
trente cinc{ à quarante ans efl déjà dans la décrépitude , ce qu'on doit
fur-tout attribuer aux mines qu'ils détachent avec le cileau & le maillet,
&. qu'ils refpirent perpétuellement par la bouche & par le nez; il
paroit ([ue fi dans ces mines on failoit ulage de la poudre à canon
pour détacher le minerai , les jours de ces malheureux Ouvriers
ne feroient point fi indignement [prodigués. Encyclopédie , article
Orpiment.
DES Minéraux. 409
des vapeurs aiTenicales dans les fbuterrains des mines
dès qu'on y fait du feu; & de plus, c'efl en laifànt
au marteau des tranchées dans la roche du minéral
pour le féparer & l'enlever en morceaux, qu'ils refpirent
cette poullière arfenicale qui les tue comme poilbn ,
(Sl les incommode comme pou/Tière ; car nos Tailleurs
de pierre de grès font très-fouvent malades du poumon,
quoique cette pouffière de grès n'ait pas d'autres mau-
vai/ès qualités que fà très-grande ténuité ; mais dans tous
ies ufàges , dans toutes les circonftances où l'appât du
gain, commande , on voit avec plus de peine qtie de
furprife , la lanté des liommes comptée pour rien , <5c
leur vie pour peu de cliofè.
L'arfenic qui malheurcufement fe trotive fi fouvcnt
& fi abondamment dans la plupart des mines métalliques,
y eil prefque toujours en fèl cri Hall in ou en poudres
blanches ; il ne fe trouve guère que dans les volcans
agilTans ou éteints fous la forme d'orpiment ou de
réaigar; on alFure néanmoins qu'il y en a dans les mines
de Hongrie, à Kremnitz , à Newibl, &c. La fubUance
de ces arlènics mclés de foufre , eft difpofée par lames
minces ou feuillets, & par ce caradère on peut tou-
jours diftinguer l'orpiment naturel de l'artificiel dont
le tilfu eft plus confus. Le réaigar eft auffi difpofé par
feuillets , & ne diffère de l'orpiment jaune que par fa
couleur rouge ; il eft encore plus rare que l'orpiment ;
& ces deux formes fous lefquelies fè préfente l'arfenic
MirJruiix, Tome IIL Fff
410 Histoire N atv relle
ne font pas communes, parce qu'elles ne proviennent
que de i'a6tion du feu , & l'orpiment & le rcalgar n'ont
été formés que par celui des volcans ou par des incendies
de forets ; au lieu que l'arfenic fe trouve en grande
quantité fous d'autres formes dans prefque toutes \t$
mines , &. fur-tout dans celles de cobalt.
Pour recueillir l'arfenic & en éviter en même temps
Jes vapeurs funefles, on confîruit des cheminées inclinées
& longues de vingt à trente toifes au-de(fus des four-
neaux où l'on travaille la mine de cobalt , &. l'on a
obfervé que l'arfenic qui s'élève le plus haut efl aufïi
le plus pur & le plus corrofif ; pour ramaffer fans danger
cette poudre pernicieufe, il faut fe couvrir la bouche
& le nez , &. ne refJ3irer l'air qu'à travers une toile ;
& comme cette poudre arfenicale fë diffout dans les
graiffes & les huiles auffi-bien que dans l'eau , & qu'une
très -petite quantité fuffit pour caufèr les plus funefîes
effets , la fabrication devroit en être défendue & le
commerce profcrit.
Les Chimifles , malgré le danger , n'ont pas laifTé
que de foumettre cette poudre arfenicale à un grand
nombre d'épreuves pour la purifier & la convertir en
criflaux; ils la mettent dans des vaiffeaux de fer exaéle-
ment fermés où elle fe fublime de nouveau fur le feu.
Les vapeurs s'attachent au haut du vaiffeau en criflaux
blancs & tranfparens comme du verre , &. lorfqu'ils
veulent faire de l'arfenic jaune ou rouge femblable au
DES Minéraux. 411
rcalgar & à l'orpiment, ils mclent cette poudre d'arfenic
avec une certaine quantité de foufre pour les fublimer
enfèmble ; la matière fublimce devient jaune comme
l'orpiment, ou rouge comme le rcalgar, félon la plus
ou moins grande quantité de foufre qu'on y aura mêlée.
Enfm fi l'on fond de nouveau ce réalgar artificiel , il
deviendra tranfparent & d'un rouge de rubis ; le réalgar
naturel n'efl qu'à demi-tranfparent, fou vent même il efl:
opaque & reflemble beaucoup au cinabre ; ces arfcnics
jaunes & rouges font, comme l'on voit, d'ime formation
bien poftérieure à celle des mines ar/ènicales, puifque
le foufre eft entré dans leur compofition & qu'ils ont
été fublimés enfèmble par les feux fouterrains. On affure
qifà la Chine, l'orpiment & le réalgar fe trouvent en fi
grandes maffes qu'on en a fait des vafes & des pagodes ;
ce fait démontre i'exiHence préfénte ou paffée des volcans
dans cette partie de l'Afie.
Pour réduire i'arfenic en régule, on en mêle la poudre
blanche fublimée avec du favon noir & même avec de
l'huile ; on fait fécher cette pâte humide à petit feu
dans un matras , & on augmente le degré de feu jufqu'à
rougir le fond de ce vaiffeau. M. Bergman donne la
pefanteur f])écifique de ce régule dans le rapport de
8310 a 1000 , ce qui, à yz livres le pied cube d'eau,
donne 598 livres 7^; pour le poids d'un pied cube de
régule d'arfenic ; ainfi la denfité de ce régule ed un
peu plus grande que celle du fer, & à peu-près égale
Fff i]
412 Histoire Naturelle
à la clcnCitc de l'acier. Ce régule d'arfenic a , comme
nous l'avons dit , piufieurs j^roprictcs communes avec
îes demi-mctaux ; il ne s'unit point aux terres ; il ne
fe diffout point dans l'eau , il s'allie aux métaux fans
leur ôter l'éclat métallique; & dans cet état de régule,
l'arfenic eft plutôt un demi -métal qu'un fcl.
On a donné le nom de t'erre d'arfaiic, aux criflaux
qui fe forment par la poudre fublimée en vaiffeaux clos;
mais ces criflaux tranfparens ne font pas du verre , puif-
qu'ils font folubles dans l'eau ; &. ce qui le démontre
encore, c'efl que cette même poudre blanche d'arfenic
prend cet état de prétendu verre par la voie humide
& à la fimple chaleur de l'eau bouillante (k).
Lorfqu'on veiu purger les métaux de l'arfenic qu'ils
contiennent, on commence par le volaiilifcr autant qu'il
efl poffible ; mais comme il adhère quelquefois trcs-
fortement au métal & fur-tout au cuivre, & que par le
feu de fufion on ne l'en dégage pas en entier, on ne vient
a bout de le féparer de la matte que par l'intermède
du fer qui ayant plus d'affinité que le cuivre avec l'ar-
fenic s'en faifit & en débarraffe le cuivre ; on doit faire
la même opération & par le même moyen en rafinant
l'argent qui fe tire des mines arfenicales.
(k) 11 faut pour cela mettre la diilolution de cette cliauv dans
quinze parties d'eau bouillante, & laifler, enfuite refroidir cette diflb-
lution ; on obtient alors de petits criftaux en fegmens d'odacdres,
&c. c'eft un verre d'arfenic formé par un degré de chaleur bien peu
confidérable. Le tires d^ AI. Dcmejk ^ terne II , page iiS,
D E s AI I N É R A U X. 4I 3
DES CI MENS DE NATURE.
vJN a VU par l'expcfc des articles préccclens , que
toutes les matières folides du Globe terreilre, produites
d'abord par le feu primitif, ou formées enfuite par l'in-
termède de l'eau , peuvent être comprifes dans quatre
clafTes générales.
La première contient les verres primitifs & les matières
qui en font composées , telles que les porphyres , les
granités & tous leurs détrimens, comme les grès, les
argiles , fchifles , ardoifes , &c.
La féconde claffe efl celle des matières calcinables ,
& contient les craies, les marnes , les pierres calcaires,
les albâtres , les marbres & les plâtres.
La troifième contient les métaux , les demi-métaux
&L les alliages métalliques formés par la Nature, ainfi que
les pyrites & tous le^ minerais pyriteux.
Et la quatrième eft celle des réfidus & détrimens
de toutes les fubihnces végétales & animales, telles que
ie terreau, la terre végétale, le limon, les bols, les
tourbes , les charbons de terre, les bitumes, &c.
A ces quatre grandes clafTes des matières dont le
Globe terreftre eft prefque entièrement compofé , nous
devons en ajouter une cinquième, qui contiendra les
fels du toutes les matières falines.
Enfin nous pouvons encore faire une fixième claffe
414- Histoire Naturelle
des fubftances produites ou travaillées par le feu des
volcans, telles que les bafaltes, les laves, les pierres-
ponces , les pouzzolanes , les foufres , &c.
Toutes les matières dures & folides doivent leur
première confiftance à la force générale & réciproque
d'une attradion mutuelle qui en a réuni les parties
conflituantes ; mais ces matières pour la plupart, n'ont
acquis leur entière dureté & leur pleine folidité, que
par rinterpofition fuccelfive d'un ou de plufieurs cimcns
que j'appelle c////^//j"^£' Nature, parce qu'ils font dificrens
de nos cimens artificiels, tant par leur effence que par
leurs effets. Prefque tous nos cimens ne font pas de
la même nature que les matières qu'ils réuniffent ; la
fubUance de la colle efl très-différente de celle du bois
dont elle ne réunit que les fur faces ; il en efl; de même du
maflic qui joint le verre aux autres matières contiguës;
ces cimens artificiels ne pénètrent que peu ou point
du tout dans l'intérieur des matières qu'ils uniffent, leur
effet fè borne à une fimple adhéfion aux furfaces. Les
cimens de nature font au contraire, ou de la même
effence , ou d'une effence analogue aux matières qu'ils
uniffent, ils pénètrent ces matières dans leur intérieur,
& s'y trouvent toujours intimement unis; ils en aug-
mentent la denfité en même temps qu'ils établiffent la
continuité du volume: or, il me femble que les fix
claffes fous lefquelles nous venons de comprendre toutes
les matières terreflres, ont chacune leur ciment propre
DES Minéraux. 41J
& particulier, que la Nature emploie dans les opéra-
tions qui font relatives aux différentes fubflances fur
le/quelles elle opère.
Le premier de ces cimens de nature efl Je fuc
criftaiiin qui tranfude & fort des grandes mafTes quart-
zeufes , pures ou mêlées de fel d-f pat h , de fchorl, de
jafpe & de mica ; il forme la fubflance de toutes les
flaladites viireufes , opaques ou tranfparentes. Le fuc
quartzeux , lorfqu'il efl pur, produit le criflal de roche,
les nouveaux quartz , l'émail du grès , &c. Celui du (eld-
fpath produit les pierres chatoyantes , & nous verrons
que le fchorl, le mica & le jafpe ont aufTi leurs flalac-
tites propres & particulières ; ces flaladites des cinq
verres primitifs fe trouvent en plus ou moins grande
quantité dans toutes les fubflances vitreufès de féconde
ÔL de troifième formation.
Le fécond ciment, tout auffi naturel & peut-être
plus abondant à proportion que le premier, efl le fuc
fpath ique qui pénètre , confblide & réunit toutes les
parties des fubflances calcaires. Ces deux cimens vitreux
& calcaire font de la même efTence que les matières
(lir lefquelles ils opèrent ; ils en tirent auffi chacun leur
origine , foit par l'infiltration de l'eau , foit par l'éma-
nation des vapeurs qui s'élèvent de l'intérieur des grandes
malles vitreufès ou calcaires ; ces cimens ne font , en
un mot, que les particules de ces mêmes matières atté-
nuées Sl enlevées par les vapeurs qui s'élèvent du fein
4î6 Histoire Naturelle
(le la terre , ou bien détachées & entraînées par une
lente flillation des eaux, & ces cimens s'infinuent dans
tous les vides &l jufqae dans les pores des ma/Fes qu'ils
reniplident.
Dans les cimens calcaires , je comprends le fuc
gypfeux, plus foible & moins fblide que le fuc fpathique
qui reflaufTi beaucoup moins que le ciment vitreux; mais
ce fuc gypfeux ell fbuvent plus abondant dans ia pierre
à pldtrc que le fpath ne i'eft dans les pierres calcaires.
Le troifième ciment de nature eil celui qui provient
des matières métalliques , & c'eft peut-être le plus fort
de tous. Celui que fournit le fer ell le plus univerfel-
lement répandu, parce que la quantité du fer eft bien
plus grande que celle de tous les autres minéraux métal-
liques , (Se que le fer étant plus fiafceptible d'altération
qu'aucun autre métal par l'humidité de l'air & par tous
les fels de la terre , il ie décompofe très-aifément à.
fè combine avec la plupart des autres matières dont il
remplit les vides & réimit les parties conftituantes. On
connoît la ténacité & la folidité du ciment fait artifi-
ciellement avec ia limaille de fer; ce ciment néanmoins ne
réunit que les i».u-faces , &l ne pénètre que peu ou point
du tout dans l'intérieur des fubUances dont il n'établit que
la contiguïté ; mais lorfque le ciment ferrugineux eft
employé par la Nature , il augmente de beaucoup la
denfité & la dureté des matières qu'il pénètre ou réunit.
Or cette matière ferrugineufe cil entrée, foit enmafles^
foit
DES Minéraux. 417
loit en vapeurs, clans les jafpes, les porphyres, les gra-
nités, les grenats, les crifîaiix colorés, & dans toutes les
pierres vitreufes, fimplcs oucompofces, qui pré/entent
des teintes de rouge, de jaune , de brun, &c. On recon-
noît auin les indices de cette matière ftrrugineufè dans
plufieurs pierres calcaires, & fur-tout dans les marbres,
les albâtres & les plâtres colorés; ce ciment ferru^rineux.
comme les deux autres premiers cimens, a pu être porté
de deux façons diltérentes; la première par fublimation
en vapeurs , & c'efl ainfi qu'il eft entré dans les jafpes ,
porphyres & autres matières primitives ; la féconde par
l'innltration des eaux dans les matières de formation
poflérieure , telles que les fchiftcs , les ardoifes , les
marbres & les albâtres; l'eau aura détaché ces particules
ferrugineufes des grandes roches de fer produites par
le feu primitif dès le commencement de la confolidation
du Globe; elle les aura réduites en rouille, & aura tranf-
porté cette rouille ferrugineufe fur la furface entière du
Globe; dès-lors cette chaux de fer fe fera mêlée avec
les terres , les fables & toutes les autres matières qui
ont été remuées & travaillées par les eaux. Nous avons
ci-devant démontré que les premières mines de fer ont
été formées par l'aétion du feu primitif, & que ce n'ell
que des débris de ces premitres mines ou de leurs
détrimens décompofés par l'intermède de l'eau , que
les mines de fer de féconde & de troidème formation
ont été produites.
Minéraux, Tome II L Cgg
4i8 Histoire Naturelle
On doit rcunir au ciment ferrugineux le riment
pyriteux, qui fc trouve non-fculcmem clans les minerais
métalliques, mais auffi clans la plupart des fchiftes &
dans quelques pierres calcaires ; ce ciment pyriteux
-augmente la dureté des matières qui ne font point
expofces à l'humidité, & contribue au contraire à Jeur
décompornion dès qu'elles font humeélées.
On peut auffi regarder le bitume comme un quatrième
ciment de nature : il fe trouve dans toutes les terres
végétales, ainfi que dans les argiles & les fcbifles mêlés
de terre limoneufe; ces fchifles limoneux contiennent
quelquefois une fi grande quantité de bitume qu'ils en
font inflammables ; & comme toutes les huiles & graiiïes
végétales ou animales fe convertiffent en bitumes par le
mélange de l'acide , on ne doit pas être étonné que
cette fubûance bitumineufe fe trouve dans les matières
tranfportées & dépofées par les eaux , telles que les
argiles, les ardoifes, les fchifles & même certaines pierres
calcaires; il n'y a que ks fubflances vitreufes, produites
par le feu primitif, dans lefquelles le bitume ne peut
être mêlé, parce que la formation des matières brutes
& vitreufes , a précédé la production des fubftances
organifées & calcaires.
Une autre forte de ciment qu*on peut ajouter aux
précédens , eft produit par l'aélion des fels ou par
leur mélange avec les principes du foufre; ce ciment
falin ÔL fulfureux exifle dans la plupart des matières
D E s AI I N É R A U X, 417
terreufes; on le rcconnoît à la mauvaifc odeur que ccs
matières répandent lorfqu'on les entame ou les frotte ,
il y en a même comme la pierre de porc (a) , qui ont
une très-forte odeur de foie de foufre, ôl d'autres qui,
dès qu'on les frotte, répandent l'odeur du bitume (l^J.
(a) Ce n'eft qu'en Norwcge & en Suède , dit Pontoppidan ,
que l'on trouve la pierre du cochon, ainfi appelée, parce qu'elle
gucrit une certaine maladie du cochon. Cette pierre , autrement
nommée lap'is fœiidiis , rend une puanteur affieufe quand on la
frotte ; elle eft brune , luifante & paroît être une efpcte de vitri-
fication dans la compoiltion de laquelle il entie beaucoup de foufre.
Journal étranger , mois de Septembre i 7// , page 21^, — Nota. Nous
ne pouvons nous difpenfer de relever ici la contradlcflion qui ell
entre ces jnots , vitrif cation qui contient du foufre , puifque le foufre
fe feroit dilfipé par la combuftion , long-temps avant que le feu fe
fût porté au degré nécelTaire à la vitrification. La pierre de porc
n'ert; point du tout une vitrification , mais une matière calcaire faturt'e
du fuc pyriteux qui lui fait rendre fon odeur fétide de foie de loufre ;
combinaifon formée , comme l'on fait , pr.r l'union de l'acide avec
l'alkali , repréfenté ici par une terre abforbante ou calcaire.
(b) La pierre de taille de Méjaune , dit M. l'abbé de Sauvages,
efl tendre , calcinable , d'un grain fin , & d'un blanc terne ; pour
peu qu'on la frotte, elle fent le bitume; Mémoires de l'Académie des
Sciences, année i 74^ , p^gt 7-2/. — La {iierre puante du Canada,
qui efl: noire & dont on fait des pierres à rafoir , fe dilfout avec
vivacité , & refte enfuite fans jeter les moindres bulles , d'où il
fembleroit qu'on pourroit' conclure qu'il entre dans fa compofition
des bitumes, des matières animales mêlées à des parties terreules
Peut-être l'odeur forte & puante de quelques autres pierres n'efl-el'e
produite que par des parties de bitume très-ténues & difpofées dars
leur maffe , au point que ces parties fe diflblvent entièrement dans les
Gggij
420 Histoire Naturelle
Enfin le fixième ciment de nature cfl encore moins
fmiple que le cinquième, & fouvent aufTi il cfl de qualités
trcs-diuérenics , félon les matières diverfe? iur leiquclles
le feu des volcans a travaillé avec plus ou moins de
force ou de continuité, & fuivanc que ces matières fè
font trouvées plus ou moins pures ou mélangées de
fubllances diiiérentes : ce ciment , dans les matières
volcaniques , efl fouvent compofé des autres cimcns ,
& particulièrement du ciment ferrugineux ; car tous les
ba/altes &: prcfque toutes les laves des volcans, con-
tiennent une grande quantité de fer , puifqu'ellcs font
attirables à l'aimant ; <S^ pludeurs matières volcanifées
contiennent des foufrcs &. des fèls.
Dans les matières vitreufes \'Ci plus fmiples , telles
que le quartz de ikiQo\\(\c formation & les grès , on
ne trouve que le ciment crirtallin & vitreux; mais dans
les matières vitreufes compofées , telles que les por-
phyres , granités & cailloux , il eft fouvent réuni avec
les cimens ferrugineux ou pyritcux : de même , dans les
matières calcaires fimples &. blanches , il n'y a que le
ciment fpathique ; mais di^ns celles qui font compofées
&. colorées , & fur-tout dans les mar!,'res , on trouve ce
ciment fpathique fouvent mêlé du cin.ent ferrugineux,
acides Les pierres bitumineufei de l'Auvergne le trouvent dans
des endroits qui forment une fuiie de ;iiouiicu es pofcs dans le même
alij^nement; peut- être y a-t-il ailleurs de femblables pitrres. Alémoïre
de Al. Guet tard , dans ceux de l'Ai.adéniie dts Sciences , année i y^ ^'
D E s M I N É R A U X, 42 I
&. quelquefois du bitumineux. Les deux premiers
cimeiis , c'eft-à-dire , le vitreux & le fpathique , dès
qu'ils font abondans , fe manifeflcnt par la crillalli-
lation ; le bitimie même fe criilallifè lorfqu'il eft pur,
& les cimeiis ferrugineux ou pyriteux prennent aafîi
fort fouvent une forme régulière ; les cimens fulfureux
&L falins fe criftallifent non - feulement par l'intermède
de l'eau , mais auiïi par l'aélion du feu ; néanmoins
ils paroident aflcz rarement fous cette forme criiJal-
lifée dans les matières qu'ils pénètrent, &. en général
tous ces cimens font ordinairement difperfés &i inti-
mement mêlés dans la fubflance même des matières
dont ils lient les parties ; fouvent on ne peut les recon-
noître qu'à la couleur ou à l'odeur qu'ils donnent à
ces mêmes matières.
Le iUc crifîailin paroît être ce qu'il y a de plus pur
dans les matières vitreufes , comme le fuc fpathique eft
auffi ce qu'il y a de plus pur dans les fùbftances calcaires;
Je ciment ferrugineux pourroit bien être aulfi l'extrait du
fer le plus décompofé par l'eau ou du fer fublimié par le
feu; mais les cimens bitumineux, fulfureux & ialin ne
peuvent guère être confidérés que comme des colles ou
c^lutens , qui réuni (Tent par interpofition les parties de toute
matière, iâns néanmoins en pénétrer la fubltance intime,
au Jicu que les cimens crifiailin, ipathique & ierrugineu^x
ont donné ladenfité, la dureté & les couleurs à toutes
les matières dans lefquelles ils fe iont incorporés.
4-22 Histoire Naturelle
Le feu & i'cau pcuNcnt cgaiement réduire toutes les
matières à l'homogénéité ; le feu en dévorant ce qu'elles
ont d'impur , & l'eau en réparant ce qu'elles ont d'hé-
térogène , & les divifànt jufqu'au dernier degré de ténuité.
Tous les métaux, & le fer en particulier, fe cridalh/ent
par le moyen du feu plus aifément que par l'intermède
de l'eau ; mais pour ne parler ici que des criflallifaticns
opérées par ce dernier élément, parce qu'elles ont plus
de rapport que les autres avec les cimens de nature,
nous devons obferver que les formes de criftallifatioii
ne font ni générales ni confiantes , & qu'elles varient
autant dans le genre calcaire que dans le genre vitreux ;
chaque contrée , chaque colline & , pour ainfi dire ,
chaque banc de pierre , foit vitreufe ou calcaire offre
des criftallifations de formes différentes: or cette variété
de forme dans les extraits , tant de la matière vitreufe
que de la matière calcaire , démontre que ces extraits ren-
ferment quelques élémens différens entr'eux , qui font
varier leur forme de criftallifation ; fans cela , tous les
criflaux, foit vitreux, foit calcaires, auroient chacun une
forme confiante & déterminée, &. ne différeroient (\\.\c
par le voliune <Sc non par la figure. C'eft peut-être au
mélange de quelque matière, telle que nos cimens de
nature, qu'on doit attribuer toutes les variétés de figure
qui fe trouvent dans les criflallifations; car une petite
quantité de matière étrangère qui fe mêlera dans une
(lalaétite au moment de fa formation , fuffit pour en
D E s AI I N É R A U X. 423
changer la couleur & en modifier la forme; dès - lors
on ne doit pas être étonné de trou^'er prcfaue autant
de différentes formes de criitallifation qu'il y a de pierres
différentes.
La terre limoneu/è produit aufTi des criftallifations
de formes différentes, 6l en affez grand nombre; nous
verrons que les pierres précieufes, les fpaths pefàns &
la plupart des pyrites, ne font que des (laladites de la
terre végétale réduite en limon, & cette terre ed ordi-
nairement mêlée de parties ferrugineufès qui donnent la
couleur à ces matières.
Des différens nVplanges & des combinaifons variées
de la matière métallique avec les extraits des fubflances
vitreufes , calcaires & limoneufes , il réfulte non-feule-
ment des formes différentes dans la criftailifation , mais
des divcrfités de pefanteur fpécifique, de dureté, de
couleur Si. de tranfparence dans la fubflance des ftalaélites
de ces trois fortes de matières.
Il faut que la matière vitreufe, calcaire ou limoneufè
foit réduite à fa plus grande ténuité pour qu'elle puiffe
fe criflallifer ; il faut auffi que le métal foit à ce même
point de ténuité, & même réduit en vapeurs, &. que
le mélange en foit intime, pour donner la couleur aux
fubftances criftallifées , fans en altérer la tranfparence ;
car pour peu que la fubflance vitreufe , calcaire ou
limoneufè foit impure & mêlée de parties grofîières,
ou que le métal ne foit pas affez diffout, il en réfulte
424 Histoire Naturelle
des fla!aditcs opaques & des concrétions mixtes, qui
participent de la qualité de chacune de ces matières.
Nous avons démontré la formation des flalaélites opaques
dans les pierres calcaires , (Se celle de la mine de fer en
grains dans la terre limoneufe (c) ; on peut reconnoître
le même procédé de la Nature pour la formation des
concrétions vitreufes, opaques ou demi-tranfparentes, qui
ne diffèrent du criflal de roche que comme les flalaélites
calcaires opaques diffèrent du fpath tranfparent , & nous
trouverons tous les degrés intermédiaires entre la pleine
opacité & la parfaite tran/J3arence , dans tous les extraits
&. dans tous les produits des décompofitions des ma-
tières terrcftres, de quelque eflence que puiffent être
les fùbftances dont ces criflallifations ou concrétions
tirent leur origine, &. de quelque manière qu'elles aient
été formées , foit par exudation ou par flillation.
(c) Voyez dans le premier volume de cette Miftoire des minéraux,
l'arutle de K Albâlrc & celui de la Terre végétale.
DES
DES Minéraux. 425
nrr- VI Jga
DES CRISTALLISATIONS.
JLjORSQ.ue les matières vitreufes, calcaires & limo-
neufes font réduites à riiomogcnéitc par leur clifTolutioii
dans l'eau , les j)arties fimilaires fe rapprochent par
leur afîmité , & forment un corps folide ordinairement
tranfparent, lequel en fè folidifiant par le defféchement,
reffemble plus ou moins au cridal; &. comme ces crif-
tallifations prennent des formes anguieufès, & quelque-
fois aiïez régulières , tous les Alinéralogiftes ont cru
qu'il étoit néceffaire de défigner ces formes ditiérentcs
par des dénominations géométriques & des mefures
précifes , ils en ont même fait le caraéîère fpécifique
de chacune de ces fubflances : nous croyons que pour
juger de la juflefTe de ces dénominations, il efl nécef-
faire de confidérer d'abord les folides les plus fniiples,
alidi de fè former enfuite une idée claire de ceux dont
}a figure efl plus compofée.
La manière la plus générale de concevoir la géné-
ration de toutes les formes difîérentes des folides, efl
de commencer par la figure plane la plus fimple, qui
cft le triangle. En établiffant donc une bafe triangulaire
équilatérale , &l trois triangles pareils fur les trois côtés
de cette bafe, on formera un tétraèdre régulier dont
les quatre faces triangulaires font égales ; & en alongear<j;
ou raccourciffant les trois triangles qui portent fur les
Minéraux , Tome IIL H h h
426 Histoire Natu n e lle
trois côxs de cette bafe, on aura des tétraèdres aigus
ou obtus, mais toujours à trois faces fcmblablcs lur une
bafc ou quatrième £ce triangulaire cquilatcraie : (Se Ç\
l'on rend cette bafe triangulaire inégale par fes cotés,
on aura tous- les tétraèdres pofllblc^, c'cfl-à-dire , tous
les foiides à quatre faces , réguliers & irréguliers.
En joignant ce tétraèdre baie à bafe avec un autre
tétraèdre femblable , on aura un hexaèdre à lîx faces
irianguiaires, &l par conféquent tous les hexaèdres pof-
fibles à pointe triangulaire coiiuiie les tétraèdres.
Maintenant b nous étabiilTons un quarré pour bafe,
& que nous élevions lin* chaque lace un triangle, nous
aurons un pentaèdre ou fbiide à cinq laces, en forme
de pyramide , dont la baie elt quarrée & les quatre
autres faces triangulaires: deux pentaèdres de cette e/pèce,
joints l)afe à bafe , forment un octaèdre régulier.
Si la b?fe n'efl pas un quarré, mais un lozange,
& qu'on élève de même des triangles fur les quatre
côtés de cette baie en lozange, on aura auffi un pen-
taèdre, mais dont Ls faces feront inclinées fur la bafe;
& en joignant ! afe à lafè ces deux pentaèdres, l'on
aura un o(5laèdre à faces triangulaires &i obliques rela-
tivement à la bafe.
Si la bafe ell pentagone, &. qu'on élève des triangles
fur chacun des côtés d<- cette bafe, il en réfultera une
pyramide à cinq faces h lafè pentagone, ce qui fait un
hexaèdre qui, joint bafe à bafe avec un pareil hexaèdre.
DES AI I N É R A U A\ 427
pmduit un décaèdre rt2:idier dont les dix faces font
triangulaires , & ielon que ces triangles feront plus ou
moins alongcs ou raccourcis, & félon au/Ti que h ba/è
pentagone lera compofëe de côtés plus ou moins iné-
gaux , les pentaèdres & décaèdres qui en réfulteront
feront plus ou moins rcp^uliers.
Si i'on prend une bafè hexagone, & qu'on élève
fur les côtés de cette bafc lix triangles, on formera un
heptaèdre ou folide à fèpt faces, dont la bafe fera un
hexagone, & les lix autres faces formeront une pyramide
plus ou moins alongée ou accourcie , félon que les
triangles feront plus ou moins aigus , & en joignant bafe
à bafe ces deux heptaèdres, ils formeront un dodé-
caèdre ou folide à douze faces triangulaires.
En fuivant ainfi toutes les figures polygones de fcpt ,
de huit, de neuf, ôlc. côtés, & en établiffant fur ces
côtés de la bafe des triangles & les joignant enfuite
bafe contre bafe , on aura des fblidcs dont le nombre
des faces fera toujours double de celui des triangles
élevés fur cette bafe , & par ce progrès on aura la
fuite entière de tous les fblides poffibles qui fe terminent
en pyramides funples ou doubles.
Maintenant, i\ nous élevons trois parallélogrammes
fur les trois côtés de la bafe triangulaire, & que nous
fuppofions une pareille face triangulaire au-deffus , nous
aurons un folide pentaèdre compofé de trois faces redan-
gulaires ôl de deux faces triangulaires.
H h h ij
428 Histoire Naturelle
Et Je même, fi /ùr les côtés d'une ba/è quarrce,
nous établifiTons des quarrés au lieu de triang!cs , & que
nous fuppofions ime bafe quarrée au-deiïiîs égale &
/èmblablc à celle du defTous , l'on aura un cvht ou
hexaèdre à fix faces quarrées &: égaies ; & fi la bafe
efl en lozange, on aura un Iiexaèdre rhomboïdai dont
Jes quatre faces font inclinées relativement à leurs
bafes.
Et fi l'on joint plufieurs cubes enl'ëmble,& de même
plufieurs hexaèdres rhomboïdaux par leurs bafes , on
formera des hexaèdres plus ou moins alongés , dont les
quatre faces latérales feront plus ou moins longues, &
les faces fupérieures & inférieures toujours égales.
De même, fi l'on élève des quarrés fur une bafe
pentagone , & qu'on les couvre d'un pareil pentagone ,
on aura un heptaèdre dont les cinq faces latérales feront
quarrées , & les faces fupérieures & inférieures penta-
gones. Et fi l'on alonge ou raccourcit les quarrés,
l'heptaèdre qui en réfukera , fera toujours compofé de
cinq faces rectangulaires plus ou moins hautes.
Sur une bafe bexagone, on fera de même un oélaèdre,
c'eft-à-dire , un folide à huit faces , dont les faces fupé-
rieures & inférieures feront hexagones, <St les fix faces
latérales feront des quarrés ou des reétangles plus ou
moins longs.
On peut continuer cette génération de folides par
des quarrés pofés fur les côtés d'une bafe, d'un nombre
DES Al J IS' É R A U X. 429
quelconque de côtés , foit fur des polygones réguliers ,
foit fur des polygones irréguliers.
Et CCS deux générations de folides , tant par des
triangles que par des qiiarrés poics fur des bafes d'une
iigurc quelconque, donneront les formes de tous les
folides polTibles, réguliers ou irréguliers, à l'exception
de ceux dont la fuperficie n'efl pas com])ofée de facts
planes 6c rediligncs, tels que les folides fpliériques ,
elliptiques , & autres dont la furface efl convexe eu
concave, au lieu d'être anguleufe ou à faces planes.
Or pour compo/er tous ces /ôlidcs anguleux, de
quelque ligure qu'ils puifTent être, il ne faut qu'une agré-
gation de lames triangulaires, puifqu'a^ec dts triangles
on peut faire le quarré , le pentagone, l'iiexagone &.
toutes les ligures reélilignes poffiblcs , à. l'on doit fup-
pofer que ces lames triangulaires, premiers éiémens du
folide criflallifé, font très -petites cîs. prefque infiniment
minces. Les expériences nous démontrent que fi l'on
met iùr l'eau des lames minces en forme d'aiguilles
ou de triangles alongés, elles s'attirent & fe joignent
en iaifant l'une contre l'autre, des ofcillations jufqti'à
ce qu'elles fé fixent <& demeurent en repos au point
du centre de gravité, qui efl le même que le centre
d'attraélion, en forte que le fécond triangle ne s'atta-
chera pas à la bafé du premier , mais à un tiers de fa
hauteur perpendiculaire, & ce point ccrrefpond à celui
du centre de gravité, par conféquent tous \cs folides
4.-0 Histoire Natu relle
poiTibies peuvent être produits par la fimplc agrégation
des lames triangulaires, dirigées par la feule force de
leur attra6lion mutuelle & refpeétive dès qu'elles font
mifés en liberté.
Comme ce mécanifme efl le même & s'exécute par
Ja même loi entre toutes les matières homogènes qui
fe trouvent en liberté dans un fluide, on ne doit pas
être étonné de voir des matières très - dificrentcs fe
criilallircr fous la même forme. On jugera de cette
fimilitude de crillallifation dans des fubftances très-dilfé-
rentes par la table ci-jointe {^J , qu'on pourroit fans
(a) Table de la for
I. Téiracdre régulier, & qui
forme un folide qui n'a que quatre
face y , toutes quatre triangulaires
^ équilnérales.
Spath calcaire.
Marcaffite.
Mine d'argent grife.
X. Téiracdre ir régulier.
Spath calcaire.
MarcafTite.
Mine d'argent grife.
■y. Tétraèdre dont les bords font
tronques.
Marcafiite.
Mine d'argent grife.
4. Tétraèdre dont les bords font
de paît & d'autre en bifeau,
Marcaflite.
me des Criflallifîuions.
Mine d'argent grife.
5 . Tétraèdre dont les bords & les
angles font tronqués.
Marcafiite.
Mine d'argent grife.
6. Prifme dont la bafe tf en
losange, ou f lu tut hcxaedre-rhom-
boidal.
Spath calcaire.
Fcld-fpath ou fpath étincelant.
Spath fufible.
Grès criftallifé.
Marcafiite.
Pyrite arfénicale.
Galène.
7. Solide pyramidal à deux
pointes , cowpofées de deux faces
triangulaires ifocèles; ce qui forme
D E s M I N É R A U X, ^31
doute étendre encore plus loin , mais qui fuflit pour
démontrer que la forme de eri(lai!ilàtion ne dépend pas
de l'efTence de chaque matière , puifqu'on voit le fpath
calcaire , par exemple , fe crillalli/er fous la même forme
que la marcaffue, la mine d'argent grife , le ftld-/patli ,
le fpath fufible , le grès , la pyrite arfénicale , la galène,
di'iix pyramides à fix faces jointes
bafe cl l'dfe.
Crilul.
8. Prifme à fx faces reâangles
et barlongues , tcrwiuces par deux
pyramides <•■ fx fuis.
Grillai de roche.
Mine de plomb verte.
p. Prijme à neuf pans inégaux,
terminés par deux pyramides à trois
faces inégales.
Schorl.
Tourmaline.
1 o. Prifme oânedre, h pans iné-
gaux , terminés par deux pyra-
mides hexaèdres tronquées.
Topaze de Saxe.
1 I . Cube ou hexaèdre ré soulier.
Spath fiifible.
Sel marin.
MarcafTite cnhique.
Galène ttiTulatre.
Mine de fer cubique.
Mine d'argent vitreufe.
Mine li'irgcntcornéc.
12. CuLe , dont les atgles font
un peu troncjués , ce qii fait un
foiuic h quaior-^e fces . don; fx
Octogones c'' l:it triangulaires.
Spath fufible.
Sel marin.
MaiLafllte.
Aline de fer.
G a h n e .
Blende.
Mine d'argent vitreufe.
I 3. Cale tronqué , dont les an-
gles font tronqués jufqu'd la moitié
de la jace , & qui a , comme le
précèdent, qu at or r^e faces dort fx
Jont quarrées à^ huit hexaoones ir ré-
guliers dans lefquels il y a trois
longues faces e!^ trois courtes.
Spath fufible violet.
Marcalfite.
Galène.
Mine de cobalt grifc.
14.. Cube , dont les angles font
totalement tronqués , ce qui fait un
folide à quaierr^e faces , dont fx
43^ Histoire Naturelle
6l qu'on voit même le crjilal de roche, dont la forme
de criftailifation paroît être la moins commune & la
plus confiante , fe criflallifcr néanmoins fous la même
forme que la mine de plomb verte.
La figure des criflaux ou, fi Ton veut, la forme de
quarrées & huit triangulaires équi-
latérales.
Spath fufible violet.
MarcaiTite.
Galène.
JVIine de cobalt grife,
I 5. Cube tronqué a vingt -fix
faces, dontfix oélogenes , huit hexa-
gones & dou-[e reéîangles.
Galène.
I 6. Oâacdre régulier ou double
tétraèdre , dont les huit côtés font
égaux.
Diamant.
Rubis fpinelle.
MarcafTite.
Fer oif^aèdrc.
Cuivre odaèdre.
Galène odaédre.
Etain blanc.
Argent.
Or.
1 7. Oâaèdre à pyramides égales
tronquées au fommst , & qui fait
deux pyramides a quatre faces ,
jointes bafe à bafe d/ tronquées
par leur fommet.
Topaze d'Orient.
Spath fufible.
Soufre natif-
Mârcaintc.
Galène tcfrulaire.
Etain blanc.
I 8. Oâûcdre , dont les angles
Ù" les bords font tronqués , huit
hexagones , fix petits oâogones à"
dou^e reéîangles.
Galène tefTufaire.
I 9 . Oélaedre , dont les fix anglet
folides font tronqués.
Spath fufible.
Alun.
Galène.
20. Dodécaèdre f dont les faces
font en loi^anges.
Grenat.
1 1 . Pyramides doubles oda'tires
réunies par les bafes tronquées à'
terminées par quatre faces en la-
langes.
Grenat.
22» Solide à trente fix faces.
Grenat.
criflallifation ,
D E s AI I N É R A U X. 43 ^
criftallifation, n'indique donc ni la denfité, ni la dureté,
ni la fudbiiité , ni l'iiomogénéité , ni par conféquenc
aucune des propriétés efTentielIes de la fuhltance des corps,
dès que cette forme appartient également à des matières
très-diiTé rentes & qui n'ont rien autre cho/è de commun;
aind c'efl gratuitement & fans réflexion qu'on a voulu
faire de la forme de crirtallifation un caractère Ipécilique
& diflinélif de chaque fubftance , puifque ce caradlère
efl commun à plufieurs matières , & que même dans
chaque fubflance particulière , cette forme n'cil pas
confiante. Tout le travail des Criftalloi^raphes ne fervira
qu'à démontrer qu'il n'y a que de la variété par -tout
où ils fuppofent de l'uniformité ; leurs obfervations mul-
tipliées auroient du les en convaincre & les rappeler
à cette métaphyfique fi fiinple qui nous démontre que
dans la Nature il n'y a rien d'abfolu, rien de parfai-
tement régulier. C'efl par abflradion que nous avons
formé les figures géométriques & régulières , &. par
conféquent nous ne devons pas les appliquer comme
des propriétés réelles aux productions de la Nature dont
reffcnce peut être la même fous mille formes diliérentes.
Nous verrons dans la fuite qu'à l'exception des pierres
précieufes qui font en très-petit nombre, toutes les autres
matières tranfparentes ne font pas d'ime feule & même
effence , que leur fubflance n'ell pas homogène , mais
toujours compofée de couches alternatives de différente
denfité , & que c'efl par le plus ou le moins de force
Miîiérdiix , Toîne III. I i i
434 Histoire Naturelle
dans rattraclion de chacune de ces matières de difîc-
rente denfité que s'opère la criftallifàtion en angles plus
ou moins obliques , en ihne qu'à commencer par le
criftal de roche , les améthillcs 6i les autres pierres
vitreufes , jufqu'au fjiath appelé crijlûl iïljîande , & au
gypfe , toutes ces flaladites tranfparentes , vitreufes ,
calcaires & gypfeufes font compofces de couches alter-
natives de ditièrente denfitc ; ce qui dans toutes ces
pierres produit le phénomène de la double réfraction ,
tandis que dans le diamant & les pierres précieufes ,
dont toutes les couches font d'une égale denfité, il n'y
a qu'une fmij.ie réfradion.
DES Minéraux. 43 j
DES STALACTITES VITREUSES
V_>HAQ,UE matière peut fournir Ton extrait, foit en
vapeurs, foit par exudation ou flilJation; cJiaaue mafle
folide peut donc produire des incruflations fiir fà propre
fubftance ou des flafaélites , qui d'abord font atiacliées
à fa furface (Se peuvent enfuite s'en fcparer ; il doit par
confcquent fe former autant de ftaladites différentes qu'il
y a de /ubdances diver/ès; <&. comme nous avons divifc
toutes les matières du Globe en quatre grandes ciaffes, nous
fuivrons la même divifion pour les extraits de ces ma-
tières, & nous prcfenterons d'abord les flaJacflites vitreu/t'S
dont nous n'avons donné que de légères indications en
traitant des verres primitifs &. des fubftances produites
par leur décompobtion ; nous expoferons enfuite les
{lala6lites calcaires qui font moins dures & moins nom-
breufès que celles des matières vitreufès , & defquelles
nous avons donné quelques notions en parlant de ralbùtrc.
Nous offrirons en troilième ordre les ftaladlites de la
terre limoneufè , dont les extraits nous paroi/fent tenir
le premier rang dans la Nature , par leur dureté ,
ieur dendtc 6l leur homogénéité ; après quoi nous
rappellerons en abrégé ce que nous avons dit au fujct
des flaladites métalliques, lefquelles ne (ont pas de5
extraits du métal même, mais de fcs détrimens ou de
fes minerais, & qui font toujours mélangées de parties
1 ii ij
43^ Histoire Naturelle
vitreufes, calcaires ou limoneufes : enfin nous jetterons
un coup-d'œi] fur \qs produits des volcans & des ma-
tières volcanilccs telles que les laves, lesbafàltes, &c.
Mais pour mettre de l'ordre dans les détails de ces
Jivinons , & répandre plus de lumière fur cJiacun des
objets qu'elles renferment, il faut confidérer de nouveau,
& de plus près , les propriétés des matières fimples
dont toutes les autres ne font que des mélanges ou
des compofitions différemment combinées; par exemple,
clans la claffe des matières vitreufes, les cinq verres
primitifs font les fiibflances les plus fimples; &. comme
chacun de ces verres peut fournir fon extrait, il faut
d'abord les comparer par leurs propriétés efîentielles
qui ne peuvent manquer de fe trouver dans leurs agrégats
& même dans leurs extraits ; ces mêmes propriétés
nous ferviront dès-lors à reconnoître la nature de ces
extraits, & à les diftinguer les uns des autres.
La première des propriétés effentielles de toute
matière eft fans contredit la denfité ; & fi nous en compa-
rons les rapports, on verra qu'elle ne laiffe pas d'être
fenfiblement différente dans chacun des cinq verres
primitifs; car,
La pcfameur fpécifique du quartz eft d'environ
26J00, relativement au poids fuppofé loooo de l'eau
diflillée :
La pefanteur fj^écrfique des jafpes de couleur uni-
forme, efl d'environ zyooo :
DES M J N É R A U X. 437
Celle du mica blanc cft aufTi d'environ lyooo, <Sc
celle du mica noir efl de 29000:
Celle du feld-fpath blanc qui efl un peu plus pefant
que le rouge, efl de 26466:
Et enfin la pefanteur fpécilique du fchori eft ia \)\\.\s
grande de toutes , car Je fcjjorl crifîalii/ë pèfe 2 3 ou
34000.
En comparant ces rapports , on voit que le quartz
& le feld-fpath ont à peu -près la même denfiié , qu'en-
fuite les jafpes & les micas font un peu plus denfes ,
& à peu -près dans la même proportion relativement
aux deux premiers , & que le fchori qui efl le dernier
des cinq verres primitifs efl le plus pefànt de tous. La
différence efl même fi confidcrable , que le mélange
d'une petite quantité de fchori avec les autres verres,
peut produire une affez forte augmentation de poids ,
qui doit fè retrouver & ih retrouve en eftèt dans les
extraits ou flaiadites des matières vitreufes , mêlées de
ce cinquième verre de nature.
La féconde propriété effentielle à la matière fblide, eft
ia dureté; elle efl à peu-près la même dans le quartz, le
feld-fpath <^ Je fchori ; eWc eft un peu moindre dans le
jafpe ÔL affez petite dans le mica, dont les parties n'ont que
peu de cohéfion, & dont les concrétions ou les agrégats
font pour la plupart affez tendres &l quelquefois friables.
La troifième propriété , qu'on peut regarder comme
effentielle à la fiibflance de chacun des verres primitifs,
efl la plus ou moins grande fuhbilité: ie fchori & le feld-
438 Histoire Naturelle
ipath font très-fufibles ; le mica & le ja/pe ne le font
qu'aux feux les plus violens , &. le quartz elt le plus
réfradaire de tous.
Enfin une quatrième propriété tout au/H e/TentielIe que
les trois premières, eft l'homogèncité qui fè marque par
la fmipie réfradlion dans les corps tranfparens ; le quartz
& le feld-fpath font plus Hmples que le jaipe & le mica,
& le moins fimple de tous e(l le fchorl.
Ces propriétés, & fur-tout la denfité plus ou moins
grande, la fufibilité plus ou moins facile, & la fimple
ou double réfraélion, doivent fe confèr\er en tout ou
en partie dans les agrégats fimples & les extraits trauf-
parens, & même fe retrouver dans les décompofitions de
toute matière primitive: aufli ces mêmes propriétés, tirées
de la nature même de chaque fubftance, nous fourni-
ront des moyens qu'on n'a pas employés jufqu'ici, pour
reconnoître l'effence de leurs extraits, en comparant ces
extraits avec les matières primitives qui les ont produits.
Les extraits qui tranfudent des matières vitreufcs font
plus ou moins purs , félon qu'elles font çWcs - mêmes
plus fmiples & plus liomogcnes , & en général , ces
extraits font plus purs que la matière dont ils pro-
viennent, parce qu'ils ne font formés que de fa fubftance
propre , dont ils nous préfentent l'efience ; le fpatli
n'eft que de la pierre calcaire épurée ; le criftal de
roche n'eft proprement & cfTcnticllcment que du quartz
diffous par l'eau & criftallifé après fon évaporation; \ts
fubftanccs pures produifent donc des extraits tout au/B
DES Minéraux, 4^9
purs; mais fouvcnt d'une matière qui paroît très impure,
il lort un extrait en flaladites tranlparcmcs ôc pures;
clans ce cas, il fc fait une fecrction des parties fiinilaircs
<i'une feule forte de matière, qui fe raffcmbicnt &i prc-
fcntent alors une fubftance qui paroit dilîèrcnte des
matières impures dont elle fort; &l c'efl ce qui arrive
dans les cailloux, les marbres, la terre limoncufe, 6c
dans les matières volcaniques ; comme elles font elles-
mêmes compofèes d'un grand nombre de fubflances
diverfes &l mélangées , elles peuvent produire des lia-
]a6tites tres-diiicrentes , & qui proviennent de chaque
fubftance diverfe contenue dans ces matières.
Ou peut donc diftinguer les extraits ou fîalaélites
de toute matière par les rapports de denfitc, de fufibilitc,
d'homogénéité, & l'on doit auffi comparer les degrés
de dureté , de tranfparence ou d'opacité ; nous trou-»
■verons , entre les termes extrêmes de ces propriétés,
les degrés & nuances intermédiaires que la Nature
nous offre en tout & par-tout; car fes productions ne
doivent jamais être regardées comme des ouvrages
ifolés ; mais il faut les conddérer comme des fuites
d'ouvrages dans lefquels on doit failir les opérations
fuccefîives de fbn travail , en partant &. marciiant avec
elle du plus hmple au plus compofé.
440 H ISTOIRE NaTU RELLE
STALACTITES
CRISTALLISÉES DU QUARTZ,
CRISTAL DE ROCHE.
I iF, Crilial de roche paroît être l'extrait le plus fimple
& la Haladite la plus tranfparente des matières vitreufcs;
en le comparant avec le quartz , on reconnoît aifément
qu'il eft de la même efTence ; tous deux ont la même
denfité fa), & font à très-pcu-prcs de la même dureté;
ils réijftent également à l'action du feu &l a. celle des
acides; ils ont donc les mêmes propriétés efTcntielles ,
quoique leur formation foit très-difîérentc; car le quartz
a tous les caradères du verre fondu par le feu, & le
criftal préfente évidemment ceux d'une flaladite du
même verre atténué par les vapeurs humides ou par
l'adion de l'eau: fès molécules très-ténues, fe trouvant
en liberté dans le liuide qui les a diffous , fe raffemblent
par leur affinité à mefùre que l'humidité s'évapore; &
comme elles font hmples & fmilaires, leurs agrégats
prennent de la tranfparence & une figure déterminée.
(a) Le poids du c^iurtz trani'parent efl à celui de l'eau diftiKce
comme z6^^6, & celui du crirtal de roche d'Europe comme 26548
font à 1 0000 ; on peut donc aflurer que leur denfité efl: la même. Voyez
la Table des pefanteurs f/)€cijîçucs que M. Brid'on , lavant Phyficien,
de l'Académie des Sciences, s'eft donné la peine de faire en pelant à
la balance hydroftatique toutes les matières terreufes & métalliques.
La
i
DES Minéraux, 44.1
La forme de cridallifation dans cet extrait du quartz,
paroît être non-feulement régulière , mais plus coniiante
que dans la plupart des autres fubftances criflallifées;
ces criûaux fe prcfentent en prifmes à fix faces
parallélogrammes, furmontées aux deux extrémités par
des pyramides à fix faces triangulaires. Le criflal de
roche lorfqu'il fe forme en toute liberté, prend cette
ligure prifmatique furmontée aux deux extrémités par
des pyramides ; mais il faut pour cela que le fuc crif-
tallin qui découle du quartz, trouve im lit horizontal
qui permette au prifme de s'étendre dans ce même fens,
& aux deux pyramides de fe former à l'ime & à l'autre
extrémité (hj: lorfqu'au contraire le fuintement de
i'extrait du quartz fè fait verticalement ou obliquement
contre les voûtes & \es parois du quartz ou dans les
fentes des rochers, le criflal alors attaché par fa bafe
n'a de libre qu'une de fes extrémités, qui prend tou-
jours la forme de pyramide; & comme cette féconde
pofition cfl infiniment plus fréquente que la première,
on ne trouve que rarement des criflaux à deux pointes ,
& très-communément des criftaux en pyramide fimple
ou en prifmes furmontés de cette feule pyramide , parce
que la première pyramide ou le prifme, toujours attachés
fb) On trouve de petits crirtaux à deux poijites dans quelques
cailloux creux; ils ne (ont point attache's par leur bafe, comme les
antres, à la furface intérieure du caillou, ils en lont icparés & on
ïes entend même balotter dans cette cavité en fecouant le caillou.
M'mcrau^ç , Tome IIL K k k
44-2 Histoire N.iTU re ll e
au rocher, n'ont pas perirJs à fa féconde pyramiJc (fe fe
former à cette extrémité qui ferc de ba/è au criftal.
On peut même dire que la forme primi:ive du criflal
de roche , n'cd rcel!en:iciit compofL'e que des deux
pyramides oppofées par leur bafè, à. que le prifhie à
ilx faces qui les fcpare , efl plutôt accidentel qu'elTentiel
à cette forme de crifîallifàtion; car il y a des criflaux
qui ne font compofés que de deux pyramides oppofées
& fans prifne intermédiaire ; en forte que le criflal
n'eft alors qu'iui (oWdQ dodécaèdre; d'ailleurs, la hauteur
des pyramides efl confiante, tandis que la longueur du
prifiiie efl très-variaLle ; ce n'efl pas qu'il n'y ait auffi
beaucoup de variété dans les faces des pyramides comme
dans celles du prifme , & qu'elles ne ioient plus étroites
ou plus larges, & plus ou moins inclinées, fuivant la
dimcnfion tranfverfale de la bafe hexagone, qui paroit
être la fiirface d'appui fijr laquelle fe forment les pointes
pyramidales. Cette figuration irrégulière & déformée,
cette inégalité entre l'étendue & l'inclinaifon refpedive
des faces du criflal, ne doit erre attribuée qu'aux obflacles
environnans , qui fouvent l'empêchent de fe former en
toute liberté dans un efpace affez étendu & affez libre
pour qu'il y prenne fa forme naturelle.
Les criilatix grands & petits font ordinairement tous
figurés de même, & rien ne démontre mieux que leur
forme effcntielle efl cçWe d'une ou deux pyramides à
fîx faces ; que les aiguilles du criflal naiffant dans les
DES Minéraux, 44-3
cailloux creux , elles font d'abord fi petites qu'on ne
}es aperçoit qu'à ia loupe, & dans cet état de primeur,
elles n'offrent (\\\e leur pointe pyramidale, qui fe con-
ferve en grandifTant toujours dans les mêmes proportions:
néanmoins i'accroiffement de cette matière brute ne (è
fait que par juxtapofition &. non par intuffufception , ou
par nutrition comme dans les êtres organifés ; car ia
première pyramide n'efl point un germe qui puifTe fe
développer & s'étendre proportionnellement dans toutes
fès dimenfîons extérieures <Sc intérieures par ia mitrition,
c'eft feulement une bafe figurée fur laquelle s'appliquent
de tous côtés les parties luiiiiaires, fans en pénétrer ni
développer ia mafle ; & ces parties conftituantcs du criflal
étant des lames prefque infiniment minces & de figure
triangulaire, leur agrégat conferve cette même figure
triangulaire dans ia portion pyramidale ; or quatre de
ces lames triangulaires en s'unifîant par la tranche,
forment un quarré , & fix formeront un iiexagone ; ainfi
la portion prifinatique à il x laces de la bafë de criflal ,
cfl compofée de lames triangulaires comme ia partie
pyramidale.
Quoique la fubflance du criflal paroiffe continue &
affez femblable à celle du beau verre blanc, <^ quoi-
qu'on ne puiffe diftinguer à l'œil la forme de fes parties
conflituantes , il efl néanmoins certain que le criftal efl
.compofé de petites lames qui font à ia vérité bien
moins apparentes que dans d'autres pierres, mais qu!
Klvk ij
44-4- Histoire Naturelle
nous font également démontrées par le fil, c*efl-à-dire,
par le fens dans lequel on doit attaquer les pierres pour
ies tailler; or le fil (k le contre-fil ic reconnoifFent dans
ie criftal de roche, non-feulement par la plus ou moins
grande facilité de l'entamer, mais encore par la double
réfraélion qui s'exerce condamment dans le iens du
fil, & qui n'a pas lieu dans le fèns du contre-lil ; ce
dernier fens efl; celui dans lequel les lames forment
continuité 6l ne peuvent fè féparer, tandis que le pre-
mier fens eiî celui dans lequel ces mêmes lames /è
féparent le plus facilement; elles /ont donc réunies de fi
prés dans le fens du contre-fil , qu'elles forment une
fiibdance homogène & continue , tandis que dans le lens du
fil elles laiffententr'elles un intervalle rempli d'une matière
de denfité différente qui produit la leconde réfradion.
Et ce qui prouve que cet intervalle entre les lames
n'ell: pas vide & qu'il efl rempli d'une fubflance un peu
moins denfe que celle des lames , c'efl que les images
produites par les deux réfraétions , ne diffèrent que peu
par leur grandeur & leur intenfité de couleurs; la lon-
gueur du fpeélre fblaire efl 19 dans la première réfrac-
tion, & 18 dans la féconde; il en efl de même de la
iargeur de l'image , & il en efl encore de même de
i'intenfité des couleurs qui fè trouvent afîbiblies dans
h même proportion ; quelque pure que nous paroiffe
donc la fubflance du criflal , elle n'efl pas abfolument
homogène ni d'égale denfité dans toutes lès parties. La
DES Af I N Ê R A U X, 445
lumière cliffcremment rcfradée fcmble le démontrer ,
d'autamqiie nous verrons, en traitant des fpaths calcaires,
qu'ils ont non-leulement une double, mais une triple,
quadruple , (îkc. réfradion , félon qu'ils font plus ou
moins mélanges de fubftances de dendté dilTcrente.
Un autre fait par lequel on peut encore prouver
que le criflal efl compolé de deux matières de diiTcrcnte
denfité , c'efl que fes furiaces polies avec le plus grand
foin ne lailTent pas de préienter des filions, c'eft-à-dire,
des éminences & des profondeurs alternatives dans
toute l'étendue de leur iuperficie ; or la partie creufè
de ces lillons efl certainement compofce d'une matière
moins dure que la partie haute , puifqu'elle a moins
réfiffé au frottement (c) ; il y a donc dans le criflal de
roche alternativement des couches contiguës de différente
dureté , dont l'une a été moins ufée que l'autre par le
même frottement, puiiqu'alternativement les unes de ces
couches font plus élevées , & les autres plus baffes fur
la même fijrface polie.
Mais de quelle nature efl cette matière moins denfè
■I — — — »
/c M. l'abbé de Rochon a dcmoniré cette inégalité de dureté
dans les tranches du criflal de roche , en mettant fur la lurfdce
polie de ce crillal uvi. verre objetflif d'un long foyer. Si la lurface
du criftal étoit parfaitement plane & (ans filions , les anneaux
colores produits par ce moyen feroient réguliers , comme ils le
font quand on met un objedif fur un autre verre plan Ôl poli, mais
les anneaux coiorcs font toujours irréguliers lur le crillai le mieux
poli , ce qui ne i)eut provenir que des inégalités de fa lurtace.
44-6 Histoire N atu relle
& moins dure des tranches alternatives du criftal! comme
il n'efl guère pollible de la recueillir /"éparément, Vun
de nos fàvans Académiciens, M. l'abbc de Rochon, m'a
dit qu'ayant réduit du criftal de roche en poudre très-
fine par le feul frottement d'un morceau de crillal comrç
un autre morceau, cette poudre s'eft trouvée contenir
une portion afTez conGdérable de fer attirable à l'aimant.
Ce fait m'a paru iingulier, & demande au moins d'être
confirmé & vérifié far p'ufieurs criftaux ; car il le
pourroit que ceux qui fe forment dans les cailloux &
autres matières où le quartz ei\ mêlé avec des fubfiances
ferrugineufes , ou même avec des matières vitreufès
colorées par le fer, en continfTent une petite quantité;
mais je doute que les crilîaux qui fortent du quartz
pur, en foient mêlés ni même imprégnés, ou bien le
quartz même contiendroit auffi wwq certaine quantité
de fer, ce que j'ai bien de la peine à croire, quoique
ia chofe ne foit pas impofiibie; puifque le fer a été
formé prefque en même temps que les verres primitifs,
& qu'il s'eft mêlé avec les jafjjes , les feld -fpaths,
les fchorls , & même avec les quartz dont quelques-uns
font colores de jaune ou de rougeâtre.
Quoi qu'il en /oit, la lumière qui pénètre tous les
corps tranfparens , & en fort après avoir fubi des
réfradions & des difpcrhons , cfl l'infîrument le plus
délié , le fcalpcl le plus fin par lequel nous puiiïions
fermer l'intérieur des fubfiances qui la reçoivent d
DES M I N É n A U X, 44.7
ià tranfiiuitent; & comme cet inftrument ne s'applique
point aux matières opaques , nous pouvons mieux juger
de la compofition intérieure des fubfîanccs tran/parentes
que de la texture coniufe des matières opaques 011 tout
eft mélangé , confondu fans apparence d'ordre ni de
régularité, (bit dans la polition, ioit dans la figure des
parties intégrantes qui font fbuvent différentes ou diffé-
remment pofées , fans qu'on puiffe le reconnoître
autrement que par leurs difTérens extraits lorfqu'ils
prennent de la tranfparence , c'efl-à -dire , de l'ordre
dans la pofition de leurs parties fmii'aires, & de i'ho-
niogénéité par leur réunion fans mélange.
C'efl dans les cavités & les fentes de tous les quartz
purs ou mélangés que le criftal fé forme , fbit par
i'exudation de leur vapeur humide, foit par le fuinte-
ment de l'eau qui les a pénétrés ; les granités, les quartz
mixtes, les cailloux & toutes les matières vitreiifes de
féconde formation, produifent des criflaux de couleurs
différentes ; il y en a de rouges, de jaunes & de bleus
auxquels on a donné les noms de ruhïs, de topaze & de
fapinr, aulfi improprement que l'on applique le nom de
diamant aux criftaux blancs qui fe trouvent à Alençon,
à Briflol & dans d'autres lieux où ces criflaux blancs
ont été dépofés après avoir été roulés & entraînés par
ies eaux. Les amétbyfîes violettes & pourprées qu'on
met au nombre des pierres précieufes , ne font néan-
moins que des criflaux leims de ces belles couleurs;
44-8 Histoire N aturelle
on trouve les premiers en Auvergne, en Bohème, &c,
& les {^conds en Catalogne. Les topazes, dites ocàJen'
tilles , & que l'on trouve en Bohème, en SuifTe & dans
d'autres contrées de l'Europe, ne font de mcme que
des criftaux jaunes: l'hyacinthe, dite de Compojlelle, e(è
un criftal d'un jaune plus rougeatre. Les pierres aux-
quelles on donne le nom di algues mannes occidentales,
& qui fè trouvent en plufieurs endroits de l'Europe,
& mcme en France, ne font de même que des criflaux
teints d'un vert-bleuâtre ou d'un blcu-verdâtre: on ren-
contre auffi des criftaux verts en Dauphiné, & d'autres
bruns &: même noirs ; ces derniers font entièrement
obfcurs : & toutes ces couleurs proviennent des parties
métalliques dont ces criflaux font imprégnés , particu-
lièrement de celles du fer contenu dans les granités
& les quartz mixtes ou colorés , dont ces flalaclites
quartzeufcs tirent leur origine.
De tous les criflaux blancs, celui de Madagafcar
efl le plus beau & le plus également tranfparent dans
toutes fes parties ; il eft un peu plus dur que nos
criflaux d'Europe, dans lefqucls néanmoins on remarque
auffi quelque différence pour la dureté ; mais nous ne
connoilTons ce très -beau criflal de Madagafcar qu'en
maffes arrondies & de plufieurs pouces de diamètre;
celui qui nous eil venu du mcme pays, & qui efl en
prifme à double pointe, n'efl pas aufîi beau & reffemblc
plus à uos criflaux d'Europe, dans lefqucls la tranfparence
n'eft
DES Minéraux. .44.9
n'eft pas aufTi limpide, & qui fouvent font nuageux,
& préfeiitein tous les degrés de la tranfparence plus ou
moins nette dans les criflaux blancs, jufqu'à la pleine
opacité dans les criflaux bruns & noirs.
Lorfque l'on compare les petites aiguilles naiffantes
du criftal, qu'on aperçoit à peine dans les cailloux
creux, avec les grofTes quilles qui fe forment dans les
cavités des rochers quartzeux &. graniteux (d) , on ne peut
s'empêcher d'admirer dans cette criftallifation la confiance
& la régularité du travail de la Nature qui néanmoins
n'agit ici qu'en opérant à la furface, c'efl-à-dire, dans
deux dimenfions ; la plus grande quille ou aiguille de
criflal eft de la même forme que la plus petite ; la
réunion des lames prefque infiniment minces dont il
eft compofé fe faifànt par la même loi , la forme
demeure toujours la même, fi rien ne trouble l'arran-
gement de leur agrégation. Cette médiode de travail
efl même la feule que la Nature emploie pour augmenter
ie volume des corps bruts, c'efl par juxtapofition, &
en ajoutant pour ainfi dire, furfaces à furfaces , qu'elle
place les lames très - minces dont eft compofée toute
criftallifation, toute agrégation régulière; elle ne travaille
donc que dans deux dimenfions, au lieu que dans le
fd) M. Bertrand rapporte dans Ton Didionnaire univerfel des
foiïiles, qu'on a trouvé près de Vifbach dans le haut Valais, à neuf ou
dix lieues de Sion, une quille de criftal, du poids de douze quintaux;
elle avoit fept pieds de circonférence & deux pieds & demi de hauteur.
ATinéraiix , Tome III. L 1 1
450 HisTOinE Natvrëlle
développement des êtres organifés , elle agit dans les
trois dimenfions à la fois , puiique le volume &. la
mafTe augmentent tous deux, & confervent la même
forme & les mêmes proportions, tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur. L'aiguille naiflante d'un criftal ne peut grandir
& gro/Tir que par des additions fuperhcielles, & par la
fupcrpofition de nouvelles lames minces femblabies à
celles dont la première aiguille ell: composée , & qui
s'arrangent dans le même ordre , en forte que cette
petite aiguille rélkle dans la plus grolîe fans avoir pris
Ja moindre extenlion, tandis que le germe d'un corps
organifé s'étend en tout fens par la nutrition, & prend
de l'augmentation dans toutes fés dimendons & dans
fa maffe comme dans fon volume.
\\ efl certain que le criftal ne fe forme que par
l'intermède de l'eau, & l'on peut en donner des preuves
évidentes; il y a des criftaux qui contiennent de l'eau,
d'autres renferment du mica, àa fcliorl, des particules
métalliques, &c. d'ailleurs, le crifîal fe forme comme
ie fpath calcaire & comme toutes les autres flaladites,
il n'en diffère que par fà nature vitreufe & par fa figu-
ration ; il préfente fouvent des apparences de mouffes
& de végétations dont la plupart néanmoins ne font
pas des fubflances réelles, mais de fimples fentes ou
cavités vides de toute autre matière (e): fouvent on
(e) Voyez le Mémoire iû par M. Daubenton, de i'Acadcaue cies
Sciences, en Avril \yZz.
DES Minéraux, 451
trouve des criflaux encroûtés, c'eft- à -dire, donc les
furfaces font chargées de matières étrangères, & fur-
tout de terre ferrugineufe ; mais l'intérieur de ces crif
taux n'en eft point altéré, <5c il n'y a vraiment de
criftal ferrugineux que celui qui eft coloré, & dans
lequel il efl entré des vapeurs ou des molécules de fer
lor/qu'il s'eft formé.
La groffeur du prifme ou canon de criftal efl afTcz
égale dans toute fa longueur; les dimenfions font beau-
coup moins confiantes dans les parties pyramidales, &
l'on ne trouve que très-rarement des criflaux dont les
faces triangulaires des pyramides foient égales ou pro-
portionnelles entr'elles , & cette groffeur du prifme
femble déj^endre des dimenfions de la bafe de la pyra^
mide , car la pointe fort du rocher la première , & la
pyramide y efl attachée par fa bafe qui s'en éloigne
enfuite à mefure que le prifme fe forme & pouffe Ja
pointe au dehors.
La denfité du criflal de roche n'efl pas, à beau-
coup près, auffi grande que celle du diamant & des
autres pierres précieufes. On peut voir dans la note
ci-de(fous {f), les rapports de pefanteur des différens
(f) Pieds cubes.
t.i*res. Oncei. Grsi. Crains.
185. II. 2. 64.
i85. 10. 7. 2.1.
Criftal de roche de Madagafcar.
> de roche du Brefil. . . .
Pffiinfr-jr, Pouces cubes.
Onces. Cr. Grcitti
2(jî30. I. 5. 54.
26')z6. I. 5. 54.
J-llii
4)2 HiSTO ï P E N ATU R E L LE
criflaux que M. BrifTon a fournis à l'épreuve Je fa
balance hyciroftatique ; cette pe/ànteur fpécifiq'ie n'eft
pas fenfiblemenc augmentée dans les criflaux colorés.
Cette table nous démontre au/Ti que les aniétiiyftes, ia
topaze occidentale , la cbryfblite & l'aiguë marine ne
font que des criftaux violets , jaunes & verdâtres.
M. BrifTon donne en/iiite la pe/anteur re/pecflive des
Pieds cubes.
JLmei. Oncts. Cm. Craint.
185.
3'
1.
185. 7. 5. 0.1.
185. 12, 4. 53.
18;. II. o. 14.
1^8 j. 12, o. 18.
I 80. 1 I. o. ^^.
385. II. 7. x6.
185. 15. d. 52.
185. 5». 3. 47.
185. 3 . 1 . 16.
^85. 10. I. 2.
185. 3
18;. 13
Crirtal de roche d'Europe
de roche irifé
jaune ou topaze de Bo-
nciTic •••••••»• ••••
roux- brun ou topaze en-
fumée
noir
' ou faphir d'eau. . . .
violet ou améthyfte
violet-pourpré ou améthyfle
de vigne 01 de Cariha-
gène
blanc - violet ou améthyfte
blanche
2. 2.6.
I. 71. I
Quartz criftailifé,
laiteux. . ,
gras....
fragile . , ,
Pefaitteur. Pouces cubes»
Onces. Cr. Crt'ms.
26548. I. J, JJ.
26497. I. 5. 53.
26541. I. j. 5j.
26534. I. 5. 54.
26536. I. 5. 55.
26513.1. 5. 28.
26570. r. 5. 56.
26513. I. 5. 54.
26^4.6. I. 5. 55.
26519. I. 5. 54,
2645 8. I. 5. 52.
26404. 1. 5. ^0.
D E s Aï I N É R A U X. 453
différens quartz , & lews poids fpécifiqiies fc trouvent
encore être les mêmes que ceux des criftaux de roche,
en forte qu'on ne peut douter que leur fubilance ne
foii de la même eflence.
Toutes les matières cridailifées font compofées de
petites lames prelque intiniment minces , & qui fè
réunifTent par la feule force de leur attradion réciproque
dès qu'elles fe trouvent en liberté ; & ces lames fi
minces dont on ne doit confidérer que la furface plane,
peuvent avoir différentes figures dont le triangle efl la
plus fimple. M. Bourguet avoit ohfcrvc avant nous CgJ ^
que les prifmes hexagones , ainfi que les pyramides trian-
gulaires du criflal de roche, font également compofées
de petites lames triangulaires qu'on peut apercevoir à la
loupe à l'extrémité des pyramides, & qui, par leur
réunion, forment les grands triangles pyramidaux, &
même les hexagones pri/matiqucs du criftal ; car ces
lames triangulaires ne iè joignent jamars que par la
tranche (h) , &- fix de ces triangles, ainfi réunis, forment
un KeMagone ; fi l'on obferve ces triangles au microf-
cope , ils paroiffent évidemment composés d'autres
triangks plus petits , & l'on ne peut douter que les
parties élémentaires du criflal ne ibient des lames trian-
gulaires fort petites , &. dont la fiirface plane efl
/gj Lettres philofophiqiies lur la formation des fels, &c. Amjlerdam,
172$.
(h) Voyez dans ce volume l'article de U CriJîaUifatiop,
4)4- Histoire Naturelle
néanmoins beaucoup plus étendue que celle Je la
tranche qui efl infiniment mince.
Quelques Naturalises récens, & entr'autres Linnaîus
& Tes Écoliers, ont avancé mai - à - propos , que les
criflaux pierreux doivent leur figure aux fels; nous ne
nous arrêterons pas à réfuter des opinions auffi peu
fondées : cependant tous les Phyficiens inflruits , &
notamment le favant Minéralogifte Cronfledt, avoient
nié avec raifon, que les fels euffent aucune part à la
formation non plus qu'à la figure de ces criilaux; \[
fufiit, dit -il, qu'il y ait des corps métalliques qui fe
criftallifent par la fufion, pour démontrer que la forme
des criflaux n'eft point dépendante des fels. Cela ell
très-certain; les fels & les criftaux pierreux n'ont rien
de commun que la faculté de fè criflalii/èr , faculté
plus que commune, puifqu'elle appartient à toute ma-
tière non - feulement faline, mais picrreufe, ou même
métallique, dès que ces matières font amenées à l'état
fluide, foit par l'eau, foit par le feu, parce que dans
cet état de liquidité, les parties fnnilaircs peuvent ^'ap-
procher &l fe réunir par la feule force de l'attradion,
& former par leur agrégation des crifîaux dont la forme
dépend de la figure primitive de leurs parties confli-
tuantes, & de l'arrangement que prennent entr 'elles ces
lames minces en vertu de leur affinité mutuelle <Sc
réciproque.
Le criftal de roche fe trouve ^ croît en groffes
DES Minéraux, 4^^
quilles dans les cavités des rochers quartzeux & gra-
niteux ; ces cavitc's s'annoncent quelquefois à l'extérieur
par des éminences ou bourioufMurcs dont on reconnoît
Je vide en frappant le rocher; l'on juge par le fon
que l'iniérieur en elt creux.
11 le trouve en Dauphiné ( i ) , pluGeurs de ces
(tj Depuis long-temps, dit M. Guettard, VOifan ( en Dauphiné)
cft ctltbre par les mines de cnilal ; les babitans ne celîent pas d'ea
farte la recherche ou de continuer l'ouverture des criflalikeres dont
l'exploitation elt commencée. . . . L'on a découvert plufieurs mines
de ce foUîle; il y en a au lac de Brandc , à Maronne , à la Corde ,
\ G'irauje , à V Arment'iere , précifémeni au-delTus de la Romanche , à
Frenay , à la Grave, à Cyentor près le Cbazelle , à Vuujanï ; le criftal
y efl nuageux & peu clair; au Sautet , paroiHe du Mont-de-lau ,
à M'iip'in qui ert au-deflus de cet endroit. . . . Les hlons de criftallicre
(e font voir afTez communément à des hauteurs trcs-élevées dans les
montagnes , quelquefois même , comme à la Grave , ils louchent ou
font à j)eu de dillance des glacières, ce qui en rend Tacccs tou-
jours alTez difficile & quelquefois dangereux, ce c[ui fera toujours
un obllacle réel à une exploitation régulière. Alémoire Jur la Aline'
ralog'ie du Dauphiné , lome II , page ^y6 & jui\anies. — De Brandes ,
<^i le même Naturalille , nous avons monte à la petite Herpia , où
il y a une criRallière abandonnée. Le criftal en ell beau; le rocher
cft un Ichifte tendre & dur en quelques jtarties.
De la petite Herpia on monte à la grande Herpia en deux heures
par un chemin très - étroit & jour arrivera la giaiide ciif-
tallière , il faut monter par des rochers preiqL:e droits.... On y
travaille l'hiver , & elle ell , dit-on , la mc'e de toutes les autres
criftallières , il y a un filon très- confidciable de quartz, & le criltal
elt di vile en poches qui patoiflcnt très étroites & qui s'elargiflent
à fur &. à mefure qu'on avance ; les inctes dçi crilta,ux font aaachees
456 Histoire Naturelle
rochers creux dont les cavités /ont garnies de cri/laux;
on donne à ces cavités le nom de criflallicres lorfqu^ellcs
en contiennent une grande quantité. C'efl toujours près
du fommet des montagnes quartzeufes & graniteu/ès
que giflent ces grandes criflallicres ou mines de crif-
tal ; plufieurs Naturaliftes , & entr'autres M." Altman
& Cappeller, ont décrit celles des montagnes de la
aux quartz de chaque côté, de forte que les aiguilles font tournées
les unes contre les autres , & cet entre-deux eil rempli d'une terre
ocreufe où il y a quelquefois des aiguilles de criftal détachées;
on fait jouer la mine dans le quartz pour détacher le rocher par
quartiers , & en fuite on fépare avec des marteaux les crillaux de
ce quartz. Le rocher eft: d'un fchifte tendre qui fe décompofe
facileinent. Mémoire fur la Aiinéralogie d' Auvergne , tome I , page ij
à" fuivantes. — Ce même favant Acadéjnicien ( M. Guettard ) a
parcouru avec M. Faujas de Saint-Fond, les montagnes de l'Oifaa
dans les Alpes, dont Içs mines font couvertes de glaces perma-
nentes , &i ont examiné les mines de criftal des foffe s de la Garde,
des Afas-fur-lcs-clos, de A^aronne , de Frenny, Ils ont auffi vifitc
les travaux de la fameule mine de criftal de la grande Herp'ia , qu'on
a été forcé d'abandonner malgré fa richefte , parce qu'on ne peut
y aborder que pendant un mois & demi de l'année , & qu'il faut
courir les plus grands rifques en y efcaladant par des rochers taillés
à pic, qui ne préfentent que quelques faillies qui (xxfhient à peine
pour placer la pointe du pied , & c'eft au-delTus d'un précipice de
plus de cinq cents pieds de profondeur qu'on eft obligé de voyager
de la forte ; mais on eft dédommagé des peines & des dangers en
contemplant cette magnifique criftailière qui préfente à l'œil un rocher
qui n'eft prefqu'une maffe du })lus beau criftal , 6; c'eft pour ceue
raifon que les gens des environs l'ont nommée la grande aijlalliire.
Journal de Phyfique , mois de Décembre J 77J , page j ly.
SuiiTç ;
DES Minéraux. 457
Suiffe (k) ; elles font fréquentes dans ie mont Grhnfcl ,
entre le canton de Berne &: le Valais, dans le mont
Scûnt - Gothard & autres montagnes voi fuies ; & c'ell
toujours dans les cavités du quartz ou dans les fentes
des rochers quartzeux que fe forme le criflal , & jamais
dans les cavités ou fentes des rochers calcaires. Le
criflal fè produit auffi dans les pierres mixtes, comme
(k) Sur les cimes des plus hautes Alpes, on trouve dç.% mines
de criilaux ; on iait que cette matière fe trouve dans les cavités de
certaines veines métalliques , & que le quartz leur fert de matrice.
Aux Alpes, les veines de quartz fortent au jour, & indiquent aux
Mineurs où il faut creul'er; cependant il faut fouvent beaucoup de
temps & de travail pour trouver une cavité qui contienne des criftaux.
Dans \q Cr'mfelberg , on découvrit en 1719 une mine ue criHaux
plus riche que toutes celles qu'on avoit déjà découvertes. L'un des
criQaux de cette mine pelbit huit cents livres; il s'en trouve plufieurs
de cinq cents livres. Les criftaux de la Suifle font en général fort
tranfparens. On en conlerve un de couleur noire dans la bibliothèque
de Berne ; on en trouve rarement de couleur jaune ou brune ou
rouge. M. Altman en a un ciiez lui dont la couleur approche de celle
de l'améthyde. Defcripl'ion des montagnes de glaie de la Suijfe , par
M. Aitman^ Journal étranger, Janvier //Jj". — Les indices qui
guident les Mineurs dans la recherche du criflal de roche, (ont
des bandes ou zones blanches de plufieurs toifes d'étendue & de
huit à dix pouces de largeur, qui enveloppent eu divers fens les
blocs des rochers; ces zones, qu'ils nomment feurs de mine, font,
dit M. Cappeller, formées par des concrétions brillantes & plus
dures que la fubftance du roc. Les Mineurs examinent auffi avec
foin s'ils ne découvrent pas au bord de ces bandes des fuintemens
d'eau qui tranfudent par des efpèces de loupes qui excèdent la
Airfdce du rocher; alors ils frappent à grands coups de mafle fur
Ali/iJraux , Tome IIL M m m
458 Histoire Naturelle
on le voit dans prefque tous les cailloux creux dont
la fublbnce efl fouvent mclée de différentes matières
vitreufes, métalliques, calcaires & limoneufes : mais il
faut toujours que le quartz y foit contenu en plus ou
moins grande quantité ; fans cela le criftal ne pourroit
fe produire, puifque fa flibflance eft un vrai quartz,
f^ns mélange apparent d'aucune autre m.atière, & que
quand on y trouve des corps étrangers , ils n'y font
ces éminences , & par le Ton qui réfulte de fa commotion , ils jugent
fi le rocher cil plein ou caverneux. Si ce fon ell creux , ils conçoivent
de i'efpérance & mettent la main à l'œuvre. Ils commencent par
fe frayer une route par la mine avec la poudre ; ils la dirigent en
galerie comme les autres Mineurs , & ils ont grande attention que
leur mine ne coupe pas tranfverfalement les bandes blanches, au
moins dans leur plus grande largeur; ce travail eft pénible & fouvent
de plufieut^ années , même incertains s'ils parviendront à la caverne
qui récèle le criftal de roche. La longueur de l'exécution efl encore
prolongée par les neiges qui ne laifîent à découvert les travaux que
pendant environ trois mois de l'année. . . .
La minière la plus riche que l'on ait trouvée , fut celle que l'on
découvrit en 1719 ; la quantité du criftal que l'on en tira, fut eftimée
trente mille écus. Les quilles étoient d'un volume e'norme ; il y en
avoit une qui pefoit huit cents livres, plufieurs de cinq cents, &
beaucoup de cent livres. L'on voit encore deux de ces belles quilles
dans la bibliothèque de Berne. Tous les criflaux de cette riche
minière étoient de la plus grande régularité & de la plus belle eau.
Il s'en trouva très-peu de tannées par ces taches que l'on appelle
neiges. Dans le Valais , vers le canton de Berne , dans la vallée de
Kletch , on a trouvé une belle mine de criftal. Voyei^ les Mémoires
de AI. CappcUer , Aie de m a Lucerne.
DES Minéraux. 459
que renfermés, enveloppés par accident, & non intime-
ment & réellement mêlés.
M. Achard, très-habile Chimifte, de 1* Académie de
Berlin , ayant fait i'analyfe chimique du rubis & d'autres
pierres précieufes , &. en ayant tiré de la terre alkalinc ,
a penfé que le criflai de roche en contenoit aufTi , 6l
dans cette idée il a imaginé un appareil très-ingénieux
pour former du criftal en faifant pafTer l'air fixe de la
craie à travers du fable quartzeux & des diaphragmes
d'argile cuite. M. le prince Galitzin qui aime les Sciences
& les cultive avec grand fuccès , eut la bonté de m'en-
voyer au mois de Septembre i777> un extrait de la
Lettre que lui avoit écrite M. Achard , avec le dcfiln de
fon appareil pour faire du cridal ; M. Magellan, favant
Phyiicien , de la Société royale de Londres , me fit
voir quelque temps après un petit morceau de criflai
qu'il me dit avoir été produit par l'appareil de M. Achard,
& enfuitc il préfènta ce même criftal à l'Académie des
Sciences ; les Commiffaires de cette Compagnie firent
exécuter l'appareil , & effayèrent de vérifier l'expérience
de M. Achard ; j'engageai M. le duc de Chaulnes
& d'autres habiles Phyficiens à prendre tout le temps
& tous les foins néccffaires au fuccès de cette expé-
rience , & néanmoins aucun n'a réuffi , & j'avoue que
je n'en fus pas furpris , car d'après les procédés de
M. Achard, il me paroît qu'on viendroit plutôt à bout
de faire un rubis qu'un criftal de roche ; j'en dirai
Mm m ij
460 Hi STO I RE Naturel LE
les raifons lorfque je traiterai des pierres précieufes, dont
la fiibilance , la formation & l'origine font , feJon moi ,
irès-diiferentes de celles du criftal de roche. En atten-
dant, je ne puis qu'applaudir aux efforts de M. Achard,
dont la théorie me paroît faine & peut s'appliquer à
la criflallifation des pierres précieufes ; mais leur fiibftance
diffère de celle des criftaux , tant par la denfité que par
la dureté &: l'homogénéité ; & nous verrons que c'eft
de la terre limoneufe ou végétale, & non de la matière
vitreufe que le diamant ôl les vraies pierres précieufes
tirent leur origine.
Tout criflai , foit en petites aiguilles dans les cailloux
creux , foit en groffes & grandes quilles dans les cavités
des rochers quartzeux, efl donc également un extrait,
ime flalaélite du quartz. Les criftaux plus ou moins
arrondis que l'on trouve dans le fable des rivières ou
dans les mines de féconde formation , & auxquels on
donne les noms impropres de diamans de Comouailles
ou d'Almçon, ne font que des morceaux de crifîal àt
roche, détachés des rochers & entraînés par le mouve-
ment des eaux courantes, ils font de la même effence,
de la même pefanteur fpécilique & de la même tranfpa-
rence ; ils ont de même une double réfradion , & ne dif-
fèrent du criflai des montagnes qu'en ce qu'ils ont été
plus ou moins arrondis par les frottemens qu'ils ont fubis,
H fe trouve une grande quantité de cqs criflaux arrondis
dans les vallées des hautes montagnes & dans tous les
DES Minéraux. 461
torrens & les fleuves qui en découlent ; ils ne perdent
ni n'acquièrent rien par leur long féjour dans l'eau ,
l'intérieur de leur mafle n'efl point altéré, leur furface
eft feulement recouverte d'une enveloppe ferrugineufe
ou terreufe, qui n'efl même pas fort adhérente, & lorique
cette croûte efl: enlevée , les criflaux qu'elle recouvroit,
préfentent le même poli & la même tranfparence que
le crillal tiré de la roche où il fè forme.
Parmi les criflaux même les plus purs & les plus
folidcs, il s'en trouve qui contiennent de l'eau & des
bulles d'air , preuve évidente qu'ils ont été formes par
Je fuintement ou la filiation de l'eau. Tavernier dit avoir
vu dans le cabinet du prince de Monaco, un morceau
de criflal qui contenoit près d'un verre d'eau //J ; ce
fait me paroît exagéré ou mal vu , car les pierres qui
renferment une grande quantité d'eau , ne font pas de
vrais criflaux , mais des efpcces de cailloux plus ou
moins opaques. On connoît fous le nom à'enhyJres (m)
ceux qui font à demi-tranfparens &. qui contiennent
beaucoup d'eau ; on en trouve fouvent dans les matières
rejetées par les volcans (n) ; mais j'ai vu plufieurs criflaux
r ■ I
(l) Voyage en Turquie, &c. Rouen, 171 ^ , tome I , page ^ ^ 2,
(m) Cette pierre fut connue des anciens ^ fous fe même nom.
Pline en parle & la décrit bien en ces termes : Enhydros feniper
rotunduatis abfolutœ , in candore ejl levls , fed ad motum Jluduat intùs
in eâ veluti in ovis litjuor. Lib. XXXVII , cap, xi.
• (n) Les enhydres ou cailloux creux font, dit M. Faujas de Saint-
fond , àQ% eipèces de pierres caverneufes ou géodes , pieines d'eaii-.
462 Histoire Naturelle
de roche bien tranfparens & régulièrement criflailifcs ,
dans lefquels on ^^^ercevoit aifément une goutte d'eau
flirmontée d'une buile d'air qui la rendoit fènfibfe par
fon mouvement en s'élevant toujours au-deffus de la
goutte d'eau lorfqu'on changeoit la pofition verticale
du morceau de criflal ; & non -feulement il fe trouve
quelquefois des gouttes d'eau renfermées dans le criflal
de roche, mais on en voit encore plus fouvent dans
ies agates & autres pierres vitreufes qui n'ont qu'une
demi - tran/parence. M. Fougeroux de Bondaroy , de
i' Académie des Sciences, a trouve de l'eau en quantité
très-fenfible dans plufieurs agates qu'il a fait cafler (0);
il efl donc certain que les criftaux, les agates & autres
flaladites quartzeufes , ont toutes été produites par l'in-
termède de l'eau.
Comme les montagnes primitives du Globe ne font
compofées que de quartz, de granit & d'autres matières
vitreufes, on trouve par-tout dans l'intérieur &. au pied
de ces montagnes, du criflal de roche, foit en petits
morceaux roulés, /bit en pri/mes & en aiguilles attachées
Cette eau efl ordinairement limpide , fans goût , fans odeur & de
la plus grande pureté. On trouve près de Vicence, fur une colline
yolcanique , de petits cailloux creux , d'une efpcce de calcédoine
ou d'opale, dans lefquels il y a quelquefois de Teau : ces enhydres
peuvent fe monter en bagues , & comme ils font d'une fubftance
tranfparente , on y voit très-diftindement l'eau qui s'y trouve ren-
fermée. Recherches fur les volcans éteints ^ page 2.^ o , in- fol.
(0) Voyez les Mémoires de l'Académie des Sciences , annéf
DES Al I N È R A U X. 4.6J
aux rochers. Les hautes montagnes de l'Afie en font
aulTi fournies que les Alpes d'Europe. Les Voyageurs
parlent du criftal de la Chine (p) , dont on fait de
beaux vafes &l des magots ; des crifhux de Siam (éj^ ,
de Camboie , des Moluques (r) , &. particulièrement de
celui de Ceylan où ils difeni qu'il efl fort commun (fj.
En Afrique, le pays de Congo tire fon nom du
criftal qui s'y trouve en très -grande abondance ('ij ; il
y en a aufti en quantité dans le pays de Galam /^uj ;
mais l'ile de Madagafcar eft peut - être de toute la
terre la contrée la plus riche en criftaux ("xj , il y en a
de plus & de moins tranfparens ; le premier eft limpide
(p) Hiftoire générale des Voyages, tome VI, page 48 j.
(q) Idem, tome IX, page ^oj.
(r) Hiftoire de la Conquête des Moluques, par Argenfola\
Amjlerdam, lyoS , tome II , page ^^.
(f) Hiftoire générale des Voyages, tome VIII, page ^4^»
■— Les Romains tiroient du criftal de l'Inde & en fàifoient grande
eftime , quoiqu'ils fuflent bien que les Alpes d'Italie en produifoient
de très-beau. Oriens, dit V\me ^ crijlallum mitîït, IndkœnuUa prefcrtur,.,.
fed laudaia in Europe Alpîum jugis , lïh. XXXVII, cap. II.
(t) Idem, tome IV , page 611,
(u) Idem, tome II, page 644.
(x) Il y a de fort beau criftal à Madagafcar , fur-tout dans fa
province de Galemboul où on le tire en pièces de fix pieds de
Jong & quatre de large fur autant d'épaifteur. Les Nègres n'y tra-
vaillent que le foir , apparemment parce qu'ils n'aiment pas à le voir
embarquer fur nos navires, Hijloire générale des Voyages, tome VIII,
jpage 629,
4<Î4 Histoire Naturelle
comme l'eau, &. fe préfeme, pour ainfi dire, en mafles
dont nous avons vu des blocs arrondis, de près d'un
pied de diamètre en tout fens ; cependant quoiqu'il
foit plus net & plus diaphane que le criflal d'Europe,
il efl; un peu moins denfe fyj, 6l fouvent il cfl plus
mclé de fchorl & d'autres parties hétérogènes. Le
fécond criflal de jMadagafcar refTemble à celui d'Europe.
Al. l'abbé de Rochon a rapporte de cette île une groffe
Si belle aiguille à deux pointes de ce criflal ; on peut
la voir au Cabinet du Roi.
Dans le nouveau continent, le criflal de roche eft
tout au/Ti commun que dans, l'ancien ; on en a trouvé
à Saint-Domingue [iJ, en Virginie ^-/^^ au Mexique
&. au Pérou ("ôj^ où M. d'Ulloa dit en avoir vu des
morceaux fort grands 6l très - nets : ce favant Natu-
ralise marque même fa furprife de ce qu'on ne ie
recherche pas, & que c'efl le hafard fcul qui en fait
quelquefois trouver de groffes malfes fc). Enfin, il
y a du crillal dans les pays les plus froids comme dans
fyj Dans la Table de M. BrifToii , la pefanteur fpécifique du
criftal de Madagafcar efl: de Z0530 , & celle du ciiftal d'Euiope
de 26548, relativement à l'eau fuppofee loooo. Ainfi le triftaJ
d'Europe efl un peu plus denfe que celui de Madagalcar,
(':^J Hif^oire générale des Voyages, tome XII , pa^c 21 S,
(a) Idem , tome XIV ^ page jf.08.
(h) Idem , tome XII , page 6 ^S .
(c) Idem, tome XIV » page ^08,
les
•^1
D E s M I ^ È R AU X. ^6 y
les climats tempérés & chauds ; on a recueilli en Lap-
ponie & au Canada , des criftaux roulés tout femblabici»
à ceux de Briftol, Si Ton y a vu d'autres criftaux en
aiguilles & en grofTes quilles f^J; ainfi dans tous les
pays du monde il fe produit du criilal , foit dans les
cavités des rochers quartzeux, foit dans les fentes per-
pendiculaires qui les divi/ènt ; & celui qui fe préfente
dans les cailloux creux & dans les pierres graniteufes ,
provient aufli du quartz qui fait partie de la fubflance
de ces cailloux & pierres mixtes.
L'extrait le plus pur du quartz eft donc le criftal
blanc , & quoique les criflaux colorés en tirent également
leur origine , ils n'en ont pas tiré leurs couleurs ; elles
leur font accidentelles , & ils les ont empruntées des
terres métalliques qui étoient interpofées dans la maffe
du quartz , ou qui fe font trouvées dans le lieu de la
formation des criflaux ; mais cela n'empêche pas qu'on
ne doive mettre au nombre des extraits ou ftaiactites
du quartz tous ces criflaux colorés ; la quantité des
molécules métalliques dont ils font imprégnés , & qui
leur ont donné des couleurs , ne fait que peu ou point
d'augmentation à leur maffe; car tous les criflaux, de
quelque couleur qu'ils foient, ont à très -peu -près la
même denfué que le criflal blanc. Et comme les
fd) Voyez la relation du Pcre Charlevoix, & les Mémoires de
l'Acadcmie des Sciences, année j/j2 , pare ipy.
ATmérûux, Tome UL N n n
i^dG Histoire Naturelle
améthyfles , la topaze de Bohème, la chryfblite à. l'aiguë-
rnarine ont la même denfité, la même dureté, la même
tlouble réfradioii , & qu'elles hm également réfilîantes
à i'adion du feu, on peut fans héfiter les regarder
comme de vrais criftaux , & l'on ne doit pas les élever
au rang des pierres prccieufes qui n'ont qu'une fimple
réfraction , & dont la denfité , la dureté & l'origine
font très-différentes de celles des criflaux vitreux.
DES Minéraux, 467
lUMB mgJTIg-^
A M É T H Y s T E.
X. OUTES les Amcthyrtes ne font que Jcs cri/laiix de
roche teints de violet ou de pourpre, elles ont la même
dcnfnéf^?J^ la même dureté, la même double réfradion .
que le criflal , elles font auiïi également réfradaircs au feu.
Les améthyflcs violettes font les plus communes, & dans
ia plupart , cette couleur n'a pas la même intenfité
par-tout, fouvent même une partie de la pierre e/t
violette & le reile eft blanc ; il femble que dans la
formation de ce criflaJ , la teinture métallique qui a
coloré la pyramide, ait manqué pour teindre le prifme;
au/Ti cette teinture s'affoiblit par nuance du violet au
blanc dans le plus grand nombre de ces pierres ; on
je voit évidemment en tranchant horizontalement une
table de criftaux d'améthyfte , toutes les pointes font
plus ou moins colorées , & les bafcs font fouvent toutes,
blanches comme le criiial.
On fait que le violet & le pourpre font les couleurs
intermédiaires entre le rouge & l'indigo ou bleu-foncé ;
le crillal de roche n'a donc pu devenir améthyfte que
quand le quartz qui l'a produit s'efl trouvé imprégné de
particules de cette même couleur violette ou pourprée;
(a) La pefaïueur fpccifique de l'améthyde eft de 26535, celfe
du criftal de roche d'Europe de 2,(55^8 , & celle du criftai de roch^
^Ê Madagafcar de ^.(î^jÇ)»
4-68 Histoire Naturelle
mais comme il n'y a aucun métal, ni même aucun minerai
métallique qui produife cette couleur par la voie humide,
& que la manganèfe ne la donne au verre que par le
moyen du teu, il faut avoir recours au mélange du
rouge & du bleu pour la compofition des améthyftes ;
or ces deux couleurs du rouge & du bleu peuvent être
fournies par le 1er feul ou par le fer mêlé de cuivre:
ainfi les améthyfles ne doivent fe trouver que dans les
quartz de féconde formation , & qui font voifins de ces
mines métalliques en décompobtion.
On trouve en Auvergne , à quatre lieues au nord
de Brioude, une minière d'améthyfles violettes, dont
M- le Monnier, premier Médecin ordinaire du Ho'i,
Si. l'un de nos favans Naturalises de l'Académie , a
donné une bonne defcription f/'J.
- ■ ■ ■ - —
fbj Les bancs de cette carrière d'amc'thyfles ne font point hori-
zontaux , ils font au contraire en tables vertica'es poftes fur leur
champ, & la matière qui les fe'pare efl; le criftal d'ame'thyfte dont la
dureté furpalTe de beaucoup celle de la pierre qui efl cependant
une gangue afiez dure.
Chaque veine d'améthyfle a quatre travers de doigt dVpaifTeur,
ôi s'étend aufîi loin que le rocher qu'elle accompagne dans une
diredion de l'efl: à l'oueft. Cette veine criftallifée n'adhère pas
également aux deux tables entre lefquelles elle fe trouve , elle eft
intimement unie à l'une des deux, à peine eft-elle feulement contiguë
a l'autre. La furface qui tient fortement au rocher eft compofée de
libres réunies de chaque faifceau qui cotnpofe l'améthyfle , & ce
fâifceau fe termine de l'autre côté à une pyramide à cinq ou fix
faces fouvent inégales, hautes d'environ fix lignes, en forte que la
i
DES Minéraux. 469
On trouve de femblables améthyfles clans les mines
de Sc/iemnhi en Hongrie (c) ; on en a rencontre en
Sibérie (dj Si jufqu'au Kamtfcliatka ("ej; il s'en trouve
auffi en pluficurs autres régions, & particulièrement en
Efpagne (f); celles de Catalogne ont une couleur
pourprée, & ce font les plus cflimées fgj; mais aucune
de ces pierres n'a la dureté, la denfué ni l'éclat des
pierres précieufes , &. totites les améthyftes perdent leur
furface de cette croûte criHalline qui regarde le rocher auquel elle
efl le moins adhérente, ell: toujours héri(îte de pointes de diamant.
Chaque pyramide eft revêtue d'une croûte d'un blanc fale , mais
l'intérieur eft très-fouvent une améthyfle de la plus belle couleur;
il s'en trouve de toutes les nuances, & 'fen ai vu qui ctoient au/îi
blanches que le plus beau criflal de roche. Ces pierres font beaucoup
plus parfaites & n'ont même de tranljjarence que vers les pointes.
Le milieu & l'autre extrémité font prefque toujours glaceux , les
paylans des environs en caflent les plus beaux morceaux qu'ils
vendent aux Curieux. Obfervations d' Hijloire Naturelle y par M. le
Aïonnier; Paris, i 7 S 9 •> P^^g^^ ^ o o ù' fuiv.
(c) ColJedion académique, partie é i range re , tome JI , page 2 j y,
(d) Voyage de Gmelin en Sibérie , &c.
(0) Journal de Phyfique, Juillet 178 i , page ^/.
(f) llifloire Naturelle d'Efpagne , par M. ViO^sX^s , page ^i 0.
(g) Pline, parlant de l'améthyfte, nous apprend en partant quelle
éioit la véritable teinte de la pourpre ; « on s'efForçoit , dit-il , de
lui donner la belle couleur de i'améthyfte de l'Inde , qui eft , te
ajoute t-il , la première & la plus belle des pierres violettes. Son «e
éclat doux & moelleux femble remplir &. raftafier tranquillement «
la vue fans la frapper de rayons pétillans comme fait i'efcarboucle».
Linc xxxYii , n° ^0,
470 Histoire Naturelle
couleur violette ou pourprée lorfqu'on les expofe à
Ta^tion du feu: enfin elles préfentent tous les caradères
& toutes les propriétés du criflal de roche ; Ton ne peut
donc douter qu'elles ne foicnt de la même eficnce, &
que leur fubdance, à la couleur près, ne fbit ahfolumeni
la même.
Les Anciens ont compte cinq efpèces d'améthyflcs
qu'ils diflinguoient par les différens tons ou degrés de
couleurs ; mais cette diverfité ne confiftc qu'en une
fuite de nuances qui rentrent les unes dans les autres,
ce qui ne peut établir entre ces pierres une différence
clfentielle. La diflinclion qu'en iont les Joailliers en
orientales & occidentales, ne me paroit pas bien iowAîiç^y
car aucune amétliyfte n'offre les caracStères des pierres
précieufes orientales; favoir, la dureté, la denfité & la
fimple réfra6lion. Ce n'efl pas qu'entre les vraies pierres
précieufes il ne puiffe s'en trouver quelques - unes de
couleur violette ou pourprée , & même quelques Ama-
teurs fe flattent d'en pofféder, & leur donnent le nom
^ amcthyfte orientale. Ces pierres font au moins très-
rares, &. nous ne les regarderons pas comme des amé-
thyfles, mais comme des rubis, dont en effet quelques-
uns feniblcnt ofirir des teintes d'un rouge mçlé dft
pourpre.
DES Minéraux. 471
CRISTAUX-TOPAZES.
\JN a mal-à-propos donne ie nom de Topa-^cs à ces
pierres qui fe trouvent en Bohème, en Auvergne &
dans plufieurs autres provinces de l'Europe, & qui ne
font que des criflaux de roche colores d'un jaune plus
ou moins fonce , & fouvent enfumé : comme leur forme
de criflallifation, leur dureté, leur denfité font les mêmes
que celles du cridal , & qu'elles ont aufTi une douhle
réfradion , il n'cfl pas douteux que ces fortes de topazes
ne foient, ainfi que les améthylles, des crillaux colorés.
Ces criflaux-topazes n'ont de rapport que par le nom
& la couleur avec la vraie topaze , qui efl une pierre
précieufe & rare qu'on ne trouve que dans les climats
chauds des régions méridionales, au lieu que ces crif
taux - topazes ont peu de prix , & fe trouvent au/Ti
communément dans les contrées du nord que dans
celles du midi (a) , & quoiqu'on doraie l'épithète
(a) Wolckmann, dit M. Pott, donne l'enumération des lieux
de Sibérie qui fournifTent les topa2es ; tels font les montagnes des
géans , ou Riefengehurge , auprès du grand lac ; le mont Kommers
ou Gomberg , auprès de Schreiberfan ; ie mont Kinart , derrière le
château & au-deflbus de Kinart près de Hernijforjl , à la colline
nommée Zei/igenbugel, dans le voifinage de Schmiedeberg , & dans les
rivières d'Yfer ôl de Zacken
M. Henckel dit qu'elle fe trouve aflez abondamment dans le
jfji Histoire Naturelle
d'occidentale à la topaze de Saxe & à celle du Brefd,
comme elles font d'une pefanteur fpéciiique bien plus
frrande que celle des criflaux colorés, & prefque égale à la
deniitédu diamant; leur criftallifàtion étant d'ailleurs toute
différente de celle des criflaux de roche, on doit les re-
garder comme des pierres qui , quoiqu'inférieures à
la topaze orientale, font néanmoins fupcrieures à nos
criflaux-topazes, par toutes leurs propriétés effentielles.
Ces criflaux -topazes fe trouvent en Bohème (l>) , en
Mifnie, en Auvergne , & fe rencontrent auffi dans prefque
Voigtiand , à la montagne nommée Schneckemberg , auprès de la
colline de Tanne b erg , à deux milles d* Anerbach , où elle fe lire
d'entre une marne jaune & le criHal de roche , <Sc fe rencontre
dans les fentes d'un rocher fi dur , qu'on peut fe fervir des mor-
ceaux de ce rocher pour entamer & briler même la topaze. La
couleur de cette topaze eft plus ou moins jaune , à peu- près tirant
fur un petit vin pâle. Le côté d'en -bas qui efl attaché au rocher,
eft pour l'ordinaire plus trouble & plus obfcur ; mais vers la pointe,
la couleur devient plus nette & plus traniparente. Alémolres de
V Académie de Berlin, année jy^j , pages jj.6 Ùf fuiv,
(h) ce La topaze de Bohème, dit M. Dutens, efl: en criflaux
■n ou canons alfez gros , mais d'un poli moins vif que la topaze
a:) d'Orient ou du Bréfil ; fa couleur tire fur celle de l'hyacinthe &
» quelquefois fur le brun.... Ce qu'on appelle /q;?J{^ enfumée ^
35 n'efl qu'un criflal de roche teint de jaune ordinairement terne &
ï> fonibre ; & ce qu'on nomme topaiç d'Allemagne efl: un fpath
» vitreux ou fluor cubique , lequel accompagne fouvent \es, filons
33 de plomb, & que l'on croit être, ainfi que la topaze même,
» coloré par ce métal « , pages ^ 4 & fuiv.
tous
DES Minéraux. 4.73
tous ies lieux du monde où le criflal de roche efl
voidii des mines de fer, l'on a fouvent obfervé que
la partie par laquelle ils font attaches au rocher quart-
zeux qui les produit, efl environnée d'une croûte fer-
rugineufè plus ou moins jaune ; ainfi cette teinture
l^rovient de la difToliuion du. fer & non de celle du
plomb, comme le dit M. Dutens, puifque le plomb
ne peut donner la couleur jaune aux matières vitreufes
que lorfqu'elles font fondues par le feu : & l'on objederoit
vainement que le fpatli fluor qui accompagne fouvent
les filons des galènes de plomb, cil teint en jaune,
comme les criflaux-topazes; car cela prouve feulement
que ce fpath fluor a été coloré par le plomb lorfqu'il
étoit en état de chaux ou de calcination par le feu
primitif
La pefanteur fpécifique des criflaux-topazes , efl pré-
cifément la même que celle du criflal de roche (c);
ainfi la petite quantité de fer qui leur a donné de la
couleur, n'a point augmenté fenhblemcnt leur denfité;
ils ont auffi à peu-près le même degré de dureté , &
ne prennent guère plus d'éclat que le criftal de roche;
leur couleur jaune n'cd pas nette , elle efl fouvent
mêlée de brun, & lorfqu'on les fait chauffer, ils perdent
fc) La pefanteur rpccifique de Ja topaze de Bohcine eft de
^6541 , & celle du criflal de roche d'Europe de 2654.8. Tables
de M. Bripn.
Minéraux^ Tome IL Ooo
474 Histoire Naturelle
leur couleur & deviennent blancs comme le criflal. On
ne peut donc pas douter que ces prétendues topazes
ne foicnt de vrais criftaux de roche, colores de jaune
par le fer en difTolution qui s'efl mêlé à l'extrait du
îjuariz lorfque ces criftaux fe font formés.
DES Minéraux. 475
C H R Y S 0 L I T E.
J_jES pierres auxquelles on donne aujourd'hui le nom
de Cliryfolkej ne font que des crijîaiix-topaies dont le
jaune efl mêlé d'un peu de vert ; leur pefanteur ij)éci-
fique efl à peu-près la même (a) j elles réljflent également
à l'aélion du feu, & leur forme de criflallifàtion n'efl
pas fort différente (b) , M. le dodeur Demefle a raifbn
de dire qu'il y a très-peu de difîérence entre cette pierre
chryfolite & la topaze de Bohème (c) ; elle n'en diffère
en effet que par la nuance de vert qui teint foiblement
ic jaune fans l'effacer (d) ; c'eft par le plus ou le moins
(a) La pefanteur fpécifique de la chryfolite du Brefil efl de
26923 , & celle du crilUl de roche de 26548. M. Briflon donne
aufli 27821 pour pefanteur fpécifique d'une autre chryfolite, fans
indiquer le lieu où elle fe trouve ; mais cette difference-de denfiie'
n'eft pas aflez confide'rable pour faire rejeter cette chryfolite du
nombre des criftaux colorés.
(h) La forme de criflallifàtion de la chryfolite ordinaire n'eft
pas , comme on le croiroit au premier coup-d'œil abfolument fem-
blable à celle du criftal de roche; la pyramide eft: plus obtufe , &
les arêtes du prifme hexagone font fouvent tronquées & forment
un dodécaèdre. Son tifTu efl fenfiblement lameileux parallèlement
à l'axe du prifme , «S: elle a plus d'éclat que le crillal de roche
le plus pur. Ej[a'i de CriJIullographie , jiar M. de Rome de Lïjle ,
tome IJ , r^^fs 272 àr fuiv.
(c) Lettre de M. Demefle, tome I, prge 42p.
(d) Robert de Berquca déâiùt uès-bieu la chryfolite, en difant
O û o i j
47"^ Histoire Naturelle
de vert répandu dans le jaune qu'on peut diftinguer
au premier coup-d'ceil la chryfblite du péridot, dans
lequel au contraire la couleur verte domine au point
d'eifacer le jaune prefque entièrement; mais nous verrons
que le péridot diffère encore de notre chryfolite par des
caraclères bien plus elfentiels que ceux de la couleur.
La chryfolite des Anciens étoit ia pierre précieu/è
que nous nommons aujourd'hui topave orientale, & à
laquelle le nom de cliryfolhe ou pierre d'or convcnoit
eu eiîèt beaucoup (e) : « La chryfolite dans fa beauté,
» dit Pline, fait pâlir l'or lui-même (f) ; aulfi a-t-on
» coutume de la monter en tranfparent & fans la doubler
j> d'une feuille brillante qui n'auroit rien à ajouter à fon
éclat. » L'Ethiopie & l'hide, c'ell-à-dire, en géwhdSy
l'Orient, fourniffoient ces pierres précieufes aux Romains,
& leur luxe encore plus fomptueux que le nôtre, leur
fai/bit rechercher toutes les pierres qui avoient de l'éclat;
ils diftinguoient dans les chryfolites plufieurs variétés;
ia chryféieâre à laquelle, dit Pline, il falloit la lumière
claire du matin pour briller dans tout fon éclat (^) ; la
leucocryfe , d'un jaune-blanc brillant (h) ; ia méléchryiè,
que fâ couleur efl un vert iiaifTant tirant fur le jaune, ou ua
vert- jaune brillant d'un luftre doré.
(e) Chrifos lithos.
(f) Livre XXXVII , n.' 42,
(g) IbUem , n." 4^.
(h) Ibidem , n' ^4,
DES Minéraux. 4.7^
qui, fuivant la force du mot, avec un éclat doré, offre
la teinte rougeâtre du miel (i) ; toutes ces belles pierres
font , comme l'on voit , très-différentes de notre chry-
folite moderne , qui n'ell qu'un criflal de roche coloré
de jaune -verdâtre.
Les chryfolites que l'on a trouvées dans les terreins
volcanifés font de la même nature que les chryfolites
ordinaires ; on en rencontre affez fouvent dans les laves
& dans certains bafaltes : elles fë prcfentent ordinairement
en grains irréguliers ou en petits fragmens qui ont la
couleur, la dureté & les autres caraétères de la véri-
table chryfolite, nous en ferons la comparaifon lor/que
nous parlerons des matières rejetées par les volcans.
(i) Livre XXXYII , n° 4j.
47? Histoire Naturelle
A I G U E-M A R I N E.
L
ES Aigues-marines ne font encore que des criflaux
quartzeux teints de bleuâtre ou de verdàtre ; ces deux
couleurs font toujours mêlées , & à différentes dofes
dans ces pierres , en forte que le vert domine fur le
bleu dans les unes, & le bleu fur le vert dans les autres;
leur dcnfité (a) ôl leur dureté font les mêmes que celles
des améthyftes, des criftaux - topazes t^ des chry/b-
lites , qui toutes ne font guère plus dures que Je crillal
de roclie ; elles réfiftent également à l'adion du feu.
Ces trois caractères effentiels fuffifent pour qu*on fait
bien fondé à mettre l'aiguë - marine au nombre des
criftaux colorés.
La reffcmblancc de couleur a fait penfèr que le
léo'I des Anciens étoit notre aiguë - marine ; mais ce
béryl , auquel les Lapidaires donnent la dénomination
(\'ai^ue - viar'uie orientale ^ eft une pierre dont la denfité
cft égale à celle du diamant, &. dès -lors on ne peut
la confondre avec notre aigue-marine ni la placer avec
jes criflaux quartzeux.
On trouve les aigues-marines dans plufieurs contrées
de l'Europe, & particulièrement en Allemagne; elles
f n) Criflal d'Europe, 26)48; aiguë jjiarijie , 2722^; chrylolite,
2.-j%%\ \ chryfolite du Erefil^ 26^23. VoycT^ la Table de Ai. Brijjon,
DES Minéraux. 479
n'ont ni la denfité , ni la dureté , ni l'éclat du béryl
& des autres pierres qui ne fe trouvent que daus les
climats méridionaux ; &. ce qui prou\ e encore que nos
aiguës - marines ne font que des criflaux de roche teints ,
c'efl qu'elles le préfcntent quelquefois en niOrceaux
afTez grands pour en faire des vafcs.
Au refte, il fe trouve entre l'aiguë - marine & le
béryl la même différence en pefanteur fpéciiique (6J
qu'entre les crillaux-topazes & la topaze du Bredl , ce
qui feul fuftit pour démontrer que ce font deux pierres
d'effence différente , & nous verrons que le béryl pro-
vient du fchorl , tandis que l'aigue-marine efl un criflal
quartzeux.
{bj La pefanteur fpécifique du béryl ou aiguë -marine orientale
efl de 3^48^, & celle de i'aiguç-marine occidentale ii'ell que de
480 Histoire Natu relle
SFA LACTITES CRISTALLISÉES
DU FELD-SPATH.
I 1 E Fel J-fpath , dont la denfité & la dureté font à peu-
près les mêmes que celles du quartz, en diflère néan-
moins par des caraclères efTentiels, la fufibilité & la
figuration en criftaux ; & cette criftalii/àtion primitive
du feid-fpadî ayant été produite par le feu, a précédé
celle de tous les criflaux quartzeux qui ne s'opère que
par l'intermède de l'eau.
Je dis que la cridaliifation du feld-fpath a été produite
par le feu primitif, & pour le démontrer, nous pourrions
ra])pcler ici toutes les preuves fur le/quelles nous avons
établi que les granités , dont le fcid-iJ3atIi fait toujours
partie conflituante, appartiennent au temps de l'incan-
deftcncc du Globe, piiifque ces mêmes granités, ainfi
que les verres primitifs dont ils font compofés , ne
portent aucune empreinte ni veflige de l'impreflion de
l'eau , & que même ils ne contiennent pas l'air fixe
qui fe tlcgage de toutes les fubftances poiicrieurement
formées par l'intermède de l'eau , ccû-a-d'ire de toutes
les matières calcaires ; on doit donc rapporter la criflal-
iifation du feld-fpatb dans les granits à cette époque,
où le feu, & le feu feul, pénétroit & travailloit le Globe
avant que les élémens de l'air & de l'eau volatilifés, &
encore relégués loin de fa furface , n'euffent pu s'y établir.
11
DES Minéraux. ^8 i
Il en efl de même du fcliorl, dont la criflallifation
primitive a été opérée par le mcme feu ; puifqu'en
prenant les fchorls en général, il en exifle autant &
plus en forme crifîailifée dans les granités, que dans
les mafTes fecondaires qui en tirent leur origine.
On reconnoît aifément le feld-fpath & les matières
qui en proviennent au jeu de la lumière qii'elles réflé-
chifTent en chatoyant , & nous verrons que les extraits
de ce verre primitif font en affez grand nombre, mai<
ils ne fe préfentent nulle part en auffi gros volume que
les criftaux quartzeux ; les extraits ou ftalaélitcs du feld-
fpath font toujours en affez petits morceaux ifolés ,
parce qu'il ne fè trouve lui-même que très-rarement eu
maffes tm peu confidérables.
Dans cette recherche fur l'origine &. la formation
des pierres tran/jiarentes , je fais donc entrer les carac-
tères de la denfité , dureté , homogénéité & fufibilité ,
que je regarde comme efîentiels & très-diflinélifs , fans
rejeter celui de la forme de criflallifation, quoique plus
équivoque; mais on ne doit regarder la couleur que
comme luie apparence accidentelle qui n'influe point
du tout fur l'effence de ces pierres, la quantité de la
matière métallique qui les colore, étant prefque infini-
ment petite, puifque les criiîaux teints de violet, de
pourpre, de jaune, de vert, ou du mélange de ces
couleurs , ne pèfent pas plus que le criflal blanc , &
que les diamans couleur de rofë, ou jaunes ou verts,
Minéraux, Tome- III. Ppp
4S2 Histoire Naturelle
font aufTi de la même denfité que les diamans blancs.
Et comme nous ne traitons ici que des flaladites
traniparentcs , & que nous venons de préfentcr celles
du quartz , nous continuerons cette expofitlon par les
flaladites du feld-fpath, & enfuite par celles du fciiorl:
ces trois verres primitifs produifent des ftalaélites tranf-
parentes ; les deux autres, fàvoir, le jafpe & le mica,
ne donnent guère que des concrétions opaques, ou tout
au plus à demi-tranfparentes , dont nous traiterons après
celles du quartz, du feld-fpath & du fchorl.
DES Minéraux. 48 j
SA P H I R D'E A U.
L^ E Saphir d'eau eft une pierre tranfparente légèrement
chatoyante, & teinte d'un bleu pâle, fa dcnfité approche
de celles du fcld-fpath &. du cridal de roclie (û) ; il a
fouvent des glaces & reflets blancs , &l fouvent aufTi
la couleur bleue manque tout-à-coup ou s'affoiblit par
nuances, comme la couleur violette fe perd <&: s'affoiblit
dans l'améthyde ; il paroît feulement par la différence
de la pefameur fpécihque qui fe trouve entre ces deux
pierres (l>), que le faphir d'eau n'efl pas tout- à- fait
auffi denfe que Taméthyfle & le criflal de roche, &
qu'il feft plus que le feld-ipath en criflaux rougeâtres ;
je fuis donc porté à croire qu'il efl de la même effence
que le feld-fpath , ou du moins que les parties quartzeufes
dont il eft compofé font mélangées de fcld-fpath : on
pourra confirmer ou faire tomber cette conjeélure , en
éprouvant au feu la fufibilité du faphir d'eau; car s'il
(a) La pefanteur fpccifique du faphir d'eau eft de 25813; celle du
ciidal de roche eft de 26548; la pefameur fpécifique du feld-fpath
blanc eft de 26466, & celle du feld-lpath rougeâtre eft de 24378,
en forte que la jiefanteur fpccifique du faphir d'eau étant de 25813,
elle fait le terme moyen entre celle de ces deux feld-fpaths , & c'eft
ce qui me fait prcfuiner que la fubftance du faphir d'eau eft plutôt
compofce de feld-fpath que de quartz.
fb) La pefanteur fpécifique du faphir d'eau eft de 2581 j, (5c
celle de l'amcthyfte de 26535.
Ppp ij
484 Histoire Naturelle
réfifle moins que Je criflal de roche ou le quarrz à
i'aclion d'un feu violent, on prononcera fans héfiter
qu'il efl mclé de feld-fpath.
Au refle, on ne doit pas confondre ce faphir d'eau,
qui n'efl qu'une pierre vitreufe foiblement colorée de
bleu, avec le vrai faphir ou faphir d'orient, qui ne
difîère pas moins de celui-ci par l'intenfite , la beauté
& le brillant de fa couleur , que par fa denfité , fà
dureté, & par tous les autres caractères de nature qui le
mettent au rang des vraies pierres précieu/ès.
(
DES Minéraux. 485
FELD- SPA TH DE R USSIE.
v_>*ETTE fubdance vitreufe afTez récemment conmie,
& jiifqu'ici Aénoirmiée pierre de Labrador (a) , parce que
ies premiers échantillons en ont été ramaflcs fur cette
terre fauvage du nord de l'Amérique, doit à plus jufte
titre prendre fa dénomination de la RufTie, où l'on vient
de trouver, non loin de Pétcrfbourg, ce feld - fpath
en grande quantité. L'augufte Impératrice des Ruifies
a daigné elle - même me le faire favoir, & c'efi avec
empreflement que je faiiis cette légère occafion de pré-
fenter à cette grande Souveraine , l'hommage univerfel
que ies Sciences doivent à fon génie qui les éclaire
autant que fa faveur les protège; & l'hommage parti-
culier que je mets à fès pieds pour les liautes bontés
dont Elle m'honore.
Ce beau feld-fpath s'efl trouvé produit &: répandu
dans des blocs de rocher que l'on a attaques pour paver
la route de Péter ftourg à Péterholi ; la maffe de cette
roche eft unexoncrétion vitreufe dans laquelle le fchori
domine , & oii Ton voit le feid-fpath formé en petites
tables obliquement inclinées, ou en rhombes criflallifés
(a) Feld - Ipath à couleurs changeantes , connu ibus le nom
de pierre de Labrador, on le trouve en effet en morceaux roulés,
quelquefois chargés de glands de mer fur les côtes de cette contrée
feptentrionale de l'Amérique.
486 Histoire Naturelle
d'une manière plus ou moins didinde. On le rcconnoît
au jeu de Tes couleurs chatoyantes, dont les reflets bleus
& verts deviennent plus vifs (Se font très - agréables à
l'œil, iorfque cette pierre efl taillée & polie: elle a
plus de denfité que le feld-fpath blanc ou rouge (h) ;
ce feld-rpath vert a donc pris ce furplus de denfité par
ie mélange du fcborl, & probablement du fcliorl ^qxi
qui efl le plus pefant de tous les fchorls (c) .
Au rede , cette belle pierre chatoyante qui ctoic
très-rare , le deviendra moins d'après la découverte que
i'on vient d'en faire en Ruffie, & peut-être efl -elle fa
même que ce feld-fpath verdâtre dont parle Wallerius,
& qu'il dit fe trouver dans les mines d'or de Hongrie
& dans quelques endroits de la Suède.
(h ) La pefunteur fpécifique du fpath de Ruflîe ou pierre de
Labrador, efl de 26925; celle du feld-fpath blanc , de 2437S'; (Se
celle du feld-fpath en crirtaux rouges, de 2.64.66. Tables Je Ai,
Brijfon.
{ c ) 'Ls. pefanteur fpécifique du fchori olivâtre ou vcrt, efl de
^ 4. 5 I p ; même Table.
DES Minéraux. 487
■ .. ... .....j j
ŒIL DE CHAT.
X-jES pierres auxquelles on a dcnué ce nom font
toutes chatoyantes , &. varient non-feulement par \c jeu
de la lumière <$i. par les couleurs, mais aufîi par le
cleflin plus ou moins régulier des cercles ou anneaux
qu'elles prcfentent. Les plus belles font celles qui ont
des teintes d'un jaune vif ou mordoré avec des cercles
bien diftinds ; elles font très-rares & fort eflimces des
Orientaux (a); celles qui n'ont point de cercles & qui
•^- .. » ■■ — ■-■"'■■■■ ■* ■ I .. — . -■■■■■ , , ., . _ ■ ^
(a) Les pierres précieufes dont on fait le plus de cas dans l'ile
de Ceylan , & parmi les Maures &. les Gentils , font hs yeux de
chat: on ne les connoît prefc[ue point en Europe. J'en vis une de
la groffeur d'un œuf de pigeon au bras du prince d'Ura lorfqu'il
vint nous voir. Cette pierre étoit toute ronde, & faite comme une
grofie balle d'arquebufe : ces pierres pèlent plus que les autres ;
on ne les travaille jamais, & on fe contente de les laver. Il femble
que la Nature ait pris plaifir de raniaiïer dans cette pierre , toutes
les plus belles & les plus vives couleurs que la lumière puifle pro-
duire , & que ces couleurs forment un combat entr'elles à qui
l'emportera pour l'éclat & pour le brillant , fans que pas une ait l'avan-
tage fur l'autre ; félon qu'on les regarde , & pour peu qu'on change
de fituation & qu'on remue cette pierre, on voit briller une autre
couleur , en forte que l'œil ne peut diftinguer de quelle manière fe
fait ce changement: de-là vient qu'on appelle ces pierres ceil de chat;
outre qu'elles ont des raies couchées l'une contre l'autre , ce qui fait
diverfité de couleurs , comme véritablement on voit que tous les
yeux de chat brillent & paroifîent de différentes couleurs fans qu'ils
le retournent- ou qu'ils fe remuent. Ces raies ou fils qui font dans
les yeux de chat ne font jamais en nombre pair; il y en a trois ;
488 Histoire Naturelle
font grifcs ou brunes , n'ont que peu d'éclat & de
valeur, on trouve celles-ci en Egypte, en Arabie, &c.
& les premières à Ceyian. Pline paroît défigner ie plus
bel œil de chat, fous le nom de Icucoplualmos , « lequel,
*» dit-il, avec la figure du globe blanc &: de la prunelle
»^ noire d'un œil , brille d'ailleurs d'une lumière enflam-
mée (h). » Et dans une autre notice où cette même
pierre cH également reconnoi (Table (c) , \\ nous a con-
fervé quelques traces de la grande cflime qu'on en
faifoit en Orient dès la plus haute antiquité : «< Les
î> Affyriens lui donnoient, dit -il, le beau nom A' œil de
Bcliis, & l'avoient confacrée à ce Dieu ».
Toutes ces pierres font chatoyantes , & ont à très-
peu-près la même denfité que le feld-fjoath ^J) ^ auquel
on doit par conféquent les rapporter par ces deux
caradères ; mais il y a ime autre pierre, à laquelle on
a donné le nom iVcc'i! Je char îioir ou îioh'âire, dont la
denfité c(t bien plus grande, & que par cette raifon
nous rapporterons au 'îq\\ox\.
cinq ou fept. HiJIoire de Ceylnn , par Jean Ribeyro , i y 0 i , page j?.
(b) Leiicophtalmos rutila allas, oculi fpeciem candïdam n'igramque
co-itiiiet. Hiil. Nar. Lib. XXXVli , n." 61.
(c) Bell Qculus all'icans pupïllam cing'it n'igrdm , e medio aurco
fuhvrc lafi-entem. Hœ , proptcr fpeciem , facratijftmo AJfyr'iorum Dco
dicauiur. Lib. XXXVII , n." 45.
(d) La pefanteur fpecilicjue du feld-fpath blanc, efl de 26466;*
celle de i'cx-ii de chat mordoré, efl: de 2.66^^ \ de l'ail de dut
jaune, 25^7;; & de l'œil de cliat gris^ 2^675,
DES Minéraux. 489
(E I L DE POISSON.
IL me paroît que l'on doit encore regarder comme
un produit du feld-fpath, la pierre chatoyante à laquelle
on a donné le nom (ïœîl de poijjbn, parce qu'elle t'a
à peu -près de la même pefanteur f|3ccifique que ce
verre primitif ('dj.
Dans cette pierre œil Je poijjon, la lumière efl blanche
& roule d'une manière uniforme , le reflet en eft d'un
blanc éclatant & vif lorfqu'dle eft taillée en* forme
arrondie, & polie avec foin; la plupart des pierres cha-
toyantes, « dit très-bien M. Dem.efle, ne font que des
feld-fpaths d'im tiffu extrêmement fin, que l'on taille «
^x^ goutte de fuifow en cabochon , pour donner à la pierre «
tout le jeu dont elle efl fufceptible. » Cette pierre
cei! de poijfon , quoiqu'aflez rare, n'efl pas d'un grand
prix , parce qu'elle n'a que peu de dureté , & qu'elle
efl fans couleur ; cWe paroît laiteufe &. bleuâtre lorf-
qu'on la regarde obliquement; mais au reflet direél de
la lumière , elle efl d'un blanc éclatant &. très - intenfè :
à ce caraélère, & en fe fondant fur le fens étymo-
logique , il me paroît que l'on pourroit prendre
(a) La pefanteur fpe'cifique de îa pierre œil de poijfon, eft de
2.5782, ce qui ed à peu-près le terme moyen entre fa pefanteur
fpccifique z6^66 du feld-fpath blaiic, & -4378 pefanteur fpécifiqua
du feld-lpatli rougeâtre.
ATincraiix, Tome IIL Q^^
490 H isTo IRE Naturelle
\ argywdnmas de Pline, pour notre œil de poifTon; car
il n'eft aucune pierre qui joigne à un beau blanc d'argent
plus d'éclat & de reflet, & qui par conféquent puilfe
à plus jufle titre , quoique toujours improprement,
recevoir le nom de diamant d'argent (b): Si. cela étant,
la pierre galLùque du même Naturalifte, fcroit une variété
de notre pierre œil de poifTon, pui/qu'li la rapporte
lui-même à fon argyrodamas (c) . Au refte cette pierre,
ceil de foijjon , eft ainfi nommée, parce qu'elle reffemble
par fa couleur au criflallin de l'œil d*un pcriflbn.
r
(b) Argyroilamas.
(c) Gûllaiiti ar^yrodamanti finùlïs ef, paulb fordid'ior; Lib. XXXV IL,.
«
I
!
DES Minéraux. 49 i
f]» '""'■l'tiimiiiiim— iBi ■ I II» ■■■ III II I I
'" ' ' m
ŒIL DE LOUP.
1-j A pierre api)clce (EU de loup, cft Je même :in pro-
duit (lu fckl-rpath ; clic efl chatoyante, & probablement
mclce de parties micacées qui en augmentent le volume
& diminuent h ma/Te ; cette pierre ccW de loup , moins
Aiin^c que \^ fcld'fpaih (a) , paroît faire la nuance entre
les feid-fpatlis & les opales qui font encore plus mélan-
gées de parties micacées; car l'œil de loup n'étincelle
pas par paillettes variées comme Taventurine ou l'opale,
mais il luit d'une lumière pleine & /ombre ; Tes reflets
verdâtres fèmblcnt fortir d'un fond rougeâtre, & on
pourroit prendre cette pierre pour une variété colorée
de la pierre œil de poiflbn, ou pour mie aventurine
iàns accident, fans aventure de couleurs, fi fa denfjté
n'étoit pas fort au-deffous de celle de ces pierres. Nous
îa regarderons donc comme un des produits ou flalac-
lites, mais des moins pures &: des plus mélangées, du
£eld-fpadi. Sa teinte foncée <Sc obfcure ne laiffe à fes
reflets que fort peu d'éclat, & cette pierre, quoiqu'affez
rare, dont nous avons au Cabinet du Roi deux grands
échantillons, n'a que peu de valeur.
* — ' ' -•
(a) La pefanreur Tpécifique de fa pierre cc'il de /oup . n'ed qu*
4? -^i5^7' tandis que celle de l'œil de poifloa ell de zjySz*
492 Histoire Natu relle
r-^— u*-.iin.^i.U3s:
a^.i ij — r I iii m '■^-j»u.Ej Lia,
A VE N T U R I N E.
i_jE feid-fpath & toutes ies pierres tranfparentes qui
Cil tirent leur origine, ont des reliets cliatoyans; mais
il y a encore d'autres pierres qui réunifTent à la lumière
flottante & varice du chatoyement, des couleurs fixes,
vives &. intenfes , telles que nous les prcfentenc les
aventurines & ies opales.
La pefantcur fpécifique des aventurines efl à très-
peu-près la même que celle du feld-fpath (a): la plu-
part de ces pierres, encore plus brillantes que chatoyantes,
paroifTent être femées de petites paillettes rouges, jaunes
& bleues , fur un fond de couleur plus ou moins
rouge; les plus belles aventurines ne font néanmoins
qu'à demi-tranfjDarentes; les autres font plus ou moins
opaques, &. je ne les rapporte au feld-fpath qu'à cau/è
de leurs reflets légèrement cliatoyans, &. de leur denfité
qui efl à très -peu -près la mcme ; car ies unes & ies
autres pourroient bien participer de la nature du mica,
dont les paillettes brillantes contenues dans ces pierres ,
paroifTent être des parcelles colorées.
(a) Feld-fpath, 26466; avemurine demi-tranfparente, 26667,
aventurine opaque, 16^26. Table de M. Brijfon,
DES Minéraux. 49 3
OPALE.
XJ E toutes les pierres chatoyantes l'Opale efl la plus
Lelle; cependant elle n'a ni la dureté ni l'éclat des vraies
pierres précieufès ; mais la lumière qui la pénètre ,
s'anime des plus agréables couleurs , & femble fe pro-
mener en reflets onJoyans, & l'œil efl encore moins
ébloui que flatte de l'effet fuave de Tes beautés. Pline
s^'arrcte avec complaifance à les peindre: « c'eft, dit-il,
le feu de f efcarboucle , le pourpre de l'améthyfte, le
vert éclatant de l'émeraude, brillant enfemble, & tantôt
réparés , tantôt unis par le plus admirable mélange (a) ».
Ce n'eft pas tout encore : le bleu & f orangé viennent
fous certains afpeéls fe joindre à ces couleurs , &. toutes
prennent plus de fraîcheur du fond blanc 6i lui/ânt fur
lequel elles jouent , &. dont elles ne femblent fortir que
pour y rentrer & jouer de nouveau.
Ces reflets colorés font produits par \c brifement
des rayons de lumière mille fois réfléchis, rompus &
renvoyés de tous les petits plans des lames dont l'opale
efl compofée ; ils font en même temps réfraélés au
fortir de la pierre, fous des angles divers & relatifs à
ia pofition des lames qui les renvoient, & ce qui prouve
fa) EJi in iis carhunculi î envi or ignis , ejl ametyfii fidgens purpura
if fmaragdi virens mare , & cunéla pariier incredibili mixlurâ luc(ntia>
Lib. XXXVII , cap. 6.
ce
494- Histoire Naturelle
que ces couleurs mobiles & fugitives, qui fuivent l'œif
&. dépendent de l'angle qu'il fait avec la lumière , ne
{ont que des iris ou fpedres colores , c'e/l qu'en cafïànc
ia pierre elle n'offre plus dans fa fracture, ces mêmes
couleurs dont le jeu varié tient à fà flruéture intérieure,
& s'accroît par la forme arrondie qu'on lui donne à
l'extérieur. L'opale ell donc une pierre irifée dans toutes
lès parties; elle efl en même temps la plus légère des
pierres chatoyantes, & de près d'un cinquième moins
àeni^e que le feld-fpath , qui de tous les verres primitifs
eft le moins pefant (h) ; elle n'a auffi que peu de du-
reté (c) ; il faut donc que les petites lames dont l'opale
eft compofée , foient peu adhérentes , & affez féparées
les unes des autres, pour que fa denfité & fa dureté
en foient diminuées dans cette proportion de plus d'un
cinquième relativement aux autres matières vitreufès.
. Une opale d'un grand volume, dans toutes les parties
de laquelle les couleurs brillent cSc jouent avec autant
de feu que de variété (i^J , efl \mc production fi rare
qu'elle n'a plus qu'un prix d'eiliiiie qu'on peut porter
(h) La pefanîcur fpc'cifique de l'opale eft de 21140, «Se celle
du feld-lpath le plus Jcger de 2^.378. Table de AI. Brijjon.
(c) L'opaÎG eH: fi tendre que , pour la polir , on ne peut , fiijvant
Boëcc , enipîoycr ni l'cineril ni la pote'e , & qu'on ne doit fe fervir
que dii tripoii étendu fur une roue de bois.
(d) Les plus grandes , dit Pline , ne paffent pas la grofTeur d'une
aveline, 7wc;s aveHanœ imignlludine. Lijj. xxxyii , çaj?. 6»
DES Al J N É R A U X, 49 5
très-haut. Pline nous dit qu'Antoine profcrivit un Séna-
teur auquel appartenoit une très-belle opale qu'il avoit
refufé de lui céder; fur quoi le Naturalise Romain s'écrie
avec une éloquente indignation : « De quoi s'étonner
ici davantage , de la cupidité farouche du tyran qui «
profcrit pour une bague , ou de l'inconcevable pafTion «
de l'homme qui tient plus à fa bague qu'à fa vie (e)f »
On peut encore juger de l'eftime que faifoiem les
j\nciens de i'opaie, par la fcrupuleufe attention avec la-
quelle ils en ont remarqué les défauts, <Sc par le foin qu'ifs
ont pris d'en caraélérifer les belles variétés (f). L'opale
en offre beaucoup , non - feulement par les diiîcrences
du jeu de la lumière, mais encore par le nombre des
nuances &l la diverfité des couleurs qu'elle réfléchit (g):
(e) Sed mira Antonii ferilas alcjne luxurla proptef gemmam profcriben^
t'is j nec m'inor Non'ii contuwacia profcriptionem fuam amantis. Idem, ibidi
/ f) y'ii'ia opal'i , fi color in forem herbue , quœ vocatur heliotropium.
exeot , aut crijîaUum mit grandinem: fi fal interveniat aut fcabritia ûut
punâa ocuUs occurfantia , nullofque mugis Jndia fimilitudine indifcreta
vitro adultérât. Experimentiim in foie tantiim ; faifts enitîi contra radios
libratis , di(^ito ac pollice unus atque idem travjlucet colos infe confumptui.
Yeri fidoor fiibind} variât & pliis hue illucque fpavgit , & fulgor lucis
in di (fîtes funditur. Hanc gcmmam proptér eximiam gratiam pleriquc
cvpellavêre pcedcrota. Sunt & qui privatum genus e'nis faciiitit , favge-
Tionque ab Indis vocari dicunt. Traduntur nafci & in yEgypto Ù" in
Arabid if vili(f'mi in Ponto. Item in Galatiâ ac Thafo if Cypro.
Quippe opa/i gratiam habct , ftd moîltus niiet , raro ncn fcaler. Plin,
lib. XXXVII , cap. G.
(cr) On conngat cj^iuuc fortes d'opales , la première trcs-parfaife
49^ Histoire Naturelle
il y a Jc5 opales à reflets foiblement colorés, ou fur
un fond laiteux flottent à peine quelques légères nuances
de bleu. Dans ces pierres nuageufes, laiteufes & prefque
opaques, la pâte opaline femble s'épaiiïir & fe rapprocher
de celle de la calcédoine: au contraire, cette même
pâte s'éclaircit quelquefois de manière à n'offrir plus que
l'apparence vitreufe & les teintes claires & lumineufes
d'un feld - fj^ath chatoyant & coloré ; & ces nuances ,
comme l'a très-bien obfervé Boëce, fe trouvent fbuvent
réunies & fondues dans un feul &. même morceau d'opale
brute. Le même Auteur parle des opales noires comme
& qui imite naïvement l'iris par le moyen de ces couleurs-ci, le
rouge , le vert , le bleu , le pourpre & fe jaune. La faconde qui
au travers d'une certaine noirceur , envoyé un feu & un c'clat
d'efcarboucle qu'on lait très-rare & très-précieufe. La troifième qui
aufli au travers d'un jaune fait paroître diverfes couleurs , mais peu
gaies & comme amollies. Et la quatrième forte, celle qu'on nomme
fauffe opale , laquelle eft diaphane & femblable aux yeux de poillon. . .
La couleur des plus belles opales eft un blanc de lait , parmi lequel
il e'clate du rouge , du vert , du bleu , du jaune , du colombin &
plufieurs autres couleurs diffcrentes qui dedans ce blanc furprennent
agréablement la vue; d'où je conclurois facilement que c'eft de cette
forte que Boëce dit en avoir vu une , de fa grofîêur d'une petite
noix, dont il fait monter fa valeur à une grande fomme de Tfiaiers.
Elle croît dans les Indes ^ dans l'Arabie, l'Egypte & en Chypre.
Et à i'égard de celles de Bohème , quoiqu'elles foient grandes , elles
font néanmoins fi peu vives en couleurs , qu'elles ne font guère
eftimées. MencUles des Indes , par Robert de Berquen , pages jf4
des
DES Minéraux. 497
^es plus rares & des plus fuperbes par l'éclat du feu qui
jaillit de leur fond fombre (/i).
On trouve des opales en Hongrie (ij , en Mi/îiie (k)
Si dans quelques îles de la Méditerranée ^/^. Les Anciens
tiroient cette pierre de l'Orient, d'où il en vient encore
aujourd'hui, Sl nos Lapidaires diilinguent les opales,
aiiifi que plufjeurs autres pierres, en orientales & en
ccc'uientalcSj mais cette diftinélion n'eft pas bien énoncée ;
car ce n'efl que fur le plus ou le moins de beauté de
ces pierres que portent les dénominations d'orientales
& d'occidentales , & non fur le climat où elles fc
trouvent , puifque dans nos opales d'Europe il s'en ren^
contre de belles parmi les communes , de même qu'à
Ceylan & dans les autres conirces de l'Inde, on trouve
beaucoup d'opales communes parmi les plus belles;
îiinfi cette diflinélion de dénominations, adoptée par les
^ . : ^
(h) Boëce de Boot dit avoir eu eu fk poirefllon \x\\2 très-petite
opale noire , & en avoir vu une autre de la groffeur d'un gro»
pois & qui rendoit un feu comparable à celui du plus beau grenat.
( Lap'id. & gemm. h'ifi. pag. 1^2). Nous avouons n'avoir pas vu
& ne pas connoître cette elpèce d'opale, quoiqu'après un témoignage
aufll pofjtif, on ne puiiîe pas , ce femble, douter de fon exiftence.
(ï) Voyage de Tavernier , tome IV , page 41. Boëce de Boot dit
que de Coa temps « la feule mine que l'on en connût en tlongrie,
effondra &. fut enfouie fous fes ruines ». Lap'id. à^ gemm. hijl. pag. / j?/#
(k) h. Freyberg.
(l) L'île de Tajjos appelée aujourd'hui Taffo , produit de fort
belles opales , qui font une forte de pierre précieufe. Defcripiion
4.C i Archipel , par Dapper; Ainjlerdam, lyo], page 1^4.
Mmûrau'A, Tome UL R r r
498 Histoire Naturelle
Lapidaires, cfoit ctrc rejetce par les Naturaliftes , piiif-
qu'on pourroit la croire fondée fur une différence
tfTentielIe de climats, tandis qu'elle ne l'efl: que fur la
différence accidentelle de l'éclat ou de la beauté.
Au refle, l'opaie cfl certainement une pierre vitreufc
de féconde formation, & qui a été produite par l'inter-
mède de l'eau: h gangue efl une terre jaunâtre qui ne
fait point d'effervefcence avec les acides ; les opales
renferment fbuvent des gouttes d'eau. M. Fougeroux
de Bondaroy, l'un de nos favans Académiciens, a facriflé
à fon infîruélion quelques opales , & les a fait caffer
pour recueillir l'eau qu'elles renfermoient ; cette eau
s'efi; trouvée pure & limpide comme dans les cailloux
creux &. les enhydres ^m) . Il fe trouve quelquefois des
(m) Je me fuis troxivé à portée d'obferver ce fait dans^ des-
opales Celles que j'ai obfervces' ont été tirées du mont
£erico dans le Vicentin , dont le terrein offre des traces de volcan
dans plufieurs endroits. Je n'alTure cependant pas que ces opales
doivent leur origine à des volcans ; beaucoup de ces pierres n'offrent
point de- bulles mobiles, &. ce n'eft que. dans la quantité, lorfqu'on
les a polies, que la bulle fe voit daiis quelques-unes.
Ces efpèces d'agates perdent avec le temps la bulle qui fixe
jnaintenant notre attention; on pourroit croire que celles-là avoient
quelques (emes ou qu'il s'y eft formé quelques creva/Tes qui donnant
iffue à l'eau, empêchoieiit la bulle d'air de s'y mouvoir comme el/e
le faifoit auparavant.
J'ai expofé ces opales où l'on n'apercevoit plus le mouvement
de la bulle, à une douce chaleur; je les ai laiffées dans de Feau
que j'ai.ûix long-temps bouillir, j'ai fait chauffer une de ces opales
(■:
DES Minéraux. 499
opales dans les pouzzolanes & dans les terres jetées par
les volcans. M. Ferber en a obfervc , comme M. de
Bondaroy, dans les terreins volcanifcs du Vicentin (nj;
t:es faits fuffifent pour nous démontrer que les opales
font des pierres de féconde formation, à. leurs reiiets
chatoyans nous indiquent que c'eft aux Halaélites du
feld-fpath qu'on doit les rapporter.
Quoique plufieurs Auteurs aient regardé le girafol
comme une forte d'opale , nous nous croyons fondés
à le féparer, non-feulement de l'opale, mais même de
toutes les autres pierres vitreufes; c'eft en effet une
pierre précieufe dont la dureté & la denfué font prefque
iloubles de celles de l'opale, & égales à celles des vraies
pierres précieufes (o),
. ' — ■ ..1.
A i'ai jetée dans Teau fans être parvenu à faire reparoître la bulle
J'ai caiïe une de ces opales qui avoit eu une buile &l qui l'avoit
perdue , & j'ai obfervé qu'elle étoit creufe & qu'il y avoit dans
J'inte'rieur une -jolie criflallifàtion , (nais point d'eau & aucun conduit
ni fente par fefquels cette eau auroit pu s'échapper.
J'ai rompu une féconde opale où je voyois aiféineut le rwouve-
ment d'une bulle, & je me fuis aflliré qu'elle étoit prefque remplie
d'une eau claire, limpide, & qui m'a paru infipide. Atémoïres de
M> Fougeroux de Bondaroy, dans ceux de l'Académie des Sciences,
finnée 1776, pagfs 628 Ù" fuiv»
(n) Lettres fur la Minéralogie, pages 24. & 2^.
(0) Voyez l'article de Cïrafol dani le volume fuivant de ©et(«
^illoire des minéraux.
500 Histoire Natu belle
PIERRES IRISÉES.
yVpRÈs ces pierres chatoyantes dont les couleurs font
flottantes, & dans lefquelies ies reflets de lumière paroifTent
uniformes, W s'en trouve plufieurs autres dont les cou-
leurs variées ne dépendent ni de ia réflexion extérieure
de la lumière, ni de fa réfraction dans Tintéricur de
ces pierres , mais des couleurs irîjQes que produifent tous
les corps lorfqu'ils font réduits en lames extrêmement
minces : les pierres qui préfèntem ces couleurs font
toutes défedueufes ; on peut en juger par le criftal de'
roche inp qui n'efl qu'un criflal fêlé ; il en eft de même'
du feid-fpath irifc ; les couleurs qu'ils offrent à l'œil,,
ne viennent que du reiiet de la lumière fur ies lames
minces de leurs parties conilituantes, lorfqu'ellcs ont
été féparées les unes des autres par fa percufTion ou:
par quelqu'autre caufe. Ces pierres irifées font éionnces,
c'efl-à-dire, fêlées dans leur intérieur; elles n'ont que
peu ou point de valeur , & on les diflingue aifément
des vraies pierres chatoyantes par le foible éclat &. le
peu d'intenfité des couleurs qu'elles renvoient à l'œil:
le plus fouvent même la fêlure ou féparation des lames
c(l fenfible à la tranche , &. vifibie jufque dans l'inté-
rieur dki morceau. Au refle, il y a auffi du criflai irife
feulement à fà furperficie, & cette iris fuperficiefle s*y
produit par i'exfoliation des petites lames de fa furface.
DES Minéraux. 501
tîe même qu'on le voit dans notre verre fadlice long-
temps expofé aux imprcffions de l'air.
Au relie, la pierre iris de Pline, qui femblerort
devoir être fpécialement notre criflal irifé, n'efl pour-
tant que le criftal dans lequel les Anciens avoient
ol)(èrvé la réfradion de la lumière , la divifion des
couleurs, en un mot, tous les effets du prifme /^J^
fans avoir fu en déduire la théorie.
^aj Nota. Seulement il eft fingulier que Pline, pour nous décrire
cet effet , ait recours à un criftal de la mer rouge , tandis que
!a première aiguille de criftal des Alpes pou voit également le lui
offrir. Iris effoditur in quâdam wfulâ maris rubri qua dijlat a Bérénice
vrbe fexaginta millia , c cetera fuâ parte crijlallus , iiaque quidam radicem
crijlaUi ejf'e dixerunt. Vecaïur ex argumento iris. Nam fub teâo perçu [fa
foie fpecies & colores arcûs cœlejlis in proximos parie tes ejaculatur g
Jiibinde mutcns magna que varietate admirât ionem fui augens. Sexangulum
ejfe , ut (rijfallum , cenfat.... Colores verb non nifi ex opaco reddunt g
née ut ipfœ habeant , fcd ut repercuffu parietum elidant : cptimaque quot
maxïmoi anus facit , fmillimofque cceleJJibus. Lib. xxxvji,n." 5 a.
502 Histoire N atv relle
STALACTITES CRISTALLISÉES
DU S C H O R L.
JLjE fchorl diftère du qyartz, ôl reflembie au feJd-
/padi par fa fufibilité , & il furpaiïe de beaucoup eu
denfitc les quatre autres verres primitifs; nous rappor-
terons donc au fchorl les pierres tranfparentes qui ont ces
mêmes propriétés; ainfi nous reconnoîtrons les produits
du fchorl par leur deufité & par leur fufibilité, & nous
verrons que toutes les matières vitreufes qui font fpé-
citiquement pkis pefantes que le quartz, les jafpes, le
mica & le ic\à - /path , proviennent du fchorl en tout
ou en partie. C'ell fur ce fondement que je rapporte
au fchorl pkuôt qu'au feld - /j^ath les émeraudes , les
péridots, le faphir du Brefd, &c.
J'ai déjà dit que les couleurs dont les pierres tranf
parentes font teintes, n'influent pas fenfiblement fur leur
pefanteur fpécifique ; ainfi l'on auroit tort de prétendre
que c'ell au mélange des matières métalliques qui fonc
entrées dans la compofition des péridots , des émeraudes
& du fapliir duBrefil, quon doit attribuer leur denfité
plus grande que celle du criflal , & dès-lors nous fommes
bien fondés à rapporter ce furplus de denfité au mélange
du fchorl qui eft le plus pefant de tous les verres
primitirs.
'"^M
DES Minéraux. 503
Les extraits ou flaladlites du fchorl font donc tou-
jours reconnoiiïabics par leur dcnfitc ôi leur fufibilitc ,
ce qui les diflingue des autres criflaux vitreux avec
Jefqueis ils ont néanmoins le *cara£lère commun de la
double réfracflion.
L'i
É M E R A U D E.
ÉMERAUDE, qui par fon brillant éclat & fa couleur
fuave, a toujours été regardée comme une pierre pré-
eieufè, doit néanmoins être mifè au nombre des criftaux
du quartz mêlé de fcborl , i . parce que fa dcnfitc efl
moindre d'un tiers que celle des vraies pierres précieufes ,
& qu'en même temps elle efl un peu plus grande que
celle du criflal de roche (û): 2. parce que fa dureté
n'efl pas comparable à celle du rubis , de la topaze
& du faphir d'Orient, puifque i'émeraude n'efl guère
plus dure que le criflal : 3. parce que cette pierre
mife au foyer du miroir ardent, fè fond &l fè convertit
en une maffe vitreufe, ce qui prouve que fà fubflance
quartzeufè efl mêlée de fcld - fpath ou de fchorl ('bj ^
(a) La pefameur fpécifique de rémeraude du Pc'rou , eft de ^yy) 5,
& celle du criftal de roche de 26548. Table de M. Br'ijj'on.
(b) L'émeraude expofee au foyer lenticulaire s'y efl fondue &
arrondie en trois minutes , elle efl: devenue d'un bleu terne avec
quelques taches blanchâtres. Cette expérience a été faite avec Ia>
lentille à refprit-de-vin de M. de Bernières. Voye\ la Ca^tU dcs>
Ans, du 2 y Juin jyj^'-
504- Histoire Naturelle
qui l'ont rendue fufible ; mais la denfité du feld-/{3aih
étant moindre que celle du criflal , & celle de l'éme*
raude étant plus grande , on ne peut attribuer qu'au mé-
lange du fchorl cette fufibilité de l'émeraude: 4.° parce
que les énieraudes croiffent, comme tous les criftaux (c),
dans les fentes des rochers vitreux (d): enfin parce
que l'émeraude a, comme tous ces criitaux, une double
réfracftion ; elle leur relTemble donc par les caradères
eiïentiels de la dcnfité , de la dureté, de la double
réfra6tion; & comme l'on doit ajouter à ces propriétés
celle de la fufibilité , nous nous croyons h\cri fondes
à féparer l'émeraude des vraies pierres précieufès, & à
ia mettre au nombre des produits du quartz mêlé de
(chorl.
Les émcraudes , commie les autres criflaux , font fort
fujettes à être glaceufès ou nuageufes ; il efl rare d'en
trouver d'un certain volume qui foient totalement
exemptes de ces défauts; mais quand cette pierre efl
parfaite, rien n'eft plus agréable que le jeu de fa lumière,
comme rien n'efl plus gai que fa couleur plus amie de
m ^ ■ ■ ' *
(c) La odiigue de la iniiie d'of de MeTjjuUel au Mexique, efl
un quartz dans lequel fe trouvent des crillaux d'emeraude, lelquels
même coniiennent des grains d'or. Bowles , Hijhïre Naturelle
à' Ejpagne.
(dj On trouve les e'jneraudes au ^ong des rochers où elfes croi/îênt,
& vienneut à peu - près comme le criibl. Voyagef de Robert Lade ;
Paris, i/4'i» lome I, pa^f^s /o t^ j-/.
l'œil
DES Minéraux. joj
l'œil qu'aucune autre fe) . La vue fe repofe, fe clclafTc,
fe récrée dans ce beau vert qui fcmble otirir la miniature
des prairies au printemps: la lumière qu'elle lance en
rayons aufii vifs que doux, femble, dit Pline, brillanter
l'air qui l'environne , & teindre par Ton irradiation l'eau
dans laquelle on la plonge (^f^: toujours belle, toujours
éclatante, foit qu'elle pétille fous le foleil, foit qu'elle
luife dans l'ombre ou qu'elle brille dans la nuit aux
lumières qui ne lui font rien perdre des anrrémens de
fa couleur dont le vert eft toujours pur fg) .
Auffi les Anciens, au rapport de Théophrafle ^/^^
( e ) Une belle émeraude fe monte fur noir comme les diamans
blancs; elle tfl: la Çt\x\e pierre de couleur qui jouifle de cette préroga-
tive, parce que le noir, bien loin d'altérer la couleur, la lend plus
riche & plus veloute'e , au lieu que le contraire arrive avec toute
autre pierre de couleur.
(f) C'efl: la remarque de Thcophrafle (lûp. & gemm. n' 44),
fur quoi les Commentateurs font tombés dans une foule de doutes
& de mëpriles , cherchant mal-à-propos comment l'émeraude pouvoit
donner à l'eau une teinture verte , tandis que Théophrafle n'entend
parler que du reflet de la lumière qu'elle y répand.
(g) NuUius coloris afpeÛus jucundior ejl ; nam herbas quoque virent es
frondefque ûvidè fpeélamus: fmaragdos vero tanto libenliùs quoniam nihil
omnino viridius comparatum illis viret. Prœiereûfoli gemmarutn contuitu ocu-
"los implent nccfatiant ; quin Ù" ab intentione aliâ obfcurata afpeâu jmaragdi
recreaîur acies Ita viridi lenitate la(fi[udinem mulcent. Prœlerea
longinquo amplificantur vifu infcientes cîrca fe repercujfum aéra; non foie
Tnutati , non umbrâ, non lucernis , fewperque fenfm radiantes & \ifum.
admittentes. Plin. lib. xxxvii, n." 16.
(^h) Lapid. & gemm. n.° 44.
Minéraux, Tome IIL S^i
$q6 Histoire Naturelle
fe plaifoient- iJs à porter i'émeraude en bague, afin de
s'égayer la vue par fon éclat Ôl fa couleur /iiave ; ils la
tailloient, /bit en cabochon pour faire flotter la lumière,
{bit en table pour la réfléchir comme un miroir , foit
en creux régulier dans lequel, fiir un fond ami de l'œil,
vcnoient fe peindre les objets en raccourci f/J. C'efl
ainfi que l'on peut entendre ce que dit Pline d'un
Empereur qui voyoit dans une émeraude les combats
des gladiateurs: réfervant rémcraude à ces ufages, ajoute
ie Naturalifle Romain, & refpeclant fes beautés natu-
relles , on fèmbloit être convenu de ne point l'entamer
par le burin (/:); cependant il reconnoît lui-même
ailleurs, que les Grecs avoient quelquefois gravé fur
cette pierre f/J, dont la dureté n'efl en effet qu'à peu-
f ij P/erùtntjue concavi ut vifum coHigant Quorum verb corpus
extenjum ejl , eâdcm quâ fpecula ratione fuperî imagines reddunt , Nero
princeps gladiatorum pugnas fpedabat fmaragdo. Idem, ibidem.
(k) Quapropter décréta hominum iis parcitur fcalpi vetitis. Loco cit,
{/J Livre xxxvii, n* j». Il parle de deux émeraudes, fur cha-
cune defqueli'es croit gravée Amymone, l'une àt% Danaïdes , & dans
le même livre de ^ow Hiftoire Naturelle, n." ^, il rapporte la gra-
vure des émeraudes à une époque qui repond en Grèce, au règne
du dernier des Tarquins. — Selon Clément Alexandrin , le fameux
cachet de Polycrate étoit une cmeraude gravée par Théodore de
Samos. ( B, Clem. Alex. Padag. Hb. IIL ) — Lorlque Lucullus ,
ce Romain fi célèbre par fes richefles & par fon luxe, aborde à
Alexandrie , Ptolomée occupé du foin de lui plaire , ne trouve
rien de plus précieux à lui offrir qu'une émeraude fur laquelle éioit
gravé le portrait du Monarque égyptien. Plut, in LuculL
\
D£s Minéraux. 507
près égale à ceiie des belles agates ou du criflal de roche.
Les Anciens attribuoient auffi quelques propriétés
imaginaires à i'émeraude; ils croyoient que fa couleur
gaie la rendoit propre à chaffer la triflcfTe, & faifoit
difparoîire les pbantômcs mélancoliques, appelés mûuvûis
efprits par le vulgaire. Ils donnoient de plus à l'éme-
raude, toutes les prétendues A'crtus des autres pierres
précieufes contre les poifons & différentes maladies :
feduits par l'éclat de ces pierres brillantes, ils s'étoicnt
plu à leur imaginer autant de vertus que de beauté ; mais
au phyfique comme au moral , les qualités extérieures les
plus brillantes ne ibnt pas toujours l'indice du mérite
le plus réel ; les émxraudcs réduites en poudre & prifes
mtcrieurement , ne peuvent agir autrement que comme
des poudres vitreufès , aclion fans doute peu curative,
& même peu falutairc : &. c'efl avec raifon que l'on a
rejeté du nombre de nos remèdes d'ufage, cette poudre
d'émcraude & les cinq fragmens précieux , autrefois fi
fameux dans la Médecine galénique.
Je ne me fuis (i fort étendu fur les propriétés réelles
& imaginaires de Témeraude, que pour mieux démontrer
qu'elle étoit bien connue des Anciens, & je ne conçois
pas comment on a pu de nos jours révoquer en doute
l'exiftence de cette pierre dans l'ancien continent, &
nier que l'antiquité en eût jamais eu connoi fiance ; c'efl
cependant i'afiertion d'un Auteur récent (m) ^ qui prétend
(m) ' M. Diitens.
Sff ij
5o8 Histoire Naturelle
que les Anciens n'avoient pas connu l'émeraucle, fous
prétexte que dans ie nombre des pierres, auxquelles
ils ont donné ie nom de JmaragJus, plulieurs ne font
pas des émeraudes ; mais il n'a pas penfé que ce mot
fmarûgJuSj étoit une dénomination générique pour toutes
ies pierres vertes , puifque Pline comprend fous ce nom,
des pierres opaques qui femblent n'être que des prafès
ou même des jafpes verts ; mais cela n'empêche pas
que la véritable émeraude ne foit du nombre de ces
fmarûgdes des Anciens : il efl même affez étonnant que
cet Auteur, d'ailleurs très-eflimable & fort inflruit, n'ait
pas reconnu la véritable émeraude aux traits vifs &
brillans, &. aux caractères très - diflin6lifs fous lefquels
Pline a fu la dépeindre. Et pourquoi chercher à atténuer
la force des témoignages en ne les rapportant pas exadte-
ment \ par exemple , l'Auteur cite Théophrafte comme
ayant parlé d'une émeraude de quatre coudées de Ion*
gueur, & d'un obélifque d'émeraude de quarante cou-
dées ; mais il n'ajoute pas que le Naturalifte Grec,
témoigne fur ces faits un doute très-marqué, ce qui
prouve qu'il connoiffoit affez la véritable émeraude
pour être bien perfuadé qu'on n'en avoit jamais vu de
cette grandeur; en effet, Théophrafte dit en propres
termes, que \ émeraude ejl rare & J^^ fe trouve jawais en
grand volume (n) , « à moins, ajoute-t-il, qu'on ne croie
(n) tçi h cr»ri'ct, xa} -rà /iiyt-^oç ^ /Afya'^H. De lapid. pag. Sj,
DES Minéraux. ^09
aux Mémoires Egyptiens, qui parient d'émeraudes de «
quatre &. de quarante coudées : » A'Iûis ce font cliofes,
continue-t-il, qu'il faut laijjer fur leur bonne foi (o) ; &
à l'égard de ia colonne tronquée ou du cippe d'éme-
raude du temple d'Hercule à Tyr, dont Hérodote lait
au/Ti mention , il dit que c'efl fans doute nnç. faufle
émcraude (p). Nous conviendrons, avec M. Dutens ,
que des dix ou douze fortes de fmaragdes, dont Pline
fait l'énumération, la plupart ne font en effet que de
fauifes émeraudes ; mais il a dû voir comme nous ,
que Pline en diflingue trois comme fupérieures à toutes
les aiures (q) . 11 efl donc évident que dans ce grand
(o ) Atque liœc quidevi ita ab ipfis referuntur. De lapid. pag. 87.
(p) T^ifi forù pjeudofmaragdus fit. Ibidem.
( q ) La première eft l'émeraude nommée par les Anciens, pierre
de Scythie , ôc qu'ils ont dit être ia plus belle de toutes. La féconde
qui nous paroît être auffi une émeraude véritable ei\ Ja badrianne ,
à laquelle Pline attribue la même dureté & le même éclat qu'à
Témeraude fcythique , mais qui , ajoute-t-il , efl: toujours fort petite.
La troifième qu'il nomme émeraude de Copias , & qu'il dit être en
morceaux aflez gros , mais qui ell moins parfaite , moins tranfj arenie
& n'ayant pas le vif éclat des deux premières. Les neuf autres lories
étoient celles de C'/^^^r^, d'Ethiopie y d'Herminie, de Perfe , de Médie ,
de V Atiique , de Lacédémone , de Cartfiage , &. celle d'Arabie, nommée
Cholus.. La plupart de celles-ci , dilent les Anciens eux-mêmes , ne
méritoient pas le nom d'énieraudes , & n'étoient, iuivant i'expreiîion de
Théophralle , que de faufTes émeraudes, pfeudofmaragdi , n."' 45 &. 4^.
On les trouvoit communéjnent dans les environs des mines de cuivre ,
circonftance qui peut nous les faire regarder comme des Jîuors verts,
ou peut-être même des malachites.
jio Histoire Naturelle
nombre de pierres auxcjiielles les Anciens donnoient le
nom générique de fmaragdcs , ils avoient néanmoins
très-bien fu diftinguer & connoître l'cmeraiide véritable
qu'ils cara(5tcrirent, à ne pas ^'y méprendre, par fa couleur,
fa tranfparence & fon éclat (r) . L'on doit en efTct ia
fcparcr &. la placer à une grande diftance de toutes les
autres pierres vertes, telles que les prafcs, Jcs fluors
verts, les malacbites, & les autres pierres vertes opaques
de la claffe du jafpe, auxquelles les Anciens appliquoicnt
improprement & génériquement le nom de fmaragdes^
Ce n'étoit donc pas d'émcraudc, mais de quelques-
uns de ces faux &. grands fmarûgdes, qu'étoient faites
les colonnes & les flatues prétendues d'émeraude dont
parle l'Antiquité (^f), de même que les très - grands
vafes ou morceaux d'émeraudes que fon montre encore
aujourd'hui dans quelques endroits , tels que la grande
jatte du tréfbr de Gcnes (t) , la pierre verte pe/ànt
(r) Voyez ThéophraQe , n' ^^; & Pline, lïv. XXXVII, uf i 6 .
(f) Telle étoit encore la rtatue de Minerve, faite d'c'meraiide ,
ouvrage fameux de Dipœnus & Scyllis. V. Jun. dt Piél. vet.
( î) M. de la Condaniine qui s'eft trouve à Gènes avec M." les
princes Corfini, peiiis-neveux du Pape CJcnient XII , a eu par leur
moyen occafion d'examiner attentivement ce vafe à la lueur d'un
flambeau. La couleur lui en a paru d'un vert très-fbnce' ; il n'y
aperçut pas la moindre trace de ces glaces, pailles, nuages & autres
défauts de tranfparence fi communs dans les émeraudes & dans toutes
les jMerres prc'cieufes un peu groflcs, même dans le criftal de roche,
iu^is il 7 dirtingua très-bien plufieurs petits vides femblables à des
DES Minéraux. jh
vingt-neuf livres , donnée par Charlemagne , au couvent
de Reichenau près Confiance (^uj, ne font que des primes
ou des prafes , ou même des verres fadices : or comme
ces émcraudes fuppofées ne prouvent rien aujourd'iiui
contre l'exiflence de la véritable émeraude, ces mcmcs
erreurs dans l'Antiquité ne prouvent pas davantage.
D'après tous ces faits, comment peut-on douter de
l'exiflence de rémeraude en Italie, en Grèce & dans les
autres parties de l'ancien continent avant la découverte
buHes d'ail-, de forme ronde ou oblongue, telles qu'il s'en trouve
' communément dans les criflaux ou verres fondus , foit bbncs , foit
colorés
Le doute de M. de la Condamine fur ce vafe foi-di(ant d'cmeraude
n'efl: pas nouveau. II eft , dit-il, clairement indique par les exprefîions
qu'employoit Guillaume , Archevêque de Tyr , il y a quatre ficelés,
en difant qu'j la pr'ife de Céfarée , ce vafe échut pour une grande
fomme d'argent aux Génois ^uî le crurent d' émeraude & qui le montrent
encore comme tel & comme miraculeux aux voyageurs. Au refte , continue
l'auteur , il ne tient qu'à ceux à qui ces foupçons peuvent déplaire ,
de les détruire s'ils ne font pas fondés. Alémoires de l'Académie
des Sciences , année i yyj , pages ^40 & fuiv.
(u) On me montra ( à l'abbaye de Reicheneau près de Confiance)
une prétendue émeraude d'une prodigieufe grandeur ; elle a quatre
côtés inégaux dont le plus petit n'a pas moins de neuf pouces &
dont le j)lus long a près de deux pieds , fon épailTeur efl: d'un
pouce, & fon poids de vingt-neuf livres. Le Supérieur du couvent
J'eflime cinquante mille florins; mais ce prix fe réduiroit à bien peu,
fi , comme je le préfume , cette émeraude n'étoit autre choie qu'un
fpath fluor tranfparent d'un alTez beau vert. Lettres de AL Vdliani
Cûxe , fur l'état de la Suijfe , page 21»
512 Histoire Naturelle
du nouveau! comment d'ailleurs fe prêter à la fup-
pofition forcée que la Nature ait ré/èrvé exclufivement
à l'Amérique cette produdtion qui peut fe trouver dans
tous les lieux où elle a formé des criflaux ! &. ne devons-
nous pas être circonfpedls lorfqu'il s'agit d'admettre des
faits extraordinaires & ifolés comme le feroit celui-ci î
mais indépendamment de la multitude des témoignages
anciens, qui prouvent que les émeraudes ctoient connues
& communes dans l'ancien continent avant la décou-
verte du nouveau , on fait par des obfervations récentes
qu'il fe trouve aujourd'hui des émeraudes en Alle-
magne (xj j, en Angleterre, en Italie: & il feroit bien
étrange , quoiqu'en difent quelques Voyageurs , qu'il
n'y en eût point en Afie. Tavernîer &l Chardin ont
çcrit que les terres de l'Orient ne produifbient poinc
d'émeraudes, &. néanmoins Chardin, relateur véridique,
convient qu'avant la découverte du nouveau monde,
les Perfans tiroient des émeraudes de l'Egypte , & que
leurs anciens Poètes en ont fait mention (y) ; que de
fon
■^-^— , ■ I . . I I , Il III -Il I ■ I - I in ^ I ■
( X ) II eft parlé dans quelques Relations d'une taiïe d'émeraude
de la grandeur d'une tafl'e ordinaire, qui efl: confervt'e à Vienne
dans le Cabinet de l'Empereur , & que des morceaux qu'on 4
ménagés en creufaqt cette tafle, on en a fait une garniture complète
pour l'Impératrice. Voye-^ la Relation hijlorïque du voyage en Allemagne;
Lyon, I 6y6, pages ^ & i o.
(y) Sefi-couli-càn , Gouverneur d'Irivan , m'apprit que dans les
Pûëtes perfans, les émeraudes de vieille roche font appelées émeraides
d'Egypte,
DES Minéral' x. 5 \ 3
<$
fou temps on connoifToit en Pcrfe, trois fortes de ce
pierres; favoir, l'cmeraude d'Egypte qui eft la plus
belle, cnfùite les émeraudes vieilles & les émeraudes
nouvelles: il dit même avoir vu plufieurs de ces pierres,
mais il n'en indique pas les différences, & il fè con-
tente d'ajouter que quoiqu'elles foient Ôlwwq très-belle
couleur & d'un poli s\î, il croit en avoir vu d'auïïî
belles qui venoient des Indes occidentales; ceci prou-
veroit ce que l'on doit prcllimer avec raifon, c'ell que
i'émeraude fè trouve dans l'ancien continent auiTi-bicn
que dans le nouveau, & qu'elle eft de même nature en
tous lieux; mais comme l'on n'en connoît plus les mines
en Egypte ni dans l'hide, & que néanmoins il y avoir
beaucoup d'émeraudes en Orient avant la découverte
du nouveau monde, ces Voyageurs ont imaginé que
ces anciennes émeraudes avoient été apportées du Pérou
aux Philippines , & de - là aux Indes orientales & en
Egypte. Selon Tavernier, les anciens Péruviens en fai-
foient commerce (i,) avec les habitans des îles orientales
d'Egypte , & qu'on tient qu'il y en avoit une mine en Egypte ,
qui eft à piélent perdue. Voyage de Chardin, &£. Londres, i Ij S 6 ,
page 2 6 ^.
(l^) Pour ce qui eft enfin de I'émeraude , c'eft une erreur
ancienne de bien des gens , de croire qu'elfe (e trouve originai-
rement dans l'Orient , parce qu'avant la dccouvei-te de l'A-
mérique l'on n'en pouvoit autrement juger; & même encore
aujourd'hui, la plupart des Joailliers & Orfèvres, d'abord qu'ifs
voient une cmcraude de couIe.ur haute tirant fur le noir , ont
Miner ans , Tome IIL T 1 1
514 Histoire Naturelle
de l'Afie; & Chardin, en adoptant cette opinion (û) ,
accoutuirié de dire que c'eft une cmeraude orientale ; je crois bien
qu'avant que l'on eût découvert cette partie du monde que l'on
appelle vulgairement les Indes occidentales, les émeraudes s'apportoient
d'Afie en Europe , mais elles venoient des fources du royauuie
du Pérou; car les Américains, avant que nous les eufljons connus,
tralk[uoient dans les îles Philippines où ils apporfoient de l'or &
de l'argent , mais j)lus d'argent que d'or , vu qu'il y a plus de
profit à l'un qu'à l'autre , à caufe de la quantité de mines d'or qui
le trouvent dans l'Orient: aujourd'hui encore ce mcme iiégoce
continue , & ceux du Pérou pafl'ent tous les ans aux Philippines
i\ec deux ou trois vaifleaux où ils ne portent que de l'argent <3c
quelcjue peu d'émeraudes brutes , & même depuis quelques années
ils cefl'ent d'y porter des émeraudes , les envoyant toutes en Europe
par la mer du nord. L'an 1660 je les ai vu donner à vingt pour
cent meilleur marché c[u'elles ne vaudraient en France. Ces Amé-
ricains étant arrivés aux Philippines, ceux de Bengale, d'Aracan,
de Pégu , de Goa & d'autres lieux y portent toutes fortes de toiles
& quantité de pierres en œuvre, comme diamans, rubis, avec plufieurs
ouvrages d'or , étoffes de foie & tapis de Perfe; mais il faut remarquer
qu'ils ne peuvent rien vendre diredement à ceux du Pérou , mais
à ceux qui réfident aux ManiUes , & ceux-ci les revendent aux
Américains ; «Se même fi quelqu'un obtenoit la permiffion de retourner
de Goa en Efpagne par la mer du fud , il feroit obligé de donner
fon argent à quatre-vingts ou cent pour cent jufqu'aux Philippines,
fans pouvoir rien acheter , & d'en faire de mêm.e des Philippines
jufqu'à la nouvelle Efpagne, C'eft donc -là ce qui fe pratiquoit
pour les émeraudes avant que les Indes occidentales fulTent décou-
vertes ; car elles ne venoient en Europe que par cette longue voie
& ce grand tour ; tout ce qui n'étoit pas beau demeuroit en ce
pays-là, & tout ce qui étoit beau pafToit en Europe. Les fix Voyages
de Tavernier , à'c. Rouen, lyj^ , tome IV , pages 42 & fuiv.
(a) Les Perfans font luie dillinâion emre Iq^ émeraudes cojnmc
DES Minéraux, j i j
dit que les cmcraiidcs qui, de fou temps Te trouvoiciu
aux Indes orientales, en Perfe & en Egypte, venoient
probablement de ce commerce des Péruviens qui avoient
travcrré ia mer du Çud long-temps avant que les E/j)a-
gnols euflent fait la conquête de leur pays ; mais ctoit-il
liécefTairc de recourir à une fuppofition au/Ti peu fondée
pour expliquer pourquoi l'on a cru ne voir aux Indes
orientales, en t^gyinc <5c en Per/c , que des, émcraudes
des Indes occidentales ! La raifon en cil bien fnnple ;
c'efl que les émeraudes font les mêmes par-tout, & que
comme les anciens Péruviens en avoient ramaffé unç
nous faifons entre les rubis; ils appellent la plus belle émeraude
d'Egypie , la (oiie fuivante éincraude vieille , &i la troificme forte
émeraude nouvelle. Avant la découverte du nouveau iHonde , les
émcraudes leur venoient d'Egypte, plus hautes en couleur, à ce
qu'ils prctendcnt, ik plus dures que les cmeraudes d'occident. \h
m'ont fciit voir plulieurs fois de ces cmeraudes qu'ils appellent
:^enorûitd Afefri ou de JlTifrdino Tancien nom d'Egypte , & aufft
"^enoroud afvaric d'afvan ville de la Thébaïde , nommée Sycne par
les anciens Géogr,iphes ; mais quoiqu'elles me jiarulfent très-belles ,
d'un vert foncé ik d'un polt:nent fort vif, il me fembloic que j'en
avois vu d'aufii belles des Indes occidentales. Pour ce qui eft do
la dureté , je n'ai jamais eu le moyen de l'éprouver , <Sc comme
il eft certain qu'on n'entend point parler depuis long-temps des
mines d'émeraude en Egypte , il pourroit être que les xfmeraudes
d'Egypte y étoicnt apportées ])ar le canal de la mer rouge, & venoieiu
ou des Indes occidentales par \es Philippines, ou du royaume du
Pégu ou de celui de Golconde fur la côte de Coromandel , d'où
l'on tire journellement à^s émeraudes. Voyage de Chardin; AmJIerdam ,
f yi 1 i towe II , page 2y.
Ttt ij
5i6 Histoire N atv re lle
trcs-granJe qiian:itc, les E/pagnols en ont tant apporté
aux Incies orientales, cîu*eHes ont fait difparoître Je nom
^ l'origine de celles qui s'y trouvoicnt auparavant, &
que par leur entière & parfaite rcffemhlance, ces éme-
raudcs de l'Afie, ont été & font encore aujourd'hui
confondues avec les émeraudcs de l'Amérique.
Cette opinion que nous réfutons, paroît n'être que
le produit d'une erreur de nomenclature ; les Natura-
liftes récens ont donné avec les Joailliers, la dénomi-
nation de pierres orientales à celles qui ont une belle
tranfj^arence , &. qui en même temps font aftez dures
pour recevoir un poli vif; & ils appellent ^/V/r^j occi-
dentales (b) , celles qu'ils croient être du même genre,
& qui ont moins d'éclat & de dureté. Et comme
l'émeraude n'eft pas plus dure en Orient qu'en Occident,
ils en ont conclu qu'il n'y avoit point d'émeraudes
orientales, tandis qu'ils auroient du pcnfer que cette
pierre étant par-tout la même, comme le criftal, l'amé-
thyfte , &c. elle ne pouvoit pas être reconnue ni
dénommée par la différence de fon éclat & de fa
dureté.
(h) Boëce paroît être l'auteur de la diftinction des emeraudes en
orientales & occidentales: il caraderife les premières par leur grand
brillant, leur pureté & leur excès de dureté. II fe trompe quant
à ce dernier point , & de Laét s'eft de même trompé d'après
lui , car on ne trouve pas entre les emeraudes cette différence de
dureté , & toutes n'ont à peu-près que la dureté du criftal de roche.
<c
et
ce
ce
ce
<«
ce
DES Minéraux, 517
Les cmeraiides étoicnt feulement plus rares & plus
chères avant la découverte de l'Amérique; mais leur
valeur a diminué en même raifon que leur quantité s'efl
augmentée. « Les lieux, dit Jofeph Acofta, où l'on a
trouvé beaucoup d'émeraudes , & où l'on en trouvoit «
encore de Ton temps en plus grande quantité, font au
nouveau royaume de Grenade & au Pérou ; proche de
Manta & de Porto-vieil , il y a un terrein qu'on ap])elle
terres des émeraudes , mais on n'a point encore fait la
conquête de cette terre. Les émeraudes naiffent des
pierres en forme de criflaux .... j'en ai vu quelques- ce
unes qui étoient moine blanches & moitié vertes, & d'autres
tontes blanches . . . . En l'année ijSy, ajoute cet Hiflo-
rien , l'on apporta des Indes occidentales en EfjDagiae, «
deux canons d'émeraude, dont chacun pefoit pour le «
moins quatre arobes (c). » Mais je foupçonne avec
raifon que ce dernier fait efl exagéré ; car Garcilaffo
dit que la plus groffe pierre de cette efJDèce, que les
Péruviens adoroient comme la Déeffe-mère des éme-
raudes, n'étoit que de la groffeur d'un œuf d'autruche,
c'eft - à - dire , d'environ fix pouces fur fon grand
diamètre (d) : &. cette pierre-mère des émeraudes n'étoit
(c) Hiftoire Naturelle des Indes, par Acofta; Paris , i6 oo ,
page j j 7 & fuiv,
/d) Hiftoire des Incas , tome I. — Du temps des Rois Incas,
011 ne trouvoit dans le Pérou que des turquoifes , des émeraudes
& du criftal fort net, mais que les Indiens ne favoient pas niettrs
5i8 Histoire Naturelle
peut - ctre el!e - même qu'une prime crcmerauJc qui,
comm.e la prime cl'améth) fie , n'cft qu'une concrétion
plus ou moins confufe de divers petits canons ou criflaux
de ces pierres. Au refte, les primes d'émeraude foiu
communément fort nuageufes, &. leur couleur n'eft pas
d'un vert pur , mais mélangée de nuances jaunâtres :
quelquefois néanmoins cette couleur verte efl auiTi
franclîc dans quelques endroits de ces primes que dans
l'émcraude même , & Boëcc remarque fort bien que dans
en œuvre. Les eineiaudes viennent dans les mojuagnes qu'on appelle
A'innta , dépendantes de Puerto - V'iejo, II a été impoflible aux
Efpagnois , quelque peine qu'ils fe foient données , de découvrir
là mine; ainfi l'on ne trouve prefque plus d'émeraudes dans cette
province qui fourniflbit autrefois Jes plus belles Je cet empire. On.
en a apporte cependant une fi grande quantité en Efpagne, qu'on
ne les eftime plus. L'émeraude a befoin de fe mûrir comme le
fruit; elle commence par être blanche, enfuite elle devient d'un vert-
obfcur, & commence })ar fe rendre parfaite par un de fes angles
qui fans doute regarde le foleii levant , & cette belle coulçm Ce
répand enfuite par toute fon étendue. J'en ai vu autrefois dans
Cufco d'auHî groOes que de petites noix , parfaitement rondes ôc
percées dans le milieu ; les Indiens les préféroient aux turquoifes.
Ils coano'iiCoïem les perles, mais ils n'en faifoient aucun ufage , car
les Incas ayant vu la peine «5c le danger avec lefquels on les tiroit
de la mer , en défendirent l'ufage , aimant mieux conferver leurs
fujets qu'augmenter leurs richeflès. On en a pêche une fi grande
quantité qu'elles font devenues conununes. Le P. Acofla dit qu'elles
étoient autrefois fi recommandables qu'il n'étoit permis qu'aux "Roï^
& à leur famille d'en porter, mais qu'elles font aujourd'hui fi
communes que les Nègres en ont des chaînes & des colliers. HiJIoirç
fffs Incas ; Paris , 1 7^^ , tome II , pages 2S ^ à" fuiv.
DES Minéraux. 519
un morceau de prime nébuleux & fans éclat (e) , il fe
trouve fouvent quelque partie brillante, qui étant enlevée
& taillée , donne une vraie & belle émeraude.
II fèroit afTez naturel de pcnfer que la belle couleur
verte de l'émeraude lui a été donnée par le cuivre ;
cependant M. Demeftc dit (f): « Que cette pierre
paroît devoir fa couleur verte au cobalt, parce qu'en
fondant des émeraudes du Pérou avec deux parties de
verre de borax, on obtient un émail bleu ». Si ce fait
fe trouve confiant & général pour toutes les émeraudes,
on lui fera redevable de Tavoir obfervé le premier, &
dans ce cas on devroit chercher, & on pourroit trotiver
des émeraudes dans le voifmage des mines de cobalt.
Cependant cet émail bleu que donne l'émeraude
fondue avec le borax, ne provient pas de l'émeraude
feule; car les émeraudes qu'on a expofées au miroir
ardent ou au feu violent de nos fourneaux (g) , com-
mencent par y perdre leur couleur verte; elles deviennent
friables, & finirent par fe fondre fans addition d'aucun
c<
(C
(e) II dit de prafe , mais il efl: clair que fa prafe eft la prime :
Prafius mater fmaragdï muliis putatur & non ïmnuritb , quod altqvandb
m eâ repenatur et'iamfi non feniper ; vam qnœ partes viriJiores nhfgue
fûvedine & perfpicuœ in prafio reperiuntur , fmaragdi rite appellari
pûjfunt , ut illi quorum jia\edo aurea ejl , chryfoprafii, Geimn. & fapid.
hill. pag. 2,3.
(f) Lettres de M. Demefte , tome I , page 426,
(ë) '^oyez l'article des Pierres préçieufss dans l'Encyclopédie.
520 Histoire Naturelle
fondant , &. fans prendre une couieur bleue ; ainfi l'éma
bleu, produit par la fufion de i'émeraude au moyen du
borax, provient peut-être moins de cette pierre que du
borax même qui, comme je l'ai dit, contient une bafè
métallique: &l ce que cette fufibilité de Têmeraude nous
indique de plus réel, c'cft que fa fubftance quartzeufe
efl mêlée d'une certaine quantité de {c\\oy\, qui la rend
plus fufible que celle du criflal de roche pur.
La pierre à laquelle on a donne le nom A'émerauJe
duBrefd, prcfente beaucoup plus de rapport que I'éme-
raude ordinaire avec les fchorls ; elle leur refTemblc
par la forme , & fe rapproche de la tourmaline par Tes
propriétés éle6triques ffi); elle efl plus pefànte <Sc d'uu
vert plus obfcur que I'émeraude du Pérou ^ij ; ià couleur
efl à peu-près la même que celle de notre verre à bou-
teilles, fes criflaux font fortement flriés ou canelés dans
leur longueur, & ils ont encore un autre rapport avec les
criftaux du fchorl par la pyramide à trois faces qui les
termine; ils croiffent, comme tous les autres criflaux,
contre les parois & dans les fentes des rochers vitreux;
on ne peut donc pas douter que cette émeraude du
Brefd ne foit, comme les autres émeraudes, une ftalac-
tite vitreufe , teinte d'une fubflance métallique , &. mêlée
(II) Voyez la Lettre de M. Demefte , tome 1 , page 42-/.
(i) La pefanteur fpécifîque de I'émeraude du Brefil eft de
31 ^j;, & ceiie de fetnerau^ie du Pérou n'eil que de 27755.
d'une
DES Minéraux, 521
d'une grande quantité de fchorl qui aura confidérabfe-
ment augmente fa pefànteur; car la denfité du fcliorl
vert efl plus grande que celle de cette émerautle {l:J;
ainfi c*efl au mélange de ce fchorl vert qu'elle doit
fà couleur, fbn poids & fa forme.
L'émeraude du Pérou , qui efl l'émcraude de tout
pays , n'efl qu'un criftal teint &: mêlé d'une petite
quantité de fchorl qui fuffit pour la rendre moins
rcfractaire que le criflal de roche à nos feux; il faudroit
eiïayer fi i'émeraude du Brefil, qui contient une plus
grande quantité de fchorl, <Sl qui en a pris fon plus
grand poids & emprunté fa figuration , ne fe fondroit pas
encore plus facilement que I'émeraude commune.
Les émeraudes, ainfi que les améthifles violettes ou
pourprées, les crillaux-topazes , \qs chryfolites dont \c
jaune efl mêlé d'un peu de vert, les aiguës - marines
verdâtres ou bleuâtres, le faphir d'eau légèrement teint
de bleu, le feld-fpath de Ruffie, &: toutes les autres
pierres tranfparentes que nous avons ci-devant indiquées,
ne font donc que des criflaux vitreux , teints de ces
diverfes couleurs par les vapeurs métalliques qui Ce font
rencontrées dans le lieu de leur formation, & qui {c^
font mêlées avec le fuc vitreux qui fait le fond de
leur effence; ce ne font que des criflaux colorés dont
(k) La pefànteur fpécifique du fchorl vert efl: de 34J25), &
celle de I'émeraude du BrefiI de 315;;.
Minéraux, Tome IIL Uuu
522 Histoire Naturelle
la fiibflaiice, à l'exception de la couleur, efl la mcmc
que celle du criflal de roche pur, ou de ce criflal mêlé
de feld-fpath &. de fchorl. On ne doit donc pas mettre
ks émeraudes au rang des pierres précieufcs , qui par
la denfitc, la dureté & rhomojnjcnéité , font d'un ordre
fupérieur, & dont nous prouverons que l'origine efl
toute différente de ccWc des émeraudes & de toutes les
autres pierres tranfî^arentes , vitreufes ou calcaires.
TA' ii-O-a ijt:~-j*l i-^-M '
DES Minéraux. 523
u ■ ,-ii-«- ■ » ■ n ■■» il " I 1 I r'JTTT
P É R I D 0 T.
Il en cfl du PériJot comme Je l'émeraucle du Brefil;
il tire également fon origine du fchorl, & ia même
différence de denfitc qui fe trouve entre l'cmeraude
du Brefd & les autres cmeraudes , fe trouve auffi entre
la chryfblite &. le péridot ; cependant on n'avoit jufqu'ici
diflingué ces deux dernières pierres que par les nuances
des couleurs jaunes & vertes dont elles font toujours
teintes. Le jaune domine fur le vert dans les cîiryfolites ,
& le vert domine fur le jaune dans les pcridots , <Sc ces
deux pierres ofil-ent toutes les nuances de couleurs
entre les topazes, qui font toujours purement jaunes &
ies émeraudes qui font purement vertes. Mais les chry-
folites difîèrent des péridots par le cara6tère elTentiel
de la denfité ; le pcridot pèfe fpécifiquement beaucoup
plus (n) ; Si. il paroît par le rapport des peraïueurs
refpedives, que la chryfblite, comme nous l'avonë dit,
eft un extrait du quartz , un criftal coloré , & que les
péridots, dont la pefanteur fpécifique eft bien plus
faj La pefanteur fpccifique de la chryfolite du BrefiI efl: de
^6()z^ , & celle de la chryfolite de l'ancien continent efl: de 2782 i ;
ce qui ne s'éloigne pas beaucoup de fa pefanteur 26548 du criflal
ôi. de celle de la topaze de Bohème, qui efl de 26541. Voyei
la Table de M, Bnjjon.
U u u ij
524 Histoire Natu relle
grande ( l) ) , ne peuvent provenir que des fchorfs
également denfes. On doit donc croire que les pcridots
font des extraits du fchori , tandis que les chr^foiites
font des criftaux du quartz.
Nous connoiiïbns deux fortes de péridots, l'un qu'on
nomme ovicmal , & dont la denfité efl confidcrablement
plus grande que celle du pérfdot occidental ; mais nous
connoiiïons auffi des fchorls dont les denfitcs font dans
le même rapport ; le fchori criflallifé correfpond au
péridot occidental , & le fchori fpathiquc au péridot
oriental , & même cette denfitc du pcridot oriental n'ell
pas encore au/fi grande que celle du fchori vert (c) ;
& ce qui confirme ici mon opinion, c'efl que les péri-
dots fe criilallifent en prifmes ftriés comme la plupart
des fchorls; j'ignore à la vérité, h ces pierres font
fufibles comme les fchorls , mais je crois pouvoir le
pré/limer, &. j'invite les Chimifles à nous l'apprendre.
M. l'abbé de Rochon qui a fait un grand nombre
d'expériences fur la réfraélion des pierres tranfparentes,
m'a afluré que le péridot donne une double réfraélion
beaucoup plus forte que celle du cridal de roche , &
- —
(b) La pefanteur fpécifique du péridot occidental efl de 30^89 ,
& celle du fchori criAailifé eft de 30926. Voye^la Table de M.
Brïjfon,
(c) La pefanteur fpécifique du péridot oriental efi de 33548 ,
celle du fchori fpathrque ert de 33852, & celle du fchori olivâtre
ou vert ea de y^yx^. Ibidem.
DES Minéraux, 52 j
moindre que celle du criftal d'Iilande ; de plus , le
péridot a, comme le cridal de roche, un fens dans
lequel il n'y a point de double rélraclion : & pui/qu'il
y a une différence encore plus grande dans les deux
réfradions du pcridot que dans celles du criflal, on
doit en conclure que fà fubflance eft compofée de
couches alternatives d'une denfité plus différente qu'elle
ne l'cH dans celles qui compofent le crifîal de roclie.
SAPHIR DU BRESIL.
Une autre pierre tranfparente qui, comme le péridot
ÔL l'émeraude duBrefd, nous paroît provenir du fchorl,
efl celle qu'on a nommée Saphir du Brefil ^ & qui ne
diffère que par fà couleur bleue, de l'émeraude du
même climat ; car leur dureté <3c leur denfité {owi à
très-peu-près égales (a) , & on les rencontre dans les
mêmes lieux. Ce fapliir du Brefd a plus de couleur &
un peu plus d'éclat que notre faphir d'eau, & leur
denfité refj)e6tive eft en même raifon que celle du,
fclîorl au quartz: cç.'i^ deux faphirs font des extraits ou
flaladlites de ces verres primitifs, & ne peuvent ni ne-
doivent être comparés au vrai fàphir dont la denfité efl
d'un quart plus grande, & dont l'origine efl aufî] très-
différente.
(a) La pefanteur ipccifique du faphir du Brefil eft de 31307, &
celle de l'émeraude du Brefil eft de 3 1 5 j ; . Tables de M, Brijfon,
J26 Histoire Natu relle
ŒIL DE CHAT NOIR
OVi NOIRÂTRE,
]\ ous avons rapporte au feld-fpath l'œil de cliat gris,
i'œil de cl\r.t jaune & l'œil de chat mordoré , parce que
kur denfitc eft à très-peu-prcs la même que celle de ce
verre primitif; mais la pierre à laquelle on a donné Je
nom à' œil de chat noirâtre efl beaucoup plus dcnlé que
les trois autres : fa pefanteur fpécifique approche de celle
du fchorl violet duDauphiné (a).
Toutes les pierres vitreufès & tranfparemes dont les
pefanteurs fpécifiques fe trouvent entre 2^ & 28 mille,
font des ftaladites du quartz & du feld - fpaih dcÇç^nek
les denrucs font auffi comprifes dans les mêmes limites;
& toutes les pierres vitreufes & tranfparentes dont les
pefanteurs fpécifiques font entre 30 & 35 miile, doivent
(è rapporter aux fchorls defquels 'es denfités font aufli
comprifes entre 30 &. 35 mille, relativement au poids
çje l'eau fuppofce 10 mille (b).
Cette manière de juger de la nature des flalaélitcs
^a) La pefanteur fpécifique du fchorl violet de Dauphiné eft
de 32956 ; celle 4e l'oeil -de -chat noirâtre, de j^jpj. Tables de
M' Briffon.
/hj Les pefanteurs fp«cifiques des fchorls font: fchorl criftalfifc,
50926, fchorl violet du Dauphiné, 32956; fchorl fpathique |
2^852; fchorl vejî on olivâtre, 3452^. Jbi<;lfm%
DES Minéraux. 527
Criflallifées & de les clafTer par le rapport cfe leur denfité
avec celle Jes matières primitives dont elles tirent Iclî
origine, me paroît, farts comparaifon, la plus diflinde
& la plus certaine de toutes les méthodes, & je m'ctonne
que jufqu'ici elle n'ait pas été raifie par les Naturalifîes ,
car la denfitc eft le caradère le plus intime, & pour ainfi
<lire, le plus fùbflantiel que puiffe ofirir la matière;
c'efl celui qui tient de plus près à Ton eflence , & duquel
dérivent le plus immédiatement la plupart de fes pro-
priétés fecondaires. Ce caradère difiindif de la denfité
ou pefanteur fj:)écifique cfl fi bien établi dans les métaux,
qu'il fert à reconnoître les proportions de leur mélange
jufque dans l'alliage le plus intime : or ce principe fi
fur à l'égard des métaux, parce que nous avons rendu
par notre art leur fubflance homogène, peut s'appliquer
de même aux pierres criflallifées qui font les extraits
les plus purs & les plus homogènes des matières pri-
mitives produites par la Nature.
528 Histoire Naturelle
B É R I L.
I j A couleur du pcriclor efl un verc mclé de jaune,
celle du bcril efl un vert mêlé de bleu, & la nature
de ces deux pierres nous paroît être la même. Les
Lapidaires ont donné au Bcril le nom (Y aiguë - vmr'me
orientale, & cette pierre nous a été afTez bien màxq^ét par
les Anciens: « Le béril , difent-ils, vient de l'Inde, &
on le trouve rarement ailleurs : on le taille en hexaèdre
& à plufîcurs faces, pour donner par la réflexion de
la lumière plus de vivacité à fa couleur, & un plus
grand jeu à fon éclat , qui fans cela eft foible.
On diflingue plufieurs fortes de bérils : les plus
cflimés font ceux dont la couleur efl d'un vert de mer
pur , enfuite ceux qu'on appelle chryfobcrils , qui font
d'un vert un peu plus pâle avec une nuance de jaune-
doré .... Les défauts ordinaires à ces pierres font les
filets & les taches : la plupart ont auffi peu d'éclat ; les
Indiens néanmoins en font grand cas à caufè de leur
grandeur (a)» » Il n'efl pas rare en effet de trouver
d'affez grandes pierres de cette efj)cce, & on les diftin-
guera toujours de i'aigue-marine qui ne leur reffemble
que par la couleur , & qui en diffère beaucoup , tant
(a) Pline, //>. XXXVII , chap. j.
par
DES Minéraux,
S^9
par la dureté que par la dendté (b). Le béril, comme
le péridot , tire Ton origine des fchorls, Si l'aigue-marine
proviem du quartz ; c'efl ce qui met cette grande diffé-
rence entre leurs denfitcs , & quoique le béril ne foit
pas d'une grande dureté, il eft cependant plus dur que
l'aigue-marine, & il a par confcquent plus d'éclat &
de jeu, fur-tout à ia lumière du jour; car ces deux pierres
font fort peu d'effet aux lumières.
(h) Ija pefanteur fpécifique du béril ou aiguë - marine orientale
eft de 3 54-89 j tandis que celle de l'aigue-raarjne occidentale n'eft
que de 2722.9. Tables de M. Bnjfon.
Minéraux , Tome IIL
Xx
53
Histoire Natu rëlle
TOPAZE ET RUBIS DU BRESIL.
Il fe trouve au Brefii, des pierres tranfj^arentes d'un
rouge-clair, <Sc d'autres d'un jaune très-foncé, auxquelles
on a donné les noms de Ritùis &. Topaies, quoiqu'elles
ne reflemblent que par la couleur aux rubis & topazes
d'Orient, car leur nature & leur origine font toutes
différentes : ces pierres du Brefd font des criflaux vitreux
provenant du fchorl auquel ils reffemblent par leur forme
de criflallifation (a): elles fe caffcnt tranfverfalement
comme les autres fchorls, leur texture eft femblable,
& l'on ne peut douter qu'elles ne tirent leur origine
de ce verre primitif, ])uifqu'elles fe trouvent, comme
les autres crillaux, implantés dans les rocbers vitreux.
Ces topazes & rubis du Brefd diffèrent effentiellement
des vraies topazes & des vrais rubis, non - feulement par
ce caraélère extérieur de la forme, mais encore par toutes
les propriétés effentielles , la denfité, la dureté, l'homo-
généité & la fufd^ilité. La pefanteur Spécifique de ces
pierres du Brefil (h), efl fort au-deffous de celle de
(a) La topaze du Brefil eft en prifmes ftries ou caneles à
l'extérieur comme ceux de lemeraude du même pays, & ces prilmes
font ordinairement furmonte's d'une pyramide à l'extrémité qui pointe
en avant au foi tir du rocher auquel leur bafe efl adhérente; cette
flrudure eft conllante , mais le nombre de leurs faces latérales
varie prefque autant que celles des autres fchorls.
(b) La pefanteur fpécifique du rubis d'orient eft de 42838,
DES AI I N É R A U X. 531
ces pierres d'Orient: leur dureté, quoiqu'un peu plus
grande que celle du criflai de roche , n'approche pas
de celle de ces pierres prccieufes; ceJles-ci n'ont, comme
je l'ai dit, qu'une Imiple Sl forte réfraction, au lieu
que ces pierres du Bredl donnent une double & plus
foible réfraélion ; enfin elles font fiifibles à un feu
violent , tandis que le diamant & les vraies pierres
précieufes font combuflibîes , Si. ne fe réduifcnt point
en verre.
La couleur des topazes du Brefil efl d'un jaune-
foncé mêlé d'un peu de rouge : ces topazes n'ont ni
l'éclat , ni la belle couleur d'or de la vraie topaze
orientale; elles en dilfèrent aufli beaucoup par toutes
les propriétés efieniiellcs, & fe rapprochent en tout du
péridot, à l'exception de la couleur, car elles n'ont
pas la moindre nuance de vert; elles font exadement
de la même pcfanteur fjoécifique que les pierres aux-
quelles on a donné le nom de ri/I^is du Brefil (c) : aulTi
la plupart de ces prétendus rubis ne font-ils que des
topazes chauffées (d) ; il ne faut pour leur donner la
& celle du rubis du Biefil n'eft que de 35311- La pelanteur
fpécifique de la topaze d'orient efl de 40106, & celle de la topaze
du DrellI n'efl que de 35365. Tahks de M. Bnjfun.
(c) La pelanteur fpccii^que du rubis du Brefil efl de 3531 i,
& celle de la topaze du Brefil ell de 35365. IJcm.
(d) On fait depuis long-temps que les pierres prccieufes orientales
peuvent foulTrir une très-forte aâion du feu fans que leur couleur
X XX ij
53- Histoire Natv pelle
couleur du rubis-balais , que les expofer à un feu aflez
fort pour les faire rougir par degrés; elles y deviennent
couleur de rofe, <Sc même pourprées; mais il efl très-
aifé de diflinguer les rubis naturels & fa6tices du Brefil
des vrais rubis, tant par leur moindre poids que par
leur fauffe coideur, leur double réfradion &. la foiblefTe
de leur éclat.
Ce cbangement tie jaune en rouge efl une exaltation
de couleur que le feu produit daiis prefque toutes les
pierres teintes d'un jaime- foncé: nous avons dit, à
l'article des marbres , qu'en les chauffant fortement
foit altérée , & qu'au contraire les occidentales y perdent en très-
peu de temps la leur, <Sc deviennent femblables à du criftal fi elles
font traniparentes , ou d'un blanc mat fj elles font opaques ; mais
on ignoroit que la topaze du Brefil ne pouvoit être comprime dans
aucun de ces deux genres dont nous venons de parler ; elle a la
fîngulière propriété de quitter au feu la couleur jaune & d'y devenir
d'une couleur de rôle feinblabJe à celui du rubis-balais , & d'autant
plus vit que le jaune de la pierre étoit plus fale & plus foncé. Le
procédé efl des plus fimples ; il ne s'agit que de placer la topaze dans
un petit creufet rempli de cendres , & poufl'er le feu par degrés
jufqu'à faire rougir le creufet , & après l'avoir entretenu quelque
temps dans cet état , de le lai/fer s'éteindre ; quand le tout fera
refroidi, on la trouvera convertie en un véritable rubis-balais; nous
difons convertie , car il n'eft pas poffible d'apercevoir la moindre
différence entre le rubis balais - naturel & ceux-ci. C'eft ce qui
avoit porté plufieurs Joailliers qui favoient ce fecret , à en faire un
myftère, & c'efl: à M. Dumelle, Orfèvre, qui l'a communiqué à
M. Guettard, que l'Académie en doit la connoiffance. Hijloirc de
l'Académie des Sciences, année ly^y , page ^ z.
DES AI I N É R A U X. 533
lorfqu'on les polit on fait changer toutes leurs taches
jaunes en un rouge plus ou moins clair. La tonaze
tlu Brefil offre ce même changement Ju jaime en
rouge, ÔL M. de Fontanicu, l'un Je nos Académi-
ciens , obferve qu'on connoit en Bohème, im verre
fufible d'un jaune à peu-près fcmblable à celui de la
topaze du Brehl, qui lorfqu'on le fait chauffer, prend
une couleur rouge plus ou moins foncée , félon le
degré de feu qu'on lui fait fubir fej. Au refle, la topaze
du Brefd , foit qu'elle ait confcrvé fa couleur jaune
naturelle , ou qu'elle foit devenue rouge par l'adion
du feu , fe diflingue toujours aifément de la vraie topaze
& du rubis-balais, par les caradères que nous venons
d'indiquer: nous fommes donc bien fondes à les féparer
des vraies pierres prccieufcs , & à les mettre au nombre
des flalaélites du fchorl , d'autant que leur dcnfité
les en rapproche plus que d'aucun autre verre pri-
mitif (y).
Je préfume, avec l'un de nos plus favans Chimiftes,
M. Sage , que le rubis fur lequel on a fait à Florence
des expériences au miroir ardent, n'étoit qu'un rubis
du Brefd, puifqu'il eft entré en Rifion , & s'eft ramolli
au point de recevoir fur fa furface l'imprelfion d'un
fej Art d'imiter les pierres precieufes; Pans, jyyS , page 28 r
(f) La pefanteur ipccifique du fchorl vert ou olivâtre ell de
34529, &. celle du rubis du BrefiI de 3 53 11»
534 Histoire Naturelle
cachet, & qu'en même temps fa fubftance fondue aJhc-
roit aux parois du creufet : cette fufibiiité provient du
fchorl qui conftitue l'effence de toutes ces pierres du
Brefil (^) ; je dis de toutes ces pierres , parce qu'indé-
( g) C'efl auiïi le fentiment d'un de nos meilleurs obfervateurs
( M. Rome de Lide , dont l'Ouvrage vient de me tomber entre les
mains). Les topazes brutes, dit - il , qui nous arrivent du Brefil,
ne confervent ordinairement qu'une feule de leurs pyramides ,
l'autre extrémité efl ordinairement terminée par une furface plane
rhomboïdale qui elT: l'endroit de la caiïure qui fe fait aifément &
tranfverfalement. On y dillingue facilement le tifiu lamelieux de ces
criflaux. La pofition de leurs lames eft perpendiculaire à l'axe du
prifme «Se conféquemment dans une direction contraire aux flries de
la furface qui font toujours parallèles à l'axe de ce même prifme.
Souvent les deux pyramides manquent , mais c'eil toujours par des
ruptures accidentelles. L'extérieur de ces criltaux préfente des cane-
îures parallèles à l'axe.
La topaze, le rubis & le faphir du Brefil ont beaucoup de rapport
avec les Ichorls & les tourmalines parleur contexture, leur canelure,
& par la variation dans les plans du prifine & des pyramides , qui
rend fouvent leur criflallifation indéterminée.
La topaze du Brefil a rarement Ja belle couleur joncjuille de la
topaze d'orient , mais elle eft fouvent d'un jaune pâle & même
entièrement blanche.
Celle dont la couleur irès-foncce tire fur i'hyacinte ed la plus
propre à convertir par le feu en rubis du Brefil , mais il y a
auffi des rubis du Brefil naturels , fouvent avec une légère teinte
de jaune , cjue les Portugais appellent topazes rouges.
Les plus beaux lont d'un rouge clair ou de la teinte que \\n\
défigne par le nom de balais. Ceux qu'on fait en expofant au feu
DES Minéraux. 53^
pendammcnt des émeraudes , faphirs , rubis Si topazes
dont nous venons de parler, il fe trouve encore au
Brefil , des pierres blanches tranlparentes qui font de
la même eiïence que les rouges, les jaunes, les bleues
Si les vertes.
la topaze du BrefiI enfunice , font d'un rouge violet plus ou moin»
fonce.
Quant aux faphirs du BrefiI , il s'en trouve depuis fe Lieu
foncé de l'indigo jufqu'au blanc-bleuâtre.
Le tiiïii feuilleté de ces gemmes fait qu'on les taille aufll quel-
quefois de manière à produire cette réfradion de la lumière qui
caradérife les pierres chatoyantes. De-Ià le rubis chatoyant , le iàphir
œil de chat &. les chatoyantes jaunes, vertes, brunes, &c. du Brefil
& autres lieux. Crîjlallographie par M, Rome de Lijle y tome II y
pages 2 ^ ^ & fuiv.
5^
Histoire Naturelle
TOPAZE DE SAXE.
i_jA Topaze de Saxe cfl encore, comme ceiie Ju
Bref il , une pierre vitreufe que l'on doit rapporter au
fchori , parce qu'elle ell d'une den(\tc beaucoup plus
grande que la topaze de Bohème faj &l autres cridaux
quartzeux avec lefquels il ne faut pas la confondre. La
topaze de Saxe &l celle du Brefd font à très-peu-près
de la même pefantcur fpécilique (b) ^ & ne diffèrent
que par la teinte de leur couleur jaune, qui efl bien
plus légère , plus nette & plus claire dans la topaze de
Saxe ; mais dans toutes deux la denfité excède de plus
d'un quart celle du criflal de roche & du criilal jaime
ou topaze de Bohème ; ainfi par cette première pro-
priété on doit les rapporter au fchori , qui des cinq
verres primitifs cfl le plus denfe: d'ailleurs, la topaze
de Saxe fe trouve , comme celle du Brefd , implantée
dans les rochers vitreux (cj, & toutes deux font
(û) La pefanteur fpécifique de la topaze de Saxe eft de 35640,
tandis que celle de la topaze de Bohème n'eft que de 2(^541.
(bj La pefanteur fpécifique de la topaze du Brefil eft de
(c) Le fameux rocher de SchneckenJIe'm d'où l'on tire les topazes
de Saxe, eft fitué près de la vallée de Dannebers à deux milles
d'Amerbach dans le Voigtland. Crijlallographie de M. Rome de Life,
tome H , page 2 6 ^ .
fufibles ,
DES Ml N É R A U X. <^^j
fiifibles (J), comme les fchorls, à un feu violent.
Les topazes de Saxe (e), quoique d'une couleur
moins foncée que celles du Brefii, ont néanmoins diffé-
rentes teintes de jaune (f). Les plus belles font celles
d'un jaune d'or pur, & qui reffemblent par cette apca-
rence à la topaze orientale , mais elles en diffèrent beau-
coup par la denfité & par la dureté (gj : d'ailleurs,
(dj La topaze de Saxe ne fe trouve guère avec fes deux pyramides ,
parce qu'elle efl fouvent implantc'e dans la roche quartzeule où elle
a pris nai.Tance. . . . On ne les trouve jamais abfolument libres 6c
folitaires , elles font entourées à leur bafe & quelquefois même
entièrement couvertes d'une argile ircs-fine, blanche ou couleur
d'ocre , &. plus pâle en quelques endroits. Elles ont un tiflu feuilleté
& fe rompent aifément. Le prifme en eft quelquefois comme articulé
ou compofé de plufieurs pièces entées l'une fur l'autre , ainfi qu'il arrive
à la chryfolite du Brefil. Crijlallograph'ie , de AI, Rome de Life, tome II,
page z6j.
(e ) « La topaze de Saxe , dit M. Dutens , efl jaunâtre , très-
tranfparente , dure &. d'un éclat fort vif; mile au feu elle y perd ce
fa couleur «Se refle blanche & claire. . . . On trouve ces topazes «
dans le quartz ou parmi les grès crirtallifés & quelquefois entourés ce
d'un limon jaune». Page ^ ^.
(f) La topaze de Saxe varie beaucoup dià.i\s /es nuances. Celles
dont la couleur jaune efh mêlée de vert , prennent le nom de
chryfûlite de Saxe , il y en a même d'un bleu verdâire ou dont
Ja couleur tire fur celle de l'aiguë - marine ; mais leur couleur efl
communément jaunâtre & quelquefois d'un beau jaune d'or, mais
celles-ci font rares ; il y en a aufll de blanches qui ont beaucoup
d'éclat. Idem , page 26 S,
(g) La pelanteur fpécifique de la topaze orientale efl de J^oioC ^
tandis que celle de la topaze de Saxe n'efl que de 35640.
Minéraux, Tome IIL Yyy
53^ H ISrO I RE N ATU RE LLE
la lumière, en traverfant ces topazes de Saxe, fe clivi/c
& foufire une double réfraélion , au lieu que cette
réfradion ell fimple dans la vraie topaze, qui étant &
plus dénie & plus dure , a aufTi beaucoup plus d'éclat
que ces topazes de Saxe, dont le poli n'efl jamais aufli
vif ni la réfraélion au/Ti forte que dans la topaze
d'Orient.
La texture de la topaze de Saxe eft lamelleu/è, cette
pierre eft compofée de lames très-minces & très-ferrées ,
fa forme de criftallifation efl différente de celle du crifbl
de roche (hj , 6l fe rapproche de celle des fchorls ; ainfi
tout nous démontre que cette pierre ne doit point être
confondue avec la topaze de Bohème, & les autres
criftaux quartzeux plus ou moins colorés de jaune.
Et comme la denfité de cette topaze de Saxe efl à
très-peu-près la même que la denfité de la topaze du
Brefd, on pourroit croire qu'en faifànt chaufîer avec
précaution cette topaze de Saxe, elle prendroit, comme
la topaze du Brefil, une couleur rougeâtre de rubis balais ;
»< ■
f/ij Cette pierre fe trouve, entre autres endroits, dans le Voigtiand
fur le Schneckenberg près de la colline de Tanmberg à deux milles
^ Averbach où on ia voit en aflez grande abondance dans les crevaiïes
d'un roc fort dur , & elle s'y trouve mêlée avec une efpèce de
marne jaune & avec du criftal de montagne. Quant à fa texture
intérieure, elle efl compade, mais foliée Sa figure eft prifmatique
à quatre angles inégaux ; elfe eft dure & a beaucoup d'éclat.
Margraff, Journal de P hyji que , fuppU ment au mois d'Août J782,
fûges j 0 I ù" fuiv.
D E s M I N É R AU X. 5 3 (^
mais Texpérience a démenti cette préfomption ; la topaze
de Saxe perd fa couleur au feu , & devient tout-à-fait
blanche , ce qui vient fans doute de ce qu'elle n*efl
teinte que d'un jaune très-léger en comparaifon du jaune
foncé & rougeâtre de la topaze du Brefd.
GRENAT.
V^uoiQUE la pefanteur fpéeifique du Grenat excède
celle du diamant , & foit à peu-près la même que celle
du rubis & de la topaze d'Orient fa), on ne doit ce-
pendant pas le mettre au rang de ces pierres précieufes ;
s'il leur reffemble par la denfité, il en diffère par la
dureté , par l'éclat & par d'autres propriétés encore plus
eflemielles ; d'ailleurs l'origine, la formation & la com-
pofuion des grenats font très-différentes de celles des
vraies pierres précieufes ; la fubflance de celles - ci efl
homogène &l pure, elles n'ont qu'une fimple réfradion,
au lieu que la fubflance du grenat efl impure, com-
pofée de parties métalliques &. vitreufes , dont le mélange
fè manifefle par la double réfraélion & par une den-
fité plus grande que celles des criftaux & même des
diamans. Le grenat n'efl réellement qu'une pierre
(a) Pefanteur fpéeifique du grenat 41888, du grenat Syrien
40000, du rubis d'Orient 42838, de la topaze d'Orient 401 06.
Voyei les Tables de M. Brijfon.
Yyy ij
54Û Histoire Nature lle
vitreiife mêlce de métal {h); c'efl du fchorl & du
fer, Ta couleur rouge & fa fufibilité le dcmontrcnt;
il faut à la^^vcrité un feu violent pour le fondre.
M. Pott e(l le premier qui l'ait londu fans intermède
& fans addition; il fe rcduii en un émail brun &
noirâtre.
Le grenat a d'ailleurs beaucoup de propriétés com-
munes avec les fclîorls de féconde formation ; il ref-
fèmblc par fa compofition aux émeraudcs & faphirs du
Brefd (cj j il efl, comme le fchorl, fufible fans addition;
ie grenat & la plupart des fchorls de féconde formation
font mêlés de fer, <5c tous Jes grenats en contiennent
une plus grande quantité que les fchorls ; plufieurs même
agiffent far l'aiguille aimantée : ce 1er contenu dans les
grenats eft donc dans fon état métallique , comme le
fable ferrugineux qui a confervé fon magnétifme, &
i*on ne peut douter que leur grande pefanteur ne
provienne & ne dépende de la quantité confidérable de
(b) Certains Chimiftes ont penfé que la couleur rouge du grenat
venoit de l'or & de l'ctain , parce que l'on contrefait les rubis &
les grenats au moyen d'un précipité d'or par l'étain ; mais on a
démontré depuis, que les grenats ne contiennent que du {et Se
point du tout d'or ni d'ctain. Voye-^ le Diûionna'ire de Chimie de
AI. Alûcquer , nrticle Mines, page 6^0,
(c) La plupart à^i crillailifations du grenat femblent prouver que
{qs molécules (oi\t rhomboïdales, de même qiie celles des fchorls &
des pierres prccieufes du lîréfil. Lettres de AI, Demcjle , tome /,
DES Minéraux, 5^1
fer qui efl entre clans la compofition de leur fubftance.
Les diitérentes nuances de leur couleur plus ou moins
rouge, &. de leur opacité plus ou moins grande, en
dépendent aufli ; car leur tranfparence efl d'autant plus
grande qu'ils contiennent moins de fer , & que les
particules de ce métal font plus atténuées ; le grenat
Syrien, qui efl le plus tranfj^arent de tous, efl en même
temps le moins pefant , & néanmoins la quantité de
fer qu'il contient efl encore affez grande pour qu'il
agiffe fur l'aiguille aimantée.
Les grenats ont tant de rapports avec les fclioris,
qu'ils paroiffent avoir été produits enfèmWe & dans
les mêmes lieux ; car on y trouve également des maffes
de fchorl parfemées de grenats , & des maffes de grenat
parfemées de fchorl fd): leur origine & leur formation
paroiffent être contemporaines & analogues ; ils fe
trouvent dans les fentes des rochers graniteux, fchifleux,
micacés <Sc ferrugineux, en forte que le grenat pourroit
être mis au nombre des vrais fchorls, s'il ne contenoit
pas une plus grande quantité de fer qui augmente fà
denfité de plus d'un (ixième; car la pefanteur fpccihque .
du fchorl vert, le plus pefant de tous les fchorls, n'efl
(d) On voit entre Faiflriiz & Cornowitz, des morceaux défachés
de fchorl vert fpathique , cjui renferment de grands grenats rouges;
quelques-uns de ces morceaux de fchorl font écailleux &. d'un tiHli
micacé. Lettres fur la Alinéralogie , par AL Ferber j à^c. traduites
par M. le Baron de Diétriçh , pages p & i q.
542 Histoire Naturelle
que de 34529, tandis que celle du grenat Syrien, Je
moins pefant & le plus pur des grenats, efl: de 40000.
Les grenats les plus opaques contiennent jufqu'à vingt-
cinq & trente livres de fer par quintal, & les plus
tranfparens en contiennent huit ou dix , c'eft - à - dire ,
toujours plus que les fchorls les plus opaques &. les
plus pcfans : cependant il y a des grenats qui ne font
que très-peu ou point fenfibles à Taétion de J'aimant,
ce qui prouve que le fer dont ils font mélanges, étoit
réduit en rouille , & avoit perdu fon magnétifme lorf-
qu'il efl entré dans leur compofition.
Ainfi le fer donne non-feulement la couleur, mais
la pefanteur aux grenats ; on pourroit donc les regarder
comme des ftaladites de ce métal , & nous ne Jes
rapportons ici à celles du fchorl qu'à caufe des autres
propriétés qui leur font communes , & des circonflances
de leur formation qui femblent être les mêmes. La forme
des grenats varie prefque autant que celle des fchorls
de féconde formation ; leur fuhflance vitreufe efl tou-
jours mêlée d'une certaine quantité de particules ferru-
gineufes, & les uns &l les autres font attirables à l'aimant,
iorfque ces particules de fer font dans leur état de
magnétifme.
Les grenats, comme les fchorls de féconde forma-
tion, fe préfentcnt quelquefois en affez gros groupes,
mais plus fouvent en criflaux ifolés & logés dans les
fentes &. cavités des rochers vitreux, dans les fchifles
DES Minéraux. ^^^
micacés & dans les autres concrétions du quartz, du
feld-fpatli & du mica ; & comme ils font difféminés en
grand nombre dans les premières couches de la terre,
on les retrouve dans les laves cSl dans les déjedions
volcaniques. La chaleur de la lave en fufion change
leur couleur de rouge en blanc, mais n'eft pas affez
forte pour les fondre, ils y confervent leur forme &
perdent feulement avec leur couleur une grande partie
de leur poids (c), ils font au/fi bien plus rcfradaircs
au feu : la grande chaleur qu'ils éprouvent lorfqu'ils
font faifis par la lave en fufion, fuffit pour brûler le
fer qu'ils contenoient, &. réduire par conféquent leur
denfité à celle des autres matières vitreufes; car on ne
peut douter que le fond de la fubftance du greiiat ne
foit vitreux, il étincelle fous le briquet, il réfifte aux
acides, il a la caffure vitreufe, il eft auffi dur que le
(e) La pefanteur fpécifique du grenat volcanifé n'eft que de
2,4684; au lieu que celle du grenat ordinaire efl: de 41888.
Voye^^ la Table de AI. Brijfon. — Rien de plus commun que les
grenats à vingt-quatre faces dans les laves & autres produits volca-
niques de l'Italie. Tantôt ils s'y trouvent plus de'colorés par l'adion
de l'acide marin & quelquefois comme à demi vitrifiés; tantôt ils
font encore plus décompofés & à l'état d'argile blanche ou de terre
non efFervelcente avec l'acide nitreux ; mais dans l'un ou l'autre
cas , ils confervent leur forme granatique , & quoique les grenats
femblent avoir fouffert un retrait ou une légère dépreOion qui rend
i'arête des bords plus faillante , leur forme trapézoïdale , loin d'en
être altérée , n'en devient que plus fenfible. Lettres du Doùkur
Demejle au D odeur Bernard, tome J , pages ^^^ & fuiv.
544- Histoire N atu relle
criftal, & s'il n'étoit pas chargé de fer, il aiiroit toutes
les qualités de nos verres primitifs.
Si le fer n'entroit qu'en vapeurs dans les grenats
pour leur donner la couleur, leur pefanteur /])ccifique
n'en feroit que trcs-pcu ou point augmentée; le fer y
réfide donc en parties mafTives , & c'efl de ce mélange
que provient leur grande denfué : en les expofànt à un
feu violent & long-- temps foutenu, le fer fe brûle c^
fe diflipe, la couleur rouge difparoît, & lorfqu'on leur
fait fubir une plus longue & plus violente adion du
feu, ils fè îonàcnt Si ih convcrtifTent en une forte
d'émail //).
Quoique les Lapidaires diftinguent les grenats en
orientaux & occidentaux, il n'en eft pas moins vrai que
/fj Ce n'efl: en effet qu'à un feu libre &. trcs-vioJent ou trcs-
long-temps foutenu , que le grenat perd fa couleur , car on peut
cmailler fur cette pierre fans qu'elle fe décolore & fans qu'elle perde
foa poli ; &: je me fuis aiïuré qu'il falloit un feu xioïent pour
diminuer la denfité du grenat & brûler le fer qu'il contient. J'ai
prié M. de Fourcroy , l'un de nos plus habiles Chiniiftes , d'en
ùire l'expérience. Il a expofé dans une coupelle pefant trois gros
vingt-cinq grains, douze grains de grenat en poudre. Après trois
heures d'un feu très-fort , pendant lequel on n'a aperçu ni vapeur ,
ni flamme, ni décrépitation , ni faùon fenfbles dans la matière, le
grenat a commencé à fe ramollir 6c à fe ]>ourfouffîer légèrement. Le
feu ayant été continué pendant huit heures en tout , le grenat n'a
pas éprouvé une fufion plus forte , & il eH: refté conflamment
dans l'état de ramollilfement déjà indiqué. L'appareil refroidi a préfenté
une matière rougeâtre , aglutinée , adhérente à la coupelle.
dans
D E s M I N É R A U X. 5 4.5
dans tout pays iis font de même nature , & que cette
diftinclion ne porte que fur la différence d'éclat & de
dureté. Les grenats les plus purs & les plus tranf])arens ,
loriqu'ils font polis, font plus brillans ^^ plus durs, &L
ont par conféquent plus d'éclat & de jeu que les autres,
& ce font ceux que les Lapidaires appellent grenats
oncntaux ; mais il s'en trouve de pareils dans les régions
de l'Occident comme dans celles de l'Orient; les
grenats de Bohème en particulier font même fouvent
plus purs , plus tranfparens & moins déicclueux que
ceux qu'on apporte des Indes orientales : il faut néan-
moins en excepter le grenat dont le rouge eft teint de
violet, qui nous vient de l'Orient, & fe trouve parti-
culièrement à Surian, dans le royaume de Pégu, &
auquel on a donné le nom de grenat Syrien (g) ; mais
ces grenats les plus tranfparens (Se les plus purs, ne le
font cependant pas plus que le criltal, & ils ont, de
même que toutes les autres pierres vitreufes, une double
réfraction.
Quoique dans tous les grenats le fond de la couleur
foit rouge, il s'en trouve, comme l'on voit, d'un
(o-^ Il paroît que le mot fyrien vient de Sun an , ville capitale
du royaume de Pcgu. Les Italiens ont donne à ces grenats, le noni
de ruhïni dï rocca , <3c cette dénomination n'ell pas mal appliquée ,
parce que Jes grenats Te trouvent en eftet dans les roches vitreufes,
tandis que les rubis tirent leur origine de la terre limoneuse , &: Te
trouvent iloles dans les terres &. les Tables.
Mincraux , Tome UI, Zzz
54-<5 Histoire Naturelle
rouge - pourpré , d'autres font mêlés de jaune & ref-
femblent aux hyacinthes; ils viennent aufîi des Indes
orientales (h): ces grenats teints de violet ou de jaune
font les plus eflimés, parce qu'ils font bien plus rares
que les autres, dont le rouge plus clair ou plus foncé
efl la feule couleur. Les grenats d'Efpagne /ont com-
munément d'un rouge femblable à celui des pépins de
la grenade bien murs, &. c'efl peut-être de cette ref-
femblance de couleur qu'on a tiré le nom de grenat.
Ceux de Bohème font d'un rouge plus intenfe (i) , &
(h) Le grenat fyrien efl: d'un rouge plus ou moins pourpre',
ou charge de violet, & cette couleur n'efl: jamais claire. Il y eu
a de prefque violets , mais ils font rares & n'ont guère cette couleur
que lorfque la pierre a un certain volume.
Quoique le grenat fyrien foit afTez commun , on en rencontre
difficilement de fort gros , purs & parfaits ; en géne'ral fa couleur
en eft rarement franche & décidée; elle efl très-fouvent fourde
& enfumée.
C'ell: le grenat fyrien, lorfqu'il efl vif & bien pourpré, que les
fripons & les ignorans font quelquefois pafTer pour améihyfle orien-
tale , ce qui fait croire à des gens peu infiruits^ que cette dernière
n'efl: pas fi rare qu'on le dit. Note communiquée par M. Hoppé.
(i) Le grenat de Bohème ( appelé vermeil en France ) efl d'un
rouge-ponceau foncé , mais pur & velouté. La grande inienfité de
fa couleur ne permet pas de le tailler à facettes deffus & deflbus ,
comme les autres pierres , car il paroîtroii prefque noir ; mais on
le cabochonne en deffus & on le chève en deffous ; cette opé-
ration l'amincit aflez pour qu'on puiffe jouir de fa riche & iuperbe
couleur , & lui domie un jeu grand & large qui enchante l'ceil
d'un amateur.
DES Minéraux. 5^7
il y en a aiifTi de verdâtres (li), de bruns & de noi-
râtres : ces derniers font les plus opaques & les plus
pefans, parce qu'ils contiennent plus de 1er que les
autres.
La pierre à laquelle les Anciens ont donné le nom
de carbunculus, & que nous avons traduit par le mot
ffciV'boucle , ell vraifemblablemcnt un grenat d'un beau
rouge & d'une belle tranfparence ; car cette pierre
brille d'un feu très - vif, lorfqu'on l'expofe aux rayons
du foleil (l) ; elle conferve même affez de temps la
Un grenat de Bohème parfait, d'une certaine grandeur , e(l une
chofe extraordinairement rare ; rien de plus commun en très-petit
volume.
Les défauts ordinaires des grenats de Bohème , font d'être remplis
de points noirs & de petites bulles d'air, comme une compofition,
ces petites bulles d'air fe rencontrent encore dans d'autres grenats,
Tur-iout dans ceux où il entre du jaune.
Ce que l'on appelle grenat de Bohême en France , eft une pierre
très-différente de celle dont on vient de parler ; elle eft plus claire
& d'un rouge vinaigre ou fie de vin légèrement fjleuâtre & très-
rarement agréable. Note communiquée par AL Happé.
(k) Le grenat varie par fa couleur; quelquefois il eft du plus
beau rouge tirant fur le pourpre, c'ed le vrai grenat; d'autres fois
il eft d'un rouge-jaunâtre & tire fur l'hyacinthe ; ceux de Bohème
font d'un rouge très-foncé. On en trouve en Saxe & dans le Tyrol,
qui font verdâtres , peu ou point tranfparens , fouvent même entière-
ment opaques. Leur gangue ordinaire eft le quartz ou le feld fpath ,
& fur-tout le mica j'en ai vu d'une groffeur extraordinaire, d'un
rouge foncé , qui étoient ainfi recouverts de mica. Idem,
(l) L'efcarboucle garamantine des Anciens eft le véritable grenat des
Zzz i;
54-8 Histoire Naturelle
lumière dont elle s'imbibe, pour briller enfuite clans
l'obfcurité & luire encore pendant la nuit fmj . Cepen-
dant le diamant & les autres pierres précieufes jouiffent
plus ou moins de cette même propriété de conferver
pendant quelque temps la lumière du- foleil , & même
celle du jour c|ui les pénètre & s'y fixe pour quelques
Jieures; mais comme !e mot latin carbuncubis , indique
une fubfîance couleur de feu, on ne peut l'appliquer
qu'au rubis ou au grenat, & les rubis étant plus rares
<5i en plus petit volume que les grenats, nous nous
croyons bien fondés à croire que i'efcarboucle des
Anciens étoit un vrai grenat d'un grand volume, (Si. tel
qu'ils ont décrit leur carbiiucidus.
La grandeur des grenats varie prcfque autant que
celle des criflaux de roche, il y en a de fi petits qu'on
ne peut les diflinguer qu'à la loupe , (Si d'autres ont
Alodernes. L'expérience fuit voir que cetre pierre a plus l'apparence
d'un charbon ardent au foleil que Je rubis ou toute autre pierre prc-
cieufe de couleur rouge. Voye^^ Hill fur Théophrcifie , page 6 i .
(m) Je ne fais cependant fi l'on doit accorder une entière confiance
à ce que je vais rapporter ici. « Dans une des falies du palais du roi de
M Ja Chine, il y a une infinité de pierreries fans prix: , & un ficge ou
33 trône précieux où le roi s'afiled en niajeftc. 11 ell fait d'un beau
» marbre dans lequel il y a tant d'efcarboucles & d'autres pieneries des
3:» plus rares, ouvragées <x enchaffees, que durant la plus obfcure nuit
» elles éclairent autant la falle que s'il y avoit wn grand nombre de
chandelles allumées. « Recueil des voyages qui ont fervi à l'étaù/ijjenient
de la Compagnie des Indes; Anijkrdam , i jQz, îvnie III, page 4^Q.
DES Minéraux, 5^9
pluficurs pouces &l jufqu'à un pied de diamètre; ils ft
trouvent également dans les fentes des rocliers vitreux,
les petits en criflallifation régulière, ^ les plus gros
en forme indéterminée ou bien en criftailifluion confiife:
en général ils n'affeélcn: fJ3écialcmcnt aucune forme
particulière ; les uns font rliomboïdaux ; d'autres lont
odlaèdres , dodécaèdres ; d'autres ont quatorze , vin<'-t-
quatre & trentc-fix faces (u): ainfi la forme de criftalli-
(n) Il y a des grenats teflulaires dodccacdres, dont les plans font
des rhonibes.
II y en a d'autres 336 facettes, dont 24. hexagones alongc'es plus
. petites que les \ 2 rhonibes.
II y a des grenats trapézoïdaux ou grenats teiTuIaires à 24. facette?,
dont les plans font des trapczoïdes.
Al. Fauias de Saint-Fond fait mention de fix varicics de orenats.
La première d'un rouge couleur de feu , décaèdre, formée par un
prifme court hexaèdre, terminé par des pyramides tricdres obtufes.
La féconde à douze facettes & à prifme alongc , qui efl: d'un très-
beau rouge, légèrement jaunâtre; cette efpèce femble tenir le milieu
entre le grenat & l'hyacinthe, «Se le rapprocher de celle que les Italiens
nomment giacinto-guûrna/Iind , hyacinthe-grenat.
Deux autres de même forme, mais dont l'un a perdu fa couleur 6c
efl blanc &. cryflallin.
Un autre à priime court hexagone, terminé par deux pyramides
pentagones , dont les faces font la plu])art rhomboïdales ou à cinq
côtés , ce qui forme un grenat à feize facettes. '
Un autre avec un pareil nombre de facettes , mais dont le prifme
trèsalongc a huit tdces terminées à chaque bout par une pyramfde
aiguë &. en pointe des quatre côtés. Recherches fur Us volcans éteints,'
par AL Faujas de Saint- Fend.
5)0 Histoire Naturelle
fation ne peut fervir à les faire reconnoître & diflinguer
des autres criflaux.
li y a des grenats fi tran/j^arens & d'une i\ belle
couleur qu'on les prendroit pour des rubis ; mais fans
être connoiffeur, on pourra toujours les diflinguer aifé-
ment ; le grenat n'eft pas fi dur à beaucoup près , on
peut l'entamer avec la lime, &l d'ailleurs il a, comme
toutes les autres pierres vitreufes, une double réfraélion,
tandis que le rubis & les vraies pierres précieufes dont
la fubftance efl bomogène, n'ont qu'une feule réfraétion
beaucoup plus forte que celle du grenat.
Et ce qui prouve encore que le grenat efl de la
même nature que les autres pierres vitreufes , c'eft
qu'il fe décompofè de même par l'adion des élcmens
hiunides (oj .
On trouve des grenats dans prefque toutes les parties
du monde. Nous connoiffons en Europe ceux de
Bohème, de Siléfie, de Mifiiie, de Hongrie, de Stirie;
(o) M. Greifelius dit ( Ephéménde s (T Allemagne , année i6yo a
I 6 S 6) qu'à un mille de la vallée de Saint- Joachim , fur X^^^ confins de
la Bohème & de la Mifnie, font des montagnes de grenats: tout y ell
plein de ces pierres , on en voit une grande quantité fur la furface de la
terre , mais de nulle valleur , ayant été calcinées par la chaleur du
foleil. Pour avoir des grenats de quelque prix , il faut fouiller la terre
de ces montagnes , car il paroît qu'une certaine humidité efl néceflaire
pour les conferver. On dit qu'un cent pefant de ces pierres contiennent
quelques onces d'argent fin. Collcdion académique , Partie étranger e ,
tome IV, page i a i.
DES AI I N É R A U X. 551
il s*cn trouve aufTi dans le Tyrol , en Suifle, en Ef-
pagne (pj^ en Italie & en France, fur-tout dans les terreins
volcanifés fi^J: ceux de Bohème font les plus purs»
les plus tranfJDarens &. les mieux colorés f?-J. Quelques
^pj Vers la moitié de ce chemin (de Motril à Almeria) il y a une
grande- plaine qv»i s'en éloigne à trois lieues; elle eft fi remplie de
grenats , que l'on en pourroit charger un vaifléau ; le lieu où l'on
en trouve le plus eft un ravin formé par les eaux & les orages au pied
d'une colline balle qui eft: aufli remplie de ces pierres. Dans le lit de
ce ruilTeau il y a beaucoup de pierres rondes avec du mica blanc ; elles
font pleines de grenats en dedans ôc en dehors , &. l'on voit qu'ils
viennent de la décompofition de la colline. Hijioire Naturelle d' Efpagne,
p(ïr\ Ai. Bowles , page 12^.
(q) Il y a plufieurs années qu'on a de'couvert près de Salins, une
veine de grenats. Sur r exploitation des mines , par Ai, de Genfanne ;
Savans Étrangers, tome IV, page i^i. — On trouve fur les bords
d'un ruifleau nommé le Riouppenouliou près d'Expailly, à un quart
de lieue du Puy, des grenats qui font dans les matières volcanifées . . , .
Il eft fmgulier que dans prefque tous les pays où Ton a des mines
de grenats, tels qu'à Swapawari en Lapponie , en Norwcge, fur les
monts Krapachs en Hongrie, &c. on foit dans la perfuafion qu'ils ont
prefque toujours avec eux des paillettes d'or ou d'argent; j'approuve
fort la raifon que donne M. Lehmann de cette croyance « J'ai ima-
giné, dit cet habile Chimifte, que ce qui a fait croire que les grenats ce
contiennent une aflez grande quantité d'or , vient de la pierre «
talqueufe & luifante qui leur fert de matrice. » Recherches fur Us
Yolcans éteints , par M. Faujas de Saint- Fond , page i S^ & fuivante.
(r) Boëtius de Boot , donne aux grenats de Bohème la préférence
fur tous les autres , même fur ceux de l'Orient , à caufe de leur pureté
& de la vivacité de leur couleur qui, félon lui, réfifte au feu. Mais,
fuivant M. Pott, les grenats en fe fondant au ièu perdent leur
55^ Histoire Natu relle
Voyageurs affarent en avoir trouve de très - beaux en
Groenland &l dans la Lapponie { f) .
En Aiie, les provinces de Pégu, de Camboie, de
Calicut , de Cananor , font abondantes en grenats ; il
s'en trouve zi\(ï^i à Golconde & au Thibet (rj.
Les Anciens ont parlé des grenats d'Ethiopie, &
l'on connoît aujourd'Iuu' ceux de Madagafcar; il doit
s'en trouver dans plufieurs autres contrées de l'Afrique:
au refte, ces grenats apportés de Madagafcar font de
la même nature que ceux de Bohème.
Entin, quoique les Voyageurs ne fafTcnt pas mention
tranfparence ôi. leur couleur rouge. Le iiuine Boëtius dit qu'en
Cohcme les gens de la campagne trouvent les grenats en morceaux
gros comme des pois, répandus dans fa terie, fans ctre attaches à
aucune matrice; ils font noirs à la furface , & l'on ne peut en recon-
noître la couleur cpi'en les plaçant entre l'tx-il c'k la lumière. . . . I^es
grenats de Silefie font ordinairement d'une qualité' très- médiocre.
Encyclopédie , article Grenat.
(f) M. Crantz met le grenat de Groenland dans la clafle du quartz,
parce qu'il fe trouve dans les lentes des rochers quartzeux, en morceaux
de grandeur &: de formes inégales. Mais comme il efl: très-dur & d'un
rouge tranlparent qui tire fur le violet , les lapidaires le rangent parmi
les rubis. C'efl dommage qu'il foit fi fragile & qu'on n'en puiffe
confèrver que de \i. grofîeur d'une fève cjuand on le met en oeuvre,
H'ijfoire générak des Voyages, tome XIX, page 2^.
( t ) Le royaume de Golconde produit beaucoup de grenats. H'ijloîre
générale des Voyages, tome IX, page y i y. — Vers les montagnes du
Thibet qui lont l'ancien Caucafe , dans les terres d'un Raja, au-delà du
royaume de Cachemire , o\\ connoît trois montngnes dont l'une produit
de:3 grenats. Idem, tome X, p^g^ ^ 2.y,
des
D E s M I M É R A U A\ 555
des grenats d'Amérique, on ne peut guère douter qu'il
ny en ait dans plufieurs régions de ce vafte continent,
comme il s'en trouve dans toutes les autres parties du
monde.
H VA C I N T HE.
-tVrès le grenat fe préfente l'Hyacinthe qui approche
de fa nature , & qu'on doit auffi regarder comme
un produit du fchorl mêlé de fubflances métalliques.
L'hyacinthe fe trouve dans les mêmes lieux que le
grenat, elle donne de même une double refradion, ces
deux pierres criflallifées fe rencontrent fouvent en-
femble dans les mêmes mafTes de rochers (a): on doit
donc la rapporter aux criflaux vitreux, & c'eft après le
grenat la pierre vitreufe la plus denfe (b). Sa couleur
(a) Cette pierre hyacinthe aufli commune que le grenat ( que
(buvent elle accompagne ), peut (ans doute , ainfi que celui-ci , (e
rencontrer dans les deux Indes aulîi fréquemment qu'en Europe... Il
y a des grenats qui ont la couleur de l'hyacinthe , & il y a des hyacinthes
qui ont celle du grenat, mais ces deux pierres diffèrent beaucoup l'une
de l'autre par la forme & la gravité fpécifique ... La dureté de l'hyacin-
the l'emporte fur celle du grenat, mais trop peu ; 2.° la gravité fpéci-
fique du grenat eft fupérieure à celle de l'hyacinthe. . . L'hyacinthe
éft infufible au degré de feu qui met le grenat en fufion. Ejfaî de
Crijlallographie y par M. Rome de Life, tome JJ , pages 28^ &
fuivantes.
(h) La pefânteur fpécifique de l'hyacinthe eft de 3^873, & celle
du grenat Syrien de 40000.
Minéraux, Tome II L Aaaa
554- Histoire Natu rellb
n'eft pas franche, elle efl d'un rouge pius ou moins
mélc de jaune ; celles dont cette couleur orangce ap-
proche le plus du rouge , font les pius rares &. les plus
eftimées ; toutes perdent leur coidcur au feu, & y
deviennent J3Janches, /ans néanmoins perdre leur iranf-
parence, & elles exigent pour fe fondre un pius grand
degré de feu que le grenat (c). On voit des hyacinthes
(c) Cetce pierre ell d'an rouge tirant lur le jaune, c'efl-à-dire ,
d'une couleur \)\us ou moins approchante de celle de l'orangé. Lorf-
f]u'on expofe l'hyacinthe à l'adion d'un feu alTez violent, eile perd Çd
couleur & conlei ve fa tranfparence , ce qui prouve que la lubflance qui
la colore eft volatile: fi on laiiïe ces criftaux expofcs trop long-temps
à l'adion du feu , ils s'y vitrifient fans intermède , au moins à leur
furface : car ils adhèrent alors entr'eux & aux parois du creufer. La
pierre qui porte le nom de jargcn , n'efl autre chofe que l'hyacinthe
blanchie au feu pour imiter le diamant. Lettres du doâcur Dewejle , &c.
tome I , page ^12. — La couleur de cette pierre eft d'un rouge tirant
fur le jaune , ce qui la rend plus ou moins tranfparcnte ; elle entre
totalement en fufion au feu , elle efl: plus légère & plus tendre que le
grenat, aulTi lalime a-t-elle facilement de la jirife fur elle. On a,
I,* L'hyacinthe d'un jaune rougeâtre , ou l'hyacinthe oriental: on fa
trouve en Arabie , à Cananor , à Calecut & à Camboye ; la couleur de
cette belle hyacinthe efl; d'un rouge foible d'écarlate ou de cornaline,
ou de vermillon, tirant lur le rubis ou plutôt fur le grenat, au travers
de laquelle on remarque ordinairement une kfgère nuance de violet-
colombin ou d'améthyfte, elle eil très-refplendiflante, dure, & reçoit
«n poli vif :
2.° L'hyacinthe d'un jaune de ^fran, ou l'hyacinthe occiàemûe-^
elle efl: moyennement dure , d'une couleur plus fafrance, plus orangée,
& bien moms éclatante que la précédente ; elle reflèmble quelquefois
D E s M I M É n A U X, 5^5
en très - grande quanticc dans ies mafTes de roches
vitrcufcs, & autres inaticrcs rejetées par le Véftive (J),
à la .^ur du louci ou à lu Heur d'hyacinthe , &. nous vient du
Portugal ;
3.° L'hyacinthe d'un blanc jaunâtre : elle a beaucoup de reflein-
blance avec l'agate ou avec le fuccin qui efî: d'un blanc- jaui-^âtre :
4,° L'hyacinthe couleur de miel ou hyacinthe niielice : autant la
précédente relVemble au fuccin , autant celle-ci reffemble au miel, tant
par fa couleur que par Ion éclat cjui efl: foible & terne : ces deu>:
dernières fortes d'hyacinthe font peu dures, peu iranfp-rentes, mal
nettes , pleines de graine ou de peiiies taches qui les font tailler à
facettes pour en cacher les défauts; elles fe foutiennent bien moins de
temi)s au feu que les orientales. Elles nous viennent de la Siléfie & de
ia Bohème.
Ce qu'on appelle jdrgon d'Auvergne, font des petits criflaux à facettes
& colores, bien des gens les regardent comme des primes d'hyacin-
thes, ils font brillans 6; très-i edts. On les rencontre communément
dans le Vivarais j)rès du Puy.
On nous apporte de CompodeHe en Ei pagne , fous le nom dliy^
cintJjes , des pierres ruuges-opaques , qui ont une figure déterminée
& qui ne font c[ue des cryflaux. A'Unéralogie de Bomarc , tome /,
pages z4^ à' fulvantcs.
(d) Il y a des hyacinthes blanches , foit en criflaux folitaires, foit
en groupes: ces dernières viennent des bafes de la Somma en Italie.
La roche qui fert de gangue aux hyacinthes de la Somma , a fouffert
plus ou moins de l'action du feu , mais en général elle efl fort peu
dénaturée. La couleur de ces hyacinthes tire plus ou moins lur le
brun; les unes font dans des gangues argiltules micacées plus ou
moins cuires ; les autres dans des malfes de grenats dodécaèdres à
bords tronqués , d'autres font entre-mclés de fchorls prifmatiques , de
fchorls dodécaèdres & même de fpath calcaire.
^ Aaaa i;
5 5^ Histoire Naturelle
ÔL ces pierres fe trouvent non-feuiement en Italie dans
Jes terreins voicanifés, mais auifi en Allemagne, en
Pologne, en Efpagne, en France, &. particulièrement
dans le Vivarais ôl l'Auvergne ^e): il y en a de toutes
les teintes, de rouge mêlé de jaune, ou de jaune mêlé
de brun; il y en a même des blanches qu'on connoît
fous le nom de jûrgon (f). II s'en trouve aulTi d'un
II y a au Vefuve des hyacinthes , les unes en groupe , les autres en
criflaux folitaires; il y en a de brunes, de verdâtres , &c. leur couleur
la plus ordinaire eft un jaune -foncé mêlé de rougeâire, mais qui tire
fouvent fur le verdâtre ou le noirâtre.
(^i\ Jes trouve non -feulement au Vefuve , mais encore parmi
certaines éruptions des anciens volcans éteints de l'Italie , & même
d'autres contrées. . . .
Elles ne font point un produit du feu des volcans , comme M. Ferber
le dit en plufieurs endroits de les Lettres fur l'Italie , en confondant ces
hyacinthes, tantôt avec les i'chorls , tantôt avec l'émail ou verre de
volcan fi connu fous le nom de pierre ohfidîenne ; mais elles faifoient
partie des roches primitives du fécond ordre, qui fe font trouvées dans
la fphère d'adivité du foyer volcanique.
Il fe trouve des hyacinthes blanches en croix par la réunion de quatre
de leurs criilaux fimples parallèlement à leur longueur. ( On peut
obferver que cette figuration eft encore un caradère commun à l'hya-
cinthe & au fchori dont les criftaux fe trouvent fouvent croilés les uns
fur les autres ). Cr'ijlcllo graphie par Ai. Rome de Lijle , tome H ,
pages 2S ^ & fuivantes.
( e ) Il fe trouve des hyacinthes d'un beau rouge de vermeil ou de
grenat. M. Faujas de Saint- Fond les a trouvées dans un ruiifeau à un
quart de lieue du Puy en Vélay, Jdem , page 2 S S.
(f) J'ai trouve parmi les grenats d'Expailly ( pays volcanique du
DES Minéraux, y^y
jaune affez rouge pour qu'on s'y trompe en les j)renant
pour des grenats, mais la plupart font d'un jaune enflimc,
6l même brunes ou noirâtres : elles fe trou\ cnt quel-
quefois en groupes, & fotivent en criflaux ifolés fgj;
mais les unes & les atures ont été détachées du rocher
où elles ont pris naiffance comme les autres criflaux
vitreux. M. Rome de Lille dit avec raifon : « Que
l'on donne quelquefois le nom <S^ hyacinthe orinuale , à tt
des rubis d'Orient de couleur orangée, ou à des jargons «»
de Ceylan, dont la teinte jaune efl mêlée de rouge,
de même qu'on donne auiïi quelquefois aux topazes
orangées du Brefil, le nom A' hyacinthe occidentale oïl de
Pornti^al ; mais l'hyacinthe vraie ou proprement dite,
e(l une pierre qui diffère de toutes les précédentes,
moins par fà couleur qui eft très- variable , que par
Vélay ) de véritables hyacinthes , d'un jaune tirant fur le rouge ,
criftallifées à prifines quadrilatères oblongs, terminés à l'un & à l'autre
bout par une pyramide à quatre côtés. J'en polsède une qui a un pouce
de lono^ueur fur fix lignes de diamètre, mais qui n'a point de pyramide.
On appelle ces hyacinthes , jargons d'hyacinthes du Puy. Recherches fnf
Us Volcans éteints, par M. faujas de Saint- Fond , page i Sj.
(g) Ces hyacinthes jaunâtres font afTez fouvent groupées dans les
cavités des roches quartzeufes ou feld-fpaihiques qui ont été détachées
des entrailles du volcan , fans avoir trop fouffert de l'acflion du feu.
Cette adion a bien été aflez violente pour les altérer plus ou moins ,
mais non pour les dénaturer entièrement. Les angles des criflaux ont
confervé leur tranchant , les faces leur poli , & le quartz ou feld-fpath
fa blancheur & fa folidité. Lettres du doÛeur Demejle , tome I,
page 41 S,
5)8 Histoire N atu r elle
fa forme, fa duretc <& fa gravité fpccifiqiie (IiJ ».
Et eu eftèt, quoiqu*il n'y ait à vrai dire qu'une feule
& mcme eflcnce clans ]es pierres prccieufes, & que
communément elles fbient teintes de rouge, de jaune
ou de bleu, ce qui nous les fait diftingutr par Jes
noms de ru lus , lopaics ir faplùrs , on ne peut guère
douter qu'il ne fe trouve aufli dans les climats chauds
des pierres de mcmc eflence , teintes de jaune mclc
d'un peu de rouge , auxquelles on aura donné la déno-
mination (ïhyûdnthcs orientales; d'autres teintes de violet, «Se
même d'autres de vert, qu'on aura de même dénommées
améîh'ijlcs & émeraiides orientales ; mais ces pierres pré-
cieufes, de quelque couleur qu'elles foient, feront toujours
très-aifées à diilinguer de toutes les autres par leur
dureté, leur denfité, & fur-tout par l'iiomogénéité de
leur fùbilance qui n'admet qu'une feule réfradion ;
tandis que toutes les pierres vitreufes dont nous venons
de faire rémunération, font moins dures, moins denfes,
& en même temps fujettes à la double réfraélion.
^h) CriRallographie , par M. Rome de Lifle, tome II, page 282,
DES Minéraux.
5>9
TOURMALINE (a).
V^ETTE pierre ctoit peu connue a\ant la publication
d'une Leitre que Ivi. le duc Je iN03a-Caraifà m'a fait
i'iionneur de m'ccrire de Naples, ^^ qu'il a fait eniuite
iiuprimcr à Paris en 175 9- H expcie dans cerie Lettre,
les obiervations <5e les expériences qu il a faites iur deux
de ces pierres qu'il avoit reçues de Ccylan: leur prin-
cipale propriété eft de devenir éleclriqucs fans frottement
(Si. par la limple chaleur (h) ; cette éledricité que le
feu leur communique, fc manileilc par attraélicn fiir
l'une des laces de cette pierre , &. par répulf'on fur la
face oppoiée, comme clans les corps éleétriques par le
frottement dont l'éleétricité s'exerce en plus ^ en moins,
<Sc agit politivement & négativement fur différentes faces:
mais cette faculté de devenir électrique fans frottement
&L par la limple chaleur, qu'on a regardée comme une
(a) Tourmaline ou tire-ccndre; cette j^ierre ell ainfi dcnomince,
parce qu'elle a la propriété d'attirer les cendres & autres corps légers ,
fans être frottée, mais feulement chaulTce ; fa forme eft la mcme que
celle de certains fchorls, tels que les peridots & les t'meraudes du
Brefil; elle ne diffère en effet des fchorls que par fon éledricité qui
efl: plus forte & plus confiante que dans toutes les autres pierres
de ce même genre.
fbj Pline parle ( liv. XXX vil, n.' 2 <) ) d'une pierre violette ou
brune (jonia)y qui échauffée par le frottement entre les doigts, ou
fimpîement chauffée aux rayons du foleil , acquiert la propriété d'attirçr
les cocps légers. iN'elVce point là la tourmaline:
560 Histoire Naturelle
propriété fmgulière & même unique, parce qu'elle n'a
encore été diftindement obfervée que fur la tourma-
l^e , doit fe trouver plus ou moins dans toutes les
pierres qui ont la même origine; & d'ailleurs, la chaleur
ne produit -elle pas un frottement extérieur & même
intérieur dans les corps qu'elle pénètre , & réciproque-
ment toute fridion produit de la chaleur? il n'y a donc
rien de merveilleux ni de furprenant dans cette com-
munication de réledricité par l'adion du feu.
Toutes les pierres transparentes font fufceptibles de
devenir éledriques, elles perdent leur éledricité avec
leur tranfparence , & la tourmaline elle - même fùbit le
même changement, & perd au/fi fbn éledricité lor/qu'elle
eft trop chauffée.
Comme la tourmaline eft de la même effence que
les fchorls , je fuis perfuadé qu'en faifant chauffer divers
fchorls, il s'en trouvera qui s'éledriferont par ce moyen;
il faut un affez grand degré de chaleur pour que la
tourmaline reçoive toute la force électrique qu'elle peut
comporter, & l'on ne rifque rien en la tenant pour
quelques inftans fur les charbons ardens ; mais lorfqu'on
lui donne un feu trop violent , ^\\t le fond comme le
fclîorl (c)j auquel d\c reffemble au/fi par fa forme de
criftallifation,
(c) M. Rittman a obfervé que la tourmaline fe fondoiten un verre
blanchâtre , & qu'en y ajoutant du borax & du fpath fufible , elle fe
fondoit entièrement , mais que les acides minéraux , même lés plus
forts ,
D E s Aï I N É R A V X. 561
criflallifation , enfin elle efl de même clenfitc & d'une
égale dureté ((ij; l'on ne peut guère douter, d'après
tous ces caractères communs, qu'elle ne foit un produit
de ce verre primitif. M. le docteur Dcmeftc le prcfu-
moit avec raifôn , & je crois qu'il efl le premier qui
ait range cette pierre parmi les fchorls fe).
Toutes les tourmalines font à demi - tranfparentes ,
les jaunes & les rougeâtres le font plus que les brunes
&. les noires; toutes reçoivent im alfez beau poli: leur
fubllance, leur caffure vitreufe, &. leur texture lamelleu/è
comme celle du fchorl, achèvent de prouver qu'elles
,font de la nature de ce verre primitif
forts , ne fembloient pas l'attaquer ; & comme les mêmes phénomènes
fe manifeftent dans la ze'olite & le balalte , il a conclu que la tourmaline
en étoit une efpèce , «Se la vertu éledrique qu'il avoit remarquée à une
efpèce de zéolite, couleur de ponceau , le fortifia dans ce fentiment....
Mais toutes ces recherches ne découvrent pas encore les vrais prin-
cipes de la tourmaline. Journal de Phyfique , fupplêment au mois de
Juillet lySz.
(d) La pefanteur fjîccifique de la tourmaline de Ceylan eft de
30541 , celle de la tourmaline du Brefil de 30S63 , & celle du fchorl
crillallifé de 3092^).
(e) La tourmaline efl aufll rangée avec les fchorls; en s'échauffant
elle s'éledrife d'un côté pofitivement , tandis que de l'autre côté elle
s'éledriie négativement, comme l'a obier vé M. Franklin. Sa couleur efl
rouge , jaunâtre ou d'un jaune-noirâtre aflez tranlparent , elle eft
criftalliiée comme le fchorl de Madagaicar, en prifmes à neuf pans,
fouvent llriés , terminés par deux pyramides trièdres obtufes placées
en fens contraire. Lettres de M. Demejle , tome I, in-i 2 , page 2 (} 1 ^
Miucraux , Tome IIL B b b b
^6z Histoire Natu relle
UWc de Ceyian, d'où font venues les premières
tourmalines, n'efl pas la feule région qui les produife:
on en a trouvé au Brefd, & même en Europe, parti-
culièrement dans le comté de Tyrol ; les tourmalines du
Brefd font communément vertes ou bleuâtres. M. Gerhard
leur ayant fait fubir différentes épreuves , a reconnii
qu'elles réfifloieni , comme les autres tourmalines , à
l'aétion de tous les acides , & qu'elles confèrvoient la
vertu éleétrique après la calcination par le feu, en quoi,
dit-il, cette pierre diffère des autres tourmalines qui
perdent leur éledricité par l'aélion du feu (f^; mais
je ne puis être de l'avis de cet habile Chimifle fur
î'origine des tourmalines qu'il range avec les bafaltes,
& qu'il regarde comme des produits volcaniques; cette
idée n'efl fondée que fur quelques reffemblances acci-
dentelles entre ces pierres & les bafaltes ; mais leur
effence & leur formation font très-difierentes, &. toutes
(f) Les pierres gemmes , ainfi que la tourmaline , fe dninguent
par la vertu eledrique qui leur eft propre , avec la différence pourtant
que les premières ont hefoin de fridion pour exercer leur faculté
attradive , au lieu que la féconde ne devient éledrique qu'après avoir
cte' mife fur de la braife , & pofsède, outre la faculté attradive , aufîi
la répulfive. Le balalte ell une pierre fufible noirâtre, non éledrique,
qui écume beaucoup en fondant ; 6t puifque les laves o1it les mêmes
principes que la tourmaline & le bafalte , on peut croire avec plulieurs
Naturalises , que ces criftaux doivent leur origine à des volcans , du
moins pour la plupart. Journal d( Phyfique , fuppUmcnt au mois de
Juillet I jS 2.
DESAIlNÉRAUX. 563
les propriétés de ces pierres nous clcmontrent qu'elles
-ptoviennent du fchorl, ou qu'elles font elles-mêmes des
Ichorls.
11 paroît que M. Wilkes eft le premier qui ail
découvert des tourmalines dans les montagnes du Tyrol.
M. Muller nous en a donné peu de temps après une
defcription particulière f^J: ces tourmalines du Tyrol
^~~™— ^~'— ^— ^^■™^"™"~^"»— »— ^-^— »— "— ^*— »— ^— »— ^— — «»— ^——i ^»»»— ^
{^gj La montagne nommée Greïner , fituee vers l'extrémité de la
vallée de Zillerthal a fon fommet le plus élevé couvert de neige en
tout temps; c'efl fur cette montagne que M. Mulier dit avoir trouvé
dans leur lieu natal le talc, le mica à grandes lames , l'arbefte , le fchorl,
le fchorl blende , les grenats de fer & la tourmaline ; en defcendant il
ramafîà une petite pierre qui avoit quelqu'éclat & qu'il prit d'abord
pour un beau fchorl noir crilUlIifé & tranfparent ; il voulut chercher
l'endroit d'où elle provenoit , & il rencontra bientôt dans les rochers
de granit, des veines de talc fin & de Héatite, qui renfermoient la pierre
qu'il avoit prife pour un fchorl noir; il fe procura une bonne quantité
de cette pierre , qui ayant été foumife à l'acflion du feu <Sc parvenue à
l'état d'incandefcence , commença à fe fondre à fa furface , en prenant
une couleur blanchâtre ; un petit fragment de cette pierre mis enfuite
fur de la cendre chaude, apprit à M. Muller qu'elle avoit une qualité
éledrique, & enfin par différens effais , il découvrit que cette pierre
étojt la vraie tourmaline.
Cette tourmaline eft brune , couleur de fumée , ou plutôt fa.
tranfparence & fa couleur lui donnent , quant à ces deux qualités,
quelque chofe d'approchant de la colofane; & de même que les
tourmalines étrangères connues jufqu'ici, elle préfente par- tout de
petites fêlures qui ne fe remarquent cependant que lorfqu'elle eft
dégagée de fa matrice. Lettre fur la tourmaline du Tyrol, par AI.
Muller; Journal de Phyfique , Mars jyS 0 , pages 182 ir fuiv.
Bbbb ij
564 H I ST OIRE NaTU RELLE
paroifTent être de vrais fchorls, tant par leur pefanteur
fpécifique &. leur fufibiiité ('fi) , que par leur forme de
criftalli/àtioli (i); elles acquièrent la vertu clecftrique
fans frottement & par la fimple chaleur ( kj , elles
(h) La tourmaline du Tyrol , fondue à l'aide d'un chalumeau,
bouillonne comme le borax, <Sc alors elle jette une très -belle lueur
phofphorique ; elle fe fond très-promptement, & refroidie, elle a la
forme d'une perle blanche & demi - iranlparente. Lettre fur la tour-
maline du Tyrol, par AI, Afuller; Journal de Phyfique , Aîars j yS 0,
pages I S 2 & fuiv.
(ï) La forme de notre tourmaline, dit M. Muller, eft en général
prilmati({ue ; au moins n'ai - je encore trouvé que deux échantillons
qui fulîeiit des pyramides parfaites : prcfque toujours les prifmes font
à neuf pans, &; ils ont douze faces, fi on compte leur bafe
Les côtés àQs criflaux de la tourmaline Çonx^ tantôt plus larges , taniôt
plus étroits , & rarement deux côtés de la même largeur fe trouvent
contigus : leurs pointes qui font émouflees & inégales, ont pour la
plupart une très - forte adhérence à la matière jiierreufe dont ces
criflaux lont environnés. Les côtés des pnlmes ont une fui face
brillante .... Ces prifmes font longs de plus de trois pouces, &
épais depuis deux julq'à cinq lignes ; la pierre ollaire qui leur (ert
de matrice efl verdâtre ou tout-à fait blanche: ils y (ont incorporés
les uns auprès des autres en tout fens .... Mais les plus épais &
\es plus minces fe rencontrent rarement enfemble; ces, prifmes fe
dégagent fans peine de leur matrice dans laquelle ils laifîènt leurs
empreintes, qui font aufli brillantes que fi on les avoit ])olies . . . .
Mais tous ces prilmes ont des fêlures c|ui empêchent qu'on puifî'e fe
les procurer en entier, parce qu'ils fe cafîeni fouvent dans l'endroit
de ces fêlures .... Les deux nouvelles furfaces de la pierre caffée
prélentent d'une part une convexité, & de l'autre une concavité,
comme le verre , lorfqu'on le brife. Idem , ib\dc7n.
(k) Pour peu qu'elle foit chauffée, elle manifeUe fa qualita
D E s M I N Ê R A V X, 5(^5
reffemblent en tout à la tourmaline de Ceylan, & diffèrent,
félon M. Muller, de celle du Brefil; il dit: <c Qu'où
doit rapporter à la claffe des zcolites les tourmalines ^
du Tyroi comme celle de Ceylan , & que la tourma-
line du Brefil femble approcher du genre des fchorls,
parce qu'étant mife en liifion à l'aide du chalumeau,
cette tourmaline du Brefd ne produit pas les mêmes
effets que celle du Tyrol , qui d'ailleurs eli de couleur
enfumée comme la vraie tourmaline, au lieu que celle
du Brefil n'ed pas de la même couleur 3). Mais le
traduéteur de cette Lettre de M. Muller, ohfcrve avec
raifon, qu'il y a des fchorls cletStriques qui ne jettent
pas, comme la tourmaline, un éclat phofphorique lorf-
qu'ils entrent en fufion ; il me paroît donc que ces
différences indiquées par M. Muller, ne fuffifent pas
pour féparer la tourmaline du Brefil des deux autres,
& que toutes trois doivent être regardées comme des
produits de différens fchorls qui peuvent varier, &
varient en effet beaucoup par les couleurs, la denfité,
ciedrique ; cette vertu augmente jufqu'à ce qu'elfe ait acquis à
peu-près le degré de chaleur de l'eau bouillante ; <S: à ce degré de
clialeur i'atmofphère éledrique s'éteadoit des pôles de la pierre à la
diftance d'environ un pouce. Notre tourmaline, fortement grillée
fous la moufïïe , ne perd rien de fon poids : elfe conferve fa tranf-
parence & fa qualité éledrique , quoiqu'on l'ait fait rougir à plufieurs
reprifes , & que même on ait pouni- le feu au point de la faire fondre
à la fuperficie. Lciirc fur la tourmaline du Tyrol, par AI. AlulUr;
Journal de Phyftque , Mars 17S0 , pages j S2 cT fuiy.
566 Histoire Naturelle
la fufibilité , ainfi que par la forme de criflailifàiion.
Et ce qui démontre encore que ces tourmalines ont
plus de rapport avec les fcliorls criflailifcs en prifmes
qu'avec les zéolites , c'eft que M. Muller ne dit pas
avoir trouvé des zéolites dans le lieu d'où il a tiré fes
tourmalines, & que M. Jaskevifch y a trouvé du fchorl
vert (l).
(l) A. quatre portes d'Infpruck, il y a une mine d'or dans un
endroit nomme Zilkrthnl ; la gangue efl un fchifte dur, verdâtre ,
iraverfé par le quartz; on en retire fort peu d'or; mais cette mine
eft très-fameufe par la produdion de la tourmaline décrite par M.
Muller. La gangue de la tourmaline efl un fchifle verdâtre mêle
avec beaucoup de mica. On a découvert dans la même mijie où fe
trouve la tourmaline, dw fchorl vert , du mica couleur de cuivre &
de couleur verte & noire , en grandes lames , le fchilie talqueux avec
des grenats, le vrai talc blanc en aflez gros morceaux. Supplément au,
Journal de Phyfique d'Odobre ijSi^ pages ^i i ù" j; i 2.
DES Minéraux. 567
PIERRES DE CROIX.
V/ N obferve clans quelques - uns des faifctaux ou
groupes criflaliifés des fcliorls , une dirpofiuon dans
ieurs aiguilles à fe barrer & fe croifer les unes les
autre en tout fens, en toute direction, & fous toutes
fortes d'angles. Cette difpolition a fon plein efîèt dans
la Pierre de croix , qui n'ell qu'un groupe forme de
deux ou quatre colonnes de fchorl, oppofées & croifces
les unes fur les autres ; mais ici , comme dans toute
autre forme , la Nature n'efl point affervie à la régula-
rité géométrique ; les axes des branches croifées de
cette pierre de croix ne fe répondent prcfque jamais
exa<5lement; fes angles font quelquefois droits, mais
plus fotivent obliques ; il y a même plufieurs de ces
pierres en lozange , en croix de Saint - André ; ainfi
cette forme ou difpofition des colonnes , dont cette
criflallifation du fchorl efl compofée, n'efl point un
phénomène particulier, mais rentre dans le fait général
de l'incidence oblique ou direde, des rayons du fchorl
les uns fur les autres : les prifmes , dont les branches
de la pierre de croix font formées, font quadrangulaires,
rhomboïdaux , & fouvent deux de leurs bords font tron-
qués. On trouve communément ces pierres dans le fchifte
micacé (a) , ôl la plupart paroiffent incruflées de mica;
(a) Lettres du dodeur Demefte , pa^es 2 /j? Ù' fuiv.
568 Histoire Naturelle
peut-être même ce mica efl-il entre dans leur compo-
fition, & en a-t-ii dcterminc la forme; car cette pierre
de croix eft certainement un fchori de formation
fecondaire.
Mais il ne faut pas confondre ce fchori pierre de
croix avec la ??îdcle , à laquelle on a donné quelquefois
ce même nom , & que plufieurs Naturalises regardent
comme un fchori, car nous croyons qu'elle appartient
plutôt aux pctriiications des corps organifés.
STALACTITES
DES Minéraux. 569
STALACTITES VITREUSES
NON CRISTALLISEES.
J_jES cinq verres primitifs font les matières premières,
clcic|ue!ies feules toutes les fubilauces vitreufes tirent
leur origine, 64. de ces cinq verres Je nature il y en a
trois, le quartz, le IlU - {j)at[i d^ le fcliorl , dont les
extraits font tranfparens , & fe présentent en formes
criflailifces ; les deux autres, /avoir, le mica &: le jafpe
ne produisent que des concrétions plus ou moiiis opaques,
ci. même lorfquc les extraits du quartz, du fel d/j^ath Si
du fchorl le trouvent mêlés avec ceux du jafpe Si. du
mica, ils perdent plus ou moins de leur tranfparence,
& fouvent ils prennent une entière opacité. Le même
effet arrive lorfque les extraits tranfparens de ces pre-
miers verres fe trouvent mêlés de matières métalliques,
qui par leur effence font opaques : les llaladiLes tranf-
parentes du quartz, du feld-fpath & du fchorl, peuNent
Jonc devenir plus ou moins obfcures , Si tout- à- fait
onaques, fuivant la grande ou petite quantité de matières
étrangères qui s y feront mêlées; Si comme ks com-
J>inaifons de ces mélanges hétérogènes font en nombre
inlini, nous ne pouvons faifir dans cette immenfe variété
que les principales différences de leurs réfukats, & eu
préfenter ici les degrés les plus apparens entre lefquels
Minéraux , Tome III, C c c c
570 Histoire Natu re lle
on pourra fuppofcr toutes les nuances intermédiaires
& fuccefTives.
En examinant les matières pierreu(es fous ce point
de vue, nous remarquerons d'abord que leurs extraits
peuvent fe produire de deux manières diiîérentes; la
première , par une exu dation lente des parties atténuées
au point de la difTohnion ; & la féconde, par une
flillation abondante <Sc plus prompte de leurs parties
moins atténuées & non difToutes; toutes fe rapprochent,
fe réuniffent & prennent de la /bliditc à meiure que
îeur humidité s'évapore; mais on doit encore obferver
que toutes ces particules pierreufes peuvent fe dépofer
dans des efpaces vides , ou dans des cavités remplies
d'eau: fi i'cfpace efl vide, le ixxc pierreux n'y formera
que des incruflations ou concrétions en couches hori-
zontales ou inclinées, fuivant les plans fur lefquels il
fè dépofe; mais lor/que ce me tombe dans des cavités
remplies d'eau, où les molécules qu'il tient en difTolu-
tion peuvent fe foutenir & nager en liberté, elles forment
alors des criflallifations qui, quoique de la même effence,
Ibnt plus tranfparentes & plus pures que \es matières
dont elles font extraites.
Toutes les pierres vitrcufes, que nous avons ci-devant
indiquées, doivent être regardées comme des flala(5tites
criftallifées du quartz, du feld-fpath & du fchorl purs,
ou feulement mêlés les uns avec les autres, & fouvent
teints de couleurs métalliques : ces fîaladites font toujours
DES Minéraux, 571
tranfparentes lorfque les fucs vitreux ont toute leur pureté ;
mais pour peu qu'il y ait mélange de matière étrangère,
elles perdent en même temps partie de leur tranfparence
& partie de leur tendance à fe criflallifer , en forte que
la Nature paffe par degrés infenfibles de la criflallifàtion
diftindte à la concrétion confufe , ainfi que de la par-
faite diaphanéité à la demi -tranfparence & à la pleine
opacité : il y a donc une gradation marquée dans la
fuccclTion de toutes ces nuances , & bien prononcée
dans les termes extrêmes ; les ilalaélites tranfparentes
font prcique toutes criftallifées, & au contraire la pliîpart
des llaiaélites opaques n'ont aucune forme de criftalli-
fuion , & l'on en trouve la raifon dans la loi générale
de la crillallifation , combinée avec les effets particuliers
des diiférens mélanges qui la font varier; car la forme
de toute criflallifation efl le produit d'une attraélion
régulière & uniforme entre des molécules homogènes
& fimilaircs; & ce qui produit l'opacité dans les extraits
des fucs pierreux , n'efl que le mélange de quelque
fubflance hétérogène , & fpécialement de la matière
métallique, non fnnplement étendue en teinture comme
dans les pierres tranfparentes & colorées, mais incor-
porée c^ mêlée en fubdance maifive avec la matière
pierreufe : or la puifTance attractive de ces molécules
métalliques, fuit une autre loi que celle fous laquelle les
molécules pierreufès s'attirent & tendent à fe joindre;
ii ne peut donc rélulter de ce mélange qu'ime attraclioii
C c c c ij
57- H ISTO 1 R E N ATU RELLE
confufe dont les tendances divcrfes fe font réciproque-
ment obitaclc , & ne permettent pas aux molécules de
prendre entr'elles aucune ordonnance régulière: & il en
efl de même du mélange des autres matières minérales
ou terreu(ès, trop hétérogènes pour que les rapports
d'attraction puiflènt être les mêmes ou fè combiner
enfemhle dans la même direciion uns fe croifer , &
nuire à l'efFet général de la cridallifation & de la
tranfparence.
Aiin que la criflallifation s'opère, il faut donc qu'il
y .ait allez d'homogénéité entre les molécules pour
qu'elles concourent à s'unir ibus une loi d'affinité corn-
m.une , & en même temps on doit leur fup})ofcr aiïez
de liberté pour, qu'obéiilant à cette loi, elles puifTent
fe chercher, fè réunir oc fc difpofer entr'elles dans le
rapport combiné de leur hgure propre avec leur puif-
fance attractive ; or pour que les molécules aient cette
pleine liberté, il leur faut non - feulement l'e/pace, le
temps & le repos néceffaires , mais il leur faut encore
ie fecours, ou plutôt le foutien d'un véhicule Piuide
dans lequel elles puifTent fe mouvoir fans trop de rélK-
tance, & exercer avec facilité leurs forces d'attradion
réciproques: tous les liquides, & même l'air & le feu,
comme fluides , peitvent fèrvir de foutien aux molé-
cules de la matière atténuée au point de la diffolution.
Le feu primitif fut le fluide dans lequel s'opéra la crif-
lallifation du feld-fpath & du fcliorl'; la criflallifation des
DES Minéraux, 573
régules métalliques s*opère de même à nos feux, par le
rapprochement libre des molécules du métal en fufion
par le fiuide igné. De femblables etiets doivent fë pro-
duire dans le fein des volcans ; mais ca criflalli/àtions,
produites par le feu, font en trcs - petit nombre en
comparai/on de celles qui font formées par l'intermcde
de l'eau : c'efl; en efkt cet élément qui , dans l'état
acltiel de la Nature, efl le grand inflrument & le véhi-
cule propre de la plupart des criflallifations ; ce n'ell
pas que l'air & les vapeurs aqueufes ne /oient auffi pour
les fiibftances fufccptibles de fublimation, des véhicules
également propres, & des liuides très -libres où leur
Griilallifàtion peut s'opérer avec toute facilité ; 6c il paroît
cju'il fe fait réellement ainfi un grand nombre de cril-
tallifations des minéraux renfermés & fublimés dans les
cavités de la terre; mais l'eau en produit infiniment plus
encore, & même l'on peut afTurer que cet élément feul,
forme aélueilement prcfque toutes les criflalli/àtions des
fubfîances picrreufes , vitreufes ou calcaires.
Mais une féconde circonftance effcntielle à laquelle
il paroît qu'on n'a pas fait attention, c'ell qu'aucune
criflaliifation ne peut fe faire que dans un bain fluide,
toujours égal & conflamment tranquille , dans lequel les
molécules diiToutcs nagent en liberté ; & pour que l'eau
puiffe former ce bain,, il efl néceffaire qu'elle fbit con-
tenue en allez grande quantité &. en repos, dans des
cavités qui en fbiem entièrement ou prefque entièrement
574 Histoire Naturelle
remplies. Cette circonftance d'une quantité d'eau qui
puiiTe faire un bain efl fi néccffaire à la cridaili/àtion ,
qu'il ne fèroit pas pofîible fans cela d'avoir une k[ée
nette des effets généraux <Sc particuliers de cette opéra-
tion de la Nature; car la criflalliiàtion, comme on Aient
de le voir, dépend en général de l'accefTion pleinement
libre des molécules les unes vers les autres , & de leur
tranfport dans un équilibre affez parfait pour qu'elles
puiffcnt s'ordonner fous la loi de leur puiffance atiraélive,
ce qui ne peut s'opérer que dans un Huide abondant
& tranquille: <Sc de même, il ne feroit pas poffible de
rendre raifbn de certains effets particuliers de la criflal-
lifation, tel par exemple, que le jet en tout fens des
aiguilles dans un groupe de criftal de rocbe , fans fuppofèr
un bain ou maffe d'eau, dans laquelle puiffe fe fornire
ce jet de criflallifation en tout fens ; car fi l'eau tombe
de la voûte, ou coule le long des parois d'une cavité
vide, elle ne produira que des concrétions ou guhrs ,
néceffairement étendus & dirigés dans le /èul fens de
l'écoulement de l'eau qui fe fait toujours de haut en
bas ; ainfi cet effet particulier du jet des criftaux en
tout fens, auffi-bien que l'efîet général &i combiné de
la réunion des molécules qui forment la criflallifation,
ne peuvent donc avoir lieu que dans un volume d'eau
qui rempiiffe prcfque entièrement & pendant un long
temps, la capacité du lieu où fe produi/ent les criflaux.
Les Anciens avoient remarqué avant nous , que les
DES Minéraux, 575
grandes mines de criflal ne fe trouvent que vers les
liants foinmets des montagnes, près des neiges & des
glaces, dont la fonte qui fe fait contintiellement en-
deifous par la chaleur propre de la terre, entretient un
perpétuel écoulement dans les fentes & les cavités des
rochers; & on trouve même encore aujourd'hui en
ouvrant ces cavités auxquelles on donne le nom de
cr'ijliillicres , des relies de l'eau dans laquelle s'cfl opérée
la criliallilation; ce travail n'a ceiTé que quand cette eau
s'efl écoulée, & que les cavités font demeurées vides.
Les fpaths crillailifés dans les fentes & cavités des
bancs calcaires, fe font formés de la même manière que
les crifiaux dans les rochers vitreux : la figuration de
ces fpaths enrhombes, leur polition en tout fens, ainfi
que le mécanifme par lequel leurs lames fe font fuccef-
livement appliquées les unes aux autres, n'exigent paî>
moins la fluctuation libre des molécules calcaires dan^
im fluide qui leur permette de s'appliquer dans toui
les fens, fuivant les loix de leur attraélion refpcélive;
ainfi toute crillallifàtion , foit dans les matières vitreufès,
foit dans les fubflances calcaires , fuppofe néceffairement
im fluide ambiant & tranquille, dans lequel les molé-
cules diffoutes foient foutenues & puiffent fè rapprocher
en liberté.
Dans les lieux vides au contraire, où les eaux flillantes
tombent goutte :i goutte des parois & des voûtes, les
fucs vitreux & calcaires ne forment ni criflaux ni fpaths
57^ Histoire Naturelle
réguliers, mais feulement des concrétions ou congela^
lions, Icfquelles n'offrent qu'une ébauche & des rudimens
de criliallifation ; la forme de ces congélations efî en
général arrondie , tubuléc , & ne prcjfènte ni faces planes,
ni angles réguliers , parce que les particules dont elles
font compoiccs, ne nageant pas librement dans le fluide
qui les charrie , elles n'ont pu des-lors fe joindre uni-
formément, & n'ont produit que des agrégats confus
fous mi 11'.^ formes indéterminées.
Après cet expofé que j'ai cru néccifairc pour donner
une idée nette de la manière dont s'opère la criftalli/à-
tion, & iaire fèntir en même temps la diiîcreiice effentielle
qui fe trouve entre la formation des concrétions & des
criflallifations , nous concevrons aifément pourquoi la
plupart des ilalaclites dont nous allons donner la defcrip-
tion, ne font pas des crilialliiations, mais des concrétions
demi-tranfparentes ou opaques , qui tirent également leur
origine du quartz, du feld-fpadi à du fchorl.
AGATES,
DES Minéraux.
577
tm
AGATES.
Jtarmi les pierres demi - tranfparentes , les agates, les
cornalines & les farcloines tiennent le premier rang; ce
font, comme les criflaux, des ftaladites quartzeufes, mais
dans lefquelles le fuc vitreux n'a pas été afTez pur, ou
aflez libre pour fè criflallifer & prendre une entière
tranfparence: la denfité de ces pierres fa)^ leur dureté,
leur rcfiftance au feu & à ra6tion des acides, font à
{aj Pefanteur fpécifique du quartz.
2644.6.
du criflal de roche d'Europe.
2654.8.
de l'agate orientale. 26901.
. de l'agate iiue'e. . • 26253.
de l'agate ponc^ue'e. 26070.
de l'agate tachée. . 2.6324.
— — de l'agate veme'e. . 2666y.
—— de l'agate onix ... . 26375.
de l'agate herborifée. 25891.
de l'agate moufleufe. 25991.
-, — de l'agate jafpée ... 263 5 6.
de la cornaline. . . 261 37.
— de la cornaline pâle. 26301.
— de la cornaliiie pondluée ,
26120.
filmé fau;<. Tome UL
Pefanteur fpécifique de la corna-
line veinée. ... 26234.
de la cornaline onix. 26227.
——de la cornaline herborifée.;
26133.
de la cornaline en flaladite.
25977.
■ de la fardoine.... 26025.
de la fardoine pâle. 26060.
— — de la fardoine poni^uée.)
2621 5.
——— de la fardoine veinée. 25951»
de la fardoine onix . 2 5949.
— — de la fardoine herborifée.;
25988.
—— de la fardoine noirâtre.;
26284,
Voyez la Tahk de M. Brijfoni
578 Histoire Natu relle
très -peu -près les mêmes que celles du quartz & du
criftal de roche: la très-petite différence qui fe trouve
en moins dans leur pefanteur fpécifique, relativement à
celle du criflal , peut provenir de ce que leurs parties
conftituantes n'étant pas aufTi pures, n'ont pu fe rap-
procher d'aufli près ; mais le fond de leur fubflance efl
de la même efTence que celle du quartz ; ces pierres
en ont toutes les propriétés, & même la demi-tranf-
parence, en forte qu'elles ne diffèrent des quartz de
féconde formation que par les couleurs dont elles font
imprégnées, & qui proviennent de la diffolution de
quelque matière métallique qui s'efl mêlée avec le fuc
quartzeux ; mais loin d'en augmenter la maffe par un
mélange intime, cette matière étrangère ne fait qu'en
étendre le volume en empêchant les parties quartzeufes
de fe rapprocher autant qu'elles fe rapprochent dans les
criflaux.
Les agates n'afïèétent pas autant que les cailloux la
forme globuleufe ; elles fe trouvent ordinairement en
petits lits horizontaux ou inclinés, toujours affez peu
épais & diverfement colorés ; & l'on ne peut douter
que ces lits ne fbient formés par la flillation des eaux;
car on a obfervé dans plufieurs agates des gouttes d'eau
très-fenfibles (bj ; d'ailleurs, elles ont les mêmes caractères
(b) A Conftantinople, M. i'AmbafTadeur me fit voir des manches
de couteaux d'agate, dont l'un avoit dedans une eau qui jouoii, &
DES AI I N É R AV X. 579
que tous les autres fécJimens de la flillaiion des eaux;
on donne le nom (ïonix à celles qui préfenieut diffé-
rentes couleurs en couches ou zones bien diflindes :
dans les autres, les couclies font moins apparentes, &
les couleurs font plus brouillées, même dans chaque
qui femhloit à un ver noir qui fe feroit remué. Voyages de Atori'
conys ; Lyon, j^^j, page ^ 2 (j , Première partie. — Je conjedure ,
dit M. de Bondaroy, que dans les agates la furface extt'rieure
s'ctant durcie la première , l'eau pétrifiante %'e'ii dépofée inté-
rieurement; cette eau a prefque rempli la capacité de ces pierres,
il eft reflé une bulle d'air qui a produit le même effet que dans les
tubes qui fervent de niveau ; une preuve que cette bulle efl: de l'air
qui nage dans l'eau, c'eft qu'en tournant la pierre, la bulle plus
légère que l'eau, monte & gagne la partie la plus élevée de la pierre;
fi vous la retournez, la bulle, du bas où vous l'avez portée, remonte
encore à la partie fupérieure de l'agate ; la bulle change un peu de
forme dans les différens mouvemens qu'on lui fait éprouver ; enfin ,
ces pierres produifent le même eflTet que les niveaux d'eau à bulles
d'air; & je crois que ceux qui ont parlé de ce fait dans les criftaux,
ne l'ont pas expliqué de cette manière faute d'avoir été à portée
d'examiner des pierres où il fe rencontroit J'ai vu le même
fait dans les morceaux d'ambre ; enfin, je l'ai obfervé dans une partie
de glace où ii s'éioit rencontré une bulle que l'on pouvoit faire
mouvoir ....
Cette eau fe dépofe avec le temps, & forme des criftallifations
dans l'intérieur des agates, dès-lors le phénomène difparoît , & je
n'ai plus trouvé d'eau dans les pierres qui n'avoient plus de bulles. . . .
Je crois devoir ajouter ici qu'au lieu de bulles d'air ou d'eau , je
connois des agates qui, dans leur intérieur, renferment des grains
de fable qui fe meuvent dans ces pierres. Voyei les Mémoires de
V Académie des Sciences, année ijy^'T^è^^ éSyàrfuiv.
Dddd ij
580 Histoire Natu relle
couche, & il n'y a aucune agate, fï ce n'efl en petil
volume, dont la couleur foit uniforme & la mcme clans
toute Ton cpaifTeur, ce qui prouve que ia matière dont
les agates font formées n'efl pas fimple, & que le quartz
qui domine dans leur compofition , efl mêlé de parties
terraifès ou métalliques qui s'oppofent à la criflallifàtion,
ÔL donnent à ces pierres les diverfes couleurs & leâ
teintes variées qu'elles nous préfentent à la furface &
Jans l'intérieur de leur mafTe.
Lorfque le fuc vitreux qui forme les agates fe trouve
en liberté dans un efpace vide, il tombe fur le fol oii
s'attache aux parois de cette cavité, & y forme quel-
quefois des maffes d'un aifez grand volume (c) ; il prend
(c) Du côté de Pinczovia & de Niefvetz en Lithuanie, on trouve
quelques agates onix , des fardoines , des calcédoines , & une pierre
qu'on pourroit peut-être regarder comme une aventurine. Le fond
de cette pierre, dit M. Guettard , efl: blanc, gris, brun, rouge ou
de quelqu'autre couleur, & parfemé d'une quantité de petites paillettes
argentées ou dorées. J'ai vu de toutes ces pierres travaillées en taba-
licres, pommes de canne, poignées de fabre, taflès, foucoupes, &c,
en un mot on fait, dans les manufadlures du prince Radzivil, travailler
ces pierres avec beaucoup de foin, & on leur donne un trts-beau
poli ; il eft depuis peu lorti de cette manufadure , un c^tbaret à café
dont le plateau eft d'un feul morceau d'une de ces pierres , & affez
grand pour qu'on puifle y placer fix taiïes avec leurs foucoupes,
la cafetière, & même unethéyère, qui font tous d'une pareille pierre;
ce cabaret a été préfenté au roi de Pologne par le prince Radzivil,
J^. Guettard , Mémoires de V Académie des Sciences, année 17^2^
page 2^^,
DES Minéraux. 581
les mêmes formes que premient toutes les autres con-
crétions ou flala<flites ; mais lorfqu'il rencontre des corps
figurés &. poreux , comme des os , des coquilles ou
des morceaux de bois dont il peut pénétrer la fubfiance,
ce fuc vitreux produit, comme le fuc calcaire, des
pétrifications qui confervent & préfentent tant à l'extérieur
qu'à l'intérieur, la forme de l'os ("JJ, de la coquille &
du bois (^^/.
I - ■ ... I ■ ■ ^
{dj J'ai vu dans un Cabinet à Livourne, dit M. de la Condamine,
un fragment de mâchoire d'éléphant, pétrifié en agate, pefant près
de vingt livres. J'ai parlé ailleurs d'une dent molaire ( on ne fait de
quel animal ) du poids de deux ou trois livres , pareillement con-
vertie en agate , trouvée au Tucuman , dans l'Amérique méridionale
où il n'y a point d'éléphans. Mémoires de l'Académie des Sciences,
cnnée 17^7, jxigi 34^-
(e) Ce qui m'a le plus frappé à Vienne, dans le Cabinet de l'Em-
pereur, dit M. Guettard, eft une cjuantité de morceaux de bois
pétrifié , qui [font devenus plus 'ou moins agates , & qui varient par
les couleurs; les uns font bruns, d'autres blanchâtres, gris, ou autre-
ment colorés ; un de ces morceaux qui efl: agatifié dans le centre
& par un bout, eft encore bois par l'autre bout; on prétend même
qu'il s'enflamme dans cette partie, nous n'en fimes point l'expérience,
elle fut propofée. Ces bois pétrifiés font ordinairement des rondins
de plus d'un demi-pied ou d'un pied de diamètre; quantité d'autres
ont plufieurs pieds de longueur , & font d'une grofleur confidérable^
ils prennent tous un poli beau & brillant. Idem, année 176^,
ipage 2rj. — Dans les terres du duc de Saxe - Cobourg , dit M.
Schepflin , qui font fur les frontières de la Franconie & de la Saxe,
à quelques lieues de la ville de Cobourg même , on a déterré depuis
peu, à une petite profondeur, des arbres entiers pétrifiés, mais pétrifiés
4 un point de perfedion ; qu'en uavaillant on trouve que cela fait
582 Histoire Naturelle
Quoique les Lapidaires, <Sc d'après eux nos Naturali/îes,
aient avancé qu'on doit diflinguer les agates en orientales
& occidentales, il efl néanmoins très-certain qu'on trouve
dans l'Occident, & notamment en Allemagne, d'auffi
belles agates que celles qu'on dit venir de l'Orient, &
de même, il efl très -fur qu'en Orient la plupart des
agates font entièrement femblables à nos agates d'Europe:
on peut même dire qu'on trouve de ces pierres dans
toutes les parties du monde, & dans tous les terreins
où le quartz & le granit dominent, au nouveau continent
comme dans l'ancien, &. dans les contrées du Nord
comme dans celles du Midi ; ainfi la diflinétion d'orien-
tale & d'occidentale ne porte pas fur la différence du
climat , mais feulement fur celle de la netteté <&. de l'éclat
une pierre aufli belle & aufli dure que l'agate. Les princes de Saxe
qui ont pafle ici m'en ont donné quelques morceaux , dont j'ai
l'honneur de vous envoyer deux pour le Cabinet du Jardin royal:
ils m'ont montré de belles tabatières , des couteaux de chafTe & des
boîtes de toutes fortes de couleurs , faites de ces pétrifications : fi les
morceaux ne font pas de conféquence , vous verrez pourtant par-là
mon attention à fatisfaire à vos defirs. Lettres de Ai. Schepfiin à
Aï. de Buffon ; Strajhourg , 2 y Septembre iy^6. — On a trouvé,
dit M. Neret fils, dans une montagne, qui eft auprès du village de
Séry, en creufant à la fource d'une fontaine, une très-grande quantité
de bois pétrifié qui étoit dans un fable argileux. Ces bois ne font
point efFervefcence avec les acides; Oi\ y diltingue très-bien l'endroit
qui a été recouvert par l'écorce, il efl toujours convexe, & confi-
dérablement piqué de vers qui , après avoir fiUonné entre l'écorce
& le bois, traverfent toute l'épaifleur du morceau, & y font agatifés.
Journal de Phyfique ; Avril i y8 1 , page ^ 0 ^ .
DES Minéraux. 583
de certaines agates plus belles que les autres: néanmoins
i'eflence de ces belles agates efl la même que cdk des
agates communes ; car leur pefanteur fpéciiique & leur
dureté font auffi à peu-près les mêmes ("fj.
L'agate, fuivant Théophrafte, prit Ton nom du fleuve
Achates en Sicile, où fiirent trouvées les premières
agates; mais l'on ne tarda pas à en découvrir en diverfes
autres contrées, & il paroît que les Anciens connurent
les plus belles variétés de ces pierres, puifqu'ils les
avoient toutes dénommées (g) , & que même dans ce
nombre, il en efl quelques-unes qui femblent ne fe plus
trouver aujourd'hui (h): quant aux prétendues agates
odorantes, dont parlent ces mêmes Anciens (i) , ne
(f) Voyez ci-deflus la Table des pefameurs Ipccifiques des diverfes
agates.
(g) Pha(facates , cerachates, fardachatcs , harnachâtes , Uucachaies r-
dendrochates , corallochaies , à^c.
(h) Entr'auires celle qui, félon Pline, étoit parfemée de points d'or
(à moins que ce ne foit i'aventurine ), comme le lapis ( Pline dit le
faphir ; mais nous verrons ci-après que Ion faphir elt notre lapis),
Ù" fe trouvait abondamment dans l'île de Crète. Celles de Lefios & de
JVIefsene , ainfi que du Alont (Eta Ù" du Alont Parnajfe qui , par
l'éclatante variété de leurs couleurs , fembloient le difputer à l'émail des
Jleurs champêtres ; celle d'Arabie, qui, excepté fa dureté, avoit toute
i' apparence de l'ivoire Ù' en offroit toute la blancheur. Pline, liv. xxxvii,
n." 54.
(i) Aromatites & Ipfa in Arabiâ traditur gigni , fed & in ^Egypto circa
Pifas ubique lapidofa Ù" myrrhœ coloris & odoris , ob hoc Riginis fre-
quentata. Plin. loc. cit, & auparavant il avoit dit, autachates , cùm
uritur, wyrrham redolcns.
584 Histoire N aturelle
doit - on pas les regarder comme des bitumes con-
crets, de la nature du jayet, auquel on a quelquefois
donné, quoique très - improprement , le nom (ï agate
7ioire ! ce n'efl pas néanmoins que ces fucs bitumineux
ne puiflent s'être infjnués, comme fubflance étrangère,
ou même être entrés, comme parties colorantes, dans
la pâte vitreufe des agates lors de leur concrétion.
M. Dutens afTure à ce fujet, que fi Y on racle dans Jei
agates herborifées les linéamens qui en forment i'her-
borifation, & qu'on en jette la poudre fur des charbons
ardens, éXç, donne de la fumée avec une odeur bitu-
mineufè. Et à l'égard de ces accidens ou jeux d'her-
borifations, qui rendent quelquefois les agates fnigulières
& précieufès, on peut voir ce que nous en dirons
çi-après à l'article des cailloux.
CORNALINE.
DES Minéraux. 585
CORNALINE.
V^OMME les agates d'une feule couleur font plus rares
que les autres, on a cru devoir leur donner des noms
particuliers : on appelle Cornalines , celles qui font d'un
rouge pur; fardoincs, celles dont la couleur ed; jaune
ou d'un rouge mêlé de jaune ; yrafts , les agates vertes ;
& calcédoines, les agates blanches ou d'un blanc-bleuâtre.
Quoique le nom de cornaline , que l'on écrivoit autre-
fois carnéole , paroiffc défigner une pierre couleur de
chair, & qu'en effet, il fe trouve beaucoup de ces
agates couleur de chair ou rougeâtres , on reconnoît
néanmoins la vraie cornaline à fà teinte A'mw rouge pur,
^ à la tranfparence qui ajoute à fon éclat ; les plus belles
cornalines font celles dont la pâte eft la plus diaphane, &
dont le rouge a le plus d'intenfitc: & de ce rouge inten/e
jufqu'au rouge - clair & couleur de chair, on trouve
toutes les nuances intermédiaires dans ces pierres.
La cornaline n'elt doiic qu'une beJJe agare plus ou
moins rouge , & la matière métallique qui iui donne
cette couleur n'augmente pas fa denlité , &. ne lui ôte
pas /a tranfparence ; c'efl ce qui la diflingue des cailloux
rouges -opaques, qui font en général de même effence
que les agates, mais dont la fubiiance eft moins pure,
& a reçu fa teinture par àt^ parties métalliques plus
jrrolTières & moins atténuées : ce font les rouilles ou
ATméraux, Tome lîL E e ee
586 Histoire Naturelle
chaux de fer, de cuivre, &c. plus ou moins difToutes
qui donnent la couleur à ces pierres, & l'on trouve
toutes les nuances de couleur , & même toutes les
couleurs différentes dans les cailloux auffi-bien que dans
les agates; il y a même plufieurs agates onix , dont les
différens lits préfentent fuccefTivement de l'agate blanche
ou noire, de la calcédoine, de la cornaline, &c. on
recherche ces onix pour en faire des camées; les plus
beaux font ceux dont les reliefs font de cornaline fur
un fond blanc.
Il en eft des belles cornalines comme des belles agates;
elles font auffi rares que les autres font communes : on
trouve fouvent des ftala6lites de cornalines en mamelons
accumulés & en affez grand volume ; mais ces cornalines
font ordinairement impures, peu tranfparentes , & d'un
rouge faux ou terne. On connoît auffi des agates qui
font pQn(5tuées & comme femées de particules de cor-
nal'ine , formant des petits mamelons rouges dans la
fubftance de l'agate , & certaines cornalines font elles-
mêmes femées de points d'un rouge plus vif que celui
de leur pâte ; mais la nature de toutes ces pierres eft
abfolument la même ; & l'on trouve des cornalines dans
ia plupart des lieux d'où l'on tire les agates, foit en
Afie (<^) , foit en Europe &. dans les autres parties
du monde.
(a) Dans VYémen , fur le chemin entre Taœs & le Mont Sumara,
©n voit ia pierre akjk'jemani , qui eft d'un rouge-foncc , ou plutôt
DES Minéraux. 587
(Tun brun- clair, qu'on nomme quelquefois fimpleinent yV/w^w/' ou
akjk , on la tire principalement de la montagne Hirran prés de la
ville Damar. Les Arabes la font enchâfler, &. la portent au doigt ou
au bras, au-deflus du coude, ou à la ceinture au-devant du corps,
& on croit qu'elle arrête le fang quand on la met fur la plaie. . . .
On trouve louvent des pierres fort reflemblantes à Vakjk ou à la
cornaline, parmi celles de Camboye , qu'on nomme pierre de mockha,
& dont on porte une grande quantité de Surate , tant à la Chine
qu'en Europe. Defcr'ipîion de l'Arabie, par AI. Niebuhr, page 12^.
Les plus belles cornalines font celles que l'on apporte des environs
de Babylone ; enluite viennent celles de Sardaigne ; les dernières
font celles du Rhin, de Bohème & de Siléfie; pour leur donner le
plus grand brillant, on met defibus, en les montant, une feuille
d'argent. Diélionnaire Rncydopédique de Chambcrs.
E e e e i j
5S3 Histoire Naturelle
S A R D 0 I N E.
L
A Sardoine ne diffère de la cornaline que par fa
couleur qui n'eft pas (ï\m rouge pur, mais d'un rouge-
orangé, & plus ou moins mêlé de jaune; néanmoins
cette couleur orangée de la fardoine, quoique moins
vive, efl plus fiiave, plus agréable à l'œil que ie rouge
dur & fcc de la cornaline ; mais comme ces pierres
font de la même effence, on paiïe par nuances de
l'orangé le plus foible au rouge le plus intenfé, c'efî-
à-dire," de la fardoine la moins jaune à la cornaline la
plus rouge , &i l'on ne diflingue pas l'une de l'autre
dans les teintes intermédiaires entre l'orangé & le rouge,
car ces deux pierres ont la même tranfparence, & leur
denfité, leur dureté & toutes leurs autres propriétés font
les mêmes ; enfin , toutes deux ne font que de belles
agates teintes par le fer en dilTolution.
La fardoine efl très-anciennement connue ; Mithri-
date avoit, dit-on, ramaffé quatre mille échantillons de
cette pierre, dont le nom, fuivant certains Auteurs,
vient de celui de l'île de Sardaigne , où il s'en trouvoit
en affez grande quantité : il paroît que cette pierre étoit
en grande eflime chez les Anciens (a) ; elle efl en effet
(a) Polycrate, tyran de Samos, croyoit expier fuffifamment le
bonheur dont la fortune s'étoit plue conflamment à le combler , par
le facrifice volontaire d'une fardoine qu'il jeta dans la mer, & qui
DES Minéraux, 589
plus rare que la cornaline , & fe trouve rarement en aiiffi
grand \'oiume.
fut retrouvée dans les entrailles d'un poiflbn deiliné pour la table de
ce tyran. Pline, livre xxxvil, chap, i.
FRASE.
V^ETTE pierre a été auffi célébrée par les Anciens;
c'eft une agate verte ou verclâtre , fouvent tachée de
blanc, de jaunâtre, de brun, & qui cfl quelquefois
aufTi tranfparente que les belles agates dont elle ne diffère
que par le nom: les Prafes ne font pas fort communes,
cependant on en trouve non - feulement en Afic, mais
en Europe, & particulièrement en Siléfie. M. Lehman
a donne Thifloire & la defcription de cette prafe de
Siléfie, ainfi que de la chryfoprafe du même pays, qui
n'efl qu'une prafe dont la couleur verte eft mêlée de
jaune faj. Ce favant Minéralogifle dit qu'on trouve les
prafes & les chryfoprafes dans une terre argileufe verte,
& fouvent mclée d'opales , de calcédoines & d'afbcfle ;
<Sl comme elles font à très-peu-près de la même pefan-
leur fpécifique f/>J^ & qu'elles ont Ja même dureté, Sl
prennent le même poli que les agates, on doit les mettre
{aj Mémoires de l'Académie de Berlin, ûnna i /JJ'
(b) La pefanteur fpécifique de l'agate o^entale eft de 250^1, &
celle de la prafe eft de 2 5 8 o 5 .
590 Histoire Naturelle
au nombre des agates colorées ; la cornaline l'efl de
rou'T-e, la fardoine de jaune-orange, & la prafe l'eft de
vert. M. Dcmefte penfe que cette couleur verte de la
prafe, provient du mélange du cobalt, parce que cette
pierre étant fondue avec deux parties de borax elle
produit un beau verre bleu (c) ; mais peut-être cette
couleur bleue provient du borax qui , comme je l'ai
dit (d) , contient des parties métalliques; on pourroit
s'affurer du fait en fondant la prafe fans borax, car fi
elle donnoit également un verre bleu , l'opinion de
M. Demefle feroit pleinement confirmée ; mais il efl
à croire que la prafe feroit, comme l'agate, très-réfrac-
taire au feu, & qu'on ne pourroit la faire fondre fans
addition, foit du borax ou d'un autre fondant, & dans
ce cas, il faudroit employer un fondant purement falin
qui ne contînt pas , comme le borax , des parties
métalliques.
Au refle, quelques Naturalises ont donné le nom de
-prafe à la prime d'émeraude qui n'efl point une agate,
mais un criflal vert, défectueux, inégalement coloré , &
dont certaines parties plus parfaites que les autres, font
de véritables & belles émeraudes ; le nom de j^rafe a
donc été mal appliqué à cette fubftance qui n'eft qu'une
(c) Lettres de M. Demefle, &c. tome I, pages 48^ & j^S ^ .
(d) Voyez l'article du Borax dans le fécond volume de cette
hiftoire des Minéraux.
DES Minéraux. 591
émeraude imparfaite afTcz bien défignce par la dénomi-
nation de prime ou matrice d'émeraude.
ONYX.
J_jE nom iVOnyx (a) , qu'on a donné de préférence
aux agates dont les lits font de couleurs différentes ,
pourroit s'appliquer affez généralement atomes les pierres
dont les couches fuperpofées font de diverfes fubflances
ou de couleurs différentes. Théopliraffe a caradcrifc
l'onyx, en difant qu'elle eft variée alternativement de
blanc «Se de brun (b) ; mais il faut obferver que quel-
quefois les Anciens ont donné improprement le nom
d'^//>'X à l'albâtre, & c'efl faute de l'avoir remarqué que
plufieurs iModernes fe font perdus dans leurs conjeétures
au fujet de l'onyx des Anciens , ne pouvant concilier
des caractères qui en efîét appartiennent à des fubflanccs
très-différentes.
(a) Onyx en Grec, fignifie ongle; ik. l'imagination des Grecs n'étoit
pas reflce en défaut fur cette dénomination pour lui former une
origine élégante & mythologique. Un jour, difoient - ils , l'Amour
trouvant Venus endormie, lui coupa les ongles avec le fer d'une de
Ces flèches, & s'envola; les rognures tombèrent fur le fable du rivage
de l'Inde; & comme tout ce qui provient d'un corps célefle ne peut
pas périr , les Parques les ramafsèrent foigneufement , & les chan-
gèrent en cette forte de pierre qu'on appelle onyx, Voyez Robert
de Berquen. AlerveiHes des Indes, page (f i ,
(h) Lapid. & gemm, n." y y.
592 Histoire Naturelle
De quelque couleur que foieiit les couches ou zones
dont font compofccs les onyx , pourvu que ces mêmes
couches aient ime certaine régularité, la pierre n'en cfl
pas moins de la cîafTe des onyx , à moins cependant
qu'elles ne foient rouges ; car alors la pierre prend le
nom de fardonyx o\\ fdni aine -onyx (c): ainii la di/po-
fition des couleurs en couches ou zones fait le principal
cara6lère des onyx, &: les diflingue des agates {jmp/es
qui font bien de la même nature, & peuvent offrir les
mêmes couleurs, mais confu/es, nuces ou difpofées par
taches &. par veines irrégulières.
Il y a des jafpcs, des cailloux opaques, &. même des
pierres à fuld, dans lefquels on voit des lits ou des
veines de couleurs différentes , & qu'on peut mettre au
jiombre des onyx : ordinairement les agates-onyx qui ,
de toutes les pierres onyx font les plus belles, n'ont
néanmoins que peu de tranfparence , parce que les
couches brunes, noires ou blanches & bleuâtres de ce§
agates font prefque opaques, & ne laiffent pas aperce-
voir la tranfparence du fond de la pierre fur laquelle
ces couches font fuperpofées parallèlement ou concen-
triquement , & prefque toujours avec une cpaiffeur égale
dans toute l'étendue de ces couches. II y a auffi des
onyx que l'on appelle agates œillces, &. que les Anciens
avoient diflinguées par des dénominations propres: ils
(c) Hill. page 12 2,
nommoient
D E s M I N É R A U X, 595
nommoicnt trwphtalmos & lycophtalmos (d) , celles qui
préfeiitoieiu la forme de trois ou quatre petits yeux
rouges, & clonnoient le nom A' homimodes (e) , k une
agate qui préfentoit un cercle de couleur d'or au centre
duquel étoit une tache verte.
Les Grecs f/J^ qui ont excellé dans tous les beaux
Arts , avoient porté à un haut point de perfedlion la
gravure en creux & en relief fur les pierres ; ils reclier-
choient les belles agates onyx pour en faire des camées;
il nous rcfte plufieurs de ces pierres gravées dont nos
Connoilfeurs ne peuvent fe laffer d'admirer la beauté
du travail, la correction du deflln, la netteté Si la iineife
du trait dans le relief, qui fe détache fi parfaitement du
fond de la pierre qu'on ie croiroit fait à part, & enfuite
collé fur cette même pierre: ils choififfoient pour ces
beaux camées les onyx blanches & rouges , ou de deux
autres couleurs qui tranchoient fortement l'une fur
l'autre. Il y a plufieurs agates qui n'ont que deux couches
('(IJ Plia. liù. XXXVII, n*' yi & J2.
(e) Idem , w.* 60.
(f) Plufieurs Artiftes Grecs s'immortalisèrent par îa gravure fur
pierres fines. Pline nomme Apoiionide, Cronias , Diofcoride qui
grava la tête d'AuguHe, laquelle fervit de fceau aux Celars ; mais le
premier de ces Ariirtes, ajoute-t-il , fut Pyrgotèle ; & Alexandre,
par le même Édit où il dêfeiidoit à tout autre qu'à Appelle de le
peindre, & à tout autre qu'à Lyfippe de modeler faftatue, n'accordoit
qu'au feul Pyrgotèle l'honneur de graver fon effigie. Voyc^^ Pline ,
l'iv. XXXVII , n.' 4.
Aïinéraus , Tome ÎIL F ff f
594 Histoire Naturelle
ou lits de couleurs différentes ; mais on en connoit
d'autres qui ont trois & même quatre lits bien dif-
tinds (g) , du brun profond & noir, du blanc mat, du
bleu-clair & du jaune - rougeâtre ; ces onyx de trois &
quatre couleurs font plus rares , cSl font en plus petit
volume que celles de deux couleurs qui fe trouvent
commimément avec les autres agates: les Anciens tiroient
de l'Egypte les plus belles onyx, & aujourd'hui \'oxi
en trouve dans pîufieurs provinces de l'Orient, & par-
ticulièrement en Arabie (h),
(g) Lycophtalmos quatuor efr coîorum ex rut'ilo ù' fanguïneo in mcdio
vigrum candido c'iugitur ut luporum cculi , illis per omnia fimilis. —
Triophtalnios très hominis fimul oculos exprïmens. PJin. lib. XXXVii ,
n. 71 & 72. — Horm'inodes ex argumenta viridïtatïs in candidâ gemma
vel nigrâ & aliquando p/illidâ , ambiente circula aurei coloris appellatur.
Idem, n.° 60.
(h) On trouve des onyx dans VYemen ; on voit beaucoup de ces
pierres dans /es chemins, entre Tms & le mont Sumara: Aycfcha ,
Ja femme bien aimée de Mahomet, avoit un collier de ces pierres peu
eflimées aujourd'hui. Defcriptim de l'Arabie , par Al, JSiebuhr .
page I2J,
DES Minéraux. 595
l'jA.iiBJi-ii m^i.' 'rtai
CALCÉDOINE.
JLi A Calcédoine cfl encore une agate, mais moins belle
que la cornaline, la fardoine & la prafe; elle efl au/Ti
moins tranfparente , & fa couleur efl indécife, iaiteufè &
bleuâtre; cette pierre eft donc fort au-de(fous, non-feu-
Jement des cornalines Si. des fardoines, mais même des
agates qui ne font point laiteufes , Sl dont la demi-tranf-
parence eft nette; auffi donne-t-on le nom de calcéJoîne
k toute agate dont la pâte efl nuageufe & blanchâtre.
Les calcédoines en petites maffes , grolTes comme
des lentilles ou des pois , font très - communes & fe
trouvent en immenfe quantité ; j'en ai vu par milliers
dans des mines de fer en grains; elles y étoient elles-
mêmes en petits grains arrondis , qui paroifToient avoir
été ufés par le frottement dans leur tranfport par le
mouvement des eaux ; ia plupart n'étoient donc que des
débris de maffes plus grandes ; car on trouve com-
munément les calcédoines en flaladites d'un affez grand
volume , tantôt mamelonnées , & tantôt en lames apla-
ties; elles forment fouvent la bafe des onix dans Icf-
quelles on voit le lit de calcédoine fiarmonté d'un lit
de cornaline ou de fardoine ; les calcédoines font auffi
quelquefois ondées ou ponduées de rouge ou d'orangé,
& ih rapprochent par-là des cornalines & des fardoines;
pliais les onix les plus eflimées , Sl dont on fait les plus
Ffffi/
59^ Histoire Natv relle
beaux camées, font celles qui, fur un lit d'agate pure-
ment blanche, portent un ou plufieurs lits de couleur
rouge , orangée , bleue , brune ou noire , de couleurs
en un mot , dont les couches différentes tranchent
vivement & nettement i'épaiiïeur de la pierre ; ordi-
nairement la calcédoine eft laiteufë, blanche ou bleuâtre
dans toute fa fubftance. On en trouve de cette forte
de très -gros & grands morceaux, qui paroilfent avoir
fait partie de couches épaiffes Gaffez étendues: les plus
beaux échantillons que nous en connoiiïions, ont été
trouvés aux îles de Feroë, & Ton peut en voir un de
fix à fept pouces d'épaiiïeur au Cabinet du Roi. On
diftingue dans ce morceau , des couches d'un blanc
auffi mat & auffi opaque que de l'émail blanc , & d'autres
qui prennent une demi - tranfparence bleuâtre. Dans
d'autres morceaux, cette pâte bleuâtre offre des reflets
& un chatoyement qui iont reflembler ces calcédoines à
des girafols (a) ^ Si les rapprochent de l'opale, laquelle
femble participer en effet de la nature de la calcédoine,
ainfi que nous l'avons dit à fon article.
^aj Cette eipèce de calcédoine bleuâtre & à reflets, paroîi défjgnée
dans la notice fuivante : « On tire de la montagne de Tougas , des
» agates de différentes efpèces , & quelques-unes d'extraordinairement
j> belles , d'une couleur bleuâtre, afiez femblables au faphir: on en
» tire auffi des cornalines & des jafpes. Cette montagne eft à l'extré-
» mité feptentrionale de la grande province d'Osju au Japon , vis-à-
vis du pays de Yeço w. H'ijhire Naturelle du Japon, par Kc£mpfer ;
la Haye, i y 2 c) , tome I, page pj.
DES Minéraux. ^ç^-j
Au refte , les calcédoines mélangées de pâte d'agate
commune , ou les agates mêlées de calcédoine , font
beaucoup plus communes que les calcédoines pures;
de même que les agates, fardoines & cornalines pures,
font infiniment plus rares que les agates mêlées &
brouillées de ces diverfes pâtes colorées ; car la fubf-
tance vitreufe étant la même dans toutes les agates, &
les parties métalliques ou terreufes colorantes , ayant pu
s'y mélanger de mille & mille manières , il n'efl point
étonnant que la Nature ait produit avec tant de variété
les agates mêlées de diverfes couleurs, tandis que les
agates d'une feule couleur pure fans mélange, & d'une
belle tranfparence , font aflez rares & toujours en très-
petit volume.
593 Histoire N aturelle
PC I -m- J.l-JT ■■■■. J-' l.
PIERRE HYDROPHANE.
V^ETTE pierre fc trouvant ordinairement autour de h
calcédoine, doit être placée immédiatement après q\\q\
toutes deux font corps enfemble dans le même bloc,
&. cependant différent l'une de l'autre par des caradtères
effentiels: les Naturalifles modernes ont nommé cette
pierre oculus miuidi , &. ils me paroifient s'être mépris
lorfqu'ils l'ont mife au nombre des agates ou calcé-
doines ; car cette pierre hydropliane n'a point de tranf^
parence, elle eit opaque <Sc moins dure que l'agate, &
elle en diffère par la propriété particulière de devenir
tranfparente , & même diaphane lorfqu'on la laiffe tremper
pendant quelque temps dans l'eau; nous lui donnons
par cette raifbn le nom de pierre hydropliane : cette
propriété, qui fuppofe i'imbibition intime & prompte
de l'eau dans la fubfîance de la pierre , prouve en même
temps que cette fubftance efl d'une autre texture que
celle des agates dont aucune ne s'imbibe d'eau; enlin,
ce qui démontre plus évidemment combien la flruéture
ou la compofition de cette pierre hydropliane diffère de
celle des agates ou calcédoines, c'efl la grande diffé-
rence qui fe trouve dans le rapport de leurs denfités (a) ,
(a) La pefanteur fpécifique de l'agate eft de 25901 , & celle de
la pierre oculus mundi ou hydrophane, n'efl que de 22(jjc. Voye^
la Table de M. Brijon.
DES Minéraux. 599
celle de l'hydrophane n'efl que d'environ 23000, tandis
que celle des agates & calcédoines eft de 26 à 27000;
il eft vrai que la fub fiance de toutes deux efl quartzeufe,
mais la texture de i'hydroph^ne eft poreufe comme une
éponge, (Se celle des agates &i calcédoines efl folide &
pleine ; on ne doit donc regarder cette pierre hydro-
phane <Sc poreufe, que comme un agrégat de particules
ou grains quartzeux qui ne fe touchent que par des
points, & laifTcnt entr'eux des interflices continus qui
font la fondion de tu)'aux capillaires, & attirent l'eau
jufque dans l'intérieur &. au centre de la pierre ; car
fa tranfparence s'étend & augmente à mefure qu'on la
laifTe plus long-temps plongée dans l'eau, elle ne devient
même entièrement diaphane qu'après un afTez long féjour,
foit dans l'eau pure , foit dans toute autre liqueur ; car
le vin, le vinaigre, i'efprit-de-vin , & même les acides
minéraux, produifent fur cette pierre le même effet que
l'eau ; ils la rendent tranfparente fans la diffoudre ni
l'entamer, ils n'en dérangent pas la texture, & ne font
qu'en remplir \es pores dont enfuite ils s'exhalent par
le feul delféchement ; elle acquiert donc ou perd du
poids à mefure que le liquide la pénétra ou l'abandonne
en s'exhalant, & l'on a obfervé que les liquides, aidés
de la chaleur , la pénètrent plutôt que les liquides
froids.
Cette pierre qui n'étoit pas connue des Anciens/
navoit pas encore de nom dans le fiècle dernier: ïï
6oo Histoire N atu relle
eft dit dans les Éphémérides d'Allemagne, année ify2,
qu'un Lapidaire, qui avoir trois de ces pierres, fit prc*
fent d'une au Confui de Marienbourg, & la lui donna
comme une pierre précieufè qui n'avoit point de nom;
Tune de ces pierres, ajoute le Relateur, étoit encore
dans fa gangue de quartz ; celle qui fut donnée au
Confui de Marienbourg , n'étoit que de la groffeur
d'un pois & d'une couleur de cendre; elle étoit opaque,
& lorfqu'elle fut plongée dans l'eau, elle commença au
bout de ^\^ minutes , à paroître diaphane par les bords ;
elle devint d'un jaune - d'ambre ; elle pafTa enfuite du
jaune à la couleur d'améthyfte , au noir, au blanc, &
enfin elle prit une couleur obfcure, nébuleufe & comme
enfumée; tirée de l'eau elle revint à fon premier état
d'opacité, après s'être colorée fucceiïivement, & dans
un ordre inver(è des mêmes teintes qu'elle avoit prifes
auparavant dans l'eau (b). Je dois remarquer qu'on n'a
pas vu cette fucce/Tion de couleurs fur les pierres qui ont
été obfèrvées depuis ; elles ne prennent qu'une couleur
&. la confervent tant qu'elles font imbibées d'eau.
M. Gerhard, favant Académicien de Berlin, a fait
beaucoup d'obfervations fur cette pierre hydrophane (c) ,
il dit avec raifon qu'elle forme l'écorce qui environne
(b) Colledion académique. Partie étrangère , tome III, page i 6j.
(c) Voyez les Mémoires de l'Académie de Berlin, année ijjj;
&. le Journal de Phyficjue de M. l'abbé Rozier, Mars 177 S.
les
DES Minéraux, 6oi
les opales cSc les calcédoines cl'Iiîancle & de Fcroc, 6c
qu'on Ja trouve également en Siiéfie où elle conftitue
l'ccorce brunâtre & jaunâtre de la cryfopmfe. D'après les
expériences chimiques que M. Gerhard a faites fur cette
pierre, W croit qu'elle eft compofée de deux tiers d'alun
fur un tiers de terre vitrihable & de matière graiïe (d) ;
mais ce favant Auteur ne nous dit pas quelle efl cette
matière graiïe ; on peut lui demander fi c'eft de la
graifle, de l'huile ou de l'eau-mère de fel ! & ces deux
tiers d'alun font- ils de l'alun pur, ou feulement de la
terre^ alumineufe ! quoi qu'il en foit , il nous apprend
qu'il a fait la découverte d'une pierre en Silcfre , qui
préfente les mêmes phénomènes que celle-ci: « Cette
pierre, dit-il, efl foiblement tranfpa rente ; mais plongée «
dans l'eau elle le devient complètement ; il lui faut ^«
feulement plus de temps pour acquérir toute ià tranf- «
parcnce (e) ». De plus, par les recherches particulières
(d) Cette pierre efl compolc'e de deux tiers d'alun, d'un tiers dé
terre vitrifiable «Se de matière grafle. L'efpèce brune de Siléfie contient
aufîi du fer; ce n'ell donc ni quartz, ni caillou, mais une pierre
grade de l'ordre de celles qui contiennent de la terre d'alun; d'où
l'Auteur avoir conclu qu'il falloir en faire plutôt une efpcce qu'un
genre , attendu qu'il pouvoit arriver qu'on découvrît dés pierres
chatoyantes parmi les pierres grafles qui contiennent la magnéfie du
fel marin. Jmrnal de Pliyjîijiie de Af. l'abbé Hoiier , Mars J 77S .
(e) ÎI y a cej)endînt une grande diffcrence entre ce morceau & /es
autres qii'ort.avoii auparavant examinés; il faut à celui-ci plufieurs
jours avant qu'il devienne tranfparent duns i'eau. M. Gerhard examinant
Minéraux, Tome ÎIL ^ ZZ^
6o2 Histoire Naturelle
que M. Gerhard a laites de ces pierres hydrophancs, il
alTiire en avoir vu qui avoient jufqu'à deux pouces un
quart de longueur fur un pouce un huitième de largeur^
& plus d'un pouce d'épaifFcur par un bout, & il dit
qu'on les trouve dans la matière intercalée, entre les
couches des calcédoines de l'ile de Feroë.
Il eft vrai que toutes ces pierres bydrophanes ne
font pas également lufceptibles de prendre à volume
égal le même degré de tranfparence , les m*es deviennent
bien plus diaphanes, ou le deviennent en bien moins
de temps que les autres; il y en a qui changent de
couleur, & qui de grifes deviennent jaunes par l'imbi-
bition de l'eau; mais nous avons vu plufieurs de ces
pierres dont les unes étoient grifes, les autres rougeâtres,
d'autres vcrdcitres, & qui ne changeoient pas fenhble-
ment de couleur dans l'eau où elles prenoient une afTez
cette difFérence , a trouvé qu'elle confifte uniquement dans une
plus grande quantité de matière grafle ; car fi l'on fait bouillir cette
nouvelle efpcce d'ocu/us mundi dans du vinaigre , & encore mieux
dans la lefîive caullique, on s'apercevra qu'après cette opération, H
faut beaucoup moins de temps pour qu'elle devienne tranfparente.
Cette expérience donne lieu de préfumerque toutes les pierres grafles
dans lefquelles la matière grafïè n'eft pas trop abondante, & qui ne
font pas trop chargées de parties martiales , pourroient produire le
même effet , d'autant j)lus qu'il efl vraifemblable que toutes les efpèces
qui appartiennent à cette clafTe, doivent leur origine, fur tout à une
terre glaife ou marneufe, dont le caractère principal efl de s'imbiber
fortement des principes fluides. Journal de Phyfique de M. Vû^bi
Rojier y Mars ijjS,
D E s M l N È R AU X. 60^
belle tranfparence. M. le dodcur Titiiis, favaiit Natara-
lifte, & Direéleur du Cabinet d'Hifloire Naturelle à
Drefde, m'a fait voir quelques-unes de ces pierres,
& m'a confirme le fait avance par M. Gerhard, que
\hydrophû7ie grife eft m\t matière qui fe trouve inter-
calée entre les couches de la calcédoine; M. Daubenton,
de l'Académie des Sciences, a vérifié ce fait en réduifant
à une petite épaifieur quelques-unes des couches opaques
grifes ou blanches , qui fe trouvent fouvent entre les
couches des calcédoines ; il y a auffi toute apparence que
cette même matière fert quelquefois d'enveloppe, &
recouvre la couche extérieure des calcédoines; car on a
vu des hydrophanes grifes , qui avoient trop d'épaifleur
pour qu'on puifTe les regarder comme des couches de
lames intercalées dans la petite mafie des calcédoines ;
on peut auffi préfumer qu'en recherchant fur les cor-
nalines, fardoines & agates colorées, les couches opaques
qui les enveloppent ou les traverfent , on trouvera des
hydrophanes de diverses couleurs, rougcitrcs, jaunâtres*
verdâtres , fèmblables à celles que m'a montrées Ai. Ta'ius,
& je penfe que cette matière qui fait la fubilance des
hydrophanes, n'eft que la portion la plus groffière dii
fuc vitreux qui forme les agates; comme les parties de
cette matière ne font pas affcz atténuées , elles ne peuvent
fe réunir d'afiez près pour prendre la demi-tranfparencc
èL la dureté de l'agate ; elles forment une fubftance
opaque, porcufe & friable, à peu-près comme le grès;
Ggggij
6o4 Histoire Naturelle
ce font en effet de petits grains quartzeux réunis plutôt
que diffoub, qui laiffent entr'eux des vides continus &
tortueux en tous fens, & dans lelquels la lumière s'éteint
& ne peut paifer que quand ils font remplis d'eau; la
tranfparence n'appartient donc pas a la pierre hvdrophane,
& ne provient uniquement que de l'eau qui fait alors
une partie majeure de fa maffc, & je luis perfuadc qu'en
faifant la même épreuve fiir des grès amincis , on les
rendroit hydrophanes par leur imbibiiion dans l'eau. Il
n'eft donc pas ncceffaire de recourir avec j\i. Gerhard,
à la fuppoluion d'une terre mêlée de matière graiïe
pour rendre railbn de la traniparence que ces pierres
acquièrent par leur immcrfion & leur fé/our dans l'eau
ou dans tout autre Jiquide traniparent.
r^^^^
DES Minéraux. 605
PÉTRO-SILEX.
JLi E premier caraclère apparent du Péiro-filex efl une
clen:ii-tranrparence gralFe , qu'on peut comparer à celle
du miel ou de l'huile flgce ; il me femble que ce
cara6lère n'éloigne pas le pétro - iilex du quartz gras ;
mais confidcram toutes Tes autres propriétés, je crois
qu'on peut le regarder comme un quartz de féconde
formation mclc d'une certaine quantité de feld -fpath;
car la dendté du pétro-lilex efl prefque exaélement la
même que celle du quartz gras & du feld-ipath blanc (aj:
fa dureté efl aufTi la même que celle de ces deux verres
primitifs, & comme, félon M. d'Arcet , le pctro-filex
efl fufiblc à un feu \iolent , cette propriété femLle
indiquer que fa fubftance n'efl pas de quartz pur, &
qu'elle efl mêlée d'une certaine quantité de ield-lpath
qui , fans rien changer à fa denfité, lui donne cette
fufibilitc.
Le pétro-filex fe trouve en petits & gros blocs , &
même en afTez grandes maffes dans les montagnes
quaptzcufes & graniteufes : fa demi-tranfparence le dif-
tingue des jafpes avec lefquels il fe rencontre quel-
quefois, & auxquels il reffemble fouvent par les couleurs;
— - I II, - - - , ■ -
mm i ■" ' ' ■ ■'
(a) La pefanteur fpecifique du quartz gras eft de 26458, celle du
feld-lpath blanc dl de z6^66, ôi celle du pétro-filex blanc eft de
^6^27.
6o6 Histoire Natv relle
car il y a des pétro-filex, comme des jafpes, Je toutes
teintes (b) ; elles font feulement moins intenfes <5c moins
nettes dans le pctro-filex, & dm poli fans être gras ,
comme fa tranfparence , n'eft néanmoins pas aufïi vif
que celui des beaux ja/pes.
Cette pierre e(l de féconde formation; elle fe trouve
dans les fentes 6i cavités des rochers vitreux ; c'eft une
concrétion du quartz mclé de feld-fpath , & comme ces
(b) Caillou de roch^ ; petro-jîlex; lapis corneus Germanorum, II eli
compofé de parties aflcz groOlères , & ne reçoit pas un beau poli;
jj eil demi-tranfparent à les extrémités & aux parties minces.
Jl y a du pétro-filex :
{ I ) Couleur de chair dans la mine de Caris à S^hlberg :
(2) Jaune-blanchâtre à Sahia:
(3) Blanc; à la mine de Chrifticnfl^erg, dans la nouvelle minç
de cuivre.
(4.) Verdàtre ; à la Fofîe des Prêtres dans Hellefors.
On ne connoît point encore de caradère diftindif entre le pétro-
fllex & le jafpe; mais un œil expert s'aperçoit bien que le pérro-fjlev,
quand il eft cafTé, efi: un peu brillant & demi -tranfparent , au lieu
que le jafpe reflemble à de la corne, qu'il ell juat & opaque, comme
une argile defTcchée. Le pétro-filex ne le trouve aufîi qu'en morceaux
& débris , tandis que le jalpe fait quelquefois les plus grofl'es & les
plus fpacieufes montagnes. II fe trouve aufTl dans le voifinage de
\à pierre à chaux , comme les filex dans \es lits de craie : arec Je
temps on pourroit peut-être acquérir de plus amples & de plus
fxades connoiflances. EQaï de Aiinéralog'ie traduit du Suédois ù" de
l'Allemand de M. Wledman , par M. Dreax ; Paris, 17/1 , p^g^i
p 2 & Juiv,
DES Minéraux. 607
deux verres primitifs font unis clans la fubflance des
granités, le pétro-filex doit fe trouver communément
dans les montagnes graniteufes , telles que les Vofges
en Lorraine, & les montagnes de Suède, où \Vallerius
dit qu'il y en a de blancs , de gris , de bruns , de
rougcâtres, de verdâtres & de noirâtres; d'autres qui
font ondes alternativement de veines brunes & jaunes,
ou griiès & noirâtres ; d'autres irrégulièrement tachés
de ces différentes couleurs, &c.
DES Minéraux, 609
ARRANGEMENT DES MINÉRAUX
EN TABLE MÉTHODIQUE,
Rédigée d'après la connoiffancc de leurs propriétés
naturelles.
V^ETTE Table préfente les Minéraux, non-feulement
avec leurs vrais caradères , qui font leurs propriétés
naturelles, mais encore avec Tordre fucceffif de leur
gcnéfïe ou filiation , félon qu'ils ont été produits par
l'adron du feu , de l'air &l de l'eau fur l'élément de
la terre.
Ces propriétés naturelles font:
1 . La dendté ou pefantcur fpéciiique de chaque
fubdance qu'on peut toujours reconnoître avec précifion
par la balance hydroftatique :
2. La dureté dont la connoiffancc n'eft pas aufli
précife , parce que l'effet du choc ou du frottement
ne peut fe mefurer auffi exaclement que celui de la
pefanteur par la balance, mais qu'on peut néanmoins
eflimer, & comparer par des effais afTez faciles:
3. L'homogénéité ou fmpiicité de fubflance dans
chaque matière, qui fe reconnoît avec toute précifion
dans les corps tranfjjarens , par la f mple ou double
réfraction que la lumière foufïre en les traverfant , &
que l'on peut connoître , quoique moins cxaétcment ,
Alinéraux, Tome JIL H h h h.
6 10 Histoire NyiTURE lle
clans les corps opaques, en les foumettant à Tadioii
tles acides ou du feu:
^/^ La fudbilitc & la réfiflance plus ou moins grande
des diiîë rentes matières à l'adion du feu avant de /e
calciner, fe fondre ou fè vitritier:
y^ La combuftibilité ou dellru^tion des différentes
fubilances par l'adion du feu libre, c'eft-à-dire , par
Ja combinailon de l'air & du feu.
Ces cinq propriétés font les plus effentiellcs de toute
matière, & leur connoiffance doit être la bafe de tout
fyftème minéralogique & de tout arrangement métho-
dique : auffi cette connoiffance , autant que j'ai pu
l'acquérir, m'a fervi de guide dans la compofition de
cet Ouvrage fur les Minéraux, dont le quatrième &
dernier Volume efl aétuellement fous prefTe ; & c'efl
d'après ces mêmes propriétés, qui conffituent la nature
de chaque fubftance, que j'ai rédigé la Table fuivante:
(5ir
Mg-iJ-ii-u-i— ■i,»i.ijv«^^tiUj_i,jt^imji^t>'_i.'in.»-«.>.;u«TiXr^tUi^i»jit^n
».mn.imi. L-1..UUI— j^ja
TABLE MÉTHODIQUE
DES MINÉRAUX.
PREMIER ORDRE.
Maiïères vhreiifes.
Première Classe.
MdîVcrcs viîreufes produites par le feu primitif.
I JUL.I riVI'IW"'" "'""■■' ■" "i.iiii", "7
MATIERES.
SORTES.
Subfiances vitreules
iiniples. r r\
* ' Quartz.
Feld-fpath.
Verres primitifs ^ Schorl.
Jafpe.
Mica.
VARIETES.
1
Roches de 2, , 3 & 4.
lubllances vitreules.
Pierre Je Lapponic.
rouge.
'■■ SuLHances compofe'es.
Porphyre,
brun.
tous deux pondues de|
blanc.
rou£re.
Granit < ?
ens.
a gros grains,
à petits gra'ns.
Hhhh ij
6i2 Table
Deuxième Classe,
Matières vitreufes extraites des premières , & produites pat
l'intermède de l'eau.
PREMIERE DIVISION.
Produits du Quart^.
MATIERES.
Vitreufes produites
par l'intermède
de l'eau ,
demi - tranlparentes.
Quartz
de féconde foniuiion
Criflal de roche,
Tranfparentes / Amcthyfte
Criflal-topaze
Chryfûlithe.
Algue-marine.
VARIETES.
blanchâtre.
lougeatre.
gras.
feuilleté.
grenu.
blanc.
nuageux.
rougcâtre.
bleuâtre.
jaune.
vert.
l"Tun.
noir opaque.
irifc.
violette,
pourprée.
d'un jaune plus ou moins
foncé & enfumé.
d'un jaune mêlé de plus
ou moins de vert.
d'un vert bleuâtre
ou
d'un bleu verdâtrc.
MÉTHODIQUE. 613
SECONDE DIVISION.
Produits du Feld-fpalh feul , & du Qvnvli mêlé de Fcld-fpath.
MATIERES.
SORTES.
VARIETES.
Tranfparentes j Saphir d'eau,
Pierre de RufTie
ou
de Labrador.
Demi-tranfparemes. . . 1 Q£il de chat,
Toutes chatoyantes. . . J QEil de poifTon
QEil de loup.
Opale .
Opaque
A vent urine.
1
plus ou moins bleuâtre
& à demi-chatoyant.
chatoyante , avec reflets
vcrdàtres &. bleuâtres.
gris.
jaune.
mordoré.
blanc intenfe.
blanc-bleuâtre.
brun-rougeâtre.
brun-verdâtre,
à fond blanc.
à fond bleuâtre,
là fond noir.
fans paillettes.
femée de paillettes bril
lantes rouges, bleues
(3c d'autres couleurs.
rouge plus ou moins femée
de paillettes brillantes
de 4ilférentcs couleurs.
6i4
Table
TROISIEME DIVISION.
Produits du Schorl fiul, & du Qudrii & Fdd-fpath mêlés de fchorl.
MATIERES.
Traiifparentcs,
VARIETES.
du Pérou.
^I,
vert pur plus ou moins
cidir.
(iu Brcfil.
vert plus ou moins
foncé.
)Icu.
blanc.
B, \ vert-blcnâtrc.
ervi \
) bleu-verUatre.
( plus ou moins denfe.
< vert plus ou moins mclc
de jaune.
dEir de chat noir ou
noiratie
Demi- tranfparentes
Opaques
Rubis & Topazes diA P^"s ou moins rougcâtre.
Brelil ) plus ou moins jaune- loncc
jaunc-dor'é.
Topaze de Saxe / jaune-clair.
blanche.
rouge-violct^ Syrien.
rouge couleur de feu /
Grenat ^ Efcarboude. I
rouge brun dcmi-tranfpa-j
rcnt ou opaque.
Hyacinthe ^ jaune mêlée de plus ou
^ moins de rouge.
Tourmaline S «■'^"S'-'e.
f orangt-(
^ noirâtr(
Pierre de croix 5 ^''""^•
) noirâtre.
MÉTHODIQUE. 615
QUATRIÈME DIVISION.
StûlûLiites vïtreiifes non crijlallifées , produites par le mélange du Quart?^
& des autres verres primitifs.
Demi-tranfparentes. .
( blanche.
] laitcufe.
Agate < veinée.
j ponduée.
V herborifée.
C rouge pur plus ou moins
^-. T. 1 intenfe.
<-OXi-l^\me < veinée.
f ponéluée.
C orangée.
Sardoine < veinée.
/ herborifée,
Prafe vert plus ou moins foncé.
C blanchâtre.
y-^ \ . y • / bleuâtre.
^^^^^àoxnt <rougeâtre.
^ toujours laiteufe,
Tranfpareii tes imbibées f „. i t i ) m' ^-^^
,, ' > Pierre hydrophane. . .< bleuâtre.
<^eau ^ J ^ /rougeâtrc.
i blanc.
1-k • r C 1 roui;eâtre.
Demi-tranfparentes \ Petro-filex (de toutes couleurs.
aux parties milices. J j veiné.
\ taché.
C compoTéc de lits on
Onyx \ couches de différentes
/ couleurs.
C veinés.
Cailloux < œillés.
^_ , / herborifés.
Opaques { )
^ r» T- V^np'i's gros ou plus petits
Poudino'ues < -n
1 uuuHJj^uca \ cailloux.
r fanguin.
Jaf])es de féconde for-1 héliotrope.
mation i ^*^';'''- ,
V. univerlel.
6i6
Table
CINQUIEME DIVISION.
Produits if ûçrréirais du Alica cf du Talc.
Ojîaques
&
Demi-tranlparentes,
C blanchâtre.
i^de / verr.
{ olivâtre.
tachée de toutes couleurs,
verte fans tache.
Serpentine / veinée.
librcufe.
grenue, .
blanchâtre,
verdâtre.
Pierre ollaire / fcmée de points talqueux.
veinée,
feuilletée.
ipure.
no'râtre-plonibée.
melee de leurre,
plombagine.
o- j I T S blanche,
r terre de lard {
) rougeâtre,
r> • l'-r r 1 blanche.
Craie d Lipap-ne. . . . < .^
) griie.
r^.. ; ,1 T) • ) blanche.
L-raie de Jinancon. . . {
f plus ou moins fine.
blanc.
Talc ) ^^^rdâtre.
jaunâtre,
rougeâtre.
Suite
M É T U 0 D I (l U E. 6iy
Suite de la cinquième division.
Produits & agrégats du Mica & du Talc.
Amiante.
Demi-tran(parentes. .
Aftefte.
Cuir de montagne.
Opaques.
Liège de montagne
Minéraux, Tome III.
en filets plus ou moins
longs , & plus ou moins
fins.
blanchâtre.
jaunâtre.
verdâtrc.
en epis.
en filets plus ou moins
courts,
gris.
jaunâtre,
blanchâtre.
plus ou moirts poreux
&. léger.
blanc.
jaunâtre.
en lames plates ou fcuil
lets fuperpofés.
jaunâtre.
blanchâtre.
en cornets ou feuillets
contournés.
plus ou moins caverneux
& léger.
lii
1 1
6i8 Table
Troisième Classe.
Détrimens des Matières vïîreiifes.
Compofees
des détrimens des verre
primitifs.
Porphyres
de féconde formation
Granits
de féconde formation
Opaques.
Grcs .
Argiles.
\
Schide & Ardoife. ,
vert taché de blanc,
dç couleurs variées.
rougeâtre à gros grains
^ grandes lames ta!-
queufes.
rougeâtre à petits grains,
Granité lie.
pur.
mêlé de mica.
à grains plus ou moins fins
de fubftance plus ou
moins compa(5ie.
blanc,
jaunâtre,
rougeâtre.
brun.
grès poreux.
grès à tiltrer.
blanche & pure.
bleuâtre.
verdâtre.
rougeâtre.
jaunâtre.
noirâtre.
grifâtre.
bleuâtre.
noirâtre.
pins ou moins dur, & en
grains plus ou moins
fins.
MÉTHODIQUE. 619
Quatrième Classe.
Concrétions vïîreufes & argilcufes formées par l'intermède de l'eau.
MATIERES.
Concréiions arorileufes
Grès mêlés d'argile
SORTES.
Ampdite.
Sme<^is
ou
Argile à foulon.
Pierre à rafoir
Ces
ou Pierres à aiguifer.
VARIETES.
plus ou moins noire,
à grain plus ou moins fin,
comporéc de couches al-
ternatives de gris-blanc
ou jaunâtre , & d'un
gris brun.
plus ou moins dures.
blanches.
brunes,
bleuâtres.
jaunes.
rougeâtres.
grès de Turquie.
l i i i ij
620
T A B
DEUXIEME ORDRE.
Matières calcaires toutes produites pari intermède de Veau.
Première Classe.
Matières calcaires prlmitires avec leurs Jétrimeiis & agrégats.
MATIERES.
SORTES.
Coquilles
Sub/laiîces
calcaires primitives.
Madrépores.
Polypieds
de toutes fortes. ,
1
Craie
Detrimens des matières
calcaires primitives
en grande marfes. j Pierres calcaires
VARIETES.
Les variétés de ces corps
marins à ÇviD?i3.ï-\ct co-
quilleufe font innom-
brables.
\
plus ou moins blanche (S;]
plus ou moins dure.
de première formation.
Pierres coqu'illeufes.
de féconde formation.
plus ou moins dures.
à grain plus ou moins fi«n
blanches ou teintes de
dïiférentes couleurs.
MÉTHODIQUE, 6ll
Suite de ia Première Classe.
Matières calcaires primitives avec leurs rlétrimens & agre'gats.
VARIETES.
Marbres.
Détrimens des matières
calcaires primitives
en grandes mafles.
lAIMm
de première rorniatron.
Marbres coquilleux.
Brèches.
I
Poudingues calcaires.
de Ççconà.Q ïormiiXïon.
blancs.
de toutes couleurs uni-
formes ou variées.
veiné.
onde.
blanchâtre.
jaune.
irougeâtre.
mêlé de gris , de brun
& de noir.
hcrborifé.
Plâtre.
6ii
Table
Deuxième Classe.
Staldâites & concrétions calcaires.
MATIERES.
SORTES.
Produits des matières
calcaires tranlparens, r
Spatii calcaire
Demi-tranfparens
Opaques mêlés
de lublUnce olleufe
Perles.
Turquoifes
criflal d'inande.
fpath blanc,
jaune,
rougeâtre.
blanches. Perles d'huître.
jaunâtres.
brunâtres. Perles de pa-
telles i^ de moules.
de vieille roche.
de nouvelle roche.
d'un bleu plus ou moin
pur (Se plus ou moins
foncé.
verdâtres.
IiicruHaiions
&
pétrifications calcaires.
Tous les corps orga-
nifés incruAcs ou pé-
trifiés par la fijbftance
calcaire.
Coquilles pétrifiées.
Madrépores & autres
corj)s marins iiicruftés
& pétrifiés.
Bois & végétaux in-
cruftes & pétrifiés.
623
MÉTHODIQUE.
Troisième Classe.
Adtitières vitreiifes mêlées d'une petite quantité de fuhflances calcaires
MATIERES.
Plus vitreufes que
calcaires.
Opaques.
Demi- iranfparentes
Opaques.
Tianfparentes
SORTES.
VARIETES.
blanche.
2^^'û'"'^e rougeatrc
bleuâtre.
bleu.
Lapis lazuli / taché de blanc.
mêlé de veines pyriteufes
grife.
Pierre a rulil (
rougeâtre.
noirâtre.
C plus ou moins dure &
Pierre meuiitre .....( ,
j plus ou moins trouée.
rouge ; faux rubis.
jaune ; fauïïe topaze
Spath fluor
^ vert; faufTe émeraude
bleuj faux faphir.
02^
Table
TROISIEME ORDRE.
Matières provenant des débris if du détriment des
Animaux if des Végétaux,
Première Classe.
Produits en grandes maffes de la terre végétale.
r Terre de jardin plus ou
Terreau < moins décompofée &
/ plus ou moins mélangée*
S Terreau décompofé, dont
les parties font plus ou
. ..,.^ moins atténuées
& des animaux , plus , r t- j i
ou moins mélangées/ Terre limoneufe ) ?'T r P'"!"
j • I . \ 1 erie iimoneuie / font encore plus de
de parties heiero- J ^ compofées.
gènes opâfjues
Terre végétale entière
ment décompofée
Bols </ ^''""
rouge
gris
vert
Tourbe ... \ '^^'''■^^" P'"s ou moins
) bitumineux.
Mëlaneëes de bitume. / l ^^^•^.•'e végétale plus ou
i I moins bitumineufe.
paques. \ Charbon de terre.. . .< P'"^ ou moins pyriteufe.
plus ou moins mélangée
•de matière calcaire ,
fchilleufe, &c
Seconde
MÉTHODIQUE, 625
Deuxième Classe.
Concrétions & produits de la Terre limoneufe.
Produites
par la terre limoneufe ,L ^ t
phofphorefcentes \ ^P^^^ P^^^"^'
&. combullibies.
Opaques
& comburtibles.
Pyrite.
Liquides & concrètes;
tranfparentes ,
demi-tranfparentes,
opaques
& conibuftibles.
Pierre de Bologne.
Spath pefant odaèdre.
blanc.
cridallifé.
mat.
de couleurs différentes.
^cubique lifTe.
\ cubique flriée à la furface
Iglobuleufe ou elliptique.
K Marcaffite.
Jplus ou moins dure.
Ê recevant le poli, <Sc non
V efflorefcente.
Soufre minéral plus ou moins décompofé
naphte.
pétrole,
afphalte.
Bitumes ^ fuccin.
ambre gris.
poix de montagne,
jayet.
Minéraux, Tome IIL
Kkkk
(>zi Table
Suite de la Deuxième Classe.
Concrétions & produits de la Terre limoneiife.
MATIERES.
SORTES.
Produites
par la terre Jimoneufe ,
tranfparentes
& homogcnes.
Diamant.
V A
R 1
É T
E
s.
blanc.
odaèdre.
dodécaè
drc.
jaune.
couleur
de rofe.
vert.
Combuftibles
bleuâtre,
noirâtre.
rouge de feu.
Vrai Rubis ^ rouge pourpre, >'W.
rouge clair,, balais.
rouge orangé j vermeille.
^j. . rr- \ jaune vif.
Vraie Topaze. ...... ^
jaune d'or velouté.
bleu.
bleu-célede.
Ibleu foible.
Vrai Saphir ^ blanc.
bleu-foncé.
bleu mêlé de rouge,
Gyrafol,
METHODIQUE.
6zj
QUATRIEME ORDRE.
Aiatîères falïnes.
Première Classe.
Sels ftinples , Acî.Ie , Alkali & Arfcuic,
MATIERES,
SORTES.
Acide acrien.
VARIETES.
Produits f Acide & Sels
de r.cide aérien V ^itrioliques
fur les maticres vitreufet. '
Produits
de l'acide aérien
fur les fubrtances
animales & végétales.
Alkali
Alun de roche.
Alun de plume.
Vitriol.
— en maffcs.
— en ftaladitcs.
— vert. }'ltriol ferrugi-
neux.
— bleu. Vitriol cuivreux
— blanc. Vitriolée ^inc
Beurre fertile.
Natron.
Soude.
Allsali minéral.
Alkali fixe végétal.
D
Alkali volatil.
Alkali cauftique.
Alkali fluor.
Kkkk ij
628 Table
Suite Je la Première Classe.
Sels fimpJcs , AciJe , Alkali & Arfcnic.
MATIERES.
SORTES.
Autres produits
de l'acide aérien
liir les fu bilan ces
animales &. végétales .
Produits
de l'acide aérien
lur les matières
calcaiies & alkalines.
Acide des végétaux
'& des animaux
Acide pholphorique.
Acide marin.
Nitre,
Produits
de l'acide aérien
liir les matières
alkalines, animales,
végétales &. minérales.
Arfênic.
Sel mêlé de parties . p
métalliques, .......) '^^^^^'
VARIETES.
Vinaigre.
Acide du tartre.
Acerbes.
Acide des fourmis , 6cc.
mclé d'alkali.
Sel gemme.
Sel marin.
Salpêtre de houfTage.
mclé de parties métalli-
ques en Heurs blanches,
criltallifé.
mêlé de foufre.
orpiment,
réalgar.
Tinckal eu borax brut,
d'une confiftance molle
& rougeâtre.
d'une confiflance ferme, |
grifc ou verdâtre.
Sel fedatif.
MÉTHODIQVE. 629
Deuxième Classe.
Sels fublimés par le feu.
Subftance du feu
faifie V Soufre
par l'acide vitriolique.
Produits fublimés
de l'acide maria
&. de l'alkali volatil.
Sel ammoniac
Compofées
de l'acide vitriolique
&. de la niaiiére
du feu libre.
Acide fulfureux volatil.
compofé de l'alkali volatil
& de l'acide marin.
de l'alkali volatil <?c de
l'acide vitriolique.
de l'alkali volatil & de
l'acide nitreux.
630
Table
Troisième Classa.
Sels compofés par l'intermède de l'eau.
MATIERES.
SORTES.
VARIETES.
C
de fo
lompofces r
une &. d alkali. \
Coinpofées
de l'acide vitriolique ^ Sel de Clauber.
(3c d'alkali minerai.
Compofées
de l'acide vitriolique \ Sel d'Epfoin.
<5t de la niagncTic.
METHODIQUE.
6>,l
CINQUIEME ORDRE.
Afatières métalliques.
Première Classe.
Matières métalliques proiiitites par le feu primitif.
MATIERES.
Métalliques fimples
& dans leur état
de nature.
Métaux,
SORTES.
VARIETES.
Or primitif
en état de métal . .
en filets,
en lames,
en grains-
en malfes.
en pépites,
en végétations.
jaune.
rougeâtre.
blanchâtre.
criftallifé en odacdre par
le feu.
toujours allié d'argent par
la nature.
en ramification,
en feuilles,
en grains.
Argent primitif / toujours allié d'or cScquel-
en état de métal \ quefois d'autres fubltan-
ces métalliques,
criftallifé en odaèdre par
le feu.
Cuivre primitif
en état de métal. . .
Ç en bloi
l gros.
blocs plus ou moins
ans les roches
Plomb en état de chaux. J"^^'.^"g^,^3
l vitreufes.
Étain en état de chaux . 5 "^^'.^"g^/^n^ les roches
) vitreules.
Fer en ctat de fonte.
mélangé dans les roches
vitreufes.
aimant,
émeril.
mâchefer,
fablon magnétique.
632 Table.
Deuxième Classe.
Al dû ère s méîdUiques formées par l'intermède de l'eau.
MATIERES.
SORTES.
Concrétions & mines
des métaux dans
leur état d'agrégationj *
&. de minéraliration.
VARIETES.
Argent.
Métaux.
)
Cuivre.
en paillettes,
pyrite aurifère.
en paillettes.
pyrites argentifères.
Mine d'argent vitrée, bru-
ne, noirâtre ou grife.
Mine d'argent cornée ,
jaunâtre, à dcmi-tranf-
parente & opaque.
Mine d'argent rouge.
Minerais pyriteux du
cuivre ou pyrites
cuivreufes.
Mine de cuivre vitreufe.
Mine de cuivre cornée.
Mine de cuivre foyeufe.
Malachite.
Mine cri/tallifée.
veloutée.
fibreufe.
— mamelonnée.
Pierre arménienne,
azur, bleu de montagne
vert de montagne.
Mine de cuivre antimo-
niale.
Suite
MÉTHODIQUE, 6^
Suite (Je la D e u x i i m e Classe.
Afdtières métallitjues formées par l'intermède de l'eaa.
MATIERES.
SORTES.
Concrétions & mines /
des métaux dans
leur état d'aerefratioi
& de minérilifation.
VARIETES.
Plomb
Étain
Métaux
Fer,
galène.
Mine de piomb viîreufe
& crillailifee.
— blanche.
— noire.
— rouge.
— verte.
— jaune.
Mine d'étain en filons.
— en couches.
— en rognons.
— en grenailles.
— en criftaux.
— noirs.
— blancs.
— jaunâtreSt
rouges.
Mine fpathique.
— fpéculaire.
— en grains.
— en géode.
— en ocre.
— en rouille plus ou
moins décompofée.
hématite.
Minéraux, Tome JIL
LUI
634 Table
Troisième Classe.
Afciùères femi-niétûîli(]ues ou dcnù-tnéîaux dans leur état de nature.
SORTES.
Eau métallique
Demi-métaux,
I
Mercure.
Antimoine.
Bifmuth
;
Zinc,
VARIETES.
\
en cinabre.
en état coulant.
en minerais blancs & gris.
Mine d'antimoine en
aiguilles.
Mine d'antimoine en
plume, fouvent niéiéc
d'argent.
en état métallique,
mêlé de cobalt,
jaunâtre.
rougeatre.
en pierre calaminaire.
en blende.
— noire.
grife.
— jaunâtre.
— rougeatre , &c.
— crillailifée.
— tranfparentc.
— opaque.
en vitriol blanc
METHODIQUE.
Quatrième Classe.
AlHages métalliques faits par la Nature,
'^35
MATIÈRES.
SORTES.
VARIÉTÉS,
f
•
en grenaille toujours mc-
Platine é
t
1 lée de fablon magné-
tique , &. alliée de fer
dans fa fubflancc.
' toujours plus ou moins
Cobalt <
(
mclé de fer par un
* alliage intime.
Alliages métalliques j
.
' mêlé de fer &: de cobalt
tous mêles de fer .... ^
Nickel )
par un alliage intime,
grenu.
^
. iamellcuî.
(
' grife.
\
1 noire.
Manganèfe <, .J
i
fcrillalliféc.
L non criflallifée.
r toujours mêlée de fer par
an alliage intime,
<
EBia
LUI ij
6^,6 Table méthodique.
SIXIEME ET DERNIER ORDRE.
Produits volcaniques.
MATIERES.
SORTES.
VARIETES.
Laves.
Bafalte,
Matières fondues
par le feu des Volcans.
Pierre de touche.
Pierre variolite.
Te
par le fe
rre cuire f
u des Volcans, (
.Tripoli.
Detrimens des
matières voicaniques.
Pouzzolane.
plus ou moins compades,
plus ou moins trouées,
noires , brunes & rou-
ge aue s.
■plus ou moins mêlé de
fer , ainfi que les laves
& de différentes figures,
depuis trois jufqu'a neuf
faces dans fa longueur,
articulé ou non dans
Ton épaiffeur.
noirâtre.
grifâtre.
verdàtrc.
à grains plus ou moins
hns.
noire,
brune.
fe.
gri
à grains plus ou moins
proéminens , & plus ou
moins rougeâtres,
blanc.
jaunâtre,
noirâtre.
plus ou moins sécFi« &
rude au toucher.-
grife.
rouge,
blanchâtre, ôcc.
■■
!
Fin du troifième Volume des Minéraux,
TABLE DES MATIERES
Contenues dans ce Volume.
XTLGATES. Le fond de leur fubf-
tance efl de la même eflence que
celle du qw^-m^page 578. — Elles
font produites par le fédiment de
ia ftillaiion des eaux , 579. —
Agates en grand volume , leur
formation, j8o. — Variétés dans
les couleurs & dans ia difpofition
des lits dont font compolces les
agates, ^7^ à" fu'iv. — Elles fe
trouvent dans toutes les parties du
monde, & dans tous les terreins
où le quartz domine , 582. — La
pelanteur fpécifique des agates en
général , ell un peu moindre que
celle du criAal de roche, 577. —
Quelques agates contiennent de
i'eau en quantité même aflez (en-
fible , & que l'on peut recueillir
en les calTant, 462 & 578. —
Agates œillées , 5 p 2. — Agates
herborifées, 5 84. — Pétrifications
d'os & de bois en agates , j 8 i . —
Les agates onyx font compofées
de couches ou de lits de différentes
touleurs, 592. — Les plus belles
agates onyx fe trouvent en Orient j,
& particulièrement en Arabie ,
594.
AiGUE-MARiNE (!') efl: une
ftalâdite du quartz, un criftal de
roche teint d'un vert- bleuâtre ou
d'un bleu-verdâtre, 448 & 478.
AlGUE-MARINE ORIENTALE.
Voyei BÉRYL,
Airain efl; un alliage de cuivre
& d'ctain , dans lequel il ne
faut qu'une partie de ce dernier
métal iur trois de cuivre, pour en
faire difparoître la couleur, &
même pour le défendre à jamais
de fa rouille ou vert-de-gris , 64.
— L'airain de Corinthe étoit un
alliage de cuivre, d'or & d'argent,
dont les Anciens ne nous ont pas
indiqué les proportions , 61 .
A L K A L I volatil efl plus commun
qu'on ne croit à la furface 6c dans
l'intérieur de la terre, 58.
Amalgame. Différences entre
l'amalgame & l'alliage, 245.
Améthyste, Les amethyfl:es
violettes & pourprées ne font que
des criHâux de roche teints de ces
}J Ta
belles couleurs, 447 & 467.—
Elles ont la même denfitc , la même
duieLé, la même double réfradion
que le ciiflal de roche, & font
également rcfiadaires au feu , 467.
— Leur pointe ell toujours colo-
rce, 6c fouvent la couleur manque
dans leur bafe, ibïd. — Amethyftes
en Auvergne, en Hongrie, en
Sibe'rie, à Kamtfchatka , 468 ù"
fuiv. — Ainethyltes pourprées en
Catalogne, 4(^9.
Antjmoine. Formation des mines
primordiales d'antimoine, 277.—
Formation des mines fecondaires,
ibid. — Mines d'antimoine en plu-
mes & autres mines antimoniales
de dernière formation, 27 S. —
Alines d'antimoine en France, en
Allemagne, en Hongrie, en Italie,
en Afie, en Afrique &; en Amé-
rique, 279 àf Ju'iv, — Antimoine
crud, fa compofition & fa re'duc-
tion en rcgule , 272 à^ fuiv. —
Foie & verre d'antimoine, 274. —
Différence du régule d'antimoine
avec les me'taux, 276. — Alliage
du re'Lfule d'antimoine avec les
mc-taux , ibïd. & fuiv.
Argent. L'argent & l'or dans la
nature primitive n'ont fait gcnéra-
iement qu'une mafle commune, i.
— Propriétés communes à ces
deux métaux ; 2, — Pioprililés
BLE
différentes de ces deux métaux , 4.
— Mine d'argent vitrée, fa forma-
tion , 5 . — M ine d'argent cornée ,
7 & t 5. — Mine d'argent rouge,
1 J. — Vitriol d'argent, 7. — Autres
minéralifations de l'argent, 9. —
Alliage de l'argent avec les autres
métaux, lo & fuiv. — Raifons
pourquoi l'argent & l'or ne fe con-
veriiOent point en chaux comme
les métaux imparfaits, 12. — Ar-
gent natif de deux fortes, 14. —
Mines d'argent en France, 1 6 tf
fuiv. — En Ef])agne , 1 9 ci^ fui^.
— En Allemagne, 22. — Eu
Hongrie, 2 > & fuiv. — En Suède,
Danemarck , Norwège& Illande,
2.6 & fuiv. — En Pologne, 27.—
En Sibérie & dans plulleurs pro-
vinces de i'Afie , 30 & fuiv. -^
En Afrique , 3 i c^ fuiv. — En
Amérique, & particulièrement au
Pérou , à Potolî , 3 2 di^ fuiv. —
Manière d'exploiter les mines d'ar-
gent au Pérou , &L d'en tirer le
métal, 34.
Arsenic. Efl une matière qui
forme une ligne de féparaiion qui
remplit le grand intervalle entre
les matières métalliques & \çs ma-
tières falines , 3 94. — Son effence
efl autant faline que métallique ,
395. — Propriétés falines de l'ai^
feiiic^ ibid, — Propriétésmétalliques
iD E s Ma
<3e fon reguïe, ïbid. — La plupart
des mines d'arfetiic, noires & grifes,
font des mines de cobalt mêlées
d'arfenic ; & l'arfeaic vierge efl:
comme le cobalt, toujours mtlé
de fer, 399. — L'arfenic fe trouve
dans prefque toutes les mines mé-
talliques , & fur - tout dans celles
de cobalt & d'étain *, 402. —
A (fiions de l'arfenic fur les mines de
différens métaux, 403. — Alliage
de l'arfenic avec les ipctaux, 407,
— Manière dont on recueille l'ar-
fenic par fublimation, 410.
AvENTURiNE. Ses rapports avec
le feld-fpath & le mica. Defcrip-
tion de cette pierre , qui louvent
cil plus opaque que iranfjiarente ,
492.
B
B
É R Y L. Ses différences avec
l'aiguë - marine à laquelle il rel-
feinble par les couleurs, 328. —
Les Lapidaires lui ont donné le
nom à' aiguë -marine orientale , ibiJ,,
^ Différentes fortes de béryls,
leurs défauts. — Le béryl tire fon
origine du fchorl , au lieu que
i'aigue-marine provient du quartz ,
ibid. & fulv.
Bismuth. Se trouve prefque
toujours pur dans le lein de la
terre, ^8). — Sa pefanteur eft
T J E R E S. ]};
plus grande que celle du cuivre,
ibid. — Il eft plus fufi ble qu'au-
cune autre fubAance métallique ,
2 3(î. — Son alliage avec les mé-
taux 6i demi-métaux , ibid. & 290.
— Le bidnuth & le mercure
forment enfemble un amalgame
coulant, 2 S 7. — Epoque de la
première formation du bifmuth ,
289, — Poudre du précipité de
bifmuth avec laquelle on fait le
fard, 2f) I . — Étaniage des glaces c^
verres au moyen du biimuth, 292.
Blende. Voyei Z i n c. — Il fe
forme allez fouvent dans les grands
fourneaux , des concrétions fem-
blables aux blendes naturelles.
Koyei ibid.
C '
^ADMIE des fourneaux efl Une
concrétion de fleurs de zinc , ({ui
s'accumulent & s'attachent aux
parois des cheminées des four-
neaux où l'on fond les mines de
fer qui contiennent du zinc, 303.
— Manière de faire du laiton avec la
cadmie des fourneaux , ibid. Ù'jilivi
Calamine. Voyei Zinc.
Calcédoine eO une agate d'un
blanc bleuâtre & d'une tranfpa-
rence laiteuiè, 55^5 & 595. —
Calcédoin.^s en pe it & en grand
volume, )9 5 Ù' Juiy,
h T A
C A R A C O L I ^cj- Àmencûins , quelfe
peut être cette matière métallique,
113.
Chrysocolle verte ou veri de
montagne, n'efl: que du vert- de -
gris très -atténué. -La chryfocolfe
bleue ne diffère de la verte que
par la couleur que les alkalis vola-
tils ont fait changer, 56. — 0\\
l'appelle aiur lorfque le bleu eft
bien intente, & bleu de montagne
lorfqu'il l'efl moins, ibid.
Chrysolite. Les pierres que
l'on appelle aujourd'hui chryfolites,
ne font que des criflaux dont le
jaune efl mêlé d'un peu de vert ,
475. — Différence de la chryfo-
îite & du péridot, 476. — Chry-
folites des volcans font de la même
rature que les chryfolites ordi-
naires , 477.
Chrysoprase, efl une prafe dont
Ja couleur verte efl: mêlée d'un
peu de jaune, 589.
C I M E N s. Différence des cimens
naturels & de nos cimens artifi-
ciels ,414. — Le premier des ci-
mens de nature, eft le lue vitreux
DU criflâllin. — Le fécond ell le
fiic f])athiqueou calcaire, 41 5. —
Le troificme ell le ciment métal-
lique & pyriteux , ibid. if fu'iv —
Le quatrième e(l le bitume, &c.
418,
BLE
Cinabre ell un compofé de
mercure par le foie de foufre, 230.
— Produdion du cinabre , 23 i «y
fu'iv. — Le cinabre ne fe trouve
point mêle avec les mines des
autres métaux , à l'exception de
celles de fer en rouille , qui font de
dernière formation, 229.
Cobalt. De tous les minéraux
métalliques , le cobalt efl; peut-être
celui dont la nature ell la plus
mafquée;^on ne peut le recon-
noitre d'une manière fûre que par
la couleur bleue qu'il donne aux
émaux, 359. — Les mines de
cobalt font aflez rares, & toujours
chargées de matières étrangères ,
ibid. — Le cobalt efl toujours mêle
de fer fi intimement, qu'on ne peut
les féparer , ibid. — Régule de co-
balt , fes propriétés , 3 60 & ^ i . —
Indices des minières de cobalt, 3 6 1
Ù'fuiv. — La fubftance du régule de
cobalt efl plus fixe au feu que celle
des demi- métaux , & même que
celle du fer & des autres métaux
imparfaits , 369. — Alliage du ré-
gule, de cobalt avec les métaux &
demi - métaux, ^yo Ù" fuiv. —
Mines de cobalt en Europe, à la
Chine, au Japon, &c. 372 Ù*
fuiv.
Cornalines font des agates
d'un rouge pur & d'une belle
tranfparence ,
DES Ai 'A
tranfparence , jSj.— If y en a
auiïî de moins tranfparentcs , 5 S (5.
Cristal de roche. Eli de la même
elTence que le quartz. — Sa for-
mation , 44,0. — Pourquoi l'on
trouve'trcs ' rarement des cridaux
à deux pointes , & très-commune'-
ment des criftaux en pyramide
fimple , ou en prifmes funnontcs
de cette feule pyramide, 44.1. —
Criftaux de roche, grands & petits,
font figures de même , 442. —
Criflal de roclie donne une doubfe
réfraction dans le fens dnfl, qui
n'a pas lieu dans le fens du contre-fl
de fa fubftance, 444. — Efl: com-
pofé de deux matières de différente
denfité, & dont l'une eft moins
dure que l'autre, ibid. &. 445. —
Criftaux de roche de couleurs
différentes, 447. — Les parties
élémentaires du criftal de roche ,
font des lames triangulaires fort
petites , ôc dont lafurface plane eft
néantnoins beaucoup plus étendue
que celle de la tranche qui eft pref-
que infiniment mince, 453 ù'fuiv.
— C'eft toujours près du fommet
des montagnes quartzeufes <Sc gra-
niteufes, que fe trouvent les gran-
des criftallières ou mines decriflal,
45 5 ^fi^iv. — Il fe trouve plufieurs
criflaux qui contiennent de l'eau <Sc
des bulles d'air , 46 r . — Le criftal
Mincrmx , Tome UL
T I E R E s. >
fe trouve dans toutes les montagnes
primitives quartzeufes & grani-
teufes en Europe, en A fie & dans
toutes les parties du monde, 462
à^ fuïv. — Les criftaux colorés ne
font pas plus denfes que les criftaux
fans couleurs, 4<55 <5c 487.
Cristallisation. Les formes de
criftallifation , ne font ni générales
ni confiantes, & elles varient au-
tant dans le genre calcaire que dans
le genre vitreux, 422. — Mnnière
dont fe produifent les crifiaflifa-
tions, foit par le moyen du feu,
foit par l'intermède de l'eau, 425
Ù' fuiv. — Raifon pourquoi des
matières très-différentes peuvetit fa
criftallifer, & fe criftallifent en effet
fous la même forme, 430. — La
forme de criftallifation n'indique
ni la denfité , ni la dureté , ni la
fufibilité , ni l'homogénéité , ni
aucune des propriétés effentielles
de la fubftance des corps , 433. —
Elle n'eft point un caradère ipé-
cifique & diftindif de chaque
fubftance , ibid. — Dans la criftal-
lifation la Nature n'opère que dans
deux dimenfions , au lieu que dans
le développement des êtres orga-
nifés, elle agit dans les trois di-
menfions à la fois, 449 &" fuiv. —
Circonftance efientielle à la crif-
tallifation , 5 73-^ y^'^- — ^
Jvl m m m
yj Ta
crinallrfation peut s'opeier égale-
ment par le moyen du feu comme
par celui de i'eau , 72.
Cuivre. Le cuivre primitif a été
formé comme l'or & l'argent dans
les montagnes quartzeules, &l\[ le
trouve, foi t en morceaux de métal
malllf, foit en veines ou filons
jnélancrés d'autres métaux, 50. —
Mines de cuivre de féconde for-
mation , elles font plus rébelles
que toutes les autres à i'adion du
feu , \ \6. — Elles exigent d'être
grillées plufieurs fois avant de
donner leur métal, yy. — Mines
de cuivre de troifième formation,
56. — Cuivre de cémentation fait
par la Nature, 66. — Affinité du
cuivre & du fer, 64 & 66. —
Alliages du cuivre avec les autres
métaux, demi-métaux & avec l'ar-
fenic, 6^. — Propriétés du cuivre,
fa denfité, fa ténacité, fa mauvaiie
odeur , fes qualités funeftes , la
dureté, fon élailicité, fa dudilité,
fa réfiftance au feu , 70. — Chaux
& verre de cuivre ,71. — Tous
les fels de la terre & des eaux , foit
acides , foit alkalins , attaquent le
cuivre & le difiolvent avec plus ou
moins de promptitude & d'énergie,
74. — Enumeration des principales
mines de cuivre de l'Europe , ôc
des autres parties du monde, 80
BLE
& fuiv. — Comme le cuivre efl
moins difficile à fondre que le fer,
il a été employé long-temps au-
paravant, pour fabriquer les armes
& \gs inftrumens d'Agriculture ,
51. — Kailon pourquoi l'on ne
trouve prefque plus de cuivre
primitif en Europe & en A fie; &
pourquoi l'on en trouve encore
en Atiique &. en Amérique, ibid.
Converlion du cuivre en vert-de-
gris ou verdet; comment elle s'eft
opérée dès les premiers temps , 5 2,
à^ Juiv. — Eaux cuivreufes ,53. —
Comparaifon du cuivre avec l'or
& l'argent , & leurs diliérences
efîentielles , 60. — Les minerais
cuivreux de leconde forination ,
demandent encore plus de temps
& d'art que les mines de fer pour
être réduits en bon métal, ib'id.
de 61.
Cuivre jaune ou laiton. Efl un
mélange de cuivre ik de zinc, qui
ne fe trouve pas dans la Nature,
61. — Manière de faire du bon
laiton, 68.
D
.U ISSOLUTIONS. Les difiolutions
des métaux (ont en générai plus
corrofives que l'acide même dans
lequel ils ont été diflous, 45.
DES AI A
E
V
■L A u ( r ) dans Ton eiïence doit
être regardée comme un fel infi-
pide & fluide, & [a glace qui n'efl:
que ce même fel rendu folide le
devient d'autant plus que le froid
efl; plus grand , 214.
Emeraude doit être niife au
nombre des crillaux du quartz
mêlé de fchorl , 503 ci^ fuïv. —
De'fàuts des emeraudes, 504. —
La véritable cjneraude étoit bien
connue des Anciens, 5 07 & fuiv.
Faufles emeraudes , 510. — Lieux
où l'on a trouvé la plus grande
quantité d'émeraudes en Amérique,
j I 7. — L'émeraude efl fufible ,
& {à fufibilité ainfi que fa pefanteur
(pécifique, démontrent que fa fubf-
tance quartzeufe efl mêlée d'une
certaine quantité de fchorl , 5 20.
— Emeraude du Brefil , l'es diffé-
rences d'avec la véritable emeraude
du Pérou, 520. — Rapports évi-
dçns de cette emeraude du Breill
avec les fchorls , ibid. — Ses autres
propriétés , ïbid. — Les emeraudes
étant des pierres vitreufes &. à
double réfradion, ne doivent pas
être mifes au rang des pierres
précieufes, qui par leur àen^né y
leur dureté & leur homogénéité,
font d'un ordre fupérieur &
T I è R E s. vi)
d'une origine didl-rente , 522.
Enhydres; c'efl le nom qu'oii
a donné à des agates ou cailloux
minces & creux qui contiennent
une aflez grande quantité d'eau,
461 .
E TA I N. Mines d'étain de première
forjiiation, i 27. — La mine d'étain
efl plus pefante qu'aucune de celles
• des autres métaux minéralifés, &
fa plus grande pefanteur provient
de l'arfenic qui y efl mêlé , 135.—
Etain, cofiime tous les autres mé-
taux, ell un dans la Nature, 14^,
— Mines d'étain en roche, 125.
— Mines d'étain en criflaux ; gran-
deur & couleurs 4p ces criflaux ,
1 24. — Produits de ces mines
d'étain par \à fonte , ihid. — Etain
peut s'dllier avec tous les métaux
& demi-métaux, 153. — Grande
affinité de l'étain avec le fer & le
cuivre, 158. — Étamage du fer
préférable à celui du cuivre, i 5p.
— L'étain enlève à l'argent comme
à l'or , leur ducflilitc , 11, — Eit
après l'or & l'argent , le métal le
moins fufceptible d'altération par
les élémens humides , 64. — Ses
mines paroifîent affecter des lieux
particuliers, 1:^5. — Nulle part
il ne fe préfente fous fa fonne
métallique, ibïd. — Mines d'étain
font toujours plus ou moins mêlées
M m m m ij
vnj
T A
d'aifenic, 123. — . Cendre & potée
d'étain, 129. — On peut faire
artificiellement des mines d'étain
avec de l'ctain & de l'arfenic ,130.
— L'ctain efl après Je plomb le
plus mou des métaux , 131.—
On mêle le cuivre avec i'étain
pour lui donner plus de fermeté,
ibiJ. — Propriétés de l'ctain , fa
denfité , (à. ténacité , &c. îbid. ù'
fulv — II n'y a point d'étain pur
dans le commerce , & il efl toujours
mêlé de cuivre ou de plomb ,132.
— Mines d'étain en Angleterre,
en Allemagne, aux Indes, à Ma-
laca , Banca , &c. fur les côtes
orientales de l'Afrique & en Amé-
rique , I 3 5 & fulv,
F
£LD-SPATH. Caradères par
lefquels il diffère du quartz. — La
criftâllifation du feld - fpath a été
produite par le feu primitif, & a
par conféquent précédé toutes les
crillallilations qui le font faites par
l'intermède de l'eau ; preuve de
cette allértion, 480 éfjuiv. — Les
extraits du feld-fpaih font en afléz
grand nombre ; mais ils ne le pré-
fentent nulle part en aufli gros
volume que les criftaux quartzeux ;
ils lont toujours en alfez petits
morceaux ifolés , parce qu'il ne le
BLE
trouve lui-même que très-rarement
en mafles un peu confidérables ,
481.
Feld-SPATH de Ruffie. Trouvé
nouvellement près de Féterfbourg;
fa delcription, fes couleurs «Se les
propriétés, 485. — Cette pierre
chatoyante paroît être un feld-
fpath mélangé de fchorl, 48 (j.
Fer. Il ne le fait aucune union
intime, auciui alliacre entre le fer
&. l'argent, 11. — Comparaifoii
du fer avec le zinc ,214.
Feu. Le feu agit fur les métaux,
comme l'eau (ur les lels , 212. —
Le feu paroît être dans le mercure
en quantité prefque infiniment
petite , ibid.
Foie de foufre. A fouvent aidé ,
plus qu'aucun autre agent , à la
minéralifation de tous les métaux,
2y i .
ALÊNE n'efl qu'une efpèce
de pyrite compofée de chaux de
plomb , &. de l'acide uni à la fub-
flance du feu fixe, 204. — Peut
fe régénérer dans les mines de
plomb qui font en état de cérufe
ou de chaux blanche , 1 p i .
Grenat, (le) Quoiqu'aufll pelant
que les pierres précieufes, ne doit
pas être mis à leur rang, fa grande
DES 'Aï A
pefanteur ne provenant que du fer
qu'il contient en parties inafTives ,
5 39 ^ 5+4- — Différences du
grenat & des pierres précieufes ,
ibid. — Le grenat eft conipofc de
fchori <3c de fer, il e(l fufible «Se
donne une double rtfradion, ibid,
6 540. — Ses reflemblances avec
les fchorls de féconde formation ,
ibid. — La plupart des grenats
contiennent aflez de fer en état
métallique pour agir fur l'aiguilîe
aimantée, ibid. — La forme des
grenats varie prefque autant que
celle des fchorls, 542 & 54p. —
On les trouve fouvent mêlés en-
femble , J 4 i . — Les grenats fe
préfentent quelquefois en allez
gros groupes , & plus fouvent en
criflaux ifolés , J42. — Grenats
volcanilés ont perdu leur couleur
& une grande partie de leur poids ,
J44. — Les grenats de tout pays
font de la même nature ; fouvent
même ceux de Bohème font plus
parfaits que ceux qu'on apporte
des Indes orientales, 545. — Gre-
nat Syrien; le plus beau de tous
les grenats vient de Surian dans
le royaume de Pégu, ibid. — Dif-
férentes couleurs dans les grenats ,
546 cf fuiv. — L'eicarboucle ou
carbunculus des Anciens , eft vrai-
fembiabiement un grenat; )-^7 ^
1
tx
T I E Ti E S.
fuiv. — Difîerences par lefquelles
on peut diftinguer aifément les
grenats des ruljis , 5 jo, — Diffé-
rens lieux où l'on trouve (\ts
grenats , tant dans l'ancien que
dans le nouveau coniuieat , ibid,
& fuiv.
H
H
Y A C I N T H E ( r ) ajiproche du
grenat , &. on peut la regarder
comme un produit du fchori mêlé
de lubftances métalliques, 553.
— Ses caradères communs avec
le grenat : ces deux pierres fe ren-
contrent fouvent enfemble, ibid,
— L'hyacinthe elt après le grenat
la pierie vitreufe la plus denfe ,
ibid. — Différentes nuances dans
la couleur orangée des hyacinthes,
5^4. — Elles perdent leur couleur
au feu, & y deviennent blanches
fans perdre leur tranfparence, ibid,
— Différens lieux où l'on trouve
des hyacinthes , j 5 (5.
Hydrophane ( Pierre ) , ocu/us
mundi ; cette pierre ie trouve ordi-
nairement autour de la calcédoine,
ou intercalée entre ks couches ,
598 &. 603. — Leurs différences;
cette pierre hydrophane eft opa-
que , «Se ne prend de la tranfpa-
rence que quand eWe eft itnbi-
bée d'eau, ibid. — Sa texture eft
X T A B
différente de celle de la calcédoine
& des autres agates, 598. — Elle
devient traniparente , non - feule-
ment dans l'eau, mais dans toutes
les autres liqueurs, 599. — Ces
pierres ne prennent pas toutes à
volume égal le même degré de
tranfparence, 6oz. — La tranfpa-
rence n'appartient pas à la pierre
hydrophane, &. ne provient uni-
quement que de l'eau, qui fait une
partie majeure de fa mafTe après
l'imbibition, 604.
L
JLaiton. Koyf^ Cuivre jaune,
6\. — Efl: un peu plus denfe que
le cuivre pur, mais c'eft lorfque
ni l'un ni l'autre n'ont été com-
primés ou battus , car il devient
moins denfe que le cuivre rouge
après la comprefTlon ; il efl: aufîl
moins fujet à verdir, & fuivant les
différentes dofes du mélange , cet
alliage efl: plus ou moins blanc ,
jaunâtre , jaune ou rouge ; c'efl:
d'après ces différentes couleurs
qu'il prend les noms de Similor ,
de Pïnchebec & d^ métal de Prince,
61. & 62.
M
IVi ALACHITES. Comment elles
font produites par la décompo-
L E
fition du cuivre, jS & 59. —
Les belles malachites fe trouvent
le plus communément dans les
contrées du nord de i' A fie, 103.
— Différentes formes fous lef-
quelles fe préfentent les mala-
chites , ihid.
Manganèse efl un minéral
compofé qui contient toujours du
fer, & qui efl: mélangé de matière
calcaire, 38 j. — La manganè/e
fe trouve principalement dans les
mines de fer fpathiques , 386. —
Elle a auffi fes mines particulières,
ibid. — Indices de la manganèfe
par la couleur violette des pierres
calcaires ,386 if fuïv. — Variétés
de la manganèfe dans fes mines ,
390. — Régule de la manganèfe;
les principales propriétés , ihid. —
Alliage du régule de la manganèfe
avec les métaux & demi -métaux,
391, — Le régule de manganèfe
contient toujours du fer , & il efl:
fi intimement uni avec ce métal
qu'on ne peut jamais S'tn féparer
totalement , ihid. — Ufage de la
manganèfe dans les Manufaélures
des glaces & des verres blancs ;
elle donne au verre une couleur
violette , & fait difparoître les autres
couleurs lorfqu'elles font foibles,
ihid.
Massicot efl une chaux de
DES AI A T
plomb qui prend au feu la cou-
leur jaune en la remuant avec une
fpatule ,195.
Matière. Les propriétés eflen-
tielles de toute matitre font la
denfitc , la dureté , la plus ou
moins grande fuj^bilité , i'homo-
généïtc <5t la combuniLilité ; ce
font en même temps les vrais
caractères par lefquels on peut
reconnoître la nature & l'oricrine
de chaque fubftance différente ,
43<5 & fuiv.
Mercure efl plutôt une eau
métallique qu'un vrai métal, 2, i 5.
— Raifon pourquoi le mercure
ne mouille que les métaux , &. ne
mouille pas les terres , ih'id. & fuiv.
— Le froid extrême coagule le
mercure fans lui donner une foli-
dité confiante , ni même auffi per-
manente que celle de l'eau glacée,
2. 1 I . — Comparaiion ^s proprié-
tés du mercure avec l'eau & avec
les métaux , ïbïd. — Le mercure
mouille les métaux , comme l'eau
mouille les fels ou les terres à pro-
portion des fels qu'elles contien-
nent, 212. — Rapports du mer-
cure avec l'eau, 214. & fuiv. —
Rapports du mercure avec \gs
métaux , 2 1 7 diT' fuh. — Le mer-
cure ne fe trouve que dans les
couches de la terre , formées par
I h R E S. X).
le dépôt des eaux ; il n'efl point
mêlé dans les minerais des autres
métaux, 219. — Sa mine à laquelle
on donne le nom de cinabre , n'ell
point un vrai minerai, mais un
compolc par llmple juxtapofîtion
de loufre & de mercure réunis,
ibid. — La formation des mines de
mercure efl poflérieure à celle des
mines primordiales des métaux ,
220. — Le mercure fe préfenie
très-rarement dans un état coulant,
ibid. — Le cinabre r;e fe trouve que
dans quelques endroits particuliers
où le loutre s'efl trouvé en grande
quantité , & réduit en foie de
foufre par des alkalis ou des terres
calcaires , qui lui ont donné l'afiî-
nité nécefîaire à Ion union avec
le mercure , ibid. — Des trois
grandes mines de mercure, &
dont chacune lufïîroit aux befoins
de tout l'Univers, deux font en
Europe & une en Amérique, 221.
Aline d'Idria dans la Carniole ....
— Mine d' Almadcn en Efpagne ,
ibid. — Mine de Guanca Velica au
Pérou , 222. — Autres petites
mines de mercure , tant en Europe
qu'en A fie, 225 & fuiv Raifon
pourquoi Von trouve fi rarement
le mercure dans fon état coulant ,
^23 2. — Confidération du mercure
dans Ion état de cinabre ; & dai-!>
a}; T a
\<ôn c'tat fTui Je , 237, — Principales
propriétés du mercure , ïbiJ. —
Différence de la chaux de mercure
& des autres chaux métalliques ,
2.40 ù' yî"i'« — Amalgame du
mercure avec les métaux (?c demi-
métaux , 246 & fuïv. — II refufe
de s'amalgamer avec le fer, l'an-
timoine & le cobalt, 248. — Le
mercure ne forme pas un amalgame
avec les graifl'es , 252. — On retire
Je mercure fans perte de tous les
amalgames ; mais on ne peut le
retirer en entier des graifles, 254.—
Sublimé corrofif , ibid. — Mercure
doux, fa préparation, 255. — Le
mercure jeté dans l'huile bouil-
lante prend une forte de folidité,
2J9. — D'où peut provenir la
folidité que le mercure prend dans
le zinc fondu & dans l'huile bouil-
lante , ibid. & fuiv. — Le mercure
philofophique n'eft qu'un être
d'opinion, 262, — Comment le
mercure agit dans le corps des
animaux, 16 i).
Al É T A U X. Confidérations & re-
flexions fur la nature des métaux ,
2 63 <y fuiv. Ordre des matières
métalliques, depuis l'or jufqu'à
J'arfenic, 393* La rédudion de la
chaux des métaux , n'efl: dans le
vrai, qti'une forte de précijiitation ,
^99' — Comparaifon des mines
BLE
primordiales des fix métaux, 208
Ù' fuiv. — Échelle de la Nature
dans fes produdions métalliques ,
213^ fuiv.
Minéralisation. Comment &
par quels agens s'opère la minera-
lifation des matières métalliques ,
402 & fuiv.
Mines. Les mines primordiales
du fer, de l'or, de l'argent, «Se
même du cuivre , font toutes dans
le roc vitreux , & ces métaux y
font incorporés en plus ou moi/is
grande quantité, dès le temps de
leur première fufion ou fublima-
tion par le feu primitif, 38. — Les
mines fecondaires qui fe trouvent
dans les matières calcaires ou fchif-
teufes , tirent évidemment leux
origine des premières , ibid,
M I N I u M efl: une chaux de plomb,
qui prend la couleur rouge à un
certain degré de feu déterminé, qui
eft de cent vingt degrés , & ne
doit être ni plus fort ni j)lus foible,
195. — Pratiques ufitées en An-
gleterre , pour faire le minium eia
grande quantité & à moindres frais,
196 Ù" fuiv,
M u N D I c K efl une poufîlère qui
fe trouve dans les mines d'étain,
& qui ne contient qu'une très-
petite quantité de métal, & c'ert
plutôt
D £ s Aî A
plutôt de l'arfenic decompofç que
de l'ctàin, 1^3.
T I È R E S.
Xiij
O
N
A'
A T U R E. Ses produdions ne
doivent pas être regardées comme
des ouvrages ifolcs ; mais il faut
les confidcrer comme des fuites
d'ouvrages dans lefquels on doit
faifir les opérations fucceflives de
travail , en partant & marchant
avec elle du plus fimple au plus
compofé, 439.
Nickel efl un minéral qui fe
trouve dans les mines de cobalt,
& qui n'efl connu que depuis peu
d'années, 377. — Le nickel con-
tient toujours du fer, & l'on ne
peut l'en féparer entièrement par
aucun moyen , 380. — II donne
au verre la' couleur d'hyacinthe ,
ibïd. — Le nickel , le cobalt & la
inanganèfe ne font pas des demi-
métaux purs, mais des alliages de
différens minéraux mélangés , & fi
intimement unis au fer qu'on ne
peut les en féparer, 381. — Alliage
du nickel avec les métaux & demi-
métaux, 381 d/fuiv. — Le nickel
ne s'amalgame point avec le mer-
cure , 383. — Différence entre le
minerai du nickel & celui du
cobalt, /^/V.
Minéraux, Tome II L
kJ c u LU s M u N D i, Voyfi
Hydrophane.
(EiL DE Chat. Les pierres aux-
quelles on a donné ce nom, font
toutes chatoyantes; elles varient
pour le deffin plus ou moins régu-
lier des cercles ou anneaux qu'elles
préfenteiit, 487. — Variétés de
ces pierres , ibid. — Leurs pro-
priétés chatoyantes , leurs rapports
avec le feld-fpaih , 488.
<EiL DE Chat noir ou noirâtre.
Ses différences avec les autres
pierres auxquelles on donne ce
même nom d' œil de chai, 526. —
II provient du fchori , ibid.
(ElL DE Loup. Pierre chatoyante
provenant du feld-fpath , & mêlée
de particules micacées; elle paroît
faire la nuaiice entre lesfeld-fpaths
de les opales , 49 i •
(ElL DE Poisson. Pierre ainfi
nommée , parce qu'elle refîeinble
au criftallin de l'œil d'un poilfon,
^89. — Elle ell chatoyante, &
on doit la rapporter au feld-fpath,
fa defcription & fes propriétés, ibid.
& 490.
Onyx. Voyei Agate, Le nom
à'ofiyx qu'on a donné de préfé-
rence aux agates , dont les lits font
de couleurs différentes, pourroit
N n 11 n
xlv T A
s'appliquer afTez généralement à
toutes les pierres dont les couches
fuperpofées font de diverfes fubf-
tànces ou de couleurs différentes,
591.
Opale eft la plus belle de toutes
les pierres chatoyantes; fa defcrip-
tion , Ton chatoyement, fa texture,
fon peu de denfité & fes autres
propriétés, 493. — L'opale eft
dans la réalité , une pierre irilée
dans toutes fes parties , elle efl:
beaucoup plus légère que le feld-
Ipath , & auflx beaucoup moins
dure, 45)4. — Différentes fortes
d'opales, ib'id. & fu'iv. — Opales
noires, 49^- — La gangue de
i'opale ell une terre jaunâtre &
vitreufe, qui ne fait point effer-
vefcence sisec \gs acides, 498. —
Les opales renferment fou vent des
gouttes d'eau , \hid.
Or. VoycT^ Argent, i, 2, 3 & 4.
Orpiment. Comment on dillingue
l'orpiment & le rcalgar naturels
de l'orpiment ôc du réalgar arti-
ficiels , 409.
P
X ELLA & PiGNE d'ArGENT.
Voye?^ Argent, 36.
P É R I D O T , tire fon origine du
fchorl , 5 2. 3 . — Différences du
péridot & de la chryfolite , ïhid. —
BLE
Deux fortes de pcridots , leurs
difîérences & leur defcripiion ,
524. — Le péridot donne une
double réfradion plus forte que
celle du crillal de roche , & il a ,
comme ce criftal, un fens dans
lequel il n'y a point de double
réfradion , ib'id. ôc 5 2 j .
PÉTRO-SILEX. Son premier carac-
tère apparent, eiï une demi-tranf-
parence grafle qu'on peut comparar
à celle de l'huile figée, 605. —
Il doit être regardé comme un
quartz mêlé de feld-lpath.- — Il eft
fufible à un feu violent. — II fe
trouve en petits & gros blocs , &
teint de différentes couleurs , ibid,
Pierre de croix. Cette pieire
n'efl qu'un groupe formé de deux
ou quatre colonnes de fchorl ,
oppofées & croifées les unes fur
les autres , 5 6y. — Variétés dans
la forme de ces pierres , & leur
defcription , ibid. — Ce font des
fchorls de formation fecondaire ,
568.
Pierre deLabrador, Voyei
Feld-spath de Russie.
ViET^TiE infernale. Voyei Dissolu-
tion d'Argent, 45.
Pierres irifées. Commem fê pro-
duifentles couleurs dans les pierres
irifées, 500. — Ce Lbnten général
D £ s Ma
des pierres fêlées & défedueufes ,
joo,
Pj ERRES précievfes. Leur fubdance
diffère de celle des criHaux de
roche, tant par la denfitc que par
la dureté & l'homogéncité , c'ell:
de la terre limoneufe ou végétale,
& non de h matière vitreufe
qu'elles tirent leur origine, 460.
Pierres travfparentes. Toutes les
pierres tranlparentes Ibnt fufcep-
tibles de devenir éledriques, elles
perdent leur éledricité avec leur
traniparence, jéo.
Platine. On n'en a jamais rencon-
tré dans aucune région de l'ancien
continent , & il n'y a que deux
endroits en Amérique, où l'on ait
julqu'ici trouvé cette matière mé-
tallique dans des mines d'or, 3 i 6.
•— Elle efl: en grenaille , & mêlée
de fablon ferrugineux & magné-
tique, ibid. — Il n'eft pas certain
que cette forme de grenaille foit
la forme native de la platine ,317.
■ — La platine eft encore plus ré-
fraâiaire au feu que la mine de fer,
ibid. — La platine n'efl point un
vrai métal fimple , mais un minéral
dont la produdion eft accidentelle,
3 1 8 6c 5 I 9. — La platine contient
toujours du fer, car elle eft tou-
jours attirable à l'aimant, 319. —
l^a platine eft toujours aigre, &
T I E R E S» XV
n'acquiert que très-peu de dudi-
iité, ibid. — C'eft un alliage d'or &
de fer fait par la Nature, 320, —
Raifons pourquoi l'on ne peut
tirer ni l'or ni le fer de la platine,
321. — Principales propriétés de
la platine , 323. — Mélange de la
platine avec les métaux , 3 2 5 di^
fuiv. — Moyens de reconnoître
l'or falfifié par le mélange de la
platine, 3 27 ^ fuiv. — La fubi-
tance de la platine, quoique tirée
de la même mine , n'eft pas tou-
jours la iiième, 328. — Pourquoi
la platine ne s'amalgame pas, comme
l'or, avec le mercure j 330. —
XJfages utiles qu'on pourroit faire
de l'alliage de la platine & du
laiton, 332 & 33 4- — De tous
les n)étaux , le plomb & l'ar-
gent font ceux qui ont le moins
d'affinité avec la platine , 333.—
La platine n'eft qu'un mélange
accidentel d'or imbu de vapeurs
arfenicales, & de fer brûlé autant
qu'il eft pofllble; preuves de cette
aftertion , 334. & fuiv. — Diffé-
rences de la platine avec l'or, 336
(^ fuiv, — La denfité de la platina
n'eft pas conftante , mais varie
félon les differens procédés qu'on
emploie pour la fondre, 3}9- -^
XJfage de l'alliage de la platine
avec le fer forgé, 345 Ù'Juiv,-^
N n n n ij
XVJ T A B
Obfefvations intereflaiites fur i'hif-
toire naturelle de la platine, 355.
Plomb. Les mines primordiales de
plomb font toutes en galènes de
forme hexaèdre, & toutes les mines
qui le prcièntent fous d'autres
formes ne proviennent que de la
• décompofition de ces galènes, 1 87.
— Mine de plomb blanche, n'efl:
qu'une cèrufe ou chaux de plomb
criftallifèe, & produite par l'inter-
mède de Teau , i 90. — Mines de
plomb verte , mine de plomb
rouge, ibid. — Mine de plomb
ijngulière, qui renferme des grains
de plomb tout- à-fait pur, i 87 e^
fuiv. — Mines de plomb tiennent
prefque toutes une petite quantité
d'argent , & prefque toutes les
mines d'argent tiennent aufFi du
plomb; mais dans les filons de ces
mines le plomb , comme plus pe-
fant , defcend au-de(Tous de l'ar-
gent , & il arrive prefque toujours
que les veines les plus riches en
argent, fe changent en plomb à
mefure qu'elles s'étendent en pro-
fondeur , ibid. — Toutes les chaux
de plomb blanches, grifes, jaunes
& rouges font non-feulement très-
aifèes à vitrifier, mais même déter-
minent promptement la vitrification
de plufieurs autres matières, jpS.
, — Le plomb eft le moins dur &
L E
le moins élaftique de tous les mé-
taux , il efl: aufTi le moins duâile
& le moins tenace, ibid. — Coin-
paraifon de la chaux de plojub
avec celle d'étain , 200. — Le
plomb peut s'allier avec tous les
métaux, à l'exception du fer, 202.
— Mélange du foufre avec le
plomb par la fufion, forme une
elpèce de pyrite qui refîemble à
la galène, 206. — Le plomb ne
fe trouve pas plus que l'étain dans
l'état de métal, i 64. — La galène
de plomb efl une vraie pyrite, ibid.
— Mines de plomb en galène,
varient beaucoup par la largeur de
leurs filons , 1 66. — Le plomb Te
convertit en chaux non-feulement
j)ar le feu , mais aufll par les élé-
mens humides, ibid. — Les mines
de plomb en cérufe font de troi-
fième formation , 1 67. — Décom-
pofition naturelle de la galène,
ihid. — Mines de plomb en îrance :
celle de Pompéan en Bretagne,
eft la plus riche, 168. — En
Elpagne de autres provinces de
l'Europe, 178 & fuiv. — En Afi>e,
I 83. — En Afrique & en Amé-
rique , ibid. & fui'j.
P R A s E. Efl une agate verte , fou-
vent tachée de blanc , de jaunâtre ,
de brun, & qui efl quelquefois
auHi tranfparente que les belles
DES Ma
sgates, 5 89.— Les prafes ne font
pas fort communes , ibid. — On
en trouve néanmoins en Siléfie ,
& lorfque leur vert efl mêlé de
jaune , on leur donne le nom de
cryfoprafcSy 589. — Quelques Na-
turalifles ont donné Je nom de
prafe à la prime d'émeraude , qui
n'eft point une agate, mais un
criftal vert défedueux, 590.
S
O AFFRE. Voye-^ Cobalt, 362 &
370.
Saphir à'eau. Ses propriétés natu.
relies , Tes couleurs , fa double
réfra^ion, &c. 48 3 & 4.84. — Ses
défauts. — Il tire fon origine du
feld-fpath & du quartz; preuves
de cette aflertion , ibid.
Saphir du Brésil provient du
ichorl; Tes rapports avec i'éme-
raude du Brefil, & Tes différences
d'avec le vrai faphir , 5 2 j .
SardoiNE efl une agate d'un
rouge mêlé de jaune, ou pure-
ment jaune , 585. — Cette couleur
orangée de la fardoine, eft plus
fuave à l'œil que le rouge dur de
ia cornaline , 588. — Les fardoines
font plus rares que les cornalines ,
& fe trouvent rarement en aufîi
grand volume, 5 85>.
S C H O R L , eft le plus denfe des
cinq verres primitifs, 437. — La
T I è R E S. ay)}
criftdliifation des premiers fchorls
a été produite par le feu primitif,
comme celle du feldfpath, 487,
— Rapports du fcliorl avec le
feld-fpath, j 02. — Ses différences
avec le quartz , ibid.
Sels. On peut compter trois fels
fimples dans la Nature , l'acide ,
l'alkali & l'arfenic, qui répondent
aux trois idées que nous nous
fommes formées de leurs effets ,
& qu'on peut défigner par les
dénominations de fel acide , fel
cauftique & fel corrofif, 1^6.
Smath. Voyei Cobalt, ^6j &
370.
T
1 o M B AC. Mines de tombac à la
Chine, au Japon &. à file de
Bornéo, font des mines de cuivre
mêlées d'une certaine quantité d'or,
105^ Juiv.
Topazes de Bohème ne font
que des criflaux de roche colores
de jaune, 448 «3c 471. Ces to-
pazes auxquelles j'ai cru devoir
donner la dénomination de crijîaux-
topa^es , fe trouvent, comme le
criftal de roche, dans les climats
chauds , tempérés & froids , au
lieu que les vraies topazes ne fe
trouvent que dans les climats \q.%.
plus chauds , 471. — La denfiré
de ces criftaux-topazes efl à très-
xvTi/ T À
peu-près égale à celle du criftal
bfanc, ifs ont auflî le inênie degré
de dureté, 473. — Us perdent
leur couleur, & deviennent blancs
comme le criftal par l'adion du
feu , iûiJ. <5c 474.
Topazes & Rubis du Brésil,
Leur nature & ieur origine font
toutes différentes de celle des rubis
& topazes d'Orient, 550. — Ce
font des criftaux vitreux prove-
nans du fchorl; preuve de cette
aflertion, ii^id. — La plupart des
rubis du Brefil, ne font que des
topazes chauffées du même pays,
532.
Topaze de Saxe eft, comme
celle du BrefiI, une pierre vi-
treufe que l'on doit rapporter au
fchorl , leurs refîembfances & leurs
différences, 536. — La couleur
jaune de la topaze de Saxe, efh
toujours moins foncée que celle
de h topaze du Brefif, 557. ^.
Différences de dureté entre la
topaze de Saxe & la vraie topaze ,
ibid. — La topaze de Saxe perd
(à couleur jaune au feu , & y
devient tout- à -fait blanche, au
lieu que la topaze du Brefil y
prend une couleiir rougeâtre ,
538 iùrfuiv.
Tourmaline. Sa principale
propriété eft de devenir éledrique
fans frottement, ôa par la fimple
BLÉ
chaleur ; cette électricité que le
feu lui communique , Ce manifefte
par attradion, fur l'une des faces
de cette pierre , & par répulfioii
lur la face oppofée, J59. — La
tounnaline perd fon électricité
lorfqu'elle eft trop chauffée , 5 60.
— La tourmaline le fond comme
ie fchorl, à un feu violent, iùiJ,
— Ses autres rapports avec les
^chorls, $61. — Différentes fortes
de tourmalines, ibid. — Tourma-
lines de Ceylan , du Brefil, du
Tyrol, Sic. leurs différences, 5 62.
TUTUNAC. Le métal qu'on appelle
aux Lides orientales tutunac , eft
probablement un alliage d'étain &
de bifmuth ,152.
V,
V
ERMILLON. Les Romains
faifoient grand cas du vermillon ,
&:tiroient tous les ans d'Efpagne,
environ dix mille livres de cinabre ,
&L les anciens Péruviens em-
ployoient auffi le cinabre pour
faire du vermillon, & ne connoif^
foient pas le mercure avant l'arrivée
des Efpagnols dans leurs pays,
a82.
Vert-degris ou Verdet, eft:
une elpèce de rouille qui pénètre
dans l'intérieur du cuivre , & avec
le temps en détruit la cohérence,
& la texture , 60.
'DES Mât
Vert de montagne. Comment
il efl produit par la décompofuion
du cuivre, 59. — Voye^ Chryfe-
cclle.
Z
J—i I N C. Ce demi - mctal fe tire
également de la pierre calaminaire
&. des blendes, 295. — Compa-
raifon de cette pierre calaminaire «Se
des blendes , ïb'id. & fuiv. — Le
zinc exifte non-feulement dans la
pierre calaminaire & les blendes,
mais encore dans plufieurs raines de
fer, 2C)7. — La formation des mines
de zinc efl; pûft^érieure à celle des
autres mines métalliques, & même
pofle'rieure à leur première dé-
compofition , 297. — Le zinc efl;
très-volatil, il ne fe trouve dans au-
cune mine primordiale des métaux,
2,^ 8 . — Manière de tirer le zinc des
blendes & de la pierre calaminaire,
jyid, — Lieux où l'on trouve des
minières de pierre calaminaire ,
2.c)Cf à^ fuiv. — Le zinc s'emploie
rarement pur, & n'efl pas même
fi propre à faire du cuivre jaune
ou laiton , que la pierre calami-
naire, 300. — Manière dont fe
A'Jy
T 'È P E S.
fait le laiton ou cuivre jaune avec
le cuivre rouge & la pierre cala-
minaire , 301. — Le zinc efl non-
feulement très- volatil, mais très-
inflammable , 303. — Moyen d'ob-
tenir le zinc dans fa plus grande
pureté, 305. — Propriétés natu-
relles du zinc , fes conformités &
fes diflcrences avec l'étain , iùiJ.
d^ fuiv. — Fleurs de zinc. — Con-
verfion de la chaux de zinc eu
verre couleur d'aigue-marine, 3 10.
— Le zinc en fufion & fous fa
forme propre , s'allie avec tous
les métaux &. n>inéraux métallicjues,
à l'exception du bifniuth &. du
nickel, 311. — Alliage du zinc
avec les métaux, il les rend tous
aigres &. caflans, jbid. — Amalgame
du zinc avec le mercure, efl diffé-
rent des autres amalgames, iùiJ. —
La chaux du zinc efl très-diflScile
à réduire , &. conlerve mieux fa
blancheur que la cérufe ou chaux
de plomb. Il paroît donc que le
blanc de zinc feroit préférable au
blanc de plomb dans la peinture,
312. — Le vitriol de zinc efl blanc,
& fe trouve afllez fouvent dans le
fein de la terre , ^ ^ ^'
Fin âe la Table des Aintïeres du tro'ifihne Volume âa
Minéraux^
■^^r-
-•*£...
, J -
^
w
1-'
m
-*^
#L
#
I
i-^W
>*
5:,»r>,
^
t^^
m
i.(
e>Ai
,;asi'^"
^
^
'*^.