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Full text of "Histoire naturelle des poissons"

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HARVARD    UNIVERSITY. 


LIBRARY 

OF   THE 

MUSEUM   OF  COMPARATIVE  ZOOLOGY 

LiBRARY  OF 

SAMUEL  GARMAN 


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0CT5    1928 


HISTOIRE 

NATURELLE 

DES   POISSONS. 


^TRASBOlIRf 


IMPRllVIERIE   TIF.    V.    G.  I.KVBAULl'. 


HISTOIRE 

NATURELLE 

DES  P0ISS01\fS, 


PAR 

m.  LE  B.^"  CUVIER, 

Pair  de  France,  Grand-Officier  de  la  Légion  d'honneur,  Conseiller  d'Etat  et 
au  Conseil  royal  de  l'Instruction  publique,  l'un  des  quarante  de  l'Académie 
française,  Associé  libre  de  l'Académie  des  Belles-Lettres,  Secrétaire  per- 
pétuel de  celle  des  Sciences ,  Membre  des  Sociétés  et  Académies  royales  de 
Londres,  de  Berlin,  de  Pétersbourg,  de  Stockholm,  de  Turin,  dcGoeltingue, 
des  Pays-Bas,  de  Munich,  de  Modène,  etc.; 

ET   PAl! 

M.  A.  VALENCIENNES, 

Professeur  de  Zoologie  au  Muséum  d'Histoire  naturelle,  Membre  de  l'Académie 
rovalc  des  sciences  de  Berlin,  de  la  Société  zoologique  de  Londres,  etc. 


TOME  TREIZIEME. 


A  PARIS, 

Chez  PITOIS-LEVRAULT,  et  C.%  rue  de  la  Harpe,  n."  81. 
1839. 


AVERTISSEMENT. 


J_jE  volume  que  je  publie  aujourd'hui  contient 
l'histoire  d'une  famille  qui  m'a  donné  jusqu'à 
présent  le  plus  de  peines  dans  la  rédaction  de  cet 
ouvrage.  Ce  livre  comprend  une  partie  de  la 
grande  famille  des  labroïdes  ;  il  a  fallu  le  commen- 
cer par  l'histoire  du  genre  labre,  et  le  terminer 
par  celui  des  girelles.  Or,  tous  les  naturalistes 
savent  que  ces  poissons  n'ont  jamais  été  bien 
reconnus  et  distingués  par  les  auteurs  qui  pou- 
vaient les  voir  sur  le  bord  de  la  mer,  au  moment 
ou  ils  sortaient  de  l'eau  et  où  la  constance  de  leur 
couleur  peut  être  appréciée.  Tous  ces  poissons. 


VJ  AVERTISSEMENT. 

conserves  dans  nos  cabinets,  y  perdent  leurs 
couleurs  et  ne  présentent  plus ,  surtout  dans  les 
labres ,  que  des  caractères  de  formes  si  fugaces , 
qu'il  devient  presque  impossible  au  naturaliste 
de  cabinet  de  trouver  des  caractères  qui  répon- 
dent aux  différentes  espèces  si  peu  caractérisées 
et  si  souvent  mal  dénommées  par  ceux  qui  m'ont 
précédé  dans  ce  travail.  Aussi  suis -je  loin  de 
croire  que  l'bistoire  naturelle  que  je  présente 
aujourd'hui,  et  qui  a  exigé  de  moi  un  travail 
si  pénible ,  ne  soit  encore  bien  imparfaite.  J'es- 
père du  moins  avoir ,  dans  un  grand  nombre 
de  cas,  fixé  la  synonymie  existante,  et  les  na- 
turalistes auront  bien  la  géiiérosité  de  me  savoir 
gré  de  ce  premier  résultat. 

J'ai  pendant  ce  travail  perfectionné  un  peu  les 
divisions  que  nous  avions  déjà  établies  dans  un 
premier  aperçu,  et  j'ai  précisé  les  caractères  des 
crénilabres,  en  établissant  les  genres  des  cossy- 
plies ,  des  cténolabres  et  des  acantliolabres.  J'ai 
aussi  débarrassé  les  cbéiliues,  dont  je  traiterai 
dans  le  volume  suivant  et  è^i  retirant  tous  les  la- 
broïdes  à  préopercules  peu  écailleux,  mais  dont 
le  reste  de  la  tête  est  nu  et  la  ligne  latérale  non 
interrompue.  Ce  genre  des  tautogues  sera ,  je  l'es- 


AVERTISSEMENT.  VÎj 

père ,  considéré  comme  une  bonne  amélio- 
ration. J'ai  aussi  rétabli  le  genre  cheilion,  et 
marqué  ses  affinités  avec  les  malacanthes. 

Les  naturalistes  voyageurs  ont  continué  a 
nous  apporter  le  fruit  de  leurs  recherches.  Nous 
devons  de  nouveaux  remercîmens  à  M.  Gaudi- 
chaud  et  à  MM.  Eydoux  et  Souleyet,  qui  ont 
fait  d'amples  collections  ichtliyologiques  pen- 
dant le  voyage  de  la  Bonite. 

M.  Gernaart,  consul  de  France  a  Macao, 
nous  a  aussi  donné  de  nombreux  poissons  de 
la  mer  de  Chine,  dont  quelques-uns  sont  déjà 
cités  dans  ce  volume. 

Un  des  ouvrages  les  plus  récens  et  les  plus 
utiles  pour  l'ichthyologie  des  mers  du  Nord,  est 
celui  que  MM.  Fries  et  Eckstrom  publient  en  ce 
moment  sous  le  nora  àe  Skanâinaviens  JîskaV) 
dont  les  peintures,  faites  d'après  nature,  sont 
d'une  grande  exactitude.  Je  regrette  de  n'avoir 
pas  reçu  l'ouvrage ,  pour  citer  complètement  à 
leur  place  la  belle  figure  du  lahrus  her^ylta, 
représenté  pi.  2  ,  dans  la  1  .^^  livraison ,  et  celle 
du  ctenolahrus  rupestris.,  pi.  9,  fig.  1,  de  la 
2.^  livraison,  et  de  Yacantholabriis  exoletus, 
pi.  9,  fig.  2.  La  première  est  conforme  à  ce  que 


viij  AVERTISSEMENT. 

nous  avons  nous-mêmes  observé  sur  ce  cténo- 
labre,  et  la  seconde  me  prouve  que  j'ai  eu  rai- 
son de  séparer  le  poisson  de  Linné  de  celui  de 
la  Méditerranée. 

Au  Jardin  des  Plantes,  Décembre  1838. 


TABLE 

DU  TREIZIÈME  VOLUME. 


LIVRE  SEIZIEME. 

Pages.    Planch. 

Labroïdes 1 

CHAPITRE   PREMIER. 

Des  Labres 16 

La  Vieille  commune  ou  Perroquet  de  mer  (Lahriis 

Bergjlia ,  Asc. ,  et  Fries  et  Eckstr. ,  pi.  2  )    .  20 
La  Vieille  verte  {Lahrus  Donoi^ani,  nob.;  Lahriis 

suillusj  Linn.?) 39 

Le  Labre  varié  {Lahrus  mixtus ^  Art.) 43    3  6g 

Le  Labre  à  trois  taches  {Lahrus  trimaculatus^  Gm.)  5  8 

Le  Labre  tourd  {Lahrus  turdus^  Linn.) 62 

Le  Labre  louche  {Lahrus  luscusj  Linn.).  ....  69 

Le  Labre  paré  {Lahrus  Jestit^u s ^  Riss.) 71 

Le  Labre  vert  {Lahrus  viridis^  Lin.) yS    Syo 

Le  Labre  néxée .{Lahrus  nereus^  Riss.) 78 

Le  Labre  merle  {Lahrus  merula^  Linn.) 80 

Le  Labre  livide  {Lahrus  Iwidus^  nob.  ) 87 

Le  Labre  bordé  {Lahrus  limbatusj  nob.) 89 

Le  Labre  linéolé  {Lahrus  lineolatusj  nob.)  ...  90 

Le  Labre  des  roches  {Lahrus  saxorum ,  nob.  ) .  91 

Le  Labre  porc  {Lahrus  scrqfa^  nob.) 93 

Le  Labre  à  flancs  tachetés  {Lahrus  pœcdopleura^ 

nob.) 90 


X  TABLE. 

rages.    Planchj 

Le  Labre  selle  (Labrus  ephippium^  nob.) .  ...  56 

Le  Labre  de  Gay  (  Lahrus  Gaji^  nob.) 97 

Le  Labre  macrodonte  {Lahrus  macrodontus.  Lac.)  98. 

Le  Labre  du  Japon  {Lahrus  Japonicus  ^  nob.).  g  g 

Le  Labre  de  lago  {Lahrus  lagonensis ^  Bowd.)  100 

CHAPITRE   IL 

Des  Cossyphes  {Cossyphus^  nob.) 102 

Le  CiOS?> j^\iQ^o(ï\dx\{C os sjphus Bodianu s ^noh.)  io3 

Le  Cossyphe  maldaque  {Cossjphus  maldat,  nob.)  114 
Le  Cossyphe  à  deux  croissans  (  Cossjphus  hdu- 

nulatus  j  nob.  ;  Labre  deux  croissans ,  Lac.  )  .  121 
Le  Cossyphe  aux  reins  noirs  {Cossjphus  atro- 

lumhuSy  nob.) i23 

Le  Cossyphe  perdition  {Cossjphus perditio^noh.\ 

Labre  perdition ,  Q.  G.) 126 

Le  Cossyphe   diane    {Cossjphus   diana^   nob.; 

Labre  diane,  Lacép.) 127 

Le  Cossyphe  amiral  {Cossjphus  mesothorax^  nob.  ; 

Lahrus  jiiesothorax j  Bl.,  Schn.) 129 

Le  Cossyphe  axillaire  {Cossjphus  axillaris^  nob.)  1 3 1    371 
Le  Cossyphe  ruban  (  Cossjphus  tœniatus ,  nob.  ; 

Lahrus  tœniatus^  Ehr.) i34 

Le  Cossyphe  à  quatre  raies  {Cossjphus  quadri- 

Uneatus  j  nob.  ;  Lahrus  quadiilineatus^  Rupp.)  1 3  5 
Le  Cossyphe    partagé   {Cossjphus   dimidiatusj 

nob.;  Lahrus  îatouittatus ^  Rupp.) i36 

Le  Cossyphe  maillé  ( 6*0 j-j-j^^^Azi^  reticulalus  ^nob.)  139 
Le  Cossyphe  aux  petites  écailles  {Cossjphus  mi- 

crolepidotus y  nob.) 140 


TABLE.  XJ 

Pages.    Planch. 

Le  Cossyphe  aux  rubans  nacrés  (Cossjyhus  albo- 
tœniatitSj  nob.  ) 141 

Le  Cossyphe  de  Schœnlein  (  Cossjphus  Schœn- 
leiniij  Agass.) 14^ 

CHAPITRE   IIL 

Des  Cuénilabres 146 

Le  Crénilabre  paon  {Crenilahrus pai^o^  nob.  ;  Pai^o 

Salv. ;  Lahrus  paç^Oj  Briinn.) 149    372 

Le  Crénilabre  niélope  (Creiiilahriis  melopsj  nob.  ; 

Lahrus  melops^  Linn.) 167 

Le  Crénilabre  rone  (Crenilnhriis  roîie^  nob.). .  .    172 
Le  Crénilabre  bossu  (Crejiilahriis  gihhus^  nob.; 

Gibbons  wrasse^  Penn.) 176 

Le  Crénilabre  norwégien  (  Crenilabrus  norwegi- 

citSj  nob.;  Lutjanus  norwegicus^  Bl.) 176 

Le  Crénilabre  de  Pennant  (Crenilabrus  Pennantii^ 

nob. ;  Goldsinny^  Penn.) 178 

Le  Crénilabre  de  Donovan  (  Crenilabrus  Dono- 

uani^  nob.;  Lahrus  cornubius^  Donov.). .  .  .  180 
Le  Crénilabre  verdâtre  (Crenilabrus  virescens  j  n.)  182 
Le  Crénilabre  de  Briinnich  (  Crenilabrus  Brùn- 

nichii;  Lutjanus  BrùnnicJiii^  Lacép.) i83 

Le  Crénilabre  méditerranéen  (Crenilabrus  medi- 

terraneus ^  nob.) 186 

Le  Crénilabre  de  Bory  (Crenilabrus  Borjanus ^ 

nob.;  Crenildbrus  nigrescens ^  Risso) 189 

Le  Crénilabre  à  sourcils  d'or  (Crenilabrus  chry- 

sopkrjSj  Risso) 190 

Le  Crénilabre  de  Bâillon  (  Crenilabrus  Baillonij 

nob.) • 191    373 


Xlj  TABLE. 

Pjges.     PlancK; 

LeCrénilabre  ocellé  (Crenilabnis  ocellatus,  nob.  ; 

Lahrus  ocellatus^  Forsk.) 19^ 

Le  Cl énilabre  de  Risso  (Crenilabrus  Rissoi^  nob.  -, 

Lutjamis  olwaceus^  Risso ) 197 

Le  Crénilabre  littoral  ( Crenilabrus  littoralis^  Ris.).  198 
Le  Crénilabïe  petite  tanche  (  Crenilabrus  tinca , 

nob.;  Labrus  iinca^  Brïinn.) 199 

Le  Crénilabre  Massa  {Crenilabrus  Massa ^  Risso)  202 
Le  Crénilabre  de  Cotta  {Crenilabrus  Cottœ,  Risso)  2  04 
Le  Crénilabre Ro'issa\{Crenilabrus Roissalii^  Risso)  206 
Le  Crénilabre  à  cinq  taches   {Crenilabrus  rjuin- 

ffuemaculatus ,  Risso) 212 

Le  Crénilabre  queue  noire  {Crenilabrus  melano- 

cercusj  Risso) 2i3 

Le  Crénilabre  bleu  {Crenilabrus  cœruleus^  Risso)  214 
Le  Crénilabre  vert  tendre   {Crenilabrus  chloro- 

sochrus^  Risso) 2i5 

Le  Crénilabre  arqué  {Crenilabrus  arcuatus^  Ris.).  216 
Le  Crénilabre  marqué  {Crenilabrus notatus^nob.; 

Lutjamis  notatus^  Bl.  ) 217 

Le  Crénilabre  de  Lincke  {Crenilabrus  Linckii,  n.)  218 
Le  Crénilabre  brun  {Crenilabrus  fuscus^  nob.; 

Labrus  fuscus^  Pallas) 219 

Le  Crénilabre  bridé    {Crenilabrus   capistralus ^ 

nob.;  Labrus  capisiratus ^  Pallas) 220 

Le  Crénilabre  à  frein  {Crenilabrus  frœnatus^  nob.; 
Labrus  frœnatus ^  Pallas) 221 

CHAPITRE   IV. 

De  nuelaues  ge/ires  voisins  des  CuÉMLAiiiiKS  et 
en  particulier  des  Cténolabues 2  2  3 


TABLE.  Xn] 

Pages.     Plancli. 

Le  Cténolabre  des  roches  (Ctenolabrus  rupestris; 

nob. ;  Labrus  rupesiris ,  Linn.) 223 

Le  Cténolabre  bordé  {Ctenolahrus  marginatus^n.)   2  3  2 
Le  Cténolabre  cendré  (Ctenolahrus  cineieus,xïo\i.\, 

Labrus  cinereus^  Pallas) 234 

Le  Cténolabre  à  museau  aigu  (Ctenolabrus  acu- 

tuSj  nob.) 235 

Le  Cténolabre  iris  (Ctenolabrus  iris^  nob.)  ....    236    374 
Le  Cténolabre  chogset  (  Ctenolabrus  chogset^ 

nob.;  Labrus  Burgall,  Schœpf) 237 

Le  Cténolabre  mouche  {Ctenolabrus  uninotatus  ^ 

nob.) 239 

Le  Cténolabre  flagellifère  {Ctenolabrus  Jlagelli- 

fer^  nob.) 240 

Des  Acantholabres 242 

L'Acantholabre  Palloni  {Acantholabrus  Palloni^ 

nob.) 243    375 

L'Acantholabre  du  Nord  {Â cantholabrus  exoletus^ 

nob.;  Labrus  exoletus^  Linn.) 247 

L'Acantholabre  de  Couch  {Acantholabrus  Cou- 

ckiij  nob.) 248 

L'Acantholabre  de  Yarell  {Acantholabrus  Yarelliij 

nob. ) 25o 

L'Acantholabre  petite  bouche  {Acaniholabrus  tni- 

crostomaj  nob.;  Crenilabrus  microstoma^  Th.)  Ibid. 
L'Acantholabre  vert  {Acantholabrus  viridis^  nob.)   2  5  2 

CHAPITRE   V. 

Des  Labkoïdes  a  museau  protractile  et  a  ligne 

latérale  non  interrompue 253 

Des  Sublets Ibid. 


XIV  TABLE. 

Pages.     Plancli. 

Le  Sublet  groin  {Coricus  rostratus^  iiob.;  Liit- 

janiis  rostratusj  Bl.) 25  6    376 

Le  Sublet  Lamarck  (Coricus  Lamarckii ^  Risso).  260 

Le  Sublet  verdâtre  {Coricus  virescens ^  Risso)..  261 

Le  Sublet  rougeâtre  (Coricus  ruhescens^  Risso).  262 

Des  Cleptiques 266 

Le  Cleptique  créole  (Clepticus  genizarra^  noh.)  267    377 

CHAPITRE   VL 

Des  Lachnolèmes  (Lachnolaimus) ^  nommés 
vulgairement  aux  Antilles  Aigrettes  ou  Ca- 
pitaines      274 

Le  Laclinolème  aigrette  (  Lachnolaimus  aigula^ 

nob.) 277    378 

Le  Laclinolème  cai^iiame  (Lachnolaimus  âux^nob.)  2  85 

Le  Laclinolème  à  grouin  de  cochon  (Lachnolaimus 

suillusj  nob.) 286 

Le  Lachnolème  petit  chien  (Lachnolaimus  cani- 


nus 


nob.) 288 

Le  Lachnolème  perroquet  (f^achnolainius  psitta- 

cusy  nob.) 291 

CHAPITRE   VIL 

Des  Taxjtogxjes  (  Tautoga ^  nob.) 292 

Le  Tautogue  noir  (Tautoga  nigra^  Mitch.) ....  293 

Tautoga  fusca , 3oi 

Tautoga  ruhens 3o2 

Tautoga  alia Ihid. 

Le  Tautogue  à  bandes  (Tautoga  f as  data  ^  nob.; 
Lahrus  Jasciatusj  Bl.  ;  Labrus  JuliginosuSj 

Lacép.) 3o3   379 


TABLE.  XV 

Pages.     Plancli. 

Le  Tautogue  de  Mertens  (  Tau  toga  Mertensiij  nob .)  3  o  8 
Le  Tautogue  à  six  bandes  {Tautoga  sexfasciata^ 

nob.;  Halichores  sexfasciatus ^  Rupp.).  ...  3 03 
Le  Tautogue  aux  grandes  lèvres  (  Tautoga  me- 

laplerus^  nob.;  Lahriis  melapterus ^  Bl.)..  .  .  3i  1 
Le  Tautogue   veiné  {Tautoga  tesselata,    nob.; 

Lahrus  iesse/atus,  Bl.) 3  1  5 

CHAPITRE  VIIL 

Des  Malacanthes 3  1  6 

Le  Malacanthe  de  Plumier  {Malacanthus  Plumieri^ 
nob.;   Corjphœna   jP/i/m7>/7 ^  Bloch;  Sparus 

ohlongus,^  Bl,  Schn.) 319    38o 

Le  Malacanthe  à  large  raie,  ou  Tubleu  de  l'Isle-de- 
France  {Malacanthus  tœniatus^  nob.;  Lahre 
large  raie^  et  Tœnianote  large  /y7/>,  Lacép.)  .    327    38  i 

CHAPITRE   IX. 

Des  Cheilions 338 

Le  Cheilion  doré  {Cheilio  auratus  ^  Comm.) .  .  ,  341 

Le  Cheilion  vert  et  bleu  (6'/^e/7/o  cjanochloris  ^x\oh.)  346    382 

Le  Cheilion  brun  {Clieilio  fuscus^  Comm.)..  .  .  84g 
Le  Cheihon  de  Forskal  {Cheilio  ForskaUi^  nob.  ; 

Labrus  inermis^  Forsk.) Ibid. 

Le  Cheilion  demi  -  doré  (  Cheilio  hemichrysos , 

nob.;  Cheilio  auratus^  Quoy).- 35i 

Le  CheiUon  vert  {Cheilio  viridis^  nob.) 35  2 

Le  Cheilion  petite  bouche  (  Cheilio  viicrostoma , 

nob.) 35  3 

Le  Cheilion  rayé  {Cheilio  lineatus ,  nob.) 354 


XVJ  TABLE. 

Pages.     Plancli. 

Du  Malaptère 3  5  5 

Du  Malaptère  réticulé  (Malapterus  reticulalus  ^ 

iiob.) Ihid.  3  83 

CHAPITRE    X. 

Des  Girelles 358 

La  Girelle  commune  {Jidis  vulgaris^  nob.).  .  .  36 1    384 

La  Girelle  Giofredi  (Julis  Giqfredi^  Risso).  ...  371    385 

La  Girelle  coquette  (Julis festwa^  nob.) 374 

La  Girelle  élégante  {Julis  speciosa^  Risso).  ...  375 

La  Girelle  paon  (Julis  pat^o^  nob.) 377    386 

La  Girelle  de  Sainte-Hélène  (Julis  Sanctœ  He- 

lence ,  nob. ) , 382 

La  Girelle  de  Lesson  (Julis  Lessonii^  nob.).  .  .  384 

La  Girelle  de  l'Ascension  (JulisAscensionis^0.e\.G.)  3  85 

La  Girelle  à  trois  taches  (Julis  trimaculatus^  nob.)  38  6 

La  Girelle  perruche  (Julis psittaculus ^  Lacép.).  387 

La  Girelle  de  Garnot  (Julis  Garnoti^  nob.).  ...  390 
La  Girelle  aux  taches  bleues  (Julis  cyanostigmaj 

nob.  ) 391 

La  Girelle  opaline  (Julis  opalinus ^  nob.) 392 

La  Girelle  aux  tempesnoires  (Julis  crotap/ius^  nob.)  395 

La  Girelle  patate  (Julis  paiatus ^  nob.) 398 

La  Girelle  du  Prince  (Julis  principis^  nob.)  .  ,  402 

La  Girelle  partagée  (Julis  dimidiatus ^  Agass.) . .  407 

La  Girelle  dégraisseur  (Julis  detersor^  nob.).  .  408 

La  Girelle  lunaire  (Julis  lunaris^  nob.) 409 

La  Girelle  croissant  (Julis  meniscus^  nob.)..  .  .  410 

La  Girelle  à  joues  rayées  (Julis  gerwittatuSy  nob.)  416 

La  Girelle  de  Commerson  (Julis  Commersoni^  nob.)  418 

La  Girelle  de  Matthieu  (Julis  Matthœi^  nob.).  .  419 


TABLE.  XVlj 

P»gc».     PUnch. 

La  Girelle  verte  (Jidis  viridis^  nob.  ;  Lahrus  viri- 

disj  Bl.) 420 

La  Girelle  de  Mertens  (Julis  Mertensii^  nob.) .  .  421 

La  Girelle  de  Duperrey  {Julis  Duperrei,  Q.  G.)  Ibid. 
La  Girelle  de  Bloch  (Julis  Blochiij  nob.  ;  Lahrus 

lunaris j  Bl.) 422 

La  Girelle   hébraïque   (  Julis  hehraicus ,  nob.  ; 

Lahre  hébraïque ^  Lacép.) 423 

La  Girelle  à  queue  tachetée  (Julis  caudijnacula. 

Q.  et  G.) 426 

La  Girelle  ceinture  (Julis  cingulum^  nob.)  ....  428 
La  Girelle  parterre  (Julis  hortulanuSj  nob.  ;  Labrus 

-    centifjuadjusj  Comra.) 43o 

La  Girelle  brigadier    (Julis   decussatusy   nob.; 

Sparus  decussatusj  W.  Benn. ) 433 

La  Girelle  corbeille  (Julis  corbisj  nob.) 435 

La  Girelle  linéolée  (Julis  lineolatus ^  nob.).  .  .  436 
La  Girelle  trilobée  (Julis  trilobatusj  n.  ;  Labrus 

trilobatusj  Lacép.  j  et  Labrus  fuscus ^  ejusd.)  437 

La  Girelle  parée  (Julis Jonnosus j  nob.) 439 

La  Girelle  malachite  (Julis  œruginosus ^  nob.)..  44  1 

La  Girelle  demi-bleue  (Julis  semicœruleuSjKui^i^.^.  442 

La  Girelle  pao  (Julis  quadricolor ^  Lesson)..  ,  443 
La  Girelle  cyanogastre  (Julis  cjanogaster ^noh.'^ 

Labrus  cyanogaster ,  Solander.) 444 

La  Girelle  i^our^vée  (Julis purpureus^  Ruppel)  .  445 
La  Girelle  à  ventre  rouge  (Julis  erjthrogaster^ 

Solander) ,  447 

La  Girelle  semi-fasciée  (Julis  semifasciaius ^  n.).  448 

La  Girelle  à  dorsale  rayée  (Julis  dor salis ^  Q'Gr.)  449 

La  Girelle  trimaculée  (Julis  trimaculatus ^  Q.).  462 

b 


Pages. 

Phnch. 

453 

455 

467 

459 

460 

XVllj  TABLE. 

La  Girelle  de  Leschenault  (Jiilis  Leschenaultij 
nob.) 

La  Girelle  de  Eydoux  (Julis  Ejdouxiij  nob.). 
La  Girelle  de  Souleyet  (Julis  Soulejetii^  nob.). 
La  Girelle  de  Desjardins  (Julis  y4hhortani^  n.). 
La  Girelle  rouge  (Julis  miniatus ^  K.  V.  H.).. 
La  Girelle  nuageuse  (Julis  nehulosus  ^  nob.)..  461 
La  Girelle  variée  (Julis  variegatusj  nob.)..  .  .  462 
La  Girelle  aux  nageoires  rouges  (Julis  erythrov- 

terus j  nob.) 464 

La  Girelle  multicolore  (Julis  inulticolor^  Rupp.).  466 
La  Girelle  rayée  de  bleu  (Julis  cœruleo-vittalus  ^ 

Ruppel ) 466 

La  Girelle  élégante  (Julis  elegans ^  K.  V.  H. ).  467 
La  Girelle  à  ventre  rayé  (Julis  sirigii^enler^  Benn.).  468 
La  Girelle  de  Ceilan  (Julis  ceilanicus ^  Benn.)..  Ihid. 
La  Girelle  scapulaire  (Julis  scapularis ^  Benn.)..  469 
La  Girelle   double    cliaîne    (Julis    bicaleiiatus ^ 

Bennett) 470 

La  Girelle  de  Finlayson  (Julis  Finlajsoni ,  nob.).  471 
La  Girelle  à  raies  pourpres  (Julis  purpureo-linea- 

iusj  nob.) Ibid. 

La  Girelle  axillaire  (Julis  axillaris ^  nob.)..  .  .  472 
La  Girelle  de  Seba  (Julis  S  eh  anus  ^  nob.).  .  .  474 
La  Girelle  raie  aurore  (Julis  halteatus ^  Q.  G).  476 
La  Girelle  de  Dussumier  (Julis  Dussumieri^  nob.).  478  387 
La  Girelle  de  Geoffroy  (Julis  Geoffroyii ^  Q.  G.).  479 
La  Girelle  méléacridée  (Julis  meleagris ^  nob.).  481 
La  Girelle  de  Lamarre  (Julis  Lamarii^  nob.)..  Ihid. 
La  Girelle  annulaire  (Julis  annularis^  K.  V.  H.).  482 
La  Girelle  pointillée  (Julis  punclulatus ^  nob.).    483 


TABLE.  XIX 

Pages.    Planch' 

La  Girelle  pavonine  (Jiilis  pat^oninus,  nob.).  483 

La  Girelle  nacrée  {^Julis  margaritaceus ^  nob.).  484 

La  Girelle  papillonacée  (Julis  papilionaceus  j  n.).  Ihid. 

La  Girelle  notopside  (Julis  notopsis ^  K.  V.  H.).  486 

La  Girelle  aurite  (Julis  auritus^  nob.) 486 

La  Girelle  de  Horsfield  (Julis  Horsjieldii ^  nob.).  Ihid. 

La  Girelle  ornée  (Julis  ornatus^  nob.) 487 

La   Girelle  aux  points   sombres  (  Julis  umhro- 

stjgma j  Ruppel ) 488 

La  Girelle  auriculaire  (Julis  auricularisj  nob.).  489 

La  Girelle  bordée  (Julis  marginatus ,  Ruppel).  490 
La   Girelle  à   deux  taches   (Julis  himaculatus ^ 

Ruppel) 491 

La  Girelle  coris  (Julis  coris ^noh.;  Corisajgulay 

Lacép.) Ibid, 

La  Girelle  étoilée  (Julis  stellatus^  nob.) 499 

La  Girelle  de  Gaimard   (Julis  Gaimardij  Q.).  5 00 

La  Girelle  annelée  (Julis  annulatusj  nob.).  .  .  5 01    388 

La  Girelle  cerclée  (Julis  doliatus ^  nob.) 604 

La  Girelle  aux  bords  jaunes  (Julis  prœtextatusy 

Q.) 5o5 


HISTOIRE 

DES   POISSONS. 


LIVRE  SEIZIEME. 

DES    LABROÏDES. 

Artedi  avait  emprunté  aux  Latins  la  déno- 
mination de  Labrus,  pour  désigner  un  de  ses 
genres  d'acanthoptérygiens.  Ce  nom  est  en 
effet  cité  par  Pline  *  comme  celui  d'un  poisson 
dont  aurait  parlé  Ovide  dans  un  passage  de 
ses  OEuvres  qui  ne  nous  est  pas  parvenu. 

Nous  retrouvons  cette  même  expression 
dans  un  autre  endroit  d'Ovide,  où  il  s'en  sert 
pour  nommer  un  des  chiens  de  la  meute  d'Ac- 
téon^;  mais  il  paraît  que  dans  ce  passage  le 
chantre  de  Sulmone  a  voulu  indiquer  par  ce 
mot  la  voracité  et  l'impétuosité  du  chien. 

1.  Et  placentem  cauda  labrum,  1.  XXXII,  c.  ii. 

"i.  Et  pâtre  Dictœo,  sed  matre  Laconide  nali , 
Labros,  et  Agriodos .  et  acutœ  vocis  Hylacior. 
(Met.,  1.  III,  V.  224.) 

i3.  1 


2  LIVRE   SEIZIÈME. 

Nous  ne  savons  pas  si  dans  les  vers  dont 
Pline  nous  a  laissé  le  souvenir,  le  poète  l'em- 
ployait encore  dans  le  méine  sens,  ou  si, 
comme  la  cru  Artedi,  cette  expression  était 
appliquée  à  un  poisson  remarquable  par  des 
lèvres  grosses  et  proéminentes.  L'épithète  que 
Pline  ajoute  au  mot  lahrus  ne  confirme  pas 
cette  conjecture,  qui  d'ailleurs  est  contraire 
au  sens  attaché  à  ce  mot  par  tous  les  grammai- 
riens. 

Ce  nom  ne  se  retrouve  dans  aucun  auteur 
ancien,  ce  qui  porte  à  croire  qu'il  était  peu 
usité,  et  que,  peut-être  même  imaginé  par  un 
poète,  il  n'a  jamais  désigné  une  espèce  parti- 
culière. 

Quoi  qu'il  en  soit,  l'emploi  qu'en  a  fait  Ar- 
tedi, Ta  consacré  aujourd'hui  en  ichtliyologie: 
il  s'applique  à  des  poissons  à  lèvres  grosses, 
charnues,  proéminentes,  plissées,  qui  ont  tous 
des  rapports  marqués  entre  eux,  et  qui  com- 
posent dans  notre  système  une  famille  à  la- 
quelle M.  Cuvier  a  imposé  le  nom  de  Lahroï- 
des.  Le  genre,  tel  qu'Artedi  l'avait  entendu', 
comprenait  des  poissons  pour  la  plupart  de 
la  Méditerranée  ,  qui  avaient  la  membrane 
branchiostège  soutenue   par  six  rayons  j  des 

1.  Ailcdi,  Gen.  XXVII,  p.  35.  - 


LABROIDES.  ù 

dents  fortes  aux  mâchoires;  des  plaques  os- 
seuses et  dentées,  au  nombre  de  deux  aux 
pliaryngiens  supérieurs,  et  d'une  seule  aux  in- 
férieurs; la  langue  et  le  palais  lisses;  les  lèvres 
épaisses  et  charnues,  recouvrant  les  dents;  les 
rayons  de  la  dorsale  de  nature  épineuse  et 
molle,  et  la  membrane  qui  réunit  les  premiers, 
prolongée  en  filet  charnu  près  de  la  pointe 
de  chaque  épine  ;  enfin  il  ajoutait  à  ces  carac- 
tères l'absence  d'appendices  pyloriques,  et  il 
faisait  remarquer  que  le  corps  était  couvert  de 
grandes  écailles  lisses  et  molles. 

Ce  genre  comprenait  neuf  espèces,  qui  tou- 
tes, sauf  la  huitième,  étaient  assez  bien  rappro- 
chées Tune  de  l'autre  pour  composer  un  groupe 
naturel.  La  huitième,  à  la  vérité,  n'a  aucun 
des  caractères  cités  plus  haut,  et  Artecli  ne  l'y 
a  introduite  que  par  une  confusion ,  dont 
nous  avons  déjà  parlé  à  l'article  du  serranus 
hepatus} 

Ce  nombre  des  espèces  semble  augmenter 
dans  la  synonymie^;  mais  déjà  l'auteur  s'écarte 
des  caractères  qu'il  a  posés  pour  le  genre 
lahrus  ;  ainsi  son  Labrus  totus  ruhescens , 
caucla  hifurca,  est  encore  un  de  nos  serrans^;  le 

1.  Cuv.  Val.,  Hist.  nat.  des  poissons,  t.  II,  p.  233. 

2.  kïlcA'i ,  Sjn. ,  p.  55. 

3.  Serranus  anthias ^  Guy.  Val.,  t.  II,  p.  25o. 


A  LIVRE   SEIZIÈME. 

Labtmjs  pulcJirè  varius,pinnispectoralihus  in 
extremo  rotundis,  est  reproduit  une  seconde 
fois  dans  son  labrus  rostro  surshm  rejlexo, 
cauda  in  extremo  ciixulari;  et  le  Labrus  ex 
purpureOy  viridi  cœruleo  et  nigro  varius, 
n'en  est  peut-être  encore  qu'une  troisième  ré- 
pétition. Quant  à  l'espèce  n.°  9,  qui  est  deve- 
nue le  labrus  cjnœdus  de  Linné,  il  est  fort 
difficile  de  la  reconnaître,  et  elle  nous  paraît 
être,  par  l'entassement  des  synonymes  qui  y 
sont  réunis,  un  être  imaginaire,  qui  par  sa 
caractéristique  seule  pourrait  être  rapproché 
du  Icthrus  n.°  10,  devenu  le  labrus  mixtus  du 
Sjstema  naturœ. 

Linné,  dès  sa  dixième  édition,  augmente 
beaucoup  la  confusion  commencée  par  Artedi, 
aussi  nous  retranchons  déjà  un  plus  grand  nom- 
bre d'espèces  des  labres  de  Linné.  Il  en  men- 
tionne quarante,  parmi  lesquelles  nous  avons 
déjà  signalé  plusieurs  percoïdes  ^  plus  ou  moins 
incertains;  un  sciénoïde  voisin  des  pristipomes 
et  des  hémulons^;  un  autre,  qui  appartient 
probablement  à  la  famille  des  poissons  à  pha- 
ryngiens labyrinthiformes^,  mais   sur  lequel 


1.  Labrus  anihias  ;  Labrus  hepaius;  Labrus  auriius;  Labrus 
Guaza;  Labrus  fulvus. 

2.  Labrus  striaius.  —  3.  Labrus  opercularis. 


LABROÏDES.  5 

nous  n'avons  encore  que  des  idées  fort  in- 
certaines. 

Nous  éloignerons  encore  de  notre  genre 
labre  les  lahrus  mar^inalis  et  lahrus  ferru- 
gineus^  qui  n'ont  chacun  que  deux  rayons 
épineux  à  la  dorsale ,  et  qui  doivent  appartenir 
à  un  même  genre,  voisin  peut-être  de  nos 
malacanthes,  et  dont  les  caractères  seront  éta- 
blis quand  nous  aurons  pu  retrouver  ces  es- 
pèces. J'en  dirai  autant  du  lahrus  linearis,  qui 
a  un  caractère  tout  opposé  et  fort  extraordi- 
naire dans  le  grand  groupe  des  acanthoptéry- 
giens  :  sur  les  vingt  et  un  rayons  de  sa  dorsale 
le  dernier  seul  est  mou,  tous  les  autres  sont 
épineux.  Ce  poisson  pourrait  bien  appartenir 
à  notre  famille  de  ceux  à  pharyngiens  laby- 
rinthi  formes. 

Linné  n'avait  fait  que  deux  additions  à  cette 
liste  dans  sa  douzième  édition;  mais  elles  n'é- 
taient pas  très-heureuses,  car  des  deux  poissons 
que  Garden  lui  avait  fait  connaître,  l'un,  le 
lahrus  chromis^  est  de  la  famille  des  scié- 
noïcles  et  du  genre  pogonias^  et  l'autre,  son 
lahrus  hiatula,  est  tout-à-fait  indéterminable. 
Le  lahrus  griseus,  pris  dans  Catesby,  est  en- 
core dans  le  même  cas,  car  il  est  impossible 
que  le  manque  des  pectorales  ne  soit  pas  le 
fait  d'une  mutilation. 


6  LIVRE  SEIZIÈME. 

Si  nous  retranchons  encore  quelques  dou- 
bles emplois,  dont  nous  établirons  les  preuves 
dans  la  suite  de  cette  histoire ,  le  nombre  des 
labroïdes  connus  de  Linnë  se  réduirait  tout 
au  plus  à  vingt  espèces  de  labres,  tels  qu'Ar- 
tedi  les  caractérisait;  mais  ce  nombre  s'aug- 
menterait de  quelques  autres,  éparses  dans  des 
genres  difFérens.  C'est  ainsi  que  nous  ramenons 
à  la  famille  dont  nous  parlons ,  le  spams  saxa- 
tilisy  qui  est  de  nos  cichla;  le  spams  ^alilœus, 
un  de  nos  chromis. 

Cette  confusion  s'accroît  de  manière  à  deve- 
nir presque  inextricable  par  les  additions  des 
auteurs  postérieurs  à  Linné.  Il  nous  a  fallu  un 
travail  opiniâtre  pour  parvenir  à  reconnaître 
leurs  doubles  emplois  et  leurs  rapprochemens 
contraires  à  toutes  les  affinités  naturelles. 

Ainsi  Gmelin,  qui  a  porté  à  soixante-onze 
le  nombre  de  ses  labres ,  y  range  deux  serrans 
faciles  à  reconnaître ,  l'un ,  d'après  Forskal ,  le 
lahrus  chanus\  et  le  second,  d'après  Briïn- 
nich,  le  lahrus  adriaticus^ ;  un  gerres,  le  la- 
brus  ojena^,  et  un  des  genres  de  nos  poissons  à 


1 .  C'est  notre  serranus  cabriUa ,  Cuv.  Val. ,  Hlsl.  nat.  des  poiss. , 
l.II,  p.  229. 

2.  iSlerranM^- ^fi/7rt/M5, Cuv.  Val.,  Ilis.  nat.  des  poiss.,  t.  II,  p.  255. 

3.  Gerres  ojena, Cixv.  Val.,  Ilist.  nat.  des  poiss.,  t.  VI,  p.  472. 


LABROIDES.  / 

pharyngiens  labyrinthi  formes,  le  labrus  irichop- 
terus  de  Pallas',  et  enfin,  cfaprès  Houttuyn, 
deux  percoïdes  ,  difficiles  d'ailleurs  à  caracté- 
riser d  une  manière  précise,  le  lahrus  j aponicus 
et  le  lahrus  Boops.  Parmi  les  espèces  restantes, 
nous  y  reconnaissons  cinq  à  six  doubles  em- 
plois, ce  qui  porterait  à  vingt  et  un  le  nombre 
des  additions  faites  par  Gmelin,  et  prises  en 
grande  partie  à  Forskal,  à  Brùnnich  et  même 
à  Pennant. 

Notre  tâche  est  devenue  très-difficile,  quand 
nous  avons  voulu  faire  ces  mêmes  recherches 
critiques  sur  l'ouvrage  de  M.  de  Lacépède.  Son 
genre  labre  comprend  cent  trente  espèces; 
mais  comme  il  a  copié  sans  aucune  critique 
Gmehn  et  le  travail  de  Bonnaterre  de  l'Ency- 
clopédie méthodique,  et  qu'il  y  a  ajouté  plus 
d'erreurs  peut-être  que  dans  aucun  autre  genre, 
on  est  tout  étonné  du  résultat  auquel  notre 
travail  nous  conduit. 

Outre  les  labroïdes  que  nous  y  laisserons, 
M.  de  Lacépède  y  a  classé  des  poissons  de 
presque  toutes  les  autres  familles  d'acanthop- 
térygiens.  En  effet,  nous  y  voyons  parmi  les 


1.    Trichopodus  IrichopUrus ,  Lac.  ,  Cuv.  Val.,  llisl.   liât,   des 
poiss. ,  l.  VII,  p.  588. 


8  LIVRE    SEIZIÈME. 

percoïdes  quatre  serrans  \  six  diacopes%  un 
cirrhite^,  deux  centrarchus  sous  trois  espèces 
nominales'*,  un  pomotis^,  un  priacanthe^,  un 
holocentrum^,  un  percis  ^  et  deux  autres  per- 
coïdes douteux^;  nous  avons  également  re- 
connu comme  sciënoïdes  une  sciène  propre- 
ment dite'°,  deux  johnius'',  un  liëmulon'% 
un  pristipome^^  et  deux  glypliisodons  '1  II  a 
reproduit  sous  le  nom  de  labrus  opercularisy 
ce  poisson  que  nous  croyons  être  de  la  fa- 
mille de  ceux  à  pharyngiens  labyrinthiformes. 
Nous  avons  placé  dans  les  sparoïdes  un  chryso^ 


1.  Labrus  hepaius;  Labrus  punciulatus  ;  Labrus  lœvis ,  le  même 
que  son  Bodian  cjclostomej  Labrus  leopardus. 

I.  Labrus  Bohar;  Labrus  gibbus  ;  Labrus  niger;  Labrus  argent 
tatus  ;  Labrus  octovittatus  ;  Labrus  Kasmîra. 

3.  Labrus  marmoratus. 

4.  Labrus  sparoides  ;  Labrus  iris ,  le  même  que  le  Labrus  ma-s 
çropierus. 

6.  Labrus  auritus. 

6.  Labrus  cruentatus. 

7.  Labrus  angulosus. 

8.  Labrus  teiracanthus. 

9.  Labrus  Guaza;  Labrus  fulvus. 

10.  Labrus  hololepidotus . 

II.  Labrus  carutta;  Labrus  œneus. 

12.  Labrus  Plumieri  [Hœmulon  formosunif  Cuv.  Val.,  t.  V, 
p.  23l). 

13.  Labrus  Commersonii  {Prisiipoma  kaakarij  Cuv.  Val.,  t.  V, 
p.  344;  Luljan  microstome ,  Lacép.). 

14.  Labrus  sexfasciaius  [Gljphisodon  cœUslinus ,  Cuv.  Val.); 
Labrus  macrogaster  [Gljphisodon  bengaknsis ,  Cuy.  Val.). 


LABROÏDES.  9 

phrys*,  un  pagel^,  deux  dentés^  et  un  lethri- 
nus/ 

Aux  mënides  appartiennent  un  smaris  ^,  un 
gerres  reproduit  sans  dénomination  spécifi- 
que^; enfin,  nous  avons  aussi  notre  aphareus 
cœrulescens  dans  un  des  labres  de  Lacépède/ 
Des  poissons  de  la  famille  des  squatnniipen- 
nes  ont  été  aussi  rangés  dans  ce  genre  :  l'un  est 
selon  M.  Ruppel  un  pimeleptère^,  et  l'autre 
est  le  toxotes^;  enfin,  il  nous  paraît  très- 
probable  que  l'on  doit  aussi  y  retrouver  un 
scombéroïde  du  genre  des  liches  ^°,  quoique 
la  description  du  sciœna  annata,  telle  que 
Forskal  nous  l'a  laissée,  rende  cette  détermina- 
tion peu  sûre;  et  il  restera  encore  à  retirer 

1.  Làbrus  catenula  {^Chrysophrys  hifasciata,  Cuv.  Val.,  t.  VI, 
p.  119). 

2.  Labrus  calops  (Pagellus  centrodontus ,  Cuv.  Val.).  Espèce 
établie  d'après  une  note  envoyée  par  feu  M.  Noël  à  M.  de  Lacépède. 
Nous  n'avions  pas  reconnu  cette  sjuonjmie  quand  nous  avons 
rédigé  l'article  de  notre  sixième  volume. 

3.  Labrus  macrocephalus  ;  Labrus  Jliunbergii. 

4.  Labrus  nebulosus  {^Lethrjnus  nebulosus ,  Cuv.  Val.,  t.  VI, 
p.  284). 

5.  Labrus  unîmaculatus. 

6.  Labrus  ojena ,  Forsk.  ;  le  Labrus  îongirostris ,  et  probablement 
aussi  le  Labrus  lepisma.  Notez  bien  que  ce  poisson  existe  encox'e  une 
quatrième  fois  sous,  le  nom  de  Sparus  britannus. 

7.  Labrus  furcà. 

8.  Labrus  cinerascens . 

9.  Labrus  jaculaîor. 
JO.  Labrus  armaius. 


10  LIVRE   SEIZIÈME. 

des  labres  ces  espèces  établies  sur  l'autorité 
de  Linnë,  et  que  nous  avons  signalées  comme 
impossibles  à  déterminer  aujourd'hui.  Et  à 
celles-ci  nous  ajouterons  le  labrus  aristatus, 
que  Lacépède  a  pris  de  l'Encyclopédie  sans 
recourir  au  mémoire  de  Sparmann,  inséré  dans 
le  tome  VII  des  Aménités  académiques.  Or, 
Bonnaterre ,  ne  lisant  apparemment  que  le 
titre  du  mémoire ,  a  cru  que  tous  les  animaux 
mentionnés  parle  voyageur  en  Chine,  venaient 
de  ce  pays;  ce  qui  est  bien  contraire  au  rap- 
port de  l'auteur,  qui  a  eu  le  soin  de  citer 
jour  par  jour  les  lieux  où  il  s'était  procuré  les 
difFérens  êtres  dont  il  a  laissé  des  descriptions 
malheureusement  trop  peu  détaillées.  Quant  au 
poisson  dont  il  s'agit  ici,  c'est  au  retour  en 
Europe,  entre  Sainte -Hélène  et  l'Ascension, 
qu'il  Tut  pris.  Le  rédacteur  de  l'Encyclopédie 
a  dit  que  S\)iiYu\di\\n  a  trouvé  ce  poisson  dans 
la  Chine;  Lacépède,  pour  arrondir  sa  phrase, 
a  changé  ces  mots  en  ceux-ci  :  et  Sparniann  a 
dit  que  le  labre  aristé  a  pour  patrie  les  eaux 
de  la  Chine.  Shaw  venant  à  son  tour  paraphraser 
sur  ces  erreurs,  change  d'abord,  sans  que  l'on 
puisse  trop  savoir  pourquoi,  le  nom  de  Linné 
en  celui  de  carinatus,  et  en  fait  alors  un 
poisson  des  eaux  douces  de  la  Chine  {natis^e 
of  the  fresh  waters  of  China). 


LABROÏDES.  1  1 

Voici  encore  un  nouvel  exemple  de  la  ma- 
nière légère  avec  laquelle  on  écrit  en  histoire 
naturelle, quand  on  ne  se  résigne  pas  au  travail 
pénible  de  tout  revoir  par  soi-même.  Le  degré 
de  certitude  que  l'on  donne  à  ses  ouvrages, 
est  cependant  une  douce  satisfaction  pour 
l'auteur. 

Quand  les  navigateurs  qui  traversent  cette 
région  de  l'Atlantique  nous  rapporteront  ce 
poisson,  je  crois  bien  que  nous  le  reconnaî- 
trons dans  la  courte  notice  de  Sparmann  ; 
mais  on  ne  peut,  d'après  elle,  dire  à  quelle  fa- 
mille il  appartient  :  ce  qui  paraît  certain,  c'est 
que  ce  ne  sera  pas  dans  les  labroïdes  qu'il  vien- 
dra prendre  place. 

Il  nous  restait  encore  un  second  genre  de 
corrections  à  faire,  et  qui  consistait  à  recon- 
naître les  doubles  emplois.  Ils  y  sont  en  si 
grand  nombre,  que  nous  démontrerons  qu'une 
des  espèces  les  plus  communes  de  nos  côtes 
existe  dans  ce  catalogue  sous  sept  noms  spé- 
cifiques distincts.  xAïussi  les  labroïdes  placés 
par  Lacépède  dans  son  genre  labre  y  après  tou- 
tes ces  rectifications,  se  réduisent  à  cinquante 
et  une  espèces  :  c'est-à-dire  à  moins  de  moitié 
de  celles  comptées  par  l'auteur.  Nous  devons 
cependant  dire  que  Lacépède  a  connu  un  plus 
grand  nombre  de  poissons  de  cette   famille,. 


12  LIVRE    SEIZIÈME. 

car  nous  y  rapprochons,  mais  avec  la  même 
espèce  de  critique ,  les  genres  cheilines,  scares^ 
chelioriy  et  même  d'autres  poissons  que  nous 
y  avons  ramenés  des  genres  difFërens  dans  les- 
quels il  les  avait  placés.  Ainsi  nous  avons 
compté  vingt-deux  labroïdes  parmi  ses  spares  * 
et  quinze  parmi  ses  lutjans. 

Shaw ,  après  avoir  copié  arbitrairement  toute 
cette  liste  d'espèces  disparates,  y  ajoute  encore 
des  poissons  fort  étrangers,  car  il  y  fait  figurer 
l'ombrine  vulgaire  sous  le  nom  de  labre  cja- 
nopterey  et  il  fait  de  nouveaux  doubles  emplois 
des  figures  d'As  canins. 

Bloclî  a  dans  son  Système  posthume  un  genre 
un  peu  moins  nombreux  que  Lacépède,  mais 
encore  il  a  huit  ou  dix  espèces  qui  doivent  en 
être  retirées,  et  qui  n'auraient  pas  même  dû  y 
entrer ,  s'il  leur  avait  applique  le  caractère  de 
son  genre,  tout  large  qu'il  était. 

Après  avoir  écarté  toutes  ces  espèces  hété- 
rogènes à  celles  qu'Artedi  avait  primitivement 
réunies  dans  son  genre  lahrus,  nous  formerons 
une  fimille  d'acanthoptérygiens ,  que  nous 
caractérisons  par  la  forme  oblongue  d'un  corps 
écailleux  ;  une  seule  dorsale,  soutenue  en  avant 
par  des  rayons  épineux,  garnie  le  plus  souvent 


1.  Vovcz  Cuv.  Val. ,  t.  VI .  p.  4  .  noie. 


LABROÏDES.  1 5 

d'un  lambeau  membraneux;  les  mâchoires  re- 
couvertes par  des  lèvres  charnues;  le  palais 
lisse  et  sans  aucunes  dents  ;  les  pharyngiens 
au  nombre  de  trois ,  deux  supérieurs  et  un 
inférieur  :  tous  trois  armés  de  dents  tantôt  en 
pavé,  tantôt  en  lames,  en  pointes;  un  canal 
intestinal  sans  cœcums,  et  une  vessie  nata- 
toire. 

Cette  famille,  réduite  à  ne  renfermer  que 
les  poissons  qui  présentent  ces  caractères , 
comprend  encore  un  assez  grand  nombre  d'es- 
pèces, qui  sont  réparties  en  plusieurs  genres. 

Celui  des  labres  réunit  les  espèces  à  lèvres 
grandes,  charnues  et  comme  doubles; la  mem- 
lirane  branchiostège  n'a  que  cinq  rayons,  les 
dents  maxillaires  simples  et  coniques  sur  un 
ou  plusieurs  rangs;  les  pharyngiennes  cyKndri- 
ques  et  mousses;  les  pièces  operculaires  sans 
épines;  la  joue  et  l'opercule  couverts  d'écail- 
lés ;  la  ligne  latérale  presque  droite. 

Les  crénilahres  diffèrent  de  ceux-ci  par  leur 
préopercule  profondément  dentelé,  et  parce 
que  leur  museau  n'est  pas  protractile.  Cette 
protractilité  a  fait  distinguer  par  M.  Cuvier  les 
suhlets  [coj'icus)  de  ses  crénilabres. 

Les  c/iei7i/2e^  sont  semblables  aux  labres  par 
l'intégrité  de  leur  préopercule;  mais  leur  ligne 
latérale  se  dirige  parallèlement  au  dos  jusqu'à 


]A  LIVRE    SEIZIÈME. 

la  fin  de  la  dorsale,  ou  elle  s'interrompt  pour 
recommencer  par  une  ligne  plus  basse,  tracée 
par  le  milieu  de  la  queue. 

L'extrême  protractilité  du  museau  des  epi^ 
puIuSj,  a  engagé  M.  Cuvier  à  séparer  comme 
genre  ce  poisson,  semblable,  du  reste,  aux  chei- 
lines ,  et  qu'avant  lui  Pallas  avait  rangé  parmi 
les  spares. 

Nos  tautogas  sont  distingués  des  labres  par 
la  peau  nue  et  épaisse  de  l'opercule  :  celle  du 
préopercule  étant  couverte  de  petites  écailles. 

M.  Cuvier  SLUOinmé  laclmolaimiisles  es^^Gces 
à  rayons  de  la  dorsale  et  de  l'anale  prolongés 
en  longs  filamens,  et  qui  ofFrent  encore  un 
caractère  d'une  valeur  plus  élevée  dans  les  vil- 
losités  épaisses  qui  sont  au-devant  des  dents 
pharyngiennes  supérieures. 

Les  girelles  ont  la  tête  toute  nue ,  la  bou- 
che petite  et  des  dents  coniques  et  droites 
sur  les  mâchoires  ;  on  a  pu  distinguer  de  ceux- 
ci  les  anampsès,  qui  n'ont  à  chaque  mâchoire 
que  deux  dents  comprimées,  tranchantes,  re- 
courl^ées  et  saillantes  hors  de  la  bouche. 

Les  razons,  que  l'on  avait  classés  parmi  les 
coryphènes  avant  M.  Cuvier,  sont  des  poissons 
très-semblables  aux  labres  ou  aux  girelles,  et 
que  la  hauteur  de  leur  profil  vertical  en  dis- 


tmgue  aisément. 


LABROÏDES.  ^  S 

Les  chromis  et  les  cichlas  ont  les  dents  en 
carde  aux  deux  mâchoires ,  et  les  premiers  ont 
sur  la  rangée  externe  des  dents  plus  fortes, 
ce  qui  les  distingue  des  seconds. 

Tous  ces  poissons  ont  une  dorsale  soutenue 
en  avant  par  de  nombreux  rayons  épineux; 
ceux  qui  n'ont  que  deux  rayons  au  plus ,  sim- 
ples ,  mais  souvent  flexibles  sur  la  partie  anté- 
rieure de  la  dorsale,  constituent  les  genres 
chelion  ou  malacanthe  ;  les  uns  ont  l'opercule 
des  labres,  les  autres  y  ont  une  petite  épine. 

Après  toutes  ces  divisions  génériques ,  il  faut 
encore  rapporter  aux  labroïdes  un  groupe  ou 
une  tribu  particulière  :  celle  des  scares,  re- 
marquables par  leurs  intermaxillaires  convexes, 
arrondis  et  garnis  de  dents  disposées  comme 
des  écailles  sur  la  partie  externe  et  convexe 
de  la  mâchoire.  Il  a  fallu  distinguer  dans  cette 
tribu  les  calliodons,  où  les  dents  latérales  de 
la  mâchoire  supérieure  sont  écartées  et  poin- 
tues, avec  une  rangée  interne  de  petites  dents; 
et  les  odax,  qui  ont  les  lèvres  renflées,  recou- 
vrant des  mâchoires  osseuses  et  dentées  comme 
celles  des  scares,  mais  plates  et  non  bombées: 
leurs  dents  pharyngiennes  sont  semblables  à 
celles  des  labres. 


My  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

CHAPITRE  PREMIER. 

Des  Labres. 

Les  poissons  que  nous  réunissons  dans  le 
genre  des  labres  se  reconnaissent  à  la  forme 
ovale  ,  élégante  et  régulière  5  à  leurs  lèvres 
épaisses  et  charnues.  Elles  sont  comme  doubles 
à  la  mâchoire  supérieure,  parce  que  la  peau 
des  sous-orbitaires  et  des  os  du  nez  dépasse  les 
bords  de  ces  pièces  osseuses,  et  se  prolonge 
en  un  lambeau  cutané,  qui  recouvre  souvent 
la  lèvre,  et  va  au-delà  du  bout  du  museau 
quand  la  bouche  est  fermée. 

L'opercule,  le  préopercule,  le  sous- oper- 
cule ,  sont  écailleux;  le  limbe  du  préopercule 
et  l'interopercule  sont  généralement  nus  dans 
les  espèces  de  nos  côtes,  ainsi  que  les  sous- 
orbitaires  et  le  devant  du  front.  Il  n'y  a  au- 
cune épine  ni  dentelure  aux  bords  des  pièces 
operculaires;  les  dents  sont  fortes,  coniques, 
plus  alongées  auprès  de  la  symphyse  :  dans  quel- 
ques espèces  étrangères,  on  en  voit  saillir  une 
pjus  grande  de  l'angle  de  la  mâchoire  supé- 
rieure, et  dont  la  pointe  est  dirigée  en  avant. 

Les  rayons  épineux  de  la  dorsale  sont  gé- 
néralement plus  nombreux  que  les  mousj  les 


CHAP.    I.   LABRES.  17 

épines  anales  sont  courtes  et  grosses;  un  lam- 
beau charnu  dépasse  le  plus  souvent  la  pointe 
de  chaque  rayon,  et  c'est  ce  caractère  que 
Linné  exprimait  par  ces  mots  :  pinna  dorsalis 
rainentacea;  mais  lui,  et  surtout  ses  élèves, 
avaient  donné  beaucoup  trop  d'extension  et 
d'importance  à  ce  caractère. 

Les  côtes  de  la  Méditerranée  en  nourrissent 
un  assez  bon  nombre  d'espèces,  dont  quelques- 
unes  sont  propres  à  cette  mer,  et  dont  un  petit 
nombre  lui  sont  communes  avec  l'Océan.  Une 
seule  espèce  jusqu'à  présent  n'a  été  vue  que 
sur  nos  côtes  septentrionales  de  l'Europe  ;  elle 
y  est  abondante,  et  y  présente  beaucoup  de 
variétés,  dont  plusieurs  brillent  des  couleurs 
les  plus  vives  :  nous  la  voyons  remonter  vers  le 
Nord  jusque  sur  les  côtes  de  Norwége;  mais 
elle  ne  paraîtrait  pas  atteindre  la  hauteur  de 
l'Islande  :  car  je  ne  trouve  pas  que  Mohr,  ni 
Faber,  auteur  plus  moderne,  en  fassent  men- 
tion. 

Tous  ces  poissons  se  nourrissent  de  petits 
coquillages,  d'oursins,  de  crustacés,  dont  ils 
peuvent  facilement  briser  l'enveloppe  dure  et 
solide,  par  l'action  de  leurs  pharyngiens  for- 
tement dentés.  Ils  vivent  réunis,  sans  former 
des  troupes  nombreuses,  sur  les  côtes  rocheu- 
ses, à  l'abri  des  mouvemens  violens  des  va- 

\3.  '2 


18  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

gues.  Ils  fraient  au  printemps  parmi  les  fucus 
et  les  autres  algues  marines,  au  milieu  desquels 
leurs  petits  trouvent  un  abri  pendant  le  pre- 
mier temps  de  leur  développement. 

Nous  ne  voyons  jamais  ces  animaux  attein- 
dre à  de  grandes  dimensions;  leur  chair,  blan- 
che et  ferme ,  est  partout  estimée  comme  une 
nourriture  aussi  saine  qu'agréable. 

Tous  ces  poissons  brillent  des  couleurs  les 
plus  vives;  on  les  voit  ainsi  parés  de  ces  belles 
robes  jusque  dans  nos  contrées  septentrionales, 
et  leur  fond  vert,  varié  de  rouge  ou  de  jaune, 
leur  a  fait  donner  le  nom  de  perroquet  de 
mer.  Sur  nos  côtes  on  les  connaît  aussi  sous 
celui  de  vieille  de  mer.  Tous  les  pécheurs  du 
littoral  de  la  Méditerranée  les  désignent  sous 
le  nom  de  rouquié,  ce  qui  doit  avoir  rapport 
à  leur  séjour  sur  les  plages  rocheuses;  et  aussi 
sous  celui  de  lourd,  de  tordou  ou  tordu,  nom 
qui  est  générique  dans  le  langage  des  pécheurs, 
car  ils  ajoutent  à  cette  dénomination  diffé- 
rentes épithètes  :  c'est  ainsi  qu'ils  disent  tordu 
sera,  tordou  h  lu,  etc. 

Ce  nom  vient  très- certainement  de  celui 
de  turdus,  que  nous  trouvons  souvent  cité 
pour  le  poisson  de  la  Méditerranée,  connu  des 
anciens,  qui  était  probablement  de  nos  espèces 
de  labres;  mais  dont  la  détermination  spéci- 


CHAP.  I.   LABRES.  49 

fique  est  aujourd'hui  impossible.  Nous  voyons 
d'ailleurs  que  c'est  par  ce  mot  ou  par  celui  de 
inerula,  qu'ont  été  traduits  les  noms  des  poissons 
que  les  Grecs  désignaient  par  k;kA;7,  /.urrucpos-, 
ou  KécrauCpos-  et  qu'Aristote  cite  comme  des  pois- 
sons saxatiles,  se  tenant  sur  les  rochers  et  chan- 
geant de  couleur  selon  les  saisons  :  étant  noirs 
en  hiver  et  blancs  en  été.  iElien  reproduit  cette 
même  assertion  en  nommant  le  v!oaav^oç  et  le 
x/kAqj.  On  retrouve  encore  la  confirmation 
de  cette  assertion  dans  Numénius ,  cité  par 
Athénée,  qui  donne  au  -/ccrauCpoç  l'épilhète  de 
jjisKxyx^ûoç ,  de  couleur  noire;  et  au  KiKKtj  celle 
de  oiKi&i^&ocç,  c'est-à-dire  de  tacheté  ou  varié  en 
couleur. 

Nos  labres  abondent  dans  la  Méditerranée 
et  dans  l'Océan;  mais  peu  d'espèces  se  trouvent 
parmi  les  poissons  intertropicaux,  région  oii  les 
girelles  sont  répandues  avec  profusion. 

Nous  allons  commencer  l'énumération  de 
nos  espèces  par  celle  de  l'Océan.  Quoiqu'il  ne 
paraisse  pas  qu'elle  ait  été  connue  de  Linné,  elle 
y  est  commune,  et  elle  vient  assez  fréquem- 
ment sur  nos  marchés ,  pour  qu  il  soit  facile 
de  se  la  procurer  et  de  bien  1  étudier.  Après 
l'avoir  décrite ,  nous  parlerons  des  espèces 
communes  aux  deux  mers;  nous  donnerons 
ensuite  les  espèces  méditerranéennes,  et  enfin 
nous  traiterons  des  exotiques. 


20  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Z«  Vieille  COMMUNE  OU  Perroquet  DE  MER. 
{Lahras  Bergylta ,  Asc.  et  mieux  Friers  et  Eckstr.  ) 

Nos  pécheurs  des  côtes  de  Normandie  ou 
de  Bretagne  connaissent  plusieurs  variétés  de 
couleur  de  cette  espèce,  et  les  désignent  sous 
le  nom  de  vieille  rouge j  quand  sur  le  fond 
vert  le  rouge  est  dominant;  ils  appellent  vieille 
vertCy  celles  d'une  teinte  plus  uniforme;  ^'^e^7/e 
jaune,  celles  qui  ont  peu  de  vert  et  beaucoup 
de  jaune.  Ils  en  ont  d'autres,  tout-à-fait  olive, 
auxquelles  ils  donnent  le  nom  de  vieille,  sans 
épithète ,  et  ils  réservent  le  nom  de  perroquet 
de  mer  à  la  variété  qui  a  sur  le  fond  vert  un 
réseau  de  couleur  rouge  ou  de  brique,  étendu 
sur  tout  le  corps.  Tels  sont  les  renseignemens 
que  nous  ont  fournis  sur  ces  poissons  M.  Gar- 
not,  médecin  de  la  marine  à  Brest,  et,  plus  ré- 
cemment, Mad.^  Ducrest  de  Villeneuve,  qui 
a  bien  voulu,  sur  ma  demande,  en  faire  re- 
chercher sur  les  cotes  de  Lorient.  Ayant  exa- 
miné un  grand  nombre  de  ces  différentes  va- 
riétés de  poissons,  nous  ne  pouvons  les  regarder 
comme  des  espèces  distinctes,  tant  leurs  carac- 
tères essentiels  sont  constans  et  seml^lables; 
et  nous  choisissons,  pour  faire  notre  descrip- 
tion, la  variété  verte  ou  bleue  d'aigue-marine, 
à  réseau  rouge ,  parce  que  c'est  une  de  celles 


CHAP.  I.   LABRES.  21 

OÙ  les  couleurs  se  reproduisent  le  plus  cons- 
tamment, et  que  l'excellente  figure,  que  M. 
Friers  en  a  publiée  dans  son  Histoire  des  pois- 
sons de  la  Norwëge,  va  maintenant  fixer  les 
caractères  de  cette  espèce. 

Le  corps  de  la  vieille,  comme  celui  des  labres  en 
général,  a  une  forme  régulière,  en  ovale  alongé,  ré- 
tréci du  côté  de  la  tête.  Le  milieu  des  côtés  est  plus 
épais  que  le  dos  ou  le  ventre.  La  plus  grande  hau- 
teur du  corps  se  mesure  k  l'aplomb  des  ventrales, 
et  varie  de  grandeur.  Nous  avons  des  individus  où 
elle  n'est  contenue  que  trois  fois  et  demie  dans  la 
longueur  totale.  Chez  d'autres ,  cette  même  hauteur 
y  est  comprise  quatre  fois.  Ces  variations  dépendent 
probablement  de  l'état  de  plénitude  des  laitances  ou 
des  ovaires.  L'épaisseur,  prise  aux  pectorales,  ne  fait 
guère  que  la  moitié  de  la  hauteur  du  corps.  La  hau- 
teur de  la  queue  n'a  que  les  deux  cinquièmes  de  celle 
du  tronc,  mesurée  aux  pectorales. 

La  tête  est  assez  longue  et  contenue  trois  fois  et 
deux  tiers  dans  la  longueur  totale;  son  profil  monte 
vers  le  dos  par  une  courbe  peu  arquée  et  peu  obli- 
que; le  museau  est  gros,  arrondi,  et  un  peu  élargi 
sur  les  côtés  ,  à  cause  de  l'épaisseur  des  lèvres. 
L'œil  est  de  grandeur  médiocre,  parfaitement  rond, 
placé  surle  haut  de  la  joue ,  sans  que  l'orbite  échancre 
le  profil  du  front;  il  est  éloigne  du  bout  du  museau 
de  deux  fois  la  longueur  du  diamètre,  qui  lui-même 
est  contenu  cinq  fois  et  demie  dans  celle  de  la  tête. 
Le  premier  sous-orbitaire  est  quadrilatère,  irrégu- 


22  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

lier,  sans  écailles,  caché  sous  une  peau  épaisse.  Les 
autres  pièces  de  cet  os  sont  petites  et  en  partie  re- 
couvertes par  les  écailles  de  la  joue,  sur  laquelle 
on  en  compte  dix  rangées  au-dessous  de  l'orbite, 
et  quatre  ou  cinq  derrière.  Le  préopercule,  assez 
grand,  a  le  bord  montant  le  plus  souvent  droit, 
mais  quelquefois  légèrement  sinueux  et  toui-à-fait 
lisse,  sans  aucunes  dentelures;  il  fait  un  angle  ar- 
rondi, un  peu  obtus, avec  le  bord  horizontal.  L'oper- 
cule est  une  grande  pièce  trapézoide,  sans  aucune 
épine  ni  arête.  Le  bord  membraneux  est  très-large. 
Le  sous- opercule  lui  est  très -intimement  réuni;  il 
est  impossible  de  le  distinguer  à  l'extérieur  sous  les 
écailles  qui  couvrent  les  deux  pièces;  car  elles  n'ont 
entre  elles  aucun  mouvement.  Ces  écailles  sont 
presque  quadruples  de  celles  du  préopercule;  elles 
sont  irrégulièrement  disposées ,  de  manière  qu'on 
ne  peut  porter  le  nombre  des  rangées  qu'à  cinq 
ou  six.  L'interopercule  est  élargi,  recouvert  d'une 
peau  épaisse,  dans  laquelle  on  ne  voit  que  quelques 
écailles  éparses.  Quand  la  bouche  et  les  ouïes  sont 
fermées,  les  deux  interopercules  ne  se  touchent  pas 
sous  l'isthme  de  la  gorge.  L'ouverture  des  ouïes  est 
grande.  La  membrane  branchioslège  €t  ses  rayons, 
au  nombre  de  cinq,  sont  presque  tout-cà-fait  cachés, 
dans  l'état  de  repos ,  sous  les  pièces  operculaires. 
Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  rondes; 
petites,  percées  au-devant  et  au-dessus  de  l'oeil.  L'an- 
térieure a  un  rebord  membraneux,  saillant,  qui  l'en- 
toure et  forme  une  espèce  d'entonnoir,  au  fond 
duquel  est  l'orifice  de  la  narine. 


CHAP.    I.    LABRES.  23 

Les  deux  mâchoires  sont  d'égale  longueur  :  la 
supérieure  est  assez  protractile.  Les  branches  mon- 
tantes de  rinterniaxillaire  remontent  sur  le  front 
jusqu'au-delà  des  orbites.  Les  maxillaires  sont  courts, 
presque  entièrement  engagés  sous  le  sous-orbitaire. 
Cette  disposition  fait  que  la  protractilité  de  la  bouche 
n'est  pas  aussi  grande  que  la  longueur  des  branches 
de  l'intermaxillaire  pourrait  le  permettre.  Les  lèvres 
sont  très-épaisses,  charnues  et  étalées  sur  les  côtés 
de  la  bouche;  elles  sont  lisses  en  dessus.  La  supé- 
rieure, en  dessous,  a  huit  plicatures,  qui  augmen- 
tent beaucoup  l'étendue  de  sa  surface.  Il  n'y  en  a 
que  deux  sur  la  lèvre  inférieure. 

Les  dents  sont  coniques,  régulières,  et  décroissent 
à  mesure  qu'elles  s'enfoncent  dans  la  bouche.  L'in- 
termaxillaire en  porte  sept,  et  la  demi -mâchoire 
inférieure  dix  ;  en  d'autres  termes ,  il  y  a  qua- 
torze dents  à  la  mâchoire  supérieure,  et  vingt  à 
l'inférieure.  Derrière  ces  dents  coniques  on  en  voit 
une  seconde  rangée,  composée  de  six  ou  huit  très- 
petites  et  de  même  forme.  Le  palais  est  parfaitement 
lisse.  Le  voile  membraneux  de  la  mâchoire  supé- 
rieure est  large  et  très-mobile;  l'inférieure  l'est  un 
peu  moins.  La  langue  n'avance  pas  beaucoup  dans  la 
bouche;  elle  est  libre,  arrondie,  mais  étroite  à  l'ex- 
trémité. 

Les  râtelures  des  branchies  sont  courtes,  lisses  et 
sans  aucunes  aspérités.  Les  deux  premiers  arceaux 
portent  en  avant  des  pharyngiens  deux  pelotes,  re- 
couvertes de  papilles  fines  et  serrées,  comme  du 
velours,  et  derrière  elles  on  voit  alors  les  pharyn^ 


24  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

giens supérieurs,  pièces  osseuses,  triangulaires,  armées 
de  dents  fortes,  dont  les  internes  sont  globuleuses  et 
obtuses,  et  les  externes  sont  coniques  et  pointues. 
Derrière  la  langue,  une  pièce  unique,  triangulaire, 
pourvue  de  dents  semblables  aux  pharyngiennes, 
correspond  aux  pharyngiens  supérieurs. 

Le  surscapulaire  est  petit,  couché  obliquement  le 
long  du  bord  supérieur  de  l'opercule,  et  qui  lui 
est  réuni  par  une  peau  épaisse ,  sorte  de  continuation 
du  bord  membraneux  de  l'opercule.  Au-dessus  du 
surscapulaire  on  compte  dix  écailles  obliques,  dont 
la  rangée  remonte  jusque  sur  le  front,  et  sépare,  au- 
dessus  de  la  tempe,  une  plaque  écailleuse,  oblique, 
composée  de  deux  rangées  d'écaillés.  L'ossature  de 
l'épaule  est  entièrement  cachée  sous  le  bord  mem- 
braneux de  l'opercule.  En  le  soulevant,  on  voit  que 
les  différentes  pièces  qui  la  composent  n'ont  point 
d'écaillés.  L'huméral  est  étroit  et  alongé.  Sous  l'angle 
arrondi  de  l'opercule  est  l'attache  des  rayons  supé- 
rieurs de  la  pectorale.  Les  autres  rayons  sont  fixés 
obliquement  en  arrière  du  premier,  de  sorte  que 
le  dernier  rayon  répond  à  la  seconde  rangée  d'écaillés 
derrière  l'ouïe.  La  longueur  de  la  pectorale  fait  à  peu 
de  chose  près  le  sixième  de  la  longueur  totale  du 
poisson.  Quand  elle  est  étalée,  la  hauteur  de  son. 
éventail  est  plus  grande  que  le  plus  long  de  ses  rayons. 
Ils  sont  gros,  bien  séparés,  au  nombre  de  quatorze: 
le  premier  est  simple  et  presque  aussi  long  que  le 
second;  les  cinquième,  sixième  et  septième  sont 
les  plus  longs,  et  surpassent  de  très -peu  les  pre- 
miers; les  autres  diminuent  insensiblement  jusqu'au 


CHAP.  I.   LABRES.  2S 

dernier,  qui  est  de  moitié  plus  court  que  le  sixième. 
Le  bord  libre  de  la  nageoire  est  arrondi. 

Les  ventrales  sont  insérées  en  arrière  des  pectorales. 
Leur  attache  répond  à  la  pointe  du  dernier  rayon 
de  ces  nageoires  thoraciques.  La  longueur  de  leur 
premier  rayon  mou  est  des  quatre  cinquièmes  du 
plus  long  rayon  de  la  pectorale.  Le  rayon  épineux 
a  les  deux  tiers  de  celui  qui  le  suit.  Quand  la  na- 
geoire est  reployée  le  long  du  corps ,  elle  atteint 
aux  deux  tiers  de  la  distance  entre  leur  base  et  l'ou- 
verture de  l'anus.  La  dorsale  s'élève  un  peu  en  ar- 
rière de  l'insertion  de  la  pectorale.  Le  premier  rayon 
épineux  n'a  que  la  moitié  de  la  hauteur  du  vingtième, 
lequel  a  le  tiers  de  la  hauteur  du  corps,  mesurée 
sous  lui.  Les.  autres  rayons  épineux  augmentent  in- 
sensiblement; ils  ont  tous  à  leur  pointe  un  petit  lam- 
beau charnu  libre.  La  portion  molle  de  la  nageoire 
est  courte;  car  elle  n'occupe  que  le  dernier  quart  de 
la  longueur  de  la  dorsale,  qui  mesure  la  moitié  de  la 
longueur  du  corps,  la  caudale  non  comprise.  Cette 
dernière  portion  de  la  dorsale  est  arrondie,  et  d'un 
tiers  plus  haute  que  le  dernier  rayon  épineux.  La 
première  épine  de  l'anale  répond  à  la  dernière  de 
la  dorsale.  La  hauteur  de  la  portion  molle  est  un 
peu  moindre  que  celle  de  la  nageoire  du  dos.  La 
caudale  est  large,  coupée  carrément.  Sa  longueur 
mesure  le  sixième  de  celle  du  corps  entier;  sa  hau- 
teur, quand  la  nageoire  est  étalée,  surpasse  d'un 
tiers  la  longueur.  Quelques  écailles  s'avancent  sur 
la  membrane  entre  les  rayons,  et  y  forment  ainsi 
des  petites  bandelettes  écailleuses  qui  n'atteignent 


(i  LIVRE  XVI.    LABROIDES. 

pas  à  la  moitié  de  la  hauteur  de  la  caudale.  Il  n'y 
en  a  pas  sur  les  autres  nageoires. 

B.  5;  D.  20/11 5  A.  3/9;  C.  16;  P.  14;  V.  1/5. 

Les  écailles  de  l'occiput,  et  surtout  celles  de  la 
poitrine,  sont  très  -  petites  ;  elles  commencent  à 
devenir  grandes  et  larges  aux  pectorales  j  encore 
celles  au-dessus  de  la  ligne  latérale  sont -elles  tou- 
jours plus  petites  que  celles  des  flancs;  elles  sont 
d'ailleurs  placées  d'une  manière  fort  régulière  sur 
les  côtés  par  bandes  légèrement  obliques,  au  nombre 
de  trente-six,  entre  l'ouïe  et  la  caudale.  Chaque  zone 
est  composée  d'une  vingtaine  d'écaillés;  elles  sont 
très-fortement  adhérentes  ;  leur  bord  est  mince  et 
lisse.  On  ne  voit  pas  d'aspérités  ou  de  granulations 
h.  leur  surface.  Une  écaille  séparée,  est  oblongue; 
le  bord  libre  est  arrondi  en  arc  de  cercle,  mince 
et  membraneux.  La  hauteur  de  l'écaillé  égale  la  lon- 
gueur de  la  portion  recouverte,  qui  mesure  les  deux 
tiers  de  l'écaillé.  Le  bord  radical  est  vertical  et  très- 
peu  festonné  par  l'extrémité  des  vingt-cinq  rayons 
de  l'éventail  de  la  racine. 

La  ligne  latérale  part  du  surscapulaire  et  marche 
à  peu  près  parallèlement  au  dos  par  le  quart  de  la 
hauteur  jusqu'à  la  fin  de  la  dorsale,  où  elle  s'inflé- 
chit sans  s'interrompre,  et  va  se  terminer  à  la  cau- 
dale par  le  milieu  de  la  hauteur  de  la  queue;  elle 
est  composée  d'une  série  de  traits  obliques  et  relevés 
sur  une  suite  d'écaillés  pointues  et  de  moitié  plus 
petites  que  les  autres.  Cette  disposition  est  très- 
remarquable,  et  rend  la  ligne  latérale  très -facile  à 
apercevoir. 


CHAP.  I.   LABRES.  27 

Nous  avons  fait  cette  description  sur  un 
individu  frais,  long  de  quatorze  pouces,  bien 
conserve,  acheté  à  la  Halle  de  Paris,  sous  le 
nom  de  perroquet  de  mer. 

Sa  couleur  était  fort  agréablement  variée;  il  avait 
le  dos  d'un  beau  bleu,  à  reflets  verdâtres,  qui  lui 
donnaient  une  teinte  d'aigue-marine  brillante,  s'af- 
flnblissant  sur  les  côtés  et  passant  au  blanc  nacré 
sous  le  ventre.  Tout  le  corps  est  couvert  d'un  réseau 
de  mailles,  de  couleur  orangée  ou  aurore,  rembruni 
sur  le  dos,  rougeâtre  sur  la  tête,  vive  sur  le  ventre 
et  sur  les  nageoires,  qui  sont  bleues.  Les  pectorales 
seules  avaient  les  rayons  orangés.  Les  lèvres  supé- 
rieures et  l'intérieur  de  la  bouche  étaient  d'un  beau 
vert;  les  inférieures  et  la  membrane  branchiostège 
d'un  beau  blanc. 

Nous  avons  trouvé  dans  les  papiers  de  M.  le 
comte  de  Lacépède  le  dessin  d'une  vieille  de 
Fécamp ,  peint  de  couleurs  entièrement  sem- 
blables. 

Nous  avons  reçu  la  même  variété  de  Brest, 
par  les  soins  de  M.  Garnot,  sous  le  nom  de 
vieille  rouge. 

Le  fond  de  la  couleur  du  dos  et  des  nageoires 
était  vert  ;  les  flancs  et  le  ventre  argentés,  et  les 
mailles  plus  brillantes  étaient  d'une  belle  couleur 
de  minium.  Sur  la  caudale,  les  ocelles  étaient  violets. 

Ce  poisson  a  plus  d'un  pied  de  long. 


28  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Nous  venons  de  recevoir  un  grand  nombre 
de  ces  vieilles,  péchëes  au  Croisic,  et  que  M. 
Bâillon  s'y  est  procurées  pour  nous  les  commu- 
niquer. Elles  sont  aussi  fraîches  qu'au  sortir  de 
l'eau,  et  n'ont  toutes  que  six  à  sept  pouces. 
La  couleur  de  ces  poissons  varie  presque  au- 
tant que  celle  des  poissons  rouges  que  nous 
conservons  dans  nos  bassins. 

Le  fond  est  verdâtre,  et  la  tête  conserve  toujours 
uniformément  cette  teintej  mais  le  rouge,  qui  y  est 
mêlé  en  plus  ou  moins  grande  abondance,  varie 
depuis  la  teinte  la  plus  vive  de  vermillon  jusqu'à 
l'orangé  pâle,  et  même  au  jaune  verdâtre.  Quelques 
individus  ont  des  mailles  irrégulières  sur  tout  le 
corps;  d'autres  n'ont  que  des  taches;  plusieurs  autres 
sont  peints  de  grandes  marbrures;  quelques-unes  de 
ces  vieilles  ont  la  caudale  sans  taches  ;  d'autres  l'ont 
tachetée. 

Nous  trouvons  aussi  de  ces  variétés,  ayant 
toujours  les  nombres  de  rayons  comme  nous 
les  donnons,  à  la  dorsale  et  à  l'anale,  qui 
sont  distinguées  des  pêcheurs  sous  le  nom  de 
'vieille  jaune.  Nous  en  devons  de  pareilles  à 
M.  Garnot,  qui  les  a  envoyées  sous  ce  nom  avec 
des  vieilles  rouges. 

Il  paraît  que  sur  d'autres  individus  le  vert 
domine,  et  est  étendu  d'une  manière  plus 
uniforme  j  car  les  pécheurs  de  Brest  ont  donné 


CHAP.  I.  LABRES.  29 

de  ces  vieilles  avec  l'épithète  de  vertes,  qui 
ont  encore  les  mêmes  nombres  de  rayons. 

D.  20/11}  A.  3/9,  etc. 

Nous  observons  aussi  avec  abondance  une 
variété  de  ces  labres,  qui  non-seulement  varie 
parles  couleurs,  mais  par  le  nombre  de  rayons; 
ainsi  nous  en  achetons  sur  nos  marchés  de 
Paris,  dont  le  fond  de  la  couleur,  plutôt  bleue 
que  verte,  est  maillé  de  rouge  brique. 

De  celles-là  nous  en  avons  un  individu  qui 
a  les  nombres  suivans  : 

D.  21/10;  A.  3/9,  etc. 

Nous  le  devons  à  M.  Bâillon. 
D'autres ,  qui  étaient  maillées  de  couleur 
semblable ,  ont  : 

D.  20/10;  A.  3/9,  etc. 

Nous  en  avons  observé  de  couleur  olivâtre 
sans  aucune  trace  de  réseau  rougeâtre,  ou 
même  de  couleur  brune  assez  foncée,  ayant 

D.  21/10;  A.  3/9,  etc. 

M.  Riener  a  rencontré  cette  même  variété 
à  Saint-Malo. 

Nous  en  avons  reçu  une  de  Fécamp  ayant 
encore  plus  de  rayons. 

D.  21/11;  A.  3/9,  etc.  ,   ^ 

Mais  il  y  en  a  d'autres  qui  offrent  de  nou- 


SO  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

velles  variations ,  car  elles  ne  se  bornent  plus 
à  des  différences  dans  les  nombres  de  la  dor- 
sale, mais  l'anale  a  un  rayon  de  moins.  Elles 
pre'sentent  des  nuances  de  couleur  tout  aussi 
distinctes  que  les  variations  numériques  des 
rayons  de  la  dorsale;  ainsi  M.  Bâillon  vient  de 
nous  envoyer  d'Abbeville  un  très-grand  labre , 
long  de  seize  pouces  et  demi,  varié  de  rouge, 
de  jaune  et  de  verdâtre,  ayant 

D.  20/11;  A.  3/8,  etc. 

Le  même  naturaliste  a  pris  dans  le  même 
endroit  une  autre  variété,  verte,  a  D.  20/10; 
A.  5/8,  etc.,  et  nous  avons  observé  les  mêmes 
nombres  sur  des  variétés  brunes,  achetées  chez 
nos  marchands  de  Paris. 

La  vieille  a,  comme  tous  les  labres,  un  canal  in- 
testinal très-simple;  il  commence  par  un  large  pha- 
rynx à  plis  longitudinaux,  qui  permettent  la  dilata- 
tion nécessaire  pour  la  déglutition.  Le  canal  se  con- 
tinue pour  former  un  sac  oblong ,  qui  descend  dans 
la  cavité  abdominale  jusque  vers  la  moitié  de  sa  lon- 
gueur. Ce  sac,  formé  de  la  réunion  de  l'œsophage 
et  de  l'estomac,  se  contourne  pour  remonter  vers 
le  diaphragme,  et  se  rétrécit  beaucoup  en  cet  en- 
droit. Une  valvule  masque  le  pylore.  Le  duodénum, 
qui  le  suit,  longe  la  face  inférieure  de  l'estomac, 
et ,  arrivé  entre  les  deux  lobes  du  foie ,  se  plie  de 
nouveau,  pour  se  rendre  droit  à  l'anus.  Aux  deux 
tiers  de  sa  longueur,  une  seconde  valvule,  forte  et 


CHAP.   I.   LABRES.  51 

épaisse,  montre  la  terminaison  de  l'intestin  grêle  et 
le  commencement  du  rectum,  dont  le  diamètre  est 
plus  du  double  de  celui  de  l'intestin  qui  précède. 
De  grosses  rides  longitudinales  sillonnent  sa  mem- 
brane muqueuse.  Sa  tunique  musculaire  est  très- 
épaisse.  Les  fibres  charnues  ont  une  direction  longi- 
tudinale. Le  velouté  du  reste  de  l'intestin  est  couvert 
de  mailles  hexagonales,  et  vers  l'origine  du  canal  les 
papilles  sont  tellement  grandes  qu'elles  flottent  sur 
la  surface  interne  de  l'intestin,  ou  qu'elles  semblent 
s'imbriquer  les  unes  sur  les  autres,  quand  elles  sont 
couchées  dans  le  sens  de  la  marche  des  alimens  dans 
le  canal  alimentaire  du  poisson. 

Le  foie  est  assez  gros  et  composé  de  trois  lobes 
assez  distincts,  de  sorte  qu'on  commence  à  voir  ici 
la  disposition  que  ce  viscère  a  dans  les  cyprins,  d'êlre 
très-divisé,  et  en  quelque  sorte  traversé  par  le  canal 
intestinal ,  qui  y  adhère  fortement. 

Le  lobe  gauche  est  subdivisé  en  deux  lobules  plus 
gros  chacun  que  le  lobe  droit.  De  ces  deux  lobules 
l'un  est  adhérent  à  la  face  gauche  de  l'estomac  par 
un  tissu  cellulaire  assez  dense,  et  dépasse  de  beau- 
coup la  crosse  de  ce  viscère.  L'autre  lobule,  plus 
court,  mais  plus  épais,  est  trièdre  et  reporté  sur  la 
face  supérieure  de  l'estomac,  entre  lui  et  la  vessie 
aérienne.  Le  lobe  droit,  mince  et  pointu,  a  à  peu 
près  la  même  apparence  que  le  lobule  gauche  et 
inférieur,  mais  il  n'atteint  pas  même  la  pointe  de 
l'estomac. 

La  vésicule  du  fiel  est  petite ,  oblongue;  elle  donne 
un  canal  assez  long,  qui  reçoit  un  très-grand  nombre 


32  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

de  vaisseaux  hépato-cystiques,  versant  eux-mêmes  la 
bile  dans  un  très-long  canal  cystique.  Le  canal  cho- 
lédoque est  récurrent,  et  porte  la  bile  dans  l'intestin , 
peu  en  arrière  du  pylore.  La  rate  est  très -grosse, 
trièdre,  située  sur  .la  région  supérieure  de  l'intestin. 

Les  ovaires  de  cette  femelle  sont  gros,  remplis 
d'œufs  d'une  petitesse  excessive,  réunis  en  très-jolies 
houppes  formant  des  arbuscules  dans  les  sacs  qui 
contiennent  ces  innombrables  grappes.  Les  deux  sacs 
sont  réunis  à  leur  partie  inférieure,  de  manière  à  ce 
qu'il  n'y  a  qu'une  seule  ouverture  pour  la  sortie  des 
œufs  ;  il  n'y  a  aucune  papille  externe. 

Les  laitances,  sauf  leur  nature,  ressemblent  par 
leur  forme  aux  ovaires.  Le  péritoine,  qui  enveloppe 
ces  organes,  est  fin  et  argenté.  Le  repli  qu'il  fait 
pour  former  la  première  enveloppe  de  la  vessie 
aérienne ,  devient  une  membrane  fibreuse  très-épaisse, 
très -adhérente  aux  parois  abdominales,  et  contient 
une  vessie  aérienne  très -grande,  ovale,  convexe  en 
dessous,  pointue  en  arrière,  et  profondément  éclian- 
crée  en  avant,  sans  avoir  aucune  espèce  de  cornes 
ni  de  prolongemens  tubuliformes.  Sa  membrane 
propre  est  très- mince. 

Au-dessus  d'elle  sont  les  reins,  constitués  en  deux 
rubans  grêles,  situés  de  chaque  côté  de  la  colonne 
vertébrale  et  débouchant  presque  directement  en 
arrière  de  la  vessie  aérienne  dans  la  vessie  urinaire, 
qui  est  oblongue  et  à  parois  très -minces,  mais  ré- 
sistantes. 

La  nourriture  consiste  en  petits  crustacés ,  en  petits 
oursins,  que  le  poisson  avale  sans  les  triturer  sous 


CHAP.   T.    LABRES.  35 

ses  pharyngiens ,  en  partie  arrondis.  J'ai  aussi  trouvé 
des  débris  de  flustres  foliacés,  et  de  fucus  dans  l'es- 
lomac. 

Sur  le  squelette  nous  voyons  le  crâne  avoir  une 
crête  interpariétale,  élevée,  triangulaire,  pointue  en 
arrière ,  deux  autres  crêtes  latérales  et  antérieures  peu 
saillantes.  L'occiput  prolongé  en  arrière  est  comme 
tronqué  obliquement.  La  crête  moyenne,  continua- 
tion de  la  première,  est  peu  élevée,  et,  au  contraire, 
les  latérales  le  sont  davantage.  La  région  du  front 
est  bombée;  une  crête  transverse,  aplatie,  large, 
peu  élevée,  passe  d'un  frontal  sur  son  congénère,  de 
l'autre  côté,  et  termine  ainsi  la  gouttière,  dans  la- 
quelle glissent  lesbranclies  montantes  del'intermaxil- 
laire,  qui  sont  grosses  et  fortes.  Les  os  du  nez  sont 
minces,  étroits  et  alongés. 

Je  compte  dix  vertèbres  abdominales  et  un  pareil 
nombre  de  caudales.  Les  apophyses  épineuses  de 
la  dernière  et  de  l'avant -dernière  s'élargissent  pour 
former  ensemble  l'éventail  osseux  qui  soutient  les 
rayons  de  la  caudale.  Les  apophyses  iransverses  des 
vertèbres  de  l'abdomen  sont  peu  longues,  assez  grosses, 
comprimées,  aplaties  d'avant  en  arrière.  Sur  leur  face 
postérieure  s'articulent  les  côtes,  qui  sont  longues, 
assez  fortes,  et  dont  les  douze  premières  portent  des 
apophyses  horizontales,  longues  et  grêles.  Les  inter- 
épineux de  la  dorsale  et  de  l'anale  sont  hauts  et  di- 
minuent de  largeur ,  à  mesure  qu'ils  sont  plus  près 
de  la  fin  de  la  nageoire.  Les  crêtes  latérales  sont 
assez  élevées  et  diminuent  de  la  même  manière. 

L'huméral  et  le  cubital  sont  deux  très-forts  os  ; 

i3.  3 


34  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

qui  laissent  entre  eux  une  échancrure  peu  ouverte. 
Quant  au  radial,  il  est  petit j  son  trou  rond  est 
assez  grand  ;  les  osselets  du  carpe  sont  assez  larges. 
Les  os  pelviens  sont  longs  et  forts. 

Telle  est  la  vieille  rouge  la  plus  commune, 
et  qui  offre  toujours  cette  disposition  de  cou- 
leur et  vingt  a  vingt  et  un  rayons  épineux  à  la 
dorsale.  Il  est  assez  étonnant  que  ce  poisson 
ait  été  inconnu  d'Artedi  et  de  Linné.  Dans 
la  douzième  édition  du  Systema  naturœ,  qui 
est  de  1766,  on  ne  trouve  aucun  labre  à  qui 
ce  grand  naturaliste  ait  compté  ces  vingt  et 
une  épines  à  la  dorsale.  L'année  suivante,  As- 
canius  publia  le  premier  caliier  de  ses  Icônes 
rerum  naturalium ;  la  première  planche  repré- 
sente d'une  manière  reconnaissable  notre  pois- 
son. La  description  ajoute  encore  à  ce  que 
cette  ligure  laisse  à  désirer.  Les  nombres  des 
rayons  de  la  dorsale  se  rapportent  parfaite- 
ment à  ceux  de  nos  vieilles.  Ascanius  donna 
à  ce  labre  l'épithète  de  bergjlta,  tirée  de  son 
nom  norwégien  ;  cependant  Gmelin  ne  profita 
pas  du  travail  du  zoologiste  danois,  et  notre 
poisson  ne  prit  point  de  place  dans  cette  édi- 
tion du  Systema  naturœ. 

Il  négligea  également  la  description  et  la 
figure  du  lahrus  Ballan,  de  Pennant,  qui 
appartient    très -probablement    à   la   variété 


CHAP.   I.   LABRES.  55 

jaune  de  notre  poisson  *  ;  sur  la  planche  on 
voit  les  os  pharyngiens  parfaitement  bien  re- 
présentes. Cette  figure  a  été  copie'e  plusieurs 
fois.  Il  est  d'ailleurs  assez  curieux  de  remar- 
quer que  Gmelin,  ayant  négligé  de  se  servir 
d'une  description  assez  bien  faite,  accompa- 
gnée d'une  figure  passable ,  ait  placé  dans  la  liste 
des  labres  le  L.  comber  et  le  L.  coquiis,  tous 
deux  plus  difficiles  à  déterminer,  et  connus 
par  une  phrase  très-courte  et  peu  caractéris- 
tique de  Rai,  et  par  une  figure  tout  aussi  peu 
reconnaissable.  Pennant  a  ajouté  au  L.  comber 
de  Rai  des  nombres  de  rayons  qui  peuvent 
faire  présumer  qu'on  doit  le  rapprocher  de 
notre  vieille  rouge. 

Turton  donne  à  ce  L.  comber,  dans  sa  Faune 
de  la  Grande-Bretagne,  trente  et  un  rayons 
à  la  dorsale  5  mais  comme  il  n'indique  pas  s'il 
y  a  une  épine  de  plus  à  cette  nageoire  pour 
former  ce  nombre,  on  ne  sait  pas  si  l'on  doit 
rapprocher  son  L.  comber  de  la  vieille  rouge  ou 
de  la  vieille  brune. 

Quant  au  cook  {^lahrus  coquus)^  il  me  pa- 
raît être  différent,  et  nous  démontrerons  plus 


1.  Notez  bien  que  le  labrus  Ballan  de  Risso  est  tout  différent 
de  celui  de  Pennanl. 


36  LIVRE   XVT.  LABROÏDES. 

bas  que  c'est  au  labre  à  trois  taches  quil  res- 
semble le  plus. 

Ce  fut  Bonnaterre  qui  plaça  le  premier  notre 
vieille  dans  le  catalogue  de  ses  labres,  pour 
l'Encyclopédie  méthodique,  sous  le  nom  de 
lahre  BergyltCj,  sans  remarquer  que  sur  la 
même  page  il  venait  d'indiquer  déjà  la  même 
espèce  d'après  Pennant,  sous  le  nom  de  labiée 
Ballan. 

Bloch  s'étant  procuré  de  la  mer  du  Nord  une 
de  ces  vieilles,  la  fit  représenter  sur  la  plan- 
che 294  de  sa  grande  Ichthyologie.  Il  l'appela 
lahre  tacheté  [lahrus  maculatus),  tout  en 
reconnaissant  que  c'était  le  hergylta  d'Asca- 
nius;  mais  il  ne  parle  pas  de  Pennant. 

Bien  que  la  figure  de  Bloch  soit  très-défec- 
tueuse, nous  sommes  sûrs  de  cette  identité 
spécifique ,  attendu  que  nous  avons  étudié  le 
poisson  même  de  ce  naturaliste,  que  M.  Lich- 
tenstein  a  bien  voulu  nous  prêter. 

M.  de  Lacépède  copia  Bonnaterre  et  Gmelin, 
de  sorte  qu'on  retrouve  parmi  ses  labres  un 
L.  Ballan,  un  L.  Bergylte;  mais  il  donne  un 
nouveau  nom  à  notre  labre,  en  employant 
la  note  et  le  dessin  qui  lui  avaient  été  com- 
muniqués par  M.  Noël,  de  Rouen.  Nous  avons 
retrouvé  ce  dessin  parmi  ses  papiers;  de  façon 
que  nous  sommes  assurés  que  le  lahre  neustrien, 


CHAP.  I.    LABRES.  57 

décrit  d'après  ce  dessin ,  n'est  autre  que  la  vieille 
commune. 

Enfin,  nous  trouvons  une  figure  encore  re- 
connaissable  de  notre  vieille  dans  le  Zoologi- 
cal  miscellanj  de  Shaw  (pi.  426)5  mais  il  le 
croit,  très-faussement,  une  variété  du  labrus 
tinca  de  Linné ,  qui  n'a  que  quinze  rayons  épi- 
neux à  la  dorsale,  et  qui  est  un  de  nos  créni- 
labres.  La  figure  citée  plus  haut,  a  été  repro- 
duite dans  la  Zoologie  générale  du  même  auteur 
(t.  IV,  part.  2,  pi.  7  2 ,  p.  499). 

Donovan  en  donne  aussi  une  assez  bonne 
figure  *  sous  le  faux  nom  de  lahrus  tinca. 

Tous  les  naturalistes  que  nous  venons  de 
citer  ont  cependant  oublié  la  meilleure  figure 
de  la  vieille  qui  se  trouvait  dans  Duhamel.  Sous 
le  nom  de  vieille  ou  carpe  de  mer,  cet  auteur 
représente  fort  exactement  notre  poisson.  L'a- 
natomie  qu'il  ajoute  à  cette  planche  %  a  été 
copiée  des  manuscrits  de  Duverney.  Les  dents 
pharyngiennes  sont  fort  exactement  dessinées, 
comme  dans  la  figure  de  Pennant. 

Duhamel  avait  reçu  ce  poisson  de  Granville. 

Plus  tard  Bloch  fit  attention  à  cette  figure 
de  Duhamel,  et  il  l'a  citée  dans  son  Système 

1.  Brit.  fish.,  pi.  85. 

2.  Trailc  des  pêches ^  secl.  4,  pi.  6- 


38  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

poslliume;  mais  à  faux,  car  il  la  rapportée  à 
son  lahrus  vetula,  tandis  qu'il  aurait  dû  la 
citer  sous  le  lahrus  maculatus. 

Son  lahrus  vetula,  comme  nous  le  dirons 
plus  tard,  est  une  figure  dénaturée  du  labre 
mêlé  (Z«Z>rw.y  mz.r^M.y  Gmelin). 

Fleming  * ,  négligeant  tous  les  noms  de  ses 
prédécesseurs ,  établit  l'espèce  sous  le  nom  de 
lahrus  ballanus^  mais  il  confond  avec  elle  le 
striped  wrasse  de  Pennant  et  de  Donovan, 
qui  est  devenu  le  lahrus  lineatus  (  notre 
lahrus  mixtus),  et  il  cite  sous  ce  même  nom, 
comme  une  espèce  distincte,  une  variété  de 
notre  vieille,  dont  nous  allons  parler  tout  à 
l'heure. 

M.  Jenyns  reprend  le  nom  de  Bloch  et 
donne  une  fort  bonne  notice  sur  cette  espèce, 
dont  une  partie  me  paraît  prise  de  l'excellent 
ouvrage  que  j'ai  tant  de  plaisir  à  consulter, 
celui  de  M.  Yarell,  qui  veut  bien  m'honorer 
de  son  amitié.  La  figure  de  cet  ouvrage^  me 
paraît  avoir  la  dorsale  et  l'anale  un  peu  trop 
pointues;  elles  sont  touj  ours  plus  arrondies  dans 
les  poissons  de  ce  genre.  L'espèce  y  conserve 
le  nom  anglais  hallan  virasse,  et  la  synonymie 

1.  Règ.  anim.,  p.  209.  —  2.  Brit.  fish. ,  p.  275, 


CHAP.   I.  LABRES.  59 

est  conforme  à  ce  que  nous  venons  nous-mêmes 
de  consigner. 

La  vieille  fraie  en  Avril,  se  nourrit  princi- 
palement de  crustacés,  se  tient  sur  les  côtes 
rocheuses  ;  quand  elle  a  atteint  son  entière 
croissance,  elle  pèse  jusqu'à  cinq  livres. 

Elle  s'avance  vers  le  Nord  ;  nous  la  trouvons 
citée  dans  la  Faune  danoise  de  Millier  S  sous 
le  nom  de  labrus  berg-galt. 

Quoique  Linné  n'en  fasse  pas  mention  dans 
son  Fauna  suecica^  nous  la  trouvons  dans 
l'édition  de  Retzius^  Ce  zoologiste  lui  donne 
le  nom  de  labrus  aper;  mais  il  le  reconnaît 
pour  le  poisson  décrit  par  Ascanius  et  Millier, 
et  même  pour  le  ballan  de  Pennant. 

On  en  trouve  aussi  aux  Orkney,  où  elle 
prend  le  nom  de  bergill.  Partout  elle  est  dési- 
gnée comme  une  nourriture  agréable. 

La  Vieille  verte. 
(  Labrus  Donovani,  nob.  -,  ou  Labrus  suilluSj  Linn.  ?  ) 

Nous  avons  reçu  des  mêmes  ports  de  la  Bre- 
tagne d'autres  vieilles ,  sous  le  nom  de  vieille 
verte,  dépassant  aussi  la  longueur  d'un  pied, 


1.  Zool.  dan.,  Prod. ,  p.  46,  n."  687. 

2.  Faun.  suec,  p.  335. 


40  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

ayant  les  mêmes  formes  et  les  mêmes  nombres 
de  rayons  à  la  dorsale,  et  que  les  pêcheurs 
désignent  par  des  noms  particuliers,  tirés  de 
la  couleur  des  individus. 

Leur  vieille  verte  a  la  tête ,  le  dos  et  les  nageoires 
verts,  le  dessous  de  la  gorge  jaunâtre,  le  ventre  oli- 
vâtre. Le  pâle  des  côtés  était  séparé  du  foncé  du  dos 
par  une  bandelette  longitudinale  argentée;  quelques 
rivulations  blanches  couraient  sur  la  tête  et  sur  le 
ventre.  Les  couleurs  sembleraient  rapprocher  celte 
variété  du.tourd  de  la  Méditerranée  :  mais  les  nom- 
bres des  rayons  distingueront  facilement  ces  deux 
poissons. 

Nous  trouverons  cette  vieille  bien  représentée  par 
Donovan  ^  sous  le  nom  de  labriis  lineatus  :  il  la 
peint  en  vert,  pâlissant  vers  le  bas  des  côtés  ;  le  ventre 
est  teint  de  jaunâtre,  et  les  flancs  portent  dix-huit 
lignes  longitudinales  jaunes;  toutes  les  nageoires 
sont  vertes.  Ce  poisson  est  rare  sur  la  côte  de  Cor- 
nouailles,  où  les  pêcheurs  le  nomment  greenfish 
(poisson  vert).  Les  nombres  des  rayons  cités  par 
Donovan,  sont  les  mêmes  que  ceux  comptés  sur  nos 
individus. 

Turton,  dans  sa  Faune  de  la  Grande-Bre- 
tagne, a  cité  ce  lahrus  lineatus  d'après  Dono-* 
van.  Nous  n'en  trouvons  pas  d'autres  indica^ 
tions  dans  les  auteurs  de  cette  époque. 

- 

1,  HUU  nat.  ofhr'U.fish.,  t.  IV,  pi.  74. 


CHAP.  I.  LABRES.  41 

C'est  probablement  à  cette  variété  qu'il  faut 
rapporter  le  lahrus  cornuhiensis ,  décrit  par 
Couch*  dans  son  mémoire  sur  les  poissons  de 
Cornouailles.  Il  lui  donne  vingt  épines  à  la 
dorsale,  et  le  colore  en  brun  foncé  sur  le  dos, 
plus  clair  sur  les  côtés,  et  en  jaune  safrané  sur 
le  ventre. 

Mais  dans  aucun  cas  ce  lahrus  cornuhien- 
sis ne  peut  être,  comme  le  croit  M.  Couch, 
une  variété  de  la  girelle  ordinaire  [lahrus  j'ulis). 

MM.  Fleming  et  Jenyns  ont  introduit  ce 
poisson  dans  leurs  ouvrages  sous  ce  même 
nom  de  lahrus  lineatus;  et  M.  YarelP  qui  ne 
me  paraît  pas  avoir  copié,  du  moins  fidèle- 
ment, la  figure  de  Donovan,  a,  comme  il  le 
déclare  lui-même,  donné  cette  espèce  sur  l'au- 
torité de  ce  naturaliste. 

Nous  ferons  observer  que  ce  ne  peut  être, 
comme  M.  Yarell  l'a  cru ,  le  lahrus  psittacus  de 
Bisso,  lequel  est  pris  de  Lacépède,  et  n'est 
autre  que  le  lahrus  viriclis  de  la  Méditerranée, 
et  tout-à-fait  distinct  par  ses  formes  plus  alon- 
gées.  Ils  ont  tous  copié  les  nombres  de  Dono- 
van ,  qui  sont  ceux  de  r\os  différentes  variétés 
de  vieilles,  sans  faire  attention  qu'il  y  a  eu 

1.   Trans.  of  ihe  Linn.  soCf  t.  XIV,  1."^*  part,,  p.  8o. 
2^  Brit.  fish.,  p.  279. 


42  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

certainement  erreur  de  sa  part  en  attribuant 
huit  rayons  à  la  ventrale  de  ce  labre,  car  tous 
n'ont  que  cinq  rayons  mous  avec  le  premier 
épineux. 

.  Nous  avons  reçu  de  Saint-Malo  des  vieilles 
qui  se  rapportent  parfaitement  au  poisson  de 
Donovan,  s'ils  ne  sont  pas  des  variétés  de 
notre  lahrus  bergjlta. 

Quant  au  lahrus  comber  de  Pennant*,  nous 
devons  ici  faire  remarquer  que  cette  espèce 
est  encore  trop  douteuse  pour  être  introduite 
dans  un  ouvrage  de  la  nature  de  celui  que  nous 
écrivons.  Il  n'est  pas  d'abord  certain  que  le 
poisson  de  Pennant  soit  le  comber  de  lago^, 
qui  était  un  petit  poisson  rouge,  h  corps  à  peu 
près  semblable  à  nos  labrus  inixtus  ou  labrus 
trimaculatus ,  et  dont  il  n'a  pas  donné  les 
nombres  des  rayons. 

Pennant  a  cru  le  reconnaître  dans  un  pois- 
son rouge,  à  ventre  jaunâtre,  avec  une  bande 
blanchâtre  ou  argentée  le  long  des  flancs.  Il 
compte  les  rayons  ainsi  qu'il  suit: 

D.  20/11;  A.  3/2;  C?  P.  14;  V.  5; 

nombres  qui  le  rapprochent  de  nos  vieilles. 

i.  Pennantj  Brit.zooL,  III,  p.  342,  pi.  58. 
2.  Rai,  p.  i63. 


CHAP.  I.  LABRES.  45 

La  figure  de  Pennant  a  ëtë  copiée  dans  l'En* 
cyclopédie;  Gmelin,  Lacëpède  ont  adopte  le 
lahrus  comheP,  et,  ce  qui  est  plus  fâcheux, 
les  auteurs  des  Faunes  anglaises,  qui,  sans  l'a- 
voir retrouvé,  l'ont  signalé  comme  une  espèce 
des  côtes  de  ce  pays.  Ainsi  Turton,  Fleming, 
Jenyns  l'ont  nommé  dans  leurs  ouvrages. 
M.  Yarell  a  même  reproduit  une  nouvelle 
copie  de  la  figure  de  Pennant;  mais  ce  savant 
s'est  appuyé  d'une  nouvelle  autorité,  puisée 
dans  les  manuscrits  de  Couch. 

Quoi  qu'il  en  soit,  c'est  toujours  un  poisson 
peu  connu,  et  qui,  lorsqu'il  le  sera  mieux, 
rentrera  aussi  dans  nos  variétés  des  vieilles 
communes,  ainsi  que  M.  Cuvierl'a  déjà  dit  dans 
une  note  du  Règne  animal. 

Le  Labre  varié. 
{Lahrus  inlœtus ,  Art,  Linn.) 

Je  passe  maintenant  aux  espèces  communes 
à  l'Océan  et  à  la  Méditerranée,  et  je  vais  com-^ 
mencer  par  une  des  plus  abondantes  sur  nos 
côtes,  qui  a  été  cependant  mal  connue  et  mal 
caractérisée  jusqu'à  ce  jour,  quoique  les  dif- 
férens  iclitliyologistes,  postérieurs  à  Wil- 
lughby,  lui  aient  chacun  assigné  un  nom  spé- 
cifique, chaque  fois  qu'il  la  reconnaissaient; 


44  LIVRE  XVI.  labroïdes. 

aussi  sa  synonymie  est -elle  très -confuse  et 
très -longue. 

On  a  lieu  de  s'étonner  qu'un  poisson  aussi 
commun,  et  paré  de  couleurs  aussi  brillantes, 
ait  échappé  à  Rondelet  et  à  ses  contemporains. 
Bélon,  Salviani  n'en  font  pas  mention;  il  est 
de  même  impossible  de  le  reconnaître  dans 
les  différens  tourds  décrits  par  iildrovande. 

Willughby^  en  a  décrit  deux  variétés  qu'il 
avait  observées  à  Livourne;  car  on  ne  peut 
douter  que  son  tur dus  perh elle  pictus  ne  soit 
le  poisson  dont  nous  parlons  dans  notre  ar- 
ticle ,  mais  paré  des  belles  couleurs  qu'il  prend 
pendant  le  temps  du  frai.  Il  crut,  mais  avec 
doute,  y  reconnaître  le  pavo  de  Salviani;  cette 
erreur,  qu'il  aurait  pu  éviter,  puisqu'il  avait 
décrit  le  pavo  au  commencement  de  son 
chapitre  %  a  été  cause  des  erreurs  d'Artedi ,  qui 
ont  été  copiées  et  augmentées  par  ses  succes- 
seurs. 

En  effet,  celui-ci  tire  de  Willughby,  dans 
ses  gênera,  son  troisième  lahrus;  et  ici,  co- 
piste fidèle,  il  cite  encore  avec  le  point  d'in- 
terrogation Xepavo  de  Salviani;  puis , la  seconde 
variété  de  Willughby  devient  le  quatrième  la- 

1.  Willughj,ItM.,p.322,S.2,n.''  1-2.— 2.Jiif/.,p.3i9, 
S.  1 ,  n."  2 


CHAP.   I.   LABRES.  45 

bre  d'Artedi.  Mais  dans  sa  synonymie,  tout  en 
conservant  le  texte  de  Willughby  pour  son 
caractère  spécifique,  il  ajoute  et  sans  conser- 
ver de  doute ,  le  pa\>o  de  Salviani ,  qui  est  un 
crënilabre,  et  la  copie  qu'Aldrovande  en  avait 
faite*,  celle  donnée  par  Gesner'^  du  second 
tourd  de  Rondelet,  sans  cependant  citer 
Rondelet  lui-même.  Il  ne  change  rien  d'ailleurs 
à  la  phrase  et  à  la  synonymie  de  la  variété. 

Linné,  dès  sa  dixième  édition,  est  venu  em- 
brouiller encore  plus  ce  qu'Artedi  avait  déjà 
mal  commencé;  car  il  prend  son  lahriis pavo 
dans  Hasselquist ,  qui  a  décrit  sous  ce  nom  une 
fort  belle  girelle  de  la  Méditerranée,  et  point 
du  tout  le  crénilabre  de  Salviani;  puis  il  ajoute 
comme  synonyme  la  phrase  du  troisième  labre 
d'Artedi. 

Cette  confusion  explique  comment  Linné 
a  placé  son  lahrus  pa^o  dans  la  division  de 
ceux  à  queue  fourchue,  caractère  qui  convient 
en  effet  à  la  girelle ,  mais  point  au  poisson  de 
Willughby  et  d'Artedi.  Le  lahrus  pavo  de 
Linné  est  donc  un  être  complexe,  tout-à-fait 
imaginaire ,  qu'il  faut  rayer  de  nos  catalogues 
systématiques.  Eli  bien  ,  qu'on  lise  maintenant 


1.  Lib. ,  c.  4>  p.  29. 

2.  Gesner,  p.  ioi6,  n."  11. 


46  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

la  description  poétique  que  Lacépède  a  faite 
de  son  labre  paon ,  amplification  faite  sur  le 
texte  d'Hasselquist,  et  où  il  a  entassé  sans  au- 
cune critique  toutes  ces  citations  si  éloignées 
l'une  de  l'autre,  d'Artedi,  de  Linné  et  d'Has- 
selquist; ne  sera-t-on  pas  étonné  de  nouveau 
de  la  légèreté  avec  laquelle  l'histoire  naturelle 
a  été  jusqu'à  présent  écrite? 

Bloch  avait  bien  reconnu  cette  erreur  de 
Linné,  mais  il  n'est  pas  venu  en  aide  pour 
la  rectifier;  il  s'est  contenté  d'inscrire  le  pois- 
son d'Hasselquist  sous  le  nom  de  lahrus 
syriacus. 

Quant  à  la  seconde  variété  que  Willughby 
avait  vue  et  décrite  à  Livourne,  nous  venons 
de  dire  que,  sur  l'indication  de  cet  auteur, 
l'espèce  a  été  nommée  par  Artedi^,  et  qu'elle 
a  pris  rang  dans  la  dixième  édition  du  Syste- 
ma  naturœy  sous  le  nom  de  lahrus  niixtus;  où 
Linné  l'a  placée  parmi  celles  dont  les  nombres 
des  rayons  épineux  de  la  dorsale  lui  sont  in- 
connus. Mais  il  est  possible  que  dans  ce  même 
travail  Linné  eût  déjà  inscrit  fespèce  dont  il 
s'agit  ici,  sous  le  nom  de  lahrus  ossifa^us: 
car  les  nombres  des  épines  dorsales  indiquées 
pour  cette  espèce,  conviennent  à  notre  pois- 

1.  Gen.  34  j  n-°  4  j  et  Sjn. ,  p.  67 ,  n."  10. 


CHAP.  I.   LABRES.  47* 

son.  A  la  vérité,  ils  sont  les  mêmes  dans  l'es- 
pèce suivante,  le  lahrus  trimaculatus ,  dont 
Linné  n'a  pas  parlé.  Or,  je  crois  que  ce  grand 
naturaliste  a  plutôt  eu  sous  les  yeux  un  poisson 
de  l'espèce  dont  il  s'agit  dans  ce  chapitre,  que 
de  la  seconde ,  parce  que  les  individus  de  cette 
dernière ,  quelque  décolorés  qu'ils  soient  par 
l'action  de  l'alcool,  montrent  toujours  des 
traces  des  trois  taches,  caractère  qui  certes 
n'eût  pas  échappé  à  Linné.  '        ^ 

Si,  comme  je  le  crois,  il  a  introduit  son 
lahrus  ossifa^us  d'après  l'examen  de  la  nature, 
je  ne  doute  presque  pas  que  déjà  dans  le 
tome  II  du  Musée  du  prince  Adolphe,  Linné 
niait  encore  mentionné  notre  poisson  sous  le 
nom  de  lahrus  onitisy  qui  se  trouve  sur  la 
même  page  au  n.''  27.  Nous  devons  cependant 
avouer  que  les  nombres  des  rayons  ne  se 
rapportent  pas  aussi  bien. 

Si  ces  conjectures  sont  vraies,  notre  poisson 
aurait  donc  reçu  de  Linné  lui-même  trois 
noms,  ou  tout  au  moins  deux,  qui  sont  re- 
produits dans  la  douzième  édition  sans  aucuns 
changemens. 

A  peu  près  dans  le  mêriie  temps  Pennant 
publia  la  Zoologie  britannique,  où  se  trouve 
notre  poisson  une  première  fois,  sous  la  déno- 
mination de  striped  -wrasse  (  lahrus  lineatus  ) , 


*48  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

avec  une  excellente  figure;  et  une  seconde, 
sous  celle  de  cook^  empruntée  par  Pennant 
à  Rai,  qui  l'avait  reçue  de  lago,  dans  son  petit 
Catalogue  des  poissons  de  Cornouailles,  im- 
primé à  la  suite  du  Synopsis, 

Celle-ci  devient  dans  Gmelin  labrus  coquus, 
et  la  première  lahriis  variegatus,  en  même 
temps  que  dans  l'Encyclopédie  Bonnaterre 
conserve  le  labrus  lineatus,  et  qu'il  ajoute  le 
labrus  mixtus  de  Linné.  Mais  ce  même  Bon- 
naterre prend  encore  notre  espèce  dans  Asca- 
nius,  et  en  fait  un  labrus  cœruleus. 

Cette  même  'figure  d'Ascanius  a  été  copiée 
par  Sliaw,  d'abord  dans  le  Naturalists  Miscel- 
lanj,  et  donnée  comme  sparus  formosus ,  et 
il  place  ensuite  cette  espèce,  dans  le  General 
zoology-y  dans  le  genre  des  labres;  mais  en  lui 
conservant  l'épithète  qu'il  lui  avait  donnée, 
comme  une  espèce  nouvelle  et  distincte  de 

spare. 

Bloch  a,  comme  nous  l'avons  dit,  reconnu 
l'erreur  de  Linné,  relative  au  labrus  pa^o^ 
mais  il  en  commet  une  de  son  côté,  en  repro- 
duisant notre  poisson  par  une  figure  inexacte, 
et  dont  nous  n'eussions  jamais  reconnu  l'iden- 
tité, si  nous  n'eussions  vu  l'original,  qui  est 
encore  conservé  dans  le  Cabinet  de  l'université 
de  Berlin,  et  que  nous  devons  encore  à  la 


CHAP.    I.    LABRES.  49 

libéralité  de  M.  Lichtenstein  :  c'est  le  lahrus 
vetula  de  la  grande  Ichtliyologie,  pi.  284. 

M.  de  Lacépède  venant  copier,  comme  à 
son  ordinaire,  toutes  ces  erreurs,  reproduit 
ces  espèces  nominales,  d'où  il  résulte  que  no- 
tre poisson  se  trouve  répété  huit  fois,  sous 
autant  de  noms  différens,  dans  le  genre  labre 
de  Lacépède.  Heureux  encore  qu'il  n'ait  pas 
travaillé  sur  l'ouvrage  de  Shaw ,  car  il  y  aurait 
pris  un  neuvième  nom. 

Donovan^  aurait  pu  cependant  éclairer 
Shaw^;  car  il  avait  publié,  une  année  avant  lui, 
une  nouvelle  figure  très-bonne  de  ce  labre, 
sous  le  nom  que  Gmelin  lui  avait  imposé,  et 
en  cela  il  est  suivi  par  Turton^,  qui  cependant 
ne  reconnaît  pas  l'identité  du  lahrus  coquus 
de  Rai,  et  qui,  d'après  Pennant,  le  cite  un  peu 
plus  bas  comme  une  espèce  distincte.  Mais  ce 
que  nous  venons  de  rapporter  fait  voir  que  Do- 
novan  se  trompe,  quand  il  croit  que  Gmelin 
est  le  seul  auteur  du  continent  qui  ait  fait  con- 
naître cette  espèce. 

Coucli  l'a  donnée  dans  son  Catalogue  des 
poissons  de  Cornouailles ,  sous  le  nom  de 
lahrus  coquus^  et  c'est   ainsi  qu'il  reparaît 


1.  Donovan,  tab.  21.  —  2.  Brit.  faun. ,  p.  99,  n.°  65. 

i3.  ^    4 


50  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

dans louvrage de  Fleming'.  M.  Yarell  en  donne 
une  jolie  figure ,  en  lui  restituant  son  nom  Lin- 
nëen,  et  en  y  ajoutant  une  synonymie  presque 
complète.  11  y  manque  le  labrus  vetula  de 
Blocli,  nom  qu'il  a  appliqué  à  un  poisson  tout 
différent  ;  et  M.  Jenyns  l'a  fidèlement  suivi. 

M.  Risso ,  parmi  les  iclithyologistes  qui  ont 
écrit  sur  les  poissons  de  la  Méditerranée,  a 
inscrit  ce  poisson  dans  son  ouvrage;  mais  il 
en  a  embrouillé  également  la  synonymie.  En 
efFet,  c'est,  avec  des  citations  fausses,  le  la- 
hrus  pavo  de  la  seconde  édition,  mais  non  de 
la  première,  celui-ci  étant  un  crénilabre.  Et 
puis,  dans  cette  première  édition,  et  comme 
si  l'auteur,  au  lieu  d'observer  la  nature,  eût 
compilé  dans  quelques  livres,  on  retrouve 
notre  espèce  sous  les  dénominations  de  lahrus 
lineatus,  pris  dans  Pennant;  de  lahrus  varie- 
patiiSy  tiré  de  Gmelin ,  et  de  labrus  mixtus, 
copié  d'Artedi  et  de  Willughby.  De  ces  trois 
espèces  nominales,  la  dernière  seule  reparaît 
dans  la  seconde  édition,  sans  que  l'auteur  dise 
pourquoi  il  a  supprimé  les  deux  autres.  Et 
enfin  l'on  trouve  encore  dans  cet  ouvrage  les 
noms  de  lahrus  cœruleus,  avec  des  citations 
d'Ascanius,  qui  n'ont  jamais  été  vérifiées,  et 

1.  Fleming,  Reg.  an.,  p.  209,  n.**  i35. 


CHAP.  I.   LABRES.  51 

de  lahriis  ossifa^us,  appliques  à  d'autres  es- 
pèces. 

On  doit  s'étonner  qu'on  ait  si  mal  déterminé 
un  poisson  aussi  commun  dans  la  Méditerra- 
née et  dans  l'Océan,  bien  plus  l'acile  à  recon- 
naître et  à  caractériser  que  la  vieille  ordinaire; 
car  la  distribution  de  ses  couleurs  ne  change 
point. 

Nous  en  avons  examiné  une  vingtaine  d'in- 
dividus ,  dont  nous  avons  acheté  nous-mêmes 
quelques-uns  sur  nos  marchés  de  Paris; 
les  autres  ont  été  apportés  au  Cabinet  du 
Roi,  de  Brest,  par  M.  Garnot;  de  Lorient,  par 
Mad.^  Ducrest  de  Villeneuve;  de  Norwége, 
par  M.  Bâillon  ;  de  Marseille,  par  M.  Cuvier  ;  de 
Nice,,  par  MM.  Bisso  et  Laurillard;  de  Gênes, 
de  Naples,  par  M.  Savigny;  de  Messine,  par 
M.  Bibron;  de  Corse,  par  M.  Payraudeau,  et 
d'Iviça,  par  feu  de  Laroche. 

Ce  labre  a  le  corps  plus  alongé  que  la  vieille  j 
sa  hauteur  n'est  contenue  que  quatre  fois  et  deux 
tiers  dans  la  longueur  totale.  La  tête  est  plus  longue; 
elle  fait  le  tiers  de  la  longueur  du  corps,  la  caudale 
non  comprise.  Le  museau  est  plus  aigu;  l'œil  est 
un  peu  plus  grand  ;  son  diamètre  fait  le  cinquième 
de  la  largeur  de  la  tête  ;  la  distance  du  bout  du 
museau  au  bord  antérieur  de  l'orbite  est  double 
de  la  longueur  du  diamètre.  Le  premier  sous-orbi- 
taire  est  petit , triangulaire  et  enveloppé  par  une  peau 


52  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

épaisse,  dont  le  bord  se  prolonge  en  avant  etaugmente 
l'étendue  de  la  surface  non  écailleuse, comprise  entre 
l'œil  et  la  lèvre  supérieure.  La  joue  est  beaucoup 
moins  haute  que  dans  la  vieille.  Le  bord  montant  du 
préopercule  est  lisse  et  vertical;  le  bord  inférieur  est 
légèrement  oblique  et  descend  de  l'angle  vers  le  bas 
de  la  branche  horizontale  de  la  mâchoire  inférieure. 
Le  limbe  est  étroit;  il  n'y  a  sur  la  joue,  au-dessous  ou 
derrière  l'œil,  que  sept  à  huit  rangées  d'écaillés, 
beaucoup  plus  petites  que  celles  de  la  vieille.  L'oper- 
cule et  le  sous-opercule  sont  intimement  réunis  et 
couverts  de  petites  écailles ,  un  peu  plus  larges  que 
celles  du  préopercule;  il  y  en  a  sur  l'interopercule 
un  plus  grand  nombre  que  dans  la  vieille  :  toutes 
sont  placées  vers  l'angle  supérieur  et  postérieur,  de 
sorte  que  la  partie  antérieure  de  cet  os,  le  limbe  du 
préopercule  et  la  mâchoire  inférieure,  forment  sous 
la  tête  une  longue  bande  sans  écailles,  recouverte 
par  une  peau  épaisse.  Les  deux  ouvertures  de  la  na- 
rine sont  petites,  un  peu  plus  éloignées  l'une  de 
l'autre;  la  postérieure  est  percée  tout  près  du  bord 
supérieur  de  l'orbite;  le  maxillaire  est  entièrement 
caché  sous  le  bord  membraneux  du  sous-orbilaire; 
il  est  plus  court  que  celui  de  la  vieille.  Les  dents 
sont  beaucoup  plus  petites,  plus  fines,  plus  pointues 
et  plus  nombreuses.  Les  lèvres  sont  larges,  mais 
peu  épaisses,  et  n'ont  en  dessous  que  cinq  à  six 
replis  membraneux  ;  sous  la  symphyse  de  la  mâchoire 
inférieure,  elles  sont  épaissies.  La  langue  est  plus 
longue  et  plus  libre;  les  dents  pharyngiennes  sont 
coniques,  et  il  y  en  a  moins  que  chez  la  vieille.  Le 


CHAP.  I.  LABRES.  S5 

surscapulaire  est  plus  long  et  plus  étroit  ;  les  autres 
parties  de  l'épaule  sont  de  même  cachées  sous  le 
bord  membraneux  de  l'opercule.  La  pectorale  est 
beaucoup  plus  courte  ;  elle  ne  fait  pas  le  huitième 
de  la  longueur  totale.  La  ventrale  n'est  pas  attachée 
autant  en  arrière  des  pectorales,  et  l'anus  est  moins 
éloigné  de  la  base  de  cette  nageoire.  La  dorsale  com- 
mence à  l'aplomb  de  l'insertion  de  la  pectorale;  elle 
est  moins  haute,  mais  à  proportion  aussi  longue  que 
celle  de  la  vieille.  Sa  portion  épineuse  est  plus  courte, 
à  peine  plus  basse  que  la  partie  molle,  qui  n'est  point 
arrondie.  Le  premier  rayon  de  l'anale  répond  au  der- 
nier épineux  de  la  dorsale;  elle  est  plus  haute.  La 
caudale  est  un  peu  arrondie ,  et  du  huitième  de  la 
longueur  totale. 

Voici  les  nombres  que  nous  observons  le 
plus  communément,  et  qui  nous  paraissent 
être  en  particulier  ceux  de  la  variété  qui  vit 
dans  la  Méditerranée. 

B.  SjD.  nyiSjA.  3yil;G.  15;P.  16 î  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  petites,  au  nombre  de  cin- 
quante-cinq entre  l'ouïe  et  la  caudale,  sur  vingt- 
quatre  dans  la  hauteur.  Chaque  écaille  est  un  rec- 
tangle oblong,  dont  le  bord  antérieur  est  mince, 
arrondi  et  lisse.  Le  bord  radical  est  crénelé  par 
les  neuf  rayons  de  l'éventail.  La  ligne  latérale  va 
de  l'ouïe  à  la  caudale  par  le  quart  de  la  hauteur 
du  corps,  parallèlement  au  dos,  et  s'abaissant  insen- 
siblement, de  manière  à  traverser  la  queue  par  le 
milieu   de  sa  hauteur.   Les   écailles  sur  lesquelles 


o4  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

elle  est  tracée,  ne  sont  pas  différentes  des  autres, 
dans  leur  partie  visible.  Leur  bord  radical  est  an- 
guleux. Cette  ligne  est  composée  d'une  série  de 
petits  tubes  relevés  en  saillie  arrondie  sur  chaque 
écaille. 

Les  couleurs  de  ce  labre  sont  vives  et  brillantes  j 
elles  sont  toujours  distribuées  de  même.  Nous  avons 
seulement  observé  quelques  variations  dans  les 
teintes. 

La  tête  et  la  moitié  antérieure  du  dos  sont  ver- 
dàtre  plus  ou  moins  foncé  et  lavé  de  brun.  Cette 
teinte  se  prolonge,  par  le  milieu  des  flancs  jusqu'à  la 
caudale,  en  une  bande  étroite,  de  manière  à  laisser 
au-dessus  la  portion  postérieure  du  dos  le  plus  sou- 
vent jaune  orangé  ou  lilas.  Cinq  raies  longitudinales, 
plus  ou  moins  larges,  bleues,  quelquefois  plus  ou 
moins  violettes,  traversent  le  corps  sur  sa  partie 
colorée  en  verdàtrej  les  trois  supérieures  ne  s'avan- 
cent pas  sur  l'orangé  du  dos  ;  les  inférieures  vont 
jusqu'à  la  caudale.  Ces  raies  bleues  s'avancent  sur 
la  tête,  s'anastomosent  irrégulièrement  entre  elles  et 
font  sur  les  joues  un  réseau  bleu  ou  violet,  à 
maille  plus  ou  moins  large. 

La  dorsale  est  orangée,  bordée  d'un  fin  liséré 
bleu.  Sur  la  partie  antérieure  il  y  a  une  large  tache 
bleue,  qui  n'atteint  quelquefois  qu'au  huitième  rayon 
épineux,  mais  qui  aussi  s'étend  jusqu'au  treizième. 
L'anale  est  orangée  et  bordée  d'un  large  ruban  bleu. 
La  caudale  est  eniièreineni  bleue.  Les  pectorales  sont 
orangées,  et  les  ventrales  ont  à  leur  bord  interne 
une  tache  bleue,   qui  quelquefois  s'étend  sur  toute 


CHAP.  I.   LABRES.  55 

leur  surface  :  telles  sont  les  couleurs  prises  sur  le 
frais  à  Brest,  par  M.  Garnot,  ou  par  nous-mêmes 
sur  des  individus  du  marché  de  Paris.  D'autres 
avaient  le  dos  plus  foncé  et  presque  entièrement 
violet  noirâtre.  M.  Noël  en  a  dessiné  à  Fécamp, 
chez  qui  la  partie  postérieure  du  dos  était  d'un  beau 
rouge,  et  les  teintes  des  nageoires  ou  des  bandes 
étaient  plus  verdâtres.  Le  dessin  fait  à  Nice  par 
M.  Laurillard,  représente  le  dos  et  les  nageoires  du 
plus  beau  jaune  citron. 

Les  viscères  de  ce  poisson  n'offrent  rien  de  bien 
différent  de  ceux  des  autres  labres. 

Le  squelette  a  une  colonne  épinière,  composée 
de  dix  -  huit  vertèbres  abdominales  et  de  vingt  et 
une  caudales.  Les  trois  et  même  les  quatre  dernières 
concourent  à  former  l'éventail  osseux,  sur  lequel 
s'insèrent  les  rayons  de  la  caudale.  Les  interépineux 
de  la  dorsale  sont  plus  courts  et  plus  faibles  que 
ceux  du  labrus  bergylta. 

Les  crêtes  du  crâne  sont  plus  basses;  la  gouttière 
qui  réunit  les  branches  montantes  des  intermaxil- 
laires, moins  profonde.  Les  os  du  bras  sont  plus 
faibles. 

Nous  avons  dit  que  l'on  doit  distinguer  des 
variétés  dans  cette  espèce;  celles  que  nous 
offrent  les  couleurs  ne  consistent  que  dans  des 
teintes  plus  ou  moins  étendues;  mais  nous  en 
trouvons  de  plus  sensibles  en  comptant  les 
nombres  sur  différons  individtis. 


56  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Ainsi  nous  trouvons  sur  un  individu  venu 
de  Brest: 

D.  18/12;  A.  3/11,  etc. 

Sur  un  autre,  envoyé  de  Nice,  par  M.Risso: 

D.  18/11;  A.  3/11,  etc. 

M.  Bâillon  nous  en  a  donné  un  qu'il  avait 
reçu  de  Norwége,  et  qui  a 

D.  17/12;  A.  3/11,  etc.; 

et  nous  trouvons  les  mêmes  nombres  sur  un 
autre,  acheté  à  Paris  et  venu  de  Brest. 

Deux  autres,  de  même  taille,  achetés  à  Paris 
avec  le  précédent,  et  venus,  comme  lui  et  dans 
le  même  temps,  de  Brest,  n'ont  que 

D.  16/12;  A.  3/11. 

Enfin,  un  dernier  individu  plus  grand,  car 
il  a  quatorze  pouces  et  demi,  a  des  nombres 
encore  plus  différens;  car  nous  comptons  : 

D.  16/14;  A.  3/11,  etc. 

Nous  devons  faire  remarquer  que  toutes  ces 
différences  sont  observées  sur  des  poissons  par- 
faitement bien  conservés,  et  qu'on  ne  peut 
pas  les  attribuer  à  des  observations  mal  faites, 
parce  qu'elles  reposeraient  sur  des  poissons  en 
mauvais  état. 

Nous  en  avons  des  individus  qui  ont  treize 
pouces  de  longueur. 

Ce  labre,  comme  ses  congénères,  vit  sur  les 


CHAP.    I.    LABRES.  S7 

côtes  rocheuses,  et  se  nourrit  de  petits  crus- 
tacés ;  il  apparaît  quelquefois  en  troupes  nom- 
breuses. M.  Risso  cependant  l'indique  comme 
se  tenant  sur  les  côtes  sablonneuses. 

L'espèce  s'avance  au  Nord  jusque  sur  les 
côtes  de  Norwége  et  de  Suède,  car  on  la  trouve 
mentionnée  dans  l'ouvrage  de  M.  Nilsson,  quoi- 
que Millier  n'en  ait  pas  fait  mention  dans  son 
Prodromus  faunœ  danicœ.  Ce  qui  me  ferait 
croire  que  ce  poisson  est  rare  dans  ces  con- 
trées septentrionales,  c'est  que  je  ne  le  vois 
pas  cité  dans  le  Catalogue  des  poissons  du 
Danemarck  envoyés  à  G.  Cuvier  par  S.  A.  R.  le 
prince  Christian  de  Danemarck;  et  probable- 
ment il  ne  se  trouve  pas  dans  des  latitudes 
plus  élevées  :  car  Faber  ne  le  cite  pas  parmi 
ses  Poissons  d'Islande  ;  il  n'est  mentionné  dans 
la  Fauna  grœnlandicaj  il  ne  l'est  pas  même 
la  Faune  des  Orcades. 

Dans  le  Nord^  ce  labre,  quelquefois  con- 
fondu avec  le  suivant  et  avec  le  lahms  exo- 
letus,  a  une  synonymie  vulgaire  peu  certaine. 

M.  Nilsson,  qui  le  distingue  bien,  le  donne 
comme  le  hlaastaalou  blaastack  des  pêcheurs 
de  Suède  et  de  Norwége,  dénomination  que 
MuUer  indique  avec  celles  de  hlaagomnie  ou 
de  seigunune,  au  labriis  exoletuSy  si  distinct 
par  les  cinq  épines  de  son  anale. 


58.  LIVRE    XVI.   LABROÏDES. 

Ce  transport  de  nom  ayant  été  suivi  par 
M.  Retzius,  qui  a  même  ajouté  foi  à  une  autre 
erreur  des  pêcheurs,  a  donne  naissance  à  une 
confusion  sur  laquelle  nous  serons  obligés  de 
revenir  à  l'article  du  cj^énilabre  à  cinq  épines 
ou  lahrus  exoletus. 

M.  Risso  indique  comme  noms  vulgaires  à 
Nice,  ceux  de  sero,  de  tenco  et  de  verdon^ 
qui  sont  collectifs  à  plusieurs  autres  espèces. 

Le  Labre  a  trois  taches. 

{^Lahrus  trimaculatus y  Gmel.) 

Un  autre  labre ,  également  commun  dans 
l'Océan  et  dans  la  Méditerranée,  ne  diffère 
guère  du  précédent  que  par  les  couleurs,  les 
différences  dans  les  formes  étant  très-légères. 

Le  corps  est  aussi  alongé;  la  tête  est  comprise 
le  même  nooibre  de  fois  dans  la  longueur  du  corps. 
Il  a  le  museau  aussi  pointu ,  les  dents  aussi  fines  et 
aussi  nombreuses,  les  lèvres  aussi  minces j  les  écailles 
de  la  joue  sont  un  peu  plus  petites  et  en  moindre 
nombre;  celles  de  l'angle  supérieur  et  postérieur  de 
l'inleropercule  sont  moins  nombreuses. 

Ce  labre  a  les  pectorales  et  les  ventrales  plus 
courtes;  la  dorsale,  et  surtout  Fanale,  plus  basses. 
D'ailleurs,  les  nombres  des  rayons  sont  les  mêmes. 

D.  17/13;  A.  3/11,  elc. 

Ces  nombres  nous  paraissent  être  plus  conslans. 


CHAP.    1.   LABRES. 


m 


car  les  nombreux  individus  examinés  par  nous  sur 
les  différens  points  de  nos  côtes,  nous  ont  montré 
la  même  régularité. 

Ce  poisson  est  d'une  belle  couleur  rouge,  s'affai- 
blissant  sur  les  côtés  et  devenant  rose  sur  les  flancs. 
On  voit  sur  l'arrière  du  dos  trois  taches  noires,  dont 
les  deux  antérieures  occupent  la  base  de  la  dorsale, 
l'une  sur  les  cinq  premiers  rayons,  l'autre  sur  les 
six  derniers;  de  sorte  qu'il  n'y  a  que  l'espace  de  deux 
rayons  qui  les  sépare.  La  troisième  est  étendue  sur 
la  croupe  de  la  queue. 

Il  y  a  des  individus  qui  ont  une  première  petite 
tache  sur  les  derniers  rayons  épineux  de  la  dorsale. 
Une  tache  noirâtre  est  sur  le  commencement  de  cette 
nageoire,  entre  le  premier  et  le  troisième  rayon  épi- 
neux. Les  trois  nageoires  verticales  sont  bordées  d'un 
fin  liséré  bleu  pâle  ou  lilas.  Il  y  a  un  trait  bleuâtre 
le  long  du  bord  inférieur  du  sous-orbitaire.  L'iris 
de  l'œil  est  rouge,  entouré  d'un  cercle  bleu. 
Nous  trouvons  quelquefois  des   individus 
de  cette  espèce  sur  le  marche  de  Paris.  Le 
Cabinet  du  Roi  en  a  reçu  d'autres  de  Brest, 
par  M.  Dumëril,  et  de  presque  tous  les  ports  de 
la  Méditerranée ,  par  les  différens  collecteurs 
que  nous  nous  sommes  fait  un  devoir  de  citer 
déjà  tant  de  fois.  Le  docteur  Leach  Ta  envoyée 
de  Malte;  M.  Virlet  la  prise  au  Bosphore,  où 
elle  porte  le  nom  de  kans-balok^  et  M.  de 
Laroche  l'a  trouvée  à  Iviça,  où  elle  est  com- 
mune et  de  haute  mer. 


60  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Cette  espèce  ne  paraît  pas  dépasser  un  pied 
de  longueur. 

Ce  labre  n'a  pas  été  connu  d'Artedi  ni  de 
Linné,  quoiqu'ils  auraient  pu  en  trouver  une 
notice  dans  le  cinquième  tourd  d'Aldrovande. 

Ascanius  *  le  publia  sous  le  nom  de  lahrus 
carneus,  qui  fut  adopté  par  Bloch. 

Mais  Pennant  le  fit  connaître  sous  la  déno- 
mination de  lahrus  trimaculatus y  qui  est  plus 
caractéristique,  en  effet,  et  qui  a  été  adoptée 
par  tous  les  autres  iclithyologistes.  La  figure 
a  été  copiée  par  Bonnaterre  dans  l'Encyclo- 
pédie, et  Gmelin  et  Lacépède  reconnurent 
la  synonymie  d'Ascanius  et  de  Bloch. 

Donovan^  en  a  donné  aussi  une  fig-ure  élé- 
gante ,  où  le  dos  nous  paraît  seulement  un  peu 
troj)  jaune;  elle  a  été  copiée  par  M.  Yarell.^ 
Turton"^  et  Jenyns^  le  comptent  également 
dans  leurs  Faunes;  mais  Fleming  n'en  a  pas 
fait  mention  dans  son  Règne  animal. 

L'espèce  s'avance  aussi  sur  les  côtes  septen- 
trionales de  l'Europe;  car,  outre  le  témoi- 
gnage d'Ascanius,  nous  la  voyons  mention- 
née par  Millier^,  sous  le  nom  que  lui  avait 


1.  Ascanius,  tab.  XII,  pi.  289.  —  2.  Donovan,  Brit.  fis  h.  y 
pi.  49-  —  3.  Brît.fish. ,  p.  286.  —  4.  Brit.  faun. ,  p.  99,  n."  67. 
—  5.  Man.  ofvert.  an.,  p.  396.  —  6.  Faun.  dan.,  Prod.,  p.  46 j 
n.°  585. 


CHAP.    I.   LABRES.  61 

donné  son  prédécesseur.  Linné  l'a  notée  dans 
le  Fauna  suecica^  et  Retzius,  dans  sa  nouvelle 
édition,  la  cite  comme  femelle  du  lahrus  exo- 
letus,  poisson  du  Nord,  à  préopercule  den- 
telé et  à  cinq  épines  anales. 

C'est  d'après  l'assertion  des  pêcheurs  que 
cette  opinion  a  prévalu  chez  plusieurs  savans 
de  Suède  ou  de  Norwége;  mais  je  crois  que 
la  similitude  des  noms  vulgaires  a  donné  lieu 
à  quelque  confusion  :  car  nous  avons  observé 
que  les  deux  sexes  de  notre  espèce,  qui  tous 
deux  sont  identiques  et  se  rapportent  parfai- 
tement à  notre  lahrus  triniaculatus ,  n'ont 
jamais  que  trois  épines  à  l'anale.  Je  vois  d'ail- 
leurs que  mon  opinion  est  d'accord  avec  celle 
de  M.  Nilsson,  de  Stockholm,  qui  a  dans  ses 
labres  de  Scandinavie  un  labre  à  trois  taches, 
et  dans  ses  crénilabres  un  lahrus  exoletus. 

Notre  poisson  ne  paraît  pas  se  trouver  sur  les 
cotes  d'Islande ,  car  nous  ne  l'avons  pas  reçu 
de  ces  mers,  et  Faber  n'en  fait  pas  mention. 

M.  Ilisso  a,  dans  sa  première  édition,  décrit 
le  labre  à  trois  taches;  et  depuis,  observant 
que  quelques  individus  ont  une  tache  sur  le 
devant  de  la  dorsale,  il  a  fait  de  ceux-ci,  dans 
sa  seconde  édition ,  un  lahrus  quadrimacula- 
tus,  ne  parlant  plus  du  lahrus  trimaculatus 
que  comme  d'un  synonyme  douteux  de  sa 


62  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

nouvelle  espèce,  et  se  demandant  si  le  poisson 
de  la  Méditerranée  est  bien  le  même  que  celui 
de  l'Océan  septentrional. 

Rafînesque  ne  l'a  pas  reconnu  dans  son  Icli- 
tliyologie  de  la  Sicile,  et  il  l'a  donné ^  comme 
une  nouvelle  espèce,  nommée  lahrus  luvarus, 
ce  poisson  se  nommant  en  sicilien  luppanii 
luvarii  ou  rossignUy  le  premier  de  ces  noms 
étant  générique  pour  les  labres. 

Selon  M.  Risso,  le  nom  nicéen  de  cette  es- 
pèce est  tiiico  ou  tinca.  Du  temps  de  Mrdler, 
les  pécheurs  norwégiens  lui  donnaient  le  nom 
de  Suder-Naal,  qui  n'est  plus  cité  par  M.  Nils- 
son,  mais  qui  indique  les  suivans,  Rôdsnàcka 
ou  Sypiga.  Sur  nos  côtes  de  Bretagne  on  le 
nomme  ordinairement  coquette,  et  ceux  qui 
nous  venaient  du  C  roi  sic  avaient  particulière- 
ment le  nom  de  couniet. 

Le  Labre  tourd. 

{Lahrus  tiirdus ,  Linn.) 

Il  nous  reste  à  parler  maintenant  des  espèces 
que  nous  croyons  appartenir  à  la  Méditerra- 
née seule;  car  nous  ne  les  avons  jamais  vues 
venir  de  nos  côtes  de  l'Océan. 

1.  Ind.  d'itt.  Sic.  j  p.  20 ,  n."  J 44  ;  et  Caraii.  Sp.,  p.  38 ,  n.°  iOi . 


CHAP.  î.  LABRES.  G5 

Nous  allons  commencer  par  celle  dont  nous 
possédons  un  plus  grand  nombre  de  variétés, 
et  nous  regardons  le  poisson  que  nous  allons 
décrire,  comme  étant  le  lahrus  turdus  de 
Linné,  c'est  du  moins  celui  qui  se  rapproche 
le  plus  de  la  description  de  Willugliby. 

Comparé  à  notre  vieille  de  l'Océan,  il  a  le  corps 
éU'oit,  plus  svelte;  mais  sa  forme  se  rapproche  da- 
vantage de  celle  de  notre  labre  à  trois  taches. 

Le  museau  est  plus  aigu,  ce  qui  contribue  à  ren- 
dre la  tête  plus  longue;  elle  est  contenue  trois  fois 
dans  la  longueur  du  corps,  sans  comprendre  la  cau- 
dale, qui  n'est  que  du  sixième  ou  du  septième  de  la 
longueur  totale.  La  hauteur  du  corps  fait  le  quart 
de  la  longueur,  mesurée  depuis  le  bout  du  museau 
jusqu'à  l'extrémité  de  la  nageoire  de  la  queue.  L'œil 
est  petit,  rond ,  placé  à  peu  près  au  milieu  de  la  lon- 
gueur de  la  tête,  mais  au  haut  de  la  joue,  sans  que 
cependant  le  cercle  de  l'orbite  échancre  la  ligne  du 
profil.  Son  diamètre  n'est  que  du  septième  de  la  lon- 
gueur de  la  tête.  Le  sous-orbitaire,  étroit  et  alongé, 
est  caché  sous  une  peau  épaisse.  Le  préopercule  est 
large;  son  angle  est  très-ouvert,  parce  que  le  bord 
vertical  monte  obliquement  et  en  arrière  sur  la  joue, 
et  que  le  bord  horizontal  descend  obliquement 
en  avant.  L'opercule  est  lui-même  assez  large,  et 
confondu  avec  le  sous-opercule  sous  les  écailles  qui 
recouvrent  ces  deux  os.  L'interopercule  est  élargi  et 
touche  sous  la  gorge  celui  du  côté  opposé.  Il  n'y  a 
qu'une  ou  deux  écailles  sur  la  partie  postérieure  de 


64  LIVRE    XVI.    LALROÏDES. 

cet  OS.  Celles  du  préopercule  sont  plus  petites  que 
celles  de  l'opercule.  Le  front,  le  sous-orbitaire  et 
les  branches  de  la  mâchoire  inférieure  en  sont  dé- 
pourvus. Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  rap- 
prochées l'une  de  l'autre  et  de  l'œil;  l'antérieure  est 
petite  et  rendue  tubuleuse  par  la  papille  relevée  et 
attachée  sur  le  bord  de  l'ouverture. 

Quand  la  bouche  est  fermée ,  le  maxillaire  est  pres- 
que en  entier  caché  sous  le  bord  membraneux  du 
sous-orbitaire.  Ce  rebord  est  très-élargià  l'extrémité, 
et  s'étend  sur  le  bout  du  museau  comme  une  sorte 
de  lèvre.  Les  deux  mâchoires  sont  d'égale  longueur. 
La  fente  de  la  bouche  fait,  à  peu  de  chose  près, 
le  quart  de  la  longueur  de  la  tête.  La  longueur 
des  branches  des  intermaxillaires  rend  la  bouche 
protractile;  mais  l'élargissement  et  le  peu  de  mobilité 
des  branches  de  la  mâchoire  inférieure  ne  permet  pas 
que  l'ouverture  en  soit  très-grande.  La  lèvre  supé- 
rieure est  relevée  en  un  bourrelet  épais,  qui  a  sept 
plis  obliques  ;  l'inférieure  est  élargie  en  une  membrane 
épaisse  sans  plis  et  légèrement  renflée  le  long  du  bord 
de  la  mâchoire.  Les  dents  sont  pointues,  coniques, 
un  peu  courbées  en  crochets,  espacées  au  nombre  de 
sept  à  la  mâchoire  supérieure,  plus  rapprochées  à 
l'inférieure  et  au  nombre  de  dix  à  douze. 

La  langue  est  hbre  dans  une  grande  portion  de  sa 
longueur,  mais  très- reculée  vers  le  fond  de  la  gorge. 
Le  palais  est  lisse;  le  voile  membraneux  supérieur 
et  inférieur,  large  et  distendu.  La  membrane  bran- 
chiostège  est  épaisse  et  avance  beaucoup  sous  l'isthme 
le  long  des  rayons  qui  soutiennent  celte  membrane  : 


CHAP.   I.    LABRES*  65 

disposition  qui  rétrécît  l'ouverture  des  ouïes.  Il  n'y  a 
que  cinq  rayons  brancliiostèges.  Les  peignes  des  bran- 
chies sont  courts,  et  les  râtelures  antérieures  de  la 
première  branchie  fortes ,  courtes ,  et  un  peu  cour- 
bées en  crochets,  dont  la  pointe  est  tournée  vers  le 
fond  du  gosier. 

L'ossature  de  l'épaule  est  cachée  par  le  bord  mem- 
braneux de  l'opercule.  Quand  on  le  soulève,  on 
aperçoit  l'huméral  comme  ufle  bande  osseuse  fort 
étroite,  un  peu  élargie  vers  le  bas,  près  de  la  pec- 
torale. Cette  nageoire  est  courte,  à  peine  du  sep- 
tième de  la  longueur  totale.  S'arrondissant  en  éven- 
tail, chaque  rayon  se  divise  en  deux  branches,  qui 
n'ont  elles-mêmes  qu'une  seule  division.  11  faut  y 
regarder  avec  quelque  attention  pour  apercevoir  les 
articulations  des  rayons,  tant  elles  sont  petites. 

La  dorsale  s'élève  en  arrière  de  l'aplomb  de  l'inser- 
tion des  pectorales  ;  ses  épines  sont  médiocres,  à  peu 
près  d'égale  grosseur;  elles  s'élèvent  successivement, 
et  la  dernière  ne  surpasse  la  première  que  d'un  quart; 
les  rayons  mous  sont  plus  hauts  ;  cette  portion  est  ar- 
rondie. Le  premier  rayon  épineux  de  l'anale  répond 
à  la  dernière  épine  de  la  dorsale.  Les  rayons  arti- 
culés de  l'anale  sont  plus  longs  que  ceux  de  la  na- 
geoire du  dos.  La  caudale  a  les  angles  légèrement 
arrondis.  Les  ventrales  sont  petites ,  reculées  en 
arrière  des  pectorales ,  au-delà  da  la  moitié  de  la  lon- 
gueur de  celles-ci;  elles  ont  dans  leur  aisselle  une  ou 
deux  écailles,  un  peu  plus  longues  que  celles  du  corps 
et  détachées.  Entre  la  base  des  deux  ventrales  il  y  a 
aussi  une  ou  deux  grandes  écailles  arrondies. 

i3.  5 


66  LIVRE    XVI.    LABROÏDES* 

B.  55  D.  18/14;  A.  3/12;  C.  13;  P.  14;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  minces,  comme  membraneuses  à 
leur  bord.  On  ne  voit  à  la  loupe  que  des  stries  très- 
fines,  un  peu  onduleuses  et  parallèles  au  bord.  La 
portion  radicale  est  un  carré  long ,  sillonné  par 
vingt  à  vingt-deux  stries  rayonnantes,  qui  compo- 
sent l'éventail ,  dont  les  extrémités  entaillent  et  fes- 
tonnent le  bord  radical.  On  compte  quarante -cinq 
rangées  entre  l'ouïe  et  la  caudale. 

La  ligne  latérale ,  tirée  parallèlement  au  dos  par 
le  quart  de  la  hauteur,  est  composée  d'une  série  de 
petits  tubes  obliques  de  bas  en  haut,  et  séparés  les 
uns  des  autres.  Les  écailles  sur  lesquelles  on  peut 
suivre  le  tracé  de  cette  ligne,  sont  un  peu  plus  petites 
que  celles  qui  couvrent  le  tronc. 

Quant  aux  couleurs,  nous  regardons  comme  ca- 
ractéristique de  cette  première  espèce  la  teinte  uni- 
forme des  nageoires,  qui,  d'après  le  dessin  que  M.  Lau- 
rillard  a  fait  à  Nice,  et  qu'il  a  eu  la  bonté  de  nous 
donner,  sont  d'un  vert  clair  plus  pâle  que  le  dos 
et  sans  aucunes  taches  ni  ocelles.  L'anale  est  moins 
foncée  que  la  dorsale;  la  caudale  a  une  teinte  plus 
jaune,  la  pectorale  est  bordée  de  rougeàtre,  et  les 
ventrales  tirent  tout-à-fait  au  jaunâtre.  Ces  nageoires 
deviennent  blanchâtres,  plus  ou  moins  pâles  sur  nos 
individus  conservés  dans  l'alcool. 

La  couleur  du  corps  paraît  très-sujette  à  varier  ; 
mais  nous  la  trouvons  toujours  verdâtre  sur  le  dos, 
plus  ou  moins  lavée  de  jaune,  et  tirant  plus  au  jaune 
sur  l'abdomen  ;  la  gorge  et  les  parties  antérieures  étant 
argentées  et  tachetées  de  blanc  nacré.  Une  large  ban- 


CHAP.    I.   LABRES.  67 

delette  va  de  l'œil  à  la  caudale  par  le  travers  des 
flancs  :  elle  est  le  plus  souvent  argentée.  Nous  voyons 
que  dans  la  liqueur  les  teintes  vertes  se  changent  en 
brun  rougeâtre ,  et  que  les  taches  se  relèvent  par  leur 
brillant  argenté. 

Nous  en  avons  de  tels ,  qui  offrent  d'ailleurs  des 
variations  dans  les  nombres  de  leurs  rayons,  que 
nous  ne  devons  pas  négliger  de  citer. 

Ainsi  il  en  est  venu  de  Marseille,  de  Nice, 
de  Naples ,  qui  ont  à  la  dorsale 

D.  18/13 ,  etc. 

Nous  nous  sommes  procuré  sur  les  marche's 
de  Marseille  et  de  Toulon  des  individus  qui 
ont 

D.  18/12,  etc. 

Ceux  rapportés  de  Palerme  par  M.  Constant 
Prévost,  donnent 

D.  18/11. 

Et  enfin ,  un  de  Nice ,  que  l'on  doit  à  M. 

Laurillard ,  a 

D.  n/14. 

Sur  d'autres  individus  non-seulement  les  taches, 
mais  la  bandelette,  ont  pris  un  brillant  nacré,  qui 
leur  donne  un  aspect  si  différent  que  l'on  serait  tenté 
de  les  regarder  comme  d'une  autre  espèce ,  si  l'on 
ne  voyait  des  nuances  bien  établies  entre  la  plus  ou 
moins  parfaite  conservation  de  la  bande.  Ils  varient 
de  même  par  les  nombres  de  leurs  rayons. 


G8  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

Nous  conservons  de  ces  individus  à  bande 
argentée  des  localités  suivantes  :  Marseille , 
Toulon,  Naples,  Messine  et  Malaga. 

Il  nous  paraît  que  nous  devons  rapporter 
à  cette  variété  le  turdiis  viridis maj or  de  Wil- 
lughby  (  p.  322 ,  n.°  3  )^  car  il  dit  positivement 
que  les  nageoires  du  ventre  seules  avaient  des 
taches,  et  que  les  autres  étaient  verdâtres:  c'est 
donc  le  onzième  labre  d'Artedi  *,  et  par  con- 
séquent le  làbriis  turdus  de  Linné.  C'est  avec 
plus  de  doute  que  nous  y  rapportons  les  va- 
riétés de  tourd  de  Rondelet.  Nous  croyons 
cependant  que  celui  qu'il  a  donné  sous  le  nom 
de  exocœtus  (1.  VI ,  p.  1 93 ,  cliap.  1 5  )  le  repré- 
sente assez  bien.  Nous  y  adjoindrons,  mais 
avec  plus  d'hésitation,  son  cinquième  tourd 
(p.  176),  puis  son  neuvième  (p.  178),  et  enfin 
son  huitième,  quoique  ce  dernier  soit  encore 
moins  reconnaissable  que  les  autres. 

Il  nous  paraît  être  le  labre  tourd  de  Risso 
de  la  première  édition,  p.  278,  et  de  la  se- 
conde, bien  que  dans  cette  nouvelle  des- 
cription M.  Risso  me  semble  avoir  confondu 
d'autres  variétés  sous  cette  espèce. 

Selon  M.  Risso,  l'espèce  se  nomme  à  Nice 


1.  Artedi ,  Syn. ,  p.  67. 


CHAP.    I.    LABRES.  69 

sero.  On  la  trouve  sur  les  côtes  rocheuses  et 
peu  profondes  pendant  toute  Tannée. 

La  splanchnologie  de  cette  espèce  ne  diffère 
pas  d'une  manière  notable  de  celle  des  autres 
labres. 

Quant  à  son  squelette,  comparé  à  celui  de  notre 
vieille  de  l'Océan ,  nous  voyons  les  crêtes  antérieures 
du  crâne  plus  élevées  :  les  postérieures  le  sont  moins. 
La  gouttière  antérieure,  destinée  à  laisser  glisser  les 
branches  montantes  de  l'intermaxillaire ,  est  plus 
longue. 

Il  y  a  vingt  vertèbres  abdominales  et  vingt  et  une 
caudales.  Les  apophyses  épineuses  des  trois  dernières 
supportent  les  rayons  de  la  nageoire  de  la  queue; 
mais  la  dernière  vertèbre  a  seule  ses  apophyses  élar- 
gies en  éventail;  les  côtes  et  leurs  apophyses  sont 
longues  et  grêles. 

Le  Labre  louche. 
{Lahriis  luscus ^  Linn. ) 

La  Méditerranée  nourrit,  en  assez  grande 
abondance ,  un  labre 

qui  ressemble  au  précédent  par  ses  formes,  par  le 
nombre  de  ses  rayons  ;  qui  a  les  mêmes  habitudes, 
et  que  nous  avons  été  long-temps  tentés  de  regarder 
comme  une  variété  de  ce  premier. 

Tous  nos  individus  offrent  autour  de  l'œil,  des 
points  bruns  très-foncés  ;  sur  le  sourcil  il  y  a  un  et 
souvent  deux  traits  bruns.  Le  rouge  du  dos  est  chargé 


70  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

de  marbrures  brunes  plus  ou  moins  étendues,  et 
souvent,  dans  ce  cas,  il  n'y  a  plus  de  trace  de  ban- 
delette sur  les  flancs. 

Les  nageoires  ne  sont  pas  tachetées.  Nous  pensons 
que  le  rouge  était  plus  abondant  sur  quelques  indivi- 
dus, car  nous  voyons  le  bord  rougeâtre  de  la  portion 
temporale  de  la  bandelette,  telle  que  la  représente 
M.  Laurillard,  se  changer  en  brun  de  la  même  teinte 
que  les  autres  points  ou  traits. 

Les  mêmes  localités  nous  ont  fourni  cette 
seconde  espèce. 

Nous  en  avons  reçu  de  Naples  par  M.  Sa- 
vigny,  qui  nous  a  fait  connaître  les  couleurs 
de  ce  poisson.  Il  l'a  trouvé  aussi  à  Gènes,  à 
Nice ,  et  MM.  Riener  et  Delalande  en  ont  rap- 
porté de  Martigues  et  de  Toulon. 

C'est  évidemment  le  lahrus  luscus  de  Linné, 
qu'il  a  d'abord  décrit  dans  le  tome  II  du 
Musée  du  prince  Adolphe-Frédéric,  page  80, 
et  qu'il  avait  cru  alors  originaire  d'Amérique; 
mais  sur  la  patrie  duquel  il  est  resté  douteux 
dans  les  éditions  subséquentes  du  Sjstema 
naturœ. 

Nous  sommes  d'autant  plus  fondés  à  regar- 
der notre  conjecture  comme  vraie,  que  M.  de 
Jussieu  possède  dans  sa  bibliothèque  un  des- 
sin de  tourd,  fait  par  Aubriet  pendant  son 
voyage  avec  Tournefort,  et  qui  représente  le 


CHAP.   I.    LABRES.  7\ 

dos  du  poisson  bleu  verdâtre ,  les  flancs  vert 
jaunâtre,  le  ventre  blanc,  avec  des  marbrures 
rougeâtres  et  jaunâtres. 

Nous  y  retrouvons  encore  le  lahms  turdiis 
de  Brûnnich*,  et  surtout  sa  variété  b,  qui  alors 
serait  différente  du  labre  décrit  par  Linné 
sous  le  même  nom. 

M.  Risso  a  donné  dans  sa  première  édition , 
page  217,  un  labre  louche  qui  convient  assez 
bien  à  celui  de  Linné;  mais  je  ne  devine  pas 
pourquoi  il  a  supprimé  cette  espèce  dans  sa 
seconde  édition.  L'a -t- il  confondue  avec  le 
lahrus  turdus  P 

M.  Risso  disait  de  cette  espèce  qu  elle  paraît 
de  Juin  à  Décembre  sur  les  côtes  de  Nice  et 
principalement  à  Ville fran ch e  ;  il  l'indiquait 
alors  sous  le  nom  de  sera^  qu'il  donne  comme 
nom  vulgaire  de  son  lahrus  turdus  et  de  son 
lahrus  festivus. 

Le  Labre  paré. 
(  Lahrus  festivus ,  Risso.  ) 

La  Méditerranée  nourrit  en  aussi  grande 
abondance  un  labre  qui  nous  offre  autant  de 
variétés  que  les  précédens,  mais  qui  paraît  de- 
voir en  être  distingué  spécifiquement. 

1.  Vise.  Massil.,  p.  52. 


72  LIVRE   XVI.  LABROÏDES. 

Ses  formes,  ses  dents,  la  grandeur  des  écailles, 
les  nombres,  sont  semblables  et  varient  dans  les 
mêmes  limites  que  ceux  du  labre  lourd;  mais  les 
couleurs  l'en  distinguent  aise'ment. 

La  première  différence  que  nous  regardons  comme 
caractéristique ,  consiste  en  ce  que  les  trois  nageoires 
verticales  sont  couvertes  de  taches  rondes,  lilas  ou 
bleues,  dont  le  bord,  étant  plus  foncé,  en  fait  des 
ocelles,  qui  restent  toujours  visibles  sur  les  nageoires 
décolorées  par  l'action  de  l'alcool. 

M.  Laurillard  nous  a  rapporté  de  Nice  un 
bel  individu,  long  d'un  pied  sept  pouces. 

Nous  en  avons  d'autres,  venus  de  Martigues 
par  M.  Delalande;  de  Toulon,  par  M.  Riener; 
de  Sicile,  par  MM.  Benoit  et  Bibron;  des 
Dardanelles,  par  M.  Virlet,  et  d'Alexandrie 
d'Egypte ,  par  M.  Geoffroy  Saint-Hilaire. 

Nous  trouvons  parmi  tous  ces  individus 
deux  variétés  très-distinctes,  qui  offrent  elles- 
mêmes  des  sous-variétés. 

Une  première  est  verte,  plus  ou  moins  mêlée  d'o- 
rangé sur  le  dos  et  sur  les  flancs;  le  dessous  du  corps 
est  blanchâtre,  à  reflets  nacrés.  La  dorsale  a  une 
teinte  plus  jaunâtre,  et  les  autres  nageoires,  plus  ver- 
dâtre;  l'anale  a  souvent  un  liséré  violet;  une  bande 
verdâtre  ou  bleuâtre  est  étendue  depuis  l'oeil  jusqu'à 
la  caudale.  Sur  le  poisson  desséché  le  vert  se  con- 
serve; le  bleu  de  la  bande  s'efface  ou  devient  ver- 
dâtre; le   rouge  ou  l'orangé  des  flancs  forme  des 


CHAP.    T.    LABRES.  75 

marbrures  noirfitres  :  il  en  est  de  même  des  traits 
qui  sont  autour  de  l'œil.  Les  taches  du  ventre  de- 
viennent nacrées  et  donnent  au  poisson  un  aspect 
brillant,  qui  augmente  encore  d'éclat  quand  le  pois- 
son est  conservé  dans  l'eau-de-vie.  Les  autres  teintes 
deviennent  alors  brunes  ou  roussâtres,  et  la  bandelette 
se  change  aussi  en  une  bande  nacrée  assez  brillante. 

M.  de  Laroche  l'avait  prise  à  Iviça. 

Nous  reconnaissons  parfaitement  dans  cette 
espèce  ou  variété  le  turdus  oblongus.,  fuscus, 
maculosus  de  Willughby  (p.  323,  n.°  4)>  ^t 
qu'Artedi  a  mentionné  comme  la  variété  et  du 
labre  devenu  le  lahrus  turdus  de  Linné;  car 
l'ichthyologiste  anglais  le  distingue  de  l'espèce 
dont  il  parle  précédemment  (notre  lahrus  tur- 
dus) parce  que  les  nageoires  sont  tachetées. 

Le  sixième  tourd  de  Rondelet  (p.  177) 
pourrait  bien  être  rapproché  de  notre  espèce, 
car  la  figure  représente  des  taches  sur  la  dor- 
sale, l'anale  et  la  ventrale. 

C'est  avec  plus  de  doute  que  j'y  joindrais  le 
poisson  gravé  dans  le  même  auteur  comme 
sa  troisième  espèce  d'Anthias.  J'y  vois  encore 
les  taches  de  l'anale,  cependant  la  couleur  vio- 
lette ne  répond  pas  à  celle  des  individus  hais 
qu'a  dû  voir  Rondelet. 

La  bibliothèque  de  M.  de  Jussieu  possède 
un  dessin  de  notre  espèce  fait  par  Aubriet,  dans 


74-  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

le  même  voyage  que  celui  dont  nous  avons 
parlé  plus  haut.  ]Nous  sommes  d'autant  plus 
redevables  de  la  libéralité  que  M.  de  Jussieu 
a  mise  à  nous  communiquer  ce  dessin,  qu'il 
nous  a  servi  à  reconnaître  la  copie  assez  mé- 
diocre que  Duhamel*  en  a  publiée  sans  en  faire 
connaître  la  source,  et  qu'il  a  intitulé  scare 
rouge. 

Nous  avons  encore  à  signaler  la  seconde 
variété  notable  de  ce  poisson,  étiquetée  par 
M.  Risso  lui-même,  et  que  M.  Laurillard  nous 
a  fait  connaître  en  nous  en  donnant  un  dessin 
fait  sur  le  vivant,  et  en  en  rapportant  des 
individus  au  Cabinet. 

Elle  a  le  dos  bleu  foncé,  la  bandeleue  rouge,  les 
côtés  brun  verdâtre  et  tout  couverts  de  points  bleu 
de  cielj  le  ventre  blanc  argenté,  marbré  de  petites 
taches  rouges,  vives  et  serrées.  Les  nageoires  sont 
orangées  et  chargées  de  points  semblables  à  ceux 
du  dos  et  des  côtés. 

Je  ne  vois  pas  sur  le  dessin  d'indication  de  taches 
noirâtres  sur  le  sourcil  ni  autour  de  l'œil,  et  elles 
n'ont  laissé  aucune  trace  sur  nos  individus  conservés 
dans  l'eau-de-vie.  Ceux-ci  sont  devenus  brun  rou- 
geâtre  sur  le  dos,  blancs  sur  le  ventre,  semés  partout 
de  taches  nacrées.  Les  ocelles  des  nageoires  sont 
demeurées  bien  visibles. 


1.  Traité  des  pêches,  secl.  4)  pl-  4?  fig-  6. 


CHAP.    I.    LABRES.  75 

M.  Risso  considérait  ce  poisson  comme  une 
variété  de  son  lahrus  festwus,  sans  doute  parce 
que  la  bandelette  latérale  est  rouge  au  lieu 
d'être  argentée,  comme  il  le  dit  dans  sa  des- 
cription ;  dans  ce  cas,  les  taches  sur  les  nageoires 
distingueraient  le  labre  paré  du  labre  lourd. 
La  femelle  est,  dit-on ,  plus  grosse  que  le  mâle. 

On  les  voit  pendant  toute  l'année  sur  les 
rivages  de  Nice,  peu  profonds,  et  sur  fonds 
de  roche. 

Il  nous  paraît  très  -  probable  que  M.  Risso 
avait  sous  les  yeux  un  individu  de  cette  es- 
pèce, qu'il  a  pris  dans  sa  première  édition  pour 
le  labre  Ballan  de  Pennant.  Les  lignes  dorées 
de  la  gorge  et  les  taches  obscures  du  pour- 
tour des  yeux,  ne  peuvent  convenir  à  notre 
vieille  de  l'Océan.  Nous  nous  empressons  de 
faire  cette  remarque,  parce  que  l'on  pourrait^ 
d'après  une  détermination  aussi  fautive,  croire 
que  le  labre  de  nos  côtes  de  fOcéan  habite 
également  la  Méditerranée,  ce  qui  ne  s'est 
pas  encore  vérifié  jusqu'à  présent. 

Le  Labre  vert. 
{Lahnis  viridis^  Linn.) 

M.  Laurillard  a  pris  et  dessiné  à  Nice  un 
grand  labre,  dont  les  proportions  et  les  nom- 


76  LIVRE   XVI.  LABROÏDES. 

bres  des  rayons  sont  les  mêmes  que  dans  no- 
tre premier  tourd; 

mais  qui  a  des  dents  plus  fortes,  plus  serrées  et  plus 
nombreuses ,  car  je  lui  en  compte  douze  à  chaque 
mâchoire. 

Le  dessin  colorié,  fait  sur  le  vivant,  nous  montre 
que  la  couleur  générale  est  verte,  un  peu  rembrunie 
sur  le  dos,  un  peu  moins  foncée  sur  les  flancs,  et 
que  ces  deux  teintes  sont  séparées  par  une  bande- 
lette d'un  beau  vert  clair  et  brillant,  tracée  le  long 
de  la  ligne  latérale.  La  gorge  et  la  poitrine  sont  par- 
semées d'un  grand  nombre  de  taches  brunes  et  na- 
crées; celles-ci  paraissent  aussi  sur  le  bas  de  la  joue. 
Les  nageoires  sont  couvertes  de  taches  ou  d'ocelles 
lilas  sur  un  fond  verdâtre. 

L'individu  est  long  de  dix-sept  pouces. 

Nous  en  avons  d'autres  individus  qui  nous 
sont  venus  de  Martigues,  par  M.  Delalande; 
de  Marseille,  par  M.  Cuvier,  et  qui  paraissent 
tout-à-fait  de  la  même  espèce  que  celui  décrit 
plus  haut. 

Nous  ne  saurions  douter  que  ce  ne  soit 
le  Labrus  viridis y  linea  utrincjue  cœrulea 
d'Artedi^,  de  son  Gênera,  et  dont  il  n'a  pas 
lait  mention  dans  sa  Synonymie.  C'est  donc 
par  conséquent  le  lahrus  viridis  de  Linné. 

Mais  ce  ne  peut  être,  comme  l'a  cru  Artedi, 

1.  Ailedi,,  Gc«.,54j  n."  2. 


CHAP.   I.   LABRES.  77 

le  dixième  tourd  de  Rondelet,  lequel  a  le  corps 
trop  court,  trop  haut,  et  a  la  forme  de  nos 
crënilabres. 

Nous  doutons  beaucoup  du  rapprochement 
de  la  figure  de  Salviani  (pi.  88),  sous  le  nom 
de  verdone;  car  elle  peut  tout  aussi  bien  être 
rapportée  aux  labres  dénommés  plus  haut,  qu'à 
celui-ci,  puisqu'elle  n'offre  aucun  caractère 
précis,  et  que  la  description  ne  vient  apporter 
aucun  renseignement  positif. 

Il  n'en  est  pas  de  même  de  la  description 
de  Willughby  ^,  pour  son  Turdus  viridis  mi- 
nor,  qui  convient  parfaitement  à  notre  pois- 
son. Mais  cet  auteur  s'était  trompé  quant  aux 
ressemblances  qu'il  avait  cru  trouver  entre 
l'espèce  de  Rondelet  et  celle  de  Salviani,  et 
on  voit  que  c'est  lui  qui  a  induit  Artedi  en 
erreur. 

Bonnaterre ,  tout  en  admettant  le  nom  de 
Linné,  avait  désigné  l'espèce  sous  la  dénomi- 
nation française  de  lahre  perroquet.  M.  de 
Lacépède  ,  trouvant  que  Bloch  avait  donné 
sous  le  nom  de  lahrus  viridis  un  poisson  dif- 
férent de  celui  de  Linné ,  a  adopté  le  nom  de 
Bloch  pour  cette  espèce  différente  et  du  genre 
des  ^ir elles ,  et  a  changé  le  nom  linnéen  de 

1.  De  pisc,  p.  320,  n."  2. 


78  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

notre  poisson  en  celui  de  lahrus psittacus ,  tra- 
duisant ainsi  l'idée  de  Bonna terre  ;  et  il  a  été 
suivi  en  cela  par  M.  Risso  ',  dans  sa  première 
édition,  qui  a  cité  cependant  et  avec  raison  le 
labrus  viridis  de  Linné;  mais  dans  la  seconde 
(p.  3oo)  il  a  supprimé  le  labrus  viridis,  a  décrit 
notre  espèce  sous  le  nom  de  labrus  saxatilis , 
et  nous  sommes  d'autant  plus  certains  de  re- 
connaître sa  description,  qui  est  du  reste  fort 
exacte,  qu'il  a  nommé  ainsi  à  M.  Laurillard 
l'espèce  dont  nous  parlons  ;  et  le  labrus  psit- 
tacus de  cette  seconde  édition  devient  une 
variété  du  labrus  merula  de  Linné. 

Nous  croyons  bien  reconnaître  notre  es- 
pèce dans  la  troisième  variété  c  dulabre  tourd 
de  Briinnich. 

Cette  espèce  est  tout  aussi  abondante  dans 
la  Méditerranée  que  les  précédentes. 

Selon  M.  Risso  ,  elle  apparaît  sur  les  ro- 
chers de  Nice  en  Mars  et  en  Décembre,  et 
ses  noms  nicéens  seraient  rouchié  ou  sera. 

Le  Labre  nérée. 
{Labrus  nereus ,  Risso.) 

Devra-t-on  regarder  comme  une  espèce  ou 
comme  une  simple  variété  du  précédent,  le 

1.  Ichlh.  de  Nice,  p.  221. 


CHAP.    I.    LABRES.  79 

poisson  que  les  pécheurs  ont  encore  donné 
à  M.  Laurillard  sous  le  nom  de  rouchié,  et 
dans  lequel   M.  Eisso   a   reconnu  son  labre 
nérée?  car  il  l'a  ainsi  nomme. 
Cet  auteur  dit  que  ce  labre  est 
vert  un  peu  étiolé  sur  le  dos,  et  bleuâtre  ou  ver- 
dâtre  à  reflets   argentés  sous  la  gorge  et  le  ventre, 
avec  quelques  lignes  jaunâtres.  La  dorsale  est  verte, 
mêlée  de  jaunâtre  et  bordée  de  jaune  rougeâtre  ;  les 
pectorales  sont  olivâtres;  l'anale  et  la  caudale,  ver- 
dâtres. 

L'absence  de  bande  verte  et  les  nombres  semblent 
le  caractériser,  car  il  a 

D.  19/11;  A.  3/10,  etc. 
Les   couleurs  de  la  femelle  ne  sont  presque  pas 
différentes  de  celles  du  mâle. 

Il  approche  des  côtes  pendant  les  mois  de 
Novembre  et  de  Décembre  et  se  tient  parmi  les 
rochers  peu  recouverts  par  les  eaux.  Nos 
individus  ont  un  pied  de  long. 

Nous  rapportons  à  cette  espèce  un  petit 
labre  long  de  quatre  pouces,  pris  à  Naples  par 
M.  Savigny,  à  qui  nous  trouvons  également 

dix-neuf  rayons  épineux  à  la  dorsale;  mais  qui  en 

a  un  mou  de  plus ,  c'est-à-dire  douze. 

M.  Savigny  nous  l'a  donné  comme  d'une  couleur 

vert  de  mer,  uniforme,  avec  un  fin  liséré  bleuâtre 

sur  le  bord   des  nageoires  verticales,  ce  dont  on 

voit  encore  la  trace. 


80  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

Le  Labre  merle. 
{Labrus  merula,  Linn.) 

On  trouve  dans  la  Méditerranée  un  labre 
dont  les  formes  épaisses  rappellent  davantage 
celles  de  notre  vieille  de  l'Océan  {lahrus  ber- 
gjlta). 

Son  corps,  en  ovale  alongé,  est  cependant  moins 
étroit  et  moins  long  que  celui  des  lourds  dont  nous 
venons  de  parler.  Sa  hauteur  est  trois  fois  et  trois 
quarts  dans  la  longueur  totale.  La  longueur  de  la 
tête  égale  la  hauteur  du  tronc.  L'oeil,  placé  sur  le 
haut  de  la  joue  sans  entamer  la  ligne  du  profil,  est 
parfaitement  rond,  et  son  diamètre  est  du  sixième 
de  la  longueur  de  la  tête;  il  est  éloigné  du  bout  du 
museau  de  deux  fois  et  demie  ce  diamètre,  et  la  fente 
de  la  bouche  égale  une  fois  et  demie  ce  diamètre.  Les 
lèvres  sont  très-épaisses;  je  compte  six  ou  sept  plis 
à  la  supérieure,  mais  je  n'en  vois  pas  à  l'inférieure. 
La  mâchoire  d'en  haut  a  seize  dents,  huit  de  chaque 
côté,  coniques,  droites,  diminuant  graduellement  à 
partir  des  mitoyennes;  il  y  en  a  dix  à  douze  à  la  mâ- 
qjioire  inférieure;  elles  sont  semblables  aux  supé- 
rieures, et  derrière  celles-ci  on  en  voit  une  rangée 
de  plus  petites,  qui  sont  coniques,  pointues  et  sem- 
blables, à  la  grandeur  près,  à  celles  de  la  rangée  ex- 
terne. Quand  la  bouche  est  fermée,  on  aperçoit  en- 
core l'extrémité  postérieure  du  maxillaire,  laquelle 
est  recouverte  d'une  peau  épaisse.  Le  voile  surmaxil- 
laire s'avance  vers  l'extrémité  du  museau,  sans  re- 


CHAP.  I.   LABRES.  81 

couvrir  la  lèvre  supérieure.  Cette  peau,  abondante  en 
cryptes  muqueux,  recouvre  le  sous-orbitaire,  le  dessus 
delà  tête,  et  n'a  aucunes  écailles.  Dix  à  douze  pores 
sont  disposés  en  cercle  autour  de  l'œil  ;  d'autres 
,  percés,  le  long  de  la  tempe  au-dessus  de  l'articulation 
du  préopercule,  sur  le  surscapulaire,  y  forment  deux 
séries,  réunies  en  chevron  sur  le  vertex;  on  en  voit 
le  long  du  bord  du  préopercule ,  et  enfin,  au-devant  de 
l'œil  d'autres  suivent  une  direction  parallèle  au  bord 
inférieur  du  sous-orbitaire.  Au-dessus  de  ces  os  on 
distingue  les  deux  ouvertures  de  la  narine ,  dont 
l'antérieure  est  un  simple  petit  trou,  qu'on  pren- 
drait facilement  pour  un  pore. 

Le  bord  inférieur  du  préopercule  descend  obli- 
quement vers  le  dessous  de  la  mâchoire  inférieure, 
et  fait  ainsi  un  angle  très-ouvert  et  arrondi  avec  le  bord 
vertical;  le  limbe  en  est  assez  étroit.  La  joue  est 
couverte  d'une  dizaine  de  rangées  de  petites  écailles. 
L'opercule,  de  forme  triangulaire,  est  assez  distinct 
du  sous-opercule,  qui  a  très-peu  d'écaillés  sur  sa 
surface;  celles  de  l'opercule  sont  grandes;  je  n'en 
vois  que  deux  ou  trois  sur  l'interopercule,  qui  est 
assez  élargi  en  arrière. 

Les  deux  membranes  branchiostèges  sont  réunies 
sous  un  isthme  assez  large,  sans  écailles;  les  ouver- 
tures des  ouïes  ne  sont  pas  très -bâillantes,  on  ne 
compte  que  cinq  rayons  à  la  membrane  des  bran- 
chies. Le  bord  membraneux  de  l'opercule,  qui  semble 
se  continuer  avec  la  membrane  brarichiostège,  re- 
couvre la  plus  grande  partie  de  l'huméral  et  du  sca- 
pulaire. 

i3.  6 


82  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

La  pectorale  est  large,  arrondie,  du  sixième  de 
la  longueur  totale;  ses  rayons  sont  branclius ,  à  quatre 
divisions. 

La  dorsale  est  insérée  un  peu  en  arrière  de  la 
base  de  la  nageoire  de  la  poitrine.  Les  rayons  épi- 
neux, à  partir  du  premier,  qui  n'a  guère  que  le  hui- 
tième de  la  hauteur  du  corps,  augmentent  progres- 
sivement jusqu'au  dix-huitième ,  qui  mesure  à  peine 
le  quart  de  cette  même  hauteur. 

La  portion  molle  est  arrondie,  et  sa  plus  grande 
hauteur  n'est  pas  tout- à -fait  double  de  celle  de  la 
dernière  épine  de  la  dorsale.  La  première  de  Tanale 
répond  à  la  dernière  de  la  dorsale,  et  la  forme  de  la 
nageoire  est  assez  semblable  à  celle  de  la  portion  molle 
de  la  nageoire  du  dos;  mais  elle  n'atteint  pas  aussi  loin 
sous  la  queue.  Ce  tronçon  de  la  queue,  mesuré  du 
pied  du  dernier  rayon  à  la  caudale,  n'est  guère  que 
du  huitième  de  la  longueur  totale.  La  caudale  est 
arrondie  vers  les  angles,  et  le  bord  est  presque  droit. 
Les  ventrales,  insérées  à  peu  près  sous  le  milieu 
des  pectorales,  sont  triangulaires;  mais  leurs  angles 
sont  arrondis. 
B.  5;  D.  n  -  18  -  19/12  ;  A.  3/9  5  C.  13  ;  P.  15  ;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  médiocres,  régulières,  minces, 
à  bord  lisse  et  comme  membraneux  :  j'en  compte 
quarante  entre  l'ouïe  et  la  caudale.  Sur  une,  détachée, 
on  voit  que  la  portion  nue  de  l'écaillé  est  triangu- 
laire, et  que  sa  surface  est  finement  striée  et  plus  fine- 
ment grenue;  la  portion  radicale,  quadrilatère,  plus 
que  double  de  la  portion  libre;  le  centre  en  est 
très-fmement  granuleux,  et  le  pourtour  est  forte- 


CHAP.    I.    LABRES.  83 

ment  strié  par  les  rayons  de  l'éventail.  Mais  nous 
voyons  quelquefois  ces  rayons  former  un  éventail 
ordinaire,  et  partir  d'un  point  comme  centre;  et  sur 
d'autres  individus,  ou  mieux,  sur  d'autres  écailles 
prises  sur  le  même  individu,  mais  à  une  place  non 
déterminée,  on  trouve  un  carré  central  très-petit,  et 
ces  écailles  paraissent  alors  être  intermédiaires  entre 
les  deux  formes  que  nous  venons  de  citer. 

La  ligne  latérale  est  composée  d'une  série  de  tubu- 
lures; elle  commence  par  être  tracée,  près  du  dos, 
au  quart  de  la  hauteur,  se  courbe  brusquement  sous 
la  lin  de  la  dorsale,  et  se  rend  à  la  caudale  par  le 
milieu  du  tronçon  de  la  queue. 

La  couleur  de  ce  labre,  conservé  dans  l'eau-de- 
vie,  est  un  brun  tirant  plus  ou  moins  au  chocolat, 
et  on  voit  des  taches  bleues  éparses  sur  des  écailles, 
de  sorte  que  le  poisson  devait  être  en  grande  partie 
bleu  quand  il  était  vivant.  La  dorsale  est  brune,  plus 
claire  que  le  corps.  La  pectorale  et  la  caudale  sont 
au  contraire  plus  foncées,  presque  noirâtres,  et  sur 
le  bord  de  celle-ci  on  aperçoit  des  traces  de  taches 
violettes.  Cette  teinte  est  très-prononcée  sur  le  bord 
de  l'anale  et  des  ventrales,  et  forrtie  un  liséré  violet 
ou  lilas  foncé  très-caractéristique  de  cette  espèce. 

Je  retrouve,  en  effet,  ce  caractère  sur  des  indi- 
vidus de  couleur  fauve  plus  égale,  dont  les  taches 
bleues  ne  sont  plus  visibles ,  et  qui  ont  la  pectorale 
très-pâle.  Mais  comme  M.  Domhando  nous  a  envoyé 
d'Athènes  un  individu  à  pectorale  fauve  clair,  dont 
les  taches  bleues  sont  bien  conservées ,  je  regarde 
ces  différences  comme  accidentelles,  et  ne  s'appli- 


84  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

quant  qu'à  des  variétés  probablement  peu  constantes. 
Un  autre  labre  de  cette  espèce,  venu  de  l'expédi- 
tion de  Morée,  a  même  sur  la  tête  des  points  noirs 
qui  rappellent  ceux  de  nos  lourds;  mais  j'y  retrouve 
la  forme  elliptique  du  corps  de  notre  labre  merle, 
et  l'anale  et  les  ventrales  ont  leur  liséré  caractéris- 
tique. 

Nous  avons  d'ailleurs  reçu  ce  labre  des  difFë- 
rens  ports  de  la  Méditerranée  avec  lesquels 
les  correspondans  ou  les  voyageurs  nous  ont 
mis  en  relation.  La  collection  en  a  reçu  de 
très -beaux  échantillons,  pris  à  Toulon,  par 
M.  Riener;  à  Martigues,  par  M.  Delalande;  à 
Marseille  et  à  Gènes,  par  M.  Cuvier;  à  Nice, 
par  M.  Laurillard,  et  à  Naples,  par  M.  Savigny  ; 
en  Corse,  par  M.  Payraudeauj  à  Messine,  par 
M.  Bibron. 

Sa  splanchnologie  ne  nous  a  offert  aucune 
différence  bien  notable , 

et  sur  son  squelette  nous  comptons  dix-huit  vertè- 
bres abdominales  et  vingt  caudales.  Les  apophyses 
épineuses  des  trois  dernières  concourent  à  former 
l'éventail  osseux  qui  soutient  les  rayons  de  la  na- 
geoire caudale  ;  la  grandeur  et  la  profondeur  des  fosses 
externes  de  la  région  occipitale  sont  plus  considé- 
rables que  celles  des  espèces  précédentes. 

C'est  sans  aucun  doute  le  Icihrus  merula  de 
Linné,  car  il  est  facile  de  reconnaître  notre 


CHAP.    I.    LABRES.  85 

espèce  dans  la  figure  d'Aldrovande^  citée  par 
Artedi  ^  ;  on  peut  encore  admettre  que  Ron- 
delet en  a  voulu  parler^  sous  le  nom  de  merula, 
quoique  sa  figure  soit  moins  bonne  que  la  pré- 
cédente :  elles  sont  d'ailleurs  les  seules  vraiment 
reconnaissables  et  sur  lesquelles  repose  le  sep- 
tième labre  d'x\rtedi,  dont  Linnë  s'est  servi  et 
qui  répond  assez  bien,  par  sa  couleur  bleu  foncé, 
à  la  phrase  un  peu  vague  du  premier  de  ces 
naturalistes.  Le  merle  de  Bélon  est  presque  in- 
déchiffrable, et  on  ne  peut  le  ranger,  avec  quel- 
que apparence  de  probabilité,  auprès  d'aucun 
de  nos  labres.  Quant  à  la  figure  de  Salviani 
(p.  224,  pi.  87),  il  est  très  -  probable  qu'elle 
appartient  à  un  poisson  d'un  tout  autre  genre 
et  même  d'une  famille  différente,  à  cause  des 
neuf  rayons  épineux  de  sa  dorsale.  On  peut  aussi 
admettre  que  Willughby  ait  eu  sous  les  yeux 
notre  poisson,  quand  il  a  écrit  le  peu  de  lignes,  à 
peine  caractéristiques,  de  son  troisième  tourd."* 
Briinnich^  nous  a  laissé  une  assez  bonne 
description,  malgré  sa  brièveté,  de  notre  es- 
pèce, dans  son  lahrus  Iwens ,  puisqu'il  a  eu 
soin  de  signaler  la  couleur  bleue  du  bord  des 


1.  Aldrovande,  De  pisc,  1. 1,  c.  6,  p.  35.  —  2.  Artedi,  Syn. , 
p.  55.  —  3.  Rondelet,  1.  VI,  c.  5,  p.  172.  —  4.  Willughby,  />tf 
pisc.f  p.  520,  n."  5.  —  5.  Briinnich,  Fisc  Mass.f  p.  53. 


86  LIVRE  XVT.  LABROÏDES. 

nageoires  du  poisson  qui  a  le  corps  brun  livide. 
Nous  pensons  seulement  que  la  description  n'a 
pas  ëtë  faite  sur  un  individu  frais  et  sortant  de 
la  mer;  mais  rien  ne  peut  prouver  que  ce  soit 
le  lahrus  Iwens  que  Linné  a  décrit  dans  le 
tome  second  du  Musée  du  prince  Adolphe- 
Frédéric. 

Risso  a  aussi  connu  notre  poisson,  mais  il  en 
a  embrouillé  toute  la  nomenclature;  car  il  est 
facile  de  le  reconnaître  dans  son  lahrus  ossi- 
fa^us,  qui  n'est  pas  celui  de  Linné.  Pour  cette 
espèce,  sous  ce  dernier  nom,  Risso  n'a  fait 
heureusement  aucun  changement  dans  sa  se- 
conde édition;  mais  il  n'en  est  pas  de  même 
des  deux  espèces  nominales  que  l'on  devait 
s'attendre  à  voir  trouver  ici  leur  place. 

Il  a  dans  sa  première  édition  un  lahrus 
nierula,  pour  lequel  il  cite  la  figure  d'Aldro- 
vande;  mais  il  ne  lui  donne  que  dix  rayons 
à  la  dorsale,  et  une  couleur  bleue,  mêlée  de 
teintes  plus  ou  moins  ferrugineuses.  Dans  la 
seconde  édition  le  labre  merle  conserve  cette 
teinte,  mais  l'auteur  y  ajoute  une  bandelette 
longitudinale  bleue  et  des  nombres  tout  diffé- 
rens  :  la  dorsale  ayant  dix-huit  épines.  Les  ven- 
trales sont  cependant  lisérées  de  bleu  ou  de 
violet. 

Nous  ne   trouvons  plus  de   lahrus  Iwens 


CHAP.   I.    LABRES.  87 

dans  cette  seconde  édition,  sans  que  l'auteur 
nous  dise  pourquoi  cette  espèce  n'y  paraît  plus. 
Celle  de  la  première  est  toute  différente  du 
poisson  de  Brunnich,  et  devait  être  faite  d'a- 
près quelques  variétés  de  notre  lahrus  turclus 
ou  L.  luscus. 

Je  trouve  bien  encore  un  lahrus  Iwens  dans 
l'ouvrage  de  Coriiide  '  5  mais  cette  citation  ne 
peut  tout  au  plus  servir  qu'à  prouver  l'exis- 
tence de  labres  sur  la  côte  de  Galice ,  ce  dont 
on  ne  pouvait  douter^  mais  on  ne  peut,  d'après 
elle,  en  aucune  manière  en  déterminer  l'espèce. 

Le  Labre  livide. 
{Lahrus  Iwidiis ,  noh.) 

Parmi  tous  ces  nombreux  labres  de  la  Mé- 
diterranée, que  j'ai  sous  les  yeux,  j'en  vois 
plusieurs  individus 

qui  ont  exactement  la  même  forme  que  le  précédent , 
les  mêmes  variations  dans  les  nombres,  une  disposi- 
tion semblable  des  écailles;  mais  qui  ont  tous  une 
teinte  plus  pâle  et  uniforme;  la  dorsale  grise  ou  vio- 
lette, peu  foncée;  la  caudale  noirâtre;  les  pectorales 
pâles;  les  ventrales  très-foncées  et  sans  traces  de  liséré. 
L'anale  a  le  bord  noirâtre ,  et  cette  teinte  se  fond  sur 
l'olivâtre  de  sa  base;  elle  n'a  point  de  liséré  violet. 


1.  Cornide,  Ensajo  de  los  pesc.  Gai,,  p.  5i, 


88  LIVRE  XVI.   labroïdes. 

Nos  individus  sont  venus  de  Toulon,  de 
Marseille  et  de  Naples,  par  MM.  Delalande 
et  Savigny. 

Ils  ont  sept  à  huit  pouces. 

Nous  en  avons  d'autres,  plus  grands,  rap- 
portés de  Corse  par  M.  Payraudeau,  et  qui, 
avec  ces  mêmes  teintes  rembrunies  sur  les 
nageoires,  sans  aucun  liséré  aux  ventrales 
ou  à  l'anale ,  montrent  encore  les  restes  des 
couleurs  bleues  dont  ils  brillaient  pendant  la 
vie,  et  qui  doivent  être,  sans  aucun  doute, 
rapprochés  de  nos  labres  livides;  leurs  lèvres 
sont  cependant  un  peu  plus  épaisses  ;  la  supé- 
rieure a  neuf  plis  bien  distincts. 

Delalande  en  a  pris  un  tout-à-fait  semblable 
à  Marseille;  il  est  un  des  plus  grands  labres 
que  nous  ayons  reçus  de  la  Méditerranée,  sa 
longueur  étant  de  dix-sept  pouces. 

La  mer  de  Naples  nous  a  fourni  deux  labres 
qui  se  distinguent  des  précédens  par 

une  sorte  de  réseau  jelé  sur  le  corps,  et  résultant 
de  ce  que  la  couleur  des  écailles  est  plus  foncée 
sur  la  portion  découverte  que  sur  la  partie  nue.  Le 
bord  membraneux  de  chaque  écaille  laisse  aperce- 
voir sous  lui  le  brun-violet  qui  colore  l'écaillé  qu'il 
recouvre,  et  ses  traits  bruns  constituent  le  filet  dont 
je  viens  de  parler. 

Sauf  l'épaisseur  des   lèvres,  que  je  trouve  plus 


CHAP.  I.    LABRES.  89 

minces,  et  qui  n'ont  que  six  plis,  toutes  les  autres 
formes  sont  semblables. 

Un  des  deux  a  le  corps  foncé  et  les  nageoires 
rembrunies,  surtout  la  pectorale;  l'autre  est  d'un 
fauve  clair,  a  la  dorsale  pâle,  la  caudale,  l'anale  et 
les  ventrales  d'un  brun  clair,  et  les  pectorales  sont 
jaunâtres. 

Je  n'ose  pas  cependant  les  regarder  comme 
différant  par  l'espèce  des  précédens.  Ils  ont 
neuf  pouces  de  long,  et  ont  été  rapportés  de 
Naples  par  M.  Savigny. 

Le  Labre  bordé. 
{Labnts  limbatus y  nob.) 

Nous  en  avons  encore  d'autres  qui  ressem- 
blent aux  précédens  par  tous  les  détails  de 
leur  forme; 

mais  leur  teinte  est  encore  plus  claire,  et  l'anale  seule 
a  un  fin  liséré  noir  ;  les  autres  nageoires  sont  deve- 
nues transparentes. 

M.  Laurillard,  qui  a  rapporté  un  de  ces 
individus  de  Nice,  nous  dit 

que  tout  le  corps  et  les  nageoires  étaient  d'un  vert 
de  perruche,  c'est-à-dire  un  peu  mêlé  de  jaunâtre. 
L'anale  a  conservé  son  liséré. 

Les  autres  nous  viennent  de  Toulon ,  de 
Naples;  leur  taille  varie  de  quatre  à  huit 
pouces. 


9^  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

On  pourrait  peut-être  rapporter  à  ce  pois- 
son le  lahrus  psittacus  de  la  seconde  édition 
de  M.  Risso,  et  qui  n'est  probablement  plus  le 
même  que  celui  de  la  première  ;  mais  dans  le 
doute  où  nous  sommes,  nous  nous  abstenons 
de  prendre  ces  déterminations,  qui  embrouil- 
leraient encore  le  chaos  que  M.  Risso  a  jeté  sur 
toutes  ces  espèces  de  la  Méditerranée. 

Le  Labre  linéolé. 
{Lahrus  lineolatus ,  nob.) 

Un  autre  labre  de  la  Méditerranée,  qui  a 
été  confondu  par  M.  Risso  lui-même  avec  son 
ossifage  (^lahrus  ossifagus), 

a  le  corps  plus  court;  l'ovale  est  plus  régulier;  c'est 
en  arrière  des  pectorales  que  l'on  prend  sa  plus  grande 
hauteur,  qui  ne  fait  que  le  tiers  de  la  longueur,  la 
caudale  non  comprise. 

La  tête  est  plus  courte  que  cette  hauteur:  le  mu- 
seau paraît  plus  pointu  ;  les  lèvres  ont  sept  à  huit 
plis  :  d'ailleurs  les  autres  parties  sont  semblables  à 
celles  des  précédents. 

Les  nageoires  sont  arrondies  et  les  nombres  sem- 
blables. 

D.  18/11  ou  12;  A.  3/9,  etc. 

Les  couleurs  ont  laissé  sur  tous  les  nombreux 
Individus  que  j'ai  examinés,  des  traces  de  rayures 
brunes  longitudinales,  au  nombre  de  neuf  à  dix, 
au-dessous  de  la  ligne  latérale.  L'entre-deux  de  ces 


CHAP.  I.   LABRES.  91 

lignes  est  éclairé  par  des  taches  blanchâtres  ou  ar- 
gentées, plus  brillantes  dans  la  région  pectorale  que 
partout  ailleurs.  Le  dos  est  brun;  le  ventre  et  la 
poitrine  sont  argentés  ;  les  nageoires  sont  pâles ,  et 
surtout  les  pectorales.  Il  n'y  a  point  de  liséré  aux 
ventrales  :  souvent  l'anale  en  a  un  petit ,  noirâtre. 

J'en  ai  de  Toulon,  par  M.  Riener;  de  Nice, 
par  MM.  Laurillard  et  Savigny  :  celui-ci  en  a 
également  rapporté  de  Naples,  et  ce  sont  ces 
individus  et  ceux  de  M.  Laurillard  qui  ont 
ëtë  confondus  par  M.  Risso  avec  le  lahrus 
tessellatus ,  BL;  mais  le  poisson  de  Bloch  est 
tout'.à-fait  différent. 

Le  Labre  des  roches. 
{^Lahrus  saaoorum,  nob.) 

Une  espèce  qui  paraît  plus  distincte,  est 
celle  que  M.  Risso  a  cru  reconnaître  pour  son 
lahrus  rupestris,  sur  les  individus  que  lui  a 
montrés  à  Nice  M.  Laurillard.  Mais  comme 
M.  Risso  ne  donne  que  dix  rayons  épineux  à 
son  lahrus  rupestris,  nous  ne  pouvons  admet- 
tre cette  détermination,  et  nous  pensons  que  le 
poisson  de  M.  Risso  est  un  de  nos  crénilabres, 
auquel  l'espèce  décrite  dans  cet  article  ressem- 
blait par  la  disposition  de  ses  couleurs. 

Ses  proportions  sont  celles  de  notre  lahrus  nereus. 
Sa  plus  grande  hauteur,  prise  aux  ventrales,  est  du 


92  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

quart  de  la  longueur  totale  :  elle  égale  la  longueur 
de  la  tête,  dont  les  bords  sont  disposés  de  même-, 
Les  nombres  des  rayons  des  nageoires  sont  sembla- 
bles ;  les  formes  arrondies  sont  les  mêmes. 

Une  tache  bleue  existe  au  haut  de  l'opercule,  près 
du  surscapulaire.  Le  corps  est  marbré  de  brun  ou 
de  noirâtre  sur  un  fond  jaunâtre;  ces  marbrures  de- 
viennent des  raies  transverses  sous  les  branches  de  la 
mâchoire  inférieure.  Le  ventre  est  argenté;  la  dor- 
sale et  la  caudale  sont  brunes  et  sans  tache;  l'anale 
a  quelques  points  blanchâtres;  les  ventrales  sont  noi- 
râtres. 

Selon  M.  Laurillard,  les  marbrures  sont  bleues 
quand  le  poisson  est  frais ,  et  sa  couleur  est  plus  Ou 
moins  roussâtre,  lavée  de  vert.  La  tète  est  surtout 
agréablement  variée  de  bleu. 

Nos  individus  sont  longs  de  sept  pouces; 
ils  nous  viennent  de  Nice,  et  nous  en  avons 
qui  ont  été  pris  à  Marseille. 

Il  serait  possible  de  rapporter  a  cette  es- 
pèce la  figure  gravée  dans  Duhamel  (11.^  part., 
sect.  4?  pi-  4?  %•  ?)•  Il  l'avait  prise  d'un  dessin 
d'Aubriet,  qui  est  encore  conservé  dans  la 
bibliothèque  de  M.  de  Jussieu,  et  sur  lequel 
ce  poisson  est  coloré  de  bandes  brunes  trans- 
versales et  de  raies  longitudinales  sur  un  fond 
argenté. 

Aubriet  avait  peint  ce  poisson  sous  les 
yeux  de  Tournefort,  pendant  le  voyage  de 
cet  illustre  botaniste  dans  le  Levant. 


CHAP.   I.    LABRES.  03 

Le  Labre  porc. 
{Labrus  scrofa y  nob.) 

L'Atlantique  nourrit  une  espèce  de  labre 
que  l'on  trouve  près  des  îles  qui  s'élèvent  du 
milieu  de  cette  mer. 

Le  Cabinet  du  Roi  en  possède  depuis  long- 
temps un  très-bel  exemplaire,  long  de  deux 
pieds,  originaire  du  Cap -Vert.  Un  second  in- 
dividu, de  moitié  plus  petit,  donné  par  S.  A. 
le  prince  de  Neuwied ,  a  été  pris  par  ce  voya- 
geur à  Madère.  Nous  avons  trouvé,  parmi  les 
papiers  des  infortunés  Kuhl  et  Van  Hasselt, 
un  fort  beau  dessin  de  cette  espèce,  fait  au 
même  endroit;  et  les  peintures  que  M.  d'Orbi- 
gny  avait  envoyées  à  M.  Cuvier,  nous  ont  aussi 
prouvé  que  ce  poisson  se  rencontre  àTénériffe. 

C'est  donc  une  espèce  propre  à  lAtlantique , 
et  les  dilïérens  documens  que  nous  venons  de 
citer,  nous  la  font  parfaitement  connaître. 

Ce  labre  ressemble  au  labrus  mixtus^  par  la  tache 
noire  placée  sur  la  partie  antérieure  de  la  dorsale; 
mais  elle  y  occupe  moins  d'espace,  et  le  nombre  des 
rayons  est  si  différent  qu'on  ne  pourrait  pas  con- 
fondre ces  deux  espèces. 

Celle  que  nous  décrivons  dans  cet  article,  a  le 
corps  plus  court,  la  tête  moins  longue,  le  museau 


94  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

tout  aussi  pointu,  l'œil  plus  petit.  On  voit  a.  l'ex- 
trémité des  deux  mâchoires  quatre  fortes  canines  : 
une  autre,  tout  aussi  grosse,  sort  de  l'angle  de  la 
bouche  et  se  dirige  en  avant.  Entre  cette  dent  et  les 
antérieures  il  y  en  a  dix  coniques  et  courtes.  Derrière 
les  canines  de  la  mâchoire  inférieure  il  y  a  une  rangée 
de  seize  dents,  dont  les  dix  premières  sont  plus 
grandes  que  les  six  suivantes.  La  caudale  est  coupée 
carrément;  les  ventrales  naissent  tout-à-fait  sous  les 
pectorales. 

D.  12/10;  A.  3/12;  C.  H;  P.  17;  V.  1/5. 

La  ligne  latérale  est  formée  d'une  série  de  petits 
traits  et  parallèle  au  dos,  au-dessus  du  tiers  de  la 
hauteur  du  corps.  # 

La  couleur  de  ce  labre  est  rouge  carmin  brillant 
sur  le  dos,  passant  à  l'orangé  clair  sur  les  flancs, 
parce  qu'il  se  mêle  avec  le  jaune  du  ventre;  le  dessous 
de  la  poitrine  est  plus  pâle;  la  dorsale  et  l'anale  sont 
.  jaunes  et  tachetées  de  brun;  la  caudale  a  le  fond  de 
la  couleur  de  la  dorsale,  mais  elle  n'a  point  de  taches. 
La  pectorale  est  orangée  et  la  ventrale  rouge.  Une  large 
tache  noire  couvre  l'espace  compris  entre  les  cinq 
premiers  rayons  de  la  dorsale. 

Nous  venons  d'en  voir  de  fort  beaux  indi- 
vidus dans  les  collections  faites  aux  Canaries 
par  MM.  Webb  et  Berthelot;  ils  sont  indi- 
qués comme  des  poissons  d'une  chair  tendre 
et  agréable. 


CHAP.   I.    LABRES.  95 

Le  Labre  a  flancs  tachetés. 
{Lcibrus  pœcilopleura ,  nob.) 

On  trouve  sur  les  côtes  de  la  Nouvelle- 
Zélande  un  labre 

qui  a  la  bouche  petite,  armée  de  quatorze  dents  à 
chaque  mâchoire  et  de  chaque  côté;  celle  de  l'angle 
de  la  mâchoire  supérieure  est  prolongée  autant  que 
les  deux  crochets  antérieurs  :  les  autres  dents  sont 
très-petites. 

Le  corps  est  un  ovale  régulier;  sa  hauteur  est  con- 
tenue quatre  fois  et  demie  dans  la  longueur  totale;  la 
tête  n'est  comprise  dans  cette  même  longueur  que 
trois  fols  et  demie. 

La  dorsale  est  basse,  la  caudale  coupée  carrément, 
les  pectorales  assez  grandes. 

D.  9/11;  A.  8/10;  C.  13;  P.  12;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  minces,  de  grandeur  moyenne; 
on  en  compte  vingt-sept  entre  Fouie  et  la  caudale, 
leur  contour  n'est  pas  arrondi,  mais  anguleux;  la 
surface  externe  est  finement  striée  et  granuleuse;  leur 
portion  cachée  est  un  carré  un  peu  alongé,  très- 
finement  strié  par  l'éventail  composé  de  branches 
nombreuses  et  déliées,  qui  n'entaillent  point  le  bord 
radical.  La  ligne  latérale,  tracée  parallèlement  au  dos 
par  le  quart  de  la  hauteur,  est  formée  par  une  série 
de  tubes  alongés ,  divisés  à  leur  extrémité  postérieure 
en  deux  branches,  une  dirigée  vers  le  dos  et  l'autre 
vers  le  bas  :  chacune  d'elles  se  bifurque. 

La  teinte  générale  est  un  brun  rougeâtre  au-dessus 


96  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

de  la  ligne  latérale,  et  le  ventre  est  blanc  :  le  tout 
glacé  de  verdâtre.  Au-dessous  de  la  ligne  latérale  et 
vis-à-vis  les  premiers  rayons  mous  de  la  dorsale,  il 
y  a  sur  chaque  écaille  une  large  tache  formée  par  la 
réunion  d'une  douzaine  de  gros  points  bruns  :  quel- 
ques autres  sont  épars  sur  le  corps.  Le  sous-orbitaire 
est  traversé  obliquement  par  une  ligne  brune,  dirigée 
de  l'angle  de  la  mâchoire  vers  le  bord  antérieur  de 
l'œil.  La  dorsale  et  l'anale  ont  quelques  taches  vio- 
lettes :  les  autres  nageoires  n'ont  pas  de  taches.  Les 
rayons  paraissent  avoir  été  jaunes,  plus  ou  moins 
orangés,  et  la  membrane  qui  les  réunit,  violette. 

Nous  ne  connaissons  celte  espèce  que  par 
un  individu  long  de  sept  pouces,  que  les 
naturels  de  la  Nouvelle-Zélande  ont  donné 
à  MM.  Lesson  et  Garnot  sous  le  nom  de 
paré-quiriquiri. 

Le  Labre  selle. 

(^Labrus  ephîppiwn ,  nob.) 

J'ai  vu  dans  la  collection  du  Musée  royal 
de  Hollande,  pendant  mon  séjour  à  Leyde, 
un  labre 

ayant  les  formes  et  les  dents  semblables  à  celles  de 
notre  labre  à  trois  taches. 

Le  fond  delà  couleur  paraissait  avoir  été  olivâtre; 
une  grande  tache  d'un  bleu  noirâtre ,  en  forme  de 
selle,  couvrait  le  dos,  sous  la  dorsale,  en  commen- 
çant à  son  premier  rayon  épineux,  et  en  finissant 
vers  les  rayons  mous.  La  queue  était  entourée  d'un 


CHAP.  I.   LABRES.  97 

large  anneau  noirâtre  ou  bleu  très-foncé.  Le  dessus 
de  la  tête  est  bleu,  et  cette  teinte  s'étend  sur  l'oper- 
cule: les  nageoires  participent  de  ces  teintes. 
D.  19/11  ;  A.  3/9  j  C.  13;  P.  16;  V.  1/5. 

C'est  un  grand  poisson ,  long  de  quinze 
pouces,  que  M.  Temriiinck  croyait,  sans  en 
être  très  -  certain ,  originaire  de  Java,  et  qui 
se  distingue  bien,  par  le  nombre  des  rayons 
épineux  de  sa  dorsale,  des  espèces  de  cossyphes 
avec  lesquelles  on  serait  peut-être  tenté  de  le 
confondre. 

Le  Labre  de  Gay» 

{Labrus  Gaji,  nob.) 

M.  Gay  nous  a  pj;ocuré  un  petit  poisson  des 
îles  Juan-Fernandez, 

qui  a  la  forme  alongée  de  nos  labres,  les  lèvres 
épaisses,  les  dents  sur  un  seul  rang  et  toutes  poin- 
tues :  celles  de  devant  plus  grandes  ;  le  limbe  du 
préopercule  et  l'interopercule  lisses,  très -minces, 
sans  écailles 5  la  joue  en  est  couverte,  mais  elles  sont 
très -petites.  Celles  de  l'opercule  sont  aussi  grandes 
que  celles  du  corps  j  j'en  compte  vingt-cinq  rangées 
environ  entre  l'ouïe  et  la  caudale. 

La  dorsale  et  l'anale  sont  basses,  la  caudale  cou- 
pée carrément. 

D.  9/11;  A.  3/10;  C.  15;  P.  12;  V.  1/5. 

La  couleur  est  un  rouge-brun  uniforme,    plus 

i3.  7 


98  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

foncé  sur  les  nageoires  impaires.  Les  pectorales  et 
les  ventrales  paraissent  avoir  été  jaunes. 

Ce  poisson  n'a  que  quatre  pouces. 

Le  Labre  macrodonte. 
{Labrus  macrodontus y  Lacép.) 

Nous  avons  au  Cabinet  du  Roi  un  autre 
labre,  probablement  originaire  de  Java, 

qui  a  le  profil  oblique,  le  front  élevé,  l'œil  petit;  le 
bord  interne  du  maxillaire  est  relevé  en  un  bourrelet 
osseux,  épais,  denliculé  ou  festonné.  La  mâchoire  infé- 
rieure a  un  bourrelet  moins  épais.  Les  canines,  au 
nombre  de  quatre,  sont  fortes  et  crochues,  et  dans 
l'angle  de  la  mâchoire  supérieure  est  une  petite  dent 
saillante.  Les  écailles  du  préopercule  sont  petites; 
celles  de  l'opercule  sont  assez  grandes,  mais  moins 
que  celles  du  corps,  sur  lequel  on  compte  trente- 
deux  rangées  entre  l'ouïe  et  la  caudale;  elles  sont 
minces  et  lisses. 

D.  13/7  ;  A.  3/9  ;  C.  15  :  P.  16  ;  V.  1/5. 

La  ligne  latérale  se  courbe  sous  la  fin  de  la  dor- 
sale ;  elle  est  composée  d'une  suite  d'arbuscules  di- 
visés en  branches  nombreuses. 

La  tête  et  le  dos,  jusqu'à  la  fin  de  la  dorsale, 
paraissent  avoir  été  violets.  Cette  couleur  se  prolonge 
en  une  bande  étroite  sur  le  milieu  de  la  queue  jus- 
qu'à la  caudale;  le  reste  du  corps  est  décoloré  et 
paraît  avoir  été  jaune  ou  rougeâtre.  Une  large  tache 
violette  couvre   les  quatre  premiers  rayons   mous 


CHAP.  I.   LABRES.  99 

de  la  dorsale,  et  une  autre,  plus  foncée,  presque  noire, 
est  sur  la  base  de  la  pectorale.  Les  joues,  l'occiput 
et  le  dos,  au-dessus  de  la  ligne  latérale,  jusque  sous 
la  septième  ou  la  huitième  épine  de  la  dorsale,  sont 
couverts  d'une  grande  quantité  de  petits  points  blan- 
châtres ou  violets. 

L'individti  est  long  d'un  pied  et  porte  la 
dénomination  de  tenouh,  que  notis  ne  trou- 
vons point  dans  Valentyn,  ni  dans  le  Diction- 
naire malais. 

Cette  description  est  faite  sur  le  poisson  qui 
a  servi  à  M.  de  Lacëpède  pour  établir  son  lahre 
macrodonte  \  ainsi  nous  sommes  bien  certains 
de  notre  synonymie. 

Le  Labre  du  Japon. 
{Lahrus  Japoiiicus ,  nob.) 

Le  Cabinet  de  Berlin  possède  un  labre  du 
Japon,  voisin  dti  précédent,  et  qui  lui  a  été 
donné  par  M.  Langsdorff. 

Cette  espèce  a  le  même  profil ,  quatre  canines 
très-fortes  et  une  petite  dent  en  arrière  sur  la  partie 
antérieure  du  bourrelet,  lequel  est  plus  épais  et  plus 
relevé  qu'à  la  précédente,  mais  il  m'a  paru  lisse.  La 
dent  de  l'angle  de  la  mâchoire  supérieure  est  beau- 
coup plus  forte.  Les  écailles,  d'égale  grandeur,  ont 


1.  Lacépède,  t.  III,  p.  45i,  n."  ii5,  et  p.   523. 


'100  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

leur  surface  finement  striée.  La  ligne  latérale  a  des 
arbuscules  plus  courts  et  moins  branchus.  Les  nom- 
bres sont  semblables. 

D.  13/7;  A.  3/9,  etc. 
La  couleur  paraît  avoir  été  brune  ou  rougeâtre 
sur  le  dos;  la  caudale  est  foncée;  l'anale  a  sa  base 
violette,  le  milieu  jaune  et  le  bord  brun. 
Ce  poisson  s'appelle  au  Japon  nobussu  ou 
nahekusara-kaschis.  Il  est  long  d'un  pied. 

Le  Labre  de  Iago. 
(Labnis  lagonensis ,  Bowdicli.  ^) 

Nous  citerons  à  la  suite  de  ces  labres,  exa- 
minés par  nous-mêmes,  ime  espèce  que  nous 
trouvons  indiquée  dans  la  relation  du  second 
voyage  en  Afrique  de  Bowdicli,  et  qui  a  été 
publiée  par  sa  courageuse  compagne,  aussi 
distinguée  par  l'élévation  et  la  noblesse  de  son 
ame,  que  par  la  solidité  de  son  instruction 
si  variée  dans  les  différentes  branches  de  l'his- 
toire naturelle. 

C'est  un  poisson  ayant  quatre  dents  à  l'extrémité 
de  chaque  mâchoire,  un  préopercule  rayonné,  un 
opercule  écailleux. 

D.  25;  A.  14;  C.  12;  P.  18;  V.  8? 
Ce  poisson  brille  d'une  belle  couleur  rouge. 

1.  Excursions  in  ISIadeira  and  Porto- Santo ,bj  M.  Bowdich, 
îSaS.  yJppend.fp.  234,  fig-  47- 


CHAP.    I.    LABRES.  101 

Il  a  été  observé  à  Porto-Praya  du  Cap-Vert, 
et  à  l'embouchure  de  la  Gambie. 

Je  doute  de  l'exaclitude  des  huit  rayons  de  la  ven- 
trale. 

Mad.^  Lee  [formerly  Bowdich  )  parle  d'un 
rang  de  dents  en  velours,  ce  qui  pourrait  ne 
pas  convenir  à  un  labre;  mais  cependant  la 
figure  ne  me  laisse  aucun  doute  sur  le  genre 
auquel  nous  rapportons  cette  espèce  de  l'At- 
lantique ,  que  nous  demanderons  aux  voya- 
geurs. L'espèce  doit  être  voisine  de  notre 
lahrus  suillus. 


i02  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

CHAPITRE  IL 

Des  Cossjplies  {Cossyplius,  nob.). 

Nous  croyons  devoir  séparer  des  labres, 
des  espèces  qui  se.ml)lent  avoir  des  caractères 
communs  aux  poissons  de  ce  genre  et  aux  cré- 
nilabres,  et  qui  composent  un  groupe  intermé- 
diaire entre  les  deux  genres  de  Cuvier. 

Ces  poissons  ont  tous  les  maxillaires  élargis, 
et  derrière  la  rangée  externe  des  dents  poin- 
tues il  y  en  a  de  petites  rondes,  grenues,  ser- 
rées, donnant  à  ces  espèces  un  caractère  de 
dentition  très-notable  et  facile  à  reconnaître. 

Les  pièces  operculaires  sont  généralement 
plus  écailleuses,  et  souvent  toutes  sont  cou- 
vertes sous  une  cuirasse  d'écaillés  semblables 
à  celles  du  corps.  Les  nageoires  verticales  sont 
aussi  protégées  par  des  écailles  qui  se  relèvent 
ou  s'abaissent  avec  les  rayons  et  les  cachent 
quand  ils  sont  tout-à-fait  abaissés  sur  le  dos; 
mais  elles  ne  forment  pas  une  gouttière  pro- 
fonde, semblable  à  celle  des  perches  ou  des 
spares. 

Une  autre  particularité  de  presque  toutes 
ces  espèces  consiste  dans  les  crénelures  souvent 
très-prononcées  du  bord   montant  du  préo- 


CHAP.  II.    COSSYPHES.  403 

percule.  Ces  dentelures  ne  paraissent  quelque- 
fois que  vers  l'angle  de  cette.pièce;  elles  y  sont 
si  faibles,  qu'elles  semblent  ne  plus  exister. 

Ce  caractère  a  fait  prendre  plusieurs  de  ces 
espèces  pour  des  crénilabres  de  Cuvier  j  mais 
ceux-ci  ont,  comme  nous  le  verrons  tout  à 
l'heure,  des  dents  si  distinctes,  qu'on  ne  peut 
confondre  les  deux  genres. 

Nous  avons  emprunté  aux  Grecs  le  nom 
générique  de  ce  nouveau  groupe.  Sous  cette 
dénomination  de  Koaav(pos,  Aristote  a  parlé  de 
poissons  saxatiles,  qu'il  regardait  comme  les 
femelles  de  ses  k/jcA»?.  Ce  nom  étant  aussi  celui 
de  l'oiseau  si  commun  chez  nous,  le  merle , 
Ko(7(yv(poç  a  été  traduit  par  menda  ou  turdiis^ 
et  on  lui  a  donné  la  même  traduction  en  ich- 
thyologie,  c'est  ce  qui  a  déterminé  Artedi  à 
faire  de  ces  dénominations  des  synonymes  de 
ses  labres;  mais  on  ne  peut  certainement  les 
appliquer,  ainsi  qu'il  a  voulu  le  faire,  à  aucune 
espèce,  et  ce  n'est  même  qu'avec  doute  qu'elles 
doivent  être  données  comme  synonymes  de 
genre. 

Le    COSSYPHE    BODIAN. 

{Cossjphus  BodianuSy  nob.) 

L'Atlantique  nourrit  un  de  ces  labroïdes  à 
dents  grenues  qui  y  est  fort  commun ,  qui  y 


]  04  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

a  été  observe  par  la  plupart  des  naturalistes 
descripteurs  de  poissons  des  côtes  d'Amérique, 
mais  qui  a  reçu  presque  autant  de  noms  qu'il 
y  a  eu  d'observateurs  pour  en  parler. 

Le  corps  est  alongé  et  de  forme  ovalaire  assez 
régulière  et  élégante.  La  hauteur  fait  le  quart  de  la 
longueur  totale,  prise  jusqu'à  rextrémilé  des  filets 
prolongés  de  la  caudale j  l'épaisseur  n'est  pas  tout- 
à-fait  moitié  de  cette  hauteur. 

La  longueur  de  la  tète  égale  la  hauteur  du  corps. 
L'œil,  de  grandeur  médiocre,  est  placé  sur  le  haut 
de  la  joue  et  à  la  fm  de  la  première  moitié  de  la 
longueur  de  la  tête;  son  diamètre  est  compris  cinq 
ou  six  fois  dans  la  distance  du  bout  du  museau  à 
l'angle  de  l'opercule.  Le  sous-orbitaire  est  large,  haut 
et  sans  écailles;  le  préopercule  a  toute  sa  surface 
écailleuse,  même  sur  le  limbe;  on  voit  des  écailles 
semblables  sur  l'interopercule  et  la  mâchoire  infé- 
rieure; l'opercule  et  le  sous-opercule  sont  couverts 
par  des  écailles  plus  grandes  ;  le  bord  membraneux 
est  assez  large;  le  bord  montant  du  préopercule  est 
finement  crénelé. 

La  lèvre  supérieure  est  épaisse,,  plissée,  et  recouvre 
une  mâchoire  droite,  à  bord  comprimé,  élargie  en 
dedans,  de  fliçon  que  le  palais  est  très-étroit.  Il  y  a 
quatre  dents  coniques  à  l'extrémité  de  chaque  mâ- 
choire; les  deux  mitoyennes  sont  droites  et  dirigées 
en  avant;  les  autres  dents  sont  petites  et  en  tuber- 
cules jusqu'à  l'angle  de  la  mâchoire,  où  il  y  a  deux 
autres  dents  longues  et  saillantes,  la  dernière  étant 


CHAP.   II.   COSSYPHES.  105 

toujours  la  plus  forte.  Les  dents  grenues  sont  sur  une 
bande  étroite.  Le  palais,  d'ailleurs,  est  lisse;  les  pha- 
ryngiens supérieurs  ont  trois  rangées  de  tubercules 
d'un  beau  blanc,  dont  les  internes  sont  plus  gros  et 
correspondent  aux  moyens  et  gros  tubercules  du 
pharyngien  inférieur.  Ces  dents  grenues  ne  sont  pas 
portées  sur  de  longues  racines,  et  diffèrent,  sous  ce 
rapport,  des  dents  pharyngiennes  des  labres. 

La  dorsale  est  basse  à  son  origine  et  presque  en- 
tièrement cachée  sous  les  écailles  qui  remontent  du 
dos  sur  les  rayons  épineux  de  cette  nageoire;  elle  se 
relève  un  peu  vers  la  fm,  où  les  rayons  mous  pren- 
nent plus  de  hauteur,  et  s'alongent  en  pointe  ou  en 
un  filet,  qui  atteint  jusqu'à  la  caudale  :  ce  sont  les 
cinquième ,  sixième  et  septième  rayons  mous  qui 
s'alongent  ainsi. 

La  caudale  est  coupée  carrément;  les  rayons  qui 
la  bordent  en  dessus  et  en  dessous  donnent  un  pro- 
longement filiforme.  L'anale  a  sa  portion  molle  sem- 
blable à  celle  de  la  dorsale,  et  les  huitième,  neu- 
vième et  dixième  se  terminent  en  filet.  Cette  même 
disposition  a  lieu  pour  le  premier  rayon  mou  de  la 
ventrale,  qui  touche  presque  à  l'anale.  Les  pecto- 
rales sont  arrondies. 

D.  13/9;  A.  8/12  j  C.  15;  P.  16;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  finement  ciselées,  assez  grandes: 
j'en  trouve  trente -quatre  entre  l'ouïe  et  la  caudale. 
La  ligne  latérale,  composée  d'une  série  de  tubercules, 
est  plus  ou  moins  rameuse,  parallèle  à  la  courbure 
du  dos,  et  se  rend  à  la  queue  sans  faire  d'inflexion 


106  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

irès-sensible ;  elle  semble  presque  droite  sur  ceilalns 

individus. 

Quant  à  la  couleur,  elle  paraît  avoir  été  lie  de  vin 

ou  pourprée,  ou  quelquefois  d'un  beau  rouge  orangé 

sur  le  dos;  le  ventre  est  gris;  le  reste  des  côte's  est 

jaune  citron,  ainsi  que  les  nageoires.  La  dorsale  et 

la  pointe  de  l'anale  offrent  une  tache  noire  plus  ou 

moins  foncée. 

Nous  en  avons  reçu  de  nombreux  indivi- 
dus,  parmi  lesquels  un  est  long  de  quatorze 
pouces.  Il  nous  vient  de  Saint-Domingue,  par 
M.  Ricord;  M.  Plëe  en  a  envoyé  de  Porto-Rico 
et  de  Saint-Thomas  j  MM.  Delalande  et  le  duc 
de  Rivoli  l'ont  pris  au  Brésil,  et  MM.  d'Abadie 
nous  l'ont  rapporté  d'Olinda  :  nous  voyons 
l'espèce  s'avancer  dans  le  milieu  de  l'Océan 
jusqu'à  Sainte -Hélène;  car  M.  Dussumier  en 
a  donné  au  Cabinet  un  bel  individu  pris  sur 
ces  côtes;  mais  cet  observateur  le  regarde 
comme  un  des  poissons  rares  de  Tile. 

Selon  M.  Fiée ,  il  se  nomme  patate  rouge 
dans  nos  Antilles. 

Parra  le  connaît  sous  le  nom  de  perro  Co- 
lorado à  la  Havane.  Les  Espagnols  désignent 
sous  le  nom  de  pei^ro  (chien)  les  poissons  à 
dents  canines  saillantes.  C'est  ainsi  que  nous 
voyons  cette  dénomination  appliquée  à  nos 
lachnolaimes. 

Margrave   et  le  prince  Maurice  disent  que 


CHAP.   II.    COSSYPHES.  i  07 

ce  poisson  est  de  la  taille  d'une  perche  ou 
d'une  carpe,  et  que  sa  cliair  est  tendre  :  suivant 
Catesby,  il  atteindrait  à  deux  pieds  de  long^ 
cependant  Parra  le  compte  parmi  les  petits 
poissons.  Margrave  est  le  seul  qui  dise  que  l'on 
mange  ce  poisson  à  Rio-Janeiro. 

Parmi  les  collections  que  nous  devons  à 
M.  Gay,  nous  avons  trouvé  une  variété  si 
notable  de  cette  espèce,  que  nous  avons  hésité 
long-temps  à  ne  pas  l'en  distinguer. 

L'individu  a  l'œil  beaucoup  plus  petit ,  le  front 
plus  large,  la  ligne  latérale  sensiblement  plus  arquée, 
les  filets  des  nageoires  plus  longs,  et  je  trouve  que 
c'est  le  sixième  seul  qui  se  prolonge  en  fil  à  la  dor- 
sale^  dont  les  nombres  diffèrent. 

D.  12/10;  A.  3/12,  etc. 

Le  dos  paraît  avoir  été  plus  rouge  ;  la  taclie  de  la 
pectorale  et  de  la  dorsale ,  plus  noire, 

11  vient  du  Brésil,  et  est  long  de  neuf  pouces. 

Je  n'en  fais  pas  une  espèce,  parce  que  je 

trouve  pai^mi  nos  individus  venus  de  Sainte 

Domingue  que  le   nombre  des  épines  de  la 

dorsale  ne  va  quelquefois  qu'à  douze. 

Cette  espèce  a  été  connue  dès  le  milieu  du 
dix-septième  siècle  5  car  elle  a  été  publiée  par 
Margrave  ',  qui  la  tenait  des  Portugais  du  Brésil, 

1.  Margrave,  Bras.,  p.  i45j  i46. 


408  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

SOUS  le  nom  de  pudiano  vermelho  ou  de  bo- 
diano.  Suivant  lui ,  les  Brésiliens  la  nommaient 
aipimixira  et  tetimixira. 

L'original  du  dessin  qui  accompagne  la 
description  se  trouve  dans  les  dessins  ma- 
nuscrits du  prince  Maurice  de  Nassau,  et  que 
nous  avons  consultés  à  la  bibliothèque  royale 
de  Berlin.  Ces  documens  ont  été  employés  par 
Bloch,  qui  a  publié  dans  sa  grande  Ichtliyo- 
logie  ce  dessin  du  prince;  mais  en  le  qua- 
druplant, selon  son  habitude,  quoiqu'il  n'en 
ait  pas  averti  ses  lecteurs.  Cette  copie  serait 
très-exacte ,  si  le  dessinateur  ne  s'était  pas  mé- 
pris sur  un  léger  accident  de  couleur  qui 
existe  au  bas  de  l'angle  du  préopercule,  et 
dont  il  a  fait  une  forte  épine ,  quoiqu'elle 
n'existe,  à  bien  dire,  ni  sur  le  dessin  original, 
ni  encore  moins  sur  la  nature.  Il  faut  remar- 
quer cependant  que  la  tête,  et  particuhère- 
ment  la  l30uche  et  les  dents ,  sont  altérées  dans 
la  planche  de  Bioch. 

Mais  cet  ichthyologiste  reproduit  cette  même 
espèce  dans  la  livraison  suivante  et  deux  fois 
de  suite;  car  son  lutjanns  verres  (Bl.  255) 
en  est  une  figure  assez  bonne,  faite  d'après 
nature ,  et  nous  avons  dans  le  Cabinet  du  Roi 
un  poisson  desséclié  qui  nous  vient  de  1  an- 
cienne collection  de  Hollande,  tellement  sem- 


CHAP.  11.    COSSYPHES.  109 

blable  à  la  gravure  de  Blocli,  que  l'on  pour- 
rait le  regarder  comme  en  étant  l'original. 
Une  seconde  fois,  et  quelques  pages  plus  loin 
(pi.  258),  Bloch,  ayant  trouvé  dans  les  manus- 
crits du  père  Plumier  un  dessin  dans  lequel 
on  peut  reconnaître  notre  espèce  à  la  bifurca- 
tion de  la  queue  et  au  prolongement  de  la 
dorsale  et  de  lanale,  l'a  fait  graver  comme  une 
nouvelle  espèce  de  spare,  spams  falcatus» 
Nous  sommes  encore  aides  dans  notre  déter- 
mination parla  distribution  des  couleurs  telles 
que  nous  les  trouvons  sur  le  Vélin  fait  par 
Aubriet,  et  que  Ton  conserve  dans  la  biblio- 
thèque du  Muséum.  La  tcte  et  le  dos  sont 
peints  bleu  d'outremer,  le  ventre  et  les  côtés 
sont  jaunes,  le  bord  de  la  dorsale  et  de  l'anale 
et  les  pointes  de  la  caudale  sont  aussi  de  cette 
couleur.  Ainsi,  sauf  Texactitude  des  teintes, 
c'est  encore  la  disposition  de  celles  que  nous 
observons  sur  la  nature.  Bloch  lui  a  donné 
une  coloration  verdâtre  plus  foncée  sur  le  dos, 
et  tirant  au  jaune  sous  le  ventre.  Je  ferai  ob- 
server que  son  dessinateur  a  mal  compris  les 
dessins,  en  général  peu  achevés,  de  Plumier, 
et  qu'il  a  marqué  à  tort  quatre  épines  à  l'anale  j 
car  dans  notre  Vélin  il  n'y  en  a  que  deux. 

Un  de  nos  individus  empaillés,  et  venus  de 
Saint-Domingue  par  M.  Ricord ,  ressemble 


110  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

beaucoup  5  dans  ses  traits  généraux,  à  cette 
figure  de  Plumier  :  tout  concourt  donc  à  prou- 
ver que  le  spams  falcatus  n'est  autre  que 
l'espèce  dont  nous  faisons  ici  l'histoire.  Heu- 
reusement que  Bloch  na  pas  vu  un  dessin 
beaucoup  plus  incorrect  du  père  Feuillce,  et 
qui  existe  à  la  bibliothèque  du  Roi.  Le  pois- 
son, sans  nom  et  sous  le  n.°  20,  est  peint  en 
rouge  vermillon  clair  ou  de  minium,  et  les 
nageoires  sont  roses.  Malgré  les  incorrections 
nombreuses  de  ce  dessin,  on  y  reconnaît  en- 
core notre  espèce. 

Gatesby ',  de  son  coté,  a  aussi  représenté 
notre  cossyphe,  quoique  jusqu'à  présent  aucun 
naturaliste  ne  l'eût  reconnu  dans  le  labrus 
jiavus  de  cet  auteur.  Linné  s'est  servi  de  ce 
document  dans  sa  douzième  édition,  c'est  donc 
le  lahriLS  fuhus  du  Sjslema  natiirœ. 

M.  de  Lacépède  a  in:,crit  d'abord  toutes  ces 
espèces  nominales  sans  aucune  difficulté,  et 
il  a  fait  ensuite  de  nouveaux  doubles  emplois. 

Le  labre  fauve  de  Caîesby  {Jabrus  fulvus, 
Lin.)  est  d'abord  compté  parmi  ses  labres. 

Le  Bodicmiis  hodianus  est  conservé,  mais 
sous  le  nom  de  Bodian  Bloclr.  Le  lutjan  verrat^ 


1.  Catesbj,C;it.,t.XI,fig.  i.  — 2.Lacép.,  t.  IV, p.  27901  290. 
3.  Ibid.,  p.   209. 


CHAP.  ïl.    COSSYPHES.  111 

prend  place  dans  ce  genre  également  sur  l'au- 
toritë  de  Bloch ,  et  son  spaie  faucille  est 
établi  de  la  même  manière  ;  puis  il  se  sert  du 
TuRDUS  totus  cceruleus  et  ciureus,  de  Plu- 
mier, et  il  fait  graver  une  copie  de  la  peinture 
d'Aubriet.  Comme  il  ajoute  une  foi  très-grande 
à  l'exactitude  de  ce  Vëlin,  et  qu'il  n'a  point 
cherché  à  le  comparer  à  la  nature ,  il  crée  sur 
cette  autorité  un  genre  nouveau,  dont  les 
caractères  sont  basés  sur  la  forme  en  fliux 
des  nageoires  verticales ,  et  il  donne  parmi 
les  caractères  spécifiques  un  nombre  de  huit 
rayons  branchiostèges  que  l'on  compte  sur 
quelques  percoïdes  seulement,  les  liolocen- 
triun;  mais  la  manière  dont  le  peintre  a  traité 
les  autres  parties  de  l'animal,  suffit  seule  pour 
prouver  qu'il  n'a  certainement  pas  compté  les 
rayons  branchiostèges  en  les  dessinant.  M.  de 
Lacépède  a  pris  aussi  pour  un  barbillon  l'en- 
foncement triangulaire  qui  se  découvre  près 
de  l'angle  de  la  bouche,  quand  la  mâchoire 
inférieure ,  qui  est  assez  mal  dessinée,  s'abaisse. 
La  forme  des  nageoires  coupées  en  faux  lui  a 
fait  imaginer  le  nom  générique  de  liarpé^.  Ce 
harpe  bleu  doré  doit  donc  être  rayé  de  la 
liste  des  genres   ou  d'un  species  de  poisson. 

1.  ciLç>7TYi  •  qui  signifie  faux  ou  faucille,  ou  tout  instrument  crochu. 


1i2  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Le  Vélin  d'Aubriet  a  été  aussi  copié  et  assez 
bien  rendu  dans  le  Recueil  de  physique  de 
Dagoty. 

Mais  Commerson  avait  trouvé  notre  pois- 
son sur  le  marché  de  Rio- Janeiro,  au  mois 
de  Juin  1767,  et  il  en  avait  fait  une  descrip- 
tion remarquable  par  son  exactitude  et  d'a- 
près le  plan  que  cet  habile  observateur  s'était 
fait  pendant  son  voyage. 

M.  de  Lacépède ,  ayant  lu  cette  description 
dans  les  manuscrits  de  notre  célèbre  voyageur, 
n'a  pas  manqué  de  s'en  servir  en  étabhssant, 
d'après  ce  document ,  une  nouvelle  espèce 
nominale  de  labre.  Son  lahrus  semiruher  n'est 
encore  qu'une  sixième  manière  de  reproduire 
notre  cossyphe. 

Shaw  ne  compte  cette  espèce  que  cinq  fois, 
parce  qu'il  a  bien  reconnu  l'identité  du  harpe 
de  Lacépède  avec  le  sparus  falcatus  de  Bloch; 
mais,  trompé  sans  doute  parles  quatre  épines 
indiquées  par  cet  auteur,  il  y  a  réuni  un  autre 
spare,  étabU  aussi  sur  les  dessins  de  Plumier, 
etauquelBloch  attribuait.quatre  épines  anales. 
Nous  avons  déterminé  ce  sparus  tetracan- 
thus^  c'est  notre  mesoprion  griseus  \  et  nous 
avons  déjà  signalé  la  confusion  de  Shaw;  mais 


1.  Cm.  Val.,  t.  Il,  p.  47»' 


CHAP*    II.    COSSYPHES»  i\% 

à  cette  époque  nous  pensions  que  le  spams 
falcatus  pouvait  être  une  espèce  du  genre 
chéiline.  Je  ne  doute  plus  aujourd'hui,  après 
l'examen  des  nombreux  individus  rapportes 
de  Saint-Domingue  par  M.  Ricord,  ou  des 
Antilles  par  M.  Plée,  du  nouveau  rapproche- 
ment que  je  fais. 

Shaw,  d'ailleurs,  reproduit  le  labre  demi-^ 
rouge  parmi  ses  espèces  de  labres,  mais  en  y 
ajoutant  une  erreur  qui  lui  est  propre  5  car  il 
dit  ce  poisson  originaire  des  Indes  et  d'Ame* 
rique.  Lacëpède  avait  cependant  copie  fidèle- 
ment Commerson. 

Shaw  a  du  reste  placé  le  liitjanus  verres 
parmi  ses  spares;  le  hodianus  bodianus  est  le 
premier  de  ses  bodians,  et  le  labriis  ful^us 
est  inscrit  comme  un  labre. 

Bloch,  à  l'article  de  son  lutjanus  verres, 
avait  déjà  cité  le  perro  Colorado  de  Parra.  ' 
Cet  auteur  le  colore  en  rouge  sur  la  queue, 
sur  le  dessus  de  la  tête  et  sur  le  dos,  et  en 
jaune  sur  tout  le  reste  du  corps.  Les  ventrales 
et  l'anale  ont  du  rouge  à  la  base  ou  sur  le 
bord, 

1.  Parra,  Hav.;  p.  5,  pi.  3^  fig.  i. 

i3.  8 


114  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Le    COSSYPHE    MALDAQUE. 
{Cossfphus  maldat ,  nob.) 

Les  espèces  suivantes  dont  nous  allons  donner 
la  description  et  l'historique,  sont  toutes  origi- 
naires des  mers  de  l'Inde.  Commerson  en  avait 
observé  à  l'Isle- de -France,  et  en  avait  rap- 
porte des  descriptions  et  des  figures,  qui  ont 
été  employées  par  M.  de  Lacépède ,  mais  qui  lui 
ont  servi  à  faire  plusieurs  doubles  emplois.  Nous 
devons  les  autres  aux  recherches  des  natura- 
listes qui  ont  fait  partie  des  circumnavigations 
commandées  par  MM.  Freycinet,  Dumont- 
d'Urville  et  Duperré,  en  France,  et  par  M. 
Liitke,  pour  la  Russie.  MM.  Julien  Desjardins 
et  Théodore  Delisse  nous  ont  aussi  envoyé 
des  dessins  faits  d'après  nature;  et  des  poissons 
bien  conservés,  joints  à  ces  envois,  nous  ont 
aidés  dans  nos  recherches.  N'oublions  pas  aussi 
M.  Dussumier,  dont  nous  avons  consulté  les 
notes  avec  fruit,  et  dont  les  collections  ont 
enrichi  ce  genre  dans  le  Cabinet  du  Roi. 

Un  de  ces  poissons,  remarquable  par  l'éclat 
et  la  distribution  des  couleurs, 

a  le  corps  court,  sa  hauteur  n'étant  que  du  tiers  de 
sa  longueur,  la  caudale  non  comprise,  et  qui  n'est 
guère  que  du  septième  ou  du  huitième  du  corps. 
La    tête    est    presque    aussi    longue    que   le   tronc 


CHAP.  II.  COSSYPHES.  "IIS 

est  élevé.  L'œil  est  de  grandeur  médiocre;  son  dia- 
mètre n'a  que  le  cinquième  de  la  longueur  de  la 
tête.  Le  bord  du  préopercule  est  très-fînement  den- 
telé. Toute  la  tète  est  plus  écailleuse  que  celle  des 
autres  labres;  car  il  en  a  sur  le  limbe  du  préoper- 
cule, sur  l'interopercule,  et  sur  la  branche  de  la 
mâchoire  inférieure,  où  elles  sont  aussi  serrées  que 
sur  les  sous-opercules  et  les  opercules,  dont  le  bord 
membraneux  est  peu  large.  Le  front,  le  pourtour 
des  narines,  le  devant  de  l'œil  et  les  lèvres  seules, 
sont  nus.  Les  dents  pharyngiennes  forment  deux 
plaques  osseuses,  grenues,  encore  plus  serrées  que 
celles  du  précédent. 

La  dorsale  est  peu  élevée,  et  sa  base  est  couverte 
sous  les  écailles  du  dos,  qui  se  relèvent  de  chaque 
côté  des  rayons,  et  forment  une  sorte  de  gouttière 
profonde ,  dans  laquelle  ils  se  cachent  quand  ils 
s'abaissent.  La  portion  molle  de  la  dorsale  est  plus 
libre;  elle  est  pointue,  ainsi  que  l'anale.  Les  deux 
rayons  supérieurs  de  la  caudale  se  prolongent  un 
peu  au-delà  des  autres,  qui  sont  coupés  carrément. 
Les  ventrales  sont  longues  et  pointues. 

D.  12/10;  A.  312;  C.  13;  P.  17;  V.  1/5. 

Il  y  a  vingt-huit  rangées  d'écailles  entre  l'ouïe  et 
la  nageoire  de  la  queue.  La  partie  visible  de  l'écaillé 
est  ovalaire  et  très-finement  chagrinée  ;  la  portion 
radicale  forme  un  long  carré,  dont  la  surface  est 
presque  quadruple  du  reste;  elle  est  couverte  de  stries 
qui  rayonnent  du  centre  vers  le  bord  radical  :  ce  bord 
est  légèrement  festonné  par  la  terminaison  des  bran- 
ches de  l'éventail  ;  elles  sont  au  nombre  de  dix.  On 


116  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

compte  dix-huit  rangées  de  ces  écailles  entre  la  base 
du  dernier  rayon  épineux  de  la  dorsale  et  celle  de  la 
première  épine  de  l'anale.  La  ligne  latérale  a  peu 
d'inflexion  sous  la  fin  de  la  dorsale;  elle  se  compose 
d'une  série  de  petits  arbuscules  peu  rameux,  et  dont 
les  branches,  naissant  de  l'extrémité  du  tube  princi- 
pal, remontent  vers  le  dos.  La  tète  oflTre,  sur  un  fond 
jaune  citron,  huit  raies  longitudinales  violettes,  plus 
ou  moins  brunes:  deux  sont  sur  le  front,  au-dessus 
des  yeux;  trois  autres  partent  du  bout  du  museau, 
par  l'œil ,  et  se  terminent  sur  la  tempe ,  et  trois  autres , 
plus  pâles,  traversent  la  joue  au-dessous  de  l'œil. 

Le  jaune  de  la  tête  passe  sur  l'épaule,  se  mêle 
et  se  confond  avec  l'orangé  plus  ou  moins  rouge 
et  brillant  du  corps.  Cette  teinte  est  agréablement 
variée  par  dix  rangées  longitudinales  de  taches  ob- 
longues,  violacées  ou  rougeâtres,qui  forment  comme 
de  beaux  chanelets  sur  les  flancs.  Une  laree  tache 
noire  carrée  couvre  l'extrémité  postérieure  du  tronc 
et  la  plus  grande  partie  de  la  queue;  elle  s'étend  du 
troisième  rayon  mou  de  la  dorsale  au  huitième  de 
l'anale;  le  reste  de  la  queue  est  jaune;  la  caudale 
est  orangée  ;  les  pectorales  sont  plus  pâles  ;  la  por- 
tion épineuse  de  la  dorsale  est  rougeâtre,  un  peu 
teintée  de  verdâtre  sur  le  bord;  une  tache  noire  existe 
sur  les  trois  premières  épines;  la  portion  molle, 
ainsi  que  l'anale,  sont  olivâtres,  tachetées  de  points 
brunâtres  et  bordées  de  noir;  les  ventrales,  d'un 
beau  rouge  vineux,  ont  le  premier  rayon  noirâtre; 
l'œil  paraît  avoir  été  orangé. 

Leur  cavité  abdominale  est  petite;  le  foie  est  court, 


CHAP.    ir.    COSSYPHES.  ]]7 

divisé  et  subdivisé  ;  le  canal  intestinal  médiocre  ;  la 
vessie  aérienne  très  -  grande  et  à  parois  épaisses  et 
argentées. 

Le  squelette  a  onze  vertèbres  abdominales  et  dix- 
sept  caudales.  Les  apophyses  épineuses  des  deux 
dernières  sont  élargies  en  éventail;  les  dernières  sont 
surtout  très- épaisses  et  très-fortes.  Les  apophyses 
épineuses  inférieures,  qui  répondent  à  l'anale,  et  même 
les  interépineux  de  l'anale ,  sont  longs  et  grêles  j 
les  inlerépineux  du  dos,  de  hauteur  médiocre;  les 
antérieurs  sont  plus  forts. 

La  crête  mitoyenne  du  crâne  est  élevée  et  trian- 
gulaire; les  latérales  sont  basses;  la  fosse  moyenne 
occipitale  est  large  et  profonde,  à  cause  de  la  saillie 
du  condyle  occipital;  le  dessus  du  crâne  est  large  et 
convexe  ;  la  coulisse  pour  les  intermaxillaires  est 
courte  et  peu  profonde  ;  les  os  du  nez  sont  peu  longs , 
étroits,  sinueux  et  percés  de  nombreux  trous  nutritifs. 

Cette  description  est  rédigée  d'après  un  indi- 
vidu long  de  huit  pouces,  et  aussi  frais  que 
s'il  sortait  de  l'eau;  car  elle  est  en  tous  points 
conforme  à  celle  qui  a  été  faite  par  MM.  Quoy 
et  Gaimard,  au  moment  où  ils  ont  pris  ce 
poisson. 

M.  Dussumier  en  a  observé  à  l'Isle-de-France 
quelques  variétés.  Un  des  individus  rapportés 
par  ce  naturaliste  n'a  que  cinq  pouces  de  lon- 
gueur. Il  avait  le  corps  brun  foncé  avec  des  raies 
blanches^  el  un  cercle  rouge  autour  de  l'iris. 


118  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

La  caudale  était  blanchâtre.  Un  autre  était 
très-pâle ,  et  lui  a  offert  sur  le  frais  des  cou- 
leurs semblables  à  celles  dont  MM.  Lesson  et 
Garnot  ont  peint  leur  poisson. 

Commerson  a  donné  une  teinte  rouge  plus 
décidée  au  dos  et  au  sommet  de  la  tête;  toute 
la  partie  épineuse  de  la  dorsale  est  aussi  foncée 
que  la  portion  molle  et  que  le  tronçon  de  la 
queue.  Les  ventrales  sont  de  couleur  brune 
ou  marron. 

Cependant  le  dessin,  à  la  mine  de  plomb, 
représente  une  variété  de  cette  espèce;  car 
la  dorsale  n'a  de  taches  que  sur  les  trois  pre- 
miers rayons  épineux,  et  l'anale  a  une  bordure 
brune.  C'est  la  variété  de  MM.  Lesson  et  Gar- 
not, et  il  paraît  que  c'est  la  plus  ordinaire; 
car  je  retrouve  ces  mêmes  distributions  sur 
un  joli  dessin  que  M.  Théodore  Delisse  m'a 
communiqué.  Le  dos  y  est  peint  assez  rouge 
et  se  rapproche  de  la  couleur  de  la  figure  laissée 
par  Commerson  :  les  joues  tirent  plus  à  l'o- 
rangé. La  queue,  derrière  la  tache  noire,  est 
violette,  et  la  caudale,  d'un  rouge  orangé  pâle, 
est  tachetée  de  points  jaunâtres.  Nous  pensons 
que  la  belle  variété  de  Commerson  représente 
le  poisson  au  temps  du  frai. 

Selon  M.  Delisse,  ce  poisson  se  nomme,  à 
risle-de-France,  maldcit,  ou  maldaque  selon 
M.  J.  Desjardins. 


CHAP.   II.    COSSYPHES.  119 

Nous  nous  sommes  détermines  à  conserver 
à  l'espèce  cette  dénomination  vulgaire  ;  car  ce 
poisson  a  déjà  paru  sous  trois  noms  dans  le  genre 
des  labres  de  M.  de  Lacépède ,  et  M.  Lesson 
est  venu  lui  en  donner  un  quatrième. 

En  efFet,  M.  de  Lacépède  a  fait  de  la  figure 
coloriée  de  Commeison  son  labre  hérissé.  Une 
petite  copie,  assez  mauvaise,  est  gravée  t.  III, 
pi.  20,  fig.  1.  Les  arbuscules  de  la  ligne  latérale 
avaient  été  repoussés  au  pinceau  et  gouaches; 
l'épaisseur  du  blanc  a  fait  prendre,  sans  au- 
cun doute,  ces  traits  pour  des  épines  ou  des 
villosités  dures  et  relevées  sur  le  corps  du 
poisson  :  et  c'est  de  là  que  M.  de  Lacépède  a  tiré 
son  nom  spécifique. 

Le  dessin  au  crayon  a  été  égalerhent  copié 
et  gravé  dans  le  même  volume,  pi.  g,  fig.  3.  La 
queue  du  poisson  ayant  été  bien  étalée  par  le 
dessinateur  de  Commerson,  l'espèce  établie 
d'après  ce  document  a  reçu  le  nom  de  labre 
large  queue. 

Enfin,  M.  de  Lacépède,  prenant  la  descrip- 
tion de  Commerson,  en  fait  une  troisième 
espèce,  sous  le  nom  de  labre  à  rouges  raies. 

Il  ne  nous  a  pas  été  difficile ,  avec  les  pré- 
cieux originaux  de  ces  travaux,  de  reconnaître 
ces  doubles  ou  même  triples  emplois;  et  nous 
les  avions  déjà  signalés  en  inscrivant  ces  syno- 


120  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

nymies  sur  les  individus  de  la  collection  du 
Muséum.  Aussi  avons-nous  été  surpris  de  voir 
M.  Lesson  venir  donner,  sous  un  nom  spéci- 
fique nouveau  et  comme  du  genre  crénilabre, 
ce  poisson  déjà  bien  connu.  Il  a  été  publié, 
planche  38  des  poissons  dans  l'Atlas  de  la 
Coquille,  sous  le  nom  de  crénilabre  Chabrol. 

Mais  cette  erreur  est-elle  à  peine  commise 
et  aussitôt  publiée,  que  M.  Guérin  s'en  em- 
pare, et  donne,  sous  une  enluminure  un  peu 
rude,  une  copie  de  cette  figure  de  Lesson, 
pour  représenter  un  type  du  genre  crénilabre 
de  Cuvier.  Or,  c'est  précisément  une  de  nos 
espèces  de  cossypbe  qui  a  le  moins  de  rapport 
avec  les  crénilabres;  car  son  préopercule  est 
faiblement  dentelé;  on  en  trouve  même  des  in- 
dividus qui  ont  perdu  toutes  leurs  dentelures. 
Aussi  M.  Cuvier  avait-il  cité  le  labre  hérissé  sous 
ses  labres  *,  où  je  m'étonne  de  voir  le  labre  large 
queue  indiqué  comme  une  espèce  distincte. 

\\  faut  avouer  que  M.  Guérin  n'a  pas  été 
heureux  dans  ses  copies  sur  cette  planche  l^i 
de  son  Iconographie  du  règne  animal;  car  le 
poisson  figuré  pour  donner  l'idée  d'une  es- 
pèce de  labre,  est  du  genre  malacanthe  de 
Cuvier.  Il  la  cite  dans  la  note  de  ce  genre.* 

1.  Règne  anim.,  t.  II,  p.  266.  —  2-  Ibid.,  t.  II,  p.  a64» 


CHAP.    II.    COSSYPHES.  "121 

Rien  n'eût  été  plus  facile  cependant  que  d'éviter 
ces  erreurs. 

Le    COSSYPHE   DEUX    CROISSAIS. 

{Cossfphiis  bilu7iulatus j,noh.;  Labre  deux  croissans, 

Lacép.) 

Une  seconde  espèce,  que  les  pécheurs  de 
risle-de-France  semblent  confondre  avec  la 
précédente,  en  diffère 

par  un  corps  plus  alongé,  par  des  dénis  grenues 
plus  fortes ,  et  par  des  dentelures  encore  moins  sen- 
sibles au  bord  du  préopercule  :  elles  ne  paraissent 
qu'à  l'angle  arrondi  de  cette  pièce.  Le  limbe  du  préo- 
percule a  quelques  écailles  moins  visibles  que  dans 
l'espèce  précédente;  la  branche  de  la  mâchoire  in- 
férieure n'en  a  aucune;  celles  de  l'inieropercule  sont 
aussi  forles  et  aussi  nombreuses  que  celles  du  sous- 
opercule.  Les  granulations  de  la  portion  nue  des 
écailles  sont  beaucoup  plus  fines,  et  les  stries  de  la 
partie  cachée  ou  radicale  beaucoup  plus  grosses. 

La  couleur,  telle  que  nous  l'a  fait  connaître  M.  Des- 
jardins, est  uniforme,  d'un  rouge  tirant  au  rose  et 
devenant  orangé  sur  la  tête,  plus  vif  sur  le  dos  et 
près  de  l'anale.  Les  lèvres  sous  la  mâchoire  inférieure 
sont  jaune  citron.  Une  tache  noire  est  placée  sur  les 
lombes,  entre  la  ligne  latérale  et  la  base  des  rayons 
mous  de  la  dorsale,  sans  les  couvrir;  elle  commence 
sous  l'aplomb  du  troisième  rayon  mou  de  la  dor- 
sale, et  s'étend  jusque  vers  le  milieu  de  la  queue.  La 


1  ZÂ  LIVRE  XVI.    LABROIDES. 

caudale,  légèremenl  éclianciée,  est  orangée  ou  rou- 
geâire.  La  dorsale,  plus  haute  et  plus  libre  que  celle 
de  l'espèce  précédente,  a,  comme  elle,  une  tache  sur 
les  trois  premiers  rayons  épineux;  elle  s'étend  quel- 
quefois jusque  sur  la  sixième  épine.  Le  fond  de  sa 
couleur  et  celui  de  l'anale  est  rougeatre;  la  pectorale 
est  d'un  beau  jaune,  et  les  ventrales  tirent  au  pourpré. 
Les  nombres  des  rayons  sont  comme  chez  le  pré- 
cédent. 

D.  12/10;  A.  3/12,  etc. 

L'individu  rapporté  de  l'Isle-de-Fraiice  par 
MM.  Quoy  et  Gaimard  est  long  de  dix  pouces. 
Celui  que  nous  avons  retrouvé  parmi  les  pois- 
sons de  Commerson  est  plus  grand;  il  a  près 
de  quatorze  pouces,  et  nous  venons  d'en  re- 
cevoir un  de  la  même  taille  et  du  même 
endroit  par  M.  J.  Desjaidins.  Nous  devons 
en  adresser  a  ce  savant  zoologiste  des  lemer- 
cîmens  d'autant  plus  vils,  qu'il  a  bien  voulu 
se  dessaisir,  en  faveur  des  collections  du  Mu- 
séum, du  seul  individu  qu'il  possédait  dans 
son  cabinet;  il  l'avait  pris  à  Flacq. 

M.  Th.  Delisse  nous  a  aussi  communiqué 
un  dessin  de  la  même  espèce,  où  les  couleurs 
sont  bien  les  mêmes  que  celles  indiquées  par 
M.  J.  Des  jardins  ;  mais  on  y  trouve  un  trait 
rouge  purpurin  ou  lie  de  vin,  tracé  de  l'œil 
à  l'angle  supérieur  de  l'opercule,  une  tache 
large  oblongue,  étendue  obliquement  de  l'angle 


CHAP.  II.  COSSYPHES.  i  25 

de  la  bouche  au  bas  de  l'opercule ,  en  passant 
par  l'angle  du  prëopercule.  La  base  de  la  pec- 
torale est  brune. 

M.  Desjardins  nous  apprend,  dans  la  note 
qu'il  ajoute  à  son  poisson,  qu'on  le  confond 
avec  le  précédent  sous  le  nom  de  maldaque. 

M.  de  Lacépède  a  connu  cette  espèce  par 
le  beau  dessin  au  crayon  rouge  et  à  la  pierre 
noire ,  qu'il  avait  trouvé  dans  les  papiers  de 
Commerson.  Nous  n'avons  pas  de  description 
relative  à  ce  poisson  dans  les  manuscrits  de 
ce  voyageur.  M.  de  Lacépède  lui  a  donné  le 
nom  de  lahre  deux  -  croiss ans  {labrus  bilii- 
nulatus)^  dont  nous  avons  conservé  l'épithète 
spécifique. 

Le    GOSSYPHE    AUX    REINS    NOIRS. 

(Cossjphus  atrolumhus y  nob.) 

Nous  avons  trouvé  parmi  les  poissons  de 
Commerson  une  espèce  voisine  des  deux  pré- 
cédentes, et  qui  tient  de  l'une  et  de  l'autre. 

Elle  a  les  granulations  des  mâchoires  semblables 
à  celles  du  cossyphe  maldaque,  les  dentelures  au 
préopercule  aussi  fines  et  aussi  nombreuses.  Le  limbe 
de  cet  os  est  sans  écailles,  et  la  peau  épaisse  qui  le 
recouvre  est  percée  de  pores  fins  et  fréquens.  La 
mâchoire  inférieure,  moins  poreuse,  n'a  aucune 
écaille  j  sa  peau  est  parfaitement  lisse.  Les  écailles  de 


124  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

l'interopercule  sont  plus  larges  et  tiennent  davantage 
de  celles  des  labres  ordinaires. 

Les  couleurs  sont  uniformes  et  se  rapprochent 
davantage  du  précédent;  cependant  la  tache  brune 
des  lombes  est  autrement  placée;  elle  s'étend  depuis 
le  neuvième  rayon  épineux  de  la  dorsale,  sur  la  base 
de  tous  les  rayons  mous,  et  descend  sur  les  côtés 
en  s'affaiblissant  pour  s'effacer  auprès  de  la  ligne  la- 
térale; elle  ne  paraît  en  cet  endroit  que  par  des  traces 
de  croissans  brunâtres  sur  les  écailles.  On  voit  quel- 
ques traces  pâles  de  ces  taches  au-dessous  de  la  ligne 
latérale. 

La  couleur  générale  paraît  avoir  été  jaune  soufre. 
Il  y  avait  une  lâche  brune  sur  l'avani  de  la  dorsale. 
Les  nombres  des  rayons  sont  comme  dans  les  autres. 

•D.  12/95  A.  3/10,  etc. 

L'individu  sec  n'a  que  huit  pouces  de  lon- 
gueur. Nous  n'avons  trouve  aucun  renseigne- 
ment sur  cette  espèce  dans  les  manuscrits  de 
Commerson,  ni  dans  les  auteurs  qui  ont  lait 
mention  des  poissons  des  mers  de  l'Inde. 

Nous  avons  appris  depuis  que  cette  espèce 
est  originaire  de  l'Isle-de-France;  car  le  Ca- 
binet du  Roi  en  possède  aujourdliui  un  bel 
individu,  conservé  dans  l'esprit  de  vin,  long 
d'un  pied,  et  qui  a  été  envoyé  par  J.  Desjar- 
dins, et  M.  Dussumier  en  a  donné  un  indi- 
vidu sec,  long  de  seize  pouces  et  parfaitement 
bien  conservé. 


CHAP.    11.   COSSYPHES.  1 2S 

Nous  en  avons  connu  les  couleurs  telles 
qu'elles  sont  sur  le  poisson  frais,  par  un  beau 
dessin  que  nous  a  donné  M.  Th.  Delisse. 

Le  poisson  brille  du  plus  beau  jaune  éclatant  et 
pur  sur  la  tête,  le  ventre  et  les  nageoires,  et  deve- 
nant orangé  assez  vif  sur  le  dos.  Sous  la  septième 
épine  de  la  dorsale  commence  une  bande  verticale, 
qui  occupe  la  largeur  de  l'intervalle  de  deux  rayons, 
et  dont  la  teinte  est  rose,  devenant  très-pâle  près  de 
l'anale,  qui  est  également  rose  sur  sa  moitié  inférieure. 
On  voit  ensuite  la  tache  noire  comme  nous  l'avons 
indiquée.  Cinq  à  six  traits  longitudinaux  parallèles, 
verdàlres,  sont  tracés  sous  le  ventre,  depuis  la  cein- 
ture de  l'épaule  sous  la  pectorale;  ils  s'effacent  quand 
ils  sont  arrivés  sous  la  tache  noire  des  lombes. 

Le  dessin  représente  un  poisson  long  de 
cinq  pouces. 

Le    C0SS\PHE    PERDITION. 

{Cossjphiis  perditio;  Labre  perdition:,  Q.  G.  ) 

C'est  évidemment  auprès  de  notre  cossy- 
pJiiis  atrolunihus  qu'il  faut  placer  le  poisson 
que  MM.  Quoy  et  Gaimaid  ont  nommé  labre 
perdition. 

Ses  formes  sont  presque  entièrement  semblables; 
toutefois  le  dessin  de  ces  naturalistes  les  fait  paraître 
un  peu  plus  courts.  Les  nombres  sont  aussi  les  mêmes. 
D.  10/12;  A.  3/10;  C.  12;  P.  16;  V.  1/5. 


■126  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Sur  un  fond  jaune  brillant,  le  devant  du  dos  et 
le  dessus  de  la  tête  sont  couverts  de  rivulatlons  vio- 
lettes et  serrées.  Une  tache  triangulaire,  dont  la  base 
est  sous  le  premier  rayon  mou  de  la  dorsale,  et  le 
sommet  sur  la  ligne  latérale,  presque  à  l'extrémité 
de  la  pectorale,  se  détache  en  jaune  clair  sur  le  fond 
du  corps;  derrière  elle  une  grande  tache  violette 
brillante,  quoique  foncée,  s'étend  sous  tout  le  reste 
de  la  dorsale,  et  se  perd  sur  les  flancs  au-dessus  de 
la  ligne  latérale.  Quatre  taches  noires  se  voient  sur 
la  dorsale,  entre  les  rayons  antérieurs  de  cette  na- 
geoire, qui  est  d'une  belle  couleur  jaune  soufre. 
Les  ventrales  ont  la  même  teinte  ;  les  autres  na- 
geoires tirent  au  verdàtre. 

MM.  Quoy  et  Gaimard  n'ont  pris  qu'un 
seul  individu  de  cette  espèce;  il  était  long 
de  sept  pouces. 

Le  zèle  et  le  courage  de  ces  infatigables 
voyageurs  et  naturalistes,  ne  s'est  pas  ralenti  un 
seul  instant  pendant  toute  leur  campagne  et 
dans  quelque  position  critique  oii  rëlément 
qui  les  portait  les  avait  souvent  placés.  Ils  ont 
eu  le  courage  et  la  présence  d'esprit  de  décrire 
et  de  dessiner  ce  poisson,  le  20  Avril  182^, 
pendant  qu'ils  étaient  échoués  sur  des  récifs 
très-dangereux,  sur  le  point  de  perdre  leur 
navire,  et  entourés  d'insulaires  féroces,  qui 
attendaient  l'instant  du  naufrage  pour  se  par- 
tager les  débris  de  l'équipage.  Cette  position 


CHAP.    II.    COSSYPHES.  127 

de  l'Astrolabe  a  duré  plus  de  quatre  jours. 
Le  courage  de  leur  commandant,  Dumont 
d'Urville,  a  su  dominer  la  tempête,  sauver 
le  navire,  les  riches  et  immenses  collections 
que  ses  compagnons  de  voyage  avaient  faites, 
dont  ils  ont  enrichi  nos  musées  et  iUustré  la 
science.  MM.  Quoy  et  Gaimard,  voulant  per- 
pétuer le  souvenir  de  ces  difficiles  circons- 
tances, ont  donné  à  l'espèce  le  nom  spéci- 
fique que  nous  nous  sommes  Fait  un  devoir 
de  conserver. 

Elle  est  figurée  planche  20,  figure  4?  tle 
la  Collection  des  poissons  de  l'Astrolabe,  et 
décrite  tome  III,  page  702.  Ces  naturahstes 
ont  soin  de  dire  que  leur  dessin  ne  rend  qu'im- 
parfaitement le  brillant  et  la  variété  des  cou- 
leurs de  cette  espèce. 

Le    COSSYPHE    DIANE. 
(Cossfphus  dianOj,  nob.  ;  Labre  diane,  Lacép.) 

M.  de  Lacépède  a  trouvé  dans  les  dessins 
de  Commerson  la  figure  d'un  poisson  que 
nous  plaçons  à  côté  des  espèces  précédentes. 

Ce  labre  a  le  museau  aigu,  quatre  dents  fortes  à 
l'extrémité  des  mâchoires,  et  un  crochet  saillant  et 
dirigé  en  avant  à  l'angle  de  la  bouche,  la  dorsale 
épineuse  basse,  la  portion  molle  et  la  caudale  arron- 
dies. 


128  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Le  dessin  de  Commerson  a  été  fait  au  crayon 
rouge,  et  représente  le  poisson  de  cette  teinte  géné- 
rale, avec  une  tache  rouge  plus  foncée,  en  croissant, 
sur  chaque  écaille;  de  nombreuses  taches  noires 
éparses  entre  la  ligne  latérale  et  la  portion  molle 
de  la  dorsale  et  sur  les  côtés  de  la  queue.  On  voit 
sur  le  dos ,  au-dessus  de  la  ligne  latérale ,  trois  ta- 
ches blanches  ;  toutes  les  nageoires  sont  rouges  et 

sans  taches. 

D.  12/10;  A.  3/13,  etc. 

Nous  avons  pris  une  idée  plus  juste  de  ce 
poisson  et  de  la  beauté  de  ses  couleurs,  par 
un  dessin  colorié ,  que  nous  devons  encore 
à  M.  Th.  Delisse. 

Il  donne  au  dos,  au  ventre  et  à  la  tête  une  teinte 
rouge  de  laque  assez  foncée  et  diminuant  insensi- 
blement, pour  se  fondre  avec  l'orangé  des  côtés, 
où  chaque  écaille  est  bordée  d'un  croissant  rouge 
comme  le  dos.  Les  taches  noires  sont  disposées 
comme  sur  le  dessin  de  Commerson  ;  celles  du 
dos  sont  ici  peintes  en  jaune  brillant;  la  dorsale 
épineuse  est  couleur  de  carmin ,  et  la  portion  molle, 
ainsi  que  la  caudale,  sont  rosées;  l'anale  et  les  ven- 
trales, d'un  beau  carmin  brillant,  sont  moins  fon- 
cées que  la  dorsale;  les  pectorales  sont  jaunes,  un 
peu  teintées  d'orangé  près  de  la  base. 

M.  de  Lacépède  a  fait  graver  une  copie  très- 
exacte  du  dessin  de  Commerson  (t.  III, pi.  32, 
fig.  1  ).  Les  manuscrits  de  ce  voyageur  ne  font 
pas  mention  de  cette  espèce. 


CHAP.   II.  COSSYPHES.  129 

La  figure  du  naturaliste  compagnon  de 
Bougainville  est  longue  de  dix  pouces;  celle 
de  M.  Delisse  n'en  a  que  six  et  demi. 

Le    COSSYPHE    AMIRAL. 

{Cossjphus  mesothoraxj, noh.j  Lahriis  mesothorax , 
Bl.  Schn.) 

Les  côtes  de  l'île  de  Java  nourrissent  un 
cossyphe  remarquable  par  l'éclat  et  par  l'oppo- 
sition des  couleurs  dont  son  corps  est  peint. 

Sa  forme  générale  rappelle  celle  du  précédent. 
Le  museau  est  pointu  ;  il  y  a  quatre  canines  à  cha- 
que mâchoire,  et  dans  l'angle  de  la  supérieure  un 
crochet  assez  fort.  Le  long  de  l'os  maxillaire  on  voit 
quelques  petites  granulations  :  elles  sont  plus  visibles 
à  la  mâchoire  inférieure.  La  dorsale  épineuse  est  basse , 
la  portion  molle  arrondie;  l'anale  est  plus  haute  que  la 
dorsale  et  trapézoïde;  la  caudale  est  coupée  carrément. 
D.  12/10;  A.  3/12;  C.  13;  P.  15;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  de  grandeur  moyenne,  arrondies , 
minces,  et  n'offrent  que  de  très-fines  aspérités  gre- 
nues ou  quelques  stries  visibles  à  la  loupe.  On 
compte  vingt- six  rangées  d'écaillés  entre  l'ouïe  et  la 
caudale. 

La  ligne  latérale  est  tracée  par  le  tiers  de  la  hau- 
teur du  corps;  elle  est  continue,  non  rameuse. 

La  tête  est  rouge,  un  peu  rembrunie  sur  l'occiput 
et  sur  l'épaule.  Cette  teinte  devient  noire,  et  forme 
une  large  écharpe,  qui  se  termine  obliquement  de 


130  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

l'aisselle  de  la  pectorale  au  dernier  rayon  mou  de  la 
dorsale.  Le  reste  du  dos  et  le  dessus  de  la  queue 
sont  orangés;  les  flancs,  le  ventre  et  la  gorge  bril- 
lent d'un  beau  jaune  doré;  une  large  tache  noire  ar- 
rondie est  à  la  base  de  la  pectorale;  une  bande  noire 
oblique  va  de  l'angle  de  la  mâchoire  au  bas  de  l'oper- 
cule; la  dorsale  molle  et  la  caudale  sont  rougeâtres; 
les  pectorales  sont  plus  pales;  une  teinte  olivâtre 
est  étendue  sur  les  ventrales  et  sur  l'anale;  l'iris  de 
l'œil  est  jaune. 

Ces  couleurs  sont  décrites  d'après  un  beau 
dessin  envoyé  de  Java  par  MM.  Kuhl  et  Van 
Hasselt.  On  en  reconnaît  parfaitement  la  dis- 
tribution sur  l'individu  sec,  long  de  six  pouces, 
que  nous  conservons  dans  le  Cabinet  du  Roi. 
Ces  jeunes  et  infortunés  naturalistes,  qui 
ont  observé  ce  poisson  à  Batavia ,  l'avaient 
nommé  ci^enilahriis  elegans.  Mais  cette  esj^èce 
est  connue  depuis  long-temps  :  Bloch  la  pos- 
sédait dans  sa  collection,  et  je  l'ai  vtie  dans 
le  Cabinet  de  Berlin,  étiquetée  lahrus  meso- 
thorax.  C'est,  en  effet,  sous  ce  nom  qu'on 
la  trouve  dans  l'édition  posthume  de  Bloch, 
(p.  254 ,  n-°  5 1  ).  Cet  auteur  y  rapporte  avec  rai- 
son la  figure  de  Renard  (  n.°  1 43 ,  fol.  26  ) ,  quoi- 
que les  couleurs  ne  soient  pas  très-exactes  ;  elles 
sont  plus  vraies  dans  l'original  de  Corneille 
Vlaming,  et  cependant  un  peu  différentes  des 
nôtres.  La  tête  y  est  peinte  en  noir  comme  l'é- 


CHAP.  IL  COSSYPHES.  151 

charpe;  les  bords  du  prëopercule  et  de  l'oper- 
cule sont  verts,  une  large  tache  bleue  triangu- 
laire couvre  l'ëpaule;  l'écharpe  est  bordée  de 
jaune;  le  ventre  est  blanc;  le  dessous  de  la  gorge 
est  violet.  Nous  n'osons  pas  regarder  ces  diffé- 
rences assez  grandes  pour  croire  que  ce  dessin 
appartienne  à  une  autre  espèce. 

Vlaming  et  Renard  appellent  ce  poisson 
schout  bjjiagt,  c  est-à-dire  le  contre-amiral  ; 
Valentyn  en  parle  sous  le  même  nom  (n.°  1 26, 
p.  388),  comme  d'un  beau  poisson,  délicat, 
et  qui  devient  grand  comme  une  morue  or- 
dinaire. 

Le   COSSYPHE    AXILLAIRE. 
{Cossj'phiis  axillaris j,  noh.) 

M.  Dussumier  nous  a  rapporté  des  mers  de 
risle-de-France  unç  autre  espèce,  voisine  du 
précédent,  bien  distincte  par  ses  couleurs, 
et  qui  paraît  avoir 

le  museau  plus  aigu,  les  dentelures  inférieures  du 
bord  vertical  du  préopercule  plus  fines,  mais  plus 
régulières  et  plus  évidentes;  les  écailles  couvertes  de 
granulations  fines ,  celles  de  la  tête  les  ayant  un  peu 
plus  fortes. 

Les  écailles  qui  revêtent  le  sous-opercule ,  l'in- 
teropercule  et  même  la  branche  de  la  mâchoire  in- 
férieure, sont  plus  serrées  et  plus  grandes  que  sur  le 
labre  hérissé  et  les  espèces  voisines.  Celles  de  la  base, 


1  52  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

de  la  dorsale  et  de  l'anale,  et  surtout  celles  de  la 
portion  épineuse ,  remontent  assez  haut  sur  la  na- 
geoire. J'en  compte  trente-deux  ou  trente-trois  entre 
l'ouïe  et  la  caudale. 

La  ligne  latérale  est  très-courbée,  parallèle  au  dos; 
elle  ressemble  h  celle  du  cossyplie  maldaque.  Les 
rayons  de  la  portion  molle  de  la  dorsale  atteignent 
à  la  moitié  de  la  longueur  des  tronçons  de  la  queue, 
quand  ils  sont  couchés  sur  le  dos  de  cet  organe.  La 
caudale  est  coupée  carrément;  la  ventrale  se  prolonge 
un  peu  en  filet. 

D,  12/10  j  A.  3/12;  C.  15;  P.  15;  V.  1/5. 

La  couleur  du  corps,  conservé  dans  l'alcool,  est 
jaunâtre,  un  peu  rembrunie  sur  le  dos  et  sur  la  tête; 
mais  ce  qui  frappe  le  plus  dans  la  disposition  des 
teintes,  ce  sont  les  grosses  taches  noires,  au  nombre 
de  cinq ,  qui  sont  sur  le  corps  :  une  première  occupe 
les  trois  premiers  rayons  épineux  de  la  dorsale;  une 
seconde,  plus  large,  va  du  dernier  rayon  épineux  au 
quatrième  mou  de  celte  même*dorsale,une  plus  grande 
est  sur  l'anale,  étendue  du  bord  postérieur  de  la  troi- 
sième épine,  au  bord  antérieur  du  sixième  rayon  mou; 
une  quatrième,  plus  grande,  à  l'insertion  de  chaque 
pectorale, dessinée  même  en  arc  noir  sur  la  base  des 
rayons  de  cette  nageoire ,  colore  toute  l'aisselle.  En 
arrière  de  cette  tache  et  sous  la  nageoire  en  est  une 
autre  blanc  de  lait.  La  portion  épineuse  de  la  nageoire 
du  dos  a  un  fin  liséré  noir  ;  la  dorsale  molle,  la  cau- 
dale et  la  pectorale  n'ont  aucune  tache,  mais  on  voit 
de  gros  points  grisâtres  sur  l'anale  et  sur  la  ventrale, 
où  ils  sont  plus  nombreux  et  plus  serrés. 


CHAP.  H.  COSSYPHES.  1  55 

Nos  individus  sont  longs  de  sept  pouces. 

M.  Dussumier,  qui  les  a  rapportes,  a  décrit 
les  couleurs  sur  le  frais,  et  ses  notes  nous. 
prouvent  que 

les  taches  noires  n'ont  pas  changé  j  mais  il  indique 
la  tête,  les  opercules  et  le  dos,  depuis  le  bout  du 
museau  jusqu'au  dernier  rayon  de  la  dorsale,  d'un 
beau  brun-rouge.  Les  trois  premiers  rayons  épineux 
sont  d'un  beau  noir,  et  les  autres  sont  brun  rougeâ- 
tre  et  leur  membrane  est  rouge;  la  queue  et  le  ventre 
sont  blanc  brunâtre;  la  caudale,  de  cette  teinte,  a 
les  rayons  extérieurs  noirs;  l'anale  a  sur  im  fond 
verdâtre  clair  une  bande  longitudinale  blanc  de  lait; 
les  ventrales  sont  mouchetées  de  brun,  et  les  pecto- 
rales sont  rosées;  l'iris  de  l'œil  est  jaune. 

M.  Théodore  Delisse  nous  a  aussi  donné  un 
dessin  de  ce  poisson;  il  colore  les  pectorales 
en  jaune,  la  portion  molle  de  la  dorsale  en 
orangé,  et  le  ventre  en  rosé.  On  voit  d'ail- 
leurs que  pour  tout  le  reste  le  dessin  ressemble 
aux  observations  faites  par  M.  Dussumier,  et 
que  ces  deux  naturalistes  ont  examiné  deux 
variétés  très-voisines  l'une  de  l'autre. 

MM.  Retlitz  et  Mertens  ont  aussi  rencontré 
ce  poisson  dans  leur  voyagé,  et  ils  nous  ont 
communiqué  les  dessins  qu'ils  ont  faits  a  Ulea. 
Sur  l'un,  le  poisson  est  d'un  carmin  clair  sur 
le   dos;   les  lianes  sont   jaunes,   tachetés  de 


i  54  LIVRE  XYf.  LABROÏDES. 

rouge;  la  portion  molle  de  la  dorsale,  la  cau- 
dale et  la  pectorale,  jaunes,  avec  l'intervalle 
entre  la  base  de  leurs  rayons  rouge  clair  ou 
orangé;  et  il  n'y  a  pas  de  tache  sur  le  de- 
vant de  la  dorsale  épineuse.  Sur  l'autre,  le  dos 
a  une  teinte  carmin  remÎ3runie,  semblable  à 
celle  de  nos  dessins  faits  à  l'Isle-de-France  ; 
le  corps  est  rose,  la  caudale  orangée  et  bor- 
dée de  rouge  foncé.  Les  nombres  des  rayons 
sont  les  mêmes.  Il  est  bien  évident  que  ces 
différences  ne  peuvent  qu'indiquer  des  va- 
riétés. 

Le    ÇOSSYPHE    RUBAN. 
{Cossjphus  tCGfiiatuSj  nob. ;  Lahriis  tœniatus ,YXm\) 

Nous  plaçons  à  la  suite  de  ces  espèces  deux 
petits  poissons  de  la  mer  Rouge,  dont  l'un  a 
été  connu  par  le  voyage  de  M.  Ebrenberg. 

Il  a  le  museau  pointu,  la  lêie  entièrement  couverte 
d'écaillés,  et  la  forme  ramassée  des  espèces  précé- 
dentes ;  les  nombres  sont  un  peu  différens. 

D.  8/12;  A.  3;il;  C.  14;  p.  13;  V.  1/5. 

M.  Ehrenberg  l'a  représenté  sur  le  vivant,  et  le 
poisson  a  le  corps  noir,  orné  de  chaque  côté  de 
deux  bandes  longitudinales  bleuâtres,  l'une  passant 
au-dessus  de  l'œil  et  l'autre  au-dessous.  La  pectorale 
est  couleur  de  chair  ;  au  pied  des  quatre  premiers 


CHAP.   II.    COSSYPHES  i  35 

rayons  épineux  de  la  dorsale ,  il  y  a  sur  la  mem- 
brane une  tache  jaune. 

Ce  petit  poisson,  long  de  deux  pouces  et 
demi,  a  été  donné  à  M.  Ehrenberg  par  les 
pécheurs  de  Massuah,  sous  le  nom  de  karan. 

Le  COSSYPHE  A  QUATRE  RAIES. 

(  Cossjphus  quadrilineatus ,  nob.  ;  Lahrus  quadrili- 
neatuSj  Ruppel.) 

Une  espèce  très -voisine  de  la  précédente^ 
si  même  elle  n'en  est  pas  une  simple  variété, 
est  le  poisson  que  M.  Ruppel^  a  représenté  et 
décrit  sous  le  nom  de  labrus  quadrilineatus. 

Les  formes  sont  très-semblables,  seulement  la  dor- 
sale et  l'anale  paraissent  plus  basses  dans  celui-ci, 
et  la  caudale  un  peu  plus  concave;  les  nombres  sont 
les  mêmes. 

D.  8/12;  A.  3/11,  etc. 

M.  Ruppel  représente,  sur  un  fond  bleuâtre  ar- 
doisé, le  poisson  peint  de  deux  lignes  bleuâtres 
claires,  tracées  l'une  au-dessus,  l'autre  au-dessous  de 
l'œil.  L'intervalle  qui  les  sépare  est  noir  très-foncé, 
et  cette  bande,  élargie  sur  la  caudale,  en  colore  toute 
la  base,  et  tranche  nettement  sur  celte  nageoire  par 
un  bord  convexe  opposé  à  la  concavité  dul)ord  de 


1.  JSeue    IVirbelthiere  zu    Faun.    Abjss.  ,    Wie   Lief.  ,   S.   Ç>  , 
Taf.i,Fig.y, 


156  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

la  membrane  et  des  rayons.  Les  pectorales  et  les 
autres  nageoires  sont  bleuâtres.  Les  taches  jaunes 
existent  sur  la  partie  antérieure  de  la  dorsale,  mais 
la  portion  molle  de  cette  nageoire  et  celle  de  l'anale 
ont  du  noir  à  leur  extrémité  et  sont  bordées  de  blan- 
châtre. 

Ce  petit  poisson  ne  dépasse  pas  deux  pou- 
ces et  demi.  Il  a  été  observé  sur  les  côtes  cor- 
ralligènes  de  Massuab. 

Le    COSSYPHE    PARTAGÉ. 

(Cossyphus  dimidiatiis ,  nob. ;  Lahriis  latovittatus :, 
Rappel.  ) 

M.  Ruppel  a  encore  une  espèce  du  même 
genre  et  voisine  de  la  précédente,  représentée' 
sous  le  nom  de  lahrus  latovittatus. 

En  effet,  les  formes  générales  sont  semblables, 
mais  le  corps  est  plus  alongé;  d'ailleurs,  toutes  les 
parties  de  la  tête  sont  de  même  garnies  d'écaillés. 
Les  nombres  sont  un  peu  différens: 

D.  9/11;  A.  3/10;  C.  15;  P.  13  ;  V.  1/5; 
et  les  couleurs  rendent  encore  la  distinction  des 
deux  espèces  plus  facile.  Une  large  raie  longitudinale, 
d'un  noir  très-profond,  part  du  bout  du  museau, 
traverse  l'œil,  et  par  conséquent  toute  la  tête,  et  se 
rend, .sans  interruption  et  en  s'élargissant ,  jusqu'à 
l'extrémité  de  la  caudale ,  qui  n'a  plus  que  ses  deux 

1.  Neue  JVirbelthiere  zu  Faun.  Jbjss.,  Wie  Lie/.,  S.  7, 
Taf.  2,  Flg.  2. 


CHAP.   II.    COSSYPHES.  437 

bords  d'une  couleur  ditrérente.  La  moitié  antérieure 
du  corps  est  d'un  brun  châtain,  un  peu  plus  foncé 
sur  le  dos  que  sur  le  ventre.  Cette  teinte  est  étendue 
sur  toute  la  portion  épineuse  de  la  dorsale,  et  sur 
toute  la  partie  de  même  hauteur  de  la  nageoire 
molle  ;  le  reste  de  la  membrane ,  qui  dépasse  la 
hauteur  des  rayons  épineux,  est  bleu  céleste.  L'a- 
nale a  de  même  la  base  des  rayons  brune ,  comme 
la  dorsale,  et  la  moitié  marginale  bleue.  Cette  cou- 
leur est  celle  du  corps  entre  l'anale  et  la  portion 
molle  de  la  dorsale,  du  tronçon  de  la  queue  et  des 
bords  supérieur  et  inférieur  de  la  caudale.  Ce  bleu 
est  fondu  d'une  manière  insensible  avec  le  brun  de 
la  partie  antérieure  du  tronc.  Le  bord  inférieur  de 
la  queue,  compris  entre  l'anale  et  la  caudale,  est  noir, 
aussi  foncé  que  la  bande  latérale. 

M.  Ruppel  n'a  trouvé  qu'un  seul  individu 
de  cette  espèce ,  long  de  deux  pouces  trois 
quarts,  près  de  Tor,  entre  les  coraux. 

J'ai  dû  changer  le  nom  spécifique  de  ce 
poisson;  car,  si  la  description  et  la  figure  du 
célèbre  voyageur  de  Francfort  sont  pleines 
de  justesse  et  de  vérité,  il  n'en  est  pas  de  même 
de  sa  synonymie.  J'ai  peine  à  comprendre 
comment  un  observateur  aussi  exact  que 
M.  Ruppel  a  pu  persister  dans  la  croyance, 
que  le  petit  poisson  qu'il  avait  sous  les  yeux 
était  de  la  même  espèce  que  le  lahre  large 
raie   de  Lacépède,  ou,  ce   qui  revient    au 


158  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

même,  que  le  malacanthe  tubleu  de  Flsle-de- 
France.  M.  Guvier  a  parfaitement  déterminé  et 
le  genre  et  l'espèce  de  ce  poisson  curieux,  fort 
beau,  qui  atteint  à  peu  près  dix-huit  pouces, 
et  que  Commerson  a  si  bien  fait  connaître  par 
le  dessin  qui  a  servi  à  M.  de  Lacépède  pour 
établir  son  labre  large  raie.  Outre  la  diffé- 
rence générique ,  si  bien  exprimée  dans  la 
gravure  de  Lacépède ,  de  n'avoir  que  deux 
rayons  grêles  et  simples,  et  non  pas  neuf 
épines  dorsales,  les  couleurs  ne  sont  pas  dis- 
posées à  permettre  l'identité  de  cette  figure 
avec  celle  de  M.  Piuppel,  car  la  ligne  noire  de 
ce  labre  large  raie  ne  passe  pas  sur  la  tête  :  elle 
se  rétrécit  plutôt  sur  l'arrière  du  corps,  qu'elle 
ne  s'y  élargit.  Il  était  aisé  à  M.  Piuppel  de  se 
faire  une  idée  juste  du  tubleu  de  Flsle-de- 
France,  en  consultant  Texcellente  figure  co- 
loriée, que  MM.  Quoy  et  Gâimard  en  ont 
donnée  dans  l'Astrolabe  (pi.  20,  fîg.  3). 

Je  ne  crois  pas  non  plus  que  le  parallys 
de  Renard,  cité,  quoique  avec  doute,  le  soit 
convenablement  ;  car  c'est  un  poisson  d'un 
genre  différent  de  celui  de  M.  Ruppel  et  du 
labre  large  raie.  Il  était  encore  facile  de  s'en 
faire  une  idée  claire ,  qui  eut  évité  ces  rap- 
prochemens  erronnés,  en  consultant  la  figure  4 
de  la  planche  19  de  l'Astrolabe. 


CHAP.    H.    COSSYPHES.  159 

Le    COSSYPHE    MAILLÉ. 

{Cossjphus  reticulqtus 3  iiob.) 

# 

Nous  trouvons  encore  parmi  les  poissons 
rapportés  du  Japon  par  M.  LangsdorfF,  et 
étudies  par  moi   au  Cabinet  de  Berlin , 

une  espèce  à  corps  oblong,  dont  la  tête  a  un  peu  plus 
que  le  quart  de  la  longueur  totale;  ayant  quatre  dents 
canines  très-fortes  à  l'extrémité  de  chaque  mâchoire, 
les  mitoyennes  plus  petites;  les  dents  insérées  sur  le 
bord  externe  des  branches  petites,  obtuses,  courtes, 
sans  dents  récurrentes  à  l'angle  de  la  bouche.  La  mâ- 
choire est  épaissie  en  un  bourrelet  osseux  assez  con- 
vexe, et  derrière  lui  sont  des  petites  dents  grenues  sur 
plusieurs  rangs,  surtout  nombreuses  à  la  mâchoire 
supérieure.  La  joue  est  couverte  de  petites  écailles;  le 
limbe  du  préopercule  est  nu,  sans  dentelures;  l'oper- 
cule et  l'interopercule  sont  écailleux  ;  la  base  des  épines 
de  la  dorsale  est  aussi  recouverte  par  les  grandes  écailles 
du  dos;  mais  les  rayons  mous  sont  plus  dégagés,  ainsi 
que  l'anale.  Ces  deux  nageoires  et  la  caudale  sont  ar- 
rondies. Les  nombres  sont  ceux  de  nos  cossyphes. 

D.  12/10;  A.  8/12;  C.  16;  P.  18;  V.  1/5. 

La  ligne  latérale  est  tracée  par  le  tiers  de  la  hau- 
teur du  corps,  composée  de  tubulures  formant  une 
série  interrompue  ,  et  dont  l'extrémité  postérieure 
s€  relève  vers  le  dos.  Je  compte  quarante -huit  ran- 
gées d'écaillés  entre  l'ouïe  et  la  caudale;  elles  sont 
lisses  et  peu  épaisses. 


140  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

La  couleur  paraît  jaunâtre  et  était  probablement 
rougeâtre,  avec  des  taches  de  rouille  en  croissant, 
étroites,  verticales,  sur  chaque  écaille,  et  dont  la 
convexité  paraît  tournée  du  côté  de  la  tête  ;  ils  for- 
ment un  réseau  à  mailles  serrées  sur  tout  le  corps 
du  poisson.  Sur  le  ventre  et  surtout  au-dessus  de 
l'anale  on  voit  huit  à  neuf  traits  jaunâtres  longitu- 
dinaux et  parallèles.  Les  nageoires  sont  brunes,  assez 
foncées.  L'individu  est  long  d'un  pied. 

Cette  espèce  tient  à  ce  genre  par  ses  dents, 
ses  écailles  de  la  base  de  la  dorsale,  les  nombres 
de  ses  rayons;  et  paraît  même  se  rapprocher 
des  maldaqaes  de  l'Isle-de-France  {^cossyplius 
maldat  o\x  cossjphus  atroluiiihus^  \  mais  sa 
forme  alongëe,  la  liberté  de  la  partie  molle 
de  ses  nageoires  du  dos  et  de  l'anus,  lui  don- 
nent aussi  quelques  affinités  avec  nos  labres. 

Le    COSSYPHE   AUX   PETITES   ÉCAILLES. 

(  Cossjphus  viicrolepidotuSj  nob.  ) 

Nous  croyons  devoir  placer  à  côté  de  ce 
cossyphe  du  Japon,  une  espèce  que  Bloch  a 
figurée  (pi.  292)  sous  le  nom  de  labrus  mi- 
crolepidotus. 

C'est  un  poisson  de  forme  alongée,  semblable  à 
celui  que  nous  venons  de  décrire ,  ayant  toute  la 
joue,  et  même  le  limbe  du  préopercule,  couvert 
d'écaillés  :  celles  du  corps  sont  de  grandeur  mé- 
diocre. La  dorsale  et  l'anale  sont  à  la  vérité  toutes 


CHAP.   II.    COSSYPHES.  141 

dégagées;  elles  sont  coupées  carrément.  La  caudale 
est  arrondie. 

D.  17/13;  A.  3/10;  C.  18;  P.  12;  V.  1/5. 
Bloch  le  peint,  mais  probablement  de  fantaisie, 
de  couleur  jaune   verdàlre,  rembrunie  sur  le  dos, 
et  avec  la  dorsale  et  l'anale  brunâtres;  les  autres  na- 
geoires sont  transparentes. 

Nous  ne  pouvons  avoir  que  des  doutes  stir 
cette  espèce,  que  Bloch  n'a  connue  que  par 
le  dessin  qu'un  peintre  en  avait  fait  au  cabinet 
de  M.  Lincke,  à  Leipzig,  et  dont  on  igno- 
rait la  patrie. 

Son  affinité  avec  la  précédente  m'a  déter- 
miné à  lui  assigner  cette  place. 

Le    COSSYPHE  A  RUBAN  NACRÉ. 

{Cossjphus  aïbo-tœniatus,  nob.) 

J'avais,  dans  le  recueil  des  dessins  manus- 
crits que  nous  avons  pris  tant  de  soins  à  réunir, 
une  figure  de  poisson  faite  aux  îles  Sandwich, 
peu  arrêtée,  sans  aucunes  notes,  et  que  j'avais 
considérée  comme  une  variété  de  notre  cos- 
sjplius  atrollunhus ^  mais  au  moment  de  livrer 
cette  feuille  à  l'impression,  j'ai  trouvé  dans  les 
belles  collections  que  MM.  Eydoux  et  Sou- 
leyet  ont  faites  avec  un  zèle  et  une  activité 
si  dignes  de  la  reconnaissance  des  naturalistes, 
deux  individus  de  ce  même  cossyphe,  qui 


142  LIVRE  XVI.    LARROÏDES. 

nous  démontrent  que  le  dessin  peu  fini  de 
MM.  Quoy  et  Gaimard  représente  une  nou- 
velle espèce  de  cossyphe. 

Elle  ressemble  pour  la  forme  générale  à  notre 
cossyphus  atrolumbus ;  sa  lête  fait  le  tiers  de  la  lon- 
gueur du  corps,  la  caudale  non  comprise,  et  qui 
entre  pour  un  sixième  dans  cette  mesure  générale; 
les  deux  màclioires  sont  égales,  armées  sur  le  devant 
de  quatre  canines  crochues;  les  dents  qui  suivent 
sont  coniques ,  mais  peu  longues;  il  y  a  dans  l'angle 
un  crochet  recourbé  en  avant,  mais  qui  ne  dépasse 
pas  la  lèvre;  la  bande  des  granulations  est  assez 
large. 

Le  préopercule  est  très-finement  dentelé,  couvert 
de  petites  écailles,  sans  limbe  nu;  le  bord  membra- 
neux de  l'opercule  est  assez  large;  les  écailles  im- 
briquées sur  l'os  et  sur  le  sous-opercule ,  sous  les- 
quelles il  se  confond  avec  le  supérieur,  sont  larges; 
j'en  vois  aussi  sur  l'interopercule.  La  ligne  latérale 
est  faiblement  rameuse,  arquée  jusqu'à  la  fin  du 
corps  parallèlement  au  dos. 

La  dorsale  est  presque  entièrement  couverte  d'écail- 
lés; sa  portion  molle  est  arrondie,  ainsi  que  l'anale. 
La  caudale  est  concave,  sans  donner  de  prolonge- 
ment de  ses  angles  supérieur  et  inférieur.  La  pecto- 
rale est  aussi  plus  courte  et  plus  arrondie.  Les  ven- 
trales se  terminent  en  filets.  Je  compte  trente  écailles 
entre  r0)p.ie  et  la  nageoire  de  la  queue. 

D.    12/10;   A.  3/i-2;   C.  14;  P.  H;  V.  1/5. 

Ce  cossyphe  a ,  comme  notre  cossyphus  atrohim- 


CHAP.  II.  COSSYPHES.  145 

bus^  une  lâche  noire  sur  le  dos  de  la  queue,  et  qui 
s'avance  jusque  sur  les  cinq  derniers  rayons  mous 
de  la  dorsale;  une  autre  tache  noire,  sur  la  mem- 
brane, unit  les  trois  premières  épines  de  la  dor- 
sale; elle  est  plus  marquée  entre  la  seconde  et  la 
troisième.  Sur  un  fond  qui  paraît  avoir  été  rouge, 
le  corps  est  rayé  de  vingt  et  une  lignes  brunes,  dont 
sept  sont  au-dessus  de  la  ligne  latérale. 

La  tête  a  au-dessous  de  l'œil  un  large  ruban  nacré 
qui  s'étend  jusqu'au  lobe  membraneux  de  l'opercule. 
Quatre  raies  brunes  sont  entre  les  yeux ,  et  au  tra- 
vers de  l'œil  est  un  large  ruban  brun.  Le  ruban  na- 
cré est  liséré  en  dessous  d'un  Irait  brun,  et  un  autre, 
de  pareille  nuance,  va  obliquement,  de  l'angle  de  la 
bouche ,  au  bas  de  l'interopercule.  Tout  le  dessous 
de  la  gorge  est  tacheté  de  brun  sur  un  fond  blanc 
plus  ou  moins  nacré.  La  dorsale,  l'anale  et  la  cau- 
dale, sont  d'un  beau  jaune  citron;  la  nageoire  de 
l'anale  a  un  fin>.  liséré  noir  ;  les  pectorales  étaient 
probablement  rougeâtres,  la  ventrale  jaune,  bordée 
en  avant  de  noirâtre. 

Les  deux  individus  de  ce  cossyphe ,  rap- 
portés de  Sandwich ,  ont  sept  pouces  de  long. 

Le  Cossyphe  de  Schoenlein. 
{Cossjphus  Schœnleinii ,  Agassiz.) 

Enfin,  je  puis  encore  ajouter  à  ce  genre  une 
superbe  espèce,  que  je  dois  à  la  complaisance 
de   mon  célèbre  ami,  M.  Agassiz.  Il  tient  ce 


i44  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

poisson  des  Célèbes,  et  il  a  bien  voulu  m'en 
communiquer  une  ligure  coloriée,  d'après  la- 
quelle je  donnerai  la  description  suivante. 

Ce  cossyphe  ressemble  assez,  pour  la  force  de  ses 
dents  et  la  forme  trapue  de  son  corps,  à  notre  cos- 
syphus  atrohinibus.  Il  a  cependant  le  museau  encore 
plus  obtus  j  la  hauteur  du  corps  fait  le  tiers  de  sa 
longueur  totale;  la  tête  est  contenue  le  môme  nom- 
bre de  fois  dans  celle  du  tronc,  la  caudale  exceptée, 
laquelle  est  courte  et  comprise  huit  fois  et  demie  dans 
la  longueur  totale.  La  ligne  du  profil  descend  presque 
verticalement  ;  l'œil  est  médiocre  et  situé  au  haut 
de  la  joue,  à  distance  du  bord  du  front.  La  joue, 
l'opercule,  le  sous-opercule  et  l'interopercule  ont  des 
écailles;  mais  je  n'en  vois  pas  sur  le  limbe  du  pré- 
opercule. La  dorsale  est  basse;  la  pectorale  est  grande; 
la  caudale  a  le  bord  convexe. 

D.  13/7  ;  A.  3/9;  C.  14;  P.  15;  V.  1/5. 

Les  écailles  du  tronc  sont  grandes,  fortes,  amin- 
cies au  bord  et  linéolées;  j'en  trouve  trente  entre 
l'ouïe  et  la  caudale,  trois  seulement  au-dessus  de  la 
ligne  latérale ,  dix  au-dessous. 

Cette  ligne  latérale  offre  un  caractère  que  je  n'ai  en- 
core observé  que  dans  les  scares,  c'est  d'être  rameuse 
et  subdivisée  en  nombreuses  branches  sur  les  écailles 
antérieures;  le  nombre  des  divisions  diminue  à  me- 
sure que  l'on  approche  de  la  queue,  de  telle  sorte 
que  sous  les  derniers  rayons  de  la  dorsale  la  ligne 
latérale  n'est  plus  composée,  comme  à  l'ordinaire, 
que  de  simples  tubulures  droites. 


CHAP.  II.   COSSYPHES.  145 

La  couleur  paraît  avoir  été  uniforme,  et  brune, 
lavée  de  jaune  avec  quelques  traits  verticaux  plus 
foncés  sur  les  écailles.  Les  nageoires ,  plus  jaunes,  ont 
des  taches  brunes. 

M.  Agassîz,  en  recevant  ce  poisson  parmi 
ceux  collectes  aux  Gélèbes  par  M.  le  D/Bessel, 
de  Berne,  qui  est  mort  malheureusement  dans 
son  voyage ,  a  cru  devoir  dédier  cette  belle 
espèce,  nouvelle  dans  la  famille  deslabroïdes, 
à  M.  le  D/  Schœnlein ,  de  Zurich ,  un  des  plus 
célèbres  médecins  de  l'Allemagne  ;  je  me  suis 
empressé  de  m'associer  aux  sentimens  du 
savant  professeur  de  Neufchâtel. 


o 


lô.  10 


146  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

CHAPITRE  III. 
Des    Crénilabres. 

M.  Guvier ,  en  établissant  le  genre  des  cré- 
nilabres sur  les  nombreuses  espèces  de  la- 
broïdes  delà  Méditerranée  à  préopercule  den- 
telé, avait  formé  un  groupe  de  poissons  qui 
se  distinguait  des  labres  de  nos  côtes,  mais 
qui  n'offrait  plus  des  caractères  assez  précis 
et  assez  tranchés  de  ceux  des  espèces  étran- 
gères ,  réunis  encore  par  l'illustre  auteur  du 
Règne  animal  dans  le  genre  des  labres.  J'ai  cher- 
ché à  remédier  à  cet  inconvénient,  et  j'ai  été 
assez  heureux  pour  en  trouver  le  moyen  dans 
l'observation  que  j'ai  faite  sur  la  différence  des 
dents  qui  m'ont  servi  à  caractériser  le  genre 
cossyphe,  dont  je  viens  de  faire  connaître  les 
espèces. 

Ces  recherches  ont  dû  me  faire  changer  un 
peu  la  méthode  que  M.  Cuvier  avait  tracée 
pour  ses  labroïdes ,  et  m'a  fait  rapprocher  les 
crénilabres  des  labres,  et  surtout  des  cossy- 
phes,  avec  lesquels  ces  espèces  ont  les  plus 
grandes  affinités.  On  voit  en  effet  qu'elles 
tiennent  des  deux  genres.  Les  crénilabres 
seront  pour  moi  les  labroïdes  a  préopercule 
dentelé,  à  lèvres  épaisses  et  charnues,  à  dents 


CHAP.   m.    CRÉNILABRES.  147 

coniques  sur  un  seul  rang  à  chaque  mâchoire, 
à  dorsale  épineuse  libre  et  sans  écailles,  à  ligne 
latérale  non  interrompue.  Ils  différeront  des 
cossyphes  par  l'absence  de  dents  grenues  sur 
les  mâchoires ,  et  par  le  manque  d'écaillés  sur 
la  dorsale  et  l'anale. 

J'ai  signalé  le  caractère  de  la  ligne  latérale 
non  interrompue,  parce  qu'il  rattache  aussi, 
selon  moi,  les  crénilabres  aux  labres,  et  qu'il 
les  éloigne  des  chromis ,  des  cicliles  et  des 
autres  genres  a  ligne  latérale  divisée,  comme 
les  cheilines.  Ces  crénilabres  forment  un  des 
genres  les  plus  difficiles  à  étudier,  à  décrire, 
et  dont  on  connaît  un  assez  grand  nombre 
d'espèces,  pour  la  plupart  encore  mal  détermi- 
nées. La  monographie  que  j'en  publie  aujour- 
d'hui en  fait  connaître  un  plus  grand  nombre 
que  les  auteurs  qui  m'ont  précédé.  Ce  sont 
surtout  les  naturalistes  qui  écriront  sur  les  pois- 
sons de  la  Méditerranée,  qui  devront  corriger 
et  améliorer  cette  lacune  dans  notre  Ichthyo- 
logie.  Je  dois  dire  que  les  ouvrages  de  M.  Risso 
n'ont  pas  du  tout  éclairé  cette  famille ,  et 
n'ont  pu  me  servir  de  guide  assuré.  Le  prince 
Ch.  Bonaparte  n'en  a  pas  encore  parlé  dans  sa 
Faune  d'Italie;  mais  comme  il  a  bien  voulu 
me  communiquer  les  différentes  espèces  qu'il 
en  avait  rassemblées,  pour  préparer  le  travail 


1  48  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

que  nous  attendions  de  lui  avec  impatience, 
je  crois  que  le  mien  offrira  encore  aux  natu- 
ralistes des  documens  neufs  et  précieux. 

Je  viens  de  parler  des  espèces  de  la  Médi- 
terranée, parce  qu'en  effet,  c'est  dans  cette 
mer  que  ces  poissons  abondent.  Nous  en  avons 
moins  dans  notre  océan  du  Nord,  et  je  n'en 
connais  encore  qu'un  petit  nombre,  probable- 
ment originaire  des  mers  étrangères,  mais  dont 
je  ne  puis  désigner  avec  exactitude  la  patrie. 
On  voit  donc  que  les  crénilabres,  comme  les 
labres,  sont  des  poissons  de  nos  zones  tempé- 
rées, et  les  seuls  représentans  nombreux  des 
autres  labroïdes,  qui  vivent  pour  la  plupart 
dans  les  mers  des  climats  intertropicaux. 

Bloch  en  avait  placé  quelques  espèces  dans 
son  genre  des  lutjans,  et  avait  été  en  cela  suivi 
par  Lacépède;  mais  on  a  déjà  vu  pourquoi 
nous  nous  sommes  décidé  à  supprimer  cette 
dénomination  de  lut j  an  y  appliquée  à  ce  genre 
formé  contre  les  principes  de  la  méthode  na- 
turelle. M.  Risso  avait  aussi  suivi  ces  erremens 
dans  la  première  édition  de  son  Ichtliyologie 
de  Nice ,  mais  il  s'est  corrigé  dans  la  seconde , 
en  adoptant  la  nomenclature  et  la  méthode  du 
Bègne  animal. 

Les  caractères  que  j'ai  donnés  plus  liant,  nous 
feront  encore  réformer  le  genre  des  crénilabres 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  149 

de  M.  Cuvier;  car  il  y  laissait  des  espèces  qui 
ont  derrière  leur  rangée  de  dents  coniques , 
un  second  rang  de  dents,  avec  plus  de  trois 
rayons  épineux  à  l'anale ,  tel  que  son  crenila- 
hrus  exoletus  [lahriis  exoletus  Lin.)  j  et  d'autres 
qui  ont  une  bande  de  dents  en  velours,  le  cre- 
nilabrus  cornubiiis y  me  paraissent  devoir  être 
séparés  du  groupe  auquel  je  réserve  le  nom 
de  crénilahre. 

Le    CrÉNI LABRE    PAON. 

{Crenilahriis  pa^o,  nob.;  Pavo,  Salv.;  Lahriis  pavOy 
Brùnn. ,  mais  non  Linné.  ) 

Salviani  a  appliqué  à  ce  brillant  labroïde, 
si  fréquent  sur  les  marchés  de  Rome,  le  nom 
de  pavo  f  qu'il  a  emprunté  de  passages  de 
Philostrate  et  d'Isidore,  où  sous  ce  même  nom 
sont  désignés  des  poissons  non  moins  différens 
par  l'espèce  que  par  leur  séjour,  puisque  c'est 
dans  les  eaux  douces  du  Phase  que  Philostrate 
les  fait  vivre. 

Le  vert  mêlé  de  rouge  et  de  jaune,  dont  le 
crénilabre  de  la  Méditerranée  est  paré,  justi- 
fie bien  mieux  le  nom  vulgaire  de  papagello 
(perroquet),  sous  lequel,  suivant  Salviani, 
notre  poisson  est  désigné  à  Rome.  Mais  ce  que 
nous  devons  nous  hâter  de  dire,  c'est  que  la 
figure  de  cet  auteur  est  une  des  meilleures 


i50  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

de  son  livre,  et  certainemeiit  la  plus  belle  et 
la  plus  fidèle  représentation  de  notre  espèce, 
et  que  cependant  les  naturalistes  nomencla- 
teurs  ont  peu  profité  de  ce  document  pour 
en  fixer  les  caractères. 

Aldrôvande  *  a  reproduit  la  figure  du  natu- 
raliste romain,  en  même  temps  que  d'autres, 
moins  bonnes,  prises  de  Rondelet  ou  de  Bé- 
lon;  mais  il  en  a  donné  aussi  une  qui  lui 
est  propre  et  qui  est  préférable  à  celles  de 
ces  deux  auteurs,  mais  inférieure  à  celle  de 
Salviani.  On  ne  peut  en  effet  douter  que  sous 
son  turdiis  secundus^  il  n'ait  eu  l'intention  de 
représenter  notre  espèce.  Je  ne  vois  pas  ce- 
pendant que  les  nomenclateurs  aient  reconnu 
et  cité  cette  figure  d'Aldrovande. 

Toute  mauvaise  qu'est  la  représentation 
donnée  par  Bélon,  je  crois  encore  que  c'est 
à  notre  crénilabre  qu'il  faut  rapporter  la  fi- 
gure (p.  160)  à  laquelle  il  a  imposé  les  noms 
de  jc/jcAa  ou  de  turdus.  La  tache  qui  est  au- 
devant  de  l'œil,  les  séries  de  points  le  long  des 
flancs  et  ceux  des  nageoires,  me  confirment 
dans  cette  opinion. 

Je  rapporte  ces  détails,  parce  que  je  ne  puis 


1.  Aldrôvande,  De  pisc- ,  fol.  29. 

2.  Ibid.,  p.  17. 


CHAP.   III.    CRÉNILABRES.  1S1 

admettre  avec  lui  que  ce  soit  le  phjcis  des  an- 
ciens, auquel  Ovide  *  fait  allusion  dans  ce  vers  : 
jétaue  ai^ium  diilces  iiidos  imitata  sub  undis. 

Bëlon  rappelle  ensuite  la  tradition  qui  s'y 
rattache,  que  c'est  le  seul  poisson  qui  se 
construise  un  nid  composé  d'algues  marines, 
et  où  il  dépose  ses  œufs.  Comme  les  auteurs 
modernes  parlent  tous  de  la  manière  de  frayer 
de  notre  crénilabre,  et  que  nous  ne  trouvons 
rien  qui  puisse  faire  croire  à  l'habitude  de 
construire  un  nid,  attribuée  ainsi  par  Bélon 
à  ce  poisson ,  nous  restons  dans  l'opinion  que 
nous  avons  émise  dans  l'histoire  des  gobies^, 
que  c'est  dans  une  espèce  de  ce  dernier  genre 
qu'il  faut  chercher  le  phjcis. 

Rondelet,  qui  nous  fait  ordinairement  con- 
naître si  bien  les  poissons  de  la  Méditerranée, 
nous  laisse  dans  la  même  incertitude.  Les  fi- 
gures de  ses  deux  premiers  lourds^  me  sem- 
blent représenter  des  variétés  de  notre  espèce. 
Je  la  reconnais  à  son  museau  garni  de  lèvres 
épaisses ,  à  sa  tache  noire  au-dessus  de  la  pec- 
torale, qu'il  dit  être  d'un  beau  jaune  doré, 
et  enfin  à  ce  qu'il  regarde  son  poisson  comme 


1.  Ovide, //«//(£«/.,  vers  12  2. 

2.  Cuv.  Val.,  Hisl.  nat.  des  polss.,  l.  XII,  p.  7. 
S.  Rondelel .  De  pisc.y  1.  4}  c.  6,  p.  17^  et  175. 


1  52  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

le  pa^^o  ou  le  merlo  de  Rome ,  ou  le  roqueau 
de  Marseille. 

Ce  qu'il  ajoute  dans  son  texte  des  couleurs 
et  de  certaines  parties  caractéristiques,  comme 
de  teinte  jaune  des  pectorales,  semble  égale- 
ment justifier  ce  rapprochement. 

On  ne  sera  point  étonné  de  retrouver  plu- 
sieurs fois  dans  ce  même  ouvrage  le  poisson 
dont  nous  parlons,  quand  on  a  observé  les 
variétés  si  différentes  sous  lesquelles  on  le 
rencontre.  Quant  aux  déterminations  ou  aux 
synonymes  grecs  ou  latins,  j'ai  déjà  dit,  page 
ig,  combien  il  est  difficile  de  les  appliquer 
avec  quelque  certitude. 

Gesner  ne  nous  a  laissé  aucun  document 
original. 

Willugliby*  a  reproduit,  dans  une  copie 
élégante  et  fort  exacte,  la  figure  de  Salviani; 
mais  nous  avons  déjà  vu  que  cet  auteur  a  pris, 
avec  doute,  ce  pai^o  pour  un  synonyme  de 
son  tiirdus  perbelle  pictus,  qui  est  évidem- 
ment une  description  fort  bonne  du  lahrus 
mixtus. 

En  même  temps  il  a  donné  une  description 
non  moins  exacte  du  poisson  qui  nous  occupe 
en  ce  moment,  au  §.  i.%  ch.  24?  p.  3 19, de  ses 
turcli  minores. 

1.  Willughbj,  De  pisc,  tab.  X,  5. 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  155 

Il  est  impossible  de  se  mëprendie  un  seul 
instant  à  la  description  de  son  turdus  vulgatis- 
simus  tinca  marina  Fenetis.ie  dois  me  hâter 
de  dire  que  je  n'ajoute  pas  une  très-grande  foi 
à  toute  la  synonymie  vulgaire  qui  y  est  annexée  ; 
car  je  ne  vois  pas  dans  l'article  de  Willughby, 
qui  a  décrit  beaucoup  de  poissons  de  la  Médi- 
terranée d'après  nature,  que  celui  dont  nous 
traitons  ici  soit  des  côtes  d'Angleterre. 

Artedi,  qui  a  plus  travaillé  sur  les  matériaux 
de  Willughby  que  sur  la  nature,  a  fait  une  si 
grande  suite  de  confusions  dans  tous  les  rappro- 
chemens  de  cette  nomenclature,  qu'il  est  im- 
possible d'appliquer  ses  descriptions  à  telles 
ou  telles  espèces.  En  effet,  son  sixième  labre 
serait,  par  les  citations  de  Salviani,  notre  cré- 
nilabre;  mais  comme  il  ajoute  à  ses  synony- 
mes le  turdus  perhelle  pictus  de  Willughby, 
il  fait  de  son  espèce  un  être  complexe  et  ima- 
ginaire ,  que  les  associations  de  Linné  ont 
encore  rendu  plus  confus. 

En  même  temps  Artedi  qui  prenait  d'a- 
bord, pour  sa  première  espèce,  la  très-bonne 
description  que  nous  venons  de  citer  de 
Willughby,  gâte  tout  de  nouveau  dans  sa 
synonymie;  car  à  sa  neuvième  espèce  il  asso- 
cie le  douzième  tourd  de  Rondelet,  qui  est 
indéchiffrable ,  mais   certainement  poinl  de 


454  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

notre  espèce.  Ce  premier  labre  du  genre  est 
devenu  avec  le  neuvième  de  la  synonymie  le 
labrus  tinca  de  Linnë  (i  ?,.^  èdit.).  Il  me  semble 
donc  que  l'on  pourrait  regarder  le  lahrus  tinca 
comme  étant  en  quelque  sorte ,  par  la  première 
pensée  d'Artedi,  le  nom  qui  doit  être  attri- 
bue à  l'espèce  décrite  dans  ce  chapitre. 

Je  viens  de  dire  que  Linné  avait  ajouté 
encore  aux  fautes  d'Artedi  relativement  au 
sixième  labre  de  sa  synonymie ,  être  déjà  com- 
plexe. En  effet,  Tillustre  auteur  du  Sjstenia 
naturœ  a  pris  cet  être,  déjà  rendu  imaginaire 
par  Artedi,  pour  en  faire  son  lahrus  pavo, 
en  y  ajoutant  celui  qu'Hasselquist  décrit  avec 
la  plus  grande  exactitude  sous  ce  même  nom. 
Or,  ce  lahrus  pavo  est  une  de  nos  girelles, 
assez  abondante  dans  la  Méditerranée,  à  queue 
fourchue,  et  qui  a  été  ensuite  vue  par  des 
naturalistes  lécens,  qui  l'ont  décrite  comme 
une  nouvelle  espèce.  C'est  même  sur  la  des- 
cription d'Hasselquist  que  la  phrase  caracté- 
ristique a  été  rédigée  par  Linné,  et  c'est  ce 
qui  explique  pourquoi  il  a  donné  à  son  pois- 
son le  caractère  de  caucla  hifurca. 

C'est  aussi  à  cette  même  source  que  M.  de 
Lacépède  a  puisé  la  description  de  son  labre 
paon,  et  qu'il  a  pu  l'orner  de  toutes  les  figures 
brillantes  de  son  style,  bien  que  le  synonyme 


CHAP.  III.    CRÉNILAliRES.  "1^5 

d'Hasselquist  vienne  après  toutes  les  citations 
tirées  d'Artedi. 

Shaw  a  de  même  reproduit  ce  labre  paon 
avec  toutes  ces  fautes,  mais  en  y  ajoutant 
encore  une  qui  me  paraît  lui  être  propre  :  il 
fait  venir  son  poisson  de  la  Méditerranée  et 
de  la  mer  des  Indes. 

Brùnnich  avait  cependant  fourni  à  Gmelin 
et  à  M.  de  Lacépède  les  moyens  de  réparer 
les  erreurs  de  Linné ^  car  il  a  fait  connaître* 
d'une  manière  fort  exacte  le  poisson  de  Sal- 
viani  en  lui  appliquant  l'épithète  de  cet  au- 
teur, mais  en  faisant  remarquer  que  le  poisson 
d'Hasselquist  est  différent.  Or,  ni  M.  de  La- 
cépède ni  Gmelin  et  Blocli,  qui  ont  pris  plu- 
sieurs de  leurs  labres  à  Briinnich,  n'ont  pas 
cité  celui-ci. 

Peu  de  temps  après,  Forskal  trouve  le  même 
poisson  dans  l'Archipel,  et  il  le  publie  comme 
une  nouvelle  espèce  sous  le  nom  de  lahrus 
lapina  y  qui  vient  prendre  place  dans  Gmelin 
sous  ce  nom,  et  qui  est  reproduit  par  Lacé- 
pède comme  un  lutjan,  à  cause  des  dentelures 
du  préopercule. 

C'est  aussi  parmi  les  lutjans  que  nous  le 
retrouvons  dans  la  première  édition  de  Bisso, 

1.  Tisc.  Mais.,  p.  49 j  ri»°  66. 


456  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

et  en  double  emploi;  car  on  ne  peut  douter 
que  le  lutjan  Geojfroj  *  ne  soit  le  même  que 
son  lut j anus  lapina'^ j  le  premier  est  une  des- 
cription faite  d'après  nature  sur  un  poisson  de 
cette  espèce  qu'il  n'a  pas  su  reconnaître  dans 
le  second;  ce  qui  n'a  pas  empêché  M.  Risso 
de  mettre  en  tête  de  son  genre  un  labrus  pai^o. 

Dans  sa  seconde  édition  il  change  le  nom 
de  genre  en  celui  de  crénilabre ,  mais  il  ne 
corrige  aucune  de  ces  erreurs;  et  la  figure  en 
est  fort  peu  correcte. 

Je  retrouve  encore  une  description,  très- 
exacte,  dans  le  Fauna  rossica  de  Pallas^  Cet 
illustre  savant  le  reconnaît  pour  le  lahrus 
lapina  du  naturaliste  danois  ;  mais  il  lui  donne 
un  nouveau  nom,  qui  exprime  la  variété  des 
couleurs  de  ce  poisson.  Pallas  l'a  appelé  lahrus 
poljchrous. 

J'ai  dit  que  le  lahrus  tinca  pouvait  être 
considéré  comme  étant  le  nom  auquel  on  de- 
vrait rapporter  le  poisson  dont  nous  parlons 
ici,  et  qui  est  le  neuvième  labre  d'Artedi, 
iàit  sur  la  description  de  Willughby.  Mais  je 
crois  que  Pennant  s'est  trompé  sur  son  lahrus 
tinca,  et  qu'il  a  encore  embrouillé  le  sujet; 


1.  Risso,  Iclit.  de  Nice,  i."  édil. ,  p.  a6i  ,  pi.  8,  fig.  aS. — 
2.  Ihid.,  p.  262.  —  3.  Pallas,  Faun.  ross.,  III,  p.  ^62. 


CHAP.   m.  CRÉNILABRES.  157 

car  son  old  wife  ou  wrasse  nous  paraît  appar- 
tenir plutôt  aux  nombreuses  variétés  de  notre 
labrus  bergylta. 

Gmelin  a  donc  encore  plus  altéré  le  lahrus 
tinca  de  Linné  et  d'Artedi,  en  y  adjoignant 
l'espèce  mal  caractérisée  de  Pennant.  M.  de  La- 
cépède,  ne  trouvant  pas  dans  les  auteurs,  sur 
les  indications  de  Gmelin,  l'assertion  que  les 
préopercules  fussent  dentelés,  a  laissé  l'espèce 
dans  ses  labres,  en  changeant  un  peu  le  nom 
spécifique  de  Linné  et  en  appelant  son  pois- 
son labre  tajicoïde;  mais  qui  n'est  pas  le  lut- 
jan  tancoïde  de  la  première  édition  de  Risso, 
quoique  celui-ci  ait  cité  Pennant.  Il  eût  mieux 
fait  de  rapporter  son  espèce  au  labrus  tinca  de 
Briinnich,  dont  Bonnaterre,  et  par  conséquent 
Lacépède,  n'ont  fait  aucun  usage,  et  qui  est 
bien  différent  de  l'espèce  de  Linné;  et  j'ai 
fait  voir  aussi  plus  haut  comment  Donovan  a 
donné,  sous  la  fausse  détermination  de  labrus 
tinca,  notre  premier  labre.  J'aurais  donc  peu 
éclairci  cette  nomenclature  en  reprenant  pour 
notre  espèce  le  nom  de  crenilabrus  tinca, 
et  j'ai  préféré  lui  donner  celui  que  Salviani 
lui  a  d'abord  assigné,  et  sous  lequel  Briinnich 
en  a  laissé  une  description  sur  laquelle  il  ne 
peut  y  avoir  aucun  doute. 

Celle  espèce,  une  des  plus  communes  et  des  plus 


458  LIVRE   XVI.  labroïdes. 

brillantes  de  la  Méditerranée,  est  un  des  labroïdes 
qui  a  les  lèvres  les  plus  épaisses. 

Le  corps  est  elliptique  et  un  peu  plus  élargi  de 
l'avant  que  vers  la  queue.  La  hauteur ,  prise  aux 
pectorales,  n'est  contenue  que  trois  fois  et  demie 
dans  la  longueur  totale;  l'épaisseur  est  des  deux  cin- 
quièmes de  la  hauteur.  Le  profil,  un  peu  concave 
entre  les  yeux  et  le  bout  du  museau,  devient  con- 
vexe sur  la  nuque. 

La  longueur  de  la  tête  est  un  peu  plus  courte 
que  le  corps  n'est  haut.  Son  museau  est  surtout 
renflé  par  l'épaisseur  des  lèvres;  il  est  recouvert  par 
le  voile  membraneux  qui  passe  sur  les  sous  -  or- 
bitaires ,  et  qui  s'étend  au-dessus  des  lèvres ,  qu'il 
cache  entièrement.  Ce  caractère  donne,  comme  je 
l'ai  dit,  une  physionomie  particulière  aux  crénila- 
bres.  L'œil  est  petit,  son  diamètre  n'étant  à  peine 
que  du  sixième  de  la  longueur  de  la  tête;  il  est  éloigné 
du  bout  du  museau  de  trois  fois  ce  diamètre,  et  il 
est  placé  sur  le  haut  de  la  joue,  sans  que  le  cercle 
parfaitement  rond  de  l'orbite  entame  la  ligne  du 
profil. 

Le  sous-orbitaire,  du  double  plus  long  que  large, 
est  au-devant  de  l'œil,  et  occupe  à  peu  près  deux 
fois  la  largeur  de  l'œil. 

Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  peu  rap- 
prochées l'une  de  l'autre,  mais  elles  le  sont  de  l'œil; 
l'antérieure  n'est  qu'un  très  -  petit  trou  rond  ;  la  se- 
conde, très -visible ,  n'a  aucun  rebord  saillant  ni 
papille. 

Le  préopercule  a  le  bord  vertical  un  peu  con- 


CHAP.  III.     CRÉNILABRES.  459 

cave,  riiorizonlal  légèrement  sinueux,  l'angle  très- 
arrondi,  le  limbe  assez  large,  surtout  l'inférieur. 

Les  crénelures  du  bord,  qui  sont  toujours  plus 
prononcées  sur  les  jeunes  sujets  que  dans  les  adultes, 
ne  sont  très-enfoncées  que  près-de  l'angle  et  dans  le 
bas  du  bord  vertical;  ces  dentelures  se  montrent 
même  sur  des  individus  qui  paraissent  tout- à -fait 
adultes  et  de  la  taille  de  huit  à  neuf  pouces;  mais  il 
faut  avouer  que  dans  cette  espèce  un  grand  nombre 
d'adultes ,  ou  même  de  taille  moyenne ,  ont  les 
dentelures  dubord  effacées  par  le  progrès  del'ossifica- 
tion,  et  que  le  caractère  des  crénilabres  ne  se  montre 
plus  que  rudimeniairement  et  par  les  stries  dont  le 
limbe  osseux  de  ce  préopercule  est  ciselé.  Je  ne  sais 
à  quoi  attribuer  cette  variation,  car  elle  ne  dépend 
ni  de  l'âge  ni  du  sexe;  et  d'ailleurs  les  individus  sans 
crénelures  ressemblent  tellement ,  par  tous  leurs  au- 
tres caractères ,  à  ceux  qui  ont  le  préopercule  den- 
telé, qu'il  est  impossible  de  faire  de  cette  variation 
un  caractère  spécifique  et  encore  moins  générique. 

L'opercule  et  le  sous- opercule  sont  confondus 
sous  les  larges  écailles  qui  les  recouvrent;  l'interoper- 
cule  n'en  a  que  quelques-unes  derrière  l'angle  ar- 
rondi du  préopércule.  La  joue  porte  cinq  rangées 
d'écaillés  oblongues  au-dessous  de  l'œil;  derrière 
cet  organe  il  n'y  en  a  qu'un  seul  rang;  tout  le  reste 
de  la  tête  est  garni  d'une  peau  épaisse  et  criblée 
d'une  infinité  de  pores. 

La  bouche  est  fendue,  à  l'extrémité  du  museau, par 
une  ouverture  peu  étendue  sur  les  côtés  de  la  tète. 
La  mâchoire  supérieure  n'a  que  dix  à  douze  dents 


160  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

sur  un  seul  rang  et  de  chaque  côté  :  l'inférieure  en 
a  quinze  ou  seize.  Ces  dents  sont  recouvertes  par  des 
lèvres  remarquables  à  cause  de  leur  épaisseur  et  de 
leurs  nombreux  replis.  La  supérieure,  élargie  sur  les 
côtés,  a  huit  plis  longitudinaux  en  dessous;  renflée 
et  arrondie  en  dessus,  elle  est  garnie  d'une  crête 
membraneuse  sur  son  bord  supérieur,  qui  senible 
simuler  une  seconde  lèvre  couchée  sous  le  large 
voile  membraneux  qui  s'étend  sur  le  tout.  La  lèvre 
inférieure  forme  d'abord  un  bourrelet  couvert  de 
fines  papilles  serrées,  en  velours  ras,  le  long  des 
dents;  ce  bourrelet  se  joint  à  celui  du  côté  opposé. 
Au-devant  de  la  symphyse  de  la  mâchoire  est  une  lame 
en  ogive  dont  le  sommet  de  l'angle  est  tourné  vers 
le  bas.  Un  sillon  profond  sépare  ce  bourrelet  d'une 
lèvre  épaisse  sans  pli,  et  qui  porte  sur  son  milieu 
une  crête  membraneuse  mince ,  mais  plus  large  que 
celle  de  la  lèvre  supérieure.  A  l'intérieur  de  la  bouche, 
les  voiles  membraneux  du  palais  et  de  la  mâchoire 
inférieure  sont  épais,  larges  et  plissés  longitudina- 
lement.  Il  n'y  a  d'ailleurs  aucunes  dents  au  palais,  à 
la  langue ,  ni  aux  arceaux  des  branchies;  les  deux  pre- 
mières plaques  sont  supportées  parles  deux  premières 
branchies;  leurs  râtelures  sont  recouvertes  de  fines 
villosités,  formant  un  velours  ras  au  -  devant  des 
deux  pharyngiens  supérieurs.  Ceux-ci  sont  également 
entourés  de  papilles  charnues,  et  portent  chacun 
une  plaque  triangulaire  de  dents  arrondies  en  pavé, 
qui  correspondent  à  la  pièce  unique  inférieure, 
garnie  de  dents  semblables,  ainsi  que  cela  existe 
dans  les  labres.  La  langue  est  lisse  et  peu  libre.  Outre 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  AG\ 

les  quatre  branchies  il  y  a  une  lame  branchiale  oper- 
culaire. 

La  membrane  branchioslège  est  peu  libre  et  réu- 
nie, par  un  isthme  assez  large,  à  celle  du  côté 
opposé.  Cependant  ,  comme  cette  membrane  est 
étendue,  l'arc  de  la  fente  des  ouïes  est  encore  assez 
grand.  Les  rayons  branchiostèges  sont  au  nombre 
de  cinq. 

La  dorsale  s'élève  au  tiers  de  la  longueur  totale; 
sa  portion  molle  est  arrondie,  et  plus  haute  que  la 
partie  épineuse.  La  partie  molle  de  l'anale  corres- 
pond à  la  même  région  de  la  dorsale  :  elle  est  plus 
ovale;  la  caudale  a  ses  angles  arrondis;  la  pectorale 
est  ronde. 

B.  5;  D.  15/1 1  ;  A.  3/9  ;  C.  13  ;  P.  14  ;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  grandes  et  minces  ;  il  y  en  a 
trente-quatre  rangées  entre  l'ouïe  et  la  caudale,  et 
quinze  dans  la  hauteur.  Chaque  écaille  a  sa  portion 
radicale  quadrilatère;  l'éventail  a  vingt-quatre  rayons; 
la  portion  nue  a  le  bord  membraneux  sans  dente- 
lures ni  ciselures. 

La  ligne  latérale  est  formée  d'une  série  de  tubes, 
doubles  sur  chaque  écaille  et  réunis  en  chevron , 
dont  le  sommet  est  du  côté  de  la  tête  :  elle  est  tracée 
parallèlement  au  dos  sur  la  quatrième  rangée  d'écaillés, 
et  s'infléchit  sous  la  fin  de  la  dorsale,  pour  se  rendre 
à  la  caudale  par  le  milieu  de  la  hauteur  du  tronçon 
de  la  queue. 

La  couleur  est  très- variable.  Nous  voyons  des  indi- 
vidus qui  ont  sur  un  fond  verdâtre  trois  lignes  de 
taches  rouges  disposées  en  zig-zag;  d'autres  ont  le 

i3.  11 


162  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

corps  plus  brun  sur  le  dos,  argenté  sur  le  ventre,  les^ 
taches  rouges  sont  plus  efTacées  ;  et  sur  d'autres , 
enfin,  on  voit  une  large  tache  brune  ou  vert  foncé 
au-dessus  de  la  pectorale ,  et  une  seconde ,  plus  ou 
moins  mal  terminée,  de  chaque  côté  de  la  queue.  Les 
pectorales  sont  jaunes,  les  ventrales  bleues,  les  autres 
nageoires,  mêlées  de  jaune  et  de  rouge,  sont  couvertes 
de  nombreux  points  violets  ou  bleu  céleste. 

Quand  le  poisson  habite  sur  les  fonds  vaseux , 
M.  Risso  dit  que  les  couleurs  semblent  se  salir  et 
que  les  points  rouges  s'effacent;  il  en  a  observé  des 
individus  dont  le  corps  est  traversé  par  de  grandes 
bandes  claires  et  obscures,  et  quelques-uns  de  ceux 
qui  sont  conservés  à  l'esprit  de  vin,  m'ont  montré 
des  traces  de  cette  disposition. 

Pendant  la  saison  des  amours,  le  vert  prend  des 
reflets  dorés,  et  les  taches  rouges  sont  mêlées  de 
couleurs  bleues ,  qui  augmentent  encore  la  richesse 
des  reflets  de  ce  beau  poisson.  Mais  la  couleur 
jaune  des  pectorales  me  paraît  constante  et  servir 
à  le  faire  reconnaître  dans  les  descriptions  plus  ou 
moins  vagues  des  auteurs. 

L'examen  des  viscères,  compares  à  ceux  des 
labres ,  ne  nous  a  fait  apercevoir  que  de  légères 
nuances. 

Le  foie  est  assez  gros,  verdâtre;  le  canal  alimen- 
taire se  continue  sans  former  d'abord  une  dilata- 
lion  bien  marquée  constituant  l'estomac;  la  valvule 
du  pylore  est  vers  le  bas  de  cette  première  anse, 
l'intestin    grêle    remonte    dans    l'abdomen    vers   le 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  165 

diaphragme ,  se  plie  et  se  dilate  ensuite  en  un  très- 
large  rectum ,  séparé  par  un  léger  rétrécissement 
marqué  par  la  valvule  de  Bauhin.  Les  parois  de  ce 
canal  alimentaire  sont  partout  très- minces. 

La  vessie  aérienne  est  très-grande,  arrondie  en 
avant,  et  à  parois  plus  épaisses  en  cette  partie  qu'à 
l'arrière ,  où  elle  est  conique  et  pointue.  Le  repli 
du  péritoine,  qui  passe  sous  elle,  est  dense  et  fibreux. 
Les  reins  sont  épais  et  débouchent  par  deux  uretères 
courts  dans  une  vessie  urinaire  assez  grande  et  di- 
visée en  deux  lobules. 

Voici  les  observations  que  nous  avons  faites 
sur  le  squelette  de  ce  crénilabre. 

Le  crâne  est  légèrement  arrondi  à  sa  partie  mi- 
toyenne; une  gouttière  large,  évasée  et  arrondie  en 
arrière,  peu  profonde,  laisse  glisser  les  branches 
montantes  des  intermaxillaires.  La  crêle  occipitale 
mitoyenne  est  haute  et  triangulaire;  mais  les  laté- 
rales sont  presque  nulles,  réduites  à  une  sorte  de 
gros  tubercule  osseux,  triangulaire,  au-dessus  de 
la  région  temporale;  sous  lui  est  une  fossette  trian- 
gulaire. Il  n'y  a  pas  de  crête  sur  l'arrière  de  l'occi- 
put, d'où  il  résulte  que  cette  partie  du  crâne  est 
saillante  en  un  cône  tronqué,  légèrement  concave 
en  dessus,  et  séparée  en  deux  par  une  carène  obtuse 
longitudinale,  que  l'on  pourrait  regarder  comme  l'ana- 
logue de  la  crête  longitudinale  des  labres.  Les  autres 
pièces  de  l'opercule,  ou  celles  qui  l'avoisinent,  n'offrent 
pas  de  caractères  qui  n'aient  déjà  été  signalés  dans  la 
description  générale  des  parties  externes  du  poisson. 


164  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

L'huméral  et  le  radial  font  une  large  ceinture 
sous  la  gorge;  le  radial  surtout  est  très -large, 
et  séparé  à  sa  pointe  antérieure  de  l'huméral  par 
un  très  -  grand  trou  rond.  Le  styléal  est  large  et 
plat. 

Je  compte  quinze  vertèbres  abdominales  et  dix- 
huit  caudales.  La  première  et  la  seconde  sont  très- 
courtes  et  comme  aplaties,  les  autres  ont  des  apo- 
physes transverses,  assez  longues,  obliques  de  haut 
en  bas  et  d'avant  en  arrière;  elles  augmentent  jus- 
qu'à la  treizième  vertèbre;  celles  de  la  quatorzième 
sont  plus  courtes,  mais  plus  aplaties,  et  s'unissent 
pour  porter  le  premier  interépineux  de  l'anale  ;  la 
dernière,  et  même  l'avant- dernière  vertèbre  cau- 
dale ,  ont  leurs  apophyses  épineuses  élargies  en 
grand  éventail.  Les  autres  apophyses  épineuses  sont 
longues  et  grêles.  Les  côtes  sont  aussi  très-alongées , 
et  leurs  apophyses  styloïdés  égalent  à  peu  près  la 
moitié  de  la  longueur  de  la  côte. 

Les  interépineux  cfe  la  dorsale  et  de  l'anale  sont 
larges,  triangulaires,  carénés  sur  leur  face  latérale, 
et  atteignent  par  leur  insertion  jusqu'à  la  moitié 
de  la  longueur  de  l'apophyse  épineuse,  sur  laquelle 
ils  s'insèrent. 

Nos  plus  grands  individus  ont  près  d'un 
pied. 

L'espèce  abonde  dans  la  Méditerranée,  car 
il  en  est  venu  au  Cabinet  du  Roi  de  tous 
les  points  de  cette  mer  où  nous  avons  eu  des 
coirespondans  ou    des  naturalistes  qui    ont 


CHAP.   III.    CRÉMLABRES.  1 6Sr 

bien  voulu  collecter  des  poissons  pour  noire 
Musée.  M.  Cuvier  en  avait  recueilli  à  Mar- 
seille; M.  Kiener  nous  a  donné  de  fort  beaux 
individus  pris  à  Toulon;  nous  en  avons  reçu 
de  Corse,  par  M.  Payiaudeau;  de  Nice,  par 
MM.  Risso  et  Laurillard;  de  Naples  et  de 
Rome,  par  M.  Savigny  ;  de  Gènes,  par  M.  Spi- 
nola  ;  de  Messine ,  par  M.  Bibron  ;  de  Pa- 
ïenne, par  M.  Constant  Prévost;  d'Athènes, 
par  M.  Domnando;  de  Napoli  de  Romanie, 
par  M.  Reynaud;  du  Bosphore,  par  M.  Virlet; 
d'Alexandrie ,  par  M.  Geoffroy  Saint-Hilaire 
et  par  M.  Lefebvre. 

M.  de  Laroche  l'a  rapportée  d'Iviça.  Il  me 
paraît  même  probable  qu'on  la  trouve  sur 
les  côtes  d'Espagne,  car  je  vois  dans  Cornide 
im  labre  paon  qui  doit  se  rapproher  de  ce 
labix)ïde,  confondu  avec  d'autres  espèces  du 
même  genre.  Mais  je  n'ai  pas  la  preuve  qu'on 
la  voie  s'avancer  dans  notre  Océan  septen- 
trional. Il  me  semble  que  si  elle  a  été  citée 
par  quelques  auteurs  comme  originaire  de  la 
Grande-Bretagne,  c'est  sur  l'assertion  de  Wil- 
lughby;  et  j'ai  déjà  fait  observer  qu'elle  ne 
mérite  pas  une  grande  confiance.  Je  ne  la  vois 
pas  citée  dans  l'Histoire  des  poissons  d'Angle- 
terre par  M.  Yarell,  et  les  auteurs  des  Faunes 
du  Nord  n'en  font  pas  mention. 


466  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

Outre  le  nom  âepapagelloj,  déjà  cité  plus 
haut,  nous  voyons  que  Biùnnich  connaît  notre 
crënilabre  sous  la  dénomination  vulgaire  de 
roucao,  à  Marseille,  qui  à  Nice  devient  rou- 
ffiiiéj  mais  M.  Risso  dit  aussi  de  son  labrus 
lapina  qu'il  s'appelle  hla^dé.  Ce  nom  de  lapina 
des  Turcs  de  Constantinople ,  ou  de  'Komivoc  des 
Grecs  modernes,  suivant  Forskal,  se  change- 
rait chez  les  Arabes  en  liassun,  ce  qui  veut  dire 
beau.  Mais  je  croirais  volontiers  que  l'Arabe, 
en  montrant  ce  beau  poisson  à  Forskal,  se 
servait  de  l'expression  qui  rendait  son  admira- 
tion pour  la  beauté  des  couleurs,  plutôt  qu'il 
ne  lui  disait  le  nom  de  notre  crénilabre. 

Pallas  n'indique  pas  de  noms  vulgaires; 
mais  il  le  donne  comme  un  poisson  abondant 
dans  la  mer  Noire,  qui  se  prend  quelquefois 
dans  les  filets  en  nombre  considérable,  sur- 
tout du  printemps  à  l'automne.  C'est  un  pois- 
son des  plus  recherché  pour  la  table. 

Pallas,  qui  en  a  vu  tant  d'individus  à  la 
fois,  regarde,  comme  nous,  la  couleur  jaune 
des  pectorales  et  les  taches  des  côtés  de  la 
queue,  comme  étant  caractéristiques  au  mi- 
lieu des  teintes  si  variées  que  prennent  les 
divers  individus  de  cette  espèce.  Us  varient 
beaucoup  suivant  l'âge. 


CHAP.   111.  CRÉNILABRES.  167 

Le  Grénilabre  mélope. 
( Crenilahrus melopSj nob.;  Labrus  melops »\AnTi.) 

La  seconde  espèce  dont  nous  avons  à  par- 
ler est  non-seulement  abondante  dans  la  Mé- 
diterranée, mais  elle  s'avance  dans  notre  océan 
Septentrional  jusque  sur  les  côtes  de  Nov- 
wége.  En  effet,  nous  en  avons  reçu  de  nom- 
breux individus  de  Martigues ,  par  M.  Dela- 
lande;  de  Marseille,  par  M.  Cuvier;  de  Nice, 
par  M.  Laurillard;  de  Gènes,  par  M.  Viviani; 
de  Naples,  par  M.  Savigny;  et  des  côtes  bai- 
gnées par  l'Océan,  il  nous  en  est  venu,  du 
Groisic,  par  M.  Bâillon;  de  La  Rochelle,  par 
M.  d'Orbignyj  de  Brest,  par  M.  Duméril;  de 
Saint-Malo,  par  M.  le  duc  de  Rivoli;  de  Gran- 
ville  ,  par  M.  Audouin  ,  et  de  Riel  par  M.  Boié. 

Tous  ces  individus  ont  constamment  seize 
rayons  épineux  à  la  dorsale,  et  une  tache 
noire  derrière  l'œil;  deux  caractères  qui  nous 
ont  servi  à  reconnaître  l'espèce  dans  le  labrus 
melops  de  Linné. 

Ce  crénilabre  a  le  corps  plus  court  que  le  précé- 
dent, la  ligne  du  profil  plus  droite.  La  hauteur  n'est 
que  le  tiers  de  la  longueur  totale.  La  tête  est  plus 
courte;  elle  est  comprise  près  de  quatre  fois  dans  la 
longueur  du  corps.  L'œil  est  proportionnellement 
plus  grand ,  son  diamètre  faisant  le  quart  de  la  tête; 


168  LIVRP:  XVI.    LABROÏDES. 

il  est  éloigné  du  bout  du  museau  d'une  seule  fois 
ce  diamètre:  aussi  le  museau  est-il  beaucoup  plus 
raccourci.  L'orbite  est  placé  plus  haut  sur  la  joue; 
car  il  touche  un  peu  à  la  ligne  du  profil.  La  peau 
du  front  s'étend  de  même  au-dessus  des  lèvres;  mais 
elles  sont  peu  épaisses  :  je  ne  vois  que  quatre  ou 
cinq  petits  plis  à  la  supérieure,  qui  n'a  point  de  crête 
en  dessus.  L'inférieure  a  un  bourrelet  très-mince;  elle 
s'étend  d'ailleurs  assez  sur  les  côtés  ou  en  dessus  de 
la  symphyse,  quand  la  bouche  est  fermée.  Les  dents, 
petites  et  presque  égales,  sont  au  nombre  de  cmq  ou 
six  en  haut  et  de  chaque  côté,  et  de  six  ou  sept  en 
bas.  Le  voile  membraneux  de  l'intérieur  delà  bouche, 
soit  sur  le  palais,  soit  au-devant  de  la  langue,  n'a 
pas  de  plis. 

Les  crénelures  du  préopercule  sont  ici  très-pro- 
noncées dans  tous  les  individus  rassemblés  dans 
la  collection  du  Roi.  L'interopercule  a  plus  d'écaillés. 
La  pectorale  et  la  caudale  sont  arrondies.  L'anale  est 
plus  haute  que  la  portion  molle  de  la  dorsale. 

D.  16y9;  A.  3/9;  C.  13;  P.  14;  V.  1/5. 

Je  trouve  trente  et  une  écailles  entre  l'ouïe  et  la 
caudale;  ces  écailles  sont  minces,  un  peu  striées. 
L'éventail  a  vingt  rayons. 

Dans  la  liqueur  ils  paraissent  bruns  ou  roussâtres, 
ayant  derrière  l'oeil  une  tache  noire,  des  rayures 
obliques  et  irrégulières  sur  les  joues,  (Jes  points 
brunâtres  en  séries  longitudinales  sur  les  côtés,  une 
petite  tache  noirâtre ,  plus  ou  moins  effacée ,  près 
de  la  queue;  les  ventrales  de  cette  teinte;  et  cinq  à 


CHAP.  III.   CRÉNILABRES.  169 

six  grandes  taches  de  même  couleur  sur  la  dorsale 
et  trois  sur  l'anale.  Les  flancs  sont  peints  de  séries 
de  points  bleus  alternant  avec  des  points  bruns  ; 
ceux-ci  étaient  très-pâles  sur  le  ventre. 

Mais  sur  le  poisson  frais  les  teintes  sont  tout 
autres.  Nous  les  avons  prises  sur  des  individus  péchés 
au  Croisic.  Le  fond  de  la  couleur  était  un  jaune 
olivâtre,  plus  ou  moins  mêlé  d'orangé  sur  le  ventre. 
On  voyait  sur  les  cotés  quatorze  lignes  longitudinales 
foncées.  La  tête,' plus  brillante  que  le  corps,  avait 
de  nombreuses  rivulations  de  lignes  vertes.  La  tache 
derrière  l'œil  était  bleu  noirâtre.  La  portion  épi- 
neuse de  la  dorsale  avait  sur  son  fond  jaune  des  traits 
obliques  bleus,  l'un  en  liséré,  l'autre  à  la  base.  La 
portion  molle  avait  ses  rayons  seuls  jaunes,  et  sur 
la  membrane  verdâtre  il  existait  trois  séries  longi- 
tudinales de  gros  points  bleus.  Sur  le  fond  jaune  de 
l'anale,  des  ventrales  et  de  la  caudale  les  rivulations 
étaient  bleues-  la  pectorale  avait  sa  base  bleue,  et 
toute  la  moitié  externe  d'un  beau  jaune  orangé. 

Son  foie  est  divisé  en  deux  lobes  grêles  et  alongés; 
l'intestin  se  replie  quatre  fois;  il  n'y  a  pas  de  dila- 
tation stomachale;  le  rectum  est  assez  large  et  court; 
la  vessie  natatoire  est  grande,  comprimée,  simple, 
à  parois  fibreuses  et  argentées. 

Je  compte  treize  vertèbres  abdominales  et  dix- 
neuf  caudales.  Le  dessus  du  crâne  est  plus  bombé 
que  celui  du  crénilabre  paon;  sa  gouttière  antérieure 
moins  profonde;  sa  crête  occipitale  plus  isolée  et 
triangulaire;  l'huméral  et  le  radial  plus  courts;  le 
styléal  plus  large. 


170  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Nos  individus  ont  depuis  quatre  jusqu'à 
sept  pouces  de  longueur. 

L'espèce  fraie  en  Avril,  se  nourrit  de  crus- 
tacés qu'elle  trouve  sur  les  côtes  rocheuses  de 
l'Océan  où  elle  se  tient  j  ses  habitudes  sont  les 
mêmes  dans  la  Méditerranée. 

La  tache  oculaire,  qui  se  conserve  même  sur 
les  individus  les  plus  décolorés  par  l'action  de 
l'alcool,  me  paraît  bien  prouver  la  justesse  de 
notre  détermination  en  rapportant  à  cette  es- 
pèce le  labrus  melops  de  Linné.  Il  en  a  parlé 
dès  sa  dixième  édition ,  et  dans  le  prodrome 
du  tome  second  du  Musée  du  prince  Adolphe- 
Frédéric^;  et  il  est  même  le  seul  naturaliste 
qui  ait  caractérisé  cette  espèce,  car  ni  Artedi, 
ni  Willughby,  ni  Rondelet,  n'en  font  aucune 
mention,  quoiqu'elle  soit  commune  sur  nos 
côtes  de  Provence. 

Cependant  M.  Risso  avait  bien  reconnu 
le  poisson  de  Linné,  et  dès  sa  première  édition 
il  le  place ,  conformément  à  la  méthode  de 
M.  de  Lacépède,  qu'il  suivait,  parmi  ses  lutjans, 
quoique  celui-ci,  se  bornant  à  copier  Bonna- 
terre,  l'ait  laissé  parmi  ses  labres  sous  le  nom 
linnéen.  Dans  sa  seconde  édition,  M.  Risso 
suit  M.  Cuvier,  et  il  en  fait  un  crénilabre. 

1.  Mus.  Ad.  Fr.prod.,  II,  p.  78,  n."  23. 


CHAP.  m.  CRÉNILABRES.  ^7\ 

Je  dois  dire  cependant  que  M.  Risso  parle 
d'une  tache  de  la  base  de  la  pectorale  que  je 
ne  trouve  pas  dans  les  individus  que  je  rap- 
porte à  cette  espèce. 

Je  ne  vois  pas  que  la  plupart  des  natura- 
listes qui  ont  écrit  sur  les  poissons  des  côtes 
d'Angleterre,  aient  songé  à  retrouver  le  pois- 
son de  Linné.  Ainsi  ni  Pennant,  ni  Donovan, 
ni  Turton,  ni  Jenyns,  ni  Fleming,  ne  citent 
le  lahrus  melops.  Je  crois  cependant  que  ce 
dernier  auteur  a  eu  entre  les  mains  un  poisson 
de  notre  espèce,  qu'il  a  confondu  avec  le  gib- 
bons wrasse  de  Pennant.  Celui-ci  ne  parle  pas 
de  tache  noire  derrière  l'œil,  et  M.  Fleming 
dit  positivement^  ahove  eacli  eje  a  dusky  se- 
niilunar  spot. 

Quoique  M.  Yarell^  ne  cite  pas  le  labrus 
melops,  je  suis  très-porté  à  croire  que  son  ^ilt 
head  ou  Connor,  ou  golden  maid,  n'est  autre 
chose  que  notre  espèce,  il  n'a  oublié  sur  sa 
figure  ni  les  rayures  des  joues  ni  la  tache  noire 
de  l'œil.  Mais  ce  ne  peut  être,  comme  il  le 
pense ,  le  crenilabrus  tinca,  et  encore  moins 
le  labrus  tinca  de  Linné  ni  celui  de  Fleming. 
On  concevra,  par  la  discussion  que  nous  avons 


1.  Fleming,  Hisi.  cf.  brit.  an.,  p.  209,  n."  129. 

2.  Yarell;  Brit.  fish. ,  1. 1,  p.  293. 


I  72  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

faite  sur  le  lahriis  tinca,  que  M.  Yarell,  et 
plus  récemment,  ait  eu  quelque  difficulté  à 
reconnaître  les  confusions  qui  partent  déjà  de 
Willughby,  qu'Artedi  a  augmentées  et  que 
Linné  a  adoptées;  et  quoique  M.  Yarell  ait  eu 
la  sagacité  d'excltire  quelques-uns  des  syno- 
nymes de  Fleming,  il  aurait  du  oublier  tout- 
à-fait  cette  espèce  nominale,  que  l'auteur'  de 
l'Histoire  naturelle  des  animaux  d'Angleterre  a 
rendue  encore  plus  imaginaire,  en  lui  adjoi- 
gnant le  goldsiimj  de  Jago  et  de  Ray,  et  celui 
de  Donovan ,  qui  diffèrent  tous  deux  entre  eux, 
et  dont  le  premier  est  même  d'un  autre  genre. 
M.  Jenyns  n'a  pas  été  plus  heureux,  car  son 
lahriis  tinca  présente  les  mêmes  erreurs  de 
synonymie,  et  la  description  me  paraît  être 
du  labre  rone  dAscanius. 

Le  Crénilabre  rone. 
{Crenilabrus  rone,  nob.  ;  Lahrus  j^one ,  Ase.) 

Je  n'ai  pu  encore  me  procurer  le  poisson 
dont  le  professeur  Ascanius  a  donné  une  figure* 
sous  le  nom  de  rone  ou  de  carousse  de  mer. 

Il  le  représente  rouge  foncé  sur  le  dos  et  sur  la 
tête,  argenté  sur  le  ventre;  les  joues  et  les  opercules 


1.  Fleming,  Bisi.  of.  brit.  an.,  p.  208,  n."  128. 
1.  le.  ver.  nat.  tab.  XIV. 


CHAP.  m.  CRÉNILABRES.  475 

sont  couverts  de  lignes  et  de  rivulatlons  vertes; 
quelques  traits  rouges  passent  en  bride  sous  la  mâ- 
choire inférieure  ;  les  lèvres  sont  jaunes  ;  le  dos  est 
couvert  de  points  verts  et  le  ventre  de  points  rouges; 
le  rouge  du  dos  s'étend  sur  les  rayons  supérieurs  de 
la  caudale,  qui  est  verdâtre  et  bordée  de  bleu  pâle 
liséré  de  rougeâlre;  la  dorsale  a  trois  larges  rubans 
rouges  longitudinaux,  et  les  deux  supérieurs  se  réu- 
,  nissent  en  avant  sur  la  partie  épineuse;  la  membrane 
qui  joint  les  rayons  simples  est  jaune,  passant  au 
verdâtre  vers  l'arrière;  sur  la  portion  molle  les  taches 
sont  vertes,  et  il  y  en  a  trois  rangées;  l'anale  a  la 
même  couleur  que  la  partie  de  la  dorsale  qui  lui 
correspond,  le  bord  rouge  est  seulement  plus  large; 
la  pectorale  est  chargée  de  points  rouges;  la  ventrale 
est  bleue  avec  un  trait  rouge  sur  le  milieu;  il  n'y  a 
aucune  trace  de  tache  noire  derrière  l'œil. 

Voici  les  nombres  tels  qu'Ascanius  les  a  comptés  : 

B.  5;  D.  16/9  5  A.  3/9;  C.  14;  P.  14;  V.  1/5. 

L'individu  figuré  a  six  pouces  de  long,  et 
Ascanius  dit  que  l'espèce  ne  devient  pas  plus 
grande.  Le  nom  norw^égien  de  ce  poisson  est 
roriCj,  et  les  Danois  l'appellent  strandkaroiisse. 

Bonnaterre  a  introduit  ce  labre  rone  dans 
l'Encyclopédie ,  et  M.  de  Lacëpède  l'y  a  copié. 
Quoique  Ascanius  n'ait  niaiY[ué  aucunes  den- 
telures au  préopercule ,  je  ne  doute  pas  que  ce 
poisson  ne  soit  du  genre  des  crénilabres,et  j'ai 
même  beaucoup  hésité  à  ne  pas  le  considérer 


]7A  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

comme  étant  de  la  même  espèce  que  le  précé- 
dent. Je  vois  cependant  que  M.  Nilsson*  le 
regarde  comme  distinct  et  qu'il  le  range  parmi 
ses  crénilabres.  Je  le  trouve  aussi  mentionné 
dans  le  Catalogue  des  poissons  du  Danemarck 
de  S.  A.  R.  le  prince  Christian.  Il  a  soin  de 
dire  que  c'est  une  espèce  à  part,  mais  rare 
sur  les  côtes.  Mais  ce  qui  m'étonne,  c'est  Je 
la  voir  citée  par  un  observateur  aussi  exact , 
comme  un  labre,  tandis  que  M.  Nilsson  en  fait 
un  crénilabre.  Miiller  la  compte  aussi  parmi 
les  poissons  de  son  Fauna  danica. 

Je  crois,  aussi,  que  c'est  un  poisson  de  cette 
espèce  dont  M.  Jenyns^  a  fait  son  lahrus  tinca; 
en  effet,  il  le  décrit 

rouge  et  bleu,  foncé  sur  le  dos  au-dessus  de  la  ligne 
latérale,  plus  pâle  au-dessous,  et  tacheté  de  rouge  sur 
le  ventre  et  sur  la  poitrine.  La  nuque  et  les  opercules 
verts,  avec  des  rivulalions  rouges,  etc. 

Il  ne  parle  pas  de  taches  derrière  l'œil,  et 
les  nombres  sont  tout-à-fait  les  mêmes. 

Si  ma  conjecture  est  vraie,  ce  poisson  se- 
rait très-commun  sur  certaines  côtes  d'Angle- 
terre, sur  les  fonds  rocheux,  frayant  en  Avril 
et  se  nourrissant  principalement  de  crustacés. 


1.  Nilsson,  Prod.  Ichth.  Scand. ,  p.  77,  n."  6. 

2.  Jenyns ,  Man.  of.  brit.  vert.  an. ,  p.  397 ,  n."  yS. 


CHAP.  III.    CRÉNILABRES.  4  75 

Je  dois  cependant  faire  remarquer  que 
M.  Jenyns  cite  parmi  ses  synonymes  le  ^ilt 
head  de  M.  Yarell,  qui  a  une  tache  derrière 
l'œil,  et  que  nous  avons  cru  être,  par  cette 
raison,  de  notre  espèce  du  crenilahrus  me- 
lops.  Comme  M.  Jenyns  dit  que  son  poisson 
est  un  des  plus  communs  de  la  famille  des 
labroïdes ,  cette  remarque,  jointe  à  sa  cita- 
tion, me  laisse  quelques  doutes  :  M.  Jenyns 
aurait-il  oublié  la  tache  de  l'œil?  En  tous  cas, 
la  synonymie  est  entachée  des  erreurs  que  nous 
avons  déjà  signalées;  car  ce  poisson  ne  pouvait 
être  en  aucune  façon  le  lahrus  tinca  de  Linné 
ni  de  Willughby. 

Le  Crénilabre  bossu. 
{Crenilahrus  gibbiis ,  nob.;  Gihbus  virasse,  Penn.) 

C'est  sur  la  foi  de  Pennant  que  les  natura- 
listes parlent  de  cette  espèce,  qui  a 

le  corps  plus  court  et  plus  haut  que  le  précédent, 
la  hauteur  étant,  d'après  la  figure  du  zoologiste  an- 
glais, de  la  moitié  de  la  longueur  du  tronc. 

D.  16/9;  A.  3/11;  C....;P.  13;  V.  1/5. 

Suivant  Pennant ,  le  corps  est  élégamment  tacheté 
et  rayé  de  bleu  et  d'orangé,  la  dorsale  et  l'anale  vert 
de  mer  tacheté  de  noir;  les  ventrales  et  la  caudale. 


]  76  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

de  même  couleur,  n'ont  pas  de  taches;  les  pecto- 
rales sont  rayées  de  rouge  à  la  base. 

L'individu  était  long  de  huit  pouces;  il  avait 
été  pris  sur  la  côte  d'Anglesea. 

On  voit  que  ce  poisson  tient  beaucoup  du 
précédent  :  il  n'en  est  peut-être  même  qu'une 
variété.  Les  ichthyologistes  en  ont  tous  parlé 
d'après  l'auteur  de  British  fauna.  Gmelin  en 
fait  son  lahrus  gibbus,  que  Lacépède  a  adopté, 
M.  Yarell  a  reproduit  la  figure  et  la  descrip- 
tion de  son  prédécesseur.  L'espèce,  si  cen 
est  une,  doit  être  rare,  car  on  ne  l'a  pas  en- 
core retrouvée  depuis  la  publication  du  Bri- 
tish  fauna. 

Le  Crénilabre  norwégien. 

(^Crenilahrus  noj^wegicus ,  nob.  ;  Lutjaniis  noi'we- 
giciis ,  Bl.) 

Le  lut j an  norwégien ^  que  Bloch  a  figuré 
(pi.  256),  et  que  Lacépède,  sur  cette  auto- 
rité, a  aussi  inscrit  parmi  ses  lutjans,  est  un 
crénilabre  qui  est  voisin  de  ces  poissons,  et 
que  je  ne  suis  pas  encore  parvenu  a  me  pro- 
curer. 

Il  a  le  corps  semblable  au  crenilabrus  melops  ; 
mais,  si  la  figure  de  Bloch  est  exacte,  les  dentelures 
des  préopercules  sont  plus  grosses ,  et  surtout  au  bord 
horizontal  de  cette  espèce.  Les  nombres  sont  encore 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  \77 

ceux  du  crenîlabrus  melops ,  sauf  qu'il  y  aurait  un 
rayon  mou  de  moins  à  l'anale. 

D.  16/9;  A.  5/10,  etc. 
Je  ne  vois  pas  que  Blocli  ait  marqué  de  tache 
derrière  l'œil;  mais  il  y  en  a  une  très -prononcée 
de  chaque  côté  de  la  queue,  qui  ne  se  trouve  pas 
sur  nos  crénilabres  mélopes.  Le  corps  est  noirâtre 
ou  violet  foncé  sur  le  dos ,  passant  insensiblement 
aii  jaune  sous  le  ventre;  il  est  tout  marbré  de  grosses 
taches  brunes;  la  dorsale  a  aussi  des  marbrures  noires 
sur  un  fond  jaunâtre;  la  caudale,  jaune  à  la  base,  est 
violette  à  son  bord;  l'anale  a  cette  même  teinte;  les 
pectorales  et  les  ventrales  sont  bleuâtres;  il  n'y  a  pas 
non  plus  de  rayures  sur  les  joues. 

Tel  est  le  poisson  que  Spengler  avait  en- 
voyé à  Bloch.  Il  est  voisin  des  précédens,  mais 
il  me  parait  devoir  en  être  distingué. 

M.  Retzius  l'a  cité  dans  son  édition  du 
Fauna  suecica  (p.  337,  ^-^  7^)?  ^^^^  le  nom 
de  perça  niaculosa ,  en  conservant  pour  sy- 
nonyme le  nom  et  la  figure  de  Bloch. 

M.  Nilsson*  nous  éclaire  davantage  sur  cette 
espèce,  et  il  ajoute  que  sur  les  côtes  de  Nor- 
w^ége  des  individus  atteignent  jusqu'à  dix 
pouces. 

Elle  paraît  commune  sur  le  littoral  de  la 
Norwége  et  dans  la  mer  Baltique. 


1.  Niisson ,  Prod.  Ichth.  Scand.,  p.  76,  n.°  /|. 

i3.  12 


478  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

Le    CrÉNI LABRE    DE    PeNNANT. 

{Crenilahrus  Pennandi,  nob.;  Goldsinnj,VQm\zxA.') 

Devia-l-on  considérer  comme  étant  d'une 
espèce  différente  du  précédent,  le  goldsinny 
de  Pennant*,  figuré  dans  l'édition  in-4.°  du 
British  Fauna,  et  qui  a  été  copié  par  Bonna- 
terre  dans  les  planches  de  l'Encyclopédie  mé- 
thodique ? 

Il  ne  me  paraît  différer  du  précédent  que  par 
l'absence  de  la  tache  des  côtés  de  la  queue,  et  je 
lui  vois  aussi  quelques  rayures  sur  les  joues,  que 
ne  paraît  pas  avoir  le  poisson  de  Blochj  car  je  ne 
crois  pas  qu'on  doive  prendre  pour  telles  les  varia- 
tions de  couleur  que  la  pelniure  de  l'iclithyologiste 
allemand  indique  au-dessous  de  l'œil. 

Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  ce  s^old- 

sinny  n'est  pas  le  même  que  celui  dont  Pen- 

nant  avait  parlé  d'abord  d'après  Ray,  lequel 

est  devenu  le  labrus  cornuhius  de  Gmelin  et 

des  autres  ichthyologistes ,  et  qui  a  été  ensuite 

confondu  avec  les  espèces  dont  nous  traitons 

ici. 

he  Crénilabre  de  Couch. 

{^Crenilahrus  Couchii^  nob.) 

Un  autre  poisson,  très -voisin  de  ceux-ci, 


1    Brii,  zool. ,  III,  p.  :i5i,  pi.  47- 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  179 

mais  qui  me  paraît  encore   distinct,   est  le 
CoT^kwing  de  M.  Couch/ 

Il  le  représente  trois  fois  aussi  long  que  large, 
comprimé;  à  mâchoires  égales;  à  bouche  étroite, 
peu  fendue;  à  dents  régulières. 

Les  nombres  de  l'anale  sont  encore  un  peu  diffé- 
rents. 

D.  16/9  ;  A.  3/95  C.  14;  P.  14;  V.  1/5. 

La  couleur  de  la  tête  et  du  dos  est  brune;  les 
côtés  sont  d'un  vert  tendre  avec  de  nombreuses 
bandes  rouges  et  brillantes;  les  opercules  sont  rayés 
de  rouge  et  de  vert;  une  tache  noire  est  marquée 
de  chaque  côté  de  la  queue.  Mais  l'auteur  ne  parle 
pas  de  tache  noire  derrière  l'œil,  et  je  n'en  vois  pas 
non  plus  sur  la  figure. 

Ce  n'est  donc  pas  le  crënilabre  inëlopej  ce 
n'est  pas  non  plus  le  crénilabie  norwëgien  : 
l'espèce  se  rapproche  plus  du  crénilabre  bossu; 
mais  les  proportions  et  les  nombres  diffèrent. 
En  tous  cas  je  ne  pense  pas  comme  M.  Yarell, 
et  je  ne  crois  pas  qu'il  faille  réunir  ce  poisson  à 
son  lahrus  goldsinnj.  Si  les  individus  qui  lui 
ont  été  envoye's  par  M.  Couch  le  confirment 
dans  cette  opinion,  il  faut  avouer  que  la  des- 
cription de  cet  auteur  et  sa  figure  sont  bien 
incomplètes. 


1.  Couch,  Fishes  new  îo  the  Brit.  Faun.,  apud  Loudon  Mag. 
ofnat.  hist.,  vol.Y^  V'  ^1  y  %•  4- 


18Ô  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

M.  Couch  a  trouvé  cette  espèce  sur  la  côte 
de  Cornwall. 

Le  Crénilabre  de  Donovain. 

{Crenilahrus  Donovani,  nob.  ;  Labrus  corniihius , 

Donovan.  ) 

Donovan*  a  aussi  un  crénilabre  confondu 
par  lui,  sous  le  nom  de  labrus  cornubias, 
avec  le  goldsmny  de  Ray  ou  de  Jago,  et  qu'il 
représente 

d'un  vert  plus  ou  moins  doré  ou  rougeâtre  sur  le 
dos,  traversé  par  six  bandes  verticales  brunes,  dont 
trois  remontent  sur  la  dorsale  ,  où  elles  laissent 
de  grosses  taches.  Les  côtés  et  le  ventre  deviennent 
jaune  verdâtre,  plus  ou  moins  argentés,  et  sont  rayés 
iongitudinalement  de  verdâtre  ou  de  bleu  :  on  voit 
une  taclie  noire  de  chaque  côté  de  la  queue,  et  une 
bande  bleu  fonce'  a  la  base  de  la  caudale.  La  pecto- 
rale a  sur  l'insertion  des  rayons  un  arc  bleu  bordé 
d'orangé.  La  nageoire  du  dos  est  verte  et  couverte 
de  petits  traits  bleus  sur  la  membrane  entre  chaque 
rayon  épineux  :  sur  la  portion  molle  ce  sont  des 
traits.  La  caudale  est  arrondie  et  jaunâtre  au  milieu, 
plus  verte  au  bord  ou  pointillée  de  citron  verdâtre 
sur  l'anale,  dont  le  fond  est  gris  verdâtre;  il  y  a 
deux  grosses  taches  oblongues  brunes,  et  le  reste  est 
pointillé  de  verdâtre.  Il  n'y  a  point  de  rayures  sur 
la  joue,  et  Donovan  ne  parle  pas  de  tache  derrière 
l'œil. 

1.  Donovan,  Nat.  hist.  of.  Brit, fish. ,  roi.  III,  pi.  LXXII. 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  181 

M.  Yarell  a  donné  une  seconde  figure , 
non  moins  jolie,  de  ce  petit  crënilabie,'car 
tous  ses  caractères  conviennent  parfaitement 
au  goldsinnj  de  Donovan;  je  lui  vois  cepen- 
dant une  tache  noire  derrière  l'œil. 

Voici  les  nombres  tels  que  M.  Yarell  les 
compte  : 

D.  16/8;  A.  3/10;  C.  14;  P.  14;  V.  1/5. 

MM.  Donovan  et  Couch  indiquent  leurs 
poissons  comme  étant  rares  sur  les  côtes 
d'Angleterre.  Selon  M.  Yarell,  celui-ci  serait 
plus  facile  à  se  procurer;  car  il  en  a  plu- 
sieurs individus  depuis  un  pouce  et  demi 
jusqu'à  quatre  pouces  de  longueur. 

Comme  il  n'y  a  point  de  rayures  sur  les 
joues,  je  ne  puis  le  croire  de  la  même  espèce 
que  le  Corkwing  de  M.  Couch. 

Je  ne  le  crois  pas  le  goldsinnj  de  Pennant, 
qui  a  des  rayures  sur  la  joue,  et  pas  de  ta- 
ches aux  côtés  de  la  queue. 

C'est  encore  moins  le  labrus  cornubius  de 
Risso. 

M.  Audouin  a  rapporté  de  Granville  de 
très-petits  individus  de  cette  espèce;  ils  n'ont 
que  deux  pouces  à  deux  pouces  et  demi.  On 
voit  encore  les  taches  de  la  dorsale  et  de 
l'anale. 


182  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Mais  je  m'étonne  que  tous  ces  auteurs  l'aient 
confondu  avec  le  labrus  cornuhius  de  Ray,  qui 
est  si  facile  à  distinguer  par  sa  tache  noire  sur 
le  devant  de  sa  dorsale  et  sur  le  dos  de  la  queue. 

Le  Crénilabre  verdatre. 
{Crenilabriis  viresceiis ,  nob.) 

Le  poisson  que  Bloch^  a  donné  parmi  ses 
lutjans,  et  qu'il  tenait  d'un  marchand  ham- 
bourgeois,  me  paraît  assez  voisin  du  labre 
rone  d'Ascanius,  et  de  tous  ceux  que  je  men- 
tionne ici;  mais  je  crois  devoir  encore  le  con- 
sidérer comme  d'une  espèce  distincte. 

L'enluminure  de  Bloch  le  représente  jaune  ver- 
datre sur  le  dos,  argenté  sur  le  ventre,  rayé  d'une 
douzaine  de  lignes  longitudinales  roussàtres;  les  na- 
geoires  sont  vertes  avec  deux  raies  rousses  longitu- 
dinales sur  la  dorsale  et  sur  l'anale  :  deux  autres, 
verticales,  sur  la  caudale.  Il  y  a  aussi  deux  traits 
obliques  sur  la  joue  et  sous  l'œil;  mais  point  de  tache 
noire  ni  derrière  l'œil,  ni  sur  les  côtés  de  la  queue. 
Voici  les  nombres  de  Bloch  : 

D.  16/9  ;  A.  3/9  ;  G.  16  ;  P.  12  ;  V.  1/5. 
Ce  ne  peut  être  le  lahrus  melops,  s'il  est 
vrai  qu'il  n'y  ait  pas  eu  de  tache  noire  der- 
rière l'œil.  Ce  n'est  pas  non  plus  le  corkwln^ 

1.  Lutjanus  virescens  ,^\oc\\,  20^. 


CHAP.   III.    CRÉNILABRES.  183 

de  M.  Couch,  car  il  n'y  a  pas  de  tache  à  la 
queue. 

Il  ne  peut  être  aussi  de  l'espèce  du  creni- 
labrus  Donovani,  qui  a  des  bandes  verticales 
sur  le  corps  et  sur  les  nageoires,  une  tache 
près  de  la  queue  et  même  derrière  l'œil,  selon 
M.  Yarell.  Il  parait  plus  voisin  d'une  espèce 
de  Pallas ,  dont  je  parlerai  plus  loin. 

Le  Crénilabre  BRimNiCH. 

{Crenilahriis  Brùnnichii ;  Lut j anus  Brûnnichii, 
Lacép.) 

A  côte  de  ces  espèces  à  seize  rayons  épi- 
neux à  la  dorsale ,  et  si  variées  dans  l'ocëan 
septentrional  de  l'Europe,  il  faut  placer  aussi 
plusieurs  poissons  à  nombre  égal  d'épines  à 
la  dorsale,  et  qui  se  distinguent  cependant  du 
crenilahriis  melops  par  des  caractères  tirés  de 
la  couleur  ou  quelquefois  de  leurs  dents. 

Tel  est  d'abord  celui  que  je  regarde  comme 
le  lut  j  an  Brûnnich,  que  Lacépède  avait  tiré 
de  Brûnnich,  et  qui  me  paraît  aussi  le  même 
que  celui  nommé  par  Bloch  (pi.  2^1,  fig.  2) 
lutjanus  hidens, 

à  cause  de  la  saillie  des  deux  dents  mitoyennes  de 
la  mâchoire  supérieure,  qui  sont  plus  fortes  que  les 
autres  et  dirigées  en  avant.  Ce  poisson  a  du  reste 


484  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

la  forme  de  noire  crenilabrus  îapina ,  mais  avec  le 
museau  un  peu  plus  court. 

D.  16/9;  A.  3y9,  etc. 

Il  se  décolore  tout-à-fait  dans  l'esprit  de  vin;  mais 
il  conserve  une  grande  tache  noire  ou  bleu  foncé, 
à  la  base  de  la  pectorale,  qui  le  fait  aisément  recon- 
naître. La  peau  du  sous-orbitaire  est  aussi  colorée  en 
bleu;  et  les  trois  nageoires  verticales,  et  surtout  la 
caudale,  sont  piquetées  de  petits  points  toujours 
visibles. 

Le  poisson  vivant  est  peint  de  couleurs  agréables; 
nous  pouvons  le  juger  par  le  dessin  que  M.  Lauril- 
lard  a  bien  voulu  nous  donner.  Sur  un  fond  olive, 
qui  passe  à  l'orangé  sous  le  ventre,  le  corps  est  rayé 
longitudinalement  par  treize  lignes  bleues  du  plus 
bel  outremer;  quatre  traits  de  même  couleur  pas- 
sent en  chevrons  sur  le  dessus  de  la  tête,  et  un  autre 
forme  un  cercle  sur  la  tempe.  Une  ligne  plus  pâle 
traverse  obliquement  de  l'œil  sous  la  mâchoire  infé- 
rieure. Le  dessous  de  la  gorge  est  bleu;  le  devant  de 
la  tête,  sous  le  sous-orbitaire,  est  olive  comme  le 
dos;  la  dorsale  est  jaune  olivâtre,  bordée  de  bleu; 
à  la  base  des  quatre  premiers  rayons  épineux  il  y  a 
un  trait  bleu,  et  deux  rangées  de  points  bleus  sur  le 
reste.  L'anale  est  un  peu  orangée,  bordée  de  bleu  et 
toute  couverte  de  points  de  cette  nuance.  La  cau- 
dale, jaune  orangé  à  la  base,  a  son  tiers  postérieur 
bleu.  La  pectorale  est  jaune  pâle,  et  porte,  sur  la 
portion  qui  rattache  les  rayons  au  bras ,  une  grosse 
tache  bleu  foncé.  On  voit  par  ce  que  j'ai  dit  plus 
haut   que  c'est  la  seule  tache  qui  persiste  sur  le 


CHAP.    III.    CRÉNILABRES.  185 

corps,  et  qui  se  conserve  dans  l'eau-de-vie  aussi  long- 
temps que  l'on  garde  le  poisson.  J'en  ai  des  individus 
devenus  tout  blancs,  qui  ont  cette  tache  rousse  très- 
manifeste. 

Leur  canal  intestinal  fait  trois  replis.  Le  péritoine 
est  grisâtre.  La  vessie  aérienne  est  ovalaire,  alongée, 
et  ses  parois  sont  très-épaisses. 

Son  squelette  a  treize  vertèbres  abdominales  et 
dix-sept  caudales.  Le  crâne  est  arrondi,  assez  bombé 
en  arrière.  Sa  crête  mitoyenne  est  haute,  peu  large 
et  un  peu  en  pointe  conique. 

Nos  individus  sont  longs  de  quatre  pouces, 
Ils  nous  sont  venus  de  Marseille  par  M.  Cu- 
vier;  de  Nice ,  par  MM.  Risso ,  Savigny  et  Lau- 
rillard;  de  Rome  et  de  Naples,  par  M.  Savi- 
gny ;  de  Messine,  par  M.  Bibron;  de  Palerme, 
par  M.  Constant  Prévost;  de  Malte ,  par  le  doc- 
teur Leach;  de  Malaga,  par  M.  Bâillon,  et 
d'Iviça,  par  Laroche. 

Ce  petit  poisson  estreconnaissable  aux  lignes 
bleues  serpentiformes  dont  parle  Briinnich* 
parmi  ses  labres  qui  lui  paraissent  encore  diffi- 
ciles à  déterminer.  Bonnaterie  a  fait  de  cette 
description  son  lahrus  serpentinus ^  que  M.  de 
Lacépède  a  placé  dans  ses  lutjans,  sous  le  nom 
que  nous  avons  adopté.  Mais  cette  même 
espèce  se  trouve  encore  un  peu  plus  loin  dans 

\.  Fisc.  Mass.,  p.  56,  n.°  72. 


'1  8()  LIVRE  XVI.    LAEROÏDES. 

Brûiinicli,  car  on  ne  peut  douter  un  seul  ins- 
tant que  ce  ne  soit  son  perça  inediterranea , 
qu'il  a  eu  le  tort  de  prendre  pour  le  poisson 
de  Linnë,  lequel  est  de  l'espèce  suivante. 
Lacëpède  a  confondu  ces  deux  espèces  dans 
son  lutjan  méditerranéen;  et  M.  Risso  a  copié 
toutes  ces  erreurs,  car,  à  la  suite  l'un  de  l'au- 
tre ,  il  a  un  créniiabre  me'diterranëen  et  un 
crënilabre  Biûnnich,  qui  bien  certainement 
ne  sont  que  de  la  même  espèce. 

C'est  diU^sWe lut j anus hidens àe^Xoch,  quoi- 
que le  dessinateur  ait  interrompu  la  ligne  la- 
térale. 

Le  Crénilabre  méditerranéen. 

(  Crenilahrus  mediterraneus ,  nob.  ) 

La  Méditerranée  nourrit  encore  un  autre 
crénilabre,  semblable  au  précédent 

par  ses  dénis  saillantes,  par  les  lâches  de  la  base 
de  la  pectorale;  mais  qui  en  diffère,  parce  qu'il  a 
toujours  une  tache  noire  sur  le  haut  du  tronçon  de 
la  queue,  près  de  l'insertion  des  rayons  de  la  cau- 
dale, et  par  la  teinte  bleue  de  l'anus;  la  tache  de  la 
pectorale  est  aussi  plus  étroite;  les  nageoires  verti- 
cales n'ont  pas  les  petits  points  que  nous  avons  signa- 
lés sur  l'autre  espèce. 

Les  nombres  sont  les  mêmes. 

D.  16/9;  A.  3/9. 


CHAP.  HT.    CRÉNILABRES.  487 

Le  reste  du  corps  est  brun  foncé  sur  le  dos ,  avec 
quelques  lignes  noirâtres  longitudinales;  blanc  sous 
le  ventre. 

Celle-ci  paraît  rester  un  peu  plus  petite,  et  ne 
pas  dépasser  quatre  pouces. 

Marseille,  Toulon ,  Nice,  Messine,  Paleime, 
sont  les  difFérens  points  dont  nous  avons  reçu 
cette  espèce. 

Nous  en  avons  reconnu  deux  variétés  nota- 
bles. L'une  vient  de  Toulon  :  elle  a  dix-sept 
rayons  épineux  à  la  dorsale  ;  l'individu  est  long 
de  cinq  pouces.  L'autre ,  rapportée  de  Naples 
par  M.  Savigny,  en  a  dix-huit  :  il  n'a  que  quatre 
pouces.  Peut-être  que  ces  différences  de  nom- 
bres coïncideront  avec  d'autres  caractères  et 
serviront  encore  à  établir  deux  nouvelles  es- 
pèces. 

C'est  bien  certainement  celle  que  Linné 
a  décrite  dans  le  Musée  du  prince  Adolphe- 
Frédéric  ',  sous  le  nom  de  perça  mediterranea, 
et  que  Biùnnich  a  cru  être  identique  à  celle 
qu'il  décrivait  et  dont  nous  venons  de  parler. 
Cette  erreur  a  été  copiée  par  Lacépède  et  par 
M.  Risso.  Mais  Briinnich  avait  aussi  ce  créni- 
labre  parmi  ses  labres  douteux;  car  la  des- 
cription qu'il  a  donnée  (p.  57,  n."  73)  convient 

1.  Mus.  Ad.  Fr.  Prod.,  t.  II,  p.  85. 


]  88  LIVRE  XVI.    LABROIDES. 

parfaitement  pour  les  couleurs.  Il  n'y  a  compté 
que  quinze  rayons  épineux  à  la  dorsale. 

Bonnaterre  a  fait  de  cette  description  son 
lahrus  cœruleo  -vittatus y  qui  est  devenu  le 
lutjan  marseillais  de  Lacépède. 

Cette  synonymie  a  été  employée  par  M.  Risso 
pour  un  autre  crénilabre,  à  quatorze  rayons 
épineux  à  la  dorsale,  et  qui  n'est  certaine- 
ment pas  le  poisson  de  Briinnicli. 

Gmelin  avait  aussi  employé  la  description 
de  Brimnich,  et  en  avait  fait  son  lahrus  uni- 
maculatus ,  qui  a  été  cette  fois  réuni  par 
Lacépède  au  labre  marseillais.  Mais  Gmelin 
en  a  rapproché  a  tort  comme  une  variété,  la 
description  tirée  du  Spolia  maris  Aclriatici 

(p-97)- 

C'est  plutôt  à  ce  crénilabre  qu'au  précé- 
dent qu'il  faut  rapporter  le  lahrus  pittima  de 
Rafinesque.  Je  ne  fais  ici  mention  de  cet  auteur 
que  pour  avertir  le  lecteur  qu'il  m'a  été  im- 
possible de  reconnaître  la  plupart  des  espèces 
mentionnées  dans  son  ouvrage. 

Je  ne  le  regarde  pas  comme  de  la  même 
espèce  que  le  ^oldsinnj  de  l'Océan  ou  au- 
tres crénilabres,  dont  il  est  parlé  plus  haut, 
parce  que  la  position  de  la  tache  et  les 
autres  distributions  des  couleurs  ne  sont  pas 
les  mêmes. 


CHAP.  III.  CRÉNILABRES.  i  89 

Le  Crénilabre  de  Bory. 

{Creiîilahrus  Bory  anus,  Risso;  Crenilabrus  nigres- 
cens,  Risso.) 

Je  trouve  encore,  parmi  les  poissons  re- 
cueillis à  Nice  par  M.  Laurillard ,  un  créni- 
labre 

ayant  une  tache  noire  cerclée  de  jaune  à  la  base  de 
la  pectorale,  qui  est  roussfitre  et  sans  tache  sur  sa 
membrane  et  ses  rayons;  la  tête  et  le  dos  sont  d'un 
vert  assez  foncé  ;  le  ventre  orangé ,  et  les  flancs  rayés 
de  treize  bandes  longitudinales  bleues;  on  volt  des 
rayures  ondulées  et  anastomosées,  de  même  teinte, 
sur  la  tête,  sur  la  gorge  et  sur  le  devant  de  la  dorsale. 
Cette  nageoire,  bordée  de  bleu ,  est  d'un  roux  verdàtre 
à  la  base,  couverte  de  deux  rangées  longitudinales  de 
points  bleus;  sur  l'anale,  qui  est  orangée  et  lisérée  de 
bleu,  il  y  a  quatre  à  cinq  rangées  de  points;  la  caudale 
n'offre  aucune  tache,  elle  est  orangée  à  la  base,  et 
bleue  sur  tout  le  bord  ;  la  ventrale  a  la  même  disposi- 
tion de  couleur ,  qui  est  partout  du  plus  bel  outremer. 
Ce  qui  le  dislingue  des  deux  précédens,  ce  sont 
deux  bandes  verticales  d'un  roux  brunâtre  sur  la 
fin  de  la  queue,  sans  s'étendre  sur  les  rayons  de  la 

caudale. 

D.  16/9;  A.  3/11,  etc. 

Nos  individus  sont  longs  de  cinq  à  six 
pouces.  Les  pécheurs  de  Nice  l'ont  donné  à 
M.  Laurillard  sous  le  nom  de  rouquié  nègre. 

En  lisant  la  description  de  M.  Risso ,  il  est 


190  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

impossible  de  méconnaître  dans  ce  poisson  son 
crenilahrus  Bojycmus.  Les  seules  différences 
consistent  en  ce  qu'il  ne  parle  que  d'une  seule 
bande  sur  la  queue,  et  qu'il  leur  donne  un 
rayon  épineux  de  moins.  Mais  je  ne  puis  douter 
non  plus  que  ce  ne  soit  aussi  son  crenilahrus 
ni^rescens y  car  il  a  ainsi  déterminé  le  dessin 
pris  sur  le  frais ,  que  M.  Laurillard  a  exécuté 
à  Nice.  Or,  dans  ce  dessin  les  bandes  cauda- 
les sont  clairement  marquées,  et  cependant 
M.  Piisso  n'en  a  pas  fait  mention  dans  la  des- 
cription de  son  crénilahre  noirâtre. 

Grénilabre  a  sourcils  d'or. 
{Crenilahrus  chrjsophus ,  Risso.) 

M.  Risso  parle  encore  d'un  crénilabre ,  voisin 
de  ceux-ci,  et  que  je  n'ai  pas  retrouvé  dans 
les  nombreux  individus  de  la  collection  du 
Cabinet  du  Roi. 

Suivant  cet  auteur  le  corps  est  ovalaire,  d'un  beau 
vert  pré  uniforme  et  sans  aucunes  taches;  le  des- 
sous est  argenté;  la  bouche  est  bleuâtre,  armée  de 
dents  antérieures  plus  fortes,  une  bande  dorée  colore 
le  sourcil;  toutes  les  nageoires  sont  vertes;  la  tache  de 
la  base  des  pectorales  est  de  couleur  verte  et  foncée. 
D.  16/10;  A.  3/8;  C.  14;  P.  14:  V.  15. 

La  femelle  seule  aurait,  selon  M.  Risso,  une  trace 
de  tache  sur  le  bout  de  la  queue. 


CHAP.  m.   CRÉNILABRES.  191 

La  taille  de  ce  poisson  est  de  quatre  à  cinq 
pouces.  11  habite  parmi  les  rochers ,  et  se  mon- 
tre en  plus  grande  abondance  sur  la  côte  de 
Nice,  au  mois  d'Octobre. 

Le  Crénilabre  de  Bâillon. 
{Crenilahrus  BailloTii ,  nob.) 

J'ai  reçu  de  la  baie  de  Saint- Valéry,  près 
l'embouchure  de  la  Somme,  par  M.  Bâillon, 
un  crénilabre  qui  a  encore  une  tache  a  la  base 
de  la  pectorale,  et  dont 

le  corps  est  assez  semblable  à  celui  de  noire  creni- 
lahrus  pcwo.  La  hauteur  fait  le  tiers  de  la  longueur 
du  corps,  la  caudale  non  comprise,  et  qui  est  con- 
tenue huit  fois  dans  la  longueur  totale.  La  tête  est 
plus  courte  que  la  hauteur.  La  bouche  est  petite j 
les  dents  sont  égales,  sur  un  seul  rang. 

D.  14/10;  A.  3/13,  etc. 

Le  poisson  frais  avait  le  corps  d'un  gris  bleuâtre, 
passant  au  violet  sur  les  flancs.  Cinq  à  six  larges 
taches  bleues  noirâtres  descendaient  du  dos  en  s'é- 
vanouissant  sur  les  côtés;  cinq  à  six  séries  de  taches 
ou  traits  jaunes  étaient  tirés  sur  la  longueur  des 
flancs;  un  trait  jaune  oblique  passait  sur  la  nuque; 
et  d'autres  de  la  même  teinte  s'avançaient  sur  le  front. 
Au-dessus  des  yeux,  jusqu'à  l'extrémité  du  museau, 
quatre  raies  orangées  et  longitudinales  étaient  tracées 
sur  la  région  sous-orbitaire;  le  reste  de  la  joue,  sur 


492  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

un  fond  violet ,  était  tacheté  de  points  orangés.  L'o- 
percule n'avait  aucune  tache. 

La  dorsale  avait  sur  sa  portion  épineuse,  dont  le 
fond  est  violet,  un  trait  longitudinal  jaune,  et  une 
bordure  rosée  lisérée  de  jaune  pâle  :  sur  la  portion 
molle  la  bordure  rose  est  plus  large,  et  il  y  a  quatre 
à  cinq  rangées  de  points  jaunes.  L'anale  avait  beau- 
coup plus  de  rose  que  de  violet,  et  sur  les  derniers 
rayons  il  y  avait  des  points  jaunes.  La  caudale  était 
verte,  avec  une  large  et  belle  tache  rose  foncé  ou 
vineuse  sur  l'angle  supérieur  et  postérieur.  Les  pec- 
torales étaient  violacées,  avec  trois  bandes  verticales 
jaunâtres.  La  tache  de  la  pectorale  était  bleue  et  bordée 
d'orangé.  Enfin,  sur  les  ventrales  on  voyait  des  points 
jaunes. 

Cette  belle  espèce  devient  assez  grande,  car 
l'individu  a  près  de  huit  pouces.  Je  l'ai  aussi 
reconnu  dans  des  poissons  décolores  que  j'ai 
reçus  de  La  Rochelle  par  M.  d'Orbigny;  mais 
qui  conservent  encore  le  trait  de  la  base  de 
la  pectorale,  et  dont  les  taches  jaunes  des 
nageoires  effacées  se  dessinent  en  clair  sur 
la  membrane. 

C'est  avec  un  vrai  plaisir  que  je  dédie  cette 
espèce  à  mon  ami  M.  Bâillon ,  qui  a  rendu 
tant  d'autres  services  à  notre  ouvrage  par  ses 
recherches  sur  les  poissons  de  nos  côtes  de  la 
Manche. 


CHAP.  HT.  CRÉNILABRES.  195 

Le  Grénilabre  ocellé. 

{Crenilahriis  ocellatus ,  nob.j  Labrus  ocellatus , 
Forskal.) 

La  Méditerranée  nourrit  en  abondance  un 
petit  crënilabre  qu'il  est  facile  de  reconnaître 
dans  la  description  qu'en  avait  laissée  Forskal 5 
mais  dont  l'espèce  a  été  mal  caractérisée  et 
même  multipliée  par  ceux  qui  ont  copié  sans 
critique  cet  auteur,  et  ensuite  Briinnich,  qui 
en  a  aussi  parlé. 

Le  corps  est  un  ovale  dont  la  longueur  contient 
trois  fois  ou  trois  fois  et  demie  la  hauteur.  Son  préo- 
percule est  dentelé  tout  autour  de  l'angle  jusque 
sur  le  bord  inférieur;  et,  outre  ce  caractère  tiré  des 
formes,  nous  le  reconnaissons  à  la  tache  bleu  foncé 
presque  noire ,  qui  se  conserve  sur  le  haut  de  l'oper- 
cule après  la  mort  de  l'animal  et  même  après  un  long 
séjour  dans  l'esprit  de  vm  :  souvent  cette  tache,  lisé- 
rée  d'un  fin  trait  bleu  ou  blanc,  devient  un  ocelle. 
Une  tache  oblongue  de  même  couleur,  mais  moins 
foncée,  existe  au-devant  de  l'œil,  le  long  du  sous- 
orbitaire.  Une  troisième  tache,  mais  moins  arrêtée, 
se  voit  de  chaque  côté  de  la  queue  ;  et  sur  quelques 
individus  j'en  vois  une  petite  sur  le  commencement 
de  la  dorsale.  Le  fond  du  corps  est  un  brun  rou- 
geâtre,  plus  ou  moins  mêlé  ou  tacheté  de  bleuâtre. 
Les  nageoires  sont  jaunâtres,  avec  des  ocelles  bleu 
pâle.  Ceux-ci ,  plus  prononcés  sur  la  caudale ,  sont 

i3.  i3 


194  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

disposés  de  manière   à  faire  cinq  à  six  lignes   on- 
duleuses  sur  cette  nageoire. 

D.  14/10;  A.  3/9,  elc. 

Nous  en  avons  un  grand  nombre  d'indivi- 
dus chez  lesquels  nous  comptons  : 

D.  15/9;  A.  3/9,  etc. 
Enfin,  un  seul  s'est  trouvé  n'avoir  que  treize  rayons 
épineux,  de  sorte  qu'il  n'a  que  vingt-trois  rayons  à 
la  dorsale,  au  lieu  de  vingt-cinq,  en  y  comprenant 
les  rayons  branclius. 

Ce  petit  ciënilabre  nous  est  venu,  comme 
les  précëdens,  de  Toulon,  de  Marseille,  de 
Nice,  de  Naples,  de  Palerme,  de  Messine, 
de  Napoli  de  Romanie,  d'Alexandrie  d'Egypte, 
d'Iviça  et  de  Malaga. 

C'est  bien,  comme  nous  l'avons  dit,  le  pois- 
son que  FoiskaP  a  nommé  lahriis  ocellatus, 
et  qui  a  pris  rang  sous  ce  nom  dans  la  trei- 
zième édition  du  Systenia  naturce. 

Briinnich^  en  a  aussi  parlé,  et  je  crois  même 
qu'il  a  décrit  deux  des  variétés  que  nous  avons 
signalées,  l'une  sous  le  n.°  7  i,  et  l'autre  sous  le 
n.°  74  de  ses  labres  incertains-  Cette  dernière 
ne  se  distingue  en  effet  de  la  première  que 
par  la  tache  mentionnée  sur  la  dorsale;  et  la 
première  ne  diffère  certainement  pas  de  celle 

1.  Forskai ,  Faun.  nrab. ,  p.  Sy,  ii.°  55. 

2.  Biiinnich,  Fisc.  Mass.,  p.  56  et  58. 


CHAP.  III.  CP.ÉNILABRES.  195 

de  Forskal.  Celle  sous  le  n°  -y  i ,  est  devenue  le 
lahrus  olwaceus  de  Gmelin,  et  la  seconde  son 
lahriis  venosus.  Ces  trois  espèces  nominales 
sont  reproduites  par  Lacëpède*:  deux  parmi 
ses  lut j ans,  et  la  dernière  est  même  inscrite 
dans  son  genre  Labre  sous  le  nom  de  lahrus 
reticulatiis^,  que  Bonnaterre  avait  déjà  em- 
ployé pour  changer  l'épithète  de  Gmelin. 

On  peut  dire  que  M.  Risso  a  bien  singuliè- 
rement embrouillé  l'histoire  de  ces  espèces, 
lui,  qui  aurait  dû,  au  contraire,  nous  faire 
bien  connaître  des  poissons  qu'il  peut  voir  et 
étudier  si  facilement  à  Nice. 

Nous  sommes  cependant  parvenus  à  bien 
reconnaître  ces  espèces  sur  ses  descriptions  in- 
complètes, et  dans  lesquelles  il  a  mêlé  ce  qu'il 
prenait  aux  auteurs  qu'il  consultait,  malheu- 
reusement, le  plus  souvent  dans  leurs  copistes. 
Nous  sommes  arrivés  à  ces  résultats  en  réu- 
nissant un  grand  nombre  de  ces  petits  poissons 
étiquetés  par  M.  Risso  soit  à  M.  Savigny,  soit 
à  M.  Laurillard;  nous  avons  comparé  ces  pré- 
tendues espèces,  et  nous  nous  sommes  assurés 
qu'il  a  souvent  donné  la  même  espèce  à  ces 
deux  collecteurs  sous  deux  noms  différens. 


1.  Lacépède,  t.  IV,  p.  218,  Luij.  ocellahis ,  Liiij.  olivaceus. 

2.  Ejusd. ,  t.  III,  p.  5o8,  Lab.  maillé. 


496  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

Ainsi  on  trouve  dans  sa  première  édition* 
un  lutjanus  ocellatus,  sous  lequel  il  ne  cite 
que  Forskal,  qui  est  de  notre  espèce,  car  nous 
avons  vu  des  individus  ainsi  dénommés  par 
lui;  mais  il  a  un  labre  maillé^  qu'il  tient  de 
Briinnich.  Or,  il  ajoute  dans  cette  descrip- 
tion un  caractère  pris  d'une  autre  espèce, 
et  dont  Briinniclî,  effectivement,  ne  fait  pas 
mention ,  c'est  la  couleur  bleue  de  l'anus. 
Ainsi  son  lahrus  venosus  est  déjà  une  espèce 
factice;  et  il  la  rend  encore  plus  imaginaire 
dans  sa  seconde  édition  (p.  325  ),  car  il  ajoute 
une  large  tache  de  chaque  côté  de  la  partie 
supérieure  de  la  queue;  caractère  qu'il  em- 
prunte au  crénilabre  méditerranéen.  Le  nôtre 
a  quelquefois  une  petite  tache, souvent  effacée, 
mais  sur  le  milieu  de  la  base  de  la  caudale. 

Selon  M.  Bisso,  les  pêcheurs  de  Nice  le 
nomment  rouquié  ou  vachetto. 

L'examen  d'un  très-grand  nombre  d'indi- 
vidus de  cette  espèce  me  fait  croire  qu'il  faut 
encore  rapporter  à  notre  poisson  le  labrus 
ocellaris  de  Linné  ^.  Les  nombres  des  rayons  et 
la  petite  tache  noire  se  rapportent  assez  bien 
pour  que  l'on  puisse  admettre  ce  rapproche- 


1.  Risso,  Ichlh.  de  Nice,  p.  278.  —  2.  Ibid,,  p.  269. 
3.  Mus.  Ad.  Fr.  Prod. ,  t.  II,  p.  78,  n."  19. 


CHAP.  III.  CRÉNILABRES.  197 

ment,  qui  restera  toujours  douteux,  à  cause 
de  la  brièveté  de  la  description  linnéenne.  Ce 
labroïde  est  reste  parmi  les  labres  de  Lacëpède. 

Pallas  a  aussi  ce  poisson  sous  le  nom  de 
lahrus  perspicillatus  %  tout  en  reconnaissant 
son  identité  avec  le  lahrus  ocellatus  de  Fors- 
kal,  il  en  changeait  cependant  le  nom. 

Il  est  très-abondant  au  printemps  dans  la 
mer  Noire,  et  les  pécheurs  de  Théodosie  le 
rejettent  à  la  mer,  parce  qu'ils  le  regardent 
comme  d'une  nourriture  malsaine. 

Le  Crénilabre  de  Risso. 

{Crenilahrus  Rissoi^  nob.;  Luljanus  olwaceus , 
Risso ,  mais  non  Lacép.) 

Nous  avons  reçu,  étiqueté  par  M.  Risso  lui- 
même,  sous  le  nom  de  lut j anus  olwaceus^^ 
un  petit  crénilabre  si  voisin  du  précédent,  que 
M.  Savigny  lui-même ,  à  qui  nous  le  devons , 
le  regardait  comme  une  simple  variété. 

Cependant  nous  lui  trouvons  le  corps  plus  court, 
l'ovale  plus  régulier ,  le  profil  moins  concave  ;  les 
crénelures  du  bord  horizontal  du  préopercule  se 
portent  moins  en  avant,  et  les  nombres  vont  jusqu'à 
seize  dans  quelques  individus. 

D.  15  à  16/10  5  A.  3/9,  etc. 

1.  Pallas,  Faun.  Ross.,  t.  III,  p.  267. 


198  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

Le  corps  est  oliviâtre;  la  tache  de  l'opercule  peu 
marquée,  moins  que  celle  de  l'extrémité  du  museau. 
Je  ne  vois  pas  de  taches  ni  de  points  sur  les  nageoires  : 
celle  de  la  queue  est  réduite  à  un  point  noir. 

Ces  observations  me  font  croire  que  M.  Risso 
a  eu  raison  de  regarder  ce  poisson  comme 
étant  d'une  espèce  distincte.  Nos  individus 
viennent  de  Naples,  par  M.  Savigny,  ou  de 
Palerme.  Ceux-ci  sont  dus  aux  recherches 
éclairées  de  M.  Constant  Prévost.  Leur  lon- 
gueur varie  de  deux  à  trois  pouces. 

J'ai  admis  pour  synonyme  de  cette  espèce  le 
lutjcnius  olwaceuSy  puisque  M.  Piisso  Ta  ainsi 
déterminé;  mais  je  ferai  de  suite  remarquer 
que  sa  citation  de  Brùnnich  et  de  Lacépède 
sera  dans  ce  cas  mauvaise,  et  que  son  lutjanus 
olivaceus  ne  peut  être  regardé  comme  iden- 
tique de  celui  de  Lacépède,  ou  du  lahru,s 
olivaceus  établi  par  Gmelin  d'après  Brùnnich. 

Le  CrÉNI LABRE    LITTORAL. 

{Crenilabrus  littoralis,  Risso.) 

Parmi  ces  vachetta  des  pécheurs  nicéens 
M.  Risso  a  encore  distingué  une  espèce ,  dont  il 
n'avait  pas  osé  faire  mention  dans  sa  première 
édition. 

Elle  a  le  corps  alongé,  le  fond  argenté  verdatre 
sur  le  dos,  une  tache  bleue  à  l'opercule  et  une  noire 


CHAP.  III.  CRÉNILABRES.  1  99 

près  de  la  queue;  mais  elle  diffère  constamment  de 
la  précédente  par  de  grandes  bandes  longitudinales 
argentées,  qui  tranchent  agréablement  sur  le  fond 
verdatre  du  poisson.  La  gorge  est  traversée  par  dix 
raies  d'un  beau  bleu  foncé,  étendues  souvent  jusque 
sur  les  opercules,  La  tache  de  la  base  de  la  queue 
est  toujours  plus  grande. 

Voici  les  nombres  comptes  par  M.  Risso. 

D.  14/10;  A.  3/10;  C.  13;  p.  14;  V.  1/5. 

La  femelle  fraie  au  printemps.  On  les  trouve 
pendant  toute  l'année  sur  les  plages  couvertes 
de  galets. 

Le  Crénilabre  petite  tanche. 
{Creîiilahrus  tinca,  nob. ;  Lahriis  tinca^  Brima.) 

Un  autre  petit  crénilabre  de  la  Méditer- 
ranée, qui  est  parfaitement  reconnaissable 
dans  le  lut j anus  tinca  de  Briinnicli,  et  dont  la 
hauteur  est  comprise  trois  fois  et  demie  ou 
quatre  fois  dans  la  longueur  du  corps,  suivant 
l'ëtat  de  plénitude  du  ventre,  se  distingue 
encore  des  précédens  par 

son  corps  plus  épais  et  arrondi  sur  les  côtés,  l'épais- 
seur étant  moitié  de  la  hauteur.^  Le  museau  est  gros 
et  rond.  L'oeil,  écarté  de  l'autre  d'une  fois  son  dia- 
mètre ,  et  éloigné  du  bout  du  museau  d'une  fois  et 
un  tiers  cette  même  mesure ,  a  une  largeur  égale  au 
quart  de  la  longueur  -de  la  tête,  laquelle  est  con- 


200  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

tenue  trois  fois  dans  celle  du  corps ,  la  caudale  non 
comprise. 

Les  dénis  sont  toutes  égales  et  non  proclives;  les 
dentelures  du  préopercule  sont  toujours  manifestes 
et  ne  dépassent  pas  l'angle  arrondi  de  cette  pièce. 

D.  15/9;  A.  3/8,  etc. 

J'en  trouve  un  individu  qui  n'a  que  quatorze 
épines;  mais  il  a  un  rayon  mou  de  plus. 

La  joue,  l'opercule  et  l'interopercule  sont  cou- 
verts d'écaillés.  Je  vois  peu  de  pores  sur  les  parties 
nues  de  la  tête.  Il  y  a  une  trentaine  d'écaillés  entre 
l'ouïe  et  la  caudale;  chaque  écaille  est  petite,  oblon- 
gue,  membraneuse  dans  sa  partie  visible,  et  sa  portion 
radicale  a  douze  ou  quatorze  rayons  à  éventail. 

Sur  un  fond  rouge  lavé  de  rose,  le  poisson  a  une 
bande  brune  ou  bleu  foncé,  qui  va  du  bout  du  mu- 
seau au  dos  de  la  queue,  dans  la  largeur  du  diamètre 
de  l'œil,  qui  l'interrompt;  au-dessus  une  seconde 
raie  va  le  long  du  dos  sur  la  base  de  la  dorsale,  sans 
la  recouvrir  :  elle  avance  sur  le  dessus  de  la  tête  jus- 
qu'au bout  du  museau.  La  bandelette  rouge  qui  sépare 
ces  deUx  bandes  brunes  passe  au-dessus  de  l'œil, 
se  réunit  sur  le  dessus  de  la  tête  en  avant  des  yeux,  et 
y  forme  un  chevron.  Sur  le  ventre  il  y  a  trois  ran- 
gées longitudinales  de  points  de  la  même  teinte  que 
les  bandes,  et  de  chaque  côté  de  la  queue  et  au- 
dessus  de  la  ligne  latérale  une  petite  tache  noire. 
L'anus  est  coloré  en  bleu  brillant;  la  dorsale  est 
orangée  et  bordée  de  bleu  céleste;  les  autres  na- 
geoires ont  la  base  orangée.  Une  tache  bleue  est  à 
l'aisselle  de  la  pectorale.  Le  dessous  de  l'œil  et  de  la 


CHAP.  lîl.  CRÉNILABRES.  201 

mâchoire  inférieure  est  aussi  d'un  beau  jaune  orangé. 
Sur  le  frais  la  couleur,  selon  M.  Laurillard,  est 
également  rouge,  avec  deux  larges  bandes  vertes: 
une  qui  règne  le  long  de  la  base  de  la  dorsale,  et 
l'autre,  qui  commence  à  la  lèvre  supérieure,  passe 
à  travers  l'œil,  et  va  atteindre  à  la  caudale  au-dessous 
delà  ligne  latérale,  quand  elle  n'est  pas  encore  flé- 
chie, et  au-dessus  d'elle  après  sa  courbure. 

Nos  individus  ne  dépassent  pas  trois  pouces. 

Cette  description  est  faite  d'après  des  indi- 
vidus en  bon  état,  que  nous  devons  à  M.  Rie- 
ner,  qui  les  a  pris  à  Toulon.  Nous  en  avons 
reçu  d'autres  de  Marseille,  de  Nice,  par  MM. 
Risso  et  Laurillard;  de  Naples,  de  Gênes,  par 
M.  Savigny  ;  de  Sicile ,  par  M.  Bibron. 

Nous  ne  doutons  pas  que  ce  ne  soit  le  la- 
brus  tinca  de  Brïmnich;  mais  ce  ne  peut  être 
celui  de  Linné,  ainsi  que  nous  l'avons  fait  voir 
à  l'article  de  notre  crénilabre  paon. 

Il  est  toutefois  curieux  de  remarquer  que 
Gmelin,  que  Bonnaterre  et  Lacépède,  qui  à 
la  vérité  n'ont  fait  que  le  copier,  n'ont  pas  cité 
cette  espèce  si  claire  et  si  reconnaissable  de 
Briinnich,  lorsqu'ils  ont  fait  usage  de  descrip- 
tions que  ce  savant  naturaliste  regardait  lui- 
même  comme  incertaines. 

C'est  bien  certainement  le  poisson  dont 
M.  Bisso  a  voulu  parler  sous  le  nom  de  lut- 


202  LIVRE  XVI.  lalroïdes. 

janiis  tinca^  mais,  sauf  le  caractère  de  la  co- 
loration de  l'anus,  il  est  bien  évident  que  le 
reste  de  la  description  n'a  pas  été  étudié  sur  la 
nature,  et  sa  synonymie  est  encore  plus  fau- 
tive; car  dans  la  première  édition  il  ne  cite 
que  Pennant,  et  dans  la  seconde  il  y  ajoute 
Gmelin,  ce  qui  n'est  pas  plus  vrai;  et  dans 
cette  circonstance  M.  Risso  a  aussi  négligé  de 
se  servir  de  l'ouvrage  de  Brùnnicli  :  il  ne  l'a 
pas  cité. 

Le  Créni LABRE  Massa. 

(^Crenilahrus  Massa,  Risso.) 


.  V 


Voici  encore  un  petit  poisson  fort  abondant 
dans  toute  la  Méditerranée,  et  que  nous  fai- 
sons paraître  sous  le  nom  que  lui  a  imposé 
M.  Risso,  quoiqu'il  ait  été  connu  avant  lui 
par  Brûnniclî. 

Il  a  le  corps  plus  haut  et  plus  ovale  que  le  pré- 
cédent et  beaucoup  plus  comprimé.  La  hauteur  fait 
le  tiers  et  quelque  chose  de  la  longueur  totale;  l'é- 
paisseur est  moins  que  le  tiers  de  la  hauteur.  Le 
museau  est  pointu;  la  ligne  du  profil  monte  obli- 
quement à  la  dorsale;  le  préopercule  a  des  dente- 
lures fines  qui  ne  dépassent  pas  l'angle;  la  peau  nue 
de  la  tête  est  criblée  de  pores. 

D.  15/10;  A  3/9,  etc. 

La  couleur  est  rouge  ou  lie  de  vin,  niêlée  de  bleu 


chap.  ni.  crénilabres.  205 

sur  le  dos,  et  de  points  irréguliers  de  celte  couleur  sur 
les  côtés.  Une  tache  bleue  existe  de  chaque  côté  de  la 
queue,  mais  sous  la  ligne  latérale;  disposition  qui 
fait  facilement  distinguer  cette  espèce  de  la  précédeme. 
L'anus  n'offre  aucune  coloration  remarquable.  Les 
nageoires  sont  rougeâtres  ou  orangées  et  tachetées 
de  bleu  céleste.  Une  tache  bleue,  aussi  foncée  que 
celle  de  la  queue,  existe  sur  les  trois  premiers  rayons 
de  la  dorsale. 

Ce  petit  poisson,  de  la  taille  du  précédent, 
nous  est  venu  de  difterens  points  de  la  Mé- 
diterranée, où  nous  avons  eu  des  correspon- 
dans.  Ainsi  nous  le  possédons  de  Toulon,  par 
M.  Kiener;  de  Montpellier,  par  M.  Delille  ;  de 
Corse,  par  M.  Payraudeau;  de  Nice,  par  MM. 
Laurillard  etRisso;  de  Naples,  par  M.  Savigny; 
de  Napoli  de  Romanie,  par  M.  Reynaud;  du 
Bosphore,  par  M.  Virlet. 

11  est  aisé  de  reconnaître  notre  poisson  dans 
la  description  de  Brimnicli',  puisqu'il  dit: 
macula  Jiigra  infra  ad  basin  caudœ. 

Gmeliu  a  fait  de  cette  description  le  lahrus 
griseus^j  mais,  comme  il  avait  déjà  employé 
pour  sa  quatrième  espèce  ce  nom ,  M.  de 
Lacépède  a  changé  l'épithète  de  notre  créni- 
labre  en  celle  de  cinei^eus y  en  plaçant  cepen- 


L  Fisc.  Mass.,  p.  58,  n."  75.  —  2.  Sjst.  nai. ,  édiliou  i5, 
p.  1296,  n.°  64- 


204  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

dant  cette  espèce  parmi  ses  lutjans  à  côté  des 
lutjanus  ocellatiis  et  lutjanus  olwaceuSy  avec 
lesquels  elle  a  de  nombreuses  affinités. 

M.  Risso  a  repris  cette  description  de  Briin- 
nich  ou  peut-élre  de  Lacëpède  pour  établir 
dans  sa  première  édition  un  lutjanus  cinereus, 
qui  ne  reparaît  plus  dans  la  seconde,  où  le 
crénilabre  massa  seul  est  conservé.  Il  est  figuré 
dans  la  première  édition  (pi.  8,  fig.  26).  Il 
porte  à  Nice  le  nom  de  lan^aneu.  I^a  tache 
caudale  est  moins  apparente  sur  les  femelles. 
On  la  voit  sur  les  cotes  rocheuses  de  Nice,  en 
Mars,  Juin  et  Décembre. 

Le  Crénilabre  de  Cotta. 
{Crenilabrus  Cottœ j  nob.j  Lutjanus  Cottœ ,  Risso.) 

Les  collections  faites  à  Nice  par  M.  Lauril- 
lard  nous  ont  fait  connaître  une  petite  espèce 
de  crénilabre,  qui  nous  paraît  devoir  être  rap- 
portée à  l'espèce  décrite  par  M.  Risso,  dès  sa 
première  édition,  sous  le  nom  de  lut j an  Cotta. 

Elle  a  le  corps  plus  alongé  et  plus  rond  que  celui 
du  crenilabrus  massa;  mais  il  le  paraît  un  peu  moins 
que  celui  du  crenilabrus  iinca.  Les  dents  sont  plus 
fortes  et  plus  inégales. 

D.  14/10;  A.  3/8,  etc. 
Tout  le  corps  est  sur  un  fond  rougeâlre  grivelé 
è 


CHAP.  III.  CRÉNILABRES.  205 

OU  marbré  de  brun  ou  de  bleuâtre;  un  large  trait 
va  du  bout  du  museau  à  l'oeil,  sans  le  dépasser;  un 
autre,  au-dessous  de  l'œil,  s'étend  en  une  sorte  de 
bride  sous  la  mâchoire  inférieure  ;  un  autre ,  plus 
court,  le  précède.  Il  y  a  une  tache  bleue  sur  le  com- 
mencement de  la  dorsale;  une  autre,  souvent  mal 
terminée,  sous  la  base  de  la  queue.  La  dorsale  a  du 
brun  sur  sa  partie  épineuse,  et  un  très-fin  sablé  noi- 
râtre sur  la  portion  molle  ;  la  caudale  et  l'anale  sont 
pointillées  de  bleu. 

Notre  plus  grand  individu  a  trois  pouces  et 
demi. 

Outre  ceux  que  nous  devons  àM.Lauiillard, 
nous  avons  trouvé  des  individus  de  cette  même   ; 
espèce  parmi  les  poissons  rapportés  de  Napoli-.  >>,^ 
de  Romanie,  par  M.  Reynaud,  et  du  Bosphore,  ■  * 
par  M.  Virlet. 

Le   CrÉNI LABRE  PlOISSAL. 
{Crenilabrus  Roissalii,  Risso.) 

Un  autre  de  ces  crénilabres  a  encore  été 
mentionné  par  Biùnnich^,  mais  confondu  par 
Gmelin  avec  une  des  espèces  précédentes; 
aussi,  pour  plus  de  clarté,  nous  adoptons  un 
des  noms  sous  lesquels  M.  Risso  a  inscrit  cette 
espèce  dans  son  ouvrage. 

1.  Spol.  mar.  yldr.,  p.  97,  n."  10. 


206  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Ce  poisson,  de  forme  elliptique  et  régulière,  a  sa 
hauteur  comprise  trois  fois  dans  sa  longueur  totale; 
les  crénelures  du  préopercule  très-fines,  et  il  n'y  en 
a  point  sur  le  bord  horizontal. 

D.  15/9;  A.  3/9,  etc. 

Outre  la  tache  noire  que  cette  espèce  conserve 
sur  l'opercule  et  sur  le  sous-orbitaire,  entre  l'œil  et 
le  bout  du  museau,  elle  se  reconnaît  surtout  aux 
deux  plus  foncées  que  l'action  de  l'alcool  ne  déco- 
lore pas,  et  qui  sont  sur  la  base  des  trois  premiers 
et  des  trois  derniers  rayons  mous  de  la  dorsale.  Ces 
taches  sont  d'un  bleu-noirâtre  assez  foncé.  Quelques 
individus  ont  une  tache  grise  ou  brune,  peu  mar- 
quée, sur  les  deux  premiers  rayons  épineux,  et  d'au- 
tres entre  le  onzième  et  le  douzième  rayon  de  la 
dorsale  ;  on  en  voit  aussi  chez  d'autres  une  sur  les 
troisième,  quatrième  et  cinquième  rayons  mous  de 
l'anale.  Il  y  en  a  d'autres  qui  ont  une  tache  peu  mar- 
quée de  chaque  côté  de  la  queue. 

Le  corps  de  nos  individus,  décolorés  par  l'alcool, 
paraît  jaunâtre,  tantôt  marbré  de  brun  clair,  tantôt 
couvert  de  points  disposés  en  séries  régulières  et 
formant  huit  a.  neuf  lignes  longitudinales.  Ceux  de 
cette  dernière  variété  ont  des  lignes  brunes  sur  les 
joues. 

M.  Risso,  qui  les  a  décrits  frais,  dit  que  le  fond 
est  couleur  d'outremer,  nuancé  et  varié  de  lignes 
sinueuses  d'un  vert-jaunâtre  foncé,  qui  bordent  pres- 
que toutes  les  écailles;  la  gorge  et  l'abdomen  sont 
argentés,  glacés  d'azur,  et  avec  des  reflets  aurore/ 
La  dorsale  est  ornée  de  deux  grandes  taches  noires, 


CHAP.  m.   CRÉNILABRES.  207 

cerclées  de  fiiuve  ;  les  ventrales,  aurore  azuréj  les 
pectorales,  vert  jaunâtre,  avec  une  lunule  bleue  à 
leur  basej  la  caudale  est  colorée  comme  les  pecto- 
rales. 

Cette  espèce  atteint  près  de  cinq  pouces. 

Nous  lavons  reçue  de  Montpellier,  de  Tou- 
lon, de  Marseille,  de  INice,  de  Naples,  de 
Messine,  de  Malte,  dlviça;  et  le  nombre  des 
individus  montre  c[uelle  y  est  partout  fort 
commune. 

Nous  avons  parmi  ces  nombreux  crénilabres 
une  variété  assez  constante,  en  ce  quelle  a 

un  rayon  épineux  de  plus  à  la  dorsale. 

D.  16/9;  A.  3/9,  etc. 

Le  corps  paraît  aussi  plus  chargé  de  points  ou  de 
marbrures  noirâtres. 

Ils  viennent  tous  des  mêmes  lieux  que  les 
précédens. 

Le  grand  nombre  d'individus  que  j'ai  étu- 
diés comparativement  me  fait  croire  que  Brùn- 
nich  a  mentionné  cette  espèce  au  n.°  --ô,  p.  5g 
de  ses  Poissons  de  Marseille.  Je  crois  qu'il  a 
eu  sous  les  yeux,  en  rédigeant  cet  article,  une 
des  variétés  où  les  taches  de  la  dorsale  sont 
peu  apparentes:  aussi  n'en  parle-t-il  pas;  mais 
tout  le  reste  de  la  description  convient  par- 
faitement. 


208  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

Je  retrouve  une  seconde  fois  l'espèce  dans 
Brûnnich*,  et  par  une  description  dans  la- 
quelle elle  est  nettement  caractérisée  ;  l'auteur 
n'oublie  pas  ici  de  signaler  les  taches  noires  de 
la  dorsale.  Seulement  Brùnnich  s'est  trompé 
en  regardant  les  poissons  qui  faisaient  le  sujet 
de  cette  seconde  description  comme  une  va- 
riété de  son  lahrus  n.°  -y  3;  mais  comme  toutes 
ces  déterminations  étaient  restées  douteuses 
dans  l'esprit  de  Brïmnich,  c'était  aux  auteurs 
qui  travaillaient  après  lui  d'éclaircir  les  incerti- 
tudes, et  on  voit  que  les  moyens  étaient  pos- 
sibles. C'est  ce  que  ne  fit  pas  Gmelin,  car  la 
description  vague  sous  le  n.°  -^6  est  devenue 
son  lahrus  ^uttatus,  et  la  seconde,  plus  ca- 
ractéristique ,  est  restée  indiquée  comme  une 
variété  du  lahrus  unimaculatus. 

M.  de  Lacépède  a  admis , sans  plus  de  critique 
qu'à  son  ordinaire ,  le  travail  de  Gmelin ,  et  c'est 
ainsi  qu'une  espèce  déjà  signalée  parBriinnich 
est  restée  comme  inconnue,  et  que  M.  Bisso 
l'a  regardée  comme  étant  nouvelle  en  icbtliyo- 
logie,  et  qu'il  lui  a  imposé  un  nom  particulier 
dès  sa  première  édition.  C'est  en  effet  son  lut- 
jan  Roissal%  mais  il  la  reproduit  tout  de  suite 


1.  SpoL  mar.  Adr. ,  p.  97,  n."  10. 

2.  Risso,  Ichth.  de  Nice  ;  p.  276,  pi.  VIII,  %.  28. 


CHAP.  m.  CRÉNILABRES.  209 

en  double  emploi  ;  car  ce  n'est  qu'une  des  nom- 
breuses variétés  de  cette  espèce  qui  est  nom- 
mée lutjanus  Alherti^,  celle-ci  n'en  différant, 
suivant  la  description,  que  par  la  tache  noire 
de  l'opercule.  Or,  elle  existe  constamment  dans 
tous  les  individus  que  j'ai  vus  en  si  grande 
quantité.  D'ailleurs ,  les  nombres  sont  les 
mêmes  :  il  n'y  a  donc  pas  de  doute,  selon  moi, 
pour  cette  synonymie;  et  quoique  M.  Risso 
ne  l'ait  pas  dit,  il  me  paraît  probable  qu'il  a 
reconnu  lui-même  cette  identité,  puisqu'il  a 
fait  disparaître  ce  lutjanus  Alherti  de  sa  se- 
conde édition,  mais  sans  en  faire  connaître  le 
motif. 

Quant  à  son  lutjan  varie,  je  devrais  aussi 
le  rapporter,  et  sans  hésiter,  à  l'espèce  dont 
nous  parlons  ici  \  car  elle  porte  le  même  nom 
vulgaire,  et  M.  Risso  a  étiqueté  lui-même  à 
M.  Savigny  des  poissons  de  l'espèce  de  notre 
crénilabre  Roissal  sous  le  nom  de  lutjan  varié, 
mais  je  crois  voir,  en  lisant  sa  description, 
qu'elle  renferme ,  comme  plusieurs  autres,  un 
mélange  de  caractères  du  lutjan  Roissal  et  du 
lutjan  tigré. 

Or,  je  crois  aussi  qu'il  faut  encore  y  rap- 
porter  le    crénilabre  tigré^  de    la   seconde 

1.  Risso,  Ichlh.  de  Nice,  p.  323. 

2.  Ejusd. ,  ibid.f  2.*  édit. ,  p.  317. 

i3.  14 


210  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

édition  de  l'Iclithyologie  de  Nice.  Parmi  les 
nombreux  individus  de  cette  espèce  j'en  ai 
qui  ont  été  nommés  par  M.  Risso  lui-même ,  et 
ceux-là  montrent  parfaitement  les  deux  taches 
sur  la  dorsale.  D'ailleurs  on  peut  voir  que, sous 
les  rapports  des  nombres  de  rayons,  des  formes, 
de  la  tache  de  l'opercule,  de  la  coloration  de 
l'anus,  tous  ces  poissons  sont  de  la  même  espèce. 
La  tête  a  sur  les  joues  deux  lignes  noirâtres  plus 
nettement  marquées  que  sur  les  autres  variétés 
du  crénilabre  Roissal.  Les  points  noirs  dont  le 
corps  est  semé,  sont  disposés  en  bandes  trans- 
versales, assez  nettes  sur  quelques  individus. 
Suivant  M.  Risso ,  le  fond  de  la  couleur  est  de 
même  verdâtre;  mais  il  a  oublié  dans  sa  des- 
cription de  parler  de  taches. 

Bloch  avait  aussi  connu  cette  espèce,  et  il 
en  a  donné  une  figure  assez  reconnaissable 
sous  le  lahriis  quinqueinaculatus.  On  ne  peut 
deviner  pourquoi  Bloch  n'en  a  pas  fait  un  de 
ses  lutjans,  car  les  dentelures  du  préopercule 
y  sont  clairement  marquées;  il  a  seulement  un 
peu  exagéré  la  tache  qui  est  sur  le  devant  du 
museau,  et  même  celle  de  l'angle  de  l'oper- 
cule. Les  nombres  des  rayons  sont  absolument 
les  mêmes.  Bloch  dit  qu'il  a  reçu  ce  poisson 
de  son  ami  Spengler,  et  qu'il  est  originaire  de 
la  mer  de  Norwége. 


CHAP.  III.  CRÉNILABRES.  21  \ 

Nous  ne  l'avons  pas  reçu  de  mers  aussi  froi- 
des; mais  nous  savons  que  l'espèce  se  trouve, 
quoique  rarement,  dans  notre  oeëan  d'Eu- 
rope. M.  Bâillon  en  a  envoyé  au  Cabinet  du 
Roi  un  individu  péché  au  Croisic  sur  nos  côtes 
de  Bretagne.  Cependant  l'espèce  doit  être  rare, 
car  nous  ne  l'avons  rencontrée  qu'une  seule 
fois  depuis  tant  d'années  que  nous  recueillons 
les  poissons  de  nos  côtes.  Je  ne  la  trouve  men- 
tionnée dans  aucun  auteur  des  Faunes  du  Nord, 
et  si  S.  A.  R.  le  prince  Christian  de  Danemarck 
l'a  inscrite  sur  son  Catalogue  des  Poissons  du 
Danemarck,  il  a  soin  de  faire  remarquer  que 
c'est  sur  l'autorité  de  Bloch. 

M.  de  Lacépède  n'a  pas  manqué  de  repro- 
duire encore  cette  nouvelle  espèce  nominale, 
et  de  suivre  Bloch  en  en  faisant,  contrairement 
aux  principes  de  sa  classification,  un  labre; 
quoique,  s'il  eût  regardé  la  figure,  il  aurait  dû, 
sans  aucun  doute,  le  placer  parmi  ses  lutjans. 

Nous  voyons  par  les  travaux  de  Pallas  que 
l'espèce  avance  aussi  jusque  sur  les  côtes  ro- 
cheuses de  la  Tauride  :  c'est  son  labrus  œrusi- 
nosiis  du  Fauna  rossica  (t.  III,  p.  264).  Il  dit 
que  l'espèce  vit  en  troupes,  mais  moins  nom- 
breuses que  le  crénilabre  paon.  Il  nous  apprend 
que  les  arêtes  du  poisson  cuit  deviennent 
vertes,  plus  foncées  que  celles  de  l'orphie. 


2i2  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Le  Crénilabre  a  cinq  taches. 
{^Crenilabrus  quinquemaculatus ,  Risso.) 

M.  Risso  a  donné,  dans  sa  seconde  édition, 
sous  le  nom  que  nous  adoptons  avec  lui,  un 
crénilabre  qui  est  différent  du  poisson  auquel 
Bloch  avait  donné  cette  épithète. 

C'est  une  espèce  voisine  ou  peut-être  une 
simple  variété  du  crénilabre  Roissal. 

Il  a  les  mêmes  formes,  les  mêmes  nombres  de 
rayonsj  mais  les  taches  de  la  dorsale  sont  au  nombre 
de  cinq  :  une  sur  les  deux  premières  épines;  la  se- 
conde, sur  les  cinquième,  sixième  et  septième  rayons; 
la  troisième,  sur  les  dixième,  onzième  et  douzième; 
celles  des  rayons  mous  sont  dans  les  mêmes  rap- 
ports avec  les  rayons  que  celles  du  crénilabre  Rois- 
sal. L'anale  a  deux  taches;  une  autre  existe  sur  l'o- 
percule ,  et  une  de  chaque  côté  de  la  queue. 

Nous  l'avons  reçu  de  Palerme  par  M.  Cons- 
tant Prévost. 

Nos  individus  ont  trois  pouces  de  longueur. 

Suivant  M.  Risso ,  les  couleurs  sont  aussi  un  peu 
différentes  du  précédent.  Le  dos  est  vert  tendre  et 
le  ventre  argenté,  et  tout  le  côté  est  parsemé  d'écaillés 
bleu  d'azur,  qui  forment  un  réseau;  le  tout  traversé 
par  des  raies  longitudinales  obscures.  Les  joues  et 
les  opercules  ont,  sur  un  fond  glacé  d'azur,  des 
lignes  obliques  d'un  brun  rougeàtre;  les  pectorales 
sont  vertes,  les  ventrales  bleu  de  ciel,  l'anale  rou- 


CHAP.  III.  CRÉNILABRES.  215 

geatre  mêlé  de  bleu;  la  caudale,  d'un  vert  pâle,  est 

polnlillée  de  rouge. 

Ils  vivent  sur  les  rochers  couverts  d'algues 
marines,  et  sont  plus  abondans  pendant  les 
mois  de  Novembre  et  Décembre. 

Le  Crénilabre  queue  noire. 
(Crenilabrus  melanocercus ,  Risso.) 

Un  autre  petit  crénilabre  de  la  Méditerranée 
a  été  décrit  pour  la  première  fois  par  M.  Risso, 
sous  le  nom  de  lutjanus  melanocercus ,  des- 
cription qui  a  pris  place  dans  la  seconde  édi- 
tion parmi  les  crénilabres. 

Il  a  le  corps  alongé;  sa  hauteur  fait  le  quart  de 
la  longueur  totale;  ses  dents  sont  petites  et  égales,  les 
crénelures  fines ,  et  s'étendant  autour  même  du  préo- 
percule, qui  est  très-rond. 

D.  17/6  ;  A.  3/9 ,  etc. 

D'autres  individus  ont,  comme  l'indique 
M.  Hisso  : 

D.  n/lj  A.  3/9,  etc. 

La  peau  de  la  tête  n'a  que  peu  de  pores.  Le  corps 
est  brun;  le  dos  est  rembruni  par  des  teintes  bleu 
foncé;  un  trait  de  cette  couleur  passe  au-dessus  de 
l'œil,  et  un  autre,  plus  délié  et  plus  noirâtre,  prend 
naissance  sous  le  bord  de  l'orbite,  se  contourne 
un  peu  de  manière  à  décrire  une  petite  courbe 
convexe  sous  le  sous-orbitaire ,  et  descend  ensuite 
pour  passer  sous  la  mâchoire  inférieure.  La  dorsale 


214  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

et  la  caudale  sont  rembrunies  et  lavées  de  bleu;  l'a- 
nale est  plus  claire  et  plus  bleuâtre;  la  base  de  la  cau- 
dale est  plus  pâle  que  la  plus  grande  portion  de  son 
extrémité,  laquelle  a  des  taches  ou  des  points  noi- 
râtres, qu'on  voit  aisément  en  étalant  celte  nageoire; 
la  pectorale  est  pâle,  avec  une  tache  noire  sur  l'ex- 
trémité des  rayons  supérieurs. 

Tel  est  le  poisson  conservé  daus  l'eau-de-vie;  mais 
M.  Risso ,  qui  le  décrit  d'après  le  frais,  lui  donne 
le  corps  rouge;  la  dorsale  plus  obscure  que  le  dos, 
et  à  reflets  bleuâtres;  les  pectorales  orangées;  la  cau- 
dale est  liséréede  blanc;  l'anale  est  rousse,  pointillée 
de  bleu. 

On  voit  cette  petite  espèce  sur  les  rochers 
garnis  de  plantes  marines,  pendant  les  mois 
de  Juin,  Juillet  et  Septembre. 

Ce  poisson  ne  dépasse  pas  trois  pouces.  On  le 
trouve  à  Marseille  et  à  Toulon ,  comme  à  Nice, 

Le  Crénilabre  bleu. 
( Crenilahrus  cceruleus,  Risso ,  2.^  édit. ,  pi.  X ,  fîg.  25.) 

Nous  croyons  devoir  séparer,  avec  M.  Risso, 
un  petit  poisson  tout  aussi  abondant  que  le 
précédent  dans  la  Méditerranée,  mais  qui  nous 
paraît  avoir 

le  corps  plus  court,  la  hauteur  n'étant  que  trois  fois 
et  demie  dans  la  longueur  totale;  l'ovale  du  corps 
plus  régulier;  le  museau  moins  obtus;  constamment 
seize  rayons  épineux  à  la  dorsale. 


CHAP.    m.    CRÉNILABRES.  215 

D.  16/7;  A.  3/8,  etc. 
Les  couleurs  sont  plus  claires  :  c'est  un  brun  uni- 
forme sans  teinte  bleue  sur  le  dos.  Le  trait  sous  l'œil 
est  peu  marqué  ;  la  base  de  la  caudale  est  d'un  beau 
jaune,  qui  tranche  vif  et  net  avec  le  noir  de  la  moitié 
externe  de  la  nageoire,  laquelle  est  lisérée  de  jau- 
nâtre; la  pectorale  n'a  jamais  de  noir  à  son  extré- 
mité, mais  on  voit  à  sa  base  un  petit  trait  plus  ou 
moins  effacé. 

Sur  le  frais,  M.  Risso  le  décrit  comme  ayant  le  corps 
bleu  céleste,  irisé  par  une  infinité  de  nuances  d'ou- 
tremer, de  rose,  de  pourpre;  le  ventre  est  d'un  aurore 
tendre;  l'iris  d'un  rose  brun;  les  nageoires  sont  bleues  j 
les  pectorales  et  les  ventrales  très-pâles. 

Les  nombreux  individus  que  nous  avons 
reçus  de  Marseille ,  de  Montpellier,  de  Toulon, 
de  Nice,  n'ont  que  deux  pouces  à  deux  pouces 
et  demi.  M.  Domnando  vient  de  nous  en  en- 
voyer un  d'Athènes ,  qui  a  trois  pouces  quatre 
lignes  de  longueur. 

La  femelle  fraie  à  la  fin  du  printemps.  On 
voit  cette  espèce  apparaître  parmi  les  algues 
marines  en  Mars  et  Avril. 

Le    CrÉNI LABRE   VERT  TENDRE. 

{Crenilabrus  chlorosochrus,  Risso.) 

Je  trouve  dans  l'Ichthyologie  de  M.  Risso 
(2.^  éd.,  p.  327,  pi.  io,fig.  24;eti.''ed.p.275, 
pi  8,  fig.  27)  un  crénilabre  qu'il  avait  men- 


21  6  LIVRE  XYI.  LABROÏDES. 

tioniié  avec  la  même  épithète  parmi  les  lut- 
jans  de  la  première  édition,  et  que  je  n'ai  pas 
vu  dans  les  collections  du  Cabinet  du  Roi. 
Le  corps  est  verdâlre,  nuancé  de  rouge,  traversé 
de  petites  lignes  obscures,  avec  une  laclie  noire  sur 
la  portion  dorsale  de  la  queue.  L'iris   est  vert,   à 
cercles  dorés,  les  nageoires  variées;  la  dorsale  par- 
semée de  points  rouges,  la  caudale  traversée  d'une 
bande  noire  à  sa  base ,  et  pointillée  de  rouge. 

D.  16/8;  A.  10;  C.  14;  P.  14;  V.  1/5. 
Cette  espèce  se  nomme  langaneu^  ce  qui 
prouve  que  les  pécheurs  la  confondent  avec 
le  crënilabre  Pioissal.  Elle  me  paraît  cependant 
ne  pas  lui  appartenir  :  toutefois,  si  l'on  compare 
les  figures  des  deux  éditions  de  l'ouvrage  de 
M.  Risso ,  on  voit  qu'elles  sont  assez  différentes 
pour  que  l'on  puisse  difficilement  conclure 
rien  de  positif  d'après  ces  documens. 

Le  Crénilabre  arqué. 
{Crenilahrus  arcuatus,  Risso.) 

Je  n'ai  pu  rapporter  à  aucune  des  espèces 
déposées  dans  le  Cabinet,  les  caractères  tirés 
de  la  description  que  M.  Risso  a  insérée, 
sous  ce  nom,  dans  la  seconde  édition  de  son 
Iclitliyologie. 

Le  dos  de  ce  poisson  est  coloré  en  pourpre  obscur; 

il  est  moins  foncé  sur  les  côtés,  plus  clair  sous  la 


CHAP.  m.  CRÉNILABRES.  217 

gorge  et  le  ventre,  qui  devient  argenté  violâtre  ou 
bleu.  Les  opercules  sont  bariolées  de  lignes  pourpres; 
il  y  a  une  tache  noire  près  de  la  caudale;  les  pecto- 
rales et  la  caudale  sont  d'un  jaune  roussâtre;  les 
autres,  variées  de  différentes  couleurs,  ont  des  taches 

noires. 

D.  16/9  ;  A.  3/10  j  C.  14;  P.  14;  V.  1/^5. 

Le  profil  du  dos  est  presque  droit,  et  celui  du 
ventre  est  très -arqué. 

Il  me  paraît  que  c'est  d'après  cette  forme 
que  M.  Risso  a  tiré  le  nom  spécifique  de  ce 
poisson,  qui  vit  sur  les  rochers  peu  profonds, 
et  que  l'on  trouve  sur  la  côte  en  Mars,  Avril 
et  Septembre. 

Le  Crénilabre  marqué. 
(  Crenilàbrus  notatus,  nob.  j  Lutjanus  notatus,  Bl.) 

Ce  n'est  qu'avec  doute  que  j'insère  à  la  suite 
de  ces  espèces  le  poisson  dont  Bloch  a  fait 
une  espèce  sous  le  nom  de  lutjanus  notatus. 

Bloch  le  représente  semblable,  par  ses  for- 
mes générales,  à  nos  petites  espèces  dont  je 
viens  de  parler.  Les  nombres  sont  à  peu  près 
les  mêmes. 

D.  14/8;  a.  3/10;  C.  16;  P.  14;  V.  1/5. 

D'ailleurs  rien  dans  la  description  ne  pré- 
sente de  note  spécifique,  Bloch  n'ayant  men- 
tionné que  des  traits  qui  conviennent  au 
genre. 


21  8  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

Il  le  peint  d'un  jaune  sale,  marqué  de  taches  bru- 
nes; une,  plus  foncée  et  noirâtre,  est  près  de  la  cau- 
dale, qui  est  traversée  par  trois  bandes  rousses.  La 
dorsale  a  une  série  de  taches  rousses  sur  la  partie 
épineuse,  et  deux  séries  sur  la  portion  molle.  La 
pectorale  et  la  ventrale  ont  deux  bandes  brunes.  Je 
vois  trois  bandes  brunes  sur  l'anale. 

Bloch  dit  ce  poisson  originaire  des  Indes 
orientales. 

Le  poisson  me  paraît  très-voisin  de  notre 
Cr,  Donoi^ani  ou  de  notre  Cr.  tinca  de  la  Mé- 
diterranée 3  mais  il  est  difficile  de  rien  dire 
de  précis  d'après  la  figure  et  la  description 
de  Bloch. 

Le  Crénilabre  de  Lincke. 
(Crenilabnis  Linckiij  nob.  ) 

C'est  encore  parmi  les  crénilabres  incertains 
que  le  lutjanus  Linckii,  représenté  sous  ce 
nom  planche  252  de  la  Grande  ichthyologie 
de  Bloch,  viendra  prendre  place. 

Celui-ci  paraît  être  d'une  espèce  plus  dis- 
tincte. 

Il  a  le  corps  assez  oblong,  les  lèvres  épaisses,  le 
profil  du  museau  un  peu  concave.  Les  nombres, 
suivant  Bloch,  sont  : 

D.  15/11;  A.  3/11  ;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 

La  couleur  est  uniforme  et  violette  sur  le  corps. 


CHAP.  m.  CRÉNILABRES.  219 

jaunâtre  sur  les  nageoires  ;  il  n'y  a  aucune  tache.  Les 
écailles  sont  assez  grandes. 

La  figure  a  neuf  pouces  et  demi.  Blocli  con- 
naissait ce  poisson  par  le  dessin  que  lui  en 
avait  envoyé  M.  Lincke.  Il  en  ignorait  la  pa- 
trie. Les  naturalistes  se  fixeront  davantage  sur 
la  valeur  de  cette  espèce,  lorsqu'ils  pourront 
étudier  l'original,  qui  doit  être  conservé  dans 
le  Cabinet  de  l'université  d'Iéna  avec  les  autres 
poissons  de  Lincke. 

Le  Crénilabre  brun. 
{Crenilabrus fuscus i  nob.;  Lahrus fiiscus ,  Pallas.) 

Il  me  paraît  que  c'est  encore  parmi  les  cré- 
nllabres  qu'il  faut  placer  le  labrusfuscus,  que 
Pallas  a  décrit  sous  ce  nom  dans  le  Faunaros- 
sica,  page  266. 

Pallas  dit  qu'il  ressemble  à  son  lahrus  œru- 
mnosus,  qui  est  notre  crénilabre  Roissaljmais 
qu'il  a 

la  tête  un  peu  pointue;  les  lèvres  épaisses,  charnues, 
rougeâtres;  le  corps  lancéolé,  comprimé  et  à  grandes 
écailles;  les  opercules  étendus  et  alongés  par  des 
bords  membraneux  assez  grands.  La  couleur  est  grise, 
avec  des  bandes  onduleuses  brunes  :  une  près  de  la 
dorsale,  une  par  le  milieu  des  côtés;  une  tache  noirq 
à  la  queue. 

D.  14/10;  A.  3/9;  C.  14;  P.  18;  V.  1/5. 
L'anale  et  la  caudale  sont  souvent  variées. 


220  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

Pallas  le  donne  comme  un  poisson  de  bon 
goût,  qu'il  n'a  vu  que  sur  les  rocliers  voisins 
d'Alupka,  sur  les  côtes  de  Crimée,  oii  il 
abonde  vers  le  printemps. 

L'espèce  doit  être  très-voisine  de  notre  cre- 
nïLahrus  tinca;  mais  les  couleurs  ne  paraissent 
pas  semblables. 

Le  Crénilabre  bridé. 

{Crenilabrus  capistratus  ^  nob.;  Labrus  capistratuSj 

Pallas.) 

C'est  encore  un  crénilabre  que  le  labrus 
capistratus  de  Pallas.^ 

Le  corps  est  comprimé,  à  dos  tranchant  et  couvert 
d'écaillés  assez  petites.  Les  lèvres  sont  épaisses,  blan- 
ches à  l'extérieur  ,  rougeâtres  en  dedans ,  plissées 
obliquement;  la  mâchoire  supérieure  a  deux  dents 
plus  fortes  ;  le  préopercule  est  dentelé.  La  tête  est 
verte,  tachetée  de  brun,  et  sur  la  joue,  au-dessous 
de  l'œil, il  y  a  deux  traits  obliques  noirâtres,  bordés 
de  vert,  qui  embrassent  le  dessous  de  la  mâchoire 
comme  une  bride.  Au-devant  de  l'œil  est  une  tache 
noire;  le  trône  est  verdàtre  et  tacheté  de  brun;  le 
ventre  est  blanchâtre  ;  une  grande  tache  noire  existe 
de  chaque  côté  de  la  queue  ;  la  pectorale  est  d'un 
jaune  verdàtre;  les  ventrales,  vertes,  sont  tachetées 
de  brun  ;  la  dorsale  et  l'anale  sont  vertes  et  tachetées 

1.  Faurj'  ross.,  l.  lU,  p.  a6g. 


CHAP.  m.  CRÉNILAERES.  224 

fie  brun  ;  la  portion  molle  de  la  dorsale  est  lisérée 
de  rouge. 

D.  14/9;  A.  3/8;  C.  14;  P.  13;  V.  1/5. 

Pallas  en  a  vu  depuis  la  taille  d'un  pouce 
jusqu'à  six;  et  il  est  assez  abondant  dans  la 
baie  de  Théodosie. 

Il  en  a  observé  quelque  variété  sans  taches; 
il  a  remarqué  que  les  couleurs  se  perdent  dans 
l'alcool  et  que  le  poisson  devient  gris. 

Cette  espèce  a  des  rapports  avec  le  Cr.  vi- 
rescens  et  avec  le  Cr.  notatuSy  par  les  nom- 
bres de  rayons  et  par  quelques  dispositions 
générales  des  couleurs;  mais  les  brides  de  la 
tête  la  distinguent  suffisamment.  Elle  ne  peut 
être  non  plus  rapportée  au  lahrus  griseus  de 
Brimnich,  comme  Pallas  a  hésité  à  le  croire. 

Le  Crénilabre  a  frein. 
(CrenilabrusfrœnatuSj  nob.  ;  Lahrus  frœnatus ^  Pall.) 

Une  autre  espèce,  voisine  de  la  précédente, 
est  celle  que  Pallas  a  nommée  lahrus  frœnatus, 
dans  son  Fauna  rossica,  page  i^-j. 

C'est  un  petit  poisson  à  corps  couvert  d'assez 
grandes  écailles j  épais; à  museau  court,  obtusj  à  mâ- 
choires égales. 

D.  14/9;  A.  3/8;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 

Le  dessus  de  la  tête  est  brun;  il  y  a  sous  l'œil  trois 
bandes  brunes  interrompues,  obliques;  le  corps  est 


222  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

gris ,  couvert  de  taches  brunes  :  on  en  voit  aussi  sur 
la  dorsale,  qui  est  lisérée  de  brun;  une  tache  noire 
existe  près  de  la  queue. 

Ce  poisson  est  observé  plus  rarement  qne 
les  autres  parmi  cette  quantité  de  petits  labres 
que  l'on  prend  sur  les  rivages  de  la  Crimée. 


CHAP.  IV.  CTÉNOLABRES.  223 

CHAPITRE  lY. 

De  quelques  genres  voisins  des  Crénila- 
bres  et  en  particulier  des  Cténolabres. 

J'ai  dû  séparer  du  genre  des  crenilabres  ceux 
de  ces  poissons  qui  ont  derrière  les  dents  co- 
niques qui  bordent  le  devant  des  mâchoires, 
une  bande  plus  ou  moins  large  de  dents  en 
velours. 

Parmi  ceux-ci  j'ai  formé  un  premier  groupe 
des  espèces  qui  ne  diffèrent  des  crenilabres  que 
par  ce  seul  caractère.  Car  ils  ont  du  reste  le 
prëopercule  finement  dentelé  en  peigne  ;  trois 
rayons  épineux  seulement  à  l'anale.  Je  nomme 
ce  premier  genre  cténolahre.  Il  ne  comprend 
encore  qu'un  petit  nombre  d'espèces,  répan- 
dues dans  l'océan  du  Nord  de  l'Europe,  dans 
la  Méditerranée  et  sur  les  côtes  de  l'Amérique 
septentrionale.  La  patrie  d'une  seule  espèce 
m'est  inconnue. 

Le  Cténolabre  des  roches. 
{Cteiiolabrus  rupestris,  nob.;  Labrus  riipestris,  Linn.) 

Ray  avait  reçu  de  Jago  la  figure ,  accompa- 
gnée d'une  courte  notice,  d'un  poisson  pris  sur 
les  côtes  de  Cornouailles,  qu'il  a  publiée  à  la 


224  LIVRE  XVI.  LAEROÏDES. 

suite  de  son  Synopsis  (  p.  1 63 ,  fig.  3  ).  La  taclie 
noire,  marquée  sur  les  premiers  rayons  de  la 
dorsale,  et  celle  qui  est  placée  sur  le  haut  et 
à  l'extrémité  de  la  queue ,  avant  les  rayons  de 
la  caudale,  ne  peuvent  laisser  le  moindre  équi- 
voque sur  cette  espèce.  Jagole  dormait  comme 
le  goldsinnj  des  pécheurs  de  Cornotiailles. 

Linné,  de  son  côté,  connaissait  ce  poisson 
commun  dans  la  Baltique  et  sur  les  côtes  de 
Norwégej  il  en  donna  une  première  descrip- 
tion dans  le  Musée  du  prince  Adolphe- Fré- 
déric^, et  il  l'introduisit  dans  le  Sjstema  na- 
turœ  sous  le  nom  de  lahrus  rupestrisj  mais 
sans  profiter  des  travaux  de  Piay. 

Ce  lahrus  rupestris  de  Linné  a  été  reconnu 
par  Millier  et  les  autres  auteurs  qui  ont  écrit 
sur  les  poissons  de  l'Océan  septentrional  ou 
de  la  Baltique.  Ainsi  l'auteur  que  nous  citons 
en  donne ,  dans  le  Fauna  danica  (t.  III ,  p.  44» 
pi.  107),  une  figure  fort  reconnaissable,  où 
on  a  seulement  oublié  de  marquer  les  den- 
telures du  préopercule.  D'ailleurs,  la  descrip- 
tion de  Millier  est  excellente,  et,  à  cause 
des  opercules  dentelés,  il  plaçait  le  poisson 
parmi  les  perches.  On  le  trouve  cependant  sous 
le  nom  de  lahrus  rupestris  dans  le  prodrome 

1.  Mus.  Ad.  F,.,  t.  I,  p.  G 5. 


CHAP.  IV.  CTÉNOLABRES.  225 

du  Fauna  danica  (n.°  382).  M.  Retzius  le 
cite  aussi  dans  son  édition  du  Fauna  suecica 
(p.  337,  n.°  73)  sous  le  nom  de  perça  rupes- 
tris.  Strôm'  et  Pontoppidan^  en  font  aussi 
mention. 

L'espèce  était  donc  parfaitement  connue 
lorsque  Pennant  écrivit  les  différentes  éditions 
de  sa  Zoologie  britannique.  Dans  celle  de  1769 
il  y  introduit  un  goldsùin/y  d'après  Ray  ou 
Jago;  car  il  ne  cite  que  la  figure  du  premier 
et  il  est  facile  de  voir  que  l'article  de  Pennant 
a  été  rédigé  sur  celui  de  Jago.  Mais  dans  l'é- 
dition in-4.°  Pennant  donne  sous  le  nom  de 
goldsinnj  un  tout  autre  poisson,  notre  creni- 
lahrus  Pennantii^ ^  et  Gmelin,  d'après  ces 
deux  documens,  se  rapportant  à  deux  êtres 
tout-à-fait  différens,  établit  un  lahrus  cornu- 
biuSy  être  par  conséquent  complexe  et  à  rayer 
du  catalogue  de  nos  Species,  en  même  temps 
qu'il  conserve  le  lahrus  rupestris. 

Ce  qu'il  y  a  de  singulier,  c'est  que  ce  lahrus 
cornuhius  a  été,  sans  aucune  critique  préa- 
lable, appliqué  par  un  assez  grand  nombre 
d'auteurs  récens,  à  des  poissons  toujours 
différens  de  celui  de  Ray,  et  souvent  même 


1.  Strôm,  Sund.  to.  ,  p.  291.  —  2.  Pontoppidan  ,  f/w/.  nat,  of 
Nonv.,  t.  II,  p.  226.  —  3.   Vide  supra. 

i3.  i5 


226  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

diffëiens  du  second  de  Pennant.  Nous  l'avons 
fait  remarquer  à  l'occasion  des  crenilabres, 
dont  nous  avons  déjà  parlé  en  citant  les 
travaux  de  MM.  Donovan,  Turton,  Fleming, 
Jenyns ,  Yarell  et  Couch. 

M.  Yarell  aurait  pu  cependant  faire  entrer 
dans  son  Histoire  des  poissons  d'Angleterre, 
et  sous  un  article  particulier,  notre  poisson; 
car  il  en  a  donné  une  figure  dans  *la  vignette 
de  la  page  3o  i.  Elle  serait  même  à  l'abri  de  tout 
reproche,  si  la  tache  des  rayons  de  la  dorsale 
n'y  avait  pas  été  oubliée. 

M.  Risso  a  aussi  un  lahrus  cornubius,  mais 
l'espèce  de  la  Méditerranée  est  différente  de 
celle  de  l'Océan. 

Bloch  a  mentionné,  dans  sa  Grande  ich- 
thyologie,  sous  le  nom  de  lutjanus  rupestris 
(pi.  25o ,  fig.  i) ,  l'espèce  dont  il  s'agit  dans  cet 
article  ;  mais  sous  une  enluminure  un  peu  rude , 
et  avec  des  lignes  bleues  sur  la  tête,  dont Mùller 
et  Linné  ne  font  aucune  mention. 

C'est  aussi  sous  le  nom  de  lahrus  rupestris 
que  M.  Nilsson  *  en  parle.  Cependant  j'ai  peine 
à  comprendre  comment  ce  savant  y  associe  le 
ber^snultra  du  Voyage  de  Linné  en  Laponie; 
car  fauteur  du  Sjstenia  naturœ  dit   positi- 

1.  Prod.,  Ichth.  Scand. ,  p.  76,  n."  5. 


CHAP.  IV.  CTÉNOLABRES.  227 

vement  que  ce  poisson  avait  dix-neuf  rayons 
épineux  à  la  dorsale  et  une  tache  noire  à  la  base 
du  dernier  rayon  mou  de  cette  nageoire,  carac- 
tères qui  ne  peuvent  convenir  qu'à  notre  pre- 
mier labre ,  et  qui  n'explique  pas  le  lahrus  suiU 
lus  de  Linné,  que  cependant  M.  Nilsson  cite 
comme  une  conséquence  de  cette  synonymie. 
Car  en  admettant  que ,  par  une  faute  d'impres- 
sion ,  il  faille  lire  pour  les  nombres  de  la  dorsale 
\  7l^d  au  lieu  de  9/1 7 ,  comme  Linné  l'a  écrit,  ce 
qui  dans  ce  renversement  ne  devient  pas  encore, 
suivant  notre  manière  de  compter,  les  nombres 
des  rayons  de  la  dorsale  de  notre  poisson,  ce 
grand  homme  ajoute  sur  les  couleurs  différens 
traits  qui  ne  conviennent  plus  à  notre  cténo- 
labre.  11  faut  d'ailleurs  se  souvenir  que,  si  Linné 
avait  voulu  écrire  \  7/9  pour  les  rayons  de  la 
dorsale,  cela  voudrait  dire,  selon  sa  manière  de 
formuler,  huit  rayons  épineux  et  neuf  mous  à  la 
dorsale,  nombres  qui  ne  s'accordent  à  aucune 
des  espèces  du  genre. 

Le  corps ,  de  forme  plus  alongée  qu'ovale,  est  assez 
épais.  La  hauteur  est  comprise  trois  fois  dans  la  dis- 
tance du  bout  du  museau  à  la  base  des  rayons  de  la 
caudale,  et  trois  fois  et  demie  dans  la  longueur  totale; 
l'épaisseur  ne  fait  pas  lout-à-fait  moitié  de  la  hauteur. 
La  longueur  de  la  tête  fait  aussi  moitié  de  celle  du 
tronc.  La  bouche  est  petite,  peu  fendue;  la  mâchoire 


228  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

inférieure  dépasse  un  peu  la  supérieure;  il  y  a  en 
avant  quatre  dents  en  crochets,  plus  grandes  que 
celles  qui  suivent;  et  derrière  cette  rangée  une  bande 
étroite  de  dents  en  velours.  Les  lèvres  sont  assez 
épaisses,  en  bourrelet  arrondi,  ne  recouvrant  pas  les 
dents  du  premier  rang  :  la  supérieure  a  quelques  plis 
obliques  très-fins.  Le  diamètre  de  l'œil  est  du  quart  de 
la  longueur  de  la  tète  ;  l'orbite  est  éloigné  du  bout  du 
museau  d'une  fois  et  demie  ce  diamètre.  Quoique 
l'œil  soit  sur  le  haut  de  la  joue,  le  cercle  de  son 
bord  n'entame  pas  la  ligne  du  profil.  L'intervalle  qui 
sépare  les  deux  yeux  est  un  peu  plus  grand  que  le 
diamètre  n'est  long,  convexe  d'un  œil  à  l'autre,  et 
presque  recliligne  dans  le  sens  longitudinal.  La  nu- 
que est  un  peu  plus  relevée;  le  sous-orbitaire  est 
assez  grand,  mince  et  arqué  en  avant;  le  préopercule 
est  large;  tout  le  bord  vertical  et  son  angle,  très- 
arrondi,  sont  très-finement  dentelés.  Le  limbe  seul 
est  sans  écailles ,  mais  tout  criblé  de  pores.  Il  y  a  trois 
rangées  d'écaillés  derrière  l'œil  et  cinq  au-dessous  sur 
la  joue.  L'opercule,  le  sous -opercule  et  l'interoper- 
cule,  sont  écailleux.  Les  ouïes  sont  assez  bien  fendues. 
La  membrane  branchiostège  a  cinq  rayons;  elle  est 
nue,  et  réunie  à  celle  du  côté  opposé  par  un  isthme 
sans  écailles  et  assez  large. 

Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  sur  ledessus 
de  la  tête ,  distantes  l'une  de  l'autre  :  l'antérieure  est 
entourée  d'une  papille  tubuleuse.  D'ailleurs ,  tout  le 
dessus  delà  tête  est,  comme  le  sous-orbitaire,  dé- 
pourvu d'écaillés  et  percé  d'un  nombre  assez  consi- 
dérable de  pores;  il  en  existe  aussi  sur  les  côtés. 


CHAP.  IV.    CTÉNOLABRES.  229 

La  pectorale  est  insérée  sous  l'angle  membraneux  ' 
de  l'opercule;  elle  a  son  angle  supérieur  et  son  bord 
libre  arrondis. 

La  dorsale  commence  un  peu  en  arrière  de  celle- 
ci  j  la  portion  épineuse  est  très-basse  :  la  molle  est 
un  peu  plus  haute  ;  les  rayons  simples  de  l'anale  sont 
plus  forts  et  plus  hauts  ;  la  caudale  est  courte,  à  bord 
légèrement  convexe,  et  à  moitié  couverte  d'écaillés; 
les  ventrales  sont  petites, 

B.  5;  D.  17/10;  A.  3/8;  C.  15;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  très-régulièrement  disposées  en 
séries  sur  le  corps;  j'en  compte  trente -cinq  entre 
l'ouïe  et  la  caudale,  quatre  rangées  au-dessus  de  la 
ligne  latérale  et  douze  en  dessous  :  chaque  écaille 
est  beaucoup  plus  longue  que  haute.  Sa  portion  nue 
est  couverte  de  stries  concentriques  très-fines  ;  le  bord 
radical  est  droit,  non  creusé;  il  y  a  quinze  à  seize 
rayons  à  l'éventail. 

La  ligne  latérale  est  tracée  parallèlement  au  dos 
par  le  sixième  environ  de  la  hauteur  du  tronc;  elle 
s'infléchit  sous  la  fin  de  la  dorsale,  et  se  rend  à  la 
caudale  par  le  milieu  de  la  hauteur  du  tronçon  de  la 
queue. 

Nos  individus  conservés  dans  l'eau-de-vie  devien- 
nent plus  ou  moins  pâles;  mais  la  tache  noire  de  la 
dorsale  et  celle  du  dos  de  la  queue  sont  constam- 
ment très-marquées. 

Mûller  et  Linné ,  qui  l'ont  souvent  vu  frais,  le  re- 
présentent d'un  gris  plus  ou  moins  verdâtre,  lavé 
de  rougeâtre,  avec  plusieurs  bandes  verticales  plus 
foncées,  qui  s'effacent  sur  les  portions  inférieures; 


230  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

.  et  dix  ou  douze  lignes  longitudinales  et  parallèles, 
d'un  gris  verdâtre,  le  long  des  flancs.  Il  n'y  a  pas 
d'autres  taches  sur  le  corps  que  les  deux  caracté- 
ristiques que  j'ai  déjà  signalées. 

Le  foie  est  situé  presque  entièrement  dans  le  côté 
gauche,  où  il  se  prolonge  en  un  lobe  long  et  pointu; 
il  est  concave  en  arrière  et  recouvre  les  replis  du 
canal  intestinal. 

On  voit  l'œsophage  descendre  d'abord  dans  le  côté 
gauche  au-dessus  du  foie,  et  se  porter  jusqu'à  la 
pointe  de  son  lobe;  il  se  courbe,  remonte  dans  le 
creux  du  foie,  puis  se  courbe  et  descend  de  nouveau 
pour  revenir  bientôt  le  long  de  la  première  ansej 
il  se  replie  alors,  et,  en  faisant  une  sinuosité  et  en 
se  dilatant  un  peu,  il  se  rend  à  l'anus. 

La  vessie  aérienne  est  mince,  argentée  et  moins 
grande  que  celle  des  crénilabres. 

Nous  comptons  quinze  vertèbres  abdominales  et 
dix-huit  caudales  à  la  colonne  vertébrale.  Les  côtes 
sont  grêles  et  petites.  Le  dessus  du  crâne  est  arrondi. 
Il  n'y  a  point  de  carène  transverse  en  arrière  de  la 
gouttière   dans  laquelle  jouent  les  intermaxillaires. 

Nos  individus  varient  de  trois  à  cinq  pouces. 

Nous  en  avons  de  Saint-Malo,  parM.  Riener, 
et  de  Norv^ége,  qui  ont  ëtë  donnés  au  Cabinet 
du  Roi  par  M.  Alexandre  Brongniart. 

Millier  lui  donne,  comme  dénomination 
vulgaire,  les  noms  de  rnatte,  herg-neppe, 
strand-kat  lisse ,  haw-karudse^  sôe-karudse, 
et   tous  les  auteurs   de  ces  Faunes  du  Nord 


CHAP.  IV.    CTÉNOLABRES.  231 

en  parlent   comme  d'une    espèce   commune 
sur  les  côtes  rocheuses. 

Pendant  que  j'imprimais  ces  recherches  sur 
le.  lahriis  rupestris  de  Linné,  je  reçois  par 
l'obligeance  de  M.  William  Thompson ,  vice- 
prësident  de  la  société  des  sciences  naturelles 
de  Belfast,  une  notice  sur  les  crénilabres  de 
l'Irlande  \  extraite  du  Magasin  de  zoologie  et 
de  botanique,  n.°  1 1.  Je  trouve  dans  ce  travail 
que  l'auteur  a  fort  bien  reconnu  le  goldsinriy, 
de  Jago  dans  le  lahrus  rupestris  de  Linné, 
et  qu'il  en  a  pris  des  individus  sur  les  côtes 
de  Bangor  tout-à-fait  semblables  aux  nôtres  ; 
mais  que  le  nombre  des  rayons  épineux  de  la 
dorsale  paraîtrait  varier,  et  que  tantôt  on  en 
compte  dix-sept  et  d'autres  fois  dix -huit  sur 
la  dorsale  de  ces  poissons. 

Suivant  M.  Thompson,  M.  Selby  aurait 
aussi  retrouvé  et  reconnu  le  poisson  de  Jago 
de  Ray  sur  la  côte  de  Barncleugh ,  ce  qui 
prouve  que  l'espèce  est  assez  commune  dans 
ces  mers  septentrionales. 

Je  trouve  dans  le  même  mémoire  une  des- 
cription accompagnée  d'une  figure  d'un  cré- 
nilabre  que  l'auteur  nommé  crenilahrus  niul- 
tidentatus ,  et  sur  lequel  je  reviendrai  dans 

1.  Conir.  ioyvards  a  Knon'l.  ofi/ie  crenilabr.  of  Ireland ,  p.  3. 


252  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

un  de  nos  supplemens  :  il  me  paraît  d'une 
espèce  distincte,  voisine  de  notre  crenilahrus 
melops. 

Le  Cténolabre  bordé. 
{Ctenolabrus  marginatus ,  nob.) 

La  Méditerranée  en  nourrit  une   seconde 
espèce,  qui  a 

l'œil  plus  grand,  car  son  diamètre  fait  près  du  tiers 
de  la  longueur  de  la  têtç;  il  est  placé  plus  près  du 
museau,  qui  est  plus  aigu.  La  tête  est  plus  étroite; 
l'intervalle  qui  sépare  les  deux  yeux  n'est  que  des  trois 
quarts  du  diamètre  de  l'orbite.  La  tête  est  propor- 
tionnellement plus  longue;  car  la  hauteur  portée 
sur  elle  ne  dépasse  pas  le  bord  du  préopercule  ; 
comparée  avec  celle  du  corps,  la  hauteur  du  tronc 
est  contenue  quatre  fois  et  deux  tiers  dans  la  lon- 
gueur totale. 

Il  y  a  un  rayon  mou  de  moins  à  la  dorsale  et  à 

l'anale. 

D.  n/9;  A.  3/T. 

Les  écailles  sont  plus  courtes  et  plus  larges. 

Le  poisson  est  d'une  couleur  plus  uniforme  ;  car 
je  ne  vois  pas  les  tracçs  des  rayures  longitudinales 
qui  existent  sur  l'espèce  précédente. 

La  tache  noire  du  devant  de  la  dorsale  est  plus 
noire,  plus  haute,  et  va  jusqu'au  sixième  rayon.  La 
dorsale  et  l'anale  ont  un  fin  liséré  noir.  Le  bord 
de  la  caudale  est  noirâtre;  la  base  paraît  avoir  été 
jaune;  la  tache  noire  de  chaque  côté  de  la  queue 
existe  comme  dans  toutes  les  autres  espèces  du  genre. 


CHAP.    IV.     CTÉNOLALRES.  255 

Il  y  a  du  noîrâlre  sur  l'opercule  et  sur  la  base  de  la 
pectorale. 

Ce  sont  de  petits  poissons  de  trois  pouces 
et  demi.  Ils  ont  ete  rapportés  de  Marseille  et 
de  Toulon  par  M.  Delalande  et  M.  Roux. 

Ce  serait  sans  doute  sous  cette  espèce  qu'il 
faudrait  placer  le  lahrus  cornuhius^  de  la  pre- 
mière édition  de  M.  Risso  ;  car  il  copie  la 
phrase  de  Linné,  en  ne  citant  que  l'édition 
in -8.°  de  Pennant,  c'est-à-dire  l'article  de 
Ray  Ainsi  M.  Risso  n'aurait  eu  que  le  tort 
de  confondre  deux  espèces  extrêmement  voi- 
sines, ce  qui  était  en  quelque  sorte  consa- 
cré à  fépoque  où  il  écrivait  son  ouvrage; 
mais  sa  description  est  certes  un  mélange  con- 
fus ,  dont  plusieurs  traits  appartiennent  à  des 
espèces  différentes.  Il  ne  donne  que  quatorze 
rayons  épineux  à  la  dorsale,  et  cependant 
Linné  lui  en  indique  dix-sept.  Comment  donc 
a-t-il  pu  regarder  comme  identiques  des  êtres 
dont  les  caractères  sont  si  distincts?  Puis  il 
parle  de  taches  bleues  à  l'anus;  caractères  qui 
sont  pris  sans  aucun  doute  d'autres  espèces  du 
genre  des  crénilabres. 

Dans  sa  seconde  édition^  il  augmente  en- 


1.  Ichtlî.  de  Nice,  p.  267,  n."  8.  —  2-  Ibid.,  l.  III,  p.  325, 
n.°  255. 


254  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

core  plus  la  confusion  de  la  première;  car  il 
entasse  les  synonymes  de  Gmelin  et  de  Lacd- 
pède,  sans  corriger  d'ailleurs  aucune  des  er- 
reurs que  nous  venons  d'indiquer. 

Le    CtÉNO LABRE    CENDRÉ. 

{Ctenolahrus  cinereiis^  nob.;  Lahrus  cinereiis ,Voi\\.) 

Nous  avons  encore  trouvé  parmi  les  poissons 
du  Cabinet  du  Roi  un  de  ces  cténolabres, 
que  nous  avons  vu  avec  d'autant  plus  de  plaisir, 
qu'il  a  été  déjà  décrit  dans  le  Faiina  rossica 
de  Pallas. 

Il  a  le  corps  plus  alongé  que  celui  de  l'Océan, 
le  museau  plus  gros  et  plus  rond ,  et  l'œil  plus  petit 
que  celui  de  la  Méditerranée,  les  dents  antérieures 
de  la  mâchoire  supérieure  plus  grosses  et  plus  cour- 
bées ,  la  tache  caudale  beaucoup  plus  grande  ,  et 
celle  de  la  dorsale  plus  petite  ;  car  elle  ne  s'étend  pas 
au-delà  du  quatrième  rayon  épineux. 
D.  17/10;  A.  3/8,  etc. 

Les  rayons  osseux  de  la  dorsale  et  de  l'anale  sont 
plus  hauts  que  ceux  des  espèces  précédentes.  Il 
paraît  d'ailleurs  d'un  brun  cendré  ou  verdàtre  uni- 
forme. 

Je  n'ai  vu  qu'un  seul  individu  de  cette  es- 
pèce, qui  a  été  rapporté  du  Bosphore  par 
M.  Yirlet;  il  l'a  entendu  nommer  par  les  Turcs 
tchuchur  Baloc. 


CHAP.    IV.    CTÉNOLABRES.  "  255 

Pallas'  a  décrit,  sous  le  nom  de  lahrus  ci- 
Jiereus,  une  espèce  qu'il  signale  comme  n'ayant 
aussi  que  les  quatre  premiers  rayons  de  la  dor- 
sale tachetés  de  noir.  Le  reste  de  la  descrip- 
tion s'accorde  parfaitement,  à  l'exception  du 
nombre  des  rayons  épineux  de  cette  nageoire  : 
il  n'en  compte  que  seize. 

Le  poisson  est  long  de  quatre  pouces. 

Le  Cténolabre  a  museau  aigu. 
{Ctenolahriis  acutus y  nob.) 

Parmi  des  poissons  que  M.  Bâillon  avait 
reçus  de  Malaga,  et  qu'il  a  bien  voulu  donner 
au  Muséum,  j'ai  trouvé  un  petit  cténolabre 
assez  semblable  à  celui  de  la  Méditerranée 

par  la  forme  générale  ;  mais  qui  paraît  avoir  encore 
le  museau  plus  aigu,  parce  que  la  ligne  du  profil  des- 
cend plus  obliquement  de  la  dorsale  vers  la  bouche. 
Les  dents  sont  petites  et  égales. 

La  tache  caudale  est  plus  petite,  et  celle  de  la  dor- 
sale ne  s'étend  que  sur  les  trois  premiers  rayons  j  et 
il  y  a  encore  un  rayon  mou  de  moins  à  la  dorsale. 

D.  n/8;  A.  3/8,  etc. 

L'individu  n'a  que  trois  jx)uces  et  demi. 

'  "  ■  m       I    I  ■.  I 

1.  Faun.  ross.  asiai.,  t.  III,  p.  2G7. 


256  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Le    CtÉN GLABRE    IRIS. 

(Ctenolabrus  iris,  nob.) 

Nous  avons  encore  reçu  de  la  Méditerranée 
une  cinquième  espèce  de  ce  genre. 

Elle  a  le  museau  très-aigu  et  très-déprimé;  la  ligne 
latérale  du  profil  inférieur  presque  droite,  et  celle  du 
supérieur  monte ,  par  une  ligne  un  peu  concave  entre 
les  yeux,  jusqu'à  la  dorsale,  et  se  continue,  pour 
redescendre  par  une  ligne  très-arquée ,  jusqu'à  la 
queue,  qui  est  beaucoup  plus  basse  que  celle  des  es- 
pèces précédentes.  La  hauteur  est  du  cinquième  de 
la  longueur  totale;  la  tête  n'en  fait  que  le  quart.  Le 
museau  est  si  étroit  que  l'orbite  entaille  la  ligne  du 
front.  Le  diamètre  de  l'œil  est  du  quart  de  la  lon- 
gueur de  la  tête.  Le  préopercule  est  très-arrondi  et 
finement  dentelé.  Les  quatre  dents  mitoyennes  sont 
en  petits  crochets,  et  celles  de  derrière  sont  un  peu 
plus  grenues  que  dans  les  espèces  précédentes. 

La  couleur  est  un  beau  rouge  écarlate,  avec  un 
trait  brun  allant  de  l'œil  s'évanouir  sur  l'épaule  en 
traversant  l'opercule.  Il  y  a  la  tache  noire  sur  le  des- 
sus de  la  queue,  à  la  base  des  rayons  de  la  caudale, 
mais  il  n'y  en  a  plus  sur  le  devant  de  la  dorsale  épi- 
neuse; elle  est  en  quelque  sorte  reportée  en  arrière 
sur  les  trois  premiers  mous  de  la  nageoire  du  dos.  Il 
en  existe  une  sur  l'extrémité  des  rayons  mitoyens  de 
la  caudale. 

D.  16/12;  A.  3/10;  C.  13;  P.  16;  V.  1/5. 

J'en  ai  des  individus  de  quatre  pouces  de 


CHAP.    IV.    CTÉNOLABRES.  237 

long,  que  M.  Savigny  a  pris  dans  la  baie  de 
Naples.  Je  viens  d'en  ^recevoir  d'autres  indivi- 
dus de  la  Sicile ,  de  la  même  taille ,  qui  me  sont 
envoyés  par  M.  le  prince  Charles  Bonaparte. 
Nous,  en  avons  reçu  de  Malte  un  plus  petit 
individu,  mais  tout  aussi  bien  caractérisé,  par 
les  soins  du  docteur  Leach. 

Le   CtÉNO LABRE   CHOGSET. 

(  Clenolahrus  chogset^  nob.  ;  Labrus  Burgall,  Scliœpf.) 

Le  poisson  décrit  par  Mitcliill  sous  le  nom 
de  lahrus  chogset  est  aussi  un  cténolabre,  qui  a 

le  corps  alongé,  et  assez  semblable,  par  sa  forme  à 
noire  Cten.  riipeslris.  Sa  hauteur  est  comprise  trois 
fois  et  trois  quarts  dans  la  longueur  totale;  l'épais- 
seur n'est  pas  tout-à-fait  moitié  de  la  hauteur.  La  tête 
est  plus  courte  que  cette  mesure.  Le  profil  supérieur 
est  assez  convexe  ;  le  cercle  de  l'orbite  ne  l'entame  pas , 
quoique  l'œil  soit  au  haut  de  la  joue;  son  diamètre 
est  contenu  plus  de  quatre  fois  dans  la  longueur  de 
la  tête.  Le  dessus  du  crâne,  le  sous-orbi taire  et  la 
plus  grande  partie  de  la  joue  sont  nus;  il  n'y  a 
que  deux  rangées  derrière  l'œil  et  trois  en  dessous  de 
petites  écailles  couvrant  le  préopercule  :  le  limbe  en 
est  nu.  Le  bord  vertical  est  finement  dentelé;  l'oper- 
cule a  un  bord  membraneux  assez  large;  sur  le  mi- 
lieu de  l'os  est  une  petite  plaque  d'écaillés  plus  grandes 
que  celles  du  préopercule,  plus  petites  que  celles  du 
corps.  Le  bord  est  nu,  ainsi  que  le  sous-opercule  et 


258  LIVRE   XVI.    LADROÏDES. 

l'interopercule.  Les  lèvres  sont  épaisses,  mais  sans 
plis  en  dessous.  Les  six  ^enis  du  milieu  sont  assez 
grosses  et  crochues.  Les  rayons  antérieurs  de  la  dor- 
sale sont  bas.  Les  nageoires  sont  arrondies. 

D.  18/10  ;  A.  3/9  ;  C.  15  ;  P.  14  ;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  lisses,  assez  épaisses ,  peu  grandes  ; 
j'en  trouve  quarante-six  entre  Fouie  et  la  caudale,  six 
au-dessus  de  la  ligne  latérale  et  dix-sept  au-dessous. 
Une  écaille  est  plus  longue  que  haute  et  n'a  que  dix 
à  douze  rayons  à  l'éventail.  La  ligne  latérale  se  courbe 
très-peu  sous  la  fin  de  la  dorsale. 

La  couleur  du  poisson  conservé  dans  l'eau-de-vle 
est  un  brun  plus  ou  moins  verdâtre,  sur  lequel  on 
voit,  et  principalement  sur  les  nageoires,  des  teintes 
violettes.  La  dorsale  semble  avoir  conservé  de  petits 
ocelles  plus  pâles  que  le  fond. 

Mitchill',  qui  Ta  vu  frais,  indique  presque 
les  mêmes  teintes  :  un  fond  bleuâtre  passant 
au  vert;  les  opercules  plus  verts,  ainsi  que 
l'anale  et  les  ventrales  ;  quelquefois  le  dos  est 
nuageux  et  varié  de  taches  orangées. 

C'est  un  poisson  qui  atteint  rarement  plus 
de  huit  pouces.  Il  a  la  vie  très-tenace ,  même 
quand  il  est  hors  de  l'eau. 

C'est  le  bergall  ou  le  hluefish  des  pêcheurs 
de  New-York,  le  cJiogset   des  Mohegans.  II 


L  Mitchill,  Phii.  trans.  o/Neiv-  York,  vol.  i ,  p.  4o3,  pi.  3 , 


flg.    2. 


CHAP.    IV.    CTÉNOLABRES.  259 

vit  dans  les  mêmes  eaux  que  le  tautog  (  tau- 
toga  nigra  nob. ,  lahrus  tautoga  Mitch.  ) 

Ce  nom  de  bergall  nous  a  fait  retrouver 
le  lahrus  burgall  de  Blocli,  mentionné  par 
Scliœpf  dans  le  tome  ViTI  des  écrits  des  natu- 
ralistes de  Berlin.  Les  nombres  sont  les  mêmes. 

Le  docteur  Mitcliill  cite  une  variété  remar- 
quable de  son  cliogset,  qui  est  jaune  et  que 
l'on  nomme,  à  cause  de  cela.,  jellow  cJiogset 
ou  jellow  bergall.  Le  fond  est  souvent  aussi 
orangé,  ou  coloré  de  jaunâtre  teinté  de  rou- 


geatre. 


Nos  individus  viennent  de  New- York  par 
MM.  Milbert  et  Lesueur,  et  nous  en  avons  un 
autre  qui  a  été  pris  à  Terre-Neuve  et  donné  au 
Cal)inct  du  Roi  par  M.  Le  Guillou,  un  des 
chirurgiens  de  la  marine  royale,  aujourd'hui 
embarqué  sur  la  Zélée,  conserve  de  l'Astrolabe, 
dans  l'expédition  de  M.  Dumont  d'Urville. 

Le  Cténolabre  mouche. 
{Ctenolabrus  uninotatiis ^  nob.) 

Le  même  M.  Milbert  a  envoyé  parmi  ses 
chogsets  une  espèce  voisine  de  la  précédente, 
dont  M.  Mitchill  n'a  point  fait  mention,  et  qui 
cependant  s'en  distingue 

par  un  corps  un  peu  plus  trapu,  la  hauteur  n'étant 


210  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

pas  quatre  fois  dans  la  longueur  totale.  Les  dents 
sont  plus  égales,  plus  serrées  et  plus  petites;  les  den- 
telures du  préopercule  sont  très-fines;  le  limbe  en 
est  nu,  ainsi  que  le  sous  -  opercule  et  l'interoper- 
cule.  La  caudale  est  plus  arrondie;  la  dorsale  l'est 
un  peu  moins.  Les  nombres  sont  les  mêmes  : 

D.  18/10;  A.  3/9,  etc. 

La  ligne  late'rale  est  un  peu  plus  fortement  déviée. 

Le  corps  est  plus  vert,  sans  aucunes  teintes  bleues; 
la  tête  en  a  conservé  de  plus  marquées,  et  sur  tous 
nos  individus  je  vois  une  tache  noire  sur  le  bas  des 
deux  premiers  rayons  mous  de  la  dorsale. 

Nous  n'en  avons  pas  reçu  qui  aient  plus  de 
quatre  pouces.  Ils  viennent  tous  de  New- York. 

Le  Cténolabre  flagellifère. 
{Ctenolahrus  Jlagelliferj  noh.) 

Nous  avons  encore  un  de  ces  cténolabres, 
remarquable  par  les  prolongemens  filamenteux 
de  la  membrane  qui  unit  les  premiers  rayons 
de  la  dorsale. 

Le  corps  est  plus  en  ovale  régulier;  il  est  plus  haut 
et  moins  alongé  que  le  précédent,  et  il  est  plus  com- 
primé. La  courbure  du  dos  est  plus  grande  que  celle 
du  ventre.  La  hauteur  fait,  à  peu  de  cliose  près,  le 
tiers  de  la  longueur  totale;  l'épaisseur  n'est  que  du 
quart  de  la  hauteur;  la  longueur  de  la  tête  égale  la 
hauteur  du  corps.  Le  museau  est  aigu;  la  ligne  du 
front  descend  assez  obliquement^  la  nuque  est  plus 


CHAP.  IV.  CTÉNOLABRES.  241 

soutenue,  et  se  relève  à  partir  de  l'orbite.  Celui-ci 
est  creusé  sur  le  haut  de  la  joue,  entame  la  ligne 
du  profil,  et  sa  crête  sourcilière  est  assez  élevée.  Le 
diamètre  est  compris  quatre  fois  et  demie  dans  la  lon- 
gueur de  la  tête.  Le  sous-orbitaire  est  haut  et  large , 
sans  écailles,  comme  le  dessus  de  la  tète.  Les  deux 
ouvertures  de  la  narine  sont  percées  en  dessus  et  sur 
le  devant  de  l'œil,  comme  dans  les  autres  cténolabres. 

Le  préopercule  est  très  finement  dentelé  le  long 
de  son  bord  vertical,  qui  fait  un  angle  presque  droit 
avec  le  bord  horizontal.  L'opercule,  l'interopercule 
et  le  sous-opercule,  sont  couverts  de  très -grandes 
écailles,  qui  dépassent,  comme  une  membrane  fes- 
tonnée, le  bord  de  la  fente  des  ouïes. 

La  bouche  est  assez  fendue  ;  les  deux  mâchoires 
sont  égales  :  à  la  supérieure  il  y  a  deux  fortes  dents 
en  crochets,  entre  lesquelles  sont  deux  autres  un 
peu  plus  petites.  De  l'autre  côté  de  ces  canines  est 
la  rangée  de  dents  externes,  qui  vont  en  croissant, 
à  mesure  que  l'on  approche  de  l'extrémité  de  l'inter- 
maxillairej  les  dernières  cependant  ne  sont  pas  en 
crochets. 

Le  maxillaire  inférieur  a  deux  fortes  canines,  sé- 
parées seulement  par  deux  dents  pointues,  coniques, 
mais  plus  petites;  puis  vient  le  long  de  l'os  une  ran- 
gée de  petites  dents  coniques  et  droites  :  les  internes 
sont  un  peu  mousses. 

La  dorsale  a  de  fortes  épines  assez  longues ,  et  la 
membrane  qui  unit  les  trois  premiers  rayons  se  pro-^ 
longe,  près  du  premier  et  du  second,  en  un  filet  mou 
plus  long  que  le  rayon j  les  autres   prolongemens 

i3.  16 


242  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

membraneux,  quoique  plus  courts,  sont  encore 
assez  sensibles.  Les  rayons  mous  sont  plus  alongés 
que  les  premiers  ;  ceux  de  l'anale  le  sont  beaucoup 
plus,  car  ils  touchent  à  ceux  de  la  caudale,  qui  est 
arrondie.  La  pectorale  est  petite,  la  ventrale  est  pointue. 
D.  9/11;  A.  3/9;  C.  14;  P.  13;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  grandes  et  finement  striées  à  leur 
surface;  j'en  compte  vingt  entre  l'ouïe  et  la  caudale, 
deux  rangées  au-dessus  et  cinq  au-dessous  de  la  ligne 
latérale,  qui  est  fortement  infléchie  sous  la  fin  de  la 
dorsale. 

Le  poisson  est  entièrement  décoloré  par  l'action 
de  l'alcool  ;  mais  une  tache  noire  s'est  conservée  sur 
le  haut  de  la  membrane ,  entre  les  deux  premiers 
rayons  de  la  dorsale. 

Ce  poisson  est  long  de  quatre  pouces  ;  j'en 
ignore  la  patrie.  Il  n'y  en  a  qu'un  seul  individu 
dans  le  Cabinet  du  Roi.  Quand  il  sera  mieux 
connu,  il  est  très-probable  qu'on  le  distinguera 
génériquement.  Il  a  des  affinités  avec  nos  lacli- 
nolèmes. 

DES  ACANTHOLABRES. 

J'ai  cru  devoir  faire  un  genre  particulier 
des  labroïdes  à  prëopercule  dentelé  qui  pré- 
sentent quelques  modifications  dans  la  dis- 
position de  leurs  dents.  Celles  de  la  rangée  ex- 
terne sont  coniques  et  grosses,  et  par  derrière 
il  y  en  a  de  petites  formant  une  bande  étroite. 


CHAP.    IV.    ACANTHOLABRES.  245 

Un  second  caractère  consiste  dans  les  nom- 
breux rayons  épineux  de  l'anale. 

Ces  poissons  correspondent,  dans  les  la- 
broïdes,  à  nos  centrarchus  de  la  famille 
des  percoïdes.  En  les  retirant  des  crénilabres, 
on  précise  davantage  les  caractères  de  ces 
différens  genres.  Je  n'en  connais  qu'un  petit 
nombre  d'espèces  des  mers  d'Europe,  et  dont 
celles  de  notre  Océan  septentrional  me  sont 
moins  bien  connues  que  celle  de  la  Méditer- 
ranée. 

Z/'ACANTHOLABRE    PaLLONI. 
{Acantholcibrus  Palloniy  nob.) 

J'ai  pu,  en  effet,  voir  plusieurs  individus  de 
l'acantholabre  de  cette  mer.  Je  lui  conserverai 
l'épithète  que  M.  Risso  lui  avait  donnée  sous 
le  nom  de  lutjanus  Palloni,  dès  sa  première 
édition ,  parce  nous  avons  dans  le  Cabinet  du 
Roi  un  poisson  désigné  sous  cette  dénomina- 
tion par  cet  ichtliyologiste  dès  1812,  et  qu'un 
autre  de  la  même  espèce,  et  ainsi  étiqueté 
par  M.  Risso,  faisait  partie  des  collections  for- 
mées à  Nice  par  M.  Savigny. 

Ce  poisson  a  le  corps  assez  régulier  :  sa  hauteur 
fait  le  double  de  l'épaisseur  et  est  comprise  quatre 
fois  dans  la  longueur  totale;  celle  de  la  tête  égale 
cette  même  hauteur  du  corps.  Le  inuseau  est  assez 


244  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

oblus  et  arrondi;  l'intervalle  qui  sépare  les  deux 
yeux  est  convexe,  et  le  diamètre  de  l'œil  surpasse 
un  peu  le  quart  de  la  longueur  de  la  tête.  Le  sous- 
orbitaire  est  presque  entièrement  au-devant  de  l'œil. 
Le  bord  vertical  du  préopercule  est  oblique  en  avant, 
son  angle  est  arrondi;  le  bord  horizontal  descend  un 
peu  en  dessous;  les  dentelures,  fines  et  égales,  ne 
dépassent  pas  l'angle.  Toute  la  joue,  l'opercule,  le 
sous-opercule  et  l'interopercule,  sont  couverts  d'é- 
cailles  ;  elles  avancent  aussi  sur  le  crâne  jusques  entre 
les  yeux,  de  sorte  que  le  bout  du  museau,  le  premier 
sous  -  orbitaire  et  les  branches  de  la  mâchoire  infé- 
rieure, sont  les  seules  parties  de  la  tête  qui  ne  soient 
pas  écailleuses.  La  mâchoire  inférieure  paraît  dépasser 
un  peu  la  supérieure,  surtout  quand  la  bouche  est 
ouverte:  elle  est  d'ailleurs  peu  fendue.  Les  dent» sont 
égales ,  coniques ,  pointues,  et  plus  grandes  au  milieu 
que  vers  le  fond  de  la  bouche.  La  rangée  des  dents 
internes  est  étroite  :  elles  sont  assez  fortes;  les  pha- 
ryngiennes ressemblent  à  celles  des  labres  ordinaires. 

La  dorsale  s'élève  à  l'aplomb  de  l'angle  de  l'oper- 
cule ;  elle  est  soutenue  par  des  épines  l'oides  et 
poignantes;  la  partie  molle  est  courte  et  arrondie.  La 
caudale  et  l'anale  le  sont  de  même,  et  quelques 
écailles  s'étendent  sur  leurs  membranes. 

B.  b;  D.  20/9;  A.  5/8;  C.  15;  P.  15;  V.  1/5. 

Les  ventrales  sont  de  médiocre  grandeur,  arron- 
dies, et  ont  entre  elles  une  longue  plaque  cornée 
triangulaire,  plus  grande  que  celle  des  pentapodes. 

Les  écailles  du  corps  sont  fortes ,  point  dentelées 
ni  ciliées.  Une  écaille,  séparée  et  détachée,  montre 


CHAP.   IV.    ACANTHOLABRES.  245 

que  la  portion  radicale  est  très-large;  son  bord  d'in- 
sertion est  festonné.  Le  triangle  de  l'éventail  a  treize 
rayons;  il  est  opposé  à  celui  de  la  portion  libre  et 
colorée.  Je  compte  quarante-deux  rangées  d'écaillés 
entre  l'ouïe  et  la  caudale;  il  n'y  en  a  que  trois  au- 
dessus  de  la  ligne  latérale  et  treize  au-dessous.  Cette 
ligne  commence  au  surscapulaire,  se  recourbe  pour 
monter  près  du  dos,  et  descend  ensuite  très -peu 
jusque  sous  la  fin  de  la  dorsale,  où  elle  s'infléchit 
pour  se  rendre  de  là,  par  le  milieu  du  tronçon  de 
la  queue,  à  la  caudale;  elle  est  composée  d'une  série 
de  points  relevés  en  relief  sur  chaque  écaille. 

Nos  individus,  plus  ou  moins  décolorés  par  l'ac- 
tion de  l'alcool,  montrent  une  tache  noire  ronde 
sur  le  haut  du  tronçon  de  la  queue,  en  avant  des 
rayons  supérieurs  de  la  nageoire.  D'autres  ont  une 
petite  tache  noire  en  avant,  ou  ont  encore  une 
tache  noire  à  la  base  des  derniers  rayons  de  la  dor- 
sale, précédée  de  trois  ou  quatre  autres,  qui  sem- 
blent môme  descendre  en  bandes  larges  et  transverses 
sur  le  dos;  mais  elles  s'évanouissent  dès  qu'elles  ont 
atteint  la  ligne  latérale.  Je  vois  aussi  sur  un  de  ces 
individus  de  Nice  des  traces  de  lignes  rousses  lon- 
gitudinales et  parallèles,  au  nombre  de  treize  sur 
chaque  côté. 

D'après  un  dessin  colorié  que  M.  Risso  nous  a 
communiqué ,  le  poisson  serait  bleuâtre  sur  le  dos , 
noir  sur  le  dessus  de  la  tète,  et  rougeâtre,  à  reflets 
bleus  et  argentés  sur  le  reste  du  tronc.  La  dorsale 
est  jaune,  tirant  à  l'orangé  sur  les  rayons  épineux;  la 
caudale  est  verdàtre,  l'anale  bleuâtre;  les  pectorales 


246  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

et  les  ventrales  sont  orangées  et  bordées  de  bleuâtre. 
Le  foie  est  réduit  à  un  seul  lobe,  situé  plus  à 
gauche  qu'à  droite  de  l'intestin.  Cet  organe  est  court, 
et  ne  fait  que  deux  fortes  sinuosités  plutôt  que  de 
véritables  replis.  La  vessie  aérienne  est  grande,  simple 
et  cachée  sous  un  repli  fibreux  et  épais  du  péritoine ^ 
qui, dans  le  reste  de  l'abdomen, est  mince  et  argenté. 
Le  squelette  n'offre  aucunes  particularités  remar- 
quables; il  ressemble   à  celui  des  autres  labroides: 
il  y  a  seize  vertèbres  abdominales  et  dix-neuf  caudales. 
Tel  est  le  poisson  que  M.  Risso  (  i.""^  éd., 
p.  203)  dit  se  nommer   tenco,  et  qu'il  cite 
dans  sa  seconde  édition  (p.  3ig  )  sous  le  nom 
de  crenilabims  exoletus,  pensant  alors  qu'il 
est  de   la  même  espèce  que  le  poisson   de 
l'Océan  septentrional.  Il  le  dit  d'une  couleur 
rosée  pâle,  à  reflets  dorés,  la  gorge  et  le  ven- 
tre étant  d'un  blanc  mat;  les  traits  de  la  ligne 
latérale  sont  jaunes;  la  dorsale,  verte  ou  jau- 
nâtre, est  variée  de  teintes  obscures;  l'anale 
est  blanche;  les  pectorales  sont  jaunâtres,  les 
ventrales   roses.  Il  faut  remarquer  que  cette 
description  est  assez  différente  de  celle  que 
nous  avons  faite  d'après  son  dessin.  L'espèce 
vit  sur  les  rochers  peu  profonds.  On  la  trouve 
sur  la  côte  en  Mars  et  Août.  M.  Savigny  l'a 
aussi  rapportée  de  Naples;  et  je  viens  encore 
d'en  recevoir  un  individu  de  Sicile  qui  m'a 
été  envoyé  par  le  M.  le  prince  Ch.  Bonaparte. 


CHAP.    IV.     ACANTHOLABRES.  247 

X'ACANTH GLABRE    DU  NoRD. 

{Acantholahrus  exoletus,  nob.;  Lahriis  eocoletiis, 
Linn.) 

Linné  avait  désigné  par  l'épithète  d^exo- 
letus  un  labre  qui  lui  paraissait  anomal  dans 
le  genre  tel  qu'il  l'entendait,  à  cause  des  cinq 
épines  de  son  anale.  Je  n'ai  jamais  vu  ce  pois- 
son de  l'Océan  septentrional,  et  cependant 
il  me  paraît  être  différent  du  précédent,  car 
Linné  ne  lui  compte 

que  dix-neuf  rayons  épineux  à  la  dorsale,  et  il  lui 
donne  des  lignes  bleues  sur  le  corps.  Oihon  Fabri- 
cius  ',  qui  n'a  fait  que  l'entrevoir  une  seule  fois  en 
naviguant,  l'indique  comme  bleu  et  brillant. 

Voici  les  nombres  tels  que  Linné  les  a  indiqués, 
et  écrits  à  notre  manière  : 

D.  19/8;  A.  5/8;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 

Ce  poisson  paraît  très-rare,  et  si  on  le  voit 
cité  dans  toutes  les  Faunes  du  Nord,  il  me 
semble  en  général  que  c'est  sur  la  foi  de  Linné, 
Otlion  Fabricius  excepté.  Strœm^,  Millier^,  le 
comptent  parmi  leurs  poissons.  Le  prince  royal 
de  Danemarck  le  nomme  comme  provenant 
des  côtes  occidentales  de  la  Norwége.  Outre 
les  noms  de  Blaagomme ,  de  Blaastaaly  etc., 
communs  à  d'autres  labroides,  je  trouve  que 

1.  Faun.  Groenl. ,  p.  i66.  —  2.  Sœndm.  y  t.  I/%  p.  267.— 
3.  Fauv.  Dan.,  Prod. ,  p.  6,  n.°  38G. 


248  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

Fabricius  a  indiqué,  comme  tlënomination 
dans  l'idiome  des  Groenlandais,  le  nom  de 
Keblernak. 

Millier,  trompé  par  les  rayures  bleues  dont 
le  corps  de  ce  poisson  est  orné,  l'a  cru  iden- 
tique avec  le  labriis  cœruleus  d'Ascanius,  et 
cette  erreur  a  été  reproduite  par  M.  Retzius, 
dans  son  édition  du  Fauna  suecica^  en  l'aug- 
mentant encore,  car  il  a  ajouté  à  cette  syno- 
nymie fautive  le  striped  wiYisse  de  Pennant, 
et  comme  variété  le  labrus  carmeus  de  Bloch, 
dont  nous  avons  parlé  plus  haut. 

Bloch  et  Lacépède  l'ont  placé  parmi  leurs 
labres  :  le  premier  sous  le  nom  de  Linné,  et 
le  second  sous  celui  de  labrus  pentacanthus. 
Je  trouve  aussi  dans  l'ouvrage  de  M.  Nilsson 
un  labrus  exoletus  j  mais  comme  ce  savant 
n'a  compté  que  dix-sept  rayons  épineux  à  la 
dorsale,  et  seulement  sept  mous,  je  me  de- 
mande si  le  poisson  était  bien  de  la  même 
espèce. 

jL'AcANTHO LABRE    DE    COUCH. 
(^Acantholahrus  Couchii,  nob.) 

M.  Couch  a  publié,  dans  le  Recueil  de 
M.  Loudon'  la  description  et  la  figure  d'un 

1.  Couch  ,  apud  Loudon,  Mag.  nat.  hisl.  ;  descr. ,  vol.  V,  p.  18 
el  742 ,  et  fig.  11."  121. 


CHAP.  IV.    ACANTHOLABRES.  249 

acantholabre,  qui  me  paraît  différer  de  celui 
de  Linné, 

principalement  par  le  nombre  des  rayons  ;  car  il  a 
six  épines  à  l'anale  et  vingt  et  une  à  la  dorsale.  Voici 
ses  nombres  écrits  suivant  notre  manière  : 

D.  21/8  j  A.  6/8;  C.  15  j  P.  14;  V.  1/5. 

La  couleur  est  un  brun  uniforme  et  brillant,  plus 
clair  sous  le  ventre;  le  sourcil  est  noir,  et  une  tache 
brune  et  foncée  est  sur  le  dos  de  la  queue,  à  la  base 
des  rayons  de  la  caudale.  Les  pectorales  sont  jaunes  J 
les  autres  nageoires  sont  bordées  de  cette  teinte. 

M.  Yarell'  a  reproduit  d'une  manière  plus 
élégante  la  figure  de  M.  Couch,  et  l'a  donnée, 
ainsi  que  son  prédécesseur  l'avait  fait,  comme 
le  labrus  luscus  de  Linné,  qui  n'a  cependant 
que  trois  rayons  épineux  à  l'anale.  On  le  trouve 
aussi  répété  dans  le  Traité  de  M.  Jenyns^  mais 
ces  deux  auteurs  n'en  parlent  que  d'après 
M.  Couch. 

Comme  l'espèce  n'est  certainement  pas  le 
labrus  luscus  de  Linné,  j'ai  cru  devoir  le 
dédier  au  zélé  naturaliste  qui  a  avancé  l'ich- 
thyologie  des  côtes  d'Angleterre. 

1.  Brit.  fish. ,  p.  3o2.  —  2.  Jenjns,  Brit.  an.  Kingd,  p.  4oo. 


250  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

Z/'ACANTH GLABRE    DE    YarELL. 

{Acantholahrus  Varelliij  nob.) 

Je  placerai  aussi  dans  ce  genre  le  poisson 

que  M.  Yarell^  a  figure  et  décrit  d'après  un 

individu  acheté  par  lui  au  marcbé  de  Londres. 

Il  diffère  sensiblement  de  tous  les  autres  par  les 

nombres  des  rayons  de  sa  dorsale;  et  de  celui  de 

Linné ,  par  les  six  épines  de  son  anale. 

D.  16/13;  A.  6/8;  C.  12;  P.  15;  V.  1/5. 
Ce  poisson  était  d'un  noir  pourpre  foncé,  plus 
clair  et  plus  brillant  sous  le  ventre  ;  les  lèvres  et  les 
parties  antérieures  de  la  tête  couleur  de  chair  lavée 
de  pourpre,  les  nageoires  bleues  et  les  ventrales  mar- 
quées de  noir  à  la  pointe. 

L'individu  avait  neuf  pouces  et  demi. 

Cette  espèce  nouvelle  appartient  à  nos  acan- 
tholabres,  et  je  me  suis  fait  un  vrai  plaisir  de 
la  dédier  à  M.  Yarell. 

Il  l'a  regardée  à  tort  comme  le  lahrus  vetula 
de  Bloch  que  j'ai  déterminé  après  l'avoir  vu 
dans  le  Cabinet  de  Berlin. 

X'ACANTHO LABRE    PETITE    BOUCHE. 

{Acantholabrus  microstoma,   nob.;  Crenilahrus 
micros toma ,  Thompson.) 

M.  William  Thompson,  vice-président  de 
la  société  d'histoire  naturelle  de  Belfast,  vient 

1.  Yarell,  Brit.fish.,  p.  284. 


CHAP.  IV.  acantholabres.  251 

de  décrire*  quelques  poissons  des  côtes  de 
l'Irlande.  J'ai  trouvé  parmi  ces  descriptions 
celle  d'un  acantholabre ,  que  l'auteur  a  nommé 
crenilabrus  micT^ostoma. 

Ce  poisson  a  la  forme  de  notre  crenilabrus  melops 
et  des  espèces  voisines  j  c'est-à-dire  qu'il  a  le  corps 
plus  court  et  plus  haut  que  celui  des  autres  acantho- 
labres. Sa  bouche  est  petite  et  peu  fendue;  les  écail- 
les paraissent  plus  grandes.  L'auteur  en  a  eu  trois 
individus,  sur  lesquels  il  a  vu  varier  les  nombres  des 
rayons  de  la  manière  suivante  : 

D.  19/7;  A.  5/7;  C.  13;  P.  14;  V.  \/h. 
D.  19/6;  A.  5/7;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 
D.  20/6;  A.  6/7;  C.  15;  p.  13;  V.  1/5. 

Le  dos  était  bleu  foncé;  le  dessus  de  la  tête  pourpre, 
plus  noir  sur  le  bord  supérieur  de  l'orbite;  des  raies 
violettes  et  orangées  longitudinales  sur  les  joues,  et 
verticales  sous  la  mâchoire  inférieure;  le  ventre, 
blanc  argenté;  la  dorsale,  violette,  bleue  à  la  base  et 
bordée  d'orangé;  la  caudale,  brune,  et  noirâtre  à  la 
pointe;  la  pectorale,  orangée,  et  portant  une  large 
tache  noire  à  sa  base. 

Je  ne  parle  de  ces  poissons  que  d'après  les 
descriptions  que  j'ai  indiquées  plus  haut.  Il 
ne  serait  pas  impossible  que  la  troisième  va- 
riété, citée  par  M.  W.  Thompson,  fût  d'une 
espèce  particulière.  Je  laisse  aux  naturalistes 

1.  Will.Thomps.  yProcsfc?.  of  zool.  soc.  of  London ,  Juin  1837, 
p.  55,  et  Contrib.  towards  a  knowlegde  of  the  crenil.  of  Ireïandf 
in  Mag.  of  zool.  and  bot. ,  p.  6,  vol.  2  ,  pi.  XIV. 


252  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

qui  verront  ce  poisson,  à  lever  ces  différens 
doutes,  en  examinant  avec  soin  la  dentition 
de  ces  individus ,  qui  ont  été  pris  sur  les  côtes 
d'Antrim. 

L'ACANÏHO LABRE    VERT. 

{Jlcantholahrus  ^iridis  ^  nob.) 

Les  collections  faites  aux  Canaries  par 
MM.  Webb  et  Berthelot,  montrent  que  lo- 
cëan  Atlantique  fournit  aussi  des  poissons  de 
ce  genre.  L'espèce  que  j  ai  sous  les  yeux  res- 
semble au  crénilabre  mélope. 

La  longueur  de  la  lête  fait  le  quart  de  celle  du 
corps.  La  hauteur  du  tronc  est  le  tiers  de  celle  du 
corps,  la  caudale  n'y  étant  pas  comprise.  Le  préo- 
percule est  finement  dentelé.  Les  dents  sont  égales 
et  serrées. 

D.  17/9;  A.  4/9;  C.  13;  P.  H;  V.  1/5. 
J'en  ai  un  individu  qui  a  cinq  rayons  épineux 
à  l'anale;  d'ailleurs  il  n'a  pas  de  caractères  spécifi- 
ques différens. 

La  couleur  est  verte,  avec  des  nuances  jaunes  sur 
la  caudale  et  la  portion  molle  de  la  dorsale  et  de 
l'anale. 

Nos  individus  ont  six  pouces  de  long. 

MM.   Webb   et   Berthelot   font    entendu 

nommer  par  les   pêcheurs   canariens  verde. 

J'en  ai  fliit  donner  une  figure  dans  l'atlas  de 

l'Histoire  naturelle  des  Canaries  (pi  i7?fig-  4)- 


.    CHAP.    V.    SUBLETS.  255 

CHAPITPxE  V. 

Des  Lahroïdes  à  museau  protractile  et 
à  ligne  latérale  non  interrompue. 


DES   SUBLETS. 

Je  place  dans  ce  chapitre  un  genre  de  lahroï- 
des que  M.  Cuvier  a  établi  dès  la  première 
édition  du  Règne  animal,  et  qui  a  les  plus 
grandes  affinités  avec  les  crénilabres,  tels  que 
je  les  ai  caractérisés;  car  les  mâchoires  ne  por- 
tent que  des  dents  coniques  disposées  sur  uu 
seul  rang.  Mais  la  protractilité  de  leur  bouche, 
les  fait  aisément  distinguer  des  poissons  de 
l'autre  genre.  Ils  tiennent  dans  cette  famille  le 
même  rang  que  les  smaris  et  les  gerres  occu- 
pent dans  la  grande  famille  des  sparoïdes;  et 
l'on  aurait  pu  même,  pour  rendre  le  parallé- 
lisme plus  complet,  faire  une  famille  des  la- 
broïdes  à  museau  protractile ,  et  composées 
des  genres  siihlets  et  filous,  de  même  que 
M.  Cuvier  à  voulu  former  une  famille  dis- 
tincte, sous  la  dénomination  de  méniâes ,  des 
spares  à  museau  protractile.  Mais  comme  il 
est  contraire  aux  principes  d'une  bonne  mé- 
thode naturelle  de  multiplier  inutilement  les 
familles,  et  que  dans  cette  circonstance  c'était 


252  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

qui  verront  ce  poisson,  à  lever  ces  différens 
doutes,  en  examinant  avec  soin  la  dentition 
de  ces  individus ,  qui  ont  été  pris  sur  les  côtes 
d'Antrim. 

L'ACANÏHOLABRE    VERT. 
{Jlcantholahriis  ojiridis ,  nob.) 

Les  collections  faites  aux  Canaries  par 
MM.  Webb  et  Berthelot,  montrent  que  l'o- 
cëan  Atlantique  fournit  aussi  des  poissons  de 
ce  genre.  L'espèce  que  j'ai  sous  les  yeux  res- 
semble au  crënilabre  mëlope. 

La  longueur  de  la  lête  fait  le  quart  de  celle  du 
corps.  La  hauteur  du  tronc  est  le  tiers  de  celle  du 
corps,  la  caudale  n'y  étant  pas  comprise.  Le  préo- 
percule est  finement  dentelé.  Les  dents  sont  égales 
et  serrées. 

D.  17/9;  A.  4/9;  C.  13;  P.  14;  V.  1/5. 
J'en  ai  un  individu  qui  a  cinq  rayons  épineux 
à  l'anale;  d'ailleurs  il  n'a  pas  de  caractères  spécifi- 
ques difTérens. 

La  couleur  est  verte,  avec  des  nuances  jaunes  sur 
la  caudale  et  la  portion  molle  de  la  dorsale  et  de 
l'anale. 

Nos  individus  ont  six  pouces  de  long. 

MM.   Webb   et   Berthelot   font    entendu 

nommer  par  les   pêcheurs   canariens  verde. 

J'en  ai  fait  donner  une  figure  dans  l'atlas  de 

l'Histoire  naturelle  des  Canaries  (pi.  i7?fig-  4)- 


CHAP.    V.    SUBLETS.  255 

CHAPITRE  V. 

Des  Lahroïdes  à  museau  protractile  et 
d  ligne  latérale  non  interrompue. 


DES   SUBLETS. 

Je  place  dans  ce  chapitre  un  genre  de  lahroï- 
des que  M.  Cuvier  a  établi  dès  la  première 
édition  du  Règne  animal,  et  qui  a  les  plus 
grandes  affinités  avec  les  crénilabres,  tels  que 
je  les  ai  caractérisés;  car  les  mâchoires  ne  por- 
tent que  des  dents  coniques  disposées  sur  un 
seul  rang.  Mais  la  protractilité  de  leur  bouche, 
les  fait  aisément  distinguer  des  poissons  de 
l'autre  genre.  Ils  tiennent  dans  cette  famille  le 
même  rang  que  les  smaris  et  les  gerres  occu- 
pent dans  la  grande  famille  des  sparoïdes;  et 
l'on  aurait  pu  même,  pour  rendre  le  parallé- 
lisme plus  complet,  faire  une  famille  des  la- 
broïdes  à  museau  protractile,  et  composées 
des  genres  suhlets  et  filous,  de  même  que 
M.  Cuvier  à  voulu  former  une  famille  dis- 
tincte, sous  la  dénomination  de  ménides,  des 
spares  à  museau  protractile.  Mais  comme  il 
est  contraire  aux  principes  d'une  bonne  mé- 
thode naturelle  de  multiplier  inutilement  les 
familles,  et  que  dans  cette  circonstance  c'était 


25G  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

synonymies  d'Aitedi.  Qui  pourrait,  en  effet, 
blâmer  d'attribuer  à  nos  sublets  cette  diagnose 
de  son  neuvième  labre?  Ljbrus  rostro  sur-* 
sum  reJlexOy  cauda  in  extremo  Circulari  ? 
Mais  la  synonymie  qu'il  y  a  jointe,  laisse  sub- 
sister les  doutes  que  j'ai  déjà  indiqués  plus  haut 
(p.  134)-  Malgré  les  assertions  de  M.  Risso,  je 
crois  ne  devoir  admettre  qu'une  seule  espèce 
de  ce  genre,  celle  dont  je  vais  donner  la  des- 
cription sous  le  nom  suivant  : 

Le    SUBLET    GROIN. 

(  Coricus  rostratus,  nob.  ;  Lutjcmus  rostratuSj  Blocli, 
pi.  254,2.) 

Ce  petit  poisson  a  le  corps  plutôt  parallélograni- 
nûque  qu'ovalaire.  En  effet,  la  ligne  du  profil  su- 
périeur monte  par  une  courbe  concave  jusqu'à  la 
naissance  de  la  dorsale,  d'où  elle  descend,  par  une 
courbure  un  peu  convexe,  vers  la  queue.  Celle  du 
profil  inférieur  se  porte,  par  une  ligne  oblique  et 
descendante,  à  l'abdomen,  jusqu'au-delà  des  points 
des  ventrales,  pour  remonter  ensuite  à  la  queue. 
L'angle  du  dos  est  plus  avancé  que  celui  de  l'ab- 
domen, et  c'est  entre  eux  deux  que  l'on  mesure 
la  plus  grande  hauteur  du  corps;  elle  est  comprise 
trois  fois  et  demie  dans  la  longueur  totale,  la  tête 
égalant  cette  hauteur,  et  la  caudale  en  en  faisant 
la  moitié.  La  hauteur  du  tronçon  de  la  queue  n'est 
que  le  tiers  de  celle  du  tronc.  Quand  la  bouche 


CHAP.    V.    SUBLETS.  257 

est  fermée,  le  museau  est  aigu,  et  la  mâchoire  in- 
férieure se  porte  très-obliquement  vers  l'angle  posté- 
rieur de  ses  branches.  L'œil  est  placé  à  peu  près  au 
miheu  de  la  longueur  de  la  joue;  il  est  de  médiocre 
grandeur,  son  diamètre  étant  compris  un  peu  plus  de 
cinq  fois  dans  la  longueur  de  la  tête,  et  distant  du  bout 
du  museau  de  deux  fois  la  longueur  de  ce  diamètre. 
L'orbite  n'entame  pas  la  ligne  du  profil  ;  c'est  au-dessus 
de  cet  organe  que  la  ligne  du  front  est  le  plus  concave , 
et  à  cet  endroit  la  tête  n'a  pas  en  hauteur  la  moitié  de 
sa  longueur.  Le  sous-orbilaire  est  étroit  et  assezalongé, 
un  peu  échancré  en  avant.  Le  préopercule  a  le  limbe 
étroit;  le  bord  vertical  et  son  angle,  qui  est  arrondi, 
finement  dentelés  :  le  bord  liorizontal  est  lisse.  Je  ne 
vois  sur  la  joue,  au-dessous  de  l'œil ,  que  deux  rangées 
d'écaillés.  Les  trois  autres  pièces  operculaires  en  sont 
aussi  couvertes.  Elles  sont  plus  grandes  que  celles  des 
sous-orbitaires,  mais  plus  petites  que  celles  du  corps. 
Le  bord  membraneux  est  petit;  la  bouche  est  peu 
fendue,  mais  elle  est  protractile. 

Les  branches  montantes  des  intermaxillaires  ont 
le  double  de  la  longueur  de  la  branche  horizontale; 
et  le  maxillaire,  petit  et  élargi  en  palette  ronde  à 
son  extrémité  inférieure,  a  en  dessous  une  échan- 
crure  qui  reçoit  l'angle  de  l'articulaire  de  la  mâ- 
choire inférieure ,  sur  lequel  il  bascule  quand  celle-ci 
s'abaisse.  Une  branche  grêle,  et  pliée  à  angle  droit 
sur  cette  portion  inférieure  de  l'os  maxillaire,  va 
rejoindre  la  branche  montante  de  l'intermaxillaire , 
d'où  il  résulte  que  l'abaissement  de  la  mâchoire  in- 
férieure porte  nécessairement  en  avant  le  maxillaire 

i3.  17 


258  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

et  l'intermaxillaire ,  et  fait  exécuter  à  la  bouche  son 
mouvement  de  prolraction.  Quand  la  mâchoire  in- 
férieure se  relève,  elle  relire,  en  portant  l'articulaire 
en  arrière,  le  maxillaire,  qui  entraîne  les  inlermaxil- 
laires,  dont  les  branches  glissent  dans  la  coulisse  pra- 
tiquée pour  leur  mouvement  entre  les  deux  sous- 
orbitaires  et  les  deux  os  propres  du  nez. 

Les  dents  sont  petites  et  sur  un  seul  rang,  en  tout 
semblables  à  celles  de  nos  crénilabres  ;  elles  sont  toutes 
implantées  perpendiculairement  sur  la  mâchoire,  et 
celles  du  milieu  ne  se  portent  pas  horizontalement 
en  avant  ;  les  pharyngiennes  sont  de  même  mousses 
et  grenues.  Les  lèvres  sont  minces  et  étendues  en 
assez  larges  membranes  sur  les  côtés  de  la  bouche. 
Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  pratiquées 
près  de  la  ligne  du  profil,  au-dessus  de  l'œil  :  la 
postérieure  est  ovale  et  plus  grande  que  l'antérieure. 
La  langue  est  libre  et  pointue.  Les  ouïes  sont  large- 
ment fendues;  il  y  a ,  comme  à  l'ordinaire,  cinq 
rayons  aux  ouïes. 

La  pectorale  est  attachée  sous  l'angle  membra- 
neux du  bord  de  l'opercule,  un  peu  obliquement; 
ses  rayons  sont  très-petits ,  et  sa  membrane  tellement 
transparente  qu'on  la  voit  à  peine  quand  elle  est 
étalée  et  collée  sur  le  corps  :  elle  est  généralement 
du  septième  de  la  longueur  totale  ;  mais  j'ai  trouvé 
des  individus  qui  l'ont  un  peu  plus  longue,  et  dans 
ce  cas  elle  est  comprise  six  fois  et  demie  dans  cette 
même  longueur  totale. 

La  dorsale  commence  un  peu  en  arrière  de  l'a- 
plomb tiré  par  l'insertion  des  pectorales  ;  ses  rayons 


CHAP.    V.    SUBLETS.  2^9 

épineux  sont  bas  et  faibles  :  la  portion  molle  se  ter- 
mine en  pointe, 

La  caudale  est  arrondie.  En  avant  de  l'anale  est  un 
appendice  charnu ,  conique ,  mousse ,  et  percé  de  deux 
trous  :  l'un  pour  la  laitance,  l'autre  pour  l'urine. 

Les  ventrales  sont  reculées  assez  en  arrière  des 
pectorales. 

B.  5;  D.  15/10;  A.  3/9;  G.  13;  P.  12;  V.  1/5. 

Il  y  a  trente  rangées  d'écaillés  entre  l'ouïe  et  la 
caudale.  Une  écaille  a  le  bord  radical  crénelé  par  les 
extrémités  des  treize  rayons  de  l'éventail.  La  portion 
nue  est  finement  ciselée  par  des  stries  divergentes, 
en  rayonnant  du  centre  vers  le  bord,  et  croisées 
par  d'autres  moins  fortes,  circulairef-  et  parallèles 
au  bord.  La  ligne  latérale  est  tracée  sur  la  quatrième 
série  d'écaillés;  elle  est  parallèle  au  dos,  et  composée 
d'une  suite  de  tubulures  relevées  et  redressées  vers  la 
dorsale. 

La  couleur  est  un  rouge  orangé,  quelquefois  lavé 
de  verdàtre.  A  l'anus  existe  une  grande  tache  bleue. 
Les  pectorales  sont  plus  ou  moins  rouges ,  les  ven- 
trales jaunes.  Je  vois  la  caudale  colorée  d'une  belle 
teinte  orangée  chez  les  individus  à  pectorales  pâles, 
et  jaunâtre  chez  ceux  à  pectorales  rouge  assez  foncé. 
Celte  nageoire  de  la  queue  a  le  plus  souvent  près 
du  bord  un  fm  liséré  noirâtre  et  des  points  de 
même  teinte ,  plus  ou  moins  effacés  entre  les  rayons. 
L'anale  a  une  très  -  faible  couleur  orange  chez  les 
individus  à  caudale  orangée,  et  elle  est  jaune  sur 
ceux  de  l'autre  variété.  Chez  les  premiers  la  dor- 
sale a  une  tache  noire,  étendue  sur  toute  la  mem- 


2G0  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

brane  réunissant  les  trois  premières  épines.  Sur  le 
reste  de  la  portion  épineuse  il  y  a  deux  séries  de 
points  noirs  :  une  près  du  bord,  et  une  à  la  base 
de  la  nageoire.  La  portion  molle  a  le  tiers  inférieur 
rougeâtre,  le  reste  pâle  et  comme  incolore.  Sur  les 
individus  de  la  seconde  variété,  je  vois  la  nageoire 
plus  verdâtre  et  des  points  entre  tous  les  rayons 
épineux;  la  tache  noire  sur  le  devant  étant  plus  ou 
moins  bien  marquée.  L'anale  a  une  suite  de  petits 
points  noirs  à  sa  base.  Ces  points  se  montrent  aussi 
sur  la  poitrine,  sur  le  ventre,  sur  la  queue,  et  en 
plus  grande  abondance  sur  la  tète;  dont  le  dessus  de 
la  tête  est  brun.  Une  bandelette  de  cette  couleur  tra- 
verse du  bout  du  museau  à  l'œil  ;  puis  elle  reprend 
derrière  l'orbite  et  s'étend  sur  l'opercule,  passe  par 
l'angle  et  va  finir  sur  les  flancs,  à  moitié  de  la  lon- 
gueur du  corps.  Le  dessus  de  la  ligne  latérale  est 
noirâtre.  On  voit  quelquefois  au-dessus  de  la  bande 
brune  une  autre  argentée,  mais  qui  ne  la  suit  pas 
aussi  loin. 

Les  nombreuses  variations  des  teintes  de 
ces  petits  poissons  ont  suggéré  à  M.  Risso 
l'idée  d'en  distinguer  d'abord  deux  espèces, 
et  il  en  a  même  plus  tard  établi  une  troisième. 

La  première ,  qu'il  a  nommée 

Le  SuBLET  Lamarck 
{Corlcus  Lamarcku)y 
a ,  suivant  sa  diagnose , 
le  corps  gris  obscur ,  varié  de  teintes   dorées  et 


CHAP.   V.    SUBLETS.  261 

argentées,  et  marqué  de  lignes  ou  de  points  rouges. 

Le  plus  grand  nombre  d'individus  auraient  le  dos 

bleu  d'outremer;  les  côtés  teintés  d'aurore  argenté, 

parsemés  de  points  rouge-carmin.  Les  nageoires  sont 

variées  de  plusieurs  couleurs;  l'iris  est  doré;  l'œil 

a  l'éclat  du  rubis. 

M.  Risso  en  a  distingué  une  première  va- 
riété, offrant  les  mêmes  fonds, 

mais  qui  manque  de  points  rouges; 
et  une  seconde , 

jaune  doré,  verdâtre,  avec  les  opercules  pointillés 

d'obscur. 

La  seconde  espèce  est 

he    SUBLET    VERDATRE. 

(  Coricus  'virescens.  ) 

Elle  a  le  corps  vert,  varié  de  jaune,  et  la  tête 
traversée  par  des  lignes  violettes.  Le  vert  foncé  du 
dos  passe  au  doré  sur  le  ventre;  les  nageoires  sont 
d'un  vert  tendre;  les  yeux  sont  rouge  argenté,  avec 
l'iris  doré. 

11  distingue  de  cette  seconde  espèce  trois 
variétés. 

Une, 

chez  laquelle  le  jaune  domine  ; 
une  seconde, 

où  le  vert  s'étend  sur  tout  le  corps; 
et  une  troisième, 

qui  offre  un  mélange  de  toutes  les  gradations  du  vert 

et  du  jaune,  sans  raies  violettes^ 


262  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

11  a  nomme  la  troisième  espèce 

Le    SUBLET    ROUGEATRE. 

{Coî^icus  ruhescejis.) 

Son  dos  est  brun-rouge;  les  côtés  portent  une 
bande  longitudinale  rose  argenté  ;  la  base  de  la  queue 
est  tachetée  de  noir.  La  couleur  du  dos  dépend  de 
la  dispersion  de  taches  d'un  brun  obscur,  mêlées 
à  d'autres,  couleur  d'outremer,  sur  un  beau  fond  rose- 
Le  blanc  argenté  lavé  de  rose,  qui  s'étend  sur  la 
gorge  et  le  ventre ,  est  séparé  de  la  teinte  du  dos 
par  la  bandelette  argentée  et  rosée.  L'iris  est  doré; 
les  yeux  ont  l'éclat  du  rubis,  avec  des  reflets  argen- 
tés; les  nageoires  variées  de  jaune  et  de  rouge.  Sur 
les  premiers  rayons  de  la  dorsale  existe  une  tache 
bleuâtre,  et  la  caudale  est  marquée  à  sa  base  d'un 
point  noir  très-petit.  La  tache  de  la  dorsale  serait 
moins  apparente  sur  les  femelles. 

M.  Laurillaid,  qui  en  a  rapporté  de  nom- 
breux individus  pris  à  Nice,  et  reconnus  par 
M.  Risso  pour  son  suhlet  verdâtre^  les  décrit 
comme  ayant 

le  corps  traversé  par  douze  raies  longitudinales  ver- 
tes, avec  une  bande  d'un  violet  obscur,  partant  de  la 
tête  à  la  hauteur  de  l'œil,  et  se  perdant  vis-à-vis  de 
l'anale;  la  dorsale  était  bordée  de  rose.  Une  autre 
variété  avait  le  dos  vert  obscur,  les  côtés  jaunâtres; 
la  tête  et  les  flancs  traversés  par  une  ligne  brune. 
Je  suis  étonné  que  cet  habile  observateur 
ne  parle  pas  de  la  variété  rouge,  ou  bleu  poin- 


CHAP.    V.    SUBLETS.  263 

tille,  qui  me  paraît  la  plus  abondante  sur  tous 
les  points  de  la  Méditerranée. 

Ces  variétés,  qui  ne  sont  pas  mentionnées 
par  M.  Risso,  rentreraient  dans  l'espèce  de 
sonsublet  verdâtre,  si  les  nombres  des  rayons 
étaient  les  mêmes. 

A  en   juger  d'après  les  nombres  cités  par 
M.  Piisso,  le  sublet  verdâtre  à  seize  rayons 
épineux  serait  très-différent  des  deux  autres, 
qui  n'en  auraient  que  quatorze;  mais  j'ai  vérifié 
ces  nombres  sur  plus  de  cent  individus ,  et  dans 
ce  grand  nombre  je  n'en  ai  trouvé  qu'un  seul 
ayant  seize  rayons  à  la  dorsale,  et  cinq  n'en 
ayant  que  quatorze.  J'ai  observé  plus  de  trente 
sublets,    envoyés  de  Nice  par  M.  Risso  lui- 
même,  sous  le  nom  de  lutjanus  Lainarckii , 
et  sur  tous  j'ai  trouvé  quinze  rayons  épineux 
à  la  dorsale.  Comme  sur  les  individus  à  seize 
ou   à  quatorze  rayons,  je  ne  trouve  aucun 
caractère  qui  justifie  la  distinction  spécifique 
faite  par  M.  Risso  ;  et  que  les  couleurs,  si  :aria- 
bles  dans  les  labres,  ne  peuvent  dcnnei  des 
signes  spécifiques,  je  persiste  à  croire  que  l'on 
doit  considérer  ces  nombreuses  variétés  de 
teintes  comme  appartenant  toutes  à  une  même 
espèce. 

Les  recberclies  anatomîques  que  j'ai  faites 
confirment  aussi   ces  conjectures.  Je  trouve 


264  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

dans  tous  ces  individus,  quel  que  soit  le  nom- 
bre de  leurs  rayons, 

un  foie  assez  gros,  convexe  en  dessous,  concave  en 
dessus,  pour  loger  dans  son  sillon  l'œsophage  et 
l'estomac.  Ce  foie,  situé  presque  en  entier  dans  le 
côté  gauche  de  l'abdomen,  donne  à  droite  et  en 
haut  un  très -petit  lobule.  La  vésicule  du  fiel  est 
très-petite.  L'intestin  ne  fait  que  deux  plis;  la  troi- 
sième anse  a  deux  fois  plus  de  longueur  que  la 
seconde.  La  rate  est  petite  et  lenticulaire,  siiuée  à 
droite  de  l'intestin.  Les  ovaires  forment  deux  petits 
corps  trièdres  occupant  la  moitié  inférieure  de  l'ab- 
domen, réunis  largement  par  en  bas,  et  contenant 
des  œufs  d'une  petitesse  excessive.  La  vessie  aérienne 
est  grande,  simple,  ovoïde,  à  parois  argentées  ré- 
sistantes; elle  contient  des  corps  rouges  très-volu- 
mineux. 

Outre  les  parties  du  squelette  que  nous  avons 
déjà  mentionnées  en  décrivant  l'extérieur  de  l'ani- 
mal, j'ajouterai  que  la  colonne  épinière  a  trente  et 
une  vertèbres,  dont  treize  sont  abdominales,  et  que 
je  n'ai  pas  trouvé  de  variations  dans  ce  nombre, 
lorsque  j'en  observais  dans  celui  des  rayons  épineux 
de  la  dorsale.  Les  côtes  sont  petites,  mais  assez  fortes. 
Il  n'y  a  que  deux  ou  trois  côtes  horizontales. 

Ce  qui  me  porte  encore  à  croire  qu'il 
n'existe  qu'une  seule  espèce  de  sublet,  c'est 
que  les  pécheurs  ne  distinguent  pas  par  des 
noms  differens  ces  nombreuses  variétés,  pa- 
rées de  couleurs  si  variées,  qu'ils  observent 


CHAP.  V.    SUBLETS.  265 

constamment.  Leur  nom  nicéen  est  suhlaire. 

Ce  sont  des  petits  poissons  que  l'on  trouve 
pendant  toute  l'année  sur  les  cotes  rocheuses 
et  peu  profondes.  La  femelle  fraie  au  prin- 
temps. Leur  chair  est  tendre,  savoureuse. 

L'espèce  abonde  dans  toute  la  Méditerranée. 

M.  Delille  nous  l'a  envoyée  de  Montpellier; 
M.  Delalande,  de  Martigues;  MM.  Cuvier  et 
Pol.  Roux,  de  Marseille  ;  M.  Kiener,  de  Tou- 
lon ;  MM.  lUsso ,  Savigny  et  Laurillard ,  de  Nice  ; 
M.  le  prince  Charles  Bonaparte ,  de  Rome  ; 
MM.  Constant  Prévost  et  Bibron,  de  Sicile; 
M.  Leach,  de  Malte;  M.  Domnando,  d'Athè- 
nes; M.  Reynaud,  de  Napoli  de  Romanie; 
M.  Geoffroy  Saint-Hilaire,  d'Alexandrie  d'E- 
gypte :  M.  de  Laroche  l'a  aussi  trouvée  aux 
îles  Baléares. 

C'est  de  Naples  que  nous  avons  reçu  les 
plus  grands  individus.  Ils  ont  quatre  pouces 
et  demi  de  long  sur  dix-huit  hgnes  de  hau- 
teur. Les  autres  n'ont  pas  généralement  trois 
pouces  de  longueur. 


DES   CLEPTIQUES. 
Parra  a  figuré^,  sous  le  nom  de  rahiruhia 

1.  Parra,  Hisi.  de  los  raros  mariiimos  de  la  Hamna;  p.  44  ? 
Lam.  2  1 ,  fig.  1. 


26G  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

S^enizarra,  un  labroïde  que  nous  avons  appris 
à  connaître  par  les  collections  faites  à  la  Mar- 
tinique par  M.  Plëe. 

Nous  avons  reconnu  que  ce  poisson  doit 
être  d'un  genre  particulier,  voisin  des  sublets, 
par  la  protractilité  de  son  museau,  par  les 
dentelures  de  son  préopercule  et  par  sa  ligne 
latérale  non  interrompue.  La  petitesse  de  sa 
bouche,  la  manière  dont  elle  rentre  sous  la 
voûte  des  sous-orbitaires;  ses  dents  sur  un 
seul  rang,  mais  en  très-petit  nombre  et  à  peine 
visibles;  ses  dents  pharyngiennes  composant, 
par  leur  réunion ,  des  petites  lames  à  bord  den- 
telé en  scie  ;  ses  nageoires  verticales,  couvertes 
en  grande  partie  d  écailles  semblables  à  celles 
du  reste  du  corps ,  sont  les  caractères  distinc- 
tifs  de  ce  genre.  Dès  notre  premier  travail  sur 
les  poissons ,  nous  avons  reconnu ,  M.  Cuvier 
et  moi,  la  nécessité  de  l'établir.  Pour  rappeler 
ses  affinités  avec  les  filous  {epihulus),  que 
M.  Cuvier  en  rapprochait  trop,  dans  ma  ma- 
nière de  voir,  nous  avons  imaginé  de  nom- 
mer ce  genre  du  nom  de  clepticus ,  KhsTrny/oç 
étant  une  épithète  que  les  Grecs  donnaient 
aux  êtres  enclins  à  voler. 

C'est  ainsi  que  le  genre  a  paru  sous  cette 
dénomination  dans  la  seconde  édition  du 
Règne  animal;  mais  on  peut  remarquer   que 


CHAP.  V.    CLEPTIQUES.  267 

M.  Cuvier  a  négligé  de  donner  plusieurs  de 
ses  traits  caractéristiques;  car,  entre  autres 
oublis,  il  n'a  pas  parlé  de  la  dentelure  du 
préopercule. 

Nous  n'avons  jusqu'à  présent  reçu  qu'une 
seule  espèce  de  ce  genre,  dont  nous  ne  pos- 
sédons qu'un  petit  nombre  d'individus,  quoi- 
que M.  Plée  nous  dise  dans  ses  notes  que  le 
poisson  n'est  pas  rare  aux  Antilles.  En  voici 
la  description. 

Le  Cleptique  créole. 
(  Clepticus  genizarra ,  nob.  ) 

Le  corps  est  alongé  et  assez  régulier  :  sa  hauteur 
fait  le  quart  de  la  longueur  totale,  et  son  épaisseur 
est  comprise  deux  fois  et  demie  dans  la  hauteur,  La 
longueur  de  la  tête  est  du  quart  de  celle  du  corps,  la 
caudale  non  comprise ,  qui  n'est  elle-même  qu'un  peu 
moins  longue  que  la  tête.  La  ligne  du  profil  supé- 
rieur est  convexe  sur  la  nuque,  et  assez  semblable 
à  la  courbure  inférieure  ;  aussi  l'oeil  est-il  à  peu  près 
au  milieu  de  la  hauteur  de  la  tête ,  mais  sur  le  tiers 
antérieur.  L'orbite  est  rond,  petit,  son  diamètre  étant 
contenu  cinq  fois  et  demie  dans  la  longueur  de  la 
tête.  Le  sous-orbitaire  est  une  petite  pièce  quadrila- 
tère, couverte  d'une  peau  adipeuse  et  nue,  située  tout 
au-devant  de  l'œil,  et  dont  le  bord  antérieur,  con- 
cave en  haut,  devient  au  contraire  convexe  en  bas; 
il  forme  avec  celui  du  côté  opposé  une  sorte  d'ogive, 


2G8  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

dans  laquelle  se  place  et  joue  la  mâchoire  supérieure. 
Sur  le  bord  supérieur  et  un  peu  oblique  de  cet  os, 
est  un  petit  sillon  dans  lequel  on  voit  les  deux  très- 
petites  ouvertures  de  la  narine  :  la  postérieure  est 
cependant  plus  visible  que  l'antérieure.  Tout  le  pour- 
tour de  l'œil,  ainsi  que  le  petit  espace  compris  entre 
les  deux  narines  et  l'extrémité  du  museau,  est  nu. 
C'est  la  seule  portion  du  corps  qui  soit  sans  écailles; 
car  il  y  en  a  sur  les  branches  de  la  mâchoire  infé- 
rieure, sur  toutes  les  pièces  operculaires,  sur  la  base 
des  nageoires  impaires  et  même  sur  celle  de  la  pec- 
torale. Le  préopercule  occupe  le  bas  de  la  joue;  son 
bord  vertical  est  légèrement  concave,  très-finement 
dentelé;  son  angle  est  arrondi,  et  sa  courbe  s'étend 
le  long  du  bord  horizontal,  qui  est  lisse,  mince  et 
sans  dentelure.  On  ne  distingue  pas  de  limbe.  Les 
écailles,  au  nombre  de  trois  rangées  vers  le  haut 
du  bord  vertical,  et  de  sept  vers  l'angle,  s'étendent 
jusqu'au  bord,  dont  elles  cachent  les  dentelures. 

On  ne  distingue  pas  sous  les  larges  écailles  de 
l'opercule  cet  os  du  sous-opercule,  et  Tinteropercule 
ne  se  reconnaît  qu'à  la  petitesse  des  écailles.  Ces 
pièces  sont  lisses,  sans  dentelures;  le  bord  membra- 
neux et  l'angle  de  l'opercule  sont  assez  larges.  Les 
deux  bords  de  l'interopercule  se  touchent  sous 
l'isthme,  et  la  fente  des  ouïes,  quoique  grande,  ne 
se  voit  qu'à  peine,  tant  l'appareil  operculaire  s'ap- 
plique hermétiquement  sur  la  ceinture  de  la  poi- 
trine; en  la  soulevant  on  voit  la  membrane  bran- 
chiostège  entièrement  pliée  et  cachée  sous  l'intero- 
percule et  le  sous-opercule;  elle  est  soutenue  par 


CHAP.    V.    CLEPTIQUES.  269 

six  rayons  branchiostèges.  Les  branchies,  au  nom- 
bre de  quatre  de  chaque  côté,  sont  petites.  Les  lames 
des  peignes  sont  très-fines,  serrées,  et  celles  des 
trois  premières  sont  profondément  divisées  et  simu- 
lent sur  chaque  arceau  une  branchie  double  :  les 
lames  de  la  quatrième  sont  simples.  Les  râtelures  de 
la  première  externe  sont  formées  de  lames  longues, 
serrées,  dirigées  en  dedans,  comme  pour  rétrécir 
et  proléger  l'entrée  de  la  cavité  branchiale.  Les  râ- 
telures des  autres  branchies  deviennent  des  lames 
horizontales,  entrecroisées,  sans  aucunes  dents  ni 
épines.  Les  deux  pharyngiens  supérieurs  portent  cinq 
rangées  de  lames  émaillées ,  denliculées,  dont  les 
pointes  sont  fort  aiguës  et  font  du  bord  externe  de 
ces  deux  os  une  sorte  de  scie,  qui  joue  sur  un  sys- 
tème semblable  du  pharyngien  inférieur,  dont  la  tige, 
sans  dentelures,  s'avance  entre  les  branchies,  vers  le 
corps  de  l'os  hyoïde. 

Cette  dentition,  qui  rentre  dans  celle  des  labroides 
ordinaires,  offre  encore  cependant  une  disposition 
caractéristique  du  genre  des  cleptiques. 

La  bouche  est  extrêmement  petite;  mais  elle  peut 
s'alonger  en  un  long  tube  par  la  protraction  des 
intermaxillaires,  dont  les  branches  sont  très-longues. 
L'ouverture  est  semi-circulaire,  les  deux  intermaxil- 
laires étant  réunis  en  demi- cercle.  La  lèvre  supé- 
rieure a  très- peu  d'épaisseur,  est  très -adhérente  à 
l'os ,  dont  la  branche  latérale  n'a  que  quatre  à  cinq 
petites  dents  coniques;  la  mitoyenne  seule  est  hori- 
zontale ;  elle  seule  dépasse  un  peu  la  lèvre  ,  et  peut 
se  voir  facilement;  les  autres  se  sentent  au  toucher 


270  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

comme  de  petites  aspérités.  Quand  la  mâchoire  infé- 
rieure s'abaisse  pour  ouvrir  la  bouche,  la  branche 
horizontale  de  l'intermaxillaire  seule  se  détache  du 
bord  de  la  voûte  des  sous-orbitaires,  et  l'on  ne  voit  pas 
du  tout  les  maxillaires;  mais  ils  deviennent  visibles 
quand  on  fait  sortir  le  tube  entier  de  la  bouche: 
on  aperçoit  les  branches  montantes  dans  toute  leur 
longueur;  elles  jouent  sous  la  peau  nue  du  devant 
du  museau;  elles  remontent  sur  le  crâne  jusqu'à  la 
hauteur  du  milieu  de  l'orbite.  Le  maxillaire  se  mon- 
tre alors  comme  une  languette  plate,  arrondie  par 
en  bas,  mince  et  un  peu  courbée,  pour  se  cacher 
entièrement  dans  la  rétraction  de  la  bouche  sous 
le  sous-orbitaire.  La  mâchoire  inférieure,  qui  a  une 
lèvre  très-épaisse  et  étendue  sous  elle,  a  deux  dents 
mitoyennes  horizontales ,  un  peu  plus  fortes  que  les 
deux  ou  trois  autres,  extrêmement  petites,  qui  la 
suivent.  Les  branches  horizontales  sont  portées  assez 
loin  en  arrière;  elles  deviennent  larges,  et  ont  un 
articulaire  as^ez  grand ,  qui  sert  à  faire  basculer  les 
maxillaires  et  attirer  en  avant  les  intermaxillaires.  La 
langue  a  de  la  liberté  dans  l'intérieur  de  la  bouche  ; 
elle  est  pointue  et  lisse  comme  le  palais. 

Quand  les  rayons  de  la  dorsale  sont  abaissés,  ils 
sont  tout-à-fait  cachés  par  les  écailles  de  la  base  de  la 
nageoire,  qui  ne  font  pas  cependant  une  large  gout- 
tière, comme  celle  des  spares.  Les  rayons,  en  se  re- 
dressant, entraînent  et  relèvent  avec  eux  les  écailles 
qui  les  recouvrent;  la  nageoire  devient  tout-à-fait 
écailleuse;  on  ne  voit  que  la  pointe  des  épines,  et 
une  plus  longue  portion  des  rayons  articulés.  La 


CHAP.   V.    CLEPTIQUES.  271 

longueur  des  rayons  épineux  augmente  successive- 
ment du  premier  au  douzième,  puis  les  deux  pre- 
miers rayons  mous  s'alongent  un  peu,  et  ils  sont  en- 
suite dépassés  de  plus  du  double  de  leur  longueur, 
jusqu'au  septième  articulé,  lequel  est  suivi  de  trois 
autres  rayons,  moitié  plus  courts  que  lui,  ce  qui 
rend  la  portion  molle  de  l'anale  pointue,  puis  échan- 
crée  en  arrière,  comme  si  la  nageoire  était  coupée. 
L'anale  est  faite  de  même  :  c'est  le  septième  et  le 
huitième  rayon  mou  qui  sont  prolongés  en  pointe. 

La  caudale  est  fourchue  quand  elle  est  fermée , 
et  coupée  en  croissant  quand  ses  rayons  sont  écar- 
tés. La  pectorale  est  pointue,  triangulaire;  elle  est 
comprise  quatre  fois  et  demie  dans  la  longueur  to- 
tale :  elle  n'a  pas  d'écaillés  à  sa  base.  La  ventrale  est 
de  médiocre  grandeur;  elle  a  dans  son  aisselle  une 
série  d'écaillés  pointues,  et  une  plus  longue  sépare 
la  base  des  deux  nageoires  inférieures. 

Les  écailles  sont  lisses,  assez  grandes;  j'en  compte 
trente-cinq  entre  l'ouïe  et  la  caudale ,  cinq  rangées 
au-dessus  de  la  ligne  latérale  tracée  parallèlement 
au  dos  le  long  de  la  sixième  rangée,  et  dix  à  douze 
au-dessous.  Chaque  écaille  a  une  base  radicale  qua^ 
drilatère,  plus  que  double  en  surface  de  la  portion 
nue;  elle  a  un  large  éventail  triangulaire  à  dix-sept 
rayons.  La  portion  nue  de  l'écaillé,  vue  à  la  loupe, 
montre  de  très-nombreuses  stries  longitudinales. 

La  ligne  latérale  se  continue  sans  interruption 
jusqu'à  la  caudale;  elle  est  formée  d'une  sorte  de 
petites  tubulures  simples  et  un  peu  relevées. 

Le  poisson,  décoloré  par  l'esprit  de  vin,  est  d'un 


272  LIVRE  XVI.   labroïdes. 

brun  olivâtre  foncé  sur  le  clos;  lavé  de  bleuâtre, 
argenté  et  marbré  de  bleu  sur  le  ventre.  La  caudale 
est  violâlre;  les  pointes  de  la  dorsale  et  de  l'anale  sont 
brunes ,  ces  deux  nageoires  étant  bordées  de  brun;  la 
face  interne  de  la  pectorale  est  très-foncée. 

Le  foie  est  peu  volumineux;  la  vésicule  du  fiel  est 
assez  grande,  ovale,  suspendue  à  un  long  canal  cys- 
tique  :  sa  plus  grande  portion  est  située  dans  le  côté 
droit  de  l'abdomen.  Le  canal  intestinal  n'offre  aucune 
dilatation  ;  il  descend  d'abord  jusqu'au  tiers  de  l'ab- 
domen, puis  fait  un  petit  feston,  et  remonte  vers  le 
diaphragme  pour  se  porter  de  nouveau  vers  le  bas; 
au  second  tiers ,  il  revient  de  nouveau  vers  la  tête  : 
cette  anse  va  loucher  le  premier  pli,  d'où  l'intestin, 
en  s'élargissant,  se  rend  droit  à  l'anus.  Son  épiploon 
est  très  gras.  Les  organes  de  la  génération  n'étaient 
pas  développés.  La  vessie  aérienne  est  mince,  mais 
très- grande.  Le  péritoine  est  argenté. 
Nous  en  avons  des  individus  qui  ont  jus- 
qu'à  dix  pouces  de  longueur.  Ils  nous  sont 
venus  de  la  Martinique  par  M.  Garnot;  mais 
nous  connaissions  déjà  l'espèce  par  un  indi- 
vidu plus  petit,  qui   nous  avait  été  envoyé 
de  la  même  île  par  M.  Plee. 

Ce  voyageur  le  regarde  comme  un  des  pois- 
sons communs  sur  le  rivage ,  et  c'est  même  de 
là  qu'il  déduit  l'origine  du  nom  vulgaire  de 
Créole,  sous  lequel  il  nous  l'a  envoyé.  Il  dit 
que  sa  chair  est  de  bon  goût,  et  qu'il  ne  dé- 
passe pas  une  livre  de  poids. 


CHAP.   V.    CLEPTIQUES.  273 

Parra  l'indique  avec  des  couleurs  plus  vives 
que  M.  Plëe,  mais  à  peu  près  semblables  :  la 
tête  est  carmin  obscur;  le  dos,  plus  clair, 
passe  au  rose;  les  cotes  orangés  et  les  pecto- 
rales noirâtres.  Il  le  dit  un  poisson  de  hauts 
fonds,  et  très-rare  dans  les  mers  de  la  Havane; 
car  le  pécheur  qui  lui  a  apporté  l'individu 
qu'il  a  peint,  n'en  avait  pas  encore  vu  d'au- 
tres, quoiqu'il  se  livrât  à  l'exercice  de  la  pèche 
depuis  plus  de  quarante  ans. 


i3.  18 


274  LIVRE  XVL   LABROÏDES. 

CHAPITRE  YI. 

Des  Laclinolèmes  {haclniolaiinus) ,  nom- 
més vulgairement  aux  Antilles  aigret- 
tes ou  capitaines. 

Catesby,  dans  son  Histoire  naturelle  de  la 
Caroline,  a  donne  (t.  II,  pi.  i5)  la  figure  de 
la  tête  et  des  premiers  rayons  dorsaux  d'un 
poisson  qu'il  nomme  suilluSy  et  dont  il  n'est 
pas  question  dans  les  auteurs  systématiques, 
excepté  toutefois  Bonnaterre,  qui,  dans  l'En- 
cyclopédie méthodique  \  l'a  confondu  avec  le 
lahrus  suilliis  ou  her^sniltra  de  Linné,  et  en 
a  fait  ainsi  un  poisson  des  Antilles  et  d'Eu- 
rope. Cet  oubli  tient  probablement  à  ce  que 
sa  description  est  aussi  incomplète  que  sa 
figure;  on  voit  cependant  qu'il  a  des  caractères 
remarquables  dans  la  protrac tilité  de  sa  mâ- 
choire supérieure ,  dans  les  grandes  dents  qui 
l'arment  en  avant,  ainsi  que  l'inférieure;  dans 
le  prolongement  en  longues  lanières  des  pre- 
miers rayons  de  sa  dorsale ,  dans  son  profil  con- 
cave et  dans  l'intégrité  de  toutes  ses  pièces 
operculaires. 

1.  Explic.  des  pi.  d'ichlh.,  p.  109. 


CHAP.    VI.    LACHNOLÈMES.  2715 

Ces  mêmes  caractères  généraux  se  retrou- 
vent dans  un  poisson  de  la  Havane,  décrit 
et  représenté  par  Parra  (pi.  3,  fig.  2),  sous 
le  nom  de  perro,  c'est-à-dire  chien  en  espa- 
gnol; mais  il  ne  paraît  pas  que  ce  perro  soit 
de  la  même  espèce  que  le  suilluSf  ou  du  moins 
faut-il  avouer  que  les  descriptions  de  leurs 
couleurs,  telles  que  les  donnent  Catesby  et 
Parra,  et  même  les  formes  de' leurs  museaux, 
ne  se  ressemblent  guère  ;  mais  l'identité  du 
genre  n'en  est  pas  moins  certaine. 

Nous  avons  vu  aussi  un  dessin  d'un  poisson 
du  même  genre, fait  en  1771  au  Cap-Français 
de  Saint-Domingue,  et  intitulé  aigrette  ou 
vivaneau;  et  M.  Plée  nous  en  a  envoyé  de  la 
Martinique,  sous  le  nom  de  capitaine;  de 
Porto-Rico,  sous  le  nom  de  cotorra  {perru- 
ches^ de  Barthélémy,  sous  celui  d'aigrette^ 
et  de  Saint -Thomas,  sous  celui  de  hog-Jish 
[poisson  cochon),  tous  semblables  entre  eux 
et  à  ceux  de  Parra  et  de  Catesby  par  les  ca- 
ractères généraux;  mais  assez  différens  par  les 
détails  des  proportions  et  quelques  accidens 
de  couleurs,  pour  être  considérés  comme 
formant  au  moins  quatre  espèces,  ainsi  que 
nos  lecteurs  vont  en  juger. 

J'ai  lieu  de  crohe  cependant  que  Linné 
avait  vu  un  poisson  de  ce  genre  dans  le  Musée 


276  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

de  De  Geei^;  car  ce  qu'il  en  dit  dans  sa 
douzième  édition  convient  parfaitement  à 
nos  lachnolèmes.  Il  le  décrit  sous  le  nom  de 
«  LJBRUS  FALCATUS,  pinïiœ  dorsali  analique 
raâiis  quinque  primis  inerniihus  falcata.  '' 
Et  il  ajoute  :  «  corpus  latitudine  Bramœ,  ar^ 
genteum.  Radii  quinque  prirni  e  mollihus  doj^- 
salis  analisque  elongati,  sequentibus  œqua- 
libus,  unde  hœ  pinnœ  falcatœ  j  dentés  acuti 
sunt;  pinnœ  ventrales  parvœ.  '' 

Le  poisson  venait  d'Amérique  ,  comme 
tous  nos  lachnolèmes;  mais  les  nombres  de 
rayons  sont  différens  de  tous  ceux  que  nous 
avons  observes.  Les  voici  tels  que  Linné  les 
a  comptes,  et  écrits  suivant  notre  méthode: 

D.  7/20;  A.  3/17;  C.  20;  P.  17;  V.  1/5. 

Ce  poisson  est  devenu  le  labre  faucheur 
de  l'Encyclopédie,  et  il  est  cité  sous  ce  nom 
dans  l'ouvrage  de  Lacépède. 

Tous  nos  lachnolèmes  ressemblent  à  des 
labres  proprement  dits ,  par  leurs  lèvres ,  par 
l'ensemble  de  leurs  formes,  par  la  membrane 
qui  descend  de  leurs  sous-orbitaires,  par  les 
écailles  de  leurs  joues,  par  les  lanières  de  leur 
dorsale.  Mais  on  les  reconnaît  dès  l'extérieur 
aux  prolongemens  flexibles  de  leurs  premiers 
aiguillons  dorsaux;  à  leur  ligne  latérale  parai- 


CHAP.    VI.    LACHNOLÈMES.  277 

lèle  au  dos  non  interrompue;  à  leurs  dents  an- 
térieures fortes,  crochues,  portées  en  avant  et 
suivies  d'une  série  de  petites  dents  égales.  Un 
caractère  plus  profond  consiste  dans  leurs  pha- 
ryngiens ,  qui ,  au  lieu  d'être  armés  sur  leur  tota- 
lité, comme  dans  les  labres,  de  dents  en  forme 
de  pavés,  n'en  ont  que  sur  une  petite  étendue 
et  sont  couverts,  sur  le  reste  de  leur  surface, 
d'une  membrane  veloutée.  C'est  de  cette  parti- 
cularité que  nous  avons  dérivé  leur  nom  géné- 
rique, laclinolhne,  de  '^c^%v^  {lanugo)  et  de 
?^ccifAo^  (giUtiir)j  il  signifie  gorge  laineuse,  gorge 
veloutée. 

Leur  intérieur  est  aussi  analogue  à  celui 
des  labres  :  ils  manquent  de  cœcums. 

II  paraît  qu'ils  se  ressemblent  entre  eux  par 
les  couleurs  non  moins  que  par  les  formes. 
Leurs  teintes  générales  sont  rouges,  et  pres- 
que tous  ont  une  tache  noire  sur  la  base  de 
la  dorsale  à  son  bord  postérieur. 

Le  Lachnolème  aigrette. 
{Lachnolaimus  aigula ,  nob.) 

L'espèce  que  nous  décrirons  en  tête  du 
genre,  est  Yaigrette  de  Saint-Barthélémy. 

Son  corps  est  ovale,  et  assez  comprimé  lorsque 
sa  bouche  est  rentrée  et  fermée.  Sa  plus  grande  liau- 


278  LIVRE  XVI.  labroïdes. 

teur,  prise  au  milieu  du  tronc,  est  deux  fois  et  trois 
quarts  dans  sa  longueur  totale,  la  caudale  comprise, 
et  deux  fois  et  un  quart  seulement,  en  ne  la  comp- 
tant pas.  Son  épaisseur  est  deux  fois  et  demie  dans 
sa  hauteur.  La  longueur  de  sa  tête  fait  le  quart  de  la 
longueur  totale,  et  elle  est  aussi  haute  à  la  nuque 
qu'elle  est  longue;  mais  la -bouche,  en  s'alon géant, 
ajoute  plus  d'un  quart  à  la  longueur  de  la  tête,  et  les 
proportions  générales  changent  en  conséquence.  La 
manière  dont  la  mâchoire  supérieure  se  porte  en 
avant  et  dont  l'inférieure  s'abaisse  dans  cette  protrac- 
tion, donne  à  la  physionomie  de  ce  poisson  un  rap- 
port sensible  avec  celle  de  nos  hœmulons  ou goretles. 
Des  lèvres  charnues  garnissent  les  deux  mâchoires, 
et  les  sous-orbitaires  sont  enveloppés  sous  une  large 
production  de  la  peau,  qui  unit  ceux  d'un  côté  à 
ceux  de  l'autre,  et  sous  laquelle  la  mâchoire  supé- 
rieure se  cache  presque  entièrement  dans  la  rétrac- 
tion. Cest  même  à  peine  si  le  maxillaire  se  montre 
un  peu  dans  la  protraction;  il  est  plat,  un  peu  élargi, 
et  arrondi  à  son  extrémité.  La  fente  de  la  bouche, 
même  lorsqu'elle  est  visible  jusqu'à  la  commissure, 
ne  fait  qu'un  peu  plus  du  tiers  de  la  longueur  de  la 
tête  (les  mâchoires  censées  retirées),  et  ne  s'étend 
pas  jusque  sous  l'œil,  qui  est  à  peu  près  au  milieu 
de  cette  longueur  et  au  quart  de  la  hauteur.  La 
mâchoire  supérieure  a  en  avant  quatre  dents  alongées , 
crochues  et  terminées  en  pointe;  et  de  chaque  côté 
treize  ou  quatorze  petites  dents  coniques  et  mousses, 
à  peu  près  égales,  et  se  montrant  peu  hors  de  la 
gencive.  L'inférieure  a  aussi  en  avant  quatre  dents 


chap.  VI  lachnolèmes.  279 

longues  et  crochues;  mais  les  deux  intermédiaires 
sont  de  moitié  plus  courtes  de  chaque  côté;  elle  en 
a  dix-sept  ou  dix-huit,  coniques  et  courtes,  un  peu 
moins  cependant  que  celles  d'en  haut.  Les  voiles  de 
derrière  les  dents  sont  épais  et  peu  larges.  La  langue 
est  ovale,  obtuse,  peu  libre;  elle  est,  ainsi  que 
le  palais ,  veloutée  vers  sa  base  et  sans  dents  ; 
et  une  membrane,  dont  le  velouté  est  encore  plus 
épais,  couvre  les  deux  pharyngiens  supérieurs  an- 
térieurs et  les  bords  de  l'inférieur ,  de  sorte  qu'il 
n'y  a  de  dents  en  pavés  qu'au  troisième  d'en  haut  et 
à  la  partie  moyenne  et  postérieure  de  celui  d'en  bas. 
Le  diamètre  de  l'œil  est  du  cinquième  de  la  longueur 
de  la  tête  ;  l'intervalle  des  yeux  est  presque  double 
de  ce  diamètre.  Un  léger  rebord  de  la  peau  garnit 
le  tour  de  l'orbite,  mais  sans  former  aucune  pau- 
pière. L'orifice  postérieur  de  la  narine  est  un  trou 
assez  petit,  sans  rebord,  placé  en  avant  de  l'œil,  à 
une  distance  égale  à  la  moitié  de  son  diamètre;  l'anté- 
rieur, encore  beaucoup  plus  petit  et  semblable  à 
une  piqûre  d'aiguille,  est  à  la  même  distance,  en 
avant  du  postérieur,  mais  un  peu  plus  bas;  l'inter- 
valle et  le  tour  des  yeux,  et  tout  le  museau  et  les 
mâchoires,  sont  couverts  d'une  peau  sans  écailles, 
ainsi  que  le  limbe  du  préopercule;  mais  le  crâne, 
la  tempe,  la  joue  et  les  trois  pièces  operculaires  sont 
écailleux.  Le  préopercule  est  rectangulaire ,  et  a  l'angle 
arrondi  et  le  bord  entier.  L'opercule  est  deux  fois  plus 
haut  que  long,  coupé  en  arc  peu  courbé;  un  bord 
cutané  le  termine  en  angle  obtus.  La  membrane  bran- 
chioslège  s'unit  à  sa  correspondante  sous  risihme , 


280  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

à  peu  près  vis-à-vis  le  milieu  de  l'œil;  elles  ont  cha- 
cune six  rayons.  La  quatrième  brancliie  est  tout- 
à-fait  collée  à  l'épaule,  de  manière  que  l'eau  ne 
peut  passer  entre  elle  et  le  corps.  Il  y  a  une  demi- 
branchie  attachée  sous  les  os  de  la  'joue.  L'aisselle 
est  nue,  et  il  n'y  a  à  l'épaule  ni  armure  ni  écaille 
particulière.  La  pectorale,  de  forme  demi-ovale  et 
attachée  au  tiers  inférieur  de  la  hauteur,  est  d'un 
peu  moins  du  cinquième  de  la  longueur  et  a  quinze 
rayons.  Le  premier,  qui  est  simple,  n'a  que  moitié 
de  la  longueur  des  trois  suivans ,  qui  sont  les  plus 
longs. 

Les  ventrales ,  à  peu  près  de  la  longueur  des  pec- 
torales, sont  attachées  un  peu  plus  en  arrière,  l'une 
près  de  l'autre  ;  sur  leur  base  est  un  petit  repli 
écailleux,  et  il  y  en  a  un  impair  entre  elles.  Leur 
épine  est  grêle  et  d'un  quart  plus  courte  que  le 
deuxième  rayon  mou,  qui  est  le  plus  long. 

La  dorsale  commence,  au-dessus  de  l'attache  des 
pectorales,  par  trois  rayons  comprimés,  et  les  ter- 
mine en  pointes  flexibles  de  près  de  moitié  de  la 
longueur  du  corps;  le  quatrième  n'a  que  le  tiers  de 
la  longueur  des  autres,  et  il  est  suivi  de  dix  autres, 
de  moitié  plus  courts  que  lui.  Entre  tous  ces  rayons 
la  membrane  est  échancrée  jusqu'à  sa  racine;  mais 
à  chacun  des  dix  derniers  elle  forme  une  petite 
lanière  qui  dépasse  l'épine  de  moitié.  La  dixième 
épine  reprend  un  peu  de  longueur,  et  des  onze 
rayons  mous  qui  la  suivent,  le  quatrième  et  le  cin- 
quième sont  les  plus  longs,  et  donnent  à  cette  partie 
de  la  nageoire  une  pointe  aiguë.  Cette  portion  molle 


CHAP.  VI.  lachnolèmes.  281 

de  la  dorsale ,  dont  la  pointe  égale  en  hauteur  la 
moitié  des  premiers  rayons  épineux ,  n'occupe  pas  en 
longueur  sur  le  dos  moitié  de  l'espace  qu'y  tient  la 
partie  épineuse,  et  les  deux  ensemble  y  prennent  à 
peu  près  les  deux  cinquièmes  de  la  longueur  totale. 

L'anale  commence  vis-à-vis  l'avant-dernier  rayon 
osseux  du  dos,  et  a  trois  épines  courtes  et  fortes, 
munies  de  lanières,  comme  celles  de  la  dorsale;  et 
dix  rayons  mous,  dont  le  troisième  et  le  quatrième 
forment  aussi  une  pointe  aiguë,  égale  à  celle  de  la 
nageoire  supérieure. 

Les  écailles  du  corps  s'étendent  un  peu  sur  les 
hases  de  ces  nageoires,  et  les  aiguillons  de  la  dor- 
sale peuvent,  jusqu'à  un  certain  point,  se  cacher 
entre  elles. 

La  portion  de  queue  derrière  la  dorsale  et  l'anale 
est  du  sixième  de  la  longueur  totale,  et  un  peu 
moins  haute  que  longue.  La  caudale  a  ses  deux 
angles  prolongés  en  pointes  aiguës;  leur  longueur 
est  de  plus  du  cinquième  du  total;  dans  le  milieu 
elle  n'en  a  que  le  huitième.  On  y  compte  quatorze 
rayons,  dont  les  deux  extrêmes  sont  sans  branches. 

D.  15/11,  dont  cinq  filets;  A.  3/10;  C.  14; P.  15;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  grandes,  ovales,  plus  longues 
que  larges ,  à  peu  près  lisses  dans  leur  partie  visible, 
membraneuses  et  très-fmement  striées  sur  leur  limbe. 
L'éventail  prend  les  deux  tiers  de  la  longueur  et  a 
'  dix-sept  ou  dix-huit  stries.  Celles  qui  couvrent  la 
racine  de  la  caudale,  sont  plus  alongées  que  les 
autres;  il  en  est  de  même  de  celles  de  la  joue.  La 


282  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

ligne  latérale,  à  peu  près  parallèle  au  dos,  occupe 
en  avant  le  tiers  de  la  hauteur,  et  se  marque  sur 
chaque  écaille  par  une  élevure  linéaire  et  simple,  qui 
occupe  moitié  de  la  longueur.  Les  nageoires  n'ont 
aucunes  écailles. 

Dans  la  liqueur  il  paraît  entièrement  d'un  brun 
pourpré,  avec  une  tache  ronde  et  d'un  brun  foncé  à 
la  base  postérieure  de  la  dorsale.  Mais  M.  Plée^  qui 
l'a  vu  et  dessiné  vivant,  lui  donne  des  couleurs  plus 
belles  et  plus  variées:  le  dos,  selon  lui,  est  rouge,  les 
flancs  d'un  rouge  nuancé  de  blanc,  la  mâchoire  infé- 
rieure blanche;  sur  la  tempe  et  sur  la  joue  se  voient 
de  petits  traits  obliques  bleus;  les  longs  rayons  épi- 
neux de  la  dorsale  sont  très-rouges,  et  la  tache  de 
l'angle  de  cette  nageoire  très-noire. 

A  l'ouverture  du  corps  du  lachnolème,  l'abdomen 
paraît  petit;  on  voit  les  viscères  qui  servent  à  la 
digestion  et  à  la  génération,  renfermés  dans  une  ca- 
vité un  peu  plus  longue  que  haute,  très-étroite,  et 
dont  les  parois  sont  tapissées  par  un  péritoine  argenté 
brillant,  assez  mince  sur  les  muscles  du  ventre ,  mais 
qui  s'épaissit  beaucoup  sous  le  dos,  excepté  à  l'endroit 
où  il  laisse  passer  les  vaisseaux  qui  se  rendent  à  la 
vessie  aérienne.  Celle-ci,  par  son  volume,  lait  plus 
que  doubler  la  capacité  de  la  cavité  que  l'on  a  vue 
d'abord. 

Le  canal  intestinal  est  un  tube  alongé,  simple, 
sans  dilatation  sensible  qui  fasse  l'estomac.  A  son 
entrée  près  du  pharynx  l'œsophage  est  très-plissé; 

1.  Barthélémy',  n."  22,  fol.  106,  de  Porto-Rico. 


CHAP.   VI.    LACHNOLÈMES.  285 

ces  plis  ne  se  portent  pas  loin  en  arrière,  et  la  mu- 
queuse est  couverte  de  petites  cellules  hexagonales, 
formées  par  la  réunion  des  papilles  élevées  sur  sa 
surface.  Cette  disposition  est  la  même  sur  toute  la 
veloutée  de  l'intestin.  Vers  le  tiers  de  sa  longueur 
il  y  a  un  étranglement,  puis  l'intestin  fait  quelques 
ondulations,  et  ensuite  un  repli  très -court,  après 
lequel  il  se  courbe  de  nouveau  et  se  rend  droit  a 
l'anus,  en  augmentant  beaucoup  de  largeur.  Une 
valvule  charnue,  épaisse,  en  forme  de  bourrelet, 
sépare  le  rectum  du  reste  de  l'intestin  5  elle  répond 
à  la  hauteur  du  premier  repli. 

La  rate  est  petite,  ovale,  aplatie,  suspendue  au- 
dessus  de  l'intestin  vers  le  second  repli. 

Les  laitances  sont  médiocres,  rejetées  vers  l'ar- 
rière de  l'abdomen j  les  sacs  sont  ovales,  alongés,  et 
se  prolongent  en  un  canal  peu  étroit  qui  débouche 
derrière  l'anus. 

La  vessie  natatoire  est  très- grande  :  elle  s'étend 
depuis  les  branchies  jusque  dans  les  muscles  de  la 
queue,  où  elle  pénètre  assez  loin  par  les  deux  cornes 
à  base  très-large ,  qu'elle  envoie  en  arrière.  Sa  tuni- 
que propre  est  membraneuse  et  d'une  grande  té- 
nuité; celle  que  lui  fournit  le  péritoine  est  épaisse, 
fibreuse,  très -solide,  et  donne  de  fortes  brides  qui 
s'unissent  intimement  avec  les  aponévroses  des  mus- 
cles latéraux,  de  manière  que  la  vessie  adhère  aux 
côtes  avec  beaucoup  de  force:  Vers  le  haut,  cette 
tunique  de  la  vessie  adhère  aux  apophyses  trans- 
verses des  vertèbres ,  qui  sont  grosses  et  élargies , 
pour  donner  de  plus  grandes  attaches  encore  à  celte 
tunique,  qui  brille  d'un  bel  éclat  argenté. 


284  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

Les  reins  sont  renflés  antérieurement  entre  les 
branchies  et  la  vessie  aérienne;  ils  deviennent  sous 
la  colonne  vertébrale  un  simple  filet,  qui  descend 
entre  les  fourches  de  la  vessie  natatoire,  et  qui  se 
renfle  de  nouveau  en  un  bulbe  unique,  qui  dé- 
bouche immédiatement  dans  la  vessie  urinaire;  celle- 
ci  est  grande,  en  ovale  alongé,  un  peu  comprimé, 
et  étendue  depuis  l'anus  jusqu'en  avant  de  la  bifur- 
cation du  sac  des  laitances. 

Nous  ne  pouvons  rien  dire  du  foie,  qui  était 
détruit;  mais  nous  avons  pu  juger  que  ce  viscère 
doit  être  très-petit  dans  ce  poisson. 

L'individu  que  nous  décrivons  est*  long  de 
onze  pouces,  et  en  a  quatre  de  hauteur. 

Uaîgrette  de  Saint-Domingue,  dont  je 
n'ai  qu'un  dessin  peu  correct  pour  la  partie 
de  la  queue,  me  paraît  cependant,  d'après 
les  rayons  de  sa  dorsale  et  la  forme  de  sa 
tête,  appartenir  à  la  même  espèce  que  celle 
de  Saint-Barthëlemy. 

La  note  qui  accompagne  le  dessin  dit  que 
l'individu  était  long  de  deux  pieds,  que  l'es- 
pèce porte  aussi  le  nom  de  vwaneau,  sans 
doute  à  cause  de  sa  couleur  rouge ,  semblable 
à  celle  du  vrai  vivaneau  (mesopi^ion),  et  que 
c'est  un  excellent  poisson ,  dont  la  chair  est 
blanche  comme  du  lait,  et  d'un  goût  déli- 
cieux. 


CHAP.    VI.    LACHNOLÈMES.  285 

Le  Lachnolème  capitaine. 
{Lachîiolaimus  diiaCj  nob.) 

Le  lacliiiolème  envoyé  de  la  Martinique 
par  M.  Plée,  et  qui  se  nomme  capitaine  dans 
cette  île,  ressemble  à  celui  de  Saint-Bartlié- 
lemy  pour  les  formes; 

mais  son  quatrième  rayon  dorsal  n'est  que  d'un  tiers 
plus  court  que  le  troisième,  et,  au  contraire,  les 
pointes  de  ses  trois  nageoires  verticales  ne  sont  ni  si 
alongées  ni  si  aiguës.  Dans  la  liqueur  il  paraît  entière- 
ment aurore,  avec  la  tache  noire  à  la  dorsale,  des 
teintes  noirâtres  au  bord  de  l'anale,  et  une  triple  série 
de  points  noirâtres  sur  la  membrane  de  la  caudale, 
dont  celle  de  la  base  est  plus  large. 

D'après  la  description  de  M.  Plée,  dans  l'état  frais 
il  est  rouge  et  a  les  nageoires  jaunes. 

Le  lachnolème  capitaine  a  le  foie  petit;  le  canal 
intestinal  simple,  onduleux,  et  faisant  en  outre  deux 
replis  très-courts  dans  sa  longueur;  peu  avant  de 
déboucher  à  l'anus,  une  valvule  assez  épaisse  indi- 
que le  rectum,  qui  est  très-large.  Son  diamètre  a  plus 
que  le  double  de  celui  de  l'intestin.  La  veloutée  n'a 
que  de  petites  rides  irrégulières  et  inégales. 

Nous  n'avons  pas  vu  la  vessie  aérienne  de  celle 
espèce  parce  qu'elle  était  détruite. 

Cet  individu  est  long  de  huit  pouces. 
Ses  dents   antérieures,  surtout  celles  d'en 
bas ,  sont  beaucoup  moins  longues  à  propor- 


286  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

tion    que   dans    celui  de    Saint-Bartliélemy; 
mais  il  paraît  jeune. 

M.  Plëe  assure  qu'il  y  en  a  à  la  Martinique 
de  vingt-cinq  à  trente  livres  pesant,  qu'ils  y 
sont  peu  communs,  et  qu'on  les  y  recherche 
à  cause  de  la  bonté  de  leur  chair. 

Le  Lachnolème  a  grouin  de  cochon. 
{Lachnolaimus  suillus ^  nob.j  Catesb.,  XV.) 

Un  des  lachnolèmes  envoyés  de  Saint- 
Thomas,  sous  le  nom  de  ho^-jisli,  me  paraît 
répondre  mieux  que  tous  les  autres  à  la  figure 
de  Catesby. 

C«st  une  femelle,  longue  d'un  peu  plus  de  deux 
pieds;  son  museau  est  plus  alongé  et  plus  concave 
à  proportion  que  dans  les  précédents;  sa  tête  n'est 
que  trois  fois  et  deux  tiers  dans  la  longueur  totale  , 
prise  jusqu'au  bout  des  longues  pointes  de  la  cau- 
dale. Ses  dents  antérieures  sont  très-fortes,  excepté 
les  deux  intermédiaires  d'en  bas;  outre  la  rangée  de 
petites  de  chaque  côté,  il  y  en  a  à  la  face  interne  de 
chaque  mâchoire  deux  ou  trois  rangs  irréguliers 
et  elles  y  sont  encore  plus  petites.  Sa  dorsale  n'a  que 
trois  rayons  alongés;  le  quatrième  est  aussi  court 
que  les  dix  qui  le  suivent.  Au  contraire,  les  angles 
de  sa  caudale  s'alongent  en  pointes  étroites  et  aiguës, 
plus  longues  que  le  reste  de  la  mâchoire,  et  qui,  à 


CHAP.    yi.    LACHNOLÈMES.  287 

elles  seules  prennent  près  du  sixième  de  la  longueur 
du  poisson. 

A  l'état  sec  la  couleur  paraît  d'un  gris  fauve.  La 
tache  de  la  dorsale  est  petite  ;  la  moitié  de  la  cau- 
dale, du  côté  de  la  base,  est  couverte  d'une  large 
bande  verticale  noirâtre,  qui  se  prolonge  sur  les  bords 
jusqu'aux  extrémités  de  ses  pointes.  La  membrane 
de  sa  dorsale  est  noire  à  sa  base,  et  du  pied  de  ses 
trois  premiers  rayons  part  une  bande  noirâtre,  qui 
se  porte,  en  s'affalbllssant,  jusque  vers  l'œil  et  au- 
delà  sur  les  côtés  du  museau.  Sur  chaque  flanc,  au- 
dessus  de  la  pointe  de  la  pectorale,  est  une  tache 
oblongue  et  noirâtre.  La  pectorale  même  est  jaune. 
La  ventrale  et  le  bord  antérieur  de  la  dorsale  et  de 
l'anale  sont  teints  de  noirâtre. 

Dans  le  frais,  d'après  les  notes  qui  nous  sont 
fourmes  par  M.  Plée  et  par  M.  Rlcord,  l'espèce  a  le 
bord  des  écailles  rouge  et  la  base  jaunâtre;  le  dessus 
de  la  tête  pourpré;  les  deux  côtés  de  sa  mâchoire 
inférieure  d'un  rouge  de  sang  très-vif,  les  écailles  de 
la  joue  d'un  bleu  clair  sur  un  fond  orangé,  couvert 
de  petites  rlvulatlons  rouges;  la  portion  épineuse 
de  la  dorsale  brune;  ses  longues  pointes  rouges  ou 
orangées,  avec  des  filets  brunâtres;  la  seconde  dorsale 
bordée  sur  le  devant  de  gris  foncé,  et  de  rouge  sur 
le  haut;  la  base  est  verdâtre,  les  pectorales  jaunes; 
les  ventrales  noires  à  la  pointe ,  et  jaune  taclieté  de 
rouge  à  la  base;  la  caudale  a  la  moitié  noire  et  le 
croissant  jaune;  les  pointes  sont  noires,  son  Iris 
rouge. 

Il  ajoute  que  ces  couleurs  sont  sujettes  à  varier; 


288  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

mais  on  volt  que  ce  qu'il  en  dit,  joint  à  ce  que  nous 
y  avons  observé,  s'accorde  assez  bien  avec  la  des- 
cription et  la  figure  de  Gatesby.  ^ 

M.  Plée  assure  que  la  chair  de  ce  poisson 
est  très-estimée ,  et  qu'on  le  trouve  en  abon- 
dance parmi  les  rochers  des  petites  Isles- 
Vierges.  L'individu  qu'il  nous  a  envoyé  est, 
dit-il,  des  plus  grands.  Catesby  en  a  vu  de 
bien  supérieurs,  car  il  leur  attribue  une  lon- 
gueur de  trois  et  de  quatre  pieds. 

Cette  espèce  se  retrouve  aussi  à  Saint- 
Domingue,  d'où  M.  Ricord  nous  en  a  rap- 
porté un  bel  individu,  aussi  grand  que  celui 
qui  a  servi  à  notre  description.  Il  a  tous  les 
caractères  que  nous  avons  signalés  sur  le  pois- 
son de  Saint-Tliomas. 

Le  Lachnoléme  petit  chien. 
{Lachnolaimus  caninus ,  nob.) 

Les  mers  des  Antilles  nourrissent  une  qua- 
trième espèce  de  lachnolèmes,  qui  atteint  à 
une  taille  assez  considérable. 


1.  Catesby  n'avait  vu  que  la  partie  antérieure  du  poisson  ^  et 
à  ce  qu'il  paraît  déjà  un  peu  altérée.  Il  indique  bien  le  rouge  de 
la  bouche,  \t&  petites  taches  bleues  des  joues,  le  brun  du  dcA'ant 
du  museau  ,  le  jaune  de  la  pectorale,  le  noir  de  la  dorsale  et  des 
ventrales;  mais  il  peint  le  dos  d'un  brun  pourpré,  et  dit  que  le 
ventre  était  tacheté  de  jaune. 


CHAP.    VI.     LACHNOLÈMES.  289 

Elle  n'a  que  les  trois  premiers  rayons  alongés  en 
lanière,  qui  atteignent,  en  les  abaissant,  à  la  taclie  de  la 
base  de  la  dorsale.  Le  quatrième  rayon  est  court  et 
devient  une  forte  épine.  Le  museau  est  beaucoup 
moins  prolongé.  La  mâchoire  supérieure  a  au  milieu 
quatre  très-grosses  dents  coniques  et  pointues;  et,  à 
l'inférieure,  des  quatre  plus  grosses  les  deux  externes 
dépassent  les  autres.  Le  long  des  mâchoires  il  n'y  a 
qu'une  rangée  de  dents.  Il  est  probable  que  cette 
disposition  aura  fait  donner  à  l'espèce  le  nom  de 
perro  par  les  Espagnols  de  la  Havane. 

Le  corps  est  rouge,  plus  uniforme,  sans  tache  sur 
les  flancs,  sans  brun  sur  la  dorsale  et  sans  pourpré 
sur  la  nuque. 

Nous  avons  pu  faire  sur  le  squelette  de  cette 
espèce  les  oÎ3servations  suivantes  : 

La  crête  interpariétale  est  très-haute  et  se  divise 
antérieurement  en  deux  petites,  qui  sont  divergentes 
et  se  portent  sur  le  devant  des  frontaux  antérieurs, 
pour  laisser  glisser  entre  elles  les  branches  montantes 
des  interniaxiilaires.  Il  y  a  deux  autres  petites  crêtes 
sur  la  région  mastoïdienne.  La  colonne  vertébrale  a 
douze  vertèbres  abdominales  et  dix -sept  caudales; 
la  dernière,  en  éventail,  est  large  et  sans  apophyse 
latérale. 

Nous  avons  connu  cette  espèce  d'après  un 
individu  mâle, long  de  dix  pouces,  que  M.  Plëe 
a  recueilli  à  Saint-Thomas.  Mais  nous  en  avons 
aussi  des  individus  plus  petits,  qui  ont  été 
donnés  au  Muséum  par  M.  L'Herminier,  et 

i3.  19 


290  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

d'autres,  plus  grands,  dont  un  de  vingt-deux 
pouces,  rapportés  de  Saint-Domingue  par 
M.  Ricord.  Nous  considérons  encore  comme 
de  la  même  espèce  un  petit  individu  long 
de  quatre  pouces,  que  nous  avons  observé 
parmi  les  poissons  de  la  collection  de  Mont- 
pellier. 

Cette  suite  d'individus  montre  que  tous 
ont  les  mêmes  rayons  dorsaux,  et  dans  les 
mêmes  proportions  ;  que  les  dents  antérieures 
s'alongent  avec  l'âge,  et  qu'il  en  est  de  même 
des  pointes  de  la  dorsale,  de  l'anale  et  des 
fourches  de  la  caudale.  Ainsi  cette  nageoire 
est  coupée  carrément  dans  le  plus  petit  de 
nos  individus;  elle  est  écbancrée  dans  ceux  de 
moyenne  taille,  et  elle  devient,  dans  le  grand 
poisson  de  Saint-Domingue,  tout  aussi  pro- 
fondément fourchue  que  la  caudale  du  Lachn. 
sidllus, 

La  figure  de  Parra  représente  fort  exactement 
(pi.  3,  iig.  2)  l'individu  que  nous  devons  aux 
recherches  de  M.  Plée;  elle  manque  également 
de  noir  sur  la  queue,  de  taches  aux  flancs, 
et  n'a  que  trois  fdamens  de  couleur  fauve 
comme  le  corps,  où  les  bords  des  parties 
molles  de  la  dorsale  et  de  l'anale  sont  seuls 
teints  de  rose. 

L'auteur  assure  que  sa  chair  est  suspecte. 


CHAP.    VI.    LACHNOLÈMES.  291 

Le  Lachnolème  perroquet. 
{Lachnolaimus  psittacus y  nob.) 

M.  Plëe,  qui  parait  avoir  regardé  tous  les 
lachnolèmes  comme  identiques,  en  décrit  un 
de  Porto-Rico , 

d'un  rouge  rose,  qui,  outre  la  tache  noire  de  l'angle 
de  la  dorsale,  en  a  une  autre,  plus  petite,  à  l'angle 
correspondant  de  l'anale,  laquelle  s'efface  après  la 
mort. 

Les  colons  espagnols  de  cette  île  ont  donné 
à  ce  poisson,  à  cause  de  ses  belles  couleurs, 
le  nom  de  cotorra,  qui  signifie  perruche. 
Comme  nous  ne  l'avons  pas  vu ,  nous  ne  pou- 
vons pas  dire  jusqu'à  quel  point  il  ressemble 
aux  autres  ou  en  diffère  pour  les  caractères 
de  forme,  ou  s'il  doit  être  d'une  espèce  à 
part;  mais  la  tache  de  son  anale  nous  le  fait 
soupçonner;  il  est  le  seul  sur  lequel  on  trouve 
ce  caractère. 


292  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

CHAPITRE  YÏI. 

Des  Tautogiies  {Tautoga,  iiob.). 

J'ai  employé,  à  l'exemple  de  Mitchlll,  le 
nom  qui  se  terminait,  par  une  heureuse  eu- 
phonie, en  une  désinence  latine,  pour  faire 
connaître  un  nouveau  genre  de  la  famille  que 
je  traite  dans  ce  chapitre. 

Les  tautogues  sont  des  labroides  dont  le 
caractère  générique  consiste  dans  la  double 
rangée  de  dents  sur  les  deux  mâchoires,  et 
dans  le  nu  de  la  peau  épaisse  et  sans  écailles, 
qui  couvre  l'opercule ,  le  sous-opercule  et  l'in- 
teropercule  :  il  n'y  en  a  même  que  fort  peu 
sur  le  préopercule. 

Ce  genre  semble  nous  conduire  aux  girelles, 
dont  la  joue  est  toute  nue. 

Nous  ne  possédons  dans  nos  collections 
qu'une  espèce  de  l'Atlantique,  qui  offre  d'assez 
nombreuses  variétés,  et  qui  fournit,  sur  les 
côtes  des  États-Unis  d'Amérique,  une  pèche 
abondante;  nous  pensons  même  qu'il  n'y  a 
qu'une  seule,  quoique  Mitchill  en  ait  distingué 
une  seconde  dans  son  premier  Essai  sur  les 
poissons  de  New- York ,  dont  il  n'a  plus  parlé 
dans  son   grand  mémoire.  Mais  la  mer  des 


CHAP,    VÏI.    TAUTOGUES.  2D5 

Indes  en  nourrit  plusieurs  autres  qui  offrent 
toutes  le  même  caractère  générique. 

Le  Tautogue  noir. 
(  Tautoga  nigra,  Mitcli.) 

Ce  poisson,  qui  porte  à  New-York  le  nom 
de  hlack-fisli  (poisson  noir),  dénomination 
qui  lui  est  commune  avec  le  centropriste  noir 
{^centropristis  atrarius^  nob. ),  et  quelques, 
autres  encore,  de  familles  très-différentes,  tels 
que  des  silures,  n'est  pas  du  nombre  de  ceux 
que  Garden  fit  connaître  à  Linné;  aussi  ne  le 
trouve- t-on  pas  dans  le  Sjstema  naturce,  ni 
dans  l'édition  de  Gmelin,  quoique  cet  éditeur 
aurait  pu  l'y  placer  d'après  la  description  fort 
exacte  que  Sclicepf  en  a  donnée  dans  son 
mémoire  sur  les  poissons  du  nord  d'Amérique.* 

Cette  description  a  servi  à  Blocli^  pour  in- 
troduire l'espèce  dans  son  Système  posthume, 
sous  le  nom  de  lahriis  ainericanus. 

Mitchill  a  mentionné  ce  labroïde^,  d'abord 
dans  son  premier  Essai  sur  l'histoire  des  pois- 
sons de  New-York,  publié  en  iSi/f,  et  oii  il 
le  considère  comme  d'un  genre  particulier, 

1.  Beschreib.  Nord- Amer.  Fiscke ^  von  Joh.  Dav.  Schœpf, 
in  Nalurforsch.  Fr. ,  t.  VIII,  p.  i56.  —  2.  Bloch  ,  édit.  Schn., 
Syst.  poslh. ,  p.  261  ,  n."  80.  —  3.  Report  of  Sam.  Milch. ,  on 
ihe  fish.  of  New-York.  p.  3  3. 


294  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

qu'il  désigne  sous  le  nom  de  tautoga,  latini- 
sant ainsi  le  nom  vulgaire  des  pêcheurs  de 
Rhode-Island.  Le  même  auteur  en  a  parlé  en- 
suite plus  au  long,  sous  le  rapport  de  ses  ha- 
bitudes et  des  différentes  observations  que  les 
Américains  ont  faites  sur  un  poisson  si  connu 
d'eux,  mais  sans  mieux  signaler  ses  caractères 
zoologiques,  dans  son  grand  travail  sur  les 
poissons  de  New^-York,  inséré  dans  le  premier 
volume  de  la  Société  littéraire  et  philoso- 
phique de  cette  ville  pour  l'année  181 5.  Il 
y  place  notre  poisson  parmi  les  labres,  sous 
le  nom  de  lahrus  tautoga,  sans  rappeler  le 
travail  de  Schœpf ,  ni  l'emploi  qu'en  avait  fait 
Bloch. 

Ayant  appris  à  connaître  les  caractères  gé- 
nériques de  ce  poisson ,  nous  adopterons , 
pour  ne  pas  introduire  de  nouveaux  noms, 
celui  que  Mitchill  avait  déjà  employé;  mais 
l'établissement  du  genre  et  de  ses  rapports 
sera  évidemment  notre  œuvre.  Nous  allons 
en  justifier  par  la  description  suivante. 

Le  corps  du  tautogue  est  alongé,  comprimé  et 
du  double  plus  haut  de  l'avant  que  de  l'arrière.  C'est 
au-devant  de  la  dorsale  quil  a  le  plus  de  hauteur: 
elle  est  contenue  trois  fois  et  un  tiers  dans  la  lon- 
gueur totale.  Le  profil  descend  vers  l'exlrémité  du 
museau  par  une  courbe  assez   soutenue  et   relevée 


CHAP.    VIT.    TAUTOGUES.  295 

en  bosse  au-devant  des  veux.  Ces  organes  sonipelits; 
le  diamètre  n'est  guère  que  du  huitième  ou  neuvième 
de  la  longueur  de  la  tête,  qui  est  comprise  trois  fois 
et  deux  tiers  dans  la  longueur  totale  du  corps.  On  ne 
distingue  pas  le  sous-orbitaire  sous  la  peau  épaisse 
et  sans  écailles  qui  le  recouvre. 

Le  préopercule  est  grand  ,  à  angle  arrondi,  à  bords 
lisses  et  sans  aucunes  dentelures;  on  n'y  aper- 
çoit point  de  limbe.  L'opercule  est  large,  échancré 
en  arrière,  bordé  par  une  membrane  épaisse,  qui 
s'étend  sur  tout  l'os  et  sur  le  sous -opercule,  ainsi 
que  sur  l'interopercule  et  sur  la  mâchoire  inférieure. 

Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  percées 
dans  le  haut  de  la  joue,  au-devant  de  l'œil.  L'anté- 
rieure, qui  est  au  tiers  postérieur  de  la  distance  entre 
le  bord  antérieur  de  l'œil  et  le  bout  du  museau,  est 
petite  et  tubuleuse;  la  seconde  est  un  grand  trou 
ovale,  près  de  l'œil.  Le  museau  est  très-gros  et  renflé. 

La  mâchoire  inférieure  est  un  peu  plus  courte 
que  la  supérieure.  Les  lèvres,  et  surtout  celle  d'en 
haut,  sont  très  -  épaisses ,  et  n'offrent  que  peu  de 
plis,  à  la  manière  des  labres  ordinaires;  elles  sont 
garnies  de  nombreuses  papilles.  Les  dents  sont  fortes 
et  coniques,  et  disposées  sur  deux  rangs;  les  quatre 
antérieures,  tant  en  haut  qu'en  bas,  sont  les  plus 
grosses ,  celles  de  la  rangée  interne  les  plus  petites  : 
les  pharyngiennes  sont  globuleuses  comme  celles 
des  labres. 

Le  surscapulaire  est  recouvert  par  la  peau  épaisse 
de  la  tête ,  et  qui  s'étend  aussi  sur  l'huméral.  Il  y 
a  des  pores  assez  visibles  et  peu  nombreux  sur  le 


296  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

haut  de  la  tempe.  L'huméral  a  la  forme  d'un  large 
triangle. 

La  pectorale  est  un  grand  éventail  arrondi,  dont 
la  longueur  égale  la  moitié  de  la  hauteur  du  corps  ; 
elle  est  attachée  sous  les  deux  tiers  de  cette  même 
hauteur.  Les  ventrales  sont  reculées  sous  la  moitié  de 
la  pectorale.  La  dorsale  est  au  contraire  un  peu  plus 
avancée  que  la  base  de  la  nageoire  de  la  poitrine;  elle 
est  basse,  et  ne  commence  à  s'élever  un  peu  que  sur 
la  portion  molle,  qui  est  arrondie.  La  longueur  to- 
tale de  la  nageoire  égale  la  moitié  de  la  longueur  du 
poisson,  et  la  portion  molle  n'a  pas  le  tiers  de  la 
longueur  de  la  dorsale.  L'anale  répond  au  premier 
rayon  mou  de  celle-ci;  elle  est  arrondie  en  arrière,- 
mais  un  peu  plus  haute.  La  caudale  est  coupée  car- 
rément. 

B.  5;  D.  17/10;  A.  3/8;  C.  13;  P.  17;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  minces,  nombreuses,  plus  petites 
sur  le  dos  que  sur  les  côtés  entre  l'ouie  et  la  cau- 
dale :  on  en  compte  de  soixante-cinq  à  soixante- 
dix,  et  c[uarante  à  quarante -cinq  dans  la  hauteur. 
Une  écaille,  vue  isolée ,  montre  plus  de  longueur  que 
de  hauteur;  la  portion  recouverte  est  presque  triple 
de  la  partie  visible;  l'éventail  est  composé  de  qua- 
torze rayons,  qui  entament  à  peine  le  bord  radical, 
îl  y  a  un  groupe  de  très-petites  écailles  noyées  dans 
la  peau  sur  le  haut  du  préopercule  et  sous  le  sur- 
scapulaire;  toutes  les  autres  parties  de  la  tète  en  sont 
dépourvues;  il  y  en  a  de  très-petites  sur  la  mem- 
brane de  la  dorsale  et  de  l'anale,  et  «juelques-unes. 


CHAP.    VIT.    TAUTOGUES.  297 

un  peu  plus  grandes,  s'avancent  entre  les  rayons  de 
la  caudale  :  celles  que  suit  la  ligne  latérale  sont  plus 
étroites.  Cette  ligne  est  parallèle  à  la  courbe  du  dos, 
tracée  à  peu  près  par  le  tiers  de  la  hauteur,  sur  la 
treizième  rangée  d'écaillés,  et  infléchie  sur  la  queue 
qu'elle  traverse  par  le  milieu  :  elle  n'est  pas  inter- 
rompue. 

La  couleur  des  individus  conservés  dans  l'eau-de- 
vie  est  d'un  brun  uniforme,  rougeâtre  sur  le  dos  et 
blanchâtre  sous  le  ventre.  La  mâchoire  inférieure  est 
blanche  avec  quelques  grosses  taches  noirâtres;  un 
d'entre  eux,  long  de  treize  pouces,  a  de  grandes  mar- 
brures noirâtres  sur  un  fond  brun  pâle.  D'autres 
individus  montrent  le  dessous  de  la  mefnbrane  bran- 
chiostège  très-noir. 

Mais,  selon  Mitchill,  le  poisson  frais  a  le  dos  et 
les  côtés  noirs,  à  reflets  bleuâtres,  comme  la  cor- 
neille; les  lèvres,  la  mâchoire  inférieure  et  le  ventre 
étant  blancs. 

L'anatomie  du  tautoga  ressemble  à  celle  des  la- 
bres proprement  dits.  Le  cœur  a,  comme  à  l'ordi- 
naire, la  forme  d'une  pyramide  quadrangulaire,  dont 
l'arête  inférieure  est  arrondie,  et  dont  l'angle  anté- 
rieur et  inférieur  est  fort  aigu  ;  l'oreillette  est  mé- 
diocre ,  et  le  bulbe  de  l'aorte  peu  renflé.  Le  foie  est 
très-volumineux;  le  lobe  gauche  est  divisé  en  deux 
forts  lobules,  chacun  plus  gros  que  le  droit;  la 
vésicule  du  fiel,  attachée  à  ^celui-ci,  est  longue, 
cylindrique,  peu  large;  le  canal  cholédoque  rampe 
sur  le  foie ,  y  reçoit  de  nombreux  vaisseaux  cystiques , 
et  se  renfle  un  peu  avant  de  déboucher  dans  l'estomac. 


298  LIVRE  XVI.  LADROÏDES. 

La  veloutée  de  celle  portion  du  canal  alimentaire  et  de 
tout  le  reste  du  tube  digestif,  est  garnie  de  papilles 
élevées,  minces  et  placées  dans  le  sens  de  la  longueur 
de  l'inteslin,  comme  de  nombreuses  plicatures. 

Vers  la  moitié  de  la  longueur  de  la  cavité  abdomi- 
nale, le  diamètre  de  l'estomac  diminue;  l'intestin  fait 
un  premier  pli,  et  il  se  porte  vers  le  diaphragme 
jusque  dans  la  fourche  du  foie.  Il  se  plie  de  nouveau, 
descend  au-delà  de  la  crosse  de  l'estomac,  revient 
encore  sur  lui-même,  remonte  à  droite  de  l'estomac 
jusqu'à  la  hauteur  du  premier  pli,  se  contourne  de 
nouveau,  et  à  cet  endroit  le  diamètre  augmente  de 
près  du  double.  Une  valvule  épaisse  ,  à  quelque 
distance  du  dernier  pU,  marque  le  reclmn,  dont  la 
largeur  est  presque  double  de  celle  de  l'intestin,  qui 
précède  la  valvule. 

La  rate  est  sur  l'estomac,  entre  les  deux  laitances; 
elle  est  ovoïde,  grosse  et  d'un  tissu  dense. 

Les  laitances  occupent  les  deux  tiers  postérieurs 
de  l'abdomen  ;  elles  sont  cylindriques,  un  peu  amin- 
cies en  avant. 

La  vessie  aérienne  est  très-grande ,  un  peu  échan- 
crée  à  la  partie  antérieure,  qui  est  grosse  et  renflée; 
l'autre  extrémité  est  pointue.  Les  reins  sont  peu  vo- 
lumineux; ils  débouchent  presque  immédiatement 
dans  une  grande  vessie  urinaire,  qui  n'est  marquée 
par  aucun  renflement  particulier. 

L'étude  du  squelette  nous  montre  que  le  dessus 
du  crâne  ressemble  plus  à  celui  des  percoïdes  qu'aux 
labres,  dont  nous  avons  déjà  traité.  En  effet,  en  ar- 
rière de  la  partie  convexe  du  front,  entre  les  yeux. 


CHAP.    VII.    TAUTOGUES.  299 

s'élève  une  crête  osseuse,  impaire,  triangulaire,  qui 
descend  sur  la  région  occipitale,  sans  la  dépasser. 
De  cliaque  côté  sont  deux  autres  crêtes,  moins  sail- 
lantes, qui  divisent  le  dessus  du  crâne  en  trois  fosses 
assez  profondes.  La  portion  du  maxillaire,  cachée 
par  le  sous-orbitaire ,  est  épaisse  et  élargie  en  une 
palette  demi-ovale;  l'angulaire  de  la  mâchoire  infé- 
rieure est  très-fort ,  l'huméral  élargi.  Derrière  l'angle 
de  l'opercule  une  plaque  trapézoide  donne  de  son 
angle  antérieur  et  inférieur  une  lame  pliée  en  gout- 
tière, dont  le  bord  interne  se  recourbe  en  arrière 
et  forme  la  ceinture  osseuse  de  la  poitrine.  Le  cubi- 
tal est  en  arc  à  large  courbure;  il  est  surmonté  du 
radial,  percé  d'un  grand  trou  ovale.  Le  coracoïdien 
est  très-large  et  épaissi  en  avant. 

Je  compte  seize  vertèbres  abdominales  et  dix- 
huit  caudales  .'-la  dernière  est  élargie  en  deux  plaques 
flabelliformes  ,  et  porte  les  principaux  rayons  de 
la  caudale  ;  les  supérieurs  et  les  inférieurs  sont  atta- 
chés aux  apophyses  épineuses  de  la  pénultième  et 
de  l'antépénultième.  Les  côtes  sont  longues,  fortes 
et  ont  de  longues  apophyses  horizontales.  Le  premier 
interépineux  de  l'anale  est  assez  fort. 

Nous  avons  reçu  ce  poisson  du  marché  de 
New-York  par  les  soins  de  M.  Milbert  et  de 
M.  Hyde  de  Neuville ,  alors  ministre  de  France 
aux  Etats-Unis.  Nos  plus  grands  individus 
ont  dix-huit  pouces  de  longueur.  II  atteint, 
selon  Mitchill,  jusqu'à  dix  ou  douze  livres  de 
poids  et  même  davantage.  Il  abonde  sur  les 


500  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

côtes  de  l'État  de  New -York,  et  il  paraît  sur 
le  marché  sous  le  nom  de  hlack-Jîsh,  nom 
qui  lui  est  donne  à  cause  de  la  couleur  noire 
de  son  dos  et  des  flancs.  Mais  les  pêclieurs 
moliegans  le  nomment  dans  leur  patois  tautog. 

Le  tautog  vit  parmi  les  roches,  les  récifs  et 
les  fonds  rocailleux  des  côtes  de  Long-Island; 
et  nous  venons  aussi  de  le  recevoir  de  l'em- 
bouchure de  l'Hudson  par  M.  le  comte  de 
Castelnau.  Il  ne  remonte  jamais  dans  les  ri- 
vières comme  le  saumon  ou  l'esturgeon.  Le 
docteur  Mitchill  ajoute  à  ces  détails  les  par- 
ticularités suivantes: 

Le  tautog  n'est  pas  originaire  de  la  baie  de 
Massachussets,  mais  il  s'y  est  beaucoup  mul- 
tiplié depuis  que  les  pécheurs  l'y  ont  porté; 
et  aujourd'hui  le  marché  de  Boston  est  aussi 
amplement  fourni  de  ce  poisson  que  celui 
de  NcAV  -  York.  Sa  chair  est  si  bonne  et  si 
rechcrcliée  pour  la  table,  qu'on  la  vend  dans 
cette  dernière  ville  de  huit  à  douze  cens 
la  livre.  Sa  vie  est  très -tenace  :  on  peut  le 
garder  long-temps  hors  de  l'eau,  et  souvent 
on  porte  dans  les  marais,  pour  les  y  nourrir 
et  les  y  engraisser,  ceux  qui  ne  pèsent  en- 
core que  deux  à  trois  livres.  Il  paraît  qu'il  est 
sensible  au  froid,  et  qu'il  entre  en  une  sorte 
de  somnolence,  plus  commune  à  un  grand 


CHAP.    VIT.    TAUTOGUES.  501 

noml^re  de  poissons  qu'on  ne  le  croit  généra- 
lement^ etMitchill  assure  que  le  tautog  reluse 
alors  toute  nourriture.  Il  ajoute  qu'une  mem- 
brane adventive  vient  fermer  l'anus;  mais 
ce  fait  n'a"  probablement  pas  été  suffisamment 
bien  observé.  Le  poisson  reprend  de  l'appétit 
dès  l'apparition  du  printemps.  L'époque  de  la 
floraison  du  dogwood  [coimus  florida,  Lin.) 
est  la  saison  que  Ton  regarde  comme  favorable 
pour  amorcer  le  hlack-fish.  Si  ce  cornouiller 
aux  grandes  fleurs  manque  dans  l'endroit,  les 
pêcheurs  portent  leur  jngement  d'après  la 
végétation  du  châtaignier.  On  conserve  même 
ces  traditions  dans  des  vers  populaires  cités 
par  Mitchill.  ' 

L'appât  ordinaire  du  tautog  sont  des  mol- 
lusques voisins  des  myes  ou  des  venus  et  des 
crustacés. 

Mitchill  en  distingue  plusieurs  variétés. 

L'une  j  son 

Tautoga  fusca, 

a  le  fond  de  la  couleur  brun,  avec  des  bandes  ou 
des  zones  de  même  couleur. 


1.    îVhen   Chesinut  lemes  are  as  hlg  as  ihumb-nail 
Then  bite  Black-fish  wiihout  fail  ; 
But  when  Chestmit  leaçes  are  as  long  as  a  span 
Then  eaich  Black-fish ,  if  JQU  can. 


302  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

Une  seconde  est  son 

Tautoga  rubens, 

qui  a  des  nuages  rougeàtres,  donnant  celte  teinte 
gf^nérale  à  tout  le  corps  du  poisson. 

Une  troisième,  que  Mitchill  a  désignée  par 
une  épithète  plus  vague,  sous  le  nom  de 

Tautoga  alia, 

aurait  encore  d'autres  mélanges  de  nuances  ou  de 
taches. 

Cet  auteur  distinguait  encore  dans  son  pre- 
mier Essai  un  tautoga  ccerulea^  qu'il  disait 
être  plus  rare,  ne  dépassant  jamais  sept  à  huit 
pouces  anglais,  se  trouvant  dans  les  mêmes 
eaux  que  le  hlack-jisli,  se  nourrissant  des  mê- 
mes animaux  et  incommode  aux  pécheurs, 
parce  qu'il  enlève  l'appât  des  liaims  apprêtés 
pour  le  tautog  ordinaire.  Il  vit  long -temps 
hors  de  l'eau,  quoiqu'il  ait  moins  de  ténacité 
vitale  que  l'autre.  Mitchill  n'en  a  plus  reparlé 
dans  son  grand  mémoire  sur  les  poissons  de 
Nev^-York. 

Il  me  paraît  probable  qu'il  a  jugé  que  ce 
nen  était  aussi  qu'une  simple  variété,  et,  en 
efFet,  les  nombres  des  rayons  sont  toujours 
les  mêmes  :  peut-être  aussi  que  sous  le  nom 
de  hlue-jîsh  il  l'a  indiqué  parmi  ses  variétés 
de  son  labre  chogset. 


CHAP,    VII.    TAUTOGUES.  503 

Le  Tautogue  a  bandes. 

(  Tautogafasciata,  nob.;  Lahrus fasciatus ,  Bl,  290; 
Lahriis  fuUginosus  j  Lacép.  ) 

Les  mers  de  l'Inde  ont  aussi  leurs  tautogues. 
En  voici  un  de  l'Isle- de -France,  figuré  par 
Bloch,  observé  auparavant  par  Commerson, 
et  qui,  malgré  ses  couleurs  tranchées,  parlés- 
quelles  on  pouvait  si  facilement  le  caractériser, 
a  reçu  plusieurs  noms,  et  a  été  méconnu  des 
naturalistes. 

Son  corps  est  court  et  en  ovale  régulier;  sa  hau- 
teur fait  le  tiers  de  sa  longueur,  et  son  épaisseur 
le  tiers  de  sa  hauteur.  La  courbure  du  dos  et  celle 
du  ventre  sont  assez  régulières  et  semblables,  La 
hauteur  du  tronçon  de  la  queue  n'est  pas  tout-à- 
fait  la  moitié  de  celle  du  corps.  La  tête  a  nn  faciès 
assez  semblable  à  celui  de  nos  carpes;  sa  longueur 
est  comprise  trois  fois  dans  celle  du  tronc,  en  n'y 
comptant  pas  la  caudale,  dont  la  longueur  égale  à 
peu  près  la  moitié  de  celle  de  la  tête.  L'œil  est  placé 
sur  le  haut  de  la  joue;  il  est  petit  et  rond;  son 
diamètre  ne  fait  que  le  septième  de  la  tête;  il  est 
éloigné  du  bout  du  museau  de  trois  longueurs  de 
diamètre,  et  on  en  mesure  près  de  quatre  sous  lui.  Le 
sous-orbitaire  antérieur  est  caché  sous  la  peau  nue  qui 
le  couvre;  elle  est  percée  d'un  assez  grand  nombre  de 
pores  :  les  autres  pièces  osseuses  qui  complètent  le 
cercle  de  l'orbite  sont  lisses  et  sans  rugosité.  Les  deux 
ouvertures  de  la  narine  sont  petites,  égales,  et  toutes 


304  LIVRE  XVI.  LADROÏDES. 

deux  un  peu  tubuleuscs.  Les  lèvres  sont  très-épaisses: 
la  supérieure  a  huit  à  neuf  plis  ;  l'inférieure  est  éten- 
due en  deux  ailes  très-larges  de  chaque  coté  des 
branches  de  la  mâchoire.  Deux  canines  droites , 
projetées  en  avant,  saillent  de  chaque  mâchoire,  qui 
porte  le  long  du  bord  des  dents  courtes  et  coniques. 
A  l'angle  il  y  a  une  canine  dirigée  en  avant;  il  ny 
a  pas  de  dents  sur  le  rang  interne.  Les  voiles  mem- 
braneux ,  supérieur  et  inférieur,  sont  très-dévelop- 
pés.  La  langue  est  libre  au  fond  de  la  bouche;  sa 
pointe  est  large  et  arrondie.  Il  y  a  un  petit  groupe 
d'écaillés  sous  la  joue  et  derrière  la  tempe.  Le  reste 
du  préopercule,  son  limbe,  l'opercule,  le  sous- 
opercule  et  l'interopercule,  sont  couverts  par  une 
peau  sans  écailles.  L'opercule  a  quelques  stries ,  son 
bord  membraneux,  surtout  k  l'angle,  est  assez  grand. 
Les  deux  interopercules  se  touchent  sous  l'isthme, 
sans  être  cependant  très -larges.  La  portion  épineuse 
de  la  dorsale  est  plus  basse  que  la  molle;  la  caudale 
est  arrondie,  surtout  aux  angles;  la  pectorale  est 
peu  pointue;  le  premier  rayon  de  la  ventrale  est 
prolongé. 

D.  9/11  ;  A.  3/11 5  C.  15  ;  P.  13  5  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  assez  grandes,  finement  ciselées; 
il  y  en  a  vingt-six  entre  l'ouïe  et  la  caudale,  cinq 
au-dessus  de  la  ligne  latérale,  et  onze  au-dessous. 
Cette  ligne  est  droite  jusque  vers  l'extrémité  de  la 
dorsale,  où  elle  s'infléchit  pour  se  rendre  ensuite 
à  la  caudale  par  le  milieu  du  tronçon  de  la  queue; 
elle  est  formée  d'une  série  de  tubulures  non  ra- 
meuses. 


CHAP.  VII.  tautogues.  505 

Le  poisson  conservé  dans  l'esprit  de  vin  offre , 
sur  un  fond  blanc,  cinq  larges  bandes  brunes j  la 
première  descend  en  écharpe  derrière  l'ouïe ,  et 
prend  la  base  de  la  pectorale  ;  la  seconde  vient  du 
quatrième  rayon  épineux;  les  deux  autres  descendent 
sous  la  portion  molle  de  la  dorsale:  la  dernière  couvre 
la  queue.  Les  nageoires  sont  toutes  plus  foncées  que 
les  bandes,  et  elles  ont  une  teinte  violette.  Les  pec- 
torales seules  sont  blanches,  avec  une  grande  tache 
noire  à  la  base;  à  l'exlrémiie  de  la  ligne  latérale  il  y 
a  une  petite  tache  noire  de  chaque  côté  de  la  queue. 

On  voit  sur  la  tête  et  sur  l'anale  des  traces  de  bandes 
effacées.  Derrière  l'œil  il  y  a  aussi  une  tache  brune. 

Nous  connaissons  les  brillantes  couleurs 
de  ce  poisson  par  la  description  que  M.  Dus- 
sumier  en  a  faite  sur  le  frais,  et  par  un  dessin 
que  M.  Théodore  Delisse  nous  en  a  envoyé 
de  risle-de-France. 

Le  poisson  frais  a  la  tête  bariolée  de  lignes  vertes , 
et  de  bandes  roses  bordées  de  bleu,  qui  produisent 
un  très-agréable  assortiment  de  couleurs.  En  avant 
de  l'œil  on  voit  trois  raies  longitudinales  vertes  et 
trois  bandes  roses;  le  dessous  de  la  gorge  est  jaune; 
la  nuque,  d'un  beau  vert,  a  des  taches  roses  ;  l'oper- 
cule, qui  devient  plus  jaunâtre,  a  quatre  grandes 
taches  roses  irrégulières;  le  fond  du  corps  est  blanc 
jaunâtre;  les  bandes  brunes  ont  une  teinte  rougeâtrej 
la  dorsale  épineuse  est  jaunâtre  ;  la  portion  molle 
est  moitié  jaune,  moitié  noirâtre;  l'anale  est  toute 
noire;  la  caudale,  jaunâtre,  est  bordée  de  noir;  les 

l3.  20 


506  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

ventrales  sont  très-foncées,  les  pectorales  sont  jau- 
nâtres. 

Tel  est  le  poisson  que  Commerson  avait  vu  à 
risle-de-France,  au  mois  de  Décembre  176g, 
et  dont  il  a  laissé  dans  les  manuscrits  deux  des- 
criptions et  un  dessin.  L'une  d'elles,  faite  avec 
grand  soin,  a  ëtë  employée  par  M.  de  Lacépède , 
et  est  devenue  son  labriisfuliginosus^  sans  rien 
changer  à  la  diagnose  du  compagnon  de  Bou- 
gainville.  L'autre  est  moins  complète;  Com- 
merson renvoie  à  son  dessin  fait  au  crayon  noir 
et  rouge,  et  dont  il  avait  sans  doute  reconnu  le 
peu  d'exactitude ,  quant  aux  couleurs ,  attendu 
que  la  description  et  le  dessin  avaient  ëtë  pris 
sur  un  individu  peu  frais,  et  dont  les  cou- 
leurs ëtaient  dëjà  altërëes;  car  dans  cette 
description  il  a  soin  de  mettre  en  note  :  vide 
infra  ad  lahjmrn  fuli^inosum ,  capite  eoc  vi- 
ridi,  etc.,  in  recentiore  specimine  descriptinn. 
Lacëpède  a  fait  graver  ce  dessin  en  le  réduisant 
et  en  le  donnant,  comme  une  espèce  distincte, 
sous  le  nom  de  labre  nialaptéronote ;  mais  il 
a  reproduit  encore  une  troisième  fois  cette 
même  espèce  dans  un  autre  genre  :  car  il  n'est 
pas  possible  de  douter  que  le  lahrus  fasciatus 
de  Blocli  (  pi.  290  ),  qui  est  devenu  le  spare 
zonéphore  dans  Lacëpède,  ne  soit  de  la  même 
espèce.  Bloch  a  toutefois  représenté  trop  d'ë- 


CHAP.    VII.    TAUTOGUES.  307 

cailles  sur  la  joue  ,  et  il  a  fait  monter  trop  haut 
les  écailles  sur  les  nageoires  verticales;  les  nom- 
bres sont  les  mêmes,  et  la  distribution  des 
couleurs  convient  très- bien  à  notre  poisson. 

C'est  aussi  le  spams  quinquefasciatus  de 
W.  Bennett  {Fish  of  Cejl ,  n.°  aS);  les  Cin- 
galais  le  nomment  panoo-^irawah. 

Mais  il  est  une  autre  synonymie,  à  laquelle 
on  est  assez  loin  de  s'attendre,  car  ce  poisson 
a  déjà  été  vu  par  Thunberg ,  et  décrit  sous 
le  nom  de  niullus fasciatiis^ .  La  figure  qu'il  en 
donne  fournit  les  élémens  nécessaires  pour  re- 
connaître cette  espèce  sous  ce  nom,  si  éloigné 
de  tous  ses  rapj)orts  naturels.  On  ne  peut  con- 
cevoir pourquoi  cet  élève  de  Linné  n'a  pas 
classé  cette  espèce  dans  le  genre  des  labres. 
M.  Lacépède,  en  employant  cette  note  de  Thun- 
berg, a  fait  reparaître  encore  notre  poisson  une 
quatrième  fois  sous  le  nom  de  spare  niéaco.  ^ 

J'avais  cru  que  l'on  devait  aussi  en  rappro- 
cher le  spams  anchora^o  de  Bloch,  pi.  i^-y; 
mais  j'avoue  que  ce  rapprochement  ne  me  paraît 
pas  possible;  en  même  temps  je  suis  obligé 
de  dire  que  j'ignore  tout-à-fait  à  quelle  es- 
pèce il  faut  rapporter  cette  figure,  qui  est 
peut-être  celle  d'un  labre  ou  d'un  cossyphe. 

1.  Thunberg,  Vqy.  au  Jap. ,  IV,  p.  55i,  pi.  3i4- 

2.  Lacépède,  IV,  p.  i6o. 


508  -LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

Commerson  et  M.  Dussumier  s'accordent 
à  regarder  notre  tautogue  comme  un  poisson 
rare  des  rivages  rocheux  de  l'Isle-de-France; 
ce  dernier  et  M.W.Bennett  le  donnent  comme 
un  bon  poisson  pour  la  table. 

Les  individus  de  Commerson  et  de  M.  Dus- 
sumier ont  un  pied  de  long.  M.  Julien  Des- 
jardins nous  en  a  aussi  envoyé  de  plus  petits: 
ils  n'offrent  aucunes  différences  dans  les  cou- 
leurs. Un  individu  de  cette  espèce  faisait  aussi 
partie  des  collections  faites  à  fIsle-de-France 
par  les  compagnons  de  M.  le  capitaine  Du- 
perrey. 

Le  Tautogue  de  Mertens. 
{Tautoga  Mertensli,  nob. ) 

Je  ne  crois  pas  qu'il  faille  regarder  comme 
une  variété  du  précédent,  le  poisson  que 
M.  Mertens  nous  a  fait  connaître  par  le  dessin , 
dont  voici  les  principaux  traits  caractéristiques. 

La  tête  est  verte,  avec  trois  bandelettes  élroiles, 
longitudinales  :  deux  au-devant  de  l'œil  :  la  troisième 
naît  de  l'angle  de  la  bouche;  elles  sont  roses  bordées 
de  bleu.  Il  y  a  sur  les  opercules  et  derrière  l'œil  cinq 
autres  taches  roses  alongées,  dont  les  trois  supé- 
rieures sont  aussi  bordées  de  bleu.  Les  lèvres  sont 
de  la  même  couleur  que  les  taches,  mais  sans  liséré. 
Il  y  en  a  aussi  de  bleues  sur  la  nuque.  Le  corps 
est  traversé  par  cinq  larges  bandes  brunes.  La  dor- 


CHAP.    VII.    TAUTOGUES.  309 

sale  esi  jaunâtre ,  avec  trois  raies  longitudinales 
bleues,  dont  une  suit  le  bord.  L'anale  est  violette, 
bordée  d'un  trait  rose  entre  deux  lisérés  bleus. 
La  pectorale  et  les  ventrales  ont  les  rayons  jaunes: 
il  en  est  de  même  de  la  caudale  dont  la  membrane 
est  brune. 

Les  nombres  des  rayons  sont  les  mêmes. 

D.  9/11  ;  A.  3/11;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 

Le  dessin  représente  un  poisson  long  de 
sept  pouces  et  demi.  M.  Mertens  dit  que  les 
individus  vivent  isolés  parmi  les  rochers  de 
l'arcliipel  des  Carolines.  L'espèce  me  semble 
intermédiaire  entre  celle  que  j'ai  décrite  dans 
l'article  précédent,  et  celle  de  la  mer  Rouge, 
dont  je  vais  parler. 

Le  Tautogue  a  six  bandes. 

(  TcuUoga  sexfasciata ,  nob.  ;  Hallchores  sexfas- 
ciatus  y  Rupp.) 

La  mer  Rouge  nourrit  une  espèce  voisine 
de  celles-ci  par  la  distrllmtion  des  couleurs, 
qui  offrent  cependant  quelques  différences  5 
mais  elle  s'en  distingue,  parce  que 

la  joue  est  couverte  sous  l'œil  d'un  bien  plus 
grand  nombre  d'écaillés;  le  sous-orbitaire  est  plus 
petit;  les  os  sont  plus  rugueux,  surtout  î'interoper- 
cule,  qui  est  plus  étroit;  la  dorsale  et  l'anale  sont 
plus  hautes;  la  caudale  est  plus  longue  et  plus  large 5 
les  ventrales  sont  un  peu  plus  alongées. 


3i0  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Le  dos  est  rougeâtre  et  le  ventre  est  bleuâtre: 
ces  teintes  sont  traversées  par  six  bandes  brunes  ou 
noirâtres.  Il  n'y  a  pas  de  rayures  sur  les  joues  ni  sur 
les  opercules.  Sur  la  nuque,  derrière  l'oeil,  il  y  a 
des  taches  bleues. 

La  dorsale  est  rayée  longitudinalement,  et  la  cau- 
dale verticalement,  de  traits  carmins  sur  un  fond 
gris  rosé.  L'anale  est  brune  comme  les  bandes  ver- 
ticales du  corps,  avec  un  liséré  noirâtre.  Les  pec- 
torales et  les  ventrales  sont  jaunes. 

J'en  ai  un  individu  d'un  pied  de  long;  il 
nous  a  été  envoyé  par  M.  Botta. 

M.  Ruppel  a  trouvé  cette  espèce  sur  le 
marché  de  Djedda  pendant  le  mois  d'Août;  il 
l'a,  avec  raison,  distingué  du  lahrus  fasciatus 
de  Bloch,  qui  était  alors  classé  parmi  les  chei- 
lines,  quoique  ceux-ci  se  distinguent  de  nos 
tautogues  parce  que  leur  ligne  latérale  est  in- 
terrompue, et  que  leur  opercule  et  leur  préo- 
percule sont  couverts  de  grandes  écailles  sem- 
blables à  celles  du  corps.  M.  Ruppel  avait  cru 
devoir  placer  cette  nouvelle  espèce  de  poissons 
dans  le  genre  qu'il  avait  nommé  halichores y  et 
dont  il  a  malheureusement  fondé  le  caractère 
sur  la  présence  de  la  dent  saillante  en  crochet 
de  l'angle  de  la  mâchoire.  Ce  caractère  appar- 
tient à  toute  la  famille  des  labroïdes  :  nous 
l'avons  vu  se  montrer  dans  des  labres,  dans  les 
cossyphes,  dans  les  malacanthes,  etc.;  beau- 


CHAP.    VU.    TAUTOGUES.  311 

coup  de  girelles ,  que  M.  Ruppel  réunit  à  ses 
halichores,  ont  aussi  cette  singulière  dent; 
les  scares  en  sont  également  pourvus.  On  voit 
donc  que  nous  n'avons  pu  nous  servir  de  ce 
caractère  pour  faire  une  nouvelle  coupe  gé- 
nérique. Si  M.  Ruppel  avait  fait  attention  à  la 
position  des  écailles  de  la  joue,  et  qu'il  en  eût 
tiré  sa  diagnose,  l'espèce  qui  nous  occupe  n'au- 
rait pas  été  rangée  avec  les  autres  girelles ,  qu'il 
a  réunies  sous  le  nom  de  halichores^  et  le 
genre  eût  été  établi  d'après  un  caractère  zoo- 
logique digne  d'être  noté.  En  se  rappelant  ce 
que  j'ai  dit  au  commencement  de  ce  chapitre, 
on  voit  d'ailleurs  que  Mitchill  avait  déjà  fait 
cette  coupe  pour  l'espèce  que  nous  avons 
décrite  la  première  dans  ce  genre. 

Le  Tautogue  aux  grandes  lèvres. 

(  Taiitoga  melapterus ,  nob.  ;  Labrus  melapteruSy 
BL,  2850 

MM.  Ruhl  et  Van  Hasselt  ont  envoyé  de 
Java  au  Musée  royal  de  Leyden,  sous  le  nom 
de  cheilinus  macrocheilus ,  un  tautogue,  re- 
marquable en  effet  par  l'épaisseur  de  ses  lèvres» 
J'aurais  même  été  tenté  de  conserver  ce  nom 
à  l'espèce,  si  elle  n'était  pas  déjà  nommée 
depuis  long-temps  par  Bloch. 


312  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

Sa  hauteur  fait  le  tiers  de  la  longueur  du  tronc. 
La  caudale,  coupée  carrément,  est  contenue  sept 
fois  et  deux  tiers  dans  cette  même  longueur-  celle 
de  la  tête  est  comprise  trois  fois  et  deux  tiers  dans 
la  dislance  du  bout  du  museau  à  l'extrémité  de  la 
nageoire  de  la  queue.  L'œil  est  petit,  et  situé  sur  le 
haut  de  la  joue,  mais  bien  au-dessous  de  la  ligne 
du  profil;  son  diamètre  est  du  septième  de  la  lon- 
gueur de  la  télé,  et  du  cinquième  de  la  hauteur; 
il  est  éloigné  du  bout  du  museau  de  trois  distances 
de  diamètre.  Le  premier  sous-orbitaire  est  une 
grande  plaque  oblongue,  altachée  obliquement  au- 
devant  de  l'œil,  deux  fois  plus  haute  qu'elle  n'est 
large  ;  les  autres  sous-orbiiaires  forment  un  grand 
arc  au-dessous  de  l'œil  :  leur  surface  est  toute  ru- 
gueuse. A  une  distance  égale  à  la  largeur  de  l'œil,  sur 
le  haut  de  l'angle  antérieur  du  premier  sous-orbitaire, 
est  l'ouverture  antérieure  de  la  narine,  qui  est  petite 
comme  un  trou  d'aiguille ,  et  derrière  elle  en  est  une 
autre ,  grande  et  ronde. 

La  bouche  est  assez  proiraclile.  Les  lèvres  sont 
charnues  et  très-épaisses;  la  supérieure  a  sept  gros 
plis  :  l'inférieure  n'en  a  que  deux,  mais  elle  est  éten- 
due en  deux  larges  voiles  de  chaque  côté  de  la 
bouche.  L'épaisseur  des  lèvres  ne  laisse  presque  rien 
voir  des  os  qui  les  portent,  ni  même  des  maxil- 
laires, qui  sont  cachés  dans  la  rétraction  de  la  bou- 
che en  totalité,  et  dans  la  protraction  dans  leur 
plus  grande  parlie,  par  le  voile  adipeux  du  sous- 
orbitaire. 

Les  deux  dents  mitoyennes  d'en  haut  et  d'en  bas 


CHAP.    VII.    TAUTOGUES.  313 

sont  coniques,  pointues,  recourbées;  elles  sont  lon- 
gues, suivies  de  onze  à  douze  dents  coniques  et  cour- 
tes, et  qui  diminuent  à  mesure  qu'elles  sont  plus 
près  de  l'angle,  oi^i  il  n'y  a  pas  de  dents  saillantes. 
Il  y  a  quelques  écailles  sur  la  joue.  Le  limbe  du 
préopercule  et  les  trois  autres  pièces  operculaires  sont 
nus.  Le  bord  membraneux  de  l'opercule  est  large  et 
étendu  en  un  lobule  assez  grand.  On  voit  aussi  quel- 
ques petites  écailles  sur  la  tempe. 

Il  y  a  vingt- sept  rangées  d'écaillés  entre  l'ouïe 
et  la  caudale,  quatre  rangs  au-dessus  de  la  ligne 
latérale  et  onze  au-dessous,  en  les  comptant  à  la 
plus  grande  hauteur  du  corps.  La  ligne  latérale 
est  formée  d'une  série  de  tubulures  relevées  sur 
chaque  écaille ,  non  branchues ,  et  elle  n'est  pas 
interrompue. 

La  dorsale  a  ses  premiers  rayons  très-bas;  les 
derniers  mous  ont  leur  hauteur  double  de  celle  des 
antérieurs.  Les  ventrales  sont  très-  pointues.  La  cau- 
dale a  le  bord  un  peu  concave. 

D.  9/11  j  A.  3/11;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 

Quelques  petites  écailles  sont  étendues  en  ligne 
entre  la  base  des  rayons  de  la  caudale.  Le  premier 
rayon  épineux  de  l'anale  est  si  petit  qu'on  ne  le 
voit  que  par  la  dissection. 

Dans  l'eau-de-vie  le  poisson  paraît  brun,  éclairci 
sous  le  ventre;  la  lèvre  supérieure  est  foncée,  l'in- 
férieure blanchâtre;  la  dorsale  et  l'anale  ont  une 
teinte  violette  rembrunie;  la  caudale  est  plus  pâle: 
elles  sont  tachetées  ou  rayées  de  petits  traits  bleuâ- 
tres. On  voit  sur  le  bord  de  l'anale  deux  traits  fon- 


314  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

ces,  séparés  par  une  bandelette  blanchâtre,  et,  exté- 
rieurement, une  autre  bandelette  de  même  couleur, 
lisérée  de  noirâtre  j  les  nageoires  paires  sont  déco- 
lorées. 

Mais  sur  le  poisson  frais  les  couleurs  sont  bien 
vives  et  très  -  agréablement  distribuées  :  nous  le 
jugeons  par  le  beau  dessin  que  MM.  Kuhl  et  Van 
Hasselt  avaient  envoyé  de  Java.  Le  dos  et  le  dessus 
de  la  tête  est  peint  en  brun  rougeâtre  de  lie  de 
vin  ;  la  joue  et  les  opercules  sont  orangés  ;  une 
grande  tache  verte  colore  le  sous-orbitairej  au- 
dessus  et  au-devant  de  l'œil  il  y  a  deux  traits  verts, 
un  autre  sur  la  tempe,  et  des  rivulations  de  même 
couleur  sur  l'opercnle,  sur  le  sous-opercule,  sur 
rinteropercule  et  sur  le  préopercule,  lequel  a  en 
outre  des  points  verts  près  des  mâchoires;  et  on 
voit,  au  milieu  de  ces  traits  onduleux  et  verts,  d'au- 
tres, en  plus  petit  nombre,  d'un  beau  bleu  d'ou- 
tremer. Les  écailles  des  flancs  sont  vertes,  bordées 
d'un  croissant  bleu  d'azur,  et  d'un  second,  exté- 
rieur, très-foncé.  Sous  le  ventre  le  fond  est  rosé, 
et  les  écailles  n'ont  plus  qu'une  seule  bordure  bleu 
pâle.  La  caudale  est  verte;  la  dorsale  et  l'anale  sont 
rouge  violacé,  rayées  et  tachetées  de  bleu.  La  ven- 
trale est  rougeâtre  et  sans  taches. 

Bloch  (pi.  285)  a  donné  une  mauvaise  figure 
de  ce  poisson,  que  j'ai  vu  à  Berlin,  sous  le 
nom  de  labrus  melapterus,  nom  qui  convient 
en  effet  assez  bien  à  l'animal  desséche;  mais 
il  a  oublié  d'abord  les  écailles  de  la  joue^ 


CHAP.   VII.    TAUTOGUES.  315 

il  a  donné  une  couleur  imaginaire  au  corps, 
il  a  rendu  la  caudale  trop  noire,  il  a  mal 
compté  les  rayons  épineux,  qui  sont  trop 
grossis;  cependant  il  a  bien  rendu  les  carac- 
tères des  dents,  surtout  des  inférieures,  et 
en  général,  malgré  les  défauts,  on  peut  en- 
core reconnaître  l'espèce  dans  cette  mauvaise 
figure. 

Le  Tautogue  veiné. 

(^Tautoga   tessellata,  nob. ;  Lahrus  tesselatus, 
BIocli,  pi.  291 ,  fîg.  2.) 

Si  l'on  s'en  rapporte  à  la  description  et  à 
la  figure  de  Bloch ,  je  pense  qu'il  faudra  pla- 
cer parmi  ces  tautogues  le  poisson  que  cet 
auteur  avait  reçu  comme  originaire  des  mers 
de  Norwége ,  par  les  soins  de  son  ami  Spengler. 

Les  nombres  des  rayons  diffèrent  assez  de  ceux 
de  toutes  les  autres  espèces. 

Sur  un  fond  violet,  qui  devient  argenté  sous  le 
ventre,  le  corps  et  la  tête  sont  marquées  de  taches 
brunes,  anastomosées  entre  elles. 

D.  17/10;  A.  9/3;  C.  16  ;  P.  I65  V.  1/5. 

Bloch  ne  donne  que  quatre  rayons  à  la 
membrane  branchiostège  ;  mais  il  y  a  tout  lieu 
de  croire  qu'il  y  a  erreur  dans   ce  nombre. 

Je  n'ai  jamais  vu  ce  poisson.  S'il  vient  des 
mers  du  Nord,  il  doit  y  être  rare. 


31  G  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

CHAPITRE  Vlll. 

Des  Malacanthes  et  des  Malaptères, 

Ce  genre  est  un  de  ceux  qui  prouvent  le 
mieux  avec  quelle  incurie ,  et  même  avec 
quelle  infidélité,  Bloch  nous  a  transmis  les 
documens  qu'il  trouvait  dans  les  papiers  de 
Plumier.  L'archipel  des  Antilles  produit  une 
espèce  à  laquelle  nos  colons  de  la  Martinique 
ont  transporté  le  nom  de  vU'e.  Le  savant 
minime  en  avait  laissé  une  figure  fort  exacte, 
dont  l'original  existe  encore  à  la  Bibliothèque 
du  Roi,  et  que  M.  de  Lacépède  a  fait  graver, 
tome  IV,  planche  8,  figure  i;  mais  Bloch, 
s'imaginant  que  ce  devait  être  la  figure  d'une 
coryphène,  lui  a  fait  arranger,  sur  la  planche  175, 
le  profil  du  museau  en  demi- cercle,  et  a 
nommé  en  conséquence  le  poisson  corjphœna 
Plumieri.  Lorsqu'il  composa  son  Système  post- 
hume (p.  299) ,  il  reconnut  cette  faute  et  la  re- 
jeta sur  son  dessinateur,  et  il  y  exprima  même 
l'opinion  que  ce  poisson  pourrait  bien  être 
un  labre;  mais  dans  l'intervalle  M.  de  Lacé- 
pède, quoique  possédant  la  figure  non  altérée, 
n'en  avait  pas  moins  laissé  l'espèce  dans  les 
coryphènes  (t.  III,  p.  201),  en  quoi  il  a  été 
imité  par  Shaw,  pendant  que  Schneider,  trou- 
vant une  autre  figure  de  ce  poisson  dans  Parra^ 


CHAP.   VIII.   MALACANTHES.  317 

(pi.  i3,  fig.  i)  OÙ  elle  est  appelée  matejuelo 
Z>/«?7C0,  en  faisait  un  double  emploi'  et  plaçait 
ce  poisson  dans  les  spares,  sous  le  nom  de 
spams oblongus.  Enfin,  une  espèce  du  même 
genre,  dessinée  dans  la  mer  des  Indes  par 
Commerson,  et  associée  par  lui  à  ses  cliei- 
lions,  en  formait  deux  dans  M.  de  Lacépède: 
l'une,  d'après  la  figure  (  t.  III ,  p.  527,  et  pi.  28, 
fig.  2)  sous  le  nom  de  labre  large  raie,  et 
l'autre,  d'après  la  description  (t. IV,  p.  3o4), 
sous  celui  de  tœnianote  large  raie- 

Les  malacanthes  ne  sont  pas  des  coryphè- 
nés ,  quoiqu'ils  semblent  participer  à  quelques- 
uns  des  caractères  de  ce  genre,  par  la  longueur 
de  leur  dorsale  et  de  leur  anale,  et  que  les 
nageoires  ont  leurs  rayons  presque  aussi  flexi- 
bles. Cependant  c'est  à  la  famille  des  labroïdes 
qu'ils  appartiennent  véritablement. 

Nous  les  plaçons  dans  le  voisinage  du  genre 
singulier  des  lachnolèmes,  à  cause  de  leur  joue 
couverte  d'écaillés  et  de  leur  ligne  latérale  non 
interrompue,  et  parce  que  la  flexibilité  de 
leurs  rayons  semble  être  déjà  annoncée  dans 
les  prolongemens  filamenteux  de  ceux  de  la 
dorsale  de  nos  capitaines.  - 

Leur  caractère  le  plus  apparent  consiste  clans 

1.  Blocli ,  Syst.  posih.,  p.  285. 


318  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

leur  longue  nageoire  dorsale,  où,  parmi  de 
très-nombreux  rayons,  il  n'en  est  que  trois  ou 
quatre  en  avant  qui  soient  simples;  encore 
sont-ils  quelquefois  tout-à-fait  flexibles  :  tous 
les  autres  sont  branchus.  C'est  de  cette  mollesse 
de  leurs  rayons  épineux  du  dos  que  nous  avons 
dérivé  le  nom  de  malacanthe  (de  fxuKuKcSf 
mou,  et  dHxKotvOcCi  épine).  Ils  ont  d'ailleurs  le 
corps  alongé,  peu  comprimé;  les  écailles  petites  ; 
l'anale  presque  aussi  longue  que  la  dorsale;  les 
autres  nageoires  médiocres;  la  tête  oblongue; 
le  front  peu  convexe;  l'œil  médiocre  et  placé 
en  arrière;  la  bouche  assez  fendue;  les  lèvres 
charnues.  Chacune  de  leurs  mâchoires  a  une 
rangée  de  dents,  parmi  lesquelles  il  en  est  de 
fortes  et  crochues;  mais  leur  palais  et  leur 
langue  n'en  ont  aucune.  Sous  ces  divers  rap- 
ports ils  se  rapprocheraient  de  plusieurs  labres, 
auxquels  ils  tiennent  aussi  par  des  intestins 
sans  cul-de-sac  stomachal  et  sans  cœcums; 
mais  ils  en  diffèrent  par  leurs  dents  pharyn- 
giennes, qui  sont  en  cardes  en  haut,  et  qui  n'en 
offrent  en  pavés  qu'au  pharyngien  inférieur, 
encore  y  sont-elles  accompagnées  de  dents  en 
carde;  enfin  fépine  assez  forte  de  l'angle  de 
de  leur  opercule  est  aussi  un  de  leurs  carac- 
tères essentiels. 

Nous  ne  connaissons  jusqu'à  présent  que 


CHAP.    Vin.    MALACANTHES.  319 

deux  espèces  de  ce  genre  :  l'une   des  mers 
d'Amérique,  l'autre  de  celles  des  Indes. 

Le  Malacanthe  de  Plumier. 

{Malacanthus  Pliunieri,  nob.;  Coryphœna  Plumieri, 
Bl.,  1765  Sparus  ohlongus ,  Bl.  Sclin.) 

Le  malacanthe  d'Amérique  est  alongë. 

Sa  longueur  totale,  avec  la  caudale  et  ses  pointes, 
comprend  huit  fois  et  demie  sa  hauteur,  et  sans  cette 
nageoire  près  de  sept  fois.  La  longueur  de  sa  tête 
y  est  quatre  fois  et  deux  tiers,  et  elle  est  deux  fois 
aussi  longue  que  haute.  L'épaisseur,  aux  pectorales, 
fait  les  deux  tiers  de  la  hauteur.  Il  résulte  de  là  que 
les  lignes  du  dos  et  du  ventre  sont  presque  droites, 
et  celles  du  profil  et  de  la  gorge  très-peu  arquées. 
Le  crâne,  le  front  et  le  museau  forment  une  surface 
très-légèrement  convexe,  et  qui  a  en  largeur  entre 
les  yeux  les  trois  cinquièmes  de  la  hauteur  de  la 
tête.  Le  diamètre  de  l'œil  est  du  sixième  de  la  lon- 
gueur de  la  tête;  il  en  occupe  le  quatrième  sixième, 
fort  près  de  la  ligne  du  profil.  La  bouche  est  fen- 
due, et  prend  les  trois  cinquièmes  de  la  distance  du 
bout  du  museau  à  l'œil.  Les  lèvres  sont  épaisses, 
charnues j  le  maxillaire  est  petit,  caché  sous  les  replis 
de  la  peau,  qui  ne  laisse  rien  paraître  non  plus  du 
sous-orbitaire.  L'orifice  antérieur  de  la  narine,  prati- 
qué à  moitié  de  la  distance  de  l'œil  à  l'extrémité  du 
museau,  est  petit,  rond,  entouré  d'un  léger  rebord; 
l'autre,  ouvert  au  tiers  de  la  distance  entre  le  premier 
et  Tœil,  est  petit,  ovale  et  sans  rebord. 


320  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

La  mâchoire  supérieure  a  en  avant  six  fortes 
dents  pointues,  entre  lesquelles  en  sont  deux  petites, 
puis  de  chaque  côté  une  rangée  de  quinze  petites, 
coniques  et  pointues,  et  à  l'angle  une  forte,  un  peu 
dirigée  en  avant.  A  la  mâchoire  inférieure  il  y  en  a 
en  avant  six  et  deux  petites,  à  peu  près  comme  en 
haut,  mais  un  peu  moindres;  et  puis  de  chaque  côté 
cinq  crochues,  pointues,  comprimées,  qui  vont  en 
grandissant  jusqu'à  la  cinquième;  la  sixième  est  de 
moitié  plus  petite,  et  après  elle  il  en  vient  dix  ou 
douze  très-petites,  et  enfin,  à  l'angle,  une  plus  forte, 
un  peu  dirigée  en  avant,  bien  moindre  cependant 
que  celle  qui  lui  correspond  à  la  mâchoire  supérieure. 
Les  deux  mâchoires  ont  toute  leur  partie  antérieure 
derrière  leurs  six  dents  de  devant  garnie  d'une  rangée 
en  velours  ras  et  serré.  Les  voiles  maxillaires  sont 
minces,  mais  assez  larges.  Le  palais  est  lisse;  la  langue 
est  également  désarmée,  petite,  plate,  un  peu  poin- 
tue, et  assez  libre.  Le  préopercule  est  entier  et  a 
l'angle  arrondi,  le  bord  montant  vertical ,  et  le  limbe 
peu  distinct.  La  longueur  de  l'opercule  est  d'un  peu 
raioins  du  quart  de  celle  de  la  tête;  il  forme  avec  le 
sous-opercule  une  pièce  deux  fois  aussi  haute  que 
longue;  l'épine  qui  termine  son  angle  est  plate,  mais 
forte  et  assez  pointue.  Les  ouïes  sont  bien  ouvertes , 
mais  leurs  membranes  s'unissent  ensemble  vis-à-vis 
l'angle  du  préopercule,  et  enveloppent  l'isthme  sans 
s'y  attacher;  car  il  ne  se  fixe  lui-même  à  leur  face 
interne  que  sous  l'œil.  De  chaque  côté  sont  six  rayons 
assez  forts;  le  premier  est  plat  et  caché  sous  le  sous- 
opercule,  les  suivans  sont  à  découvert,  et  le  sixième 


CHAP.    vin.    MALACANTHES.  321 

est  fort  rapproché  de  son  correspondant  de  l'autre 
coté.  Les  arceaux  des  branchies  n'ont  que  de  petits 
tubercules  lisses  sur  deux  rangs.  Les  pharyngiens 
ont  des  dents  en  velours ,  si  ce  n'est  le  rang  interne 
des  inférieurs  où  elles  sont  en  petits  pavés,  et  l'an- 
térieur des  supérieurs,  où  elles  sont  en  crochet. 
Les  branchies  ont  leurs  lames  fendues  jusqu'à  moi- 
tié; la  dernière  n'est  séparée  de  l'épaule  que  dans 
un  petit  espace.  H  y  a  une  petite  demi-branchie  ad- 
hérente à  l'os  qui  porte  l'opercule.  L'épaule  n'a  point 
d'armure,  et  est  même  sans  écailles  dans  l'aisselle  et 
un  peu  au-dessus.  La  pectorale  est  aussi  large  que 
longue ,  et  serait  arrondie ,  sans  une  pointe  assez 
aiguë  que  forme  son  sixième  rayon  ;  elle  en  a  en  tout 
seize,  dont  le  premier  est  simple  et  court  :  ils  croissent 
jusqu'au  sixième  et  décroissent  ensuite.  Cette  nageoire 
n'a  que  le  neuvième  de  la  longueur  totale;  elle  s'at- 
tache au-dessous  du  milieu  de  la  hauteur. 

Les  ventrales  sont  d'un  tiers  plus  courtes,  aussi 
un  peu  pointues  ;  leur  membrane  s'attache  à  l'ab- 
domen par  le  tiers  de  sa  base;  leur  épine  n'a  que 
moitié  de  leur  longueur  et  n'est  pas  très-forte. 

La  dorsale  commence  vis-à-vis  la  base  des  pec- 
torales par  cinq  rayons  simples,  mais  flexibles,  dont 
le  premier  est  à  peine  du  dixième  de  la  hauteur  du 
corps.  Le  cinquième  n'a  qu'un  tiers  en  sus;  il  est 
suivi  d'un  sixième,  simple,  mais  articulé,  et  de  cin- 
quante-cinq autres,  tous  articulés  et  branchus , 
excepté  le  dernier,  qui  n'a  point  de  branches;  c'est 
donc  en  tout  soixante  et  un  rayons,  formant  une 
nageoire  qui,  dès  le  dixième  ou  le  douzième,  prend 
et  conserve  moitié  de  la  hauteur  du  corps. 
l3.  21 


522  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

L'anale  commence  vis-à-vis  la  pointe  de  la  pr clo- 
rale  ;  elle  est  à  peu  près  de  même  hauteur  que  la 
dorsale,  et  a  cinquante  et  un  rayons,  dont  le  premier 
seul  est  simple  et  sans  branches. 

Ces  deux  nageoires  finissent  vis-à-vis  l'une  de 
l'autre,  et  ne  laissent  entre  elles  et  la  caudale  qu'un 
espace  du  dix-huitième  de  la  longueur  totale,  à  peu 
près  aussi  haut  que  long;  mais  qui  n'a  pas  en  épais- 
seur moitié  de  sa  hauteur. 

La  caudale  a  dans  son  milieu  le  douzième  à  peu 
près  de  la  longueur  du  reste  du  poisson  ;  mais  les 
rayons  supérieurs  et  inférieurs  s'alongent ,  et  les  ex- 
trêmes forment  deux  pointes  grêles  et  deux  fois  plus 
longues  que  la  partie  moyenne. 

Une  peau  nue  recouvre  le  front,  le  museau,  les 
mâchoires,  les  lèvres,  le  limbe  du  préopercule, 
l'interopercule,  le  dessous  de  la  gorge  et  la  mem- 
brane des  ouïes;  ma's  il  y  a  des  écailles  sur  le  crâne ^ 
la  tempe,  la  joue,  l'opercule,  le  sous-opercule  et  la 
poitrine,  ainsi  que  sur  tout  le  corps  :  les  nageoires 
n'en  ont  point,  si  ce  n'est  de  très-petites  entre  les 
bases  des  rayons  de  la  caudale.  Ces  écailles  sont 
au  nombre  de  plus  de  cent  soixante  entre  l'ouïe  et 
la  caudale,  et  de  près  de  cinquante  sur  une  ligne 
verticale.  Leur  forme  est  elliptique;  leur  base,  tron- 
quée carrément,  a  huit  ou  dix  très-petites  crénelures, 
et  des  sillons  qui  ne  se  réunissent  pas  en  éventail. 
Leur  partie  externe,  vue  à  une  forte  loupe,  a  le 
milieu  pointillé,  les  côtés  striés,  et  1q  bout  un  peu 
dentelé  :  aussi  laissent  -  elles  sentir  quelque  âpreté 
quand  on  les  louche  d'arrière  en  avant.  La  ligne 


CHAP.    VIIT.    MALACANTHES.  325 

latérale  occupe  à  son  origine  le  quart  supérieur  de 
la  hauteur,  et  demeure  à  peu  près  droite  et  parallèle 
au  dos  sur  toute  sa  longueur;  elle  ne  se  marque 
que  par  une  légère  élevure  sur  chaque  écaille. 

Ce  poisson  est  agréablement  varié  de  jaune  et  de 
lilas  ou  de  bleuâtre.  En  avant  de  l'œil  et  sur  la 
tempe,  le  jaune  et  le  lilas  sont  disposés  en  lignes 
longitudinales.  Sur  l'opercule  il  y  a  des  marbrures 
jaunes  sur  un  fond  lilas.  A  la  dorsale  le  fond  est 
d'un  lilas  rougeâtre ,  avec  trois  séries  longitudi- 
nales de  taches  jaunes,  et  un  liséré  d'un  lilas  plus 
foncé.  L'anale  est  à  peu  près  de  même.  La  caudale 
est  jaune,  et  a  le  bord  postérieur  bleuâtre  et  trans- 
parent ,  et  un  liséré  bleu  aux  bords  supérieur  et 
inférieur.  Dans  nos  individus  le  corps  jDaraît  bru- 
nâtre en  dessus,  blanchâtre  en  dessous;  mais  d'après 
la  figure  de  Plumier  il  aurait,  au  moins  dans  cer- 
tains temps,  la  partie  dorsale  jaune,  irrégulièrement 
ondée  de  lilas  ou  de  bleu.  Cette  figure  donne  aussi 
à  la  dorsale  une  teinte  rouge  uniforme,  assez  diffé- 
rente de  ce  que  nous  observons.  L'enluminure  est 
assez  bien  rendue  sur  la  planche  n."  176  de  Bloch, 
qui  ne  pèche  que  par  la  trop  grande  convexité  du 
museau;  mais  sa  description,  qu'il  n'a  pu  faire  que 
d'après  la  figure,  est  beaucoup  plus  fautive,  surtout 
par  les  nombres  des  rayons  qu'il  donne.  Voici  ceux 
que  nous  avons  comptés  nous-mêmes  sur  la  nature. 
B.  6;D.6/55j  A.  1/50;  C.  17;  P.  16;  V.  1/5. 

Nous  avons  fait  sur  cette  espèce  les  obser- 
vations anatomiques  suivantes  : 

Le  foie  du  malacanthe  est  très -petit,  et  ne  forme 


►24  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

qu'un  seul  lobe  quadrilatère  placé  sous  l'œsophage. 
Les  canaux  biliaires  se  réunisseni  de  plusieurs  points 
à  sa  face  concave;  mais  il  n'y  a  pas,  à  proprement 
parler,  une  vésicule  du  fiel  distincte.  Le  canal  cholé- 
doque est  assez  long;  il  débouche  dans  le  duodénum 
en  arrière  du  pylore. 

L'entrée  de  l'œsophage  est  très-large;  l'estomac 
est  un  sac  assez  grand,  peu  alongé,  arrondi  en  ar- 
rière; les  parois  sont  minces,  et  à  l'intérieur  on  ne 
voit  de  plis  ou  des  rides  longitudinales  que  dans  le 
fond  de  l'estomac;  le  pylore  est  percé  à  la  moitié 
delà  longueur  de  l'œsophage  et  de  l'estomac,  mesurés 
ensemble;  son  ouverture  est  large,  pourvue  d'une 
valvule  charnue,  hérissée  de  papilles  assez  épaisses, 
qui  rétrécissent  l'entrée. 

L'intestin  n'est  pas  très-long  ;  il  se  replie  trois  fois 
et  fait  quelques  ondulations  dans  l'intervalle  de  ses 
plis.  Une  valvule  épaisse  et  charnue  est  à  l'entrée  du 
rectum,  qui  se  dilate  lorsqu'il  débouche  à  l'anus. 
Le  fond  de  l'estomac  répond  à  la  hauteur  de  l'anus; 
mais  la  cavité  abdominale  s'étend  en  arrière  de  plus 
du  double  encore,  pour  loger  les  organes  de  la  géné- 
ration, de  la  sécrétion  de  l'urine,  et  plus  de  la  moitié 
postérieure  de  la  vessie  natatoire. 

L'individu  que  nous  avons  disséqué  était  un  mâle. 
Les  laitances  étaient  très-peu  développées  ;  elles  sont 
placées  dans  le  fond  de  la  cavité  abdominale,  en 
avant  des  reins  et  au-dessus  de  la  vessie  urinai re. 
Un  long  canal,  placé  sur  cette  vessie  et  se  dirigeant 
en  avant,  verse  la  laitance  par  un  trou  percé  derrière 
le  rectum. 


CHAP.    VIIT.    MALACANTHES.  52S 

L<a  vessie  natatoire  est  très-grande  ;  elle  commence 
mi  peu  en  arrière  du  diaphragme,  et  s'étend  tout  le 
long  du  dos,  jusqu'au  dix -neuvième  rayon  de  l'a- 
nale; elle  est  protégée  en  arrière  par  les  premiers 
cercles  osseux ,  dont  nous  allons  parler  plus  bas  en 
décrivant  le  squelette.  Sa  membrane  propre  est  très- 
mince  et  argentée.  Au-dessous  d'elle,  le  péritoine 
prend  une  épaisseur  considérable  et  un  tissu  fibreux 
très-dense. 

Les  reins  forment  deux  longs  rubans  d'un  assez  beau 
rouge,  placés  de  chaque  côté  de  l'épine;  ils  se  réunis- 
sent en  arrière,  au-delà  de  la  vessie  natatoire,  dans  le 
cône  osseux.  Ils  débouchent  dans  la  vessie  urinaire, 
placée  en  partie  au-dessous  d'eux  dans  le  cône,  et  elle 
se  porte  en  avant  sous  les  laitances,  ayant  la  forme  d'un 
sac  étroit,  alongé,  à  parois  minces  et  blanches;  elle 
se  rétrécit  en  un  tube  de  très-petit  diamètre,  avant  de 
déboucher  derrière  l'ouverture  des  organes  génitaux. 

Nous  avons  trouvé  dans  l'estomac  de  ce  poisson 
des  débris  de  crustacés. 

A  ce  que  nous  avons  déjà  vu  des  pièces 
osseuses,  en  faisant  la  description  externe  du 
poisson,  nous  ajouterons  que 

la  colonne  vertébrale  du  malacanthe  est  composée 
de  vingt-trois  vertèbres;  elles  sont  alongées,  excepté 
la  première,  dont  le  corps  n'a  que  la  moitié  de  la 
longueur  des  suivantes;  leur  articulation  est  très- 
lâche  :  ce  qui  rend  les  mouvemens  latéraux  de  ce 
poisson  très-faciles.  Les  douze  premières  vertèbres 
portent  des  côtes;   les  neuf  premières    paires  sont 


526  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

libres  par  leur  extrémité  inférieure  :  les  trois  autres 
se  réunissent  et  forment  un  cône  osseux,  qui  reçoit 
lextrêmite  de  la  vessie  aérienne  et  les  reins. 

L'anus  répond  à  la  fin  de  la  quatrième  vertèbre, 
et  l'on  ne  commence  à  trouver  les  interépineux  de 
l'anale ,  articulés  avec  les  apophvses  épineuses  infé- 
rieures des  vertèbres  ,  qu  au  vingtième  rayon  de 
cette  nageoire. 

L'apopbvse  transverse  de  la  vertèbre  caudale  est 
assez  forte. 

Notre  plus  grand  individu,  qui  vient  de 
Saint-Domingue,  est  long  de  quinze  pouces  : 
la  fiçrure  de  Plumier  en  a  dix-huit. 

M.  Plée  nous  en  a  envoyé  un  plus  petit  de 
la  Martinique,  et  nous  en  avons  trouvé  un 
autre  de  la  même  ile  dans-  les  collections  de 
feu  M.  Richard. 

Son  poids  est  souvent  de  trois  livres  et  plus. 
Suivant  M.  E.icord,  lespèce  est  commune 
pendant    toute  Tannée   à    Saint-Domingue, 
mais  on  ne  ly  mange  pas. 

Nous  la  voyons  aussi  se  porter  sur  les  côtes 
du  Brésil  :  M.  Blanche t,  que  nous  avons  déjà 
cité  tant  de  fois,  en  a  envoyé  de  nombreux 
et  beaux  échantillons  au  Musée  de  Genève, 
qui  a  bien  voulu  en  céder  à  celui  de  Paris. 
Comme  nous  lavons  dit,  les  colons  fran- 
çais des  Antilles  nomment  ce  malacanthe  vwe, 
et  les  habilans  actuels  de  Haïti  lui  ont  con- 


CHAP.    Mil.    MALACA>.TUES.  527 

serve  ce  nom.  M.  Plëe  lexplique  d après  1  ha- 
bitude que  l'on  suppose  à  ce  poisson  de  char- 
rier, avec  beaucoup  de  travail,  des  pierres  et 
des  roches  pour  se  faire  un  abri  dans  le  tond 
de  la  mer.  Il  est  plus  probable  quil  vient  sim- 
plement des  rapports  de  forme  et  de  couleur 
quon  lui  aura  trouvés  avec  la  viue  d'Europe 
(  trachinus  draco),  et  que  l'histoire  sera  nëe 
du  nom,  comme  il  est  arrivé  bien  souvent. 
Parra,  qui  l'appelle  (p.  22,  et  pi.  i3,  fig.  1) 
matejuelo  blanco ,  nen  rapporte  rien  de  sem- 
blable. Il  assure  qu'à  Cuba  Ion  n'en  mange 
point.  A  Saint-Domingue  on  en  fait  peu  de 
cas,  selon  M.  Ricord.  M.  Plée  nous  dit,  au 
contraire,  quà  la  Martinique  il  est  estimé.  Ces 
diÔérences  peuvent  tenir  à  la  nature  des  fonds 
où  on  le  prend.  Il  se  pèche  soit  dans  des 
nasses,  soit  à  la  Ugne. 

Le  Malacamhe  a  large  raie,  ou  Tubleu 

DE    lIsLE-DE-Fra^CE. 

{MaLicanthus  tœniatus,  nob.  ;   Labre  large  raie, 
et  Tœnianote  larse  raie^,  Lacép.) 

Cette  espèce  a  été  décrite  et  représentée  à 
lIsle-do-France  par  Commei^on,  en  Octobre 
1-69.  Elle  est  rare  dans  cette  mer,  et  je  ne 
sais  si  le  nom  de  tubleu  j  que  Commerson  lui 


528  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

donne,  est  un  nom  vulgaire,  ou  s'il  a  été  ima- 
giné par  le  voyageur.  M.  de  Lacëpède ,  suivant 
son  usage,  a  tiré  deux  espèces  des  documens 
laissés  par  Commerson  :  la  figure  lui  a  fourni  son 
labiée  large  raie  (t.  III,  p.  627,  et  pi.  28,fig.  2), 
et  la  description,  son  tœnianote  large  raie 
(  t.  IV,  p.  304)5  tandis  que  par  une  erreur 
contraire  il  a  rapporté  à  ce  taeniauote  (  t.  IV, 
pi.  III ,  fig.  2  )  la  figure  d'un  poisson  tout  dif- 
férent, même  par  le  genre  et  par  la  famille  j 
car  c'est  un  de  nos  apistes  (^ap.  tœnianotus, 
nob.). 

On  a  dû  se  demander  souvent,  comment 
M.  de  Lacépède  a  pu  être  conduit  à  tant  de 
doubles  emplois  et  à  tant  de  confusions,  qu'il 
lui  aurait  été  si  facile  d'éviter,  en  rapprochant 
même  rapidement  les  matériaux  dont  il  faisait 
usage;  mais  on  se  l'expliquera,  lorsque  l'on 
saura  qu'il  a  composé  son  livre  à  la  campagne, 
où  les  troubles  de  1793  l'avaient  forcé  de 
se  cacher  pour  soustraire  sa  tête  vénérable 
à  l'échafaud  révolutionnaire;  qu'il  travaillait 
non  pas  sur  les  manuscrits  originaux,  ou  sur 
les  poissons  eux-mêmes  qui  étaient  à  sa  dis- 
position ,  mais  sur  des  notes  qu  il  avait  prises 
en  dilTérens  temps,  et  qui  ne  lui  présentaient 
plus  d'idées  complètes;  et  même  dans  l'occa- 
sion, présente   il   est  encore   plus   excusable 


CHAP.    Vin.    MALACANTHES.  329 

qu'en  bien  d'autres,  parce  que  les  dessins  que 
Commerson  a  laisses  de  son  tuhleii,  ne  portent 
point  de  nom  ni  de  renvoi  à  la  description, 
et  qu'une  lecture  assidue  et  répétée  du  ma- 
nuscrit pouvait  seule  en  faire  reconnaître 
l'identité. 

Quant  à  la  figure  d'apîste,  j'avoue  que  je 
ne  comprends  pas  comment  elle  se  trouve  mê- 
lée à  cette  histoire  :  le  moindre  coup  d'œil 
suffisait  pour  juger  qu'elle  n'a  point  de  rap- 
port à  la  description  de  la  page  3o4/ 

Ce  tuhleu  n'est  pas  du  nombre  des  espèces 
conservées  en  nature  par  Commerson ,  et 
nous  n'aurions  pu  en  parler  que  d'après  la 
description  et  les  figures  de  cet  observateur, 
si  M.  Dussumier  n'avait  pas  été  assez  heureux 
dans  ses  recherches  pour  nous  envoyer  le 
poisson.  Depuis  M.  Desjardins  nous  en  a 
procuré  de  la  même  île,  et  MM.  Quoy  et 
Gaimard  l'ont  aussi  rapporté  de  leur  voyage. 

Nos  exemplaires  sont  parfaitement  conser- 
vés; mais  ils  manquent  de  leurs  viscères. 

Cette  espèce  ressemble  beaucoup,  par  sa 


1.  Peut-être  est-ce  une  distraction  et  a-t-il  voulu  écrire  iœnia- 
note  iriancanthe;  mais  une  question  non  moins  difficile  est  de 
deviner  comment  11  a  jju  associer  ce  triacanthe,  qui  est  vraiment 
un  apiste,  genre  voisin  des  scorpènes  ,  avec  le  large  raie,  qui 
est  manifestement  de  la  famille  des  labres. 


350  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

forme  alongée,  par  la  force  de  l'épine  oper- 
culaire,  pyr  le  nu  du  dessus  de  la  tête,  éga- 
lement aplatie,  par  les  petites  écailles  sur  le 
préopercule ,  au  malacanthe  des  mers  d'Améri- 
que ;  mais  elle  en  diffère  parla  forme  des  dents 
et  parce  que  la  caudale  est  à  peine  fourchue  : 
quelques  différences  existent  dans  les  rapports 
de  proportion  des  diverses  autres  parties  : 
aussi  allons-nous  donner  une  description  dé- 
taillée de  cette  rare  espèce. 

La  tête,  plus  longue  que  celle  du  malacanlhe  de 
Plumier,  n  est  que  du  quart  de  la  longueur  totale. 

L'œil  est  situé  sur  le  haut  de  la  joue,  sans  que 
l'orbite  entame  la  ligne  du  profil,  et  à  peu  près 
au  milieu  de  la  dislance  entre  le  bout  du  museau  et 
la  pointe  de  l'opercule  :  le  diamètre  fait  le  septième 
de  la  longueur  de  la  tête;  et  trois  fois  et  demie 
ce  diamètre  fait  la  dislance  qui  sépare  l'œil  de  l'ex- 
trémité du  museau.  La  fente  de  la  bouche  est  un 
peu  moins  du  tiers  de  la  longueur  de  la  tête.  Les 
dents  sont  sur  une  bande  assez  large  et  en  ve- 
lours, sur  le  devant  des  mâchoires  :  celles  du  rang 
externe  seules,  un  peu  plus  fortes,  se  continuent 
avec  la  rangée  unique  de  dents  courtes,  mais  coni- 
ques, des  côtés  de  la  bouche.  Elles  augmentent  de 
force  en  approchant  de  l'extrémité  de  l'intermaxil- 
laire  :  la  dernière  est  même  plus  forte,  et  rappelle 
la  disposition  que  nous  avons  signalée  dans  le  plus 
grand  nombre  des  labroïdes,  et  qui  est  plus  mani- 
feste dans  le  premier  de  nos  malacanthes.  Le  palais 


CHAP.    VIII.    MALACANTHES.  331 

el  la  langue  sont  lisses  et  sans  aucunes  dents;  les 
deux  voiles,  supérieur  et  inférieur,  sont  larges;  les 
lèvres  sont  épaisses  et  charnues,  mais  peu  plissées 
en  dessous. 

Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  rapprochées 
l'une  de  l'autre;  l'antérieure  est  sur  la  seconde  moitié 
de  l'intervalle  de  l'œil  au  bout  du  museau,  et  n'est 
qu'un  petit  trou  semblable  à  une  piqûre  d'épingle; 
la  postérieure  est  une  fente  longitudinale. 

On  doit  déjà  pressentir  que  le  sous-orbitaire  est 
un. os  long  et  étroit,  à  cause  de  la  longueur  et  de 
l'étroitesse  du  museau.  Le  préopercule  est  assez  grand  ; 
son  angle  est  ouvert  et  arrondi  ;  le  bord  montant 
est  incliné  en  arrière,  et  l'inférieur  est  dirigé  obli- 
quement et  en  bas  vers  l'angle  de  la  mâchoire  infé- 
rieure. 

L'opercule  a  la  forme  d'un  pentagone  irrégulier. 
Le  bord  antérieur  est  caché  sous  le  postérieur  du 
préôpercule,  sans  atteindre  jusqu'à  l'angle  infé- 
rieur; de  la  terminaison  de  ce  bord  en  commence 
un  second,  dirigé  obliquement  d'avant  en  arrière, 
et  qui  va  rejoindre  le  bord  inférieur  postérieur, 
en  faisant  avec  lui  un  angle  assez  aigu  et  rentrant, 
ou  un  arc  convexe  en  avant.  Le  bord  postérieur 
supérieur  est  un  peu  festonné  en  ^-x-'x.-w^'x, ,  et  se 
réunit  au  précédent ,  en  donnant  de  leur  angle  la 
pointe  osseuse  operculaire,  qui  atteint  jusqu'au  mi- 
lieu de  l'huméral,  et  qui  est  très -acérée.  Le  sous- 
opercule  est  une  lame  étroite,  taillée  suivant  la  courbe 
du  bord  de  l'opercule.  L'interopercule  suit  de  même 
le  bord  de  celui-ci;  il  est  un  peu  plus  large   en 


532  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

arrière  ;  enire  lui  et  les  deux  os  postérieurs  de  l'ap- 
pareil operculaire,  il  y  a  une  petite  pièce  triangu- 
laire, mince,  mobile,  que  je  regarde  comme  démem- 
brée de  l'interopercule ,  et  qui  a  donné  une  forme 
pentagonale  à  l'os  qui  porte  l'épine. 

Nous  avons  dit  que  le  préopercule  est  en  partie 
couvert  d'écaillés  :  il  en  est  de  même  de  toute  la 
partie  de  l'opercule  qui  est  au-dessus  de  la  pointe. 
On  voit  quelques  points  écailleux  sur  le  sous-oper- 
cule; mais  l'interopercule,  le  limbe  du  préopercule, 
les  mâchoires,  la  membrane  brancliiostège,  le  sous- 
orbitaire,  et  le  dessus  de  la  tête  jusqu'au  bord  posté- 
rieur de  l'orbite,  sont  recouverts  d'une  peau  épaisse 
sans  écailles.  Le  dessus  du  crâne  entre  les  yeux  a 
deux  fois  la  largeur  du  diamètre  de  l'œil,  et  le  bout 
du  museau  est  de  moitié  plus  étroit. 

Les  ouïes  sont  largement  fendues;  la  membrane 
brancliiostège  est  cependant  réunie  à  celle  du  côté 
opposé,  sous  toute  la  portion  inférieure  de  la  tète. 
Les  rayons  sont  cachés  par  l'épaisseur  de  la  peau, 
de  manière  à  n'être  vus  que  par  la  dissection.  Ils  sont 
forts,  au  nombre  de  cinq,  et  le  dernier,  couché  sous 
l'opercule,  est  aplati  et  arqué.  ^ 

Les  branchies  sont  au  nombre  de  quatre,  et  il  y 
en  a  une  rudimentaire  sous  le  haut  de  l'opercule.  Les 
râtelures  des  arcs  branchiaux  sont  de  petits  tuber- 


1.  Commerson  porte  le  nombre  a  six  clans  la  description, 
d'ailleurs  fort  exacte,  qui  existe  dans  ses  manuscrits,  li  y  a  ici 
erreur,  je  les  ai  comptés  avec  soin  des  deux  côtés  de  la  mem- 
brane; le  nombre  est  celui  que  je  donne. 


CHAP.    VIII.    MALACANTHES.  535 

cules  rugueux.  Les  dents  pliaryngiennes  sont  en 
cardes  pointues  et  coniques. 

Le  tronc  est  arrondi  de  l'avant  et  comprimé  vers 
la  queue;  sa  plus  grande  hauteur  aux  pectorales  est 
du  septième  de  la  longueur  totale  :  derrière  les  deux 
grandes  nageoires  impaires  elle  n'est  que  du  ving- 
tième. L'épaisseur  aux  pectorales  surpasse  la  moitié 
de  la  hauteur.  Ces  nageoires  ont  le  bord  supérieur 
arqué,  leur  terminaison  pointue,  et  le  bord  inférieur 
sinueux  et  très-convexe  en  dessous.  Les  rayons  sont 
larges  et  plats,  au  nombre  de  dix-sept;  le  premier 
seul  est  simple  et  de  moitié  plus  court  que  le  plus 
long,  qui  mesure  à  peu  près  le  huitième  de  la  lon- 
gueur totale. 

L'huméral  se  montre  au-dessus  de  la  pectorale  en 
une  plaque  demi-ronde,  dont  le  bord  supérieur  va 
rejoindre,  sous  le  bord  membraneux  de  l'opercule, 
le  scapulaire  ,  qui  est  en  partie  caché  sous  l'ouïe. 
On  ne  voit  qu'un  peu  du  bord  arqué  de  sa  portion 
supérieure.  Le  surscapulaire  est  seul  couvert  d'écail- 
lés. Le  bas  de  l'huméral  forme  une  large  ceinture, 
entièrement  recouverte  par  l'ouïe,  et  qui  ne  se  voit 
qu'en  soulevant  l'opercule. 

La  ventrale  a  les  deux  tiers  en  longueur  de  la 
pectorale,  elle  est  étroite,  et  insérée  sous  le  ventre 
un  peu  en  arrière  de  celle-ci.  Son  épine  osseuse  est 
poignante,  quoique  grêle  et  collée  tellement  au  pre- 
mier des  cinq  rayons  branchus,  qu'on  ne  la  juge 
bien  qu'après  l'avoir  séparée  avec  le  scalpel. 

La  dorsale  commence  un  peu  au-delà  de  la  pec- 
torale j  elle  se  continue  sur  toute  l'étendue  du  dos, 


334  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

s'élevant  un  peu  vers  l'arrière.  On  lui  compte  qua- 
rante-sept  rayons,  dont  les  quatre  premiers  sont 
simples  et  moins  flexibles ,  quoique  grêles ,  que  ceux 
du  malacanthe  d'Amérique.  Le  sixième  est  simple, 
mais  articulé  :  les  autres  sont  tous  branchus. 

L'anale  a  trente- huit  rayons,  dont  le  premier, 
très-flexible,  est  simple  :  il  répond  au  seizième  de 
la  dorsale.  Ces  deux  nageoires  atteignent  aussi  loin 
l'une  que  l'autre,  et  le  tronçon  de  queue  qu'elles 
laissent  derrière  elles ,  est  du  quinzième  de  la  lon- 
gueur totale.  La  caudale  de  ce  poisson  a  le  bord 
droit  quand  elle  est  étalée,  et  légèrement  concave 
quand  les  rayons  sont  à  moitié  rapprochés. 
B.  5  5  D.  4/43  ;  A.  1/38  ;  GAI  ;  P.  17  ;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  petites  et  légèrement  rudes  au 
toucher.  Je  compte  cent  vingt-cinq  rangées  entre 
l'ouïe  et  la  caudale,  et  une  trentaine  dans  la  hau- 
teur. Vue  isolée,  une  écaille  a  la  forme  rectangu- 
laire; plus  des  deux  tiers  de  sa  surflice  est  recou- 
verte; la  portion  nue  a  le  bord  libre  cilié,  la  sur- 
face grenue  :  le  bord  radical  a  trois  fortes  épines 
d'insertion. 

La  ligne  latérale  est  marquée  par  une  suite  de 
tubulures,  et  commence  au-dessus  de  l'ouïe  par  le 
quart  de  la  hauteur;  elle  s'abaisse  peu  à  peu,  et, 
arrivée  au  milieu  de  la  longueur  du  corps,  elle  se 
rend  à  la  caudale  par  le  milieu  de  la  hauteur  du 
tronc. 

Dans  la  liqueur,  le  poisson  paraît  brun  sur  le  dos, 
au-dessus  de  la  ligne  latérale.  Cette  teinte  se  fond  par 
lignes  parallèles,  plus  effacées  sur  l'argenté  des  côtés, 


CHAP.    VIIT.    MALACANTHES.  535 

qui  devient  irès-pur  et  très-brillant  sous  le  ventre. 
Une  large  bande,  égalant  le  quart  de  la  hauteur, 
part  de  l'aisselle  de  la  pectorale  et  se  rend  à  l'extré- 
mité de  la  caudale.  Celte  bande,  brune  à  son  origine, 
paraît  être  composée  de  neuf  traits  rapprochés, 
qui ,  au  milieu  du  corps ,  se  réunissent  pour  ne 
plus  former  qu'une  bande  beaucoup  plus  foncée , 
et  presque  noire  à  la  queue.  Elle  s'élargit  un  peu 
en  dessous,  sur  le  bas  de  la  caudale,  de  manière  à 
donner  une  sorte  de  talon,  qui  ne  couvre  que  la 
base  de  la  nageoire.  Cette  singulière  disposition  est 
constante  dans  tous  les  individus  que  j'ai  sous  les 
yeux,  et  elle  est  aussi  représentée  sur  les  différens 
dessins  qui  nous  sont  parvenus. 

Les  nageoires  semblent  avoir  été  jaunes. 

Mais  Commeison,  dont  la  description  est 
si  exacte,  sauf  la  légère  erreur  qu'il  a  commise 
sur  le  nombre  des  rayons  brancliiostèges,  nous 
donne  la  description  suivante  des  couleurs , 
faite  sur  le  poisson  frais. 

La  couleur  de  la  tête  et  du  dos  est  d'un  brun 
bleuâtre.  Une  large  bande  noire  comme  de  l'encre, 
règne  en  ligne  droite  depuis  la  pectorale  jusqu'à  la 
caudale.  Le  dessous  du  corps  est  blanc.  La  dorsale 
a  toute  la  moitié  de  sa  base  brune,  celle  du  bord 
blanchej  l'anale  est  blanche  comme  le  ventre.  La  cau- 
dale a  sa  partie  supérieure  brune,  comme  le  dos  :  le 
noir  de  la  bande  latérale  se  répand  sur' le  reste  de 
sa  surface,  excepté  une  large  tache  blanche,  demi- 
circulaire,  qui  occupe   son  bord   au  milieu  de   sa 


356  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

moitié  inférieure.  Le  blanc  de  l'abdomen  s'étend  aussi 
un  peu  sur  la  base  de  celte  partie.  Les  pectorales 
sont  brunâtres  à  l'extérieur,  et  bleuâtres  à  leur  face 
interne. 

Notre  individu  est  long  de  seize  pouces  ; 
celui  décrit  par  Commerson,  et  le  seul  qu'il 
ait  vu,  était  long  de  quinze  pouces  et  demi,  et 
pesait  dix-sept  onces.  On  lui  a  dit  que  la  chair 
de  ce  poisson  était  peu  estimée.  Son  estomac 
contenait  de  très-petites  coquilles  et  des  frag- 
mens  de  lythopliytes. 

Nous  ne  pouvons  donner  aucun  détail  sur 
l'anatomie  de  ce  poisson  ,  puisque  les  indivi- 
dus que  l'on  nous  a  envoyés  manquaient  des 
viscères  abdominaux. 

M.  Desjardins  nous  a  dit  dans  une  note  que 
le  nom  vulgaire  de  ce  poisson,  à  l'Isle- de- 
France,  est  sans-culotte. 

Nous  avons  d'ailleurs  à  regretter  que  ce  sa- 
vant et  zélé  observateur  n'ait  pas  eu  le  temps 
de  nous  donner  d'autres  détails  sur  cette  rare 
espèce.  C'est  une  lacune  qu'il  aura  le  soin  de 
remplir  aussitôt  qu'il  aura  l'occasion  de  publier 
quelque  notice  scientifique  sur  ce  labroïde. 

L'espèce  n'est  pas  confinée  autour  de  l'Isle- 
de-France  :  MM.  Quoy  et  Gaimard  en  ont  ob- 
servé au  havre  Dorey  de  la  Nouvelle-Guinée 
une  variété,  qui  a  sur  le  milieu  du  dos  une 
tache  jaunâtre. 


CHAP.    VIII.    MALACANTHES.  357 

Nous  la  signalons  à  cause  de  la  petite  dif- 
férence des  couleurs  que  ces  naturalistes  ont 
indiquée.  Ce  poisson ,  dont  ils  ont  donné 
une  figure,  planche  20,  figure  3,  et  une  des- 
cription, tome  III,  page  701,  de  la  Rela- 
tion du  voyage  de  l'Astrolabe,  en  le  regardant 
comme  le  labre  large  raie  de  Lacépède,  est 
peint  de  couleur  bleu  d'azur  sur  le  dos  et 
sur  le  ventre;  cette  teinte  aurait  sur  la  tête 
des  reflets  de  carmin,  qui  ne  sont  pas  exprimés 
sur  la  planche;  la  bandelette  longitudinale  est 
noire,  l'anale  a  le  bord  jaunâtre;  sur  le  dos 
il  y  a  une  tache  oblongue  jaunâtre,  rayée  de 
trois  traits  bruns  longitudinaux.  Le  nom  de 
cette  espèce,  au  port  Dorey,  est  insoronobar. 

J'ai  pu  vérifier  sur  le  poisson  son  identité 
avec  celui  de  FIsle-de-France.  Je  ne  doute 
pas  qu'il  soit  de  la  même  espèce  malgré  la 
phrase  un  peu  obscure  rédigée  par  les  natura- 
listes qui  en  ont  fait  la  diagnose. 

NB.  Je  ne  parle  pas  ici  de  VAspidonle  que  M.  Quoj  a  figuré, 
pi.  19,  fig.  4j  dans  la  Zoologie  de  l'Astrolabe,  parce  que  j'ai 
reconnu  en  faisant  ce  travail  que  ce  petit  poisson ,  qui  n'a  que 
trois  rajons  aux  ventrales  et  les  ouïes  ouvertes  par  une  fente 
linéaire  et  verticale,  est  de  la  famille  des  blennies,  et  voisin  de  nos 
Blennechis.  Trompé  alors  par  la  ressemblance  des  couleurs ,  j'avais 
pensé  qu'il  avait  des  affinités  avec  notre  malacanlhe  de  la  mer  des 
Indes. 


3. 


22 


538  LIVRE  XVI.   LAEROÏDES. 

CHAPITRE  JX. 

Des   Cheilions. 

Commerson,  en  observant  avec  tant  de  soins 
les  poissons  de  risle-de-France ,  y  vit  une  ou 
deux  espèces  voisines  Tune  de  l'autre,  ayant 
beaucoup  d'affinité  avec  les  labres,  mais  s'en 
distinguant,  suivant  la  méthode  linnéenne, 
par  l'absence  de  prolongemens  cutanés  auprès 
des  rayons  épineux  de  la  dorsale.  Ils  offraient 
d'ailleurs  un  autre  caractère  dans  la  nature 
molle  de  tous  ceux  qui  sont  simples  à  la 
nageoire.  Cet  habile  naturaliste  consigna  ces 
observations  dans  son  journal ,  et  donna  pro- 
visoirement à  ces  poissons  le  nom  générique 
de  cheilion,  le  faisant  dériver  du  grec  %ètKoç, 
(lèvre),  pour  rappeler  les  affinités  que  ce  genre, 
qu'il  se  proposait  d'établir,  avait  avec  les  la- 
bres. Il  donne  d'ailleurs  la  description  de  deux 
espèces,  l'une  faite  avec  le  plus  grand  détail, 
l'autre  comparativement ,  et  un  peu  plus  courte. 
Ces  matériaux  ont  paru  pour  la  première  fois 
dans  le  quatrième  volume  de  l'Histoire  des 
poissons  de  Lacépède,  qui  en  a  fait  un  extrait, 
et  qui  a  publié  ce  genre  en  méconnaissant  les 
rapports  que  leur  avait  si  bien  assignés  Gommer- 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  539 

son  :  car  il  le  place  à  côté  des  genres  harpe, 
pomatome  et  lëiostome ,  que  nous  avons  dé- 
montré être  des  doubles  emplois  d'espèces 
bien  connues,  et  classées  dans  des  familles 
différentes  les  unes  des  autres;  il  le  rapprochait 
du  genre  pimeleptere ,  qui  est  un  squammi- 
penne  et  tout  aussi  éloigné  des  cheilions. 

Lacépède  d'ailleurs  ne  se  doutait  pas,  en 
copiant  Forskal,  qu'il  plaçait  dans  ses  labres 
un  poisson  de  ce  genre  des  cheilions,  et  même 
tellement  voisin  de  celui  de  l'Isle-de-France, 
que  j'ai  beaucoup  hésité  à  l'en  distinguer. 

Le  lahrus  inermis  du  naturaliste  danois  n'est 
en  effet  autre  chose  quun  cheilion;  toutefois 
nous  devons  observer  que  Commerson  n'a  pas 
présenté  les  vrais  caractères  du  genre  qu'il 
projetait,  imbu  qu'il  était  des  caractères  lin- 
néens. 

Ils  consistent  dans  la  forme  particulière  des 
intermaxillaires.  Ces  os  sont  en  effet  élargis  et 
chargés  en  dedans  de  granulosités  que  l'on 
n'observe  chez  aucun  autre  labroïde.  Les  dents 
de  la  rangée  externe  ne  sont  pas  moins  caracté- 
ristiques; car  elles  sont  triangulaires,  compri- 
mées et  tranchantes,  comme  celles  de  certai- 
nes sphyrènes,  ou  des  cjbiums  dans  la  famille 
des  scombéroïdes.  Les  deux  dents  mitoyennes 
sont  en  crochets,  et  l'espace  entre  toutes  ces 


340  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

dents  est  rempli  par  d'autres,  petites;  coniques , 
et  constituent  ainsi  Tarmure  de  la  mâchoire 
inférieure.  L'égalité  des  dents  de  la  mâchoire 
supérieure,  sauf  les  deux  mitoyennes,  est  aussi 
très-particulière.  La  mollesse  et  la  flexibilité 
de  tous  les  rayons  est  non  moins  caractéris- 
tique; mais  elle  ne  serait  pas  seule  suffisante. 
La  ligne  latérale  non  interrompue  sert  égale- 
ment à  distinguer  ce  groupe  de  labroïdes  à 
rayons  mous  et  à  ligne  latérale  interrompue, 
comme  on  le  voit  dans  le  lahrus  inalapterus 
de  Bloch.  Les  cheilions  ont  aussi  quelques 
écailles  rares  sur  l'opercule,  tandis  que  le  pois- 
son auquel  je  le  compare  en  ce  moment,  a  la 
joue  nue  comme  la  girelle. 

On  voit  donc  que  les  cheilions  avoisinent 
les  malacanthes,  qu'ils  ont  encore  les  rayons 
plus  mous  que  le  tubleu  de  fIsle-de-France, 
et  qu'ils  sont  intermédiaires  entre  les  labres  et 
les  girelles. 

M.  Cuvier,  qui  n'avait  pas  examiné  les  dents 
ni  les  intermaxillaires  de  ces  poissons,  a  cru 
que  la  seule  flexibilité  des  rayons  ne  pouvait 
être  un  caractère  assez  important  pour  faire 
de  ces  espèces  un  genre  distinct.  C'est  ce  qui 
explique  comment  il  a  dit  dans  le  Règne  ani- 
mal, que  les  cheilions  n'étaient  que  des  labres 
très-gréles,  dont  les  épines  dorsales  sont  flexi- 


CHAP.    IX.    CHEILIONS,  341 

bles.  Il  aura  sans  doute  été  trompé  par  l'inexac- 
titude de  la  figure  du  Voyage  de  l'Uranie. 

Je  commencerai  par  décrire  les  espèces  con- 
nues de  Commerson,  et  je  parlerai  ensuite  de 
celles  qui  ont  été  découvertes  depuis. 

Le  Cheilion  doré. 
( Cheilio  auratusy  Commerson,  Lacép.,  t. IV,  p.  4^3.) 

Ce  poisson,  que  nous  venons  de  recevoir  , 
de  risle-de-France  par  M.  Dussumier  en  très- 
bon  état,  est  distinct  de  celui  des  Sandwich, 
rapportéparMM.  Quoy  et  Gaimard.  L'individu 
de  ces  voyageurs  était  le  seul  que  nous  ayons 
eu  alors  à  notre  disposition,  et  à  l'aide  duquel 
nous  avons  reconnu  la  description  de  Com- 
merson. Nous  le  crûmes  identique  avec  son 
poisson,  et  nous  le  déterminâmes  ainsi  dans 
la  collection  du  Muséum.  C'est  là  ce  qui  expli- 
que comment  ce  poisson  a  paru,  sous  le  nom 
de  cheilion  doré,  dans  le  Voyage  de  l'Uranie , 
bien  que  nous  le  distinguions  aujourd'hui  de 
celui  auquel  nous  réservons  le  nom  du  premier 
naturaliste  qui  Fa  fait  connaître» 

Le  corps  est  irès-alongé  et  presque  arrondi.  La 
hauteur  fait  à  peine  le  huitième  de  la  longueur 
totale;  l'épaisseur  a  près  des  deux  tiers  de  la  hauteur. 
La  tète  est  longue,  car  elle  n'est  comprise  que  trois 
fois  et  demie  dans  la  longueur  totale.  Son  museaw 


342  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

est  pointu,  arrondi  à  l'extrémité,  prolongé,  par  la 
saillie  des  intermaxillaires,  au-devant  des  sous-orbi- 
taires;  il  a  beaucoup  de  ressemblance  avec  celui 
d'une  sphyrène,  même  par  la  disposition  des  dents 
de  la  mâchoire  inférieure;  mais  le  palais  est  lisse  et 
sans  dents,  et  la  nature  des  intermaxillaires  devient 
tellement  caractéristique  qu'on  ne  peut  s'y  méprendre. 
L'œil  est  de  grandeur  médiocre,  situé  au  milieu 
de  la  longueur  de  la  joue;  le  cercle  de  son  orbite 
touche  presque,  mais  n'entame  pas  la  ligne  du  profil  j 
son  diamètre  est  du  huitième  de  la  longueur  de  la 
tête.  Le  premier  sous-orbitaire  a  le  bord  supérieur 
•  droit  et  alongé  ;  l'inférieur  est  convexe,  et  son  angle 
postérieur  prolongé  en  pointe,  qui  va  rejoindre  les 
autres  osselets  du  sous-orbitaire.  Le  préopercule  est 
grand ,  à  angle  bien  marqué ,  quoique  arrondi.  Le  bord 
inférieur  est  oblique  un  peu  vers  le  bas,  ce  qui  aug- 
mente la  largeur  de  la  joue.  L'opercule  est  triangu- 
laire, alongé,  et  agrandi  par  son  angle  membraneux. 
Sur  le  bord  supérieur,  près  des  surscapulaires ,  il  y 
a  une  rangée  d'écaillés,  et  une  autre  existe  le  long 
du  bord  inférieur.  Cette  rangée  semble  séparer  d'une 
manière  plus  nette  le  sous -opercule,  qui  est  étroit, 
alongé  et  sans  écailles.  L'interopercule  est  de  même 
en  triangle  oblongr,;  sans  écailles  ;  il  touche  sous 
l'isthme  à  celui  du  côté  opposé.  La  bouche  est  bien 
fendue.  Le  maxillaire  reste  tout  entier  caché  sous  le 
bord  membraneux  du  sous-orbitaire.  Les  intermaxil- 
laires ne  sont  pas  protractiles ,  tant  est  courte  leur 
branche  montante.  La  lèvre  supérieure  est  peu  épaisse 
et  a  deux  à  trois  plis  longitudinaux;  l'inférieure  est 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  345 

plus  large  et  collée  le  long  de  la  branche  de  la  mâ- 
choire, comme  dans  la  plupart  de  nos  labroïdes  ; 
son  bord  est  sinueux  ,  à  cause  de  l'élargissement 
qu'elle  a  peu  après  la  symphyse. 

Les  dents  sont  petites,  coniques,  serrées  le  long 
du  bord  externe  de  l'intermaxillaire.  J'en  compte 
trente- sept,  qui  diminuent  graduellement  jusqu'à 
l'ancle  de  la  mâchoire.  A  l'extrémité  antérieure  de 
l'os  il  y  a  une  forte  canine  crochue,  presque  trois 
fois  plus  grosse  que  la  dent  qui  la  suit.  Ce  qui  est 
remarquable  dans  le  poisson,  c'est  que  cet  inter- 
maxillaire est  élargi  en  dedans,  sur  les  deux  tiers 
antérieurs  de  sa  longueur,  en  une  plaque  osseuse, 
granuleuse ,  et  qui  forme ,  en  touchant  à  celle  du 
côté  opposé,  une  sorte  de  voûte  osseuse  à  toute 
la  partie  antérieure  de  la  bouche j  d'ailleurs  il  n'y  a 
point  de  dents  ou  granulations  sur  le  vomer,  ni  sur 
les  palatins ,  qui  sont  reculés  en  arrière  pour  laisser 
la  place  nécessaire  à  l'étendue  des  intermaxillaires. 

A  la  mâchoire  inférieure  les  dents  sont  plus  gran- 
des et  plus  écartées.  Près  de  la  symphyse  il  y  a  d'abord 
une  première  canine  de  chaque  côté,  semblable  aux 
dents  en  crochets  de  la  mâchoire  supérieure  ;  puis 
vient  un  groupe  de  quatre  petites  dents  coniques , 
crochues,  et  grandissant  à  mesure  qu'elles  sont  plus 
postérieures;  ensuite  une  grosse  dent  en  triangle 
isocèle,  comprimée,  tranchante,  et  semblable  à  celle 
de  certaines  sphyrènes  ou  de  nos  cybmnis.  Après  un 
intervalle  sans  dents,  une  autre  canine, en  triangle  et 
très-pointue,  plus  grande,  suit  celle  dont  je  viens  de 
parler;  un  espace  sans  dents  sépare  celle-ci  de  deux 


344  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

autres ,  semblables  pour  la  taille  et  la  forme  à  la 
première;  enfin,  une  série  de  cinq  petites  coniques 
termine  cette  denture. 

Le  voile  supérieur  du  palais  est  très-petit,  à  peine 
Visible  ;  l'inférieur  est  très-large;  derrière  lui  est  une 
langue  libre,  pointue  et  lisse.  Les  pharyngiens  sont 
petits  et  couverts  de  dents  rondes  et  comme  gra- 
nuleuses; l'inférieur  a  la  tige  longitudinale  en  ovale 
alongé.  Les  râtelures  des  branchies  sont  courtes  et 
dirigées  en  dehors.  Les  ouïes  sont  largement  fen- 
dues. Il  y  a  six  rayons  branchiostèges. 

Les  deux  ouvertures  de  la  narine  sont  près  de  l'oeil  ; 
la  postérieure  a  une  distance  égale  au  diamètre  de 
l'orbite  :  elle  est  petite,  mais  visible  à  l'œil  nu;  l'anté- 
rieure est  d'une  petitesse  extrême  et  percée  sur  une  pe- 
tite papille:  il  faut  la  chercher  avec  soin  pour  la  voir. 

La  dorsale  commence  un  peu  en  arrière  de  l'angle 
de  l'opercule;  les  premiers  rayons  sont  simples,  aussi 
mous  que  ceux  qui  sont  divisés  en  branche  à  leurs 
extrémités.  L'anale  a  de  même  trois  rayons  simples 
et  mous  ;  elle  commence  sous  le  second  rayon  arti- 
culé de  la  nageoire  du  dos.  La  caudale  est  peu  ar- 
rondie. La  pectorale  est  courte;  elle  est  contenue 
plus  de  dix  fois  dans  la  longueur  totale;  elle  est 
tronquée  obliquement.  La  ventrale  est  petite,  arron- 
die; son  rayon  simple  est  mou. 

B.  6}  D.  9/13;  A.  S/1-2;  C.  15;  P.  11;  V.  l/b. 

Les  écailles  sont  assez  grandes  et  demi- ovales  : 
j'en  compte  quarante-quatre  entre  l'ouïe  et  la  cau- 
dale, et  dix-sept  dans  une  rangée  verticale  au  mi- 
lieu. La  portion  radicale  est  plus  large  du  double 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  345 

que  la  portion  visible.  La  surface  est  très -finement 
striée  par  des  ciselures  parallèles  au  bord.  L'éventail 
a  trente-six  rayons,  marqués  par  des  stries  très-fines. 

La  ligne  latérale  est  tracée  droite,  et  elle  descend 
un  peu  obliquement  de  l'angle  de  l'opercule  au  mi- 
lieu de  la  queue,  de  sorte  qu'à  sa  naissance  il  n'y 
a  que  cinq  rangées  d'écaillés  au-dessus  d'elle,  et 
qu'au  milieu  ou  aux  deux  tiers  du  tronc,  il  y  en  a 
huit  ou  neuf. 

La  couleur  des  individus  conservés  dans  l'eau-de- 
vie  est  d'un  jaune  plus  ou  moins  doré,  avec  une  série 
de  points  noirs  sur  l'arrière  de  la  ligne  latérale,  plus 
marqués  à  mesure  qu'ils  sont  plus  près  de  la  caudale. 

M.  Dussumier,  qui  l'a  vu  frais,  dit  que  les  écailles 
du  dos  sont  verdâtres,  bordées  de  jaune;  que  les 
flancs  et  le  ventre  sont  argentés.  La  tête,  jusqu'au 
bord  membraneux  des  opercules,  est  jaune  orangé 
pâle  ;  les  nageoires  ont  leurs  rayons  de  cette  même 
teinte,  et  la  membrane  transparente. 

Le  canal  intestinal  ne  fait  que  deux  ou  trois  sinuo- 
sités. La  vessie  aérienne  est  grande,  quoiqu'elle  n'oc- 
cupe que  la  moitié  postérieure  de  la  cavité  abdominale. 

Nos  individus  ont  quinze  à  seize  pouces 
de  longueur 5  ils  nous  sont  venus  de  l'Isle-de- 
France,  par  MM.  Desjardins  et  Dussumier. 
M.  Leschenault  a  trouvé  l'espèce  à  Bourbon. 

Tous  ces  individus  sont  plus  petits  que  ceux 
de  risle-de-France  ;  l'inégalité  des  dents  est 
fort  bien  exprimée,  et  la  ligne  latérale  est  plus 
brune,  avec  les  points  noirs  plus  marqués. 


540  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

Commerson  dit  que  la  cliair  du  poisson  est 
d'un  assez  bon  goût,  mais  qu'on  ne  le  mange 
pas  à  risle-de-France ,  à  cause  de  son  peu  de 
fréquence  sur  le  marche.  Sapore  haiid  illau- 
dahilis,  sed  infrequentia  pariim  usurpatus. 
Caro  alhissima. 

M.  de  Lacëpède  a  traduit  cette  phrase  tout 
différemment,  en  disant  que  ce  poisson  de 
bon  goût  n'est  pas  reclierché  à  l'Isle-de-France , 
à  cause  de  son  abondance  sur  le  marché  de 
l'ile. 

M.  Quoy,  dans  la  Relation  du  voyage  de 
rUranie,  a  copié  celte  erreur  de  Lacépède, 
et  a  cru  devoir  en  inférer  que,  s'il  n'avait  pas 
rencontré  le  clieilion  sur  le  marché  de  flsle- 
de-France,  c'est  qu'il  n'y  paraissait  que  très- 
rarement  pendant  les  mois  de  Mai,  Juin  et 
Juillet,  qu'ils  avaient  passés  à  Maurice. 

Commerson  fappelle  lejaunet  de  flsle-de- 
France,  mais  sans  dire  positivement  s'il  en- 
tend sous  cette  dénomination  parler  d'un  nom 
vulgaire. 

Le  Cheilion  vert  et  bleu. 
{Cheilio  cjano-chloris ,  nob.) 

Nous  avons  aussi  retrouvé  une  seconde  es- 
pèce de  cheilion  dans  les  collections  faites  à 
î'Isle-de-France  par  M.  Dussumier. 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  347 

Elle  ressemble  beaucoup  à  la  précédente,  mais 
elle  a  le  sous  -  orbilaire  plus  lisse,  les  rayons  de  la 
dorsale  plus  forts  et  moins  flexibles  j  la  ligne  laté- 
rale rameuse. 

D.  9/13  î  A.  3/12;  C.  13;  P.  11  ;  V.  1/5. 

Dans  la  liqueur,  tout  le  poisson  paraît  brun  noirâtre, 
cette  teinte  se  dessinant  par  taclies  sur  les  écailles 
blanches  du  ventre.  La  dorsale  et  l'anale  sont  trans- 
parentes ,  mais  laissent  encore  voir  des  taches  :  fraî- 
ches, elles  sont  tout  autres.  Les  voici  telles  que 
M.  Dussumier  nous  les  indique  :  le  dos  est  vert  olive 
foncé;  les  côtés  sont  verts,  avec  une  tache  bleue 
sur  chaque  écaille;  le  dessus  de  la  tête  est  de  la 
même  teinte  que  le  dos,  mais  les  opercules  sont  plus 
clairs;  le  ventre  prend  une  teinte  bleue,  et  le  des- 
sous de  la  gorge  est  blanc;  une  tache  noire  est  sur 
le  tiers  antérieur  du  corps ,  et  elle  est  surmontée  de 
trois  points  rouges. 

On  ne  voit  plus  qu'une  faible  trace  de  la  tache 
noire  sur  le  poisson  conservé  dans  l'eau-de-vie.  La 
dorsale  et  l'anale  sont  variées  de  vert  clair  et  d'o- 
rangé. La  caudale  a  ses  rayons  verts  et  la  membrane 
rosée;  les  pectorales  et  les  ventrales  sont  blanches  et 
transparentes. 

Nous  ajouterons  à  ces  observations  quel- 
ques autres,  que  nous  prenons  d'un  dessin 
qui  nous  a  été  envoyé  de  l'Isle  -  de  -  France 
par  M.  Théodore  Delisse.  Elles  me  semblent 
indiquer  que  les  individus  offrent  entre  eux 
des  variétés  assez  notables. 


348  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Ce  dessin  représenie  le  poisson  vert  sur  la  moitié 
supérieure  du  corps ,  et  bleuâtre  à  reflets  argentés 
en  dessous.  Il  est  couvert  d'un  réseau  jaunâtre , 
formé  par  la  réunion  des  traits  déliés  qui  bordent 
chaque  écaille.  Ce  réseau  s'évanouit  sur  le  dessus 
du  dos,  où  le  jaune  se  perd  dans  le  vert  foncé 
de  cette  partie,  et  sur  le  ventre,  où  les  traits  de- 
viennent blanchâtres. 

Les  deux  taches  latérales  sont  de  couleur  orangée. 
L'antérieure  est  la  plus  petite,  et  répond  à  la  pointe 
de  la  pectorale.  Le  sous-orbitaire,  les  lèvres  et  le 
dessous  de  la  tête  sont  azurés;  le  dessus  du  crâne, 
le  bord  du  préopercule  et  tout  l'opercule  sont  verts. 
Un  trait  jaune  descend  de  l'angle  de  la  bouche  vers 
la  jonction  de  l'interopercule  avec  le  sous  -  opercule. 
Un  autre  petit  trait,  de  même  couleur,  va  de  l'angle 
du  préopercule  au  bord  de  l'opercule. 

La  pectorale  est  olivâtre ,  pâle  à  sa  base.  Les  ven- 
trales ont  un  peu  plus  de  jaunâtre.  La  dorsale  est 
transparente,  avec  de  nombreuses  vermicellures  jau- 
•  nés;  l'anale,  aussi  pâle,  a  cinq  à  six  taches  jaunes  très- 
peu  colorées  sur  la  hauteur  de  la  membrane,  entre 
chaque  rayon.  Ceux  de  la  caudale  sont  verts  ;  la 
membrane  blanche  a  de  fines  vermicellures  orangées 
ou  rougeâtres. 

L'individu  a  treize  pouces  de  longj  il  a  été 
donné  à  M.  Dussumier  par  les  pécheurs  sous 
le  nom  de  tassard  marron.  Ce  nom  de  tas- 
sard  est  généralement  appliqué  dans  nos  co- 
lonies aux  poissons   à  dents  tranchantes,  et 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  349 

particulièrement  à  nos  cjbiums.  Il  est  assez 
curieux  de  voir  que  les  pêcheurs  ont  déjà  fait 
ce  rapport. 

Le  Cheilion  brun. 
{Cheilio  fuscus ,  Comm.,  Lacép.,  t.  IV,  p.  435.) 

La  description  du  second  clieilion  de  Com- 
merson  me  paraît  encore  différer  de  ces  deux 
espèces 

La  forme  du  corps  est  lout-à-fait  semblable  à  celle 
du  cheilion  doré. 

D.  9/14;  A.  3/11,  etc. 
Commerson  dit  que  la  couleur  n'offre  rien  de  re- 
marquable; qu'elle  est  brune  ou  plombée,  devenant 
plus  pâle  sur  les  côtés  et  blanchissant  sous  le  ventre. 
La  dorsale  est  ferrugineuse,  variée  de  taches  blan- 
ches et  lenticulaires.  Les  taches  de  l'anale  sont  plus 
nombreuses  et  y  deviennent  confluentes.  La  caudale 
est  d'un  brun  verdâtre  ,  et  les  ventrales  sont  blan- 
ches :  les  pectorales  ont  une  teinte  brune  très-claire. 
Commerson  a  observé  ce  poisson  dans  les 
barques  des  pécheurs  de  l'Isle-de-France,  au 
mois   d'Octobre    1769;  il  était  long  de    dix 
pouces  et  demi. 

Le  Cheilion  de  Forskal. 
(Cheilio  Forskaliiy  nob. ;  Lahriis  inermis ,  Forsk.) 

Un  autre  cheilion,  connu  aussi  à  peu  près 
a  la  même  époque  où  Commerson  observait 


350  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

les  siens  à  l'Isle-de-France,  est  celui  dont  Fois- 
kal  a  laisse  une  description,  qui  a  été  publiée 
sous  le  nom  de  lahrus  inermls.  Voici  ce  qu'on 
peut  tirer  de  Foiskal  pour  en  faire  les  caractères 
de  celte  espèce. 

Le  corps,  très-alongé,  est  vert,  traversé  par  une 
bandelette  de  points  noirs,  le  long  de  la  ligne  laté- 
rale. Au-dessus,  la  teinte  devient  plus  brune;  en 
dessous,  elle  est  plus  pâle  et  tachetée  de  blanc.  Sur 
la  tête  et  les  joues  on  voit  des  points  violets.  Toutes 
les  nageoires  sont  verdâtres. 

Je  viens  de  retrouver  ces  traces  de  couleur, 
surtout  les  taches  du  ventre  et  les  lignes  vio- 
lettes des  joues,  sur  un  poisson  que  M.  Le- 
febvre  nous  a  rapporté  de  Suez. 

L'espèce  se  distingue  aussi  de  celles  de  l'Isle-de- 
France  par  ses  dents  plus  égales  et  par  ses  premiers 
rayons   de  la  dorsale,  qui   sont  plus  courts,  plus 
grêles,  et  paraissent  un  peu  moins  flexibles. 
D.  9/13;  A.  3/12,  etc. 

L'individu  a  huit  pouces  de  long;  mais 
Forskal  en  a  vu  qui  avaient  un  pied  de  lon- 
gueur et  deux  pouces  de  hauteur. 

Les  pêcheurs  donnent  à  ce  poisson  le  nom 
de  ghassek.  Bonnaterre  et  Lacépède  l'ont  fait 
paraître  dans  leur  genre  labre,  en  empruntant 
au  langage  des  Arabes  la  dénomination  de 
l'espèce  quils  nommèrent  labiée  hassek. 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  351 

M.  Ruppel  a  aussi  vu  ce  poisson  a  DjeJda 
et  à  Massawah;  mais  il  ne  Ta  pas  reconnu 
dans  la  description  de  Forskal,  bien  que 
celle  publiée  par  le  célèbre  voyageur  de 
Francfort  soit  en  tous  points  conforme  à  celle 
du  naturaliste  danois.  M.  Ruppel'  a  nommé 
son  poisson  lahrus  fusiformis ,  épithète  aussi 
peu  caractéristique  dans  ce  genre,  que  celle 
de  Forskal;  aussi  nai-je  pas  cru  devoir  con- 
server l'une  ou  l'autre. 

Le  Cheilion  demi-doré. 

{Cheilio  hemichrjsos ,  nob. ;  Cheilio  auratus ,  Quoy, 
Uranie,  p.  274,  pi.  64,%.  2.) 

MM.  Quoy  et  Gaimard  ont  rapporté,  comme 
nous  Tavons  dit  tout  à  l'heure ,  un  cheilion  des 
îles  Sandwich,  qu'ils  ont  confondu  avec  le 
cheilion  doré  de  Commerson  et  de  Lacépède. 

Il  s'en  dislingue  par  un  museau  plus  aigu,  un  œil 
plus  grand ,  des  rayons  dorsaux  plus  fins  et  très- 
flexibles.  La  bouche  est  moins  fendue,  et  les  dents 
sonL  plus  égales  et  plus  fines.  Il  paraît  dans  la  li- 
queur être  d'un  brun  rougealre  uniforme,  avec  une 
série  de  points  noirs  le  long  de  la  ligne  latérale  depuis 
l'opercule  jusqu'à  la  caudale.  Le  bas  de  l'opercule  et 
la  poitrine  sont  argentés. 

î.  Rappel^  ^'cue  JVirhcllhiere  zu  der  Faun.  ahj-ss. ,  p-  7  y 
pi.    1,  %  4. 


552  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Suivant  M.  Quoy,  le  poisson  frais  est  brun  sur  la 
moitié  supérieure  du  corps,  et  jaune  doré  sur  l'in- 
férieure. Les  pectorales,  les  ventrales,  l'anale  et  la 
caudale,  brillent  de  cette  belle  couleur;  mais  la  dor- 
sale est  d'un  brun  très-pâle. 

Les  nombres  des  rayons  sont  voisins  de  ceux  des 

autres  espèces. 

D.  9/14  ;  A.  3/12. 

Nous  eu  avons  de  sept  pouces  de  long.  Le 
nom  des  péclieuis  de  Sandwich,  est  selon 
M.  Quoy,  irou. 

J'ai  dit  comment  ce  poisson  n'est  pas  le  chei- 
lion  doré  de  Lacépède  et  de  Commerson  ; 
mais  je  dois  faire  remarquer  que  sur  la  plan- 
che citée  le  dessinateur  a  couvert  d'écaillés 
l'opercule,  comme  celui  de  nos  labres,  tandis 
qu'il  n'y  en  a  que  le  long  du  bord  par  lequel 
il  touche  au  sous-opercule. 

Je  retrouve  aussi  cette  espèce  dans  un  bel 
individu  long  d'un  pied,  que  MM.  Eydoux 
et  Souleget  viennent  de  rapporter  du  même 
archipel;  il  est  jaune  orangé,  avec  une  suite 
de  gros  points  noirs  bien  marqués  le  long  de 
la  ligne  latérale. 

Le  Cheilion  vert. 
{Cheilio  viridis ,  nob.) 

Les  mers  de  l'archipel  de  Vanikoro  ont 
fourni  aux  mêmes  naturalistes  une  nouvelle 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  555 

espèce  de  cheilion,  facile  à  reconnaître  à  la 

forme  des  dents  : 

celles ,  qui  dans  les  autres  espèces  sont  saillantes  et  en 
crochets  à  l'extrémité  du  museau,  sont  dans  celle-ci 
à  peine  visibles  à  la  mâchoire  supérieure,  quoiqu'elles 
soient  encore  distinctes  des  autres  dents  à  l'inférieure. 
Les  dents  latérales  sont  plus  égales,  proportionnelle- 
ment plus  grosses  à  la  mâchoire  supérieure,  plus 
petites  et  plus  égales  à  l'inférieure.  Il  y  a  peu  d'écaillés 
le  long  de  l'opercule.  La  bandelette  latérale  est  assez 
foncée,  surtout  vers  la  queue.  La  ligne  latérale  est 
rameuse. 

D.  9/13;  A.  3/12,  etc. 

M.  Quoy  nous  apprend ,  par  le  dessin  fait  sur  le  pois- 
son sortant  de  l'eau,  que  le  dos  est  vert-pré  brillant, 
le  ventre  vert  jaunâtre  tacheté  de  bleu,  le  dessus  de 
la  tête  de  la  couleur  du  dos;  les  joues  ont  des  teintes 
rougeâtres,  des  rayures  bleues,  dont  une  est  tracée 
de  l'angle  du  museau  au  milieu  du  bord  du  préoper- 
cule. La  dorsale  est  grise,  avec  deux  rangées  de  taches 
brunes;  l'anale  est  plus  jaunâtre;  la  caudale  est  ver- 
dâtre  :  les  nageoires  paires  sont  transparentes. 
Ce  poisson  n'est  pas  rare  à  Vanikoro.  Les 
voyageurs  en  ont  vu  d'un  pied  et  demi  de 
long.  Les  indigènes  l'ont  nommé  fénéou. 

Le  Cheilion  petite  bouche. 
{Cheilio  micros toma ,  nob.) 

Je  trouve  encore  parmi  les  poissons  du  Mu- 
séum un  petit  cheilion  dont  j'ignore  la  patrie: 
i3.  23 


554  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

il  vient  probablement  de  l'Inde,  car  il  faisait 
partie  de  la  collection  du  stadhouder  de 
Hollande. 

La  forme  générale  est  celle  de  nos  cheilions;  mais 
la  bouche  est  sensiblement  moins  fendue;  roell  est 
plus  grand;  la  couleur  est  uniforme  et  sans  aucune 
tache,  même  le  long  de  la  Hgne  latérale;  la  caudale 
et  les  ventrales  sont  d'un  orangé  assez  vif  sur  les 
rayons. 

Ce  petit  poisson  n'a  pas  tout-à-fait  quatre 
pouces. 

Le  Cheilion  rayé. 

{Cheilio  lineatuSj  nob.) 

Ce  n'est  qu'avec  doute  que  je  place  ici  ce 
joli  poisson,  dont  nous  devons  la  connaissance 
à  un  officier  de  l'expédition  de  l'Astrolabe, 
M.  Gressien,  qui  en  a  donne  le  dessin  à 
M.  Quoy.  Ce  naturaliste  l'a  publié  dans  la 
Zoologie  de  l'Astrolabe,  tome  III,  page  719, 
et  planche  19,  figure  2,  de  l'atlas  des  poissons; 
mais  sous  le  nom  impropre  de  malacanthe 
rayé. 

Il  a  le  dos  bleu  ;  le  ventre  jaune  doré  ,  rayé 
longitudinalement  dé  tà-aits  roussâtres.  La  tête  est 
bleue,  passant  au  verdâtre  sur  le  museau,  et  rayée 
comme  le  corps.  La  base  de  la  dorsale  est  jaune, 
puis  elle  a  une  raie  bleue  tachetée  de  gros  points 
noirs  carrés;  celte  bandelette  est  surmontée  d'une 


CHAP.    IX.    CHEILIONS.  355 

série  de  taches  rouge  de  brique,  carrées;  et  enfin  sur 
un  fond  jaune  passant  au  brun  sur  le  devant,  et  à 
l'orangé  sur  l'arrière ,  on  voit  six  à  sept  lignes  brunes, 
longitudinales  et  étroites.  Le  premier  rayon  de  la 
dorsale  est  prolongé  en  filet.  L'anale  est  courte, 
jaune,  avec  trois  traits  rouges  ou  orangés,  parallèles  à 
la  base  de  la  nageoire.  M.  Quoy  les  dit  bleus,  mais  la 
planche  les  représente  comme  je  l'indique  ici.  La 
caudale  est  lancéolée  et  de  couleur  bleue,  bordée  de 
jaune  orangé.  Les  pectorales  et  les  ventrales  sont 
jaunes. 

Il  est  évident  que  ce  poisson,  originaire  du 
port  du  roi  George,  est  un  des  plus  élégam- 
ment colorés  qu'on  puisse  voir,  et  il  me  paraît 
encore  inconnu  des  naturalistes;  mais  il  est 
facile  de  juger  que  le  dessinateur  n'était  pas 
zoologiste ,  et  que  les  caractères  de  l'espèce  ont 
été  mal  rendus.  Il  est  possible  que  ce  soit  une 
girelle  ordinaire  :  ce  ne  peut  toutefois  être  un 
malacanthe,  comme  l'a  cru  M.  Quoy. 


DU   MALAPTÈRE, 

et  en  particulier  du  Malaptère  réticulé. 

{Malapterus  reticulatus ,  nob.) 

Je  place  à  la  suite  des  malacanthes  et  des 
cheilions,  un  genre  qui  tient  de  ces  deux  par 
des  caractères  communs,  qui  l'empêchent  de 


55G  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

rentrer  soit  dans  l'un  soit  dans  l'autre.  Je  n'en 
ai  vu  qu'un  seul  exemplaire  sans  ses  viscères, 
et  sur  lequel  je  n'ai  eu  aucuns  renseignemens. 

Le  corps  est  alongé,  comprimé;  sa  hauteur,  qui 
est  égale  à  la  longueur  de  la  tête  sans  le  lobule 
membraneux  de  l'opercule,  est  du  cinquième  de  la 
longueur  totale.  La  bouche  est  petite ,  à  dents  mi- 
toyennes plus  longues;  les  autres,  coniques,  sur  un 
seul  rang,  sans  élargissement  des  intermaxillaires. 
Le  préopercule  est  couvert  d'écaillés  ;  l'opercule  en 
a  sur  son  bord  comme  celui  des  cheilions  :  les  autres 
pièces  n'en  ont  pas. 

La  dorsale  a  tous  ses  rayons  mous  et  flexibles  : 
il  y  a  des  appendices  membraneux  à  la  pointe  de 
chaque  rayon.  Le  sous-orbitaire  est  étroit;  le  bord 
membraneux  de  l'opercule  est  très -prolongé,  jus- 
qu'au-delà de  l'aisselle  de  la  pectorale;  la  dorsale 
commence  au-delà  de  l'insertion  de  cette  nageoire; 
le  tronçon  de  queue,  derrière  elle,  est  court;  la 
caudale  est  coupée  carrément  avec  ses  angles  arron- 
dis; les  ventrales  sont  petites  :  leur  épine  est  faible. 
D.  18/14  ;  A.  3/18;  C.  16;  P.  12;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  lisses  et  molles  :  il  y  en  a  trente- 
sept  rangées  entre  l'ouïe  et  la  nageoire  de  la  queue  ; 
il  y  en  a  trois  au-dessus  et  onze  au-dessous  de  la 
ligne  latérale ,  qui  n'est  pas  interrompue. 

La  couleur  est  brune  sur  tout  le  corps ,  avec  un 
réseau  noir,  dont  la  maille  entoure  chaque  écaille. 
Les  nageoires  sont  verdâtres,  bordées  de  noir. 

Ce  poisson  n'a  pas  six  pouces  de  long.  Il 


CHAP.    IX.    MALAPTÈRE.  357 

vient  des  iles  Juan-Fernandez,  et  il  a   été 
donné  au  Cabinet  du  Roi  par  M.  Gay. 

On  voit  qu'il  a  les  rayons  flexibles  des  chei- 
lions,  sans  en  avoir  les  dents,  qui  ressemblent 
à  celles  des  labres.  Il  a,  comme  eux  et  les 
malacanthes ,  les  opercules  e'cailleux,  mais  il 
manque  de  l'épine  operculaire  de  ceux-ci.  La 
mollesse  de  ses  rayons  et  les  écailles  de  l'oper- 
cule empêchent  d'en  faire  un  tautogue.  Enfin, 
il  ne  peut  être  placé  parmi  les  girelles. 


558  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

CHAPITRE  X. 
Des  Girelles. 

Nous  voici  arrives  à  un  des  genres  les  plus 
nombreux  en  espèces  de  la  famille  des  labres, 
et  qui  contient  les  poissons  parés  des  cou- 
leurs les  plus  variées  et  les  plus  brillantes,  je 
crois,  entre  tous  les  liabitans  des  eaux.  Celles 
de  nos  mers  ne  le  cèdent  nullement  par 
leur  éclat  aux  espèces  des  régions  inter- 
tropicales. Toutefois  ces  animaux  sont  carac- 
téristiques des  pays  chauds  :  c'est  tout  au  plus 
si  une  seule  s'avance  vers  le  Nord,  jusque 
sur  les  côtes  d'Angleterre  ou  de  France;  déjà 
dans  la  Méditerranée  nous  en  comptons  trois 
ou  quatre,  et  nous  les  voyons  même  sortir  de 
ce  bassin  de  l'Europe  méridionale,  et  s'avancer 
dans  l'Atlantique  jusqu'aux  Canaries,  où  elles 
vivent  avec  d'autres  qui  commencent  cette 
nombreuse  série  de  girelles  des  mers  chaudes 
du  globe. 

Je  réunis  avec  M.  Cuvier,  sous  le  nom  de 
^irelle,  tous  les  labroïdes  à  ligne  latérale  non 
interrompue  ;  à  dorsale  munie  de  rayons  épi- 
neux roides  et  piquans;  dont  la  tête  entière, 
c'est-à-dire,  le  sous-orbitaire ,  le  préopercule 
et  les  autres  pièces  operculaires ,  le  dessus  de 


CHAP.    X.    GIRELLES.  359 

la  le  te  et  les  mâchoires,  sont  dépourvus  d'é- 
cailles.  Leurs  dents  sont  coniques ,  plus  fortes 
en  avant;  et  derrière  cette  rangée  externe  il 
y  en  a  de  tuberculeuses  ou  de  grenues  en 
nombre  variable,  qui  dans  quelques  espèces 
se  succèdent  avec  l'âge ,  augmentent  la  largeur 
de  la  surface  émaillée  des  deux  mâchoires, 
et  nous  conduisent  lentement  à  ce  que  nous 
observerons  dans  les  scares ,  et  dont  nous  avons 
déjà  eu  un  premier  vestige  dans  les  cheilions. 

Les  pharyngiens  de  toutes  les  girelles  sont 
conformés  comme  ceux  des  labres  proprement 
dits. 

Certaines  espèces  ont  dans  l'angle  de  la 
bouche  une  dent  dirigée  en  avant;  mais  ce 
caractère  spécifique  est  tout  aussi  variable 
dans  ce  genre  que  dans  tous  ceux  des  autres 
labroïdes  dont  nous  avons  déjà  parlé.  Cette 
observation  nous  a  conduits  à  supprimer  le 
genre  halichores,  que  M.  Ruppel  a  récem- 
ment publié  dans  ses  Nouvelles  recherches  sur 
les  animaux  vertébrés  de  la  Faune  africaine, 
et  que  nous  avons  déjà  signalé,  dans  notre 
article  du  tautoga  sexfasciata,  qu'il  confon- 
dait avec  ces  girelles  à  défenses. 

Ceux  de  nos  lecteurs  habitués  aux  recher- 
ches ichthyologiques,  savent  déjà  que  M.  Cu- 
vier  a  démontré,  dès  sa  première  édition  du 


300  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Règne  animal,  que  le  genre  holo^jninose , 
établi  par  Lacépède,  doit  rentrer  dans  celui 
dont  nous  nous  occupons;  car  il  n'est  qu'un 
double  emploi  du  labre  cerclé,  également 
décrit  sur  les  dessins  ou  les  manuscrits  de 
Commerson,  lequel  poisson  est  une  de  nos 
girelles.  Il  faut  aussi  y  réunir,  comme  l'a  déjà 
fait  M.  Cuvier,  le  genre  coris  de  Lacépède, 
fondé  de  même  sur  les  matériaux  de  Com- 
merson, quoique  la  crête  élevée  de  ce  poisson 
lui  donne  un  aspect  un  peu  différent  des  au- 
tres girelles ,  et  qu'il  semble  nous  conduire 
vers  les  xyriclithys. 

Ces  poissons  sont  littoraux,  vivent  parmi  les 
roches  madréporiques,  où  ils  trouvent  en  abon- 
dance des  mollusques,  des  oursins  et  autres 
animaux  à  test  dur,  qu'ils  brisent  facilement 
avec  les  dents  fortes  et  coniques,  soit  des 
mâchoires,  soit  des  pharyngiens. 

Le  nom  de  julis,  sous  lequel  M.  Cuvier 
décrit  ce  genre ,  est  l'épithète  d'un  des  labres 
de  Linné,  qui  l'avait  tiré  d'Artedi  pour  l'ap- 
plique!' à  l'espèce  du  Systema  naturœ,  qui 
comprenait  alors  les  différentes  variétés  de 
nos  mers.  Il  y  a  peu  de  probabilité ,  pour  ne 
pas  dire  davantage,  que  le  poisson  désigné 
chez  les  Grecs  sous  le  nom  de  iovKis,  fût  un 
de  nos  labres.  Du  moins  rien  de  ce  que  les 


CHAP.    X.    GIRELLES.  36i 

auteurs  en  disent  ne  justifie  cette  conjecture. 
On  trouve  dans  Aristote  (I.  IX,  c.  2)  une 
seule  fois  le  nom  de  iovKièsç,  cite  comme  un 
des  poissons  qui  vont  en  troupe  avec  les  thons 
et  les  autres  saxatiles.  Athënëe  rapporte  (1.  VII, 
c.  i5,  p.  3o4)  que  Dorion  recommande  dans 
son  Traité  des  poissons,  de  faire  bouillir  les 
îovKi^sç  dans  de  la  saumure,  et  il  lui  donne, 
selon  Numenius,  l'épithète  de  vorace. 

Il  n'y  a  dans  ces  traits,  ni  dans  ce  qu'en 
rapportent  les  autres  auteurs,  rien  qui  puisse 
faire  connaître  ce  que  les  anciens  entendaient 
sous  ce  nom,  ainsi  que  je  l'ai  déjà  remarqué 
pour  les  labres. 

La    GiRELLE    COMMUNE. 

(Jiiiis  'Viilgaris,  nob.) 

Il  paraîtrait  que  du  temps  de  Rondelet  la 
girelle  était  plus  rare  sur  les  côtes  de  Pro- 
vence que  de  nos  jours,  car  il  dit  qu'elle  y  est 
à  peine  connue  j  aussi  la  figure  que  nous  trou- 
vons dans  son  ouvrage  (1.  VI,  c.  7,  p.  180) 
est-elle  mauvaise,  mal  caractérisée  et  difficile 
à  appliquer  à  l'une  ou  l'autre  de  nos  variétés. 
Il  n'en  est  pas  de  même  de  celle  de  Salviani*  : 

1.  Salviani;,  De  aquat.,  p.  219,  fol.  85. 


362  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

elle  représente  certainement  notre  première 
espèce,  bien  caractérisée  par  sa  tache  noire. 
C'est  encore  elle  que  donne  Aldrovande  (l.  L^"^, 
chap.  7,  p.  39),  quoique  sa  figure  soit  plus 
grossière   que  celle  de  l'auteur  romain. 

Willughby*  l'a  vue  aussi  à  Gênes,  et  c'est 
d'après  ces  renseignemens  que  ce  poisson , 
originaire  de  la  Méditerranée,  a  pris  place 
dans  Artedi;  cependant  Linné  l'a  fait  venir 
d'Amérique ,  dans  le  prodrome  du  tome  second 
du  prince  Adolphe ,  et  je  crois  qu'il  a  confondu 
quelque  espèce  étrangère,  peut-être  notre X 
psittaculus,  avec  lui;  car  il  parle  d'une  ligne 
rouge  sur  la  dorsale ,  que  je  ne  trouve  pas  dans 
notre  poisson  d'Europe. 

Bloch  (pi.  287,  fig.  1)  en  a  donné  une  figure 
d'une  enluminure  peu  exacte,  et  qui  a  été  faite 
d'après  une  de  ces  nombreuses  variétés  que 
nous  conservons  dans  l'eau-de-vie. 

La  girelle  est  un  poisson  très-commun  dans 
la  Méditerranée ,  et  dont  on  trouve  un  grand 
nombre  de  variétés,  que  quelques  zoologistes 
ont  essayé  de  séparer  en  espèces.  Elles  font 
l'ornement  des  marchés  des  ports  de  cette 
mer,  car  leurs  couleurs,  très  -  variées ,  ne  le 
cèdent  en  rien,  par  leur  éclat  et  leur  beauté, 

1.  Willughbj,  De  fisc. ,  p.  524> 


CHAP.    X.    GIRELLES.  363 

aux  poissons  les  plus  brillants  que  les  mers  des 
tropiques  nous  envoient. 

Nous  allons  commencer  par  décrire  la  va- 
riété à  tache  noire  et  à  bandelette  orangée ,  à 
bords  dentelés,  parce  que  nous  croyons  qu'elle 
a  été  le  type  du  lahrus  julis  d'Artedi. 

Le  corps  de  la  girelle  est  alongé;  sa  plus  grande 
hauteur  est  vers  la  sixième  épine  de  la  dorsale,  et 
elle  n'est  que  du  cinquième  de  la  longueur  totale. 
La  ligne  du  dos  et  celle  du  ventre  convergent  l'une 
vers  l'autre,  de  sorte  que  la  hauteur  de  la  queue  a 
les  deux  cinquièmes  de  celle  du  tronc,  dont  l'é- 
paisseur est  comprise  deux  fois  et  demie  dans  la 
hauteur.  Les  lignes  dorsale  et  ventrale  du  profil 
se  courbent  et  se  rapprochent  assez  promptement 
vers  le  bout  du  museau,  qui  est  cependant  encore 
très-pointu. 

La  tète  n'est  pas  contenue  tout-à-fait  quatre  fois 
dans  la  longueur  totale.  L'œil  est  de  grandeur  mé- 
diocre, arrondi  et  éloigné  du  bout  du  museau  du 
tiers  de  la  longueur  de  la  tête.  L'intervalle  entre  les 
yeux  est  bombé,  arrondi  et  égal  au  diamètre  de  l'œil. 
Le  sous-orbitaire  est  peu  visible  sous  la  peau  épaisse 
qui  le  recouvre.  Le  bord  du  préopercule  descend 
verticalement;  l'angle  qu'il  fait  avec  le  bord  horizontal 
est  arrondi.  Le  bord  membraneux  de  l'opercule  se 
prolonge  en  une  languette  libre ,  charnue  et  arrondie , 
semblable  à  celle  que  nous  avons  déjà  vue  sur  les 
pomotis.  L'interopercule  est  mince  et  large,  et  touche 
celui  du  côté  opposé  sous  l'isthme  de  la  gorge,  de 


>64  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

façon  que  la  membrane  branchiostège  est  entièrement 
invisible,  si  on  n'écarte  pas  les  ouïes, 

La  bouche  est  peu  fendue  et  très-peu  protractile. 
Le  maxillaire  est  petit  et  tout- à -fait  caché  sous 
le  bord  du  sous-orbitaire.  L'intermaxillaire  est  mince 
et  n'a  que  des  branches  montantes  médiocres.  Les 
dents  sont  simples  et  coniques  sur  le  rang  externe  5 
les  quatre  antérieures  sont  alongées  et  courbées ,  et 
comme  de  vraies  canines;  les  autres,  plus  courtes, 
ont  l'air  d'entailler  le  bord  de  l'os,  comme  le  feraient 
les  dents  d'une  scie.  A  l'extrémité  de  la  mâchoire,  dans 
l'angle  de  la  bouche,  il  y  a  une  dent  alongée,  comme 
une  petite  défense,  semblable  à  ce  que  nous  avons 
vu  dans  plusieurs  de  nos  labres  étrangers.  Sauf  cette 
dernière  dent,  celles  de  la  mâchoire  inférieure  sont 
semblables  à  celles  de  la  supérieure.  Les  deux  mâ- 
choires portent  derrière  cette  rangée  quelques  dents 
rondes  et  grenues.  Les  ouïes  sont  peu  fendues,  parce 
que  la  membrane  branchiostège  est  réunie  à  celle 
du  côté  opposé,  sous  toute  l'étendue  de  l'isthme 
de  la  gorge.  Les  rayons  branchiostèges  sont  au  nom- 
bre de  six.  Les  peignes  des  branchies  sont  médiocres, 
et  les  râtelures  antérieures  fort  courtes.  Des  groupes 
de  villosités  épaisses  et  nombreuses  garnissent  en 
haut  et  en  bas  l'entrée  du  pharynx.  Au  milieu  de 
ces  villosités  on  voit,  comme  dans  les  labres  pro- 
prement dits,  les  deux  plaques  supérieures  des  dents 
pharyngiennes  obtuses,  et  la  plaque  triangulaire  in- 
férieure. Celle-ci  porte  en  arrière  une  dent  globu- 
leuse, beaucoup  plus  grosse  que  les  autres. 

La  dorsale  commence  à  la  fin  du  premier  quarl 


CHAP.    X.    GIRELLES.  365 

de  la  longueur  totale,  et  son  étendue  sur  le  dos 
égale  la  moitié  de  celle  du  corps.  Ses  rayons  sont 
grêles  et  flexibles  ;  le  premier  rayon  épineux  est  plus 
haut  que  le  second ,  celui-ci  l'est  plus  que  le  troisième , 
lequel  dépasse  un  peu  les  six  qui  suivent.  A  la  suite 
de  ces  neuf  rayons  épineux  on  en  compte  douze 
branchus. 

L'anale  commence  sous  le  premier  rayon  mou 
de  la  dorsale;  ses  trois  épines  sont  faibles.  Les  douze 
rayons  mous  composent  une  nageoire  qui  s'étend 
sous  la  queue,  ainsi  que  la  dorsale  le  fait  en  dessus. 
La  caudale  est  coupée  carrément  ;  les  pectorales  et 
les  ventrales  sont  médiocres. 

B.  6;  D.  9/12;  A.  3/12;  C.  14;  P.  13;  V.  1/5. 
Les  écailles  sont  petites  :  on  en  compte  près  de 
quatre- vingts  entre  l'ouie  et  la  caudale;  elles  sont  très- 
minces  et  paraissent  lisses.  A  la  loupe  on  aperçoit 
de  fines  granulations  et  quelquefois  des  stries  diver- 
gentes et  longitudinales.  Vue  isolément,  une  d'elles 
paraît  oblongue;sa  portion  radicale  est  plus  que  deux 
fois  plus  grande  que  la  partie  nue.  L'éventail  se  com- 
pose de  quinze  à  seize  stries ,  qui  rayonnent  d'un  point 
qui  n'est  pas  placé  au  milieu  de  l'écaillé.  La  ligne  laté- 
rale part  de  fangle  supérieur  du  surscapulaire,  re- 
monte jusque  sous  le  troisième  rayon  de  la  dorsale, 
et,  après  avoir  fait  une  légère  courbure,  elle  suit 
une  ligne  droite,  parallèle  au  dos,  tracée  par  le 
septième  de  la  hauteur  du  corps.  Arrivée  sous  le 
dixième  rayon  mou  de  la  nageoire,  elle  s'infléchit 
brusquement,  descend,  sans  s'interrompre,  jusque 
sur  le  milieu  de  la  hauteur  de  la  queue,  qu'elle  tra- 


366  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

verse  ensuite  en  ligne  droite,  et  sur  laquUe  elle  s'ef- 
face un  peu  avant  de  toucher  à  la  caudale.  Elle  se 
compose  d'une  série  de  petits  tubes  relevés  en  saillie 
sur  les  écailles  que  cette  ligne  parcourt.  L'extrémité 
de  chaque  tube  est  ouverte,  et  montre  ainsi  l'orifice 
d'un  petit  pore. 

Nous  avons  des  girelles  très -fraîches,  pêchées  à 
Toulon,  et  qui  paraissent  encore  avoir  très-bien  con- 
servé leurs  couleurs.  Le  sommet  de  la  tête  et  le  dos 
est  d'un  beau  brun  mêlé  de  bleu  et  de  rougeâtre;  au- 
dessous  de  cette  teinte  brille  une  large  bandelette 
à  bords  dentelés  d'un  beau  rouge  orangé  :  elle  naît 
sur  l'opercule  et  s'évanouit  sur  la  queue.  Au-dessous 
de  la  raie,  et  à  partir  de  l'épaule,  jusque  sous  les 
premiers  rayons  mous  de  la  dorsale,  le  milieu  des 
côtés  est  coloré  par  une  bande  bleu  foncé,  presque 
noire,  qui  forme  une  grande  tache  oblongue  sur  les 
côtés  du  corps  du  poisson.  Cette  tache  se  prolonge, 
jusqu'auprès  de  la  queue,  en  une  bande  colorée  de 
bleu  d'outremer,  plus  ou  moins  rembrunie  par  le 
brun  doré  qui  s'y  trouve  mêlé.  Le  dessous  du  corps 
est  blanc  d'argent.  Une  raie  bleu  d'outremer  le  plus 
vif  naît  de  l'angle  de  la  bouche,  traverse  la  joue, 
se  marque  à  l'angle  de  la  pectorale,  et  se  prolonge, 
en  diminuant  de  ton,  le  long  du  bord  inférieur  de 
la  tache  bleu  foncé  des  côtés. 

L'angle  supérieur  du  bord  membraneux  de  l'oper- 
cule porte  une  petite  tache  bleu  foncé.  Le  haut  des 
joues  est  mordoré  ;  les  lèvres  sont  mélangées  de 
jaune,  de  rouge,  et  bordées  de  violet. 

La  dorsale  est  olivâtre  mêlé  de  rouge  et  lisérée  de 


CHAP.    X.    GIRELLES.  567 

bleu  clair.  Une  grande  tache  bleu  foncé  colore  le 
milieu  de  la  membrane  qui  réunit  les  trois  premiers 
rayons.  Une  bandelette  rouge  plus  ou  moins  orangé, 
suit  la  base  de  la  nageoire  un  peu  au-dessous  du  dos. 
L'anale  a  le  pied  de  ses  rayons  coloré  en  violet.  Au- 
dessus  de  cette  bande  on  voit  une  raie  orangée,  teinte 
d'olivâtre  j  puis  il  y  a  une  bande  lilas,  qui  est  suivie 
d'une  autre,  plus  large,  d'un  bel  orangé,  laquelle  est 
bordée  de  violet.  La  caudale  est  olivâtre. 

Les  pectorales  et  les  ventrales  ont  quelques  teintes 
rougeâtres. 

Ces  couleurs  diffèrent  peu  de  celles  qui  sont 
indiquées  par  les  observateurs  qui  ont  vu  des 
girelles  sortant  de  l'eau. 

Suivant  M.  Risso  et  M.  Laurillard, 

le  dos  est  vert  mêlé  de  bleuâtre;  la  bande  latérale 
est  rouge  orangé,  la  tache  des  côtés  bleu  noirâtre; 
le  ventre  est  argenté,  glacé  d'outremer;  la  tache  de 
la  dorsale  est  bleue ,  bordée  de  rouge  de  minium 
très-vif;  le  reste  de  la  nageoire  a  la  moitié  inférieure 
verdâtre,  la  supérieure  rougeâtre,  bordée  de  bleu 
pâle.  L'anale  offre  quatre  bandes  ainsi  colorées  :  celle 
qui  est  près  du  corps,  est  orangé  pâle  ;  celle  qui  lui 
est  inférieure,  rose  violet;  la  troisième,  qui  est  la 
plus  large,  est  orange;  et  la  quatrième  forme  un  li- 
séré bleuâtre  à  la  nageoire.  La  caudale  a  ses  deux 
bords  bleuâtres.  Au-dessous  et  au-dessus  de  ces  lignes 
en  sont  deux  autres,  rousses  pâles  :  le  milieu  seul 
de  la  nageoire  est  verdâtre. 

M.  Risso  mentionne  une  variété  que  les 


368  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

chaleurs  de  1  été  font  paraître  sur  les  côtes  de 
Nice, 

et  qui  a  le  dos  vert  foncé,  l'abdomen  argenté,  et 
les  nageoires  rouges. 

Nous  en  avons  une  autre  variété  parmi  celles 
que  M.  Bibron  a  rapportées  de  Messine. 

La  bandelette  dentelée  est  du  plus  beau  jaune 
doré;  le  ventre  est  rougeâtre,  à  reflets  jaunes  ou 
dorés,  et  les  nageoires  sont  rouges. 

Cette  variété  s'est  reproduite  avec  des  nuan- 
ces plus  pâles  sur  celles  qui  nous  sont  venues 
de  Négrepont,  et  que  nous  devons  à  M.  Virlet. 

Toutes  ces  variétés  ont  constamment  la 
tache  latérale  noire  alongée.  Cette  tache  s'ef- 
face chez  quelques  individus,  de  manière  à 
établir  des  passages  insensibles  entre  ce  que 
M.  Risso  a  établi  comme  la  girelle  ordinaire 
et  les  individus  qu'il  a  voulu  grouper  en  une 
espèce  particulière,  dont  nous  donnerons  la 
description. 

Outre  ces  individus,  qui  nous  sont  venus 
de  Toulon  par  M.  le  duc  de  Rivoli  et  par 
M.  Kiener,  nous  en  avons  eu  de  Nice,  par 
M.  Laurillard;  de  Naples,  par  M.  Savignyj  de 
Messine,  par  M.  Bibron;  d'Iviça,  par  M.  de 
Laroche;  de  Malaga,  par  M.  Bâillon;  de  Na- 
poli  de  Romanie,  par  M.   Reynaud;  et  des 


CHAP.    X.    GIRELLES.  o69 

cîifteiens  points  de  la  Môrée,  par  MM.  Bory 
de  Saint-Vincent  et  Virlet. 

Son  anatomie  diffère  peu  de  celle  de  nos 
labres. 

Elle  a  le  foie  peut,  le  canal  intestinal  médiocre, 
une  vessie  aérienne  assez  grande ,  le  péritoine  mince, 
peu  brillant. 

Les  vertèbres  abdominales  sont  au  nombre  de 
douze,  et  les  caudales  de  dix-neuf. 

Ses  noms  vulgaires  sur  les  côtes  de  la  Mé- 
diterranée sont  donzellina  ou  zi^urellay  à  Ve- 
nise donzella^  à  Marseille  dovella,  à  Livourne 
zigorella,  à  Candie  afdella^  à  Naples  et  à 
Borne  manchina  di  re,  dans  File  de  Rhodes 
zillo.  Selon  M.  Virlet,  les  Grecs  modernes  lui 
donneraient  le  nom  de  /gAo,  ce  qui  semble- 
rait justifier  le  rapprochement  que  les  auteurs 
de  la  renaissance  ont  fait  de  la  dénomination 
des  anciens  à  ce  poisson.  Selon  M.  Risso,  elles 
se  nomment  à  Nice  ^irella.  Leur  chair  est 
blanche,  de  bon  goût  et  facile  à  digérer.  Ces 
beaux  poissons  fréquentent  les  bords  couverts 
d'algues  marines  sur  les  rochers. 

Si  l'on  s'en  rapportait  à  MM.  Donovan  et 
Yarell,  il  paraîtrait  que  la  girellese  trouve  sur 
nos  côtes;  mais  l'on  va  voir  que  leur  figure 
représente  une  espèce  différente. 

Une  autre  variété  nous  a  été  apportée  de 
i3.  24 


570  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Naples  par  M.  Savigny.  Je  ne  lui  trouve  d'au- 
tres difTérences  de  formes  que  dans  la  briè- 
veté des  premiers  rayons  de  la  dorsale  :  ils  ne 
dépassent  pas  les  autres.  Quant  aux  couleurs, 
elles  sont  peu  autrement  distribuées. 

La  moitié  supérieure  du  corps  est  brun  foncé;  ce 
brun  se  termine  par  une  ligne  droite,  tirée  par  le 
bord  inférieur  de  l'orbite  jusque  sous  le  milieu  de 
la  queue;  le  reste  du  corps  est  blanc  argenté.  Une 
bandelette  peu  distincte  et  orangée  sépare  le  brim 
du  dos  en  deux  parties  égales.  Il  n'y  a  plus  de  trace 
de  trait  bleu  d'outremer  et  de  tache  bleu  noirâtre 
sur  les  côtés. 

La  dorsale  a  du  noirâtre  sur  sa  partie  antérieure; 
/  elle  est  grise  dans  sa  plus  grande  partie,  bordée  de 
jaune  et  lisérée  de  violet.  L'anale  paraît  avoir  été 
rougeâtre  et  de  même  lisérée  de  violet. 

Nous  en  avons  un  individu  qui  est  long  de 
sept  pouces. 

Cette  variété  a  été  aussi  observée  à  Nice 
par  M.  Laurillard.  L'individu  qu'il  nous  a  pro- 
curé est  entièrement  décoloré. 

Je  crois  qu'il  faut  encore  rapprocher  de  cette 
dernière  variété  un  poisson  rapporté  de  Lan- 
cerote  par  MM.  Webb  et  Berthellot. 

Il  a  les  couleurs  distribuées  de  même;  mais  les 
trois  premiers  rayons  dépassent  beaucoup  les  autres. 
L'épaule  et  le  bas  de  l'opercule  sont  colorés  en  rouge 
carmin  vif.  La  dorsale  et  l'anale  sont  jaunâtres,  sauf  la 


CHAP.    X.    GIRELLES.  37i 

teinte  noirâtre  de  la  membrane  des  rayons  antérieurs. 
La  caudale  a  une  grande  tache  noire,  le  bord  est 
jaunâtre,  ainsi  que  les  ventrales. 

L'individu  a  huit  pouces  de  longueur. 
■  Je  vois  que  Pallas  ne  parle  pas  de  la  girelle 
dans  son  Fauna  rossica. 

La  Girelle  Giofredi. 

{Julis  Giofredi,  Riss.) 

• 

Après  ces  variétés  je  crois  pouvoir  distinguer 
une  seconde  espèce,  qui  ne  le  cède  en  rien, 
pour  la  beauté  des  couleurs,  à  la  précédente. 
Elle  offre  plusieurs  variétés,  et  elle  paraît  tout 
aussi  commune  dans  la  Méditerranée. 

'  Quoique  les  formes  soient  très-semblables  à  celles 
du  Ju/is  vulgaris,  la  girelle  Giofredi  paraît  avoir 
le  corps  un  peu  j)lus  arrondi,  la  dorsale  plus  basse: 
ses  premiers  rayons  épineux  ne  dépassent  pas  les 
suivants  ;  ils  sont  aussi  plus  roides.  Les  nombres  sont 
les  mêmes  : 

D.  9/12  î  A.  3/12,  etc. 

Conservée  dans  l'eau-de-vie,  elle  paraît  brune  sur 
la  moitié  supérieure,  blanchâtre  sur  la  moitié  infé- 
rieure du  corps  ;  une  tache  bleue  existe  à  l'angle  de 
l'opercule,  et  toutes  les  nageoires  sont  pâles.  Mais 
M.  Laurillard  l'a  peinte  à  Nice;  et  ses  couleurs,  au 
sortir  de  l'eau ,  sont  distribuées  en  une  teinte  uniforme 
et  d'un  beau  rouge  de  vermillon  sur  le  dos,  et  par 


572  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

quatre  bandes  longitudinales  :  une  première,  brun 
olivâtre,  commence  au  bout  du  museau,  est  inter- 
rompue par  l'œil  et  par  la  tache  bleue  de  l'opercule; 
elle  s'évanouit  sous  la  fin  de  la  dorsale.  Une  seconde 
bande  commence  en  bleu  pâle  sur  les  lèvres,  tra- 
verse la  joue,  et  prend  sur  l'épaule  une  teinte  vio- 
lette qu'elle  conserve  jusqu'à  la  caudale.  Au-dessous 
est  une  bande  jaune,  aussi  longue,  aussi  large  que 
la  précédente,  et  enfin  une  quatrième,  blanche, 
teinte  de  bleuâtre,  colore  le  ventre.  La  dorsale  n'a 
point  de  tache,  et  est  jaunâtre,  lisérée  de  bleu.  L'a- 
nale a  la  même  bordure,  mais  sa  base  est  plus  rou- 
geâtre;  les  pectorales  sont  rosées,  les  ventrales  bleuâ- 
tres, et  la  caudale  vert  olivâtre. 

M.  Hisso  donne  à  peu  près  les  mêmes  cou- 
leurs à  son  Giofiedi.  Le  clos  est,  dit-il, 

d'un  beau  rouge  de  corail,  dégradé  en  jaune  doré 
sur  les  côtés,  et  passant  à  l'argenté  sous  le  ventre- 
La  dorsale  est  rouge  ,  les  ventrales  bleuâtres,  les 
pectorales  jaune  pâle,  la  caudale  rouge  mêlé  de 
jaune  et  de  vert. 

Nous  avons  des  individus  qui  ont  sept 
pouces  de  long.  Il  nous  en  est  venu  de  Nice, 
de  Toulon  et  de  Messine. 

Parmi  les  individus  de  Toulon,  nous  en 
avons  trouvé  qui  ont 

la  moitié  supérieure  du  corps  d'un  très -beau  brun 
rougeâtre  passant  au  violet,  et  jaunâtre  devenant 
blanc  argenté  sur  le  ventre,  avec  huit  ou  dix  pe- 


CHAP.    X.    GIRELLES,  375 

tiles  lignes  formées  d'une  série  de  poinls  rouges;  les 
nageoires  dorsale,  anale  et  caudale,  sont  d'un  beau 
rouge  carmin;  les  pectorales  sont  violettes,  et  les 
ventrales  ont  du  jaunâtre. 

Quand  le  violet  du  milieu  des  côtés  est 
glacé  d'argent,  ce  qui  arrive  très -souvent, 
cette  variété  devient  la  première  mentionnée 
par  M.  Risso.  Les  individus  chez  lesquels  le 
jaune  domine  sur  les  cotés ,  et  qui  ont  la  cau- 
dale bordée  de  bleu,  se  rangent  dans  la  se- 
conde variété  de  cet  auteur. 

Nous  en  avons  reçu  de  Toulon,  de  Napîes, 
de  Messine,  de  Morée  et  de  Malaga. 

M.  Laurillard  nous  en  a  rapporté  deux  au- 
tres variétés,  plus  éloignées  que  la  précédente 
de  ce  que  nous  donnons  pour  type  du  julis 
GiofredL 

La  première  a  les  couleurs  distribuées  en  cinq 
bandes  longitudinales.  La  supérieure ,  sur  le  haut  du 
dos,  est  un  brun  verdâtre  mêlé  de  rougeâtre,  surtout 
vers  la  tête;  la  seconde,  tracée  au-dessus  de  la  ligne 
latérale,  en  partant  de  l'œil,  est  d'un  vert  glauque.  La 
troisième,  d'un  brun  violâtre,  s'étend  à\i  bout  du 
museau  à  l'origine  de  la  queue.  La  quatrième,  aussi 
longue  que  la  troisième,  est  blanc  lavé  de  verdâire. 
La  cinquième  colore  le  ventre  en  jaune  orangé.  La 
dorsale  a  la  base  jaune,  le  milieu  rouge  et  le  bord 
blanc;  l'anale  est  rouge,  lisérée  de  blanc;  la  caudale 
est  mêlée  de  iaune,  de  rouge  ei  de  vert» 


374  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

L'individu  est  long  de  trois  pouces. 

La  seconde  variété  a  le  manteau  vert,  marbré  de 
grandes  plaques  brunâtres  ;  la  dorsale  a  du  vert  à 
la  base,  et  le  reste  rouge  liséré  de  bleu  :  l'anale  porte 
trois  bandes;  une  supérieure,  jaune  verdâtre;  une 
moyenne  d'un  brun  rougeâtre,  et  le  bord  bleu  clair. 

Je  ne  vois  pas  que  les  auteurs  aient,  avant 
M.  Risso,  distingué  cette  espèce. 

La    GiRELLE    COQUETTE. 

(  Julis  Jestiva  j  nob.  ) 

On  a  pu  remarquer  que  toutes  ces  variétés, 
dont  nous  avons  vu  plus  de  trente  individus, 
ont  la  membrane  qui  unit  les  rayons  antérieurs 
de  la  dorsale  rembrunie ,  et  souvent  même 
assez  foncée;  mais  elles  n'ont  jamais  de  tache 
isolée  sur  celte  nageoire.  Nous  croyons  devoir 
distinguer,  comme  espèce,  la  girelle  dont  M. 
Garnot  nous  a  envoyé  la  peiiiture  faite  sur  le 
vivant;  comparée  à  la  précédente,  elle  se  re- 
connaît 

parce  qu'elle  a  une  tache  bleue  triangulaire  entre  le 
second  et  le  troisième  rayon  de  la  dorsale;  et  elle 
se  rapproche  cependant  du  Giofredi ,  parce  que  les 
rayons  de  sa  dorsale  sont  égaux,  et  qu'elle  manque 
de  tache  sur  les  flancs.  Elle  lui  ressemble  encore  par 
la  couleur  rouge  du  dos,  par  la  tache  bleue  de  la 
pectorale  et  de  l'opercule;  mais  elle  paraît  en  dif- 
férer, par  son  ventre  d'un  beau  rose  vif;  par  une 


CHAP.    X.    GIRELLES.  375 

première  bandelette,  composée  de  petites  lunules 
bleu  noirâtre,  étendue  depuis  l'angle  de  l'opercule 
jusque  sur  la  queue,  et  par  une  seconde  bande  jaune» 
semée  de  points  rouges,  qui  prend  naissance  dans 
l'aisselle  de  la  pectorale,  et  qui  va  jusque  sur  la 
queue.  Toutes  les  nageoires  sont  rouges  :  la  caudale 
seule  est  bordée  d'orange.  L'iris  est  rougeâtre;  il  y  a 
quelques  nuances  bleues  sous  la  gorge  et  sur  le  limbe 
du  préopercule. 

Cette  girelle  a  été  prise  à  Brest,  sur  la  fin 
de  Mai  1826.  Elle  est  confondue  par  les  pê- 
cheurs avec  le  labre  varié,  sous  le  nom  de 
coquette. 

L'individu  a  près  de  neuf  pouces  de  lon- 


gueur. 


C'est  bien  évidemment  à  cette  espèce  qu'il 
faut  rapporter  le  lahrus  julis  de  Donovan', 
qui  est ,  je  pense ,  reproduit  par  lui  dans 
M.  Yarell,  et  qui  se  trouve  aussi  cité,  d'après 
le  même  document,  dans  Fleming  et  dans 
Jenyns.  Il  venait  des  côtes  de  Cornouailles. 

La  Girelle  élégante. 
{Julis  speciosa^  Risse.) 

Nous  avons  trouvé  dans  les  collections  faites 
à  Naples  par  M.  Savigny,  et  à  Messine  par 


1.  Donov.,  Brit.  fish. ,  t.  IV.  pi.  96. 


à7G  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

M.  Bibron,  des  girelles  de  l'espèce  nommée 
par  M.  Risso  julis  speciosa. 

Elle  a  les  mêmes  formes  et  les  mêmes  proportions 
que  les  girelles  précédentes  ;  mais  ses  couleurs 
sont  arrangées  par  bandes  verticales  rouges  sur  un 
fond  jaune.  La  dorsale  a  une  grande  tache  noire 
sur  ses  premiers  rayons,  qui  ne  dépassent  pas  les 
suivans.  La  base  de  la  nageoire  paraît  jaune;  la  partie 
supérieure  grise,  bordée  de  blanc.  L'anale  a  sur  un 
fond  jaune  une  bande  violette  sur  le  milieu,  et  un 
liséré  de  même  couleur.  Le  haut  de  la  caudale  est 
vert  mêlé  de  rougeâtre,  et  le  dessous  jaune  olivâtre. 

Nos  individus  atteignent  six  pouces. 
M.  Risso  regarde  cette  espèce  comme  moins 
abondante   que  les  autres  girelles.  Il  donne 

au  dos  un  rouge -brun;  des  bandes  jaune  d'or  al- 
ternant avec  d'autres,  incarnats,  sur  les  flancs.  La 
tête  est  ornée  de  lignes  rouges  et  de  bandes  jaunes 
sur  un  fond  argenté;  la  dorsale  fauve,  bordée  de 
rose,  avec  une  grande  tache  bleu  indigo,  entourée 
d'un  cercle  aurore.  L'anale  traversée  de  deux  bandes 
jaunes;  une  tache  bleue  dans  l'aisselle  des  pectorales j 
les  ventrales  blanchâtres. 

Elle  vit  parmi  les  coraux  de  la  côte  de 
Nice,  et  se  montre  en  Juin  et  en  Juillet. 

Cette  espèce  entre  dans  l'Atlantique,  et  on 
la  trouve  à  Madère.  Nous  en  avons  reçu  des 
individus  pjarmi  les  poissons  de  cette  île, 
donnes  à  M.  Cuvier  par  sir  R.  Brown. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  377 

Nous  en  avons  vu  aussi  un  individu  long 
de  huit  pouces  et  demi  parmi  les  poissons 
recueillis  aux  Canaries  par  MM.  Webb  et 
Berthellot.  Il  offre  cependant  cette  particu- 
larité que  les  trois  premiers  rayons  de  la 
dorsale  sont  plus  hauts  que  les  suivans.  Je 
compte  vingt  bandes  verticales  sur  les  flancs. 
La  tache  de  l'opercule  et  de  Taisselle  est  bien 
marquée.  La  caudale  est  tout-à-fait  rembrunie 
vers  le  haut. 

La    GiRELLE    PAON. 

{Julis  paçOj  nob.j  Lahriis  pavOj,  Hasselquist.) 

Une  belle  espèce,  répandue  dans  toute  la 
Méditerranée ,  et  qui  a  été  fort  exactement 
décrite  par  Hasselquist  ^,  sous  le  nom  de  lahrus 
pavOy  est  restée  pour  ainsi  dire  ignorée  des  na- 
turalistes jusqu'à  ces  derniers  temps,  très-pro- 
bablement à  cause  de  la  confusion  que  Linné 
a  faite  de  cette  description  du  voyageur  en 
Syrie  avec  ce  qu'Artedi  entendait  rapporter 
au  pavo  de  Salviani.  Il  en  résulte  que  le  la- 
hrus pavo  de  Linné  doit  être  rayé  de  nos 
species;  mais  que,  pour  conserver  le  travail 
bien  fait  d'Hasselquist,  on  peut  donner  à  notre 
poisson  l'épithète   de  pavo ,  ce  qui  servira  à 

1.  lier  Pakst, ,  p.  344?  n.°  77. 


378  LIVRE    XVI.    LADROÏDES. 

faire  oublier  la  confusion  de  M.  Risso  à  l'c- 
gard  de  cette  même  espèce. 

Bloch,  à  la  vérité,  avait  bien  reconnu  l'er- 
reur commise  par  Hasselquist,  et  il  changea 
le  nom  spécifique  en  celui  de  syriacus  j  mais 
il  ne  fit  pas  remarquer  que  le  lahriis  pavo  de 
Linné  était  devenu  un  être  complexe  à  sup- 
primer. 

M.  de  Lacépède  a  suivi  les  erreurs  de  Linné 
et  d'Hasselquist ,  sans  y  rien  corriger,  et  il  a 
fait  la  description  de  son  labre  paon  d'après 
la  description  du  naturaliste  danois. 

Ce  poisson,  si  brillant  de  couleur,  n'avait  été 
remarqué  par  aucun  des  écrivains  sur  la  Médi- 
terranée avant  Hasselquist,  quoique  Solander 
l'avait  déjà  décrit  et  dessiné  dès  1 769  à  Madère  j 
mais  sa  description,  comme  son  dessin,  sont 
restés  ingnorés  jusqu'à  nos  travaux. 

M.  Risso,  dans  la  première  édition  de  son 
Icluhyologie  de  Nice,  publia  cette  espèce, 
en  la  confondant  avec  un  tout  autre  pois- 
son de  la  mer  des  Indes ,  le  labre  hébraïque 
de  Lacépède;  espèce  d'ailleurs  assez  mal  dé- 
terminée ,  comme  on  le  verra  plus  tard.  Dans 
sa  seconde  édition,  M.  Risso,  profitant  de  no- 
tre travail,  rectifia  la  fausse  application  de 
nom  de  Lacépède,  et  changea  son  nom  spé- 
cifique en  celui  de  ^irelle  turque,  parce  que 


CHAP.    X.    GIRELLES.  579 

cette    espèce    serait,  suivant   lui,   connue   à 
Nice  sous  le  nom  de  girella  turca. 

Elle  commence  la  série  nombreuse  des  gi- 
relles  à  tête  grosse,  à  museau  court  et  arrondi, 
à  pectorales  tachetées  de  noirâtre,  à  caudale 
fourchue.  Elle  tient  à  ces  poissons  des  mers 
équatoriales  parés  de  vives  couleurs,  par  le 
brillant  des  siennes. 

Le  corps  est  arrondi  de  l'avant,  de  façon  que  la 
hauteur  aux  ventrales,  plus  que  double  de  celle  de 
la  queue,  fait  le  quart  de  la  longueur  totale.  La  lon- 
gueur de  la  tête  est  dans  les  mêmes  proportions, 
comparée  à  celle  du  corps.  La  nuque  est  soutenue; 
l'œil  est  petit;  la  peau  qui  couvre  les  joues  est  épaisse; 
les  deux  dents  du  milieu  dépassent  les  autres,  qui 
sont  disposées  sur  un  seul  rang. 

La  dorsale  commence  à  l'aplomb  de  l'angle  de 
l'opercule.  Ses  premières  épines  sont  très-basses. 
L'anale  répond  au  troisième  rayon  mou  de  la  dor- 
sale, et  elle  ne  la  dépasse  pas  en  arrière.  La  caudale 
est  courte  ;  les  deux  ou  trois  rayons  qui  la  bordent 
se  prolongent  en  cornes,  et  la  rendent  échancrée. 
La  pectorale  est  arrondie;  les  ventrales  sont  petites. 
B.  6;D.  8/135  A.  3/11;  C.  13;  P.  15;  V.  1/5. 
Les  écailles  sont  minces  et  assez  grandes  :  il  y  en  a 
une  trentaine  entre  l'ouïe  et  lajiageoire  de  la  queue. 
Chaque  écaille  isolée  est  pentagonale,  à  bord  mem- 
braneux, entièrement  et  finement  striée,  de  manière 
à  ce  que  sa  portion  radicale  soit  peu  différente  de 
la  portion  libre.  La  ligne  latérale ,  tracée  en  droite 


380  LIVRE   XVI.    LADROÏDES. 

ligne  près  du  dos,  s'incline  sous  la  fin  de  la  dorsale, 
et  reprend  par  le  milieu  de  la  hauteur  de  la  queue; 
elle  est  formée  par  une  série  de  petits  tubes  obli- 
ques, relevés  sur  chaque  écaille. 

M.  Savigny,  qui  l'a  vue  fraîche  à  Naples,  l'a  peinte 
d'un  beau  vert  doré  sur  le  corps,  et  rouge -brun 
sur  la  tête.  Des  rivulations  partent  de  l'œil  et  se 
portent  en  avant  par  trois  raies  droites,  sur  le  bas 
de  l'opercule  par  une  seule  bandelette  divisée,  sur 
le  préopercule,  l'interopercule  et  sur  la  tempe,  par 
une  ligne  plus  courte  et  moins  divisée.  Sur  chaque 
écaille  un  trait  rougeàire  vertical  relève  le  fond  uni- 
forme du  corps.  La  dorsale  est  verte  et  a  une  très- 
large  bande  bleue  qui  la  recouvre  presque  en  entier. 
L'anale  est  bleue  à  la  base,  verte  près  le  bord  :  ces 
deux  raies  séparées  par  une  bandelette  blanche. 

La  caudale,  verte,  a  ses  deux  pointes  lougeàtres. 
La  pectorale  est  blanchâtre  ou  verdâtre,  avec  une 
lâche  bleu  foncé  sur  la  pointe  des  rayons  supé- 
rieurs ,  et  du  jaune  à  la  base.  Les  ventrales  sont 
verdàtres;  elles  offrent  souvent  derrière  les  pecto- 
rales une  bande  transversale  oblique  d'un  vert  uni- 
forme, parce  que  les  écailles  n'ont  pas  dans  cette 
région  de  traits  rougeâtres  et  verticaux;  quelquefois 
il  en  manque  un  plus  grand  nombre  d'espace  en 
espace,  de  façon  qu'il  y  a  des  individus  dont  le 
corps  est  traversé  par  quatre  ou  cinq  bandes  verti- 
cales vertes.  Souvent  ces  individus  ont  une  grande 
tache  bleue  sur  le  dos  et  au-dessous  de  la  fin  de  la 
dorsale  épineuse  :  d'autres  ont  trois  ou  quatre  de 
ces  taches. 


CIIAP.    X.    GIRELLKS.  581 

Les  pécheurs  de  Naples  ont  assuré  à  M.  Sa- 
vigny,  que  les  mâles  prennent  pendant  le 
temps  du  frai  des  bandes  rouges  plus  ou  moins 
vives  sur  le  bord  de  ces  bandes  vertes. 

M.  Risso  donne  à  sa  girelle  turque  des  cou- 
leurs peu  différentes  et  non  moins  brillantes. 

Le  corps  est,  dit-il,  d'un  vert  tendre  à  reflets  dorés, 
traversé  sur  les  opercules  par  une  bande  bleu  céleste, 
bordée  de  rouge  vif  de  chaque  côté.  La  tète  est 
brune,  ornée  de  raies  bleu  indigo,  divisées  en  mille 
.  sens.  Sur  le  devant  de  la  dorsale  il  y  a  une  tache 
jaune  doré,  et  du  noir  sur  la  pointe  de  la  pectorale. 

M.  Risso  se  trompe  quand  il  ne  donne  à 
cette  espèce  que  cinq  rayons  à  la  membrane 
branchiostège ,  et  un  seul  rayon  épineux  à 
l'anale. 

Nous  en  avons  de  nombreux  individus 
venus  de  Nice,  de  Sicile,  de  Morée  ;  M.  de 
Laroche  a  rapporté  l'espèce  d'Iviça,  et  elle 
s'est  trouvée  aussi  avec  ses  variétés  dans  la 
collection  des  poissons  de  Madère,  donnée 
à  M.  Cuvier.  Ces  individus  nous  ont  facilité 
la  détermination  du  lahrus  lunarius  de  So- 
lander.  Il  ne  lui  compte,  comme  M.  Risso, 
que  cinq  rayons  branchiostèges;  mais  on  doit 
observer  que  le  troisième  et  le  quatrième 
sont  tellement  rapprochés  qu'il  faut  y  faire 
attention,  sans  quoi  il  est  très-aisé  de  les  pren- 


582  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

dre  pour  un  seul.  Le  reste  de  la  description 
s'accorde  parfaitement  :  il  avait  même  remarqué 
les  variétés  à  dos  tacheté,  et  la  figure  con- 
firme encore  ce  que  nous  prouve  la  descrip- 
tion. C'est  suivant  Solander  le  peixe  vercle 
des  Portugais  de  Madère,  et  elle  porte  aussi 
ce  nom  aux  îles  Canaries ,  ainsi  que  nous  l'ap- 
prennent MM.  Webb  et  Berthellot.  Mais  nous 
ne  croyons  pas  que  ce  soit  le  lahrus  lunaris 
de  Linné.  En  eflfet,  le  naturaliste  suédois  cite 
Gronovius  S  dont  la  figure  montre  une  tache 
oblongue  sur  le  milieu  de  la  pectorale.  Nous 
verrons  plus  bas  à  quelle  espèce  nous  la  rap- 
porterons. 

La  taille  de  nos  girelles  paons  varie  jusqu'à 
six  pouces. 

Nous  venons  nous -même  de  donner  une 
belle  figure  de  cette  girelle  dans  l'atlas  ich- 
thyologique  des  poissons  des  Canaries,  pour 
la  publication  duquel  M.  Webb  montre  de 
nouveau  avec  quelle  générosité  il  emploie  sa 
fortune  aux  progrès  des  sciences  naturelles. 

La  Girelle  de  Sainte-Hélène. 
{JiiUs  Sanctce  Helence.) 

L'Atlantique   nourrit  ,  près  des    côtes    de 

1.  Mus.  icht. ,  labi.  VI,  fig.  2. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  583 

Sainte-Hélène,  une  girelle  voisine  de  la  pré- 
cédente :  un  premier  individu  en  a  été  rap- 
porté au  Cabinet  du  Roi  par  feu  Sonnerat, 
et  cette  même  espèce  y  a  été  retrouvée  par 
MM.  Quoy  et  Gaimard. 

Elle  a  le  museau  plus  pointu,  sans  avoir  cepen- 
dant la  tête  plus  longue.  L'occiput  est  beaucoup 
moins  relevé.  Les  pointes  de  la  caudale,  et  surtout 
celles  des  ventrales,  sont  plus  longues. 

B.  6j  D.  8/15;  A.  3/12;  C.  14;  P.  14;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  plus  finement  striées.  La  ligne 
latérale  est  un  peu  moins  près  du  dos,  et  composée 
de  trois  branches  divergentes,  partant  du  centre  de 
chaque  écaille.  ^ 

La  couleur  du  dos  est  verte,  et  tranche  nettement 
avec  le  blanc  argenté  des  côtés  et  du  ventre;  une 
bandelette  rougeàtre  borde  le  dos  le  long  de  la  base 
de  la  dorsale; des  traits  verticaux,  rapprochés  et  rous- 
sâtres,  pâles  sur  le  ventre,  traversent  les  écailles;  la 
pointe  supérieure  de  la  pectorale  est  noirâtre;  la 
dorsale  a  aussi  une  tache  bleue  noirâtre  sur  les  trois 
rayons  antérieurs  ,  le  reste  est  coloré  en  violet  peu 
foncé;  un  trait  fin  et  noirâtre  la  parcourt  parle  milieu 
de  la  hauteur  des  rayons.  Les  couleurs  de  l'anale  pa- 
raissent être  les  mêmes  que  celles  de  la  dorsale;  la 
caudale,  orangée  ou  rougeàtre,  a  les  longs  rayons 
colorés  en  violet  •  la  ventrale  a  les  mêmes  couleurs. 

Nous  en  avons  un  individu  qui  a  près  de 
dix  pouces  de  longueur. 


584  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

La    GiRELLE    DE    LeSSON. 
(Julis  Lessonii.) 

Une  autre  petite  espèce  ,  rapportée  du 
même  endroit  par  MM.  Lesson  et  Garnot, 
a  la  tête  plus  longue  que  celle  de  la  girelle  de  Sainte- 
Hélène  j  elle  fait  le  tiers  de  la  longueur  du  corps, 
sans  y  comprendre  la  caudale,  qui  est  courte  et 
arrondie.  Les  écailles  sont  très-finement  et  très-fré- 
quemment striées;  elles  s'étendent  plus  haut  sur  la 
dorsale  et  sur  l'anale.  Les  arbuscules  de  la  ligne  la- 
térale sont  plus  divisés.  Les  nombres  sont  également 
différents. 

B.  6  ;  D.  8/14  ;  A.  3/12 ,  etc. 

Quoique  décoloré,  l'individu  montre  encore  qua- 
tre @u  cinq  lignes  longitudinales  brunes  le  long  de 
la  partie  supérieure  des  flancs,  une  petite  tache  noi- 
râtre sur  le  devant  de  la  dorsale,  et  une  ligne  noi- 
râtre longitudinale  sur  le  milieu  de  cette  nageoire, 
qui  paraît  avoir  été  jaunâtre.  La  pointe  pectorale 
est  brune.  Trois  ou  quatre  lignes  obliques  blanchâ- 
tres partent  de  l'œil,  et  se  dirigent  sur  la  joue  :  la 
postérieure  atteint  le  dessus  de  l'angle  de  l'opercule. 
Le  bord  des  écailles,  coloré  autrement  que  le  fond, 
forme  sur  le  corps  un  réseau  étendu. 

Le  poisson  que  je  décris  est  un  mâle,  dont  les 
laitances  pleines  sont  divisées  en  un  grand  nombre 
de  petits  lobules.  Le  foie  est  très  -  petit.  La  vessie 
aérienne,  très -mince,  occupe  tout  le  haut  de  l'ab- 
domen. 

L'individu  est  long  de  cinq  pouces. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  585 

La    GiRELLE    DE    l'AsCENSION. 

(Julis  ^scensionis 3  Q.  et  G.) 

Une  autre  petite  espèce  des  côtes  de  l'As- 
cension ,  voisine  des  précédentes,  et  que  nous 
devons  aux  compagnons  de  l'expédition  com- 
mandée par  M.  d'Urville , 

a  le  corps  un  peu  plus  étroit,  le  museau  encore  plus 
aigu,  la  caudale  carrée  et  sans  pointe:  les  écailles 
sont  très-finement  striées. 

D.  8/14;  A.  2/13;  C.  14;  P.  13;  V.  1/5. 
Sur  un  fond  vert,  le  corps  porte  deux  petits  ru- 
bans étroits  et  longitudinaux,  d'une  belle  couleur 
rouge,  dont  le  supérieur  naît  sur  le  front,  au-devant 
de  l'œil,  passe  sur  l'occiput  et  borde  le  dos  au  pied 
des  rayons  de  la  dorsalej  le  second  part  du  même 
endroit,  est  interrompu  par  l'œil,  se  prolonge  sur 
le  milieu  des  côtés,  et  se  termine  à  la  caudale.  Le 
dessous  du  ventre  est  jaune.  La  dorsale  et  l'anale 
sont  vertes,  et  portent  sur  le  milieu  de  la  hauteur 
une  bande  rouge,  semblable  à  celle  du  corps.  Une 
tache  noire  existe,  selon  M.  Quoy,  sur  le  premier 
rayon  de  la  dorsale.  Cette  nageoire  est  olivâtre, 
bordée  d'orange;  les  pectorales  sont  rosées,  sans 
taches  noires  à  la  pointe  supérieure,  et  les  ventrales 
sont  vertes. 

Cette  description  des  couleurs  est  faite 
d'après  le  dessin  colorié  que  MM.  Quoy  et 
Gaimard  ont  bien  voulu  nous  communiquer. 

i3.  25 


586  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

L'individu  est  long  de  trois  pouces  et  demi. 

Il  a  été  décrit  par  M.  Quoy  sous  le  nom 
que  nous  lui  conservons,  tome  III,  page  706, 
de  la  Relation  de  l'Astrolabe,  et  représenté 
planche  XX  de  l'atlas  des  poissons,  figure  5. 

La    GiRELLE    A    TROIS    TACHES. 

{Julis   trlmaculata ,  nob.;  Labriis  macrolepidoLus , 
Bl.,  284,  2.) 

Le  poisson  que  Bloch  a  représenté  (pi.  284) 
sous  le  nom  de  macrolepidotiis.,  est  une  gi- 
relle  très-voisine  de  celle  que  nous  venons 
de  décrire. 

Sa  caudale  est  courte  et  arrondie;  les  épines  de 
la  dorsale  paraissent  plus  fortes ,  les  pointes  des  ven- 
trales plus  courtes,  et  celles  de  la  pectorale  plus 
longues.  D'ailleurs  les  écailles  ont  les  mêmes  stries, 
et  ne  sont  pas  plus  grandes  que  dans  aucune  autre 
girelle;  c'est  ce  qui  nous  a  décidés  à  changer  l'épi- 
thète  fort  impropre  que  Bloch  a  donnée  à  cette 
espèce.  Il  a  enluminé  le  corps  en  roussatre,  les  na- 
geoires en  bleu  pâle  et  bordées  de  jaunâtre,  trois  ta- 
ches noires  foncées  se  voient  sur  la  membrane  qui 
réunit  les  quatre  premiers  rayons  de  la  nageoire  du 
dos;  un  trait  jaune  remonte  de  l'œil  au  surscapu- 
laire,  et  un  autre  traverse  l'opercule. 
Ce  poisson,  d'origine  inconnue,  a  été  acheté 
à  Amsterdam.  Il  n'avait  pas  six  pouces  en 
longueur. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  387 

ha    GiRELLE    PERRUCHE. 

{Julis  psittaculus y  nob.  ;  Lahrus  psittaculus ,  Lacép.) 

Eu  avançant  clans  l'Atlantique  jusque  sur 
les  côtes  d'Amérique,  nous  trouvons  des  gi- 
relles  dans  toutes  les  parties  méridionales  de 
ce  continent;  mais  nous  ne  voyons  pas  des 
poissons  de  ce  genre  vivre  sur  les  côtes  sep- 
tentrionales. 

Nous  commençons  à  parler  de  l'espèce  que 
le  père  Plumier  a  observée  aux  Antilles,  et 
dont  il  a  rapporté  une  peinture  coloriée. 

Cette  girelle  a  la  forme  générale  de  celle  de  nos 
côtes;  mais  son  museau  est  plus  obtus.  Les  dents 
antérieures,  et  surtout  celles  de  la  mâchoire  infé- 
rieure, sont  grandes;  il  y  a  aussi  un  fort  crochet  à 
l'angle  de  la  bouche,  sur  le  maxillaire  supérieur. 
L'œil  est  petit,  et  on  voit  sous  le  bord  inférieur  une 
suite  de  petits  pores.  Il  y  en  a  d'autres  au-dessus  de 
l'œil,  et  d'autres  encore  sur  le  limbe  du  préoper- 
cule. La  caudale  est  petite  et  coupée  carrément. 

D.  9/11;  A.  3/12. 

Les  écailles  sont  grandes,  bien  marquées  :  j'en 
compte  vingt-quatre  entre  l'ouïe  et  la  nageoire  de  la 
queue.  En  examinant  une  d'elles  Isolée,  on  volt  que 
l'éventail  est  composé  d'un  nombre  considérable  de 
stries  réunies  en  un  point  central ,  situé  sur  le  milieu 
de  la  base  du  triangle  formé  par  la  portion  de  l'écallle. 
De  ce  même  point  part,  en  rayonnant,  un  nombre 


?)88  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

presque  aussi  considérable  de  stries,  qui  couvrent  la 
partie  nue.  La  ligne  latérale  est  composée  d'une  série 
d'arbuscules  plus  ou  moins  rameux ,  jusqu'à  l'endroit 
où  elle  s'infléchit,  et,  à  partir  de  là,  elle  n'offre  plus 
qu'une  suite  de  tubes. 

La  couleur  est  un  brun  plus  ou  moins  rougeàtre 
sur  le  dos,  et  pâle  sur  le  ventre;  deux  bandelettes 
parallèles,  de  couleur  violette  ou  lilas,  longent  les 
flancs;  le  pied  de  la  dorsale  et  de  l'anale  est  teint 
de  cette  nuance.  La  bandelette  supérieure  naît  de 
l'angle  de  l'opercule,  l'inférieure  de  l'angle  du  sous- 
opercule  ,  et  passe  sous  la  pectorale. 

La  tête  est  plus  variée  :  une  bande  violette  monte 
.  de  l'œil  sur  l'occiput,  et,  en  se  réunissant  à  celle  du 
côté  opposé,  forme  un  chevron  notable  sur  le  dessus 
de  la  tête.  Du  sommet  de  ce  chevron  descend  verti- 
calement un  trait  large,  mais  court,  qui  s'anastomose 
avec  un  autre  trait  horizontal,  tiré  de  l'œil  à  langle 
de  l'opercule.  Le  sous-orbitaire  porte  aussi  un  trait 
tracé  de  l'œil  vers  le  bout  du  museau.  Une  bride 
transversale  passe  sous  la  mâchoire  inférieure,  et 
se  prolonge  en  une  bande  plus  pâle,  qui  divise  le 
préopercule  et  s'étend  même  jusque  sur  l'opercule. 
L'interopercule  a  aussi  du  violet. 

L'œil  est  d'un  beau  jaune  au  milieu  de  ces  nuances 
lilas.  La  dorsale  a  la  base  violette  :  la  moitié  supérieure, 
pâle  ou  jaunâtre,  a  deux  ou  trois  traits  ondulés, 
plus  ou  moins  effacés  et  probablement  lilas.  La  base 
de  l'anale  est  de  cette  même  couleur  et  bordée  d'o- 
livâtre; les  ventrales  et  les  pectorales  sont  jaunes; 
la  caudale  offre  trois  ou  quatre  arcs  concentriques 


CHAP.    X.    PrlRELLES.  380 

violets,  et  les  deux  angles  de  son  bord  noirs.  Un 
ocelle  bleu  foncé  ou  noirâtre  relève  la  couleur  de 
Tangle  membraneux  de  l'opercule. 

Cette  description  est  faite  sur  un  individu 
long  d'environ  six  pouces ,  envoyé  de  la  Marti- 
nique sous  le  nom  de  patate. 

Nous  avons  dit  que  le  père  Plumier  en 
avait  laissé  un  dessin  où  le  corps  est  peint 
en  vert,  les  raies  en  rouge;  le  clievron  de  la 
tête  est  bordé  de  bleu;  les  nageoires  ont  un 
fond  jaunâtre  ou  olivâtre;  la  bande  mitoyenne 
de  la  dorsale  est  rouge;  le  bord  de  l'anale  est  de 
la  même  couleur;  la  caudale  a  des  zones  vio- 
lettes et  bleues,  et  les  angles  brun  noirâtre. 
Plumier  avait  inscrit  sous  son  dessin  turdiis 
mariniis  variiisj  viilgOy  petit  perroquet. 

M.  de  Lacépède  sest  servi  de  cette  figure 
et  de  ce  nom  pour  inscrire  parmi  ses  labres 
un  labre  perruche^  mais  il  n'a  pas  reconnu 
lidentitë  qui  existe  entre  le  dessin  de  Plu- 
mier et  la  figure  de  Bloch  de  sa  grande  Icli- 
thyologie  (pi.  284?  fig-  i  )•  Ce  naturaliste  avait 
acheté  son  poisson,  comme  il  dit,  dans  un 
encan  hollandais;  et  quand  on  a  acquis  l'ha- 
bitude de  reconnaître  comment  Bloch  pei- 
gnait les  poissons  décolorés  qui  devaient  servir 
à  son  ouvrage,  on  ne  peut  douter  que  le 
lahrus  hwittatus  ne  soit  le  même  que  celui 


390  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

décrit  clans  cet  article  :  on  le  reconnaît  à  l'as- 
pect général,  aux  pores  tracés  sous  l'œil  et 
sur  la  joue,  aux  arbuscules  de  la  ligne  laté- 
rale et  aux  deux  lignes  du  corps;  mais  la  cou- 
leur de  ces  lignes,  comme  celle  du  tronc  et 
des  nageoires,  est  de  pure  invention. 

J'ai  sous  les  yeux  une  variété  de  cette  es- 
pèce, remarquable  par  la  couleur  jaune  uni- 
forme des  nageoires  verticales.  Elle  n'offre 
aucunes  traces  de  bandes,  et  il  n'y  a  point 
de  taches  noires  aux  angles  de  la  caudale. 
Je  l'ai  achetée  à  Amsterdam  parmi  d'autres 
poissons  venus  de  Surinam. 

Les  deux  individus  déposés  dans  le  Cabinet 
du  Pioi  sont  longs  de  cinq  pouces. 

Des  observations  ultérieures  décideront  si 
cette  variété  doit  être  regardée  comme  une 
espèce. 

La    GiRELLE    DE    GaRNOT. 

{Julis  Gamotiy  nob.) 

Une  autre  espèce,  envoyée  de  la  Marti- 
nique par  M.  Garnot, 

a  la  tête  un  peu  plus  petite  et  le  museau  un  peu  plus 
pointu. 

Celte  girelle  parait  avoir  eu  la  tête  bleue.  Trois 
ou  quatre  traits  noirâtres  et  fins  montent  oblique- 
ment de  l'œil  sur  la  nuque.  Le  corps  est  bleu  ou 
verdâtre,  avec  du  rouge  vif  le  long  du  dos;  la  portion 


CHAP.    X.    CIRELLES.  391 

épineuse  de  la  dorsale  est  colorée  en  bleu  noirâtre; 
la  portion  molle  en  gris,  avec  des  taches  rouges  à  la 
base  des  rayons;  l'anale,  d'une  teinte  tirant  sur  la 
lie  de  vin,  a  des  taches  bleu  foncé  entre  chaque 
rayon,  près  du  corps;  la  caudale,  arrondie,  est  gri- 
sâtre et  rayée  transversalement  de  dix  raies  alterna- 
tivement étroites  et  larges  ;  les  pectorales  sont  bleuâ- 
tres, et  les  ventrales  verdâtres. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 
J'en  observe  d'autres  individus  de  même  taille, 
qui  me  paraissent  n'être  que  des  variétés  de  cette 
espèce.  Toutefois  ils  sont  plus  verdâtres  ,  et  ont 
moins  de  rouge  et  de  bleu  sur  les  flancs.  L'anale  est 
lisérée  de  bleu.  Peut-être  qu'en  les  observant  sur  le 
frais,  on  les  trouvera  d'espèces  différentes. 

Nos  individus  ont  six  pouces  de  longueur. 

La    GiRELLE    AUX    TACHES    BLEUES. 

{JiiUs  cjanostigma ,  nob.) 

Le  même  voyageur  nous  a  encore  procuré 
une  autre  girelle,  qui  nous  paraît  d'une  espèce 
distincte,  à  cause  de  la  régularité  de  la  dis- 
tribution de  ses  couleurs. 

Elle  ressemble  à  la  précédente  par  la  forme  du 
corps.  La  tête  a  été  nuancée  de  bleu  ou  de  violet  et 
de  rouge;  elle  n'a  pas  sur  la  tempe  ce  trait  en  crois- 
sant que  j'observe  sur  l'espèce  nommée  fatale  verte 
par  M.  Plée.  Il  y  a  le  long  des  écailles  des  flancs 
sept  à  huit  rangées  de  taches  azurées,  sur  le  pied 


392  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

de  la  dorsale  trois  grandes  taches  noires  :  une  sur 
les  premiers  rayons  simples,  une  à  la  fin  de  la  na- 
geoire; celle  du  milieu  comprend  les  quatre  premiers 
rayons  mous.  Une  raie  violette  existe  à  la  base,  le 
long  du  milieu  de  l'anale.  La  caudale  et  la  dorsale 
ont  quelques  traces  de  taches  violettes. 

Le  poisson  est  long  de  six  pouces. 

La    GiRELLE    OPALIIVE. 
{JiiUs  opalina  y  nob.) 

Je  trouve  encore  dans  les  collections  faites 
à  la  Martinique  par  M.  Garnot,  une  giielle 
voisine  de  toutes  ces  espèces  ou  variétés. 

Sa  hauteur  fait  le  tiers  de  sa  longueur,  et  l'épais- 
seur est  dans  les  mêmes  proportions  par  rapport  à 
la  hauteur.  La  ligne  du  profil  s'élève  par  une  ligne 
presque  droite  et  inclinée  à  peu  près  des  deux  tiers 
d'un  angle  droit  vers  la  nuque,  où  elle  devient  bombée 
et  saillante,  et  se  continue  ensuite  dans  l'arc  du  dos, 
qui  est  convexe,  tandis  que  le  bord  horizontal  est 
presque  droit. 

L'œil  est  petit  et  situé  sur  le  haut  de  la  joue;  son 
diamètre  est  du  huitième  de  la  longueur  de  la  tète, 
qui  égale  sa  hauteur  et  fait  le  quart  de  la  longueur 
totale  du  corps.  En  avant  et  un  peu  en  dessous  de  l'œil 
sont  les  deux  ouvertures  de  la  narine  :  l'antérieure  est 
petite  et  tubuleuse,  la  seconde  est  une  simple  fente 
transversale.  On  n'aperçoit  rien  des  sous-orbitaires 
sous  la  peau  qui  couvre  toute  la  tête,  tant  elle  est 


CHAP.    X.    GIRELLES.  395 

épaisse.  On  distingue  peu  le  limbe  du  préopercule 
du  reste  de  l'os.  Son  bord  vertical  est  festonné;  l'ho- 
rizontal est  droit,  l'angle  tout-à-fait  arrondi  ;  l'intero- 
percule  est  très-large,  et  cependant  ne  touche  pas 
sous  l'isthme  à  celui  du  côté  opposé.  Le  sous-oper- 
cule est  distinct  de  l'opercule,  même  à  travers  de 
l'épaisseur  de  la  peau  :  il  est  plus  étroit  que  l'in- 
teropercule.  L'opercule  est  arrondi;  son  bord  mem- 
braneux et  son  angle  sont  très -larges.  On  voit  au- 
dessous  de  l'œil  neuf  à  dix  rangées  de  pores  très-fins, 
qui  rayonnent  du  bord  de  l'orbite  vers  la  joue,  les 
antérieures  étant  plus  longues  que  celles  tracées 
derrière  l'œil.  Il  y  a  aussi  cinq  à  six  rangées  de  ces 
pores  sur  les  écailles  surscapulaires  et  nuchales,  qui 
sont  recouvertes,  comme  la  tête,  par  une  peau  non 
écailleuse.  La  portion  postérieure  de  l'intermaxillaire 
est  entièrement  cachée  par  le  sous-orbitaire. 

On  ne  voit  guère  sur  le  devant  de  la  bouche  que 
la  lèvre  épaisse,  portant  en  dessous  cinq  à  six  plis, 
qui  cachent  les  dents  latérales,  mais  que  dépassent 
les  canines  mitoyennes,  très-grosses  dans  ce  poisson. 
A  la  suite  des  huit  dents  latérales  et  coniques,  il  y  a 
dans  l'angle  une  canine  dirigée  en  avant,  mais  cachée 
par  la  lèvre.  Il  y  a  en  dedans  deux  ou  trois  rangées 
de  dents  grenues.  La  mâchoire  inférieure  a  quatre 
grosses  dents  en  crochets,  une  rangée  de  onze  dents 
coniques,  et  une  de  dents  rondes  interne.  Lb  lèvre  in- 
férieure est  épaisse  près  de  l'os,  amincie  vers  son  bord 
libre,  et  couchée  sur  la  branche.  Les  branches  de  la 
mandibule  sont  larges  et  arrondies.  Je  vois  en  dedans 
de   la  bouche  des  voiles    membraneux   étendus  et 


394  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

plissés,  et  dans  le  fond  une  langue  large,  tronquée 
en  avant,  peu  libre.  Les  pharyngiens,  comme  ceux 
de  nos  labres,  portent  des  dents  en  tubercules  ar- 
rondis en  arrière  et  pointus  sur  le  devant  de  l'os. 
La  dorsale  est  basse,  la  caudale  coupée  carrément, 
la  ventrale  prolongée  en  filet.  Les  nombres  sont  : 

D.  9/11;  A.  3/12  j  G.  15;  P.  12;  V.  1/5. 

Les  écailles  sont  grandes,  en  losanges;  la  portion 
radicale  quadrilatère,  à  bord  droit,  peu  festonné, 
ayant  près  de  trente  rayons  à  l'éventail  ;  la  portion 
nue  est  presque  tout  autant  ciselée;  son  bord  est 
très-mince  :  j'en  compte  vingt-cinq  entre  l'ouïe  et 
la  caudale,  deux  au-dessus  de  la  ligne  latérale,  et 
neuf  au-dessous. 

Cette  ligne  est  marquée  par  une  suite  d'arbuscules, 

dont  les  branches  sont  moins  nombreuses  et  plus 

resserrées  à  mesure  qu'on  approche  de  la  queue.  La 

ligne  n'est  pas  interrompue  :  arquée  sous  le  dos , 

,    elle  est  droite  sur  le  tronçon  de  la  queue. 

La  couleur  est  un  mélange  de  bleu,  de  vert,  de 
jaune,  d'orangé  et  de  rouge,  qui  donne  au  poisson 
une  teinte  opaline  ou  irisée.  Le  bleu  est  disposé  par 
lignes  sous  le  ventre;  on  y  distingue  quatre  raies  bien 
tranchées.  La  tête  est  bleue  ou  couleur  de  chair, 
avec  des  rayures  bleues  plus  foncées.  La  dorsale  est 
bleue;  l'anale  a  deux  rayures  violettes  sur  un  fond 
plus  foncé;  la  caudale,  bleue,  a  des  bandelettes  vio- 
lettes, tantôt  verticales,  tantôt  longitudinales. 

Ce  poisson  me  paraît  d'une  espèce  distincte, 
à  moins  qu'il  n'en  soit  de   cette  gircllc  d'A- 


CHAP.    X.    GIRELLES.  595 

mérique  comme  de  la  nôtre,  qui  présente 
tant  de  nuances  différentes;  mais  ici  les  for- 
mes de  la  tête  sont  assez  distinctes  pour  qu'on 
puisse  trouver  des  caractères  qui  paraissent 
plus  certains. 

L'individu  que  je  décris  est  long  de  quinze 
pouces,  et  haut  de  cinq. 

La    GiRELLE    AUX   TEMPES   NOIRES. 
{Julis  crotaphus t  nob.) 

Une  autre  espèce,  des  côtes  du  Brésil,  rap- 
portée d'abord  par  feu  Delalande ,  et  plus 
récemment  par  M.  Gay,  et  que  nous  avons 
ensuite  reçue  des  côtes  de  Bahia,  d'où  elle 
a  été  envoyée  au  Musée  de  Genève  par  M.  Blan- 
chet, 

a  le  museau  plus  arrondi  que  la  précédente;  l'œil  un 
peu  plus  petit,  et  placé  plus  haut  sur  la  joue.  Le 
sous-orbitaire  est  criblé  de  petits  pores  épars.  La  mâ- 
choire inférieure  offre  des  petites  inégalités  plus  ou 
moins  marquées. 

D.  9/11;  A.  3/125  C.  13;  P.  12;  V.  1/5. 

Les  individus  longs  de  sept  pouces  ont  le  premier 
rayon  mou  de  la  ventrale  prolongé  en  un  filet  qui 
atteint  à  l'anus;  tandis  que  d'autres,  longs  de  quatre 
pouces ,  n'ont  pas  encore  de  prolongement.  La 
ligne  latérale  a  quelques  ramuscules  jusqu'à  l'en- 


5î)G  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

droit  OÙ  elle  se  fléchit,  et  alors  elle  n'est  plus  com- 
posée que  de  tubes  relevés. 

La  couleur  paraît  avoir  été  verdâtre,  mêlée  de 
bleu  sur  le  dos,  et  pâlissant  sous  le  ventre.  Il  y  a  der- 
rière l'œil  une  tache  qui  dans  l'alcool  paraît  bleu 
foncé ,  et  un  trait  de  cette  couleur  occupe  la  base 
de  la  pectorale.  La  dorsale  est  d'un  rouge  de  mi- 
nium; des  taches  de  cette  même  couleur,  mais 
beaucoup  plus  foncée,  sont  à  l'angle  de  la  base  de 
chaque  rayon,  et  laissent  leur  trace  sur  les  individus 
décolorés,  par  des  lignes  obliques  et  paies.  La  caudale 
a  la  base  de  la  même  couleur,  l'extrémité  verdàlre, 
et  sur  les  deux  angles,  supérieur  et  inférieur,  on 
voit  deux  lignes  obliques  violettes.  L'anale  a  la  base 
bleuâtre  ou  violette;  l'autre  moitié  devient  plus  rou- 
geâtre,  et  ces  deux  nuances  sont  séparées  par  un 
trait  violet  et  onduleux,  dont  on  voit  encore  la  trace 
sur  les  individus  décolorés.  Il  y  a  deux  fins  lisérés 
plus  effacés  près  du  bord  de  la  nageoire.  La  ventrale 
a  une  teinte  verdâtre,  et  les  pectorales  tirent  plus 
au  violet. 

Les  jeunes  individus  ont  le  corps  couvert  de  ta- 
ches bleues  ou  noirâtres;  une  bandelette  claire  et  sans 
tache  sur  le  milieu  des  côtés;  la  caudale  rouge,  sans 
trace  de  tache  violette  vers  les  angles.  La  joue  est 
traversée  obliquement  par  trois  bandes  onduleuses, 
qui  paraissent  d'un  blanc  bleuâtre  très-pâle  sur  nos 
individus  décolorés  par  l'alcool. 

Nous  avons  aussi  retrouvé  un  individu  de 
cette  espèce  parmi  les  poissons  de  la  Havane, 
donné  par  M.  Poey,  et  dans  le  dessin  fait  sur 


CHAP.    X.    GIRELLES.  597 

le  vivant,  qu'il  a  bien  voulu  nous  commu- 
niquer, nous  avons  pris  une  idée  des  teintes 
du  poisson  frais. 

Le  corps  est  vert,  un  peu  rembruni  sur  le  dos;  la 
Laclie  du  haut  de  l'opercule  est  verte  et  très-foncée;  la 
tête  est  rayée  de  rouge,  ainsi  que  la  bande  oblique,  qui 
traverse  le  haut  de  l'opercule,  descend  sur  le  devant 
de  la  pectorale  et  se  termine  sous  le  ventre,  un  peu 
en  arrière  de  l'insertion  des  ventrales;  la  dorsale  est 
toute  rouge;  la  caudale  est  verte,  et  porte  trois  ban- 
delettes rouges  :  la  mitoyenne  est  dans  le  sens  de 
la  longueur  du  corps  du  poisson;  les  deux  autres, 
obliques,  tendent  à  converger  au-delà  du  bord  de  la 
nageoire;  l'anale  est  bleue,  et  porte  sur  le  milieu 
une  large  bande  verte. 

Cette  même  espèce  a  été  observée  et  peinte 
au  Brésil  par  Parkinson.  Le  dessin  conservé 
dans  la  Bibliothèque  de  Banks ,  ne  porte 
pas  de  nom,  et  nous  n'avons  pas  trouvé  de 
description  qui  y  fut  relative  parmi  celles  de 
Solander. 

La  couleur  du  corps  y  est  indiquée  verte,  variée 
de  bleu  et  de  lilas;  la  dorsale  est  peinte  en  vert,  et 
tachetée  et  bordée  de  rouge;  le  trait  vert  de  l'anale 
est  entre  deux  bandes  violettes  :  d'ailleurs  la  tête  et 
la  caudale  sont  de  même  rayées  de  rouge. 


398  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

La  GiRELLE    PATATE. 
{Julis  patatus  j  nob.) 

Nous  avons  encore  trouve  parmi  les  pois- 
sons de  la  collection  de  M.  Plée,  plusieurs 
individus  d'une  assez  grande  espèce  de  girelle, 
sans  aucune  autre  indication  que  le  nom  sous 
lequel  les  nègres  la  désignent  à  la  Martinique  : 
c'est  la  patate  verte  des  pécheurs. 

Elle  a  l'œil  petit  :  son  diamètre  ne  fait  guère  que 
le  septième  de  la  tête,  qui  est  contenue  quatre  fois 
et  un  tiers  dans  la  longueur  du  corps. 

Il  n'y  a  que  deux  canines  à  la  mâchoire  supé- 
rieure, suivies  d'une  série  de  petites  dents  coniques; 
et  à  l'angle  de  la  bouche  il  y  a  deux  crochets  sail- 
lans.  La  mâchoire  inférieure  a  quatre  canines.  A  cha- 
que mâchoire,  derrière  ces  dents  coniques,  il  v  a 
deux  ou  trois  rangs  de  tubercules  arrondis  et  grenus. 

D.  9/11;  A.  3/12;  C.  13;  P.  14;  V.  1/5. 

La  caudale  est  coupée  carrément.  Le  premier  rayon 
mou  de  la  ventrale  se  prolonge  en  filet.  Les  écailles 
sont  grandes,  minces,  entièrement  couvertes  de 
stries  longitudinales  :  on  en  compte  vingt-huit  ran- 
gées entre  l'ouïe  et  la  caudale.  La  ligne  latérale  se  com- 
pose d'une  suite  d'arbuscules  à  longues  branches, 
et  qui  se  continue  jusqu'à  la  nageoire  de  la  queue. 

D'après  son  nom  vulgaire,  nous  devons  présu- 
mer que  la  couleur  de  ce  poisson  est  verte.  L'indi- 
vidu desséché  quia  servi  à  cette  description,  est  brun 


CHAP.    X.    GIRELLES.  599 

jaunâtre ,  et  est  couvert  d'un  réseau  plus  ou  moins 
visible,  formé  par  l'anastomose  de  traits  jaunâtres, 
tracés  sur  la  base  de  chaque  écaille,  et  dont  la  con- 
vexité est  dirigée  du  côté  de  la  tête  et  opposée ,  par 
conséquent,  à  celle  formée  par  la  courbure  du  bord 
libre  de  chaque  écaille.  Un  petit  trait  arqué,  violet, 
tracé  sur  Técaille  surtemporale,  au-dessus  de  la 
naissance  de  la  ligne  latérale ,  paraît  être  un  carac- 
tère constant  de  cette  espèce;  au-dessus  de  cet  arc, 
et  près  de  la  nuque,  on  voit  au-dessus  de  la  ligne  laté- 
rale trois  séries  de  gros  points  violets  prolongés  sur 
le  dos,  et,  au-dessous  de  la  ligne  latérale,  des  vestiges 
de  raies  longitudinales  brunâtres,  plus  visibles  sur 
la  queue  que  sur  les  flancs  ou  sur  le  ventre.  Il  y  a 
aussi  des  vestises  de  taches  brunes  ou  violettes  au- 
dessus  de  l'œil  et  sur  l'opercule.  La  pectorale  a  la 
pointe  et  la  base  du  premier  rayon  noirâtres. 

Cet  individu  a  plus  de  quinze  pouces. 

Deux  autres,  longs  de  treize  pouces,  ont  le  petit 
trait  de  la  tempe  et  les  points  violets  sur  le  dos; 
mais  ils  en  ont  encore  de  très-visibles  sur  la  queue, 
disposés  par  raies  longitudinales  au-dessus  et  au- 
dessous  de  la  ligne  latérale,  qui  est  rameuse  dans 
toute  sa  longueur.  La  caudale  a  des  points  vio- 
lets, et  son  bord  paraît  avoir  été  d'une  autre  cou- 
leur que  le  reste  de  la  nageoire.  Cette  bordure  était 
probablement  jaune.  Les  joues  et  l'opercule  parais- 
sent rivulés  de  petites  lignes  sinueuses ,  ou  chargés 
de  points.  La  dorsale  était  rayée  longitudinalemenl, 
et  une  large  tache  noire,  ou  violet  très-foncé,  cou- 
vre l'espace  compris  entre  le  dernier  rayon  épineux 


400  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

et  le  quatrième  rayon  mou.  Ces  deux  individus  ont 
les  mêmes  dents  que  le  précédent,  sauf  qu'il  n'y  a 
qu'un  seul  crochet  à  l'extrémité  de  l'intermaxillaire- 

Un  quatrième  individu,  seulement  long  de  sept 
pouces  ,  offre  toujours  le  croissant  surtemporal  ; 
mais  sa  ligne  latérale  n'est  plus  rameuse  que  dans 
sa  partie  droite  :  à  partir  de  l'inflexion,  elle  est  com- 
posée de  tubes  en  relief  simple.  Il  offre  aussi  des 
différences  dans  la  disposition  des  couleurs;  mais  je 
le  regarde  encore  comme  de  la  même  espèce.  Le- 
dos  avait  cinq  ou  six  bandes  claires,  formées  par  de 
grandes  taches  ainsi  distribuées.  La  nuque  est  brun 
jaunâtre.  Une  première  tache  de  même  teinte  occupe 
l'espace  compris  entre  les  trois  premières  épines, 
et  descend  jusqu'à  la  ligne  latérale;  sous  la  quatrième 
est  la  seconde  bande  claire;  sous  les  cinquième,  sixième 
et  septième  épines,  est  une  autre  grande  tache  un  peu 
plus  foncée  que  la  précédente;  depuis  la  septième  à 
la  neuvième  est  la  troisième  bande  claire,  plus 
nettement  dessinée,  parce  que  la  tache  qui  la  suit 
est  presque  noire  :  elle  monte  sur  la  nageoire,  et 
s'étend  jusqu'au  huitième  rayon  mou;  une  quatrième 
tache  noire  occupe  les  quatre  derniers  rayons  de 
la  dorsale;  une  cinquième,  sur  la  croupe  delà  queue, 
est  située  à  la  base  des  rayons  supérieurs  de  la 
caudale,  et  enfin  une  sixième  et  dernière  est  sur  la 
nageoire  même  de  la  queue,  au-dessus  et  à  l'extré- 
mité de  la  ligne  latérale. 

Au-dessous  de  la  ligne  latérale  les  flancs  portent 
quatre  ou  cinq  lignes  brunes.  Le  préopercule  a  des 
rivulalions  violettes,  et  l'opercule  des  taches  de  même 


CHAP.    X.    GIRELLES.  401 

couleur.  La  pectorale  a  dans  l'angle  supérieur  de 
l'aisselle  une  petite  tache  noire  :  d'ailleurs  je  ne  vois 
pas  que  les  autres  nageoires  aient  été  rayées  ou  ponc- 
tuées. 

Nous  avons  sous  les  yeux  un  dessin  fait  à 
la  Havane  par  M.  Poey,  qui  représente  évi- 
demment cette  dernière  variété  ;  elle  porte 
dans  ce  pays  le  nom  de  doncella^  qui  lui  est 
commun  avec  les  autres  girelles.  C'est,  suivant 
ce  naturaliste,  un  des  plus  beaux  poissons  de 
l'île  de  Cuba. 

Il  a  le  dos  verdàtre,  tirant  au  jaune  à  cause  des 
reflets  de  cette  couleur  qui  brille  sur  chaque  écaille. 
Le  long  de  la  base  de  la  dorsale  il  y  a  de  grandes 
taches  brunes,  mêlées  de  jaune,  celle  du  milieu 
est  plus  foncée  et  bleue.  Le  corps  offre,  sur  un  fond 
jaune,  de  larges  bandes  longitudinales  bleues,  agréa- 
blement variées  et  mélangées  par  des  reflets  ou  ta- 
ches jaunes.  La  raie  mitoyenne  est  pâle  :  celle  qui 
est  sous  le  ventre  est  bleu  d'azur. 

Le  dessus  de  la  tête  est  vert  et  les  côtés  sont 
jaunes,  parsemés  de  taches  ou  de  petits  traits  d'une 
belle  couleur  bleu  d'outremer.  Il  y  a  aussi  des  raies 
de  même  couleur  sur  la  queue  et  sur  les  nageoires 
dorsale  et  anale.  Les  pectorales  et  les  ventrales  sont 
bleuâtres. 

Telles  sont  les  variétés  observées  sur  la  na- 
ture et  déposées  maintenant  dans  le  Cabinet 
du  Roi.  Elles  ne  nous  paraissent  constituer 

i3.  26  • 


402  LIVRE  XVI.   LABROÏDES. 

qu'une  seule  espèce,  qu'il  est  assez  difficile 
de  déterminer  d'après  les  difFérens  auteurs 
qui  nous  ont  précédés,  quoiqu'il  ne  serait  pas 
impossible  qu'elle  n'ait  été  indiquée  par  plu- 
sieurs d'entre  eux,  qui  en  auraient  vu  des 
variétés  difficiles  à  retrouver  dans, leurs  des- 
criptions et  qui  les  auraient  peut-être  confon- 
dues avec  l'espèce  suivante.  M.  Poey  lui-même 
fait  observer  dans  la  note  jointe  à  sa  figure, 
que  ce  poisson  varie  beaucoup. 

La  GiRELLE  DU  Prince. 
i^Julis  Principis y  nob.) 

Nous  avons  aussi  observé,  dans  les  collec- 
tions faites  à  Bahia  par  M.  Blanchet,  une  assez 
grande  girelle,  qui  me  paraît  devoir  être  rap- 
portée au  lahriis  brasiliensis  àe  Bloch,  parce 
que  les  dissemblances  qui  existent  lors  d'une 
première  comparaison,  dépendent  des  falsifi- 
cations que  Bloch  a  fait  subir  à  la  figure  du 
prince  Maurice  de  Nassau ,  qui  lui  a  servi 
pour  faire  de  ce  poisson  un  être  entièrement 
composé  de  fantaisie. 

Celte  girelle  a  le  corps  semblable  à  ceux  des  es- 
pèces précédentes.  La  hauteur  est  comprise  trois  fois 
et  deux  tiers  dans  la  longueur  totale,  laquelle  con- 
tient quatre  fois  celle  de  la  tête.  La  dorsale  épineuse 


CIIAP.    X.    GIRELLES.  405 

est  plus  basse  que  la  portion  molle.  La  caudale  est 
coupée  carrément. 

D.  9/11;  A.  3/12,  etc. 

La  ligne  latérale  est  rameuse;  il  y  a  vingt -cinq 
rangées  de  grandes  écailles  entre  l'ouïe  et  la  cau- 
dale :  elles  sont  toutes  assez  fortement  striées.  Le 
poisson  semble  couvert  d'un  réseau  violet,  formé 
par  les  anastomoses  des  lignes  qui  sont  à  la  base 
de  chaque  écaille.  Il  y  a  trois  raies  violettes  sur  la 
nuque  :  une  ou  deux  vont  de  l'œil  vers  le  bout  du 
museau  par  le  travers  du  sous-orbitaire.  L'opercule 
est  traversé  par  de  grandes  rayures  violettes.  La  dor- 
sale a  un  bord  de  celte  couleur,  et  des  lignes  sem- 
blables, irrégulières  et  interrompues  sur  la  portion 
molle  :  ces  rivulations  sont  aussi,  mais  en  plus  grand 
nombre ,  sur  la  caudale.  L'anale  a  deux  raies  vio- 
lettes et  un  liséré  de  cette  même  couleur.  La  pec- 
torale a  le  bord  et  l'aisselle  colorés  de  même. 

Ce  poisson  est  long  de  onze  pouces. 

Je  crois  que  c'est  à  lui  qu'il  faut  rapporter 
ce  que  dit  Margrave  de  son  purliano  verde.  Il 
donne  (p.  1 46)  sous  ce  nom  la  figure  d'une 
girelle  dont  les  couleurs  se  rapportent  tout- 
à-fait  à  la  description  précédente. 

Nous  avons  retrouvé  dans  le  livre  du  prince 
Maurice  l'original  de  cette  figure.  Ce  dessin 
porte  le  nom  de  tetimixira  que  très -proba- 
blement l'éditeur  de  Margrave  a,  par  erreur, 
écrit  dans  l'article  qui  précède  et  qui  a  rapport 


404  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

à  notre  cossjplius  bodianus^  dont  nous  avons 
déjà  parlé  plus  liaut.  Ce  cossyphe  est  d'une 
belle  couleur  jaune;  aussi  Margrave,  indiquant 
son  nom  brésilien  ,  aipimixira^  le  donne 
comme  le  hodiano  ou  le  pudiano  vermelho, 
ou  le  hodian  jaune  des  Portugais ,  qui ,  par 
opposition,  appellent  le  t etimixir a ,  pudiano 
ver  de  ou  le  bodian  vert. 

Le  dessin  du  prince  Maurice  n'a  que  trois 
pouces  et  demi.  Il  en  existe  un  autre  sous 
un  nom  qui  est  certainement  le  même,  quoi- 
que écrit  un  peu  différemment ,  dans  le  livre 
de  Mentzel.  Cette  figure,  longue  de  neuf  pouces 
et  demi,  porte  pour  inscription  jetigmicira. 

Les  couleurs  sont  disposées  de  la  même 
manière  et  à  peu  de  chose  près  de  la  même 
teinte.  Cette  peinture  n'a  pas  été  consultée. 
Celle  du  prince  Maurice  a  été,  de  l'aveu  de 
Bloch  lui-même,  copiée  dans  son  Ichthyo- 
logie  (pi.  280)  5  mais  ce  qu'il  ne  dit  pas,  c'est 
qu'il  l'a  altérée  tellement  qu'elle  ne  ressemble 
plus  du  tout  à  l'original.  En  premier  lieu,  la 
caudale,  qui  est  carrée,  est  devenue  échan- 
crée  en  croissant,  avec  les  deux  lobes  pro- 
longés en  pointe;  le  dos,  verdâtre  tacheté 
de  bleu,  a  été  coloré  en  orangé  vif,  et  cha- 
que écaille  bordée  d'un  croissant  bleu  d'azur; 
les  flancs,  peints  en  jaune  verdâtre  et  recou- 


-CHAP.    X.    GIRELLES.  405 

verts  d'un  réseau  bleu ,  ont  été  changes  par 
le  peintre  de  Bloch  en  jaune  vif,  et  les  écailles 
ont  été  lisérées  de  rouge;  les  nombres  des  raies 
de  la  dorsale  et  de  l'anale  ont  été  altérés;  la 
caudale  a  été  faite  d'une  seule  teinte  bleue, 
tandis  qu'elle  est  tachetée  :  les  rayures  de  la 
tête  ne  sont  pas  plus  exactes;  enfin,  il  a  triplé 
la  grandeur  du  dessin. 

M.  Liclîtenstein ,  dans  son  savant  Mémoire 
sur  les  poissons  de  Margrave,  que  nous  avons 
déjà  cité  plusieurs  fois,  a  fait  ces  mêmes  re- 
marques; mais  nous  ne  croyons  pas  qu'il  ait 
eu  raison  de  considérer  le  hudiano  verde 
comme  identique  du  lahrus  viridis,  figuré 
planche  282.  Ce  dernier  est  une  girelle  abon- 
dante dans  les  mers  de  l'Inde.  Nous  en  avons 
reçu  un  grand  nombre  d'individus,  et  Bloch 
tenait  lui-même  ses  deux  exemplaires  proba- 
blement de  Java,  quoiqu'il  les  fasse  venir  du 
Japon.  Son  dessin,  fait  d'après  nature,  est 
exact,  ainsi  que  nous  le  dirons  dans  un  des 
articles  suivans ,  en  traitant  de  cette  espèce. 

Nous  pensons  que  Bloch,  qui  a  suivi,  d'ail- 
leurs, avec  tant  d'inexactitude  pour  son  en- 
luminure la  figure  du  prince  Maurice,  a  pris 
pour  le  dessin  celle  de  Willughby,  tab.  X,  g. 
Bloch  regarde  cette  figure  comme  préférable 
à  celle  du  prince,  et  en  cela  il  s'est  trompé; 


406  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

car  il  est  facile  de  reconnaître  que  cette  ligure 
de  Willughby,  quoique  mauvaise  et  à  peu 
près  indéterminable,  ne  convient  en  aucune 
façon  au  poisson  de  Margrave. 

Pison  rétablit  le  nom  de  tetimixira  à  la 
figure  du  pudiano  vercle  de  Margrave. 

Plumier  a  laissé  parmi  ses  dessins  de  pois- 
sons de  la  Martinique,  sous  le  nom  de  petit 
perroquet,  et  avec  cette  note  turdus  alias 
marinus  varius,  la  représentation  d'un  pois- 
son qui  ressemble  tellement  à  notre  espèce 
que  nous  croyons  devoir  l'y  rapporter,  bien 
qu'il  y  ait  quelques  légères  différences  dans 
la  distribution  et  dans  les  nuances  des  cou- 
leurs. 

Ce  dessin  de  Plumier  nous  met  sur  la  voie 
de  reconnaître  la  figure  peu  exacte  de  Catesby 
(pi.  12 ).  Le  poisson  aura  été  coloré  d'après 
un  individu  dont  les  couleurs  étaient  altérées 
par  la  mort  5  mais  il  est  certain  qu'il  est  de 
la  même  espèce.  Nous  ne  voyons  pas  que 
Blocli,  Gmelin  et  M.  de  Lacépède  aient  fait 
usage  de  ces  figures. 

Nous  ^^trouvons  encore  la  représentation 
d'une  variété  de  ces  girelles  dans  un  ouvrage 
plus  récent,  celui  de  Parra.  Cet  auteur  donne 
(p.  gS,  pi.  37,  fig.  i),  sous  le  nom  de  don- 
cella,  la  figure  d'une  girelle  dont  la  tête  et 


CHAP.    X.    GIRELLES.  407 

le  dos  sont  rayés  ou  tachetés  de  bleu.  Les 
flancs  ont  du  rosé,  et  le  dessous  du  corps  est 
vert;  la  dorsale,  l'anale  et  la  caudale,  sont 
vertes,  bordées  de  bleu;  les  pectorales  ont 
du  rosé  à  la  base  :  le  reste  est  du  même  vert 
que  les  autres  nageoires. 

Cet  auteur  s'accorde  avec  Margrave  et 
Pison  sur  la  bonté  de  la  chair  de  ces  pois- 
sons ,  que  l'on  recherche  dans  les  difterens 
points  de  la  cote  d'Amérique. 

La    GiRELLE    PARTAGÉE. 

{Julis  dimidiatus ,  Agass.  ) 

Nous  avons  aussi  trouvé  dans  les  collections 
faites  à  Bahia  par  M.  Blanchet,  la  girelle  que 
M.  Spix  avait  prise  sur  les  côtes  de  l'Atlantique , 
et  dont  il  a  laissé  une  figure  dans  son  histoire 
des  poissons  du  Brésil,  planche  53. 

M.  Agassis  en  a  publié  la  description  d'a- 
près le  seul  exemplaire ,  long  de  six  pouces 
et  quelques  lignes,  conservé  dans  le  Musée 
de  Munich. 

Il  est  d'une  couleur  rosé  foncé  sur  le  dos  et  le  long 
des  flancs-  il  y  a  une  large  bande  violette,  étendue 
depuis  le  bout  du  museau  jusqu'à  la  caudale.  La 
dorsale  est  rosée  tout  le  long  de  son  bord  et  jusqu'à 
la  cinquième  épine  :  le  reste  est  violet.  L'anale  est 
violette,  bordée  de  rosé;  la  caudale  a  le  lobe  supé- 


408  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

rieur  bleu,  et  l'inférieur  rose;  la  pectorale,  bleue, 
a  du  jaune  à  sa  base;  les  ventrales  sont  roses. 
Les  nombres,  d'après  M.  Agassis,  sont  : 

D.  9/13  ;  A.  3/13  ;  C.  12  ;  P.  12  ;  V.  1/5. 

Nous  en  avons  des  individus  bien  plus 
grands  :  ils  atteignent  à  un  pied. 

Leurs  canines  mitoyennes  sont  fortes  et  crochues; 
les  dents  grenues  sont  sur  trois  rangs,  derrière  les 
coniques  du  bord  externe.  Je  vois  le  bleu  du  dos 
se  prolonger  sur  la  tête  en  une  ligne  passant  entre 
les  yeux,  et  se  terminer  à  la  lèvre  supérieure.  Une 
large  bande  bleue,  bordée  de  chaque  côté  d'un  trait 
plus  foncé;  monte  de  l'œil  sur  la  nuque,  et  une 
tache  large  et  de  même  couleur,  couvre  l'insertion 
de  l'opercule.  La  dorsale  est  bleue,  lisérée  de  rose; 
mais  ce  liséré  est  partagé  en  deux  traits  par  une  ligne 
bleue,  plus  foncée  que  la  couleur  de  la  dorsale.  Le 
liséré  rose  de  l'anale  est  bordé  de  violet. 

La  même  espèce  nous  a  été  aussi  envoyée 
de  la  Martinique  par  M.  Garnot. 

La    GïRELLE    DÉGRAISSEUR. 
{Julis  detersory  nob.  ) 

Les  mers  des  Antilles  produisent  encore  une 
girelle,  facile  à  reconnaître  parla  distribution 
nette  et  tranchée  de  ses  couleurs  et  par  la  forme 
de  sa  caudale ,  qui  est  trcs-fourchue. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  409 

Les  autres  parties  de  ce  poisson  sont  faites  sur  le 
plan  général  des  gl relies.  Les  nombres  sont  : 
D.  8/13;  A.  3/11,  etc. 

La  portion  épineuse  de  la  dorsale  est  basse  et  cou- 
verte d'écaillés.  La  tête  et  la  poitrine  sont  d'une  belle 
teinte  violette,  presque  noire  :  le  reste  du  corps  est 
vert  brillant.  La  portion  antérieure  de  la  dorsale,  la 
pointe  des  pectorales  et  les  fourches  de  la  caudale, 
sont  de  la  même  couleur  que  la  tête  ;  le  reste  de  la 
dorsale  et  de  l'anale  a  une  teinte  vert  clair;  l'in- 
térieur du  croissant  de  la  caudale  est  gris. 

Nous  avons  un  individu  de  cette  espèce, 
long  de  sept  pouces,  provenant  de  la  baie 
du  Port-au-Prince  de  Saint-Domingue,  oii 
M.  Ricord  le  dit  rare.  D'autres ,  plus  petits,  ont 
été  envoyés  de  la  Martinique  par  M.  Plée.  Ce 
poisson  y  porte  le  nom  de  dégraisseur^  à  cause 
de  l'adresse  avec  laquelle  il  sait  manger  l'ap- 
pât que  les  nègres  mettent  à  leurs  lignes,  sans 
mordre  à  l'hameçon  et  se  laisser  prendre. 

La    GiRELLE    LUNAIRE. 

{Julis  lunarîSj  nob.;  Lahrus  lunaris  j  Linn.) 

Après  ces  espèces  américaines,  nous  allons 
nous  occuper  de  celles  plus  nombreuses  qui 
peuplent  les  mers  de  l'Inde. 

Nous  commencerons  par  une  espèce  de  la 
mer  Rouge  qui  y  a  été  observée  par  Forskal, 


'ilO  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

mais  que  Linné  avait  déjà  inscrite  dans  le  Sjs- 
tema  naturce.  Elle  abonde,  d'ailleurs,  sur  toutes 
les  côtes  des  mers  orientales  de  l'Inde.  La  beauté 
de  ses  couleurs  l'a  fait  observer  et  peindre  par 
plusieurs  voyageurs,  et  cependant  son  histoire 
naturelle  n'a  pas  encore  été  bien  présentée  par 
les  naturalistes  qui  nous  ont  précédés. 

Elle  a  le  museau  plus  aigu  que  celui  de  la  girelle 
commune  et  de  celles  qui  lui  ont  été  déjà  compa- 
rées. Le  corps  est  beaucoup  moins  rétréci  en  ar- 
rière. La  hauteur  de  la  portion  comprise  entre  la 
dorsale  et  la  caudale,  surpasse  la  moitié  de  la  plus 
grande  hauteur  du  corps,  laquelle  est  du  quart  de 
la  distance  prise  entre  le  bout  du  museau  et  le  mi- 
lieu du  croissant  de  la  caudale.  Les  fourches  de 
cette  nageoire  sont  longues  et  pointues;  les  ven- 
trales sont  petites ,  les  pectorales  médiocres  et  trian- 
gulaires, les  nageoires  dorsale  et  anale  peu  élevées. 
D.  8/13;  A.  3/10;  G.  V6;  P.  15;  V.  1/5. 

Les  écailles,  très -minces,  ont  quelques  stries  à 
peine  visibles.  La  ligne  latérale  est  rameuse. 

Ce  poisson  nous  paraît  convenir  en  tous 
points  au  scarus  gallus  de  Forskal. 

Il  lui  donne  un  fond  vert  obscur  pour  la  cou- 
leur générale  de  la  tête  et  du  corps.  Chaque  écaille 
est  éclairée  par  un  petit  trait  vertical  pourpre.  La 
tète  a  de  même  des  raies  violettes,  ainsi  distribuées: 
il  y  en  a  une  impaire  sur  le  verlex;  puis,  de  chaque 
côté  de  l'extrémité  du  museau,  un  trait  va  à  l'œil; 


CHAP.    X.    GIRELLES.  A\  \ 

du  bord  postérieur  de  î'orblte  on  en  voit  naître  quatre 
ou  cinq  autres,  dont  les  deux  supérieurs  remontent 
sur  le  haut  du  crâne ,  et  les  inférieurs  sont  étendus 
sur  les  opercules  sans  les  dépasser.  De  l'angle  de  la 
mâchoire  inférieure  partent  deux  nouvelles  bande- 
lettes 5  qui  traversent  l'une  le  bas  du  préopercule, 
l'autre  l'inleropercule,  se  prolongent  sur  la  poitrine 
et  s'évanouissent  vers  l'anale.  La  dorsale  et  l'anale  ont 
le  bord  libre  verdâtre,  la  base  violette  et  le  milieu 
bleu.  Les  deux  pointes  de  la  caudale  sont  bordées 
de  bleu,  et  violettes  dans  le  milieu  :  l'intérieur  de 
la  fourche  de  cette  nageoire  est  jaune.  La  pectorale 
a  une  tache  pourpre  oblongue  sur  ses  plus  longs 
rayons  :  le  reste  de  la  nageoire  est  bleu.  Les  ven- 
trales ont  les  mêmes  couleurs,  avec  le  second  rayon 
seul  pourpre. 

Nous  voyons  par  un  dessin  fait  à  Massuah, 
que  nous  devons  à  M.  Ehrenberg,  que  la  des- 
cription de  ces  couleurs  est  d'une  grande  exac- 
titude. Ce  voyageur  a  vu  des  individus  dont 
la  base  de  l'anale  est  verte.  Un  autre  dessin , 
conservé  dans  la  belle  bibliothèque  de  la  mai- 
son de  la  Compagnie  des  Indes,  et  qui  m'a 
été  communique  par  M.  le  docteur  Horsfield, 
représente  aussi  cette  espèce  de  girelle  peinte 
des  mêmes  couleurs.  Il  a  été  fait  à  Siam,  et 
envoyé  de  ce  lieu  par  le  docteur  Finlayson; 
mais  des  auteurs  plus  anciens  avaient  aussi 
observé  ce  beau  poisson.  La  figure  que  Rein- 


412  LIVRE    XVI.    LABPvOÏDES. 

hold  Forster  a  publiée  dans  la  Zoologie  in- 
dienne, quoique  d'un  dessin  fort  peu  correct, 
est  peinte  exactement  des  mêmes  couleurs  : 
c'est  son  lahrus  zejlonicus.^ 

Un  autre  dessin,  exécuté  par  Parkinson, 
et  non  publié,  mais  que  Ton  peut  encore  con- 
sulter dans  la  bibliothèque  de  Banks,  prouve 
que  l'espèce  se  trouve  à  Otaïti  :  elle  y  est 
nommée  lahrus  lorius.  Solander,  dans  ses 
manuscrits,  cbangea  ce  nom  en  celui  de  lahrus 
ornatus. 

MM.  Kuhl  et  Van  Hasselt  ont  peint  à  Java 
une  variété  de  cette  espèce.  Le  fond  du  corps 
est  bleu  et  non  pas  vert 5  la  tête  a  les  lèvres 
et  le  front  bleus,  ainsi  que  la  bande  supérieure, 
qui  va  de  l'angle  de  la  bouche  se  perdre  sur 
la  poitrine;  l'intervalle  entre  les  autres  raies 
pourpres  de  la  tête  est  la  seule  partie  verte 
qu'offre  ce  dessin. 

Déjà  Seba  avait  donné  une  représentation 
de  cette  girelle  (t.  III,  pi.  3i,  lîg.  7).  Cette 
figure,  citée  par  Pennant,  à  l'article  de  son 
lahrus  zejlonicus,  a  été  oubliée  par  Gmelin. 
Celui-ci  a  introduit  parmi  ses  labres  l'espèce 
de  Forster  ou  de  Pennant,  et  sans  reconnaître 
son  identité  avec  le  ^aïlus  de  Forskal,  il  re- 

1.  Pennant,  Ind.  zool. ,  tabl.  XVI,  p.  56. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  413 

produisit  une  seconde  fois  cette  espèce,  sous 
le  nom  de  lahrus  gallus,  en  la  conservant  sous 
la  troisième  dénomination  de  lahrus  lunaris, 
d'après  Gronovius.  La  figure^  de  cet  auteur  est 
moins  correcte  que  celle  de  Seba ,  et  serait  plus 
difficile  à  reconnaître,  s'il  ne  disait  qu'il  a  com- 
pare son  individu  avec  celui  du  cabinet  de 
Seba.  C'est  sans  doute  par  erreur  qu'il  a  dit 
que  l'anale  a  quatorze  rayons  mous  :  il  aura 
compte  tous  les  rayons  de  cette  nageoire,  qui 
en  a  trois  épineux  et  onze  mous.  Cette  figure 
de  Gronovius  a  été  copiée  dans  l'Encyclopé- 
die, mais  d'une  manière  si  inexacte  qu'elle  n'est 
plus  reconnaissable. 

M.  de  Lacépède  a  suivi  Bonnaterre  et  Gme- 
lin,  pour  établir  ses  deux  espèces  de  labre 
croissant  et  de  labre  Ceilan;  mais  nous  ne 
pouvons  comprendre  comment  il  a  été  amené 
à  penser  que  le  scarus  gallus  devait  être  mis 
à  côté  de  l'osphromène.  Il  en  a  fait  la  seconde 
espèce  de  ce  genre  sous  le  nom  d'osphronème 
gai.  Nous  avons  déjà  fait  cette  remarque 
en  traitant  de  ce  genre  (voyez  t.  VII,  p.  386). 
Shaw^,  copiant  M.  de  Lacépède  en  a  tirp  son 
tricbopode  arabique. 

Plus  récemment  M.  Gray  vient  de  publier 

1.  Mus.  ichth.,  labl.  VI,  fig.  2. 


414  LIVRE    XVI.    LADROÏDES. 

une  nouvelle  figure  coloriée  de  cette  espèce, 
dans  les  Illustrations  de  la  Zoologie  indienne 
du  major-général  Hardwick,  planche  9  de  la 
série  des  poissons.  Il  Ta  crue  nouvelle,  et 
il  lui  a  donné  le  nom  de  j'iilis  Hardwichii; 
mais  il  suffit  de  comparer  cette  figure  avec 
nos  clifFérens  individus,  pour  s'assurer  de  la 
vérité  de  notre  synonymie.  M.Ruppelavu  aussi 
le  labrus  lunariS)  mais  il  n'y  a  rapporté  qu'a- 
vec doute  la  citation  de  M.  Gray.  Enfin,  nous 
avons  encore  notre  espèce  dans  \ejulis  porphy- 
rocephalusàe  Bennett,  mentionné  dans  lesPro- 
ceedijigs  de  la  Société  zoologique  de  Londres. 

Blocli  a  donné,  sous  le  nom  de  labinis  lii- 
naris  (pi.  281),  une  girelle  d'une  espèce  par- 
ticulière ,  mais  c[ui  est  bien  loin  d'être,  comme 
il  le  croit,  identique  avec  le  poisson  de  Gro- 
novius.  Nous  verrons  tout  à  Tlieure  de  quelle 
espèce  on  doit  le  rapprocher. 

Les  individus  de  la  collection  du  Muséum 
n'ont  que  sept  pouces  de  longueur. 

Forster  dit  qu'il  en  a  vu  d'un  pied  et  un 
quart.  Suivant  lui,  ce  poisson  est  nommé  à 
Ceilan  par  les  Cingalais  dscliirau-niâlu,  et 
par  les  Hollandais  papegaaj-viscli  (poisson 
perroquet),  nom  commun  à  la  plupart  des 
labres.  Le  bas  peuple  de  cette  île  seul  le  mange. 
Cette  assertion  est  bien  opposée  à  ce  qui  a 


CHAP.    X.    GIRELLES.  415 

été  rapporté  à  Foiskal,  qui  le  donne  pour  un 
poisson  très-venimeux,  et  dangereux  même 
par  le  tact  (^venenatissimus  feront  vel  lei^iter 
tactiim).  Son  nom  arabe  à  Lohaje  est  dik  el 
bdlir  ou  mo^haj^red.  M.  Ehrenberg  dit  qu'on 
le  connaît  sous  le  nom  de  liassad  à  Massuah, 
et  Solander,  sous  celui  e  pahu  e  paathi, 
d'Otaïti. 

La    GiRELLE    CROISSANT. 

{Jidis  menisciis^  nob.) 

La  mer  des  Indes  nourrit  encore  une  es- 
pèce  très  -  semblable  à   la  précédente  j  mais 

elle  a  la  tête  plus  grosse,  le  front  plus  bombé,  le 
museau  plus  arrondi ,  ce  qui  le  rend  plus  obiusj  les 
dents  un  peu  plus  fortes.  Les  fourches  de  la  caudale 
paraissent  un  peu  plus  longues,  et  je  lui  compte 
deux  rayons  de  plus  à  l'anale. 

D.  8/13;  A.  3/12,  etc. 
Les  couleurs  de  cette  espèce  ont  été  décrites  sur 
le  poisson  sortant  de  l'eau  par  M.  Dussumier;  leur 
distribution  est  tout- à- fait  semblable  à  celle  de  la 
girelle  lunaire;  mais  leurs  nuances  diffèrent  un  peu.  Le 
dos  et  le  ventre  étaient  bleus,  et  le  milieu  des  côtés 
vert;  les  traits  verticaux  étaient  de  couleur  ama- 
ranthe;  la  dorsale  et  l'anale  étaient  rayés  longitudi- 
nalement  d'orangé,  de  bleu  de  ciel,  de  jaune;  du 
bleu,  de  l'orangé  et  du  vert,  colorent  la  pectorale. 
Les  raies  de  la  tête  tranchent  par  leur  couleur  brune 
sur  le  fond  vert. 


41 G  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Ce  poisson,  assez  rare  aux  Séchelles,  a, selon 
le  même  observateur ,  la  chair  agréable  et  saine. 

La  collection  du  Muséum  possède  d'autres 
individus  de  la  même  espèce,  dont  plusieurs 
sont  depuis  très-long-temps  conservés  dans 
l'alcool  5  ils  faisaient  partie  du  Cabinet  du 
Stadlîouder.  Un  autre,  le  plus  grand  de  tous, 
vient  du  voyage  de  Pérou  ;  il  a  neuf  pouces 
de  longueur. 

M.  de  Gernaart,  consul  de  France  à  Can- 
ton, vient  de  nous  en  envoyer  des  individus 
des  mers  de  Chine,  et  tout  récemment  nous 
avons  observé  cette  espèce  dans  les  belles 
collections  rapportées  par  MM.  Eydoux  et 
Souleyet.  Ils  l'ont  prise  à  Macao. 

La    GiRELLE    A   JOUES    RAYÉES. 

(Julis  geîiivittatus ,  nob.) 

Les  mers  de  l'Isle- de -France  nourrissent 
en  abondance  une  autre  girelle,  qui  paraît 
offrir  presque  autant  de  variétés  que  l'espèce 
de  la  Méditerranée. 

Elle  a  le  museau  aigu  et  les  formes  générales 
de  la  girelle  verte;  mais  les  pointes  de  la  caudale 
sont  moins  prolongées.  Les  couleurs,  disposées  à 
peu  près  comme  celles  de  cette  espèce,  offrent  ce- 
pendant des  différences  :  la  plus  notable  consiste 
dans  la  tache  de  la  pectorale,  laquelle  n'est  pas  en 


CHAP.    X.    GIP.ELLES.  417 

ovale  limité  sur  celle  nageoire;  mais  qui  s'étend 
jusqu'à  la  pointe,  et  se  fond  par  degrés  insensibles 
sur  le  bord  des  rayons  inférieurs  dans  l'absence  de 
lignes  prolongées  sur  la  poitrine. 

Commerson,  qui  en  a  rapporté  un  très- 
grand  nombre  d'individus,  en  a  laissé  un 
dessin  colorié;  elle   y  est  représentée 

toute  verte,  foncée  sur  la  têie,  et  plus  claire  (vert-pré) 
sur  le  corps.  Il  y  a  deux  raies  arquées  sur  le  bas  de 
la  joue,  au-dessous  de  l'œil,  et  une  plus  courte  part 
de  l'angle  postérieur  de  Vt>i'bite  et  s'évanouit  sur 
l'opercule.  Un  trait  vertical  rouillé  existe  sur  chaque 
écaille.  La  dorsale  et  l'anale  ont  la  base  brune  et  le 
bord  vert.  Le  croissant  de  la  caudale  est  plus  pâle 
que  la  base  de  la  nageoire,  qui  est,  ainsi  que  les 
ventrales,  du  même  vert  que  le  corps. 

M.  Dussumier,  M.  Desjardins  et  M.  La- 
marre-Piquot,  nous  en  ont  depuis  envoyé  et 
en  nombre  tout  aussi  considérable.  Le  pre- 
mier de  ces  observateurs  nous  les  a  donnés 
sous  les  couleurs  suivantes. 

Une  première  variété  a 

le  corps  vert-pré,  et  les  lignes  verticales  des  écailles 
violettes;  la  tête,  noirâtre,  a  les  joues  rayées  de  vert; 
la  base  de  la  dorsale  est  verle,  le  bord  jaune  et  le 
milieu  violet;  l'anale  n'a  que  deux  bandes  :  une  vio- 
lette et  une  verte  ;  la  caudale ,  verte ,  avait  les  rayons 
externes  violets;  les  ventrales  étaient  blanches,  la 
base  de  la  pectorale  jaune. 
i3.  2-^ 


418  LIVRE    XVI.    LABOÏDRES. 

Une  seconde  variété  a  toujours 
le  corps  vertj  mais  les  traits  verticaux  sont  orangés; 
le  fond  de  la  couleur  de  la  tête  est  un  lilas  brunâtre; 
la  dorsale  n'a  que  deux  raies  vertes  et  lilas,  comme 
l'anale;  les  ventrales  sont  vert  pâle,  ainsi  que  la  base 
des  pectorales. 

D.  8/13;  A.  3/11,  elc. 

M.  de  Lacépède  a  fait  graver  le  dessin  de 
Commerson  j  mais  il  ne  s'en  est  pas  servi  pour 
faire  la  description  de  l'espèce ,  qu'il  avait 
jugée  nouvelle,  et  il  l'a  donnée  clans  sa  planche 
comme  une  variété  du  labre  argenté.  Nous 
avons  vu  que  cette  espèce  nominale  est  faite 
sur  le  sciœna  argentimaculata  de  Forskal, 
dont  les  caractères  doivent  être  ceux  d'une 
diacope,  ainsi  que  nous  l'avons  établi  à  son 
article. 

La    GiRELLE    DE    COMMERSON. 

{Julis  Commersoni  3  nob.) 

D'autres  individus ,  observés  parmi  les  col- 
lections de  Commerson  et  de  M.  J.  Desjar- 
dins, ne  sont  peut-être  encore  qu'une  variété 
de  l'espèce  précédente.  Les  naturalistes  qui 
peuvent  observer  ces  poissons  vivans,  éclair- 
ciront  ce  point  encore  douteux. 

Cette  girelle  a  les  mêmes  formes  et  les  mêmes 
nombres  que  la  précédente.  La  joue  a  sur  le  haut 
des  traces  de  raies;  mais  les  couleurs  sont  cepen- 


CHAP.    X.    GIRELLES.  419 

dant  autrement  distribuées.  Le  dessus  de  la  tête  et 
les  tempes  ont  une  teinte  violet  foncé ,  presque 
noirâtre,  qui  s'étend  sur  le  haut  des  côtés  jusqu'à  la 
fin  de  la  dorsale.  Le  bas  de  la  joue,  les  côtés  du 
corps  et  toute  la  queue  sont  pales  et  décolorés  chez 
tous  les  individus  soumis  à  notre  observation.  Le 
haut  du  dos,  le  long  de  la  base  de  la  dorsale, 
est  brunâtre  ;  et  quelques-uns  des  exemplaires  des- 
séchés, provenant  des  collections  de  Commerson, 
ont  une  teinte  verdàtre  pâle  le  long  du  ventre.  La 
dorsale  a  une  raie  brune  ou  jaunâtre  entre  deux 
bords  verts.  L'anale  n'a  que  deux  raies,  l'une  brune, 
l'autre  verte.  La  caudale  est  pâle  sur  son  croissant, 
et  la  pectorale  noirâtre. 

La  taille  varie,  comme  dans  les  individus  de 
l'autre  espèce ,  de  sept  pouces  à  sept  pouces  et 
demi. 

La    GiRELLE    DE    MaTTHIEU. 

{JiiUs  Matthcei,  nob.) 

Les  espèces  ou  variétés  dont  nous  venons 
de  traiter,  ont  toutes  des  pectorales  dont  la 
longueur  égale  ou  même  dépasse  celle  de  la 
tète. 

M.  Matthieu  a  envoyé  de  l'Isle-de-France 
au  Cabinet  une  girelle  dont 

la  pectorale  n'a  que  la  moitié  de  la  longueur  de  la 
tête,  qui  est  d'ailleurs  comprise  quatre  fois  et  demie 
dans  la  longueur  du  corps,  comme  dans  les  espèces 
précédentes.  Les   raj'ons  inférieurs  de  la  nageoire 


420  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

sont  aussi  plus  alongés,  ce  qui  donne  à  celle  pec- 
torale une  forme  différente;  mais  la  forme  du  corps 
et  les  fourches  de  la  caudale  sont  les  mêmes. 

La  distribution  des  couleurs  est  encore  par  rayures 

sur  la  joue  et  sur  les  nageoires  dorsale  et  anale.  La 

tache  de  la  pectorale  est  plus  petite  ;  le  sonmiet  de 

la  tête  est  violet;  le  corps  paraît  très-pâle,  avec  des 

points  violets,  plutôt  que  des  traits  verticaux. 

Nous  n'avons  qu'un  seul  individu ,  long  de 

six  pouces  ;  c'est  une  variété  fort  notable  de 

l'espèce  à  joue  rayée,  si  elle  ne  doit  pas  être 

regardée  comme  faisant  une  espèce  séparée. 

La    GiRELLE    VERTE. 
{Julis  viridis,  nob.;  Labrus  viridis ,  Bl.  282.) 
Le  poisson  que  Blocli  a  décrit  comme  ori- 
ginaire du  Japon,  et  gravé  sous  le  nom  de 
lahrus  viridis  (pi.  282),  est  une  girelle  voi- 
sine des  espèces  précédentes. 

Sa  lête  parait  un  peu  plus  courte ,  parce  que  le 
museau  est  moins  aigu.  La  caudale  est  de  même  four- 
chue, les  ventrales  prolongées  en  filet,  les  écailles 
assez  grandes  et  très-fmement  striées. 
D.  8/135  A.  3/9,  etc. 
Les  couleurs  sont  un  peu  autrement  distribuées 
que  sur  les  pi^écédentes  :  le  fond  du  corps  est  tou- 
jours un  beau  vert,  et  les  écailles  ont  un  petit  trait 
vertical;  mais  les  raies  de  la  tête  sont  au  nombre 
de  quatre ,  et  les  deux  inférieures  se  prolongent  sur 
la  gorge  et  le  ventre,  jusqu'auprès  de  l'anus. 


CHAP.    X.    GÏRELLES.  42'l 

Nous  en  avons  un  individu  long  de  huit 
pouces  et  demi,  qui  vient  de  l'île  Bourbon, 
d'où  il  a  été  rapporté  par  M.  Leschenault. 

La    GiRELLE    DE    MeRTENS. 

{Julis  Mertensiiy  nob.) 

Une  espèce  voisine  de  celle-ci  ne  nous  est 
connue  que  par  le  dessin  communiqué  par 
M.  Mertens. 

La  couleur  de  la  tête  est  verdâtre,  celle  du  corps 
jaunâtre.  Quatre  raies  orangées  longitudinales  traver- 
sent la  joue;  les  traits  verticaux  des  écailles  sont  de 
la  couleur  des  raies  de  la  tête;  la  base  de  la  dorsale, 
de  l'anale,  de  la  pectorale,  et  les  deux  bords  de  la 
caudale  sont  aussi  de  cette  même  teinte;  les  nageoi- 
res sont  jaune  pâle  :  la  caudale  seule  est  aussi  foncée 
que  le  corps.  Le  dessin  ne  montre  pas  de  tache 
noire  sur  la  pectorale.  Les  nombres  comptés  par 
M.  Mertens  sont  : 

D.  7/13;  A.  2/11,  etc. 

L'individu,  long  de  cinq  pouces,  a  été  des- 
siné à  Uléa. 

La    GiRELLE    DE    DuPERREY. 

{Julis  Duperrei,  Q.  G.;  Voy.  Fraye,  pi.  56,fig.  2.) 

Les  naturalistes  qui  ont  accompagné  M.  Frey- 
cinet,  ont  péché  sur  les  côtes  des  îles  Sand- 
wich une  girelle,  qui  tient  des  précédentes 
par  la  tache  de  sa  pectorale. 


422  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Sa  tête  est  plus  courte  et  plus  grosse;  la  pecto- 
rale est  large ,  surtout  vers  le  bas  ;  à  peu  près  de  la 
même  forme  que  celle  de  la  girelle  de  Matthieu;  la 
caudale  a  ses  pointes  prolongées. 

D.  8/13;  A.  3/11,  elc. 

Les  écailles  sont  assez  grandes  et  finement  striées. 
La  ligne  latérale  est  entièrement  composée  d'une 
série  d'arbuscules.  La  couleur  de  la  tète  est  bleu 
d'outremer:  celte  teinte,  rembrunie  sous  l'œil,  y 
forme  une  taclie  notable.  Il  n'y  a  aucune  trace  de 
lignes  ou  de  taches  sur  la  joue. 

La  dorsale  est  de  la  couleur  du  sommet  de  la  tête, 
l'anale  violette;  la  pectorale  a  du  jaunâtre  orangé  à 
la  base,  et  une  large  tache  lilas,  semée  de  points 
bleus,  couvre  la  pointe.  La  caudale,  bordée  d'orangé, 
a  la  base  bleu  pâle,  et  le  croissant  cendré  verdâtre; 
tous  les  rayons  sont  jaunâtres. 

Une  large  bande  orangée,  étendue  depuis  la  nuque 
jusque  sous  le  troisième  rayon  épineux  de  la  dor- 
sale, forme  une  écharpe,  qui  tranche  entre  le  bleu 
de  la  tête  et  le  roussâtre  plus  ou  moins  pâle  du 
reste  du  corps.  Le  bord  des  écailles  est  plus  pâle 
que  le  fond. 

Nos  individus  sont  longs  de  six  à  sept  pouces. 

La  Girelle  de  Bloch. 
{Jiilis  Blochiij  nob.;  Labrus  lunariSy  Bl.,  281.) 

C'est   près   de    ces   espèces    que  l'on   doit 
placer  la  girelle,  assez  peu  caractérisée,  dont 


CHAP.    X.    GIRELLES.  423 

Bloch  a  laissé  une  figure  *.  Ce  lahrus  lunaris 

a  la  tête  bleu  foncé,  sans  aucune  raie  sur  la  tête. 
Le  corps  est  peint  en  violet  plus  ou  moins  foncé, 
et  traversé  par  cinq  à  six  bandes  jaune  pâle.  Toutes 
les  écailles  sont  bordées  de  noirâtre.  La  dorsale  a 
une  large  bande  bleue  entre  deux  bords  blancs. 
L'anale  a  la  moitié  supérieure  bleue  et  l'inférieure 
violette.  Les  ventrales  et  la  caudale  fourchue,  sont 
de  cette  couleur.  La  pectorale  est  bordée  de  bleu 
noirâtre. 

La  figure  représente  un  poisson  long  de  dix 
pouces.  Bloch  le  fait  venir  des  Indes  orien- 
tales. 

Ces  couleurs,  probablement  d'une  teinte 
fort  arbitraire ,  sont  distribuées  tout  autrement 
que  sur  le  lahrus  lunaris  de  Gronovius,  au- 
quel Bloch  veut  rapporter  son  poisson.  La 
synonymie  que  cet  auteur  a  placée  sous  cette 
espèce  est  complètement  fausse,  et  nous  ne 
voyons  aucune  de  nos  girelles  à  laquelle  on 
puisse  la  rapporter. 

La    GiRELLE    HÉBRAÏQUE. 

{JuUs  hebraicus y  nob.;  Labre  hébraïque,  Lacép.) 

Commerson  avait  laissé  le  dessin  d'une  es- 
pèce  de    girelle    dont    nous  avons   retrouvé 

1.  Grande  Ichthjologic,  pi.  281. 


424-  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

quelques  individus  desséchés  dans  ses  collec- 
tions. M,  de  Lacépède  fit  graver  ce  dessin  et 
publia  l'espèce  de  poisson  qu'il  représente, 
sous  le  nom  de  labre  hébraïque^  tirant  son 
ëpitlîète  de  la  disposition  des  raies  de  la  joue, 
imitant,  dit-il,  des  caractères  hébraïques  ou 
orientaux.  Depuis,  MM.  Quoy  et  Gaimard, 
J.  Desjardins  et  Dussumier,  nous  en  ont  pro- 
curé d'autres  individus,  mieux  conservés  et 
dans  l'eau-de-vie  :  tous  sont  originaires  de 
risle-de-France ,  où  l'espèce  n'est  pas  rare. 

Elle  a  la  tête  courte,  le  front  et  le  dessus  de  la 
mâchoire  inférieure  arqués,  les  dénis  antérieures,  et 
surtout  les  inférieures,  fortes  et  pointues.  Les  four- 
ches de  la  caudale  sont  prolongées, 

D.  8/13;  A.  3/il,  etc. 

Voici  la  description  des  couleurs,  faite  sur 
le  poisson  frais  par  M.  Dussumier. 

Tout  le  corps  est  vert  et  varié  de  jaune  pâle.  Une 
bande  oblique,  d'un  beau  jaune  vif,  descend  de  la 
base  antérieure  de  la  dorsale  jusque  sous  le  ventre, 
et  s'efface  près  de  l'endroit  où  la  pointe  des  ventrales 
peut  atteindre.  La  tête  a  sur  un  fond  lilas  pâle  des 
raies  bleues  brillantes  ,  traversant  l'opercule  et  se 
portant  sur  la  poitrine  entre  la  base  des  nageoires 
paires.  La  dorsale,  les  ventrales  et  la  caudale,  sont 
verdàtres  ;  l'anale,  plus  paie,  est  blanche  lavée  de 
jaunâtre;  les  pectorales  ont  du  noir  à  leurs  pointes. 


CHAP.    X.    GIRELLES. 


425 


Sur  le  poisson  conservé  dans  l'eau- de-vie,  on  voit 
la  distribution  de  ces  couleurs ,  qui  paraissent  bleues, 
plus  ou  moins  noirâtres.  La  bande  jaune  du  corps 
est  devenue  blanche,  bordée  de  deux  larges  raies 
bleuâtres ,  et  sur  la  queue  il  y  a  une  grande  tache  de 
la  même  couleur,  en  avant  de  la  caudale. 

Cette  espèce  se  mange  à  l'Isle-de-France. 

Nos  individus  sont  longs  de  sept  pouces. 

Ce  poisson  se  trouve  aussi  sur  les  côtes  de 
Madagascar:  M.  Gaimard  l'en  a  rapporté.  Lui 
et  son  ami,  M.  Quoy,  le  peignent  de  cinq 
bandes  noirâtres  sur  le  fond  verdâtre  du  dos. 
D'ailleurs  le  reste  de  leur  peinture  s'accorde 
parfaitement  avec  la  description  de  M.  Dus- 
sumier.  Ils  ont  cru  l'espèce  nouvelle ,  et  ils  en 
ont  publié  une  très-belle  figure  dans  l'atlas 
du  Voyage  de  l'Astrolabe  (pi.  i5,  fig.  3), 
sous  le  nom  de  girelle  à  baudrier  [julîs  zos- 
terophorus),  nom  qui  ne  pourra  pas  être 
maintenu. 

L'on  possède  au  Cabinet  du  Eoi  une  pe- 
tite girelle,  longue  de  quatre  pouces,  qui 
provient  de  la  collection  du  Stadhouder; 
elle  est  plus  décolorée  que  les  exemplaires 
dont  nous  venons  de  parler,  et  ses  teintes 
sont  devenues  rousses.  On  n'y  voit  plus  de 
traces  de  raies  sur  la  joue.  Ce  poisson  con- 
vient en  tout  point  à  la  figure  que  nous  trou- 


420  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

vons  dans  Bloch ,  sous  le  nom  de  labrus  hi- 
fasciatus  (pi.  283).  Ces  petites  différences 
dans  la  distribution  des  couleurs,  et  la  forme 
un  peu  plus  alongée  de  la  tête  du  poisson, 
nous  laissent  encore  en  doute,  si  nous  devons 
considérer  le  poisson  de  Bloch  comme  de  la 
même  espèce  que  celui  de  Commerson. 

La    GlRELLE    A    QUEUE    TACHETÉE. 
{Julis  caudiniacida 3  Q.  G.) 

C'est  une  espèce  de  l'Isk-de-France,  dont 
les  formes  rappellent  celles  de  la  girelle  com- 
mune. 

Son  museau  est  pointu;  la  longueur  de  la  tête 
surpasse  un  peu  la  hauteur  du  tronc,  et  est  com- 
prise quatre  fois  dans  la  longueur  totale.  Les  dents 
mitoyennes  sont  alongées;  il  n'y  a  point  de  canines 
à  l'angle  de  la  bouche.  Le  premier  et  le  second  rayon 
de  la  dorsale  sont  flexibles,  et  dépassent  les  suivans; 
la  caudale  est  arrondie;  les  deux  rayons  de  la  dor- 
sale et  de  l'anale  atteignent  à  la  base  ceux  de  cette 
nageoire;  le  premier  rayon  de  la  ventrale  est  alongé 
en  filet.  La  pectorale  est  tronquée. 

D.  9/12;  A.  3/12;  C.  13;  P.  12;  V.  1/5. 
Je  compte  près  de  cinquante  rangées  d'écaillés 
dans  la  longueur,   quatre   au-dessus   de   la  ligne 
latérale,  et  dix-huit  au-dessous.  Cette  ligne  n'est  pas 
rameuse. 

Dans  la  liqueur,  le  poisson  paraît  violet  avec  quatre 


i  CHAP.    X.    GIRELLES.  427 

raies  jaunâtres  le  long  des  flancs;  la  seconde  s'avance 
sur  la  tête  et  se  termine  au  museau,  en  étant  inter- 
rompue par  l'œil  ;  une  autre  va  de  l'angle  de  la  bouche 
à  l'opercule,  en  touchant  l'orbite;  l'angle  de  l'oper- 
cule, terminé  par  une  tache  bleue,  en  a  une  en  demi- 
cercle.  J'en  vois  deux  autres  sur  le  bas  de  la  joue,  et 
une  autre  borde  le  sourcil.  La  caudale,  qui  offre  des 
traces  de  violet,  a  une  large  tache  noire  fondue 
sur  îe  tronçon  de  la  queue,  près  la  base  des  rayons. 
La  dorsale  a  sur  les  deux  premiers  une  large  tache 
violette  ou  noire,  très -foncée,  puis  deux  raies  ou 
deux  séries  de  points  décolorés  qui  paraissent  violets. 
L'anale  a  de  même  la  base  violette  et  deux  traits 
parallèles  au  bord. 

M.  Quoy'  dit  que  le  haut  du  corps  est  vert,  par- 
couru par  trois  lignes  longitudinales,  formées  de 
taches  couleur  de  laque;  le  ventre,  d'un  jaune  teinté 
de  verdâtre,  est  parsemé  de  lignes  de  laque.  L'ori- 
gine de  la  dorsale  est  noire,  le  reste  aurore  avec  des 
points  jaunes  et  des  linéoles  bleu  de  ciel.  L'anale 
a  des  réticules  de  laque  et  de  lignes  bleuâtres.  La 
caudale  est  ornée  de  larges  bandes  transverses,  oran- 
gées, séparées  par  du  bleu  de  ciel. 

J'ai  fait  ma  description  sur  l'individu  rap- 
porte par  M.  Quoy.  C'est  par  une  erreur  de 
plume  qu'il  a  dit  que  le  rayon  de  la  pectorale 
est  filamenteux;  car  sur  la  figure  il  représente 
bien  celui  de  la  ventrale.  Je  dois  d'ailleurs  faire 

1.  Quoy,  Zool.  de  l'Aslrolabe,  t.  III,  p.  710,  atl.  poissons^ 
pi.  i5,  %.  2. 


428  LIVRE  XVÎ.    LABROÏDES. 

remarquer  que  renluminure  ne  correspond  pas 
exactement  à  la  description  de  M.  Quoy,  et 
que  le  dessin  n'en  est  pas  très-exact.  Un  autre 
individu,  long  de  huit  pouces  et  semblable  au 
précèdent,  a  ëte  envoyé  du  même  endroit  au 
Cabinet  du  Roi  par  M.  Desjardins. 

La    GlRELLE    CEINTURE. 
{Jiilîs  cinguluin^  nob.) 

Une  girelle  de  l'Isle  -  de  -  France ,  facile  à 
reconnaître ,  est  celle  que  Lacëpède  a  publiée 
d'après  les  dessins  de  Commerson,  sous  le  nom 
de  labre  ceintiu^e. 

Cette  espèce  a  le  museau  alongé,  pointu,  à  dents 
mitoyennes  saillantes,  sans  canines  vers  l'angle  de 
la  mâchoire.  La  ligne  latérale  est  simple;  les  écailles 
sont  lisses  et  petites  :  il  y  en  a  cinquante-sept  dans 
la  longueur,  cinq  au-dessus  de  la  ligne  latérale,  et 
vingt-quatre  au-dessous.  Une  écaille  est  oblongue  et 
a  vingt-quatre  rayons  environ  à  l'éventail.  Les  ven- 
trales sont  très-alongées.  La  caudale  est  arrondie. 
D.  9/12;  A.  3/12,  etc. 

Le  fond  de  la  couleur  est  brun,  plus  clair  sur  la 
tète  et  sur  la  poitrine  que  sur  la  partie  postérieure  du 
corps.  La  teinte  claire  de  l'avant  finit  à  la  pointe  de 
la  pectorale,  et  elle  est  séparée  de  la  portion  rem- 
brunie par  une  ceinture  pâle  qui  occupe  l'intervalle 
de  quatre  rangées  d'écaillés.  La  tête  est  couverte  de 
points  bleuâtres,  éparsj  une  tache  noire  est  à  l'angle 


CHAP.    X.    GIRELLES.  421> 

de  l'opercule  •  il  y  a  du  noirâtre  dans  l'aisselle  de  la 
pectorale.  La  dorsale  et  l'anale  sont  plus  foncées  que 
le  corps,  et  bordées  de  blanchâtre  :  elles  sont  ponc- 
tuées de  noir  sur  la  partie  brune.'  La  caudale  a  une 
large  ceinture  noire,  bordée  de  blanc,  et  toute  la 
base  plus  pâle,  ponctuée  de  noir.  Les  ventrales  ont 
leurs  premiers  rayons  bruns. 

Tel  est  le  poisson  que  MM.  Quoy  et  Gai- 
mard  ont  pris  à  Tlsle  -  de  -  France ,  et  que 
M.  Lamarre-Piquot  s'y  est  aussi  procuré.  Ils 
sont  tout-à-fait  semblables  au  dessin  laissé 
par  Commerson ,  sauf  que  la  base  des  trois 
nageoires  impaires  y  est  représentée  blan- 
châtre. M.  de  Lacépède  l'a  fait  graver  volume 
ÏII,  planche  28,  figure  1. 

C'est  aussi  à  cette  espèce  qu'il  faut  rapporter 
\ejulis  semipimctatus  de  M.  Ruppel,  qui  n'a 
pas  osé  prendre  pour  certaine  la  synonymie 
de  Lacépède.  Sa  figure,  coloriée  d'après  le 
vivant,  représente  la  tête  et  le  dos  verdâtres 
ponctués,  la  partie  postérieure  du  dos  brune, 
avec  deux  grandes  taches  plus  foncées.  La  base 
de  la  dorsale  et  de  la  caudale  jaunâtre  plus 
clair  que  le  fond,  ainsi  que  l'indique  le  dessin 
de  Commerson.  Cette  partie  est  tachetée;  une 
large  ceinture  brune  borde  la  dorsale  et  l'a- 
nale, qui  sont  en  dehors  rayées  de  bleu  et 
bordées  de  jaune  verdâtre.  La  caudale  est  aussi 


430  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

bordée  de  verdâtiej  mais  elle  n'a  pas  de  raie 
bleue. 

Je  pense  qu'il  faut  aussi  y  rapporter  le  la- 
brus  aureomaculatus y  publié  planche  9.0  des 
Poissons  de  Ceilan,  par  M.  Whitchurch  Ben- 
ne tt.  Il  représente  la  tête  et  la  poitrine  brun 
jaunâtre  ponctué  de  noir;  une  bandelette 
verticale  blanche  sé])are  cette  teinte  de  la 
partie  postérieure,  cpii  est  plus  verdâtre.  11 
y  a  sur  le  dos  deux  larges  taches  rouges  à  la 
place  011  M.  Puippel  a  indiqué  les  siennes  d'une 
couleur  brune.  La  dorsale  est  ponctuée  de 
brun  et  bordée  de  jaune,  ainsi  que  l'anale  et 
la  caudale.  C'est  une  variété  assez  notable  ;  le 
nom  que  lui  donnent  les  pécheurs  cingalais 
est  tîk-^irawah. 

M.  Rappel  a  pris  sa  vanete  pendant  l  hiver 
à  Mohila,  et  pendant  l'été  à  Massuah.  Ainsi 
elle  existe  dans  toute  la  mer  Ponge. 

La    GiRELLE    PARTERRE. 

{Julls  hortulanus,  nob.  j  Lahriis  cenliquadms ,  Comm) 

On  trouve,  en  grande  abondance  à  Tlsle- 
dc-France,  une  girelle  non  moins  remarquable 
que  les  précédentes  par  la  beauté  des  couleurs 
que  par  quelques  autres  caractères  qui  sem- 
bleraient l'éloigner  de  ce  genre. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  ^  431 

Elle  a  le  museau  assez  pointu,  la  nuque  relevée; 
la  hauteur  est  comprise  trois  fois  et  deux  tiers  dans 
la  longueur  totale  :  la  tête  égale  cette  hauteur.  A 
l'extrémité  de  la  mâchoire  supérieure  il  y  a  quatre 
dents  pointues,  une  très-forte  dans  l'angle;  deux 
rangées  de  dénis  granuleuses  derrière.  Quelques 
écailles  sur  la  tenipe;  mais  tous  les  autres  caractères 
et  le  faciès  sont  tellement  d'une  girelle,  qu'on  ne 
saurait,  sans  rompre  tous  les  rapports  naturels, 
placer  cette  espèce  dans  un  autre  genre. 

La  ligne  latérale  n'est  pas  rameuse.  Les  écailles 
sont  grandes,  surtout  leur  portion  radicale,  dont  le 
pourtour  seul  est  strié  :  d'ailleurs  le  bord  est  con- 
vexe. Il  y  en  a  vingt-quatre  rangées  sur  les  cotés. 

La  caudale  est  coupée  carrément,  la  ventrale  est 
prolongée  en  filet,  les  pectorales  sont  pointues. 

D.  9/12;  A.  3/11,  etc. 

Le  poisson,  conservé  dans  de  l'eau-de-vie,  a,  sur 
un  fond  jaunâtre  rembruni  vers  le  dos,  des  taches 
noires  verticales ,  qui  s'effacent  et  deviennent  des 
petits  points  sur  le  ventre.  La  tête  offre  sur  des  tons 
violacés  quatre  bandes  longitudinales  bleuâtres  ou 
lilas  pâle,  souvent  confluenles ,  et  des  points  de 
même  couleur  sur  la  nuque  et  sur  la  partie  anté- 
rieure du  dos.  La  gorge  et  la  poitrine  ont  quelques 
traits  ou  points  blanc  de  lait.  Une  ou  deux  taches 
nacrées  se  conservent  sur  la  base  de  la  dorsale,  qui 
est  elle-même  pâle  et  tachetée  de  brun  ou  d'ocelles 
plus  ou  moins  effacés.  La  caudale  a  conservé  quel- 
ques petits  traits,  et  l'anale,  des  traces  de  rayures. 
Une  tache  noire  existe  dans  l'angle  de  la  pectorale ^ 


452  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

et  une  autre  sur  le  haut  de  la  queue  en  avant  de  la 
caudale. 

M.  Dussumier  nous  décrit  les  couleurs  clu 
poisson  frais  de  la  manière  suivante  : 

Le  corps  est  vert-pré,  tacheté  de  vert  noirâtre, 
en  forme  de  quinconce.  La  tête  et  la  nuque,  d'une 
teinte  plus  claire,  ont  des  bandes  et  des  points  oran- 
gés, et  il  y  a  sur  la  base  de  la  dorsale  des  taches  d'un 
beau  jaune.  La  dorsale  est  variée  de  vert  pâle  et 
d'orange;  la  caudale  est  violette,  mouchetée  de  vert 
et  terminée  par  du  rouge  j  les  pectorales  et  les  ven- 
trales sont  vert  pâle. 

Telle  estcettegirelle,  dont  nous  avons  encore 
reçu  des  individus  longs  de  six  pouces  par  les 
soins  de  M.  Julien  Desj  ardins ,  et  c{ue  MM.  Quoy 
et  Gaimard,  Lesson  et  Garnot,  ont  pris  aussi 
à  risle-de-France. 

Ces  deux  derniers  naturalistes  en  ont  donné 
une  figure  coloriée  d'après  un  individu  qui  avait 
déjà  perdu  les  belles  teintes  vertes  du  corps. 
Ils  l'ont  regardée  à  tort  comme  une  nouvelle 
espèce,  qu'ils  ont  nommée  Girelle  demi-parée 
[Julis  semidecorata,  Lesson 5  Atlas  de  la  Co- 
quille, poissons,  n.°  35). 

M.  Ruppel  l'a  retrouvée  aussi  dans  la  mer 
Rouge,  et  en  a  donné  une  figure  bien  plus 
exacte  et  qui  ne  laisse  rien  h  désirer.  Cet  ha- 
bile naturaliste  l'a  nommée  lialicliores  exi- 


CHAP.    X.    GIRFXLES.  455 

niius\  tout  en  liësitaiit  à  la  regarder  comme  la 
même  que  le  labre  parterre  ou  que  le  labre  échi- 
quier de  Lacépède.  Cette  synonymie  ne  peut 
être  cependant  douteuse.  En  effet,  Commerson 
avait  depuis  bien  long -temps  observé  cette 
espèce ,  et  en  avait  rapporté  un  dessin  à  la 
pierre  noire ,  d'une  bonne  exactitude.  M.  de  La- 
cépède, comme  à  son  ordinaire,  a  fait  graver  le 
dessin  sous  le  nom  de  labre  parterre  (lahriis 
Jiortulaniis^),  en  même  temps  que  la  des- 
cription de  Commerson  ,  qui  avait  nommé 
l'espèce  lahrus  centiquadrus^y  lui  fournissait 
cette  seconde  espèce  nominale.  Je  ne  crois 
pas  d'ailleurs  que  l'on  doive  en  rapprocher  le 
poisson  ligure  par  Renard  (lab.  7,  iig.  5o)  sous 
le  nom  de  coj^heille.  C'est  une  girellc  proba- 
blement d'une  espèce  particulière,  mais  qu'on 
ne  saurait  déterminer  sur  une  enluminure 
aussi  mauvaise. 

La    GiRELLE    BRIGADIER. 

{Jiilis  decussatus,  nob.  ;  Spams  decussatuSj,  W.  Benn.) 

Il  y  a  dans  Renard  (folio  1 1,  n.°  -^i),  sous 
le  nom  de  brigadier^,  une  espèce  voisine  de 


1.  Neue  Wirbelthiere  zu  derFaun.  abjss.  ,  p.  16,  tab.  5,  n.°  1. 
—  2.  Lacép.,  III,  tab.  29,  fîg.  2.  —  3.  Ejusd. ,  ibid. ,  III, 
p.  495. 

i3.  28 


434  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

ce  labre  parterre,  mais  que  je  crois  encore 
distincte,  et  que  l'on  peut  déterminer  en 
s  aidant  du  dessin  original  de  l'amiral  Corneille 
de  Vlaming,  lequel  est  tout-à-fait  identique  à 
la  planche  que  M.  Whitchurch  Benne tt  a 
donnée  de  cette  espèce  dans  les  poissons  de 
Ceilan  (n."  i4)?  sous  le  nom  impropre  de 
spams  decussatus. 

Le   dos   est  vert,    passant   par  degrés   au  jaune 
brillant  sous  le  ventre.  Tous  les  flancs  sont  marqués 
de  taches  carrées,  noirâtres  sur  le  dos  et  orangées 
sous  le  ventre;  la  tête,  verte,  est  rayée  de  rouge;  la 
nuque  est  couverte  de  points  rouges;  sur  le  devant 
du  dos  est  une  tache  jaune.  La  dorsale,  jaune,  est 
rayée  d'orange  :  des  points  de  celte  couleur  dessinent 
cinq  bandes  verticales  sur  la  caudale ,  qui  est  très- 
brillante.  L'anale  est  plus  orangée  :  elle  a  deux  raies 
rembrunies  près  de  son  bord. 
La  figure  de  Vlaming  a  les  nageoires  jaunes 
et  rayées,  sauf  la  caudale,  qui  est  uniforme; 
le  ventre  est  moins  brillant.  Il  est  difficile  de 
concevoir  comment  l'enluminure  de  Renard  a 
changé  totalement  la  vérité  de  ces  couleurs, 
pour  en  faire  une  figuré  tpute  de  fantaisie. 

M.  Bennett  dit  que  le  nom  cingalais  est 
hemhili-^irawahj  c'est-à-dire  basket  parrot, 
ou  perroquet  de  mer  treiUissé,  le  nom  de 
hemhili  s'appliquant  en  général  à  ce  qui  rap- 
pelle un  panier. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  ACiÙ 

Nous  avons  reçu  de  Pondichéry  par  M.  Les- 
cheiiault  un  petit  poisson  sous  le  nom  tamule 
Nell/y-vettj ,  qui  nous  paraît  de  cette  espèce. 

La    GiRELLE    CORBEILLE. 
{Julis  corbis  y  nob.) 

Je  trouve  encore  dans  le  Recueil  de  Vla- 

ming  une  girelle  plus  élégante,  sous  le  nom 

de  corbeille ,  et  que  Renard  a  fort  mal  copiée 

fol.  20,  n.°  97,  et  seconde  partie,  planche  25, 

n.°  1 20,  OLi  il  est  dit  que  ce  poisson  est  le  dam- 

bordt  ou  fécliiquier,  qu'il  y  en  a  trois  à  Lou- 

VEN,  où  on  les  nomme  quelquefois  corbeille. 

La  tête,  sur  un  fond  bleu,  est  grlvelée  de  gros  et  de 

petits  points  jaunes,  de  petits  points  noirs  ou  bleus 

foncés.  Le  corps  a,  en  quinconce,  de  nombreux  traits 

verticaux  fort  serrés",  et  de  couleur  rouge,  orange, 

devenant  plus  noire  sur   le   dos.  Une  tache  noire 

très-foncée,  longitudinale,  occupe  toute  la  base  de  la 

dorsale,  qui  est  orangée,  l'anale  et  la  caudale  étant 

jaunes. 

C'est  une  jolie  espace,  que  les  voyageurs 
naturalistes  nous  fe4*ont  sans  doute  mieux 
connaître  un  jour. 

Il  ne  faut  pas  d'ailleurs  la  confondre  avec  la 
corbeille  citée  plus  haut  et  représentée,  Renard , 
tab.  7,  fig.  5o.  Celle  que  nous  décrivons  est 
distincte  et  facile  à  caractériser. 


450  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

La    GiRELLE    LINÉOLÉE. 

{JliUs  Uneolatus  y  nob.) 

MM.  Quoy  et  Gaimaid  ont  envoyé  du  port 
Western,  de  la  Nouvelle-Hollande,  une  belle 
g i relie 

à  tête  grosse,  à  museau  obtus,  à  mâchoire  inférieure 
large  et  saillante,  à  nuque  très-peu  bombée,  à  écailles 
médiocres;  car  il  y  en  a  cinquante-trois  rangées  entre 
l'ouïe  et  la  nageoire  caudale,  cinq  au-dessus  de  la 
ligne  latérale,  et  dix -sept  ou  dix -huit  au-dessous. 
Elle  a  d'ailleurs,  comme  la  girelle  parlerre,  quel- 
ques petites  écailles  sur  la  tempe  et  derrière  l'œil. 
Une  écaille  seule  se  montre  arrondie,  à  surface  ra- 
dicale fortement  striée  :  la  partie  nue  l'est  très-fine- 
ment. La  ligne  latérale  est  un  peu  ramifiée.  Sur  un 
beau  fond  rouge,  le  poisson  a  une  bande  longitu- 
dinale noire  de  chaque  côté,  plus  ou  moins  effacée, 
et  sur  la  tête  des  traits  fins  et  verticaux,  au  nombre 
de  quinze  ou  seize,  qui  descendent  pour  se  perdre  sur 
la  gorge.  Je  n'en  vois  que  deux  seulement  sur  la  mâ- 
choire inférieure.  La  dorsale  a  trois  ou  quatre  raies 
violettes.  L'anale  offre  deil*  vestiges  de  taches. 

D.  9/13  ;  A?^/13 ,  etc. 

Un  de  nos  individus  a  près  de  onze  pouces. 
Pérou  avait  déjà   apporté  cette  espèce  au 
Cabinet  du  Roi. 


CnAP.    X.    GIRELLES.  457 

La    GiRELLE    TRILOBÉE. 

{Julls  trilohatus,  nob.;  Lahrus  trilobalus ,  Lacép., 
et  Lahrus  fuscus ,  ejiisd.) 

Commerson  a  rapporté  en  grand  nombre 
une  girelle  abondante  à  Bourbon  et  à  Mada- 
gascar, et  dont  je  puis  donner  une  description 
exacte  des  couleurs,  en  la  prenant  d'un  très- 
bon  dessin  que  M.  Th.  Delisse  nous  a  envoyé 
de  risle-de-France,  où  Commerson  ne  paraît 
pas  avoir  observé  l'espèce. 

Cette  girelle  a  le  museau  arrondi  et  obtus,  la 
nuque  relevée,  l'œil  petit,  l'interoperoule  élevé.  Les 
dents  petites,  même  les  mitoyennes;  point  de  ca- 
nines saillantes  dans  l'angle  de  la  bouche.  Le  sous- 
orbitaire  chargé  de  lignes  de  pores,  trois  conduits 
muqueux  sur  l'opercule,  la  caudale  festonnée;  k 
ligne  latérale  très-mmeuse.  Les  écailles  sont  grandes  ; 
leur  portion  nue  est  toute  striée;  leur  partie  radicale 
est  aussi  couverte  de  stries,  sauf  le  centre.  Il  y  en  a 
vingt-huit  rangées  entre  l'ouïe  et  la  caudale. 
D.  8/13;  A.  3/11;  G.  15:  P.  15;  V.  1/5. 

On  ne  voit  sur  la  tête  aucune  trace  de  raies  ou 
de  taches,  et  les  individus  décolorés  et  secs  mon- 
trent encore  les  taches  vertes  disposées  en  deux 
bandes  longitudinales  sur  chaque  flanc,  et  les  bor- 
dures de  même  couleur  sur  la  dorsale  et  sur  l'anale. 
Le  poisson  frais  a  le  dessus  de  la  tête  vert  oHvàlre^ 
au-dessous  de  l'œil  uno  tache  un  peu  moins  foncée. 


438  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

une  autre,  bleue,  à  l'angle  de  l'opercule;  le  reste  est 
orangé.  Celte  teinte  devient  plus  brillante  sur  le  corps , 
rouge  sur  le  dos,  et  elle  reprend  le  long  du  ventre  une 
couleur   olivâtre.  Les  deux  raies  vertes  des  flancs 
sont  très-colorées;  elles  se  réunissent  pour  couvrir 
la  base  de  la  caudale,  dont  le  bord  des  rayons  est 
bleu  et  la  membrane  orangée.  La  dorsale  a  les  deux 
bords  verts  et  le  milieu  orangé.  L'anale  a  la  base  de 
cette  teinte  et  la  moitié  externe  bleue.  La  pectorale 
a  la  pointe  bleu  foncé,  et  la  base  de  couleur  oran- 
gée. Les  ventrales  sont  bleues. 
Outre   les  individus  rapportés   par   Com- 
merson,   nous   en  avons    de   conserves  dans 
l'esprit  de  vin,  et  qui  ont  été  déposés  dans 
le  Cabinet  par   Pérou,   ou  par  M.  Mathieu, 
colonel  d'artillerie    commandant  à  Tlsle-de- 
France.  Ils  sont  longs  de  sept  à  huit  pouces. 
M.  Delisse  nous  la  donnée  sous  le  nom  de 
cateaii,  dénomination  que  Commeison  ap- 
pliquait aux  scares  verts  de  cette  île.  Le  des- 
sin que  ce  voyageur  a  laissé  avait  été  fait  sur  un 
poisson  desséché  :  aussi  a-t-il  le  museau  trop 
pointu.  C'est  d'après  lui  que  M.  de  Lacépède  a 
établi  son  labre  trilobé,  en  même  temps  qu'il 
employait  la  description  du  compagnon  de 
Bougainville  pour  en  faire  un  lahrus  fuscus , 
parce  que  la  phrase  caractéristique  commence 
par  ces  mots  :  labrus  fuscus ,  tœniis  utrinque 
duahus,  etc. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  459 

Il  cite  cette  espèce  comme  abondante  parmi 
les  récifs  et  les  roches  madréporiques  des  îles 
de  Bourbon  et  de  Madagascar. 

J'en  ai  aussi  un  individu  de  la  première  de 
ces  îles,  qui  a  été  donné  au  Cabinet  du  Roi 
par  madame  Ducrest  de  Villeneuve,  avec  une 
note  indiquant  que  le  poisson  y  est  nommé 
lézard  de  mer. 

Il  faut  d'ailleurs  faire  bien  attention  que 
Shaw  a  inscrit,  sous  le  nom  de  lahrus  trilo- 
hatus,  la  chéiline  trilobée  de  Lacépède,  et 
non  la  girelle  de  cet  article. 

La  Girelle  parée. 
{JidisformosuSy  nob.  ) 

M.  Desjardins  nous  a  envoyé  de  l'Isle-de- 
France  une  espèce  voisine  de  la  précédente, 
et  dont  nous  pouvons  parler  avec  certitude, 
parce  qu'il  a  eu  l'obligeance  d'accompagner 
son  envoi  d'un  dessin  pris  sur  le  poisson  frais. 

CeUe  espèce  a  le  museau  un  peu  moins  arrondi 
que  la  précédente.  Il  n'y  a  point  de  dents  saillantes 
à  l'angle  de  la  bouche.  Les  écailles  paraissent  plus 
larges  et  plus  courtes.  Il  n'y  a  plus  de  surface  non 
striée  sur  la  partie  radicale  j  toute  la  portion  libre  est 
ciselée  de  stries  qui  s'étendent  sur  le  bord  membra- 
neux de  l'écaillé.  La  ligne  latérale  est  rameuse. 
D.  8/i3;  A.  3/11,  etc. 


440  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

La  tête  est  d'une  couleur  uniforme  orangte,  sans 
aucune  raie  ni  tache j  l'iris  de  l'oeil  est  vert.  Le  dos, 
les  flancs  et  la  portion  inférieure  de  la  queue  sont 
rouges  sang  de  bœuf  Le  long  de  la  ligne  latérale  et 
sur  le  milieu  du  côté,  il  y  a  deux  larges  bandes 
bleues,  teintées  de  verdàire.  Le  long  du  dos  on  voit 
quatre  ou  cinq  taches  vertes.  La  dorsale  et  l'anale 
sont  orangées  et  bordées  de  bleu  céleste.  Le  ventre 
est  verdâlre.  La  caudale  a  sa  membrane  olivâtre  et 
ses  rayons  terminés  par  du  bleu  céleste;  une  bor- 
dure de  cette  couleur  colore  le  haut  et  le  bas  de  la 
nageoire.  La  pectorale  est  bleue  et  a  sa  base  jaune. 
La  ventrale  est  verte. 

On  voit  que  ces  coule  tirs  ne  sont  pas  sem- 
blables à  celles  de  la  girelle  trilobée  :  nous 
croyons  à  leur  constance ,  parce  que  nous 
avons  observé  des  poissons  de  la  même  va- 
riété parmi  ceux  récoltés  par  M.  Dussumier 
ou  par  M.  Quoy,  et  que  les  notes  de  ces 
voyageurs  se  rapportent  tout-à-fait  à  ce  que 
nous  observons  sur  le  dessin  de  M.  Desjar- 
dins. Ce  naturaliste  nous  apprend  que  ces 
poissons  se  portent  rarement  au  marché,  que 
les  esclaves  les  achètent  des  pécheurs,  et  qu'ils 
les  font  cuire  après  les  avoir  préalablement 
écorchés.  L'individu  dessiné  par  M.  Desjar- 
dins fut  pris  au  mois  de  Décembre. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  "M'I 

La    GlRELLE    MALACHITE. 

{Julis  œruginosus  3  nob.) 

Les  mêmes  voyageurs  ont  rapporté  de  ces 
mers  mie  troisième  girelle,  qui  est  encore 
très-voisine  des  deux  précédentes,  mais  qui  a 
des  couleurs  un  peu  différentes  et  autrement 
distribuées. 

Celle-ci  a,  sur  un  fond  vert  de  malachite,  qui  se 
conserve  quelquefois  Uès- brillant,  une  bande  lon- 
gitudinale brune  au-dessus  de  la  ligne  latérale,  et 
deux  autres  couleur  de  rose  au-dessous,  et  sur  la 
poitrine  un  trait  rose  est  tracé  obliquement  de  l'ouïe 
à  la  ventrale.  Une  tache  rembrunie  couvre  le  bord 
de  l'opercule;  sur  les  tempes,  sur  le  front,  sur  le 
sous-orbitaire,  le  long  de  la  lèvre  supérieure  et  au- 
'  dessous  de  l'œil,  sont  de  larges  taches  onduleuses 
et  anastomosées,  d'une  belle  teinte  rose.  Celle  qui 
couvre  le  préopercule  se  divise  en  deux  traits.  La 
dorsale  est  violette,  bordée  de  vert;  l'anale,  de  cette 
couleur,  a  sur  la  base  une  bandelette  rose.  La  cau- 
dale est  toute  verte.  La  pectorale  est  plus  foncée  et 
a  le  bord  inférieur  rose.  Les   ventrales  sont  plus 

pâles. 

D.  8/13;  A.  3/11,  etc. 

Cette  espèce  n'a  pas  de  dents  saillantes  dans  l'angle 
de  la  bouche;  les  pointes  de  la  caudale  sont  quel- 
quefois très-longues.  La  ligne  latérale  est  très-rami- 
fiée.  Le  museau  est  obtus  et  arrondi. 


442  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

M.  Desjardins  nous  en  a  envoyé  de  l'Isle-de- 
France.  M.  Dussumier  en  a  aussi  rapporté  de 
très-beaux  individus  longs  de  quinze  pouces. 

La    GiRELLE    DEMI-BLEUE. 

{Jiilis  seviicœruleus ,  Ruppel.  ) 

La  mer  Rouge  nourrit  des  girelles  qui  ressem- 
blent beaucoup  à  celles  de  l'Isle  -  de -^  France , 
quand  elles  ont  séjourné  pendant  quelque 
temps  dans  l'alcool.  Mais  les  observations  de 
M.  Ruppel  *  semblent  établir  qu'elles  ont  encore 
les  couleurs  clifTérentes. 

Cet  habile  naturaliste  les  représente 

vertes  sur  la  moitié  supérieure  du  corps,  et  bleues 
sur  l'inférieure.  Les  trois  bandes  longitudinales  du 
corps  sont  couleur  de  brique,  ainsi  que  les  traits  de 
la  têle,  des  joues  et  de  la  poitrine.  La  dorsale  et  l'anale 
sont  bleues  et  traversées  dans  leur  milieu  par  un  trait 
longitudinal  coloré  comme  les  bandes  du  corps.  La 
caudale  est  bleue,  bordée  de  vert  dans  son  croissant, 
et  de  jaunâtre  briqueté  sur  ses  deux  bords.  Les  pec- 
torales et  les  ventrales  sont  pâles. 
D.  8/13;  A.  3/11,  etc. 

M.  Ruppel  en  a  observé  des  individus  de 
onze  pouces  sur  le  marché  de  Djedda ,  au 
mois  d'Août. 

1.  P^eue  JVirhelihiere  zu  der  Faun.  abyss, ,  p.  lo  ,  pi.  5,  fi^.  i  - 


CHAP.    X.    GIRELLES.  ^^5 

M.  Botta  en  a  envoyé  de  ce  port  un  indi- 
vidu long  de  quatorze  pouces,  et  M.  Lefebvre 
en  a  rapporté  de  Suez. 

La    GiRELLE    PAO. 

(  Julis  quadricolor ,  Lesson.  ) 

C'est  encore  une  espèce  très -voisine  des 
précédentes, si  même  elle  en  est  distincte,  que 
la  girelle  figurée  par  M.  Lesson  sur  la  planche  35 
des  poissons,  dans  l'atlas  du  Voyage  de  la 
Coquille 

Celle-ci  a  le  dos  d'un  beau  rouge  de  carmin  qui 
colore  aussi  l'échiquier  par  les  bandes  longitudinales 
et  verticales  des  flancs.  La  tache  au-devant  de  l'œil, 
celle  bifide  sur  l'opercule,  la  bandelette  de  la  poi- 
trine, une  autre  sur  le  front  entre  les  deux  yeux,  sont 
de  la  même  teinte  rouge.  Le  dessus  de  la  tête,  l'o- 
percule et  l'intervalle  entre  les  lignes,  sont  verts;  le 
dessous  de  la  gorge  et  le  ventre  bleus.  La  dorsale  est 
verte,  rayée  de  rouge  dans  le  milieu.  L'anale  est  bleue 
avec  une  bande  près  de  sa  base  de  la  même  couleur 
que  celle  de  la  dorsale.  La  caudale  a  les  rayons  verts 
terminés  par  du  jaune;  la  membrane  qui  les  réunit  est 
rouge.  Les  pectorales  et  les  ventrales  sont  bleues. 

D.  8/13;  A.  3/11. 

M.  Lesson  a  pris  cette  espèce  à  Otaïti,  où 

les  naturels  la  lui  ont  désignée  sous  le  nom 

de  pao.  Sa  chair  est  délicate  :  on  la  mange 

crue,  ainsi  que  le  font  les  habitans  de  la  rade 


444  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

de  Matawai  pour  les  autres  poissons.  Les  mê- 
mes voyageurs  ont  retrouvé  cette  girelle  à  File 
de  Bolabola,  où  elle  est  commune  parmi  les 
récifs  madréporiques. 

Je  crois  encore  quil  faut  rapporter  à  cette 
espèce  le  scarus  Georgii^  figuré  au  n."  4^ 
des  Poissons  de  Ceilan.  M.  W.  Bennett  dit 
que  son  nom  cingalais  est  lena-girawah,  ou 
squirell  parrot,  perroquet  de  mer  écureuil, 
parce  qu'il  est  rayé  comme  l'écureuil  de  Ceilan. 

La  Girelle  cyanogastre. 
(  Julis  cjanogcLster,  nob.  ;  Labrus  cjanogaster.  Sol.  ) 

Il  me  semble  qu'il  faut  aussi  distinguer  le 
labrus  cjanogaster  de  Solander, quoique  bien 
voisin  de  ce  J.  quadricolor. 

D'après  la  copie  du  dessin  que  nous  avons 
sous  les  yeux,  grâce  à  la  complaisance  que 
madame  Lée  a  eue  de  nous  l'envoyer,  nous  lui 
trouvons 

la  forme  semblable  à  la  précédente,  mais  les  couleurs 
encore  autrement  distribuées.  Le  dos  est  brun;  la  tête 
et  les  flancs  sont  peints  longitudinalement  et  en  tra- 
vers de  lignes  rouges;  le  ventre  est  vert.  La  dorsale , 
rouge,  a  la  base  verte,  et  sa  portion  molle,  ainsi 
que  l'anale,  est  rayée  de  vert,  puis  de  rouge,  et 
bordée  de  bleu.  Les  nageoires  paires  sont  jaunes. 
La  caudale  est  brune,  bordée  de  verdâtre. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  '       445 

Ce  poisson  venait  d'Otaïti  comme  le  pré- 
cédent, et  il  porte  dans  le  manuscrit  les  noms 
indiens  de  paa-hu  ou  de  paa-rnaa-utha.  Sur 
le  dessin  de  Forster,  que  l'on  peut  consulter 
dans  la  bibliothèque  de  Banks,  aujourd'hui  au 
Bridsh  muséum,  le  poisson  est  nommé  lahrus 
vittatus. 

La    GiRELLE    POURPRÉE. 

(  JuUs  purpureus ,  Ruppel.  ) 

Nous  avons  trouvé  dans  les  collections  faites 
à  Bombay  par  M.  Polydore  Boux,  l'espèce  que 
Forskal  a  fait  connaître  sous  le  nom  de  sca- 
rus  purpureus. 

Voisine  des  précédentes,  elle  a  la  tête  peu  bombée, 
le  museau  moins  arrondi,  le  bord  de  la  caudale 
coupé  plus  carrément  entre  les  deux  pointes  pro- 
longées des  rayons  supérieurs  et  inférieurs.  La  ligne 
latérale  est  rameuse,  les  écailles  sont  assez  grandes; 
une,  détachée,  se  montre  oblongue,  à  surface  radi- 
cale striée  sur  le  pourtour  et  laissant  dans  le  centre 
un  grand  espace  vermiculé;  la  portion  nue  est  striée 
en  éventail  jusque  sur  le  bord  membraneux. 
D.  8/11  î  A.  3/11,  etc. 

La  tête,  sur  un  fond  bleuâtre,  offre  des  raies  ar- 
quées qui  paraissent  plus  bleues  et  lisérées  de  noi- 
râtre; deux  au-dessous  de  l'œil,  deux  par  le  travers 
de  l'œil,  et  une  ou  deux  sur  le  front.  Le  corps,  sur 
un   fond   verdâtre,   a    deux    bandelettes   décolorées 


446  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

blanchâtres,  une  par  le  milieu  de  la  hauteur  clu 
tronc,  l'autre  naît  de  l'aisselle  de  la  pectorale.  Sous 
la  gorge  sont  deux  autres  bandelettes  également 
blanchâtres,  et  qui  se  réunissent  en  une  seule  près 
de  la  ventrale,  pour  suivre  le  bas  des  côtés  le  long 
de  l'anale.  Des  lignes  violettes  verticales  descendent 
du  dos  se  perdre  sur  le  flanc.  La  dorsale,  décolorée, 
a  une  bande  longitudinale  lisérée  de  deux  traits  noirs 
et  déliés.  La  caudale  est  bordée  sur  ses  rayons  pro- 
longés. La  pectorale,  jaune  à  sa  base,  a  du  noir  à  sa 
pointe.  Il  y  a  dans  l'aisselle  une  tache  bleue.  Les  ven- 
trales sont  verdàtres. 

Le  poisson  frais  est,  d'après  la  figure  de  M.  Rup- 
pel  ^ ,  vert  rayé  de  rouge.  La  dorsale  a  deux  raies 
couleur  de  laque. 

On  peut  voir  que  cette  description  convient 
parfaitement  à  ce  que  Forskal^  nous  a  laisse 
de  son  scarus  purpureus ,  devenu  le  lahriis 
purpureus  de  Gmelin ,  et  que  Bloch  a  placé 
dans  le  genre  si  singulièrement  composé  des 
grammistes. 

Forskal  apris  ce  poisson  comme  M.  Piuppel, 
à  Djedda ,  oii  on  le  lui  a  nommé  dur  rat  el  hàlir, 
c  est-a-dire  perroquet  de  mer.  Selon  M.  Rup- 
pel,  on  le  trouve  dans  toutes  les  autres  parties 
de  la  mer  Rouge. 


1.  Ruppel,  Atl.  zu  der  Reise  im  n'ordl.  Afr. ,  p.  25,  lab.  6, 
f,rr.  2.  —  2.  Forskal , /«?<«.  arah.,  p.   27,  n."  12. 


CHAP.    X.    GIRELLES. 


447 


La    GiRELLE    A    VENTRE    ROUGE. 

(  Julis  erjtJwogaster^  Solander.  ) 

Je  regarde  comme  voisin  de  ce  lahrus  pur- 
pureus  l'espèce  dont  je  dois  la  connaissance  à 
M.  de  Mertens.  Son  dessin  nous  représente  un 
poisson 

d'un  beau  vert,  rayé  de  deux  lignes  courbes  et  un 
peu  concaves,  d'un  beau  carmin,  sur  les  côtés  au- 
dessus  de  la  pectorale,  et  d'une  troisième,  plus  pour- 
pre, le  long  du  venire  :  celle-ci  et  la  supérieure  s'é- 
tendent sur  les  bords  de  la  caudale,  dont  le  centre 
est  jaune,  avec  du  bleu  à  la  base.  La  têle  a  trois 
bandes  rouges  au-devant  de  l'œil,  une  autre  arquée 
dessous,  et  une  grande  tache  pourprée  sous  la  gorge. 
La  dorsale,  verte,  est  rayée  de  rouge;  la  pectorale  est 
violette;  l'anale  et  les  ventrales  sont  jaunâtres  rem- 
brunies. 

L'espèce  vient  d'Uléa.  Je  crois  que  l'on  doit 
regarder  comme  identique  le  labrus  erytliro- 
gaste?',  dont  j'ai  retrouvé  la  description  dans 
les  manuscrits  de  Solander;  car  le  dessin  de 
Forster,  conservé  dans  la  bibliothèque  de 
Banks  sous  le  nom  de  lahrus  formosus ,  se 
rapporte  très-bien  à  celui  de  M.  Mertens.  Ces 
compagnons  de  Cock  ont  eu  leur  poisson  à 
Otaïti  sous  le  nom  cYépao. 


448  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

La    GiRELLE    SEMI-FASCIÉE. 

{Jiilis  semifascialus  y  nob.  ) 

Commerson  a  rapporté  de  l'Isle-de-France 
une  girelle  qu'il  n'a  pas  mentionnée  dans  ses 
manuscrits,  et  qui  y  a  été  retrouvée  après  lui 
par  MM.  Pérou,  Lamarre -Piquot  et  Dussu- 
mier. 

Elle  a  la  nuque  assez  convexe,  la  bouche  irès-peu 
fendue;  les  dents  mitoyennes  ne  dépassent  pas  les 
latérales,  qui  sont  fort  petites;  point  de  canines  à 
l'angle  de  la  bouche,  le  dessous  de  l'œil  et  le  limbe 
du  préopercule  criblés  de  pores.  La  hauteur  du 
tronc  fait  un  peu  plus  et  la  longueur  de  la  tête  un 
peu  moins  du  quart  de  la  longueur  totale.  La  portion 
épineuse  de  la  dorsale  est  plus  basse  que  la  partie 
molle.  La  caudale  est  peu  échancrée,  quand  elle  est 
fermée.  Elle  devient  concave  près  des  angles,  et 
convexe  dans  le  milieu ,  quand  ses  rayons  sont  écartés. 
Les  ventrales  sont  très-petites. 

D.  8;13;  A.  3/li;  C.  13:  P.  15;  V.  1/5. 

La  ligne  latérale  est  rameuse.  Les  écailles  ont  leur 
surface  nue  striée;  la  surface  recouverte,  plus  que 
double  de  l'autre,  a  sa  portion  centrale  finement 
striée  et  les  trois  côtés  du  bord  radical  ciselés  :  ces 
écailles  sont  très-minces.  J'en  compte  vingt-six  entre 
l'ouïe  et  la  caudale,  et  trois  au-dessus  et  dix  au- 
dessous  de  la  ligne  latérale. 

Dans  l'alcool ,  on  voit  six  bandes  noires  descendre 
du  dos  et  venir  s'évanouir  sur  les  flancs  à  moitié  de 


CHAP.    X.    GIRELLES.  449 

la  hauteur  du  tronc.  Ce  noir  remonte  sur  la  dorsale 
et  y  dessine  des  traits  obliques  en  avant  et  vers  le 
haut,  de  manière  que  la  cinquième  bande,  qui  est 
sous  la  fin  de  la  dorsale,  et  la  quatrième,  qui  est 
sous  le  milieu  de  la  portion  molle,  laissent  deux 
traces  sur  cette  partie  de  la  nageoire.  La  troisième 
et  la  seconde  en  dessinent  de  semblables  sur  la  por- 
tion épineuse  j  mais  ces  traits  bordent  la  nageoire 
qui  est  beaucoup  plus  basse.  Une  tache  noir  foncé 
est  sur  les  deux  premiers  rayons  épineux;  une  autre 
tache  se  voit  à  l'angle  de  l'opercule,  une  autre  à 
l'aisselle  de  la  pectorale,  dont  la  pointe  a  du  noirâtre: 
il  y  a  aussi  une  tache  pâle  sur  le  commencement  de 
l'anale.  La  joue  est  traversée  par  des  raies  bleues  :  le 
reste  du  corps  est  jaunâtre  décoloré. 

Mais  M.  Dussumier,  qui  l'a  vue  fraîche,  nous  la 
décrit  comma ayant,  sur  un  fond  vert-pré  très-clair, 
le  corps  traversé  par  des  bandes  violettes,  le  des- 
sous de  la  mâchoire  argenté  à  reflets  verts,  la  dor- 
sale vert  clair  varié  de  lilas;  la  caudale  a  sur  cette 
teinte  deux  bandes  roses;  les  rayures  de  la  tète  sont 
violettes. 

Nos  plus  grands  individus  ont  six  pouces 
de  long. 

]La    GiRELLE    A    DORSALE    RAYÉE. 
{Julis  dorsalis y  Q.  G.,  Astroh,  pi.  i5,  fig.  5.) 

Les   mêmes   mers   nourrissent  une  espèce 
voisine  de  celle-ci,  et  qui  n'en  est  peut-être 
qu'une  variété,  parée  des  couleurs  que  pren- 
i3.  29 


AT^O  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

neut  souvent  les  poissons  pendant  le  temps 
du  frai. 

Elle  a,  suivant  M.  Quoy,  le  dos  vert,  traversé  par 
sept  demi-bandes  noires;  la  troisième,  la  quatrième 
et  la  cinquième  se  prolongent  en  une  bande  jaune 
ponctuée  d'orangé,  du  plus  agréable  effet.  Le  ventre 
est  blanc  argenté,  un  peu  lavé  de  verdâlre,  avec 
quelques  reflets  rougeâtres,  dus  à  des  points  qui 
prennent  plus  de  netteté  sur  la  queue  et  y  forment 
une  bandelette  rosée.  La  tête  est  verte,  avec  deux 
taches  alongées  couleur  de  laque  au-devant  de  Tocil, 
et  deux  ou  trois  derrière  cet  organe.  Elles  deviennent 
obliques  sur  l'opercule  et  sur  le  préopercule.  La 
dorsale,  verdâtre,  a  une  raie  noire  dans  son  milieu. 
L'anale,  verdâtre,  a  une  tache  sur  les  rayons  épineux , 
verte  selon  la  figure,  et  noire  selon  le  texte.  La  cau- 
dale, verdâtre,  a  les  deux  bords  supérieur  et  inférieur 
rougeâtres  et  prolongés  en  pointe.  La  ligne  latérale 
est  ramifiée,  mais  non  interrompue,  bien  que  M.  Quoy 
dise  le  contraire.  La  pectorale  a  la  base  rougeâtre. 

D.  8/12;  A.  3/il,etc. 

Cette  espèce  atteint  à  cinq  pouces.  Je  crois 
qu'elle  est  distincte  de  la  précédente  malgré 
ses  affinités,  surtout  à  cause  de  la  raie  noire 
de  la  dorsale. 

Je  regarde  comme  identique  la  girelle  si 
élégamment  figurée  par  M.  Bennett  dans  les 
poissons  de  Ceilan  (n.°  12),  mais  je  ne  puis 
dire  sous  quel  nom,  parce  que  la  feuille  de 


CHAP.    X.    GIRELLES.  451 

texte  manque  à  mon  exemplaire.  Il  a  peint  plus 
vivement  la  bande  latérale  rouge;  la  raie  de 
la  dorsale  est  vert  foncé,  et  son  i'ond  est  jaune. 

C'est  encore  à  elle  que  je  rapporte  la  figure 
que  MM.  Kubl  et  Van  Hasselt  ont  envoyée  de 
Java  sous  le  nom  de  julis  prostzgma^  et  qui 
ont  peint  les  raies  verticales  violettes,  la  bande 
longitudinale  pourpre,  et  la  dorsale  verte,  à 
raie  lilas  et  à  bordure  jaune. 

C'est  aussi  près  de  cette  espèce  que  je  place 
le  labrus  pulcherriinus  de  Forster,  qu'il  a 
dessiné  à  Otaïti,  et  dont  j'ai  vu  la  figure  dans 
la  bibliothèque  de  Banks.  Sur  un  fond  vert, 
il  avait  des  bandes  noires  terminées  de  jaune  j 
une  bande  longitudinale  rose;  la  tête  verte, 
rayée  de  lilas;  la  caudale  verte,  bordée  de  rose. 

Je  la  retrouve  aussi  dans  Renard  (fol.  28, 
n.°  i55),  sous  le  nom  de  plieasant.  Si  le 
poisson  n'était  pas  de  la  même  espèce,  il  en 
était  du  moins  très-voisin;  en  effet  l'original 
de  Vlaraing  nous  le  présente  vert,  varié  de 
bleu,  de  jaune  et  de  noir;  deux  raies  rouges 
sur  la  joue,  une  bande  rouge  le  long  des  côtés 
de  la  queue  ;  six  demi-bandes  noires  sur  le  dos  ; 
la  dorsale  rayée,  les  autres  nageoires  jaunes, 
la  caudale  bordée  de  rouge. 


452  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

La    GiRELLE    TRIMACULÉE. 

{JuUs  trimaculatus ,  Q.) 

Les  naturalistes  de  l'expëditioii  de  ce  cé- 
lèbre navigateur  qui  affronte  aujourd'hui  les 
glaces  du  pôle  austral,  ont  rapporté  de  Vani- 
koro  une  girelle 

à  nuque  bombée,  à  caudale  tronquée.  La  plus  grande 
hauteur  dépasse  un  peu  le  quart  de  la  longueur  to- 
tale. Les  dents  mitoyennes  sont  saillantes  :  celles  de 
l'angle  sont  doubles,  la  postérieure  étant  la  plus  pe- 
tite. Les  écailles  sont  assez  grandes,  finement  striées  : 
la  portion  radicale  l'est  entièrement.  J'en  compte 
vingt-quatre  sur  la  longueur,  et  huit  au-dessous  et 
deux  au-dessus  de  la  ligne  latérale,   qui  n'est  pas 

rameuse. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

Le  dos  a  conservé  des  teintes  violettes  sur  un  fond 
rougeâtre;  le  ventre,  argenté,  est  glacé  de  verdâtre; 
la  nuque  est  couverte  de  points  bleus,  et  chaque 
écaille  du  dos  et  des  flancs  a  un  trait  bleu  vertical. 
Au  milieu  de  la  longueur  du  tronçon  de  la  queue 
et  au-dessus  de  la  ligne  latérale  est  une  grande  tache 
noire.  La  tête,  violette,  a  des  taches  bleu  céleste  sur 
la  tempe  et  l'opercule;  une  grande  tache  de  cette 
teinte  couvre  le  sous-orbitaire  et  une  autre  l'inter- 
opercule.  La  dorsale,  décolorée,  a  encore  des  traces 
de  points  ronds  disposés  en  séries  entre  chaque 
rayon,  une  raie  longitudinale  au-dessus  et  un  fin 
liséré  le  long  des  rayons  mous. 


CnAP.    X.    GIRELLES.  41>3 

La  caudale  a  une  teinte  uniforme  jaunâtre;  lanale 
a  sur  la  base  une  bandelette  blanche,  et  au-dessus 
une  autre  bleuâtre ,  lisérée  de  plus  foncé;  une  petite 
tache  est  à  l'angle  de  l'aisselle.  La  ventrale  est  pro- 
longée en  filet. 

Le  poisson  frais  a,  suivant  M.  Quoy,  le  dos  vert, 
le  ventre  argenté,  les  taches  des  joues  et  du  dos  d'un 
beau  rouge  vermillon;  la  portion  épineuse  de  la 
dorsale  verte,  l'autre  parlie  bleuâtre;  les  rayures  de 
ladorsale  sont  rouges;  la  caudale  jaunâtre,  est  bordée 
d'une  teinte  légère  de  carmin;  l'anale,  bleuâtre,  a  une 
bordure  rose,  une  raie  jaune  dans  le  milieu,  et  près 
de  la  base  un  petit  trait  rouge;  les  taches  des  flancs 
sont  noires. 

Nos  individus  ont  cinq  pouces  de  long.  La 
figure  donnée  dans  l'Astrolabe  (pi.  20,  fig.  2) 
est  loin  d'être  exacte;  la  nuque  n'est  pas  assez 
bombée,  les  dents  ne  sont  pas  assez  proclives, 
le  rose  de  la  caudale  a  été  oublié,  etc. 

La  GiRELLE  DE  Leschenault. 
(  JiiUs  Leschenaulti  3  nob.  ) 

M.  Leschenault  a  rapporté  de  Bourbon  une 
girelle  voisine  des  précédentes. 

Elle  a  le  front  bombé,  assez  saillant  au-devant  des 
yeux ,  qui  sont  plutôt  petits.  Les  dents  mitoyennes 
droites  et  avancées  :  celles  de  l'angle  de  la  bouche 
petites,  les  intermédiaires  très-fines.  Les  écailles  sont 
grandes,  à  bord    mince,  non    strié;  mais  elles  le 


A'6A  LIVRE  XVI.  LAEROÏDES. 

sont  dans  le  centre,  La  portion  radicale  est  large  et 
toute  couverte  de  stries  rayonnantes,  celles  des  côtés 
étant  plus  distantes  que  celles  du  triangle  central.  Le 
dessus  de  la  tête  est  violet,  le  bas  des  joues  rose;  de 
grandes  taches,  devenues  bleues  dans  l'eau -de-vie, 
couvrent  le  dessus  de  la  tête,  le  sous-orbitaire,  la 
joue,  la  tempe,  les  côtés  de  la  nuque  derrière  l'œil, 
et  s'étendent  sur  l'opercule  et  un  peu  sur  le  sous- 
opercule,  dont  le  haut  est  bordé  par  l'une  d'elles; 
mais  il  n'y  en  a  pas  sur  l'inieropercule.  Le  dos  est 
devenu  obscur  à  reflets  rougeàlres,  et  l'on  voit  sur 
chaque  écaille  une  tache  étroite  verticale  en  crois- 
sant, dont  plusieurs  réunies  font  une  bande  argentée, 
oblique  de  l'aisselle  sur  le  ventre.  La  dorsale  a  des 
teintes  violacées  et  une  bande  pâle  à  la  base.  L'anale 
a  une  bande  blanche  très-nettement  dessinée.  La  cau- 
dale, tronquée  et  légèrement  arrondie,  a  sur  un  fond 
pâle  quatre  ou  cinq  bandes  verticales,  confluentes 
et  violettes. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

Les  taches  sont  orangées  sur  le  poisson  frais,  dont 
la  couleur  générale  est  vert-pré.  Les  opercules  sont 
jaunes;  le  reste  de  la  tête  est  vert  plus  foncé  que  le 
corps.  La  caudale  est  jaune  et  ses  raies  orangées; 
l'anale  est  blanche  et  sa  bande  est  orangée. 

Cette  description  des  couleurs  est  lirëe  des 
notes  de  M.  Dussuraier,  qui  a  retrouvé  cette 
espèce  à  TIsle-de-France.  Nos  individus  dé- 
passent six  pouces. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  455 

La    GiRELLE    DE    EyDOUX. 

(  Julis  Ejdouxii 3  nob.  ) 

M.  Eydoux  vient  de  rapporter  des  îles 
Sandwich  une  fort  belle  espèce  de  girelle, 
qui  n'a  pas  encore  été  décrite,  et  que  je  me 
fais  un  vrai  plaisir  de  lui  dédier. 

Sa  forme  rappelle  assez  bien  celle  de  la  girelle  de 
notre  Méditerranée;  elle  a  cependant  la  nuque  plus 
bombée.  Sa  hauteur  égale  la  longueur  de  la  tête,  et 
est  contenue  quatre  fois  et  un  tiers  dans  celle  du 
corps,  y  compris  la  caudale.  Le  museau  est  peu  aigu; 
les  dents  mitoyennes  sont  dirigées  en  avant  et  poin- 
tues :  il  n'y  a  pas  de  crochet  à  l'angle  de  la  bouche. 
La  dorsale  est  longue,  mais  moins  haute  que  l'anale, 
qui  mesure  près  de  la  moitié  de  la  hauteur  du  tronc. 
La  caudale  est  légèrement  arrondie. 

D.  9/12;  A.  3/12  j  C.  13;  P.  15;  V.  1/0. 

Les  écailles  sont  très-petites;  il  y  en  a  plus  de  quatre- 
vingts  entre  l'ouïe  et  la  caudale,  j'en  compte  cinq  à  six 
au-dessus  de  la  ligne  latérale,  qui  est  tracée  par  le 
premier  sixième  de  la  hauteur,  et  trente-trois  ou 
trente- quatre  rangées  au-dessous.  Une  écaille  est 
oblongue,  du  double  plus  longue  que  haute,  mince 
et  comme  membraneuse;  sa  surface  radicale  est  sil- 
lonnée par  dix-huit  rayons  qui  entament  le  bord. 
La  ligne  latérale  est  formée  d'une  suite  de  tubulures 
serrées,  obliques,  remontant  vers  le  dos  sous  la  dor- 
sale, et  devenant  horizontales  sur  le  tronçon  de  la 
queue. 


456  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

La  couleur  du  poisson,  conservé  dans  l'esprit  de 
vin,  est  distribuée  par  trois  larges  raies  noires  lon- 
gitudinales; une,  qui  naît  sur  le  front,  passe  le  long 
du  pied  de  la  dorsale,  suit  le  dos  de  la  queue,  et 
trace  un  large  cercle  sur  la  caudale  :  elle  vient  mourir 
sous  le  dessous  de  la  queue.  La  seconde  commence 
sur  le  bout  du  museau  au-dessus  des  narines  et  de 
l'œil,  et  suit  la  ligne  latérale;  la  troisième  traverse 
l'œil,  la  tempe,  passe  au-dessus  de  l'angle  de  l'oper- 
cule, se  continue  droite  le  long  des  flancs,  et  va  se 
confondre  avec  la  précédente  à  l'endroit  où  la  ligne 
latérale  s'infléchit;  toutes  deux  réunies  s'effacent  dès 
qu'elles  atteignent  les  rayons  de  la  caudale.  Une  tache 
lilas  est  à  l'angle  de  l'opercule,  une  autre  le  long  du 
limbe  du  préopercule,  et  une  troisième  au-dessous 
de  l'œil,  près  de  l'angle  de  la  bouche.  Une  tache 
bleue  très-foncée,  comme  noire,  est  sur  le  commen- 
cement de  la  dorsale,  qui  a  une  large  bande  noire 
le  long  de  son  bord,  liséré  de  blanchâtre;  une  série 
de  taches  triangulaires  forme  à  la  base  des  rayons 
une  seconde  raie  sur  la  nageoire,  dont  le  milieu  est 
jaunâtre,  ainsi  que  la  partie  non  colorée  de  la  cau- 
dale. L'anale  a  la  moitié  inférieure  noire,  lisérée  de 
blanchâtre;  l'autre  partie  est  grisâtre,  avec  le  pied 
des  rayons  jaunâtre.  Les  pectorales  et  les  ventrales 
ne  sont  pas  colorées.  Toute  la  partie  inférieure  des 
,  flancs,  sous  la  troisième  bande  noire,  est  jaunâtre, 
ou  mieux,  couverte  d'un  réseau  jaune  à  mailles  aussi 
petites  que  les  écailles,  dont  le  centre  est  bleuâtre  ou 
nacré. 

M.  Eydoux,  qui  a  observé  le  poisson  frais,  nous 


,  CHAP.    X.    GIRELLES.  457 

apprend  que  les  bandes  sont  effectivement  brunes, 
que  leur  intervalle  est  jaune,  qu'au-dessous  de  la 
bande  inférieure  est  une  bordure  de  la  même  cou- 
leur, et  que  le  reste  du  flanc  est  rougeâtre  ou  rosé, 
passant  à  l'argenté  sous  le  ventre. 

L'espèce  atteint  à  sept  pouces  et  demi  de 
longueur. 

Elle  avait  été  déjà  vue  et  dessinée  par 
M.  Mertens  pendant  l'expédition  russe  du 
capitaine  Lïitkej  la  disposition  des  raies  lon- 
gitudinales est  tout-à-lait  semblable. 

La    GiRELLE    DE    SoULEYET. 

{Julis  Souleyetiiy  nob.  ) 

Le  Cabinet  du  Roi  possède  depuis  long- 
temps une  girelle 

dont  les  dents  sont  pointues,  de  grandeur  médiocre, 
sans  canines  vers  l'angle.  L'œil  est  de  grandeur 
moyenne,  sur  le  haut  de  la  joue,  entouré  de  canaux 
muqueux,  dont  trois,  plus  longs,  sillonnent  le  côté 
de  la  face  jusque  sur  l'opercule:  on  en  voit  d'autres 
sur  l'interopercule.  La  caudale  est  coupée  carrément  j 
la  dorsale  est  basse;  l'anale  est  un  peu  plus  haute  :  son 
premier  rayon  épineux  est  très-petit. 

D.  8/13  j  A.  3/il;  C.  13)  P.  15;  V.  1/5. 
Les  écailles  sont  larges,   granuleuses  ou  striées 
dans  les  deux  sens;  le  pourtour  seul  de  la  partie 
radicale  est  strié  comme  dans  \ejuUs  semifascialus ; 


458  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

le  centre  est  irrégulièrement  et  finement  ciselé  ;  il 
y  en  a  vingt-liuit  rangées  entre  l'ouïe  et  la  caudale,  et 
dix  ou  douze  dans  la  hauteur,  dont  trois  au-dessus 
de  la  ligne  latérale  :  celle-ci  est  composée  d'une  suite 
d'arbuscules  assez  étendus. 

Le  fond  de  la  couleur  du  dessus  du  corps  est 
brun,  plus  ou  moins  jaunâtre,  passant  à  l'argenté 
sous  le  ventre.  Il  y  a  des  lignes  ou  des  points  noirs 
sur  la  tête,  sous  l'œil  et  sur  l'opercule;  les  flancs 
sont  marqués  de  traits  verticaux  interrompus  et 
tracés  en  échiquier;  une  tache  noire  est  sur  le  de- 
vant de  la  dorsale. 

L'individu  que  je  décris  est  long  de  cinq 
pouces  et  une  ou  deux  lignes.  Il  nous  a  été 
envoyé  de  l'Isle-de-France  par  M.  le  colonel 
Mathieu. 

MM.  Quoy  et  Gaimard  en  ont  rapporté  des 
îles  Sandwich,  lors  de  leur  première  relâche 
avec  M.  Freycinet,  un  petit  individu  long  de 
deux  pouces  et  demi, 

qui  a  plus  de  points  sur  la  tête,  et  une  petite  tache 
grise  sur  les  premiers  rayons  mous  de  la  dorsale. 

Je  retrouve  cette  même  espèce  dans  les 
collections  faites  dans  le  même  archipel  par 
MM.  Eydoux  et  Souleyet,  qui  en  ont  pris  un 
individu  à  la  cascade  d'Ouaou. 

Ici  les  traits  du  corps  sont  plus  confluents,  et 
forment  trois  séries  de  grosses  taches.  La  couleur  a 
conservé  des  teintes  violeues. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  459 

J'ai  dédié  cette  jolie  espèce  au  compagnon 
de  travail  et  de  navigation  de  M.  Eydoux, 
M.  le  docteur  Souleyet. 

La    GiRELLE    DE   DeSJARDINS. 
{Julis  Ahhortani  y  nob.  ) 

M.  J.  Desjardins  a  adressé  de  l'Isle-de-France 
pour  le  Cabinet  du  Roi,  une  girelle  que  je  ne 
trouve  pas  décrite  parmi  les  espèces  dont 
M.  Th.  Bennett  a  donné  les  caractères,  sur  les 
individus  envoyés  de  cette  île  à  la  Société 
zoologique  de  Londres  par  M.  Telfair. 

Celle-ci  a  le  corps  Irapu,  la  hauteur  étant  du 
tiers  de  la  longueur  du  corps,  la  caudale  non  com- 
prise. Les  dents  sont  petites  ;  il  n'y  en  a  point  dans 
l'angle  de  la  bouche.  L'œil  est  petit,  entouré  de  pores 
en  séries;  trois  conduits  muqueux  sont  sur  l'oper- 
cule, comme  dans  la  précédente;  mais  je  n'en  vois 
pas,  comme  dans  celle-ci,  sur  l'interopercule,  qui 
est  très-large.  L'espèce  présente  s'en  distingue  encore 
par  les  écailles ,  qui  sont  larges,  à  bord  mince  et  mem- 
braneux, strié  comme  la  partie  nue  sur  toute  la  por- 
tion radicale,  qui  est  aussi  très-large.  La  ligne  latérale 
est  très-ramifiée. 

Le  poisson  décoloré  paraît  comme  doré;  on  ne 
voit  aucune  trace  de  bandes  ou  de  taches  sur  la  tète: 
des  traits  violets,  qui  peut-être  étaient  orangés  pen- 
dant la  vie,  dessinent  sur  le  bord  des  écailles  un 
réseau  qui  couvre  les  côtés.  La  dorsale  a  une  tache 


460  LIVRE  XVI.  LABROÏDES. 

noire  sur  les  premiers  rayons,  le  reste  est  d'une 
couleur  jaune  uniforme;  l'anale  a  la  moitié  infé- 
rieure violette  et  le  bord  pâle;  les  pectorales  sont 
violacées,  le  bord  supérieur  étant  nettement  coloré; 
les  ventrales  et  la  caudale  n'offrent  qu'une  teinte 

uniforme. 

D.  8/13  j  A.  3/11,  etc. 

Je  n'ai  qu'un*  s«ul  individu  de  cette  espèce. 
Il  est  long  de  six  pouces  et  demi. 

La    GiRELLE    ROUGE. 
(  Jiilis  miniatus ,  K.  V.  H.  ) 

Je  trouve  dans  les  collections  faites  à  Java 
par  MM.  Rulil  et  Van  Hasselt,  une  petite 
girelle  voisine  des  précédentes, 

qui  a  sur  le  second  rayon  mou  de  la  dorsale  une 
petite  tache  noire  et  ronde,  un  trait  vertical  noirâtre 
derrière  l'œil,  et  un  autre  longitudinal  et  brillant 
d'un  beau  nacré  sur  le  sous-orbitaire,  partant  de 
l'anole  de  la  bouche  et  se  terminant  en  se  coudant 
sur  le  sous-opercule,  après  avoir  traversé  l'oper- 
cule. Le  dos  et  les  flancs  ont,  sur  un  fond  qui  a  été 
probablement  rouge  de  minium,  des  traits  noirâtres 
anastomosés,  et  la  poitrine  et  le  ventre  sont  très- 
élégamment  couverts  de  petits  traits  en  croissant, 
à  convexité  tournée  en  avant,  en  sens  opposé  à 
celle  du  bord  des  écailles,  et  d'une  belle  couleur 
blanche  et  brillante;  cinq  ou  six  petits  traits  argentés 
descendent  aussi  du  dos  vers  la  ligne  latérale.  La 


CHAP.    X.    GIRELLES.  4G 1 

dorsale  avait  quelques  rayures  plus  ou  moins  effa- 
cées; l'anale  a  des  petits  points  noirs;  les  autres 
nageoires  sont  unicolores. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 
La  ligne  latérale  a  des  arbuscules  peu  nombreux , 
formant  le  plus  souvent  des  petits  chevrons  à  deux 
branches. 

L'individu  que  M.  Temminck  a  bien  voulu 
céder  du  musée  royal  de  Leyde  à  celui  de 
Paris,  est  long  de  deux  pouces  et  demi  en- 
viron. 

La    GiRELLE    NUAGEUSE. 
(  Jidis  nebulosus ,  nob.  ) 

J'ai  encore  sous  les  yeux  une  girelle 

qui  a  sur  le  dos  quatre  taches  argentées,  les  deux 
antérieures  étant  plus  étroites.  Sur  la  dorsale  exis- 
tent deux  taches  noirâtres,  une  petite  derrière  le 
premier  rayon,  et  une  seconde  sur  le  haut  des  trois 
premiers  rayons  mous.  Cette  espèce  a  d'ailleurs,  pour 
se  distinguer  des  deux  autres,  une  bande  bleuâtre 
en  chevron  sur  la  joue,  au-dessous  de  l'œil,  une 
autre  en  avant  sur  le  sous-orbitaire  antérieur,  une 
autre  en  travers  sur  l'opercule  et  prolongée  en  s'ef- 
façant  sous  la  base  de  la  pectorale.  Une  bandelette 
bleue  ou  lilas  s'étend  le  long  du  corps  au-dessous 
de  la  ligne  latérale,  de  l'angle  de  l'opercule  vers  la 
queue,  mais  elle  s'évanouit  de  bonne  heure.  Il  y  a 
au-dessous  la  trace  d'une  seconde,  encore  plus  effacée; 
sur  le  milieu  des  cotés  il  y  a  plusieurs  taclies  noires 


/|4]2  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

nuageuses,  mêlées  à  d'autres  nacrées.  On  voit  sur  la 
dorsale  des  traces  de  taches  blanches  ou  nacrées, 
grandes  à  la  base,  plus  petites  près  du  bord,  qui 
devait  être  bleuâtre.  L'anale,  plus  bleue,  a  deux  ran- 
gées de  taches  blanc  de  lait;  la  caudale,  blanchâtre,  est 
traversée  par  cinq  à  six  séries  verticales  de  points 
noirâtres;  les   nageoires    paires  ont  conservé  une 

teinte  jaunâtre. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

La  caudale  est  coupée  carrément,  et  a  le  bord 
légèrement  arrondi,  quand  elle  est  déployée;  la  ligne 
latérale  rameuse;  les  écailles  assez  grandes,  striées: 
il  y  en  a  vingt-six  rangées  sur  la  longueur.  Toute  la 
portion  radicale  est  entièrement  striée;  il  y  a  trente- 
deux  rayons  à  l'éventail, 

L'indiviau  a  trois  pouces  et  demi.  Il  faisait 
partie  des  collections  de  feu  M.  Polydore 
Roux.  Il  vient  de  Bombay. 

La    GiRELLE    VARIÉE. 

(  Julls  variegatus ,  Ruppel.  ) 

Une  charmante  espèce  de  girelle  a  été  ob- 
servée dans  la  mer  Rouge  par  M.  Ruppel.  Il 
en  a  cédé  un  individu  au  Cabinet  du  Roi, 
sur  lequel  j'ai  fait  les  observations  suivantes  : 

Le  corps,  un  peu  trapu,  a  le  museau  pointu;  la 
queue  mesure  plus  de  la  moitié  du  tronc.  La  hauteur 
aux  pectorales  est  comprise  trois  fois  dans  la  distance 
du  bout  du  museau  à  la  naissance  de  la  caudale.  La 


CHAP.    X.    GIRELLES.  465 

lête  égale  la  hauieur  du  tronc,  les  dents  mitoyenrjs 
sont  saillantes ,  ainsi  que  les  canines  de  l'angle  de  la 
bouche.  La  caudale  a  le  bord  légèrement  arrondi. 
D.  9/11  ;  A.  3/12;  C.  13;  P.  13;  V.  1/5. 
Les  écailles  sont  petites,  très-minces,  lisses  ou  à 
peine  striées  d'un  ou  deux  traits  excessivement  fins; 
une  d'elles,  vue  détachée,  est  oblongue,  et  a  sa 
portion  radicale  striée  de  quatorze  à  seize  rayons. 
Je  compte  cinquante-deux  rangées  entre  l'ouïe  et  la 
nageoire  de  la  queue,  quatre  ou  cinq  au-dessus  de 
la  ligne  latérale,  et  vingt  à  vingt-deux  au-dessous; 
la  ligne  latérale  n'est  pas  rameuse. 

La  couleur  dans  l'eau -de -vie  est  un  jaune  rou- 
geâtre,  devenant  argenté  sous  la  poitrine,  et  semé 
de  points  noirs  irréguliers;  une  tache  noirâtre  est 
derrière,  une  autre  à  la  base  de  la  pectorale,  et  trois 
sur  la  dorsale,  une  à  chaque  extrémité  et  une  plus 
grande  sur  le  milieu  ;  un  trait  bleu  se  voit  sous  ToeiL 
Les  nageoires  sont  jaunâtres.  La  figure  de  M.  Ruppel  ^ 
représente  le  fond  de  la  couleur  verdâtre  lavé  de  gris, 
avec  six  petits  traits  verticaux  descendant  du  pied  de 
la  dorsale,  et  s'efFacant  en  atteignant  la  ligne  latérale; 
le  corps,  couvert  de  petits  points  noirs,  est  linéolé  de 
traits  jaunes  et  longitudinaux  ;  la  tache  de  l'œil  est 
bleue,  ainsi  que  trois  traits  longitudinaux  tracés  sur 
la  joue;  la  caudale  jaunâtre;  les  autres  nageoires 
bleuâtres;  la  dorsale  ayant  un  ocelle  blanc,  à  centre 
noir  et  large,  sur  le  troisième  rayon  mou,  et  un 
très-petit  de  même  couleur  près  le  premier  rayon 


1.  JSeue   Wîrhellhîere  zu  der  Fauv.  ahyss.,  pi.  4,  fig-  2. 


464  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

mépineux,  et  de  plus  trois  ou  quatre  séries  de  bandes 
ou  de  points  lilas.  L'anale  a  au  milieu  de  sa  hauteur 
une  bandelette  d'un  bleu  clair,  lisérée  de  deux  traits 
lilas.  L'iris  est  d'un  beau  rouge  carmin. 

M.  Ruppel  a  pris  cette  espèce  à  Massuah; 
il  en  a  vu.  des  individus  de  six  pouces.  Ce 
naturaliste  a  réuni  cette  espèce  avec  ses  au- 
tres halichores,  sous  le  nom  dilialicores  varie- 
^atus,  a  cause  de  sa  dent  saillante  à  l'angle 
de  la  bouche.  Je  lui  ai  conservé  le  nom  spé- 
cifique qu'elle  avait  reçu  par  le  célèbre  voya- 
geur de  Francfort. 

La    GiRELLE    AUX    NAGEOIRES    ROUGES. 

(  Julis  erjthropterus  3  nob.  ) 

Je  pense  que  M.  Ruppel  regarde  à  tort  le 
Woorn  de  Renard  (fol.  9,  n.°  62)  comme 
pouvant  être  rapproché  de  l'espèce  que  je 
viens  de  décrire  d'après  l'auteur  de  la  Faune 
d'Abyssinie. 

J'en  juge  mieux  que  M.  Ruppel  n'a  pu  le 
faire,  parce  que  j'ai  sous  les  yeux  l'original  de 
l'amiral  Corneille  de  Vlaming.  Il  représente 

le  poisson  vert,  marqué  de  points  rouges  disposés 
en  bandelettes  transversales  sur  le  tronc,  au  nombre 
de  huit.  Les  pectorales  et  les  ventrales  sont  rouges, 
ainsi  que  l'anale  ;  une  série  de  points  noirs  existe  le 
long  de  la  dorsale. 


CMAP.    X.    GIRELLES.  465 

Renard  a  rendu  le  poisson  de  lamiral  tout- 
à-fait  méconnaissable.  Je  ne  doute  pas  qu'on 
ne  retrouve  celte  espèce. 

La    GiRELLE    MULTICOLORE. 

(  JllUs  multicolor,  Ruppel,  ) 

M.  Ruppel^  a  encore  décrit,  sous  le  nom 
de  halichores  multicolor,  une  girelle  dont 

le  dos  est  brun  lougeâtre,  traversé  par  six  larges 
bandes  verdâlres,  qui  ne  descendent  pas  au-delà  de 
la  moitié  des  flancs.  Le  ventre  est  jaunâtre  ou  ver- 
dàtre;  la  tête,  de  la  couleur  du  dos,  a  une  raie  bleue 
sur  la  portion  médiane,  allant  du  bout  du  museau 
à  la  dorsale;  une  seconde  raie  bleue  part  du  milieu 
du  maxillaire  supérieur,  remonte  vers  l'œil,  qui  l'in- 
terrompt, et  s'étend  ensuite  par  le  milieu  des  bandes 
du  dos  jusqu'au  bord  postérieur  de  la  cinquième, 
sous  le  dernier  rayon  de  la  dorsale.  Une  troisième 
raie  bleue  va  du  milieu  de  la  branche  de  la  mâchoire 
inférieure  courir  par  plusieurs  flexuosités  vers  l'angle 
de  l'opercule.  Au-dessous  il  y  a  deux  traits  bleus  in- 
terrompus, puis  un  autre  le  long  de  l'interopercule, 
et  un  chevron  de  même  teinte  sous  la  gorge.  Une 
bande  interrompue,  jaune  orangé,  traverse  longi- 
tudinalement  la  poitrine,  en  partant  de  l'aisselle  de 
la  pectorale  et  en  finissant  sous  l'aplomb  du  sixième 
rayon  mou  de  la  dorsale.  La  queue  est  couverte,  près 
de  la  naissance  de  la  caudale,  de  taches  ou  vermicel- 


1.  ISene  Wirbelthiere  zu  derFaun.  abjss. ,  p.  j5  ,  pi.  4  ,  fig-  5. 

i3.  3o 


4G6  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

lures  bleues  :  cette  nageoire  a  quatre  raies  rougeâtres 
verticales  sur  un  fond  gris  rougeâtre.  La  dorsale  et 
l'anale  ont  la  base  verdàtre,  l'autre  moitié  rose  avec 
trois  lignes  longitudinales  violettes.  Les  nageoires 
paires  sont  rosées. 

D.  9/12;  A.  3/12;  C.  12;  P.  13;  V.  1/5. 

Le  premier  rayon  de  la  dorsale  est  alongé  et  a  un 
peu  de  noirâtre  sur  sa  membrane. 

Les  individus  atteignent  à  six  pouces.  M. 
Ruppel  les  a  pris  à  Djedda  au  mois  de  Juillet. 

La    GiRELLE    RAYÉE    DE    BLEU. 

(  Julis  cœruleo-vittatus ,  Ruppel.  ) 

Je  trouve  dans  les  nouvelles  livraisons  de 
M.  Ruppel  une  girelle  dont 

le  dos  est  vert  de  mer,  le  ventre  blanc  lavé  de  rose 
très-clair,  une  raie  bleue  en  zigzag  est  dessinée 
le  long  des  flancs,  sur  le  haut  des  cotés.  Sur  la  joue 
sont  trois  taches  carmin,  lisérées  de  bleu;  celle  du 
milieu  est  la  plus  grande  et  se  prolonge  sur  l'oper- 
cule, et  même  sur  l'épaule,  jusqu'à  la  ligne  bleue. 
Un  autre  trait  rouge  descend  obliquement  de  l'ais- 
selle de  la  pectorale  derrière  l'insertion  de  la  ven- 
trale. Celles-ci  sont  prolongées  en  filet;  les  deux 
nageoires  paires  sont  rosées;  la  dorsale  et  l'anale  sont 
lilas  et  rayées  longitudinalement  de  trois  bandelettes 
roses;  la  caudale  est  verte  comme  le  dos,  avec  deux 
bandes  verticales  irrégulières  rouges;  l'iris  de  l'oeil 


CHAP.    X.    GIRELLES.  467 

est  carmin;  la  caudale  est  légèrement  arrondie;  le 
museau  est  assez  pointu. 

D.  9/11;  A.  3/11;  C.  14;  P.   14;  V.   1/5. 

M.  Rappel  a  trouvé  ce  poisson  assez  fre- 
quemineiit  sur  le  marche  de  Djedda.  Les  in- 
dividus étaient  longs  de  sept  pouces.  M.  Hup- 
pe!' en  avait  fait  une  espèce  de  ses  halicliores, 
à  cause  des  défenses  de  l'angle  de  la  mâchoire. 

La    GiRELLE    ÉLÉGANTE. 

(  Julis  elegans  ^  K.  V.  H.  ) 

MM.  Ruhl  et  Van  Hasselt  ont  envoyé  une 
girelle  voisine  de  la  précédente,  qui  a 

le  dos  vert,  un  point  violet  sur  chaque  écaille, 
et  une  bande  violette  le  long  des  côtés;  le  dessous 
argenté  glacé  de  verdâtre.  La  tête,  v«rte  en  dessus, 
est  jaune  en  dessous;  un  trait  courbe  rouge  de  laque 
va  de  la  lèvre  à  l'œil;  deux  points  rouges  sont  au- 
dessus  de  cet  organe;  un  trait  oblique,  rouge  aussi, 
traverse  la  poitrine. 

La  dorsale  et  l'anale  sont  vertes,  rayées  de  deux 
bandes  rouge  carmin,  bordées  de  bleu.  La  caudale 
a  sur  un  fond  vert  des  bandes  verticales  rouges,  bor- 
dées de  bleu  :  elle-même  a  le  limbe  jaune. 

Cette  espèce  vient  de  Java. 

1.  Neue  JVirbelthiere  zu  derFaun.  abyss. ,  p.  i4  j  tab.  4,  %•  * • 


408  LTVRi:   XVI.    LABPvOÏDES. 

La    GiRELLE  A  VENTRE  RAYÉ. 

{JuUs  strigiventer ,  Benn.,  Proceed.  of  the  Zool 
soc,  i852,  p.  184.) 

Une  autre  girelle,  de  risle-de-France,  a 

la  caudale  arrondie,  le  corps  ovale  et  lancéolé,  la 
tête  pointue;  elle  est  brune  sur  le  dos  avec  des  gout- 
telettes plus  foncées;  plus  pâles  en  dessous,  avec 
six  lignes  longitudinales  argentées  sur  chaque  côté. 
La  moitié  supérieure  de  la  tête  est  mêlée  de  jaunâtre  ; 
l'inférieure  est  argentée;  les  nageoires  sont  transpa- 
rentes, avec  un  point  noir  près  la  base  de  lavant- 
dernier  rayon  mou  de  la  dorsale  et  de  l'anale- 
D.  9/12  ;  A.  3/12 ,  elc. 

La  GiREi;.LE  de  Ceilan. 

{Julis  ceilanicus ,  Benn.,  Proceed.  of  the  Zool.  soc. , 
i832,  p.  i83.) 

Le  docteur  Sibbald  a  réuni  à  Ceilan  une 
nombreuse  collection  de  poissons.  M.  Bennett 
a  donné  sur  ces  espèces  une  notice  dont  nous 
extrayons  l'article  suivant  : 

Une  d'elles,  décrite  sous  le  nom  àe  julis 
ceilanicus  f 

a  la  caudale  arrondie;  la  couleur  est  jaunâtre,  la  tête 
plombée  avec  des  rivulations  orangées.  Cette  teinte 
se  retrouve  sur  les  nageoires  verticales,  sur  une  bande 
bordée  de  bleu,  tracée  le  long  de  la  base  de  la  dor- 


CIIAP.    X.    GIRELLKS.  469 

-  sale,  sur  une  autre  interrompue,  qui  suit  la  ligne 
latérale,  sur  une  troisième  le  long  des  flancs,  qui 
est  en  haut  et  en  bas  lisérée  de  bleu,  et  sur  des 
branches  de  cette  ligne  plus  courtes  et  descendant 
sur  le  ventre;  enfin,  sur  une  ligne  oblique  allant  de 
la  base  des  pectorales  au  ventre.  La  dorsale  a  entre 
la  base  de  chaque  rayon  une  large  ligne  oblique  de 

'  couleur  bleue,  une  seconde  de  même  teinte  au  mi- 
lieu des  rayons  mous;  elle  a  vers  la  pointe  des  taches 
bleues.  L'anale  porte  au  milieu  et  sur  son  bord  libre 
une  bande  qui  est  aussi  de  couleur  bleue,  et  celte 
teinte  colore  les  rivulations  dont  la  caudale  est  ornée. 
Les  dents  de  l'extrémité  du  museau  sont  grandes  et 
pointues  :  celles  de  la  mâchoire  supérieure  reçoivent 
entre  elles  les  dents  de  l'inférieure.  Il  y  a  dans  l'angle 
de  la  bouche  deux  crochets  saillants. 

D.  9/II5  A.  3/il,  etc. 

Il  faut  faire  attention  que  M.  Bennett  ne 
regarde  pas  cette  espèce  comme  identique  du 
lahriis  ceilanicus  de  Forster.  Il  aurait  été 
toutefois  mieux  de  lui  donner  un  autre  nom 
spécifique. 

La  GiRELLE  SCAPULAIRE. 

{Julis  scapularis  3  Benn.,  Proceed.  qf  the  Zool.  soc.^ 
i85i,  t.  I."j  p.  167.) 

Cette  girelle,  dont  nous  devons  la  diagnose 
h  M.  Bennett, 

a  la  caudale  arrondie,  la  tète  chargée  de  rivulations? 


470  LIVRE  XVI.    LABROÏDES. 

le  corps  de  petits  croissans,  et  derrière  les  pecto- 
rales une  bande  tracée  obliquement  vers  le  ventre , 
une  bandelette  sur  l'anale  :  le  tout  de  couleur  rose. 
La  dorsale  et  la  caudale  sont  de  même  roses;  celte 
dernière  nageoire  est  bariolée  de  bleu;  la  tache  du 
dos,  les  taches  en  croissant  sur  la  base,  la  bandelette 
sur  le  milieu,  et  le  bord,  étant  bleus.  La  pectorale, 
transparente,  est  jaune  à  la  base,  et  il  y  a  sur  l'épaule 
une  large  bande  noire,  tronquée  au  sommet  de  la 

pectorale.  > 

D.  9/11;  A.  3/12,  etc. 

Cette  espèce  vient  de  risle-de-Fiance,  d'où 
elle  a  été  envoyée  à  la  Société  zoologique  par 
M.  Telfair. 

La  GiRELLE    DOUBLE   CHAINE. 

{  Jiilis  hicatencitus ,   Benn.,  Proceed.  of  the  Zool. 
soc,  i838,  t.  I.",  p.  167.) 

Le  même  naturaliste  a  encore  envoyé  do 
cette  île  à  la  même  Société  une  autre  girelle, 
que  M.  Bennett  a  décrite 

comme  ayant  la  caudale  carrée,  la  tête  et  le  dos  verts, 
les  côtés  rouges,  ornés  de  chaque  côté  de  deux 
bandes  formées  de  deux  séries  de  taches  grises,  oblon- 
gues  et  transversales  ;  le  bord  de  la  dorsale  et  de 
l'anale  d'un  beau  jaune;  la  pointe  de  la  caudale  de 
même  couleur;  la  pectorale  noire,  ayant  à  sa  base 
une  grande  tache  orangée,  atteignant  jusqu'au  bord 
inférieur;  les  ventrales  verdàtres. 

D.  9yl2;  A.  3/11,  etc. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  47l 

La  GiRELLE    DE  FiNLAYSON. 

{Julis  Finlajsoniy  nob.) 

J'ai  observé  parmi  les  dessins  envoyés  de 
Ceilan  par  le  major  Finlayson ,  et  déposés 
dans  le  Cabinet  de  la  Compagnie  des  Indes, 
une  girelle 

verle,  à  raie  latérale  brune,  couverte  de  points  plus 
foncés.  La  dorsale,  bordée  de  rouge,  est  poinlillée  de 
cette  couleur;  l'anale  est  semblable;  la  caudale  a  sur 
chaque  lobe  trois  raies  obliques  orangées,  bordées 
de  bleu.  Le  dessous  de  la  tête,  argenté,  a  un  trait 
orangé  sur  toute  sa  longueur,  il  est  au-dessous  de  la 
bande  brune  qui  vient  du  corps  par  l'œil  jusqu'au 
bout  du  museau. 

La  Girelle  a  raies  pourpre. 
{Julis  purpureo-lineatus ,  nob.) 

Une  autre  peinture,  envoyée  par  le  même 
naturaliste,  m'a  fait  voir  une  petite  espèce 

à  corps  vert,  rayé  de  violet  sur  le  dos,  sur  le  milieu 
du  corps,  sur  le  bord  de  la  dorsale  et  de  l'anale;  les 
pectorales  sont  jaunes;  la  tête  est  jaunâtre,  tachetée 
de  violet;  la  caudale  a  de  jolies  petites  raies  rouges; 
la  base  de  la  dorsale  est  pointillée  de  rouge  très- vif. 

Ce  poisson  vient  aussi  de  Ceilan. 


472  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

La    GiRELLE   AXILLAIRE. 

{Julis  aocillaiis ,  nob. ) 

Une  petite  giielle  des  îles  Sandwich,  rap- 
portée par  MM.  Quoy  et  Gaimard  de  leur 
premier  voyage  avec  M.  le  capitaine  Freyci- 
net,  et  qui  n'a  pas  été  retrouvée  depuis  soit 
par  eux,  soit  par  les  naturalistes  de  la  Bonite,  a 

la  courbe  du  dos  assez  convexe;  celle  du  ventre 
presque  rectiligne.  La  longueur  de  la  tête  est  égale  à 
la  hauteur  du  tronc  et  au  tiers  de  la  longueur  du 
corps,  la  caudale  non  comprise,  celle-ci  y  étant  con- 
tenue sept  fois.  Les  dents  sont  petites,  tronquées, 
à  peu  près  égales  ;  l'interniaxillaire  a  une  sorte  de 
petit  talon  revenant  en  avant,  et  donnant  de  son 
bord  antérieur  une  dent  canine  conique,  droite, 
très- pointue  et  dirigée  en  avant.  Les  deux  o^uver- 
tures  de  la  narine  sont  très -petites  et  rapprochées, 
et  la  tête  est  percée  d'un  assez  grand  nombre  de 
pores.  La  caudale  est  carrée. 

D.  9/11;  A.  3/11;  C.  13;  P.  16;  V.   1/5. 

Je  compte  vingt-huit  rangées  d'écaillés  entre  l'ouïe 
et  la  caudale,  trois  au-dessus  de  la  ligne  latérale  et 
neuf  au-dessous.  Une  écaille,  vue  détachée,  est  pen- 
lagonale;  son  triangle,  libre  et  nu,  a  des  stries  rayon- 
nantes du  centre  vers  les  deux  côtés,  au  nombre  de 
quatorze  environ  :  elles  sont  croisées  par  de  fines 
ciselures.  La  portion  recouverte  et  quadrilatère  a  le 
bord   radical  droit  festonné,  et  dix -huit  rayons  à 


CHAP.    X.    GIRKLl.ES.  475 

Févenlail.  La  ligne  latérale  est  composée  d'une  suite 
de  tubulures  non  rameuses. 

La  couleur  est  un  brun  assez  uniforme  sur  le  dos, 
un  peu  tacheté  sous  le  ventre.  La  base  de  la  pecto- 
rale est  noire,  et  au-dessus  de  l'aisselle  il  y  a  une 
tache  blanche  et  nacrée,  qui  se  conserve  même  sur 
les  individus  les  plus  décolorés.  On  voit  trois  petits 
points  noirs  de  chaque  côté  de  la  queue,  le  long  de 
la  ligne  latérale.  Les  articulations  des  rayons  de  la 
pectorale  sont  marquées  par  de  très-fins  traits  noirs. 
Sur  le  frais,  les  couleurs  sont  plus  vives.  D'après 
les  observations  de  M.  Quoy,  ce  poisson  aurait  une 
teinte  rosée,  des  points  bleuâtres  sur  le  corps  et 
sur  la  tête,  qui  est,  ainsi  que  le  dos,  un  peu  enfumée. 
■  Le  ventre,  la  gorge  et  les  nageoires,  tirent  sur  le 
jaune;  la  tache  de  l'aisselle  est  d'un  beau  jaune  écla- 
tant; les  points  noirs  de  la  queue  sont  le  centre  d'un 
cercle  jaune. 

La  longueur  des  diffërens  individus  varie 
de  quatre  pouces  à  quatre  pouces  et  demi. 

Cette  espèce  doit  être  cependant  répandue 
dans  les  mers  de  l'Inde;  car  le  Cabinet  du 
Roi  en  possédait  depuis  long-temps  un  indi- 
vidu de  même  taille  que  les  prêcédens,  et 
qui  provenait  du  voyage  de  Pêron,  qui  n'a 
pas  vu  les  îles  Sandwich.  M.  Quoy,  en  adop- 
tant le  nom  que  nous  avions  donné  à  l'espèce, 
en  a  publié  une  description  dans  la  Relation 
zoologique  du  voyage  de  l'Uranie,  page  272. 


474  UVRE  XVI.    LABROÏDES. 

La    GiRELLE    DE    SeBA. 

(  Jiills  Sehanus  j  nob.  ) 

Nous  avons  pu  déterminer  avec  certitude  la 
girelle  dont  Seba  a  donné  la  figure  tome  III, 
planche  3i,  figure  5,  parce  que  nous  possé- 
dons dans  le  Cabinet  du  Roi  l'individu  qui 
lui  a  servi  d'original.  C'est  une  girelle 

à  corps  ovalaire,  à  flancs  arrondis,  dont  la  hauteur, 
égale  à  la  longueur  de  la  tête,  surpasse  un  peu  le  quart 
de  celle  du  corps.  La  dorsale  est  Basse;  les  ventrales 
sont  assez  reculées,  et  la  caudale  est  coupée  carré- 
ment. La  ligne  latérale  n'est  pas  rameuse;  les  écailles 
sont  finement  striées:  elles  ont  leur  surface  radicale 
ciselée  par  quatorze  rayons  qui  entament  le  bord, 
lequel  est  un  peu  sinueux. 

D.  9/11;  a;  3/11,  etc. 

Le  corps  est  décoloré;  mais  il  reste  encore  la  trace 
de  trois  raies  longitudinales  tracées  sur  le  côté  du 
poisson.  Une,  roussâtre,  vient  de  l'œil  sur  le  sursca- 
pulaire,  où  elle  est  suivie  d'une  bandelette  blanche, 
qui  va  tout  le  long  de  la  ligne  latérale  se  terminer 
à  la  fin  de  la  queue. 

Une  seconde  raie  part  du  bout  et  reste  au-dessous 
de  l'œil;  elle  est  blanche,  puis  elle  devient  rousse, 
traverse  l'opercule  en  prenant  une  teinte  plus  foncée; 
elle  continue  en  passant  au-dessus  de  l'aisselle,  pre- 
nant de  nouveau  une  couleur  blanche,  et  ne  va  pas 
au-delà  du  bord  de  lapectorale.  Une  troisième  raie. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  47o 

blanche  dans  toute  sa  longueur,  commence  à  l'angle 
de  la  bouche,  se  continue  sous  la  nageon-e,  et  se 
termine  à  la  naissance  de  la  caudale.  Les  nageoires 
n'offrent  aucune  trace  de  taches. 

La  figure  de  Seba  est  très-exacte  :  l'individu 
qui  lui  a  servi  de  modèle  est  long  de  quatre 
pouces  et  demi.  Il  ne  parle  pas  du  lieu  d'où 
il  avait  reçu  ce  poisson. 

On  ne  peut  rapporter  à  cette  espèce  le 
lahriis  trilineatiis  du  Système  posdiume  de 
Schneider,  parce  que  Bloch  y  a  joint  comme 
synonyme  le  poisson  de  Kœlréuter,  qui,  étant 
d'une  autre  espèce,  a  rendu  ce  lahrus  trili- 
neatus  un  être  complexe  à  rayer  de  la  liste 
du  catalogiie  des  êtres. 

La   GiRELLE    RAIE   AURORE. 

{Jiilis  balteatus,  Q.  G.,  Ad.  de  l'Uranie,  pi.  56, 

fig.  1.) 

MM.  Quoy  et  Gaimard  ont  rapporté  des 
îles  Sandwich  une  girelle  très -voisine  de  la 
précédente,  mais  qui  n'a  pas  les  lignes  des 
flancs  disposées  tout-à-fait  de  même. 

Elle  a  d'ailleurs  le  corps  plus  haut  et  le  museau 
moins  pointu.  La  hauteur  est  du  tiers  de  la  longueur 
du  corps,  sans  y  comprendre  la  caudale,  qui  a  la 
moitié  de  cette  hauteur  du  tronc,  La  tête,  plus  courte 
que  le  corps  n'est  haut,  est  contenue  quatre  fois  dans 


476  LIVRE    XVI.    LABROÏÛES. 

la  longueur  totale.  La  dent  de  l'angle  de  la  bouche 
est  assez  saillante  et  pointue.  La  ligne  latérale  n'est 
pas  rameuse  :  je  trouve  vingt-quatre  rangées  d'écaillés 
sur  le  flanc,  et  onze  dans  la  hauteur,  dont  deux 
seulement  au-dessus  de  la  ligne  latérale.  Une  écaille 
est  à  peu  près  carrée;  sa  surface  radicale,  très-large, 
n'a  que  le  pourtour  strié  et  le  centre  chargé  de  petites 
raies  anastomosées.  Toute  la  portion  nue  a  de  fines 
stries.  La  dorsale  est  basse,  la  caudale  a  les  rayons 
mitoyens  un  peu  plus  longs  que  les  autres,  ce  qui 
la  rend  comme  festonnée  à  double  échancrure. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

Cette  girelle  est  rayée  de  trois  raies  blanches  sur 
la  tète  et  de  deux  sur  le  corps,  ainsi  disposées:  la 
supérieure  commence  sur  le  bout  du  museau,  est 
interrompue  par  l'œil,  et  va  se  perdre  sur  l'épaule, 
à  la  quatrième  rangée  d'écaillés.  Une  seconde  prend 
naissance  au  bout  du  museau,  traverse  la  joue  en 
touchant  le  bord  inférieur  de  l'orbite,  passe  sur  l'ais- 
selle, et,  en  se  courbant  un  peu,  se  rend  le  long  du 
côté  à  la  queue,  sur  laquelle  elle  meurt.  La  troisième, 
aussi  tracée  sur  la  tête ,  y  forme  une  bride  convexe 
en  dessus,  en  naissant  de  dessous  la  mâchoire  infé- 
rieure, remontant  au-dessus  du  limbe  du  préopercule 
pour  se  terminer,  en  passant  par  l'angle,  sur  le  bas  du 
sous-opercule. 

La  seconde  ligne  des  flancs  prend  de  l'angle  in- 
férieur de  l'aisselle  de  la  pectorale,  et  se  rend,  paral- 
lèlement à  la  première,  sur  le  bas  du  tronçon  de  la 
queue.  L'huméral  est  bordé  de  blanchâtre.  Mais  sur 
le  frais  le  poisson  est  coloré  en  vert  sur  la  tête  et 


CHAP.    X.    GIRELLES.  477 

le  dos,  et  est  argenté,  glacé  de  verdàlre  pâle,  sur  le 
ventre.  Les  raies  de  la  joue,  de  l'épaule,  sont  aurores, 
ainsi  que  l'espace  compris  entre  les  deux  raies  des 
côtés,  lesquelles  sont  d'une  teinte  plus  foncée.  La 
dorsale  et  la  caudale  sont  aussi  orangées,  l'anale 
en  a  une  faible  teinte,  les  nageoires  paires  sont 
verdâtres. 

Les  naturalistes  de  l'expédition  de  la  Bo- 
nite ont  retrouvé  ce  poisson  aux  îles  Sand- 
wich. Nos  individus  vont  jusqu'à  cinq  pouces. 
MM.  Quoy  et  Gairaard  ont  décrit  les  leurs 
dans  la  Relation  de  l'Uranie,  page  26^7,  et  en 
ont  donné  une  figure  planche  56,  figure  1.'" 
Toutefois  ces  naturahstes,  qui  ont  regardé  ce 
poisson  comme  nouveau,  auraient  pu  le  trou- 
ver dans  Lacépède.  En  effet  celui-ci'  a  pris 
dans  Bonnaterre^  un  labre  blanche-raie  (/ûj- 
hrus  albo-vittatus)  qui  est  de  l'espèce  dont 
nous  traitons  ici.  Il  suffit  de  consulter,  pour 
s'en  convaincre,  la  description  et  la  planche 
de  Kœlreuter^,  qui  conviennent  en  tous  points 
aux  individus  décolorés  que  nous  avons  sous 
les  yeux. 

Nous  venons  de  dire  que  Bloch  a  confondu 
cette  espèce  avec  celle  figurée  par  Seba,  et 


1.  Hist.    nat.    des  poissons,    t.    III,  p.    Sog.    —    '2.  Encjcl.  , 
p.  ii8.  —  3.  ISov.  comm.  patr.,  t.  IX,  p.  458,  pi.  lo,  fig.  2. 


478  LIVRE  XVI.  labuoïdes. 

comment  il  avait  fait  un  être  complexe  de 

son  lahrus  trilineatus. 

Nous  avons  toutefois  conservé  le  nom  de 
M.,Quoy,  et  l'avons  préféré  à  celui  de  Bon- 
naterre,  parce  que  le  nom  de  l'Encyclopédie 
donne  une  idée  fausse  des  couleurs  du  poisson. 

Je  crois  qu'il  faut  encore  en  rapprocher  le 
gallenaj  castouri  de  Renard  (fol.  24,  n.°  i33). 
Je  trouve  l'original  dans  le  Recueil  de  Vlaming 
sous  le  nom  de  gallenaj  parquit  of  castouri. 
La  disposition  des  raies  est  tout-à-fait  conforme 
à  notre  poisson;  mais  les  couleurs  sont,  même 
dans  Vlaming,  fort  différentes,  le  dos  étant 
brun,  le  ventre  vert,  avec  les  bandelettes  de 
même  teinte ,  mais  plus  pâle  ;  cependant  la  raie 
aurore  est  marquée  jusqu'aux  pectorales. 

La    GiRELLE   DE   DuSSUMlER. 

(  JiiUs  Dussumieri,  nob.  ) 

Nous  avons  reçu  de  la  côte  de  Malabar,  par 
les  soins  de  M.  Dussumier,  une  girelle 

qui  a,  sur  un  fond  vert-pré,  le  dos  varié  de  teintes 
violettes,  et  les  flancs  rayés  longitudinalement  de 
rose.  La  tête  a  des  lignes  flexueuses  vertes  sur  un 
fond  rose,  qui  paraît  quelquefois  prendre  des  teintes 
orangées  assez  marquées.  La  dorsale  a  sur  les  sixième, 
septième  et  huitième  rayons  épineux  une  tache  bleue 
ou  violette  :  le  reste  de  la  nrageoire  est  rose  varié  de 


CHAP.    X.    GIRELLES.  .        479 

violet.  L'anale  a  une  large  bordure  violette  et  la  base 
rosée;  la  caudale  a  son  centre  violet,  la  base  et  les 
deux  angles  blancs  ou  roses,  selon  la  saison;  la  pec- 
torale a  aussi  du  rose  à  l'insertion  de  ses  rayons. 

D.  9/IS5  A.  3/12,  etc. 

La  dorsale  est  terminée  en  pointe,  atteignant, 
comme  celle  de  l'anale,  la  base  de  la  caudale,  qui 
est  arrondie.  La  ventrale  est  prolongée  en  filet  jus- 
qu'à l'anale,  la  canine  de  l'angle  de  la  bouche  est 
très-saillante  :  les  autres  dents  sont  petites  et  à  peu 
près  égales.  La  ligne  latérale  est  rameuse;  il  y  a 
vingt-six  rangées  d'écaillés  le  long  de  ses  côtés;  elles 
sont  minces,  assez  grandes,  striées,  et  leur  portion 
radicale,  qui  n'est  pas  très-grande,  l'est  presque  en 
entier. 

INos  individus  ont  quatre  pouces  de  long  y 
mais  M.  Dussumier  dit  qu'on  en  voit  de  huit 
pouces,  et  que  l'espèce  est  rare  à  la  côte  mala- 
bare. 

ha    GiRELLE   DE   GeOFFROY. 

{Julls  Geoffrojiij  Q.  G.,  Atl.  de  l'Uranie,  pi.  56 ^ 

O      r»     \ 

n.    D.) 

Les  compagnons  de  M.  le  capitaine  Frey- 
cinet  ont  rapporté  des  îles  Sandwich  une  gi- 
relle  qui  est  remarquable 

par  la  hauteur  de  son  corps  :  elle  est  à  la  nuque 
d'un  peu  plus  que  le  tiers  de  la  longueur  totale. 
Cette  hauteur  paraît  encore  augmentée  par  celle  des 


480  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

nageoires  verticales,  surtout  de  l'anale.  La  nuque 
est  très-bombée;  la  tête  est  plus  courte,  n'étant  que 
du  quart  de  la  même  longueur  totale.  Les  points  de 
la  dorsale  et  de  l'anale  atteignent  à  la  caudale,  qui 
est  coupée  carrément.  Les  ventrales  sont  prolongées 
en  filet  et  atteignent  à  l'anale. 

D.  9/11;  A.  3/12,   elc. 

La  ligne  latérale  est  rameuse  ;  les  écailles  sont  au 
nombre  de  vingt-six  rangées  sur  dix  dans  la  hau- 
teur, dont  sept  au-dessous  de  la  ligne  latérale;  une 
d'elles,  isolée,  se  montre  plus  haute  que  large  et  a 
toute  sa  partie  radicale  finement  striée. 

Les  dents  sont  petites;  celles  de  l'angle  de  la 
mâchoire  sont  fortes  et  saillantes. 

Selon  M.  Quoy,  la  couleur  est  bleu  foncé,  chaque 
écaille  étant  légèrement  ponctuée  de  la  même  cou- 
leur. Tout  le  corps  est  parsemé  de  lunules  bleues, 
bordées  de  brun,  irrégulières  sur  la  queue  et  sur  les 
ventrales,  mais  décrivant  trois  ou  quatre  lignes  à  la 
dorsale  et  à  l'anale.  On  voit  du  jaune  sur  la  mem- 
brane qui  unit  les  trois  premiers  rayons  de  la  dor- 
sale. Le  front,  la  gorge  et  les  joues  ont  des  lignes 
et  des  points  bleus;  quatre  de  ces  raies,  parallèles 
entre  elles,  descendent  obliquement  de  l'œil  vers  la 
bouche. 

Ce  naturaliste  a  donné  la  description  de 
cette  espèce  dans  la  Relation  zoologique  du 
Voyage  de  TUranie,  page  270,  et  une  figure 
coloriée  planche  56,  n.°  3,  de  l'atlas  de  cet 
ouvrage. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  481 

Nos  individus  ont  quatre  pouces  et  demi 
de  long. 

La    GiRELLE  MÉLÉAGRIDÉE. 

{Julis  meleagriS)  nob.  ) 

M.  Meitens  nous  a  aussi  communiqué  un 
dessin  d'une  petite  girelle  très-voisine  de  celle 
de  Geoffroy. 

Sur  un  fond  brun  orangé ,  le  corps  a  neuf  séries 
de  points  verts;  il  y  en  a  deux  sur  la  dorsale,  dont 
la  partie  molle  est  un  peu  orangée.  L'anale  a  des 
points  à  la  base,  un  trait  vert  dans  le  milieu,  et  des 
points  le  long  du  bord;  la  caudale,  jaune,  bordée 
de  brun,  est  couverte  de  taches  vertes;  les  pectorales 
sont  rougeâtres  et  l'anale  brun  verdâtre,  sans  taches. 
Sur  la  tête,  ce  sont  des  raies  vertes  mêlées  de  points 
en  dessous. 

D.  9/11;  A.  â/ll,etc. 

Ce  poisson,  long  de  cinq  pouces,  vient 
d'Ulëa. 

La  Girelle  de  Lamarre. 
(  Julis  Lamariiy  nob.  ) 

M.  Lamarre -Piquot  nous  a  donné  une 
girelle  de  Flsle- de -France,  très -voisine  de 
celle-ci. 

La  dorsale  et  l'anale  sont  encore  plus  hautes;  la 
caudale  est  arrondie.  Les  dents  sont  très -petites, 
il  n'y  en  a  pas  de  saillantes  dans  l'angle.  Sur  un  fond 

i3.  3i 


>^82  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

vert-noir,  très-foncé,  le  corps  et  les  nageoires  soûl 
grivelés  et  rayés  de  petits  traits  ou  points  verts  plus 
clairs,  qui  ne  se  voient  bien  que  par  transparence 
sur  les  nageoires. 

La  caudale  a  la  base  noire;  une  seconde  raie  large 
et  en  croissant  traverse  la  seconde  moitié;  le  bord  est 
vert  clair,  ainsi  que  Tintervalle  qui  sépare  les  deux 
bandes  noires.  La  pectorale,  verte,  a  le  bord  blan- 
châtre ou  décoloré. 

D.    8/11;  A.   3/11,  Ole. 

L'individu  a  six  pouces  de  long. 

La   GiRELLE    A?^N CLAIRE. 

{Jul'is  anmilaris ,  K.  V.  H.) 

Sous  le  nom  de  s^ir elle  annulaire ,  j'ai  Lrotivé 
dans  le  Musée  royal  de  Leyde  une  espèce  en- 
voyée de  Java  par  MM.  Kubl  et  Van  Hasselt, 
et  dont  la  forme  ressemble  à  celle  de  La- 
marre 

par  la  hauteur  de  la  dorsale  et  de  l'anale  prolongées 
en  pointe  atteignant  la  caudale.  Celle-ci  est  ronde. 
D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 
Sur  un  fond  vert  olivâtre  tiqueté  de  jaune,  le 
poisson  a  treize  lignes  longitudinales  pourpres. 
Chaque  écaille  a  un  croissant  jaune;  l'anale  et  la 
dorsale  sont  lisérées  de  bleu,  bordées  de  jaune;  la 
pectorale  a  un  croissant  bleu  et  un  autre  jaune  ;  la 
caudale  a  la  base  annelée  de  vert  bordé  de  bleu,  et 
est  terminée  par  deux  anneaux  concentriques  à  son 


CHAP.    X.    GIRELLES.  483 

bord,  l'un  bleu  d'indigo,  l'exlerne  jaune  brillant.  La 
tête  est  couverte  de  rivulations  lilas  bordées  de  bleu. 

Le  poisson  a  cinq  pouces  et  demi. 

La    GlRELLE    POINTILLÉE. 
{Jidis  punctulatiis ,  nob.) 

On  rapprochera  de  ces  espèces  le  poisson 
figuré  dans  Renard  (fol.  21,  n.°  11 5),  dont 
l'original  est  aussi  conservé  dans  Vlaming. 
Celui-ci  le  peint 

rose  sur  la  tête  et  sur  le  ventre,  avec  des  lignes  vertes 
rayonnant  de  l'œil  en  tous  sens.  Les  lèvres  et  le  front 
sont  rouges;  le  corps,  la  dorsale,  l'anale  et  la  cau- 
dale sont  bleu  foncé,  pointillé  de  jaune  doré.  Une 
raie  verte  traverse  l'anale,  et  un  limbe  jaune  orangé 
termine  la  caudale. 

La    GiRELLE    PAVOîNINE. 
(^Jalis  pavoninus ,  nob.) 

Une  autre,  qui  est  dans  le  même  auteur 
(fol.  33,  n.°  '^g)  sous  le  nom  de  gallonaj- 
pavon,  se  retrouve  aussi  dans  Vlaming  et  de- 
vient caractérisable.  Voisine  des  précédentes, 
cette  espèce  a 

le  corps  rose  couvert  de  points  ocellés  jaunes,  bordés 
de  plus  foncé;  la  tête,  de  même  teinte  que  le  corps, 
est  chargée  de  points  ou  de  traits  verdâtres  qui  s'é- 
tendent sous  le  ventre.  La  dorsale,  rougeâtre,  a  deux 


484  LIVRE   XVI.   LABROÏDES. 

séries  de  points  ocellés  jaunes;  l'anale,  verte,  a  deux 
raies  rouges;  la  pectorale  est  jaune;  la  caudale,  de 
même  couleur,  offre  six  traits  bruns  réunis  par 
paires  :  elle  est  bordée  en  haut  et  en  bas  de  rose. 

La   GiRELLE   NACRÉE. 
(Jidis   inargar'Uaceus  j  nob.) 

Une  petite  girelle,  voisine  des  précédentes, 
se  distingue 

par  ses  teintes  nacrées,  disposées  en  bandes  plus  ou 
moins  interrompues  sur  le  ventre.  Un  trait  nacré 
existe  sous  l'œil,  derrière  lequel  il  y  a  deux  taches 
noires. 

Le  long  de  la  ligne  latérale  les  côtés  sont  mélangés 
de  noirâtre,  qui  est  quelquefois  disposé  sur  quatre 
ou  cinq  bandes  transversales.  Puis  sur  le  dos  on 
voit  encore  du  nacré,  soit  en  bandes  longitudinales, 
soit  en  taches,  dont  deux  ou  trois  sont  plus  mar- 
quées. La  dorsale  et  la  caudale  sont  pointillées  de 
noirâtre;  les  nageoires  paires  sont  jaunes. 
D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

Nous  n'en  avons  que  de  petits  individus 
longs  de  deux  pouces,  qui  ont  été  rapportés 
de  Vanikoro  par  MM.  Quoy  et  Gaimard. 

La  Girelle  papillonacée. 
{Julis  papilionaceus i  nob.) 

Les  mêmes  naturalistes  ont  pris  dans  cet 
archipel  une  petite  espèce 


CIIAP.    X.    GIRELLES.  485 

à  corps  rayé  et  tacheté  de  bleu  plus  ou  moins  obs- 
cur. La  tête  a  un  trait  bleu  sur  le  sous  -  orbitaire 
entre  la  bouche  et  l'œil,  un  autre  sur  le  bas  du 
préopercule;  une  bande  verticale  descend  le  long  du 
bord  postérieur  de  cet  os  et  traverse  l'opercule  :  il  y 
a  de  petites  taches  bleues  au-dessus  et  au-dessous. 
Un  gros  point  bleu  foncé  existe  entre  la  troisième 
et  la  quatrième  épine  de  la  dorsale,  qui  est  tachetée 
d'ocelles  lilasplus  ou  moins  effacés.  La  caudale,  cou- 
pée carrément,  a  du  noirâtre  au  milieu  de  son  bord. 
L'anale  est  grivelée  comme  la  dorsale,  mais  sans 

points  noirs. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

Nos  individus  n'ont  pas  tout -à- fait  trois 
pouces. 

La    GiRELLE    NOTOPSIDE. 

{Julis  nolopsis j  K.  V.  H.) 

Les  collections  ichthyologiques  du  Muséum 
doivent  encore  au  zèle  de  ces  naturalistes  une 
petite  girelle  qu'ils  ont  trouvée  à  l'ile  Guam 
pendant  la  relâche  qu'ils  y  ont  faite  sous  les 
ordres  de  M.  le  capitaine  Freycinet. 

La  dorsale  et  l'anale  sont  noires;  une  tache  plus 
foncée,  ronde,  se  dessine  sur  les  premiers  rayons 
mous  de  la  nageoire  du  dos;,  la  caudale  a  du  noi- 
râtre. Le  corps  est  brun,  plus  ou  moins  rayé  longi- 
tudinalement  de  traits  plus  pâles. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

L'individu  est  long  de  deux  pouces. 


486  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

Il  parait  que  l'espèce  ne  devient  pas  plus 
grande;  car  MM.  Ruhl  et  Van  Hasselt  l'ont 
envoyée  de  même  taille  à  Leyde.  Ils  repré- 
sentent sur  le  dessin  le  corps  et  les  nageoires 
rayés  de  jaune. 

La  GiRELLE  AURITE. 
{Julis  aiiritus  i  nob.  ) 

M.  Mertens  nous  a  communiqué  un  dessin 
pris  à  Uléa  sur  une  girelle  qui  a 

le  fond  vert  très-pâle,  une  tache  rose  derrière  l'œil, 
et  une  autre  sur  le  milieu  de  l'opercule;  un  trait 
jaune  arqué  traverse  la  joue;  un  autre,  rouge,  passe 
sous  la  poitrine.  La  caudale  est  jaune;  les  autres 
nageoires  sont  pâles. 

Le  poisson  est  long  de  cinq  pouces. 

La  Girelle  de  Horsfield. 
{Julis  Horsjieldii,  nob.) 

J'ai  encore  trouvé  cette  girelle  parmi  celles 
dont  les  dessins ,  envoyés  de  Siam  par  le  major 
Finlayson,  sont  conservés  dans  la  bibliothèque 
de  la  Compagnie  des  Indes. 

Elle  a  le  dessus  de  la  tête  d'un  brun  violet  très- 
foncé;  le  corps  est  violet  rose,  rayé  longitudinale- 
ment  de  bleu  sur  les  flancs  et  verticalement  sur  le 
dos  par  bandes  larges  et  onduleuses  violacées;  les 
trois  nageoires  verticales  sont  roses,  la  caudale,  ar- 


CHAr.  X.  gikelLes.  487 

rondlcj  et  l'anale  sont  lisérées  de  bleu  d'azur j  la  dor- 
sale, plus  colorée,  ou  carmin,  est  bordée  de  bleu 
plus  foncé.  Au-dessous  sont  trois  ou  quatre  lignes 
bleues,  et  sur  la  base  est  une  série  de  points  bleus. 
La  pectorale  est  d'un  beau  jaune  doré,  à  rayons 
orangés;  la  ventrale  est  bleue,  bordée  de  rose. 

J'ai  dédié  cette  jolie  girelle  si  bien  carac- 
térisée à  M.  le  docteur  Horsfield,  si  connu 
par  ses  travaux  zoologiques  sur  lile  de  Java, 
pour  lui  donner  un  témoignage  de  mon  amitié 
et  de  la  gratitude  que  je  conserve  des  facilités 
qu'il  m'a  procurées  pendant  mon  séjour  à 
Londres,  dans  la  bibliothèque  de  East  India 
House. 

La  Girelle  ornée. 
{JiiUs  ornatiis  3  nob.) 

Le  capitaine  Carmicbael  a  donné,  dans  le 
\i.^  volume  des  Transactions  de  la  Société 
linnéenne  de  Londres,  planche  27,  la  figure 
d'une  girelle  prise  à  Tristan  d'Acunha. 

Ce  labroïde  a  le  museau  obtus,  le  corps  oblong, 
de  couleur  olivâtre,  rayé,  ainsi  que  les  nageoires,  de 
lignes  bleues  longitudinales,  quatre  étant  sur  le  tronc 
et  trois  sur  les  nageoires  verticales;  la  caudale  est 
arrondie. 

D.  8/14;?  A.  3/13;  G.  14;  P.  1-2;  V.  1/5. 
La  dorsale,  les  pectorales  et  la  caudale  ont  du 
pourpre. 

Je  n'ai  pas  vu  ce  poisson  long  de  huit  pouces^ 


488  LIVRE   XVI.    LABROIDES. 

il  a  été  pris  parmi  les  roches,  et  décrit  sous 
le  nom  de  lahrus  ornatus. 

La    GiRELLE  AUX    POINTS  SOMBRES. 
{Julis  iimhrostjgma ,  Ruppel.) 

M.  Ruppel  décrit  aussi,  parmi  les  poissons 
auxquels  il  laissait  le  nom  de  girelle,  une  es- 
pèce qui  a  le  corps  assez  semblable  à  celui  de 
notre  girelle  ceinture,  mais  qui  en  diffère  par 

la  caudale  un  peu  concave,  la  dorsale  épineuse  plus 
basse  que  la  portion  molle,  le  front  plus  bombé. 
Elle  est  verte,  avec  deux  bandes  rousses  longitudi- 
nales au-dessous  d'une  ll^rie  latérale  ramifiée  et  toute 
tachetée  de  points  couleur  de  terre  d'ombre;  sur  les 
joues,  au-devant  ou  derrière  l'œil,  il  y  a  deux  petits 
traits.  La  dorsale  est  verte,  rayée  en  haut  et  en  bas 
d'orangé;  une  tache  plus  foncée  que  celle  du  corps 
existe  sur  les  premiers  rayons.  L'anale  a,  sur  un  fond 
de  même  couleur  que  la  dorsale,  la  base  orangée  et 
lisérée  en  dehors  de  blanc;  près  du  bord  est  un  trait 
plus  rembruni.  La  caudale  est  bordée  d'orangé  pâle; 
la  pectorale  et  la  ventrale  sont  vertes:  celle-ci  a  la 
base  rayée  d'orangé.  L'iris  est  brun  avec  un  anneau 

doré. 

D.  8/13;  A.  2/11,  etc. 

L'auteur  n'a  observé  cette  girelle  qu'isolée , 
près  de  Mohila  et  près  de  Djedda  pendant 
l'été.  La  longueur  est  de  sept  pouces. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  489 

ILa    GiRELLE    AURICULAIRE. 
{Julis  auricularis  y  nob.) 

MM.  Quoy  et  Gaimard  ont  envoyé  du  Port 
du  Roi  George,  de  la  Nouvelle -Hollande^ 
pendant  l'expédition  de  M.  Dumont  d'Urville , 
une  assez  grande  gi relie  qui  a 

le  corps  alongé,  la  tète  plus  courte  que  le  quart  de 
la  longueur  totale,  et  égale  à  la  hauteur  du  tronc;  la 
bouche  est  petite;  les  dents  mitoyennes  sont  de  mé- 
diocre force;  point  de  canines  saillantes  à  l'angle  de 
la  bouche;  l'œil  est  un  peu  bas;  les  deux  ouvertures 
de  la  narine  rapprochées  l'une  de  l'autre;  la  ligne 
latérale  simple,  non  rameuse,  formée  d'une  série 
de  pores  enfoncés.  Les  écailles  sont  petites,  minces, 
oblongues,  striées  sur  toute  la  surface  radicale.  Il  y 
en  a  plus  de  soixante-dix  rangées  entre  l'ouïe  et  la 
.  caudale;  cinq  à  six  sont  au-dessus  de  la  ligne  latérale, 
sous  la  dorsale,  et  au-dessous  j'en  compté  vingt-cinq. 
La  dorsale  et  l'anale  sont  hautes,  et  ont  leurs  rayons 
flexibles  et  grêles;  ils  égalent  près  de  la  moitié  de 
la  hauteur  du  tronc.  La  caudale  est  arrondie;  les 
ventrales,  quoique  prolongées,  n'atteignent  pas  à 
l'anale. 

D.  9/12 î  A.  3/12,  etc. 

La  couleur  est  effacée,  et  les  voyageurs  qui  ont 
envoyé  cette  girelle  au  Cabinet  du  Roi,  ne  nous  ont 
communiqué  aucunes  notes  sur  la  teinte  du  poisson 
frais.  L'opercule  a  l'angle  coloré  en  bleu  foncé, 
bordé  en  avant  d'un  arc  blanc  nacré,  et  en  arrière 


490  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

d'un  liséré  noir  foncé.  Une  tache  bleue  esl  sur  le 
devant  de  la  dorsale,  qui  a  six  à  sept  lignes  longi- 
tudinales grises;  l'anale  n'en  a  que  trois  ou  quatre, 
et  point  de  taches  noires;  les  côtés  étaient  rayés 
longitudinalenient;  les  traits  sont  plus  visibles  sous 
le  ventre,  que  près  du  dos. 

Le  poisson  est  long  d'un  pied. 

La  GiRELLE  -BORDÉE. 

{JliUs  marginciLiLS ,  Riippel.) 

Une  autre  girelle,  que  je  n'ai  pas  vue,  est 
celle  que  M.  Piuppel  a  appelée  Jialichores 
marginatiLS.  Selon  lui 

le  corps  est  comprimé,  elliptique;  la  caudale  est 
arrondie;  le  corps  est  d'un  vert  noirâtre;  la  tête  et 
la  poitrine  sont  couvertes  de  rivulations  vert  de 
cuivre,  bordées  de  bleu.  La  dorsale,  l'anale  et  la  cau- 
dale, sont  chargées  d'ocelles  bleus  à  centre  roux;  le 
bord  des  nageoires,  bleu  d'azur,  est  liséré  de  jaune; 
un  croissant  vert ,  bordé  de  bleu ,  couvre  la  base  de 
là  caudale. 

M.  Ruppel  n'a  pas  fait  graver  cette  espèce, 
parce  qu'il  croit  l'avoir  reconnue  dans  la  fi- 
gure 5  de  la  planche  12  du  quatrième  Fasci- 
cule ichtyologique  de  Klein.  Il  est  à  regretter 
qu'un  auteur  aussi  exact  que  M.  Ruppel,  se 
soit  contenté  de  cette  gravure  pour  la  repré- 
sentation d'une  espèce  qu'il  dit  être  fréquente 
dans  toute  l'étendue  de  la  mer  Rouge. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  491 

La  GiRELLE  A   DEUX  TACHES. 
{Julis  himaculatus  3  Ruppel.) 

C'est  encore  une  belle  espèce  de  girelle 
que  le  lialicliores  himaculatus  de  Ruppel. 

La  figure  i  de  la  planche  5  des  nouveaux 
vertèbres  appartenant  à  la  Faune  d'Abyssinie 
la  représente 

d'un  beau  vert  de  mer  sur  le  dos,  et  jaunâtre  sur  le 
le  ventre.  Des  lignes  roses  ou  violettes  rayonnent 
autour  de  l'oeil  et  couvrent  les  mâchoires.  Un  bel 
ocelle  bleu  à  centre  noir  brille  sur  chaque  côté;  la 
ligne  latérale  le  traverse.  Au-dessous  est  une  large 
raie  bleue,  et  sur  le  jaune  des  flancs  on  voit  une  série 
de  points  bleus. 

D.  9/11;  A.  3/11,  etc. 

La  dorsale  et  l'anale  sont  couleur  de  chair  et  ponc- 
tuées de  bleu,  rayées  ensuite  d'orangé,  de  bleu  et 
de  roussâtre.  La  pectorale  et  la  ventrale  ont  le  même 
fond  que  les  deux  autres  nageoires,  et  elles  n'ont  ni 
taches  ni  raies.  La  caudale  est  jaune,  tachetée  de  bleu. 

C'est  une  espèce  rare,  que  M.  Ruppel  a 
vue  pendant  l'hiver  à  Massuah. 

La  Girelle  coris. 
(Julis  coris  j  nob.j  Coris  ajgula,  Lacép.) 

Nous  avons  reçu  en  très-bon  état  la  girelle 
que  Commerson  avait  observée  en  176g,  et 


492  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

dont  M.  Lacëpède  a  fait  sur  les  matériaux  de 
ce  naturaliste,  un  genre  sous  le  nom  de  coris, 
genre  qui  ne  comprend,  dans  cet  ouvrage,  que 
deux  espèces,  lesquelles  se  réduisent  cependant 
à  une  seule.  C'est  à  M.  Dussumier,  à  M.  La- 
marre-Piquot  et  à  MM.  Quoy  et  Gaimard  que 
nous  devons  les  individus  qui  ont  servi  à  notre 
description. 

CeUe  girelle  est  très-remarquable  par  la  protubé- 
rance qui  saille  sur  la  tête  un  peu  en  arrière  des  yeux, 
et  qui  donne  une  physionomie  toute  particulière  à 
ce  poisson.  La  hauteur  du  corps  est  comprise  trois 
fois  et  deux  tiers  dans  la  longueur  totale;  celle  de  la 
tête  égale  la  hauteur  du  tronc.  La  longueur  de  la 
partie  du  museau,  saillante  au-devant  de  la  bosse 
frontale,  est  du  tiers  de  celle  de  k  tête.  A  partir  de 
l'angle  du  museau,  la  ligne  du  profil  monte  obli- 
quement jusqu'à  l'angle  de  la  base,  qui  répond  à 
l'aplomb  de  l'œil.  Le  profil  inférieur  descend  vers 
le  bas  de  l'ouverture  de  l'ouïe,  de  sorte  que  ces  deux 
lignes  font  presque  un  angle  droit,  ce  qui  donne  à 
la  tête  une  figure  quadrilatère,  dont  le  museau  fait 
l'angle  antérieur,  le  bord  de  l'opercule  le  postérieur, 
et  à  la  bosse  correspond  le  supérieur.  La  ligne  du 
profil,  après  s'être  portée  jusqu'à  l'aplomb  du  bord 
antérieur  de  l'orbite,  se  redresse  et  monte  verticale- 
ment dans  une  hauteur  égale  au  quart  de  celle  de 
la  tête,  et  se  contourne  en  une  courbe  arrondie,  pour 
suivre  la  ligne  du  dos,  après  avoir  formé  la  pro- 
tubérance si  singulière  sur  la  tête  de  cette  girelle. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  495 

L'œil  est  petit,  son  diamètre  est  du  neuvième  de  la 
longueur  de  la  tête;  la  distance  du  bord  supérieur 
de  la  bosse  frontale  au  contour  supérieur  de  l'or- 
bite est  du  tiers  de  la  hauteur  de  la  tète.  Le  préo- 
percule a  un  grand  limbe,  et  l'interopercule,  qui  est 
sous  cet  os,  est  large  et  arqué.  Le  sous-opercule  est 
bien  distinct  de  l'opercule,  dont  le  bord  membra- 
neux est  épais,  arrondi  et  dilaté.  Les  deux  ouvertures 
de  la  narine  sont  petites  et  rapprochées  de  l'œi!.  Les 
dents  antérieures  sont  longues,  saillantes,  un  peu 
courbées  :  il  n'y  a  pas  de  canines  à  l'angle  de  la 
bouche;  les  dents  du  rang  externe  sont  de  gran- 
deur médiocre  et  mousses;  en  dedans  il  y  a  une 
seconde  rangée  de  dents  plus  petites,  et  devenant 
de  simples  granulations  vers  le  fond  de  la  bouche. 
La  langue  est  large,  arrondie,  peu  libre.  Le  pha- 
ryngien inférieur  a  une  ceinture  transversale,  os- 
seuse, arrondie,  très-épaisse,  et  qui  est  attachée  au 
crâne  par  un  hgament  de  chaque  côté,  d'une  épais- 
seur et  d'une  force  remarquables,  et  qui  empêche 
l'os  de  s'abaisser  quand  l'animal  presse  dessus  pour 
casser  avec  ses  grosses  dents  pharyngiennes  supé- 
rieures les  corps  souvent  très -durs  qu'il  avale.  Les 
deux  pharyngiens  sont  faits  comme  ceux  des  autres 
girelles;  mais  ils  sont  assez  forts.  Ces  os  sont  garnis 
de  dents  en  pavés  carrés  et  oblongs,  qui  doivent 
exercer  une  puissante  mastication.  Il  y  a  sur  le  bord 
interne  de  chacun  trois  larges  dents  revêtues  d'un 
émail  d'une  parfaite  blancheur.  L'antérieure  est  la 
plus  grande;  elle  a  sept  millimètres  de  long  sur 
quatre  de  large.  Autour  d'elles,  il  y  a  de  grosses 


496  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

rayée  de  deux  ou  trois  lignes  jaunes  rougeatres,  la 
joue  et  la  nuque  sont  vert-pré. 

La  splanclinologie  n'offre  rien  de  remar- 
quable dans  ce  poisson.  Je  dois  faire  obser- 
ver que  sa  vessie  aérienne  est  très-grande. 
Mais  son  squelette  nous  offre  quelques  parti- 
cularités notables 

dans  la  grande  crête  mitoyenne  du  crâne  qui  sou- 
tient la  bosse  du  front  :  cette  crête  est  relevée  en 
avant  sur  deux  petites  lames  en  chevron  ,  qui  se 
portent  sur  les  frontaux  antérieurs  et  latéraux,  et 
ouvrent  ainsi  la  coulisse  qui  reçoit  les  branches  mon- 
tantes des  intermaxillaires.  Les  crêtes  latérales  sont 
élevées  et  doubles  :  ce  qui  contribue  à  élargir  et  à 
arrondir  par  les  muscles  qui  remplissent  les  gout- 
tières de  l'arrière  du  crâne,  la  tubérosité  frontale. 
L'occiput  n'a  que  deux  larges  creux ,  les  crêtes  latérales 
ne  se  portant  pas  si  loin  en  arrière.  Au-dessus  du 
condyle  occipital  s'élèvent  deux  petites  crêtes  réunies 
en  chevron  sous  la  grande  impaire  dont  nous  avons 
parlé  en  premier  lieu.  Le  basilaire  a  deux  larges 
tubérosités  arrondies  en  condyle,  pour  s'articuler 
avec  les  pharyngiens  supérieurs,  et  donner  attache, 
par  leurs  faces  latérales,  au  grand  ligament  suspen- 
seur  du  pharyngien  inférieur.  Cet  os  prend  d'ailleurs 
appui  sur  les  deux  arcs  de  la  ceinture  pectorale;  elle 
est  formée  par  un  humerai  très-grand  et  très-large, 
et  par  un  radial  et  un  cubital  eux-mêmes  assez  forts. 
Le  trou  radial  est  grand  j  l'échancrure  cubitale  est 
profonde  et  bien  ouverte;  le  styléal  est  aussi  fort  et 


CHAP.    X.    GIRELLES.  497 

élargi.  La  colonne  épinière  a  neuf  verlèbies  abdomi- 
nales et  seize  caudales;  la  dernière  est  élargie  en 
éventail.  Les  deux  premiers  interépineux  de  l'anale 
sont  courts  et  réunis  à  deux  larges  apophyses  trans- 
verses, arquées  et  rapprochées  en  anneau,  qui  reçoit 
la  fin  de  la  vessie  aérienne.  Je  compte  vingt  inter- 
épineux à  la  dorsale  et  douze  à  l'anale. 

Telle  est  la  description  de  la  girelle  que 
Commersoii  avait  vue  à  lIsle-de-France ,  et 
dont  il  a  laisse  deux  dessins,  l'un  qu'il  dit 
très-bon,  et  qu'il  a  fait  exécuter,  parce  que  le 
premier  ne  l'avait  pas  satisfait.  M.  de  Lacë- 
pède  les  a  fait  graver  tous  deux,  l'un  tome  III, 
planche  4?  figure  i.''',  et  l'autre,  figure  2  delà 
même  planche.  Le  dessin  n.°  1  représente  bien 
le  filet  alongé  de  la  dorsale,  la  longueur  des 
ventrales,  la  relation  de  la  dorsale  et  de  l'anale 
avec  la  caudale  à  bord  découpé,  la  saillie  de 
la  tête;  mais  les  dents  ne  sont  pas  bien  ren- 
dues. L'autre  a  le  premier  rayon  courbé;  voilà 
pourquoi  il  ne  me  paraît  pas  alongé  en  filet. 
D'ailleurs  la  bosse  de  la  tête  et  les  dents,  ici 
mieux  exprimées,  la  grandeur  des  écailles,  tout 
confirme  l'identité  de  ces^  deux  dessins.  Le 
coris  aigrette  et  le  coris  anguleux  ne  sont  donc 
établis  que  sur  une  même  espèce.  Lacépède  a 
sans  doute  voulu  rendre  l'idée  de  cette  sorte 
de  casque  surmontant  la  tête  du  poisson,  en 
1 3.  32 


41){j  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

rayée  de  deux  ou  trois  lignes  jaunes  rougeâtres,  la 
joue  et  la  nuque  sont  vert-pré. 

La  splanclmologie  n'offre  rien  de  remar- 
quable dans  ce  poisson.  Je  dois  faire  obser- 
ver que  sa  vessie  aérienne  est  très-grande. 
Mais  son  squelette  nous  oiTre  quelques  parti- 
cularités notables 

dans  la  grande  crête  mitoyenne  du  crâne  qui  sou- 
tient la  bosse  du  front  :  cette  crête  est  relevée  en 
avant  sur  deux  petites  lames  en  chevron  ,  qui  se 
portent  sur  les  frontaux  antérieurs  et  latéraux,  et 
ouvrent  ainsi  la  coulisse  qui  reçoit  les  branches  mon- 
tantes des  intermaxillaires.  Les  crêtes  latérales  sont 
élevées  et  doubles  :  ce  qui  contribue  à  élargir  et  à 
arrondir  par  les  muscles  qui  remplissent  les  gout- 
tières de  l'arrière  du  crâne,  la  tubérosité  frontale. 
L'occiput  n'a  que  deux  la  rges  creux ,  les  crêtes  latérales 
ne  se  portant  pas  si  loin  en  arrière.  Au-dessus  du 
condyle  occipital  s'élèvent  deux  petites  crêtes  réunies 
en  chevron  sous  la  grande  impaire  dont  nous  avons 
parlé  en  premier  lieu.  Le  basilalre  a  deux  larges 
tubérosités  arrondies  en  condyle,  pour  s'articuler 
avec  les  pharyngiens  supérieurs,  et  donner  attache, 
par  leurs  faces  latérales,  au  grand  hgament  suspen- 
seur  du  pharyngien  inférieur.  Cet  os  prend  d'ailleurs 
appui  sur  les  deux  arcs  de  la  ceinture  pectorale;  elle 
est  formée  par  un  humerai  très-grand  et  très-large, 
et  par  un  radial  et  un  cubital  eux-mêmes  assez  forts. 
Le  trou  radial  est  grand  j  l'échancrure  cubitale  est 
profonde  et  bien  ouverte;  le  styléal  est  aussi  fort  et 


CHAP.    X.    Gl BELLES.  497 

élargi.  La  colonne  épinière  a  neuf  vertèbres  abdomi- 
nales et  seize  caudales;  la  dernière  est  élargie  en 
éventail.  Les  deux  premiers  interépineux  de  l'anale 
sont  courts  et  réunis  à  deux  larges  apophyses  trans- 
verses, arquées  et  rapprochées  en  anneau,  qui  reçoit 
la  fin  de  la  vessie  aérienne.  Je  compte  vingt  inter- 
épineux à  la  dorsale  et  douze  à  l'anale. 

Telle  est  la  description  de  la  girelle  que 
Commerson  avait  vue  à  lIsle-de-France,  et 
dont  il  a  laissé  deux  dessins,  l'un  qu'il  dit 
très-bon,  et  qLi'il  a  fait  exécuter,  parce  que  le 
premier  ne  l'avait  pas  satisfait.  M.  de  Lacé- 
pède  les  a  fait  graver  tous  deux,  l'un  tome  III, 
planche  4?  figure  i.'^,  et  l'autre ,  figure  2  delà 
même  planche.  Le  dessin  n.""  1  représente  bien 
le  filet  alongé  de  la  dorsale,  la  longueur  des 
ventrales,  la  relation  de  la  dorsale  et  de  l'anale 
avec  la  caudale  à  bord  découpé,  la  saillie  de 
la  tête;  mais  les  dents  ne  sont  pas  bien  ren- 
dues. L'autre  a  le  premier  rayon  courbé;  voilà 
pourquoi  il  ne  me  paraît  pas  alongé  en  filet. 
D'ailleurs  la  bosse  de  la  tête  et  les  dents,  ici 
mieux  exprimées,  la  grandeur  des  écailles,  tout 
confirme  l'identité  de  ces  deux  dessins.  Le 
coris  aigrette  et  le  coris  anguleux  ne  sont  donc 
établis  que  sur  une  même  espèce.  Lacépède  a 
sans  doute  voulu  rendre  l'idée  de  cette  sorte 
de  casque  surmontant  la  tête  du  poisson,  en 
i3.  32 


498  LIVRE    XVI.    LABROÏDES. 

le  nommant  du  nom  de  coris,  qu'il  a  ensuite 
attribue ,  par  faute  de  mémoire ,  à  Commerson  ; 
car  je  ne  trouve  pas  ce  nom  dans  son  manuscrit. 

M.  Quoy  a  donné,  dans  l'expédition  de 
l'Astrolabe,  à  la  planche  19  des  poissons,  une 
très-bonne  figure  de  cette  espèce;  mais  il  l'a 
regardée  comme  nouvelle ,  et  il  l'a  publiée 
sous  le  nom  de  girelle  à  front  bombé  [julis 
gibbifrons).  M.  Bennett,  en  décrivant  des 
poissons  de  l'Isle- de -France,  lui  avait  déjà 
donné  un  autre  nom  :  c'est  son j'ulis  Cui^ieri.^ 

M.  Ehrenbergl'a  observée  dans  la  mer  Rouge. 
M.  Ruppel  a  publié  une  figure^  fort  exacte, 
mais  coloriée  d'après  un  poisson  déjà  mort. 
Il  paraît  que  la  bande  verte  qu'il  a  tracée  par 
le  milieu  du  corps  subsiste  assez  long-temps; 
car  j'en  vois  des  traces  sur  nos  poissons  secs 
et  décolorés.  Il  l'a  appelée  y  w/zj  aj^ula.  Mais 
comme  je  suis  obligé  de  réunir  les  deux  es- 
pèces de  Lacépède  en  une,  je  crois  mieux 
de  prendre  pour  épithète  le  nom  de  genre 
imaginé  par  Lacépède,  et  qui  rend  bien  le 
caractère  de  cette  espèce. 

1.  Bennett,  Proceed.  of  Zool  soc.  y  t.  I.",  p.  128,  i85i. 

2.  Atlas  zu  der  Eeise  im  n'drdl.  Afr. ,  tab.  6,5. 


CHAP.  X.  gip.ellf:s.  A\)i) 

La    GiRELLE   ÉTOILÉE. 

{Jiilis  stellatus ,  nob.  ) 

Il  y  a  encore  à  FIsle-de-France  une  autre 
girelle  à  rayon  de  la  dorsale  prolongé  en  filet, 

mais  qui  n'a  pas  de  bosse  sur  la  tête,  et  qui  se  dis- 
tingue aussi  par  ses  écailles  plus  petites;  car  j'en 
compte  soixante-dix  rangées  de  la  tête  à  la  queue. 
M.  Dussumier,  qui  l'a  vue  fraîche,  dit  que  le  corps  est 
violet  foncé,  avec  de  très-pelils  points  verts  très-bril- 
lans.  Le  dessus  de  la  tête  est  plus  clair  que  le  tronc; 
les  joues  sont  traversées  par  de  larges  bandes  d'un 
vert  Irès-éclatant  et  d'un  violet  plus  clair  que  celui 
du  corps.  La  dorsale  et  l'anale,  violacées,  ont  dans  le 
milieu  une  bandelette  d'un  vert  brillant  et  des  pe- 
tits points  de  môme  couleur  sur  toute  son  étendue, 
La  caudale  offre  la  même  disposition  de  couleurs, 
et  de  plus  elle  est  bordée  de  blanc;  l'anale  est  lisérée 
de  bleu;  les  pectorales,  à  base  orangée,  ont  l'extré- 
mité jaune;  l'aisselle  est  verte;  les  ventrales,  vertes 
en  dedans,  ont  les  rayons  colorés  en  violet  à  l'ex- 
térieur. 

■  Ce  poisson  est  rare  à  l'Isle-de-France.  Outre 
ceux  que  nous  devons  à  M.  Dussumier,  M. 
Lamarre-Pi quot  en  a  envoyé  de  fort  beaux 
exemplaires  au  Muséum.  Ils  sont  longs  de 
treize  pouces. 


oOO  LIVRE    XVT.    LABROÏDES. 

ha    GiRELLE  DE  GaIMARD. 

{JuUs  Gaimardi,  Q.,  AU.  Freyc,  tab.  54,  fig.  i.) 

MM.  Quoy  et  Gaimard  ont  rr-  porté  de 
leur  premier  voyage  avec  le  capitaine  Frey- 
cinet  une  girelle 

dont  le  premier  rayon  de  la  dorsale  est  alongé  en 
filet,  dont  les  ventrales  touchent  à  l'anale,  mais  qui 
a  les  écailles  plus  petites  et  les  couleurs  différentes. 
La  tête  et  le  devant  du  corps  sont  brun  jaunâtre; 
la  partie  postérieure  du  dos  est  rose;  la  dorsale,  poin- 
tillée  à  sa  base,  offre  deux  lisérés  bleuâtres;  l'anale 
est  bordée  de  vert;  la  caudale  est  jaune.  Le  dessous 
de  la  gorge  est  bleu;  un  trait  de  même  couleur  re- 
monte du  museau  sur  l'occiput;  deux  bandes  violettes 
lisérées  de  rose  traversent  la  joue. 

L'individu,  long  de  neuf  pouces,  a  été  pris 
dans  l'archipel  des  Sandwich,  à  File  Mowi, 
où  les  indigènes  le  nomment  inaréa  louaïné- 
M.  Quoy  l'a  dédié  à  son  compagnon  de  voyage 
et  de  fatigues,  M.  Gaimard. 

Si  j'ai  conservé  le  nom  donné  par  M.  Quoy, 
je  n'établis  pas,  comme  lui^  que  l'espèce  ait  été 
inconnue  des  naturalistes  quand  il  l'a  publiée. 
En  effet,  ce  l^eau  poisson  est  figuré  d  une  ma- 
nière très-reconnaissable  dans  le  recueil  de 
dessins  de  l'amiral  Corneille  de  Vlaming,  qui 
le  nomme  ikan  roupa. 


CHAP.    X.    GIRELLES.  ISO  I 

x\.la  vérité,  Renard  n'a  pas  reproduit  la  (igure 
de  l'amiral,  et  celle  qu'il  donne,  II.''  partie, 
pi.  3,  fig.  g,  est  loin  d'être  aussi  bonne. 

Il  le  nomme  parequiet  de  Baguewal ,  c'est- 
à-dire  ,  perruche.  Je  retrouve  ce  poisson  dans 
Valentyn,  p.  4^3  ,  n.°  337,  sous  le  nom  malais 
ikan  soelang  J^ng  ongoe ,  ce  que  l'auteur 
traduit  par  poisson  pourpre  brodé. 

Il  dit  que  la  bonté  de  la  chair  égale  la 
beauté  des  couleurs. 

L'espèce  est  donc  répandue  dans  toute  la 
mer  des  Indes. 

La    GiRELLE    ANNELÉE. 
(Julis  annulaLus ,  nob.) 

Les  mers  de  l'Inde  ont  encore  une  girelle 
remarquable  par  l'éclat  de  ses  couleurs  et  qui 
se  distingue  des  précédentes  par  la  petitesse 
de  ses  écailles. 

J'en  compte  plus  de  cent  entre  l'ouïe  et  la  cau- 
dale, dont  les  pointes  sont  légèrement  saillantes.  Ces 
poissons  ne  conservent  dans  l'esprit  de  vin  que  les 
Uaces  des  bandes  dont  le  corps  est  cerclé;  mais  pen- 
dant la  vie,  la  tête  est  d'un  beau  vert  rayé  d'orangé. 
Le  corps,  vert,  à  teintes  violacées  sur  le  dos,  est  tra- 
versé par  quatorze  à  quinze  bandes  verticales  jaunes. 
Les  pectorales  et  les  ventrales  sont  olivâtre  irès- 
clalr;  la  dorsale  a  la  base  jaune  éclatai] t,  le  nulieu 


1)02  LIVRE   XVI.    LABROÏDES. 

bleu  irès-vif,  un  trait  orangé,  surmonté  d'une  ban- 
delette bleue  lisérée  de  blanc. 

L'anale  est  bleue,  tachetée  d'orange  à  la  base,  et 
bordée  de  trois  traits  comme  la  dorsale.  La  caudale, 
bleue ,  a  ses  deux  bords  horizontaux  d'une  teinte 
orangée  très -vive. 

Nous  avons  eu  connaissance  de  ces  brillantes 
couleurs  par  une  belle  peinture  que  M.  Théo- 
dore Delisse  nous  a  envoyée  de  l'Isle-de-France , 
et  nous  les  avons  trouvées  conformes  aux 
descriptions  que  M.  Dussumier  a  laites  de 
ces  poissons  frais.  Outre  les  individus  de  l'Isle- 
de-France,  cet  habile  naturaliste  a  pris  l'espèce 
aux  Séchelles,  où  on  la  nomme  camharin. 
L'espèce  y  est  rare;  on  l'y  mange.  Nos  exem- 
plaires ont  treize  à  quatorze  pouces. 

Commerson  avait  observé  cette  espèce,  qui 
paraît  plus  commune  à  l'Isle-de-France  qu'aux 
Séchelles,  et  il  en  a  laissé  trois  dessins,  dont 
deux  étaient  coloriés,  et  qui  tous  trois  ont  été 
employés  par  M.  de  Lacépède,  mais  en  les 
considérant  comme  autant  d'espèces  diffé- 
rentes. Deux  de  ces  dessins,  faits  au  crayon, 
n'ont  pas  d'écaillés;  M.  de  Lacépède  a  consi- 
déré sur  lUn  des  deux  ce  caractère  comme 
suffisant  povu'  en  faire  un  genre  distinct.  C'est 
celui  qui  repiésenlo  le  plus  fidèlement  la  dis- 
tribution des  couletirs.  Il  l'a  fait  graver  sotis 


CHAP.    X.    GIRELLES.  505 

le  nom  d'hologymnose  fascéj  t.  III,  pi.  i.", 
fig.  3.  Le  second  dessin  au  crayon  est  moins 
exact  que  le  précédent,  même  pour  la  forme 
de  la  tête;  c'est  le  labre  annelé  de  ce  natu- 
raliste, t.  III,  pi.  28,  fig.  3.  Le  troisième  dessin 
est  colorié  en  brun  traversé  par  de  nombreux 
traits  plus  foncés,  au  nombre  de  dix-neuf  La 
tête  est  verte,  la  dorsale  est  brune,  lisérée  de 
blanc;  l'anale  est  verdâtre,  bordée  d'une  large 
bande  bleue  lisérée  de  blanc;  la  caudale  a  le 
demi-cercle  de  sa  nageoire  blanc.  Je  regarde 
encore  ce  dessin  comme  fait  sur  des  individus 
décolorés  de  la  même  espèce;  le  liséré  blanc 
des  nageoires  et  la  forme  générale  me  semblent 
justifier  ce  rapprochement.  Les  individus  des- 
séchés, trouvés  dans  les  collections  de  Com- 
merson,  me  paraissent  aussi  conduire  à  ce 
résultat.  C'est  avec  ce  document  que  M.  de 
Lacépède  a  établi  son  labre  demi-disque,  et 
le  dessin  a  été  gravé  t.  III,  pi.  6,  fig.  2. 

MM.  Desjardins,  Lesson  et  Garnot,  nous 
ont  aussi  procuré  de  beaux  exemplaires  de 
cette  espèce. 


504  LIVRE   XVI.   LABROÏDÉS. 

La    GiRELLE    CERCLÉE. 

{Julis  doliatns  y  nob.) 

Mais  Commerson  avait  aussi  observé  une 
autre  espèce  voisine  de  celle-ci,  qui  me  parait 
s'en  distinguer 

par  des  écailles  plus  petites  encore  et  des  teintes 
moins  variées.  Le  corps  est  très-alongé. 

M.  Dussumier  dit  le  poisson  rosé  avec  des  bandes 
verticales  rouge  orangé.  Le  ventre  et  le  dessous 
de  la  gorge  blancs;  les  opercules  dorés,  avec  une 
petite  tache  noire  à  l'extrémité.  La  dorsale  et  l'anale 
blanc  rosé  avec  des  lignes  longitudinales  orangées; 
la  caudale  jaune  clair;  les  pectorales  ont  une  teinte 
plus  faible. 

Selon  M.  Dussumier,  ce  poisson,  rare  à 
risle- de -Fiance ,  s  y  nomme  colomhine.  Il  est 
très -bon.  J'y  rapporte  le  dessin  colorié  que 
Commerson  a  laissé  dans  ses  manuscrits,  et 
qui  représente  le  corps  rosé  avec  vingt -trois 
bandes  verticales  rouge  plus  foncé,  et  toutes 
les  nageoires  jaunes,  sauf  les  ventrales.  Ce 
dessin  est  devenu  dans  Lacépède  le  labre 
cerclé  y  il  l'a  fait  graver  t.  III,  pi.  6,  fig.  3. 
Jo  regarde  aussi  comme  de  la  même  espèce 
le  poisson  que  MM.  Quoy  et  Gaimard  ont 
représenté  dans  l'atlas  de  l'Astrolabe,  pi.  i5, 
fig.  i."^^,  sous  le  nom  de  girelle  à  dos  rose.  La 


CHAP.    X.    GIRELLES.  50^ 

peinture,  aux  bandes  près,  est  très-conforme 
à  ce  que  M.  Dussumier  uous  rapporte  sur  les 
couleurs  de  cette  girelle,  au  moment  où  on 
la  tire  de  l'eau. 

ha  Girelle  aux  bords  jaunes. 
{JuUs  prcetextatus  y  Q.) 

Ces  girelles  aux  petites  écailles  me  condui- 
sent à  une  espèce  couverte  d'écaillés  encore 
plus  petites,  mais  dont  le  front  est  plus  relevé 
et  le  museau  plus  obtus  que  dans  toutes  les 
précédentes. 

Elle  a  été  figurée  par  M.  Quoy  dans  l'atlas 

de  l'Astrolabe,  pi.  i5,  n.°  4? 

avec  le  dos  verdâire,  le  reste  du  corps  jaunâtre, 
les  pectorales  pâles,  les  autres  nageoires  vertes,  la 
dorsale  et  l'anale  bordées  de  jaune. 

Ce  poisson  vient  de  l'Isle-de-France  ;  il  est 
long  de  trois  pouces  et  demi.  Un  autre  indi- 
vidu, plus  grand  et  qui  a  été  envoyé  de  Java, 
me  paraît  appartenir  à  la  même  espèce. 


FIN   DU  TOME  TREIZIEME. 


AYIS  AU  RELIEUR 

POUR  PLACER  LES  PLANCHES. 


Planches. 

36g.  Lahrus  mixtus vis-à-vis  la   page  5o 

3  70.  Lahrus  viridis 76 

371.  Cossjphus  axillaris i32 

372.  Crenilabrus  pai^o i58 

373.  Crenilabrus  Bailloni 192 

374.  Ctenolabrus  iris. 236 

376.  Acantholahrus  Palloni 244 

376.  Coricus  rostratus 256 

377.  Clepticus  genizarra 268 

378.  Lachnolaimus  aigula 278 

379.  T auto  ga  f as  data 3o4 

3 80.  Malaca?ithus  Plumieri. 32o 

3 8 1 .  Malacanthus  iœniatus 33o 

382.  Cheilio  cjaJiochloris 346 

383.  Malapterus  reticulatus 356 

384.  Julis  vulgaris 362 

385.  Julis  Giofredi 372 

386.  Julis  pa^fo 378 

387.  Julis  Dussumieri 478 

388.  Julis  annulatus 602 


/  il  ^