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HARVARD UNIVERSITY.
LIBRARY
OF THE
MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY
LiBRARY OF
SAMUEL GARMAN
^e /' Pi i7&£(yh7'7G^f ÛàrVf//:?^vie^.
0CT5 1928
HISTOIRE
NATURELLE
DES POISSONS.
^TRASBOlIRf
IMPRllVIERIE TIF. V. G. I.KVBAULl'.
HISTOIRE
NATURELLE
DES P0ISS01\fS,
PAR
m. LE B.^" CUVIER,
Pair de France, Grand-Officier de la Légion d'honneur, Conseiller d'Etat et
au Conseil royal de l'Instruction publique, l'un des quarante de l'Académie
française, Associé libre de l'Académie des Belles-Lettres, Secrétaire per-
pétuel de celle des Sciences , Membre des Sociétés et Académies royales de
Londres, de Berlin, de Pétersbourg, de Stockholm, de Turin, dcGoeltingue,
des Pays-Bas, de Munich, de Modène, etc.;
ET PAl!
M. A. VALENCIENNES,
Professeur de Zoologie au Muséum d'Histoire naturelle, Membre de l'Académie
rovalc des sciences de Berlin, de la Société zoologique de Londres, etc.
TOME TREIZIEME.
A PARIS,
Chez PITOIS-LEVRAULT, et C.% rue de la Harpe, n." 81.
1839.
AVERTISSEMENT.
J_jE volume que je publie aujourd'hui contient
l'histoire d'une famille qui m'a donné jusqu'à
présent le plus de peines dans la rédaction de cet
ouvrage. Ce livre comprend une partie de la
grande famille des labroïdes ; il a fallu le commen-
cer par l'histoire du genre labre, et le terminer
par celui des girelles. Or, tous les naturalistes
savent que ces poissons n'ont jamais été bien
reconnus et distingués par les auteurs qui pou-
vaient les voir sur le bord de la mer, au moment
ou ils sortaient de l'eau et où la constance de leur
couleur peut être appréciée. Tous ces poissons.
VJ AVERTISSEMENT.
conserves dans nos cabinets, y perdent leurs
couleurs et ne présentent plus , surtout dans les
labres , que des caractères de formes si fugaces ,
qu'il devient presque impossible au naturaliste
de cabinet de trouver des caractères qui répon-
dent aux différentes espèces si peu caractérisées
et si souvent mal dénommées par ceux qui m'ont
précédé dans ce travail. Aussi suis -je loin de
croire que l'bistoire naturelle que je présente
aujourd'hui, et qui a exigé de moi un travail
si pénible , ne soit encore bien imparfaite. J'es-
père du moins avoir , dans un grand nombre
de cas, fixé la synonymie existante, et les na-
turalistes auront bien la géiiérosité de me savoir
gré de ce premier résultat.
J'ai pendant ce travail perfectionné un peu les
divisions que nous avions déjà établies dans un
premier aperçu, et j'ai précisé les caractères des
crénilabres, en établissant les genres des cossy-
plies , des cténolabres et des acantliolabres. J'ai
aussi débarrassé les cbéiliues, dont je traiterai
dans le volume suivant et è^i retirant tous les la-
broïdes à préopercules peu écailleux, mais dont
le reste de la tête est nu et la ligne latérale non
interrompue. Ce genre des tautogues sera , je l'es-
AVERTISSEMENT. VÎj
père , considéré comme une bonne amélio-
ration. J'ai aussi rétabli le genre cheilion, et
marqué ses affinités avec les malacanthes.
Les naturalistes voyageurs ont continué a
nous apporter le fruit de leurs recherches. Nous
devons de nouveaux remercîmens à M. Gaudi-
chaud et à MM. Eydoux et Souleyet, qui ont
fait d'amples collections ichtliyologiques pen-
dant le voyage de la Bonite.
M. Gernaart, consul de France a Macao,
nous a aussi donné de nombreux poissons de
la mer de Chine, dont quelques-uns sont déjà
cités dans ce volume.
Un des ouvrages les plus récens et les plus
utiles pour l'ichthyologie des mers du Nord, est
celui que MM. Fries et Eckstrom publient en ce
moment sous le nora àe Skanâinaviens JîskaV)
dont les peintures, faites d'après nature, sont
d'une grande exactitude. Je regrette de n'avoir
pas reçu l'ouvrage , pour citer complètement à
leur place la belle figure du lahrus her^ylta,
représenté pi. 2 , dans la 1 .^^ livraison , et celle
du ctenolahrus rupestris., pi. 9, fig. 1, de la
2.^ livraison, et de Yacantholabriis exoletus,
pi. 9, fig. 2. La première est conforme à ce que
viij AVERTISSEMENT.
nous avons nous-mêmes observé sur ce cténo-
labre, et la seconde me prouve que j'ai eu rai-
son de séparer le poisson de Linné de celui de
la Méditerranée.
Au Jardin des Plantes, Décembre 1838.
TABLE
DU TREIZIÈME VOLUME.
LIVRE SEIZIEME.
Pages. Planch.
Labroïdes 1
CHAPITRE PREMIER.
Des Labres 16
La Vieille commune ou Perroquet de mer (Lahriis
Bergjlia , Asc. , et Fries et Eckstr. , pi. 2 ) . 20
La Vieille verte {Lahrus Donoi^ani, nob.; Lahriis
suillusj Linn.?) 39
Le Labre varié {Lahrus mixtus ^ Art.) 43 3 6g
Le Labre à trois taches {Lahrus trimaculatus^ Gm.) 5 8
Le Labre tourd {Lahrus turdus^ Linn.) 62
Le Labre louche {Lahrus luscusj Linn.). .... 69
Le Labre paré {Lahrus Jestit^u s ^ Riss.) 71
Le Labre vert {Lahrus viridis^ Lin.) yS Syo
Le Labre néxée .{Lahrus nereus^ Riss.) 78
Le Labre merle {Lahrus merula^ Linn.) 80
Le Labre livide {Lahrus Iwidus^ nob. ) 87
Le Labre bordé {Lahrus limbatusj nob.) 89
Le Labre linéolé {Lahrus lineolatusj nob.) ... 90
Le Labre des roches {Lahrus saxorum , nob. ) . 91
Le Labre porc {Lahrus scrqfa^ nob.) 93
Le Labre à flancs tachetés {Lahrus pœcdopleura^
nob.) 90
X TABLE.
rages. Planchj
Le Labre selle (Labrus ephippium^ nob.) . ... 56
Le Labre de Gay ( Lahrus Gaji^ nob.) 97
Le Labre macrodonte {Lahrus macrodontus. Lac.) 98.
Le Labre du Japon {Lahrus Japonicus ^ nob.). g g
Le Labre de lago {Lahrus lagonensis ^ Bowd.) 100
CHAPITRE IL
Des Cossyphes {Cossyphus^ nob.) 102
Le CiOS?> j^\iQ^o(ï\dx\{C os sjphus Bodianu s ^noh.) io3
Le Cossyphe maldaque {Cossjphus maldat, nob.) 114
Le Cossyphe à deux croissans ( Cossjphus hdu-
nulatus j nob. ; Labre deux croissans , Lac. ) . 121
Le Cossyphe aux reins noirs {Cossjphus atro-
lumhuSy nob.) i23
Le Cossyphe perdition {Cossjphus perditio^noh.\
Labre perdition , Q. G.) 126
Le Cossyphe diane {Cossjphus diana^ nob.;
Labre diane, Lacép.) 127
Le Cossyphe amiral {Cossjphus mesothorax^ nob. ;
Lahrus jiiesothorax j Bl., Schn.) 129
Le Cossyphe axillaire {Cossjphus axillaris^ nob.) 1 3 1 371
Le Cossyphe ruban ( Cossjphus tœniatus , nob. ;
Lahrus tœniatus^ Ehr.) i34
Le Cossyphe à quatre raies {Cossjphus quadri-
Uneatus j nob. ; Lahrus quadiilineatus^ Rupp.) 1 3 5
Le Cossyphe partagé {Cossjphus dimidiatusj
nob.; Lahrus îatouittatus ^ Rupp.) i36
Le Cossyphe maillé ( 6*0 j-j-j^^^Azi^ reticulalus ^nob.) 139
Le Cossyphe aux petites écailles {Cossjphus mi-
crolepidotus y nob.) 140
TABLE. XJ
Pages. Planch.
Le Cossyphe aux rubans nacrés (Cossjyhus albo-
tœniatitSj nob. ) 141
Le Cossyphe de Schœnlein ( Cossjphus Schœn-
leiniij Agass.) 14^
CHAPITRE IIL
Des Cuénilabres 146
Le Crénilabre paon {Crenilahrus pai^o^ nob. ; Pai^o
Salv. ; Lahrus paç^Oj Briinn.) 149 372
Le Crénilabre niélope (Creiiilahriis melopsj nob. ;
Lahrus melops^ Linn.) 167
Le Crénilabre rone (Crenilnhriis roîie^ nob.). . . 172
Le Crénilabre bossu (Crejiilahriis gihhus^ nob.;
Gibbons wrasse^ Penn.) 176
Le Crénilabre norwégien ( Crenilabrus norwegi-
citSj nob.; Lutjanus norwegicus^ Bl.) 176
Le Crénilabre de Pennant (Crenilabrus Pennantii^
nob. ; Goldsinny^ Penn.) 178
Le Crénilabre de Donovan ( Crenilabrus Dono-
uani^ nob.; Lahrus cornubius^ Donov.). . . . 180
Le Crénilabre verdâtre (Crenilabrus virescens j n.) 182
Le Crénilabre de Briinnich ( Crenilabrus Brùn-
nichii; Lutjanus BrùnnicJiii^ Lacép.) i83
Le Crénilabre méditerranéen (Crenilabrus medi-
terraneus ^ nob.) 186
Le Crénilabre de Bory (Crenilabrus Borjanus ^
nob.; Crenildbrus nigrescens ^ Risso) 189
Le Crénilabre à sourcils d'or (Crenilabrus chry-
sopkrjSj Risso) 190
Le Crénilabre de Bâillon ( Crenilabrus Baillonij
nob.) • 191 373
Xlj TABLE.
Pjges. PlancK;
LeCrénilabre ocellé (Crenilabnis ocellatus, nob. ;
Lahrus ocellatus^ Forsk.) 19^
Le Cl énilabre de Risso (Crenilabrus Rissoi^ nob. -,
Lutjamis olwaceus^ Risso ) 197
Le Crénilabre littoral ( Crenilabrus littoralis^ Ris.). 198
Le Crénilabïe petite tanche ( Crenilabrus tinca ,
nob.; Labrus iinca^ Brïinn.) 199
Le Crénilabre Massa {Crenilabrus Massa ^ Risso) 202
Le Crénilabre de Cotta {Crenilabrus Cottœ, Risso) 2 04
Le Crénilabre Ro'issa\{Crenilabrus Roissalii^ Risso) 206
Le Crénilabre à cinq taches {Crenilabrus rjuin-
ffuemaculatus , Risso) 212
Le Crénilabre queue noire {Crenilabrus melano-
cercusj Risso) 2i3
Le Crénilabre bleu {Crenilabrus cœruleus^ Risso) 214
Le Crénilabre vert tendre {Crenilabrus chloro-
sochrus^ Risso) 2i5
Le Crénilabre arqué {Crenilabrus arcuatus^ Ris.). 216
Le Crénilabre marqué {Crenilabrus notatus^nob.;
Lutjamis notatus^ Bl. ) 217
Le Crénilabre de Lincke {Crenilabrus Linckii, n.) 218
Le Crénilabre brun {Crenilabrus fuscus^ nob.;
Labrus fuscus^ Pallas) 219
Le Crénilabre bridé {Crenilabrus capistralus ^
nob.; Labrus capisiratus ^ Pallas) 220
Le Crénilabre à frein {Crenilabrus frœnatus^ nob.;
Labrus frœnatus ^ Pallas) 221
CHAPITRE IV.
De nuelaues ge/ires voisins des CuÉMLAiiiiKS et
en particulier des Cténolabues 2 2 3
TABLE. Xn]
Pages. Plancli.
Le Cténolabre des roches (Ctenolabrus rupestris;
nob. ; Labrus rupesiris , Linn.) 223
Le Cténolabre bordé {Ctenolahrus marginatus^n.) 2 3 2
Le Cténolabre cendré (Ctenolahrus cineieus,xïo\i.\,
Labrus cinereus^ Pallas) 234
Le Cténolabre à museau aigu (Ctenolabrus acu-
tuSj nob.) 235
Le Cténolabre iris (Ctenolabrus iris^ nob.) .... 236 374
Le Cténolabre chogset ( Ctenolabrus chogset^
nob.; Labrus Burgall, Schœpf) 237
Le Cténolabre mouche {Ctenolabrus uninotatus ^
nob.) 239
Le Cténolabre flagellifère {Ctenolabrus Jlagelli-
fer^ nob.) 240
Des Acantholabres 242
L'Acantholabre Palloni {Acantholabrus Palloni^
nob.) 243 375
L'Acantholabre du Nord {Â cantholabrus exoletus^
nob.; Labrus exoletus^ Linn.) 247
L'Acantholabre de Couch {Acantholabrus Cou-
ckiij nob.) 248
L'Acantholabre de Yarell {Acantholabrus Yarelliij
nob. ) 25o
L'Acantholabre petite bouche {Acaniholabrus tni-
crostomaj nob.; Crenilabrus microstoma^ Th.) Ibid.
L'Acantholabre vert {Acantholabrus viridis^ nob.) 2 5 2
CHAPITRE V.
Des Labkoïdes a museau protractile et a ligne
latérale non interrompue 253
Des Sublets Ibid.
XIV TABLE.
Pages. Plancli.
Le Sublet groin {Coricus rostratus^ iiob.; Liit-
janiis rostratusj Bl.) 25 6 376
Le Sublet Lamarck (Coricus Lamarckii ^ Risso). 260
Le Sublet verdâtre {Coricus virescens ^ Risso).. 261
Le Sublet rougeâtre (Coricus ruhescens^ Risso). 262
Des Cleptiques 266
Le Cleptique créole (Clepticus genizarra^ noh.) 267 377
CHAPITRE VL
Des Lachnolèmes (Lachnolaimus) ^ nommés
vulgairement aux Antilles Aigrettes ou Ca-
pitaines 274
Le Laclinolème aigrette ( Lachnolaimus aigula^
nob.) 277 378
Le Laclinolème cai^iiame (Lachnolaimus âux^nob.) 2 85
Le Laclinolème à grouin de cochon (Lachnolaimus
suillusj nob.) 286
Le Lachnolème petit chien (Lachnolaimus cani-
nus
nob.) 288
Le Lachnolème perroquet (f^achnolainius psitta-
cusy nob.) 291
CHAPITRE VIL
Des Taxjtogxjes ( Tautoga ^ nob.) 292
Le Tautogue noir (Tautoga nigra^ Mitch.) .... 293
Tautoga fusca , 3oi
Tautoga ruhens 3o2
Tautoga alia Ihid.
Le Tautogue à bandes (Tautoga f as data ^ nob.;
Lahrus Jasciatusj Bl. ; Labrus JuliginosuSj
Lacép.) 3o3 379
TABLE. XV
Pages. Plancli.
Le Tautogue de Mertens ( Tau toga Mertensiij nob .) 3 o 8
Le Tautogue à six bandes {Tautoga sexfasciata^
nob.; Halichores sexfasciatus ^ Rupp.). ... 3 03
Le Tautogue aux grandes lèvres ( Tautoga me-
laplerus^ nob.; Lahriis melapterus ^ Bl.).. . . 3i 1
Le Tautogue veiné {Tautoga tesselata, nob.;
Lahrus iesse/atus, Bl.) 3 1 5
CHAPITRE VIIL
Des Malacanthes 3 1 6
Le Malacanthe de Plumier {Malacanthus Plumieri^
nob.; Corjphœna jP/i/m7>/7 ^ Bloch; Sparus
ohlongus,^ Bl, Schn.) 319 38o
Le Malacanthe à large raie, ou Tubleu de l'Isle-de-
France {Malacanthus tœniatus^ nob.; Lahre
large raie^ et Tœnianote large /y7/>, Lacép.) . 327 38 i
CHAPITRE IX.
Des Cheilions 338
Le Cheilion doré {Cheilio auratus ^ Comm.) . . , 341
Le Cheilion vert et bleu (6'/^e/7/o cjanochloris ^x\oh.) 346 382
Le Cheilion brun {Clieilio fuscus^ Comm.).. . . 84g
Le Cheihon de Forskal {Cheilio ForskaUi^ nob. ;
Labrus inermis^ Forsk.) Ibid.
Le Cheilion demi - doré ( Cheilio hemichrysos ,
nob.; Cheilio auratus^ Quoy).- 35i
Le CheiUon vert {Cheilio viridis^ nob.) 35 2
Le Cheilion petite bouche ( Cheilio viicrostoma ,
nob.) 35 3
Le Cheilion rayé {Cheilio lineatus , nob.) 354
XVJ TABLE.
Pages. Plancli.
Du Malaptère 3 5 5
Du Malaptère réticulé (Malapterus reticulalus ^
iiob.) Ihid. 3 83
CHAPITRE X.
Des Girelles 358
La Girelle commune {Jidis vulgaris^ nob.). . . 36 1 384
La Girelle Giofredi (Julis Giqfredi^ Risso). ... 371 385
La Girelle coquette (Julis festwa^ nob.) 374
La Girelle élégante {Julis speciosa^ Risso). ... 375
La Girelle paon (Julis pat^o^ nob.) 377 386
La Girelle de Sainte-Hélène (Julis Sanctœ He-
lence , nob. ) , 382
La Girelle de Lesson (Julis Lessonii^ nob.). . . 384
La Girelle de l'Ascension (JulisAscensionis^0.e\.G.) 3 85
La Girelle à trois taches (Julis trimaculatus^ nob.) 38 6
La Girelle perruche (Julis psittaculus ^ Lacép.). 387
La Girelle de Garnot (Julis Garnoti^ nob.). ... 390
La Girelle aux taches bleues (Julis cyanostigmaj
nob. ) 391
La Girelle opaline (Julis opalinus ^ nob.) 392
La Girelle aux tempesnoires (Julis crotap/ius^ nob.) 395
La Girelle patate (Julis paiatus ^ nob.) 398
La Girelle du Prince (Julis principis^ nob.) . , 402
La Girelle partagée (Julis dimidiatus ^ Agass.) . . 407
La Girelle dégraisseur (Julis detersor^ nob.). . 408
La Girelle lunaire (Julis lunaris^ nob.) 409
La Girelle croissant (Julis meniscus^ nob.).. . . 410
La Girelle à joues rayées (Julis gerwittatuSy nob.) 416
La Girelle de Commerson (Julis Commersoni^ nob.) 418
La Girelle de Matthieu (Julis Matthœi^ nob.). . 419
TABLE. XVlj
P»gc». PUnch.
La Girelle verte (Jidis viridis^ nob. ; Lahrus viri-
disj Bl.) 420
La Girelle de Mertens (Julis Mertensii^ nob.) . . 421
La Girelle de Duperrey {Julis Duperrei, Q. G.) Ibid.
La Girelle de Bloch (Julis Blochiij nob. ; Lahrus
lunaris j Bl.) 422
La Girelle hébraïque ( Julis hehraicus , nob. ;
Lahre hébraïque ^ Lacép.) 423
La Girelle à queue tachetée (Julis caudijnacula.
Q. et G.) 426
La Girelle ceinture (Julis cingulum^ nob.) .... 428
La Girelle parterre (Julis hortulanuSj nob. ; Labrus
- centifjuadjusj Comra.) 43o
La Girelle brigadier (Julis decussatusy nob.;
Sparus decussatusj W. Benn. ) 433
La Girelle corbeille (Julis corbisj nob.) 435
La Girelle linéolée (Julis lineolatus ^ nob.). . . 436
La Girelle trilobée (Julis trilobatusj n. ; Labrus
trilobatusj Lacép. j et Labrus fuscus ^ ejusd.) 437
La Girelle parée (Julis Jonnosus j nob.) 439
La Girelle malachite (Julis œruginosus ^ nob.).. 44 1
La Girelle demi-bleue (Julis semicœruleuSjKui^i^.^. 442
La Girelle pao (Julis quadricolor ^ Lesson).. , 443
La Girelle cyanogastre (Julis cjanogaster ^noh.'^
Labrus cyanogaster , Solander.) 444
La Girelle i^our^vée (Julis purpureus^ Ruppel) . 445
La Girelle à ventre rouge (Julis erjthrogaster^
Solander) , 447
La Girelle semi-fasciée (Julis semifasciaius ^ n.). 448
La Girelle à dorsale rayée (Julis dor salis ^ Q'Gr.) 449
La Girelle trimaculée (Julis trimaculatus ^ Q.). 462
b
Pages.
Phnch.
453
455
467
459
460
XVllj TABLE.
La Girelle de Leschenault (Jiilis Leschenaultij
nob.)
La Girelle de Eydoux (Julis Ejdouxiij nob.).
La Girelle de Souleyet (Julis Soulejetii^ nob.).
La Girelle de Desjardins (Julis y4hhortani^ n.).
La Girelle rouge (Julis miniatus ^ K. V. H.)..
La Girelle nuageuse (Julis nehulosus ^ nob.).. 461
La Girelle variée (Julis variegatusj nob.).. . . 462
La Girelle aux nageoires rouges (Julis erythrov-
terus j nob.) 464
La Girelle multicolore (Julis inulticolor^ Rupp.). 466
La Girelle rayée de bleu (Julis cœruleo-vittalus ^
Ruppel ) 466
La Girelle élégante (Julis elegans ^ K. V. H. ). 467
La Girelle à ventre rayé (Julis sirigii^enler^ Benn.). 468
La Girelle de Ceilan (Julis ceilanicus ^ Benn.).. Ihid.
La Girelle scapulaire (Julis scapularis ^ Benn.).. 469
La Girelle double cliaîne (Julis bicaleiiatus ^
Bennett) 470
La Girelle de Finlayson (Julis Finlajsoni , nob.). 471
La Girelle à raies pourpres (Julis purpureo-linea-
iusj nob.) Ibid.
La Girelle axillaire (Julis axillaris ^ nob.).. . . 472
La Girelle de Seba (Julis S eh anus ^ nob.). . . 474
La Girelle raie aurore (Julis halteatus ^ Q. G). 476
La Girelle de Dussumier (Julis Dussumieri^ nob.). 478 387
La Girelle de Geoffroy (Julis Geoffroyii ^ Q. G.). 479
La Girelle méléacridée (Julis meleagris ^ nob.). 481
La Girelle de Lamarre (Julis Lamarii^ nob.).. Ihid.
La Girelle annulaire (Julis annularis^ K. V. H.). 482
La Girelle pointillée (Julis punclulatus ^ nob.). 483
TABLE. XIX
Pages. Planch'
La Girelle pavonine (Jiilis pat^oninus, nob.). 483
La Girelle nacrée {^Julis margaritaceus ^ nob.). 484
La Girelle papillonacée (Julis papilionaceus j n.). Ihid.
La Girelle notopside (Julis notopsis ^ K. V. H.). 486
La Girelle aurite (Julis auritus^ nob.) 486
La Girelle de Horsfield (Julis Horsjieldii ^ nob.). Ihid.
La Girelle ornée (Julis ornatus^ nob.) 487
La Girelle aux points sombres ( Julis umhro-
stjgma j Ruppel ) 488
La Girelle auriculaire (Julis auricularisj nob.). 489
La Girelle bordée (Julis marginatus , Ruppel). 490
La Girelle à deux taches (Julis himaculatus ^
Ruppel) 491
La Girelle coris (Julis coris ^noh.; Corisajgulay
Lacép.) Ibid,
La Girelle étoilée (Julis stellatus^ nob.) 499
La Girelle de Gaimard (Julis Gaimardij Q.). 5 00
La Girelle annelée (Julis annulatusj nob.). . . 5 01 388
La Girelle cerclée (Julis doliatus ^ nob.) 604
La Girelle aux bords jaunes (Julis prœtextatusy
Q.) 5o5
HISTOIRE
DES POISSONS.
LIVRE SEIZIEME.
DES LABROÏDES.
Artedi avait emprunté aux Latins la déno-
mination de Labrus, pour désigner un de ses
genres d'acanthoptérygiens. Ce nom est en
effet cité par Pline * comme celui d'un poisson
dont aurait parlé Ovide dans un passage de
ses OEuvres qui ne nous est pas parvenu.
Nous retrouvons cette même expression
dans un autre endroit d'Ovide, où il s'en sert
pour nommer un des chiens de la meute d'Ac-
téon^; mais il paraît que dans ce passage le
chantre de Sulmone a voulu indiquer par ce
mot la voracité et l'impétuosité du chien.
1. Et placentem cauda labrum, 1. XXXII, c. ii.
"i. Et pâtre Dictœo, sed matre Laconide nali ,
Labros, et Agriodos . et acutœ vocis Hylacior.
(Met., 1. III, V. 224.)
i3. 1
2 LIVRE SEIZIÈME.
Nous ne savons pas si dans les vers dont
Pline nous a laissé le souvenir, le poète l'em-
ployait encore dans le méine sens, ou si,
comme la cru Artedi, cette expression était
appliquée à un poisson remarquable par des
lèvres grosses et proéminentes. L'épithète que
Pline ajoute au mot lahrus ne confirme pas
cette conjecture, qui d'ailleurs est contraire
au sens attaché à ce mot par tous les grammai-
riens.
Ce nom ne se retrouve dans aucun auteur
ancien, ce qui porte à croire qu'il était peu
usité, et que, peut-être même imaginé par un
poète, il n'a jamais désigné une espèce parti-
culière.
Quoi qu'il en soit, l'emploi qu'en a fait Ar-
tedi, Ta consacré aujourd'hui en ichtliyologie:
il s'applique à des poissons à lèvres grosses,
charnues, proéminentes, plissées, qui ont tous
des rapports marqués entre eux, et qui com-
posent dans notre système une famille à la-
quelle M. Cuvier a imposé le nom de Lahroï-
des. Le genre, tel qu'Artedi l'avait entendu',
comprenait des poissons pour la plupart de
la Méditerranée , qui avaient la membrane
branchiostège soutenue par six rayons j des
1. Ailcdi, Gen. XXVII, p. 35. -
LABROIDES. ù
dents fortes aux mâchoires; des plaques os-
seuses et dentées, au nombre de deux aux
pliaryngiens supérieurs, et d'une seule aux in-
férieurs; la langue et le palais lisses; les lèvres
épaisses et charnues, recouvrant les dents; les
rayons de la dorsale de nature épineuse et
molle, et la membrane qui réunit les premiers,
prolongée en filet charnu près de la pointe
de chaque épine ; enfin il ajoutait à ces carac-
tères l'absence d'appendices pyloriques, et il
faisait remarquer que le corps était couvert de
grandes écailles lisses et molles.
Ce genre comprenait neuf espèces, qui tou-
tes, sauf la huitième, étaient assez bien rappro-
chées Tune de l'autre pour composer un groupe
naturel. La huitième, à la vérité, n'a aucun
des caractères cités plus haut, et Artecli ne l'y
a introduite que par une confusion , dont
nous avons déjà parlé à l'article du serranus
hepatus}
Ce nombre des espèces semble augmenter
dans la synonymie^; mais déjà l'auteur s'écarte
des caractères qu'il a posés pour le genre
lahrus ; ainsi son Labrus totus ruhescens ,
caucla hifurca, est encore un de nos serrans^; le
1. Cuv. Val., Hist. nat. des poissons, t. II, p. 233.
2. kïlcA'i , Sjn. , p. 55.
3. Serranus anthias ^ Guy. Val., t. II, p. 25o.
A LIVRE SEIZIÈME.
Labtmjs pulcJirè varius,pinnispectoralihus in
extremo rotundis, est reproduit une seconde
fois dans son labrus rostro surshm rejlexo,
cauda in extremo ciixulari; et le Labrus ex
purpureOy viridi cœruleo et nigro varius,
n'en est peut-être encore qu'une troisième ré-
pétition. Quant à l'espèce n.° 9, qui est deve-
nue le labrus cjnœdus de Linné, il est fort
difficile de la reconnaître, et elle nous paraît
être, par l'entassement des synonymes qui y
sont réunis, un être imaginaire, qui par sa
caractéristique seule pourrait être rapproché
du Icthrus n.° 10, devenu le labrus mixtus du
Sjstema naturœ.
Linné, dès sa dixième édition, augmente
beaucoup la confusion commencée par Artedi,
aussi nous retranchons déjà un plus grand nom-
bre d'espèces des labres de Linné. Il en men-
tionne quarante, parmi lesquelles nous avons
déjà signalé plusieurs percoïdes ^ plus ou moins
incertains; un sciénoïde voisin des pristipomes
et des hémulons^; un autre, qui appartient
probablement à la famille des poissons à pha-
ryngiens labyrinthiformes^, mais sur lequel
1. Labrus anihias ; Labrus hepaius; Labrus auriius; Labrus
Guaza; Labrus fulvus.
2. Labrus striaius. — 3. Labrus opercularis.
LABROÏDES. 5
nous n'avons encore que des idées fort in-
certaines.
Nous éloignerons encore de notre genre
labre les lahrus mar^inalis et lahrus ferru-
gineus^ qui n'ont chacun que deux rayons
épineux à la dorsale , et qui doivent appartenir
à un même genre, voisin peut-être de nos
malacanthes, et dont les caractères seront éta-
blis quand nous aurons pu retrouver ces es-
pèces. J'en dirai autant du lahrus linearis, qui
a un caractère tout opposé et fort extraordi-
naire dans le grand groupe des acanthoptéry-
giens : sur les vingt et un rayons de sa dorsale
le dernier seul est mou, tous les autres sont
épineux. Ce poisson pourrait bien appartenir
à notre famille de ceux à pharyngiens laby-
rinthi formes.
Linné n'avait fait que deux additions à cette
liste dans sa douzième édition; mais elles n'é-
taient pas très-heureuses, car des deux poissons
que Garden lui avait fait connaître, l'un, le
lahrus chromis^ est de la famille des scié-
noïcles et du genre pogonias^ et l'autre, son
lahrus hiatula, est tout-à-fait indéterminable.
Le lahrus griseus, pris dans Catesby, est en-
core dans le même cas, car il est impossible
que le manque des pectorales ne soit pas le
fait d'une mutilation.
6 LIVRE SEIZIÈME.
Si nous retranchons encore quelques dou-
bles emplois, dont nous établirons les preuves
dans la suite de cette histoire , le nombre des
labroïdes connus de Linnë se réduirait tout
au plus à vingt espèces de labres, tels qu'Ar-
tedi les caractérisait; mais ce nombre s'aug-
menterait de quelques autres, éparses dans des
genres difFérens. C'est ainsi que nous ramenons
à la famille dont nous parlons , le spams saxa-
tilisy qui est de nos cichla; le spams ^alilœus,
un de nos chromis.
Cette confusion s'accroît de manière à deve-
nir presque inextricable par les additions des
auteurs postérieurs à Linné. Il nous a fallu un
travail opiniâtre pour parvenir à reconnaître
leurs doubles emplois et leurs rapprochemens
contraires à toutes les affinités naturelles.
Ainsi Gmelin, qui a porté à soixante-onze
le nombre de ses labres , y range deux serrans
faciles à reconnaître , l'un , d'après Forskal , le
lahrus chanus\ et le second, d'après Briïn-
nich, le lahrus adriaticus^ ; un gerres, le la-
brus ojena^, et un des genres de nos poissons à
1 . C'est notre serranus cabriUa , Cuv. Val. , Hlsl. nat. des poiss. ,
l.II, p. 229.
2. iSlerranM^- ^fi/7rt/M5, Cuv. Val., Ilis. nat. des poiss., t. II, p. 255.
3. Gerres ojena, Cixv. Val., Ilist. nat. des poiss., t. VI, p. 472.
LABROIDES. /
pharyngiens labyrinthi formes, le labrus irichop-
terus de Pallas', et enfin, cfaprès Houttuyn,
deux percoïdes , difficiles d'ailleurs à caracté-
riser d une manière précise, le lahrus j aponicus
et le lahrus Boops. Parmi les espèces restantes,
nous y reconnaissons cinq à six doubles em-
plois, ce qui porterait à vingt et un le nombre
des additions faites par Gmelin, et prises en
grande partie à Forskal, à Brùnnich et même
à Pennant.
Notre tâche est devenue très-difficile, quand
nous avons voulu faire ces mêmes recherches
critiques sur l'ouvrage de M. de Lacépède. Son
genre labre comprend cent trente espèces;
mais comme il a copié sans aucune critique
Gmehn et le travail de Bonnaterre de l'Ency-
clopédie méthodique, et qu'il y a ajouté plus
d'erreurs peut-être que dans aucun autre genre,
on est tout étonné du résultat auquel notre
travail nous conduit.
Outre les labroïdes que nous y laisserons,
M. de Lacépède y a classé des poissons de
presque toutes les autres familles d'acanthop-
térygiens. En effet, nous y voyons parmi les
1. Trichopodus IrichopUrus , Lac. , Cuv. Val., llisl. liât, des
poiss. , l. VII, p. 588.
8 LIVRE SEIZIÈME.
percoïdes quatre serrans \ six diacopes% un
cirrhite^, deux centrarchus sous trois espèces
nominales'*, un pomotis^, un priacanthe^, un
holocentrum^, un percis ^ et deux autres per-
coïdes douteux^; nous avons également re-
connu comme sciënoïdes une sciène propre-
ment dite'°, deux johnius'', un liëmulon'%
un pristipome^^ et deux glypliisodons '1 II a
reproduit sous le nom de labrus opercularisy
ce poisson que nous croyons être de la fa-
mille de ceux à pharyngiens labyrinthiformes.
Nous avons placé dans les sparoïdes un chryso^
1. Labrus hepaius; Labrus punciulatus ; Labrus lœvis , le même
que son Bodian cjclostomej Labrus leopardus.
I. Labrus Bohar; Labrus gibbus ; Labrus niger; Labrus argent
tatus ; Labrus octovittatus ; Labrus Kasmîra.
3. Labrus marmoratus.
4. Labrus sparoides ; Labrus iris , le même que le Labrus ma-s
çropierus.
6. Labrus auritus.
6. Labrus cruentatus.
7. Labrus angulosus.
8. Labrus teiracanthus.
9. Labrus Guaza; Labrus fulvus.
10. Labrus hololepidotus .
II. Labrus carutta; Labrus œneus.
12. Labrus Plumieri [Hœmulon formosunif Cuv. Val., t. V,
p. 23l).
13. Labrus Commersonii {Prisiipoma kaakarij Cuv. Val., t. V,
p. 344; Luljan microstome , Lacép.).
14. Labrus sexfasciaius [Gljphisodon cœUslinus , Cuv. Val.);
Labrus macrogaster [Gljphisodon bengaknsis , Cuy. Val.).
LABROÏDES. 9
phrys*, un pagel^, deux dentés^ et un lethri-
nus/
Aux mënides appartiennent un smaris ^, un
gerres reproduit sans dénomination spécifi-
que^; enfin, nous avons aussi notre aphareus
cœrulescens dans un des labres de Lacépède/
Des poissons de la famille des squatnniipen-
nes ont été aussi rangés dans ce genre : l'un est
selon M. Ruppel un pimeleptère^, et l'autre
est le toxotes^; enfin, il nous paraît très-
probable que l'on doit aussi y retrouver un
scombéroïde du genre des liches ^°, quoique
la description du sciœna annata, telle que
Forskal nous l'a laissée, rende cette détermina-
tion peu sûre; et il restera encore à retirer
1. Làbrus catenula {^Chrysophrys hifasciata, Cuv. Val., t. VI,
p. 119).
2. Labrus calops (Pagellus centrodontus , Cuv. Val.). Espèce
établie d'après une note envoyée par feu M. Noël à M. de Lacépède.
Nous n'avions pas reconnu cette sjuonjmie quand nous avons
rédigé l'article de notre sixième volume.
3. Labrus macrocephalus ; Labrus Jliunbergii.
4. Labrus nebulosus {^Lethrjnus nebulosus , Cuv. Val., t. VI,
p. 284).
5. Labrus unîmaculatus.
6. Labrus ojena , Forsk. ; le Labrus îongirostris , et probablement
aussi le Labrus lepisma. Notez bien que ce poisson existe encox'e une
quatrième fois sous, le nom de Sparus britannus.
7. Labrus furcà.
8. Labrus cinerascens .
9. Labrus jaculaîor.
JO. Labrus armaius.
10 LIVRE SEIZIÈME.
des labres ces espèces établies sur l'autorité
de Linnë, et que nous avons signalées comme
impossibles à déterminer aujourd'hui. Et à
celles-ci nous ajouterons le labrus aristatus,
que Lacépède a pris de l'Encyclopédie sans
recourir au mémoire de Sparmann, inséré dans
le tome VII des Aménités académiques. Or,
Bonnaterre , ne lisant apparemment que le
titre du mémoire , a cru que tous les animaux
mentionnés parle voyageur en Chine, venaient
de ce pays; ce qui est bien contraire au rap-
port de l'auteur, qui a eu le soin de citer
jour par jour les lieux où il s'était procuré les
difFérens êtres dont il a laissé des descriptions
malheureusement trop peu détaillées. Quant au
poisson dont il s'agit ici, c'est au retour en
Europe, entre Sainte -Hélène et l'Ascension,
qu'il Tut pris. Le rédacteur de l'Encyclopédie
a dit que S\)iiYu\di\\n a trouvé ce poisson dans
la Chine; Lacépède, pour arrondir sa phrase,
a changé ces mots en ceux-ci : et Sparniann a
dit que le labre aristé a pour patrie les eaux
de la Chine. Shaw venant à son tour paraphraser
sur ces erreurs, change d'abord, sans que l'on
puisse trop savoir pourquoi, le nom de Linné
en celui de carinatus, et en fait alors un
poisson des eaux douces de la Chine {natis^e
of the fresh waters of China).
LABROÏDES. 1 1
Voici encore un nouvel exemple de la ma-
nière légère avec laquelle on écrit en histoire
naturelle, quand on ne se résigne pas au travail
pénible de tout revoir par soi-même. Le degré
de certitude que l'on donne à ses ouvrages,
est cependant une douce satisfaction pour
l'auteur.
Quand les navigateurs qui traversent cette
région de l'Atlantique nous rapporteront ce
poisson, je crois bien que nous le reconnaî-
trons dans la courte notice de Sparmann ;
mais on ne peut, d'après elle, dire à quelle fa-
mille il appartient : ce qui paraît certain, c'est
que ce ne sera pas dans les labroïdes qu'il vien-
dra prendre place.
Il nous restait encore un second genre de
corrections à faire, et qui consistait à recon-
naître les doubles emplois. Ils y sont en si
grand nombre, que nous démontrerons qu'une
des espèces les plus communes de nos côtes
existe dans ce catalogue sous sept noms spé-
cifiques distincts. xAïussi les labroïdes placés
par Lacépède dans son genre labre y après tou-
tes ces rectifications, se réduisent à cinquante
et une espèces : c'est-à-dire à moins de moitié
de celles comptées par l'auteur. Nous devons
cependant dire que Lacépède a connu un plus
grand nombre de poissons de cette famille,.
12 LIVRE SEIZIÈME.
car nous y rapprochons, mais avec la même
espèce de critique , les genres cheilines, scares^
chelioriy et même d'autres poissons que nous
y avons ramenés des genres difFërens dans les-
quels il les avait placés. Ainsi nous avons
compté vingt-deux labroïdes parmi ses spares *
et quinze parmi ses lutjans.
Shaw , après avoir copié arbitrairement toute
cette liste d'espèces disparates, y ajoute encore
des poissons fort étrangers, car il y fait figurer
l'ombrine vulgaire sous le nom de labre cja-
nopterey et il fait de nouveaux doubles emplois
des figures d'As canins.
Bloclî a dans son Système posthume un genre
un peu moins nombreux que Lacépède, mais
encore il a huit ou dix espèces qui doivent en
être retirées, et qui n'auraient pas même dû y
entrer , s'il leur avait applique le caractère de
son genre, tout large qu'il était.
Après avoir écarté toutes ces espèces hété-
rogènes à celles qu'Artedi avait primitivement
réunies dans son genre lahrus, nous formerons
une fimille d'acanthoptérygiens , que nous
caractérisons par la forme oblongue d'un corps
écailleux ; une seule dorsale, soutenue en avant
par des rayons épineux, garnie le plus souvent
1. Vovcz Cuv. Val. , t. VI . p. 4 . noie.
LABROÏDES. 1 5
d'un lambeau membraneux; les mâchoires re-
couvertes par des lèvres charnues; le palais
lisse et sans aucunes dents ; les pharyngiens
au nombre de trois , deux supérieurs et un
inférieur : tous trois armés de dents tantôt en
pavé, tantôt en lames, en pointes; un canal
intestinal sans cœcums, et une vessie nata-
toire.
Cette famille, réduite à ne renfermer que
les poissons qui présentent ces caractères ,
comprend encore un assez grand nombre d'es-
pèces, qui sont réparties en plusieurs genres.
Celui des labres réunit les espèces à lèvres
grandes, charnues et comme doubles; la mem-
lirane branchiostège n'a que cinq rayons, les
dents maxillaires simples et coniques sur un
ou plusieurs rangs; les pharyngiennes cyKndri-
ques et mousses; les pièces operculaires sans
épines; la joue et l'opercule couverts d'écail-
lés ; la ligne latérale presque droite.
Les crénilahres diffèrent de ceux-ci par leur
préopercule profondément dentelé, et parce
que leur museau n'est pas protractile. Cette
protractilité a fait distinguer par M. Cuvier les
suhlets [coj'icus) de ses crénilabres.
Les c/iei7i/2e^ sont semblables aux labres par
l'intégrité de leur préopercule; mais leur ligne
latérale se dirige parallèlement au dos jusqu'à
]A LIVRE SEIZIÈME.
la fin de la dorsale, ou elle s'interrompt pour
recommencer par une ligne plus basse, tracée
par le milieu de la queue.
L'extrême protractilité du museau des epi^
puIuSj, a engagé M. Cuvier à séparer comme
genre ce poisson, semblable, du reste, aux chei-
lines , et qu'avant lui Pallas avait rangé parmi
les spares.
Nos tautogas sont distingués des labres par
la peau nue et épaisse de l'opercule : celle du
préopercule étant couverte de petites écailles.
M. Cuvier SLUOinmé laclmolaimiisles es^^Gces
à rayons de la dorsale et de l'anale prolongés
en longs filamens, et qui ofFrent encore un
caractère d'une valeur plus élevée dans les vil-
losités épaisses qui sont au-devant des dents
pharyngiennes supérieures.
Les girelles ont la tête toute nue , la bou-
che petite et des dents coniques et droites
sur les mâchoires ; on a pu distinguer de ceux-
ci les anampsès, qui n'ont à chaque mâchoire
que deux dents comprimées, tranchantes, re-
courl^ées et saillantes hors de la bouche.
Les razons, que l'on avait classés parmi les
coryphènes avant M. Cuvier, sont des poissons
très-semblables aux labres ou aux girelles, et
que la hauteur de leur profil vertical en dis-
tmgue aisément.
LABROÏDES. ^ S
Les chromis et les cichlas ont les dents en
carde aux deux mâchoires , et les premiers ont
sur la rangée externe des dents plus fortes,
ce qui les distingue des seconds.
Tous ces poissons ont une dorsale soutenue
en avant par de nombreux rayons épineux;
ceux qui n'ont que deux rayons au plus , sim-
ples , mais souvent flexibles sur la partie anté-
rieure de la dorsale, constituent les genres
chelion ou malacanthe ; les uns ont l'opercule
des labres, les autres y ont une petite épine.
Après toutes ces divisions génériques , il faut
encore rapporter aux labroïdes un groupe ou
une tribu particulière : celle des scares, re-
marquables par leurs intermaxillaires convexes,
arrondis et garnis de dents disposées comme
des écailles sur la partie externe et convexe
de la mâchoire. Il a fallu distinguer dans cette
tribu les calliodons, où les dents latérales de
la mâchoire supérieure sont écartées et poin-
tues, avec une rangée interne de petites dents;
et les odax, qui ont les lèvres renflées, recou-
vrant des mâchoires osseuses et dentées comme
celles des scares, mais plates et non bombées:
leurs dents pharyngiennes sont semblables à
celles des labres.
My LIVRE XVI. LABROÏDES.
CHAPITRE PREMIER.
Des Labres.
Les poissons que nous réunissons dans le
genre des labres se reconnaissent à la forme
ovale , élégante et régulière 5 à leurs lèvres
épaisses et charnues. Elles sont comme doubles
à la mâchoire supérieure, parce que la peau
des sous-orbitaires et des os du nez dépasse les
bords de ces pièces osseuses, et se prolonge
en un lambeau cutané, qui recouvre souvent
la lèvre, et va au-delà du bout du museau
quand la bouche est fermée.
L'opercule, le préopercule, le sous- oper-
cule , sont écailleux; le limbe du préopercule
et l'interopercule sont généralement nus dans
les espèces de nos côtes, ainsi que les sous-
orbitaires et le devant du front. Il n'y a au-
cune épine ni dentelure aux bords des pièces
operculaires; les dents sont fortes, coniques,
plus alongées auprès de la symphyse : dans quel-
ques espèces étrangères, on en voit saillir une
pjus grande de l'angle de la mâchoire supé-
rieure, et dont la pointe est dirigée en avant.
Les rayons épineux de la dorsale sont gé-
néralement plus nombreux que les mousj les
CHAP. I. LABRES. 17
épines anales sont courtes et grosses; un lam-
beau charnu dépasse le plus souvent la pointe
de chaque rayon, et c'est ce caractère que
Linné exprimait par ces mots : pinna dorsalis
rainentacea; mais lui, et surtout ses élèves,
avaient donné beaucoup trop d'extension et
d'importance à ce caractère.
Les côtes de la Méditerranée en nourrissent
un assez bon nombre d'espèces, dont quelques-
unes sont propres à cette mer, et dont un petit
nombre lui sont communes avec l'Océan. Une
seule espèce jusqu'à présent n'a été vue que
sur nos côtes septentrionales de l'Europe ; elle
y est abondante, et y présente beaucoup de
variétés, dont plusieurs brillent des couleurs
les plus vives : nous la voyons remonter vers le
Nord jusque sur les côtes de Norwége; mais
elle ne paraîtrait pas atteindre la hauteur de
l'Islande : car je ne trouve pas que Mohr, ni
Faber, auteur plus moderne, en fassent men-
tion.
Tous ces poissons se nourrissent de petits
coquillages, d'oursins, de crustacés, dont ils
peuvent facilement briser l'enveloppe dure et
solide, par l'action de leurs pharyngiens for-
tement dentés. Ils vivent réunis, sans former
des troupes nombreuses, sur les côtes rocheu-
ses, à l'abri des mouvemens violens des va-
\3. '2
18 LIVRE XVI. LABROÏDES.
gues. Ils fraient au printemps parmi les fucus
et les autres algues marines, au milieu desquels
leurs petits trouvent un abri pendant le pre-
mier temps de leur développement.
Nous ne voyons jamais ces animaux attein-
dre à de grandes dimensions; leur chair, blan-
che et ferme , est partout estimée comme une
nourriture aussi saine qu'agréable.
Tous ces poissons brillent des couleurs les
plus vives; on les voit ainsi parés de ces belles
robes jusque dans nos contrées septentrionales,
et leur fond vert, varié de rouge ou de jaune,
leur a fait donner le nom de perroquet de
mer. Sur nos côtes on les connaît aussi sous
celui de vieille de mer. Tous les pécheurs du
littoral de la Méditerranée les désignent sous
le nom de rouquié, ce qui doit avoir rapport
à leur séjour sur les plages rocheuses; et aussi
sous celui de lourd, de tordou ou tordu, nom
qui est générique dans le langage des pécheurs,
car ils ajoutent à cette dénomination diffé-
rentes épithètes : c'est ainsi qu'ils disent tordu
sera, tordou h lu, etc.
Ce nom vient très- certainement de celui
de turdus, que nous trouvons souvent cité
pour le poisson de la Méditerranée, connu des
anciens, qui était probablement de nos espèces
de labres; mais dont la détermination spéci-
CHAP. I. LABRES. 49
fique est aujourd'hui impossible. Nous voyons
d'ailleurs que c'est par ce mot ou par celui de
inerula, qu'ont été traduits les noms des poissons
que les Grecs désignaient par k;kA;7, /.urrucpos-,
ou KécrauCpos- et qu'Aristote cite comme des pois-
sons saxatiles, se tenant sur les rochers et chan-
geant de couleur selon les saisons : étant noirs
en hiver et blancs en été. iElien reproduit cette
même assertion en nommant le v!oaav^oç et le
x/kAqj. On retrouve encore la confirmation
de cette assertion dans Numénius , cité par
Athénée, qui donne au -/ccrauCpoç l'épilhète de
jjisKxyx^ûoç , de couleur noire; et au KiKKtj celle
de oiKi&i^&ocç, c'est-à-dire de tacheté ou varié en
couleur.
Nos labres abondent dans la Méditerranée
et dans l'Océan; mais peu d'espèces se trouvent
parmi les poissons intertropicaux, région oii les
girelles sont répandues avec profusion.
Nous allons commencer l'énumération de
nos espèces par celle de l'Océan. Quoiqu'il ne
paraisse pas qu'elle ait été connue de Linné, elle
y est commune, et elle vient assez fréquem-
ment sur nos marchés , pour qu il soit facile
de se la procurer et de bien 1 étudier. Après
l'avoir décrite , nous parlerons des espèces
communes aux deux mers; nous donnerons
ensuite les espèces méditerranéennes, et enfin
nous traiterons des exotiques.
20 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Z« Vieille COMMUNE OU Perroquet DE MER.
{Lahras Bergylta , Asc. et mieux Friers et Eckstr. )
Nos pécheurs des côtes de Normandie ou
de Bretagne connaissent plusieurs variétés de
couleur de cette espèce, et les désignent sous
le nom de vieille rouge j quand sur le fond
vert le rouge est dominant; ils appellent vieille
vertCy celles d'une teinte plus uniforme; ^'^e^7/e
jaune, celles qui ont peu de vert et beaucoup
de jaune. Ils en ont d'autres, tout-à-fait olive,
auxquelles ils donnent le nom de vieille, sans
épithète , et ils réservent le nom de perroquet
de mer à la variété qui a sur le fond vert un
réseau de couleur rouge ou de brique, étendu
sur tout le corps. Tels sont les renseignemens
que nous ont fournis sur ces poissons M. Gar-
not, médecin de la marine à Brest, et, plus ré-
cemment, Mad.^ Ducrest de Villeneuve, qui
a bien voulu, sur ma demande, en faire re-
chercher sur les cotes de Lorient. Ayant exa-
miné un grand nombre de ces différentes va-
riétés de poissons, nous ne pouvons les regarder
comme des espèces distinctes, tant leurs carac-
tères essentiels sont constans et seml^lables;
et nous choisissons, pour faire notre descrip-
tion, la variété verte ou bleue d'aigue-marine,
à réseau rouge , parce que c'est une de celles
CHAP. I. LABRES. 21
OÙ les couleurs se reproduisent le plus cons-
tamment, et que l'excellente figure, que M.
Friers en a publiée dans son Histoire des pois-
sons de la Norwëge, va maintenant fixer les
caractères de cette espèce.
Le corps de la vieille, comme celui des labres en
général, a une forme régulière, en ovale alongé, ré-
tréci du côté de la tête. Le milieu des côtés est plus
épais que le dos ou le ventre. La plus grande hau-
teur du corps se mesure k l'aplomb des ventrales,
et varie de grandeur. Nous avons des individus où
elle n'est contenue que trois fois et demie dans la
longueur totale. Chez d'autres , cette même hauteur
y est comprise quatre fois. Ces variations dépendent
probablement de l'état de plénitude des laitances ou
des ovaires. L'épaisseur, prise aux pectorales, ne fait
guère que la moitié de la hauteur du corps. La hau-
teur de la queue n'a que les deux cinquièmes de celle
du tronc, mesurée aux pectorales.
La tête est assez longue et contenue trois fois et
deux tiers dans la longueur totale; son profil monte
vers le dos par une courbe peu arquée et peu obli-
que; le museau est gros, arrondi, et un peu élargi
sur les côtés , à cause de l'épaisseur des lèvres.
L'œil est de grandeur médiocre, parfaitement rond,
placé surle haut de la joue , sans que l'orbite échancre
le profil du front; il est éloigne du bout du museau
de deux fois la longueur du diamètre, qui lui-même
est contenu cinq fois et demie dans celle de la tête.
Le premier sous-orbitaire est quadrilatère, irrégu-
22 LIVRE XVI. LABROÏDES.
lier, sans écailles, caché sous une peau épaisse. Les
autres pièces de cet os sont petites et en partie re-
couvertes par les écailles de la joue, sur laquelle
on en compte dix rangées au-dessous de l'orbite,
et quatre ou cinq derrière. Le préopercule, assez
grand, a le bord montant le plus souvent droit,
mais quelquefois légèrement sinueux et toui-à-fait
lisse, sans aucunes dentelures; il fait un angle ar-
rondi, un peu obtus, avec le bord horizontal. L'oper-
cule est une grande pièce trapézoide, sans aucune
épine ni arête. Le bord membraneux est très-large.
Le sous- opercule lui est très -intimement réuni; il
est impossible de le distinguer à l'extérieur sous les
écailles qui couvrent les deux pièces; car elles n'ont
entre elles aucun mouvement. Ces écailles sont
presque quadruples de celles du préopercule; elles
sont irrégulièrement disposées , de manière qu'on
ne peut porter le nombre des rangées qu'à cinq
ou six. L'interopercule est élargi, recouvert d'une
peau épaisse, dans laquelle on ne voit que quelques
écailles éparses. Quand la bouche et les ouïes sont
fermées, les deux interopercules ne se touchent pas
sous l'isthme de la gorge. L'ouverture des ouïes est
grande. La membrane branchioslège €t ses rayons,
au nombre de cinq, sont presque tout-cà-fait cachés,
dans l'état de repos , sous les pièces operculaires.
Les deux ouvertures de la narine sont rondes;
petites, percées au-devant et au-dessus de l'oeil. L'an-
térieure a un rebord membraneux, saillant, qui l'en-
toure et forme une espèce d'entonnoir, au fond
duquel est l'orifice de la narine.
CHAP. I. LABRES. 23
Les deux mâchoires sont d'égale longueur : la
supérieure est assez protractile. Les branches mon-
tantes de rinterniaxillaire remontent sur le front
jusqu'au-delà des orbites. Les maxillaires sont courts,
presque entièrement engagés sous le sous-orbitaire.
Cette disposition fait que la protractilité de la bouche
n'est pas aussi grande que la longueur des branches
de l'intermaxillaire pourrait le permettre. Les lèvres
sont très-épaisses, charnues et étalées sur les côtés
de la bouche; elles sont lisses en dessus. La supé-
rieure, en dessous, a huit plicatures, qui augmen-
tent beaucoup l'étendue de sa surface. Il n'y en a
que deux sur la lèvre inférieure.
Les dents sont coniques, régulières, et décroissent
à mesure qu'elles s'enfoncent dans la bouche. L'in-
termaxillaire en porte sept, et la demi -mâchoire
inférieure dix ; en d'autres termes , il y a qua-
torze dents à la mâchoire supérieure, et vingt à
l'inférieure. Derrière ces dents coniques on en voit
une seconde rangée, composée de six ou huit très-
petites et de même forme. Le palais est parfaitement
lisse. Le voile membraneux de la mâchoire supé-
rieure est large et très-mobile; l'inférieure l'est un
peu moins. La langue n'avance pas beaucoup dans la
bouche; elle est libre, arrondie, mais étroite à l'ex-
trémité.
Les râtelures des branchies sont courtes, lisses et
sans aucunes aspérités. Les deux premiers arceaux
portent en avant des pharyngiens deux pelotes, re-
couvertes de papilles fines et serrées, comme du
velours, et derrière elles on voit alors les pharyn^
24 LIVRE XVI. LABROÏDES.
giens supérieurs, pièces osseuses, triangulaires, armées
de dents fortes, dont les internes sont globuleuses et
obtuses, et les externes sont coniques et pointues.
Derrière la langue, une pièce unique, triangulaire,
pourvue de dents semblables aux pharyngiennes,
correspond aux pharyngiens supérieurs.
Le surscapulaire est petit, couché obliquement le
long du bord supérieur de l'opercule, et qui lui
est réuni par une peau épaisse , sorte de continuation
du bord membraneux de l'opercule. Au-dessus du
surscapulaire on compte dix écailles obliques, dont
la rangée remonte jusque sur le front, et sépare, au-
dessus de la tempe, une plaque écailleuse, oblique,
composée de deux rangées d'écaillés. L'ossature de
l'épaule est entièrement cachée sous le bord mem-
braneux de l'opercule. En le soulevant, on voit que
les différentes pièces qui la composent n'ont point
d'écaillés. L'huméral est étroit et alongé. Sous l'angle
arrondi de l'opercule est l'attache des rayons supé-
rieurs de la pectorale. Les autres rayons sont fixés
obliquement en arrière du premier, de sorte que
le dernier rayon répond à la seconde rangée d'écaillés
derrière l'ouïe. La longueur de la pectorale fait à peu
de chose près le sixième de la longueur totale du
poisson. Quand elle est étalée, la hauteur de son.
éventail est plus grande que le plus long de ses rayons.
Ils sont gros, bien séparés, au nombre de quatorze:
le premier est simple et presque aussi long que le
second; les cinquième, sixième et septième sont
les plus longs, et surpassent de très -peu les pre-
miers; les autres diminuent insensiblement jusqu'au
CHAP. I. LABRES. 2S
dernier, qui est de moitié plus court que le sixième.
Le bord libre de la nageoire est arrondi.
Les ventrales sont insérées en arrière des pectorales.
Leur attache répond à la pointe du dernier rayon
de ces nageoires thoraciques. La longueur de leur
premier rayon mou est des quatre cinquièmes du
plus long rayon de la pectorale. Le rayon épineux
a les deux tiers de celui qui le suit. Quand la na-
geoire est reployée le long du corps , elle atteint
aux deux tiers de la distance entre leur base et l'ou-
verture de l'anus. La dorsale s'élève un peu en ar-
rière de l'insertion de la pectorale. Le premier rayon
épineux n'a que la moitié de la hauteur du vingtième,
lequel a le tiers de la hauteur du corps, mesurée
sous lui. Les. autres rayons épineux augmentent in-
sensiblement; ils ont tous à leur pointe un petit lam-
beau charnu libre. La portion molle de la nageoire
est courte; car elle n'occupe que le dernier quart de
la longueur de la dorsale, qui mesure la moitié de la
longueur du corps, la caudale non comprise. Cette
dernière portion de la dorsale est arrondie, et d'un
tiers plus haute que le dernier rayon épineux. La
première épine de l'anale répond à la dernière de
la dorsale. La hauteur de la portion molle est un
peu moindre que celle de la nageoire du dos. La
caudale est large, coupée carrément. Sa longueur
mesure le sixième de celle du corps entier; sa hau-
teur, quand la nageoire est étalée, surpasse d'un
tiers la longueur. Quelques écailles s'avancent sur
la membrane entre les rayons, et y forment ainsi
des petites bandelettes écailleuses qui n'atteignent
(i LIVRE XVI. LABROIDES.
pas à la moitié de la hauteur de la caudale. Il n'y
en a pas sur les autres nageoires.
B. 5; D. 20/11 5 A. 3/9; C. 16; P. 14; V. 1/5.
Les écailles de l'occiput, et surtout celles de la
poitrine, sont très - petites ; elles commencent à
devenir grandes et larges aux pectorales j encore
celles au-dessus de la ligne latérale sont -elles tou-
jours plus petites que celles des flancs; elles sont
d'ailleurs placées d'une manière fort régulière sur
les côtés par bandes légèrement obliques, au nombre
de trente-six, entre l'ouïe et la caudale. Chaque zone
est composée d'une vingtaine d'écaillés; elles sont
très-fortement adhérentes ; leur bord est mince et
lisse. On ne voit pas d'aspérités ou de granulations
h. leur surface. Une écaille séparée, est oblongue;
le bord libre est arrondi en arc de cercle, mince
et membraneux. La hauteur de l'écaillé égale la lon-
gueur de la portion recouverte, qui mesure les deux
tiers de l'écaillé. Le bord radical est vertical et très-
peu festonné par l'extrémité des vingt-cinq rayons
de l'éventail de la racine.
La ligne latérale part du surscapulaire et marche
à peu près parallèlement au dos par le quart de la
hauteur jusqu'à la fin de la dorsale, où elle s'inflé-
chit sans s'interrompre, et va se terminer à la cau-
dale par le milieu de la hauteur de la queue; elle
est composée d'une série de traits obliques et relevés
sur une suite d'écaillés pointues et de moitié plus
petites que les autres. Cette disposition est très-
remarquable, et rend la ligne latérale très -facile à
apercevoir.
CHAP. I. LABRES. 27
Nous avons fait cette description sur un
individu frais, long de quatorze pouces, bien
conserve, acheté à la Halle de Paris, sous le
nom de perroquet de mer.
Sa couleur était fort agréablement variée; il avait
le dos d'un beau bleu, à reflets verdâtres, qui lui
donnaient une teinte d'aigue-marine brillante, s'af-
flnblissant sur les côtés et passant au blanc nacré
sous le ventre. Tout le corps est couvert d'un réseau
de mailles, de couleur orangée ou aurore, rembruni
sur le dos, rougeâtre sur la tête, vive sur le ventre
et sur les nageoires, qui sont bleues. Les pectorales
seules avaient les rayons orangés. Les lèvres supé-
rieures et l'intérieur de la bouche étaient d'un beau
vert; les inférieures et la membrane branchiostège
d'un beau blanc.
Nous avons trouvé dans les papiers de M. le
comte de Lacépède le dessin d'une vieille de
Fécamp , peint de couleurs entièrement sem-
blables.
Nous avons reçu la même variété de Brest,
par les soins de M. Garnot, sous le nom de
vieille rouge.
Le fond de la couleur du dos et des nageoires
était vert ; les flancs et le ventre argentés, et les
mailles plus brillantes étaient d'une belle couleur
de minium. Sur la caudale, les ocelles étaient violets.
Ce poisson a plus d'un pied de long.
28 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Nous venons de recevoir un grand nombre
de ces vieilles, péchëes au Croisic, et que M.
Bâillon s'y est procurées pour nous les commu-
niquer. Elles sont aussi fraîches qu'au sortir de
l'eau, et n'ont toutes que six à sept pouces.
La couleur de ces poissons varie presque au-
tant que celle des poissons rouges que nous
conservons dans nos bassins.
Le fond est verdâtre, et la tête conserve toujours
uniformément cette teintej mais le rouge, qui y est
mêlé en plus ou moins grande abondance, varie
depuis la teinte la plus vive de vermillon jusqu'à
l'orangé pâle, et même au jaune verdâtre. Quelques
individus ont des mailles irrégulières sur tout le
corps; d'autres n'ont que des taches; plusieurs autres
sont peints de grandes marbrures; quelques-unes de
ces vieilles ont la caudale sans taches ; d'autres l'ont
tachetée.
Nous trouvons aussi de ces variétés, ayant
toujours les nombres de rayons comme nous
les donnons, à la dorsale et à l'anale, qui
sont distinguées des pêcheurs sous le nom de
'vieille jaune. Nous en devons de pareilles à
M. Garnot, qui les a envoyées sous ce nom avec
des vieilles rouges.
Il paraît que sur d'autres individus le vert
domine, et est étendu d'une manière plus
uniforme j car les pécheurs de Brest ont donné
CHAP. I. LABRES. 29
de ces vieilles avec l'épithète de vertes, qui
ont encore les mêmes nombres de rayons.
D. 20/11} A. 3/9, etc.
Nous observons aussi avec abondance une
variété de ces labres, qui non-seulement varie
parles couleurs, mais par le nombre de rayons;
ainsi nous en achetons sur nos marchés de
Paris, dont le fond de la couleur, plutôt bleue
que verte, est maillé de rouge brique.
De celles-là nous en avons un individu qui
a les nombres suivans :
D. 21/10; A. 3/9, etc.
Nous le devons à M. Bâillon.
D'autres , qui étaient maillées de couleur
semblable , ont :
D. 20/10; A. 3/9, etc.
Nous en avons observé de couleur olivâtre
sans aucune trace de réseau rougeâtre, ou
même de couleur brune assez foncée, ayant
D. 21/10; A. 3/9, etc.
M. Riener a rencontré cette même variété
à Saint-Malo.
Nous en avons reçu une de Fécamp ayant
encore plus de rayons.
D. 21/11; A. 3/9, etc. , ^
Mais il y en a d'autres qui offrent de nou-
SO LIVRE XVI. LABROÏDES.
velles variations , car elles ne se bornent plus
à des différences dans les nombres de la dor-
sale, mais l'anale a un rayon de moins. Elles
pre'sentent des nuances de couleur tout aussi
distinctes que les variations numériques des
rayons de la dorsale; ainsi M. Bâillon vient de
nous envoyer d'Abbeville un très-grand labre ,
long de seize pouces et demi, varié de rouge,
de jaune et de verdâtre, ayant
D. 20/11; A. 3/8, etc.
Le même naturaliste a pris dans le même
endroit une autre variété, verte, a D. 20/10;
A. 5/8, etc., et nous avons observé les mêmes
nombres sur des variétés brunes, achetées chez
nos marchands de Paris.
La vieille a, comme tous les labres, un canal in-
testinal très-simple; il commence par un large pha-
rynx à plis longitudinaux, qui permettent la dilata-
tion nécessaire pour la déglutition. Le canal se con-
tinue pour former un sac oblong , qui descend dans
la cavité abdominale jusque vers la moitié de sa lon-
gueur. Ce sac, formé de la réunion de l'œsophage
et de l'estomac, se contourne pour remonter vers
le diaphragme, et se rétrécit beaucoup en cet en-
droit. Une valvule masque le pylore. Le duodénum,
qui le suit, longe la face inférieure de l'estomac,
et , arrivé entre les deux lobes du foie , se plie de
nouveau, pour se rendre droit à l'anus. Aux deux
tiers de sa longueur, une seconde valvule, forte et
CHAP. I. LABRES. 51
épaisse, montre la terminaison de l'intestin grêle et
le commencement du rectum, dont le diamètre est
plus du double de celui de l'intestin qui précède.
De grosses rides longitudinales sillonnent sa mem-
brane muqueuse. Sa tunique musculaire est très-
épaisse. Les fibres charnues ont une direction longi-
tudinale. Le velouté du reste de l'intestin est couvert
de mailles hexagonales, et vers l'origine du canal les
papilles sont tellement grandes qu'elles flottent sur
la surface interne de l'intestin, ou qu'elles semblent
s'imbriquer les unes sur les autres, quand elles sont
couchées dans le sens de la marche des alimens dans
le canal alimentaire du poisson.
Le foie est assez gros et composé de trois lobes
assez distincts, de sorte qu'on commence à voir ici
la disposition que ce viscère a dans les cyprins, d'êlre
très-divisé, et en quelque sorte traversé par le canal
intestinal , qui y adhère fortement.
Le lobe gauche est subdivisé en deux lobules plus
gros chacun que le lobe droit. De ces deux lobules
l'un est adhérent à la face gauche de l'estomac par
un tissu cellulaire assez dense, et dépasse de beau-
coup la crosse de ce viscère. L'autre lobule, plus
court, mais plus épais, est trièdre et reporté sur la
face supérieure de l'estomac, entre lui et la vessie
aérienne. Le lobe droit, mince et pointu, a à peu
près la même apparence que le lobule gauche et
inférieur, mais il n'atteint pas même la pointe de
l'estomac.
La vésicule du fiel est petite , oblongue; elle donne
un canal assez long, qui reçoit un très-grand nombre
32 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de vaisseaux hépato-cystiques, versant eux-mêmes la
bile dans un très-long canal cystique. Le canal cho-
lédoque est récurrent, et porte la bile dans l'intestin ,
peu en arrière du pylore. La rate est très -grosse,
trièdre, située sur .la région supérieure de l'intestin.
Les ovaires de cette femelle sont gros, remplis
d'œufs d'une petitesse excessive, réunis en très-jolies
houppes formant des arbuscules dans les sacs qui
contiennent ces innombrables grappes. Les deux sacs
sont réunis à leur partie inférieure, de manière à ce
qu'il n'y a qu'une seule ouverture pour la sortie des
œufs ; il n'y a aucune papille externe.
Les laitances, sauf leur nature, ressemblent par
leur forme aux ovaires. Le péritoine, qui enveloppe
ces organes, est fin et argenté. Le repli qu'il fait
pour former la première enveloppe de la vessie
aérienne , devient une membrane fibreuse très-épaisse,
très -adhérente aux parois abdominales, et contient
une vessie aérienne très -grande, ovale, convexe en
dessous, pointue en arrière, et profondément éclian-
crée en avant, sans avoir aucune espèce de cornes
ni de prolongemens tubuliformes. Sa membrane
propre est très- mince.
Au-dessus d'elle sont les reins, constitués en deux
rubans grêles, situés de chaque côté de la colonne
vertébrale et débouchant presque directement en
arrière de la vessie aérienne dans la vessie urinaire,
qui est oblongue et à parois très -minces, mais ré-
sistantes.
La nourriture consiste en petits crustacés , en petits
oursins, que le poisson avale sans les triturer sous
CHAP. T. LABRES. 35
ses pharyngiens , en partie arrondis. J'ai aussi trouvé
des débris de flustres foliacés, et de fucus dans l'es-
lomac.
Sur le squelette nous voyons le crâne avoir une
crête interpariétale, élevée, triangulaire, pointue en
arrière , deux autres crêtes latérales et antérieures peu
saillantes. L'occiput prolongé en arrière est comme
tronqué obliquement. La crête moyenne, continua-
tion de la première, est peu élevée, et, au contraire,
les latérales le sont davantage. La région du front
est bombée; une crête transverse, aplatie, large,
peu élevée, passe d'un frontal sur son congénère, de
l'autre côté, et termine ainsi la gouttière, dans la-
quelle glissent lesbranclies montantes del'intermaxil-
laire, qui sont grosses et fortes. Les os du nez sont
minces, étroits et alongés.
Je compte dix vertèbres abdominales et un pareil
nombre de caudales. Les apophyses épineuses de
la dernière et de l'avant -dernière s'élargissent pour
former ensemble l'éventail osseux qui soutient les
rayons de la caudale. Les apophyses iransverses des
vertèbres de l'abdomen sont peu longues, assez grosses,
comprimées, aplaties d'avant en arrière. Sur leur face
postérieure s'articulent les côtes, qui sont longues,
assez fortes, et dont les douze premières portent des
apophyses horizontales, longues et grêles. Les inter-
épineux de la dorsale et de l'anale sont hauts et di-
minuent de largeur , à mesure qu'ils sont plus près
de la fin de la nageoire. Les crêtes latérales sont
assez élevées et diminuent de la même manière.
L'huméral et le cubital sont deux très-forts os ;
i3. 3
34 LIVRE XVI. LABROÏDES.
qui laissent entre eux une échancrure peu ouverte.
Quant au radial, il est petit j son trou rond est
assez grand ; les osselets du carpe sont assez larges.
Les os pelviens sont longs et forts.
Telle est la vieille rouge la plus commune,
et qui offre toujours cette disposition de cou-
leur et vingt a vingt et un rayons épineux à la
dorsale. Il est assez étonnant que ce poisson
ait été inconnu d'Artedi et de Linné. Dans
la douzième édition du Systema naturœ, qui
est de 1766, on ne trouve aucun labre à qui
ce grand naturaliste ait compté ces vingt et
une épines à la dorsale. L'année suivante, As-
canius publia le premier caliier de ses Icônes
rerum naturalium ; la première planche repré-
sente d'une manière reconnaissable notre pois-
son. La description ajoute encore à ce que
cette ligure laisse à désirer. Les nombres des
rayons de la dorsale se rapportent parfaite-
ment à ceux de nos vieilles. Ascanius donna
à ce labre l'épithète de bergjlta, tirée de son
nom norwégien ; cependant Gmelin ne profita
pas du travail du zoologiste danois, et notre
poisson ne prit point de place dans cette édi-
tion du Systema naturœ.
Il négligea également la description et la
figure du lahrus Ballan, de Pennant, qui
appartient très -probablement à la variété
CHAP. I. LABRES. 55
jaune de notre poisson * ; sur la planche on
voit les os pharyngiens parfaitement bien re-
présentes. Cette figure a été copie'e plusieurs
fois. Il est d'ailleurs assez curieux de remar-
quer que Gmelin, ayant négligé de se servir
d'une description assez bien faite, accompa-
gnée d'une figure passable , ait placé dans la liste
des labres le L. comber et le L. coquiis, tous
deux plus difficiles à déterminer, et connus
par une phrase très-courte et peu caractéris-
tique de Rai, et par une figure tout aussi peu
reconnaissable. Pennant a ajouté au L. comber
de Rai des nombres de rayons qui peuvent
faire présumer qu'on doit le rapprocher de
notre vieille rouge.
Turton donne à ce L. comber, dans sa Faune
de la Grande-Bretagne, trente et un rayons
à la dorsale 5 mais comme il n'indique pas s'il
y a une épine de plus à cette nageoire pour
former ce nombre, on ne sait pas si l'on doit
rapprocher son L. comber de la vieille rouge ou
de la vieille brune.
Quant au cook {^lahrus coquus)^ il me pa-
raît être différent, et nous démontrerons plus
1. Notez bien que le labrus Ballan de Risso est tout différent
de celui de Pennanl.
36 LIVRE XVT. LABROÏDES.
bas que c'est au labre à trois taches quil res-
semble le plus.
Ce fut Bonnaterre qui plaça le premier notre
vieille dans le catalogue de ses labres, pour
l'Encyclopédie méthodique, sous le nom de
lahre BergyltCj, sans remarquer que sur la
même page il venait d'indiquer déjà la même
espèce d'après Pennant, sous le nom de labiée
Ballan.
Bloch s'étant procuré de la mer du Nord une
de ces vieilles, la fit représenter sur la plan-
che 294 de sa grande Ichthyologie. Il l'appela
lahre tacheté [lahrus maculatus), tout en
reconnaissant que c'était le hergylta d'Asca-
nius; mais il ne parle pas de Pennant.
Bien que la figure de Bloch soit très-défec-
tueuse, nous sommes sûrs de cette identité
spécifique , attendu que nous avons étudié le
poisson même de ce naturaliste, que M. Lich-
tenstein a bien voulu nous prêter.
M. de Lacépède copia Bonnaterre et Gmelin,
de sorte qu'on retrouve parmi ses labres un
L. Ballan, un L. Bergylte; mais il donne un
nouveau nom à notre labre, en employant
la note et le dessin qui lui avaient été com-
muniqués par M. Noël, de Rouen. Nous avons
retrouvé ce dessin parmi ses papiers; de façon
que nous sommes assurés que le lahre neustrien,
CHAP. I. LABRES. 57
décrit d'après ce dessin , n'est autre que la vieille
commune.
Enfin, nous trouvons une figure encore re-
connaissable de notre vieille dans le Zoologi-
cal miscellanj de Shaw (pi. 426)5 mais il le
croit, très-faussement, une variété du labrus
tinca de Linné , qui n'a que quinze rayons épi-
neux à la dorsale, et qui est un de nos créni-
labres. La figure citée plus haut, a été repro-
duite dans la Zoologie générale du même auteur
(t. IV, part. 2, pi. 7 2 , p. 499).
Donovan en donne aussi une assez bonne
figure * sous le faux nom de lahrus tinca.
Tous les naturalistes que nous venons de
citer ont cependant oublié la meilleure figure
de la vieille qui se trouvait dans Duhamel. Sous
le nom de vieille ou carpe de mer, cet auteur
représente fort exactement notre poisson. L'a-
natomie qu'il ajoute à cette planche % a été
copiée des manuscrits de Duverney. Les dents
pharyngiennes sont fort exactement dessinées,
comme dans la figure de Pennant.
Duhamel avait reçu ce poisson de Granville.
Plus tard Bloch fit attention à cette figure
de Duhamel, et il l'a citée dans son Système
1. Brit. fish., pi. 85.
2. Trailc des pêches ^ secl. 4, pi. 6-
38 LIVRE XVI. LABROÏDES.
poslliume; mais à faux, car il la rapportée à
son lahrus vetula, tandis qu'il aurait dû la
citer sous le lahrus maculatus.
Son lahrus vetula, comme nous le dirons
plus tard, est une figure dénaturée du labre
mêlé (Z«Z>rw.y mz.r^M.y Gmelin).
Fleming * , négligeant tous les noms de ses
prédécesseurs , établit l'espèce sous le nom de
lahrus ballanus^ mais il confond avec elle le
striped wrasse de Pennant et de Donovan,
qui est devenu le lahrus lineatus ( notre
lahrus mixtus), et il cite sous ce même nom,
comme une espèce distincte, une variété de
notre vieille, dont nous allons parler tout à
l'heure.
M. Jenyns reprend le nom de Bloch et
donne une fort bonne notice sur cette espèce,
dont une partie me paraît prise de l'excellent
ouvrage que j'ai tant de plaisir à consulter,
celui de M. Yarell, qui veut bien m'honorer
de son amitié. La figure de cet ouvrage^ me
paraît avoir la dorsale et l'anale un peu trop
pointues; elles sont touj ours plus arrondies dans
les poissons de ce genre. L'espèce y conserve
le nom anglais hallan virasse, et la synonymie
1. Règ. anim., p. 209. — 2. Brit. fish. , p. 275,
CHAP. I. LABRES. 59
est conforme à ce que nous venons nous-mêmes
de consigner.
La vieille fraie en Avril, se nourrit princi-
palement de crustacés, se tient sur les côtes
rocheuses ; quand elle a atteint son entière
croissance, elle pèse jusqu'à cinq livres.
Elle s'avance vers le Nord ; nous la trouvons
citée dans la Faune danoise de Millier S sous
le nom de labrus berg-galt.
Quoique Linné n'en fasse pas mention dans
son Fauna suecica^ nous la trouvons dans
l'édition de Retzius^ Ce zoologiste lui donne
le nom de labrus aper; mais il le reconnaît
pour le poisson décrit par Ascanius et Millier,
et même pour le ballan de Pennant.
On en trouve aussi aux Orkney, où elle
prend le nom de bergill. Partout elle est dési-
gnée comme une nourriture agréable.
La Vieille verte.
( Labrus Donovani, nob. -, ou Labrus suilluSj Linn. ? )
Nous avons reçu des mêmes ports de la Bre-
tagne d'autres vieilles , sous le nom de vieille
verte, dépassant aussi la longueur d'un pied,
1. Zool. dan., Prod. , p. 46, n." 687.
2. Faun. suec, p. 335.
40 LIVRE XVI. LABROÏDES.
ayant les mêmes formes et les mêmes nombres
de rayons à la dorsale, et que les pêcheurs
désignent par des noms particuliers, tirés de
la couleur des individus.
Leur vieille verte a la tête , le dos et les nageoires
verts, le dessous de la gorge jaunâtre, le ventre oli-
vâtre. Le pâle des côtés était séparé du foncé du dos
par une bandelette longitudinale argentée; quelques
rivulations blanches couraient sur la tête et sur le
ventre. Les couleurs sembleraient rapprocher celte
variété du.tourd de la Méditerranée : mais les nom-
bres des rayons distingueront facilement ces deux
poissons.
Nous trouverons cette vieille bien représentée par
Donovan ^ sous le nom de labriis lineatus : il la
peint en vert, pâlissant vers le bas des côtés ; le ventre
est teint de jaunâtre, et les flancs portent dix-huit
lignes longitudinales jaunes; toutes les nageoires
sont vertes. Ce poisson est rare sur la côte de Cor-
nouailles, où les pêcheurs le nomment greenfish
(poisson vert). Les nombres des rayons cités par
Donovan, sont les mêmes que ceux comptés sur nos
individus.
Turton, dans sa Faune de la Grande-Bre-
tagne, a cité ce lahrus lineatus d'après Dono-*
van. Nous n'en trouvons pas d'autres indica^
tions dans les auteurs de cette époque.
-
1, HUU nat. ofhr'U.fish., t. IV, pi. 74.
CHAP. I. LABRES. 41
C'est probablement à cette variété qu'il faut
rapporter le lahrus cornuhiensis , décrit par
Couch* dans son mémoire sur les poissons de
Cornouailles. Il lui donne vingt épines à la
dorsale, et le colore en brun foncé sur le dos,
plus clair sur les côtés, et en jaune safrané sur
le ventre.
Mais dans aucun cas ce lahrus cornuhien-
sis ne peut être, comme le croit M. Couch,
une variété de la girelle ordinaire [lahrus j'ulis).
MM. Fleming et Jenyns ont introduit ce
poisson dans leurs ouvrages sous ce même
nom de lahrus lineatus; et M. YarelP qui ne
me paraît pas avoir copié, du moins fidèle-
ment, la figure de Donovan, a, comme il le
déclare lui-même, donné cette espèce sur l'au-
torité de ce naturaliste.
Nous ferons observer que ce ne peut être,
comme M. Yarell l'a cru , le lahrus psittacus de
Bisso, lequel est pris de Lacépède, et n'est
autre que le lahrus viriclis de la Méditerranée,
et tout-à-fait distinct par ses formes plus alon-
gées. Ils ont tous copié les nombres de Dono-
van , qui sont ceux de r\os différentes variétés
de vieilles, sans faire attention qu'il y a eu
1. Trans. of ihe Linn. soCf t. XIV, 1."^* part,, p. 8o.
2^ Brit. fish., p. 279.
42 LIVRE XVI. LABROÏDES.
certainement erreur de sa part en attribuant
huit rayons à la ventrale de ce labre, car tous
n'ont que cinq rayons mous avec le premier
épineux.
. Nous avons reçu de Saint-Malo des vieilles
qui se rapportent parfaitement au poisson de
Donovan, s'ils ne sont pas des variétés de
notre lahrus bergjlta.
Quant au lahrus comber de Pennant*, nous
devons ici faire remarquer que cette espèce
est encore trop douteuse pour être introduite
dans un ouvrage de la nature de celui que nous
écrivons. Il n'est pas d'abord certain que le
poisson de Pennant soit le comber de lago^,
qui était un petit poisson rouge, h corps à peu
près semblable à nos labrus inixtus ou labrus
trimaculatus , et dont il n'a pas donné les
nombres des rayons.
Pennant a cru le reconnaître dans un pois-
son rouge, à ventre jaunâtre, avec une bande
blanchâtre ou argentée le long des flancs. Il
compte les rayons ainsi qu'il suit:
D. 20/11; A. 3/2; C? P. 14; V. 5;
nombres qui le rapprochent de nos vieilles.
i. Pennantj Brit.zooL, III, p. 342, pi. 58.
2. Rai, p. i63.
CHAP. I. LABRES. 45
La figure de Pennant a ëtë copiée dans l'En*
cyclopédie; Gmelin, Lacëpède ont adopte le
lahrus comheP, et, ce qui est plus fâcheux,
les auteurs des Faunes anglaises, qui, sans l'a-
voir retrouvé, l'ont signalé comme une espèce
des côtes de ce pays. Ainsi Turton, Fleming,
Jenyns l'ont nommé dans leurs ouvrages.
M. Yarell a même reproduit une nouvelle
copie de la figure de Pennant; mais ce savant
s'est appuyé d'une nouvelle autorité, puisée
dans les manuscrits de Couch.
Quoi qu'il en soit, c'est toujours un poisson
peu connu, et qui, lorsqu'il le sera mieux,
rentrera aussi dans nos variétés des vieilles
communes, ainsi que M. Cuvierl'a déjà dit dans
une note du Règne animal.
Le Labre varié.
{Lahrus inlœtus , Art, Linn.)
Je passe maintenant aux espèces communes
à l'Océan et à la Méditerranée, et je vais com-^
mencer par une des plus abondantes sur nos
côtes, qui a été cependant mal connue et mal
caractérisée jusqu'à ce jour, quoique les dif-
férens iclitliyologistes, postérieurs à Wil-
lughby, lui aient chacun assigné un nom spé-
cifique, chaque fois qu'il la reconnaissaient;
44 LIVRE XVI. labroïdes.
aussi sa synonymie est -elle très -confuse et
très -longue.
On a lieu de s'étonner qu'un poisson aussi
commun, et paré de couleurs aussi brillantes,
ait échappé à Rondelet et à ses contemporains.
Bélon, Salviani n'en font pas mention; il est
de même impossible de le reconnaître dans
les différens tourds décrits par iildrovande.
Willughby^ en a décrit deux variétés qu'il
avait observées à Livourne; car on ne peut
douter que son tur dus perh elle pictus ne soit
le poisson dont nous parlons dans notre ar-
ticle , mais paré des belles couleurs qu'il prend
pendant le temps du frai. Il crut, mais avec
doute, y reconnaître le pavo de Salviani; cette
erreur, qu'il aurait pu éviter, puisqu'il avait
décrit le pavo au commencement de son
chapitre % a été cause des erreurs d'Artedi , qui
ont été copiées et augmentées par ses succes-
seurs.
En effet, celui-ci tire de Willughby, dans
ses gênera, son troisième lahrus; et ici, co-
piste fidèle, il cite encore avec le point d'in-
terrogation Xepavo de Salviani; puis , la seconde
variété de Willughby devient le quatrième la-
1. Willughj,ItM.,p.322,S.2,n.'' 1-2.— 2.Jiif/.,p.3i9,
S. 1 , n." 2
CHAP. I. LABRES. 45
bre d'Artedi. Mais dans sa synonymie, tout en
conservant le texte de Willughby pour son
caractère spécifique, il ajoute et sans conser-
ver de doute , le pa\>o de Salviani , qui est un
crënilabre, et la copie qu'Aldrovande en avait
faite*, celle donnée par Gesner'^ du second
tourd de Rondelet, sans cependant citer
Rondelet lui-même. Il ne change rien d'ailleurs
à la phrase et à la synonymie de la variété.
Linné, dès sa dixième édition, est venu em-
brouiller encore plus ce qu'Artedi avait déjà
mal commencé; car il prend son lahriis pavo
dans Hasselquist , qui a décrit sous ce nom une
fort belle girelle de la Méditerranée, et point
du tout le crénilabre de Salviani; puis il ajoute
comme synonyme la phrase du troisième labre
d'Artedi.
Cette confusion explique comment Linné
a placé son lahrus pa^o dans la division de
ceux à queue fourchue, caractère qui convient
en effet à la girelle , mais point au poisson de
Willughby et d'Artedi. Le lahrus pavo de
Linné est donc un être complexe, tout-à-fait
imaginaire , qu'il faut rayer de nos catalogues
systématiques. Eli bien , qu'on lise maintenant
1. Lib. , c. 4> p. 29.
2. Gesner, p. ioi6, n." 11.
46 LIVRE XVI. LABROÏDES.
la description poétique que Lacépède a faite
de son labre paon , amplification faite sur le
texte d'Hasselquist, et où il a entassé sans au-
cune critique toutes ces citations si éloignées
l'une de l'autre, d'Artedi, de Linné et d'Has-
selquist; ne sera-t-on pas étonné de nouveau
de la légèreté avec laquelle l'histoire naturelle
a été jusqu'à présent écrite?
Bloch avait bien reconnu cette erreur de
Linné, mais il n'est pas venu en aide pour
la rectifier; il s'est contenté d'inscrire le pois-
son d'Hasselquist sous le nom de lahrus
syriacus.
Quant à la seconde variété que Willughby
avait vue et décrite à Livourne, nous venons
de dire que, sur l'indication de cet auteur,
l'espèce a été nommée par Artedi^, et qu'elle
a pris rang dans la dixième édition du Syste-
ma naturœy sous le nom de lahrus niixtus; où
Linné l'a placée parmi celles dont les nombres
des rayons épineux de la dorsale lui sont in-
connus. Mais il est possible que dans ce même
travail Linné eût déjà inscrit fespèce dont il
s'agit ici, sous le nom de lahrus ossifa^us:
car les nombres des épines dorsales indiquées
pour cette espèce, conviennent à notre pois-
1. Gen. 34 j n-° 4 j et Sjn. , p. 67 , n." 10.
CHAP. I. LABRES. 47*
son. A la vérité, ils sont les mêmes dans l'es-
pèce suivante, le lahrus trimaculatus , dont
Linné n'a pas parlé. Or, je crois que ce grand
naturaliste a plutôt eu sous les yeux un poisson
de l'espèce dont il s'agit dans ce chapitre, que
de la seconde , parce que les individus de cette
dernière , quelque décolorés qu'ils soient par
l'action de l'alcool, montrent toujours des
traces des trois taches, caractère qui certes
n'eût pas échappé à Linné. ' ^
Si, comme je le crois, il a introduit son
lahrus ossifa^us d'après l'examen de la nature,
je ne doute presque pas que déjà dans le
tome II du Musée du prince Adolphe, Linné
niait encore mentionné notre poisson sous le
nom de lahrus onitisy qui se trouve sur la
même page au n.'' 27. Nous devons cependant
avouer que les nombres des rayons ne se
rapportent pas aussi bien.
Si ces conjectures sont vraies, notre poisson
aurait donc reçu de Linné lui-même trois
noms, ou tout au moins deux, qui sont re-
produits dans la douzième édition sans aucuns
changemens.
A peu près dans le mêriie temps Pennant
publia la Zoologie britannique, où se trouve
notre poisson une première fois, sous la déno-
mination de striped -wrasse ( lahrus lineatus ) ,
*48 LIVRE XVI. LABROÏDES.
avec une excellente figure; et une seconde,
sous celle de cook^ empruntée par Pennant
à Rai, qui l'avait reçue de lago, dans son petit
Catalogue des poissons de Cornouailles, im-
primé à la suite du Synopsis,
Celle-ci devient dans Gmelin labrus coquus,
et la première lahriis variegatus, en même
temps que dans l'Encyclopédie Bonnaterre
conserve le labrus lineatus, et qu'il ajoute le
labrus mixtus de Linné. Mais ce même Bon-
naterre prend encore notre espèce dans Asca-
nius, et en fait un labrus cœruleus.
Cette même 'figure d'Ascanius a été copiée
par Sliaw, d'abord dans le Naturalists Miscel-
lanj, et donnée comme sparus formosus , et
il place ensuite cette espèce, dans le General
zoology-y dans le genre des labres; mais en lui
conservant l'épithète qu'il lui avait donnée,
comme une espèce nouvelle et distincte de
spare.
Bloch a, comme nous l'avons dit, reconnu
l'erreur de Linné, relative au labrus pa^o^
mais il en commet une de son côté, en repro-
duisant notre poisson par une figure inexacte,
et dont nous n'eussions jamais reconnu l'iden-
tité, si nous n'eussions vu l'original, qui est
encore conservé dans le Cabinet de l'université
de Berlin, et que nous devons encore à la
CHAP. I. LABRES. 49
libéralité de M. Lichtenstein : c'est le lahrus
vetula de la grande Ichtliyologie, pi. 284.
M. de Lacépède venant copier, comme à
son ordinaire, toutes ces erreurs, reproduit
ces espèces nominales, d'où il résulte que no-
tre poisson se trouve répété huit fois, sous
autant de noms différens, dans le genre labre
de Lacépède. Heureux encore qu'il n'ait pas
travaillé sur l'ouvrage de Shaw , car il y aurait
pris un neuvième nom.
Donovan^ aurait pu cependant éclairer
Shaw^; car il avait publié, une année avant lui,
une nouvelle figure très-bonne de ce labre,
sous le nom que Gmelin lui avait imposé, et
en cela il est suivi par Turton^, qui cependant
ne reconnaît pas l'identité du lahrus coquus
de Rai, et qui, d'après Pennant, le cite un peu
plus bas comme une espèce distincte. Mais ce
que nous venons de rapporter fait voir que Do-
novan se trompe, quand il croit que Gmelin
est le seul auteur du continent qui ait fait con-
naître cette espèce.
Coucli l'a donnée dans son Catalogue des
poissons de Cornouailles , sous le nom de
lahrus coquus^ et c'est ainsi qu'il reparaît
1. Donovan, tab. 21. — 2. Brit. faun. , p. 99, n.° 65.
i3. ^ 4
50 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dans louvrage de Fleming'. M. Yarell en donne
une jolie figure , en lui restituant son nom Lin-
nëen, et en y ajoutant une synonymie presque
complète. 11 y manque le labrus vetula de
Blocli, nom qu'il a appliqué à un poisson tout
différent ; et M. Jenyns l'a fidèlement suivi.
M. Risso , parmi les iclithyologistes qui ont
écrit sur les poissons de la Méditerranée, a
inscrit ce poisson dans son ouvrage; mais il
en a embrouillé également la synonymie. En
efFet, c'est, avec des citations fausses, le la-
hrus pavo de la seconde édition, mais non de
la première, celui-ci étant un crénilabre. Et
puis, dans cette première édition, et comme
si l'auteur, au lieu d'observer la nature, eût
compilé dans quelques livres, on retrouve
notre espèce sous les dénominations de lahrus
lineatus, pris dans Pennant; de lahrus varie-
patiiSy tiré de Gmelin , et de labrus mixtus,
copié d'Artedi et de Willughby. De ces trois
espèces nominales, la dernière seule reparaît
dans la seconde édition, sans que l'auteur dise
pourquoi il a supprimé les deux autres. Et
enfin l'on trouve encore dans cet ouvrage les
noms de lahrus cœruleus, avec des citations
d'Ascanius, qui n'ont jamais été vérifiées, et
1. Fleming, Reg. an., p. 209, n.** i35.
CHAP. I. LABRES. 51
de lahriis ossifa^us, appliques à d'autres es-
pèces.
On doit s'étonner qu'on ait si mal déterminé
un poisson aussi commun dans la Méditerra-
née et dans l'Océan, bien plus l'acile à recon-
naître et à caractériser que la vieille ordinaire;
car la distribution de ses couleurs ne change
point.
Nous en avons examiné une vingtaine d'in-
dividus , dont nous avons acheté nous-mêmes
quelques-uns sur nos marchés de Paris;
les autres ont été apportés au Cabinet du
Roi, de Brest, par M. Garnot; de Lorient, par
Mad.^ Ducrest de Villeneuve; de Norwége,
par M. Bâillon ; de Marseille, par M. Cuvier ; de
Nice,, par MM. Bisso et Laurillard; de Gênes,
de Naples, par M. Savigny; de Messine, par
M. Bibron; de Corse, par M. Payraudeau, et
d'Iviça, par feu de Laroche.
Ce labre a le corps plus alongé que la vieille j
sa hauteur n'est contenue que quatre fois et deux
tiers dans la longueur totale. La tête est plus longue;
elle fait le tiers de la longueur du corps, la caudale
non comprise. Le museau est plus aigu; l'œil est
un peu plus grand ; son diamètre fait le cinquième
de la largeur de la tête ; la distance du bout du
museau au bord antérieur de l'orbite est double
de la longueur du diamètre. Le premier sous-orbi-
taire est petit , triangulaire et enveloppé par une peau
52 LIVRE XVI. LABROÏDES.
épaisse, dont le bord se prolonge en avant etaugmente
l'étendue de la surface non écailleuse, comprise entre
l'œil et la lèvre supérieure. La joue est beaucoup
moins haute que dans la vieille. Le bord montant du
préopercule est lisse et vertical; le bord inférieur est
légèrement oblique et descend de l'angle vers le bas
de la branche horizontale de la mâchoire inférieure.
Le limbe est étroit; il n'y a sur la joue, au-dessous ou
derrière l'œil, que sept à huit rangées d'écaillés,
beaucoup plus petites que celles de la vieille. L'oper-
cule et le sous-opercule sont intimement réunis et
couverts de petites écailles , un peu plus larges que
celles du préopercule; il y en a sur l'interopercule
un plus grand nombre que dans la vieille : toutes
sont placées vers l'angle supérieur et postérieur, de
sorte que la partie antérieure de cet os, le limbe du
préopercule et la mâchoire inférieure, forment sous
la tête une longue bande sans écailles, recouverte
par une peau épaisse. Les deux ouvertures de la na-
rine sont petites, un peu plus éloignées l'une de
l'autre; la postérieure est percée tout près du bord
supérieur de l'orbite; le maxillaire est entièrement
caché sous le bord membraneux du sous-orbilaire;
il est plus court que celui de la vieille. Les dents
sont beaucoup plus petites, plus fines, plus pointues
et plus nombreuses. Les lèvres sont larges, mais
peu épaisses, et n'ont en dessous que cinq à six
replis membraneux ; sous la symphyse de la mâchoire
inférieure, elles sont épaissies. La langue est plus
longue et plus libre; les dents pharyngiennes sont
coniques, et il y en a moins que chez la vieille. Le
CHAP. I. LABRES. S5
surscapulaire est plus long et plus étroit ; les autres
parties de l'épaule sont de même cachées sous le
bord membraneux de l'opercule. La pectorale est
beaucoup plus courte ; elle ne fait pas le huitième
de la longueur totale. La ventrale n'est pas attachée
autant en arrière des pectorales, et l'anus est moins
éloigné de la base de cette nageoire. La dorsale com-
mence à l'aplomb de l'insertion de la pectorale; elle
est moins haute, mais à proportion aussi longue que
celle de la vieille. Sa portion épineuse est plus courte,
à peine plus basse que la partie molle, qui n'est point
arrondie. Le premier rayon de l'anale répond au der-
nier épineux de la dorsale; elle est plus haute. La
caudale est un peu arrondie , et du huitième de la
longueur totale.
Voici les nombres que nous observons le
plus communément, et qui nous paraissent
être en particulier ceux de la variété qui vit
dans la Méditerranée.
B. SjD. nyiSjA. 3yil;G. 15;P. 16 î V. 1/5.
Les écailles sont petites, au nombre de cin-
quante-cinq entre l'ouïe et la caudale, sur vingt-
quatre dans la hauteur. Chaque écaille est un rec-
tangle oblong, dont le bord antérieur est mince,
arrondi et lisse. Le bord radical est crénelé par
les neuf rayons de l'éventail. La ligne latérale va
de l'ouïe à la caudale par le quart de la hauteur
du corps, parallèlement au dos, et s'abaissant insen-
siblement, de manière à traverser la queue par le
milieu de sa hauteur. Les écailles sur lesquelles
o4 LIVRE XVI. LABROÏDES.
elle est tracée, ne sont pas différentes des autres,
dans leur partie visible. Leur bord radical est an-
guleux. Cette ligne est composée d'une série de
petits tubes relevés en saillie arrondie sur chaque
écaille.
Les couleurs de ce labre sont vives et brillantes j
elles sont toujours distribuées de même. Nous avons
seulement observé quelques variations dans les
teintes.
La tête et la moitié antérieure du dos sont ver-
dàtre plus ou moins foncé et lavé de brun. Cette
teinte se prolonge, par le milieu des flancs jusqu'à la
caudale, en une bande étroite, de manière à laisser
au-dessus la portion postérieure du dos le plus sou-
vent jaune orangé ou lilas. Cinq raies longitudinales,
plus ou moins larges, bleues, quelquefois plus ou
moins violettes, traversent le corps sur sa partie
colorée en verdàtrej les trois supérieures ne s'avan-
cent pas sur l'orangé du dos ; les inférieures vont
jusqu'à la caudale. Ces raies bleues s'avancent sur
la tête, s'anastomosent irrégulièrement entre elles et
font sur les joues un réseau bleu ou violet, à
maille plus ou moins large.
La dorsale est orangée, bordée d'un fin liséré
bleu. Sur la partie antérieure il y a une large tache
bleue, qui n'atteint quelquefois qu'au huitième rayon
épineux, mais qui aussi s'étend jusqu'au treizième.
L'anale est orangée et bordée d'un large ruban bleu.
La caudale est eniièreineni bleue. Les pectorales sont
orangées, et les ventrales ont à leur bord interne
une tache bleue, qui quelquefois s'étend sur toute
CHAP. I. LABRES. 55
leur surface : telles sont les couleurs prises sur le
frais à Brest, par M. Garnot, ou par nous-mêmes
sur des individus du marché de Paris. D'autres
avaient le dos plus foncé et presque entièrement
violet noirâtre. M. Noël en a dessiné à Fécamp,
chez qui la partie postérieure du dos était d'un beau
rouge, et les teintes des nageoires ou des bandes
étaient plus verdâtres. Le dessin fait à Nice par
M. Laurillard, représente le dos et les nageoires du
plus beau jaune citron.
Les viscères de ce poisson n'offrent rien de bien
différent de ceux des autres labres.
Le squelette a une colonne épinière, composée
de dix - huit vertèbres abdominales et de vingt et
une caudales. Les trois et même les quatre dernières
concourent à former l'éventail osseux, sur lequel
s'insèrent les rayons de la caudale. Les interépineux
de la dorsale sont plus courts et plus faibles que
ceux du labrus bergylta.
Les crêtes du crâne sont plus basses; la gouttière
qui réunit les branches montantes des intermaxil-
laires, moins profonde. Les os du bras sont plus
faibles.
Nous avons dit que l'on doit distinguer des
variétés dans cette espèce; celles que nous
offrent les couleurs ne consistent que dans des
teintes plus ou moins étendues; mais nous en
trouvons de plus sensibles en comptant les
nombres sur différons individtis.
56 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ainsi nous trouvons sur un individu venu
de Brest:
D. 18/12; A. 3/11, etc.
Sur un autre, envoyé de Nice, par M.Risso:
D. 18/11; A. 3/11, etc.
M. Bâillon nous en a donné un qu'il avait
reçu de Norwége, et qui a
D. 17/12; A. 3/11, etc.;
et nous trouvons les mêmes nombres sur un
autre, acheté à Paris et venu de Brest.
Deux autres, de même taille, achetés à Paris
avec le précédent, et venus, comme lui et dans
le même temps, de Brest, n'ont que
D. 16/12; A. 3/11.
Enfin, un dernier individu plus grand, car
il a quatorze pouces et demi, a des nombres
encore plus différens; car nous comptons :
D. 16/14; A. 3/11, etc.
Nous devons faire remarquer que toutes ces
différences sont observées sur des poissons par-
faitement bien conservés, et qu'on ne peut
pas les attribuer à des observations mal faites,
parce qu'elles reposeraient sur des poissons en
mauvais état.
Nous en avons des individus qui ont treize
pouces de longueur.
Ce labre, comme ses congénères, vit sur les
CHAP. I. LABRES. S7
côtes rocheuses, et se nourrit de petits crus-
tacés ; il apparaît quelquefois en troupes nom-
breuses. M. Risso cependant l'indique comme
se tenant sur les côtes sablonneuses.
L'espèce s'avance au Nord jusque sur les
côtes de Norwége et de Suède, car on la trouve
mentionnée dans l'ouvrage de M. Nilsson, quoi-
que Millier n'en ait pas fait mention dans son
Prodromus faunœ danicœ. Ce qui me ferait
croire que ce poisson est rare dans ces con-
trées septentrionales, c'est que je ne le vois
pas cité dans le Catalogue des poissons du
Danemarck envoyés à G. Cuvier par S. A. R. le
prince Christian de Danemarck; et probable-
ment il ne se trouve pas dans des latitudes
plus élevées : car Faber ne le cite pas parmi
ses Poissons d'Islande ; il n'est mentionné dans
la Fauna grœnlandicaj il ne l'est pas même
la Faune des Orcades.
Dans le Nord^ ce labre, quelquefois con-
fondu avec le suivant et avec le lahms exo-
letus, a une synonymie vulgaire peu certaine.
M. Nilsson, qui le distingue bien, le donne
comme le hlaastaalou blaastack des pêcheurs
de Suède et de Norwége, dénomination que
MuUer indique avec celles de hlaagomnie ou
de seigunune, au labriis exoletuSy si distinct
par les cinq épines de son anale.
58. LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ce transport de nom ayant été suivi par
M. Retzius, qui a même ajouté foi à une autre
erreur des pêcheurs, a donne naissance à une
confusion sur laquelle nous serons obligés de
revenir à l'article du cj^énilabre à cinq épines
ou lahrus exoletus.
M. Risso indique comme noms vulgaires à
Nice, ceux de sero, de tenco et de verdon^
qui sont collectifs à plusieurs autres espèces.
Le Labre a trois taches.
{^Lahrus trimaculatus y Gmel.)
Un autre labre , également commun dans
l'Océan et dans la Méditerranée, ne diffère
guère du précédent que par les couleurs, les
différences dans les formes étant très-légères.
Le corps est aussi alongé; la tête est comprise
le même nooibre de fois dans la longueur du corps.
Il a le museau aussi pointu , les dents aussi fines et
aussi nombreuses, les lèvres aussi minces j les écailles
de la joue sont un peu plus petites et en moindre
nombre; celles de l'angle supérieur et postérieur de
l'inleropercule sont moins nombreuses.
Ce labre a les pectorales et les ventrales plus
courtes; la dorsale, et surtout Fanale, plus basses.
D'ailleurs, les nombres des rayons sont les mêmes.
D. 17/13; A. 3/11, elc.
Ces nombres nous paraissent être plus conslans.
CHAP. 1. LABRES.
m
car les nombreux individus examinés par nous sur
les différens points de nos côtes, nous ont montré
la même régularité.
Ce poisson est d'une belle couleur rouge, s'affai-
blissant sur les côtés et devenant rose sur les flancs.
On voit sur l'arrière du dos trois taches noires, dont
les deux antérieures occupent la base de la dorsale,
l'une sur les cinq premiers rayons, l'autre sur les
six derniers; de sorte qu'il n'y a que l'espace de deux
rayons qui les sépare. La troisième est étendue sur
la croupe de la queue.
Il y a des individus qui ont une première petite
tache sur les derniers rayons épineux de la dorsale.
Une tache noirâtre est sur le commencement de cette
nageoire, entre le premier et le troisième rayon épi-
neux. Les trois nageoires verticales sont bordées d'un
fin liséré bleu pâle ou lilas. Il y a un trait bleuâtre
le long du bord inférieur du sous-orbitaire. L'iris
de l'œil est rouge, entouré d'un cercle bleu.
Nous trouvons quelquefois des individus
de cette espèce sur le marche de Paris. Le
Cabinet du Roi en a reçu d'autres de Brest,
par M. Dumëril, et de presque tous les ports de
la Méditerranée , par les différens collecteurs
que nous nous sommes fait un devoir de citer
déjà tant de fois. Le docteur Leach Ta envoyée
de Malte; M. Virlet la prise au Bosphore, où
elle porte le nom de kans-balok^ et M. de
Laroche l'a trouvée à Iviça, où elle est com-
mune et de haute mer.
60 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Cette espèce ne paraît pas dépasser un pied
de longueur.
Ce labre n'a pas été connu d'Artedi ni de
Linné, quoiqu'ils auraient pu en trouver une
notice dans le cinquième tourd d'Aldrovande.
Ascanius * le publia sous le nom de lahrus
carneus, qui fut adopté par Bloch.
Mais Pennant le fit connaître sous la déno-
mination de lahrus trimaculatus y qui est plus
caractéristique, en effet, et qui a été adoptée
par tous les autres iclithyologistes. La figure
a été copiée par Bonnaterre dans l'Encyclo-
pédie, et Gmelin et Lacépède reconnurent
la synonymie d'Ascanius et de Bloch.
Donovan^ en a donné aussi une fig-ure élé-
gante , où le dos nous paraît seulement un peu
troj) jaune; elle a été copiée par M. Yarell.^
Turton"^ et Jenyns^ le comptent également
dans leurs Faunes; mais Fleming n'en a pas
fait mention dans son Règne animal.
L'espèce s'avance aussi sur les côtes septen-
trionales de l'Europe; car, outre le témoi-
gnage d'Ascanius, nous la voyons mention-
née par Millier^, sous le nom que lui avait
1. Ascanius, tab. XII, pi. 289. — 2. Donovan, Brit. fis h. y
pi. 49- — 3. Brît.fish. , p. 286. — 4. Brit. faun. , p. 99, n." 67.
— 5. Man. ofvert. an., p. 396. — 6. Faun. dan., Prod., p. 46 j
n.° 585.
CHAP. I. LABRES. 61
donné son prédécesseur. Linné l'a notée dans
le Fauna suecica^ et Retzius, dans sa nouvelle
édition, la cite comme femelle du lahrus exo-
letus, poisson du Nord, à préopercule den-
telé et à cinq épines anales.
C'est d'après l'assertion des pêcheurs que
cette opinion a prévalu chez plusieurs savans
de Suède ou de Norwége; mais je crois que
la similitude des noms vulgaires a donné lieu
à quelque confusion : car nous avons observé
que les deux sexes de notre espèce, qui tous
deux sont identiques et se rapportent parfai-
tement à notre lahrus triniaculatus , n'ont
jamais que trois épines à l'anale. Je vois d'ail-
leurs que mon opinion est d'accord avec celle
de M. Nilsson, de Stockholm, qui a dans ses
labres de Scandinavie un labre à trois taches,
et dans ses crénilabres un lahrus exoletus.
Notre poisson ne paraît pas se trouver sur les
cotes d'Islande , car nous ne l'avons pas reçu
de ces mers, et Faber n'en fait pas mention.
M. Ilisso a, dans sa première édition, décrit
le labre à trois taches; et depuis, observant
que quelques individus ont une tache sur le
devant de la dorsale, il a fait de ceux-ci, dans
sa seconde édition , un lahrus quadrimacula-
tus, ne parlant plus du lahrus trimaculatus
que comme d'un synonyme douteux de sa
62 LIVRE XVI. LABROÏDES.
nouvelle espèce, et se demandant si le poisson
de la Méditerranée est bien le même que celui
de l'Océan septentrional.
Rafînesque ne l'a pas reconnu dans son Icli-
tliyologie de la Sicile, et il l'a donné ^ comme
une nouvelle espèce, nommée lahrus luvarus,
ce poisson se nommant en sicilien luppanii
luvarii ou rossignUy le premier de ces noms
étant générique pour les labres.
Selon M. Risso, le nom nicéen de cette es-
pèce est tiiico ou tinca. Du temps de Mrdler,
les pécheurs norwégiens lui donnaient le nom
de Suder-Naal, qui n'est plus cité par M. Nils-
son, mais qui indique les suivans, Rôdsnàcka
ou Sypiga. Sur nos côtes de Bretagne on le
nomme ordinairement coquette, et ceux qui
nous venaient du C roi sic avaient particulière-
ment le nom de couniet.
Le Labre tourd.
{Lahrus tiirdus , Linn.)
Il nous reste à parler maintenant des espèces
que nous croyons appartenir à la Méditerra-
née seule; car nous ne les avons jamais vues
venir de nos côtes de l'Océan.
1. Ind. d'itt. Sic. j p. 20 , n." J 44 ; et Caraii. Sp., p. 38 , n.° iOi .
CHAP. î. LABRES. G5
Nous allons commencer par celle dont nous
possédons un plus grand nombre de variétés,
et nous regardons le poisson que nous allons
décrire, comme étant le lahrus turdus de
Linné, c'est du moins celui qui se rapproche
le plus de la description de Willugliby.
Comparé à notre vieille de l'Océan, il a le corps
éU'oit, plus svelte; mais sa forme se rapproche da-
vantage de celle de notre labre à trois taches.
Le museau est plus aigu, ce qui contribue à ren-
dre la tête plus longue; elle est contenue trois fois
dans la longueur du corps, sans comprendre la cau-
dale, qui n'est que du sixième ou du septième de la
longueur totale. La hauteur du corps fait le quart
de la longueur, mesurée depuis le bout du museau
jusqu'à l'extrémité de la nageoire de la queue. L'œil
est petit, rond , placé à peu près au milieu de la lon-
gueur de la tête, mais au haut de la joue, sans que
cependant le cercle de l'orbite échancre la ligne du
profil. Son diamètre n'est que du septième de la lon-
gueur de la tête. Le sous-orbitaire, étroit et alongé,
est caché sous une peau épaisse. Le préopercule est
large; son angle est très-ouvert, parce que le bord
vertical monte obliquement et en arrière sur la joue,
et que le bord horizontal descend obliquement
en avant. L'opercule est lui-même assez large, et
confondu avec le sous-opercule sous les écailles qui
recouvrent ces deux os. L'interopercule est élargi et
touche sous la gorge celui du côté opposé. Il n'y a
qu'une ou deux écailles sur la partie postérieure de
64 LIVRE XVI. LALROÏDES.
cet OS. Celles du préopercule sont plus petites que
celles de l'opercule. Le front, le sous-orbitaire et
les branches de la mâchoire inférieure en sont dé-
pourvus. Les deux ouvertures de la narine sont rap-
prochées l'une de l'autre et de l'œil; l'antérieure est
petite et rendue tubuleuse par la papille relevée et
attachée sur le bord de l'ouverture.
Quand la bouche est fermée , le maxillaire est pres-
que en entier caché sous le bord membraneux du
sous-orbitaire. Ce rebord est très-élargià l'extrémité,
et s'étend sur le bout du museau comme une sorte
de lèvre. Les deux mâchoires sont d'égale longueur.
La fente de la bouche fait, à peu de chose près,
le quart de la longueur de la tête. La longueur
des branches des intermaxillaires rend la bouche
protractile; mais l'élargissement et le peu de mobilité
des branches de la mâchoire inférieure ne permet pas
que l'ouverture en soit très-grande. La lèvre supé-
rieure est relevée en un bourrelet épais, qui a sept
plis obliques ; l'inférieure est élargie en une membrane
épaisse sans plis et légèrement renflée le long du bord
de la mâchoire. Les dents sont pointues, coniques,
un peu courbées en crochets, espacées au nombre de
sept à la mâchoire supérieure, plus rapprochées à
l'inférieure et au nombre de dix à douze.
La langue est hbre dans une grande portion de sa
longueur, mais très- reculée vers le fond de la gorge.
Le palais est lisse; le voile membraneux supérieur
et inférieur, large et distendu. La membrane bran-
chiostège est épaisse et avance beaucoup sous l'isthme
le long des rayons qui soutiennent celte membrane :
CHAP. I. LABRES* 65
disposition qui rétrécît l'ouverture des ouïes. Il n'y a
que cinq rayons brancliiostèges. Les peignes des bran-
chies sont courts, et les râtelures antérieures de la
première branchie fortes , courtes , et un peu cour-
bées en crochets, dont la pointe est tournée vers le
fond du gosier.
L'ossature de l'épaule est cachée par le bord mem-
braneux de l'opercule. Quand on le soulève, on
aperçoit l'huméral comme ufle bande osseuse fort
étroite, un peu élargie vers le bas, près de la pec-
torale. Cette nageoire est courte, à peine du sep-
tième de la longueur totale. S'arrondissant en éven-
tail, chaque rayon se divise en deux branches, qui
n'ont elles-mêmes qu'une seule division. 11 faut y
regarder avec quelque attention pour apercevoir les
articulations des rayons, tant elles sont petites.
La dorsale s'élève en arrière de l'aplomb de l'inser-
tion des pectorales ; ses épines sont médiocres, à peu
près d'égale grosseur; elles s'élèvent successivement,
et la dernière ne surpasse la première que d'un quart;
les rayons mous sont plus hauts ; cette portion est ar-
rondie. Le premier rayon épineux de l'anale répond
à la dernière épine de la dorsale. Les rayons arti-
culés de l'anale sont plus longs que ceux de la na-
geoire du dos. La caudale a les angles légèrement
arrondis. Les ventrales sont petites , reculées en
arrière des pectorales , au-delà da la moitié de la lon-
gueur de celles-ci; elles ont dans leur aisselle une ou
deux écailles, un peu plus longues que celles du corps
et détachées. Entre la base des deux ventrales il y a
aussi une ou deux grandes écailles arrondies.
i3. 5
66 LIVRE XVI. LABROÏDES*
B. 55 D. 18/14; A. 3/12; C. 13; P. 14; V. 1/5.
Les écailles sont minces, comme membraneuses à
leur bord. On ne voit à la loupe que des stries très-
fines, un peu onduleuses et parallèles au bord. La
portion radicale est un carré long , sillonné par
vingt à vingt-deux stries rayonnantes, qui compo-
sent l'éventail , dont les extrémités entaillent et fes-
tonnent le bord radical. On compte quarante -cinq
rangées entre l'ouïe et la caudale.
La ligne latérale , tirée parallèlement au dos par
le quart de la hauteur, est composée d'une série de
petits tubes obliques de bas en haut, et séparés les
uns des autres. Les écailles sur lesquelles on peut
suivre le tracé de cette ligne, sont un peu plus petites
que celles qui couvrent le tronc.
Quant aux couleurs, nous regardons comme ca-
ractéristique de cette première espèce la teinte uni-
forme des nageoires, qui, d'après le dessin que M. Lau-
rillard a fait à Nice, et qu'il a eu la bonté de nous
donner, sont d'un vert clair plus pâle que le dos
et sans aucunes taches ni ocelles. L'anale est moins
foncée que la dorsale; la caudale a une teinte plus
jaune, la pectorale est bordée de rougeàtre, et les
ventrales tirent tout-à-fait au jaunâtre. Ces nageoires
deviennent blanchâtres, plus ou moins pâles sur nos
individus conservés dans l'alcool.
La couleur du corps paraît très-sujette à varier ;
mais nous la trouvons toujours verdâtre sur le dos,
plus ou moins lavée de jaune, et tirant plus au jaune
sur l'abdomen ; la gorge et les parties antérieures étant
argentées et tachetées de blanc nacré. Une large ban-
CHAP. I. LABRES. 67
delette va de l'œil à la caudale par le travers des
flancs : elle est le plus souvent argentée. Nous voyons
que dans la liqueur les teintes vertes se changent en
brun rougeâtre , et que les taches se relèvent par leur
brillant argenté.
Nous en avons de tels , qui offrent d'ailleurs des
variations dans les nombres de leurs rayons, que
nous ne devons pas négliger de citer.
Ainsi il en est venu de Marseille, de Nice,
de Naples , qui ont à la dorsale
D. 18/13 , etc.
Nous nous sommes procuré sur les marche's
de Marseille et de Toulon des individus qui
ont
D. 18/12, etc.
Ceux rapportés de Palerme par M. Constant
Prévost, donnent
D. 18/11.
Et enfin , un de Nice , que l'on doit à M.
Laurillard , a
D. n/14.
Sur d'autres individus non-seulement les taches,
mais la bandelette, ont pris un brillant nacré, qui
leur donne un aspect si différent que l'on serait tenté
de les regarder comme d'une autre espèce , si l'on
ne voyait des nuances bien établies entre la plus ou
moins parfaite conservation de la bande. Ils varient
de même par les nombres de leurs rayons.
G8 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Nous conservons de ces individus à bande
argentée des localités suivantes : Marseille ,
Toulon, Naples, Messine et Malaga.
Il nous paraît que nous devons rapporter
à cette variété le turdiis viridis maj or de Wil-
lughby ( p. 322 , n.° 3 )^ car il dit positivement
que les nageoires du ventre seules avaient des
taches, et que les autres étaient verdâtres: c'est
donc le onzième labre d'Artedi *, et par con-
séquent le làbriis turdus de Linné. C'est avec
plus de doute que nous y rapportons les va-
riétés de tourd de Rondelet. Nous croyons
cependant que celui qu'il a donné sous le nom
de exocœtus (1. VI , p. 1 93 , cliap. 1 5 ) le repré-
sente assez bien. Nous y adjoindrons, mais
avec plus d'hésitation, son cinquième tourd
(p. 176), puis son neuvième (p. 178), et enfin
son huitième, quoique ce dernier soit encore
moins reconnaissable que les autres.
Il nous paraît être le labre tourd de Risso
de la première édition, p. 278, et de la se-
conde, bien que dans cette nouvelle des-
cription M. Risso me semble avoir confondu
d'autres variétés sous cette espèce.
Selon M. Risso, l'espèce se nomme à Nice
1. Artedi , Syn. , p. 67.
CHAP. I. LABRES. 69
sero. On la trouve sur les côtes rocheuses et
peu profondes pendant toute Tannée.
La splanchnologie de cette espèce ne diffère
pas d'une manière notable de celle des autres
labres.
Quant à son squelette, comparé à celui de notre
vieille de l'Océan , nous voyons les crêtes antérieures
du crâne plus élevées : les postérieures le sont moins.
La gouttière antérieure, destinée à laisser glisser les
branches montantes de l'intermaxillaire , est plus
longue.
Il y a vingt vertèbres abdominales et vingt et une
caudales. Les apophyses épineuses des trois dernières
supportent les rayons de la nageoire de la queue;
mais la dernière vertèbre a seule ses apophyses élar-
gies en éventail; les côtes et leurs apophyses sont
longues et grêles.
Le Labre louche.
{Lahriis luscus ^ Linn. )
La Méditerranée nourrit, en assez grande
abondance , un labre
qui ressemble au précédent par ses formes, par le
nombre de ses rayons ; qui a les mêmes habitudes,
et que nous avons été long-temps tentés de regarder
comme une variété de ce premier.
Tous nos individus offrent autour de l'œil, des
points bruns très-foncés ; sur le sourcil il y a un et
souvent deux traits bruns. Le rouge du dos est chargé
70 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de marbrures brunes plus ou moins étendues, et
souvent, dans ce cas, il n'y a plus de trace de ban-
delette sur les flancs.
Les nageoires ne sont pas tachetées. Nous pensons
que le rouge était plus abondant sur quelques indivi-
dus, car nous voyons le bord rougeâtre de la portion
temporale de la bandelette, telle que la représente
M. Laurillard, se changer en brun de la même teinte
que les autres points ou traits.
Les mêmes localités nous ont fourni cette
seconde espèce.
Nous en avons reçu de Naples par M. Sa-
vigny, qui nous a fait connaître les couleurs
de ce poisson. Il l'a trouvé aussi à Gènes, à
Nice , et MM. Riener et Delalande en ont rap-
porté de Martigues et de Toulon.
C'est évidemment le lahrus luscus de Linné,
qu'il a d'abord décrit dans le tome II du
Musée du prince Adolphe-Frédéric, page 80,
et qu'il avait cru alors originaire d'Amérique;
mais sur la patrie duquel il est resté douteux
dans les éditions subséquentes du Sjstema
naturœ.
Nous sommes d'autant plus fondés à regar-
der notre conjecture comme vraie, que M. de
Jussieu possède dans sa bibliothèque un des-
sin de tourd, fait par Aubriet pendant son
voyage avec Tournefort, et qui représente le
CHAP. I. LABRES. 7\
dos du poisson bleu verdâtre , les flancs vert
jaunâtre, le ventre blanc, avec des marbrures
rougeâtres et jaunâtres.
Nous y retrouvons encore le lahms turdiis
de Brûnnich*, et surtout sa variété b, qui alors
serait différente du labre décrit par Linné
sous le même nom.
M. Risso a donné dans sa première édition ,
page 217, un labre louche qui convient assez
bien à celui de Linné; mais je ne devine pas
pourquoi il a supprimé cette espèce dans sa
seconde édition. L'a -t- il confondue avec le
lahrus turdus P
M. Risso disait de cette espèce qu elle paraît
de Juin à Décembre sur les côtes de Nice et
principalement à Ville fran ch e ; il l'indiquait
alors sous le nom de sera^ qu'il donne comme
nom vulgaire de son lahrus turdus et de son
lahrus festivus.
Le Labre paré.
( Lahrus festivus , Risso. )
La Méditerranée nourrit en aussi grande
abondance un labre qui nous offre autant de
variétés que les précédens, mais qui paraît de-
voir en être distingué spécifiquement.
1. Vise. Massil., p. 52.
72 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ses formes, ses dents, la grandeur des écailles,
les nombres, sont semblables et varient dans les
mêmes limites que ceux du labre lourd; mais les
couleurs l'en distinguent aise'ment.
La première différence que nous regardons comme
caractéristique , consiste en ce que les trois nageoires
verticales sont couvertes de taches rondes, lilas ou
bleues, dont le bord, étant plus foncé, en fait des
ocelles, qui restent toujours visibles sur les nageoires
décolorées par l'action de l'alcool.
M. Laurillard nous a rapporté de Nice un
bel individu, long d'un pied sept pouces.
Nous en avons d'autres, venus de Martigues
par M. Delalande; de Toulon, par M. Riener;
de Sicile, par MM. Benoit et Bibron; des
Dardanelles, par M. Virlet, et d'Alexandrie
d'Egypte , par M. Geoffroy Saint-Hilaire.
Nous trouvons parmi tous ces individus
deux variétés très-distinctes, qui offrent elles-
mêmes des sous-variétés.
Une première est verte, plus ou moins mêlée d'o-
rangé sur le dos et sur les flancs; le dessous du corps
est blanchâtre, à reflets nacrés. La dorsale a une
teinte plus jaunâtre, et les autres nageoires, plus ver-
dâtre; l'anale a souvent un liséré violet; une bande
verdâtre ou bleuâtre est étendue depuis l'oeil jusqu'à
la caudale. Sur le poisson desséché le vert se con-
serve; le bleu de la bande s'efface ou devient ver-
dâtre; le rouge ou l'orangé des flancs forme des
CHAP. T. LABRES. 75
marbrures noirfitres : il en est de même des traits
qui sont autour de l'œil. Les taches du ventre de-
viennent nacrées et donnent au poisson un aspect
brillant, qui augmente encore d'éclat quand le pois-
son est conservé dans l'eau-de-vie. Les autres teintes
deviennent alors brunes ou roussâtres, et la bandelette
se change aussi en une bande nacrée assez brillante.
M. de Laroche l'avait prise à Iviça.
Nous reconnaissons parfaitement dans cette
espèce ou variété le turdus oblongus., fuscus,
maculosus de Willughby (p. 323, n.° 4)> ^t
qu'Artedi a mentionné comme la variété et du
labre devenu le lahrus turdus de Linné; car
l'ichthyologiste anglais le distingue de l'espèce
dont il parle précédemment (notre lahrus tur-
dus) parce que les nageoires sont tachetées.
Le sixième tourd de Rondelet (p. 177)
pourrait bien être rapproché de notre espèce,
car la figure représente des taches sur la dor-
sale, l'anale et la ventrale.
C'est avec plus de doute que j'y joindrais le
poisson gravé dans le même auteur comme
sa troisième espèce d'Anthias. J'y vois encore
les taches de l'anale, cependant la couleur vio-
lette ne répond pas à celle des individus hais
qu'a dû voir Rondelet.
La bibliothèque de M. de Jussieu possède
un dessin de notre espèce fait par Aubriet, dans
74- LIVRE XVI. LABROÏDES.
le même voyage que celui dont nous avons
parlé plus haut. ]Nous sommes d'autant plus
redevables de la libéralité que M. de Jussieu
a mise à nous communiquer ce dessin, qu'il
nous a servi à reconnaître la copie assez mé-
diocre que Duhamel* en a publiée sans en faire
connaître la source, et qu'il a intitulé scare
rouge.
Nous avons encore à signaler la seconde
variété notable de ce poisson, étiquetée par
M. Risso lui-même, et que M. Laurillard nous
a fait connaître en nous en donnant un dessin
fait sur le vivant, et en en rapportant des
individus au Cabinet.
Elle a le dos bleu foncé, la bandeleue rouge, les
côtés brun verdâtre et tout couverts de points bleu
de cielj le ventre blanc argenté, marbré de petites
taches rouges, vives et serrées. Les nageoires sont
orangées et chargées de points semblables à ceux
du dos et des côtés.
Je ne vois pas sur le dessin d'indication de taches
noirâtres sur le sourcil ni autour de l'œil, et elles
n'ont laissé aucune trace sur nos individus conservés
dans l'eau-de-vie. Ceux-ci sont devenus brun rou-
geâtre sur le dos, blancs sur le ventre, semés partout
de taches nacrées. Les ocelles des nageoires sont
demeurées bien visibles.
1. Traité des pêches, secl. 4) pl- 4? fig- 6.
CHAP. I. LABRES. 75
M. Risso considérait ce poisson comme une
variété de son lahrus festwus, sans doute parce
que la bandelette latérale est rouge au lieu
d'être argentée, comme il le dit dans sa des-
cription ; dans ce cas, les taches sur les nageoires
distingueraient le labre paré du labre lourd.
La femelle est, dit-on , plus grosse que le mâle.
On les voit pendant toute l'année sur les
rivages de Nice, peu profonds, et sur fonds
de roche.
Il nous paraît très - probable que M. Risso
avait sous les yeux un individu de cette es-
pèce, qu'il a pris dans sa première édition pour
le labre Ballan de Pennant. Les lignes dorées
de la gorge et les taches obscures du pour-
tour des yeux, ne peuvent convenir à notre
vieille de l'Océan. Nous nous empressons de
faire cette remarque, parce que l'on pourrait^
d'après une détermination aussi fautive, croire
que le labre de nos côtes de fOcéan habite
également la Méditerranée, ce qui ne s'est
pas encore vérifié jusqu'à présent.
Le Labre vert.
{Lahnis viridis^ Linn.)
M. Laurillard a pris et dessiné à Nice un
grand labre, dont les proportions et les nom-
76 LIVRE XVI. LABROÏDES.
bres des rayons sont les mêmes que dans no-
tre premier tourd;
mais qui a des dents plus fortes, plus serrées et plus
nombreuses , car je lui en compte douze à chaque
mâchoire.
Le dessin colorié, fait sur le vivant, nous montre
que la couleur générale est verte, un peu rembrunie
sur le dos, un peu moins foncée sur les flancs, et
que ces deux teintes sont séparées par une bande-
lette d'un beau vert clair et brillant, tracée le long
de la ligne latérale. La gorge et la poitrine sont par-
semées d'un grand nombre de taches brunes et na-
crées; celles-ci paraissent aussi sur le bas de la joue.
Les nageoires sont couvertes de taches ou d'ocelles
lilas sur un fond verdâtre.
L'individu est long de dix-sept pouces.
Nous en avons d'autres individus qui nous
sont venus de Martigues, par M. Delalande;
de Marseille, par M. Cuvier, et qui paraissent
tout-à-fait de la même espèce que celui décrit
plus haut.
Nous ne saurions douter que ce ne soit
le Labrus viridis y linea utrincjue cœrulea
d'Artedi^, de son Gênera, et dont il n'a pas
lait mention dans sa Synonymie. C'est donc
par conséquent le lahrus viridis de Linné.
Mais ce ne peut être, comme l'a cru Artedi,
1. Ailedi,, Gc«.,54j n." 2.
CHAP. I. LABRES. 77
le dixième tourd de Rondelet, lequel a le corps
trop court, trop haut, et a la forme de nos
crënilabres.
Nous doutons beaucoup du rapprochement
de la figure de Salviani (pi. 88), sous le nom
de verdone; car elle peut tout aussi bien être
rapportée aux labres dénommés plus haut, qu'à
celui-ci, puisqu'elle n'offre aucun caractère
précis, et que la description ne vient apporter
aucun renseignement positif.
Il n'en est pas de même de la description
de Willughby ^, pour son Turdus viridis mi-
nor, qui convient parfaitement à notre pois-
son. Mais cet auteur s'était trompé quant aux
ressemblances qu'il avait cru trouver entre
l'espèce de Rondelet et celle de Salviani, et
on voit que c'est lui qui a induit Artedi en
erreur.
Bonnaterre , tout en admettant le nom de
Linné, avait désigné l'espèce sous la dénomi-
nation française de lahre perroquet. M. de
Lacépède , trouvant que Bloch avait donné
sous le nom de lahrus viridis un poisson dif-
férent de celui de Linné , a adopté le nom de
Bloch pour cette espèce différente et du genre
des ^ir elles , et a changé le nom linnéen de
1. De pisc, p. 320, n." 2.
78 LIVRE XVI. LABROÏDES.
notre poisson en celui de lahrus psittacus , tra-
duisant ainsi l'idée de Bonna terre ; et il a été
suivi en cela par M. Risso ', dans sa première
édition, qui a cité cependant et avec raison le
labrus viridis de Linné; mais dans la seconde
(p. 3oo) il a supprimé le labrus viridis, a décrit
notre espèce sous le nom de labrus saxatilis ,
et nous sommes d'autant plus certains de re-
connaître sa description, qui est du reste fort
exacte, qu'il a nommé ainsi à M. Laurillard
l'espèce dont nous parlons ; et le labrus psit-
tacus de cette seconde édition devient une
variété du labrus merula de Linné.
Nous croyons bien reconnaître notre es-
pèce dans la troisième variété c dulabre tourd
de Briinnich.
Cette espèce est tout aussi abondante dans
la Méditerranée que les précédentes.
Selon M. Risso , elle apparaît sur les ro-
chers de Nice en Mars et en Décembre, et
ses noms nicéens seraient rouchié ou sera.
Le Labre nérée.
{Labrus nereus , Risso.)
Devra-t-on regarder comme une espèce ou
comme une simple variété du précédent, le
1. Ichlh. de Nice, p. 221.
CHAP. I. LABRES. 79
poisson que les pécheurs ont encore donné
à M. Laurillard sous le nom de rouchié, et
dans lequel M. Eisso a reconnu son labre
nérée? car il l'a ainsi nomme.
Cet auteur dit que ce labre est
vert un peu étiolé sur le dos, et bleuâtre ou ver-
dâtre à reflets argentés sous la gorge et le ventre,
avec quelques lignes jaunâtres. La dorsale est verte,
mêlée de jaunâtre et bordée de jaune rougeâtre ; les
pectorales sont olivâtres; l'anale et la caudale, ver-
dâtres.
L'absence de bande verte et les nombres semblent
le caractériser, car il a
D. 19/11; A. 3/10, etc.
Les couleurs de la femelle ne sont presque pas
différentes de celles du mâle.
Il approche des côtes pendant les mois de
Novembre et de Décembre et se tient parmi les
rochers peu recouverts par les eaux. Nos
individus ont un pied de long.
Nous rapportons à cette espèce un petit
labre long de quatre pouces, pris à Naples par
M. Savigny, à qui nous trouvons également
dix-neuf rayons épineux à la dorsale; mais qui en
a un mou de plus , c'est-à-dire douze.
M. Savigny nous l'a donné comme d'une couleur
vert de mer, uniforme, avec un fin liséré bleuâtre
sur le bord des nageoires verticales, ce dont on
voit encore la trace.
80 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le Labre merle.
{Labrus merula, Linn.)
On trouve dans la Méditerranée un labre
dont les formes épaisses rappellent davantage
celles de notre vieille de l'Océan {lahrus ber-
gjlta).
Son corps, en ovale alongé, est cependant moins
étroit et moins long que celui des lourds dont nous
venons de parler. Sa hauteur est trois fois et trois
quarts dans la longueur totale. La longueur de la
tête égale la hauteur du tronc. L'oeil, placé sur le
haut de la joue sans entamer la ligne du profil, est
parfaitement rond, et son diamètre est du sixième
de la longueur de la tête; il est éloigné du bout du
museau de deux fois et demie ce diamètre, et la fente
de la bouche égale une fois et demie ce diamètre. Les
lèvres sont très-épaisses; je compte six ou sept plis
à la supérieure, mais je n'en vois pas à l'inférieure.
La mâchoire d'en haut a seize dents, huit de chaque
côté, coniques, droites, diminuant graduellement à
partir des mitoyennes; il y en a dix à douze à la mâ-
qjioire inférieure; elles sont semblables aux supé-
rieures, et derrière celles-ci on en voit une rangée
de plus petites, qui sont coniques, pointues et sem-
blables, à la grandeur près, à celles de la rangée ex-
terne. Quand la bouche est fermée, on aperçoit en-
core l'extrémité postérieure du maxillaire, laquelle
est recouverte d'une peau épaisse. Le voile surmaxil-
laire s'avance vers l'extrémité du museau, sans re-
CHAP. I. LABRES. 81
couvrir la lèvre supérieure. Cette peau, abondante en
cryptes muqueux, recouvre le sous-orbitaire, le dessus
delà tête, et n'a aucunes écailles. Dix à douze pores
sont disposés en cercle autour de l'œil ; d'autres
, percés, le long de la tempe au-dessus de l'articulation
du préopercule, sur le surscapulaire, y forment deux
séries, réunies en chevron sur le vertex; on en voit
le long du bord du préopercule , et enfin, au-devant de
l'œil d'autres suivent une direction parallèle au bord
inférieur du sous-orbitaire. Au-dessus de ces os on
distingue les deux ouvertures de la narine , dont
l'antérieure est un simple petit trou, qu'on pren-
drait facilement pour un pore.
Le bord inférieur du préopercule descend obli-
quement vers le dessous de la mâchoire inférieure,
et fait ainsi un angle très-ouvert et arrondi avec le bord
vertical; le limbe en est assez étroit. La joue est
couverte d'une dizaine de rangées de petites écailles.
L'opercule, de forme triangulaire, est assez distinct
du sous-opercule, qui a très-peu d'écaillés sur sa
surface; celles de l'opercule sont grandes; je n'en
vois que deux ou trois sur l'interopercule, qui est
assez élargi en arrière.
Les deux membranes branchiostèges sont réunies
sous un isthme assez large, sans écailles; les ouver-
tures des ouïes ne sont pas très -bâillantes, on ne
compte que cinq rayons à la membrane des bran-
chies. Le bord membraneux de l'opercule, qui semble
se continuer avec la membrane brarichiostège, re-
couvre la plus grande partie de l'huméral et du sca-
pulaire.
i3. 6
82 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La pectorale est large, arrondie, du sixième de
la longueur totale; ses rayons sont branclius , à quatre
divisions.
La dorsale est insérée un peu en arrière de la
base de la nageoire de la poitrine. Les rayons épi-
neux, à partir du premier, qui n'a guère que le hui-
tième de la hauteur du corps, augmentent progres-
sivement jusqu'au dix-huitième , qui mesure à peine
le quart de cette même hauteur.
La portion molle est arrondie, et sa plus grande
hauteur n'est pas tout- à -fait double de celle de la
dernière épine de la dorsale. La première de Tanale
répond à la dernière de la dorsale, et la forme de la
nageoire est assez semblable à celle de la portion molle
de la nageoire du dos; mais elle n'atteint pas aussi loin
sous la queue. Ce tronçon de la queue, mesuré du
pied du dernier rayon à la caudale, n'est guère que
du huitième de la longueur totale. La caudale est
arrondie vers les angles, et le bord est presque droit.
Les ventrales, insérées à peu près sous le milieu
des pectorales, sont triangulaires; mais leurs angles
sont arrondis.
B. 5; D. n - 18 - 19/12 ; A. 3/9 5 C. 13 ; P. 15 ; V. 1/5.
Les écailles sont médiocres, régulières, minces,
à bord lisse et comme membraneux : j'en compte
quarante entre l'ouïe et la caudale. Sur une, détachée,
on voit que la portion nue de l'écaillé est triangu-
laire, et que sa surface est finement striée et plus fine-
ment grenue; la portion radicale, quadrilatère, plus
que double de la portion libre; le centre en est
très-fmement granuleux, et le pourtour est forte-
CHAP. I. LABRES. 83
ment strié par les rayons de l'éventail. Mais nous
voyons quelquefois ces rayons former un éventail
ordinaire, et partir d'un point comme centre; et sur
d'autres individus, ou mieux, sur d'autres écailles
prises sur le même individu, mais à une place non
déterminée, on trouve un carré central très-petit, et
ces écailles paraissent alors être intermédiaires entre
les deux formes que nous venons de citer.
La ligne latérale est composée d'une série de tubu-
lures; elle commence par être tracée, près du dos,
au quart de la hauteur, se courbe brusquement sous
la lin de la dorsale, et se rend à la caudale par le
milieu du tronçon de la queue.
La couleur de ce labre, conservé dans l'eau-de-
vie, est un brun tirant plus ou moins au chocolat,
et on voit des taches bleues éparses sur des écailles,
de sorte que le poisson devait être en grande partie
bleu quand il était vivant. La dorsale est brune, plus
claire que le corps. La pectorale et la caudale sont
au contraire plus foncées, presque noirâtres, et sur
le bord de celle-ci on aperçoit des traces de taches
violettes. Cette teinte est très-prononcée sur le bord
de l'anale et des ventrales, et forrtie un liséré violet
ou lilas foncé très-caractéristique de cette espèce.
Je retrouve, en effet, ce caractère sur des indi-
vidus de couleur fauve plus égale, dont les taches
bleues ne sont plus visibles , et qui ont la pectorale
très-pâle. Mais comme M. Domhando nous a envoyé
d'Athènes un individu à pectorale fauve clair, dont
les taches bleues sont bien conservées , je regarde
ces différences comme accidentelles, et ne s'appli-
84 LIVRE XVI. LABROÏDES.
quant qu'à des variétés probablement peu constantes.
Un autre labre de cette espèce, venu de l'expédi-
tion de Morée, a même sur la tête des points noirs
qui rappellent ceux de nos lourds; mais j'y retrouve
la forme elliptique du corps de notre labre merle,
et l'anale et les ventrales ont leur liséré caractéris-
tique.
Nous avons d'ailleurs reçu ce labre des difFë-
rens ports de la Méditerranée avec lesquels
les correspondans ou les voyageurs nous ont
mis en relation. La collection en a reçu de
très -beaux échantillons, pris à Toulon, par
M. Riener; à Martigues, par M. Delalande; à
Marseille et à Gènes, par M. Cuvier; à Nice,
par M. Laurillard, et à Naples, par M. Savigny ;
en Corse, par M. Payraudeauj à Messine, par
M. Bibron.
Sa splanchnologie ne nous a offert aucune
différence bien notable ,
et sur son squelette nous comptons dix-huit vertè-
bres abdominales et vingt caudales. Les apophyses
épineuses des trois dernières concourent à former
l'éventail osseux qui soutient les rayons de la na-
geoire caudale ; la grandeur et la profondeur des fosses
externes de la région occipitale sont plus considé-
rables que celles des espèces précédentes.
C'est sans aucun doute le Icihrus merula de
Linné, car il est facile de reconnaître notre
CHAP. I. LABRES. 85
espèce dans la figure d'Aldrovande^ citée par
Artedi ^ ; on peut encore admettre que Ron-
delet en a voulu parler^ sous le nom de merula,
quoique sa figure soit moins bonne que la pré-
cédente : elles sont d'ailleurs les seules vraiment
reconnaissables et sur lesquelles repose le sep-
tième labre d'x\rtedi, dont Linnë s'est servi et
qui répond assez bien, par sa couleur bleu foncé,
à la phrase un peu vague du premier de ces
naturalistes. Le merle de Bélon est presque in-
déchiffrable, et on ne peut le ranger, avec quel-
que apparence de probabilité, auprès d'aucun
de nos labres. Quant à la figure de Salviani
(p. 224, pi. 87), il est très - probable qu'elle
appartient à un poisson d'un tout autre genre
et même d'une famille différente, à cause des
neuf rayons épineux de sa dorsale. On peut aussi
admettre que Willughby ait eu sous les yeux
notre poisson, quand il a écrit le peu de lignes, à
peine caractéristiques, de son troisième tourd."*
Briinnich^ nous a laissé une assez bonne
description, malgré sa brièveté, de notre es-
pèce, dans son lahrus Iwens , puisqu'il a eu
soin de signaler la couleur bleue du bord des
1. Aldrovande, De pisc, 1. 1, c. 6, p. 35. — 2. Artedi, Syn. ,
p. 55. — 3. Rondelet, 1. VI, c. 5, p. 172. — 4. Willughby, />tf
pisc.f p. 520, n." 5. — 5. Briinnich, Fisc Mass.f p. 53.
86 LIVRE XVT. LABROÏDES.
nageoires du poisson qui a le corps brun livide.
Nous pensons seulement que la description n'a
pas ëtë faite sur un individu frais et sortant de
la mer; mais rien ne peut prouver que ce soit
le lahrus Iwens que Linné a décrit dans le
tome second du Musée du prince Adolphe-
Frédéric.
Risso a aussi connu notre poisson, mais il en
a embrouillé toute la nomenclature; car il est
facile de le reconnaître dans son lahrus ossi-
fa^us, qui n'est pas celui de Linné. Pour cette
espèce, sous ce dernier nom, Risso n'a fait
heureusement aucun changement dans sa se-
conde édition; mais il n'en est pas de même
des deux espèces nominales que l'on devait
s'attendre à voir trouver ici leur place.
Il a dans sa première édition un lahrus
nierula, pour lequel il cite la figure d'Aldro-
vande; mais il ne lui donne que dix rayons
à la dorsale, et une couleur bleue, mêlée de
teintes plus ou moins ferrugineuses. Dans la
seconde édition le labre merle conserve cette
teinte, mais l'auteur y ajoute une bandelette
longitudinale bleue et des nombres tout diffé-
rens : la dorsale ayant dix-huit épines. Les ven-
trales sont cependant lisérées de bleu ou de
violet.
Nous ne trouvons plus de lahrus Iwens
CHAP. I. LABRES. 87
dans cette seconde édition, sans que l'auteur
nous dise pourquoi cette espèce n'y paraît plus.
Celle de la première est toute différente du
poisson de Brunnich, et devait être faite d'a-
près quelques variétés de notre lahrus turclus
ou L. luscus.
Je trouve bien encore un lahrus Iwens dans
l'ouvrage de Coriiide ' 5 mais cette citation ne
peut tout au plus servir qu'à prouver l'exis-
tence de labres sur la côte de Galice , ce dont
on ne pouvait douter^ mais on ne peut, d'après
elle, en aucune manière en déterminer l'espèce.
Le Labre livide.
{Lahrus Iwidiis , noh.)
Parmi tous ces nombreux labres de la Mé-
diterranée, que j'ai sous les yeux, j'en vois
plusieurs individus
qui ont exactement la même forme que le précédent ,
les mêmes variations dans les nombres, une disposi-
tion semblable des écailles; mais qui ont tous une
teinte plus pâle et uniforme; la dorsale grise ou vio-
lette, peu foncée; la caudale noirâtre; les pectorales
pâles; les ventrales très-foncées et sans traces de liséré.
L'anale a le bord noirâtre , et cette teinte se fond sur
l'olivâtre de sa base; elle n'a point de liséré violet.
1. Cornide, Ensajo de los pesc. Gai,, p. 5i,
88 LIVRE XVI. labroïdes.
Nos individus sont venus de Toulon, de
Marseille et de Naples, par MM. Delalande
et Savigny.
Ils ont sept à huit pouces.
Nous en avons d'autres, plus grands, rap-
portés de Corse par M. Payraudeau, et qui,
avec ces mêmes teintes rembrunies sur les
nageoires, sans aucun liséré aux ventrales
ou à l'anale , montrent encore les restes des
couleurs bleues dont ils brillaient pendant la
vie, et qui doivent être, sans aucun doute,
rapprochés de nos labres livides; leurs lèvres
sont cependant un peu plus épaisses ; la supé-
rieure a neuf plis bien distincts.
Delalande en a pris un tout-à-fait semblable
à Marseille; il est un des plus grands labres
que nous ayons reçus de la Méditerranée, sa
longueur étant de dix-sept pouces.
La mer de Naples nous a fourni deux labres
qui se distinguent des précédens par
une sorte de réseau jelé sur le corps, et résultant
de ce que la couleur des écailles est plus foncée
sur la portion découverte que sur la partie nue. Le
bord membraneux de chaque écaille laisse aperce-
voir sous lui le brun-violet qui colore l'écaillé qu'il
recouvre, et ses traits bruns constituent le filet dont
je viens de parler.
Sauf l'épaisseur des lèvres, que je trouve plus
CHAP. I. LABRES. 89
minces, et qui n'ont que six plis, toutes les autres
formes sont semblables.
Un des deux a le corps foncé et les nageoires
rembrunies, surtout la pectorale; l'autre est d'un
fauve clair, a la dorsale pâle, la caudale, l'anale et
les ventrales d'un brun clair, et les pectorales sont
jaunâtres.
Je n'ose pas cependant les regarder comme
différant par l'espèce des précédens. Ils ont
neuf pouces de long, et ont été rapportés de
Naples par M. Savigny.
Le Labre bordé.
{Labnts limbatus y nob.)
Nous en avons encore d'autres qui ressem-
blent aux précédens par tous les détails de
leur forme;
mais leur teinte est encore plus claire, et l'anale seule
a un fin liséré noir ; les autres nageoires sont deve-
nues transparentes.
M. Laurillard, qui a rapporté un de ces
individus de Nice, nous dit
que tout le corps et les nageoires étaient d'un vert
de perruche, c'est-à-dire un peu mêlé de jaunâtre.
L'anale a conservé son liséré.
Les autres nous viennent de Toulon , de
Naples; leur taille varie de quatre à huit
pouces.
9^ LIVRE XVI. LABROÏDES.
On pourrait peut-être rapporter à ce pois-
son le lahrus psittacus de la seconde édition
de M. Risso, et qui n'est probablement plus le
même que celui de la première ; mais dans le
doute où nous sommes, nous nous abstenons
de prendre ces déterminations, qui embrouil-
leraient encore le chaos que M. Risso a jeté sur
toutes ces espèces de la Méditerranée.
Le Labre linéolé.
{Lahrus lineolatus , nob.)
Un autre labre de la Méditerranée, qui a
été confondu par M. Risso lui-même avec son
ossifage (^lahrus ossifagus),
a le corps plus court; l'ovale est plus régulier; c'est
en arrière des pectorales que l'on prend sa plus grande
hauteur, qui ne fait que le tiers de la longueur, la
caudale non comprise.
La tête est plus courte que cette hauteur: le mu-
seau paraît plus pointu ; les lèvres ont sept à huit
plis : d'ailleurs les autres parties sont semblables à
celles des précédents.
Les nageoires sont arrondies et les nombres sem-
blables.
D. 18/11 ou 12; A. 3/9, etc.
Les couleurs ont laissé sur tous les nombreux
Individus que j'ai examinés, des traces de rayures
brunes longitudinales, au nombre de neuf à dix,
au-dessous de la ligne latérale. L'entre-deux de ces
CHAP. I. LABRES. 91
lignes est éclairé par des taches blanchâtres ou ar-
gentées, plus brillantes dans la région pectorale que
partout ailleurs. Le dos est brun; le ventre et la
poitrine sont argentés ; les nageoires sont pâles , et
surtout les pectorales. Il n'y a point de liséré aux
ventrales : souvent l'anale en a un petit , noirâtre.
J'en ai de Toulon, par M. Riener; de Nice,
par MM. Laurillard et Savigny : celui-ci en a
également rapporté de Naples, et ce sont ces
individus et ceux de M. Laurillard qui ont
ëtë confondus par M. Risso avec le lahrus
tessellatus , BL; mais le poisson de Bloch est
tout'.à-fait différent.
Le Labre des roches.
{^Lahrus saaoorum, nob.)
Une espèce qui paraît plus distincte, est
celle que M. Risso a cru reconnaître pour son
lahrus rupestris, sur les individus que lui a
montrés à Nice M. Laurillard. Mais comme
M. Risso ne donne que dix rayons épineux à
son lahrus rupestris, nous ne pouvons admet-
tre cette détermination, et nous pensons que le
poisson de M. Risso est un de nos crénilabres,
auquel l'espèce décrite dans cet article ressem-
blait par la disposition de ses couleurs.
Ses proportions sont celles de notre lahrus nereus.
Sa plus grande hauteur, prise aux ventrales, est du
92 LIVRE XVI. LABROÏDES.
quart de la longueur totale : elle égale la longueur
de la tête, dont les bords sont disposés de même-,
Les nombres des rayons des nageoires sont sembla-
bles ; les formes arrondies sont les mêmes.
Une tache bleue existe au haut de l'opercule, près
du surscapulaire. Le corps est marbré de brun ou
de noirâtre sur un fond jaunâtre; ces marbrures de-
viennent des raies transverses sous les branches de la
mâchoire inférieure. Le ventre est argenté; la dor-
sale et la caudale sont brunes et sans tache; l'anale
a quelques points blanchâtres; les ventrales sont noi-
râtres.
Selon M. Laurillard, les marbrures sont bleues
quand le poisson est frais , et sa couleur est plus Ou
moins roussâtre, lavée de vert. La tète est surtout
agréablement variée de bleu.
Nos individus sont longs de sept pouces;
ils nous viennent de Nice, et nous en avons
qui ont été pris à Marseille.
Il serait possible de rapporter a cette es-
pèce la figure gravée dans Duhamel (11.^ part.,
sect. 4? pi- 4? %• ?)• Il l'avait prise d'un dessin
d'Aubriet, qui est encore conservé dans la
bibliothèque de M. de Jussieu, et sur lequel
ce poisson est coloré de bandes brunes trans-
versales et de raies longitudinales sur un fond
argenté.
Aubriet avait peint ce poisson sous les
yeux de Tournefort, pendant le voyage de
cet illustre botaniste dans le Levant.
CHAP. I. LABRES. 03
Le Labre porc.
{Labrus scrofa y nob.)
L'Atlantique nourrit une espèce de labre
que l'on trouve près des îles qui s'élèvent du
milieu de cette mer.
Le Cabinet du Roi en possède depuis long-
temps un très-bel exemplaire, long de deux
pieds, originaire du Cap -Vert. Un second in-
dividu, de moitié plus petit, donné par S. A.
le prince de Neuwied , a été pris par ce voya-
geur à Madère. Nous avons trouvé, parmi les
papiers des infortunés Kuhl et Van Hasselt,
un fort beau dessin de cette espèce, fait au
même endroit; et les peintures que M. d'Orbi-
gny avait envoyées à M. Cuvier, nous ont aussi
prouvé que ce poisson se rencontre àTénériffe.
C'est donc une espèce propre à lAtlantique ,
et les dilïérens documens que nous venons de
citer, nous la font parfaitement connaître.
Ce labre ressemble au labrus mixtus^ par la tache
noire placée sur la partie antérieure de la dorsale;
mais elle y occupe moins d'espace, et le nombre des
rayons est si différent qu'on ne pourrait pas con-
fondre ces deux espèces.
Celle que nous décrivons dans cet article, a le
corps plus court, la tête moins longue, le museau
94 LIVRE XVI. LABROÏDES.
tout aussi pointu, l'œil plus petit. On voit a. l'ex-
trémité des deux mâchoires quatre fortes canines :
une autre, tout aussi grosse, sort de l'angle de la
bouche et se dirige en avant. Entre cette dent et les
antérieures il y en a dix coniques et courtes. Derrière
les canines de la mâchoire inférieure il y a une rangée
de seize dents, dont les dix premières sont plus
grandes que les six suivantes. La caudale est coupée
carrément; les ventrales naissent tout-à-fait sous les
pectorales.
D. 12/10; A. 3/12; C. H; P. 17; V. 1/5.
La ligne latérale est formée d'une série de petits
traits et parallèle au dos, au-dessus du tiers de la
hauteur du corps. #
La couleur de ce labre est rouge carmin brillant
sur le dos, passant à l'orangé clair sur les flancs,
parce qu'il se mêle avec le jaune du ventre; le dessous
de la poitrine est plus pâle; la dorsale et l'anale sont
. jaunes et tachetées de brun; la caudale a le fond de
la couleur de la dorsale, mais elle n'a point de taches.
La pectorale est orangée et la ventrale rouge. Une large
tache noire couvre l'espace compris entre les cinq
premiers rayons de la dorsale.
Nous venons d'en voir de fort beaux indi-
vidus dans les collections faites aux Canaries
par MM. Webb et Berthelot; ils sont indi-
qués comme des poissons d'une chair tendre
et agréable.
CHAP. I. LABRES. 95
Le Labre a flancs tachetés.
{Lcibrus pœcilopleura , nob.)
On trouve sur les côtes de la Nouvelle-
Zélande un labre
qui a la bouche petite, armée de quatorze dents à
chaque mâchoire et de chaque côté; celle de l'angle
de la mâchoire supérieure est prolongée autant que
les deux crochets antérieurs : les autres dents sont
très-petites.
Le corps est un ovale régulier; sa hauteur est con-
tenue quatre fois et demie dans la longueur totale; la
tête n'est comprise dans cette même longueur que
trois fols et demie.
La dorsale est basse, la caudale coupée carrément,
les pectorales assez grandes.
D. 9/11; A. 8/10; C. 13; P. 12; V. 1/5.
Les écailles sont minces, de grandeur moyenne;
on en compte vingt-sept entre Fouie et la caudale,
leur contour n'est pas arrondi, mais anguleux; la
surface externe est finement striée et granuleuse; leur
portion cachée est un carré un peu alongé, très-
finement strié par l'éventail composé de branches
nombreuses et déliées, qui n'entaillent point le bord
radical. La ligne latérale, tracée parallèlement au dos
par le quart de la hauteur, est formée par une série
de tubes alongés , divisés à leur extrémité postérieure
en deux branches, une dirigée vers le dos et l'autre
vers le bas : chacune d'elles se bifurque.
La teinte générale est un brun rougeâtre au-dessus
96 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de la ligne latérale, et le ventre est blanc : le tout
glacé de verdâtre. Au-dessous de la ligne latérale et
vis-à-vis les premiers rayons mous de la dorsale, il
y a sur chaque écaille une large tache formée par la
réunion d'une douzaine de gros points bruns : quel-
ques autres sont épars sur le corps. Le sous-orbitaire
est traversé obliquement par une ligne brune, dirigée
de l'angle de la mâchoire vers le bord antérieur de
l'œil. La dorsale et l'anale ont quelques taches vio-
lettes : les autres nageoires n'ont pas de taches. Les
rayons paraissent avoir été jaunes, plus ou moins
orangés, et la membrane qui les réunit, violette.
Nous ne connaissons celte espèce que par
un individu long de sept pouces, que les
naturels de la Nouvelle-Zélande ont donné
à MM. Lesson et Garnot sous le nom de
paré-quiriquiri.
Le Labre selle.
(^Labrus ephîppiwn , nob.)
J'ai vu dans la collection du Musée royal
de Hollande, pendant mon séjour à Leyde,
un labre
ayant les formes et les dents semblables à celles de
notre labre à trois taches.
Le fond delà couleur paraissait avoir été olivâtre;
une grande tache d'un bleu noirâtre , en forme de
selle, couvrait le dos, sous la dorsale, en commen-
çant à son premier rayon épineux, et en finissant
vers les rayons mous. La queue était entourée d'un
CHAP. I. LABRES. 97
large anneau noirâtre ou bleu très-foncé. Le dessus
de la tête est bleu, et cette teinte s'étend sur l'oper-
cule: les nageoires participent de ces teintes.
D. 19/11 ; A. 3/9 j C. 13; P. 16; V. 1/5.
C'est un grand poisson , long de quinze
pouces, que M. Temriiinck croyait, sans en
être très - certain , originaire de Java, et qui
se distingue bien, par le nombre des rayons
épineux de sa dorsale, des espèces de cossyphes
avec lesquelles on serait peut-être tenté de le
confondre.
Le Labre de Gay»
{Labrus Gaji, nob.)
M. Gay nous a pj;ocuré un petit poisson des
îles Juan-Fernandez,
qui a la forme alongée de nos labres, les lèvres
épaisses, les dents sur un seul rang et toutes poin-
tues : celles de devant plus grandes ; le limbe du
préopercule et l'interopercule lisses, très -minces,
sans écailles 5 la joue en est couverte, mais elles sont
très -petites. Celles de l'opercule sont aussi grandes
que celles du corps j j'en compte vingt-cinq rangées
environ entre l'ouïe et la caudale.
La dorsale et l'anale sont basses, la caudale cou-
pée carrément.
D. 9/11; A. 3/10; C. 15; P. 12; V. 1/5.
La couleur est un rouge-brun uniforme, plus
i3. 7
98 LIVRE XVI. LABROÏDES.
foncé sur les nageoires impaires. Les pectorales et
les ventrales paraissent avoir été jaunes.
Ce poisson n'a que quatre pouces.
Le Labre macrodonte.
{Labrus macrodontus y Lacép.)
Nous avons au Cabinet du Roi un autre
labre, probablement originaire de Java,
qui a le profil oblique, le front élevé, l'œil petit; le
bord interne du maxillaire est relevé en un bourrelet
osseux, épais, denliculé ou festonné. La mâchoire infé-
rieure a un bourrelet moins épais. Les canines, au
nombre de quatre, sont fortes et crochues, et dans
l'angle de la mâchoire supérieure est une petite dent
saillante. Les écailles du préopercule sont petites;
celles de l'opercule sont assez grandes, mais moins
que celles du corps, sur lequel on compte trente-
deux rangées entre l'ouïe et la caudale; elles sont
minces et lisses.
D. 13/7 ; A. 3/9 ; C. 15 : P. 16 ; V. 1/5.
La ligne latérale se courbe sous la fin de la dor-
sale ; elle est composée d'une suite d'arbuscules di-
visés en branches nombreuses.
La tête et le dos, jusqu'à la fin de la dorsale,
paraissent avoir été violets. Cette couleur se prolonge
en une bande étroite sur le milieu de la queue jus-
qu'à la caudale; le reste du corps est décoloré et
paraît avoir été jaune ou rougeâtre. Une large tache
violette couvre les quatre premiers rayons mous
CHAP. I. LABRES. 99
de la dorsale, et une autre, plus foncée, presque noire,
est sur la base de la pectorale. Les joues, l'occiput
et le dos, au-dessus de la ligne latérale, jusque sous
la septième ou la huitième épine de la dorsale, sont
couverts d'une grande quantité de petits points blan-
châtres ou violets.
L'individti est long d'un pied et porte la
dénomination de tenouh, que notis ne trou-
vons point dans Valentyn, ni dans le Diction-
naire malais.
Cette description est faite sur le poisson qui
a servi à M. de Lacëpède pour établir son lahre
macrodonte \ ainsi nous sommes bien certains
de notre synonymie.
Le Labre du Japon.
{Lahrus Japoiiicus , nob.)
Le Cabinet de Berlin possède un labre du
Japon, voisin dti précédent, et qui lui a été
donné par M. Langsdorff.
Cette espèce a le même profil , quatre canines
très-fortes et une petite dent en arrière sur la partie
antérieure du bourrelet, lequel est plus épais et plus
relevé qu'à la précédente, mais il m'a paru lisse. La
dent de l'angle de la mâchoire supérieure est beau-
coup plus forte. Les écailles, d'égale grandeur, ont
1. Lacépède, t. III, p. 45i, n." ii5, et p. 523.
'100 LIVRE XVI. LABROÏDES.
leur surface finement striée. La ligne latérale a des
arbuscules plus courts et moins branchus. Les nom-
bres sont semblables.
D. 13/7; A. 3/9, etc.
La couleur paraît avoir été brune ou rougeâtre
sur le dos; la caudale est foncée; l'anale a sa base
violette, le milieu jaune et le bord brun.
Ce poisson s'appelle au Japon nobussu ou
nahekusara-kaschis. Il est long d'un pied.
Le Labre de Iago.
(Labnis lagonensis , Bowdicli. ^)
Nous citerons à la suite de ces labres, exa-
minés par nous-mêmes, ime espèce que nous
trouvons indiquée dans la relation du second
voyage en Afrique de Bowdicli, et qui a été
publiée par sa courageuse compagne, aussi
distinguée par l'élévation et la noblesse de son
ame, que par la solidité de son instruction
si variée dans les différentes branches de l'his-
toire naturelle.
C'est un poisson ayant quatre dents à l'extrémité
de chaque mâchoire, un préopercule rayonné, un
opercule écailleux.
D. 25; A. 14; C. 12; P. 18; V. 8?
Ce poisson brille d'une belle couleur rouge.
1. Excursions in ISIadeira and Porto- Santo ,bj M. Bowdich,
îSaS. yJppend.fp. 234, fig- 47-
CHAP. I. LABRES. 101
Il a été observé à Porto-Praya du Cap-Vert,
et à l'embouchure de la Gambie.
Je doute de l'exaclitude des huit rayons de la ven-
trale.
Mad.^ Lee [formerly Bowdich ) parle d'un
rang de dents en velours, ce qui pourrait ne
pas convenir à un labre; mais cependant la
figure ne me laisse aucun doute sur le genre
auquel nous rapportons cette espèce de l'At-
lantique , que nous demanderons aux voya-
geurs. L'espèce doit être voisine de notre
lahrus suillus.
i02 LIVRE XVI. LABROÏDES.
CHAPITRE IL
Des Cossjplies {Cossyplius, nob.).
Nous croyons devoir séparer des labres,
des espèces qui se.ml)lent avoir des caractères
communs aux poissons de ce genre et aux cré-
nilabres, et qui composent un groupe intermé-
diaire entre les deux genres de Cuvier.
Ces poissons ont tous les maxillaires élargis,
et derrière la rangée externe des dents poin-
tues il y en a de petites rondes, grenues, ser-
rées, donnant à ces espèces un caractère de
dentition très-notable et facile à reconnaître.
Les pièces operculaires sont généralement
plus écailleuses, et souvent toutes sont cou-
vertes sous une cuirasse d'écaillés semblables
à celles du corps. Les nageoires verticales sont
aussi protégées par des écailles qui se relèvent
ou s'abaissent avec les rayons et les cachent
quand ils sont tout-à-fait abaissés sur le dos;
mais elles ne forment pas une gouttière pro-
fonde, semblable à celle des perches ou des
spares.
Une autre particularité de presque toutes
ces espèces consiste dans les crénelures souvent
très-prononcées du bord montant du préo-
CHAP. II. COSSYPHES. 403
percule. Ces dentelures ne paraissent quelque-
fois que vers l'angle de cette.pièce; elles y sont
si faibles, qu'elles semblent ne plus exister.
Ce caractère a fait prendre plusieurs de ces
espèces pour des crénilabres de Cuvier j mais
ceux-ci ont, comme nous le verrons tout à
l'heure, des dents si distinctes, qu'on ne peut
confondre les deux genres.
Nous avons emprunté aux Grecs le nom
générique de ce nouveau groupe. Sous cette
dénomination de Koaav(pos, Aristote a parlé de
poissons saxatiles, qu'il regardait comme les
femelles de ses k/jcA»?. Ce nom étant aussi celui
de l'oiseau si commun chez nous, le merle ,
Ko(7(yv(poç a été traduit par menda ou turdiis^
et on lui a donné la même traduction en ich-
thyologie, c'est ce qui a déterminé Artedi à
faire de ces dénominations des synonymes de
ses labres; mais on ne peut certainement les
appliquer, ainsi qu'il a voulu le faire, à aucune
espèce, et ce n'est même qu'avec doute qu'elles
doivent être données comme synonymes de
genre.
Le COSSYPHE BODIAN.
{Cossjphus BodianuSy nob.)
L'Atlantique nourrit un de ces labroïdes à
dents grenues qui y est fort commun , qui y
] 04 LIVRE XVI. LABROÏDES.
a été observe par la plupart des naturalistes
descripteurs de poissons des côtes d'Amérique,
mais qui a reçu presque autant de noms qu'il
y a eu d'observateurs pour en parler.
Le corps est alongé et de forme ovalaire assez
régulière et élégante. La hauteur fait le quart de la
longueur totale, prise jusqu'à rextrémilé des filets
prolongés de la caudale j l'épaisseur n'est pas tout-
à-fait moitié de cette hauteur.
La longueur de la tète égale la hauteur du corps.
L'œil, de grandeur médiocre, est placé sur le haut
de la joue et à la fm de la première moitié de la
longueur de la tête; son diamètre est compris cinq
ou six fois dans la distance du bout du museau à
l'angle de l'opercule. Le sous-orbitaire est large, haut
et sans écailles; le préopercule a toute sa surface
écailleuse, même sur le limbe; on voit des écailles
semblables sur l'interopercule et la mâchoire infé-
rieure; l'opercule et le sous-opercule sont couverts
par des écailles plus grandes ; le bord membraneux
est assez large; le bord montant du préopercule est
finement crénelé.
La lèvre supérieure est épaisse,, plissée, et recouvre
une mâchoire droite, à bord comprimé, élargie en
dedans, de fliçon que le palais est très-étroit. Il y a
quatre dents coniques à l'extrémité de chaque mâ-
choire; les deux mitoyennes sont droites et dirigées
en avant; les autres dents sont petites et en tuber-
cules jusqu'à l'angle de la mâchoire, où il y a deux
autres dents longues et saillantes, la dernière étant
CHAP. II. COSSYPHES. 105
toujours la plus forte. Les dents grenues sont sur une
bande étroite. Le palais, d'ailleurs, est lisse; les pha-
ryngiens supérieurs ont trois rangées de tubercules
d'un beau blanc, dont les internes sont plus gros et
correspondent aux moyens et gros tubercules du
pharyngien inférieur. Ces dents grenues ne sont pas
portées sur de longues racines, et diffèrent, sous ce
rapport, des dents pharyngiennes des labres.
La dorsale est basse à son origine et presque en-
tièrement cachée sous les écailles qui remontent du
dos sur les rayons épineux de cette nageoire; elle se
relève un peu vers la fm, où les rayons mous pren-
nent plus de hauteur, et s'alongent en pointe ou en
un filet, qui atteint jusqu'à la caudale : ce sont les
cinquième , sixième et septième rayons mous qui
s'alongent ainsi.
La caudale est coupée carrément; les rayons qui
la bordent en dessus et en dessous donnent un pro-
longement filiforme. L'anale a sa portion molle sem-
blable à celle de la dorsale, et les huitième, neu-
vième et dixième se terminent en filet. Cette même
disposition a lieu pour le premier rayon mou de la
ventrale, qui touche presque à l'anale. Les pecto-
rales sont arrondies.
D. 13/9; A. 8/12 j C. 15; P. 16; V. 1/5.
Les écailles sont finement ciselées, assez grandes:
j'en trouve trente -quatre entre l'ouïe et la caudale.
La ligne latérale, composée d'une série de tubercules,
est plus ou moins rameuse, parallèle à la courbure
du dos, et se rend à la queue sans faire d'inflexion
106 LIVRE XVI. LABROÏDES.
irès-sensible ; elle semble presque droite sur ceilalns
individus.
Quant à la couleur, elle paraît avoir été lie de vin
ou pourprée, ou quelquefois d'un beau rouge orangé
sur le dos; le ventre est gris; le reste des côte's est
jaune citron, ainsi que les nageoires. La dorsale et
la pointe de l'anale offrent une tache noire plus ou
moins foncée.
Nous en avons reçu de nombreux indivi-
dus, parmi lesquels un est long de quatorze
pouces. Il nous vient de Saint-Domingue, par
M. Ricord; M. Plëe en a envoyé de Porto-Rico
et de Saint-Thomas j MM. Delalande et le duc
de Rivoli l'ont pris au Brésil, et MM. d'Abadie
nous l'ont rapporté d'Olinda : nous voyons
l'espèce s'avancer dans le milieu de l'Océan
jusqu'à Sainte -Hélène; car M. Dussumier en
a donné au Cabinet un bel individu pris sur
ces côtes; mais cet observateur le regarde
comme un des poissons rares de Tile.
Selon M. Fiée , il se nomme patate rouge
dans nos Antilles.
Parra le connaît sous le nom de perro Co-
lorado à la Havane. Les Espagnols désignent
sous le nom de pei^ro (chien) les poissons à
dents canines saillantes. C'est ainsi que nous
voyons cette dénomination appliquée à nos
lachnolaimes.
Margrave et le prince Maurice disent que
CHAP. II. COSSYPHES. i 07
ce poisson est de la taille d'une perche ou
d'une carpe, et que sa cliair est tendre : suivant
Catesby, il atteindrait à deux pieds de long^
cependant Parra le compte parmi les petits
poissons. Margrave est le seul qui dise que l'on
mange ce poisson à Rio-Janeiro.
Parmi les collections que nous devons à
M. Gay, nous avons trouvé une variété si
notable de cette espèce, que nous avons hésité
long-temps à ne pas l'en distinguer.
L'individu a l'œil beaucoup plus petit , le front
plus large, la ligne latérale sensiblement plus arquée,
les filets des nageoires plus longs, et je trouve que
c'est le sixième seul qui se prolonge en fil à la dor-
sale^ dont les nombres diffèrent.
D. 12/10; A. 3/12, etc.
Le dos paraît avoir été plus rouge ; la taclie de la
pectorale et de la dorsale , plus noire,
11 vient du Brésil, et est long de neuf pouces.
Je n'en fais pas une espèce, parce que je
trouve pai^mi nos individus venus de Sainte
Domingue que le nombre des épines de la
dorsale ne va quelquefois qu'à douze.
Cette espèce a été connue dès le milieu du
dix-septième siècle 5 car elle a été publiée par
Margrave ', qui la tenait des Portugais du Brésil,
1. Margrave, Bras., p. i45j i46.
408 LIVRE XVI. LABROÏDES.
SOUS le nom de pudiano vermelho ou de bo-
diano. Suivant lui , les Brésiliens la nommaient
aipimixira et tetimixira.
L'original du dessin qui accompagne la
description se trouve dans les dessins ma-
nuscrits du prince Maurice de Nassau, et que
nous avons consultés à la bibliothèque royale
de Berlin. Ces documens ont été employés par
Bloch, qui a publié dans sa grande Ichtliyo-
logie ce dessin du prince; mais en le qua-
druplant, selon son habitude, quoiqu'il n'en
ait pas averti ses lecteurs. Cette copie serait
très-exacte , si le dessinateur ne s'était pas mé-
pris sur un léger accident de couleur qui
existe au bas de l'angle du préopercule, et
dont il a fait une forte épine , quoiqu'elle
n'existe, à bien dire, ni sur le dessin original,
ni encore moins sur la nature. Il faut remar-
quer cependant que la tête, et particuhère-
ment la l30uche et les dents , sont altérées dans
la planche de Bioch.
Mais cet ichthyologiste reproduit cette même
espèce dans la livraison suivante et deux fois
de suite; car son lutjanns verres (Bl. 255)
en est une figure assez bonne, faite d'après
nature , et nous avons dans le Cabinet du Roi
un poisson desséclié qui nous vient de 1 an-
cienne collection de Hollande, tellement sem-
CHAP. 11. COSSYPHES. 109
blable à la gravure de Blocli, que l'on pour-
rait le regarder comme en étant l'original.
Une seconde fois, et quelques pages plus loin
(pi. 258), Bloch, ayant trouvé dans les manus-
crits du père Plumier un dessin dans lequel
on peut reconnaître notre espèce à la bifurca-
tion de la queue et au prolongement de la
dorsale et de lanale, l'a fait graver comme une
nouvelle espèce de spare, spams falcatus»
Nous sommes encore aides dans notre déter-
mination parla distribution des couleurs telles
que nous les trouvons sur le Vélin fait par
Aubriet, et que Ton conserve dans la biblio-
thèque du Muséum. La tcte et le dos sont
peints bleu d'outremer, le ventre et les côtés
sont jaunes, le bord de la dorsale et de l'anale
et les pointes de la caudale sont aussi de cette
couleur. Ainsi, sauf Texactitude des teintes,
c'est encore la disposition de celles que nous
observons sur la nature. Bloch lui a donné
une coloration verdâtre plus foncée sur le dos,
et tirant au jaune sous le ventre. Je ferai ob-
server que son dessinateur a mal compris les
dessins, en général peu achevés, de Plumier,
et qu'il a marqué à tort quatre épines à l'anale j
car dans notre Vélin il n'y en a que deux.
Un de nos individus empaillés, et venus de
Saint-Domingue par M. Ricord , ressemble
110 LIVRE XVI. LABROÏDES.
beaucoup 5 dans ses traits généraux, à cette
figure de Plumier : tout concourt donc à prou-
ver que le spams falcatus n'est autre que
l'espèce dont nous faisons ici l'histoire. Heu-
reusement que Bloch na pas vu un dessin
beaucoup plus incorrect du père Feuillce, et
qui existe à la bibliothèque du Roi. Le pois-
son, sans nom et sous le n.° 20, est peint en
rouge vermillon clair ou de minium, et les
nageoires sont roses. Malgré les incorrections
nombreuses de ce dessin, on y reconnaît en-
core notre espèce.
Gatesby ', de son coté, a aussi représenté
notre cossyphe, quoique jusqu'à présent aucun
naturaliste ne l'eût reconnu dans le labrus
jiavus de cet auteur. Linné s'est servi de ce
document dans sa douzième édition, c'est donc
le lahriLS fuhus du Sjslema natiirœ.
M. de Lacépède a in:,crit d'abord toutes ces
espèces nominales sans aucune difficulté, et
il a fait ensuite de nouveaux doubles emplois.
Le labre fauve de Caîesby {Jabrus fulvus,
Lin.) est d'abord compté parmi ses labres.
Le Bodicmiis hodianus est conservé, mais
sous le nom de Bodian Bloclr. Le lutjan verrat^
1. Catesbj,C;it.,t.XI,fig. i. — 2.Lacép., t. IV, p. 27901 290.
3. Ibid., p. 209.
CHAP. ïl. COSSYPHES. 111
prend place dans ce genre également sur l'au-
toritë de Bloch , et son spaie faucille est
établi de la même manière ; puis il se sert du
TuRDUS totus cceruleus et ciureus, de Plu-
mier, et il fait graver une copie de la peinture
d'Aubriet. Comme il ajoute une foi très-grande
à l'exactitude de ce Vëlin, et qu'il n'a point
cherché à le comparer à la nature , il crée sur
cette autorité un genre nouveau, dont les
caractères sont basés sur la forme en fliux
des nageoires verticales , et il donne parmi
les caractères spécifiques un nombre de huit
rayons branchiostèges que l'on compte sur
quelques percoïdes seulement, les liolocen-
triun; mais la manière dont le peintre a traité
les autres parties de l'animal, suffit seule pour
prouver qu'il n'a certainement pas compté les
rayons branchiostèges en les dessinant. M. de
Lacépède a pris aussi pour un barbillon l'en-
foncement triangulaire qui se découvre près
de l'angle de la bouche, quand la mâchoire
inférieure , qui est assez mal dessinée, s'abaisse.
La forme des nageoires coupées en faux lui a
fait imaginer le nom générique de liarpé^. Ce
harpe bleu doré doit donc être rayé de la
liste des genres ou d'un species de poisson.
1. ciLç>7TYi • qui signifie faux ou faucille, ou tout instrument crochu.
1i2 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le Vélin d'Aubriet a été aussi copié et assez
bien rendu dans le Recueil de physique de
Dagoty.
Mais Commerson avait trouvé notre pois-
son sur le marché de Rio- Janeiro, au mois
de Juin 1767, et il en avait fait une descrip-
tion remarquable par son exactitude et d'a-
près le plan que cet habile observateur s'était
fait pendant son voyage.
M. de Lacépède , ayant lu cette description
dans les manuscrits de notre célèbre voyageur,
n'a pas manqué de s'en servir en étabhssant,
d'après ce document , une nouvelle espèce
nominale de labre. Son lahrus semiruher n'est
encore qu'une sixième manière de reproduire
notre cossyphe.
Shaw ne compte cette espèce que cinq fois,
parce qu'il a bien reconnu l'identité du harpe
de Lacépède avec le sparus falcatus de Bloch;
mais, trompé sans doute parles quatre épines
indiquées par cet auteur, il y a réuni un autre
spare, étabU aussi sur les dessins de Plumier,
etauquelBloch attribuait.quatre épines anales.
Nous avons déterminé ce sparus tetracan-
thus^ c'est notre mesoprion griseus \ et nous
avons déjà signalé la confusion de Shaw; mais
1. Cm. Val., t. Il, p. 47»'
CHAP* II. COSSYPHES» i\%
à cette époque nous pensions que le spams
falcatus pouvait être une espèce du genre
chéiline. Je ne doute plus aujourd'hui, après
l'examen des nombreux individus rapportes
de Saint-Domingue par M. Ricord, ou des
Antilles par M. Plée, du nouveau rapproche-
ment que je fais.
Shaw, d'ailleurs, reproduit le labre demi-^
rouge parmi ses espèces de labres, mais en y
ajoutant une erreur qui lui est propre 5 car il
dit ce poisson originaire des Indes et d'Ame*
rique. Lacëpède avait cependant copie fidèle-
ment Commerson.
Shaw a du reste placé le liitjanus verres
parmi ses spares; le hodianus bodianus est le
premier de ses bodians, et le labriis ful^us
est inscrit comme un labre.
Bloch, à l'article de son lutjanus verres,
avait déjà cité le perro Colorado de Parra. '
Cet auteur le colore en rouge sur la queue,
sur le dessus de la tête et sur le dos, et en
jaune sur tout le reste du corps. Les ventrales
et l'anale ont du rouge à la base ou sur le
bord,
1. Parra, Hav.; p. 5, pi. 3^ fig. i.
i3. 8
114 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le COSSYPHE MALDAQUE.
{Cossfphus maldat , nob.)
Les espèces suivantes dont nous allons donner
la description et l'historique, sont toutes origi-
naires des mers de l'Inde. Commerson en avait
observé à l'Isle- de -France, et en avait rap-
porte des descriptions et des figures, qui ont
été employées par M. de Lacépède , mais qui lui
ont servi à faire plusieurs doubles emplois. Nous
devons les autres aux recherches des natura-
listes qui ont fait partie des circumnavigations
commandées par MM. Freycinet, Dumont-
d'Urville et Duperré, en France, et par M.
Liitke, pour la Russie. MM. Julien Desjardins
et Théodore Delisse nous ont aussi envoyé
des dessins faits d'après nature; et des poissons
bien conservés, joints à ces envois, nous ont
aidés dans nos recherches. N'oublions pas aussi
M. Dussumier, dont nous avons consulté les
notes avec fruit, et dont les collections ont
enrichi ce genre dans le Cabinet du Roi.
Un de ces poissons, remarquable par l'éclat
et la distribution des couleurs,
a le corps court, sa hauteur n'étant que du tiers de
sa longueur, la caudale non comprise, et qui n'est
guère que du septième ou du huitième du corps.
La tête est presque aussi longue que le tronc
CHAP. II. COSSYPHES. "IIS
est élevé. L'œil est de grandeur médiocre; son dia-
mètre n'a que le cinquième de la longueur de la
tête. Le bord du préopercule est très-fînement den-
telé. Toute la tète est plus écailleuse que celle des
autres labres; car il en a sur le limbe du préoper-
cule, sur l'interopercule, et sur la branche de la
mâchoire inférieure, où elles sont aussi serrées que
sur les sous-opercules et les opercules, dont le bord
membraneux est peu large. Le front, le pourtour
des narines, le devant de l'œil et les lèvres seules,
sont nus. Les dents pharyngiennes forment deux
plaques osseuses, grenues, encore plus serrées que
celles du précédent.
La dorsale est peu élevée, et sa base est couverte
sous les écailles du dos, qui se relèvent de chaque
côté des rayons, et forment une sorte de gouttière
profonde , dans laquelle ils se cachent quand ils
s'abaissent. La portion molle de la dorsale est plus
libre; elle est pointue, ainsi que l'anale. Les deux
rayons supérieurs de la caudale se prolongent un
peu au-delà des autres, qui sont coupés carrément.
Les ventrales sont longues et pointues.
D. 12/10; A. 312; C. 13; P. 17; V. 1/5.
Il y a vingt-huit rangées d'écailles entre l'ouïe et
la nageoire de la queue. La partie visible de l'écaillé
est ovalaire et très-finement chagrinée ; la portion
radicale forme un long carré, dont la surface est
presque quadruple du reste; elle est couverte de stries
qui rayonnent du centre vers le bord radical : ce bord
est légèrement festonné par la terminaison des bran-
ches de l'éventail ; elles sont au nombre de dix. On
116 LIVRE XVI. LABROÏDES.
compte dix-huit rangées de ces écailles entre la base
du dernier rayon épineux de la dorsale et celle de la
première épine de l'anale. La ligne latérale a peu
d'inflexion sous la fin de la dorsale; elle se compose
d'une série de petits arbuscules peu rameux, et dont
les branches, naissant de l'extrémité du tube princi-
pal, remontent vers le dos. La tète oflTre, sur un fond
jaune citron, huit raies longitudinales violettes, plus
ou moins brunes: deux sont sur le front, au-dessus
des yeux; trois autres partent du bout du museau,
par l'œil , et se terminent sur la tempe , et trois autres ,
plus pâles, traversent la joue au-dessous de l'œil.
Le jaune de la tête passe sur l'épaule, se mêle
et se confond avec l'orangé plus ou moins rouge
et brillant du corps. Cette teinte est agréablement
variée par dix rangées longitudinales de taches ob-
longues, violacées ou rougeâtres,qui forment comme
de beaux chanelets sur les flancs. Une laree tache
noire carrée couvre l'extrémité postérieure du tronc
et la plus grande partie de la queue; elle s'étend du
troisième rayon mou de la dorsale au huitième de
l'anale; le reste de la queue est jaune; la caudale
est orangée ; les pectorales sont plus pâles ; la por-
tion épineuse de la dorsale est rougeâtre, un peu
teintée de verdâtre sur le bord; une tache noire existe
sur les trois premières épines; la portion molle,
ainsi que l'anale, sont olivâtres, tachetées de points
brunâtres et bordées de noir; les ventrales, d'un
beau rouge vineux, ont le premier rayon noirâtre;
l'œil paraît avoir été orangé.
Leur cavité abdominale est petite; le foie est court,
CHAP. ir. COSSYPHES. ]]7
divisé et subdivisé ; le canal intestinal médiocre ; la
vessie aérienne très - grande et à parois épaisses et
argentées.
Le squelette a onze vertèbres abdominales et dix-
sept caudales. Les apophyses épineuses des deux
dernières sont élargies en éventail; les dernières sont
surtout très- épaisses et très-fortes. Les apophyses
épineuses inférieures, qui répondent à l'anale, et même
les interépineux de l'anale , sont longs et grêles j
les inlerépineux du dos, de hauteur médiocre; les
antérieurs sont plus forts.
La crête mitoyenne du crâne est élevée et trian-
gulaire; les latérales sont basses; la fosse moyenne
occipitale est large et profonde, à cause de la saillie
du condyle occipital; le dessus du crâne est large et
convexe ; la coulisse pour les intermaxillaires est
courte et peu profonde ; les os du nez sont peu longs ,
étroits, sinueux et percés de nombreux trous nutritifs.
Cette description est rédigée d'après un indi-
vidu long de huit pouces, et aussi frais que
s'il sortait de l'eau; car elle est en tous points
conforme à celle qui a été faite par MM. Quoy
et Gaimard, au moment où ils ont pris ce
poisson.
M. Dussumier en a observé à l'Isle-de-France
quelques variétés. Un des individus rapportés
par ce naturaliste n'a que cinq pouces de lon-
gueur. Il avait le corps brun foncé avec des raies
blanches^ el un cercle rouge autour de l'iris.
118 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La caudale était blanchâtre. Un autre était
très-pâle , et lui a offert sur le frais des cou-
leurs semblables à celles dont MM. Lesson et
Garnot ont peint leur poisson.
Commerson a donné une teinte rouge plus
décidée au dos et au sommet de la tête; toute
la partie épineuse de la dorsale est aussi foncée
que la portion molle et que le tronçon de la
queue. Les ventrales sont de couleur brune
ou marron.
Cependant le dessin, à la mine de plomb,
représente une variété de cette espèce; car
la dorsale n'a de taches que sur les trois pre-
miers rayons épineux, et l'anale a une bordure
brune. C'est la variété de MM. Lesson et Gar-
not, et il paraît que c'est la plus ordinaire;
car je retrouve ces mêmes distributions sur
un joli dessin que M. Théodore Delisse m'a
communiqué. Le dos y est peint assez rouge
et se rapproche de la couleur de la figure laissée
par Commerson : les joues tirent plus à l'o-
rangé. La queue, derrière la tache noire, est
violette, et la caudale, d'un rouge orangé pâle,
est tachetée de points jaunâtres. Nous pensons
que la belle variété de Commerson représente
le poisson au temps du frai.
Selon M. Delisse, ce poisson se nomme, à
risle-de-France, maldcit, ou maldaque selon
M. J. Desjardins.
CHAP. II. COSSYPHES. 119
Nous nous sommes détermines à conserver
à l'espèce cette dénomination vulgaire ; car ce
poisson a déjà paru sous trois noms dans le genre
des labres de M. de Lacépède , et M. Lesson
est venu lui en donner un quatrième.
En efFet, M. de Lacépède a fait de la figure
coloriée de Commeison son labre hérissé. Une
petite copie, assez mauvaise, est gravée t. III,
pi. 20, fig. 1. Les arbuscules de la ligne latérale
avaient été repoussés au pinceau et gouaches;
l'épaisseur du blanc a fait prendre, sans au-
cun doute, ces traits pour des épines ou des
villosités dures et relevées sur le corps du
poisson : et c'est de là que M. de Lacépède a tiré
son nom spécifique.
Le dessin au crayon a été égalerhent copié
et gravé dans le même volume, pi. g, fig. 3. La
queue du poisson ayant été bien étalée par le
dessinateur de Commerson, l'espèce établie
d'après ce document a reçu le nom de labre
large queue.
Enfin, M. de Lacépède, prenant la descrip-
tion de Commerson, en fait une troisième
espèce, sous le nom de labre à rouges raies.
Il ne nous a pas été difficile , avec les pré-
cieux originaux de ces travaux, de reconnaître
ces doubles ou même triples emplois; et nous
les avions déjà signalés en inscrivant ces syno-
120 LIVRE XVI. LABROÏDES.
nymies sur les individus de la collection du
Muséum. Aussi avons-nous été surpris de voir
M. Lesson venir donner, sous un nom spéci-
fique nouveau et comme du genre crénilabre,
ce poisson déjà bien connu. Il a été publié,
planche 38 des poissons dans l'Atlas de la
Coquille, sous le nom de crénilabre Chabrol.
Mais cette erreur est-elle à peine commise
et aussitôt publiée, que M. Guérin s'en em-
pare, et donne, sous une enluminure un peu
rude, une copie de cette figure de Lesson,
pour représenter un type du genre crénilabre
de Cuvier. Or, c'est précisément une de nos
espèces de cossypbe qui a le moins de rapport
avec les crénilabres; car son préopercule est
faiblement dentelé; on en trouve même des in-
dividus qui ont perdu toutes leurs dentelures.
Aussi M. Cuvier avait-il cité le labre hérissé sous
ses labres *, où je m'étonne de voir le labre large
queue indiqué comme une espèce distincte.
\\ faut avouer que M. Guérin n'a pas été
heureux dans ses copies sur cette planche l^i
de son Iconographie du règne animal; car le
poisson figuré pour donner l'idée d'une es-
pèce de labre, est du genre malacanthe de
Cuvier. Il la cite dans la note de ce genre.*
1. Règne anim., t. II, p. 266. — 2- Ibid., t. II, p. a64»
CHAP. II. COSSYPHES. "121
Rien n'eût été plus facile cependant que d'éviter
ces erreurs.
Le COSSYPHE DEUX CROISSAIS.
{Cossfphiis bilu7iulatus j,noh.; Labre deux croissans,
Lacép.)
Une seconde espèce, que les pécheurs de
risle-de-France semblent confondre avec la
précédente, en diffère
par un corps plus alongé, par des dénis grenues
plus fortes , et par des dentelures encore moins sen-
sibles au bord du préopercule : elles ne paraissent
qu'à l'angle arrondi de cette pièce. Le limbe du préo-
percule a quelques écailles moins visibles que dans
l'espèce précédente; la branche de la mâchoire in-
férieure n'en a aucune; celles de l'inieropercule sont
aussi forles et aussi nombreuses que celles du sous-
opercule. Les granulations de la portion nue des
écailles sont beaucoup plus fines, et les stries de la
partie cachée ou radicale beaucoup plus grosses.
La couleur, telle que nous l'a fait connaître M. Des-
jardins, est uniforme, d'un rouge tirant au rose et
devenant orangé sur la tête, plus vif sur le dos et
près de l'anale. Les lèvres sous la mâchoire inférieure
sont jaune citron. Une tache noire est placée sur les
lombes, entre la ligne latérale et la base des rayons
mous de la dorsale, sans les couvrir; elle commence
sous l'aplomb du troisième rayon mou de la dor-
sale, et s'étend jusque vers le milieu de la queue. La
1 ZÂ LIVRE XVI. LABROIDES.
caudale, légèremenl éclianciée, est orangée ou rou-
geâire. La dorsale, plus haute et plus libre que celle
de l'espèce précédente, a, comme elle, une tache sur
les trois premiers rayons épineux; elle s'étend quel-
quefois jusque sur la sixième épine. Le fond de sa
couleur et celui de l'anale est rougeatre; la pectorale
est d'un beau jaune, et les ventrales tirent au pourpré.
Les nombres des rayons sont comme chez le pré-
cédent.
D. 12/10; A. 3/12, etc.
L'individu rapporté de l'Isle-de-Fraiice par
MM. Quoy et Gaimard est long de dix pouces.
Celui que nous avons retrouvé parmi les pois-
sons de Commerson est plus grand; il a près
de quatorze pouces, et nous venons d'en re-
cevoir un de la même taille et du même
endroit par M. J. Desjaidins. Nous devons
en adresser a ce savant zoologiste des lemer-
cîmens d'autant plus vils, qu'il a bien voulu
se dessaisir, en faveur des collections du Mu-
séum, du seul individu qu'il possédait dans
son cabinet; il l'avait pris à Flacq.
M. Th. Delisse nous a aussi communiqué
un dessin de la même espèce, où les couleurs
sont bien les mêmes que celles indiquées par
M. J. Des jardins ; mais on y trouve un trait
rouge purpurin ou lie de vin, tracé de l'œil
à l'angle supérieur de l'opercule, une tache
large oblongue, étendue obliquement de l'angle
CHAP. II. COSSYPHES. i 25
de la bouche au bas de l'opercule , en passant
par l'angle du prëopercule. La base de la pec-
torale est brune.
M. Desjardins nous apprend, dans la note
qu'il ajoute à son poisson, qu'on le confond
avec le précédent sous le nom de maldaque.
M. de Lacépède a connu cette espèce par
le beau dessin au crayon rouge et à la pierre
noire , qu'il avait trouvé dans les papiers de
Commerson. Nous n'avons pas de description
relative à ce poisson dans les manuscrits de
ce voyageur. M. de Lacépède lui a donné le
nom de lahre deux - croiss ans {labrus bilii-
nulatus)^ dont nous avons conservé l'épithète
spécifique.
Le GOSSYPHE AUX REINS NOIRS.
(Cossjphus atrolumhus y nob.)
Nous avons trouvé parmi les poissons de
Commerson une espèce voisine des deux pré-
cédentes, et qui tient de l'une et de l'autre.
Elle a les granulations des mâchoires semblables
à celles du cossyphe maldaque, les dentelures au
préopercule aussi fines et aussi nombreuses. Le limbe
de cet os est sans écailles, et la peau épaisse qui le
recouvre est percée de pores fins et fréquens. La
mâchoire inférieure, moins poreuse, n'a aucune
écaille j sa peau est parfaitement lisse. Les écailles de
124 LIVRE XVI. LABROÏDES.
l'interopercule sont plus larges et tiennent davantage
de celles des labres ordinaires.
Les couleurs sont uniformes et se rapprochent
davantage du précédent; cependant la tache brune
des lombes est autrement placée; elle s'étend depuis
le neuvième rayon épineux de la dorsale, sur la base
de tous les rayons mous, et descend sur les côtés
en s'affaiblissant pour s'effacer auprès de la ligne la-
térale; elle ne paraît en cet endroit que par des traces
de croissans brunâtres sur les écailles. On voit quel-
ques traces pâles de ces taches au-dessous de la ligne
latérale.
La couleur générale paraît avoir été jaune soufre.
Il y avait une lâche brune sur l'avani de la dorsale.
Les nombres des rayons sont comme dans les autres.
•D. 12/95 A. 3/10, etc.
L'individu sec n'a que huit pouces de lon-
gueur. Nous n'avons trouve aucun renseigne-
ment sur cette espèce dans les manuscrits de
Commerson, ni dans les auteurs qui ont lait
mention des poissons des mers de l'Inde.
Nous avons appris depuis que cette espèce
est originaire de l'Isle-de-France; car le Ca-
binet du Roi en possède aujourdliui un bel
individu, conservé dans l'esprit de vin, long
d'un pied, et qui a été envoyé par J. Desjar-
dins, et M. Dussumier en a donné un indi-
vidu sec, long de seize pouces et parfaitement
bien conservé.
CHAP. 11. COSSYPHES. 1 2S
Nous en avons connu les couleurs telles
qu'elles sont sur le poisson frais, par un beau
dessin que nous a donné M. Th. Delisse.
Le poisson brille du plus beau jaune éclatant et
pur sur la tête, le ventre et les nageoires, et deve-
nant orangé assez vif sur le dos. Sous la septième
épine de la dorsale commence une bande verticale,
qui occupe la largeur de l'intervalle de deux rayons,
et dont la teinte est rose, devenant très-pâle près de
l'anale, qui est également rose sur sa moitié inférieure.
On voit ensuite la tache noire comme nous l'avons
indiquée. Cinq à six traits longitudinaux parallèles,
verdàlres, sont tracés sous le ventre, depuis la cein-
ture de l'épaule sous la pectorale; ils s'effacent quand
ils sont arrivés sous la tache noire des lombes.
Le dessin représente un poisson long de
cinq pouces.
Le C0SS\PHE PERDITION.
{Cossjphiis perditio; Labre perdition:, Q. G. )
C'est évidemment auprès de notre cossy-
pJiiis atrolunihus qu'il faut placer le poisson
que MM. Quoy et Gaimaid ont nommé labre
perdition.
Ses formes sont presque entièrement semblables;
toutefois le dessin de ces naturalistes les fait paraître
un peu plus courts. Les nombres sont aussi les mêmes.
D. 10/12; A. 3/10; C. 12; P. 16; V. 1/5.
■126 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Sur un fond jaune brillant, le devant du dos et
le dessus de la tête sont couverts de rivulatlons vio-
lettes et serrées. Une tache triangulaire, dont la base
est sous le premier rayon mou de la dorsale, et le
sommet sur la ligne latérale, presque à l'extrémité
de la pectorale, se détache en jaune clair sur le fond
du corps; derrière elle une grande tache violette
brillante, quoique foncée, s'étend sous tout le reste
de la dorsale, et se perd sur les flancs au-dessus de
la ligne latérale. Quatre taches noires se voient sur
la dorsale, entre les rayons antérieurs de cette na-
geoire, qui est d'une belle couleur jaune soufre.
Les ventrales ont la même teinte ; les autres na-
geoires tirent au verdàtre.
MM. Quoy et Gaimard n'ont pris qu'un
seul individu de cette espèce; il était long
de sept pouces.
Le zèle et le courage de ces infatigables
voyageurs et naturalistes, ne s'est pas ralenti un
seul instant pendant toute leur campagne et
dans quelque position critique oii rëlément
qui les portait les avait souvent placés. Ils ont
eu le courage et la présence d'esprit de décrire
et de dessiner ce poisson, le 20 Avril 182^,
pendant qu'ils étaient échoués sur des récifs
très-dangereux, sur le point de perdre leur
navire, et entourés d'insulaires féroces, qui
attendaient l'instant du naufrage pour se par-
tager les débris de l'équipage. Cette position
CHAP. II. COSSYPHES. 127
de l'Astrolabe a duré plus de quatre jours.
Le courage de leur commandant, Dumont
d'Urville, a su dominer la tempête, sauver
le navire, les riches et immenses collections
que ses compagnons de voyage avaient faites,
dont ils ont enrichi nos musées et iUustré la
science. MM. Quoy et Gaimard, voulant per-
pétuer le souvenir de ces difficiles circons-
tances, ont donné à l'espèce le nom spéci-
fique que nous nous sommes Fait un devoir
de conserver.
Elle est figurée planche 20, figure 4? tle
la Collection des poissons de l'Astrolabe, et
décrite tome III, page 702. Ces naturahstes
ont soin de dire que leur dessin ne rend qu'im-
parfaitement le brillant et la variété des cou-
leurs de cette espèce.
Le COSSYPHE DIANE.
(Cossfphus dianOj, nob. ; Labre diane, Lacép.)
M. de Lacépède a trouvé dans les dessins
de Commerson la figure d'un poisson que
nous plaçons à côté des espèces précédentes.
Ce labre a le museau aigu, quatre dents fortes à
l'extrémité des mâchoires, et un crochet saillant et
dirigé en avant à l'angle de la bouche, la dorsale
épineuse basse, la portion molle et la caudale arron-
dies.
128 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le dessin de Commerson a été fait au crayon
rouge, et représente le poisson de cette teinte géné-
rale, avec une tache rouge plus foncée, en croissant,
sur chaque écaille; de nombreuses taches noires
éparses entre la ligne latérale et la portion molle
de la dorsale et sur les côtés de la queue. On voit
sur le dos , au-dessus de la ligne latérale , trois ta-
ches blanches ; toutes les nageoires sont rouges et
sans taches.
D. 12/10; A. 3/13, etc.
Nous avons pris une idée plus juste de ce
poisson et de la beauté de ses couleurs, par
un dessin colorié , que nous devons encore
à M. Th. Delisse.
Il donne au dos, au ventre et à la tête une teinte
rouge de laque assez foncée et diminuant insensi-
blement, pour se fondre avec l'orangé des côtés,
où chaque écaille est bordée d'un croissant rouge
comme le dos. Les taches noires sont disposées
comme sur le dessin de Commerson ; celles du
dos sont ici peintes en jaune brillant; la dorsale
épineuse est couleur de carmin , et la portion molle,
ainsi que la caudale, sont rosées; l'anale et les ven-
trales, d'un beau carmin brillant, sont moins fon-
cées que la dorsale; les pectorales sont jaunes, un
peu teintées d'orangé près de la base.
M. de Lacépède a fait graver une copie très-
exacte du dessin de Commerson (t. III, pi. 32,
fig. 1 ). Les manuscrits de ce voyageur ne font
pas mention de cette espèce.
CHAP. II. COSSYPHES. 129
La figure du naturaliste compagnon de
Bougainville est longue de dix pouces; celle
de M. Delisse n'en a que six et demi.
Le COSSYPHE AMIRAL.
{Cossjphus mesothoraxj, noh.j Lahriis mesothorax ,
Bl. Schn.)
Les côtes de l'île de Java nourrissent un
cossyphe remarquable par l'éclat et par l'oppo-
sition des couleurs dont son corps est peint.
Sa forme générale rappelle celle du précédent.
Le museau est pointu ; il y a quatre canines à cha-
que mâchoire, et dans l'angle de la supérieure un
crochet assez fort. Le long de l'os maxillaire on voit
quelques petites granulations : elles sont plus visibles
à la mâchoire inférieure. La dorsale épineuse est basse ,
la portion molle arrondie; l'anale est plus haute que la
dorsale et trapézoïde; la caudale est coupée carrément.
D. 12/10; A. 3/12; C. 13; P. 15; V. 1/5.
Les écailles sont de grandeur moyenne, arrondies ,
minces, et n'offrent que de très-fines aspérités gre-
nues ou quelques stries visibles à la loupe. On
compte vingt- six rangées d'écaillés entre l'ouïe et la
caudale.
La ligne latérale est tracée par le tiers de la hau-
teur du corps; elle est continue, non rameuse.
La tête est rouge, un peu rembrunie sur l'occiput
et sur l'épaule. Cette teinte devient noire, et forme
une large écharpe, qui se termine obliquement de
130 LIVRE XVI. LABROÏDES.
l'aisselle de la pectorale au dernier rayon mou de la
dorsale. Le reste du dos et le dessus de la queue
sont orangés; les flancs, le ventre et la gorge bril-
lent d'un beau jaune doré; une large tache noire ar-
rondie est à la base de la pectorale; une bande noire
oblique va de l'angle de la mâchoire au bas de l'oper-
cule; la dorsale molle et la caudale sont rougeâtres;
les pectorales sont plus pales; une teinte olivâtre
est étendue sur les ventrales et sur l'anale; l'iris de
l'œil est jaune.
Ces couleurs sont décrites d'après un beau
dessin envoyé de Java par MM. Kuhl et Van
Hasselt. On en reconnaît parfaitement la dis-
tribution sur l'individu sec, long de six pouces,
que nous conservons dans le Cabinet du Roi.
Ces jeunes et infortunés naturalistes, qui
ont observé ce poisson à Batavia , l'avaient
nommé ci^enilahriis elegans. Mais cette esj^èce
est connue depuis long-temps : Bloch la pos-
sédait dans sa collection, et je l'ai vtie dans
le Cabinet de Berlin, étiquetée lahrus meso-
thorax. C'est, en effet, sous ce nom qu'on
la trouve dans l'édition posthume de Bloch,
(p. 254 , n-° 5 1 ). Cet auteur y rapporte avec rai-
son la figure de Renard ( n.° 1 43 , fol. 26 ) , quoi-
que les couleurs ne soient pas très-exactes ; elles
sont plus vraies dans l'original de Corneille
Vlaming, et cependant un peu différentes des
nôtres. La tête y est peinte en noir comme l'é-
CHAP. IL COSSYPHES. 151
charpe; les bords du prëopercule et de l'oper-
cule sont verts, une large tache bleue triangu-
laire couvre l'ëpaule; l'écharpe est bordée de
jaune; le ventre est blanc; le dessous de la gorge
est violet. Nous n'osons pas regarder ces diffé-
rences assez grandes pour croire que ce dessin
appartienne à une autre espèce.
Vlaming et Renard appellent ce poisson
schout bjjiagt, c est-à-dire le contre-amiral ;
Valentyn en parle sous le même nom (n.° 1 26,
p. 388), comme d'un beau poisson, délicat,
et qui devient grand comme une morue or-
dinaire.
Le COSSYPHE AXILLAIRE.
{Cossj'phiis axillaris j, noh.)
M. Dussumier nous a rapporté des mers de
risle-de-France unç autre espèce, voisine du
précédent, bien distincte par ses couleurs,
et qui paraît avoir
le museau plus aigu, les dentelures inférieures du
bord vertical du préopercule plus fines, mais plus
régulières et plus évidentes; les écailles couvertes de
granulations fines , celles de la tête les ayant un peu
plus fortes.
Les écailles qui revêtent le sous-opercule , l'in-
teropercule et même la branche de la mâchoire in-
férieure, sont plus serrées et plus grandes que sur le
labre hérissé et les espèces voisines. Celles de la base,
1 52 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de la dorsale et de l'anale, et surtout celles de la
portion épineuse , remontent assez haut sur la na-
geoire. J'en compte trente-deux ou trente-trois entre
l'ouïe et la caudale.
La ligne latérale est très-courbée, parallèle au dos;
elle ressemble h celle du cossyplie maldaque. Les
rayons de la portion molle de la dorsale atteignent
à la moitié de la longueur des tronçons de la queue,
quand ils sont couchés sur le dos de cet organe. La
caudale est coupée carrément; la ventrale se prolonge
un peu en filet.
D, 12/10 j A. 3/12; C. 15; P. 15; V. 1/5.
La couleur du corps, conservé dans l'alcool, est
jaunâtre, un peu rembrunie sur le dos et sur la tête;
mais ce qui frappe le plus dans la disposition des
teintes, ce sont les grosses taches noires, au nombre
de cinq , qui sont sur le corps : une première occupe
les trois premiers rayons épineux de la dorsale; une
seconde, plus large, va du dernier rayon épineux au
quatrième mou de celte même*dorsale,une plus grande
est sur l'anale, étendue du bord postérieur de la troi-
sième épine, au bord antérieur du sixième rayon mou;
une quatrième, plus grande, à l'insertion de chaque
pectorale, dessinée même en arc noir sur la base des
rayons de cette nageoire , colore toute l'aisselle. En
arrière de cette tache et sous la nageoire en est une
autre blanc de lait. La portion épineuse de la nageoire
du dos a un fin liséré noir ; la dorsale molle, la cau-
dale et la pectorale n'ont aucune tache, mais on voit
de gros points grisâtres sur l'anale et sur la ventrale,
où ils sont plus nombreux et plus serrés.
CHAP. H. COSSYPHES. 1 55
Nos individus sont longs de sept pouces.
M. Dussumier, qui les a rapportes, a décrit
les couleurs sur le frais, et ses notes nous.
prouvent que
les taches noires n'ont pas changé j mais il indique
la tête, les opercules et le dos, depuis le bout du
museau jusqu'au dernier rayon de la dorsale, d'un
beau brun-rouge. Les trois premiers rayons épineux
sont d'un beau noir, et les autres sont brun rougeâ-
tre et leur membrane est rouge; la queue et le ventre
sont blanc brunâtre; la caudale, de cette teinte, a
les rayons extérieurs noirs; l'anale a sur im fond
verdâtre clair une bande longitudinale blanc de lait;
les ventrales sont mouchetées de brun, et les pecto-
rales sont rosées; l'iris de l'œil est jaune.
M. Théodore Delisse nous a aussi donné un
dessin de ce poisson; il colore les pectorales
en jaune, la portion molle de la dorsale en
orangé, et le ventre en rosé. On voit d'ail-
leurs que pour tout le reste le dessin ressemble
aux observations faites par M. Dussumier, et
que ces deux naturalistes ont examiné deux
variétés très-voisines l'une de l'autre.
MM. Retlitz et Mertens ont aussi rencontré
ce poisson dans leur voyagé, et ils nous ont
communiqué les dessins qu'ils ont faits a Ulea.
Sur l'un, le poisson est d'un carmin clair sur
le dos; les lianes sont jaunes, tachetés de
i 54 LIVRE XYf. LABROÏDES.
rouge; la portion molle de la dorsale, la cau-
dale et la pectorale, jaunes, avec l'intervalle
entre la base de leurs rayons rouge clair ou
orangé; et il n'y a pas de tache sur le de-
vant de la dorsale épineuse. Sur l'autre, le dos
a une teinte carmin remÎ3runie, semblable à
celle de nos dessins faits à l'Isle-de-France ;
le corps est rose, la caudale orangée et bor-
dée de rouge foncé. Les nombres des rayons
sont les mêmes. Il est bien évident que ces
différences ne peuvent qu'indiquer des va-
riétés.
Le ÇOSSYPHE RUBAN.
{Cossjphus tCGfiiatuSj nob. ; Lahriis tœniatus ,YXm\)
Nous plaçons à la suite de ces espèces deux
petits poissons de la mer Rouge, dont l'un a
été connu par le voyage de M. Ebrenberg.
Il a le museau pointu, la lêie entièrement couverte
d'écaillés, et la forme ramassée des espèces précé-
dentes ; les nombres sont un peu différens.
D. 8/12; A. 3;il; C. 14; p. 13; V. 1/5.
M. Ehrenberg l'a représenté sur le vivant, et le
poisson a le corps noir, orné de chaque côté de
deux bandes longitudinales bleuâtres, l'une passant
au-dessus de l'œil et l'autre au-dessous. La pectorale
est couleur de chair ; au pied des quatre premiers
CHAP. II. COSSYPHES i 35
rayons épineux de la dorsale , il y a sur la mem-
brane une tache jaune.
Ce petit poisson, long de deux pouces et
demi, a été donné à M. Ehrenberg par les
pécheurs de Massuah, sous le nom de karan.
Le COSSYPHE A QUATRE RAIES.
( Cossjphus quadrilineatus , nob. ; Lahrus quadrili-
neatuSj Ruppel.)
Une espèce très -voisine de la précédente^
si même elle n'en est pas une simple variété,
est le poisson que M. Ruppel^ a représenté et
décrit sous le nom de labrus quadrilineatus.
Les formes sont très-semblables, seulement la dor-
sale et l'anale paraissent plus basses dans celui-ci,
et la caudale un peu plus concave; les nombres sont
les mêmes.
D. 8/12; A. 3/11, etc.
M. Ruppel représente, sur un fond bleuâtre ar-
doisé, le poisson peint de deux lignes bleuâtres
claires, tracées l'une au-dessus, l'autre au-dessous de
l'œil. L'intervalle qui les sépare est noir très-foncé,
et cette bande, élargie sur la caudale, en colore toute
la base, et tranche nettement sur celte nageoire par
un bord convexe opposé à la concavité dul)ord de
1. JSeue IVirbelthiere zu Faun. Abjss. , Wie Lief. , S. Ç> ,
Taf.i,Fig.y,
156 LIVRE XVI. LABROÏDES.
la membrane et des rayons. Les pectorales et les
autres nageoires sont bleuâtres. Les taches jaunes
existent sur la partie antérieure de la dorsale, mais
la portion molle de cette nageoire et celle de l'anale
ont du noir à leur extrémité et sont bordées de blan-
châtre.
Ce petit poisson ne dépasse pas deux pou-
ces et demi. Il a été observé sur les côtes cor-
ralligènes de Massuab.
Le COSSYPHE PARTAGÉ.
(Cossyphus dimidiatiis , nob. ; Lahriis latovittatus :,
Rappel. )
M. Ruppel a encore une espèce du même
genre et voisine de la précédente, représentée'
sous le nom de lahrus latovittatus.
En effet, les formes générales sont semblables,
mais le corps est plus alongé; d'ailleurs, toutes les
parties de la tête sont de même garnies d'écaillés.
Les nombres sont un peu différens:
D. 9/11; A. 3/10; C. 15; P. 13 ; V. 1/5;
et les couleurs rendent encore la distinction des
deux espèces plus facile. Une large raie longitudinale,
d'un noir très-profond, part du bout du museau,
traverse l'œil, et par conséquent toute la tête, et se
rend, .sans interruption et en s'élargissant , jusqu'à
l'extrémité de la caudale , qui n'a plus que ses deux
1. Neue JVirbelthiere zu Faun. Jbjss., Wie Lie/., S. 7,
Taf. 2, Flg. 2.
CHAP. II. COSSYPHES. 437
bords d'une couleur ditrérente. La moitié antérieure
du corps est d'un brun châtain, un peu plus foncé
sur le dos que sur le ventre. Cette teinte est étendue
sur toute la portion épineuse de la dorsale, et sur
toute la partie de même hauteur de la nageoire
molle ; le reste de la membrane , qui dépasse la
hauteur des rayons épineux, est bleu céleste. L'a-
nale a de même la base des rayons brune , comme
la dorsale, et la moitié marginale bleue. Cette cou-
leur est celle du corps entre l'anale et la portion
molle de la dorsale, du tronçon de la queue et des
bords supérieur et inférieur de la caudale. Ce bleu
est fondu d'une manière insensible avec le brun de
la partie antérieure du tronc. Le bord inférieur de
la queue, compris entre l'anale et la caudale, est noir,
aussi foncé que la bande latérale.
M. Ruppel n'a trouvé qu'un seul individu
de cette espèce , long de deux pouces trois
quarts, près de Tor, entre les coraux.
J'ai dû changer le nom spécifique de ce
poisson; car, si la description et la figure du
célèbre voyageur de Francfort sont pleines
de justesse et de vérité, il n'en est pas de même
de sa synonymie. J'ai peine à comprendre
comment un observateur aussi exact que
M. Ruppel a pu persister dans la croyance,
que le petit poisson qu'il avait sous les yeux
était de la même espèce que le lahre large
raie de Lacépède, ou, ce qui revient au
158 LIVRE XVI. LABROÏDES.
même, que le malacanthe tubleu de Flsle-de-
France. M. Guvier a parfaitement déterminé et
le genre et l'espèce de ce poisson curieux, fort
beau, qui atteint à peu près dix-huit pouces,
et que Commerson a si bien fait connaître par
le dessin qui a servi à M. de Lacépède pour
établir son labre large raie. Outre la diffé-
rence générique , si bien exprimée dans la
gravure de Lacépède , de n'avoir que deux
rayons grêles et simples, et non pas neuf
épines dorsales, les couleurs ne sont pas dis-
posées à permettre l'identité de cette figure
avec celle de M. Piuppel, car la ligne noire de
ce labre large raie ne passe pas sur la tête : elle
se rétrécit plutôt sur l'arrière du corps, qu'elle
ne s'y élargit. Il était aisé à M. Piuppel de se
faire une idée juste du tubleu de Flsle-de-
France, en consultant Texcellente figure co-
loriée, que MM. Quoy et Gâimard en ont
donnée dans l'Astrolabe (pi. 20, fîg. 3).
Je ne crois pas non plus que le parallys
de Renard, cité, quoique avec doute, le soit
convenablement ; car c'est un poisson d'un
genre différent de celui de M. Ruppel et du
labre large raie. Il était encore facile de s'en
faire une idée claire , qui eut évité ces rap-
prochemens erronnés, en consultant la figure 4
de la planche 19 de l'Astrolabe.
CHAP. H. COSSYPHES. 159
Le COSSYPHE MAILLÉ.
{Cossjphus reticulqtus 3 iiob.)
#
Nous trouvons encore parmi les poissons
rapportés du Japon par M. LangsdorfF, et
étudies par moi au Cabinet de Berlin ,
une espèce à corps oblong, dont la tête a un peu plus
que le quart de la longueur totale; ayant quatre dents
canines très-fortes à l'extrémité de chaque mâchoire,
les mitoyennes plus petites; les dents insérées sur le
bord externe des branches petites, obtuses, courtes,
sans dents récurrentes à l'angle de la bouche. La mâ-
choire est épaissie en un bourrelet osseux assez con-
vexe, et derrière lui sont des petites dents grenues sur
plusieurs rangs, surtout nombreuses à la mâchoire
supérieure. La joue est couverte de petites écailles; le
limbe du préopercule est nu, sans dentelures; l'oper-
cule et l'interopercule sont écailleux ; la base des épines
de la dorsale est aussi recouverte par les grandes écailles
du dos; mais les rayons mous sont plus dégagés, ainsi
que l'anale. Ces deux nageoires et la caudale sont ar-
rondies. Les nombres sont ceux de nos cossyphes.
D. 12/10; A. 8/12; C. 16; P. 18; V. 1/5.
La ligne latérale est tracée par le tiers de la hau-
teur du corps, composée de tubulures formant une
série interrompue , et dont l'extrémité postérieure
s€ relève vers le dos. Je compte quarante -huit ran-
gées d'écaillés entre l'ouïe et la caudale; elles sont
lisses et peu épaisses.
140 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La couleur paraît jaunâtre et était probablement
rougeâtre, avec des taches de rouille en croissant,
étroites, verticales, sur chaque écaille, et dont la
convexité paraît tournée du côté de la tête ; ils for-
ment un réseau à mailles serrées sur tout le corps
du poisson. Sur le ventre et surtout au-dessus de
l'anale on voit huit à neuf traits jaunâtres longitu-
dinaux et parallèles. Les nageoires sont brunes, assez
foncées. L'individu est long d'un pied.
Cette espèce tient à ce genre par ses dents,
ses écailles de la base de la dorsale, les nombres
de ses rayons; et paraît même se rapprocher
des maldaqaes de l'Isle-de-France {^cossyplius
maldat o\x cossjphus atroluiiihus^ \ mais sa
forme alongëe, la liberté de la partie molle
de ses nageoires du dos et de l'anus, lui don-
nent aussi quelques affinités avec nos labres.
Le COSSYPHE AUX PETITES ÉCAILLES.
( Cossjphus viicrolepidotuSj nob. )
Nous croyons devoir placer à côté de ce
cossyphe du Japon, une espèce que Bloch a
figurée (pi. 292) sous le nom de labrus mi-
crolepidotus.
C'est un poisson de forme alongée, semblable à
celui que nous venons de décrire , ayant toute la
joue, et même le limbe du préopercule, couvert
d'écaillés : celles du corps sont de grandeur mé-
diocre. La dorsale et l'anale sont à la vérité toutes
CHAP. II. COSSYPHES. 141
dégagées; elles sont coupées carrément. La caudale
est arrondie.
D. 17/13; A. 3/10; C. 18; P. 12; V. 1/5.
Bloch le peint, mais probablement de fantaisie,
de couleur jaune verdàlre, rembrunie sur le dos,
et avec la dorsale et l'anale brunâtres; les autres na-
geoires sont transparentes.
Nous ne pouvons avoir que des doutes stir
cette espèce, que Bloch n'a connue que par
le dessin qu'un peintre en avait fait au cabinet
de M. Lincke, à Leipzig, et dont on igno-
rait la patrie.
Son affinité avec la précédente m'a déter-
miné à lui assigner cette place.
Le COSSYPHE A RUBAN NACRÉ.
{Cossjphus aïbo-tœniatus, nob.)
J'avais, dans le recueil des dessins manus-
crits que nous avons pris tant de soins à réunir,
une figure de poisson faite aux îles Sandwich,
peu arrêtée, sans aucunes notes, et que j'avais
considérée comme une variété de notre cos-
sjplius atrollunhus ^ mais au moment de livrer
cette feuille à l'impression, j'ai trouvé dans les
belles collections que MM. Eydoux et Sou-
leyet ont faites avec un zèle et une activité
si dignes de la reconnaissance des naturalistes,
deux individus de ce même cossyphe, qui
142 LIVRE XVI. LARROÏDES.
nous démontrent que le dessin peu fini de
MM. Quoy et Gaimard représente une nou-
velle espèce de cossyphe.
Elle ressemble pour la forme générale à notre
cossyphus atrolumbus ; sa lête fait le tiers de la lon-
gueur du corps, la caudale non comprise, et qui
entre pour un sixième dans cette mesure générale;
les deux màclioires sont égales, armées sur le devant
de quatre canines crochues; les dents qui suivent
sont coniques , mais peu longues; il y a dans l'angle
un crochet recourbé en avant, mais qui ne dépasse
pas la lèvre; la bande des granulations est assez
large.
Le préopercule est très-finement dentelé, couvert
de petites écailles, sans limbe nu; le bord membra-
neux de l'opercule est assez large; les écailles im-
briquées sur l'os et sur le sous-opercule , sous les-
quelles il se confond avec le supérieur, sont larges;
j'en vois aussi sur l'interopercule. La ligne latérale
est faiblement rameuse, arquée jusqu'à la fin du
corps parallèlement au dos.
La dorsale est presque entièrement couverte d'écail-
lés; sa portion molle est arrondie, ainsi que l'anale.
La caudale est concave, sans donner de prolonge-
ment de ses angles supérieur et inférieur. La pecto-
rale est aussi plus courte et plus arrondie. Les ven-
trales se terminent en filets. Je compte trente écailles
entre r0)p.ie et la nageoire de la queue.
D. 12/10; A. 3/i-2; C. 14; P. H; V. 1/5.
Ce cossyphe a , comme notre cossyphus atrohim-
CHAP. II. COSSYPHES. 145
bus^ une lâche noire sur le dos de la queue, et qui
s'avance jusque sur les cinq derniers rayons mous
de la dorsale; une autre tache noire, sur la mem-
brane, unit les trois premières épines de la dor-
sale; elle est plus marquée entre la seconde et la
troisième. Sur un fond qui paraît avoir été rouge,
le corps est rayé de vingt et une lignes brunes, dont
sept sont au-dessus de la ligne latérale.
La tête a au-dessous de l'œil un large ruban nacré
qui s'étend jusqu'au lobe membraneux de l'opercule.
Quatre raies brunes sont entre les yeux , et au tra-
vers de l'œil est un large ruban brun. Le ruban na-
cré est liséré en dessous d'un Irait brun, et un autre,
de pareille nuance, va obliquement, de l'angle de la
bouche , au bas de l'interopercule. Tout le dessous
de la gorge est tacheté de brun sur un fond blanc
plus ou moins nacré. La dorsale, l'anale et la cau-
dale, sont d'un beau jaune citron; la nageoire de
l'anale a un fin>. liséré noir ; les pectorales étaient
probablement rougeâtres, la ventrale jaune, bordée
en avant de noirâtre.
Les deux individus de ce cossyphe , rap-
portés de Sandwich , ont sept pouces de long.
Le Cossyphe de Schoenlein.
{Cossjphus Schœnleinii , Agassiz.)
Enfin, je puis encore ajouter à ce genre une
superbe espèce, que je dois à la complaisance
de mon célèbre ami, M. Agassiz. Il tient ce
i44 LIVRE XVI. LABROÏDES.
poisson des Célèbes, et il a bien voulu m'en
communiquer une ligure coloriée, d'après la-
quelle je donnerai la description suivante.
Ce cossyphe ressemble assez, pour la force de ses
dents et la forme trapue de son corps, à notre cos-
syphus atrohinibus. Il a cependant le museau encore
plus obtus j la hauteur du corps fait le tiers de sa
longueur totale; la tête est contenue le môme nom-
bre de fois dans celle du tronc, la caudale exceptée,
laquelle est courte et comprise huit fois et demie dans
la longueur totale. La ligne du profil descend presque
verticalement ; l'œil est médiocre et situé au haut
de la joue, à distance du bord du front. La joue,
l'opercule, le sous-opercule et l'interopercule ont des
écailles; mais je n'en vois pas sur le limbe du pré-
opercule. La dorsale est basse; la pectorale est grande;
la caudale a le bord convexe.
D. 13/7 ; A. 3/9; C. 14; P. 15; V. 1/5.
Les écailles du tronc sont grandes, fortes, amin-
cies au bord et linéolées; j'en trouve trente entre
l'ouïe et la caudale, trois seulement au-dessus de la
ligne latérale , dix au-dessous.
Cette ligne latérale offre un caractère que je n'ai en-
core observé que dans les scares, c'est d'être rameuse
et subdivisée en nombreuses branches sur les écailles
antérieures; le nombre des divisions diminue à me-
sure que l'on approche de la queue, de telle sorte
que sous les derniers rayons de la dorsale la ligne
latérale n'est plus composée, comme à l'ordinaire,
que de simples tubulures droites.
CHAP. II. COSSYPHES. 145
La couleur paraît avoir été uniforme, et brune,
lavée de jaune avec quelques traits verticaux plus
foncés sur les écailles. Les nageoires , plus jaunes, ont
des taches brunes.
M. Agassîz, en recevant ce poisson parmi
ceux collectes aux Gélèbes par M. le D/Bessel,
de Berne, qui est mort malheureusement dans
son voyage , a cru devoir dédier cette belle
espèce, nouvelle dans la famille deslabroïdes,
à M. le D/ Schœnlein , de Zurich , un des plus
célèbres médecins de l'Allemagne ; je me suis
empressé de m'associer aux sentimens du
savant professeur de Neufchâtel.
o
lô. 10
146 LIVRE XVI. LABROÏDES.
CHAPITRE III.
Des Crénilabres.
M. Guvier , en établissant le genre des cré-
nilabres sur les nombreuses espèces de la-
broïdes delà Méditerranée à préopercule den-
telé, avait formé un groupe de poissons qui
se distinguait des labres de nos côtes, mais
qui n'offrait plus des caractères assez précis
et assez tranchés de ceux des espèces étran-
gères , réunis encore par l'illustre auteur du
Règne animal dans le genre des labres. J'ai cher-
ché à remédier à cet inconvénient, et j'ai été
assez heureux pour en trouver le moyen dans
l'observation que j'ai faite sur la différence des
dents qui m'ont servi à caractériser le genre
cossyphe, dont je viens de faire connaître les
espèces.
Ces recherches ont dû me faire changer un
peu la méthode que M. Cuvier avait tracée
pour ses labroïdes , et m'a fait rapprocher les
crénilabres des labres, et surtout des cossy-
phes, avec lesquels ces espèces ont les plus
grandes affinités. On voit en effet qu'elles
tiennent des deux genres. Les crénilabres
seront pour moi les labroïdes a préopercule
dentelé, à lèvres épaisses et charnues, à dents
CHAP. m. CRÉNILABRES. 147
coniques sur un seul rang à chaque mâchoire,
à dorsale épineuse libre et sans écailles, à ligne
latérale non interrompue. Ils différeront des
cossyphes par l'absence de dents grenues sur
les mâchoires , et par le manque d'écaillés sur
la dorsale et l'anale.
J'ai signalé le caractère de la ligne latérale
non interrompue, parce qu'il rattache aussi,
selon moi, les crénilabres aux labres, et qu'il
les éloigne des chromis , des cicliles et des
autres genres a ligne latérale divisée, comme
les cheilines. Ces crénilabres forment un des
genres les plus difficiles à étudier, à décrire,
et dont on connaît un assez grand nombre
d'espèces, pour la plupart encore mal détermi-
nées. La monographie que j'en publie aujour-
d'hui en fait connaître un plus grand nombre
que les auteurs qui m'ont précédé. Ce sont
surtout les naturalistes qui écriront sur les pois-
sons de la Méditerranée, qui devront corriger
et améliorer cette lacune dans notre Ichthyo-
logie. Je dois dire que les ouvrages de M. Risso
n'ont pas du tout éclairé cette famille , et
n'ont pu me servir de guide assuré. Le prince
Ch. Bonaparte n'en a pas encore parlé dans sa
Faune d'Italie; mais comme il a bien voulu
me communiquer les différentes espèces qu'il
en avait rassemblées, pour préparer le travail
1 48 LIVRE XVI. LABROÏDES.
que nous attendions de lui avec impatience,
je crois que le mien offrira encore aux natu-
ralistes des documens neufs et précieux.
Je viens de parler des espèces de la Médi-
terranée, parce qu'en effet, c'est dans cette
mer que ces poissons abondent. Nous en avons
moins dans notre océan du Nord, et je n'en
connais encore qu'un petit nombre, probable-
ment originaire des mers étrangères, mais dont
je ne puis désigner avec exactitude la patrie.
On voit donc que les crénilabres, comme les
labres, sont des poissons de nos zones tempé-
rées, et les seuls représentans nombreux des
autres labroïdes, qui vivent pour la plupart
dans les mers des climats intertropicaux.
Bloch en avait placé quelques espèces dans
son genre des lutjans, et avait été en cela suivi
par Lacépède; mais on a déjà vu pourquoi
nous nous sommes décidé à supprimer cette
dénomination de lut j an y appliquée à ce genre
formé contre les principes de la méthode na-
turelle. M. Risso avait aussi suivi ces erremens
dans la première édition de son Ichtliyologie
de Nice , mais il s'est corrigé dans la seconde ,
en adoptant la nomenclature et la méthode du
Bègne animal.
Les caractères que j'ai donnés plus liant, nous
feront encore réformer le genre des crénilabres
CHAP. III. CRÉNILABRES. 149
de M. Cuvier; car il y laissait des espèces qui
ont derrière leur rangée de dents coniques ,
un second rang de dents, avec plus de trois
rayons épineux à l'anale , tel que son crenila-
hrus exoletus [lahriis exoletus Lin.) j et d'autres
qui ont une bande de dents en velours, le cre-
nilabrus cornubiiis y me paraissent devoir être
séparés du groupe auquel je réserve le nom
de crénilahre.
Le CrÉNI LABRE PAON.
{Crenilahriis pa^o, nob.; Pavo, Salv.; Lahriis pavOy
Brùnn. , mais non Linné. )
Salviani a appliqué à ce brillant labroïde,
si fréquent sur les marchés de Rome, le nom
de pavo f qu'il a emprunté de passages de
Philostrate et d'Isidore, où sous ce même nom
sont désignés des poissons non moins différens
par l'espèce que par leur séjour, puisque c'est
dans les eaux douces du Phase que Philostrate
les fait vivre.
Le vert mêlé de rouge et de jaune, dont le
crénilabre de la Méditerranée est paré, justi-
fie bien mieux le nom vulgaire de papagello
(perroquet), sous lequel, suivant Salviani,
notre poisson est désigné à Rome. Mais ce que
nous devons nous hâter de dire, c'est que la
figure de cet auteur est une des meilleures
i50 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de son livre, et certainemeiit la plus belle et
la plus fidèle représentation de notre espèce,
et que cependant les naturalistes nomencla-
teurs ont peu profité de ce document pour
en fixer les caractères.
Aldrôvande * a reproduit la figure du natu-
raliste romain, en même temps que d'autres,
moins bonnes, prises de Rondelet ou de Bé-
lon; mais il en a donné aussi une qui lui
est propre et qui est préférable à celles de
ces deux auteurs, mais inférieure à celle de
Salviani. On ne peut en effet douter que sous
son turdiis secundus^ il n'ait eu l'intention de
représenter notre espèce. Je ne vois pas ce-
pendant que les nomenclateurs aient reconnu
et cité cette figure d'Aldrovande.
Toute mauvaise qu'est la représentation
donnée par Bélon, je crois encore que c'est
à notre crénilabre qu'il faut rapporter la fi-
gure (p. 160) à laquelle il a imposé les noms
de jc/jcAa ou de turdus. La tache qui est au-
devant de l'œil, les séries de points le long des
flancs et ceux des nageoires, me confirment
dans cette opinion.
Je rapporte ces détails, parce que je ne puis
1. Aldrôvande, De pisc- , fol. 29.
2. Ibid., p. 17.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 1S1
admettre avec lui que ce soit le phjcis des an-
ciens, auquel Ovide * fait allusion dans ce vers :
jétaue ai^ium diilces iiidos imitata sub undis.
Bëlon rappelle ensuite la tradition qui s'y
rattache, que c'est le seul poisson qui se
construise un nid composé d'algues marines,
et où il dépose ses œufs. Comme les auteurs
modernes parlent tous de la manière de frayer
de notre crénilabre, et que nous ne trouvons
rien qui puisse faire croire à l'habitude de
construire un nid, attribuée ainsi par Bélon
à ce poisson , nous restons dans l'opinion que
nous avons émise dans l'histoire des gobies^,
que c'est dans une espèce de ce dernier genre
qu'il faut chercher le phjcis.
Rondelet, qui nous fait ordinairement con-
naître si bien les poissons de la Méditerranée,
nous laisse dans la même incertitude. Les fi-
gures de ses deux premiers lourds^ me sem-
blent représenter des variétés de notre espèce.
Je la reconnais à son museau garni de lèvres
épaisses , à sa tache noire au-dessus de la pec-
torale, qu'il dit être d'un beau jaune doré,
et enfin à ce qu'il regarde son poisson comme
1. Ovide, //«//(£«/., vers 12 2.
2. Cuv. Val., Hisl. nat. des polss., l. XII, p. 7.
S. Rondelel . De pisc.y 1. 4} c. 6, p. 17^ et 175.
1 52 LIVRE XVI. LABROÏDES.
le pa^^o ou le merlo de Rome , ou le roqueau
de Marseille.
Ce qu'il ajoute dans son texte des couleurs
et de certaines parties caractéristiques, comme
de teinte jaune des pectorales, semble égale-
ment justifier ce rapprochement.
On ne sera point étonné de retrouver plu-
sieurs fois dans ce même ouvrage le poisson
dont nous parlons, quand on a observé les
variétés si différentes sous lesquelles on le
rencontre. Quant aux déterminations ou aux
synonymes grecs ou latins, j'ai déjà dit, page
ig, combien il est difficile de les appliquer
avec quelque certitude.
Gesner ne nous a laissé aucun document
original.
Willugliby* a reproduit, dans une copie
élégante et fort exacte, la figure de Salviani;
mais nous avons déjà vu que cet auteur a pris,
avec doute, ce pai^o pour un synonyme de
son tiirdus perbelle pictus, qui est évidem-
ment une description fort bonne du lahrus
mixtus.
En même temps il a donné une description
non moins exacte du poisson qui nous occupe
en ce moment, au §. i.% ch. 24? p. 3 19, de ses
turcli minores.
1. Willughbj, De pisc, tab. X, 5.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 155
Il est impossible de se mëprendie un seul
instant à la description de son turdus vulgatis-
simus tinca marina Fenetis.ie dois me hâter
de dire que je n'ajoute pas une très-grande foi
à toute la synonymie vulgaire qui y est annexée ;
car je ne vois pas dans l'article de Willughby,
qui a décrit beaucoup de poissons de la Médi-
terranée d'après nature, que celui dont nous
traitons ici soit des côtes d'Angleterre.
Artedi, qui a plus travaillé sur les matériaux
de Willughby que sur la nature, a fait une si
grande suite de confusions dans tous les rappro-
chemens de cette nomenclature, qu'il est im-
possible d'appliquer ses descriptions à telles
ou telles espèces. En effet, son sixième labre
serait, par les citations de Salviani, notre cré-
nilabre; mais comme il ajoute à ses synony-
mes le turdus perhelle pictus de Willughby,
il fait de son espèce un être complexe et ima-
ginaire , que les associations de Linné ont
encore rendu plus confus.
En même temps Artedi qui prenait d'a-
bord, pour sa première espèce, la très-bonne
description que nous venons de citer de
Willughby, gâte tout de nouveau dans sa
synonymie; car à sa neuvième espèce il asso-
cie le douzième tourd de Rondelet, qui est
indéchiffrable , mais certainement poinl de
454 LIVRE XVI. LABROÏDES.
notre espèce. Ce premier labre du genre est
devenu avec le neuvième de la synonymie le
labrus tinca de Linnë (i ?,.^ èdit.). Il me semble
donc que l'on pourrait regarder le lahrus tinca
comme étant en quelque sorte , par la première
pensée d'Artedi, le nom qui doit être attri-
bue à l'espèce décrite dans ce chapitre.
Je viens de dire que Linné avait ajouté
encore aux fautes d'Artedi relativement au
sixième labre de sa synonymie , être déjà com-
plexe. En effet, Tillustre auteur du Sjstenia
naturœ a pris cet être, déjà rendu imaginaire
par Artedi, pour en faire son lahrus pavo,
en y ajoutant celui qu'Hasselquist décrit avec
la plus grande exactitude sous ce même nom.
Or, ce lahrus pavo est une de nos girelles,
assez abondante dans la Méditerranée, à queue
fourchue, et qui a été ensuite vue par des
naturalistes lécens, qui l'ont décrite comme
une nouvelle espèce. C'est même sur la des-
cription d'Hasselquist que la phrase caracté-
ristique a été rédigée par Linné, et c'est ce
qui explique pourquoi il a donné à son pois-
son le caractère de caucla hifurca.
C'est aussi à cette même source que M. de
Lacépède a puisé la description de son labre
paon, et qu'il a pu l'orner de toutes les figures
brillantes de son style, bien que le synonyme
CHAP. III. CRÉNILAliRES. "1^5
d'Hasselquist vienne après toutes les citations
tirées d'Artedi.
Shaw a de même reproduit ce labre paon
avec toutes ces fautes, mais en y ajoutant
encore une qui me paraît lui être propre : il
fait venir son poisson de la Méditerranée et
de la mer des Indes.
Brùnnich avait cependant fourni à Gmelin
et à M. de Lacépède les moyens de réparer
les erreurs de Linné ^ car il a fait connaître*
d'une manière fort exacte le poisson de Sal-
viani en lui appliquant l'épithète de cet au-
teur, mais en faisant remarquer que le poisson
d'Hasselquist est différent. Or, ni M. de La-
cépède ni Gmelin et Blocli, qui ont pris plu-
sieurs de leurs labres à Briinnich, n'ont pas
cité celui-ci.
Peu de temps après, Forskal trouve le même
poisson dans l'Archipel, et il le publie comme
une nouvelle espèce sous le nom de lahrus
lapina y qui vient prendre place dans Gmelin
sous ce nom, et qui est reproduit par Lacé-
pède comme un lutjan, à cause des dentelures
du préopercule.
C'est aussi parmi les lutjans que nous le
retrouvons dans la première édition de Bisso,
1. Tisc. Mais., p. 49 j ri»° 66.
456 LIVRE XVI. LABROÏDES.
et en double emploi; car on ne peut douter
que le lutjan Geojfroj * ne soit le même que
son lut j anus lapina'^ j le premier est une des-
cription faite d'après nature sur un poisson de
cette espèce qu'il n'a pas su reconnaître dans
le second; ce qui n'a pas empêché M. Risso
de mettre en tête de son genre un labrus pai^o.
Dans sa seconde édition il change le nom
de genre en celui de crénilabre , mais il ne
corrige aucune de ces erreurs; et la figure en
est fort peu correcte.
Je retrouve encore une description, très-
exacte, dans le Fauna rossica de Pallas^ Cet
illustre savant le reconnaît pour le lahrus
lapina du naturaliste danois ; mais il lui donne
un nouveau nom, qui exprime la variété des
couleurs de ce poisson. Pallas l'a appelé lahrus
poljchrous.
J'ai dit que le lahrus tinca pouvait être
considéré comme étant le nom auquel on de-
vrait rapporter le poisson dont nous parlons
ici, et qui est le neuvième labre d'Artedi,
iàit sur la description de Willughby. Mais je
crois que Pennant s'est trompé sur son lahrus
tinca, et qu'il a encore embrouillé le sujet;
1. Risso, Iclit. de Nice, i." édil. , p. a6i , pi. 8, fig. aS. —
2. Ihid., p. 262. — 3. Pallas, Faun. ross., III, p. ^62.
CHAP. m. CRÉNILABRES. 157
car son old wife ou wrasse nous paraît appar-
tenir plutôt aux nombreuses variétés de notre
labrus bergylta.
Gmelin a donc encore plus altéré le lahrus
tinca de Linné et d'Artedi, en y adjoignant
l'espèce mal caractérisée de Pennant. M. de La-
cépède, ne trouvant pas dans les auteurs, sur
les indications de Gmelin, l'assertion que les
préopercules fussent dentelés, a laissé l'espèce
dans ses labres, en changeant un peu le nom
spécifique de Linné et en appelant son pois-
son labre tajicoïde; mais qui n'est pas le lut-
jan tancoïde de la première édition de Risso,
quoique celui-ci ait cité Pennant. Il eût mieux
fait de rapporter son espèce au labrus tinca de
Briinnich, dont Bonnaterre, et par conséquent
Lacépède, n'ont fait aucun usage, et qui est
bien différent de l'espèce de Linné; et j'ai
fait voir aussi plus haut comment Donovan a
donné, sous la fausse détermination de labrus
tinca, notre premier labre. J'aurais donc peu
éclairci cette nomenclature en reprenant pour
notre espèce le nom de crenilabrus tinca,
et j'ai préféré lui donner celui que Salviani
lui a d'abord assigné, et sous lequel Briinnich
en a laissé une description sur laquelle il ne
peut y avoir aucun doute.
Celle espèce, une des plus communes et des plus
458 LIVRE XVI. labroïdes.
brillantes de la Méditerranée, est un des labroïdes
qui a les lèvres les plus épaisses.
Le corps est elliptique et un peu plus élargi de
l'avant que vers la queue. La hauteur , prise aux
pectorales, n'est contenue que trois fois et demie
dans la longueur totale; l'épaisseur est des deux cin-
quièmes de la hauteur. Le profil, un peu concave
entre les yeux et le bout du museau, devient con-
vexe sur la nuque.
La longueur de la tête est un peu plus courte
que le corps n'est haut. Son museau est surtout
renflé par l'épaisseur des lèvres; il est recouvert par
le voile membraneux qui passe sur les sous - or-
bitaires , et qui s'étend au-dessus des lèvres , qu'il
cache entièrement. Ce caractère donne, comme je
l'ai dit, une physionomie particulière aux crénila-
bres. L'œil est petit, son diamètre n'étant à peine
que du sixième de la longueur de la tête; il est éloigné
du bout du museau de trois fois ce diamètre, et il
est placé sur le haut de la joue, sans que le cercle
parfaitement rond de l'orbite entame la ligne du
profil.
Le sous-orbitaire, du double plus long que large,
est au-devant de l'œil, et occupe à peu près deux
fois la largeur de l'œil.
Les deux ouvertures de la narine sont peu rap-
prochées l'une de l'autre, mais elles le sont de l'œil;
l'antérieure n'est qu'un très - petit trou rond ; la se-
conde, très -visible , n'a aucun rebord saillant ni
papille.
Le préopercule a le bord vertical un peu con-
CHAP. III. CRÉNILABRES. 459
cave, riiorizonlal légèrement sinueux, l'angle très-
arrondi, le limbe assez large, surtout l'inférieur.
Les crénelures du bord, qui sont toujours plus
prononcées sur les jeunes sujets que dans les adultes,
ne sont très-enfoncées que près-de l'angle et dans le
bas du bord vertical; ces dentelures se montrent
même sur des individus qui paraissent tout- à -fait
adultes et de la taille de huit à neuf pouces; mais il
faut avouer que dans cette espèce un grand nombre
d'adultes , ou même de taille moyenne , ont les
dentelures dubord effacées par le progrès del'ossifica-
tion, et que le caractère des crénilabres ne se montre
plus que rudimeniairement et par les stries dont le
limbe osseux de ce préopercule est ciselé. Je ne sais
à quoi attribuer cette variation, car elle ne dépend
ni de l'âge ni du sexe; et d'ailleurs les individus sans
crénelures ressemblent tellement , par tous leurs au-
tres caractères , à ceux qui ont le préopercule den-
telé, qu'il est impossible de faire de cette variation
un caractère spécifique et encore moins générique.
L'opercule et le sous- opercule sont confondus
sous les larges écailles qui les recouvrent; l'interoper-
cule n'en a que quelques-unes derrière l'angle ar-
rondi du préopércule. La joue porte cinq rangées
d'écaillés oblongues au-dessous de l'œil; derrière
cet organe il n'y en a qu'un seul rang; tout le reste
de la tête est garni d'une peau épaisse et criblée
d'une infinité de pores.
La bouche est fendue, à l'extrémité du museau, par
une ouverture peu étendue sur les côtés de la tète.
La mâchoire supérieure n'a que dix à douze dents
160 LIVRE XVI. LABROÏDES.
sur un seul rang et de chaque côté : l'inférieure en
a quinze ou seize. Ces dents sont recouvertes par des
lèvres remarquables à cause de leur épaisseur et de
leurs nombreux replis. La supérieure, élargie sur les
côtés, a huit plis longitudinaux en dessous; renflée
et arrondie en dessus, elle est garnie d'une crête
membraneuse sur son bord supérieur, qui senible
simuler une seconde lèvre couchée sous le large
voile membraneux qui s'étend sur le tout. La lèvre
inférieure forme d'abord un bourrelet couvert de
fines papilles serrées, en velours ras, le long des
dents; ce bourrelet se joint à celui du côté opposé.
Au-devant de la symphyse de la mâchoire est une lame
en ogive dont le sommet de l'angle est tourné vers
le bas. Un sillon profond sépare ce bourrelet d'une
lèvre épaisse sans pli, et qui porte sur son milieu
une crête membraneuse mince , mais plus large que
celle de la lèvre supérieure. A l'intérieur de la bouche,
les voiles membraneux du palais et de la mâchoire
inférieure sont épais, larges et plissés longitudina-
lement. Il n'y a d'ailleurs aucunes dents au palais, à
la langue , ni aux arceaux des branchies; les deux pre-
mières plaques sont supportées parles deux premières
branchies; leurs râtelures sont recouvertes de fines
villosités, formant un velours ras au - devant des
deux pharyngiens supérieurs. Ceux-ci sont également
entourés de papilles charnues, et portent chacun
une plaque triangulaire de dents arrondies en pavé,
qui correspondent à la pièce unique inférieure,
garnie de dents semblables, ainsi que cela existe
dans les labres. La langue est lisse et peu libre. Outre
CHAP. III. CRÉNILABRES. AG\
les quatre branchies il y a une lame branchiale oper-
culaire.
La membrane branchioslège est peu libre et réu-
nie, par un isthme assez large, à celle du côté
opposé. Cependant , comme cette membrane est
étendue, l'arc de la fente des ouïes est encore assez
grand. Les rayons branchiostèges sont au nombre
de cinq.
La dorsale s'élève au tiers de la longueur totale;
sa portion molle est arrondie, et plus haute que la
partie épineuse. La partie molle de l'anale corres-
pond à la même région de la dorsale : elle est plus
ovale; la caudale a ses angles arrondis; la pectorale
est ronde.
B. 5; D. 15/1 1 ; A. 3/9 ; C. 13 ; P. 14 ; V. 1/5.
Les écailles sont grandes et minces ; il y en a
trente-quatre rangées entre l'ouïe et la caudale, et
quinze dans la hauteur. Chaque écaille a sa portion
radicale quadrilatère; l'éventail a vingt-quatre rayons;
la portion nue a le bord membraneux sans dente-
lures ni ciselures.
La ligne latérale est formée d'une série de tubes,
doubles sur chaque écaille et réunis en chevron ,
dont le sommet est du côté de la tête : elle est tracée
parallèlement au dos sur la quatrième rangée d'écaillés,
et s'infléchit sous la fin de la dorsale, pour se rendre
à la caudale par le milieu de la hauteur du tronçon
de la queue.
La couleur est très- variable. Nous voyons des indi-
vidus qui ont sur un fond verdâtre trois lignes de
taches rouges disposées en zig-zag; d'autres ont le
i3. 11
162 LIVRE XVI. LABROÏDES.
corps plus brun sur le dos, argenté sur le ventre, les^
taches rouges sont plus efTacées ; et sur d'autres ,
enfin, on voit une large tache brune ou vert foncé
au-dessus de la pectorale , et une seconde , plus ou
moins mal terminée, de chaque côté de la queue. Les
pectorales sont jaunes, les ventrales bleues, les autres
nageoires, mêlées de jaune et de rouge, sont couvertes
de nombreux points violets ou bleu céleste.
Quand le poisson habite sur les fonds vaseux ,
M. Risso dit que les couleurs semblent se salir et
que les points rouges s'effacent; il en a observé des
individus dont le corps est traversé par de grandes
bandes claires et obscures, et quelques-uns de ceux
qui sont conservés à l'esprit de vin, m'ont montré
des traces de cette disposition.
Pendant la saison des amours, le vert prend des
reflets dorés, et les taches rouges sont mêlées de
couleurs bleues , qui augmentent encore la richesse
des reflets de ce beau poisson. Mais la couleur
jaune des pectorales me paraît constante et servir
à le faire reconnaître dans les descriptions plus ou
moins vagues des auteurs.
L'examen des viscères, compares à ceux des
labres , ne nous a fait apercevoir que de légères
nuances.
Le foie est assez gros, verdâtre; le canal alimen-
taire se continue sans former d'abord une dilata-
lion bien marquée constituant l'estomac; la valvule
du pylore est vers le bas de cette première anse,
l'intestin grêle remonte dans l'abdomen vers le
CHAP. III. CRÉNILABRES. 165
diaphragme , se plie et se dilate ensuite en un très-
large rectum , séparé par un léger rétrécissement
marqué par la valvule de Bauhin. Les parois de ce
canal alimentaire sont partout très- minces.
La vessie aérienne est très-grande, arrondie en
avant, et à parois plus épaisses en cette partie qu'à
l'arrière , où elle est conique et pointue. Le repli
du péritoine, qui passe sous elle, est dense et fibreux.
Les reins sont épais et débouchent par deux uretères
courts dans une vessie urinaire assez grande et di-
visée en deux lobules.
Voici les observations que nous avons faites
sur le squelette de ce crénilabre.
Le crâne est légèrement arrondi à sa partie mi-
toyenne; une gouttière large, évasée et arrondie en
arrière, peu profonde, laisse glisser les branches
montantes des intermaxillaires. La crêle occipitale
mitoyenne est haute et triangulaire; mais les laté-
rales sont presque nulles, réduites à une sorte de
gros tubercule osseux, triangulaire, au-dessus de
la région temporale; sous lui est une fossette trian-
gulaire. Il n'y a pas de crête sur l'arrière de l'occi-
put, d'où il résulte que cette partie du crâne est
saillante en un cône tronqué, légèrement concave
en dessus, et séparée en deux par une carène obtuse
longitudinale, que l'on pourrait regarder comme l'ana-
logue de la crête longitudinale des labres. Les autres
pièces de l'opercule, ou celles qui l'avoisinent, n'offrent
pas de caractères qui n'aient déjà été signalés dans la
description générale des parties externes du poisson.
164 LIVRE XVI. LABROÏDES.
L'huméral et le radial font une large ceinture
sous la gorge; le radial surtout est très -large,
et séparé à sa pointe antérieure de l'huméral par
un très - grand trou rond. Le styléal est large et
plat.
Je compte quinze vertèbres abdominales et dix-
huit caudales. La première et la seconde sont très-
courtes et comme aplaties, les autres ont des apo-
physes transverses, assez longues, obliques de haut
en bas et d'avant en arrière; elles augmentent jus-
qu'à la treizième vertèbre; celles de la quatorzième
sont plus courtes, mais plus aplaties, et s'unissent
pour porter le premier interépineux de l'anale ; la
dernière, et même l'avant- dernière vertèbre cau-
dale , ont leurs apophyses épineuses élargies en
grand éventail. Les autres apophyses épineuses sont
longues et grêles. Les côtes sont aussi très-alongées ,
et leurs apophyses styloïdés égalent à peu près la
moitié de la longueur de la côte.
Les interépineux cfe la dorsale et de l'anale sont
larges, triangulaires, carénés sur leur face latérale,
et atteignent par leur insertion jusqu'à la moitié
de la longueur de l'apophyse épineuse, sur laquelle
ils s'insèrent.
Nos plus grands individus ont près d'un
pied.
L'espèce abonde dans la Méditerranée, car
il en est venu au Cabinet du Roi de tous
les points de cette mer où nous avons eu des
coirespondans ou des naturalistes qui ont
CHAP. III. CRÉMLABRES. 1 6Sr
bien voulu collecter des poissons pour noire
Musée. M. Cuvier en avait recueilli à Mar-
seille; M. Kiener nous a donné de fort beaux
individus pris à Toulon; nous en avons reçu
de Corse, par M. Payiaudeau; de Nice, par
MM. Risso et Laurillard; de Naples et de
Rome, par M. Savigny ; de Gènes, par M. Spi-
nola ; de Messine , par M. Bibron ; de Pa-
ïenne, par M. Constant Prévost; d'Athènes,
par M. Domnando; de Napoli de Romanie,
par M. Reynaud; du Bosphore, par M. Virlet;
d'Alexandrie , par M. Geoffroy Saint-Hilaire
et par M. Lefebvre.
M. de Laroche l'a rapportée d'Iviça. Il me
paraît même probable qu'on la trouve sur
les côtes d'Espagne, car je vois dans Cornide
im labre paon qui doit se rapproher de ce
labix)ïde, confondu avec d'autres espèces du
même genre. Mais je n'ai pas la preuve qu'on
la voie s'avancer dans notre Océan septen-
trional. Il me semble que si elle a été citée
par quelques auteurs comme originaire de la
Grande-Bretagne, c'est sur l'assertion de Wil-
lughby; et j'ai déjà fait observer qu'elle ne
mérite pas une grande confiance. Je ne la vois
pas citée dans l'Histoire des poissons d'Angle-
terre par M. Yarell, et les auteurs des Faunes
du Nord n'en font pas mention.
466 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Outre le nom âepapagelloj, déjà cité plus
haut, nous voyons que Biùnnich connaît notre
crënilabre sous la dénomination vulgaire de
roucao, à Marseille, qui à Nice devient rou-
ffiiiéj mais M. Risso dit aussi de son labrus
lapina qu'il s'appelle hla^dé. Ce nom de lapina
des Turcs de Constantinople , ou de 'Komivoc des
Grecs modernes, suivant Forskal, se change-
rait chez les Arabes en liassun, ce qui veut dire
beau. Mais je croirais volontiers que l'Arabe,
en montrant ce beau poisson à Forskal, se
servait de l'expression qui rendait son admira-
tion pour la beauté des couleurs, plutôt qu'il
ne lui disait le nom de notre crénilabre.
Pallas n'indique pas de noms vulgaires;
mais il le donne comme un poisson abondant
dans la mer Noire, qui se prend quelquefois
dans les filets en nombre considérable, sur-
tout du printemps à l'automne. C'est un pois-
son des plus recherché pour la table.
Pallas, qui en a vu tant d'individus à la
fois, regarde, comme nous, la couleur jaune
des pectorales et les taches des côtés de la
queue, comme étant caractéristiques au mi-
lieu des teintes si variées que prennent les
divers individus de cette espèce. Us varient
beaucoup suivant l'âge.
CHAP. 111. CRÉNILABRES. 167
Le Grénilabre mélope.
( Crenilahrus melopSj nob.; Labrus melops »\AnTi.)
La seconde espèce dont nous avons à par-
ler est non-seulement abondante dans la Mé-
diterranée, mais elle s'avance dans notre océan
Septentrional jusque sur les côtes de Nov-
wége. En effet, nous en avons reçu de nom-
breux individus de Martigues , par M. Dela-
lande; de Marseille, par M. Cuvier; de Nice,
par M. Laurillard; de Gènes, par M. Viviani;
de Naples, par M. Savigny; et des côtes bai-
gnées par l'Océan, il nous en est venu, du
Groisic, par M. Bâillon; de La Rochelle, par
M. d'Orbignyj de Brest, par M. Duméril; de
Saint-Malo, par M. le duc de Rivoli; de Gran-
ville , par M. Audouin , et de Riel par M. Boié.
Tous ces individus ont constamment seize
rayons épineux à la dorsale, et une tache
noire derrière l'œil; deux caractères qui nous
ont servi à reconnaître l'espèce dans le labrus
melops de Linné.
Ce crénilabre a le corps plus court que le précé-
dent, la ligne du profil plus droite. La hauteur n'est
que le tiers de la longueur totale. La tête est plus
courte; elle est comprise près de quatre fois dans la
longueur du corps. L'œil est proportionnellement
plus grand , son diamètre faisant le quart de la tête;
168 LIVRP: XVI. LABROÏDES.
il est éloigné du bout du museau d'une seule fois
ce diamètre: aussi le museau est-il beaucoup plus
raccourci. L'orbite est placé plus haut sur la joue;
car il touche un peu à la ligne du profil. La peau
du front s'étend de même au-dessus des lèvres; mais
elles sont peu épaisses : je ne vois que quatre ou
cinq petits plis à la supérieure, qui n'a point de crête
en dessus. L'inférieure a un bourrelet très-mince; elle
s'étend d'ailleurs assez sur les côtés ou en dessus de
la symphyse, quand la bouche est fermée. Les dents,
petites et presque égales, sont au nombre de cmq ou
six en haut et de chaque côté, et de six ou sept en
bas. Le voile membraneux de l'intérieur delà bouche,
soit sur le palais, soit au-devant de la langue, n'a
pas de plis.
Les crénelures du préopercule sont ici très-pro-
noncées dans tous les individus rassemblés dans
la collection du Roi. L'interopercule a plus d'écaillés.
La pectorale et la caudale sont arrondies. L'anale est
plus haute que la portion molle de la dorsale.
D. 16y9; A. 3/9; C. 13; P. 14; V. 1/5.
Je trouve trente et une écailles entre l'ouïe et la
caudale; ces écailles sont minces, un peu striées.
L'éventail a vingt rayons.
Dans la liqueur ils paraissent bruns ou roussâtres,
ayant derrière l'oeil une tache noire, des rayures
obliques et irrégulières sur les joues, (Jes points
brunâtres en séries longitudinales sur les côtés, une
petite tache noirâtre , plus ou moins effacée , près
de la queue; les ventrales de cette teinte; et cinq à
CHAP. III. CRÉNILABRES. 169
six grandes taches de même couleur sur la dorsale
et trois sur l'anale. Les flancs sont peints de séries
de points bleus alternant avec des points bruns ;
ceux-ci étaient très-pâles sur le ventre.
Mais sur le poisson frais les teintes sont tout
autres. Nous les avons prises sur des individus péchés
au Croisic. Le fond de la couleur était un jaune
olivâtre, plus ou moins mêlé d'orangé sur le ventre.
On voyait sur les cotés quatorze lignes longitudinales
foncées. La tête,' plus brillante que le corps, avait
de nombreuses rivulations de lignes vertes. La tache
derrière l'œil était bleu noirâtre. La portion épi-
neuse de la dorsale avait sur son fond jaune des traits
obliques bleus, l'un en liséré, l'autre à la base. La
portion molle avait ses rayons seuls jaunes, et sur
la membrane verdâtre il existait trois séries longi-
tudinales de gros points bleus. Sur le fond jaune de
l'anale, des ventrales et de la caudale les rivulations
étaient bleues- la pectorale avait sa base bleue, et
toute la moitié externe d'un beau jaune orangé.
Son foie est divisé en deux lobes grêles et alongés;
l'intestin se replie quatre fois; il n'y a pas de dila-
tation stomachale; le rectum est assez large et court;
la vessie natatoire est grande, comprimée, simple,
à parois fibreuses et argentées.
Je compte treize vertèbres abdominales et dix-
neuf caudales. Le dessus du crâne est plus bombé
que celui du crénilabre paon; sa gouttière antérieure
moins profonde; sa crête occipitale plus isolée et
triangulaire; l'huméral et le radial plus courts; le
styléal plus large.
170 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Nos individus ont depuis quatre jusqu'à
sept pouces de longueur.
L'espèce fraie en Avril, se nourrit de crus-
tacés qu'elle trouve sur les côtes rocheuses de
l'Océan où elle se tient j ses habitudes sont les
mêmes dans la Méditerranée.
La tache oculaire, qui se conserve même sur
les individus les plus décolorés par l'action de
l'alcool, me paraît bien prouver la justesse de
notre détermination en rapportant à cette es-
pèce le labrus melops de Linné. Il en a parlé
dès sa dixième édition , et dans le prodrome
du tome second du Musée du prince Adolphe-
Frédéric^; et il est même le seul naturaliste
qui ait caractérisé cette espèce, car ni Artedi,
ni Willughby, ni Rondelet, n'en font aucune
mention, quoiqu'elle soit commune sur nos
côtes de Provence.
Cependant M. Risso avait bien reconnu
le poisson de Linné, et dès sa première édition
il le place , conformément à la méthode de
M. de Lacépède, qu'il suivait, parmi ses lutjans,
quoique celui-ci, se bornant à copier Bonna-
terre, l'ait laissé parmi ses labres sous le nom
linnéen. Dans sa seconde édition, M. Risso
suit M. Cuvier, et il en fait un crénilabre.
1. Mus. Ad. Fr.prod., II, p. 78, n." 23.
CHAP. m. CRÉNILABRES. ^7\
Je dois dire cependant que M. Risso parle
d'une tache de la base de la pectorale que je
ne trouve pas dans les individus que je rap-
porte à cette espèce.
Je ne vois pas que la plupart des natura-
listes qui ont écrit sur les poissons des côtes
d'Angleterre, aient songé à retrouver le pois-
son de Linné. Ainsi ni Pennant, ni Donovan,
ni Turton, ni Jenyns, ni Fleming, ne citent
le lahrus melops. Je crois cependant que ce
dernier auteur a eu entre les mains un poisson
de notre espèce, qu'il a confondu avec le gib-
bons wrasse de Pennant. Celui-ci ne parle pas
de tache noire derrière l'œil, et M. Fleming
dit positivement^ ahove eacli eje a dusky se-
niilunar spot.
Quoique M. Yarell^ ne cite pas le labrus
melops, je suis très-porté à croire que son ^ilt
head ou Connor, ou golden maid, n'est autre
chose que notre espèce, il n'a oublié sur sa
figure ni les rayures des joues ni la tache noire
de l'œil. Mais ce ne peut être, comme il le
pense , le crenilabrus tinca, et encore moins
le labrus tinca de Linné ni celui de Fleming.
On concevra, par la discussion que nous avons
1. Fleming, Hisi. cf. brit. an., p. 209, n." 129.
2. Yarell; Brit. fish. , 1. 1, p. 293.
I 72 LIVRE XVI. LABROÏDES.
faite sur le lahriis tinca, que M. Yarell, et
plus récemment, ait eu quelque difficulté à
reconnaître les confusions qui partent déjà de
Willughby, qu'Artedi a augmentées et que
Linné a adoptées; et quoique M. Yarell ait eu
la sagacité d'excltire quelques-uns des syno-
nymes de Fleming, il aurait du oublier tout-
à-fait cette espèce nominale, que l'auteur' de
l'Histoire naturelle des animaux d'Angleterre a
rendue encore plus imaginaire, en lui adjoi-
gnant le goldsiimj de Jago et de Ray, et celui
de Donovan , qui diffèrent tous deux entre eux,
et dont le premier est même d'un autre genre.
M. Jenyns n'a pas été plus heureux, car son
lahriis tinca présente les mêmes erreurs de
synonymie, et la description me paraît être
du labre rone dAscanius.
Le Crénilabre rone.
{Crenilabrus rone, nob. ; Lahrus j^one , Ase.)
Je n'ai pu encore me procurer le poisson
dont le professeur Ascanius a donné une figure*
sous le nom de rone ou de carousse de mer.
Il le représente rouge foncé sur le dos et sur la
tête, argenté sur le ventre; les joues et les opercules
1. Fleming, Bisi. of. brit. an., p. 208, n." 128.
1. le. ver. nat. tab. XIV.
CHAP. m. CRÉNILABRES. 475
sont couverts de lignes et de rivulatlons vertes;
quelques traits rouges passent en bride sous la mâ-
choire inférieure ; les lèvres sont jaunes ; le dos est
couvert de points verts et le ventre de points rouges;
le rouge du dos s'étend sur les rayons supérieurs de
la caudale, qui est verdâtre et bordée de bleu pâle
liséré de rougeâlre; la dorsale a trois larges rubans
rouges longitudinaux, et les deux supérieurs se réu-
, nissent en avant sur la partie épineuse; la membrane
qui joint les rayons simples est jaune, passant au
verdâtre vers l'arrière; sur la portion molle les taches
sont vertes, et il y en a trois rangées; l'anale a la
même couleur que la partie de la dorsale qui lui
correspond, le bord rouge est seulement plus large;
la pectorale est chargée de points rouges; la ventrale
est bleue avec un trait rouge sur le milieu; il n'y a
aucune trace de tache noire derrière l'œil.
Voici les nombres tels qu'Ascanius les a comptés :
B. 5; D. 16/9 5 A. 3/9; C. 14; P. 14; V. 1/5.
L'individu figuré a six pouces de long, et
Ascanius dit que l'espèce ne devient pas plus
grande. Le nom norw^égien de ce poisson est
roriCj, et les Danois l'appellent strandkaroiisse.
Bonnaterre a introduit ce labre rone dans
l'Encyclopédie , et M. de Lacëpède l'y a copié.
Quoique Ascanius n'ait niaiY[ué aucunes den-
telures au préopercule , je ne doute pas que ce
poisson ne soit du genre des crénilabres,et j'ai
même beaucoup hésité à ne pas le considérer
]7A LIVRE XVI. LABROÏDES.
comme étant de la même espèce que le précé-
dent. Je vois cependant que M. Nilsson* le
regarde comme distinct et qu'il le range parmi
ses crénilabres. Je le trouve aussi mentionné
dans le Catalogue des poissons du Danemarck
de S. A. R. le prince Christian. Il a soin de
dire que c'est une espèce à part, mais rare
sur les côtes. Mais ce qui m'étonne, c'est Je
la voir citée par un observateur aussi exact ,
comme un labre, tandis que M. Nilsson en fait
un crénilabre. Miiller la compte aussi parmi
les poissons de son Fauna danica.
Je crois, aussi, que c'est un poisson de cette
espèce dont M. Jenyns^ a fait son lahrus tinca;
en effet, il le décrit
rouge et bleu, foncé sur le dos au-dessus de la ligne
latérale, plus pâle au-dessous, et tacheté de rouge sur
le ventre et sur la poitrine. La nuque et les opercules
verts, avec des rivulalions rouges, etc.
Il ne parle pas de taches derrière l'œil, et
les nombres sont tout-à-fait les mêmes.
Si ma conjecture est vraie, ce poisson se-
rait très-commun sur certaines côtes d'Angle-
terre, sur les fonds rocheux, frayant en Avril
et se nourrissant principalement de crustacés.
1. Nilsson, Prod. Ichth. Scand. , p. 77, n." 6.
2. Jenyns , Man. of. brit. vert. an. , p. 397 , n." yS.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 4 75
Je dois cependant faire remarquer que
M. Jenyns cite parmi ses synonymes le ^ilt
head de M. Yarell, qui a une tache derrière
l'œil, et que nous avons cru être, par cette
raison, de notre espèce du crenilahrus me-
lops. Comme M. Jenyns dit que son poisson
est un des plus communs de la famille des
labroïdes , cette remarque, jointe à sa cita-
tion, me laisse quelques doutes : M. Jenyns
aurait-il oublié la tache de l'œil? En tous cas,
la synonymie est entachée des erreurs que nous
avons déjà signalées; car ce poisson ne pouvait
être en aucune façon le lahrus tinca de Linné
ni de Willughby.
Le Crénilabre bossu.
{Crenilahrus gibbiis , nob.; Gihbus virasse, Penn.)
C'est sur la foi de Pennant que les natura-
listes parlent de cette espèce, qui a
le corps plus court et plus haut que le précédent,
la hauteur étant, d'après la figure du zoologiste an-
glais, de la moitié de la longueur du tronc.
D. 16/9; A. 3/11; C....;P. 13; V. 1/5.
Suivant Pennant , le corps est élégamment tacheté
et rayé de bleu et d'orangé, la dorsale et l'anale vert
de mer tacheté de noir; les ventrales et la caudale.
] 76 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de même couleur, n'ont pas de taches; les pecto-
rales sont rayées de rouge à la base.
L'individu était long de huit pouces; il avait
été pris sur la côte d'Anglesea.
On voit que ce poisson tient beaucoup du
précédent : il n'en est peut-être même qu'une
variété. Les ichthyologistes en ont tous parlé
d'après l'auteur de British fauna. Gmelin en
fait son lahrus gibbus, que Lacépède a adopté,
M. Yarell a reproduit la figure et la descrip-
tion de son prédécesseur. L'espèce, si cen
est une, doit être rare, car on ne l'a pas en-
core retrouvée depuis la publication du Bri-
tish fauna.
Le Crénilabre norwégien.
(^Crenilahrus noj^wegicus , nob. ; Lutjaniis noi'we-
giciis , Bl.)
Le lut j an norwégien ^ que Bloch a figuré
(pi. 256), et que Lacépède, sur cette auto-
rité, a aussi inscrit parmi ses lutjans, est un
crénilabre qui est voisin de ces poissons, et
que je ne suis pas encore parvenu a me pro-
curer.
Il a le corps semblable au crenilabrus melops ;
mais, si la figure de Bloch est exacte, les dentelures
des préopercules sont plus grosses , et surtout au bord
horizontal de cette espèce. Les nombres sont encore
CHAP. III. CRÉNILABRES. \77
ceux du crenîlabrus melops , sauf qu'il y aurait un
rayon mou de moins à l'anale.
D. 16/9; A. 5/10, etc.
Je ne vois pas que Blocli ait marqué de tache
derrière l'œil; mais il y en a une très -prononcée
de chaque côté de la queue, qui ne se trouve pas
sur nos crénilabres mélopes. Le corps est noirâtre
ou violet foncé sur le dos , passant insensiblement
aii jaune sous le ventre; il est tout marbré de grosses
taches brunes; la dorsale a aussi des marbrures noires
sur un fond jaunâtre; la caudale, jaune à la base, est
violette à son bord; l'anale a cette même teinte; les
pectorales et les ventrales sont bleuâtres; il n'y a pas
non plus de rayures sur les joues.
Tel est le poisson que Spengler avait en-
voyé à Bloch. Il est voisin des précédens, mais
il me parait devoir en être distingué.
M. Retzius l'a cité dans son édition du
Fauna suecica (p. 337, ^-^ 7^)? ^^^^ le nom
de perça niaculosa , en conservant pour sy-
nonyme le nom et la figure de Bloch.
M. Nilsson* nous éclaire davantage sur cette
espèce, et il ajoute que sur les côtes de Nor-
w^ége des individus atteignent jusqu'à dix
pouces.
Elle paraît commune sur le littoral de la
Norwége et dans la mer Baltique.
1. Niisson , Prod. Ichth. Scand., p. 76, n.° /|.
i3. 12
478 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le CrÉNI LABRE DE PeNNANT.
{Crenilahrus Pennandi, nob.; Goldsinnj,VQm\zxA.')
Devia-l-on considérer comme étant d'une
espèce différente du précédent, le goldsinny
de Pennant*, figuré dans l'édition in-4.° du
British Fauna, et qui a été copié par Bonna-
terre dans les planches de l'Encyclopédie mé-
thodique ?
Il ne me paraît différer du précédent que par
l'absence de la tache des côtés de la queue, et je
lui vois aussi quelques rayures sur les joues, que
ne paraît pas avoir le poisson de Blochj car je ne
crois pas qu'on doive prendre pour telles les varia-
tions de couleur que la pelniure de l'iclithyologiste
allemand indique au-dessous de l'œil.
Ce qu'il y a de certain, c'est que ce s^old-
sinny n'est pas le même que celui dont Pen-
nant avait parlé d'abord d'après Ray, lequel
est devenu le labrus cornuhius de Gmelin et
des autres ichthyologistes , et qui a été ensuite
confondu avec les espèces dont nous traitons
ici.
he Crénilabre de Couch.
{^Crenilahrus Couchii^ nob.)
Un autre poisson, très -voisin de ceux-ci,
1 Brii, zool. , III, p. :i5i, pi. 47-
CHAP. III. CRÉNILABRES. 179
mais qui me paraît encore distinct, est le
CoT^kwing de M. Couch/
Il le représente trois fois aussi long que large,
comprimé; à mâchoires égales; à bouche étroite,
peu fendue; à dents régulières.
Les nombres de l'anale sont encore un peu diffé-
rents.
D. 16/9 ; A. 3/95 C. 14; P. 14; V. 1/5.
La couleur de la tête et du dos est brune; les
côtés sont d'un vert tendre avec de nombreuses
bandes rouges et brillantes; les opercules sont rayés
de rouge et de vert; une tache noire est marquée
de chaque côté de la queue. Mais l'auteur ne parle
pas de tache noire derrière l'œil, et je n'en vois pas
non plus sur la figure.
Ce n'est donc pas le crënilabre inëlopej ce
n'est pas non plus le crénilabie norwëgien :
l'espèce se rapproche plus du crénilabre bossu;
mais les proportions et les nombres diffèrent.
En tous cas je ne pense pas comme M. Yarell,
et je ne crois pas qu'il faille réunir ce poisson à
son lahrus goldsinnj. Si les individus qui lui
ont été envoye's par M. Couch le confirment
dans cette opinion, il faut avouer que la des-
cription de cet auteur et sa figure sont bien
incomplètes.
1. Couch, Fishes new îo the Brit. Faun., apud Loudon Mag.
ofnat. hist., vol.Y^ V' ^1 y %• 4-
18Ô LIVRE XVI. LABROÏDES.
M. Couch a trouvé cette espèce sur la côte
de Cornwall.
Le Crénilabre de Donovain.
{Crenilahrus Donovani, nob. ; Labrus corniihius ,
Donovan. )
Donovan* a aussi un crénilabre confondu
par lui, sous le nom de labrus cornubias,
avec le goldsmny de Ray ou de Jago, et qu'il
représente
d'un vert plus ou moins doré ou rougeâtre sur le
dos, traversé par six bandes verticales brunes, dont
trois remontent sur la dorsale , où elles laissent
de grosses taches. Les côtés et le ventre deviennent
jaune verdâtre, plus ou moins argentés, et sont rayés
iongitudinalement de verdâtre ou de bleu : on voit
une taclie noire de chaque côté de la queue, et une
bande bleu fonce' a la base de la caudale. La pecto-
rale a sur l'insertion des rayons un arc bleu bordé
d'orangé. La nageoire du dos est verte et couverte
de petits traits bleus sur la membrane entre chaque
rayon épineux : sur la portion molle ce sont des
traits. La caudale est arrondie et jaunâtre au milieu,
plus verte au bord ou pointillée de citron verdâtre
sur l'anale, dont le fond est gris verdâtre; il y a
deux grosses taches oblongues brunes, et le reste est
pointillé de verdâtre. Il n'y a point de rayures sur
la joue, et Donovan ne parle pas de tache derrière
l'œil.
1. Donovan, Nat. hist. of. Brit, fish. , roi. III, pi. LXXII.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 181
M. Yarell a donné une seconde figure ,
non moins jolie, de ce petit crënilabie,'car
tous ses caractères conviennent parfaitement
au goldsinnj de Donovan; je lui vois cepen-
dant une tache noire derrière l'œil.
Voici les nombres tels que M. Yarell les
compte :
D. 16/8; A. 3/10; C. 14; P. 14; V. 1/5.
MM. Donovan et Couch indiquent leurs
poissons comme étant rares sur les côtes
d'Angleterre. Selon M. Yarell, celui-ci serait
plus facile à se procurer; car il en a plu-
sieurs individus depuis un pouce et demi
jusqu'à quatre pouces de longueur.
Comme il n'y a point de rayures sur les
joues, je ne puis le croire de la même espèce
que le Corkwing de M. Couch.
Je ne le crois pas le goldsinnj de Pennant,
qui a des rayures sur la joue, et pas de ta-
ches aux côtés de la queue.
C'est encore moins le labrus cornubius de
Risso.
M. Audouin a rapporté de Granville de
très-petits individus de cette espèce; ils n'ont
que deux pouces à deux pouces et demi. On
voit encore les taches de la dorsale et de
l'anale.
182 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Mais je m'étonne que tous ces auteurs l'aient
confondu avec le labrus cornuhius de Ray, qui
est si facile à distinguer par sa tache noire sur
le devant de sa dorsale et sur le dos de la queue.
Le Crénilabre verdatre.
{Crenilabriis viresceiis , nob.)
Le poisson que Bloch^ a donné parmi ses
lutjans, et qu'il tenait d'un marchand ham-
bourgeois, me paraît assez voisin du labre
rone d'Ascanius, et de tous ceux que je men-
tionne ici; mais je crois devoir encore le con-
sidérer comme d'une espèce distincte.
L'enluminure de Bloch le représente jaune ver-
datre sur le dos, argenté sur le ventre, rayé d'une
douzaine de lignes longitudinales roussàtres; les na-
geoires sont vertes avec deux raies rousses longitu-
dinales sur la dorsale et sur l'anale : deux autres,
verticales, sur la caudale. Il y a aussi deux traits
obliques sur la joue et sous l'œil; mais point de tache
noire ni derrière l'œil, ni sur les côtés de la queue.
Voici les nombres de Bloch :
D. 16/9 ; A. 3/9 ; G. 16 ; P. 12 ; V. 1/5.
Ce ne peut être le lahrus melops, s'il est
vrai qu'il n'y ait pas eu de tache noire der-
rière l'œil. Ce n'est pas non plus le corkwln^
1. Lutjanus virescens ,^\oc\\, 20^.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 183
de M. Couch, car il n'y a pas de tache à la
queue.
Il ne peut être aussi de l'espèce du creni-
labrus Donovani, qui a des bandes verticales
sur le corps et sur les nageoires, une tache
près de la queue et même derrière l'œil, selon
M. Yarell. Il parait plus voisin d'une espèce
de Pallas , dont je parlerai plus loin.
Le Crénilabre BRimNiCH.
{Crenilahriis Brùnnichii ; Lut j anus Brûnnichii,
Lacép.)
A côte de ces espèces à seize rayons épi-
neux à la dorsale , et si variées dans l'ocëan
septentrional de l'Europe, il faut placer aussi
plusieurs poissons à nombre égal d'épines à
la dorsale, et qui se distinguent cependant du
crenilahriis melops par des caractères tirés de
la couleur ou quelquefois de leurs dents.
Tel est d'abord celui que je regarde comme
le lut j an Brûnnich, que Lacépède avait tiré
de Brûnnich, et qui me paraît aussi le même
que celui nommé par Bloch (pi. 2^1, fig. 2)
lutjanus hidens,
à cause de la saillie des deux dents mitoyennes de
la mâchoire supérieure, qui sont plus fortes que les
autres et dirigées en avant. Ce poisson a du reste
484 LIVRE XVI. LABROÏDES.
la forme de noire crenilabrus îapina , mais avec le
museau un peu plus court.
D. 16/9; A. 3y9, etc.
Il se décolore tout-à-fait dans l'esprit de vin; mais
il conserve une grande tache noire ou bleu foncé,
à la base de la pectorale, qui le fait aisément recon-
naître. La peau du sous-orbitaire est aussi colorée en
bleu; et les trois nageoires verticales, et surtout la
caudale, sont piquetées de petits points toujours
visibles.
Le poisson vivant est peint de couleurs agréables;
nous pouvons le juger par le dessin que M. Lauril-
lard a bien voulu nous donner. Sur un fond olive,
qui passe à l'orangé sous le ventre, le corps est rayé
longitudinalement par treize lignes bleues du plus
bel outremer; quatre traits de même couleur pas-
sent en chevrons sur le dessus de la tête, et un autre
forme un cercle sur la tempe. Une ligne plus pâle
traverse obliquement de l'œil sous la mâchoire infé-
rieure. Le dessous de la gorge est bleu; le devant de
la tête, sous le sous-orbitaire, est olive comme le
dos; la dorsale est jaune olivâtre, bordée de bleu;
à la base des quatre premiers rayons épineux il y a
un trait bleu, et deux rangées de points bleus sur le
reste. L'anale est un peu orangée, bordée de bleu et
toute couverte de points de cette nuance. La cau-
dale, jaune orangé à la base, a son tiers postérieur
bleu. La pectorale est jaune pâle, et porte, sur la
portion qui rattache les rayons au bras , une grosse
tache bleu foncé. On voit par ce que j'ai dit plus
haut que c'est la seule tache qui persiste sur le
CHAP. III. CRÉNILABRES. 185
corps, et qui se conserve dans l'eau-de-vie aussi long-
temps que l'on garde le poisson. J'en ai des individus
devenus tout blancs, qui ont cette tache rousse très-
manifeste.
Leur canal intestinal fait trois replis. Le péritoine
est grisâtre. La vessie aérienne est ovalaire, alongée,
et ses parois sont très-épaisses.
Son squelette a treize vertèbres abdominales et
dix-sept caudales. Le crâne est arrondi, assez bombé
en arrière. Sa crête mitoyenne est haute, peu large
et un peu en pointe conique.
Nos individus sont longs de quatre pouces,
Ils nous sont venus de Marseille par M. Cu-
vier; de Nice , par MM. Risso , Savigny et Lau-
rillard; de Rome et de Naples, par M. Savi-
gny ; de Messine, par M. Bibron; de Palerme,
par M. Constant Prévost; de Malte , par le doc-
teur Leach; de Malaga, par M. Bâillon, et
d'Iviça, par Laroche.
Ce petit poisson estreconnaissable aux lignes
bleues serpentiformes dont parle Briinnich*
parmi ses labres qui lui paraissent encore diffi-
ciles à déterminer. Bonnaterie a fait de cette
description son lahrus serpentinus ^ que M. de
Lacépède a placé dans ses lutjans, sous le nom
que nous avons adopté. Mais cette même
espèce se trouve encore un peu plus loin dans
\. Fisc. Mass., p. 56, n.° 72.
'1 8() LIVRE XVI. LAEROÏDES.
Brûiinicli, car on ne peut douter un seul ins-
tant que ce ne soit son perça inediterranea ,
qu'il a eu le tort de prendre pour le poisson
de Linnë, lequel est de l'espèce suivante.
Lacëpède a confondu ces deux espèces dans
son lutjan méditerranéen; et M. Risso a copié
toutes ces erreurs, car, à la suite l'un de l'au-
tre , il a un créniiabre me'diterranëen et un
crënilabre Biûnnich, qui bien certainement
ne sont que de la même espèce.
C'est diU^sWe lut j anus hidens àe^Xoch, quoi-
que le dessinateur ait interrompu la ligne la-
térale.
Le Crénilabre méditerranéen.
( Crenilahrus mediterraneus , nob. )
La Méditerranée nourrit encore un autre
crénilabre, semblable au précédent
par ses dénis saillantes, par les lâches de la base
de la pectorale; mais qui en diffère, parce qu'il a
toujours une tache noire sur le haut du tronçon de
la queue, près de l'insertion des rayons de la cau-
dale, et par la teinte bleue de l'anus; la tache de la
pectorale est aussi plus étroite; les nageoires verti-
cales n'ont pas les petits points que nous avons signa-
lés sur l'autre espèce.
Les nombres sont les mêmes.
D. 16/9; A. 3/9.
CHAP. HT. CRÉNILABRES. 487
Le reste du corps est brun foncé sur le dos , avec
quelques lignes noirâtres longitudinales; blanc sous
le ventre.
Celle-ci paraît rester un peu plus petite, et ne
pas dépasser quatre pouces.
Marseille, Toulon , Nice, Messine, Paleime,
sont les difFérens points dont nous avons reçu
cette espèce.
Nous en avons reconnu deux variétés nota-
bles. L'une vient de Toulon : elle a dix-sept
rayons épineux à la dorsale ; l'individu est long
de cinq pouces. L'autre , rapportée de Naples
par M. Savigny, en a dix-huit : il n'a que quatre
pouces. Peut-être que ces différences de nom-
bres coïncideront avec d'autres caractères et
serviront encore à établir deux nouvelles es-
pèces.
C'est bien certainement celle que Linné
a décrite dans le Musée du prince Adolphe-
Frédéric ', sous le nom de perça mediterranea,
et que Biùnnich a cru être identique à celle
qu'il décrivait et dont nous venons de parler.
Cette erreur a été copiée par Lacépède et par
M. Risso. Mais Briinnich avait aussi ce créni-
labre parmi ses labres douteux; car la des-
cription qu'il a donnée (p. 57, n." 73) convient
1. Mus. Ad. Fr. Prod., t. II, p. 85.
] 88 LIVRE XVI. LABROIDES.
parfaitement pour les couleurs. Il n'y a compté
que quinze rayons épineux à la dorsale.
Bonnaterre a fait de cette description son
lahrus cœruleo -vittatus y qui est devenu le
lutjan marseillais de Lacépède.
Cette synonymie a été employée par M. Risso
pour un autre crénilabre, à quatorze rayons
épineux à la dorsale, et qui n'est certaine-
ment pas le poisson de Briinnicli.
Gmelin avait aussi employé la description
de Brimnich, et en avait fait son lahrus uni-
maculatus , qui a été cette fois réuni par
Lacépède au labre marseillais. Mais Gmelin
en a rapproché a tort comme une variété, la
description tirée du Spolia maris Aclriatici
(p-97)-
C'est plutôt à ce crénilabre qu'au précé-
dent qu'il faut rapporter le lahrus pittima de
Rafinesque. Je ne fais ici mention de cet auteur
que pour avertir le lecteur qu'il m'a été im-
possible de reconnaître la plupart des espèces
mentionnées dans son ouvrage.
Je ne le regarde pas comme de la même
espèce que le ^oldsinnj de l'Océan ou au-
tres crénilabres, dont il est parlé plus haut,
parce que la position de la tache et les
autres distributions des couleurs ne sont pas
les mêmes.
CHAP. III. CRÉNILABRES. i 89
Le Crénilabre de Bory.
{Creiîilahrus Bory anus, Risso; Crenilabrus nigres-
cens, Risso.)
Je trouve encore, parmi les poissons re-
cueillis à Nice par M. Laurillard , un créni-
labre
ayant une tache noire cerclée de jaune à la base de
la pectorale, qui est roussfitre et sans tache sur sa
membrane et ses rayons; la tête et le dos sont d'un
vert assez foncé ; le ventre orangé , et les flancs rayés
de treize bandes longitudinales bleues; on volt des
rayures ondulées et anastomosées, de même teinte,
sur la tête, sur la gorge et sur le devant de la dorsale.
Cette nageoire, bordée de bleu , est d'un roux verdàtre
à la base, couverte de deux rangées longitudinales de
points bleus; sur l'anale, qui est orangée et lisérée de
bleu, il y a quatre à cinq rangées de points; la caudale
n'offre aucune tache, elle est orangée à la base, et
bleue sur tout le bord ; la ventrale a la même disposi-
tion de couleur , qui est partout du plus bel outremer.
Ce qui le dislingue des deux précédens, ce sont
deux bandes verticales d'un roux brunâtre sur la
fin de la queue, sans s'étendre sur les rayons de la
caudale.
D. 16/9; A. 3/11, etc.
Nos individus sont longs de cinq à six
pouces. Les pécheurs de Nice l'ont donné à
M. Laurillard sous le nom de rouquié nègre.
En lisant la description de M. Risso , il est
190 LIVRE XVI. LABROÏDES.
impossible de méconnaître dans ce poisson son
crenilahrus Bojycmus. Les seules différences
consistent en ce qu'il ne parle que d'une seule
bande sur la queue, et qu'il leur donne un
rayon épineux de moins. Mais je ne puis douter
non plus que ce ne soit aussi son crenilahrus
ni^rescens y car il a ainsi déterminé le dessin
pris sur le frais , que M. Laurillard a exécuté
à Nice. Or, dans ce dessin les bandes cauda-
les sont clairement marquées, et cependant
M. Piisso n'en a pas fait mention dans la des-
cription de son crénilahre noirâtre.
Grénilabre a sourcils d'or.
{Crenilahrus chrjsophus , Risso.)
M. Risso parle encore d'un crénilabre , voisin
de ceux-ci, et que je n'ai pas retrouvé dans
les nombreux individus de la collection du
Cabinet du Roi.
Suivant cet auteur le corps est ovalaire, d'un beau
vert pré uniforme et sans aucunes taches; le des-
sous est argenté; la bouche est bleuâtre, armée de
dents antérieures plus fortes, une bande dorée colore
le sourcil; toutes les nageoires sont vertes; la tache de
la base des pectorales est de couleur verte et foncée.
D. 16/10; A. 3/8; C. 14; P. 14: V. 15.
La femelle seule aurait, selon M. Risso, une trace
de tache sur le bout de la queue.
CHAP. m. CRÉNILABRES. 191
La taille de ce poisson est de quatre à cinq
pouces. 11 habite parmi les rochers , et se mon-
tre en plus grande abondance sur la côte de
Nice, au mois d'Octobre.
Le Crénilabre de Bâillon.
{Crenilahrus BailloTii , nob.)
J'ai reçu de la baie de Saint- Valéry, près
l'embouchure de la Somme, par M. Bâillon,
un crénilabre qui a encore une tache a la base
de la pectorale, et dont
le corps est assez semblable à celui de noire creni-
lahrus pcwo. La hauteur fait le tiers de la longueur
du corps, la caudale non comprise, et qui est con-
tenue huit fois dans la longueur totale. La tête est
plus courte que la hauteur. La bouche est petite j
les dents sont égales, sur un seul rang.
D. 14/10; A. 3/13, etc.
Le poisson frais avait le corps d'un gris bleuâtre,
passant au violet sur les flancs. Cinq à six larges
taches bleues noirâtres descendaient du dos en s'é-
vanouissant sur les côtés; cinq à six séries de taches
ou traits jaunes étaient tirés sur la longueur des
flancs; un trait jaune oblique passait sur la nuque;
et d'autres de la même teinte s'avançaient sur le front.
Au-dessus des yeux, jusqu'à l'extrémité du museau,
quatre raies orangées et longitudinales étaient tracées
sur la région sous-orbitaire; le reste de la joue, sur
492 LIVRE XVI. LABROÏDES.
un fond violet , était tacheté de points orangés. L'o-
percule n'avait aucune tache.
La dorsale avait sur sa portion épineuse, dont le
fond est violet, un trait longitudinal jaune, et une
bordure rosée lisérée de jaune pâle : sur la portion
molle la bordure rose est plus large, et il y a quatre
à cinq rangées de points jaunes. L'anale avait beau-
coup plus de rose que de violet, et sur les derniers
rayons il y avait des points jaunes. La caudale était
verte, avec une large et belle tache rose foncé ou
vineuse sur l'angle supérieur et postérieur. Les pec-
torales étaient violacées, avec trois bandes verticales
jaunâtres. La tache de la pectorale était bleue et bordée
d'orangé. Enfin, sur les ventrales on voyait des points
jaunes.
Cette belle espèce devient assez grande, car
l'individu a près de huit pouces. Je l'ai aussi
reconnu dans des poissons décolores que j'ai
reçus de La Rochelle par M. d'Orbigny; mais
qui conservent encore le trait de la base de
la pectorale, et dont les taches jaunes des
nageoires effacées se dessinent en clair sur
la membrane.
C'est avec un vrai plaisir que je dédie cette
espèce à mon ami M. Bâillon , qui a rendu
tant d'autres services à notre ouvrage par ses
recherches sur les poissons de nos côtes de la
Manche.
CHAP. HT. CRÉNILABRES. 195
Le Grénilabre ocellé.
{Crenilahriis ocellatus , nob.j Labrus ocellatus ,
Forskal.)
La Méditerranée nourrit en abondance un
petit crënilabre qu'il est facile de reconnaître
dans la description qu'en avait laissée Forskal 5
mais dont l'espèce a été mal caractérisée et
même multipliée par ceux qui ont copié sans
critique cet auteur, et ensuite Briinnich, qui
en a aussi parlé.
Le corps est un ovale dont la longueur contient
trois fois ou trois fois et demie la hauteur. Son préo-
percule est dentelé tout autour de l'angle jusque
sur le bord inférieur; et, outre ce caractère tiré des
formes, nous le reconnaissons à la tache bleu foncé
presque noire , qui se conserve sur le haut de l'oper-
cule après la mort de l'animal et même après un long
séjour dans l'esprit de vm : souvent cette tache, lisé-
rée d'un fin trait bleu ou blanc, devient un ocelle.
Une tache oblongue de même couleur, mais moins
foncée, existe au-devant de l'œil, le long du sous-
orbitaire. Une troisième tache, mais moins arrêtée,
se voit de chaque côté de la queue ; et sur quelques
individus j'en vois une petite sur le commencement
de la dorsale. Le fond du corps est un brun rou-
geâtre, plus ou moins mêlé ou tacheté de bleuâtre.
Les nageoires sont jaunâtres, avec des ocelles bleu
pâle. Ceux-ci , plus prononcés sur la caudale , sont
i3. i3
194 LIVRE XVI. LABROÏDES.
disposés de manière à faire cinq à six lignes on-
duleuses sur cette nageoire.
D. 14/10; A. 3/9, elc.
Nous en avons un grand nombre d'indivi-
dus chez lesquels nous comptons :
D. 15/9; A. 3/9, etc.
Enfin, un seul s'est trouvé n'avoir que treize rayons
épineux, de sorte qu'il n'a que vingt-trois rayons à
la dorsale, au lieu de vingt-cinq, en y comprenant
les rayons branclius.
Ce petit ciënilabre nous est venu, comme
les précëdens, de Toulon, de Marseille, de
Nice, de Naples, de Palerme, de Messine,
de Napoli de Romanie, d'Alexandrie d'Egypte,
d'Iviça et de Malaga.
C'est bien, comme nous l'avons dit, le pois-
son que FoiskaP a nommé lahriis ocellatus,
et qui a pris rang sous ce nom dans la trei-
zième édition du Systenia naturce.
Briinnich^ en a aussi parlé, et je crois même
qu'il a décrit deux des variétés que nous avons
signalées, l'une sous le n.° 7 i, et l'autre sous le
n.° 74 de ses labres incertains- Cette dernière
ne se distingue en effet de la première que
par la tache mentionnée sur la dorsale; et la
première ne diffère certainement pas de celle
1. Forskai , Faun. nrab. , p. Sy, ii.° 55.
2. Biiinnich, Fisc. Mass., p. 56 et 58.
CHAP. III. CP.ÉNILABRES. 195
de Forskal. Celle sous le n° -y i , est devenue le
lahrus olwaceus de Gmelin, et la seconde son
lahriis venosus. Ces trois espèces nominales
sont reproduites par Lacëpède*: deux parmi
ses lut j ans, et la dernière est même inscrite
dans son genre Labre sous le nom de lahrus
reticulatiis^, que Bonnaterre avait déjà em-
ployé pour changer l'épithète de Gmelin.
On peut dire que M. Risso a bien singuliè-
rement embrouillé l'histoire de ces espèces,
lui, qui aurait dû, au contraire, nous faire
bien connaître des poissons qu'il peut voir et
étudier si facilement à Nice.
Nous sommes cependant parvenus à bien
reconnaître ces espèces sur ses descriptions in-
complètes, et dans lesquelles il a mêlé ce qu'il
prenait aux auteurs qu'il consultait, malheu-
reusement, le plus souvent dans leurs copistes.
Nous sommes arrivés à ces résultats en réu-
nissant un grand nombre de ces petits poissons
étiquetés par M. Risso soit à M. Savigny, soit
à M. Laurillard; nous avons comparé ces pré-
tendues espèces, et nous nous sommes assurés
qu'il a souvent donné la même espèce à ces
deux collecteurs sous deux noms différens.
1. Lacépède, t. IV, p. 218, Luij. ocellahis , Liiij. olivaceus.
2. Ejusd. , t. III, p. 5o8, Lab. maillé.
496 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ainsi on trouve dans sa première édition*
un lutjanus ocellatus, sous lequel il ne cite
que Forskal, qui est de notre espèce, car nous
avons vu des individus ainsi dénommés par
lui; mais il a un labre maillé^ qu'il tient de
Briinnich. Or, il ajoute dans cette descrip-
tion un caractère pris d'une autre espèce,
et dont Briinniclî, effectivement, ne fait pas
mention , c'est la couleur bleue de l'anus.
Ainsi son lahrus venosus est déjà une espèce
factice; et il la rend encore plus imaginaire
dans sa seconde édition (p. 325 ), car il ajoute
une large tache de chaque côté de la partie
supérieure de la queue; caractère qu'il em-
prunte au crénilabre méditerranéen. Le nôtre
a quelquefois une petite tache, souvent effacée,
mais sur le milieu de la base de la caudale.
Selon M. Bisso, les pêcheurs de Nice le
nomment rouquié ou vachetto.
L'examen d'un très-grand nombre d'indi-
vidus de cette espèce me fait croire qu'il faut
encore rapporter à notre poisson le labrus
ocellaris de Linné ^. Les nombres des rayons et
la petite tache noire se rapportent assez bien
pour que l'on puisse admettre ce rapproche-
1. Risso, Ichlh. de Nice, p. 278. — 2. Ibid,, p. 269.
3. Mus. Ad. Fr. Prod. , t. II, p. 78, n." 19.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 197
ment, qui restera toujours douteux, à cause
de la brièveté de la description linnéenne. Ce
labroïde est reste parmi les labres de Lacëpède.
Pallas a aussi ce poisson sous le nom de
lahrus perspicillatus % tout en reconnaissant
son identité avec le lahrus ocellatus de Fors-
kal, il en changeait cependant le nom.
Il est très-abondant au printemps dans la
mer Noire, et les pécheurs de Théodosie le
rejettent à la mer, parce qu'ils le regardent
comme d'une nourriture malsaine.
Le Crénilabre de Risso.
{Crenilahrus Rissoi^ nob.; Luljanus olwaceus ,
Risso , mais non Lacép.)
Nous avons reçu, étiqueté par M. Risso lui-
même, sous le nom de lut j anus olwaceus^^
un petit crénilabre si voisin du précédent, que
M. Savigny lui-même , à qui nous le devons ,
le regardait comme une simple variété.
Cependant nous lui trouvons le corps plus court,
l'ovale plus régulier , le profil moins concave ; les
crénelures du bord horizontal du préopercule se
portent moins en avant, et les nombres vont jusqu'à
seize dans quelques individus.
D. 15 à 16/10 5 A. 3/9, etc.
1. Pallas, Faun. Ross., t. III, p. 267.
198 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le corps est oliviâtre; la tache de l'opercule peu
marquée, moins que celle de l'extrémité du museau.
Je ne vois pas de taches ni de points sur les nageoires :
celle de la queue est réduite à un point noir.
Ces observations me font croire que M. Risso
a eu raison de regarder ce poisson comme
étant d'une espèce distincte. Nos individus
viennent de Naples, par M. Savigny, ou de
Palerme. Ceux-ci sont dus aux recherches
éclairées de M. Constant Prévost. Leur lon-
gueur varie de deux à trois pouces.
J'ai admis pour synonyme de cette espèce le
lutjcnius olwaceuSy puisque M. Piisso Ta ainsi
déterminé; mais je ferai de suite remarquer
que sa citation de Brùnnich et de Lacépède
sera dans ce cas mauvaise, et que son lutjanus
olivaceus ne peut être regardé comme iden-
tique de celui de Lacépède, ou du lahru,s
olivaceus établi par Gmelin d'après Brùnnich.
Le CrÉNI LABRE LITTORAL.
{Crenilabrus littoralis, Risso.)
Parmi ces vachetta des pécheurs nicéens
M. Risso a encore distingué une espèce , dont il
n'avait pas osé faire mention dans sa première
édition.
Elle a le corps alongé, le fond argenté verdatre
sur le dos, une tache bleue à l'opercule et une noire
CHAP. III. CRÉNILABRES. 1 99
près de la queue; mais elle diffère constamment de
la précédente par de grandes bandes longitudinales
argentées, qui tranchent agréablement sur le fond
verdatre du poisson. La gorge est traversée par dix
raies d'un beau bleu foncé, étendues souvent jusque
sur les opercules, La tache de la base de la queue
est toujours plus grande.
Voici les nombres comptes par M. Risso.
D. 14/10; A. 3/10; C. 13; p. 14; V. 1/5.
La femelle fraie au printemps. On les trouve
pendant toute l'année sur les plages couvertes
de galets.
Le Crénilabre petite tanche.
{Creîiilahrus tinca, nob. ; Lahriis tinca^ Brima.)
Un autre petit crénilabre de la Méditer-
ranée, qui est parfaitement reconnaissable
dans le lut j anus tinca de Briinnicli, et dont la
hauteur est comprise trois fois et demie ou
quatre fois dans la longueur du corps, suivant
l'ëtat de plénitude du ventre, se distingue
encore des précédens par
son corps plus épais et arrondi sur les côtés, l'épais-
seur étant moitié de la hauteur.^ Le museau est gros
et rond. L'oeil, écarté de l'autre d'une fois son dia-
mètre , et éloigné du bout du museau d'une fois et
un tiers cette même mesure , a une largeur égale au
quart de la longueur -de la tête, laquelle est con-
200 LIVRE XVI. LABROÏDES.
tenue trois fois dans celle du corps , la caudale non
comprise.
Les dénis sont toutes égales et non proclives; les
dentelures du préopercule sont toujours manifestes
et ne dépassent pas l'angle arrondi de cette pièce.
D. 15/9; A. 3/8, etc.
J'en trouve un individu qui n'a que quatorze
épines; mais il a un rayon mou de plus.
La joue, l'opercule et l'interopercule sont cou-
verts d'écaillés. Je vois peu de pores sur les parties
nues de la tête. Il y a une trentaine d'écaillés entre
l'ouïe et la caudale; chaque écaille est petite, oblon-
gue, membraneuse dans sa partie visible, et sa portion
radicale a douze ou quatorze rayons à éventail.
Sur un fond rouge lavé de rose, le poisson a une
bande brune ou bleu foncé, qui va du bout du mu-
seau au dos de la queue, dans la largeur du diamètre
de l'œil, qui l'interrompt; au-dessus une seconde
raie va le long du dos sur la base de la dorsale, sans
la recouvrir : elle avance sur le dessus de la tête jus-
qu'au bout du museau. La bandelette rouge qui sépare
ces deUx bandes brunes passe au-dessus de l'œil,
se réunit sur le dessus de la tête en avant des yeux, et
y forme un chevron. Sur le ventre il y a trois ran-
gées longitudinales de points de la même teinte que
les bandes, et de chaque côté de la queue et au-
dessus de la ligne latérale une petite tache noire.
L'anus est coloré en bleu brillant; la dorsale est
orangée et bordée de bleu céleste; les autres na-
geoires ont la base orangée. Une tache bleue est à
l'aisselle de la pectorale. Le dessous de l'œil et de la
CHAP. lîl. CRÉNILABRES. 201
mâchoire inférieure est aussi d'un beau jaune orangé.
Sur le frais la couleur, selon M. Laurillard, est
également rouge, avec deux larges bandes vertes:
une qui règne le long de la base de la dorsale, et
l'autre, qui commence à la lèvre supérieure, passe
à travers l'œil, et va atteindre à la caudale au-dessous
delà ligne latérale, quand elle n'est pas encore flé-
chie, et au-dessus d'elle après sa courbure.
Nos individus ne dépassent pas trois pouces.
Cette description est faite d'après des indi-
vidus en bon état, que nous devons à M. Rie-
ner, qui les a pris à Toulon. Nous en avons
reçu d'autres de Marseille, de Nice, par MM.
Risso et Laurillard; de Naples, de Gênes, par
M. Savigny ; de Sicile , par M. Bibron.
Nous ne doutons pas que ce ne soit le la-
brus tinca de Brïmnich; mais ce ne peut être
celui de Linné, ainsi que nous l'avons fait voir
à l'article de notre crénilabre paon.
Il est toutefois curieux de remarquer que
Gmelin, que Bonnaterre et Lacépède, qui à
la vérité n'ont fait que le copier, n'ont pas cité
cette espèce si claire et si reconnaissable de
Briinnich, lorsqu'ils ont fait usage de descrip-
tions que ce savant naturaliste regardait lui-
même comme incertaines.
C'est bien certainement le poisson dont
M. Bisso a voulu parler sous le nom de lut-
202 LIVRE XVI. lalroïdes.
janiis tinca^ mais, sauf le caractère de la co-
loration de l'anus, il est bien évident que le
reste de la description n'a pas été étudié sur la
nature, et sa synonymie est encore plus fau-
tive; car dans la première édition il ne cite
que Pennant, et dans la seconde il y ajoute
Gmelin, ce qui n'est pas plus vrai; et dans
cette circonstance M. Risso a aussi négligé de
se servir de l'ouvrage de Brùnnicli : il ne l'a
pas cité.
Le Créni LABRE Massa.
(^Crenilahrus Massa, Risso.)
. V
Voici encore un petit poisson fort abondant
dans toute la Méditerranée, et que nous fai-
sons paraître sous le nom que lui a imposé
M. Risso, quoiqu'il ait été connu avant lui
par Brûnniclî.
Il a le corps plus haut et plus ovale que le pré-
cédent et beaucoup plus comprimé. La hauteur fait
le tiers et quelque chose de la longueur totale; l'é-
paisseur est moins que le tiers de la hauteur. Le
museau est pointu; la ligne du profil monte obli-
quement à la dorsale; le préopercule a des dente-
lures fines qui ne dépassent pas l'angle; la peau nue
de la tête est criblée de pores.
D. 15/10; A 3/9, etc.
La couleur est rouge ou lie de vin, niêlée de bleu
chap. ni. crénilabres. 205
sur le dos, et de points irréguliers de celte couleur sur
les côtés. Une tache bleue existe de chaque côté de la
queue, mais sous la ligne latérale; disposition qui
fait facilement distinguer cette espèce de la précédeme.
L'anus n'offre aucune coloration remarquable. Les
nageoires sont rougeâtres ou orangées et tachetées
de bleu céleste. Une tache bleue, aussi foncée que
celle de la queue, existe sur les trois premiers rayons
de la dorsale.
Ce petit poisson, de la taille du précédent,
nous est venu de difterens points de la Mé-
diterranée, où nous avons eu des correspon-
dans. Ainsi nous le possédons de Toulon, par
M. Kiener; de Montpellier, par M. Delille ; de
Corse, par M. Payraudeau; de Nice, par MM.
Laurillard etRisso; de Naples, par M. Savigny;
de Napoli de Romanie, par M. Reynaud; du
Bosphore, par M. Virlet.
11 est aisé de reconnaître notre poisson dans
la description de Brimnicli', puisqu'il dit:
macula Jiigra infra ad basin caudœ.
Gmeliu a fait de cette description le lahrus
griseus^j mais, comme il avait déjà employé
pour sa quatrième espèce ce nom , M. de
Lacépède a changé l'épithète de notre créni-
labre en celle de cinei^eus y en plaçant cepen-
L Fisc. Mass., p. 58, n." 75. — 2. Sjst. nai. , édiliou i5,
p. 1296, n.° 64-
204 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dant cette espèce parmi ses lutjans à côté des
lutjanus ocellatiis et lutjanus olwaceuSy avec
lesquels elle a de nombreuses affinités.
M. Risso a repris cette description de Briin-
nich ou peut-élre de Lacëpède pour établir
dans sa première édition un lutjanus cinereus,
qui ne reparaît plus dans la seconde, où le
crénilabre massa seul est conservé. Il est figuré
dans la première édition (pi. 8, fig. 26). Il
porte à Nice le nom de lan^aneu. I^a tache
caudale est moins apparente sur les femelles.
On la voit sur les cotes rocheuses de Nice, en
Mars, Juin et Décembre.
Le Crénilabre de Cotta.
{Crenilabrus Cottœ j nob.j Lutjanus Cottœ , Risso.)
Les collections faites à Nice par M. Lauril-
lard nous ont fait connaître une petite espèce
de crénilabre, qui nous paraît devoir être rap-
portée à l'espèce décrite par M. Risso, dès sa
première édition, sous le nom de lut j an Cotta.
Elle a le corps plus alongé et plus rond que celui
du crenilabrus massa; mais il le paraît un peu moins
que celui du crenilabrus iinca. Les dents sont plus
fortes et plus inégales.
D. 14/10; A. 3/8, etc.
Tout le corps est sur un fond rougeâlre grivelé
è
CHAP. III. CRÉNILABRES. 205
OU marbré de brun ou de bleuâtre; un large trait
va du bout du museau à l'oeil, sans le dépasser; un
autre, au-dessous de l'œil, s'étend en une sorte de
bride sous la mâchoire inférieure ; un autre , plus
court, le précède. Il y a une tache bleue sur le com-
mencement de la dorsale; une autre, souvent mal
terminée, sous la base de la queue. La dorsale a du
brun sur sa partie épineuse, et un très-fin sablé noi-
râtre sur la portion molle ; la caudale et l'anale sont
pointillées de bleu.
Notre plus grand individu a trois pouces et
demi.
Outre ceux que nous devons àM.Lauiillard,
nous avons trouvé des individus de cette même ;
espèce parmi les poissons rapportés de Napoli-. >>,^
de Romanie, par M. Reynaud, et du Bosphore, ■ *
par M. Virlet.
Le CrÉNI LABRE PlOISSAL.
{Crenilabrus Roissalii, Risso.)
Un autre de ces crénilabres a encore été
mentionné par Biùnnich^, mais confondu par
Gmelin avec une des espèces précédentes;
aussi, pour plus de clarté, nous adoptons un
des noms sous lesquels M. Risso a inscrit cette
espèce dans son ouvrage.
1. Spol. mar. yldr., p. 97, n." 10.
206 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ce poisson, de forme elliptique et régulière, a sa
hauteur comprise trois fois dans sa longueur totale;
les crénelures du préopercule très-fines, et il n'y en
a point sur le bord horizontal.
D. 15/9; A. 3/9, etc.
Outre la tache noire que cette espèce conserve
sur l'opercule et sur le sous-orbitaire, entre l'œil et
le bout du museau, elle se reconnaît surtout aux
deux plus foncées que l'action de l'alcool ne déco-
lore pas, et qui sont sur la base des trois premiers
et des trois derniers rayons mous de la dorsale. Ces
taches sont d'un bleu-noirâtre assez foncé. Quelques
individus ont une tache grise ou brune, peu mar-
quée, sur les deux premiers rayons épineux, et d'au-
tres entre le onzième et le douzième rayon de la
dorsale ; on en voit aussi chez d'autres une sur les
troisième, quatrième et cinquième rayons mous de
l'anale. Il y en a d'autres qui ont une tache peu mar-
quée de chaque côté de la queue.
Le corps de nos individus, décolorés par l'alcool,
paraît jaunâtre, tantôt marbré de brun clair, tantôt
couvert de points disposés en séries régulières et
formant huit a. neuf lignes longitudinales. Ceux de
cette dernière variété ont des lignes brunes sur les
joues.
M. Risso, qui les a décrits frais, dit que le fond
est couleur d'outremer, nuancé et varié de lignes
sinueuses d'un vert-jaunâtre foncé, qui bordent pres-
que toutes les écailles; la gorge et l'abdomen sont
argentés, glacés d'azur, et avec des reflets aurore/
La dorsale est ornée de deux grandes taches noires,
CHAP. m. CRÉNILABRES. 207
cerclées de fiiuve ; les ventrales, aurore azuréj les
pectorales, vert jaunâtre, avec une lunule bleue à
leur basej la caudale est colorée comme les pecto-
rales.
Cette espèce atteint près de cinq pouces.
Nous lavons reçue de Montpellier, de Tou-
lon, de Marseille, de INice, de Naples, de
Messine, de Malte, dlviça; et le nombre des
individus montre c[uelle y est partout fort
commune.
Nous avons parmi ces nombreux crénilabres
une variété assez constante, en ce quelle a
un rayon épineux de plus à la dorsale.
D. 16/9; A. 3/9, etc.
Le corps paraît aussi plus chargé de points ou de
marbrures noirâtres.
Ils viennent tous des mêmes lieux que les
précédens.
Le grand nombre d'individus que j'ai étu-
diés comparativement me fait croire que Brùn-
nich a mentionné cette espèce au n.° --ô, p. 5g
de ses Poissons de Marseille. Je crois qu'il a
eu sous les yeux, en rédigeant cet article, une
des variétés où les taches de la dorsale sont
peu apparentes: aussi n'en parle-t-il pas; mais
tout le reste de la description convient par-
faitement.
208 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Je retrouve une seconde fois l'espèce dans
Brûnnich*, et par une description dans la-
quelle elle est nettement caractérisée ; l'auteur
n'oublie pas ici de signaler les taches noires de
la dorsale. Seulement Brùnnich s'est trompé
en regardant les poissons qui faisaient le sujet
de cette seconde description comme une va-
riété de son lahrus n.° -y 3; mais comme toutes
ces déterminations étaient restées douteuses
dans l'esprit de Brïmnich, c'était aux auteurs
qui travaillaient après lui d'éclaircir les incerti-
tudes, et on voit que les moyens étaient pos-
sibles. C'est ce que ne fit pas Gmelin, car la
description vague sous le n.° -^6 est devenue
son lahrus ^uttatus, et la seconde, plus ca-
ractéristique , est restée indiquée comme une
variété du lahrus unimaculatus.
M. de Lacépède a admis , sans plus de critique
qu'à son ordinaire , le travail de Gmelin , et c'est
ainsi qu'une espèce déjà signalée parBriinnich
est restée comme inconnue, et que M. Bisso
l'a regardée comme étant nouvelle en icbtliyo-
logie, et qu'il lui a imposé un nom particulier
dès sa première édition. C'est en effet son lut-
jan Roissal% mais il la reproduit tout de suite
1. SpoL mar. Adr. , p. 97, n." 10.
2. Risso, Ichth. de Nice ; p. 276, pi. VIII, %. 28.
CHAP. m. CRÉNILABRES. 209
en double emploi ; car ce n'est qu'une des nom-
breuses variétés de cette espèce qui est nom-
mée lutjanus Alherti^, celle-ci n'en différant,
suivant la description, que par la tache noire
de l'opercule. Or, elle existe constamment dans
tous les individus que j'ai vus en si grande
quantité. D'ailleurs , les nombres sont les
mêmes : il n'y a donc pas de doute, selon moi,
pour cette synonymie; et quoique M. Risso
ne l'ait pas dit, il me paraît probable qu'il a
reconnu lui-même cette identité, puisqu'il a
fait disparaître ce lutjanus Alherti de sa se-
conde édition, mais sans en faire connaître le
motif.
Quant à son lutjan varie, je devrais aussi
le rapporter, et sans hésiter, à l'espèce dont
nous parlons ici \ car elle porte le même nom
vulgaire, et M. Risso a étiqueté lui-même à
M. Savigny des poissons de l'espèce de notre
crénilabre Roissal sous le nom de lutjan varié,
mais je crois voir, en lisant sa description,
qu'elle renferme , comme plusieurs autres, un
mélange de caractères du lutjan Roissal et du
lutjan tigré.
Or, je crois aussi qu'il faut encore y rap-
porter le crénilabre tigré^ de la seconde
1. Risso, Ichlh. de Nice, p. 323.
2. Ejusd. , ibid.f 2.* édit. , p. 317.
i3. 14
210 LIVRE XVI. LABROÏDES.
édition de l'Iclithyologie de Nice. Parmi les
nombreux individus de cette espèce j'en ai
qui ont été nommés par M. Risso lui-même , et
ceux-là montrent parfaitement les deux taches
sur la dorsale. D'ailleurs on peut voir que, sous
les rapports des nombres de rayons, des formes,
de la tache de l'opercule, de la coloration de
l'anus, tous ces poissons sont de la même espèce.
La tête a sur les joues deux lignes noirâtres plus
nettement marquées que sur les autres variétés
du crénilabre Roissal. Les points noirs dont le
corps est semé, sont disposés en bandes trans-
versales, assez nettes sur quelques individus.
Suivant M. Risso , le fond de la couleur est de
même verdâtre; mais il a oublié dans sa des-
cription de parler de taches.
Bloch avait aussi connu cette espèce, et il
en a donné une figure assez reconnaissable
sous le lahriis quinqueinaculatus. On ne peut
deviner pourquoi Bloch n'en a pas fait un de
ses lutjans, car les dentelures du préopercule
y sont clairement marquées; il a seulement un
peu exagéré la tache qui est sur le devant du
museau, et même celle de l'angle de l'oper-
cule. Les nombres des rayons sont absolument
les mêmes. Bloch dit qu'il a reçu ce poisson
de son ami Spengler, et qu'il est originaire de
la mer de Norwége.
CHAP. III. CRÉNILABRES. 21 \
Nous ne l'avons pas reçu de mers aussi froi-
des; mais nous savons que l'espèce se trouve,
quoique rarement, dans notre oeëan d'Eu-
rope. M. Bâillon en a envoyé au Cabinet du
Roi un individu péché au Croisic sur nos côtes
de Bretagne. Cependant l'espèce doit être rare,
car nous ne l'avons rencontrée qu'une seule
fois depuis tant d'années que nous recueillons
les poissons de nos côtes. Je ne la trouve men-
tionnée dans aucun auteur des Faunes du Nord,
et si S. A. R. le prince Christian de Danemarck
l'a inscrite sur son Catalogue des Poissons du
Danemarck, il a soin de faire remarquer que
c'est sur l'autorité de Bloch.
M. de Lacépède n'a pas manqué de repro-
duire encore cette nouvelle espèce nominale,
et de suivre Bloch en en faisant, contrairement
aux principes de sa classification, un labre;
quoique, s'il eût regardé la figure, il aurait dû,
sans aucun doute, le placer parmi ses lutjans.
Nous voyons par les travaux de Pallas que
l'espèce avance aussi jusque sur les côtes ro-
cheuses de la Tauride : c'est son labrus œrusi-
nosiis du Fauna rossica (t. III, p. 264). Il dit
que l'espèce vit en troupes, mais moins nom-
breuses que le crénilabre paon. Il nous apprend
que les arêtes du poisson cuit deviennent
vertes, plus foncées que celles de l'orphie.
2i2 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le Crénilabre a cinq taches.
{^Crenilabrus quinquemaculatus , Risso.)
M. Risso a donné, dans sa seconde édition,
sous le nom que nous adoptons avec lui, un
crénilabre qui est différent du poisson auquel
Bloch avait donné cette épithète.
C'est une espèce voisine ou peut-être une
simple variété du crénilabre Roissal.
Il a les mêmes formes, les mêmes nombres de
rayonsj mais les taches de la dorsale sont au nombre
de cinq : une sur les deux premières épines; la se-
conde, sur les cinquième, sixième et septième rayons;
la troisième, sur les dixième, onzième et douzième;
celles des rayons mous sont dans les mêmes rap-
ports avec les rayons que celles du crénilabre Rois-
sal. L'anale a deux taches; une autre existe sur l'o-
percule , et une de chaque côté de la queue.
Nous l'avons reçu de Palerme par M. Cons-
tant Prévost.
Nos individus ont trois pouces de longueur.
Suivant M. Risso , les couleurs sont aussi un peu
différentes du précédent. Le dos est vert tendre et
le ventre argenté, et tout le côté est parsemé d'écaillés
bleu d'azur, qui forment un réseau; le tout traversé
par des raies longitudinales obscures. Les joues et
les opercules ont, sur un fond glacé d'azur, des
lignes obliques d'un brun rougeàtre; les pectorales
sont vertes, les ventrales bleu de ciel, l'anale rou-
CHAP. III. CRÉNILABRES. 215
geatre mêlé de bleu; la caudale, d'un vert pâle, est
polnlillée de rouge.
Ils vivent sur les rochers couverts d'algues
marines, et sont plus abondans pendant les
mois de Novembre et Décembre.
Le Crénilabre queue noire.
(Crenilabrus melanocercus , Risso.)
Un autre petit crénilabre de la Méditerranée
a été décrit pour la première fois par M. Risso,
sous le nom de lutjanus melanocercus , des-
cription qui a pris place dans la seconde édi-
tion parmi les crénilabres.
Il a le corps alongé; sa hauteur fait le quart de
la longueur totale; ses dents sont petites et égales, les
crénelures fines , et s'étendant autour même du préo-
percule, qui est très-rond.
D. 17/6 ; A. 3/9 , etc.
D'autres individus ont, comme l'indique
M. Hisso :
D. n/lj A. 3/9, etc.
La peau de la tête n'a que peu de pores. Le corps
est brun; le dos est rembruni par des teintes bleu
foncé; un trait de cette couleur passe au-dessus de
l'œil, et un autre, plus délié et plus noirâtre, prend
naissance sous le bord de l'orbite, se contourne
un peu de manière à décrire une petite courbe
convexe sous le sous-orbitaire , et descend ensuite
pour passer sous la mâchoire inférieure. La dorsale
214 LIVRE XVI. LABROÏDES.
et la caudale sont rembrunies et lavées de bleu; l'a-
nale est plus claire et plus bleuâtre; la base de la cau-
dale est plus pâle que la plus grande portion de son
extrémité, laquelle a des taches ou des points noi-
râtres, qu'on voit aisément en étalant celte nageoire;
la pectorale est pâle, avec une tache noire sur l'ex-
trémité des rayons supérieurs.
Tel est le poisson conservé daus l'eau-de-vie; mais
M. Risso , qui le décrit d'après le frais, lui donne
le corps rouge; la dorsale plus obscure que le dos,
et à reflets bleuâtres; les pectorales orangées; la cau-
dale est liséréede blanc; l'anale est rousse, pointillée
de bleu.
On voit cette petite espèce sur les rochers
garnis de plantes marines, pendant les mois
de Juin, Juillet et Septembre.
Ce poisson ne dépasse pas trois pouces. On le
trouve à Marseille et à Toulon , comme à Nice,
Le Crénilabre bleu.
( Crenilahrus cceruleus, Risso , 2.^ édit. , pi. X , fîg. 25.)
Nous croyons devoir séparer, avec M. Risso,
un petit poisson tout aussi abondant que le
précédent dans la Méditerranée, mais qui nous
paraît avoir
le corps plus court, la hauteur n'étant que trois fois
et demie dans la longueur totale; l'ovale du corps
plus régulier; le museau moins obtus; constamment
seize rayons épineux à la dorsale.
CHAP. m. CRÉNILABRES. 215
D. 16/7; A. 3/8, etc.
Les couleurs sont plus claires : c'est un brun uni-
forme sans teinte bleue sur le dos. Le trait sous l'œil
est peu marqué ; la base de la caudale est d'un beau
jaune, qui tranche vif et net avec le noir de la moitié
externe de la nageoire, laquelle est lisérée de jau-
nâtre; la pectorale n'a jamais de noir à son extré-
mité, mais on voit à sa base un petit trait plus ou
moins effacé.
Sur le frais, M. Risso le décrit comme ayant le corps
bleu céleste, irisé par une infinité de nuances d'ou-
tremer, de rose, de pourpre; le ventre est d'un aurore
tendre; l'iris d'un rose brun; les nageoires sont bleues j
les pectorales et les ventrales très-pâles.
Les nombreux individus que nous avons
reçus de Marseille , de Montpellier, de Toulon,
de Nice, n'ont que deux pouces à deux pouces
et demi. M. Domnando vient de nous en en-
voyer un d'Athènes , qui a trois pouces quatre
lignes de longueur.
La femelle fraie à la fin du printemps. On
voit cette espèce apparaître parmi les algues
marines en Mars et Avril.
Le CrÉNI LABRE VERT TENDRE.
{Crenilabrus chlorosochrus, Risso.)
Je trouve dans l'Ichthyologie de M. Risso
(2.^ éd., p. 327, pi. io,fig. 24;eti.''ed.p.275,
pi 8, fig. 27) un crénilabre qu'il avait men-
21 6 LIVRE XYI. LABROÏDES.
tioniié avec la même épithète parmi les lut-
jans de la première édition, et que je n'ai pas
vu dans les collections du Cabinet du Roi.
Le corps est verdâlre, nuancé de rouge, traversé
de petites lignes obscures, avec une laclie noire sur
la portion dorsale de la queue. L'iris est vert, à
cercles dorés, les nageoires variées; la dorsale par-
semée de points rouges, la caudale traversée d'une
bande noire à sa base , et pointillée de rouge.
D. 16/8; A. 10; C. 14; P. 14; V. 1/5.
Cette espèce se nomme langaneu^ ce qui
prouve que les pécheurs la confondent avec
le crënilabre Pioissal. Elle me paraît cependant
ne pas lui appartenir : toutefois, si l'on compare
les figures des deux éditions de l'ouvrage de
M. Risso , on voit qu'elles sont assez différentes
pour que l'on puisse difficilement conclure
rien de positif d'après ces documens.
Le Crénilabre arqué.
{Crenilahrus arcuatus, Risso.)
Je n'ai pu rapporter à aucune des espèces
déposées dans le Cabinet, les caractères tirés
de la description que M. Risso a insérée,
sous ce nom, dans la seconde édition de son
Iclitliyologie.
Le dos de ce poisson est coloré en pourpre obscur;
il est moins foncé sur les côtés, plus clair sous la
CHAP. m. CRÉNILABRES. 217
gorge et le ventre, qui devient argenté violâtre ou
bleu. Les opercules sont bariolées de lignes pourpres;
il y a une tache noire près de la caudale; les pecto-
rales et la caudale sont d'un jaune roussâtre; les
autres, variées de différentes couleurs, ont des taches
noires.
D. 16/9 ; A. 3/10 j C. 14; P. 14; V. 1/^5.
Le profil du dos est presque droit, et celui du
ventre est très -arqué.
Il me paraît que c'est d'après cette forme
que M. Risso a tiré le nom spécifique de ce
poisson, qui vit sur les rochers peu profonds,
et que l'on trouve sur la côte en Mars, Avril
et Septembre.
Le Crénilabre marqué.
( Crenilàbrus notatus, nob. j Lutjanus notatus, Bl.)
Ce n'est qu'avec doute que j'insère à la suite
de ces espèces le poisson dont Bloch a fait
une espèce sous le nom de lutjanus notatus.
Bloch le représente semblable, par ses for-
mes générales, à nos petites espèces dont je
viens de parler. Les nombres sont à peu près
les mêmes.
D. 14/8; a. 3/10; C. 16; P. 14; V. 1/5.
D'ailleurs rien dans la description ne pré-
sente de note spécifique, Bloch n'ayant men-
tionné que des traits qui conviennent au
genre.
21 8 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Il le peint d'un jaune sale, marqué de taches bru-
nes; une, plus foncée et noirâtre, est près de la cau-
dale, qui est traversée par trois bandes rousses. La
dorsale a une série de taches rousses sur la partie
épineuse, et deux séries sur la portion molle. La
pectorale et la ventrale ont deux bandes brunes. Je
vois trois bandes brunes sur l'anale.
Bloch dit ce poisson originaire des Indes
orientales.
Le poisson me paraît très-voisin de notre
Cr, Donoi^ani ou de notre Cr. tinca de la Mé-
diterranée 3 mais il est difficile de rien dire
de précis d'après la figure et la description
de Bloch.
Le Crénilabre de Lincke.
(Crenilabnis Linckiij nob. )
C'est encore parmi les crénilabres incertains
que le lutjanus Linckii, représenté sous ce
nom planche 252 de la Grande ichthyologie
de Bloch, viendra prendre place.
Celui-ci paraît être d'une espèce plus dis-
tincte.
Il a le corps assez oblong, les lèvres épaisses, le
profil du museau un peu concave. Les nombres,
suivant Bloch, sont :
D. 15/11; A. 3/11 ; C. 13; P. 13; V. 1/5.
La couleur est uniforme et violette sur le corps.
CHAP. m. CRÉNILABRES. 219
jaunâtre sur les nageoires ; il n'y a aucune tache. Les
écailles sont assez grandes.
La figure a neuf pouces et demi. Blocli con-
naissait ce poisson par le dessin que lui en
avait envoyé M. Lincke. Il en ignorait la pa-
trie. Les naturalistes se fixeront davantage sur
la valeur de cette espèce, lorsqu'ils pourront
étudier l'original, qui doit être conservé dans
le Cabinet de l'université d'Iéna avec les autres
poissons de Lincke.
Le Crénilabre brun.
{Crenilabrus fuscus i nob.; Lahrus fiiscus , Pallas.)
Il me paraît que c'est encore parmi les cré-
nllabres qu'il faut placer le labrusfuscus, que
Pallas a décrit sous ce nom dans le Faunaros-
sica, page 266.
Pallas dit qu'il ressemble à son lahrus œru-
mnosus, qui est notre crénilabre Roissaljmais
qu'il a
la tête un peu pointue; les lèvres épaisses, charnues,
rougeâtres; le corps lancéolé, comprimé et à grandes
écailles; les opercules étendus et alongés par des
bords membraneux assez grands. La couleur est grise,
avec des bandes onduleuses brunes : une près de la
dorsale, une par le milieu des côtés; une tache noirq
à la queue.
D. 14/10; A. 3/9; C. 14; P. 18; V. 1/5.
L'anale et la caudale sont souvent variées.
220 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Pallas le donne comme un poisson de bon
goût, qu'il n'a vu que sur les rocliers voisins
d'Alupka, sur les côtes de Crimée, oii il
abonde vers le printemps.
L'espèce doit être très-voisine de notre cre-
nïLahrus tinca; mais les couleurs ne paraissent
pas semblables.
Le Crénilabre bridé.
{Crenilabrus capistratus ^ nob.; Labrus capistratuSj
Pallas.)
C'est encore un crénilabre que le labrus
capistratus de Pallas.^
Le corps est comprimé, à dos tranchant et couvert
d'écaillés assez petites. Les lèvres sont épaisses, blan-
ches à l'extérieur , rougeâtres en dedans , plissées
obliquement; la mâchoire supérieure a deux dents
plus fortes ; le préopercule est dentelé. La tête est
verte, tachetée de brun, et sur la joue, au-dessous
de l'œil, il y a deux traits obliques noirâtres, bordés
de vert, qui embrassent le dessous de la mâchoire
comme une bride. Au-devant de l'œil est une tache
noire; le trône est verdàtre et tacheté de brun; le
ventre est blanchâtre ; une grande tache noire existe
de chaque côté de la queue ; la pectorale est d'un
jaune verdàtre; les ventrales, vertes, sont tachetées
de brun ; la dorsale et l'anale sont vertes et tachetées
1. Faurj' ross., l. lU, p. a6g.
CHAP. m. CRÉNILAERES. 224
fie brun ; la portion molle de la dorsale est lisérée
de rouge.
D. 14/9; A. 3/8; C. 14; P. 13; V. 1/5.
Pallas en a vu depuis la taille d'un pouce
jusqu'à six; et il est assez abondant dans la
baie de Théodosie.
Il en a observé quelque variété sans taches;
il a remarqué que les couleurs se perdent dans
l'alcool et que le poisson devient gris.
Cette espèce a des rapports avec le Cr. vi-
rescens et avec le Cr. notatuSy par les nom-
bres de rayons et par quelques dispositions
générales des couleurs; mais les brides de la
tête la distinguent suffisamment. Elle ne peut
être non plus rapportée au lahrus griseus de
Brimnich, comme Pallas a hésité à le croire.
Le Crénilabre a frein.
(CrenilabrusfrœnatuSj nob. ; Lahrus frœnatus ^ Pall.)
Une autre espèce, voisine de la précédente,
est celle que Pallas a nommée lahrus frœnatus,
dans son Fauna rossica, page i^-j.
C'est un petit poisson à corps couvert d'assez
grandes écailles j épais; à museau court, obtusj à mâ-
choires égales.
D. 14/9; A. 3/8; C. 13; P. 13; V. 1/5.
Le dessus de la tête est brun; il y a sous l'œil trois
bandes brunes interrompues, obliques; le corps est
222 LIVRE XVI. LABROÏDES.
gris , couvert de taches brunes : on en voit aussi sur
la dorsale, qui est lisérée de brun; une tache noire
existe près de la queue.
Ce poisson est observé plus rarement qne
les autres parmi cette quantité de petits labres
que l'on prend sur les rivages de la Crimée.
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 223
CHAPITRE lY.
De quelques genres voisins des Crénila-
bres et en particulier des Cténolabres.
J'ai dû séparer du genre des crenilabres ceux
de ces poissons qui ont derrière les dents co-
niques qui bordent le devant des mâchoires,
une bande plus ou moins large de dents en
velours.
Parmi ceux-ci j'ai formé un premier groupe
des espèces qui ne diffèrent des crenilabres que
par ce seul caractère. Car ils ont du reste le
prëopercule finement dentelé en peigne ; trois
rayons épineux seulement à l'anale. Je nomme
ce premier genre cténolahre. Il ne comprend
encore qu'un petit nombre d'espèces, répan-
dues dans l'océan du Nord de l'Europe, dans
la Méditerranée et sur les côtes de l'Amérique
septentrionale. La patrie d'une seule espèce
m'est inconnue.
Le Cténolabre des roches.
{Cteiiolabrus rupestris, nob.; Labrus riipestris, Linn.)
Ray avait reçu de Jago la figure , accompa-
gnée d'une courte notice, d'un poisson pris sur
les côtes de Cornouailles, qu'il a publiée à la
224 LIVRE XVI. LAEROÏDES.
suite de son Synopsis ( p. 1 63 , fig. 3 ). La taclie
noire, marquée sur les premiers rayons de la
dorsale, et celle qui est placée sur le haut et
à l'extrémité de la queue , avant les rayons de
la caudale, ne peuvent laisser le moindre équi-
voque sur cette espèce. Jagole dormait comme
le goldsinnj des pécheurs de Cornotiailles.
Linné, de son côté, connaissait ce poisson
commun dans la Baltique et sur les côtes de
Norwégej il en donna une première descrip-
tion dans le Musée du prince Adolphe- Fré-
déric^, et il l'introduisit dans le Sjstema na-
turœ sous le nom de lahrus rupestrisj mais
sans profiter des travaux de Piay.
Ce lahrus rupestris de Linné a été reconnu
par Millier et les autres auteurs qui ont écrit
sur les poissons de l'Océan septentrional ou
de la Baltique. Ainsi l'auteur que nous citons
en donne , dans le Fauna danica (t. III , p. 44»
pi. 107), une figure fort reconnaissable, où
on a seulement oublié de marquer les den-
telures du préopercule. D'ailleurs, la descrip-
tion de Millier est excellente, et, à cause
des opercules dentelés, il plaçait le poisson
parmi les perches. On le trouve cependant sous
le nom de lahrus rupestris dans le prodrome
1. Mus. Ad. F,., t. I, p. G 5.
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 225
du Fauna danica (n.° 382). M. Retzius le
cite aussi dans son édition du Fauna suecica
(p. 337, n.° 73) sous le nom de perça rupes-
tris. Strôm' et Pontoppidan^ en font aussi
mention.
L'espèce était donc parfaitement connue
lorsque Pennant écrivit les différentes éditions
de sa Zoologie britannique. Dans celle de 1769
il y introduit un goldsùin/y d'après Ray ou
Jago; car il ne cite que la figure du premier
et il est facile de voir que l'article de Pennant
a été rédigé sur celui de Jago. Mais dans l'é-
dition in-4.° Pennant donne sous le nom de
goldsinnj un tout autre poisson, notre creni-
lahrus Pennantii^ ^ et Gmelin, d'après ces
deux documens, se rapportant à deux êtres
tout-à-fait différens, établit un lahrus cornu-
biuSy être par conséquent complexe et à rayer
du catalogue de nos Species, en même temps
qu'il conserve le lahrus rupestris.
Ce qu'il y a de singulier, c'est que ce lahrus
cornuhius a été, sans aucune critique préa-
lable, appliqué par un assez grand nombre
d'auteurs récens, à des poissons toujours
différens de celui de Ray, et souvent même
1. Strôm, Sund. to. , p. 291. — 2. Pontoppidan , f/w/. nat, of
Nonv., t. II, p. 226. — 3. Vide supra.
i3. i5
226 LIVRE XVI. LABROÏDES.
diffëiens du second de Pennant. Nous l'avons
fait remarquer à l'occasion des crenilabres,
dont nous avons déjà parlé en citant les
travaux de MM. Donovan, Turton, Fleming,
Jenyns , Yarell et Couch.
M. Yarell aurait pu cependant faire entrer
dans son Histoire des poissons d'Angleterre,
et sous un article particulier, notre poisson;
car il en a donné une figure dans *la vignette
de la page 3o i. Elle serait même à l'abri de tout
reproche, si la tache des rayons de la dorsale
n'y avait pas été oubliée.
M. Risso a aussi un lahrus cornubius, mais
l'espèce de la Méditerranée est différente de
celle de l'Océan.
Bloch a mentionné, dans sa Grande ich-
thyologie, sous le nom de lutjanus rupestris
(pi. 25o , fig. i) , l'espèce dont il s'agit dans cet
article ; mais sous une enluminure un peu rude ,
et avec des lignes bleues sur la tête, dont Mùller
et Linné ne font aucune mention.
C'est aussi sous le nom de lahrus rupestris
que M. Nilsson * en parle. Cependant j'ai peine
à comprendre comment ce savant y associe le
ber^snultra du Voyage de Linné en Laponie;
car fauteur du Sjstenia naturœ dit positi-
1. Prod., Ichth. Scand. , p. 76, n." 5.
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 227
vement que ce poisson avait dix-neuf rayons
épineux à la dorsale et une tache noire à la base
du dernier rayon mou de cette nageoire, carac-
tères qui ne peuvent convenir qu'à notre pre-
mier labre , et qui n'explique pas le lahrus suiU
lus de Linné, que cependant M. Nilsson cite
comme une conséquence de cette synonymie.
Car en admettant que , par une faute d'impres-
sion , il faille lire pour les nombres de la dorsale
\ 7l^d au lieu de 9/1 7 , comme Linné l'a écrit, ce
qui dans ce renversement ne devient pas encore,
suivant notre manière de compter, les nombres
des rayons de la dorsale de notre poisson, ce
grand homme ajoute sur les couleurs différens
traits qui ne conviennent plus à notre cténo-
labre. 11 faut d'ailleurs se souvenir que, si Linné
avait voulu écrire \ 7/9 pour les rayons de la
dorsale, cela voudrait dire, selon sa manière de
formuler, huit rayons épineux et neuf mous à la
dorsale, nombres qui ne s'accordent à aucune
des espèces du genre.
Le corps , de forme plus alongée qu'ovale, est assez
épais. La hauteur est comprise trois fois dans la dis-
tance du bout du museau à la base des rayons de la
caudale, et trois fois et demie dans la longueur totale;
l'épaisseur ne fait pas lout-à-fait moitié de la hauteur.
La longueur de la tête fait aussi moitié de celle du
tronc. La bouche est petite, peu fendue; la mâchoire
228 LIVRE XVI. LABROÏDES.
inférieure dépasse un peu la supérieure; il y a en
avant quatre dents en crochets, plus grandes que
celles qui suivent; et derrière cette rangée une bande
étroite de dents en velours. Les lèvres sont assez
épaisses, en bourrelet arrondi, ne recouvrant pas les
dents du premier rang : la supérieure a quelques plis
obliques très-fins. Le diamètre de l'œil est du quart de
la longueur de la tète ; l'orbite est éloigné du bout du
museau d'une fois et demie ce diamètre. Quoique
l'œil soit sur le haut de la joue, le cercle de son
bord n'entame pas la ligne du profil. L'intervalle qui
sépare les deux yeux est un peu plus grand que le
diamètre n'est long, convexe d'un œil à l'autre, et
presque recliligne dans le sens longitudinal. La nu-
que est un peu plus relevée; le sous-orbitaire est
assez grand, mince et arqué en avant; le préopercule
est large; tout le bord vertical et son angle, très-
arrondi, sont très-finement dentelés. Le limbe seul
est sans écailles , mais tout criblé de pores. Il y a trois
rangées d'écaillés derrière l'œil et cinq au-dessous sur
la joue. L'opercule, le sous -opercule et l'interoper-
cule, sont écailleux. Les ouïes sont assez bien fendues.
La membrane branchiostège a cinq rayons; elle est
nue, et réunie à celle du côté opposé par un isthme
sans écailles et assez large.
Les deux ouvertures de la narine sont sur ledessus
de la tête , distantes l'une de l'autre : l'antérieure est
entourée d'une papille tubuleuse. D'ailleurs , tout le
dessus delà tête est, comme le sous-orbitaire, dé-
pourvu d'écaillés et percé d'un nombre assez consi-
dérable de pores; il en existe aussi sur les côtés.
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 229
La pectorale est insérée sous l'angle membraneux '
de l'opercule; elle a son angle supérieur et son bord
libre arrondis.
La dorsale commence un peu en arrière de celle-
ci j la portion épineuse est très-basse : la molle est
un peu plus haute ; les rayons simples de l'anale sont
plus forts et plus hauts ; la caudale est courte, à bord
légèrement convexe, et à moitié couverte d'écaillés;
les ventrales sont petites,
B. 5; D. 17/10; A. 3/8; C. 15; V. 1/5.
Les écailles sont très-régulièrement disposées en
séries sur le corps; j'en compte trente -cinq entre
l'ouïe et la caudale, quatre rangées au-dessus de la
ligne latérale et douze en dessous : chaque écaille
est beaucoup plus longue que haute. Sa portion nue
est couverte de stries concentriques très-fines ; le bord
radical est droit, non creusé; il y a quinze à seize
rayons à l'éventail.
La ligne latérale est tracée parallèlement au dos
par le sixième environ de la hauteur du tronc; elle
s'infléchit sous la fin de la dorsale, et se rend à la
caudale par le milieu de la hauteur du tronçon de la
queue.
Nos individus conservés dans l'eau-de-vie devien-
nent plus ou moins pâles; mais la tache noire de la
dorsale et celle du dos de la queue sont constam-
ment très-marquées.
Mûller et Linné , qui l'ont souvent vu frais, le re-
présentent d'un gris plus ou moins verdâtre, lavé
de rougeâtre, avec plusieurs bandes verticales plus
foncées, qui s'effacent sur les portions inférieures;
230 LIVRE XVI. LABROÏDES.
. et dix ou douze lignes longitudinales et parallèles,
d'un gris verdâtre, le long des flancs. Il n'y a pas
d'autres taches sur le corps que les deux caracté-
ristiques que j'ai déjà signalées.
Le foie est situé presque entièrement dans le côté
gauche, où il se prolonge en un lobe long et pointu;
il est concave en arrière et recouvre les replis du
canal intestinal.
On voit l'œsophage descendre d'abord dans le côté
gauche au-dessus du foie, et se porter jusqu'à la
pointe de son lobe; il se courbe, remonte dans le
creux du foie, puis se courbe et descend de nouveau
pour revenir bientôt le long de la première ansej
il se replie alors, et, en faisant une sinuosité et en
se dilatant un peu, il se rend à l'anus.
La vessie aérienne est mince, argentée et moins
grande que celle des crénilabres.
Nous comptons quinze vertèbres abdominales et
dix-huit caudales à la colonne vertébrale. Les côtes
sont grêles et petites. Le dessus du crâne est arrondi.
Il n'y a point de carène transverse en arrière de la
gouttière dans laquelle jouent les intermaxillaires.
Nos individus varient de trois à cinq pouces.
Nous en avons de Saint-Malo, parM. Riener,
et de Norv^ége, qui ont ëtë donnés au Cabinet
du Roi par M. Alexandre Brongniart.
Millier lui donne, comme dénomination
vulgaire, les noms de rnatte, herg-neppe,
strand-kat lisse , haw-karudse^ sôe-karudse,
et tous les auteurs de ces Faunes du Nord
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 231
en parlent comme d'une espèce commune
sur les côtes rocheuses.
Pendant que j'imprimais ces recherches sur
le. lahriis rupestris de Linné, je reçois par
l'obligeance de M. William Thompson , vice-
prësident de la société des sciences naturelles
de Belfast, une notice sur les crénilabres de
l'Irlande \ extraite du Magasin de zoologie et
de botanique, n.° 1 1. Je trouve dans ce travail
que l'auteur a fort bien reconnu le goldsinriy,
de Jago dans le lahrus rupestris de Linné,
et qu'il en a pris des individus sur les côtes
de Bangor tout-à-fait semblables aux nôtres ;
mais que le nombre des rayons épineux de la
dorsale paraîtrait varier, et que tantôt on en
compte dix-sept et d'autres fois dix -huit sur
la dorsale de ces poissons.
Suivant M. Thompson, M. Selby aurait
aussi retrouvé et reconnu le poisson de Jago
de Ray sur la côte de Barncleugh , ce qui
prouve que l'espèce est assez commune dans
ces mers septentrionales.
Je trouve dans le même mémoire une des-
cription accompagnée d'une figure d'un cré-
nilabre que l'auteur nommé crenilahrus niul-
tidentatus , et sur lequel je reviendrai dans
1. Conir. ioyvards a Knon'l. ofi/ie crenilabr. of Ireland , p. 3.
252 LIVRE XVI. LABROÏDES.
un de nos supplemens : il me paraît d'une
espèce distincte, voisine de notre crenilahrus
melops.
Le Cténolabre bordé.
{Ctenolabrus marginatus , nob.)
La Méditerranée en nourrit une seconde
espèce, qui a
l'œil plus grand, car son diamètre fait près du tiers
de la longueur de la têtç; il est placé plus près du
museau, qui est plus aigu. La tête est plus étroite;
l'intervalle qui sépare les deux yeux n'est que des trois
quarts du diamètre de l'orbite. La tête est propor-
tionnellement plus longue; car la hauteur portée
sur elle ne dépasse pas le bord du préopercule ;
comparée avec celle du corps, la hauteur du tronc
est contenue quatre fois et deux tiers dans la lon-
gueur totale.
Il y a un rayon mou de moins à la dorsale et à
l'anale.
D. n/9; A. 3/T.
Les écailles sont plus courtes et plus larges.
Le poisson est d'une couleur plus uniforme ; car
je ne vois pas les tracçs des rayures longitudinales
qui existent sur l'espèce précédente.
La tache noire du devant de la dorsale est plus
noire, plus haute, et va jusqu'au sixième rayon. La
dorsale et l'anale ont un fin liséré noir. Le bord
de la caudale est noirâtre; la base paraît avoir été
jaune; la tache noire de chaque côté de la queue
existe comme dans toutes les autres espèces du genre.
CHAP. IV. CTÉNOLALRES. 255
Il y a du noîrâlre sur l'opercule et sur la base de la
pectorale.
Ce sont de petits poissons de trois pouces
et demi. Ils ont ete rapportés de Marseille et
de Toulon par M. Delalande et M. Roux.
Ce serait sans doute sous cette espèce qu'il
faudrait placer le lahrus cornuhius^ de la pre-
mière édition de M. Risso ; car il copie la
phrase de Linné, en ne citant que l'édition
in -8.° de Pennant, c'est-à-dire l'article de
Ray Ainsi M. Risso n'aurait eu que le tort
de confondre deux espèces extrêmement voi-
sines, ce qui était en quelque sorte consa-
cré à fépoque où il écrivait son ouvrage;
mais sa description est certes un mélange con-
fus , dont plusieurs traits appartiennent à des
espèces différentes. Il ne donne que quatorze
rayons épineux à la dorsale, et cependant
Linné lui en indique dix-sept. Comment donc
a-t-il pu regarder comme identiques des êtres
dont les caractères sont si distincts? Puis il
parle de taches bleues à l'anus; caractères qui
sont pris sans aucun doute d'autres espèces du
genre des crénilabres.
Dans sa seconde édition^ il augmente en-
1. Ichtlî. de Nice, p. 267, n." 8. — 2- Ibid., l. III, p. 325,
n.° 255.
254 LIVRE XVI. LABROÏDES.
core plus la confusion de la première; car il
entasse les synonymes de Gmelin et de Lacd-
pède, sans corriger d'ailleurs aucune des er-
reurs que nous venons d'indiquer.
Le CtÉNO LABRE CENDRÉ.
{Ctenolahrus cinereiis^ nob.; Lahrus cinereiis ,Voi\\.)
Nous avons encore trouvé parmi les poissons
du Cabinet du Roi un de ces cténolabres,
que nous avons vu avec d'autant plus de plaisir,
qu'il a été déjà décrit dans le Faiina rossica
de Pallas.
Il a le corps plus alongé que celui de l'Océan,
le museau plus gros et plus rond , et l'œil plus petit
que celui de la Méditerranée, les dents antérieures
de la mâchoire supérieure plus grosses et plus cour-
bées , la tache caudale beaucoup plus grande , et
celle de la dorsale plus petite ; car elle ne s'étend pas
au-delà du quatrième rayon épineux.
D. 17/10; A. 3/8, etc.
Les rayons osseux de la dorsale et de l'anale sont
plus hauts que ceux des espèces précédentes. Il
paraît d'ailleurs d'un brun cendré ou verdàtre uni-
forme.
Je n'ai vu qu'un seul individu de cette es-
pèce, qui a été rapporté du Bosphore par
M. Yirlet; il l'a entendu nommer par les Turcs
tchuchur Baloc.
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. " 255
Pallas' a décrit, sous le nom de lahrus ci-
Jiereus, une espèce qu'il signale comme n'ayant
aussi que les quatre premiers rayons de la dor-
sale tachetés de noir. Le reste de la descrip-
tion s'accorde parfaitement, à l'exception du
nombre des rayons épineux de cette nageoire :
il n'en compte que seize.
Le poisson est long de quatre pouces.
Le Cténolabre a museau aigu.
{Ctenolahriis acutus y nob.)
Parmi des poissons que M. Bâillon avait
reçus de Malaga, et qu'il a bien voulu donner
au Muséum, j'ai trouvé un petit cténolabre
assez semblable à celui de la Méditerranée
par la forme générale ; mais qui paraît avoir encore
le museau plus aigu, parce que la ligne du profil des-
cend plus obliquement de la dorsale vers la bouche.
Les dents sont petites et égales.
La tache caudale est plus petite, et celle de la dor-
sale ne s'étend que sur les trois premiers rayons j et
il y a encore un rayon mou de moins à la dorsale.
D. n/8; A. 3/8, etc.
L'individu n'a que trois jx)uces et demi.
' " ■ m I I ■. I
1. Faun. ross. asiai., t. III, p. 2G7.
256 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le CtÉN GLABRE IRIS.
(Ctenolabrus iris, nob.)
Nous avons encore reçu de la Méditerranée
une cinquième espèce de ce genre.
Elle a le museau très-aigu et très-déprimé; la ligne
latérale du profil inférieur presque droite, et celle du
supérieur monte , par une ligne un peu concave entre
les yeux, jusqu'à la dorsale, et se continue, pour
redescendre par une ligne très-arquée , jusqu'à la
queue, qui est beaucoup plus basse que celle des es-
pèces précédentes. La hauteur est du cinquième de
la longueur totale; la tête n'en fait que le quart. Le
museau est si étroit que l'orbite entaille la ligne du
front. Le diamètre de l'œil est du quart de la lon-
gueur de la tête. Le préopercule est très-arrondi et
finement dentelé. Les quatre dents mitoyennes sont
en petits crochets, et celles de derrière sont un peu
plus grenues que dans les espèces précédentes.
La couleur est un beau rouge écarlate, avec un
trait brun allant de l'œil s'évanouir sur l'épaule en
traversant l'opercule. Il y a la tache noire sur le des-
sus de la queue, à la base des rayons de la caudale,
mais il n'y en a plus sur le devant de la dorsale épi-
neuse; elle est en quelque sorte reportée en arrière
sur les trois premiers mous de la nageoire du dos. Il
en existe une sur l'extrémité des rayons mitoyens de
la caudale.
D. 16/12; A. 3/10; C. 13; P. 16; V. 1/5.
J'en ai des individus de quatre pouces de
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 237
long, que M. Savigny a pris dans la baie de
Naples. Je viens d'en ^recevoir d'autres indivi-
dus de la Sicile , de la même taille , qui me sont
envoyés par M. le prince Charles Bonaparte.
Nous, en avons reçu de Malte un plus petit
individu, mais tout aussi bien caractérisé, par
les soins du docteur Leach.
Le CtÉNO LABRE CHOGSET.
( Clenolahrus chogset^ nob. ; Labrus Burgall, Scliœpf.)
Le poisson décrit par Mitcliill sous le nom
de lahrus chogset est aussi un cténolabre, qui a
le corps alongé, et assez semblable, par sa forme à
noire Cten. riipeslris. Sa hauteur est comprise trois
fois et trois quarts dans la longueur totale; l'épais-
seur n'est pas tout-à-fait moitié de la hauteur. La tête
est plus courte que cette mesure. Le profil supérieur
est assez convexe ; le cercle de l'orbite ne l'entame pas ,
quoique l'œil soit au haut de la joue; son diamètre
est contenu plus de quatre fois dans la longueur de
la tête. Le dessus du crâne, le sous-orbi taire et la
plus grande partie de la joue sont nus; il n'y a
que deux rangées derrière l'œil et trois en dessous de
petites écailles couvrant le préopercule : le limbe en
est nu. Le bord vertical est finement dentelé; l'oper-
cule a un bord membraneux assez large; sur le mi-
lieu de l'os est une petite plaque d'écaillés plus grandes
que celles du préopercule, plus petites que celles du
corps. Le bord est nu, ainsi que le sous-opercule et
258 LIVRE XVI. LADROÏDES.
l'interopercule. Les lèvres sont épaisses, mais sans
plis en dessous. Les six ^enis du milieu sont assez
grosses et crochues. Les rayons antérieurs de la dor-
sale sont bas. Les nageoires sont arrondies.
D. 18/10 ; A. 3/9 ; C. 15 ; P. 14 ; V. 1/5.
Les écailles sont lisses, assez épaisses , peu grandes ;
j'en trouve quarante-six entre Fouie et la caudale, six
au-dessus de la ligne latérale et dix-sept au-dessous.
Une écaille est plus longue que haute et n'a que dix
à douze rayons à l'éventail. La ligne latérale se courbe
très-peu sous la fin de la dorsale.
La couleur du poisson conservé dans l'eau-de-vle
est un brun plus ou moins verdâtre, sur lequel on
voit, et principalement sur les nageoires, des teintes
violettes. La dorsale semble avoir conservé de petits
ocelles plus pâles que le fond.
Mitchill', qui Ta vu frais, indique presque
les mêmes teintes : un fond bleuâtre passant
au vert; les opercules plus verts, ainsi que
l'anale et les ventrales ; quelquefois le dos est
nuageux et varié de taches orangées.
C'est un poisson qui atteint rarement plus
de huit pouces. Il a la vie très-tenace , même
quand il est hors de l'eau.
C'est le bergall ou le hluefish des pêcheurs
de New-York, le cJiogset des Mohegans. II
L Mitchill, Phii. trans. o/Neiv- York, vol. i , p. 4o3, pi. 3 ,
flg. 2.
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 259
vit dans les mêmes eaux que le tautog ( tau-
toga nigra nob. , lahrus tautoga Mitch. )
Ce nom de bergall nous a fait retrouver
le lahrus burgall de Blocli, mentionné par
Scliœpf dans le tome ViTI des écrits des natu-
ralistes de Berlin. Les nombres sont les mêmes.
Le docteur Mitcliill cite une variété remar-
quable de son cliogset, qui est jaune et que
l'on nomme, à cause de cela., jellow cJiogset
ou jellow bergall. Le fond est souvent aussi
orangé, ou coloré de jaunâtre teinté de rou-
geatre.
Nos individus viennent de New- York par
MM. Milbert et Lesueur, et nous en avons un
autre qui a été pris à Terre-Neuve et donné au
Cal)inct du Roi par M. Le Guillou, un des
chirurgiens de la marine royale, aujourd'hui
embarqué sur la Zélée, conserve de l'Astrolabe,
dans l'expédition de M. Dumont d'Urville.
Le Cténolabre mouche.
{Ctenolabrus uninotatiis ^ nob.)
Le même M. Milbert a envoyé parmi ses
chogsets une espèce voisine de la précédente,
dont M. Mitchill n'a point fait mention, et qui
cependant s'en distingue
par un corps un peu plus trapu, la hauteur n'étant
210 LIVRE XVI. LABROÏDES.
pas quatre fois dans la longueur totale. Les dents
sont plus égales, plus serrées et plus petites; les den-
telures du préopercule sont très-fines; le limbe en
est nu, ainsi que le sous - opercule et l'interoper-
cule. La caudale est plus arrondie; la dorsale l'est
un peu moins. Les nombres sont les mêmes :
D. 18/10; A. 3/9, etc.
La ligne late'rale est un peu plus fortement déviée.
Le corps est plus vert, sans aucunes teintes bleues;
la tête en a conservé de plus marquées, et sur tous
nos individus je vois une tache noire sur le bas des
deux premiers rayons mous de la dorsale.
Nous n'en avons pas reçu qui aient plus de
quatre pouces. Ils viennent tous de New- York.
Le Cténolabre flagellifère.
{Ctenolahrus Jlagelliferj noh.)
Nous avons encore un de ces cténolabres,
remarquable par les prolongemens filamenteux
de la membrane qui unit les premiers rayons
de la dorsale.
Le corps est plus en ovale régulier; il est plus haut
et moins alongé que le précédent, et il est plus com-
primé. La courbure du dos est plus grande que celle
du ventre. La hauteur fait, à peu de cliose près, le
tiers de la longueur totale; l'épaisseur n'est que du
quart de la hauteur; la longueur de la tête égale la
hauteur du corps. Le museau est aigu; la ligne du
front descend assez obliquement^ la nuque est plus
CHAP. IV. CTÉNOLABRES. 241
soutenue, et se relève à partir de l'orbite. Celui-ci
est creusé sur le haut de la joue, entame la ligne
du profil, et sa crête sourcilière est assez élevée. Le
diamètre est compris quatre fois et demie dans la lon-
gueur de la tête. Le sous-orbitaire est haut et large ,
sans écailles, comme le dessus de la tète. Les deux
ouvertures de la narine sont percées en dessus et sur
le devant de l'œil, comme dans les autres cténolabres.
Le préopercule est très finement dentelé le long
de son bord vertical, qui fait un angle presque droit
avec le bord horizontal. L'opercule, l'interopercule
et le sous-opercule, sont couverts de très -grandes
écailles, qui dépassent, comme une membrane fes-
tonnée, le bord de la fente des ouïes.
La bouche est assez fendue ; les deux mâchoires
sont égales : à la supérieure il y a deux fortes dents
en crochets, entre lesquelles sont deux autres un
peu plus petites. De l'autre côté de ces canines est
la rangée de dents externes, qui vont en croissant,
à mesure que l'on approche de l'extrémité de l'inter-
maxillairej les dernières cependant ne sont pas en
crochets.
Le maxillaire inférieur a deux fortes canines, sé-
parées seulement par deux dents pointues, coniques,
mais plus petites; puis vient le long de l'os une ran-
gée de petites dents coniques et droites : les internes
sont un peu mousses.
La dorsale a de fortes épines assez longues , et la
membrane qui unit les trois premiers rayons se pro-^
longe, près du premier et du second, en un filet mou
plus long que le rayon j les autres prolongemens
i3. 16
242 LIVRE XVI. LABROÏDES.
membraneux, quoique plus courts, sont encore
assez sensibles. Les rayons mous sont plus alongés
que les premiers ; ceux de l'anale le sont beaucoup
plus, car ils touchent à ceux de la caudale, qui est
arrondie. La pectorale est petite, la ventrale est pointue.
D. 9/11; A. 3/9; C. 14; P. 13; V. 1/5.
Les écailles sont grandes et finement striées à leur
surface; j'en compte vingt entre l'ouïe et la caudale,
deux rangées au-dessus et cinq au-dessous de la ligne
latérale, qui est fortement infléchie sous la fin de la
dorsale.
Le poisson est entièrement décoloré par l'action
de l'alcool ; mais une tache noire s'est conservée sur
le haut de la membrane , entre les deux premiers
rayons de la dorsale.
Ce poisson est long de quatre pouces ; j'en
ignore la patrie. Il n'y en a qu'un seul individu
dans le Cabinet du Roi. Quand il sera mieux
connu, il est très-probable qu'on le distinguera
génériquement. Il a des affinités avec nos lacli-
nolèmes.
DES ACANTHOLABRES.
J'ai cru devoir faire un genre particulier
des labroïdes à prëopercule dentelé qui pré-
sentent quelques modifications dans la dis-
position de leurs dents. Celles de la rangée ex-
terne sont coniques et grosses, et par derrière
il y en a de petites formant une bande étroite.
CHAP. IV. ACANTHOLABRES. 245
Un second caractère consiste dans les nom-
breux rayons épineux de l'anale.
Ces poissons correspondent, dans les la-
broïdes, à nos centrarchus de la famille
des percoïdes. En les retirant des crénilabres,
on précise davantage les caractères de ces
différens genres. Je n'en connais qu'un petit
nombre d'espèces des mers d'Europe, et dont
celles de notre Océan septentrional me sont
moins bien connues que celle de la Méditer-
ranée.
Z/'ACANTHOLABRE PaLLONI.
{Acantholcibrus Palloniy nob.)
J'ai pu, en effet, voir plusieurs individus de
l'acantholabre de cette mer. Je lui conserverai
l'épithète que M. Risso lui avait donnée sous
le nom de lutjanus Palloni, dès sa première
édition , parce nous avons dans le Cabinet du
Roi un poisson désigné sous cette dénomina-
tion par cet ichtliyologiste dès 1812, et qu'un
autre de la même espèce, et ainsi étiqueté
par M. Risso, faisait partie des collections for-
mées à Nice par M. Savigny.
Ce poisson a le corps assez régulier : sa hauteur
fait le double de l'épaisseur et est comprise quatre
fois dans la longueur totale; celle de la tête égale
cette même hauteur du corps. Le inuseau est assez
244 LIVRE XVI. LABROÏDES.
oblus et arrondi; l'intervalle qui sépare les deux
yeux est convexe, et le diamètre de l'œil surpasse
un peu le quart de la longueur de la tête. Le sous-
orbitaire est presque entièrement au-devant de l'œil.
Le bord vertical du préopercule est oblique en avant,
son angle est arrondi; le bord horizontal descend un
peu en dessous; les dentelures, fines et égales, ne
dépassent pas l'angle. Toute la joue, l'opercule, le
sous-opercule et l'interopercule, sont couverts d'é-
cailles ; elles avancent aussi sur le crâne jusques entre
les yeux, de sorte que le bout du museau, le premier
sous - orbitaire et les branches de la mâchoire infé-
rieure, sont les seules parties de la tête qui ne soient
pas écailleuses. La mâchoire inférieure paraît dépasser
un peu la supérieure, surtout quand la bouche est
ouverte: elle est d'ailleurs peu fendue. Les dent» sont
égales , coniques , pointues, et plus grandes au milieu
que vers le fond de la bouche. La rangée des dents
internes est étroite : elles sont assez fortes; les pha-
ryngiennes ressemblent à celles des labres ordinaires.
La dorsale s'élève à l'aplomb de l'angle de l'oper-
cule ; elle est soutenue par des épines l'oides et
poignantes; la partie molle est courte et arrondie. La
caudale et l'anale le sont de même, et quelques
écailles s'étendent sur leurs membranes.
B. b; D. 20/9; A. 5/8; C. 15; P. 15; V. 1/5.
Les ventrales sont de médiocre grandeur, arron-
dies, et ont entre elles une longue plaque cornée
triangulaire, plus grande que celle des pentapodes.
Les écailles du corps sont fortes , point dentelées
ni ciliées. Une écaille, séparée et détachée, montre
CHAP. IV. ACANTHOLABRES. 245
que la portion radicale est très-large; son bord d'in-
sertion est festonné. Le triangle de l'éventail a treize
rayons; il est opposé à celui de la portion libre et
colorée. Je compte quarante-deux rangées d'écaillés
entre l'ouïe et la caudale; il n'y en a que trois au-
dessus de la ligne latérale et treize au-dessous. Cette
ligne commence au surscapulaire, se recourbe pour
monter près du dos, et descend ensuite très -peu
jusque sous la fin de la dorsale, où elle s'infléchit
pour se rendre de là, par le milieu du tronçon de
la queue, à la caudale; elle est composée d'une série
de points relevés en relief sur chaque écaille.
Nos individus, plus ou moins décolorés par l'ac-
tion de l'alcool, montrent une tache noire ronde
sur le haut du tronçon de la queue, en avant des
rayons supérieurs de la nageoire. D'autres ont une
petite tache noire en avant, ou ont encore une
tache noire à la base des derniers rayons de la dor-
sale, précédée de trois ou quatre autres, qui sem-
blent môme descendre en bandes larges et transverses
sur le dos; mais elles s'évanouissent dès qu'elles ont
atteint la ligne latérale. Je vois aussi sur un de ces
individus de Nice des traces de lignes rousses lon-
gitudinales et parallèles, au nombre de treize sur
chaque côté.
D'après un dessin colorié que M. Risso nous a
communiqué , le poisson serait bleuâtre sur le dos ,
noir sur le dessus de la tète, et rougeâtre, à reflets
bleus et argentés sur le reste du tronc. La dorsale
est jaune, tirant à l'orangé sur les rayons épineux; la
caudale est verdàtre, l'anale bleuâtre; les pectorales
246 LIVRE XVI. LABROÏDES.
et les ventrales sont orangées et bordées de bleuâtre.
Le foie est réduit à un seul lobe, situé plus à
gauche qu'à droite de l'intestin. Cet organe est court,
et ne fait que deux fortes sinuosités plutôt que de
véritables replis. La vessie aérienne est grande, simple
et cachée sous un repli fibreux et épais du péritoine ^
qui, dans le reste de l'abdomen, est mince et argenté.
Le squelette n'offre aucunes particularités remar-
quables; il ressemble à celui des autres labroides:
il y a seize vertèbres abdominales et dix-neuf caudales.
Tel est le poisson que M. Risso ( i.""^ éd.,
p. 203) dit se nommer tenco, et qu'il cite
dans sa seconde édition (p. 3ig ) sous le nom
de crenilabims exoletus, pensant alors qu'il
est de la même espèce que le poisson de
l'Océan septentrional. Il le dit d'une couleur
rosée pâle, à reflets dorés, la gorge et le ven-
tre étant d'un blanc mat; les traits de la ligne
latérale sont jaunes; la dorsale, verte ou jau-
nâtre, est variée de teintes obscures; l'anale
est blanche; les pectorales sont jaunâtres, les
ventrales roses. Il faut remarquer que cette
description est assez différente de celle que
nous avons faite d'après son dessin. L'espèce
vit sur les rochers peu profonds. On la trouve
sur la côte en Mars et Août. M. Savigny l'a
aussi rapportée de Naples; et je viens encore
d'en recevoir un individu de Sicile qui m'a
été envoyé par le M. le prince Ch. Bonaparte.
CHAP. IV. ACANTHOLABRES. 247
X'ACANTH GLABRE DU NoRD.
{Acantholahrus exoletus, nob.; Lahriis eocoletiis,
Linn.)
Linné avait désigné par l'épithète d^exo-
letus un labre qui lui paraissait anomal dans
le genre tel qu'il l'entendait, à cause des cinq
épines de son anale. Je n'ai jamais vu ce pois-
son de l'Océan septentrional, et cependant
il me paraît être différent du précédent, car
Linné ne lui compte
que dix-neuf rayons épineux à la dorsale, et il lui
donne des lignes bleues sur le corps. Oihon Fabri-
cius ', qui n'a fait que l'entrevoir une seule fois en
naviguant, l'indique comme bleu et brillant.
Voici les nombres tels que Linné les a indiqués,
et écrits à notre manière :
D. 19/8; A. 5/8; C. 13; P. 13; V. 1/5.
Ce poisson paraît très-rare, et si on le voit
cité dans toutes les Faunes du Nord, il me
semble en général que c'est sur la foi de Linné,
Otlion Fabricius excepté. Strœm^, Millier^, le
comptent parmi leurs poissons. Le prince royal
de Danemarck le nomme comme provenant
des côtes occidentales de la Norwége. Outre
les noms de Blaagomme , de Blaastaaly etc.,
communs à d'autres labroides, je trouve que
1. Faun. Groenl. , p. i66. — 2. Sœndm. y t. I/% p. 267.—
3. Fauv. Dan., Prod. , p. 6, n.° 38G.
248 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Fabricius a indiqué, comme tlënomination
dans l'idiome des Groenlandais, le nom de
Keblernak.
Millier, trompé par les rayures bleues dont
le corps de ce poisson est orné, l'a cru iden-
tique avec le labriis cœruleus d'Ascanius, et
cette erreur a été reproduite par M. Retzius,
dans son édition du Fauna suecica^ en l'aug-
mentant encore, car il a ajouté à cette syno-
nymie fautive le striped wiYisse de Pennant,
et comme variété le labrus carmeus de Bloch,
dont nous avons parlé plus haut.
Bloch et Lacépède l'ont placé parmi leurs
labres : le premier sous le nom de Linné, et
le second sous celui de labrus pentacanthus.
Je trouve aussi dans l'ouvrage de M. Nilsson
un labrus exoletus j mais comme ce savant
n'a compté que dix-sept rayons épineux à la
dorsale, et seulement sept mous, je me de-
mande si le poisson était bien de la même
espèce.
jL'AcANTHO LABRE DE COUCH.
(^Acantholahrus Couchii, nob.)
M. Couch a publié, dans le Recueil de
M. Loudon' la description et la figure d'un
1. Couch , apud Loudon, Mag. nat. hisl. ; descr. , vol. V, p. 18
el 742 , et fig. 11." 121.
CHAP. IV. ACANTHOLABRES. 249
acantholabre, qui me paraît différer de celui
de Linné,
principalement par le nombre des rayons ; car il a
six épines à l'anale et vingt et une à la dorsale. Voici
ses nombres écrits suivant notre manière :
D. 21/8 j A. 6/8; C. 15 j P. 14; V. 1/5.
La couleur est un brun uniforme et brillant, plus
clair sous le ventre; le sourcil est noir, et une tache
brune et foncée est sur le dos de la queue, à la base
des rayons de la caudale. Les pectorales sont jaunes J
les autres nageoires sont bordées de cette teinte.
M. Yarell' a reproduit d'une manière plus
élégante la figure de M. Couch, et l'a donnée,
ainsi que son prédécesseur l'avait fait, comme
le labrus luscus de Linné, qui n'a cependant
que trois rayons épineux à l'anale. On le trouve
aussi répété dans le Traité de M. Jenyns^ mais
ces deux auteurs n'en parlent que d'après
M. Couch.
Comme l'espèce n'est certainement pas le
labrus luscus de Linné, j'ai cru devoir le
dédier au zélé naturaliste qui a avancé l'ich-
thyologie des côtes d'Angleterre.
1. Brit. fish. , p. 3o2. — 2. Jenjns, Brit. an. Kingd, p. 4oo.
250 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Z/'ACANTH GLABRE DE YarELL.
{Acantholahrus Varelliij nob.)
Je placerai aussi dans ce genre le poisson
que M. Yarell^ a figure et décrit d'après un
individu acheté par lui au marcbé de Londres.
Il diffère sensiblement de tous les autres par les
nombres des rayons de sa dorsale; et de celui de
Linné , par les six épines de son anale.
D. 16/13; A. 6/8; C. 12; P. 15; V. 1/5.
Ce poisson était d'un noir pourpre foncé, plus
clair et plus brillant sous le ventre ; les lèvres et les
parties antérieures de la tête couleur de chair lavée
de pourpre, les nageoires bleues et les ventrales mar-
quées de noir à la pointe.
L'individu avait neuf pouces et demi.
Cette espèce nouvelle appartient à nos acan-
tholabres, et je me suis fait un vrai plaisir de
la dédier à M. Yarell.
Il l'a regardée à tort comme le lahrus vetula
de Bloch que j'ai déterminé après l'avoir vu
dans le Cabinet de Berlin.
X'ACANTHO LABRE PETITE BOUCHE.
{Acantholabrus microstoma, nob.; Crenilahrus
micros toma , Thompson.)
M. William Thompson, vice-président de
la société d'histoire naturelle de Belfast, vient
1. Yarell, Brit.fish., p. 284.
CHAP. IV. acantholabres. 251
de décrire* quelques poissons des côtes de
l'Irlande. J'ai trouvé parmi ces descriptions
celle d'un acantholabre , que l'auteur a nommé
crenilabrus micT^ostoma.
Ce poisson a la forme de notre crenilabrus melops
et des espèces voisines j c'est-à-dire qu'il a le corps
plus court et plus haut que celui des autres acantho-
labres. Sa bouche est petite et peu fendue; les écail-
les paraissent plus grandes. L'auteur en a eu trois
individus, sur lesquels il a vu varier les nombres des
rayons de la manière suivante :
D. 19/7; A. 5/7; C. 13; P. 14; V. \/h.
D. 19/6; A. 5/7; C. 13; P. 13; V. 1/5.
D. 20/6; A. 6/7; C. 15; p. 13; V. 1/5.
Le dos était bleu foncé; le dessus de la tête pourpre,
plus noir sur le bord supérieur de l'orbite; des raies
violettes et orangées longitudinales sur les joues, et
verticales sous la mâchoire inférieure; le ventre,
blanc argenté; la dorsale, violette, bleue à la base et
bordée d'orangé; la caudale, brune, et noirâtre à la
pointe; la pectorale, orangée, et portant une large
tache noire à sa base.
Je ne parle de ces poissons que d'après les
descriptions que j'ai indiquées plus haut. Il
ne serait pas impossible que la troisième va-
riété, citée par M. W. Thompson, fût d'une
espèce particulière. Je laisse aux naturalistes
1. Will.Thomps. yProcsfc?. of zool. soc. of London , Juin 1837,
p. 55, et Contrib. towards a knowlegde of the crenil. of Ireïandf
in Mag. of zool. and bot. , p. 6, vol. 2 , pi. XIV.
252 LIVRE XVI. LABROÏDES.
qui verront ce poisson, à lever ces différens
doutes, en examinant avec soin la dentition
de ces individus , qui ont été pris sur les côtes
d'Antrim.
L'ACANÏHO LABRE VERT.
{Jlcantholahrus ^iridis ^ nob.)
Les collections faites aux Canaries par
MM. Webb et Berthelot, montrent que lo-
cëan Atlantique fournit aussi des poissons de
ce genre. L'espèce que j ai sous les yeux res-
semble au crénilabre mélope.
La longueur de la lête fait le quart de celle du
corps. La hauteur du tronc est le tiers de celle du
corps, la caudale n'y étant pas comprise. Le préo-
percule est finement dentelé. Les dents sont égales
et serrées.
D. 17/9; A. 4/9; C. 13; P. H; V. 1/5.
J'en ai un individu qui a cinq rayons épineux
à l'anale; d'ailleurs il n'a pas de caractères spécifi-
ques différens.
La couleur est verte, avec des nuances jaunes sur
la caudale et la portion molle de la dorsale et de
l'anale.
Nos individus ont six pouces de long.
MM. Webb et Berthelot font entendu
nommer par les pêcheurs canariens verde.
J'en ai fliit donner une figure dans l'atlas de
l'Histoire naturelle des Canaries (pi i7?fig- 4)-
. CHAP. V. SUBLETS. 255
CHAPITPxE V.
Des Lahroïdes à museau protractile et
à ligne latérale non interrompue.
DES SUBLETS.
Je place dans ce chapitre un genre de lahroï-
des que M. Cuvier a établi dès la première
édition du Règne animal, et qui a les plus
grandes affinités avec les crénilabres, tels que
je les ai caractérisés; car les mâchoires ne por-
tent que des dents coniques disposées sur uu
seul rang. Mais la protractilité de leur bouche,
les fait aisément distinguer des poissons de
l'autre genre. Ils tiennent dans cette famille le
même rang que les smaris et les gerres occu-
pent dans la grande famille des sparoïdes; et
l'on aurait pu même, pour rendre le parallé-
lisme plus complet, faire une famille des la-
broïdes à museau protractile , et composées
des genres siihlets et filous, de même que
M. Cuvier à voulu former une famille dis-
tincte, sous la dénomination de méniâes , des
spares à museau protractile. Mais comme il
est contraire aux principes d'une bonne mé-
thode naturelle de multiplier inutilement les
familles, et que dans cette circonstance c'était
252 LIVRE XVI. LABROÏDES.
qui verront ce poisson, à lever ces différens
doutes, en examinant avec soin la dentition
de ces individus , qui ont été pris sur les côtes
d'Antrim.
L'ACANÏHOLABRE VERT.
{Jlcantholahriis ojiridis , nob.)
Les collections faites aux Canaries par
MM. Webb et Berthelot, montrent que l'o-
cëan Atlantique fournit aussi des poissons de
ce genre. L'espèce que j'ai sous les yeux res-
semble au crënilabre mëlope.
La longueur de la lête fait le quart de celle du
corps. La hauteur du tronc est le tiers de celle du
corps, la caudale n'y étant pas comprise. Le préo-
percule est finement dentelé. Les dents sont égales
et serrées.
D. 17/9; A. 4/9; C. 13; P. 14; V. 1/5.
J'en ai un individu qui a cinq rayons épineux
à l'anale; d'ailleurs il n'a pas de caractères spécifi-
ques difTérens.
La couleur est verte, avec des nuances jaunes sur
la caudale et la portion molle de la dorsale et de
l'anale.
Nos individus ont six pouces de long.
MM. Webb et Berthelot font entendu
nommer par les pêcheurs canariens verde.
J'en ai fait donner une figure dans l'atlas de
l'Histoire naturelle des Canaries (pi. i7?fig- 4)-
CHAP. V. SUBLETS. 255
CHAPITRE V.
Des Lahroïdes à museau protractile et
d ligne latérale non interrompue.
DES SUBLETS.
Je place dans ce chapitre un genre de lahroï-
des que M. Cuvier a établi dès la première
édition du Règne animal, et qui a les plus
grandes affinités avec les crénilabres, tels que
je les ai caractérisés; car les mâchoires ne por-
tent que des dents coniques disposées sur un
seul rang. Mais la protractilité de leur bouche,
les fait aisément distinguer des poissons de
l'autre genre. Ils tiennent dans cette famille le
même rang que les smaris et les gerres occu-
pent dans la grande famille des sparoïdes; et
l'on aurait pu même, pour rendre le parallé-
lisme plus complet, faire une famille des la-
broïdes à museau protractile, et composées
des genres suhlets et filous, de même que
M. Cuvier à voulu former une famille dis-
tincte, sous la dénomination de ménides, des
spares à museau protractile. Mais comme il
est contraire aux principes d'une bonne mé-
thode naturelle de multiplier inutilement les
familles, et que dans cette circonstance c'était
25G LIVRE XVI. LABROÏDES.
synonymies d'Aitedi. Qui pourrait, en effet,
blâmer d'attribuer à nos sublets cette diagnose
de son neuvième labre? Ljbrus rostro sur-*
sum reJlexOy cauda in extremo Circulari ?
Mais la synonymie qu'il y a jointe, laisse sub-
sister les doutes que j'ai déjà indiqués plus haut
(p. 134)- Malgré les assertions de M. Risso, je
crois ne devoir admettre qu'une seule espèce
de ce genre, celle dont je vais donner la des-
cription sous le nom suivant :
Le SUBLET GROIN.
( Coricus rostratus, nob. ; Lutjcmus rostratuSj Blocli,
pi. 254,2.)
Ce petit poisson a le corps plutôt parallélograni-
nûque qu'ovalaire. En effet, la ligne du profil su-
périeur monte par une courbe concave jusqu'à la
naissance de la dorsale, d'où elle descend, par une
courbure un peu convexe, vers la queue. Celle du
profil inférieur se porte, par une ligne oblique et
descendante, à l'abdomen, jusqu'au-delà des points
des ventrales, pour remonter ensuite à la queue.
L'angle du dos est plus avancé que celui de l'ab-
domen, et c'est entre eux deux que l'on mesure
la plus grande hauteur du corps; elle est comprise
trois fois et demie dans la longueur totale, la tête
égalant cette hauteur, et la caudale en en faisant
la moitié. La hauteur du tronçon de la queue n'est
que le tiers de celle du tronc. Quand la bouche
CHAP. V. SUBLETS. 257
est fermée, le museau est aigu, et la mâchoire in-
férieure se porte très-obliquement vers l'angle posté-
rieur de ses branches. L'œil est placé à peu près au
miheu de la longueur de la joue; il est de médiocre
grandeur, son diamètre étant compris un peu plus de
cinq fois dans la longueur de la tête, et distant du bout
du museau de deux fois la longueur de ce diamètre.
L'orbite n'entame pas la ligne du profil ; c'est au-dessus
de cet organe que la ligne du front est le plus concave ,
et à cet endroit la tête n'a pas en hauteur la moitié de
sa longueur. Le sous-orbilaire est étroit et assezalongé,
un peu échancré en avant. Le préopercule a le limbe
étroit; le bord vertical et son angle, qui est arrondi,
finement dentelés : le bord liorizontal est lisse. Je ne
vois sur la joue, au-dessous de l'œil , que deux rangées
d'écaillés. Les trois autres pièces operculaires en sont
aussi couvertes. Elles sont plus grandes que celles des
sous-orbitaires, mais plus petites que celles du corps.
Le bord membraneux est petit; la bouche est peu
fendue, mais elle est protractile.
Les branches montantes des intermaxillaires ont
le double de la longueur de la branche horizontale;
et le maxillaire, petit et élargi en palette ronde à
son extrémité inférieure, a en dessous une échan-
crure qui reçoit l'angle de l'articulaire de la mâ-
choire inférieure , sur lequel il bascule quand celle-ci
s'abaisse. Une branche grêle, et pliée à angle droit
sur cette portion inférieure de l'os maxillaire, va
rejoindre la branche montante de l'intermaxillaire ,
d'où il résulte que l'abaissement de la mâchoire in-
férieure porte nécessairement en avant le maxillaire
i3. 17
258 LIVRE XVI. LABROÏDES.
et l'intermaxillaire , et fait exécuter à la bouche son
mouvement de prolraction. Quand la mâchoire in-
férieure se relève, elle relire, en portant l'articulaire
en arrière, le maxillaire, qui entraîne les inlermaxil-
laires, dont les branches glissent dans la coulisse pra-
tiquée pour leur mouvement entre les deux sous-
orbitaires et les deux os propres du nez.
Les dents sont petites et sur un seul rang, en tout
semblables à celles de nos crénilabres ; elles sont toutes
implantées perpendiculairement sur la mâchoire, et
celles du milieu ne se portent pas horizontalement
en avant ; les pharyngiennes sont de même mousses
et grenues. Les lèvres sont minces et étendues en
assez larges membranes sur les côtés de la bouche.
Les deux ouvertures de la narine sont pratiquées
près de la ligne du profil, au-dessus de l'œil : la
postérieure est ovale et plus grande que l'antérieure.
La langue est libre et pointue. Les ouïes sont large-
ment fendues; il y a , comme à l'ordinaire, cinq
rayons aux ouïes.
La pectorale est attachée sous l'angle membra-
neux du bord de l'opercule, un peu obliquement;
ses rayons sont très-petits , et sa membrane tellement
transparente qu'on la voit à peine quand elle est
étalée et collée sur le corps : elle est généralement
du septième de la longueur totale ; mais j'ai trouvé
des individus qui l'ont un peu plus longue, et dans
ce cas elle est comprise six fois et demie dans cette
même longueur totale.
La dorsale commence un peu en arrière de l'a-
plomb tiré par l'insertion des pectorales ; ses rayons
CHAP. V. SUBLETS. 2^9
épineux sont bas et faibles : la portion molle se ter-
mine en pointe,
La caudale est arrondie. En avant de l'anale est un
appendice charnu , conique , mousse , et percé de deux
trous : l'un pour la laitance, l'autre pour l'urine.
Les ventrales sont reculées assez en arrière des
pectorales.
B. 5; D. 15/10; A. 3/9; G. 13; P. 12; V. 1/5.
Il y a trente rangées d'écaillés entre l'ouïe et la
caudale. Une écaille a le bord radical crénelé par les
extrémités des treize rayons de l'éventail. La portion
nue est finement ciselée par des stries divergentes,
en rayonnant du centre vers le bord, et croisées
par d'autres moins fortes, circulairef- et parallèles
au bord. La ligne latérale est tracée sur la quatrième
série d'écaillés; elle est parallèle au dos, et composée
d'une suite de tubulures relevées et redressées vers la
dorsale.
La couleur est un rouge orangé, quelquefois lavé
de verdàtre. A l'anus existe une grande tache bleue.
Les pectorales sont plus ou moins rouges , les ven-
trales jaunes. Je vois la caudale colorée d'une belle
teinte orangée chez les individus à pectorales pâles,
et jaunâtre chez ceux à pectorales rouge assez foncé.
Celte nageoire de la queue a le plus souvent près
du bord un fm liséré noirâtre et des points de
même teinte , plus ou moins effacés entre les rayons.
L'anale a une très - faible couleur orange chez les
individus à caudale orangée, et elle est jaune sur
ceux de l'autre variété. Chez les premiers la dor-
sale a une tache noire, étendue sur toute la mem-
2G0 LIVRE XVI. LABROÏDES.
brane réunissant les trois premières épines. Sur le
reste de la portion épineuse il y a deux séries de
points noirs : une près du bord, et une à la base
de la nageoire. La portion molle a le tiers inférieur
rougeâtre, le reste pâle et comme incolore. Sur les
individus de la seconde variété, je vois la nageoire
plus verdâtre et des points entre tous les rayons
épineux; la tache noire sur le devant étant plus ou
moins bien marquée. L'anale a une suite de petits
points noirs à sa base. Ces points se montrent aussi
sur la poitrine, sur le ventre, sur la queue, et en
plus grande abondance sur la tète; dont le dessus de
la tête est brun. Une bandelette de cette couleur tra-
verse du bout du museau à l'œil ; puis elle reprend
derrière l'orbite et s'étend sur l'opercule, passe par
l'angle et va finir sur les flancs, à moitié de la lon-
gueur du corps. Le dessus de la ligne latérale est
noirâtre. On voit quelquefois au-dessus de la bande
brune une autre argentée, mais qui ne la suit pas
aussi loin.
Les nombreuses variations des teintes de
ces petits poissons ont suggéré à M. Risso
l'idée d'en distinguer d'abord deux espèces,
et il en a même plus tard établi une troisième.
La première , qu'il a nommée
Le SuBLET Lamarck
{Corlcus Lamarcku)y
a , suivant sa diagnose ,
le corps gris obscur , varié de teintes dorées et
CHAP. V. SUBLETS. 261
argentées, et marqué de lignes ou de points rouges.
Le plus grand nombre d'individus auraient le dos
bleu d'outremer; les côtés teintés d'aurore argenté,
parsemés de points rouge-carmin. Les nageoires sont
variées de plusieurs couleurs; l'iris est doré; l'œil
a l'éclat du rubis.
M. Risso en a distingué une première va-
riété, offrant les mêmes fonds,
mais qui manque de points rouges;
et une seconde ,
jaune doré, verdâtre, avec les opercules pointillés
d'obscur.
La seconde espèce est
he SUBLET VERDATRE.
( Coricus 'virescens. )
Elle a le corps vert, varié de jaune, et la tête
traversée par des lignes violettes. Le vert foncé du
dos passe au doré sur le ventre; les nageoires sont
d'un vert tendre; les yeux sont rouge argenté, avec
l'iris doré.
11 distingue de cette seconde espèce trois
variétés.
Une,
chez laquelle le jaune domine ;
une seconde,
où le vert s'étend sur tout le corps;
et une troisième,
qui offre un mélange de toutes les gradations du vert
et du jaune, sans raies violettes^
262 LIVRE XVI. LABROÏDES.
11 a nomme la troisième espèce
Le SUBLET ROUGEATRE.
{Coî^icus ruhescejis.)
Son dos est brun-rouge; les côtés portent une
bande longitudinale rose argenté ; la base de la queue
est tachetée de noir. La couleur du dos dépend de
la dispersion de taches d'un brun obscur, mêlées
à d'autres, couleur d'outremer, sur un beau fond rose-
Le blanc argenté lavé de rose, qui s'étend sur la
gorge et le ventre , est séparé de la teinte du dos
par la bandelette argentée et rosée. L'iris est doré;
les yeux ont l'éclat du rubis, avec des reflets argen-
tés; les nageoires variées de jaune et de rouge. Sur
les premiers rayons de la dorsale existe une tache
bleuâtre, et la caudale est marquée à sa base d'un
point noir très-petit. La tache de la dorsale serait
moins apparente sur les femelles.
M. Laurillaid, qui en a rapporté de nom-
breux individus pris à Nice, et reconnus par
M. Risso pour son suhlet verdâtre^ les décrit
comme ayant
le corps traversé par douze raies longitudinales ver-
tes, avec une bande d'un violet obscur, partant de la
tête à la hauteur de l'œil, et se perdant vis-à-vis de
l'anale; la dorsale était bordée de rose. Une autre
variété avait le dos vert obscur, les côtés jaunâtres;
la tête et les flancs traversés par une ligne brune.
Je suis étonné que cet habile observateur
ne parle pas de la variété rouge, ou bleu poin-
CHAP. V. SUBLETS. 263
tille, qui me paraît la plus abondante sur tous
les points de la Méditerranée.
Ces variétés, qui ne sont pas mentionnées
par M. Risso, rentreraient dans l'espèce de
sonsublet verdâtre, si les nombres des rayons
étaient les mêmes.
A en juger d'après les nombres cités par
M. Piisso, le sublet verdâtre à seize rayons
épineux serait très-différent des deux autres,
qui n'en auraient que quatorze; mais j'ai vérifié
ces nombres sur plus de cent individus , et dans
ce grand nombre je n'en ai trouvé qu'un seul
ayant seize rayons à la dorsale, et cinq n'en
ayant que quatorze. J'ai observé plus de trente
sublets, envoyés de Nice par M. Risso lui-
même, sous le nom de lutjanus Lainarckii ,
et sur tous j'ai trouvé quinze rayons épineux
à la dorsale. Comme sur les individus à seize
ou à quatorze rayons, je ne trouve aucun
caractère qui justifie la distinction spécifique
faite par M. Risso ; et que les couleurs, si :aria-
bles dans les labres, ne peuvent dcnnei des
signes spécifiques, je persiste à croire que l'on
doit considérer ces nombreuses variétés de
teintes comme appartenant toutes à une même
espèce.
Les recberclies anatomîques que j'ai faites
confirment aussi ces conjectures. Je trouve
264 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dans tous ces individus, quel que soit le nom-
bre de leurs rayons,
un foie assez gros, convexe en dessous, concave en
dessus, pour loger dans son sillon l'œsophage et
l'estomac. Ce foie, situé presque en entier dans le
côté gauche de l'abdomen, donne à droite et en
haut un très -petit lobule. La vésicule du fiel est
très-petite. L'intestin ne fait que deux plis; la troi-
sième anse a deux fois plus de longueur que la
seconde. La rate est petite et lenticulaire, siiuée à
droite de l'intestin. Les ovaires forment deux petits
corps trièdres occupant la moitié inférieure de l'ab-
domen, réunis largement par en bas, et contenant
des œufs d'une petitesse excessive. La vessie aérienne
est grande, simple, ovoïde, à parois argentées ré-
sistantes; elle contient des corps rouges très-volu-
mineux.
Outre les parties du squelette que nous avons
déjà mentionnées en décrivant l'extérieur de l'ani-
mal, j'ajouterai que la colonne épinière a trente et
une vertèbres, dont treize sont abdominales, et que
je n'ai pas trouvé de variations dans ce nombre,
lorsque j'en observais dans celui des rayons épineux
de la dorsale. Les côtes sont petites, mais assez fortes.
Il n'y a que deux ou trois côtes horizontales.
Ce qui me porte encore à croire qu'il
n'existe qu'une seule espèce de sublet, c'est
que les pécheurs ne distinguent pas par des
noms differens ces nombreuses variétés, pa-
rées de couleurs si variées, qu'ils observent
CHAP. V. SUBLETS. 265
constamment. Leur nom nicéen est suhlaire.
Ce sont des petits poissons que l'on trouve
pendant toute l'année sur les cotes rocheuses
et peu profondes. La femelle fraie au prin-
temps. Leur chair est tendre, savoureuse.
L'espèce abonde dans toute la Méditerranée.
M. Delille nous l'a envoyée de Montpellier;
M. Delalande, de Martigues; MM. Cuvier et
Pol. Roux, de Marseille ; M. Kiener, de Tou-
lon ; MM. lUsso , Savigny et Laurillard , de Nice ;
M. le prince Charles Bonaparte , de Rome ;
MM. Constant Prévost et Bibron, de Sicile;
M. Leach, de Malte; M. Domnando, d'Athè-
nes; M. Reynaud, de Napoli de Romanie;
M. Geoffroy Saint-Hilaire, d'Alexandrie d'E-
gypte : M. de Laroche l'a aussi trouvée aux
îles Baléares.
C'est de Naples que nous avons reçu les
plus grands individus. Ils ont quatre pouces
et demi de long sur dix-huit hgnes de hau-
teur. Les autres n'ont pas généralement trois
pouces de longueur.
DES CLEPTIQUES.
Parra a figuré^, sous le nom de rahiruhia
1. Parra, Hisi. de los raros mariiimos de la Hamna; p. 44 ?
Lam. 2 1 , fig. 1.
26G LIVRE XVI. LABROÏDES.
S^enizarra, un labroïde que nous avons appris
à connaître par les collections faites à la Mar-
tinique par M. Plëe.
Nous avons reconnu que ce poisson doit
être d'un genre particulier, voisin des sublets,
par la protractilité de son museau, par les
dentelures de son préopercule et par sa ligne
latérale non interrompue. La petitesse de sa
bouche, la manière dont elle rentre sous la
voûte des sous-orbitaires; ses dents sur un
seul rang, mais en très-petit nombre et à peine
visibles; ses dents pharyngiennes composant,
par leur réunion , des petites lames à bord den-
telé en scie ; ses nageoires verticales, couvertes
en grande partie d écailles semblables à celles
du reste du corps , sont les caractères distinc-
tifs de ce genre. Dès notre premier travail sur
les poissons , nous avons reconnu , M. Cuvier
et moi, la nécessité de l'établir. Pour rappeler
ses affinités avec les filous {epihulus), que
M. Cuvier en rapprochait trop, dans ma ma-
nière de voir, nous avons imaginé de nom-
mer ce genre du nom de clepticus , KhsTrny/oç
étant une épithète que les Grecs donnaient
aux êtres enclins à voler.
C'est ainsi que le genre a paru sous cette
dénomination dans la seconde édition du
Règne animal; mais on peut remarquer que
CHAP. V. CLEPTIQUES. 267
M. Cuvier a négligé de donner plusieurs de
ses traits caractéristiques; car, entre autres
oublis, il n'a pas parlé de la dentelure du
préopercule.
Nous n'avons jusqu'à présent reçu qu'une
seule espèce de ce genre, dont nous ne pos-
sédons qu'un petit nombre d'individus, quoi-
que M. Plée nous dise dans ses notes que le
poisson n'est pas rare aux Antilles. En voici
la description.
Le Cleptique créole.
( Clepticus genizarra , nob. )
Le corps est alongé et assez régulier : sa hauteur
fait le quart de la longueur totale, et son épaisseur
est comprise deux fois et demie dans la hauteur, La
longueur de la tête est du quart de celle du corps, la
caudale non comprise , qui n'est elle-même qu'un peu
moins longue que la tête. La ligne du profil supé-
rieur est convexe sur la nuque, et assez semblable
à la courbure inférieure ; aussi l'oeil est-il à peu près
au milieu de la hauteur de la tête , mais sur le tiers
antérieur. L'orbite est rond, petit, son diamètre étant
contenu cinq fois et demie dans la longueur de la
tête. Le sous-orbitaire est une petite pièce quadrila-
tère, couverte d'une peau adipeuse et nue, située tout
au-devant de l'œil, et dont le bord antérieur, con-
cave en haut, devient au contraire convexe en bas;
il forme avec celui du côté opposé une sorte d'ogive,
2G8 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dans laquelle se place et joue la mâchoire supérieure.
Sur le bord supérieur et un peu oblique de cet os,
est un petit sillon dans lequel on voit les deux très-
petites ouvertures de la narine : la postérieure est
cependant plus visible que l'antérieure. Tout le pour-
tour de l'œil, ainsi que le petit espace compris entre
les deux narines et l'extrémité du museau, est nu.
C'est la seule portion du corps qui soit sans écailles;
car il y en a sur les branches de la mâchoire infé-
rieure, sur toutes les pièces operculaires, sur la base
des nageoires impaires et même sur celle de la pec-
torale. Le préopercule occupe le bas de la joue; son
bord vertical est légèrement concave, très-finement
dentelé; son angle est arrondi, et sa courbe s'étend
le long du bord horizontal, qui est lisse, mince et
sans dentelure. On ne distingue pas de limbe. Les
écailles, au nombre de trois rangées vers le haut
du bord vertical, et de sept vers l'angle, s'étendent
jusqu'au bord, dont elles cachent les dentelures.
On ne distingue pas sous les larges écailles de
l'opercule cet os du sous-opercule, et Tinteropercule
ne se reconnaît qu'à la petitesse des écailles. Ces
pièces sont lisses, sans dentelures; le bord membra-
neux et l'angle de l'opercule sont assez larges. Les
deux bords de l'interopercule se touchent sous
l'isthme, et la fente des ouïes, quoique grande, ne
se voit qu'à peine, tant l'appareil operculaire s'ap-
plique hermétiquement sur la ceinture de la poi-
trine; en la soulevant on voit la membrane bran-
chiostège entièrement pliée et cachée sous l'intero-
percule et le sous-opercule; elle est soutenue par
CHAP. V. CLEPTIQUES. 269
six rayons branchiostèges. Les branchies, au nom-
bre de quatre de chaque côté, sont petites. Les lames
des peignes sont très-fines, serrées, et celles des
trois premières sont profondément divisées et simu-
lent sur chaque arceau une branchie double : les
lames de la quatrième sont simples. Les râtelures de
la première externe sont formées de lames longues,
serrées, dirigées en dedans, comme pour rétrécir
et proléger l'entrée de la cavité branchiale. Les râ-
telures des autres branchies deviennent des lames
horizontales, entrecroisées, sans aucunes dents ni
épines. Les deux pharyngiens supérieurs portent cinq
rangées de lames émaillées , denliculées, dont les
pointes sont fort aiguës et font du bord externe de
ces deux os une sorte de scie, qui joue sur un sys-
tème semblable du pharyngien inférieur, dont la tige,
sans dentelures, s'avance entre les branchies, vers le
corps de l'os hyoïde.
Cette dentition, qui rentre dans celle des labroides
ordinaires, offre encore cependant une disposition
caractéristique du genre des cleptiques.
La bouche est extrêmement petite; mais elle peut
s'alonger en un long tube par la protraction des
intermaxillaires, dont les branches sont très-longues.
L'ouverture est semi-circulaire, les deux intermaxil-
laires étant réunis en demi- cercle. La lèvre supé-
rieure a très- peu d'épaisseur, est très -adhérente à
l'os , dont la branche latérale n'a que quatre à cinq
petites dents coniques; la mitoyenne seule est hori-
zontale ; elle seule dépasse un peu la lèvre , et peut
se voir facilement; les autres se sentent au toucher
270 LIVRE XVI. LABROÏDES.
comme de petites aspérités. Quand la mâchoire infé-
rieure s'abaisse pour ouvrir la bouche, la branche
horizontale de l'intermaxillaire seule se détache du
bord de la voûte des sous-orbitaires, et l'on ne voit pas
du tout les maxillaires; mais ils deviennent visibles
quand on fait sortir le tube entier de la bouche:
on aperçoit les branches montantes dans toute leur
longueur; elles jouent sous la peau nue du devant
du museau; elles remontent sur le crâne jusqu'à la
hauteur du milieu de l'orbite. Le maxillaire se mon-
tre alors comme une languette plate, arrondie par
en bas, mince et un peu courbée, pour se cacher
entièrement dans la rétraction de la bouche sous
le sous-orbitaire. La mâchoire inférieure, qui a une
lèvre très-épaisse et étendue sous elle, a deux dents
mitoyennes horizontales , un peu plus fortes que les
deux ou trois autres, extrêmement petites, qui la
suivent. Les branches horizontales sont portées assez
loin en arrière; elles deviennent larges, et ont un
articulaire as^ez grand , qui sert à faire basculer les
maxillaires et attirer en avant les intermaxillaires. La
langue a de la liberté dans l'intérieur de la bouche ;
elle est pointue et lisse comme le palais.
Quand les rayons de la dorsale sont abaissés, ils
sont tout-à-fait cachés par les écailles de la base de la
nageoire, qui ne font pas cependant une large gout-
tière, comme celle des spares. Les rayons, en se re-
dressant, entraînent et relèvent avec eux les écailles
qui les recouvrent; la nageoire devient tout-à-fait
écailleuse; on ne voit que la pointe des épines, et
une plus longue portion des rayons articulés. La
CHAP. V. CLEPTIQUES. 271
longueur des rayons épineux augmente successive-
ment du premier au douzième, puis les deux pre-
miers rayons mous s'alongent un peu, et ils sont en-
suite dépassés de plus du double de leur longueur,
jusqu'au septième articulé, lequel est suivi de trois
autres rayons, moitié plus courts que lui, ce qui
rend la portion molle de l'anale pointue, puis échan-
crée en arrière, comme si la nageoire était coupée.
L'anale est faite de même : c'est le septième et le
huitième rayon mou qui sont prolongés en pointe.
La caudale est fourchue quand elle est fermée ,
et coupée en croissant quand ses rayons sont écar-
tés. La pectorale est pointue, triangulaire; elle est
comprise quatre fois et demie dans la longueur to-
tale : elle n'a pas d'écaillés à sa base. La ventrale est
de médiocre grandeur; elle a dans son aisselle une
série d'écaillés pointues, et une plus longue sépare
la base des deux nageoires inférieures.
Les écailles sont lisses, assez grandes; j'en compte
trente-cinq entre l'ouïe et la caudale , cinq rangées
au-dessus de la ligne latérale tracée parallèlement
au dos le long de la sixième rangée, et dix à douze
au-dessous. Chaque écaille a une base radicale qua^
drilatère, plus que double en surface de la portion
nue; elle a un large éventail triangulaire à dix-sept
rayons. La portion nue de l'écaillé, vue à la loupe,
montre de très-nombreuses stries longitudinales.
La ligne latérale se continue sans interruption
jusqu'à la caudale; elle est formée d'une sorte de
petites tubulures simples et un peu relevées.
Le poisson, décoloré par l'esprit de vin, est d'un
272 LIVRE XVI. labroïdes.
brun olivâtre foncé sur le clos; lavé de bleuâtre,
argenté et marbré de bleu sur le ventre. La caudale
est violâlre; les pointes de la dorsale et de l'anale sont
brunes , ces deux nageoires étant bordées de brun; la
face interne de la pectorale est très-foncée.
Le foie est peu volumineux; la vésicule du fiel est
assez grande, ovale, suspendue à un long canal cys-
tique : sa plus grande portion est située dans le côté
droit de l'abdomen. Le canal intestinal n'offre aucune
dilatation ; il descend d'abord jusqu'au tiers de l'ab-
domen, puis fait un petit feston, et remonte vers le
diaphragme pour se porter de nouveau vers le bas;
au second tiers , il revient de nouveau vers la tête :
cette anse va loucher le premier pli, d'où l'intestin,
en s'élargissant, se rend droit à l'anus. Son épiploon
est très gras. Les organes de la génération n'étaient
pas développés. La vessie aérienne est mince, mais
très- grande. Le péritoine est argenté.
Nous en avons des individus qui ont jus-
qu'à dix pouces de longueur. Ils nous sont
venus de la Martinique par M. Garnot; mais
nous connaissions déjà l'espèce par un indi-
vidu plus petit, qui nous avait été envoyé
de la même île par M. Plee.
Ce voyageur le regarde comme un des pois-
sons communs sur le rivage , et c'est même de
là qu'il déduit l'origine du nom vulgaire de
Créole, sous lequel il nous l'a envoyé. Il dit
que sa chair est de bon goût, et qu'il ne dé-
passe pas une livre de poids.
CHAP. V. CLEPTIQUES. 273
Parra l'indique avec des couleurs plus vives
que M. Plëe, mais à peu près semblables : la
tête est carmin obscur; le dos, plus clair,
passe au rose; les cotes orangés et les pecto-
rales noirâtres. Il le dit un poisson de hauts
fonds, et très-rare dans les mers de la Havane;
car le pécheur qui lui a apporté l'individu
qu'il a peint, n'en avait pas encore vu d'au-
tres, quoiqu'il se livrât à l'exercice de la pèche
depuis plus de quarante ans.
i3. 18
274 LIVRE XVL LABROÏDES.
CHAPITRE YI.
Des Laclinolèmes {haclniolaiinus) , nom-
més vulgairement aux Antilles aigret-
tes ou capitaines.
Catesby, dans son Histoire naturelle de la
Caroline, a donne (t. II, pi. i5) la figure de
la tête et des premiers rayons dorsaux d'un
poisson qu'il nomme suilluSy et dont il n'est
pas question dans les auteurs systématiques,
excepté toutefois Bonnaterre, qui, dans l'En-
cyclopédie méthodique \ l'a confondu avec le
lahrus suilliis ou her^sniltra de Linné, et en
a fait ainsi un poisson des Antilles et d'Eu-
rope. Cet oubli tient probablement à ce que
sa description est aussi incomplète que sa
figure; on voit cependant qu'il a des caractères
remarquables dans la protrac tilité de sa mâ-
choire supérieure , dans les grandes dents qui
l'arment en avant, ainsi que l'inférieure; dans
le prolongement en longues lanières des pre-
miers rayons de sa dorsale , dans son profil con-
cave et dans l'intégrité de toutes ses pièces
operculaires.
1. Explic. des pi. d'ichlh., p. 109.
CHAP. VI. LACHNOLÈMES. 2715
Ces mêmes caractères généraux se retrou-
vent dans un poisson de la Havane, décrit
et représenté par Parra (pi. 3, fig. 2), sous
le nom de perro, c'est-à-dire chien en espa-
gnol; mais il ne paraît pas que ce perro soit
de la même espèce que le suilluSf ou du moins
faut-il avouer que les descriptions de leurs
couleurs, telles que les donnent Catesby et
Parra, et même les formes de' leurs museaux,
ne se ressemblent guère ; mais l'identité du
genre n'en est pas moins certaine.
Nous avons vu aussi un dessin d'un poisson
du même genre, fait en 1771 au Cap-Français
de Saint-Domingue, et intitulé aigrette ou
vivaneau; et M. Plée nous en a envoyé de la
Martinique, sous le nom de capitaine; de
Porto-Rico, sous le nom de cotorra {perru-
ches^ de Barthélémy, sous celui d'aigrette^
et de Saint -Thomas, sous celui de hog-Jish
[poisson cochon), tous semblables entre eux
et à ceux de Parra et de Catesby par les ca-
ractères généraux; mais assez différens par les
détails des proportions et quelques accidens
de couleurs, pour être considérés comme
formant au moins quatre espèces, ainsi que
nos lecteurs vont en juger.
J'ai lieu de crohe cependant que Linné
avait vu un poisson de ce genre dans le Musée
276 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de De Geei^; car ce qu'il en dit dans sa
douzième édition convient parfaitement à
nos lachnolèmes. Il le décrit sous le nom de
« LJBRUS FALCATUS, pinïiœ dorsali analique
raâiis quinque primis inerniihus falcata. ''
Et il ajoute : « corpus latitudine Bramœ, ar^
genteum. Radii quinque prirni e mollihus doj^-
salis analisque elongati, sequentibus œqua-
libus, unde hœ pinnœ falcatœ j dentés acuti
sunt; pinnœ ventrales parvœ. ''
Le poisson venait d'Amérique , comme
tous nos lachnolèmes; mais les nombres de
rayons sont différens de tous ceux que nous
avons observes. Les voici tels que Linné les
a comptes, et écrits suivant notre méthode:
D. 7/20; A. 3/17; C. 20; P. 17; V. 1/5.
Ce poisson est devenu le labre faucheur
de l'Encyclopédie, et il est cité sous ce nom
dans l'ouvrage de Lacépède.
Tous nos lachnolèmes ressemblent à des
labres proprement dits , par leurs lèvres , par
l'ensemble de leurs formes, par la membrane
qui descend de leurs sous-orbitaires, par les
écailles de leurs joues, par les lanières de leur
dorsale. Mais on les reconnaît dès l'extérieur
aux prolongemens flexibles de leurs premiers
aiguillons dorsaux; à leur ligne latérale parai-
CHAP. VI. LACHNOLÈMES. 277
lèle au dos non interrompue; à leurs dents an-
térieures fortes, crochues, portées en avant et
suivies d'une série de petites dents égales. Un
caractère plus profond consiste dans leurs pha-
ryngiens , qui , au lieu d'être armés sur leur tota-
lité, comme dans les labres, de dents en forme
de pavés, n'en ont que sur une petite étendue
et sont couverts, sur le reste de leur surface,
d'une membrane veloutée. C'est de cette parti-
cularité que nous avons dérivé leur nom géné-
rique, laclinolhne, de '^c^%v^ {lanugo) et de
?^ccifAo^ (giUtiir)j il signifie gorge laineuse, gorge
veloutée.
Leur intérieur est aussi analogue à celui
des labres : ils manquent de cœcums.
II paraît qu'ils se ressemblent entre eux par
les couleurs non moins que par les formes.
Leurs teintes générales sont rouges, et pres-
que tous ont une tache noire sur la base de
la dorsale à son bord postérieur.
Le Lachnolème aigrette.
{Lachnolaimus aigula , nob.)
L'espèce que nous décrirons en tête du
genre, est Yaigrette de Saint-Barthélémy.
Son corps est ovale, et assez comprimé lorsque
sa bouche est rentrée et fermée. Sa plus grande liau-
278 LIVRE XVI. labroïdes.
teur, prise au milieu du tronc, est deux fois et trois
quarts dans sa longueur totale, la caudale comprise,
et deux fois et un quart seulement, en ne la comp-
tant pas. Son épaisseur est deux fois et demie dans
sa hauteur. La longueur de sa tête fait le quart de la
longueur totale, et elle est aussi haute à la nuque
qu'elle est longue; mais la -bouche, en s'alon géant,
ajoute plus d'un quart à la longueur de la tête, et les
proportions générales changent en conséquence. La
manière dont la mâchoire supérieure se porte en
avant et dont l'inférieure s'abaisse dans cette protrac-
tion, donne à la physionomie de ce poisson un rap-
port sensible avec celle de nos hœmulons ou goretles.
Des lèvres charnues garnissent les deux mâchoires,
et les sous-orbitaires sont enveloppés sous une large
production de la peau, qui unit ceux d'un côté à
ceux de l'autre, et sous laquelle la mâchoire supé-
rieure se cache presque entièrement dans la rétrac-
tion. Cest même à peine si le maxillaire se montre
un peu dans la protraction; il est plat, un peu élargi,
et arrondi à son extrémité. La fente de la bouche,
même lorsqu'elle est visible jusqu'à la commissure,
ne fait qu'un peu plus du tiers de la longueur de la
tête (les mâchoires censées retirées), et ne s'étend
pas jusque sous l'œil, qui est à peu près au milieu
de cette longueur et au quart de la hauteur. La
mâchoire supérieure a en avant quatre dents alongées ,
crochues et terminées en pointe; et de chaque côté
treize ou quatorze petites dents coniques et mousses,
à peu près égales, et se montrant peu hors de la
gencive. L'inférieure a aussi en avant quatre dents
chap. VI lachnolèmes. 279
longues et crochues; mais les deux intermédiaires
sont de moitié plus courtes de chaque côté; elle en
a dix-sept ou dix-huit, coniques et courtes, un peu
moins cependant que celles d'en haut. Les voiles de
derrière les dents sont épais et peu larges. La langue
est ovale, obtuse, peu libre; elle est, ainsi que
le palais , veloutée vers sa base et sans dents ;
et une membrane, dont le velouté est encore plus
épais, couvre les deux pharyngiens supérieurs an-
térieurs et les bords de l'inférieur , de sorte qu'il
n'y a de dents en pavés qu'au troisième d'en haut et
à la partie moyenne et postérieure de celui d'en bas.
Le diamètre de l'œil est du cinquième de la longueur
de la tête ; l'intervalle des yeux est presque double
de ce diamètre. Un léger rebord de la peau garnit
le tour de l'orbite, mais sans former aucune pau-
pière. L'orifice postérieur de la narine est un trou
assez petit, sans rebord, placé en avant de l'œil, à
une distance égale à la moitié de son diamètre; l'anté-
rieur, encore beaucoup plus petit et semblable à
une piqûre d'aiguille, est à la même distance, en
avant du postérieur, mais un peu plus bas; l'inter-
valle et le tour des yeux, et tout le museau et les
mâchoires, sont couverts d'une peau sans écailles,
ainsi que le limbe du préopercule; mais le crâne,
la tempe, la joue et les trois pièces operculaires sont
écailleux. Le préopercule est rectangulaire , et a l'angle
arrondi et le bord entier. L'opercule est deux fois plus
haut que long, coupé en arc peu courbé; un bord
cutané le termine en angle obtus. La membrane bran-
chioslège s'unit à sa correspondante sous risihme ,
280 LIVRE XVI. LABROÏDES.
à peu près vis-à-vis le milieu de l'œil; elles ont cha-
cune six rayons. La quatrième brancliie est tout-
à-fait collée à l'épaule, de manière que l'eau ne
peut passer entre elle et le corps. Il y a une demi-
branchie attachée sous les os de la 'joue. L'aisselle
est nue, et il n'y a à l'épaule ni armure ni écaille
particulière. La pectorale, de forme demi-ovale et
attachée au tiers inférieur de la hauteur, est d'un
peu moins du cinquième de la longueur et a quinze
rayons. Le premier, qui est simple, n'a que moitié
de la longueur des trois suivans , qui sont les plus
longs.
Les ventrales , à peu près de la longueur des pec-
torales, sont attachées un peu plus en arrière, l'une
près de l'autre ; sur leur base est un petit repli
écailleux, et il y en a un impair entre elles. Leur
épine est grêle et d'un quart plus courte que le
deuxième rayon mou, qui est le plus long.
La dorsale commence, au-dessus de l'attache des
pectorales, par trois rayons comprimés, et les ter-
mine en pointes flexibles de près de moitié de la
longueur du corps; le quatrième n'a que le tiers de
la longueur des autres, et il est suivi de dix autres,
de moitié plus courts que lui. Entre tous ces rayons
la membrane est échancrée jusqu'à sa racine; mais
à chacun des dix derniers elle forme une petite
lanière qui dépasse l'épine de moitié. La dixième
épine reprend un peu de longueur, et des onze
rayons mous qui la suivent, le quatrième et le cin-
quième sont les plus longs, et donnent à cette partie
de la nageoire une pointe aiguë. Cette portion molle
CHAP. VI. lachnolèmes. 281
de la dorsale , dont la pointe égale en hauteur la
moitié des premiers rayons épineux , n'occupe pas en
longueur sur le dos moitié de l'espace qu'y tient la
partie épineuse, et les deux ensemble y prennent à
peu près les deux cinquièmes de la longueur totale.
L'anale commence vis-à-vis l'avant-dernier rayon
osseux du dos, et a trois épines courtes et fortes,
munies de lanières, comme celles de la dorsale; et
dix rayons mous, dont le troisième et le quatrième
forment aussi une pointe aiguë, égale à celle de la
nageoire supérieure.
Les écailles du corps s'étendent un peu sur les
hases de ces nageoires, et les aiguillons de la dor-
sale peuvent, jusqu'à un certain point, se cacher
entre elles.
La portion de queue derrière la dorsale et l'anale
est du sixième de la longueur totale, et un peu
moins haute que longue. La caudale a ses deux
angles prolongés en pointes aiguës; leur longueur
est de plus du cinquième du total; dans le milieu
elle n'en a que le huitième. On y compte quatorze
rayons, dont les deux extrêmes sont sans branches.
D. 15/11, dont cinq filets; A. 3/10; C. 14; P. 15; V. 1/5.
Les écailles sont grandes, ovales, plus longues
que larges , à peu près lisses dans leur partie visible,
membraneuses et très-fmement striées sur leur limbe.
L'éventail prend les deux tiers de la longueur et a
' dix-sept ou dix-huit stries. Celles qui couvrent la
racine de la caudale, sont plus alongées que les
autres; il en est de même de celles de la joue. La
282 LIVRE XVI. LABROÏDES.
ligne latérale, à peu près parallèle au dos, occupe
en avant le tiers de la hauteur, et se marque sur
chaque écaille par une élevure linéaire et simple, qui
occupe moitié de la longueur. Les nageoires n'ont
aucunes écailles.
Dans la liqueur il paraît entièrement d'un brun
pourpré, avec une tache ronde et d'un brun foncé à
la base postérieure de la dorsale. Mais M. Plée^ qui
l'a vu et dessiné vivant, lui donne des couleurs plus
belles et plus variées: le dos, selon lui, est rouge, les
flancs d'un rouge nuancé de blanc, la mâchoire infé-
rieure blanche; sur la tempe et sur la joue se voient
de petits traits obliques bleus; les longs rayons épi-
neux de la dorsale sont très-rouges, et la tache de
l'angle de cette nageoire très-noire.
A l'ouverture du corps du lachnolème, l'abdomen
paraît petit; on voit les viscères qui servent à la
digestion et à la génération, renfermés dans une ca-
vité un peu plus longue que haute, très-étroite, et
dont les parois sont tapissées par un péritoine argenté
brillant, assez mince sur les muscles du ventre , mais
qui s'épaissit beaucoup sous le dos, excepté à l'endroit
où il laisse passer les vaisseaux qui se rendent à la
vessie aérienne. Celle-ci, par son volume, lait plus
que doubler la capacité de la cavité que l'on a vue
d'abord.
Le canal intestinal est un tube alongé, simple,
sans dilatation sensible qui fasse l'estomac. A son
entrée près du pharynx l'œsophage est très-plissé;
1. Barthélémy', n." 22, fol. 106, de Porto-Rico.
CHAP. VI. LACHNOLÈMES. 285
ces plis ne se portent pas loin en arrière, et la mu-
queuse est couverte de petites cellules hexagonales,
formées par la réunion des papilles élevées sur sa
surface. Cette disposition est la même sur toute la
veloutée de l'intestin. Vers le tiers de sa longueur
il y a un étranglement, puis l'intestin fait quelques
ondulations, et ensuite un repli très -court, après
lequel il se courbe de nouveau et se rend droit a
l'anus, en augmentant beaucoup de largeur. Une
valvule charnue, épaisse, en forme de bourrelet,
sépare le rectum du reste de l'intestin 5 elle répond
à la hauteur du premier repli.
La rate est petite, ovale, aplatie, suspendue au-
dessus de l'intestin vers le second repli.
Les laitances sont médiocres, rejetées vers l'ar-
rière de l'abdomen j les sacs sont ovales, alongés, et
se prolongent en un canal peu étroit qui débouche
derrière l'anus.
La vessie natatoire est très- grande : elle s'étend
depuis les branchies jusque dans les muscles de la
queue, où elle pénètre assez loin par les deux cornes
à base très-large , qu'elle envoie en arrière. Sa tuni-
que propre est membraneuse et d'une grande té-
nuité; celle que lui fournit le péritoine est épaisse,
fibreuse, très -solide, et donne de fortes brides qui
s'unissent intimement avec les aponévroses des mus-
cles latéraux, de manière que la vessie adhère aux
côtes avec beaucoup de force: Vers le haut, cette
tunique de la vessie adhère aux apophyses trans-
verses des vertèbres , qui sont grosses et élargies ,
pour donner de plus grandes attaches encore à celte
tunique, qui brille d'un bel éclat argenté.
284 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Les reins sont renflés antérieurement entre les
branchies et la vessie aérienne; ils deviennent sous
la colonne vertébrale un simple filet, qui descend
entre les fourches de la vessie natatoire, et qui se
renfle de nouveau en un bulbe unique, qui dé-
bouche immédiatement dans la vessie urinaire; celle-
ci est grande, en ovale alongé, un peu comprimé,
et étendue depuis l'anus jusqu'en avant de la bifur-
cation du sac des laitances.
Nous ne pouvons rien dire du foie, qui était
détruit; mais nous avons pu juger que ce viscère
doit être très-petit dans ce poisson.
L'individu que nous décrivons est* long de
onze pouces, et en a quatre de hauteur.
Uaîgrette de Saint-Domingue, dont je
n'ai qu'un dessin peu correct pour la partie
de la queue, me paraît cependant, d'après
les rayons de sa dorsale et la forme de sa
tête, appartenir à la même espèce que celle
de Saint-Barthëlemy.
La note qui accompagne le dessin dit que
l'individu était long de deux pieds, que l'es-
pèce porte aussi le nom de vwaneau, sans
doute à cause de sa couleur rouge , semblable
à celle du vrai vivaneau (mesopi^ion), et que
c'est un excellent poisson , dont la chair est
blanche comme du lait, et d'un goût déli-
cieux.
CHAP. VI. LACHNOLÈMES. 285
Le Lachnolème capitaine.
{Lachîiolaimus diiaCj nob.)
Le lacliiiolème envoyé de la Martinique
par M. Plée, et qui se nomme capitaine dans
cette île, ressemble à celui de Saint-Bartlié-
lemy pour les formes;
mais son quatrième rayon dorsal n'est que d'un tiers
plus court que le troisième, et, au contraire, les
pointes de ses trois nageoires verticales ne sont ni si
alongées ni si aiguës. Dans la liqueur il paraît entière-
ment aurore, avec la tache noire à la dorsale, des
teintes noirâtres au bord de l'anale, et une triple série
de points noirâtres sur la membrane de la caudale,
dont celle de la base est plus large.
D'après la description de M. Plée, dans l'état frais
il est rouge et a les nageoires jaunes.
Le lachnolème capitaine a le foie petit; le canal
intestinal simple, onduleux, et faisant en outre deux
replis très-courts dans sa longueur; peu avant de
déboucher à l'anus, une valvule assez épaisse indi-
que le rectum, qui est très-large. Son diamètre a plus
que le double de celui de l'intestin. La veloutée n'a
que de petites rides irrégulières et inégales.
Nous n'avons pas vu la vessie aérienne de celle
espèce parce qu'elle était détruite.
Cet individu est long de huit pouces.
Ses dents antérieures, surtout celles d'en
bas , sont beaucoup moins longues à propor-
286 LIVRE XVI. LABROÏDES.
tion que dans celui de Saint-Bartliélemy;
mais il paraît jeune.
M. Plëe assure qu'il y en a à la Martinique
de vingt-cinq à trente livres pesant, qu'ils y
sont peu communs, et qu'on les y recherche
à cause de la bonté de leur chair.
Le Lachnolème a grouin de cochon.
{Lachnolaimus suillus ^ nob.j Catesb., XV.)
Un des lachnolèmes envoyés de Saint-
Thomas, sous le nom de ho^-jisli, me paraît
répondre mieux que tous les autres à la figure
de Catesby.
C«st une femelle, longue d'un peu plus de deux
pieds; son museau est plus alongé et plus concave
à proportion que dans les précédents; sa tête n'est
que trois fois et deux tiers dans la longueur totale ,
prise jusqu'au bout des longues pointes de la cau-
dale. Ses dents antérieures sont très-fortes, excepté
les deux intermédiaires d'en bas; outre la rangée de
petites de chaque côté, il y en a à la face interne de
chaque mâchoire deux ou trois rangs irréguliers
et elles y sont encore plus petites. Sa dorsale n'a que
trois rayons alongés; le quatrième est aussi court
que les dix qui le suivent. Au contraire, les angles
de sa caudale s'alongent en pointes étroites et aiguës,
plus longues que le reste de la mâchoire, et qui, à
CHAP. yi. LACHNOLÈMES. 287
elles seules prennent près du sixième de la longueur
du poisson.
A l'état sec la couleur paraît d'un gris fauve. La
tache de la dorsale est petite ; la moitié de la cau-
dale, du côté de la base, est couverte d'une large
bande verticale noirâtre, qui se prolonge sur les bords
jusqu'aux extrémités de ses pointes. La membrane
de sa dorsale est noire à sa base, et du pied de ses
trois premiers rayons part une bande noirâtre, qui
se porte, en s'affalbllssant, jusque vers l'œil et au-
delà sur les côtés du museau. Sur chaque flanc, au-
dessus de la pointe de la pectorale, est une tache
oblongue et noirâtre. La pectorale même est jaune.
La ventrale et le bord antérieur de la dorsale et de
l'anale sont teints de noirâtre.
Dans le frais, d'après les notes qui nous sont
fourmes par M. Plée et par M. Rlcord, l'espèce a le
bord des écailles rouge et la base jaunâtre; le dessus
de la tête pourpré; les deux côtés de sa mâchoire
inférieure d'un rouge de sang très-vif, les écailles de
la joue d'un bleu clair sur un fond orangé, couvert
de petites rlvulatlons rouges; la portion épineuse
de la dorsale brune; ses longues pointes rouges ou
orangées, avec des filets brunâtres; la seconde dorsale
bordée sur le devant de gris foncé, et de rouge sur
le haut; la base est verdâtre, les pectorales jaunes;
les ventrales noires à la pointe , et jaune taclieté de
rouge à la base; la caudale a la moitié noire et le
croissant jaune; les pointes sont noires, son Iris
rouge.
Il ajoute que ces couleurs sont sujettes à varier;
288 LIVRE XVI. LABROÏDES.
mais on volt que ce qu'il en dit, joint à ce que nous
y avons observé, s'accorde assez bien avec la des-
cription et la figure de Gatesby. ^
M. Plée assure que la chair de ce poisson
est très-estimée , et qu'on le trouve en abon-
dance parmi les rochers des petites Isles-
Vierges. L'individu qu'il nous a envoyé est,
dit-il, des plus grands. Catesby en a vu de
bien supérieurs, car il leur attribue une lon-
gueur de trois et de quatre pieds.
Cette espèce se retrouve aussi à Saint-
Domingue, d'où M. Ricord nous en a rap-
porté un bel individu, aussi grand que celui
qui a servi à notre description. Il a tous les
caractères que nous avons signalés sur le pois-
son de Saint-Tliomas.
Le Lachnoléme petit chien.
{Lachnolaimus caninus , nob.)
Les mers des Antilles nourrissent une qua-
trième espèce de lachnolèmes, qui atteint à
une taille assez considérable.
1. Catesby n'avait vu que la partie antérieure du poisson ^ et
à ce qu'il paraît déjà un peu altérée. Il indique bien le rouge de
la bouche, \t& petites taches bleues des joues, le brun du dcA'ant
du museau , le jaune de la pectorale, le noir de la dorsale et des
ventrales; mais il peint le dos d'un brun pourpré, et dit que le
ventre était tacheté de jaune.
CHAP. VI. LACHNOLÈMES. 289
Elle n'a que les trois premiers rayons alongés en
lanière, qui atteignent, en les abaissant, à la taclie de la
base de la dorsale. Le quatrième rayon est court et
devient une forte épine. Le museau est beaucoup
moins prolongé. La mâchoire supérieure a au milieu
quatre très-grosses dents coniques et pointues; et, à
l'inférieure, des quatre plus grosses les deux externes
dépassent les autres. Le long des mâchoires il n'y a
qu'une rangée de dents. Il est probable que cette
disposition aura fait donner à l'espèce le nom de
perro par les Espagnols de la Havane.
Le corps est rouge, plus uniforme, sans tache sur
les flancs, sans brun sur la dorsale et sans pourpré
sur la nuque.
Nous avons pu faire sur le squelette de cette
espèce les oÎ3servations suivantes :
La crête interpariétale est très-haute et se divise
antérieurement en deux petites, qui sont divergentes
et se portent sur le devant des frontaux antérieurs,
pour laisser glisser entre elles les branches montantes
des interniaxiilaires. Il y a deux autres petites crêtes
sur la région mastoïdienne. La colonne vertébrale a
douze vertèbres abdominales et dix -sept caudales;
la dernière, en éventail, est large et sans apophyse
latérale.
Nous avons connu cette espèce d'après un
individu mâle, long de dix pouces, que M. Plëe
a recueilli à Saint-Thomas. Mais nous en avons
aussi des individus plus petits, qui ont été
donnés au Muséum par M. L'Herminier, et
i3. 19
290 LIVRE XVI. LABROÏDES.
d'autres, plus grands, dont un de vingt-deux
pouces, rapportés de Saint-Domingue par
M. Ricord. Nous considérons encore comme
de la même espèce un petit individu long
de quatre pouces, que nous avons observé
parmi les poissons de la collection de Mont-
pellier.
Cette suite d'individus montre que tous
ont les mêmes rayons dorsaux, et dans les
mêmes proportions ; que les dents antérieures
s'alongent avec l'âge, et qu'il en est de même
des pointes de la dorsale, de l'anale et des
fourches de la caudale. Ainsi cette nageoire
est coupée carrément dans le plus petit de
nos individus; elle est écbancrée dans ceux de
moyenne taille, et elle devient, dans le grand
poisson de Saint-Domingue, tout aussi pro-
fondément fourchue que la caudale du Lachn.
sidllus,
La figure de Parra représente fort exactement
(pi. 3, iig. 2) l'individu que nous devons aux
recherches de M. Plée; elle manque également
de noir sur la queue, de taches aux flancs,
et n'a que trois fdamens de couleur fauve
comme le corps, où les bords des parties
molles de la dorsale et de l'anale sont seuls
teints de rose.
L'auteur assure que sa chair est suspecte.
CHAP. VI. LACHNOLÈMES. 291
Le Lachnolème perroquet.
{Lachnolaimus psittacus y nob.)
M. Plëe, qui parait avoir regardé tous les
lachnolèmes comme identiques, en décrit un
de Porto-Rico ,
d'un rouge rose, qui, outre la tache noire de l'angle
de la dorsale, en a une autre, plus petite, à l'angle
correspondant de l'anale, laquelle s'efface après la
mort.
Les colons espagnols de cette île ont donné
à ce poisson, à cause de ses belles couleurs,
le nom de cotorra, qui signifie perruche.
Comme nous ne l'avons pas vu , nous ne pou-
vons pas dire jusqu'à quel point il ressemble
aux autres ou en diffère pour les caractères
de forme, ou s'il doit être d'une espèce à
part; mais la tache de son anale nous le fait
soupçonner; il est le seul sur lequel on trouve
ce caractère.
292 LIVRE XVI. LABROÏDES.
CHAPITRE YÏI.
Des Tautogiies {Tautoga, iiob.).
J'ai employé, à l'exemple de Mitchlll, le
nom qui se terminait, par une heureuse eu-
phonie, en une désinence latine, pour faire
connaître un nouveau genre de la famille que
je traite dans ce chapitre.
Les tautogues sont des labroides dont le
caractère générique consiste dans la double
rangée de dents sur les deux mâchoires, et
dans le nu de la peau épaisse et sans écailles,
qui couvre l'opercule , le sous-opercule et l'in-
teropercule : il n'y en a même que fort peu
sur le préopercule.
Ce genre semble nous conduire aux girelles,
dont la joue est toute nue.
Nous ne possédons dans nos collections
qu'une espèce de l'Atlantique, qui offre d'assez
nombreuses variétés, et qui fournit, sur les
côtes des États-Unis d'Amérique, une pèche
abondante; nous pensons même qu'il n'y a
qu'une seule, quoique Mitchill en ait distingué
une seconde dans son premier Essai sur les
poissons de New- York , dont il n'a plus parlé
dans son grand mémoire. Mais la mer des
CHAP, VÏI. TAUTOGUES. 2D5
Indes en nourrit plusieurs autres qui offrent
toutes le même caractère générique.
Le Tautogue noir.
( Tautoga nigra, Mitcli.)
Ce poisson, qui porte à New-York le nom
de hlack-fisli (poisson noir), dénomination
qui lui est commune avec le centropriste noir
{^centropristis atrarius^ nob. ), et quelques,
autres encore, de familles très-différentes, tels
que des silures, n'est pas du nombre de ceux
que Garden fit connaître à Linné; aussi ne le
trouve- t-on pas dans le Sjstema naturce, ni
dans l'édition de Gmelin, quoique cet éditeur
aurait pu l'y placer d'après la description fort
exacte que Sclicepf en a donnée dans son
mémoire sur les poissons du nord d'Amérique.*
Cette description a servi à Blocli^ pour in-
troduire l'espèce dans son Système posthume,
sous le nom de lahriis ainericanus.
Mitchill a mentionné ce labroïde^, d'abord
dans son premier Essai sur l'histoire des pois-
sons de New-York, publié en iSi/f, et oii il
le considère comme d'un genre particulier,
1. Beschreib. Nord- Amer. Fiscke ^ von Joh. Dav. Schœpf,
in Nalurforsch. Fr. , t. VIII, p. i56. — 2. Bloch , édit. Schn.,
Syst. poslh. , p. 261 , n." 80. — 3. Report of Sam. Milch. , on
ihe fish. of New-York. p. 3 3.
294 LIVRE XVI. LABROÏDES.
qu'il désigne sous le nom de tautoga, latini-
sant ainsi le nom vulgaire des pêcheurs de
Rhode-Island. Le même auteur en a parlé en-
suite plus au long, sous le rapport de ses ha-
bitudes et des différentes observations que les
Américains ont faites sur un poisson si connu
d'eux, mais sans mieux signaler ses caractères
zoologiques, dans son grand travail sur les
poissons de New^-York, inséré dans le premier
volume de la Société littéraire et philoso-
phique de cette ville pour l'année 181 5. Il
y place notre poisson parmi les labres, sous
le nom de lahrus tautoga, sans rappeler le
travail de Schœpf , ni l'emploi qu'en avait fait
Bloch.
Ayant appris à connaître les caractères gé-
nériques de ce poisson , nous adopterons ,
pour ne pas introduire de nouveaux noms,
celui que Mitchill avait déjà employé; mais
l'établissement du genre et de ses rapports
sera évidemment notre œuvre. Nous allons
en justifier par la description suivante.
Le corps du tautogue est alongé, comprimé et
du double plus haut de l'avant que de l'arrière. C'est
au-devant de la dorsale quil a le plus de hauteur:
elle est contenue trois fois et un tiers dans la lon-
gueur totale. Le profil descend vers l'exlrémité du
museau par une courbe assez soutenue et relevée
CHAP. VIT. TAUTOGUES. 295
en bosse au-devant des veux. Ces organes sonipelits;
le diamètre n'est guère que du huitième ou neuvième
de la longueur de la tête, qui est comprise trois fois
et deux tiers dans la longueur totale du corps. On ne
distingue pas le sous-orbitaire sous la peau épaisse
et sans écailles qui le recouvre.
Le préopercule est grand , à angle arrondi, à bords
lisses et sans aucunes dentelures; on n'y aper-
çoit point de limbe. L'opercule est large, échancré
en arrière, bordé par une membrane épaisse, qui
s'étend sur tout l'os et sur le sous -opercule, ainsi
que sur l'interopercule et sur la mâchoire inférieure.
Les deux ouvertures de la narine sont percées
dans le haut de la joue, au-devant de l'œil. L'anté-
rieure, qui est au tiers postérieur de la distance entre
le bord antérieur de l'œil et le bout du museau, est
petite et tubuleuse; la seconde est un grand trou
ovale, près de l'œil. Le museau est très-gros et renflé.
La mâchoire inférieure est un peu plus courte
que la supérieure. Les lèvres, et surtout celle d'en
haut, sont très - épaisses , et n'offrent que peu de
plis, à la manière des labres ordinaires; elles sont
garnies de nombreuses papilles. Les dents sont fortes
et coniques, et disposées sur deux rangs; les quatre
antérieures, tant en haut qu'en bas, sont les plus
grosses , celles de la rangée interne les plus petites :
les pharyngiennes sont globuleuses comme celles
des labres.
Le surscapulaire est recouvert par la peau épaisse
de la tête , et qui s'étend aussi sur l'huméral. Il y
a des pores assez visibles et peu nombreux sur le
296 LIVRE XVI. LABROÏDES.
haut de la tempe. L'huméral a la forme d'un large
triangle.
La pectorale est un grand éventail arrondi, dont
la longueur égale la moitié de la hauteur du corps ;
elle est attachée sous les deux tiers de cette même
hauteur. Les ventrales sont reculées sous la moitié de
la pectorale. La dorsale est au contraire un peu plus
avancée que la base de la nageoire de la poitrine; elle
est basse, et ne commence à s'élever un peu que sur
la portion molle, qui est arrondie. La longueur to-
tale de la nageoire égale la moitié de la longueur du
poisson, et la portion molle n'a pas le tiers de la
longueur de la dorsale. L'anale répond au premier
rayon mou de celle-ci; elle est arrondie en arrière,-
mais un peu plus haute. La caudale est coupée car-
rément.
B. 5; D. 17/10; A. 3/8; C. 13; P. 17; V. 1/5.
Les écailles sont minces, nombreuses, plus petites
sur le dos que sur les côtés entre l'ouie et la cau-
dale : on en compte de soixante-cinq à soixante-
dix, et c[uarante à quarante -cinq dans la hauteur.
Une écaille, vue isolée , montre plus de longueur que
de hauteur; la portion recouverte est presque triple
de la partie visible; l'éventail est composé de qua-
torze rayons, qui entament à peine le bord radical,
îl y a un groupe de très-petites écailles noyées dans
la peau sur le haut du préopercule et sous le sur-
scapulaire; toutes les autres parties de la tète en sont
dépourvues; il y en a de très-petites sur la mem-
brane de la dorsale et de l'anale, et «juelques-unes.
CHAP. VIT. TAUTOGUES. 297
un peu plus grandes, s'avancent entre les rayons de
la caudale : celles que suit la ligne latérale sont plus
étroites. Cette ligne est parallèle à la courbe du dos,
tracée à peu près par le tiers de la hauteur, sur la
treizième rangée d'écaillés, et infléchie sur la queue
qu'elle traverse par le milieu : elle n'est pas inter-
rompue.
La couleur des individus conservés dans l'eau-de-
vie est d'un brun uniforme, rougeâtre sur le dos et
blanchâtre sous le ventre. La mâchoire inférieure est
blanche avec quelques grosses taches noirâtres; un
d'entre eux, long de treize pouces, a de grandes mar-
brures noirâtres sur un fond brun pâle. D'autres
individus montrent le dessous de la mefnbrane bran-
chiostège très-noir.
Mais, selon Mitchill, le poisson frais a le dos et
les côtés noirs, à reflets bleuâtres, comme la cor-
neille; les lèvres, la mâchoire inférieure et le ventre
étant blancs.
L'anatomie du tautoga ressemble à celle des la-
bres proprement dits. Le cœur a, comme à l'ordi-
naire, la forme d'une pyramide quadrangulaire, dont
l'arête inférieure est arrondie, et dont l'angle anté-
rieur et inférieur est fort aigu ; l'oreillette est mé-
diocre , et le bulbe de l'aorte peu renflé. Le foie est
très-volumineux; le lobe gauche est divisé en deux
forts lobules, chacun plus gros que le droit; la
vésicule du fiel, attachée à ^celui-ci, est longue,
cylindrique, peu large; le canal cholédoque rampe
sur le foie , y reçoit de nombreux vaisseaux cystiques ,
et se renfle un peu avant de déboucher dans l'estomac.
298 LIVRE XVI. LADROÏDES.
La veloutée de celle portion du canal alimentaire et de
tout le reste du tube digestif, est garnie de papilles
élevées, minces et placées dans le sens de la longueur
de l'inteslin, comme de nombreuses plicatures.
Vers la moitié de la longueur de la cavité abdomi-
nale, le diamètre de l'estomac diminue; l'intestin fait
un premier pli, et il se porte vers le diaphragme
jusque dans la fourche du foie. Il se plie de nouveau,
descend au-delà de la crosse de l'estomac, revient
encore sur lui-même, remonte à droite de l'estomac
jusqu'à la hauteur du premier pli, se contourne de
nouveau, et à cet endroit le diamètre augmente de
près du double. Une valvule épaisse , à quelque
distance du dernier pU, marque le reclmn, dont la
largeur est presque double de celle de l'intestin, qui
précède la valvule.
La rate est sur l'estomac, entre les deux laitances;
elle est ovoïde, grosse et d'un tissu dense.
Les laitances occupent les deux tiers postérieurs
de l'abdomen ; elles sont cylindriques, un peu amin-
cies en avant.
La vessie aérienne est très-grande , un peu échan-
crée à la partie antérieure, qui est grosse et renflée;
l'autre extrémité est pointue. Les reins sont peu vo-
lumineux; ils débouchent presque immédiatement
dans une grande vessie urinaire, qui n'est marquée
par aucun renflement particulier.
L'étude du squelette nous montre que le dessus
du crâne ressemble plus à celui des percoïdes qu'aux
labres, dont nous avons déjà traité. En effet, en ar-
rière de la partie convexe du front, entre les yeux.
CHAP. VII. TAUTOGUES. 299
s'élève une crête osseuse, impaire, triangulaire, qui
descend sur la région occipitale, sans la dépasser.
De cliaque côté sont deux autres crêtes, moins sail-
lantes, qui divisent le dessus du crâne en trois fosses
assez profondes. La portion du maxillaire, cachée
par le sous-orbitaire , est épaisse et élargie en une
palette demi-ovale; l'angulaire de la mâchoire infé-
rieure est très-fort , l'huméral élargi. Derrière l'angle
de l'opercule une plaque trapézoide donne de son
angle antérieur et inférieur une lame pliée en gout-
tière, dont le bord interne se recourbe en arrière
et forme la ceinture osseuse de la poitrine. Le cubi-
tal est en arc à large courbure; il est surmonté du
radial, percé d'un grand trou ovale. Le coracoïdien
est très-large et épaissi en avant.
Je compte seize vertèbres abdominales et dix-
huit caudales .'-la dernière est élargie en deux plaques
flabelliformes , et porte les principaux rayons de
la caudale ; les supérieurs et les inférieurs sont atta-
chés aux apophyses épineuses de la pénultième et
de l'antépénultième. Les côtes sont longues, fortes
et ont de longues apophyses horizontales. Le premier
interépineux de l'anale est assez fort.
Nous avons reçu ce poisson du marché de
New-York par les soins de M. Milbert et de
M. Hyde de Neuville , alors ministre de France
aux Etats-Unis. Nos plus grands individus
ont dix-huit pouces de longueur. II atteint,
selon Mitchill, jusqu'à dix ou douze livres de
poids et même davantage. Il abonde sur les
500 LIVRE XVI. LABROÏDES.
côtes de l'État de New -York, et il paraît sur
le marché sous le nom de hlack-Jîsh, nom
qui lui est donne à cause de la couleur noire
de son dos et des flancs. Mais les pêclieurs
moliegans le nomment dans leur patois tautog.
Le tautog vit parmi les roches, les récifs et
les fonds rocailleux des côtes de Long-Island;
et nous venons aussi de le recevoir de l'em-
bouchure de l'Hudson par M. le comte de
Castelnau. Il ne remonte jamais dans les ri-
vières comme le saumon ou l'esturgeon. Le
docteur Mitchill ajoute à ces détails les par-
ticularités suivantes:
Le tautog n'est pas originaire de la baie de
Massachussets, mais il s'y est beaucoup mul-
tiplié depuis que les pécheurs l'y ont porté;
et aujourd'hui le marché de Boston est aussi
amplement fourni de ce poisson que celui
de NcAV - York. Sa chair est si bonne et si
rechcrcliée pour la table, qu'on la vend dans
cette dernière ville de huit à douze cens
la livre. Sa vie est très -tenace : on peut le
garder long-temps hors de l'eau, et souvent
on porte dans les marais, pour les y nourrir
et les y engraisser, ceux qui ne pèsent en-
core que deux à trois livres. Il paraît qu'il est
sensible au froid, et qu'il entre en une sorte
de somnolence, plus commune à un grand
CHAP. VIT. TAUTOGUES. 501
noml^re de poissons qu'on ne le croit généra-
lement^ etMitchill assure que le tautog reluse
alors toute nourriture. Il ajoute qu'une mem-
brane adventive vient fermer l'anus; mais
ce fait n'a" probablement pas été suffisamment
bien observé. Le poisson reprend de l'appétit
dès l'apparition du printemps. L'époque de la
floraison du dogwood [coimus florida, Lin.)
est la saison que Ton regarde comme favorable
pour amorcer le hlack-fish. Si ce cornouiller
aux grandes fleurs manque dans l'endroit, les
pêcheurs portent leur jngement d'après la
végétation du châtaignier. On conserve même
ces traditions dans des vers populaires cités
par Mitchill. '
L'appât ordinaire du tautog sont des mol-
lusques voisins des myes ou des venus et des
crustacés.
Mitchill en distingue plusieurs variétés.
L'une j son
Tautoga fusca,
a le fond de la couleur brun, avec des bandes ou
des zones de même couleur.
1. îVhen Chesinut lemes are as hlg as ihumb-nail
Then bite Black-fish wiihout fail ;
But when Chestmit leaçes are as long as a span
Then eaich Black-fish , if JQU can.
302 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Une seconde est son
Tautoga rubens,
qui a des nuages rougeàtres, donnant celte teinte
gf^nérale à tout le corps du poisson.
Une troisième, que Mitchill a désignée par
une épithète plus vague, sous le nom de
Tautoga alia,
aurait encore d'autres mélanges de nuances ou de
taches.
Cet auteur distinguait encore dans son pre-
mier Essai un tautoga ccerulea^ qu'il disait
être plus rare, ne dépassant jamais sept à huit
pouces anglais, se trouvant dans les mêmes
eaux que le hlack-jisli, se nourrissant des mê-
mes animaux et incommode aux pécheurs,
parce qu'il enlève l'appât des liaims apprêtés
pour le tautog ordinaire. Il vit long -temps
hors de l'eau, quoiqu'il ait moins de ténacité
vitale que l'autre. Mitchill n'en a plus reparlé
dans son grand mémoire sur les poissons de
Nev^-York.
Il me paraît probable qu'il a jugé que ce
nen était aussi qu'une simple variété, et, en
efFet, les nombres des rayons sont toujours
les mêmes : peut-être aussi que sous le nom
de hlue-jîsh il l'a indiqué parmi ses variétés
de son labre chogset.
CHAP, VII. TAUTOGUES. 503
Le Tautogue a bandes.
( Tautogafasciata, nob.; Lahrus fasciatus , Bl, 290;
Lahriis fuUginosus j Lacép. )
Les mers de l'Inde ont aussi leurs tautogues.
En voici un de l'Isle- de -France, figuré par
Bloch, observé auparavant par Commerson,
et qui, malgré ses couleurs tranchées, parlés-
quelles on pouvait si facilement le caractériser,
a reçu plusieurs noms, et a été méconnu des
naturalistes.
Son corps est court et en ovale régulier; sa hau-
teur fait le tiers de sa longueur, et son épaisseur
le tiers de sa hauteur. La courbure du dos et celle
du ventre sont assez régulières et semblables, La
hauteur du tronçon de la queue n'est pas tout-à-
fait la moitié de celle du corps. La tête a nn faciès
assez semblable à celui de nos carpes; sa longueur
est comprise trois fois dans celle du tronc, en n'y
comptant pas la caudale, dont la longueur égale à
peu près la moitié de celle de la tête. L'œil est placé
sur le haut de la joue; il est petit et rond; son
diamètre ne fait que le septième de la tête; il est
éloigné du bout du museau de trois longueurs de
diamètre, et on en mesure près de quatre sous lui. Le
sous-orbitaire antérieur est caché sous la peau nue qui
le couvre; elle est percée d'un assez grand nombre de
pores : les autres pièces osseuses qui complètent le
cercle de l'orbite sont lisses et sans rugosité. Les deux
ouvertures de la narine sont petites, égales, et toutes
304 LIVRE XVI. LADROÏDES.
deux un peu tubuleuscs. Les lèvres sont très-épaisses:
la supérieure a huit à neuf plis ; l'inférieure est éten-
due en deux ailes très-larges de chaque coté des
branches de la mâchoire. Deux canines droites ,
projetées en avant, saillent de chaque mâchoire, qui
porte le long du bord des dents courtes et coniques.
A l'angle il y a une canine dirigée en avant; il ny
a pas de dents sur le rang interne. Les voiles mem-
braneux , supérieur et inférieur, sont très-dévelop-
pés. La langue est libre au fond de la bouche; sa
pointe est large et arrondie. Il y a un petit groupe
d'écaillés sous la joue et derrière la tempe. Le reste
du préopercule, son limbe, l'opercule, le sous-
opercule et l'interopercule, sont couverts par une
peau sans écailles. L'opercule a quelques stries , son
bord membraneux, surtout k l'angle, est assez grand.
Les deux interopercules se touchent sous l'isthme,
sans être cependant très -larges. La portion épineuse
de la dorsale est plus basse que la molle; la caudale
est arrondie, surtout aux angles; la pectorale est
peu pointue; le premier rayon de la ventrale est
prolongé.
D. 9/11 ; A. 3/11 5 C. 15 ; P. 13 5 V. 1/5.
Les écailles sont assez grandes, finement ciselées;
il y en a vingt-six entre l'ouïe et la caudale, cinq
au-dessus de la ligne latérale, et onze au-dessous.
Cette ligne est droite jusque vers l'extrémité de la
dorsale, où elle s'infléchit pour se rendre ensuite
à la caudale par le milieu du tronçon de la queue;
elle est formée d'une série de tubulures non ra-
meuses.
CHAP. VII. tautogues. 505
Le poisson conservé dans l'esprit de vin offre ,
sur un fond blanc, cinq larges bandes brunes j la
première descend en écharpe derrière l'ouïe , et
prend la base de la pectorale ; la seconde vient du
quatrième rayon épineux; les deux autres descendent
sous la portion molle de la dorsale: la dernière couvre
la queue. Les nageoires sont toutes plus foncées que
les bandes, et elles ont une teinte violette. Les pec-
torales seules sont blanches, avec une grande tache
noire à la base; à l'exlrémiie de la ligne latérale il y
a une petite tache noire de chaque côté de la queue.
On voit sur la tête et sur l'anale des traces de bandes
effacées. Derrière l'œil il y a aussi une tache brune.
Nous connaissons les brillantes couleurs
de ce poisson par la description que M. Dus-
sumier en a faite sur le frais, et par un dessin
que M. Théodore Delisse nous en a envoyé
de risle-de-France.
Le poisson frais a la tête bariolée de lignes vertes ,
et de bandes roses bordées de bleu, qui produisent
un très-agréable assortiment de couleurs. En avant
de l'œil on voit trois raies longitudinales vertes et
trois bandes roses; le dessous de la gorge est jaune;
la nuque, d'un beau vert, a des taches roses ; l'oper-
cule, qui devient plus jaunâtre, a quatre grandes
taches roses irrégulières; le fond du corps est blanc
jaunâtre; les bandes brunes ont une teinte rougeâtrej
la dorsale épineuse est jaunâtre ; la portion molle
est moitié jaune, moitié noirâtre; l'anale est toute
noire; la caudale, jaunâtre, est bordée de noir; les
l3. 20
506 LIVRE XVI. LABROÏDES.
ventrales sont très-foncées, les pectorales sont jau-
nâtres.
Tel est le poisson que Commerson avait vu à
risle-de-France, au mois de Décembre 176g,
et dont il a laissé dans les manuscrits deux des-
criptions et un dessin. L'une d'elles, faite avec
grand soin, a ëtë employée par M. de Lacépède ,
et est devenue son labriisfuliginosus^ sans rien
changer à la diagnose du compagnon de Bou-
gainville. L'autre est moins complète; Com-
merson renvoie à son dessin fait au crayon noir
et rouge, et dont il avait sans doute reconnu le
peu d'exactitude , quant aux couleurs , attendu
que la description et le dessin avaient ëtë pris
sur un individu peu frais, et dont les cou-
leurs ëtaient dëjà altërëes; car dans cette
description il a soin de mettre en note : vide
infra ad lahjmrn fuli^inosum , capite eoc vi-
ridi, etc., in recentiore specimine descriptinn.
Lacëpède a fait graver ce dessin en le réduisant
et en le donnant, comme une espèce distincte,
sous le nom de labre nialaptéronote ; mais il
a reproduit encore une troisième fois cette
même espèce dans un autre genre : car il n'est
pas possible de douter que le lahrus fasciatus
de Blocli ( pi. 290 ), qui est devenu le spare
zonéphore dans Lacëpède, ne soit de la même
espèce. Bloch a toutefois représenté trop d'ë-
CHAP. VII. TAUTOGUES. 307
cailles sur la joue , et il a fait monter trop haut
les écailles sur les nageoires verticales; les nom-
bres sont les mêmes, et la distribution des
couleurs convient très- bien à notre poisson.
C'est aussi le spams quinquefasciatus de
W. Bennett {Fish of Cejl , n.° aS); les Cin-
galais le nomment panoo-^irawah.
Mais il est une autre synonymie, à laquelle
on est assez loin de s'attendre, car ce poisson
a déjà été vu par Thunberg , et décrit sous
le nom de niullus fasciatiis^ . La figure qu'il en
donne fournit les élémens nécessaires pour re-
connaître cette espèce sous ce nom, si éloigné
de tous ses rapj)orts naturels. On ne peut con-
cevoir pourquoi cet élève de Linné n'a pas
classé cette espèce dans le genre des labres.
M. Lacépède, en employant cette note de Thun-
berg, a fait reparaître encore notre poisson une
quatrième fois sous le nom de spare niéaco. ^
J'avais cru que l'on devait aussi en rappro-
cher le spams anchora^o de Bloch, pi. i^-y;
mais j'avoue que ce rapprochement ne me paraît
pas possible; en même temps je suis obligé
de dire que j'ignore tout-à-fait à quelle es-
pèce il faut rapporter cette figure, qui est
peut-être celle d'un labre ou d'un cossyphe.
1. Thunberg, Vqy. au Jap. , IV, p. 55i, pi. 3i4-
2. Lacépède, IV, p. i6o.
508 -LIVRE XVI. LABROÏDES.
Commerson et M. Dussumier s'accordent
à regarder notre tautogue comme un poisson
rare des rivages rocheux de l'Isle-de-France;
ce dernier et M.W.Bennett le donnent comme
un bon poisson pour la table.
Les individus de Commerson et de M. Dus-
sumier ont un pied de long. M. Julien Des-
jardins nous en a aussi envoyé de plus petits:
ils n'offrent aucunes différences dans les cou-
leurs. Un individu de cette espèce faisait aussi
partie des collections faites à fIsle-de-France
par les compagnons de M. le capitaine Du-
perrey.
Le Tautogue de Mertens.
{Tautoga Mertensli, nob. )
Je ne crois pas qu'il faille regarder comme
une variété du précédent, le poisson que
M. Mertens nous a fait connaître par le dessin ,
dont voici les principaux traits caractéristiques.
La tête est verte, avec trois bandelettes élroiles,
longitudinales : deux au-devant de l'œil : la troisième
naît de l'angle de la bouche; elles sont roses bordées
de bleu. Il y a sur les opercules et derrière l'œil cinq
autres taches roses alongées, dont les trois supé-
rieures sont aussi bordées de bleu. Les lèvres sont
de la même couleur que les taches, mais sans liséré.
Il y en a aussi de bleues sur la nuque. Le corps
est traversé par cinq larges bandes brunes. La dor-
CHAP. VII. TAUTOGUES. 309
sale esi jaunâtre , avec trois raies longitudinales
bleues, dont une suit le bord. L'anale est violette,
bordée d'un trait rose entre deux lisérés bleus.
La pectorale et les ventrales ont les rayons jaunes:
il en est de même de la caudale dont la membrane
est brune.
Les nombres des rayons sont les mêmes.
D. 9/11 ; A. 3/11; C. 13; P. 13; V. 1/5.
Le dessin représente un poisson long de
sept pouces et demi. M. Mertens dit que les
individus vivent isolés parmi les rochers de
l'arcliipel des Carolines. L'espèce me semble
intermédiaire entre celle que j'ai décrite dans
l'article précédent, et celle de la mer Rouge,
dont je vais parler.
Le Tautogue a six bandes.
( TcuUoga sexfasciata , nob. ; Hallchores sexfas-
ciatus y Rupp.)
La mer Rouge nourrit une espèce voisine
de celles-ci par la distrllmtion des couleurs,
qui offrent cependant quelques différences 5
mais elle s'en distingue, parce que
la joue est couverte sous l'œil d'un bien plus
grand nombre d'écaillés; le sous-orbitaire est plus
petit; les os sont plus rugueux, surtout î'interoper-
cule, qui est plus étroit; la dorsale et l'anale sont
plus hautes; la caudale est plus longue et plus large 5
les ventrales sont un peu plus alongées.
3i0 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Le dos est rougeâtre et le ventre est bleuâtre:
ces teintes sont traversées par six bandes brunes ou
noirâtres. Il n'y a pas de rayures sur les joues ni sur
les opercules. Sur la nuque, derrière l'oeil, il y a
des taches bleues.
La dorsale est rayée longitudinalement, et la cau-
dale verticalement, de traits carmins sur un fond
gris rosé. L'anale est brune comme les bandes ver-
ticales du corps, avec un liséré noirâtre. Les pec-
torales et les ventrales sont jaunes.
J'en ai un individu d'un pied de long; il
nous a été envoyé par M. Botta.
M. Ruppel a trouvé cette espèce sur le
marché de Djedda pendant le mois d'Août; il
l'a, avec raison, distingué du lahrus fasciatus
de Bloch, qui était alors classé parmi les chei-
lines, quoique ceux-ci se distinguent de nos
tautogues parce que leur ligne latérale est in-
terrompue, et que leur opercule et leur préo-
percule sont couverts de grandes écailles sem-
blables à celles du corps. M. Ruppel avait cru
devoir placer cette nouvelle espèce de poissons
dans le genre qu'il avait nommé halichores y et
dont il a malheureusement fondé le caractère
sur la présence de la dent saillante en crochet
de l'angle de la mâchoire. Ce caractère appar-
tient à toute la famille des labroïdes : nous
l'avons vu se montrer dans des labres, dans les
cossyphes, dans les malacanthes, etc.; beau-
CHAP. VU. TAUTOGUES. 311
coup de girelles , que M. Ruppel réunit à ses
halichores, ont aussi cette singulière dent;
les scares en sont également pourvus. On voit
donc que nous n'avons pu nous servir de ce
caractère pour faire une nouvelle coupe gé-
nérique. Si M. Ruppel avait fait attention à la
position des écailles de la joue, et qu'il en eût
tiré sa diagnose, l'espèce qui nous occupe n'au-
rait pas été rangée avec les autres girelles , qu'il
a réunies sous le nom de halichores^ et le
genre eût été établi d'après un caractère zoo-
logique digne d'être noté. En se rappelant ce
que j'ai dit au commencement de ce chapitre,
on voit d'ailleurs que Mitchill avait déjà fait
cette coupe pour l'espèce que nous avons
décrite la première dans ce genre.
Le Tautogue aux grandes lèvres.
( Taiitoga melapterus , nob. ; Labrus melapteruSy
BL, 2850
MM. Ruhl et Van Hasselt ont envoyé de
Java au Musée royal de Leyden, sous le nom
de cheilinus macrocheilus , un tautogue, re-
marquable en effet par l'épaisseur de ses lèvres»
J'aurais même été tenté de conserver ce nom
à l'espèce, si elle n'était pas déjà nommée
depuis long-temps par Bloch.
312 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Sa hauteur fait le tiers de la longueur du tronc.
La caudale, coupée carrément, est contenue sept
fois et deux tiers dans cette même longueur- celle
de la tête est comprise trois fois et deux tiers dans
la dislance du bout du museau à l'extrémité de la
nageoire de la queue. L'œil est petit, et situé sur le
haut de la joue, mais bien au-dessous de la ligne
du profil; son diamètre est du septième de la lon-
gueur de la télé, et du cinquième de la hauteur;
il est éloigné du bout du museau de trois distances
de diamètre. Le premier sous-orbitaire est une
grande plaque oblongue, altachée obliquement au-
devant de l'œil, deux fois plus haute qu'elle n'est
large ; les autres sous-orbiiaires forment un grand
arc au-dessous de l'œil : leur surface est toute ru-
gueuse. A une distance égale à la largeur de l'œil, sur
le haut de l'angle antérieur du premier sous-orbitaire,
est l'ouverture antérieure de la narine, qui est petite
comme un trou d'aiguille , et derrière elle en est une
autre , grande et ronde.
La bouche est assez proiraclile. Les lèvres sont
charnues et très-épaisses; la supérieure a sept gros
plis : l'inférieure n'en a que deux, mais elle est éten-
due en deux larges voiles de chaque côté de la
bouche. L'épaisseur des lèvres ne laisse presque rien
voir des os qui les portent, ni même des maxil-
laires, qui sont cachés dans la rétraction de la bou-
che en totalité, et dans la protraction dans leur
plus grande parlie, par le voile adipeux du sous-
orbitaire.
Les deux dents mitoyennes d'en haut et d'en bas
CHAP. VII. TAUTOGUES. 313
sont coniques, pointues, recourbées; elles sont lon-
gues, suivies de onze à douze dents coniques et cour-
tes, et qui diminuent à mesure qu'elles sont plus
près de l'angle, oi^i il n'y a pas de dents saillantes.
Il y a quelques écailles sur la joue. Le limbe du
préopercule et les trois autres pièces operculaires sont
nus. Le bord membraneux de l'opercule est large et
étendu en un lobule assez grand. On voit aussi quel-
ques petites écailles sur la tempe.
Il y a vingt- sept rangées d'écaillés entre l'ouïe
et la caudale, quatre rangs au-dessus de la ligne
latérale et onze au-dessous, en les comptant à la
plus grande hauteur du corps. La ligne latérale
est formée d'une série de tubulures relevées sur
chaque écaille , non branchues , et elle n'est pas
interrompue.
La dorsale a ses premiers rayons très-bas; les
derniers mous ont leur hauteur double de celle des
antérieurs. Les ventrales sont très- pointues. La cau-
dale a le bord un peu concave.
D. 9/11 j A. 3/11; C. 13; P. 13; V. 1/5.
Quelques petites écailles sont étendues en ligne
entre la base des rayons de la caudale. Le premier
rayon épineux de l'anale est si petit qu'on ne le
voit que par la dissection.
Dans l'eau-de-vie le poisson paraît brun, éclairci
sous le ventre; la lèvre supérieure est foncée, l'in-
férieure blanchâtre; la dorsale et l'anale ont une
teinte violette rembrunie; la caudale est plus pâle:
elles sont tachetées ou rayées de petits traits bleuâ-
tres. On voit sur le bord de l'anale deux traits fon-
314 LIVRE XVI. LABROÏDES.
ces, séparés par une bandelette blanchâtre, et, exté-
rieurement, une autre bandelette de même couleur,
lisérée de noirâtre j les nageoires paires sont déco-
lorées.
Mais sur le poisson frais les couleurs sont bien
vives et très - agréablement distribuées : nous le
jugeons par le beau dessin que MM. Kuhl et Van
Hasselt avaient envoyé de Java. Le dos et le dessus
de la tête est peint en brun rougeâtre de lie de
vin ; la joue et les opercules sont orangés ; une
grande tache verte colore le sous-orbitairej au-
dessus et au-devant de l'œil il y a deux traits verts,
un autre sur la tempe, et des rivulations de même
couleur sur l'opercnle, sur le sous-opercule, sur
rinteropercule et sur le préopercule, lequel a en
outre des points verts près des mâchoires; et on
voit, au milieu de ces traits onduleux et verts, d'au-
tres, en plus petit nombre, d'un beau bleu d'ou-
tremer. Les écailles des flancs sont vertes, bordées
d'un croissant bleu d'azur, et d'un second, exté-
rieur, très-foncé. Sous le ventre le fond est rosé,
et les écailles n'ont plus qu'une seule bordure bleu
pâle. La caudale est verte; la dorsale et l'anale sont
rouge violacé, rayées et tachetées de bleu. La ven-
trale est rougeâtre et sans taches.
Bloch (pi. 285) a donné une mauvaise figure
de ce poisson, que j'ai vu à Berlin, sous le
nom de labrus melapterus, nom qui convient
en effet assez bien à l'animal desséche; mais
il a oublié d'abord les écailles de la joue^
CHAP. VII. TAUTOGUES. 315
il a donné une couleur imaginaire au corps,
il a rendu la caudale trop noire, il a mal
compté les rayons épineux, qui sont trop
grossis; cependant il a bien rendu les carac-
tères des dents, surtout des inférieures, et
en général, malgré les défauts, on peut en-
core reconnaître l'espèce dans cette mauvaise
figure.
Le Tautogue veiné.
(^Tautoga tessellata, nob. ; Lahrus tesselatus,
BIocli, pi. 291 , fîg. 2.)
Si l'on s'en rapporte à la description et à
la figure de Bloch , je pense qu'il faudra pla-
cer parmi ces tautogues le poisson que cet
auteur avait reçu comme originaire des mers
de Norwége , par les soins de son ami Spengler.
Les nombres des rayons diffèrent assez de ceux
de toutes les autres espèces.
Sur un fond violet, qui devient argenté sous le
ventre, le corps et la tête sont marquées de taches
brunes, anastomosées entre elles.
D. 17/10; A. 9/3; C. 16 ; P. I65 V. 1/5.
Bloch ne donne que quatre rayons à la
membrane branchiostège ; mais il y a tout lieu
de croire qu'il y a erreur dans ce nombre.
Je n'ai jamais vu ce poisson. S'il vient des
mers du Nord, il doit y être rare.
31 G LIVRE XVI. LABROÏDES.
CHAPITRE Vlll.
Des Malacanthes et des Malaptères,
Ce genre est un de ceux qui prouvent le
mieux avec quelle incurie , et même avec
quelle infidélité, Bloch nous a transmis les
documens qu'il trouvait dans les papiers de
Plumier. L'archipel des Antilles produit une
espèce à laquelle nos colons de la Martinique
ont transporté le nom de vU'e. Le savant
minime en avait laissé une figure fort exacte,
dont l'original existe encore à la Bibliothèque
du Roi, et que M. de Lacépède a fait graver,
tome IV, planche 8, figure i; mais Bloch,
s'imaginant que ce devait être la figure d'une
coryphène, lui a fait arranger, sur la planche 175,
le profil du museau en demi- cercle, et a
nommé en conséquence le poisson corjphœna
Plumieri. Lorsqu'il composa son Système post-
hume (p. 299) , il reconnut cette faute et la re-
jeta sur son dessinateur, et il y exprima même
l'opinion que ce poisson pourrait bien être
un labre; mais dans l'intervalle M. de Lacé-
pède, quoique possédant la figure non altérée,
n'en avait pas moins laissé l'espèce dans les
coryphènes (t. III, p. 201), en quoi il a été
imité par Shaw, pendant que Schneider, trou-
vant une autre figure de ce poisson dans Parra^
CHAP. VIII. MALACANTHES. 317
(pi. i3, fig. i) OÙ elle est appelée matejuelo
Z>/«?7C0, en faisait un double emploi' et plaçait
ce poisson dans les spares, sous le nom de
spams oblongus. Enfin, une espèce du même
genre, dessinée dans la mer des Indes par
Commerson, et associée par lui à ses cliei-
lions, en formait deux dans M. de Lacépède:
l'une, d'après la figure ( t. III , p. 527, et pi. 28,
fig. 2) sous le nom de labre large raie, et
l'autre, d'après la description (t. IV, p. 3o4),
sous celui de tœnianote large raie-
Les malacanthes ne sont pas des coryphè-
nés , quoiqu'ils semblent participer à quelques-
uns des caractères de ce genre, par la longueur
de leur dorsale et de leur anale, et que les
nageoires ont leurs rayons presque aussi flexi-
bles. Cependant c'est à la famille des labroïdes
qu'ils appartiennent véritablement.
Nous les plaçons dans le voisinage du genre
singulier des lachnolèmes, à cause de leur joue
couverte d'écaillés et de leur ligne latérale non
interrompue, et parce que la flexibilité de
leurs rayons semble être déjà annoncée dans
les prolongemens filamenteux de ceux de la
dorsale de nos capitaines. -
Leur caractère le plus apparent consiste clans
1. Blocli , Syst. posih., p. 285.
318 LIVRE XVI. LABROÏDES.
leur longue nageoire dorsale, où, parmi de
très-nombreux rayons, il n'en est que trois ou
quatre en avant qui soient simples; encore
sont-ils quelquefois tout-à-fait flexibles : tous
les autres sont branchus. C'est de cette mollesse
de leurs rayons épineux du dos que nous avons
dérivé le nom de malacanthe (de fxuKuKcSf
mou, et dHxKotvOcCi épine). Ils ont d'ailleurs le
corps alongé, peu comprimé; les écailles petites ;
l'anale presque aussi longue que la dorsale; les
autres nageoires médiocres; la tête oblongue;
le front peu convexe; l'œil médiocre et placé
en arrière; la bouche assez fendue; les lèvres
charnues. Chacune de leurs mâchoires a une
rangée de dents, parmi lesquelles il en est de
fortes et crochues; mais leur palais et leur
langue n'en ont aucune. Sous ces divers rap-
ports ils se rapprocheraient de plusieurs labres,
auxquels ils tiennent aussi par des intestins
sans cul-de-sac stomachal et sans cœcums;
mais ils en diffèrent par leurs dents pharyn-
giennes, qui sont en cardes en haut, et qui n'en
offrent en pavés qu'au pharyngien inférieur,
encore y sont-elles accompagnées de dents en
carde; enfin fépine assez forte de l'angle de
de leur opercule est aussi un de leurs carac-
tères essentiels.
Nous ne connaissons jusqu'à présent que
CHAP. Vin. MALACANTHES. 319
deux espèces de ce genre : l'une des mers
d'Amérique, l'autre de celles des Indes.
Le Malacanthe de Plumier.
{Malacanthus Pliunieri, nob.; Coryphœna Plumieri,
Bl., 1765 Sparus ohlongus , Bl. Sclin.)
Le malacanthe d'Amérique est alongë.
Sa longueur totale, avec la caudale et ses pointes,
comprend huit fois et demie sa hauteur, et sans cette
nageoire près de sept fois. La longueur de sa tête
y est quatre fois et deux tiers, et elle est deux fois
aussi longue que haute. L'épaisseur, aux pectorales,
fait les deux tiers de la hauteur. Il résulte de là que
les lignes du dos et du ventre sont presque droites,
et celles du profil et de la gorge très-peu arquées.
Le crâne, le front et le museau forment une surface
très-légèrement convexe, et qui a en largeur entre
les yeux les trois cinquièmes de la hauteur de la
tête. Le diamètre de l'œil est du sixième de la lon-
gueur de la tête; il en occupe le quatrième sixième,
fort près de la ligne du profil. La bouche est fen-
due, et prend les trois cinquièmes de la distance du
bout du museau à l'œil. Les lèvres sont épaisses,
charnues j le maxillaire est petit, caché sous les replis
de la peau, qui ne laisse rien paraître non plus du
sous-orbitaire. L'orifice antérieur de la narine, prati-
qué à moitié de la distance de l'œil à l'extrémité du
museau, est petit, rond, entouré d'un léger rebord;
l'autre, ouvert au tiers de la distance entre le premier
et Tœil, est petit, ovale et sans rebord.
320 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La mâchoire supérieure a en avant six fortes
dents pointues, entre lesquelles en sont deux petites,
puis de chaque côté une rangée de quinze petites,
coniques et pointues, et à l'angle une forte, un peu
dirigée en avant. A la mâchoire inférieure il y en a
en avant six et deux petites, à peu près comme en
haut, mais un peu moindres; et puis de chaque côté
cinq crochues, pointues, comprimées, qui vont en
grandissant jusqu'à la cinquième; la sixième est de
moitié plus petite, et après elle il en vient dix ou
douze très-petites, et enfin, à l'angle, une plus forte,
un peu dirigée en avant, bien moindre cependant
que celle qui lui correspond à la mâchoire supérieure.
Les deux mâchoires ont toute leur partie antérieure
derrière leurs six dents de devant garnie d'une rangée
en velours ras et serré. Les voiles maxillaires sont
minces, mais assez larges. Le palais est lisse; la langue
est également désarmée, petite, plate, un peu poin-
tue, et assez libre. Le préopercule est entier et a
l'angle arrondi, le bord montant vertical , et le limbe
peu distinct. La longueur de l'opercule est d'un peu
raioins du quart de celle de la tête; il forme avec le
sous-opercule une pièce deux fois aussi haute que
longue; l'épine qui termine son angle est plate, mais
forte et assez pointue. Les ouïes sont bien ouvertes ,
mais leurs membranes s'unissent ensemble vis-à-vis
l'angle du préopercule, et enveloppent l'isthme sans
s'y attacher; car il ne se fixe lui-même à leur face
interne que sous l'œil. De chaque côté sont six rayons
assez forts; le premier est plat et caché sous le sous-
opercule, les suivans sont à découvert, et le sixième
CHAP. vin. MALACANTHES. 321
est fort rapproché de son correspondant de l'autre
coté. Les arceaux des branchies n'ont que de petits
tubercules lisses sur deux rangs. Les pharyngiens
ont des dents en velours , si ce n'est le rang interne
des inférieurs où elles sont en petits pavés, et l'an-
térieur des supérieurs, où elles sont en crochet.
Les branchies ont leurs lames fendues jusqu'à moi-
tié; la dernière n'est séparée de l'épaule que dans
un petit espace. H y a une petite demi-branchie ad-
hérente à l'os qui porte l'opercule. L'épaule n'a point
d'armure, et est même sans écailles dans l'aisselle et
un peu au-dessus. La pectorale est aussi large que
longue , et serait arrondie , sans une pointe assez
aiguë que forme son sixième rayon ; elle en a en tout
seize, dont le premier est simple et court : ils croissent
jusqu'au sixième et décroissent ensuite. Cette nageoire
n'a que le neuvième de la longueur totale; elle s'at-
tache au-dessous du milieu de la hauteur.
Les ventrales sont d'un tiers plus courtes, aussi
un peu pointues ; leur membrane s'attache à l'ab-
domen par le tiers de sa base; leur épine n'a que
moitié de leur longueur et n'est pas très-forte.
La dorsale commence vis-à-vis la base des pec-
torales par cinq rayons simples, mais flexibles, dont
le premier est à peine du dixième de la hauteur du
corps. Le cinquième n'a qu'un tiers en sus; il est
suivi d'un sixième, simple, mais articulé, et de cin-
quante-cinq autres, tous articulés et branchus ,
excepté le dernier, qui n'a point de branches; c'est
donc en tout soixante et un rayons, formant une
nageoire qui, dès le dixième ou le douzième, prend
et conserve moitié de la hauteur du corps.
l3. 21
522 LIVRE XVI. LABROÏDES.
L'anale commence vis-à-vis la pointe de la pr clo-
rale ; elle est à peu près de même hauteur que la
dorsale, et a cinquante et un rayons, dont le premier
seul est simple et sans branches.
Ces deux nageoires finissent vis-à-vis l'une de
l'autre, et ne laissent entre elles et la caudale qu'un
espace du dix-huitième de la longueur totale, à peu
près aussi haut que long; mais qui n'a pas en épais-
seur moitié de sa hauteur.
La caudale a dans son milieu le douzième à peu
près de la longueur du reste du poisson ; mais les
rayons supérieurs et inférieurs s'alongent , et les ex-
trêmes forment deux pointes grêles et deux fois plus
longues que la partie moyenne.
Une peau nue recouvre le front, le museau, les
mâchoires, les lèvres, le limbe du préopercule,
l'interopercule, le dessous de la gorge et la mem-
brane des ouïes; ma's il y a des écailles sur le crâne ^
la tempe, la joue, l'opercule, le sous-opercule et la
poitrine, ainsi que sur tout le corps : les nageoires
n'en ont point, si ce n'est de très-petites entre les
bases des rayons de la caudale. Ces écailles sont
au nombre de plus de cent soixante entre l'ouïe et
la caudale, et de près de cinquante sur une ligne
verticale. Leur forme est elliptique; leur base, tron-
quée carrément, a huit ou dix très-petites crénelures,
et des sillons qui ne se réunissent pas en éventail.
Leur partie externe, vue à une forte loupe, a le
milieu pointillé, les côtés striés, et 1q bout un peu
dentelé : aussi laissent - elles sentir quelque âpreté
quand on les louche d'arrière en avant. La ligne
CHAP. VIIT. MALACANTHES. 325
latérale occupe à son origine le quart supérieur de
la hauteur, et demeure à peu près droite et parallèle
au dos sur toute sa longueur; elle ne se marque
que par une légère élevure sur chaque écaille.
Ce poisson est agréablement varié de jaune et de
lilas ou de bleuâtre. En avant de l'œil et sur la
tempe, le jaune et le lilas sont disposés en lignes
longitudinales. Sur l'opercule il y a des marbrures
jaunes sur un fond lilas. A la dorsale le fond est
d'un lilas rougeâtre , avec trois séries longitudi-
nales de taches jaunes, et un liséré d'un lilas plus
foncé. L'anale est à peu près de même. La caudale
est jaune, et a le bord postérieur bleuâtre et trans-
parent , et un liséré bleu aux bords supérieur et
inférieur. Dans nos individus le corps jDaraît bru-
nâtre en dessus, blanchâtre en dessous; mais d'après
la figure de Plumier il aurait, au moins dans cer-
tains temps, la partie dorsale jaune, irrégulièrement
ondée de lilas ou de bleu. Cette figure donne aussi
à la dorsale une teinte rouge uniforme, assez diffé-
rente de ce que nous observons. L'enluminure est
assez bien rendue sur la planche n." 176 de Bloch,
qui ne pèche que par la trop grande convexité du
museau; mais sa description, qu'il n'a pu faire que
d'après la figure, est beaucoup plus fautive, surtout
par les nombres des rayons qu'il donne. Voici ceux
que nous avons comptés nous-mêmes sur la nature.
B. 6;D.6/55j A. 1/50; C. 17; P. 16; V. 1/5.
Nous avons fait sur cette espèce les obser-
vations anatomiques suivantes :
Le foie du malacanthe est très -petit, et ne forme
►24 LIVRE XVI. LABROÏDES.
qu'un seul lobe quadrilatère placé sous l'œsophage.
Les canaux biliaires se réunisseni de plusieurs points
à sa face concave; mais il n'y a pas, à proprement
parler, une vésicule du fiel distincte. Le canal cholé-
doque est assez long; il débouche dans le duodénum
en arrière du pylore.
L'entrée de l'œsophage est très-large; l'estomac
est un sac assez grand, peu alongé, arrondi en ar-
rière; les parois sont minces, et à l'intérieur on ne
voit de plis ou des rides longitudinales que dans le
fond de l'estomac; le pylore est percé à la moitié
delà longueur de l'œsophage et de l'estomac, mesurés
ensemble; son ouverture est large, pourvue d'une
valvule charnue, hérissée de papilles assez épaisses,
qui rétrécissent l'entrée.
L'intestin n'est pas très-long ; il se replie trois fois
et fait quelques ondulations dans l'intervalle de ses
plis. Une valvule épaisse et charnue est à l'entrée du
rectum, qui se dilate lorsqu'il débouche à l'anus.
Le fond de l'estomac répond à la hauteur de l'anus;
mais la cavité abdominale s'étend en arrière de plus
du double encore, pour loger les organes de la géné-
ration, de la sécrétion de l'urine, et plus de la moitié
postérieure de la vessie natatoire.
L'individu que nous avons disséqué était un mâle.
Les laitances étaient très-peu développées ; elles sont
placées dans le fond de la cavité abdominale, en
avant des reins et au-dessus de la vessie urinai re.
Un long canal, placé sur cette vessie et se dirigeant
en avant, verse la laitance par un trou percé derrière
le rectum.
CHAP. VIIT. MALACANTHES. 52S
L<a vessie natatoire est très-grande ; elle commence
mi peu en arrière du diaphragme, et s'étend tout le
long du dos, jusqu'au dix -neuvième rayon de l'a-
nale; elle est protégée en arrière par les premiers
cercles osseux , dont nous allons parler plus bas en
décrivant le squelette. Sa membrane propre est très-
mince et argentée. Au-dessous d'elle, le péritoine
prend une épaisseur considérable et un tissu fibreux
très-dense.
Les reins forment deux longs rubans d'un assez beau
rouge, placés de chaque côté de l'épine; ils se réunis-
sent en arrière, au-delà de la vessie natatoire, dans le
cône osseux. Ils débouchent dans la vessie urinaire,
placée en partie au-dessous d'eux dans le cône, et elle
se porte en avant sous les laitances, ayant la forme d'un
sac étroit, alongé, à parois minces et blanches; elle
se rétrécit en un tube de très-petit diamètre, avant de
déboucher derrière l'ouverture des organes génitaux.
Nous avons trouvé dans l'estomac de ce poisson
des débris de crustacés.
A ce que nous avons déjà vu des pièces
osseuses, en faisant la description externe du
poisson, nous ajouterons que
la colonne vertébrale du malacanthe est composée
de vingt-trois vertèbres; elles sont alongées, excepté
la première, dont le corps n'a que la moitié de la
longueur des suivantes; leur articulation est très-
lâche : ce qui rend les mouvemens latéraux de ce
poisson très-faciles. Les douze premières vertèbres
portent des côtes; les neuf premières paires sont
526 LIVRE XVI. LABROÏDES.
libres par leur extrémité inférieure : les trois autres
se réunissent et forment un cône osseux, qui reçoit
lextrêmite de la vessie aérienne et les reins.
L'anus répond à la fin de la quatrième vertèbre,
et l'on ne commence à trouver les interépineux de
l'anale , articulés avec les apophvses épineuses infé-
rieures des vertèbres , qu au vingtième rayon de
cette nageoire.
L'apopbvse transverse de la vertèbre caudale est
assez forte.
Notre plus grand individu, qui vient de
Saint-Domingue, est long de quinze pouces :
la fiçrure de Plumier en a dix-huit.
M. Plée nous en a envoyé un plus petit de
la Martinique, et nous en avons trouvé un
autre de la même ile dans- les collections de
feu M. Richard.
Son poids est souvent de trois livres et plus.
Suivant M. E.icord, lespèce est commune
pendant toute Tannée à Saint-Domingue,
mais on ne ly mange pas.
Nous la voyons aussi se porter sur les côtes
du Brésil : M. Blanche t, que nous avons déjà
cité tant de fois, en a envoyé de nombreux
et beaux échantillons au Musée de Genève,
qui a bien voulu en céder à celui de Paris.
Comme nous lavons dit, les colons fran-
çais des Antilles nomment ce malacanthe vwe,
et les habilans actuels de Haïti lui ont con-
CHAP. Mil. MALACA>.TUES. 527
serve ce nom. M. Plëe lexplique d après 1 ha-
bitude que l'on suppose à ce poisson de char-
rier, avec beaucoup de travail, des pierres et
des roches pour se faire un abri dans le tond
de la mer. Il est plus probable quil vient sim-
plement des rapports de forme et de couleur
quon lui aura trouvés avec la viue d'Europe
( trachinus draco), et que l'histoire sera nëe
du nom, comme il est arrivé bien souvent.
Parra, qui l'appelle (p. 22, et pi. i3, fig. 1)
matejuelo blanco , nen rapporte rien de sem-
blable. Il assure qu'à Cuba Ion n'en mange
point. A Saint-Domingue on en fait peu de
cas, selon M. Ricord. M. Plée nous dit, au
contraire, quà la Martinique il est estimé. Ces
diÔérences peuvent tenir à la nature des fonds
où on le prend. Il se pèche soit dans des
nasses, soit à la Ugne.
Le Malacamhe a large raie, ou Tubleu
DE lIsLE-DE-Fra^CE.
{MaLicanthus tœniatus, nob. ; Labre large raie,
et Tœnianote larse raie^, Lacép.)
Cette espèce a été décrite et représentée à
lIsle-do-France par Commei^on, en Octobre
1-69. Elle est rare dans cette mer, et je ne
sais si le nom de tubleu j que Commerson lui
528 LIVRE XVI. LABROÏDES.
donne, est un nom vulgaire, ou s'il a été ima-
giné par le voyageur. M. de Lacëpède , suivant
son usage, a tiré deux espèces des documens
laissés par Commerson : la figure lui a fourni son
labiée large raie (t. III, p. 627, et pi. 28,fig. 2),
et la description, son tœnianote large raie
( t. IV, p. 304)5 tandis que par une erreur
contraire il a rapporté à ce taeniauote ( t. IV,
pi. III , fig. 2 ) la figure d'un poisson tout dif-
férent, même par le genre et par la famille j
car c'est un de nos apistes (^ap. tœnianotus,
nob.).
On a dû se demander souvent, comment
M. de Lacépède a pu être conduit à tant de
doubles emplois et à tant de confusions, qu'il
lui aurait été si facile d'éviter, en rapprochant
même rapidement les matériaux dont il faisait
usage; mais on se l'expliquera, lorsque l'on
saura qu'il a composé son livre à la campagne,
où les troubles de 1793 l'avaient forcé de
se cacher pour soustraire sa tête vénérable
à l'échafaud révolutionnaire; qu'il travaillait
non pas sur les manuscrits originaux, ou sur
les poissons eux-mêmes qui étaient à sa dis-
position , mais sur des notes qu il avait prises
en dilTérens temps, et qui ne lui présentaient
plus d'idées complètes; et même dans l'occa-
sion, présente il est encore plus excusable
CHAP. Vin. MALACANTHES. 329
qu'en bien d'autres, parce que les dessins que
Commerson a laisses de son tuhleii, ne portent
point de nom ni de renvoi à la description,
et qu'une lecture assidue et répétée du ma-
nuscrit pouvait seule en faire reconnaître
l'identité.
Quant à la figure d'apîste, j'avoue que je
ne comprends pas comment elle se trouve mê-
lée à cette histoire : le moindre coup d'œil
suffisait pour juger qu'elle n'a point de rap-
port à la description de la page 3o4/
Ce tuhleu n'est pas du nombre des espèces
conservées en nature par Commerson , et
nous n'aurions pu en parler que d'après la
description et les figures de cet observateur,
si M. Dussumier n'avait pas été assez heureux
dans ses recherches pour nous envoyer le
poisson. Depuis M. Desjardins nous en a
procuré de la même île, et MM. Quoy et
Gaimard l'ont aussi rapporté de leur voyage.
Nos exemplaires sont parfaitement conser-
vés; mais ils manquent de leurs viscères.
Cette espèce ressemble beaucoup, par sa
1. Peut-être est-ce une distraction et a-t-il voulu écrire iœnia-
note iriancanthe; mais une question non moins difficile est de
deviner comment 11 a jju associer ce triacanthe, qui est vraiment
un apiste, genre voisin des scorpènes , avec le large raie, qui
est manifestement de la famille des labres.
350 LIVRE XVI. LABROÏDES.
forme alongée, par la force de l'épine oper-
culaire, pyr le nu du dessus de la tête, éga-
lement aplatie, par les petites écailles sur le
préopercule , au malacanthe des mers d'Améri-
que ; mais elle en diffère parla forme des dents
et parce que la caudale est à peine fourchue :
quelques différences existent dans les rapports
de proportion des diverses autres parties :
aussi allons-nous donner une description dé-
taillée de cette rare espèce.
La tête, plus longue que celle du malacanlhe de
Plumier, n est que du quart de la longueur totale.
L'œil est situé sur le haut de la joue, sans que
l'orbite entame la ligne du profil, et à peu près
au milieu de la dislance entre le bout du museau et
la pointe de l'opercule : le diamètre fait le septième
de la longueur de la tête; et trois fois et demie
ce diamètre fait la dislance qui sépare l'œil de l'ex-
trémité du museau. La fente de la bouche est un
peu moins du tiers de la longueur de la tête. Les
dents sont sur une bande assez large et en ve-
lours, sur le devant des mâchoires : celles du rang
externe seules, un peu plus fortes, se continuent
avec la rangée unique de dents courtes, mais coni-
ques, des côtés de la bouche. Elles augmentent de
force en approchant de l'extrémité de l'intermaxil-
laire : la dernière est même plus forte, et rappelle
la disposition que nous avons signalée dans le plus
grand nombre des labroïdes, et qui est plus mani-
feste dans le premier de nos malacanthes. Le palais
CHAP. VIII. MALACANTHES. 331
el la langue sont lisses et sans aucunes dents; les
deux voiles, supérieur et inférieur, sont larges; les
lèvres sont épaisses et charnues, mais peu plissées
en dessous.
Les deux ouvertures de la narine sont rapprochées
l'une de l'autre; l'antérieure est sur la seconde moitié
de l'intervalle de l'œil au bout du museau, et n'est
qu'un petit trou semblable à une piqûre d'épingle;
la postérieure est une fente longitudinale.
On doit déjà pressentir que le sous-orbitaire est
un. os long et étroit, à cause de la longueur et de
l'étroitesse du museau. Le préopercule est assez grand ;
son angle est ouvert et arrondi ; le bord montant
est incliné en arrière, et l'inférieur est dirigé obli-
quement et en bas vers l'angle de la mâchoire infé-
rieure.
L'opercule a la forme d'un pentagone irrégulier.
Le bord antérieur est caché sous le postérieur du
préôpercule, sans atteindre jusqu'à l'angle infé-
rieur; de la terminaison de ce bord en commence
un second, dirigé obliquement d'avant en arrière,
et qui va rejoindre le bord inférieur postérieur,
en faisant avec lui un angle assez aigu et rentrant,
ou un arc convexe en avant. Le bord postérieur
supérieur est un peu festonné en ^-x-'x.-w^'x, , et se
réunit au précédent , en donnant de leur angle la
pointe osseuse operculaire, qui atteint jusqu'au mi-
lieu de l'huméral, et qui est très -acérée. Le sous-
opercule est une lame étroite, taillée suivant la courbe
du bord de l'opercule. L'interopercule suit de même
le bord de celui-ci; il est un peu plus large en
532 LIVRE XVI. LABROÏDES.
arrière ; enire lui et les deux os postérieurs de l'ap-
pareil operculaire, il y a une petite pièce triangu-
laire, mince, mobile, que je regarde comme démem-
brée de l'interopercule , et qui a donné une forme
pentagonale à l'os qui porte l'épine.
Nous avons dit que le préopercule est en partie
couvert d'écaillés : il en est de même de toute la
partie de l'opercule qui est au-dessus de la pointe.
On voit quelques points écailleux sur le sous-oper-
cule; mais l'interopercule, le limbe du préopercule,
les mâchoires, la membrane brancliiostège, le sous-
orbitaire, et le dessus de la tête jusqu'au bord posté-
rieur de l'orbite, sont recouverts d'une peau épaisse
sans écailles. Le dessus du crâne entre les yeux a
deux fois la largeur du diamètre de l'œil, et le bout
du museau est de moitié plus étroit.
Les ouïes sont largement fendues; la membrane
brancliiostège est cependant réunie à celle du côté
opposé, sous toute la portion inférieure de la tète.
Les rayons sont cachés par l'épaisseur de la peau,
de manière à n'être vus que par la dissection. Ils sont
forts, au nombre de cinq, et le dernier, couché sous
l'opercule, est aplati et arqué. ^
Les branchies sont au nombre de quatre, et il y
en a une rudimentaire sous le haut de l'opercule. Les
râtelures des arcs branchiaux sont de petits tuber-
1. Commerson porte le nombre a six clans la description,
d'ailleurs fort exacte, qui existe dans ses manuscrits, li y a ici
erreur, je les ai comptés avec soin des deux côtés de la mem-
brane; le nombre est celui que je donne.
CHAP. VIII. MALACANTHES. 535
cules rugueux. Les dents pliaryngiennes sont en
cardes pointues et coniques.
Le tronc est arrondi de l'avant et comprimé vers
la queue; sa plus grande hauteur aux pectorales est
du septième de la longueur totale : derrière les deux
grandes nageoires impaires elle n'est que du ving-
tième. L'épaisseur aux pectorales surpasse la moitié
de la hauteur. Ces nageoires ont le bord supérieur
arqué, leur terminaison pointue, et le bord inférieur
sinueux et très-convexe en dessous. Les rayons sont
larges et plats, au nombre de dix-sept; le premier
seul est simple et de moitié plus court que le plus
long, qui mesure à peu près le huitième de la lon-
gueur totale.
L'huméral se montre au-dessus de la pectorale en
une plaque demi-ronde, dont le bord supérieur va
rejoindre, sous le bord membraneux de l'opercule,
le scapulaire , qui est en partie caché sous l'ouïe.
On ne voit qu'un peu du bord arqué de sa portion
supérieure. Le surscapulaire est seul couvert d'écail-
lés. Le bas de l'huméral forme une large ceinture,
entièrement recouverte par l'ouïe, et qui ne se voit
qu'en soulevant l'opercule.
La ventrale a les deux tiers en longueur de la
pectorale, elle est étroite, et insérée sous le ventre
un peu en arrière de celle-ci. Son épine osseuse est
poignante, quoique grêle et collée tellement au pre-
mier des cinq rayons branchus, qu'on ne la juge
bien qu'après l'avoir séparée avec le scalpel.
La dorsale commence un peu au-delà de la pec-
torale j elle se continue sur toute l'étendue du dos,
334 LIVRE XVI. LABROÏDES.
s'élevant un peu vers l'arrière. On lui compte qua-
rante-sept rayons, dont les quatre premiers sont
simples et moins flexibles , quoique grêles , que ceux
du malacanthe d'Amérique. Le sixième est simple,
mais articulé : les autres sont tous branchus.
L'anale a trente- huit rayons, dont le premier,
très-flexible, est simple : il répond au seizième de
la dorsale. Ces deux nageoires atteignent aussi loin
l'une que l'autre, et le tronçon de queue qu'elles
laissent derrière elles , est du quinzième de la lon-
gueur totale. La caudale de ce poisson a le bord
droit quand elle est étalée, et légèrement concave
quand les rayons sont à moitié rapprochés.
B. 5 5 D. 4/43 ; A. 1/38 ; GAI ; P. 17 ; V. 1/5.
Les écailles sont petites et légèrement rudes au
toucher. Je compte cent vingt-cinq rangées entre
l'ouïe et la caudale, et une trentaine dans la hau-
teur. Vue isolée, une écaille a la forme rectangu-
laire; plus des deux tiers de sa surflice est recou-
verte; la portion nue a le bord libre cilié, la sur-
face grenue : le bord radical a trois fortes épines
d'insertion.
La ligne latérale est marquée par une suite de
tubulures, et commence au-dessus de l'ouïe par le
quart de la hauteur; elle s'abaisse peu à peu, et,
arrivée au milieu de la longueur du corps, elle se
rend à la caudale par le milieu de la hauteur du
tronc.
Dans la liqueur, le poisson paraît brun sur le dos,
au-dessus de la ligne latérale. Cette teinte se fond par
lignes parallèles, plus effacées sur l'argenté des côtés,
CHAP. VIIT. MALACANTHES. 535
qui devient irès-pur et très-brillant sous le ventre.
Une large bande, égalant le quart de la hauteur,
part de l'aisselle de la pectorale et se rend à l'extré-
mité de la caudale. Celte bande, brune à son origine,
paraît être composée de neuf traits rapprochés,
qui , au milieu du corps , se réunissent pour ne
plus former qu'une bande beaucoup plus foncée ,
et presque noire à la queue. Elle s'élargit un peu
en dessous, sur le bas de la caudale, de manière à
donner une sorte de talon, qui ne couvre que la
base de la nageoire. Cette singulière disposition est
constante dans tous les individus que j'ai sous les
yeux, et elle est aussi représentée sur les différens
dessins qui nous sont parvenus.
Les nageoires semblent avoir été jaunes.
Mais Commeison, dont la description est
si exacte, sauf la légère erreur qu'il a commise
sur le nombre des rayons brancliiostèges, nous
donne la description suivante des couleurs ,
faite sur le poisson frais.
La couleur de la tête et du dos est d'un brun
bleuâtre. Une large bande noire comme de l'encre,
règne en ligne droite depuis la pectorale jusqu'à la
caudale. Le dessous du corps est blanc. La dorsale
a toute la moitié de sa base brune, celle du bord
blanchej l'anale est blanche comme le ventre. La cau-
dale a sa partie supérieure brune, comme le dos : le
noir de la bande latérale se répand sur' le reste de
sa surface, excepté une large tache blanche, demi-
circulaire, qui occupe son bord au milieu de sa
356 LIVRE XVI. LABROÏDES.
moitié inférieure. Le blanc de l'abdomen s'étend aussi
un peu sur la base de celte partie. Les pectorales
sont brunâtres à l'extérieur, et bleuâtres à leur face
interne.
Notre individu est long de seize pouces ;
celui décrit par Commerson, et le seul qu'il
ait vu, était long de quinze pouces et demi, et
pesait dix-sept onces. On lui a dit que la chair
de ce poisson était peu estimée. Son estomac
contenait de très-petites coquilles et des frag-
mens de lythopliytes.
Nous ne pouvons donner aucun détail sur
l'anatomie de ce poisson , puisque les indivi-
dus que l'on nous a envoyés manquaient des
viscères abdominaux.
M. Desjardins nous a dit dans une note que
le nom vulgaire de ce poisson, à l'Isle- de-
France, est sans-culotte.
Nous avons d'ailleurs à regretter que ce sa-
vant et zélé observateur n'ait pas eu le temps
de nous donner d'autres détails sur cette rare
espèce. C'est une lacune qu'il aura le soin de
remplir aussitôt qu'il aura l'occasion de publier
quelque notice scientifique sur ce labroïde.
L'espèce n'est pas confinée autour de l'Isle-
de-France : MM. Quoy et Gaimard en ont ob-
servé au havre Dorey de la Nouvelle-Guinée
une variété, qui a sur le milieu du dos une
tache jaunâtre.
CHAP. VIII. MALACANTHES. 357
Nous la signalons à cause de la petite dif-
férence des couleurs que ces naturalistes ont
indiquée. Ce poisson , dont ils ont donné
une figure, planche 20, figure 3, et une des-
cription, tome III, page 701, de la Rela-
tion du voyage de l'Astrolabe, en le regardant
comme le labre large raie de Lacépède, est
peint de couleur bleu d'azur sur le dos et
sur le ventre; cette teinte aurait sur la tête
des reflets de carmin, qui ne sont pas exprimés
sur la planche; la bandelette longitudinale est
noire, l'anale a le bord jaunâtre; sur le dos
il y a une tache oblongue jaunâtre, rayée de
trois traits bruns longitudinaux. Le nom de
cette espèce, au port Dorey, est insoronobar.
J'ai pu vérifier sur le poisson son identité
avec celui de FIsle-de-France. Je ne doute
pas qu'il soit de la même espèce malgré la
phrase un peu obscure rédigée par les natura-
listes qui en ont fait la diagnose.
NB. Je ne parle pas ici de VAspidonle que M. Quoj a figuré,
pi. 19, fig. 4j dans la Zoologie de l'Astrolabe, parce que j'ai
reconnu en faisant ce travail que ce petit poisson , qui n'a que
trois rajons aux ventrales et les ouïes ouvertes par une fente
linéaire et verticale, est de la famille des blennies, et voisin de nos
Blennechis. Trompé alors par la ressemblance des couleurs , j'avais
pensé qu'il avait des affinités avec notre malacanlhe de la mer des
Indes.
3.
22
538 LIVRE XVI. LAEROÏDES.
CHAPITRE JX.
Des Cheilions.
Commerson, en observant avec tant de soins
les poissons de risle-de-France , y vit une ou
deux espèces voisines Tune de l'autre, ayant
beaucoup d'affinité avec les labres, mais s'en
distinguant, suivant la méthode linnéenne,
par l'absence de prolongemens cutanés auprès
des rayons épineux de la dorsale. Ils offraient
d'ailleurs un autre caractère dans la nature
molle de tous ceux qui sont simples à la
nageoire. Cet habile naturaliste consigna ces
observations dans son journal , et donna pro-
visoirement à ces poissons le nom générique
de cheilion, le faisant dériver du grec %ètKoç,
(lèvre), pour rappeler les affinités que ce genre,
qu'il se proposait d'établir, avait avec les la-
bres. Il donne d'ailleurs la description de deux
espèces, l'une faite avec le plus grand détail,
l'autre comparativement , et un peu plus courte.
Ces matériaux ont paru pour la première fois
dans le quatrième volume de l'Histoire des
poissons de Lacépède, qui en a fait un extrait,
et qui a publié ce genre en méconnaissant les
rapports que leur avait si bien assignés Gommer-
CHAP. IX. CHEILIONS. 539
son : car il le place à côté des genres harpe,
pomatome et lëiostome , que nous avons dé-
montré être des doubles emplois d'espèces
bien connues, et classées dans des familles
différentes les unes des autres; il le rapprochait
du genre pimeleptere , qui est un squammi-
penne et tout aussi éloigné des cheilions.
Lacépède d'ailleurs ne se doutait pas, en
copiant Forskal, qu'il plaçait dans ses labres
un poisson de ce genre des cheilions, et même
tellement voisin de celui de l'Isle-de-France,
que j'ai beaucoup hésité à l'en distinguer.
Le lahrus inermis du naturaliste danois n'est
en effet autre chose quun cheilion; toutefois
nous devons observer que Commerson n'a pas
présenté les vrais caractères du genre qu'il
projetait, imbu qu'il était des caractères lin-
néens.
Ils consistent dans la forme particulière des
intermaxillaires. Ces os sont en effet élargis et
chargés en dedans de granulosités que l'on
n'observe chez aucun autre labroïde. Les dents
de la rangée externe ne sont pas moins caracté-
ristiques; car elles sont triangulaires, compri-
mées et tranchantes, comme celles de certai-
nes sphyrènes, ou des cjbiums dans la famille
des scombéroïdes. Les deux dents mitoyennes
sont en crochets, et l'espace entre toutes ces
340 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dents est rempli par d'autres, petites; coniques ,
et constituent ainsi Tarmure de la mâchoire
inférieure. L'égalité des dents de la mâchoire
supérieure, sauf les deux mitoyennes, est aussi
très-particulière. La mollesse et la flexibilité
de tous les rayons est non moins caractéris-
tique; mais elle ne serait pas seule suffisante.
La ligne latérale non interrompue sert égale-
ment à distinguer ce groupe de labroïdes à
rayons mous et à ligne latérale interrompue,
comme on le voit dans le lahrus inalapterus
de Bloch. Les cheilions ont aussi quelques
écailles rares sur l'opercule, tandis que le pois-
son auquel je le compare en ce moment, a la
joue nue comme la girelle.
On voit donc que les cheilions avoisinent
les malacanthes, qu'ils ont encore les rayons
plus mous que le tubleu de fIsle-de-France,
et qu'ils sont intermédiaires entre les labres et
les girelles.
M. Cuvier, qui n'avait pas examiné les dents
ni les intermaxillaires de ces poissons, a cru
que la seule flexibilité des rayons ne pouvait
être un caractère assez important pour faire
de ces espèces un genre distinct. C'est ce qui
explique comment il a dit dans le Règne ani-
mal, que les cheilions n'étaient que des labres
très-gréles, dont les épines dorsales sont flexi-
CHAP. IX. CHEILIONS, 341
bles. Il aura sans doute été trompé par l'inexac-
titude de la figure du Voyage de l'Uranie.
Je commencerai par décrire les espèces con-
nues de Commerson, et je parlerai ensuite de
celles qui ont été découvertes depuis.
Le Cheilion doré.
( Cheilio auratusy Commerson, Lacép., t. IV, p. 4^3.)
Ce poisson, que nous venons de recevoir ,
de risle-de-France par M. Dussumier en très-
bon état, est distinct de celui des Sandwich,
rapportéparMM. Quoy et Gaimard. L'individu
de ces voyageurs était le seul que nous ayons
eu alors à notre disposition, et à l'aide duquel
nous avons reconnu la description de Com-
merson. Nous le crûmes identique avec son
poisson, et nous le déterminâmes ainsi dans
la collection du Muséum. C'est là ce qui expli-
que comment ce poisson a paru, sous le nom
de cheilion doré, dans le Voyage de l'Uranie ,
bien que nous le distinguions aujourd'hui de
celui auquel nous réservons le nom du premier
naturaliste qui Fa fait connaître»
Le corps est irès-alongé et presque arrondi. La
hauteur fait à peine le huitième de la longueur
totale; l'épaisseur a près des deux tiers de la hauteur.
La tète est longue, car elle n'est comprise que trois
fois et demie dans la longueur totale. Son museaw
342 LIVRE XVI. LABROÏDES.
est pointu, arrondi à l'extrémité, prolongé, par la
saillie des intermaxillaires, au-devant des sous-orbi-
taires; il a beaucoup de ressemblance avec celui
d'une sphyrène, même par la disposition des dents
de la mâchoire inférieure; mais le palais est lisse et
sans dents, et la nature des intermaxillaires devient
tellement caractéristique qu'on ne peut s'y méprendre.
L'œil est de grandeur médiocre, situé au milieu
de la longueur de la joue; le cercle de son orbite
touche presque, mais n'entame pas la ligne du profil j
son diamètre est du huitième de la longueur de la
tête. Le premier sous-orbitaire a le bord supérieur
• droit et alongé ; l'inférieur est convexe, et son angle
postérieur prolongé en pointe, qui va rejoindre les
autres osselets du sous-orbitaire. Le préopercule est
grand , à angle bien marqué , quoique arrondi. Le bord
inférieur est oblique un peu vers le bas, ce qui aug-
mente la largeur de la joue. L'opercule est triangu-
laire, alongé, et agrandi par son angle membraneux.
Sur le bord supérieur, près des surscapulaires , il y
a une rangée d'écaillés, et une autre existe le long
du bord inférieur. Cette rangée semble séparer d'une
manière plus nette le sous -opercule, qui est étroit,
alongé et sans écailles. L'interopercule est de même
en triangle oblongr,; sans écailles ; il touche sous
l'isthme à celui du côté opposé. La bouche est bien
fendue. Le maxillaire reste tout entier caché sous le
bord membraneux du sous-orbitaire. Les intermaxil-
laires ne sont pas protractiles , tant est courte leur
branche montante. La lèvre supérieure est peu épaisse
et a deux à trois plis longitudinaux; l'inférieure est
CHAP. IX. CHEILIONS. 345
plus large et collée le long de la branche de la mâ-
choire, comme dans la plupart de nos labroïdes ;
son bord est sinueux , à cause de l'élargissement
qu'elle a peu après la symphyse.
Les dents sont petites, coniques, serrées le long
du bord externe de l'intermaxillaire. J'en compte
trente- sept, qui diminuent graduellement jusqu'à
l'ancle de la mâchoire. A l'extrémité antérieure de
l'os il y a une forte canine crochue, presque trois
fois plus grosse que la dent qui la suit. Ce qui est
remarquable dans le poisson, c'est que cet inter-
maxillaire est élargi en dedans, sur les deux tiers
antérieurs de sa longueur, en une plaque osseuse,
granuleuse , et qui forme , en touchant à celle du
côté opposé, une sorte de voûte osseuse à toute
la partie antérieure de la bouche j d'ailleurs il n'y a
point de dents ou granulations sur le vomer, ni sur
les palatins , qui sont reculés en arrière pour laisser
la place nécessaire à l'étendue des intermaxillaires.
A la mâchoire inférieure les dents sont plus gran-
des et plus écartées. Près de la symphyse il y a d'abord
une première canine de chaque côté, semblable aux
dents en crochets de la mâchoire supérieure ; puis
vient un groupe de quatre petites dents coniques ,
crochues, et grandissant à mesure qu'elles sont plus
postérieures; ensuite une grosse dent en triangle
isocèle, comprimée, tranchante, et semblable à celle
de certaines sphyrènes ou de nos cybmnis. Après un
intervalle sans dents, une autre canine, en triangle et
très-pointue, plus grande, suit celle dont je viens de
parler; un espace sans dents sépare celle-ci de deux
344 LIVRE XVI. LABROÏDES.
autres , semblables pour la taille et la forme à la
première; enfin, une série de cinq petites coniques
termine cette denture.
Le voile supérieur du palais est très-petit, à peine
Visible ; l'inférieur est très-large; derrière lui est une
langue libre, pointue et lisse. Les pharyngiens sont
petits et couverts de dents rondes et comme gra-
nuleuses; l'inférieur a la tige longitudinale en ovale
alongé. Les râtelures des branchies sont courtes et
dirigées en dehors. Les ouïes sont largement fen-
dues. Il y a six rayons branchiostèges.
Les deux ouvertures de la narine sont près de l'oeil ;
la postérieure a une distance égale au diamètre de
l'orbite : elle est petite, mais visible à l'œil nu; l'anté-
rieure est d'une petitesse extrême et percée sur une pe-
tite papille: il faut la chercher avec soin pour la voir.
La dorsale commence un peu en arrière de l'angle
de l'opercule; les premiers rayons sont simples, aussi
mous que ceux qui sont divisés en branche à leurs
extrémités. L'anale a de même trois rayons simples
et mous ; elle commence sous le second rayon arti-
culé de la nageoire du dos. La caudale est peu ar-
rondie. La pectorale est courte; elle est contenue
plus de dix fois dans la longueur totale; elle est
tronquée obliquement. La ventrale est petite, arron-
die; son rayon simple est mou.
B. 6} D. 9/13; A. S/1-2; C. 15; P. 11; V. l/b.
Les écailles sont assez grandes et demi- ovales :
j'en compte quarante-quatre entre l'ouïe et la cau-
dale, et dix-sept dans une rangée verticale au mi-
lieu. La portion radicale est plus large du double
CHAP. IX. CHEILIONS. 345
que la portion visible. La surface est très -finement
striée par des ciselures parallèles au bord. L'éventail
a trente-six rayons, marqués par des stries très-fines.
La ligne latérale est tracée droite, et elle descend
un peu obliquement de l'angle de l'opercule au mi-
lieu de la queue, de sorte qu'à sa naissance il n'y
a que cinq rangées d'écaillés au-dessus d'elle, et
qu'au milieu ou aux deux tiers du tronc, il y en a
huit ou neuf.
La couleur des individus conservés dans l'eau-de-
vie est d'un jaune plus ou moins doré, avec une série
de points noirs sur l'arrière de la ligne latérale, plus
marqués à mesure qu'ils sont plus près de la caudale.
M. Dussumier, qui l'a vu frais, dit que les écailles
du dos sont verdâtres, bordées de jaune; que les
flancs et le ventre sont argentés. La tête, jusqu'au
bord membraneux des opercules, est jaune orangé
pâle ; les nageoires ont leurs rayons de cette même
teinte, et la membrane transparente.
Le canal intestinal ne fait que deux ou trois sinuo-
sités. La vessie aérienne est grande, quoiqu'elle n'oc-
cupe que la moitié postérieure de la cavité abdominale.
Nos individus ont quinze à seize pouces
de longueur 5 ils nous sont venus de l'Isle-de-
France, par MM. Desjardins et Dussumier.
M. Leschenault a trouvé l'espèce à Bourbon.
Tous ces individus sont plus petits que ceux
de risle-de-France ; l'inégalité des dents est
fort bien exprimée, et la ligne latérale est plus
brune, avec les points noirs plus marqués.
540 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Commerson dit que la cliair du poisson est
d'un assez bon goût, mais qu'on ne le mange
pas à risle-de-France , à cause de son peu de
fréquence sur le marche. Sapore haiid illau-
dahilis, sed infrequentia pariim usurpatus.
Caro alhissima.
M. de Lacëpède a traduit cette phrase tout
différemment, en disant que ce poisson de
bon goût n'est pas reclierché à l'Isle-de-France ,
à cause de son abondance sur le marché de
l'ile.
M. Quoy, dans la Relation du voyage de
rUranie, a copié celte erreur de Lacépède,
et a cru devoir en inférer que, s'il n'avait pas
rencontré le clieilion sur le marché de flsle-
de-France, c'est qu'il n'y paraissait que très-
rarement pendant les mois de Mai, Juin et
Juillet, qu'ils avaient passés à Maurice.
Commerson fappelle lejaunet de flsle-de-
France, mais sans dire positivement s'il en-
tend sous cette dénomination parler d'un nom
vulgaire.
Le Cheilion vert et bleu.
{Cheilio cjano-chloris , nob.)
Nous avons aussi retrouvé une seconde es-
pèce de cheilion dans les collections faites à
î'Isle-de-France par M. Dussumier.
CHAP. IX. CHEILIONS. 347
Elle ressemble beaucoup à la précédente, mais
elle a le sous - orbilaire plus lisse, les rayons de la
dorsale plus forts et moins flexibles j la ligne laté-
rale rameuse.
D. 9/13 î A. 3/12; C. 13; P. 11 ; V. 1/5.
Dans la liqueur, tout le poisson paraît brun noirâtre,
cette teinte se dessinant par taclies sur les écailles
blanches du ventre. La dorsale et l'anale sont trans-
parentes , mais laissent encore voir des taches : fraî-
ches, elles sont tout autres. Les voici telles que
M. Dussumier nous les indique : le dos est vert olive
foncé; les côtés sont verts, avec une tache bleue
sur chaque écaille; le dessus de la tête est de la
même teinte que le dos, mais les opercules sont plus
clairs; le ventre prend une teinte bleue, et le des-
sous de la gorge est blanc; une tache noire est sur
le tiers antérieur du corps , et elle est surmontée de
trois points rouges.
On ne voit plus qu'une faible trace de la tache
noire sur le poisson conservé dans l'eau-de-vie. La
dorsale et l'anale sont variées de vert clair et d'o-
rangé. La caudale a ses rayons verts et la membrane
rosée; les pectorales et les ventrales sont blanches et
transparentes.
Nous ajouterons à ces observations quel-
ques autres, que nous prenons d'un dessin
qui nous a été envoyé de l'Isle - de - France
par M. Théodore Delisse. Elles me semblent
indiquer que les individus offrent entre eux
des variétés assez notables.
348 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ce dessin représenie le poisson vert sur la moitié
supérieure du corps , et bleuâtre à reflets argentés
en dessous. Il est couvert d'un réseau jaunâtre ,
formé par la réunion des traits déliés qui bordent
chaque écaille. Ce réseau s'évanouit sur le dessus
du dos, où le jaune se perd dans le vert foncé
de cette partie, et sur le ventre, où les traits de-
viennent blanchâtres.
Les deux taches latérales sont de couleur orangée.
L'antérieure est la plus petite, et répond à la pointe
de la pectorale. Le sous-orbitaire, les lèvres et le
dessous de la tête sont azurés; le dessus du crâne,
le bord du préopercule et tout l'opercule sont verts.
Un trait jaune descend de l'angle de la bouche vers
la jonction de l'interopercule avec le sous - opercule.
Un autre petit trait, de même couleur, va de l'angle
du préopercule au bord de l'opercule.
La pectorale est olivâtre , pâle à sa base. Les ven-
trales ont un peu plus de jaunâtre. La dorsale est
transparente, avec de nombreuses vermicellures jau-
• nés; l'anale, aussi pâle, a cinq à six taches jaunes très-
peu colorées sur la hauteur de la membrane, entre
chaque rayon. Ceux de la caudale sont verts ; la
membrane blanche a de fines vermicellures orangées
ou rougeâtres.
L'individu a treize pouces de longj il a été
donné à M. Dussumier par les pécheurs sous
le nom de tassard marron. Ce nom de tas-
sard est généralement appliqué dans nos co-
lonies aux poissons à dents tranchantes, et
CHAP. IX. CHEILIONS. 349
particulièrement à nos cjbiums. Il est assez
curieux de voir que les pêcheurs ont déjà fait
ce rapport.
Le Cheilion brun.
{Cheilio fuscus , Comm., Lacép., t. IV, p. 435.)
La description du second clieilion de Com-
merson me paraît encore différer de ces deux
espèces
La forme du corps est lout-à-fait semblable à celle
du cheilion doré.
D. 9/14; A. 3/11, etc.
Commerson dit que la couleur n'offre rien de re-
marquable; qu'elle est brune ou plombée, devenant
plus pâle sur les côtés et blanchissant sous le ventre.
La dorsale est ferrugineuse, variée de taches blan-
ches et lenticulaires. Les taches de l'anale sont plus
nombreuses et y deviennent confluentes. La caudale
est d'un brun verdâtre , et les ventrales sont blan-
ches : les pectorales ont une teinte brune très-claire.
Commerson a observé ce poisson dans les
barques des pécheurs de l'Isle-de-France, au
mois d'Octobre 1769; il était long de dix
pouces et demi.
Le Cheilion de Forskal.
(Cheilio Forskaliiy nob. ; Lahriis inermis , Forsk.)
Un autre cheilion, connu aussi à peu près
a la même époque où Commerson observait
350 LIVRE XVI. LABROÏDES.
les siens à l'Isle-de-France, est celui dont Fois-
kal a laisse une description, qui a été publiée
sous le nom de lahrus inermls. Voici ce qu'on
peut tirer de Foiskal pour en faire les caractères
de celte espèce.
Le corps, très-alongé, est vert, traversé par une
bandelette de points noirs, le long de la ligne laté-
rale. Au-dessus, la teinte devient plus brune; en
dessous, elle est plus pâle et tachetée de blanc. Sur
la tête et les joues on voit des points violets. Toutes
les nageoires sont verdâtres.
Je viens de retrouver ces traces de couleur,
surtout les taches du ventre et les lignes vio-
lettes des joues, sur un poisson que M. Le-
febvre nous a rapporté de Suez.
L'espèce se distingue aussi de celles de l'Isle-de-
France par ses dents plus égales et par ses premiers
rayons de la dorsale, qui sont plus courts, plus
grêles, et paraissent un peu moins flexibles.
D. 9/13; A. 3/12, etc.
L'individu a huit pouces de long; mais
Forskal en a vu qui avaient un pied de lon-
gueur et deux pouces de hauteur.
Les pêcheurs donnent à ce poisson le nom
de ghassek. Bonnaterre et Lacépède l'ont fait
paraître dans leur genre labre, en empruntant
au langage des Arabes la dénomination de
l'espèce quils nommèrent labiée hassek.
CHAP. IX. CHEILIONS. 351
M. Ruppel a aussi vu ce poisson a DjeJda
et à Massawah; mais il ne Ta pas reconnu
dans la description de Forskal, bien que
celle publiée par le célèbre voyageur de
Francfort soit en tous points conforme à celle
du naturaliste danois. M. Ruppel' a nommé
son poisson lahrus fusiformis , épithète aussi
peu caractéristique dans ce genre, que celle
de Forskal; aussi nai-je pas cru devoir con-
server l'une ou l'autre.
Le Cheilion demi-doré.
{Cheilio hemichrjsos , nob. ; Cheilio auratus , Quoy,
Uranie, p. 274, pi. 64,%. 2.)
MM. Quoy et Gaimard ont rapporté, comme
nous Tavons dit tout à l'heure , un cheilion des
îles Sandwich, qu'ils ont confondu avec le
cheilion doré de Commerson et de Lacépède.
Il s'en dislingue par un museau plus aigu, un œil
plus grand , des rayons dorsaux plus fins et très-
flexibles. La bouche est moins fendue, et les dents
sonL plus égales et plus fines. Il paraît dans la li-
queur être d'un brun rougealre uniforme, avec une
série de points noirs le long de la ligne latérale depuis
l'opercule jusqu'à la caudale. Le bas de l'opercule et
la poitrine sont argentés.
î. Rappel^ ^'cue JVirhcllhiere zu der Faun. ahj-ss. , p- 7 y
pi. 1, % 4.
552 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Suivant M. Quoy, le poisson frais est brun sur la
moitié supérieure du corps, et jaune doré sur l'in-
férieure. Les pectorales, les ventrales, l'anale et la
caudale, brillent de cette belle couleur; mais la dor-
sale est d'un brun très-pâle.
Les nombres des rayons sont voisins de ceux des
autres espèces.
D. 9/14 ; A. 3/12.
Nous eu avons de sept pouces de long. Le
nom des péclieuis de Sandwich, est selon
M. Quoy, irou.
J'ai dit comment ce poisson n'est pas le chei-
lion doré de Lacépède et de Commerson ;
mais je dois faire remarquer que sur la plan-
che citée le dessinateur a couvert d'écaillés
l'opercule, comme celui de nos labres, tandis
qu'il n'y en a que le long du bord par lequel
il touche au sous-opercule.
Je retrouve aussi cette espèce dans un bel
individu long d'un pied, que MM. Eydoux
et Souleget viennent de rapporter du même
archipel; il est jaune orangé, avec une suite
de gros points noirs bien marqués le long de
la ligne latérale.
Le Cheilion vert.
{Cheilio viridis , nob.)
Les mers de l'archipel de Vanikoro ont
fourni aux mêmes naturalistes une nouvelle
CHAP. IX. CHEILIONS. 555
espèce de cheilion, facile à reconnaître à la
forme des dents :
celles , qui dans les autres espèces sont saillantes et en
crochets à l'extrémité du museau, sont dans celle-ci
à peine visibles à la mâchoire supérieure, quoiqu'elles
soient encore distinctes des autres dents à l'inférieure.
Les dents latérales sont plus égales, proportionnelle-
ment plus grosses à la mâchoire supérieure, plus
petites et plus égales à l'inférieure. Il y a peu d'écaillés
le long de l'opercule. La bandelette latérale est assez
foncée, surtout vers la queue. La ligne latérale est
rameuse.
D. 9/13; A. 3/12, etc.
M. Quoy nous apprend , par le dessin fait sur le pois-
son sortant de l'eau, que le dos est vert-pré brillant,
le ventre vert jaunâtre tacheté de bleu, le dessus de
la tête de la couleur du dos; les joues ont des teintes
rougeâtres, des rayures bleues, dont une est tracée
de l'angle du museau au milieu du bord du préoper-
cule. La dorsale est grise, avec deux rangées de taches
brunes; l'anale est plus jaunâtre; la caudale est ver-
dâtre : les nageoires paires sont transparentes.
Ce poisson n'est pas rare à Vanikoro. Les
voyageurs en ont vu d'un pied et demi de
long. Les indigènes l'ont nommé fénéou.
Le Cheilion petite bouche.
{Cheilio micros toma , nob.)
Je trouve encore parmi les poissons du Mu-
séum un petit cheilion dont j'ignore la patrie:
i3. 23
554 LIVRE XVI. LABROÏDES.
il vient probablement de l'Inde, car il faisait
partie de la collection du stadhouder de
Hollande.
La forme générale est celle de nos cheilions; mais
la bouche est sensiblement moins fendue; roell est
plus grand; la couleur est uniforme et sans aucune
tache, même le long de la Hgne latérale; la caudale
et les ventrales sont d'un orangé assez vif sur les
rayons.
Ce petit poisson n'a pas tout-à-fait quatre
pouces.
Le Cheilion rayé.
{Cheilio lineatuSj nob.)
Ce n'est qu'avec doute que je place ici ce
joli poisson, dont nous devons la connaissance
à un officier de l'expédition de l'Astrolabe,
M. Gressien, qui en a donne le dessin à
M. Quoy. Ce naturaliste l'a publié dans la
Zoologie de l'Astrolabe, tome III, page 719,
et planche 19, figure 2, de l'atlas des poissons;
mais sous le nom impropre de malacanthe
rayé.
Il a le dos bleu ; le ventre jaune doré , rayé
longitudinalement dé tà-aits roussâtres. La tête est
bleue, passant au verdâtre sur le museau, et rayée
comme le corps. La base de la dorsale est jaune,
puis elle a une raie bleue tachetée de gros points
noirs carrés; celte bandelette est surmontée d'une
CHAP. IX. CHEILIONS. 355
série de taches rouge de brique, carrées; et enfin sur
un fond jaune passant au brun sur le devant, et à
l'orangé sur l'arrière , on voit six à sept lignes brunes,
longitudinales et étroites. Le premier rayon de la
dorsale est prolongé en filet. L'anale est courte,
jaune, avec trois traits rouges ou orangés, parallèles à
la base de la nageoire. M. Quoy les dit bleus, mais la
planche les représente comme je l'indique ici. La
caudale est lancéolée et de couleur bleue, bordée de
jaune orangé. Les pectorales et les ventrales sont
jaunes.
Il est évident que ce poisson, originaire du
port du roi George, est un des plus élégam-
ment colorés qu'on puisse voir, et il me paraît
encore inconnu des naturalistes; mais il est
facile de juger que le dessinateur n'était pas
zoologiste , et que les caractères de l'espèce ont
été mal rendus. Il est possible que ce soit une
girelle ordinaire : ce ne peut toutefois être un
malacanthe, comme l'a cru M. Quoy.
DU MALAPTÈRE,
et en particulier du Malaptère réticulé.
{Malapterus reticulatus , nob.)
Je place à la suite des malacanthes et des
cheilions, un genre qui tient de ces deux par
des caractères communs, qui l'empêchent de
55G LIVRE XVI. LABROÏDES.
rentrer soit dans l'un soit dans l'autre. Je n'en
ai vu qu'un seul exemplaire sans ses viscères,
et sur lequel je n'ai eu aucuns renseignemens.
Le corps est alongé, comprimé; sa hauteur, qui
est égale à la longueur de la tête sans le lobule
membraneux de l'opercule, est du cinquième de la
longueur totale. La bouche est petite , à dents mi-
toyennes plus longues; les autres, coniques, sur un
seul rang, sans élargissement des intermaxillaires.
Le préopercule est couvert d'écaillés ; l'opercule en
a sur son bord comme celui des cheilions : les autres
pièces n'en ont pas.
La dorsale a tous ses rayons mous et flexibles :
il y a des appendices membraneux à la pointe de
chaque rayon. Le sous-orbitaire est étroit; le bord
membraneux de l'opercule est très -prolongé, jus-
qu'au-delà de l'aisselle de la pectorale; la dorsale
commence au-delà de l'insertion de cette nageoire;
le tronçon de queue, derrière elle, est court; la
caudale est coupée carrément avec ses angles arron-
dis; les ventrales sont petites : leur épine est faible.
D. 18/14 ; A. 3/18; C. 16; P. 12; V. 1/5.
Les écailles sont lisses et molles : il y en a trente-
sept rangées entre l'ouïe et la nageoire de la queue ;
il y en a trois au-dessus et onze au-dessous de la
ligne latérale , qui n'est pas interrompue.
La couleur est brune sur tout le corps , avec un
réseau noir, dont la maille entoure chaque écaille.
Les nageoires sont verdâtres, bordées de noir.
Ce poisson n'a pas six pouces de long. Il
CHAP. IX. MALAPTÈRE. 357
vient des iles Juan-Fernandez, et il a été
donné au Cabinet du Roi par M. Gay.
On voit qu'il a les rayons flexibles des chei-
lions, sans en avoir les dents, qui ressemblent
à celles des labres. Il a, comme eux et les
malacanthes , les opercules e'cailleux, mais il
manque de l'épine operculaire de ceux-ci. La
mollesse de ses rayons et les écailles de l'oper-
cule empêchent d'en faire un tautogue. Enfin,
il ne peut être placé parmi les girelles.
558 LIVRE XVI. LABROÏDES.
CHAPITRE X.
Des Girelles.
Nous voici arrives à un des genres les plus
nombreux en espèces de la famille des labres,
et qui contient les poissons parés des cou-
leurs les plus variées et les plus brillantes, je
crois, entre tous les liabitans des eaux. Celles
de nos mers ne le cèdent nullement par
leur éclat aux espèces des régions inter-
tropicales. Toutefois ces animaux sont carac-
téristiques des pays chauds : c'est tout au plus
si une seule s'avance vers le Nord, jusque
sur les côtes d'Angleterre ou de France; déjà
dans la Méditerranée nous en comptons trois
ou quatre, et nous les voyons même sortir de
ce bassin de l'Europe méridionale, et s'avancer
dans l'Atlantique jusqu'aux Canaries, où elles
vivent avec d'autres qui commencent cette
nombreuse série de girelles des mers chaudes
du globe.
Je réunis avec M. Cuvier, sous le nom de
^irelle, tous les labroïdes à ligne latérale non
interrompue ; à dorsale munie de rayons épi-
neux roides et piquans; dont la tête entière,
c'est-à-dire, le sous-orbitaire , le préopercule
et les autres pièces operculaires , le dessus de
CHAP. X. GIRELLES. 359
la le te et les mâchoires, sont dépourvus d'é-
cailles. Leurs dents sont coniques , plus fortes
en avant; et derrière cette rangée externe il
y en a de tuberculeuses ou de grenues en
nombre variable, qui dans quelques espèces
se succèdent avec l'âge , augmentent la largeur
de la surface émaillée des deux mâchoires,
et nous conduisent lentement à ce que nous
observerons dans les scares , et dont nous avons
déjà eu un premier vestige dans les cheilions.
Les pharyngiens de toutes les girelles sont
conformés comme ceux des labres proprement
dits.
Certaines espèces ont dans l'angle de la
bouche une dent dirigée en avant; mais ce
caractère spécifique est tout aussi variable
dans ce genre que dans tous ceux des autres
labroïdes dont nous avons déjà parlé. Cette
observation nous a conduits à supprimer le
genre halichores, que M. Ruppel a récem-
ment publié dans ses Nouvelles recherches sur
les animaux vertébrés de la Faune africaine,
et que nous avons déjà signalé, dans notre
article du tautoga sexfasciata, qu'il confon-
dait avec ces girelles à défenses.
Ceux de nos lecteurs habitués aux recher-
ches ichthyologiques, savent déjà que M. Cu-
vier a démontré, dès sa première édition du
300 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Règne animal, que le genre holo^jninose ,
établi par Lacépède, doit rentrer dans celui
dont nous nous occupons; car il n'est qu'un
double emploi du labre cerclé, également
décrit sur les dessins ou les manuscrits de
Commerson, lequel poisson est une de nos
girelles. Il faut aussi y réunir, comme l'a déjà
fait M. Cuvier, le genre coris de Lacépède,
fondé de même sur les matériaux de Com-
merson, quoique la crête élevée de ce poisson
lui donne un aspect un peu différent des au-
tres girelles , et qu'il semble nous conduire
vers les xyriclithys.
Ces poissons sont littoraux, vivent parmi les
roches madréporiques, où ils trouvent en abon-
dance des mollusques, des oursins et autres
animaux à test dur, qu'ils brisent facilement
avec les dents fortes et coniques, soit des
mâchoires, soit des pharyngiens.
Le nom de julis, sous lequel M. Cuvier
décrit ce genre , est l'épithète d'un des labres
de Linné, qui l'avait tiré d'Artedi pour l'ap-
plique!' à l'espèce du Systema naturœ, qui
comprenait alors les différentes variétés de
nos mers. Il y a peu de probabilité , pour ne
pas dire davantage, que le poisson désigné
chez les Grecs sous le nom de iovKis, fût un
de nos labres. Du moins rien de ce que les
CHAP. X. GIRELLES. 36i
auteurs en disent ne justifie cette conjecture.
On trouve dans Aristote (I. IX, c. 2) une
seule fois le nom de iovKièsç, cite comme un
des poissons qui vont en troupe avec les thons
et les autres saxatiles. Athënëe rapporte (1. VII,
c. i5, p. 3o4) que Dorion recommande dans
son Traité des poissons, de faire bouillir les
îovKi^sç dans de la saumure, et il lui donne,
selon Numenius, l'épithète de vorace.
Il n'y a dans ces traits, ni dans ce qu'en
rapportent les autres auteurs, rien qui puisse
faire connaître ce que les anciens entendaient
sous ce nom, ainsi que je l'ai déjà remarqué
pour les labres.
La GiRELLE COMMUNE.
(Jiiiis 'Viilgaris, nob.)
Il paraîtrait que du temps de Rondelet la
girelle était plus rare sur les côtes de Pro-
vence que de nos jours, car il dit qu'elle y est
à peine connue j aussi la figure que nous trou-
vons dans son ouvrage (1. VI, c. 7, p. 180)
est-elle mauvaise, mal caractérisée et difficile
à appliquer à l'une ou l'autre de nos variétés.
Il n'en est pas de même de celle de Salviani* :
1. Salviani;, De aquat., p. 219, fol. 85.
362 LIVRE XVI. LABROÏDES.
elle représente certainement notre première
espèce, bien caractérisée par sa tache noire.
C'est encore elle que donne Aldrovande (l. L^"^,
chap. 7, p. 39), quoique sa figure soit plus
grossière que celle de l'auteur romain.
Willughby* l'a vue aussi à Gênes, et c'est
d'après ces renseignemens que ce poisson ,
originaire de la Méditerranée, a pris place
dans Artedi; cependant Linné l'a fait venir
d'Amérique , dans le prodrome du tome second
du prince Adolphe , et je crois qu'il a confondu
quelque espèce étrangère, peut-être notre X
psittaculus, avec lui; car il parle d'une ligne
rouge sur la dorsale , que je ne trouve pas dans
notre poisson d'Europe.
Bloch (pi. 287, fig. 1) en a donné une figure
d'une enluminure peu exacte, et qui a été faite
d'après une de ces nombreuses variétés que
nous conservons dans l'eau-de-vie.
La girelle est un poisson très-commun dans
la Méditerranée , et dont on trouve un grand
nombre de variétés, que quelques zoologistes
ont essayé de séparer en espèces. Elles font
l'ornement des marchés des ports de cette
mer, car leurs couleurs, très - variées , ne le
cèdent en rien, par leur éclat et leur beauté,
1. Willughbj, De fisc. , p. 524>
CHAP. X. GIRELLES. 363
aux poissons les plus brillants que les mers des
tropiques nous envoient.
Nous allons commencer par décrire la va-
riété à tache noire et à bandelette orangée , à
bords dentelés, parce que nous croyons qu'elle
a été le type du lahrus julis d'Artedi.
Le corps de la girelle est alongé; sa plus grande
hauteur est vers la sixième épine de la dorsale, et
elle n'est que du cinquième de la longueur totale.
La ligne du dos et celle du ventre convergent l'une
vers l'autre, de sorte que la hauteur de la queue a
les deux cinquièmes de celle du tronc, dont l'é-
paisseur est comprise deux fois et demie dans la
hauteur. Les lignes dorsale et ventrale du profil
se courbent et se rapprochent assez promptement
vers le bout du museau, qui est cependant encore
très-pointu.
La tète n'est pas contenue tout-à-fait quatre fois
dans la longueur totale. L'œil est de grandeur mé-
diocre, arrondi et éloigné du bout du museau du
tiers de la longueur de la tête. L'intervalle entre les
yeux est bombé, arrondi et égal au diamètre de l'œil.
Le sous-orbitaire est peu visible sous la peau épaisse
qui le recouvre. Le bord du préopercule descend
verticalement; l'angle qu'il fait avec le bord horizontal
est arrondi. Le bord membraneux de l'opercule se
prolonge en une languette libre , charnue et arrondie ,
semblable à celle que nous avons déjà vue sur les
pomotis. L'interopercule est mince et large, et touche
celui du côté opposé sous l'isthme de la gorge, de
>64 LIVRE XVI. LABROÏDES.
façon que la membrane branchiostège est entièrement
invisible, si on n'écarte pas les ouïes,
La bouche est peu fendue et très-peu protractile.
Le maxillaire est petit et tout- à -fait caché sous
le bord du sous-orbitaire. L'intermaxillaire est mince
et n'a que des branches montantes médiocres. Les
dents sont simples et coniques sur le rang externe 5
les quatre antérieures sont alongées et courbées , et
comme de vraies canines; les autres, plus courtes,
ont l'air d'entailler le bord de l'os, comme le feraient
les dents d'une scie. A l'extrémité de la mâchoire, dans
l'angle de la bouche, il y a une dent alongée, comme
une petite défense, semblable à ce que nous avons
vu dans plusieurs de nos labres étrangers. Sauf cette
dernière dent, celles de la mâchoire inférieure sont
semblables à celles de la supérieure. Les deux mâ-
choires portent derrière cette rangée quelques dents
rondes et grenues. Les ouïes sont peu fendues, parce
que la membrane branchiostège est réunie à celle
du côté opposé, sous toute l'étendue de l'isthme
de la gorge. Les rayons branchiostèges sont au nom-
bre de six. Les peignes des branchies sont médiocres,
et les râtelures antérieures fort courtes. Des groupes
de villosités épaisses et nombreuses garnissent en
haut et en bas l'entrée du pharynx. Au milieu de
ces villosités on voit, comme dans les labres pro-
prement dits, les deux plaques supérieures des dents
pharyngiennes obtuses, et la plaque triangulaire in-
férieure. Celle-ci porte en arrière une dent globu-
leuse, beaucoup plus grosse que les autres.
La dorsale commence à la fin du premier quarl
CHAP. X. GIRELLES. 365
de la longueur totale, et son étendue sur le dos
égale la moitié de celle du corps. Ses rayons sont
grêles et flexibles ; le premier rayon épineux est plus
haut que le second , celui-ci l'est plus que le troisième ,
lequel dépasse un peu les six qui suivent. A la suite
de ces neuf rayons épineux on en compte douze
branchus.
L'anale commence sous le premier rayon mou
de la dorsale; ses trois épines sont faibles. Les douze
rayons mous composent une nageoire qui s'étend
sous la queue, ainsi que la dorsale le fait en dessus.
La caudale est coupée carrément ; les pectorales et
les ventrales sont médiocres.
B. 6; D. 9/12; A. 3/12; C. 14; P. 13; V. 1/5.
Les écailles sont petites : on en compte près de
quatre- vingts entre l'ouie et la caudale; elles sont très-
minces et paraissent lisses. A la loupe on aperçoit
de fines granulations et quelquefois des stries diver-
gentes et longitudinales. Vue isolément, une d'elles
paraît oblongue;sa portion radicale est plus que deux
fois plus grande que la partie nue. L'éventail se com-
pose de quinze à seize stries , qui rayonnent d'un point
qui n'est pas placé au milieu de l'écaillé. La ligne laté-
rale part de fangle supérieur du surscapulaire, re-
monte jusque sous le troisième rayon de la dorsale,
et, après avoir fait une légère courbure, elle suit
une ligne droite, parallèle au dos, tracée par le
septième de la hauteur du corps. Arrivée sous le
dixième rayon mou de la nageoire, elle s'infléchit
brusquement, descend, sans s'interrompre, jusque
sur le milieu de la hauteur de la queue, qu'elle tra-
366 LIVRE XVI. LABROÏDES.
verse ensuite en ligne droite, et sur laquUe elle s'ef-
face un peu avant de toucher à la caudale. Elle se
compose d'une série de petits tubes relevés en saillie
sur les écailles que cette ligne parcourt. L'extrémité
de chaque tube est ouverte, et montre ainsi l'orifice
d'un petit pore.
Nous avons des girelles très -fraîches, pêchées à
Toulon, et qui paraissent encore avoir très-bien con-
servé leurs couleurs. Le sommet de la tête et le dos
est d'un beau brun mêlé de bleu et de rougeâtre; au-
dessous de cette teinte brille une large bandelette
à bords dentelés d'un beau rouge orangé : elle naît
sur l'opercule et s'évanouit sur la queue. Au-dessous
de la raie, et à partir de l'épaule, jusque sous les
premiers rayons mous de la dorsale, le milieu des
côtés est coloré par une bande bleu foncé, presque
noire, qui forme une grande tache oblongue sur les
côtés du corps du poisson. Cette tache se prolonge,
jusqu'auprès de la queue, en une bande colorée de
bleu d'outremer, plus ou moins rembrunie par le
brun doré qui s'y trouve mêlé. Le dessous du corps
est blanc d'argent. Une raie bleu d'outremer le plus
vif naît de l'angle de la bouche, traverse la joue,
se marque à l'angle de la pectorale, et se prolonge,
en diminuant de ton, le long du bord inférieur de
la tache bleu foncé des côtés.
L'angle supérieur du bord membraneux de l'oper-
cule porte une petite tache bleu foncé. Le haut des
joues est mordoré ; les lèvres sont mélangées de
jaune, de rouge, et bordées de violet.
La dorsale est olivâtre mêlé de rouge et lisérée de
CHAP. X. GIRELLES. 567
bleu clair. Une grande tache bleu foncé colore le
milieu de la membrane qui réunit les trois premiers
rayons. Une bandelette rouge plus ou moins orangé,
suit la base de la nageoire un peu au-dessous du dos.
L'anale a le pied de ses rayons coloré en violet. Au-
dessus de cette bande on voit une raie orangée, teinte
d'olivâtre j puis il y a une bande lilas, qui est suivie
d'une autre, plus large, d'un bel orangé, laquelle est
bordée de violet. La caudale est olivâtre.
Les pectorales et les ventrales ont quelques teintes
rougeâtres.
Ces couleurs diffèrent peu de celles qui sont
indiquées par les observateurs qui ont vu des
girelles sortant de l'eau.
Suivant M. Risso et M. Laurillard,
le dos est vert mêlé de bleuâtre; la bande latérale
est rouge orangé, la tache des côtés bleu noirâtre;
le ventre est argenté, glacé d'outremer; la tache de
la dorsale est bleue , bordée de rouge de minium
très-vif; le reste de la nageoire a la moitié inférieure
verdâtre, la supérieure rougeâtre, bordée de bleu
pâle. L'anale offre quatre bandes ainsi colorées : celle
qui est près du corps, est orangé pâle ; celle qui lui
est inférieure, rose violet; la troisième, qui est la
plus large, est orange; et la quatrième forme un li-
séré bleuâtre à la nageoire. La caudale a ses deux
bords bleuâtres. Au-dessous et au-dessus de ces lignes
en sont deux autres, rousses pâles : le milieu seul
de la nageoire est verdâtre.
M. Risso mentionne une variété que les
368 LIVRE XVI. LABROÏDES.
chaleurs de 1 été font paraître sur les côtes de
Nice,
et qui a le dos vert foncé, l'abdomen argenté, et
les nageoires rouges.
Nous en avons une autre variété parmi celles
que M. Bibron a rapportées de Messine.
La bandelette dentelée est du plus beau jaune
doré; le ventre est rougeâtre, à reflets jaunes ou
dorés, et les nageoires sont rouges.
Cette variété s'est reproduite avec des nuan-
ces plus pâles sur celles qui nous sont venues
de Négrepont, et que nous devons à M. Virlet.
Toutes ces variétés ont constamment la
tache latérale noire alongée. Cette tache s'ef-
face chez quelques individus, de manière à
établir des passages insensibles entre ce que
M. Risso a établi comme la girelle ordinaire
et les individus qu'il a voulu grouper en une
espèce particulière, dont nous donnerons la
description.
Outre ces individus, qui nous sont venus
de Toulon par M. le duc de Rivoli et par
M. Kiener, nous en avons eu de Nice, par
M. Laurillard; de Naples, par M. Savignyj de
Messine, par M. Bibron; d'Iviça, par M. de
Laroche; de Malaga, par M. Bâillon; de Na-
poli de Romanie, par M. Reynaud; et des
CHAP. X. GIRELLES. o69
cîifteiens points de la Môrée, par MM. Bory
de Saint-Vincent et Virlet.
Son anatomie diffère peu de celle de nos
labres.
Elle a le foie peut, le canal intestinal médiocre,
une vessie aérienne assez grande , le péritoine mince,
peu brillant.
Les vertèbres abdominales sont au nombre de
douze, et les caudales de dix-neuf.
Ses noms vulgaires sur les côtes de la Mé-
diterranée sont donzellina ou zi^urellay à Ve-
nise donzella^ à Marseille dovella, à Livourne
zigorella, à Candie afdella^ à Naples et à
Borne manchina di re, dans File de Rhodes
zillo. Selon M. Virlet, les Grecs modernes lui
donneraient le nom de /gAo, ce qui semble-
rait justifier le rapprochement que les auteurs
de la renaissance ont fait de la dénomination
des anciens à ce poisson. Selon M. Risso, elles
se nomment à Nice ^irella. Leur chair est
blanche, de bon goût et facile à digérer. Ces
beaux poissons fréquentent les bords couverts
d'algues marines sur les rochers.
Si l'on s'en rapportait à MM. Donovan et
Yarell, il paraîtrait que la girellese trouve sur
nos côtes; mais l'on va voir que leur figure
représente une espèce différente.
Une autre variété nous a été apportée de
i3. 24
570 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Naples par M. Savigny. Je ne lui trouve d'au-
tres difTérences de formes que dans la briè-
veté des premiers rayons de la dorsale : ils ne
dépassent pas les autres. Quant aux couleurs,
elles sont peu autrement distribuées.
La moitié supérieure du corps est brun foncé; ce
brun se termine par une ligne droite, tirée par le
bord inférieur de l'orbite jusque sous le milieu de
la queue; le reste du corps est blanc argenté. Une
bandelette peu distincte et orangée sépare le brim
du dos en deux parties égales. Il n'y a plus de trace
de trait bleu d'outremer et de tache bleu noirâtre
sur les côtés.
La dorsale a du noirâtre sur sa partie antérieure;
/ elle est grise dans sa plus grande partie, bordée de
jaune et lisérée de violet. L'anale paraît avoir été
rougeâtre et de même lisérée de violet.
Nous en avons un individu qui est long de
sept pouces.
Cette variété a été aussi observée à Nice
par M. Laurillard. L'individu qu'il nous a pro-
curé est entièrement décoloré.
Je crois qu'il faut encore rapprocher de cette
dernière variété un poisson rapporté de Lan-
cerote par MM. Webb et Berthellot.
Il a les couleurs distribuées de même; mais les
trois premiers rayons dépassent beaucoup les autres.
L'épaule et le bas de l'opercule sont colorés en rouge
carmin vif. La dorsale et l'anale sont jaunâtres, sauf la
CHAP. X. GIRELLES. 37i
teinte noirâtre de la membrane des rayons antérieurs.
La caudale a une grande tache noire, le bord est
jaunâtre, ainsi que les ventrales.
L'individu a huit pouces de longueur.
■ Je vois que Pallas ne parle pas de la girelle
dans son Fauna rossica.
La Girelle Giofredi.
{Julis Giofredi, Riss.)
•
Après ces variétés je crois pouvoir distinguer
une seconde espèce, qui ne le cède en rien,
pour la beauté des couleurs, à la précédente.
Elle offre plusieurs variétés, et elle paraît tout
aussi commune dans la Méditerranée.
' Quoique les formes soient très-semblables à celles
du Ju/is vulgaris, la girelle Giofredi paraît avoir
le corps un peu j)lus arrondi, la dorsale plus basse:
ses premiers rayons épineux ne dépassent pas les
suivants ; ils sont aussi plus roides. Les nombres sont
les mêmes :
D. 9/12 î A. 3/12, etc.
Conservée dans l'eau-de-vie, elle paraît brune sur
la moitié supérieure, blanchâtre sur la moitié infé-
rieure du corps ; une tache bleue existe à l'angle de
l'opercule, et toutes les nageoires sont pâles. Mais
M. Laurillard l'a peinte à Nice; et ses couleurs, au
sortir de l'eau , sont distribuées en une teinte uniforme
et d'un beau rouge de vermillon sur le dos, et par
572 LIVRE XVI. LABROÏDES.
quatre bandes longitudinales : une première, brun
olivâtre, commence au bout du museau, est inter-
rompue par l'œil et par la tache bleue de l'opercule;
elle s'évanouit sous la fin de la dorsale. Une seconde
bande commence en bleu pâle sur les lèvres, tra-
verse la joue, et prend sur l'épaule une teinte vio-
lette qu'elle conserve jusqu'à la caudale. Au-dessous
est une bande jaune, aussi longue, aussi large que
la précédente, et enfin une quatrième, blanche,
teinte de bleuâtre, colore le ventre. La dorsale n'a
point de tache, et est jaunâtre, lisérée de bleu. L'a-
nale a la même bordure, mais sa base est plus rou-
geâtre; les pectorales sont rosées, les ventrales bleuâ-
tres, et la caudale vert olivâtre.
M. Hisso donne à peu près les mêmes cou-
leurs à son Giofiedi. Le clos est, dit-il,
d'un beau rouge de corail, dégradé en jaune doré
sur les côtés, et passant à l'argenté sous le ventre-
La dorsale est rouge , les ventrales bleuâtres, les
pectorales jaune pâle, la caudale rouge mêlé de
jaune et de vert.
Nous avons des individus qui ont sept
pouces de long. Il nous en est venu de Nice,
de Toulon et de Messine.
Parmi les individus de Toulon, nous en
avons trouvé qui ont
la moitié supérieure du corps d'un très -beau brun
rougeâtre passant au violet, et jaunâtre devenant
blanc argenté sur le ventre, avec huit ou dix pe-
CHAP. X. GIRELLES, 375
tiles lignes formées d'une série de poinls rouges; les
nageoires dorsale, anale et caudale, sont d'un beau
rouge carmin; les pectorales sont violettes, et les
ventrales ont du jaunâtre.
Quand le violet du milieu des côtés est
glacé d'argent, ce qui arrive très -souvent,
cette variété devient la première mentionnée
par M. Risso. Les individus chez lesquels le
jaune domine sur les cotés , et qui ont la cau-
dale bordée de bleu, se rangent dans la se-
conde variété de cet auteur.
Nous en avons reçu de Toulon, de Napîes,
de Messine, de Morée et de Malaga.
M. Laurillard nous en a rapporté deux au-
tres variétés, plus éloignées que la précédente
de ce que nous donnons pour type du julis
GiofredL
La première a les couleurs distribuées en cinq
bandes longitudinales. La supérieure , sur le haut du
dos, est un brun verdâtre mêlé de rougeâtre, surtout
vers la tête; la seconde, tracée au-dessus de la ligne
latérale, en partant de l'œil, est d'un vert glauque. La
troisième, d'un brun violâtre, s'étend à\i bout du
museau à l'origine de la queue. La quatrième, aussi
longue que la troisième, est blanc lavé de verdâire.
La cinquième colore le ventre en jaune orangé. La
dorsale a la base jaune, le milieu rouge et le bord
blanc; l'anale est rouge, lisérée de blanc; la caudale
est mêlée de iaune, de rouge ei de vert»
374 LIVRE XVI. LABROÏDES.
L'individu est long de trois pouces.
La seconde variété a le manteau vert, marbré de
grandes plaques brunâtres ; la dorsale a du vert à
la base, et le reste rouge liséré de bleu : l'anale porte
trois bandes; une supérieure, jaune verdâtre; une
moyenne d'un brun rougeâtre, et le bord bleu clair.
Je ne vois pas que les auteurs aient, avant
M. Risso, distingué cette espèce.
La GiRELLE COQUETTE.
( Julis Jestiva j nob. )
On a pu remarquer que toutes ces variétés,
dont nous avons vu plus de trente individus,
ont la membrane qui unit les rayons antérieurs
de la dorsale rembrunie , et souvent même
assez foncée; mais elles n'ont jamais de tache
isolée sur celte nageoire. Nous croyons devoir
distinguer, comme espèce, la girelle dont M.
Garnot nous a envoyé la peiiiture faite sur le
vivant; comparée à la précédente, elle se re-
connaît
parce qu'elle a une tache bleue triangulaire entre le
second et le troisième rayon de la dorsale; et elle
se rapproche cependant du Giofredi , parce que les
rayons de sa dorsale sont égaux, et qu'elle manque
de tache sur les flancs. Elle lui ressemble encore par
la couleur rouge du dos, par la tache bleue de la
pectorale et de l'opercule; mais elle paraît en dif-
férer, par son ventre d'un beau rose vif; par une
CHAP. X. GIRELLES. 375
première bandelette, composée de petites lunules
bleu noirâtre, étendue depuis l'angle de l'opercule
jusque sur la queue, et par une seconde bande jaune»
semée de points rouges, qui prend naissance dans
l'aisselle de la pectorale, et qui va jusque sur la
queue. Toutes les nageoires sont rouges : la caudale
seule est bordée d'orange. L'iris est rougeâtre; il y a
quelques nuances bleues sous la gorge et sur le limbe
du préopercule.
Cette girelle a été prise à Brest, sur la fin
de Mai 1826. Elle est confondue par les pê-
cheurs avec le labre varié, sous le nom de
coquette.
L'individu a près de neuf pouces de lon-
gueur.
C'est bien évidemment à cette espèce qu'il
faut rapporter le lahrus julis de Donovan',
qui est , je pense , reproduit par lui dans
M. Yarell, et qui se trouve aussi cité, d'après
le même document, dans Fleming et dans
Jenyns. Il venait des côtes de Cornouailles.
La Girelle élégante.
{Julis speciosa^ Risse.)
Nous avons trouvé dans les collections faites
à Naples par M. Savigny, et à Messine par
1. Donov., Brit. fish. , t. IV. pi. 96.
à7G LIVRE XVI. LABROÏDES.
M. Bibron, des girelles de l'espèce nommée
par M. Risso julis speciosa.
Elle a les mêmes formes et les mêmes proportions
que les girelles précédentes ; mais ses couleurs
sont arrangées par bandes verticales rouges sur un
fond jaune. La dorsale a une grande tache noire
sur ses premiers rayons, qui ne dépassent pas les
suivans. La base de la nageoire paraît jaune; la partie
supérieure grise, bordée de blanc. L'anale a sur un
fond jaune une bande violette sur le milieu, et un
liséré de même couleur. Le haut de la caudale est
vert mêlé de rougeâtre, et le dessous jaune olivâtre.
Nos individus atteignent six pouces.
M. Risso regarde cette espèce comme moins
abondante que les autres girelles. Il donne
au dos un rouge -brun; des bandes jaune d'or al-
ternant avec d'autres, incarnats, sur les flancs. La
tête est ornée de lignes rouges et de bandes jaunes
sur un fond argenté; la dorsale fauve, bordée de
rose, avec une grande tache bleu indigo, entourée
d'un cercle aurore. L'anale traversée de deux bandes
jaunes; une tache bleue dans l'aisselle des pectorales j
les ventrales blanchâtres.
Elle vit parmi les coraux de la côte de
Nice, et se montre en Juin et en Juillet.
Cette espèce entre dans l'Atlantique, et on
la trouve à Madère. Nous en avons reçu des
individus pjarmi les poissons de cette île,
donnes à M. Cuvier par sir R. Brown.
CHAP. X. GIRELLES. 377
Nous en avons vu aussi un individu long
de huit pouces et demi parmi les poissons
recueillis aux Canaries par MM. Webb et
Berthellot. Il offre cependant cette particu-
larité que les trois premiers rayons de la
dorsale sont plus hauts que les suivans. Je
compte vingt bandes verticales sur les flancs.
La tache de l'opercule et de Taisselle est bien
marquée. La caudale est tout-à-fait rembrunie
vers le haut.
La GiRELLE PAON.
{Julis paçOj nob.j Lahriis pavOj, Hasselquist.)
Une belle espèce, répandue dans toute la
Méditerranée , et qui a été fort exactement
décrite par Hasselquist ^, sous le nom de lahrus
pavOy est restée pour ainsi dire ignorée des na-
turalistes jusqu'à ces derniers temps, très-pro-
bablement à cause de la confusion que Linné
a faite de cette description du voyageur en
Syrie avec ce qu'Artedi entendait rapporter
au pavo de Salviani. Il en résulte que le la-
hrus pavo de Linné doit être rayé de nos
species; mais que, pour conserver le travail
bien fait d'Hasselquist, on peut donner à notre
poisson l'épithète de pavo , ce qui servira à
1. lier Pakst, , p. 344? n.° 77.
378 LIVRE XVI. LADROÏDES.
faire oublier la confusion de M. Risso à l'c-
gard de cette même espèce.
Bloch, à la vérité, avait bien reconnu l'er-
reur commise par Hasselquist, et il changea
le nom spécifique en celui de syriacus j mais
il ne fit pas remarquer que le lahriis pavo de
Linné était devenu un être complexe à sup-
primer.
M. de Lacépède a suivi les erreurs de Linné
et d'Hasselquist , sans y rien corriger, et il a
fait la description de son labre paon d'après
la description du naturaliste danois.
Ce poisson, si brillant de couleur, n'avait été
remarqué par aucun des écrivains sur la Médi-
terranée avant Hasselquist, quoique Solander
l'avait déjà décrit et dessiné dès 1 769 à Madère j
mais sa description, comme son dessin, sont
restés ingnorés jusqu'à nos travaux.
M. Risso, dans la première édition de son
Icluhyologie de Nice, publia cette espèce,
en la confondant avec un tout autre pois-
son de la mer des Indes , le labre hébraïque
de Lacépède; espèce d'ailleurs assez mal dé-
terminée , comme on le verra plus tard. Dans
sa seconde édition, M. Risso, profitant de no-
tre travail, rectifia la fausse application de
nom de Lacépède, et changea son nom spé-
cifique en celui de ^irelle turque, parce que
CHAP. X. GIRELLES. 579
cette espèce serait, suivant lui, connue à
Nice sous le nom de girella turca.
Elle commence la série nombreuse des gi-
relles à tête grosse, à museau court et arrondi,
à pectorales tachetées de noirâtre, à caudale
fourchue. Elle tient à ces poissons des mers
équatoriales parés de vives couleurs, par le
brillant des siennes.
Le corps est arrondi de l'avant, de façon que la
hauteur aux ventrales, plus que double de celle de
la queue, fait le quart de la longueur totale. La lon-
gueur de la tête est dans les mêmes proportions,
comparée à celle du corps. La nuque est soutenue;
l'œil est petit; la peau qui couvre les joues est épaisse;
les deux dents du milieu dépassent les autres, qui
sont disposées sur un seul rang.
La dorsale commence à l'aplomb de l'angle de
l'opercule. Ses premières épines sont très-basses.
L'anale répond au troisième rayon mou de la dor-
sale, et elle ne la dépasse pas en arrière. La caudale
est courte ; les deux ou trois rayons qui la bordent
se prolongent en cornes, et la rendent échancrée.
La pectorale est arrondie; les ventrales sont petites.
B. 6;D. 8/135 A. 3/11; C. 13; P. 15; V. 1/5.
Les écailles sont minces et assez grandes : il y en a
une trentaine entre l'ouïe et lajiageoire de la queue.
Chaque écaille isolée est pentagonale, à bord mem-
braneux, entièrement et finement striée, de manière
à ce que sa portion radicale soit peu différente de
la portion libre. La ligne latérale , tracée en droite
380 LIVRE XVI. LADROÏDES.
ligne près du dos, s'incline sous la fin de la dorsale,
et reprend par le milieu de la hauteur de la queue;
elle est formée par une série de petits tubes obli-
ques, relevés sur chaque écaille.
M. Savigny, qui l'a vue fraîche à Naples, l'a peinte
d'un beau vert doré sur le corps, et rouge -brun
sur la tête. Des rivulations partent de l'œil et se
portent en avant par trois raies droites, sur le bas
de l'opercule par une seule bandelette divisée, sur
le préopercule, l'interopercule et sur la tempe, par
une ligne plus courte et moins divisée. Sur chaque
écaille un trait rougeàire vertical relève le fond uni-
forme du corps. La dorsale est verte et a une très-
large bande bleue qui la recouvre presque en entier.
L'anale est bleue à la base, verte près le bord : ces
deux raies séparées par une bandelette blanche.
La caudale, verte, a ses deux pointes lougeàtres.
La pectorale est blanchâtre ou verdâtre, avec une
lâche bleu foncé sur la pointe des rayons supé-
rieurs , et du jaune à la base. Les ventrales sont
verdàtres; elles offrent souvent derrière les pecto-
rales une bande transversale oblique d'un vert uni-
forme, parce que les écailles n'ont pas dans cette
région de traits rougeâtres et verticaux; quelquefois
il en manque un plus grand nombre d'espace en
espace, de façon qu'il y a des individus dont le
corps est traversé par quatre ou cinq bandes verti-
cales vertes. Souvent ces individus ont une grande
tache bleue sur le dos et au-dessous de la fin de la
dorsale épineuse : d'autres ont trois ou quatre de
ces taches.
CIIAP. X. GIRELLKS. 581
Les pécheurs de Naples ont assuré à M. Sa-
vigny, que les mâles prennent pendant le
temps du frai des bandes rouges plus ou moins
vives sur le bord de ces bandes vertes.
M. Risso donne à sa girelle turque des cou-
leurs peu différentes et non moins brillantes.
Le corps est, dit-il, d'un vert tendre à reflets dorés,
traversé sur les opercules par une bande bleu céleste,
bordée de rouge vif de chaque côté. La tète est
brune, ornée de raies bleu indigo, divisées en mille
. sens. Sur le devant de la dorsale il y a une tache
jaune doré, et du noir sur la pointe de la pectorale.
M. Risso se trompe quand il ne donne à
cette espèce que cinq rayons à la membrane
branchiostège , et un seul rayon épineux à
l'anale.
Nous en avons de nombreux individus
venus de Nice, de Sicile, de Morée ; M. de
Laroche a rapporté l'espèce d'Iviça, et elle
s'est trouvée aussi avec ses variétés dans la
collection des poissons de Madère, donnée
à M. Cuvier. Ces individus nous ont facilité
la détermination du lahrus lunarius de So-
lander. Il ne lui compte, comme M. Risso,
que cinq rayons branchiostèges; mais on doit
observer que le troisième et le quatrième
sont tellement rapprochés qu'il faut y faire
attention, sans quoi il est très-aisé de les pren-
582 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dre pour un seul. Le reste de la description
s'accorde parfaitement : il avait même remarqué
les variétés à dos tacheté, et la figure con-
firme encore ce que nous prouve la descrip-
tion. C'est suivant Solander le peixe vercle
des Portugais de Madère, et elle porte aussi
ce nom aux îles Canaries , ainsi que nous l'ap-
prennent MM. Webb et Berthellot. Mais nous
ne croyons pas que ce soit le lahrus lunaris
de Linné. En eflfet, le naturaliste suédois cite
Gronovius S dont la figure montre une tache
oblongue sur le milieu de la pectorale. Nous
verrons plus bas à quelle espèce nous la rap-
porterons.
La taille de nos girelles paons varie jusqu'à
six pouces.
Nous venons nous -même de donner une
belle figure de cette girelle dans l'atlas ich-
thyologique des poissons des Canaries, pour
la publication duquel M. Webb montre de
nouveau avec quelle générosité il emploie sa
fortune aux progrès des sciences naturelles.
La Girelle de Sainte-Hélène.
{JiiUs Sanctce Helence.)
L'Atlantique nourrit , près des côtes de
1. Mus. icht. , labi. VI, fig. 2.
CHAP. X. GIRELLES. 583
Sainte-Hélène, une girelle voisine de la pré-
cédente : un premier individu en a été rap-
porté au Cabinet du Roi par feu Sonnerat,
et cette même espèce y a été retrouvée par
MM. Quoy et Gaimard.
Elle a le museau plus pointu, sans avoir cepen-
dant la tête plus longue. L'occiput est beaucoup
moins relevé. Les pointes de la caudale, et surtout
celles des ventrales, sont plus longues.
B. 6j D. 8/15; A. 3/12; C. 14; P. 14; V. 1/5.
Les écailles sont plus finement striées. La ligne
latérale est un peu moins près du dos, et composée
de trois branches divergentes, partant du centre de
chaque écaille. ^
La couleur du dos est verte, et tranche nettement
avec le blanc argenté des côtés et du ventre; une
bandelette rougeàtre borde le dos le long de la base
de la dorsale; des traits verticaux, rapprochés et rous-
sâtres, pâles sur le ventre, traversent les écailles; la
pointe supérieure de la pectorale est noirâtre; la
dorsale a aussi une tache bleue noirâtre sur les trois
rayons antérieurs , le reste est coloré en violet peu
foncé; un trait fin et noirâtre la parcourt parle milieu
de la hauteur des rayons. Les couleurs de l'anale pa-
raissent être les mêmes que celles de la dorsale; la
caudale, orangée ou rougeàtre, a les longs rayons
colorés en violet • la ventrale a les mêmes couleurs.
Nous en avons un individu qui a près de
dix pouces de longueur.
584 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE DE LeSSON.
(Julis Lessonii.)
Une autre petite espèce , rapportée du
même endroit par MM. Lesson et Garnot,
a la tête plus longue que celle de la girelle de Sainte-
Hélène j elle fait le tiers de la longueur du corps,
sans y comprendre la caudale, qui est courte et
arrondie. Les écailles sont très-finement et très-fré-
quemment striées; elles s'étendent plus haut sur la
dorsale et sur l'anale. Les arbuscules de la ligne la-
térale sont plus divisés. Les nombres sont également
différents.
B. 6 ; D. 8/14 ; A. 3/12 , etc.
Quoique décoloré, l'individu montre encore qua-
tre @u cinq lignes longitudinales brunes le long de
la partie supérieure des flancs, une petite tache noi-
râtre sur le devant de la dorsale, et une ligne noi-
râtre longitudinale sur le milieu de cette nageoire,
qui paraît avoir été jaunâtre. La pointe pectorale
est brune. Trois ou quatre lignes obliques blanchâ-
tres partent de l'œil, et se dirigent sur la joue : la
postérieure atteint le dessus de l'angle de l'opercule.
Le bord des écailles, coloré autrement que le fond,
forme sur le corps un réseau étendu.
Le poisson que je décris est un mâle, dont les
laitances pleines sont divisées en un grand nombre
de petits lobules. Le foie est très - petit. La vessie
aérienne, très -mince, occupe tout le haut de l'ab-
domen.
L'individu est long de cinq pouces.
CHAP. X. GIRELLES. 585
La GiRELLE DE l'AsCENSION.
(Julis ^scensionis 3 Q. et G.)
Une autre petite espèce des côtes de l'As-
cension , voisine des précédentes, et que nous
devons aux compagnons de l'expédition com-
mandée par M. d'Urville ,
a le corps un peu plus étroit, le museau encore plus
aigu, la caudale carrée et sans pointe: les écailles
sont très-finement striées.
D. 8/14; A. 2/13; C. 14; P. 13; V. 1/5.
Sur un fond vert, le corps porte deux petits ru-
bans étroits et longitudinaux, d'une belle couleur
rouge, dont le supérieur naît sur le front, au-devant
de l'œil, passe sur l'occiput et borde le dos au pied
des rayons de la dorsalej le second part du même
endroit, est interrompu par l'œil, se prolonge sur
le milieu des côtés, et se termine à la caudale. Le
dessous du ventre est jaune. La dorsale et l'anale
sont vertes, et portent sur le milieu de la hauteur
une bande rouge, semblable à celle du corps. Une
tache noire existe, selon M. Quoy, sur le premier
rayon de la dorsale. Cette nageoire est olivâtre,
bordée d'orange; les pectorales sont rosées, sans
taches noires à la pointe supérieure, et les ventrales
sont vertes.
Cette description des couleurs est faite
d'après le dessin colorié que MM. Quoy et
Gaimard ont bien voulu nous communiquer.
i3. 25
586 LIVRE XVI. LABROÏDES.
L'individu est long de trois pouces et demi.
Il a été décrit par M. Quoy sous le nom
que nous lui conservons, tome III, page 706,
de la Relation de l'Astrolabe, et représenté
planche XX de l'atlas des poissons, figure 5.
La GiRELLE A TROIS TACHES.
{Julis trlmaculata , nob.; Labriis macrolepidoLus ,
Bl., 284, 2.)
Le poisson que Bloch a représenté (pi. 284)
sous le nom de macrolepidotiis., est une gi-
relle très-voisine de celle que nous venons
de décrire.
Sa caudale est courte et arrondie; les épines de
la dorsale paraissent plus fortes , les pointes des ven-
trales plus courtes, et celles de la pectorale plus
longues. D'ailleurs les écailles ont les mêmes stries,
et ne sont pas plus grandes que dans aucune autre
girelle; c'est ce qui nous a décidés à changer l'épi-
thète fort impropre que Bloch a donnée à cette
espèce. Il a enluminé le corps en roussatre, les na-
geoires en bleu pâle et bordées de jaunâtre, trois ta-
ches noires foncées se voient sur la membrane qui
réunit les quatre premiers rayons de la nageoire du
dos; un trait jaune remonte de l'œil au surscapu-
laire, et un autre traverse l'opercule.
Ce poisson, d'origine inconnue, a été acheté
à Amsterdam. Il n'avait pas six pouces en
longueur.
CHAP. X. GIRELLES. 387
ha GiRELLE PERRUCHE.
{Julis psittaculus y nob. ; Lahrus psittaculus , Lacép.)
Eu avançant clans l'Atlantique jusque sur
les côtes d'Amérique, nous trouvons des gi-
relles dans toutes les parties méridionales de
ce continent; mais nous ne voyons pas des
poissons de ce genre vivre sur les côtes sep-
tentrionales.
Nous commençons à parler de l'espèce que
le père Plumier a observée aux Antilles, et
dont il a rapporté une peinture coloriée.
Cette girelle a la forme générale de celle de nos
côtes; mais son museau est plus obtus. Les dents
antérieures, et surtout celles de la mâchoire infé-
rieure, sont grandes; il y a aussi un fort crochet à
l'angle de la bouche, sur le maxillaire supérieur.
L'œil est petit, et on voit sous le bord inférieur une
suite de petits pores. Il y en a d'autres au-dessus de
l'œil, et d'autres encore sur le limbe du préoper-
cule. La caudale est petite et coupée carrément.
D. 9/11; A. 3/12.
Les écailles sont grandes, bien marquées : j'en
compte vingt-quatre entre l'ouïe et la nageoire de la
queue. En examinant une d'elles Isolée, on volt que
l'éventail est composé d'un nombre considérable de
stries réunies en un point central , situé sur le milieu
de la base du triangle formé par la portion de l'écallle.
De ce même point part, en rayonnant, un nombre
?)88 LIVRE XVI. LABROÏDES.
presque aussi considérable de stries, qui couvrent la
partie nue. La ligne latérale est composée d'une série
d'arbuscules plus ou moins rameux , jusqu'à l'endroit
où elle s'infléchit, et, à partir de là, elle n'offre plus
qu'une suite de tubes.
La couleur est un brun plus ou moins rougeàtre
sur le dos, et pâle sur le ventre; deux bandelettes
parallèles, de couleur violette ou lilas, longent les
flancs; le pied de la dorsale et de l'anale est teint
de cette nuance. La bandelette supérieure naît de
l'angle de l'opercule, l'inférieure de l'angle du sous-
opercule , et passe sous la pectorale.
La tête est plus variée : une bande violette monte
. de l'œil sur l'occiput, et, en se réunissant à celle du
côté opposé, forme un chevron notable sur le dessus
de la tête. Du sommet de ce chevron descend verti-
calement un trait large, mais court, qui s'anastomose
avec un autre trait horizontal, tiré de l'œil à langle
de l'opercule. Le sous-orbitaire porte aussi un trait
tracé de l'œil vers le bout du museau. Une bride
transversale passe sous la mâchoire inférieure, et
se prolonge en une bande plus pâle, qui divise le
préopercule et s'étend même jusque sur l'opercule.
L'interopercule a aussi du violet.
L'œil est d'un beau jaune au milieu de ces nuances
lilas. La dorsale a la base violette : la moitié supérieure,
pâle ou jaunâtre, a deux ou trois traits ondulés,
plus ou moins effacés et probablement lilas. La base
de l'anale est de cette même couleur et bordée d'o-
livâtre; les ventrales et les pectorales sont jaunes;
la caudale offre trois ou quatre arcs concentriques
CHAP. X. PrlRELLES. 380
violets, et les deux angles de son bord noirs. Un
ocelle bleu foncé ou noirâtre relève la couleur de
Tangle membraneux de l'opercule.
Cette description est faite sur un individu
long d'environ six pouces , envoyé de la Marti-
nique sous le nom de patate.
Nous avons dit que le père Plumier en
avait laissé un dessin où le corps est peint
en vert, les raies en rouge; le clievron de la
tête est bordé de bleu; les nageoires ont un
fond jaunâtre ou olivâtre; la bande mitoyenne
de la dorsale est rouge; le bord de l'anale est de
la même couleur; la caudale a des zones vio-
lettes et bleues, et les angles brun noirâtre.
Plumier avait inscrit sous son dessin turdiis
mariniis variiisj viilgOy petit perroquet.
M. de Lacépède sest servi de cette figure
et de ce nom pour inscrire parmi ses labres
un labre perruche^ mais il n'a pas reconnu
lidentitë qui existe entre le dessin de Plu-
mier et la figure de Bloch de sa grande Icli-
thyologie (pi. 284? fig- i )• Ce naturaliste avait
acheté son poisson, comme il dit, dans un
encan hollandais; et quand on a acquis l'ha-
bitude de reconnaître comment Bloch pei-
gnait les poissons décolorés qui devaient servir
à son ouvrage, on ne peut douter que le
lahrus hwittatus ne soit le même que celui
390 LIVRE XVI. LABROÏDES.
décrit clans cet article : on le reconnaît à l'as-
pect général, aux pores tracés sous l'œil et
sur la joue, aux arbuscules de la ligne laté-
rale et aux deux lignes du corps; mais la cou-
leur de ces lignes, comme celle du tronc et
des nageoires, est de pure invention.
J'ai sous les yeux une variété de cette es-
pèce, remarquable par la couleur jaune uni-
forme des nageoires verticales. Elle n'offre
aucunes traces de bandes, et il n'y a point
de taches noires aux angles de la caudale.
Je l'ai achetée à Amsterdam parmi d'autres
poissons venus de Surinam.
Les deux individus déposés dans le Cabinet
du Pioi sont longs de cinq pouces.
Des observations ultérieures décideront si
cette variété doit être regardée comme une
espèce.
La GiRELLE DE GaRNOT.
{Julis Gamotiy nob.)
Une autre espèce, envoyée de la Marti-
nique par M. Garnot,
a la tête un peu plus petite et le museau un peu plus
pointu.
Celte girelle parait avoir eu la tête bleue. Trois
ou quatre traits noirâtres et fins montent oblique-
ment de l'œil sur la nuque. Le corps est bleu ou
verdâtre, avec du rouge vif le long du dos; la portion
CHAP. X. CIRELLES. 391
épineuse de la dorsale est colorée en bleu noirâtre;
la portion molle en gris, avec des taches rouges à la
base des rayons; l'anale, d'une teinte tirant sur la
lie de vin, a des taches bleu foncé entre chaque
rayon, près du corps; la caudale, arrondie, est gri-
sâtre et rayée transversalement de dix raies alterna-
tivement étroites et larges ; les pectorales sont bleuâ-
tres, et les ventrales verdâtres.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
J'en observe d'autres individus de même taille,
qui me paraissent n'être que des variétés de cette
espèce. Toutefois ils sont plus verdâtres , et ont
moins de rouge et de bleu sur les flancs. L'anale est
lisérée de bleu. Peut-être qu'en les observant sur le
frais, on les trouvera d'espèces différentes.
Nos individus ont six pouces de longueur.
La GiRELLE AUX TACHES BLEUES.
{JiiUs cjanostigma , nob.)
Le même voyageur nous a encore procuré
une autre girelle, qui nous paraît d'une espèce
distincte, à cause de la régularité de la dis-
tribution de ses couleurs.
Elle ressemble à la précédente par la forme du
corps. La tête a été nuancée de bleu ou de violet et
de rouge; elle n'a pas sur la tempe ce trait en crois-
sant que j'observe sur l'espèce nommée fatale verte
par M. Plée. Il y a le long des écailles des flancs
sept à huit rangées de taches azurées, sur le pied
392 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de la dorsale trois grandes taches noires : une sur
les premiers rayons simples, une à la fin de la na-
geoire; celle du milieu comprend les quatre premiers
rayons mous. Une raie violette existe à la base, le
long du milieu de l'anale. La caudale et la dorsale
ont quelques traces de taches violettes.
Le poisson est long de six pouces.
La GiRELLE OPALIIVE.
{JiiUs opalina y nob.)
Je trouve encore dans les collections faites
à la Martinique par M. Garnot, une giielle
voisine de toutes ces espèces ou variétés.
Sa hauteur fait le tiers de sa longueur, et l'épais-
seur est dans les mêmes proportions par rapport à
la hauteur. La ligne du profil s'élève par une ligne
presque droite et inclinée à peu près des deux tiers
d'un angle droit vers la nuque, où elle devient bombée
et saillante, et se continue ensuite dans l'arc du dos,
qui est convexe, tandis que le bord horizontal est
presque droit.
L'œil est petit et situé sur le haut de la joue; son
diamètre est du huitième de la longueur de la tète,
qui égale sa hauteur et fait le quart de la longueur
totale du corps. En avant et un peu en dessous de l'œil
sont les deux ouvertures de la narine : l'antérieure est
petite et tubuleuse, la seconde est une simple fente
transversale. On n'aperçoit rien des sous-orbitaires
sous la peau qui couvre toute la tête, tant elle est
CHAP. X. GIRELLES. 395
épaisse. On distingue peu le limbe du préopercule
du reste de l'os. Son bord vertical est festonné; l'ho-
rizontal est droit, l'angle tout-à-fait arrondi ; l'intero-
percule est très-large, et cependant ne touche pas
sous l'isthme à celui du côté opposé. Le sous-oper-
cule est distinct de l'opercule, même à travers de
l'épaisseur de la peau : il est plus étroit que l'in-
teropercule. L'opercule est arrondi; son bord mem-
braneux et son angle sont très -larges. On voit au-
dessous de l'œil neuf à dix rangées de pores très-fins,
qui rayonnent du bord de l'orbite vers la joue, les
antérieures étant plus longues que celles tracées
derrière l'œil. Il y a aussi cinq à six rangées de ces
pores sur les écailles surscapulaires et nuchales, qui
sont recouvertes, comme la tête, par une peau non
écailleuse. La portion postérieure de l'intermaxillaire
est entièrement cachée par le sous-orbitaire.
On ne voit guère sur le devant de la bouche que
la lèvre épaisse, portant en dessous cinq à six plis,
qui cachent les dents latérales, mais que dépassent
les canines mitoyennes, très-grosses dans ce poisson.
A la suite des huit dents latérales et coniques, il y a
dans l'angle une canine dirigée en avant, mais cachée
par la lèvre. Il y a en dedans deux ou trois rangées
de dents grenues. La mâchoire inférieure a quatre
grosses dents en crochets, une rangée de onze dents
coniques, et une de dents rondes interne. Lb lèvre in-
férieure est épaisse près de l'os, amincie vers son bord
libre, et couchée sur la branche. Les branches de la
mandibule sont larges et arrondies. Je vois en dedans
de la bouche des voiles membraneux étendus et
394 LIVRE XVI. LABROÏDES.
plissés, et dans le fond une langue large, tronquée
en avant, peu libre. Les pharyngiens, comme ceux
de nos labres, portent des dents en tubercules ar-
rondis en arrière et pointus sur le devant de l'os.
La dorsale est basse, la caudale coupée carrément,
la ventrale prolongée en filet. Les nombres sont :
D. 9/11; A. 3/12 j G. 15; P. 12; V. 1/5.
Les écailles sont grandes, en losanges; la portion
radicale quadrilatère, à bord droit, peu festonné,
ayant près de trente rayons à l'éventail ; la portion
nue est presque tout autant ciselée; son bord est
très-mince : j'en compte vingt-cinq entre l'ouïe et
la caudale, deux au-dessus de la ligne latérale, et
neuf au-dessous.
Cette ligne est marquée par une suite d'arbuscules,
dont les branches sont moins nombreuses et plus
resserrées à mesure qu'on approche de la queue. La
ligne n'est pas interrompue : arquée sous le dos ,
, elle est droite sur le tronçon de la queue.
La couleur est un mélange de bleu, de vert, de
jaune, d'orangé et de rouge, qui donne au poisson
une teinte opaline ou irisée. Le bleu est disposé par
lignes sous le ventre; on y distingue quatre raies bien
tranchées. La tête est bleue ou couleur de chair,
avec des rayures bleues plus foncées. La dorsale est
bleue; l'anale a deux rayures violettes sur un fond
plus foncé; la caudale, bleue, a des bandelettes vio-
lettes, tantôt verticales, tantôt longitudinales.
Ce poisson me paraît d'une espèce distincte,
à moins qu'il n'en soit de cette gircllc d'A-
CHAP. X. GIRELLES. 595
mérique comme de la nôtre, qui présente
tant de nuances différentes; mais ici les for-
mes de la tête sont assez distinctes pour qu'on
puisse trouver des caractères qui paraissent
plus certains.
L'individu que je décris est long de quinze
pouces, et haut de cinq.
La GiRELLE AUX TEMPES NOIRES.
{Julis crotaphus t nob.)
Une autre espèce, des côtes du Brésil, rap-
portée d'abord par feu Delalande , et plus
récemment par M. Gay, et que nous avons
ensuite reçue des côtes de Bahia, d'où elle
a été envoyée au Musée de Genève par M. Blan-
chet,
a le museau plus arrondi que la précédente; l'œil un
peu plus petit, et placé plus haut sur la joue. Le
sous-orbitaire est criblé de petits pores épars. La mâ-
choire inférieure offre des petites inégalités plus ou
moins marquées.
D. 9/11; A. 3/125 C. 13; P. 12; V. 1/5.
Les individus longs de sept pouces ont le premier
rayon mou de la ventrale prolongé en un filet qui
atteint à l'anus; tandis que d'autres, longs de quatre
pouces , n'ont pas encore de prolongement. La
ligne latérale a quelques ramuscules jusqu'à l'en-
5î)G LIVRE XVI. LABROÏDES.
droit OÙ elle se fléchit, et alors elle n'est plus com-
posée que de tubes relevés.
La couleur paraît avoir été verdâtre, mêlée de
bleu sur le dos, et pâlissant sous le ventre. Il y a der-
rière l'œil une tache qui dans l'alcool paraît bleu
foncé , et un trait de cette couleur occupe la base
de la pectorale. La dorsale est d'un rouge de mi-
nium; des taches de cette même couleur, mais
beaucoup plus foncée, sont à l'angle de la base de
chaque rayon, et laissent leur trace sur les individus
décolorés, par des lignes obliques et paies. La caudale
a la base de la même couleur, l'extrémité verdàlre,
et sur les deux angles, supérieur et inférieur, on
voit deux lignes obliques violettes. L'anale a la base
bleuâtre ou violette; l'autre moitié devient plus rou-
geâtre, et ces deux nuances sont séparées par un
trait violet et onduleux, dont on voit encore la trace
sur les individus décolorés. Il y a deux fins lisérés
plus effacés près du bord de la nageoire. La ventrale
a une teinte verdâtre, et les pectorales tirent plus
au violet.
Les jeunes individus ont le corps couvert de ta-
ches bleues ou noirâtres; une bandelette claire et sans
tache sur le milieu des côtés; la caudale rouge, sans
trace de tache violette vers les angles. La joue est
traversée obliquement par trois bandes onduleuses,
qui paraissent d'un blanc bleuâtre très-pâle sur nos
individus décolorés par l'alcool.
Nous avons aussi retrouvé un individu de
cette espèce parmi les poissons de la Havane,
donné par M. Poey, et dans le dessin fait sur
CHAP. X. GIRELLES. 597
le vivant, qu'il a bien voulu nous commu-
niquer, nous avons pris une idée des teintes
du poisson frais.
Le corps est vert, un peu rembruni sur le dos; la
Laclie du haut de l'opercule est verte et très-foncée; la
tête est rayée de rouge, ainsi que la bande oblique, qui
traverse le haut de l'opercule, descend sur le devant
de la pectorale et se termine sous le ventre, un peu
en arrière de l'insertion des ventrales; la dorsale est
toute rouge; la caudale est verte, et porte trois ban-
delettes rouges : la mitoyenne est dans le sens de
la longueur du corps du poisson; les deux autres,
obliques, tendent à converger au-delà du bord de la
nageoire; l'anale est bleue, et porte sur le milieu
une large bande verte.
Cette même espèce a été observée et peinte
au Brésil par Parkinson. Le dessin conservé
dans la Bibliothèque de Banks , ne porte
pas de nom, et nous n'avons pas trouvé de
description qui y fut relative parmi celles de
Solander.
La couleur du corps y est indiquée verte, variée
de bleu et de lilas; la dorsale est peinte en vert, et
tachetée et bordée de rouge; le trait vert de l'anale
est entre deux bandes violettes : d'ailleurs la tête et
la caudale sont de même rayées de rouge.
398 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE PATATE.
{Julis patatus j nob.)
Nous avons encore trouve parmi les pois-
sons de la collection de M. Plée, plusieurs
individus d'une assez grande espèce de girelle,
sans aucune autre indication que le nom sous
lequel les nègres la désignent à la Martinique :
c'est la patate verte des pécheurs.
Elle a l'œil petit : son diamètre ne fait guère que
le septième de la tête, qui est contenue quatre fois
et un tiers dans la longueur du corps.
Il n'y a que deux canines à la mâchoire supé-
rieure, suivies d'une série de petites dents coniques;
et à l'angle de la bouche il y a deux crochets sail-
lans. La mâchoire inférieure a quatre canines. A cha-
que mâchoire, derrière ces dents coniques, il v a
deux ou trois rangs de tubercules arrondis et grenus.
D. 9/11; A. 3/12; C. 13; P. 14; V. 1/5.
La caudale est coupée carrément. Le premier rayon
mou de la ventrale se prolonge en filet. Les écailles
sont grandes, minces, entièrement couvertes de
stries longitudinales : on en compte vingt-huit ran-
gées entre l'ouïe et la caudale. La ligne latérale se com-
pose d'une suite d'arbuscules à longues branches,
et qui se continue jusqu'à la nageoire de la queue.
D'après son nom vulgaire, nous devons présu-
mer que la couleur de ce poisson est verte. L'indi-
vidu desséché quia servi à cette description, est brun
CHAP. X. GIRELLES. 599
jaunâtre , et est couvert d'un réseau plus ou moins
visible, formé par l'anastomose de traits jaunâtres,
tracés sur la base de chaque écaille, et dont la con-
vexité est dirigée du côté de la tête et opposée , par
conséquent, à celle formée par la courbure du bord
libre de chaque écaille. Un petit trait arqué, violet,
tracé sur Técaille surtemporale, au-dessus de la
naissance de la ligne latérale , paraît être un carac-
tère constant de cette espèce; au-dessus de cet arc,
et près de la nuque, on voit au-dessus de la ligne laté-
rale trois séries de gros points violets prolongés sur
le dos, et, au-dessous de la ligne latérale, des vestiges
de raies longitudinales brunâtres, plus visibles sur
la queue que sur les flancs ou sur le ventre. Il y a
aussi des vestises de taches brunes ou violettes au-
dessus de l'œil et sur l'opercule. La pectorale a la
pointe et la base du premier rayon noirâtres.
Cet individu a plus de quinze pouces.
Deux autres, longs de treize pouces, ont le petit
trait de la tempe et les points violets sur le dos;
mais ils en ont encore de très-visibles sur la queue,
disposés par raies longitudinales au-dessus et au-
dessous de la ligne latérale, qui est rameuse dans
toute sa longueur. La caudale a des points vio-
lets, et son bord paraît avoir été d'une autre cou-
leur que le reste de la nageoire. Cette bordure était
probablement jaune. Les joues et l'opercule parais-
sent rivulés de petites lignes sinueuses , ou chargés
de points. La dorsale était rayée longitudinalemenl,
et une large tache noire, ou violet très-foncé, cou-
vre l'espace compris entre le dernier rayon épineux
400 LIVRE XVI. LABROÏDES.
et le quatrième rayon mou. Ces deux individus ont
les mêmes dents que le précédent, sauf qu'il n'y a
qu'un seul crochet à l'extrémité de l'intermaxillaire-
Un quatrième individu, seulement long de sept
pouces , offre toujours le croissant surtemporal ;
mais sa ligne latérale n'est plus rameuse que dans
sa partie droite : à partir de l'inflexion, elle est com-
posée de tubes en relief simple. Il offre aussi des
différences dans la disposition des couleurs; mais je
le regarde encore comme de la même espèce. Le-
dos avait cinq ou six bandes claires, formées par de
grandes taches ainsi distribuées. La nuque est brun
jaunâtre. Une première tache de même teinte occupe
l'espace compris entre les trois premières épines,
et descend jusqu'à la ligne latérale; sous la quatrième
est la seconde bande claire; sous les cinquième, sixième
et septième épines, est une autre grande tache un peu
plus foncée que la précédente; depuis la septième à
la neuvième est la troisième bande claire, plus
nettement dessinée, parce que la tache qui la suit
est presque noire : elle monte sur la nageoire, et
s'étend jusqu'au huitième rayon mou; une quatrième
tache noire occupe les quatre derniers rayons de
la dorsale; une cinquième, sur la croupe delà queue,
est située à la base des rayons supérieurs de la
caudale, et enfin une sixième et dernière est sur la
nageoire même de la queue, au-dessus et à l'extré-
mité de la ligne latérale.
Au-dessous de la ligne latérale les flancs portent
quatre ou cinq lignes brunes. Le préopercule a des
rivulalions violettes, et l'opercule des taches de même
CHAP. X. GIRELLES. 401
couleur. La pectorale a dans l'angle supérieur de
l'aisselle une petite tache noire : d'ailleurs je ne vois
pas que les autres nageoires aient été rayées ou ponc-
tuées.
Nous avons sous les yeux un dessin fait à
la Havane par M. Poey, qui représente évi-
demment cette dernière variété ; elle porte
dans ce pays le nom de doncella^ qui lui est
commun avec les autres girelles. C'est, suivant
ce naturaliste, un des plus beaux poissons de
l'île de Cuba.
Il a le dos verdàtre, tirant au jaune à cause des
reflets de cette couleur qui brille sur chaque écaille.
Le long de la base de la dorsale il y a de grandes
taches brunes, mêlées de jaune, celle du milieu
est plus foncée et bleue. Le corps offre, sur un fond
jaune, de larges bandes longitudinales bleues, agréa-
blement variées et mélangées par des reflets ou ta-
ches jaunes. La raie mitoyenne est pâle : celle qui
est sous le ventre est bleu d'azur.
Le dessus de la tête est vert et les côtés sont
jaunes, parsemés de taches ou de petits traits d'une
belle couleur bleu d'outremer. Il y a aussi des raies
de même couleur sur la queue et sur les nageoires
dorsale et anale. Les pectorales et les ventrales sont
bleuâtres.
Telles sont les variétés observées sur la na-
ture et déposées maintenant dans le Cabinet
du Roi. Elles ne nous paraissent constituer
i3. 26 •
402 LIVRE XVI. LABROÏDES.
qu'une seule espèce, qu'il est assez difficile
de déterminer d'après les difFérens auteurs
qui nous ont précédés, quoiqu'il ne serait pas
impossible qu'elle n'ait été indiquée par plu-
sieurs d'entre eux, qui en auraient vu des
variétés difficiles à retrouver dans, leurs des-
criptions et qui les auraient peut-être confon-
dues avec l'espèce suivante. M. Poey lui-même
fait observer dans la note jointe à sa figure,
que ce poisson varie beaucoup.
La GiRELLE DU Prince.
i^Julis Principis y nob.)
Nous avons aussi observé, dans les collec-
tions faites à Bahia par M. Blanchet, une assez
grande girelle, qui me paraît devoir être rap-
portée au lahriis brasiliensis àe Bloch, parce
que les dissemblances qui existent lors d'une
première comparaison, dépendent des falsifi-
cations que Bloch a fait subir à la figure du
prince Maurice de Nassau , qui lui a servi
pour faire de ce poisson un être entièrement
composé de fantaisie.
Celte girelle a le corps semblable à ceux des es-
pèces précédentes. La hauteur est comprise trois fois
et deux tiers dans la longueur totale, laquelle con-
tient quatre fois celle de la tête. La dorsale épineuse
CIIAP. X. GIRELLES. 405
est plus basse que la portion molle. La caudale est
coupée carrément.
D. 9/11; A. 3/12, etc.
La ligne latérale est rameuse; il y a vingt -cinq
rangées de grandes écailles entre l'ouïe et la cau-
dale : elles sont toutes assez fortement striées. Le
poisson semble couvert d'un réseau violet, formé
par les anastomoses des lignes qui sont à la base
de chaque écaille. Il y a trois raies violettes sur la
nuque : une ou deux vont de l'œil vers le bout du
museau par le travers du sous-orbitaire. L'opercule
est traversé par de grandes rayures violettes. La dor-
sale a un bord de celte couleur, et des lignes sem-
blables, irrégulières et interrompues sur la portion
molle : ces rivulations sont aussi, mais en plus grand
nombre , sur la caudale. L'anale a deux raies vio-
lettes et un liséré de cette même couleur. La pec-
torale a le bord et l'aisselle colorés de même.
Ce poisson est long de onze pouces.
Je crois que c'est à lui qu'il faut rapporter
ce que dit Margrave de son purliano verde. Il
donne (p. 1 46) sous ce nom la figure d'une
girelle dont les couleurs se rapportent tout-
à-fait à la description précédente.
Nous avons retrouvé dans le livre du prince
Maurice l'original de cette figure. Ce dessin
porte le nom de tetimixira que très -proba-
blement l'éditeur de Margrave a, par erreur,
écrit dans l'article qui précède et qui a rapport
404 LIVRE XVI. LABROÏDES.
à notre cossjplius bodianus^ dont nous avons
déjà parlé plus liaut. Ce cossyphe est d'une
belle couleur jaune; aussi Margrave, indiquant
son nom brésilien , aipimixira^ le donne
comme le hodiano ou le pudiano vermelho,
ou le hodian jaune des Portugais , qui , par
opposition, appellent le t etimixir a , pudiano
ver de ou le bodian vert.
Le dessin du prince Maurice n'a que trois
pouces et demi. Il en existe un autre sous
un nom qui est certainement le même, quoi-
que écrit un peu différemment , dans le livre
de Mentzel. Cette figure, longue de neuf pouces
et demi, porte pour inscription jetigmicira.
Les couleurs sont disposées de la même
manière et à peu de chose près de la même
teinte. Cette peinture n'a pas été consultée.
Celle du prince Maurice a été, de l'aveu de
Bloch lui-même, copiée dans son Ichthyo-
logie (pi. 280) 5 mais ce qu'il ne dit pas, c'est
qu'il l'a altérée tellement qu'elle ne ressemble
plus du tout à l'original. En premier lieu, la
caudale, qui est carrée, est devenue échan-
crée en croissant, avec les deux lobes pro-
longés en pointe; le dos, verdâtre tacheté
de bleu, a été coloré en orangé vif, et cha-
que écaille bordée d'un croissant bleu d'azur;
les flancs, peints en jaune verdâtre et recou-
-CHAP. X. GIRELLES. 405
verts d'un réseau bleu , ont été changes par
le peintre de Bloch en jaune vif, et les écailles
ont été lisérées de rouge; les nombres des raies
de la dorsale et de l'anale ont été altérés; la
caudale a été faite d'une seule teinte bleue,
tandis qu'elle est tachetée : les rayures de la
tête ne sont pas plus exactes; enfin, il a triplé
la grandeur du dessin.
M. Liclîtenstein , dans son savant Mémoire
sur les poissons de Margrave, que nous avons
déjà cité plusieurs fois, a fait ces mêmes re-
marques; mais nous ne croyons pas qu'il ait
eu raison de considérer le hudiano verde
comme identique du lahrus viridis, figuré
planche 282. Ce dernier est une girelle abon-
dante dans les mers de l'Inde. Nous en avons
reçu un grand nombre d'individus, et Bloch
tenait lui-même ses deux exemplaires proba-
blement de Java, quoiqu'il les fasse venir du
Japon. Son dessin, fait d'après nature, est
exact, ainsi que nous le dirons dans un des
articles suivans , en traitant de cette espèce.
Nous pensons que Bloch, qui a suivi, d'ail-
leurs, avec tant d'inexactitude pour son en-
luminure la figure du prince Maurice, a pris
pour le dessin celle de Willughby, tab. X, g.
Bloch regarde cette figure comme préférable
à celle du prince, et en cela il s'est trompé;
406 LIVRE XVI. LABROÏDES.
car il est facile de reconnaître que cette ligure
de Willughby, quoique mauvaise et à peu
près indéterminable, ne convient en aucune
façon au poisson de Margrave.
Pison rétablit le nom de tetimixira à la
figure du pudiano vercle de Margrave.
Plumier a laissé parmi ses dessins de pois-
sons de la Martinique, sous le nom de petit
perroquet, et avec cette note turdus alias
marinus varius, la représentation d'un pois-
son qui ressemble tellement à notre espèce
que nous croyons devoir l'y rapporter, bien
qu'il y ait quelques légères différences dans
la distribution et dans les nuances des cou-
leurs.
Ce dessin de Plumier nous met sur la voie
de reconnaître la figure peu exacte de Catesby
(pi. 12 ). Le poisson aura été coloré d'après
un individu dont les couleurs étaient altérées
par la mort 5 mais il est certain qu'il est de
la même espèce. Nous ne voyons pas que
Blocli, Gmelin et M. de Lacépède aient fait
usage de ces figures.
Nous ^^trouvons encore la représentation
d'une variété de ces girelles dans un ouvrage
plus récent, celui de Parra. Cet auteur donne
(p. gS, pi. 37, fig. i), sous le nom de don-
cella, la figure d'une girelle dont la tête et
CHAP. X. GIRELLES. 407
le dos sont rayés ou tachetés de bleu. Les
flancs ont du rosé, et le dessous du corps est
vert; la dorsale, l'anale et la caudale, sont
vertes, bordées de bleu; les pectorales ont
du rosé à la base : le reste est du même vert
que les autres nageoires.
Cet auteur s'accorde avec Margrave et
Pison sur la bonté de la chair de ces pois-
sons , que l'on recherche dans les difterens
points de la cote d'Amérique.
La GiRELLE PARTAGÉE.
{Julis dimidiatus , Agass. )
Nous avons aussi trouvé dans les collections
faites à Bahia par M. Blanchet, la girelle que
M. Spix avait prise sur les côtes de l'Atlantique ,
et dont il a laissé une figure dans son histoire
des poissons du Brésil, planche 53.
M. Agassis en a publié la description d'a-
près le seul exemplaire , long de six pouces
et quelques lignes, conservé dans le Musée
de Munich.
Il est d'une couleur rosé foncé sur le dos et le long
des flancs- il y a une large bande violette, étendue
depuis le bout du museau jusqu'à la caudale. La
dorsale est rosée tout le long de son bord et jusqu'à
la cinquième épine : le reste est violet. L'anale est
violette, bordée de rosé; la caudale a le lobe supé-
408 LIVRE XVI. LABROÏDES.
rieur bleu, et l'inférieur rose; la pectorale, bleue,
a du jaune à sa base; les ventrales sont roses.
Les nombres, d'après M. Agassis, sont :
D. 9/13 ; A. 3/13 ; C. 12 ; P. 12 ; V. 1/5.
Nous en avons des individus bien plus
grands : ils atteignent à un pied.
Leurs canines mitoyennes sont fortes et crochues;
les dents grenues sont sur trois rangs, derrière les
coniques du bord externe. Je vois le bleu du dos
se prolonger sur la tête en une ligne passant entre
les yeux, et se terminer à la lèvre supérieure. Une
large bande bleue, bordée de chaque côté d'un trait
plus foncé; monte de l'œil sur la nuque, et une
tache large et de même couleur, couvre l'insertion
de l'opercule. La dorsale est bleue, lisérée de rose;
mais ce liséré est partagé en deux traits par une ligne
bleue, plus foncée que la couleur de la dorsale. Le
liséré rose de l'anale est bordé de violet.
La même espèce nous a été aussi envoyée
de la Martinique par M. Garnot.
La GïRELLE DÉGRAISSEUR.
{Julis detersory nob. )
Les mers des Antilles produisent encore une
girelle, facile à reconnaître parla distribution
nette et tranchée de ses couleurs et par la forme
de sa caudale , qui est trcs-fourchue.
CHAP. X. GIRELLES. 409
Les autres parties de ce poisson sont faites sur le
plan général des gl relies. Les nombres sont :
D. 8/13; A. 3/11, etc.
La portion épineuse de la dorsale est basse et cou-
verte d'écaillés. La tête et la poitrine sont d'une belle
teinte violette, presque noire : le reste du corps est
vert brillant. La portion antérieure de la dorsale, la
pointe des pectorales et les fourches de la caudale,
sont de la même couleur que la tête ; le reste de la
dorsale et de l'anale a une teinte vert clair; l'in-
térieur du croissant de la caudale est gris.
Nous avons un individu de cette espèce,
long de sept pouces, provenant de la baie
du Port-au-Prince de Saint-Domingue, oii
M. Ricord le dit rare. D'autres , plus petits, ont
été envoyés de la Martinique par M. Plée. Ce
poisson y porte le nom de dégraisseur^ à cause
de l'adresse avec laquelle il sait manger l'ap-
pât que les nègres mettent à leurs lignes, sans
mordre à l'hameçon et se laisser prendre.
La GiRELLE LUNAIRE.
{Julis lunarîSj nob.; Lahrus lunaris j Linn.)
Après ces espèces américaines, nous allons
nous occuper de celles plus nombreuses qui
peuplent les mers de l'Inde.
Nous commencerons par une espèce de la
mer Rouge qui y a été observée par Forskal,
'ilO LIVRE XVI. LABROÏDES.
mais que Linné avait déjà inscrite dans le Sjs-
tema naturce. Elle abonde, d'ailleurs, sur toutes
les côtes des mers orientales de l'Inde. La beauté
de ses couleurs l'a fait observer et peindre par
plusieurs voyageurs, et cependant son histoire
naturelle n'a pas encore été bien présentée par
les naturalistes qui nous ont précédés.
Elle a le museau plus aigu que celui de la girelle
commune et de celles qui lui ont été déjà compa-
rées. Le corps est beaucoup moins rétréci en ar-
rière. La hauteur de la portion comprise entre la
dorsale et la caudale, surpasse la moitié de la plus
grande hauteur du corps, laquelle est du quart de
la distance prise entre le bout du museau et le mi-
lieu du croissant de la caudale. Les fourches de
cette nageoire sont longues et pointues; les ven-
trales sont petites , les pectorales médiocres et trian-
gulaires, les nageoires dorsale et anale peu élevées.
D. 8/13; A. 3/10; G. V6; P. 15; V. 1/5.
Les écailles, très -minces, ont quelques stries à
peine visibles. La ligne latérale est rameuse.
Ce poisson nous paraît convenir en tous
points au scarus gallus de Forskal.
Il lui donne un fond vert obscur pour la cou-
leur générale de la tête et du corps. Chaque écaille
est éclairée par un petit trait vertical pourpre. La
tète a de même des raies violettes, ainsi distribuées:
il y en a une impaire sur le verlex; puis, de chaque
côté de l'extrémité du museau, un trait va à l'œil;
CHAP. X. GIRELLES. A\ \
du bord postérieur de î'orblte on en voit naître quatre
ou cinq autres, dont les deux supérieurs remontent
sur le haut du crâne , et les inférieurs sont étendus
sur les opercules sans les dépasser. De l'angle de la
mâchoire inférieure partent deux nouvelles bande-
lettes 5 qui traversent l'une le bas du préopercule,
l'autre l'inleropercule, se prolongent sur la poitrine
et s'évanouissent vers l'anale. La dorsale et l'anale ont
le bord libre verdâtre, la base violette et le milieu
bleu. Les deux pointes de la caudale sont bordées
de bleu, et violettes dans le milieu : l'intérieur de
la fourche de cette nageoire est jaune. La pectorale
a une tache pourpre oblongue sur ses plus longs
rayons : le reste de la nageoire est bleu. Les ven-
trales ont les mêmes couleurs, avec le second rayon
seul pourpre.
Nous voyons par un dessin fait à Massuah,
que nous devons à M. Ehrenberg, que la des-
cription de ces couleurs est d'une grande exac-
titude. Ce voyageur a vu des individus dont
la base de l'anale est verte. Un autre dessin ,
conservé dans la belle bibliothèque de la mai-
son de la Compagnie des Indes, et qui m'a
été communique par M. le docteur Horsfield,
représente aussi cette espèce de girelle peinte
des mêmes couleurs. Il a été fait à Siam, et
envoyé de ce lieu par le docteur Finlayson;
mais des auteurs plus anciens avaient aussi
observé ce beau poisson. La figure que Rein-
412 LIVRE XVI. LABPvOÏDES.
hold Forster a publiée dans la Zoologie in-
dienne, quoique d'un dessin fort peu correct,
est peinte exactement des mêmes couleurs :
c'est son lahrus zejlonicus.^
Un autre dessin, exécuté par Parkinson,
et non publié, mais que Ton peut encore con-
sulter dans la bibliothèque de Banks, prouve
que l'espèce se trouve à Otaïti : elle y est
nommée lahrus lorius. Solander, dans ses
manuscrits, cbangea ce nom en celui de lahrus
ornatus.
MM. Kuhl et Van Hasselt ont peint à Java
une variété de cette espèce. Le fond du corps
est bleu et non pas vert 5 la tête a les lèvres
et le front bleus, ainsi que la bande supérieure,
qui va de l'angle de la bouche se perdre sur
la poitrine; l'intervalle entre les autres raies
pourpres de la tête est la seule partie verte
qu'offre ce dessin.
Déjà Seba avait donné une représentation
de cette girelle (t. III, pi. 3i, lîg. 7). Cette
figure, citée par Pennant, à l'article de son
lahrus zejlonicus, a été oubliée par Gmelin.
Celui-ci a introduit parmi ses labres l'espèce
de Forster ou de Pennant, et sans reconnaître
son identité avec le ^aïlus de Forskal, il re-
1. Pennant, Ind. zool. , tabl. XVI, p. 56.
CHAP. X. GIRELLES. 413
produisit une seconde fois cette espèce, sous
le nom de lahrus gallus, en la conservant sous
la troisième dénomination de lahrus lunaris,
d'après Gronovius. La figure^ de cet auteur est
moins correcte que celle de Seba , et serait plus
difficile à reconnaître, s'il ne disait qu'il a com-
pare son individu avec celui du cabinet de
Seba. C'est sans doute par erreur qu'il a dit
que l'anale a quatorze rayons mous : il aura
compte tous les rayons de cette nageoire, qui
en a trois épineux et onze mous. Cette figure
de Gronovius a été copiée dans l'Encyclopé-
die, mais d'une manière si inexacte qu'elle n'est
plus reconnaissable.
M. de Lacépède a suivi Bonnaterre et Gme-
lin, pour établir ses deux espèces de labre
croissant et de labre Ceilan; mais nous ne
pouvons comprendre comment il a été amené
à penser que le scarus gallus devait être mis
à côté de l'osphromène. Il en a fait la seconde
espèce de ce genre sous le nom d'osphronème
gai. Nous avons déjà fait cette remarque
en traitant de ce genre (voyez t. VII, p. 386).
Shaw^, copiant M. de Lacépède en a tirp son
tricbopode arabique.
Plus récemment M. Gray vient de publier
1. Mus. ichth., labl. VI, fig. 2.
414 LIVRE XVI. LADROÏDES.
une nouvelle figure coloriée de cette espèce,
dans les Illustrations de la Zoologie indienne
du major-général Hardwick, planche 9 de la
série des poissons. Il Ta crue nouvelle, et
il lui a donné le nom de j'iilis Hardwichii;
mais il suffit de comparer cette figure avec
nos clifFérens individus, pour s'assurer de la
vérité de notre synonymie. M.Ruppelavu aussi
le labrus lunariS) mais il n'y a rapporté qu'a-
vec doute la citation de M. Gray. Enfin, nous
avons encore notre espèce dans \ejulis porphy-
rocephalusàe Bennett, mentionné dans lesPro-
ceedijigs de la Société zoologique de Londres.
Blocli a donné, sous le nom de labinis lii-
naris (pi. 281), une girelle d'une espèce par-
ticulière , mais c[ui est bien loin d'être, comme
il le croit, identique avec le poisson de Gro-
novius. Nous verrons tout à Tlieure de quelle
espèce on doit le rapprocher.
Les individus de la collection du Muséum
n'ont que sept pouces de longueur.
Forster dit qu'il en a vu d'un pied et un
quart. Suivant lui, ce poisson est nommé à
Ceilan par les Cingalais dscliirau-niâlu, et
par les Hollandais papegaaj-viscli (poisson
perroquet), nom commun à la plupart des
labres. Le bas peuple de cette île seul le mange.
Cette assertion est bien opposée à ce qui a
CHAP. X. GIRELLES. 415
été rapporté à Foiskal, qui le donne pour un
poisson très-venimeux, et dangereux même
par le tact (^venenatissimus feront vel lei^iter
tactiim). Son nom arabe à Lohaje est dik el
bdlir ou mo^haj^red. M. Ehrenberg dit qu'on
le connaît sous le nom de liassad à Massuah,
et Solander, sous celui e pahu e paathi,
d'Otaïti.
La GiRELLE CROISSANT.
{Jidis menisciis^ nob.)
La mer des Indes nourrit encore une es-
pèce très - semblable à la précédente j mais
elle a la tête plus grosse, le front plus bombé, le
museau plus arrondi , ce qui le rend plus obiusj les
dents un peu plus fortes. Les fourches de la caudale
paraissent un peu plus longues, et je lui compte
deux rayons de plus à l'anale.
D. 8/13; A. 3/12, etc.
Les couleurs de cette espèce ont été décrites sur
le poisson sortant de l'eau par M. Dussumier; leur
distribution est tout- à- fait semblable à celle de la
girelle lunaire; mais leurs nuances diffèrent un peu. Le
dos et le ventre étaient bleus, et le milieu des côtés
vert; les traits verticaux étaient de couleur ama-
ranthe; la dorsale et l'anale étaient rayés longitudi-
nalement d'orangé, de bleu de ciel, de jaune; du
bleu, de l'orangé et du vert, colorent la pectorale.
Les raies de la tête tranchent par leur couleur brune
sur le fond vert.
41 G LIVRE XVI. LABROÏDES.
Ce poisson, assez rare aux Séchelles, a, selon
le même observateur , la chair agréable et saine.
La collection du Muséum possède d'autres
individus de la même espèce, dont plusieurs
sont depuis très-long-temps conservés dans
l'alcool 5 ils faisaient partie du Cabinet du
Stadlîouder. Un autre, le plus grand de tous,
vient du voyage de Pérou ; il a neuf pouces
de longueur.
M. de Gernaart, consul de France à Can-
ton, vient de nous en envoyer des individus
des mers de Chine, et tout récemment nous
avons observé cette espèce dans les belles
collections rapportées par MM. Eydoux et
Souleyet. Ils l'ont prise à Macao.
La GiRELLE A JOUES RAYÉES.
(Julis geîiivittatus , nob.)
Les mers de l'Isle- de -France nourrissent
en abondance une autre girelle, qui paraît
offrir presque autant de variétés que l'espèce
de la Méditerranée.
Elle a le museau aigu et les formes générales
de la girelle verte; mais les pointes de la caudale
sont moins prolongées. Les couleurs, disposées à
peu près comme celles de cette espèce, offrent ce-
pendant des différences : la plus notable consiste
dans la tache de la pectorale, laquelle n'est pas en
CHAP. X. GIP.ELLES. 417
ovale limité sur celle nageoire; mais qui s'étend
jusqu'à la pointe, et se fond par degrés insensibles
sur le bord des rayons inférieurs dans l'absence de
lignes prolongées sur la poitrine.
Commerson, qui en a rapporté un très-
grand nombre d'individus, en a laissé un
dessin colorié; elle y est représentée
toute verte, foncée sur la têie, et plus claire (vert-pré)
sur le corps. Il y a deux raies arquées sur le bas de
la joue, au-dessous de l'œil, et une plus courte part
de l'angle postérieur de Vt>i'bite et s'évanouit sur
l'opercule. Un trait vertical rouillé existe sur chaque
écaille. La dorsale et l'anale ont la base brune et le
bord vert. Le croissant de la caudale est plus pâle
que la base de la nageoire, qui est, ainsi que les
ventrales, du même vert que le corps.
M. Dussumier, M. Desjardins et M. La-
marre-Piquot, nous en ont depuis envoyé et
en nombre tout aussi considérable. Le pre-
mier de ces observateurs nous les a donnés
sous les couleurs suivantes.
Une première variété a
le corps vert-pré, et les lignes verticales des écailles
violettes; la tête, noirâtre, a les joues rayées de vert;
la base de la dorsale est verle, le bord jaune et le
milieu violet; l'anale n'a que deux bandes : une vio-
lette et une verte ; la caudale , verte , avait les rayons
externes violets; les ventrales étaient blanches, la
base de la pectorale jaune.
i3. 2-^
418 LIVRE XVI. LABOÏDRES.
Une seconde variété a toujours
le corps vertj mais les traits verticaux sont orangés;
le fond de la couleur de la tête est un lilas brunâtre;
la dorsale n'a que deux raies vertes et lilas, comme
l'anale; les ventrales sont vert pâle, ainsi que la base
des pectorales.
D. 8/13; A. 3/11, elc.
M. de Lacépède a fait graver le dessin de
Commerson j mais il ne s'en est pas servi pour
faire la description de l'espèce , qu'il avait
jugée nouvelle, et il l'a donnée clans sa planche
comme une variété du labre argenté. Nous
avons vu que cette espèce nominale est faite
sur le sciœna argentimaculata de Forskal,
dont les caractères doivent être ceux d'une
diacope, ainsi que nous l'avons établi à son
article.
La GiRELLE DE COMMERSON.
{Julis Commersoni 3 nob.)
D'autres individus , observés parmi les col-
lections de Commerson et de M. J. Desjar-
dins, ne sont peut-être encore qu'une variété
de l'espèce précédente. Les naturalistes qui
peuvent observer ces poissons vivans, éclair-
ciront ce point encore douteux.
Cette girelle a les mêmes formes et les mêmes
nombres que la précédente. La joue a sur le haut
des traces de raies; mais les couleurs sont cepen-
CHAP. X. GIRELLES. 419
dant autrement distribuées. Le dessus de la tête et
les tempes ont une teinte violet foncé , presque
noirâtre, qui s'étend sur le haut des côtés jusqu'à la
fin de la dorsale. Le bas de la joue, les côtés du
corps et toute la queue sont pales et décolorés chez
tous les individus soumis à notre observation. Le
haut du dos, le long de la base de la dorsale,
est brunâtre ; et quelques-uns des exemplaires des-
séchés, provenant des collections de Commerson,
ont une teinte verdàtre pâle le long du ventre. La
dorsale a une raie brune ou jaunâtre entre deux
bords verts. L'anale n'a que deux raies, l'une brune,
l'autre verte. La caudale est pâle sur son croissant,
et la pectorale noirâtre.
La taille varie, comme dans les individus de
l'autre espèce , de sept pouces à sept pouces et
demi.
La GiRELLE DE MaTTHIEU.
{JiiUs Matthcei, nob.)
Les espèces ou variétés dont nous venons
de traiter, ont toutes des pectorales dont la
longueur égale ou même dépasse celle de la
tète.
M. Matthieu a envoyé de l'Isle-de-France
au Cabinet une girelle dont
la pectorale n'a que la moitié de la longueur de la
tête, qui est d'ailleurs comprise quatre fois et demie
dans la longueur du corps, comme dans les espèces
précédentes. Les raj'ons inférieurs de la nageoire
420 LIVRE XVI. LABROÏDES.
sont aussi plus alongés, ce qui donne à celle pec-
torale une forme différente; mais la forme du corps
et les fourches de la caudale sont les mêmes.
La distribution des couleurs est encore par rayures
sur la joue et sur les nageoires dorsale et anale. La
tache de la pectorale est plus petite ; le sonmiet de
la tête est violet; le corps paraît très-pâle, avec des
points violets, plutôt que des traits verticaux.
Nous n'avons qu'un seul individu , long de
six pouces ; c'est une variété fort notable de
l'espèce à joue rayée, si elle ne doit pas être
regardée comme faisant une espèce séparée.
La GiRELLE VERTE.
{Julis viridis, nob.; Labrus viridis , Bl. 282.)
Le poisson que Blocli a décrit comme ori-
ginaire du Japon, et gravé sous le nom de
lahrus viridis (pi. 282), est une girelle voi-
sine des espèces précédentes.
Sa lête parait un peu plus courte , parce que le
museau est moins aigu. La caudale est de même four-
chue, les ventrales prolongées en filet, les écailles
assez grandes et très-fmement striées.
D. 8/135 A. 3/9, etc.
Les couleurs sont un peu autrement distribuées
que sur les pi^écédentes : le fond du corps est tou-
jours un beau vert, et les écailles ont un petit trait
vertical; mais les raies de la tête sont au nombre
de quatre , et les deux inférieures se prolongent sur
la gorge et le ventre, jusqu'auprès de l'anus.
CHAP. X. GÏRELLES. 42'l
Nous en avons un individu long de huit
pouces et demi, qui vient de l'île Bourbon,
d'où il a été rapporté par M. Leschenault.
La GiRELLE DE MeRTENS.
{Julis Mertensiiy nob.)
Une espèce voisine de celle-ci ne nous est
connue que par le dessin communiqué par
M. Mertens.
La couleur de la tête est verdâtre, celle du corps
jaunâtre. Quatre raies orangées longitudinales traver-
sent la joue; les traits verticaux des écailles sont de
la couleur des raies de la tête; la base de la dorsale,
de l'anale, de la pectorale, et les deux bords de la
caudale sont aussi de cette même teinte; les nageoi-
res sont jaune pâle : la caudale seule est aussi foncée
que le corps. Le dessin ne montre pas de tache
noire sur la pectorale. Les nombres comptés par
M. Mertens sont :
D. 7/13; A. 2/11, etc.
L'individu, long de cinq pouces, a été des-
siné à Uléa.
La GiRELLE DE DuPERREY.
{Julis Duperrei, Q. G.; Voy. Fraye, pi. 56,fig. 2.)
Les naturalistes qui ont accompagné M. Frey-
cinet, ont péché sur les côtes des îles Sand-
wich une girelle, qui tient des précédentes
par la tache de sa pectorale.
422 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Sa tête est plus courte et plus grosse; la pecto-
rale est large , surtout vers le bas ; à peu près de la
même forme que celle de la girelle de Matthieu; la
caudale a ses pointes prolongées.
D. 8/13; A. 3/11, elc.
Les écailles sont assez grandes et finement striées.
La ligne latérale est entièrement composée d'une
série d'arbuscules. La couleur de la tète est bleu
d'outremer: celte teinte, rembrunie sous l'œil, y
forme une taclie notable. Il n'y a aucune trace de
lignes ou de taches sur la joue.
La dorsale est de la couleur du sommet de la tête,
l'anale violette; la pectorale a du jaunâtre orangé à
la base, et une large tache lilas, semée de points
bleus, couvre la pointe. La caudale, bordée d'orangé,
a la base bleu pâle, et le croissant cendré verdâtre;
tous les rayons sont jaunâtres.
Une large bande orangée, étendue depuis la nuque
jusque sous le troisième rayon épineux de la dor-
sale, forme une écharpe, qui tranche entre le bleu
de la tête et le roussâtre plus ou moins pâle du
reste du corps. Le bord des écailles est plus pâle
que le fond.
Nos individus sont longs de six à sept pouces.
La Girelle de Bloch.
{Jiilis Blochiij nob.; Labrus lunariSy Bl., 281.)
C'est près de ces espèces que l'on doit
placer la girelle, assez peu caractérisée, dont
CHAP. X. GIRELLES. 423
Bloch a laissé une figure *. Ce lahrus lunaris
a la tête bleu foncé, sans aucune raie sur la tête.
Le corps est peint en violet plus ou moins foncé,
et traversé par cinq à six bandes jaune pâle. Toutes
les écailles sont bordées de noirâtre. La dorsale a
une large bande bleue entre deux bords blancs.
L'anale a la moitié supérieure bleue et l'inférieure
violette. Les ventrales et la caudale fourchue, sont
de cette couleur. La pectorale est bordée de bleu
noirâtre.
La figure représente un poisson long de dix
pouces. Bloch le fait venir des Indes orien-
tales.
Ces couleurs, probablement d'une teinte
fort arbitraire , sont distribuées tout autrement
que sur le lahrus lunaris de Gronovius, au-
quel Bloch veut rapporter son poisson. La
synonymie que cet auteur a placée sous cette
espèce est complètement fausse, et nous ne
voyons aucune de nos girelles à laquelle on
puisse la rapporter.
La GiRELLE HÉBRAÏQUE.
{JuUs hebraicus y nob.; Labre hébraïque, Lacép.)
Commerson avait laissé le dessin d'une es-
pèce de girelle dont nous avons retrouvé
1. Grande Ichthjologic, pi. 281.
424- LIVRE XVI. LABROÏDES.
quelques individus desséchés dans ses collec-
tions. M, de Lacépède fit graver ce dessin et
publia l'espèce de poisson qu'il représente,
sous le nom de labre hébraïque^ tirant son
ëpitlîète de la disposition des raies de la joue,
imitant, dit-il, des caractères hébraïques ou
orientaux. Depuis, MM. Quoy et Gaimard,
J. Desjardins et Dussumier, nous en ont pro-
curé d'autres individus, mieux conservés et
dans l'eau-de-vie : tous sont originaires de
risle-de-France , où l'espèce n'est pas rare.
Elle a la tête courte, le front et le dessus de la
mâchoire inférieure arqués, les dénis antérieures, et
surtout les inférieures, fortes et pointues. Les four-
ches de la caudale sont prolongées,
D. 8/13; A. 3/il, etc.
Voici la description des couleurs, faite sur
le poisson frais par M. Dussumier.
Tout le corps est vert et varié de jaune pâle. Une
bande oblique, d'un beau jaune vif, descend de la
base antérieure de la dorsale jusque sous le ventre,
et s'efface près de l'endroit où la pointe des ventrales
peut atteindre. La tête a sur un fond lilas pâle des
raies bleues brillantes , traversant l'opercule et se
portant sur la poitrine entre la base des nageoires
paires. La dorsale, les ventrales et la caudale, sont
verdàtres ; l'anale, plus paie, est blanche lavée de
jaunâtre; les pectorales ont du noir à leurs pointes.
CHAP. X. GIRELLES.
425
Sur le poisson conservé dans l'eau- de-vie, on voit
la distribution de ces couleurs , qui paraissent bleues,
plus ou moins noirâtres. La bande jaune du corps
est devenue blanche, bordée de deux larges raies
bleuâtres , et sur la queue il y a une grande tache de
la même couleur, en avant de la caudale.
Cette espèce se mange à l'Isle-de-France.
Nos individus sont longs de sept pouces.
Ce poisson se trouve aussi sur les côtes de
Madagascar: M. Gaimard l'en a rapporté. Lui
et son ami, M. Quoy, le peignent de cinq
bandes noirâtres sur le fond verdâtre du dos.
D'ailleurs le reste de leur peinture s'accorde
parfaitement avec la description de M. Dus-
sumier. Ils ont cru l'espèce nouvelle , et ils en
ont publié une très-belle figure dans l'atlas
du Voyage de l'Astrolabe (pi. i5, fig. 3),
sous le nom de girelle à baudrier [julîs zos-
terophorus), nom qui ne pourra pas être
maintenu.
L'on possède au Cabinet du Eoi une pe-
tite girelle, longue de quatre pouces, qui
provient de la collection du Stadhouder;
elle est plus décolorée que les exemplaires
dont nous venons de parler, et ses teintes
sont devenues rousses. On n'y voit plus de
traces de raies sur la joue. Ce poisson con-
vient en tout point à la figure que nous trou-
420 LIVRE XVI. LABROÏDES.
vons dans Bloch , sous le nom de labrus hi-
fasciatus (pi. 283). Ces petites différences
dans la distribution des couleurs, et la forme
un peu plus alongée de la tête du poisson,
nous laissent encore en doute, si nous devons
considérer le poisson de Bloch comme de la
même espèce que celui de Commerson.
La GlRELLE A QUEUE TACHETÉE.
{Julis caudiniacida 3 Q. G.)
C'est une espèce de l'Isk-de-France, dont
les formes rappellent celles de la girelle com-
mune.
Son museau est pointu; la longueur de la tête
surpasse un peu la hauteur du tronc, et est com-
prise quatre fois dans la longueur totale. Les dents
mitoyennes sont alongées; il n'y a point de canines
à l'angle de la bouche. Le premier et le second rayon
de la dorsale sont flexibles, et dépassent les suivans;
la caudale est arrondie; les deux rayons de la dor-
sale et de l'anale atteignent à la base ceux de cette
nageoire; le premier rayon de la ventrale est alongé
en filet. La pectorale est tronquée.
D. 9/12; A. 3/12; C. 13; P. 12; V. 1/5.
Je compte près de cinquante rangées d'écaillés
dans la longueur, quatre au-dessus de la ligne
latérale, et dix-huit au-dessous. Cette ligne n'est pas
rameuse.
Dans la liqueur, le poisson paraît violet avec quatre
i CHAP. X. GIRELLES. 427
raies jaunâtres le long des flancs; la seconde s'avance
sur la tête et se termine au museau, en étant inter-
rompue par l'œil ; une autre va de l'angle de la bouche
à l'opercule, en touchant l'orbite; l'angle de l'oper-
cule, terminé par une tache bleue, en a une en demi-
cercle. J'en vois deux autres sur le bas de la joue, et
une autre borde le sourcil. La caudale, qui offre des
traces de violet, a une large tache noire fondue
sur îe tronçon de la queue, près la base des rayons.
La dorsale a sur les deux premiers une large tache
violette ou noire, très -foncée, puis deux raies ou
deux séries de points décolorés qui paraissent violets.
L'anale a de même la base violette et deux traits
parallèles au bord.
M. Quoy' dit que le haut du corps est vert, par-
couru par trois lignes longitudinales, formées de
taches couleur de laque; le ventre, d'un jaune teinté
de verdâtre, est parsemé de lignes de laque. L'ori-
gine de la dorsale est noire, le reste aurore avec des
points jaunes et des linéoles bleu de ciel. L'anale
a des réticules de laque et de lignes bleuâtres. La
caudale est ornée de larges bandes transverses, oran-
gées, séparées par du bleu de ciel.
J'ai fait ma description sur l'individu rap-
porte par M. Quoy. C'est par une erreur de
plume qu'il a dit que le rayon de la pectorale
est filamenteux; car sur la figure il représente
bien celui de la ventrale. Je dois d'ailleurs faire
1. Quoy, Zool. de l'Aslrolabe, t. III, p. 710, atl. poissons^
pi. i5, %. 2.
428 LIVRE XVÎ. LABROÏDES.
remarquer que renluminure ne correspond pas
exactement à la description de M. Quoy, et
que le dessin n'en est pas très-exact. Un autre
individu, long de huit pouces et semblable au
précèdent, a ëte envoyé du même endroit au
Cabinet du Roi par M. Desjardins.
La GlRELLE CEINTURE.
{Jiilîs cinguluin^ nob.)
Une girelle de l'Isle - de - France , facile à
reconnaître , est celle que Lacëpède a publiée
d'après les dessins de Commerson, sous le nom
de labre ceintiu^e.
Cette espèce a le museau alongé, pointu, à dents
mitoyennes saillantes, sans canines vers l'angle de
la mâchoire. La ligne latérale est simple; les écailles
sont lisses et petites : il y en a cinquante-sept dans
la longueur, cinq au-dessus de la ligne latérale, et
vingt-quatre au-dessous. Une écaille est oblongue et
a vingt-quatre rayons environ à l'éventail. Les ven-
trales sont très-alongées. La caudale est arrondie.
D. 9/12; A. 3/12, etc.
Le fond de la couleur est brun, plus clair sur la
tète et sur la poitrine que sur la partie postérieure du
corps. La teinte claire de l'avant finit à la pointe de
la pectorale, et elle est séparée de la portion rem-
brunie par une ceinture pâle qui occupe l'intervalle
de quatre rangées d'écaillés. La tête est couverte de
points bleuâtres, éparsj une tache noire est à l'angle
CHAP. X. GIRELLES. 421>
de l'opercule • il y a du noirâtre dans l'aisselle de la
pectorale. La dorsale et l'anale sont plus foncées que
le corps, et bordées de blanchâtre : elles sont ponc-
tuées de noir sur la partie brune.' La caudale a une
large ceinture noire, bordée de blanc, et toute la
base plus pâle, ponctuée de noir. Les ventrales ont
leurs premiers rayons bruns.
Tel est le poisson que MM. Quoy et Gai-
mard ont pris à Tlsle - de - France , et que
M. Lamarre-Piquot s'y est aussi procuré. Ils
sont tout-à-fait semblables au dessin laissé
par Commerson , sauf que la base des trois
nageoires impaires y est représentée blan-
châtre. M. de Lacépède l'a fait graver volume
ÏII, planche 28, figure 1.
C'est aussi à cette espèce qu'il faut rapporter
\ejulis semipimctatus de M. Ruppel, qui n'a
pas osé prendre pour certaine la synonymie
de Lacépède. Sa figure, coloriée d'après le
vivant, représente la tête et le dos verdâtres
ponctués, la partie postérieure du dos brune,
avec deux grandes taches plus foncées. La base
de la dorsale et de la caudale jaunâtre plus
clair que le fond, ainsi que l'indique le dessin
de Commerson. Cette partie est tachetée; une
large ceinture brune borde la dorsale et l'a-
nale, qui sont en dehors rayées de bleu et
bordées de jaune verdâtre. La caudale est aussi
430 LIVRE XVI. LABROÏDES.
bordée de verdâtiej mais elle n'a pas de raie
bleue.
Je pense qu'il faut aussi y rapporter le la-
brus aureomaculatus y publié planche 9.0 des
Poissons de Ceilan, par M. Whitchurch Ben-
ne tt. Il représente la tête et la poitrine brun
jaunâtre ponctué de noir; une bandelette
verticale blanche sé])are cette teinte de la
partie postérieure, cpii est plus verdâtre. 11
y a sur le dos deux larges taches rouges à la
place 011 M. Puippel a indiqué les siennes d'une
couleur brune. La dorsale est ponctuée de
brun et bordée de jaune, ainsi que l'anale et
la caudale. C'est une variété assez notable ; le
nom que lui donnent les pécheurs cingalais
est tîk-^irawah.
M. Rappel a pris sa vanete pendant l hiver
à Mohila, et pendant l'été à Massuah. Ainsi
elle existe dans toute la mer Ponge.
La GiRELLE PARTERRE.
{Julls hortulanus, nob. j Lahriis cenliquadms , Comm)
On trouve, en grande abondance à Tlsle-
dc-France, une girelle non moins remarquable
que les précédentes par la beauté des couleurs
que par quelques autres caractères qui sem-
bleraient l'éloigner de ce genre.
CHAP. X. GIRELLES. ^ 431
Elle a le museau assez pointu, la nuque relevée;
la hauteur est comprise trois fois et deux tiers dans
la longueur totale : la tête égale cette hauteur. A
l'extrémité de la mâchoire supérieure il y a quatre
dents pointues, une très-forte dans l'angle; deux
rangées de dénis granuleuses derrière. Quelques
écailles sur la tenipe; mais tous les autres caractères
et le faciès sont tellement d'une girelle, qu'on ne
saurait, sans rompre tous les rapports naturels,
placer cette espèce dans un autre genre.
La ligne latérale n'est pas rameuse. Les écailles
sont grandes, surtout leur portion radicale, dont le
pourtour seul est strié : d'ailleurs le bord est con-
vexe. Il y en a vingt-quatre rangées sur les cotés.
La caudale est coupée carrément, la ventrale est
prolongée en filet, les pectorales sont pointues.
D. 9/12; A. 3/11, etc.
Le poisson, conservé dans de l'eau-de-vie, a, sur
un fond jaunâtre rembruni vers le dos, des taches
noires verticales , qui s'effacent et deviennent des
petits points sur le ventre. La tête offre sur des tons
violacés quatre bandes longitudinales bleuâtres ou
lilas pâle, souvent confluenles , et des points de
même couleur sur la nuque et sur la partie anté-
rieure du dos. La gorge et la poitrine ont quelques
traits ou points blanc de lait. Une ou deux taches
nacrées se conservent sur la base de la dorsale, qui
est elle-même pâle et tachetée de brun ou d'ocelles
plus ou moins effacés. La caudale a conservé quel-
ques petits traits, et l'anale, des traces de rayures.
Une tache noire existe dans l'angle de la pectorale ^
452 LIVRE XVI. LABROÏDES.
et une autre sur le haut de la queue en avant de la
caudale.
M. Dussumier nous décrit les couleurs clu
poisson frais de la manière suivante :
Le corps est vert-pré, tacheté de vert noirâtre,
en forme de quinconce. La tête et la nuque, d'une
teinte plus claire, ont des bandes et des points oran-
gés, et il y a sur la base de la dorsale des taches d'un
beau jaune. La dorsale est variée de vert pâle et
d'orange; la caudale est violette, mouchetée de vert
et terminée par du rouge j les pectorales et les ven-
trales sont vert pâle.
Telle estcettegirelle, dont nous avons encore
reçu des individus longs de six pouces par les
soins de M. Julien Desj ardins , et c{ue MM. Quoy
et Gaimard, Lesson et Garnot, ont pris aussi
à risle-de-France.
Ces deux derniers naturalistes en ont donné
une figure coloriée d'après un individu qui avait
déjà perdu les belles teintes vertes du corps.
Ils l'ont regardée à tort comme une nouvelle
espèce, qu'ils ont nommée Girelle demi-parée
[Julis semidecorata, Lesson 5 Atlas de la Co-
quille, poissons, n.° 35).
M. Ruppel l'a retrouvée aussi dans la mer
Rouge, et en a donné une figure bien plus
exacte et qui ne laisse rien h désirer. Cet ha-
bile naturaliste l'a nommée lialicliores exi-
CHAP. X. GIRFXLES. 455
niius\ tout en liësitaiit à la regarder comme la
même que le labre parterre ou que le labre échi-
quier de Lacépède. Cette synonymie ne peut
être cependant douteuse. En effet, Commerson
avait depuis bien long -temps observé cette
espèce , et en avait rapporté un dessin à la
pierre noire , d'une bonne exactitude. M. de La-
cépède, comme à son ordinaire, a fait graver le
dessin sous le nom de labre parterre (lahriis
Jiortulaniis^), en même temps que la des-
cription de Commerson , qui avait nommé
l'espèce lahrus centiquadrus^y lui fournissait
cette seconde espèce nominale. Je ne crois
pas d'ailleurs que l'on doive en rapprocher le
poisson ligure par Renard (lab. 7, iig. 5o) sous
le nom de coj^heille. C'est une girellc proba-
blement d'une espèce particulière, mais qu'on
ne saurait déterminer sur une enluminure
aussi mauvaise.
La GiRELLE BRIGADIER.
{Jiilis decussatus, nob. ; Spams decussatuSj, W. Benn.)
Il y a dans Renard (folio 1 1, n.° -^i), sous
le nom de brigadier^, une espèce voisine de
1. Neue Wirbelthiere zu derFaun. abjss. , p. 16, tab. 5, n.° 1.
— 2. Lacép., III, tab. 29, fîg. 2. — 3. Ejusd. , ibid. , III,
p. 495.
i3. 28
434 LIVRE XVI. LABROÏDES.
ce labre parterre, mais que je crois encore
distincte, et que l'on peut déterminer en
s aidant du dessin original de l'amiral Corneille
de Vlaming, lequel est tout-à-fait identique à
la planche que M. Whitchurch Benne tt a
donnée de cette espèce dans les poissons de
Ceilan (n." i4)? sous le nom impropre de
spams decussatus.
Le dos est vert, passant par degrés au jaune
brillant sous le ventre. Tous les flancs sont marqués
de taches carrées, noirâtres sur le dos et orangées
sous le ventre; la tête, verte, est rayée de rouge; la
nuque est couverte de points rouges; sur le devant
du dos est une tache jaune. La dorsale, jaune, est
rayée d'orange : des points de celte couleur dessinent
cinq bandes verticales sur la caudale , qui est très-
brillante. L'anale est plus orangée : elle a deux raies
rembrunies près de son bord.
La figure de Vlaming a les nageoires jaunes
et rayées, sauf la caudale, qui est uniforme;
le ventre est moins brillant. Il est difficile de
concevoir comment l'enluminure de Renard a
changé totalement la vérité de ces couleurs,
pour en faire une figuré tpute de fantaisie.
M. Bennett dit que le nom cingalais est
hemhili-^irawahj c'est-à-dire basket parrot,
ou perroquet de mer treiUissé, le nom de
hemhili s'appliquant en général à ce qui rap-
pelle un panier.
CHAP. X. GIRELLES. ACiÙ
Nous avons reçu de Pondichéry par M. Les-
cheiiault un petit poisson sous le nom tamule
Nell/y-vettj , qui nous paraît de cette espèce.
La GiRELLE CORBEILLE.
{Julis corbis y nob.)
Je trouve encore dans le Recueil de Vla-
ming une girelle plus élégante, sous le nom
de corbeille , et que Renard a fort mal copiée
fol. 20, n.° 97, et seconde partie, planche 25,
n.° 1 20, OLi il est dit que ce poisson est le dam-
bordt ou fécliiquier, qu'il y en a trois à Lou-
VEN, où on les nomme quelquefois corbeille.
La tête, sur un fond bleu, est grlvelée de gros et de
petits points jaunes, de petits points noirs ou bleus
foncés. Le corps a, en quinconce, de nombreux traits
verticaux fort serrés", et de couleur rouge, orange,
devenant plus noire sur le dos. Une tache noire
très-foncée, longitudinale, occupe toute la base de la
dorsale, qui est orangée, l'anale et la caudale étant
jaunes.
C'est une jolie espace, que les voyageurs
naturalistes nous fe4*ont sans doute mieux
connaître un jour.
Il ne faut pas d'ailleurs la confondre avec la
corbeille citée plus haut et représentée, Renard ,
tab. 7, fig. 5o. Celle que nous décrivons est
distincte et facile à caractériser.
450 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE LINÉOLÉE.
{JliUs Uneolatus y nob.)
MM. Quoy et Gaimaid ont envoyé du port
Western, de la Nouvelle-Hollande, une belle
g i relie
à tête grosse, à museau obtus, à mâchoire inférieure
large et saillante, à nuque très-peu bombée, à écailles
médiocres; car il y en a cinquante-trois rangées entre
l'ouïe et la nageoire caudale, cinq au-dessus de la
ligne latérale, et dix -sept ou dix -huit au-dessous.
Elle a d'ailleurs, comme la girelle parlerre, quel-
ques petites écailles sur la tempe et derrière l'œil.
Une écaille seule se montre arrondie, à surface ra-
dicale fortement striée : la partie nue l'est très-fine-
ment. La ligne latérale est un peu ramifiée. Sur un
beau fond rouge, le poisson a une bande longitu-
dinale noire de chaque côté, plus ou moins effacée,
et sur la tête des traits fins et verticaux, au nombre
de quinze ou seize, qui descendent pour se perdre sur
la gorge. Je n'en vois que deux seulement sur la mâ-
choire inférieure. La dorsale a trois ou quatre raies
violettes. L'anale offre deil* vestiges de taches.
D. 9/13 ; A?^/13 , etc.
Un de nos individus a près de onze pouces.
Pérou avait déjà apporté cette espèce au
Cabinet du Roi.
CnAP. X. GIRELLES. 457
La GiRELLE TRILOBÉE.
{Julls trilohatus, nob.; Lahrus trilobalus , Lacép.,
et Lahrus fuscus , ejiisd.)
Commerson a rapporté en grand nombre
une girelle abondante à Bourbon et à Mada-
gascar, et dont je puis donner une description
exacte des couleurs, en la prenant d'un très-
bon dessin que M. Th. Delisse nous a envoyé
de risle-de-France, où Commerson ne paraît
pas avoir observé l'espèce.
Cette girelle a le museau arrondi et obtus, la
nuque relevée, l'œil petit, l'interoperoule élevé. Les
dents petites, même les mitoyennes; point de ca-
nines saillantes dans l'angle de la bouche. Le sous-
orbitaire chargé de lignes de pores, trois conduits
muqueux sur l'opercule, la caudale festonnée; k
ligne latérale très-mmeuse. Les écailles sont grandes ;
leur portion nue est toute striée; leur partie radicale
est aussi couverte de stries, sauf le centre. Il y en a
vingt-huit rangées entre l'ouïe et la caudale.
D. 8/13; A. 3/11; G. 15: P. 15; V. 1/5.
On ne voit sur la tête aucune trace de raies ou
de taches, et les individus décolorés et secs mon-
trent encore les taches vertes disposées en deux
bandes longitudinales sur chaque flanc, et les bor-
dures de même couleur sur la dorsale et sur l'anale.
Le poisson frais a le dessus de la tête vert oHvàlre^
au-dessous de l'œil uno tache un peu moins foncée.
438 LIVRE XVI. LABROÏDES.
une autre, bleue, à l'angle de l'opercule; le reste est
orangé. Celte teinte devient plus brillante sur le corps ,
rouge sur le dos, et elle reprend le long du ventre une
couleur olivâtre. Les deux raies vertes des flancs
sont très-colorées; elles se réunissent pour couvrir
la base de la caudale, dont le bord des rayons est
bleu et la membrane orangée. La dorsale a les deux
bords verts et le milieu orangé. L'anale a la base de
cette teinte et la moitié externe bleue. La pectorale
a la pointe bleu foncé, et la base de couleur oran-
gée. Les ventrales sont bleues.
Outre les individus rapportés par Com-
merson, nous en avons de conserves dans
l'esprit de vin, et qui ont été déposés dans
le Cabinet par Pérou, ou par M. Mathieu,
colonel d'artillerie commandant à Tlsle-de-
France. Ils sont longs de sept à huit pouces.
M. Delisse nous la donnée sous le nom de
cateaii, dénomination que Commeison ap-
pliquait aux scares verts de cette île. Le des-
sin que ce voyageur a laissé avait été fait sur un
poisson desséché : aussi a-t-il le museau trop
pointu. C'est d'après lui que M. de Lacépède a
établi son labre trilobé, en même temps qu'il
employait la description du compagnon de
Bougainville pour en faire un lahrus fuscus ,
parce que la phrase caractéristique commence
par ces mots : labrus fuscus , tœniis utrinque
duahus, etc.
CHAP. X. GIRELLES. 459
Il cite cette espèce comme abondante parmi
les récifs et les roches madréporiques des îles
de Bourbon et de Madagascar.
J'en ai aussi un individu de la première de
ces îles, qui a été donné au Cabinet du Roi
par madame Ducrest de Villeneuve, avec une
note indiquant que le poisson y est nommé
lézard de mer.
Il faut d'ailleurs faire bien attention que
Shaw a inscrit, sous le nom de lahrus trilo-
hatus, la chéiline trilobée de Lacépède, et
non la girelle de cet article.
La Girelle parée.
{JidisformosuSy nob. )
M. Desjardins nous a envoyé de l'Isle-de-
France une espèce voisine de la précédente,
et dont nous pouvons parler avec certitude,
parce qu'il a eu l'obligeance d'accompagner
son envoi d'un dessin pris sur le poisson frais.
CeUe espèce a le museau un peu moins arrondi
que la précédente. Il n'y a point de dents saillantes
à l'angle de la bouche. Les écailles paraissent plus
larges et plus courtes. Il n'y a plus de surface non
striée sur la partie radicale j toute la portion libre est
ciselée de stries qui s'étendent sur le bord membra-
neux de l'écaillé. La ligne latérale est rameuse.
D. 8/i3; A. 3/11, etc.
440 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La tête est d'une couleur uniforme orangte, sans
aucune raie ni tache j l'iris de l'oeil est vert. Le dos,
les flancs et la portion inférieure de la queue sont
rouges sang de bœuf Le long de la ligne latérale et
sur le milieu du côté, il y a deux larges bandes
bleues, teintées de verdàire. Le long du dos on voit
quatre ou cinq taches vertes. La dorsale et l'anale
sont orangées et bordées de bleu céleste. Le ventre
est verdâlre. La caudale a sa membrane olivâtre et
ses rayons terminés par du bleu céleste; une bor-
dure de cette couleur colore le haut et le bas de la
nageoire. La pectorale est bleue et a sa base jaune.
La ventrale est verte.
On voit que ces coule tirs ne sont pas sem-
blables à celles de la girelle trilobée : nous
croyons à leur constance , parce que nous
avons observé des poissons de la même va-
riété parmi ceux récoltés par M. Dussumier
ou par M. Quoy, et que les notes de ces
voyageurs se rapportent tout-à-fait à ce que
nous observons sur le dessin de M. Desjar-
dins. Ce naturaliste nous apprend que ces
poissons se portent rarement au marché, que
les esclaves les achètent des pécheurs, et qu'ils
les font cuire après les avoir préalablement
écorchés. L'individu dessiné par M. Desjar-
dins fut pris au mois de Décembre.
CHAP. X. GIRELLES. "M'I
La GlRELLE MALACHITE.
{Julis œruginosus 3 nob.)
Les mêmes voyageurs ont rapporté de ces
mers mie troisième girelle, qui est encore
très-voisine des deux précédentes, mais qui a
des couleurs un peu différentes et autrement
distribuées.
Celle-ci a, sur un fond vert de malachite, qui se
conserve quelquefois Uès- brillant, une bande lon-
gitudinale brune au-dessus de la ligne latérale, et
deux autres couleur de rose au-dessous, et sur la
poitrine un trait rose est tracé obliquement de l'ouïe
à la ventrale. Une tache rembrunie couvre le bord
de l'opercule; sur les tempes, sur le front, sur le
sous-orbitaire, le long de la lèvre supérieure et au-
' dessous de l'œil, sont de larges taches onduleuses
et anastomosées, d'une belle teinte rose. Celle qui
couvre le préopercule se divise en deux traits. La
dorsale est violette, bordée de vert; l'anale, de cette
couleur, a sur la base une bandelette rose. La cau-
dale est toute verte. La pectorale est plus foncée et
a le bord inférieur rose. Les ventrales sont plus
pâles.
D. 8/13; A. 3/11, etc.
Cette espèce n'a pas de dents saillantes dans l'angle
de la bouche; les pointes de la caudale sont quel-
quefois très-longues. La ligne latérale est très-rami-
fiée. Le museau est obtus et arrondi.
442 LIVRE XVI. LABROÏDES.
M. Desjardins nous en a envoyé de l'Isle-de-
France. M. Dussumier en a aussi rapporté de
très-beaux individus longs de quinze pouces.
La GiRELLE DEMI-BLEUE.
{Jiilis seviicœruleus , Ruppel. )
La mer Rouge nourrit des girelles qui ressem-
blent beaucoup à celles de l'Isle - de -^ France ,
quand elles ont séjourné pendant quelque
temps dans l'alcool. Mais les observations de
M. Ruppel * semblent établir qu'elles ont encore
les couleurs clifTérentes.
Cet habile naturaliste les représente
vertes sur la moitié supérieure du corps, et bleues
sur l'inférieure. Les trois bandes longitudinales du
corps sont couleur de brique, ainsi que les traits de
la têle, des joues et de la poitrine. La dorsale et l'anale
sont bleues et traversées dans leur milieu par un trait
longitudinal coloré comme les bandes du corps. La
caudale est bleue, bordée de vert dans son croissant,
et de jaunâtre briqueté sur ses deux bords. Les pec-
torales et les ventrales sont pâles.
D. 8/13; A. 3/11, etc.
M. Ruppel en a observé des individus de
onze pouces sur le marché de Djedda , au
mois d'Août.
1. P^eue JVirhelihiere zu der Faun. abyss, , p. lo , pi. 5, fi^. i -
CHAP. X. GIRELLES. ^^5
M. Botta en a envoyé de ce port un indi-
vidu long de quatorze pouces, et M. Lefebvre
en a rapporté de Suez.
La GiRELLE PAO.
( Julis quadricolor , Lesson. )
C'est encore une espèce très -voisine des
précédentes, si même elle en est distincte, que
la girelle figurée par M. Lesson sur la planche 35
des poissons, dans l'atlas du Voyage de la
Coquille
Celle-ci a le dos d'un beau rouge de carmin qui
colore aussi l'échiquier par les bandes longitudinales
et verticales des flancs. La tache au-devant de l'œil,
celle bifide sur l'opercule, la bandelette de la poi-
trine, une autre sur le front entre les deux yeux, sont
de la même teinte rouge. Le dessus de la tête, l'o-
percule et l'intervalle entre les lignes, sont verts; le
dessous de la gorge et le ventre bleus. La dorsale est
verte, rayée de rouge dans le milieu. L'anale est bleue
avec une bande près de sa base de la même couleur
que celle de la dorsale. La caudale a les rayons verts
terminés par du jaune; la membrane qui les réunit est
rouge. Les pectorales et les ventrales sont bleues.
D. 8/13; A. 3/11.
M. Lesson a pris cette espèce à Otaïti, où
les naturels la lui ont désignée sous le nom
de pao. Sa chair est délicate : on la mange
crue, ainsi que le font les habitans de la rade
444 LIVRE XVI. LABROÏDES.
de Matawai pour les autres poissons. Les mê-
mes voyageurs ont retrouvé cette girelle à File
de Bolabola, où elle est commune parmi les
récifs madréporiques.
Je crois encore quil faut rapporter à cette
espèce le scarus Georgii^ figuré au n." 4^
des Poissons de Ceilan. M. W. Bennett dit
que son nom cingalais est lena-girawah, ou
squirell parrot, perroquet de mer écureuil,
parce qu'il est rayé comme l'écureuil de Ceilan.
La Girelle cyanogastre.
( Julis cjanogcLster, nob. ; Labrus cjanogaster. Sol. )
Il me semble qu'il faut aussi distinguer le
labrus cjanogaster de Solander, quoique bien
voisin de ce J. quadricolor.
D'après la copie du dessin que nous avons
sous les yeux, grâce à la complaisance que
madame Lée a eue de nous l'envoyer, nous lui
trouvons
la forme semblable à la précédente, mais les couleurs
encore autrement distribuées. Le dos est brun; la tête
et les flancs sont peints longitudinalement et en tra-
vers de lignes rouges; le ventre est vert. La dorsale ,
rouge, a la base verte, et sa portion molle, ainsi
que l'anale, est rayée de vert, puis de rouge, et
bordée de bleu. Les nageoires paires sont jaunes.
La caudale est brune, bordée de verdâtre.
CHAP. X. GIRELLES. ' 445
Ce poisson venait d'Otaïti comme le pré-
cédent, et il porte dans le manuscrit les noms
indiens de paa-hu ou de paa-rnaa-utha. Sur
le dessin de Forster, que l'on peut consulter
dans la bibliothèque de Banks, aujourd'hui au
Bridsh muséum, le poisson est nommé lahrus
vittatus.
La GiRELLE POURPRÉE.
( JuUs purpureus , Ruppel. )
Nous avons trouvé dans les collections faites
à Bombay par M. Polydore Boux, l'espèce que
Forskal a fait connaître sous le nom de sca-
rus purpureus.
Voisine des précédentes, elle a la tête peu bombée,
le museau moins arrondi, le bord de la caudale
coupé plus carrément entre les deux pointes pro-
longées des rayons supérieurs et inférieurs. La ligne
latérale est rameuse, les écailles sont assez grandes;
une, détachée, se montre oblongue, à surface radi-
cale striée sur le pourtour et laissant dans le centre
un grand espace vermiculé; la portion nue est striée
en éventail jusque sur le bord membraneux.
D. 8/11 î A. 3/11, etc.
La tête, sur un fond bleuâtre, offre des raies ar-
quées qui paraissent plus bleues et lisérées de noi-
râtre; deux au-dessous de l'œil, deux par le travers
de l'œil, et une ou deux sur le front. Le corps, sur
un fond verdâtre, a deux bandelettes décolorées
446 LIVRE XVI. LABROÏDES.
blanchâtres, une par le milieu de la hauteur clu
tronc, l'autre naît de l'aisselle de la pectorale. Sous
la gorge sont deux autres bandelettes également
blanchâtres, et qui se réunissent en une seule près
de la ventrale, pour suivre le bas des côtés le long
de l'anale. Des lignes violettes verticales descendent
du dos se perdre sur le flanc. La dorsale, décolorée,
a une bande longitudinale lisérée de deux traits noirs
et déliés. La caudale est bordée sur ses rayons pro-
longés. La pectorale, jaune à sa base, a du noir à sa
pointe. Il y a dans l'aisselle une tache bleue. Les ven-
trales sont verdàtres.
Le poisson frais est, d'après la figure de M. Rup-
pel ^ , vert rayé de rouge. La dorsale a deux raies
couleur de laque.
On peut voir que cette description convient
parfaitement à ce que Forskal^ nous a laisse
de son scarus purpureus , devenu le lahriis
purpureus de Gmelin , et que Bloch a placé
dans le genre si singulièrement composé des
grammistes.
Forskal apris ce poisson comme M. Piuppel,
à Djedda , oii on le lui a nommé dur rat el hàlir,
c est-a-dire perroquet de mer. Selon M. Rup-
pel, on le trouve dans toutes les autres parties
de la mer Rouge.
1. Ruppel, Atl. zu der Reise im n'ordl. Afr. , p. 25, lab. 6,
f,rr. 2. — 2. Forskal , /«?<«. arah., p. 27, n." 12.
CHAP. X. GIRELLES.
447
La GiRELLE A VENTRE ROUGE.
( Julis erjtJwogaster^ Solander. )
Je regarde comme voisin de ce lahrus pur-
pureus l'espèce dont je dois la connaissance à
M. de Mertens. Son dessin nous représente un
poisson
d'un beau vert, rayé de deux lignes courbes et un
peu concaves, d'un beau carmin, sur les côtés au-
dessus de la pectorale, et d'une troisième, plus pour-
pre, le long du venire : celle-ci et la supérieure s'é-
tendent sur les bords de la caudale, dont le centre
est jaune, avec du bleu à la base. La têle a trois
bandes rouges au-devant de l'œil, une autre arquée
dessous, et une grande tache pourprée sous la gorge.
La dorsale, verte, est rayée de rouge; la pectorale est
violette; l'anale et les ventrales sont jaunâtres rem-
brunies.
L'espèce vient d'Uléa. Je crois que l'on doit
regarder comme identique le labrus erytliro-
gaste?', dont j'ai retrouvé la description dans
les manuscrits de Solander; car le dessin de
Forster, conservé dans la bibliothèque de
Banks sous le nom de lahrus formosus , se
rapporte très-bien à celui de M. Mertens. Ces
compagnons de Cock ont eu leur poisson à
Otaïti sous le nom cYépao.
448 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE SEMI-FASCIÉE.
{Jiilis semifascialus y nob. )
Commerson a rapporté de l'Isle-de-France
une girelle qu'il n'a pas mentionnée dans ses
manuscrits, et qui y a été retrouvée après lui
par MM. Pérou, Lamarre -Piquot et Dussu-
mier.
Elle a la nuque assez convexe, la bouche irès-peu
fendue; les dents mitoyennes ne dépassent pas les
latérales, qui sont fort petites; point de canines à
l'angle de la bouche, le dessous de l'œil et le limbe
du préopercule criblés de pores. La hauteur du
tronc fait un peu plus et la longueur de la tête un
peu moins du quart de la longueur totale. La portion
épineuse de la dorsale est plus basse que la partie
molle. La caudale est peu échancrée, quand elle est
fermée. Elle devient concave près des angles, et
convexe dans le milieu , quand ses rayons sont écartés.
Les ventrales sont très-petites.
D. 8;13; A. 3/li; C. 13: P. 15; V. 1/5.
La ligne latérale est rameuse. Les écailles ont leur
surface nue striée; la surface recouverte, plus que
double de l'autre, a sa portion centrale finement
striée et les trois côtés du bord radical ciselés : ces
écailles sont très-minces. J'en compte vingt-six entre
l'ouïe et la caudale, et trois au-dessus et dix au-
dessous de la ligne latérale.
Dans l'alcool , on voit six bandes noires descendre
du dos et venir s'évanouir sur les flancs à moitié de
CHAP. X. GIRELLES. 449
la hauteur du tronc. Ce noir remonte sur la dorsale
et y dessine des traits obliques en avant et vers le
haut, de manière que la cinquième bande, qui est
sous la fin de la dorsale, et la quatrième, qui est
sous le milieu de la portion molle, laissent deux
traces sur cette partie de la nageoire. La troisième
et la seconde en dessinent de semblables sur la por-
tion épineuse j mais ces traits bordent la nageoire
qui est beaucoup plus basse. Une tache noir foncé
est sur les deux premiers rayons épineux; une autre
tache se voit à l'angle de l'opercule, une autre à
l'aisselle de la pectorale, dont la pointe a du noirâtre:
il y a aussi une tache pâle sur le commencement de
l'anale. La joue est traversée par des raies bleues : le
reste du corps est jaunâtre décoloré.
Mais M. Dussumier, qui l'a vue fraîche, nous la
décrit comma ayant, sur un fond vert-pré très-clair,
le corps traversé par des bandes violettes, le des-
sous de la mâchoire argenté à reflets verts, la dor-
sale vert clair varié de lilas; la caudale a sur cette
teinte deux bandes roses; les rayures de la tète sont
violettes.
Nos plus grands individus ont six pouces
de long.
]La GiRELLE A DORSALE RAYÉE.
{Julis dorsalis y Q. G., Astroh, pi. i5, fig. 5.)
Les mêmes mers nourrissent une espèce
voisine de celle-ci, et qui n'en est peut-être
qu'une variété, parée des couleurs que pren-
i3. 29
AT^O LIVRE XVI. LABROÏDES.
neut souvent les poissons pendant le temps
du frai.
Elle a, suivant M. Quoy, le dos vert, traversé par
sept demi-bandes noires; la troisième, la quatrième
et la cinquième se prolongent en une bande jaune
ponctuée d'orangé, du plus agréable effet. Le ventre
est blanc argenté, un peu lavé de verdâlre, avec
quelques reflets rougeâtres, dus à des points qui
prennent plus de netteté sur la queue et y forment
une bandelette rosée. La tête est verte, avec deux
taches alongées couleur de laque au-devant de Tocil,
et deux ou trois derrière cet organe. Elles deviennent
obliques sur l'opercule et sur le préopercule. La
dorsale, verdâtre, a une raie noire dans son milieu.
L'anale, verdâtre, a une tache sur les rayons épineux ,
verte selon la figure, et noire selon le texte. La cau-
dale, verdâtre, a les deux bords supérieur et inférieur
rougeâtres et prolongés en pointe. La ligne latérale
est ramifiée, mais non interrompue, bien que M. Quoy
dise le contraire. La pectorale a la base rougeâtre.
D. 8/12; A. 3/il,etc.
Cette espèce atteint à cinq pouces. Je crois
qu'elle est distincte de la précédente malgré
ses affinités, surtout à cause de la raie noire
de la dorsale.
Je regarde comme identique la girelle si
élégamment figurée par M. Bennett dans les
poissons de Ceilan (n.° 12), mais je ne puis
dire sous quel nom, parce que la feuille de
CHAP. X. GIRELLES. 451
texte manque à mon exemplaire. Il a peint plus
vivement la bande latérale rouge; la raie de
la dorsale est vert foncé, et son i'ond est jaune.
C'est encore à elle que je rapporte la figure
que MM. Kubl et Van Hasselt ont envoyée de
Java sous le nom de julis prostzgma^ et qui
ont peint les raies verticales violettes, la bande
longitudinale pourpre, et la dorsale verte, à
raie lilas et à bordure jaune.
C'est aussi près de cette espèce que je place
le labrus pulcherriinus de Forster, qu'il a
dessiné à Otaïti, et dont j'ai vu la figure dans
la bibliothèque de Banks. Sur un fond vert,
il avait des bandes noires terminées de jaune j
une bande longitudinale rose; la tête verte,
rayée de lilas; la caudale verte, bordée de rose.
Je la retrouve aussi dans Renard (fol. 28,
n.° i55), sous le nom de plieasant. Si le
poisson n'était pas de la même espèce, il en
était du moins très-voisin; en effet l'original
de Vlaraing nous le présente vert, varié de
bleu, de jaune et de noir; deux raies rouges
sur la joue, une bande rouge le long des côtés
de la queue ; six demi-bandes noires sur le dos ;
la dorsale rayée, les autres nageoires jaunes,
la caudale bordée de rouge.
452 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE TRIMACULÉE.
{JuUs trimaculatus , Q.)
Les naturalistes de l'expëditioii de ce cé-
lèbre navigateur qui affronte aujourd'hui les
glaces du pôle austral, ont rapporté de Vani-
koro une girelle
à nuque bombée, à caudale tronquée. La plus grande
hauteur dépasse un peu le quart de la longueur to-
tale. Les dents mitoyennes sont saillantes : celles de
l'angle sont doubles, la postérieure étant la plus pe-
tite. Les écailles sont assez grandes, finement striées :
la portion radicale l'est entièrement. J'en compte
vingt-quatre sur la longueur, et huit au-dessous et
deux au-dessus de la ligne latérale, qui n'est pas
rameuse.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
Le dos a conservé des teintes violettes sur un fond
rougeâtre; le ventre, argenté, est glacé de verdâtre;
la nuque est couverte de points bleus, et chaque
écaille du dos et des flancs a un trait bleu vertical.
Au milieu de la longueur du tronçon de la queue
et au-dessus de la ligne latérale est une grande tache
noire. La tête, violette, a des taches bleu céleste sur
la tempe et l'opercule; une grande tache de cette
teinte couvre le sous-orbitaire et une autre l'inter-
opercule. La dorsale, décolorée, a encore des traces
de points ronds disposés en séries entre chaque
rayon, une raie longitudinale au-dessus et un fin
liséré le long des rayons mous.
CnAP. X. GIRELLES. 41>3
La caudale a une teinte uniforme jaunâtre; lanale
a sur la base une bandelette blanche, et au-dessus
une autre bleuâtre , lisérée de plus foncé; une petite
tache est à l'angle de l'aisselle. La ventrale est pro-
longée en filet.
Le poisson frais a, suivant M. Quoy, le dos vert,
le ventre argenté, les taches des joues et du dos d'un
beau rouge vermillon; la portion épineuse de la
dorsale verte, l'autre parlie bleuâtre; les rayures de
ladorsale sont rouges; la caudale jaunâtre, est bordée
d'une teinte légère de carmin; l'anale, bleuâtre, a une
bordure rose, une raie jaune dans le milieu, et près
de la base un petit trait rouge; les taches des flancs
sont noires.
Nos individus ont cinq pouces de long. La
figure donnée dans l'Astrolabe (pi. 20, fig. 2)
est loin d'être exacte; la nuque n'est pas assez
bombée, les dents ne sont pas assez proclives,
le rose de la caudale a été oublié, etc.
La GiRELLE DE Leschenault.
( JiiUs Leschenaulti 3 nob. )
M. Leschenault a rapporté de Bourbon une
girelle voisine des précédentes.
Elle a le front bombé, assez saillant au-devant des
yeux , qui sont plutôt petits. Les dents mitoyennes
droites et avancées : celles de l'angle de la bouche
petites, les intermédiaires très-fines. Les écailles sont
grandes, à bord mince, non strié; mais elles le
A'6A LIVRE XVI. LAEROÏDES.
sont dans le centre, La portion radicale est large et
toute couverte de stries rayonnantes, celles des côtés
étant plus distantes que celles du triangle central. Le
dessus de la tête est violet, le bas des joues rose; de
grandes taches, devenues bleues dans l'eau -de-vie,
couvrent le dessus de la tête, le sous-orbitaire, la
joue, la tempe, les côtés de la nuque derrière l'œil,
et s'étendent sur l'opercule et un peu sur le sous-
opercule, dont le haut est bordé par l'une d'elles;
mais il n'y en a pas sur l'inieropercule. Le dos est
devenu obscur à reflets rougeàlres, et l'on voit sur
chaque écaille une tache étroite verticale en crois-
sant, dont plusieurs réunies font une bande argentée,
oblique de l'aisselle sur le ventre. La dorsale a des
teintes violacées et une bande pâle à la base. L'anale
a une bande blanche très-nettement dessinée. La cau-
dale, tronquée et légèrement arrondie, a sur un fond
pâle quatre ou cinq bandes verticales, confluentes
et violettes.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
Les taches sont orangées sur le poisson frais, dont
la couleur générale est vert-pré. Les opercules sont
jaunes; le reste de la tête est vert plus foncé que le
corps. La caudale est jaune et ses raies orangées;
l'anale est blanche et sa bande est orangée.
Cette description des couleurs est lirëe des
notes de M. Dussuraier, qui a retrouvé cette
espèce à TIsle-de-France. Nos individus dé-
passent six pouces.
CHAP. X. GIRELLES. 455
La GiRELLE DE EyDOUX.
( Julis Ejdouxii 3 nob. )
M. Eydoux vient de rapporter des îles
Sandwich une fort belle espèce de girelle,
qui n'a pas encore été décrite, et que je me
fais un vrai plaisir de lui dédier.
Sa forme rappelle assez bien celle de la girelle de
notre Méditerranée; elle a cependant la nuque plus
bombée. Sa hauteur égale la longueur de la tête, et
est contenue quatre fois et un tiers dans celle du
corps, y compris la caudale. Le museau est peu aigu;
les dents mitoyennes sont dirigées en avant et poin-
tues : il n'y a pas de crochet à l'angle de la bouche.
La dorsale est longue, mais moins haute que l'anale,
qui mesure près de la moitié de la hauteur du tronc.
La caudale est légèrement arrondie.
D. 9/12; A. 3/12 j C. 13; P. 15; V. 1/0.
Les écailles sont très-petites; il y en a plus de quatre-
vingts entre l'ouïe et la caudale, j'en compte cinq à six
au-dessus de la ligne latérale, qui est tracée par le
premier sixième de la hauteur, et trente-trois ou
trente- quatre rangées au-dessous. Une écaille est
oblongue, du double plus longue que haute, mince
et comme membraneuse; sa surface radicale est sil-
lonnée par dix-huit rayons qui entament le bord.
La ligne latérale est formée d'une suite de tubulures
serrées, obliques, remontant vers le dos sous la dor-
sale, et devenant horizontales sur le tronçon de la
queue.
456 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La couleur du poisson, conservé dans l'esprit de
vin, est distribuée par trois larges raies noires lon-
gitudinales; une, qui naît sur le front, passe le long
du pied de la dorsale, suit le dos de la queue, et
trace un large cercle sur la caudale : elle vient mourir
sous le dessous de la queue. La seconde commence
sur le bout du museau au-dessus des narines et de
l'œil, et suit la ligne latérale; la troisième traverse
l'œil, la tempe, passe au-dessus de l'angle de l'oper-
cule, se continue droite le long des flancs, et va se
confondre avec la précédente à l'endroit où la ligne
latérale s'infléchit; toutes deux réunies s'effacent dès
qu'elles atteignent les rayons de la caudale. Une tache
lilas est à l'angle de l'opercule, une autre le long du
limbe du préopercule, et une troisième au-dessous
de l'œil, près de l'angle de la bouche. Une tache
bleue très-foncée, comme noire, est sur le commen-
cement de la dorsale, qui a une large bande noire
le long de son bord, liséré de blanchâtre; une série
de taches triangulaires forme à la base des rayons
une seconde raie sur la nageoire, dont le milieu est
jaunâtre, ainsi que la partie non colorée de la cau-
dale. L'anale a la moitié inférieure noire, lisérée de
blanchâtre; l'autre partie est grisâtre, avec le pied
des rayons jaunâtre. Les pectorales et les ventrales
ne sont pas colorées. Toute la partie inférieure des
, flancs, sous la troisième bande noire, est jaunâtre,
ou mieux, couverte d'un réseau jaune à mailles aussi
petites que les écailles, dont le centre est bleuâtre ou
nacré.
M. Eydoux, qui a observé le poisson frais, nous
, CHAP. X. GIRELLES. 457
apprend que les bandes sont effectivement brunes,
que leur intervalle est jaune, qu'au-dessous de la
bande inférieure est une bordure de la même cou-
leur, et que le reste du flanc est rougeâtre ou rosé,
passant à l'argenté sous le ventre.
L'espèce atteint à sept pouces et demi de
longueur.
Elle avait été déjà vue et dessinée par
M. Mertens pendant l'expédition russe du
capitaine Lïitkej la disposition des raies lon-
gitudinales est tout-à-lait semblable.
La GiRELLE DE SoULEYET.
{Julis Souleyetiiy nob. )
Le Cabinet du Roi possède depuis long-
temps une girelle
dont les dents sont pointues, de grandeur médiocre,
sans canines vers l'angle. L'œil est de grandeur
moyenne, sur le haut de la joue, entouré de canaux
muqueux, dont trois, plus longs, sillonnent le côté
de la face jusque sur l'opercule: on en voit d'autres
sur l'interopercule. La caudale est coupée carrément j
la dorsale est basse; l'anale est un peu plus haute : son
premier rayon épineux est très-petit.
D. 8/13 j A. 3/il; C. 13) P. 15; V. 1/5.
Les écailles sont larges, granuleuses ou striées
dans les deux sens; le pourtour seul de la partie
radicale est strié comme dans \ejuUs semifascialus ;
458 LIVRE XVI. LABROÏDES.
le centre est irrégulièrement et finement ciselé ; il
y en a vingt-liuit rangées entre l'ouïe et la caudale, et
dix ou douze dans la hauteur, dont trois au-dessus
de la ligne latérale : celle-ci est composée d'une suite
d'arbuscules assez étendus.
Le fond de la couleur du dessus du corps est
brun, plus ou moins jaunâtre, passant à l'argenté
sous le ventre. Il y a des lignes ou des points noirs
sur la tête, sous l'œil et sur l'opercule; les flancs
sont marqués de traits verticaux interrompus et
tracés en échiquier; une tache noire est sur le de-
vant de la dorsale.
L'individu que je décris est long de cinq
pouces et une ou deux lignes. Il nous a été
envoyé de l'Isle-de-France par M. le colonel
Mathieu.
MM. Quoy et Gaimard en ont rapporté des
îles Sandwich, lors de leur première relâche
avec M. Freycinet, un petit individu long de
deux pouces et demi,
qui a plus de points sur la tête, et une petite tache
grise sur les premiers rayons mous de la dorsale.
Je retrouve cette même espèce dans les
collections faites dans le même archipel par
MM. Eydoux et Souleyet, qui en ont pris un
individu à la cascade d'Ouaou.
Ici les traits du corps sont plus confluents, et
forment trois séries de grosses taches. La couleur a
conservé des teintes violeues.
CHAP. X. GIRELLES. 459
J'ai dédié cette jolie espèce au compagnon
de travail et de navigation de M. Eydoux,
M. le docteur Souleyet.
La GiRELLE DE DeSJARDINS.
{Julis Ahhortani y nob. )
M. J. Desjardins a adressé de l'Isle-de-France
pour le Cabinet du Roi, une girelle que je ne
trouve pas décrite parmi les espèces dont
M. Th. Bennett a donné les caractères, sur les
individus envoyés de cette île à la Société
zoologique de Londres par M. Telfair.
Celle-ci a le corps Irapu, la hauteur étant du
tiers de la longueur du corps, la caudale non com-
prise. Les dents sont petites ; il n'y en a point dans
l'angle de la bouche. L'œil est petit, entouré de pores
en séries; trois conduits muqueux sont sur l'oper-
cule, comme dans la précédente; mais je n'en vois
pas, comme dans celle-ci, sur l'interopercule, qui
est très-large. L'espèce présente s'en distingue encore
par les écailles , qui sont larges, à bord mince et mem-
braneux, strié comme la partie nue sur toute la por-
tion radicale, qui est aussi très-large. La ligne latérale
est très-ramifiée.
Le poisson décoloré paraît comme doré; on ne
voit aucune trace de bandes ou de taches sur la tète:
des traits violets, qui peut-être étaient orangés pen-
dant la vie, dessinent sur le bord des écailles un
réseau qui couvre les côtés. La dorsale a une tache
460 LIVRE XVI. LABROÏDES.
noire sur les premiers rayons, le reste est d'une
couleur jaune uniforme; l'anale a la moitié infé-
rieure violette et le bord pâle; les pectorales sont
violacées, le bord supérieur étant nettement coloré;
les ventrales et la caudale n'offrent qu'une teinte
uniforme.
D. 8/13 j A. 3/11, etc.
Je n'ai qu'un* s«ul individu de cette espèce.
Il est long de six pouces et demi.
La GiRELLE ROUGE.
( Jiilis miniatus , K. V. H. )
Je trouve dans les collections faites à Java
par MM. Rulil et Van Hasselt, une petite
girelle voisine des précédentes,
qui a sur le second rayon mou de la dorsale une
petite tache noire et ronde, un trait vertical noirâtre
derrière l'œil, et un autre longitudinal et brillant
d'un beau nacré sur le sous-orbitaire, partant de
l'anole de la bouche et se terminant en se coudant
sur le sous-opercule, après avoir traversé l'oper-
cule. Le dos et les flancs ont, sur un fond qui a été
probablement rouge de minium, des traits noirâtres
anastomosés, et la poitrine et le ventre sont très-
élégamment couverts de petits traits en croissant,
à convexité tournée en avant, en sens opposé à
celle du bord des écailles, et d'une belle couleur
blanche et brillante; cinq ou six petits traits argentés
descendent aussi du dos vers la ligne latérale. La
CHAP. X. GIRELLES. 4G 1
dorsale avait quelques rayures plus ou moins effa-
cées; l'anale a des petits points noirs; les autres
nageoires sont unicolores.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
La ligne latérale a des arbuscules peu nombreux ,
formant le plus souvent des petits chevrons à deux
branches.
L'individu que M. Temminck a bien voulu
céder du musée royal de Leyde à celui de
Paris, est long de deux pouces et demi en-
viron.
La GiRELLE NUAGEUSE.
( Jidis nebulosus , nob. )
J'ai encore sous les yeux une girelle
qui a sur le dos quatre taches argentées, les deux
antérieures étant plus étroites. Sur la dorsale exis-
tent deux taches noirâtres, une petite derrière le
premier rayon, et une seconde sur le haut des trois
premiers rayons mous. Cette espèce a d'ailleurs, pour
se distinguer des deux autres, une bande bleuâtre
en chevron sur la joue, au-dessous de l'œil, une
autre en avant sur le sous-orbitaire antérieur, une
autre en travers sur l'opercule et prolongée en s'ef-
façant sous la base de la pectorale. Une bandelette
bleue ou lilas s'étend le long du corps au-dessous
de la ligne latérale, de l'angle de l'opercule vers la
queue, mais elle s'évanouit de bonne heure. Il y a
au-dessous la trace d'une seconde, encore plus effacée;
sur le milieu des cotés il y a plusieurs taclies noires
/|4]2 LIVRE XVI. LABROÏDES.
nuageuses, mêlées à d'autres nacrées. On voit sur la
dorsale des traces de taches blanches ou nacrées,
grandes à la base, plus petites près du bord, qui
devait être bleuâtre. L'anale, plus bleue, a deux ran-
gées de taches blanc de lait; la caudale, blanchâtre, est
traversée par cinq à six séries verticales de points
noirâtres; les nageoires paires ont conservé une
teinte jaunâtre.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
La caudale est coupée carrément, et a le bord
légèrement arrondi, quand elle est déployée; la ligne
latérale rameuse; les écailles assez grandes, striées:
il y en a vingt-six rangées sur la longueur. Toute la
portion radicale est entièrement striée; il y a trente-
deux rayons à l'éventail,
L'indiviau a trois pouces et demi. Il faisait
partie des collections de feu M. Polydore
Roux. Il vient de Bombay.
La GiRELLE VARIÉE.
( Julls variegatus , Ruppel. )
Une charmante espèce de girelle a été ob-
servée dans la mer Rouge par M. Ruppel. Il
en a cédé un individu au Cabinet du Roi,
sur lequel j'ai fait les observations suivantes :
Le corps, un peu trapu, a le museau pointu; la
queue mesure plus de la moitié du tronc. La hauteur
aux pectorales est comprise trois fois dans la distance
du bout du museau à la naissance de la caudale. La
CHAP. X. GIRELLES. 465
lête égale la hauieur du tronc, les dents mitoyenrjs
sont saillantes , ainsi que les canines de l'angle de la
bouche. La caudale a le bord légèrement arrondi.
D. 9/11 ; A. 3/12; C. 13; P. 13; V. 1/5.
Les écailles sont petites, très-minces, lisses ou à
peine striées d'un ou deux traits excessivement fins;
une d'elles, vue détachée, est oblongue, et a sa
portion radicale striée de quatorze à seize rayons.
Je compte cinquante-deux rangées entre l'ouïe et la
nageoire de la queue, quatre ou cinq au-dessus de
la ligne latérale, et vingt à vingt-deux au-dessous;
la ligne latérale n'est pas rameuse.
La couleur dans l'eau -de -vie est un jaune rou-
geâtre, devenant argenté sous la poitrine, et semé
de points noirs irréguliers; une tache noirâtre est
derrière, une autre à la base de la pectorale, et trois
sur la dorsale, une à chaque extrémité et une plus
grande sur le milieu ; un trait bleu se voit sous ToeiL
Les nageoires sont jaunâtres. La figure de M. Ruppel ^
représente le fond de la couleur verdâtre lavé de gris,
avec six petits traits verticaux descendant du pied de
la dorsale, et s'efFacant en atteignant la ligne latérale;
le corps, couvert de petits points noirs, est linéolé de
traits jaunes et longitudinaux ; la tache de l'œil est
bleue, ainsi que trois traits longitudinaux tracés sur
la joue; la caudale jaunâtre; les autres nageoires
bleuâtres; la dorsale ayant un ocelle blanc, à centre
noir et large, sur le troisième rayon mou, et un
très-petit de même couleur près le premier rayon
1. JSeue Wîrhellhîere zu der Fauv. ahyss., pi. 4, fig- 2.
464 LIVRE XVI. LABROÏDES.
mépineux, et de plus trois ou quatre séries de bandes
ou de points lilas. L'anale a au milieu de sa hauteur
une bandelette d'un bleu clair, lisérée de deux traits
lilas. L'iris est d'un beau rouge carmin.
M. Ruppel a pris cette espèce à Massuah;
il en a vu. des individus de six pouces. Ce
naturaliste a réuni cette espèce avec ses au-
tres halichores, sous le nom dilialicores varie-
^atus, a cause de sa dent saillante à l'angle
de la bouche. Je lui ai conservé le nom spé-
cifique qu'elle avait reçu par le célèbre voya-
geur de Francfort.
La GiRELLE AUX NAGEOIRES ROUGES.
( Julis erjthropterus 3 nob. )
Je pense que M. Ruppel regarde à tort le
Woorn de Renard (fol. 9, n.° 62) comme
pouvant être rapproché de l'espèce que je
viens de décrire d'après l'auteur de la Faune
d'Abyssinie.
J'en juge mieux que M. Ruppel n'a pu le
faire, parce que j'ai sous les yeux l'original de
l'amiral Corneille de Vlaming. Il représente
le poisson vert, marqué de points rouges disposés
en bandelettes transversales sur le tronc, au nombre
de huit. Les pectorales et les ventrales sont rouges,
ainsi que l'anale ; une série de points noirs existe le
long de la dorsale.
CMAP. X. GIRELLES. 465
Renard a rendu le poisson de lamiral tout-
à-fait méconnaissable. Je ne doute pas qu'on
ne retrouve celte espèce.
La GiRELLE MULTICOLORE.
( JllUs multicolor, Ruppel, )
M. Ruppel^ a encore décrit, sous le nom
de halichores multicolor, une girelle dont
le dos est brun lougeâtre, traversé par six larges
bandes verdâlres, qui ne descendent pas au-delà de
la moitié des flancs. Le ventre est jaunâtre ou ver-
dàtre; la tête, de la couleur du dos, a une raie bleue
sur la portion médiane, allant du bout du museau
à la dorsale; une seconde raie bleue part du milieu
du maxillaire supérieur, remonte vers l'œil, qui l'in-
terrompt, et s'étend ensuite par le milieu des bandes
du dos jusqu'au bord postérieur de la cinquième,
sous le dernier rayon de la dorsale. Une troisième
raie bleue va du milieu de la branche de la mâchoire
inférieure courir par plusieurs flexuosités vers l'angle
de l'opercule. Au-dessous il y a deux traits bleus in-
terrompus, puis un autre le long de l'interopercule,
et un chevron de même teinte sous la gorge. Une
bande interrompue, jaune orangé, traverse longi-
tudinalement la poitrine, en partant de l'aisselle de
la pectorale et en finissant sous l'aplomb du sixième
rayon mou de la dorsale. La queue est couverte, près
de la naissance de la caudale, de taches ou vermicel-
1. ISene Wirbelthiere zu derFaun. abjss. , p. j5 , pi. 4 , fig- 5.
i3. 3o
4G6 LIVRE XVI. LABROÏDES.
lures bleues : cette nageoire a quatre raies rougeâtres
verticales sur un fond gris rougeâtre. La dorsale et
l'anale ont la base verdàtre, l'autre moitié rose avec
trois lignes longitudinales violettes. Les nageoires
paires sont rosées.
D. 9/12; A. 3/12; C. 12; P. 13; V. 1/5.
Le premier rayon de la dorsale est alongé et a un
peu de noirâtre sur sa membrane.
Les individus atteignent à six pouces. M.
Ruppel les a pris à Djedda au mois de Juillet.
La GiRELLE RAYÉE DE BLEU.
( Julis cœruleo-vittatus , Ruppel. )
Je trouve dans les nouvelles livraisons de
M. Ruppel une girelle dont
le dos est vert de mer, le ventre blanc lavé de rose
très-clair, une raie bleue en zigzag est dessinée
le long des flancs, sur le haut des cotés. Sur la joue
sont trois taches carmin, lisérées de bleu; celle du
milieu est la plus grande et se prolonge sur l'oper-
cule, et même sur l'épaule, jusqu'à la ligne bleue.
Un autre trait rouge descend obliquement de l'ais-
selle de la pectorale derrière l'insertion de la ven-
trale. Celles-ci sont prolongées en filet; les deux
nageoires paires sont rosées; la dorsale et l'anale sont
lilas et rayées longitudinalement de trois bandelettes
roses; la caudale est verte comme le dos, avec deux
bandes verticales irrégulières rouges; l'iris de l'oeil
CHAP. X. GIRELLES. 467
est carmin; la caudale est légèrement arrondie; le
museau est assez pointu.
D. 9/11; A. 3/11; C. 14; P. 14; V. 1/5.
M. Rappel a trouvé ce poisson assez fre-
quemineiit sur le marche de Djedda. Les in-
dividus étaient longs de sept pouces. M. Hup-
pe!' en avait fait une espèce de ses halicliores,
à cause des défenses de l'angle de la mâchoire.
La GiRELLE ÉLÉGANTE.
( Julis elegans ^ K. V. H. )
MM. Ruhl et Van Hasselt ont envoyé une
girelle voisine de la précédente, qui a
le dos vert, un point violet sur chaque écaille,
et une bande violette le long des côtés; le dessous
argenté glacé de verdâtre. La tête, v«rte en dessus,
est jaune en dessous; un trait courbe rouge de laque
va de la lèvre à l'œil; deux points rouges sont au-
dessus de cet organe; un trait oblique, rouge aussi,
traverse la poitrine.
La dorsale et l'anale sont vertes, rayées de deux
bandes rouge carmin, bordées de bleu. La caudale
a sur un fond vert des bandes verticales rouges, bor-
dées de bleu : elle-même a le limbe jaune.
Cette espèce vient de Java.
1. Neue JVirbelthiere zu derFaun. abyss. , p. i4 j tab. 4, %• * •
408 LTVRi: XVI. LABPvOÏDES.
La GiRELLE A VENTRE RAYÉ.
{JuUs strigiventer , Benn., Proceed. of the Zool
soc, i852, p. 184.)
Une autre girelle, de risle-de-France, a
la caudale arrondie, le corps ovale et lancéolé, la
tête pointue; elle est brune sur le dos avec des gout-
telettes plus foncées; plus pâles en dessous, avec
six lignes longitudinales argentées sur chaque côté.
La moitié supérieure de la tête est mêlée de jaunâtre ;
l'inférieure est argentée; les nageoires sont transpa-
rentes, avec un point noir près la base de lavant-
dernier rayon mou de la dorsale et de l'anale-
D. 9/12 ; A. 3/12 , elc.
La GiREi;.LE de Ceilan.
{Julis ceilanicus , Benn., Proceed. of the Zool. soc. ,
i832, p. i83.)
Le docteur Sibbald a réuni à Ceilan une
nombreuse collection de poissons. M. Bennett
a donné sur ces espèces une notice dont nous
extrayons l'article suivant :
Une d'elles, décrite sous le nom àe julis
ceilanicus f
a la caudale arrondie; la couleur est jaunâtre, la tête
plombée avec des rivulations orangées. Cette teinte
se retrouve sur les nageoires verticales, sur une bande
bordée de bleu, tracée le long de la base de la dor-
CIIAP. X. GIRELLKS. 469
- sale, sur une autre interrompue, qui suit la ligne
latérale, sur une troisième le long des flancs, qui
est en haut et en bas lisérée de bleu, et sur des
branches de cette ligne plus courtes et descendant
sur le ventre; enfin, sur une ligne oblique allant de
la base des pectorales au ventre. La dorsale a entre
la base de chaque rayon une large ligne oblique de
' couleur bleue, une seconde de même teinte au mi-
lieu des rayons mous; elle a vers la pointe des taches
bleues. L'anale porte au milieu et sur son bord libre
une bande qui est aussi de couleur bleue, et celte
teinte colore les rivulations dont la caudale est ornée.
Les dents de l'extrémité du museau sont grandes et
pointues : celles de la mâchoire supérieure reçoivent
entre elles les dents de l'inférieure. Il y a dans l'angle
de la bouche deux crochets saillants.
D. 9/II5 A. 3/il, etc.
Il faut faire attention que M. Bennett ne
regarde pas cette espèce comme identique du
lahriis ceilanicus de Forster. Il aurait été
toutefois mieux de lui donner un autre nom
spécifique.
La GiRELLE SCAPULAIRE.
{Julis scapularis 3 Benn., Proceed. qf the Zool. soc.^
i85i, t. I."j p. 167.)
Cette girelle, dont nous devons la diagnose
h M. Bennett,
a la caudale arrondie, la tète chargée de rivulations?
470 LIVRE XVI. LABROÏDES.
le corps de petits croissans, et derrière les pecto-
rales une bande tracée obliquement vers le ventre ,
une bandelette sur l'anale : le tout de couleur rose.
La dorsale et la caudale sont de même roses; celte
dernière nageoire est bariolée de bleu; la tache du
dos, les taches en croissant sur la base, la bandelette
sur le milieu, et le bord, étant bleus. La pectorale,
transparente, est jaune à la base, et il y a sur l'épaule
une large bande noire, tronquée au sommet de la
pectorale. >
D. 9/11; A. 3/12, etc.
Cette espèce vient de risle-de-Fiance, d'où
elle a été envoyée à la Société zoologique par
M. Telfair.
La GiRELLE DOUBLE CHAINE.
{ Jiilis hicatencitus , Benn., Proceed. of the Zool.
soc, i838, t. I.", p. 167.)
Le même naturaliste a encore envoyé do
cette île à la même Société une autre girelle,
que M. Bennett a décrite
comme ayant la caudale carrée, la tête et le dos verts,
les côtés rouges, ornés de chaque côté de deux
bandes formées de deux séries de taches grises, oblon-
gues et transversales ; le bord de la dorsale et de
l'anale d'un beau jaune; la pointe de la caudale de
même couleur; la pectorale noire, ayant à sa base
une grande tache orangée, atteignant jusqu'au bord
inférieur; les ventrales verdàtres.
D. 9yl2; A. 3/11, etc.
CHAP. X. GIRELLES. 47l
La GiRELLE DE FiNLAYSON.
{Julis Finlajsoniy nob.)
J'ai observé parmi les dessins envoyés de
Ceilan par le major Finlayson , et déposés
dans le Cabinet de la Compagnie des Indes,
une girelle
verle, à raie latérale brune, couverte de points plus
foncés. La dorsale, bordée de rouge, est poinlillée de
cette couleur; l'anale est semblable; la caudale a sur
chaque lobe trois raies obliques orangées, bordées
de bleu. Le dessous de la tête, argenté, a un trait
orangé sur toute sa longueur, il est au-dessous de la
bande brune qui vient du corps par l'œil jusqu'au
bout du museau.
La Girelle a raies pourpre.
{Julis purpureo-lineatus , nob.)
Une autre peinture, envoyée par le même
naturaliste, m'a fait voir une petite espèce
à corps vert, rayé de violet sur le dos, sur le milieu
du corps, sur le bord de la dorsale et de l'anale; les
pectorales sont jaunes; la tête est jaunâtre, tachetée
de violet; la caudale a de jolies petites raies rouges;
la base de la dorsale est pointillée de rouge très- vif.
Ce poisson vient aussi de Ceilan.
472 LIVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE AXILLAIRE.
{Julis aocillaiis , nob. )
Une petite giielle des îles Sandwich, rap-
portée par MM. Quoy et Gaimard de leur
premier voyage avec M. le capitaine Freyci-
net, et qui n'a pas été retrouvée depuis soit
par eux, soit par les naturalistes de la Bonite, a
la courbe du dos assez convexe; celle du ventre
presque rectiligne. La longueur de la tête est égale à
la hauteur du tronc et au tiers de la longueur du
corps, la caudale non comprise, celle-ci y étant con-
tenue sept fois. Les dents sont petites, tronquées,
à peu près égales ; l'interniaxillaire a une sorte de
petit talon revenant en avant, et donnant de son
bord antérieur une dent canine conique, droite,
très- pointue et dirigée en avant. Les deux o^uver-
tures de la narine sont très -petites et rapprochées,
et la tête est percée d'un assez grand nombre de
pores. La caudale est carrée.
D. 9/11; A. 3/11; C. 13; P. 16; V. 1/5.
Je compte vingt-huit rangées d'écaillés entre l'ouïe
et la caudale, trois au-dessus de la ligne latérale et
neuf au-dessous. Une écaille, vue détachée, est pen-
lagonale; son triangle, libre et nu, a des stries rayon-
nantes du centre vers les deux côtés, au nombre de
quatorze environ : elles sont croisées par de fines
ciselures. La portion recouverte et quadrilatère a le
bord radical droit festonné, et dix -huit rayons à
CHAP. X. GIRKLl.ES. 475
Févenlail. La ligne latérale est composée d'une suite
de tubulures non rameuses.
La couleur est un brun assez uniforme sur le dos,
un peu tacheté sous le ventre. La base de la pecto-
rale est noire, et au-dessus de l'aisselle il y a une
tache blanche et nacrée, qui se conserve même sur
les individus les plus décolorés. On voit trois petits
points noirs de chaque côté de la queue, le long de
la ligne latérale. Les articulations des rayons de la
pectorale sont marquées par de très-fins traits noirs.
Sur le frais, les couleurs sont plus vives. D'après
les observations de M. Quoy, ce poisson aurait une
teinte rosée, des points bleuâtres sur le corps et
sur la tête, qui est, ainsi que le dos, un peu enfumée.
■ Le ventre, la gorge et les nageoires, tirent sur le
jaune; la tache de l'aisselle est d'un beau jaune écla-
tant; les points noirs de la queue sont le centre d'un
cercle jaune.
La longueur des diffërens individus varie
de quatre pouces à quatre pouces et demi.
Cette espèce doit être cependant répandue
dans les mers de l'Inde; car le Cabinet du
Roi en possédait depuis long-temps un indi-
vidu de même taille que les prêcédens, et
qui provenait du voyage de Pêron, qui n'a
pas vu les îles Sandwich. M. Quoy, en adop-
tant le nom que nous avions donné à l'espèce,
en a publié une description dans la Relation
zoologique du voyage de l'Uranie, page 272.
474 UVRE XVI. LABROÏDES.
La GiRELLE DE SeBA.
( Jiills Sehanus j nob. )
Nous avons pu déterminer avec certitude la
girelle dont Seba a donné la figure tome III,
planche 3i, figure 5, parce que nous possé-
dons dans le Cabinet du Roi l'individu qui
lui a servi d'original. C'est une girelle
à corps ovalaire, à flancs arrondis, dont la hauteur,
égale à la longueur de la tête, surpasse un peu le quart
de celle du corps. La dorsale est Basse; les ventrales
sont assez reculées, et la caudale est coupée carré-
ment. La ligne latérale n'est pas rameuse; les écailles
sont finement striées: elles ont leur surface radicale
ciselée par quatorze rayons qui entament le bord,
lequel est un peu sinueux.
D. 9/11; a; 3/11, etc.
Le corps est décoloré; mais il reste encore la trace
de trois raies longitudinales tracées sur le côté du
poisson. Une, roussâtre, vient de l'œil sur le sursca-
pulaire, où elle est suivie d'une bandelette blanche,
qui va tout le long de la ligne latérale se terminer
à la fin de la queue.
Une seconde raie part du bout et reste au-dessous
de l'œil; elle est blanche, puis elle devient rousse,
traverse l'opercule en prenant une teinte plus foncée;
elle continue en passant au-dessus de l'aisselle, pre-
nant de nouveau une couleur blanche, et ne va pas
au-delà du bord de lapectorale. Une troisième raie.
CHAP. X. GIRELLES. 47o
blanche dans toute sa longueur, commence à l'angle
de la bouche, se continue sous la nageon-e, et se
termine à la naissance de la caudale. Les nageoires
n'offrent aucune trace de taches.
La figure de Seba est très-exacte : l'individu
qui lui a servi de modèle est long de quatre
pouces et demi. Il ne parle pas du lieu d'où
il avait reçu ce poisson.
On ne peut rapporter à cette espèce le
lahriis trilineatiis du Système posdiume de
Schneider, parce que Bloch y a joint comme
synonyme le poisson de Kœlréuter, qui, étant
d'une autre espèce, a rendu ce lahrus trili-
neatus un être complexe à rayer de la liste
du catalogiie des êtres.
La GiRELLE RAIE AURORE.
{Jiilis balteatus, Q. G., Ad. de l'Uranie, pi. 56,
fig. 1.)
MM. Quoy et Gaimard ont rapporté des
îles Sandwich une girelle très -voisine de la
précédente, mais qui n'a pas les lignes des
flancs disposées tout-à-fait de même.
Elle a d'ailleurs le corps plus haut et le museau
moins pointu. La hauteur est du tiers de la longueur
du corps, sans y comprendre la caudale, qui a la
moitié de cette hauteur du tronc, La tête, plus courte
que le corps n'est haut, est contenue quatre fois dans
476 LIVRE XVI. LABROÏÛES.
la longueur totale. La dent de l'angle de la bouche
est assez saillante et pointue. La ligne latérale n'est
pas rameuse : je trouve vingt-quatre rangées d'écaillés
sur le flanc, et onze dans la hauteur, dont deux
seulement au-dessus de la ligne latérale. Une écaille
est à peu près carrée; sa surface radicale, très-large,
n'a que le pourtour strié et le centre chargé de petites
raies anastomosées. Toute la portion nue a de fines
stries. La dorsale est basse, la caudale a les rayons
mitoyens un peu plus longs que les autres, ce qui
la rend comme festonnée à double échancrure.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
Cette girelle est rayée de trois raies blanches sur
la tète et de deux sur le corps, ainsi disposées: la
supérieure commence sur le bout du museau, est
interrompue par l'œil, et va se perdre sur l'épaule,
à la quatrième rangée d'écaillés. Une seconde prend
naissance au bout du museau, traverse la joue en
touchant le bord inférieur de l'orbite, passe sur l'ais-
selle, et, en se courbant un peu, se rend le long du
côté à la queue, sur laquelle elle meurt. La troisième,
aussi tracée sur la tête , y forme une bride convexe
en dessus, en naissant de dessous la mâchoire infé-
rieure, remontant au-dessus du limbe du préopercule
pour se terminer, en passant par l'angle, sur le bas du
sous-opercule.
La seconde ligne des flancs prend de l'angle in-
férieur de l'aisselle de la pectorale, et se rend, paral-
lèlement à la première, sur le bas du tronçon de la
queue. L'huméral est bordé de blanchâtre. Mais sur
le frais le poisson est coloré en vert sur la tête et
CHAP. X. GIRELLES. 477
le dos, et est argenté, glacé de verdàlre pâle, sur le
ventre. Les raies de la joue, de l'épaule, sont aurores,
ainsi que l'espace compris entre les deux raies des
côtés, lesquelles sont d'une teinte plus foncée. La
dorsale et la caudale sont aussi orangées, l'anale
en a une faible teinte, les nageoires paires sont
verdâtres.
Les naturalistes de l'expédition de la Bo-
nite ont retrouvé ce poisson aux îles Sand-
wich. Nos individus vont jusqu'à cinq pouces.
MM. Quoy et Gairaard ont décrit les leurs
dans la Relation de l'Uranie, page 26^7, et en
ont donné une figure planche 56, figure 1.'"
Toutefois ces naturahstes, qui ont regardé ce
poisson comme nouveau, auraient pu le trou-
ver dans Lacépède. En effet celui-ci' a pris
dans Bonnaterre^ un labre blanche-raie (/ûj-
hrus albo-vittatus) qui est de l'espèce dont
nous traitons ici. Il suffit de consulter, pour
s'en convaincre, la description et la planche
de Kœlreuter^, qui conviennent en tous points
aux individus décolorés que nous avons sous
les yeux.
Nous venons de dire que Bloch a confondu
cette espèce avec celle figurée par Seba, et
1. Hist. nat. des poissons, t. III, p. Sog. — '2. Encjcl. ,
p. ii8. — 3. ISov. comm. patr., t. IX, p. 458, pi. lo, fig. 2.
478 LIVRE XVI. labuoïdes.
comment il avait fait un être complexe de
son lahrus trilineatus.
Nous avons toutefois conservé le nom de
M.,Quoy, et l'avons préféré à celui de Bon-
naterre, parce que le nom de l'Encyclopédie
donne une idée fausse des couleurs du poisson.
Je crois qu'il faut encore en rapprocher le
gallenaj castouri de Renard (fol. 24, n.° i33).
Je trouve l'original dans le Recueil de Vlaming
sous le nom de gallenaj parquit of castouri.
La disposition des raies est tout-à-fait conforme
à notre poisson; mais les couleurs sont, même
dans Vlaming, fort différentes, le dos étant
brun, le ventre vert, avec les bandelettes de
même teinte , mais plus pâle ; cependant la raie
aurore est marquée jusqu'aux pectorales.
La GiRELLE DE DuSSUMlER.
( JiiUs Dussumieri, nob. )
Nous avons reçu de la côte de Malabar, par
les soins de M. Dussumier, une girelle
qui a, sur un fond vert-pré, le dos varié de teintes
violettes, et les flancs rayés longitudinalement de
rose. La tête a des lignes flexueuses vertes sur un
fond rose, qui paraît quelquefois prendre des teintes
orangées assez marquées. La dorsale a sur les sixième,
septième et huitième rayons épineux une tache bleue
ou violette : le reste de la nrageoire est rose varié de
CHAP. X. GIRELLES. . 479
violet. L'anale a une large bordure violette et la base
rosée; la caudale a son centre violet, la base et les
deux angles blancs ou roses, selon la saison; la pec-
torale a aussi du rose à l'insertion de ses rayons.
D. 9/IS5 A. 3/12, etc.
La dorsale est terminée en pointe, atteignant,
comme celle de l'anale, la base de la caudale, qui
est arrondie. La ventrale est prolongée en filet jus-
qu'à l'anale, la canine de l'angle de la bouche est
très-saillante : les autres dents sont petites et à peu
près égales. La ligne latérale est rameuse; il y a
vingt-six rangées d'écaillés le long de ses côtés; elles
sont minces, assez grandes, striées, et leur portion
radicale, qui n'est pas très-grande, l'est presque en
entier.
INos individus ont quatre pouces de long y
mais M. Dussumier dit qu'on en voit de huit
pouces, et que l'espèce est rare à la côte mala-
bare.
ha GiRELLE DE GeOFFROY.
{Julls Geoffrojiij Q. G., Atl. de l'Uranie, pi. 56 ^
O r» \
n. D.)
Les compagnons de M. le capitaine Frey-
cinet ont rapporté des îles Sandwich une gi-
relle qui est remarquable
par la hauteur de son corps : elle est à la nuque
d'un peu plus que le tiers de la longueur totale.
Cette hauteur paraît encore augmentée par celle des
480 LIVRE XVI. LABROÏDES.
nageoires verticales, surtout de l'anale. La nuque
est très-bombée; la tête est plus courte, n'étant que
du quart de la même longueur totale. Les points de
la dorsale et de l'anale atteignent à la caudale, qui
est coupée carrément. Les ventrales sont prolongées
en filet et atteignent à l'anale.
D. 9/11; A. 3/12, elc.
La ligne latérale est rameuse ; les écailles sont au
nombre de vingt-six rangées sur dix dans la hau-
teur, dont sept au-dessous de la ligne latérale; une
d'elles, isolée, se montre plus haute que large et a
toute sa partie radicale finement striée.
Les dents sont petites; celles de l'angle de la
mâchoire sont fortes et saillantes.
Selon M. Quoy, la couleur est bleu foncé, chaque
écaille étant légèrement ponctuée de la même cou-
leur. Tout le corps est parsemé de lunules bleues,
bordées de brun, irrégulières sur la queue et sur les
ventrales, mais décrivant trois ou quatre lignes à la
dorsale et à l'anale. On voit du jaune sur la mem-
brane qui unit les trois premiers rayons de la dor-
sale. Le front, la gorge et les joues ont des lignes
et des points bleus; quatre de ces raies, parallèles
entre elles, descendent obliquement de l'œil vers la
bouche.
Ce naturaliste a donné la description de
cette espèce dans la Relation zoologique du
Voyage de TUranie, page 270, et une figure
coloriée planche 56, n.° 3, de l'atlas de cet
ouvrage.
CHAP. X. GIRELLES. 481
Nos individus ont quatre pouces et demi
de long.
La GiRELLE MÉLÉAGRIDÉE.
{Julis meleagriS) nob. )
M. Meitens nous a aussi communiqué un
dessin d'une petite girelle très-voisine de celle
de Geoffroy.
Sur un fond brun orangé , le corps a neuf séries
de points verts; il y en a deux sur la dorsale, dont
la partie molle est un peu orangée. L'anale a des
points à la base, un trait vert dans le milieu, et des
points le long du bord; la caudale, jaune, bordée
de brun, est couverte de taches vertes; les pectorales
sont rougeâtres et l'anale brun verdâtre, sans taches.
Sur la tête, ce sont des raies vertes mêlées de points
en dessous.
D. 9/11; A. â/ll,etc.
Ce poisson, long de cinq pouces, vient
d'Ulëa.
La Girelle de Lamarre.
( Julis Lamariiy nob. )
M. Lamarre -Piquot nous a donné une
girelle de Flsle- de -France, très -voisine de
celle-ci.
La dorsale et l'anale sont encore plus hautes; la
caudale est arrondie. Les dents sont très -petites,
il n'y en a pas de saillantes dans l'angle. Sur un fond
i3. 3i
>^82 LIVRE XVI. LABROÏDES.
vert-noir, très-foncé, le corps et les nageoires soûl
grivelés et rayés de petits traits ou points verts plus
clairs, qui ne se voient bien que par transparence
sur les nageoires.
La caudale a la base noire; une seconde raie large
et en croissant traverse la seconde moitié; le bord est
vert clair, ainsi que Tintervalle qui sépare les deux
bandes noires. La pectorale, verte, a le bord blan-
châtre ou décoloré.
D. 8/11; A. 3/11, Ole.
L'individu a six pouces de long.
La GiRELLE A?^N CLAIRE.
{Jul'is anmilaris , K. V. H.)
Sous le nom de s^ir elle annulaire , j'ai Lrotivé
dans le Musée royal de Leyde une espèce en-
voyée de Java par MM. Kubl et Van Hasselt,
et dont la forme ressemble à celle de La-
marre
par la hauteur de la dorsale et de l'anale prolongées
en pointe atteignant la caudale. Celle-ci est ronde.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
Sur un fond vert olivâtre tiqueté de jaune, le
poisson a treize lignes longitudinales pourpres.
Chaque écaille a un croissant jaune; l'anale et la
dorsale sont lisérées de bleu, bordées de jaune; la
pectorale a un croissant bleu et un autre jaune ; la
caudale a la base annelée de vert bordé de bleu, et
est terminée par deux anneaux concentriques à son
CHAP. X. GIRELLES. 483
bord, l'un bleu d'indigo, l'exlerne jaune brillant. La
tête est couverte de rivulations lilas bordées de bleu.
Le poisson a cinq pouces et demi.
La GlRELLE POINTILLÉE.
{Jidis punctulatiis , nob.)
On rapprochera de ces espèces le poisson
figuré dans Renard (fol. 21, n.° 11 5), dont
l'original est aussi conservé dans Vlaming.
Celui-ci le peint
rose sur la tête et sur le ventre, avec des lignes vertes
rayonnant de l'œil en tous sens. Les lèvres et le front
sont rouges; le corps, la dorsale, l'anale et la cau-
dale sont bleu foncé, pointillé de jaune doré. Une
raie verte traverse l'anale, et un limbe jaune orangé
termine la caudale.
La GiRELLE PAVOîNINE.
(^Jalis pavoninus , nob.)
Une autre, qui est dans le même auteur
(fol. 33, n.° '^g) sous le nom de gallonaj-
pavon, se retrouve aussi dans Vlaming et de-
vient caractérisable. Voisine des précédentes,
cette espèce a
le corps rose couvert de points ocellés jaunes, bordés
de plus foncé; la tête, de même teinte que le corps,
est chargée de points ou de traits verdâtres qui s'é-
tendent sous le ventre. La dorsale, rougeâtre, a deux
484 LIVRE XVI. LABROÏDES.
séries de points ocellés jaunes; l'anale, verte, a deux
raies rouges; la pectorale est jaune; la caudale, de
même couleur, offre six traits bruns réunis par
paires : elle est bordée en haut et en bas de rose.
La GiRELLE NACRÉE.
(Jidis inargar'Uaceus j nob.)
Une petite girelle, voisine des précédentes,
se distingue
par ses teintes nacrées, disposées en bandes plus ou
moins interrompues sur le ventre. Un trait nacré
existe sous l'œil, derrière lequel il y a deux taches
noires.
Le long de la ligne latérale les côtés sont mélangés
de noirâtre, qui est quelquefois disposé sur quatre
ou cinq bandes transversales. Puis sur le dos on
voit encore du nacré, soit en bandes longitudinales,
soit en taches, dont deux ou trois sont plus mar-
quées. La dorsale et la caudale sont pointillées de
noirâtre; les nageoires paires sont jaunes.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
Nous n'en avons que de petits individus
longs de deux pouces, qui ont été rapportés
de Vanikoro par MM. Quoy et Gaimard.
La Girelle papillonacée.
{Julis papilionaceus i nob.)
Les mêmes naturalistes ont pris dans cet
archipel une petite espèce
CIIAP. X. GIRELLES. 485
à corps rayé et tacheté de bleu plus ou moins obs-
cur. La tête a un trait bleu sur le sous - orbitaire
entre la bouche et l'œil, un autre sur le bas du
préopercule; une bande verticale descend le long du
bord postérieur de cet os et traverse l'opercule : il y
a de petites taches bleues au-dessus et au-dessous.
Un gros point bleu foncé existe entre la troisième
et la quatrième épine de la dorsale, qui est tachetée
d'ocelles lilasplus ou moins effacés. La caudale, cou-
pée carrément, a du noirâtre au milieu de son bord.
L'anale est grivelée comme la dorsale, mais sans
points noirs.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
Nos individus n'ont pas tout -à- fait trois
pouces.
La GiRELLE NOTOPSIDE.
{Julis nolopsis j K. V. H.)
Les collections ichthyologiques du Muséum
doivent encore au zèle de ces naturalistes une
petite girelle qu'ils ont trouvée à l'ile Guam
pendant la relâche qu'ils y ont faite sous les
ordres de M. le capitaine Freycinet.
La dorsale et l'anale sont noires; une tache plus
foncée, ronde, se dessine sur les premiers rayons
mous de la nageoire du dos;, la caudale a du noi-
râtre. Le corps est brun, plus ou moins rayé longi-
tudinalement de traits plus pâles.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
L'individu est long de deux pouces.
486 LIVRE XVI. LABROÏDES.
Il parait que l'espèce ne devient pas plus
grande; car MM. Ruhl et Van Hasselt l'ont
envoyée de même taille à Leyde. Ils repré-
sentent sur le dessin le corps et les nageoires
rayés de jaune.
La GiRELLE AURITE.
{Julis aiiritus i nob. )
M. Mertens nous a communiqué un dessin
pris à Uléa sur une girelle qui a
le fond vert très-pâle, une tache rose derrière l'œil,
et une autre sur le milieu de l'opercule; un trait
jaune arqué traverse la joue; un autre, rouge, passe
sous la poitrine. La caudale est jaune; les autres
nageoires sont pâles.
Le poisson est long de cinq pouces.
La Girelle de Horsfield.
{Julis Horsjieldii, nob.)
J'ai encore trouvé cette girelle parmi celles
dont les dessins , envoyés de Siam par le major
Finlayson, sont conservés dans la bibliothèque
de la Compagnie des Indes.
Elle a le dessus de la tête d'un brun violet très-
foncé; le corps est violet rose, rayé longitudinale-
ment de bleu sur les flancs et verticalement sur le
dos par bandes larges et onduleuses violacées; les
trois nageoires verticales sont roses, la caudale, ar-
CHAr. X. gikelLes. 487
rondlcj et l'anale sont lisérées de bleu d'azur j la dor-
sale, plus colorée, ou carmin, est bordée de bleu
plus foncé. Au-dessous sont trois ou quatre lignes
bleues, et sur la base est une série de points bleus.
La pectorale est d'un beau jaune doré, à rayons
orangés; la ventrale est bleue, bordée de rose.
J'ai dédié cette jolie girelle si bien carac-
térisée à M. le docteur Horsfield, si connu
par ses travaux zoologiques sur lile de Java,
pour lui donner un témoignage de mon amitié
et de la gratitude que je conserve des facilités
qu'il m'a procurées pendant mon séjour à
Londres, dans la bibliothèque de East India
House.
La Girelle ornée.
{JiiUs ornatiis 3 nob.)
Le capitaine Carmicbael a donné, dans le
\i.^ volume des Transactions de la Société
linnéenne de Londres, planche 27, la figure
d'une girelle prise à Tristan d'Acunha.
Ce labroïde a le museau obtus, le corps oblong,
de couleur olivâtre, rayé, ainsi que les nageoires, de
lignes bleues longitudinales, quatre étant sur le tronc
et trois sur les nageoires verticales; la caudale est
arrondie.
D. 8/14;? A. 3/13; G. 14; P. 1-2; V. 1/5.
La dorsale, les pectorales et la caudale ont du
pourpre.
Je n'ai pas vu ce poisson long de huit pouces^
488 LIVRE XVI. LABROIDES.
il a été pris parmi les roches, et décrit sous
le nom de lahrus ornatus.
La GiRELLE AUX POINTS SOMBRES.
{Julis iimhrostjgma , Ruppel.)
M. Ruppel décrit aussi, parmi les poissons
auxquels il laissait le nom de girelle, une es-
pèce qui a le corps assez semblable à celui de
notre girelle ceinture, mais qui en diffère par
la caudale un peu concave, la dorsale épineuse plus
basse que la portion molle, le front plus bombé.
Elle est verte, avec deux bandes rousses longitudi-
nales au-dessous d'une ll^rie latérale ramifiée et toute
tachetée de points couleur de terre d'ombre; sur les
joues, au-devant ou derrière l'œil, il y a deux petits
traits. La dorsale est verte, rayée en haut et en bas
d'orangé; une tache plus foncée que celle du corps
existe sur les premiers rayons. L'anale a, sur un fond
de même couleur que la dorsale, la base orangée et
lisérée en dehors de blanc; près du bord est un trait
plus rembruni. La caudale est bordée d'orangé pâle;
la pectorale et la ventrale sont vertes: celle-ci a la
base rayée d'orangé. L'iris est brun avec un anneau
doré.
D. 8/13; A. 2/11, etc.
L'auteur n'a observé cette girelle qu'isolée ,
près de Mohila et près de Djedda pendant
l'été. La longueur est de sept pouces.
CHAP. X. GIRELLES. 489
ILa GiRELLE AURICULAIRE.
{Julis auricularis y nob.)
MM. Quoy et Gaimard ont envoyé du Port
du Roi George, de la Nouvelle -Hollande^
pendant l'expédition de M. Dumont d'Urville ,
une assez grande gi relie qui a
le corps alongé, la tète plus courte que le quart de
la longueur totale, et égale à la hauteur du tronc; la
bouche est petite; les dents mitoyennes sont de mé-
diocre force; point de canines saillantes à l'angle de
la bouche; l'œil est un peu bas; les deux ouvertures
de la narine rapprochées l'une de l'autre; la ligne
latérale simple, non rameuse, formée d'une série
de pores enfoncés. Les écailles sont petites, minces,
oblongues, striées sur toute la surface radicale. Il y
en a plus de soixante-dix rangées entre l'ouïe et la
. caudale; cinq à six sont au-dessus de la ligne latérale,
sous la dorsale, et au-dessous j'en compté vingt-cinq.
La dorsale et l'anale sont hautes, et ont leurs rayons
flexibles et grêles; ils égalent près de la moitié de
la hauteur du tronc. La caudale est arrondie; les
ventrales, quoique prolongées, n'atteignent pas à
l'anale.
D. 9/12 î A. 3/12, etc.
La couleur est effacée, et les voyageurs qui ont
envoyé cette girelle au Cabinet du Roi, ne nous ont
communiqué aucunes notes sur la teinte du poisson
frais. L'opercule a l'angle coloré en bleu foncé,
bordé en avant d'un arc blanc nacré, et en arrière
490 LIVRE XVI. LABROÏDES.
d'un liséré noir foncé. Une tache bleue esl sur le
devant de la dorsale, qui a six à sept lignes longi-
tudinales grises; l'anale n'en a que trois ou quatre,
et point de taches noires; les côtés étaient rayés
longitudinalenient; les traits sont plus visibles sous
le ventre, que près du dos.
Le poisson est long d'un pied.
La GiRELLE -BORDÉE.
{JliUs marginciLiLS , Riippel.)
Une autre girelle, que je n'ai pas vue, est
celle que M. Piuppel a appelée Jialichores
marginatiLS. Selon lui
le corps est comprimé, elliptique; la caudale est
arrondie; le corps est d'un vert noirâtre; la tête et
la poitrine sont couvertes de rivulations vert de
cuivre, bordées de bleu. La dorsale, l'anale et la cau-
dale, sont chargées d'ocelles bleus à centre roux; le
bord des nageoires, bleu d'azur, est liséré de jaune;
un croissant vert , bordé de bleu , couvre la base de
là caudale.
M. Ruppel n'a pas fait graver cette espèce,
parce qu'il croit l'avoir reconnue dans la fi-
gure 5 de la planche 12 du quatrième Fasci-
cule ichtyologique de Klein. Il est à regretter
qu'un auteur aussi exact que M. Ruppel, se
soit contenté de cette gravure pour la repré-
sentation d'une espèce qu'il dit être fréquente
dans toute l'étendue de la mer Rouge.
CHAP. X. GIRELLES. 491
La GiRELLE A DEUX TACHES.
{Julis himaculatus 3 Ruppel.)
C'est encore une belle espèce de girelle
que le lialicliores himaculatus de Ruppel.
La figure i de la planche 5 des nouveaux
vertèbres appartenant à la Faune d'Abyssinie
la représente
d'un beau vert de mer sur le dos, et jaunâtre sur le
le ventre. Des lignes roses ou violettes rayonnent
autour de l'oeil et couvrent les mâchoires. Un bel
ocelle bleu à centre noir brille sur chaque côté; la
ligne latérale le traverse. Au-dessous est une large
raie bleue, et sur le jaune des flancs on voit une série
de points bleus.
D. 9/11; A. 3/11, etc.
La dorsale et l'anale sont couleur de chair et ponc-
tuées de bleu, rayées ensuite d'orangé, de bleu et
de roussâtre. La pectorale et la ventrale ont le même
fond que les deux autres nageoires, et elles n'ont ni
taches ni raies. La caudale est jaune, tachetée de bleu.
C'est une espèce rare, que M. Ruppel a
vue pendant l'hiver à Massuah.
La Girelle coris.
(Julis coris j nob.j Coris ajgula, Lacép.)
Nous avons reçu en très-bon état la girelle
que Commerson avait observée en 176g, et
492 LIVRE XVI. LABROÏDES.
dont M. Lacëpède a fait sur les matériaux de
ce naturaliste, un genre sous le nom de coris,
genre qui ne comprend, dans cet ouvrage, que
deux espèces, lesquelles se réduisent cependant
à une seule. C'est à M. Dussumier, à M. La-
marre-Piquot et à MM. Quoy et Gaimard que
nous devons les individus qui ont servi à notre
description.
CeUe girelle est très-remarquable par la protubé-
rance qui saille sur la tête un peu en arrière des yeux,
et qui donne une physionomie toute particulière à
ce poisson. La hauteur du corps est comprise trois
fois et deux tiers dans la longueur totale; celle de la
tête égale la hauteur du tronc. La longueur de la
partie du museau, saillante au-devant de la bosse
frontale, est du tiers de celle de k tête. A partir de
l'angle du museau, la ligne du profil monte obli-
quement jusqu'à l'angle de la base, qui répond à
l'aplomb de l'œil. Le profil inférieur descend vers
le bas de l'ouverture de l'ouïe, de sorte que ces deux
lignes font presque un angle droit, ce qui donne à
la tête une figure quadrilatère, dont le museau fait
l'angle antérieur, le bord de l'opercule le postérieur,
et à la bosse correspond le supérieur. La ligne du
profil, après s'être portée jusqu'à l'aplomb du bord
antérieur de l'orbite, se redresse et monte verticale-
ment dans une hauteur égale au quart de celle de
la tête, et se contourne en une courbe arrondie, pour
suivre la ligne du dos, après avoir formé la pro-
tubérance si singulière sur la tête de cette girelle.
CHAP. X. GIRELLES. 495
L'œil est petit, son diamètre est du neuvième de la
longueur de la tête; la distance du bord supérieur
de la bosse frontale au contour supérieur de l'or-
bite est du tiers de la hauteur de la tète. Le préo-
percule a un grand limbe, et l'interopercule, qui est
sous cet os, est large et arqué. Le sous-opercule est
bien distinct de l'opercule, dont le bord membra-
neux est épais, arrondi et dilaté. Les deux ouvertures
de la narine sont petites et rapprochées de l'œi!. Les
dents antérieures sont longues, saillantes, un peu
courbées : il n'y a pas de canines à l'angle de la
bouche; les dents du rang externe sont de gran-
deur médiocre et mousses; en dedans il y a une
seconde rangée de dents plus petites, et devenant
de simples granulations vers le fond de la bouche.
La langue est large, arrondie, peu libre. Le pha-
ryngien inférieur a une ceinture transversale, os-
seuse, arrondie, très-épaisse, et qui est attachée au
crâne par un hgament de chaque côté, d'une épais-
seur et d'une force remarquables, et qui empêche
l'os de s'abaisser quand l'animal presse dessus pour
casser avec ses grosses dents pharyngiennes supé-
rieures les corps souvent très -durs qu'il avale. Les
deux pharyngiens sont faits comme ceux des autres
girelles; mais ils sont assez forts. Ces os sont garnis
de dents en pavés carrés et oblongs, qui doivent
exercer une puissante mastication. Il y a sur le bord
interne de chacun trois larges dents revêtues d'un
émail d'une parfaite blancheur. L'antérieure est la
plus grande; elle a sept millimètres de long sur
quatre de large. Autour d'elles, il y a de grosses
496 LIVRE XVI. LABROÏDES.
rayée de deux ou trois lignes jaunes rougeatres, la
joue et la nuque sont vert-pré.
La splanclinologie n'offre rien de remar-
quable dans ce poisson. Je dois faire obser-
ver que sa vessie aérienne est très-grande.
Mais son squelette nous offre quelques parti-
cularités notables
dans la grande crête mitoyenne du crâne qui sou-
tient la bosse du front : cette crête est relevée en
avant sur deux petites lames en chevron , qui se
portent sur les frontaux antérieurs et latéraux, et
ouvrent ainsi la coulisse qui reçoit les branches mon-
tantes des intermaxillaires. Les crêtes latérales sont
élevées et doubles : ce qui contribue à élargir et à
arrondir par les muscles qui remplissent les gout-
tières de l'arrière du crâne, la tubérosité frontale.
L'occiput n'a que deux larges creux , les crêtes latérales
ne se portant pas si loin en arrière. Au-dessus du
condyle occipital s'élèvent deux petites crêtes réunies
en chevron sous la grande impaire dont nous avons
parlé en premier lieu. Le basilaire a deux larges
tubérosités arrondies en condyle, pour s'articuler
avec les pharyngiens supérieurs, et donner attache,
par leurs faces latérales, au grand ligament suspen-
seur du pharyngien inférieur. Cet os prend d'ailleurs
appui sur les deux arcs de la ceinture pectorale; elle
est formée par un humerai très-grand et très-large,
et par un radial et un cubital eux-mêmes assez forts.
Le trou radial est grand j l'échancrure cubitale est
profonde et bien ouverte; le styléal est aussi fort et
CHAP. X. GIRELLES. 497
élargi. La colonne épinière a neuf verlèbies abdomi-
nales et seize caudales; la dernière est élargie en
éventail. Les deux premiers interépineux de l'anale
sont courts et réunis à deux larges apophyses trans-
verses, arquées et rapprochées en anneau, qui reçoit
la fin de la vessie aérienne. Je compte vingt inter-
épineux à la dorsale et douze à l'anale.
Telle est la description de la girelle que
Commersoii avait vue à lIsle-de-France , et
dont il a laisse deux dessins, l'un qu'il dit
très-bon, et qu'il a fait exécuter, parce que le
premier ne l'avait pas satisfait. M. de Lacë-
pède les a fait graver tous deux, l'un tome III,
planche 4? figure i.''', et l'autre, figure 2 delà
même planche. Le dessin n.° 1 représente bien
le filet alongé de la dorsale, la longueur des
ventrales, la relation de la dorsale et de l'anale
avec la caudale à bord découpé, la saillie de
la tête; mais les dents ne sont pas bien ren-
dues. L'autre a le premier rayon courbé; voilà
pourquoi il ne me paraît pas alongé en filet.
D'ailleurs la bosse de la tête et les dents, ici
mieux exprimées, la grandeur des écailles, tout
confirme l'identité de ces^ deux dessins. Le
coris aigrette et le coris anguleux ne sont donc
établis que sur une même espèce. Lacépède a
sans doute voulu rendre l'idée de cette sorte
de casque surmontant la tête du poisson, en
1 3. 32
41){j LIVRE XVI. LABROÏDES.
rayée de deux ou trois lignes jaunes rougeâtres, la
joue et la nuque sont vert-pré.
La splanclmologie n'offre rien de remar-
quable dans ce poisson. Je dois faire obser-
ver que sa vessie aérienne est très-grande.
Mais son squelette nous oiTre quelques parti-
cularités notables
dans la grande crête mitoyenne du crâne qui sou-
tient la bosse du front : cette crête est relevée en
avant sur deux petites lames en chevron , qui se
portent sur les frontaux antérieurs et latéraux, et
ouvrent ainsi la coulisse qui reçoit les branches mon-
tantes des intermaxillaires. Les crêtes latérales sont
élevées et doubles : ce qui contribue à élargir et à
arrondir par les muscles qui remplissent les gout-
tières de l'arrière du crâne, la tubérosité frontale.
L'occiput n'a que deux la rges creux , les crêtes latérales
ne se portant pas si loin en arrière. Au-dessus du
condyle occipital s'élèvent deux petites crêtes réunies
en chevron sous la grande impaire dont nous avons
parlé en premier lieu. Le basilalre a deux larges
tubérosités arrondies en condyle, pour s'articuler
avec les pharyngiens supérieurs, et donner attache,
par leurs faces latérales, au grand hgament suspen-
seur du pharyngien inférieur. Cet os prend d'ailleurs
appui sur les deux arcs de la ceinture pectorale; elle
est formée par un humerai très-grand et très-large,
et par un radial et un cubital eux-mêmes assez forts.
Le trou radial est grand j l'échancrure cubitale est
profonde et bien ouverte; le styléal est aussi fort et
CHAP. X. Gl BELLES. 497
élargi. La colonne épinière a neuf vertèbres abdomi-
nales et seize caudales; la dernière est élargie en
éventail. Les deux premiers interépineux de l'anale
sont courts et réunis à deux larges apophyses trans-
verses, arquées et rapprochées en anneau, qui reçoit
la fin de la vessie aérienne. Je compte vingt inter-
épineux à la dorsale et douze à l'anale.
Telle est la description de la girelle que
Commerson avait vue à lIsle-de-France, et
dont il a laissé deux dessins, l'un qu'il dit
très-bon, et qLi'il a fait exécuter, parce que le
premier ne l'avait pas satisfait. M. de Lacé-
pède les a fait graver tous deux, l'un tome III,
planche 4? figure i.'^, et l'autre , figure 2 delà
même planche. Le dessin n."" 1 représente bien
le filet alongé de la dorsale, la longueur des
ventrales, la relation de la dorsale et de l'anale
avec la caudale à bord découpé, la saillie de
la tête; mais les dents ne sont pas bien ren-
dues. L'autre a le premier rayon courbé; voilà
pourquoi il ne me paraît pas alongé en filet.
D'ailleurs la bosse de la tête et les dents, ici
mieux exprimées, la grandeur des écailles, tout
confirme l'identité de ces deux dessins. Le
coris aigrette et le coris anguleux ne sont donc
établis que sur une même espèce. Lacépède a
sans doute voulu rendre l'idée de cette sorte
de casque surmontant la tête du poisson, en
i3. 32
498 LIVRE XVI. LABROÏDES.
le nommant du nom de coris, qu'il a ensuite
attribue , par faute de mémoire , à Commerson ;
car je ne trouve pas ce nom dans son manuscrit.
M. Quoy a donné, dans l'expédition de
l'Astrolabe, à la planche 19 des poissons, une
très-bonne figure de cette espèce; mais il l'a
regardée comme nouvelle , et il l'a publiée
sous le nom de girelle à front bombé [julis
gibbifrons). M. Bennett, en décrivant des
poissons de l'Isle- de -France, lui avait déjà
donné un autre nom : c'est son j'ulis Cui^ieri.^
M. Ehrenbergl'a observée dans la mer Rouge.
M. Ruppel a publié une figure^ fort exacte,
mais coloriée d'après un poisson déjà mort.
Il paraît que la bande verte qu'il a tracée par
le milieu du corps subsiste assez long-temps;
car j'en vois des traces sur nos poissons secs
et décolorés. Il l'a appelée y w/zj aj^ula. Mais
comme je suis obligé de réunir les deux es-
pèces de Lacépède en une, je crois mieux
de prendre pour épithète le nom de genre
imaginé par Lacépède, et qui rend bien le
caractère de cette espèce.
1. Bennett, Proceed. of Zool soc. y t. I.", p. 128, i85i.
2. Atlas zu der Eeise im n'drdl. Afr. , tab. 6,5.
CHAP. X. gip.ellf:s. A\)i)
La GiRELLE ÉTOILÉE.
{Jiilis stellatus , nob. )
Il y a encore à FIsle-de-France une autre
girelle à rayon de la dorsale prolongé en filet,
mais qui n'a pas de bosse sur la tête, et qui se dis-
tingue aussi par ses écailles plus petites; car j'en
compte soixante-dix rangées de la tête à la queue.
M. Dussumier, qui l'a vue fraîche, dit que le corps est
violet foncé, avec de très-pelils points verts très-bril-
lans. Le dessus de la tête est plus clair que le tronc;
les joues sont traversées par de larges bandes d'un
vert Irès-éclatant et d'un violet plus clair que celui
du corps. La dorsale et l'anale, violacées, ont dans le
milieu une bandelette d'un vert brillant et des pe-
tits points de môme couleur sur toute son étendue,
La caudale offre la même disposition de couleurs,
et de plus elle est bordée de blanc; l'anale est lisérée
de bleu; les pectorales, à base orangée, ont l'extré-
mité jaune; l'aisselle est verte; les ventrales, vertes
en dedans, ont les rayons colorés en violet à l'ex-
térieur.
■ Ce poisson est rare à l'Isle-de-France. Outre
ceux que nous devons à M. Dussumier, M.
Lamarre-Pi quot en a envoyé de fort beaux
exemplaires au Muséum. Ils sont longs de
treize pouces.
oOO LIVRE XVT. LABROÏDES.
ha GiRELLE DE GaIMARD.
{JuUs Gaimardi, Q., AU. Freyc, tab. 54, fig. i.)
MM. Quoy et Gaimard ont rr- porté de
leur premier voyage avec le capitaine Frey-
cinet une girelle
dont le premier rayon de la dorsale est alongé en
filet, dont les ventrales touchent à l'anale, mais qui
a les écailles plus petites et les couleurs différentes.
La tête et le devant du corps sont brun jaunâtre;
la partie postérieure du dos est rose; la dorsale, poin-
tillée à sa base, offre deux lisérés bleuâtres; l'anale
est bordée de vert; la caudale est jaune. Le dessous
de la gorge est bleu; un trait de même couleur re-
monte du museau sur l'occiput; deux bandes violettes
lisérées de rose traversent la joue.
L'individu, long de neuf pouces, a été pris
dans l'archipel des Sandwich, à File Mowi,
où les indigènes le nomment inaréa louaïné-
M. Quoy l'a dédié à son compagnon de voyage
et de fatigues, M. Gaimard.
Si j'ai conservé le nom donné par M. Quoy,
je n'établis pas, comme lui^ que l'espèce ait été
inconnue des naturalistes quand il l'a publiée.
En effet, ce l^eau poisson est figuré d une ma-
nière très-reconnaissable dans le recueil de
dessins de l'amiral Corneille de Vlaming, qui
le nomme ikan roupa.
CHAP. X. GIRELLES. ISO I
x\.la vérité, Renard n'a pas reproduit la (igure
de l'amiral, et celle qu'il donne, II.'' partie,
pi. 3, fig. g, est loin d'être aussi bonne.
Il le nomme parequiet de Baguewal , c'est-
à-dire , perruche. Je retrouve ce poisson dans
Valentyn, p. 4^3 , n.° 337, sous le nom malais
ikan soelang J^ng ongoe , ce que l'auteur
traduit par poisson pourpre brodé.
Il dit que la bonté de la chair égale la
beauté des couleurs.
L'espèce est donc répandue dans toute la
mer des Indes.
La GiRELLE ANNELÉE.
(Julis annulaLus , nob.)
Les mers de l'Inde ont encore une girelle
remarquable par l'éclat de ses couleurs et qui
se distingue des précédentes par la petitesse
de ses écailles.
J'en compte plus de cent entre l'ouïe et la cau-
dale, dont les pointes sont légèrement saillantes. Ces
poissons ne conservent dans l'esprit de vin que les
Uaces des bandes dont le corps est cerclé; mais pen-
dant la vie, la tête est d'un beau vert rayé d'orangé.
Le corps, vert, à teintes violacées sur le dos, est tra-
versé par quatorze à quinze bandes verticales jaunes.
Les pectorales et les ventrales sont olivâtre irès-
clalr; la dorsale a la base jaune éclatai] t, le nulieu
1)02 LIVRE XVI. LABROÏDES.
bleu irès-vif, un trait orangé, surmonté d'une ban-
delette bleue lisérée de blanc.
L'anale est bleue, tachetée d'orange à la base, et
bordée de trois traits comme la dorsale. La caudale,
bleue , a ses deux bords horizontaux d'une teinte
orangée très -vive.
Nous avons eu connaissance de ces brillantes
couleurs par une belle peinture que M. Théo-
dore Delisse nous a envoyée de l'Isle-de-France ,
et nous les avons trouvées conformes aux
descriptions que M. Dussumier a laites de
ces poissons frais. Outre les individus de l'Isle-
de-France, cet habile naturaliste a pris l'espèce
aux Séchelles, où on la nomme camharin.
L'espèce y est rare; on l'y mange. Nos exem-
plaires ont treize à quatorze pouces.
Commerson avait observé cette espèce, qui
paraît plus commune à l'Isle-de-France qu'aux
Séchelles, et il en a laissé trois dessins, dont
deux étaient coloriés, et qui tous trois ont été
employés par M. de Lacépède, mais en les
considérant comme autant d'espèces diffé-
rentes. Deux de ces dessins, faits au crayon,
n'ont pas d'écaillés; M. de Lacépède a consi-
déré sur lUn des deux ce caractère comme
suffisant povu' en faire un genre distinct. C'est
celui qui repiésenlo le plus fidèlement la dis-
tribution des couletirs. Il l'a fait graver sotis
CHAP. X. GIRELLES. 505
le nom d'hologymnose fascéj t. III, pi. i.",
fig. 3. Le second dessin au crayon est moins
exact que le précédent, même pour la forme
de la tête; c'est le labre annelé de ce natu-
raliste, t. III, pi. 28, fig. 3. Le troisième dessin
est colorié en brun traversé par de nombreux
traits plus foncés, au nombre de dix-neuf La
tête est verte, la dorsale est brune, lisérée de
blanc; l'anale est verdâtre, bordée d'une large
bande bleue lisérée de blanc; la caudale a le
demi-cercle de sa nageoire blanc. Je regarde
encore ce dessin comme fait sur des individus
décolorés de la même espèce; le liséré blanc
des nageoires et la forme générale me semblent
justifier ce rapprochement. Les individus des-
séchés, trouvés dans les collections de Com-
merson, me paraissent aussi conduire à ce
résultat. C'est avec ce document que M. de
Lacépède a établi son labre demi-disque, et
le dessin a été gravé t. III, pi. 6, fig. 2.
MM. Desjardins, Lesson et Garnot, nous
ont aussi procuré de beaux exemplaires de
cette espèce.
504 LIVRE XVI. LABROÏDÉS.
La GiRELLE CERCLÉE.
{Julis doliatns y nob.)
Mais Commerson avait aussi observé une
autre espèce voisine de celle-ci, qui me parait
s'en distinguer
par des écailles plus petites encore et des teintes
moins variées. Le corps est très-alongé.
M. Dussumier dit le poisson rosé avec des bandes
verticales rouge orangé. Le ventre et le dessous
de la gorge blancs; les opercules dorés, avec une
petite tache noire à l'extrémité. La dorsale et l'anale
blanc rosé avec des lignes longitudinales orangées;
la caudale jaune clair; les pectorales ont une teinte
plus faible.
Selon M. Dussumier, ce poisson, rare à
risle- de -Fiance , s y nomme colomhine. Il est
très -bon. J'y rapporte le dessin colorié que
Commerson a laissé dans ses manuscrits, et
qui représente le corps rosé avec vingt -trois
bandes verticales rouge plus foncé, et toutes
les nageoires jaunes, sauf les ventrales. Ce
dessin est devenu dans Lacépède le labre
cerclé y il l'a fait graver t. III, pi. 6, fig. 3.
Jo regarde aussi comme de la même espèce
le poisson que MM. Quoy et Gaimard ont
représenté dans l'atlas de l'Astrolabe, pi. i5,
fig. i."^^, sous le nom de girelle à dos rose. La
CHAP. X. GIRELLES. 50^
peinture, aux bandes près, est très-conforme
à ce que M. Dussumier uous rapporte sur les
couleurs de cette girelle, au moment où on
la tire de l'eau.
ha Girelle aux bords jaunes.
{JuUs prcetextatus y Q.)
Ces girelles aux petites écailles me condui-
sent à une espèce couverte d'écaillés encore
plus petites, mais dont le front est plus relevé
et le museau plus obtus que dans toutes les
précédentes.
Elle a été figurée par M. Quoy dans l'atlas
de l'Astrolabe, pi. i5, n.° 4?
avec le dos verdâire, le reste du corps jaunâtre,
les pectorales pâles, les autres nageoires vertes, la
dorsale et l'anale bordées de jaune.
Ce poisson vient de l'Isle-de-France ; il est
long de trois pouces et demi. Un autre indi-
vidu, plus grand et qui a été envoyé de Java,
me paraît appartenir à la même espèce.
FIN DU TOME TREIZIEME.
AYIS AU RELIEUR
POUR PLACER LES PLANCHES.
Planches.
36g. Lahrus mixtus vis-à-vis la page 5o
3 70. Lahrus viridis 76
371. Cossjphus axillaris i32
372. Crenilabrus pai^o i58
373. Crenilabrus Bailloni 192
374. Ctenolabrus iris. 236
376. Acantholahrus Palloni 244
376. Coricus rostratus 256
377. Clepticus genizarra 268
378. Lachnolaimus aigula 278
379. T auto ga f as data 3o4
3 80. Malaca?ithus Plumieri. 32o
3 8 1 . Malacanthus iœniatus 33o
382. Cheilio cjaJiochloris 346
383. Malapterus reticulatus 356
384. Julis vulgaris 362
385. Julis Giofredi 372
386. Julis pa^fo 378
387. Julis Dussumieri 478
388. Julis annulatus 602
/ il ^