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jm.
HISTOIRE
NATURELLE,
GÉNÉRALE ET PARTICULIÈRE,
AVEC LA DESCRIPTION
DU CABINET DU ROL
Tome Qinn:(ieme\
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in 2011
Iittp://www.arcliive.org/details/liistoirenaturell002buff
HISTOIRE
NATURELLE
DES OISEAUX.
Tome Second.
A PARIS,
DE L^IMPRIMERÏE ROYALE.
M. DCCLXX.
naiiMi ■■ 11. I ■ ■■■■■! ■■■■■■■■■ ■! 1 111
TABLE
De ce qui eft contenu dans ce
Volume.
/ / E Faucon . ....... page i
Oifeût/x étrangers qui ont rapport au
Gerfaut & aux Faucons ... 31
Le Hobreau 43^
La Cre(ferelle ........... 48,
Le Rochier , . . 56
L'Emérillon 55'
Les Pie - grièches , 67^
La Pte-grièche grîfe . 70
La Pïe-grïèche roujfe 7 8i
L'Ecorcheur .... 8 li
Oifeaux étrangers qui ont rapport à
la Pie-grièche grife & à l'Écor-
cheur, . • . . , . . , .. , , , ., 8fe
^ L Le Fingah., .', ^&
IL Rcuge-qiime , , . 8^
m. Langraien iT' Tcha-chert . ... 89
I V". Bécardes 91
V. Bécardes à ventre jaune ^ .... 9:^
VI. Le Vanga ou Bê carde à ventre
blanc .,.,.,■ 93
VU. Le Schet~bé . 94-
V\\\, Le Tcha-chert-bé , .... ... 95
JX. Le Gonolek 96
X. Le Calï-Calkit/ le Bruia, . , 97
XI. La Pie-griêche huppée, . . ^ Jbid,
Les Oïjeaux de proie noâurnes, pp
he Duc OLi gmnd Duc . . ,- . 121.
X^ Hïhou ou 7?/(9yf /; Z)//r . V . i j j
Z'^ ScOpS ou /7^/// i)//6' .... 151
La Hulotte ........... 158
Le Chat-huant .....*.•• 163
L' Enraie ou /^ Frefaie . . * . 168
X<f2 Chouette ou Z:/ grande Chevêche,
La Chevêche ou petite Cliouette, 183
Oijeaiix étrangers qui ont rappoH aux
Hiboux & aux Chouettes. , , i p i
I, Le Cahiire ou CiTkoiire Ibid,
II. Le Caparacocli, , 1^4,
m. Le Harfang, . i 97
IV. I^e Chat- huant de Cayenne , , 202
V. La Chouette ou grande Chevêche de
Canada , 203
VI. La Chouette ou grande Chevêche de
Saint-Domingue , , 204^
Oîjeaux quï ne peuvent voler ... 205
L' Autruche 212
Le Tony ou . ... . 29a
Le Cajoar «....o 306
Le Dronte 325
L^e Solitaire & l'Oifeau de Na^are,
336
PaT M. DE BUFF©N.
HISTOIRE
HISTOIRE
NATURELLE
DES
OISEAUX,
LE FAUCON (a).
JL OR S qu'on jette les yeux fur îcs
liltes de nos Noinenclateurs d'Hiftoire
(a) En dec moderne, (taKKù>v ; en Latin mo-;
deme, Falco; en Italien, Falcotie ; en Efpagnoi ,
■Halkon ; en Allemand, Falck; enPolonois, Sokol ^
en Anglois , Falcon, — Fako apud Fmnicwn , Sui-
dam & récent iores. Gefner. Jcon, Avî. pag, ti 04
i— Fûucofi. Bclon , Hijf. nai. des^ Oifeaux , pa^e
Î15. — Falcc, Aldrov. Avi. rom^ J , pag, ^2^,
— AcàpucY fufcus. Frifch , planche LXXIV, avec
une figure coloriée. ^ — Accipiier fujcus oris penmrum
rufefcentibus ndricihus fufcis fujco faiurativre iranf-
perjîm flriatis Falco , le Faucon, Briflbng
ÇYnith, tome l , page ^ 2 / ,
Qifcaux f Tom^ IL .^ A
^ 'Hlflolre Naturelle
Naturelle (b) , on fer oit porté à croîr^
qu'il y a dans l'erpèce du Faucon autant
^de variéte's que dans celles du pigeon ,
de la poule ou -des autres oifeanx do-
su eiliquies : cependant rien n'efl: moins
vrai ; l'homme n'a point influé fur h
(h) M. Brlffon compte treize variétés dans
.C€tte première efpèce, favoir ; ie faucon-fors, le
faucon-Iiagard ou bolTu , ie faucoii à tête blanche,
îe faucon blanc, le faucon noir , ie faucon tacheté,
]e faucon brun , ie faucon rouge des Indes , le
faucoa d'Italie , îe faucon d'IUande & ie facre ;
<& en même temps il compte douze autres efpèces
ou variétés de faucons , différentes de la première ^
favoir ; 4e faucon gentii , ie fauccn-péierin , dont
le faucon de Barbarie & ie faucon de Tartarie
font àts> variétés ; ie faucon à collier, le faucon de
roche ou rochier ; ie faucon de montagne ou mon-
tagner, dont ie faucon de montagne cendré ell
une variété ; ie faucon de la baie de Hudfon , le
faucon-étoiié, le faucon- huppé à^s, Indes, ie faucon
Ât?. Antilles , & ie faucon-pêcheur de la Caroline.
M» Linnsus comprend fous l'indication génériquie
idu faucon, vingt-iîx' efpèces différentes; mais il
eit vrai qu'il confond feus ce même nom , comme
il fait en tout y- les efpèçes ébignées , auffi - \ÀtVL
sue les erpèce'lç rbinnesy ear'çin trouve dans cette
iiik de fa-jcoris , les argics',^ les '|)ygargU€s, -les
orfraies , \t^ crefferelles , les-bufesV &c. Au moins
la iifLe de M.-Briiron, quoique' -d'un tiers trop
jîotîibreufe , Ç-^i faite avec plus de drcop/ped-ioii
^ à& difcernemenî.
(h Faucon: 51
nature de ces animaux ; queîqu*utiles
aux plaifirs , quelqu'agréables qu'ils
foierit pour ie fade des Princes chaf-
fèurs, jamais on n'a pu en élever, en
multiplier l'efpèce : on dompte à la
vérité , ie naturel féroce de ces oifeaux ,
par la farce de l'art & des privations (c):
( c) Pour drefler îe faucon, l'on commence
par l'armer d'entraves , appelées jeis , au bout
defqueHes on met un anneau, fur lequel eft écrit
le nom du maître ; on y ajoute àt^ fonnettes qui
fervent à indiquer ie lieu où il eft lorfqu'ii s'é-
carte de la chalfe ; on le porte continueliemene
fur le poing ; on l'oblige de veiller : s'il eft mé-
chant & qu'il cherche à fe défendre, on lui plonge
îa tête dans l'eau ; enfin on le contraint par k
faim & par la laffitude à fe laiffer. couvrir la tête
d'un chaperon qui lui enveloppe les yeux ; cet
exercice dure fouvent tr@is jours & trois nuits de
fuite : il efl rare qu'au bout de ce temps , \t%
befoins qui le tourmentent & la privation de ia
lumière ne lui faflent pas perdre toute idée de
liberté : on juge qu'il a oublié fa fierté riatureHca
.lorfqu'ii fe laifîe aifément couvrir la tête , & que
découvert il faifit le pât ou la viande qu'on a foin
de lui préfenter de temps en temps ; h répétition.
de ces leçons en aÏÏure peu à peu le fuccès : les
befoins étant le principe de la dépendance , oii
cherche à les augmenter en lui nétoyanî l'efiomaG
par des cures ; ce font de petites pe'otles de fikffe
qu'on lui fait avaler , & qui augmentent fon ap-
pétit j on le fatisfait après l'avoir excite , & \%
Ait
.^ 'Hiflolre Natiireïle
DU ieur fait acheter leur vie par des
mouvemens qu'on ieur comfnande ;
chaque morceau de ieur fubriilance ne
ieur eit accordé que pour un fèrvice
rendu : on ies attache , on ies garotte ,
on ies affuble , on ies prive même de
ia iumière & de toute nourriture , pour
îes rendre pius dépendans , pius do-
ciles , & ajouter à leur vivacité naturelle
l'impétuoiité du befoin (d) ; mais iis
reconnoiffance attache l'oifeau à celui même qui l'a
tourmenté. Encyclopédie , à l'anick de la fau.-.
connerit.
(d) Lorfque les premières îeçons ont réuffi , &
que roifeau montre de ia docilité j on le porte fur
îe gazon dans un jardin , là on le découvre, &
avec l'aide de la viande , on le fait fauîer de lur-
3-nême fur le poing ; quand il efl afTuré à cet
exercice , on juge qu'il efl: temps de lui donner
3e vif, & de lui faire connoître le leurre ; c'elî
une repréfentation de proie, un affembiage de pieds
'£•<: d'ailes , dont les fauconniers fe fervent pour ré-
damer les oifeaux , & fur lequel on attache leur
\iande; il ed important qu'ils foientnon-feuîemenc
accoutumés , mais affriandés à ce leurre ; dès que
l'oifeau a fondu deffus & qu'il a pris feulement
tine beccade, quelques fauconniers font dans Tufage
de retirer le leurre , mais par cette méthode on
court rifque de rebuter l'oifeau; il efl pius fur,
îorfqu il a fait ce qu'on attend de lui , de le paître
l|9U£-à-faîî, ^ ce doit être la récompenfe de i^
du Fdiïcoth 5^
fervent p:ir nécefîné , par habitude &
fhn^ attachement ; ils demeurent captifs,
fans devenir donielliques; l'individu feul
ell efciave , l'eipèce eil: toujours libre ,
docilité ; îe îcnrre efl l'appât qui doit le fure re-
venir iorlliu'il fera élevé dans fes airs, m.Tis i( ne
feroit pas iiiffifant fans la voix du fauconnier qui
i avertit de fe tourner de ce côté-là; i! faut que ces
leçons foient foiivent répétées I! faut cher-
cher à bien connoître le caradèrc lie loiitau ,
parler fouvcnt à celui qui paroît moins attentif à
la voix, laiffer jeûner ceiui qui revietu moins avi-
dement au leurre ; laiffcr auiTi \ eiiier plus îoni^-
temps celui qui n'efh pas afTez famiiier ; couvrit:
fouvenr du chaperon celui qui craint ce genre
d'alîujctliifement : icrfque la fimiliariîé & la docilité
de I oifeau font fufnfammcni confirmées dans un
jardin , on le porte en pleine campagne , m^ais tou-
jours attaché à la iiiière, qui ei^ une ficelle longue
d'une dixaine de toifes ; on le découvre , <& en
l'appelant à quc!(}ucs pas de diHance, oh lui montre
le leurre; iorfqu'il fond deiTus , on fe fert de fa
viande & on lui en iaiiîe prendre bonne gorge j
pour continuer de i'aiTurer, le lendemain on la lui
montre d'un peu plus loin , & il parvient ç.x\Ç\i\ à
fondi'e defïïis du bout de la i7iicre , c'eft aîcrs qu'ii
fiut faire connoître & manier pluiieurs ï^Sn à l'cifeau
le gîbier auquel on le defîine; on en conferve de
prÏN'és pour cet ufage , cela s'appeî's dorr-er l'fjcnp ,-
c'eft la dernière leçon , mais elle doit fe répéter
jufqu'à ce qu'on foit parfaitement aiTuré de i'oifeau :
alors on le met hors de fiiière , & on le vole pour
iors. Encydijénie , an, de la fmcomerie.
A ii)
6 Hlfloire 'Natnrdle
toujours également éloignée de Tempire
de i'homme : ce n'efl niêiiie qu'avec
des peines infinies qu'on en fait quel-
ques-uns prifonniers , & rien n'ell plus,
difficile que d'étudier leurs mœurs dans,
î'état de nature ; comme ils habitent les.
rochers les pius efcarpés àQ^:> plus hautes,
montagnes , qu'ils s'approchent très-
rarement de terre , qu'ils voient d'une
hauteur & d'une ra]:>idiié ians égale ;
on ne peut avoir que peu de faits fur
ieurs habitudes naturelles : en a feule-
ment remarqué qu'ils choififfent toujours
pour élever leurs petits , les rochers ex-
poles au midi ; qu'ils le placent dans les
trous & les ûnfraéîures les plus inaccef^
iibles ; qu'ils font ordinairement quatre
ceufs , dans les derniers mois de l'hiver,
qu'ils ne couvent pas long-temps , car
îes petits font adultes vers le 15 de
Mai ; qu'ils changent de couleur fai-
vant le fexe , l'âge & la mue ; que les
femelles font confidérablement plus
groiTes que les mâles ; que tous deux
jettent des cris perçans , défagréables &
prefque continuels , dans le temps qu'ils
chafTent leurs petits pour les dépaïfer 3
{lu FaucofU 7j
ce qui Te fait , comme chez ïes aigles ^
par .la dure nécelîité qui rompt les
liens dès ftiniilies & de toute Ibciété ,-
dès qu'ii n'y a pas afîez pour partager^
ou qu'il y a impofTibiiité de trouver
aiïez de vivres pour rubfiHer enfemble
dans les mêmes terres.
Le faucon ed peut-être l'oifeau dont
le courage efl le plus franc , le plus
grand , relativement à fes forces : il fond
làns détour & perpendiculairement fur
fa proie ; au lieu que l'autour & ia
plupart des autres arrivent de côté :
aufîi prend- on l'autour avec ^qs filets
dans iefqueis le faucon ne s'empêtre
jamais ; il tombe à plomb fur l'oifeau
vi(flim-e , expole au milieu de l'enceinte
des filets , le tue , le mange {\aX le liett
s'il efl gros , ou l'emporte s'il n'efl pas
trop lourd , en fe relevant à plom.b ::
s'il y a quelque faifinderie dans fou
voifinage , il choifn cette. proie de pré-
férence ; on le voit tout-à-coup fondre
fur un troupeau de faiians comimic s'il
tomboit à^s nues , parce qu'il arrive
de {\ haut, <& en fi peu de temps, que
fou apparition eil toujours im.prévuç &>
A iiij^
8 Hifloire Naturelle
fouvent inopinée : on le voit fréquem-
ment attaquer le milan , foit pour
exercer fon courage , foit pour lui en-
lever une proie ; mais il iui fiit plutôt
la honte que la guerre • il le traite comme
m lâche , le chafTe , le frappe avec
dédain , & ne le met point à mort ,
parce que le milan fe défend mal , &
<]ue probablement fa chair répugne au
faucon encore plus que fa lâcheté ne
iui àé'^l'ûu
Les gens qui habitent dans le voi-
fmage de nos grandes montagnes, en
Dauphiné, Bugey, Auvergne & aux
pieds des Alpes , peuvent s'adurer de
îous ces faits ( e ), On a envoyé de
Genève à la fauconnerie du Roi, des
|eunes faucons pris dans les monta crues
voifines au mois d'avril , & qui pa-
roiffenî avoir acquis toutes les di-
menfions de leur taille & toutes leurs
forces avant le mois de juin. Lorfqu'ils
font jeunes ; on les iippdk faucon-fors,
(e) Nom. Ils m'ont été rendus par cîes témoins
oculaires, & partrcufîèrcment par M. Hébert, que
j'ai déjà cité plus d'une fois , & qui a chafTé pendanî
gincj ans dans les monragnes du Buge)^,
du Faucon, 9
comme Ton dit harengs - fors , parce
qu'ils Ibnt alors plus bruns que dans
les années iuivantes "" ('^''^y(\ planche I de
ce volume ) ; &i l on iippclle les vieux
inucons , hagards , qui ont beaucoup
plus de blanc que les jeunes (fj,
voyer planche II de ce volume ^; le faucon
qui eil reprélènté dans cette dernière
planche nous paroît être de la féconde
année , ayant encore un aiïez grand
nombre de taches brunes fur la poitrine
& fur le venire ; car à la troifième
année ces taches diminuent, & la quan-
tité du blanc fur le plumage augmente,
comme on le peut voir dans le ftucou
reprélènté \ dans laquelle on a gravé,
par erreur , le nom de lanière au lieu de
tiercelet de faucon de la troficnu année,
Comm.e ces oifeaux cherchent par-
tout les rochers les plus hauts, & que
* Voycj^ les planches enhimïnécs, n.° 470,
( f) JMotn. Puifque le faucon- fors & le faucon-
Iiagar ou bofTu ne font que Je nntme faucon, jeune
& vieux , on ne doit pas en faire des variétés dajis
lefpèce,
^ Voyei les planches enluminées, n,° 4-21.
A ¥
fîo HïJIoh'e Naîiirelle
îa plupart des îies ne font que des
groupes & des pointes de montagnes ;
M y en a beaucoup à Rhodes, en Chy-
pre , à Maïte , &. dans ies autres îles de
la Méditerranée , auffi-bien qu'aux Or-
cades & en Ifîande ; mais on peut croire
que fuivant les différens clim.ats , ils
paroifTent fubir des variétés différentes ,
dont il e(l néceffaire que nous fafllons
quelque mention.
Le faucon qui efl naturel en France
eft gros comme une pouie : ii a dix-
huit pouces de longueur , depuis le
bout du bec jufqu'à celui de ia queue ^
êc autant jufqu'à celui des pieds : la
queue a un peu plus de cinq pouces
de longueur, & il a près de trois pieds
& demi de vol ou d'envergure : Çqs
ailes , iorfqu'elies font pliées , s'étendent
prefque jufqu'au bout de la queue ; je
ne dirai rien des couleurs, parce qu'elles
changent aux différentes mues, à mefure
que i'oifeau avance en âge , & que
d'ailleurs elles font fidèlement repré-
fentées par les trois planches enluminées
que nous venons de citer ci - deffus^
J'obferverai feulement que la couleur fe
du Faucon, tt
plus ordinaire des pieds du faucon , eft
verçjâtre , & que quand il s'en trouve
qui oni les pieds &: -la membrane du
bec jaune *, les Fa.uconniers les appel-
lent faucon bec jaune , & les regardent
comme les plus laids & ies moins nobles--
de tous les fiîucons ; en forte qu'iis ies
rejettent de l'écoie de ia fiuconnerie :
j'obierverai encore qu'ils fe (ervent àw
tiercelet de faucon , c'eft - à - dire , àxL
mâle , lequel ell: d'un tiers plus petit
que la femelle , pour voler ies p-^rdrix ^^
pies , geais , merles &: autres oi féaux de
cette elpèce ; au lieu qu'on emploie îa
femelle au voi du lièvre , du milan , de
la grue & des autres grands oileaux.
Il paroît que cette efpèce de faucon ^
qui eil affez commune en France ,. fe
trouve aufîi en Allemno-ne, M. FriCch
(g) a donné ia ngure coloriée d'un
. * Voyez celui qui efî repréferité às.n^^^^ flmchr-
•^nluminée , n.° 4-50.
( g ) N:ita, Voler ce que M. FriilH dit de cet
oifeau , qu'il appelle \''em£?ni ries canards ou ïaïuov/r-
d'un ù^-un noir, il a été pourvu par h Nature de
longues ailes- & de plumes ferrées les unes fur les
amres , , . . ^. , ^ Ceti des oifeaux-. ds- pmia i'un àesi
■ A. -4
fi2 Hïfloire Naturelle
faucon -fors à pieds & à membrane Jiî
bec jaune , fous le nom de emen-Jlojfet
ou fchwart';^- bmvne hûhigt , & il" s'efl
trompé en iui donnant le nom d'autour
hrim ; car il diltère de l'auiour par la
grandeur & par le naturel. II paroît
qu'on trouve aufD en Allemagne , &
queiquefois en France ^ une eipèce
différente de celle-ci , qui e(t le faucoa
pattu à tête blanche , que M. Frifch
appelle mal - à - propos vautour, ce Ce
D3 vautour à pieds velus ou à culotte
>3 de plume , eft , dit - il , de tous les
33 oileaux de proie diurnes à bec crochu ^
33 le feui qui ait {\qs plumes julqu'à ia
D3 partie inférieure des pieds , auxquels
D> elles s'appliquent exadlement : l'aigle
33 des rochers a aufîi des plumes fem-
33 blables ^ mais qui ne vont que juf=
D3 qu'à la moitié des pieds : les oifeaux
D3 de proie nodlurnes , comme les
33 chouettes , en ont jufqu'aux ongles ,
33 mais ces plumes font une efpèce de
23 duvet : ce vautour pourfuit toute forte
plus vigoureux, il poUrfuit de préférence les ca-
nards , fes poules d eau & autres oilbaux d'eau.
Jii Faucon. I 3'
de proie , ^ on ne le trouve Jamais ec
auprès des cadavres (h) , y> c'eil parce
que ce n'efl: pas un vautour , mais un
fliucon , qu'il ne fê nourrit pas de
cadavres ; & ce faucon a paru à
quelques-uns de nos Naturaiifles allez
femblable à notre faucon de France ("i/,
pour n'en faire qu^une variété : s'il ne
differoit en effet de notre faucon que
par la blancheur de la tête, tout le reite
e(t affez femblable pour qu'on ne dût
ie confidérer que comme variété ; mais
le caraélère des pieds couverts déplumes
jufqu'aux ongles, me p.iroit être fpé-
cifique , ou tout au moins l'indice d'une
variété confiante, & qui fait race à
part dans i'efpèce du fiucon.
Une ieconde variété ejfl îe faucon
Blanc , qui fe trouve en Rullie, & peut-
être dans fes autres pays du Nord ; ii
Y^J Vr'ifch , p Fane fie L^XV ; avec me figure
^coloriée, — Le Faucon à tête blanche. Briffon ,
tome I, page J 2j ; & tome VI , Jvpplément , page:
S. 2. , flanche I,
(î) Voyez rOrnithoîogîe de M^ Briflbn^
; î. 4. Hîflolre . Naturelle
y en a de tout - à - £iît blancs & fàns
taches, k l'exception de l'extrémité des-
grandes plumes des ailes qui font: noi-
râtres : il y en a d'autres de cette eipèce,
qui font aufîi tous bfancs, à i'exception.^
de quelques taches brunes lur le dos
é£ fur les ailes , & de quelques raies
brunes fur la queue (k) r- comme ce
faucon blanc eii de la même grandeur
que notre faucon , & qu'il n'en diffère
que par la blancheur, qui efl la couleur
que \ts oifeaux , comme les autres
animaux , prennent affez généralement
dans les pays du Nord ^ on peut pré-
fumer avec fbndement que ce n'efl
qu'une variété de i'efpèce commune,-
produite par l'influence du climat : ce-
pendant il paroît qu'en îjfîande, il y a
aullj des faucons de la même couleur:
que les nôtres , mais qui font un peu
pius gros , & qui ont les ailes & la
queue plus longues ; com.me ils refTem-
bient prefqu'en tout à notre faucon,
&: qu'ils n'en diffèrent que par. ces
XégtïS caraélères 5 on ne doit pas les
féparer de i'efpèce commune. îl en efî^
(k) Briflbîi, îomtl imge ^.z6o_
{lu Faucotù 'î 5'
tle même de celui qu'on appelle y^z/rt?/?-
gentil , que prefque tous les Naturalises
ont donné comme diftérent du faucon
commun, tandis qu« c'ell le même,
& que le nom de gent.ïl ne leur efl ap-
pliqué que lorsqu'ils font bien élevés ,.
bien faits & d'une jolie figure ; aufîi nos
anciens Auteurs de fiuconnerie , ne
comptoient que deux e(|:>èces principales
de fuicon , le faucon- oentii ou faucon
de notre pays , & le faucon-pélerin ou
étranger, & res^ardoient tous les autres
comme de fimpies variétés de l'une ou
de l'autre de ces deux cipèces. li
arrive en effet quelques faucons des
pays étrangers , qui ne font que fe
montrer fans s'arrêter , & qu'on prend
au paffage i il en vient fur - tout du
côté du midi, que Ton prend à Malte ,
& qui font beaucoup plus noirs que nos
faucons d'Europe; on en a pris même
quelquefois de cette elpèce en France ;
& celui dont nous donnons la figure
enluminée * , a été pris en Brie : . c'efl
par cette raifon que nous avons qïVl
pouvoir i'appeler faucon pûjfager ^ il,
^ yojeiis^ planches enlumn^ess ^- n.° ^éc^»
Il6 Hljîolre Naturelle
paroît que ce faucon noir pnfle en
Aliemagne comme en France , car c'efk
îe même que M. Frifch a donné, fous
ie nom de falco fufcus , fauccn brun
(planche LXXXIII ), ôl qu'il voyage
beaucoup plus loin ; car c'eil: encore
ie même faucon que M. Edwards a
décrit & repréfènté , tome I , page ^ ,
fous le nom de faucon noir de la baie
de Hudfon , ôl qui en effet iui avoit été
envoyé de ce climat. J'obferverai à ce
fujet , que le faucon paflager ou pè-
lerin , décrit par M . Brifibn , page J41,
n'efl: point du tout un faucon étranger
ni paflager , & que c'eil abfolument le
même q e notre faucon-hagard * , en
forte que i'efpèce du faucon commun
ou pafîàger, ne nous efl: connue jufqu'à
préfent que par le faucon d'Ifîande, qui
n'efl qu'une variété de I'efpèce com-
mune, & par le fiucon noir d'Afrique,
qui en difîère afîez , far - tout par la
couleur , pour pouvoir être regardé
comme formant une efpèce différente.
On pouri-oit peut-être rapporter à
* Vo)'ez celui qui eii repréfenlé ^ planche cnh^
'{Jii Faucon, 17,
cette efpèce le faucon Tunifieii ou
Pumcieii dont parle Beloii ( l) , « &
qu'il dit être ww peu plus petit que ce
le faucon-pélerin , qui a la tête pfus cç
grofîe & ronde , &: qui reflemble oç
par ia grandeur & ïe plumage au ce
lanier w ; peut-être aufTi le faucon de
Tartarie (in) , qui au contraire , eft un
peu plus grand que le faucon-péferin ,
ai que Belon dit en différer encore, en
ce que le deflus de lès ailes eft roux ,
& que Tes doigts lont plus alon gés.
En radenibiant &. reflerrant les difïe-
rens ol^jcts que nous venons de pré-
fenter en détail , il paroît i .° qu'il n'y
a en France qu'une leuie efpèce de fau-
con bien connue , pour y fûre fon aire
dans nos provinces monîagneufes,; que
cette même eipèce fe trouve en Suiffe,
en Allemagne , en Pologne & jul qu'en
ïilande vers îe Nord, en Italie (n) ^
en Efpagne & dans les îles de ia Mé-
diterranée, & peut-être jufqu'en Egypte
(1) Befon , Hijl. nat. ces Oifeaux , fagt 1 1 y^
(m) Ibidem, page 116,
(ttj Aldrov. Avji tonu I, pdg» f ^/^
fî§' Hijlolre NdUirelle
(o) vers îe midi; 2." que ic faucon Mane
n'eft dans cette même efpèce , qu'une
variété produite par l'influence du climat
du nord; 3,.° que îe faucon-geinii n'efl:
pas d'une efpèce différente de notre
faucon commun (p); 4.° que ie faucon-
pèlerin ou paflager eil d'une efpèce
différente ^ qu'on doit rep-arder comme
Étrangère , & qui peut - être renferme
quelques variétés , telles que ie faucon
de Barbarie, ie faucon Tunifien, &c....
(0) Profper Aipin, /Eg}ft, tome 1, page 200,
( p ) Nota, Jean àt Tranchières , qui efl l'un
des pîus anciens êi peut-être le meilleur de nos
Auteurs fur h fauconnerie, ne compte que fept
cfpèces d'oifeaux auxquels ii donne le nom de
faucon , fâvoir ; le faucon-gentil, ie faucon-péierin ^
ie faucon-tartaret , ie gerfaut , le facre , ie ianier
& ie faucon tunifien ou tunicien : en retranchant
de cette iifte le gerfaut, ie facre &. ie ianier, qui
ne font pas proprement des faucons, il ne refis
que ie faucon-gentil & ie faucon-pélerin ,'~dont ie
rartarst & ie tunifien font deux variétés. Cet
Auteur ne connoifToit donc qu'une fsuie efpèce de
faucon naturelle en France , qu'il indique fous ie
Bom àcfauccn-gentit, & cela prouve encore ce que
j'ai avancé , que le faucon - gentil & ie faucon
commun, ne font tous deux qu'une feule & même
gfpècee.
(h Fdiicoiù r^
Il n'y a donc, quoiqu'en dilent îes No-
lîieiichueurs , que deux efpèces réelles
de iàucons en Europe,» dont h première
efl: naturelle à notre climat , & fe mul-
tiplie chez nous , &: l'autre qui ne fiiit
qu'y pafier , &; qu'on doit regarder
comme étrangère : en rappelant donc
à l'examen la lifte la plus nombreuie
de nos Nomenclateurs , au fujet des
faucons, & fuivant article par article
celle de M. BrifTon , nous trouverons
1 .^ que le £uicon-fors n'eft que ie jeune
de Teipèce commune ; 2.° que le fau-
con - hagard n'en efl que le vieux ;
3 .° que ie faucon à tête blanche & à
pieds pattus , eft une variété ou race
conftante dans cette même e(pèce ;
4.° fous le nom de faucon - blanc ,
M. BrifTon indique deux différentes
efpèces d'oifeaux, & peut-être trois,
car le premier & le troifïème pourroient
être , abiolument parlant , des faucons
qui auroient fubi ia variété commune,
aux oiieaux du nord , qui eft le blanc ;
mais pour ie fécond , dont M . Briffon
ne paroît parler que d'après M. Frifch 5.
dont il cite ia planche LXXX , ce n'eft
2 0 Htjlolre 'NaîureUe ^
certainement pas un fliucon , mais un
oiieau dé rapine , commun en France ^
auquel on donne le nom de harpaye r
5.*^ que îe faucon noir efi: ie véritable
fitiicon-pélerin ou paffagcr , qu'on doit
regarder comme étranger ; 6° que ie
£aucon lâcheté , n'efi que le jeune de
ce même fèiucon étranger ; 7.° que ie
faucon brun eft moins un faucon qu'un
bufard : M. Frifch eft ie feul qui en
ait donné la repréfentation (q) -, & cet
Auteur nous dit que cet oiieau attrape
quelquefois en Volant les pigeons (au^
va2;es; que fon vol eft très- haut, &
qu'on le tire rarement , mais que néan-
moins il guette les oi féaux aquatiques ,
fur les étj^ngs & dans les au tes lieux
rnarécao-eux : ces indices réunis , nous
piorîem à croire , que ce faucon brun
de M. Eriffon n'ed vraifemblablement
qu'une variété dans i'efpèce à^s bulards,
quoiqu'il n'ait pas la queue aulll longue
que les autres bufards; 8.'' que le fuicon
rouge n'eil qu'une variété dans notre
efpèce commune du faucon , que Belon
dit, avec quelques anciens Fauconniers,
(rj Frifch, tome I, planche LXXVI*^
{lu Fûucoiî, ^ i\
fe trouver dans les lieux marécageitx
qu'il .fréquente de préférence; p."" que
le fiucon rouge des In-des , eft un oi-
feau étranger , dont nous parlerons dans
la fuite ; i o.° que le fiucon d'Italie ,
dont M. Briiïbn ne parle que d'après
Jonflon , peut encore être , fins fcru-
pule , regardé comme une variété de
l'elpèce commune de notre faucon des
Alpes ; I i,° que le faucon d'illande
eft , comme nous l'avons dit , une
autre variété de i'efpèce commune ,
dont il ne diffère que par un peu plus
de grandeur; 12.*" que le facre n'effc
point , comme le dit M. Briffbn , une
variété du fuicon , mais une efpèce
différente qu'il faut confidérer à part;
13.** que le faucon - gendi n'eft point
une efpèce différente de celle de notre
fîiucon commun , & que ce n'eft que
le faucon- fors de cette efpèce coin-
anune , que M. BrifTon a décrit fous
ie nom de faucon-gentil ; mais dans un
temps de mue, différent de celui qu'il
a décrit fous le fimple nom de faucon;
14.° que ie faucon appelé pékrïn par
M. Bfiflbn, n'efl que notre même
2. 1 HiJIoke Naturelle
faucon commun , devenu par l'âgé
faucon-hagard *, & que par conféquent
ce n'efl qu'une variété de i'âge , & non
pas une diverfité d'efpèce ; 15.° que
ie faucon de Barbarie n'efl qu'une va-
riété dans i'eipèce du faucon étranger ,
que nous avons noiumé faucon paffager ^
iC."" qu'il en eil de même du faucon
de Tartarie ; i yJ" que ie faucon à coiiier
n'efl point un faucon , mais un oifeau
d'un tout autre genre , auquel nous
avons donné ie nom de foubufe /
I 8.° que le faucon de roche n'eil point
encore un faucon , puifqu'il approche
beaucoup pius du hobreau & de la
crefTerelie ; & que par conféquent c'eft
un oifeau qu'il fiut confidérer à part ;
i^° que le faucon de montagne n'efl
qu'une variété du rochier ; 20.'' que le
faucon de montagne cendré n'efl qu'une
variété de l'efpèce commune du faucon ;
:2î,° que ie faucon de ia baie de Hud-
fon efi un oiieau étranger, d'une eiJDèce
* Vêyei les planches enluminées, n." 421.
^ Voyez celui qui efl repréfenté ^ pknche cniu-
Viiii/e ^ n/ 4.(55.
du Faucon, 2r
différente de celle d'Europe, Se dont
nous. parlerons dans l'article fuivanr ;
2Z.'' que ie £iucon étoHé cfl un oifeau
d'un autre genre que ie fJuicon ; 23 .° que
le £uicon huppé des Indes , le fliucoii
des Antilles , le faucon -pêcheur des
Antilles, & le £iucon - pêcheur de la
Caroline , font encore des oifeaux
étrangers dont if fera fait mention dans
la iuite. On peut voir par cette longue
^numération , qu'en féparant même les
oifeaux étrangers , & qui ne font pas
preciiément des faucons ; & en ôrant
encore le faucon pattu , qui n'eft peut-
être qu'une variété ou une efpèce très-
yoifine de celle du faucon commun ,
il y en a dix-neuf que nous réduifons
à quatre efpèces ; fivoir , le fmcon
commun , le faucon paffager , le facre
ScÂe bufard, dont il n'y en a plus que
deux qui foient en effet des faucons.
Après cette réduction faite de tous
ies prétendus faucons , aux deux ef-
pèces du faucon commun ou o-entif
& ^ du faucon pa%er ou pèlerin ;
VOICI les difféfeaçe§ que noâ anciens
54 HiJIoire Naturelle
Fauconniers trouvoient dans lexir nature
& mettoiem dans ieur éducation. Le
faucon-gentil mue dès îe mois de mars,
& même plus tôt ; ie faucon - pèlerin
ne mue qu'au mois d'août: il eil pius
plein fur les épaules, & il a les yeux
plus grands , pius enfoncés , le bec
plus gros, les pieds plus longs & mieux
fendus que ie fiucon- gentil (r): ceux
qu'on prend au nid s'appellent faucons-
niais ; lorfqu'ils font pris trop jeunes ,
ils font fouvent criards & difficiles à
élever ; il ne faut donc pas les dénicher
avant qu'ils foient un peu grands, ou
il l'on eil obligé de les ôter de leur
nid , il ne faut point les manier , mais
les mettre dans un nid le plus fem-
blabk au leur qu'on pourra , & les
nourrir de chair d'ours ^ qui eft une
■viande aiïez commune dans les mon-
tagnes où l'on prend ces oifeaux , 6c
su défaut de cette nourriture on leur
(rj Fauconnerie d'Arteîoucfie , imprimée à la
fuite de k Vénerie de du Fouiiioux, & des Fau-
conneries de Jean de Franchières & de Guillaume
Jardif. Paris > 161^^ page Sp*
donnera.
du Faucon. "2 ?
donnera de la chair de poulet : fi l'on
ne prend pas ces précautions, les ailes
ne leur croi fient pas (fj, ôl leurs jambes
fe cafient ou le déboîtent aifément : les
faucons - fors , qui font les jeunes, &
qui ont été pris en fepiembre, odobrc
& novembre, font les meilleurs &: les
plus ailes à élever: ceux qui ont été
pris plus tard en hiver ou au printemps
fuivant, & qui par ccnféquent ont neuf
ou dix mois d'âge, font déjà trop ac-
coutumés à leur liberté pour fubir aifé-
ment la fervitude , 6i demeurer en cap»
tivité ftns regret , & l'on neil jamais
fur de leur obéifi"ance &. de leur fidélité
dans le fervice : ils trompent fou vent
-leur maître, & quittent iorfqu'il s'y
attend le moins. On prend tous les ans
les faucons-péierins au mois de fep-
tembre, à leur pafTage dans les îles,
•ou fur les falaifes de la mer. Ils font
de leur naturel prompts , propres à tout
ffj Recueil de tous les oifeaux de proie qui
fervent à la fauconnerie , par G. B. imprimé à
îa fuite des Fauconneries citées dans la note p?é»
cédente , page / / ^ , per/o,
Oifeaux, Terne JL B
%6 'Hiflolrè mtiirellè
faire, dociles & fort aifés à inllruîre (t):
on peut ies faire voler pendant tout ie
-mois de mai & celui de juin , " parce
qu'ils font tardifs à muer; mais auflî
dès que ia mue commence, ils ie dé-
pouiilent en peu de temps. Les lieux où
Ton prend le pius de faucons-péierins ,
ïfont non- feulement ies côtes de Bar-
barie, mais toutes ies îles de ia Médi-
terranée, & particulièrement celle de
Candie, d'où nous venoient autrefois
Jes meilleurs faucons.
Comme ies Arts n'appartiennent
point ài'Hiftoire Naturelle, nous n'en-
trerons point ici dans ies détails de i'art
de la fauconnerie ; on les trouvera dans
î'Encyciopédie fu), dont nous avons
déjà emprunté deux notes, ce \Jn bon
13 faucon, dit M. ie Roi, auteur de
'ft) Fauconnerie de Jean de Yï2^nQh\hts,vûge 2^
fu) Voyez cet article Faucomiârk , au fujet de
S éducation à^s faucons, de Tes maladies & des
foins propres à les .prévenir, ou àtî remèdes né-
ceffaires pour les guérir. Pat M, le Roy , Lien-,
ynam es Chafss lU Sa Majejîe\ à Vcrfaillis^
^// Faucon: ^7^
fartîcîe Fauconnerie , doit avoir la tête ce
ronde, le bec court & gros , le cou ce
fort long, la poitrin£ nerveufè, les «:
mahutes larges, les cuifTes longues, ce
les jambes courtes , la main large , ce
îes doigts déliés , alongés & nerveux ce
aux articles , les ongles fermes & re- ce
courbés , les ailes longues ; les fignes œ
de force &: de courage, font les ce
mêmes pour le gerfaut & pour le ce
tiercelet , qui e(t le mâle dans toutes ce
îes efpèces d'oifeaux de proie , &: ee
qu'on appelle ainfi, parce qu'il eft ce
d'un tiers plu5 petit que la femelle ; ce
une marque de bonté moins équi- ce
voque dans un oiieau, eft de chevau- ce
cher contre le vent, c'eft-à-dire , de ce
fe roidir contre , & fê tenir ferme fur
ie poing lorfqu'on l'y expofe : le
pennage d'un faucon doit être brun
&. tout d'une pièce , c'eft-à-dire , de
même couleur ; la bonne couleur des ce
mains efl: de vert-d'eau; ceux dont ce
les mains & le bec font jaunes , ceux ce
dont le plumage eft femé de taches, c<
font moins eftimés que les autres; ^
Bij
;2,S Hipoke Naturelle
>3 on fait cas des faucons noirs, mais
>> quel que foit leur plumage , ce font
39 toujours les plus forts en courage
j> qui font les meilleurs .... Il y a
» des faucons lâches & parefleux, il
?5 y en a d'autres fi fiers , qu'ils s'irri-
35 tent contre tous les moyens de les
3> apprivoifer ; il faut abandonner les
uns & les autres , &:c w.
M. Forget, Capitaine du vol a
Verfailles , a bien voulu me commu-
niquer la notice fufvante.
ce II n'y a , dit-il , de diiTérence efîèn-
35 tielle entre les faucons de difiérens
35 pays , que par la grofîeur ; ceux qui
35 viennent du Nord, font ordinaire-
35 ment plus grands que ceux des mon-
35 tagnes des Aipes & des Pyrénées ;
3> ceux-ci fe prennent, mais dans leurs
35 nids , les autres fe prennent au paffage,
33 dans tous les pays ; ils paffent en oc-
35 tobre & en novembre , & repafTent
35 en. février & mars L'âge ôqs
53 faucons le âé^igno, très- diflindement
33 ia féconde année, c'eil- à-dire, à la
n.
l'/.L^nu/, 23
LE FAUCON SORT,
l,]I.
PI. R.pqi/. 2$.
LE FAUCON HAGARD.
du Faucon, 2p
première mue, mais dans ia fuite les ce
coiinoidiînces deviennent bien plus ce
diiriciies ; indépendaiijment dits chan- «
gemens de couleur, on peut les dif- ce
tinguer jufqu'à la troiliènie mue , ce
c'eli-à-dire, par la couleur des pieds «
& celie de la membrane du bec :>^.
4>
I
Bïij
"30 'Hjloke Naturelle
mSEAUX ÉTRANGERS
Qjù ont rapport au Gerfaut
& aux Faucons,.
JLi E faucon dlfîande, que nous avons-
dit être une variété dans i'efpèce de
îîotre faucon commun, ôi qui n'ea
diffère en effet, qu'en ce qu'il efl un
peu plus grand &: plus fort,
IL
Le faitcon noir* qui fe prend au
paiîage à Malte, en France, en Alle-
magne,, dont nous avons parlé, & que
mr Frifch (a) & Edwards (b) ont
indiqué & décrit, qui nous paroit être
d'une efpèce étrangère & différente de
celle de notre faucon commun ; fob-
ièrverai que ia defcripuon qu'en donne
* Voyei les planches enluminées, n.° 4^9.^
(a) FriCch , tome 1, -planche DCXXlll,
[h} Edwards, toms î ^ jmge ^ , planche IV^i^
(^es Olfeûux étrangers', 'J t]
]Vï. Edwards eft exadle, mais que
M. J'rifch n'eft pas fondé à prononcer
que ce faucon doit être fîuis doute ie
plus fort des oiieaux'de proie de ià
grandeur, parce que près de i'extré-^
miré du bec fupérieur, ii y a une e(-
pèce de dent triangulaire ou de pointe
tranchante , & que les jambes font
garnies de plus grands doigts & ongles-
qu'aux autres faucons; car en corn--
parant les doigts & le's ongles de ce
faucon noir, que nous avons en na-
ture, avec ceux de notre faucon, nous
n'avons pas trouvé qu'il y eût de diffé-
rence, ni pour la grandeur, ni pour
la force de ces parties ; & en comparant
de même le bec de ce faucon noir avec
îe bec de nos faucons , nous avons
trouvé que dans la plupart de ceux-ci
il y avbit une pareille dent- trianguiaircy
"vers l'extrémité de la mandibule fupé--
rieure; en forte qu'il ne diffère point
à ces deux égards du faucon commun ,
comme M. Frifch femble l'infinuer ;
au refte, le faucon tacheté dont AL^
JEdwards i^iixi^ h d^fcription & la
B iii|
32 Hifioke Naturelle
figure (c), & qu'il dit être du^ même
ciiniaî que ie faucon noir, c'eil- à-dire,
des terres de ia baie de Hudfon, ne
nous paroît être en eilet que ie finicon-
îors ou jeune de cette même eipece,
& par coniéquenî ce n'cil qu'une va-
YÏéié produite dans ies couleurs par la
différence de l'âge, & non pas une
Yariété réelle ou varie'té de race dans
cette eipèce. On nous a aiTuré que" la
plupart de ces faucons noirs arrivent
du coté du mj!di ; cependant nous en
avons vu un qui avoit été pris fur ies
côtes de i'Amiérique feptentrionale, près
du banc de Terre-neuve; & com.me
M. Edwards dit qu'il fe trouve auiîi
dans les terres voiiïnes de h baie de
rJudion , on peut croire que feipèce
eft fort répandue, & qu'elle fréquente
également les climats chauds, tempérés
ou fi'oids.
Nous obierverons que cet oifèau
que nous avons eu en nature, avoit
hs pieds d'un bleu bien décidé, &
que ceux que l'on trouve repréientés
(c) Edwards , ims I , pûge ^ , planche III*
'cles Oifedux étrangers', ^ ^
dans les planches enluminées de M/^
Edwards <& Frilch, avoient les pieds
jaunes; cependant il n'ell pas douteux
que ce ne foient les mêmes oileaux:
nous avons déjà reconnu en examinant
ies balbuzards, qu'il y en avoit à pieds
bleus, & d'autres à pieds jaunes ; ce
caracftère eft donc beaucoup moins fixe
qu'on ne l'imaginoit: A en eil: de la
couleur àti pieds à peu près comme
de celle du plumage ; elle varie fouvent
avec \^'^g^^ ou par d'autres circonf-
tances.
III.
L'o I s E AU qu'on peut appeler ïe
faucon rouge des Indes orientales , très^
bien décrit par Aldrovande (d), & à
peu près dans les termes fuivans. La
femelle qui elt d'un tiers plus grofîè
que le mâle, a le delTus delà têtelarfye
& prefque plat : la couleur de la tête ,
du cou , de tout le dos & du defTus
des ailes, efl: d'un cendré tirant fur
ie brun; le bec eft très-gros , quoique
(â) Fako mleus indicus. P^àxoy, Avu pag?
Ç^ 'Hïphe 'Naturelle
!e crochet en foit afTez petit :, îa bafè
du bec eil jaune, & le relie jufqu'au
crochet eil de couleur cendrée ; -ia pu-
pille des yeux efl très-noire , l'iris brunCj
ia poitrine entière, la partie Tupérieure
du delTous des ailes , le ventre , le crou-
pion & les cuiiïes, font d'un orangé
prefque rouge : il y a cependant au~
defTus de la poitrine fous le menton,
une tache longue de couleur cendrée ,
& quelque petite tache de cette même
couleur fur la poitrine-: la queue eft
rayée de bandes en demi-cercle , aïter-^
nativement brunes & cendrées ; les,
jambes & les pieds font jaunes, & les.
ons:îes noirs. Dans le mâle , toutes les
parties rouges font plus rouges, oc.
toutes les parties cendrées font plus
brunes ; ie h^Q eft plus bleu , & \q%
pieds font plus jaunes. Ces faucons,
ajoute Aldrovande, avoient été envoyés
des Indes orientales au grand Duc Fer-
dinand-, qui les fit- deffiner vivans (e)^
(t) Rouge faucon eft fôuvent trouvé es iieujji
pkins & en migrais : il efl hardi ; mais difficile à.
gouverner. FmcQnmrk d^Jaxdif^ fremUn parm ^
tJes Oifeûiix étrangers. 3 5 •
Nous devons obierver ici que Tardif^,
Albert &: Creicent (g) , ont parlé du
faucon rouge comme d'une elpèce ou
d'une variété qu'on Gonnoiiïbit en Eu--
rope, & qui Te trouve dans les pays
de plaines &: de marécages; mais ce
faucon rouge n'eft pas aflez bien dé-
crit , pour qu'on puiiïe dire fi c'eft le
même que le faucon rouge des Indes,,
qui pourroit bien voyager & venir eiî^
Europe comme le fuicon paflager..
I V.
L'^O I s E A U indiqué par Willuf-^
ghby (h) i fous la dénomination de
falco indiens cirratus, qui efl plus gros^
que le faucon, & prelque égai à l'au-
tour, qui a fur la tête une huppe dans
l'extrémité ie divife en deux parties qui
pendent fur ie cou. Cet oifeau efï noir
fur toutes les parties fupérie tires de lai
i^ete & du corps; mais fur La poitriRe &:
(f) Albert, vtrjo 2j, cap. xm.
(g) Peir. Crefcmîius, lib. X , cap* \Y^
2 6 Hijtolre Ndtm-elk
ie ventre, fon plumage eft traveife de
lignes noires &l blanches alTernativement:
ies plumes de ia queue font auffi rayées
de lignes aîtcrnativement noires & ceii- |
drées ; les pieds font couverts de piumes
juiqu'à i'origine des doigts; l'iris des
yeux, la peau qui couvre la bafe du
hec , & ies pieds font Jaunes ; ie bec
eil d'un bieu noirâtre, & ies ongles
font d'un beau noir.
Au refie, ii paroît par ie te'moignage
des Voyageurs , que ie genre des fau-
cons ed i\m des plus univerfeilement
répandus ; nous avons dit qu'on en
trouve par-tout en Europe, du Nord
au Midi, qu'on en prend en quantité
dans ies îles de ia Méditerranée, qu'iis
font communs fur la côte de Barbarie»
M. Siiaw (ï) , dont j'ai trouvé ies re-
lations preique toujours fidèles, dit
qu^au royautne de Tunis, ii y a des
faucons & des éperviers en afiez grande ^
abondance, & que ia cFiaiTe à i'oifeau
eft un des pius grands piaifirs éts
Arabes & d^s gens un peu au-defîus du
commun : on ies trouve encore piiîs
OJ Voyage de M. Sliaw^ tom h vagi ^S^^^
clés O if eaux éîrûtigcrs. 37
fréquemment au Mogol (k) & en
Pcrlè fl), où Ton prétend que l'ait de
(k) On fe fert du fiuccai au Mogo!, pour la
chafîe du daim <Si des gazelles. Vojyai^e dt Je<as
Oi'ington, mm 1 , page ^yg*
( l) Les Perfàns entendent tout -à-fait Men à en^
feigner les oifeaux de chalTe, & ordinairement ils
dreiïent les faucons à \oler fur toutes fortes d'oi-
feaux, & pour cela ils prennent àti grues <& d'autres
oifeaux qu'ils laiflent aller, après leur avoir bouché
iesyeux; auffi-tôt ils font voler le faucon, qui les
prend fort aifément Il y a des fiucons pour
la chalTe de la gazelle, qu'ils inflruifent de la ma-
nière qui fuit : ils ont àt?> gazelles contrefaites
Rempaillées) , fur le nez defquelles ils donnent
toujours à manger à ces faucons, & jamais ailleurs^
après qu'ils les ont ainfî élevés, ils les mènent à îa
campagne ; & lorfqu'iis ont découvert une gazelle,
ils lâchent deux de qç.s oifeaux , dont l'un va fondre
fur le nez de la gazelle , & lui donne en arrière
à^s coups de pieds: la gazelle s'arrête & fe fecoue
pour s'en délivrer) l'oifeau bat àti ailes pour fe
retenir , ce qui empêche encore îa gazelle de bieri
courir, &: même de voir devant elle ; enân, lorf-
qu'avec bien de la peine elle s'en efl; défaite , l'autre
faucon qui efl en l'air prend la place de celui qui
eft à bas , lequel fe relève pour fuccéder à fon com-
pagnon quand il fera tombé ; & de cette forte ils
retardent tellement la courfe de la gazelle , que \t^
chiens ont le temps de l'attraper. Il y a d'autant
plus de plaifir à ces chaffes ;, que k pays eâ plat
& découvert , y ayant fort peu de bois. Relation
é Thsmot^ toms lU j>age 2,00» tytf V"jage: di
3 s Hijlo\re'I<!atureïïe
îa. fauconnerie efl plus cultivé que par-
tout ailleurs (m); on en trouve jufqu'au
'Jmn Ovïngtony lomt 1, -page 2~p. — La manière
dont les Perfans drefTent ies faucons à ia chaffe àes
bêtes fauves, efl d'en écorcher une & A'tn remplir-
la peau de pailie , & d'attacher toujours la viande
dont on repaît ies faucons fur la têie de cette peau
bourrée , que l'on fait mou^■oir fur quatre roues
par une machine ,. tant que i bifeau mange , afin
de l'y accoutumer Si la bête efl grande , on
lâche piufieurs oifeaux après elle, qui la tour-
mentent l'un après l'autre ils fe fervent
auffi de cts oifeaux pour les rivières & les m?.rais,
dans lefquels ils vont, comme les chiens, chercher
le gibier Comme tous les gens ^'épée font
chafîeurs, ils portent d'ordinaire à l'arçon de la
felle une petite tinnbaie de huit à neuf pouces de
diamètre, qui leur fert à rappeler l'oifeau en.
frappant deifus. Vi)ysige de Chardin, tome 11,
■pages ^2 iT" ^j, — La Perfe ne manque pas
d'ûifeaux de proie; il s'y trouve quantité de fau-
cons, d'éperviers & de lannerets, & autres fem-
bîables oifeaux de chaiTe, dont la Vénerie du
Hoieft très-bien pourvue, & on y en compte plus
de huit cents : 'es uns font pour le fanglier, l'âne
fauvage & la gazelle ; les autres pour voler les
grues, les hérons , ies oies & \ts perdrix. Une
grande partie de ces oifeaux de chaffe s'apporte de
HufTie; mais ies plus grands & les plu«^ beaux vien-
nent àcs, montagnes qui s'étendent xexs le Midi g',
depuis Schyras jufqu'au golfe Perfique, Voyage ds,
JDampieïf tome II , page 2 ^ & faiv.
(^n)\^ Perfans qui font fort paîi€ns, prennent
des OïfedîTx If rangers: jc^;
Japon, ou Kœnipfer (n) dit qu'on les^
tient plutôt par taite, que pour l'utilité
delà chafle, & ces fiuicons du Japon
viennent des parties (^ptentrionales de.
cette île. Kolbe (o) ïàW. auffi nientioix
^Q.?, fimcons du cap de Bonne- efpé-.
rance,& Bofman de ceux de Guinée (p) ;
en forte qu'il n'y a, pour ainfi dire 5
aucune terre, aucun climat dans l'an^
cien continent, où l'on ne trouve l'ef^
pèce du fîiucon ; & comme ces oileaux:
fiipportent très-bien le froid , & qu'ils-
volent facilement &: très - rapidement ,,
on ne doit pas être furpris de les
retrouver dans le nouveau continent;
aufll pîaifir à drefîer un corbeau de la même
manière qu'ils dreiïent un épervier. Voyage dî.
Dampier , tomt il, page jz/.
(n) Kœmpfer , Hijl. du Jàpnn, leme l,pagei /_/*.
{0I Koibe, Defaiption du. cap de Bonne- e/pérance^
wme 111 , page i ^ 6,.
(p) Sur cette côte de Guinée, on voit encore
Un autre oifeau de proie , qui reifemble fort à un
fpucon , & qui ,. quoiqu'un peu plus gros qu'un^
piaeon, efl fï hardi & fi fort, qu'il le jette fur
les plus grofTes poules & \ts emporte. Voyage tk-
ÇailUmie Bofman, Uurc i j/ î>age z.CS^..
4o HîJIoire Naturelle
il y en a dans ie Groenland (q), 'dans les
parties montagneules de l'Amérique lep-
tentrîonaie & méridionaie Cr), Sl jufque
dans les îles de la nier du Sud ff),
( q) On trouve dans le Groenland àt% faucons
blancs & gris, en très - grand nombre, & plus
qu'en autre lieu du monde. On portoit ancienne-
ment de ces oifeaux pour grande rareté aux rois
de Danemarck , à caufe de leur bonté mer-
veilieufe, & les rois de Danemarck en faifoienC
àts préfens aux rois & princes leurs voiflns oa
amis , parce que {a chafTc de l'oifeau n'eft du tous
point en ufage dans le Danemarck , non plus qu'aux
autres endroits du Septentrion. Recueil des Voyages
du Nord, tome I , j>age pp.
(r ) On a envoyé plufieurs &: diverfes fortes
de faucons de la neuve Efpagne & du Pérou aux
feignturs d'Efpagne , d'autant qu'on en fait grande
ertime. Il y a même des hérons & des aigles de
diverfes fortes, & il n'y a point de doute que ct^
efpèces d'oifeaux , &: autres femblables , n'y aient
paUé bien plus tôt que les lions & les tigres, ////-
loïn naturelle des Indis cccidemales , par Acofta ,
page T p S' — Nota, L'oifeau que les Mexicains
appeloient HotU , bdrqué par Fernandès , paroît
être le même que te faucon noir dont nous avons
parlé.
{/) Hidoire 6es Navigations aux terres Auft
traies ; lonu lU , .^agt /j?/.
'^les Oipûiix eîfwîgers* 41;
V.
L'o 1 s E A u appelé t^nûs par les
Nègres du Sénégal ,••& qui nous a
été donné par M. Adanlon, (uns le
nom de faucon-pêcheur *, il rcilemble
prefque en tout à notre faucon par ies
couleurs du plumage; il efl néanmoins
un peu plus petit, & il a fur la tête de
longues plumes eminentes qui le ra-
battent en arrière «Se qui forment une
efpèce de hupj^^e , par laquelle 011
pourra toujours diilinguer cet oifeau
des autres du mém.e genre : il a nulli
ie bec jaune , moins courbé & plus gros
que le fiiucon ; il en diffère encore eu
ce que les deux mandibules ont ôqs
dentelures trèi-fenfibles ; & Ton nature!
eii aufîi difierent ; car il pêche plutôt
qu'il ne chafle : je crois que c'efi à
cette efpèce qu'on doit rapporter l'oi-
leaù duquel Dampier (t) fait mention
fous ce même nom à^ faiiCGn-pêcheur :
ce il reflembie, dit-il, à nos plus petits
* Voyelles planches enluminées , n.° 478.
(î) Nouveau ^^oyage autour du monde ^ pa^
Guillaume Dampier , tome JII, ^age j i é\
4 2 Htjlolre Naîiireïïe , &ù
>3 faucons pour la couleur &: L\ figure:
35 il a le bec & ies ergots faits tout de
3> même; il fe perche fur ies troncs
33 des arbres & fur les branches sèches
3) qui donnent fur l'eau dans les criques,
35 les rivières ou au bord de fa mer;
» & dès que ces oifeaux voient quel-
33 ques petits poiffons auprès d'eux, ils
33 volent à fleur d'eau , ies enfilent avec
>5 leurs griffes , & s'élèvent aufli-îôt en
35 l'air , fans toucher l'eau de leur^
ailes 53 : il ajoute ce qu'ils n'avalent pas
3D le poiffon tout entier, comme font
33 les autres oifeaux qui en vivent , mais
33 qu'ils le déchirent avec leur beC; &
ie mangent par morceaux ^>^
'4Ï
^LE HOBR^AV(a).
Voye:^ planche JII de ce volume,
JLj E Hobreau efl; bien plus pçiît que
îe faucon, & en diffère aufîi par les
habitudes naturelles : le faucon eft plus
fier, plus vif & plus courageux; il at-
taque des oiieaux beaucoup plus gros
que lui. Le hobreau efl: plus lâche de
fon naturel ; car à moins qu'il ne foit
drefîé, il ne prend que les alouettes &,
les cailles ; mais il fait compenfcr ce
défaut de courage & d'ardeur par fou
* Voye-i_ les planches enluminées ^ n.^* 43 i îf 432,"
(a)Y.r\ Angîois, rJohly; en Italien, Bncdlo»
— Hobreau. Btlon , Hijloire naturelle des Oifeauv^
page it8. — Subbvteo, Aîdrov. Avi. tome \^
page 373 ...... Falco arborarius. Aidrov. Avi».
tome ï , pag, 492. — Hobreau, Albin, loine 1 ,
■page 7, pi. VI, avec une figure coloriée. — Litho":
falco five czfalus , Rochier , cx.fahn. Y n(<z\\ , planche;
LXKXVI , avec une figure coloriée. — Le Hobreau,
BriiTon, Ornithnl. tome I , page 375. — Thâ
Hobby. Britifch T^oq\o<^n , planche. /{ ^, avec una
figure coloriée^
44- Hijlolre Naturelle
indudrie : dès qu'il aperçoit uit chafleiif
& fou chien , il ies fuit d'aiïez près ou
plane au-defTus de leur tête, & lâche
de iaiiir ies petits oi féaux qui s'èièvent
devant eux; li le chien \à\x lever une
alouette, une caille, & que le chaiTeur
ia manque , il ne la manque pas : il a
l'air de ne pas craindre le bruit, &: de
ne pas connoitre Teffet des armes à feu ,
car il s'approche de très-près du chaf-
ieur qui le tue fouvent ioifqu'il ravit
fa proie: il fréquente les plaines voi-
fines des bois , & fur-tout celles où \^s
alouettes abondent ; il en détruit un très-
grand nombre, & elles connoifient fi
bien ce mortel ennemi, qu'elles ne
l'aperçoivent jamais fins le plus grand
effroi , &: qu'elles fe precipiient du haut
des airs, pour fe cacher fous i'hcrbe
ou dans les buifTons : c'eil: ia feule
manière dont elles puifTent échapper;
car quoique i'aiouette s'élève beaucoup,
ie hobreau vole encore plus haut qu'elle,
& on peut ie drefTer au leune comme
ie fmcon & les autres oifeaux du plus
haut vol : il demeure cSc niche dans les
forets où il fe perche fur ieo arbres les
du Hoir eau, 4j'
plus élevés. Dans quelques-unes de nos
provinces on donne le nom de hobreau
/h) aux petits ieigneurs qui tyrannifent
leurs paiilins , <^ plus panicuiièrenient
au gentilhomme à lièvre, qui va chafîer
chez les voifins , lans en être prié, &
qui chafTe moins pour Ton plaifir que
pour le profit.
On peut obferver que dans cette
efpèce le plumage de i'oifeau efl plus
noir dans la première année qu'il ne
i'ell dans les années fuivantes : il y a
aulfi dans notre climat une variété de
cet oifeau, qui nous a paru afTez fin-
gulière pour mériter d'être repréfentée *;
les différences confiftent en ce que la
^orge, le defTous du cou, ia poitrine,
une partie du ventre & les grandes
plumes des ailes font cendrées & fans
taches \ tandis que dans le hobreau
(h) Ce nom de Hohreau , appliqué aux Gentils-
îiommes de campagne, peut venir aufTi de ce qu'au-
trefois tous ceux qui netoient point aiïez riches
pour entretenir une fauconnerie, fe conîentoient
d élever àts hobreaux pour la chafTe.
* V^-^-l, ks phiches tnhminces, 13/ -^31»
^'é Hijlolre 'Naturelle ■
commun, îa gorge & ie deiïbus Ja
cou font blancs , la poitrine &'le defTus
du ventre blancs aufîi , avec des taches
îongitudinaîes brunes, 6c que les grandes
plumes des ailes font prefque noirâtres :
ïl y a de même d'affez grandes diffé-
rences dans les couleurs de la queue,
qui dans le hobreau commun efl: blan-
châtre par-defîous, traverfée de brun,
& qui dans l'autre efl abfokiment brune.
Mais ces différences n'empêchent pas
que ces deux oifeaux ne puifTent être
regardés comme de la même efpèce;
car ils ont la même grandeur, ïe même
port , & fe trouvent de même en
ï^rance; & d'ailleurs ils fe refîemblent
par un caractère fpécifique très-parti-
culier , c'efl: qu'ils ont tous deux ie bas
du ventre &ies cuifles garnies déplumes
d'un roux vif, & qui tranche beaucoup
fur les autres couleurs de cet oifeau; if
n'eft pas même impoffible que cette
variété, dont toutes les différences fè
réduifent à des nuances de couleurs,
ne provienne de l'âge ou des différent
temps de la mue de cet oifeau; de.
I'/.IZl./>aç,4^-
I.E BTOBREAXJ
^du Hôlreau: ' ^^y^
c'efi: encore une raifon de plus pour ne
le pas réparer de l'efpèce commune. Au
refte , îe hobreau fe porte fur le poing,
découvert & fans chaperon , conime
i'émérillon , l'épervier Sl l'autour , & l'on
en faifoit autrefois un grand ufage pour
la chaffè des perdrix & des c.a lies.
4 s Hlflolre Ndturdk
L A
CRESSEREj..LE (a)
VoyeT^ la planche I V de ce volume,
J_jA CrefTerelIe * efi i'oifeau de proie
le plus commun dans la plupart de nos
provinces
* Voyei hs planches ■.nhimlnées, n.°^ 4.01 £7*4.71,
(a) En Grec, K£V>f/f ou 'K.iyy^iç', Cenchris
feu miliaria dichuY hac avis , ait Gefnerus , quoi
pundis nigrïi^^ vvJii amulis injigms fît : en Latin ,
Tinnunaut s ; en Italien, Cambello , Tiv.incuk , Tin-
tarello , Gavinelh; en Efpagnol , Cerràcalo ou
Xcmicalo ; en AilcrKani , Roeihel weih ou Wamen-
waehcr , qnod aJa'i extendat ( ait Schwenckfeid ) ven-
tile ù;;^ injtar vamlalr.i quod vannum nominaut ; en
pGîciiois, Pujiolka; en ngfois, lùjlril ou KefrnU
J\o-:c. Ce pourroii êrr-^ r ce mot An^ois Kejirel ,
qu'eu dérivé le nom C ?/ que les Bourguignons
donnent à cet oiTeau ^n. EcolTe , Sianchel oxx
Stmnel ou Stonegall ; on ùi aulfi appeié en vieux
François , & encore sdaellement dans quel(|ues
provinces de France, Ce/cerelle, Quircerelle , £cre-
celle. Saierne dit quVjn t'appelle en ioiogne, Meiy
à Châions- fur - Âlarne, E.abû.iUet ; en Provence
Maiier ; en Touraîne , Pitrlcu ; à Saumur , Pitri
en Beauce
^de la Cnfferelïe» 4p*
provinces de France, & fur -tout en
Bourgogne : il n'y a point d'ancien
château ou de tour abandonnée qu'elle
ne fréquente & qu efie n'habite ; c'efl
fur-tout le matin & le foir qu'on la voit
voler autour de ces vieux bâtîmens , &
on l'entend encore plus fouvent qu'on
ne îa voit ; elle a un cri précipité pH. ,
pCi ,pti ou pu, prï, prï , qu'elle ne
cefle de répéter en volant , & qui
effraie tous les petits oifeaux fur iefquels
eîle fond comme une flèche, & qu'elle
faifit avec fes ferres ; fi par halard elle
les manque du premier coup , elle les
en Beauce , Preneur de muhts , b'c . . . . CrefTereiJe
ou Cercerelle. Beion , Hipire naturelle des Oifeaux,
page I 14. — Tinnuncuhs feu Cenchvïs. Aidrov'. AvL
tom. I, pag. 556. — Crecerdie. Albin, tome I ,
page 8, -planche VU, avec une figure coloriée ,
qui eft ceile de ia femelle Co^ de Windhover,
Albin, tome III , planche v, avec une figure co=
■ionée, qui eft celle du m^\^.— Tmnunculus verys.
Frifcb, plmche LXXXlv, avec une fiaure coloriée,
qui eft celle du mafe falco ?ufus. Frifch '
pknche LXXXVlïI , avec une figure coloriée , cmi
cfi celle de îa femdle. — La CrefTereiie. Briffon
OrnlihoL tome I , page 393. — Kcflrii Britifch
Zoology, planche A S , ûg. 1 , The mnk , Th&
feniale , fig. 2 , ces deux figures font coloriées.
O'^eauxi Tomç IL C
50^ Hïfloire Ndîiirelle
pourfuît fans crainte du danger jufque
dans les maifons ; j'ai vu pius d'une
fois mes gens prendre une crefTe relie &
ie petit oifeau qu'elle pouriliivoit , en
fermant la fenêtre d'une chambre ou la
porte d'une galerie, qui étoient éloignées
de plus de cent toifes des vieilles tours
d'où eiie étoit partie : lorfqu'elle a faifi
& emporté i'oifeau , elle le tue & ie
plume très - proprement avant de ie.
manger : elle ne prend pas tant de
psine pour les fouris <& les mulots ; elle
avale les plus petits tout entiers, & dé-
pèce les autres. Toutes les parties molles
du corps de la fouris fe digèrent dans
reftom.ac de cet oifèau ; mais ïa peau
fe roule & formée une petite pelote ,
qu'il rend par le bec , & non par le
bas; car fes excrémens font prefque li-
quides & blanchâtres : en mettant ces
pelotes qu elle vomit , dans l'eau chaude,
pour les ramollir & les étendre , on re-
trouve !b peau entière de la fouris comme
fi on l'eût écorchée. Les ducs j les
chouettes , les bufes , & peut-être beau-
coup d'oifeaux de proie 3 rendent de
pareilles pelotes dans iefquelleSj o\\v^%
Je la Crefferelk: 5'fl
la peau roulée , il fe trouve quelquefois
des portions les plus dures des os ; il eii
eft de même des oifêaux pêcheurs ; les
arêtes & ies écailles des poifTons fe
roulent dans ieur eftomac , & ils les
rejettent par le bec.
La creflerelle efl: un aflez bel oifeau ;
elle a i'œil vif & ia vue très-perçante ,
îe voi aifé & foutenu: elle efl: diligente
ôi courageufe : elle approche par le
naturel , des oilèaux nobles & géné-
reux ; on peut même la drefîer, comme
ies émériilons , pour la fauconnerie. La
femelle efl plus grande que le mâle , &
elle en diffère en ce qu'elle a la tête
rouffe , le defTus du dos , des ailes &
de la queue rayé de bandes tranfver-
files brunes ; & qu'en même temps
toutes les plumes de ia queue font d'un
brun roux plus ou moins foncé ; au
lieu que dans le mâle , ia tête & ia
queue font grifes , & que ies parties
fupérieures du dos & des ailes font d'un
roux vineux , fenié de quelques petites
taches noires ; on peut voir les diffé-
rences du mâle & de ia femelle danf
Ci;
y 2 Hîjloire Naturelle
les planches enluminées que nous ayons
citées.
Nous ne pouvons nous difpenfêr
d'obferv^er que quelques - uns de nos
Nomendateurs modernes (bj, ont ap-
pelé épervier des akuettes , la crefTerelie
fenieile, &: qu'ils en ont fait une efpèce
particulière & différente de celle de ia
creiîereiie.
Quoique cet oifeau fréquente habi-
tueliement ies vieux bâtimens , ii y
niche pkîs rarement que dans les bois ;
& iorfqu'il ne dépole pas fès œufs
dans des trous de murailles ou d'arbres
ereux , ii fait une efpèce de nid très-
négligé , compofé de bûchettes & de
racines, & aflez fembiabie à celui des
geais , fur les arbres les plus élevés
des forêts : quelquefois ii occupe aufîî
les nids que ies corneilles ont aban-
donnés; ii pond plus fouvent cinq
œufs que quatre, & quelquefoij iix &
même iêpt , dont les ^Jeux bouts font
teints d'une couleur rougeâtre ou jau--
mire , affez femblable à celle de fon
(h) BrilTon, tome î, jmge //^e
de ta Cre (fer elle* j j^
pîuiriage. Ses petits , dans le premier
âge , ne font couverts que d'un duvet
blanc ; d'abord il les nourrit avec des
in levées , & en fuite il leur apporte d^s
mulots en quantité qu'il aperçoit iur
terre du plus haut des airs où il tourne
lentement, & demeure fouvent ftation-
naire pour épier Ion gibier fur lequel
il fond en un inftont : il enlève quel-
quefois une perdri.K rouge beaucoup
plus pefante que lui ; fouvent aufli if
prend des pigeons qui s'écanent de leur
compagnie; mais fa proie la plus or-
dinaire après les mulots & les reptiles,
font les moineaux , les pinçons & les
autres petits oifeaux : comme il produit
en plus grand nombre que ia plupart
ôts autres oifeaux de proie , l'efpèce
eil plus nombreufe & plus répandue ;
on ia trouve dans toute l'Europe ,
depuis la Suède Ce) jufqu'en Italie de
en E (pagne ^^J; on la retrouve même
dans les pays tempérés de l'Amérique
(c) Linn. Faun. Suec. n,° 6y»
(d) AIdroY, AvU tom. I ; pag. 3 5 tf ,
C iij
[54 Hïjloire Naturelle
feptentrionaîe ( e ) '- plufieurs de ces
oifeaux reftent pendant toute l'année
dans nos provinces de France ; cepen-
dant j'ai remarqué qu'il y en a voit beau-
coup moins en hiver qu'en été , ce
qui me fait croire que plufieurs quittent
ie pays , pour ailer paffer ailleurs la
înauvaifè fàifon»
J'ai fait élever plufieurs de ces oi-
feaux dans de grandes volières ; iis font ^
comme je l'ai dit , d'un très-beau blanc
pendant le premier mois de leur vie ,.
après quoi les plumes du dos deviennent
roufTâtres & brunes en peu de jours :
ils font robuites <& aifés à nourrir ; ils
mangent la viande crue qu'on leur pré-
fente , à quinze jours ou trois femaines
d'âore ; ils connoiffent bientôt la perfonne
qui les foigne , & s'apprivoifent a(îez
pour ne jamais l'oifenfer : ils font en-
tendre leur voix de très-bonne heure ^
%L quoiqu'ehfermés , ils répètent le même
cri qu'ils font en liberté : j'en ai vu
s'échapper & revenir d'eux-mêmes à la
(§) Hans Sloane ^ Jama'ic, pag. ^94.^
P/.nrp,u^c.S4.
LA CRESSERELLE .
de la Crefferelké 5 j
Irolièré, après un jour ou deux d'ab-
{^ncç^ , & peut-être d'abUinence forcée.
Je ne connois pomt de variétés dans
cette efpèce que quelques individus qui
ont ia tête & ïes deux plumes du milieu
de ia queue grifes , tels qu'ils nous
font repréfentés par M. Friich (planche
LXXXYj; mais M. Saierne fait men-
tion d'une crefTerelIe jaune qui le trouve
en Sologne , & dont les œufs font de
cette même couleur jaune, ce Cette
creflereile , dit-il , eft rare , & quel- ce
quefois elfe fe bat généreufement es
centre îe jean-ie-blanc , qui , quoi- ce
que plus fort , eft fou vent obligé de ce
lui céder: on les a vus, ajoute-t-il , ce
s'accrocher enfembîe en i'air y & ce
tomber de la forte par terre comme ce
une motte ou une pierre : >5 ce fiit me
paroît bien ftiipedl; car i'oifeau jean=
le-blancefl non-feuiement très-iiipérieur
à la creflereiîe par la force ; mais il a
îe vol & toutes les allures fi différentes^
qu'ils ne doivent guère fe rencontrer*
mj
5*^ Hifîolre Natunlk
* LE ROC HIER (a).
Xj 'ois EAU qu'on a nommé fmîfen de
roche ou rochïer ^ n'efi pas fi gros que
ia creflerelle , & me paroît fort fem-
hlable à l'émériiion , dont on fe (èrt
dans la fîiuconnerie ; il fait , diient îes
Auteurs, ia retraite & Ton nid dans les
rochers. M. Frilch eiî le feul avant
nous qui ait donné une bonne indi-
cation de. cet difeau , & Ton peut com-
parer dans Ton ouvrage , ia iigure du
* Voyci ks planches enluminées , n,* 447.
(a) Litho-fakus, Gefncr , Avi. pag. 75,
— Falco Ir.pidayhis. Aidi'ov. AvLxom. I , parj. 499,
" — Dendro-fako five ftmr-uy„ Éniériilon, FriCch ,
•planche LXXXVlI, avec une figure coloriée. — Le
faucon de roche ou Rochier. BrifTon , Ormthoh
tome I, paj/e ^49. JW'W. Il me paroît qu'on
doit rapporter à cette efpèce le faucon de mon-
tagne cendré; BrifTon, tome], pa^e ^JS' ^^
\& Fafccnis momani fecundum genus d'AIdrovande ,
Avi. tom. ï , pag. 79 ; & que ces Auteurs ont
fait un double emploi en féparant ces deux efpèceî
d'oileaux.
'du Rochier. 57^
rochier , 'planche lxxxvii , avec fa
nôtre , & aufîi avec les crefTerelIes mâle
& femeile , qui , tomes trois font afîez
bien rendues ; leurs rapports de reiïem-
blance & de différence , font encore
mieux exprimés dans nos planches en-
luminées ; en confidérant attentivement
la forme & ies caradères de cet oifeau ,
& en les comparant avec la forme &
les caradères de i'efpèce d'émériilon ,
dont on fe fert dans la fauconnerie * ,
nous fommes très - portés à croire que
le rochier & cet émérillon font de la
même efpèce , ou du moins d'une
efpèce encore plus voifme i'une de
l'autre , que de celle de ia crefferelle.
On verra dans l'article fuivant , qu'il
y a deux efpèccs d'émérillons , dont
la première approche beaucoup de
celle du rochier , & la féconde de celle
de la crefTerelle : comme tous ces
oifeaux font à peu prèis de la même
taille, du même naturel, & qu'ils va-
rient autant & plus par le fexe & par
l'âge, que par la différence des efpèces^
* Yo)'ti h planches tnluminécs, n.° 4^8.
Cy
13 8 Hîflohe Naturelle, érC
il eft très -difficile de les bien recoii-
noître, & ce n'eft qu'à force de corn-
paraifons faites d'après nature, que nous
iommes parvenus à ies dilUnguer ki
uns des autres.
'f9
^L'EMERIl.LON(a),
Voyei planch V de ce volume.
X-i 'oiseau dont il eft ici qiienîon ;.
n'efl point i'émériilon des Naturaiilies ,.
mais i'émériilon des Fauconniers ^ qui
n'a été indiqué ni bien décrit par aucun
de nos Nomenclateurs ; cependant c'eft
le véritable émériKon dont on fe fsrt:
tous les jours dans la fauconnerie , &
que l'on dreffe au vol pour la chafTe ;
cet oiieau e(t , à l'exception des pie-
-grièches , le plus petit de tous les oifeaux
de proie , n'étant que de la grandeur
.* Voyei ks plancher enluminées , n° ^6'>à,-
(a) En Grec ,- A'/cuAii)»', quoi onmi tempors
appareat ; en Latin , /Efalo , en Italien , Smerh ^
ou Smeriglio ; en Allemand , JVIyrle oa Smyrlm ,»
en Pologn€, Orjemlik ; en Angiois , Alerlin ; sx\
ÉœfTe on appelle le naâie, Jach; en vieux François^
JLoy^tte : en quelques provinces de France , Polft-
lier , Preneur de Paffe ou Pafferets, — The MerUïï^-
Brkifch Zoology, pi, j^ i a» -=~ Frifch ^ wmt /j^
^6o Hîjlohe NatmeUe
d'une groiï'e grive , néanmoins on doit
ie regarder comme un oifeau noble, &
qui tient de plus près qu'un autre à
l'eipèce du fliucon ; il en a le plu-
mage (b ), la forme & l'attitude; il a
ïe même naturel , la même docifité , &
tout autant d'ardeur & de courage : on
peut en faire un bon oifeau de chafîè
pour les alouettes, les cailles, & même
îes perdrix qu'il prend & traiifj)orte ,
quoique beaucoup plus pelantes que
iui ; fouvent il les tue d'un feul coup,
en les frappant de l'ellom^ac, fur la tête
ou fur le cou.
Cette petite efpèce, fî voifîne d'aîi-
îeurs de celle du faucon par ie courage
& le naturel ( c) , reflemble néanmoins
plus au hobreau par la figure, & encore
plus au rochier ; on le diftinguera ce-
pendant du hobreau , en ce qu'if a les
(h) Nota, If reffembfe en effet par les nuances
& la diftribution des couleurs au faucorr-fors,
(cj Plufîeurs Auteurs ayant fait fa remarque cfe
îa conformité de I émérifion avec Je faucon, font
appelé /^f"//' faucon , filo, parinis merlinus, Schwenck-
leld, Avi.Sil. pag. ^49. — FakoneIkst'Rz&ç» Auifl^
mih nat» FoU pag. 3 5^.
2e ÏÉmertllofl: ^€t\
aîles beaucoup plus courtes , <5c qu'elles
ne siétendent pas à beaucoup près (uf-
qu'à l'extrémitié de la queue, au liea
que celles du hobreau s'étendent ua
peu au-delà de cette extrémité ; mais,
.comme nous l'avons déjà fait fentir dans
l'article précédent , Tes reiïembiances
avec le rochier font fi grandes, tant
pour ia groiïeur & la longueur du corps,
ia forme du bec, des pieds & des ferres^
les couleurs du plumage , la diftribution
des taches , &c ...... . . qu'on feroit
très -bien fondé à regarder ie rochier
comme une variété de rémérilion, ou
du moins comme une efpèce fi voifine,
qu'on doit fufpendre fon jugement fur
la diverfité de ces deux elpèces : aiî
refte , i'émériflon s'éloigne de l'efpèce
du faucon & de celle de tous les autres
oifêaux de proie , par un attribut qui k
rapproche de la clafTe commune des
autres oi féaux ; c'efl que le jn aie & ia
femelle font dans l'émérillon de la même
grandeur, au lieu que dans tous les aiures
oiièaux de proie , le mâle eft bien plus
petit que la femelle : cette fingularité ne
tient donc point à leur manière de vivre^.
'6i Hiphe NaînreUe
ni à rien de tout ce qui diftingue îes
oifeaux de proie des autres oifeaux ; elle
iêmbieroit d^abord appartenir à ia gran-
deur , parce que dans ies pie-grièches y
qui font encore plus petites que ies émé-
riilons , le mâle & la femeile font aufîi
de la même grofîeur ; tandis que dans
ies aigles , ies vautours ^ ies gerfauts ,
les autours , ies faucons & ies éperviers ,
ie mâle eft d'un tiers ou d'un quart plus
petit que la femelle. Après avoir ré—
fîéciii fur cette fingularité ^ & reconnu
qu'elle ne pouvoit pas dépendre des
caufes généraies , j'ai reclierché s'il n'y
en avoit pas de particulières auxquelles
on pût attribuer cet effet ; & j'ai trouvé
€n comparant les paffages de ceux qui
ont diiTéqué des oifeaux de proie, qu'il
y a dans la plupart des femelles un:
double cœcum aiïez gros & aifez étendu f
tandis que dans les mâies il n'y a qu'un
tœciim , & quelquefois point du tout i
cette différence de la conformation in-
térieure , qui fe trouve toujours en plus
dans les femelles que dans ies mâles ^
peut être la vraie caufe phyfique de leur
=iixcès €n grandeur, Je iaiffe aux gea^
"^àe ÏÉmérûlohl- <? J
-qui s'occupent d'anatomie à vëiifierplus
exacflement ce fait , qui feul m'a paru
prof)re à rendre raifon ^de la fupe'riorité
-de grandeur de la femelle fur le mâle j.
dans prefque toutes les efpèces des
grands oifeaux de proie.
L'émcrillon vole bas , quoique très.-
vite & très-légèrement, il fréquente les
bois & les buiiîbns pour y faifir les peiits
oilèaux , & chaffe feul fans être ac-
compagné de fa femelle ; elle niche dans-
les forêts en montagnes , â: produit
cinq ou lix petits.
Mais indépendamment de cet émé-*
rillon dont nous venons de donner l'hif-
^toire & la repréfèntation , il exifle une
autre efpèce d'émérillon mieux connue
[des Naturalises 5 dont AI,- Frifch a
I donné la figure (planche LXXXîx) ^
i& qui a été décrit d'après nature par
|-'M. Briffon , tome I , page ^82: cet
! -émériilon diffère en effet par un affez
-^rand nombre de caradères de i'émé»
! riilon des Fauconniers ; il paroît même
-approcher beaucoup plus de Telpèce
: de ia crefferelle, du moins autant qu'il-
\ nous eft permig d'en juger par la
'^4 Hljîoke Naturelle
repréfentation , n'ayant pu nous le prô-^
curer en nature ; mais ce qui femble
appuyer notre conjedure , c'eft que les
oifeaux d'Ame'rique qui nous ont été
envoyés fous les noms d'émérlllon de
Cayenne ^ , & émérillon de Saint- Domin"
gue ^ , ne nous paroifTent être que des
variétés d'une feule efpèce , & peut-
être l'un de ces oifeaux n'eft-il que le
mâle ou la femelle de l'autre ; mais
tous deux reiïemblent fi fort à l'émé-
rîllon donné par M. Frifch, qu'on doit
les regarder comme étant d'efpèces très-
voifjnes ; & cet émérillon d'Europe ,
auiïi-bien que ces émériiions d'Amé-
rique dont les cfpèces font fi voifînes,
paroitront à tous ceux qui les confi-
dèreront attentivement beaucoup plus
près de la creflerelie que de l'émérillon
des Fauconniers : ii fe peut donc que
cette elpèce ait pafTé d'un continent à
l'autre; & en effet M. Linnoeus fait
mention des crefTereiles en Suède, <Sc
ne dit pas que les émériiions s'y trou-
vent ) ceci femble confirmer encore
' Voyei les planches enluminées ^ n,° ^^^^
de l'ÉniérilIou: êf
notre opinion , que ce prétendu cmé-
rilion'des NaturaiLiles n'efl: qu'une va-
riété, ou tout au pius une elpèce très-
voifine de celle de la creflereile ; on
pourroit même lui donner un nom par-
ticulier , Il on vouloit la didinguer, foit
de l'éinérilion des Fauconniers, foit de
la cre/l'erelle , & ce nom fer oit celui
qu'on lui donne dans les îies Antilles.
et L'émériilon , dit le P. du Tertre ,
que nos hai^iîans appellent gry gry , c<
à caufe C|u'en volant il jette un cri ce
qu'ifs expriment par ces fyllabes gry c<
gry, e(ï un autre petit oifeau de proie «
qui n'elt guère plus gros qu'une ce
grive ; il a toutes les plumes de deiTus ce
5'e dos & des ailes roufîts , tachées c<
de noir, & le deiïbus du ventre blanc, «
moucheté d'hermine ; il efl: armé de ce
bec & de griffes à proportion de fa «c
grandeur ; il ne fait la chafîe qu'aux ce
petits lézards & aux fauterelles , & ce
quelquefois aux pe.its poulets quand ce
i ils font nouvellement éclos; je leur en ce
ai fiit lâcher plufieurs fois , ajoute-t-il ; ce
la poule fe défend contre lui Ôl lui «<
'6 6 Hijîoire Naturelle , &c,
» donne la chafîe ; les habitans en maiï-r
gent , mais il n'efl: pas bien gras (^d):>:>,
La relTemblance du cri de cet éme'-
rillon du P. du Tertre (e), avec le cri
de notre crefTerelIe eft encore un autre
indice du voifinage de ces efpèces ; &
il me paroît qu'on peut conclure afTez
pofitivementque tous cesoifeauîi donnés
par ies Naturaiifles , fous les noms d'é-*
mêrîllon cF Europe , émérïllon de la Caroline
ou de Cayenne , Se êmérillon de Saint^
Domingue ou des Antilles, ne font qu'une-
varie'té dans i'efpèce de la crefferelie à
laquelle on pourroit donner le nom de
gry gry pour la diftinguer de la cr efle-^
relie commune.
( d) Hifî. nat. des Antilles, par le Pèie é$
^Tertre, tome II , pages 2j^ îr ^j^.
(e) l^ota. Le cri de ia crefFereile eu prï pn, ce
qui ap}-»roche beaucoup de giy gry, qui ed ie nome
qu on doniie aux Antiiies à cet oifeau à caufe de
foiî cri.
TL T^' pa,/. oh'
l'emerii.liox
LES .
PÏE-GRIECHES.
i v-rf ES oileaux, quoique petits, quoi^
que délicats de corps <& de membres,
, doivent néanmoins par ieur courage ,
I par leur large bec , fort & crochu ; &
j par leur appétit pour la chair , être mis
i au rang des oileaux de proie , même
I des plus fiers & des plus fanguinaires ;
I on eft toujours étonné de voir i'intré-
1 pidité avec laquelle une petite pie-
j grièche combat contre les pies , les
I corneilles , les crefîerelles , tous oileaux
I beaucoup plus grands & plus forts
I qu'elle; non- feulement eHe combat pour
j ic défendre , mais fouvent elle attaque ^
i & toujours avec avantage , fur - tout
I lorfque le couple fe réunit pour éloigner
i de leurs petits les oifeaux de rapine ;
elles n'attendent pas qu'ils approchent ^
H fuffit qu'ils pafTent à leur portée, pour
qu'elles aillent au-devant ; elles les atta«
^uent à grande cris ^ ieur font df3
éB Hipoke Naturelle
bleffures crudies , & les ' chaJfTent iti
tant de fureur , qu'ils fuient fouvni
iàns ofer revenir ; cl dans ce coiT^at
inégal contre d'auffi grands ennéiis,
\\ eit rare de ïes voir fuccomber fouJa
force , ou fe iaifier emporter ; ii arik
feulement qu'elles tombent quelque jis
avec i'oifeau contre iequei elles (è iat
accrochées avec tant d'acharnement, cie
ie combat ne finit que par ia chute^
ia mort de tous deux ; auffi les oife^x
de proie les plus braves les refpec^eii;
ies milans, (es bufes , îes corbeaux jj-
roillènt les craindre & les fuir plujt
que les chercher ; rien dans la Natip
ne peint mieux ia puiffance & les drcf
du courage, que de voir ce petit cL
feau qui n'efl guère pius gros qu'us
alouette, voier de pair avec ies épervie L
îes faucons & tous les autres tyrans \
i'air, fans fes redouter ; & chafler da:
îeur domaine, fans craindre à'^w et
puni ; car quoique les pie-grîèches
nourriiïent communément d'infet^e^
elles aiment la chair de préférence : ell<
pourfuivent au vol tous les petits o
féaux ; oaea a YU prendre desperdreai]
'iJes Pk-gnèches, 6^^
de Jeunes fevreaux ; les grives , les
îrles , &:.Ies autres oifeaux pris au lacet
au piège , deviennent leur proie I:i
^ ordinaire ; elles les fairifTent avec
\, ongles , leur crèvent la tête avec le
c , leur ferrent & déchiquètent le
[« , & après les avoir e'trangle's ou
j-és , elles les plument pour les manger,
l dépecer à leur aile , & en emporter
jns leur nid les débris en lambeaux.
j Le genre de ces oifeaux eft compofe
[m affez grand nombre d'efpèces ;
Liis nous pouvons réduire à trois prin^
.:)ales c£ux de notre climat, Ja pre^
ère efl celle de la pie-grièche grife ,
(econde celle de la pie-grièche roufTe ,
la troifième celle de la pie-grièche ap-
lée vulgairement Vécorcheur. Chacune
\ ces trois efpèces mérite une defcrip-
n particulière , & contient quelques
riétés que nous allons indiquer»
y^ 'Hfloke Naturelle
L A
PIE^GRIÈCHE GRISE fa^
Voye^ la planche VI de ce voh
urne.
ETTE Pie-grièche grife * eft très
commune dans nos provinces de Frana
(û) En Grec moderne, KcMug/it^v ; en Latin
Lanius ; en Italien , Gaia fperviera , Falcontlk
Orejh , Caflrica, Ver/a, Srragaiiina, J^aganoia
en Sa\'oie , A'Iontagafe , Arneat ; en Bourgogne
Foiichari ou Bouchari , mot qui vient de l'Angloi
Butchev , Buîchery , qu'on prononce en Franco
Boutchtr , Boutcheryy Boucher , Boucherie ; en AHl
mand, Thom-Iùef^er y Thorn - Tracer ; Walut - ht
Warkengel; Nun-maerder, Nun-îoeder; en Polonoi
d'Zieri(ba, Sirokos , Wîekfiy ; en Suède, Wa\
fogeî ; enAnglois, Butcher-bird , Adder-bird, Aiù
"togafer — Lanius Cimreus. Gefner, Avi. pag. 57J
Curn icône maris, — Collurio. Aldrov^ Avi, tom. I
pag. 389. Cum icône fmnincz, — Grande Vit
grièchc, Beion , Hifl* nat. des Oifeaux , page i 2 6^
fg, page 127, — Caflrica palumbina. Olina
pag. 4-1 , avec une figure. — Grand Écorcheu
cendré. Aîbin , loim 11 ^ page f , avec une fîguri
coloriée, planche Xlll. — Lanius médius feu fecundus
Pica medicz inagniiudinis^ Frirch , tab. L X» Icont;
maris & faiminœ,
^ y<^'^ l^s ]}lamhes enluminées t n.® ^^^,f
^de la Pie-grièclie gnfe, y t]
i5t paroît être naturelle à notre climnt,
car elle y pafTe l'hiver & ne le quitte
sn aucun temps ; elle habite les bois &
les montagnes en été , ^ vient dans
les plaines & près des habitations en
hiver ; elle fait Ton nid fur les arbres
[es plus élevés des bois ou des terres
n montagnes ; ce nid eft compolé au
iehors de moufTe blanche entreîafTée
3'herbes longues, & au dedans il eft
mx\ doublé & tapiiïe de laine ; ordi-
lairenient il eft appuyé fur une branche
double & triple fourche ; la femelle
:[ui ne diffère pas du mâle par la grof-
,eur , mais feulement par la teinte des
:ouleurs plus claires que celles du mâle ,
ond ordinairement cinq ou fix & quel^
(uefois fept , ou même huit œufs
Tos comme ceux d'une grive ; elle
ourrit fes petits de chenilles & d'autres
ilêcles dans les premiers jours , & bien-
5t elle leur fait manger de petits mor-
eaux de viande que leur père leur
pporte avec un foin <Sc une diligence
dmirables ; bien différente des autres
ifeaux de proie qui chaffent leurs petits
^Aiit qu'ils foisat en état de fe pour'wfeil^
L.
^2 FTîflotre Naturelle
d'eux-mêmes, la pie-grièche garde «Se
foigne les Tiens tout le temps du premier
âge, ôa quand ils font adultes, elle ies
loigne encore ; ia famiîle ne fe fépare
pas , Oii les voit voier enfemble pendant
Fautomne entier , <& encore en hiver ,
fans qu'ils fe réuniiîent en grandes
troupes : chaque famille fait une petite
bande à part , ordinairement compofe'eg
du père, de ia mère & de cinq ou fix
petits , qui tous prennent un inte'rêt
coinmun à ce qui leur arrive, vivent
en paix , & chaiïènt de concert, jufqu'à
ce que ie fentiment ou ie befoin d'a-
mour, plus fort que tout autre fenti-
ment , détruifè les liens de cet attache-
ment, & enlève les enfans à leurs parens ;
ia famille ne fe fe'pare que pour en
former de nouvelles. \
II eft aifé de reconnoître ies pie-
grîèches de loin , non-fèulement à caufè
de cette petite troupe qu'elles forment
après le tem^ps des nichées , mais encore
à leur vol qui n'eft ni dired , ni oblique
à ia même hauteur, & qui ie fait tou-i
jours de bas en haut , & de haut en ^
bâs^ alternativement & précipitamment;
'delà Pie-gnèchè gAfè. yf
en peut aufîi ies reconnoître , fans ies
voir, à leur cri aigu troui tfôu'i , qu'on
entend de fort loin , & qu'elles ne
cefîent de répéter loriqu'eiles font per-
chées au lonimet des arbres.
II y a dans cette première elpèce,
variété pour la grandeur, & variété
pour la couleur : nous avons au Cabinet
une pie-grièche qui nous a été envoyée
d'Italie, & qui ne diffère de la pie-
grièche coinmune, que par une teinte
de roux fur la poitrine & le ventre *;
on en trouve d'abioiument blanches
dans les Alpes (b), Si ces pie-grièches
blanches, aufTf -bien que celles qui ont
une teinte de roux lur le ventre , font de
îa jiiême grandeur que la pie-grièche
grife, qui n'eft elle-même pas plus grofî^
que le mauvis ( c) , autrement la griye^
* f''<y^ les planches enluminées, n.° -2,1 .figure ri
fh)^ Lan'ius alhus. Aldrov. Avï, tom, I , pagi
3 87. Cutn kone.
(c) Lunius major, GtCnev , Âri. pag. 581;
Cum icône, — fica churea feu lanius major, Frifch ,
tûb. Lix, avec àts figures coloriées du mâie & dç
ia femeife.
Oifeauxj Tome IL D
74 I^ïftoire Naturelle
mauviette (d); mais il s'en trouve d'ajatres
en Ailemagne & en SuilTe qui font un
peu plus grandes , & dont quelques Na-
turalifles ont voulu fîiireune elpece par-
ticulière , quoiqu'il n'y ait aucune autre
diiïéfence entre ces oifeaux que celle d'un
peu plus de grandeur , ce qui pourroit
bien ])rovenir de la nourriture, c'efl-à-
dire, de l'abondance ou de la difette
des pays qu'ils habitent; ainii la pie-
grièche grife varie , même dans nos
climats d'Europe, par la grandeur &
par \^i couleurs : on ne doit donc pas
être furpris fi elle varie encore davantage
dans des climats plus éloignés , tels que
ceux de l'Amérique, de l'Afrique & des
îiides ; la pie-grièche grife de la Loui-
.fiane*5 ell le même oifeau que la pie-
(à) Nota, Eiie diffère de la première en ce
ciielle eft plus grande & plus crroffe, & en ce
qu'eîJe a les pîumeî fcapuiaires & les petites cou-
vertures du deffiis des ailes d'une couieur rouflâtre ;
mais comme elle reffemble par tout ie refle à ia
pie-grièche commune , ct% diiterences , qui peut-
être ne font pas générales ni bien confiantes , ne
nous paroiflent pas (uffifantes pour établir une
efpèce diftind:e &: féparée de la première.
de la Pie-gnèchc grijc. 7 J
gricche grife d'Euro i[)e , de kiqiieîle elle
paroît différer aulii-pcu que la pie-
grièche d'Italie ; on n'y reniarqueroit
même aucune difFiTence bien Tcnilble ,
fi elle n'étoit pas un peu plus petite
ÔL un peu plus ïonc^t de couleur iur
k;i parties Ibpéricures du corps.
La pie-giièche dii cap de bonne-
Efptrance'' (e) , la pie-gricche grife du
Sénégal^ &: la pie -grièche bieue de
* Vi>y(ri les y! anches enluminées, n.^ 477» fg^ii'^ t »
(e) Nota, C'eft à cette efpèce qu'on doit auffi
rapporter 1 oi'eau des Inàcs orientales , que les
Anglois qui fréquentent les côres de Bengale ont
appelé Dial-hird ( l'horloge ou ie cadran ) , & qui
a été indiqué par Albin , tome II! , page 8 , avec
àçi> figures coloriées du maie ( yl, XVIlJ , & de
ia femelie { pL XVI II): <« cette pie grièche, dit-il ,
ert grande à peu près comme notre pie-grièche (t
grife , avec ie bec noir , les coins de la bouche «
jaunes, l'iris àt^ yeux de la même couleur, les •:
jambes & les pieds hruns: le mâle a la tête, le «.
cou , le dos , le croupion , les couvertures du <e
defîus de la queue , les plumes fcapuiaires, ïa «
gorge & la poitrine noires; le ventre, les côtés «.
& les couvertures du delfous de la queue blanches; v.
toutes les plumes de la queue également longues, «
noires en de iïus & blanches en defTous : la femelle *«
ne diiîère du mâle qu'en ce que les couleurs foni «
moins foncées ».
è Voyei^ les ykncks enluminas, n.° 297, /^. /,'
Di;
•7"^ 'Bîjlohe Ndîurelîe
Madagafcar*, font encore irois variétés
^îrès-vôirines l'une de i'autre, & appar-
tiennent également à l'eTpèce commune
,de ia pie-grièche grife d'Europe ; celle du
Cap ne diffère de ceiie d'Europe qu'en
-Ce qu'elfe a toutes les parties lupérieures
,du corps d'un brun -noirâtre; celle du
Sénégal les a d'un brun plus clair, &
.celle de Madagafcar a»ces mêmes parties
d'un beau bleu ; mais ces différences
,dans la .couleur du plumage , tout -le
refle étant égal & femblabie d'ailleurs,
ne luffiient pas à beaucoup près pour
,en faire des efpèces diftinifes & féparées
de la pie-grièche commune. Nous
donnerons plufieurs exemples.de chan-
gemens de cpulevir tout auiîi grands
dans d'autres oifeaux, même dans notre
climat; à plus forte raifon ; ces chan-
gemicns doivent-ils arriver dans des
.^rlim.ats difïerens & aufîî éloigné: les
.uns des autres : l'influence de la te. •
.rature fe marque par des rappor
-dts gens attentifs ne doivent pas ...i.ier
réchapper ; par exemple , nous tn
ici que la pie - grièche étran^.
X.A PIE-GRIEGETE GRISE
'i^ie^h Pie-grîèche gnfe. jj
Feflenibie le plus à notre pie-grièch^
d'Italie, ell celle de la Loiiiiiaiie : or
ta température de ces deux climats n'cfl:'
pas "fort illégale ,. & nous trouvons mi
contraire que celle dja Cap, du Sé-
négal & de Madagalcar reflemble moins ,<
parce que ces climats (ont en effet d'une
température très - différente de celle
d'Italie.
Il en cfl de même du climat de
Cayenne , où la pie-grièche prend un
pluinage varié ou rayé de longues
taches brunes*; mais comme elle eu.
de la même grandeur que notre pie^
grièche grife, & qu'elle lui reffemble-
à tous autres égards , nous avons crti
pouvoir ia rapporter avec fondenienî^à>
cette ef[:)èce commune.
2'" V'iy£i ks planches enluminks, n,° ^^Ja
p iç
7'8 fliflolre NaîîireJle
LA ' ■
PIE-€RIECHE ROUSSE (a).
V>ETTE Pie-grièche roiifTe* efl un
peu plus petite que la grifc, & trèi-
aiiée à reconnoure par îe roux qu'elle
a fur îa tête , qui eil quelquefois rouge
& ordinairement d'un roux vif; on peut
aufïi remarquer qu'elle a ies yeux d'un
gris biitn châtre ou jaunâtre; au lieu que
ia pie-giièche griie ies a bruns ; elie a
aufîi ie bec & ies jambes plus noires :
ie naturel de cette pie-grièche roulTe
cil à très -peu près le même que celui
(a) Coïkr'tonls primum geniis. AfJrov. AvL tom. I,
|>ag. 389. Cnm icône maris, — Ecorcheur à tête
ronge. Albin, tome 11, pn^e 1 o ; avec une fi^^ure
coloriée du vcv^^t, planche XVI ... , Pctii Ecorcheur
femeiie, pUyic^t XV, — Pic a minima ; Lanius
tninor feu lerïiwi, \-i'vx\\, mh. LXI, avec des figures
coloriées du mâle & de k femelle. — Ampcîis dorfo
grifeo macula, ad oculos longirudiriali (fœmina). Lirin.
Faun. Suec. tab. 2 , t\.° \ 80. — Lanius ruj'us. La
Pie-grièche rouiTe, BrifTon , icme U , page i ^j.
* Voyei^ les planches enluminées, n.^ 9, figure 2 3
Je mâle ,• i^ rJ^ 31, figure i , ia femelle^
'^e kl Pie-gmche rciifc, jc^
de la pie-grièche grile : toutes deux font
aufli hardies, aufii méchantes l'une que
i'autre; mais ce qui prouve que ce font
néanmoins deux elpèces ditîérentes ,
c'eft que la première i^ile au pays toute
i'année ; au lieu que celle-ci ie quitie
en automne , & ne revient qu'au pria-
temps ; la famille qui ne fe lepare pas
a ia fonie du nid , & qui demeure tou-
jours rafîêmbfce, part vers le commen-
cement de fepîembre, lans ie réunir
avec d'autres familles , & l^ns faire de
iongs vols: ces cifeaux ne vont que
d'arbre en arbre, &. ne voient pas de
fuite, même dans le temps de leur dé-
part ; ils relient pendant l'été dans nos
campagnes, &. font leur nid fur quel-
que arbre touîtii ; au lieu que îa pic-
grièche grife habite les bois dans cette
même (iiifon , & ne vient guère dans
nos plaines que quand ia pie-grièche
rouffe ell partie : on prétend aulli que
de toutes les pie-grîèches celle- ci eil
îa meilleure, ou, fi Ton veut, ia feule
qui ioit bonne à manger (bj,
/g) Lanius 'tninor rutihs ad clbum r:pnor reljqu's^
dduaius Ù' Jalubrif, Sch, Thinoirop . SU pag. 292,
D iiij
$0 Hi foire Naîiirtlle, à" cl
Le mâle & la femelle font à très- •
peu près de la même groiîèu/ ; mais
iis diffèrent par les couleurs affez pour
paroître des oifeaux de différente ef-
pèce : nous renvoyons fur ceia aux
planches enluminées que nous venons
de citer, & qu'il iulïîra de compare*
pour le reconnoître; nous obferverons
Seulement au fujet de celte efpèce &
de la fuivante, appele'e Vécorcheur , que
ces oifeaux font leur nid avec beaucoup
d'art & de propreté, à peu près avec
les mêmes matériaux qu'emploie la pie-
grièche grife ; la mouffe & la laine y
font fi bien entrelaiTces avec les petites^
racines fouples , les herbes fines &
longues , les branches pliantes des petits
arbulles, que cet ouvrage paroît avoir
été tiiui : ils produifent ordinairement
cinq ou fîx œufs, & quelquefois da-
vantage ; &L ces œufs dont le fond efl
de couleur blanchâtre, font en tout ou
en partie tachés de brun ou de fauve,
8i
L' ECO RC HEUR (a).
Voye^ la planche Vil de ce vclume.
E
Ij'É c O r c h e u r eft 1111 peu pîuà
petit que la pie-griècLe roufle , & lui
reffemble afTez par les habitudes natu-
relles, comme elfe il arrive au prin-
temps , fait Ton nid far des arbres ou
même dans des buifTons en pleine cam-
pagne & non }3as dans les bois , part
* Voye^^ ks planches enluminées, n.° 3 \, figure J/
(a) Petite Pie - griècfie , Pie - efirrayère / Pie»"
ancrouelie. Be'on, HijL nat. des Oïjeaux, page i 28}
&• P.'Ytrùiîs d'O'îJeaux , page zi , rcdo , avec figure»
— CcMurionis prjpï teriium genus, Aidrov. Avï,
tôîM. I , pag. 390» Cum icône MeruliZ con^
gêner alia. Idem, tom. II, pag. 625. Cum aherâ
icône. — Ampelis dorfo grifeo tnaculà ad oculos lon-r
gimdinali, Linnseus , Faiin, Suec. n.^ 180. Cum
fcone maris non accunudi Nota. M. Linnseus sc\k.
trompé en prenant i'efpèce précédente & celle - ci
peur la femelle & le mâle de la même efpèceo
—^ Petit Écorcheur» Aibin , tome II , page i <?',
svec une figure coloriée, planche XIV, . . . Colluriâk
|^'£cor€h€iir» J^fiflun j tsms II-, vase ///,
82 Hijloire Naîurelk
avec Ç'à famille vers le mois de feptemLrey
fe nourrit communément d'iniedes , &
fait auffi la guerre aux petits ôileaux ;
en (orte qu'on ne peut trouver aucune
différence eiïentielie entr'eux , /iiion la
grandeur , ia diftribution & les nuances
CQS couleurs, qui paroiOent être conf-
tamnient différentes dans chacune de
ces efpèces, tant celles du maie que
celles de la femelle ; néanmoins comme
entre le mâle & la femelle de chacune
de ces deux efpèces, il y a dans ce
même caradère de ia couleur encore
plus de différence que d'une ef])èce à
i'autre, on feroit très- bien fondé à nç
ks regarder que comme des variétés,
êa à réunir fous la même efpèce , la
pie-grièche rouffe, i'écorcheur & l'é-
corcheur varié (b), dont quelques Na-
turalifies ont encore fait une efpèce
diflinde , <& qui cependant pourroit
bien être ia femelle de celui dont A
eft ici queflion; nous renvoyons aux
(h) Colknoms parvifecundwn genus, AiJrov. A vu
t©m. I, pag, 390. Cuni icône , . . . Collurlo vanuSt
rÉcorcheur varié. BriiTon, tomt 11 , page i j^.
An fuicedetitis fairdna, Idem, ibidem , pag> 158,
de VÉcorchur. ^^
planches enluminées pour en juger par
îa comparaiibn.
Au relie , ces deux efpèccs de pie-
grièches avec ieurs variétés , nichent
dans nos climats , &. ie trouvent en
Suède comme en France; en ibne
qu'elles ont pu pafler. d'un contineuî à
l'autre ; il ell donc \ préiumer que les
clpèces étrangères de ce mime genre^
& qui ont des couleurs rouifes, ne font
que des vartttcs de i'écorcheur, d'au-
tant qu'ayant i'ulage de pafier tous les
ans d'un climat à i'auire , elles OJit pu
le naturalifer dans des climats éloignés,
encore plus ailément que la pie-grièche
qui reile conilamment dans notre pays.
Rien ne prouve mieux le palTage de
ces oileaux cie notre pays dans des climats
plus chauds, pour y pafTer i'hiver, que
de ies retrouver au Sénégal ; la pie-
grièche roulTe ^, nous a été envoyée
par M. Adanfon, & c'eil abfoiument
,îe même oileau que notre pie-grièche
roufle d'Europe; il y en a une autre'*
qui nous a été également envoyée du
* Voye^ les planches enluminer, n.° ^77 > fgi*rt z,
^ IhïcUm , n.^ 479.
D vj
84 Hifîolre Naturelle
Sénégal, & qui doit n'être regardée
que comme une fimple vari^'té dans
l'eipèce, puilqu'elie ne diffère des autres
que par ia couleur de la tête qu'elle .a
noire, & par un peu plus de longueur
de queue, ce qui ne fait pas à beau-
coup près une affez grande différence
pour en former une cfpèce diftinde
& réparée.
Il en efl de même de i'oifeau que
nous avons sppeîé V écorcheur'^ des Phï^
lipp'in&s ( c) , & encore de celle que
nous avons appelée pie-grièche ds la
■* Voj-eiks planchs e7ilunùnées, n.° ^J^, figure i ,
(c) ïi nous paroît que cet oifeau eft le même
que ceiui que M. Edv/ards a donné fous le nom
iiQ pie-grièche rouge ou rdUjfe huppée, « Cet oifenu ,
* dit-il, s'appelie Carach, dans ie pays de Bcht
3> ^ale , & diffère de nos pie-grièclies par une fnippe
qu'il porte fur la tête » ; mais cette différence efî
ijien légère, car cette huppe n'en eft pas une-,
c'ed feulement une difpoiltion de plumes qui pa-
roiir*:nt hériiTée^ comme celles du geai lorfqu'il efl
en ccîcre, &: que M. Edwards avoue lui même
qu'il n'a vue que dans i'oifeau mort.- en forte
qu'on ne p«4it pas afTurer fi ces plumes n'avoient
pas été redrefTëes par quelque froifiemcnt avant ou
après ia mort de i'oifeau , ce qui efi bien différent
jd'une huppe naturdle. La preuve de ce que je
%ism àt dire^ ç'eft.^u'oa voit une ferobiafck .
^r>.IL.
PLpn.piig. 84,
jl'ecorcheur.
de ï Êcorcheur* ■ 8' 5' '
'Ilouifiane ^, qui nous ont été envoyées
de. ces deux climats fi éloignés l'un ce
rentre, & qui néanmoins le reflemblent
aflez* pour ne paroîire que le même
oileau , & qui dans ^e réel ne font
eniemble qu'une variété de notre écor-
cheur, à la femelle duquel cette varié le
relîembie preiqu'en- tout.
huppç fur la tête de la pie-griècf.e Manche &-noire
de Surinam, dent ie même. M. Edwards a donné
la figure dans ia première partie de ics Glanures * ;
or nous avons cette efpèce au Cabinet du Roi , &
ii crt certain qu'elle n'a jx)int de huppe; dès - loKS
nous ne pouvons nous empêcher de prérumer que
cette apparence de huppe, ou plutôt de plumes
FiërilTées fur la tête, qui fe trouve dam ces deux
pie-grièches de M. Edwards, ne foi t une difpo-;
fitlon acciJente'le ou momentanée, & qui proba-
Mement ne fe manifef-le que. quand loifeau ell en
colère ; ainfi nous perUflons à croije que cette pie^
grièche de Bengale n'eft qu'une variété de i'efpèce
de la pie- grièche roufîe ou de l'écorcheur d'Europe,
* Glanures -d'Edwards, partie I, page j y, pi. CCXXVIi .
? Vû^c:^ les pknches enluminées ^n° -^<)j..= .
8^ Hifloire Naturelle
OISEAUX ÉTRANGERS
Qjn ont rapport à la PiE-GRÎÈCHE
grife & à ÏÉcorcheu R,
I.
LE F I N G A H.
J_j 'oiseau des Indes orientales ,
appeié à Bengale Fïngah , dont M.
Edwards a donné la deicripiion fous ie
nom dQ pie-grieche des Indes, à queue
fourchue , qui efl: certainement une ei-
pèce difrérente de toutes !es autres pie- ;
grièches. Voici ia traduction de ce que
dit M, Edwards à ce iujet : la forme
du bec, les niouflaches ou poils, qui
en furmontent la bafe , ia force des
jambes m.'ont déterminé à donner à cet
oifeau le nom de pk-grièche , quoique
fà queue foit fiite tout autrement que
celle dts pie-grièches dont les piumes
du milieu roai les plus ioiigues j au iieu
des Oifeaux e [rangers > 87
C[iie dans ceile-ci elîes font beaucoup
plus courtes que les plumes extérieures ;
€11 forte que ia queue paroîc fourchue
c'efl-à-dire, vide au milieu vers ion
extrémité : il a ie bec épais & fort ,
voûte en arc y a peu près comme celu!
de i'épervier, plus long à proportion
de fa groiïeur , âc moins crochu , avec
des narines affez grandes ; la bafe de la
mandibule fupérieure eft environnée de
poils roides La tête entière , le
cou, ie dos & les couvertures des ailes
font d'un noir brillant , avec un reflet
de bleu, de pourpre 6c de vert, &: qui
fe décide ou varie fuivanî l'incidence
de la lumière La poitrine efl:
d'une couleur cendrée, fombre & noi-
râtre : tout le ventre , les jambes & les
couvertures du defTous de la queue
font blanches ; les jambes , les pieds &
ies ongles font d'un brun noirâtre : je
doutois, ajoute M. Edwards, fi je de-
vois ranger cet oifeau avec les pie-=
grièches ou avec les pies ; car il me
paroiiToit égaicment voifin de chacun
de ces deux genres , & je penfe que
ïous deux pourroient nQïi fûre qu'un?
&8' MïJIofre Naîùrelle^
les pies convenant en beaucoupr de
choies avec ics pie-grièches ; quoique
perfonne en Angleterre ne Tait remar-
qué , il paroît qu'en France on y a fait
attention , & qu'on a obfervé cette
conformité de nature dans ces deux
oiieaux , puilqu'on les a tous deux
appelés pies (a) .
(a) Edwards, Ifijl. -nat. pf hirds , îum. II;
p<rg. / 6, planche L VJ, avec une figure bien coloriée,
ri.
ROUGE-QUEUE.
L' O I S E AU des Indes orientales ,
indiqué & décrit par A ibin, fous le
nom de Rouge-queue de Bengale ^ ileft
de la même grandeur que la pie-grièche
gri(e d'Europe-: le bec efi d'un cendré
brun ; i'iris dts yeux eft blanchâtre , le
deiTus & le derrière de. la tête noirs;
il y 'a au-deiïous des yetix une tache
d'un rouore vif terminée de blanc, &
iur le cou quatre taches noires en por-
tion de c^icfe; .iedeffus du CQU; k
{les Oifeûux étrangers. 8 9
Jos, le croupion, les couvertures du
deiTus de la queue, celles du deffous
des ailes, & les plumes Icapulaires font
brunes; la gorge, le defTus du cou, la
poitrine, le haut du \e«tre-, les côtés
& les jambes font blanches; le bas du
ventre &: les couvertures du defious Je
la queue font rouges; la queue eft d'un
brun clair; les pieds & les ongles font
noirs (b)»-
i (h) Rouge -queue de Bengale. Aibin^ tome IIJ,
\page 2.^ y planche LVI , avec une figure coiorîée.
I— La Pie-gfièche de Bengale. BrifTon, tomt U\
III.
LANGRAIEN
E T
TCHA'CHERT^
Les- oilêaux envoye's de Manille.
& de Madagafcar, le premier fous le
inoni de Langraien , ôl le fécond fous
* Voyeiks planches enluminas^ n,° ^tfy^i^f ft
I ^ n»° 3 2 , figure 2,..
po Hifolre Naturelle i
celui de tcha-chcrt , que l'on a rapport€'s)i
peut-êipe mai-à-pioj)os au genre c!es|J
pie-grièches (c) , parce qu'ils. en diffè-;-
rent par un caradère efieniiel, ayonti
les ailes, iorCqu'elles font pliées , au(îi ■
longues que lu queue ; tandis que toutes
les autres pie-grièches, ainfi que les oi-
féaux étrangers que nous y rappor-
terons, ont les ailes beaucoup plus
courtes à proportion, ce qui pourroit
faire croire que ce font des oifeaux^
d'un autre genre: néanmoins, comme
ceiui de iMiidagafcar approche aflez d^
l'efpèce de notre pic-grièche grife ,
cette diiference p;cs de la longueur dej
ailes, on pourroit le reo-arder comm(
faiiant la nuance entre notre pie-grièch(
& cet oifeau de Manille, auquel i|
reffemble encore plus qu'à notre pic-
grièche; & comme nous ne connoil-
fons aucun genre d'oifeaux, auquel on
puifTe rapporter direcT:ement cet oifeau
de Manille, nous avons fuivi le fentii
ment des autres Naturaiiites , en lui
donnant le nom de pie-grièche , auffi^
bien qu'à ceiui de Aladagafcar; mais
(c) Briffon, tom& U, fû^ts j 80 if i ^ J, •
"{les Oifcdux cîvdu^crs. 91
Inous avons cru devoir ici marquer nos
cloutes fur la jullclle de cette denomi-
naiion.
IV.
BÉCARDES.''
Les oileaux envoyés de Cayenne ;
îe premier, w/' 30^, Tous le nom de
P'u'-grièclte grife ; ôl le Iccond , fous
; celui de pie - gruchc tachetée , qui font
j d'une efpèce difle rente de nos pie-
I grièches d'Europe, & que nous avons
[cru devoir appeler bécanies , à caufe de
la grollcur <Sc de la longueur de leur
bec, qu'ils ont aulll de couleur rouge;
ces becardes digèrent encore de nos
pie-grièches , en ce qu'elles ont la tête
toute noire , & l'habitude du corps plus
cpaifîè 6>L plus longue ; mais d'ailleurs
elles leur refTemblent pii;s qu'à tout
' autre oileuu. Au reite, l'une nous paroit
être le maie &: l'autre la femelle de h
nièine efpèce, fur laquelle nous ob-
ferverons qu'il le trouve encore d'autres
'^ l^oj'c'^/csfkvic/its ailuminéts, n.'^'^jo^. ÎT' 377»
^'1 Mîjîotre Naturelle'
efpèces fembiabies par la grofTeur- ^^
bec dans ce même ciimat de Cayenne
& dans d'autres climats très-éloignés,,
comme on va le voir dans les articies
divans.
v;
B ÉC A RD E
A. VENTRE JAUNE.^'
L'oiseau envoyé de Cayenne,
fous le nom de Pie-grièche jaune , qaï
par fon long h&c nous paroît être d'une
efpèce afTez voifine de la précédente,
& que, par cette raifon , nous avons
appelé la bécarde à ventre jaum, car elles
ne diffèrent guère que par les couleurs :
ïes planches enluminées fufïiront pour
îes faire reconnoître & diftinguer aifé-
ment l'une de l'autre.
^^VoyeiJes planches enluminéts ^ n,® 295,
des Oîjeaux étrangers* c^^
VI.
'Le VANGA ou BÉCARDE
1 V ENTRE BLANC. *
L'oiseau envoyé de Madagnfcnr
wr M. Pgivre, Tous le nom de Vanga,
k qui, quoique différent par i'efpèce
le -nos pie-grièches & -de nos écor-
^eurs , peut - êîie même étant d'un
utre genre, a néanmoins pius de rap^
•ort avec ces oifeaux qu'avec aucun
utre ; c'eft pour cette raiion que nous
vivons nommé fur ies pianqhes eniu-
linées , pk-grU'che ou écotcheur de Mû-
'iigafcar. Mais on pourroit à plus julîe.
tre le rapporter au g€nre des bécarde^
ont nous venons de parler , oc i'ap.^
eier bccardt a ventre blanc.
Vp^^ih j^Ianches cnîunibm, n,^ a a Sa
^4 Hijîone Nature JJe
VIL
LE SCHET^BÉ^
L'oiseau envové de Madnaafca
par M. Poivre, fous le nom de Schet-bé
êi dont i'efpèce nous paroît fi voiiin
de la précédente , qu'on pourroit ie
regarder toutes deux comme ncn fi^J
iarit qu'une, n {e climat de Cayeno
n'étoit pas aiifîl éloigné qu'il efl d
ceiui de Madagafcar. Nous avons a
peié cet oife-àupie-griêche rouffe de Adû
dagafcar^ p?:r la mêm.e rai (on que nov
avons appelé ie précédent pïe-grïèch
jaune de Cayenne; & il fiiut avouer qi:
cette pie-grièche rouiîe de Madagafca
approche un peu plus que celle c
Cayenne de nos pie - gricches d'Eu
rope , parce C{u'eile a le bec plus cour
ÔL par conléquent différent de ceiui c
nos pie-grièches d'Europe ; au reft<
ces deux efpeces étrangères font pii
voifuies l'une de l'autre, que de n<
pie-gnèches d'Europe.
? VO'^l l<:s planches enluminées ^ n,* s p 8, fgure
{Je s Oîjeaux étrangers. 95
VI I î.
LE TCHA-CHERT-BÉ^
L'OïSEAU envoyé de Madagafcar
par M. Poivre, fous le wom de Tcha-
chert-bé , & que nous avons noiiiiiié au
bas de nos planches enluminées , gronde
pic-griècke verdâtre , âc qui ne nous
paroît êu'e qu'une elpèce ircs-voinne,
ou même une variété d'âae ou de fexe
îdans l'elpèce précédente, dont elle ne
idiiîère guère que parce qu'elle a le bec
iun peu plus court ôi moins crochu,
[& les couleurs un peu diiïercmment
jclillribuées. Au relie, ces cinq oifeaux
létrangers & à gros bec ; favoir , la pie-
igrièche grife (k la pie-grièche jaune de
jCayenne, la pie-grièche roufTe, i'é-
|:orcheur & ia pie-grièche verdâtre de
iMadagafcar, pourroient hÏQn faire un
oetit genre à part auquel nous avons
itJonné le nom de bécardes, à caufe de
c^a grandeur & de ia groiieur de leur
bec, parce que dans le réel, tous ces
* Voytj^ ks flanches enluminées^ n,^ 3 74.,
'«p6 Wtjîolre "Naturelle
oifeaux diffèrent aflez des pie-grièchi
pour devoir en être leparés. |
I X.
LE GONOLEK^
L'oiseau qui nous a été envo
-du Sénégai par M, Adanfon fous
aïoni de Pie-gneche rouge du Sénégc
.& que les Nègres, dit -il, appelle
:g07\okk, c'efi-à-dire, mangeurd'inied'
•C'eit un oiieau remarquable par \
couleurs vives dont il eft peint ; il <
à très-peu près de la même grande^
que ia ple-grièche d'Europe, & nV
,diffère, pour ainfi dire, que par ]
couleurs, qui néanmoins fuivent da:
ieur diitribution à peu près le mên
ordre que furla pie-grièche grife d'Ei
rope ; mais comme les couleurs en.ellt
mêmes, font très- différentes, nous ave
cru devoir regarder cet oifeau comr
étant d'une eij:)èce différente.
^ Vo^c-^ ks planches enluminées, n,* y6.
iks O if eaux étrangers, 07;
X.
^LeCALI-GALICetleBRUIA^
L'oiseau envoyé de Madagafcar
par M. Poivre , tant ^e mâfe que îa
femelle , le premier fous le nom de
Cali-calic , Se ie fécond fous celui dé
Bruîa, que l'on peut rapporter au genre
de notre écorcheur d'Europe, à caufe
de fi petiteffe ; mais qui du refte en
diffère affez pour être regarde' comme
un oifeau d'efpèce différente.
il
F XL
\ î> PIE-GRIÈCHE HUPPÉE.
\ L'oiseau envoyé du Canada fous
[îe nom de Pîe-grièche huppée , & qui
[porte en effet, fur le fommet de îa tête
lune huppe molie & de plumes îon--
[guettes qui retombent en arrière ; mais
jqui du refte eft une vraie pie-grièche
* Veyti les planches enluminées, n.° ^pp, fier, ^
k mfile ; & fig. 2 , la femelle, 'a* »
^ Voyei les planches enluminées y n,° 4.7^, Çia, 2
Oifeaux , Tome IL £
5 8 Eïpoire Naturelle, &ç, .
& alTez femblabîe à notre pie-grièche
roufle par ia dirporïtion des couleurs,
pour qu'on puiOe ia regarder comme
une eipèce voifine , qui n'&n diffère
guère que par les caradères de cette
huppe & du bec qui cft un peu
plus groso
99
L ES
OISEAUX DE PROIE
*
NOCTURNES.
1-jES yeux de ces oifeaux font dune
fenfibilité fi grande, qu'ils paroi/rent
être; cblouis par la clarté du jour , &
entièrement otruiqués par \qs rayons du
foleil : ii leur faut une lumière plus
douce , telle que celle de i'aurore naif^
iante ou du crëpulcule tombant ; c'efl
alors qu'ils fortent de leurs retraites pour
chaffer , ou plutôt pour chercher leur
proie , & ils Ibnt cette quête avec grand
avantage ; car ils trouvent dans ce temps
les autres oifeaux & les petits animaux
endormis , ou prêts à l'être : les nuits
où la lune brille font pour eux \qs
beaux jours , les jours de plaifir , \qs
jours d'abondance , pendant lefquels ils
chaflênt plufieurs heures de fuite , & Çq
pourvoient d'amples provifions : le^
Ei;
'îoo Hîjlolre NatiireHe
nuits où h lune fait défaut font beau--
coup moins heureufcs ; iîs n'ont guère
qu'une heure le foir & une heure le
matin pour chercher leur rubfiPiance ;
car il ne faut pas croire que la vue de
ces oifeaux qui s'exerce fi parfaitement
à une foibie lumière , puifie fe palTer
de toute lumière , & qu'elle perce en
effet dans l'obfcuriîé la plus profonde;
dès que la nuit elî bien ciofe , ils ceffent
de voir, &l ne diffèrent pas à cet égard
des autres animaux , tels que les lièvres ,
ks loups, les cerfs, qui fortent le foir
des bois pour repaître ou chafler pen-
dant la nuit : feulement ces animaux
voient encore mieux le jour que la
nuit ; au lieu que la vue des oifeaux
nodurnes ell fï fort olfufquée pendant
îe jour, qu'ils font obligés de fe tenir
dans le même lieu fans bouger , &
que quand on les force à en lorrîr,.
ils ne peuvent faire que de très-petites
courfcs , des vols courts & îents , de
peur de fe heurter ; les autres oifèaux
qui s'aperçoivent de leur crainte ou de
la gêne de leur fituation, viennent à
lenvi les infulter ; les mézangcs , les
Jes O'ifedux de proie noélurnes, i o i
pinçons , les rouge-gorges , les meries ,
les geais ,^ les grives, à^c. arrivem à h.
file : { oiieau de nuit perché fur une
branche , immobile , étonné , entend
ieurs'mouvemens-, ieur> cris c{ui redou-
blent (ans cefTe , parce •qu'ii n'y répond
que par des geiies bas, en tournant la
têre , Tes yeux &: Ibil corps d'un air
ridicule ; il fe laijfîe même aflailiir &
frapper , fluis fe défendre ; \^^^ plus
petits , les plus foibies eîe Tes ennemis
lont les pkîs ardens à le tourmenter y
les plus opiniâtres à le huer : c'efl (ur
cette efpèce de jeu de moquerie ou
ci'aniipathie naturelle , qu'ed fondé le
petit art de la pipée ; i[ fjffit de jMacer
* un oifeau nodurne, ou même ^^n cou-
I trefiire la voix , pour fiire arriver les
-oifeaux à l'endroit^ où Ion a tendu \^i^
giuaux Y^^/^- ii^ fiLit s'y prendre une
heure avant la ïin du jour, pour que
(n) Nvd. Cette efpèce de chafTe étoit connue
dë5 Ancien^; car kn'àoic l'indique cbirement duns
Jes t"i-tne.î fuivans; Die co.teyct aviculœ vmnes noc-^
tuani circumvolant , qwd mïrari vocmur , advoîantef-
que yacuivum. Qiia proprer ea cnnfmuîâ auicularwn
gênera àr v<2ria muita capiunt, Hïih anim. ilb. ftCj
:. ii;
Ï0 2 Hî flaire 'Nûîureik
cette chaiïe foit heiireufe ; car fi l'on
attend plus tard , c^i m cm es petits oi-
féaux qui viennent pendant ie jour pro-
voquer Foifeau de nuit, avec autant d'au-
dace que d'opiniâtreté , îe fuient & le
redoutent éh% que l'obfcurité lui permet
de fe mettre en mouvement, & de dé-
ployer fes ficuités.
Tout cela doit néanmoins s'entendre
avec certaines reflridions qu'il efl bon
d'indiquer , i ." toutes ies efpèces de
hiboux & de chouettes , ne font pas
également ofFufquées par la iumière du
jour ; ie grand duc voit affez clair pour
voier & fuir à d'af ez o-randes diflances
en plein jour ; îa chevêciie , ou la plus
petite cfpè'ce de chouettes chaffe, pour-
iliit & prend des petits oi féaux long-
temps avant îe coucher & après le lever
du foieil. Les Voyap-eurs nous affurenf
que le grand duc ou hibou de {'Amé-
rique feptentrionale (b) , prend ies ge-
linottes blanches en plein jour, & même
lorfque ia neige en augmente encore
ia iumière ; Belon dit très-bien dans fon'
(h) Voyage de ia baie de Hudfon , tome -/^
Jes Oifeàux Je proie îioâunies. ï o 3
vieux langage (c), que quiconque prendra
^arde à la vue de (es oifcaux , ne lu trou-
vera pas fi unhé cille qu'on la crie ; 2/' if
paroîî^que le hibou commun ou moyeii
duc voit plus mal que le fcops ou peut
duc, & que c'elt ^ie tôus les hiboux
celui qui eft le plus offufqué par la lu-
mière du jour, comme le font aufli le
chat-huant, l'effraie & la hdiotte; car on
voit les oiltauK s'attrouper également
pour (es infulter à la pipée ; mais avant
de donner les faits qui ont rapport à
chaque eipèce en pariiculier, ii faut eii
préleiuer les difiindions générales.
On peut diviicr en deux genres prin-
:ipaux les oiicaux de proie nodurnes ,
le gcrire du hibou <Sc celui de la choueu'e^
qui contiennent chacun plu(ieurs ef-
jvcces diiTérentes ;• ie caractère difdnc^if
de ces deux genres , c'eft que tous les
hiboux ont deux aigrettes de plumes ea
I fcj Be!on, Hlil nat. nés Olfeaux , pnge 133,
N>[ci. C'ci! en efFit avec cette reihidioq (ju'on
blt^enîendi'e ee qu-é difent à cet égird ia plupart:
les Ecrivains, & entr'autres Schwenckfeld! Nodu
\erjricd:i(fimè vidcntcs ^ dïu cacmiaitcs, Theriotrop,
fi/, pag. 308.
E ii ij
J04 Hîfwîre Naturelle
f©rme d'oreilles , droites de chaque côte
de la tête (d) , tandis que les chouettes
ont la tête arrondie fans aigrettes (Si liins
aucunes plumes proéminentes ^^^Z nous
Téduifons à trois' ics efpèces contenues
dans le genre du hibou. Ces trois éfpèces
font I." le duc oii grand duc , 2." le
hibou ou moyen duc, 3." le fcops ou
peiiî duc ; mais nous ne pouvons ré-
duire à moins de cinq tes efpèces du
genre de la chouette , & ces eijjèces
iont, i.*" la hulotte ou huette , 2.° le
chat- huant, 3.'' i'eîîniie eu freffaie ,
4.° la chouette ou grande chevêche ,
5.° la chevêche ou petite chouette ;
ces huit efpèces (e trouvent toutes en
(d) Nortu Ces oifcaux peuvent remuer Si faire
baiifcr ou élever ces aigrettes de piumes à voionté.
f e J II parott que Pline avoit remarqué cette
différence générique , iorfqu'il dit : Pennaroriun ani-
n^ûiîum buhcni tnmùm iT olô pluma relut aui-er, Lib.
Xf, cap. 47. Et aiiieurs: Oiis hùone niinûr eÛ ,-
mx^uîs m"J7>' , auriluis p'unuis ernimmibus , unde &
nanun illi ; quidam hiiinè aficncm vocant. Lie. X ,
cap. 23. I^ota. Qu'il y a trois efpèces de hiboux
tjui ont en efîet Cxti aigrettes de plumes , & qus
ces trois efpèces font ie grand àwc , bubo ; le moyen
duc, otus ; &. le petit duc^ afio , eue Pline con-
fond avec ypfm
des Oïfedtix de proie noâiinies, v&f
Europe & même en France ; queîques-
unes ont des variétés qui paroifi'ent dé-
pendre de la différence des climats ;
d'autres ont des repréfentans dans le
nouveau continent ; la plupart des hi-
boux & des chouettes» de l'Amérique
ne diffèrent pas afîez de celles de l'Eu-*
rope , pour qu'on ne puifle leur iup-.
pofer une même origine.
Aridote £iit mention de douze ef^
pèces d'oileaux (jui voient dans l'obf^
curité , & volent pendant la nuit ; ôc
comme dans ces douze efpèces il com-.
prend l'orfraie & le tette - chèvre ou
crapaud volant^ fous les noms à^ phinis:
& d'cegoti/ûs ; & trois autres fous les,
noms de capriceps ,. de chalcis ôl de^
iharadrios , qui font du nombre des.
oifeaux pêcheurs &. habitans des marais,
ou des rives des eaux & des torrens ; \\
paroît qu'il a réduit à (ept efpèces tous.
les hiboux & toutes les chouettes qui
étoiem connus en Grèce de fon temps;,
ie hibou ou moyen duc qu'il appelle:
O^itç, otus , précède & conduit, dit-il 5;
ks cailles ^ lorf<ju'elks partent pou^
\
io5 Hijloire Naîîirelk
changer de climat (f); & c'efl: par
cette railoa qu'on appelle cet oileau
dux ou duc ; l'étymologie nie paroït
fîire , mais le fait efl: plus qu'inceruiin :
il cft vrai que les cailles qui , iorfqu'clles
partent en automne, font furchargées
de graifTe , ne volent guère que la nuit ,
êL qu'elles fe repofent pendant le jour
à l'ombre pour éviter la chrJeur, <Sc
que par conféquent on a pu s'aperce-
voir que le hibou accompagnoit ou
précédoit quelquefois ces troupes de
cailles ; mais il ne paroït par aucune
obfervation, par aucun témoignage bien
conflaté , que le hibou foit comme la
caille un oifeau de pafTage ; ie feul fait
que j'aie trouvé dans les Voyageurs ,
qui aille à l'appui de cette opinion , efl
dans la Préface de i'Hiiloire Naturelle
de la Caroline , par Catefby ; il dit
ce qu'à vingt-fix degrés de latitude nord,
59 à peu près entre les deux coniinens
^fj Cum coturnîces adeunt hca , fine rîticihus
fergunt ; at cum hïnc abeum , ducihus linguJaca , oto
ir matrice iroficifcuntuy. Arift» Hijl, mitih lib. YlHj
P 'lies Oifedîix de proie noâurnes. i 07
:f d'Afrique & d'Amérique , c'eft-à-dire, ce
U iix cents lieues environ de l'un & ce
\ de .l'autre , il vit en allant à la Ca- ce
rôline uil hibou au-defTus du vaiiieau ce
où il étoit , ce qui le furprit d'autant ce
pius que ces oiièaux ayant les ailes ce
: courtes , ne peuvent voier fort loin , ce
) &: font aifénient iailés par les enfàns, ce
I ce qui arrive tout au plus à la troi- ce
fiènie volée; il ajoute que ce hibou ce
, difparoît après avoir fiât des tentatives ce
pour fe repofer fur le valifeau (g)^^-
On peut dire en faveur du fait 5 que
tous les hiboux 6w toutes les chouettes
j n'ont pas les ailes courtes, puifque dans
1 ia plupart de ces oifeaux elles s'étendent
! au-delà de l'extrémité de la queue, &
j qu'il n'y a que le grand duc & l^fcops,
j ou petit duc 5 dont les ailes , lorfqu'elles
j font pîiées , n'arrivent pas jufqu'au bouc
de la queue ; d'ailleurs on voit , ou
plutôt on entend tous ces oifeaux faire
d'affez longs vols en criant ; dèt-Iors il
Icmbie que la puilfance de voler au loin
(g) Hift. nar. de k Caroline, par M. CateiLy^
E V j
io8 H'î foire Naturelle
pendant la nuit leur appartient aufîT-
bien qu'aux autres ; mais que n'ayant
pas d'aujfîi bons yeux , & ne voyant
pas de loin , ils ne peuvent fe* formée
lin tableau d'une grande étendue de
pays , & que c'eft par cette raiion qu'ils
n'ont pas , comme ia plupart des autre$>
oi féaux , i'inftincfl des migrations , qur
fuppofe ce tableau pour le déterminer
à fiire de grands voyages ; quoi qu'il en
foJt , il paroît qu'en général nos hiboux .
& nos chouettes font allez fédentaircs :
on m'en a apporté de prefque toutes
les efpèces , non-leulement en été , au
printemps , en automne , mais mêjne
dans les temps les plus rigoureux de
l'hiver ; il n'y a que le fcops ou petit
duc qui ne fe trouve pas dans cette
laiion ; 6c j'ai été en eftet informé que
cette petiie efpèce de hibou part en
automne , & arrive au printemps ; ainfi
ce feroît plutôt au petit duc qu'au
moyen duc qu'on pourroit attribuer h
fonction de conduire les caiiles ; mais
encore une fois ce faitn'efi: pas prouvé ,'
& de même je ne fais pas fiir quoi peut
être fondé un autre fait avancé par.
I' des Oifedîix de proie noâurnes. i oc^
Pjl Ariftote , qui dît que le chat - huant
\\ ( glaux , noâua f feion (on interprète
i Gaza) fh)f fè cache pendant quelques
jours de fuite ; car on m'en a apporté
,j dans fâ pius mauvaiie faifon de l'année,
tj qu'on avoit pris dans Ies.bois ; & fi i'oii
■ prétendoit que le mot glaux , noâva ^
indique ici l'efTraie , ie fait feroit encore
moins vrai ; car à l'exception des foirées
très-fbmbres & pluvieaies , on Fentend
tous les jours de l'année fouffler & crier
à l'heure du crépulcufe.
Les douze oifeaux de nuit , indiqués
t 2. y
par Ariflote , font : byas , otos , fcêps^.
4- 5 6 7
phinis , œgotilas , eleos > vyâïcorax s-
s 9 I o II
œgoiios , glaux , charadrios ,- chaicis 3..
1 2
tegocephalos , traduits en latin par Théo-
'dore Gaza.
I 25 4-
nfio , offifraga ,. ca-^
) 8 9
'> ulula f noâudg,
(h) Paucis qiiihfiîam diebus (glaux) noâua lalSS-^
i^ï^, H'iff, anitn. iib, VIII, cap, 16^
ï ï o Hijloïre Naturelle
I o I r 12
charàdrius , chalcls , capriceps ; j'ai cni)
devoir interpréter cii François les neuf
premiers comme il fuit :
Le duc ou grand duc, le hibou ou
moyen duc, ie petit duc , Vorfraie , ie
mr^ - f^^vr^ ou crapaud volant , r effraie
6 7 8
ou frejfaîe , la ^z.'/c;/r^ , la chouette ou
9
grande chevêche, le chat- huant.
Tous les Naturaliftes & les Litté-
rateurs conviendront aifément avec moi,
I.** que le byas des Grecs, bubo des
Latins , efl notre duc ou grand duc ;
z° que Votes des Grecs, otus des La--
tins , efl notre hibou ou moyen duc ;
3.*' que lefcops des Grecs, ûjio des La-
tins , efl notre petit duc ; 4.° que le
phinis des Grecs , ojjïfraga des Latins ,
cft notre orfraie ou grand aigle de mer ;
s".° que Vœgotilas des Grecs , caprimutgus
des Latins, e(t notre tette- chèvre ou^
crapaud volant; 6.*' que Veleos des Grecs, '
aluco des Latins , efl notre effraie ou
éefaie; mais ils me deiuattderQat eu
des Oifeaux de p foie îwétunies. m
même temps par quelle raifon je pre'--
,tcnds que le glmix ell notre chat-huant,
jfe nyârcorax noire hulotte , & Vcegolios
notre chouette ou grande chevêche ;
tandis 'que tous les. Interprètes &. tous
jks Naturaliftes qui m'oi^t précédé ont
attribué le nom cegolios à ia hulotte,
&: qu'ils font forcés d'avouer qu'ils ne
fàvent à quel oifeau rapporter celui de
Tiydicorax , non plus qu'e ceux du cha-
radrïos , du chalds ôl du capriceps , &
qu'on ignore abfolument quels p.euvent
être les oifeaux défignés par ces noms;
6ç enfin ils me reprocheront que c'efl
jnal-à-propos que je tranfporte aujour-
d'hui le nom de glaux au chat-huant 3
tandis qu'il appartient de . tout temps ,
c'eil-à-dire, du confentement de tous
ceux qui m'ont précédé , à la chouette
ou grande chevêche , & même à ia
petite chouette ou chevêche proprement
dite, comme à la grande.
Je vais leur expofer les raifons que
m'ont déterminé, & je les crois aflez
fondées pour les (atisfaire , & pour
cclaircir l'obfcurité qui réfulte de leurs
douie§ & dekurs feufles jinerprétatigns.
I ï 2 Hifloire Naturelle
De tous les oileaux de nuit dont nous
avons fiiit i'éniimération, le chat- huant
eft le feui cjui ait les yeux bleuâtres , &
la hulotte la {q\\\q qui les ait noirâtres ;.
tous les autres ont l'iris des yeux d'un
jaune coufeiir d'or , ou du moins cou-
ieur de fafran. Or les Grecs dont j'ai
fouvent admiré la juflefTe de difcerne^.
inent & la précifion des idées, par les;
noms qu'ils ont im pôles aux objets de-
là Nature, & qui font toujours relatifs,!
à leurs caraélères diflindli^s & frappans^^
n'âuroient eu aucune railoa de donner
le nom glmix (glaucus) vert de mer o^x.
bleuâtre , à ceux de ces oileaux quÉ
n'ont rien de bleuâtre, & dont les yeuje:
font noirs ou orangés ou jaunes ; & ili^
auront avec fondement impofé ce non^
à i'efpèce de ces oileaux , qui parmi
toutes les autres , efl: la feule en effet,
qui ait les yeux de cette couleur bleu-
âtre ; de même ils n'âuroient pas appelé
vyélhordx , c'eft-à-dire , corbeau de nuit,,
des oifèaux qui ayant les yeux jaunes;
ou bleus, & le plumage blanc ou o-ris
n'ont aucun rapport au corbenu, & ilâ
auront doiané avec juftc raiibn ce noia
des Oîfeûiix dcprcie ncâurncs, i i 3
à la hulotte , qui eft la feuie de tous
ces oiicaux nodunics, qui ait {es yeux
noirs t< le j)îuinnge aulli prefque noir,
&i qui de plus approche du corbeau
plus qu'aucun autre par la grcfleur. .
II y a encore une raifon de conve-
nance qui ajoute à la vi'aifenibfance de
mon interprétation , c'ed que (e nyc-
ticorax chez les Grecs, 6i même chez
les Hébreux , étoit un oifeau commua
& connu , puiiqu'ils en empruntoicnt des
comparaîions (ficut nyâicorax in demi'
cilioj; il ne faut pas s'imaginer, comme
I le croient ia plupart de ces Liitérateurs,
■ que ce fût un oiieau fi foiitaire & fi
rare , qu'on ne puiffe aiijourd'hui en
retrouver l'efpèce : la hulotte eft par-
I tout allez commune; c'eil cîe toutes les
chouettes la plus grofie, la plus noire
& la plus femblabie au corbeau : toutes
les autres efpèces en font abfolument
différentes; je crois donc que cette ob-
lervation , tirée de la chofe même, doit
avoir plus de poids que l'autorité de ces
. Commentateurs, qui ne connoifFent pas
aiïez la Nature , pour en bien inter-
préter i'hiltoire.
T ï 4 Hijloire Naturelle \
Or le glûux étant le chat-huant, ou
fi l'on veut , la chouetie aux yeux
bleuâtres , & le nyâicorax étant la hu-
iotte ou chouette aux yeux noirs , Vœ-
golios ne peut être autre que la chouette
aux yeux jaunes; ceci iiiéfite encore
quelque dircuflion.
Théodore Gaza traduit le mot nyc-
îhorax , d'abord par cicumû , enfùite
par ulula, <& enfin par cicunla ; cette
dernière interprétation n'éil vraifernbla-
hX^m^m qu'une fîiute à^s Copiées , qui
de cicuma ont fait ckunia ; car Feftus
avant Gaza , avoiî également traduit
vyâicQTûx par clcurna , & îfidore p.ar ce-
cuma , &. quelques autres par cecuû : cqH
même à ces noms qu'on pourroit rap-
porter l'étymoiogie des mots ^neta en
italien 5 chomîte en françois: fi Gaza eût
fait attention aux caraclères du nyâkorax,
ï\ s'en i^roit tenu à la ieconde inîeq:!ré-
taiion ulula , & i\ n'eût pas fait double
emploi de ce terme , car il eût alors tra-
duit œgolïos par cicuma; il me paron donc
par cet examen coiuparé de ces difFérens
objets & par ces raiibns critiques , que
le ghmx Q^ le chat-huaat ^ ie nyâicorax
(bs Oifedux (k proie noâiirncs. 1 1 5
hulotte ; eSc Xcs^olïos • la chouette ou
'grande chevêche.
: li reile le chnmdiios , le chalcïs ai le
capriceps. Gaza ne leur donne peint de
noms latins particiiiiors; c^ fe contente
de copier le mot grec, .& de les indi-
quer par charadrius, cJialâs Si. capriceps:
comme ces oifeaux Ibnt d'un genre
différent de ceux dont nous traitons , (Se
que tous trois paroiffcnt être des oifeaux
de marais , & hai:»itant le bord des eaux ,
nous n'en ferons pas ici plus ampie
mention ; nous nous réfervons dVii
parier lorlqu'ii fera queftion des oiicaux
pêcheurs, parmi lefquds ii y a , comme
dans les oifeaux de proie , des efpèces
qui ne voient pas bien pendant le jour,
& qui ne pèchent que dans le temps
où les hiboux & les chouettes chafîent,
c'efc-à-dire, iorfque la lumière du jour
ne les oiïiifque plus : en nous renfer-
mant donc d:vns le fujet que nous trai-
tons, & ne confidu-ant à préfent que
les oifeaux àa genre des hiboux ôl des
chouettes , je crois avoir donné la iufte
interprétation à^i mots grecs qui les
xiéfio-nent tous ; ii n'y a que la feule
I I 6 Hiflou-e Naturelle
chevêche ou petite chouette dont je rw
trouve pas le nom dans cette lanouei
Ariiîote n'en fliit aucune menticn nuile
part , & ii y -a grande appi-tence qu'il
n'a pas diilingué cette petite efpèce de*
chouette de ceile àxijcops , ou petit duc^
parce qu'elles fe reilembient en effèi
par la orandeur , ia forme , la couleujr
des yeux, & qu'elles ne diftèrent efTeul
tieiiemem que par la petite plume pro-»-
e'minente que ie Icops porte de chaque
côté de ia tête, & dont la chevêche ou
petite chouette e(i dénuée : mais toutes
ces diiicrences particulières feront ex- •
poites plus au long dans les articles,
lui vans.
Aidrovande remarcjue avec raifon , i
que la plupart des erreurs en Hiiloire^l
Naturelle, font venues de la conflifioii i
des noms, & que dans celle des oifèaux |
nccflurnes , on trouve Tobicurité & les (
ténèbres de la nuit ; je crois que ce que \
nous venons de dire pourra les diOlper \
en grande partie : nous ajouterons, poiir^:
achever d'éclaircir cette matière, quei- '
ques autres remarques ; le nom iile , eule
en Allemand ; owl , houkî en Angloisj
iles Oîfeaux de proie noâurnes. i 1 7
huette , hulotte en François , vient du
Latin ulula , ôc celui-ci vient du cri de
::es oîfeaux nocflurnes de la grande ef-
pcce; il elt très-vraiiemblable , comme
,e dit M. Frilch , qu'on n'a d'abord
nomme ainfi que îes grandes efpèces
de chouettes , mais que fes petites leur
rciiemblant par la forme & par le na-
turel, on leur a donné le même nom ,
qui dès- lors elt devenu un nom général
6c commun à tous ces oi féaux ; de - là
h confufion à laquelle on n'a qu'impar-
iaucment remédié, en ajoutant à ce nom
oc aérai une épi th été priie du lieu de leur
dcineurc ou de leur forme particulière ,
ou de leurs difîérens cris ; par exemple,
/?£/// - eule en Allemand , chouette des
rochers , qui ell notre chouette ou
grande chevêche ; kirc/i - eule en Alle-
mand , churchowl en Angîois , chouette
des églifês ou des clochers en François,
qui eil notre eiïraie , qu'on a aufîi 2i^'
pelé fclikyer-eule , chouette voilée , perl-
eule , chouette perlée ou marquée de
petites taches rondes ; orh-eule en Alle-
mand, horn-oivl en Anglois, chouette ou
jîibou à oreilles en François, qui eft
•f
'î I 8 Hîfloire Ndîurelle
notre hîP:>ou ou moyen duc ; knapp-euh,
chouette qui fait avec Ton bec le bruit
qu-e l'on fait en cafiant une noifette , ce
qui ne'anmoins ne peut défïgner aucune
elpèce particulière , puifque toutes les
grofles eipèces de hiboux & de chouettes
font ce même bruit avec leur bec ; le
nom biibo , que les Latins ont donné à
îa plus grande efpèce de hibou , c'efl^
à-dire au grand duc , vient du rapport
d-e ion cri avec le m.ugilTementdu bœuf;
& les Allemands ont défigné le nom de
i'animal par le cri même , ulu ( oukoiij, ,
puhu ( pouhou ).
Les trois efpèces de hiboux & les i
cinq el]:)èces de chouettes que nous?
venons d'indiquer par, des dénomina-?)
lions precilès, & par des caradères aufîî:
précis , x:ompo{ent le genre entier é^si
oifeaux de proie nocturnes ; ils diiîerent;
des oifeaux de proie diurnes, i .° Par le
fens de la vue , qui eft excellent dansj
ceux - ci , <& qui paroît fort obtus dans
ceux-là , parce qu'il eft trop fenfible &
trop afteété de i'éciat de la lumière ; on
voit leur pupille , qui eft très-large , (è
ï'étrécir au grand jour d'une manière !^
lies Oïfeaux 4e proie noâurnes. i rp
différente de celle des chats ; \\ pupille
dcsoiieaux de nuit reile toujours rondç
en le rétréciflant conceatriquemcnt ; au
lieu que celle des chats devient perpeii-
diculaireinent étroite & longue. 2." Par
le lens de l'ouïe , il paroît que ces oi-
leaux de proie nodurnes ont ce iens
fupérieur à tous les autres oileaux , &
}xut - être même à tous les atiimaux •
car ils ont^ toute proportion gardée,
les conques des oreilles bien plus o-rande$
qu'aucun des animaux ; il y a auUl plus
d'appareil & de mouvement dans cet
organe, qu'ils font maîtres de fermer &
d'ouvrir à volonté, ce qui n'efl donné
à aucun animal. 3 ." Par je bec dont Li
bafe n'eft pas comme dai^s les oifeaux
de proie diurnes , couverte d'une peau
iifTe & nue, mais efl au contraire gari^ie
de plumes tournées en devant; & de
plus ils ont le bec court & mobile dans
fes deux parties comme le h^c des per=
roquets (h), & c'efl par la facilité de ces
(h) Utrumquerojhwnfve mmdihulcz amlcz wolUes
fim ; infigiufque fuperioYi mufculi ah utraque pane dati
qui luiid renvveant adducamque ad hferius rcfmm re^
Mus adduaormi aluy in uno laterc ai? occipiie v^rMu^
I 2 b H ijloire Naturelle , &c.
deux mouvemens, qu'ils font fi fouvent
craquer leur bec, &: qu'ils peuvent auiîî
l'ouvrir aitez pour prendre de très gros
morceaux que leur gofier auiîi ample ,
aufîi large que l'ouverture de ieur bec ,
ieur permet d'avaler tout entiers. 4.'' Par
les ierres dont ils ont un doigt antérieur
de mobile , & qu'ils peuvent à volonté
retourner en arrière , ce qui leur donne
plus de fermeté & de facilité qu'aux
autres pour fe tenir perchés fur un feul
pied. 5.° Par leur vol qui fe fait en
culbutant lorfqu'iis fortent de ieur trou ,
& toujours de travers & fans aucun'
bruit , comme fi le vent les emportoit :
ce font-ià les différences générales entre
ces oi féaux de proie noâ:urnes , & les
oiieaux de proie diurnes , qui , comme
l'on voit, n'ont pour ainfi dire rien de
fembiable que leurs armes , rien de com-
mun que leur appétit pour ia chair &
leur goût pour ia rapine.
tinàimsa expanfione in palato définît. Klein , de Avih»
LE DUC
*Z£ DUC (a)
o u
GRAND DUC,
Voye^ planche viii de ce volume,
jLi ES Poètes ont dédié l'Aigïe à Ju-J
piter, & ie JDuc à Junon ; c'efl ea
f^ Voyei les planches enluminées, n,°*4,35 ^ 38^^
(a) En Grec, Bvctç ; en Latin, Buh; en EP
^agnol; Bu/io; en Portugais, Afoc/io ; en ïtaîien;
Duco , Dugo ; en Savoyard , Cnaferon ; en AHe-
tnsind, Uhu, Hiihu, Schuffur , Bhu, Becghu, Huhuy^
^Jiuh , Huo , Puhi ; en Poionois, Puhaci, ^owa.'
îe^na; en Suédois, Vf; en Anglois, Great hornowi,
JEagk-owh — On l'appelle aufîi en François , Grand
■ Hibou cornu ; en quelques endroits de l'Italie , Bar^^.
hagiani ; en quelques endroits de. la France , Bar^,
ia'ian; & en Provence, Petuve, — Buho. Gefner;'
Avium, pag. 233. — Aldrov. Avi, tom, I, pag4
502. — Grand duc. Belon. J^iji. nat, des Oifeaux^
page 135. — Grand chat - huant. Albin, tome 11 ^
page /, planche IX , avec une figure colorîéef
— r: Bubo noâua maxima, Frifch , planche XCIII ,.
avec une figure coloriée. — Le Grand duc, BrllFoi^
■Ornirh. tome ï , page 4.77,
Oifeau?if Tçms JL^ JE
;i 2 2 HiPûîre Nûtwelle
efTct l'aigle de la nuit , & le roi Je cett^
tribu d'oileaux , qui craignent la lumière
du jour , 6c ne volent que quand elle
s'éteint : le duc paroît être au premier
coup d'oeil aulîi gros, aufîi fort que
ï'aigle commun , cependant il ed réel-
iement plus petit, Ôt [es proportions de
fon corps font toutes ditlérentes ^ il a
ïes jambes, le corps & la queue plus
courtes que l'aigle , la tête beaucoup
pîus grande , les ailes bien moins lon-
gues , rétendue du vol ou l'envergura
n'étant que d'environ cinq pieds : on
diftingue aifém^ent le duc à la grofTe
figure, à fon énorme tête, aux larges
& profondes cavernes de fes oreilles,
aux deux aigrettes qui furmontent ft
tête , & qui font élevées de plus de
deux pouces & demi; à fon bec court,
noir & crochu ; à fes grands yeux fixes
& tranfparens ; à fes larges prunelles
noires & environnées d'un cercle de
couleur orangée ; à fa face entourée de
poils, ou plutôt de pentes plumes blan-^
ches & décompoiées qui aboutiOent à.
une circonférence d'autres petiiCo piume^
ftiféesj à fes ongles noirs /très- fon|j|
in Duc Giï grand Duc. i z^
,èi. très-crochus ; à Ton cou très -court,
à Ton plumage d'un roux brun taché
de noir & de jaune fiir le dos j & de
jaune fur le ventre ^ marqué de taches
noires . & traverfé de quelques bandes
brunes mêlées allez confufément ; à lès
pieds couverts d'un duvet épais &. de
plumes rouiTâtres jufqu'aux ongles (b);
^nfiïi à Ton cri effrayant (c) hû'ihôu,
(h) Nota, La femcîfe ne diffère du mâîe,^
^ t^tVi ce que les plumes fur le corps , les ailes &
I la queue , font d'une couleur plus f ombre.
i (c) Voici ce que rapporte M . Frifch au fujet
j des différens cris du Puhii, Schuffut , ou Grand
I Vue , qu'il a long - ternps gardé vivant : lorfqu'iï
avoit faim, dit cet Auteur, il formoit un (on
i allez fcmbiable à celui qui exprime fon nom (en
I Aiiemand, Puhu) Pi7«/^£?«; ïorfqu'il entendoit îoufe
ou cracher un vieillard , il commençoit très-hauÊ
£c très-fort, à peu-près du ton d'un payfan ivre
qui éclate en riant , & il faifoit durer Ton cri
Oiihou ou Pouhou, autant qu'il pou voit être de
temps fans reprendre haleine ; il m'a paru , ajout-e
M. Frirch , que cela arrivoit lorfqu'iï étoit en
i amour , & qu'il prenoit ce bruit qu'un homme
fait en touflant , pour le cri de fa femelle : mais
quand il crie par angoiffe ou de peur, c'eft tirs
: cri très-défagréable > très -fort &. cependant alTez
' femblable à celui des oifeaux de proie diurnes,
-: Traduit de l'Allemand de Frifch , article du Buh§
i m Grand Duc*
Iwuliûu , houhôu , pouhôu , qu'il {'?àt y H
teniir dans le filence de la nuit, lorfque
tous les autres animaux fe taifent; 6c
c'efl alors qu'il les éveille , les' inquiète ,
ies pourfuit & les enlève , ou les met
à mort pour les de'pecer & les emporter
dans les cavernes qui lui fervent de
retraite; auffi n'habite -t-il que les ro-
.chers ou les vieilles tours abandonne'es
<& fituées au-deffus des montagnes : iî
defcend rarement dans les plaines, ^
aie le perche pas volontiers fur les
arbres , mais fur les égliies écartées <Sc.
fur les vieux châteaux. Sa chafTela pluS!
ordinaire, font les jeunes lièvres, ie$i
iapins , les taupes , les mulots , les fou ris j
qu'il avale tout entières, & dont il digérée
la fubftance charnue , vomit le poil ^4^ ^j
(d) J'ai eu deux fois, dit M. Frifch, des grandtS^
Ducs vivans, &: je les ai ccnfervés iong-temps; jec
les nourrilTois de chair & de foie de bœuf, doiùi
Ils ava'oienî foavent de fort gros morceaux j Ior(--
qu'on jetoit des fouris à cet oifeau , ii leur brifoitf
les côtes (Se les autres os avec fon bec , puis il les.
avaloît l'une après l'autre , quelquefois jufqu'à cinq \
4e fuite ; au bout de quelques heures , les poils ;
& les os fe radembloîent , fe pelotonnoient dans
fon eftomac par petites mafles , après quoi il les
îFan^enoît en haut, 6: ies rejetoiï par le becj ay|J
du Duc ou grdrîJ Diià t i y
îes os & ia peau en peîottes arrondies ^
ril mange auilî les chauve- fburis, ics
jièrpens, les ie'zards, les crapauds, leS
iigreiîouiiles , ôl en nourrit fes petits : if
;ehafle alors avec tant d'adiyité , que foit
[nid regorge de provifioni ; il en raiïein-
?'l)Ie plus qu'aucun autre oifeau de proie.
' On o;arde ces oiieaux dans les
[me'nagerics à caufe de leur figure fin-
^uiière ; i'eipèce n'en eil pas auflî
Jnombreufe en France que ceiie des
^autres hiboux, & il n'eft pas fiar qu'iis
:rell:ent au pays toute l'année , ils y ni-
'chent cependant quelquefois fi-ir (10.9
'arbres creux , & plus fouvent dans des
tavernes de rochers , ou dans des trouS'
'de hautes & vieilles murailles ; leur nid
^ près de trois pieds de diamètre, &
déf ut d'autre pâture , il mangeoit toute forte de-
poiifons de rivière , petits & moyens , & après*
avoir de même brifé & pelotonné les arêtes dans
fon eftomac, il les ramenoit ie long de fon coUj^-
&' (es rejetoit par fe bec : ii ne voufoit point du'
tout boire, ce que j'ai obfervé de même de que-ques-
oifeaux de proie diurnes. Nota, Qu'à îa vérité ces^
sifeaux peuvent fe paffer de boire , mais que ce-
pendant , qunnd ils font à portée , ils boivent , m^
S cachant-, Vo}'eiJur cchl'artick du jean-ie-blanc^-
12 6 Hipoire Naturelle
eft compofe de petites branches de borsi||'
ièc enirel.ilîées de racines rou{)les, &
garni de feuilles en dedans/, on ne<
trouve fouvent qu'un œuf ou deux^
dans ce nid, & rarement trois ;. la cou-
leur de ces œufs tire un peu fur celiez
du plumage de l'oifeau ; leur grofleur i
excido. ceile des (xixîs de poule: les;
petits font irès-voraces , & les pères &<
mères très -habiles à la chaffe cju'ils font i
dans le filence , & avec beaucoup j:)Ius i
de légèreté que leur groiïe corpuiancejL
ne paroît ie permettre; fouvent ils iek
battent avec les bufes, & font ordi-:
nairement les plus forts & ies maîtres
de la proie cju'iis leur enlèvent; ilsi
fupportent plus allument la lumière duj:
jour que les autres oiieaux de nuit ^
car ils fortent de meilleure heure ie foir
& rentrent plus tard le matin; on voit
quelquefois le duc affaiili par des troupes i
de corneilles qui le fuivem au vol & c
l'environnent par milliers; il foutient i
leur choc (e), pouffe des cris plus forts j
(e) Fortîjfimd avis fap'ius valde tumuhuatur imer^ f
mlknarii numeri comicest Klein, Avit pag. 54. &;!
(uîvjintes, •!
y// Duc ou ^mnd Duc. 1 27
tiu'elies, & finit par ies difperfcr, <5c
,fouvent par en prendre quelqu'une
ilorfque la lumière du jour baifle ; quoi-
i qu'ils aient les ailes plus courtes que la
, plupart des oil'eaux. de haut vol , ils ne
ilainènt pas de s'élever jiffez haut, fur-
I tout à l'heure du crépu feu le ; mais or-
idinairement ils ne volent que bas & à
[de petites diftances dans les autres heures
\ du jour : on fe iert du duc dans la
i fauconnerie pour attirer le milan; on
i attache au duc une queue de renard,
I pour rendre la figure encore plus ex-.
\ Uaord inaire ; il voie à fleur de terre , &
ife poie dans la campagne, fans fe per-
cher fur aucun arbre , le m.ilan qui
(l'aperçoit de loin , arrive & s'approche
du duc , non pas pour ie combattre ou
l'attaquer , mais comme pour l'admirer y
& ii fe tient auprès de lui afTez long-
j temps pour fe îaifier tirer par le chai-
: ieur , ou prendre par les oifeaux de
j proie qu'on lâche à (a pourluite : la
i plupart des faifuidiers tiennent aufîi dans
leur faifanderie un duc qu'ils mettent
'toujours en cage fur des juchoirs dans
un lieu découvert; afin que les corbeaux
F iiij
fï 2 8 'Hïfloire Naturelle
êL les corneilles s'aiïembient autour Je
ïui, & qu'on puifTe tirer & tuer un plus
grand nombre de ces oifeaux criards
qui inquiètent beaucoup leâ jeunes
failans; & pour ne pas effrayer les fai-
fans, on tire ies corneilles avec une
farbacane (fj.
On a obferve' à l'égard des parties
intérieures de cet oifeau qu'il a la langue
courte &. afTez large, reftomac très-
ample , l'œil enfermé dans une tunique
cartiiagineufe en forme de capfule , &
ie cerveau recouvert d'une fimple tu-
nique plus épaiife que celle des autres
oifeaux , qui comme les animaux qua-
drupèdes 5 ont deux membranes qul^
recouvrent la cervelle (^gj.
Il paroît qu'il y a dans cette efpèce
une première variété qui femble ex%
(f) Voyez Frifch , à l'article du Grand Duc*
(g) Vide Schwenckfeld , Theriotrop, SU. pagi.
^o8. Nota. Ceux qui voudront avoir àts cou-
ïioifTances exades fur ia ftrudure àts parties in-
* lérieures des oifeaux de ce genre , ies trouveronl-
dans les ^obfervations 51 & 52 de Jean de Ma-
raîto. Ephémérides des Curieux de la Nature , aunes
\j 682. ; & Coll, Acad, paru étrangère, tomç IIÏ ^
j^ages ^7^ a^ ^75,.
«^// Duc ou grand Duc. î^^
ï^nfermer une féconde ; toutes deux ie
trouvent en Italie , & ont été indique'es
j par Aldrovande , on peut appeler l'un
le duc aux ailes noires (h), &: le fécond
le duc aux pieds mis (ï); le premier ne
diffère en effet du grand duc commun
que par les couleurs qunl a pïus brunes
\ ou plus noires liir les ailes , le dos &:
la queue , 6c le fécond qui reiïeinbfe
en entier à celui-ci par ces couleurs
' plus noires , n'en difîère que par h
: jMudité des jambes & des pieds qui font
très-peu fournis déplumes; ils ont âullx
tous deux les jambes plus menu-ts &
i.Hioins forces que le duc coiraîiiuio
Indépendamment de' ces deux va^»
nétés qui le trouvent dans nos climats ^
îî y en a d'autres dans des climats p!us
: éioiscnés : le duc blanc de LaDDonie ,
(h) Bulo nojler, AiJrov. Avi» tom. î, -pv.gi-
■50 S. — Grand duc aux ailes noïres. k\h\n ^,
tome JII, page ^, — Le grand duc d'Italie. Brllîon,
lomt I, page ^82, — Le grand hibou CGma d'A-
thènes. Edwards, Glanures , page 3 •7, pUncFae
ccxxvii.
- _ ( i) Bulo mP.er. Afdrov. Avl ton?, \ , pagi-
'508. — Le grand duc dé<lîaufîë. Briffon ^ ^mrlt
X f
'ï '3 o Hifloire Naturelle
marqué de taches noires , qu'indique
Liniiœus (k), ne paroît être qu'une
variété produite par le froid du Nord ;
on fliit que la plupart des anii-naux qua-
drupèdes font naturellement blancs ou
îe deviennent dans les pays très-froids ;
il en efl: de même d'un grand nombre
d'oifeaux : celui-ci qu'on trouve dans
ies montagnes de Lapponie efl blanc,
taché de noir; & ne diffère que par
celte couleur du grand duc commun ;
ainfi on peut le rapporter à cette efpècc
comme ifimple variété.
Comme cet oifeau craint peu îe
chaud , & ne craint pas le froid , on le
trouve également dans les deux con-
îinens au Nord & au Midi, &: non-
ièuîemem on y trouve l'elpèce même,
mais encore ies variétés de i'efpèce :
i,e jacurutu du Brefii (IJ, décrit par
(k) Strix cafite auriw , corpon alhtJo. LinnseU5,
'Faun, Suec, numéro 46. — Le grand duc àt
Lapponie. BriiToa, tome 1, page ^86,
( l) Jacurutu Brafillenfibus , Bufo Lujithamî
tiodua eji magnnudine aquat anfcns : cûput habet
ronmdwn injîur felis : rofirum admcum nigrwn , fu-
du Duc ou grand Duc. î j t;
^arcgrave ; efl: ablolument le même
oiieau que notre grand duc commun ;
celui qui nous a eié apporté des terres
Alagellaniques *, ne diffère pas afTez
du grand duc d'Europe pour en faire
une efpèce féparée; celui qui efl: indiqué
par l'Auieur du voyagera ia baie de Hud-
ion , fous le nom de hibou couronné (m) ,
ÔL par M. Edwards, fous le nom de duc
iy fpleniîcntes ini'Jar cryjlalll , in quthits imerlas dr-
culus jîayns verjus extrcwa apparet ; Ltitwio oculomm
aliqnamo mdjor gro^fo mifnico ; prope aurium foramina
ylwnas hahci duos dighos Ltngas, qua inflar aurium
in acutum definunt & attoHuntur .• cauda lata eji ,
neque alcz pertingmn ad Ulius extremitatmi : cyura
pciinis vifiita ufque ad pedcs, in niàhus quatuor digiti,
nés anterins , iinus pojîerivs ver fus, ntquc in quolibet
nnguis incurvants t niger , pkjquam digitum longus iT"
acutijpmus ; penna totivs corporis varie gant ur e flavo,
clho & nigrkante yerckganter, Marcg. ////?. natt
BrafiL pag. 199.
* F^'f^ Je s planches enlumïne'es, n,*' 3 85.
(m) Le arancl hibou couronné efl fort commun
dans les terres voifiiies de ia baie de Hudion ; cefi
un oifeau fort finguiier, & dont la tête n'efl: guère
plus petite que celle d'un chat ; ce qu'on appelle
fcs cornes, font des pi urnes qui ^élèvent pré ctjémem
/lu-dt^us du bec, où elles font ■ mêlées de blanc,
devenant peu à peu d'un rouge-brun marqueté de
noir, Vcj/oge de (a baie de. Hudjon, lome I , page ^ j .^
F vj
[ï^i 'Hîjtolre NatureBe
de Virginie (nj, font des variétés qui fg
Si-ouvent en Amérique les mêmes qu'en
/«/« Getoifeau, dit M. Edwards', efî de fa-
80 plus grande efpèce àts hiboux, & très-approchans
5» de ia grandeur du hibou cornu, que nous ap-
5> peions hibou aigle (grand duc); fa tête eft aufii
:>» grofTe que ceiie d'un chat ie bec efl noir^
» ia mandibule Tupérieure en eft crochue & fur-
» paflè la mandibule inférieure comnfe dans les
3> aigles ; il eft recouvert d'une peau dans laquelle
5» font placées les narines , &. qui eft recouverte à
3> la bafe par de^ plumes grifes qui environnent le
3> htç; les yeux font grands, & l'iris en eft brillante
3> & couleur d'or Les }jlun:cs qui compofent-
3) /(fj cornes , p'ennent leur naij/ance immédiateme-nt
S) au'deffiis du bec , où elles font mélangées d'un
3J peu de blanc; mais à mefure qu'elles s'élèvent
2> au-deflus de la tête, elles deviennent dun rouge»
» brun & fe terminent par du noir au dehors ;
>j le deffus de la tête , du cou , du dos , àts ailes
5> & de la queue, font d'un brun obfcur, taché
3> & entre - mêlé aiïez confufément de petites lignes
5> tranfverfales rougeâtres & cendrées. . » , . le haut
s> de la gorge, fous ie htc, t?i blanc ; un peu plus
•» bas , jaune-orangé , taché de noir ; le bas de la-
9> poitrine, le ventre, les jambes & le delTous de:
» la queue efi blanc ou d'un gris-paie , alTez régu-
» lièrement traverlë de barres brunes ; ie dedans ■
3> d&s ailes eft varié & coloré de la même façon ,
s> les pieds font couverts , jufqu'aux ongles , de
3> plumes d'un gris-blanc , & les ongles font d'une
?> couleur de corne brune & foncée : j'ai deffiné j
^ ajoute M» Edwards^ çcî oiCeau vivant à l^nàx^^.
'du Duc ou grand Duc. r 3 31
îurope ; car la différence la plus re-
inarquable qu'il y ait entre le duc
commun & ie duc de la baie de
I ludion (Se de Virginie, c'cfl: que les
aigrcucs partent du bec au lieu de partir
des oreilles. Or on peut voir de même
dans les figures des trois ducs, données'
par Aldrovande, c[u'il n'y a que le
premier, c'eft-à- dire , le duc commun
dont les aigrettes partent des oreilles ^
& que dans les autres , qui néanmoins
font des variétés qui fe trouvent en
Italie , les plumes des aigrettes ne partent
pas des oreilles, mais de la bafe du
où il étoit venu de Virginie : j'en ai chez moi «
ia dépoui<le d'un autre qui eft empaiiié, & qui «■
a éié apporté de ia baie de HuJron ; il m'a «
paru qu'il étjit de la même efpèce .que le «
premier, étant de la même grandeur & n'en <«•
différant que par quelques nuances de couleur »'
Je ne ferai qu'une réflexion fur cette dclcription
dont je viens de donner la tradudion par extrait ,
c'ell; qu'il n'y a que le caradère àti aigrettes partanS'
du bec, & non pas des oreilie5, qui puilTe faire re-
garder cet oifeau d'Amérique comme iaifant une
variété confiante dnns i'efpèce du grand duc ; &
que cette variété fe trouvant en Europe auffi- bien
qu'en Amérique, elle eft non-feulement confiantej
; mais générale , & fait une branche particulière ^
jLine famille différente dans cette efpèce<
Ï34 Hïfioire Naturelle, &c:
bec , comme dans le duc de Viro-inîe ,
décrit par M. Edwards : il me paroît
donc que M. Klein a prononcé trop
légèrement, iorfqu'ila dit que te grand
duc de Virginie étoit d'une elpèce
toute différente de i'efpèce d'Europe ,
parce que les aigrettes partent du bec ,
au lieu que celles de notre duc partent ^
des oreilles; s^ii eût comparé les figures %
d'AIdrovande & celles de M. Edwards,
il eût reconnu que cette même diffé-
rence, qui ne fait qu'une variété, fe
trouve en Italie comme en Virginie, ëc
qu'en général les aigrettes dans ce^ oi-
fèaux ne partent pas préciiément du bord
des oreilles, mais plutôt du deffus des
yeux &, des parties fupérieures à la bafe
du bec.
^
#
^<êf^
n.
M. 7I[I.fUN/.z34.
LE &RA:>J^r) DUC
135'
LE HIBOU (a)
ou
MOYEN DU C^,
Voyei la flanche ix de ce yolume<,
!■
! JLi E Hibou , Otus ou moyen Duc ,
! a , comme le grand duc , ies oreiiles
^ * Voyei les planches enluminées, n.°' z^if 473 »
(a) En Grec , D^'jtç ; en Latin , Afio ou Otus;
' en Italien , Gufo , Barhagianni ; en Efpagnoî ,'
j Mochuelo ; en Allemand, Orheule ou Rmtieule i
Ohrreuti^, Kauiijem ; en Polonois , Cluk - noaiy ou.
Sowa-urfaîa; en Suédois,, Hern-ugJa; en Angloisj^
Hom-owl ; on l'appelle en quelques endroits, Chm-
huant cornu ; en Bourgogne , Chov.e Comerote ; en
î Gafcogne , Ducquet , c'eft-à-dire , Petit Duc ; en
i Sologne , Chat-huant de bruyères , parce qu'il fe
I tient dans les landes & bruyères; en Anjou & en
j "Bretagne, Chouant ; & dans quelques autres endroiiS
i Clouc'.et , à caufe de Ton cri clôû , clôûd. — Afw»
Gefner, Avi. pag. 223.... Oius. Idem , pag. 6 3 ^i
— Moyen Duc ou Hibou cornu. Beîon, Hifl. nait
'des Oijeaux , page 137. — Grand Duc. Albin,
i^me 1 f page â , plmck X ^ ayeç une figuie
r:^3^ Hijhlre Isciturée
&rt ouvertes, & furmontées d'une a!^
grette compofée de fix plumes tournées
en avant (b); mais ces aigrettes font
plus courtes que cdfes du grand duc ^
& n'ont guère plus d'un pouce de lon-
gueur, eiles paroillent proportionnées
à là taiîle, car il ne pèfe qu'environ
^\^ onces , 6c n'efi: pas plus gros qu'une r*
corneille ; ii forme donc une efpèce |
évidemment différente de ceiie du grand
duc, qui e(t gros comme une oie, &
de celie du Scops ou petit duc , qui
îî'efi: pas plus grand qu'un merle , &
qui n'a au-deiïus des oreilles que des
aigrettes très-courtes. Je fais cette re-
i^arque , parce qu'il y a des Naturaliftes^
qui n'ont regardé le moyen & le petit
eoîoriée. — ' N^diia m'imr mrnta, Scops. Frifch ;-
-planche X c I X , a^'ec une figure coloriée. — Le-
moyen Duc ouïe Hibou. BrilTon , Ornithologie,.-
tome r, page 4,80. — The long Eand owL Lej
Hibou à longues oreilles. Britifch Zoology , FlJ
(h) Notdo Aldrovandle dit avoir obfervé quel
c-naque plume auricukire qui compofe l'aigretre j.|
peut ie mouvoir féparément , & que la peau qurî
pecou'/ra la cavité ues oreilles naît dç la partie iiy
ff rieure la pias yoJHnf df rgep5
"du Hthoîi ou nwyen Duc. 1 3 7
Juc , que comme de fimples varie'tés-
d'une feule & même efiDèce : le moyen:
duc a environ un pied de longueur de
eorps, depuis îe bout du bec jufqu'aux
ongles, trois pieds de vol ou d'enver-
gure , & cinq ou fix pouces de ion^
gLieur de queue; il a le defTus delà
îéic, du cou , du dos de des ailes raye's
de gris , de roux.&: de brun; la poitrine
& le ventre font roux, avec des bandes
brunes irregulières & étroites ; le h^c eHi
court &: noirâtre , les yeux font d'un
beau jaune, les pieds font couverts de
plumes roufTes jufqu'à l'origine des
ongles, qui font afTez grands & d'un?
i)run noirâtre ; on peut oblerver de plus-
qu'il a la langue charnue & un peu
fourchue, les ongles très-aigus & très-
îranchans, le doigt extérieur mobile,
& pouvant fe tourner en arrière , i'ef-
tomac afîez ample , la véficule du fiel
très-grande , les boyaux longs d'en-
jjViron vingt pouces , les deux cœcum de
Meux pouces & demi de profondeur,
idc plus gros à proportion que dans les
jautres oiieaux de proie. L'efpèce en effc
fiCOiiimuae & beaucoup plus noinbreufe
ï 3 8 Hiflolre Naturelle
«dans nos dunats (c), que celle du gmnd
duc , qu'on n'y rencontre que rareiiienc
en hivet; au lieu que le moyen duc
y refle toute l'année, & ^le trouve^
même plus airément en hiver qu'eiiii
été : il habite ordinairement dans les»
anciens bâdmens ruinés , dans les ca-.-
vernes des rochers (d), dans le creux:
des vieux arbres , dans les forêts en i
montagnes, & ne defcend guère dans.
les plaines; îorfque d'autres oi féaux l'at-
taquent , il fe fert très - bien , & des
griffes & du bec ; il fe retourne auilî
fur le dos , pour fe deTendre , quand il
efl afîàiiii par un ennemi trop fort. i
Il par oit que cet oifeau , qui elli
commun dans nos provinces d'Europe,!,
le trouve auiîi en A fie ; car Belon dit
en avoir rencontré un dans les plaines
de Ciiicie.
(c) Nota, II efl plus commun en France & en
îtaiie qu'en Analeterre. On le trouve très - fré-
quemment en Bourgogne, en Champagne, eiî
Sologne & dans ies montagnes de l'Auvergne.
(dj Sîn il Gufù ntlk grotte, per îe bûche degJl
alhcri , mUantrlngUe o crtpature di mûri e tetti dt
café dijabitate , ne dirupi e luoghi ère mi, Oiina.
UccelUr, fog. 5 6.
iu Hîhoti OU moyen Duc. r jp'
II y a dans cette efpcce pîuricurs
variétés dont la première le trouve en
Italie, (k a été indiquée par Aidro-
;:vande; ce hibou d'Italie ell plus gros
[que le. hibou commun, *Sw en diffère
auïîi par les couleurs : voyez & com-
parez les dcfcripiions qu'il a laites de
Tun & de 1 autre, (e) .
Ces oileaux fe donnent rarement îa
peine de faire un nid , ou (e l'épargnent
1 en entier : car tous ies œufs & ies
[ petits qu'on m'a apportés , ont toujours
été trouvés dans des nids étrangers ,
fouvent dans des nids de pies , qui ,
' comme i'on fait , abandonnent chaque
i année leur nid , pour en fiire un nou-
veau ; quelquefois dans des nids de
butes , mais jamais on n'a pu me
trouver un nid conftruit par un hibou :
ils pondent ordinairement quatre ou
cinq œufs , & leurs petits qui font
blancs en naiflant, prennent des cou-
leurs au bout de quinze jours.
Comme ce hibou n'efl pas fort
fenfible au froid , qu'il pafTe l'hiver
dans notre pays , & qu'on le trouve
(e) Aldroy, AvU tom, I, pag. 519,
I
lï^o Hïfmlre Naturelle
en Suède comme en France 0, iî
pu palier d'un continent à l'autre;
par oit qu'on le retrouve en Canada de-
dans plufieurs autres endroits de l'Amé-
rique feptentrionale Cg); ii fe pourroit
même que le hibou de la Caroline décrit
(f) Strix capite aurlio , pènjiisfex* Linn. Faun^,
'Suec. n.° 4,7. .
(g ) Nota, i.° C'eft au hibou commun ou'"*'
îïioyen duc qu'il faut appliquer le pafTage fuivant.
« On entend durant ia nuit, prefque dans toutes
5> nos îles , une forte de chat- huant qu'on appelle'
» canot , qui jette un cri lugubre , comme quF
» crieroit au canot, ce qui lui a fait porter ce
» nom ; ces oifeaux ne font pas plus gros que des'
2» tourterelles , mais ils font tout femblables en leur
2> plumage aux hiboux que nous voyons commu-
3» nément en France ; ils ont deux ou trois petites-
2J plumés aux deux côtés de la tête , qui femblenr
» être des oreilles : ils fe rafîemblent quelquefois
» fept ou huit de ces oifeaux au-deffus àçs toits j-
ou ils ne ceiïènî de crier pendant toute la nuit »,'
jShta, %.° Par ia comparaifon de la grandeur de cg'
hibou avec une tourterelle, il femlieroit que c'efi
îe fcops ou petit duc; mais s'il a, comme le dit
l'Auteur , plufieurs plumes éminentes aux côtés de
h. tête, ce ne peut être qu'une variété de i'efpèce
du moyen duc. Ce même Auteur ajoute que le
chat-huant Canadien n'a de différence du François,
qu'une petite fraife blanche autour du cou & un
cri particulier. Hifloire de la nmvelk France }'ar;
Çharkvoix y tmi lU , V^i^k^ï
I2u Hihou ou moyen Duc, 1 4T1
ïp^r Catefby (h), & celui de l'Ame-
iique méridionale , indiqué par le Père
j Feuillée fi) , ne fuflent que des variétés
de notre hibou, produiies par la diffé-
rence des climats, d'autant qu'ils font
à très-peu près de la mçme grandeur,
&: qu'ils ne diffèrent que par les nuances
ôi la diflribution des couleurs.
On fe fert du hibou & du chat-
huant (k)i pour attirer les oifeaux à la
(h) Voyez la defcriptîon & la figure coloriée de
cet oifeau dans l'Hiltoice Natureile de la Caroline^;
:ar C:ilQ\hY , pi^ge j, planche VII.
(ï) Buho ocro-cinereus peéîore nmcnhfo, Feuillée l
Ohfir. Phyfi(]. pag. j^, avec une figure, jyotû. Il
:')aroît qu'on peut rapporter à ce hibou de l'Amé-
!-iqus méridionale, indiqué par le Père Feuillée,'
relui dont Ferjriandès fait mention fous le nom de
Tccohlt, qui fe trouve au Mexique & à la nouvelle
L'>»?.gne ; mais ceci n'eft qu'une vraifemblanca
"ondée fur les rapports de grandeur &: de climat,'
:ar Fernandss n'a donné non - feulement aucune
fif^ure des oifeaux dont il parle, mais même aucune
dcfcription afi!ez détaillée pour qu'on puifTe le re^
connoître.
'k) h Gkfo ah'dmeme Barlagtdmï ucceUacdo^not^
■j ïn forma di civetta (chat-huant) grofo quantê'
•m gaÙina, con le penne dal lato del capo che pmoit
:/.;; comcine, di color gialb. mejlicafù con profilnturéL
di :icro, Cou ^uejio Jucçella a anlmali grojjt çotne c0f^
I
14^ Hijlohe Nûîurelk
pipée, & l'on a remarqué que les gros
oiieaux viennent plus volontiers à la voix
du hibou , qui eit une efpèce de cri
plaintif ou de géniifTenient grave &
alongé côîvl, clôûd, qu'il ne' cefTe de
jépéter pendant la nuit, & que les petits
oiiëaux viennent en plus grand noPxibre
à celle du chat- huant qui efl une voix
Jiaute, une efpèce d'appel hohô , hohô :
îous deux font pendant le jour des geftes
ridicules & bouffons en préfence des
îiommes & d^s autres oifeaux. Arifloie
n'attribue c&ixc efpèce de talent ou de
propriété qu'au hibou ou moyen duc,
ctus ; Pline la donne au fcops , & ap-
pelle ces gefles bizarres , motus fatyricos;
mais ce Icops de Pline elt le même
oifèau que Voîos d'Arijflote ; car les La-
îins çonfondoient lous le même nom
icops, Yotos & le y?^';?^ des Grecs, ie
moyen duc & le petit duc qu'ils réu-
jiiil oient fous une feule efpèce , & fous
le même nom , en le contentant d'aver-î-
tir qu'il exiiloit néanmoins des grands
£cops & dt$ petits..
cornachk e nihlii con h cîveita a uçcdkîti d^ognl^
^m» plina, Uceller* fog, ^6,,
<^// Hîlon où moycli Duc. 143^
C'eiT: en cfîet au hiboni , otus , ou
moyen duc, qu'il finit principalement
appliquer ce que difent les Anciens de
ces geftes bouffons & inouvemcns faty-
riques ; ôl comme de très-habiies Phy-
ficiens'ôc Naturaliftes ont prétendu que
ce n'étoit point au hibdu, mais à un
autre oiieau d'un genre tout différent,
qu'on appelle la demoifelle de JSumidïe ,
qu'il faut rapporter ces pajfîages des
Anciens, nous ne pouvons nous dii^
penfer de difcuter ici cette queftion, &
de relever cette erreur.
, Ce lont M/' les Anatomifîes de
l'Académie des Sciences, qui dans la d^Ç-
cription qu'ils nous ont donnée de la
jdemoifelle de Numidie , ont voulu établir
pette opinion ôl s'exprimer dans les
;ermes ùiivans. ce L'oileau (difent-iis)
que nous décrivons efl appelé demoï- ce
^elle de Numïdie , parce qu'il vient de ce
cette province d'Afrique , & qu'il a <c
certaines façons par le i quelles on a <c
trouvé qu'il (embioit iniiier les gefles ce
d'une femme qui affecfle de la grâce «
dsms ion port & dans Ion marcher, se
piirembIetçjiirfouvçnt^ueI(^ue choie «;
[1^4* JJifloire NatnreÏÏe
de la danfe : il y a plus de deu^sf
mille aiis que les Naturaliftes qui ont
parle de cet oifèau , i'ont défigné par
cette particularité de l'imitation des
geftes & des contenances de la femme.
Ariftote lui a donné le nom de ba-^
teleur,àz danfeur & de bouffon, contre-
faifant ce qu'ii voit faire. ..... lî
y a apparence que cet oifèau danfeur
& bouiîbn étoit rar^ parmi les An-
ciens , parce que Pline croit qu'il eft
fabuleux , en mettant cet animal qu'il
appelle fatyrique au lang des pégaiès,,
é^s griffons & des firènes , iî eft en-
core croyable qu'il a été jufqu'ài
préfent inconnu aux Modernes, puif-
qu'ils n'en ont point parlé comme;
l'ayant vu , mais feulement comme;
ayant iû dans ies écrits des Anciens,^
la defcription d'un oifeau appelé y?^^ji
& otus, par les Grecs , & afio par leS:
Latins, à qui ils avoient donné ie:
nom de danfeur, de bateleur & dei
comédien , de forte qu'ii s'agit de voir
il notre demoifelie de Numidie peut,
paffer pour le fcops & pour Voîus des
n Anciens; la defcription qu'il noes,
i/// Hihou ou moyen Duc. i^f
ont laifTée de Yeîus ou fcops, confifle ce
en trois particularités remarquables. . . ce
la première ell: d'imiter les gelles. ... ce
la féconde ell: d'avoir des éminences ce
de plumes aux deux côtés de la tête , ce
en forme d'oreiiîcs. . .*. & la troiiicme ce
cft la couleur du plumage , qu'A- ce
lexandre Myndien , dans Athénée , ce
<iit être de couleur cie plomb : or la ce
demoifelle de Numidie a ces trois at- ce
tributs, & Ariftote femble avoir voulu ce
exprimer leur manière de danfer , ce
qui eft de fauter l'une devant l'autre , ce
lorfqu'il dit qu'on les prend quand ce
^lles danfent l'une contre l'autre. Be- ce
ion croit néanmoins que Votus d'A- <x.
riftote eft le hibou , par la feule raifon ce
que cet oifeau , à ce qu'il dit , fait oc
beaucoup de mines avec la tête ; la ce
plupart des Interprètes d'Ariflote , qui ce
font aufîi de notre opinion , fe fon- te
dent fur le nom à'otus , qui fignifie , ce
ayant des oreilles ; mais ces elpèces ce
d'oreilles dans ces oifeaux ne font pas ce
îout-à-fait particulières au hibou , & ce
Ariftote fait afTez voir que Votus n'eft ce
pas le hibou , quand il dit que Votus çç.
0 Ifs aux , To-m IL Q
:"I46 hijloire Naturelle
:>o reiïembie au hibou , & il y a appn-
53 rence que cette relTeinblance ne con-
33 fide que dans ces oreiiles : toutes les
» demoilelles de Nun:iidie que nous
>5 ayons diiréquées , avoieiit aux côtés
^3 des oreiiles , ces plumes qui ont
33 donné le nom à i'otus des Anciens...
:>3 Leur plumage étoiî d'un gris-cendré,
:>3 tel qu'ii eil décrit par Alexandre
Myndien àansïotus :>3.
Comparons maintenant ce qu'Ariflote
dit de Votus, avec ce qu'en difeiit ici iM./^
de i' Académie : otus noéluœ fimilis eft ,
plnnulis circiter aurts eminentlbus prœditus,
unde nomen accepït , quafi aurïtum dïcas ;
nomulli eum ululam oppeîlant , alii afio-
neriîe B.latero h'ic ejî , é^ hallucinator if
flanîpes ^ faltantes enbn imîtatur, Capitur
intentas in altero aucupe, altero cîrcumeunîe
ut noâuM. Uotus , c'ell:-à-dire ie hibou
ou moyen duc eil femblable au noflua ,
c'eft-à-dire au chat-huant ; ils font en
effet femblables , foit par la grandeur ,
foit par le plumage , foit par toutes les
habitudes naturelles : tous deux ils font
oifeaux de nuit, tous deux du même
genre & d'une efpècç très-Yoifme^ au
(la Hthoîi on moyen Duc. T 4.7
lieu que ia deinoilcHe de Numidic elt
iix fois plus grolle & plus grande ,
d'une forme toute dliicrcnte , îk. d'un
genre rrcs-éioigné , &: qu'elle n'efl point
dij nombre des oifeaux de nuit ; ïotus
ne diffère , pour aiafi dire , à\\ noélua ,
que par les aigrettes de plumes qu'il
porte fur ia tête auprès des oreilles ,
& c'efl pour dillinguer l'une de l'autre,
qu'A riftote dit , pumul^s dr citer auresi
eminetitïbus prœditus , imde nomen accepit^
qiiafi auritum dicas. Ce iont des petites
plumes, pinnulœ , qui s'élèvent droites
& en ai2:rettes auprès des oreilles , circïter
aures eminentilnis , & non pas de longues
plumes qui ie rabattent & qui pendent
de chaque côté de ia tête , comme dans
la demoi(elle de Numidie ; ce n'efl
donc pas de cet oileau , qui n'a point
d'aigrettes ^ plumes releve'es & en forme
d'oreilles ,' qu'a été tiré îe nom. de otus »
quafi aurïtus ; c'efl au contraire du hibou
qu'on pourroiî appeler noâua aurita ,
que vient évidemment ce nom , & ce
qui achève de le démontrer , c'eil ce
qui fuit immédiatement dans Ariflote,
nonnullï eum (otum) ululam appellant , cdïï
[148' 'HiJIohe Naturelle
ûfionem. C'eft donc un oifeau du genre
des hiboux & des chouettes, puiTque
quelques-uns lui donnoient ces noms j
ce n'eli donc point la demoifelle de
Numidie aufïï difFérente de tous ces
pifeaux , qu'un dindon peut l'être d'un
épervler. Rien, à mon avis, n'eft donc
plus mal fondé , que tous ces prétendus
rapports que l'on a voulu établir entre
Voîus des Anciens , &: i'oifeau appelé
demoifelle de Nu?nidïe , & l'on voit bien
que tout cela ne porte que fur les
gedes & les mouvemens ridicules que
fe donne la demoifelle de Numidie ;
elle a en effet ces geftes bien fupé-
rieurement au hibou , mais cela n'em-
pêche pas que celui-ci, aufîî-bieii
que la plupart des oifeaux de nuit ,
ne foit hlatero , bavard ou criard ( l);
' hallucmator , fe contrefaifant ; planipes >
bouffon. Ce n'efl encore qu'au hibou
(l) M. Frifcïi , en parlant de ce hibou, dit
quefon cri eft très-frécjuent & fort, qu'ii reffemble
aux huées des enfans iorfquils pourfuivent quel-
qu'un dont ils fe moquent; que cependant ce cri.
cft commun à plufieurs efpèces de chouettes. VoviT
Frifch , à l'article des Oifeaux nodurnes.
du Hïhou ou moyen Duc, i ^cji
qu'on peut attribuer de le iaiiïer prendre
ttuûi aîfëment que les autres chouettes ,»
comme le dit Aridote, &c. Je pourrois
ui'ctendre encore pius fur cette criti-
que,, en expolant & comparant ce que
dit Pline à ce fujet ; mais en voilà plus?
qu'il n'en faut pour mettre la chofe
hors de doute , ù. pour afTurer que
Yotos^ des Grecs n'a jamais pu défigner
la demoiielle de Nimiidie , & ne peut,
s'appliquer qu'à i'oifeau de nuit , auquel
nous donnons le nom de /iii?au ou moyeri
duc : j'obTerverai feulement que tous-
ces m ou ve mens bouffons ou fatyrïques
attribue's au hibou par les Anciens, ap-
partiennent aufli à preique tous les oi-
féaux de nuit (m) , Sl que dans le fait ils fe'
réduiient à une contenance étonnée , à
de fréquens tournemens de cou , à des
înouvemens de tête , en haut ^ en ba^
('mj Tous les hiboux peuvent tourner leur tête-
Comme i'oifeau appelé to7-coL Si quelque chofe d'ex-
traordinaire arrive , ils ouvrent de grands yeux ;
dreflent leurs plumes & paroiiïent une fois plus
gros; ils étendent auiTi les ailes, fe baifTent ou s'ac-*;
GroupifTcnt , mais ils fe relèvent promptement ;
comme étonnés ; ils font craquer deux ou treiç
iLis kur bec. Mm ^ iùldmh
G ilj
! ï 5 o Hijloîre Naturelle, &c.
& de tous côtés , à des craqueniens de
bec , à des trépidations de jambes , &
des mouvemens de pieds dont ils por-
tent un doigt , tantôt jen arrière , &
tantôt en avant , & qu'on peut aifément
remarquer tout cela en gardant quel-
ques-uns de ces oileaux en captivité ;
mais j'obferverai encore qu'il faut les
prendre très-jeunes loriqu'on veut les
nourrir : les autres re fuient toute la
nourriture qu'on leur préfente dès qu'ils
font enfermés.
JP/JX. . r^.ur. ,Scy
LE HIBOU ^, MOYEl^ DXTC =
ï 5 r
L£ SCOFSfaJ
o u
PETIT 'duc,
Voye:^ la planche X de ce volume.
*
V OICI la troifième & dernière efpèce
du genre des Hiboux ^ c'ed-à-dire, des
^ V^^y^Z ^-^ planches enluminées, n.°43(5o
(a) En Grec, 2>c<i!-j^, en Latin, Afio , en
Italien , Zipctta ou Zue:ia , Ahchavello -, Chiv'mo /
en Allemand, Sîol,eule ; en Polonois, Sowka ; en
Anglois , Littk horn-owL Scops Aldrovandi. 'Av'u
tom. I , pag. 530. ^ — Hueiie ou Huiorte ou.
Chouette, nommée par aucuns, Pnit Duc, Belon,
Hifl. nat> <ks O'ijtau:-:, page 14?. Et Portraiîs d oi-
feaux , j.mgt 2-. — NoSlua Jfunor, noéîua nucupana*
Scops riinu. Rzac. Hifl, nat. Pol, pag. 288. Noâlua
tniuor. Scops A/dror. nJi. Rzac. Aud, h'/fl. nar,
P:'7. pag. 398. — Scops AJdwiKrn-û, Wii'ulghby,
Orniih, pag. 65, tab. XII. — Le petit Duc. Fh
XXXVII , fig. I, Omit h. Brifîljn , tome 1 , page
^çS' — The fhorî eared owl. Le Hibou à oreilles
courtes, Britifch Zooiogy, ph B ^; «^ /'/• B ^ ^^
G liij
,^5 2 'HîJIohe Naturelle
©ifeaux de nuit, qui portent des pîumes-
J%. 2. Nota. C'efî pour ne rien omettre & pou?
i--:U indiquer, que je cite ici ia Zoo'ogie Britan-
nique; car cet ouvrr.ge , dont le principal mérite
confiée dans {es plandies , efi même cà cet égard
encore très-défcdueux : par exemple , les aiarettes
àts, hiboux , qui ne font compofëes que de plumes y
Y font repréfentées comme fi c'étoit de vraies
oreilles de chair , &c. . . . . . De même il eft dit
dans le texte que le hibou à oreilles courtes a treize
pouces & demi Anglois de longueur , ce qui fait
plus de douze pouces & demi de France : or ce
même oifeau n'a que fept pouces & demi tout'
au plus , ainïî c'eft probablement le moyen duc ,,
que l'Auteur aura pris pour le petit duc, & ce
qui prouve encore fon peu de ConnoifT^ince «.%
d'exaélitude , c'efl: d'avoir également indiqué ce
même oifeau dans les /;/. B ^ if E ^ > fig- ^*
On voit , au premier coup d'œil , que ce ne doit
pas être le m.eme oifeau , puifque la figure repré-
fentée dans la planche B 4 ,, fg> ^ , ell d'un;,
tiers plus petite que celle qui eft repréfentée dans
la flanche ^ ^ , &: que le moyen duc qui ef&;
repréfenté dans la -planche B ^ , fig- i > n'eft pas.
plus grand que le petit duc, B 4, fg- 2. : or
îe moyen duc ayant , comme le dit Willulghby,
quatorze pouces & derr>i ; Ç\ le petit duc en avoit
treize &: demi, comme le dit l'Auteur de la Zoo-
logie Britannique , pourquoi ne pas appuyer -fur
ce. fait & relever l'erreur de ceux qui ne lut
donnent que fept pouces î ou bien dire qu'en An-
gleterre les petits ducs font plus gros qu'ailleurs ^.
du Scops ou petit Duc> ï j ^\
ctevëes aii-defilis deja tête , &: elle cfl:
r>ilee à dillinguer des deux autres, d'a-
bord par la petitefîè même du corps
de l'oileau , qui n'efi; pas plus gros
f[u'un merle, <S: en fuite par ie raccour-
ctiTement très-marqué de ces aigrettes
qui lurmontent ies oreilles , ielquelies
dans cette efpèce ne s'éièvent pas d'un
demi-pouce , & ne font compoiées que
d'une feule petite plume (l?); ces deux
caradères fuffifent pour dillinguer le
petit duc du moyen & du grand duc ^
eu bien encore que c'eft une efpèce parriculière
à ia Grande-Bretagne: cela vabit bien h peine
d'être difcuté ; mais cet Auteur ne difcute rien ^■-
nc dit rien de nouveau , ni même rien de mo-
derne, car it paroît ignorer beaucoup de chofe^^
qui ont été dires avant {ni l'ur les fujets qu'il traite.
L'ouvrage de M. Edwards ert infiniment meilleur;,
car indépendamment de ce que les defiins êc les
planches coloriées font plus correéles , c'eft que
fès delcriptions font plus exaéles, fes comparaifons
plus juftes, & que par -tout il paroît avoir une
pleine connoiffance de ce qui a été fait avant iur
fur les objets qui ont rapport à ceux qu'il nous ■
préfente.
fl') Aures vel fJumulœ in aurium modum fwmdœ.
ifî r7wrruo vix apparent , i?i vivo manifejlions ^ ex ufiâ -
tkiniiim pinnulâ corjlamsi, Aidrov. /H'i» tom, 1'^
i I 5 4 Hifîolre 'Naturelle
& oii (e reconnoitra encore aîiéiiient â
ia tête qui eft proportionneliemem plus
petite par rapport au corps que ceiie
des deux autres , & encore à fon plu-
mage plus élégamment bigarré & plus
diitinClemeiit tacheté que celui des au-
tres , car tout fon corps eft très-joli-
jnent varié de gris , de roux , de brun
^ de noir ; &. les jambes font couvertes
jufqu'à l'origine des ongles , de plumes
d'un gris - rouflâtre mêlé de taches
Brunes ; il diffère aulTi des deux autres
par le naturel , car il fe réunit en troupe
en automne & au primemps , pour
paiïer dans d'autres climats ; il n'en
relie que très -peu, ou point du tout
en hiver dans nos provinces , & on
îes voit partir après les hirondelles , &
arriver à peu près en même temps ;
quoiqu'ils habitent de préférence les
terreins élevés, ifs fe raffembient vo-
lontiers dans ceux où les mulots fe font
le plus multipliés , &. y font un grand
feien par la dellru<fl:ion de ces animaux qui
fe multiplient toujours trop, & qui dans
de certaines années puiliiient à un tel
point , qu'ils dévorent toutes les graines
J// Scops ou peut Duc, 155
& toutes les racines jiles plantes les plus
nëcefliiires à la nourriture &: à l'uîage
de l'homme : on a. fouvent vu dans les
tenips de cette eipèce de fîéau , les petits
ducs arriver en trotipe, & faire li bonne
guerre aux mulots qu'en peu de jours
ils en purgent la terre (cj ; les hiboux
ou moyens ducs fe réuniiient aufli quel-
quefois en troupe de plus de cent ;
nous en avons été informés deux fois
par des témoins oculaires , mais ces
aOemblées font rares, au lieu que celles
des fcops ou petits ducs fe font tous
îes ans ; d'ailleurs c'efl pour voyager
(c) Noter, I S Samuel Dalc en cite deux exemples
d'après Chiiutey , & ii les rapporte dans ie.s termes
fui\3ns. /// i/ie veor fjSo et hallomide an army of
mi as fo overrun ihc morshts near fouih-minfkr that
îne ent up gYajJ to ihe vcry roots But
at knght d great immher of Strange painted owls
came and dcvonred ail rhe mice. The likc appened
c.gain in Ejfcx anno i 6a.F, Childrey, Britav.nia bo-
ïûnlca , pag. i oo. — Dales appendix tho îhe hijîory
vf Hanvich, London , 1732, pag. 397. AW.
5.° Que quoique Dale rapporte ces faits à Votai
ou 'ûiojym duc, je crois qu'il faut les attribuer au
fcops ou petit duc , à caufe de l'indication Sirangt
j'dnncd ow/s , qui tuffit pour £iire icconnoître ici
k fcops ou petit duc.
Gvj
il 3^ Hijloire Naturelle
qu'ils femblent fe raflembîer, <5: il n^QW
refle point au pays , au lieu qu'on y
trouve des hiboux ou moyens ducs en
tout temps ; ii eil même à préfumer
que ies petits ducs font des voyages de
long cours , & qu'ils paiïent d'un con-
tinent à i'autre ; i'oifeau de la nouvelle
Elpagne indiqué par Nieremberg, fous-
îe: nom de îalchicuatlï , efl ou de h
anême efpèce , ou d'une eipèce très-
voifine de celle du fcops ou petit
duc (d)i au rede , quoiqu'il voyage
par troupes nombreufes, il efl aiïez rare
par- tout j & difficile à prendre; on nV
jamais pu m'en procurer ni -les œufs
ni les petits , & on a même de la peine.
à l'indiquer aux Chafîeurs qui le con-
fondent toujours avec la chevêche ,,
parce que ces deux oifeaux font à peuj
près de la même grofîeur , & que les
petites plumes éminentes qui diflinguent;
îe petit duc font très - courtes , & trop
(d) Exoikurn où gemis lakhicuaîU vicïetur : corffu-a, .
avis efl five aur'iculata , -parva cor pore , refuna , roCiro •
Irevi , nigra lumine , hitta enéejcms iride f'ifca à"
âmrea -plumis vjqm ad cnira , mra à" mcurva un-
guïlms. Catera fimilis nofli'aà otu, Eufeb. Niereiîîbr^
'^Ifj m,^ Lib, X ^ cap. xxxix . page z z.u
F/.X.mur iSf.
XE SCOPS LUC PETIT DUC
• W// Scops ou petit Duc: t 5 7
peu apparentes pour fcire un caracftère
qu'on puifTe reconnoître de loin.
Au relie, la couleur de ces oiieaux
varie beaucoup fiai vant Tige & leciimat^.
ôi peut-être le iexe ; ils îbnt tous gris^
dans ie premier âge , il y en a de plus
bruns ies uns que ies autres quand ils
font adultes , la couleur des yeux paroît
fuivre celle du plumage, ies gris n'ont
îes yeux que d'un jaune très -pâle, ies
autres ies ont plus jaunes ou d'une
couleur de noifette plus brune , mais
ces iégères difFe'rences ne fuffilent pas
pour en fliire des elpèces diilin-des &
réparées^
.î 5 s Hifioire 'Naturelle
*LA HULOTTE (a).
JLi A Hulotte qu'on peut appeler auffi
ia chouette noire , & que ies Grecs ap-
peioient nyclicorax ou ie corbeau de nuit^
Vc>}'ci ks 'planches enlumine es , n,® 4.4.
(a) En Grec , l^vK-nKû^.z, ; ^" Latin , Ululn ;
& auiïï en Italien ielon Gelner \ Alocho cl quei-
quefois Luckaro îéon Wà^os-àuàty en Portugal.;,
Conifa; en Gitalogne, Xura, Kuta ; en AHerriand,
Huhu ; en Polonois, Ldok , Sowka , Puj^ïh; en
An'-jfois , H'.nvlet ; on i'appelle en Bourgoo'ne Chouc ,
ce qui eft un augmentatif de Ch.ueite. Salerne dit
qu'on Tappelie en Champagne le Trtmhkiir , parce
que cet oifeau crie comme en friîTonnant & trcm-
blant de froid. Ulula. Gefner, Avï. pag! 772,
— Aidrov. Avi. tom. I , pag. 538. — Ulula La."
finis. Ray, Sj'n. Avi, p-g. xù , n.'' 4-. «
Ulula Gefntri , idem , ibidem , n° 5 . — Ulula Al-
drovandi. Wiliuigh. Cntiîh, pag. 68. — Hibou fans
cornes ou Chat-huanî. Beion , Hi(î. fiar. dts Oifenuxt
page 159..... Hibou , Chat-huant , appelé auiTi
'^Dame, Imm. Portraits d'Oiieaux , page 26 A»
l'holà. Cette dér.om.ination Dame vient probable-
ment de ce que cet oifeau a ia face enxiroiir.c'e
^\\w collier & d'une eîpèce de chaperoii allez fem-,
blabie à ceux que portant les femmes pour ie
j»3uvrir la tête j mais on peut dire la même c'):vJ\.^
^e la Hulotte^ ï 5p
cO: îa plus grande Je toutes ies chouettes |
QÏie a près de quirr/e pouces de ton-
gueur, depuis ie bout du bec à l'ex-
tre'miîé des onole^ ; eiie a la tête très-
groiïe , bien arrondie & lans aigrettes ,
ia face enfoncée & comme encavée dans
fi plume , les yeux aufli enfoncés 6c
environnés de plumes grifâtres & dé-
compolées , l'iris des yeux noirâtre ou
plutôt d'un brun foncé , ou couleur
de noifett^ obfcur, le bec d'un blanc-
jaunatre ou vcrdâtre , le deffus du corps
couleur de gris -de -fer foncé, marqué
de taches noires & de taches blanchâtres ;
ïe defibus du corps blanc , croifé de
bandes noires traniverfafes & longitu-
dinales ; ia queue d'un peu plus de Ùk
de l'effraie &. du chat -huant. — Vlula. Aldrov,
Ai'i, tom. I , pag. 538' Ahico , idem ,•
tom, I, pag. 5 54-. — Chouette noire Albin,
îome 111 , page ^ , planche VIII , avec une figure
mal coloriée. Nota. Albin me pxroît avoir fiùt une
faute , en diiant dans fa defcription , que cet oifeau
a l'iris àes yeux jaune, à moins qu'il n'appelle
jaune le brun couleur de noifette, coui-ur où il
entre en effet un peu de jaune obfcur. — No^lua
wajoY. Frifch , planche XCIV , avec une ff^ure bien
coloriée. — La Hulotte, BrifTon, OmiihoL îome i^
page <^oj.
[f6o HifLoire Naturelle
pouces , les ailes s'éiendent un peu au-
delà de Ton extrémité, l'étendue du vo!
de trois pieds , les jambes couvertes juf-
qu'à l'origine des doigts , de plumes
Blanches tachetées de points. noirs (b);
ces caradères font plus que fuffifans
pour faire diilinguer la hulotte de toutes
les autres chouettes ; elle vole légère-
îuent & fins faire de bruit avec fes
ailes, &: toujours de côté comme toutes
les autres chouettes; c^eit fon cri (c) y
hofi ou ou oïl ou OU- oïl , qui reffemble
afiez au hurlement du loup , qui lui a
fait donner par les Latins le nom à' ulula ^
qui vient à'ululare , heurier ou crier
comme le loup , & c'efl par cette même
(b) On peut encore ajouter à ces caradères un
figne diftindif, c'eft que la piume ia plus exté-
rieure de i'aiie t{\. plus courte de deux ou trois
pouces que la féconde , qui eft elle - même pius
courte d'un pouce que ia troiiîème , <& que ies
plus longues de toutes font îa quatrième & ia cin-
quième, au lieu que dans l'effraie la féconde & ia-^
îroifième font les plus longues, & l'extérieure
neil: pius courte que d un ckmi-pouce»
(c) Cet oifeau pouiïe la nuit, fur- tout quand i?'
gèle, une voix terrible , qui fait peur aux femirj^
ê^. aux eiïfanSj-Salerne^ S^^^^/ic/. page 5.3 j
'de la Hulotte, 'i6t
âwJogle que les Allemands i'appelienî
hû h il ou plutôt lidu Jidu (d).
La hulotLe ie tient pendant l'été
dans les bcis , toujours dans des arbres-
creux ; quelquefois elle s'approche en>
hiver de n-os habitations , elle chafTe &
prend les petits oifeaux , & pius encore"
\^% mulots &: {es campagnols ; elle ies-
avale tout entiers , & en rend aufli par
le bec les peaux roulées en pelotons :;
lorfque la chaife de la campagne ne-
iui_ produit rien , elfe vient dans les
granges pour y chercher àts fouris &
At^ rats : elle retourne au bois de aranâ
matin à l'heure de la rentrée des lièvres ,
& elle fe fourre dans les taillis les plus^
(â) Nota. C'ed d'après Gefner que Je dis ici qua
îes Allemands appellent cette chouette , hû hû /,
cependant c'ed ie grand duc auquel appartient ce
nom : il dit aufTi qu'ils l'appellent id Se eu/. JVU
Frifch ne lui donne que le nom générique eu/e ,.
& dit que les autres furnoms qu'oii lui donne em
Allemand font fans fondement , comme celui de
/inapp euk , par exemple, qui exprime le craque-
ment que cet oifeau fait avec fon bec, mais que
toutes les efpcces de chouettes font également j.
& nacht eut qui fignine chouette de nuit , puilque
toutes les chouettes font égaiemenî. des. oileaux d^
aui,^^
1 62 Hifîoîre Naturelle, &c.
épais , ou fur {es arbres les plus Feuilles,
& y pafTe tout le jour , iàns chano-er
de lieu : clans la mauvaile iaifon , elle
demeure dans des arbres creux pendant
le jour, & n'en Ibrt qu'à la nuit; ces
habitudes lui font communes avec le
hibou ou jiioyen duc, auffj-bien que
celle de pondre leurs œufs dans éç.%
nids étrangers , fur-tout dans ceux des
bufes , des crefTerelics , des corneilles <5c
àts pies ; elle fait ordinairement quatre
œufs d'un gris file , de forme arrondie ,
& à peu près aulli gros que ceux d'une
petite poule.
<w/->
1^3
L E
""CHAT-HUANTfa).
Voye:^ la planche XI de ce volume.
/il près ia hulotte , qui efl la plus
grande de toutes les chouettes , & qui
a les yeux noirâtres , fe trouvent le
Chat - huant qui ies a bleuâtres , &
* Voye?^ ks planches enluminées, n.° 437,
(a) En Grec , Tkoj^ ; en Latin , Noélua ; en
Catalogne, Cahtca ; en Allemand, MikhfangeY ,
Kinder, Alekker, Stock-euk ; en Anglnis, Common
Irown-owl ow. Leech-owl — Strix. Gefner , Avi ^
pag. 738. — Aldrov. Avi , tom. I , pag. 561*
—-Chouette. Albin , tome l, page 1 o, j^Ianche IX ,
avec une figure mal coloriée. — Noélua majou
Frifch , planche XCVI , avec une figure coloriée du
mâle; ir planche xcv, avec une fi^rure coloriée
de la femelle. — Le Chat-huant. Briilbn , Omiîh»
tome I, page 500. — The tawny owL Britifch
Zoo!og)r, ph B j. Nota. Que faute d'exaditude,
i'Auteur de la Zoologie Britannique a marqué du
même numéro B S' c^eux planches différentes , &
que l'une de ces planches repréfente ie hibou 012
moyen duc , & l'autre le chaî- huant dont ii cil
ici ^uertionj
'i 64 Hîfiolre Naturelle
ï' Effraie qui les a jaunes : tous deux?-
font à peu près de la même grandeur;
ils ont environ douze à treize pouces de
iongueur, dépuis le bout du bec juf-
qu*à i'exirémJîé des pieds, ainfi ils n'ont
guère que deux pouces de moins que-
ia hulotte , mais ris paroifîent fenfibie-
jTient moins gros à proportion. On re-
eonnoîtra le cliat-huant d'abord à Tes
yeux bleuâtres, & enfuite à la beauté &t
à la variété diftincfle de Ton plumage (b);
Sl enfin à Ton cri Iw/id j hohô , ho ho ho ho ^
par lequel il fembie huer , hôler ou*
appeler à haute voix.
Gefner, Aidrovande , & plufieurs-
autres Naturalilles après eux, ont em-
ployé ie mot Jïrîx , pour défigner cette-
efpèce , mais je crois qu'ils fè font
•f rompes, & c|ue c'ell à l'effraie qu'il faut
(h) Voyez-en îa ciefcription très-détaillée & très-
"cxade dans J'Ornithoiogie deM.Briffon, tome I ,■
•page y o o i^ Julvantts : ii fiiffit de dire ici que les-
eoufeurs du chat- huant font bien plus ciaires que:
eeiles de la hulotte ; ie mâle chat - huant eft à ia-
%-érité plus brun que la femelle , mais il n'a que '
très-peu de noir en comparaifon de ia hulotte qur
de toutes les cliouettes eft ia plus grande & la piii|-
àii Chaî-hiianî. \6f
îe rapporter : jlnx , pri.*» dans cette ac^
,cepîion, c'eft-à-dire, comme nom d'urjL
oifeau de nuit, eft un mot plutôt latin
que grec; Ovide nous en donne l'e'ty-
inologie , & indique aiïez clairement
quei eft l'oiieau nocturne auquel ii ap-
partient, par ie paflage fuivant :
Strh
wn
grande caput, flanUs oculi , roflra apta rapînm
Canines permis, iinguibus hamiis inejl,
Efl illis ftrigibiis nomen , Sed iiominis hujus
Caufa qiiod horrenda ftridere noéîe foîent.
La tête groiïe , les yeux fixes , îe
bec propre à ia rapine , les ongles
en hameçon, font des caraâières corn-
jiiuns à tous ces oifeaux ; mais la blan-
cheur du plumage , canïtks permis ^
appartient plus à i'eftraie qu'à aucuii
autre ; & ce cjui détermine fur cela
mon ientiment, c'efl que le mot Jlrîdor^
qui figniiîe en latin un craquement , un
grincement, un bruit délagréablement
entrecoupé & femblable à celui d'une
fcÏQ, eil précifément îe cri ^r^^ grei
ude i'e&aie i au iieu que le qù du
1 66 . HiJIoke Ndturelk
chat- huant eil plutôt une voix haute,
un hôlement qu'un grincement.
On ne trouve guère ies chat-hûnns
ailleurs que dans ies bois ; en Bourgogne
ils font bien pius communs que ies
hulottes , ils le tiennent dans âts arbres
creux , & l'on m'en a apporté quel-
ques - uns dans le temps le plus ri-
goureux de l'hiver , ce qui me fait
preTumer qu'ils reftent toujours dans le
pays , & qu'ils ne s'approchent que ra-
rem.ent de nos habitations. M. Frifch
donne le chat-huant comme une varie'té
de i'efpèce de la hulotte , & prend en-
core pour une féconde variété de cette
îTiêmie efpèce le mâle du chat- huant:
fà planche cotée XCI V, efl: la hulotte ; ia
flanche XCV, ia femeile du chat-huant;
& la planche XCVI le chat-huant mâle :
îiinfi au lieu de trois variétés qu'il in-
dique , ce font deux efpèces différentes,
ou û l'on vouioit que ie chat-huant ne
fût qu'une variété de i'eipèce de ia
hulotte , il faudroit pouvoir nier ies
différences confiantes & les raracflères , î
qui ies diftinguent l'un de l'autre , &
qui nae paroiflent aflez fenfibks & aflez
TLxi.p^u/.j^r/^.
I.E CHAT-HTJANT
du CJmî'huaut. i 6"^
iiîuîiipîiés pour conftitutr deux efpèces
dillincî^es & féparées.
Comme le chat -huant fe trouve
en Suède & dans les autres terres du
Nord (c) , il a pu pafîer d'un continent
è l'autre ; aufii le retrouve - t - on en
Amérique jufque dans les pays chauds.
Il y a au cabinet de M. Mauduyt ,
un chat-huant qui lui a été envoyé de
Saint-Domingue, qui ne nous paroît
être qu'une variété de i'eipèce d'Eu-
rope , dont il ne diffère que par l'uni-
formité des couleurs fur la poitrine &:
fur le ventre qui font roufies & prefque
fans taches , & encore par les couleurs
plus fojicées é&^ parties fupérieures
du corps.
(c) Sirîx capite lûtvï , corpore ferrugineo , renùg^
lernâ longhre. Linn. Fami> 6mc. n.° 55,
l'm 'Hijloke Naturelle
TEFFRAIE
OU
%A PRES AIE fa)
Voye^ la planche xii de ce volume.
Is
'effraie qu'on appelle corn miiné-
nient ia chouette des clochers , effraie
en eifet par les foufflcmens., chë , chêi ,
chëfi f
* Voyei^ks ■planches enluminées , n.®^ 474- & 44. o'^
'(a) En Grec, 'E\ïoç ; en Latin, AJuco \ €iî
'Allemand & en Flamand, Kirch-euk, ce qui fignifie
Chouette des égUfes ; SchkyeY-euk , Chouette voilée,
parce qu elle femble avoir la tête encapuchonnée j
Perl-euk , parce que Ton plumage eft parfemé de
taches rondes comme des perles ou des gouttes de
liqueur ; en Anglois., Whlte-owl , Chouette blanche.
î^ota, Salerne dit qu'on l'appelle dans i'Orléanois,
ia Sologne , &c Fréfaie; en Poitou,
Fréfaie ; en Gafcogne, Brefague ou Irtfaço; dans
ie Vendômois , Chouart, — Effraie ou Frefaïe,
Selon , Hifl, nat, des Oijeaux, page 14.2
Petit Chat-huant plombé. Idem, Portraits d'oifeaux^
'^agt 2. 6^1 B' ^oint II paroît gue Beîon confond ^
à quelques
. '^e rEfmte Oti ia Frcfale. i 6^^,
fhêû , chièû , i€S cris» acres &: lugubres
grei , gré , créi , & fa voix entrecoupée
qu'elle fî>it ibuvent retentir dans ic fi-
lence de la nuit ; elle eft , pour ainfi
dire, domellique , &. habite au inilieu des
villes les mieux peuplées ; les tours ,
ies clochers , les toits des égiifes & des
autres bâtimens élevés lui fervent de
retraite pendant le jour , & qWq en fort
à l'heure du crépufcule ; Ton louffle^
ment qu'elle réitère fans cefîe , reflem-
ble à celui d'un homme cjui d; rt la
bouche ouverte ; elle pouffe aufTi en
volant <Sc en fe repofmt, difîérens fons
aigres, tous fi défagréables que cela
joint à l'idée du voifmage des çimetière$
^ des égiifes, & encore à i'obfcurité
à quelques égards , l'effraie ou frefaïe avec le tettCf
chèvre ou çrapaud-voiant, 6i Gefner ie jui a re#
proche avec jufte rai(on, — AIuco miaor, Aidror.
Avu tome I.pag. 536. Vfu'x gcnus alitrum quod
quidam fîammeatum cogmminant, Gefner, Avi, pag,
774. — Aluco m'mor Alikovandi Wiliulgh. Orn'uh,
pag. 6j, tab. xill. — Lucheran ou Chcuette-
bianche, Albin , tome 11, -page j, planche XI, avec'
• une figure coloriée. — Noéîua gimaia, Frifch,
■^lanc. XCVll, avec une figure coloriée. — Le petil
Çhat-huant. Briifon , Omth, tome I, page 50^,
I— The White owl. Britifch Zooiogy, yh B^
O'ifcaux: Toms JL H
A
lïjQ 'Hifloire iSûîureïlè
de la nuit , infpire de i'horreur & de fe
crainte aux enfans , aux femmes &
îiiême aux hommes fournis aux mêmes
préjugés , & qui croient aux revenans ,
aux forciers, aux augures; ils regardent
i'efîraie comme Toifeim funèbre, comme
ie meiïager de la mort; -ils croient que
quand il fe fixe fur une niaifon , & qu'il
y fait retentir une voix différente de fe&
cris ordinaires , c'eft pour appeler quei^
qu'un au cimetière.
On la diftingue aifément às,^ autres
chouettes par la beauté de fon piumage ;
(elle eiL à peu près de la même grandeui*
que ie chat-huant, pius petite que ia-'
hulotte, & plus grande que la chouette
proprement dite , dont nous parlerons
dans l'articie fuivant , elle a un pied ou
treize pouces de longueur, depuis le
bout du h^c jufqu'à l'extrémité de la
queue qui n'a que cinq pouces de lon-
gueur ; éà.ç. a le deffus du corps jaune ,
onde de gris & de brun , & taché dé
points blancs; îe deflbus du csrps
blanc, marqué de points noirs ; les
veux environnés très-régulièrement d'un
cercle de plumes blanches & fi fines ^
' "cle ï Effraie ou h Frefaiel 17T
qu'on les prendroit pour des poils ;
l'iris d'un beau jaune , le bec blanc ,
excepté le bout du crochet qui e(l
brun ; les pieds couverts de duvet blanc ^
ies doigts blancs &: les ongles noirâtres ;
il y en a d'autres qui , quoique de la
même eipèce , paroilTent au premier
coup d'œil être afTez difiérentes ; elles
font d'un beau jaune lur la poitrine &
fur ie ventre, marquées de même de
points noirs; d'autres font parfaitement
blanches fur ces mêmes parties , fans
îa plus petite tache noire : d'autres enfin
font parfaitement jaunes & (^ns aucune
tache *..
J'ai eu pîufieurs de ces chouettes
vivantes, ii eft fort aifé de les prendre,
en oppofant un petit tilct , une trouble
à poilïon aux trous qu'elles occupent
dans ies vieux bâtimens; elles vivent
dix ou douze jours dans ies volières où
elles font renfermées , mais clîes refufent
toute nourriture, 6l meurent d'inanition
nu bout de ce temps ; ie jour elles ie
tiennent fans bouger au bas de ia vo--
lière , ie foir elles montent au iommet
* Voye:(^ ks j)ldnçhes cnhminées, n.^ 4-40.
7 7 2: Hifloire NatnrcUe
cjes juçhoirs où elles font entendre îeut
louiilement , chë, chëï , par lequel elles
i£niblent appeler \^5> autres : j'ai vu plu-
fieurs fois en effet , d'autres effraies
arriver au fbufïîement de l'effraie pri-
ipnnière , le pofer au - deffus de la
volière, y fliire le même foufflement ,
à. s'y lailFer prendre au filet. Je n'ai
jamais entendu leur cri acre (Jîrïdor) ,
crèi , giei dans les volières ; elles ne
poufTent ce cri qu'en volant & îorf-
fîju'eiles font en pleine liberté ; la fe-
îneiie eft un peu plus grofTe que le
Biâle , & a les couleurs plus claires &
plus difi:in<*les ; c'efl: de tous les oifsaux
jio<fturncs ceiui dont le plumage eft le
plus agréablement varié.
L'efpèce de l'çfFraie ^ft nombreuicj
& par-tout très-commune en Europe ;
comme on la voit en Suède aulli-bfen
qu'en France (b), elle a pu paffer d'un
continent à l'autre ; aulîi la trouve-t-on
(h) Strix capite Imn , corpore luîfo. Linn. Fdun«
Snec, n.** 49. Naia, M. Sa'.erne s'cfl trompé lorfqu'if,
a dit que Linnaeiis n'en p.arle point , & qu'appa-
temment ia frefaie ne le trouve point en 5uède^
Voyf^ Sahmc, Omithpl. lu-i^c jo»_
Ve ïEffime Ou .la Frejaie. îjj
èîi Amérique, depuis les terres du Nord
juiqu'à celles du Midi. Marcgrave l'a
vue & reconnue au Brcfil, où les nci-
turels du pays l'appellent ïuïdara (c),
L effraie ne va jpas comme la hulotte
& le chat-huant, pondre dans des nids
érrangers ; elle dépofe les œufs à crud
dans des trous de murailles , oiî fur des
folives foLis les toits, & aufîi dans des
creux d'arbres ; elle n'y met ni herbes
ni racines , ni feuilles pour les recevoir ;
'elle pond de très-bonne heure au p)rin-
temps, c'eft-à-dire, dès la fin de mars
ou le commencement d'avril ; elle fait
ordinairement cinq œufs & quelquefois
fix & même fept , d une Forme alongée
& de couleor blanchâ:re; elle nourrie
fes petits d'inleCles & de morceaux de
chair de fouris ; ils font tout blancs dans
ie premier âge , & ne font pas mauvais
à manger au bout de trois feinaines,
car lis font gras &: bien nourris; les
(c) Tuldara BYafiJ'enfllus ; ululez e(} fpecks , Cn'-
tnatns ScHLElER-EULE , Bclgïs krkuyk .,..,,
Ddfcyiliiiur & à Gcjicro, Marcgr. Hifi, nnt,- Brajil»
H iij
^îj4 Hifloîre NdUirelk
■pères &: mères purgent les églifes cfe
iburis ; ils boivent aufîî afTez fcm^enî
ou plutôt mangent l'huile- des lampes,,
ilir-tout fi elle vient à fe figer ; ils
ay aient les fouris & les mulots , les petits
oifeaux tout entiers , ôt en rendent par
îe ho-c , les os , les pium.es &l les peaux
roulées, leurs excrémens font blancs &
liquides comme ceux de tous les autres
oifeaux de proie; dans la belle faifon ^
îa plupart de ces oifeaux vont le foir
dans \qs bois voifins , mais ils reviennent
tous les matins à leur retraite ordinaire^
où ils dorment &: ronflent jufqu'aux
heures du loir; & quand la nuit arrive,,
ils fe laiiTeni tomber de leur trou , &
volent en culbutant prefque jufqu'à terre
îorfque le froid eft "rigoureux , on ieS-
îrouve quelquefois cinq ou fix dans le
même trou , ou cachées dans les four-
rages ; elles y cherchent l'abri, fair
tempéré & la nourriture ; les fouris font
en effet alors en plus grand nombre
é'àxïs les granges que dans tout autre
temps : en automne , elles vont fou vent
yifiter pendant ia nuit ks iieiix où Fou
X'EIE'PRAIE.
" ik FEffiwe ou la FrefatCé -îyf
^ tendu des rejettoire^ ôl des lacets pour
prendre des bécafles & des grives (^dj,-
elles tuent ies béeaffes qu'eliey tr<)uveii;|
fuipendues, & les mangent fur le lieu y
Biais elles emportent quelquefois les grives
éc les autres petits oi féaux qui font pris
aux lacets, eiies ies avalent fouvent entiers
Si avec la plume, mais eiies déplument
ordinairement, avant de ies manger ^^
. ceux qui font un peu plus gros : ces
dernières iiabitudes , aufii-bien que ceile
de voier de travers, c'eil-à-dire , comme"
û le vent ies emportoit , & fans faire
aucun bruit des ailes , font commuiies
à l'effraie, au chat-liuant , à la hulotte'
& à ia chouette proprement <^te. dout
nous allons parier.
{(^J Rejettoire , Baguette de bois vert courbée ^
èu bout de laquelle on attache un iacet , & qui
par Ton reffort en lerre le nœud coulant & enièvg
IWëauj-
Hiii;
176 Hiflolre Naturelle
LA CHOUETTES
OU LA
GRANDE CHEVECHE (a).
Yoy% la planche Xlll de ce volume,
V>ETTE efpèce, qui eft la Chouette,
proprement dite, & qu'on peut appeler
ia chouette des rochers on la grande che-
yêche , eft affez commune, mais elie
n'approche pas auiîi fouvent de nos
^ Voyei ks planches enlumineis, nJ^ 43 S.
y^ï^ Fn Grec, A'iyooMoç-^ en Latin, Cicuma'j
fen Allemand, Stein-kmi, ou Stein-tuk ; en Poionois,
Sowa ; en Angloîs, Gfeat Bnnvn owL — Notflua
quant Jaxatikm Heîve'.'ti eogmtninant, Noétua faxa'
ri/is. Gefner, Au/,- pag. 622. AUrov, Ai^i tome I,
pag. 545. — Grsnde Chevêche. Btion, Hifhiye
vaturelk des Oifcaux , page 140 ..... . Chevêche.
griraaut ; Machette, Idenu Portraits d'oifeaux , pagt
2. y. A> Grande Chouette brune. Albm , tcmu III,
•page ^, planche VII, avec une figure mal coloriée,
Ululû -flamineata, A1.'/-7 jaune ians oreilles ou Stein*
eule. Chouette ou Souette. Frifch , planche XCVIIL ,
avec une bonne figure coloriée. — La grande
ghouçiîÇ; Briflbn ^ Omithol, tome I , page %i\^
^de h Chou e île, &c. lyy
ïiaBkations que i'eîTfafe ; elle fe tient
plus volontiers dans ies carrières , dan^
ies -rochers , dans ies bâiimens ruinés
Si. éloignés des lieux habités : il femblG
qu'elle prétère les pays de nuontagnes,
& qu'elle cherche les précipices escarpés
& les endroits Iblitaires ; cependant on
ne la trouve pas dans les bois , & elle
ne le loge pas dans des arbres creux (^i^Js.
on la diilinoruera ailément de la hulotte
êc du chat-huant par la couleur des
yeux qui font d'un très-beau jaune,
au lieu que ceux d^ la hulotte font d'un
brun prefque noir, & ceux du cha^
huant d'une couleur bleuâtre ; on la
diliinguera plus difficilement de l'effraie ,
parce que toutes deux ont l'iris des yeux
■ jaunes, environnés de même d'un grand
cercle de petites plumes blanches : que'
toutes deux ont du jaune fous le ventre ^
ÔL qu'elles fom à peu près de la m.ême:
fl;J Nolîs laifTeroïis ( ctit M. Frifc?ï ) a cette-
Chouette fon narn difliî>dif Stcineuk , parce que
je ne i'ai jamais trouvée dans des arhrcs creux ^^
Tna's feuifincnt dans des batimens en ruines eu d'H!
^ HTiO-ns abandonnés depuis longtemps, Si d^ns lâiù
' jpcehars. Frîjch , arucle des Oifcûux n^clumes^
^TjS 'HïjÎGtre Naturelle -
grandeur ; mais ia chouette des rocf.ers-
ed en général plus brune, marquée de
taches pius grandes & longues comme
de pedîes fiammes ; au lieu que les
taches de l'effraie, lorfqu'elle en a, ne
font, pour ainfi dire, que des points
ou des gouttes , & c'eit par cette raifoiî
qu'on a appelé l'effraie noâua guttaîa ^
Ci la chouette des rochers dont il eft ici
quefiion, noâua flamme at a; elle a au (îi-
les pieds bien pius garnis de plumes ,
ÔL le bec tout brun ; tandis que celui
de l'effraie ell blanchâtre, & n'a de
brun qu'à ion extrémité. Au rePœ , la^
femelle, dans cette efpèce , a les cou-
leurs pius claires , & les taches plus
petites que le mâle, comme nous l'a-
vons auiîi remarqué fur la femelle diï
ehat- huant.
Belon dit que cette efpèce s'appelle
ïa grande chevêche; ce nom n'eil. pas
impropre, car cet oifeau reffemble affcz
par fon plumage & par fes pieds bien
garnis de duvet, à la petite chevêche:
que nous appelons fimplement chevêche;-
il paroît être aufîi du même naturel , ne
fe temnt tous deux que ciaa§ ks roçh^rs^
lie la Chouette , &c. 17^
îes earrièies, & très-peu dans les bois :
ces deux efpèces ont auffi un nom pac^
lîculier , kaut-^ ou kautT^-kïn en Alle-
mand , qui répond au nom particulier,
chevêche en François. M. Salerne dit
que la chouette du pays d'Orléans eft
certainement Ja grande chevêche de
Beion ; qu'en Sologne on l'appelle r/z^-
yêche , &: plus communément chavoche
ou caboche; que les Laboureurs font
grand cas de cet oiieau, en ce qu'ii-
détruit quantité de mulots ; que dans k
mois d'avril on l'entend crier jour &
nuit goût , mais d'un ton adez doux^
ëé. que quand il doit pleuvoir , ellç'
change de cri, & Temblc dire goyonj
qu'elle ne fait point de nid , ne pon^<
que trois œufs toiu blancs , parfiitemeiit
ronds , & gros comme ceux d'un pigeon
,ramier ; il dit auffi qu'elle loge dans d^s^
arbres creux, &: qu'Olina fe trompe'
lourdement quand il avance qu'elfe couve
les deux derniers mois de l'hiver v ce-
pendant ce dernier fiit n'eil pas éloigné-
du vrai^ non- feulement cette chouette 5.
Biais même toutes les autres pondent: au^
(ïSô Hiflolre Naturelle
par confequent dans ce même temp? ,
é< à l'égard de ia demeure habituelie
de la chouette ou grande chevêche dojit
51 eft ici quedion , nous avons obiervé
qu'elle ne la prend, pas dans des arbres
creux, comme i'aiTiue M. Saleme ,
mais dans des trous de rochers & dans
les carrières , habitude qui lui eft eom-
îiiune avec îa petite chevêche dont nous
allons parler dans l'article fuivant; elle
eft aufti confidérablement plus petite
que la hulotte, & même plus petite que
k chat-huant , n'ayant guère que onze
pouces de longueur depuis le bout du
bec juiqu'aux ongles.
11 paroît que cette grande chevêche
quiert aflez commune en Europe , fur-
tout dans les pays de montagnes , fe re-
trouve en Amérique dans celle du Chily,
& que i'efpèce indiquée par le Père^
Teuiliée, fous le nom. àQchevêche-Iap'infc},
êi à laquelle il a donné ce furnom de
fc) Efpèce de chevcche-iapin ou ulula cmicuînria.
Peiiiifée , Journal des Ohfervations yhyfiquts , page
<6z. — La chouette de Coquimbo. '^Y'dTon^Orniih.
tome ï, pîîge 525, où l'on peut en voir fa dtrcrip-
tion aufli ijiçn 4ue dans î ouvrage du P. Feuiiléc,
''de h Chouette , &c, \ 8 îl
}apin , parce qu'il l'a nrouvée dans un
trou fait dans la terre ; que cette efpèce ,
dis- je , n'eft qu'une variété de noire
grande chevêche ou chouette des rochers
d'Europe, car eile eft de la même
grandeur & n'en diffère que par la dif-
tribution des couleurs , ce qui- n'eft pas
fuffifant pour en faire une efpèce dif-
tinde & féparée. Si cet oifeau creufoit
lui-même fon irou , comme le Père
Feuiilée paroit le croire , ce feroit une
raifon pour le juger d'une autre efpèce
que notre chevêche (d) , & même que
(d) Nota, I .° Le P. du Tertre , en parlant (îe
i'oifeau no<flurne appelé dialjle dar.s nos îles de
l'Amérique, dit qu'il eft gros comme un canard,
qu'il a ia vue afFreufe, le plumage mêlé de blanc
èi de noir , qu'il repaire fur les. plus hautes mon-
tagnes , qu'il fe territ comme le lapin dans lis irons
qu'il fak dans la terre , où il pond Tes oeufs, les y.
couve & élève {ts petits qu'il ne defcend
jamais de la montagne que de nuit, & qu'en volant
il fait un cri fort lugubre <&. effroyable. Hjloire des
Antilles, tome II , page 2. jy. Nota. 2.° Cet oifeau
efl certainement le même que celui du P. Feuiilée,.
^& quelques-uns des habitans de nos xhî. fe trouvera
peut-être à portée de xérifier s'il creufe en effet un
terrier pour fe loger & y élever fe^ petits. Tout
ie refte des indications que nous donnent ces deux
Auteurs , s'accorde à ce que cet oifeau foiî de
îa même efpèce que notre chevêche ou chouet€
des rochers^
(rSV Hlfwlre Naiiirtlk , &c~.
toutes nos autres chouettes ; mais il ne
^'enruit pas de ce qu'il a trouve cet
©iieau au fond d'un terrier , que ce foit
l'oifeau qui l'ait creule ; & ce qu'on en
peut feulement induire, c'eft qu'il efl
du même naturel que nos chevêches
d'Europe , qui préfèrent conftam.ment
ies trous , foit dans les pierres , foit dans
ies terres , à ceux qu'elles pourroien,!
trouver dans les arbres creux.
;/// . //.
I^l. XnLpj,;.26-2.
iiillliiiii'iiilii^
I.A CHOUETTE.
i
i
183'
£A CHEVÈCHE(^
ou
PETITE CHOUETTE^
Voy^:^ la planche Xîv de ce volume,-
X^ A Chevêche &: îe Scops ou petit:
j^uc 5 font à peu près de ia même-
T Voyei^ les flanches enluminées , w^- 439»
(û) Nota, hes Grecs & les Latins n'ont pa^
dîflingué cette efpèce par un nom particulier, &. iîs-
îont vraifemblabïement confondue avec celie du^
fcops ou petit duc, afio. Il en eft de même des-
Italiens qui les appellent tous deux Zueîta ou Civetra ;
en Efpagnol , LechuTa; en Portugais, Mocho ; en^
Allemand, Az/rç ou plutôt Kautikin; en Polonois^
S'^QWa ; en Angiois , Littk owL Ncâucz genus
jMYvnm, Gefner , Icon, Avi. pag. 15,. — Petite
GTievêche, - Belon , Hijloire naturelle des Oifcaux ,.
page 140. — Noélua. Àldrovande, Av'u tom. I,
pag. 54.3. — Petite Chouette, Albin , tome 11 ^
jiûge 8 y planche :k 1 1 , avec une figure coloriée^
— Petit Hibou, 'Eàw^ràs ^ Glanures-, page 39^;
■pi. ce XXVI II, avec une bonne figure coloriée»
— La petite Chouette ou la Chevêche. BrifTona
fïg4 ^ifolre Naturelle
grandeur, ce (ont les plus petits oifènt^
du genre des hiboux & des chouettes;
iïs ont fept ou huit pouces de longueur,
depuis ie bout du bec jufqu'à i'extré-
niité des ongles, & ne font que de la
^roiTeur d'un merie; mais on ne îes
prendra pas Tun pour l'autre , fi l'on
le lou vient que le petit duc a des ai-
grettes , qui font à la vérité , très-courtes
& conipoiées d'une feule piume , &
que la chevêche a la tête dénuée de
ces deux plumes éminentes; d'ailleurs
gWq a l'iris des yeux d'un jaune plus
paie ; ie bec brun à la ba(e , &i jaune
vers ie bout , au lieu que k petit duc
a tout le bec noir ; elle en diftère auiîi
beaucoup par les couleurs, & peut ai-
fément être reconnue par la réguiarittf
Britifch ^.odogy, planche B /« Notû'\\. EtiwarJs,
M. Frirch & l'Auteur de ia Zoo'ogie Britannique
ont chacun donné une planche coloriée de cet
oifeau : la aicilleure & la plus refTeiriblante à fa
INature, e(ï celle de M. Edwn ds; elle rcpréfente ia
ffmelle de cette elpèce. La plrinche de ta Zo.^ogie
Britannique & celle de M. Frifch reptéfentent fe,
mâle, mais ce dernier Auteur a fait une ÛMXe.
en donnant de- yeux d'un bleu noirâtre à cet oittau'^
car il les a d un jaune pâle.
^^e la Chevêche , &c, 185"
'«5c s taches blanches qu'elle a furies ailes
&: fur ie corps, »Sc aulîi par fa c|ueue
courte comme celle d'une perdrix ; elle
a encore les ailes beaucoup plus courtes
a proportion , plus courtes même que
îa grande chevêche , elle a un cri or-
dinaire poupoû poïipou, qu'elle pouiîè
& répète ei; volant j & un autre cri
qu'elle ne fait entendre que quand elle eft
polée , qui reflemble beaucoup à la voix
d'un jeune homme qui s'écrieroit, aime,
hëme j ^'w? plufieurs fois die fuite (b);
elle (è tient rarement dans les bois, ion
domicile ordinaire eft dans les maiures
(h) Noia. Étant couché dans une Hes vieilles
toUr5 du château de Montbard , une chevêche vint
fepofer un peu avant le jour, à trois heures du
matin, fur la tablette delà fenêtre de ma chanîbre>
& m'éverifa par ("on cri hêmë, ëdwe ; comme je
prêtois l'oreille à certc voix qui me parut d'abord
d'autant plus finguiière quelle étoit tout près de
moi , j'entendis un de mes gens, qui étoit couché
dans la chambre au-dedus de la mienne, ouvrir
fa fenêtre, &: trompé par la reffemblance du fon
bien articulé edric , répondre à roife^U; qui eÇt-tn
là-bas, je yit m'appelle vas Eàme, je 771' appelle Pierres
Ce domeftique croyoit , en effet , que c'étoit un
homme qui en appeloit un autre, tant la voix de
ia chevêche refTemble à là \oix humaine & articur^
^iltin<^çment ce mot.
Iî26 HiJIoire Naturelle .
écartées des iieux peuplés , dans fe
carrières , dans les ruines des anciens
édifices abandonnés ; eile ne s'établit
pas dans ies arbres creux , & reflembie
par toutes ces habitudes à ia grande
chevêche ; elle n'eft pas abfolument oi-
feau de nuit , elle voit pendant le jour
beaucoup mieux que les autres oifeaux
Boclurnes, & iouvent elle s'exerce à
ïa chafle ûqs hirondelles & des autres
petits oifeaux , quoiqu'affez infruclueu-
fement ; car ii eil rare qu'elle en prenne ;
elle réuffit mieux avec les fouris &
ks petits mulots qu'elle ne peut avaler
entiers & qu'elle déchire avec le bec
& les ongles ; elle plume auffi très-
proprement les oifeaux avant de les
manger ; au lieu que ies hiboux , la
hulotte & les autres chouettes les avalent
avec la plume qu'elles vomiUent eniuite ,
iàns pouvoir la digérer ; die pond cinq
œufs qui font tachetés de blanc & de
jaunâtre , & £iit fon nid prefqu'à crud
dans des trous de rochers ou de vieilles
murailles. M. Frifch dit que comme'
eette petite chouette cherche la folitude j
quelle habite çommunéjîicm ks églifes^
^de la Chevêche, &c> i 87
les voûtes, les cimeticres.où Ton conf^
truit des tombeaux , queiques-uns l'ont
nommée oïfeau d'églife ou de cadavrCf
hircken-odcr , leich enhuhu , &. que^ comme
on a reiTiarqué auiîi qu'elie voltigeoit
quelquefois autour des mailbns où il
y avoit des mourans Le
peuple fuperflitieux , l'a appelée oïfeais
de mort ou de cadavre, s'rmnginant
qu'elle préfageoit la mort des malades.
Al. Frifch n'a pas fait attention que
e'eft à i^effraie, & non pas à la che-
vêche qu'appartiennent toutes ces im-
putations, car cette petite chouette eil
très-rare en comparaiion de l'effraie;
elle ne fè tient pas comme ceile-ci dans
Jes clochers , dans les toits des égiifès ;
; elle n'a pas le foufHement lugubre ^
ni le cri acre & effrayant de l'autre, <Sc
ce qu'il y a de certain, c'eft que fî
cette petite chouette ou chevêche eft
regardée en Allemagne comme l'oifeau
de la mort , en France c'eft à l'effraie
qu'on, donne ce nom finiftre. Au refie,
Ja chevêche ou petite chouette dont
^ M. Frifch a domié la figure, & qui le
trouve eu Aii€magn,e ; paroit être une
■î88 Hïflolre Ndfurcile ■
Variété dans refpèce de notre chevêche^
eile eft beaucoup pftîs noire par le plu-
inage^ & a aufîî Tiris des yetix noir,
au lieu que notre chevêche eil beaucoup
moins brune , & a i'iris des yeux jaune :
nous avons aulîl au cabinet \ix\t variété
de l'efpèce de la chevêche qui nous
a été envoyée de Saint-Dominguej ^,
qui ne diffère de notre chevêche de
France, qu'en ce qu'elle a un peu
moins de blanc fous la gorge , & que
ia poitrine & le ventre ioni rayés tranf-
verlalement de bandes brunes afîez ré-
gulières; au lieu que dans notre che-
vêche , il n'y a que des taches brunes
femées irrégulièrement fur ces mêmes
parties.
Pour préfenter en raccourci, & d une
manière plus facile à faifïr, les caraâ:ères
qui diiiingjuent lès cinq efpèces de
chouettes dont nous venons de parler ,
nous dirons: i,"" Que la hulotte efl la
plus grande & ia plus grofîc, qu'elle a
les yeux noirs, le plumage noirâtre, &
le bec d'un blanc- jaunâtre, qu'on peu~t
îa nommer hgrofpe chouettt nvire aux yeux
fio'irs ; 2." Que le ch^it-huant eïl; moins
<7^ la Chevêche , &c. i 8^^
grAi^d &. beaucoup moins gros que la
hulotte , qu'il a ies yeux bleuâtres , le
plumage roux mêlé de gris-de-fer, le
h^c d'un blanc verdâtre , ik qu'on peut
l'appeler la chouette rouffe & gris-de-fer
aux yeux bleus : 3 .° Que l'effraie eft à
peu près de la mêine grandeur que le
chat-huant , qu'elle a les yevix jaunes ,
le plumage d'un jaune blanchâtre, varié
de taches bien diilincles , &. le bec blanc
avec le bout du crochet brun , & qu'où
peut l'appeler la chauetle blanche ou jaune
aux yeux orangés : 4." Que la grande
chevêche ou chouette des rochers n efl
pas fi grande que le chat - huant ni
l'effraie , quoiqu'elle foiî à peu près aulîi
grofie , qu'elle a le plumage brun , les
yeux d'un beau jaune & ie bec brun ,
& qu'on peut l'appeler la chouette brune
aux yeux jaunes & au bec brun: 5.° Que
îa petite chouette ou chevêche efl beau-
coup plus petite qu'aucune des autres,
qu'elle a ïe plumage brun , régulière-
ment taché de blanc ;, ies yeux d'un
jaune pâle & le bec brun à la bafe ,
& jaune vers le bout, & qu'on peu*
J'appeler la petlu çhmtts brum aux yeux
^.
Ipô Htjiohê Naîmilïe] 'éTc:-
jaunâtres } au bec brun ù" orangé. Cei
caradères fe trouveront vrais en général;
ies femelles &: les mâîes de toutes ces
«ipèces fe relîemblant affez par les cou-
leurs, pour que les différences ne foient
pas fort fenlibles : cependant il y a ici,
comme dans toute la Nature, des va-
riétés alTez confidérabks , fur-tout dans
îes couleurs ; il fe trouve des hulottes
plus noires les unes que les autres ,
des chat-huants, plutôt couleur de plomb
que gris-de-fer foncé , des effraies plus
blanches ou plus jaunes les unes que
ies autres , des chouettes ou chevêches
grandes & petites, plutôt fauves que
briuies, mais en réunifiant enlemble
& comparant îes caradères que nous
venons d'indiquer, je crois que tout
le monde pourra ies reconnoître , c'efl-
à-dire, les diftinguer ies unes des autres
lans s'y méprendre.
JI,
Tl .Xn7 /7(U^. i^û.
LA CHEVECHE au PETITE CHOUETTE
OISEAUX ÉTRANGERS
Qjd ont rapport aux Hl BOUX
èr aux Chouettes.
I.
L
'oiseau appelé Cabure ou Cahourâ
I par les Indiens du Brefil, qui a à^s
j aigrettes de plumes fur ia tête , &. qui
I n'efl pas plus gros qu'une litorne ou
1 grive des genévriers ; ces deux carac-
I tères Tuffifent pour indiquer qu'il tient
I de très-près à i'eipèce du fcops ou
j petit duc , fi même il n'ejfl pas une
' .variété de cette efpèce. iMarcgrave efl
ie feul qui ait décrit cet oiieau (a)^ il
n'en donne pas la figure ; c'eft , dit-il ,
une efpèce de hibou de la grandeur
(d'une iitorne (turdela); il a ia tête ronde,
ie bec court , jaune & crochu avec
deux trous pour narines ; ies yeux beaux ,
grands , ronds , jaunes avec la pupille
iioire ; (bus les yeux & à coté du bec ^
(a) Marcgrave, HiJI, Braf,^^g, ai a»
î 5 1 Hîflove NaîweÏÏe
H y a des poils ionguets & bruns ; les
jambes font courtes & entièrement cou-
vertes, ^ulli-bien que les pieds, de
piumes jaunes ; quatre doigts à l'ordi-
naire , avec des ongles iëmilunaires.,
noirs & aigus ; la queue large , & à
l'origine de laquelle fe terminei^t les
ailes : le corps , le dos , les ailes & la
queue, font de couleur d'ombre pâle,
inarquée fur la tête & le cou de très-
petites taches blanches , & fur les ailes
de plus grandes taches de cette même
couleur; la queue eft ondée de blanc,
ïa poitrine & le ventre iont d'un gris-
blanchâtre, marqué d'ombre paie (c'eil-
à-dire d'un brun clair). Marcgrave
ajoute que cet cifeau s'apprivoile ailé-
ment , qu'il peut tourner la têie & alonger
îe cou j de manière que l'extrémité de
fon bec touche au milieu de fon dos ;
qu'il joue avec les hommes comme un
iînge , & fait à leur alpeét diverfes
bouifonnerîes & craquemens de bec; ,
«qu'il peut outre cela remuer les plumes I
qui font des deux côtés de la tête , de
manière qu'elles ie drefTent &l repré-
lenteut des petites cornes ou des oreilles;
enfia
î
• lies Oifcaux étrangers, &c. i p 3
enfin qu'il vit de chair crue: on vole
par cette defcription , con'ibien ce hibou
approche de notre fcops ou petit duc
d'Europe, <5c je ne ferois pas éloigné
de croire que cette même efpèce du
Brefil fe retrouve au cap de Bonne-
efpërance. Kolbe dît que \t% chouettes
qu'on trouve en quantité au Cap , font
de la même taille que celles d'Europe ,
que leurs plumes font partie roug^ &
partie noires, avec un mélange de ta-
ches griles qui les rendent très-bciles,
&: qu'il y a plufieurs Européens au
Cap , qui gardent des chouettes appri-
voilées , qu'on voit courir autour de
feurs maifons , & qu'elles fervent à net-
toyer leurs chambres de fouris (b): quoi-
que cette defcription ne foit pas afîèz
détaillée pour en faire une bonne com-
parai(bn avec celle de Marcgrave, ou
peut croire que ces chouettes du Cap ,
qui s'apprivoilent aiiément , comme \^%
hiboux du BrefiI, font plutôt de cette
même efpèce que de celles d'Europe ,
parce que les influences du climat Ibnt
(l) Defcription du cap de Bonne-efpérance g
y)ms 111 1 pages I ç8 & 1 9^*
O'ifeaux , Tome IL I
fî94' Hiflolre Ndtiirelfe
â peu près les mêmes au Brefil & ail
Cap , & que les difFérences & ies va-
riétés des eipèces fom toujours analogues
aux influences du climat.
II.
L'oiseau de la baie de Hudfon^^
appelé dans cette partie de l'Amérique ^
Caparacoch, très - bien décrit , defîîné ,
gravé & colorié par M. Edwards, qui
l'a nommé hawk-oiyl (c), chouette-
épervier , parce qu'il participe des deux,
& qu'il ièmble faire en effet la nuance
entre ces deux genres d'oifeaux ; il n'efl
guère pins gros qu'un épervier de la
r ^ s (panow-hawh ( ,
petite eipece < , . , . > > la
î ^ ) eperyier des moineaux \ '
longueur de fes ailes & de fà queue luî
donne l'air d'un épervier ; mais la forme
de fa tête & de lès pieds démontre
qu'il touche de plus près au genre des
chouettes ; cependant il vole , chafîe &
prend fa proie en pein jour , comme
les autres oifeaux de proie diurnes ; fon
fç) The Luth Hawk-owL Edwards , Hif}, oj
Birds , tom. II, pag. 62, planche LXIl, ayei?
Une benne figure coloriée.
' ^des Oijeaux étrangers, &€, i^f
•î>ec ell: femblable à ctiui de répervier ,
mais fans angles fur les côtés ; il efl
luifant & de couieur orangée, couvert
prefqu'en entier de poils , ou plutôt de
petites plumes décompofées & grifes ,
comme dans la plupart des efpèces de
choueues ; i'iris des yeux efl de la même
couieur que celle du bec, c'eft-à-dire,
orangée ; ils font entourés de blanc ,
ombragés d'un peu de brun moucheté
de petites taches longuettes & de couleur
obfcure , un cercie noir environne cet
efpace blanchâtre , & s'étend autour de
ia face jufqu'auprès des oreilles ; au-
delà de ce cercie noir fe trouve encore
un peu de blanc ; ie fommct de la tête efl
d'un brun foncé , marqueté de petites
taches blanches & rondes ; le tour du
cou & les plumes, jufqu'au milieu du
dos , font d'un brun obfcur & bordées
de blanc ; les ailes font brunes & élé=
gamment tachées de blanc , !es piumes
fcapulaires font rayées iranfverfalement
de bîanc «& de brun ; les trois piumes
ies plus voifmes du corps ne font pas
tachées , mais feulement bordées de
blanc; la partie inférieure du dos, I§
'Ip6 HîPoire Naturelle
croupion & ies couvertures du deflîïJ
de la queue font d'un brun foncé ,
avec des raies tranfverfaies d'un brun
plus léger ; la partie inférieure de ia
gorge, ia poitrine, le ventre, les côtés,
les jambes , ia couvertfire du deiTous
de la queue & ies petites couvertures
du defious des ailes Ibnt blanches , avec
des raies tranlveriaies brunes ; ies o-randes
font d'un cendré obfcur , avec des ta^
ches blanches fur les deux bords ; la
première des grandes plumes de l'aile eft
toute brune , fans tache ni bordure
blanche , & il n'y a rien de femblable
aux autres plumes de l'aiie , comme
on peut aufîi le remarquer dans les
autres chouettes; les plumes delà queue
font au nombre de douze , d'une cou-
leur cendrée en defTous , d'un brun
obfcur en deiïus avec des raies tranf-
verfaies étroites & blanches ; les jambes
& les pieds font couverts de plumes
fines , douces & blanches comme celles
du ventre , traverfées de lignes brunes
plus étroites &: plus courtes; les ongles
font crochus , aigus & d'un brun foncé.
Uu autre individu de ia même eipèe^
Aes 01 [eaux êtKcingers, &c. i<^j
èioM un peu plus gros , ^ avoit les
couleurs plus claires , ce qui fait pré-
fumer que celui qu'on vient de décrire
efl ie maie, & ce iecond-ci la femelle :
tous deux ont été apportés de la baie
de Hudfpn en Angleterre , par M.
Light, à M. Edwards.
I ï L
LE HARFANG\
Uo î s E A u qui fe trouve dans ies
terres feptentrionaies des deux contînens^
que nous appellerons Harfang, du nom
liarfaong (d) , qu'il porte en Suède , <Sc
qui par ià grandeur ed à i'égard des
chouettes , ce que ie grand duc eft à
J 'égard des hiboux ; car ce harfang n'a
point d'aigrettes fur la tête , &: il e(t
encore plus grand & pius gros que ie
* Voye7_ les -planches tnluminécs , n.° 4.58.
(d) Strix caphe lavl , corpore alhïdo. Harfaong»
Linn. Fmn. Suec, n.° 54 Nydea. Sirix
cap: te lavi , corpore altido, macul'is Imatis diftantibus
fùjcis. ldenrj.J>y?. nat, edit. X Noâuafcandmv&
ma:<ima ex aJbo & cinerco var'iegata, Rudi)eck cité
par Linnaeus. //'/V,
liij
nc}S Hîjlotre Naturelle
grand duc; comme la plupart des oi-
jeaux du Nord , il e(l prefque par-
tout d'un très - beau bianc , mais nous
ne pouvons rien faire de mieux ici, que
de traduire de l'Angrlois la bonne def-
cription que M. Edwards^ nous a
donnée de cet oifeau rare, & que nous
n^wons pu nous procurer : « la grande
53 chouette blanche, dit cet Auteur, efl
53 de ia première grandeur d:îns le genre
53 des oileaux de proie nocflurnes , 6c
D3 c'eft en même temps i'efpèce la plus
53 beile à caufe de Ion plumage qui eft
y> blanc comme neige ; fa têie n'efl pas
DD fï groffe, à proportion, que celle des
33 autres chouettes ; (es ailes , forfqu'elles
33 font pliées, ont liize pouces ( Anglois) ,
3> depuis l'épaule jufqu'à l'extrémité de
5> la plus longue plume , ce qui peut
5> faire juger de fà grandeur : on dis
>3 que c'eft un oifeau diurne, & qu'il
>? prend en plein jour les perdrix blan-
y> ches dans les terres de la baie de
S3 Hudfon (e), où il demeure pendant
( e) Nota. Que ces perdrix blanches des terres
du nord de l'Amérique ne font pas ds5 perdrix ^.
piais des gélinotte^s
des Û if eaux étrangers, &c. 'l^^
toute l'année ; Ton bec efl crochu et
comme celui d'un épervier , n'ayant et:
point d'angles fur les côtés ; il ell ce
noir & percé de larges ouvertures ou c<
narines , il efl de plus prefqu'entière- c<
nient couvert de plumes roides , fem- ce
blables à des poiis plantés dans ia ce
h:i{ç. du htQ , & fe letournant en ce
dehors ; la pupiifé des yeux ell en- c<
vironnée d ua€ iris briilaiit^ & jaune , <.<
k tête auffi-bien que le corps, les ce
ailes & la queue font d'un bianc pur ; es
ie defTus de la tête efl feulement ce
marqué de petites taches brunes , ia «
partie fupérieure du dos eft rayée cî
tranPv^erfaîement de quelques lignes c€
brunes , lés côtés fous les ailes font <.<
auffi rayés de même , mais par des c<
lignes plus étroites & plus claires ; les ce
grandes plumes des ailes font tachées c^
de brun fur les bords extérieurs , il ce
y a aulîi des taches brunes fiir les ce
couvertures des ailes , mais leurs cou- ce
vertures en deflous font purement ce
blanches , le bas du dos «Se ie croupion ce
font blancs & iàns taches \ les jambes ce
& ks pieds fom couverts de plumes c^^
l iiij
:2oo Hiflolre Ndîurelfe
5> blanches, les ongles font longs, fbrts^
>3 d'une couleur noire & très-aigus : j'ai
» eu un autre individu de cetie efpèce ,
35 ajoute M. Edwards, qui ne diiîéroit
» de celui-ci qu'en ce qu^il a voit des
35 taches plus fréquentes & d'une cou-
leur plus foncée :>:> (f). Cet oifeau qui
eft commun dans les terres de la baie
de Hudfon, eft apparemment confiné
dans les pays du Nord, car il efl très-
rare eu Penfiivanie , dans le nouveau
continent; & en Europe, on ne le
trouve plus en- deçà de la Suède & du
pays de Dantzick ; il efl prefque biauc
& fans taches dans les montagnes de
Lapponie. M. Klein dit que cet oifeau
qu'on appelle hûrfang en Suède , fe
nomme weijfebunle fchliclete-eule en Aiîe-
magne; qu'il a eu à Dantzick le mâle
êc la femelle vivans , pendant plufieurs
mois (g), en 1747. M. Ellis rapporte
//; Edwards , HiJÎ. of Birds , tom. 1 1 ,
pag. 6 [ , -planche LX I ^ avec une bonne figure
coloriée.
(g) — Ulula alla maculls tenei coloris. Hûrfang;
Suec. WeifTehunte Schlidete-euîe. Ejuftnodl avetn
anno 17 f 7, j j^i^r if^J^^am inter curioja jocktath
aes Oifeatix étrangers, é"c. .2 o Sj
que le grand hibou tianc fans oreilles
( c'efl - a - dire , cette grande chouette
tianche ) , aboncie auili - bien que le
hibou couronné ( c'eft- à-dire, le grand
duc ) , dans les terres qui avoifinent la
baie de Hudfon : il e(t, dit cet Auteur,
d'un blanc ebiouilTant, & i'on a peine
à ie dillinguer de la neige ; il y paroît
pendant toute l'année , il vole louvent
en plein jour, & donne la chaffe aux
perdix blanches (h): on voit par tous
ces témoignages , que ie harfling , qui
éft fans comparaifon la plus grande de
toutes les chouettes , le trouve afiez
communément dans les terres fepten-
trionales des deux continéns (ij; mais
Gûar repofuî. Pondus aguahat j» 4"^ -pojîià marem if
^xminam vivos ohtinui, pojî menjcs fex famina mornia ,
marem Hhenate donavu Eadtm apud Edwdrdum , t, II,
p. 6\, Ab iinco rojiri cid exitumcmdx i ~- uln<z daitl
alïs exyanjis 2\, rofîmm & ungy.es nigri ; getia , alct
inferna. , uropygium pedss pilofa laéîea ; rruncus fupernè
juper albo ex cinereo mavmoratus, Klein , Avu p. 54..
(h) Voyage de ia baie de Hudfon , tome l ;
pages // & ^6. Nota, J'ai dé/à averii que ces
perdrix étoient des géiiriotîes.
(i) Nota» On îe trouve , comme on voit , en
Lappotiie , en v5iiède & dans le nord de i'Ailemagne^
I V
.20 2 Mijîohe Naturelle
qu'apparemment cet oifeau craint lé
chaud , puifqu'on ne le trouve dans
aucun pays du Midi.-
IV.
LE CHAT- HUANT
de Cayenne *,
L'o I s E AU que nous avons cru
devoir appeler ie Chat-huant de Cayenne;,
qui n'a été indiqué par aucun Natu-
ralise ; il efl: en effet de- la grandeur
du chat-huant, dont cependant il diffère
pour ia couieur des yeux qu'ii a jaunes,
en forte qu'on pourroit peut-être ie rap-
porter également à i'efpèce de l'effraie;
©n le trouve à la baie de Hùdfon &: en Penfilvaniej
©n ie trouve aufTi en Iflande , car Anderfon l'a fair
deffiner & graver. Voyei la Dtfcnpdon de Ufiande ,.
par Anderfon, tome 1 , jwge Sj, planche I ; & quoi-
que Horrobous , qui a fait ia critique de l'ouvrage
d'Anderfon , afTure qu'ii n'y a aucun hibou ni
chouette en Jflande , ce fait négatif & général ne
doit pas être admi5 fur la parole d'un leui garant ,
dont il paroît que le but principal étoit de coa^
tredire Anderfon.
^ y^^l k^ plane kl cajmlmff^ n* ^,^
des Olfecwx étrangers, &c. 203
ïnais dans le vrai, il* ne refiemble ni à
Tun nia l'autre, &: nousparoit être un
oiieau différent de tous ceux que nous
avons indiqués : il eft particulièrement
remarquable par Ton plumage roux ,
rayé tranfverfalement de lignes en ondes
brunes & très- étroites, non-leulement
fur ia poitrine & le ventre , mais même
fur le dos , il a aufîi le bec couleur de
chair & les ongles noirs ; cette courte
defcription fufïira pour faire diflinguer
cette elpèce nouvelle de toutes les autre.s
chouettes»
y,
La Chouette ou grande
Chevêche de Canada.
Cet oïfèau qui a été indiqué par
M. Briffon (k) , fous le nom de 6//^;-
huant de Canada , nous a paru appro--
cher beaucoup plus de i'efpèce de la^
grande chevêche, & c'efl par cette raifoii
que nous lui en avons donné le nom i
(h) BrifTon, Omithoh tomçl, page ^iS]fiàî2ck
î y)
20 4* Hifîolre Naturelle
îa planche enluminée qui le repréfenle^
comparée avec celle de notre chevêche
& de notre chat-huant , luffit pour dé-
montrer que cet oilcau a plus de rapport
avec la première qu'avec le lecond ; elle
diffère néanmoins de notre chevêche,
en ce qu'elle a fur la poitrine &. fur le
ventre des bandes brimes tranfverfales ,
régulièrement difpolées , & c'eft une
chofe aflez fingulière , qui fe trouva
également dans la petite chevêche d'A-
mérique dont nous avons parlé à l'article
de la chevêche ou petite chouette, <5c
que nous n'avons confidéré que comme
une variété de cette petite efpèce.
VL
La Chouette ou gt^ande
Chevêche de Saint-Domingue.
Cet oifeau nous a été envoyé de
Saint- Domingue , & nous paroit être
une efpèce nouvelle, différente de toutes
celles qui ont été indiquées par tous \q%
Naturaliiles ; nous avons cru devoir la
rapporter par ie nom à ceUe de k
(ies Oifeai/x etrangêfs, '&c. 2. o f
CÎiouette ou grande chevêche d'Europe,
parce qu'elle s'en éloigne moins que
d'aucune autre ; mais dans le réel , elle
nous paroît faire une efpèce à part , &
qui mériteroit un nom' particulier ; elle
a le bec plus grand , plus fort ôc plus
crochu qu'aucune elpèce de chouette ,
& elle diffère encore de notre grande
chevêche , en ce qu'elle a le ventre
d'une couleur roufîâtre, uniforme, ôl
qu'elle n'a fur la poitrine que quelques
taches longitudinales ; au lieu que ïa
chouette ou grande chevêche d'Europe,
a fur ia poitrine & fur le ventre de
grandes taches brunes , oblongues &
pointues , qui lui ont fait donner le nom
de Chouette flambée, no^ua fammmî£l^
2o6 Hiflolre Naturelle
0 I S E A U X
QUI NE PEUVENT VOLER^
jLJ e s Oifeaux les plus îégers & qur .
percent les nues , nous pafTons aux
plus peians qui ne peuvent quitter la:
terre; le pas eft brufque , mais la coni-
paraifon eft la voie de toutes nos con-
noiflànces , & le contrafte étant ce qu'il
y a de plus frappant dans la compa-
railbn , nous ne laififTons jamais mieux-
que par l'oppofition , les points prin-
jeipaux de la nature des êtres que nous-
confidérons. De même , ce n'efl que
par un coup d'œil ferme fur les ex-
trêmes que nous pouvons juger les
milieux. La Nature déployée dans toute
fon étendue, nous préiente un immenfe
tableau , dans lequel tous les ordres des
êtres ioat chacun repréfcntés par une
chaîne qui foutient une fuite continue
d'objets aflcz voifms , affez femblablea^
jpour cjue leurs différences foia^t difficiles
'âes Oîjeatix'^ à"c* 20-/
a {aifir ; cette chaîne n'eit pas un fimpk
fil qui ne s'étend qu'en longueur , c'eft
une large trame ou plutôt un fluiceau ^
qui, d'intervalle à intervalle, jette des
branches de côté pour le réunir avec
ies faifceaux d'un autre ordre ; & c'eil
ilir-tout aux deux extrémités que ces
faifceaux fe plient , fe ramifient pour
en atteindre d'autres. Nous avons vu
dans l'ordre des quadrupèdes , Fune
des extrémités de la chaîne , s'élever
vers l'ordre des oifeaux par les pola^-
touches, les roufîettes, les chauve-fourisj.
qui , comme eux , ont la faculté de
voler. Nous avons vu cette même
chaîne , par fon autre extrémité , fe ra-*
•feaiffer jufqu'à l'ordre des cétacées par
îes phoques, les morfes , les lamantins.
Nous avons vu dans le milieu de cette
chaîne , une branche s'étendre du finge
à l'homme par le magot, le gibbon 5.
fe pithèque & l'orang-outang. Nous
Favons vue dans un autre point , jeter
un double & triple rameau , d'un côté
vers les reptiles par les fourmiiliers , les
phatagins , les pangolins , dont la forme
approche de celle des crocodiles , des
■j2Lo8 Hijlolre Naîiirelle
Iguanes , des lézards ; & d'autre côté
vers les cruftacés par les tatous , dont
ie corps en entier e(t revêtu d'une cui-
ra(îè offeuie. Il en iera de même du
fàilceau qui foutient l'ordie très -nom-
breux des oiieaux , fi nous plaçons
au premier point en haut les oifeaux
aériens les plus légers, les mieux volans,
nous defcendrons par degrés & même
par nuances prerqu'infenlibles aux oi-
ieaux les plus pefans , les moins agiles ,
ôi qui dénués des inftrumens nécelîaires
à l'exercice du vol , ne peuvent ni s'é-
lever ni fe foutenir dans l'air; & nous
trouverons que cette extrémité inférieure
du faiiceau, le diviTe en deux branches,
dont l'une contient les oifeaux terrellres,
tels que l'autruche , le touyou , le cafoar,
le dronte , &:c. qui ne peuvent quitter
ia terre : & f au'.re fe projette de côté
fur les pingoins &: autres oifeaux aqua-
tiques , auxquels fufage ou plutôt ie
féjour de ia ierre & de l'air font éga-
lement interdits , & qui ne peuvent
s'élever au-delTus de ia furnxe de l'eau,
qui paroît être leur élénient particulier.
Ce Ibntlà les deux extrêmes de ia chainç
des Oifeaux ,^ &c, 1 o p
<fue nous avons raifjn de confidérer
d'abord avant de vouloir faifir les mi-
lieux , qui tous s'éloignent pius ou moins
ou participent inégalement de ia nature
de ces extrêmes , & iur ieiquels milieux
nous ne pourrions jeter en effet que
des regards incertains , fi nous ne con-
noiiîions pas les limites de la Nature
par la confidération attentive des points
où elles font placées. Pour donner
â cette vue métaphyfique toute ion
étendue, & en réaiifer les idées par de
juftes applications , ^lous aurions dû ,
après avoir donné l'hifloire des animaux
quadrupèdes , commencer celle des oi-
feaux par ceux dont ia nature appro-
che le plus de celle de ces animaux.
L'autruche qui tient d'une part au cha-
meau par la forme de {ç.% jambes , &
au porc-épic par les tuyaux ou piquans
dont fes ailes font armées , devoit donc
fuivre les quadrupèdes ; mais la Phi-
iofophie eft fouvent obligée d'avoir
l'air de céder aux opinions populaires,
& le peuple des Naturaliftes qui efl
fort nombreux , fouffre impatiemment
iju'on dérange fes méthodes , & n'auroit
^i6 Hijloke Nûtuteîle
regardé cette dirpofiîion que comme
une nouveauté déplacée , produite par
l'envie de contredire ou le deiir de faire
autrement que les autres : cependant on
verra qu'indépendamment des deux
rapports extérieurs dont je viens de
parler , indépendamment de l'attribut
de la grandeur , qui feul fuffiroit pour
faire placer Tautruche à ia tête de tous
ies oiieaux ; elle a encore beaucoup
d'autres conformités par l'organifatiorï
intérieure avec les animaux quadrupèdes,
êi que tenant prefi^u'autant à cet ordre
qu'à celui des oifeaux , elle doit être
donnée comme faifant la nuance entre
î'un & l'autre.
Dans chacune de ces fuites ou-
chaînes, qui foutiennent un ordre entier
de la Nature vivante , les rameaux qui
s'étendent vers d'autres ordres font tou-
jours aflez courts & ne forment que
de très-petits genres. Les oifeaux qui
ne peuvent voler, fe réduifent à fept ou
huit efpèces; les quadrupèdes qui vo-.
îent , à cinq ou fix ; & il en efl de
même de toutes les autres branches
.'qui s'échappent de leur ordre ou du
^Jes Oifeattx^, &c. 2 i \
feîfceau principal , eiles y tiennent tou-
jours par le plus grand nombre de con-
formités , de refiemblances , d'analogies,
éc n'ont que quelques rapports &: quel-
ques convenances avec les autres ordres ;
ce font , pour aînfi dire , àç.i traits fu-
gitifs que la Nature paroît n'avoir tracés
que pour nous indiquer toute l'étendue
de fa puiiïance , & faire fentir au Phi-
iofophe qu'elle ne peut être contrainte
par les entraves de nos méthodes , vt
renfermée dans les bornes étroites du
cerck de ros idées.
^% ï z Hïjloire Naturelle
T AUTRUCHE (a).
Voye:^ planche XV de et volume,
l_j ' A u T R U C H E efl un oifeau très-
anciennement connu , pui (qu'il en eft
£ût mention dans le plus ancien à^s
Livres : ii failoit même qu'il fût très-
connu , car ii fournit aux Écrivains
facrés piufieurs comparaifons tirées de
fcs mvjsurs & de les habitudes ( bj; ôc
plus anciennement encore, fa chair étoit,
* Vo^'£7_ les planches enluminées, ii.° 4-57.
(a) Autruche, en Hébreu, Jacuah; en Arabe;
J^eamah; en Grec, S^f y^r? j en Latin , Sirwhio;
en Efpagnol , AvejiYui ; en ItaJien , Snutio ; en
A\\tms.\\à , Strujf on Sîrau(( ; tn Angiois, OJkich,
' — Autruche. %\on ,■ HiJIoire natt^relk des Oifraux,
page 231. — Mémoires pour fervir à l'Hiftoirc
des Animaux, yariie II, j)age iiS> avec une
aifez bonne figure. — Albin, tome 111 , page j ^,
planché XXXI, avec une figure coforiée.
(h) Hahîtahunt ihi flruthme^. Ifaïe, cap. XI II,
"V . 2.1, — Filîa p.'^puii mei crudelis qunfi (Iruthio in
deferio. Jérém. Thnn. cap. IV, V. \.l—lMdum
^uafi firuthionum, Mich, ca£, I ^ y, <^»
1
de TAuîrir^he. 2 r f
tloii toute apparence , une viande com-
mune , au moins parmi le peuple
puifque le Légiflateur des Juifs la leur
interdit comme une nourriture im-
monde (cj: enfin, il en eft queftioa
dans Hérodote, le plus ancien des Hil-
toriens profanes {rlj, & dans les Écrits
fcj Leulric.cRp.XI, y. iC.^Deufem. cap,
XIV, y. I 5, *
fr/J Nota. Hérodote, fi l'on en croit M. de
Saarne fOmnnoL.g/e, page y.;), parle de troii fortes
dautruches; le ihouihos aquatujue ou marin, qui eft
ie poilTon piat nomvni plye : K a:érien , ^^xl eft notre
meneau, t^ le terreitre (kamgaios), qui eft notre
autruche. De ces trois efpèces , la dernière eft la
leule dont jaie trouvé l'indicaticn dans Hérodote
(Jn Mdpomene verjus finem ) . encore ne puis - ic
être de lavis de M. Salerne fur la manière d'en-
îendreleyWo:; katagaios qui, félon moi, doit
être ici traduit par autruche fe creufant des trous dafts
la terre, non que j'admette de telles autruches, mais
parce qu Hérodote parle en cet endroit des produc-
tions fingulieres & propres à une certaine réajon de
\ Afrique, & non de celles qui fui étoient" com-
munes avec d autres contrées ( Hcz Junt iWic fera
tr item^ ciu<z ahln). Or l'autruche ordinaire étant
très -répandue & par conféquent très- connue dans
toute! Afrique, ou bien il n'en auroit pas fait
mention en ce lieu, puifqu'elle n'étoir pas ojne
produdion propre au pays dont il parbit, ou du
roojn^ s il en c^t fait ^îention , ïi auroit om^
^i4 Hîjïoh'e Naturelle
des premiers PhilofGphes qui ont traita-
des chofès naturelles ; en effet , com-
ment un animal fi confidérabie par fa
î'cpitftète de terreÛre, qui n'ajoutoit rien à l'idée
que tout ie monde en avoit ; & en cela cet Hif-*
torien n'eût fait que fuivre Tes propres principes ,
puifqu'il dit aiiieurs (in Thalia) , en parlant du
chameau , Grczcis utjotè fdentilrus non jmto dcfcri-
iendum, H faut donc, pour donner au pafTage ci-
defTus un fens conforme ài'efprit de l'Auteur, rendre
îe katagaios comme je 1 ai rendu , d'autant plus qu'il
«xifle réellement des oifeaux qui ont l'infiind de fe
cacher dans ie fable , -&. qu'il efi: queflion dans le
tnême paflage de chofes encore plus étranges, comme
de ferpens & d'ânes cornus, d'acéphales, 6fc. &
i'on fait que ce Père de i'Hiflcire n'étoit pas tou-
jours ennemi des hhlts ni du merveilleux.
X l'égard àts deux autres efpèces de firouths ;
i'aërien & l'aquatique, je ne puis non plus accorder
à M. Saierne que ce foit notre moineau ôc le
poiiïbn nommé plye , ni imputer avec lui à îa
langue Grecque fî riche, fi belle, fi fage, l'énorme
difparate de comprendre fous un même nom d«
•ctres auffi diiïemblabies que i'autruche , le moineau
& une efpèce de poiïïbn. S'il failoit prendre un
parti fur les deux dernières fortes de flrouthos ,
ï'aërien & l'aquatique , je dirois que le premier eft ;
cette outarde à long cou, qui porte encore au-
jourd'hui dans plus d'un endroit de l'Afrique Je
nom à' autruche volante , Sl que le fécond eft quel-
que gros oifeau aquatique à qui fa pefanteur ou ia
:&ibieire de fes ailes ne permet pas de voler.
'de TAuîriiclie, ^iy
grandeur , fi remarquable par fa forme ,
il étonnant par fa fécondité , attaché
d'ailleurs par fa nature à un certain
climat, qui efl l'Afrique & une panie
de i'Afie,.auroit-iI pu demeurer inconnu
(dans des pays fi anciennement peuplés,
où il fe trouve à la vérité des déferts ,
mais où il ne s'en trouve point que
l'homme n'ait pénétrés & parcourus!
La race de l'autruche cfl donc une
race très-ancienne , puifqu'elle prouve
jufqu'aux premiers temps , mais elle
lî'eft pas moins pure qu'elle efl an-
cienne; elle a fu fe conferver pendant
cette longue fuite de frècles , & tou^
jours dans la même terre , fans altération
comme fans méfalliance ; en forte qu'elle
icfl: dans les oifeaux , comme l'éléphant
dans les quadrupèdes , une efpèce en-
tièrement ifolée & diftinguée de toutes
ies autres efpèces par des çara(â:ères
auffi frappans qu'invariables.
L'autruche pafTe pour être le plus
grand des oifeaux , mais elle eft privée,
\ par fa grandeur même , de ia princi-
pale prérogative des oileaux , je veux
dire la puifTançe de voier : l'une é&
2i6 Hijlohe Naturelle
celles fur qui Vaflifnien a fliit Tes ob-^
fervations, pefoit, quoique très-maigre,
cinquante- cinq livres toute ccorchée &
vidée de Tes parties intérieures ; en lorie
que paflant vingt à vingt - cinq livres
pour ces parties & pour la graifîe qui
lui manquoit (e); on peut , fans rien
outrer, fixer le poids moyen d'une au-
truche vivante & médiocrement grafîè ,
ri foixarite & quinze ou quatre - vingts
livres : or queiie force ne faudroit-ii pas
dans les ailes ôl dans les muicles mo-
teurs de ces ailes , pour foule ver (Se
ibutenir au milieu des airs une maiïe
auffi pelante î Les forces de la Nature
paroiflënt infinies lorfqu'on la con-
temple en gros & d'une vue générale;
mais lorfqu'on la confidère de près <Sc
©n détail , on trouve que tout eil limité ;
fe) Ses, Jeux ventricules, Bien nettoyés , peroîent
feuls fix livres ; le foie ^ une livre huit onces ; le
cœur, avec Tes at*eiHettes & les troncs àes gros vaif-
(eaux , une livre iept onces; les deux pancréas,
une livre ; & il faut remarquer que les inteftins^,
qui font très-lor\gs & très-gros , doivent être d'ua
poids confidérabîe. Voye^^ Notomia dello Strujjp%
Tome I des Œuins d& ValUJnim, page 239 &
(lavantes, ' '
de F Aiiîniclic» 1 1 7
êc c'efl à bien faifir les limites que s'eft
prefcrit la Nature paT fagefîe , & non
par impuiffance , que conlifle la bonne
méthode d'étudier & fes ouvrages &
les opérations. Ici un poids de foixante
& quinze livres, efl: llipéricur par (a
feule réfiftance à tous les moyens que
la Nature fait employer pour élever &
faire voguer dans le fluide de i'atmo-
fphère des corps, dont la gravité fpé-
cifique efl un millier de fois plus grande
que celle de ce fluide; & c'eil par
cette raifon qu'aucun des oifeaux dont
iâ nialîê approche de celle de l'autruche;
tels que le touyou, le cafbar, le dronte,
n'ont ni ne peuvent avoir la faculté de
voler ; il eft vrai que la pefanteur n'eil
pas le feul obftacle qui s'y oppofe ; la
force des mufcles pecfloraux , ia gran-
deur des ailes , leur fituation avantageufe,
ia fermeté de leurs pennes ('fjj &c.
ff) Notû« J'appelle & dans la fuite j'appellerai
toujours ainfî \es grandes plumes de i'aife & de ia
queue qui fervent, foit à î'adion du vol , fort à fa
direélion , me conformant en cda à l'analogie de
ïa langue latine & à i'ufage des Écrivains àes bons
fiècles , iefquels n'ont jamais employé le mot i^euna,
dans un autre fens. Rapidisfecat petinis, Virgil^
Oifeaux } Tomi II* K
aî8 Hijlolre Naturelk
feroient ici des conditions d'autant "pîus
néceffaires , que la réfiitance à vaincre
efl plus grande : or toutes ces condi-
tions ieur manquent abfoiument ; car
pour me renfermer dans ce qui regarde
Tautruche, cet oifeau, à vrai dire, n'a
point d'ailes, puifque les plumes qui
îortent de fes ailerons font toutes éfilées^
décompofées, & que ieurs barbes font
de longues foies détachées les unes dts
autres , & ne peuvent faire corps en-
fçnibie pour frapper l'air avec avantage,
ce qui eft îa principale fondion des
pennes de Faile ; celles de la queu.e
font aulîi de ia même flruclure, & ne
peuvent par conféquent oppoier à l'air
une réfifiancc convenable ; elles ne font
pas même dilpofées pour pouvoir gou-
verner le vol en s'étalant ou fe ref-
ferrant à propos , & en prenant diffé-
rentes inclinaiibns ; & ce qu'il y a de
remarquable, c'eft que toutes les plumes
qui recouvrent le corps font encore
faites de même ; l'autruche n'a pas ,
comme la plupart des autres oi féaux ,
àQs plumes de plulieurs fortes , les
mes lanugineufes & duvetées , qui font
^Je r Autruche: it^
immédiatement fur Ja peau, les autres
d'une confillance plus ferme & plus
ferrée qui recouvrent les premières, ôc
d'autres encore plus fortes &: plus lon-
gues qui fervent au mouvement, ôc
répondent à ce qu'on appelle /es œuvres
vives dans un vaifleau : toutes les plumes
de l'autruche font de la même efpèce ,
toutes ont pour barbes des filets dé-
tachés, fans confiftance, fans adhérence
réciproque, en un mot, toutes font
inutiles pour voler ou pour diriger le
vol ; auffi l'autruche eft attachée à la
terre comme par une double chaîne,
fon excefîive pelanteur & la confor-
mation de fès ailes ; & elle efl: con-
damnée à en parcourir laborieufèment
ïa furface , comme les quadrupèdes ,
fans pouvoir jamais s'élever dans l'air ;
auffi a-t-elle, foit au dedans, foit au
dehors, beaucoup de traits de refîem-
blance avec ces animaux : comme eux ,
elle a fur la plus grande partie du
corps, du poil plutôt que des plumes;
fa tête & fes flancs n'ont même que
peu ou point de poil, non plus quiê
K ïj
'210 Hiflolre Naturelle
fes cuifTes qui font très-groffes , très-^
mufculeufes , & où réfide la principale
force ; les grands pieds nerveux <Sc
charnus qui n'ont que deux doigts ,
ont beaucoup de rapport avec les pieds
du chameau qui , lui-même , eft un
animal fingulier entre ies quadrupèdes
par la forme de fes pieds; fes ailes '
armées de deux piquans fèmblabics à
ceux du porc-épic , font moins des
ailes que des cfpèces de bras, qui lui
ont été donnés pour fe défendre; i'o-
3-ifice des oreilles efl à découvert, &
feulement garni de poil dans la partie
intérieure où eH: le canal auditif; fà
paupière fupérieure eft mobile comme
dans prefque tous les quadrupèdes , &
bordée de longs cils corn. me dans
l'homme & l'éléphant ; la forme totale
de ^&s yeux a plus de rapport avec les
yeux humains qu'avec ceux des oi-
ieaux , & ils font difpofés de manière
qu'ils 'peuvent voir tous deux à la fois
le même objet (g); enfin les efpaces
(g ) Voyez Mémoires de l'Académie , cmé^
^de ÏAiiiruch: '"lit
caîîeiix & dénués de plumes Sl de poils
qu'elle a comme le chameau , au bas
du Jlernum , & à l'endroit des os pubis ,
€11 dépofant de fa grande peianteur, la
mettent de niveau avec les bttes de
fomme îes plus terreilres , les plus
lourdes par elles-mêmes, & qu'on a
coutume de fur charger des plus rudes
fardeaux. Thévenot étoit fi frappé de
la refiemblance de l'autruche avec le
chameau dromadaire fh), qu'il a cru lui
voir une bcfîe fur le dos (^1); mais
quoiqu'elle ait le dos arqué, on n'y
tfoiive rien de pareil à cette émJnence
charnue des chameaux & des droma-
daires.
Si de l'examen de la forme extérieure,
nous pafTons à celui de la conformation
interne, nous trouverons à l'autruche
fil) Nota, II faut que les rapports cfe reffeni'*
Klance qu'a i'autruche avec ie chameau foient en
fiTet bien frappaiT^, puifque les Grecs modernes,
Jes Turcs, les Pei-fans , dic. l'ont nommée, chacun
dans leur langue , oi[c au- chameau : Ton ancien nom
Ç^îçc, jlrPinhos, eft la racine de tous les nsms, fans
exception , qu'elle a dans les différentes langues de
i'Europe.
(ij Voyages de Thévenot, îome 1 , fagt ///J
K iij
2.2 2 Htflolre Naturelle
de nouvelles diffembîanccs avec les
oifeaux , & de nouveaux rapports avec
ies quadrupèdes.
Une tête fort petite (h), aplatie, &
comporée d'os très- tendres & très-foi-
blés (l), mais fortifiée à fon foinmet
par une plaque de corne ed: foutenue
dans une fituation horizontale fur une
colonne oileufe d'environ trois pieds
de haut , & compofée de dix-fept ver-
tèbres : la fituation ordinaire du corps
eil aufli parallèle à l'horizon ; le dos
a deux pieds de long & fept vertèbres ,
auxquelles s'articulent fept paires de
côtes j dont deux de faulTes & cinq
de vraies : ces dernières font doubles à
leur origine, puis fe réunifTent en une
feule branche. La clavicule ed formée
(k) Nota. Scaîiger a remarqué que plufieurs
autres oifeaux pefans,. tels que k coq , le paon , le
dindon , &:c. avoient auiïi ia tête petite ; au lieti
que la plupart des oifeaux qui volent bien , petits
& grands , ont {a tête p5us gi'ofTc à proportion,
Exsrcit. in Cnvdamim, fol. 308, verfo,
(I) M.^* de l'Académie ont trouvé une fraélure
au crâne de i'un àes fujets qu'iis ont dilTéqués. Mé-
moires pour fervir à l'Hifloire namrclk des Animaux ^
partie ill; page 15U
de ï Autruche* I23
d'une troifième paire de faufles côtes ;
les cinq véritables vont s'attacher par des
appendices cartiiagineufes au Jlernum ,
qui ne defcend point juiqu'au bas du
ventre comme dans ia plupart à^i oi-
ièaux , ii eft aufîi beaucoup moins
faiiiant au dehors; fa forme^ a du rap-
port avec celle d'un bouclier, &: ii a
pius de iargeur que dans l'homme miême.
De i'os facrum naît une efpèce de queue
compofée de fept vertèbres iemblables
aux vertèbres humaines, le fémur a un
pied de long, le tibia & le tarfe, un
pied & demi chacun ; & chaque doigt
eft compofé de trois phalanges conmle
dans l'homme, & contre ce qui fe voit
ordinairement dans les doigts des oi-
feaux , iefqueïs ont très - rarement un
nombre égal de phalanges (m).
Si nous pénétrons pius à l'intérieur,
& que nous obfervions les organes de
ia digefiion , nous verrons d'abord un
bec aflez médiocre (n ) , capable d'une
(m) Voyez Ambr. Paré , lih. XXIX^, cap, 2 2j
Bl Vaililhieri, wme I, jmge 2^6 à" J'eq,
(n) Nota, M. J3riffon dit que fe fcec fcil
K jii;
^24 HîJIûire Trahir elle
très-grande ouverture, une langue fort
courte & fans aucun vedige de pa-
pilles ; plus loin couvre un ample
pharynx proportionné à l'ouverture du
Bec , & qui peut admettre un corps
de la grolîeur du poing; rcefophage
dl: aufii très - large & très - fort , &
aboutit au premier ventricule qui fait
ici trois fondions; celle de jabot,
parce qu'il ell le premier; celle de
ventricule , parce qu'il e(l en partie
mulculeux , (5c en partie muni de libres
mufculeufes, longitudinales & circu-
laires ( o); enfin celle du bulbe glan-
duleux qui ie trouve ordinairement
dans la partie inférieure de i'cefophage
la plus voifine du géfier , puifqu'il ell
en effet garni d'un grand nombre de
gfandes ; & ces glandes font conglo-
inérées , & non cojiglobées comme dans
ungurculé ; VaHîfnieri , que la pointe en efl obtufe
& fans crochet : ia iangue n'eft point non plus
«î'une forme ni d'une grandeur confiante dans
tous les individus. Voyej_ Animaux de Perrault,
-^aYîie II, -page 1 2. ^ , & Vaiiifnieri, uhïjufYa*
[0) VaHifnîerr, uhî fupra. — Rnmby, nJ" jSi
f ^i ^ di^ Trcinf Phflofoj)hiqiies de Londres,
de l Autruche', 2 2"|'|
' h. plupart des oifeaux (p): ce premier
ventricule efl: fitué plus bas que le fé-
cond , en forte que l'entrée de celui-ci
que l'on nomme commune'ment Vorîfica
Jiipérieur, e(t réellement f orifice inférieur
par fa fïtuation ; ce fécond ventricule
n'efi fou vent didingué du premier que
par un léger étranglement , & quelque-
fois il eil: féparé lui-même en deux
cavités diftindes par un étranglement
femblable, mais qui ne paroît point au
dehors ; il elt parfemié de glandes &
revêtu intérieurement d'une tunique vii-
ieufe prefque femblable à la flanelle j,
fans beaucoup d'adhérence , & criblée
d'une infinité de petits trous répondant
îiux orinces des glandes : il n'efl: pas
aulîi fort que le font communément les
géiiers des oifeaux , mais il eil fortifié
par dehors de mufcles très - puiflans ^
dont quelques-uns font épais de trois
pouces ; fi forme extérieure approche'
beaucoup de celle du ventricule de
l'homme,
M. du Verney a prétendu que Je
(p) Mém, peur fervir à i'Hif^oire des Animaux^-
iC Y
xzd Hîjlolre Naturelle
canal hépatique fe tcrminoit dans cc
iecond ventiicuie (q) , comme cela a
lieu dans la tanche <Sc plufieurs autres
poiflons , & même quelquefois dans
l'homme, fëlon i'obfervation de Ga-
iien (r); mais Ramby (f) & Vallifnieri
^t) afTurem avoir vu conftamment
dans plufieurs autruches i'infertion de
ce canal dans le duodénum, deux pouces,
un pouce , quelquefois même un demi'-
pouce feulement au-delTous du pylore;
& Valiifiiieri indique ce qui auroit pu
occafionner cette mëprife, fi c'en eft
ime , en ajoutant plus bas , qujl avoit
vu dans deux autruches une veine allant
du fécond ventricule au foie, iaqueik
veine il prit d'abord pour un rameau
du canal hépatique , mais qu'il reconnut
enfuite dans les deux fujets pour un
vaifTeau fanguin , portant du fang au
• -(q) Hiftojre de l'Académie Royale des Sciencc%
mnee i dp^, page 21 j^
(r) Valiifnieri, uhi jup-a»
(f) Tranfadions Philofophiques , n° ^ S^i
(î) VaHifnien, toms, 1, page 2^t\
de ï Autruche, 227
foie &. non de ia bile au ventricule (u).
Le pylore eft plus ou moins îarge
dans difFérens fujets, ordinairement teint
en jaune, & imbibé d'un fuc amer,
ainfî que le fond du fécond ventricule ,
ce qui eft facile à comprendre , vu i'in-
fertion du canal hépatique tout au com-
mencement du duodmum) ôl fa diredion
de bas en haut.
Le pylore dégorge dans ïe duodénum.
qui eft le plus étroit des inteftins, &
où s'insèrent encore les deux canaux
pancréatiques j un pied & quelquefois
deux & trois pieds au-deiïbus de Vïïh-
fertion de l'hépatique, au lieu qu'ils s'iri-
sèrent ordinairement dans les oifeaux
tout près du cholédoque.
Le duodénum eft fans valvules , ainfr
que \q jéjunum y l'iléon en a quelques-
unes aux approches de (à jondion avec
le colon: ces trois inteftins grêles font
à peu près la moitié de la longueur de
tout le tube inteftinaï , & cette longueur
eft fort fujette à varier , même dans des-
fujets d'égale grandeur, étant de foixanxe-
{uj Yaliirrueri^r tome 1, page -2^/.
2i2 Hïjlotre Naturelle ■
pieds dans les uns (x), & de ymgt-^
neuf dans ies autres (y)»
Les deux cœcum naiffent ou du com-
mencement du colon, félon les Anar
tomiftes de l'Académie, ou de la fin
de l'iléon, félon le dcdeur Ramby /l^^;
chaque cœcum forme une efpèce de
cône creux, long de deux ou trois
pieds, iarge d'un pouce à fa bafe , garni
à l'intérieur d'une valv^uie en forme de
iame fpiraie , faiiant environ vingt tours
de la ba(e au fommet, comme dans
îe iièvre , le lapin & dans le renard
marin , la raie , la torpille , l'aiguille de
mer, &c.
Le colon a aufîi fês valvules en
Jèuiiiet , mais au lieu de tourner en fpi-
raie comme dans le cœcum , ia iame ou
feuillet de chaque valvule, forme un
croiiïant qui occupe un peu plus que
la demi - circonférence du coion; en
(x) Voyez Coîiedions Philofopîiiques , ff»* //
'ifftîcîe VIII.
(y) Mémoires pour fervir à l'Hiftoire àt% hxCi*
ïnaux , fûYiie 11, -page 1^2»
(l) Tranfadions Philofophiques, »/ sS^^
de ï'Auîi'nche, 22'^
forte que ies extrémités des croidàns
oppofés empiètent un peu les unes fur
ies autres, & Te croiient de toute la
quantité dont elies iurpadent le demi-
cercie ; ftrucfture qui fe retrouve dans
ie Golon du linge & dans ie jéjunum
de i'iiomme, & qui fe marque au dehors
de l'inteflin par des cannelures tranfver-
faies , paralièles , efpacées d'un demi-
pouce, & répondant aux feuillets in-
térieurs ; mais ce qu'il y a de remar-
quable, c'eii que ces feuillets ne fie
trouvent pas dans toute ia longueur du
colon , ou plutôt c'eit que l'autruche
a deux colons bien difîincls , l'un plus
krge & garni de ces feuillets intérieurs
en forme de croiffans , fur une lon-
gueur d'environ huit pieds ;- l'autre plus
étroit & plus iong , qui n'a ni feuillets
ni valvules, & s'étend jufqu'au reâum^
c'efl dans ce fécond cofon que les ex-
crémens commencent à fe figurer félon
Vallifnieri.
Le reâum eft fortîarge, long d'en-
■vîron un pied , & muni à fbn extré-
mité de fibres charnues : il s'ouvre dans
une grande podie ou veflie eompofee
230 Hîflone Naturelle
des mêiKes membranes que les inteflîns,
mais pius épaiffes , & dans laquelle on
a trouvé quelquefois jufqu'à huit onces
d'urine (a); car les uretères s'y rendent
aufîi par une iniertion très - oblique ,
telle qu'elle a lieu dans ia vefile des
animaux terreftres ; &: non - feulement
ils y charient l'urine , mais encore une
certaine pâte blanche qui accompagne
îes excrémens de tous les oifeaux.
Cette première poche , à qui i! ne
wianque qu'un col pour être une véri-
table vefîie, communique par un orifice
muni d'une efpèce de fphrn^fler à une
féconde & dernière poche pius petite,
qui fert de pafTage à i 'urine & aux
excrémens folides. & qui e(t prefque
rempile par une forte de noyau cartiia:-
gineux, adhérant par Ca bafe à ia jondion
(a) Nota. L'urine d'aotruche eriiève îes taches
d'encre, feion Hermoîaiis; ce fait peut n'être poiiît
vrai, mais Gefner a eL4 tort d€ le nier fur ie fon-
dement unique qu'aucun oifeau n'a^'oiE d^urine;..
car tous ies oifea-ux oni àtî, reins , des uretères , &:
par conféquent de i'urine , & ils ne difërent des
quadrupèdes, fur ce point, qu'en ce que chez eux
le nâikm s ouvre daiu ia yefTre^
de l'Autruche, 2 5 î
des os pubis , & refendu par le milieia
à la manière des abricots.
Les excrémens foiides reffemblent
beaucoup à ceux des brebis ôc des
chèvres , ils font diviles en petites
iiiafîes , dont ie A^oîume n'a aucun
rapport avec la capacité des inteflins oii
ils Ce font formés : dans les inteftins
grêles , ils (è préfentent fous la forme
d'une bouillie , tantôt verte & tantôt
Hoire , félon la quantité des alimens ,
qui prennent de la confiftance en ap-
prochant des gros inteftins , mais qui
ne le figurent, comme je l'ai déjà dit^
que dans le fécond colon fl?J,
On trouve quelquefois aux environs
de V anus 3 de petits facs à peu près
pareils à ceux .que les lions & les tigres
ont au même endroit.
Le méfèntère efl tranlparent dans
toute fon étendue , & large d'un pied
en de certains endroits. Vaïlifnieri pré-
tend y avoir vu des vefliges non obA
curs de vaifîeaux lymphatiques ; Ramby
dit auffi que les vaifîeaux du méfentère
'(}} Yailifnieri, ulï Jupa\
32 3 2 Hiflôire Naturelle
font fort apparens , & il ajoute que les
glandes en font à peine vifil^les ( c );'
mais il faut avouer qu'elles ont été ab-
folument invifibles pour la plupart d^^-
autres obiervateurs.
Le foie efl diVifé en deux orrands"
o
iobes, comme dans l'homme, mais il
efl fîîué plus au- milieu de la région'
des hypocondres , & n'a point de vé-
ijcule du fiel : la rate efl: contiguë au'
premier eflomac , & pèfe au moins'
deux onces.
Les reins font fort grands ;, rarement
découpés en plufieurs lobes , comme
dans les oiféaux , mais le plus fouvent
en forme de guittare , avec un baffin-
affez ample.
Les uretères ne font point non plus
comme dans la plupart des autres oi-
féaux 5 couchés i\rr les reins , mais ren-
fermés dans leur fubflance (d),
L'épipioon eft très -petit, & ne
recouvre qu'en partie le ventricule ;
(c) Tranfaélions Philofsphiques , n." ^§^,
(d) Mémoires pour fervîr à l'Hifloire des Ani^'
de t Autruche: ^3J^
maïs à la place de i'épiploon , on trouve
quelquefois fur ies inteftins & fur tout
le ventre , une couche de graifîe ou de
fuif, renfermée entre les aponévrofes
des mufeles du bas-ventre , épaifle de-
puis deux doigts jufqu'à fix pouces ("ej^
& c'eft de cette graifîe mêlée avec ie
fang, que fe forme la manîèque , comme
nous le verrons plus bas : cette graifle
éroit fortellime'e & fort chère chez les
E.omains , qui félon le témoignage de
Pline, la croy oient plus efficace que
celle de l'oie, contre les douleurs de
rhumatifme , les tunieurs froides, la pa-
ralyfie ; & encore aujourd'hui les Arabes
l'emploient aux mêmes ufages (fj. Val-^
iifnieri efl: peut-être le feuT, qui ayant
apparemment difféqué des autruches fort
maigres, doute de fexillence de cette
graiffe , d'autant plus qu'en Italie ia
maigreur de l'autruche a pafle en pro-
verbe, magro comme irno Stru-^Tp; W ajoute ^
fe) Ramby, Tran/aélinns Phihfoj^hiques , n.° 3 ^6^
ta— G. Warren , ihïd, n.° 3 94. — Mémoires pour
fervir à l'Hiftoire des Animaux y partie Jl , -page,
J2p.
(fj The Woïld Difpîaj/cd , lom. XIII, ^,iy.
il 3 4 Hlfîoîre Naturelle
que les deux qu'il a obferve'es paroîf^
foient , étant dllfëquées , des Iquelettes
décharnés , ce qui doit être vrai de,
toutes {es autruches qui n'ont point de
graifîe , ou même, à qui on l'a enlevée,
attendu qu'elles n'ont point de chair
fur ia poitrine ni fur ie venîfe , les
inufcles du bas-ventre ne commençant à
devenir charnus que fur ies flancs Cg).
Si des organes de ia digeflion , je:
pafie à ceux de la génération , je trouve
de nouveaux rapports avec i'organiiation
des quadrupèdes : ie plus grand nombre
des oîfeaux n'a point de verge apparente;
i'autruche en a une afîez confiderable ,
compofée de deux ilgamens blancs ,
fbiides & nerveux , ayant quatre lignes
de diamètre , revêtus d'une membrane
épaifle , & qui ne s'unifTent qu'à deux
doigts près de l'extrémité: dans quel-
ques fujets , on a aperçu de pius dans
cette partie , une fubftance rouge , Ipon-
gieufe 5 garnie d'une muititude de vaii-
feaux j en un mot , fort approchant des
(g) Mémoires pour fervir à i'Hifîoire des kvÀ-
m&ux, panie 11, page izy, — Vallirnieri, zomi J,
pages 2J-I & ^/^.
ck l'AuîmcJic, ^Si
^orps caverneux qu'on obferve dans fa
A erge des animaux leïrellres ; le tout
elt renteriiîé dans une membrane com-
mune , de même fubftance que les
ligamens , quoique cependant moins
épaifTe & moins dure : cette verge n'a
ni giand, ni prépuce, ni même de
cavité qui pût donner ifTue à la matière
leminaie , ielon M.'^ les Anatomifles de
l'Académie f/ij; mais G. Warren pré-
tend avoir dilTéqué une autruche dont
la verge longue de cinq pouces &
demi , étoit creufée iongitudinalement
dans (a partie fupérieure , d'une efpèce
de fillon ou gouttière , qui lui parut
être le conduit de la femence (^ij> Soit
que cette gouttière fût formée par îa
jonclion des deux iigamens , foit que
G. Warren fe foit mépris, en prenant
pour la verge ce noyau cartilagineux
de la féconde poche dti redum, qui
efl en effet fendu, commue je i'ai re-
marqué pkis haut ; foit que la ftrucltire
&L la forme de cette partie foit fujette à
(h) Partie II , page ///.
(i) Tranfadions Phiiofophiques, »/ SPi-t
micle V*
^ 3 ^ Hifloire Naturelle '
varier en diftérens fujets : il paroîî que
cette verge efl adhérente par fa bafe à
ce noyaux cartilagineux , d'où fe repliant
en deffous , elle paiTe par la petiie po-^
che , & fort par Ton orifice externe ,
qui eil Vimùs, & qui étant bordé d'un
ïepii membraneux , forme à cett« partie "
Vîi £\ux prépuce 5 que le _ Douleur
Browne a pris fans doute pour un pré-
puce véritable , car il eil le leui qui eu-
donne un à f autruche f/ij.
ïî y a quatre mufcies qui appartien-
nent à Yûîws & à la verge, Si de- là
réiiîlte entre ces parties , une corref-
pondance de mouvement, en vertu dé
laquelle lorfque l'animai fiente , la verge
fort de piufieurs pouces ("IJ»
Les tefiicules font de différentes
groffeurs en différens fujets , & varient-
à cet égard dans la proportion- de qua-
rante-huit à un 5 fans doute félon l'âge ,*
îa faifon , ie genre de m.aladie qui a
{ÂJ Coî!e<^ions Phiiofophiques, w." /, art» VU/»
(l) Nota. Warren' a appris ce fait de ceux qui-
éîoient chargés du foin de plufîeurs autruches en'
Angleterre. Voj.>, Tranf, Phihf, i\,^ 3-94^.
de F Autruche, 2 7 y
j^récéâé la mort, &c. lis varient auffi
ipour la conirguradon extérieure, mais
laftrudure interne efi toujours fa même-
leur place eft fur les reins, un peu plus
a gauche qu'à droite; G. Warren croit
avojr aperçu des véficules léminales.
\ Les femelles ont auffi des te/licu[es •
car je pcnfe qu'on doit nommer ainfî
tes corps glanduleux, de quatre lianes
ie diamètre -fur dk-huit de longueur
que l'on trouve dans fes femeiies au^
Jeflus de l'ovaire, adhérans à i'aorte
^ k h vefrie-cave, & qu'on ne peut
voir pris pour des glandes furrénales,
{ue par ia prévention reTuItante de quel'
[ue fyftème adopté précédemment. Les
anepctières femelles ont aufTi des tef,
cules fembfablesà ceux des mâles /m),
< il y a lieu de croira , que ies outardes
?mdles en ont pareillement , & que fi
•I/' ies Anatomifles de i'Académîe
ans leurs .nombreufes difTeaions , ont
ru n'avoir jamais rencontré que des
W Hiftoîre deTAcadémie des Sciences , ^mk
'2^9 Hijîohe Naturelle
iHâles (n), c'ell: qu'ils ne vouioîent point
reconnoître comme femelle , un animal
à qui ils voyoient des tefticuies. Or ,
îout le monde fait que i'oûtarde eft
parmi les oifeaux d'Europe, celui qui
a le pius de rapport avec i'autruche,
& que la canepetière n'eft qu'une
petite outarde , en forte que tout ce que
j'ai dit dans le traité de ia génération
lur les tefticules des femelles des qua-
drupèdes , s'applique ici de foi-même à
toute cette claiTe d' oifeaux , & trouvera
peut-être dans ia fuite des applications
encore pius étendues.
Au-defTous de ces deux corps glan-
duleux , efl: placé i'ovaire , adhérant
aufîi aux gros vaiffeaux ianguins ; on
le trouve ofdinaîrement garni d'œufs de
différentes grofTeurs, renfermés dans
leur calice comme un petit gland l'eft
ëans ie fien , & attachés à i'ovaire par
ieurs pédicules; M. Perrault en a vu
qui étoient gros comme des pois , d'autres
(n) Mémoires pour fervir à i'Hiftoire àç$ Aiii*
mauX;, l'artk U, page i oSf
p.
de l'Autruche^. 2 ? p^
comme des noix, un feul comme les
deux poings (0),
Cet ovaire eft unique , comme dans
preique tous les oilèaux , &: c ell: , pour
îe dire en pafîànt, un préjugé de plus
contre l'idée de ceux qui veuîent que
içs deux corps glanduleux qui fe trou-
Vent dans toutes les femelles é^s qua-
drupèdes , repréientent cet ovaire, qui
cft une partie fimple (p) , au lieu d'a-
vouer qu'ils repréientent en effet les
teiticules , qui font au nombre des
(0) Mémoires pour fervir à i'Hif!oire à.t% Ani-
maux, j)anic il, [iage i j S,
(p) Nora. Le bécharu eft le feul oifeau dans
lequel M." les Anatomifles de l'Académie aient
^■u trouver d^ux ovaires ; mais ces prétendus ovaires
"•sîoient, félon eux, deux corps glanduleux d'une
ubflance dure & folide , dont l'un (e'efl le gauche)
e divifoit en pluileurs grains de groiïeurs inégales;
-nais fans m'arrêter à la difTérente flruclure de ces
■eux corps , & en tirer des conféquences contre
'identité de leurs fondions , je remarquerai feule-
nent que c'efl une obfervation unique & dont on
:e doit rien conclure jufqu'à ce qu'elle ait été con-
irmée; d'ailleurs, j'aperçois dans cette obfervation
Tîême une tendance à l'unité , puifque Xoi'Idv.élus ,
jui efl certainement une dépendance de l'ovaire g
:toit unique.
'Z^o Hïjloh'ê NaîureÏÏe
parties doubles , dans ies mâles des
ci (eaux comme dans les quadrupèdes.
L'entonnoir de Voviduâus s'ouvre
au»deflous de i ovaire , & jette à droite
.& à gauche , deux appendices mem-
braneufes, en forme d'aileron , leC <
queiles ont du rapport à ceiles qui (è
trouvent à l'extrémité de ia trompe dans
les animaux terreilres (^q). Les œufs
qui fè détachent de i'ovaire , font reçus
dans cet entonnoir, ôl conduits le iong
de Voviduâus dans la dernière poche in-
teflinale , où ce canai débouche par un
orifice de quatre iignes de diamètre,
mais qui paroît capable d'une diiatatioa
proportionnée au voiume des œufs.,
étant piifîé ou ridé dans toute fa cir-
conférence ; lintérieur de Voviduâus
étoit auiîi ridé , ou plutôt feuiiieté ,
comme le troifième & ie quatrième
ventricule des ruminans (r).
Enfin ia féconde & dernière poche
ïnteftinaie dont je viens de parler, a
^ (q) Mémoires pour fcrvir à l'Hifloire àes Ani^ |
inaux , jyartie II, page i ^ dt.
\ (y) Ihïdwi^ Pge.i37i ^
aufli
de l'Autruche, '2.±i
• *■
auiïi dans la fenieile Ton noyau carti»
iagineux, comme dans le mâle; & ce '
noyau , qui fort quelquefois de plus
d'un demi-pouce hors de Vairus, aune
petite appendice de la longueur de trois
lignes, mince & recourbée, que M/^
les Anatomiftes de TAcadémie regardent
comme un clitoris (f), avec d'autant
plus de fondement, que les deux mêmes
mufcles qui s'insèrent à la baie de la
ver^e dans les mâles, s'insèrent à la ba(è
de cette appendice dansies femelles.
Je ne m'arrêterai point à décrire en
détail les organes de la refpiration, vu
qu'ils relTemblent prefque entièrement
à ce qu'on voit dans tous les oiieaux ,
étant compofés de deux poumons de
<fubftance ipongieufe, & de dix cellules
à air , cinq de chaque côte'^ , dont la qua-=
trième eil plus petite ici, comme dans
tous les autres oifeaux pefans: ces cei-
iules reçoivent l'air des poumons, avec
iefquels elles ont des communications
fort fenfibles; mais il faut qu'elles en
aient atilîi de moins apparentes avec
(f ) Mémoii-es pour fcrvir à i'Wifloire des Ani-
maux, partie II, vage, /J"/.
Oijhaux, Tome II. L
1242 HijQolre Nûturelle
-d'autres parties , .puifque Valiifnier] , .en
ibufiîant dans ia trachee-artère, a vu
un gontleinenî le îong des cuifTes &:
-fous iQS ailes (t), ce qui ilippûfe une
.conformation femblable à celle du pé-
lican , dans lequel M . Méjy a aperçu ,
fous l'aiiTeHe, & entre fa cuiiTe & k
ventre, des poches membraneufes qui
fc rempiilîoient d'air , au temps de i'exr
piration , ou lor (qu'on foufiioit ave^c
force dans ia trachée-artère , & qui en
fournilToi^nt appar.emm^ent au diîu cel«
îulaire (u).
Le D odeur Browneditpofinvemeni,
que l'autruche n'a point d'épiglotte (x):
M. Perrault le fuppoie, puifqu'il nrt-
tribue à un certain inufcle , la fondion
de fermer la glotte , en rapprochant les
carùiages du larynx fy): G. Warren
prétend avoir vu une épiglotte dans le
(t) Vallifnieri, tome J, fdgc 2^fg,
(u) Mémoires de i' Académie àt% Sciences j
-pinét i6p^, tome J(, -page ^^6.
(x) CoHeaions Philofophiques, «." /, art, VIIT^
(y) Mémoires pour fervir à i'Hiftoire à^s Ani-
jpnanx, i^cjîU U, poge r^Zt
de ï Autruche. 24 V
fuJGt qu'il a dilTéqiié *(\); & Vaililhièi-i
concilie toutes ces contrariétés, en di-
fant , qu'eu effet il n'y a pas précifé-
ment une épiglotte , mais que la partie
poftérieure de la langue en lient lieu,
en s'appliquant tur la glotie dans ia
déglutition (^a), -■
11 y a aufîi diverfité d'avis fur le
nombre &: la forrae des anneaux car-
tilagineux du larynx : Vallifnieri n'eu
compte que deux cents dix -huit, &
foutient avec M. Perrault, qu'ils font
tous entiers. Warren en a trouvé deux
cents vingt-fix entiers, tans compter
ies premiers qui ne le font point , non
plus que ceux qui lont immédiatement
au-delTous de la bifurcation de la tra-
chée. Tout cela peut être vrai , attendu
ies grandes variétés auxquelles eft fu jette
ia ftru^lure des parties internes ; mais
tout cela prouve, en même temp^,
combien il eft téméraire de vouloir dé-
crire une elpèce entière d'après un petit
ïiombre d'individus, & combien il eft
{^ Tranfadions PhilofopFiiqucs , k." S^^^
(a) Yalllfnieri , tome 1 , ^age 2^ç,
h 1}
^44 Hlfîoke Naturelle
dangereux par cette méthode , de pren-»
dre ou à^t donner des variétés indivi-
duelles pour des caradères conftans.
M. Perrault a obiervé qu€ chacune
des deux, branches ce la trache'e-artère,
fe diviie en entrant dans le pournon,
en piufieurs rameaux membraneux ,
comme dans l'éléphant ( b ),
Le cerveau avec le cervelet , forjne
une mafic d'environ deux pouces &
demi de long lur vingt lignes de large;
Vallilnieri afîùre que celui qu'il a exa-
miné , ne pefoit qu'une once , ce qui
ne feroit pas la douze- cemièm.e partie
du poids de Tanimai : il ajoute , c[ue
,ia ftruCiure en étoit ierablable à celk
:du cerveau des oifeaux y & telle préci-
iement qu'elle eft décrite par Wiîlis; je
remarquerai néanmoins avec M /^ les
Anatomiues de l'Académie, que les dix
paires de nerfs prennent -kur origine
& fortent hors du crâiie, de la même
manière que dans les animaux- te^rfellres ;
que la partie. cartîcale^(?c b. partie m oel-
\t\\it du cervelet, font dilpolees comme
(h ) Mémo!:Cs pour (txv'X à riliîloire des- Ani-
m^iiyir partie II, i\'.:gc r^^.
ck F- Autruche, 24.5
dans ces mêmes animaux : qu'on y
trouve quelquefois les deux apophyfcs
vcrmiformes c|ui le voient clans l'homme,
& un ventricule , de la forme d'une
]>lume à écrire , comme dans la plupart
{\çs quadrupèdes (c).
Je ne dirai qu'un mot fur les orgnnes
de la circulation , c'eft que le cœur efl
prefque rond , au lieu que les oifcàuk
l'ont ordinairement plus alongé.
A Ttgard des fens externes , j'ai
déjà parlé de la langue, de roreilic &
de la forme extérieure de l'oeil, j'ajou-
terai feulement ici, que (a ftru<flure in-
lerne eil celle qu'on obferve ordinai-
rement daus les oifcaux. M. Rainby
j)rérend que le globe tiré de fon orbite ,
prend de lui-même une forme prefque
triangulaire (d); il a aufTi trouvé l'iiu-
meur aqueufe en plus grande quantité ,
& l'humeur vitrée en moindre quantité
qu'à l'ordinaire (e)*
(c) Mémoires pour fervir à l'Hifloire àti Ani-
maux , imrt'u U. j)age J J ^
(d) Tranfadions Philorophiques, »/ ^/jfa
(e) J'uidm , ïî.*" 386.
L iij
'2,4'6 Hîfîoh'ê NaîiireÏÏe
Les narines font dans le bec fupe-
rieur, non loin de fa bafe ; il s'élève
du milieu de chacune des deux ouver-
tures, une protubérance cartilagineufe
revêtue d'une membrane irès-fine , &:
ces ouvertures communiquent avec ie
palais, par deux conduits qui y abou-
liiïent dans une fente affez confidé-
rabfe ; on fe troniperoit , fi l'on vouloit
conclure de îa ftrudure un peu com-
pliquée de cet organe , que i'autruche
cxceile par ie fens de l'odorat ; les fiits
ies mieux confcatés nous apprendront
bientôt tout le contraire, & il paroîten
général , que ies fenfations principales
& dominantes de cet animal , font ceiles
de la vue & du fixîème fens.
Cet expofé fuccinél de i'organifation
intérieure de l'autruche, eft plus que
fuflîfint pour confirmer l'idée que j'ai
donnée d'abord de c&i animai inigulier
qui doit être regardé comme un être
de nature équivoque , & faiiant ia nuance
entre ie . quadrupède «Se i'oifeau Y/y^/
fà place, dans une méthode où l'on fe
(f) Panîm avis partîm quûÂrvpes , dit très - Lfen
ÂriftoîC; lib. IV, dcfanïhu^ animaHuni, cip. uitirao*
{le ï Autruche. 24/
fjropoferoit de représenter le vrai iyf-
tème de la Nature, ne feroit ni danS'
ia clafTe des oileaux , ni dans celle àts
quadrupèdes , mais ilir le pafjage de
l'une à l'autre; en efiet, quel autre rang,
nfijgiier à un animai, dont ie corps,
mi- parti d'oifeau (Se de quadrupède,
efl porté fur des pieds de quadrupède ,
é< iurmonîé par une tête d'oifeau , dont
ïe mâle a une verge & la femelle vui
clitoris, cojnme les quadrupèdes, 6c
qui néanmoins eil ovipare , qui a un
géfier comme les oiieaux, & en même
teinps plufieurs eftomacs <& des intedins ,
qui par leur capacité & leur rtructure ^
répondent en partie à- ceux des rumi-
nans , en partie à ceux d'autres qua-
drupèdes î
Dans l'ordre de la fécondité, l'au-
truche femble encore appartenir de plus
près à la claife des quadru|)èdes qu'à
celle des oiicaux ^ car elle eil très-
féconde , 6c produit beaucoup. AriRo^e
dit qu'après i'aiuruche , l'oifeau qu'il
nomme airïcapilla, efi celui qui pond
Ig plus ; & il ajoute que cet oifeau
ûtrïcapïllat pond vingt œufs & davay-
L iiîj
248 Hîjioïre Naturelle
tnge ^g); d'où ii fuivroiî que i^autruche
en pond au moins vingt-cinq: d'ail-
kurs , félon ies Hiftoriens modernes &
ies voyageurs les piu4 infiruiis , elle
£àïi piuiieufs couvées de douze ou
i|iiiriZ€ ceuls chacune. Or , fi on ia rap-
ponoh à la clafiè des oifeaux . elle feroit
ia plus grande , & par conféquent de-
vroîî produire le moins, fuhrant l'ordre
€|ue (uîc conftamment ia Nature dans
ia lîiuitipiicatîon des animaux , dont elle
paroît avoir fixé la proportion en raifon
invcriè de ia grandeur des individus ; au
iieu qu'étant rapportée à la ciafTe des ani-
Biaux lerrellres, elle le trouve très-pedte,
ïtlaiîvement aux plus grands, (k ]>lus
petite que ceux de grandeur médiocre,
tels que le cochon , <k la grande fécondité
lentre dans Tordre naturel & général.
Oppien , qui croyoit mai- à-propos
que ies chameaux de la Baéiriane s'ac-
coupi oient à rebours & en fe toun ani:
le derrière, a cru par une fecorde
erreur, qu'un oife au- charrie au , (car c'eil
le nom qu'on donnoit dès-iors à l'au*
iruche) ne pourroit manquer de s'ac-
(g) Hiji, aitimah lib, IX, cap. xxv.
^e ï Autruche, 14.^
coupler de la même fxiçon , & il l'a
avancé comme un fait certain ; mais
cela n'eR pas plus vrai de i'oifeau-cha-
ineau , que du chameau lui-même,
comme je l'ai dit ailleurs ("hj: &. quoi-
que , félon tome apparence , peu d'ob-
ièrvateurs aient été témoins de cet ac-
couplement , & qu'aucun n'en ait rendu
compie, on eit en droit de fuppofet
qu'il fe fait à la manière accoutumée^
jufqu'à ce qu'il y ait preuve du Goii-
traire.
Les autruches pafîent pour être fort
lafcives Si s'accoupler fouventj & fi
l'on fe rappelle ce que j'ai dit ci-defTus
des dimeiiiions de la verge du mâle ^
on concevra que ces accouplemens lié
fc paffent point en fiinpiescomprefïlGnsj
comme dans prefque tous les oiicau^^
mais qu'il y a une intromiflion réelle
des parties fexuelles du maie dans celte
de la femelle. Thévenot efl le feul qui
cfîie' qu'elles s'affortilTent par paires, ôc
(h) Voyez îe tome X, -page f/ <3e cette nou-
vélie édition ; & le tome Xîl,pâge j2^ de léditicA
en trente-un volumes.
2. 5 o HiJIoh'e Naturelle
que chaque m Me n'a qu'une femeîle ,
contre i'ulage des oifeaux pcfans (i).
Le temps de la ponte dépend du
climat qu'elles habitent, & c'e(l tou-
jours aux environs du folilice d'été ,
c'eft-à-dire au conmiencement de juillet,
dans l'Afrique feptentrionale (k) , & fur
îa fin de décembre dans l'Afrique mé-
îidionale (l). La température du climat
influe aufîi beaucoup fur leur manière
de couver; dans la zone torride, eiles
fe contentent de dépofer leurs œufs fur
un amas de fable qu'elles ont formé
groffièrement avec leurs pieds , &. où
îa feule chaleur du foleil les fût éclore ;
à peine les couvent - elles pendant la
Tiuit: & cela même n'efi pas toujours
nécelTaire puifqu'on en a vu éclore ,
qui n'avoient point été couvés par la
îiière , ni mjêiue expofés aux rayons du
foleil (m); mais , quoique les autruches
'(t) Voyage de Thévenot, tome h -page ^//s
(k) Albert , de Animal, lib. XX ni.
(IJ Voyage de Dampier autour du monde;
t{>me 11, page ^ / / .
^(m) Janne^uin étant au Sénégal, mit dans f^
de l'Aumiche. 2 5 i|
ne couvent point outijue très -peu leurs
œufs , il s'en fk\ut beaucoup qu'elles les
♦abandonnent: au contraire, elles veil-
lent alîidûment à leur confervation, &
ne les perdent guère de vue; c'efl de-
là qu'on a pris occalion de dire qu'elles
les couv oient des yeux , à la lettre : &
Diodcre rapporte une façon de prendre
ces animaux , fondée fur leur grand
aitachement pour leur couvée ; c'ell de
planter en terre , aux environs du nid
ëi. à une jufle hauteur , des pieux armés
de pointes bien acérées , dans lefquelles
la mère s'enferre d'elle-même lorfqu'eije
revient avec empreifement fe pofer fur
fes œufs Cn).
Quoique le climat de la France foit
beaucoup moins -chaud que celui de la
Barbarie, on a vu des autruches pondre
à la ménagerie de Verfiilles; mais M/^
de l'Académie ont tenté inutilement de
faire éciore ces œufs par une incubation
caffette deux œufs d'Autmctie tien enveloppés d'ë-
toupes j quelque temps après il trouva que i'iin
de ces œufs étoit prêt d eclore, Vr^yei Hijîoire ^if-
vérale des voyages , tome ll'^fage ^j S»
L v;
a 5 2 Hïjloke Naturelle
artificielle , foit en employant h chaleur
du foieii , ou celle d'un feu gradué &
îîîénagé svec art : ils n'ont jamais pu
parvenir à découvrir dans les uns ni
dans les antres ^ auci;^ne organiintion
commencée , ni même aucune dilpoii-
tion apparente à ia génération é^un
nouvel être ; k jaune ôk ie blanc de
celui qui avoit été expoie au feu ,
s'étoient un peu épaiflis , ceiui qui
avoit été mis .\x foîeil , avoit contradé
une très-mauvaiie odeur ; & aucun ne
préientoit fa irioindre apparence d'un
fœtus ébauché ^o), en forte que cette
incubation philolophiquc n'eut aucun
fuccès. M. de Reaumur n'cxiftoit pas
encore.
Ces œufs font très-durs, très-pefans
â: très -gros: mais on fe les repréfente
quelquefois encore plus gros qu'ils ne
font en effet, en prenant d^s œufs de
crocodiles pour des œufs d'autruche (o);
on a dit qu'ils étoient comme ia lête
(o) Mémoires pour fervir à i'Hifloire des Ani-
maux, far tic /y, -page i ^S,
(j>J Bdon , HiJL na» des Oifiatt^, page 23^,
de F Autruche, 253
d\ui enfiint (q), qu'ils* pou voient con-
tenir jufqu'à une pinte de liqueur (r),
qu'ils pelbicnt quinze livres (f), &
qu'une autruche en pondoit cinquante
dans une année (t) ; Eilen a dit jufqu'à
quatre-vingts ; mais la plupart de ces
faits me paroiflent évide mmeni exagérés ;
car I ° comment (e peut-il faire qu'un
oeuf dont la coque ne pèfe pas plus
d'une livre, & qui contient au plus une
pinte de liqueur , Toit du poids total de
quinze livres ! il faudroit pour cela que
le bkinc &. le jaune de cet œuf, fût fept
fois plus àQn.ÇQ que l'eau, trois fois plus
que le marbre, & à peu-près autant
que l'étain , ce qui eft dur à fuppolèr.
zJ" En admettant avec Wiiiulghby-j
que l'autruche pond dans une année
cinquante œufs , pe(ànt quinze livres
chacun , il s'enfuivroit que le poids totaî
{(f) y^'{[{\i\^hYt Ornlthoîflgia , pag. 105.
(r) Beion , Hift, nat, des Oifeaux , fwge 235.
(f) Léon- r Africain, Defcripthn <k l'Afrique:
lib. IX. — Wiiiulghby, ubi fipra.
(t} Wiilulgliby, ibiém.
^54 Hïfioire Naturelle
de la ponte, feroit de fept cents cin-
quante livres, ce qui eil beaucoup pour-
un animai qui n'en pèle que quatre -
"vingts.
II me paroît donc qu'il y a une ré-
dudion confidérable à faire, tant fur
le poids des œufs que fur ieur nombre ,
ÔL il ell fâcheux qu'on n'ait pas de
me'moires allez lûrs pour déterminer
avec judefTe ia quantité de cette réduc-
tion ; on pourroit , en attendant , fixer
le nombre des œufs d'après Ariilote,.
à vingt-cinq ou trente ; & d'après les
Modernes qui ont parié le plus fage-
ment, à trente-fix : en admettant deux
ou trois couvées, & douze œufs par
chaque couvée, on pourroit encore dé-
terminer le poids de chaque œuf, à
trois ou quatre livres , en paiTant une
livre plus ou moins pour la coque , &
deux ou trois livres pour la pinte de
blanc & de jaune qifelie contient : mais
H y a bien loin de cette fixation conjec-
turale à une obfervation précité. Beau-
coup de gens écrivent, mais il en efl
peu qui mefurem, qwi pèfeat , qui
de ï Autruche. 2 5 5
comparent ; de quinzç ou feize autru-
ches , dont on a fait la dilîedion en
difiérens pays, il n'y. en a qu'une feule
qui ait été pcfce, & c'eft celle dont
nous devons la dcfcription à VaHifnierî.
On ne fait pas mieux ie temps qui eft
néceiiaire pour l'incubation des œufs ;
tout ce qu'on fait , ou plutôt , tout ce
qu'on affure, c'ed qu'aufîi-tôt que les
jeunes autruches font éclofes, elles font
en état de marcher , & même de courir
h. de chercher leur nourriture (u) ^ en
forte que dans la zone torride où elles
trouvent ie degré de chaleur qui leur
convient & la nourriture qui leur cft
propre , elles font émancipées en naif
flmt, & font abandonnées de leur mère
dont les foins leur font inutiles : mais
dans les pays moins chîiuds, par exem-
ple , au cap de Bonne-êfpérance , la
mère veille à fes petits, tant que fes
fecours leur font néceifaires (x) , & par-
tout les foins font proportionnés aux
be foins.
(u) Léon -l'Africain, Defcription de PA/ri^iae,^
iib. IX.
^xj IColbc; Defcrlpîlon qu Cap^
2.^6 H'ijlolre Ndturdk
Les jeunes autruches font d'un gris-^
cendré ia première année , & ont des
plumes par-tout, mars ce font de fauflès
plumes qui tombent bien-tôt d'elks-
înêmcs pour ne plus revenir fur les
parties qui doivent être nues , comme
ia tête, !e haut du cou, ies cuifTes, les
fiaiics ôi le defîous des ailes; elles iont
remplacées fur le rcfte du corps pc^r
des plumes aiternativemient blanches &
noires , & quelquefois gril es par le mé-
lange de ces deux couleurs fondues en-
fcmbie ; les plus courtes font fur ia
partie inférieure du cou, la feule qui
en foit revêtue; t\\ç.s deviennent plus
iongiîes fur ie ventre ai fur le dos, les
■\Am^ longues de toutes font à Textré-
mlté de la queue & des ailes , & ce font
fes plus recherchées. M. Klein dit ^
d'après Albert, que les plumes du dos
font très-noires dans ies mâles & brunes
dans les femelles (y): cependant M/* de
i' Académie qui ont diiïcqué huit au-
truches , dont cinq mâles & trois fe-
melles, on^: trouré le plumage à peu
(y) Klein, Hijl, Avhim , pag. i 6, — Albert,
'A^ui Gejmrum dt Avibut , pag, j^u
de V Autruche. 257
près feniblable dans les unes & les
yiurcs (\) , mais on n'tii a jamais vu
qui euflent des ]>iumes rouges, vertes,
bitues cSc jaunes, comme Cardan fembie
Tavoir cru , par une méprife bien dé-
placée dans un ouvrage yiù/ la fuhîilïté*
Redi a reconnu ])ar de nombreufcs
obfervations , que prefque tous les oi-
féaux étoient fujcis à avoir de la vermine
dans leurs plumes , 6c même de piu-
licurs efpcces ; «Se que la plupart iwoient
leurs inledes particuliers qui ne fe rcn-
controient point ailleurs, mais il n'en
a jamais trouvé en aucune fciifon dans
les autrucfccs , quoiqu'il ait fait fes ob-
fervations fur douze de ces animaux j
dont quclques«uns étoient récemment
arrivés de Barbarie (a).
D'un autre côié Valiifnieri qui en a
difléqué deux, n'a trouvé dans leur
intérieur ni iombrils , ni vers, ni infedcs
quelconques (b); il lemble qu'aucun
(lj Mémoires pour fervir à i'Hiftolre des Anï»
maux , jyartk II, page / i ^ i
(a) Coliedion Acad. tonie 1 de /'Hiftoii'e natu-
relle, page ^6^f»
(b) (Euvres de Valliûiieri, tome I, page 2^^»
2 5 8 HîjMre Naturelle
de ces animaux . n'ait d'appétit pour îa'
ehair de l'autruche , qu'ils l'évitent nîêir.e
& la craignent , &. que cette chair ait
quelque qualité contraire à leur multi-
plication , à moins qu'on ne veuille
attribuer cet cifet, du moins pour l'in-
térieur , à la force de 1 eilomac ôl de
tous les organes digeftifs, car l'autruche
a une grande réputation à cet égard,
il y a bien des gens encore qui croient
qu'elle digère le t^ï , comme la voraille'
commune digère les grains d'orge ;■
quelques Auteurs ont même avancé
qu'elle digéroit le fer rouge (c); mais on
îne diiDenfera , fans doute , de réfuter
férieiifement cette dernière aflertion ; ce
fera bien aflez de déterminer d'après les-
faits , dans quel fens on peut dire que
Faatruche digère le fer à froid.
Il eft certain que ces animaux vivent
principalement de mxatières végétales ,
qu'ils ont le géfier muni de mufcies
très-forts, comme tous les granivores (d),
(c) iMarmoi , D.j'cri^nion de l'Afilcjuc , tome I , '
page 6 s..
( d) Nota, Quoijue i'autruchis foit omnivore
dam le tait , ii Itmbie nàmmoms qu'on dois ia
de l'Autruche, ^59
& qu'ils avaient fort fotivent du fèr ^e),
au cuivre, des pierres, du verre, du
}3ois ÔL tout ce qui fe pré fente ; je ne
nier^ois pas même qu'ils n'avalafîent
queIc[uefois du fer rouge , pourvu que
ce fut en petite quantité , 6l je ne penfî
pas avec cela que ce fat impunément:
ii paroît qu'ils avalent tout ce qu'ils
trouvent , jufqu'à ce que leurs grands
eiiomacs foient entièrement })Ieins, 6c
que ie befoin de les iefter par un vo-
lume fufiifant de matière, eil l'une dts
principales caufes de ieur voracité. Dans
îes fujets difTéqués par \^'^arren ^J'J ëc
par Ramby /gj^ les ventricules étoienî
ranger pamHes grani\'ores, puifque dans Tes ciéferts
elle vit de daites k autres fruits ou matières vécé-
taies, 6c que dans les ménageries on !a r.ourrit de
ces mcincs matières: d'ailleurs, Sîrabon nous dit,
Iih. VI , que loi'fque les chaiTeurs veulent i'attircj*
dans ie piège qu'ils lui ont préparé, ils iui pré-
Tentent du grain pour appât,
(e) Je dis fort foiivent , car Albert afTure très-
pofitivement qu'il n'a jamais pu faire avaier du fer
à plufieurs autruches, quoiqu'eiies dévorafrent avi-
dement des os fort dur.'^ & même des pierres. Voj'e-^^
Cejner , de h\\hv.s , pig. /-f^, C*
(f) Tranfadions Phiîofophiviue^ , w/j»^^»
(g) Ibïim.iL' s^6.
2 6o Hijhke Naturelle
teilement reiiipiis &l diftendus, que fa
première idée qui vint à ces deux Ana-
tomiftes , fut de douter que ces auiiuaux
eufîènt jamais pu digérer une tefie fur-
charge de nourriture. Ramby ajoute que
les matières contenues dans ces ventri-
cules paroiiToient n'avoir fubi c|u'une
légère aïteration. Yaliiinîeri trouva auiîî
ie premier ventricule entièrement plein
d'herbes , de fruits , de légumes , de
noix , de cordes , de pierres , de verre ,
de cuivre jaune & rouge , de fer , d'e-
tain, de plomb & de bois; il y en
avoit emr 'autres un morceau, à. c'étoit
le dernier avalé , puifqu'ii étoit tout au-
deifus, lequel ne y)eroit pas loin d'une
livre (hj. M/^ de l'Académie afiurent
que les ventricules des huit autruches
qu'ils ont obfervées, fe font toujours
trouvés remplis de foin , d'herbes ,
d'orge, de {è^es^ d'os, de monnoies,
de cuivre & de cailloux > dont quelques-
uns avoient la grofieur d'un œuf (i);
i'autruche emafie donc les matières dans
(h) Opère di Vallïjnkri , tome î , page 24.0.
(i) Mémoires pour fervir à l'Hifloire àçi Anî^
î«aux, partie îlf page 2 2p>
de ï Autruche, 261
*
fes eflomacs à niiloiî de leur capacité,
& par la néceilité de les remplir; «Se
comme elle digère avec fliciiité ôc promp-
titude, il eil ailé de comprendre pour-
quoi elle eil inlatiible.
Mais quelque inlatiabîe qu'elle ibit,
on me demandera toujours , non pas
pourquoi elle conlomme tant de nour-
riture, mais pourquoi elle arale des
matières qui ne peuvent point la nourrir,
& qui peuvent même lui faire beaucoup
tk mai; je répondrai que c'eil: parce
qu'elle efi: privée du fens du goût, &
cela eil d'autant plus vraiiemblable, que
-iii langue étant bien examinée par d'ha-
! biles Anatomldes, leur a paru dépourvue
I de toutes ces papilles ienfibles & ner-*
j veufes , dans leiqueiles on croit avec
ï aHez de fondement que réfide la fen-
fuian du goût //;/ .- je croirois même
; qu'elle auroit le iens de l'odorat fort
i obtus , car ce iens efl celui qui fcrt
le plus aux animaux pour le diicerne-
iment de leur nourriture; & l'autruche
la il peu de ce diicernement, qu'elle
avale non-ieulementle ter, les cailloux 5
j C/iJ Vaiiirnieri, :ome 1 , page 2fp,
'%()% PAflone NûturcUe
îe Yerre, mais même le cuivre qiù a
une Çi mauvaile odeur , & que Yallif-
nieri en a vu une qui étoit mort€ pour
avoir dévoré une grande quantité de
chaux vive (l): les gallinacés & autres
granivores , (|ui n'ont pas les organes
du goût fort ienfibies , avalent bien de
petiies pierres qu'ils prenneiit apparem-
ment pour de petites graines , loriqu'elles
font mêlées enfembie; mais fj on leur
préfente pour toute nourriture un nom-
bre connu de ces petites pierres , ils
mourront de faim , fans en avaler une
feule (m); à plus forte raifon ne tou-
eheroient-iis point à la chaux vive : &'
l'on peut conclure de-là , ce me femblé,'
que l'autruche eO: un des oifeaux dont
ks fens du goût , de l'odorat , &
même celui du toucher dans les parties
internes de la bouche , font les plus
émoufTés & les plus obtus ; en quoi il \
faut convenir qu'elle s'éloigne beaucoup
^e la nature des quadrupèdes.
(I) Vallifnieri, tome 1 , page -2^/«
(m) Colîedion Académi(jue , tome I de /'Hifloîr^ <
fimxïé.\c, page ^^^t
de f Autruche. z6y
AJais enfin que deviennent les CabC^
tances dures, refradajfes & nuifibles,
que lautruchç avale lans choix & dans
ia feule intention de fe remplir! que
deviennent lur-tout fe cuivre, le verre,
Je fer ! fur cela les avis font partages^
âc chacun çjte des ftits à l'appui"^ de
fon opinion. M. Perrault ayant trouvé
foixanre & dix doubles dans reiioniac
,-d'un de ces animaux , remarqua qu'ils
étoient la plupart ufés & confumés
prelque aux trois quarts ; mais ii jugea
que c etoit plutôt par lewr frottement
piutuel & celui des cailloux, que par
i'adion d'aucun acide, vu que quel-
ques-uns de ces doubles qui étoient
boflus , fe trouvèrent fort ufés du côté
convexe , qui étoit aufli le plus expoie
aux frottemens, & nullem.ent endoiii^
înagésdu côté concave ; d'où il conclut
que dans les oifeaux , ia diffolution de
ia nourriture ne fe fiit pas feulement
par des efprits iiibtils & pénétrans, mais
encore par l'adion organique du ven-
tricule qui comprime & bat inceffam-
ment les alimens avec les corps durs
gue ces mêmes animaux ont i'inflinv't
2. 64 Hijloire 'Naturelle
d'avaîer; & comme toutes les matières
contenues dans cet edomac e'toient
teintes en vert ; il conclut encore que
ia difTolution du cuivre s'y éroit fliiie,
non par un diil'olvant particulier, ni
par voie de digefiion , mais de la même
manière qu'elle Te feroit fi l'on broyoit
ce méral avec des herbes , ou avec quel-
que liqueur acide ou falée : il ajoute
que le cuivre, bien loin de fe tourner
en nourriture dans i'eflomac de i'au-
truche , y agiffoit au contraire comme
poilon, & que toutes celles qui en
avaloient beaucoup mouroient bien-tôt
après (n),
Vallilnieri penfe au contraire que
rautmche digère ou diiTout les corps
durs, principalement par i'adion du
diffolvant de i'edomac , lans exclure
celle à^s chocs & frottemens qui peu-
vent aider à cette adïion principale ;
voici les preuves :
i.° Les morceaux de bois, de fer
ou de verre qui ont réjourné queîq?je
temps dans les ventricules de l'autruche,
(n) Mémoires pour fervir à fHifioire des Ani-
maux, ^rtie il, pcgt j 2p,
ne
^e T Autruche. 26 ^^
ne font pomt lifles & tuifans comine ils
devroient l'être , s'ils cufTent été ufés
par le frottement ; mais ils lont raboteux,
fiilonnés , criblés comme ils doivent
i'être , en ruppofant qu'ils aient été
rongés par un difToIvant aélif :
2,.° Ce diffolvant réduit les corps
ies plus durs , de même que les herbes,
îes grains & les os, en molécules im-
palpables qu'on peut apercevoir au
microfcope Sl même à i'œii nu :
3 .° II a trouvé dans un eftom-ac
d'autruche un clou implanté dans l'une
de fès parois , & qui traverfoit cet el-
tomac de façon que les parois oppofées
'lie pouvoient s'approcher ni par confé-
quent comprimer les matières contenues,
autant qu'elles îe font d'ordinaire ; ce-
pendant les alimens étoient aulîi - bien
difTous dans ce ventricule , que dans
un autre qui n'étoit traverfé d'aucun
clou , ce qui prouve au moins f|ue îa
digeftion ne fe fait pas dans l'autruche
uniquement par trituration :
4.° II a vu un dés à coudre , de
cuivre , trouvé dans i'eftomac d'un
chapon , lequel n'étoit rongé que dans
OifeauXf Toms Jl, M
7.(iG Hijloire NatureUe
ie feul endroit par où il touchoît atl
gefier, & qui par conlëquerit étoit ie
moins expoié aux chocs dei autres corps
durs ; preuve que la diflolution des
métaux , dans l eitomac des chapons ,
fe fait plutôt par l'aCiion d'un diiToIvant,
quel qu'ii roit , que par celie dç.s chocs i
& des trottemens , c\ cette conlequence ^
s'étend aflez natuxeliement aux autm-]v
ches :
5/ Il a ^-u une pièce de monnoic
rongée il profondément , que Ion poids
étoit réduit à trois grains :
6. Les glandes du premier eflomac
dccnent , étant pre (Tees , une Liqueur
vifqaeute , jaunâtre , inilpide , ô: qui
néanmoins imprime très -prom.p rement
fur ie fer . une tache oblcure :
7.' En5n , i"ac1:iyité de ces fîics ,
la force à^i mufdes du géîîer , & ia
couleur noire qui teint les excréiriens
des autruches qui ont avalé du fer ,
comme eïïe teint ceux des perfonnes
cr^ f:nt uilge des martiaux & les ài^,^
gèrent bien , venant à i'appui d^s ^^J^J
precédens . autoriient VaiLlhieri à con-^
jectiiTcr. n:n pas tout -à- fait, que les^
/
"de TAutntcIie. 16 j
autruches digcrcnt le fer & s'en nour-
îifl'ent, comme divers iniedes ou reptiles
le nourrilTent de terre & de pierres j
mais que les pierres , les métaux & fur-
tout le fer , diflous par ie fuc des glandes,
fervent à tempérer comme ablbrbans ,
les fermens trop acflifs de i'eftomac ,
qu'ils peuvent le m.êler à la nourriture
commue eicmens utiles , i'afiailonner ,
augmenter la force des folides, & d'au-
tant plus que le fer entre , comme on
fait, dans la compolîtion des erres vivans ;
<5i: que lorfqu'ii eft luftiiâmment atténue'
par des acides convenables, il le voîa-
tiiife & acquiert une tendance à végéter,
pour ainfi dire , & à prendre des formes
analogues à celles des plantes , comme
on le voit dans i "arbre de mars foj; ôc
ceil en effet le feui (ens raifonnable
dans lequel on puiile dire que l'autruche
fo) Mémoires de i'Académie des Sciences, années
j yo j, T /O 6 iT fuivanies. — Vaiiilnieri , tome I ,
rr-ge z^2. ; & ii confirme encore Ion fentimenC
par les obfervations de Santorini fur des pièces de
monnoie & des clous trouvés dans i'eftomac d'une
autruche qu'il avoir dilléquée à Venife , & par le*
expérience; de i' Académie (M Cimaito , fur la digçi-,
tion àç^ Oiieaux,
^6% Hîflehe Natureik
digère le fer , & quand elle auroit Tef^
îoinac affez fort pour le diaérer véri-
.îablement , ce n'elt que par une erreur
bien ridicule qu'on auroit pu attribuer
à ce géfier, comme on a fait, la qualité
d'un remède & la vertu d'aider la di-
gellion , puil qu'on ne peut nier qu'il
ne foit par lui-même un morceau tout-
à-fait indigefte : mais telle ejfl: la nature
de refprit bum.ain ; lorfqu'ii efl une
fois frappé de quelque objet rare &
fingulier, il fe plaît à le rendre plus
fniguiier encore , en lui attribuant des
propriétés chimériques & fouvent ab-
furdes : c'efi: ainfi qu'on a prétendu que
ies pierres les plus tranfparentes qu'oa.
trouve dans les ventricules de l'autruche,
avoient aufli la vertu , étant portées aa
cou, de faire faire de bonnes digeftions;
que la tunique intérieure de fon géfier
avoit celle de ranimer lui tempérament
afFoibli & d'infpirer de l'amour ; fon
foie j celle de guérir le mal caduc ; (on
fang , celle de rétablir la vue ; la coque
de les œufs réduite en poudre , celle
de foulager les douleurs de la goutte
& de ia gravelle , &c, Yallifnieri a eu.
- i'€ T'Autniclïei 16 (.y
«ccafion de conflatcr par Tes expériencesp?
3a raniTeté de la plupart de ces prétendues-
vertus; & les expériences lont d'autaat
plus décifives, qu'il les a faites fur les
perfonnes les plus crédules & les plus-
prévenues (p)»
L'autruche efl un j^ifeau propre &
particulier à l'Afrique, aux îles voifines
de ce continent (q) , & à la partie de
i'Afie qui confine à l'Afrique ; ceS'
régions qui font le pays natal du cha--
meau , du rhinocéros, de l'éléphant &
de plufieurs autres grands animaux 5
dévoient être auffi la patrie de l'autru-
ehe 5 qui ed l'éléphant des oifeaux ;
elles font très-fréquentes dans les mon=
tao-nes fituées au fud-oueft d'Alexandrie,
fuis-ant le dodeur Pokoke. Un Mif-
iionnaire dit qu'on en trouve à Goa ^
mais beaucoup moins qu'en A rabie (r);:
(p) Valiifnien, tome I, y agi 2 j y,
(q) Le vorou-patra de Madagafcar eft uns
cTpèce d'autruche qui le retire dans les lieux déferts
& pond àt% œufs d une finaulière grolTeur. Hifîoire.
générale dt s vo^'agcs , tome VIII, page 6o6y citant?
Flaccour.
. /V Voyage du Fr. Philippe, Carme-déchaufle^-
}>agt ij8,
M ii;
%jo Tfijlohe T^aUireUe
Philoflrate prétend même qu'ApoîîonîuS'
en trouva jufqu'au de-là du Gange (J) ,
mais c'étoit fans doute dans un temps
où ce pays étoit moins peuplé qu'au-
jourd'hui: les Voyageurs modernes n'en
ont point aperçu dans ce même pays ^
finon celles qu'on y avoit menées d'ail-
leurs (t), & tous conviennent qu'elles
ne s'écartent guère au-delà du trente-
cinquième degré de latitude , de part &
d'autre de U Ligne ; & comme l'au-
truche ne vole point , elle eft dans le
cas de tous les quadrupèdes àfi parties
méridionales de l'ancien continent, c'eft-
à-dire , qu'elle n'a pu palTer dans le
nouveau; aufli n'en a- 1- on point trouvé
en Amérique, quoiqu'on ait donné Ton
rem au touyou , qui iui reflemble en
effet , en ce qu'il ne vole point <St par
quelques autres rapports , mais qui eft
(J) Vïta Apollomî , lib. UI.
ft) On en nourrit dans les ménageries cîu roi
de Perfe, feîon Thévenot f tome 11 , page 2ao),
ce qui fuppofe qu'elles ne font pas communes dans
ce pays. — Sur la route d'Ifpahan à Scfiiras on
amena dans le caravanferaî quatre autruches , dife
pemelli Carreri , toms_ 11 , page 2.^8^
fJe rAuîniçhe* ijt
Sxvcit efpèce difFérente , comme nous
ie verrons bientôt dans Ion hiftoire :
par la même raifon , on ne i'a jamais
rencontrée en Europe , où elle auroit
cependant pu trouver un climat con-
venable à fa nature dans la Morée , &;
au midi de i'Efpagne & de l'Italie ;
mais pour fe rendre dans ces contrées,
if eût fallu ou franchir les mers qui l'en
leparoient , ce qui lui étoit impoiTiblCj
ou faire le tour de ces mers , & re-
monter jufqu'au cinquantième degré de
latitude pour revenir par ie Nord en
traverfant des régions très - peuplées ,
nouvel obftacie doublement infurmon-
table à ia migration d'un animal , qui
ne fe plaît que dans les pays chauds &
ïes déierts : les autruches habitent en
effet, par préférence, les lieux les plus
lôiiiaires & les plus arides , où il ne pleut
prefque jamais (u) , & cela confirme ce
(u) Struthum gêner an in parte Afrk/x qua non phit
îTKjuiî Theophraflus , de Hifl, plant. 44. , apud Gef-
ncrum , pag. 74. M'tû. Tous les Voyageurs & les
Naturalises font d'accord fur ce point; G. Warren
eft ie feui qui ait fait un oifeau aquatique de l'au-
truche, l'animal le plus anti-aquatique qu'il y ait;
|1 convient bien q_u elle ne fait point nager ; mais
M iiij
272. Hifîoire Naîurelle
que difent les Arabes , qu'eiîes ne Bol-
vent point ; elles fe réimifTent dans ces^
déferts en troupes nombreufes , qui de
ioin refTemblent à des efcadrons de ca-
valerie, & ont jeté' i'aiarme dans plus
d'une caravane : leur vie doit être un
peu dure dans c&s folitudes vaftes &
ileriles , mais elles y trouvent h liberté
& l'amour; & quel défert, à ce prix,
ne feroit un lieu de délices ! c'efi pour
j.ouir, au fein de la Nature , de ces biens
ineflimables qu'elles fuient l'homme ;
mais l'homme qui fait le profit qu'ii en
peut tirer , les va chercher dans leurs
retraites les plus fauvages ; il fe nourrit
de leurs œufs , de leur fang , de leur
cHe a les jambes hautes & ie cou long , ce qui
lui donne ie moyen de m.archer dans l'eau <& d'y
faifîr fa proie; d'ailleurs, on a remarqué que fa
tête avoit quelque reiïèmblance avec celle de l'oie ;
en faut-il da\antage pour prouver que l'autruche efî
Un oifeau de rivière \ Voy. Tranfad. Phïl.f.n° j ç^*
Un autre ayant ouï dire qu'on voyoit en Abiffinie
àts autruches de la groiïeur d'un âne, & ayant
appris , d'ailleurs , qu'elles avoient le cou & \cs
pieds d'un quadrupède , en a conclu & écrit qu'elles
avoient ie cou & les pieds d'un âne , fuidas, Il n'y
a guère de fujet d'Hiftoire naturelle qui ait fait
d'ire awîânt d'abfurdités que i'autruche,_
'de ïAuîniche, 273^
graffle, de leur chair , il le pare de leurs
plumes ; il conferve peut - être i'elpé-
rance de les (ubjuguer tout-à-fiut , «Se de
les mettre au nombre de les eiclaves.
L'aut-ruche promet trop d'avantages à
l'homme, pour qu'elle puifîe être ea
fureté dans l'es déierts.
Des peuples entiers ont mérité le
nom de Struthophages , par i'ulage où
ils étoient de manger de l'autruche fx);
& ces peuples étoient voifnis des Elé-
phantophages , qui ne faifoient pas
îneilleure chère. Apicius prefcrit , Ôc
avec grande raifon , une fauce un peu
vive pour cette viande (y)) ce qui
prouve au moins qu'elle étoit en uiage
chez les Romains; mais nous en avons
d'autres preuves. L'empereur Hélioga-
baie fit un jour Tervir la cervelle de fix
cents autruches dans un feul repas f:^^;^
cet Empereur avoit , comme on iàit 5
ia fantaifie de ne manger chaque jour
(x) Strabon, Ub. XV L. — Diod, ^icdt Fahvl,"
'Aftriq. geftis , iit>. IV,
(y) Apicius , Hb, VI , cap, I, -
^74 Hifloue Naturelle
que d'une feule viande , comme fàlfans^,
cochons, poulets , & l'autruche étoit du
nombre (a), mais apprêtée fans doute
à la manière d'Apicius : encore aujour~
d'hui les habitans de la Lybie, de la
Numidie, &c. en nourrirent de privées,
dont ils mangent la chair & vendent les
plumes (bj; cependant les chiens ni les
chats ne voulurent pas même fentir la
chair d'une autruche que Vallifliieri
avoit difTéquée , quoique cette chair fût
encore fraîche & vermeille , à la vérité
l'autruche étoit d'une très-grande mai-
greur ( c); de plus ^ elle pou voit être
vieille ^ & Léon-i' Africain qui en avoit
goûté fur les lieux , nous apprend qu'oa
ne mangeoit guère que les jeunes, &
même après les avoir engraiffées (dj;
le Rabin , David Kimbi , ajoute qu'on
préféroit les femelles (e), & peut-être en
(a) Lamp. in vita HeliogahaVu
(b) Beîon , Hiiï, nai^ des Oifeam , page 2 5 7;
— Marmol, Defaiption de l'Afrique ^ tome lilg
p^.ge 25.
(c) Opère di V&llïjnïeri, tom. î, pag»2 5J«
(d) Defcription de i'Africjue, Rv» IX^
(ej Gçfser , de Ambus , page 7^ i »
^ile ïAumiche. 275
eut- on fait un mets paffiible en les fou-
metiant à la calhaiion.
Cadainofto & quelques autres Voya-
geurs difent avoir goûté des œufs d'au-
truche , & ne les avoir point trouvés
mauvais; de Brue &: le Maire afTurent:
que dans un feul de fes œufs, il y a
de quoi nourrir huit hommes (f); d'au-
tres qu'il pèfe autant que trente œufs
de poule fg), mais il y a bien loin de-là
à quinze livres.
On fait avec la coque de ces œufs ,
des efpèces de coupes qui durciffent
avec le temps, & refTemblent en quel-
que forte à de l'ivoire.
Lorfque les Arabes ont tué une au-
truche , ils lui ouvrent la gorge , font
une ligature au-defTous du trou , & la
prenant enfuite à trois ou quatre , ils la
iecouent & la reflafTcnt , comm.e on
reffafîeroit une outre pour la rincer ;
après quoi la ligature étant défaite , il
fort par le trou fait à la gorge , une
quantité confidérable de mantèque en
(f) Voyage au Sénégal , &;c. page i c^.
(g) Koibe , Defcriftbn du cap de BcrMe-eJ^érance^
M vj
276 Hîjïom Naîurelk
confiftaiice d'huile figée ; on en tire
quelquefois jufqu'à vingt livres d'une
lèufe autruche , cette mantèque n'eft
autre chofe que le fang de l'animai
mêlé , non avec la cha'r , comme on
i a dit , puifqu'on ne lui en trou voit
point fur le ventre & la poitrine , où en
effet il n'y en a jamais ; mais avec cette
graifîè , qui dans les autruches grafîès ,
forme , comme nous avons dit , une
couche épaiffe de piufieurs pouces fur
^ ies inteftins : les habitans du pays pré-
tendent que !a mantèque efï un très-
bon manger , mais qu'elle donne le
cours de ventre (h).
Les Ethiopiens écorchent les au-
truches & vendent leurs peaux aux
Marchands d'Alexandrie ; le cuir en efl
très-épais (i), & les Arabes s'enfaifoient
autrefois des efpèces de foubrevelles ^
qui leur tenoient lieu de cuira ffe&: de
{hj Voyage de Thévcnot, tor^e 1 , page j t ^î
(i) Nota, Schwenckfeid prétend que ce cuir
épais eft fait pour garantir {'autruche contre la ri-
gueur du froid ; il n'a pas pris garde qu'elle n'ha-'
Htoit que les pays chauds, F^^-,. AviariUffi Silffiie -
'de FAuînicIiè. zjy
Î30ucîier (k). Belon a vu une grande
quantité de ces peaux toutes emplumées
dans les boutiques d'Alexandrie (l) , les
longues plumes blanches de îa queue
ÔL des ailes ont été recherchées dans
tous les temps ; l€$ Anciens les em-
ployoient comme ornement & comme
diilindion militaire , & elles avoienî
fuccédé aux plumes de cygne ; car les
oileaux ont toujours été en pofTeffioii
de fournir aux peuples policés , comme^
aux peuples fauvages , une partie de
{eur parure. Aidrovande nous apprend
qu'on voit encore à Rome deux ftatues
anciennes ,. l'une de Minerve & l'autre
de Pyrrhus, dont le cafque efl orné de.^
plumes d'autruche (m)j c'eft apparem--
raent de ces mêmes plumes qu'étoit
compofé le pennache des foldats Ro-
mains, dont parle Polybe (n), & qui
conliftoit en trois plumes noires oa
rouges d'environ une coudée de haut i -.
{k) PqIIux y apud. Gefmrum , de ÂNibus , /;^^5 ..
(l) "èéon.Obfem fol. <)C,
(m) AIdroVo Je Avibus , tom. I , pag> 5 9 éj ^
2.78 Hiflolre Naturelle
c'eft précifément la longueur des grandel
plumes d'autruche. En Turquie , au-
jourd'hui , un Janifîaire (0) qui s'eft
fignalé par quelques faits d'armes (p),
a le droit d'en décorer Ton turban , &
la Sultane, dans le féraii, projetant de
plus douces vidoires , ies admet dans (a
parure avec complaifance. Au royaume
de Congo , on mêle ces plumes avec
celles du paon , pour en faire des en-
lèignes de guerre (q) , & les Dames
d'Angleterre & d'Italie s'en font des
cfpèces d'éventails (r) ; on fait affez quelle
prodigieufe confommation il s'en fait en
Europe pour ies chapeaux , les cafques ,
îes habillemens de théâtre , les ameuble-
mens , ies dais, les cérémonies funèbres,
& même pour la parure des femmes ;
& il faut avouer qu'elles font un boa
effet , foit par leurs couleurs naturelles
ou artificielles , foit par leur mouvement
(0) Belon, Ohferp , , . . fol. <)6,
(p) Aldrov. de Avihus , tom. I, pag. 59^.'
(q) Hiftoire générale des Voyages , îome V,
page j 6,
(r) Aldrov, îiUJupra* — Wilîulghby, 'page /p j,
"de TAutfîiche: ij(^
ëoux & ondoyant : mais il efl bon de
fa voir que les plumes dont on fait le
plus de cas , font celles qui s'arrachent
à i'animai vivant , & on les reconnoît en
ce que leur tuyau étant preffé dans les
doigts , donne un fuc fanguinolent ;
celles au contraire qui ont été arrachées
après ia mort , font sèches , légères &
fbrt fu jettes aux vers (f)»
Les autruches, quoique habitantes
du défert , ne font pas aufïï fauvages
qu'on I'im=agineroit : tous ies Voyageurs
s'accordent à dire qu'elles s'apprivoifent
facilement , fur -tout iorfqu'elies font
jeunes. Les habitans de Dara, ceux de
Lybie , &c. en nourriffent des trou-
peaux (t), dont ils tirent fans doute
ces plumes de première qualité , qui ne
fè prennent que fur ies autruches vi-
vantes ; elles s'apprivoifent même fans
qu'on y mette de foin , & par la feule
habitude de voir des hommes & d'eii
ff) Hiftoire générale àts Voyages , tome II;
fage 6^2.
(t) Marmol, Dtjcr'iptm de l'Afrique, tome ^^^^
page 1 1_.
xWo Hîph-e Naturelle
recevoir ia nourriture & de bons traite-
temens. Brue en ayant acheté deux à
Serinpate fur la côte d'Afrique , les
trouva tout apprivoifées loriqu'il arriva
au fort Saint- Louis (u).-
On fait plus que de les apprivoifer,
on en a dompté quelques-unes au point
de îes monter comme on monte un
cheval ; & ce n'eit pas une invention
îiiodemej car le tyran Firmius qui régnoit
en Egypte fur ia fin du troifième fiè=
cle , le faifoit porter, dit -on, par de
grandes autruches (x). Moore , Anglois,-
dit avoir vu, à Joar en Afrique, un
bomme voyageant fur une autruche (y),
Vailithieri parie d'un jeune homme qui
s'étoit fait voir à Venife monté fur une:
autruche , Sl iui faiiant faire des efpèces-
de voites devant ie menu peupie (■^);
(u) Hiftoire générale àt^ Voyages, tome 11»
page 608,
(x) Firmius imper at or reâus eftingentihus Strmhio^:
nibus. Textor. apud Gefneriim , ;'^^. /7/,
(y) Hiftoire générale Q&s Voyages, tome 111^
fage S^.
(l) Valiifnieri , wins 1 , page_ 2 jj 3 -
de fAuînicJie. 2 S r
^n^n M. Adanfoiî a vu au comptoir
de Podor, deux autruches encore jeunes,
dont la plus forte couroit plus vue que
le meilleur coureur Anglois, quoiqu'elle
eût deux Nègres fur ion dos (a); tout
(a) <« Deux autruche? qu'on élevoit depuis près
de deux ans au comptoir de Podor, fur le Niger, u
quoique jeunes encore , égaloient , à très-peu prèy, «
k groffcur des plus groffes de celles que je n'avois 'c
aperçues qu'en paiïant dans les campagnes brûlées «
& fablonneuds de la gauche du Niger : ceiles-ci «
Gtoient fî privées , que deux petits Noirs monté- «
rent enfembie la plus grande des deux ; celle-ci <«
n'eut pas plutôt fenti ce poids , qu'elle fe mit à «
courir de toutes fes forces & leur fît faire plu- «
fieurs fois le tour du village, fans qu'il fût poHible «
de l'arrêter autrement qu'en lui barrant le paf- «
fage. . . . Pour cllayer la force de CGi animaux , "
je fis monter un Nègre de taille fur la plus petite , «
& deux autres fur la plus groffe : cette charge «^-
ne parut pas difproportionnée à leur vigueur ; «
d^abord elles trottèrent un petit galop des plus «
ferrés; enfuite, lorfqu'on les eût un peu excitées «
elles étendirent leurs ailes comme pour prendre «
ie vent, 6c s'abandonnèrent à une telle vîteffe, «
qu'elles fembloient perdre terre, . , . Je fuis per- «
fuadé qu'elles auroient laiffé bien loin derrière «
elles les plus fiers chevaux Anglois. . = , Il eft vrai «
qu'elles ne fourniroicnt pas une courfe aulTi longue «
qu'eux ; mais à coup fur elles pourroient l'exé- «
cuter plus promptement. J'ai é'é plufieurs fois ^
témoin de ce fpedacle, qui doit donner une ïàée «
âe la force prodigieufe de i'autruche, & feire h
'2^2 riïfloke Naturelle
Cela prouve que ces animaux, Huis cire
nbfolunicnt fiiroucfics , font nc-anmoins
(l'une nature rciive, ôl f|ue ff on ])eut les
apprivoifcr jufqu'à fc laifler mener en
troupeaux, revenir uu bercail & même à
f oufTrir qu\jn lesmojKe, il efl difficile <^
peut-être impofrible de les réduire à obéir
à. la main du cavalier, à feniir Tes de-
mandes , cojnprendrc Tes v(;lonics dx.
s'y foumctire : nous voyons par la re-
!ai!(»yn même de M. Adanfon , cjue
l'autruche de Podor ne s'élciigi'ia j>as
beaucoup, mais fju'ciîe fit plufieurs fois
le tour de la bourgade , & qu'on ne
])Ut l'arrêter qu'en lui barrant le pafîage;
docile à uji ccriain point \><\v ftiij>i';iié ,
elle parok ijitraitaljlc par fon naturel ;
&. il fiut bien f{ue cela f /it , puifque
l'Arabe qui a dompté le clievai & fub-
jugué le chameau , n'a pu encore mai-
trilér entièrement l'autruche: cej)end?iju
jufque-Ià on ne pourra firer parti de fa
viieffe (3f de fa force , car la f ;rce d'un
y> conurnire fie quel ufa^ve fille pourrr^ît ixxn U on
>»,troLiv(jit moyen de la m/itrifer 8i de l'inOniirC
comme on dttiït un cheval ", Vcy^l^t au Séiu'^nl ,^
\k FAutrQche. 1S3'
clonicfli(|UC iiulocilc, il- tourne prcUjuc
((nijouis coiuic Ion nuiinc.
Au relie , (|uoiquc les nutnichcs
courent plus \ iie (jue le cliewil , e'efl:
cependant avec le elieval (ju'on les
court cS: qu'on le> preiul , mais (n\ voit
bien <|u'il y iàut un peu cl'inJullric ;
celle des Aralie.s conlilie à les (uivrc à
vue, (ans les trop prcller , c^ fur-tout
\\ les in(|uieter afle/ jnnn" les eiupêeluT
(le prendre de la nourriture , inai.s point
allez j)our les deierininer à s'cchapper
|>ar \\\\<<i fuite jiroinpte; cela ell d'aïuant
plus fàeiie (ju'elles no vont guère iur
une li»>-ne droite, t^ ciif elles décrivent
])rel(jue toujours dans lein* eourle un
ccrele jilus ou moins étendu; les Arahes
peuxeiti donc diriger leur niarelu- fur
un cercle concentricjue , intérieur, j)ar
conic-qiient ])lus eiroit , c<c les (uivrc
toujours à une jullc dillance, en (ailant
J;eauc(nij) moins de chemin <|if elles :
lorlqu'ilslesontainfi fitiguéescSi afîamécs
pendant un ou deux jours, ils prennent
îeur mojucni, fondent fur elles au graïuï
£;alop cil ici niuiani contre le vcai auiaut
a 84 Htftohe Naturelle
qu'il eft poflible ( b ), & ies tuent a
coups de bâton pour que ieur fang ne
gâte point le beau blanc de leurs plu-
mes : on dit que lorfqu elles le fement
forcées & hors d'état d'échapper aux
ChafTeurs , elles cachent leur tête &
croient qu'on ne les voit plus (c); mais
il pourroit fe fliire que i'abrurdité de
cette intention retombât fur ceux qui
ont voulu s'en rendre ies interprètes, &
qu'elles n'eullent d'autre but en cachant
leur tête que de mettre du moins en fureté
la partie qui eil: en même temps la plus
importante & la plus foible.
Les Struthophages avoient une autre
fliçon de prendre ces animaux , ils le
eouvroient d'une peau d'autruche , paf-
fant leur bras dans le cou , ils lui fai-
foient faire tous les mouvemens que fait
ordinairement l'autruche elle-même , &
par ce moyen , ils pouvoient aifément-
(b) Kiein, HW, Avium , pag. \6. — Hiiloire
^énéraie des Voyages, tome II , page 6^2,
(c) Piine, lih.X, cap» I. — Kolbe, Defcrlption-
4u c^p de Bonnt-ejvùance y ifCi
Je l'Autruche, 285'
Î05 approcher & les furprendre ( d ):
c'eil: ainfi que les Sauvages d'Amérique
fe deguirent en chevreuil , pour prendre
les chevreuils.
On s'ell encore fervi de chiens &
de filets pour ceite chafîè , mais il paroît
qu'on la fait plus coiumunément à
cheval ; & cela feul fuffit pour expli-
quer l'antipathie qu'on a cru remarquer
entre le cheval & l'autruche.
Lorfque celle-ci court , elle déploie
{qs ailes & les grandes plumes de (a
queue (e), non pas qu'elle en dre aucun
iècours pour aller plus vite , comme
je l'ai déjà dit , mais par un efîèt très-
ordinaire de la correfpcndance d^s muÇ.
clés 5 & de la manière qu'un homme
qui court agite les bras , ou qu'un
éléphant qui revient fur le ChaiTeur,
drefle & déploie Tes grandes oreilles (f);
ia preuve , fans réplique , que ce n'ell
point pour accélérer fon mouvement
que l'autruche relève ainfi fes ailes ,
(d) Diod. Sicul. de Fabul Aniiq, geflis, Wh. IV"^
,{e) Léon Afric. Dsfcrlpiion, lib. !>;,
'2.% 6 Hijloire 'NaînreÏÏê
c'eft qu'elle les relève iors même qu'elle
va contre le vent, quoique dans ce cas
elles ne puifîent être qu'un obilacle :
ia vîtefle d'un animal n'efl que l'effet de
la force employée contre fa pefanteur ;
&: comme l'autruche eit en même-temps
très-pe(ante & très-vite à la courfe, il
s'enfuit qu'elle doit avoir beaucoup de
force : cependant malgré (à force , elle
conferve les mœurs des granivores : eiie
n'attaque point les animaux plus foibles ,
rarement même fe met-eile en défenie
contre ceux qui l'attaquent ; bordée fur
lout le corps d'un cuir épais & dur,
pourvue d'un large Jfernum qui lui tient
îicu de cuiraffe , munie d'une féconde
cuirafî'e d'infenfibiiité , elle s'aperçoit à
peine des petites atteintes du dehors , <&
elle fait fe iouilraire aux grands dangers
par la raj:)ïd!té de fa fuite ; fl quelque-
fois elfe fe défend , c'eft avec le bec ,
avec les piquans de fes aiies ( g ), &
fur-tout avec les pieds. Thévenot en a
vu une qui d'un coup de pied renverfà
j.m chien ('h). Belon dit dans fon vieux •
(g) Albert, de Animal, apitd Gefn, pag. 74a.
(■'0 Voyages de ThçvcnoE , loms I, j^age j i ^^
'ie ï Auiriiche: 1S7
îangnge , qu'elle pourroit ainfi ruer par
tene un homme qui fuiroit devant
elle fij; mais qu'elle jeue , en fuyant ,
des pierres à ceux qui la pouriuivent f/(J,
j'en doute beaucoup , ôl d'auiant plus
que la vîtefîè de fa courfe en avant
feroit autant de retranché fur celle des
pierres qu'elle lanceroit en arrière , &
que ces deux vîtefîes oppofées étant à
peu près égales, puifqu'elies ont toutes
deux pour principe le mouvement des
pieds , elles fe détruiroient nécefîaire-
ment : d'ailleurs ce fait avancé par
Pline , & répété par beaucoup d'autres,
ne me pnroît point avoir été confirmé
par aucun Moderne digne de foi , &
i'on fait que Pline avoit beaucoup plus
de génie que de critique.
Léon-I' Africain a dit que l'autruche
étoit privée du fens de l'ouïe f/J; ce-
pendant nous avons vu plus haut qu'elle
fîj Belon , ////?. fiaf, des Oifeaux , page 255.
(k) Ungula , lis .^ bijulca , conipreherJendîs
lap'ulibus utiles , quos in fugâ contra fequemes ingermît
J_ib^ X , cap. I ,
(IJ Dejcripno Afriea ^ iib. ÎX,
^3 3 Hijîoh'ê Naturelle ■
paroifloit avoir tous les organes doù
dépendent les fcnfations de ce genre ,
Touverture des c;rci!lcs efl même fort
grande, ôc n'eft point ombragée parles
plumes ; ainfi il efl: probable ou qu'elle
n'cfl: fourde qu'en certaines circonftances,
comme le tétras, c'eft-à-dire dans la
faifon de l'amour, ou qu'on a imputé
quelquefois à furdité ce qui n'étoit que
l'effet de la ilupidité. |
C'eft aufTi dans la même faifon,
ièïon toute apparence , qu'elle fait en-
tendre fa voix ; elle la fait rarement
entendre , car très - peu de perfonnes
en ont parlé ; les Écrivains facrés com- j
parent l'on cri à un gémiffement (^m/, f
& on prétend même que fon nom hé-
breu jacnah eft formé à^ianah , qui
fignifie hurler. Le docfleur Browne dit
que ce cri reffemble à la voix d'un
cnfmt enroué , & qu'il efl plus trifl:e
encore (nj; comment donc avec cela
ne paroîtroit - il pas lugubre & même
. À,
(m) Michée, cap, I, Ludum quafi SiruthiomiiTU S
(n) CoIIedions Philofophiques , »/ /, ariïch
terrible ,
i>i.xr.^u7ç.2SS.
l'ax^truche
de l'Autruche. i^^
terrible, (èlon rexpreiîlbn de M. Sandys,
à des Voyageurs qui ne s'enfoncent
qu*avec inquiétude dans l'iinmenfité de
ces déferts, & pour qui tout être animé,
fans en excepter l'homme , efl: un objet
à craindre & une rencontre dangereufè i
O'ifeaux, Tome IL
N
apo H'tjïaire Naturelle
LE TOUYOUfaJ.
X-i*AuTRUCHE de rAméiîque mé-
ridionale , appelée aufïi autruche d'Oc-
e'ident , autruche de Alagellan & de la
Guyane , n'eft point une autruche : je
crois que le Maire eft ie premier Voya^
feur qui , trompé par quelques traits
e reiïemblance avec l'autruche d'Afri-^
que , lui ait appliqué ce nom (b)» Klein
qui a bien vu que i'efpèce étoit diffé-
rente , s'ell: contenté de l'appeler au-
truche bâtarde (c), M. Barrère la nomme
tantôt un héron (d) , tantôt une grue
(a) Touyoïi on Touyouyoïi. --— Struthm Euf,
Nieremberg, jyagc -2/7; la figure, pagt 218,
fous le nom Z^/«^?^. — -Nhaiiduguam. Marcgrave ,
Tiifl, nat, Braf, pag. 190; & Pifon , page 8^ ,
avec une figure. — Autruche de Guiaae, Definar-
chais, tome lîJ , page ^2^*
(h) Voyez Tes Navigations Auflrales, pagi i2pl
dans le Jonmaîre dun,^ 22,
(c) Avium, Hift,^2ig, !7«'
(d) Orukhohgia , pag. é/,
I
du Touyoti, "2p I
ferrlvore (e), tantôt un émeu à long cou (f);
d'autres ont cru beaucoup mieux lairc
en lui appliquant d'après des rapports ,
à la vérité mieux ll\ilis , cette dénomi-
nation conipofée , cafoar gris a bec dau^
îruche ; Moehring (g) & M. BrifTon (hf
lui donnent le nom latin de rhea, auquel
le dernier ajoute le nom Américain de
îouyou , formé de celui de touyouyou qu'il
porte communément dans la Guyane (i);
d'autres Sauvages lui ont donné d'autres
noms , y ardu , yandu , andu & nandu-
guacu , au Brefii (k); fallian, dans l'île
de Maragnan (l);furl, au Chili (m), &c.
voilà bien des noms pour un oifeau il
(e) France Équinoxiaïe, page t^J*
(î) Oraithologia , pag, 64.,
(g) Meth. Avi. Ctn» 65,
(h) Brifïbn> tomt V, page S»
(i) Barrère, France É'iuinoxiaîe » page ijj»!
(k) Nieremberg, pnge 2 i j; lA^rcgtViC , page
J^o; Pifuii, pdge 8^; de Lact, &e.
(l) Hiftoire générale des Voyages, tdint XIV9
page ^ té»
{mj Ukrembarg , page 2 1 ;^,
Ni)
2p2 Hîflûire jNûturelle
nouvellemeat coiinu ; pour moi f adop-
terai volontiers ceiui de toiiyou que iui
3 donné ^ ou plutôt que lui a coiifervc
M. Briiïbn, & je préférerai, fans héfiter,
ce nom barbare , qui vraifèmblablement
a quelque rapport à la voix ou au cri
de l'oifeau , je le préférerai y dis-je , aux
dénominations Iciemifiques , qui trop
fouvent ne foat propres qu'à donner
de fau (Te s idées, éc aux noms nouveaux
qui n'indiquent aucun caractère, aucun
attribut eflèntiel de l'être auquel on les
.applique.
M. Briflon paroît croire qu'Aldro-
Vîinde a vpvilu défigner le touyou fous
îe nom iïavis eme (n) , &. il efl: très-
vrai qu'au tome 111 de l'Ornithologie
de ce dernier , page / -f / , ii fe trouve
une pianche qui repréfente le îou) ou &
le cafoar, d'après les deux planches de
Nieremberg, page 2 i S ; 6^ qu'au delTus
de la planche d'Afdrovande eil écrit eu
gros caradère , AVIS EME , de même
que la figure du touyou , dans Nie-
femberg, porte en tête le nom à'émeu;
(n) Briffons towt V de fan Ornithofogîe ç
'pagi 8*
du Tovjou, I93
ïliaîs îî eft vîfibïe que ces deux titres
ont été ajoutés par ies Graveurs ou les
Imprimeurs , peu inftruits de l'intention
des Auteurs , car Aldrovande ne dit pas
un mot du touyou, Nieremberg n'en
parle que fous les noms d'yardou , de
furi & (ï autruche d'Occident ; & tous
deux , dans leur defcr^ption , appliquent
les noms à^eme &. à'àneu au feui cafoar
de Java; en forte que pour prévenir la
confufion des noms , l'eme d'AIdro-
Yande & l'émeu de Nieremberg , ne
doivent plus déforinais reparoitre dans
ia lifie des dénominations du touyou.
Marcgrave dit que les Portugais i'ap-
pelent fw^ dans kur langue (oj; mais
les Portugais qui avoient beaucoup de
relations dans les Indes orientales , con-^
îioifToient i'émeu de Java , êi ils ont
donné Ton nom au touyou d'Améri-
que, qui lui reffembicit plus qu'àêucim
autre oifeau , de même que nous avons
donné ie nom d'autruche à ce même
touyou; & il doit demeurer pour ccnf-
tant que le nom d'émeu efl propre
au cafoar des Indes orientales , & ne
(oJ rvlarcgrave, HiJÎ* nat, BraJ, pag. 190.
N iij
2^4' Hiflotre "N mur elle
convient ni au touyou ni à aucmi autre
oifeau d'Amérique.
En détaillant les difFérens noms du
touyou , j'ai indiqué en partie ies diffé-
rentes contrées où ii fè trouve ; c'eft
un oifèau propre à l'Amérique méri-
dionale , mais qui n'eft pas également
répandu dans toutes les provinces de
ce continent. Marcgrave nous apprend
qu'il efl rare d'en voir aux environs de
Fernambouc , il ne l'efl pas moins aii
Pérou & le long des côtes les plus fré-
quentées, mais il efl: plus commun dans
îa Guyane (p), dans les capitaineries de
Sérégippe & de Rio-grande (q) , dans
les provinces intérieures du Brefil (r) ^
au Chili (f) , dans les vaftes forêt^
qui font au nord de l'embouchure de
la Piata (t) , dans les favanes immenfe^
(p) Barrei-e, France Équinox'mk , page 153.
(q) JVÎarcgrave, Hiji. nat, BraJîL pag. 190.
■ (r) Hiiîoire générale des Voyages, totmXlV t
page 2çp.
(f) Hiftoire des Incas, tomt II, page zj^ if
Juîvantes»
( t ) Wafer , Nouveaux Voyages de Dawpier;
tome V, page 30 S.
fin Touyou\ 'ipj
tj\iî s'étendent au fud Je cette rivière (u)
& dans toute la terre Magellanique^A*^^
jufqu'au port Defiré , & même jufqu'à
la côte qui borde le détroit de Ma-
gellan (y ) : autrefois il y avoit des
cantons dans le Paraguai qui en étoient
remplis , fur-tout les campagnes arrofces
par i'Uraguai ; mais à mefure que les
hommes s'y font multiplie's , ils en ont
tué un grand nombre , & le refle s'efl
éloigné (:^J: le capitaine Vood aiïure
que bien qu'ils abondent fur la côte
feptentrionale du détroit de Magellan,
on n'en voit point du tout fur la côte
méridionale /^^^; & quoique Coréal dife
qu'il en a aperçu dans les îles de la
îjier du fud (b), ce détroit paroît être
fu) Wafer , Nouveaux Voyages it Dampun
tome V, page 68.
(x) Ibidem f tome IV, page 69 j 6i tome V,
page 181.
(y) ll'ifîem, page 19a,
(1) Hiftoire du Paraguai du P. Charîevoîx;
tome 1 , page ^i ; îr tome H , page J jz.
(a) Suite des Voyages de Dampier, tome V»
fage ip2.
(b) Voyages de Cor cal ^ tome II , page 20 S,
N iiij
zc^6 Hiflotre Naturelle
îa borne du climat qui convient au
touyou , comme le cap de Bonne-
cfpérance eft la borne du climat qui
convient aux autruches ; & ces ries de
la mer du fud , où Coréai dit avoir
vu des touyous , feront apparemment
quelques-unes de celles qui avoilinent
ies côtes orientales de l'Amérique au-
delà du détroit : il paroît de plus , que
îe touyou qui fe plaît comme Tautruche,
fous la zone torride , s'habitue plus fa-
cilement à des pays moins chauds ,
puifque la pointe de l'Amérique méri-
dionale , qui eft terminée par le détroit
de Magellan , s'approche bien plus du
pôle que le cap de Bonne-efpérance
ou qu'aucun autre climat habité vo-
lontairement par les autruches ; mais ,
comme félon toutes les relations , le
touyou n'a pas plus que l'autruche la
puiffance de voler , qu'il eft , comme
elle , un oifeau tout-à-fiiit terreftre , &
que l'Amérique méridionale eft féparée
de l'ancien continent , par des mers
immeniès ; il s'enfuit qu'on ne doit pas
plus trouver de touyous dans ce con-
tinent , qu'on ne trouve d'autruches ea
du Tony ou: ^97
Amérique , 6: cela eft en effet conforme
au témoignage de tous ies Voyageurs.
Le touyou, (ans être tout- à- fait aufîî
gros que i'autruche , eft le plus gros
oiieau du nouveau monde , les vieux
ont julqu'à fix pieds de haut (c); &
^'^afer qui a melliré la cuifîe d'un des
plus grands, l'a trouvée preiquc égale à
Qtïï& d'un homme (d) ; il a le long cou,
la petite tête & le bec aplati de l'au-
truche (e) , mais pour tout le rede ,
il a plus de rapport avec le calbar: je
trouve même dans l'hifloire du Brefil,
par M. Tabbé Prévôt (f), mais point
ailleurs , i'inçlication d'une efpèce de
(c) Bsrrèrc, Frame JÉqumxîak , page i ]3*-
(d) Suite des Voyages de Dampier , tome M^,
page ^08,
(t) Nofa. On voit dans la figure de Nieremberg,'
page 2. 1 8, une efpèce de calotte fur le fommet de-
la tête , qui a du rapport à la plaque dure & cal-
ieufe que i'autruche a au même endro/t, félon le
Dcfteur Browne (Voyez \ Hïjloire de l'Autmiht\\
maiî il n'cll queflion de cette calotte rii dans la
Description de Nieremberg, ni dans aucune autre.
(f) Hiftoire ^éuérale des Voyages, tome XIV^
Nv
2^S Hiftoke Naturelle
corne que cet oifeau a fur le Bec, &
qui , fi elle exiftoit en effet , feroit un
trait de refTemblance de plus avec le
cafbar.
Son corps eft de forme ovoïde, &
paroît prefque entièrement rond , iorf-
qu'il eft revêtu de toutes fes plumas :
i^s ailes font très-courtes & inutiles pour
le vol , quoiqu'on prétende qu'elles ne
foient pas inutiles pour la courfe ; ii a
fur le dos & aux environs du croupion ,
de iongucs plumes qui lui tombent en
arrière & recouvrent l'anus , il n'a point
d'autre queue ; tout ce plumage eft
gris fur le dos & blanc fur le ventre :
c'efî un eifeau très-haut monté , ayant
trois doigts à chaque pied , & tous trois
en avant, car on ne doit pas regarder
comme un doigt , ce tubercule calleux
& arrondi qu'il a eh arrière, & fur
îeqùd le pied fe jcpofe comme fur une
efpèce de talon ; on attribue à cette
conformation la difïicuké qu'il a de fe
tenir fur un terrdn giiffant, & d'y
marcher fans tomber ; en récompenfè ,
il court très-légèrement en pleine cam-
pagne , élevant tantôt une aile , tantôt
i!u Toupu» ^pp
une autre , mais avec <jes intentions qui
ne font pas encore bien éclaircies ;
Marcgrave prétend que c'efl: afin de
s'en lervir comme d'une voile pour
prendre le vent ; Nieremberg, que c'efl
pour rendre le vent contraire aux chiens
qui le pourfuivent ; Pifoii <Sc Klein,
pour changer fouvent ia diredion de
fa courle, afin d'éviter par ces zig-
zags les flèches d^s Sauvages ; d'autres
enfin , qu'il cherche à s'exciter à courir
plus vite , en fe piquant lui-même avec
une eij^èce d'aiguillon dont (es ailes font
armées (g ] : mais , qu-oi qu'il en foit
des intentions des touyous , il eft certain
qu'ils courent avec une très - grande
VÎtefTe , & qu'il efl difficile à aucun
chien de chafTe de pouvoir les atteindre ;
en en cite un qui fè voyant coupé ,
s'élança avec une telle rapidité qu'il en
(g) Voyez tous ces Auteurs aux endroits in-
lïiqués ci-defrus ; mais il faut remarquer que Pifon ,
Marcgrave ni aucun autre qui ait vu le touyou ,
ne parle de cet aiguillon de i'aiie, & qu'il pourroit
bien avoir été donné à cet oifeau feulement par
analogie , ou parce qu'on a cru pouvoir lui attribuer,
en fa qualité d'autruche , les propriétés de l'autruche
4'Afrique ; fuite inévitable de ia confiifîon dos non».
N v|
300 Hîjloïre Klaîurelk
impofà aux chiens , & s'échappa vers
ies montagnes (h): dans l'impoiïibiiké
de les forcer , les Sauvages font re'duits
à ufer d'adrefTe & à leur tendre des
pièges pour les prendre (i). Marcgrave
dit qu'ils vivent de chair & de fruits (k)^.
mais fi on les eût mieux obfervés, on^
€Ût reconnu , Hins doute , pour laquelle
de ces deux fortes de nourritures ils ont
un appétit de préférence ; au défaut des
faits on peut conjedurer que ces oi-
ièaux ayant le même inftînA que celui
des autruches & des frugivores , qui ell
d'avaler des pierres , du fer & autres
corps durs (l), ils font auffi frugivores,
& que s'ils mangent quelquefois de la
chair, c'efl , ou parce qu'ils fontprefTés
par la faim , ou qu'ayant les fens du goût
éj: de l'odorat obtus comme l'autruche,
(h) Navigations aux terres Auikïzhs, ^ages 2 o
(i) Hiftoîre générale des Voyages, totnt J(IV,
jkigej 1 6,
(h) Marcgrave , Hifl. nat, Buaf, ubi fupra.
(1) Idem, uhtfupra, — Wafer, Suit-e as Voyages
«^<ri?^w^/Vr, tome IV; page 508^
- ' cUt Touyoïr. 501
îls avalent indiflinderiieiit tout ce qui
fe prefente.
INicremberor conte des chofês fort
o
étranges an iujet de leur propagation ;
félon lui, c'eft le mâle qui fe charge
de couver les œufs ; pour cela il fait en
forte de rafîenibler vingt ou trente fe-
melles , afin qu'elles pondent dans un
même nid ; dès qu'elles ont pondu ,
ils les chafîe à grands coups de bec ,
& vient le poier fur leurs ceufs , avec
la fingulière précaution d'en iaifîer deux
à l'écart qu'il ne couve point ; lorfque
ies autres commencent à éclore , ces
deux -là fe trouvent ofâtés, & le mâle
prévoyant ne manque pas d'en calîer
Fun , qui attire une n>u!titude de mou-
ches , de fcarabées & d'autres infèd:es
dont les petits fe nourriffent ; lorfque
Je premier efl confomrné , le couveur
entame le fécond & s'en fèrt au même
ufàge (m): il efl certain que tout cela
a pu arriver naturellement; il a pu fe
faire c[ue des œufs inféconds fc foient
caffés par accident , qu'ils aient attiré
des infedes , lefqucîs aient fervi de
(m) Niercmbcrg, Hifl* vatt Pere^r. pàg. a 17»
"30 2 Hïjloïre Naîitrelle
pâture aux jeunes touyous ; il n'y a
que l'intention du père qui foit fuf- |
pede ici , car ce font toujours ces in-
tentions qu'on prête afTez légèrement
aux bêtes , qui font le roman de i' His-
toire Naturelle.
A l'égard de ce mâle qui fe charge ,
dit-on , de couver à l'exclufion des fe-
melles ; je ferois fort porté à douter du
fài, & comme peu avéré, & comme
contraire à l'ordre de la Nature : mais
ce n'efl pas affez d'indiquer une erreur,
il faut , autant qu'on peut , en découvrir
les caufes , qui remontent quelquefois
jufqu'à la vérité ; je croirois donc vo-
iontiers que celle-ci e(t fondée fur ce
qu'on aura trouvé à quelques coyveufès
des tefticules , & peut - être une appa-
rence de verge comme on en voit à l'au-
truche femelle , & qu'on fè fera cru en
droit d'en conclure que c'étoit autant
de mâles.
Wafer dit avoir aperçu dans une terre
déferte, a-u nord de la Plata, vers îe
trente - quatrième degré de latitude
méridionale , une quantité d'œufs de
touyou dans le fable où, félon lui, ces
du - Touyou. 303
©îiêaux les îaifTent coincer (n); fi ce fîût
eft vrai , fes détails que donne Nie-
remberg fur l'incubation de ces mêmes
ceufs , ne peuvent l'être que dans un
climat moins chaud & pius voifm du
pôle ; en efîèt , ies Hollandois trouvè-
rent aux environs du port Defiré , qui
eft au quarante- (eptiè me degré de lati-
tude, un touyou qui couvoit & qu'ifs
firent envoier , ils comptèrent dix-neuf
ceufs dans ie nid (0) ; c'eft ainfi que les
autruches ne couvent point , ou pres-
que point leurs œufs fous ia zone torride,
& qu'elles ies couvent au cap de Bonne-
éfpérance où la chaleur du climat ne icroit
pas fufïifantc pour ies fiire éciore.
Lorfque ies jeunes touyous viennent
de naître, ils font familiers & fui vent la
première perfonne qu'ils renGonrent(^/?^/
lîiûis en vieiliifTam ils acquièrent de l'ex-
{n) Tome IV àc la fuite des Voyages de Dampîei',
page j 08.
(0) Voyages des HoUandois aux Indes orientales,
tome II , -page i y.
(p) « J'ai été fuivi , moi - même , dit Wafer,
par plufieurs des ces jeunes autruch&s ( il appelle «
aifjji les touyous ) , qui font fort fimpies & inno- «
cernes ». Voyages de Dainjncr fWme lV,pag^ ^ 0^8*
304 Hifloke Naturelle
périence & deviennent faiivages (q): il
paroît qu'en général leur chair efl un
aflez bon manger (r), non cependant
celle des vieux qui ell: dure & de mauvais
goût (f); on pourroit perfectionnée
cette viande en élevant des troupeaux
de jeunes touyous, ce qui feroit êicile y
vu les grandes diipofiîions qu'ils ont i
s'apprivoifer, les engraiiTant & employant
tous les moyens qui nous ont réufîi à
regard des dindons , qur viennent éga-
iement ùqs climats chauds &l tempérés
du continent de l'Amérique.
Leurs plumes ne font pas, à beau-
coup près , aufîi belles que celles de
i'autruche (t); Coréal dit même qu'elles
Be peuvent fervir à rien (u) ; il ieroit à
('^«^^ « If y a un très- grand nombre d'autruches
■n dans cette île du port Defiré, lefquelies font fort
farouches », Vqyagi des Hollandois aux liuks orkn-
taks , tome II , pagt 1 y. — « Je vis au port Defîré
» trois autruches, fans pou\'oir les approcher aflez
a> pour les tirer : àk^ qu'elles m'aperçurent , elles
s'enfuirent », Navlgaiion aux tares Aufirahs , pages'
-2 0 27.
frj Marcgrave , ////?» naf, Brajtl. pag. 190»
f/J Wafer, uhi fupra.
(t) Hift. des ÏBcas, tome 11, pag't 2jé.
(u) Voyages de Çoréai ^ tome 11^ i^cgê zoSt
du Touyoïf. 3 o ^
defircr qu*au lieu de nous parler de feur
peu de valeur , les Voyageurs nous
eufTent donné une idée juite de kur
ftruéture : on a trop écrit de l'aui ruche ,
& pas afTez du touyou; pour faire i'Iiif^
toire de la première, la plus grande diffi-
culté a été de raflembler tous les faits ,
de comparer tous les expofés , de dif^
cuter toutes les opinions , de faifir ia
vérité égarée dans le labyrinthe des avis
divers ou noyée dans l'abondance des
paroles : mais pour parier du touyou ,
nous avon» été fouvent obligés de de-
viner ce qui eft , d'après ce qui doit
être ; de commenter un mot échappé
par hafard, d'interpréter jufqu'au filence ;
au déiriut du vrai , de nous contenter
du vraifemblabîe , en un mot de nous
lé foudre à douter de la plus grande
partie des faits principaux , & à ignorer
prefque tout le refle , jufqu'à ce que les
obfervations futures nous mettent en
état de remplir les lacunes cjue , faute de
mémoires luffifans, nous laiffons aujour-
d'hui dans fon hiftoire.
30(5 Hîflùlre Naturelle
LE CASOARfaJ.
JLi E S Hollandois font les premiers
qui ont fait voir cet oifeau à l'Europe,
ils le rapportèrent de l'île de Java , en
I 597, à leur retour du premier voyage
qu'ils avoient fait aux Indes orientales fhj;
les habitans du pays l'appellent Eme ,
dont nous avons fait emeu : ceux qui
l'ont apporté lui ont auiîi donné le
nom de caffmvare (c ), que nous pro-
nonçons cafoar , & que j'ai adopté,
(a) CaCoar, Aux îndes, Eme on Emeu ; en
Euj^ope, Çrjhar on Cûfowar.r — 'Emeu. Àm, Cluju ,^
Exot, iib. V, pacf. 97, avec une allez bonne figure,
J>age p 8, — Cafoar. Mémoires pour fervir à i'Hif^
toire àts Animaux , ■partie II , page t JJ, plancht
LVl, avec une aflez bonne figure. Gafowary,
Albin , tome II ^ y âge ^ ç, planche LX , avec une
mauvaife figure. — Cajuariits. Frifch , planche CV,
avec une figure coîoriée. — Cafoar. Brifîbn, Oraith,
tome V, page 10, planche l, figure 2.
{èj Hirtoire générale des Voyages, mne VIII,
pûge j 12, — Clufius, Exot'ic. Iib. V, cap. Iil,
pag. 97, edit, fol, \6o'^, ex Off. Plantin,
(c) Bontius, — rrifch, adTahuîam, pag. 105,
duCaJoar, 307
parce qu^il n'a jamais été appliqué à
aucun autre cifeau ; au lieu que celui
d'emeu a été applique , quoique inai-
à- propos, au touyou , comme nous
Tavons vu ci-deffus dans l'hifloire de
cet oifeau.
Le calbar, fans être aufîj grand ni
même auffi gros qi'e l'autruche , pnroît
plus mafTif aux yeux , parce qu'avec,
un corps d'un volume prelque égal,
îl a fe cou &: les pieds moins longs &
beaucoup plu« gros à propornon, & îa
partie du corps plus renflée, ce qui iu|
donne un air plus lourd.
Celui qui a été décrit par M." de
l'Académie des Sciences , avoit cinq
pieds & demi , du bout du bec au
bout des ongles (d); celui que Ciufms
a obfervé étoit d un quart plus petit (e)»
Houtraan lui donne une grofTeur double
de celle du cygne (f)> & d'autres
(d) Mémoires pour ferv'îr à l'Hiftoire ét% kvX'
m?i\i-x , partie II, pagt i S7»
(e) Ibidem, — & Clufius , uhifupra,
(f) Voyage d'Houtman dans le Recueil des
Voj'ages d€ la Cowpaguie HoilaJ}dt;>ife aux Indes Orim-
taUs t année ^ )^ù»
3o8 Hïjlohe Naîwelk
Ho! andois celle d'un mouton : cett^
■variété de mefures , loin de nuire à la'
yériîé , eft au contraire la ieufe chofe
qui puifîè nous donner une connoiA
fance approchée de h. véritable grandeur
du cafoar; car ia taille d'un feul indi-
■widu n'efl point ia grandeur de i'efpèce,
& Ton ne peut fe former une idée jufte
de ccHe-ci , qu'en fa confidérant comme
une quantité variable entre certaines li-
mites ; d'où il fuit qu'un Naturalise
qui auroit comparé avec une bonne
critique , toutes les dimenfions & les
defcriptions des Obfervateurs , auroit
des notions plus exaéles & plus fûres
de lefpèce, que chacun de ces Obfer-
vateurs qui n'auroiî connu que l'individu
qu'il aura mefuré & décrit.
Le trait le plus remarquable dans îa
ligure du cafoar , efl cette efpèce de
cafque conique, noir par- devant, jaune
dans tout le relie , qui s'élève fur le
front , depuis la bafe du bec jufqu'au
milieu du fominet de la tête , & quel-
quefois au-delà : ce cafque efl formé
par le renflement éç.% os du crâne eii
cet endroit , & il eil recouvert d'une
c'u Cnfoar, 50^
enveloppe dure, compoiee de plufieurs
couches concentriques , & analogues à
la liibftance de la corne de bœuf; fâ
forme totale efi: à peu près celle d*uri
cône tronqué , qui a trois pouces de
haut, un pouce de diamètre à 1' balè
& trois lignes à Ion fommet. Clufius
penfoit que ce cafque tomboit tous les
ans avec les plumes , lorlque l'oilèau
étoit en mue ^^; mais M/^ de l'Aca-
de'mie des Sciences ont remarqué avec
raifbn , que c'étoit tout au plus Tcnve-
loppe extérieure qui pouvwt tomber
ainli , & non le noyau intérieur , qui ,
comme nous l'avons dit , fait partie des
os du crâne , & même ils ajoutent qu'on
ne s'eft point aperçu de ia chute de
cette enveloppe à la ménagerie de Ver-
failles pendant les quatre années que
Je cafoar qu'ils décri voient y a voit paf-
fées ( h) : néanmoins il peut le faire
qu'elle tombe «n efîêt , mais en détail ,
& par une efpèce d'exfoliation fuccef-
five, comme le bec de pluûeurs oiièaux ,
(g) Clufius, Exotic, îM/upra, pag. 98.
(h) Mémoires pour fervir à l'Hiftoire des Aiw-
maux , panii II , ya£e i âi*
3 I o Hiflolre Naturelle
& que cette particularité ait échappé aux
Gardes de la ménagerie.
L'iris des yeux eft d un jaune de
topafe , & ia cornée fingulièrement petite,
relativement au globe de i'œil (i), ce
qui donne à l'animal un regard égale-
ment farouche & extraordinaire ; la pau-
pière inférieure eft la plus grande, &
celle du dcflus eft garnie dans (a partie
moyenne d'un rang de petits poils noirs,
lequel s'arrondit au - deftus de l'œil en
manière d^ourcil & forme au cafoar (k)
une forte de phyfionomie que la grande
ouverture du bec achève de rendre
menaçante ; les orifices extérieurs à^s
narines font fort près de la pointe du
bec fupérieur.
Dans ie bec , il faut diftinguer la
charpente du tégument qui la recouvre :
cette charpente confifte en trois pièces
très-folides, deux defquelles forment le
(i) Le gbbe de l'œil avojt Un pouce & demi de
diamètre; ie crillallin, quatre lignes , & ia cornée
trois lignes (txÀQmtni, AÎlémoires your feruir à l'Hif.
tô^rcdes Aalmaux , -çdiïiiQ il , page 1^7.
. (kj Ibidem t page-i6ij .
{lu Cafoar, 3 i i
potinour , & le troilitme l'arête fupé-
rieure qui cfl beaucoup plus relevée que
dans Tauiruche ; toutes les trois fout re-
couvertes par une membrane qui remplit
les entre- deux.
Les mandibules fupérîeure & infe^
rîeure du bec ont leurs bords un peu
echancrés vers le bout , <5c paroifTent
avoir chacune trois pointes,
La tête & le haut du cou n'ont que
quelques petites plumes , ou plutôt quel-
ques poils noirs & clair- femés; en forte
que dans ces endroits la peau paroît à
découvert ; elle eft de différentes cou*-
ieurs , bleue fur les côtés , d'un violet
ardoifé fous la gorge, rouge par- derrière
en plufieurs places, mais principalement
vers le milieu ; & ces places rouges font
uzi peu plus relevées que le relte , par
des efpèccs de rides ou de hachures
obliques dont le cou eft fillonné : mais
il faut avouer qu'il y a variété dans \%
dilpofition de ces couleurs.
Les trous des oreilles étoîent fort
grands dans le cafoar décrit par M/* de
3 ï 2 Hijlolre Naturelle
r Académie ( l), fort petits dms celui
décrit par Clufius (mj, mais découverts
dans tous deux, & environnés comme
les paupières, de petits poils noirs.
Vers le milieu de la partie antérieure
du cou, à l'endroit où commencent les
grandes plumes, naiflent deux barbillons
rouges & bleus, arrondis par le bout,
que Bontius met dans la figure immé-
diateinent au-deflus du bec , comme dans
îes poules. Frifch en a repréfenté quatre,
deux plus longs fur les côtés du cou ,
& deux en devant, plus petits & plus
courts ; le cafque paroît auffi plus large
dans fa figure , & approche de la forme
d un turban fn). Il y a au cabinet dti
Roi une tête qui paroît être celle d^uii
cafoar , & qui porte un tubercule diffé-
rent du tubercule du cafoar ordinaire ;
c*eft au temps &: à l'obfervation à nous
apprendre fi ces variétés &l celles que
{IJ Mémoires pour fervir à THiftoire des Ani-
maux^ partie II, page i6i,
(m) Clufius, Exotic, lib, V, cap, ni , pag. 9B.
(n) Frifch, page loj^
/ nous
Ju Cajçau 3^3
BOUS rt marquerons clans la flûte , font
conilantes ou non ; fi quelques - unes
ne viendroient pas du peu d'exacftitude
des Dedinateurs , ou fi elles ne tien-
droient pas à la difFe'rence du fexe ou
à quelqu'autre circonftance. Frilch pré-
tend avoir reconnu dans deux cafoars
empaillés , des variétés qui diflinguoient
le mâle de la femelle ; mais il ne dit pas
quelles font ces différences.
Le cafoar a les ailes encore plus
petites que l'autruche , & tout aufîi
inutiles pour le vol ; elles font armées
de piquans & même en plus grand
nombre que celles de l'autruche. Clufius
en a trouvé quatre à chaque aiie ; M/* de
l'Académie cinq, & on en compte fèpt
bien diftindes dans la Jîg, de Frifch ,
pL I 0 j; ce font comme des tuyaux
de plumes qui paroifîènt rouges à leur
extrémité , & font creux dans toute leur
longueur ; ils contiennent dans leur ca-
vité une efpèce de moelle femblable è
celle des plumes iiaiffanies des autres
^ oifeaux : celui du milieu a près d'un
pied de longueur &: environ trois lianes
de diamètre, c'eft le plus long de tous^
Oifeaux, Tome IL O
'3 14 Hijlohe Natmelle
ics latéraux vont en décroifîlint de part
^ d'autre comme les doigts de ia main
<5ç à peu près dans le mêwie ordre,
S^yammerdanl s'en fervoit en guiie dç
chalumeau pour fouffier des parties très-
délicates , comme les trachées des in-
fec^tes , &c. (o). On a dit que ces ailes
a voient été données au cafbar pour
i'aider à aller plus vite fp); d'autres qu'il
pou voit s'en fervir pour frapper, comme
avec des houdlnes (q); mais perfbnne
ne dit avoir vu quel ufage il en fait
réellement : le cafoar a encore cela de
commun avec i'autruche , qu'il n'a
qu'une feule efpèce de plumes fur tout
îe corps , aux aiîes , autour du crou-
pion 5 &c. mais ia plupart de ces plumer
font doubles , chaque tuyau donnant
ordinairement nailTance à deux tiges
plus ou moins longues & fouvent iné-
gales entr'eilcs ; elles ne font pas d'unq
(o) Colie^. Acad. étrangère , lome 11 de /'Hif-n
toire Naturelle , jwge zij.
(p) Gufiusi Exoiic, iib. V, cap. llî; pag. 98c
(q) Mémoires pour fervir à i'Hiftoire des Ani-
maux, i>ûme U , fage 160,
du Ccifoaf* 3 T j"
llmc^ure uniforme oians toute leur lon-
gueur , les tiges font plates , noires &
luifantes , diviiees par nœuds en defTous,
& chaque nœud produit une barbe ou
un filet , avec cette différence que depuis
la racine au milieu de la tige , ces filets
font plus courts , pius fouples , plus
bran c h us , &. pour ainfi dire duvetés,
& d une couleur de gris-tanné ; au lieu
que depuis le milieu de la même tige
à fon extrémité , ils font plus longs ,
plus durs & de couleur noire ; & comme
ces derniers recouvrent les autres ôi. font
les lèuls qui paroiflent , le cafoar , vu
de quelque diftance , fèmble être uii
animal velu , & du même poil que
l'ours ou le fangiier : les plumes les plus
courtes font au cou , les plus longues
autour du croupion , & les moyennes
dans Tefpace intermédiaire ; celles du
croupion ont jufqu'à quatorze pouces ,
& retombent fur la partie poftérieure
du corps , elles tiennent lieu de la queue
qui manque abfoiument (^r),
II y a , comme à l'autruche , un
(y) Mémoires pour fervir à l'Hiftoire des Ani-
jnaux, }mrtie U, }mge ijS»
o \)
I î6 HiJIotre Naturelle
efpace calleux & nu fur \g Jlernum, a
l'endroit où porte le poids du corps
lorfque i'oifeau eil couciié ; & cette
partie efl: plus faiiiante & plus relevée dans
Je caioar que dans Tautruche (fj.
Les cuifics & les jambes font revêtues
de plumes prefque jufqu'auprès du
genou , ôi. ces plumes tiroient au gris
de cendre dans le fujet obièrvé par
Clufius ; les pieds , qui font très-gros-
ÔL très-nerveux , ont trois doigts & non
pas quatre comme le dit Bontius , tous
trois dirigés en avant ; les Hoiîandois
racontent que le cafoar le fert de fès
pieds pour ia défenfe , ruant & frap^
pant par-derrière comme un cheval (t),
félon les uns; & félon les autres, s'é-
lançant en avant contre celui qui l'atta-
que & le renverfant avec les pieds , dont
îl lui frappe rudement la poitrine (u),
Clufius qui en a vu un vivant dans
les jardins du comte de Solms à ia.
{/) Voyages de la Compagnie HoIIandoifei
tome VU , page ^^p^
(t) Hiftoire généraie à.t^ Voyages^ tomi Vlîll
fa^e 112,
(uj Ibidem»
'Un Cajoar^ 5 \ f
li aye , dit qu'il ne fe fert point de foil
bec pour fe défendre , mais qu'ii fe
porte obiiquenîent fiir Ton adverlaircy
ÔL qu'ii le frappe en ruant ; il ajoute que
ie même cojute de Sohus lui montra
un arbre gros comme la cuifle que cet
oifeau avoit fort maltraité , & emièrc-
jnent écorchë avec (es pieds & fes on-
gles ( X ): ii eft vrai qu'on n'a pas re-
marqué à la ménagerie de Verfaiiies 5
que îes cafoars qu'on y a gardés fuilent
fi méchans &: fi forts; mais peut-être
etoient-ils plus apprivoifés que celui de
Ciufius : d'aiiieurs ils vivoient dans l'a-
bondance & dans une pius étroite cnpîi-
TÎté , toutes circonftances qui adouciiTenl
à la iongue les mœurs des animaux qui
ne font pas abiolument féroces, énervent
ieur courage , abâtardilTent leur naturel
& les rendent méconnoiffables au travers
des habitudes nouvellement acquifes.
Les ongles du cafoar font très-durs ^
noirs au dehors & blancs en dedans ('y)<,-
Linnœus dit qu'il frappe avec fongle
{xj CIu^us, Exoiic. lib. V, cap. III.
{yj Mém. pour fovir à l'Hifîoire des Aniraau>^'
O iij
3 î 8 Hîjloîre Naturelle
du milieu qui eft le plus grand f-^) ; ce-
pendant les defcriptions & ies figures de
M/' de l'Académie & de M. Brifibn,
repréfentent i'ongle du doigt intérieur
comme ie plus grand , & il i'efl en
effet (a):
Son allure efi: bizarre ; il fenibîe
qu'il rue du derrière , faifant en même
temps un demi-faut en avant ('bj; mais
îualgré ia mauvaife grâce de (ïi démar-
che , on prétend qu'il court plus vite
que ie nicilieur coureur (c); ia Yii^û'e ed
teliem.ent l'attribut des oil'eaux, que les
plus pefans de cette famille font encoi'e
plus légers à ia courfe que les plus légers
d'entre les animaux terreflres.
Le cafoar a ia langue dentelée fiir
îes bords , & fi courte , qu'on a dit de
iui, comm.e du coq de bruyère, qu'il
( 1.) G en. 2i6, edito x, Vngne inurmcdlo majore
{trit.
(a) Mémcires pour fervir à l'Hifloire des Ani-
maux, parue II, j^age //^.-— • Ornithoiogie de
Briiîcn , tome V, page i i .
(h ) Vcyage des Hollandob; ioms VU, ^-a^t
du QjfcûK 5 I p
ft*en avoit point : ctllc qu'a obfèrvée
M. Perrault avoit feuicnient un pouce
de long & huit lignes de large (d); ii
avuie tout ce ciu'on lui jette , c'eit-a-
dire , tout corps dont le volume cfl:
proportionné à l'ouverture de Ton bec.
Frifch ne voit avec raifon , dans cette
habitude, qu\m trait de conformité avec
ks gallinacés , qui avalent leurs aiimens
tout entiers & Ihns les brifer dans leur
bec (e); mais les Hoiiandois qui paroif-
iènt avoir voulu rendre plus intérefÏÏuiie
i'hiftoire de cet oileau , dé]h, fî finguiier,
en y ajoutant du merveilleux , n'ont pas
manqué de dire , comme on i'a dit de
i'autruche , qu'il avaloit non- feulement
les pierres , ie fer , les glaçons , &c.
irais encore des charbons ardens, & fans
même en paroître incommodé Z'f).
On dit aufli qu'il rend îrès-promp-
tement ce qu'il a pris (g), & quelquefois
(li) Mémoires pour fervir à i'Hiflcirc des Ani-
maux , partie II , fhige t 6y.
(e) Frifcn , -pagt & figure j oj»
( f) Hiftoire générale its Voyages, t07ne VIIlj^
page 112.
. (g) Voy, des Hoiiandois, mic VU P'^g^ Si^^
Oiiij
\^i6 Hifîoîre Naturdk
des pommes de ia groiïeur du poing
auffi entières qu'il les avoit avalées (h);
Sl en effet , le tube inteftinal eft fi court
que les alimens doivent palTer très-vîtc ;
ÔL ceux cjui par leur dureté font ca-
pables de quelque réfiftance , doivent
éprouver peu d'altération dans un û
petit trajet , fur-tout lorfque les fondions
de fedoinac font dérangées par quelque
maladie : on a afliiré à Clufius , que
dans ce cas il rendoit quelquefois les
ceiifs de poule dont il étoit fort friand ,
tels qu'il les avoit pris, c'ell - à - dire ,
Bien entiers avec la coque , & que les
ïivaiant une féconde fois , il les digéroit
Lien (^ij: le fonds de ia nourriture de
ce même cafoar , qui étoit celui du-
comte de Solms , c'étoit du pain blanc
coupé par gros morceaux , ce qui prouve
qu'il e(t frugivore , ou plutôt il eft om-
nivore , puifqu'il dévore en effet tout,
ce qu'on lui préfente , & que s'il a le
jabot & le double eftomac des animaux
qui vivent de matières végétales ('kjj,
(h) Hift. gén. des Voyages , /. VlU^-p. 112.
(i) Ciufms, Exotic, iib. V, cap, ni , pag. 99.
(h) Mifin. pour feryir à l'Hiftoire des Animaux^
'^11 Cujoar. '5'2'r.
lï a les courts inteftinij des animaux car^
naf fiers : le tube inteilinal de celui qui
a été difTéqué par M/' de l'Académie,
avoit quatre pieds huit pouces de long
& deux pouces de diamètre dans toute
fon étendue : ie cœciim étoit double &
n'avoit pas pius d'une ligne de diamètre
fur trois , quatre <Sc cinq pouces de
longueur (" l J; à ce compte ie cafoar a
les inteftins treize fois plus courts que
l'autruche, ou du moins de celles qui
îes ont le plus longs ; ôl par cette
raifon, il doit être encore plus vorace
& avoir plus de difpofition à manger
de ia chair , c'eft ce dont on pourra
s'affurer , lorfqu'au lieu de fè contenter
^'drtie JJ, pages ijf, ij^j ij/'à^i^o. Notai
l\ y a dans ce dernier endroit une ligne omife au
bas de la page qui indiquait la différence qui fe
trouve entre les ventricules dans divers individus j
cette différence confiiie, fi je ne me trompe, en
ce qu'ils font tantôt m.ufcuîeux & tantôt mem-
braneux ; firudiire indécife, êi qui convient affez
à la nature équivoque d'un animal qui n'eff pro-
prement ni oifeau ni quadrupède, & qui réunit les
eftoraacs des granivores avec les inteilins des car^
îiafllers'..
/// Animnux de Perrault ,;w^^ /ffj'-,.
[322 Hïjloîre Naturelle
d*examiner des cadavres , les Obfèrva-
leurs s'attacheront à étudier la Nature
vivante.
Le caioar a une véficuïe du fieî , &
Ion canal qui ie croile avec ie canai
hépatique , va s'inférer plus haut que
celui-ci dans le duodénum ^ & le pancréa-
tique s'infère encore au-deffus du cyi-
tique (m) , conformation abfolument
différente de ce qu'on voit dans l'au-
truche. Celle des parties de la génération
du niâîe s'en éloigne beaucoup moins;
la verge a fa racine dans la partie fu-
périeure du reâum , fa forme efl: celle
d'une pyramide triangulaire , large de
deux pouces à fa h-A^o. & de deux lignes
à fon fommet ; elle efl: compofée de
deux ligamens cartilagineux très-foiides,
fortement attachés l'un à l'autre en
deiïus , mais féparés en deiTous , &
lailiant entr'eux un demi - canal qui efl
revêtu de la peau ; les vaifîeaux dé-
férens & les uretères n'ont aucune
communication apparente avec le canaî
(m) Mémoires pour rcr\'ir à l'Hidoire dcs Ani^r ■
clu Cafoar, 323^
de la verge (n) ^ en forie que cette partie
qui paroït avoir quatre fondions prin-
cipales dans les animaux quadrupèdes ,
îa première de fervir de conduit à l'urine,
ia ieconde de porter la liqueur fémi-
nalc du mâie dans I-a matrice de ia fe-
melle , la troiiième de contribuer par
fa fenfibiiité à i einillion de cette liqueur,
îa quatrième d'exciter ia lèinelie par fou
action à répandre la fienne, femble être
réduite dans le cafoar & l'autruche aux
deux dernières fendions , qui font de
produire dans les réfervoirs de la liqueur
it'minale du mâle & de la femelle les mou-
vemens de correfpondance néceflaires
pour i'émiiîion de cette liqueur.
On a rapporté à Clufius que l'animal
étant vivant , on avoit vu quelquefois fa
verge fortir par l'anus (0), nouveau
trait de refTemblance avec l'autruche.
Les œufs de ia femeile font d'un
gris de cendre , tirant au verdâtre , moins
gros & plus alongts que ceux de i'au-
îruche , ck (emés d'une multitude de petits
(n) Mémoires pour fervir à l'HiRoire des Anî-
ïnaux- , partie II , page i 6^f.,
(oj CiuGus, ExûiiÇf kùlfmtra; p^g. ()^.
O v;
324 'Mjloire Naturelle
tubercules d'un vert foncé , la coque
n'en eft pas fort épaiffe feion Ciufius ^
qui en a vu plufieurs ; le plus grand
<Je tous ceux qu'il a obfervés , ayoiî
quinze pouces de tour d'un fens & un
peu plus de douze de l'autre (p) ,
Le cafoar a les poumons & les dix
cellules à air comme les autres oileaux ;
& particulièrement comme les oifeaux.
pefans , cette bourfe ou membrane noire
propre aux yeux des oifeaux , & cette
paupière interne qui , comme on fait ,
eft retenue dan^ le grand angle de l'œil des
oifeaux par deux mufcles ordinaires (q) ^
& qui eft ramene'e par inftans fur la.
cornée par i'adlion d'une efpèce de
poulie mufculaire , qui mérite toute la
euriofrté des Anatomiftes (r )..
Le midi de la partie orientale de
FAfie paroîc être le vrai climat du cafoar^
(p) Ciufius, Exotîc.uin fupm , pag, çç.Ova
'punâis excavatis, dit Linnseus : cela ne rclTemble.
point à ceux que Ciufius a obfervés.
(ij) Hifioire de l'Académie royale àtî Sciences-
de PaÙs , tome J I , page ^p^jp,.
(y ) Mémoires pour fervir à i'Hifloire des- Ani?
(h CdfoûîV 3 2 5'
fon domaîne commence , pour aind
dire , où finit celui de l'autruche , qui
n'a jamais beaucoup, dépaflé le Gange ,
comme nous l'avons vu dans fon hif-
toire ; au lieu que celui - ci tê trouve
dans les îles Moluques , dans celles det
Banda, de Java, de Sumatra, &. dans les
parties corre (pondantes du continent ^fj:
mais il s'en faut bien que cette efpèce
{bit auflj multipliée dans fon diftricfl que
['autruche reft dans le fien , puifque
130US voyons un roi de Joardam , dans
i'ile de Java,, faire préfent d'un cafoar
à Scellinger , capitaine de vaiiîeau
Hollandois , comme d'un oifeau rare (t);
la raifon en efl: , ce me femble , qii<3
les Indes orientales font beaucoup plus
peuplées que l'Afrique ; & l'on fait
qu'à mcfure que l'homme ie multiplie
clans une contrée , il détruit ou fait fuir
devant lui les animaux fauvages qui
vont toujours cherchant des afiies plus-
paifibles , des terres moins habitées ou
(f) Voyage des HoHandois , tome Vil , -pag^
'^,^p> — Clufius, Exoiic* iib. V, cap. ni , pag, 991,,)
(t) Hiftoire générale des Voyages,, toms VUJj.
■326 Hifloire Naturelle
occupées par des peuples moins policés^
&: par conféquent moins defiruâeurSr
Il eil remarquable que le calbar, l'au-
truche & le touyou , les trois plus gros
oifeaux que l'on connoifie , ibnt tous
trois attachés au climat de la zone tor-
ride, qu'ils lemblent s'être partagée entre
eux , ÔL où ils fe maintiennent chacun
dans leur terrein , fans le mêler ni le
ilirmarchèr ; tous trois véritablement
terrefrres , incapables de voler , mais
courant d'une très-grande vîteffe ; tous
trois avalent à peu près tout ce qu'on
ieur jette , grains , herbes , chairs , os ,
pierres, cailloux, fer, glaçons, &c.
tous trois ont le cou plus ou moins
long, les pieds hauts & très- forts, moins
de doigts que la plupart des oifeaux ,
(k l'autruche encore moins que les àcu%
autres ; tous trois n'ont de plumes que
d'une feule forte , différentes des plumes
des autres oifeaux , & différentes dans
chacune de ces trois efpèces ; tous trois
n'en ont point du tout fur la tête ql le
haut du cou , manquent de queue pro-
prement dite , & n'ont que des ailes
iinparf liies ; gsrrâes ds qiîe^ues tuyaux
du Ciifoûr. 327
làns aucunes barbes, comme nous avons
remarqué que ies quadrupèdes des pays
chauds avcieni moins de poii que ceux
des régions du Nord; tous trois, en
un mot , paroiiïent être la produdion
naturel!c & propre de la zone torride :
mais malgré tant de rapports, ces trois
efpèces font différenciées par des carac-
tères trop frappans pour qu'on puifïe
les confondre : l'autruche le diflingue
du caibar 6c du touyou par la grandeur,
par Tes pieds de chameau & par la nature
de fes plumes ; elle diffère du cafoar ,
en particulier , par la nudité de fes cuifîès
& de fes fîancs , par la longueur & îa
capacité de fes inteftins, & parce qu'elie
n'a point de véficule du fiel ; & ie
cafoar diiïere du touyou & de l'autruche
par fes cuiiïes couvertes de plumes ,
prefque jufqu'au tarfe, par les barbillons
rouges qui lui tombent fur le cou , &
par le cafque qu'il a fur la tête.
Mais j'aperçois encore dans ce dernier
caradère dillinétif , une analogie avec
ies deux autres efpèces ; car ce cafque
n'eft autre chofe , comme on fait , qu'iuî
3 2 8 Hljfolre JNaiureJle , &c. .
renflement des os du crâne , lequel efl
recouvert d'une enveloppe de corne ;
& nous avons vu dans i'hiftoire de l'au-
truche & du touyou , que la partie fu-
périeure du crâne de ces deux animaux
ëtoit pareillement munie d'une plaque
dure & calicufe.
3P-9
LE DRONTE(a).-
V-/ N regarde communément la légè-
reté comme un attribut 'propre aux oi-
feaux, mais fi l'on voufoit en faire le
caradère effentiel de cette clafFe , le
D route n'auroit aucun titre pour y être
admis , car loin d'annoncer ia légèreté
par Tes proportions ou par fes mouve-
mens , il paroît fait exprès pour nous
donner l'idée du plus lourd des êtres
organifés ; repréfentez - vous un corps
maffif & prefque cubique , à peine fou-
tenu fur deux piliers très- gros & très-
courts , furmonté d'une tête fi extraor-
dinaire qu'on la prendroit pour la fan-
taifie d'un Peintre de grotefques; cette
ûiQ portée fur un cou renforcé &
(a) Dronte efl: le nom que lui donnent les habîrans
de i1!e M aurice & des lieux voifîns : les Portugais
l'ont appelle Dodo ; les Hollandois, Dod - aens &
Walgh-vngel. — Dronte aliis , Dodaerîs. Bontius ,.
Jndes Orientales , page 30. — Gallinacms gallus pi^:
regrinus. Clufius, Exoik, iib. V, pag. pp, Edward%,
330 Hijlohe 'Naturelle
goillreiîx , confifte prcfque toute entitTS
dans un bec énorme où font deux gros
yeux noirs entourés d'un cercle blanc ^
& dont l'ouverture des mandibules le
prolonge bien au-delà des yeux , & preA
que julqu'aux oreiiles : ces deux man-
dibuies concaves dans ie miiieu de leur
iongueur , renflées par les deux bouts
& recourbées à la pointe en iens con-
traire , refTembient à deux cuillers poin-
tues 3 qui s'appliquent l'une à l'autre fa
convexité en dehors : de tout cela ii
j'éluite une phyrionomie flupide &: vo-
race , & qui, pour comble de difformité,
efl accompagnée d'un bord dé plumés,
icquel fuivant le contour de la bafe du
bec s'avance en pointe fur le front,
puis s^arrondit autour de la face en
manière de capuchon, d'où lui eil venu
le nom de cygne encapuchonné (cycnus
cucullatus),
La groffeur qui, dans les animaux,
fuppole la force , ne produit ici ({ue la
pelanteur , l'autruche , le touyou , le
cafoar , ne font pas plus en état de
voler que le dronte , mais du moins
ils font trèj-yîtçs à la courfe > au lieu
<lu .Dronte. 3 3 î
que le droiite paroît .accablé de fon
propre poids, & avoir à peine }a force
de ie traîner : c'eft dans les oileaux ce
que le parefTeux eft dans les quadru-
pèdes; on diroit qu'il eft compote d une
maiière brute, inadive , où les mole--
cules vivantes ont été trop épargnées ;
il a des ailes , mais ces ailes font trop
courtes &i trop foibles pour l'élever dans
les airs ; il a une queue , mais cette
queue e(l difproporiionnée & hors de
fa piace ; on le prendroit pour une
tortue qui fe feroit affublée de la dé-
pouille d'un oifeau , & la Nature en luï
accordant ces ornemcns inutiles ,^ fembie
avoir voulu ajouter l'embarras à la pe-
fanteur, la gaucherie des mouvemens
à l'inertie de la maffe , & rendre fa
lourde épaifleur encore plus choquante,
enfiifant fouvenir qu'il eft un oifeau.
Les premiers Hollandois qui le virent
dans l'île Maurice , aujourd'hui file de
France (b), f appelèrent walgh-vogel ,
fb) Nota. Les Portugais avoient auparavant
nommé cette île, Jllha do^ Cime , ceft-à-dire, //?.>
aux Cyrnc^ , apparemment parce qu iis y avorent
aperçu des drontes qL*!s prirent pour des cygnes.
3 3^ Hlfîoîre Naturelle
ôifeau de dégoût , autant à caufe de fîï
figure rebutante que du mauvais goût
de fa chair ; cet oifeau bizarre cft très-
gros , & n'efl furpaiïe à cet égard , que
par les trois précédens , car il furpaiTe
Je cygne & ie dindon.
M. BrifTon donne pour un de Tes
caradères , d'avoir la partie inférieure
des jambes dénuée de plumes ; ce-
pendant \^ planche CCXCIV d'Edwards
îe repréfente avec des plumes , non-
feulement jufqu'au bas de la jambe ,
mais encore jufqu'au - delTous de fon
articulation avec le tarfe ; le h^c fu-
périeur efl: noirâtre dans toute fou
étendue , excepté fur la courbure de
fon crochet où il y a une tache rouge ;■
ïes ouvertures des narines font à peu
près dans fà partie moyenne, tout pro-
che de deux replis tranlverfaux qui s'é-*
ièvent en cet endroit iur fa furface.
Les plumes du dronte font en gé-
néral fort douces, k gris efl leur couleur
dominante , mais plus foncé fur toute
îa partie fupérieure & au bas des jambesy
& plus clair fur l'eftomac , le ventre
& tout Iç deiîgus du corps ;^ il y a du
liii D route, 3 3 31
Jaune & du blanc dan^ les plumes des
iiiles & dans celles de la queue , qui
paroiflent tri fées , & font en fort peut
nombre. Clufius n'en compte que quatre
ou cinq.
Les pieds & les doigts font jaunes ,
J&: les ongles noirs ; chaque pied a quatre
doigts , dont trois dirigés en avant &
le quatrième en arrière ; c'eft celui - ci
qui a l'ongle le plus long (c).
Quelques-uns ont prétendu que îe
dronte avoit ordinairement dans i'eilomac
une pierre auffi groiTe que le poing (d) ,
ôi à laquelle on n'a pas manqué d'at-
tribuer la même origine & les mêmes
vertus qu'aux bézoards ; mais Clufms
qui a vu deux de ces pierres de forme
& de grandeur difféi entes (^ejj penfe que
i'oifeau les avoit avalées comme font
les granivores , & qu'elles ne s'étoient
point formées dans fon eitomac.
^c^ Voyez Clufius, Exoric. pzg, 100. — Edwards^
fyirre CCXCIV,
(d) Voyage àt% HoIIandois aux Indes Orientales ^
tomt II y page 21^.
(0 Ciufîus^ ubi Juprat^
3 34 HifiOÎre 'NatureÏÏe
Le cîronie paroît propre & pnrtîcuîîer
%u% îles de France & de Bourbon, &
probable ment aux terres de ce continent
qui en font ies moins éloignées ; mais
je ne iàche pas qu'aucun Voyageur ait
dit l'avoir vu ailleurs que dans ces deux
îles.
Quelques Hoîlandois î'ont nommé
dodûrfs ou dodaers ; les Portugais & ies
Angiois , dodo ; dronte ell Ton noin
original , je veux dire celui fous lequel
ii eït connu dans le lieu de Ton origine ;
& c'ed par cette raifon que j'ai cru
devoir ie lui conferver , & parce qu'or-
dinairement ies noms impofcs par \^s
peuples fimpies ont rapport aux pro-
priétés de ia chofe nommée : on lui a
encore appliqué les dénominations de
cygne a capuchon ff), à' autruche encapu-
chonnée (g) , de coq étranger (h) , de
Waigh-vogel ; ôc M. Moehring , qui
n'a trouvé aucun de ces noms à ion
goûî, a imaginé celui de ruphus , que
(f) Nieremberg , H'ijl. mr, maxime ycrep-in^^ *
pag/232.
(g) Linnaeus, Gen, 86, fper, ^»
(h) Ciufius, ExQîlc. pag.jioos
(Ju Drontc', -^-i^^
M. Briiïon a adopté^ pour Ton nom
latin , coniine s'il y avoit quelque avan-
tage à donner au même arwmal un
nom dilférent dans chaque langue , (5c
comme ii l'effet de cette multiiude de
fynonymes n'étoit pas d'embarraiïer la
Icience & de jeter de la confufion dans
les choies: ne multiplions pas ies êtres,
difoient autrefois les Philofophes; mais
aujourd'hui on doit dire & répeter fans
ceffe aux Naturalises, ne multipliez pas.
ifis noms Huis néceiLté.
4m
5 3 5 Hijhire Natiirdle
LE SOLITAIRE
ET ' .
L'OISE A U DE NA ZAR E.
J_jE Solitaire dont parlent Léguât (a),
^ Carré (b J, & i'oifeau de Nazareth
dont parle Ft. Gauche ("^J^ paroiiTent
avoir beaucoup de rapports avec le
dronte , mais ils en diffèrent aufli en
plu fleurs points ; & j'ai cru devoir rap-
porter ce qu'en difent ces Voyageurs 3
parce que fi ces trois noms iiedéfignent
qu'une feule & unique e(pèce, les re-
lations diverfès ne pourront qu'en com-
piéter fhiiloire ; & fi au contraire ils dé-
iignent trois efpèces différentes , ce que
j'ai à dire pourra être regardé comme un
' faj Voyage en deux îîes défertes des Indes
Orientales j tame I , pages p 8 — 102,
(h) Voyage de Carré , cité dans VHiJîoire géné-
rale des Voyages , tome IX, page 3.
(c) Defcription de l'île de Madagafcar,
commencement
</}/ Soliîalre, &c. 3 ^j 7
commencement d'+iiiloire de chacune ,
ou du moins comme une notice de
nouvelles elpèces à examiner, de même
que l'on voit dans les cartes Géogra-
phiques une indication des terres in-
connues ; dans tous les cas ce fera un
avis aux Naturaliftes -qui le trouveront
à portée d'oblerver ces oiieaux de plus
près, de les comparer, s'il eft poriible,
& de nous en donner une connoiflance
plus diflindie & plus précife : les feules
queOions que l'on a faites flir des chofes
Ignorées, ont valu fouvent plus d'une
découverte.
Le foiitaîre de l'île Rodrigue efl un
très-gros oiieriU, puifqu'ii y a des mâles
qui pèfent juiqu'à quarante-cinq livres:
3e plumage de ceux-ci efl: Ordinairement
mêlé de gris & de brun, mais dans les
femelles, c'efl tantôt le brun & tantôt
ïe jaune -blond qui domine. Carré dit
que le plumage de ces oiieaux efl d'une
couleur changeante , tirant fur le jaune ,
ce qui convient à celui de la femelle ;
& il ajoute qu'il lui a paru d'une beauté
admirable.
Les femelles ont au-deflus du beç
Oifeaux, Tome IL P
3 j 8 Mifloire Natureîk
comme un ba-ndeaw de veuve ; leurs
plumes fe renflent des deux côtés de la
poitrine en deux touffes blanches , qui
repréfentent imparfaitement le lein d'une
femme ; les plumes des cuifTes s'arron-
dilîent par le bout en forme de coquilles,
ce qui fait un fort bon effet ; & comme
fi ces femelles fentoient leurs avantaaes,
elles ont grand foin d'arranger leur plu-
mage , de le polir avec le bec & de
Tajuiler prefque continuellement , en
forte qu'une plume ne pafTe pas l'autre ;
elles ont , félon Léguât , Tair noble ^l
gracieux tout enfemble; & ce Voyageur
afîure que fouvent leur bonne mine
ieura fauve ia vie (d), fi cela eft ain fi ,
& que le folitaire & le dronte foient de
ia mêm.e efpèce , il faut admettre une
ifès-grande différence entre le mâle &
la femelle quant à la bonne m.ine.
Xl'et oifcau a quelque rapport avec
ïe dindon ; il en auroit les pieds & le
bec fi fes pieds n'étoient pas plus élevés
& fon bec plus crochu; il a au iTi le cou
plus long proportionnellement , l'oeil
(d) Voyez h figuH (page p S ) du Voyage dg
Léguât,
du Solîîûire, &c. 335?
noir <5c vif, la tête *ians crête ni huppe
& prefcjue point de queue ; Ton derrière,
qui eft arrondi à peu près comme la
croupe d'un cheval , eft revêtu de ces
piumes qu'on appelle couvertures.
Le folitaire ne peut fè fervir de ies
ailes pour voler, mais elles ne lui font
pas inutiles à d'autres égards ; l'os de
i'aileron fe renfle à Ton extrémité en une
efpèce de bouton fphérique qui fe cache
dans les plumes & lui fèrt à deux ufages ;
premièreinent pour fe défendre , comme
ii fait aufli avec le bec ; en fécond Jieu
pour fifre une efpèce de battement ou
de moulinet en pirouettant vingt ou
trente fois du même côté dans i'efpace
de quatre à cinq minutes ; ç'efl ainii ,
dit-on, que îe maie rappelle fa compagne
avec un bruit qui a du rapport à celui
d'une crefTerellc & sentend de deux
cents pas.
On voit rarement ces oi/êaux en
troupes, quoique i'efpèce foit afTez nom-
breufe ; quelques-uns difent même qu'oE
n'en voit guère deux enfemble fe).
'fe) Hiftoire générale des Voyages, tom IX {
pageji citant le Voj/age de Carre»
'54^ ^'tfaîre Naturelle
lis cherchent les lieux écartes pouf
faire leur ponte, iL confiruilent leur nid
de feuilles de palmiers aiuonceltes à la
hauteur d'un pied & demi ; la femelle
pond dans ce nid un œuf beaucoup plus
gros qu'un œuf d'oie , &: le mâle par-
tage avec elle la foncftion de couver.-
Pendant tout le temps de l'incubation,
& même celui de l'éducation , ils ne
fouffrent aucun oilèau de leur efpèce à
plus de deux cents pas à la ronde ; &
l'on prétend avoir remarqué que c'eft
le mâle qui chafie les mâles , & la
femelle qui chafle les femelles ; remar-
que difficile à faire fur un oileau qui
paffe la vie dans les lieux les plus fau-
vages & les plus écartés.
L'œuf, car il paroît que ces oi féaux
n'en pondent qu'un , ou plutôt n'en
couvent qu'un à la fois; l'œuf, dis-je,
ne vient à éclore qu'au bout de fept
femaines (f), ôl le petit n'efl en état
ffj Nom, Ariftote fixe au trentième jour fe
terme de l'incubation peur les plu^ gros oifeaux ,
tels que l'aigle , l'outarde , l'oie ; il e(l vrai ou'i!
Tie cite point l'autruche en cet endroit, hiji, Anbut
kk VI , cap, VI,
du Solitaire, &c. 341
de pourvoir à les bcfoins que plufieurs
mois après : pendant tout ce temps ie
père & ia mère en ont foin , & cette
feule circonilance doit iui procurer uft
inilincfl: plus perfedionné que celui de
i'autruche , iaquelie peut en naiiîant
fabfifier par eiie-même , & qui n'ayant
jamais beibin du fecours de les père &
mère, vit ifolée, fans aucune habitude
intime avec eux, & fe prive ainii des
avantages de leur focie'te' qui , comme
je l'ai dit ailleurs , eil ia première édu-
cation des animaux & celîe qui déve-
ioppe ie pius leurs qualités naturelles;
auifi l'autruche pafTe-t-elIe pour ie plus
ftupide des oi'eaux.
Lorlque l'éducation du jeune folltalre
efl finie , ie père & la mère demeurent
toujours unis & fidèles l'un à l'autre ,
quoiqu'ils aillent quelquefois le mêler
parmi d'autres oifeaux de leur efpèce :
les foins qu'ils ont donnés en commun
au fruit de leur union , fembient en
avoir refîerré les liens , & lorfque ia
fii(on, les y invite ils recommencent une
nouvelle ponte.
On aiïure qu'à tout âge on leur
Piij
r542 yïjloîre Naturelle ■
trouve une pierre dans le gtfier , comme
au droiite ; cette pierre eft grofTe comme
un œuf de pouk , plate d'un côté ,
convexe de Tautre , & un peu raboteufe
& afTez dure pour fervir de pierre à
aiguifer; on ajoute que cette pierre eft
toujours feule dans ieur eftomac , &
qu'elle efl trop grofi^ pour pouvoir
pafTcr par le canal intermédiaire qui fait
îa feuie communication du jabot au
géfier, d'où l'on voudroit conclure que
cette pierre fe forme naturellement & à
la manière des bézoards , dans le ge'fier
du folitaire ; mais pour moi j'en conclus
ièulement que cet oifeau eil: granivore ,
qu'il avale des pierres & des cailloux
comme tous les oifeaux de cette cîaiïe y
notamment comme l'autruche, le tou-
you , le cafoar <Sc le dronte , &: que le
canal de communication du jabot au
géfier eu fufceptibîe d'une dilatation
plus grande que ne l'a cru Léguât.
Le feul nom de folitaire indique un
naturel fauvage ; & comment ne ie
fer oit- il pas ! comment un oifeau qui
compofe lui feui toute la couvée , &
■qui par conféquent pafle les premiers
'du Solkûtre, &c. 343'
feiiips de fa vie fans aucune fociété avec
d'autres oi féaux de Ton âge , & n'ayant
qu'un commerce de néceffité avec Tes
père & mère, lauvages eux-mêmes,
ne feroit-il pas maintenu par i'exemple
& par l'habitude ! on fait combien ies
habitudes premières ont d'influence fur
les preinières inclinations qui foiment ie
naturel ; & ii eft à préfumer que toute
eipèce où la femeîie ne couvera qu'un
Q^wî à ia fois , fera fauvage comme notre
foiitaire ; cependant il paroît encore plus
timide que iàuvage , car ii fe laiile ap^
procher & s'approche même affez fa-
milièrement, fur-tout iorfqu'on ne court
pas après lui & qu'il n'a pas encore
beaucoup d'expérience ; mais ii eft im-
pcfîlbie de i'apprivoifer. On l'attrape
diâicilement dans les boii , où ii peut
échapper aux chafTeurs par ia rufè <5c
par. fon adreiTe à fe cacher; mais commue
ii ne court pas fort viie , on ie prend
aifément dans ies plaines & dans ies
iieux ouverts: quand on l'a arrêté , il
ne jette aucun cri , mais il iaiiïè tomber
des larmes & refufe opiniâtrement toute
ïiQurriture. M. Caron, Diredeur de la
Piiij
'344* Htfloire Naturelle
Compagnie des Indes à Madagafcar ,
en ayant fait embarc|uer deux venant
de i'île de Bourbon pour les envoyer
au Roi , ils moururent dans le vaifTeau
fans avoir voulu boire ni manger (g).
Le temps de ieur donner, la chafîc
efl depuis le mois de mars au mois de
ieptembre , qui efi: l'hiver àç.s contrées
qu'ils habitent , & qui eft auffi ie temps
ou ils font ie plus gras : ia chair des
jeunes fur-tout, eft d'un goût excellent.
Telle eft l'idée que Léguât nous
donne du foiitaire (h); il en parie non-
fèulement comme témoin oculaire , mais
comme un Obfervateur qui s'étoit at-
taché particulièrement & long-temps à
étudier les mœurs & les habitudes de
cet oifeau; & en e&t, fa reiadon, quoi-
que gâtée en quelques endroits par des
idées fabuleufes (i) , contient néanmoins
plus de détails hifioriques fur le foliiaire
(g) Voyage de Carré aux Indes.
(h) Voyage de Léguât , tome l , pages p S — 102,
(i) Par exemple , au fujet du premier accou-
pkmcnt des jeunes foliîaires, où (on im3gin:iîioa
prévenue lui a fait voir ies formaiités d'une efpèce
de nriuriagej au fujet de la pierre de i'Eftomac, &c.
>45
que je n . . ... . i.uTu^ .^..v. ^-juie ^d'e-»
criîs fur des oilevîux plus géaéralemenî;
& plus ancienneiTieaf connue. On parle
de l'autruche depuis trente iîècles, ôl l'on
ignore aujourd'hui combien elle pond
d'oeufs , & combien elie elt de temps
à les couver.
L'oiieau de nazareth , appelé fans
doute ainfi par corruption , pour avoir
été trouvé dans l'île de Nazare ^kj, a été
obfervé par Fr. Gauche dans i'iie Mau-
rice , aujourd'hui i'île Françoiiê ; c'eil
lin très-gros oifeau , ck pius gros qu'un
cygne; au lieu de plumes ii a tout ie
corps couvert d'un duvet noir ; & ce-
pendant ii n'eft pas abfoiument fans
plumes, car ii en a de noires aux ailes ce
de frifées far le croupion , qui lui tien-
nent lieu de queue ; iï a ie bec gros ,
recourbé un peu par-defîous, ies jambes
( c'eft- à-dire les pieds ) hautes &: cou-
veries d'écaiiles , trois doigts à chaque
f /i J L'île de Nazare eft plus haute que Vih
Maurice à 1 7 degrés de latitude fud. Voyeila Def-
cription de Madagafcar , i^ar Fr* Caucàe .^
page jjo ir Juïv^
'54^ HiJJoke Naturelle
pied , ie cri de l'oiicn , & fa chair ert
inédiocrement bonne.
La fèmelie ne pond qu'un œuf, &
cet œuf tÇi blanc & gros comme un
pain d'un ibu; on trouve ordinairement
à coié une pierre bianche , de la groi^
feur d'un œuf de pouîe , ôc peut-être
cette pierre fait - elle ici ie même effet
que ces œufs de craie blanche que ies
Fermières ont coutume de mettre dans
îe nid où elles veulent firre pondre leurs
poules : celle de Nazare pond à terre-
dans les forêts j fur de petits tas d'herbes
ÔL de feuilles qu'elle a formés ; fi on
tue le petit , on trouve une pierre griie
dans fon ge'fier; la figure de cet oifeau,
eil-il dit dans une note (1)^ fe trouve
dans ie Journal de la ficonde Navigation
des Hollandais aux Indes crîentales ,
& ils l'appellent oifeau de Naufée : cqs
dernières paroles femblent décider la
qu^ilion de l'identité de i'efpèce entr«
ie dronte & l'oiieau de Nazare , &: la
prouveroient en effet, fi leurs delcripdons
(l) Voyez la Defcripîron de Madagafcaiî,
par Fr. Gauche , j^age i j à ix fuiy^-
i^e pfeTemoient des «différences effen-
ticHes , notamment dans le nombre des
doigts ; mais fans entrer dans cette dil-
Giîfiion particulière , & fans prétendre
réfoudre un problème où ii n'y a pas
encore afiez de données ; je me con-
tenterai d'indiquer ici les rapports &
ies diftérences qui réfultent de ia com-
parai fon des trois defcriptions.
Je vois d'abord en comparant ces
trois oiieaux à k fois , qu'ils appartien-
nent au même climat & prefque aux
mêfoes contrées ; car ie dronte habite
i'îie de Bourbon <& i'île Françoife , à
laquelle il fembie avoir donné fon nom
d'île au cygne, comme je l'ai remarqué
plus haut ; ie folitaire habitoit l'île Ro-
drigue dans le temps qu'elle étoit entiè-
rement déferte , & on l'a vu dans i'île
Bourbon ; i'oifeau de Nazare fe trouve
dans i'îie de Nazare , d'où ii a tiré fon
nom & dans l'île Françoife (m); or ces
quatre îles font voi fines les unes des
autres , & il eft à remarquer qu'aucun
de ces oifeaux n'a été aperçu dans le
continent.
(m) Voytz ci-deiTus i'Iiiftoirc l& ces oifeauxj
"^^S Hîfîoke Naturelle
Ils fè reiTemblent auffi tous trois plirâ
ou moins par la groffeiir , par i'im-
puiiTance de voler , par la forme des
aiies , de la queue & du corps entier ;
<5c on leur a trouvé à tous une ou piu-
iieurs pierres dans !e gëiier , cq c|uï les
fuppole tous trois granivores ; outre
■cela iis ont tous trois une allure fort
iente, car, quoique Léguât ne dife rien
de celle du folitaire , on peut juger par
la figure qu'il donne de la femelle (n),
que c'eit un oifeau très-pefant.
Comparant enfuite ces mêmes oKeaux
pris deux à deux , je vois que !e plu- .
mage du dronte fè rapproche de celui
du folitaire pour ia couleur , & de celui
de i'oiieau de Nazare pour ia qualité
de la plume qui n'efi: que du duvet ; &
que ces deux derniers oifeaux convien-
nent encore en ce qu' ils ne pondent &
ne couvent qu'un œuf.
Je vois de plus qu'on a appliqué
au dronte & à i'oiieau de Nazare ie
même nom d'oiieau de dégoût.
Voilà les rapports y 6l voici les diffé-
rences :
{fij Voyage de Léguât , tome J, fage jx Sy
du Sofitûire , &c, 349
le foli taire a les plymes de îa cuidc
arrondies par le bout en coquilles , -ce
qui iuppoie de véritables plumes comme
en ont ordinairement les oi féaux, & non
du duvet comme en ont le dronte &
l'oiieau de Nazare.
La femelle du folifaire a dç:ux touffes
de plumes blanches lur la poitrine ;- on
ne dit rien de pareil de ia femelle des
deux autres.
Le dronte a les plumes qui bordent
îa baie du bec diipoiées en manière de
capuchon , & cette difpoiition efl fi
fi-appante , qu'on en a fait le trait ca-
rac^tcfril.uquig de fa dénomination ( cycnus
cucullatiis ) ; de plus , il a les yeux dans
ie bec, ce qui n'eil pas moins frappant;
& i'oii peut croire que Léguât n'a rien
vu de pareil dans ie folitaire , puifqu'il le
contente de dire de cet oifeau qu'il avcit
tant obfervé, que fa tête étoit fins crêie
&: fans huppe; & Gauche ne ^^x rien du
tout de celle de l'oiieau de Nazare.
Les deux derniers font haut montés ,
au lieu que le dronte a les pieds très-
gros & très-courts.
Celui- ci j & ie folitaire qu'on dit avoir
5^0 Hi foire Naturelle
à peu près les pieds du dindon , ont
quatre doigts , (5c Toifeau de Nazare
n'en a que trois , félon le témoignage
de Gauche.
Le foiitaire a un battement d'ailes
très-remarquable , & qui n'a point été
remarqué dans les deux autres.
Enfin il paroi t que la chair des fo-
îitaires , & lur-tout des jeunes, eft
excellente ; que celle de l'oifeau de Na-
zare efl: médiocre , & celle du drorue
mauvaifc.
Si cette comparai Ton qui a été faite
avec la plus grande exaélitude, ne nous
met pas en état de prendre un parti fur
la queftion propofée , c'efl: parce que
les obfer valions ne font ni affèz multi-
pliées ni afiez fûres ; il feroit donc à
defirer que les Voyageurs , ôl fur- tout
les Naturalises , qui fe trouveront à
portée , examinaifent ces trois oifèaux ,
& qu'ils en fiiïent une defcription exaéle,
qifi porteroit principalement :
Sur la fonne de la tête & du bec :
Sur la qualité des plumes :
Sur la forijie (Se les dimenfions û^^
pieds i
€/// Solhdire, &a 35Ï!
"Sur k nombre des.cioims :
Sur les difîérences qui ie trouvent
entre le mâle .& la fenielle :
Entre les poufîins *Sc les adultes-:
Sur leur façon de marcher oc de
courir :
En ajoutant, autant qu'il feroit po(^
iible , ce que l'on fait dans ie pays fur
ieur génération , c'e(t-à-dire , lur leur
manière de le rappeler, de s'accoupler,
de faire ieur nid & de couver:
Sur le nombre , la forme , la couleur,
ie poids & le volume de leurs cjcufs :
Sur le temps de l'incubation :
Sur leur manière d'élever leurs petits :
Sur la façon dont ils le nourrilîènt
eux-mêmes :
Enfin fur la forme & les dimenfîons
de leur edomaç , de leurs inteftins <Sc de
ieurs parties fexuelles.
I^IN du fécond Volume des Oifeaux^
i
i f^S&SI^^^^ÊL
ffx^^SBt
o