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Full text of "Histoire physiologique des Plantes d'Europe, ou exposition des phénomènes qu'elles presentent dans les diverses periodes de leur développement"

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HISTOIRE PHYSIOLOGIQUE 


PLANTES D'EUROPE. 


OUVRAGES DU MÊME AUTEUR : 


Histoire des Conferves d’eau douce. 
Monographie des Prêles. 


Monographie des Orobanches. 


Les contrefacteurs et débitants de contrefacons seront poursuivis suivant 
toute la rigueur des lois. 


Mare ir 


VALENCE, IMPRIMERIE DE MARC AUBEL FRÈRES. 


HISTOIRE PHYSIOLOGIQUE 


DES 


PLANTES D'EUROPE 


OU 


EXPOSITION 


DES PHÉNOMÈNES QU'ELLES PRÉSENTENT DANS LES DIVERSES 
PÉRIODES DE LEUR DÉVELOPPEMENT, 


#7 
Par J. P. VAUCHER.. K 


PROFESSEUR À L'ACADÉMIE DE GENÈVE. 


Et ego desidero superari, satisque decoris fore mihi 
puto, si fundamentum ædificio straverim. 
HALLER , Prær. Hisr. Srrae. Hezver. 


Tome Premier. 


PARIS, 
LIBRAIRIE DE MARC AUREL FRÈRES, ÉDITEURS, 


RUE SAINT-HONORÉ, 158. 


MÊMES MAISONS DE LIBRAIRIE À VALENCE, NIMES ET TOULOUSE. 


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1841. 


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CHARLES ALBERT, 
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Je viens vous présenter aujourd’hui, comme une faible marque 
de mon profond respect et de mon vif attachement, cet ouvrage auquel 
j'ai travaillé une grande partie de ma vie, et dont vous m'aviez fait 
espérer, il y a quelques années, que vous accepteriez l'hommage. 

IL est entièrement consacré à la gloire du Créateur, dont les œuvres 
m'ont paru toujours plus admirables à mesure que je les ai considérées 
de plus près , et il est destiné à produire chez ceux qui le liront une 
partie des impressions qu’elles m'ont fait si souvent éprouver. C’est 
l'étude et la méditation de ces merveilles, dont je ne connais encore 
que les bords, qui ont embelli mes dernières années, et qui m'ont 
inspiré le désir de plus en plus ardent de les contempler un jour à leur 
source dans le sein de la Souveraine Sagesse. 

Daignez, Sire, accueillir avec cette touchante bonté, dont vous 
m'avez déjà donné tant de témoignages, cette dernière offrande d’un 
CŒUT qui vous à toujours tendrement aimé, et qui a toujours tout 
espéré de vous. 


J. P. E. VAUCHER, 


Drofessewr émérite à l'Académie de Genève. 


Genève , le 46 actobre 4840. 


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AU 


INTRODUCTION. 


J'ai été entraîné de très-bonre heure vers l'étude de la Botanique. 
Ce penchant inné et presque irrésistible était encore excité par les 
contrées que j'habite, les montagnes qui entourent mon heureuse 
patrie, et qui n’en sont éloignées que de quelques lieues. Tous les 
étés, j'allais visiter ces Alpes si fraiches, si riantes, et en même temps 
si majestueuses, où l’on rencontre à chaque pas des plantes nouvelles 
aussi remarquables par leur forme que par leur éclat. Je contemplais, 
avec un plaisir qui ne s’est jamais affaibli, ces riches tapis de fleurs, 
la plupart inconnues ; j'admirais la beauté de leur feuillage, l'élégance 
de leurs formes, et je les cueillais pour en faire un herbier, que 
j'arrangeais d’après Hazcer et Linné, dont les ouvrages étaient alors 
à peu près les seuls connus, ou du moins les seuls à mon usage. J'eus 
bientôt classé la plupart des plantes qui étaient à ma portée, et je me 
lassai insensiblement d’une nomenclature un peu aride, où je n'aper- 
cevais rien de ce qui m'avait d'abord charmé. Je me mis alors à 
observer de plus près les divers organes des végétaux, à étudier 
leurs formes variées, à me rendre compte des diversités que je remar- 
quais dans leur végétation, leur estivation, leur fécondation, leur 
dissémination, etc. Je recommencai ainsi sous un nouveau plan toutes 
mes études botaniques, et, au lieu d'une science auparavant circon- 
scrite, je trouvai un champ immense, une source intarissable d'obser- 
vations pleines d'intérêt, où le moindre végétal me fournissait souvent 
des sujets nombreux de réflexion. À mesure que je rencontrais des 
faits qui me paraissaient dignes d’être remarqués, je les consignais dans 


VI 


des notes, et c’est le recueil de ces notes éparses que je présente 
aujourd'hui. Il s’en trouve qui étaient nouvelles lorsque je les rédigeai 
pour la première fois, et qui ne le sont plus aujourd'hui. Il en est 
d’autres qui ont beaucoup moins d'importance sans doute que je ne 
leur en attribue. Plusieurs sont minutieuses, ou résultent d’obser- 
vations mal faites et pour lesquelles je réclame l'indulgence. Mais 
enfin il en est peut-être quelques-unes qui mériteront d'être accueillies, 
et qui fourniront aux botanistes observateurs de nouveaux points 
de vue. 

J'ai été précédé dans la carrière où j'entre aujourd’hui, par cet 
immortel LINNÉ qui a ouvert, pour ainsi dire, toutes les routes de 
l'Histoire Naturelle. Ses Amænitates academicæ sont pleines de remar- 
ques du même genre, tantôt indiquées , tantôt développées avec soin ; 
on trouve encore dans ses diverses Préfaces, ses Systèmes, ses Genera, 
et surtout ses Species, une multitude de ces notes intéressantes qui 
sauvent l'ennui des descriptions, et réjouissent l'esprit. HazLER, qui 
aurait pu avancer si fort cette même étude, semble, au contraire, 
l'avoir dédaignée. Mais elle a pris un nouvel essor par les travaux des 
inventeurs ou des partisans de la méthode naturelle, des Jussieu, des 
Gzrrner, des De Canpoie, et ensuite par celle des botanistes philo- 
sophes, tels que les Browx, les Ricmar», les Mrrsez, les Du Perir- 
Taouars, les Corrza, les Auguste Sarnr-Hirarre, etc. Toutefois les 
objets que ces divers savants considèrent, ne sont pas ceux qui m'oc- 
cupent principalement ; l’auteur dont les vues se rapprochent le plus 
des miennes, est M. Cassin1, et je me plais à dire que j'ai retrouvé dans 
ses différents ouvrages, et surtout dans ses Opuscules phytologiques 
publiés en deux volumes en 1825, l'esprit et les principes qui m'ont 
souvent dirigé dans mon travail. 

J'ai donné à cet ouvrage le titre ambitieux d'Histoire physiologique 
des Plantes d'Europe, et je sens plus que personne combien je suis 
loin de tenir ce que je promets. J'aurais dû publier cet essai sous le 
nom beaucoup plus convenable d'Études ou d'Observations ; mais les 
libraires ne s'accommodent pas plus que les auteurs de ces titres mo- 
destes, qui nuisent, disent-ils, à la réputation, et par conséquent à la 
vente d'un livre. 

J'avais d'abord eu le dessein de faire l'Histoire générale des genres; 
mais j'ai bientôt compris combien cette entreprise était au-dessus de 
mes forces, et je l'ai restreinte aux seuls genres d'Europe: encore com- 
prendra-t-on facilement que je n'ai pas pu les observer tous, parce que 
plusieurs n'étaient point à ma portée, et ne se trouvaient pas non 
plus dans les jardins. Je donne dans cette Histoire ce que j'appelle la 


VII 


physiologie du genre, non pas la structure et l’organisation parti- 
culière des espèces qui le composent, ce qui est une étude nouvelle et 
jusqu’à présent fort peu avancée, mais son mode de végétation, de 
développement, de fécondation, etc.; les phénomènes particuliers 
qu'il présente ; ceux qui sont propres à chaque espèce; en un mot, 
ce que j'appelle la manière d'être et les mœurs du genre. 

Il va sans dire que toutes les observations que je présente ne 
m'appartiennent pas en propre; j'ai profité de celles qui ont été 
faites, sous le même point de vue, par les divers botanistes, et en 
particulier des nombreuses monographies publiées de nos jours. J'ai 
cité, autant que je l'ai pu, les auteurs dont j'ai emprunté quelques 
faits, et je prie ceux que j'aurais involontairement oubliés, de vouloir 
accepter ici mes sincères excuses. 

Je demande d'avance qu’on me pardonne aussi toutes les observa- 
vations mal faites, toutes les inexactitudes qui peuvent m'avoir 
échappé. J'ai beaucoup vu de mes yeux, et avec le secours de la loupe; 
j'ai répété mes observations toutes les fois que l'occasion s'en est 
présentée, et Je les ai plus d’une fois rectifiées; mais dans un travail 
d’une si longue haleine, il est impossible que l'esprit ne se relâche pas 
quelquefois, et ne laisse échapper des phénomènes qu'il aurait pu 
saisir avec un redoublement d'attention. 

J'aurais beaucoup mieux fait, sans doute, de me borner à quelques 
genres, ou du moins à quelques familles que j'aurais étudiées avec plus 
de soin et qui auraient ainsi fourni l'exécution bien plus parfaite du 
plan que je me suis proposé. Mais d’abord mes observations ont été 
recueillies, à mesure qu’elles se sont présentées, tantôt sur un genre, 
tantôt sur un autre, et j'ai pris la seule forme qui pèt les reproduire 
avec quelque intérêt. Ensuite, j'ai considéré qu'il y aurait quelque 
avantage d'offrir pour chaque genre, les observations déjà faites, 
quelque incomplètes qu’elles fussent. L'ouvrage fera ainsi un tout, 
dont les diverses parties seront tantôt bien, tantôt mal exécutées, et 
les botanistes qui verront d’un seul coup-d'œil ce qui reste à perfec- 
tionner, trouveront du plaisir à vérifier par eux-mêmes les faits que 
j'indique, ils les rectifieront, ils les confirmeront, surtout ils les com- 
pléteront, et cette nouvelle manière d'envisager la botanique, ne 
tardera pas, si elle est goûtée, à prendre de grands développements. 

Un de mes buts, en composant cet ouvrage, est de ramener la 
science à sa vraie destination, c'est-à-dire de la faire servir à manifester 
les témoignages multipliés del'Intelligence et de la Sagesse infinies. Sans 
doute que nous avons les plus grandes obligations à tous les auteurs 
systématiques qui ont décrit et s'occupent tous les jours à décrire les 


VIII 


nombreux végétaux dont cetteterre est couverte, et qui les distribuent 
en familles, genres, espèces et variétés ; leur travail est la base sur 
laquelle reposent tous les autres, et il doit être encouragé de toutes 
manières. Les naturalistes qui entreprennent des voyages lointains, et 
s'exposent ainsi à mille privations, pour rassembler des végétaux 
encore inconnus, élèvent le superbe édifice de la science, et méritent 
aussi notre vive gratitude. Mais ces descriptions, si indispensables 
pour la pleine connaissance de la plante à laquelle elles s'appliquent, 
et si nécessaires à celui qui s'occupe des mêmes objets, ne sont pas 
faites pour intéresser le commun des lecteurs. Ce que nous voulons 
savoir, c'est la manière dont le Créateur s’est plu à différencier les 
espèces d’un même genre; ce sont les formes variées de leur végé- 
tation; les moyens dont elles ont été pourvues pour se défendre 
contre leurs divers ennemis et les nombreuses intempéries des saisons ; 
ce sont ces mouvements singuliers, organiques, et jusqu'à présent 
inexplicables, par lesquels les plantes sortent de la classé des êtres 
bruts, pour prendre quelques-uns des attributs d’une sensibilité 
confuse, ou, si l'on veut, d'un instinct particulier. En un mot, ce 
sont ces rapports de but et de moyen, ces causes finales auxquelles 
tout ramène l’homme dans la contemplation de la nature. 

Je sais bien qu’on en a étrangement abusé, et qu'on en abuse tous 
les jours dans les ouvrages destinés à la jeunesse; mais cela n'empêche 
pas qu’elles ne soient le dernier but de l'Histoire naturelle, et la der- 
nière conséquence que les hommes éclairés tirent, comme malgré eux, 
de leurs méditations sur le système de l'univers; c’est même le seul 
point de vue qui puisse intéresser le grand nombre. Eh! que me fait à 
moi cette infinie variété qui règne dans les êtres organisés, dans leurs 
différents modes d’accroissement et de reproduction, si je n’y vois que 
des effets du hasard, des arrangements indéterminés et sans but? Mais 
si je suis capable d'assigner les causes de ces arrangements, si je dé- 
couvre que les uns sont destinés à protéger l'enfance de la plante, les 
autres à favoriser sa fécondation, sa reproduction, la conservation et 
la dissémination de ses graines; si je reconnais qu'entre plusieurs 
combinaisons également possibles, celle qui a été choisie était celle 
qui menait le plus sûrement au but ; enfin, si j'apercois dans certains 
cas, l'auteur de la nature, luttant contre les accidents imprévus, mo- 
difiant ses lois selon ses besoins, réparant les désordres par un nouvel 
ordre, sorti de l'ordre ancien; alors je ne me trouve plus jeté, comme 
au hasard dans une mer sans rives ; mais je sens auprès de moi, et à 
mes côtés, une intelligence et une sagesse qui excitent à chaque mo- 
ment mon admiration la plus profonde; je découvre un Étre infini- 


1X 


ment bon, qui, quoique invisible, m'associe à ses desseins, se plaît à 
me dévoiler les merveilles de ses ouvrages, et j'en tire la conséquence 
qu'il ne saurait être indifférent à mon sort, et que, puisqu'il a réglé 
avec tant defoin le monde physique, il a arrangé avec plus de pré- 
voyance encore le monde moral, que je contemplerai un jour dans 
toute sa magnificence. 

Voilà les pensées auxquelles s'élève toujours plus ou moins le bota- 
niste observateur, et c'est dans ce sens qu'on a dit ävec beaucoup de 
raison, que l'étude de la nature rendait l'homme plus religieux. Eile 
l'éloigne, en effet, du théâtre où se débattent avec tant d’agitation les 
nombreux intérêts de cette vie; elle ouvre à son immense activité une 
carrière noble et infinie; elle lui prodigue des plaisirs purs, qui le 
suivent partout, et lui font supporter avec moins d’amertume les 
mécomptes et les peines cuisantes, qui sont trop souvent notre partage 
sur cette terre. 

J'ai tâché de faire passer quelques-uns de ces sentiments dans cet 
ouvrage, non pas en les énoncant d'une manière directe, mais en 
présentant des observations qui amènent insensiblement mes lecteurs 
à des réflexions du même genre; en ieur montrant dans les plantes des 
êtres vivants, dont les uns ouvrent leurs pétales à la lumière et les 
referment à l'humidité ; dont les autres protégent avec soin le pollen 
de leurs anthères ou leurs graines non encore mûres, et qui toutes 
arrivent au but proposé, celui de la conservation et de la dissémi- 
nation, par des moyens aussi nombreux et variés qu'admirables et 
inattendus. 

On s’est trop astreint, en botanique, à la description des apparences 
extérieures, et l'on a trop négligé ces caractères plus délicats et plus 
fugitifs que je viens d'indiquer; cependant ils sont plus constants que 
ceux que l’on tire tous les jours des formes des tiges ou des feuilles, 
des poils qui recouvrent leur surface, et d’autres circonstances sem- 
blables. Il est sûr qu'une plante fermera sa corolle; qu'une autre la 

conservera toujours ouverte ; que cette corolle tombera ou persistera 
selon les espèces ; que les anthères se disposeront d’une certaine ma- 

_nière pour l'émission de leur poussière ; que la fécondation s'opérera, 
ou dans l'intérieur ou au dehors; que les péricarpes s’ouvriront d'une 
certaine manière et non pas d'une autre; en un mot, que les diverses 
espèces conserveront jusqu'à la fin les mœurs et les habitudes avec 
lesquelles elles ont été créées. 

J'ai examiné et décrit la plupart des plantes vivant et exécutant 
leurs diverses fonctions; car ce n’est qu’alors qu'on observe sûrement 
les phénomènes qu'elles présentent, et qui étaient le principal objet 


x 
de mes recherches. On ne peut”connaitre, en effet, à aucune autre 
époque, les mouvements de leurs feuilles et de leurs pétales, le mode 
de leur fécondation, l'existence et la place vraie de leurs nectaires, la 
dissémination de leurs graines, leur germination, et cette foule de 
circonstances qui distinguent un genre et souvent un végétal d'un 
autre. Mais on comprend que non-seulement, comme je l'ai déjà dit, 
je n'ai pas eu tous les genres à ma disposition, mais que Je n'ai pu 
observer vivantes un très-grand nombre d'espèces : celles dont j'aurais 
le plus désiré la vue, habitaient des lieux éloignés, des montagnes 
inaccessibles, les contrées glacées du Nord, ou les bords éloignés de 
la Méditerranée, J'ai bien fait quelques voyages pour les surprendre 
croissant et fleurissant dans leur patrie, et j'ai souvent obtenu de 
cette manière de vives jouissances; mais je n'ai pas toujours été 
heureux, et je suis souvent obligé de m'en rapporter à des témoi- 
gnages étrangers, sur des faits que j'avais vivement désiré de constater. 

J'étais d'abord affligé de cette grande imperfection que je laissais 
dans mon travail. Mais j'ai réfléchi qu’il me suffisait de tracer la route, 
et qu'il était très-convenable d'indiquer aux botanistes des autres 
contrées, ou à ceux qui se consacrent à des voyages éloignés, quel- 
ques-uns des objets de recherche qui peuvent les occuper. Ils vérifie- 
ront à loisir une foule de faits que nous connaissons mal, et qui 
pourtant servent à perfectionner la science et à étendre nos vues sur 
les procédés de la nature, pour l’aceomplissement de ses desseins. Ils 
verront, par exemple, si les Utriculaires des Indes se conservent en 
hiver comme les nôtres, si les Loranthes germent comme notre Gui, 
si les Orobanches étrangères ressemblent aux indigènes dans leur 
manière de vivre. Ils constateront les divers modes de germination de 
ces nombreuses parasites, dont sont remplies les forêts équinoxiales ; 
et au milieu de cette riche végétation qui embellit ces climats brülants, 
ils découvriront une foule de phénomènes nouveaux dont nous 
n'avons peut-être encore aucune idée. 

J'ai suivi, dans la distribution de mes genres, la méthode naturelle, 
et j'ai adopté à peu près toutes les divisions que DE CAnDOLLE a pro- 
posées dans son Prodrome. Mon but, dans cet arrangement, a été de 
placer les uns auprès des autres, les genres qui ont plus de rapports 
entre eux, et de les classer eux-mêmes en familles, afin de pouvoir 
réunir sous un seul point de vue, les phénomènes qui sont propres à 
ces familles, ou qui appartiennent en commun à tous leurs genres. Je 
ne me suis pas astreint aux plantes d'Europe; j'ai encore mentionné 
celles qui sont cultivées communément dans les jardins des amateurs 
ou dans ceux des botanistes ; et toutes les fois qu’une plante étrangère, 


XI 


et mème très-peu répandue, m'a offert quelque arrangement ou quel- 
que observation nouvelle, je n'ai pas craint de l'énoncer, afin d'attirer 
l'attention des botanistes sur les végétaux du même genre. 

Je ne suis entré dans aucune discussion sur la méthode naturelle, 
qui doit être traitée par les maîtres de la science, et qui suppose des 
connaissances beaucoup plus étendues que les miennes. Cependant je 
n'ai pu m'empêcher de distinguer des espèces que j'appelle {pes ou 
primitives | qui renferment des caractères particuliers, et autour des- 
quelles viennent se ranger les espèces secondaires : ces types m'étaient 
nécessaires, parce que les espèces qu'ils renferment présentent les 
mêmes phénomènes, et répondent à peu près aux divisions de LiNNÉ, 
et encore mieux aux sections de DE CanpoLzE; mais ils sont moins 
étendus, et ils ne doivent comprendre que des plantes bien liées entre 
elles. J'ai fait sûrement des erreurs dans les espèces dont j'ai composé 
mes types, parce que je ne les connaissais pas toujours suffisamment; 
mais je crois avoir établi une distinction utile. 

Ce sont ces types, tels que je les concois, qui forment les vraies 
associations naturelles, et un genre n’est vraiment naturel que lorsque 
toutes ses espèces appartiennent au même type. Mais il faut bien for- 
mer des : genres, comme il faut établir des familles, des tribustet des 
classes ; quoi qu'on puisse, je crois, soutenir avec vérité qu’il y a peu 
de genres, de familles, de tribus et de classes, qui soient entièrement 
naturels. Les végétaux qui couvrent cette terre n’ont pas été formés 
pour nos classifications, et ils ne sont pas liés entre eux par des rap- 
ports également intimes. Ici les rangs sont serrés, là, au contraire, 
ils sont éloignés. Il y a évidemment plus de rapports entre les genres 
des Labiees, des Ombellifères, des Synanthérees, qu'il n’y en a entre 
les espèces dont sont encore composés certains genres. Je considère 
donc l'ensemble des végétaux comme présentant aujourd’hui des 
groupes bien réunis et des plantes aberrantes. Ces groupes forment 
les vraies familles ou les vrais genres, selon le nombre des plantes 
qu'ils contiennent. Les végétaux aberrants ou mal liés entre eux, ne 
peuvent constituer en réalité ni familles ni genres; et on ne les réunit 
que parce que leur association est nécessaire à l'avancement de la 
science. Mais ces familles et ces genres bâtards se séparent au gré des 
botanistes, ou bien lorsque le nombre de leurs espèces est suffisam- 
ment accru, on en tire de vraies familles ou de vrais genres. Du 
reste, cette discussion est à peu près étrangère à mon sujet; je ne l'ai 
entamée que pour établir ma manière de voir, et pour justifier ceux 
qui réforment les genres souvent incorrects de Linwé. Il est bien vrai 
qu'en multipliant les noms, on rend la science plus difficile ; mais cet 


XII 
inconvénient est beaucoup moindre que celui de réunir sous le même 
genre des plantes qui n’ont entre elles que des rapports éloignés. 

Je n’ai point fait précéder mes descriptions d'un Traïté de physio- 
logie, d’abord parce que je n'avais rien à dire de nouveau sur cet objet, 
ensuite parce que je ne me fais pas une idée bien nette de cette science: 
Je comprends bien qu'il existe dans les végétaux une conformation 
générale qui est commune au plus grand nombre, et se rapporte prin- 
cipalement à leur structure intérieure; mais dans nos connaissances 
actuelles, cette conformation générale se réduit à peu de chose, car 
tout ici est plein d'anomalies et d'exceptions. J'ai cru plus utile de 
transporter ce que j'avais à dire à cet égard aux considérations parti- 
culières sur les familles et aux descriptions des genres. On prendra, je 
pense, bien plus d'intérêt à des phénomènes qui s'appliquent à toutes 
les espèces d’un genre, et quelquefois à tous les genres d’une famille, 
qu’à des faits qu'on énonce comme des lois et qui pourtant sont sujets 
à mille exceptions. On pourrait ensuite généraliser en rassemblant les 
phénomènes communs; et cette manière de composer la physiologie 
botanique des organes extérieurs des plantes, serait plus utile que ces 
compilations, où l’on s'étend beaucoup sur les objets connus, et où 
l'on garde un profond silence sur le grand nombre de ceux qui ne sont 
qu'entrevus, et qui mériteraient cependant d'être étudiés. 

Cette forme nouvelle de physiologie végétale mérite d'autant plus 
d'être prise en considération, qu'il y a au moins autant de différences 
entre les familles des plantes qu'entre celles des animaux. Quels rap- 
ports y a-t:il entre les végétaux que l’on appelle acotylés et les autres ? 
Et parmi ces premiers, en quoi les champignons ressemblent-ils aux 
lichens, les lichens aux mousses, les mousses aux conferves, les con- 
ferves aux moisissures,'etc. ? Dans les végétaux monocotylés, que de 
familles dont l'organisation n'a presque aucun rapport! Les plantes 
aquatiques sont-elles conformées comme les terrestres, les Succulentes 
comme les Papilionacees, les Composées comme les Labiées ? Il me 
serait facile de multiplier les exemples; mais je crois en avoir assez dit 
pour prouver que les physiologies particulières sont aussi nécessaires 
pour arriver à une physiologie générale, que les monographies, pour 
le perfectionnement de la botanique descriptive; les unes et les autres 
sont l'ouvrage du temps, et s'obtiendront par les efforts assidus des 
vrais amis de la nature, Il faut laisser toutes ces flores particulières , 
qui n'apprennent à peu près rien (1) lorsqu'elles sé bornent à des 


(1) Il yen a, au contraire, qui apprennent beaucoup, comme l'Histoire des Stirpes 
Helveticæ de Harzer, celle de Gaup1w , etc, 


XIIE 


énumérations faites mille fois, et entreprendre courageusement de 
solides recherches sur la structure intérieure, et les divers phénome- 
nes que présentent, dans leurs développements successifs, les plantes 
surtout qui ont des caractères propres comme les Cactus, les Nym- 
phéacées., les Palmiers , les Ficoïdes , les Conifères, etc. C'est à ceux 
qui séjournent dans ces belles contrées où la nature étale tous ses tré- 
sors, que j'adresse particulièrement ces invitations; dans nos climats 
froids ou tempérés, la végétation est pauvre, et ses produits sont 
aussi faibles que peu variés; mais dans ces terres éminemment végé- 
tatives, où des pluies abondantes fécondent un sol qui ne demande 
qu'à enfanter , les végétaux prennent des accroissements dont nous 
n'avons aucune idée. Ils nous offrent des variétés de formes, d’orga- 
nisation, de port, qui nous étonnent même dans nos serres, où ils 
sont toujours rabougris, Qui pourra décrire tous les phénomènes de 
fécondation de ces immenses palmiers, de ces magnifiques Cactus , et 
de tous ces prodiges du monde végétal ? Qui pourra observer toutes 
les formes de soutien et d’entortillement de ces lianes gigantesques, 
au-dessous desquelles les voyageurs trouvent des abris impénétrables? 
Qui sera assez heureux pour contempler vivantes toutes ces magni- 
fiques fleurs, dont les formes sont si élégantes et les organes si artiste- 
ment arrangés, tous ces mouvements de corolle, de calice, de feuilles 
et de fruits destinés à accomplir le grand œuvre de la reproduction, 
et à conduire les semences à une heureuse fin ? Enfin qui pourra étu- 
dier à loisir toutes ces familles de plantes inconnues à nos climats, 
enrichies de tant d'espèces différentes, et qui fleurissent et multiplient 
sans cesse sous la zone torride, comme dans le grand laboratoire de 
la nature? Voilà les jouissances qui attendent ceux qui auront assez de 
courage, de fortune et de jeunesse, pour entreprendre des voyages 
lointains. Elles ont sûrement été déjà goûtées par un grand nombre 
de botanistes; mais ceux qui voudront en jouir pleinement, devront 
y être préparés par des études approfondies ; car plus l'on connaît, 
plus l’on est désireux d'apprendre. 

Je me suis particulièrement occupé de quelques objets qui m'ont 
paru jusqu’à présent assez négligés. Les botanistes nomenclateurs se 
sont contentés, en général, de distinguer les racines en fibreuses, 
bulbeuses, tubéreuses, etc., et ils ne sont entrés dans aucun détail 
sur les structures particulières à certains genres ou plutôt à certains 
types. Or, il existe dans cet organe les mêmes variétés que dans les 
autres. Les mêmes genres offrent même quelquefois de grandes diffe- 
rences à cet égard, comme on peut s’en assurer pour l'ail, l'iris, le 
muguet, où l’on observeau moins trois formes très-distinctes de racines. 


XIV 


Que de faits dignes d’être étudiés dans ces racines, que les botanistes 
confondent sous les dénominations de bulbes et de tubercules! Je 
me suis appliqué à faire connaître ces organisations particulières, 
souvent si propres à la distinction des espèces, et qui offrent de si 
beaux exemples de la diversité des moyens employés par la nature 
pour la conservation de l'individu, et par conséquent de l'espèce. J'ai 
donné surtout une grande attention à ces racines que les botanistes 
modernes désignent sous le nom de rhizomes ou de tiges souterraities, 
et qui ne me paraissent pas encore avoir été suffisamment étudiées. 

Je porte le même jugement sur un organe que Linxé a le premier 
fait connaître, et qu’il a désigné sous le nom de nectaire. La plupart 
des botanistes se sont élevés contre cette dénomination, etont observé 
avec raison qu'elle s’appliquait indistinctement à des parties qui 
n'avaient entre elles aucune ressemblance : tantôt, en effet, c'était 
une glande, tantôt un pétale, ou bien un calice, une écaille, ou un 
corps d'une forme distincte. Ces différents organes, ou distillaient 
l'humeur miellée, ou ne faisaient que la recevoir, ou bien y étaient 
entièrement étrangers. Laissant là toutes ces discussions, je me suis 
contenté de reconnaître quelle était la partie d'une fleur, qui fournis- 
sait le suc nectarifere. J'ai trouvé ces organes excréteurs dans plusieurs 
plantes, où l'on ne supposait pas qu'ils existassent, Je les ai décrits 
tels que je les ai vus, et je regarde leur présence et leurs différentes 
formes, comme plus constantes que la plupart des caractères dont on 
se sert pour distinguer les espèces, et quelquefois aussi les genres. J'ai 
même été plus loin, et j'ai supposé que cette humeur miellée jouait 
un très-grand rôle dans l’acte de la fécondation, non pas en attirant 
les insectes qui agitent les étamines, et contribuent à l'émission de 
la poussière; mais en recevant et en dissolvant ce pollen, dont les 
émanations devenaient ensuite prolifiques. Jai décrit dans les diffé- 
rents genres, la manière dont je supposais que cette action pouvait 
avoir lieu; et si je me suis trompé sur le mode, je n’ai pas été également 
dans l'erreur sur le résultat : car il n’est pas permis en bonne logique, 
au moins dans les ouvrages de la nature, d'imaginer qu’une sécrétion, 
qui est exactement coordonnée au grand acte de la fécondation, qui 
commence et finit avec elle, lui soit entièrement étrangère. Aussi 
quelques botanistes, frappés de cette coïncidence, et ne comprenant 
pas la nécessité de ce suc propre pour la fécondation , ont cru qu'il 
était destiné à fournir la première nourriture aux ovaires. 

Du reste, je ne crois point que sa présence soit toujours indispen- 
sable, puisqu'il existe encore plusieurs plantes où je n’ai pas su en 
observer aucune trace. On doit donc admettre ici, comme ailleurs, la 


XV 


multiplicité des moyens pour atteindre au même but. Et, en effet, 
toutes les fois qu’un stigmate est papillaire, humide ou visqueux, on 
conçoit qu’il peut lui-même fixer et dissoudre le pollen, et je suis per- 
suadé d'avance que l’on trouvera, en étudiant le grand sujet de la 
fécondation , que la nature l’opère souvent par des moyens que nous 
n'avions pas encore soupconnés. 

C’est aussi la raison pour laquelle j'ai décrit attentivement le mode 
d'ouverture, le jeu des anthères, la conformation et les mouvements 
divers des stigmates. Il existe, en effet, ici comme ailleurs, des phéno- 
mènes qui n’ont point encore été suffisamment examinés, et qui cepen- 
dant s'offrent tous les jours à nos yeux. Les anthères s’approchent, 
s’écartent, se contournent dans certaines espèces , dans d’autres elles 
restent constamment immobiles. Ici, comme dans le châtaignier, le 
stigmate est un filet roide et corné, qui ne paraît offrir ni adhérence 
avec le pollen , ni communication avec l'ovaire ; là, au contraire, c'est 
une houppe artistement conformée, ou bien une ouverture pleine 
d’une liqueur alternativement émise et pompée, ou enfin une surface 
papillaire éminemment propre à la fonction qu'elle doit remplir. Tous 
ces faits et une foule d'autres méritent d’être consignés, et ils ne peu- 
vent l’être que dans une description un peu étendue de familles, de 
genres ou même quelquefois d'espèces. 

On n'imagine pas, combien cette botanique, que je puis appeler 
vivante, a d'intérêt et de charme. Dans nos herbiers, tout représente 
le silence de la mort ; tout est sans forme, sans grâce et sans symétrie. 
Mais dans la nature, au milieu de nos champs, de nos bois et de nos 
prairies, tout est frais et brillant des plus vives couleurs. On y voit à 
nu les divers phénomènes de la végétation, les mouvements variés des 
feuilles et des tiges, l'épanouissement des calices et des fleurs, l’ap- 
pareil de la fécondation et la manière dont elle s'accomplit. On se plait 
plus tard et à l'époque où la campagne a perdu une grande partie de sa 
parure, à contempler les moyens divers par lesquels les péricarpes 
s'ouvrent pour répandre leurs graines. On admire les artifices nom- 
breux par lesquels ces graines s’accrochent, se cachent en terre, s’en- 
foncent dans l’eau ou se répandent au loin par leurs ailes, leurs enve- 
loppes floconneuses ou leurs aigrettes flottantes. Rien de tout cela nese 
retrouve dans les herbiers, qui ne présentent que des feuilles, des tiges 
et des organes déformés. Aussi je ne m'étonne guère de l’espèce 
d'effroi qu’ils causent à ceux qui ne sont pas botanistes de profession, 
et j'avoue que je ne les ai jamais visités avec plaisir, lorsque je n'avais 
pas pour but de m’assurer d’un fait particulier, ou de trouver quelques 
espèces nouvelles d’un genre qui avait fait d'avance l'objet de mes 


XVI 

recherches. Cela n’empèche pas que ces collections, souvent l'objet de 
tant de travaux et de tant de soins, ne soient le précieux et unique 
fondement de toutes nos connaissances en botanique. 

Un des organes les plus singuliers des végétaux, c'est celui qui est 
destiné à les soutenir dans leur accroissement : je veux parler des 
mains ou des vrilles. On considère aujourd'hui ces productions comme 
des pédoncules ou des pétioles avortés, et il faut bien avouer qu'il 
en est ainsi dans la plupart des cas. Mais le mot d’avortement présente 
à l'esprit une idée fausse d'imperfection et de désordre, là où ilnya 
que de la sagesse et de la prévoyance. C'est pour ne pas multiplier 
inutilement les êtres, et pour opérer un plus grand nombre d'effets 
avec un petit nombre de moyens, que le Créateur a disposé les choses 
de cette manière. Dans la vigne, par exemple, les pédoncules qui 
paraissent les premiers, sont chargés de fleurs et acquièrent une 
grande consistance. Ceux qui sont placés plus haut sur la tige, et 
dont les fruits n'auraient pu aisément mûrir, se changent en vrilles, 
c'est-à-dire que, par une loi admirable, ils acquièrent la faculté de 
s'allonger, de se contourner et de se serrer fortement autour des corps 
qu'ils rencontrent, mais comme leur grand nombre aurait chargé inuti- 
lement la plante, et nui à son développement, on ne les trouve point 
à tous les nœuds. C’est pour la même raison que les feuilles inférieures 
des ZLathyrus, des Vicia, des Pisum, n’ont point de vrilles, et que dans 
les supérieures, cet organe s'agrandit selon les circonstances. En exa- 
minant de près tout ce qui se rapporte à ce sujet, on trouve que cha- 
que genre, ou plutôt chaque espèce, a des arrangements qui lui sont 
propres. Pour l'ordinaire, les vrilles qui ne rencontrent point d'appui, 
s'étiolent et se dessèchent, tandis que les autres végètent avec force. 
Quelquefois ces organes sont pourvus d’une sensibilité exquise, 
comme on le verra dans les Sicyos et dans la famille des Cucurbitacees ; 
souvent ils se ramifient à leur extrémité, afin de se cramponner plus 
fortement à leur appui, où ils se terminent en mains qui simplantent 
contre les murs, comme on le voit dans le Lierre de Canada. Et que 
dirai-je de ces tiges volubles les unes dans un sens, les autres dans 
un autre, et de celles qui, comme le Liüerre, la Bignone radicante, 
jettent des crampons contre les corps qu’elles touchent. De tous ces 
faits et de plusieurs autres que nous supprimons ici, mais que nous 
énoncerons plus tard, on arrive à cette belle conséquence, que parmi 
les plantes à tige faible et à développement indéfini, il n’en est aucune 
qui ne présente quelque forme de soutien , tandis que parmi celles qui 
sont pourvues de tronc ou de tige solide, il n’en est aucune qui ait 
reçu un appui. S'il y avait des faits contraires à cette assertion, on 


XVII 
trouverait, en les examinant de plus près, qu'ils sont justifiés par quel- 
que but particulier, et qu'ils confirment la loi, bien loin de la violer : 
c'est ce qu'on verra, en effet, plus d'une fois, dans le cours de ces 
descriptions. 

Je ne me suis pas occupé spécialement de la Géographie botanique, 
qui n'entrait pas dans mon plan. Mais j'ai indiqué, toutes les fois que 
je l'ai pu, l'habitation et la station des diverses espèces de chaque 
genre, parce qu'il m'a paru intéressant de faire connaitre la manière 
dont elles avaient été tantôt dispersées, tantôt réunies en petits 
groupes, ou plutôt en associations distinctes, et formant ainsi ces 
scènes pleines de charmes, ces tableaux si vivants et si multipliés qui 


frappent à chaque instant l'ami de la nature. Car ce n’est rien d’ob- : 


server une plante croissant dans les jardins où nous l'avons empri- 
sonnée, Il faut la voir dans sa beauté native, dans sa patrie, au milieu 
de ses compagnes dont elle emprunte une partie de ses grâces, et dont 
elle contribue à son tour à relever l'éclat; c'est sur les lisières des bois, 
au milieu des prairies, sur les pentes arides des montagnes, sur leurs 
sommités élevées, sur les bords des ruisseaux, des lacs, des marais, 
qu'il faut les contempler pour se faire une juste idée de leur fraîcheur, 
de leur élégance, de leurs formes et de leurs parfums. Il y a dans ce 
spectacle des effets magiques que l'on ne se lasse point d'admirer, et 
que J'ai essayé de retracer toutes les fois que j'ai eu le bonheur d'en 
être le témoin. 

Il va sans dire que ces descriptions de plantes, toujours semblables 
et à peu près toujours formées des mêmes organes, n’intéresseront 
qu'un petit nombre de lecteurs, et ne présenteront aux autres qu’une 
répétition monotone et par conséquent ennuyeuse des mêmes objets. 
Aussi ce livre n'est-il destiné qu'aux diverses personnes qui s'occupent 
de botanique. C'est après avoir acquis la connaissance d’un grand 
nombre d'espèces, et avoir examiné avec soin leurs différences d’or- 
ganes, que l'on doit lire l'histoire de leurs genres. On pourra y ren- 
contrer alors des remarques qui paraîtront nouvelles, des phénomènes 


qu'on n'avait pas aperçus, et des réflexions générales dignes de quelque 


attention. J'ai goûté beaucoup de jouissances dans cette étude, et si 
j'ai réussi à en faire éprouver quelques-unes à ceux qui entreront dans 
ma manière de voir, j'aurai obtenu toute la récompense que je désiré. 

Ceci me ramène naturellement à ces idées de symétrie, qui ont 
présidé, dit-on, à l'organisation de tous les végétaux, et qui ne sont 
voilées que par des avortements, des développements extraordinaires ou 
des soudures. C'est là, en peu de mots, le système de l’'illustre auteur 
de la Théorie élémentaire, dont les opinions acquièrent chaque jour 

xx 


XVIII 


plus de faveur. Et, en effet, il est impossible de ne pas reconnaître 
dans une multitude de cas, des phénomènes de ce genre. Les ovaires 
de plusieurs plantes perdent par la maturation une partie de leurs 
loges primitives, les graines avortent régulièrement en plus ou moins 
grand nombre, ainsi que les étamines et même les styles. Enfin, l’on 
peut voir quelquefois, dans plusieurs Personees, des étamines d'abord 
bien conformées, qui sont ensuite mutilées, et dans les Labiées, des 
filets symétriquement placés, qui se contournant au sein de la 
corolle non développée, viennent ensuite s'étendre parallèlement sous 
la lèvre supérieure. Tous ces phénomènes et plusieurs autres sembla- 
bles qui s'opèrent chaque jour, indiquent que non-seulement il y à 
dans les plantes un dérangement de forme primitive, mais de plus 
que ce changement ne remonte pas très-loin, et qu’au contraire il 
s'opère souvent en partie sous nos yeux. Ce n'est pas un désordre, c'est 
au contraire une disposition prédéterminée, qui a pour but, comme 
j'ai tâché de le faire voir, de donner aux diverses parties de la fleur, 
la forme et la position les plus favorables à la conservation de 
l'espèce. Je recois donc avec plaisir l'ensemble d'un système auquel je 
ne puis me refuser, d'autant plus qu'il ne blesse point mes idées 
d'ordre et de sagesse conservatrice, et qu'au contraire il les étend et 
les perfectionne. Mais si je suis jusque là d'accord avec les partisans 
de cette théorie, aussi profonde que remarquable, je ne peux plus 
les suivre avec la même confiance dans les conséquences indéfinies 
qu'ils en tirent, et que j'exposerai lorsque les circonstances le deman- 
deront. Leurs opinions, qui gâtaient d'abord pour moi le spectacle de 
la nature, parce qu’elles semblaient me ramener à des idées de force 
mécanique et d'arrangements nécessaires, comme ceux qui ont lieu 
dans nos cristaux, ne me troublent plus aujourd’hui, parce que je 
vois autant de puissance et de sagesse à tirer de matériaux bruts et 
uniformes un ensemble parfait, qu’à ordonner tout à la fois et pri- 
mitivement ce bel ensemble. Cependant je ne puis croire que le 
Créateur ait tout fait sortir du même type, ou si l’on veut du même 
moule; qu'il n'ait pas multiplié les formes primitives comme les secon- 
daires, et je ne puis concevoir comment des êtres originairement tout 
semblables auraient pu donner naissance à des variations si merveil- 
leuses ; il fallait bien qu'il y eût dans ces formes, que vous regardez 
comme semblables, des qualités internes et des forces d'où procé- 
dassent les différences qui frappent aujourd'hui nos yeux. 
Ce système de symétrie, quelque remarquable qu'il paraisse, est 
loin de rendre compte de cette botanique que jappelle supérieure , et 
qui fait le principal bat de mon ouvrage. Pourquoi les plantes sont- 


XIX 
elles si variées en organisation et en durée ? Pourquoi leurs racines 
ne sont-elles pas toutes semblablement conformées ? Pourquoi les 
unes ont-elles des appuis, tandis que les autres en sont privées ? D'où 
viennent les formes si différentes de leurs fleurs, les mouvements si 
diversifiés de leurs calices, de leurs pétales, de leurs étamines? Pour- 
quoi certains péricarpes restent-ils fermés ? Pourquoi d'autres lancent- 
lis leurs semences avec élasticité? Pourquoi les uns s'ouvrent-ils au 
sommet, les autres horizontalement par leur milieu, ou bien à leur 
base par des pores? Toutes ces questions et d’autres semblables ne 
sont pas résolues par les lois de la symétrie, elles supposent, quoi 
qu'on fasse, une sagesse ordonnatrice qui a combiné les moyens avec 
Je but, qui a approprié le spectacle de la nature à nos yeux et à notre 
intelligence, comme elle a disposé ses nombreuses productions pour 
nos différents besoins. 

Cet ouvrage devait être accompagné de figures destinées à repré- 
senter des organes dont je voulais donner une idée plus nette, ou 
des arrangements particuliers toujours difficiles à décrire exactement. 
La personne qui s'était chargée de cette tâche était celle à qui je 
devais les dessins de mes Conferves , de mes Préles, de mes Oroban- 
ches, etc., la compagne de tous mes travaux, Je ne l'ai plus, et je 
trouve de la consolation à m'occuper des mêmes objets dont nous 
nous entretenions ensemble, et sur lesquels elle m'éclairait de ses pré- 
cieux avis. Elle est ainsi toujours présente. 

Je termine cette Introduction comme les précédentes, en remplis- 
sant un devoir qui me devient tous les jours plus doux, celui de témoi- 
gner ma vive gratitude à mon compatriote M. De Cannozze, pour 
son inépuisable obligeance. C'est lui qui a fondé dans nos murs ce 
jardin qui m'a été si utile; c’est à lui que je m'adresse quand j'ai besoin 
de conseils, de livres ou de plantes. Il m'a communiqué ses mémoires 
et même ses travaux inédits avec une libéralité sans exemple. C’est 
ainsi qu’on aime la science et que l’on concourt à ses progrès. 


1°" Mai 1830. 


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SECONDE INTRODUCTION. 


J'avais entrepris, en 1830, la publication de cet ouvrage, et je ne 
l'aurais pas interrompue si les circonstances avaient été meilleures ; 
mais, comme tous les esprits étaient alors préoccupés des événements 
politiques qui agitaient l'Europe et surtout la France, j'ai cru conve- 
nable de suspendre mon projet et d’en renvoyer la continuation à des 
temps plus heureux. 

J'ai profité de cet intervalle pour rendre cet essai plus digne de 
l'attention des botanistes : non-seulement jai entrepris plusieurs 
voyages, afin d'étudier diverses plantes que je n'avais pas encore vues 
vivantes, ou de visiter les jardins publics et particuliers qui étaient à 
ma portée ; mais J'ai consulté la plupart des livres dont je pouvais 
espérer quelques secours, j'ai lu les différents mémoires qui avaient 
des rapports avec mon sujet, en particulier ceux du Museum, des 
Annales des sciences naturelles et des collections académiques les plus 
estimées ; je citerai, toutes les fois que l’occasion s’en présentera, les 
auteurs qui m'ont fourni des remarques sur les familles, les genres 
ou même les espèces que j'ai décrits. 

Je publie aujourd'hui mon ouvrage dans son entier; le premier 
volume, qui a paru il y a neuf ans, s’ytrouve compris, mais il a recu 
des additions nombreuses, et j'y ai inséré quelques observations nou- 
velles et importantes. 


XXII 

J'ai pris pour guide, dans l'exposition des familles, mon savant 
ami, M. le professeur De Canpozre, à qui j'ai chaque jour de nou- 
velles obligations; quand son Prodromus , qui est loin d’être fini, est 
venu à me manquer, je me suis trouvé comme errant dans un vaste 
désert, et j'ai cherché cà et là des fanaux pour éclairer ma route. 
Heureusement j'ai rencontré quelques points brillants, c'est-à-dire, 
des familles décrites par des auteurs placés au faîte de la science, en 
particulier les Zabiées de Benrnam, les Graminees de Kuwra, les 
Antirrhinees de CHAvanNEs, etc. ; mais ces lumières éparses étaient 
séparées par des ténèbres plus ou moins profondes, ou, ce qui est la 
même chose, par des familles et surtout par des genres mal circonscrits, 
qui présentaient par conséquent des espèces flottantes, et sur lesquelles 
je ne pouvais pas généraliser mes observations. 

J'ai fidèlement suivi le plan que je m'étais tracé dès l'origine, et je 
suis resté étranger à tout ce qui concerne la physiologie végétale pro- 
prement dite, c'est-à-dire, l'organisation intérieure de la plante, de 
l'écorce, du liber, du bois, du parenchyme, la nature et les fonctions 
des divers vaisseaux, la marche de la sève, les différents modes de 
nutrition, de sécrétion, etc., en un mot, cette nombreuse suite de 
questions qui occupent beaucoup les physiologistes de nos jours, etsur 
lesquelles les microscopes continuellement perfectionnés donneront 
sans doute, plus tard, de grandes connaissances. 

J'ai tâché de me faire une idée claire de cette symétrie primitive 
qui a présidé à la conformation des végétaux, et de laquelle dépen- 
dent encore leurs divers développements; mais je n'ai pas pu la 
ramener à une forme unique, car, au contraire, J'ai été forcé, surtout 
dans les Cryptogames, d'en supposer autant qu'il y avait de familles 
distinctes, celle des Champignons, celle des Mousses, celle des diffé- 
rentes Algues, etc.; de même, je n’ai pas dû, dans les Phanérogames, 
confondre le type des Graminees ou celui des Liliacées avec celui des 
Cruciferes, ni celui des Crucifères avec celui des Malvacées, des Légu- 
mineuses, etc. J'en ai donc conclu qu'on ne pouvait se dispenser d’ad- 
mettre dans les végétaux, comme dans les animaux, un grand nom- 
bre de types ou de formations distinctes, et non réductibles; mais 
qu'il n'en existait pas moins, dans quelques-uns de leurs organes pris 
séparément, une vraie symétrie, par exemple dans les deux côtés de 
leurs feuilles, de leurs sépales, de leurs pétales et même de leurs 
anthères. On trouve même quelquefois de la symétrie, mais plus sou- 
vent de la régularité, dans la disposition relative des divers organes 
floraux, des corolles, des calices, des étamines et souvent des carpelles. 
On voit la même régularité dans les insertions variées des feuilles sur 


XXITI 


les tiges ; mais ces insertions ne conserventleur régularité que près de la 
base, si du moins les tiges doivent porter desfleurs; car plus hautet dans 
lesinflorescences, elles sont modifiées au point qu'il estdifficile d'assigner 
les divers ordres auxquels elles appartiennent. Il ÿ a donc ici un arran- 
gement nouveau, une loi supérieure à la précédente, et qui se rapporte 
aux fonctions les plus importantes des végétaux, c'est-à-dire, à leur 
fécondation et à leur dissémination. C'est en vertu de cette loi que 
les diverses soudures s’opèrent, que les feuilles se rapprochent en 
verticilles , qu'elles se transforment en calices, corolles, étamines, 
anthères et carpelles, tantôt disposés sur un seul rang, tantôt sur plu- 
sieurs, et presque toujours alternes les uns aux autres. 

Mon principal but, dans cet ouvrage, c'est l'exposition des diverses 
forces vitales qui se développent dans ces nombreuses transformations 
que je viens d'indiquer, et surtout aux grandes époques de la floraison, 
de la maturation et de la dissémination. J'entends par ces forces, 
celles qui donnent naissance à des phénomènes dont nous ne pouvons 
pas assigner la cause mécanique dans l’état actuel de la science , et qui 
se manifestent surtout par des mouvements et des arrangements dont 
le but est évidemment la conservation ou la reproduction de l'être, 
comme nous le verrons plus tard dans les descriptions de genre ou 
d'espèce. 

Ce qui frappe surtout les regards, dans les règnes organiques, c'est 
la simplicité du but et la magnificence de l'exécution. Le but est 
évidemment la permanence des espèces, laquelle aurait pu s’opérer, 
sans fécondation préalable, par de simples gemmes que le vent ou tout 
autre agent aurait dispersées ; or, au lieu de ces gemmes uniformes 
qui n'auraient donné aucune idée d’un être intelligent, ou qui n'en 
auraient donné qu'une très-contestée, voyez la multiplicité et la variété 
infinie des moyens mis en œuvre pour arriver au but proposé : non- 
seulement il y a des racines longuement tracantes, des stolons de 
diverses sortes, des branches qui s’enracinent, des bulbilles et des 
gemmes qui se répandent, des boutures naturelles, etc.; mais il y a, 
de plus, des formes très-nombreuses de fécondation, et dans chacune 
de ces formes des organes fécondateurs disposés en vue des organes 
floraux qui les accompagnent et les protégent; et ce que je dis des 
divers modes de fécondation, doit s'appliquer également à la structure 
des capsules, à la disposition et à la dissémination de leurs graines. 

Or pourquoi, je vous prie, cette variété infinie dans la structure 
des plantes et surtout dans celle de leurs fleurs ? Est-ce pour satisfaire 
aux besoins d’une nature insensible, ou à ceux d'animaux incapables 
de l’apercevoir ? N'est-ce pas évidemment à l'homme qu’elle s'adresse 


XXIV 
ici-bas, et n'est-ce pas à lui seul qu'il appartient d'y lire en grands 
caractères la première et la plus importante de toutes les vérités, qu’il 
yaun Être source de toute intelligence, que cet Être est sans cesse 
présent à toutes les parties de son ouvrage, qu'il a voulu et qu'il veut 
“encore que l'homme, sa créature intelligente, le contemple dans ses 
œuvres ? 

Je suppose que je sois jeté dans un désert où je ne découvre aucune 

trace d'homme : je vois bien un ciel déroulé au-dessus de ma tête, et 
je sens bien l'influence d'un soleil qui m’éclaire ; du reste, je n'apercois 
rien de plus; mais si j'incline mes regards sur la terre, j'y trouve des 
plantes avec leurs fleurs ou leurs fruits, et si je ne suis pas étranger à 
l'étude de la nature, je vois se développer sous mes yeux des formes 
nouvelles, témoignages touchants de l'existence de cet être qui m'a 
déjà parlé tant de fois dans son muet langage; et les gages qu'il me 
donne de sa toute-présence, et que je contemple avec délices, sont, je 
vous l'assure, pour les âmes capables de les reconnaître, une des plus 
vives jouissances qu'elles puissent éprouver sur cette terre. 

Faites traverser dans un beau jour, à un botaniste tel que je le 
suppose, un des passages de nos Alpes : chaque pas qu'il fait dans ce 
chemin, qu'il ne parcourt jamais qu’à pied, est accompagné d'une 
sensation nouvelle ; ici, c’est une plante qu’il a vu autrefois, et qui lui 
rappelle un précieux souvenir ; là, c’est une plante inconnue qu'il ne 
se lasse point de contempler, et dont la structure florale lui apprend 
ou lui confirme quelque secret d'organisation supérieure ; à côté, sont 
des végétaux solitaires qui le charment par l'élégance de leur port; 
plus loin, des gazons verdoyants formés par des plantes sociales ; et 
quand il arrive au sommet du passage, dans ces jardins de la nature, 
où les végétaux les plus rares se sont comme donné rendez-vous, il ne 
peut plus continuer sa route, il s’assied pour s’extasier à loisir, pour 
examiner curieusement dans leur structure florale ces plantes pleines 
de mouvement et de vie, et il rapporte de sa contemplation studieuse 
des trésors de faits inconnus, qui lui appartiennent bien plus, et 
-élèvent bien plus ses pensées, que ces autres trésors que nous pour- 
suivons avec tant d’ardeur. 

Quand j'entreprends une excursion dans des contrées que j'ai déjà 
parcourues, je me dis : Je vérifierai ces faits que je ne puisencore consi- 
dérer comme certains; je cueillerai en fleur cette plante que je n'ai 
encore rencontrée qu'en graine ou que je n'ai pasencoreeu le bonheur 
de voir; enfin je ferai des observations que j'ai jusqu'à présent négligées 
ou seulement entrevues. Mais, si je dois visiter des contrées inconnues 
et riches en plantes rares, des montagnes, des rivages, jugez des 


XXV 


‘jouissances intérieures et pures auxqueiles je me prépare, et qui ne me 
font jamais éprouver de mécompte. 

La botanique a, comme toutes les sciences naturelles, une étendue 
infinie, car le nombre des végétaux actuellement connus approche de 
quatre-vingt mille, et il doit encore long-temps s’accroître. Or il n’est 
donné à personne de réunir, et surtout de voir en pleine vie une 
telle multitude de plantes ; et, quand on le pourrait, il resterait encore 
à les étudier dans leur conformation, et surtout dans leurs mœurs, 
c’est-à-dire, dans leur organisation supérieure. Mais cet état de choses 
est très-avantageux pour nous, car, au moyen de cette dispersion 
indéfinie , chaque homme a auprès de lui un trésor qui lui appartient 
en propre et dont il peut jouir sans nuire à personne ; il y a plus : 
l'Américain ou l’Européen, en changeant mutuellement de patrie, 
trouveront chacun à leur portée des végétaux qui leur étaient autre- 
fois inconnus, et s'ils sont botanistes , ils auront un avant-goût de ces 
jouissances qui entrainent les naturalistes voyageurs à supporter tant 
de privations et à braver tant de dangers. 

Pour donner un exemple de ces points de vue multipliés que pré- 
sente l'étude de la botanique, je prends une fleur que j'étudie à ma 
manière, en m'adressant les questions suivantes : Cette fleur s’ouvre- 
t-elle ou reste-t-elle fermée ? Si elle s'ouvre, tombe-t-elle le même 
jour, ou, ce qui est la même chose à peu près, sa fécondation 
s’accomplit-elle dans la journée? Les anthères sont-elles égales en 
hauteur aux stigmates, sont-elles placées plus haut ou plus bas que le 
tube corollaire ou même dans son intérieur; et dans cestrois ou quatre 
cas, comment la fécondation s’opère-t-elle ? Les anthéres sont-elles 
introrses, latérales ou extrorses? La fécondation est-elle directe ou 
indirecte, c'est-à-dire , les anthères fécondent-elles leurs propres fleurs 
ou les fleurs voisines ? Est-elle intérieure ou extérieure, et quel rôle y 
joue le nectaire ? Après la fécondation, le fruit estil nu ou enveloppé 
par les organes floraux, et surtout par le calice ? Cet organe s’abaisse- 
t-il et se relève-t-il après la fécondation, reste-t-il fermé ou ouvert pen- 
dant la maturation ? Le fruit s’ouvre-t-il ou reste-t-il fermé, parce qu'il 
ne contient qu’une semence ? Si le péricarpe est sec,comment s'ouvre- 
t-il, et comment se répandent les semences? Est-ce par la simple 
agitation de l'air, ou bien tombent-elles sur le terrain par l'effet de la 
position penchée ou renversée de la capsule, ou enfin sont-elles 
Jancées au loin par quelque artifice particulier, et quel est cet artifice ? 
Ces semences avortent-elles en partie; sont-elles ailées, aigrettées ou 
pourvues de quelques crochets qui favorisent une dispersion lointaine? 
Enfin, à quelle famille naturelle appartient cette plante, avec quels 


XXVE 
genres peut-elle avoir des ressemblances, et quelle est la patrie que lui 
a assignée le Créateur ? Voilà une esquisse des questions que s'adresse 
souvent, sans y penser, le botaniste observateur ; et s’il examine, sous 
ces divers points de vue, le végétal proposé, je lui prédis qu'il arrivera 
souvent à la découverte d’un phénomène digne de toute son attention. 

Chaque plante, en effet, est un être vivant qui, surtout dans les 
espèces bien distinctes, a sa manière d'être et son organisation propre; 
elle se modifie, il est vrai, selon les terrains et les climats, et elle n’a 
pas la même physionomie sur les bords de la mer que dans nos plaines, 
ou sur nos montagnes lorsqu'elle y peut vivre; elle a des racines, des 
tiges, des feuilles et une inflorescence qui lui appartiennent ; elle 
fleurit, se féconde, se nourrit, se dissémine autrement qu’une autre. 
Quand on la considère croissant sur le sol qui lui est propre, et au 
moment où elle va s'épanouir, on lui trouve d'ordinaire une beauté 
native et une grâce charmante, soit dans le port, soit surtout dans les 
fleurs ; elle ouvre sa jeune corolle, elle développe ses organes repro- 
ducteurs, elle exécute les mouvements nécessaires à sa conservation, 
et enfin elle nourrit en silence les graines qu’elle répand dans la saison 
convenable, C’est dans ces différents états que j'aime à la voir, parce 
qu'elle porte alors l'empreinte de lIntelligence qui l’a créée, et que 
c'est précisément cette empreinte qui me ravit; mais que voulez-vous 
que je voie, après l'éclat et les nuances variées des couleurs, chez ces 
êtres mutilés que vous accumulez dans vos serres ou vos jardins, chez 
ces Dahlia, ces Camelia, ces Geranium, ces Camomilliers, eic., dont 
les fleurs ne présentent plus que des amas informes de pétales, dont 
les organes reproducteurs ont disparu avec leurs admirables arrange- 
ments, et qui ne sont plus capables ni d'exécuter le moindre mouve- 
ment vital, ni de mûrir et répandre leurs fruits ? Sans doute que le 
physiologiste y pourra étudier les diverses altérations que subissent 
les organes floraux tourmentés par la culture ; mais l'ami de la nature 
vivante et animée cherchera ailleurs ses jouissances. 

Cette vie de la plante, que le botaniste reconnaît surtout dans les 
organes floraux, se manifeste même extérieurement aux regards les 
moins attentifs : c'est elle qui dirige les tiges du côté de la lumière, 
et qui contourne les pédoncules de manière que les calices s'ouvrent 
aux rayons bienfaisants de l’astre du jour; c'est elle qui raccourcit ou 
allonge et entortille les vrilles des plantes, afin que leurs tiges faibles et 
sarmenteuses puissent se soutenir en bravant tous les efforts des vents; 
c'est elle qui revêt l'extrémité de ces mêmes vrilles de pelotes, de 
mains ou de griffes , afin qu’elles puissent s'attacher fortement à tous 
les corps solides, Voyez ces fleurs s'épanouir chaque matin et se fermer 


XXVIE 
chaque soir, jusqu'à ce qu’elles soient entièrement fécondees; ces 
capsules se fermer par l'humidité, et s'ouvrir par la sécheresse, ou 
bien au contraire se fermer par la sécheresse et s'ouvrir par l'humidité, 
si la réussite des graines l'exige ; voyez encore ces pédoncules incliner 
leurs fleurs vers la terre à l'approche de la pluie et les relever lorsque 
le ciel est devenu serein, et suivez ces nombreux phénomènes désignés 
sous le nom de réveil et de sommeil, et que vous pourrez constater 
vous-même à la fin et au commencement du jour. 

Les mœurs des végétaux, si je puis parler ainsi, c'est-à-dire, leur 
manière d'être et les mouvements qu'ils exécutent dans les diverses 
périodes de leur existence , ont plus de régularité et de constance, 
que vous n’en trouverez souvent dans les caractères par lesquels vous 
êtes habitués à distinguer les espèces, c’est-à-dire, la forme des feuilles, 
des stipules et des bractées, celle des tiges et des pédoncules lisses, 
rudes, nus, velus, etc. Et il n’y a rien d'étonnant dans la permanence 
des premiers et la variabilité des autres, car si vous changez la forme 
des feuilles et la surface des pédoncules ou des tiges, si vous les ren- 
dez lisses, ou que vous les couvriez de poils, vous ne faites rien que 
ce qui s'effectue tous les jours par la simple différence des localités ou 
même des climats, et par conséquent, vous n’altérez point les fonc- 
tions de la plante; mais si vous empèchez une fleur de s'ouvrir ou de 
se fermer, d'incliner ou de redresser son pédoncule, de plier ses 
feuilles à l'obscurité et de les étaler au soleil; si vous gènez ces mou- 
vements si remarquables qui ont lieu lorsqu'elle prépare son épanouis- 
sement et sa fécondation; si vous troublez son mode de déhiscence 
ou sa dissémination, vous jetez un désordre évident dans ses fonctions 
les plus importantes, et vous mettez en péril cette reproduction 
que l'Auteur de la nature a eue surtout en vue, et à laquelle sont 
subordonnés la plupart des phénomènes que vous observez dans les 
végétaux. Si vous altérez, même légèrement , ceux qui , abandonnés 
à la simple nature, se propagent sans aucun soin, vous les rendez 
souvent inhabiles à se reproduire; ainsi, par exemple, si vous cultivez 
le Pavot setigere, vous le changez en Pavot somnifère, et vous fermez 
les trous par lesquels l'espèce sauvage ou primitive répandait ses 
semences, en sorte que vous supprimez toute dissémination natu- 
relle. IL y a plus, si vous tentez de ramener à leur forme primitive 
les fleurs que nous appelons irrégulières, telles que les Labiées, les 
Personées, les Papilionacces, etc., vous les rendez stériles, comme 
le prouvent les Pélories des diverses Anthirrhinees ; tant il est vrai 
que, d'un côté, les lois qui président à l’action des forces vitales sont 
essentielles à la conservation de l'espèce, et que, de l’autre, la repro- 


XXVIII 
duction naturelle a été resserrée dans des limites trés-étroites, qui 
sont même dépendantes de la chaleur, de la pluie et de la tempéra- 
ture plus ou moins élevée de notre atmosphère. 

Ces forces vitales, toujours subordonnées à l'âge des végétaux, ne 
sont jamais plus développées que lorsque ceux-ci ont atteint l'époque 
de leur reproduction. Ont-elles quelque liaison avec ce que nous ap- 
pelons les affinités naturelles, en sorte que les plantes qui ont entre 
elles le plus grand nombre de rapports, soient aussi celles dont les 
forces vitales aient le plus d'analogie? Sans doute que les familles véri- 
tablement naturelles, comme celles des Géranices, des Malvacées, 
des Légumineuses, des Cruciferes, des Graminées, sont composées 
d'un grand nombre d'espèces qui ont des mœurs à peu près sembla- 
bles ; mais il existe plusieurs autres familles qui n’ont guère en com- 
mun que des caractères tirés de la forme apparente de la fleur et du 
fruit, et qui par conséquent renferment des espèces dont les mœurs 
sont très-différentes. Qu'y a-t-il de commun, par exemple, dans les 
mœurs des Pinguicules et des Utriculaires que vous réunissez sous la 
famille des Lentibulaires, ou bien dans les forces vitales des Antir- 
rhinées , Verbascées et Véroniées qui constituent votre famille des 
Scrofularices, ou mieux encore dans celles des V’erbascum et des 
Scrofulaires que vous rapprochez si intimement dans vos ordres natu- 
rels? Toutes les fois donc que vous formerez vos familles de tribus 
ou même de genres dont l'organisation intime sera différente, autant 
de fois vous aurez des tribus et des genres dont les habitudes n'auront 
point de rapports ou n’en auront que de très-éloignés, comme vous 
pouvez le voir dans les tribus des Renonculacées, c'est-à-dire, les 
Clématidees , \es Anémonces, les Ranonculces , les Helléborées et les 
Pæoniacées , et dans celles d’un grand nombre d’autres familles. Les 
genres même de ces différentes tribus sont pour la plupart très-dis- 
parates, comme on peut le voir, par exemple, dans l'Hellebore, le 
Coptis , YIsopyre, la Garidelle, la Nigelle, YAncolie, le Delphinium, 
l’'Aconit, qui forment en grande partie la tribu des Helleborees. Je ne 
prétends point attaquer ici les savants célèbres qui ont imaginé et per- 
fectionné les ordres naturels; j'affirme seulement que les lois d’après 
lesquelles les forces vitales ont été réparties dans ces divers végétaux, 
appartiennent à un système très-différent de celui de nos ordres natu- 
rels, et qu’on trouve souvent une grande ressemblance dans les forces 
vitales de plantes que nos diverses méthodes éloignent le plus les unes 
des autres. 

On peut même ajouter que les'Zégumineuses , les Malvacces, les 
Cruciferes et les autres familles naturelles dont les genres paraissent 


XXIX 
très-hiés entre eux, offrent, dans ces mêmes genres et dans plusieurs 
de leurs espèces, des développements de force vitale assez différents 
les uns des autres, quoique contenus en général dans des limites, 
étroites; mais tout ceci deviendra plus clair dans la suite de cet 
ouvrage, lorsque j'énumérerai les divers phénomènes que présentent 
les genres et même les espèces que j'aurai eu occasion de décrire. 

C'est une étude pleine d'intérêt et de vie que la botanique considérée 
sous ce dernier point de vue, qui est, je crois, un des plus relevés 
de ceux que la science peutatteindre, car il consiste à envisager chaque 
végétal comme un être animé, qui, indépendamment des diverses 
propriétés qu'il possède en tant que plante, en réunit d'autres qui 
lui sont propres, et par lesquelles il se distingue de tous les êtres du 
même règne. Îl est bien vrai que la zoologie manifeste plus hautement, 
dans ses diverses branches, les admirables combinaisons d’une Intelli- 
gence Créatrice; mais son étude n’est pas également à la portée de tous; 
elle exige de plus un appareil d'instruments et une suite nombreuse 
d'expériences, et nous rebute souvent par ses opérations sur les êtres 
qu'elle mutile, dont elle varie les souffrances, et qu'elle fait quelquefois 
périr avec une désespérante lenteur. J'ai bien, à la vérité, quelque 
regret de couper ces tiges si verdoyantes, et d'endommager avec mon 
scalpel ces fleurs si brillantes et si admirablement conformées ; mais je 
n'ai pas le sentiment pénible que je les fais souffrir, et je n’assiste à 
aucun de ces cruels débats entre la vie et la mort, dont les naturalistes 
d'un autre ordre sont trop souvent les témoins. 

Toutefois, je l'avoue, l'étude de la botanique ne convient pas éga- 
lement à tout le monde; les hommes appelés par leur âge à une vie 
active, les négociants, les agriculteurs, les artistes, les magistrats, etc., 
risqueraient, en s’y livrant trop exclusivement, de se distraire de leur. 
occupation principale, et par conséquent de remplir mal leurs devoirs. 
C'est donc aux hommes d'étude et à ceux qui doivent connaître par 
état les propriétés des plantes qu'elle est d’abord destinée : elle. 
convient en particulier à tous ceux que leur fortune dispense des 
affaires, et qui vivent habituellement et par choix loin du séjour des 
villes ; c'est ainsi qu'ils trouveront une ressource assurée contre l'ennui 
et la dégradation morale, une occupation facile et d'un intérêt toujours 
croissant, et qu'ils s'habitueront à diriger leurs pensées sur des objets 
qui, au lieu de rétrécir et de dégrader leur esprit, l'agrandiront au 
contraire en l’ennoblissant. 

Mais c'est surtout aux hommes éprouvés par le malheur, et que leur 
âge débarrasse du soin des affaires, que s'adresse ceite aimable étude : 
lorsque les liens qui les avaient attachés à la terre se sont insensible- 


xxx 

ment dénoués, et les ont laissés à peu près isolés dans le cercle qui sé 
meut autour d'eux, quelle occupation plus noble peuvent-ils ren: 
contrer, du moins s'ils ont conservé une intelligence libre et une âme 
sensihle, que celle qui tend à les rapprocher chaque jour de leur vraie 
et dernière destination ? C’est dans cette vie spirituelle et intérieure, 
que la Divinité leur révèlera quelques-uns de ces mystères qu’elle tient 
en réserve pour ceux qui la cherchent dans ses œuvres; c'est là qu'ils 
trouveront à chaque pas des mouvements imprévus et destinés à un 
but spécial , des arrangements préparés pour assurer la fécondation ou 
la dissémination, et des ressources disposées d'avance pour la conser- 
vation de la plante. Ils se proposeront et ils résoudront ces nombreux 
problèmes sur la manière dont les végétaux qu’ils observent accom- 
. plissent leur floraison, assurent leur fécondation, préparent leur 
dissémination, et développent enfin leurs semences sur la terre qui les 
a recues. Quelquefois il leur arrivera de troubler l’ordre d’accroisse- 
ment d'une plante, pour voir comment elle le rétablira, et quelles 
seront les ressources dont la nature disposera dans ces circonstances 
imprévues. Quand ils seront initiés à cette charmante étude, et qu’elle 
les aura captivés, ils consulteront les livres dans lesquels sont contenus 
les résultats des travaux des savants célèbres qui les ont précédés, ils 
y reconnaitront mille points de vue nouveaux et une immense carrière 
ouverte à leur intelligence ; animés alors d’une nouvelle ardeur, ils se 
proposeront eux-mêmes d’éclaircir quelques-uns des points de la 
science qui restent encore obscurs; ils tenteront, selon les circon- 
stances et l'étendue de leur esprit, des recherches nouvelles sur les 
divers sujets qu'ils ont le mieux saisis et qui leur paraissent les plus 
faciles à étudier, et arriveront enfin à se créer une occupation qui 
embellira toutes leurs promenades solitaires, qui charmera tous leurs 
loisirs, qui les intéressera dans toutes les heures du jour, qui se pré- 
sentera parée de tous ses attraits dans les brillantes scènes du printemps 
et de l'été, mais qui aura encore des charmes sur le déclin de l'année, 
et les suivra jusque dans les longues nuits de nos froids hivers. Ils 
vivront ainsi dans une société intime avec leur Créateur, ils se sen- 
tiront entourés de ces témoignages d'ordre et d'intelligence qui 
règnent dans toutes ses œuvres , et ils seront graduellement conduits 
à la profonde persuasion de l'existence de cette cause première, qu'ils 
n'avaient fait qu'entrevoir pendant le cours de leur vie active. Cette 
profonde conviction retrempera leur âme, elle leur fera envisager les 
circonstances humaines sous un nouveau point de vue, et insensible- 
ment ils comprendront ce grand plan de l'univers, où toutest enchaîné 
comme cause, comme but et comme moyen, où tout marche en se 


XXXI 
développant et en s'harmonisant, et où le présent prépare à l'avenir 
les spectacles les plus enchanteurs et les merveilles les plus inénarra- 
bles. Car si le grand Maître des mondes nous présente ici-bas, à nous, 
êtres d'un jour, aussi faibles que fragiles, tant de témoignages d'ordre 
et d'intelligence, il nous en offrira bien d’autres lorsqu'il nous aura 
revêtus de ces nouvelles facultés que nos impatients désirs nous annon- 
cent. C'est au milieu de ces sentiments d'espérance et de vive joie que 
l'ami de la nature, qui entend déjà sur cette terre la voix de celui qui 
l'a créé, avance vers son dernier terme, non pas épouvanté par les 
idées affreuses de mort et d’'anéantissement, mais réjoui au contraire 
par celles de vie et de perfectionnement indéfini. Voilà comment nous 
honorerons notre vieillesse, et rendrons à notre Créateur ce culte 
d'esprit et de vérité, le seul qu'il nous demande. 

Combien cètte philosophie, qui considère le monde entier comme 
obéissant à des lois qu'il a recues dès son origine, et qui voit dans les 
divers développements des règnes organiques des preuves irréfragables 
de desseins préparés, et d'admirables exécutions, est supérieure à celle 
qui ne reconnaît dans cet univers qu’une matière qui se modifie avec 
une pleine indépendance ! Quand vous auriez Ôté à cette terre son 
Suprême Architecte, avec toutes les idées d'ordre et de sagesse qui 
forment son essence ; quand vous auriez réussi à bannir de vos pensées 
les plus intimes, tout ce qu’on appelle cause finale, c'est-à-dire , arran- 
gement pour un but; qu'auriez-vous fait autre chose que de décolorer 
et d'avilir cette magnifique création, que de la transformer en un 
triste séjour où l’homme dégradé et confondu avec la brute aurait 
perdu toute sa beauté morale, c’est-à-dire toute sa vraie grandeur, 
et où n'apercevant plus rien qui répondit aux besoins de son intelli- 
gence et qui fût digne d'occuper ses nobles facultés, il se contenterait 
de pourvoir à ses besoins matériels et se livrerait sans remords à toutes 
ses passions brutales ? Ah! si j'avais le malheur d'être le disciple de 
cette ignoble école, j'en cacherais les funestes principes à tous ceux 
qui m'entourent, pour ne pas les plonger dans cet abime d'anéantisse- 
ment d'où rien ne peut ressortir. 


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HISTOIRE PHYSIOLOGIQUE 


DES 


PLANTES D'EUROPE. 


PLANTES VASCULAIRES OU COTYLÉES. 


1243 om— 


DICOTYLÉS OU EXOGÈNES. 


PLANTES À DEUX COTYLÉDONS OPPOSÉS ET DONT LA TIGE RENFERME UN AXE MÉDULLAIRE , 


D'où PARTENT DES RAYONS ÉGALEMENT MÉDULLAIRES. 


PREMIÈRE CLASSE. — THALAMIFLORES 


OU PLANTES DONT LES ÉTAMINES ET LES PÉTALES SONT ATTACHÉS AU TORUS. 


Première famille. — Æenonculacées. 


Les Renonculacées forment un groupe bien distinct et facile à 
reconnaître par ses étamines nombreuses et libres, son périsperme 
corné et son embryon petit et enchâssé à une des extrémités de la 
graine. 

Ces plantes présentent dans leur calice, leur corolle, leurs éta- 
mines et leurs péricarpes, des exemples nombreux d'avortements, 
de soudures et de développements, qui sont fort utiles à étudier, 
mais qui excluent toute constance dans la forme et le nombre des 
organes floraux. 

Le genre qui a donné son nom à cette famille, dont il peut être 
considéré comme le type, est celui des Renoncules, dont les fleurs sont 
formées d'un calice à cinq pièces colorées et caduques; de cinq pétales 

k I 


« 


de 

nectarifères alternes aux divisions du calice; d'un grand nombre 
d'étamines placées sur plusieurs rangs, et d'ovaires ramassés en tête, 
formant à la maturité autant de carpelles indéhiscents et monospermes. 

Le calice des Renonculacées a souvent toute Fapparence des vraies 
corolles, et il ne peut quelquefois en être distingué que par des con- 
sidérations théoriques que j'indiquerai en traitant les divers genres 
qui composent cette grande famille. 

Les pétales qui sont ici chargés des fonctions de nectaires, portent 
ordinairement une poche remplie de suc mellifère; mais leur forme 
est extrêmement variable : tantôt ils ont l'äpparence d'une simple lame 
dont l'onglet est percé d'un pore, ou recouvert d'une écaille; tantôt 
ce sont des godets sessiles ou pédicellés ; souvent ils ressemblent à des 
cornets rétrécis à leur base et évasés à leur sommet ; en sorte qu'on 
peut dire que la nature, qui est quelquefois si semblable à elle-même, 
s'est plu, dans cette occasion, à diversifier de mille manières un organe 
qu’elle avait chargé de fonctions importantes. 

Les étamines des Renonculacees se transforment facilement en 
pétales, dans la plupart des genres. Ce changement à lieu de deux 
manières : ou l’'anthère avorte et le filet dilaté devient un pétale 
simple; ou l'añthèfe s'agrandit ét se renfle en cornet ; et l'on a alors 
un pétale nectarifère. On comprend facilement comment s'opère la 
première transmutation, quand on voit les filets de ces étamines, 
colorés, dilatés et presque pétaloïdes ; mais il n’est pas aussi aisé de 
concevoir comment des anthères à deux loges remplies de poussière 
fécondante, peuvent devenir des corñets ou dés tubés simples dis- 
tillant une liqueur miellée. Cependant on a un exemple de cette 
dernière transformation dans les cornets des Ancolies doublees, 
dont on ne pourrait pas expliquer autrement l'origine. Les ovaires des 
Renonculacees ont tous la même forme primitive; ce sont des follicules 
ouverts du côté intérieur, et dont les graines sont attachées sur les 
deux bords. Mais ces follicules fort apparents dans les Hellébores ; les 
Ancolies, eic:; diminuent insensiblemient de dimension, et finissent 
par devenir indéhiscents et monospermes, ou polyspermes et süceu- 
lents comme dans les Actées; ils conservent cependant toujours la 
même forme générale ; leur style et leur stigmate sont placés de la 
même manière, et l'on voit qué s'ils s'ouvraient, leur suture se 
trouverait du côté intérieur. On peut donc en conclure que toutés 
les formes de péricarpe qu’on reconnaît dans les Renonculacées } 
sans en excépter la capsule de la Migelle de Damas, ne sont que 
des modifications de la forme primitive du follicule. On voit en même 
temps que les noms de carpelles, de baies, de capsules, que l'on 


Re 


donne aux péricarpes des divers genres de cette famille, ne désignent 
point des formes essentiellement différentes. Cette remarque impor- 
tante trouve des applications continuelles dans la Botanique phi- 
losophique. 

On peut même imaginer que les Clematites, les Anémones, les 
Thalictrum, les Renoncules, etc., ne sont monospermes que par 
l'avortement d'une de leurs deux graines, et que, si l’on examinait 
plus attentivement leurs ovaires, on y trouverait les traces de deux 
cordons ombilicaux , et par conséquent de deux graines. 

L'embryon des Renonculacees est toujours placé à l'une des extré- 
mités du périsperme; mais dans les genres à fruit déhiscent, cet 
organe est infère, et, dans les autres, il est sapère ou infère. Il 
est infère dans les Renoncules, les Myosures, les Ceratocéphales et 
les Ficaires, qui composent entre eux une petite tribu bien dis- 
tincte, et il est supère dans les autres. On explique quelquefois cette 
diversité de position, en considérant les graines, tantôt comme 
droites, tantôt comme renversées. Elles sont droites lorsque l’om- 
bilic'est placé à la base de la graine, et renversées dans le cas con- 
traire. Cependant il est des genres, comme celui des Cl/ematites, où 
l'embryon est supère , et où la graine n'est pourtant pas renversée. 

Les racines des Renonculacees, rarement simples et annuelles, sont 
plus souvent vivaces, pivotantes ou diversement tuberculées. Ilrésulte 
de leur conformation, divers modes de végétation et de développe- 
ment qui méritent d'être étudiés, et qui sont très-importants, 
soit par rapport à l’organisation de l'espèce, soit sous le point de 
vue de la nomenclature. 

Les Renonculacées portent quelquefois de simples hampes, comme 
on le voit dans les Ænemones, et quelques Hellébores ; mais, à 
l'ordinaire, elles ont de vraies tiges pourvues de feuilles, soit 
radicales, soit caulinaires. Ces feuilles ont presque toujours leurs 
pétioles dilatés et embrassants, mais elles deviennent sessiles dans 
le voisinage de la fleur. Elles sont alternes dans tous les genres, 
excepté dans celui des Clematites, qui se distingue par une orga- 
pisation particulière. 

Ces mêmes feuilles présentent deux formes différentes d’avorte- 
ment : tantôt leur pétiole disparaît et l'on n'’apercoit plus que le 
limbe, comme dans les feuilles florales dés diverses Ænemones, 
de l'£ranthis, etc.; tantôt c'est le limbe qui avorte, et le pétiole 
“qui sé dilate, ce qu'on reconnaît au parallélisme des nervures, 
Comme on peut le voir dans les bractées de Y Hellebore fétide, ete. 
‘Te he puis cependant me persuader que les feuilles de la Clématite a 


Er. ps 


feuilles entières ne soient que des pétioles dilatés ou des phyllodes, 
selon l'expression des botanistes; car leurs nervures ne sont pas plus 
parallèles que celles des folioles de la plupart des autres Clematites. 

Plusieurs genres de cette famille sont pourvus de collerette. On 
trouve cette enveloppe extérieure dans l'Eranthis, Y Hépatique, les 
Anemones et les Cheiropsis, tribu des Clématites; mais l'on n’en 
rencontre presque aucune trace dans les autres genres, excepté dans 
la Nigelle de Damas, et quelques espèces de la même division. L'usage 
de cet organe est évidemment de protéger la jeune plante avant le 
développement des fleurs. 

Les anthères des Renonculacees méritent d'être observées. Elles 
sont adnées, c’est-à-dire placées latéralement sur le filet qui s’allonge 
pour former le connectif, et elles s'ouvrent longitudinalement sur 
les côtés. Mais la membrane qui forme les loges se replie souvent en 
deux battants, dont l’un se jette en avant et l’autre en arrière, comme 
dans les Vigelles, en sorte que toute la masse des anthères est re- 
couverte de poussière; d’autres fois, au contraire, la surface exté- 
rieure ou l'intérieure est seule pollinifère. Cette construction singulière 
parait tenir à la position des nectaires. Toutes les fois que ces or- 
ganes existent, la poussière fécondante semble les rechercher de 
préférence; dans le cas contraire, elle se jette sur le pistil, comme 
on peut le voir dans les Actées, les Pivoines, etc. Je sais bien que les 
deux premières tribus des Renonculacées qui sont dépourvues de 
nectaire, ont cependant leurs anthères extrorses; mais je soupconne 
que le nectaire y existe d’une manière inapercue, ou bien que les 
filets se tordent, afin de présenter au pistil leur poussière fécondante, 
comme l'ont déjà observé quelques botanistes. Du reste, cette ma- 
tière a besoin d’être encore étudiée. 

La fécondation des Renonculacées dure plusieurs jours. Elle con- 
tünue d'autant plus long-temps que les étamines sont plus nom- 
breuses : les anthères s’épanouissent de la circonférence au centre, 
et les filets grandissent lorsqu'ils vont répandre leur pollen. 

Les Renonculaceées ne m'ont pas paru susceptibles de mouvements 
bien marqués dans leur calice et dans leur corolle. Ordinairement la 
première enveloppe tombe promptement ; quelquefois cependant elle 
persiste, et prend même une consistance coriace, comme dans les 
Hellébores. Le calice de l'Eranthis s'ouvre à la lumière et se referme 
après la floraison; il en est de même de celui de plusieurs Anémones, 
etsurtout de l'Hepatique commune. Les corolles des 4donis, de diverses 
espèces de Renoncules , des Ficaires, ete., paraissent aussi douées de 
quelque sensibilité à l’action de la lumière, Mais ce sont surtout les 


7 
étamines qui méritent d'être considérées ici, soit sous le rapport de 
leur torsion, soit sous celui de leur agrandissement et de leurs 
mouvements divers à l'époque de la fécondation. 

Le nombre naturel des ovaires paraît être celui de cinq; cepen- 
dant il varie depuis l'unité jusqu'à l'indéfini ; car il y a des Renoncules 
ou Myosures qui comptent jusqu’à quatre-vingts pistils et davantage. 
Lorsqu'il n'y a qu'un ovaire, comme dans quelques Actées et 
quelques Delphinium, cet organe est placé un peu obliquement, ce 
qui indique un défaut de symétrie et par conséquent un avortement. 

La transformation la plus singulière qui ait lieu dans cette famille, 
est celle que présente la Migelle de Damas. Son péricarpe ressemble 
à une vraie capsule formée par autant de loges qu'on y compte de 
styles ; mais en considérant la chose de plus près, on voit que cette 
prétendue capsule n’est qu'une réunion de follicules intimement 
soudés les uns aux autres, et dont le tégument externe s’est détaché 
pour former autant de loges vides qu’il y a de follicules. On ne peut 
nullement douter de la vérité de cette supposition, lorsque l'on com- 
pare cette capsule aux follicules à demi réunis de quelques MVigelles 
et surtout de celle d'Espagne. 

Les follicules des Renonculacees sont-ils formés d’une seule valve, 
ou de deux intimement réunies par une de leurs sutures? Cette 
question est indécise; il semble au premier abord qu’on ne doit voir 
ici qu'une valve; cependant j'ai devant les yeux le follicule de l'Hel- 
lébore noir, qui porte sur le dos la marque très-évidente ou d’une 
suture, ou tout au moins d’une forte nervure. 

L'estivation des calices est variable : elle est valvaire dans quel- 
ques Clematites, induplicative dans d’autres ; en recouvrement dans 
le plus grand nombre des genres. Celle des pétales est, je crois, 
toujours en recouvrement, comme on le voit dans les Renoncules, 
les Pivoines , les Adonis, etc. Mais lorsque ces pétales forment deux 
lèvres distinctes , ils sont communément séparés les uns des autres, 
et fermés à leur ouverture jusqu’à l'époque de l'épanouissement. 

Les feuilles sont plissées différemment selon le mode de leur 
composition. Dans la C/ematite à feuilles entières, elles sont renflées 
et appliquées l’une contre l’autre, de manière à cacher entièrement 
les jeunes feuilles et la fleur. Dans les Renoncules, les Anémones, etc., 
les lobes des feuilles sont roulés sur leur surface supérieure, ou 
seulement recourbés et appliqués les uns sur les autres. Souvent aussi 
le limbe des feuilles radicales est replié sur le pétiole, et tous les deux 
sont protégés par des écailles adhérentes aux racines. On en peut 
voir des exemples dans les 4nemones, les Renoncules ,les Eranthis,ete. 


EN 

Les Renonculacées ont leur surface glabre ou velue; dans ce der- 
nier Cas, les poils sont simples, sans houppes ni crochets. On ne 
trouve non plus dans toute la famille ni épines ni aiguillons. Mais les 
jeunes pousses ont leurs ramifications protégées par des stipules, 
dans le Thalictrum à feuilles d’Ancolie ; ce qui est un exemple unique 
dans cette famille. 

Les Renonculacees comprennent des plantes annuelles; d’autres 
qui sont vivaces par leurs racines, et d'autres enfin qui sont ligneuses. 
Les Wigelles sont annuelles, ainsi que les Zsopyres, les Guridelles, 
quelques Delphinium et quelques Renoncules ; toutes les autres sont 
vivaces par leurs racines, excepté les Pivoines montants et les Cle- 
matites qui doivent être considérés comme de véritables arbrisseaux. 

Ces plantes habitent presque exclusivement l'hémisphère septen- 
trional, et se plaisent surtout dans les régions tempérées. Quelques- 
unes , en très-petit nombre, sont éparses dans la Nouvelle-Hollande, 
au Cap, au détroit de Magellan, dans l'Amérique méridionale ou au 
Mexique. Elles supportent assez bien la température de nos hivers, 
et il est rare qu'elles soient détruites par le froid. 

Leur végétation commence de très-bonne heure et avant la fn de 
l'automne. Les Hellébores fleurissent dans le courant de l'hiver. Ils 
sont suivis des Eranthis, des Populages, des Ficaires, des Anemones, 
des Renoncules , des Pivoines, des Trolles, des Ancolies, etc. Les 
Isopyres, les Garidelles, les Nigelles, paraissent plus tard, parce 
qu’ils sont annuels. Les Delphinium et les Aconits, qui portent de 
grandes tiges, se montrent au commencement de l'été, et la ‘scène 
est fermée par les Thalictrum et les Clématites. 

Les Renonculacées ont été fort étudiées par les botanistes, parce 
qu'elles sont des plantes très-répandues et à formes très-variées. 
Les fleuristes les ont aussi introduites dans les jardins, à cause de Ja 
beauté de leur port ou de leurs fleurs, et surtout de leur facilité à 
se doubler et:à se revêtir des dotios les plus variées. Enfin les 
médecins ont cherché à étudier le principe âcre et caustique qu’elles 
renferment, et qui se manifeste surtout dans les Renoncules, les 
Hellébores, les Aconits, etc. Ce principe paraît tenir à une huile 
volatile répandue pe toute la substance de la plante, et qui est 
dissoute ou dénaturée par l'eau, son antidote naturel. 

Les Renonculacées sont comprises sous cinq tribus : 

1° Celle des Clématitees, à fruits monospermes et allongés en barbe, 
feuilles opposées ; 

2° Celle des Ænémonées, à fruits monospermes ‘ét sans ‘barbes k 
feuilles radicales et Frssse 2 ; 


Ni — 


3° Celle des Renonculees, à fruits monospermes et pétales à écaille 
nectarifére ; 

4° Celle des Helléborees , à fruits polyspermes déhiscents et pétales 
tubulés ; 

5° Celle des Pæonices, à fruits polyspermes déhiscents et pétales 
ni tubulés ni nectariferes. 


Première tribu. — CLÉMATITÉES. 


Les Clématitees ne comprennent que deux genres : celui des Cle- 
matites et celui du /ÂVaravelia, formé d'une seule espèce qui habite 


l'ile de Ceylan. 


RREMIER GENRE. — Clematis. 


Les Clematites se distinguent par un calice ordinairement à 
quatre, sépales, et des carpelles indéhiscents terminés par une queue 
très-souvent plumeuse. 

Quelquefois la fleur est involucrée, ou garnie de pétales ; quel- 
quefois aussi l'aigrette est glabre ou simplement velue. Ces diffé- 
rences ont nécessité la division du genre en quatre sections assez 
naturelles. 

1° Les Flammules, qui ont tous les caractères du genre; 

2° Les Viüticelles, dont l’aigrette est courte, glabre ou simplement 
velue; 
3° Les Cheiropses, dont les fleurs ont un involucre ; 

4° Les Atragenes, qui portent des pétales. 

La première section, de beaucoup la plus nombreuse, se sub- 
divise en plusieurs groupes, d’après la forme de son inflorescence 
et,celle de ses feuilles. Tantôt les pédoncules sont paniculés, et 
plusieurs fois ramifiés ; tantôt ils sont seulement ternés, triflores ou 
uniflores, tantôt enfin ils sont uniflores, axillaires ou terminaux. Les 
feuilles de même, sont une ou plusieurs fois pennées , ternées, ou 
-simples.et entières. C'est dans cette section que l'on place ia plupart 
des espèces européennes. Le V’italba, répandue dans la'plus grande 
«partie de l'Europe, dont.les fleurs sont d’un blanc sale; la Flammule, 
qui a donné son nom à la section, et qui habite de préférence le 
midi de l'Europe, où elle se fait remarquer par ses fleurs blanches 
et odorantes ; la Droite, qui vit dans les mêmes lieux, et dont la 
Maritime n’est qu'une variété; l'Orientale, cultivée dans nos jardins, 


2 EE 

à feuilles glauques et à fleurs jaunes. Toutes ces espèces appartien- 
nent au même type, celui des fleurs paniculées et des feuilles pennées 
ou bipennées. 

Dans le type des espèces à fleurs solitaires terminales ou axillaires, 
on ne trouve que la Clématite a feuilles étroites, qui habite le nord de 
l'Adriatique, et se retrouve aussi dans la Sibérie. Elle se distingue par 
ses sépales qui varient de cinq à dix, et par ses nombreux carpelles. 

On place enccre dans cette section la C/ematite à feuilles entières, 
qui forme un type trés-distinct, et qui mériterait par son organisa- 
tion d'être séparée des Flammules. Elle habite la Hongrieet la Carniole, 
et se retrouve en Sibérie; elle appartient à un petit groupe dont les 
autres espèces sont étrangères. 

La section des Vüticelles est beaucoup moins nombreuse que celle 
des Flammules , et ne renferme que quatre ou cinq espèces dont deux 
ou trois sont européennes. La Viticelle du midi de l'Europe à fleurs 
d'un bleu pourpré ; la Campaniflore, originaire du Portugal, à fleurs 
plus petites, d’un blanc rosé, et enfin la Parviflore dont la patrie est 
inconnue et dont les fleurs sont blanches. Toutes les J’iticelles appar- 
tiennent au même type, et se font remarquer par leurs pédoncules 
uniflores et penchés au sommet, par leur estivation indupliquée, et 
leurs feuilles plusieurs fois divisées ; leurs tiges sont toujours grim- 
pantes. 

Les Cheiropses sont composées de quatre à cinq espèces, dont trois 
européennes : la V’rillée, la Semitrilobée et celle des Baleares. Mais 
ces trois espèces, distinguées selon De Canpozre, par les feuilles 
et la longueur du pédoncule, ont été réunies en une seule par 
CamBEssÉDÈs, qui observe dans sa Flore des Baléares, que toutes les 
Cheiropses ont le pédoncule allongé après la floraison, et que les 
feuilles de la Vrillée, qui sont presque entières dans la plaine, de- 
viennent graduellement trilobées dans les lieux montueux, jusqu’à 
ce qu’enfin à six cents toises d'élévation, elles sont non-seulement 
palmatilobées, mais elles ont encore leurs segments divisés en lanières 
étroites. Leur involucre est formé de la réunion de deux bractées 
opposées, et leurs sépales sont en estivation sous-indupliquée ; ce 
sont des arbrisseaux grimpants qui fleurissent souvent l'hiver, dont 
les pétioles sont cirrhiformes et persistants, et dont les feuilles et 
les pédoncules toujours uniflores, naissent en faisceau aux anciennes 
aisselles. 

Enfin, les 4tragènes, qui constituent dans Linné un genre parti- 
culier, sont des plantes fort distinctes de toutes les autres Clematites, 
non pas seulement par leurs pétales, mais encore par leurs feuilles 


PU |: es 
fasciculées , biternées, renfermées durant l'hiver dans des bourgeons 
très-renflés, avec des fleurs à pédoncules non divisés. Ces plantes, 
qui se plaisent dans les lieux froids et montueux, ne comptent que 
trois ou quatre espèces comprises sous le même type, et dont une 
seule est européenne. 

Les Clématites ont toutes des racines fibreuses, quelquefois fusi- 
formes et pivotantes , des tiges sarmenteuses et articulées dont la 
structure ressemble assez à celle de la J’igne. Elles sont formées 
d'une substance sèche et percée de tubes cylindriques qui occupent 
tout l'intérieur de la partie ligneuse. Cette structure, dont Du 
Trocxer décrit le mode d'accroissement (Mém. du Musée, vx, pl. 15, 

f.ret 5), s'étend jusqu'aux racines, qui sont criblées de trous encore 
plus grands, et ne renferment point de canal médullaire. On com- 
prend que l'usage de ces tubes cylindriques, c'est la libre circulation 
de la sève, qui, pendant l'hiver, s’accumule dans les racines, et 
s'élève ensuite dans les tiges, dès les premières chaleurs du prin- 
temps, précisément comme les pleurs de la Vigne. 

Les tiges des Clematites sont presque toujours contournées, on 
disposées à obéir à la torsion de leurs vrilles. Leurs feuilles sont 
opposées, et les jeunes pousses sortent principalement des nœuds 
supérieurs; mais ce développement est fort limité, parce que les 
pédoncules et les tiges florales périssent chaque année jusqu'à une 
certaine hauteur, en sorte que bientôt la plante ne grandit plus. 
Toutefois l’on comprend qu'il y a ici de grandes différences. La Cle- 
matite vrillee s'élève au-dessus des arbres, tandis que la droite et les 
espèces à tige non grimpante et surtout à feuilles entières, périssent 
chaque année presque jusqu’à la racine. 

On doit distinguer dans la C/ématite, comme dans la plupart des 
arbrisseaux, deux sortes de tiges, les stériles et les fertiles. Les 
premières, destinées à allonger la plante, ne donnent point de 
fleurs, elles naissent des aisselles inférieures, et leur développement 
n'est arrêté que par la température; les secondes sortent des aisselles 
des premières, et couronnent la plante de leurs belles fleurs blan- 
ches, bleues, rougeûtres, jaunâtres, dont les pédoncules se dessèchent 
après la fécondation. Cependant il faut remarquer que les espèces à 
tiges droites, ou à feuilles simples, ne portent point de rameaux 
stériles, ou que si elles en fournissent, ils périssent par l'hiver. 

Les bourgeons paraissent de bonne heure sur les tiges stériles. Ils 
sont formés de quelques écailles sèches et colorées, et renferment 
-des feuilles roulées plus ou moins régulièrement sur leur surface 
supérieure. Ces bourgeons, très-remarquables par leur grosseur dans 


A |] res 


les Atragènes, sont perpendiculaires sur la tige et forcent les pétioles 
à prendre une direction horizontale, et même souvent à s'incliner 
en bas, caractère auquel il est souvent facile de reconnaître les 
Clématites. 

Les tiges de l'année sont ordinairement prismatiques; les autres 
prennent une forme cylindrique par la destruction de l'épiderme, 
qui est sec et se détache naturellement. Je n’ai point remarqué sur 
cet épiderme, non plus que sur celui de la vigne, qui est conformé 
de la même manière et se détache avec la même facilité, les lenticelles 
de De Cannorre, généralement répandues sur les écorces des 
arbres. Cela vient sans doute d'une organisation particulière, et 
je crois qu’en effet les entre-nœuds ne donnent ici aucune radicule. 

La plupart des Clématites de la première section ont leurs fleurs 
terminales, et par conséquent ne fleurissent guère qu'au commen- 
cement de l’été, au moins dans nos climats; il en est de même des 
espèces à tiges droites , de celles à feuilles simples, et des ’iicelles, 
dont les fleurs ne sortent que des nouvelles pousses; mais les Æ4tra- 
genes, dont les fleurs sont axillaires sur les anciennes tiges, s’épa- 
nouissent dès le printemps, et par la même raison, les Cheiropses 
donnent des fleurs la plus grande partie de l'année et quelquefois 
pendant l'hiver. 

Les Clématites grimpantes s'attachent aux corps voisins par leurs 
pétioles ; car leurs tiges qui se contournent quelquefois légèrement, 
ne sentortillent pas mieux que celles dela Vigne , dont les nœuds 
assez rapprochés, ne sont pas non plus flexibles. Ces pétioles se 
contournent sans ordre, régulièrement, irrégulièrement , de droite 
à gauche, de gauche à droite, à peu près dans tous les sens. Ordi- 
nairement, ces vrilles se détruisent dès la fin de l'année, mais dans 
la Clématite vrillée, et les autres espèces à feuilles persistantes, 
elles vivent plus long-temps, et attachent fortement la plante. On 
peut remarquer ici, comme cause finale, que les Clematites droites, 
et surtout celles à feuilles entières, ont des pétioles peu marqués; 
tandis que dans les autres ces pétioles sont fort longs.Par la même 
raison, ceux-ci sont plus courts dans les feuilles inférieures , et plus 
allongés dans.les autres, ce qui est contraire à la règle commune. 

Les feuilles des Clématites n’ont pas toutes la même structure :les 
unes sont simples et entières, les autres divisées. En général, elles 
sont une ou deux fois pennées ou ternées, et ces deux formes, 
qui semblent d'abord assez différentes, se rencontrent quelquefois 
dans la même plante. Le nombre des segments et:leur étendue 
varient aussi, comme nous l'avons vu en parlant de la Frillée, en 


LE 
sorte qu'on ne peut guère compter sur des espèces établies unique- 
ment d'après ce caractère. Divers botanistes pensent que les feuilles 
simples de quelques Clématites doivent être considérées comme des 
phyllodes provenus ou de la dilatation des pétioles, ou de la soudure 
des folioles; maïs je n'ai pas vu que leurs nervures fussent parallèles 
ou disposées autrement que celles des espèces du même genre. 

Ces feuilles différent de nature selon les espèces : elles sont lau- 
rinées dans les Cheiropses , assez membraneuses dans les Clematites 
à feuilles entières, molles dans les Atragènes et les Witicelles, 
variables dans les Flammules. Leur couleur est d'un vert souvent 
noirâtre ou glauque, leur surface est glabre et quelquefois velue, 
et leurs lobes sont souvent terminés par des dents excrétoires. Ces 
feuilles sont articulées dans toutes les espèces à tige ligneuse, et 
tombent plus tôt ou plus tard; mais dans les autres elles meurent 
avec la tige. Quant aux pédoncules et aux pédicelles , ils m'ont tou- 
jours paru sans articulations ou points d'attache. Ils se brisent 
irrégülièrement après la dissémination. 

Les fleurs des Clématites ont une estivation valvaire dans les Flam- 
‘mules , fortement induplicative dans les Viticelles, et valvaire indu- 
plicative dans les deux dernières sections. Leur calice est comme 
feutré, souvent recouvert de poils, et toujours dépourvu de cet éclat 
qui distingue les pétales d'un grand nombre de plantes. On trouve 
à la ‘base du calice de plusieurs espèces, deux petites écailles qu’on 
doit considérer comme les rudiments de l’involucre bifolié des Chei- 
‘ropses. 

Cet involucre est remplacé dans les Clématites à feuilles entières 
‘par:la dernière paire de feuilles, qui forme une coiffe renflée ou un 
capuchon exactement fermé, dans lequel est contenue la fleur. Les 
autres paires de feuilles sont appliquées et renflées de la même 
manière, et leur préfoliation diffère ainsi beaucoup de celle des 
autres espèces de ce genre, qui est involutive. 

Les botanistes n'ont pas toujours été d’accord sur la nature de 
l'enveloppe extérieure de la fleur des Clématites ; mais la considé- 
ration des Atragènes a levé tous iles doutes. Dans cette section, les 
premiers rangs des étamines sont changés en pétales ,et l'enveloppe 
extérieure devient alors un calice. Or, l'on ne peut pas appeler pétale 
dans les autres sections du même genre, ce qu'on nomme calice 
dans l’Atragène. Cette opinion est encore confirmée ;par les filets 
des étamines, qui, dans la plupart des espèces, diminuent de lon- 
gueur à mesure qu'ils deviennent plus voisins du centre. 

Les calices des Clématites ne m'ont ‘paru susceptibles d'aucun 


2 A = 

mouvement organique. Îls restent ouverts pendant tout le cours de 
la floraison, et ensuite ils tombent par pièces séparées. Mais les 
pédoncules des espèces uniflores comme les Witicelles, les Cheiropses, 
les Atragenes ; et surtout les Flammules à feuilles entières, sont pen- 
chés dans la préfloraison , et souvent même pendant le cours de la 
fécondation. Ils se relèvent ensuite, et étalent au sommet des tiges 
leurs queues plumeuses. 

Les sépales varient de forme selon les sections. Ils sont linéaires 
dans celle des Flammules , et généralement ovales dans les autres. 
Cette diversité dépend surtout de l’estivation : lorsqu'elle est valvaire, 
les sépales sont linéaires; autrement ils sont ovales. On peut remar- 
quer, dans ce dernier cas, que le sépale est solide et épais dans le 
centre, mince et comme chiffonné sur ses bords primitivement 
repliés. 

Les anthères des Clématites sont adnées , plutôt latérales qu'extror- 
ses, et introrses dans le type de la Clématite à feuilles entières. Les 
extérieures s'ouvrent les premières, et s’'écartent après avoir répandu 
leur poussière blanchâtre, qui tombe abondamment au fond de la 
fleur. Les autres les remplacent et s’allongent à leur tour. Le stigmate 
est toujours une languette élargie, papillaire et tournée en dehors. 
Je n'ai point su apercevoir d'organe nectarifère ; mais j'ai souvent 
remarqué, surtout dans le Vitalba , le Cirrhosa, etc., des gouttelettes 
miellées, adhérentes aux filets des étamines. Je ne crois donc pas 
qu'on puisse tout-à-fait nier l'existence de l'organe dans ce genre; 
cependant, comme la nature met sans cesse en usage différents 
moyens pour le même but, j'ai observé que dans la Clematite à 
feuilles entières, non-seulement les anthères étaient introrses; mais 
que les étamines chargées de poils enveloppaient étroitement les 
stigmates sur lesquels elles déchargeaient leur pollen : en sorte que 
la fécondation était réellement intérieure et s’opérait sans le concours 
apparent de l'air. 

Dans les espèces dont les styles sont velus, les poils servent sans 
doute à retenir et à conserver plus long-temps le pollen; mais dans 
les Viticelles à fleurs penchées, où les styles presque toujours glabres 
sont serrés les uns contre les autres, les anthères exactement latérales 
retournent les bords de leurs parois pour lancer leur pollen sur les 
stigmates; et à mesure qu'elles se défleurissent, elles se déjettent 
pour faire place à d’autres plus intérieures qui se retournent sem- 
blablement. 

Dans les Flammules à fleurs droites, dont les anthères latérales 
extrorses ne s'élèvent pas au-dessus des stigmates ordinairement 


* 


au Re —… | 

serrés les uns contre les autres, la fécondation m'a paru long-temps 
inexplicable, ou, si j'ose le dire, mal ordonnée, jusqu'à ce que 
j'eusse découvert la manière singulière dont elle s’opérait : ce sont 
les sépales feutrés et recouverts intérieurement de poils humides 
et glanduleux qui sont chargés de l’opérer : dans ce but ils reçoivent 
immédiatement le pollen des anthères qui tombent avec leurs filets 
lorsqu'elles sont défleuries, en même temps les stigmates admirable- 
ment papillaires se déjettent et se contournent en différents sens 
pour mieux recevoir les molécules du pollen ; c'est ce qu'on peut voir 
dans la #lammule , le Vitalba, et surtout dans l'Ortientale. 

Toutes les Clématites d'Europe et un grand nombre d’étrangères 
sont hermaphrodites : mais l’on trouve, dans les F/ammules à panicules 
 rameuses et à feuilles ternées, plusieurs espèces de la Nouvelle- 
Hollande et surtout des deux Amériques, dont les fleurs sont poly- 
games et plus souvent encore dioïques. Je ne sais pas d'où dépend 
cette singulière conformation; mais je remarque, en attendant, 
qu’elle appartient exclusivement à des espèces dont les pédoncules 
sont ramifiés, et dont les fleurs peuvent aisément être fécondées. 

Lorsque la floraison est accomplie, les styles de toutes les C/éma- 
tites , à l'exception toutefois des V’üicelles, s'allongent et se contour- 
nent; en même temps les poils dorit ils sont recouverts deviennent 
plus marqués; enfin, lorsque les graines approchent de la maturité, 
ces styles forment par leurs réunicns de jolies têtes blanches et 
plumeuses qui décorent nos haies à la fin de l'automne. Ensuite les 
carpelles se détachent, et vont se répandre au loin. 

Les carpelles restent indéhiscents jusqu’à la germination. Ils sont 
aplatis et évidemment soudés sur leur côté interne. La semence qui 
en remplit toute la capacité est formée d’un embryon corné, au 
sommet duquel est niché un petit embryon à cotylédons très-courts 
et à radicule supère. Ds Canporre dit que les cotylédons sont 
rapprochés dans les Atragènes, et distants dans les autres sections, 
et j'ai remarqué que dans la maturation les styles ne s'accroissent pas 
par le sommet, qui conserve toujours la forme d'un stigmate des- 
séché. 

Enfin, j'ai observé que, dans les espèces dont le style était dépourvu 
de barbes, comme les Viticelles, les carpelles sessiles étaient grossis 
et n'auraient pas pu facilement être transportés au loin, tandis 
que, dans les autres sections, ils étaient stipités et amincis, et j'en 
ai conclu que les barbes étaient en rapport avec la grosseur des 
carpelles. 


Les Clématites paniculées ont l'efflorescence générale centripète 


SE. 


_ & la particulière centrifuge ; c'est-à-dire que les panicelles inférieures 
s'épanouissent les premières, et que dans ces panicelles la fleur 
centrale paraît avant les autres. Il ÿ a donc un assez grand intervalle 
entre la fécondation de la première fleur et celle de la dernière. Mais 
cette différence disparaît à peu près à la maturation, car les carpelles 
de la panicule mûrissent et se détachent presque tous en même 
temps. 

Les Clématites , qui appartiennent aux Renonculacces pour la struc- 
ture de leurs fleurs et celle de leur péricarpe, s’en éloignent beau- 
coup dans leur organisation générale et ieur mode de végétation. 
Elles se rapprochent à cet égard des Vignes, des Cisses à tige 
sarmenteuse et grimpante ; aussi forment-elles, dans la famille où 
nous venons de les placer, une section à part, et présentent-elles 
däns la Botanique une de ces aberrations si nombreuses dans nos 
systèmes naturels comme dans les autres. 

Ces plantes ne tracent, je crois, jamais, et par conséquent ne sont 
päs, à proprement parler, sociales; mais elles se multiplient telle- 
ment, soit par leurs branches, soit par les racines qui partent de leurs 
nœuds inférieurs, qu'elles forment des buissons souvent trés-serrés 
et très-étendus, dontle feuillage se conserve long-tempsdans quelques 
espèces, comme les Cheiropses. Elles nous fournissent un assez bel 
exemple de ces lianes ou plantes ligneuses et grimpantes si rares chez 
nous et si communes dans les zones équinoxiales. La seule espèce 
qui soit répandue dans nos campagnes est le Vütalba; mais l'on 
rencontre dans nos jardins la Flammule, la Viticelle, la Vrillee, etc., 
qui tapissent nos murs, ou recouvrent nos tonnelles de leurs nom-. 
breuses fleurs blanches ou violettes, et toujours d’une longue durée. 
Les espèces qui ne grimpent pas comme /a droite et celle à feuilles : 
entières , sont placées dans nos parterres et nos massifs, où l’on trouve 
aussi quelquefois celle d'Orient à fleurs jaunâtres et à filets d’un 
pourpre noir. 

Ces plantes renferment presque toutes un suc âcre et corrosif, et 
sont par conséquent à peu près sans usage domestique, au moins 
dans leur fraicheur. On trouve sur la face inférieure et sur le pétiole 
des feuilles du J'italba un bel Æcidium jaune; décrit par De CanDoLLE, 
et qui accupe souvent un espace considérable. 


Deuxième tribu. — ANÉMONÉES. 


Les Anémonces ont le calice et la corolle imbriqués, les pétales 
nuls ou dépourvus d'onglets nectarifères, les carpelles monospermes 


L'or. 
indéhiscents et souvent prolongés en queue, leurs semences pen- 


dantes, leurs tiges herbacées et non grimpantes, leurs feuilles cauli- 
naires alternes. 


PREMIER GENRE. — 7halictrum. 


Les Thalictrum sont des herbes vivaces dont le caractère bota- 
nique consiste dans un calice à quatre ou cinq pièces, des pétales 
nuls, et dans des carpelles indéhiscents et dépourvus de queue, 
sessiles ou pédicellés dans la section des Tripterides. 

Ils habitent en grand nombre l'hémisphère septentrional , où ils 
sont dispersés sur les montagnes, les collines, les lisières des boïs, 
mais presque jamais sur les bords des eaux et daris les marais. L'Europe 
en compte près de vingt espèces, la Sibérie sept : la plupart des 
autres se trouvent au Japon ou dans l'Amérique septentrionale. La 
méridionale n’en fournit guère que deux. 

Les nombreuses espèces de ce genre se rangent ous trois formes 
principales , dont De Canpozce a forme trois sections. 

1° Celle des Triptérides , à fruit triquètre et aïlé ; 
2° Celle des Pzysocarpes, à fruit enflé en vessie ; 

3° Celle des Euthalictrum ou des vrais Thalictrum, à fruit sec et strié. 

Les Triptérides, dont l'on ne connaît encore que trois espèces, 
ont pour type le Thalictrum à feuilles d’Ancolie, très - belle plante 
répandue dans lès bois montueux de la plus grande partie de l’'Eu- 
rope, et non moins remarquable par le vert brillant de ses feuilles 
que par l'élégance de ses fleurs à anthères pourprées, Ce Thalictrum 
présénte deux phénomènes physiologiques : le premier ést celui de 
stipules blanches élargies à la base des pétioles èt de leurs subdi- 
visions ; le second est celui de carpelles d’abord droits et ensuite 
péndants sur leurs pédicelles. Les deux autres espèces de Triptérides 
appärtiennent au même type et sont originaires du nord de l'Asie. 

Les Physocarpes, au nombre de quatre, appartiennent aux deux 
Amériques. Ils diffèrent surtout des autres Thalictrum par leurs 
fruits enflés en vessie. Leurs fleurs sont monoïqués ou polygames. 

Les Euthalictrum sont très-nombreux ét se rangent à léur tour 
sous quatre groupes artificiels plutôt que naturels. 

1° Les Hétérogames à fleurs dioïques ou polygamiques, au nombre 
de cinq espèces, toutes originaires de l Amérique septentrionale ; 

2° Les Communs , à fleurs hermaphrodites et à feuilles divisées, dont 
l'on connaît à peu près vingt-six espèces, la plupart européennes ; 


ME — 

3° Les Indivis, à feuilles entières et réniformes. Ils ne comprennent 
qu'une ou deux espèces, l'une et l'autre étrangères ; 

4° Les Tuberculeux, réunis sous deux espèces, l’une des Pyrénées, 
et l’autre du nord de l'Amérique. 

Les Thalictrum communs sont tellement rapprochés les uns des 
autres, que leur synonymie est fort embrouillée. Plusieurs botanistes 
décrivent comme espèces, ceux que d'autres ne considèrent que 
comme de simples variétés, et les mêmes noms ne désignent pas 
toujours les mêmes plantes chez les différents auteurs. Il y a donc ici 
des espèces hybrides, et même des localités qui font varier les carac- 
ières spécifiques ; car l'on sait que les Thalictrum cultivés acquièrent 
de plus grandes dimensions. Ceux qui méritent d'être considérés 
comme espèces, sont peut-être : 

1° Celui des 4/pes, remarquable par sa petitesse, ses fleurs d’a- 
bord penchées et ensuite redressées; ses pédicelles fructifères sont 
réfléchis et ne portent souvent que deux ou trois pistils quelquefois 
avortés ; 

2° Le Félide, à odeur de bouc, tout recouvert de poils articulés 
et glanduleux, et remarquable par son stigmate gélatineux, en fer de 
flèche appendiculé et d'un beau rouge; ses fleurs sont aussi penchées 
pour la fécondation et ses fruits sont étoilés. 

3° L’Eraltatum à tige élevée, fistuleuse, feuilles amples à peu près 
trois fois ailées , et fleurs penchées à étamines flottantes et stigmate 
charnu, persistant et linéaire. 

4° L'Élegant , très-remarquable par ses feuilles larges et ses fleurs 
ramassées en corymbe épais et d'un beau jaune. 

Les autres varient tellement pour la pubescence, la forme des 
feuilles et celle des fruits, qu'on ne peut guère les séparer du Fétide. 
Tels sont les Minus, Nutans, Elatum, Majus, Pubescens, etc., des 
divers auteurs. L’organe le plus constant paraît être ici comme 
ailleurs le stigmate. ( Voyez Bulletin de Férussac, tom. vi, p. 195.) 

Le quatrième et dernier groupe des Euthalictrum est celui des 
Tuberculeux, dont les sépales sont plus grands que les étamines, et 
dont les fleurs solitaires ou disposées en corymbes, ressemblent à 
celles des Arémones. Ils forment un vrai type et servent de passage 
entre ce genre et le suivant. 

Les racines de presque tous les Thalictrum sont traçantes, et cons- 
tituées de manière qu’elles se détruisent à l'extrémité inférieure, et 
poussent du côté opposé, des jets rapprochés dans le grand nombre 
des espèces, et éloignés dans quelques autres. Quand ces jets se 
séparent de la racine principale, ils forment de nouvelles plantes 


Ets, TEE 

comme dans l'espèce à feuilles d’Ancolie ; quand ils restent attachés, 
ils présentent un plexus tout chargé des cicatrices des anciennes tiges, 
. Les racines, presque toutes imprégnées d’un suc jaune, ont leurs 
nouvelles pousses enveloppées d'une membrane blanche, qui n'est 
qu'un rudiment de feuilles avortées ; celle-ci en recouvre une seconde 
qui a la même origine, et en continuant la dissection, on arrive aux 
vraies feuilles et même aux tiges de l'année future, qu'on aperçoit 
comme une miniature au centre du bourgeon. 

Cette forme d'organisation est tout-à-fait semblable à celle des 
Ombelliferes, avec lesquelles les Thalictrum ont d'aussi grands rap- 
ports que les Clematites avec les Vignes. En effet, leurs feuilles, comme 
celles des Ombelliferes, sont alternes, engaïnantes, deux ou plusieurs 
fois ternées; leurs folioles pétiolées, sèches, glauques, veinées et 
réticulées au-dessous, sont roulées sur leur limbe commun, et imbri- 
quées les unes sur les autres. 

Mais l'inflorescence est bien différente, et si l'on en excepte les 
Thalictrum tuberculeux, elle est toujours en panicule plus ou moins 
garnie et plus ou moins serrée. Les fleurs sont souvent penchées 
avant l'épanouissement, et la fécondation n'a jamais lieu qu’en plein 
air, et souvent après la chute des sépales. Les filets des étamines 


allongés et souvent en massue, s’étalent et flottent facilement dans 
toutes les directions. Je n'ai apercu aucune trace de nectaire, ni sur 
le torus, ni sur les carpelles. 

L'efflorescence est presque simultanée. Toutes les fleurs paraissent 
en même temps, excepté celles de quelques panicelles axillaires, qui 
succèdent à la grande panicule. Les anthères sont proprement 
latérales, et elles oscillent continuellement jusqu’à ce qu’elles tom- 
bent après la fécondation. Les stigmates varient beaucoup en nombre 
selon les espèces ; ils sont blancs, ligulés, papillaires, extrorses et 
quelquefois un peu contournés. Ils se flétrissent promptement; mais 
le style ne s'allonge point après la floraison; au contraire, il se 
rompt promptement un peu au-dessus de la base. | 

La fécondation des Euthalictrum à pédiceiles penchés est récipro- 
que : les anthères si légères et si élégamment flottantes, répandent 
un pollen jaunâtre et nuageux qui s'élève en l'air et atteint en partie 
leurs propres stigmates, et en partie ceux des fleurs voisines déjà plus 
développés : cette forme de fécondation par l'agitation perpétuelle 
de filets roides et renflés en massue vers leur sommet, est un phé- 
nomène digne d'être remarqué. 

.. Les pédicelles grandissent et deviennent flottants dans la section 
des Triptères, et rayonnants dans celle des PAysocarpes. Ils restent 
E 2 


à peu près sessiles dans les autres; mais ils divergent en étoile dans 
le Fetide , le Penche, etc. 

Les ovaires deviennent des carpelles striés à côtes relevées, dans 
tous les Thalictrum d'Europe, excepté celui à feurlles d’Ancolie. 
Je n'y ai jamais apercu ces traces de suture qu'on remarque dans 
les Clématites, quoiqu'ils soient également bosselés à l'extérieur. Ils 
tombent un à un en se séparant de leurs pédicelles, et ne s’ouvrent 
jamais : l’on y voit distinctement, comme dans ceux des Clématites , 
les vaisseaux nourriciers arriver de la base jusqu'au sommet, où 
est placé l'embryon avec sa petite radicule. 

Les Tripteres ont leurs carpelles plus grands et toujours trique- 
tres ; ceux des Physocarpes sont enflés en vessie et nullement angu- 
leux. Leurs fleurs, comme celles de la plupart des Euthalictrum de 
l'Amérique , sont monoïques, dioiques ou polygames, par l'effet de 
l'avortement de l'un des deux organes sexuels. Il est remarquable 
que cette circonstance se retrouve également dans les C/ématites et 
quelques autres genres des mêmes contrées. 5e ne sais point l'expli- 
quer d’une manière satisfaisante. 

Les Thalictrum ne m'ont présenté presque aucune observation 
physiologique. Celui à feuilles d’Ancolie, et celui à long style, qui 
est un Physocarpe, sont pourvus de stipelles dont on aperçoit quel- 
ques traces dans une ou deux autres espèces. Les Tuberculeux diffe- 
rent essentiellement de tous leurs congénères par leurs racines et 
leur forme florale, et il n'est guère douteux que Îles espèces à pédi- 
celles déjetés pendant la floraison n’aient une fécondation différente 
de celles à pédicelles redressés. Il serait très-intéressant d'observer, 
sous ce point de vue, les Hetérogames de l Amérique à fleurs dioïques 
ou polygamiques. 

Les Thalictrum sont des plantes d’un port agréable, dont le 
feuillage ne manque ni de grâce, ni de fraicheur. Ils sont peu cul- 
tivés dans nos jardins, à l'exception toutefois de celui à feuilles 
d’Ancolie, et de Y'Élégant à fleurs d'un jaune soufré. Le premier, 
ainsi que celui des Alpes et celui à feuilles étroites, s'épanouit au 
printemps; les autres, dont les tiges sont plus élevées et plus garnies, 
ne sont en fleurs qu'au commencement de l'été. Leurs feuilles ne 
tombent jamais; mais jeurs folioles se séparent facilement. 


SECOND GENRE, — Ænemones. 


Les Anémones se distinguent par un involucre placé un peu au- 
dessous de la fleur, un calice coloré de cinq à dix pièces, et des 
carpelles cotonneux ou nus, ou chargés de queues velues. 


SN DON 

Elles ont été divisées par De Canpoze en six sections inégales, 
fondées sur leur mode de végétation et la forme de leurs carpelles. 

La première est celle des Pulsatilles, à carpelles prolongés en 
longues queues barbues, à involucre sessile et palmé ; sept espèces. 

La seconde est celle des Préonanthes, à carpelles prolongés en 
longues queues barbues, à involucre forme de feuilles pétiolées et 
trisèques ; une espèce. 

La troisième est celle des Pulsatilloïdes, à carpelles très-velus, à 
calice de quinze à vingt pièces, à involucre de deux à trois feuilles 
sessiles, incisées au sommet ; deux espèces. 

La quatrième est celle des 4neémonanthees, à carpelles dépourvus 
de queue et ovoides, à pédoncules solitaires ou géminés, aphylles et 
uniflores, à involucre à feuilles pétiolées ; vingt-quatre espèces. 

La cinquième est celle des Aneémonospermes, à carpelles légère- 
ment aplatis et sans queue, à pédoncules multiples naïssant d’un 
involucre, à pédoncule central et uniflore, pédoncules latéraux, 
chargés d'un involucelle à deux feuilles d’où sort un pédicelle uni- 
flore; huit espèces. 

La sixième est celle des Homalocarpes , à carpelles aplatis, glabres, 
orbiculés et sans queue, à pédoncules disposés en ombelle, aphylles 
et uniflores ; quatre espèces. 

La patrie naturelle des {némones est le bassin de la Méditerranée. 
C'est en Italie, en Espagne et en France, que se trouvent leurs 
principales espèces , celles qui ont été surtout introduites dans nos 
jardins. Les Pulsatilles habitent plus ordinairement les collines, |les 
montagnes et les lieux exposés au vent. Les {remonanthees préfèrent 
les pelouses sèches, les taillis et les lisières des bois. Les Préonanthes 
et les Homalocarpes appartiennent surtout à nos Alpes. Les Anemo- 
nospermes et les Pulsatilloïdes sont toutes étrangères. Les premières 
sont originaires de l'Amérique septentrionale , et les autres du Cap. 

Ce genre est très-naturel, et les espèces qui le forment, quoique 
dispersées dans plusieurs sections, sont liées entre elles par un grand 
nombre de rapports. Ce sont des herbes vivaces à feuilles lobées, 
et à hampes terminées ordinairement par une seule fleur. Leur 
organisation n'a donc rien de commun avec celle des Thalictrum et 
des Clématites, quoique leur floraison présente une foule de res- 
semblances. 

Elles végètent dés le milieu de l'hiver, et s’'épanouissent d’ordi- 
naire à l'entrée du printemps. Elles décorent dans cette saison nos 
campagnes de l'éclat de leurs belles fleurs blanches, jaunes, pourpres 
ou teintes des plus vives nuances. Celles qui vivent en société, forment 


EN 


des tapis dont rien n'égale l'élégance ou la fraicheur. Mais cette 
scène charmante est de courte durée, et dès le mois de juin, la 
plupart des Anémones ont perdu leurs feuilles et répandu leurs grai- 
nes. Celles qui vivent dans les montagnes paraissent plus tard et 
fleurissent successivement, parce qu'elles sont placées à des hauteurs 
différentes. Dans le grand nombre des espèces, le calice d'abord peu 
coloré augmente d'éclat jusqu'à la fécondation ; il se décolore ensuite 
sans se flétrir ; enfin il tombe. 

Les Pulsatilles, qui forment notre première section, ont été 
ainsi nommées parce qu'elles aiment les lieux découverts et battus 
des vents. On en connaît jusqu’à présent quatre espèces européennes : 
1° la Pulsatille proprement dite, à fleur violette, qui présente 
deux variétés : la Precoce, dont les fleurs paraissent souvent avant 
les feuilles, et la Penchce, à calice penché et développé après les 
feuilles ; 2° la Printaniere , à fleur blanche et feuilles ailées; 3° celle 
de Haller, toute couverte d'un duvet soyeux et protégée avant la 
floraison par les pétioles dilatés de feuilles plus ou moins avortées; . 
4° celle des Pres, à fleur petite et penchée, et sépales un peu réfléchis 
au sommet. 

Ces plantes ont toutes pour racines des rhizomes ligneux et tra- 
cants. Leurs feuilles et leurs hampes sont enveloppées avant leur 
sortie par les nervures desséchées des pétioles de l’année précédente; 
leurs hampes, terminales en apparence, sont, je crois, latérales : et 
le rhizome s'allonge, soit par des rejets qui sortent de l’aisselle des 
bractées florales, soit comme dans l’Anémone de Haller, par des 
pousses latérales. 

Les Pulsatilles sont des plantes solitaires ou médiocrement sociales, 
dont les fleurs s'ouvrent à la lumière et à la chaleur, et se referment 
à l'obscurité et au froid. Leurs stigmates sont de très-petites têtes 
papillaires, et leurs anthères latérales à parois réfléchies sont très- 
long-temps recouvertes de pollen. Les étamines qui s'ouvrent les 
premières dans l’Anemone de Haller sont les intermédiaires ; les der- 
nières sont les extérieures qui quelquefois ressemblent à une glande 
jaune et sessile. Cette observation s'applique à peu près à toutes les 
Pulsatilles ; excepté toutefois à l'Arborea dont les intérieures se 
développent long-temps avant les autres, et à la Coronaria des fleu- 
ristes où les premières épanouies sont les extérieures : du reste, 
SPRENGEL a observé dans la commune et dans celle des Prés, des 
glandes jaunes, sessiles et pédicellées, qui sont évidemment des 
anthères dépourvues de filets ou changées en glandes. 

L'involucre est toujours monophylle, et enveloppe la fleur jusqu’à 


\ 


ce 
l'épanouissement. Il semble d'abord contigu au calice; mais il s’en 
écarte par l'allongement du pédoncule, toujours solitaire et jamais 
articulé. À la maturation, les styles s'allongent, étalent leurs poils, et 
forment de jolies têtes plumeuses dont les carpelles se détachent 
séparément et sont transportés au loin avec leurs queues. On dit 
qu'on doit semer ces graines de bonne heure. 

La seconde section est celle des Préonanthes, qui ne contient 
qu’une seule espèce, l'Aneémone des Alpes. Sa végétation et son orga- 
nisation générale sont celles des Pulsatilles, dont elle diffère surtout 
par son involucre formé de trois feuilles distinctes et pétiolées. Elle 
présente un grand nombre de variétés : tantôt les fleurs sont blanches 
et plus ou moins tachées de pourpre; tantôt, et dans nos Alpes 
granitiques surtout, elles sont d’un beau jaune soufré. Sous ces deux 
apparences, elles offrent le singulier phénomène de fleurs polygames, 
dont les unes sont hermaphrodites, et les autres sur le même pied 
sont mâles, sans doute par avortement, mais sans vestige de pistil. 

La troisième section, ou celle des Pulsatilloïdes, ne contient que 
deux espèces originaires du Cap, et dont nous n'avons pas à parler ici. 

La quatrième, ou celle des {nemonanthees , est la plus nombreuse. 
DE Canpozze la divise en quatre groupes : 1° les espèces à involucre 
sessile et racine tubéreuse et ovoide; 2° les espèces à involucre 
pétiolé et racine tubéreuse ovoiïde ; 3° les espèces à involucre pétiolé 
et racine cylindrique, mince et allongée; 4° enfin, les espèces à 
involucre pétiolé et racines fasciculées. 

Le premier groupe comprend toutes les Anémones cultivées, et 
remarquables par la beauté et la grandeur de leurs fleurs. Leurs 
carpelles sont logés dans de petites cavités remplies d'un duvet 
cotonneux destiné à flotter dans l'air comme celui des Peupliers ou 
des Saules. Elles sont principalement au nombre de quatre : : 1° celle 
des Jardins , à feuilles décomposées ; 2° l'OEil de Paon, à feuilles 
trifides, à Lies nombreux , allongés et pointus ; 3° Y'Étoilée, à 
feuilles digitées et involucre mondphyllé: 4° la Palmee peu déchire 
del Étoilée , à feuilles moins découpées et involucres trifides. 

Les racines de ces Anémones sont des tubercules plus ou moins 
palmés, qui portent chez les jardiniers le nom de Pates , et se mul- 
tiplient par des rejets latéraux de même forme. La séparation de ces 
rejets d'avec le tubercule principal, se fait naturellement en terre, 
comme dans les Anemones sylvies. Ces pates portent à leur centre le 
bourgeon qui doit fournir la nouvelle plante, et qu’on appelle l'œil. 
Lorsque cet œil est tourné en bas, la fleur périt, parce que la hampe 
ne se développe pas, ou n’a pas la cul de se retourner. 


Les fleuristes ont poussé très-loin la culture de ces Anémones, dont 
ils ont obtenu detrés-belles variétés par des semis et des fécondations 
artificielles. Ces variétés qui se multiplient chaque jour se conservent 
par les racines. Une belle /némone est celle dont les feuilles. sont 
vertes et découpées, dont la hampe est ferme, et dont les sépales 
grands et arrondis ont les couleurs brillantes et tranchées. On re- 
cueille les pates chaque année, lorsque la végétation est terminée, 
et on les replante un an ou deux plus tard, si l’on veut obtenir des 
fleurs plus parfaites. Les racines en forme de souche ne peuvent pas 
être traitées de la inême manière, car elles périssent, si elles restent 
long-temps hors de terre. 

Le second groupe , des Anémonanthées , ne comprend qu’une 
seule espèce européenne : c'est l'Anémone des Apennins , plante 
charmante qui croît surtout dans les taillis des A pennins de l'Italie 
centrale et méridionale. Elle a le port des Sybvies et de jolis pétales 
linéaires qui passent par toutes les nuances du bleu céleste au blanc 
grisâtre; sa racine est un tubercule petit et allongé qui ne paraît 
pas se multiplier en terre; puisqu'on en trouve qui ne donnent que 
des feuilles, et qui sont isolés et très-petits. Il semble donc que cette 
Anémone ne se reproduirait que par ses semences. 

Le troisième groupe de la même section est celui des Sylvies, 
auquel DE Canpozze associe l'Anemone Baldensis, qui a bien les 
feuilles de son involucre pétiolées, mais qui en diffère beaucoup, 
soit par la conformation de sa racine, qui est une souche allongée 
comme celle des Pulsatilles , soit par ses semences laineuses comme 
celles des Anémones des jardins. 

Les Sylvies qui comprennent trois espèces européennes, la Tri- 
foliée , celle des Bois ou la Sybie proprement dite, et le Ranunculoïdes, 
sont des plantes d’une structure plus délicate que les autres Ané- 
mones. Elles croissent toutes dans nos bois, où elles forment des 
tapis. Leurs racines sont des tubercules cylindriques couchés hori- 
zontalement sur le terrain, et qui donnent à leur extrémité supérieure 
une tige simple, protégée avant son développement par une écaille 
légèrement bifide et recourbée au sommet. La pousse, qui n’est sou- 
vent qu'une feuille, se courbe à angles droits dès son origine, et le 
cylindre s'allonge pour fournir l’année suivante de nouvelles fleurs. 
En même temps, l’ancien tubercule périt, après avoir donné quelque- 
fois des pousses latérales, par lesquelles la plante se multiplie, et qui 
se séparent de la racine mère. 

Ces Anémones fleurissent de très-bonne heure, et pendant la 
maturation elles inclinent vers la terre leurs pédoncules chargés de 


ÉD 
nombreux carpelles qui se sèment déjà au milieu du printemps. La 
plus commune est la Sylvie, qui se rencontre dans toute l’Europe 
centrale, et s'étend même en Sibérie et dans le nord de l'Amérique. 
La Trifoliée est plus rare et peuple principalement les bois du midi 
de l'Europe et de l'Italie. Le Ranunculoïdes, remarquable par sa 
fleur jaune, appartient plutôt à l'Europe centrale et à la Sibérie. Elle 
est souvent biflore, et la première fleur, qui s'épanouit long-temps 
avant l’autre, est toujours mâle. (Voyez Jussieu, Mémoires de l'A- 
cadémie, année 73 , page 229. ) 

L'Anémone sylvie m'a fourni une observation curieuse qui ne 
s'étend pourtant pas à toutes les espèces du groupe. Son involucre 
est trifolié, mais deux de ces feuilles s’écartent plus que les autres, 
afin de laisser une place libre au pédoncule et à la fleur même qui se 
penchent tous les soirs et se relèvent tous les matins, jusqu’à ce que la 
fécondation soit accomplie; ensuite le calice tombe et le pédoncule 
ne se relève plus; quand la lumière reparaît la fleur s'écarte un peu 
de sa position entre les deux feuilles. 

Le Ranunculoïdes a au contraire ses trois feuilles équidistantes, 
mais en même temps on peut remarquer qu'il est très-souvent biflore, 
et que ses pedoncules se penchent peu, soit dans la fécondation, 
soit dans la dissémination. L'arrangement est donc ici adapté au but 
dans les deux cas. 

En regardant de plus près l'involucre du Vemorosa, on peut voir 
que l'une des trois feuilles est placée au-dessous des autres, qu'elle 
a son pétiole élargi, et que c'est du côté opposé que s'incline la 
fleur; le pédoncule , dans la maturation, s’endurcit et finit par for- 
mer une courbe très-élégante, peu marquée dans le Ranunculoides 
dont la première fleur n’est pas toujours mâle malgré l’assertion de 
Jussieu, mais dont les carpelles se prolongent en bec aigu et stig- 
matoide. 

Les tiges des Sybies sont des hampes presque toujours dépourvues 
de feuilles radicales. 

Les anthères de ces {nemones qui sont peu cultivées, mais qui 
doublent facilement, ont un connectif très-marqué, dont le sommet 
est lustré, légèrement glutineux, et peut-être même nectarifère. Le 
pollen, qui est peu abondant, sort par les côtés, et les loges qui le 
renferment sont à peine distinctes. 

Le quatrième groupe ne renferme qu’une Anémone européenne, 
l'Anémone sylvestris fort commune dans les bois dela France, de 
l'Allemagne, de l'Italie septentrionale, et qu'on retrouve aussi dans 
la Sibérie. Sa fleur est blanche, solitaire et formée de six pièces ; sa 


= CM — 
racine est un rhizome couvert des anciennes feuilles; ses semences 
sont velues, et son réceptacle est chargé de poils plumeux. Elle forme 
un type avec l'4/ba de la Sibérie qui n'en est peut-être qu'une va- 
riété; leur stigmate est une belle languette papillaire, et les poils 
cotonneux qui séparent les carpelles recueillent dans leur duvet hu- 
mide, le pollen, dont ils sont long-temps recouverts. 

Les Aneémonospermes, qui forment notre cinquième section, sont 
dispersés dans l'Amérique du nord, le Népaul et la Sibérie. Le rgi- 
niana est remarquable par sa tige chargée près du sommet de deux 
feuilles opposées, et par ses carpelles recouverts à la base d'une 
touffe de poils laineux, qui servent à la dissémination et paraissent 
appartenir à la plupart des espèces de la section, par exemple au 
Pensylvanica et au Multifida. L 

Enfin la dernière section de nos Anemones, celle des Homalocarpes, 
ne comprend que l'espèce à fleurs de Narcisse. C'est une belle plante 
qui couvre les pâturages des Alpes, et se retrouve sur les monta- 
gnes de la Russie et de la Sibérie, ainsi qu’au nord de l'Amérique. 
Ses graines nues et aplaties tombent séparément, et ses racines, 
couvertes des débris des anciennes feuilles, paraissent donner sans 
cesse de nouvelles pousses centrales; car on trouve à la base inté- 
rieure de la hampe, une autre hampe non encore développée, et 
ainsi de suite indéfiniment. Les fleurs d’un blanc taché de rose, sont 
disposées en ombelle ; les anthères sont exactement latérales et ne 
se retournent point en répandant leur pollen : celles qui s'ouvrent 
les premières sont les extérieures, et successivement les autres en 
s’élevant sur leurs filets; leur connectif est fort large, et sa viscosité 
doit retenir le pollen qui sort par les côtés; les stigmates sont de 
petites têtes languettées, et les feuilles sont roulées sur leur limbe 
dans la préfoliation. 

Telles sont les différentes Arémones européennes. 

Les feuilles de ces plantes sont radicales, à pétioles dilatés, et 
recouvrant les jeunes hampes; elles sont une ou plusieurs fois ter- 
nées, quelquefois ailées ou palmées, ou seulement lobées, mais 
jamais simples et entières; leur surface est ordinairement velue ; leurs 
divisions sont glanduleuses au sommet, et leur pétiole est adhérent : 
avant le développement, elles sont plissées sur leurs lobes et cour- 
bées en deux sur leur pétiole. 

C’est, je crois, une recherche oiseuse que celle de déterminer si les 
involucres des Anémones sont des calices, ou de simples feuilles. 
La nature, qui se joue sans cesse de toutes nos règles, a donné à 
quelques-uns de ces involucres l'apparence et la structure de vraies 


no = 


feuilles, et aux autres, celle de vrais sépales. De la même mamière, 
l'enveloppe intérieure colorée est épaisse et consistante dans les 
Pulsatilles, molle et délicate dans les {neémones des jardins, et encore 
plus dans les Sylvies, où elle a tous les attributs des vrais pétales. 
En sorte qu’en l'appelant calice, avec le plus grand nombre des 
. botanisites modernes, nous la conidérarons HR dy comme fort 
semblable aux autres corolles. 

Ce calice ne tombe pas très-promptement; mais il ne persiste 
point, et il se colore souvent en rouge pendant la fécondation. Son 
estivation est imbriquée et jamais valvaire, comme dans les Cléma- 
tites. Ordinairement il s'ouvre et se ferme plusieurs jours, pendant 
que la fécondation s'accomplit, et même lorsque la fleur est stérile, 
comme dans l’Anemone doublée des jardins. Les sépales sont placés 
sur deux rangs, ou un plus grand nombre, s'ils sont au-delà 
de six. 

Les pédoncules des Anemones sont ordinairement penchés dans 
la préfloraison, surtout dans les espèces à fleurs solitaires. Ils se 
redressent ensuite dans celles qui ont les graines laineuses, comme 
dans celles qui portent des aigrettes plumeuses; mais ils restent 
penchés dans les Sybies, etc. 

J'ai observé, que dans l'Anémone, Nemorosa c'est la hampe qui se 
tord pour que la fleur soit tournée du côté de la lumière, tandis que 
dans le Syvestris c'est, au contraire, le pédoncule : cette torsion 
dans les deux cas est accompagnée d’un renflement dans la partie 
tordue. 

On peut remarquer que les caractères ordinairement les plus cons- 
tants sont précisément les plus variables dans les {nemones , et l'in- 
verse. Ainsi toutes les {némones, à l'exception peut-être des Pulsa- 
tilloides du Cap, ont les feuilles radicales, et les fleurs portées sur 
une longue hampe ; tandis qu'elles diffèrent beaucoup entre elles 
pour toutes les parties de la fleur, et principalement pour les car- 
pelles. On ne peut guère assigner les causes de cette différence dans 
les graines; mais l'on remarque seulement que toutes les espèces 
destinées à vivre dans les taillis et les buissons , ont les carpelles nus, 
tandis que les autres les ont aigrettés ou laineux. On pourrait donc 
conjecturer que les Pulsatilloïdes et les Anémonospermes, qui, comme 
l'Anémone de Virginie, ont les carpelles laineux, croissent naturelle- 
ment dans les lieux découverts. 

Les étamines de ces plantes sont très-nombreuses et placées sur 
plusieurs rangs, par conséquent elles ne peuvent guère être suscep- 
tibles de mouvement. Elles grandissent à mesure qu'elles fleurissent 


— 6 — 


de l'extérieur à l'intérieur, ou bien dans un ordre différent, comme 
je l'ai remarqué dans quelques espèces, et selon que l'exige la position 
des stigmates par rapport aux anthères : la fécondation est directe, 
car les stigmates sont immédiatement recouverts du pollen blanchätre 
des anthères latérales. Cependant j'ai vu les carpelles de la Sylvie 
entourés de poils humides qui retenaient une partie du pollen. Les 
styles se rompent aussi ou persistent selon la structure des graines, 
et les torus conservent la même forme, s’arrondissent en tête ou 
s’allongent en cylindre. 

La dissémination s'opère de trois manières différentes d’après la 
structure des carpelles : lorsque ceux-ci sont nus comme dans le 
Nemorosa , le Ranunculoïdes, ces carpelles tombent au pied de la 
plante; lorsqu'ils sont pourvus de queue, comme dans les Pulsatilles 
et les Preonanthes, qui habitent d'ordinaire les lieux élevés, ils se 
dispersent au gré des vents; enfin lorsqu'ils sont enveloppés de poils 
cotonneux, ils s’échappent en flocons laineux comme les semences 
des Saules et des Peupliers : et l'on peut remarquer que, lorsque les 
carpelles sont nus, et par conséquent ne doivent pas se disperser au 
loin, les pédoncules sont fortement inclinés vers la terre, tandis 
qu'ils se redressent lorsque les carpelles sont pourvus de queues ou 
entourés de bourre , comme on le voit dans les {nemonospermes , et 
en particulier dans le Vrrginiana dont la bourre ne commence à 
s'étaler qu'à la dissémination. 

On trouve sur les feuilles de l’'Anemone syWie un Æcidium, remar- 
quable par ses cupules blanchâtres, et qui se conserve toujours sur 
les mêmes pieds. Le Ranunculoïdes) en porte un autre ponctué d'un 
jaune vif. Ces deux parasites font souvent avorter les plantes sur 
lesquelles elles croissent, de même qu’un Uredo et un Puccinia, qui 
vivent aussi sur les feuilles de l’Arémone sylvie. 

J'observe enfin que dans les Pulsatilles et les Préonanthes les 
involucres velus enveloppent la fleur dont le pédoncule, d'abord 
très-court, grandit pendant la fécondation et devient très-élevé à la 
maturation, et qu'il en est de même du style, qui s’allonge et se 
recouvre de poils étalés à la dissémination. 

Ce vaste genre présente quatre grandes aberrations à son type 
principal : 1° celle des Préonantkhes ; »° celle des Homalocarpes ; 3° celle 
des Pulsatilloïdes ; 4° celle des Anémonospermes. Les deux premières 


appartiennent à des espèces indigènes, et les deux autres à des 
étrangères. 


PE. NS 
TROISIÈME GENRE. — Hepatique. 


L'Hépatique a été séparée des Anémones, à cause de son involucre 
caliciforme à trois pièces distinctes et entières. Cette plante méritait 
encore de constituer un genre propre, par son mode de végétation. 
Sa racine est une masse solide, stolonifère et chargée de radicules 
fibreuses. Les nouveaux bourgeons continuent la plante, les fleurs 
s'épanouissent successivement, et lorsque la fécondation est accom- 
plie, on voit paraître des feuilles coriaces, régulièrement trilobées 
et d’un beau vert. On dirait qu’elles n'appartiennent pas à la plante, 
qui a fleuri entourée de feuilles rougeâtres et en partie desséchées. 
Ce sont en effet ces dernières qui ont nourri les boutons de l’année. 
Les autres, destinées à ceux de l’année suivante, ne sont pas €n 
conséquence les vraies feuilles. 

Si l’on ne consultait pas l'analogie, on ne verrait dans les fleurs de 
l'Hépatique qu'un calice à trois feuilles, et six à neuf pétales placés sur 
deux ou trois rangs; mais quand on compare ces fleurs à celles de 
l'Anémone, on est obligé d'appeler involucre leur calice, et calice leur 
corolle. Toutefois, on ne peut apercevoir aucune différence entre 
les calices des Hepatiques et les pétales des autres plantes; ce qui sert 
à prouver que ces deux organes dont les fonctions sont souvent si 
différentes, ont pourtant la même origine. 

L'Heépatique ouvre ses fleurs à la lumière, et les referme lorsque le 
temps se couvre; sa fécondation dure plusieurs jours, et ses étamines 
ne s'approchent pas des pistils; mais leurs filets capillaires sont agités 
au moindre vent, et jettent ainsi la poussière sur les stigmates à lan- 
guettes papillaires et demi-transparentes. Les anthères s ouvrent latéra- 
lement, les extérieures, avant les autres. Les carpelles sont velus, 
portés chacun sur un support un peu allongé, et conformés comme 
ceux des Aneémones. Je n’ai point su découvrir à leur base les cupules 
filamenteuses et dentées dont parle Scuxuur; je suppose, sans l'affir- 
mer, qu'il a été induit en erreur par les réceptacles particuliers des 
carpelles , qui sont en effet de petites cupules brillantes. On aper- 
coit au soleil sur ces carpelles, des points ou des glandes brillantes 
et glutineuses, destinées peut-être à retenir le pollen; mais on ne 
découvre du reste aucun nectaire proprement dit dans la fleur de 
l'Hépatique. 

Le calice et les étamines tombent promptement, et l'involucre ne 
tarde pas à s’étaler et à s'incliner vers la terre. Les carpelles, dépourvus 
de laine et de queue, se sèment dès le milieu du printemps; ensuite 


4 98 — 
les nouvelles feuilles se développent, et de leurs aisselles sortent des 
boutons qui se séparent naturellement les uns des autres, ou qui quel- 
quefois s'allongent sans se séparer , et forment ainsi des rhizomes. 
Ces boutons ne partent jamais du centre: 

Il serait intéressant d'observer la germination de l'Hépatique, et de 
comparer ses feuilles séminales à celles qui leur succèdent, et à celles 
des Anemones. 

L'estivation de l’involucre est valvaire, celle du calice est imbri- 
quée. Les feuilles portent à l'extrémité de chacun de leurs lobes, une 
glande assez renflée, et qui paraît percée à son centre. 

Ce genre, qui ne comptait autrefois qu'une seule espèce, a été 
enrichi de deux autres : l'Anguleuse, à cinq lobes profonds et dentelés, 
dont on ne connaît point la patrie; mais qui était cultivée autrefois 
dans le jardin des apothicaires de Paris, et pourrait bien n'avoir été 
qu'une monstruosité, ou qu'un hybride; et celle à feuilles entières, 
découverte au Pérou par Humsozpr, et dont l'involucre unilatéral 
est formé de trois pièces allongées. Elle croît à 1,800 toises dans une 
température humide, et fleurit au mois d'août, c'est-à-dire, pour nos 
climats, en janvier. Du reste, ces trois plantes paraissent appartenir 
à un seul type, et avoir une végétation semblable, 

Notre Hepatique vit sur les lisières des bois montueux, et au milieu 
des buissons qui la protégent. Il n’y a rien de si brillant que l’azur de sa 
fleur, dont l'éclat est encore relevé par la blancheur des filets, étendus 
avec une parfaite régularité, et terminés par des anthères de même 
couleur. Aussi a-t-elle été transportée dans tous les jardins , où elle se 
présente sous mille formes différentes. Sa fleur a doublé, elle est de- 
venue blanche, rouge, incarnate, violette, etc., mais jamais jaune. 
Néanmoins, sous toutes ces formes, et au ire des plus élégantes 
bordures, elle n’a pas conservé la grâce et la fraicheur que nous lui 
trouvons dans nos bois. 

La variété d'Amérique se distingue de celle d'Europe, par le duvet 
épais qui couvre ses pétioles et ses hampes, mais elle ne mérite pas 
du reste d’être distinguée comme espèce. 


QUATRIÈME GENRE. — Ædonis. 


L'Adonis a un véritable calice à cinq pièces, et une corolle formée 
de cinq à douze pétales, sur deux ou plusieurs rangs ; ses étamines 
sont nombreuses, ses carpelles sont ramassés en tête d'abord serrée, 
puis allongée en cylindre dans le cours de la maturation. Il diffère des 
Renoncules , parce qu'il est dépourvu d'onglet nectarifère. 


eo — 

Ce genre n ‘est plus composé qué d'espèces indigènes, depuis qu'on 
en a séparé celles du Cap, dont les carpelles sont plongés dans un 
réceptacle succulent. Il est formé de plantes à feuilles caulinaires 
plusieurs fois pennatifides , et qu'on divise en deux sections. 


1° Celle des Adonia, à racines annuelles et pétales plus ou moins 
rouges ; 

2° Celle des Consiligo, à fleurs jaunes et racines persistantes. 

Les Adonia appartiennent toutes au même type, et sont considérées 
par plusieurs auteurs comme de simples variétés fondées sur le nom- 
bre, la couleur des pétales, ou la forme des carpelles et du réceptacle. 
Ce sont des plantes qui fleurissent au commencement de l'été, parmi 
les moissons de l'Europe méridionale; et dont nous cultivons l'espèce 
ou la variété principale, sous le nom d’Adonis d'automne ou de 
Goutte de sang. Leurs pétales, comme ceux de plusieurs Renoncules, 
ont l’onglet et le limbe différemment colorés. Leurs calices sont mem- 
braneux , caducs et demi-transparents; les étamines, placées sur plu- 
sieurs rangs sont noires comme les anthères, et les pistils prennent 
en mürissant une teinte verte. 

Toutefois elles présentent des différences très-remarquables et qui 
paraissent constantes ; ainsi, par exemple, l'{romala des environs de 
Halle a trois pétales linéaires et presque avortés, et un torus qui après 
la fécondation s’allonge en un axe cylindrique chargé dans toute son 
étendue des carpelles disposés sur six rangs, et très-bien conformés. 

Les pétales ont l’estivation imbriquée, ei s’épanouissent à la lumière, 
Les anthères s'ouvrent latéralement, et répandent une poussière d'un 
rouge de tuile. Le réceptacle s’allonge plus ou moins par la matu- 
ration, et les carpelles toujours secs, sillonnés, réticulés ou dentés, 
ont leur embryon placé près du sommet. La radicule est supère, les 
cotylédons sont petits et écartés. 

La fécondation des Adonia est directe, les anthères formées d’un 
grand connectif central et de deux lobes latéraux se recourbent for- 
tement pour répandre leur pollen briqueté et granuleux sur les 
stigmates, qui sont de petites houppes pourprées, velues et papillaires: 
les premières qui s'ouvrent sont les extérieures, et les carpelles sont 
presque toujours féconds. 

Les Consiligo comprennent deux espèces principales : la Préntaniere, 
et celle des nec qui ne diffère de l’autre que par ses pétales 
entiers, ses carpelles glabres et ses feuilles radicales plusieurs fois 
divisées. Ces deux plantes, qui appartiennent au même type, ont une 
végétation semblable. Leur racine est un rhizome qui se multiplie par 
des rejets souterrains, et dont les pousses forment sur le sol des 


ER 
touffes très-brillantes. La Printanière sort de terre dès que la neige a 
disparu, et montre à découvert ses fleurs encore fermées , que proté- 
gent des feuilles très-nombreuses et très-finement divisées. La tige ne 
tarde pas à s'élever et à étaler sa belle corolle d'un jaune de soufre, 
ornée de plusieurs rangs de pétales et d'étamines de même couleur, 
Bientôt tout ce spectacle disparaît, et dès la fin de mai, on n'apercoit 
plus aucune trace de la plante. Mais elle végète et s'étend par ses 
racines, pour se développer de la même manière au premier printemps, 

A l’époque de la floraison, les longues anthères des Consiligo se 
recourbent, afin que leur pollen pulvérulent et onctueux arrive plus 
facilement aux stigmates dont les petites languettes papillaires en sont 
effectivement entièrement recouvertes. La fécondation qui marche 

our les étamines de la circonférence au centre, est encore facilitée 
par les filets amincis qui flottent au gré du vent : mais je n'ai pas apercu 
plus de trace de nectaire dans les Consiligo que dans les Adonia. 

Les Adonis sont cultivés dans nos jardins, en raison de l'élégance 
de leur feuillage d’un beau vert, qui contraste admirablement avec 
Jeurs fleurs tantôt d'un rouge foncé, tantôt d'un rouge plus clair et un 
peu jaunâtre, tantôt enfin d’un jaune soufré. Les Adonia ornent les 
champs avant la moisson, et se sèment naturellement. Je ne sais pas 
si leurs diverses variétés se conserveraient ailleurs que dans nos 
cultures. 

Camsessépès, dans sa Flore des îles Baléares (Mém. du Musée, 
an 1827, page 203 ), assure que la Cüitrine est une variété del Æstivalis, 
différente de celle d'automne, par ses épis plus allongés et ses fleurs 
beaucoup plus pâles ; et que la Jaune , celle à petits fruits, celle à petites 
fleurs , et le Flammea, n'ont pas des caractères suffisants pour consti- 
tuer des espèces. 


Troisième tribu. — IRENONCULÉES. 


Les Renonculees ont le calice et la corolle imbriqués, des pétales 
bilabiés ou simples et chargés à la base d'une écaille nectarifere, des 
carpelles secs et indéhiscents, une semence redressée et des feuilles 
radicales ou alternes. 


PREMIER GENRE. — /Wyosure. 


Le Myosure a un calice de cinq pièces détachées à la base, cinq 
pétales à onglet filiforme et tubulé, cinq à vingt étamines, des ovaires 
qui deviennent dans la maturation des cariopses triquètres disposés en 
épi sur un réceptacle allongé, une radicule réellement supère. 


Le Myosure est une vraie Renoncule pour le port et la conformation 
générale; mais il diffère assez de ce genre dans sa fleur et surtout 
dans ses carpelles, pour que les botanistes aient cru devoir l'en séparer. 

Ce genre déjà fort ancien, et que Linxé avait emprunté à Drrrenivs, 
ne contient qu'une seule espèce européenne, à laquelle De Canpozre 
vient d'en associer une seconde, originaire du nord de l'Amérique, et 
appartenant au même type. Elle se distingue de la première par des 
tiges plus courtes et des calices à appendices membraneux. 

Le Myosure commun croît dans les mares desséchées et les terrains 
pierreux, alternativement secs et inondés.CassrNi remarque que sa tige 
est un rhizome simple et solide, dont l'extrémité inférieure tronquée 
donne naissance à une multitude de radicules qui s'enfoncent dans 
la vase, et dont la supérieure produit une touffe de feuilles linéaires, 
un peu renflées dans leur milieu, disposées en rosule sur le terrain, et 
du milieu desquelles naissent des hampes ou des pédoncules en épi. 
Conformément à cette structure , la tige ou le rhizome doit sans doute 
s'élever ou s’'abaïsser, selon que les eaux s’accroissent ou se retirent ; 
et les radicules qui se développent à la base du rhizome, amarrent sans 
cesse la plante. Cette forme de végétation est à peu près celle des 
Batrachium. ( Voyez Opuscules phytologiques, vol. 2, p.390.) 

L'apparition de cette plante est très-courte : ses semences germent 
en automne, et la floraison a lieu dès l'entrée du printemps. Ce qui 
distingue surtout le WMyosure, c'est son calice formé de cinq pièces 
un peu prolongées le long de la tige, et son réceptacle, qui, d'abord 
aplati, s’allonge bientôt en épi conique, tout couvert d’ovaires serrés, 
triangulaires et rangés avec une régularité parfaite. On n’y apercoit 
distinctement ni style ni stigmate, en sorte qu'il n’est pas facile de 
décider comment s'opère la fécondation. 

Les carpelles, très-bien décrits et figurés par GxrYNer, ont leur 
enveloppe tubéreuse et irrégulièrement conformée; l'embryon paraît 
d'abord logé à la partie supérieure, à cause de la position singulière 
de l'ovaire; mais il est réellement voisin du point d'attache, comme 
dans les vraies Renoncules. Les cotylédons sont très-peu visibles. 
Scakuxr prétend que les carpelles s'ouvrent pour donner leurs 
graines. 

Les radicules du Myosure, comme celles du Cératocéphale, sont 
coléorhizées, et à l'époque de la végétation, elles sortent en assez 
grand nombre du collet de la racine, sans doute pour multiplier la 
plante, que les botanistes regardent comme annuelle, mais que son 


rhizome et ses radicules latérales pourraient bien faire considérer 
comme vivace, 


SRE. 
SECOND GENRE. — Ceralocephale. 


_ Le Cératocéphale est un genre peu distinct, qui, dans l’ordre 
naturel, se place entre le Myosure et la Renoncule. Son caractère, 
consiste dans un calice persistant à cinq pièces, dans des ovaires, 
disposés en épi, et qui se prolongent en une corne aplatie, à peu 
près six fois plus longue que la semence, 

Ce genre ne comprend que. deux espèces, dont la première, ie 
Ceratocephalus falcatus, croît dans le bassin de la Méditerranée, et 
la seconde, le Ceratocephalus orthoceras, se trouve dans les lieux 
incultes de la Tauride et de la Sibérie méridionale. Ces deux plantes 
annuelles ont entre elles une si grande ressemblance, que la descrip- 
tion de l’une s'applique entièrement à l'autre; toutefois l'orthoceras 
a les carpelles chargés d'une crête entre les deux bosses, et terminés 
en bec à peu près droit, tandis que dans le falcatus le bec est recourbé, 
et l'intervalle entre les deux bosses est canaliculé, 

Le Ceratocephalus falcatus a toutes les habitudes des Renoncules 
des champs. Ses feuilles sont radicales , irrégulièremert divisées en 
lobes linéaires. La hampe soutient une petite fleur d'un jaune pâle, 
et l'on remarque, dit Saint-HinaiRe (Mém. du Musée, 1819), à 
l'extrémité de sa racine principale, cinq radicules secondaires, ver- 
ticillées et coléorhizées, autour desquelles il en naït ensuite beaucoup 
d'autres. La plante est quelquefois glabre , plus souvent recouverte 
de poils blancs et épais qui cachent les péricarpes. Ces poils sont 
encore plus marques dans la seconde espèce. 

Les carpelles du Ceratocéphale soni recourbés, bossus à leurs 
extrémités, et rappellent la forme des follicules qui font le caractère 
des Renonculacées. Ils portent sur leur face interne des traces ma- 
nifestes de suture, et renferment des semences tétragones à radicule 
infère dirigée sur l'ombilic; Kocn décrit ces carpelles comme ren: 
fermant trois loges dont deux vides et une dernière monosperme. 

Le principal caractère physiologique de ce genre, c'est celui de ce 
torus qui, après la fécondation, s'allonge en axe cylindrique : cette 
même disposition se voit dans la Renoncule scélérate, et elle a pour but 


de fournir un développement plus libre aux nombreux ovaires de ces 
plantes. 


TROISIÈME GENRE. —— (Caire. 


La Ficaire a été détachée du genre des Renoncules, auxquelles elle 
appartient par son organisation générale, Elle est caractérisée par son 


O0 —= 


calice à trois pièces , et ses pétales au nombre de huit ou neuf, sur 
trois rangs. 

Elle vit dans toute l'Europe tempérée, et recherche de préférence 
les lieux cultivés ; on la retrouve en Barbarie, dans la Tauride, et pro- 
bablement en Asie. Elle annonce dans nos climats le retour du prin- 
temps; mais, dès le mois de mai, les feuilles et la tige se flétrissent 
et disparaissent complètement. 

La Ficaire présente quelques phénomènes dignes d'attention. Ses 
racines fibreuses portent des griffes ou tubercules, qui se distinguent 
en trois sortes : les premières, allongées et flétries, et qui ont servi à 
nourrir Ja plante; les secondes, plus renflées à leur extrémité infé- 
rieure ; enfin , celles qui naissent nouvellement du collet de la racine. 
Les secondes se séparent pour donner naissance à d’autres plantes. 
Les troisièmes appartiennent à des plantes qui fleuriront au bout de 
deux ans. 

Indépendamment de ses tubercules, la Ficaire se multiplie encore 
par des bulbes de même nature, placées aux aisselles, et qui se sèment 
dès le moment où les feuilles se détruisent. Aïnsi il y a peu de plantes 
à qui la nature ait accordé autant de formes de reproduction. 

Mais ces moyens extraordinaires nuisent à la reproduction par les 
semences. J'ai très-souvent examiné des fleurs de Ficatre, et j'y ai 
rarement apercu des stigmates bien distincts. Toutefois il peut arriver 
qu'un ou deux carpelles aient des graines fécondes, et même que la 
plupart des carpelles soient fertiles; dans ce cas, qui m’a paru très- 
rare , les pédoncules s’allongent beaucoup et se penchent aux appro- 
ches de la dissémination. 

À cette époque, ces carpelles se séparent naturellement, et en les 
examinant, jai trouvé que leur base était un pédicelle court et 
ramolli, et qu'ils renfermaient, dans une enveloppe crustacée, un 
albumen charnu dont l'extrémité inférieure présentait un point rous- 
sâtre que j'ai pris pour l'embryon. Il ne me reste plus qu’à voir germer 
ces carpelles. 

Les jeunes pousses des bulbes axillaires sont engainées dans deux 
petits fourreaux d'inégale grandeur, et qui ne paraissent que des rudi- 
ments de pétioles. [ls contiennent à leur intérieur une troisième feville 
bien conformée, à la base de laquelle on en trouve une quatrième, 
et ainsi de suite. Ces feuilles sont logées dans le pétiole dilaté des 
feuilles déjà développées, et sont roulées par leurs deux bords sur 
leur face supérieure. La jeune bulbe porte Jusqu'à quatre pouces. 

Les bulbes qui doivent donner des fleurs, et qui sont attachées au 
collet d'une plante déjà parfaite, ont des pousses composées d’un 

3 3 


SU Es 


plus grand nombre de feuilles, protégées par les rudiments de feuilles 
avortées; de leur centre sort une tige creuse et rampante qui fournit, 
par ses neuds, tantôt des rameaux et tantôt des pédoncules solitaires. 

Les fleurs de la Ficaire sont conformées comme celles des Renon- 
cules; leurs pétales ont un limbe vernissé et un onglet demi-transparent, 
qui porte à sa base un pore mellifère. Ces fleurs sont météoriques: 
elles s'ouvrent plusieurs jours de suite au soleil, et se referment à 
l'obscurité; mais les étamines ne s’inclinent pas sur les ovaires, quoique 
ceux-ci soient recouverts de pollen : ce mouvement aurait été inutile. 
Les calices et les pétales ne tombent que tard. 

On ne peut pas dire que la Ficaire soit une plante vivace; puisque 
la même bulbe ne donne pas deux fois des fleurs; mais elle produit 
des bulbes qui propagent indéfiniment la plante. En fouillant, à 
l'entrée de l'hiver et au commencement du printemps, le terrain où 
elle croît, on sera étonné de la multitude de bulbes auxquelles elle 
donne naissance. Les unes commencent à végéter, les autres sont 
plus avancées, plusieurs sont près de fleurir; en un mot, on en trouve 
dans tous les états, et l’on peut remarquer qu’elles ne poussent jamais 
que par le sommet, c’est-à-dire par la partie qui adhérait à la racine 
qui les a nourries et développées. 

Le phénomène le plus remarquable est ici celui de ces pétales qui 
se ferment à l'obscurité et s'ouvrent à la lumière, quoiqu'il y ait 
rarement des carpelles féconds à protéger. 

Les feuilles de la Ficuire portent à leur surface inférieure un Uredo 
particulier qui les détruit promptement. Elles sont glanduleuses et 
marquées souvent à leur base d’une tache brune. 


QUATRIÈME GENRE. — Renoncules. 


Les Renoncules ont un calice à cinq pièces, cinq pétales nectarifères, 
des carpelles nombreux, monospermes, indéhiscents et terminés en 
pointe plus ou moins marquée. 

Ce sont des herbes annuelles ou vivaces, à feuilles alternes plus ou 
moins divisées , à fleurs terminales ou rarement opposées aux feuilles. 
On en compte déjà près de cent cinquante espèces, répandues dans les 
diverses parties du monde, en Asie, dans les deux Amériques, dans 
les îles des Tropiques, et jusque dans les glaces du Nord ; mais leur 
véritable patrie parait être le bassin de la Méditerranée : c’est sur les 
bords de cette grande mer que croissent, en Europe, en Afrique et 
en Asie, la plupart des Renoncules, dont les recherches des botanistes 
augmentent chaque jour le nombre. 


Pnsts D PEUR 

Les espèces européennes n'ont point de localité déterminée; les 
unes vivent sur les montagnes élevées, auprès des glaces éternelles ; 
les autres dans les prairies montueuses; celles-ci de nos blés, Me 
pâturages, ou le long de nos chemins; celles-là dans les marais, les 
étangs ou les eaux courantes; en sorte qu'on peut dire que ces plantes 
ne sont étrangères à aucune station. 

Elles diffèrent principalement par leurs racines fibreuses, bulbeuses 
ou tuberculées, leurs tiges droites ou couchées, leurs feuilles lisses 
ou velues, entières ou divisées, leurs pédoncules cylindriques ou 
striés, leurs fleurs blanches, jaunes ou rougeûtres, et leurs carpelles 
unis, striés, ponctués ou raboteux. Ces diversités de formes sont la 
base des sections qui divisent ce genre nombreux. 

Celles que nous adoptons pour les Énere européennes peuvent 
être réduites aux suivantes : 

1° Les Renoncules aquatiques où Batrachium ; 

2° Celles des marais où Lingua ; 

3° Celles des champs, à des tuberculeuses ; 

4 Les Scélérates, à réceptacles allongés en épi; 

5° Celles à feuilles finement divisées, racines tuberculées et fleurs 
Jaunes; 

6° Les Communes, à feuilles lobées et fleurs jaunes; 

7° Les Alpestres , à feuilles divisées et fleurs bianches; 

8° Celles des glaciers, à feuilles entières et feuilles blanches ; 

9° Le T'hora. 

Ces neuf groupes ou sections ne sont pas tellement marqués qu'ils 
ne rentrent un peu les uns dans les autres, et qu’on n'y puisse distin- 
guer des sous-types , parce que la nature, dans ce genre comme dans 
la plupart de ceux qui sont nombreux en espèces, s’est plu à mêler 
les caractères; en sorte, par exemple, que les Renoncules communes, 
à feuilles lobées , n'ont pas toutes la même forme de racines, de fleurs, 
etc.; mais ces divisions, d'ailleurs assez semblables à celles des auteurs, 
suffisent à notre but. 

Les Renoncules aquatiques ou Batrachium forment un groupe bien 
distinct par leurs carpelles ridés transversalement, leurs pédoncules 
opposés aux feuilles, leurs stipules transparentes attachées aux pé- 
tioles, leurs pétales blancs, minces, délicats, leurs nectaires formés 
d'un pore ouvert sans écaille ni rebord, et en général par toutes leurs 
habitudes. La principale espèce, ou l’Aquatilis, présente le singulier 
phénomène de feuilles qui changent de formes, selon le milieu où 
elles vivent : forsqu’elles ont crû hors de l’eau, elles sont arrondies et 
lobées; lorsqu'elles sont établies dans les mares, elles se découpent en 


30 — 


Janières fines et bifurquées. Enfin, selon De Canpoze, elles ont hors 
de l’eau des stomates, qu'elles perdent lorsqu'elles sont plongées dans 
ce liquide. 

On compte quatre à cinq espèces ou variétés de Batrachium, jusqu'à 
présent mal circonscrites, et qui rentrent de plusieurs manières les 
unes dans les autres. De même que la plupart des plantes aquatiques, 
elles sont répandues sur la plus grande partie du globe. Elles végètent 
presque toute l'année, et couvrent les étangs de leurs jolies fleurs 
blanches , dont les graines flottent ensuite à la surface de l’eau. 

La manière dont elles se reproduisent mérite d’être remarquée. La 
Renoncule aquatique pousse en terre des radicules simples, qui la sou- 
tiennent jusqu'à son développement; ensuite on voit sortir des nœuds 
inférieurs de nouvelles radicules destinées à remplacer les autres; lors- 
qu’elles se sont amarrées, le bas de la tige se détruit avec ses sup- 
ports; les rameaux latéraux périssent aussi, à moins qu'ils ne s’amar- 
rent de même par leurs radicules; dans ce cas, ils se détachent de la 
tige mère. Dans le Fluitans, dont les tiges s'étendent le long des eaux 
courantes où elles forment souvent d'épais gazons, les rameaux se 
désarticulent et vont s'implanter plus bas avec leurs radicules déjà fort 
développées, ce qui n'empêche pas que, comme l’aquatique, la plante 
nese multiplie encore par ses graines qui germent dès la fin de l'hiver. 
On peut remarquer que le bourrelet de la radicule est criblé de pores 
destinés à pomper l’eau, et qu’il reste long-temps humide malgré son 
exposition à l'air. Ainsi, les Batrachium sont vivaces sans conserver la 
même racine et la même tige; mais leur développement par le haut 
continue sans cesse, et c’est aussi la raison pour laquelle leurs fleurs 
sont axillaires, ou plutôt extra-axillaires. 

Ces fleurs s’ouvrent le matin et leurs pétales tombent à la fin de la 
journée. Les filets sont épais, peu nombreux, et s’inclinent contre les 
stigmates, qui sont de petites houppes papillaires. Les anthères sont 
latérales, et le nectaire, qui n’est qu’un simple pore, est rempli d'hu- 
meur miellée, à l'époque de la fécondation. 

J'ai vu la Renoncule aquatique croissant dans un marais formé par 
une fontaine intermittente, et j'ai remarqué que ses fleurs, quoique 
plongées long-temps dans l'eau, n’éprouvaient aucune altération, et 
répandaient , au contraire, lorsqu'on les retirait du liquide, leur pollen 
sur les stigmates papillaires dont les carpelles donnaient des graines 
fécondes. Ramonp avait déjà fait la même observation sur les lacs 
des Pyrénées souvent grossis temporairement par la fonte des neiges, 
mais je ne crois pas que la fécondation s'opère jamais dans le liquide, 
car j'ai vu les fleurs épanouies de cette même Renoncule ne répandre 


qe 
leur pollen qu'après avoir été retirées de l'eau. ( De Cann. Phys. vege- 
tale, page 526.) 

Le second groupe est celui des Renoncules des marais, dont les 
feuilles, quoique souvent enfoncées dans l’eau , ne se divisent jamais; 
ce qui prouve que leur organisation est différente de celle des Batra- 
chium , et que toutes les plantes qui croissent dans ces localités, n'ont 
pas leurs feuilles divisées. Quelques-unes, comme le Flammula et le 
Lingua, dont les dimensions sont quelquefois très-considérables, ont 
la tige droite; les autres, telles que la Vodiflore, l Ophioglosse, etc., 
sont couchées sur le sol, et se multiplient par les radicules qui sortent 
deleurs nœuds, ou par des rejets. Leurs racines sont presque toujours 
fibreuses, leurs fleurs, terminales dans les espèces à tiges droites, sont 
quelquefois opposées aux feuilles dans celles à tiges rampantes, comme 
la Nodiflore, \ Ophioglosse , Y Uligineuse, etc. Leurs fleurs sont jaunes, 
vernissées et non météoriques. Les étamines extérieures s'ouvrent les 
premières, et répandent leur poussière en abondance sur les pétales, 
et sur les nectaires formés ordinairement en sac ou en poche fermée 
par une écaille ; ensuite, elles se recourbent en montant du côté des 
stigmates dont les papilles sont bien marquées. Je trouve dans mes 
notes que la Renoncule graminee, à fleurs jaunes, à racines bulbeuses 
et recouvertes des vestiges des anciennes feuilles, jette pourtant de ses 
nœuds inférieurs de nouvelles radicules, comme la plupart des espèces 
de la même famille; et que les rejets de la Flammule se séparent de la 
plante pour venir au printemps flotter sur la surface de l’eau jusqu’à 
ce qu'elles se soient enracinées. Les tiges florales périssent ensuite, 
après avoir répandu leurs semences. 

Le troisième groupe est celui des Renoncules annuelles, à carpelles 
couverts de tubercules ou de poils rudes, à feuilles lobées multifides 
et dentées, pédoncules striés, racines constamment fibreuses, fleurs 
jaunes et vernissées. L'espèce la plus commune est celle des champs, 
qui mûrit dans nos moissons, et dont les anthères sont véritablement 
extrorses. Elle n’a qu’un petit nombre d’étamines qui s'inclinent sur 
les stigmates papillaires et fortement recourbés en dehors; les globules 
de leur pollen, gros et peu nombreux, s’attachent immédiatement 
aux stigmates ou retombent sur les nectaires et les pétales vernissés. La 
plupart des autres espèces vivent dans les lieux humides, et ont leurs 
pédoncules opposés aux feuilles. On remarque de grandes variations 
dans leurs tubercules, dont le nombre et la disposition ne suffisent 
pas pour caractériser les espèces. Leurs carpelles, qui sont toujours 
moins nombreux, et plus grands que ceux des autres Renoncules , 
portent évidemment des traces de suture, et sont chargés de tuber- 


cules glanduleux dans le Muricatus. Le Parviflorus, qui appartient à 
ce groupe, est remarquable par la petitesse de ses fleurs dont les 
pétales avortent en partie. 

Mais la principale observation à faire sur les espèces de cette sec- 
tion, est relative aux carpelles qui, dans le Muricatus en particulier, 
perdent insensiblement leur parenchyme, et deviennent tout-à-fait 
ligneux et aplatis comme la graine qu’ils renferment. 

Le quatrième groupe est celui des Renoncules en épi, très-remar- 
quables par leurs fleurs petites et un peu verdâtres, surtout par leurs 
réceptacles allongés et recouverts d'un grand nombre de carpelles 
très-promptement caducs. L'espèce principale et peut-être la seule est 
la Scélérate, qui croît dans les marais , et a recu son nom de ses qualités 
vénéneuses ; ses étamines sont très-peu nombreuses et ses stigmates 
très-peu marqués, comme dans les Myosures; mais ses nectaires, en 
forme de pore creux, distillent abondamment l'humeur mielleuse, de 
même que ceux de la RÀenoncule avortée de Y Amérique septentrionale, 
qui me paraît appartenir à ce quatrième groupe. Les Cératocarpes et 
surtout les WMyosures dépendent de ce même type, quoique ces der- 
niers aient les carpelles en apparence différemment conformés. Toutes 
ces plantes sont annuelles, et les radicules coléorhizées des Myosures, 
pourraient bien appartenir aussi à la Renoncule scelerate. 

Les Renoncules à fleurs jaunes et à racines en griffes forment le cin- 
quième groupe. Elles sont assez rares dans l'Europe centrale, mais 
beaucoup plus communes sur les bords de la Méditerranée. Ce sont 
le Bullata, celle à feuilles de Cerfeuil, celle des Marais , Y Orientale, 
celle d’Illyrie à calice réfléchi, celle de Montpellier, et surtout l’A4sia- 
tique, dont les fleuristes font un si grand cas, et qui se présente sous 
mille formes dans nos jardins. Elles se distinguent par leur port, leurs 
fleurs grandes et leurs feuilles assez subdivisées. Leur reproduction se 
fait par des tubercules qui poussent, toutes les années, du collet, et 
qui se séparent naturellement, ou qu’on sépare sous le nom de griffes, 
comme dans la Renoncule coronaria. 

Le sixième groupe est celui des Renoncules communes , qui déco- 
rent au printemps nos chemins, nos prairies et nos bois, de leurs 
belles fleurs jaunes et luisantes. Telles sont la Rampante, ainsi appelée 
de ses nombreux rejets ; l'Acre, qui a recu son nom de sa causticité; 
l'Auricome , qui aime à croître en famille, dont les fleurs avortées au 
printemps sont plus régulières dans la pousse d'automne ; le Polyan- 
theme, celle des Montagnes, la Lanugineuse , dont les stigmates papil- 
laires seulement en-dessus, se déjettent et se recourbent fortement 
pour aller à la rencontre des anthères placées au-dessous, etc. Ces 


io e … 

plantes ont les feuilles lobées et glanduleuses à leurs extrémités , leurs 
fleurs grandes , leurs pédoncules cylindriques et leurs nectaires 
écailleux. Leurs racines sont des souches horizontales et fibreuses, 
qui se détruisent par l’extrémité inférieure, et se développent indéfi- 
niment par le sommet. On pourrait y distinguer trois sous-types : 
celui de la Rampante, qui se reproduit continuellement de radicules ; 
celui de l Auricome , qui repousse toujours du centre du collet, à peu 
près comme la Bulbeuse , et dont les pétales avortent ordinairement ; 
et enfin celui de la Bulbeuse, dont la bulbe de l'année, superposée 
à celle de l’année précédente, se développe toujours du même centre 
et par conséquent reste toujours solitaire. Ces diverses plantes, sur- 
tout l’Acre, la Rampante , la Bulbeuse, doublent facilement, et sont 
cultivées dans nos jardins sous le nom de Bouton d’or. L'Auricome, 
qui perd si facilement ses pétales, et le Cassubicus qui n’en est 
qu'une variété plus petite, sont promptement fécondés, et l'on voit 
leurs beaux stigmates recourbés, tout recouverts du pollen jaune des 
anthères fortement inclinées sur le centre de la fleur. 

Le septième est celui des Renoncules Alpestres, à feuilles divisées et 
à fleurs blanches, telles sont celle à feuilles d’ Aconit, celle des Glaciers, 
si remarquable par ses calices chargés de poils brillants et roussâtres ; 
l'Intermedius hybrique des deux premières ; l'Æ/pestre, à feuilles 
lobées et arrondies, à fleurs grandes et solitaires ; celle de Seguier, très- 
voisine del 4/pestre, mais dont la tige est plus rameuse et le feuillage 
plus découpé; celle à feuilles de Rue , qui se plait sur le sommet des 
plus hautes Alpes, etc. 

Le huitième groupe se rapproche beaucoup du précédent, avec 
lequel il est lié par la Renoncule déchirée, ainsi appelée de la forme de 
ses feuilles, et qui paraît être une hybride entre la Renoncule des 
Pyrénées et celle des Glaciers. Cette division ne comprend que quatre 
espèces, toutes européennes : celle des Pyrénées, celle à feuilles de 
Parnassia , celle à feuilles amplexicaules et celle à feuilles étroites, qui 
ne forment qu'un seul type, et ont entre elles de grandes ressem- 
blances, soit pour le port, soit pour la structure générale. 

Ces plantes vivent, comme celles du groupe précédent, dans les 
lieux humectés par la fonte des neiges ; leurs pétales ont la structure 
plus délicate et moins lustrée que ceux des Renoncules à fleurs jaunes ; 
leurs racines sont des tubérosités chargées des débris des anciennes 
feuilles et qui repoussent toujours de la même masse. On voit, en 
effet, à côté du jet de l'année, se développer une nouvelle bulbe avec 
ses radicules et sa tige; à mesure que celle-ci grandit, l'ancienne bulbe 
se flétrit, et perd ses radicules, et ainsi de suite à l'indéfini, comme 


ap 
cela a lieu aussi pour le Gramineus dont les deux bulbes sont réunis 
en un seul ; toutefois le Pyrenus repousse souvent de la même souche, 
parce que sa hampe est véritablement latérale, comme on peut s'en 
assurer en remarquant le bourgeon foliacé central qui se développe 
l'année suivante; il en est de même, je crois, du Parnassifolius , du 
Thora, et en général, des espèces alpines. 

Les fleurs du septième et du huitième groupe sont plus ou moins 
météoriques, et ne s'étalent entièrement que par l’action complète de 
Ja lumière. Leurs étamines ont les anthères latérales, et celles qui se 
développent les premières sont les extérieures ; les nectaires sont 
tantôt de simples pores, tantôt, et pour l'ordinaire, ce sont des 
cornets; les pétales varient en nombre, et prennent souvent des 
teintes rougeâtres. La seule espèce de ces deux groupes que l'on 
cultive, est celle à feuilles d’Aconit, aussi remarquable par le blanc 
pur et rosé de ses fleurs, que par la beauté de son feuillage. 

Enfin, mon dernier type est celui des Thora, qui ne comprend que 
deux ou trois espèces : le Thora proprement dit, l'Écussonnée de la 
Hongrie, celle à feuilles courtes de l'Italie méridionale, et enfin 
l'Hybride, des Alpes de l'Autriche. Ces plantes peu élevées, à fleurs 
jaunes et petites, sont remarquables par leur racine tuberculée, 
chargée de radicules renflées et coniques, et par leurs feuilles cau- 
linaires, épaisses, réticulées, divisées, peut-être soudées, et dont 
l'inférieure s'étale en forme d’éventail redressé. Elles entourent la 
fleur, comme un capuchon, avant son développement, et sont quel- 
quefois accompagnées de quelques feuilles radicales plus petites. Je 
ne connais pas exactement le mode de multiplication de ces plantes, 
qui ne forment sans doute qu'une seule espèce ; mais je vois qu’elles 
vivent solitaires. 

Le genre des Renoncules est un de ceux dont les racines présentent 
les plus grandes différences. Celles des Batrachium, comme nous 
l'avons vu, n'ont pas de rapports avec les autres; celles des Renon- 
cules jaunes , à feuilles multifides , sont des griffes qui naissent circu- 
lairement; celles des Renoncules jaunes communes , ou à feuilles lobées, 
forment des souches horizontales, et enfin ceiles des Renoncules 
Alpestres où Blanches présentent des tubercules qui se reproduisent 
du même centre, comme la Renoncule bulbeuse, ou des pousses laté- 
rales, partant de l'intérieur de la même bulbe. Et il n’est pas impossible 
qu'il n'y ait encore dans les Thora et les espèces étrangères quelques 
autres formes de racines. 

Ces plantes se multiplient encore par des rejets ou des radicules, 
principalement les Renoncules des marais, à fleurs jaunes, à feuilles 


ET pe 

simples et à tiges couchées ; mais je ne connais pas d'espèce qui soit 
réellement traçante. Les tiges des Renoncules sont toujours herbacées ; 
tantôt elles sont feuillées dans une grande partie de leur longueur ; 
plus souvent elles sont presque nues, ou portent seulement à leur 
base, des rosettes de feuilles radicales, dont les pétioles dilatés pro- 
tégent la plante avant son développement. Ces feuilles sont entières 
ou lobées : les premières ont leurs nervures parallèles, et peuvent, en 
général, être considérées comme de véritables phyllodes; les autres 
ont un limbe bien marqué, et des nervures ailées en nombre impair : 
ces nervures arrivent toujours aux dentelures des feuilles, qui sont 
autant de glandes excrétoires. 

Les aisselles des feuilies donnent naissance à des rameaux subdi- 
visés, au moins dans la plupart des espèces; car les Renoncules aqua- 
tiques et quelques autres étrangères ont leurs pédoncules opposés aux 
feuilles. La Renoncule nodiflore est, je crois, la seule espèce euro- 
péenne qui présente des fleurs axillaires et à peu près sessiles; mais les 
pédoncules ne sont ici que des rameaux avortés. 

Dans les espèces à feuilles divisées , chaque lobe est roulé séparé- 
ment, et le limbe entier est encore roulé sur sa surface supérieure. 
Le plissement est le même dans celles à feuilles entières, à l'exception 
du Thora, dont les feuilles enveloppent la fleur comme un cornet. 
Dans les Renoncules aquatiques à feuilles divisées, les lanières sont 
parallèles, et originairement protégées par les membranes dilatées des 
pétioles. Toutes les parties de ces plantes sont unies entre elles, sans 
aucune articulation. 

Les calices des Renoncules sont généralement colorés, plus ou moins 
velus et peu consistants. Ils se réfléchissent même dans le Bulbosus, 
avec une élasticité qui tient à leur organisation, et toujours ils tom- 
bent avec la corolle, ou un peu plus tôt. Leur estivation est imbriquée 
comme celle des pétales. 

Ceux-ci sont toujours au nombre de cinq dans les espèces euro- 
péennes; mais ils se développent les uns après les autres, ou man- 
quent en partie dans l’Auricome et l Avortée. Leur couleur varie, ainsi 
que leur consistance : dans les Aquatiques , les pétales sont fugaces, 
demi-transparents et blancs comme dans la plupart des 4/pestres, 
mais, pour l'ordinaire, ils sont jaunes, pâles, soufrés, ou même 
oranges. Ils sont de plus vernissés vers le haut, et presque transparents 
à leur base. Ce vernis , qui est si remarquable dans ce genre, est sans 
doute destiné à préserver de l'humidité les corolles, qui, une fois 
ouvertes, ne se referment plus, et dont la floraison dure ordinaire- 
ment plusieurs jours. 


LE. 


Le nectaire, qui manque à peu près dans l’Auricome , dont les 
anthères entourent les stigmates et dont la fleur n’est jamais étalée, 
est placé à la base des pétales, et se retrouve dans le WMyosure , le 
Cératocephale et la Ficaire, trois genres détachés de celui des RÀenon- 
cules. Il varie beaucoup, depuis la forme d'un simple pore, jusqu'à 
celle d'une écaille et même d'une oreillette, qui est fort commune dans 
les espèces à fleurs blanches. Sous ses diverses apparences, cet organe 
est toujours destiné à sécréter l'humeur miellée qui s'y trouve en . 
abondance, et à recevoir la poussière des anthères à l'époque de la 
fécondation. 

Les pétales des Renoncules jaunes sont lisses et presque transparents 
à la base, mais recouverts plus haut d'un vernis brillant et proba- 
blement résineux, quiles préserve des dangereux effets de l'humidité : 
c'est sans doute la raison pour laquelle ils restent ouverts dans la 
plupart des espèces. J'ai remarqué que dans l'Aconitifolius et les 
espèces à fleurs blanches, il n’y a ni vernis sur Îe limbe, ni trans- 
parence sur l’onglet. 

Les étamines varient beaucoup en nombre : on en compte jusqu'à 
cinquante dans les espèces communes à fleurs jaunes; mais on n'en 
trouve que huit à douze dans celle des Champs, la Scelerate et quelques 
autres. Les anthères sont toujours latérales et plus ou moins extrorses. 
Les stigmates sont quelquefois très-peu apparents ; mais, pour l'ordi- 
naire , ils forment de petites languettes papillaires tournées extérieu- 
rement. Dans quelques espèces, et surtout dans les Renoncules des 
champs, ces stigmates s’allongent un peu en faux pendant la matu- 
ration , et les carpelles se dispersent en s’accrochant. 

Ces carpelles, réunis en tête plus ou moins allongée, varient autant 
en forme qu’en nombre ; leur surface est lisse, raboteuse, ou même 
hérissée de piquants. Jamais ils ne s’ouvrent avant l'époque de la ger- 
minalion, quoiqu'on apercoive très-bien, au moins dans quelques 
espèces, les traces de leur suture toujours placée en-dedans. L'embryon 
des semences est voisin du point d'attache, et la radicule est infère. 
Nous avons déjà dit que la structure de la graine du Myosure , quoi- 
que différant en apparence, était réellement la même. Les carpelles 
de toutes les Renonculacees ont-is naturellement deux semences, 
comme semble l'indiquer la théorie ? C'est ce que j'ignore, et je crois 
qu'on n'a encore rencontré ces deux graines dans aucune de leurs 
espèces. Cependant De Cannorze suppose qu’elles ont existé, parce 
que la graine unique renfermée dans le carpelle est tantôt pendante et 
tantôt redressée. Il dit que, dans le premier cas, la graine inférieure 
a disparu , et que, dans le second, c'est la supérieure. Quant aux 


RS — 
Renoncules proprement dites, leurs graines ont toujours la même 
direction. 

La fécondation a lieu au moment où la fleur s'ouvre : les étamines 
qui se développent les premières, sont toujours jes extérieures, les 
autres leur succèdent assez régulièrement, et le pollen jaunätre reste 
long-temps fixé sur les anthères, parce qu'il arrive souvent, comme 
dans le Glacialis, que les stigmates ne sont pas encore développés 
lorsque les anthères s'ouvrent. 


Je n’ai pas aperçu d'autre mouvement organique dans les Renon- 
cules, que celui des pédoncules des Batrachium qui s'allongent 
jusqu’à ce que les fleurs atteignent la surface de l'eau. Quelques calices 
se réfléchissent encore, et quelques pétales, comme ceux de lAuricome, 
s'ouvrent et se ferment, selon les heures du jour; mais les carpelles 
restent redressés jusqu'à la dissémination. 


Je ne crois pas que la plupart des Renoncules dirigent leurs fleurs du 
côté de la lumière; je n’ai apercu ni courbure, ni torsion bien 
marquée dans leurs pédoncules, et je ne sais pas encore pourquoi 
ceux-ci sont cylindriques ou striés selon les espèces. 


Plusieurs Renoncules d'Europe sont cultivées dans nos jardins, où 
elles doublent très-facilement, et se font remarquer par l'éclat de leurs 
couleurs; telles sont parmi les jaunes, l'4cre et la Rampante, sur- 
nommées le Bouton d’or, et parmi les blanches, celle à feuilles d'Aconit, 
appelée le Bouton d'argent. Mais la plus distinguée est la Renoncule 
d'Asie, dont nous ne connaissons pas l'espèce simple, et qui se mul- 
tiplie surtout par ses griffes. On en compte deux variétés principales : 
la Sanguine et la Commune. La première, plus anciennement connue, 
a une tige simple et des feuilles découpées en trois segments, mais 
jamais déchiquetées; sa fleur, d'un pourpre sanguin ou mélangé de 
jaune, est toujours pleine. On la croit originaire d'Afrique, et on peut 
la considérer comme une espèce. La seconde a la tige rameuse, les 
feuilles découpées en lobes pointus, les fleurs semi-doubles et souvent 
fécondes. Elle offre toutes les nuances de couleur, le bleu excepté, 
et présente deux variétés assez distinctes : la Blanche, originaire de 
Candie, et la Jaune ou la Rouge, qui appartient à l'Asie. Ces dus races 
se meleut constamment par des fécondations hybrides, tandis que la 
Sanguine reste toujours semblable à elle-même. 


Les Renoncules du nord de l'Amérique ont beaucoup de rapports 
avec les nôtres, et quelques-unes d’entre elles sont communes aux 
deux continents. Il n’en est pas de même de celles de la Nouvelle- 
Hollande et de l'Amérique méridionale, qui ont, en général, un 


sh 
caractère étranger, soit dans le port, soit dans la végétation. Plusieurs 
de ces dernières comptent dix à douze pétales. 

Les Renoncules d'Europe fleurissent au commencement ou dans le 
cours du printemps; celles qui habitent sur nos montagnes végètent 
dés qu’elles sont débarrassées des neiges ou des glaces qui les recou- 
vrent; celle à feuilles d’Aconit et V Alpestre forment dans ces lieux 
solitaires des touffes charmantes ; la G/aciale embellit les bords des 
glaciers, et celle à feuilles de Parnassia tapisse les pentes des rochers 
escarpés. Les espèces communes étalent dans nos prairies leurs fleurs 
d'un jaune d'or, et sont quelquefois si abondantes, qu’elles semblent 
les couvrir entièrement. 

J'ajoute, en terminant l'histoire de ce genre, qu’il faut peu compter 
dans la détermination des espèces, sur le port, la forme des feuilles, 
et la nature de leur surface glabre ou velue. Ces caractères sont telle- 
ment inconstants, qu'ils varient beaucoup selon les climats et les loca- 
lités, et qu'il y a plusieurs Renoncules admises et décrites comme 
espèces qui ne sont que des variétés. Mais les racines, les fleurs, la 
couleur des pétales, et surtout la forme des carpelles présentent des 
notes beaucoup plus certaines. Du reste, cette discussion n’est pas de 
notre ressort, et nous nous contenterons de dire qu'il y a dans ce 
genre, comme dans la plupart de ceux dont les nombreuses espèces 
vivent rapprochées, des plantes visiblement hybrides ; telles sont, par 
exemple, la Dechiree , provenue de celle des Pyrences, fécondée par 
celle à feuilles d’ Aconit ; le Polyanthemus bulbosus, produit du Polyan- 
themus et du Bulbosus, etc., et qui, comme la plupart des autres 
hybrides, ont leurs graines infécondes. , 


Quatrième tribu. — HELLÉBORÉES. 


Les Helléborees ont l'estivation imbriquée; les petales tantôt nuls, 
tantôt irréguliers, bilabiés et nectarifères ; le calice pétaloïde, les car- 
pelles capsulaires, déhiscents et polyspermes. 


PREMIER GENRE. — Caltha. 


Le Caltha a un calice à cinq pièces pétaloïdes, dépourvues de 
nectaire; ses carpelles, qui varient de cinq à dix, sont aplatis, étalés 
et uniloculaires. 

Ce genre, qui n’a compté long-temps qu’une seule espèce, est main- 
tenant divisé en deux sections : celle des Psychrophiles ; dont les calices 


5 


persistent et les fleurs sont portées sur des hampes; et celle des 
Populages , à calices caducs et fleurs pédonculées. 

La première de ces deux sections est composée de deux espèces 
appartenant au même type, et originaires des contrées Magellaniques. 
Elles se distinguent des autres Caltha par leurs hampes uniflores et 
leurs feuilles sagittées ; elles vivent, comme leurs congénères, dans les 
lieux humides. 

La seconde, beaucoup plus nombreuse en espèces, en comprend 
déjà douze, dont deux seulement habitent l'Europe. Les dix autres 
sont éparses dans l'hémisphère boréal , sur les deux côtes de l'Amé- 
rique septentrionale, en Sibérie même, et au pied des monts Hymalaÿa; 
près du Népaul. Toutes ces plantes paraissent appartenir au même 
type, et ne différer guère les unes des autres que par le nombre de 
leurs fleurs ou la forme plus ou moins élargie et dentée de leurs 
feuilles. Il faut en excepter le Vatans de la Sibérie orientale, à 
capsules droites et fleurs blanches de la grandeur de celles des Re- 
noncules. 

L'espèce principale est notre Caltha palustris, qu'on retrouve dans 
l'Asie occidentale et l'Amérique du nord. C'est une plante dont la 
racine légèrement bulbeuse produit chaque année de longues radi- 
cules simples et cylindriques. Du collet part un turion dont les écailles 
sont des pétioles dilatés, et dont les feuilles ont pour enveloppe 
commune une spathe transparente. Lorsque cette membrane est dé- 
chirée , la première feuille paraît, puis la seconde, qui comprend de 
même les autres feuilles sous sa spathe, et ainsi de suite jusqu'à ce 
que le développement soit complet. Cette organisation, que l'on re- 
trouve probablement dans tous les Cultha, est manifestement destinée 
à protéger les nouvelles pousses contre l'humidité dans laquelle elles 
vivent. 

Du centre des feuilles, dont le pétiole est toujours cylindrique et 
canaliculé, sortent une ou deux tiges ramifiées deux ou trois fois vers 
leur sommet. 

De la première de ces divisions naît une feuille enveloppée de son 
voile, et portant à son aisselle deux pédoncules chargés d'autant de 
feuilles à double pédoncule ; mais les dernières ramifications ne sont 
plus que des pédicelles striés et uniflores. L’inflorescence générale est 
par conséquent corymbiforme; la floraison est centrifuge. 

Les sépales ne se referment point pendant la floraison, ils tombent 
même assez promptement. Ils sont placés sur deux rangs, et leur esti- 
vation est imbriquée. Les étamines sont articulées sur le réceptacle, 
où l'on distingue leur point d’insertion, de même que celui des pièces 


Et 1 
du calice; les anthères aplaties s'ouvrent sur les côtés : les deux 
grandes faces ne sont que l'extension du connectif. 

Les étamines, au moment de la fécondation, s'inclinent sur les 
stigmates qui sont sessiles, allongés et unilatéraux, et les anthères 
aplaties et latérales répandent leur pollen de la circonférence au 
centre; les carpelles s'ouvrent de bonne heure; le cordon funiculaire 
est dilaté au sommet et comme soudé à la graine dont la radicule est 
infère : on remarque au-dessous des sépales un renflement circulaire 
qui paraît un rudiment d'involucre. 

La substance qui forme le calice des Caltha est épaisse et semble 
composée de deux lames, l'une extérieure, d'un vert jaunâtre, qui 
remplit les fonctions de calice, et l’autre intérieure, d’un jaune d’or, 
qui pourtant n’a pas le velouté brillant d'un vrai pétale. 

Les feuilles de toutes les espèces sont glabres , épaisses et marquées 
de nervures très-saillantes, qui partent de la base et se ramifient beau- 
coup; les principales aboutissent à la circonférence, où elles se termi- 
nent par autant de glandes. La vernation est supervolutive comme 
celle de l'Abricotier ; c'est-à-dire, que l'une des moitiés de la feuille 
enveloppe l'autre; les deux oreillettes de la base ont leur plissement 
particulier. 

Le Caltha palustris et le Radicans des lacs et des petits ruisseaux de 
l'Écosse fleurissent à l'entrée du printemps, le premier orne les bords 
des eaux et des marais, de ses belles fleurs d’un jaune éclatant et doré. 
Ila même obtenu une place dans nos jardins paysagers, où ses fleurs 
se doublent, parce que ses étamines se transforment en pétales. Ses 
racines poussent de temps à autre quelques rejets qui se séparent 
pour multiplier la plante; et ses fleurs, qui restent épanouies plusieurs 
jours, ne se referment pas, mais les stigmates sont protégés par les 
anthères qui, en répandant leur pollen, inclinent leur surface large et 
aplatie sur les ovaires. 

Les carpelles, d'abord redressés comme dans la plupart des Helle- 
borées, s'inclinent pendant la maturation, et deviennent ensuite tout- 
à-fait horizontaux, ils sont alors membraneux et fortement élastiques, 
et s’ouvrent enfin par leur suture en mettant à découvert les deux 
rangs de graines. 

La plupart des Caltha étrangers fleurissent à peu près aux mêmes 
époques, et remplissent les mêmes fonctions dans l'économie générale 
de la nature. 


. 


SÉCOND GENRE. — 7Zrollius. 


Le Trollius a le port et le feuillage des Renoncules ; son caractère 
consiste dans un calice pétaloïde à plusieurs pièces ; des pétales tubulés 
et terminés par une lèvre élargie. Les carpelles sont sessiles, poly- 
spermes , et s'ouvrent à la maturité par le côté intérieur. 


Ce genre est formé aujourd'hui de cinq espèces, toutes originaires 
de l'hémisphère boréal , trois de l'Asie, une de l'Amérique, et la der- 
nière de l'Europe. Elles appartiennent au même type, et ont toutes 
le même port, la même végétation et la même structure. Leurs princi- 
pales différences consistent dans le nombre et la proportion des pièces 
de leur calice et de leur corolle. 


Le Trollius d'Europe, dont la description s’appliquera ainsi aux 
autres espèces, a une racine fibreuse qui reproduit chaque année la 
plante presque sans rejets. On trouve, en effet, à la base et à l'intérieur 
de la tige, le rudiment de la pousse qui paraîtra au printemps prochain, 
lorsque l’ancienne sera détruite. C’est pourquoi les racines forment 
un lacis épais, où l'on trouve encore des restes de vieilles racines et 
des fibres de tiges ou pétioles détruits. Les feuilles, dans toutes les 
espèces, ont la forme et la coupe de celles des Renoncules ; elles sont 
glabres, blanchâtres en-dessous, dentées et glanduleuses sur leurs 
bords. Toutes dans la vernation ont leurs lobes plissés, roulés sur la 


surface supérieure, et protégées par les pétioles dilatés des feuilles déjà 
développées. 


La tige, qui s'élève à la hauteur d'un pied environ dans la plus 
grande des deux variétés de cette plante, porte une fleur d’un jaune 
soufré, d'une forme globuleuse et en apparence doublée. Ses sépales 
nombreux sont placés sur six rangs, dont trois, extérieurs d’un jaune 
verdâtre semblent former le calice, et trois autres, d’un jaune plus 
foncé, représentent les pétales. Cette fleur, différente en cela de celle 
des autres Trollius, ne s'ouvre pas à la lumière, et sa fécondation 
s'opère à l'obscurité. Les pétales, au nombre de douze à quinze, sont 
de vrais nectaires, formés d’un tube ou cuilleron mellifère qui fournit 
beaucoup de liqueur et se termine par une languette. 


Les étamines sont nombreuses, et les anthères qui s'ouvrent les 
premières sont les extérieures , leurs loges sont latérales, et la pous- 
sière tombe également sur les nectaires et sur les stigmates conformés 
ordinairement en languettes papillaires et recourbées. Je n'ai rien vu 
dans ceux du Trollius americanus, qui pût ressembler à un organe 


7... en 
humide et absorbant : sans doute qu'ils n'étaient pas alors dans teur 
état naturel. 

Les sépales tombent promptement, ensuite les nectaires, et enfin 
les étamines. Les capsules sont nombreuses, ridées à leur surface, et 
marquées de raies transversales; elles s'ouvrent au sommet et répan- 
dent une à une vers le milieu de l'été leurs graines lisses et brillantes, 
ensuite elles se rapprochent et se détruisent lentement. Le périsperme 
occupe presque tout l'intérieur de la graine; l'embryon est logé à sa 
base, les cotylédons sont supères, et la râdicule infère ; disposition 
qui se retrouve aussi dans le Caltha, mais qui n’appartient pas à la 
plupart des Renonculacees. 

Toutes les espèces de ce genre fleurissent de bonne heure sur les 
pâturages humides des montagnes, où elles sont quelquefois assez 
nombreuses pour produire un effet charmant; les habitants de nos 
Alpes, ceux de la Suède et de l'Angleterre, embellissent leurs fêtes de 
printemps des fleurs odorantes de l'espèce commune, qui se conserve 
dans nos jardins lorsqu'elle est placée dans un lieu frais et abrité. 

Les Trollius étrangers que j'ai sous les yeux, sont bien des espèces 
différentes, quoique très-voisines. Celui d'Amérique a cinq à huit 
sépales courts, étalés et d’un jaune verdâtre ; ses nombreux nectaires 
sont terminés par une languette en cuiller d’une teinte plus foncée, 
et qui donne une grande abondance d'humeur miellée. Celui d'Asie, 
plus voisin encore du nôtre, a la fleur orangée et ouverte pendant 
la fécondation; ses nectaires forment un tube plus court et évasé, et 
ses stigmates sont en languette recourbée. Mais de tous les Trollius, 
le plus brillant est bien celui d'Europe. 

Pourquoi notre Trollius a-t-il la fleur constamment fermée ? Est-ce 
parce qu'il vit sur les montagnes et qu'il fleurit de très-bonne heure? 


et 4 GENRE. — Æranthis. 


Les Eranthis ont un involucre placé sous la fleur et divisé irrégu- 
lièrement en plusieurs lobes; leur calice est coloré et formé de cinq à 
huit pièces; les pétales, à peu près en même nombre, sont tubulés, 
bilabiés et nectarifères ; les étamines sont nombreuses, les ovaires 
pédicellés, les semences globuleuses et unisériées. 

Ce genre, séparé avec raison des Hellébores dont il diffère beaucoup, 
ne comprend que deux espèces : l'une, originaire de l'Europe, l’autre, 
de la Sibérie orientale, et qui se distingue de la première par ses cinq 
pétales ovales et sa fleur pédonculée sur un involucre presque entier. 

L'Eranthis hyemalis, comme le Sibirica , qui appartient absolument 


2 D — 


au même type, est une petite plante dont le tronc radical est un 
rhizome charnu, couché et blanchätre ; il végète dès l'entrée del’hiver, 
et donne au mois de février de jolies touffes de fleurs jaunes et soli- 
taires sur leurs hampes. Les feuilles, qui naissent séparément après 
les fleurs, sont glabres, orbiculées et multifides comme l'involucre, 
Dans la vernation , elles se replient comme les hampes sur elles-mêmes, 
et sont aussi cachées sous des écailles bianchâtres, transparentes et 
adhérentes au rhizome. 

Toute la plante a une contexture délicate. La hampe est demi- 
transparente, quoique plus solide près de la fleur. Les feuilles roulées 
_sur leur limbe avant le développement, comme celles des Renoncules, 
sont aussi glanduleuses à l'extrémité de leurs lobes. La fleur porte sept 
à huit sépales oblongs et très-sensibles aux variations de l'atmosphère, 
Ils s’ouvrent à la lumière et se referment à l'obscurité; au lieu de 
tomber, comme l’affirment la plupart des botanistes, ils s'appliquent 
contre les carpelles après la fécondation, et ne se détachent qu'aux 
approches de la maturité. Les pétales, au contraire, qui sont autant 
de nectaires remplis d'humeur miellée, se flétrissent promptement. 

Les étamines, à l'époque de la fécondation, se recourbent du dehors 
en dedans, vers le centre; les anthères sont extrorses, latérales, mais 
pendant le cours de la fécondation, qui a lieu de la circonférence au 
centre, elles s'inclinent fortement sur les stigmates qu’elles impré- 
gnent de leur pollen onctueux et adhérent. Les carpelles ont leurs 
graines unisériées en apparence, parce que celles qui naissent sur les 
bords d’une des valves, sont assez écartées pour que chacune d'elles 
puisse se placer entre ceiles de la valve opposée. Les valves elles-mêmes 
sont très-amincies et s'étendent horizontalement après la dissémina- 
tion; les cotylédons sont très-petits, la radicule est infère et la multi- 
plication a lieu par la rupture naturelle du rhizome horizontal en deux 
ou plusieurs parties, qui forment à leur tour de nouveaux rhizomes. 
Les hampes sont toujours accompagnées, à la base, d’une feuille sem- 
blable aux autres feuilles, et renfermées sous la même écaille. 

Cette jolie plante, qui tire une grande partie de son prix du moment 
où elle paraît, habite le pied des montagnes de la France, de l'Italie, 
de l'Autriche, et en général de l Europe australe. Elle vient en famille 
comme sa congénère, et forme de jolis tapis de fleurs jaunes, qu'on a 
rarement l'occasion d’apercevoir en place, à cause de l’époque où ils 
paraissent; mais on les obtient facilement dans les jardins. 


DEAD de 


QUATRIÈME GENRE. — Aellebore. 


Les Hellébores ont un calice à cinq pièces ordinairement peu co- 
lorées, des pétales bilobés et nectarifères, des étamines nombreuses, 
et des carpelles qui varient de trois à dix. 

On les reconnaît, au premier coup-d’œil, à leur port, à leurs sépales 
coriaces, à la consistance et surtout à la forme de leurs feuilles 
pédiaires et rarement palmées. Ce sont des plantes répandues dans 
l'ancien continent et qui habitent les buissons et le pied des mon- 
tagnes, depuis les Pyrénées jusqu’au Caucase, et même plus loin du 
côté de l'Orient. Leur aspect est, en général, triste, et leur couleur 
d’un vert foncé ou livide, si l'on en excepte cependant le Viger, dont 
les fleurs sont d’un assez beau blanc. Elles entrent en végétation dès 
le commencement de l'automne, continuent à se développer en hiver, 
et fleurissent avant le printemps : elles se flétrissent ensuite, au mo- 
ment où les autres végétaux étalent leurs brillantes couleurs. On peut 
les considérer comme destinées à annoncer le retour des beaux jours, 
et à rappeler le spectacle de la vie, lorsque tout semble mort dans la 
nature. Elles résistent au froid le plus rigoureux, et J'ai vu les tiges 
florales du Fætidus, abattues par de fortes gelées, se relever et con- 
tinuer à s'épanouir, lorsque la température s'était adoucie. Il n’en est 
pas tout-à-fait de même du Lividus, dont le feuillage est détruit faci- 
lement par un froid de quelques degrés. 

On peut diviser ce genre en trois sections , d'après la conformation 
extérieure et le mode de végétation de ses diverses espèces. 

La première est celle des Hellébores à tiges multiflores et chargées 
de feuilles. Elle comprend jusqu'à présent deux espèces : le Fœtidus, 
qui se rencontre dans toute l'Europe, et le Lividus, trouvé dans la 
Corse par La BirrarDière. Le premier, ainsi appelé de son odeur, 
provenant de glandes pédicellées et transparentes , répandues sur les 
carpelles, les calices et les bractées, a une tige solide, demi-ligneuse 
et chargée de feuilles pédiaires aussi remarquables parleur élégance que 
par la netteté de leur contour. De son sommet, sort, dès la fin del’été, 
une seconde pousse, recouverte de bractées d'un vert pâle, entre 
lesquelles sont placés les pédoncules floraux. Le développement de 
cette singulière hampe continue tout le long de l'automne , et s'achève 
au milieu de l'hiver. Après la dissémination, c’est-à-dire au milieu du 
printemps , la hampe se détache, la tige périt ensuite, et l’on remar- 
que près de sa base le point de rupture. La même racine, ou plutôt 
le même rhizome, donne naissance à de nouvelles tiges qui végètent 


PAL A ET 

de la même manière. On apercoiït souvent autour de ces plantes, 
qu'on peut appeler mères , de jeunes pieds venus de semences, dont 
les premières feuilles ne sont que trilobées, et qui fleurissent à la fin 
de la seconde année. 

Le Lividus a une végétation semblable. Ses fleurs sont également 
portées sur une hampe penchée, qui se développe dans le cours de 
de l'hiver; mais ses feuilles $ont ordinairement triséquées et glauques 
en dessous. 

La seconde section, qui ‘est la plus nombreuse, comprend les 
espèces dont la tige sort chaque hiver de la racine, et dont les 
rameaux sont chargés à la base de quelques feuilles. Elle est à peu 
près dichotome, et se termine par deux ou trois fleurs que protégent 
quelques feuilles bractéiformes et plus ou moins divisées. Le type 
de ces plantes est le Y’iridis, ainsi appelé de la couleur de ses fleurs. 
Son rhizome, subdivisé et assez semblable à celui des Fougères, 
marche en avant, et donne des pousses simplement feuillées ou 
chargées de feuilles et de fleurs. On apercoit plus bas les cicatrices et 
les débris des tiges de l’année précédente ; en sorte que cette espèce 
est vraiment sociale, tandis que celles de la section précédente sont 
solitaires, comme on aurait pu le conclure déjà de leurs dimensions. 

On range dans la même section l'Orientalis, auquel on doit rap- 
porter tout ce que les anciens on dit des vertus médicinales de 
l'Hellebore ; V Atrorubens de la Croatie, le Purpurascens, à fleurs 
pourprées ; l'Odorus , à sépales verts, et enfin le Dumetorum, origi- 
raire de la Hongrie comme les deux précédents : toutes ces espèces 
appartiennent au même type que le Wiridis, et, à l'exception de 
l'Orientalis, ne sont probablement que des variétés produites par le 
climat ou des fécondations adultérines. 

La dernière section est celle des Hellébores dépourvus de tiges : 
elle ne comprend que le Viger, ainsi appelé de la couleur de ses 
racines, et non pas de sa fleur qui est blanche. Ses feuilles, toutes 
radicales, sont épaisses, coriaces, pédiaires et consistantes, comme 
celles de la première section. La hampe est cylindrique, tigrée et 
chargée d’une ou deux fleurs accompagnées d'autant de bractées 
blanchâtres, entières et concaves. Cette belle plante, connue des 
jardiniers sous le nom de Rose de Noël, est originaire de l’Europe 
australe, et se propage dans tous les jardins. Ses sépales rou 
en vieillissant ; ses nectaires sont pédicellés, ses carpelles légèrement 
réunis, ses styles allongés et pourprés, et ses nouvelles feuilles se 
développent après la floraison. C’est certainement un véritable type. 

Les fleurs des Hellébores sont penchées avant l'épanouissement et 


gissent 


AL 


la fécondation. Les sépales, d’abord rapprochés, s'étalent plus ou 
moins selon la forme de fécondation, qui dépend des espèces : dans 
le Fœtidus, ils restent droits; ils s’'écartent beaucoup dans le Viridis, 
et s'ouvrent presque horizontalement dans le Viger. Ils ne tombent 
guère qu'avec la tige ou la hampe qui les porte, et dans aucun cas ils 
ne paraissent sensibles à l'effet de la lumière. 

Les pétales et les étamines se séparent, au contraire, de bonne 
heure. La rupture de ces dernières commence par les rangs extérieurs, 
qui grandissent au moment de l'émission du pollen. Les étamines 
voisines les remplacent, et ainsi successivement jusqu'aux plus inté- 
rieures. 

Les anthères du Fœtidus s'ouvrent extérieurement et de manière 
à ce que leur pollen jaunâtre tombe dans les tubes mellifères, remplis 
à cette époque d'humeur miellée, et à mesure qu'elles fleurissent de 
la circonférence au centre, elles s'élèvent les unes sur les autres, et 
dérobent ainsi leur pollen aux stigmates qui ne peuvent guère être 
fécondés que par les émanations des nectaires : on voit leurs petits 
cornets tout ouverts, saupoudrés des granules qu’absorbe l'humeur 
miellée. Il n’en est pas de même du Y'iridis, dont les cornets paraissent 
constamment fermés, ou du moins ne s'ouvrent que tard; mais leurs 
stigmates beaucoup plus élevés que dans le Fœtidus, se recourbent 
sur les anthères et assurent ainsi la fécondation; le pollen qui reste 
long-temps attaché aux parois retournées des anthères, est onctueux 
et pulvérulent. 

Les nectaires ou les pétales varient en nombre selon les espèces : 
ordinairement ils sont sessiles, quelquefois pédicellés , comme dans le 
Niger, quelquefois fermés avant la floraison, comme dansle Viridis, etc. 

Dans le Niger, on voit les anthères, à mesure qu'elle s'ouvrent de la 
circonférence au centre, allonger leurs filets, se diriger horizonta- 
lement vers le centre, et répandre leur pollen onctueux et adhérent 
sur les stigmates qui forment de jolies têtes glutineuses; mais dans 
le Vüridis, ce sont les stigmates fortement divariqués qui vont cher- 
cher les anthères simplement redressées. Je suis toujours plus per- 
suadé que la liqueur miellée joue un rôle important dans l’acte de la 
fécondation. On ne peut pas imaginer ici qu'elle soit destinée à attirer 
les insectes qui ne volent pas en hiver. 

Les sépales des Hellébores varient beaucoup en couleur, ils sont 
blancs , pourprés, livides, mais ordinairement verts et plus ou moins 
tachés, à l'époque de la floraison, de bandes d’un pourpre sale. Ils 
s'endurcissent ensuite pendant le cours de la maturation, et proté- 
gent ainsi le jeune fruit : ils restent redressés dans le Fœtidus, et 


dr à Al 


— 053 — 

s'étalent presque horizontalement dans le Viridis , le Niger, ete., qui 
conservent, comme tous les autres Hellébores, leurs pédonculesinclinés. 
Les carpelles ont la suture prolongée tout le long du style, et jusqu’au 
stigmate, qui est toujours une houppe papillaire. Les graines sont 
placées sur les deux bords de la suture, renflés en forme de placenta; 
le point d'attache est un corps blanchäâtre très-visible, et prolongé sur 
le côté de la graine; les carpelles, souvent striés transversalement, 
s'ouvrent de bonne heure, en s’élargissant au sommet; ils avortent 
souvent en partie. 

Les folioles des Hellebores pourvus de tiges, sont roulées en cornet 
sur leur bord supérieur, et protégées par les pétioles des feuilles nou- 
vellement développées ; ceux à hampes ont les mêmes plissements, 
mais leurs feuilles sont d’abord renfermées par des stipules, comme 
par un fourreau. On peut remarquer que leur coupe est souvent très- 
régulière ; mais que leurs dentelures, en pointe membraneuse ou 
cornée, ne sont jamais glanduleuses. 

Les racines de tous les Æellebores sont des rhizomes couchés obli- 
quement dans Ja terre, et qui se ramifient plus ou moins selon les 
espèces. GauDIN remarque, dans sa Flore helvétique, que les carpelles 
du /iridis s'ouvrent élastiquement. 

Ces plantes ne sont pas cultivées, à l'exception du MWiger, qui ne 
manque et qui réjouit les yeux à l'époque où il parait. 


CINQUIÈME GENRE. — Coplis. 


Le Coptis est un genre détaché de celui des Hellébores, dont il se 
distingue par ses sépales colorés, pétaloïdes et caducs, par ses pétales 
capuchonnés et ses carpelles longuement stipités et membraneux, 
qui renferment de quatre à six semences. 

Le Coptis diffère surtout des Hellebores, par son mode de végéta- 
tion. Ses deux espèces sont des plantes petites, à feuilles roides, 
glabres, persistantes, radicales , longuement pétiolées, une ou deux 
fois triséquées, et dont les dents ou lobules sont mucronés, comme 
dans le genre précédent. De leur racine, qui est un rhizome aminai, 
sort une hampe redressée, terminée parune fleur blanche et bractéolée, 
qui ne ressemble pas mal à celle de la Trientale. 

Les Coptis vivent dans les marais humides, ou sur les bords des 
mers septentrionales : le Trifolia se trouve en Islande, en Norwége, 
au Groënland, dans la Sibérie, le Kamchatka et la terre de Labrador, 
d'où il descend par le Canada jusqu'en Virginie. L’Asplenifolia, à 
feuilles divisées, croît uniquement sur les rivages occidentaux de 
l'Amérique septentrionale. 


#0 
Je n'ai jamais vu de Coptis vivants, et je ne connais en conséquence, 
ni leur nectaire, ni leur mode de fécondation. Ces jolies plantes pa- 


raissent au printemps comme les Hellébores, et ne tardent pas à ré- 
pandre leurs graines. 


SIXIÈME GENRE. — sopyre. 


L'Isopyre est un genre flottant entre l'Hellebore et le Coptis. Son 
calice est formé de cinq pièces colorées et caduques; sa corolle de 
cinq pétales nectarifères, corniculés à leur base, et terminés par deux 
lèvres, dont l'intérieüre est simple et l’extérieure bifide. Ses carpelles 
sont sessiles, aplatis et membraneux ; ses stigmates s'étendent latéra- 
lement sur les styles allongés. 

Ce genre, qui diffère principalement de l'Hellébore par ses sépales 
caducs, et du Coptis par ses carpelles sessiles, comprend jusqu’à 
présent quatre espèces, trois originaires d'Asie et une seule d'Europe : 
les deux plus anciennement connues sont notre Thalictroides et le 
Fumarioides de la Sibérie; la troisième est le Grandiflora des monts 
Altaïques , et la quatrième l’Ædoxoides du Japon. 

Ces plantes, comme l'indique leur nom spécifique, se font remar- 
quer par la délicatesse et l'élégance de leur port. Ce sont des herbes 
annuelles ou vivaces qui se plaisent à l'ombre des bois, dans les lieux 
frais et montueux, et dont les fleurs blanches ou jaunes, portées sur 
des pédoncules élancés, contrastent admirablement avec les feuilles 
vertes, amincies et finement découpées, qui distinguent ce genre. Le 
Thalictroides en particulier, qui habite le pied de nos montagnes, 
depuis les Pyrénées jusqu'à l'Hémus, et qui réussit assez bien dans 
nos jardins , peut être cité comme un modèle de grâce et de légereté. 
De sa racine fibreuse partent cà et là de petits tubercules, destinés à 
la propager et à la rendre sociale. Ses feuilles, pétiolées à la base, 
sessiles sur la tige, et stipellées comme celles du Thalictrum aquilegi- 
folium , sont recouvertes d’une poussière glauque. Ses pétales, plus ou 
moins réguliers, distillent une liqueur miellée, sur laquelle les anthères 
blanchâtres et latérales répandent leur poussière; ses filets minces, et 
de la même couleur que la corolle, flottent pendant la fécondation ; 
les styles, longs et recourbés, portent des stigmates en tête aplatie et 
papillaire, et les carpelles, qui varient d'un à trois, renferment de 
quatre à six semences. Cette jolie plante fleurit dès l'entrée du prin- 
temps, et ne tarde pas à disparaître du sol, comme toutes ses 
congénères. 

L'Isopyrum fumarioides | peut-être encore plus élégant, est annuel , 


NN 
et se distingue par un grand nombre de carpelles, de dix à vingt 
semences. Ses feuilles, semblables à celles de la Fumeterre, forment sur 
le terrain une rosette glauque et artistement découpée. Il en sort 
deux ou trois tiges peu élevées, garnies de feuilles presque verticillées, 
Les stipules, comme celles de l’espèce précédente, sont membraneuses 
et blanchâtres. Les pédicelles, réunis trois à trois, portent chacun 
une fleur jaunâtre dont les pétales bilabiés distillent un suc mielleux : 
les styles sont rapprochés ou quelquefois divariqués, les anthères 
sont introrses et à peu près appliquées sur les têtes papillaires des 
stigmates ; le style est court; les graines noires et très-menues, sortent 
du haut des carpelles arrondis en cornet; leur embryon est infère et 
très-petit. 

Cette espèce fleurit plus tard que la précédente, parce qu'elle est 
annuelle. On la cultive dans nos jardins, où les deux autres n'ont pas 
encore paru. 


SEPTIÈME GENRE. — Garidelle. 


Les Garidelles ont un calice de cinq pièces caduques, cinq pétales 
bilabiés et bifides, dix à quarante étamines, trois ovaires réunis , des 
styles très-courts, trois carpelles polyspermes, soudés en une seule 
&apsule triloculaire et à peine prolongée en corne. 

Ce genre, lié étroitement avec celui des Vigelles, dont il ne diffère 
guère que par le nombre de ses ovaires et ses styles raccourcis, est 
formé de deux espèces : la Garidelle Nigellastrum , anciennement 
connue, et l’'Unguicularis, découverte plus récemment aux environs 
d'Alep. Toutes les deux habitent le bassin de la Méditerranée ; la 
première croît au milieu des vignes et des oliviers, dans le midi de la 
France, et jusqu’à la Terre-Sainte. Elles sont l’une et l’autre annuelles, 
et fleurissent vers la fin du printemps. 

Les Garidelles ont le port, les habitudes et les feuilles finement 
divisées des Vigelles ; lEuropéenne a les étamines peu nombreuses, 
les pétales sessiles et ouverts; l'Asiatique en diffère par ses quarante 
étamines, ses pétales longuement onguiculés, fconnivents et velus à 
l'intérieur. Dans les deux espèces, les fleurs sont petites, blanchâtres 
et solitaires au sommet des pédoncules. 

Les calices ont l’estivation imbriquée des Renonculees ; les nectaires 
ou pétales ferment leurs lèvres jusqu'à la floraison, où ils répandent 
abondamment l'humeur miellée. Les étamines extérieures s’allongent 
les premières, en répandant leur poussière; les plus voisines leur 
succèdent. La capsule est toujours droite, et les semences sont dis- 


T2 
posées horizontalement. Celles du Vigellustrum sont noires, relevées 
en arête sur l’une des faces, et ponctuées sur les autres. L’embryon 
est situé à la base du périsperme, et la radicule est centripète ou infère. 

Les feuilles ont leurs lobes très-étroits et réunis en faisceaux dans 
la vernation. 

A l’époque de la fécondation, les étamines du Garidella Nigellas- 
trum sont recourbées sur le centre de la fleur, et leurs anthères recou- 
vrent les stigmates non encore conformés ; dans cette situation, ces 
anthères tout-à-fait semblables à celles des ÂVigelles, ouvrent leurs 
parois de bas en haut, en sorte que leur pollen toujours adhérent 
se trouve placé extérieurement et hors de tout contact avec les 
stigmates , il ne peut alors se répandre que sur les poils renflés et 
glutineux au sommet, qui recouvrent les pétales ou nectaires bilabiés, 
et par lesquels il est retenu : ce n’est donc qu'ensuite et lorsque les 
anthères en se flétrissant l'ont déccuvert, que le stigmate bilabié et 
alors papillaire peut, je crois, recevoir la poussière fécondante ; du 
reste, ce stigmate est toujours très-court. 

Je n'ai jamais vu, dans le Garidella Nigellastrum, que deux car- 
pelles tuberculés et opposés l’un à l’autre, mais je suppose bien qu’il 
s'en trouve souvent un troisième. 


HUITIÈME GENRE. — /Vigelle. 


Les Nigelles ont un calice à cinq pièces colorées, étalées et cadu- 
ques ; leur corolle est formée de cinq à dix pétales bilabiés et necta- 
riféres; leurs carpelles, qui varient également de cinq à dix, sont 
plus ou moins réunis et toujours terminés par des styles très- 
allongés. 

Ce genre, qui forme le passage entre les Renonculacees à ovaires 
libres et celles à ovaires adhérents, ne comprend que des herbes 
annuelles, à racine amincie, fibreuse et pivotante. Leur tige est droite, 
peu consistante et assez ramifiée. Leurs feuilles sont pennatifides , à 
divisions toujours étroites et capillaires, et leurs fleurs terminales sur les 
tiges et les rameaux. Leurs carpelles sont souvent chargés de tuber- 
cules ou d’aspérités gommo-résineuses, leurs semences sèches, angu- 
leuses et roides au toucher, se distinguent par leur couleur d’un noir 
foncé. 

Les Vigelles habitent l'Europe méridionale et le bassin oriental de 
la Méditerranée. Elles vivent au milieu des champs et des cultures , où 
elles se propagent naturellement, et où elles fleurissent dans le courant 
de l'été. Il est assez probable que le Damascena, si commun aujour- 


one 
d'hui dans nos jardins et dans nos blés, est originaire d’Asie; car on ne 
le trouve pas mentionné par les anciens botanistes. 

Ces plantes, qui se ressemblent beaucoup par le port, diffèrent 
essentiellement entre elles par la présence ou l'absence d’un involucre, 
par l'insertion des étamines et la forme des anthères, et surtout par les 
différents degrés de soudure de leurs carpelles; c'est pourquoi elles 
ont été divisées en trois sections. 

1° Celle des Migellastrum, à carpelles aplatis, réunis à la base, 
semences planes et orbiculaires, étamines disposées sur un seul rang; 

2° Celle des Vigellaria , à carpelles plus ou moins soudés, semences 
oyales, anguleuses, étamines réunies en huit ou dix phalanges, et 
disposées sur plusieurs rangs ; 

3° Celle des £robutos , à carpelles soudés jusqu’au sommet, et for- 
mant une seule capsule, étamines réunies en huit ou dix phalanges, 
et disposées sur plusieurs rangs. 

La première section comprend trois espèces distinguées par leurs 
pétales jaunâtres, et dont la plus connue est l'Orientale des environs 
d'Alep, et transportée depuis long-temps dans nos jardins. Les deux 
autres sont aussi étrangères, mais très-peu répandues. 

La seconde section comprend six espèces presque toutes indigènes, 
et qui, indépendamment des caractères assignés plus haut, se distin- 
guent encore par leurs sépales bleuâtres et jamais jaunes, ainsi que 
par leurs anthères presque toujours appendiculées. Ce sont : 1° l’His- 
panica , à styles dressés et carpelles réunis presque jusqu'au sommet ; 
2° le Fœniculacea de la Tauride, qui ne se distingue guère de l'Hispa- 
nica, que par ses carpelles marqués de trois nervures sur leur dos; 
3° l'Arvensis , à styles roulés en spirale , et qui se trouve dans tout le 
bassin de la Méditerranée; 4° la Divariquée de la Tauride, qui n’est 
probablement qu’une variété de la précédente ; 5° l'Aristée des en- 
virons d'Athènes, très-remarquable par son involucre multifide ; 
6° enfin, le Sativa, cultivée de temps immémorial, et la seule de la 
division dont les anthères ne soient pas aristées. 

La dernière section n’est guère formée que d'une seule espèce, le 
Damascena, distincte de toutes les autres, soit par son involucre mul- 
tifide, qu'elle ne partage qu'avec l’Aristee, soit surtout par sa capsule 
à dix loges, d’une structure très-singulière. 

Telles sont les trois sections des Nigelles. On peut remarquer que , 
quelque distinctes qu’elles paraissent, elles ne sont pas entièrement 
naturelles, puisque leurs carpelles sont différemment soudés selon 
les espèces; que le Sativa, qui appartient à la seconde section, a les 
anthères simples, et que l’Aristée, du même groupe, a l'involucre des 


et 

Erobatos. D'où l'on peut conclure, ici comme ailleurs, que les divi- 
sions de nos méthodes les plus rationnelles, ne sont presque jamais 
celles de la nature. 

Ce beau genre présente divers phénomènes physiologiques, dignes 
de notre attention. Le premier est celui de cet involucre si élégam- 
ment découpé, dont le but est évidemment de protéger la jeune fleur, 
mais qui ne se trouve que dans deux espèces ; sans doute , parce que 
les autres ont des sépales plus coriaces, ou qu’elles sont autrement 
préservées. Le second est celui de ces nectaires pédicellés, si agréa- 
blement bigarrés de bleu, de violet pâle, de blanc, et ouverts en 
deux lèvres; l'inférieure convexe et terminée par deux appendices 
renflés au sommet ; la supérieure formée d’un cuilleron prolongé en 
pointe, recouvrant l'ouverture, et au-dessous duquel on aperçoit un 
sac nectarifère rempli d'un suc mielleux, fourni par deux pores ou 
points glanduleux. On ne peut s'empêcher de reconnaitre dans cet 
organe si délicatement conformé , et en même temps si peu variable, 
un appareil destiné à des fonctions importantes. 

La structure des anthères mérite aussi d'être remarquée. Elles s’ou- 
vrent par des panneaux latéraux qui, dans le Damascena, se retour- 
nent élastiquement pour s'appliquer sur la face postérieure, mais qui 
au contraire dans le Sativa, etc., se fendent longitudinalement en deux 
parties inégales et se roulent sur leurs bords, entraïnant avec elles le 
pollen qu ie: recouvraient et qui est formé det très-petites molécules 
long-temps adhérentes. 

Au moment où la fécondation commence, les pistils courts et re- 
dressés ne montrent aucune trace de stigmate ; les étamines disposées 
en phalanges serrées commencent à s’écarter en dehors et à ouvrir les 
panneaux de leurs anthères; en même temps on voit paraître, sur les 
bords des nectaires bilabiés , les deux glandes destinées à recevoir le 
pollen, et quand enfin ce pollen a été entièrement répandu, les stig- 
mates développés et visqueux au sommet, se contournent fortement et 
viennent en s'abaissant recevoir les émanations de ce pollen dissous; 
puis ils se redressent et reprennent leur première place : telle est la 
forme de fécondation des Vigelles des deux dernières sections. 

Ces plantes offrent un bel exemple de ces soudures qui jouent un 
très-grand rôle dans l’organisation végétale : on y trouve, en effet, 
presque tous les degrés d'union de carpelles, depuis l'Orientalis , où 
les loges sont nettement séparées dès leur milieu , jusqu’au Sativa, où 
elles sont adhérentes au sommet, et même au Damascena, où elles 
n'offrent plus extérieurement qu'une seule capsule. Cette dernière 
forme mérite d'autant plus notre attention, qu’elle est plus compli- 


act di nee 


so 

quée ; car non-seulement les cinq carpelles sont tellement confondus, 
qu'ils ne laissent aucune trace de soudure; mais leur enveloppe exté- 
rieure ou leur épicarpe est soulevée et séparée de l’endocarpe, de 
manière à former cinq loges vides, correspondantes aux cinq inté- 
rieures séminifères. C'est un phénomène assez semblable à celui que 
présente le Cysticapnos, et qui s'opère sous les yeux de l'observateur 
après la fecondation. 

L'insertion des étamines varie beaucoup dans ce genre. Quelque- 
fois, comme dans les Mivellastrum, elles sont placées sur un seul 
rang, et entourent régulièrement le pistil; mais dans les deux autres 
sections, elles sont distribuées par groupes ou phalanges, dont cha- 
cune est composée de quatre étamines ou d’un plus grand nombre, 
placées exactement sur le même rayon, comme dans les 4quilegia. 
Quelle est la cause de cette différence ? Tient-elle uniquement à des 
variations de formes peu importantes en elles-mêmes ? C'est ce que je 
ne puis dire, jusqu’à ce que j'aie comparé le mode de fécondation de 
la Nigelle orientale, qui n’a qu'un rang d'étamines, avec celui des 
autres espèces, dont les étamines sont réunies par phalanges. En atten- 
dant, j'observe que les étamines extérieures, comme on devait bien 
le supposer, s'ouvrent les premières; qu’au moment où elles répan- 
dent leur poussière , elles grandissent tout-à-coup, et qu'ensuite elles 
se déjettent en arrière, pour ne pas nuire à l'action des autres, et sur- 
tout pour ramener leur pollen sur les glandes nectarifères. 

Les anthères des Vigellaria présentent de plus une organisation qui 
leur est propre : elles sont apiculées ou aristées , c'est-à-dire que leur 
connectif se prolonge au-delà des loges, et se termine en pointe. Cet 
appendice, dont j'ignore l'usage, ne manque que dans une seule espèce 
de Wigellaria, et ne se rencontre point dans les autres Vigelles. 

Les stigmates ne terminent pas les styles dans les diverses espèces 
de ce genre; mais ils sont disposés longitudinalement , dans toute 
l'étendue du style. On peut suivre à la loupe le sillon papillaire qui les 
forme, et remarquer qu'en se retournant, il facilite et assure la fécon- 
dation de la fleur. 

Les semences sont toujours attachées à l'angle interne des capsules, 
et disposées sur deux rangs. Elles diffèrent assez pour la forme ; celles 
de l'Orientalis sont aplaties, comme nous l'avons dit, et de plus 
bordées ; les autres sont presque toutes anguleuses et fortement cha- 
grinées. L'embryon, toujours placé à la base, a une radicule infère. 
Il est peu visible dans les deux premières sections, et assez grand 
dans la troisième; ses cotylédons sont même un peu foliacés. 

L'estivation du calice est en recouvrement, et les nectaires restent 


(60: — 
fermés, tant que la fleur n’est pas épanouie; les pédoncules sont re- 
dressés avant et après la fécondation; leur efflorescence est centri- 
fuge, et la dissémination commence dès l'entrée de l'automne. Les 
carpelles et les graines sont souvent recouverts de glandes ou tuber- 
cules résineux, très-remarquables surtout dans l'espèce cultivée. 

La vernation n'offre rien de particulier : les premières feuilies sont 
trifides et non plissées; les autres, toujours sessiles sur la tige, sont 
d'abord roulées sur leur surface supérieure, et leurs lobes sont rap- 
prochés en faisceau. 

La déhiscence des capsules est loculicide dans la première section 
où les carpelles sont presque entièrement séparés, et elle a lieu suc- 
cessivement du sommet à la base; mais dans les MVigellaria et les 
Erobatos, elle s'opère seulement au sommet du péricarpe : les graines 
agitées par le vent sortent par ses ouvertures plus ou moins élargies, 
et dans le Damascena, dont la capsule porte une double enveloppe, 
l’ouverture extérieure correspond directement à l’intérieure. 

Les Vigelles et surtout le Damuascena sont cultivées dans nos jardins, 
à cause de l'élégance de leur feuillage, et peut-être aussi à cause de la 
bizarre conformation deleurs fleurs, comme couronnées par des cornes. 
Elles doublent si facilement , qu’on ne rencontre guère la Migelle de 
Damas dans son état naturel, ni dans nos jardins ni dans nos cam- 
pagnes, où ses dimensions sont tellement diminuées qu’elle n'offre 
plus qu’une sorte de miniature. Si on l’observe de près, on remar- 
quera qu'en doublant, elle a acquisun grand nombre de sépales, etqu’en 
même temps elle a perdu tous ses nectaires. Ce qui me semble prouver 
deux choses : l'une, que les nectaires ou pétales se sont transformés 
en sépales, ce qui est contraire à la loi ordinaire; l'autre, qu’en per- 
dant ses nectaires, la Nigelle n’en est pas moins restée fertile. Si cette 
dernière observation est vraie, elle prouverait que, dans ce genre au 
moins, l'humeur mellifère n’est pas indispensable à la fécondation. 

On cultive, surtout en Orient, le Sativa, dont les graines aroma- 


tiques et connues sous le nom de Toute-épice servent d’assaisonne- 
ment. 


NEUVIÈME GENRE. — Æquilegia. 


L’Aquilegia où Ancolie a un calice de cinq pièces caduques; une 
corolle de cinq pétales corniculés, à deux lèvres, dont l’une est très- 
petite, et l’autre se prolonge postérieurement en éperon; des étamines 
nombreuses, disposées en phalanges, et dont les intérieures sont 
avortées ; cinq carpelles séparés, et avortant quelquefois en partie. 


EL. 

Ce genre est un des plus distincts dans toute la famille des Renon- 
culacées : on le reconnaît sans peine à son port, à la coupe de ses 
feuilles, et surtout à la forme et à la disposition singulière de ses pé- 
tales. Aussi a-t-il été admis par tous les botanistes, et ne renferme- 
til aucune espèce flottante. Celles qui le composent sont même telle- 
ment rapprochées, qu'elles ne forment qu'un type unique, et ne se 
distinguent que par leurs tiges glabres, velues ou visqueuses, leurs 
feuilles plus ou moins subdivisées , leurs cornets droits ou recourbés, 
leurs fleurs différemment colorées, et surtout par les proportions 
relatives de ces diverses parties. 

Elles sont toutes, sans exception, des herbes vivaces, dont la patrie 
est l'hémisphère boréal, et principalement la Sibérie. Des treize 
espèces qui forment actuellement ce beau genre , et dont plusieurs, 
ilest vrai, ne sont que des variétés produites par les localités ou le 
climat, quatre appartiennent à l'Europe, sept à la Sibérie, et une 
seule à l'Amérique du nord; une dernière paraît hybride et originaire 
de nos jardins. On les rencontre sur les lisières des bois, au bord des 
prairies, au pied ou même sur les sommets boisés des montagnes peu 
élevées. 

La plus répandue est l'Ancolie commune, qui croît dans toute l'Eu- 
rope, depuis Lisbonne jusqu’à Pétersbourg , et depuis la Grèce jus- 
qu'à la Suède. Elle se distingue par la beauté de son port et l'éclat de 
ses fleurs ; ses racines sont des souches souterraines ou des rhizomes 
qui s'allongent en avant, et se détruisent du côté opposé : les tiges 
auxquelles ils donnent naissance, périssent chaque année, et laissent 
à leur pied les débris des anciens pétioles; tout auprès sortent de nou- 
velles pousses, protégées par des pétioles dilatés et en partie avortés. 
Les feuilles qui viennent ensuite ont d'abord leurs lobes couchés les 
uns sur les autres et légèrement recourbés sur leur surface supérieure; 
du milieu de leurs touffes s'élèvent une ou plusieurs tiges, dont les 
fleurs terminales et penchées se redressent au moment de la floraison , 
et restent dans leur position, jusqu’à la maturité des graines, Cette 
description appartient à toutes les espèces du genre. 

Les autres Ancolies européennes sont le J’iscosa, à tige unie et 
uniflore, qui ne paraît qu’une variété de la précédente ; l'Alpina, re- 
marquable par ses grandes fleurs bleues, ses nectaires droits et les 
segments linéaires de ses feuilles multifides; enfin le Pyrenaica tout- 
à-fait voisin de l'4lpina, mais de moitié plus petit dans toutes ses 
parties. 

Les espèces de la Sibérie sont tout aussi rapprochées, et plusieurs 
ne sont évidemment que des variétés; mais il n’en est pas de même 


du Canadensis , qui se distingue de toutes les autres par l'élégance de 
son port et ses jolies fleurs d’un jaune orangé. 

Les feuilles des Ancolies sont lisses, d’une consistance un peu pa- 
pyracée, d’un vert gaï et presque toujours bleuâtre en dessous. Leur 
coupe est constamment la même; mais leurs lobes sont plus ou moins 
arrondis; leurs nervures assez apparentes se réunissent au sommet 
des principales divisions, où elles forment des glandes très-visibles. 
Ces plantes supportent assez bien les hivers de nos climats, et leurs 
feuilles radicales paraissent dès l'automne, au moins dans l'espèce 
commune. 

Dans l’estivation, Îles sépales enveloppent entièrement les nectaires, 
dont les cornets recourbés en dedans se développent après les autres 
organes, et dont les lèvres sont fermées jusqu'à la fécondation ; les 
étamines sont appliquées contre les ovaires, où leur réunion présente 
la forme d'une pyramide, et contribue, avec les sépales et les nectaires, 
à donner à ces fleurs la structure insolite qui les distingue. 

A l'époque de l'épanouissement, les étamines les plus intérieures 
sont dressées et appliquées contre les stigmates; les autres, au con- 
traire , sont réfléchies en dehors, et ce qu'il y a de remarquable, c'est 
que celles-ci fleurissent les dernières, en sorte que la fécondation va 
du centre à la circonférence. À mesure qu’elle s'avance, les anthères 
extérieures se redressent et replient leurs parois qu'elles recouvrent 
d'un pollen jaunâtre et adhérent; enfin la fleur pendante se relève 
insensiblement et devient presque horizontale. On voit alors, dans 
l'espèce commune, les styles sortir du milieu des anthères encore 
chargées de pollen , et les petites têtes des stigmates se recourber sur 
les côtés. Je n'ai pas apercu, dans tout le cours de l’opération, les cornets 
donner aucune humeur miellée, et je ne comprends pas encore le rôle 
qu'ils peuvent y jouer, s'ils ne recoivent pas le pollen des anthères : 
c'est la même chose du Canadensis, dont les extrémités du style sont 
fortement recourbées. 

L'organe stigmatoïde est la petite tête allongée et recourbée, vis- 
queuse ou papillaire, qui termine le style et ne se forme pleinement 
que lorsque les anthères ont répandu une grande partie de leur pollen. 
Toutefois je vois que, dans le Speciosa de la Sibérie et le Canadensis de 
l'Amérique , les styles sont saillants à l'époque de l'épanouissement. 

Le principal phénomène que présentent les Ancolies , de même que 
les Migelles, ce sont ces phalanges .d’étamines toutes placées sur le 
même rayon, et composées chacune d'environ dix étamines, qui 
laissent, en tombant, leurs cicatrices ou points d'attache exactement 
disposés sur la même ligne. Cependant ces phalanges, si distinctes dans 


"— 63 — 


la plupart des espèces, ne s’observent pas dans le Pyrenaica, dont les 
étamines entourent toute la base de l'ovaire, et dont les plus intérieures 
ont leurs filets enveloppés dans la membrane transparente d’où ils sor- 
tent au sommet. 

La plus intérieure a la forme d'une membrane plissée et demi- 
transparente; et comme elle ne peut pas être considérée comme une 
portion de la corolle, elle porte chez quelques botanistes le nom de 
péripétale ; maïs ce n'est évidemment qu'une étamine dont le filet s’est 
élargi en membrane, puisque dans quelques espèces, comme le Cana- 
densis et le Pyrenaica, elle conserve encore son anthère : on trouve 
quelque chose de semblable dans l’Eupomatia de la Nouvelle-Hollande, 
décrit par Robert Brown. 

Les téguments de la fleur, auxquels nous avons donné le nom de 
calice et de corolie, ne diffèrent nullement quant à leur nature. Tous 
les deux sont d’une consistance demi-membraneuse, et ne présentent 
point ces glandes brillantes qui distinguent souvent les pétales. Ils 
tombent promptement, à peu près avec les étamines. 

Pendant la maturation, les carpelles des diverses espèces se recour- 
bent en dehors, afin que les graines puissent aisément s'échapper 
lorsque la suture intérieure se sera ouverte, et Rorrer observe que 
dans l 4quilegia vulgaris la position de ces carpelles dépend du nom- 
bre des verticilles des étamines , en sorte que, lorsque ceux-ci sont 
impairs, les carpelles sont opposés aux pétales, et dans le cas con- 
traire, aux sépales. 

L'Ancolie commune double dans nos jardins de quatre manières 
différentes. Quelquefois toutes les étamines, ou plutôt toutes les 
anthères se changent en une multitude de cornets, dont la pointe 
conserve sa position naturelle, ou bien est tournée en sens contraire, 
parce que l'onglet a éprouvé une torsion. D’autres fois les étamines se 
transforment en pétales planes entièrement semblables à ceux des 
autres fleurs; ou bien enfin la fleur tout entière n’est plus composée 
que d’un amas confus de sépales verdâtres. Ces diverses monstruosités, 
qui se conservent dans les mêmes individus, et se propagent par les 
racines, ou même souvent par des graines, ont recu des fleuristes les 
noms de fleurs corniculees , renversees , étoilées et dégénérées. La nature 
les produit indifféremment, sans qu’on puisse déterminer à l'avance 
les motifs de son choix. Cependant la première monstruosité est de 
beaucoup la plus commune, et dans toutes on retrouve les écailles, 
qui ne s'altèrent que très-rarement. 

L'efflorescence des Ancolies est centrifuge, comme dans le grand 
nombre des Renonculacees. Les fleurs terminales et solitaires forment 


NES 
des panicules ou plutôt des cymes plus ou moins garnis; les carpelles 
s'ouvrent intérieurement, et portent sur deux rangs leurs graines noires 
et brillantes; l'embryon , logé près du point d’attache, est échancré; 
la radicule est infère. 

L’Ancolie commune forme, vers la fin du printemps, un des plus 
beaux ornements de nos haies, de nos prairies , et même de nos mon- 
tagnes, où elle est très-commune. On la cultive aussi dans les jardins, 
où ses fleurs sont bleues’, violettes, roses, simples ou doublées. Lors- 
qu'on veut obtenir des formes ou des nuances nouvelles, on sème les 
graines des individus qui présentent déjà des accidents remarquables. 
Les plantes âgées sont communément moins fortes que les autres. 


DIXIÈME GENRE. — Delphinium. 


Les Delphinium ont un calice coloré, caduc et formé de cinq pièces, 
dont la supérieure se prolonge en cornet; quatre pétales, quelquefois 
soudés en un seul, et dont deux ordinairement sont cachés, en par- 
tie, dans le cornet du calice. Les étamines varient de douze à vingt, 
et les ovaires d’un à cinq. 

Tous les Delphinium sont des herbes annuelles ou vivaces; leurs 
feuilles sont pétiolées, palmées ou plus ou moins multifides;leurs fleurs, 
disposées en grappes et ordinairement bleues, passent facilement au 
pourpre ou au rose, ou même au blanc; leurs bractées sont au nombre 
de trois, l’une solitaire à la base du pédicelle , les deux autres opposées 
et placées tantôt plus haut et tantôt plus bas, selon les sections. 

Ces plantes habitent l'hémisphère boréal des deux mondes : on les 
trouve dans les champs et les lieux découverts, quelquefois dans les 
bois ou dans les montagnes. L'Europe en renferme une douzaine 
d'espèces, la Mauritanie et la Barbarie à peu près cinq, la Sibérie dix, 
le reste de l'Asie quinze, l'Amérique six, et il n’est guère douteux 
que leur nombre ne s’augmente encore. 

Ce vaste genre a été divisé par Ds Canpozze en quatre sections 
très-naturelles : 

1° Les Consolida, dont les quatre pétales sont réunis en un seul, 
et dont l'ovaire est unique ; 

2° Les Delphinellum , dont les pétales sont libres et glabres, et qui 
ont trois ovaires ; 

3° Les Delphinastrum, dont les quatre pétales sont libres, et les 
deux inférieurs barbus sur le disque ; leur éperon est allongé, et leurs 
carpelles varient de trois à cinq; 

4° Les Séaphysagria, dont les pétales sont libres, et ont un 


— 65 — 
éperon raccourci, et dont les carpelles renflés varient de trois à cinq. 

Les Consolida comptent de dix à douze espèces, toutes répandues 
dans l'Europe méridionale ou la partie voisine de l'Orient. Elles sont 
annuelles, et vivent parmi nos blés, où elles fleurissent au commen- 
cement de l'été. Elles ne diffèrent guère que par leurs tiges simples ou 
ramifiées , leurs épis lâches ou serrés, leurs bractées plus ou moins 
allongées , leurs feuilles et leurs capsules glabres ou velues. 

Les espèces européennes sont au nombre de quatre, mais on n’en 
connaît guère que deux : le Delphinium Ajacis et le Consolida propre- 
ment dit. La première, qui est, dit-on, originaire de la Tauride, se 
cultive, de toute ancienneté, dans nos jardins, où elle prend le nom 
de Pied d'alouette, et où elle présente des fleurs de toutes les nuances, 
le jaune excepté. Elle fournit avec la même facilité des fleurs simples, : 
semi-doubles, doubles, qui se reproduisent par les semences, quand 
toutes les anthères n’ont pas avorté, et qui forment les plus jolies 
bordures. Quelquefois la fleur devient régulière par l'avortement du 
pétale et du cornet; quelquefois la tige s'accourcit, et l'on obtient 
une variété naine dont les épis forment de très-belles pyramides. 

Le Consolida est réellement indigène, et diffère surtout de l'espèce 
précédente par sa tige beaucoup moins garnie, et ses pétales sur les- 
quels on ne peut pas lire le nom d’A4jax ; mais elle se prête avec la 
même facilité aux soins de la culture, et donne également des fleurs 
doubles à couleurs variées. 

Le Delphinium flavum , originaire de l'Orient et peut-être de l’Ar- 
chipel, est la seule espèce étrangère que nous nous permettrons de 
mentionner , à cause de ses fleurs jaunes. 

Cette section présente deux phénomènes principaux, l’un de sou- 
dure et l'autre d’avortement. Le premier est celui de ses quatre 
pétales réunis, et dont on découvre encore la trace dans les quatre 
lobes du pétale unique. Le second est celui de son carpelle solitaire, 
qui tient ici la place des carpelles multiples des autres sections, et qui 
est placé obliquement sur le torus , en sorte que sa suture indique le 
vrai centre de la fleur. Ces deux explications ne peuvent être rejetées, 
si du moins on admet qu'il existe dans les plantes réellement congé- 
nères, une symétrie primitive des parties de la fleur, comme tout 
porte à le: croire, et comme un examen attentif semble à chaque 
instant le confirmer. 

De Canpozze va plus loin , et il suppose que la fleur du Delphinium, 
telle que nous la connaissons, est déjà altérée , et que sa forme pri- 
mitive pourrait bien être celle des Ancolies, c'est-à-dire cinq sépales 
réguliers et cinq pétales en cornet ; cependant nous devons remarquer 


I. 5 


SG 
que le sépale extérieur, quoique capuchonné, est placé sur le même 
rang que les autres, en sorte qu'il ne paraît pas appartenir naturelle- 
ment au verticille des pétales. 

Si l'on nous demandait quel a été le but de la nature dans ces 
transformations si fréquentes parmi les végétaux, nous répondrions 
que nous ne pouvons pas le connaître; mais nous ferions toutefois 
deux remarques : la première, c’est qu’en détruisant la régularité pri- 
mitive du plan, les soudures et les avortements y substituent presque 
toujours un ordre moins parfait sans doute, mais pourtant symétrique, 
comme on peut le voir dans toutes les sections de ce genre, et surtout 
dans les Consolida ; la seconde, que la structure actuelle des Delphinium 
est en rapport avec leurs besoins, qu'elle présente des organes necta- 
rifères et des arrangements de détails propres à faciliter la fécondation. 

La fécondation a lieu dans l’intérieur du pétale bilobé et recourbé 
sur ses bords; les étamines d'abord déjetées, se redressent une à une 
sur le stigmate qui n’est pas encore formé, et répandent lentement 
leur pollen débarrassé des parois qui le recouvraient, et qui se sont 
séparées en deux valves inégales et réfléchies à peu près comme dans 
les Migelles ; le pétale, déployé au sommet en étendard bifidé et 
appendiculé, se prolonge inférieurement en un cornet engagé dans 
celui du sépale, et qui distille d’un sillon verdâtre une humeur miellée; 
les émanations de celle-ci arrivent ensuite au stigmate, qui ne se 
développe que plus tard, et paraît formé de deux lèvres, sur les bords 
desquelles sont placées les vésicules papillaires. 

La culture a obtenu des Consolida, dont les pièces du calice et les 
pétales sont tous semblablement conformés et présentent une fleur 
très-régulière à deux ou trois rangs de pétales, à limbe arrondi et irré- 
gulièrement denté. Au centre est un ovaire à stigmate bien conformé 
et quelquefois bifide; d'autrefois mais plus rarement on aperçoit deux 
ou même trois ovaires ; les étamines qui les entourent donnent un 
pollen assez abondant pour que les semences soient fécondes après la 
fécondation; les filets se replient sur eux-mêmes sans se déjeter en 
dehors, comme cela arrive constamment dans le Delphinium , le Conso- 
lida etY Ajacis abandonnés à la nature ; voilà donc un exemple de fleur 
primitivement déformée et ramenée par la culture à son véritable type: 
pourquoi la nature avait-elle changé cette structure simple et irrégu- 
lière, en une autre beaucoup plus compliquée, maïs pourtant admi- 
rablement conformée pour le but qu'elle avait à remplir? c'est ce que 
j'ignore. Mais ce qu'on remarque, c'est qu’il y a peu de genres qui pré- 
sentent plus de déformations dans ses différents organes, et par consé- 
quent plus de variétés mêlées à ses vraies espèces. 


DT 0e 

Les Delphinium de la seconde section ou les Delphinelles sont, 
comme les Consolida, des plantes annuelles, et qui vivent parmi 
les blés, où elles fleurissent après la récolte. Leur patrie est exclusi- 
vement le bassin de la Méditerranée, et indépendamment des carac- 
tères que nous leur avons assignés, on les reconnait encore à leurs 
deux bractées rapprochées de la fleur. De Canpozre en décrit dix 
espèces, toutes confondues dans le Peregrinum de Linné, et par 
conséquent jusqu’à présent très-peu distinctes; dans ce nombre, trois 
sont européennes : le Cardiopetalum des Pyrénées, le Gracile de l'Es- 
pagre, et enfin le Junceum du midi de l'Europe et de la Barbarie. Ces 
plantes, ainsi que les autres Delphinelles, appartiennent au même 
type et on ne peut guère méconnaitre qu'elles renferment de SUples 
variétés que des observations ultérieures feront connaître. 

Leur organe nectarifère n’est pas conformé comme celui des Conso- 
lida , qui est un simple sillon longitudinal : l'humeur miellée, dans 
cette section, comme dans les deux dernières, sort de Hartnr des 
deux pétales supérieurs, où elle est recue par le cornet du sépale 
supérieur, qui en est souvent rempli. Du reste, la fécondation s'opère 
ici de la manière déjà décrite : lorsque les étamines sont toutes 
déjetées et par conséquent toutes défleuries, les pistils, auparavant 
cachés, se dégagent , et les stigmates commencent à étaler leurs 
papilles. 

Les Delphinastrum forment la section la plus nombreuse du genre : 
l'on en compte à peu près vingt-neuf espèces disversées en Europe, 
en Amérique et surtout en Sibérie. Ce sont des plantes élevées, à 
racines vivaces et souvent tubereuses; leurs fleurs, ordinairement 
teintes d'un bleu d'azur et quelquefois d’un beau pourpre foncé, 
sont grandes et disposées en longs épis, dont la réunion forme des 
panicules très-brillantes. On les distingue en deux sections : celle à 
pétales entiers qui ne contient que deux espèces, et celle à pétales 
échancrés qui renferme toutes les autres; plusieurs sont comprises par 
Linxé sous le nom d’Elatum. 

Les deux Delphinastrum , à pétales inférieurs entiers, sont origi- 
naires de la Russie méridionale et de la Sibérie. Le premier ou le 
Grandiflore, cultivé dans nos jardins, et dont la variété Sinense se 
distingue à ses taches pourprées, se fait remarquer par ses fleurs 
bleues, et ses feuilles palmées à divisions linéaires ; le second, ou le 
Cheilanthe, la plus belle des espèces du genre, se reconnait à ses 
feuilles velues et à ses carpelles renflés, peints sur le dos de veines 
noirâtres, disposées en réseau, et enfin, le Triste se distingue de tous 
les autres par ses fleurs livides et noirâtres. 


= ER — 


Parmi les espèces à pétales échancrés, cinq ou six sont européennes, 
et habitent, en partie, les Pyrénées ou les montagnes de la Suisse. 
Celles d'Amérique forment un groupe, dont l’espèce la plus brillante 
est l’Azurée. Mais ces plantes ont tant de rapports entre elles que, si 
lon en excepte celles à pétales entiers, elles sont toutes comprises 
dans le même type, et renferment, comme les Delphinelles , plusieurs 
variétés que des recherches ultérieures feront connaître , et que les 
botanistes soupconnent déjà. 

Il n'est point douteux que les poils nombreux et assez roides, qui 
recouvrent intérieurement le limbe des pétales inférieurs des Delphi- 
nastrum, ne soient destinés à quelque usage, par exemple, à fermer 
l'ouverture des nectaires et à assurer la fécondation; en effet, c’est 
sous leur abri, comme sous un toit, que se relèvent et s’ouvrent leurs 
anthères dont le pollen tombe immédiatement sur l'humeur miellée 
du cornet, et reste en partie fixé au-dessous du toit des pétales, jus- 
qu'à ce que les stigmates, toujours placés à l'entrée du tube mellifère, 
se soient développés : on peut même remarquer dans le Sinense ou 
Divaricatum , variété du Grandiflore, les deux petites oreillettes par 
lesquelles le limbe entier des pétales inférieurs est fixé sur les côtés 
des pétales supérieurs. 

Les Staphysagria, qui forment la dernière section du genre, ne 
comprennent que trois espèces : l’une très-anciennement connue, et 
les deux autres plus nouvelles, mais peu différentes de la première. 
On distingue ces plantes à leurs fleurs sèches, d'un bleu blanchätre, 
surtout à leurs carpelles enflés, à leurs semences grosses et peu nom- 
breuses. Elles sont bisannuelles, c'est-à-dire qu’elles germent en 

automne, et ne donnent des fleurs que l'année suivante. 

Les Delphinium des quatre sections ont un port et des caractères 
qui nécessitent leur réunion en un même genre. Ils ont la même 
végétation, la même coupe de feuilles, et la même structure primitive 
de fleurs; leurs feuilles, toujours à peu près palmées, finement dé- 
coupées dans les Consolida , ont leurs lobes glanduleux dans les autres 
sections, et surtout dans les Delphinastrum ; elles sont assez consis- 
tantes et peu sensibles au froid , à demi plissées sur leurs lobes dans 
la préfoliation, et grossièrement roulées sur leur surface supérieure ; 
elles se recouvrent et se protégent par leurs pétioles ordinairement 
dilatés, et ne se séparent jamais naturellement de leurs tiges, non 
plus que les bractées et les pédoncules. Au contraire, les enveloppes 
de la fleur et les étamines tombent d'assez bonne heure ; les carpelles 
répandent leurs graines dès le commencement de l'automne. 

Les Delphinastrum, dont les racines sont vivaces et souvent tuber- 


LEFT: 0 
culées, produisent sans cesse de nouveaux jets, qui se montrent de 
bonne heure. Les Staphysagria périssent la seconde année, après avoir 
donné leurs fleurs. Je ne connais encore aucune plante qui soit 
bisannuelle, dans le sens strict du mot, c'est-à-dire, qui porte des 
fleurs deux années consécutives, et disparaisse la troisième. 

Les fleurs des Del/phinium de toutes les sections sont disposées en 
grappes et portées sur des pédoncules, d'abord couchés le long des 
tiges, et écartés ensuite. Leur efflorescence particulière est centripète, 
et la générale centrifuge, disposition qui favorise, à tous égards, le 
plein développement de la plante. 

La forme de l'organe nectarifère varie ici considérablement, selon 
les sections. Dans les Consolida, comme nous l'avons dit, c’est un 
sillon relevé qui s'étend en longueur; dans les autres espèces, il est 
placé à la base des deux pétales supérieurs, qui se terminent souvent 
en demi-cylindre, et offrent ainsi, par leur réunion, un cylindre 
complet, Pour l'ordinaire, cependant, chaque pétale se prolonge en 
un cornet creux, toujours contenu dans le cornet calicinal. Ces diffé. 
rences, qui sont constantes, méritent d'être examinées avec soin. 
L’estivation est variable : dans les Consolida , le sépale supérieur enve- 
loppe tous les autres; mais, dans les autres sections, il ne protége 
guère que les parties de la fructification. Les sépales inférieurs se 
réunissent à leur sommet, où ils forment quatre renflements plus ou 
moins marqués ; on voit alors que ces sépales sont composés de deux 
membranes : l'une extérieure, verdâtre et solide, qui occupe le milieu, 
et remplit les fonctions de calice; l'autre mince et pétaloïde, qui 
s'étend sur les bords; mais cette organisation varie un peu selon les 

; 
espèces. 

Les semences des Delphinium sont'arrondies , bossues, anguleuses, 
toutes hérissées d’écailles dans la section des Consolida, et ordinaire- 
ment d'un noir plus ou moins brillant; leur embryon est voisin du 
point d'attache, et la radicule est infère. 

Les fleurs des Delphinium, comme celles des Aquilegia et des 
Aconits , sont dépourvues de tout mouvement organique, au moins 
dans leurs pétales et leurs calices, car leurs étamines se fléchissent 
de plusieurs manières ainsi que les pédoncules. Les stigmates, tou- 
jours cachés par les filets dilatés, se dégagent insensiblement, à mesure 
que les étamines se déjettent, et ils développent enfin leurs glandes 
papillaires. Sans doute que ce mode de fécondation varie un peu selon 
les espèces ; mais j'ai toujours vu les anthères répandre leur pollen 
sur l'humeur miellée, plutôt que sur ce stigmate. 

Toutes les parties des De/phinium ont un aspect un peu sombre et 


 - 
livide, leurs tiges et leurs feuilles sont d’un vert fonce, et leurs fleurs 
d'un bleu souvent noirâtre. 

Malgré ces désavantages extérieurs , les Delphinium ornent souvent 
nos jardins, où ils forment tantôt des bordures, comme le Delphinium 
Ajacis, dont j'ai déjà parlé, et tantôt des touffes pleines d'élégance, 
couronnées de fleurs du plus bel azur, comme le Grandiflore et plu- 
sieurs autres. 


ONZIÈME GENRE. — Aconit. 


L'Aconit est un genre distinct de tous les autres, par la forme 
bizarre de son pétale supérieur, qui imite assez bien un casque, et 
renferme deux nectaires pédicellés. Son caractère consiste en cinq 
sépales dont les deux latéraux peuvent être considérés comme des 
ailes, et les deux inférieurs comme une lèvre pendante ; les pétales 
varient en nombre et en structure, les deux supérieurs sont toujours 
tubulés, pédicellés et nectarifères ; les autres ressemblent à des filets 
dilatés, et sont en général très-peu apparents; les étamines vont de 
quinze à trente; les carpelles de trois à cinq. 

Les Aconits habitent les forêts, les buissons et les pâturages mon- 
tueux de l'hémisphère boréal, soit en Europe, soit surtout en Sibérie ; 
quelques espèces, en petit nombre, sont éparses au Japon, ou dans 
l'Amérique du nord ; quelques autres sont peut-être communes aux 
deux continents, mais aucune n’a encore été trouvée dans l’hémi- 
sphère austral. 

Ces plantes ont une si grande ressemblance dans le port et l'orga- 
nisation générale, qu'elles paraissent toutes appartenir à un même 
type. Leurs racines, d’après des observations qui ne sont peut-être 
pas encore assez généralisées, paraissent régulièrement formées de deux 
ou plusieurs tubercules, dont le principal, celui d'où sort la tige, 
périt en automne , et se trouve remplacé au printemps par ceux qu'il 
a produits dans le cours de l'année; en sorte que le plus grand nombre 
des Aconits sont ainsi des herbes vivaces. Cependant la plupart des 
botanistes considèrent les Cammarum comme bisannuels, et les autres 
Aconils comme vivaces, à l'exception toutefois du Grandiflorum, du 
Forskahlei, et de quelques autres qui sont annuels et ont leurs racines 
fibreuses. 

Les feuilles ont ici la même forme générale : les inférieures sont 
pétiolées à nervures palmées, primitivement divisées en trois grands 
lobes, et plus ou moins découpées ; les supérieures sont sessiles ou 
bractéiformes, et toutes ont leurs lobes terminés par des renflements 


rar — 
glanduleux : les fleurs sont disposées en grappes terminales, tantôt 
simples, tantôt ramifiées, et les pédicelles sont, pour l'ordinaire, sim- 
ples et uniflores ; ils portent une bractée à leur base et deux autres 
plus petites, opposées ou alternes, dont la place varie. 

Ce genre est un de ceux où il règne la plus grande incertitude sur 
le nombre des espèces. CLusrus, qui s'en est occupé le premier, n'en 
décrit que huit; Koëzze en a établi treize; Wizzpenow, quinze; 
De Canpozze, vingt-huit, dans son Système naturel; et REICHENBACH, 
cent sept, dans une monographie assez récente. Mais la plupart de 
ces espèces fondées sur de très-légères différences, avaient déjà été 
beaucoup réduites dans l'excellente monographie de SERINGE, et 
lé Prodrome de De Canpoze ; lorsque plus tard HEGETSCHWEILER, 
dans son voyage aux Alpes de Glaris, a publié des observations très- 
curieuses sur cet objet. Il affirme que les Aconits, dans l’état naturel, 
ne se multiplient guère que par leurs tubercules, lesquels, dans les 
mêmes circonstances, conservent assez bien leurs formes, mais qui, à 
des expositions et surtout à des hauteurs différentes, subissent des 
changements très-marqués, et qui, cultivés dans les jardins, donnent 
naissance à des variétés toujours nouvelles; lorsque leurs tubercules 
sont peu nombreux et les grappes florales peu garnies, les semences sont 
fertilesetlèventsans peine; mais les plantes qui en proviennent, périssent 
promptement, si elles ne se trouvent pas dans un sol dont la surface 
soit nue et gazonnée. Cet auteur ajoute que le Vapel varie plus que 
le Cammarum, parce que le dernier n’habite que la région moyenne 
des Alpes, tandis que l’autre se rencontre presque partout, tantôt 
sur les plus hautes sommités, tantôt dans les vallées basses et voisines 
de la plaine. D'après ces considérations, et surtout d’après ce que Jui 
a appris une culture de plusieurs années, il réduit tous les Aconits de 
la Suisse, que ReicEeNBACE et surtout SCHLEICHER avaient si prodi- 
gieusement maltipliés, aux quatre formes principales ou aux quatre 
espèces décrites anciennement par Lanxé, et qui sont.le Lycoctonum , 
l'Anthora, le Napel et le Cammarum ( Voyez la Flore helvétique de 
Gauni, vol. 111, pag. 467 et 468.) 

Ce sont les mêmes groupes qu’établit aujourd'hui De Canporze, 
en les fondant principalement sur la forme du casque, qui, avec les 
nectaires , est l'organe le plus constant de la fleur. Voici comment il les 
distingue : 

1° Anthora, casque conique légèrement demi-cylindrique, cinq 
ovaires, feuilles divisées en lobes linéaires, fleurs presque toujours 
jaunes, sépales persistants, racine allongée en navet ; 

2° Lycoctonum, casque conique et cylindrique, trois ovaires, feuilles. 


7; es 
divisées en lobes cunéiflores, fleurs jaunâtres, rarement blanches ou 
bleues, sépales caducs, racine tuberculée et fibreuse ; 

3° Cammarum , casque conique et comprimé, trois à cinq ovaires, 
feuilles pennatifides à lobes trapézoïdes , fleurs bleues ou bigarrées, 
rarement couleur de chair, sépales caducs, racines tuberculées ; 

4 Napel, casque semi-circulaire, rarement naviculaire, trois à 
sept ovaires, feuilles à lobes deux fois pennatifides, fleurs bleues, 
blanches, jaunâtres, ou nuancées de ces diverses couleurs, racine 
tubéreuse. 

Il ÿ ajoute pour cinquième groupe les Anabates, qui sont tous 
étrangers, et se distinguent principalement par leur tige grimpante, 
plus ou moins voluble. 

La section des Anthora ne comprend dans De Canbozze que deux 
espèces : la commune, originaire des Alpes, des Pyrénées et du 
Caucase, et l'Anthoroideum de la Sibérie, qui lui ressemble si fort 
qu'on ne peut le considérer comme une seconde espèce. Les variétés de 
l'Anthora sont peu nombreuses, et dépendent principalement du 
nombre des fleurs et du prolongement du casque quelquefois glabre, 
mais plus souvent velu. Les filets des étamines de l’Anthora sont 
dilatés et non divisés , l'éperon est gros, court et courbé en spirale, 
le sac est presque nul, et les carpelles velus s'ouvrent intérieurement, 
de manière à présenter dans la dissémination une forme de capsule à 
cinq angles, entièrement découverte au sommet. 

Celle de Zycoctonum renferme une seule espèce indigène et deux 
étrangères qui en sont très-voisines : l'Ochroleucum du Caucase et le 
Barbatum de la Sibérie. Les variétés de l'espèce commune, au nombre 
. de treize dans le Prodrome, ont été réunies sous trois formes princi- 
pales par Hrezrscaweier, qui les croit dépendantes du climat; celle 
des montagnes, la Sous- Alpine et Y Alpine. On reconnaît toujours les 
Lycoctonum aux caractères déjà indiqués, ainsi qu’à leur casque cbtus 
et à peine mucroné; celui d'Europe est répandu partout, dans les bois 
et les prairies montueuses. 

La section des Cammarum paraît d'abord plus riche en espèces 
européennes que les deux précédentes; on y trouve, en effet, l'Inter- 
medium , le Paniculatum , le Rostratum , \ Hebegynum,, le Variegatum, 
tous originaires des Alpes de la Suisse, ou dés montagnes voisines, 
et dont les formes paraissent assez constantes ; mais ces plantes ont 
aussi été considérées comme variétés d'une même espèce par le même 
HecerscnweiLer, et par GauDin, dans sa Flore helvetique, où l'on 
trouve encore les sous-variétés auxquelles elles ont donné naissance. 

Les autres Cammarum , étrangers à la Suisse, où provenant de la 


CET". 


Sibérie, de l'Amérique septentrionale, du Japon, etc., sont encore 
trop peu connus, pour que l'on puisse exactement les séparer en 
espèces et en variétés. Mais on peut déjà y remarquer l'influence du 
sol ou du climat, puisque le Speciosum , le Tortuosum et Y Exaltatum, 
qui en font partie, sont très-probablement originaires de nos jardins 
botaniques, et surtout de celui de Gœttingen. 

Enfin, la dernière.section est celle des Vapels, qui contient deux 
espèces étrangères : le Ferox du Népaul et le Biflorus de la Sibérie, et 
une seule européenne, le Vapel commun, si répandu autour des 
châlets, dans nos prairies montueuses et celles de toute l’Europe. 
Ses innombrables variétés ont été classées sous divers chefs par 
SERINGE, selon qu’elles dépendent de l'inflorescence, de la forme du 
casque, de la couleur des fleurs, de la coupe des feuilles, de leur 
couleur, etc. La plupart, comme je l'ai déjà dit, sont infécondes, et 
ce défaut doit, sans doute, être attribué à l'altération des organes 
sexuels ; car je n'ai pas su y apercevoir nettement celui qui remplit les 
fonctions de stigmate; ce n’est pas sûrement l'extrémité du style, car 
elle n’a rien de papillaire; ce ne peut être qu'une rainure longitudi- 
nale peu visible, mais qui a quelques rapports avec le stigmate des 
Delphinium. 

Les calices des Aconits varient beaucoup en couleur dans les 
espèces différentes ou dans les mêmes. Ils sont violâtres, jaunes, 
blancs, ordinairement bleus et quelquefois panachés. On a observé 
que, dans les années sèches , plusieurs fleurs avaient des teintes vertes, 
qui disparaissaient dans les années humides. 

Les pétales sont régulièrement au nombre de cinq, trois très-petits 
et tout-à-fait semblables aux filets des étamines, deux autres supérieurs 
et remplissant la fonction de nectaire. Les premiers, souvent très- 
multipliés, portent aussi le nom de parapétales, et sont assimilés par 
plusieurs botanistes aux lames plissées des Aquilegia ; mais ils en dif- 
férent en ce qu'ils recouvrent les étamines, tandis que les lames plissées 
des Aquilegia entourent immédiatement le pistil. Du reste, on ne 
peut guère nier que ces organes n'aient entre eux de très-grands rap- 
ports, et que, dans les deux cas, ils ne soient des étamines avortées. 

Les nectaires, toujours au nombre de deux, diffèrent un peu de 
forme selon les espèces. Ils sont essentiellement composés d’un pédi- 
celle creux, terminé par un sac cylindrique, dont l'extrémité supé- 
rieure est une lèvre irrégulière. Ils sont logés sous le sépale supérieur, 
et d'autant plus contournés en spirale , que ce casque est plus court. 
Le sac, pendant la floraison, est rempli d'humeur miellée, et son 
ouverture donne sur les anthères dont il recoit l'humeur fécondante. 


DR 7 et 
Du reste, je n'ai vu nettement ni le mode de fécondation, ni les pa- 
pilles stigmatoïdes; en sorte que je ne puis rien affirmer de précis 
sur ces deux objets. 

Les étamines sont disposées sur plusieurs rangs, et leurs filets sont 
constamment bordés , dans leur moitié inférieure , de deux ailes mem- 
braneuses, qui se terminent quelquefois en dents latérales. Les filets, 
dressés avant l'émission de la poussière , sont fléchis et diversement 
tortillés après cette époque; les anthères sont didymes, et renferment 
un pollen jaunâtre et grenu. 

La fécondation des Aconits esten général indirecte; carau moment 
où les anthères s'ouvrent, les stigmates sont loin d'être formés; ils ne 
le sont pas même lorsque les filets sont déjetés et que les anthères 
ont répandu la plus grande partie de leur pollen qui recouvre le fond 
de la corolle. On peut supposer que les émanations de ceypollen s’élè- 
vent alors sur les stigmates qui sont devenus de petites languettes 
papillaires ; mais jusqu’à présent je n’ai pas bien compris la fonction 
de ces singuliers nectaires recourbés au-dessus des stigmates et rem- 
plis d’une humeur miellée , assez abondante pour attirer les insectes 
qui en vivent ; cependant en examinant le phénomène de plus près, je 
suis porté à croire que l'humeur miellée humecte l'intérieur de la 
corolle pour l'absorption du pollen. 

L’estivation des Aconits ressemble à celle des Consolida. Le casque, 
avant son développement, renferme et abrite les autres parties de la 
fleur. A l'époque de l'épanouissement, toutes ces parties se dégagent 
régulièrement les unes après les autres, à l'exception des nectaires, 
qui restent toujours cachés sous le sépale supérieur. Enfin, les diverses 
pièces de la fleur tombent, d'abord les étamines, ensuite les pétales 
languettés, puis les quatre sépales, enfin le casque avec les nectaires 
qu'il contient. Les Ænthora sont la seule section où les téguments se 
flétrissent sans tomber. 

L'inflorescence est toujours paniculée, et les fleurs sont toujours 
disposées en grappe sur la tige et les rameaux. Celles qui paraissent 
les premières sont celles de la tige principale, les autres viennent en- 
suite selon leur ordre; mais ReicHenBacx et HEGETSCHWEILLER ont 
déjà remarqué que les grappes commencaient à fleurir par le bas dans 
le Vapel, et par le haut dans le Cammarum. C'est que, dans cette 
dernière section, les grappes sont lâches, tandis qu’elles sont très- 
serrées dans l’autre. Mais comment se fait-il que le mode de floraison 
se rapporte si parfaitement à la convenance? C'est ce que j'ignore. 

Les feuilles des Aconits sont plissées longitudinalement sur leurs 
lobes, comme dans le grand nombre des Renonculacées. Cependant 


le … 

on remarque que les feuilles radicales du Vapel sont repliées, ou plis- 
sées en deux par le milieu de leur longueur ; cette forme singulière 
de vernation pourrait bien appartenir aux autres espèces de ce genre, 
comme l'annonce DE Canpoize. Les grappes s’allongent à mesure 
que la floraison s'accomplit, et les carpelles restent toujours droits. 
Les graines ont une forme anguleuse; l'ombilic est assez marqué; 
l'embryon est logé à la base; la radicule est grosse et infère. 

Les Aconits sont un des genres dans lesquels la nature s’est plu à 
varier les formes spécifiques, selon les localités, la hauteur de l’atmo- 
sphère, et même la culture. On peut même dire qu’elle a donné à 
l'homme le premier exemple de ces altérations, dans la figure bizarre 
qui distingue la fleur de l'4conit. Cette fleur, que tout nous fait sup- 
poser avoir été primitivement régulière, devait être formée de cinq 
sépales en casque et de dix pétales opposés deux à deux aux sépales, 
et plus ou moins nectarifères. On arrive quelquefois à la reproduire 
plus ou moins exactement dans les jardins, où tous les pétales pren- 
nent grossièrement l'apparence de nectaire, et où les sépales corres- 
pondants se convertissent à leur tour en casque plus ou moins com- 
plet; ce qui semble indiquer qu'il ÿ a un rapport intime entre la 
transformation des sépales en casques, et celle des pétales en nectaires. 

Ces premières altérations, opérées sans l'intervention des hommes, 
ont nui essentiellement à la propagation des Aconits par les semences ; 
car nous avons déjà observé que ces plantes étaient rarement fertiles, 
soit que leur fécondation s'arrête par le défaut de conformation des 
organes sexuels, soit que le développement extraordinaire des fleurs, 
des tiges et surtout des racines, détourne de leur route les sucs nour- 
riciers destinés primitivement aux pistils et aux étamines. On peut 
donc considérer tous les 4conits jusqu'ici connus comme des plantes 
déformées, dont le type primitif pourra être retrouvé dans l’une de 
ces nombreuses espèces que l’on découvre tous les jours. 

Ce qui confirme encore cette opinion, ce sont, d’un côté, les va- 
riations considérables que l’on trouve dans les parties de la fleur, et, 
de l'autre, l'imperfection que l’on remarque dans les organes sexuels. 
En effet, les parties que l’on est convenu d'appeler pétales, sont 
tantôt plus, tantôt moins nombreuses, et quelquefois même nulles. 
D'ailleurs , elles paraissent tellement appauvries et mutilées, qu'il est 
aisé de voir qu’elles ne peuvent plus remplir de fonction importante, 
et qu'elles ont été détournées de leur destination primitive. La même 
réflexion se présente, lorsqu'on observe les anthères, et surtout le 
stigmate, qui est évidemment avorté, et qui, dans un très-nombre de 
cas, ne peut remplir le but auquel il avait été appelé. Il est bien vrai 


BB 5 

qu'en diminuant beaucoup le nombre des fleurs, on peut obtenir 
quelques semences, comme l'a fait HecerscaweiLer ; mais il faut assez 
de soins pour qu'elles germent, et surtout pour qu’elles prospèrent, 
en sorte qu'on ne doit guère les considérer comme parfaitement con- 
formées. 

Toutes les parties des Aconits, leurs tiges et leurs feuilles, ont un 
aspect sombre et plus ou moins livide. Leurs fleurs mêmes n’ont point 
cet éclat et ces couleurs brillantes qui plaisent si fort aux yeux; leurs 
teintes, au contraire, sont ternes et obscures. Cependant quelques 
espèces de ce genre, le Vapel en particulier, sont cultivées dans les 
jardins, soit pour la forme bizarre de leurs fleurs, soit surtout à cause 
de l'effet que produisent leurs belles grappes bleues; on les multiplie 
par les racines qui se séparent d’elles-mêmes, ou par les bulbes qui 
naissent quelquefois aux aisselles de leurs feuilles inférieures. Elles ne 
doublent pas facilement; mais leurs ovaires, leurs étamines, leurs 
pétales et leur calice, sont sujets à se déformer. 


Cinquième tribu. — PÆONIACÉES. 


Les Pæoniacees, qui forment la dernière tribu des Renonculacees, 
et qui pourraient bien être regardées un jour comme un ordre ou une 
famille particulière, se distinguent par leur port et surtout par leurs 
anthères introrses. Elles comprennent trois genres : les Actæes, les 
Xanthorrhizes et les Pæonies. 


PREMIER GENRE. -— ÆAclæe. 


Les Aciæes ont un calice de quatre pièces caduques, quatre pétales, 
quinze à vingt étamines à: anthères introrses, un à douze ovaires, 
autant de péricarpes, tantôt secs et déhiscents, tantôt succulents et 
fermés. 

Ces différences dans le nombre et la structure des ovaires et des 
carpelles, ont fait partager tout le genre en trois sections. 

1° Les Cimicifuges, à fleurs polygynes, et péricarpes secs, indé- 
“hiscents. : 

2° Les Macrotys, à fleurs monogynes, et péricarpes secs, déhiscents. 

3° Les Christophoriana, à fleurs monogynes, et péricarpes bacci- 
formes, indéhiscents. 

Les Aclæes sont des herbes vivaces qui habitent les bois humides 
ou montueux de l'hémisphère boréal: deux sont communes à l'Europe 


MT = 

et à la Sibérie, une troisième se trouve au Japon, et les cinq autres 
sont répandues dans l'Amérique septentrionale. Il est digne de remar- 
que que les espèces originaires des mêmes lieux, ne sont pas les plus 
rapprochées, c'est-à-dire, n'appartiennent pas toujours à la même 
section. 

Les racines des Actæes sont tubéreuses, comme celles des Aconits, 
et se multiplient de la même manière; elles donnent, chaque année, 
naissance à une ou plusieurs tiges, qui, avant leur développement, 
sont protégées par une stipule, ou plutôt par un rudiment épais de 
pétiole. Les feuilles, à cette époque, sont plissées en deux, et la tige, 
repliée sur elle-même, est cachée dans le turion; les feuilles étendues 
sont longuement pétiolées, tantôt simples ou lobées , tantôt divisées 
etcomme décomposées ; les fleurs sont disposées en grappes souvent 
allongées et recourbées jusqu'à leur pleine floraison; le calice tombe 
au moment où il s'ouvre, les pétales adhèrent plus long-temps; mais 
ils se séparent avant les étamines, qui sont recourbées dans la fleur 
encore fermée, et dont les filets, renflés en massue, flottent autour 
du pistil pendant toute la durée de la fécondation. 

La section des Cimicifuga contient quatre espèces originaires de 
l'Amérique, mais dont la principale, celle qui par son odeur écarte 
les punaises, se retrouve encore en Sibérie et en Europe, dans les 
monts Carpaths et la Gallicie. Elles diffèrent par la forme des feuilles 
comme par le nombre des ovaires, et leurs fleurs sont disposées en 
grappes simples ou rameuses, ou enfin en corymbes. 

Les Macrotys ne comptent que deux espèces , l'une du Japon, en- 
core fort mal connue, l'autre originaire des forêts ombragées de 
l'Amérique septentrionale, et cultivée depuis long-temps dans nos 
jardins. Cette dernière , qui a tout-à-fait le port et les feuilles de notre 
Actæe, s'en distingue au premier coup-d'œil par ses longues grappes 
et ses péricarpes ou ses carpelles secs et déhiscents ; elle porte quel- 
quefois deux pistils. 

Enfin, les Christophoriana sont aussi formés de deux espèces, qui 
appartiennent au même type, et pourraient bien être considérées 
comme des variétés; le Spicata, si commun dans toute l'Europe, et 
qui se retrouve au Caucase comme dans la Sibérie, et le Brachypetala, 
à pétales plus courts que les étamines, et qui peuple les hois de l'A- 
mérique septentrionale. Toutes les deux ont les racines tubéreuses, 
mais les baies de la première sont noires, tandis que celles de la 
seconde varient du blanc au rouge ou même au bleu, et ne sont ja- 
mais noires. 

Ces trois sections sont intimement liées entre elles; car, selon 


ES = 

l'observation de Ds CaNDoLLE, on ne peut pas plus éloigner les Cimi- 
cifuga des Macrotys, qu’on ne sépare les Consolida des Delphinastrum, 
d'après le nombre différent de leurs carpelles. D'autre part, les Ma- 
crotys à fruits secs sont aussi bien unis aux Christophoriana à fruits 
succulents, que les Clematis à carpelles secs le sont aux Clematis à 
carpelles bacciformes. Toutes les autres parties de l'organisation sont 
tellement semblables dans les 4ctæes, qu’on ne peut pas douter que 
leurs diverses espèces n’appartiennent au même genre. 

Les feuilles de notre Actæe présentent des traces marquées d’avor- 
tement et de soudure. Certaines parties de leur contour sont plus 
développées que d'autres, et certaines nervures, qui devaient être 
détachées , sont, au contraire, réunies; ce qui dépend, sans doute, 
de la position des feuilles dans leur bourgeon. 

Mais ces soudures sont bien plus marquées dans les fruits qui, for- 
més originairement d'un seul carpelle ouvert en longueur comme 
ceux des Hellebores, sont devenus de véritables baies, renfermant 
sept à huit semences dans une pulpe fortement colorée. En les exa- 
minant avec soin avant la maturation, on y retrouve une suture, et 
sur chacun de ses bords un placenta longitudinal en forme de bande, 
sur lequel sont attachées de nombreuses semences, qui avortent en 
très-grande partie, et dont l'embryon, très-petit, contient une radi- 
cule centrifuge. 

L'estivation du calice, comme celle des pétales, est en recouvre- 
ment; les anthères introrses, répandent immédiatement leur pollen 
sur le stigmate, qui est un bouton papillaire et glanduleux. Je n'ai 
aperçu dans les {ciæes aucune trace de nectaire. 

Les graines placées sur deux rangs, et semblables d’ailleurs à celles 
des autres Renonculacees, ont la forme d’une demi-sphère un peu 
aplatie et prolongée au point d'attache; elles se détachent de leurs 
carpelles dans les Actæes des deux premières sections , mais elles res- 
tent renfermées dans les baies des Christophoriana , qui tombent 
entières , et se sèment en se détruisant. 

Les auteurs modernes font trois différents genres de ces trois sec- 
tions d'Actæe, et il les fondent principalement sur la différence des 
fruits simples ou multiples, secs ou charnus, déhiscents ou indéhis- 
cents; ils ajoutent que, dans les Macrotys et les Christophoriana, les 
étamines inférieures sont stériles, tandis qu’elles sont fertiles dans les 
Cimicifuga. (Voyez Ann. des sciences natur., déc. 1835, pag. 333.) 

Ils forment même un quatrième genre du Palmata de la section 
des Cimicifuga, parce qu'il est dépourvu de corolle, qu'il a ses éta- 
mines fertiles, et ses carpelles nombreux, secs et indéhiscents. 


OO 

Les Actæes font l'ornement des bois montueux, par leurs feuilles 

élégamment découpées et leurs jolies corolles d'un blanc de lait; ce 

sont des plantes solitaires, qui fleurissent à la fin du printemps ou au 

commencement de l'été, et disparaissent dès l'automne; elles se con- 

servent très-bien dans les jardins, lorsqu'elles sont placées dans des 
positions convenables. 


SECOND GENRE, — Âanthorrhize. 


Le Xanthorrhize a un calice caduc de cinq pièces, cinq pétales 
tronqués, bilobés et amincis en pédicelles , cinq à dix étamines, à 
anthères introrses, cinq à dix ovaires oblong; terminés par des styles 
allongés et aigus, autant de carpelles aplatis, monospermes et bivalves, 
une semence attachée au haut du’carpelle, et pendante. 

Ce genre n’est jusqu'à présent formé que d'une seule espèce, le 
Xanthorrhize apiifolia, petit arbrisseau des bois de la Virginie, de la 
Georgie et des deux Carolines, dont les feuilles et les fleurs sortent, 
au premier printemps, des boutons écailleux qui les protégent pendant 
l'hiver. Les feuilles sont pétiolées, pennatisèques, à segments incisés ; 
les fleurs, disposées en grappes rameuses et pendantes, sont petites, 
d'un pourpre noir, et souvent unisexuelles par avortement. 

Le Xanthorrhize est, comme on le voit, un genre assez séparé de 
-ceux qui forment avec lui la tribu des Pæoniacées. I] en diffère, par 
le port, la forme de ses styles, et sa semence solitaire dans chaque 
carpelle. Ses fleurs pédicellées sur un axe filiforme et flottant, sortent 
au premier printemps d'un bouton écailleux, qui va chaque année 
en s'allongeant; leur premier verticille est formé de cinq sépales 
petits, lancéolés et planes; le second, de cinq pétales pédicellés et 
terminés par une double glande nectarifère ; le troisième, d’un nom- 
bre variable d'étamines, à anthères petites, bilobées, à pollen blan- 
châtre adhérent; le dernier enfin, de carpelles plus ou moins nom- 
breux, et dont les stigmates sont filiformes, papillaires et étalés, en 
sorte que la fécondation est directe toutes les fois que les étamines 
n'avortent pas; ces carpelles s'ouvrent, quoiqu'ils ne renferment 
qu’une semence, tandis que ceux des Actæes Christophoriana , qui en 
contiennent plusieurs, restent indéhiscents. 

Le Xanthorrhize, dont la racine et l'écorce sont jaunes, est cultivé 
dans les jardins ; on le multiplie quelquefois de graines, mais ordi- 
nairement de rejetons et d'éclats. 


0 


TROISIÈME GENRE. — Pæonia. 


Les Pæonia ou les Pivoines ont leur calice formé de cinq pieces 
inégales, foliacées et persistantes, leur corolle ordinairement de cinq 
pétales orbiculés, concaves, un peu inégaux et dépourvus d'onglet ; 
les étamines sont nombreuses, les pistils varient de deux à cinq, et 
sont quelquefois recouverts à leur base par un prolongement du 
réceptacle; les carpelles s'ouvrent intérieurement, et les semences, 
attachées sur deux rangs, sont grosses, lisses et brillantes. 

Ces plantes, dont l'on compte actuellement jusqu'à seize espèces, 
sont répandues dans la partie boréale de l'ancien continent , depuis le 
Portugal jusqu’à la Chine; elles habitent les climats tempérés, et se 
plaisent surtout dans les lieux écartés et un peu montueux, où elles 
vivent solitaires. La Chine en compte une seule , la Sibérie quatre ou 
cinq, les autres sont éparses dans l'Ukraine, la Tauride, la Russie et 
le reste de l'Europe. 

On les distingue en deux sections : 

1° Les Moutuns, à tige frutescente et disque dilaté en un urcéole 
membraneux, enveloppant plus ou moins les carpelles ; 

2° Les Pæons, à tige herbacée et disque à peine dilaté à la base des 
carpelles. 

La première section ne comprend qu’une seule espèce, la Pivoine 
Moutan , à feuilles glauques en dessous, et carpelles velus. Cette 
belle plante, cultivée depuis plus de mille ans dans les jardins de la 
Chine, a été introduite en Europe, dans le siècle dernier, par le célè- 
bre Banks ; c'est un arbrisseau qui peut s'élever chez nous jusqu'à dix 
pieds, et dont les fleurs, plus ou moins doublées, présentent toutes 
les nuances entre le blanc et le rose; on en distingue trois variétés : 
1° celle à fleurs de Pavots, dont les pétales blancs, au nombre de huit 
à treize, sont teints en pourpre à leur base, et dont les capsules sont 
presque entièrement enveloppées par le torus; 2° celle de Banks, à 
fleurs pleines, à pétales rouges au centre et légèrement frangés; 3° la 
Rose, à fleurs demi-pleines, et pétales encore plus obtusément frangés. 
Ces trois variétés sont représentées sur les papiers peints de la Chine, 
et elles produisent un grand effet par leurs fleurs larges de cinq à sept 
pouces, dont les nombreux pétales, aussi brillants en couleur que 
délicats en structure, sont encore relevés par une couronne d'étamines 
d’un jaune d'or. 

La Pivoine Moutan perd ses feuilles, qui tombent toutes les autom- 
nes en laissant des cicatrices très-apparentes ; chaque année, elle donne 


au 
des bourgeons semblables aux turions des espèces herbacées, et d'où 
sortent de nouveaux rameaux; elle ne se propage guère par ses 
graines, au moins dans nos climats, mais elle se multiplie par des 
marcottes qui poussent , la seconde année, des tubercules, au moyen 
desquels s'opère la transplantation. Cette plante s'élève peu , parce que 
les rameaux florifères périssent chaque année assez bas. 

Les Pæons sont beaucoup plus riches en espèces ; ils en contiennent, 
au moins, sept européennes : l'Officinalis, le Corallina , le Lobata, 
celle de Russi, l'Humilis, le Paradoxa, et le Tenuifolia. Mais elles 
diffèrent, en général, par des caractères si peu prononcés, qu’on 
pourrait bien n’apercevoir que des variétés dans quelques-unes d’entre 
elles. J'y distingue deux types : celui de l'Officinalis, dont les feuilles 
épaisses ont leurs lobes ovales ou lancéolés, et celui du Tenuifolia, à 
lobes minces et multifides. Les autres espèces de la même section 
s'éloignent peu des européennes, et la plupart appartiennent à mon 
premier type. 

Quelques-unes ont été produites par des fécondations artificielles, 
comme l'Aybride , qui paraît née du Tenuifolia et de Anomala , d'au- 
tres dépendent, sans doute, des localités ou du climat. Elles ne se 
distinguent presque les unes des autres que par la position plus ou 
moins verticale de leurs carpelles glabres ou velus, et les divisions plus 
ou moins prononcées de leurs feuilles : différences qui ne me parais- 
sent pas liées à l'organisation générale; et qui ne sont pas assez mar- 
quées pour que l’on puisse leur donner une grande importance; 
cependant le caractère tiré de la villosité des carpelles est plus 
constant, et il a été employé comme subdivision par Dr Canpozzr. 

Les racines des Pivoines du premier type sont formées d’une masse 
charnue d'où partent de tous côtés des prolongements fusiformes et 
renflés par intervalles; de cette masse charnue naissent toutes les 
pousses ou tous les turions qui se succèdent, sans interruption, pen- 
dant un grand nombre d'années, et qui élèvent la partie supérieure 
de la racine, tandis que l'inférieure se détruit. Ainsi, on ne peut mul- 
tiplier ces plantes qu’en éclatant, comme disent les jardiniers, la 
masse charnue; car les tubercules fusiformes qui se renouvellent 
chaque année, sont aussi inféconds que dans les Dahlia et les plantes 
d'une organisation semblable. 

Les racines du Pæonia tenuifolia et de celles qui appartiennent à ce 
second type, n'ont pas la même conformation que les précédentes ; 
ce sont des souches ou des rhizomes qui rampent horizontalement, 
et se détruisent par la base, tandis que leur sommet se charge de nou- 
veaux bourgeons. On n'y remarque point de tubercules fusiformes. 

1. 6 


ae. 

Les feuilles des Pivoines du premier type sont toutes découpées 
sur le même dessin ; elles sont deux ou trois fois ternées et plus ou 
moins divisées à leurs extrémités; les radicales forment, par l'avorte- 
ment de leur limbe, ces écailles rougeâtres et épaisses qui distinguent 
les bourgeons de ces plantes , et qui renferment les feuilles non déve- 
loppées, dont la forme est complète, et dont les lobes, couchés les 
uns sur les autres, sont recourbés sur leur surface supérieure. Les 
feuilles du second type sont bien renfermées dans des bourgeons 
semblables; mais leurs divisions se rapprochent en faisceau, et ne sont 
ni plissées ni roulées. Ces dernières, dont la texture est délicate, se 
détachent assez promptement de leur tige; les autres, au contraire, 
y restent adhérentes jusqu’au milieu de l'hiver. 

Les fleurs de toutes les Pivoines sont solitaires, terminales, et s’é- 
panouissent dès le milieu du printemps. Leur mode de développe- 
ment est le centrifuge; celles de la tige principale paraissent avant 
les autres. Les pétales, déjà colorés dans l’intérieur du calice, s’étalent 
à l'ombre aussi bien qu'à la lumière ; les deux sépales extérieurs sont 
foliacés, les trois autres, moins consistants, se prolongent souvent 
en pointe. 

L'estivation des pétales est fort irrégulière, au moins dans les indi- 
vidus à fleurs pleines; dans les autres, ces pétales sont plissés et plus 
ou moins chiffonnés; mais ils s'étendent ensuite avec beaucoup de 
régularité, et ne tombent pas comme ceux des Pavots. 

Les étamines sont très-nombreuses dans la Pivoine Moutan, le 
Tenuifolia , etc. Elles ne paraissent pas placées sur le réceptacle, mais 
sur un renflement qui borde le calice, et qui n’est autre chose que le 
torus moins développé du Moutan. La surface des carpelles qui est 
souvent velue, et retient par conséquent le pollen, paraît remplir les 
fonctions de nectaire; car, à l'époque de la fécondation, elle distille 
des gouttelettes de liqueur miellée, qui se répandent aussi sur les 
étamines et au fond de la corolle. 

Les anthères sont latérales, extrorses, et leur poussière se répand 
d’abord par le sommet où commence la rupture; elles se roulent 
ensuite en spirale, et leurs filets sont si mobiles qu'ils flottent au gré 
du vent. Les anthères prennent ainsi toutes sortes de positions, et 
plusieurs restent engagées entre les stigmates. Les premières qui s’ou- 
vrent sont les intérieures, en sorte que l'ordre de la fécondation est 
contraire à celui qui a lieu généralement dans la famille. Les vrais 
organes stigmatoïdes sont les bords glanduleux et papillaires des 
languettes qui terminent les pistils ; les carpelles sont inclinés pour la 
dissémination, et quelquefois même tellement déjetés, que leur 


D 5 PI 

ouverture est entièrement tournée en dehors. Les graines, diverse- 
ment colorées selon les espèces, müûrissent ordinairement à découvert, 
et restent long-temps attachées aux carpelles étalés ; elles ont une 
radicule infère correspondant à l'extrémité d'un raphé relevé qui pé- 
nètre dans l'enveloppe crustacée à quelque distance de l'ombilic; la 
Pivoine Coralline en particulier, est remarquable par ses belles graines 
sphériques d'un noir foncé, mêlées à d'autres avortées et d’un 
rouge carmin. 

Je n'ai pas apercu des mouvements organiques dans les Pivornes, si 
du moins j'excepte ceux des carpelles avant la dissémination , et ceux 
des fleurs du Zenuifolia et surtout du Moutan; cette dernière est si 
sensible à la lumière, que non-seulement elle étale ses pétales à la 
clarté des lampes , mais que ses pédoncules se redressent et s’incli- 
nent en divers sens, afin de recevoir plus directement les rayons 
lumineux. Les tiges sont constamment droites, ainsi que les fruits ; et 
les fleurs, une fois ouvertes, ne se referment que dans les espèces 
du premier type. 

Ces plantes font; au printemps, la décoration de nos jardins, par 
la grandeur et l'éclat de leurs fleurs rouges, roses, blanches, tachées 
à l'onglet, etc., mais jamais bleues ou jaunes. La plus brillante est, 
sans contredit, l'espèce commune, dont les fleurs, presque toujours 
doublées, ont dans leurs nombreuses variétés une grandeur et une 
magnificence qui les distinguent de toutes celles du même genre. Les 
amateurs en cultivent plusieurs autres, qui sont ou des espèces ou 
de simples variétés, mais qui, réunies, produisent dans les beaux mois 
du printemps, les effets les plus admirables. Cependant la plus recher- 
chée est la Pivoine Moutan, qui se conserve en hiver dans les oran: 
geries ou même en plein air, et dont les fleurs moins doublées, et 
par conséquent pourvues encore de leurs étamines, font, dès la fin 
de l’hiver, l'ornement de nos serres. Quelques-unes de ces plantes 
ont une faible odeur de rose. 

On peut remarquer que la fleur des Pivoines n’a pas été déformée 
comme celle des Aconits, et que par conséquent elle porte des 
graines ordinairement fécondes. 


NA — 


Seconde famille. — Délléniacées. 


Les Dilléniacées ont cinq pétales et cinq pétales en estivation im- 
briquee, les premiers persistants, les autres caducs et ordinairement 
jaunes, les étamines nombreuses insérées sur le torus, des anthères 
adnées et ordinairement introrses, des carpelles nombreux unilo- 
culaires, bivalves ou bacciformes. 

Cette famille comprend des arbres, des arbustes et des sous-arbris- 
seaux, la plupart originaires de l'Amérique sud , des Indes, des côtes 
et des îles de l'Afrique, ou même de la Nouvelle-Hollande. 

On la divise en deux tribus : 

1° Celle des Delimees , à filets dilatés au sommet, dont nous n'avons 
pas à nous occuper; 

2° Celle des Dilleniées, à filets non dilatés, qui renferme deux 
genres. 


DILLÉNIÉES. 


PREMIER GENRE. — Candolleu. 


Le Candollea a des étamines nombreuses et polyadelphes, des styles 
filiformes et deux à cinq carpelles ouverts intérieurement. 

Ce genre est formé de deux ou trois sous-arbrisseaux de la Nou- 
velle-Hollande, à feuilles simples, épaisses, entières ou dentées, à 
fleurs jaunes ordinairement terminales. 

Sa principale espèce est le Cuneiformis, à feuilles poste et 
dentées au sommet, à fleurs solitaires et terminales. La corolle est 
formée de cinq pétales caducs ; les étamines, au nombre de cinq, 
portent chacune quatre ou cinq anthères qui s'ouvrent près du 
sommet par deux pores, et les cinq ovaires ont leurs styles allongés et 
terminés par des stigmates en tête papillaire, glutineux, un peu laté- 
raux et penchés. 

Les pétales d’un beau jaune, tombent avant que la fleur soit com- 
plètement fécondée, les feuilles, finement ponctuées en dessous, sont 
amplexicaules et articulées au dessus de la base. On peut remarquer 
que, dans le Candollea, où les anthères sont introrses, les stigmates 
sont recourbés en dedans, tandis que dans les Hibbertia, où elles sont 
extrorses , les stigmates sont rejetés en dehors. 


SECOND GENRE. — /libbertia. 


L'Hibbertia a les étamines nombreuses, filiformes, libres et égales, 
les ovaires indéterminés et variant d’un à quinze, des styles filiformes 
et fléchis, des carpelles membraneux déhiscents, ordinairement mo- 
nospermes ou dispermes, des semences dépourvues d'arilles. 

Ce genre, qui compte déjà dix-neuf espèces, est divisé par DE 
CanDoLLE, en trois groupes un peu artificiels : 

1° Celui de dix à quinze carpelles un peu velus au sommet; 

2° Celui d'un à huit carpelles glabres ; 

3° Celui de deux à quatre carpelles veloutés ou écailleux. 


Le premier groupe est formé du Grossularia à feuilles orbiculées et 
crenelées, et à fleurs d'un beau jaune, pédonculées, solitaires et 
opposées aux feuilles. 

À la fécondation, les styles plus longs que les étamines et terminés 
par de petites têtes papillaires, se déjettent fortement sur les anthères 
biloculaires, dont les parois amincies s'ouvrent irrégulièrement, et le 
pollen, d'un jaune d'or, se répand en abondance sur le torus et le 
sommet velu des ES 

Dans le second groupe, on place le V’olubilis à calice coriace , 
pétales jaunes et caducs. Ses nombreuses étamines, redressées et 
stériles sur les bords, .ont des anthères percées au sommet de deux 
pores, et les cinq stigmates en tête papillaire divergent de tous côtés 
à la rencontre des anthères. 

Enfin dans le troisième, je trouve le Pedonculé, petite plante 
ligneuse qui a le port d’un Helianthème, et dont les feuilles alternes 
et linéaires sont roulées sur les bords ; la fleur jaune est terminale 
comme celle du Grossularia; ses trois styles très-allongés et qui se 
déjettent pour la fécondation, sont terminés par une petite tête 
papillaire, et les étamines extérieures sont dépourvues d’anthères; les 
pétales se détachent promptement. 

Je n'ai apercu aucun nectaire dans ces trois plantes. 

Tous les Hibbertia sont des arbrisseaux originaires de la Nouvelle-. 
Hollande, et quelques-uns sont cultivés dans nos serres. 


EN ES 


'roisième famille. — Ffagnoliacées. 


Les Magnoliacées se distinguent par des fleurs dont les enveloppes 
sont caduques et formées de plusieurs pièces disposées trois à trois 
sur un ou plusieurs rangs; leurs étamines et leurs ovaires sont en 
grand nombre, et leurs anthères sont adnées. 

Les parties de la fleur et de la fructification diffèrent beaucoup selon 
les genres. Le calice est composé de trois ou six sépales placés sur un 
ou deux rangs; les pétales varient de trois à vingt-sept, et sont tou- 
jours hypogynes ; les ovaires, quelquefois logés sur le torus au-dessus 
des étamines, plus souvent disposés en épi, sont toujours terminés 
par un style court et un stigmate simple; les péricarpes sont tantôt 
des capsules entr'ouvertes longitudinalement près du sommet ou vers 
la base, tantôt des follicules légèrement charnus et indéhiscents, 
tantôt des samares ailées et réunies en un cône lâche ou serré ; les 
semences sont toujours attachées à l'angle interne du péricarpe, le 
périsperme est charnu, l'embryon droit, petit et infère. 

Les Magnoliacées sont des arbres ou des arbustes élégants, dont 
plusieurs se distinguent par la beauté et le parfum de leurs fleurs. 
Plusieurs sont cultivées avec beaucoup de soin, soit en plein air, 
soit dans les serres. Tout le monde connaît les Magnolia et le 
Tulipier. 

Cette famille était à peu près inconnue à l'Europe, du temps de 
Baumin; Liné en a décrit dix espèces, Wicznenow seize, PERsooN 
trente et une, De Canpore trente-six : treize, environ, habitent 
l'Amérique septentrionale, cinq les Antilles ou l'Amérique du sud, 
quinze les Grandes-[ndes, la Chine ou le Japon; et trois es 
l'Australasie, 

Les feuilles sont alternes, articulées à leurs tiges, ordinairement 
roulées sur leurs deux bords, comme celles des pommiers, et enve- 
loppées séparément, dans leur vernation , par une stipule membra- 
neuse qui tombe, comme celle des Figuiers, en laissant sur la tige 
une cicatrice circulaire. Les stipules du Tulipier sont différemment 
conformées. 

Ces plantes sont aujourd'hui distribuées en deux tribus, et com- 
prises sous huit genres, 


1, SE — 


Première tribu. — ILLICIÉES. 


Les Jlliciees ont les carpelles disposés en verticilles et très-rare- 
ment solitaires par avortement ; leurs feuilles sont chargées de glandes 
internes et transparentes. 


PREMIER GENRE. — Jllicium. 


L'Jllicium a trois à six sépales pétaloïdes, des carpelles monospermes 
et déhiscents par le côté supérieur, et renfermant une semence 
brillante. 

Ce genre renferme trois arbrisseaux très-glabres , à feuilles toujours 
vertes, l'Anisatum du Japon et de la Chine, le Parviflorum et le Flori- 
danum de la Floride occidentale. 

Ce dernier porte deux ou trois fleurs au sommet des vieux rameaux 
qui sont dépassés par les jeunes pousses, et dont les pédicelles uni- 
flores sont recourbés ; ses six sépales oblongs sont caducs, ses nom- 
breux pétales teints en pourpre et étalés, sont disposés sur trois 
rangs, et ses étamines, qui varient de trente-neuf à quarante-deux , 
portent, sur leur côté intérieur, des anthères à pollen blanchâtre qui 
fécondent des stigmates tubulés, recourbés en dehors et verticillés 
comme ceux des Sempervivum. 


Deuxième tribu. — MAGNOLIÉES. 


Les Magnoliees ont des carpelles disposés en épi autour d’un axe, 
et des feuilles dépourvues de glandes transparentes. 


PREMIER GENR£. — Magnolia. 


Les Magnolia ont des capsules disposées en épi, et qui renferment 
une ou deux semences ; elles s'ouvrent à l'angle externe et restent 
long-temps sans tomber. 

On les divise en deux sections : 

1° Les Magnoliastrum, à anthères extrorses, ovaires rapprochés, 
et bouton renfermé dans une seule bractée. 

2° Les Gwillimia, à anthères introrses, ovaires un peu écartés, et 
bouton renfermé par deux bractées. 


_-#a8 

Les Magnoliastrum sont tous originaires d'Amérique , et les 
Gwillimia d'Asie. Ces derniers sont encore peu connus. 

Les Magnoliastrum, qui comptent actuellement neuf espèces, for- 
ment de grands arbres de trente à quatre-vingt-dix pieds, dispersés 
dans les vastes forêts de l'Amérique septentrionale, depuis la Caroline 
jusqu'au Canada. Leurs feuilles, roulées d’abord sur leurs deux bords, 
et protégées par deux stipules opposées, paraissent de bonne heure 
au printemps, et tombent en automne ou périssent pendant l'hiver ; 
leurs fleurs, solitaires au sommet des rameaux, sont portées sur un 
pédoncule raccourci, et enveloppées par une seule bractée qui se fend 
lätéra'ement avant de tomber. 

Les tiges florales ou les pédoncules des Magnoliastrum périssent 
chaque année après avoir répandu leurs graines, et sont remplacées 
par des pousses latérales qui subissent à leur tour le même sort ; les 
feuilles ne sont pas renfermées dans un bourgeon commun formé de 
la réunion d'un grand nombre d'écailles ou pétioles dilatés; chacune 
d'elles au contraire est protégée par sesstipules, qui me paraissent des 
organes propres, et ne peuvent guère être considérées comme des 
feuilles avortées. 

Le calice se confond souvent avec les vrais pétales, tant par sa forme 
que par sa consistance; les pétales, qui varient de six à douze, tom- 
bent successivement après la floraison; les étamines ont leurs nom- 
breux filets insérés comme les téguments floraux à la base de l'axe qui 
porte les pistils : dans la principale espèce, ou le Grandiflora, elles 
sont appliquées contre les ovaires, et leur poussière est logée dans 
deux rainures latérales terminées par une petite languette cartilagi- 
neuse ; elles tombent très-promptement. 

La fécondation des Magnoliastrum n’a pas encore été suffisamment 
étudiée : on ignore de quelle manière se répand le pollen, et quelle est 
la structure précise du stigmate. Pourquoi les anthères sont-elles 
extrorses? Quelle est la partie de la fleur qui remplit les fonctions de 
nectaire? Est-ce la languette cartilagineuse qui couronne les éta- 
mines? C'est ce que je ne saurais décider; mais je remarque en même 
temps que les stigmates du Grandiflora m'ont toujours paru avortés, 
tandis que dans leur patrie ils sont allongés, velus et portés sur un 
style tors; cependant on recueille dans les jardins du midi de l'Eu- 
rope, à Montpellier, Chambéry, etc., des graines de Magnoliastrum 
qui germent aussi facilement que celles qu’on retire d'Amérique. Ces 
graines sont toujours renfermées régulièrement deux à deux dans 
des capsules trigones et bivalves, qui s'ouvrent longitudinalement 
sur leur face externe, et elles présentent un phénomème peut-être 


dep 

unique dans tout le règne végétal, celui de leur pédicule composé de 
fibres fasciculées, et fortement réunies; il s’allonge ou se déplie pen- 
dant la maturation, et lance en dehors des graines ordinairement d'un 
beau rouge, et suspendues en l'air, jusqu'à ce que leur attache se 
rompe, ou qu’elles soient enlevées par les oiseaux. 

Ces semences sont remarquables par leur enveloppe charnue et 
bacciforme, qui recouvre un tégument testacé; le périsperme est 
charnu, et l'embryon est placé à la base; les cotylédons sont foliacés, 
et la radicule est infère. 

La plupart des Magnoliastrum sont cultivés dans les jardins ou dans 
les bosquets de l'Europe. Tels sont le Grandiflore, la plus belle des 
espèces, soit pour la hauteur à laquelle elle s'élève, soit pour l'éclat 
de ses fleurs blanches et odorantes, qui dans leur climat natal se suc- 
cèdent une grande partie de l’année; le Glauque, moins élevé, habi- 
tant les lieux humides, à fleurs beaucoup plus petites et aussi odoran- 
tes ; l'Ombrelle, remarquable par ses feuilles caduques, étalées en 
parasol, et moins recherché que les autres à cause de son odeur 
un peu fétide ; l'Acuminé, plus élevé peut-être que le Grandiflore, 
et distingué par ses feuilles caduques, acuminées et pubescentes 
en dessous; l’Auricule, plus petit de moitié, à fleurs moyennes, 
blanches , odorantes, et à feuilles caduques, cordiformes et auricu- 
lées ; enfin le Macrophylle, à peu près de la même hauteur, dont 
les feuilles caduques sont très-grandes, d’un blanc glauque en des- 
sous, et dont les fleurs odorantes sont tachées de pourpre en dedans. 
Mais tous ces beaux arbres, les plus remarquables peut-être du règne 
végétal, restent petits et comme avortés dans nos climats, tandis 
qu'ils déploient toute leur pompe dans les forêts de leur patrie, où 
leurs magnifiques fleurs exhalent les plus doux parfums une grande 
partie de l’année. 

Les Gwillimia, ou les Magnolia de la seconde section, sont tous 
originaires de la Chine, du Japon ou des îles adjacentes; on en compte 
aussi neuf, dont quelques-uns sont encore très-peu connus, mais 
dont la plupart sont cultivés en Chine, d'un temps immémorial , soit 
pour leurs fleurs, soit surtout pour leur odeur. Tels sont, le Yulan, 
qui, dans son pays natal, s'élève jusqu’à quarante pieds, mais qui, 
dans nos jardins, n'en dépasse guère quatre à cinq; le Xobus, presque 
aussi grand, et appartenant au même type; l’Obové ou le Discolor, 
ainsi appelé de ses pétales blancs à l'extérieur et pourprés en dedans; 
le Fuscata, qui, comme l'Obove, n’est qu’un arbrisseau , mais dont 
les fleurs d'un rouge jaunâtre ont une admirable odeur; enfin le Pu- 
mila, qui se distingue des quatre autres par ses feuilles épaisses et 


son 
réticulées , ainsi que par ses fleurs penchées. Dans les trois premières 
espèces , les feuilles paraissent après les fleurs, et tombent ensuite; 
dans les deux autres, elles naissent plus tard, mais elles sont persis- 
tantes. 

Les Magnolia de cette section ne supportent pas les hivers, et ne se 
conservent bien que dans nos serres tempérées. Ils diffèrent des pre- 
miers, non-seulement par leur bractée florale double, et leurs anthères 
introrses, mais encore par leur organisation générale; ce sont des 
plantes qui paraissent avoir été altérées par une longue culture, et 
qui ne fructifient jamais en Europe. Les botanistes n'ont point encore 
la connaissance complète de leurs fruits; ils savent seulement que les 
graines des Gwillimia sortent de leurs capsules et sont pendantes 
comme celles des Magnoliastrum. 

Le Yulan , qui fleurit, comme la plupart des autres, au milieu de 
l'hiver , présentait, lorsque je l'ai observé, ses feuilles débarrassées 
de leurs deux stipules velues et plissées encore sur leur face supère. A 
cette époque, les pétales étaient tombés; les anthères, appliquées 
des deux côtés du filet qui sert de connectif, répandaient latéralement 
une poussière peu abondante, et les germes paraissaient avortés. Du 
bas de la fleur suintait une humeur assez abondante, mais à peu près 
insipide. Quelques jours plus tard, les filets et les styles tombaient en 
se désarticulant , ensuite le pédoncule se séparait de la tige en laissant 
sa cicatrice. 

Les Magnolia sont à peu près dépourvus de lenticelles ; au contraire, 
les Gwillimia en ont de très-apparentes, principalement les espèces 
à feuilles caduques. 


SECOND GENRE. — liriodendrum. 


Le Liriodendrum ou Tulipier a un calice formé de trois pièces cadu- 
ques, six pétales rapprochés en cloche et placés sur deux rangs, des 
anthères allongées et latérales, des ovaires imbriqués et des stigmates 
globuleux. Les fruits sont disposés en cône sur un axe central: ce sont 
des samares qui renferment chacune deux graines à leur base, et qui 
ont la forme d’une membrane lancéolée et assez épaisse. 

Le Liriodendrum tulipifera | seule espèce de ce beau genre, est ori- 
ginaire de l'Amérique septentrionale, où il s’élève jusqu’à cent pieds; 
mais il a été de bonne heure transporté en Europe, et il fait aujour- 
d’hui l'ornement de nos bosquets et même de nos demeures champé- 
tres, autant par son magnifique feuillage que par la beauté et la singu- 
larité de ses fleurs. Son mode de végétation, semblable à celui des 


2e 
Mugnolia, en diffère cependant assez pour mériter d'être décrit. 

Les feuilles, dans leur vernation, sont plissées sur leur nervure 
moyenne, recourbées sur leur pétiole allongé, et renfermées séparé- 
ment dans une coiffe formée de deux stipules opposées et comme sou- 
dées; au dedans de ce capuchon, on en trouve un autre de même 
nature, pourvu aussi de sa feuille, et ainsi de suite à l'indéfini. Ce 
bourgeon, qu'on pourrait appeler continu, et auquel DE CaNpozrE 
donne le nom de stipulacé, se développe pendant tout le cours de 
l'année; mais, aux approches de l'hiver, lorsque la végétation est 
suspendue, les deux stipules terminales, qui ne sont pas encore ou- 
vertes , s'endurcissent et se recouvrent d'une légère couche résineuse, 
destinée avec les stipules à protéger les feuilles à naître. Quelquefois la 
plus extérieure de ces jeunes feuilles périt pendant l'hiver, et alors le 
bourgeon est protégé par une double paire d'écailles. C'est là une de 
ces modifications nombreuses que la nature apporte à ses lois, et qui 
a ici pour but de garantir plus sûrement le bourgeon contre les intem- 
péries. 

Les feuilles du Tulipier sont alternes et d’une structure tout-à-fait 
semblable à celles du Platane ; leur forme bizarre les distingue de 
toutes les autres; c'est, dit-on, celle de la lyre antique, ou plutôt 
d'un fer de pique tronqué vers sa pointe, et dont chaque oreille est 
double; la feuille porte ainsi sur son côté trois lobes et deux enfonce- 
ments inégaux, et son sommet forme un angle rentrant. Je ne puis 
me rendre compte de cette découpure si régulière à la fois et si inso- 
lite, car il n’y avait rien dans l'intérieur de la coiffe qui parût la né- 
cessiter. 

Les stipules tombent à peu près au moment où elles s'ouvrent, et 
leurs cicatrices sont long-temps visibles sur la tige. On peut remarquer 
ici, comme dans les Magnolia, que l'anneau circulaire est assez éloi- 
gné de la base du pétiole, ce qui provient de l'allongement de la tige, 
au moment où le bourgeon s'ouvrait. 

Les fleurs terminent toujours les branches et leurs rameaux ; elles 
sont aussi protégées par deux stipules, qui forment une coiffe beau- 
boup plus ample que celle des simples feuilles. L'épanouissement a 
lieu, dans nos climats, à la fin du printemps; il est simultané pour 
les fleurs des principales branches, et centrifuge pour les rameaux. Il 
y a peu de spectacles aussi curieux pour un botaniste, que celui de ces 
grandes fleurs, qui, comme de brillantes Tulipes, couvrent, pour 
ainsi dire, et couronnent tout le feuillage de ces beaux arbres. 

Les sépales du Tulipier sont concaves , un peu colorés, membra- 
neux et marqués de nervures; les pétales sont jaunes à la base, orangés 


gi. 

vers leur milieu, et verdâtres sur les bords; leur substance coriace ne 
renferme aucune glande brillante ou veloutée, mais elie paraît desti- 
née à remplir une fonction importante dans l'acte de la fécondation; 
examinée à l'intérieur, elle est recouverte de pollen, et enduite d'une 
matière visqueuse , produite par la surface intérieure et orangée de la 
corolle; cette matière recoit probablement le pollen, et le renvoie 
ensuite sur les stigmates. 

Les étamines sont fort nombreuses, et les anthères s'étendent sur 
la partie extérieure du filet; leur poussière sort par deux rainures lon- 
gitudinales, placées en face des pétales, et tombe immédiatement sur 
les taches orangées qui, à l'époque de la fécondation, distillent l'humeur 
miellée en petites gouttelettes : ce sont les émanations de ce pollen 
qui fécondent les stigmates globuleux papillaires et demi-transparents, 
car le pollen lui-même qui est sec et pulvérulent ne peut pas tomber 
immédiatement sur les stigmates, puisque les anthères sont entière- 
ment extrorses. 

GærTNER raconte qu'il a ouvert plus de cinq cents graines de Tuli- 
pier, sans y trouver un seul embryon; mais il ne dit pas si ces graines 
étaient étrangères ou indigènes. Du reste, on tire d'Amérique celles 
qu'on destine à des semis, et qui, dans certaines années , sont même 
infécondes. On peut expliquer ce fait, en supposant une température 
pluvieuse ou humide, qui détruise la viscosité des pétales, ou même 
qui détrempe et entraîne le pollen. Cet accident est d’autant plus pro- 
bable, que les fleurs du Tulipier restent toujours ouvertes et droites, 
dès qu'une fois elles sont épanouies. Heureusement elles se succèdent 
assez long-temps, pour qu'elles puissent être fécondées, au moins 
en partie, non-seulement en Amérique, mais encore en Europe. 

Les ovaires, d’abord disposés en cône et serrés étroitement les uns 
contre les autres, s'écartent fortement avant l'époque de la dissémina- 
tion , qui s'opère chez nous dans le mois de janvier. Les samares sont 
alors dispersées au gré du moindre vent, leur axe ou leur réceptacle 
reste seul à l’extrémité de la branche, où il se dessèche et se 
rompt dans le courant de l'année; la branche repousse un peu 
plus bas. 

Les samares sont terminées par une aile cartilagineuse et renferment, 
dans leur base renflée et comme parenchymateuse, des graines cons- 
tamment géminées, selon GærTNEr, au bas du cône, et solitaires 
près du sommet. Les cotylédons sont ovales, foliacés et planes, d’après 
l'observation de Mir8er. 

Le Tulipier présente des variétés dans la couleur blanche ou jaune 
de son bois, dans la forme de ses feuilles et dans la teinte de ses fleurs, 


ar 
quelquefois d'un beau jaune. Ses branches sont renflées à leur nais- 
sance, et son écorce est chargée de lenticelles. 
Il acquiert en Amérique une hauteur de cent pieds et plus, etil est 
déjà placé, en Europe, au rang des grands arbres qui bravent les 
hivers. 


Quatrième famille. — Anonacées. 


Les Anonacees ont un calice à trois lobes, rarement à quatre; une 
corolle à six pétales sur deux rangs, dont l'intérieur avorte quelque- 
fois ; des étamines nombreuses et libres, des péricarpes distincts ou 
réunis, et des semences remarquables par les plis ou les prolonge- 
ments subulés de leur endoplèvre, qui les pénètre. Ce dernier carac- 
tère surtout distingue la famille. 

Le calice des Anonacées est persistant, alterne aux pétales exté- 
rieurs, opposé aux intérieurs. Les pétales sont coriaces comme le 
calice, leur estivation est valvaire dans chaque rang, et les intérieurs 
varient beaucoup en grandeur. Les étamines s'appliquent souvent 
contre le disque central, qu'elles recouvrent alors entièrement; les 
filets sont très-courts ; les anthères, presque sessiles, ont un connectif 
à peu près tétragone , dont le sommet est souvent glanduleux et nec- 
tarifère ; elles s'ouvrent extérieurement et surtout par le bas; quelque- 
fois les intérieures semblent soudées aux ovaires, et quelquefois aussi 
les extérieures sont stériles. 

Les ovaires, ordinairement très-nombreux, sont toujours mono- 
styles; tantôt simplement agrégés , tantôt véritablement réunis; leurs 
fruits sont des baies, et des capsules sessiles ou pédonculées; les se- 
mences, dont le nombre varie beaucoup, sont ovales, oblongues, 
placées sur un ou deux rangs, et adhérentes à l'angle intérieur, Leur 
enveloppe externe est un peu crustacée et fragile, et leur endoplèvre 
se confond avec le périsperme, qu’il pénètre sous mille formes bizar- 
res; le périsperme, qui est dur et charnu, remplit toute la cavité du 
test; l'embryon est petit et logé tout près de l'ombilic, les cotylédons 
sont courts, la radicule est infère. 

Les Anonacées sont des arbres moyens ou des arbrisseaux exotiques, 
et par conséquent inconnus aux anciens botanistes. À peine BAUKIN 
en a-t-il indiqué deux espèces, et Linné treize; mais leur nombre 
s'est tellement accru, que Dunar en a déjà décrit cent cinq espèces, 


— 94 -— 


et qu’Alphonse De Canporre, dans un nouveau mémoire sur cette 
famille publié en 1832, en porte le nombre à deux cent cinq. 

Ces plantes sont no dans les parties centrales des deux con- 
tinents. On en compte actuellement quatre-vingt-sept en Asie, vingt- 
deux ou vingt-trois en Afrique, et quatre-vingt-cinq en pme 
mais comme plusieurs sont cultivées également dans ces trois parties 
du monde, et qu’on ne les retrouve guère dans l’état sauvage, leur 
origine est encore incertaine. 

Les Anonacées sont jusqu’à présent très-peu répandues en Europe, 
quoique celles qui appartiennent à l'Amérique tempérée pussent faci- 
lement s’y acclimater; nos serres chaudes ou tempérées n’en comptent 
que quelques espèces, qui ne fleurissent presque jamais. 

La structure de ces végétaux ne ressemble pas mal à celle de nos 
arbres fruitiers ; leur tronc et leurs rameaux, ordinairement droits, 
mais quelquefois volubles, sont cylindriques, recouverts d’une écorce 
souvent réticulée ou verruqueuse, et parsemés de lenticelles ‘très 
visibles; les feuilles sont alternes et articulées à la tige, dont elles se 
détachent aux approches de l’hiver ou dans la saison sèche , selon les 
climats; elles sont pétiolées, simples etentières , penninerves, souvent 
velues en desseus et percées de glandes transparentes semblables à 
celles des Hypericum. 

Dans la vernation, elles sont plissées sur leur nervure principale, 
et plus ou moins contournées , jamais protégées par des bourgeons 
ou des stipules. Lorsque la pousse de l’année est accomplie, son extré- 
mité supérieure se rompt comme dans plusieurs arbres d'Europe, et 
les nouveaux rameaux sortent de l’aisselle des feuilles précédentes. 

Les pédoncules, ordinairement axillaires, quelquefois cependant 
latéraux ou même opposés aux feuilles, sont courts, solitaires, uniflo- 
res ou multiflores, souvent garnis de quelques bractées, et souvent 
aussi recourbés en crochets, lorsque leurs fleurs sont avortées; quel- 
quefois enfin ils ont une articulation dans leur milieu. 

On peut distinguer dans ces plantes trois sortes de fruits : 1° ceux 
qui proviennent d’un seul ovaire; 2° ceux qui sont composés de plu- 
sieurs carpelles isolés; 3° ceux qui résultent de l’agrégation et de la 
soudure de plusieurs ovaires, et par suite de plusieurs carpelles. La 
surface rarement lisse de ces agrégations est souvent dure et coriace; 
souvent aussi elle est réticulée, couverte de pointes et d’écailles char- 
nues, qui correspondent à autant de carpelles soudés. 

Les fruits, à un seul ovaire, sont des baies globuleuses à péricarpe 
épais, 2 de graines placées sans ordre apparent et entourées de 
pulpe; nous ne sommes guère en état de connaître ces fruits dans 


10h. 


leur jeunesse; mais nous pouvons conjecturer avec raison que leurs 
cloisons primitives ont disparu dans la suite du développement. 

Les fruits à plusieurs ovaires sont, comme nous l'avons dit, sessiles 
ou stipités, et dans les deux cas, ils laissent leur cicatrice au point d'at: 
tache. On voit sur les carpelles, des bosselures qui indiquent la place 
des graines, et des étranglements qui correspondent à leur séparation. 

Les poils sont ordinairement courts et étoilés; on les rencontre plus 
fréquemment sur les calices et les jeunes pousses, qui s’en dépouillent 
en vieillissant. Jusqu'à présent, on ne connait aucune Ænonacee à 
aiguillons , mais quelques-unes de leurs espèces sant pourvues de cro- 
chets semblables à des vrilles, et qui proviennent de l'avortement des 
pédoncules, dont la destination est ainsi changée. 

Les Anonacees, surtout les espèces du genre Anona, qui s'élèvent 
déjà à quarante-trois, sont cultivées, de temps immémorial, sous les 
tropiques, principalement en Chine, dans les Grandes-Indes et les 
îles adjacentes, dans l'Amérique méridionale et les Antilles ; elles for- 
ment quelquefois de belles allées ombragées, d'autres fois elles déco- 
rent des jardins somptueux ou des habitations champêtres; en un 
mot, ce sont les arbres fruitiers des pays chauds, et c'est la raison 
pour laquelle quelques-unes d’entre elles n'ont point encore de patrie 
connue, et ne sont peut-être que des variétés obtenues par la culture. 

Elles comprennent actueliement dix-sept genres assez distincts par 
le port, mais principalement fondés sur la considération du fruit 
solitaire ou multiple, à une, deux ou plusieurs graines, nues ou 
munies d'un arille résineux, et placées le long des carpelles seulement 
près de la base. 

La recherche physiologique là plus importante dans cette famille 
concerne le mode de fécondation. Les anthères, qui sont souvent 
couchées sur le disque de la fleur, répandent-elles immédiatement 
leur poussière sur les stigmates ? Si cela est ainsi, pourquoi ces 
anthères sont-elles extrorses ? Quel rôle jouent ici ces points glandu- 
leux qui les terminent ? Ne sont-ils pas les vrais nectaires ? La fécon- 
dation est-elle uniforme dans les divers genres, etc. ? Toutes ces 
questions, et d'autres semblables, ne peuvent être résolues que par 
l'inspection des fleurs. 

Il serait aussi intéressant d'étudier celles de ces plantes qui sont 
grimpantes , de reconnaitre l'usage de ces crochets si fréquents dans 
les Anona , et d'examiner comment s'opère la dissémination dans les 
espèces sauvages. 

Les capsules des {nonacées présentent de beaux exemples de sou- 
dure. À quelle époque les fruits commencent-ils à se souder ? 


De 


Cinquième famille, — Æénispermées. 


Les Ménispermées ont des fleurs unisexuelles à pétales plus ou moins 
nombreux ; leurs étamines sont presque toujours monadelphes et 
opposées aux pétales ; les ovaires sont libres ou réunis ; les semences 
aplaties ont la forme de croissant ou de fer à cheval. 

Cettefamille présente plusieurs caractères qui la distinguent de toutes 
les autres ; les espèces dont elle est formée sont des arbrisseaux grim- 
pants dépourvus de toute stipule ou organe étranger, comme vrille, 
aiguillon, épine , etc.; les fleurs dioïques , sans doute par avortement, 
sont petites, peu apparentes et ordinairement blanchâtres ; leurs tégu- 
ments, en ordre ternaire ou quaternaire, sont hypogynes, caducs, 
et disposés sur un ou plusieurs rangs; les étamines, quelquefois égales 
aux pétales, souvent trois ou quatre fois plus nombreuses, ont leurs 
anthères adnées à la base ou au sommet du filet ; dans le premier cas, 
elles sont introrses ; dans le second, extrorses; les ovaires offrent les 
mêmes soudures que ceux des Anonacées; quelquefois ils sont dis- 
tincts ou à peine réunis ; d'autres fois ils sont solitaires en apparence, 
mais formés réellement de plusieurs loges toutes terminées par un 
style; enfin ils sont solitaires et uniloculaires par avortement, comme 
dans les Delphinium Consolida ; ce qu'on reconnaît à leur excentricité. 
Presque tous ces péricarpes sont des baies monospermes en forme 
de ménisque aplati. Les semences présentent la même forme; leur 
embryon est courbé et plus ou moins circulaire, le périsperme est 
ordinairement assez marqué, les cotylédons sont planes, tantôt rap- 
prochés, tantôt distants et placés chacun dans une cavité correspon- 
dante, comme on peut le voir dans le Cocculus fenestratus , etc. La 
radicule est vraiment supère, quoique par l’accroissement latéral de 
la semence, elle semble quelquefois infere. 

La végétation des Ménispermées ressemble à celle de la plupart des 
plantes volubles, qui s’allongent jusqu’à ce qu'elles soient arrêtées 
par l'hiver dans les climats froids, et par la sécheresse dans les autres. 
Les feuilles sont simples , rarement composées, souvent cordiformes, 
peltées, palmées et mucronées au sommet, leurs pétioles sont ren- 
flés et charnus à la base, pour la facilité des mouvements. 

La première connaissance de cette famille est due à RHEEDE; LINNÉ, 
plus tard, en décrivit dix espèces; Wirrnenow, ensuite, vingt-neuf; 
et aujourd'hui on en compte au-delà de cent, comprises principale- 
ment dans les deux genres Cocculus et Cissampelos. Six à peu près 


= Tes 
habitent l Amérique du nord ; une seule, la Sibérie; cinq, l'Afrique; 
les autres sont répandues dans la Chine, le Japon , les Indes orien- 
tales, l'Amérique équinoxiale, et surtout le Brésil, d'où Auguste 
Sarnr-Hizaire en a rapporté plusieurs, qui jetteront sur toute la 
famille une nouvelle lumière. 

La plupart des espèces qui la composent actuellement sont encore 
très-peu connues, parce qu'elles habitent dans l'épaisseur des forêts, 
qu'elles fleurissent au sommet des arbres, et surtout qu'elles sont 
dioïques ; car il arrive souvent qu'on n'apporte en Europe que l'un 
des deux sexes, et qu'on prend deux individus qui diffèrent par le 
sexe pour deux espèces distinctes. Cette erreur est d'autant plus facile, 
que les feuilles de ces deux individus ne sont pas toujours sembla- 
bles, et qu’elles peuvent être palmées dans l'un, et peltées dans 
l'autre, comme on le voit dansle Cissampelos Mauritiana, par exemple. 

Les fleurs des deux sexes présentent aussi des différences : les unes 
et les autres naissent à l’aisselle des feuilles ou un peu au-dessus; mais 
les pédoncules mâles ne sont pas ramifiés de la même manière que les 
autres; leurs bractées diffèrent aussi de celles des fleurs femelles, soit 
pour le nombre, soit pour la forme. Ces aberrations dépendent, sans 
doute, des avortements et des développements plus ou moins étendus; 
car on ne peut guère imaginer qu'elles tiennent à une organisation 
primitive différente. 

Les Menispermees s'entortillent de droite à gauche, et cette dispo- 
sition, qui se retrouve souvent dans les pétioles, est due aux filets 
ligneux de la tige, qui se contournent intérieurement, comme dans 
le Menispermum canadense. Comment arrive-t-il que toutes les tiges 
effilées et allongées soient contournées ? Je comprends bien la cause 
finale ou le but de ce rapport, mais je ne vois pas également que 
l'allongement soit une conséquence de la torsion, ou l'inverse. Je n’ose 
dire toutefois que les tiges sont entièrement dépourvues de liber, et 
que l'écorce est réduite à une membrane très-amincie. 

Les fleurs méritent d'être examinées sous le rapport de la féconda- 
tion; les individus mâles sont-ils placés bien loin des autres, et leur 
poussière est-elle abondante comme celle des Æmentacees ? Bosc dit, 
dans le Dictionnaire d'Histoire Naturelle de 1803, que le Menisper- 
mum virginianum , variété du Canadense, s'élève dans sa patrie au- 
dessus des plus grands arbres, qu'il couronne de ses fruits d'un beau 
rouge, en sorte que sa fécondation s'opère dans les airs au-dessus des 
forêts; et ce qui a lieu pour cette espèce, arrive sans doute dans la 
plupart des autres. Mais ce qui est encore plus digne de considération, 
c'est que les anthères sont extrorses dans certains genres, et introrses 


I. 7 


O8 = 
dans d’autres où elles paraissent différemment conformées. La fécon- 
dation est donc variable dans cette famille ; il doit en être de même du 
nectaire, si du moins il existe, ce que j'ignore. 

Les feuilles des Ménispermées tombent chaque année, comme on 
peut s'en assurer par l'articulation de leurs pétioles. Les pédoncules 
se séparent sans doute aussi pendant la dissémination, les tiges elles- 
mêmes périssent vers le haut, après avoir donné des fleurs, et repous- 
sent du bas ou même des racines; mais elles donnent peu de rameaux, 
comme la plupart des plantes grimpantes. Leur végétation ne ressemble 
pas mal à celle des Tamus. Cependant on trouve un peu au-dessus de 
la cicatrice des anciennes feuilles, deux ou trois bourgeons qui sont 
propres aux Menispermees. 

Cette famille, si naturelle à plusieurs égards, vient d’être traitée de 
nouveau par Auguste Sainr-Hiraire, qui en a observé plusieurs 
espèces vivantes, et qui a déjà corrigé les caractères de quelques-uns 
de ses genres. Il a observé que la flexion de l’ovaire du Céssampelos 
commence immédiatement après la floraison, et produit enfin la forme 
de fer à cheval, qui se communique aussi à l'embryon, dont les coty- 
lédons et la radicule deviennent alors infères. Il a également remarqué 
que les étamines avaient une structure singulière, que leurs anthéres 
s'ouvraient longitudinalement, etc.; il présentera sans doute succes- 
sivement le tableau des nombreux phénomènes physiologiques qui 
distinguent les Menispermees. 

Cette famille comprend actuellement dans De Cannozre douze 
genres divisés en trois tribus; nous n’en décrirons que deux. 


PREMIER GENRE. — Cocculus. 


Le Cocculus a les sépales et les pétales disposés presque toujours 
en ordre ternaire, ses six étamines sont libres et opposées aux pétales, 
ses carpelles varient de trois à six, et ses drupes bacciformes sont 
souvent aplaties et monospermes. 

Ce genre est déjà composé d’une cinquantaine de petits arbrisseaux 
volubles et la plupart originaires des Indes orientales, les autres sont 
dispersés dans COTE les Antilles, ou même en Égypte; aucun 
n’est indigène de l'Europe. 

Une des espèces les plus cultivées est le Laurifolius, plante dioïque 
comme presque toutes ses congénères, dont les feuilles alternes et 
entières sont articulées à un pétiole aminci et cartilagineux; les fleurs 
mâles, qui naissent un peu au-dessus de l’aisselle dans les rameaux 
supérieurs, sont disposées en petites grappes jaunâtres sur un pédon- 


Log 
cule filiforme et allongé ; le périgone est formé de six divisions pro- 
fondes sur deux rangs, les étamines à filets très-courts et anthères 
bilobées répandent immédiatement leur pollen sur :e torus probable- 
ment mellifère de la fleur très-étalée : je ne connais pas l'individu 
femelle. 

La plupart des espèces ont une organisation tout-à-fait semblable, 
et sont par conséquent homotypes. 


SECOND GENRE. — Menisperme. 


Le Menisperme , débarrassé de toutes les espèces étrangères qui lui 
avaient été autrefois associées , se distingue par ses fleurs dioïques de 
six à douze sépales disposés en ordre ternaire ou quaternaire ; les 
pétales, qui varient de six à huit, sont placés sur deux rangs, les éta- 
mines, au nombre de douze à vingt-quatre, sur trois ou quatre rangs ; 
les anthères sont terminales et quadrilobées, les ovaires ( deux à 
quatre ) légèrement stipités et bifides près des stigmates; les fruits 
sont des baies monospermes et un peu réniformes. 

Les Menispermes sont des arbrisseaux grimpants, à feuilles peltées, 
cordiformes, anguleuses et nervures palmées. Les pédoncules sont 
axillaires ou supra-axillaires ; ceux qui portent les fleurs mâles diffé- 
rent à peine des autres, ils se flétrissent promptement, tandis que les 
fructifères grossissent après la fécondation. 

L'espèce la plus commune, qui se propage très-facilement, est le 
Menispermum canadense , dont les fleurs mâles ont environ dix-huit 
étamines, et les femelles deux à quatre ovaires. Toutes les deux sont 
portées sur des pédoncules courts extra-axillaires, et disposés en 
grappes lâches un peu irrégulières ; les pédoncules mâles tombent 
incontinent après la floraison , et laissent une cicatrice assez bien 
marquée. Ce sont de jolies grappes blanches, lâches et assez nom- 
breuses, qui pendent le long de la tige, et ne paraissent douées 
d'aucun mouvement. 

Les feuilles sont peltées, glabres, anguleuses et terminées par le 
prolongement aigu de leur nervure moyenne, comme dans le grand 
nombre des espèces de la famille ; leurs pétioles renflés se retournent 
dans tous les sens, selon la direction de la lumière, 

Les tiges se tordent de droite à gauche, et supportent assez bien le 
froid de nos hivers ; cependant leurs extrémités se dessèchent, et leurs 
nouvelles branches naïssent d'assez bas; on n’y aperçoit point les 
lenticelles de Dr Canpozre, qui manquent presque toujours dans 
les tiges grimpantes ; mais on y remarque les cicatrices arrondies des 
anciens pétioles. 


— 100 — 


Les fleurs mäles, les seules que j'aie pu examiner, m'ont offert deux 
remarques : 1° celle d’anthères quadrilobées qui pourtant ne s'ouvrent 
que par une seule fente verticale qui les partage en deux parties ; 
2° celle de filets roides et rayonnants qui répandent au loin leur pollen. 

Les feuilles ne sont pas plissées avant leur développement, mais 
elles naissent tres-petites et comme enchâssées les unes sur les autres ; 
elles se dégagent ensuite, et grandissent à mesure que la tige s’allonge; 
cette forme de développement appartient à presque tous les végétaux 
grimpants. 

Les autres Menispermum sont : le Dauricum de la Russie, ie Smila- 
cinum de la Caroline et le Zyoni du Kentucki : les deux premiers appar- 
tiennent au type du Canadense dont ils diffèrent fort peu ; le dernier 
s'en distingue par ses fleurs, et les lobes prononcés de ses feuilles. 

Le Menispermum canadense est une plante sans éclat, mais dont le 
feuillage élégant sert à former des tonnelies impénétrables au soleil 
d'été. Elle se multiplie très-facilement de drageons. 


Sixième famille. — Perbéridees. 


Les Berbéridees ont trois à neuf sépales, autant de pétales caducs 
et d'étamines opposées aux pétales; les anthères sont adnées, bilo- 
culaires, et s'ouvrent de la base au sommet par une valvule qui se 
retrouve dans les Lauriers ; le fruit est un peu latéral, l'albumen est 
charnu , et l'embryon en forme d'axe occupe le centre de la graine. 

Le nombre commun des sépales et des pétales est celui de six; les 
uns et les autres sont colorés , disposés sur deux rangs, et recouverts 
en dehors d'écailles colorées et disposées sur un ou plusieurs rangs ; 
les pétales sont opposés aux pièces du calice , et souvent nectarifères 
à leur base; les filets des étamines sont courts, les anthères oblongues, 
adnées, biloculaires , à loges souvent séparées ; l'ovaire est toujours 
solitaire, plus ou moins oblique, uniloculaire, et terminé par un style 
latéral que couronne un stigmate en forme de disque; le fruit est une 
baie ou une capsule ; les semences ordinairement géminées ou ternées 
sont rarement solitaires ; l’albumen charnu est quelquefois un peu 
corné; la radicule est enflée au sommet, et les cotylédons sont planes. 

Les Berberidees sont des arbrisseaux ou des herbes vivaces souvent 
glabres ; leurs feuilles sont pétiolées, radicales ou caulinaires, alternes, 
tantôt simplement lobées, tantôt divisées des leur pétiole, pennées 


— 101 — 


ou du moins pennatifides , quelquefois même transformées en epines 
simples ou composées, mais non articulées. De l'aisselle de ces feuilles 
spiniformes, sortent ensuite d'autres feuilles simples ou composées, 
ciliées ou lobées et dentées, mais rarement entières. Les fleurs sont en 
grappes et terminent les jeunes rameaux. 

Cette famille est répandue sur tout le globe, à à l'exception toutefois 
de l'Afrique, de l'Australasie et des Iles océaniques éloignées des conti- 
nents. On en compte sept dans l'Amérique septentrionale, dix-sept 
dans la méridionale, deux en Europe, etc. Les autres habitent la Sibé- 
rie , le Népaul, la Chine, le Japon, et même les terres Magellaniques. 
Toutes ces espèces s'élèvent environ à cinquante, réunjes sous six 
genres , dont trois sont indigènes, au moins en partie : le Berberits, 
l'Epimedium et le Leontice, et trois autres entièrement étrangers : le 
Mahonia , le Nandina et le Diphyllea. Ces divers genres, qui diffè- 
rent pour le port et l’organisation générale , ne présentent qu’un petit 
nombre d'observations communes. 


PREMIER GENRE. — Derberis. 


+ Le Berberis ou l'Épine-V'inette ; le premier et le plus important des 
genres de cette famille, se distingue par un calice à six pièces, sur deux 
rangs, et une corolle à six pétales chargés chacun à leur base de deux 
glandes nectarifères ; les étamines au nombre de six sont dépourvues 
d'appendices, et les deux loges anthérifères sont séparées l'une de 
l’autre par un connectif très-élargi. 

Ces caractères sont tellement marqués qu'ils distinguent facilement 
les Berberis des autres plantes, surtout si l’on y ajoute ceux de la végé- 
tation et de l’organisation générale. Les espèces qui composent ce 
genre, et qui s'élèvent aujourd'hui à vingt-neuf, sont évidemment 
formées sur le même type; en sorte que la description que nous 
allons donner du Berberis vulgaris s'applique à peu près à toutes 
les autres. 

Ces plantes sont des arbrisseaux buissonneux, dont la hauteur 
n'est jamais considérable, et dont les rameaux sont cylindriques ou 
légèrement anguleux; lbs premières feuilles sont alternes, entières, 
ou irrégulièrement et profondément dentées ; les suivantes avortent 
et se transforment successivement en épines, d'abord assez divisées, 
puis quinquéfides, puis quelquefois trifides et même simples dans 
certaines espèces. De l’aisselle de ces feuilles transformées, sort, dans 
la même année, un faisceau d’autres feuilles bien organisées, et qui 
se séparent en automne par une articulation très-visible, et placée 


— 102 — 


assez loin du point d'attache; la base du pétiole reste adhérente et 
conserve la vie végétative, mais elle change de destination, s'épaissit, 
et enveloppe les feuilles de l’année suivante, encore protégées par 
deux petites stipules épineuses et par quelques écailles. Le jeune 
bourgeon sort du centre de l’ancien et se développe chaque année 
avec ses feuilles, jusqu'à ce qu'il donne naissance à une grappe florale ; 
alors la force végétative est détruite en ce point, mais à côté, au-dessus 
ou au-dessous, paraissent d'autres boutons tout recouverts d'écailles 
membraneuses, sans rudiments de feuilles , et chargés seulement de 
fleurs; en sorte que, dans la même aisselle ou plutôt dans la même 
place, on voit souvent des grappes en fruits et d’autres en fleurs , à 
peu près contigués, comme dans le Cersis, où le vieux bois porte 
continuellement des fleurs naissant à peu près des mêmes points. 

Les Berberis ont très-peu de rameaux, et s'étendent surtout par 
leurs rejets; lorsque la végétation de l’année est accomplie, le sommet 
de la pousse se rompt, et le bouton latéral le plus voisin continue la 
tige, mais le rameau auquel il donne naissance s'étend d'autant moims 
que la plante est plus élevée. Cependant on trouve en Italie et ailleurs, 
des Berberis de quinze à vingt pieds; celui du Canada , cultivé dans 
les jardins, acquiert aussi une assez grande hauteur. 

Ce genre si naturel a été divisé artificiellement par DE CaxnozLE 
en trois groupes, d'après la considération des feuilles et des fleurs. 

Le premier comprend les espèces à feuilles simples, et pédoncules à 
grappes multiflores; 

Le second, celles à feuilles simples, et pédicelles d’une à trois fleurs; 

Letroisième, celles à feuilles composées, et pétioleendurci en épine. 

Le premier groupe renferme dix-huit espèces dispersées surtout 
dans l'Europe, l'Asie, l'Amérique du sud, et dont quelques-unes ne 
paraissent que des variétés, dépendant de la station et du climat. Les 
plus connues sont le Vulgaris , le Canadensis , le Sinensis, le Cretica 
et l’Asiatica des Indes orientales et du Népaul, dont les grappes rac- 
courcies et multiflores portent des baies globuleuses recouvertes de 
poussière glauque, 

Le second est formé d'espèces la plupart originaires de l'Amérique 
du sud et surtout des terres Magellaniques. Quelques-unes présentent 
le singulier phénomène de feuilles, les unes simples, les autres con- 
verties en épines semblables à celles de la feuille extérieure ou pri- 
mitive. 

Enfin, le troisième groupe renferme deux espèces asiatiques encore 
trés-peu connues. 

L'efflorescence générale des Berberis est centripète, et celle de 


108 — 


chaque grappe suit la même loi. Les feuilles, dans leur”vernation , 
sont roulées sur leur surface inférieure, et se développent de très- 
bonne heure; celles de l'espèce commune sont souvent attaquées par 
un Æcidium d'un beau rouge, semblable à celui du Clematis Vitalba, 
et qui cause de grands ravages sur les plantes où il se perpétue. Les 
tiges ont une écorce membraneuse, rougeâtre ou brunâtre, qui se 
détache aisément, et où l’on aperçoit, au lieu de lenticelles, de petits 
points noirs qui paraissent autant de sphéries. 

Les fleurs ne m'ont paru susceptibles d'aucun mouvement organique 
bien marqué, quoiqu'elles s'ouvrent un peu à la lumière, au moins 
pendant tout le cours de la fécondation. Dans certaines espèces, les 
grappes sont droites, tandis que dans d’autres, elles sont plus ou 
moins inclinées; ce qui dépend, sans doute, de la manière dont 
s'opère la fécondation. 

Les pédoncules , ainsi que les pédicelles, ne sont nullement articulés; 
c'est pourquoi les fruits y restent attachés long-temps après leur ma- 
turité. Ils ne tombent que tard au printemps, lorsqu'ils n'ont pas 
servi de nourriture aux petits oiseaux. [ls se séparent alors à la base, 
et la grappe desséchée est brisée par les vents ; cependant les fleurs 
cueillies se rompent très-facilement, au bout de quelques jours, à la 
base du pédoncule. 

Chaque fleur de Berberis est entourée extérieurement de deux ou 
trois écailles, qui sont autant de rudiments de feuilles; l’ovaire est 
toujours unique et cylindrique, le style nul, le stigmate orbiculé et 
un peu incliné. Le péricarpe ou la baie est couronnée par un ombilic, 
percé d’un trou à son centre. Les semences, au nombre de deux ou 
trois, sont droites, allongées, et recouvertes d'une enveloppe crustacée ; 
leur albumen est charnu, leur radicule endorrhizée, c’est-à-dire ter- 
minée par un renflement arrondi, qui pousse des radicules sur ses 
côtés; les cotylédons sont foliacés et les premières feuilles à peu près 
entières. 

Quoique l'ovaire du Berberis soit unique, cependant il est placé ur 
peu obliquement au centre de la fleur, et il semble indiquer un avorte- 
ment assez semblable à celui qu’on remarque dans les Delphinium 
Consolida et d'autres plantes. Cette observation est encore confirmée, 
selon De Cannozze, par la position du cordon pistillaire sur le côté de 
la graine, et non pas à son centre, comme cela aurait eu lieu, si 
l’ovaire avait été naturellement unique. 

Le phénomène le plus remarquable dans les espèces de ce genre, 
c'est l'irritabilité de leurs étamines, qui, au moment où elles vont 
répandre leur poussière, s’approchent du pistil par un mouvement 


— 104 — 


spontané, qu’on détermine aussi en les touchant à la base, ou même 
en pressant les téguments floraux. La cause de ce singulier phénomène, 
qui a occupé plusieurs botanistes, tient à une organisation délicate 
que nous ne pouvons pas facilement saisir, mais dont le but est de 
favoriser la fécondation, que les insectes et les mouches assurent aussi 
en venant sucer le miel des glandes nectarifères. 

L’organe ou la glande irritable, est situé à la base intérieure du filet, 
qui, après son mouvement d'approche, reprend ensuite lentement sa 
place. Les dissolutions des sels métalliques, dans lesquelles on plonge 
la plante, détruisent promptement cette action ; les sels terreux, un 
péu plus tard : la lumière , au contraire, ne paraît pas y exercer une 
grande influence. (Voyez Annales des Sciences naturelles , année 1828, 
octobre.) 

Chaque loge anthérifère des Berberis est placée latéralement des 
deux côtés du connectif élargi en spathule; à la fécondation, cette 
loge s'ouvre sur ses bords et découvre un pollen aggloméré et jaunâtre; 
ensuite la valve extérieure se détache par le bas, et se relève en même 
temps de manière à présenter des deux côtés du connectif une petite 
palette auriculée : c’est sous cette forme que les deux valves chargées 
de leur pollen, viennent s'appliquer exactement sur le bord annulaire 
de l'organe stigmatoide qui, imprégné d'humidité visqueuse, retient 
et absorbe la poussière fécondante, enfin le connectif glutineux lui- 
même sur sa face introrse, s'écarte du stigmate et la fécondation est 
accomplie : cette singulière fécondation ressemble à celle du Laurier. 

Les nectaires des Berberis sont deux renflements épais, elliptiques, 
briquetés et placés à la base de chaque pétale. A l’époque dela floraison, 
ils distillent abondamment l'humeur miellée, et eine ainsi la 
fécondation. 

Ce genre présente, comme nous l'avons déjà indiqué, de beaux 
exemples d'avortement ou de transformations. Le plus remarquable 
est celui de ses feuilles, dont on peut suivre tous les passages, depuis 
le bas de la tige où elles sont simples, jusqu'à son milieu où elles 
n'offrent plus que des épines acérées. Ce changement s'opère par le pro- 
longement de leurs lobes, dont les bords, fortement roulés en 
dés sont séparés par une rainure longitudinale et profonde. La 
feuille, dans cet état, a perdu son articulation, et par conséquent est 
restée adhérente à la tige. Voyez cette suite de transformations dans 
la planche 9 de l'Organographie végétale de De Canpozze. 

Le second exemple d'avortement est celui de ces bourgeons placés 
aux aisselles mêmes des feuilles épineuses, et qui peuvent être comparés 
à ceux des Larix. Ces boutons se trouvent souvent dans toutes les 


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aisselles inférieures, mais quelquefois, au lieu d'avorter, ils donnent 
naissance à des branches semblables en tout aux vraies tiges, portant 
elles-mêmes des é épines et des boutons avortés. 

Toutes les espèces de ce genre renferment, ] je crois, ces deux formes 
d’avortement; en sorte que personne n'a jamais vu un Berberis dans 
son état naturel, avec ses feuilles alternes et ses rameaux foliacés ter- 
minés par des fleurs. Si une telle plante se présentait, on la prendrait 
pour une espèce nouvelle, ou peut-être même pour un genre; elle 
aurait cependant le caractère et l'organisation des Berberis. 

Mais autant il y a de variations dans les feuilles et les rameaux des 
Berberis, autant il y a de constance dans les parties de leur fleur. On y 
trouve toujours le même nombre de pétales nectarifères, teints en 
jaune et entr'ouverts ; les étamines y sont toujours irritables, le style 
toujours court, et le stigmate orbiculé. Il est bien vräi que le pistil n’a 
peut-être pas conservé sa forme primitive, et qu’il était originairement 
composé de plusieurs ovaires; mais cette ingénieuse conjecture de 
De CanpozzE n’est pas aussi facile à vérifier, que les avortements des 
feuilles ou des rameaux , et l’on ne comprend pas aussi bien comment 
des grappes déjà si serrées, pourraient porter des pédoncules chargés 
de péricarpes ou de baies multiples. 

Les Berberis habitent les haies, les collines incultes, les pentes des 
montagnes et les fentes des rochers. Ce sont des plantes robustes qui 
ne redoutent ni les intempéries, ni les extrêmes de chaud et de froid. 
L'espèce commune est un des arbrisseaux les plus répandus en 
Europe, où il forme des haies qu'il embellit au printemps de ses 
belles feuilles vertes, membraneuses et lustrées, et qu’il couronne, au 
mois de mai, de ses grappes d’un jaune d'or; il se fait encore remar- 
quer en hiver par ses baies rouges, destinées à la nourriture des petits 
oiseaux. Les autres espèces du genre ne se retrouvent que dans nos 
jardins, et ne paraissent pas avoir le même éclat et la même fraicheur. 
On reproche à toutes les fleurs une odeur forte et désagréable, qui, 
dit-on faussement, favorise la rouilie des blés. 

La culture a obtenu de notre Berberis, des baïes stériles ou sans 
semences, et d'autres qui sont jaunes, violettes, pourprées, etc. 

La floraison des Berberis a lieu au mois de mai dans nos climats, 
et au mois de décembre dans les terrés Magellaniques. 


DEUXIÈME GENRE. — ]Wahonia. 


Le Mahonia a, comme le Berberis, six sépales entourés de trois 
écailles, mais ses six pétales sont dépourvus de glandes, et ses étamines 


. — 106 — 


portent à l'extrémité de leurs filets deux dents latérales, la baie ren- 
ferme trois à neuf semences. 

Ce genre renferme cinq espèces homotypes, dont quatre sont 
répandues dans les deux Amériques, et dont la dernière appartient 
au Népaul. Ce sont des arbrisseaux à feuilles ailées avec impaire, et 
dont les premières ne sont point changées en épines, ni les secondes 
fasciculées dans les aisselles. 

Le Fasciculans de la Nouvelle-Espagne et l'AÆquifolion ont les 
folioles articulées, consistantes et épineuses. Leurs fleurs terminales 
et axillaires, sont disposées en grappes serrées et portées sur des 
pédoncules roïdes et filiformes ; leurs pédicelles sont articulés et 
bractéatés, et leurs fleurs ressemblent beaucoup en apparence à celle 
des Berberis, mais elles en diffèrent principalement par leurs filets 
glanduleux à la base, et derrière lesquels on apercoit encore sur les 
pétales les deux nectaires des Berberis. À la fécondation , la paroi de 
l’anthère se roule de haut en bas, tandis que le pollen lui-même se 
roule de bas en haut pour ramener sur les bords du stigmate gluti- 
neux les massettes granuleuses qui le forment. 


TROISIÈME GENRE. — /Vandina. 


Le Nandina appartient aux Berbéridees par son calice à six pièces, 
ses six pétales opposées aux étamines, et son péricarpe, qui est une 
baie sèche, globuleuse, uniloculaire, dont le placenta latéral porte 
une ou deux semences. Il se distingue des autres genres de la même 
famille par des écailles à plusieurs rangs, extérieures au calice, par 
des pétales privés de glandes, et un stigmate trigone. 

Ce joli arbrisseau est cultivé, depuis un temps immémorial, dans 
les jardins du Japon et de la Chu à cause de son Re et de 
l'odeur suave de ses fleurs. Ses feuilles, semblables à celles de l'Épi: 
mède, sont alternes, deux ou trois L. ternées, et engaînées à leur 
base ; les folioles sont articulées, entières et Hi les panicules 
sont “pd a re droites, plusieurs fois décomposées, et assez sem- 
blables à celles du Lilas de Perse; les fleurs petites et blanches ont 
leurs pédoncules recouverts de petites bractées; les baies sont rouges. 
Il leurit au mois de juin , et refleurit M. en automne. 

Au moment où la fleur s’épanouit, elle est redressée, et ses pétales 
d'un beau blanc sont fortement déjetés. Les étamines entourent régu- 
lièrement le stigmate qui est une tête aplatie, sillonnée de trois ou 
quatre rayons papillaires et glutineux. Les anthères sont latérales et 


2 19% — 
leur pollen sort élastiquement de deux lames qui s'entr'ouvrent longi- 
tudinalement de chaque côté, mais ne se roulent pas. 

Le fruit qui ressemble à celui du Berberis contient une ou deux 
semences à radicule supère et cotylédons courts et foliacés. 


QUATRIÈME GENRE. — Leonlice. 


Le Leontice a six sépales, placés sur deux rangs dont l'intérieur est 
plus petit; les pétales en même nombre portent chacun à leur base une 
grande écaille pédicellée et nectarifère; les filets des étamines sont 
courts, et leurs anthères biloculaires s'ouvrent à la base, d’une ma- 
nière que je ne connais pas; l’ovaire est ellipsoïde, le style court et 
disposé obliquement, le stigmate simple, la capsule enflée, membra- 
neuse, uniloculaire à trois ou quatre semences insérées vers la base; 
l'albumen est corné et creux à son centre; l'embryon est droit comme 
dans le Berberis. 

Les Leontices sont des herbes vivaces, à racines tubéreuses assez 
semblables à celles des Cyclamen. Leurs feuilles radicales, qui sortent 
sans doute, comme celles des Épimèdes, du milieu des écailles du rhi- 
zome, sont pétiolées et plus ou moins divisées, les caulinaires sont 
nulles ou composées; les tiges sont droites, cylindriques, hautes à peu 
près d'un pied; les fleurs sont paniculées ou disposées en grappes 
lâches ; les bractées à la base des pédicelles sont entières, ovales et fo- 
liacées , les calices sont souvent colorés. 

Ces plantes, dont l'on compte jusqu’à présent cinq espèces, habi- 
tent l'Éurope australe et orientale, la Sibérie et l'Amérique du nord ; 
on en trouve deux dans les champs de la Grèce et de l'Asie mineure, 
deux dans la Sibérie, et une enfin au pied des montagnes de l’Amé- 
rique. 

Les semences des Leontices présentent deux objets d'observation : 
l’un est relatif à leur embryon, séparé de l'albumen et renfermé dans 
une cavité particulière comme celui des Nymphæacées ; l'autre regarde 
leur capsule, tantôt renflée comme le calice des Physalis, et toujours 
fermée , tantôt ouverte avant la maturation, et présentant à l'air exté- 
rieur ses graines véritablement nues. C’est à Robert Brown que l'on 
doit l'observation de ce dernier phénomène sur le Leontice Thalic- 
troides ; De Canpozce l’a confirmé sur l’{ltaica, et s’en est ensuite 
servi pour diviser le genre en deux sections : 

1° Celle des Leontopetalum , à capsule enflée et non ouverte dans 
Ja maturation ; 

2° Celle des Caulophyllum , à capsule non enflée et ouverte dans la 
maturation. 


— 108 — 


La première renferme trois espèces : deux Européennes, le Chry- 
sogonum et le Leontopetalum , et une troïsième, étrangère, qui croît 
sur les bords du lac salé d’Inderi, mais dont on ne connaît pas les 
fleurs, parce que les Kirghises, habitants de ces déserts, n'en per- 
mettent l'accès qu'aux soldats armés, qui viennent, après le prin- 
temps, recueillir le sel qu'on y trouve en abondance, 

La seconde contient deux espèces : l'Æl{aica des monts Altaïques et | 
des environs d’Odessa , et le Thalictroïdes de l'Amérique boréale. 

Les Leontices ont le port et l'organisation des Épimèdes ; ce sont 
des plantes rares qu'on n’apercoit presque point dans les jardins, et 
qu'on ne rencontre non plus jamais, parce qu’elles croissent dans 
des lieux écartés, et qu’elles fleurissent dès l'entrée du printemps. 
Cependant il serait très-intéressant d'observer leur mode de fécon- 
dation, la conformation de leurs nectaires, les mouvements de leurs 
fleurs , leur reproduction par tubercules, etc. 

Tous les Leontices ont les fleurs jaunes, et les pétales, je crois, 
veinés et articulés. 


QUATRIÈME GENRE. — Æpimede. 


L'Épimède a quatre sépales caducs et enveloppés de deux petites 
bractées, quatre pétales concaves, renfermant chacun un nectaire 
tubulé , quatre étamines, un ovaire ellipsoide, un style latéral, et ter- 
miné par un stigmate simple ; ; la silique est oblongue, bivalve, unilo- 
culaire et assez semblable à celle des Chelidoines. Les semences sont 
nombreuses, unilatérales et placées obliquement. 

Les racines de l Épimède sont des rhizomes traçants et ramifiés, dont 
les tiges périssent chaque année jusqu’à la base. Les ; Jeunes pousses, 
enfermées dans deux ou trois écailles qui s’entr'ouvrent aux premières 
chaleurs du printemps, sont plissées en deux, recouvertes de longs 
poils, ainsi que les feuilles; les folioles sont roulées en cornet sur 
leur surface supérieure. Cette forme de vernation est assez semblable 
à celle des Aneémones Sylvies. 

La tige de l’Epimedium alpinum, porte régulièrement deux nœuds 
ou renflements, dont le premier est placé à la base d’une grappe 
lâche, à pédicelles inférieurs un peu subdivisés , et le second fournit 
trois rameaux ramifiés encore en trois autres portant chacun trois 
feuilles longuement pétiolées : l'ensemble de toutes ces parties pré- 
sente à l'œil une symétrie remarquable. 

Les folioles sont fortement veinées, cordiformes et bordées de 
dents aiguës semblables à celles des Berberis ; les extérieures portent 


— 109 — 


souvent à leur base un lobe ou un prolongement qui manque du côté 
interne; les dentelures ne sont point ici les continuations des ner- 
vures , et par conséquent ne sont point glanduleuses ; elles font partie 
d’un rebord cartilagineux, qui circonscrit la foliole entière et qu’on 
remarque également dans les Berberis. 

Les feuilles et les tiges des Épimèdes ne se détachent ; jamais, quoi- 
que les unes et les autres présentent des renflements qui ressemblent 
à des articulations, et sont destinés sans doute à donner plus de 
solidité aux diverses parties de la plante ; elles ne servent point comme 
ailleurs à faciliter les mouvements organiques, puisque les tiges et les 
feuilles de ce genre n'en présentent aucun exemple dans les diverses 
périodes de leur durée. 

Mais les fleurs, au contraire, sont abondamment pourvues d’arti- 
culations et de points de rupture : non-seulement les deux bractées 
extérieures et les quatre sépales tombent peu de temps après l’épa- 
nouissement ; mais les pétales, les nectaires et les étamines ne tardent 
pas à se séparer, dès que la fécondation est opérée. 

La partie la plus remarquable de ces fleurs, est leur nectaire formé 
_de quatre tubes à peu près horizontaux, ouverts et élargis du côté du 

pistil, fermés et rétrécis dans le sens opposé; leur substance est une 
membrane transparente, d'un beau jaune, remplie de liqueur miellée. 
Les quatre étamines qui entourent l'ovaire ont leurs anthères cou- 
chées sur la face externe du filet, et par conséquent extrorses. Cette 
position semble prouver que le pollen est recu par le nectaire, avant 
de concourir à la fécondation, comme cela se voit dans les cas sembla- 
bles; cependant j'observe que les anthères s'ouvrent par un couvercle 
roulé de bas en haut, spiralement, comme dans les Berberis, et ramè- 
nent ainsi sur le stigmate placé à la même hauteur, le pollen réuni en 
petites masses jaunes ; ce qui est un mode remarquable de féconda- 
tion. Je n’ai pas encore vu l'humeur miellée sortir des poches necta- 
riferes. 

L'Épimède a de nombreux rapports avec les Berberis, soit pour la 
structure papyracée de ses feuilles à rebords artnet, soit pour 
la conformation de ses anthères, soit pour son estivation oppositaire ; 
comme l'appelle De CanDoOLLE, et dans laquelle les deux sépales exté- 
rieurs recouvrent les autres, ce qui a aussi lieu pour les pétales et les 
nectaires toujours rapprochés deux à deux. Mais il diffère des Berberts, 
non-seulement par le nombre des parties de sa fleur, par ses anthères 
extrorses, ses nectaires si singulièrement conformés; mais encore par 
son péricarpe sec et siliqueux, et sa forme de végétation sans avor- 
ment ni soudure. 


— 110 —- 


L'Épimède commun fructifie très-rarement, au moins dans nos 
jardins ; car on ne connaît pas encore suffisamment ses graines, et l’on 
ne sait pas comment elles se répandent. On suppose qu’elles sont cen- 
formées intérieurement comme celles du Berberis ; mais l'on n'a, je 
crois, rien de précis à cet égard. Toutefois celles du grand nombre des 
espèces sont arillées, et je vois la silique du Grandiflore répandre en 
pleine terre des graines qui ne tardent pas à germer. 

Les Épimèdes habitent les lieux ombragés, au pied des montagnes, 
où ils fleurissent dès l'entrée du printemps; leurs jolies grappes de 
fleurs, panachées de brun, de rouge et de jaune, sont encore relevées 
par des feuilles vertes très-élégamment découpées. Quand on les ob- 
serve de près, on admire la délicatesse et la structure bizarre de leur 
nectaire d'un jaune d'or, si exactement protégé par les pétales. 

Ces plantes vivent dispersées, maïs leurs rhizomes se multiplient 
quelquefois, de manière à donner naissance à de belles touffes de 
feuilles, qui subsistent jusqu’à l'époque où elles sont remplacées par 
de nouvelles pousses. On n'en a compté long-temps qu’une seule 
espèce, l'Æpimedium alpinum de nos basses Alpes; mais l’on vient d'en 
découvrir en Perse un autre appartenant au même type, et qui ne 
diffère du commun, que par des feuilles radicales pennatiséquées, et 
une tige dépourvue de feuilles. Enfin j'ai sous les yeux le Grandiflorum 
ou le Macropelatum à pétales et nectaires très-développés et d'un beau 
blanc; ses organes sexuels, ses siliques et ses feuilles sont ceux de 
l'espèce commune. Aujourd'hui on partage ce genre en deux sections, 
dont les espèces paraissent toutes homotypes : 1° celle des Macroceras 
du Japon, dont les nectaires sont fort développés; 2° celle des Micro- 
ceras , à petits nectaires : l'une et l’autre contiennent trois espèces. 


Septième famille. — Podophyllacées. 


Les Podophyllacees forment une famille nouvelle, mal déterminée, 
très-peu nombreuse, et admise provisoirement par DE Cannozze. Son 
caractère différentiel consiste dans un calice de trois à quatre pièces, 
des pétales placés sur un ou plusieurs rangs, des anthères introrses, et 
s’ouvrant par une double fente, des ovaires ordinairement nombreux, 
et quelquefois solitaires, des semences dont l’albumen est charnu, 
l'embryon petit et situé à la base de l'ovaire. 


— 1il — 


Ces plantes se divisent en deux tribus : celle des Podophyllees, à 
ovaire unique et semences nombreuses, et celle des Hydropeltidées , à 
ovaire non solitaire, et semences peu nombreuses ou même solitaires 
par avortement. Les premières habitent les lieux humides, les secondes 
nagent dans les eaux. 

Les Podophytllées comprennent trois genres et quatre espèces, toutes 
originaires du Nouveau-Monde, et surtout du nord de Ÿ Amérique.On 
les distingue à leurs feuilles pétiolées à nervures peltées, glabres, 
entières ou lobées. 

Les Hydropeltidées sont réunies dans le Prodrome sous deux genres 
et autant d'espèces ; mais il n’est guère douteux que dès-lors le nom- 
bre des genres et des espèces de la famille ne se soit augmenté. 


Podophy llum. 


Le Podophyllum, qui a donné son nom à la famille, se distingue 
par un calice à trois pièces; une corolle de six à neuf pétales, des éta- 
mines qui varient de douze à dix-huit, et un ovaire qui se change en 
une baie uniloculaire et indéhiscente; ses nombreuses semences sont 
attachées à un large placenta latéral. 

Ce genre comprend deux espèces originaires de l'Amérique boréale, 
le Podophyllum peltatum et le Callicarpum : ce sont des herbes qui 
périssent chaque année, maïs dont les rhizomes s'étendent horizonta- 
lement, et reproduisent sans cesse de nouvelles pousses de la base des 
anciennes. Les feuilles, au nombre de deux, sont opposées, peltées, 
profondément lobées, crénelées et pourvues de glandes excrétoires. 
- Les pédoncules naissent entre les deux feuilles, et terminent la tige 
par une fleur grande , blanchâtre, à pétales caducs. 

Le Podophyllum peltatum se trouve dans la plupart des jardins de 
botanique. Ses fleurs, qui paraissent au mois de mai, sont penchées 
avant l'épanouissement, et enveloppées par les deux feuilles, dont les 
plissements forment une espèce de capuchon. Le calice et la corolle 
tombent promptement ; le stigmate est pelté et sillonné de quelques 
nervures; les baies sont jaunâtres et un peu nauséabondes ; celles du 
Callicarpum, au contraire, sont d’un blanc taché de rose, et plus 
agréables au goût. Les fruits sont penchés pendant la maturation, 
comme les fleurs. 

Il serait intéressant d'observer le mode de fécondation de ces plantes, 
la structure de leurs anthères, les mouvements de leurs étamines, etc., 
et de constater en même temps la présence ou l'absence des nectaires 
dans les fleurs. 

Je n'ai vu vivante aucune espèce d'Hydropeltidees. 


— 112 — 


Huitième famille. — Nymphæacees. 


Les Nymphæacees ont des sépales adhérents au réceptacle, des 
pétales et des étamines sur plusieurs rangs, des anthères adnées in- 
trorses s’ouvrant par deux fentes longitudinales, un torus plus ou 
moins développé, portant ou renfermant plus ou moins Îes ovaires. 

Elles sont toutes , sans exception, des plantes aquatiques, dont 
les racines forment des rhizomes épais et traçants, ou des tubercules 
pourvus de rejetons qui propagent l'espèce ; les feuilles, qui partent 
constamment des tiges souterraines, et qu'enveloppe toujours une 
membrane transparente, sont de deux sortes; les extérieures, dis- 
posées en rosule autour des nœuds du rhizome, mais très-minces, 
très-promptement détruites, et très-variables dans leurs dimensions; 
les intérieures, ou les véritables feuilles, longuement pétiolées, nageant 
ou un peu relevées sur la face de l’eau. Ces deux formes ont évidem- 
ment la même origine, et représentent le même organe, avorté dans 
le premier cas, et développé dans le second; mais comment se fait-il 
qu’il soit tantôt détruit sous l’eau, et tantôt conservé? C'est, sans 
doute, parce qu'ici il a été exposé tout l'hiver à l'influence du liquide, 
et que là, il était protégé par un grand nombre d'enveloppes. 

Les véritables feuilles ont une vernation involutive , et ne se dérou- 
lent que lorsqu'elles sont arrivées à la superficie de l’eau ; leur sub- 
stance est coriace, et comme feutrée, leur surface supérieure est 
ordinairement lisse, verte et brillante; l'inférieure souvent colorée, 
quelquefois velue ou pubescente, et toujours privée des stomates 
qu'on trouve en abondance sur la face opposée. 

Les pédoncules axillaires ou extra-axillaires sont de la même nature 
que les pétioles; les uns et les autres s’allongent pendant le cours de 
la végétation, de manière à atteindre la surface du liquide, quelle que 
soit d’ailleurs sa profondeur, et même à s'élever de trois pouces au- 
dessus dans le Nuphar lutea. Leur tissu intérieur est lâche et rempli de 
cavités aériennes, où l’on remarque des groupes d'étoiles à plusieurs 
rayons divergents, dont on ne connaît pas l'usage, et qui diffèrent 
des Rhaphides , soit par leur forme, soit par leur adhérence au tissu 
cellulaire. 

L'organisation des VNymphæacees ressemble, du reste, beaucoup 
à celle des végétaux aquatiques; leurs pédoncules et leurs feuilles ont 
une vitalité qui se conserve long-temps , et qui paraît résider séparé- 
ment dans chacune de leurs parties, lesquelles, quoique racornies et 


— 113 — 


desséchées, reprennent leur souplesse et leur végétation, quand on 
les replace sur l'eau ; mais cette propriété ne s'étend pas à la fleur. 

Le torus de ces plantes offre deux apparences fort distinctes : tantôt 
il a la forme d'un cône renversé, dont la partie supérieure est inté- 
rieurement remplie d'un grand nombre de loges, couronnées cha- 
cune d'un style et d’un stigmate; tantôt c'est un godet ou un sphé- 
roïde, renfermant, autour d'un axe idéal, des loges ou des carpelles 
intimement soudés, et dont les parois latérales sont chargées de 
graines , enveloppées d’une membrane visqueuse. La première struc- 
ture appartient aux Velumbo, dont les espèces sont toutes étrangères 
à l'Europe; la seconde aux Vymphœæa etaux Nuphar, dont la principale 
espèce est fort commune dans nos eaux : ces deux derniers genres ont 
une capsule semblable aux Pavots, et leurs stigmates réunis forment 
de même un bouclier ou un disque cartilagineux. 

Les Nymphæacées ont attiré de bonne heure les regards, par la 
grandeur et la régularité de leurs magnifiques fleurs. Les anciens en 
connaissaient cinq espèces : deux déjà décrites par Dioscoripe, et 
qu'on trouve encore dans toute l'Europe; et trois autres originaires 
de l'Egypte, mentionnées dans HÉroDoTE, ATHÉNÉE et THÉOPHRASTE, 
et gravées sur la plupart des monuments de cette célèbre contrée. 
Négligées ensuite par les botanistes, elles ne sont sorties de l'oubli 
que par des voyages plus récents, entrepris dans le but d'enrichir la 
science. WiczpeNow en a décrit onze espèces; PERsooN, treize, et 
De Canpozce , trente. On ne peut guère douter que leur nombre ne 
s’'augmente encore. 

Cette famille n’a pas toujours , comme la plupart des plantes aqua- 
tiques , les mêmes espèces répandues indifféremment dans tous les 
lieux; au contraire, si quelques-unes paraissent dispersées, d’autres 
sont circonscrites à peu près dans les mêmes contrées. On en trouve 
actuellement quatre en Europe, deux en Egypte, où autrefois il yen 
avait trois; la Sibérie en fournit deux; l'Asie méridionale, neuf, 
depuis la mer Caspienne au Japon; le Cap, une seule; l'Amérique 
boréale, neuf; et les Antilles, quatre, en y comprenant le continent 
voisin. On peut donc dire que les Nymphæacées appartiennent pres- 
que uniquement à l'hémisphère nord, puisqu'on n'en connaît actuelle- 
ment qu'une seule espèce dans l’autre. 

Iln”y a peut-être aucune famille qui présente un plus grand nombre 
de phénomènes à l'attention des physiologistes. Le premier, qui n'est 
pas particulier à ces plantes, c’est de n’ouvrir leurs fleurs qu’à la surface 
dés eaux. Lorsque ce liquide est profond, les pédoncules s’allongent 


de plusieurs pieds ; lorsque la chaleur ou d'autres circonstances ont 
L 8 


— 114 — 


desséché les marais, la fleur reste presque sessile sur sa tige; et il va 
sans dire que les pédoncules ainsi raccourcis acquièrent une plus 
grande consistance. Dans quelques espèces, les fleurs, comme les 
feuilles, s'élèvent un peu au-dessus de l'eau, parce qu'elles n’ont pas 
besoin, pour vivre, du contact immédiat de ce liquide. Il serait inté- 
ressant d'observer si l'organisation de la feuille est la même dans ce 
cas que dans l'autre, et si, en particulier, sa surface inférieure est 
entièrement dépourvue de stomates. 

Dès que les Nymphæacces sont exposées à l'air libre, elles ouvrent 
leur calice. CeL épanouissement n’a pas lieu pour toutes aux mêmes 
heures, et ne dure pas non plus le même temps. Il y a peut-être ici 
autant de différences qu'il y a d'espèces : le Nymphæa alba s'épanouit 
sur les sept heures du matin, et se referme le soir, à peu près à 
cinq heures, au moins dans nos climats; le Lotos s'ouvre et se referme 
plus tôt. C'est, sans doute, la raison pour laquelle il avait été con- 
sacré par les Égyptiens à Osiris, c'est-à-dire, à l'astre du jour. 

Les mêmes fleurs s'épanouissent-elles plusieurs jours de suite, et 
se replongent-elles chaque soir dans l'eau ? C'est ce que les auteurs 
affirment du Lotos d'Égypte, et qui pourrait bien être aussi vrai de 
quelques autres Nymphæacées, mais non pas des nôtres, qui, lors- 
qu’elles ont été ouvertes, se referment bien, mais ne se replongent 
plus dans l’eau pendant la durée de leur fécondation. 

Lorsque cette opération est accomplie, les fleurs des Vymphæacees 
rentrent dans l’eau, par la flexion ou l'enfoncement de leurs pédon- 
cules ; c'est dans ce liquide que les graines mürissent et se répandent, 
après la destruction de leur péricarpe, qui ne s'ouvre jamais régu- 
lièrement; elles sont protégées par l'enveloppe visqueuse qui les en- 
toure, et par un tégumentextérieur , dur, imperméable et admirable- 
ment réticulé; elles restent au fond de l'eau pendant l'hiver, et 
viennent flotter près de sa surface, à l'époque de leur germination, 
c'est-à-dire, au premier printemps. 

Toutes les Vymphæacées ont leurs pétales disposés sur plusieurs 
rangs alternes, et présentent ainsi l'aspect de fleurs doubles; cette 
ressemblance estencoreaugmentée parle décroissement successif deces 
pétales, dont les plus intérieurs ne sont que des filets dilatés et chargés 
d'anthères adnées; on trouve même, en approchant des stigmates, 
des filets jaunâtres, dépourvus d'anthères, et qui ressemblent assez 
bien à des nectaires; c'est au moins ce que j'ai observé dans le 
Nymphæa alba. 

Les fleurs sont différemment colorées; il y en a des HtPMess des 
jaunes, des rouges, et d’autres dont les teintes sont d’un bleu céleste. 


— 115 — 


Je ne saurais me représenter un spectacle plus enchanteur que celui 
de ces Nymphæacees étalant sur un lac azuré la pompe de leurs écla- 
tantes corolles, les unes entr'ouvertes, les autres entièrement 
épanouies. 

Les calices persistent comme les pétales et les étamines; l'estivation 
des premiers est valvaire, celle des corolles est imbriquée; les nec- 
taires, que les botanistes n'ont pas encore remarqués, paraissent 
placés, au moins dans les VNymphæa, sur le disque formé par la réunion 
des stigmates, et qui, à l'époque de la fécondation, est toujours 
humide et mielleux. En le regardant de près, on trouve cet organe 
chargé de la poussière des anthères; dans les Vuphar, le nectaire 
réside, dit-on, à la surface inférieure des pétales ; mais je ne com- 
prends pas comment il répandrait alors ses émanations, et quel serait 
son usage. Je suppose, sans l'avoir cependant vérifié, que, dans le 
Nelumbo, la partie supérieure du torus est nectarifère. 

La place que doit occuper cette famille dans l’ordre naturel , est une 
question qui a beaucoup occupé les botanistes; les uns ont considéré 
les Nymphæacées comme monocotylées, etles autres comme dicotylées. 
GæÆRTNER a prononcé que l'embryon du Nymphæa était monocotylé, 
mais De Canpozze qui l'a ouvert et observé avec plus de soin, a 
reconnu qu'il était formé, comme celui du Muphar, de deux corps 
distincts, écartés l’un de l’autre, à l'époque de la germination, et 
renfermant entre eux une plumule sans radicule , au moins apparente, 
et il en a conclu que les VNymphæa et les Nuphar étaient véritablement 
dicotylés. 

L'embryon des Velumbo, au lieu d'être placé à la base de la semence, 
et d'être séparé du périsperme par une membrane particulière, 
comme dans les VNymphæa, occupe tout l'intérieur de la graine, dans 
laquelle il germe avant la dissémination. On apercoit, en l’ouvrant, 
qu'il est aussi formé de deux cotylédons opposés et roulés sur eux- 
mêmes comme de véritables feuilles, entre lesquelles est placée une 
plumule dont la racine principale qui a avorté, est remplacée par des 
radicules naissant à l'aisselle des cotylédons ou un peu au-dessus, 
comme dans plusieurs autres plantes aquatiques : la jeune pousse est 
déjà enveloppée de ce spathe transparent qui accompagne séparément 
chaque feuille. 

On doit conclure de là que les Nymphæacees sont dicotylées, quoi- 
que leur embryon ne soit pas conformé comme celui des plantes de la 
même classe. Cette hypothèse est confirmée, selon De Caxnozze, dont 
ces détails sont empruntés, par leur structure générale, par l’exacte 
opposition des deux lobes entre lesquels est logée la plumule, par la 


— 116 — 


vernation involutive des feuilles, l'imbrication des pétales, la confor- 
mation des capsules, et enfin par le suc lactescent que fournissent les 
rhizomes, et qui est propre aux dicotylées. Du reste, il ne faut pas 
imaginer que les ouvrages de la nature soient tellement assujettis à 
nos systèmes, qu'on ne parvienne à trouver, ou qu'on ne trouve déjà 
des embryons bien plus anomaux que ceux que nous venons de dé- 
crire, et qui, sans doute, sont conformés comme le demandait leur 
destination. 

Les fleurs des Nymphæacees sont toujours axillaires , et le même 
bourgeon donne des fleurs plusieurs années de suite; c’est ce dont on 
peut s'assurer, soit par les débris des anciennes feuilles, dont il est 
toujours entouré, soit par les rudiments des fleurs de l'année suivante, 
déjà visibles au mois de juillet. 

Ces plantes se multiplient par les rejets qui sortent sans cesse de 
leurs rhizomes, ou bien par des tubercules attachés quelquefois au 
tubercule principal, au moyen de filets qui se rompent ensuite. Les 
graines reproduisent aussi la plante, et, comme nous l'avons déjà 
dit, on voit, chaque année, celles du Vymphæa alba, flotter sur 
l’eau avec ses cotylédons et ses premières feuilles déjà développées. 

Les Nymphæacées fleurissent à peu près toutes depuis le milieu du 
printemps jusqu'à la fin de l'été; leurs fleurs sont ordinairement odo- 
rantes, et passent successivement de l'éclat le plus brillant à l'appa- 
rence la plus livide. 

On les divise en deux tribus : 

Les Vélumbonées, à carpelles nombreux, distincts, monostyles et 
plongés dans un torus en cône renversé; à semences solitaires, dé- 
pourvues d'arille et d’albumen. Un seul genre. 

Les Nymphæces , à carpelles nombreux, renfermés dans un torus 
couronné à son sommet par autant de stigmates réunis en bouclier, 
qu'il y a de carpelles; à semences nombreuses, arillées, albuminées, 
et attachées aux parois latérales des carpelles. Deux genres. 


Première tribu. — NÉLUMBONÉES. 


Nelumbium. 


Le Nelumbium a quatre ou cinq sépales, seize à dix-huit pétales 
sur plusieurs rangs, un grand nombre d’étamines disposées aussi sur 
plusieurs rangs, et appendiculées au-dessus des anthères ; huit à trente 
ovaires monostyles, et plongés dans autant d’alvéoles; une semence 


MNT; 


dicotylée et dépourvue d'albumen, un embryon épais, non enveloppé 
de ses membranes, germant dans l'alvéole ou le carpelle. 

Ce genre diffère du Nymphæa par la structure singulière de son 
péricarpe composé d’alvéoles rapprochées et tronquées au sommet, et 
par celle de sa graine dépourvue d’albumen, et germant dans l'inté- 
rieur du carpelle. Ses racines sont des rhizomes compacts et rampant 
au fond de l'eau; ses pétioles et ses pédoncules s'élèvent un peu au- 
dessus de sa surface, et sont recouverts d'aspérités tuberculées ; les 
feuilles sont peltées, orbiculées, non échancrées à la base, et entières 
sur les bords; les fleurs sont grandes, blanches, roses, jaunes, selon 
les espèces ou les variétés. ° 

Le Velumbium contient cinq espèces, une originaire des Indes 
orientales, et quatre de l'Amérique boréale ou de la Jamaïque, mais 
dont une seule est suffisamment connue. L'espèce principale qu'on 
peut regarder comme le type du genre, parce qu’elle a servi à le 
former, est le Speciosum, qui habitait autrefois l'Egypte, et qui se re- 
trouve à présent dans les eaux tranquilles et les marais de l'Asie mé- 
ridionale, C'est une magnifique plante, cultivée aujourd’hui dans 
quelques jardins ; ses fleurs, qui ont l'odeur de l'Anis, sont d’un rouge 
éclatant ou d'un blanc de neige. Elle est peinte sur les papiers de la 
Chine, et représentée sur la plupart des monuments et des médailles 
de l'Égypte, comme une plante sacrée. On en distingue trois variétés, 
qui sont peut-être autant d'espèces : le Tamara, dont les filets sont 
fortement dilatés et échancrés à leur sommet; le Caspium du Volga, 
dont les pétales intérieurs sont aussi grands que les autres, et 
l'espèce commune. 

La seconde espèce est le Velumbium luteum, qui habite les lacs et 
les étangs de l'Amérique septentrionale, et appartient évidemment au 
même type. Il se distingue surtout par sa fleur jaune et très-grande, 
ses feuilles rayées de vingt-cinq nervures, et ses anthères prolongées 
en appendice linéaire, et non pas en massue, comme dans le Velum- 
bium speciosum. 

Les trois autres espèces ont été peu étudiées sous le point de vue 
botanique, c’est-à-dire, par rapport à la conformation de leur péri- 
carpe et de leurs graines. 

Je n'ai point vu le Velumbium vivant, et par conséquent je ne 
connais ni le mode précis de sa fécondation, ni l'organe qui, dans sa 
fleur, peut être considéré comme le nectaire. Je soupçonne que c'est 
le prolongement anthérifère qui recoit et dissout d'abord le pollen. 
Du reste, on ne peut s'empêcher de remarquer ici la forme bizarre du 
péricarpe, dont chaque alvéole contient une graine, attachée à un 


— 118 — 


funicule, par sa base, et à demi saillante pendant tout le cours de la 
maturation. Elle ne se sépare de la loge où elle est nichée, que lorsque 
les carpelles se désunissent, et, à cette époque, elle a déjà développé 
ses deux premières feuilles, et poussé des radicules du collet de sa 
plumule. Si donc elle germe avant d'être semée, tandis que celles des 
Nymphæa séjourne plusieurs mois dans l'eau, et ne se développe 
qu'au printemps, c'est que cette dernière est enveloppée et protégée 
par la membrane transparente qui manque au Velumbium ; c'est ainsi 
que la nature varie ses moyens, pour arriver au même but. 

Le Speciosum fleurit au jardin de Montpellier où ses racines se con- 
servent très-bien l'hiver, dans des vases pleins d’eau , à la température 
des serres. 

GærTNER représente ses premières feuilles roulées sur leurs bords, 
et repliées dans le sac des cotylédons. 


Seconde tribu. — NYMPHZÆÉES. 


PREMIER GENR& — Æuryale. 


L'Euryale a quatre sépales insérés sur le torus avec lequel ils font 
corps, seize à vingt-huit pétales placés sur quatre à sept rangs, et 
seize à vingt carpelles cachés sous le torus, qui représente, au pre- 
mier coup-d'œil, un péricarpe infère, parce que les pétales le recou- 
vrent entièrement. 

Ce genre, qui diffère du Vymphæa par son calice adhérent, ne 
renferme qu'une seule espèce, originaire des lacs du nord de la Chine. 
Elle se reconnaît, au premier coup-d'œil, par ses pédoncules, ses 
pétioles , ses feuilles, et son calice entièrement recouvert de poils ou 
d’aiguillons piquants, qui lui ont valu le nom spécifique de Ferox. 
Ses feuilles, en bouclier échancré à la base, sont marquées, à leur 
surface inférieure , de nervures rayonnantes; sa fleur, qui paraît en 
septembre, est d’un bleu pourpré ou violet, et assez semblable pour 
le port à celle de l’Artichaut. Les semences, de la grosseur d’un pois, 
sortent à la maturité du torus ou du péricarpe, qui se rompt irrégu- 
hèrement. 

Les racines sont des rhizomes. 

J'ai mentionné cette plante étrangère, afin que l’on observât ses 
semences, son mode de fécondation, et les autres particularités qui 
concernent la famille à laquelle elle appartient. 

C'est près de l'Euryale qu’il faut placerle Victoria regia, magnifique 


— 119 — 
Nymphæacee découverte depuis quelque temps dans l'intérieur de la 
Guiane, dont les feuilles atteignent la longueur de dix-huit pieds, et 
sont, comme les pédoncules et les calices, recouvertes de poils et 
d'aiguillons : la fleur a six pieds de diamètre et perd pendant la matu- 
ration sa corolle et son calice adné, qui se détachent naturellement 
du péricarpe. Ses semences, très-nombreuses, servent d’aliment. 


SECOND GENRE. — /Vymphæa. 


Les Nymphæa ont un calice à quatre sépales entourant la base du 
torus, seize à vingt-huit pétales, adhérents à ce même torus, sur 
lequel ils laissent leur empreinte ; des étamines nombreuses, insérées 
de la même manière au-dessus des ‘pétales; seize à vingt carpelles 
enveloppés par le torus, et couronnés par autant de stigmates réunis 
en plateau. 

Les diverses espèces de Vymphæa sont dispersées dans les deux 
continents. Les plus anciennement connues, et peut-être aussi les 
plus belles, habitent l'Égypte et les Indes orientales; plusieurs sont 
originaires de l'Amérique; on en trouve une en Sibérie, et trois en 
Europe. 

Ces plantes ont l'organisation générale des Nelumbium ; leurs racines 
sont ordinairement des rhizomes charnus et traçcants, quelquefois de 
simples tubercules qui se reproduisent constamment; leurs feuilles 
sont peltées ou cordiformes, entières ou dentées, nageantes ou sail- 
lantes hors de l’eau , presque toujours glabres, au moins en dessus; 
leurs fleurs sont grandes, blanches, roses, rouges ou bleues, mais 
jamais jaunes. 

Ce genre, assez nombreux en espèces, a été divisé par De CanDozLe 
en trois sections assez naturelles. 

Les Cyanées , à anthères appendiculées, feuilles peltées et entières, 
fleurs bleues ; 

Les Lotos , à anthères non appendiculées, feuilles peltées, entières 
ou finement dentées, fleurs blanches, roses ou rouges; 

Les Castalia, à anthères non appendiculées, feuilles cordiformes 
trés-entières , fleurs blanches. 

Les Cyanées sont originaires de l’Asie méridionale, de l'Afrique ou 
du Pérou, dans la baie de Guyaquil. Elles appartiennent toutes au 
même type, et se rapprochent des Velumbium parleurs anthèresappen- 
diculées ; mais elles en diffèrent totalement par la structure de leur 
péricarpe. 

La première et la plus anciennement connue, c’est le Vymphæa 


100 

cærulea, si commun dans ies canaux et les rivières du Delta, et si 
souvent représenté sur les anciens monuments des Égyptiens, qui la 
considéraient comme une plante sacrée; sa racine est un tubercule 
pyriforme; ses feuilles, à peu près orbiculées, sont cordiformes, à 
oreillettes soudées, et par conséquent réellement peltées, les pétales 
varient de seize à vingt, et les étamines, en même nombre, se ter- 
minent en une languette pétaloïde. L'espèce qui est la plus rappro- 
chée , est le Scutifolia du Cap; ensuite viennent le Madagascariensis , 
plus petit dans toutes ses parties ; le Szellata du Malabar; le Prolifera 
du Sénégal qui donne des bourgeons par les pétioles près du disque 
des feuilles, et enfin, le Pulchella de la baie de Guayaquil, qui n’a 
que huit pétales, et qui paraît assez distinct des autres. 

Le nectaire des Cyances est-il l'appendice des étamines, ou est-il 
placé quelque part sur le bouclier ? C’est ce que j'ignore. 

Les Lotos comptent sept espèces plus distinctes entre elles que les 
Cyanées, et qui sont aussi originaires des Indes orientales ou de l'A fri- 
que; une seule appartient à l'Amérique, et une à l'Europe. La plus 
connue est encore ici l'espèce égyptienne, le fameux Zotos consacré 
à Isis dans les monuments anciens, et qu’il ne faut pas confondre 
avec la plante dont les fruits nourrissaient les Lotophages , et qui est 
un Zéziphus. Cette plante croît dans les canaux ét les rivières du Delta, 
comme le Vymphæa cærulea, et se retrouve encore sur les côtes occi- 
dentales d'Afrique, dans le royaume d’Owar : elle a, comme tous les 
Lotos, ses feuilles couchées sur la surface des eaux, ses fleurs grandes 
et blanches, constamment épanouies pendant le cours de l'été. 

Les Lotos, qui appartiennent au même type, et dont quelques-uns 
pourraient bien n'être que des variétés de l'espèce principale, sont le 
Pubescens des Indes orientales ; l'Æmpla de la Guyane et de la Jamai- 
que; enfin, le T'hermalis, qui croît en Hongrie, dans les eaux chaudes, 
près du grand Waradin. Ceux qui paraissent vraiment différents, 
sont : l'Edulis, à petites fleurs, des marais de l'Inde ; le Rubra, à fleurs 
d'un beau rouge, originaire des mêmes lieux ; et enfin, le F’ersicolor 
du Bengale, dont les fleurs paraissent varier du blanc au rouge, et 
dont les feuilles dentées sont encore chargées de 'pustules ou renfle- 
ments obtus. 

Les plantes de cette section ont toutes, pour racines, des tubercules 
souvent chargés des cicatrices des anciennes tiges, et qui, comme dans 
le Versicolor, se reproduisent, sans doute, ordinairement par des 
bulbilles détachées de la racine principale. Elles fleurissent en été, ou, 
comme aux Indes, dans la saison pluvieuse, et mürissent leurs fruits 
dans les jours chauds qui succèdent. 


— 121 — 

Enfin, les Castalia, qui forment notre dernière section, compren- 
nent aussi sept espèces toutes étrangères aux Indes, et répandues 
principalement dans l Amérique et dans la Sibérie, L'Europe en compte 
actuellement trois : le Béradiata, d'un lac de la Styrie, à fleurs odo- 
rantes et à stigmates d’un rouge de sang, dont le nombre varie de cinq 
à dix; le Candida de la Bohème, dont les stigmates sont réduits à huit, 
et dont l'ovaire est libre dans les deux tiers de sa hauteur, et enfin le 
Nymphæa alba, répandu dans les fossés , les lacs et les petites rivières, 
depuis le Portugal jusqu'en Russie, et depuis la Grèce jusqu'en 
Laponie. L'espèce la plus voisine est l'Odorata de l'Amérique septen- 
trionale, si remarquable par l'excellente odeur de ses belles fleurs 
blanches, qui s'ouvrent le matin et se ferment à midi. On place ensuite 
le Mitida de la Sibérie, à fleurs inodores, un peu plus petites que les 
précédentes ; le Blanda de l'Amérique méridionale, et le Minor des 
environs de New-Yorck. Les espèces qu'on peut considérer comme 
des sous-types, sont le Reniformis, à feuilles réniformes, de la Caro- 
line, et surtout le Pygmæa, petite plante de la Sibérie orientale et de 
la Chine, où elle fleurit au premier printemps, et se fait remarquer 
par son odeur de Tubereuse, ses feuilles cordiformes, et son stigmate 
à huit rayons. 

Ces diverses plantes ont pour racines des rhizomes rampants ou 
obliques , et diversement ramifiés ; leurs fleurs varient un peu par leurs 
dimensions, le nombre de leurs pétales et celui de leurs stigmates, tou- 
Jours compris entre huit et seize. 

Les pédoncules et les pétioles des Nymphæa, coupés transversale- 
ment, présentent quatre tuyaux fistuleux, entourés d’autres plus 
petits, et tapissés intérieurement de poils simples en apparence, et 
réellement radiés à la base; on les retrouve, comme je l'ai déjà dit, 
dans la substance même de la feuille, où ils sont encore plus ramifiés. 

La fleur des Nymphæa, comme celle d'un grand nombre de Nym- 
phœæacces, présente une dégénération ou plutôt une transformation 
perpétuelle d'organes, depuis les sépales jusqu'aux stigmates. De l’en- 
veloppe extérieure , qui est verte au-dehors et blanchâtre au-dedans, 
on arrive, en passant par les différents rangs des pétales, à des lan- 
guettes qui portent sur leur surface une anthère à deux loges, ou 
plutôt deux anthères introrses latérales et ouvertes dans toute leur 
longueur ; à celles-ci en succèdent d’autres non anthérifères et jau- 
nâtres, recouvertes d'un duvet ras, ou plutôt de papilles enduites 
d'une matière légèrement glutineuse, sur laquelle s'attache la poussière 
Jaune des anthères ; ces languettes, qui font l'office de stigmates, sont 
liées entre elles, et forment au milieu de la fleur une rosette, dont le 


— 122 — 


centre est occupé par un corps conique, et dont les extrémités plus 
épaissies sont relevées, colorées en jaune d'or, et formées d’une 
substance cornée, moins visqueuse que le reste de la languette. 

Le véritable siége du stigmate est donc dans les languettes réunies 
en bouclier comme les stigmates rayonnants des Pavots, et qui corres- 
pondent à autant de loges du péricarpe; car l'extrémité relevée de la 
languette ne m'a point paru visqueuse, non plus que l’ombilic du 
cerftre, qui n’estquele prolongement de l’axe du péricarpe. Après la fé- 
condation, les languettes stigmatoïdes sont flétries , mais leur extrémité 
n'est point altérée. 

Le Nymphæœa cœrulea fleurit actuellement dans les jardins d'Eu- 
rope, et les graines récoltées de fruits qui mürissent sous l’eau, ger- 
ment facilement et donnent des fleurs au bout de quatre mois. On 
conserve ses racines en hiver dans des cuves pleines d’eau, à la tempé- 
rature des serres, et on peut le multiplier encore par les nombreuses 
bulbes qui s'en détachent, pourvu que ces bulbes soient bien müries 
et ne soient confiées à l'eau que dans les mois d'été : c'est ainsi que 
cette plante se propage dans les canaux alternativement pleins et 
desséchés du bas Delta , où ses bulbes dispersées au milieu des champs 
attendent l'inondation, afin de pouvoir se développer. (Voy. Mémoire 
sur l'acclimatation, par Dezice, Bulletin agricole du département de 
l'Hérault, août 1836.) 

Les Nymphæa sont des plantes que j'appelle dispersées, c'est-à-dire, 
qui n'ont point d'habitation fixe, et qui se trouvent répandues à de 
grandes distances. Notre NVymphæa alba, que je prends ici pour 
exemple, vit dans presque tous les lieux où se trouvent des eaux 
stagnantes. Il s'établit même dans les fossés nouvellement creusés ; 
preuve évidente que ses péricarpes sont mangés par les oiseaux, et 


que ses graines crustacées et comme indestructibles, sont sans cesse 
disséminées. 


TROISIÈME GENRE. — /Vuphar. 


Le Nuphar a un calice de cinq à six pièces pétaloïdes, dix à dix-huit 
pétales mellifères et plus petits que les sépales, un grand nombre d'éta- 
mines insérées aussi au-dessous de l'ovaire, dont elles s’écartent au 
moment de la fécondation; dix à dix-huit carpelles polyspermes, 
membraneux, réunis par la membrane du torus dilaté, et couronnés 
du même nombre de stigmates. Le péricarpe est rétréci à sa base, où 
l'on remarque les cicatrices des pétales et des étamines; ila, du reste, 
la forme d’une baie lisse et supère. 


— 123 — 


Ges plantes, dont l’on compte déjà six espèces, sont toutes aqua- 
tiques; leur rhizome, semblable à celui des Nymphœæa castalia, est 
épais, horizontal, et fixé dans la vase par de nombreuses radicules ; 
les pédoncules et les pétioles sont lisses et un peu saillants au-dessus 
des eaux; les fleurs sont toujours jaunes. 

La principale espèce est le ÂVuphar lutea, répandu, comme le 
Nymphæa alba, dans toute l'Europe, la Sibérie, et même l'Amérique 
septentrionale, où il fleurit, comme chez nous, dans les mois d'été. 
Les autres espèces, qui appartiennent au même type, sont le Pumila, 
du nord et du centre de l'Europe, à fleurs de moitié plus petites ; le 
Kalmiana de l'Amérique boréale, fort semblable au précédent; le 
Sagittæfolia des Carolines, remarquable par ses feuilles à demi 
sagittées, et par l'avortement de ses pétales ; le Japonica, qui tient le 
milieu entre le Sagittæfolia et le Lutea; et'enfin, l'4dvena de l'Amé- 
rique septentrionale, qui se distingue par ses pétales nombreux, petits 
et cachés sous les anthères. 

Le Nuphar lutea, que je prends ici pour type, a les deux espèces 
de feuilles que j'ai remarquées dans les Vymphæucées ; les extérieures, 
transparentes et toujours submergées; les intérieures qui se dévelop- 
pent plus tard, et dont les pétioles triquètres sont percés, comme les 
pédoncules, de trous cylindriques à peu près égaux. Le calice est 
formé de cinq sépales épais, d’un jaune vert en dehors et doré en 
dedans ; les pétales sont représentés par treize à quatorze languettes 
d'un beau jaune, marquées à leur surface supérieure d’arêtes et de 
sillons, d'où découle l'humeur miellée; ensuite viennent les étamines 
placées sur plusieurs rangs, terminées par un renflement épaté, et 
portant sur leur face antérieure, deux anthères à pollen jaune, cou- 
chées et engagées dans l’intérieur même de la languette. Elles sont 
fortement serrées les unes contre les autres et contre les parois du 
péricarpe, où elles ressemblent aux écailles d’une fleur composée. 
A mesure que la fleur se développe, elles s’écartent et se déjettent en 
dehors en se contournan ten demi-cercle. Au moment même où les 
anthères se dégagent, elles répandent sur les arêtes mellifères des 
pétales leur pollen jaune contenu dans deux sillons ouverts, qui font 
l'office d'autant de loges ; une partie de ce pollen arrive aussi directe- 
ment sur les stigmates, qui sont des arêtes renflées et glanduleuses 
correspondant sans doute aux loges de la capsule. 

Le plateau stigmatoïde est conformé comme dans les Pavots, et les 
loges du péricarpe sont aussi réunies et recouvertes par la membrane 
épaissie et dilatée du torus. On peut en juger à l'époque de la dissémi- 
nation, où cette membrane se détache, laissant à découvert les loges 
qui se détruisent irrégulièrement, 


HPAE. 

Les vrais stigmates doivent être ici, comme dans les VNymphæa, 
les rayons du plateau qui correspondent aux parois séminifères des 
loges ; mais j'avoue que je n’ai pas encore pu les reconnaître. 

Les Nuphar sont, comme les Nymphæa, des plantes qui vivent dis- 
persées, et s’établissent dans tous les étangs où les oiseaux transpor- 
tent leurs graines; c’est, sans doute, la raison pour laquelle elles sont; 
en général, si répandues. 

Les semences sont arillées, et leur embryon, comme celui des 
Nymphæa , est renfermé dans un sac ou une membrane transparente. 

Les botanistes disent que l'organe nectarifère est placé sur le dos 
des pétales : je l'ai toujours vu sur la face antérieure, je ne compren- 
drais pas son usage, s'il en était autrement; mais je remarque, en 
finissant, qu'il varie beaucoup de forme et de position dans les divers 
genres, et peut-être même dans les sections de la famille, et que ses 
différences dépendent principalement de celles qui existent dans la 
conformation des péricarpes. 


Neuvièéme famille. — Papavéeracées. 


Les Papavéracées ont un calice à deux pièces, quatre pétales ordi- 
nairement réguliers, et des étamines plus ou moins nombreuses, dis- 
posées en ordre quaternaire sur un ou plusieurs rangs; leur ovaire est 
formé de la réunion de deux ou plusieurs carpelles couronnés par 
autant de stigmates ; leur péricarpe est une capsule ou une silique 
bivalve; leurs semences sont nues, dépourvues d’arilles adhérentes 
aux parois des carpelles, ou aux placentas intervalvulaires; l'albumen 
est oléagineux et charnu ; l'embryon est petit, droit et basilaire. 

Les plantes de cette famille sont des herbes ou des sous-arbrisseaux, 
jamais des arbrisseaux ou des arbres. Toutes leurs parties, à l'exception 
des graines, sont remplies d’un suc blanc et laiteux, rarement jaune 
et rouge; leurs feuilles sont alternes, sessiles ou pétiolées, amplexi- 
caules ou élargies à leur base, souvent glauques, jamais entières, 
mais plus ou moins découpées, et bordées de dentelures irrégulières, 
qui se terminent quelquefois par des poils rudes et allongés. , 

Les pédoncules sont cylindriques, nus, solitaires aux aisselles des 
feuilles ou au sommet des tiges, tantôt écartés , tantôt rapprochés en 
panicules, et presque toujours penchés avant l'épanouissement ; les. 


— 125 — 


fleurs, dont les calices et les pétales sont fugaces, varient entre le 
blanc, le rouge et le jaune; mais elles ne sont jamais bleues. 

Les deux sépales concaves, qui forment leur enveloppe extérieure, 
tombent en s’ouvrant, et laissent à découvert des pétales hypo- 
gynes , irrégulièrement plissés, et remarquables par leur délicatesse 
et leur démi-transparence. Ils sont presque toujours au nombre de 
quatre ; quelquefois cependant, il y en a huit ou douze, et quelquefois 
même, ils manquent entièrement; mais toujours ils sont distribués par 
paires, alternativement enveloppant et enveloppés. Les étamines, 
opposées aux pétales, quand elles se réduisent à quatre, sont toujours 
disposées, dit-on, par rangs quaternaires; leurs filets sont filiformes 
et ordinairement flottants; leurs anthères, biloculaires, droites, à 
ouverture longitudinale et pollen ovale à trois plis; l'ovaire est uni- 
que, et les carpelles sont réunis par le prolongement du torus, qui 
les enveloppe sous la forme d’une membrane plus ou moins épaisse ; 
le style est court, souvent nul. Les stigmates s'étendent ordinairement 
en étoile au sommet du péricarpe; la capsule est ovale ou allongée, et 
les carpelles portent les graines sur leurs parois latérales , qui quelque- 
fois s’avancent assez près de l’axe central, et sont chargées de semences 
sur toute leur surface; quelquefois elles avortent en grande partie, 
et ne forment plus que des réceptacles filiformes, placés entre les 
valves, et désignés sous le nom de Plucentas intervalvulaires. On com- 
prend qu’entre ces deux formes extrêmes, on trouve toutes les nuances 
intermédiaires. 

Le Bocconia , il est vrai, ne renferme qu’une seule semence plongée 
dans une pulpe molle ; mais cette anomalie s'explique par la théorie 
des avortements; car les ovules du Bocconia cordata sont au nombre 
de cinq à sept, quoiqu’on ne trouve ensuite dans la capsule qu’une 
graine féconde. 

Cette famille est une de celles qui se sont le plus accrues de nos 
jours. Les anciens botanistes n’en connaissaient qu'un petit nombre 
d'espèces ; Linné lui-même n’en a décrit que vingt-deux, et Wiczpe- 
Now que vingt-cinq; mais DE CanporLe en compte dejà cinquante- 
trois; onze, dans l'Europe boréale et tempérée ; treize, sur les bords 
de la Méditerranée; douze, en Orient; deux, en Sibérie; trois, en 
Chine ou au Japon; une, au Cap; une, dans la Nouvelle-Hollande; 
trois, dans l’Amérique du nord, et six dans l’équinoxiale. Ces der- 
niéres forment le genre Bocconia, qui s'éloigne un peu des autres 
Pupaveracces. 

Les espèces vivaces se trouvent principalement dans les lieux écar- 
tés, au pied des montagnes ou sur leur sommet ; les annuelles habi- 


— 126 — 
tent nos champs et nos blés. Il est assez probable que la plupart d'entre 
elles ne sont pas originaires des lieux où elles vivent actuellement ; 
mais qu’elles ont été propagées par la culture, et que leur première 
patrie est l’Asie orientale, ou le bassin de la Méditerranée. On n'a 
jusqu’à présent rencontré aucune Papavéracée dans les eaux ou dans 
les lieux humides. 

Toutes ces plantes sont remplies d'un suc laiteux, gommo-résineux, 
âcre, amer, fétide, quelquefois sudorifique, mais surtout éminem- 
ment narcotique , lorsqu'il est blanc ou peu coloré. Ce suc est prin- 
cipalement accumulé dans les capsules et les parties supérieures des 
tiges ; mais il ne pénètre jamais jusqu'aux graines qui ne participent 
point aux qualités narcotiques du reste de la plante. 

Les plantes de cette famille sont toutes hermaphrodites à féconda- 
tion directe; leurs pétales qui s'ouvrent le matin tombent ordinaire- 
ment le soir lorsque toutes les anthères ont répandu leur pollen, et 
il ne reste ensuite pendant toute la durée de la maturation qu'une 
capsule nue et redressée. 

Les Papavéracces sont unies aux Nymphæacees par les Pavots et les 
autres genres dont la capsule est multiloculaire; elles tiennent aux 
Fumariées et aux Cruciferes par la Chélidoine et Y Hypecoum, dont les 
capsules sont de vraies siliques; mais leur végétation et leurs habi- 
tudes les éloignent également de ces diverses familles. 

Selon Mirsez, il y a une assez grande différence entre la silique 
des Chélidoines ou des Glaucium et celle des Cruciferes : dans cette 
dernière, le stigmate est sur un plan perpendiculaire à la cloison ; 
dans les autres, sur un plan parallèle à cette même cloison. Les Che- 
lidoines ont un ovaire d'abord uniloculaire, et qui ne devient bilocu- 
laire que par le prolongement de la substance placée entre les placen- 
taires, et dont les bords opposés, rarement réunis, portent même 
quelques graines dispersées; dans les Cruciferes, au contraire, la 
cloison existe dès le commencement, et les graines sont rangées régu- 
lièrement sur les deux bords des placentaires. 


PREMIER GENRE. — Pavot. 


Le Pavot ( Papaver) se distingue par ses deux sépales concaves, ses 
quatre pétales et ses nombreuses étamines; son ovaire est ovale, et 
ses stigmates, qui varient de quatre à vingt, sont rayonnants et 
sessiles sur le fruit qu'ils couronnent; la capsule, plus ou moins glo- 
buleuse, est uniloculaire, composée de quatre à vingt carpelles, ren- 
fermés par la membrane dilatée du torus; elle s’ouvre au-dessous du 


97e 
stigmate, en autant de trous qu'il y a de valves; les semences nom- 
breuses, petites et légèrement striées, sont attachées aux parois 
latérales et incomplètes des carpelles. 

Les Pavcts sont des herbes annuelles ou vivaces; les racines des 
premières sont allongées, fusiformes et blanchâtres; celles des espèces 
vivaces sont souvent de vrais rhizomes ; les tiges sont cylindriques, 
glabres, ou chargées de poils à demi piquantis , blanchâtres, inclinés 
ou même couchés. Ces mêmes poils, presque toujours mammelonés, 
se retrouvent sur les pédoncules, le calice et les capsules, et termi- 
nent en forme d'arêtes l'extrémité des feuilles. 

Ces feuilles sont toujours irrégulièrement sinuées, plus ou moins 
pennatiséquées, les unes sessiles ou fortement amplexicaules, les 
autres, en petit nombre, péticlées; leur surface est glabre , velue, 
hérissée, verte ou glauque. 

Le développement des Pavots est, pour ainsi dire, indéfini ; il ne 
s’arrête que lorsque le sommet des tiges se rompt, ce qui a toujours 
lieu après un certain temps; les pédoncules sont toujours axillaires ; 
l'efflorescence est centripète; la fleur, d'abord fortement penchée, 
se redresse insensiblement , et ouvre d’abord son calice en forme de 
spathe, dont les deux pièces sont engagces réciproquement l’une sous 
l'autre, par leurs bords. À peine ce calice est-il rompu, que l’on voit 
se déployer quatre pétales, d’un tissu aussi mince que délicat , et 
ordinairement tachés à la base ; leur couleur, selon les espèces, est 
blanche, rouge, orangée, jaune ou incarnate. Ils sont irrégulièrement 
plissés, et opposés deux à deux ; en sorte que le second rang recouvre 
le premier avec lequel il alterne ; les onglets élargis occupent toute 
la base. 

Dès que les pétales ont étendu leur limbe, plissé comme les ailes 
des insectes , on voit à découvert l'appareil admirable des nombreuses 
étamines qui entourent le pistil ; leurs filets sont ordinairement d'un 
violet noirâtre, et leurs anthères terminales s'ouvrent latéralement en 
longueur. Elles flottent au plus léger souffle, et viennent s'appliquer 
sur le plateau stigmatoïde, dont les rayons ou arêtes ont leurs bords 
glutineux et sans doute nectarifères. Elles se roulent en spirale, après 
avoir laissé échapper la poussière qui les recouvre en abondance, et 
qui est aussi répandue en grande quantité au fond de la corolle. 

Lorsque la fécondation est accomplie, et que toutes les parties de 
la fleur sont tombées, le pédoncule redressé se roidit, et conserve 
son état jusqu'à sa destruction. En même temps, la capsule, dont la 
conformation est tout-à-fait semblable à celle du Vymphæa et surtout 
du Vuphar, ouvre et replie les extrémités de ses valves, et présente 


— 128 — 


ainsi autant de trous ou de pores , ‘qu'il y a de valves. Au moment 
même, les semences se détachent des parois placentifères, et leur 
légèreté est telle, qu'au moindre vent ou à la moindre secousse, elles 
s’échappent par les ouvertures, et se répandent au-dehors. En exami- 
nant ces capsules après la maturation, on ne peut s'empêcher de 
remarquer le rapport parfait qui existe entre leur substance membra- 
neuse, sèche, élastique , et la destination qu’elles étaient appelées à 
remplir. 

Mais ce qui paraît surtout digne d'attention, c’est la manière dont 
sont protégées les ouvertures de cette capsule, à l'époque même de la 
dissémination. Le plateau qui les recouvre, s’avance en forme de toit, 
et en écarte l'humidité extérieure, qui, en pénétrant, aurait pu dé- 
tremper les graines, les altérer, ou nuire à leur départ; je crois même 
que lorsque les pluies sont trop abondantes ou trop continues, le haut 
des valves se referme, comme on le voit dans un grand nombre de 
péricarpes. 

Le plateau est lui-même formé d’une membrane dure, assez épaisse 
et consistante. Il porte sur sa surface les stigmates, qui sont autant 
de rayons papillaires correspondant aux cloisons placentaires, puis- 
qu'ils sont toujours en même nombre. Mrr8ez prétend ( Vouvelles 
Annales d'Histoire naturelle, novembre 1825) qu'il n’y a qu’un seul 
stigmate, puisque toutes les parties qui le composent sont continues, 
ét pourraient être déroulées ou étendues; mais cette opinion serait 
contraire à toute la théorie sur la formation des péricarpes dans les 
Papaveracees. 

De Canpozce dit que la membrane ou l'enveloppe extérieure de la 
capsule est le prolongement du torus, et que ce prolongement, qui 
se termine au-dessous des trous de la capsule, empêche les valves de 
s'ouvrir plus bas. Mais je n’ai rien vu qui indiquât la zone où se ter- 
minait le torus, et je n'ai pas remarqué non plus que la portion 
réfléchie de la valve fût moins épaisse que le reste. Le plateau, qui a 
d'abord la forme d’un capuchon, recouvreexactementla capsule, ensuite 
ilse relève insensiblement et devient plus ou moinshorizontal; lorsque 
les valves s'ouvrent au sommet et qu’il s'agit de protéger la sortie des 
graines , il forme alors le couvert d’un joli pavillon dont les colonnes 
sont les cloisons même de la capsule, comme on peut le voir dans le 
Rhœas, le Somnifere, etc. On peut même ajouter que les ouvertures de 
la capsule sont assez étroites pour que les graines si nombreuses se 
sèment successivement et non pas toutes à la fois. Cet appareil si remar- 
quable, disparaît dans le Pavot somnifère, cultivé surtout dans la 
variété à graines blanches, et l’on comprend facilement qu'il fallait 


— 129 — 
que les capsules restassent fermées pour que l’on pût recueillir leurs 
graines, 

Les Pavots peuvent se distinguer en deux sortes ; ceux à feuilles 
glauques et ceux à feuilles vertes. De Cannozce et les botanistes qui 
l'ont précédé, les ont partagés en deux groupes : ceux à capsule hérissée, 
et ceux à capsule glabre; mais, indépendamment de ce que cette divi- 
sion est peu naturelle et très-inégale, puisqu'elle comprend d'un côté 
six espèces, et de l’autre, dix-huit, il me paraît plus logique et plus 
convenable de partager tout le genre en types distinets, dont l'étude 
approfondie en fera mieux connaître la physiologie et les habitudes. 

Or, jusqu’à présent, je distingue cinq races de Pavots : 

La première est celle des Pavots de montagne, à capsule hérissée, 
petite, de quatre à douze loges. J'en compte quatre espèces, qui 
pourraient bien n'être pas assez distinctes : le Vudicaule de la Sibérie 
et du nord de l'Europe, remarquable par ses fleurs jaunes-orangées 
à la base; le Microcarpum du Kamchatka, moyen entre le précédent 
et le suivant; le Pyrenaicum des Pyrénées et des montagnes calcaires 
de l'Europe australe, et enfin l'Æ/pinum, souvent confondu avec le 
Pyrenaicum, des Alpes de la Carinthie et de la Suisse. Toutes ces 
espèces vivent sur les pentes des montagnes, et parmi les pierres, 
où elles étendent leurs longs rhizomes; leurs feuilles sont finement 
découpées et un peu glauqués; leurs tiges, en forme de hampe, sont 
souvent chargées, à la base, des vestiges des anciennes feuilles. 

La seconde est celle des 4rgémones , à capsules allongées, hérissées, 
et divisées en un petit nombre de loges. Ce sont des plantes annuelles, 
à tiges chargées de poils, comme les feuilles dont elles sont garnies. 
Ce type renferme principalement deux espèces : l'Hybridum et Y 4r- 
gémone, originaires du midi de l’Europe, à pétales d’un beau rouge. 

La troisième comprend les Pavots Rhæas, à capsule glabre et tige 
annuelle, ordinairement multiflore et assez nue. Ils vivent parmi les 
blés et les cultures, comme les 4rgémones ; mais ils sont plus répandus 
et plus riches en espèces. On y range le Dubium et YObtusifolium, 
qui en diffère très-peu; le Lævigatum du Caucase; le Roubiæi des 
environs de Montpellier, etc., surtout le Rhœas proprement dit, qui 
est 1c1 la principale espèce. Ils ont tous les fleurs d'un rouge plus ou 
moins foncé , et nuisent souvent aux moissons par leur trop grande 
multiplication. Ces diverses plantes sont originaires d'Asie, et natura- 
lisées chez nous par la culture ; quelques-unes d'entre elles pourraient 
bien n'être que des variétés. 

La quatrième race est celle des Pavots orientaux , dont le type est 
l'Orientalis de nos jardins ;'ce sont des plantes à fleurs grandes et écla- 


à 9 


— 130 — 


tantes, à tiges et feuilles hérissées de poils rudes, à racines ligneuses 
et rhizomatiques. On y place d'abord l'Oriental, originaire de l'Ar- 
ménie, puis le Bracteatum de la Russie, qui lui ressemble beaucoup ; 
enfin peut-être, le Floribundum de l'Arménie, le Pilosum de la 
Bithynie, etc. 

La cinquième race est celle des Pavots somniferes , à la tête desquels 
est l'espèce cultivée, dont l'on distingue deux variétés, la Voire et la 
Blanche. On lui associe le Caucaseum des environs du Caucase, le 
Setigerum d'Hyères, que De CanporLe soupconne et que Monis 
assure être la race sauvage du Pavot somnifere noir, et qui se distingue 
par ses lobes recourbés terminés en arêtes allongées, etc. Toutes ces 
plantes sont annuelles, d’un port élevé, à tige et calice ordinaire- 
ment glabres et recouverts, comme les feuilles, d’une abondante 
poussière glauque. 

Enfin je trouve une dernière race dans le Spectabile ou le Persicum , 
qui a le port et les feuilles de notre Rhæas, mais qui est vivace et dont 
la tige est chargée d'une multitude de rameaux, la plupart florifères ; 
son efflorescence est centrifuge et sa floraison a lieu de très-bonne 
heure, car, à six ou sept heures du matin, le calice et les pétales sont 
tombés. Mais les anthères toutes redressées, répandent plus tard leur 
pollen sur les six à huit stigmates qui couronnent une capsule allongée 
et épineuse. 

Il va sans dire que la plupart de ces divisions, plus ou moins nette- 
ment tranchées, présentent des plantes intermédiaires, qu'on pourrait 
quelquefois considérer comme hybrides. 

Les pétales et les étamines des Pavots se colorent dans l’intérieur 
de leur calice, plusieurs jours avant leur épanouissement. On en peut 
conclure, ou que la lumière pénètre à travers la mince enveloppe 
du calice, ou que les pétales n’ont pas besoin de cet agent, pour 
prendre les éclatantes couleurs qui les distinguent. 

Si l’on suit les développements successifs des fleurs des Pavots , du 
Somnifere, par exemple, on verra d’abord paraître les deux sépales 
non encore recourbés en voûte, ensuite les pétales d'abord très-petits, 
puis les anthères à peu près sessiles, puis les carpelles ouverts au 
sommet avec leurs cloisons non encore chargées des graines et plusou 
moins complètes, puis les anthères disposées sur sept ou huit rangs, 
et toujours opposées aux pétales, puis enfin les lobes des stigmates 
se réunissant au sommet et se relevant enfin horizontalemeng à la 
base pour protéger la dissémination. 

Les diverses espèces de ce genre servent d'ornement à nos jardins, 
surtout le Pavot oriental, dont les fleurs sont d’un rouge orangé, et le 


— 131 — 


Pivot à bractees, quile surpasse encore en beauté; le Rhæas, ou le 
commun, fournit des variétés nombreuses, à fleurs simples ou dou- 
bles, frangées, bordées, colorées de mille manières, et d’un effet char- 
mant lorsqu'elles sont mélangées avec art. Malheureusement, ces 
fleurs épanouies le matin, ont déjà disparu le soir. 

Je termine l'histoire de ce genre par trois remarques : la première, 
que la base des pétales a presque toujours une couleur différente du 
limbe, ce qui pourrait bien tenir à quelque disposition nectarifère ; la 
seconde, que l’on a observé des anthères de Pavot somnifere , changées 
en petites capsules parfaitement semblables à la grande, et couronnées 
par un stigmate pelié ( Voyez Organographie de De CanDore, vol.1, 
pag. 546, fig. 39); la troisième, qu'aux approches de la pluie les Pavots 
communs inclinent leur tête pour préserver leurs étamines, comme 
ils l'inclinent avant d'ouvrir leurs fleurs : cette observation avait déjà 
été faite par Vireie : « Lassove papavera collo Demisere caput pluviä 
cum-forte gravantur. » 

Pourquoi certains Pavots comme le Rhæas inclinent et plient-ils 
même leurs tiges avant l'épanouissement, tandis que d'autres, comme 
le Bracteatum , par exemple, ont constamment la tige redressée ? 


SECOND GENRE. — {rgemone. 


L'Argemone a un calice à deux ou trois sépales concaves, mucronés 
au sommet, et couverts de poils à demi épineux ; les pétales varient de 
quatre à six, les étamines sont nombreuses, l'ovaire est ovale, et ter- 
miné par quatre à sept stigmates persistants, concaves et libres ; la 
capsule uniloculaire s'ouvre au sommet, les semences adhérentes aux 
sutures ou placentas intervalvulaires, sont sphériques et scrobiculées. 

La principale espèce du genre est l'4rgemone mexicana, que l'on 
trouve dans toute l'Amérique septentrionale, et dans la plupart des 
régions intertropicales, où elle a, sans doute, été introduite par la 
culture ; elle se reproduit même dans nos jardins, lorsqu'elle y a été 
une fois semée. - 

L'Argemone mexicana est une herbe annuelle, qui fleurit chez nous 
dans les mois d'été, et dont toute la surface est hérissée de poils 
demi-épineux ; ses feuilles minces, glauques, et souvent tachées de 
blanc, sont roulées assez irrégulièrement sur leurs bords festonnés ; 
ses pédoncules axillaires ne sont jamais penchés; sa tige se rompt 
naturellement près du sommet, et fournit, comme toutes les autres 
parties, un suc jaunâtre. 

La structure de la fleur est tout-à-fait semblable à celle des Pavots. 


— 132 — 


Le calice ét la corolle tombent au moment où@ls s'épanouissent; les 
pétales sont chiffonnés, les filets vacillants et demi-flottants; les an- 
thères latérales, plutôt extrorses qu'introrses, fleurissent du dehors 
au-dedans, et se recourbent fortément au sommet pour répandre, sur 
les trois lobes festonnés et pourprés des stigmates, un pollen orangé 
qui les recouvre entièrement. 

Cette plante forme un vrai type dans la famille des Papavéracees ; 
son péricarpe n’est point recouvert d’un stigmate en bouclier; mais 
il est terminé par des stigmates bizarrement conformés, au-dessous 
desquels viennent se réunir les placentas intervalvaires, en même 
nombre que les stigmates correspondants. À l'époque de la dissémi- 
nation, les valves s'ouvrent par le haut, et l'on n'apercoit point de 
membrane qui les retienne; maïs l’on remarque le joli grillage auquel 
sont attachées les graines, et qui est formé par les placentas inter- 
valvaires. 

La fleur est d'un beau jaune de soufre, et la plante ne manque 
point d'élégance. On en trouve, dans la Louisiane et la Géorgie, une 
variété à fleurs blanches, que quelques botanistes appellent Grandi- 
flore, et qu'ils considèrent comme une espèce, parce que ses feuilles 
sont entièrement glabres et que sa capsule est souvent quadrivalve : 
on en cultive encore, sous le nom de Berclhliana, une troisième espèce 
homotype aux deux précédentes, et dont la fleur terminale et à peu 
près sessile se fait remarquer par ses petits pétales jaunes et les quatre 
festons violets de ses stigmates ; ses placentas filiformes se réunissent 
comme dans les autres espèces au sommet de la capsule, et lors de la 

_ dissémination ils se détachent des valves, et forment, en se réunissant 
au stigmate desséché et persistant, une élégante voûte à cinq 
arceaux. 


TROISIÈME GENRE, — Meconopsis. 


Ce genre, détaché de celui des Pavots, d’abord par Vieurer dans 
son istoire des Pavots, et ensuite par DE CaAnDpoLLe, se reconnait à 
ses deux sépales velus, et surtout à son ovaire surmonté d’un style 
court, persistant et contourné après la fécondation; sa capsule 
ovale est formée de quatre à six carpelles, dont les parois faiblement 
marquées sont couronnées par autant de stigmates rayotnants;/per: 
sistants et libres. 

Ce genre se divise, comme celui des Pavots, en deux sections : 

Les Meconopsis proprement dits, à capsules lisses, formées de cinq 
à six carpelles ; 


PE . ——— — 


— 133 — 


Les Stylophorum, à capsules hérissées, et comprenant seulement 
quatre carpelles. 

La première section, qui est la seule européenne, ne renferme 
qu'une espèce, le Meconopsis cambrica, qui se trouve épars en Angle- 
terre, en Auvergne, dans les Pyrénées, et reparait en Sibérie. C'est 
une herbe vivace, à feuilles pennatiséquées un peu glauques en 
dessous; ses fleurs, au nombre de deux ou trois, sont longuement 
pédonculées, d'un jaune soufré, et trés-fugaces. 

La seconde section est formée de trois espèces : deux originaires 
de l'Amérique septentrionale, et une dernière encore mal connue, du 
Népaul. 

Les Meconopsis sont tous des herbes vivaces qui se plaisent dans 
les lieux ombragés, frais et humides, et donnent un suc jaunâtre. 
Leurs feuilles, pennatiséquées, sont glabres ou velues, et souvent 
glauques en dessous ; leurs pédoncules sont axillaires, allongés et 
penchés dans la préfloraison ; les pétales sont, je crois, toujours 
jaunes. 

Ce genre ne diffère de celui des Argémones que par son stigmate 
non sessile, mais porté sur un style plus ou moins allongé et con- 
tourné ; ses valves s'ouvrent de la même manière, à l'époque de la 
dissémination ; mais ses placentas sont plus prolongés dans l'intérieur. 

Les fleurs sont indiquées comme terminales dans l'espèce com- 
mune, mais je suppose qu’elles sont réellement axillaires, comme 
dans les Pavots et les autres espèces du genre. Du reste, je n'ai pas 
vu la plante vivante. 


QUATRIÈME GENRE. — Sanguinaria. 


La Sanguinaire a la fleur formée de deux sépales concaves et caducs, 
de huit pétales oblongs, dont quatre intérieurs plus étroits, et d’en- 
viron vingt-quatre étamines à anthères linéaires; l'ovaire est oblong, 
aplati, et terminé par un stigmate épais, persistant et creusé de deux 
sillons ; la capsule est bivalve et enflée. A l’époque de la dissémination, 
les plateaux tombent, et les semences se séparent des deux placentas 
filiformes réunis à leur sommet, comme dans l'4rgeémone et le Me- 
conopsis. 

Cette plante, unique dans son genre, se distingue de toutes celles 
de la même famille par sa forme de végétation. Chaque année, au pre- 
mier printemps, elle émet de son rhizome horizontal ou oblique, un 
bourgeon extérieurement formé de deux écailles allongées, et qui 
récèle une fleur enveloppée par une grande feuille comme par un 


— 134 — 

voile; cette feuille est pétiolée, réniforme, veinée, sinuée, glandu- 
leuse sur ses bords, et glauque en dessous. La fleur qu’elle abrite est 
simple, longuement pétiolée, blanche et redressée. Les écailles tom- 
bent d'abord, ensuite les téguments de la fleur, qui laissent à décou- 
vert une capsule allongée, pointue à son sommet, et donnant promp- 
tement ses graines; bientôt après, toute la plante disparaît jusqu’au 
printemps suivant. 

La Sanguinaïre est commune dans les bois de l'Amérique septen- 
trionale, où elle vit dans les mêmes localités que les Paris et les 
Adoxa de nos contrées. Les fleurs, d’un blanc pur, paraissent dès le 
mois de mars, et doublent aisément, comme on pouvait déjà le soup- 
conner par leurs quatre petits pétales, qui ne sont sans doute que des 
étamines transformées. Les rhizomes sont âcres, narcotiques et impré- 
gnés d'un suc sanguin. 

Le Sanguinaria, qu’on trouve cà et là dans nos jardins et dont la 
hampe est souvent accompagnée de deux feuilles radicales assez sem- 
blables à celles du Bocconia cordata, a ses fleurs terminales et soli- 
taires au sommet des tiges ; les pétales, d’un beau blanc, s’étalent 
aux rayons du soleil et se referment le soir jusqu’à ce que la féconda- 
tion soit accomplie; les étamines sur deux rangs, et dont j'ai compté 
jusqu'à quarante, ont un connectif aplati et élargi, dont les deux 
côtés sont les loges polliniques. Le stigmate a ses deux lobes épais, 
parallèles et roulés fortement sur leurs bords papillaires, la féconda- 
tion est directe, et je n'ai apercu aucune trace de nectaire ; la capsule 
aplatie a ses deux sutures fortement soudées. 


CINQUIÈME GENRE. — Docconte. 


La Bocconie a deux sépales caducs et des pétales nuls ou avortés; les 
étamines, qui varient de huit à vingt-quatre, Sont toujours disposées 
en ordre quaternaire; la capsule est elliptique, aplatie et formée de 
deux valves qui se séparent d'abord par la base; le placenta est fili- 
forme et annulaire; les semences varient en nombre, le périsperme 
est charnu, l'embryon très-petit et droit. 

Ce genre comprend trois espèces rangées sous deux sections : la 
première est celle des espèces américaines ou frutescentes , dont la 
graine unique est recouverte d’un tégument crustacé, plongé dans 
une pulpe molle; la deuxième, qui ne compte qu’une espèce origi- 
naire de la Chine, est herbacée; ses péricarpes sont secs et ses ovules 
multiples. Les unes et les autres sont imprégnées d’un suc jaunâtre, 
et portent des feuilles pétiolées, glauques, ordinairement sinuées, 
comme celles du Chëne. L'inflorescence est paniculée. 


— 135 — 


Les Bocconies présentent deux exemples remarquables d'avorte- 
ments et de transformations : le premier est relatif au péricarpe, qui, 
dans la première section, ne contient qu'une semence grossie et 
nichée dans une pulpe d'un rouge de cinabre. Le second concerne 
les pétales dont on retrouve des traces dans les quatre étamines 
extérieures, qui, dans le Bocconia frutescens , persistent après la chute 
des autres. 

La première section contient deux espèces originaires de l'Améri- 
que méridionale, et dont l’une se retrouve dans nos serres, où elle 
fleurit presque toute l’année; leurs tiges sont fragiles, pleines de 
moëlle et marquées des cicatrices des anciennes feuilles. 

La seconde ne compte qu'une seule espèce, le Bocconia cordata, 
qui prospère et se ressème même à l'air libre , tandis qu'il languit dans 
les serres; c'est une plante élevée, d’un beau port, dont le calice, 
renversé dans la préfloraison, est en estivation valvaire, embrassante, 
comme celui des Pavots , et dont les étamines, roulées en spirale dans 
la fleur non épanouie, flottent ensuite, comme celles du Thalictrum 
aquilegifolium. Je n’ai aperçu aucune trace de nectaire dans la fleur, 
mais j'ai remarqué que ses étamines extérieures ne persistent pas 
comme celles du Bocconia frutescens. L'ovaire est pédicellé, unilocu- 
laire, formé de deux valves aplaties ; le placenta porte plusieurs graines, 
dont souvent une seule fructifie. La capsule tombe quelquefois avant 
la maturité, par une articulation préparée. La fécondation commence 
avant la floraison. Les anthères remplissent de leur pollen la fleur non 

-épanouïie , et en imprègnent le stigmate bilobé et papillaire; ensuite 
les deux sépales s'ouvrent au sommet pour donner passage aux éta- 
mines dont les filets se sont déroulés et dont les anthères latérales, 
allongées et défleuries restent long-temps flottantes : c'est là un mode 
singulier de fécondation. 


SIXIÈME GENRE. — /iœmeria. 


Le Ræmeria a été formé de deux ou trois espèces de Glaucium ou de 
Chélidoines qui n'avaient pas les attributs de leur genre. Il se distingue 
par une capsule à deux, trois ou quatre valves qui s'ouvrent du som- 
met à la base, et dont les placentas ne sont pas réunis vers le haut, 
comme ceux de l'Argemone et du Meconopsis. Les semences sont 
nombreuses et sans appendice. 

La principale espèce est le Ræemeria hybrida ou le Chelidonium ky- 
bridum, de Linné, répandue cà et là dans le midi de l'Europe, la 
Grèce et les parties voisines de la Russie; elle est annuelle , et fleurit 


— 136 — 

à la fin du printemps parmi les blés, où elle se fait remarquer par ses 
grandes fleurs violettes ou bleuâtres; son calice et sa corolle tombent 
promptement ; ses étamines varient de seize à vingt, et ses pédoncules 
sont opposés aux feuilles. Je n'ai point observé son stigmate, qui a 
autant de divisions que la capsule porte de placentas, et je ne connais 
point sa fécondation; Je sais seulement que les onglets des pétales ont 
une tache noire. | 

Cette plante donne un suc jaunâtre, comme les Glaucium, dont elle 


a le port et la consistance; les deux autres espèces sont originaires de 
l'Asie. 


SEPTIÈME GENRE. — Glaucium. 


Le Glaucium a une capsule à deux valves qui s’ouyrent du sommet 
à la base, deux loges séparées par une cloison irrégulière et spon- 
gieuse , un stigmate à deux languettes papillaires, des semences dé- 
pourvues d’appendice et engagées dans une substance spongieuse, 

Les Glaucium se distinguent des autres Papavéracees par leur port 
et leur surface glauque plus ou moins velue. Leurs feuilles sessiles ou 
amplexicaules ont leurs lobes obtus et souvent mucronés; les pédon- 
cules sont axillaires, solitaires et uniflores ; les fleurs, jaunes ou pour- 
prées, portent ordinairement à la base des taches foncées qui pour- 
raient bien être un peu nectarifères. 

Ces plantes habitent principalement le midi de l'Europe et s'éten- 
dent dans l'Asie mineure et la Perse; on les trouve de préférence sur 
les sables des rivières et les plages pierreuses, où leurs feuilles épaisses 
bravent les rayons du soleil. Leurs fleurs, ordinairement penchées 
avant l'épanouissement, se succèdent depuis la fin du printemps jus- 
qu'à l'automne. 

Les Glaucium sont aujourd’hui réunis sous cinq espèces, dont la 
dernière, originaire de la Perse, est encore très-peu connue; mais 
dont les quatre autres appartiennent évidemment au même type, et 
diffèrent surtout par leur inflorescence et la couleur de leurs pétales. 
Elles sont toutes bisannuelles , c’est-à-dire que leurs feuilles se déve- 
loppent en rosule sur le terrain pendant l'automne, et qu’elles fleuris- 
sent l’année suivante. 

Les sépales sont en estivation valvaire , embrassante comme dans le 
reste de la famille; les pétales sont plissés, parce qu'ils ont pris trop 
d’accroissement avant de s'ouvrir; les anthères sont extrorses, légère- 
ment latérales; leurs filets sont réunis en petits corps près de la base; 
l'organe stigmatoide borde les deux lames ou les deux lèvres que l'on 


— 137 — 
prend ordinairement pour le stigmate. Je n'ai apercu dans tout l'appa- 
reil aucune trace de nectaire. 

Les capsules ou siliques sont rudes au toucher, et leur aspérité pro- 
vient d'uhe multitude de glandes ovales et un peu relevées qui les re- 
couvrent ; elles grandissent beaucoup pendant la maturation, et sont 
manifestement articulées à la base. 

Les étamines qui s'ouvrent les premières sont les plus voisines du 
stigmate, 

Les siliques des Glaucium diffèrent de celles des Cruciferes par leurs 
stigmates parallèles et non pas perpendiculaires aux valves ; leur cloi- 
son ne s’apercoit avec évidence qu'après la floraison; elle est produite 
par l'allongement du placenta, dont la lame épaisse et spongieuse 
enveloppe insensiblement les semences , et forme enfin une véritable 
paroi qui remplit quelquefois l'intérieur du péricarpe. 

Les Glaucium vivent dans les sables de l'Europe australe, où leurs 
feuilles radicales forment, pendant l'hiver, de belles touffes blanchà- 
tres. Le Flavum , qui est le plus répandu, borde les rivages de la Mé- 
diterranée , et se retrouve dans une grande partie de l'Europe. 


HUITIÈME GENRE. — Platystemon. 


Le Platystemon a un calice de deux à trois sépales promptement 
caducs, une corolle hexapétale, des étamines sur plusieurs rangs à 
filets dilatés, une capsule hérissée de poils et terminée par sept ou huit 
stigmates allongés et papillaires vers le sommet de leur face infère. 

Ce genre ne compte encore qu'une seule espèce : le Californianum, 
nouvellement découvert dans la Californie, et qui fleurit quelques 
semaines après avoir été semé. C'estune petite plante annuelle à feuilles 
lancéolées entières, glauques et velues comme celles de la plupart des 
Papaveracees ; es supérieures, à peu près ternées, émettent de leur 
centre une tige ou hampe cylindrique recouverte de poils rares et 
allongés, et terminée par une petite fleur jaunâtre à six pétales étalés, 
et dont les nombreuses étamines ont leurs filets élargis, blanchâtres, 
demi-transparents et des anthères de même couleur, fortement 
élargies, et qui renferment entre les deux lèvres de leurs bords, un 
pollen rare, onctueux et blanchâtre; la capsule, recouverte de poils 
allongés qui forment tout autour une espèce de grillage comme dans 
les Argémones, est formée d'autant de carpelles allongés et fortement 
rapprochés qu'il y a de stigmates. 

On trouve aux aisselles de chacune des trois feuilles de la tige, un 


rudiment de tige secondaire qui pourrait bien se Hévelopper après la 
tige principale. 


— 138 — 


Dans la maturation, les carpelles allongés sont roulés en spirale, ils 
se détordent ensuite et s'ouvrent dans toute la longueur de leur face 
intérieure , les semences sont petites, et la corolle s'épanouit le matin 
et se ferme le soir, jusqu’à ce que la fécondation soit accomplie. 


NEUVIÈME GENRE. — Chelidonium. 


Le Chelidonium ou la Cheélidoine a une silique uniloculaire et 
bosselée, dort les deux valves s'ouvrent de la base au sommet, et 
dont les placentas intervalvaires se réunissent en un stigmate bilobé 
et portent des semences surmontées, un peu au-dessus de l’ombilic, 
d'un appendice globuleux , arrondi et demi-transparent. 

Ce genre, qui comprend le Chelidonium majus , très-anciennement 
connu, le Grandiflorum et le Laciniatum , qui n’en sont peut-être que 
des variétés, a des caractères qui ne permettent pas de le confondre 
avec les Glaucium ou les Rœmeria, et qui consistent surtout dans les 
appendices de ses semences et la disposition ombelliforme de ses 
fleurs. Ces diverses plantes sont des herbes vivaces, dont les racines 
périssent chaque année près du sommet, et donnent en même temps 
des pousses latérales qui se détruisent de la même manière; les feuilles 
radicales ont leurs lobes en recouvrement, et sont chargées de poils, 
qui protégent les tiges non développées; leurs divisions principales se 
terminent par une glande large et aplatie ; leurs pétioles sont creux, et 
c'est à leur surface inférieure que l’on voit circuler dans des vaisseaux 
propres, le suc jaune et corrosif qui distingue ces plantes, et dont 
on peut suivre la marche jusque dans les dernières nervures des 
feuilles. 

Les fleurs des Chelidoines sont axillaires, et réunies en ombelles 
légèrement involucrées, de trois à huit rayons simples, qui naissent 
de l'extrémité des pédoncules; elles sont plus petites que celles des 
autres Papavéracées, parce qu’elles sont plus nombreuses et plus 
rapprochées; les pétales sont d'abord plissés, comme ceux de la 
famille ; l'ovaire est même replié par suite de son accroissement pré- 
maturé, et les anthères s'ouvrent avant l'épanouissement. 

L'estivation des calices est valvaire embrassante ; l’efflorescence 
générale est centrifuge, mais à peu près simultanée dans chaque om- 
belle. Je n'ai apercu dans la fleur aucune trace de nectaire. 

Les étamines s’élargissent vers le sommet, et les anthères, qui s'ou- 
vrent longitudinalement par des espèces de poches membraneuses et 
latérales, répandent de bonne heure, dans les beaux jours, leur pollen 
jaunâtre sur la tête humide et papillaire du stigmate; bientôt après 


— 139 — 
la fleur tombe tout entière, et il n'en reste que la silique couronnée 
de son stigmate. 

La Chélidoine fleurit une grande partie de l’année, et les siliques 
de quelques-unes de ses ombelles sont déjà formées avant que les 
fleurs des autres ne soient épanouïies. Les placentas restent réunis 
après la séparation des valves, et présentent alors une forme de voûte 
allongée, ou de fenêtre : je ne sais point quel est l'usage de cet appen- 
dice ou caroncule qui couronne la semence. 

L'embryon est très-petit et basilaire ; la radicule est infere. 

Les Chélidoines européennes conservent en hiver leurs feuilles 
radicales, et développent rapidement leurs fleurs dès le milieu du 
printemps. L'espèce commune se trouve dans toute l'Europe, la 
Laponie exceptée ; elle reparaît même dans l'Amérique septentrionale, 
où vraisemblablement elle a été introduite, et comme les espèces 
uniques dans leur genre, elle présente peu de variétés. On la ren- 
contre de préférence le long de nos haies et autour de nos habitations 
champêtres; elle recouvre et décore souvent les masures de son 
feuillage d’un beau vert, élégamment découpé et relevé par des fleurs 
d’un jaune d’or. 

On indique, en Chine et au Japon, deux autres espèces de Cheli- 
doine ; mais elles sont encore très-peu connues. 


DIXIÈME GENRE. — Æschsholzia. 


L'Eschsholzia californica a un calice gdiphylle et caduc; quatre 
pétales, d'un jaune soufré, marqués à la base d'une tache orangée; 
les étamines, au nombre de douze, placées en ordre quaternaire, ont 
des anthères oscillantes et latérales , qui déjettent abondamment leur 
poussière jaune sur la tache orangée ; l'ovaire est allongé, uniloculaire, 
couronné par quatre styles et autant de stigmates filiformes et papil- 
laires, dont les deux plus grands sont alternes aux placentas; les 
anthères se recourbent sur les stigmates; les pétales, qui s'ouvrent 
au soleil, sont plus persistants que ceux des autres Papaveracees. 

Les parties les plus remarquables de cette plante sont, d'un côté, 
le torus évasé en cloche, de l'autre, la silique marquée de dix stries, 
et naissant de la base du torus. Le calice, les pétales et les étamines 
sont au contraire insérés au sommet, en sorte que la silique est à 
demi-infère, caractère qui me parait distinguer ce genre de tous ceux 
de la même famille, et lui donner des rapports avec les Caliciflores. 

L’Eschsholzia présente à sa maturité unesilique bivalve, à placentas 
intervalvaires , chargés d’un très-grand nombre de graines, qui 


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s'échappent des valves entr'ouvertes, à l'époque de la dissémination.’ 

Cette plante, originaire de la côte ouest de l'Amérique nord, se sème 
facilement dans nos jardins, où elle fleurit tout le long de l'été; elle 
appartient évidemment aux Papavéracées par son organisation géné- 
rale, quoiqu'elle en diffère beaucoup par son torus, qui est très- 
remarquable , et dont l'on ne peut pas dire que le prolongement ait 
donné naissance aux valves de la silique. 

On cultive encore une seconde espèce d'Eschsholzia qui diffère de 
la précédente, non pas tant par la coupe de ses feuilles, que par un 
stigmate en bouclier, dont les lobes peu marqués sont recouverts d'un 
duvet serré de poils glanduleux et papillaires. A l'époque de la floraison, 
qui dure aussi quelques jours, la fleur s'ouvre à la fin de la matinéeetse 
ferme la nuit, ses anthères aplaties, alongées et latérales se recour- 
bent sur le stigmate qu'elles imprègnent de leur pollen. Enfin l'on a en- 
core rapporté dernièrement de la Californie plusieurs nouvelles espèces 
d'Eschsholzia, qui ne sont pas encore répandues dans les jardins. 


ONZIÈME GENRE. — Âlypecoum. 


L'Hypecoum se distingue par ses quatre pétales inégaux : deux 
extérieurs enveloppant, deux intérieurs souvent trifides, et à lobe 
moyen creusé en cuiller; les étamines, au nombre de quatre, sont 
opposées aux pétales ; l'ovaire est allongé, et les deux stigmates sont 
un peu pédicellés ; la capsule est uniloculaire, bivalve et presque tou- 
jours articulée ; les placentas sont intervalvaires, les semences, 
placées en ordre alterne, sont dépourvues d'arille; le périsperme est 
charnu , l'embryon filiforme et arqué. 

Ce genre compose dans la famille un petit groupe d'espèces formées 
sur le même type. Il appartient aux Papavéracées par son suc jaune, 
ses deux sépales et son albumen charnu. Il se rapproche des Fumeterres 
par ses sépales peu marqués, et qui ne renferment point la fleur, par 
sa corolle irrégulière, ses feuilles glauques et succulentes ; enfin, il a 
quelque rapport avec les Crucifères par sa silique articulée, assez 
voisine de celle des Raphanus, etc., mais cette dernière ressemblance 
est moins prononcée que les autres. 

Les Hypecoum sont des plantes annuelles qui habitent les sables du 
bassin de la Méditerranée, et dont l’on compte six espèces, quatre 
européennes, une cinquième originaire de l'Égypte, et une sixième 
de la Sibérie. Elles diffèrent principalement par leurs pétales entiers 
ou échancrés, glabres ou velus, leur capsule droite, recourbée ou 
pendante et non articulée dans une seule espèce. Leurs feuilles sont 


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glauques et finement découpées, et leur port les rapproche des Zs0- 
pyres et de quelques espèces de Fumeterres, dont elles ont la déli- 
catesse et l'élégance. Malheureusement elles durent peu, et après 
avoir fleuri, au premier printemps, sur les sables de la mer ou au milieu 
des moissons, elles disparaissent déjà au milieu de l'été. 

La fleur des Hypecoum est formée de quatre pétales inégaux : les 
deux extérieurs , trifides et semblables à des lèvres, enveloppent les 
autres parties , et les protégent contre les variations atmosphériques ; 
les deux intérieurs sont profondément divisés en trois lobes, dont le 
moyen est un véritable nectaire ; sa base, légèrement concave, dis- 
tille l'humeur miellée, et son sommet est plissé en deux ailes , recour- 
bées et cachant les organes sexuels. La fécondation s'opère avant l'épa- 
nouissement ; les anthères extrorses répandent leur poussière dans le 
capuchon nectarifère , où se trouvent entièrement plongés les stig- 
mates non encore développés; en même temps la liqueur miellée rem- 
plit la rainure profonde qui divise le capuchon ; ensuite la fleur s’ou- 
vre, les ailes s’écartent, et les stigmates divergent; on voit alors le 
fond de la corolle, et surtout les bords du nectaire entièrement recou- 
verts de pollen. 

La silique des Hypecoum diffère beaucoup de celle des autres Papa- 
véracées ; non-seulement elle ne s'ouvre point en longueur, mais elle 
ne contient qu'un seul rang de graines, grosses et alternativement 
placées. De plus, ces graines ont leur embryon filiforme et longue- 
ment arqué. Enfin, la silique est articulée, et se sépare en autant de 
pièces qu'il y a de semences ; la courbure du péricarpe facilite sa rup- 
ture, et chaque graine tombe enveloppée de la portion adhérente de 
la silique. On ne peut guère imaginer ici de transformation, qui expli- 
que des changements si éloignés de ce qu’on peut appeler la structure 
primitive, et qui rende compte, en particulier, de la forme insolite de 
l'embryon. 

Les Hypecoum ne sont pas cultivés dans nos jardins, parce qu'ils 
n'ont pas d'éclat, et qu'ils disparaissent trop tôt. Cependant ils sont 
aussi remarquables par la singularité de leur organisation, que par la 
forme élégante de leur feuillage. Leurs fleurs, d'un beau jaune, sortent 
les unes après les autres de l'espèce de verticille qui termine les tiges. 
Elles s'ouvrent le matin, et tombent le soir comme celles de la plupart 
des genres de la famille. 

L'Aypecoum droit de la Sibérie a, dit-on, les siliques aplaties et non 
articulées; ce qui semble indiquer que sa dissémination diffère de 
celle des autres Hypecoum, et qu'il pourrait bien former un second 
type dans le genre. 


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Voyez dans le Bulletin des sciences naturelles , pour mai 1831, un 
Mémoire d'Auguste Sainr-Hrrarre et Moquix-Tennox, où l’on veut 
établir l'affinité des Hypecoum , plutôt avec les Fumariées qu'avec les 
Chelidoniees. 


Dixième famille. — Faumariacées. 


Les Fumariacees, qui, chez les anciens botanistes, étaient comprises 
sous le genre de la Fumeterre, et rangées parmi les Papavéracées , for- 
ment actuellement une famille établie par De Cannozces, et qui prend, 
chaque jour , de nouveaux accroissements. 

Elle se distingue par un caïice à deux pièces fort petites, quatre 
pétales irrégulièrs et souvent adhérents , quatre ou six étamines tou- 
jours réunies en deux corps opposés, et enfin par un ovaire libre, 
qui devient ensuite un carpelle indéhiscent, à une ou deux semences, 
ou une silique bivalve renfermant plusieurs semences arillées, dont 
l’albumen est charnu. 

Les Fumariacées sont des plantes d'une consistance molle et déli- 
cate, toujours remplies d’un suc aqueux. Leurs racines sont annuelles 
ou vivaces; les premières grêles et un peu pivotantes, les autres 
fibreuses ou tubéreuses. Les tiges sont herbacées et souvent angu- 
leuses ; les feuilles pétiolées, simples, glabres, tendres, plus ou moins 
décomposées. L'inflorescence est en grappe; les pédoncules sont ter- 
minaux, ou opposés aux feuilles. Chaque pédicelle porte à sa base 
une bractée membraneuse , au-dessus de laquelle on en trouve quel- 
quefois deux autres qui ressemblent tout-à-fait aux sépales. Les fleurs 
sont jaunes, pourprées, blanches, ou mélangées de ces deux der- 
nières couleurs. 

Le calice est petit et caduc; les pétales, disposés en croix, sont 
libres, ou réunis à la base, ou enfin l'inférieur est libre , et les trois 
autres sont adhérents. Les deux extérieurs, qui alternent avec les 
sépales, ont souvent leur base prolongée en poche nectarifère; sou- 
vent aussi l’un d'eux reste plane, tandis que l’autre est éperonné. Les 
deux intérieurs sont toujours linéaires, et réunis au sommet par un 
renflement destiné à renfermer les anthères et le stigmate. Les éta- 
mines, au nombre de six, sont disposées en deux corps opposés aux 
pétales extérieurs, et par conséquent alternes aux autres; quelquefois 
les trois filets se réunissent en un seul, qui porte les trois anthères à 


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pollen sphérique visqueux et opaque. Celle du milieu esttoujours bilo- 
culaire, mais les latérales n’ont qu’une loge; en sorte que le nombre 
total des loges est le même que s’iln'y avait que quatre anthères, Il est 
clair que cette conformation a pour but de resserrer l’espace destiné 
aux organes fécondateurs , qui sont ainsi mieux abrités par les pétales 
intérieurs. 

L'ovaire des Fumariacees est surmonté d’un style, qui porte un 
stigmate à deux lames parallèles aux pétales intérieurs. Ce stigmate est 
tellement enveloppé par les anthères, et protégé par les pétales , que 
la fécondation s'opère toujours. On ne peut pas imaginer ici que les 
nectaires soient destinés àattirer les insectes, puisqu'ils ne sauraient y 
pénétrer, et que d’ailleurs les anthères sont constamment couchées sur 
le stigmate. 

Le péricarpe des Fumariacees a des formes très-variées, qui peuvent 
facilement par soudure ou par avortement être ramenées à une seule, 
c'est-à-dire à celle d’un péricarpe bivalve, uniloculaire à deux placen- 
tas : quelquefois c’est une silique à deux valves opposées, qui se déta- 
chent à la maturité, en laissant à découvert leurs placentas filiformes; 
quelquefois les deux valves ne s'ouvrent point, ou sont si étroitement 
soudées qu'elles n’en forment qu'une seule. Dans le premier cas, les 
semences sont nombreuses; dans le second, il n’y en a que deux, et 
dans le troisième, il n'y en a qu’une. Ces semences sont noires, glo- 
buleuses ou lenticulaires, brillantes, pourvues à leur base d’une arille 
ou caroncule. Le périsperme est charnu, l'embryon est basilaire, 
droit et petit dans les fruits indéhiscents, arqué et allongé dans les 
autres. Les cotylédons sont oblongs et planes, selon la plupart des 
auteurs; mais d'après des observations plus récentes, ils sont à peu 
près nuls dans les Fumeterres à fruit indéhiscent. Et dans les Corydalis 
tubereux , tout comme dans le Lutea, etc., il n’y a réellement qu’un 
seul cotylédon, en sorte que la distinction des plantes en dicotylées et 
monocotylées n'est pas applicable à cette famille (Voyez Annales des 
Sciences naturelles, février 1834). 

Les Fumariacees étaient peu connues des anciens. Bawxin en cite 
sept ou huit, et Lanné onze; mais Wizzpenow en a décrit trente, et 
aujourd'hui on en connaît près de cinquante, la plupart originaires 
des parties tempérées de l'hémisphère boréal. On en compte, à peu 
près, quinze en Europe; onze, dans l'Amérique septentrionale ; 
treize, en Sibérie; cinq, dans l'Asie orientale; deux, dans la Mau- 
ritanie; deux, au Japon, et autant au Cap de Bonne-Espérance. 
Jusqu'à présent -on n’en a rencontré aucune dans l'Amérique du sud. 

L'habitation odinaire de cette famille est sur les lisières des bois, le 


— 144 — 


long des haies, au milieu des buissons, et, en général, dans les lieux 
frais abrités. Elles ne vivent ni auprès des eaux, ni sur les montagnes; 
cependant j'ai trouvé sur le Jura, à une assez grande hauteur, le 
Corydalis bulbosa, à bractées digitées. 

Ces plantes se rapprochent des Papavéracées par leur calice à deux 
sépales caducs, leurs quatre pétales opposés deux à deux, et la struc- 
ture générale de leur péricarpe; mais elles en diffèrent par l'inégalité 
de leurs fleurs, leurs nectaires, leurs étaminés réunies, leurs anthères 
à une loge, leur suc aqueux et jamais lactescent. Elles ont des rapports 
moins directs avec les Cruciferes , auxquelles elles ressemblent cepen- 
dant par le nombre de leurs pétales et celui de leurs étamines. 

Quelques-unes vivent solitaires, comme les Fumeterres annuelles ; 
d’autres, comme le Corydalis tuberosa et le bulbosa, se rassemblent en 
société. Les premiers ont une disposition à s'entortiller autour des 
corps voisins, par les dernières ramifications de leurs folioles, qui 
deviennent alors linéaires, ou se changent même en véritables vrilles. 
Ces Fumeterres annuelles ont souvent l'extrémité de leur corolle teinte 
d'un pourpre foncé. 

On peut remarquer que les Fumariacées sont toutes des plantes dé- 
formées, dont les organes de la fleur sont symétriques, mais non pas 
réguliers ; ils sont ou soudés, ou renflés en cornet, ou avortés. Cette 
déformation est surtout remarquable dans l'Ædlumia et le Cysticapnos, 
et elle s'étend jusqu'aux granules de pollen, qui dans les mêmes 
espèces ont souvent des formes différentes ( Voyez Ann. des Sciences 
naturelles , 1835. vol. 3°, p. 225). 


PREMIER GENRE. — Îiclytra. 


Ce genre est caractérisé par quatre pétales libres et caducs, dont 
les deux extérieurs sont bossus ou éperonnés à la base; les six éta- 
mines sont entièrement libres, ou réunies par leur sommet en deux 
phalanges opposées; les siliques sont bivalves , déhiscentes, aplaties 
et polyspermes. 

IL comprend six ou sept espèces, dont quatre sont originaires de 
l'Amérique septentrionale, et trois de la Sibérie. Les premières, qui 
ont pour type le Cucullaria , diffèrent très-peu entre elles, et se distin- 
guent par leurs éperons allongés, droits ou recourbés ; les autres, 
dont le Spectabilis de la Chine est la principale espèce, sont aussi fort 
liées les unes aux autres, et se font remarquer par leurs éperons très- 
obtus et ordinairement fort courts. 

Ces plantes ont le port de nos Fumeterres ; leur feuillage est fine- 


— 145 — 


ment découpé, glauque et succulent; leurs fleurs, tantôt portées sur 
des hampes, tantôt sur des tiges, forment des grappes plus ou moins 
garnies, ordinairement simples et quelquefois composées ; leur corolle 
est blanche ou pourprée, souvent tachée vers le sommet, comme 
dans la plupart des genres de la même famille. On les trouve au pied 
des montagnes, dans les lieux ombragés, parmi les rochers et les 
buissons, où elles vivent en société, et se font remarquer, dans les 
mois du printemps, par leur fraicheur, l'élégance de leur port, et sur- 
tout la beauté de leurs fleurs. On en cultive quelques espèces dans 
nos jardins, comme le Formosa du Canada, et le Spectabilis , dont les 
fleurs pourprées sont souvent représentées sur les papiers peints de 
la Chine. 

Les Diclytres sont des herbes vivaces, à racines presque toujours 
tuberculeuses, et couvertes d’écaiiles, dont les pousses sortent sans 
doute du même centre, comme celles de nos Corydalis bulbeux. Leurs 
fleurs se distinguent non-seulement par leurs deux éperons necta- 
rifères, mais encore par leurs étamines entièrement libres, ou seule- 
ment réunies au sommet. Du reste, leur fécondation est celle des 
autres Fumariacees ; elle s'opère dans l'intérieur du renflement formé 
par les limbes des pétales, et qui s’entr'ouvre à cette époque. Je ne 
connais pas la structure de l'embryon. 

Nurrazr observe que les filets du Diclytra cucullaria sont implantés 
sur les pétales, et que celui du milieu est éperonné à sa base. Cette struc- 
ture, qui appartient au Diclytra tenuifolia , et probablement encore à 
d’autres espèces, semble indiquer une différence dans la fleur des 
diverses Diclytra, et mérite d'être mieux examinée. 

Le Diclytra formosa a ses six étamines libres à la base, et insérées 
au fond de la corolle un peu au-dessous de l'ovaire; elles s'élargissent 
plus haut en s’unissant, et se détachent au sommet en six anthères 
pédicellées, à cloisons retournées etlong-temps couvertes de pollen. Le 
stigmate qu'elles entourent à la base est formé de deux lobes soudés, 
du milieu desquels sort, comme une aïgrette, le véritable organe stigma- 
tique et papillaire; les deux pétales intérieurs se réunissent en coiffe 
au sommet de la fleur qu’ils ferment, et ils sont surmontés dans leur 
milieu d’une crête qui les couronne; ils portent au-dessous deux 
poches opposées et épaisses, dans lesquelles se rassemble l'humeur 
miellée qui monte en gouttelettes jusqu'aux anthères ; les deux autres 
pétales également opposés entre eux sont aussi nectarifères; on les 
voit renflés en sac à la base, et creusés en cuiller au sommet. 

L'Eximia n'en diffère que par son stigmate à quatre lobes, deux 
latéraux et deux redressés ; on voit très-bien que ses anthères inter- 

I. 10 


— 146 — 
médiaires sont bilobées, tandis que les latérales n’ont qu’un seul lobe, 
Ces deux plantes ont une racine charnue et traçante, dont l’extré- 
mité est un bourgeon écailleux, d’où sortent successivement des 
feuilles multifides et longuement pétiolées et des hampes à fleurs 
pourprées, en sorte que la floraison qui commence au printemps 
continue une grande partie de l'année. 


SECOND GENRE. — Æ/dlumia. 


L’Adlumia se distingue par ses quatre pétales réunis en une corolle 
monopétale, fongueuse, persistante , dont le sommet présente quatre 
lobes, et la base deux éperons; ses étamines diadelphes sont insérées 
sur la corolle, et y restent adhérentes ; la silique est bivalve, poly- 
sperme et déhiscente. 

Cette singulière plante, placée d'abord dans les Fumeterres, puis 
dans les Corydalis, a été découverte dans les forêts de Hétres de la 
Pensylvanie et du Canada, où elle fleurit tout l'été, et se reproduit 
chaque année par ses graines, dont les feuilles sont finement découpées, 
et dont la tige et surtout les pétioles s’entortillent aux corps voisins; 
ses pédoncules naissent de la base des pétioles, et se ramifient en pédi- 
celles , qui portent une douzaine de fleurs réfléchies , d’un rose pâle. 
Les étamines sont réunies, dès leur origine, en une espèce de gaîne 
fongueuse ou feutrée, et séparées à leur sommet en deux phalanges 
portant chacune trois anthères; la silique aplatie et linéaire, surmontée 
d’un style qui porte un stigmate à quatre dents, est engagée dans la 
corolle, dont elle ne se sépare jamais. 

L'Adlumia appartient, pour sa conformation, aux Diclytra, dont il 
diffère principalement par ses étamines à gaine spongieuse, et ses 
quatre pétales soudés et fongueux. Cette déformation est sans doute 
produite par l’écartement des deux épidermes de la corolle, et par 
l'accroissement du parenchyme intermédiaire. Elle ne nuit point à la 
fécondation, quoiqu’elle entraîne l'avortement de l'organe nectarifère; 
mais, dans ce cas, le pollen est immédiatement contigu au stigmate 
papillaire, qui a sans doute la faculté de l'absorber. Lorsque la corolle 
est tout-à-fait desséchée, elle se détache par la base avec sa silique, 
qui, enfin dégagée, s'ouvre en deux valves séparées par une nervure 
cartilagineuse, et laisse échapper quatre à six graines d'un noir briilant, 
conformées, je crois, comme celles des Corydalis. 

L'Adlumia est remarquable par l'élégance de son port et de son 
feuillage couronné par de nombreuses grappes d’un beau rose; ses 
pétioles cirrhifères le rapprochent beaucoup des Cysticapnos. 


Ter de 


TROISIÈME GENRE. — Cysticapnos. 


Le Cysticapnos a quatre pétales distincts et caducs ; le supérieur est 
bossu à sa base, les autres sont planes et oblongs; les étamines sont 
diadelphes; la capsule est enflée, ovale, globuleuse, bivalve et déhis- 
cente ; les deux placentas sont réunis par des fibres réticulées, 

Cette plante, unique dans son genre, est originaire du Cap, et ne 
diffère presque des Corydalis que par la conformation de sa capsule. 
La racine est annuelle, simple et fibreuse, la tige est cylindrique, les 
feuilles plusieurs fois ramifiées, se terminent en lobes amincis et 
vrillés, les pédoncules, opposés aux feuilles, sont rameux, pauci- 
flores et chargés de quelques bractées membraneuses ; le calice est 
teint en rose clair, ainsi que les pétales, dont le supérieur est necta- 
rifère, et dont les intérieurs, réunis en capuchon, cachent le stigmate 
et les anthères. 

La capsule, qui forme le caractère distinct de ce genre, présente 
deux renflements considérables : l'extérieur, auquel GÆRTNER a, mal 
à propos, donné le nom d'involucre, et l'intérieur, qu’il considère à 
tort comme formant la vraie capsule. Cette bizarre conformation s’ex- 
plique naturellement , selon De Canpozzr, par l'écartement des deux 
membranes opposées, l'épicarpe et l'endocarpe, qui se séparent pen- 
dant le cours de la végétation, et laissent entre elles une cavité 
aérienne, occupée par le plexus ou les fibres du mésocarpe attachées 
aux placentas. À la maturation, l’épicarpe s'ouvre en deux valves, et 
montre à découvert le sac ou la silique intérieure, qui se rompt assez 
irrégulièrement, et dont les graines brillantes et nombreuses adhèrent 
encore aux en 

Cette jolie plante fleurit à peu près tout l'été dans nos jardins, et se 
distingue, comme la plupart des Fumariacées, par l'élégance de son 
port et de son feuillage ; ses grappes sont peu garnies, et ses fleurs 
avortent en partie, pour favoriser la maturation des siliques, qui sont 
pendantes et fort enflées. Les semences sont dépourvues d’arille, l'em- 
bryon est aminci, cylindrique, recourbé et logé dans la saillie que 
forme le périsperme ; le nectaire est sans doute la base intérieure du 
pétale renflé. 

Quel est le but de cette singulière déformation de la capsule des 
Cysticapnos ? Est-il relatif à la dissémination ? C'est ce que j'ignore ; 
en attendant, Je remarque que le {Vigella Damascena présente un 
phénomène à peu près semblable. 


— 148 — 


QUATRIÈME GENRE. — Corydalis. 


Les Corydalis ont quatre pétales, dont un seul est quelquefois 
libre, mais qui sont ordinairement réunis à la base, et se séparent à 
l'époque de la fécondation; l'inférieur est linéaire, et le supérieur 
éperonné ; la silique est bivalve, aplatie, déhiscente, et presque tou- 
jours terminée en pointe; les valves du péricarpe sont parallèles aux 
phalanges des étamines. 

Ces plantes sont des herbes so es ou vivaces; leurs racines sont 
fibreuses, fusiformes ou tubéreuses, et dans cette dernière forme, 
solides ou creuses. Les tiges, toujours simples quand les racines sont 
fusiformes ou tubéreuses, deviennent rameuses lorsqu'elles ont des 
racines fibreuses. Les feuilles caulinaires sont alternes et rarement 
opposées, à divisions une ou deux fois ternées ou pennées ; les fleurs 
sont en grappes, et portées sur des pédoncules terminaux, ou opposés 
aux feuilles ; les pédicelles n’ont chacun qu'une bractée. 

Les Corydalis ont la végétation et le port des Fumariacees; ce sont 
des plantes d'une texture tendre, à feuilles plus ou moins découpées 
et d'un vert glauque, à fleurs jaunes, blanches , pourprées, rougeätres 
ou quelquefois nuancées de ces diverses couleurs. Elles habitent 
l'hémisphère boréal, et paraissent réparties presque également entre 
l'Europe, la Sibérie et l'Amérique du nord. On en trouve quelques 
espèces éparses en Perse, dans l'Asie ou au Japon. 

Ce genre a été partagé par DE Canpoze en trois sections, plutôt 
fondées sur le port général que sur la structure de la fleur. 

La première est celle des Leonticoïdes, qui se distinguent par leur 
racine fusiforme , leurs tiges simples, chargées de deux feuilles 
opposées; elle ne compte que deux espèces originaires de la Perse ou 
de la Mésopotamie, et dont nous n’avons pas à nous occuper. 

La seconde, ou celle des Capnites, se reconnaît à ses racines tubé- 
reuses, à sa tige simple, à ses feuilles caulinaires peu nombreuses et 
alternes. Ses espèces s'élèvent aujourd'hui à treize, et habitent toutes 
l'Europe ou l'Asie. Elles appartiennent au même type, et quelques- 
unes pourraient bien n'être considérées que comme des variétés pro- 
duites par ie sol ou le climat. Les trois européennes long-temps con- 
fondues, le Tuberosa , le Bulbosa et le Fabacea, ne diffèrent, en par- 
ticulier, que par leurs bractées entières ou digitées, leurs tubercules 
creux ou solides, écailleux ou non écailleux. Toutes les trois vivent 
en famille, dars les lieux à demi découverts, sur les lisières des bois 
ou à l'ombre de nos vergers, dans les terres riches et profondes. Elles 


AO 

annoncent le printemps, et leurs jolies graines, blanches, rouges, 
vineuses, ou mélangées de ces diverses teintes , produisent des effets 
charmants, le long de nos haïes, où elles forment des plates-bandes 
naturelles. 

Les tubercules de ces plantes , en particulier ceux du Tuberosa, 
sont solides les premières années, et deviennent ensuite tronqués et 
caverneux à leur base. Ils repoussent sans cesse du mème centre, et 
paraissent détruits, qu'ils donnent encore des feuilles et des fleurs. 
Le point végétatif, ou, si l'on veut, le véritable collet, est un ménis- 
que qui recouvre la partie supérieure du tubercule , et qui se distingue 
par sa consistance et sa structure. Le reste du tubercule est la matière 
nutritive, et tant que celle-ci n'a pas entièrement disparu, le ménisque 
exerce son action reproductive. Il y a bien de la différence entre cette 
organisation et celle de la plupart des racines appelées aussi tubé- 
reuses. 

Lorsqu'on suit la germination d’une graine de Corydalis tubéreux 
ou Cava des auteurs, on voit s'élever de son sommet un cotylédon 
unique et pédicellé, et se former à l'extrémité de la radicule un petit 
bourrelet qui est la première origine du tubercule; la plante cesse 
alors de végéter jusqu'à ce que le bourrelet ait acquis de plus grandes 
dimensions : alors et après un intervalle assez long, ce bourrelet se 
fendille au sommet et jette des radicules près de sa base; ensuite il 
pousse des feuilles qui, comme je l'ai déjà dit, sont d'abord ternées 
(Voyez Annales des Sciences naturelles, février 1834). La même forme 
de germination appartient au Solida ou Halleri, dont le tubercule reste 
toujours solide, tandis qu'il se creuse et ne pousse que de son som- 
met dans le Cava. L'auteur de cette observation très-curieuse est 
Discaorr. : 

Les premières feuilles que donnele tubercule de l'année précédente, 
sont simplement ternées, et chaque division est partagée en deux ou 
trois lobes ; celles des années suivantes ont les dimensions ordinaires, 
et sont remarquables par les glandes rougeätres de leurs bords; les 
tiges, avant leur développement, sont repliées sur elles-mêmes, et 
leurs fleurs sont entièrement recouvertes par les bractées; les feuilles 
sont roulées en cornet sur leur surface supérieure, et protégées par 
une ou deux écailles transparentes, qui ne sont que des rudiments de 
feuilles, et doivent se trouver plus ou moins dans toutes les espèces; 
mais elles sont surtout marquées dans le Bulbosa. 

Des quatre pétales du Corydalis tuberosa , les deux extérieurs, placés 
lun au-dessus de l'autre, ferment exactement la fleur, à laquelle ils 
tiennent lieu de calice; leurs bords supérieurs sont libres et réfléchis ; 


— 150 — 


les deux intérieurs, latéraux et exactement appliqués l’un contre l'au- 
tre, renferment les anthères dans une poche ou capuchon quadran- 
gulaire, et ne se séparent point, quoiqu'ils laissent entre eux une 
fente étroite par laquelle l'air pénètre. La fécondation s'opère assez 
long-temps avant le développement de la fleur; les anthères sont cou- 
chées sur le stigmate, qui est un disque frangé et vertical, tout cou- 
vert de la poussière jaune fécondante; le nectaire , qui naïît du torus, 
est un corps verdâtre, rempli d'une liqueur miellée qui sort d'un 
pore très-marqué, et se répand dans la cavité du pétale supérieur; 
ensuite elle s'insinue par la fente qui sépare les deux pétales intérieurs, 
et de là pénètre jusqu'aux anthères et au stigmate qu’elle détrempe 
fortement. Cette humeur n'est pas destinée à attirer les mouches, 
puisqu'elle est renfermée dans un sac clos. Soyer Wicremer, dans 
son Memoire sur les Nectaires , inséré dans le cinquième volume de la 
Societé Linnéenne de Paris, pense que la rainure nectarifère aboutit, 
par ses deux branches, aux deux placentas, et que la liqueur sert à 
nourrir les graines, mais il est plus probable qu’elle concourt à l'œuvre 
de la fécondation, comme je viens de le montrer. 

Les siliques de tous ces Corydalis s'ouvrent par leurs valves qui se 
séparent naturellement, et sur les placentas filiformes on voit flotter 
quelque temps des graines lenticulaires, renflées, d'un noir brillant, 
et plus ou moins caronculées; au mois de juin, la scène est terminée; 
au moins dans nos plaines, et tous les Corydalis tubéreux ont disparu 
de la surface du terrain. 

Le Corydulis nobilis de la Sibérie est à peu près la seule espèce de 
cette section qui soit cultivée dans nos jardins. On dit que son tuber- 
cule, d'abord creux intérieurement, devient solide pendant la florai- 
son; Ce qui serait un phénomène bien remarquable. 

La troisième et dernière section des Corydalis, ou celle des Cap- 
noïdes , caractérisée par des racines fibreuses , des tiges nombreuses, 
et des feuilles caulinaires , incisées et alternes, est à peu près aussi 
riche en espèces que la précédente; mais elle comprend des plantes 
de différents types, annuelles ou vivaces, dont la patrie principale 
est la Sibérie , et qui se retrouvent encore au nord de l'Amérique, 
au Japon, etc. L'Europe en compte deux : le Lutea et le Claviculata ; 
et l'on rencontre encore dans les jardins le Glauca, désigné aussi sous 
le nom de Sempervirens , quoique annuel, et dont les grappes portent 
sept à huit fleurs teintes en jaune et en rouge, à peu près comme celles 
de l'Aquilegia canadensis. 

La plus remarquable des espèces de cette section c'est le Grubert, 
qui appartient au type du Glauca , de mème que l'Impatiens , le Sibi- 


— 151 — 
rica, le Stricta , ete. Ses pédoncules, comme ceux da Zongipes qui 
n'en est peut-être qu'une variété, s’allongent et se déjettent forte- 
ment pendant la maturation, et les Siliques s'ouvrent comme dans les 
Capnites par la séparation naturelle des valves articulées. 

Le Lutea, qui ne parait pas différer du Capnoïdes de Lanné, est 
commun dans le bassin de la Méditerranée, et fleurit, la plus grande 
partie de l'année, sur les murs et les fentes de rochers, où il forme 
des touffes très-élégantes qui se conservent long-temps. À l'époque de 
la floraison, il écarte ses pétales externes; l'inférieur s'abaisse, tandis 
que l’autre se relève; en même temps le style, avec ies anthères qui 
enveloppent toujours le stigmate, se redresse par un mouvement assez 
semblable à celui des Medicago, et qui est déterminé par la confor- 
mation du filet supérieur, dont la base élargie, fortement cartilagi- 
neuse et creusée en nacelle, renferme l'ovaire, et dont le sommet se 
recourbe par un mouvement élastique très-prononcé ; l'humeur sort 
par un pore qui naît près du sommet et qui monte par un sillon Jus- 
qu'aux anthères qu’elle détrempe, et dont le pollen se fond pour ainsi 
dire sur le stigmate : cet arrangement avec des variations peu impor- 
tantes se retrouve, je crois, dans tous les genres des Fumariacees. 

Le stigmate n’est pas conformé de la même manière dans tous les 
Corydalis : dans le Glauca, il est aplati et couronné de quatre franges 
papillaires ; dans le Capnoïide, il forme une coupe évasée, etc: Mais il 
est toujours immédiatement enveloppé des anthères, en sorte que la 
fécondation est directe. 

Les siliques sont terminées par un style qui s’endurcit après la flo- 
raison , et se sépare ensuite par une rupture préparée. Les graines, au 
nombre de huit à dix, sont caronculées , et se répandent sans doute, 
comme celles du Corydulis glauca. La dernière espèce des Capnoïdes 
européennes, est le Claviculata ou la Frillee, plante annuelle, qui a 
le port des Fumeterres, mais dont les fleurs peu nombreuses, d'un 
jaune blanchâtre, portent des siliques déhiscentes, courtes et chargées 
de deux à quatre semences. Elle est éparse dans diverses localités de 
l'Europe, et ne se trouve, je crois, en abondance nulle part; sa tige 
est faible et peu élevée, et ses feuilles, plusieurs fois décomposées, 
ont le caractère de la famille. 

Les Capnoïdes sont des plantes d’une organisation plus délicate et 
d’un port plus élégant que les autres Corydalis ; elles pourraient pres- 
que toutes être transportées dans nos jardins, qu’elles orneraient de 
leurs fleurs, la plupart d’un jaune d’or, et où leurs différents types 
fourniraient aux botanistes des observations intéressantes sur leur 
mode de fécondation, leurs nectaires, leur dissémination, l'irritabilité 


— 152 — 
de leurs étamines supérieures, la structure remarquable de leurs 
graines, la plupart monocotylées , etc. Il faut bien, par exemple, que 
les graines du Capnoïdes lutea aient une structure particulière pour 
s'accrocher contre les murs; que les feuilles du Sibrrica ne ressemblent 
pas à celles des autres espèces, pour être irritables au tact, etc. 


CINQUIÈME GENRE, — Sarcocapnos. 


Les Sarcocapnos ont quatre pétales libres, l'inférieur linéaire et le 
supérieur éperonné ; leur capsule est indéhiscente, ovale, aplatie, 
formée de deux valves marquées chacune de trois nervures, et renfer- 
mant deux graines. 

Ce genre, qui formait autrefois un petit groupe dans les Corydalis, 
en a été retiré à cause de son organisation particulière; on peut le 
considérer comme un passage entre le premier genre et celui des 
Fumeterres. Les deux espèces qui le composent, dont l’une appartient à 
l'Espagne et l'autre à la Mauritanie, se plaisent sur les rochers humides 
et maritimes, qu’elles recouvrent presque entièrement de leurs feuilles 
épaisses, plus ou moins triséquées, et qui se conservent presque 
toute l'année. Les racines s’enfoncent dans les fentes des rochers, et 
donnent des tiges nombreuses et frutescentes, au moins à leur base. 
Les fleurs, d'un beau blanc plus ou moins taché de rouge, se succèdent 
long-temps, et forment, avec les feuilles , des touffes pleines d'élégance. 

Je n'ai point vu les Sarcocapnos vivants, et je ne sais pas comment 
s'opère leurfécondation ; mais leur pétale éperonné indique l’existence 
d'un nectaire, et leurs capsules indéhiscentes doivent être articulées 
comme cells des Fumeterres. 


SIXIÈME GENRE. — lumaria. 


Le Fumaria ou Fumeterre a quatre pétales dont l’intérieur est libre 
et linéaire, et le supérieur éperonné; sa capsule est ovale, globu- 
leuse, indéhiscente, monosperme, évalve et souvent dépourvue de 
style après la floraison. 

Ce genre, qui comprenait autrefois toutes les Fumariacées , ren- 
ferme des plantes dont ie port et les habitudes se ressemblent beau- 
coup : leurs racines sont fibreuses et presque toujours annuelles; leurs 
tiges rameuses ; leurs feuilles glabres et finement découpées; leurs 
fleurs petites et réunies en grappes serrées; leurs pédoncules termi- 
naux ou opposés aux feuilles, leurs sépales membraneux, caducs, 
blanchätres et plus ou moins frangés. 


— 153 — 

Les Fumaria sont presque tous européens et originaires du bassin 
de la Méditerranée; ils habitent ordinairement nos cultures et nos 
champs, où ils se propagent sans cesse, et d'où ils se sont répandus 
dans les deux Amériques et jusqu'au Cap de Bonne-Espérance : on les 
distingue de toutes les autres : Fumariacees par la délicatesse de leur 
feuillage , et l'élégance de leurs fleurs ramassées en épis blancs, rouges, 
roses, ou nuancés de ces diverses couleurs. 

Ce genre se partage en deux sections assez tranchées : la première 
comprend les espèces dont la capsule conserve encore les traces de sa 
forme primitive, et forme un carpelle aplati assez semblable à celui des 
Sarcocapnos ; dans la seconde, on place celles dont la capsule est 
sphérique, sans apparence de valves ou de sutures. 

La première section, désignée par De Canpozze sous le nom de 
Platycapnos, ne renferme jusqu’à présent que deux espèces bien 
connues : le Fumaria spicata du midi de l'Europe, et le Corymbosa 
des rochers de l’Atlas : la première, souvent confondue avec le 
Fumaria officinalis , a une silique marquée de deux sutures et revêtue 
à l'intérieur d'une membrane papyracée, comme dans le Cysticapnos ; 
dans la seconde, qui est jusqu’à présent la seule Fumeterre vivace, les 
siliques sont seulement aplaties et terminées par un style persistant : 
ces deux plantes ont les épis très-serrés; leurs fleurs, d'un pourpre 
teint en rose ou en blanc, sont sessiles dans l'espèce européenne, et . 
longuement pédicellées dans l’autre. 

Le Spicata, qui est une espèce très-distincte dans ce genre, a les 
fleurs assez semblables à l'Officinalis, mais entièrement sessiles et 
serrées les unes contre les autres; à mesure que ces fleurs sont 
fécondées elles se renversent, en sorte que l'épi, commé dans quel- 
ques espèces de Trèfles, est divisé en deux parties : la supérieure à 
fleurs redressées et non encore fécondées, et l'inférieure à fleurs pen- 
dantes et déjà fécondées. A la dissémination, on voit s'échapper du 
milieu de la corolle flétrie, les capsules qui sont de petites coques 
ovales, allongées, charnues et monospermes. 

Les Sphærocapnos , qui composent la seconde section du genre, sont 
beaucoup plus nombreux, et forment ce que nous appelons les Fume- 
terres communes. Ils appartiennent au même type, et se sont vraisem- 
blablement multipliés, soit par la culture, soit par le climat; puisqu'ils 
étaient très-rares et très-peu connus du temps du GEssnER, et qu'on 
ne peut guère imaginer qu'ils soient originairement exotiques. On 
doit y distinguer deux espèces principales : le Capreolata et l'Offici- 
nalis, et peut-être une troisième, le Parviflora ; tous les autres ne me 
paraissent que des variétés. 


— 154 — 

Le Capreolata, le plus brillant de tous, n'habite guère que le midi 
de l'Europe; il aime à croître dans les haies, les murs et les fentes des 
rochers, qu'il couronne de ses fleurs blanches tachées de pourpre. Ses 
tiges sont grimpantes; ses feuilles s’entortillent , et ses pédoncules se 
recourbent après la floraison. L'Officinalis, au contraire, a ses pédi- 
celles droïts, et ses fleurs presque toujours roses à la base et pour- 
prées au sommet ; ses feuilles et ses tiges, qui ont aussi quelque dispo- 
sition à s'entortiller, sont rarement tordues. Enfin le Parviflora, plus 
commun au midi, a les fleurs blanches du Capreolata, et le feuillage 
de l'Officinalis. I] se reconnaît à la petitesse de sa fleur et à sa silique 
un peu aiguë. 

Les fleurs des Fumaria sont d'abord rapprochées en épi serré, et 
ont leurs lèvres horizontales, mais à mesure qu’elles s’'approchent de 
épanouissement , leur pédicelle se tord et leurs lèvres se disposent 
verticalement comme dans les Corydalis ; la cause finale de cet arran- 
gement se trouve dans le nectaire qui peut alors s'étendre latérale- 
ment sans être arrêté par. la tige; mais dans les Corydalis, dont les 
épis sont très-lâches, les cornets nectarifères se prolongent librement 
à droite et à gauche pendant tout le cours de la floraison, en sorte que 
leurs pédoncules ne se contournent jamais, et que leurs fleurs sont 
toujours verticales : on comprendra mieux ce joli mouvement de la 
fleur du Fumaria, en observant un de ses épis avant et pendant la 
floraison. 

Les Sphærocapnos ne dffient guère que par la forme de leur fruit 
plus ou moins mucroné, par leur pédicelles droits ou recourbés, 
courts ou allongés, par leurs tiges plus ou moins grimpantes, et les 
lobes plus ou moins arrondis de ou: feuilles. 

Les Sphærocapnos ont des siliques ou des fruits qui tombent par 
une articulation qu'on ne retrouve guère que dans les Sarcocapnos , et 
qui est d'autant plus convenable, que ces plantes fleurissent à peu près 
toute l'année, et peuvent ainsi répandre successivement leurs graines ; 
les styles se séparent aussi de bonne heure par une articulation placée 
à leur base. 

La fécondation s'opère ici comme dans le reste des Fumariacées ; 
les pétales intérieurs sont adhérents, et les anthères enveloppent de 
tous côtés le stigmate ; mais l'air pénètre par la partie inférieure de la 
corolle, qui tombe promptement, et l'organe nectarifère est placé 
dans la convexité du pétale supérieur. L’humeur miellée remonte de 
là dans les pétales intérieurs, et imprègne, pendant tout le cours de la 
fécondation, les organes sexuels comme dans les Corydalis, dont la 
structure florale est semblable. La semence est attachée à la paroi 


— 155 — 
intérieure par un cordon ombilical très-court ; l'embryon est petit et 
basilaire. 

Ces plantes, délicates en apparence, supportent fort bien les intem- 
péries de nos climats, et fleurissent jusqu’à la fin de l'automne. [ndé- 
pendamment de la déformation de la corolle, qui leur est commune 
avec les autres Fumariacées, elles présentent dans leurs siliques de 
beaux exemples d'avortements et de soudure. 

Auguste Sainr-Hivaire établit que la structure florale primitive 
des Fumariacées est celle de quatre pétales sur deux rangs et d'autant 
d’étamines opposées une à une aux pétales, et que les étamines 
amincies et uniloculaires à droite et à gauche des étamines principales, 
sont autant d’étamines dédoublées, placées d’abord devant les pétales 
intérieurs , et insensiblement d'abord séparées puis déviées par suite 
des déformations de la fleur. 


Onzième famille. — Crauciféres. 


Le caractère de cette famille, l’une des plus nombreuses en espèces, 
consiste dans un calice à quatre sépales, une corolle à quatre pétales 
alternes, six étamines dont deux plus courtes, et quatre plus longues 
rapprochées par paires. L'ovaire est monostyle, le péricarpe siliqueux, 
les semences sont dépourvues de périsperme, l'embryon est courbé ; 
la radicule, saillante au-dehors, est couchée sur les cotylédons. 

Les Cruciferes sont des herbes annuelles et vivaces, ou bien des 
sous-arbrisseaux qui ne s'élèvent pas au-delà de trois pieds. Les racines 
vivaces forment souvent des rhizomes, comme dans la Dentaire ; les 
autres sont pivotantes, fusiformes, renflées ou simplement fibreuses. 
Les radicules sont ordinairement nues ; mais quelquefois, et, par 
exemple, dans le Raphanus, elles ont, comme celles des Endogènes , 
une coléorhize bivalve qui provient de leur écorce régulièrement 
rompue. Les tiges sont cylindriques ou un peu anguleuses, et plus 
ou moins ramifiées ; quelquefois simples ou même remplacées par de 
véritables hampes , comme dans les Draves. Les pédoncules, propre- 
ment dits, sont toujours opposés aux feuilles, et par conséquent laté- 
raux; mais lorsque les rameaux qui les portent, viennent à avorter» 
ce qui arrive surtout dans les espèces annuelles, les fleurs, quoique la- 
térales , paraissent terminales. Les feuilles sont simples, presque tou- 
jours alternes , dentées, pennatifides, lyrées, à lobes irréguliers et plus 


— 156 — 

ou moins découpés, les inférieures pétiolées, les supérieures sessiles, 
souvent amplexicaules et pourvues d’oreillettes à la base. Les fleurs, 
disposées en corymbes, s’allongent souvent après la fécondation, et 
se changent en grappes, qui se développent successivement de bas en 
haut, les pédicelles sont filiformes et presque toujours nus; les fleurs, 
de grandeur moyenne, sont blanches, jaunes, pourpres et bleues, 
surtout dans quelques espèces du Cap. Elles doublent aisément, et 
sont souvent odorantes. Les poils, qui abondent dans les Cruciferes, 
sont simples, rameux ou étoilés; ils servent à caractériser les espèces, 
et quelquefois même les genres. 

Les calices, souvent caducs, sont quelquefois persistants, et pro- 
tégent alors le fruit. On donnele nom de Placentaires aux deux sépales 
opposés aux placentas ou aux sutures de la silique, et qui, dans l'esti- 
vation, occupent le rang extérieur; les deux autres sont désignés par 
l'expression de 7’alyaires, laquelle indique leur position parallèle aux 
valves de la silique. Ces derniers sont ordinairement renflés, bossus, 
ou même quelquefois éperonnés, pour recevoir dans leur cavité les 
glandes nectarifères. Les pétales onguiculés, à limbe entier ou 
échancré, et même bifide, sont ordinairement égaux en grandeur ; 
quelquefois les deux extérieurs sont plus grands que les autres ; ce 
qui arrive surtout lorsquele corymbe ne s’allonge pas en grappe; parce 
que, dans ce cas, les pétales intérieurs ne peuvent pas facilement se 
développer. 

Les étamines, placées sur le torus, et dont le nombre constant est 
de six, se réduisent quelquefois par avortement à quatre ou même à 
deux; quelquefois aussi les quatre plus longues sont dentées, ou 
soudées par paires; quelquefois enfin, comme dans les 4/yssum, ce 
sont les deux petites étamines qui portent à leur base un prolonge- 
ment dont on ne connaît pas encore l'usage. Les anthères dont le 
connectif couvre toute la surface postérieure, et dont par conséquent 
les parois ne se replient pas, sont biloculaires , introrses , ordinaire- 
ment sagittées, et roulées en spirale après la fécondation. Leur pollen 
ovoïde, opaque, à trois plis, a tantôt la membrane externe celluleuse; 
et tantôt simplement ponctuée. Quelquefois leur filet se contourne, et 
alors elles paraissent extrorses. Les deux carpelles ou les deux loges 
qui forment la silique, sont étroitement réunis en un seul péricarpe. 
L’ovaire est tantôt raccourci et tantôt allongé, et cette circonstance a 
donné lieu à la division des Cruciferes en siliculeuses et siliqueuses, 
laquelle est encore adoptée dans la plupart des ouvrages de botanique. 
Les silicules varient assez dans leurs formes; quelquefois elles sont 
aplaties dans le sens des valves, et alors elles portent le nom de 


— 157 — 

Latiseptes, parce que leur cloison est aussi large que leurs valves; 
quelquefois l’aplatissement est en sens contraire, et alors elles forment 
ce qu'on appelle les Angustiseples, comme dans le Capsella bursa 
pastoris. Il y a des silicules qui ne s'ouvrent point, et ne conservent 
aucune trace de cloison, ce sont les Vucamentacees. Il ÿ en a d’autres 
qui ont des divisions transversales, avec les valves déhiscentes, ce sont 
les Septulatées ; et d'autres enfin qui se séparent seulement en articles, 
ce sont les Lomentacées. Ces diverses formes de fruits serviront, 
comme nous le verrons bientôt, aux subdivisions de la famille. 

Il y a moins de variations dans les siliques proprement dites. On 
appelle cylindriques, celles dont chaque valve est ‘renflée en demi- 
cylindre ; quadrangulaires, celles où ces valves se plient à angle droit; 
aplaties, celles qui s'appliquent, dans toute leur surface, contre la 
cloison, etc. Le style est ordinairement fort court, et comme nul 
dans les siliqueuses, tandis qu'il est presque toujours allongé dans les 
siliculeuses; quelquefois, par une organisation singulière, il se renfle 
à sa base, et renferme alors une semence fort distincte de celles qui 
sont logées au-dessous, et, dans ce cas, il n’est pas facile de se rendre 
compte de la forme primitive du péricarpe. 

La cloison qui sépare les deux valves est presque toujours une 
pellicule fine et transparente, renflée en bourrelet sur ses bords pla- 
centaires : dans les siliques proprement dites, elle se prolonge au 
sommet en un Corps épais sur lequel est implanté le style et qui sub- 
siste après la séparation des valves ; dans les silicules , au contraire, 
ce corps manque presque tout-à-fait, et la cloison est simplement cou- 
ronnée par le style. Je ne concois pas bien ici comment la cloison 
serait formée par les bords retournés des valves, et BasrrinG pense 
qu’elle est produite par la dilatation de la colonne centrale dont les 
bords sont devenus séminifères ; toutefois l'on remarque souvent au 
milieu de la cloison une légère netvure qui semble indiquer le point 
de soudure des deux demi-cloisons, et souvent aussi, surtout parmi les 
crucifères siliculeuses , la cloison est séparable en deux lamettes atta- 
chées chacune de l’un des côtés des deux placentaires. 

Les semences sont pendantes et attachées sur quatre rangs aux pla- 
centas ; leur nombre est ainsi toujours pair, deux, quatre, huit, etc., 
dans chaque carpelle, à moins qu’il n’y ait des avortements, ce qui 
n'est pas rare. Les funicules ou cordons ombilicaires sont ordinaire- 
ment libres ; quelquefois cependant ils adhérent à la cloison, comme 
dans la Zunaire. Les valves se détachent, à l'époque de la dissémina- 
tion, et, d'ordinaire, elles demeurent parallèles; mais d’autres fois, 
comme dans les Cardamines, les Dentaires , etc., elles se roulent en 


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spirale, et lancent au loin leurs graines. Cette circonstance dépend 
probablement de la conformation de la silique, qui n’a pas alors des 
nervures longitudinales. Les semences, recouvertes d'un tégument 
assez épais, sont quelquefois entourées d'une aile membraneuse, dans 
le plan des cotylédons ; plus souvent elles sont tapissées extérieure- 
ment d'un mucilage, qui s'étend dans l’eau sous la forme de réseau 
transparent, ‘et qui est, sans doute, destiné à hâter la germination. 
L'embryon est recourbé, la radicule cylindrique, un peu conique, 
et dirigée vers l'ombilic; les cotylédons sont disposés de différentes 
manières, par rapport à la radicule. Lorsque celle-ci est logée le long 
de la suture, les cotylédons sont accombants ; mais lorsqu'elle s'étend 
sur leur dos, ils deviennent éncombants. Les premiers ont tous la même 
forme, mais les autres sont tantôt planes, tantôt plissés en deux, 
tantôt simplement contournés en spirale, ou bien, enfin, plissés sur 
eux-mêmes dans le sens de leur largeur. Toutes les fois que les cotylé- 
dons sont accombants, la radicule est latérale ; dans le cas contraire, 
elle est dorsale. Ces positions différentes de la radicule, combinées 
avec les quatre formes principales des cotylédons, sont représentées, 
par De Canozze, par les emblêmes suivants, où lo indique la section 
transversale de la radicule, et les lignes parallèles, celle des cotylé- 
dons : 

o — Cotylédons accombants, radicule latérale, ou Pleurorhizees ; 

o {|| Cotylédons incombants, radicule dorsale, ou Votorhizees ; 

o >> Cotylédons plissés en deux, radicule dorsale, ou Ortho- 

plocees ; 

o || || Cotylédons contournés en spirale, radicule dorsale, ou 

Spirolobees ; 

o || || || Cotylédons deux fois plissés sur eux-mêmes, radicule 

dorsale, ou Diplecolobees. 

Dans la position naturelle , la radicule et les cotylédons sont ascen- 
dants. | 

Dans le cas contraire, qui est rare, ils sont dits inverses. 

Ces formes différentes d'embryon, combinées avec celles de la sili- 
que, ont fourni à De Canpozze toutes les divisions des Cruciferes, 
et ce qu'il ya de singulier, c'est que chacune des deux formes d'em- 
bryon a renfermé toutes les formes des siliques, et par conséquent 
chaque forme des siliques, les deux formes des embryons; ce qui fait 
que les divisions tirées des siliques auraient pu constituer les sections 
primaires, tout comme les secondaires. 

Il est bien vrai que cette nouvelle méthode de classification rompt 
la plupart des anciens genres ; et en introduit un grand nombre de 


— 159 — 


nouveaux ; mais il est certain que tous les botanistes sentaient la 
nécessité de réformer ces genres , qui n'étaient point naturels, et d’en 
introduire d’autres pour suffire aux besoins sans cesse renaissants de 
la science. Nous jugerons, en les décrivant, si ces groupes, fondés 
sur les formes des embryons, renferment des espèces bien liées entre 
elles, ou s'ils n'offrent que des divisions artificielles. En attendant, il 
est impossible de ne pas remarquer que la valeur donnée, dans la mé- 
thode naturelle, à la forme de l’embryon, est beaucoup trop consi- 
dérable, au moins dans certains cas; puisque dans les Cruciferes, qui 
constituent une famille trés-distincte , cette forme est si variable, 

Cependant il ne faut pas considérer les diverses positions de l'em- 
bryon, par rapport aux cotylédons, comme tellement constantes 
qu'elles ne se modifient quelquefois dans les mêmes espèces ; ainsi, 
MM. Gay et Monvarp, dans leur Mémoire, inséré dans les Annales 
des Sciences naturelles, mai 1826 , ont déjà remarqué que, dans quel- 
ques plantes, comme le Cochlearia saxatilis, le Hutschinsia alpina, 
etc., la radicule est tantôt latérale et tantôt dorsale, et même que, 
dans ce dernier, elle se contourne plus ou moins. Les mêmes observa- 
tions ont été faites par d'autres botanistes, et Kocx, dans sa Flore 
d'Allemagne, a remarqué que plusieurs genres tels que ceux de l’£ry- 
timum, du Sisymbrium, etc., renfermaient dans le Prodrome des 
espèces qui ne pouvaient pas y être comprises d'après la position rela- 
tive de leurs cotylédons et de leur radicule, en sorte qu'on ne voit 
pas encore quel rapport il peut exister entre les formes variées des 
cotylédons et l'organisation générale de la plante; je remarque seule- 
ment que pius le plissement des cotylédons est compliqué, plus aussi 
la silique parait déformée. 

L’estivation du calice des Cruciferes est en recouvrement ; les deux 
sépales placentaires sont toujours extérieurs, et l'un est ordinairement 
placé un peu au-dessous de l’autre. Les pétales sont aussi sur deux 
rangs, et les extérieurs enveloppent aussi partiellement les autres, de 
manière à former, ici une estivation tordue, là une estivation enve- 
loppante, où l’un des pétales extérieurs recouvre les trois autres. Ces 
pétales restent tantôt immobiles , depuis leur épanouissement jusqu'à 
leur chute, comme dans le très-grand nombre des espèces ; tantôt ils 
s'ouvrent le matin et se referment le soir, comme dans le Cardamine 
pratensis , quelques espèces de Brassica, etc. Ces mouvements s'éten- 
dent jusqu'aux corymbes eux-mêmes, dont les uns sont toujours 
dressés, comme ceux des Jberis, tandis que les autres se penchent 
jusqu’à l’époque de la fécondation. Le calice et la corolle tombent 
après la fécondation, excepté dans quelques espèces d’Ælyssum , ec. 


— 160 — 

Les fleurs des Cruciferes sont symétriques plutôt que régulières, et 
offrent beaucoup moins de variations qu’on n’en rencontre dans les 
embryons, disposition contraire à celle du grand nombre des autres 
familles. De Canpozze suppose que l’état primitif des Cruciferes pour- 
rait être de porter des fleurs réunies trois à trois, et composées cha- 
cune de quatre pétales et de quatre étamines; que de ces trois fleurs, 
les deux latérales ont avorté, en ne laissant d’autre trace de leur exis- 
tence que les deux étamines solitaires, placées au-dessous des autres. 
Ilajoute, comme preuve de son hypothèse, qu'Auguste Sarvr-HiLarre 
a trouvé des individus de Cardamine hirsuta , où ces deux étamines 
latérales avaient été changées chacune en une fleur complète à quatre 
pétales et quatre étamines. Mais il est difficile d'imaginer que cette 
forme primitive eût tellement disparu, qu'il n’en restât, pour ainsi 
dire , aucune trace. Si l’on voulait toutefois expliquer l'existence des 
deux étamines plus petites, il semble qu'il vaudrait mieux supposer, 
comme le fait aussi DE Canpozre, que la fleur des Crucifères était 
d'abord formée de quatre pétales et de huit étamines, dont deux ont 
ensuite avorté, ou plutôt se sontsoudées, comme le montre M. SERINGE 
(Bulletin de Férussac, tome 22, p. 261), sur des fleurs de Cheiranthus 
cheiri qui présentaient huit étamines placées sur deux rangs et toutes 
alternes aux pétales, les quatre extérieures en face des valves de la 
silique et les quatre autres en face des sutures; ces premières sont 
celles qui se soudent habituellement deux à deux et qui changent la 
régularité primitive en simple symétrie. Enfin on peut ramener encore 
les fleuts des Cruciferes à la régularité, en supposant que les deux 
paires d’étamines sont formées d'étamines simples dédoublées. Mais 
pourquoi alors ces demi-étamines ont-elles conservé des anthères bilo- 
culaires ? 

Quoi qu'il en soit de ces formes primitives, les principales variations 
que présentent les fleurs des Crucifères, consistent dans l'absence des 
deux petites étamines, dans les appendices qu'on trouve quelquefois 
sur les filets, et dans le développement que prennent souvent les 
pétales extérieurs. Je ne parle pas ici de ce qui concerne l'ovaire, parce 
que j'en ai traité plus haut. 

Les couleurs des pétales sont, comme nous l'avons dit, jaunes, 
blanches et pourprées; elles ne varient presque point dans la même 
espèce, pour ne pas dire dans le même genre. Cependant il existe quel- 
ques plantes, comme les Chetranthus des Canaries, les 4/yssum, etc., 
où la couleur change, à mesure que le pétale vieillit, phénomène 
qu'on apercçoit aussi dans plusieurs Borraginées, etc. On trouve encore 
dans cetie famille certaines espèces, qui répandent une odeur très- 


— 161 — 
suave, et dont les pétales ont une couleur livide : telles sont l'Hesperis 
et le Mathiola tristis, etc. Ces plantes , qui se retrouvent aussi dans 
les Géraniées et les Gladiolus, s'épanouissent le soir et se referment 
le matin. 

Le trés-grand nombre des péricarpes s'ouvre pour l'émission des 
graines, et les valves constamment détachées de leurs bords placen- 
tifères qui subsistent très-long-temps, conservent alors leur position 
naturelle, ou se roulent sur elles-mêmes; souvent aussi les fruits se 
séparent en articulations , et quelquefois enfin ils ne s'ouvrent ni ne 
se séparent. Mais il faut remarquer que les articulations et les péri- 
carpes indéhiscents ne renferment presque jamais qu'une graine, très- 
rarement deux. S'il en eût été autrement, la germination aurait été 
gênée, souvent même détruite. Il serait important d'observer com- 
ment ces semences, ainsi enveloppées, parviennent à se débarrasser 
de leur péricarpe. ; 

A l'époque de la fécondation, les stigmates de presque toutes les 
Crucifères sont placés à côté des anthères, et à la même hauteur ou 
“un peu au-dessous; en sorte que la fécondation est toujours immédiate, 
et que le pollen peut aisément se répandre sur l'organe qui doit le 
recevoir, sans que l'anthère ait besoin de s'ouvrir sur sa face externe ; 
on peut ajouter que la silicuie est toujours surmontée d'un style qui 
élève le stigmate à la hauteur des anthères, tandis que la silique a un 
stigmate sessile, et l'on doit remarquer enfin que les anthères tou- 
jours insérées à la base du filet, ne peuvent jamais osciller ni 
changer de position, ce qui d’ailleurs aurait été impossible et inutile 
dans l’organisation donnée de la fleur. Il est impossible de ne pas 
voir ici un arrangement plein de sagesse. 

En général, les siliques des Crucifères s'ouvrent par la sécheresse, 
et se referment par l'humidité ; cette disposition appartient à la plupart 
des péricarpes secs et déhiscents, et il est aisé de comprendre qu’elle 
est nécessaire à la conservation de la graine, qui ne doit germer que 
lorsqu'elle a été disséminée. Cependant quelques plantes, comme 
l'Anastatica Hierunthica ( Rose de Jericho), offrent des exemples du 
cas contraire, qu'on retrouve aussi dans d’autres familles, telles que les 
OEnotheres , etc., et qu'on doit expliquer par une structure différente 
des fibres du péricarpe. La cause finale de cette organisation est 
extrêmement remarquable dans l’'Anastatica, comme nous le dirons 
ensuite. 

La substance mucilagineuse qui entoure la plupart des graines des 
Cruciferes , est probablement destinée à attirer l'humidité de la 
terre, et à favoriser la germination; elle n’est pas particulière à 

ji II 


— 162 — 
cette famille, car on la retrouve dans le Lin, plusieurs Labiees, etc. 

Les glandes nectarifères placées sur le réceptacle appartiennent à peu 
près à toutes les Cruciferes ; mais elles sont quelquefois très-apparentes, 
et d'autrefois très-peu marquées. En général, elles varient beaucoup 
de position et de forme. Le renflement des sépales extérieurs est sou- 
vent destiné à les recevoir, et à recueillir l'humeur miellée qu’elles 
. fournissent. Quel est l'usage de ces glandes ? Servent-elles à attirer les 
insectes qui favorisent la fécondation ? ou exhalent-elles une vapeur 
nécessaire à l’accomplissement de cet acte ? C'est ce que je n’ai pas 
encore suffisamment examiné; mais j'observe que celles qui corres- 
pondent aux grandes étamines sont extérieures, tandis que les autres 
sont intérieures, ou quelquefois intérieures extérieures, et forment 
comme un anneau à la base des petites étamines. J'ajoute qu’au moment 
de la fécondation , les unes et les autres distillent abondamment 
l'humeur miellée, et qu’on peut voir, en regardant verticalement une 
fleur, les quatre tubulures qui forment la communication des anthères 
aux glandes, comme dans les Convolvulus, les Linées, et une foule 
d’autres plantes. 

Les stigmates des Cruciferes sont bifides, tantôt rapprochés, tantôt 
écartés, et toujours correspondant aux deux placentas. Il ne faut pas 
les confondre avec d’autres organes, tels que les appendices du 
Mathiola tricuspidata où du Notoceras , qui ne sont que les prolonge- 
ments des placentas ou des valves; mais il serait intéressant de s'assurer 
siles Crucifères à fruits indéhiscents et monospermes, ont aussi deux 
stigmates distincts et non soudés. 

Quoique les Cruciferes aient de grands rapports, dans leur structure 
et leur végétation, elles présentent toutefois des différences de plu- 
sieurs sortes; les unes, comme la plupart des Cardamines et des 
Nasturtium , vivent auprès des eaux ou dans l'eau même; les autres, 
dans les lieux secs, comme les 4/yssum, où même dans les sables du 
désert, comme l’Anastatica. Quelques-unes fournissent des drageons, 
comme la Cardamine amere ; d'autres se propagent par des rejets sou- 
terrains, comme quelques Arabis ; d'autres se reproduisent par des 
bulbes, comme le Curdamine pratensis. La plupart sont indociles à la 
culture; mais plusieurs genres, et celui du Brassica en particulier, 
semblent se prêter à tout ce qu'on leur demande, et fournir, avec la 
même facilité, des racines et des feuilles pour notre nourriture, ou 
bien de l’huile pour nos différents usages. De si grandes différences 
dans la manière de vivre, ne peuvent guère s'expliquer que par des 
différences dans l’organisation primitive. 

La plupart des Crucifères bisannuelles donnent au printemps leurs 


— 163 — 
fleurs portées sur une hampe ou tige ramifiée, et sortant du milieu ou 
du côté d’une rosette de feuilles radicales ; telles sont les Draba, les 
Arabis, les Erophiles, etc. Si l'on veut prolonger la vie de ces plantes, 
il faut les empêcher de donner leurs fleurs ou au moins ieurs fruits. On 
pourra ainsi conserver, pendant quelques années, des individus, qui 
prendront alors des racines plus fortes et des feuilles mieux nourries. 

Les feuilles et les pédoncules des Cruciferes sont continus à leur 
tige, et périssent en même temps. Cependant les Anastatica, les 
Alyssum vivaces, etc., conservent leurs tiges et non pas leurs feuilles, 
ce qui semble indiquer qu'il existe quelque articulation dans ces 
dernières. Il est aussi probable que les Myagrum et les plantes à fruit 
indéhiscent, ont leur silique articulée au pédoncule. 

Les feuilles ont leur plissement irrégulier dans cette famille, 
comme dans celle des composées. En général, elles sont roulées, des 
deux côtés, sur leur surface supérieure; mais quand les bords sont 
irrégulièrement sinués et dentés, ils sont aussi irrégulièrement plissés. 
Cependant il y a des genres dans lesquels les plissements sont plus 
uniformes, comme il en est d’autres dans lesquels les feuilles sont 
entières et non plissées. Nous les indiquerons en traitant les genres. 

Les tiges des Cruciferes ne se tordent, je crois, jamais, et leurs pédi- 
cules ne se déjettent pas du côté de la iumière, mais ils conservent 
dans la floraison leur position primitive, et ordinairement ils sont dis- 
posés en grappes ou en corymbe : toutefois ils s'allongent plus ou 
moins dans la maturation comme les tiges, et quelquefois ils se dé- 
jettent ainsi que dans plusieurs espèces de Turritis. L'estivation du 
calice diffère de celle de la corolle; dans le premier, les deux sépales 
opposés sont externes, et les autres internes ; dans la corolle, deux 
pétales opposés sont, l’un externe, l’autre interne. 

L’efflorescence est toujours centripète, c’est-à-dire que les fleurs du 
bas se développent avant celles du sommet. Il arrive de là, que ces 
fleurs, d'abord disposées en corymbe, s’allongent ensuite en grappes; 
celles du bas répandent souvent leurs semences, lorsque celles du 
haut ne sont pas encore épanouies. Cet arrangement était nécessaire 
pour que la fécondation s’opérât avec plus de succès. 

Les fleurs de la plupart des Crucifères ne se referment point, elles 
durent plusieurs jours et ne se fécondent que lentement : on voit leurs 
anthères s'ouvrir à peu près simultanément et répandre insensible- 
ment sur le stigmate en tête papillaire, un pollen ordinairement jau- 
nâtre et onctueux. Maïs, lorsqu'à l'époque de l'épanouissement, les 
anthèresnon encore ouvertes sont exposées à la pluie, elles se gonflent, 
deviennent transparentes, et perdent, je crois, la faculté de s'ouvrir, 
comme on le voit dans les Æ/yssum, les Brassica, etc. 


— 164 — 


Les poils sont très-variés dans les genres des Cruciferes, dont les 
espèces sont rarement glabres. Ils sont mous et simples dans plusieurs 
Mathioles, rudes ou rameux dans d'autres genres, et étoilés dans 
presque tous les 4/yssum, dont ils font un des caractères distinctifs. 
Leur constance et leur régularité peuvent fournir de bons caractères 
spécifiques. 

Les Crucifères sont des plantes éminemment européennes; leur 
nombre, qui, du temps de Linné, ne s'élevait pas à trois cents 
espèces, s’est tellement accru de nos jours, que De Canpozre en a 
déjà décrit plus de neuf cents, et qu’actuellement on en compte près 
de douze cents. Ce sont surtout les botanistes russes qui, dans ces 
derniers temps, ont enrichi cette famille par leurs découvertes. 

On peut’ dire aujourd’hui que, de ces neuf cents espèces connues, 
environ cent soixante-six habitent l'Europe tempérée ou septen- 
trionale; deux cent vingt-quatre, le bassin de la Méditerranée et ses 
îles; cent quatre-vingt-quatre , l'Asie mineure, la Syrie et la Perse; 
cent, la Sibérie ; trente-cinq, la Chine, le Japon et les Grandes-[ndes. 
On en trouve seize dans la Nouvelle-Hollande , six dans les îles Mau- 
rice, soixante-dix au Cap, et neuf dans les Canaries. L'Amérique tout 
entière n’en comprend encore que quatre-vingt-dix espèces, disper- 
sées presque également au nord et au sud. De toutes ces plantes, 
trente-cinq seulement sont communes aux deux continents, où elles 
ont été répandues par la culture. On peut conclure ainsi que les Cru- 
ciferes se plaisent pren dans les zones froides ou tempérées, 
puisque la plupart même de celles qui vivent sous les tropiques, ne 
se trouvent guère que dans les lieux élevés et montueux. La moitié 
de la famille a été placée au nord du quarante-unième degré de lati- 
tude, et l’autre moitié au sud. 

a plantes sont robustes, et supportent bien les intempéries des 
saisons et le froid de nos Hivéses cependant elles sont sujettes à diverses 
maladies, dont les unes doivent être attribuées aux insectes, et les 
autres à des productions parasites , telles que les Æcidium, les Uredo, 
ete. Nous en parlerons en traitant séparément des genres. 

M. De Cannozce, à qui nous devons la plupart des considérations 
que nous venons de présenter, range les Cruciferes sous cinq divisions 
principales, fondées sur la cléen de l'embryon : 


Cotylédons accombants. Pleurorhizées. 
Notorhizces. 

é h Orthoplocées. 
Cotylédons incombants. | Spitolobége: 

Diplécolobées. 


— 169 — 

Chacune de ces cinq divisions primitives présente, à son tour, six 
subdivisions tirées de la forme du fruit, et qui portent les noms de 
Siliqueuse , Latisepte, Angustisepte, Nucamentacée , Septulée ; Lomen- 
tacée, ce qui forme en tout trente tribus de Cruciféres. Mais de ces 
trente, il n’y en a que vingt et une de réelles, les autres, ou n'existent 
pas, ou n’ont pas encore été trouvées. Cependant, en ne considérant 
que deux classes de cotylédons, les accombants et les incombants, 
qui se subdivisent en quatre sections, on trouve dansles deux classes 
les six formes de siliques. 


PREMIER ORDRE. — PLEURORHIZÉES. 


Les Pleurorhizées ont leurs cotylédons planes et accombants, à 
radicule latérale, c’est-à-dire placée sur la ligne de séparation des deux 
cotylédons; les semences aplaties et quelquefois bordées. 


Première tribu. — PLEURORHIZÉES SILIQUEUSES, ou ARABIDÉES. 


Les Arabidees ont leur silique plus ou moins allongée, linéaire ou 
arrondie, biloculaire, bivalve, déhiscente, à cloison linéaire, à style 
court, à valves planes, convexes ou un peu sillonnées. Les semences 
dans chaque loge sont nombreuses, disposées sur un ou deux rangs, 
ovales ou orbiculaires, aplaties et souvent échancrées. 

Les Arabidees se rapprochent beaucoup, pour le port, des Sisym- 
brees et des Alyssinces. Elles diffèrent des premières par leurs cotylé- 
dons accombants et leurs semences aplaties, et des secondes, par 
leur péricarpe toujours allongé en silique. Toutefois il ÿ a entre les 
Alyssinees et les Arabidées, ce singulier rapport, que la plupart des 
genres de l'une des tribus, ont leurs représentants dans l’autre : ainsi 
les Mathioles ont le port des Hesperis, les Chetranthus celui des Mal- 
comes, etc. 

Du reste, les siliques ne sont pas toutes distinctes des silicules, et 
il existe entre ces deux formes un grand nombre de transitions. 


PREMIER GENRE. — /Mathiole. 


Le calice des Mathioles est droit, et les deux sépales extérieurs ont 
une bosse bien marquée. Les pétales ont leur limbe ouvert, plus ou 
moins arrondi et oblong. Les étamines sont dépourvues d'appendices, 


— 166 —- 


et les quatre plus longues sont élargies à leur base. La silique est 
cylindrique ou aplatie, jamais tétragone; le stigmate est formé de 
deux lobes rapprochés et chargés d’appendices plus ou moins mar- 
qués. Les semences sont disposées sur un seul rang, et souvent bor- 
dées d’une petite aile membraneuse. 

Ce genre comprend des herbes, ou rarement des sous-arbrisseaux, 
dont le port varie. Quelquefoisles Mathioles sont droites et peu divisées, 
quelquefois étalées et branchues. On les reconnaiït à leur surface cou- 
verte d'un duvet cotonneux de poils étoilés, ou hérissée de petites 
glandes rudes et un peu pédicellées. Leurs feuilles sont alternes, 
oblongues, entières, ou diversement sinuées et glanduleuses dans 
leurs dentelures. Les grappes sont terminales par l'avortement des 
rameaux, les pédicelles dépourvus de bractées, et les fleurs blanches, 
pourprées, d’un rouge livide, ou panachées de ces diverses couleurs. 
Elles répandent presque toujours une odeur très-agréable. 

Le genre des Mathioles est fort distinct de tous ceux de la même 
famille , par la structure de son stigmate renflé et diversement bosselé. 
Celui du Votoceras, qui s’en approche le plus en apparence, a ses 
appendices formés par les prolongements des valves et non des pla- 
centas. 

Les Mathioles sont un démembrement de l'ancien genre des Chei- 
ranthus de LixNÉ, formé d'espèces qui n'avaient presque aucun rap- 
port, et qui sont maintenant réparties dans quatre ou cinq genres 
plus naturels, comme les Mathioles, les Cheiranthes, les Malcomes, 
etc. Leur nombre s'élève au-delà de vingt-quatre, et deviendra sans 
doute plus considérable encore. Cette considération aurait seule suffi 
pour la création de nouveaux genres plus naturels que l'ancien. 

Les Mathioles se subdivisent en quatre sections naturelles et symé- 
triques, fondées sur la forme des pétales et la structure des stigmates. 

La première comprend les Pachynotes, à pétales ovales et stigmates 
épaissis ; 

La seconde , les Lupéries, à pétales allongés et stigmates épaissis ; 

La troisième, les Pinares, à pétales allongés et stigmates cornus; 

La quatrième, les Acénotes, à pétales ovales et stigmates cornus. 

Les Mathioles habitent l'Europe tempérée, les bords de la Médi- 
terranée et l'Asie orientale. On en trouve quelques-unes éparses en 
Abyssinie ou en Sibérie. Elles aiment de préférence les bords de la 
mer, les lieux sablonneux et exposés au soleil. 

Les Pachynotes renferment des plantes qui appartiennent au même 
type, et dont plusieurs ne sont sans doute que des variétés obtenues par 
la culture ou le climat. On en compte cinq ou six-espèces européennes, 


ES 

et trois étrangères. La première et la plus commune des espèces indi- 
gènes est l’/ncana, ainsi appelée des poils étoilés et blancs dont elle est 
couverte; la seconde est l’Annua, qui ne diffère guère de la précédente 
que par sa tige herbacée et droite ; la troisième est le Glabra, à feuilles 
vertes, glabres, et tige tubescente; la quatrième est le Græca, qui 
diffère du Glabra, comme l'Annua de l'Incana ; la cinquième est le 
Fenestralis, remarquable par ses feuilles ramassées vers le sommet, et 
ses stigmates recourbés en voûte ; la dernière, le Sinuata, dont les 
feuilles inférieures sont sinuées, et dont la tige est annuelle. 

Toutes ces plantes font l’ornement de nos jardins, par leurs fleurs 
en bouquets peints de mille couleurs variées, le bleu et le jaune 
exceptés, et exhalant sans cesse les plus doux parfums. La plus ré- 
pandue et la plus estimée est l'Zncana , originaire, dit-on, des bords 
de la Méditerranée, où elle est vivace; tandis qu’elle ne dure guère 
que deux ans dans nos climats plus froids, où elle supporte mal l'hiver. 
On lui associe l’Annua, appelée aussi Quarantain de la rapidité de sa 
croissance, et qui fleurit tout l'été. Ensuite vient le Glabra, connu 
des fleuristes sous le nom de Cheiri, dont on ignore la patrie, mais 
qui le dispute à l’Incana pour la beauté de ses grappes florales, 
et auprès duquel on place le Græca , à feuilles glabres et à tige 
annuelle. Le cinquième rang est réservé au Sénuata, originaire des 
côtes méridionales de la Méditerranée, et qui ne répand son parfum 
qu'à la fin du jour. Enfin, la scène est terminée par le Fenestralis, 
espèce évidemment rabougrie, que l’on trouve, dit-on, sur les rivages 
de la Crète, et qui est vivace, selon les uns, bisannuelle, selon les 
autres. Tel est, en abrégé, le tableau de ces plantes charmantes, qui ne 
connaissent guère de patrie que celle de nos jardins, et auxquelles il 
ne manquerait rien, si l'élégance de leur port répondait à la suavité 
de leur odeur. 

Les Lupéries sont un peu moins nombreuses que les Mathioles, et 
ont recu leur nom de la couleur livide, jaune-pourprée de leurs fleurs. 
On en compte aujourd'hui six espèces appartenant au même type, et 
éparses dans les diverses parties du globe, au Cap, dans la Tartarie et 
l'ile de Chypre. L'Europe n’en contient que deux, qui sont demi- 
frutescentes et très-rapprochées : le Varia de l'Orient de la France et 
du Vallais à racines rhizomatiques, et le Tristis des pentes caillouteuses 
de l'Europe australe. Ces plantes se reconnaissent, non-seulement à la 
couleur de leurs fleurs, mais encore à leurs pétales allongés etobliques. 
Elles ne différent entre elles que par la durée, la forme plus ou moins 
sinuée des feuilles, et celledelasilique plus ou moins aplatie ou allongée, 
Il serait intéressant de chercher le rapport qui existe entre la couleur 


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livide et l'odeur particulière de ces pétales, aux approches de la nuit. 

Les Pinares , qui forment la troisième section , ont les pétales des 
Lupéries, mais leurs stigmates sont munis latéralement de deux pro- 
tubérances , et leur silique est souvent terminée par trois cornes, 
dont les deux extérieures sont le prolongement des placentas, et l'in- 
térieure provient des deux stigmates soudés et rapprochés. Cette divi- 
sion renferme quatre espèces très-voisines, dont une seule, le Mathiola 
Coronopifolia, est européenne; c'est une plante vivace, originaire 
de l'Espagne, de la Sicile et de la Grèce, dont les feuilles cotonneuses 
sont linéaires et pennatifides, et dontles stigmates bilobées présentent 
à la maturation deux cornes épaisses ; sa fécondation est intérieure 
comme celle des autres Mathioles. Ses quatre grandes étamines ont 
leurs filets fortement dilatés, et leurs anthères qui recouvrent le stig- 
mate roulent leurs parois en dehors. Les pétales linéaires, étalés et 
ondulés, forment un godet à l'ouverture de la fleur. 

Les Acinotes ont le port des Pachynotes et les siliques des Pinares, 
comme les Lupertes ont le port des Pinares et les siliques des Pachy- 
notes ; ‘en sorte que les quatre sections sont entièrement symétriques 
deux à deux. La patrie de cette dernière division est exclusivement la 
Méditerranée, et son principal représentant est pour nous le Mathiola 
tricuspidata, qui couvre les deux bords de la Méditerranée, depuis 
l'Espagne jusqu’à Alexandrie. Cette plante, qu’on croit annuelle, est 
au moins bisannuelle, car je l'ai cueillie en fleur, au commencement 
de mai, sur les rivages de Pouzzoles, où elle enfoncait profondément 
en terre sa racine dure et cylindrique. Le Pauciflora, originaire d’'Es- 
pagne, s’en distingue par ses petites fleurs et la forme de sa silique. 
Le Lunata , qui habite la même contrée, est remarquable par ses deux 
cornes, qui se recourbent à la maturité. Les deux autres espèces, le 
Pumilio et l Humilis, semblent former un type à part; la première se 
trouve dans l'île de Rhodes, et l’autre dans la Basse-Eo ypte. 

Les glandes nectarifères dans le Mathiola incana, et probablement 
aussi dans les autres espèces , sont placées entre l'ovaire et les petites 
étamines , assez loin de la poche des sépales opposés ou valvaires. Les 
stigmates, dont la forme est ici très-remarquable, s'étendent dans le 
plan de la cloison, et sans doute que le siége de l'organe est la ligne 
longitudinale qui partage en deux leurs lobes. Mais il importe de déter- 
miner, par des observations plus exactes, quelle est sa véritable place 
dans les quatre sections, et quel est aussi l'usage des glandes nectari- 
fères. 

Les siliques doivent être concues comme formées de trois parties 
distinctes : les deux valves, qui sont des panneaux parallèles prolongés 


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de la base au sommet du péricarpe, et la cloison terminée par la masse 
stiomatoïde. Lorsque la silique est couronnée par deux cornes, ces 
deux cornes doivent être considérées comme des stigmates épaissis 
qui ont déjà perdu leurs papilles; iorsqu'il ÿ en a trois, celle du milieu 
est le prolongement de la cloison ou plutôt des placentas qui la bor- 
dent. Les siliques des Mathioles diffèrent donc des autres par la per- 
sistance de leurs stigmates épaissis , et quelquefois encore par le pro- 
longement en pointe de leur cloison. 

Les siliques s'ouvrent par le bas dans la plupart des espèces, et les 
graines sont disposées sur une ligne régulière dans toute la longueur 
de la cloison. Elles sont souvent bordées d’une petite aile membra- 
neuse, destinée à faciliter leur transport, et que De Cannorce soup- 
conne être de la même nature que le réseau mucilagineux; il serait 
facile, je crois, de vérifier cette conjecture. 

Quel est le but de ces prolongements de placentas et de ces cornes 
stigmatoiïdes, qu'on trouve dans les deux dernières sections de ce genre? 
C'est ce qu’on pourra peut-être décider par l'observation. En atten- 
dant, nous remarquons qu’elles ne font nullement partie des valves, 
et que, lorsque celles-ci se séparent, les prolongements ne se désunis- 
sent point. 

La fécondation des Mathioles de nos trois premières sections, et 
probablement aussi celle de la dernière, est intérieure comme dans les 
Hesperides. Le stigmate, placé au-dessous de l'ouverture de la fleur, 
est entouré des anthères qui le recouvrent de leur pollen et qui sont 
elles-mêmes serrées par les onglets des pétales ; l'on n’apercoit guère 
les organes sexuels que lorsque la fécondation est accomplie. Dans le 
Varia du Valais, le sépale inférieur, inséré plus bas que le supérieur, se 
déjette pendant la fécondation et met à découvert les organes sexuels ; 
les étamines correspondantes inclinefft alors leurs anthères pour 
assurer la fécondation. 

Les Mathioles supportent assez bien l'hiver dans le midi de l'Eu- 
rope ; mais elles succombent dans nos climats, à un froid de quel- 
ques degrés ; leurs calices restent fermés pendant la floraison, et leurs 
pétales s'étendent à peu près horizontalement. Les feuilies s’accumu- 
lent au sommet des rameaux, qui ne repoussent pas de la racine, mais 
seulement de la tige. Ces plantes se ressemblent donc autant par leur 


conformation que par leurs habitudes, et forment ainsi un genre 
très-naturel. 


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SECOND GENRE. — Cheirunthus. 


Les Cheiranthus ont le calice fermé, et les deux sépales latéraux 
prolongés en fossette ; les pétales ont leur limbe arrondi ou allongé, 
les étamines sont libres et non dentées; le style est tantôt nul, tantôt 
assez marqué; le stigmate capité ou bilobé; la silique cylindrique, 
aplatie ou légèrement tétragone ; les semences, disposées sur un seul 
rang, sont aplaties et orbiculaires. 

Ce genre qui est un démembrement de celui de LinNÉ, ne contient 
que des espèces vivaces, à demi-frutescentes, à tiges plus ou moins 
anguleuses , à feuilles allongées, entières et recouvertes, comme le 
reste de la plante, de poils bifurqués, horizontaux et un peu rudes. 
Les fleurs, disposées en grappes au sommet des tiges ou des rameaux, 
sont jaunes ou changeantes, blanches ou jaunâtres en naissant, brunes, 
lilacinées ou pourprées en vieillissant. 

Les Cheiranthus se divisent en deux sections : 

Les Cheiris, à style à peu près nul et semences non bordées ; 

Les Cheiroïdes, à style filiforme , semences bordées et siliques à peu 
près tétragones. 

Le type de la première section est le Cheiri, si commun dans nos 
jardins. Il vit naturellement sur les murs et les toits de toute l'Eu- 
rope, où il conserve sa forme primitive, et qu'il couronne, dès le 
milieu du printemps, de ses fleurs jaunes et parfumées. Dans les jardins, 
au contraire, il présente des apparences très-variées , et ses fleurs, 
simples ou doubles, passent souvent au jaune foncé ou au brun 
ferrugineux. La plus remarquable de ses déformations est celle que 
R. Browx a observée à Chelsea, et qui s’est long-temps perpétuée. Elle 
consistait en des étamines chingées en ovaire, et formant une gaine 
autour d’un pistil à huit divisions, dont deux appartenaent à l'ovaire 
central, et six aux ovaires des étamines. M. SERINGE a vu d'autres 
individus de la même espèce, dont l'étamine latérale ou placentaire 
était dédoubtée, en sorte que la fleur avait huit étamines qui alter- 
naient sur deux rangs, quatresépales, quatre pétales, deux carpelles et 
deux stigmates, ce-qui formait un tout parfaitement symétrique. J'ai 
vu enfin des individus dont les fleurs avaient l'étamine latérale et 
simple, et les deux grandes triplées ; ils comptaient de même huit éta- 
mines, mais différemment placées que dans le cas précédent : quelle 
est celle de ces trois variations qui s'approche le plus de la forme 
primitive ? C'est ce qu'on ne peut guère décider. 

La seconde espèce de la section est l’Æ/pinus de la Norwége et de la 


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Laponie; ses siliques sont six fois plus longues que le pédicelle, et 
ses semences portent un appendice transparent, dont on ne connaît 
pas encore l'usage. Il n'appartient pas, à ce qu'il paraît, au même 
type que le Cheiri, et il a de plus ses semences nothorhizées, comme 
le Linifolius de l'Espagne, que Dr Cannozce place dans la seconde 
section. 

La troisième, ou l'Ochroleucus , du Jura, a été renvoyée aux Erysi- 
mum, parce que ses semences sont notorhizées, selon MM. Gay et 
Monnanp. 

La section des Cheiroïides est formée de cinq espèces originaires 
des Canaries ou des deux côtes voisines de l'Afrique et de l'Espagne. 
Ces plantes, qui appartiennent au même type, sont étroitement liées 
entre elles, non-seulement par leur style filiforme, leurs semences 
bordées etleur silique tétragone; mais encore par leurs feuilles linéaires, : 
lancéolées, soyeuses, veloutées ou rudes au toucher, enfin par leurs 
tiges rameuses et frutescentes. Quelques-unes d’entre elles, comme le 
Mutabilis et le Scoparius, présentent le singulier phénomène de pé- 
tales, qui changent de couleur depuis le moment où ils se développent, 
jusqu’à celui où ils se flétrissent. Ce dernier, qui appartient à l'ile de 
Ténériffe, a les fleurs naissantes blanches, brunes ou jaunes, selon 
les variétés, et les fleurs adultes pourprées, légèrement rougeâtres et 
orangées. Ces différentes teintes sur les mêmes individus produisent 
un effet assez bizarre. 

Les Cheiranthus ont à peu près tous la même végétation. Ils donnent 
sans cessé de leurs racines ou du bas de leurs tiges, des rameaux, dont 
les feuilles inférieures se désarticulent, tandis que les supérieures s’ac- 
cumulent au sommet; c'est du sein de cette rosette que sortent au 
printemps les tiges fleuries, qui me paraissent véritablement termi- 
nales. Ces plantes supportent facilement les plus grands degrés de 
froid. 

Ce genre n'a pas été admis dans toute son étendue par les divers 
botanistes ; non-seulement, comme je l'ai dit, parce qu’il renferme des 
espèces dont les unes ont des cotylédons incombants et les autres 
accombants, mais encore à cause des variations de sa silique qui est 
quadrangulaire à valves univervées dans le Cheiri, et cylindrique ou 
diversement aplatie dans les autres. 


TROISIÈME GENRE. — /Vasturlium. 


Le Nasturtiun , que nous allons décrire, correspond à peu prés à 
la première division des Sisymbres de Linxé, Il a pour caractère un 


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calice ouvert et égal, des pétales entiers et quelquefois nuls par avor- 
tement, des étamines libres et dépourvues d'appendice ; la silique est 
cylindrique, courte, un peu bosselée, à valves concaves et non 
carénées ; les semences sont petites, sans rebords , et placées générale- 
ment sur deux rangs. 

Ce genre est composé d'herbes ordinairement vivaces, glabres, 
rameuses, qui se multiplient de rejets, et donnent facilement des 
racines de leurs aisselles inférieures; leurs tiges sont cylindriques, leurs 
feuilles plus ou moins pennatifides, leurs fleurs disposées en grappe et 
dépourvues de bractées, leurs siliques souvent penchées. 

Les espèces aquatiques fournissent sans cesse, comme les Batra- 
chium , des racines nouvelles, qui s'enfoncent dans la vase, à mesure 
que les anciennes se détruisent ; la tige s’allonge ainsi jusqu’à ce qu’elle 
ait donné sa grappe florale. 

Le Nasturtium a été divisé par De Canpozce en trois sections assez 
naturelles, qu'on peut considérer comme trois types, jusqu'à ce que 
leurs diverses espèces soient mieux connues : 

1° Le Cardaminum, à siliques à peu près cylindriques et légèrement 
penchées, et pétales blancs, plus grands que le calice ; 

2° Les Brachylobos, à siliques à peu près cylindriques ou ellipsoïdes, 
et pétales jaunes ; 

3° Les Clandestinaria, à siliques amincies et à peu près cylindriques, 
et pétales blancs, très-petits ou nuls. 

La première section ne contient qu’une seule espèce, le Vasturtiume 
officinale, si commun dans les fontaines, les sources pures et les petits 
ruisseaux des quatre parties du monde, où il est recherché par sa 
saveur piquante et agréable. Cette plante vivace, à peu près toujours 
semblable à elle-même, fleurit une grande partie de l’année; sa tige est 
fistuleuse, son tissu lâche, comme celui des plantes aquatiques; ses 
valves s'ouvrent sans se rouler, et ses graines jaunâtres, bisériées, pen- 
dantes et crustacées sont couvertes d’un joli réseau à mailles penta- 
gones, qui les protége sans doute au milieu des eaux, et leur permet 
d'y séjourner, sans perdre leur faculté germinatrice. 

On remarque dans la fleur, quatre glandes vertes placées entre les 
petites étamines et le calice. 

Les Brachylobos renferment quinze à seize espèces, qui habitent 
aussi les eaux ou les lieux humides, dans l’ancien et le nouveau con- 
tinent , et principalement dans la Sibérie. On en compte cinq euro- 
péennes : le Palustre, dont on distingue plusieurs variétés; le Pyre- 
naicum, qui diffère aussi selon les localités, et dont le Lippizense n'est 
peut-être qu’une variété; enfin le SyWestre et V Amphibium. Ges cinq 


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plantes sont, non-seulement dispersées dans les diverses contrées de 
l'Europe, mais la plupart se retrouvent encore en Amérique, en 
Chine, au Japon, etc., sans qu'on puisse décider si elles y croissent 
naturellement, ou si elles y ont été semées. Leurs fleurs sont petites, 
jaunes, tantôt égales au calice, comme dans le Palustre ; tantôt plus 
grandes, comme dans le Sylvestre et l'Amphibium. La seule d'entre 
elles qui soit annuelle, c’est le Palustre; les autres sont vivaces, et se 
multiplient par des rejets, ou des radicules qui sortent de leurs aisselles 
inférieures. Elles fleurissent ordinairement depuis la fin du printemps 
jusqu’au milieu de l'été. Le Pyrenaicum à tiges effilées a ses siliques 
redressées sur ses pédoncules divariqués; le Sylvestre a ses feuilles 
pennatiséquées, ses petits pétales d’un jaune doré, etses quatre glandes 
emmiellées à la fécondation; enfin l'4mphibium présente un phéno- 
mène assez commun chez les plantes aquatiques, celui de feuilles 
inférieures, qui, plongées dans l’eau, ont leurs lobes plus ou moins 
capillaires, et qui, développées sur le terrain, sont seulement penna- 
tifides. 

Ces plantes, qui appartiennent évidemment au même type, se 
distinguent surtout par la forme de leur silique et sa longueur compa- 
rée à celle du pédicelle, par leurs semences régulièrement ou irrégu- 
lièrement placées sur deux rangs, et par les divisions de leurs feuilles, 
variables selon les espèces. 

Les Clandestinaria, ainsi appelées de l'absence ou de la petitesse 
de leurs pétales, sont des plantes étrangères à l'Europe, et dispersées 
dans les Indes, la Chine et l'Amérique méridionale. On en compte 
cinq ou six espèces, qui sont annuelles, et semblent se rapprocher 
par la forme et la couleur de leurs fleurs, mais qui ne sont pas encore 
suffisamment connues, et pourraient bien appartenir, les unes aux 
Sisymbres, les autres aux Arabis. 


QUATRIÈME GENRE. — /Votoceras. 


Le Notoceras est un genre créé par R. Brown, et dont le caractère 
principal consiste, conime son nom l'indique, dans des valves prolon- 
gées vers leur sommet en cornes plus ou moins marquées. Le calice 
est droit et non bosselé à la base; les pétales sont oblongs ou 
linéaires , les étamines libres et sans appendices, les siliques bivalves, 
biloculaires, et terminées, comme je l'ai dit, en cornes; le style est 
court et le stigmate arrondi en tête; les semences sont ovales, 
aplaties. 


Ces plantes sont toutes des herbes annuelles et peu élevées ; leurs 


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tiges sont cylindriques , rameuses, droites ou couchées; leurs feuilles 
oblongues, entières ou sinuées; leurs pédoncules opposés aux feuilles 
et dressés ; leurs fleurs disposées en grappes, petites et quelquefois 
apétales; leurs siliques se rapprochent de celles des Erysimum et de 
celles des Capselles. 

Ce genre, quoique composé seulement de quatre espèces, se divise 
en trois sections. 

1° Les Dicérates, à siliques déhiscentes, terminées par deux 
cornes ; 

2° Les Macrocerates , à siliques indéhiscentes , terminées par deux 
cornes ; 

3° Les Tetracerates, à siliques terminées par quatre cornes. 

Les Dicérates comptent deux espèces : le Cunuriense et l’Hispanicum, 
appartenant au même type et presque semblables. Elles diffèrent des 
autres Votoceras par leurs fleurs jaunes et leurs feuilles entières, toutes 
recouvertes de poils rudes, couchés et rayonnant deux à deux du 
même centre. 

Les Macrocérates ne forment qu'une espèce, le Cardaminifolium , 
originaire de l'ile de Chypre et des champs voisins du Bosphore. Ses 
feuilles sont glabres et pennatiséquées; ses fleurs blanches, assez sem- 
blables à celles des Cardumines. 

Enfin, le seul Tetracerate encore connu, estle Quadricorne de la 
Sibérie, dans les environs du Volga; ses feuilles sont sinuées et den- 
tées , ses poils mols et ramifiés , ses pétales très-petits ou nuls. 

La plupart des Votoceras avaient été placés par WirzLnenow parmi 
les Erysimum dont ils diffèrent évidemment par leurs valves prolon- 
gées en corne; le Canariense est une plante dure, à feuilles lancéolées, 
toutes recouvertes de poils rudes, couchés et géminés. Ses fleurs jaunes 
et disposées en épi s'élèvent au-dessus des tiges, et ses valves qui se 
détachent séparément, laissent à découvert environ six semences atta- 
chées trois à trois à chaque côté de la cloison persistante : je ne con- 
nais pas l'usage des cornes qui terminent les valves. 


CINQUIÈME GENRE. — BParbaræa. 


Le genre Barbaræa a été formé par R. Brown de quelques espèces 
démembrées des Erysimumet des Sisymbrium. Il comprend des plantes 
à calice droit, lâche , sans bosse apparente, à pétales onguiculés et 
ovales, à étamines libres et non appendiculées; le torus est chargé de 
quatre glandes, deux en dehors des grandes étamines, et deux plus 
marquées en dedans des petites ; la silique obtusément tétragone a 


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deux angles relevés, des valves carénées, des semences placées sur un 
seul rang. 

Les Barbaræa sont des herbes annuelles ou bisannuelles, et parfai. 
tement glabres; leurs racines sont fibreuses, leurs tiges droites et 
cylindriques, leurs feuilles lyrées, pennatifides, dentées et glandu- 
leuses sur les bords; leurs fleurs, toujours jaunes, sont disposées en 
grappes terminales multiflores, allongées et jamais corymbiformes. 

Ce genre, très-distinct par son port et les caractères que nous avons 
énoncés, comprend quatre ou cinq espèces éparses le long des marais 
et dans les terrains humides de’ l'Europe et de l'Asie tempérée. La 
principale d’entre elles, et celle qu’on peut considérer comme le type 
de tout le genre, est le Barbaræa vulgaris , répandue dans presque 
toutes les contrées de l'Europe, et jusque dans la Sibérie et le Kam- 
chatka. Elle fait, au printemps et en été, l’ornement de nos haies et 
de nos fossés, par ses belles grappes d'un jaune éclatant, et comme 
elle double sans peine, elle décore aussi nos jardins, où l’on peut la 
multiplier par bouture en été et par éclat en automne. 

Le Barbaræa præcox, long-temps confondu avec le Vulgaris, en 
diffère par ses feuilles supérieures pennatifides à lobes allongés, entiers, 
et par ses siliques lâches et non appliquées contre la tige. On l'emploie 
aux mêmes usages que le ÜVasturtium officinale, parce que sa saveur 
n’est pas nauséabonde, comme celle de l'espèce commune. Il fleurit 
de bonne heure, se cultive dans les jardins anglais, et croît principa- 
lement sur les rivages maritimes et dans les terrains uligineux, en 
France, en Angleterre et en Italie. 

Les autres espèces de Barbaræa, dans lesquels je comprendsle Rupi- 
cola de la Sardaigne, à siliques deux ou trois fois aussi longues que 
celles des V’ulgaris , ne diffèrent guère de celles que nous venons de 
décrire, si ce n’est par la forme de leurs feuilles , et celle de leurs sili- 
ques plus ou moins redressées ou même courbées. Quelques-unes 
d'entre elles ne sont pas suffisamment connues. 

Les Barbaræa méritent d'être étudiées pour les mouvements de 
leurs fleurs. J'ai remarqué que les pédoncules de l'espèce commune 
s'abaissaient horizontalement dans la préfloraison , parce que la partie 
supérieure de la grappe n'était pas suffisamment dégagée; que les 
pétales se rapprochaient par paire, et formaient ainsi deux lèvres, 
presque entièrement fermées, à l'approche de la nuit, sur leur pédon- 
cule incliné; enfin, que leur corolle présentait dans la floraison deux 
ouvertures tubulées, qui communiquaient immédiatement avec les 
glandes des petites étamines. ; 

A la fécondation, les six anthères s'ouvrent au sommet du tube 


ee 6 = 
corollaire , à la hauteur du stigmate , qui est une tête aplatie et papil- 
laire. 

Le Barbaræa vulgaris des jardins se multi plie par éclats de racines, 
parce que ses fleurs doubles ne fructifient jamais. 


SIXIÈME GENRE. — Ÿurrilis. 


Le Turritis a un calice lâche et des pétales onguiculés, à limbe 
oblong et entier; la silique est allongée, grêle et droite; les valves 
sont planes et rayées de nervures; le stigmate est obtus et à peu près 
entier; les semences sont très-nombreuses et placées sur deux rangs. 

Ce genre, tel que nous venons de le définir, ne comprend plus que 
trois espèces, originaires, la première de l'Europe, la seconde des lacs 
salés de la Sibérie, et la dernière des pentes du Cotopaxi dans la pro- 
vince de Quito. Ce sont des herbes droites, ordinairement rudes dans 
leur jeunesse, et qui deviennent glabres en vieillissant; leurs feuilles 
radicales, disposées en rosette, sont dentées et rétrécies'en pétiole ; 
les caulinaires sont amplexicaules, entières et plus ou moins sagittées; 
les grappes sont allongées, les pédicelles filiformes et nus, les fleurs 
blanches ou blanchâtres, les semences petites, nombreuses, exacte- 
ment placées sur deux rangs. Ce dernier caractère distingue surtout 
ce genre de celui des Arabis. 

Le Turritis glabra, qui est seul indigène, habite les pâturages secs 
et les pentes rocailleuses ou sablonneuses de nos montagnes. On le 
trouve dans toute l'Europe, et jusque dans la Sibérie; ses feuilles 
inférieures sont velnes et disparaissent de bonne heure; les autres sont 
amplexicaules , glabres et entières; les grappes florales, d'abord 
courtes, s’allongent ensuite beaucoup; les fleurs, d'un blanc jaunûtre, 
ont des glandes peu marquées; leurs siliques, toujours serrées contre 
la tige, sont amincies, linéaires et souvent longues de deux pouces. 

Cette plante, qui est bisannuelle, fleurit vers la fin du printemps, 
et ne tarde pas à répandre ses semences ; ses fleurs sont quelquefois 
vertes et déformées. 


SEPTIÈME GENRE. — ÆArabis. 


L'Arabis a un calice droit, quelquefois bosselé ; une corolle à pétales 
onguiculés, à limbe ouvert, entier, ovale ou plus rarement oblong ; 
des étamines libres et sans appendices; une silique linéaire, à valves 
planes, veinées ou marquées de nervures, des semences ovales ou orbi- 
culaires, aplaties et uniséries , bordées ou non bordées. 


— 177 — 


Ce genre, aujourd'hui très-étendu et dont plusieurs espèces sont 
encore mal déterminées, comprend des herbes annuelles ou vivaces 
dont le port et la végétation sont assez variables ; la plupart ont leurs 
feuilles radicales disposées en rosette ; leurs feuilles caulinaires sessiles 
ou amplexicaules, dentées ou entières et rarement lobées. Quelques 
espèces sont glabres, mais les autres sont plus ou moins velues; les 
poils sont simples ou ramifiés, souvent simples sur la tige, bifides ou 
trifides sur les feuilles; les grappes florales sont terminales et ordi- 
nairement lâches; les pédicelles, filiformes et dépourvus de bractées ; 
les fleurs blanches, rarement roses. 

Les Arabis diffèrent des Turritis par leurs semences toujours uni- 
sériées ; des Cardamines, par leurs valves rayées de nervures et non 
roulées en spirale, et des autres genres de la même tribu, par leurs 
siliques linéaires et aplaties. 

La plupart des espèces sont bisannuelles, et poussent en automne 
leurs feuilles radicales ; d'autres, en assez grand nombre, se multi- 
plient par des rejets souterrains, comme l’Æ{/pina, ou par des dra- 
geons semblables à ceux du Stolonifera, ou enfin ont des racines rhi- 
zomatiques comme l'Hirsuta, etc. Leurs sépales sont différemment 
conformés, quelquefois sensiblement égaux et sans glandes bien 
marquées sur le torus; quelquefois bosselés deux à deux, avec des 
glandes nectarifères saillantes. Je crois que c’est sur ces caractères et 
sur d’autres semblables, tirés principalement des organes floraux, 
qu'il faut fonder la distinction des espèces, plutôt que sur la forme 
des feuilles, leur villosité et d’autres circonstances également variables, 

Les Arabis sont dispersés sur les différents points du globe, prin- 
cipalement dans l'ancien continent et l'hémisphère boréal. On en 
trouve à peu près quarante en Europe, treize en Asie, cinq dans 
l'Amérique du nord, deux dans celle du sud, une seule à Java, et une 
autre dans la Mauritanie. Mais il est bien entendu que ces nombres 
doivent changer, à mesure que les recherches s’'augmenteront, ou 
que la science fera de plus grands progrès. 

Les Arabis se plaisent dans les lieux frais et ombragés, sur les 
pentes et quelquefois même les sommets des montagnes. Quelques- 
uns, en petit nombre, comme le Verna, vivent au milieu de nos 
cultures, d’autres dans les sables, mais aucun, je crois, dans les 
lieux humides ou sur les bords des marais. 

Ce vaste genre a été divisé par De Canpozze en deux grandes 
sections : 

Les Alomatium , à semences dépourvues d'aile membraneuse, qua- 
rante espèces ; 

I. 12 


— 178 — 

Les Lomaspora, à semences bordées d'une aile niembraneuse, seize 
espèces. | 

La première section forme quatre groupes : 

1° Celui des espèces à feuilles caulinaires amplexicaules, pétales 
ovales et ouverts ; : 

2° Celui des espèces à feuilles caulinaires amplexicaules, pétales 
oblongs et redressés ; 

3° Celui des espèces à feuilles caulinaires sessiles ou pétiolées, pé- 
tales ovales et ouverts ; 

4° Celui des espèces à feuilles caulinaires sessiles ou pétiolées, 
pétales oblongs et redressés. 

La seconde section ne comprend que trois groupes : 

1° Celui des espèces à feuilles caulinaires amplexicaules, pétales 
oblongs et redressés ; 

2° Celui des espèces à feuilles caulinaires sessiles, pétales oblongs 
et redressés ; 

3° Celui des espèces à feuilles caulinaires sessiles, pétales ovales et 
ouverts. 

Comme les graines de toutes les Arabis n'ont pas été examinées, 
il y a plusieurs espèces dont la section et même le genre sont encore 
incertains. 

Le premier groupe des Alomatium présente deux types assez 
distincts, celui des espèces à fleurs rouges et celui des espèces à fleurs 
blanches. Le premier est formé de deux plantes annuelles : le V’erna, 
qui habite l'Europe australe, et le Rosea, originaire de la Calabre. 
L'une et l’autre fleurissent au printemps, et ont les feuilles chargées 
de poils rudes et rameux. Le second type de ce premier groupe est 
représenté par notre Alpina, qui recouvre, au printemps, de ses 
fleurs d’un blanc de lait, les pentes de presque toutes les montagnes 
de l'Europe, et qui se retrouve encore au Groenland, à la terre de 
Labrador, dans l'ile de Madère , et jusque sur l'Atlas. Ses dimensions 
varient beaucoup, de même que son port; mais ses feuilles sont tou. 
jours dentées et recouvertes d’un duvet de poils radiés et blanchätres. 
C'est une plante sociale, qui se multiplie sans cesse par des rejets ;.et 
dont le même pied ne fleurit qu'une seule fois; les autres espèces du 
même type sont principalement : le Väscosa, des Alpes de la Perse 
septentrionale; l Albida, des Alpes de la Tauride et du Caucase, qui 
se conserve très-bien dans nos jardins; le Billardierii, des montagnes 
de la Syrie, etc. Toutes ces plantes vivaces ont leurs fleurs blanches 
et ouvertes, leurs calices bosselés et leurs glandes nectarifères très- 
marquées. Les deux latérales se prolongent dans le sac des sépales, 


— 179 — 
les deux autres sont en forme de dent raccourcie, et manquent quel- 
quefois. 

Le second groupe des Alomatium , tout entier européen , est jus- 
qu’à présent composé de cinq ou six espèces annuelles, qui habitent 
sur les pentes de nos montagnes, où elles fleurissent au printemps, 
pour se ressemer ensuite. Elles se réunissent sous un seul type, repré- 
senté par l’Arabis hirsuta, détaché dernièrement du genre des Turritis, 
à cause de ses graines unisériées; ses feuilles sont dentées et rudes au 
toucher, ses rameaux nombreux et rapprochés de l'axe, ses grappes 
florales allongées dans la maturation, ses calices médiocrement 
bosselés, ses glandes latérales peu apparentes, et placées en dehors des 
petites étamines. Les autres espèces ont le même port, la même végé. 
tation, les mêmes fleurs blanches ou blanchâtres ; elles ne diffèrent 
entre elles que par leurs feuilles plus ou moins auriculées, leurs pédi- 
celles courts ou allongés, et leurs siliques penchées ou redressées selon 
que leurs grappes se sont moins ou plus allongées pendant le cours de 
la floraison ; aussi leur synonymie a-t-elle beaucoup embarrassé les 
botanistes. CamBesséDÈs, dans sa Flore des Baléares, voudrait qu'on 
réunit à l'Aérsuta, non-seulement le Sagittata , mais encorele Muralis, 
qui appartient à notre troisième groupe, et se lie au second par des 
nuances insensibles. Il faudrait peut-être y ajouter encore l’Arabis 
Allicni, et l'Incana que Gaunin considère comme une variété de 
l’Hirsuta. 

Le troisième groupe, débarrassé des espèces que je viens d'indi- 
quer, ne renferme plus que deux types : l'un formé du Stricta et du 
Ciliata, et l'autre du Thaliana et du Serpyllifolia. L'espèce principale 
du premier, ou le Sfricta , forme sur la terre, des rosules de feuilles 
épaisses, vertes, laurinées, rouges en dessous, et dont les dents $e 
terminent par des poils roides, simples ou bifurqués. C’est peut-être 
une variété du Ciliata, qui a le même port, mais dont les grappes 
sont plus garnies et les fleurs plus petites. Tous les deux se multiplient 
par des rejets souterrains, et forment, chaque année, de nouvelles 
rosules. J'ai vu sur les pentes de Salève, le Stricta présenter une foule 
de passages entre les feuilles laurinées et les feuilles rudes, entre les 
tiges nues et les tiges chargées de feuilles, et j'en ai conclu que cette 
espèce, ainsi que la plupart des Arabis, était un véritable protée. 

Le Thaliana , qui est le second type du troisième groupe, vit sur 
les murs, les toits et les bords des champs sablonneux, où il fleurit 
depuis le commencement du printemps jusqu’au milieu de l'été. Il se 
trouve non-seulement dans toute l'Europe, mais encore en Asie, dans 
l'Amérique boréale, où il a été sans doute propagé. Il est bisannuel, 


— 180 — 
et forme, dès l'automne, des rosules de feuilles courtes, ovales, 
ciliées et légèrement dentées. Le Serpyllifolia, qui appartient au même 
type, et qui est aussi bisannuel, ne croît que sur les pentes des mon- 
tagnes, et se reconnaît aussi à ses fleurs petites, blanches et fermées. 
Du reste, MM. Gav et Monwarp ont placé le Thaliana parmi les 
Sisymbres, à cause de ses cotylédons dorsifères ou incombants. 

Enfin, le dernier groupe des Alomatium présente trois ou quatre 
sous-types : le premier est celui du Procurrens et du Præcox, deux 
espèces de la Hongrie et du Bannat, qui se multiplient par des rejets, 
et fleurissent dès l'entrée du printemps. La première vient dans nos 
jardins, où elle se fait remarquer par son calice bosselé et son torus 
entièrement chargé d’une substance glanduleuse, qui distille abon- 
damment l'humeur miellée. Elle s'élève jusqu'à un pied, et donne 
des feuilles très-entières, vertes en dessus et rougeâtres en dessous. 
Le second de ces sous-types est formé du Petræa, qui habite les ro- 
chers de l'Europe boréale et tempérée. Sa racine est un rhizome 
ligneux ; ses feuilles sont glauques, entières sur la tige et diversement 
incisées à la base ; ses fleurssonttantôtblanches et tantôt teintes de pour- 
pre. La troisième division comprend l’A4renosa ou le Sisymbrium are- 
nosum de Liné, plante bisannuelle à fleurs roses , à feuilles incisées 
et tige rameuse. On y joint l’Arabis Halleri, le Stolonifera et YOvi- 
rensis des Alpes de la Carinthie, trois plantes vivaces, à fleurs blan- 
ches ou rarement roses, qui se multiplient par des rejets ou par leurs 
racines. Enfin, le dernier sous-type est le Cebennensis , plante distincte 
de toutes celles du groupe, et peut-être de tous les Arabis, par ses 
feuilles pétiolées, ovales, acuminées, veloutées, et ses fleurs d'un 
violet pâle, assez semblables à celles de l’4renosa. Ces diverses espèces 
ont leurs pédicelles et leurs siliques étalées. 

Le premier groupe des Lomaspores est formé de plantes réunies 
sous un seul type, dont la principale est l’Arabis turrita, si com- 
mune dans nos buissons montueux, dès le milieu du printemps. Elle 
se reconnaît tout de suite à ses feuilles larges et pubescentes, à ses 
fleurs d’un blanc jaunâtre, et surtout à ses siliques pendantes. Les 
trois autres, appartenant au même type, sont originaires de la Sibérie, 
et ont les fleurs petites et blanches. Toutes sont annuelles, ou plutôt 
bisannuelles, et se reconnaissent à leurs siliques longues et pendantes. 
La plus remarquable est le Pendula, dont les fleurs blanches, à pétales 
étroits et allongés, se déjettent fortement pendant l’estivation, et finis- 
sent par présenter dans la maturation des siliques pendantes portées 

sur de longs pédoncules également pendants ; ses graines plutôt cylin. 
driques qu’aplaties, sont bisériées comme dans les Turritis, auxquels 
elle pourrait bien appartenir. 


— 181 — 


Les siliques pendantes qui distinguent ce premier groupe, et qui se 
retrouvent aussi cà et là dans les autres comme dans le Lilacina à 
fleurs roses, sont intimement liées avec le développement de la tige 
florale, comme on peut le voir, par exemple, dans l'Ornithogalum 
refractum : lorsque celle-ci ne s’allonge pas ou s'allonge tard, les sili- 
ques ne peuvent pas rester droites sans embarrasser la floraison, sur- 
tout si elles sont très-prolongées naturellement. 

Le second groupe renferme trois espèces européennes, qui habitent 
le sommet de nos Alpes, et se distinguent par leurs racines ligneuses, 
leurs feuilles radicales en rosettes, leurs grappes courtes, et leurs 
siliques redressées. Ce sont le Pumila, à fleurs blanches et à tige 
presque nue; le Bellidifolia, à fleurs aussi blanches, mais à tige 
feuillée, etle Cærulea à fleurs d’un rose pâle, à grappes penchées, et 
à tige garnie d'un petit nombre de feuilles. 

Enfin, le dernier groupe compte trois espèces européennes, origi- 
paires des Alpes ou des collines de l'Italie; le Stellulata, le Collina et 
le J’ochinensis encore mal déterminé. Toutes trois sont des herbes 
vivaces, à feuilles radicales , recouvertes de poils radiés, à tige peu 
élevée et à fleurs blanches. 

Il est clair, d’après ce qui précède, que les Arabis, comme la plu- 
part des genres nombreux, sont composés de plantes qui présentent 
des passages continuels de forme et d'apparence, dont les points 
saillants peuvent seuls être considérés comme des espèces, et dont 
les autres ne sont guère que des variétés produites par le sol et l'ex- 
position , quoiqu'’elles se conservent souvent par la culture. 

Un des caractères qui nous parait le plus constant dans ce genre, 
c'est celui qu’on tire de ses pétales, tantôt ovales et recourbés, tantôt 
allongés et redressés sur leur limbe. Cette double conformation est 
sans doute en rapport avec la fécondation, qui, dans le premier cas, 
s'opère à l'air libre, et dans le second, à l'intérieur de la fleur. Elle 
dépend de l’organisation intime du pétale, lequel, au moment où 
il s’'épanouit, se fléchit sur le haut de sa lame, ou se tient dressé, 
comme il était primitivement dans la fleur. Il reste à examiner quelle 
différence ces deux formes, qu'on retrouve encore dans quelques 
genres, introduisent dans les poches des sépales, les glandes nectari- 
fères , les étamines et les stigmates. 

Il serait aussi curieux d'examiner la cause finale de l'aile membra- 
neuse des semences de quelques Arabis. Est-elle liée à l'acte de la disse- 
mination ? Je ne puis l'affirmer, mais je remarque que les Lomaspores 
européennes sont en général des plantes annuelles, ou de petits sous- 
arbrisseaux qui tapissent les sommités de nos Alpes. 


— 182 — 

Les Arabis, comme la plupart des Crucifères, sont sujets à être 
déformés. DE Canpocre rapporte déjà, dans son Sysiema, qu'il a vu 
un échantillon d’Arabis Allioni, dans lequel les pédicelles étaient rap- 
prochés et réunis de manière à former entre eux un seul rameau aplati 
et multiflore. M. Serincz, dans son Bulletin botanique, 1830, table 
seconde, p. 10, mentionne une monstruosité encore plus remarquable, 
celle d’un 4rabis alpina , dont quelques fleurs portaient, à l'aisselle 
de leurs sépales mutilés, des pédicelles terminés par des fleurs avor- 
tées, en sorte que la fleur primitive était changée en trois fleurs, la 
primitive sessile, et les deux latérales longuement stipitées. Cette 
forme de monstruosité, qui se trouve dans d’autres genres de Cruci- 
fères, semble donner du poids à l'opinion que les fleurs des Cruciferes 
étaient primitivement réunies trois à trois. 

Du reste, quelque jugement qu'on porte à cet égard, il demeure 
certain que dans le très-grand nombre, pour ne pas dire la totalité 
des plantes qui existent de nos jours, c’est la forme actuelle qui seule 
assure la fécondation, et par conséquent la propagation; aussitôt que 
les végétaux s'en écartent, ils ne fournissent que des êtres mutilés, 
incapables de conserver leur espèce. Jamais donc, dans l’état actuel 
de notre globe, la forme primitive n’a pu exister avec quelque ordre 
et quelque constance. En était-il autrement à des époques antérieures ? 
C'est ce que j'ignore. 

Les Arabis fleurissent à peu près toutes au printemps, et quoi- 
qu'ils ne soient remarquables ni par leur port ni par leur élégance, 
ils ne laissent pas, surtout au pied de nos montagnes, de contribuer 
à la parure de l'année, comme je lai déjà remarqué de l 4/pina, et 
comme il serait vrai de le dire aussi de l’Arenosa, del Albida, du 
Proccurrens, ete. Ce sont des plantes dures qui ne redoutent point 
nos intempéries, et qui avancent leur développement, au milieu même 
de nos hivers et sous la neige qui les abrite. Les feuilles caulinaires des 
grandes espèces et les rosettes des petites se recourbent, à cette épo- 
que, pour protéger et envelopper les jeunes tiges. Les fleurs me 
paraissent dépourvues de mouvements organiques. 

L'Albida, qui supporte dans nos jardins les plus grands froids, 
pousse sans cesse de ses aisselles supérieures, et ses tiges inférieures 
forment sur le terrain des gazons desséchés qui conservent long-temps 
la nervure moyenne des anciennes feuilles. Ce que les 4rabis me 
paraissent présenter de plus remarquable, c'est le rapport qui se trouve 
entre les dimensions de leur grappe et le nombre ainsi que la forme 
de leurs siliques; lorsque celles-ci sont rares et peu allongées, la grappe 
s'étend très-peu , mais dans le cas contraire, elle s'étend beaucoup. 


— 183 — 


Les siliques, à leur tour, au lieu de rester droites et appliquées, s'éta- 
lent et même se réfléchissent, et je suis persuadé que dans chaque 
cas particulier, on pourrait se rendre compte des rapports qui se trou- 
vent entre ces deux organes. 


HUITIÈME GENRE. — Cardamine. 


Les Cardamines ont un calice bosselé droit ou un peu étalé; leurs 
pétales sont onguiculés et entiers, leurs étamines libres et non den- 
tées ; leurs siliques sessiles et linéaires, ont pour valves des panneaux 
planes et sans nervures, qui se détachent et se roulent obliquement, 
à l'époque de la dissémination. Ce dernier caractère distingue les Car- 
damines de toutes les Crucifères, excepté cependant des Dentaires et 
des Pteroneuron, dont la silique a la même structure, mais dont les 
cordons funiculaires sont élargis et comme ailés, tandis qu'ils sont 
amincis dans les Cardamines. 

Les Cardamines sont des herbes bisannuelles et plus souvent vivaces; 
les racines de ces dernières portent fréquemment des tubercules cu 
des renflements destinés à propager l'espèce; souvent aussi, comme 
dans le Cardamine amara, elles jettent des fibrilles de leurs aisselles 
inférieures, parce qu'elles se plaisent dans les lieux humides, tandis 
que les Arabis, qui recherchent un sol sec et rocailleux, se multi- 
plient par des rejets souterrains. 

Les feuilles des Cardamines ont une apparence et une conformation 
qui les font aisément reconnaître. Elles sont épaisses, luisantes, gla- 
bres ou parsemées de poils simples et caducs, non pas étoilés et per- 
sistants comme ceux des Arabis. Leur forme générale est la pennatifide 
à iobes profonds et arrondis, et leur disposition à se subdiviser se 
manifeste dans plusieurs espèces. 

Les fleurs, ordinairement blanches, sont quelquefois teintes en rose 
ou en lilas; les pétales sont onguiculés et ouverts, les sépales latéraux 
faiblement bosselés, le torus porte des glandes souvent aplaties à la 
base des petites étamines, et relevées auprès des grandes. Les siliques 
sont fortement articulées sur leur pédoncule; le style est court ou 
même nul, le stigmate entier ou légèrement échancré; les semences 
sont ovales, non bordées et disposées sur un seul rang; celles du Pra- 
tensis, del Hirsuta, etc., sont pendantes. 

Quelques espèces, comme le Pratensis, V Amara, etc., sont météo- 
riques, c’est-à-dire qu’elles ouvrent leur corolle lorsque le soleil luit, 
tandis qu’elles restent fermées et même penchées sur leurs pédoncules, 
lorsque le temps est couvert et la température humide. Elles répètent 


— 184 — 


ce mouvement, chaque jour, jusqu'à ce que leur fécondation soit 
accomplie. 

On observe aussi des avortements assez réguliers dans les fleurs de 
quelques espèces; par exemple, l’Hérsuta n'a jamais que les quatre 
grandes étamines; l’?mpatiens, qui, dans les lieux ombragés, perd 
quelquefois ses deux petites étamines, est souvent dépourvu de pétales. 
Mais le phénomène le plus intéressant, à cet égard, est celui qui a été 
observé par Auguste Sarnr-Hicarre, sur des échantillons de Carda- 
mine hirsuta, dont chaque calice portait trois fleurs tétrandriques ; 
parce que les étamines latérales de la fleur primitive avaient été rem- 
placées par autant de fleurs complètes à quatre étamines. 

Les feuilles radicales du Cardamine pratensis sont chargées de tuber- 
cules, d’abord observés par H. Cassini ( Opuscules phytologiques, vol. 
I1, pag. 340), et qui naissent non pas des aisselles, mais de la nervure 
principale et de la base des lobes. Ce joli phénomène se rencontre très- 
souvent dans les bois, au milieu des automnes pluvieuses, et j'ai eu 
sous les yeux, le 8 octobre 1828, des feuilles de cette Cardamine, 
toutes chargées de ces tubercules , les uns avec leurs radicules longue- 
ment développées et s’enfoncant dans la terre; les autres, et surtout 
ceux de la base du lobe terminal, commencant à se former. Je n'ai 
encore remarqué rien de semblable dans les feuilles des autres espèces, 
ni en particulier sur celles de l'Amara , qui se multiplie d’une maniere 
fort différente, et que Cassini a tort de considérer commeune variété 
du Pratensis. 

La silique des Curdamines n’est pas conformée comme celle de la 
plupart des Crucifères, chez lesquelles les valves se prolongent sou- 
vent jusqu'au sommet, et forment tout le corps de la silique, à l'excep- 
tion du stigmate. Ici, au contraire, les valves sont des panneaux arti- 
culés et distincts du reste de la silique, qui subsiste encore lorsqu'ils 
sort tombés. On pourrait donc croire que cette différence de structure 
en nécessite une autre dans la forme primitive , et qu’on ne trouverait 
pas facilement des siliques de Curdamines transformées en feuilles, 
comme celles du Diplotazis. L'observation confirmera ou détruira cette 
conjecture. 

Les diverses espèces de ce genre, qui s'élèvent déjà à près de 
soixante, sont répandues dans l'hémisphère nord, plutôt que dans le 
sud. On en trouve une quinzaine en Europe, huit dans l'Asie orien- 
tale et la Sibérie, cinq dans les Indes, la Chine et le Japon, quelques- 
unes au Cap, aux iles Maurice et aux terres australes; l'Amérique 
méridionale en compte six, et la septentrionale douze. 

Ces plantes recherchent de préférence les terrains humides ou 


— 185 — 


aquatiques et les ombrages frais des montagnes. Comme elles ont des 
racines vivaces ou bisannuelles, elles fleurissent en grand nombre au 
premier printemps, et elles ornent nos basses prairies, les lisières de nos 
bois, les bords de nos haies et de nos ruisseaux, de leurs fleurs 
tantôt d’un blanc pur, tantôt roses ou lilas, et presque toujours 
réunies en famille. Il n’y a rien de si frais, par exemple, que les 
touffes du Cardamine amara étalant sur les bords des eaux ses pani- 
cules de fleurs blanches ou roses, relevées encore par des anthères 
pourprées. Mais, de toutes les espèces, la plus commune et aussi la 
plus brillante, c’est le Pratensis, qui forme dès l'entrée du printemps, 
sur nos prairies, de vastes tapis d’un rose lilas, et se retrouve égale- 
ment dans tous nos bois. Malheureusement cette scène charmante 
passe bien vite, et au mois de juin, la plante entière a disparu. 

Les Curdamines sont tellement liées entre elles, qu'il est difficile de 
les diviser en sections. DE CannozLe en a formé trois groupes arti- 
ficiels, fondés uniquement sur la considération des feuilles entières, 
trilobées ou pennatifides. Nous nous contenterons de rapprocher 
entre elles les espèces européennes. 

La première race qui se présente à notre examen est celle des 
espèces naines, vivaces, à fleurs petites, blanches, qui tapissent sur le 
haut des montagnes, les rochers humides et voisins des neiges. Ge 
sont principalement le Bellidifolia, le Resedifolia, le Trifolia, qui 
appartiennent au même type. 

La seconde race vit plus rapprochée de nous, et se compose de 
plantes plus élevées, à racine granuleuse ou stolonifère, à fleurs 
grandes, blanches, roses, lilas, et à feuilles pennatipartites ; telles sont: 
le Granulosa des environs de Turin, dont le tronc radical est tuber- 
culé, comme celui de la Dentaire ; Ÿ Amara, dont nous avons parlé, 
et qui est répandu au bord des eaux, dans toute l'Europe et jusqu'aux 
monts Urals; l'Uliginosa, qui se trouve dans l'Ukraine et la Tauride; 
le Pratensis, le plus commun de tous et qu’on a observé jusqu'au 
nord de l'Asie et de l'Amérique; le Dentata, de la Gallicie et de la 
Podolie, fort semblable à l_Æmara ou à l Uliginosa. Toutes ces plantes, 
appartenant au même type, développent leurs feuilles pendant l'hiver 
et fleurissent au printemps. 

On peut joindre à cette race le petit groupe des Cardamines à 
feuilles entières et souvent arrondies, qu'on trouve dispersées princi- 
palement dans l'Amérique septentrionale, où elles vivent sur les bords 
des eaux, et dont une seule, l'Asarifolia, est européenne et habite 
les petits ruisseaux du Piémont et des Apennins : elle a, comme la 
plupart de ses congénères, les fleurs blanches et les siliques longues, 
affilées et redressées. 


— 186 — 


Les Cardamines de cette seconde race, et principalement le Pra- 
tensis et l'Amara, redressent leurs pédoncules et ouvrent leurs 
fleurs le matin des beaux jours; elles les referment le soir en s’in- 
clinant sur leurs pédoncules, et elles conservent cette même po- 
sition si l'atmosphère est humide ou pluvieuse ; lorsqu’ensuite 
la fécondation est accomplie, elles allongent leurs tiges et redres- 
sent leurs siliques. Ces mouvements, auxquels les autres races parti- 
cipent plus ou moins, ne peuvent guère s'expliquer mécaniquement, 
mais on voit qu'ils ont pour but de protéger les anthères qui, dans 
ces plantes, s'élèvent au-dessus du stigmate et du calice. 

La troisième race est celle de l'Hirsutu, dont le type est l'espèce 
commune, à laquelle on a coutume d’en joindre trois autres, qui n’en 
sont, je crois, que des variétés : le Sylvatica et Y Umbrosa des forêts de 
l'Europe, et le Parviflora des prairies humides. Ce sont des plantes 
annuelles, à fleurs petites et blanches, dont le port n’a point d’appa- 
rence, et qui fructifient de très-bonne heure, en allongeant leurs 
pédoncules et leurs siliques. Elles ont ordinairement, commel’Hirsuta, 
leurs petites étamines avortées, leurs pétales redressés et leurs an- 
thères très-peu apparentes; mais ce qu’elles présentent de plus remar- 
quable, c'est que leur stigmate élégamment papillaire, entouré à la 
fécondation des quatre anthères qui le recouvrent de leur pollen, 
s’élève très-promptement ensuite au-dessus de la fleur par l’allonge- 
ment de la silique. 

La quatrième race n’est formée, je crois, que d’une seule espèce, 
l'Impatiens, ainsi nommée de la facilité avec laquelle elle ouvre ses 
siliques, et répand ses semences. On la trouve dans les bois montueux 
de presque toute l'Europe, et même du Caucase et de l'Ibérie, où 
elle se fait remarquer par ses feuilles profondément pennatiséquées, 
munies à leur base de deux oreillettes, par ses fleurs petites, blan- 
châtres, presque avortées et disposées en longues grappes; enfin, par 
ses siliques allongées et étroites. Elle est annuelle ou plutôt bisan- 
nuelle, et fleurit dès le mois de mai. 

La dernière race est celle des espèces vivaces à feuilles larges, penna- 
tiséquées, semblables à celles des Chélidoines, et qui comprend prin- 
cipalement le Zatifolia et le Chelidonia, originaires de l'Europe 
australe et surtout des bois humides et montueux de l'Italie. Elles fleu- 
rissent à la même époque que les autres, et se distinguent à leur port 
élevé, à l'élégance de leur feuillage et à la grandeur de leurs fleurs 
pourpres. Vivranr, dans son second appendice à sa Flore de Corse, 
observe que le Cardamine chelidonia à les cotylédons condupliqués 
et non pas accombants comme les autres espèces du genre. Cette 


— 187 — 


observation s'applique-t-elle à toutes les Cardamines du même groupe 
dont quelques-unes habitent la Sibérie, et devrait-on ranger cette 
race dans les Pteroneuron, parce que ses funicules sont plus ou moins 
dilatés ? 

Les fleurs des Cardamines ne sont pas semblablement conformées; 
ainsi dans l'Amara et le Pratensis de la seconde race, elles ont les 
pétales élargis et assez ouverts pour qu'il y ait une communication 
immédiate entre les anthères et les glandes du torus ; au contraire ; 
dans les deux dernières races, ses pétales sont étroits, redressés, et 
cachent entièrement les glandes qui sont, au reste, très-peu marquées, 
au moins dans l’/mpatiens. On observe également que, dans les espèces 
de notre seconde race, les anthères sont fortement renversées en- 


dehors. 


NEUVIÈME GENRE. — Pteroneuron. 


Le Pteroneuron a un calice redressé , un peu ouvert et bosselé; ses 
pétales sont onguiculés et entiers, ses étamines libres et dépourvues 
d’appendices, sa silique sessile, lancéolée, à valves élastiques et planes, 
comme celles de la Cardamine ; les placentasse prolongent en aile exté- 
rieure ; le style est marqué de deux arêtes saillantes; les funicules 
sont élargis et comme ailés. 

Ce genre a été formé par De Canpozze, de deux espèces de Carda- 
mines : le Carnosa et le Græca, qui différaient des autres par la forme 
de leurs siliques. Elles ont les racines fibreuses, ies feuilles pennati- 
séquées, à grappes terminales, les fleurs blanches, les pédicelles fili- 
formes, dépourvus de bractées. 

Le Pteroneuron carnosum est une herbe vivace et peu connue, qu'on 
trouve sur les pentes rocailleuses des montagnes qui séparent la 
Dalmatie de la Croatie, et qu’on distingue à ses feuilles glauques et 
épaisses, à son calice ouvert et à ses pétales blancs, deux fois aussi 
grands que les sépales. Le Græcum est répandu dans le midi de 
YItalie et les îles de la Méditerranée. Il est annuel et fleurit au prin- 
temps ; son feuillage est aussi glauque, et son port le rapproche des 
Fumeterres ou du Thalictrum aquilegifolium. 


DIXIÈME GENRE. — Dentaire. 


Les Dentaires ont un calice égal ou bosselé, mais toujours droit ; 
leurs pétales sont onguiculés, à limbe élargi, quelquefois légèrement 
échancré; les étamines sont libres et sans appendices; les siliques 


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sessiles, lancéolées, amincies, ont leurs valves élastiques dépourvues 
de nervures et plus étroites que la cloison ; le style est filiforme et le 
stigmate à peu près simple ; les funicules sont dilatés , les graines nues, 
ovales et placées sur un seul rang. 

Ce genre, réuni par R. Brown à celui des Cardamines, en a été séparé 
par De Cannozze, à cause de la conformation de sa silique et de ses 
funicules, et surtout en raison de son port et de sa végétation. Ses 
racines sont des rhizomes épais, charnus, horizontaux et recouverts 
de tubercules, ressemblant assez bien à des dents, comme l'indique 
le nom du genre; ses feuilles, presque toujours glabres et plus ou 
moins glauques, sont larges, pétiolées, glanduleuses sur les bords, 
alternes ou verticillées, à divisions pennatiséquées ou digitées; ses 
tiges sont redressées, presque nues et terminées par des grappes de 
fleurs lâches , grandes, blanches, pourprées ou jaunâtres. 

Les Dentaires habitent les forêts ombragées et montueuses de 
l'hémisphère boréal ; on en compte onze dans l’ancien continent et 
cinq dans le nouveau. Parmi les premières , huit se trouvent en Europe 
et trois en Sibérie ou dans les forêts du Caucase ; les autres sont ori- 
ginaires de la Pensylvanie, 

Ces plantes ont tant de rapports entre elles, qu'à l'exception du 
Tenuifolia et du Microphylla, elles ne forment guère qu’un seul type, 
et se distinguent, au premier coup d'œil, de toutes les autres Cru- 
ciferes, De Cannozce les a séparées en trois groupes , dont le premier 
contient les espèces à feuilles verticillées rarement alternes et à style 
allongé; le second, celles à feuilles alternes, palmatiséquées, et le 
dernier, celles à feuilles alternes , pennatiséquées. Ces divers groupes, 
plutôt artificiels que naturels, comme il est facile de le comprendre, 
renferment chacun des plantes indigènes et étrangères, qu'il est diffi- 
cile de séparer par des caractères tranchés, et dont quelques-unes ne 
sont sans doute que des variétés. 

Les européennes habitent principalement le pied des montagnes 
sous-alpines, depuis la France jusqu’au Tyrol et à la Croatie. Les deux 
espèces les plus répandues sont le Digitata et le Pinnata, communes 
dans nos forêts montueuses, où elles croissent souvent réunies; ensuite 
vient le Bulbifera, qui s'étend au nord jusqu'en Suède et en Angle- 
terre; enfin le Polyphylla, du Piémont, de la Rhétie et de la Croatie. Les. 
autres espèces, comme l'Enneaphylla, le Glandulosa, le Trifolia et 
l'Hypanica, appartiennent surtout à l'Europe orientale, c’est-à-dire à 
la Carinthie, la Hongrie, la Podolie, la Transylvanie et la Croatie. 

Les tubercules qui recouvrent les rhizomes des Dentaires , sont les 
bases d’autant de feuilles dont les pédoncules et le limbe ont avorté, 


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comme on peut le vérifier par les appendices foliacés qu'on y observe 
encore. Leur assemblage forme comme. un collier à anneaux blanchà- 
tres d’où sortent les vraies racines. Lorsque le rhizome, qui se détruit 
toujours par le bas, en même temps qu'il se développe par le haut, 
est terminé par une tige, il cesse incontinent de se prolonger, et ne 
donne plus que des jets latéraux, sortant toujours de l’aisselle des 
tubercules; si, au contraire, il ne porte à son sommet que des feuilles, 
sa végétation continue, parce que les feuilles sont extérieures, tandis 
que les tiges naissent du centre; les rejets se séparent ensuite, plus 
tôt ou plus tard, du rhizome principal, et forment de nouvelles plantes 
qui fleurissent après avoir recu un accroissement convenable. 

Les feuilles et les tiges ne sont recouvertes d'aucune écaille avant 
leur développement, mais les fleurs sont protégées par les feuilles cau- 
linaires roulées et tordues irrégulièrement dans leur vernation, et 
repliées sur leurs pétioles, comme les tiges. J'ai remarqué que les 
jeunes pieds du Pinnata n'avaient que cinq ou trois divisions dans 
leurs feuilles, et j'en ai conclu que le nombre des lobes dépendait 
beaucoup de la vigueur de l'individu. 

Les fleurs des Dentaires ont leurs calices peu ou point bosselés, et 
leurs pétales plissés de manière que deux sont extérieurs, et deux 
enveloppés; les sépales adhèrent au torus par trois points, et les 
pétales par un seul; les uns et les autres tombent promptement, après 
la floraison; les glandes entourent principalement la base extérieure 
des petites étamines, et sont percées, à leur surface, de deux points 
mellifères. 

La fécondation est à peu près intérieure : on voit les deux loges 
des grandes anthères saupoudrer de leur pollen abondant et blan- 
châtre la jolie tête papillaire du stigmate ; les deux anthères inférieures 
placées beaucoup plus bas, répandent leur pollen sur les glandes du 
torus ; ces anthères se conservent long-temps parce que leur connectif 
est très-épais. 

Les siliques des Dentaires portent des panneaux très-marqués, qui se 
détachent par le bas et se roulent en haut pendant la dissémination ; 
les graines unisériées sont lancées à distance par le mouvement élas- 
tique qui en résulte, comme cela a lieu sans doute pour les Car- 
damines. 1 

La Dentaire bulbifere porte à ses aisselles des tubercules ou des 
gemmes, qui ont beaucoup de rapports avec ceux du Cardamine pra- 
tensis, et sont quelquefois si abondants, qu'ils causent l'avortement 
de la fleur ou au moins de la silique. On ne peut guère douter que 
les glandes des aisselles du Trifoliata, du Glandulosa et de  Hypanica, 
ne soient de même nature, quoique moins développées. 


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Les Dentaires végètent pendant l'hiver et développent leurs feuilles 
dès l'entrée du printemps. Leurs fleurs, grandes, d'un pourpre plus 
ou moins foncé, paraissent dans les forêts montueuses, avant les 
feuilles des arbres, et jouissent ainsi de tout le bienfait de la lumière. 
Mais comme elles sont en petit nombre sur leur tige solitaire et termi- 
nale, elles ont bientôt passé, et répandu leurs graines ; on doit donc 
placer les Dentaires parmi les plantes dont la végétation se termine 
dans l'intervalle de quelques semaines. 

Les cotylédons des Dentaires ne sont pas exactement accombants : 
Kocx remarque qu'ils sont pliés longitudinalement sur leurs bords, 
mais que dans le Bulbifera, un seul des deux est légèrement plissé au 
sommet. 


Deuxième tribu. — ALYSSINÉES, ou PLEURORHIZÉES LATISEPTES. 


Les Alyssinees ont la silicule biloculaire ou uniloculaire par avorte- 
ment, bivalve, ovale, oblongue, aplatie ou renflée; leur cloison est 
ovale ou oblongue, les valves sont planes ou concaves et jamais caré- 
nées, les semences ovales ou aplaties et souvent bordées. 

Elles diffèrent essentiellement des Arabidées par la forme de leur 
silicule et de leur cloison, qui cependant, dans quelques Draba et quel- 
ques Farsetia, sont assez allongées. Mais dans des familles aussi natu- 
relles que celle des Cruciferes, les passages entre les tribus sont souvent 
aussi insensibles que ceux entre les genres et les espèces. 


PREMIER GENRE. — lunaire. 


La Lunaire a un calice fermé et bosselé, des pétales onguiculés à 
limbe ovale, des étamines libres et sans appendices, une silique ou 
silicule biloculaire, pédicellée, plane, elliptique ou oblongue, des 
placentas nerviformes et relevés, une cloison membraneuse et per- 
sistante, des valves planes et sans nervures, des funicules allongés 
et adhérents à la cloison, des semences distantes et bordées. 

Ce genre comprend deux espèces, le Rediviva et le Biennis, origi- 
naires des forêts de l'Europe centrale. Ce sont des herbes élevées et un 
peu velues, à tiges cylindriques, droites etrameuses, à feuilles pétiolées, 
alternes ou opposées, cordiformes, fortement dentées et acuminées; 
leurs fleurs sont grandes, élégantes, d'un rouge lilas, les grappes 
terminales, les pédicelles filiformes, articulés et dépourvus de bractées. 

Ce genre forme un groupe naturel dans la famille des Cruciferes, 


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où il se distingue par ses feuilles grandes, épaisses et pétiolées , ainsi 
que par la forme arrondie, amincie et membraneuse de sa silicule 
pédicellée et couronnée d’un long style persistant; ses feuilles, irrégu- 
lièrement plissées , fortement veinées et glanduleuses sur les bords, 
enveloppent les grappes terminales, jusqu’à l'époque de l'épanouisse- 
ment; le calice est légèrement coloré, et les glandes nectarifères des 
petites étamines sont ternées dans le Biennis, deux en dehors et une 
en dedans, selon Scakuxe. 

Les Lunaires fleurissent dans nos bois, dès le milieu du printemps. 
Le Rediviva, qui est de beaucoup le plus commun, couvre les pentes 
du Jura, et repousse chaque année de nouvelles tiges du même rhi- 
zome ; le Biennis, plus rare et moins odorant, développe de bonne 
heure ses belles fleurs d’un pourpre foncé , qui se trouvent dans tous 
les jardins, où elles doublent avec peine et se ressèment facilement. 
Tous les deux sont remarquables par le tissu brillant et satiné de l'in- 
térieur de leurs valves et de leur cloison, qui subsiste long-temps après 
la dissémination. 

Je n'ai point remarqué de mouvement organique dans ces plantes. 
Leurs grappes sont redressées, leurs calices fermés et leurs pétales 
une fois étalés ne se referment plus. Cependant les siliques du Rediviva 
sont flottantes sur leur pédoncule, avant la dissémination, qui a lieu 
au commencement de septembre. 

Je suppose que les semences, qui sont très-peu nombreuses, ne se 
détachent pas d’elles-mêmes; mais qu’elles se sèment avec leur cloison 
où le funicule reste adhérent. 


SECOND GENRE. — Aicolia. 


Le Ricotia a le calice droit et bosselé, les pétales onguiculés à limbe 
cordiforme, les étamines libres et non dentées, la silicule sessile, 
oblongue, aplatie, biloculaire dans sa jeunesse, uniloculaire à la ma- 
turité. Les valves sont planes, les semences, au nombre de quatre 
dans l'ovaire, avortent ensuite en partie, et sont portées par un funicule 
libre et allongé. 

Ce genre diffère des Zunaires par la conformation de sa silique sessile 
etuniloculaire, ainsi que par sa végétation et par son port. Il est formé 
de deux espèces appartenant au même type, l’une et l’autre annuelle, 
le Ricotia lunaria de la Syrie ét du mont Carmel, et le Tenuifolia à 
feuilles plus divisées, dela Caramanie. 

La première à laquelle LiNNÉ avait donné le nom d’Ægyptiaca, mais 
qui ne se trouve point en Égypte, fleurit habituellement dans nos 


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jardins, où elle mûrit ses graines. Elle s'élève à deux pieds et plus, sur 
une tige glabre, tortueuse et un peu grimpante. Ses feuilles sont 
alternes, distantes, épaisses et pennatiséquées, ses grappes läches et 
terminales, ses pédicelles filiformes et allongés après la fécondation; 
les pétales, d’un rose lilas, s'ouvrent horizontalement; le torus est 
chargé de deux glandes nectarifères, placées entre les étamines latérales 
et le pistil; et le péricarpe ne renferme ordinairement qu'une seule 
graine légèrement bordée. 

Gzærrwer représente la silicule du Ricotia lunuria comme bilocu- 
laire, quoiqu’elle n'ait jamais de cloison à la maturité; il est proba- 
ble qu’il l'a confondue avec celle du Lunaria rediviva. 

Le Tenuifolia diffère de l’espèce que nous venons de décrire, par 
ses feuilles plus fortement et plus finement divisées. 


TROISIÈME GENRE. — larselia. 


Les Farsetia ont le calice droit, fermé et bosselé, les pétales ongui- 
culés à limbe entier ou un peu échancré, les étamines dentées ou non 
dentées , la silicule elliptique, sessile, aplatie, terminée par un style 
court, la cloison elliptique et membraneuse, les valves planes, les 
semences horizontales disposées irréguliérement, aplaties, plus ou 
moins orbiculaires et entourées d’une aile membraneuse. 

Ces plantes sont des herbes et quelquefois des sous-arbrisseaux 
rameux, droits, généralement blanchâtres et tomenteux; leurs feuilles 
sont toujours oblongues et entières, leurs grappes terminales, leurs 
pédicelles filiformes et ordinairement dépourvus de bractées. 

Ce genre diffère des Lunaïres par sa silicule sessile, ses funicules 
libres, et surtout par sa forme de végétation. Quoiqu'il se compose 
d'un petit nombre d'espèces, il a été divisé par DE CanDOLLE en trois 
sections, qui font autant de types. 

La première est le Farsetiana, qui se distingue des deux autres par 
une silicule elliptique, des étamines non dentées et des pétales entiers 
d'un pourpre blanchâtre. Elle ne contient qu'une espèce, le Farsetia 
ægyptiaca, herbe vivace , rameuse, qui croît sur les côtes méridionales 
de la Méditerranée, depuis Alep jusqu’en Mauritanie; ses feuilles sont 
linéaires et soyeuses, ses rameaux serrés et opposés aux feuilles, ses 
fleurs d’un pourpre pâle comme celles du Mathiola tristis. Elle fleurit 
de bonne heure et se fait remarquer par sa cloison mince et perforée à 
la base. Cette ouverture existait-elle primitivement, ou vient-elle de la 
destruction partielle de la cloison ? c'est ce que j'ignore. 

La seconde section a recu le nom de Cyclocarpæa , de la forme orbi- 


— 193 — 


culaire de sa silicule, et se reconnait encore à ses petites étamines 
dentées , ainsi qu'à ses pétales allongés, un peu échancrés et d'un 
pourpre livide. Elle ne compte non plus qu'une espèce, le Farsetia suf- 
fraticosa, originaire de la Perse, et caractérisé par sa racine ligneuse, 
ses tiges chargées des cicatrices des anciennes feuilles, ses rameaux 
tomenteux, ses grappes courtes et terminales, ses fleurs d’un violet 
lilas, inodores et légèrement penchées, enfin par ses semences gros- 
ses, ap'aties et fortement aïlées. 

Les Fibigia forment la section la plus nombreuse du genre, et 
contiennent sous le même type quatre espèces, la plupart euro- 
péennes ; le Lunarioides de Y' Archipel de la Grèce, l'£riocarpa de T'ile 
de Chypre, le Cheiranthifolia de l'Orient, et le Chypeata de l'Europe 
australe. Toutes ont les pétales jaunes, ovales et entiers, les petites 
étamines dentées, la silicule elliptique, la cloison entière, les racines 
vivaces, les tiges et les feuilles blanchätres et couvertes de poils 
étoilés. 

Le Clypeata, de beaucoup le plus commun, se conserve facilement 
dans nos jardins ; ses pétales sont étroits et linéaires, ses grandes 
étamines sont élargies à la base, et ne paraissent que des pétales 
avortés et anthérifères. Il fleurit de bonne heure, et müûrit lente- 
ment et successivementses graines. Lorsque la silicule est sur le point 
de s'ouvrir, elle se fléchit et se courbe en différents sens, jusqu’à ce 
que les valves soient détachées de la cloison, où les graines restent 
encore long-temps attachées. Ce mode de dissémination m'a paru 
assez rare, pour être remarqué. 

Les Fibigia comptent encore une cinquième espèce, le Farsetia 
triquetra de la Dalmatie, sous-arbrisseau à rameaux triquètres et à style 
caduc, qui me paraît former un second type. 


QUATRIÈME GENRE. — Perteroa. 


Le Berteroa a un calice droit et non bosselé, des pétales onguiculés, 
à limbe bilobé, des étamines libres dont les latérales sont échancrées 
à la base, une silicule biloculaire elliptique, à valve convexe et mem- 
braneuse, une cloison elliptique, un style persistant, terminé par un 
stigmate en tête, des semences ovales, planes et légèrement bordées. 

Ce genre, dédié à BerTERO, qui a enrichi la botanique par ses 
travaux et ses recherches, est formé de quelques A/yssum de Linxé, 
et comprend des herbes ou des sous-arbrisseaux d'une contexture 
solide, à tiges et à feuilles recouvertes de poils blanchîtres et radiés; 


leurs grappes terminales et opposées aux feuilles s'allongent heau- 
I, 13 


— 194 — 


coup dans la maturation; leurs pédicelles sont filiformes, redressés et 
dépourvus de bractées, leurs fleurs sont blanches et quelquefois 
changeantes. 

Le Berteroa, que l'on reconnaît tout de suite à son port et surtout 
à ses pétales bifides, contient cinq espèces, deux étrangères, et trois 
originaires du bassin septentrional de la Méditerranée; l'Incana des 
contrées orientales, le Mutabilis des environs de Corfou, et l'Obliqua 
du midi de l'Italie, dont les fleurs blanches passent facilement 
au rose. 

De ces trois espèces appartenant au même type, et qui ne sont 
peut-être que des variétés, la plus répandue est l’Incana, qui se con- 
serve et se reproduit facilement dans les jardins de botanique; ses 
fleurs , d'un beau blanc, sont assez grandes, et ne se referment point, 
lorsqu'une fois elles ont été ouvertes ; ses petites étamines légèrement 
dentées, sont entourées à leur base d'une glande mellifère, ses silicules 
médiocrement enflées, perdent successivement leurs valves, qui se 
détachent sans se déformer., et laissent à découvert une cloison mince 
et blanche, dont les bords sont garnis de sémences brunâtres. DE 
Canpozze dit que cette plante est bisannuelle, mais je l'ai observée 
plusieurs années de suite croissant à la même place et fleurissant tout 
l'été, en sorte que je soupçonne, sans l’affirmer pourtant, qu'elle est 
vivace. 

On trouve sur un échantillon d’Zncana cueilli dans la Tauride, et 
sur un autre conservé dans l'herbier de Varzranr, des calices chargés 
de trois fleurs, deux latérales et presque sessiles, et une centrale 
pédicellée portant elle-même un second calice à trois fleurs. Cette 
forme de monstruosité est semblable à celle que nous avons déjà re- 
marquée dans l'Arabis alpina. 


CINQUIÈME GENRE. — Aubrietia. 


L'Aubrietia a un calice fermé, bosselé à la base, des pétales ongui- 
culés, à limbe entier, des étamines latérales, dentées, une silicule 
oblongue, terminée par un style persistant, des valves planes, concaves, 
une cloison elliptique, des semences nombreuses et non bordées. 

Ce genre, qui est encore un démembrement des 4/yssum de Lin, 
a un port et des caractères très-distincts. Il diffère du Berteroa par ses 
pétales entiers, du Farselia et du Vesicaria par ses valves concaves, 
et de l'4/yssum par son fruit oblong et son calice bosselé. 

Les deux espèces qu'il renferme, le Deltoidea et le Purpurea sont 
originaires du bassin de la Méditerranée, et appartiennent au même 


27405 = 


type. La première croît dans le midi de l'Italie , au Liban et aux sources 
du Simoïs ; la seconde, dans la Bithynie, au sommet du mont Olympe. 
Ce sont des plantes peu élevées, sous-frutescentes à leur base, à tiges 
rameuses, blanchâtres et couvertes de poils étoilés ainsi que les feuilles; 
leurs grappes opposées et terminales sont lâches et me portent qu'un 
petit nombre de fleurs assez grandes, pourprées et semblables à celles 
des Malconia. Les feuilles du Deltoidea sont rhomboïdes, et les fleurs 
d’un bleu violet; les filets sont élargis en membrane à la base, et le 
stigmate est une tête papillaire aplatie. Ce que cette plante offre de plus 
remarquable, ce sont les onglets de ses pétales élevés au-dessus du 
calice, et qui laissent entr'eux des intervalles par lesquels pourrait 
passer la silique. | 

Quelle est l'origine de ces dents que portent les filets et qui parais- 
sent des restes d'étamines soudées et avortées ? ne semblent-elles pas 
prouver que les fleurs des Crucifères, telles que nous les voyons, sont 
déformées ? 


SIXIÈME GENRË. — V’esicaria, 


Le Vesicaria a un calice fermé, des pétales onguiculés, à limbe 
obtus ou un peu échancré, des étamines libres, quelquefois dentées 
en tout ou én partie, une silicule globuleuse, enflée, déhiscente et 
couronnée par un style assez marqué; des valves et une cloison 
membraneuses, des semences peu nombreuses et ordinairement 
bordées. 

Ce genre, fondé principalement sur la forme des silicules, n’est pas 
très-naturel, parce que les espèces qui le composent n’ont pas la même 
forme de végétation, et ne sont pas réunies par des caractères com- 
muns ; les unes ont le calice égal; les autres, bosselé ; les étamines sont 
simples ou dentées, les valves membraneuses ou coriaces, etc. Ces 
différences et d'autres semblables formeraient autant de sections, siles 
espèces étaient plus nombreuses. 

En attendant, nous nous contenterons de diviser ce genre en deux 
sections : 

1° Les Vesicariana, à silicule giobuleuse, à valves membraneuses 
et enflées ; 

2° Les Alyssoides, à silicule ovale, à valves épaisses et convexes. 

Les Vesicariana comprennent deux espèces européennes, qui ont 
quelque ressemblance pour le port, mais qui n’appartiennent pas, Je 
crois, au même type. 

La première est le ’esicaria utriculata , sous-arbrisseau qui se plait 


— 196 — 


sur les rochers calcaires, au pied des Alpes et des montagnes de l’Eu- 
rope méridionale et orientale ; ses rameaux frutescents résistent à 
l'hiver, et sont toujours couverts des vestiges des anciennes feuilles ; 
ses fleurs, en grappes terminales et d'un jaune d’or, paraissent dès 
l'entrée du printemps, et ressemblent beaucoup à celles du Cheiranthus 
cheiri, qui croît sur les murailles ; ses feuilles, recouvertes d’un vernis 
glauque, sont entières, glabres, un peu roides et touffues ; ses pétales 
sont légèrement échancrés; son calice est bosselé et son torus chargé 
de quatre glandes nectarifères ; le style tombe avant la maturation, et 
la silicule, en s'ouvrant, laisse voir dans chaque loge quatre ou six 
graines légèrement bordées et pendantes. 

La seconde espèce ou le Siruata se trouve en Espagne, sur les côtes 
de l’Istrie et de l'Ilyrie. Elle est annuelle et fleurit plus tard que la pre- 
mière ; sa tige et ses feuilles sont duvetées; son calice est entr'ouvert 
et égal; ses pétales, d'un beau jaune, sont bifides; ses filets sont 
chargés d’un renflement ou d'un appendice peu marqué ; ses silicules 
sont globuleuses, ses semences bordées d’une aile membraneuse. 

Le Grandiflora, dont je ne connais pas la patrie, est une herbe 
annuelle à feuilles ovales, dentées et recouvertes sur leurs deux sur- 
faces de poils étoilés ; le calice est égal et s'ouvre entièrement; les 
pétales sont étalés et d’un beau jaune; les étamines renflées à la base 
et entourant l'ovaire, m'ont paru dépourvues de glandes; les anthères 
amincies et fortement sagittées, recouvrent de leur pollen, avant 
l'épanouissement, la tête papillaire du stigmate; la silicule globuleuse 
renferme huit à dix semences lisses, sphériques et pédicellées. 

Les deux autres espèces de la section sont étrangères, et ne parais- 
sent pas appartenir non plus à un même type. 

La section des 4lyssoides ne comprend qu’une seule espèce euro- 
péenne, le (Cretica, petit sous-arbrisseau qui a le port du Sinuata, 
mais dont le calice est caduc, et la silicule recouverte d'un duvet 
étoilé. 

Les autres espèces sont la plupart étrangères et jusqu'à présent mal 
déterminées. FrAnKLIN, dans son voyage au pôle, en a rapporté deux 
sous-arborescentes, à tiges basses ou rampantes et à fleurs jaunes : 
lArctica du Groenland, et l4renosa du Suskatchawen. 


SEPTIÈME GENRE. — Schivereckia. 


û , , 11 
Le Schivereckia est un nouveau genre qu'Anprzelosxr, célèbre par 
ses travaux surles Crucifères, a dédiéau botaniste polonais SCHIVERECK. 
Son caractère consiste dans un calice égal et un peu lâche, des pétales 


— 197 — 


oblongs, des étamines différemment conformées, quatre grandes 
membraneuses et denticulées, deux latérales filiformes. 

Ce genre ne comprend qu'une espèce, le Schivereckia podalica, 
originaire des monts Urals, de la Wolhinie et de la Podolie; c'est 
une herbe vivace qui a le port de l'A/yssum et du Draba, et qui est 
recouverte d’un duvet blanchâtre. Ses feuilles radicales sont disposées 
en rosule; les caulinaires sont légèrement amplexicaules et les grappes 
sont terminales. 

Elle fleurit dès le premier printemps, au jardin botanique de 
Genève; ses quatre pétales, d’un beau blanc, présentent l'apparence 
de deux fleurs soudées, parce que leur ouverture est resserrée au 
milieu et élargie sur les côtés, où se réunissent trois à trois les six 
étamines ; les quatre grandes enveloppent de leurs filets élargis tout 
le pistil, qui est comme renfermé dans une petite loge; le pollen jau- 
nâtre tombe ainsi en grande partie sur l'ovaire qui est velu, et le 
dissout en partie ; la silicule est ovale, et les semences nues, un peu 
aplaties, sont disposées sur deux rangs. 


HUITIÈME GENRE. — Alyssum. 


L'Alyssum a le calice égal, les petales onguiculés, à limbe entier 
ou échancré; les étamines ordinairement dentées ou appendiculées 
en tout ou en partie; la silicule orbiculaire ou ovale, aplatie, à valves 
planes ou renflées au centre, et appliquées sur les bords ; la cloison 
très-amincie est terminée par un style court; les semences peu nom- 
breuses sont ovales, aplaties et quelquefois ailées. 

Les espèces de ce genre varient assez pour les caractères; elles ont 
les fleurs blanches ou jaunes, les semences nues ou bordées, les filets 
dentés , non dentés ou dentés seulement en partie, les silicules planes 
ou convexes, à une ou deux semences, quelquefois même quatre ; 
c'est la raison pour laquelle De Canpozze les a divisées en plusieurs 
sections, qui formeront peut-être, un jour , autant de genres : 

1° Les Adyseton, à fleurs jaunes, étamines dentées ; 

2° Les Anodontea, à fleurs jaunes, étamines non dentées ; 

3° Les Lobularia, à fleurs blanches, étamines non dentées; 

4 Les Odontostemon, à fleurs blanches, étamines dentées. 

La première section, qui est en même temps la plus naturelle et la 
mieux marquée, se subdivise en deux groupes : celui des espèces à 
tiges sous-frutescentes ou persistantes , et celui des espèces herbacées 
ou annuelles. 


Le premier et le plus riche comprend, dans De Canporre, vingt- 


— 198 — 


quatre espèces qui vivent toutes sur les rochers des montagnes ou des 
collines de l'Europe centrale et méridionale , de la Sibérie ou du mont 
Atlas. L'espèce principale est le Saxatile de la Podolie et du Volga, 
cultivé dans nos jardins sous le nom de Corbeille d’or, à cause de la 
multitude de ses fleurs ramassées en touffes. Cette plante, comme 
celles du même groupe, a une racine frutescente et très-ramifiée, qui 
résiste à tous nos hivers et fournit, chaque année, des tiges stériles 
en rosule , destinées à remplacer les tiges florales. Les autres espèces 
appartiennent évidemment au même type, et il est impossible de n'y 
pas reconnaître plusieurs variétés, comme l'ont déjà observé DE Cax- 
poLLe lui-même, Gaupin et BENTHAM dans sen voyage des Pyrénées. 
Elles ne se distinguent guère que par leurs tiges florales disposées en 
panicules, corymbes, grappes simples ou composées, leurs silicules 
plus ou moins ovales, comprimées et velues, leurs étamines différem- 
ment dentées, leurs graines plus ou'moins bordées etsouvent solitaires 
par avortement. Elles fleurissent toutes au premier printemps dans 
nos jardins, et sur les montagnes, au moment où la nature se réveille, 
et elles parent, à cette époque de l'année, les flancs décharnés des 
rochers, de leurs brillantes touffes d'un jaune d'or. On peut les sub- 
diviser peut-être en deux races : celle à tiges sous-frutescentes, qui est 
la plus nombreuse, et celle à tige sous-herbacée, dans laquelle on 
comprend deux espèces originaires de la Perse et de la Syrie, qui ont 
le calice fermé et allongé. 

L'Alyssum alpestre, qui appartient aux espèces sous-frutescentes, 
est remarquable par les appendices de ses étamines, dont la réunion 
forme une corolle intérieure recouvrant l'ovaire : ceux des quatre 
grandes étamines sont tronqués et légèrement dentés au sommet, les 
autres sont étroits et lancéolés, tous sont conformés comme de vrais 
pétales. 

Au reste ces Alyssum sous -frutescents ou sous-herbacés ont le 
port des annuels; cependant, si on les observait, on leur trouverait 
peut-être d'assez grandes différences organiques : ainsi, par exemple, 
les espèces dont les semences sont multiples ou ailées ne doivent pas 
avoir la même forme de dissémination que les autres. Je vois au jardin 
le Serpyllifolium de Y Atlas et de l'Espagne dont la silicule aplatie et 
monosperme est comme suspendue à un pédicelle réfléchi durant tout 
le cours de la maturation; tandis que dans le Calicinum de notre 
second groupe à silicule polysperme, la cloison orbiculée tombe avec 
les valves dont les bords épaissis forment un cercle vide attaché long- 
temps au pédicelle, 

Le second groupe des 4dyseton renferme les espèces annuelles qui 


— 199 


croissent dans les champs, les sables et le long des torrents, dans l'Eu- 
rope méridionale et centrale, la Podolie, la Tauride et la Sibérie. On 
en compte, jusqu'à présent, dix espèces, qui ont toutes le port et la 
végétation des Adyseton frutescents, mais qui sont dépourvues d'éclat 
et d'élégance, parce que leurs fleurs sont petites, d’un jaune pâle et 
leurs tiges presque toujours rampantes. On peut les considérer aussi 
comme dépendant d'un même type, et comprenant de même des 
variétés; cependant elles différent entre elles non-seulement par leurs 
fleurs en grappes simples, paniculées ou même ombellifères, mais 
encore par la forme de leur silicule glabre, velue ou même tuberculée, 
la longueur de leur style, et leur calice cadue ou persistant, après la 
fécondation. L'Europe proprement dite , sans y comprendre les con- 
trées orientales, n’en compte guères que deux espèces : le Campestre 
à silicule hérissée, beaucoup plus rare que le Calicinum , qui se trouve 
partout et se reconnaît à son stigmate sessile, à ses très-petites anthères 
placées plus haut, avec deux sétules qui accompagnent ses petites 
étamines, à son calice persistant et à ses pétales qui blanchissent sans 
tomber ; ses grappes s’allongent en fleurissant, et ses sicules infé- 
rieures répandent déjà leurs graines que les supérieures ne sont pas 
encore fécondées. Il n’est point impossible que quelques-unes de ces 
espèces ne se multiplient par des rejets , comme je crois l'avoir observe 
du Minutum. 

La section des {nodontea ne renferme que deux plantes annuelles : 
l'Alyssum edentulum des rochers calcaires du Bannat, et le Dasycar- 
pum de la Sibérie; elles sont le passage des 4/yssum aux Vesicaria , 
elles ont, en effet, la silicule des derniers, les tiges et les feuilles 
blanchâtres des premiers; mais elles n’appartiennent point au même 
type, car l'Edentulum a ses pétales grands et bifides, et sa capsule 
glabre ; le Dasycarpum , les pétales courts, presque entiers, et la cap- 
sule velue. 

Les Zobulaires, ou la troisième section des A4/yssum, forment un 
groupe unique, composé de huit espèces, six originaires de l’Europe 
méridionale et deux de la Sibérie. Elles ont les fleurs blanches, les éta- 
mines non dentées et les tiges sous-frutescentes à la base. On les trouve 
sur les rochers calcaires, entre lesquels pénètrent leurs racines. L’'es- 
pèce principale ou le Maritimum croît en abondance sur les bords de 
la Méditerranée, où elle se fait remarquer par ses touffes de fleurs 
blanches, qui se succèdent très-long-temps, ses silicules glabres et ses 
feuilles linéaires plus ou moins veloutées; le Rupestre des rochers de 
l'Italie n’en diffère guère que par ses feuilles argentées et ses silicules 
recouvertes d’écailles cotonneuses ; les autres espèces, ou l'Halimifo- 


— 200 — 


lium , le Macrocarpum , le Pyrenaicum et le Spinosum ont le même port 
et les mêmes habitudes. Le dernier est remarquable par ses rameaux 
et ses pédoncules, qui deviennent épineux après la chute des graines 
ou l'avortement des fleurs, propriété qu’il partage jusqu’à un certain 
point avec le Macrocarpum. 

Quelques botanistes, comme Morts, ont fait de l'Alyssum mariti- 
mum un genre particulier, auquel ils ont donné le nom de Xoniga, et 
dont le caractère est d’avoir son calice ouvert et son torus chargé de 
huit glandes hypogynes; ils y rangent encore l'A/yssum purpureum 
de Lacasca, et le Zongicaule, qui tous les deux sont originaires des 
montagnes du royaume de Grenade. 

La dernière section, ou celle de l’Odontostemum, est formée d'une 
seule espèce, l'Hyperboreum, herbe vivace et gazonnante, qui a le 
port de l'Hesperis arabidiflora, et dont nous n’avens rien à dire. 

Le principal obiet de recherches dans ce genre, consiste dans les 
dents ou les prolongements des étamines. Quel est leur usage? Pour- 
quoi les trouve-t-on dans certaines espèces et non pas dans d’autres 
qui en sont très-voisines? Pourquoi toutes les étamines en sont-elles 
quelquefois pourvues ? Pourquoi manquent-elles souvent dans les 
latérales ou dans les grandes, ou pourquoi enfin disparaissent-elles 
dans certains individus ou se retrouvent-elles dans d’autres de la même 
espèce ? Ces diverses questions ne recevront de solution satisfaisante 
que par des observations et des comparaisons attentives. En attendant, 
Je remarquerai qu’on pourrait considérer ces appendices comme des 
organes avortés, peut-être des développements informes de pétales, 
qui, dans le cours de la végétation, ont été changés en étamines, et 
qui reparaïîtraient dans les fleurs doublées. Gawpix dit, et je l'ai vérifié, 
que les étamines de l’Ælyssum calicinum, et non pas celles du Cam- 
pestre, lui ont toujours paru capillaires dans toute leur longueur. Il 
a observé de plus, après Scaxuxr, que les latérales étaient accompa- 
gnées de deux arêtes ou filets libres, que Vizzars autrefois et ensuite 
BieBERSTEIN avaient pris pour des filaments stériles. Dans le Monta- 
num et plusieurs autres espèces, les dents des étamines forment autant 
d'ailes fort élargies, et dans le Rostratum , ou dans une espèce trés- 
voisine, les appendices des quatre grandes se réunissent en utricule 
ou en sac, pour loger la silicule. 

On devrait encore déterminer ici la position et la forme des glandes 
nectarifères, qu'on néglige souvent, parce qu'il est presque impossi- 
ble de les observer sur les échantillons secs, et souvent très-difficile 
dans les fleurs fraîches. Je crois qu’elles sont, en général, peu mar- 
quées, mais qu'elles varient beaucoup, selon les espèces. De CaNnozer 


— 201 — 


dit que dans le Maritimum, on en trouve quatre placées en dehors 
des grandes étamines. Le Rostratum, dont j'ai parlé plus haut et dans 
lequel les appendices sont réunis en godet, ses étamines laté- 
rales libres et entourées, à leur base, de deux belles glandes vertes, 
qui versent sans doute dans l’utricule leur suc mellifère. Enfin j'ai vu 
le Campestre chargé à la base de sa silicule tuberculée de quatre jolies 
glandes jaunes pédicellées, et qu'on ne trouve pas dans le Calicinum. 

Les Alyssum des diverses sections m'ont paru des plantes dépour- 
vues, en général, de mouvements organiques, excepté de ceux qui 
sont propres aux pédoncules, pendant et après la fécondation. Les 
fleurs du grand nombre nese referment point et tombent assez promp- 
tement; au contraire, celles du Calicinum et de quelques espèces 
voisines resserrent leur corolle et leur calice, durant la maturation. 

Ces plantes, qui se reconnaissent au premier coup-d'œil, à leurs 
tiges dures et étalées sur le terrain, à leurs feuilles sèches, ovales, 
lancéolées, et à leur surface recouverte de poils blanchâtres, courts ; 
bifides, ramifiés ou étoilés, ne possèdent qu'à un faible degré la saveur 
âcre et brûlante qu'on trouve souvent dans les Cruciferes. 

La fécondation m'a paru directe dans tous les 4lyssum , parce que 
les anthères entourent toujours le stigmate. A la dissémination, les 
valves s’ouvrentlorsqueles silicules renferment plusieurs graines, autre- 
ment elles restent fermée. J'ai remarqué que les semences sont sou- 
vent pendantes et attachées par un pédicelle au sommet de Ja silicule. 

J'indique ici, comme pouvant être réuni aux A/yssum, le Meniocus, 
herbe annuelle, à pétales petits, entiers et blancs, qui se trouve en 
Espagne et en Orient. Elle se fait remarquer par ses tiges rameuses et 
dures, et ses feuilles recouvertes d’un duvet blanc et étoilé. Elle diffère 
des Alyssum par sa silicule un peu allongée, aplatie comme celle de la 
Drave, et qui contient six à huit semences dans chaque loge. 


NEUVIÈME GENRE. — C/ypeola. 


Le Clypeola a un calice non bosselé, des pétales entiers, des éta- 
mines dentées, une silicule orbiculaire, plane, légèrement échancrée, 
uniloculaire et monosperme, un stigmate sessile, une semence aplatie, 
centrale et attachée latéralement à un funicule horizontal, 

Ce genre est formé de trois plantes annuelles petites, droites ou 
diffuses, et recouvertes d'un duvet court et étoilé; leurs feuilles sont 
oblongues, linéaires et entières, leurs grappes terminales et redressées, 
leurs pédicelles filiformes, courts et nus; leurs fleurs petites et jaunes, 
blanchissent quelquefois après la fécondation. 


— 202 — 

Le Clypeola a le port et la végétation des Alyssum ; sa silicule 
diffère de celle du Peltaria, à laquelle elle ressemble d’ailleurs beau- 
coup, parce qu'elle est toujours bordée de cils ou de dentelures, et 
recouverte de poils ras et allongés, mols ou rudes. 

De Canozze, d'après Desvaux, partage ce genre en trois sections : 

1° Le Jonthlaspi, à silicule ciliée sur les bords, glabre ou légère- 
ment pubescente sur le disque, une espèce; 

2° L’Orium, à silicule dentée sur les bords, recouverte de poils 
lanugineux, une espèce ; 

3° Le Bergeretia , à silicule dentée sur les bords, hérissée de poils 
roides sur le disque, une espèce. 

De ces trois espèces, la plus connue est le C/ypeola Jonthlaspi, 
répandu le long des murs et sur les collines calcaires du midi de 
l'Europe, où il fleurit presque à l'entrée du printemps. C'est une plante 
sans apparence, dont les fleurs jaunes sont très-petites, et dont les 
calices ne tombent que tard. De Cannozce dit que toutes ses étamines 
sont dentées, et Gaunin qu’il n'a apercu qu’une longue dent à la base 
externe des étamines latérales. À mesure que la plante fleurit, ses sili- 
cules élégantes et membraneuses se déjettent, puis elles se détachent 
sans s'ouvrir; cependant les deux valves sont distinctes et facilement 
séparables. Mais l'avortement de la cloison et celle des graines s'opère 
de trop bonne heure pour qu’on puisse voir la séparation. 

Le Clypeola eriophora, qui forme la seconde section, est une plante 
des environs de Madrid, à calice persistant et silicule fortement 
échancrée. 

L'Echinata de la troisième section a, eomme les deux autres, les. 
fleurs très-petites, le calice promptement caduc, les pédicelles réfléchis. 
et les silicules pendantes. 

On peut ajouter à cette dernière section le Cyclodontea, qui a tout- 
à-fait le caractère du genre, les étamines dentées, les fleurs jaunes. 
très-petites et les feuilles épaisses et comme incrustées de poils blan- 
châtres et étoilés, mais ses silicules pendantes, latérales et discoïdes, 
sont tuberculées, blanchâtres, et leur contour ressemble tout-à-fait 
aux dents d’une roue. 

A la dissémination, la silicule débarrassée de son calice, comme 
dans le Jonthlaspi, se rompt au sommet de son pédoncule réfléchi. 

Cette plante annuelle a été trouvée par Dei aux environs de 
Montpellier, au milieu des laines arrivées de l'Afrique, auxquelles elle 
s'était attachée par les dents tuberculées de sa silicule pendante et 
par conséquent destinée à être transportée. 


— 203 — 


DIXIÈME GENRE. — Peltaria. 


Le Peltaria a le calice ouvert et non bosselé, les pétales entiers et 
arrondis, les étamines non dentées, la silicule orbiculaire ou ovale et 
aplatie, uniloculaire et surmontée d'un stigmate en tête ; elle renferme 
dans sa jeunesse deux à quatre semences qui se réduisent quelquefois 
à une seule, la cloison elle-même disparaît, et les valves d’abord ren- 
flées s’aplatissent ; les semences sont pendantes. 

Les Peltaria sont des herbes vivaces, glabres et droites; leurs feuilles 
sont entières, les radicales pétiolées et ovales, les autres sessiles ou 
sagittées et amplexicaules ; les grappes sont nombreuses et disposées 
en corymbe, les pédicelles, redressés à l'époque de la fécondation, 
s'étalent ensuite, ou même se recourbent; les pétales sont blancs. 

Ce genre est distingué de tous ceux qui l’avoisinent par sa confor- 
mation générale; sa silicule diffère de celle du Clypeola, parce qu'elle 
renferme plusieurs graines, et qu’elle ne devient uniloculaire que 
par la suite de la végétation ; d’ailleurs ses étamines ne sont point 
dentées. 

Les trois espèces qui le forment actuellement, sont : l’A/liacea de 
l'Istrie, de la Dalmatie et du Piémont, l'Angustifolia et le Glastifolia 
des environs de Damas ou d’Alep; elles appartiennent au même type 
et ne diffèrent pas essentiellement entre elles. La première, très- 
distincte par la forte odeur qu’elle répand lorsqu'on la broie, est 
cultivée dans la plupart de nos jardins, où elle se fait remarquer, à la 
fin du printemps, par ses feuilles glauques et semblables à celles de 
l'Jsatis, par ses nombreuses fleurs à calice caduc et blanchâtre, enfin 
par ses pétales d’un blanc de lait. Ses étamines non dentées sont un 
peu élargies à la base, et ses glandes nectarifères s’apercoivent à peine; 
sa silicule fortement bordée et comme ailée, ne s'ouvre point à la dissé- 
mination , et même ne peut point facilement se séparer en deux valves, 
quoiqu'elle contienne souvent plus d’une graine; ce qui montre que 
sa déformation , qui a commencé plus tard, a été plus considérable 
que celle du Clypeola. 

Les deux dernières espèces de ce genre sont encore peu connues. 


ONZIÈME GENRE. — Petrocallis. 


Le Peirocallis a un calice égal, des pétales entiers, des filets non 
dentés , un style très-court, une silicule ovale, à cloison membra- 
neuse, des valves planes et marquées de nervures dans leur milieu, 


— 204 — 


des loges à deux semences non bordées, des funicules adnés à la 
cloison , et des cotylédons obliquement accombants. 

Le Petrocallis est un genre créé par R. BrowN, et qui ne renferme 
qu'une seule espèce, le Draba pyrenaica de LiNNÉ, qu’on trouve sur 
les montagnes élevées du midi de l'Europe, dans les Alpes de la 
Savoie, de la Suisse, de la Carinthie, etc. Ses racines sont des rhi- 
zomes ligneux et très-ramifiés, qui forment sur le terrain des rosules 
comme celles des Saxifrages palmees, et dont les feuilles sont épaisses, 
brillantes, ciliées à la base, profondément trifides ou quinquéfides au 
sommet. Les hampes sont latérales et non terminales, en sorte que les 
mêmes tiges s’allongent indéfiniment, et redonnent, toutes les années, 
de nouveaux corymbes, qui s’allongent ensuite en grappes. 

Les fleurs du Petrocallis paraissent à la fin du printemps; elles sont 
grandes et d'un violet lilas; leurs calices sont légèrement colorés sur 
les bords; leurs étamines latérales sont recourbées; la silique est 
glabre, légèrement enflée, échancrée; les semences sont grandes, 
ovales, allongées. 

Cette plante a été séparée des Draves, principalement à cause du 
petit nombre de ses graines, dont le funicule adhère à la cloison, 
comme dans la Lunaire. Elle est encore remarquable par ses cotylédons, 
qui ne sont pas exactement accombants. GauDin, dans sa Flore helve- 
tique, vol. 1v, pag. 263, dit que M. Gay, si connu par l'exactitude de 
ses observations, sur seize semences de Petrocallis, en a trouvé une 
notorhizée, deux seulement pleurorhizées, et treize dans une position 
intermédiaire; ce qui prouve qu'au moins dans cette plante, la direc- 
tion de la radicule est variable. 

Le Petrocallis est une de ces plantes que je désignerai sous le nom 
de difformes, dont le port n’annonce pas l’organisation de la fleur ; 
elle a, en effet, la végétation des Draba Aizopsis et la silicule des 
Lunaires. Les funicules , selon Kocx, sortent par le sommet de la cap- 
sule ouverte. 


DOUZIÈME GENRE. — /)rave. 


La Drave a un calice entr'ouvert, peu ou point bosselé, des pétales 
entiers ou légèrement échancrés, des étamines non dentées, une sili- 
cule entière, ovale ou oblongue, des valves à peu près planes, une 
cloison membraneuse de même largeur que les valves, des semences 
nombreuses, nues et disposées sur deux rangs. 

Ce genre est composé d'herbes annuelles ou vivaces, tantôt basses 
et gazonnantes, tantôt élevées et rameuses; leur surface est glabre, 


— 205 — 


velue ou duvetée; leurs feuilles sont dures ou molles, linéaires ou 
ovales, entières ou dentées; leurs grappes sont terminales, leurs pédi. 
celles nus et filiformes, leurs fleurs jaunes ou blanches. 

La plupart des Draves vivent sur les montagnes élevées, dans les 
régions froides ou tempérées; les autres, en petit nombre, descendent 
dans les plaines, où elles se ressèment chaque année. Elles habitent 
presque toutes l'hémisphère boréal de l’ancien continent , principale- 
ment l'Europe orientale et la Sibérie, où les botanistes russes en ont 
découvert, depuis quelque temps , un assez grand nombre. On en 
compte aujourd'hui près de soixante-dix, en y comprenant quelques 
espèces originaires des deux Amériques. 

Ce genre, d'où l'on a exclu le Draba verna de Linné, à cause de 
ses pétales bifides, peut être, selon DE Canoe, divisé en cinq 
sections , dont les trois premières renferment des herbes vivaces, et 
les deux autres, des annuelles. 

1° Les Aizopsis, à feuilles roïdes et ciliées, à style assez allongé et 
fleurs jaunes; 

20 Les Chrysodraves , à feuilles ni roides ni carénées , à style court 
et fleurs jaunes ; 


3° Les Leucodraves , à feuilles molles et fleurs blanches ; 
4° Les Holarges , à style court et fleurs blanches ; 
5° Les Drabelles, à stigmate sessile et fleurs blanches. 


Les mêmes sections peuvent être présentées analytiquement sous 
la forme suivante : 


Feuilles roïdes. . 4izopsis. 
Feuilles molles. . CArysodraves. 
Fleurs blanches. . . . . . . . . . . Leucodraves. 


J Fleurs jaunes. 
Draves vivaces. J 


Style court, mais distinct. . . . .. Holarges. 


Dares annuelles. | SOIN, EVENE .. Drabelles. 


Il y a de plus quelques espèces qui ne sont pas assez connues pour 
être rapportées sûrement à l’une de ces sections. 

Les Aizopsis comprennent onze espèces appartenant toutes au même 
type, parce qu'elles ont la même végétation, la même foliation et la 
même inflorescence. Elles ne diffèrent que par des caractères secon- 
daires, tirés principalement du nombre des fleurs, de la forme des 
feuilles nues ou ciliées, de la longueur relative des pétales, du calice 
et des étamines, ou du style et de la silicule, etc. De ces onze espèces, 
plusieurs habitent les rochers du Caucase ou de la Sibérie ; trois seu- 
lement se rencontrent en Europe : l'Aisoon de l'Autriche et de la 


— 206 — 


Croatie, le Cuspidata de l'Espagne et des Apennins, et l’Aizoïdes , 
commun sur presque toutes nos montagnes. 

Cette dernière espèce, dont la description s'applique à peu près à 
toutes les autres, tapisse, dès les premiers jours du printemps, les 
rochers, de ses belles fleurs d’un jaune éclatant; elle se multiplie par 
des rejets qui partent de ses feuilles inférieures, et pousse continuel- 
lement du sommet, parce que ses hampes sont réellement des pédon- 
cules latéraux. À mesure que les tiges se développent er hauteur, elles 
se couchent dans leur partie inférieure, et se changent insensiblement 
en un rhizome, long-temps recouvert des anciennes feuilles, sur 
lesquelles on remarque des points noirs et réguliers qu’on peut consi- 
dérer comme autant de petites Sphéries. 

Quoique le calice de l'Aizoïdes ne soit pas bosselé, son torus est 
presque entièrement nectarifère, et ses petites étamines sont entourées 
à leur base de deux glandes assez saillantes. La fécondation est immé- 
diate, les anthères répandent leur pollen sur la petite tête aplatie et 
papillaire du stigmate placé à la même hauteur, et l'on peut remarquer 
que les six étamines sont toutes égales et équidistantes. 

Les Chrysodraves ont les fleurs jaunes des Aizopsis, mais leur style 
est très-court, et leurs feuilles ne sont ni roides ni carénées ; on en 
compte aussi onze espèces, la plupart originaires de la Sibérie et sur- 
tout du Caucase; deux d’entre elles forment un type particulier, et se 
trouvent sur les montagnes du Mexique; une autre, la Muricelle, est 
commune à la Sibérie et aux montagnes de la Norwége ; une dernière 
enfin, l'A/pina, est purement européenne, et vit sur les montagnes 
de la Norwége et de la Laponie. 

Les neuf Chrysodraves de l'ancien continent, dont quelques-unes 
sont aussi des variétés, ont tout-à-fait le port et la végétation des 
Aizopsis, et ne s'en distinguent guères que par leurs feuilles molles, 
velues et planes. Elles diffèrent principalement les unes des autres 
par leurs poils simples ou radiés, leurs feuilles entières ou dentées, 
et leurs silicules ovales, oblongues et elliptiques; plusieurs se mul- 
tiplient par des drageons, et allongent, chaque année, leurs tiges 
gazonnantes et sous-ligneuses; elles fleurissent à la même époque 
que les Æizopsis, et comme leur style est toujours raccourci, leurs 
étamines ne sont jamais saillantes. 

Les Leucodraves comptent quinze espèces, qui ont le port et la 
végétation des deux premières sections ; elles habitent les rochers des 
montagnes élevées de l’ancien continent, à l'exception du Calicina, 
qui est originaire du Pérou, et se reconnaît à son calice persistant et 
à sa haine uniflore, On en trouve trois dans l'Amérique boréale, une 


— 207 — 


en Sibérie, sur les rivages de l'Océan, une sur le Caucase, quatre er 
Norwége et en Laponie, six ou sept sur les Pyrénées ou les montagnes 
de la Suisse. Mais ces espèces ont souvent tant de rapports entreelles, 
que leur synonymie est fort embarrassée. Elles se distinguent à leurs 
différents degrés de villosité, à la forme de leurs feuilles entières, den- 
tées, nues ou ciliées, surtout à leurs silicules ordinairement plus allon. 
gées que dans les Aizopsis ou les Chrysodraves; une des plus remarqua- 
bles est le Stellata des Pyrénées et de la Suisse, qui doit son nom aux 
poils étoilés de ses feuilles ; sa hampe latérale est à peu près nue, mais 
son port n’est pas celui des 4izopsis. Les autres sont principalement 
l'Helvetica, qui habite la limite des neiges éternelles, etle Rupestris 
de l'Ecosse et de la Norwége, qui donne des rejets rosulacés et dont 
les hampes latérales portent cinq ou six fleurs blanches à silicules 
aplaties et allongées. 

Les Holarges sont moins nombreux et plus irrégulièrement distri- 
bués que les Leucodraves ; deux seulement habitent l'Europe, les six 
autres croissent au nord de l'Amérique septentrionale, au Groen- 
land, en Sibérie, ou même au détroit de Magellan. Leurs tiges sont 
rameuses et feuillées ; leurs fleurs, disposées en grappes, sont por- 
tées sur des pédicelles filiformes ordinairement redressés pendant la 
fécondation. Parmi les Holarges, je remarque le Rumnolorica qui a 
le port d'un Thlaspi, mais dont les feuilles sont velues et les fleurs 
axillaires ramassées au sommet en petits corymbes aplatis; le Confusa 
de la Suède, peu différent du Sfylaris, et le Contorta, dont les sili- 
cules aplaties et glabres se tordent après la fécondation comme celles 
de l'Arabisans, et préparent ainsi l'œuvre de la dissémination. Ces 
plantes, la plupart bisannuelles, vivent de préférence dans les contrées 
froides, sur les bords des mers boréales ou sur les montagnes. Quel- 
ques-unes sont mal déterminées et pourraient bien être considérées 
comme des variétés : l'Aurea du Groenland a les pétales jaunes, 
toutes les autres ont les fleurs blanches. 

Les Drabelles ne sont guères séparées des Holarges que par leur 
stigmate sessile et la petitesse de leurs fleurs jaunes ou blanches; la 
principale espèce de cette dernière section, qui n’en compte que 
quatre, est le Draba muralis, qui fleurit , au printemps, le iong des 
murs et des haies, où il se fait remarquer par ses rosules et ses tiges 
rameuses, chargées de feuilles caulinaires amplexicaules et dentées ; 
ses silicules étalées sont tout-à-fait semblables à celles de l’Erophila 
verna, mais ses pétales sont entiers. Les autres espèces qui appar- 
tiennent au même type, sont le Lutea du pied du Caucase, et le 
Nemoralis des Pyrénées et de la Transylvanie, tous les deux à fleurs 


— 208 — 


jaunes et ne méritant guères d'être séparés. Ces trois plantes, ainsi 
que le Caroliana et le Nummularia , ont les semences petites et nom- 
breuses. 

Les Draves, comme l'on voit, présentent deux formes de végéta- 
tion : celle des espèces à rosule et à hampe, qui se multiplient par 
des rejets ou par des développements successifs, et celle des espèces 
à tige proprement dite qui ne se propagent que par leurs graines. 
Les premières habitent exclusivement nos montagnes, où leurs feuilles 
petites et souvent assez épaisses bravent tous les frimas; les autres 
descendent quelquefois dans les plaines et disparaissent promptement, 
après avoir répandu leurs semences. Les deux Chrysodraba du Mexi- 
que, le Jorullensis et le Toluccana, semblent faire exception à la 
règle que je viens d'établir; car elles sont vivaces, et ont cependant 
des tiges feuillées; rien n'aurait empêché non plus qu'on ne trouvât 
des Draves, qui, à l'exemple de l'Erophila verna, auraient des 
hampes et des rosules, et seraient pourtant annuelles; maïs, jusqu'à 
présent du moins, cette forme de végétation ne s'est pas encore 
présentée dans ce genre. 

Les silicules des Draves varient beaucoup pour la forme; elles 
s'allongent quelquefois assez pour ressembler à celles des Arabis, 
comme dans le Draba arabisans des bords du lac Champlain; ordi- 
nairement elles sont redressées, de manière à former une ligne droite 
avec leur pédoncule; quelquefois, au contraire, elles prennent une 
position oblique, ou bien elles se contournent et se tordent, comme 
dans le Contorta et le Confusa. Ge petit phénomène, que j'ai déjà 
remarqué dans le Farsetia clypeata, a sans doute pour but de séparer 
les valves et de favoriser la dissémination. 

On a peu étudié les glandes nectarifères et la fécondation des 
Draves, parce qu'on a rarement l’occasion de rencontrer ces plantes 
vivantes ; cependant, les espèces à style court et à étamines cachées, 
ne doivent pas avoir leurs fleurs conformées exactement comme celles 
à style allongé et à étamines saillantes ; c'est ce que l'observation peut 
seule apprendre. En attendant, je remarque que les pétales des 
Draves ne paraissent pas doués de mouvements organiques; ils ne 
se referment plus quand une fois ils sont ouverts, mais ils se sé- 
parent lentement, et blanchissent quelquefois avant de tomber. Les 
grappes florales s’allongent ordinairement beaucoup pendant la fé- 
condation. 


— 209 — 


TREIZIÈME GENRE. — Ærophile. 


L'Erophile a un calice bosselé et un peu lâche, des pétales profon- 
dément bilobés, des étamines libres et non dentées, une silicule ovale 
ou oblongue, à cloison membraneuse, des valves à peu près planes 
et un stigmate sessile, des semences nombreuses, petites, nues et 
bisériées. 

Les Ærophiles sont de petites plantes annuelles, ou plutôt bisan- 
nuelles, détachées par DE Canpozze du genre des Draves, à cause de 
leurs pétales profondément bifides; elles ont tant de ressemblance 
entre elles, qu'elles peuvent être considérées comme des variétés mo- 
difiées par le climat; on les trouve, en effet, dispersées dans l'ancien 
et le nouveau monde, où elles fleurissent dès le premier printemps, et 
disparaissent dès qu’elles ont répandu leurs graines. 

Ces plantes ont toutes une racine grêle et de petites feuilles radi- 
cales glabres ou velues, ovales ou oblongues, et disposées en rosule ; 
leurs hampes sont nues, droites et toujours latérales, comme celles 
des Draves ; leurs pédicelles allongés et dépourvus de bractées ; leurs 
fleurs petites, blanches et un peu penchées avant l'épanouissement, 
s'ouvrent au soleil et se referment à l'obscurité. 

Ce genre est formé de cinq espèces : le 7’ulgaris de l'Europe, l'4me- 
ricana de Amérique boréale, le Præcox du Caucase,le Minutissima des 
environs de Constantinople, et le Wuscosa du Pérou. Elles diffèrent 
surtout par la longueur de leur silicule et celle de leur hampe plus ou 
moins feuillée, mais elles appartiennent toutes au même type, et 
peuvent être considérées, je crois, comme autant de variétés. Le 
Vulgaris lui-même en renferme deux : celle à feuilles épaisses et 
incisées qui vit dans nos cultures, et celle à feuilles plus amincies et à 
peu près entières qui croit sur les terrains stériles. 

L'espèce européenne, qui se rencontre presque partout, et qui vit, 
comme les autres, sur les bords des champs et des haies, principale- 
ment dans les terrains maigres et sablonneux, s'annonce, dés l’au- 
tomne, par ses petites rosules qui résistent à toutes les intempéries, 
et sont souvent si nombreuses que leurs fleurs forment comme un 
nuage blanc, qui couvre au loin le sol. 

On peut prolonger la vie de ces plantes si fugitives, en les empé- 
chant de fleurir. J'ai vu des pieds d'Erophila vulgaris, dont on avait 
supprimé les hampes, conserver leur végétation tout l'été, et pousser 
de leurs racines de nouvelles rosules. On ne doit guère douter que la 


me 14 


— 210 — 
plupart des espèces annuelles ne présentassent le même phénomène 
dans des circonstances semblables. 

Les filets de l'£rophile sont renflés à la base, mais non pas necta- 
riféres ; leurs graines se sèment avant la fin du printemps, et suppor- 
tent, sans s'altérer, les plus grandes chaleurs de l'été; elles germent 
pendant les pluies de l'automne, quelquefois plus tôt, et alors elles 
refleurissent la même année. Les Erophiles diffèrent des Draves, 
comme les Berterou des Alyssum , par leurs pétales bifides. 


QUATORZIÈME GENRE. — Cochlearia. 


Les Cochlearia ont un calice entr'ouvert à sépales concaves, des 
pétales à limbe ovale ou obtus, des étamines non dentées, un style 
très-court, une silicule globuleuse, elliptique ou oblongue, et marquée 
d'une nervure dorsale, une cloison membraneuse, des valves convexes 
ou un peu épaissies, des semences ordinairement nombreuses et nues. 

Les Cochlearia sont des herbes annuelles ou vivaces, souvent gla- 
bres ou charnues, quelquefois cependant recouvertes de poils sim- 
ples ou bifurqués; leurs feuilles sont ordinairement pétiolées dans le 
bas et sagittées vers le haut; leurs pédicelles sontnus, étalés, filiformes 
ou un peu anguleux, leurs fleurs blanches, excepté dans une seule 
espèce. 

Ce genre est plutôt séparé des autres par son port, ses feuilles 
épaisses, lisses, d’un vert lustré, que par les caractères tirés de sa fleur 
et de la forme variable de son péricarpe. Il diffère des Draba, non- 
seulement par sa végétation et la nature de ses poils, mais encore 
par ses valves ordinairement enflées et épaissies , et ses fleurs qui ne 
sont jamais jaunes. 

De Canpozze divise les Cochlearia en quatre sections, d'autant plus 
naturelles que quelques botanites en font autant de genres. 

1° Les Xernera , à silicule globuleuse, et valves un peu roides; 

2° Les Armoracia, à silicule ellipsoïide ou oblongue, à style filiforme 
et stigmate en tête ; 

3° Les Cochlear, à silicule de forme variée, non échancrée au som- 
met, à style très-court ou nul; 

4° Les Jonopsis , à silicule arrondie, un peu comprimée, échancrée 
au sommet, à fleurs pourpres ou lilas. 

Les Kernera ne comprennent, jusqu’à présent, qu'une seule espèce, 
le Cochleuria rupestris des montagnes calcaires de l'Europe centrale et 
méridionale ; sa racine est un rhizome qui s'attache aux fentes des 
rochers, et pousse, toutes les années, des rosules de feuilles sèches, 


— 211 — 


spathulées et chargées de quelques poils simples, rudes et blanchâtres; 
ses tiges sont grêles, flexueuses, ramifiées et chargées de feuilles 
sessiles, linéaires , incisées ou même amplexicaules, et jamais plissées 
avant leur développement. Le calice et la fleur surtout sont d'un blanc 
pur, les glandes placées entre les petites étamines et l'ovaire sont 
vertes et bilobées, les quatre grandes étamines, rapprochées deux à 
deux à la base, sont divariquées au sommet, et, par cette disposition, 
les six anthères se trouvent sur le même plan et à la même hauteur. 
C'est une charmante plante qui, dans les mois de mai et de juin, 
décore le sommet de nos rochers, et dont les semences sont au nom- 
bre de six dans chaque loge. Monvarp observe dans Gaunix que leur 
radicule n’est pas toujours pleurorhizée. 

Les Armoracia ne comprennent non plus qu'une espèce euro- 
péenne, l'Armoracia des marais un peu montueux de l'Europe, qui 
se distingue de presque tous les autres Cochlearia, par son rhizome ou 
sa souche dont les étranglements se rompent pour la reproduction, et 
redonnent des jeis dont les premières feuilles sont allongées et en- 
tières, et les suivantes pennatiséquées; sa tige est terminée par des 
grappes nombreuses de petites fleurs blanches ; ses semences avortent 
souvent, comme celles de la plupart des Cruciferes à grosse racine. 

Cette espèce, qui se trouve rarement spontanée, est commune 
dans les jardins; elle forme dans Kocx et dans quelques autres auteurs, 
un genre à part, parce que sa silicule n’a pas la nervure dorsale des 
Cochlearia. Le Macrocarpa des marais de la Hongrie, n’en est proba- 
blement qu'une variété. 

La troisième section, ou celle des Cochlear, qui comprend les an- 
ciens Cochlearia , est actuellement formée de près de vingt espèces, 
dont plusieurs sont étrangères et encore mal déterminées ; les plus 
connues appartiennent au même type, et peuvent être représentées 
par le Cochlearia officinalis. Ce sont des plantes glabres et d'un beau 
vert, à feuilles radicales arrondies ou creusées en cuiller, et à feuilles 
caulinaires sessiles | amplexicaules ou sagittées ; leurs fleurs, assez 
grandes et d'un blanc de lait, paraissent successivement, depuis le 
milieu du printemps jusqu'au commencement de l'été. Les espèces eu- 
ropéennes, à peu près au nombre de six, sont fort rapprochées; 
elles se plaisent au bord des eaux, et sont surtout répandues sur les 
côtes septentrionales de la France, de l'Allemagne et de la Baltique; 
de là, elles se dirigent d'un côté, sur le Groenland, la baie de Baffin et 
la terre de Labrador, et de l'autre, sur les rivages de la Sibérie, à 
l'embouchure de la Léna, aux îles Aleutiennes, etc. 

Je ne les connais pas assez pour rien dire de leur fécondation, mais 


de de 
je vois qu'elles sont, en général, annuelles ou plutôt bisannuelles, et 
se ressèment, chaque année sur les rivages des mers qu’elles ornent de 
leurs belles touffes vertes, dès que le printemps vient animer la végé- 
tation de ces contrées sauvages et reculées. 

Les Jonopsis ne contiennent qu'une seule espèce, qui croît sur les 
collines basaltiques ou calcaires du Portugal, et qui porte le nom 
d'Acaulis, à cause de sa petitesse. Elle se distingue par ses pétales 
pourprés, trois fois aussi grands que le calice et par ses semences 
nombreuses ; sa racine est vivace, ses pédoncules sont radicaux ou 
axillaires; sa silicule échancrée la rapproche des Thlaspi, dont l’éloi- 
gne son port et son feuillage. 


Troisième tribu. — THLASPIDÉES ou PLEURORHIZÉES ANGUSTISEPTES. 


Les Thlaspidees ont une silicule biloculaire, bivalve, à cloison 
très-étroite et linéaire, des valves carénées ou naviculaires, des 
semences ovales, aplaties et souvent bordées, des cotylédons planes, 
accombants. 

C'est une tribu très-distincte, rapprochée seulement de celle des 
Lépidinces, dont elle se distingue par ses cotylédons accombants et 
ses semences plus aplaties; elle renferme des genres à pétales inégaux, 
comme l’/beris et le Teesdalia, et un autre, le Biscutella à embryon 
inverse, c’est-à-dire dont la radicule se dirige vers le bas de la silicule. 
Les cotylédons sont évidemment perpendiculaires à la cloison, lorsque 
les loges sont monospermes. 


PREMIER GENRE. -— 1hlaspi. 


Le Thlaspi a son calice non bosselé, ses pétales entiers et égaux, 
ses étamines libres et non dentées, ses silicules aplaties, échancrées, 
sa cloison oblongue ou ovale, son style filiforme ou très-court, ses 
valves naviculaires et ailées sur le dos, ses semences nues, ordinaire- 
ment nombreuses dans chaque loge, ses cotylédons un peu convexes. 

L’essence de ce genre consiste dans des valves naviculaires prolon- 
gées sur le dos en ailes membraneuses ; les plantes qui le composent 
sont des herbes annuelles ou vivaces, à tige droite et rameuse, à 
feuilles glabres, glauques, entières ou dentées, ordinairement pétiolées 
à la base et amplexicaules sur la tige; les fleurs blanches sont disposées 
en grappes terminales et portées sur des pédicelles nus. 

De Canpozze divise les Thlaspi en cinq sections distinctes, et qui 


— 213 — 
pourraient être considérées comme autant de genres si elles étaient 
plus riches en espèces. 

1° Les Pachyphragmes, à cloison épaisse, à silicule large, légère- 
ment échancrée, à quatre semences non striées ; une espèce; 

2° Les Carpoceras, à valves dont le sommet est allongé en corne, 
quatre semences striées; une espèce; 

3° Les Vomisma, à valves entièrement bordées, semences nom- 
breuses et striées; trois espèces; 

4 Les Neurotropes , à valves bordées et circonscrites par une ner- 
vure, semences nombreuses et non striées; deux espèces ; 

5° Les Pterotropes, à valves entièrement bordées et non circonscrites 
par une nervure, semences non striées ; sept espèces. 

La première section comprend le Thlaspi latifolium, plante vivace 
de l'Ibérie et du Caucase, qui fleurit au printemps et se distingue de 
toutes les espèces du genre par son port et ses feuilles radicales , cor- 
diformes, auriculées et longuement pétiolées ; sa corolle est trois fois 
aussi longue que son calice , ses semences sont pendantes , géminées, 
planes d’un côté et convexes de l’autre. 

Le Thlaspi carpoceraton , qui forme seul la seconde section, est 
originaire des plaines salées de la Sibérie, mais croît facilement dans 
nos Jardins, où il est annuel et fleurit à la fin du printemps; ses feuilles 
caulinaires sont sagittées, amplexicaules; sa corolle est petite et ses 
silicules se prolongent en deux cornes aplaties; ses semences sont 
géminées, pendantes et striées; enfin ses capsules, longuement pédon- 
culées, sont distribuées autour de la tige sur cinq rangs très-symétri- 
ques. 

Les Nomisma sont au nombre de trois : l’Arvense, le Baicalense et 
le Collinum, qui forment un seul type et probablement une seule 
espèce. Le premier, qui se rencontre dans toute l'Europe, et même 
dans l'Amérique septentrionale où il s’est sans doute semé, est une 
plante à odeur d'ail, remarquable par sa grande silicule profondément 
échancrée, et ses semences élégamment rayées de stries concentriques. 
Ses fleurs, qui paraissent dès le commencement du printemps, m'ont 
paru dépourvues de glandes ; il en est de même de celles du Baica- 
lense, qu'on cultive dans les jardins de botanique, et qui ne diffère 
presque du commune que par ses silicules plus allongées et moins orbi- 
culaires. 

Les deux espèces de Veurotropes sont originaires de l’Ibérie ou du 
nord de la Perse, et ontle port du ThAlaspi arvense, mais elles s’en 
distinguent facilement par leurs semences non striées, et surtout par 


leur silicule marquée de rayons qui s'étendent du centre à la circon- 
férence. 


— 214 — 


Les Pierotropes forment la section la plus nombreuse; des sept 
espèces qui les composent, cinq sont européennes et appartiennent au 
même type; mais elles se distinguent en deux sous-types : le premier 
est formé de l’A/liaceum et du Perfoliatum , plantes annuelles et répan- 
dues dans les champs de toute l’Europe; le second contient deux et 
peut-être trois espèces vivaces, l’Alpestre , le Montanum, Y Hetero- 
Plhyllum, qui habitent les Pyrénées, les Alpes , etc., où la première 
au moins se multiplie par des rejets. On peut y ajouter, je crois, le 
Præcox, que l'on considère comme une variété du Montanum, mais qui 
est très-remarquable par sa précocité, son port et ses touffes feuillées 
à racines fibreuses. 

Les Thlaspi européens ont entre eux de grands rapports, soit pour 
la végétation, soit pour la conformation générale. Ils fleurissent tous 
au printemps, les vivaces sur nos montagnes, les annueïs dans nos 
blés ; leurs fleurs , d’abord en corymbe, s’'allongent de bonne heure 
et finissent par former, dans la maturation, des grappes très-régulières 
dont les silicules sont disposées symétriquement sur des pédicelles de 
même longueur; la dissémination commence par le bas, et les valves 
se séparent sans se déformer. 

La principale différence qui existe dans les espèces européennes est 
celle des graines, ordinairement lisses, mais quelquefois très-élégam- 
ment striées de raies concentriques. Quelle est la raison de cette dif- 
férence dans des plantes d’ailleurs si semblables? c'est ce que j'ignore. 

Presque tous les Thlaspi européens ont les feuilles molles, à ner- 
vures peu sensibles, d’un vert glauque, et chargées à l'extrémité de 
leurs dentelures de dents assez marquées. Ces feuilles, comme les 
autres parties de la plante, ont une saveur d'ail souvent très-pro- 
noncée. 

Les calices tombent lentement après la floraison, et les pétales de 
quelques espèces, comme le Perfoliatum , s'ouvrent au soleil et se 
referment le soir, mais les silicules restent toujours droites , et lors- 
qu’elles sont étalées, elles forment, comme je l'ai déjà dit, des grappes 
qui ne sont pas dépourvues d’élégance. 

Ces plantes, comme nous venons de le voir, habitent l'hémisphère 
boréal, à l'exception du Magellanicum, voisin du Perfoliatum et de 
l’Alpestre. Elles nuisent à la culture des céréales, avec lesquelles elles 
aiment à croître, et au moyen desquelles elles se multiplient. 

Je n'ai pas suivi leur fécondation, mais j'ai remarqué que les unes, 
comme l’4/pestre, avaient leurs étamines saillantes, tandis que les 
autres en plus grand nombre les cachaient dans la corolle; j'ai vu de 
plus que les glandes du torus étaient à peu près nulles, au moins dans 


— 915 — 


les deux dernières sections : enfin je note que dans l'Arvense bisan- 
nuel et non annuel de la section des Vomisma , les valves se séparent 
au moment où les graines mûres se détachent de leurs pédicelles. 

Les fleurs dans cette espèce se penchent la nuit sur leurs pédon- 
cules. 


SECOND GENRE. — /lutchinsia. 


L'Hutchinsia a un calice droit et non bosselé, des pétales égaux et 
entiers, des étamines libres et non dentées, une silicule oblongue ou 
elliptique, aiguë ou tronquée, aplatie et entière, les valves sont navi- 
culaires et sans rebords, la cloison membraneuse et aiguë aux deux 
extrémités, les semences pendantes, alternes, de deux à huit dans 
chaque loge. 

Les Hutchinsia sont des herbes vivaces rarement annuelles, et tou- 
jours glabres ; leurs tiges sont nombreuses, leurs feuilles entières ou 
pennatifides, leurs fleurs blanches ou rougeâtres, leurs grappes 
droites et terminales, leurs pédicelles nus et filiformes, leurs feuilles 
inférieures souvent opposées. 

Elles diffèrent des 1beris par leurs pétales égaux, des [Thlaspi par 
leurs silicules 'ni bordées ni échancrées, des Draves par leurs valves 
naviculaires , et des Lepidium par leurs loges non monospermes. 

De Canooze les divise en deux sections très-distinctes : 

1° Les Jberidella, à siyle filiforme et feuilles entières ou légèrement 
dentées ; 

2° Les Nasturtiolum, à feuilles pennatilobées. 

La première section est formée de plantes appartenant toutes au 
même type, et placées autrefois dans les Jberis ; elles habitent les 
pentes des montagnes et s'enfoncent, par leurs racines vivaces, au 
milieu des roches brisées qui les recouvrent. On en compte six ou 
sept, dont deux ou trois sont étrangères et se trouvent sur le Caucase 
ou dans les montagnes de la Perse. Des quatre européennes, la plus 
connue est le Rotundifolia, qui croît près des neiges et dont la racine 
est un rhizome très-ramifié; ses feuilles, comme celles des autres 
espèces, sont glauques , charnues, pétiolées à la base, amplexicaules 
sur la tige et glanduleuses sur les bords; elles tombent en automne 
par une articulation préparée , et permettent ainsi au rhizome de s’al- 
longer. Les semences, au nombre de deux ou trois dans chaque loge, 

sont pendantes, et ont leur radicule irrégulièrement pleurorhizée. Les 
trois autres espèces du même type sont le Cepeæfolia, le Stylosa et le 
Brevisiyla des Apennins ou de la Corse; on peut y joindre, je crois, 


— 216 — 
le Sylvia du Mont-Cervin, nouvelle espèce décrite par Gaunix, dans 
sa Flore helvétique , vol. 4, p. 227. 

Les Vasturtiolum se reconnaissent, au premier coup-d'œil, à leurs 
feuilles pennatilobées, quoiqu’ils n’appartiennent pas au même type. 
Des quatre espèces qu'ils renferment, trois sont européennes, l4/pina, 
le Petræa etle Procumbens ; mais la première et surtout la dernière 
ont, selon Gay et Moxxann, leurs cotylédons incombants, et doivent 
par conséquent être placées parmi les Lepidium. 

La seule espèce européenne de cette section est par conséquent le 
Petræa, petite plante bisannuelle qui germe en automne et fleurit dès 
l'entrée du printemps; elle croît dans deux stations très-différentes, 
tantôt dans les sables calcaires, secs et stériles du pied de nos monta- 
gnes, tantôt sur les rivages de notre lac, autour des flaques d'eau. 
C'est une plante d'une structure délicate et élégante, qui brave cepen- 
dant les froids les plus vifs ; ses pétales blancs et nectarifères à la base 
sont fortement étalés, comme les six étamines dont les anthères, 
introrses et très-petites, répandent leur pollen sur la belle tête papil- 
laire du stigmate au moment même de l'épanouissement; ses silicules 
d'abord vertes brunissent après la fécondation, et sont terminées par 
un stigmate sessile; les quatre semences qu’elle renferme sont pen- 
dantes et attachées par des pédoncules inégaux. Cette silicule, d’abord 
droite, s'incline fortement à la maturation et perd bientôt ses valves; 
mais la cloison se conserve long-temps. 

La section des Vasturtiolum a peu de rapports avec celle des Jberi- 
delles, tant pour la végétation que pour la conformation des fleurs. Si 
le caractère que j'ai cru reconnaître dans les pétales existe réellement, 
l'Hutchinsia petræa mériterait peut-être de former un genre séparé. 

Cette dernière, qui a la saveur piquante des Lepidium, disparaît de 
très-bonne heure; tandis qu'aü contraire l'Ælpina est une plante 
vivace qui couvre de ses touffes élégantes et de ses fleurs, d’un blanc 
de lait, les sommités de notre Jura et les pentes des torrents alpins. 


TROISIÈME GENRE. — 7eesdalia. 


Le Teesdalia a un calice caduc à quatre pièces légèrement réunies; 
des pétales entiers, égaux ou inégaux ; des étamines chargées à leur 
base d'un appendice écailleux; une silicule aplatie, ovale, échancrée 
au sommet, à valves naviculaires, déhiscentes et faiblement ailées; 
une cloison oblongue et étroite, un style nul et des semences géminées 
dans chaque loge. 

Le Teesdalia est un genre détaché des Jberis, à cause de ses éta- 


ON 


mines appendiculées. Il ne comprend que deux espèces qui sont rap- 

prochées, mais distinctes, l'/beris et le Lepidium , plantes annuelles 

très-petites, glabres, qui vivent parmi les blés et les sables stériles, où 

elles fleurissent au printemps. Leurs feuilles radicales, disposées en 

rosules étalées, sont pennatilobées et donnent plusieurs tiges presque 

aphylles, d'un à deux pouces; leurs grappes terminales, d'abord corym-, 
bifères, s’allongent beaucoup ensuite; leurs pédicelles sont nus, 

filiformes, divariqués ; leurs fleurs blanches et très-petites. 

Le Teesdalia Iberis, ou Y 1beris nudicaulis de Link, est plus commun 
que le Zepidium , qui ne croît guère que dans l'Europe australe, l'Es- 
pagne et la Mauritanie; les pétales du premier sont inégaux comme 
dans l'/beris , mais ils sont égaux dans le second, qui se reconnaît en- 
core à ses étamines latérales souvent avortées, et à la forme variable 
de ses feuilles. 

Gaupin soupconne, peut-être avec raison, que les appendices des 
étamines sont nectarifères; je ne les ai pas observés. 


QUATRIÈME GENRE. — /beris. 


L'Iberis a le calice non bosselé, les deux pétales extérieurs plus 
grands que les autres, les étamines libres et non dentées, les silicules 
très-aplaties, à valves carénées, naviculaires et prolongées au sommet; 
le style est filiforme et persistant, la cloison très-étroite et souvent sépa- 
rables en deux membranes superposées ; les semences solitaires sont 
nichées à l'angle intérieur de la loge; la radicule est extrorse et 
descendante dans presque toutes les espèces. 

Les Jberis sont des herbes annuelles ou des sous-arbrisseaux à tige 
cylindrique et dure; leurs feuilles sont charnues et presque toujours 
glabres , souvent entières ou dentées, quelquefois pennatifides; leurs 
fleurs sont disposées en corymbes, ordinairement allongés après la 
fécondation; les pédicelles sont nus, les fleurs blanches ou pourprées, 
mais jamais jaunes ; les calices sont souvent colorés. 

Ce genre est très-naturel, surtout lorsqu'on en sépare les Teesdalia, 
dont les étamines sont dentées, et les Hutchinsia , dont les pétales sont 
égaux. Il peut se diviser physiologiquement en deux sections : 

1° Les Jberidiastrum , à radicule horizontale, cloison double et 
semence légèrement bordée ; 

2° Les Jberidium , à radicule descendante, cloison simple et semence 
non bordée. 

La première section ne comprend qu’une espèce, le Semperflorens , 
originaire des rochers de la Sicile, et introduite dans nos jardins, où 


Ta — 
elle fleurit presque toute l'année, surtout dans les mois d'hiver. Elle 
a le port des Jberis, mais la semence et la cloison des Biscutelles, et 
pourrait bien former un genre à part. Sa végétation est celle des Jberis 
frutescents; ses feuilles se séparent naturellement, et laissent leur 
cicatrice sur la tige; ses grappes de fleurs blanches et odorantes péris- 
sent chaque année, et sont remplacées par de jeunes rameaux. 

Les Iberidium, qui comprennent tous les autres Jberis , se partagent 
en quatre groupes assez symétriques : 

1° Celui à pédicelles fructifères, corymbiformes et tiges sous- 
frutescentes ; 

2° Celui à pédicelles fructifères, corymbiformes et tiges herbacées; 

3° Celui à pédicelles fructifères , grappes et tiges herbacées ; 

4° Celui à pédicelles fructifères, grappes et tiges sous-frutescentes. 

Le premier groupe comprend trois espèces européennes : une de 
l'Espagne et deux de l'Italie méridionale ou de la Sicile, à fleurs blan- 
ches ou pourprées. Elles appartiennent au même type, sont plus ou 
moins frutescentes et végètent comme le Semperflorens. M. Moris 
vient d'en décrire une quatrième qu’il a trouvée dans la Sardaigne. 

Le second renferme huit espèces, la plupart européennes et ré- 
pandues principalement dans les contrées du midi. Elles ont tant de 
ressemblance entre elles qu’on pourrait bien les réunir sous un seul 
type. En effet, elles sont toutes annuelles ou bisannuelles ; leurs 
feuilles glabres sont ordinairement spathulées à la base, allongées, 
dentées ou linéaires près du sommet ; leurs fleurs d’un pourpre violet 
ont les pétales extérieurs beaucoup plus grands que les autres, et 
les sépales souvent colorés. La principale différence qui les distin- 
gue, c'est la forme plus ou moins échancrée et allongée des lobes de 
leur silicule, et la grandeur relative ou absolue de leur style. On les 
sépare en deux sous-types, celui des espèces qui vivent sur les mon- 
tagnes, qui comprend le Spathulata et le Nana, et celui des espèces 
qui habitent les champs et les collines de l'Italie ou de la France, 
comme le Ciliata et le Tenuifolia, qui en diffère très-peu , le Lagas- 
cana, du royaume de Valence, à feuilles simples et canaliculées, et 
enfin l Umbellata, si répandu dans nos jardins. Le caractère distinctif 
de ce groupe, c'est d’avoir ses fleurs disposées en un corymbe dont 
Vaxe ne s'allonge pas durant le cours de sa fécondation, mais dont les 
pédoncules extérieurs s'étendent et se déjettent, afin de laisser aux 
intérieurs l’espace nécessaire pour féconder et mûrir leurs graines. 

Le troisième groupe est formé de quatre espèces européennes qui 
habitent nos moissons ou nos collines découvertes, et qu'on peut 
réunir en deux sous-types, principalement d’après la forme des 


— 219 — 


feuilles entières ou pennatifides. Le premier comprend l’/ntermedia , 
des environs de Rouen, et Amara, très-répandu dans les champs de 
l'Europe et nn nie à son amertume. Le second est formé du 
Pinnata des contrées du midi, et de l'Odorata de la Crète, tous les 
deux remarquables par leur odeur. Ces quatre plantes à fleurs blanches 
sont annuelles ou bisannuelles, et n’allongent que médiocrement 
leurs grappes. Leur torus est chargé de deux glandes à la base de 
chaque étamine latérale, et leurs anthères jaunes sont un peu saillantes : 
celle qui fleurit la première est sans doute l'/ntermedia , dont la racine 
est bisannuelle, et dont les rosules sont déjà marquées en automne, 

Le dernier groupe, qui réunit les espèces sous-frutescentes, à 
corymbes allongés en grappe, a beaucoup de rapport avec le premier 
pour la végétation et pour les apparences extérieures; il comprend 
sept ou huit espèces , rangées sous le même type, dont quelques-unes 
même peuvent être considérées comme variétés , et qui, en raison de 
leurs feuilles dures et épaisses, vivent sur les pentes méridionales des 
montagnes ou des collines caillouteuses de l'Europe australe. Ce sont 
principalement le Gibraltarica, le Saxatilis , le Sempervirens , le Gar- 
rexiana et le Conferta, qui ne diffèrent guère que par leurs dimensions 
et la forme un peu variable de leurs feuilles ou de leurs silicules. Ces 
plantes, dont la consistance est telle qu’elles bravent nos frimas, 
conservent leur verdure pendant tout l'hiver, et poussent, au prin- 
temps, de leurs anciennes aisselles et surtout du sommet de leurs tiges 
feuillées, de nouvelles rosules fertiles ou stériles qui forment ensuite 
des rameaux disposés en ombelle. C'est au moins ce que je vois dans 
quelques espèces, et qui doit être vrai des autres. La plus répandue 
de ces plantes est le Sempervirens , qu’on cultive dans tous les jardins, 
où il forme des bordures de fleurs d’un beau blanc, quelquefois mêlé 
de teintes pourprées. 

Les Jberis sont éminemment européens et originaires du bassin de 
la Méditerranée. Leur consistance est sèche et robuste, leurs tiges et 
leurs feuilles sont épaisses, et leurs espèces frutescentes recherchent 
principalement les pentes arides et rocheuses où elles sont nourries 
moins parle sol que par l'atmosphère. Leurs feuilles, dont la forme 
générale est la spathulée, ne sont ni plissées ni enveloppées dans leur 
jeunesse, mais seulement réunies en rosule assez serrées, recouvertes 
d'abord par une espèce de vernis velu et résineux qui ne tarde pas à 
disparaitre. 

L'inégalité des pétales qui forme le caractère principal du genre 
dépend visiblement du mode d'inflorescence. Les fleurs accumulées 
en corymbe serré se développent surtout sur les bords où rien ne les 


— 220 — 


gène, et où se porte sans doute la sève en raison de l’organisation 
propre à ce genre. C'est pourquoi l’on observe que plus les corymbes 
sont serrés et constants dans leur forme, plus aussi les pétales extérieurs 
sont difformes. 

Les Jberis se distinguent, au premier coup-d'œil, par leur péricarpe 
qui est une silicule dont les valves s’allongent au sommet en deux 
ailes, souvent aiguës, et qui renferme dans chaque loge une semence 
pendante; la radicule est descendante, et les cotylédons ascendants 
sont contraires à la cloison. Les valves se séparent sans se déformer, et 
laissent à découvert des graines aplaties et jaunâtres suspendues au 
sommet de la cloison par un pédicelle assez marqué. 

Le calice et les pétales des Zberis n’ont pas de mouvements organi- 
ques : les fleurs une fois ouvertes ne se referment plus ; mais la tige 
principale s’allonge souvent, et les pédicelles s’étalent horizontale- 
ment toutes les fois qu'ils forment des grappes; ils se resserrent, au 
contraire, pendant la maturation, dans | Umbellata, et probablement 
dans les espèces corymbiferes. 

L'inflorescence générale de l'Iberis amara, et sans doute celie des 
autres espèces, est simultanée, c'est-à-dire que tous les corymbes 
paraissent en même temps, parce qu'ils terminent les sommets de 
rameaux semblables, et qu'ils sont semblablement placés; mais celle 
de chaque corymbe est centripète, les fleurs extérieures s’écartent un 
peu pour faire place aux intérieures, ou, ce qui est plus commun, 
le corymbe s’allonge et devient une vraie grappe. Dans l'estivation, les 
pétales extérieurs recouvrent les autres, et le sépale extérieur , plus 
large et plus agrandi, enveloppe toute la fleur. 

Les glandes nectarifères sont placées entre l'ovaire et les petites 
étamines dont elles entourent quelquefois la base; pendant la fécon- 
dation, qui a toujours lieu à l'air libre, les anthères se couchent sur 
le stigmate et le recouvrent de leur poussière jaunâtre. Ensuite, les 
téguments floraux ne tardent pas à tomber avec les étamines, dont les 
filets sont épais et sans mouvements. 


CINQUIÈME GENRE. — Biscutella. 


La Biscutelle a un calice tantôt entr'ouvert et égal, tantôt droit et 
fortement bosselé; des pétales onguiculés, à limbe ovale et entier ; 
des étamines non dentées, une silicule biloculaire surmontée d'un 
long style persistant, des loges monospermes, indéhiscentes, orbi- 
culaires, planes, très-aplaties et attachées latéralement à l'axe central; 


les semences sont aplaties, à cotylédons inverses et radicule descen- 
dante. 


St — 

Les Biscutelles sont des herbes annuelles ou vivaces, quelquefois 
assez glabres, mais ordinairement recouvertes de poils rudes et étoilés; 
leurs feuilles souvent hérissées comme leurs silicules, sontoblongues, 
entières, dentées ou même pennatifides; leurs tiges cylindriques, 
droites, rameuses et ordinairement nues, sont terminées par des 
corymbes presque toujours allongés et dont la sommité fleurit encore, 
tandis que la base répand ses graines ; les pédicelles sont filiformes et 
nus, les fleurs jaunes et le plus souvent jaune soufre. 

Ce genre est très-naturel et très-distinct de tous les autres, par 
la forme bizarre de sa silicule composée de deux loges toujours mo- 
nospermes, indéhiscentes et adhérentes par un filet latéral à un axe 
articulé. Les semences ont leur radicule extrorse et recourbée en bec, 
et leur funicule horizontal ou légèrement incliné. Les loges séparées 
de l'axe flottent long-temps suspendues, et j'ai remarqué qu'en les 
macérant on les sépare en deux lames, en sorte que le péricarpe en- 
tier semble formé de quatre panneaux appliqués deux à deux l'un 
contre l’autre. 

Ces plantes habitent le bassin de la Méditerranée , d’où elles s’éten- 
dent jusque dans la partie occidentale de l'Asie. Quelques-unes se 
rencontrent sur le sommet de nos montagnes; mais en général elles 
recherchent les terrains stériles et les collines rocailleuses et décou- 
vertes. 

Elles n’ont ni grâce ni maintien dans le port, leurs corymbes mèmes 
manquent de symétrie et d'élégance , parce qu'ils s'épanouissent suc- 
cessivement, et que les tiges, à peu près nues, sont irrégulièrement 
divisées. C'est la raison pour laquelle on ne les rencontre que dans 
les jardins botaniques, où leurs silicules en forme de lunette les font 
aisément remarquer. 

Elles ont été divisées, par Vivrant, en trois groupes, d’après la con- 
sidération de leur péricarpe, dont les loges sont ou tangentes, ou 
réunies à l’axe dans toute leur longueur, ou enfin décurrentes sur 
le style; mais DE Cannoze les a partagées en deux sections plus na- 
turelles, et qui formeront peut-être un jour autant de genres : 

1° Les Jondraves, à calice éperonné ; 

2° Les Thlaspidium à calice non éperonné; 

Les Jondruves, qui habitent l'Espagne ou le midi de la France, 
se distinguent, au premier coup d'œil, à leurs sépales latéraux pro- 
longés en longs éperons et renfermant une glande nectarifère à deux 
cornes. Ils sont formés de deux types; le premier présente deux es- 
pèces très-rapprochées et annuelles : l’Auriculata, dont l'Erigerifolia 
n'est qu'une variété selon GamsesséDës, et l'Hispida, recouverte de 


— 929 — 

poils hérissés sur les feuilles , et de tubercules sur la silicule. Le second 
n'en comprend qu'une seule, le Cichortüfolia, herbe vivace à tige 
élevée, feuillée, à poils mols et épais. Leur principale différence est 
celle des silicules qui sont décurrentes dans l’Auriculata, et seule- 
ment appliquées contre l'axe ou même échancrées dans les deux 
autres. Est-ce la glande nectarifère qui a creusé la fossette des calices 
des Jondraves , ou bien cette fossette a:t-elle été formée, parce qu’elle 
devait recevoir une glande? C'est une question qu'on déciderait en 
examinant les fleurs avant leur épanouissement, et la solution ne m’en 
paraît pas difficile. 

Les Thlaspidium peuvent également se diviser en deux types, celui 
des espèces annuelles et celui des vivaces. Le premier compte dix ou 
onze espèces distinguées par leur silicule glabre ou hérissée de tubé- 
rosités et de poils rudes, par leurs feuilles plus ou moins lyrées, leur 
tige basse, élevée, nue, feuillée, simple ou rameuse; mais ces diffé- 
rences dépendent beaucoup des localités et ne présentent pas des 
caractères très-constants. Il en est de même du second type, dont les 
espèces sont vivaces et ont des silicules plus fortement bilobées. L’es- 
pèce principale très-répandue dans les montagnes de l'Europe, est le 
Luœvigata, dont les six autres sont aussi très-voisines et dont l’on 
compte un très-grand nombre de variétés. 

Pendant la maturation, les sommités des tiges des Thlaspidium 
annuels s’allongent et se recourbent fortement, de maniere que leurs 
silicules déniennett pendantes et flottent au gré des vents. J'ai vérifié 
ce fait sur le Lyrata, le Maritime et l'Ériocarpe ; qui ne me paraissent 
guères que des variétés, et je crois qu'il appartient à la plupart des 
espèces annuelles. 

Le Lœvigata et sans doute les autres Thlaspidium du même type 
ont leurs pétaies auriculés au-dessus de l'onglet, et leurs filets courts 
et épais; leur stigmiate, à l'époque de la fécondation, est à peu près 
à la hauteur des anthères; mais il s’allonge ensuite ‘de manière que 
les silicules paraissent comme enfilées à un axe, qui les dépasse dans 
les deux sens; les glandes nectarifères, au nombre de quatre, sont 
petites et toutes placées entre l'ovaire et les étamines, tandis que 
dans les Jondraves et les Thlaspidium du second type, les latérales 
sont extérieures. 

Le fruit des Biscutelles ne peut être ramené à la structure ordinaire, 
qu’en supposant des avortements et des soudures : le cordon ombilical 
attaché à l'axe, s’allonge souvent avant d'atteindre la radicule qui se 
recourbe de son côté, et les deux lobes de la silicule qui m'ont toujours 
paru monospermes, restent long-temps suspendus à un léger fil 


223 — 
comme les péricarpes des ombelles; la déformation des silicules a 
lieu de très-bonne heure. 

Les fleurs des Biscutelles sont, je crois, dépourvues de mouvements 
organiques; leurs pédoncules, toujours dressés et articulés, ne se 
rompent qu'après la dissémination, et leurs tiges, plus ou moins 
ramifiées, ne sont nues qu'en vertu d'avortements dont on apercoit 
la trace ; leurs feuilles varient beaucoup en forme et en villosité, et 
les tubercules qui recouvrent souvent leurs silicules, n'ont pas beau- 
coup plus de constance que les poils. 

Pourquoi les Biscutelles ont-elles leurs cotylédons descendants et 
leur radicule extrorse, et quelle liaison y a-t-il entre cet arrangement 
et l'organisation générale du genre? C'est ce que j'ignore. 


SIXIÈME GENRE. — Menonvillea. 


Le Menonvillea a une silicule légèrement stipitée, formée de deux 
scutelles bordées d’une aile membraneuse, et disposées parallèlement 
à la même hauteur. 

Ce genre ne renferme que le Linearis du Pérou, herbe vivace, haute 
d'un à deux pieds; ses feuilles radicales sont plus ou moins incisées, 
sa tige glauque et un peu succulente, porte de petites fleurs à calice 
blanchätre, et pétales linéaires et jaunâtres, les anthères sont bilobées, 
le pistil est formé de deux lames parallèles papillaires sur le bord supé- 
rieur, et qui se transforment ensuite en deux loges monospermes et 
ailée ; le torus est tapissé d'une belle glande verdâtre, quadrifide et 
frangée. 

Le Menonvillea a d'assez grands rapports avec le Biscutella, mais 
les deux lobes de sa silicuie, élevés à la même hauteur, sont parallèles 
et non pas placés sur le même plan. 


Quatrième tribu. — PLEURORHIZÉES NUCAMENTACÉES, ou EUCLIDIÉES. 


Les Euclidices ont une silicule ou une silique raccourcie et ordi- 
nairement indéhiscente, à valves peu distinctes, ou lentement cadu- 
ques. Elles ne comprennent que trois genres, l'Euclidium, l'Ochtho- 
dium et le Pugionium, dont les espèces peu nombreuses habitent 
presque toutes l'Orient; l'Euclidium syriacum, ou V Anastatica syriaca 
de Linxé, est la seule qui se retrouve en Europe. 

Cette tribu n'est peut-être pas assez naturelle. 


— 924 — 


Cinquième tribu. — PLEURORHIZÉES SEPTULATÉES , ou ANASTATICÉES. 


Les Anastaticées ont une silicule oblongue ou ovale, à valves con- 
valves ouvertes en longueur et intérieurernent prolongées en cloisons, 
qui forment des loges monospermes; les semences sont aplaties et 
peu nombreuses. 

Cette tribu n’est peut-être pas assez distincte des A/yssinees. 


PREMIER GENRE. — Anastatica. 


L'Anastatica a un calice entr'ouvert, des pétales ovales, des étamines 
non dentées, une silicule enflée, biloculaire, déhiscente, terminée 
par un style filiforme et un peu crochu au sommet; les valves sont 
concaves et surmontées d'un appendice coriace, auriculé et trans- 
versal ; chaque loge est divisée, par une cloison transversale et incom- 
plète, en deux locules, qui renferment une graine pendante, orbiculée 
et plane, en sorte que la silicule entière fournit quatre graines. 
Gærrwer dit qu'il n’y en a que deux, parce que celles du locule infé- 
rieur avortent. 

Ce genre ne comprend qu'une espèce, l'Anastatica hierochuntica, 
autrement appelé Rose de Jericho. C'est une plante annuelle, petite et 
rameuse de la base; ses feuilies sont velues, oblongues et entières, 
ses grappes courtes et opposées aux feuilles, ses fleurs petites, sessiles 
et blanches ; elle est d'abord herbacée, ensuite elle s’endurcit, devient 
glabre et ligneuse, enfin ses rameaux se resserrent en peloton. 

Elle se sème au printemps et fleurit au bout de quelques semaines ; 
sa fécondation est immédiate, les anthères introrses répandent leur 
pollen jaunâtre sur le stigmate qui est une tête papillaire placée à la 
même hauteur, bientôt les pétales tombent avec le calice et les éta- 
mines, etil ne reste qu'un ovaire endurci, couronné de son style et 
chargé comme les feuilles de poils étoilés qui disparaissent également. 

Cette plante, très-remarquable par son organisation, croît dans 
les sables d'Égypte, en Syrie, en Palestine , en Arabie et en Barbarie. 
Elle fleurit en mai et en juin, ensuite ses feuilles tombent et ses 
rameaux se replient si exactement, que leur réunion forme une masse 
arrondie. Dans cet état, elle est détachée du sol et transportée par le 
vent cà et là dans le désert; lorsqu'elle arrivé dans des lieux humides 
et sur les bords des eaux, elle étale ses rameaux, ouvre ses silicules 
et répand ses semences. Cette contraction par la sécheresse et cette 


— 225 — 


dilatation par l'humidité, dont le but est ici la dispersion des graines 
dans des localités convenables, a donné lieu à un grand nombre de 
contes ridicules propagés par les moines d'Orient. 

Quelques plantes que j'indiquerai successivement, entre autres 
l'Ænothera tetraptera, déjà cité par DE France, possèdent cette pro- 
priété, directement opposée à celle qui appartient au très-grand nom- 
bre des péricarpes. 

Sracu dit que les graines sont quelquefois géminées dans chaque 
loge , et qu’alors elles sont horizontales et que les cotylédons peuvent 
être aussi irrégulièrement incombants. 


Sixième tribu. — PLEURORHIZÉES LOMENTACÉES , ou CAKILINÉES. 


Les Cakilinées ont une silicule ou une silique, qui se sépare trans- 
versalement en deux ou plusieurs articulations à une ou deux locules; 
leurs valves sont concaves, irrégulières, leur cloison étroite, leurs 
semences nues et aplaties, leurs cotylédons planes. C’est une tribu 
très-naturelle et distinguée de toutes celles qui en approchent, par ses 
cotylédons accombants. 


PREMIER GENRE. — (akile. 


Le Cakile a un calice entr'ouvert et bosselé, des pétales onguiculés, 
à limbe ovale, des étamines non dentées, une silicule lomentacée à 
deux articulations, dont l’inférieure est presque turbinée, tronquée 
et bidentée au sommet, la supérieure ensiforme est terminée par un 
stigmate sessile ; les semences sont solitaires dans chaque locule; la 
supérieure est redressée, l'inférieure pendante; le funicule est à peu 
près nul. 

Ce genre est composé d'herbes annuelles, glabres, charnues, ra- 
meuses, à feuilles pennatifides et dentées ; les grappes sont opposées 
aux feuilles et terminales ; les pédicelles sont filiformes et dépourvus 
de bractées, les fleurs blanches ou légèrement pourprées ont quatre 
glandes nectarifères. 

Elles habitent les sables maritimes et forment deux types, dont le 
premier comprend le Cakile maritima, répandu sur toutes les côtes 
d'Europe, et l'Americana des rivages de l Amérique septentrionale et 
des Antilles. Le second est limité à une seule espèce, l'Æqualis de la 
Martinique. 


La silique du Cakile maritima , et sans doute aussi celle de l'Ame- 
1% 15 


— 226 — 

ricana , que je n'ai pas examinée, est formée de deux parties distinctes : 
l'inférieure à deux valves très-marquées, la supérieure qui paraît un 
prolongement de la cloison est formée d'une seule pièce prolongée et 
ensiforme; la partie inférieure, dans laquelle on n'apercoit plus de trace 
de cloison, renferme une ou deux semences pendantes; la supérieure, 
renflée en articulations, contient également une ou deux semences 
redressées : cette singulière structure a déjà lieu long-temps avant 
qu'on puisse apercevoir la silique. 

Dans l'Æqualis du second type, que je n’ai jamais vu, l’article supé- 
rieur se termine en un long bec tétragone et recourbé. 


SECOND GENRE. — Chorispora. 


Le Chorispore a une silique à peu près cylindrique à articulations 
égales, et des semences pendantes. 

Ce genre comprend deux espèces à pétales entiers, le Stricta et le 
Tenella, originaires de la Sibérie, et rangées par Pertes sous le genre 
Raphanus : le Tenella, comme le Stricta , est une plante annuelle à 
tige succulente et feuilles roncinées ; les fleurs sont petites, rougeâtres 
et fort semblables à celles du Raphanus; les anthères sagittées répan- 
dent abondamment leur pollen jaunâtre sur le stigmate, qui s'étend en 
lame papillaire sur ses deux côtés. 

L'inflorescence est une panicule lâche et terminale. 

Le Stricta a les siliques de deux formes : les inférieures sont celles 
de son genre, et les supérieures celles des Mathiola. Les deux autres 
espèces à pétales jaunes et échancrés, sont le Sibirica et l'Iberica, 
originaires de la Sibérie et annuels comme les précédents. 

J'ai remarqué que le stigmate du Tenella était ensiforme et papil- 
laire sur les deux arêtes, tandis que celui du Sfricta était une belle 
tête papillaire et bilobée : pendant la fécondation, qui est directe, le 
calice s’entr'ouvre et les stigmates se déjettent d’un côté; la féconda- 
tion est alors extérieure soit dans le Tenella, soit dans le Séricta. 


Seconn oRDRE. — NOTORHIZÉES. 


Les Notorhizees ont les cotylédons planes et incombants, la radi- 
cule dorsale, les semences ovales et non bordées. 


— 227 — 


Septième tribu. — NOTORHIZÉES SILIQUEUSES , ou SISYMBRÉES. 


Les Sisymbrées ont la silique biloculaire, bivalve, déhiscente, 
linéaire, cylindrique ou tétragone, à style court lorsqu'elle est allon- 
gée, à style allongé lorsqu'elle estraccourcie, ce qui est rare; la cloison 
est linéaire; les valves sont planes, concaves, carénées et toujours 
déhiscentes; les semences sont unisériées, ovales ou oblongues, et 
légèrement triquètres. 

Cette tribu , très-distincte pour la conformation de sa silique et de 
sa semence, a une grande correspondance avec celle des 4rabidees. 
Ainsi, par exemple, le Mathiole des Arabidées est représenté par le 
Malcomia des Sisymbrees , le Cheiranthus par Y'Hesperis , le Nasturtium 
par le Sisymbre, le Barbaræa par l'Alliaria , etc. 

Le cotylédon dorsal introduit-il quelque différence dans la végéta- 
tion, et se lie-t-il à l’organisation générale de la plante ? C'est ce que 
je ne crois pas, et alors je ne sais pas me rendre raison de sa forme 
à peu près invariable. 


PREMIER GENRE. — ]Malcome. 


Le Malcome a un calice fermé, plus-ou moins bosselé, des pétales 
tantôt ovales, tantôt légèrement échancrés, des étamines libres et non 
dentées, une silique cylindrique, terminée par un style très-aigu, 
des semences ovales. 

Ce genre, créé par R. Browx, est formé de plusieurs plantes que 
Linné avait placées parmi les Cheiranthus ou les Hesperis , et qui ont, 
en effet, des rapports soit avec les Mathioles , soit avec les Hesperis. 
Mais on le reconnait à son port, à sa silique cylindrique, surtout à 
son style allongé, formé de deux styles étroitement réunis et terminés 
par un stigmate, en apparence unique. Les espèces qui le composent 
sont, pour la plupart, annuelles, presque toujours recouvertes de 
poils étoilés, rudes ou veloutés; leurs feuilles sont oblongues ou 
ovales , entières, dentées ou sinuées et pennatifides, leurs pédicelles 
sont nus et disposés en grappes, leurs fleurs presque toujours pour- 
prées et quelquefois très-petites. On peut remarquer , comme un 
phénomène assez rare, dans les Crucifères siliqueuses, qu’elles ne dou- 
blent pas dans nos jardins. 

La patrie des Malcomes est le bassin de la Méditerranée; leurs 
localités sont les bords de la mer, les lieux sablonneux et décou- 


— 228 — 
verts. Quelques-unes d’entre elles n'ont encore été trouvées qu'en 
Orient. 

Elles ont tant de rapports qu'il est difficile de les séparer en groupes 
ou en types. J'ai cependant essayé d'en former quelques-uns tirés prin- 
cipalement des calices égaux ou bosselés et de la longueur du style, 
deux caractères qui me paraissent liés à l'organisation générale. 

Le premier de ces types comprend, selon moi, quatre espèces, 
dont deux européennes, l’4fricana, commune à l'Afrique et au midi 
de l'Europe, et le Chia de l'île de Chio, qui ont le style très-court, les 
fleurs petites et pourprées, le calice égal et persistant après la fécon- 
dation. Ce sont des plantes annuelles qui fleurissent au milieu du 
printemps, et dont les feuilles sont couvertes de poils étoilés. 

Le second est formé de cinq ou six espèces à calice bosselé, à style 
allongé et feuilles velues ou cotonneuses. Ce sont le Maritima des 
bords de la Méditerranée, l'Incrassata à pédoncules épaissis après la 
fécondation, et qui se trouve dans les îles de l’Archipel, le Littorea 
des bords de l'Océan , le Patula des environs de Madrid, et le Lacera 
des sables maritimes de l'Espagne et du Portugal; elles sont annuelles, 
si l'on en excepte le Patula ; leurs fleurs sont pourprées et plus grandes 
que celles du premier type; leurs feuilles sont rudes ou tomenteuses. 
La plus commune est le Maritima, qu’on trouve, à la fin du printemps, 
dans nos jardins, où elle forme, sous le nom de Giroflée de Mahon, 
de charmantes bordures de fleurs pourprées ou blanchâtres, d’une 
odeur agréable. 

Le troisième type comprend deux espèces, le Parviflora et le Lyrata, 
à feuilles tomenteuses, à fleurs petites et pourprées et style très- 
court. Elles pourraient se réunir à celles du premier type, car elles 
sont aussi annuelles et elles ont à peu près les mêmes caractères; toute- 
fois elles s'en distinguent par leurs feuilles radicales lyrées ou sinuées, 
recouvertes, ainsi que la silique, d'un duvet cotonneux. 

Enfin, on doit considérer comme dernier type du genre, l’A/yssoides 
du Portugal, espèce frutescente qui a l'apparence d'un Æ/yssum , et 
qui se distingue encore par son calice bosselé, ses pédicelles très- 
courts et ses feuilles tomenteuses, obtuses, qui laissent, en tombant, 
leur cicatrice sur la tige. 

Je ne connais pas la floraison des Malcomes ; je sais seulement que 
leurs pétales sont dépourvus de mouvements, et que leurs calices 
serrés tombent quelquefois un peu tard. Il n’est pas douteux que les 
espèces à calice bosselé ne soient pourvues de glandes nectariféères, au 
moins à la base des étamines latérales , et qu’à l'époque de la féconda- 
tion, le stigmate ne soit à peu près au niveau des anthères; la silique 


— 229 — 
s'allonge beaucoup ensuite, au moins dans plusieurs espèces ; mais Je 
ne connais pas exactement la forme et la position du stigmate, qui 
doit promptement disparaître toutes les fois que le style se termine 
en pointe aigué. 


SECOND GENRE. — Hesperis. 


L'Hesperis a un calice fermé et bosselé, des pétales onguiculés, à 
limbe ouvert, obtus ou échancré, des étamines libres et non dentées, 
des glandes vertes, presque annulaires autour des petites étamines; 
une silique serrée contre la tige, un peu tétragone ou aplatie et ter- 
minée par deux stigmates dressés et connivents , des semences oblon- 
gues, légèrement triquètres et pendantes. 

Les espèces de ce genre sont annuelles, bisannuelles ou vivaces; 
leurs racines sont fibreuses, leurs tiges cylindriques, droites ou dif- 
formes, leurs feuilles ovales, lancéolées ou oblongues, dentées, en 
rondache ou lyrées; les unes sont couvertes de poils simples ou 
rameux ; les autres portent des poils glanduleux , qui répandent une 
odeur un peu bitumineuse; les grappes sont terminales, redressées 
et nues; les pédicelles sont filiformes et ne s’épaississent pas après la 
fécondation; les fleurs sont blanches ou pourprées, souvent chan- 
geantes et odorantes. 

Ce genre se reconnait facilement à la structure de ses stigmates 
redressés et connivents. Il diffère d’ailleurs du Cheiranthus par ses 
cotylédons incombants, du Sisymbre par son calice bosselé, de l'Erysi- 
mum par sa silique irrégulièrement tétraèdre, par ses stigmates qui ne 
sont ni bossus ni allongés en corne, comme ceux des Mathioles, ni 
amincis en pointe comme ceux des Mulcomes. 

Les Hesperis habitent l'hémisphère boréal, et sont dispersées en 
Europe, en Barbarie, en Orient et surtout en Sibérie : une seule 
peut-être est originaire de l'Amérique. Elles recherchent les expositions 
découvertes et le voisinage des buissons. 

De Canpoee les divise en deux sections : 

Les Hesperidium, à pétales linéaires et livides; 

Les Deilosma, à pétales arrondis et non livides. 

La première section comprend deux espèces remarquables par leur 
silique dont la cloison est fongueuse, et les valves carénées sur deux 
angles assez marqués : ce sont l'A/yssifolia de la Perse, et le Tristis 
du royaume de Naples, de l'Autriche et de la Russie méridionale. 
Ces deux plantes, dont la première est encore mal connue, n'appar- 
tüennent peut-être pas au même type, quoiqu'elles aient cependant de 


— 230 — 
grands rapports : elles diffèrent surtout par la longueur de leurs pédi- 
celles et la nature des poils qui recouvrent leurs feuilles. Toutes les 
deux répandent, vers le soir et dans la nuit, une odeur très-suave, et 
pour laquelle on cultive la dernière. 

La seconde section est plus riche en espèces, soit européennes, 
soit étrangères. Les plantes qui la forment ont leur silique cylindrique, 
ou légèrement tétragone, et leur cloison membraneuse. Le premier 
type qu'on y rencontre est moyen entre les deux sections, et ren- 
ferme deux espèces annuelles, le Zaciniata de la Provence et du 
Piémont, et le V’illosa du midi de l'Italie, distinctes des autres, soit 
par leurs feuilles en rondache et leurs tiges hispides, soit surtout par 
leurs pétales ovales, oblongs, tantôt pourprés, tantôt jaunâtres, et 
odorants le soir; le second type, et en même temps le plus connu, 
est celui des Hesperis proprement dits, qui comprend quatre espèces 
peu distinctes, le Runcénata des buissons de la Hongrie, l Heterophylla 
du royaume de Naples, le Steveniana de la Tauride méridionale, et 
le Matronalis des masures et des buissons de toute l'Europe. Cette 
dernière espèce, la seule cultivée, a naturellement ses fleurs rouges 
et peu odorantes ; mais dans les jardins, ses fleurs sont simples, d'un 
blanc violâtre, odorantes surtout le soir, ou bien doublées, rougeä- 
tres, d'un beau blanc, enfin panachées de ces deux couleurs. La 
variété blanche et double, connue sous le nom de Girarde , est remar- 
quable par la richesse et la beauté de ses grappes qui s’entremèlent 
souvent avec celles des Mathioles, et produisent alors des effets admi- 
rables. Le troisième type que je veux mentionner ici, est celui des 
Hesperis à hampe simple et à feuilles entières et charnues; il est pro- 
pre à la Sibérie orientale, et il contient deux espèces vivaces, le 
Scapigera et V Arabidi flore à fleurs pourprées, en corymbe. É 

La plupart des autres Hesperis habitent l'Orient, les sables de VÉ- 
gypte ou de la Syrie ; elles peuvent se réunir en un quatrième type 
qu’on distingue à ses tiges ramifiées , à ses pétales oblongs, roses ou 
violets. Ce sont des plantes annuelles et dont nous ne devons pas nous 
occuper. 

Plusieurs espèces d'Hesperis portent, comme nous l'avons déjà 
dit, des fruits glanduleux et visqueux à odeur de bitume; tel est en 
particulier le Runcinata , si remarquable par ses rameaux adnés aux 
aisselles , fortement déjetés dans leur jeunesse et redressés pendant la 
floraison. 

Le principal phénomène physiologique du genre est celui des fleurs 
de l’Hesperis matronalis, qui se changent quelquefois dans les jardins 
en feuilles vertes et pétaloïdes, dont le centre donne souvent une 


— 231 — 
seconde touffe feuillée, de la même forme que la première. Cette 
monstruosité et celle des fleurs doubles sont vivaces et se muluüplient 
par éclats, tandis que l'espèce primitive est ordinairement bisannuelle. 

Un second phénomène que m'a présenté ce même Hesperis , et qui 
lui est commun avec les Mathioles et quelques autres Cruciferes, c'est 
celui de sa fécondation intérieure; au moment de la floraison ses 
pétales sont tellement serrés, qu'ils cachent les organes sexuels, les- 
quels ne se montrent que plus tard; on remarque alors les deux 
stigmates rapprochés et papillaires entourés d'anthères qui ont déjà 
répandu leur pollen. 

Les fleurs des Hesperis ne se ferment point, et leur calice, souvent 
coloré, tombe de bonne heure sans s'ouvrir. La silique, dont le stig- 
mate est d’abord à la hauteur des anthères, s’allonge ensuite et s'étale 
plus ou moins selon les espèces ; elle est souvent renflée et irrégu- 
lièrement bosselée. 


TROISIÈME GENRE. — 92symbrium. 


Les Sisymbrium ou Sisymbres ont leur calice égal, ouvert ou fermé, 
leurs pétales onguiculés etentiers, leurs étamines libres et non dentées, 
leur silique sessile, cylindrique ou légèrement anguleuse, biloculaire 
et terminée par un style raccourci; la cloison est membraneuse, les 
valves sont trinervées, les semences ovales ou oblongues sont uni- 
sériées; les cotylédons sont quelquefois irrégulièrement dorsifères. 

Ce genre ne renferme pas de caractère précis et applicable à toutes 
les espèces. Il se distingue de l'Erysimum par sa silique non tétraèdre, 
de l’Hesperis, par son calice non bosselé et ses stigmates non conni- 
vents, et des autres Cruciferes, par la forme de ses cotylédons et la 
situation de sa radicule. Les plantes qui le composent sont des herbes 
annuelles ou vivaces, et très-rarement des sous-arbrisseaux ; leurs 
grappes s'allongent après la fécondation; leurs pédicelles sont fili- 
formes, dressés, nus ou chargés de bractées ; leurs fleurs sont jaunes, 
rarement blanches. 

Les Sisymbres, dont on connaît aujourd'hui près de soixante espèces, 
appartiennent presque tous à l'ancien continent et à l'hémisphère sep- 
tentrional : l'Europe en compte vingt-cinq; l'Asie, douze; l'Afrique 
boréale, quatre ; le Cap, cinq, et l'Amérique, quatre. 

De Canpoze les distribue en six sections, qui formeront peut-être 
un jour autant de genres : cinq seulement sont européennes. 

1° Les V’elarum, à siliques subulées et pédicelles très-courts, appli- 
qués contre l'axe. Fleurs jaunes ; 


— 232 — 

2° Les Norta, à siliques cylindriques, calices ouverts et semences 
oblongues. Fleurs jaunes ; 

3° Les rio, à siliques cylindriques et semences à peu près ovales. 
Fleurs jaunes ; 

4° Les Kibera, à pédicelles chargés de bractées à la base; 

5° Les Ærabidopsis, à siliques linéaires, aplaties, stigmate sessile 
et tronqué. Fleurs blanches très- “légèrement pédicellées. 

La principale et peut-être la seule espèce de la première section, est 
le Sisymbrium officinale, plante annuelle répandue dans toute l'Eu- 
rope, où elle fleurit une grande partie de l'année, le long des chemins 
et des murs, ou au milieu de nos décombres. Elle n’a ni grâce ni éclat, 
ses rameaux sont divariqués, ses fleurs jaunes et petites, ses feuilles 
légèrement velues sont découpées en rondache; mais ses siliques légé- 
rement pédicellées et fortement serrées contre la tige, en font un véri- 
table type. Elle porte deux glandes à la base de ses-étamines latérales, 
et ses pétales sont quelquefois transformés en feuilles. Le Corniculatum 
des environs de Madrid, que De Cannozze place encore parmi les 
Velurum, a le port et les fleurs de l'Officinale, mais ses feuilles arti- 
culées au-dessus de leur insertion, se coudent fortement contre la 
tige afin de protéger le fruit qui est une silique aplatie, à pédiceiles 
épais, courts et solitaires. 

Les Norta sont aussi formés de deux espèces qui n'appartiennent 
pas non plus au même type, mais qui se font remarquer par leur calice 
ouvert et coloré, leurs quatre glandes nectarifères et leurs semences 
oblongues. La première est le Strictissimum , herbe vivace, élevée, 
dont les feuilles sont lancéolées et glanduleuses, et qui est assez 
répandue dans les montagnes de l'Europe et même dans les jardins. 
La seconde est le Junceum de la Hongrie et de la Haute-Asie, plante 
annuelle à feuilles glauques et pennatifides à la base. Elle a la silique 
del’Erysimum et le calice ouvert du Sinapis, et pourrait bien un jour 
être transportée dans un autre genre, 

Les rio forment la section la plus nombreuse des Sisymbres, et se 
rangent sOus trois groupes : Ë 

1° Celui à feuilles entières ou dentées; 

2° Celui à feuilles pennatiséquées, à lobes entiers, ou dentés; 

3° Celui à feuilles bipennatiséquées. 

Le premier de ces groupes ne comprend qu’une espèce européenne, 
l'Hispanicum, plante annuelle, à tige rameuse et divariquée, sili- 
ques droites et glabres; mais dans le second, qui forme les Sésym- 
brium proprement dits, on range le Læseli, dont De Canpozze a 
forméson genre Leptocarpæa, mais qui a aussi ses cotylédons dorsiféres, 


— 233 — 

l'Acutangulum, le Taraxifolium , V'Austriacum , VIrio, le Nitidum , le 
Subhastatum, le Columnæ, le Pannonicum , tous dépendant du même 
type, et dont quelques-uns ne forment sans doute que des variétés. 
Ce sont des herbes annuelles ou plus souvent bisannuelles, assez 
grandes et étalées, à calice ouvert, à fleurs moyennes, à feuilles en 
rondache irrégulièrement lobées, glabres ou velues, et d'un beau 
vert ; elles habitent nos cultures, nos vignes, nos vallées, et s'élèvent 
quelquefois assez haut sur nos montagnes. On dit que depuis l'in- 
cendie de 1812, le Pannonicum croit en grande abondance dans les 
décombres et les terrains qui avoisinent Moskou. 

Le troisième groupe des rio est très-distinct, et renferme deux 
types principaux , celui du Sophia et celui du Tanacetifolium : le pre- 
mier, représenté par le Sésymbrium Sophia répandu dans toute l’Eu- 
rope, est composé de plantes annuelles, à port aminci et élégant, 
à feuilles blanchâtres finement bipennatiséquées , fleurs jaunes, 
petites et disposées en corymbe. Il comprend deux ou trois autres 
espèces étrangères, dont la plus remarquable est le Brachycarpum, 
à siliques raccourcies, trouvé dernièrement par FrankziN dans les 
contrées arctiques. Le second type de ce groupe est formé d'herbes 
vivaces qui ne ressemblent pas mal au Sophia, mais dont les feuilles 
ont une coupe différente, et dont les fleurs sont plus grandes. Sa 
principale espèce est le Sisymbrium Tanacetifolium, originaire des 
Alpes, dont les pétales sont légèrement dressés et veinés, et dont les 
étamines latérales raccourcies sont ceintes, à la base, d’une glande 
nectarifère. On y joint le Millefolium de Ténériffe, à longues grappes 
jaunes, et quelques espèces étrangères, moyenne entre les deux types. 

Les Xibera se réunissent en un seul groupe, et comprennent cinq 
ou six espèces annuelles, sans port ni élégance; on les reconnaît à 
leur calice fermé, à leurs fleurs petites, jaunes, rarement blanches, 
et surtout à leurs siliques sessiles aux aisselles des feuilles, ou, ce qui 
est la même chose, à leurs pédicelles garnis de bractées. Des quatre 
espèces européennes, deux, le Runcinatum et l'Hirsutum , appartien- 
nent à l'Espagne; les deux autres, le Supinum et le Polyceratium, 
sont répandues cà et là dans toute l'Europe. La dernière a les fleurs 
blanches et les siliques ternées à chaque aisselle, tandis que les autres 
- ont les fleurs jaunes et les siliques solitaires. Enfin, la section des 
Arabidopsis , ainsi appelée parce qu’elle a le port et les fleurs blanches 
des Arubis, rassemble trois espèces européennes qui se reconnaissent 
à leurs feuilles radicales lyrées, à leurs tiges droites et feuillées, ainsi 
qu'à leurs pédicelles courts, épais ou amincis. Du reste, elles ne pa- 
raissent ni appartenir au même type, ni rechercher les mêmes loca- 


— 234 — 


lités. Le Bursifolium, dont le pédicelle est grossi et dont la feuille res- 
semble à celle du Capsella Bursa Pastoris, vit dans les Pyrénées 
orientales et la Sicile ; l'Erysimoides à siliques étalées, dans les sables 
de l'île de Ténériffe et du midi de l'Espagne, et enfin le Pinnatifidum , 
sur les pentes caillouteuses des Pyrénées et des Alpes. Les deux pre- 
miers sont annuels, le troisième est vivace. C'est sans doute dans 
cette section qu'il faut placer l’Arabis Thaliana, dont les graines sont 
notorhizées et non pas pleurorhizées. 

Kocx a rangé dans son genre Braya, qu'il distingue du Sisymbrium 
par sa silique uninervée et ses semences bisériées, le Pinnatifidum et 
le Supinum qu'il réunit à l'4/pina, herbe vivace des Alpes de l'Autriche. 

On peut conclure de tout ce que nous venons d’exposer, que le 
Sisymbrium est un genre dont les espèces sont loin d’être unies entre 
elles par des rapports naturels : non-seulement elles diffèrent par la 
forme de leurs siliques, de leurs feuilles et de leurs semences, mais 
leurs pédicelles sont courts ou longs, minces ou épais, nus ou feuillés; 
leurs fleurs sont jaunes ou blanches, grandes, moyennes ou petites; 
et leurs styles, variés en longueur, sont terminés par des stigmates 
polymorphes. Les Sisymbrium ne se ressemblent pas mieux par leurs 
habitudes que par leurs formes ; leurs pétales sont courts ou saillants, 
leurs calices ouverts ou fermés, leurs siliques serrées contre la tige, 
droites, obliques ou divariquées. Ils habitent tantôt nos champs et 
nos masures, tantôt nos vallées ou nos montagnes ; ils sont annuels, 
bisannuels ou vivaces, européens , asiatiques ou africains ; en un mot, 


il n’est presque aucune différence qui ne puisse se trouver entre leurs. 


nombreuses espèces. 

Le principal mouvement organique qu’on peut y remarquer, c'est 
celui du calice, qui, dans les espèces à glandes rectarifères, s'ouvre 
sans doute pour favoriser la fécondation; les pétales, au contraire, 
conservent presque toujours la même position; mais les siliques ont 
quelquefois des mouvements très-marqués pendant la maturation. 
Dans l'Officinale,, par exemple, qui est le type des V’elarum , la silique 
jusqu'alors fortement appliquée contre la tige dans le sens de ses 
sutures, s'écarte au moment de la dissémination, et les valves s'ou- 
vrent de droite et de gauche sans que leur mouvement soit gêné. Les 
siliques s'appliquent toujours par leurs sutures lorsqu'elles. se serrent 
contre les tiges. 

Je vois dans le Sophia, à l'époque de la fécondation, les quatre 


pétales étalés et les quatre glandes du torus surmontées chacune 
d’une gouttelette. 


— 235 — 


QUATRIÈME GENRE. — Ælliaria. 


L’Alliaria a le calice lâche, caduc et non bosselé, les pétales ongui- 
culés à limbe ovale, les étamines libres et non dentées, quatre glandes 
nectarifères, deux à la base des petites étamines, et deux entre les 
grandes et le pistil ; la silique est tétragone, cylindrique, striée sur le 
milieu des valves ,et marquée encore de quelques arêtes longitudinales. 
Elle est bivalve et biloculaire, à cloison membraneuse, et se termine 
par un style très-court et un stigmate aplati; les semences sont pres- 
que cylindriques. 

Ce genre est à peine distinct de l'Erysimum, et surtout de la section 
des Coringia ; mais il mérite d'en être séparé à cause de sa végétation, 
de son port, de ses fleurs blanches et de ses propriétés. 

L'Alliaria, qui a recu son nom de la saveur de ses feuilles et de ses 
semences ,ne comprend qu’une seule espèce européenne, l'Officinalis, 
répandue dans toute l'Europe. C’est une herbe vivace, dont la racine 
pivotante est un rhizome tracant, et qui borde au printemps toutes 
nos haies de ses belles fleurs d’un blanc pur, d’abord disposées en 
corymbe et ensuite allongées en grappes. Ses siliques, qui s'ouvrent à 
panneaux, mais sans élasticité, donnent leurs graines dès le commen- 
cement de juin, et dès le mois de juillet, la plante a entièrement dis- 
paru. Les feuilles, dont les pétioles sont redressés presque parallele- 
ment aux tiges, sont cordiformes, fortement dentées, pourvues de 
glandes peu apparentes et non terminales. 

Les fleurs de l’{/liaria n’ont point de mouvements, maïs les calices 
colorés en blanc ne tardent pas à tomber, et les pédicelles s’endur- 
cissent beaucoup après la fécondation. Les graines, selon Scakumr, 
sont recouvertes de raies parallèles, roulées en spirale vers le sommet. 

L’Alliaria n’est pas une plante sociale, puisque sa racine ne donne 
point de rejets ; cependant elle airne à former des touffes qui ajoutent 
beaucoup à son éclat. 

De Cannozze lui réunit avec doute une seconde espèce, l'Alliaria 
Brachycarpa de Y'TIbérie , dont la silique est assez différente, et Kocn 
en fait une section dans les Sisymbres. 


CINQUIÈME GENRE. — Ærysimum. 


L'Erysimum a un calice fermé et légèrement bosselé, des pétales 
onguiculés, à limbe ovale et entier, des étamines libres et non den- 
tées, une silique tétragone, sessile, biloculaire, bivalve, à cloison 


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membraneuse , un style tantôt filiforme et allongé, tantôt très-court 
et terminé par deux stigmates étalés; les semences sont ovales ou 
oblongues, unisériées et non bordées. 

Ce genre a, pour caractère principal, une silique tétragone et un 
calice fermé. Les espèces qu’il comprend, et qui s'élèvent aujourd'hui 
à plus de quarante, sont des herbes annuelles ou vivaces, quelque- 
fois un peu frutescentes et ordinairement rameuses; les feuilles, 
tantôt glabres, tantôt légèrement velues ou pubescentes, sont oblon- 
gues, linéaires, entières, dentées, pétiolées, sessiles ou même am- 
plexicaules et cordiformes, dans quelques espèces. Les grappes effilées 
et naturellement axillaires, deviennent terminales par l'avortement des 
tiges ; les pédicelles sont nus et filiformes, les fleurs jaunes et très- 
rarement blanchâtres. 

DE Cannozze divise les Erysimum en quatre sections, dont deux 
appartiennent à l'Europe occidentale : 

1° Les Stylomena , à style filiforme et allongé, stigmates étalés et 
fleurs presque sessiles ; 

2° Les Cuspidaria, à style filiforme et raccourci, silique à deux 
angles plus marqués que les autres; 

3° Les Erysimastrum , à style court ou presque nul, à calice caduc ; 
à feuilles non cordiformes ou amplexicaules ; 

4° Les Coringia, à style presque nul, et feuilles cordiformes, 
amplexicaules. 

Les Stylomena comprennent quatre espèces bisannuelles dont deux 
habitent les déserts de la Tauride, une les sables de la Hongrie, et la 
dernière ceux de la Sicile. La troisième forme dans Kocx le genre 
Syrenia, qui se distingue de l'Erysimum par sa silique uninervée et 
ses semences bisériées. 

Les Cuspidaria comptent deux espèces originaires de l'Europe 
orientale : la plus connue est le Cuspidatum , distingué par la forme de 
sa silique à deux angles beaucoup plus saillants que les deux autres, et 
par conséquent imparfaitement tétragone ; ses pétales jaunes tombent 
avec le calice, et ses siliques redressées sont accumulées vers le 
sommet. 

Les Erysimastrum, qu’on doit considérer comme le vrai type du 
genre, comprennent près d'une trentaine d'espèces, les unes euro- 
péennes, et les autres moins nombreuses, éparses en Asie, en Sibérie, 
principalement sur les rochers du Caucase; une seule, jusqu'à 
présent, appartient à l'Amérique. Ce sont des herbes annuelles ou 
vivaces, à tiges fermes, anguleuses et dures, à feuilles lancéolées ou 
linéaires, ordinairement recouvertes de poils courts et étoilés; elles 


— 237 — 


ont entre elles de si grands rapports, qu’on doit les considérer comme 
appartenant à la même race, et formant des passages continuels d'une 
espèce ou d’une variété à une autre. C'est la raison pour laquelle leur 
synonymie est pleine de difficultés, qu'on ne peut lever qu'avec 
peine. 

Leurs principales différences consistent, non pas dans la forme ou 
daus la villosité toujours variable des feuilles, mais dans la grandeur 
et la couleur des ‘pétales, dans les rapports de longueur entre les 
pédoncules, les calices , les siliques et les styles; enfin, dans la confi- 
guration du stigmate, des glandes nectarifères et du calice égal ou 
bosselé. De toutes les divisions qu’on peut établir ici, la plus simple, 
je crois, et la plus commode dans l'application, quoiqu'elle ne soit 
pas entièrement naturelle , est celle de Gaupin dans sa Flore helveti- 
que : elle est fondée sur la longueur relative du pédoncule et du 
calice. 

Ce botaniste partage les Erysimastrum de la Suisse en deux groupes; 
le premier contient les espèces dont les pédoncules égalent ou surpas- 
sent les calices; et le second, celles dont les pédoncules sont au moins 
de moitié aussi courts que les calices. Il va sans dire que la compa- 
raison n’a lieu qu’à l'époque de la floraison. 

Dans le premier groupe sont placés : le Virgatum , à rameaux nom- 
breux et effilés, à fleurs d'un jaune-soufre, qui se plait le long des 
murs et des masures ; le Longisiliquum, dont les siliques ont plus de 
trois pouces, et qui est fort peu connu; le Chetranthoïdes, à fleurs 
- dorées et petites, beaucoup plus répandu que les autres; le Zanceo- 
latum ; à pétales jaunes, dont l'onglet dépasse le calice; et enfin le 
Diffusum , ou le Canescens de Koére dont le feuillage est blanchâtre, 
les feuilles linéaires, les siliques rédressges etamincies. Ces cinq plantes 
sont bisannuelles et fleurissent vers la fin du printemps. 

Le second groupe renferme quatre espèces assez distinctes, et dont 
trois au moins sont vivaces : l'Aelveticum des collines montueuses, à 
fleurs jaune-soufre, à style distinct, à siliques droites et très-allongées; 
le Pumilum des Alpes méridionales, dont les tiges ne s'élèvent guère 
au-delà d'un pouce, et dont les pétales aussi jaune-soufre ont les 
onglets étroits et saillants hors du calice; l'Ochroleucum , placé par 
Ds Cannorre parmi les Cheiranthus, maïs dont les cotylédons sont 
notorhizés, et qui recouvre les rochers du Jura de ses belles fleurs à 
pétales jaune-päle et onglets saillants ; enfin, le Rhœæticum, ou le 
Pallens de Kocx, probablement annuel, à fleurs grandes et jaunes, 
dont les siliques de trois à quatre pouces sont terminées par un style 
épais et allongé. La plupart de ces plantes ont le calice bosselé. 


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Les fleurs des Erysimastrum sont dépourvues de mouvement; leurs 
calices ne s'ouvrent point, et leurs pétales ne se referment point 
lorsqu'une fois ils sont épanouis. Les glandes nectarifères du torus, 
ordinairement assez marquées, sont coniques, relevées, obtuses, selon 
les espèces ; les stigmates sont entiers, bilobés, saillants, aplatis, 
épais, amincis, et ces différences, qui n'ont point encore été 
déterminées avec soin, sont sans doute liées à la fécondation, et 
par conséquent constantes dans les mêmes espèces. Les siliques, 
dont les valves sont pliées à angles droits, répandent leurs graines 
dans le cours de l'été; mais les tiges et les feuilles ne disparaissent que 
tard. 

Les Erysimastrum ont été destinés par la nature aux mêmes usages 
que la plupart des Cheiranthus auxquels ils ressemblent si fort. Ils 
parent de leurs jolies fleurs jaunes et quelquefois odorantes , nos vieux 
murs et nos masures, ou les collines découvertes et les rochers de nos 
montagnes; cependant ce ne sont pas des plantes sociales, et je les ai 
rarement vues en abondance dans les lieux qu'elles habitent. 

La dernière section des Erysimum , connue sous le nom de Corin- 
gia, comprend des plantes à feuilles glauques, cordiformes et am- 
plexicaules, à fleurs blanches et d’un jaune pâle. On n’en connaît 
encore que deux, l'Erysimum perfoliatum de YEurope et de l'Asie 
tempérée, plante effilée qui fleurit quelques semaines après avoir été 
semée, et que Lin a décrit sous le nom de Brassica orientalis, et 
l’Austriacum de l'Autriche et de l'Espagne, que Kocx réunit aux 
Sisymbres , à cause de ses valves trinervées; l’une et l'autre sont 
annuelles et appartiennent au même type, pour ne pas dire à la même 
espèce; car on ne les distingue guère que par leurs siliques striées ou 
lisses. De Canpozze avait joint à cette section, l'Erysimum alpinum , 
plante vivace d’un port différent, assez répandue sur les pentes des 
Alpes; mais elle a été placée depuis parmi les Arabis, à cause de ses 
cotylédons pleurorhizés, et elle est désignée actuellement sous le nom 
d'Arabis brassicæformis. 

J'ai remarqué que les pédicelles de l'Erysimum perfoliatum se pen- 
chent un peu avant la fécondation et qu'ils se relèvent ensuite, Est-ce 
la même chose des autres Erysimum ? Je crois que ce mouvement doit 
avoir lieu toutes les fois que l’inflorescence est un corymbe qui ne 
s’allonge que lentement. 


— 239 — 


Huitième tribu. — NOTORHIZÉES LATISEPTES, ou CAMÉLINÉES. 


Les Cameélinees ont la siliculé biloculaire ou uniloculaire, par avor- 
tement, les valves plus ou moins concaves, ordinairement déhiscentes, 
la cloison elliptique et placée dans le plus grand diamètre du fruit, les 
semences variables en nombre, ovales et non bordées. 

Les Camélinées , dans les Nothorizées, correspondent aux A/yssi- 
nées dans les Pleurorhizees. 


PREMIER GENRE. — Camelina. 


Le Camelina a le calice non bosselé, les pétales entiers, les étamines 
non dentées, la silicule ovale ou globuleuse, biloculaire, entière, 
obtuse et surmontée d’un style persistant, la cloison est membraneuse, 
ses valves sont ventrues et déhiscentes, les semences nombreuses, 
oblongues et non bordées. 

Les Camelines sont des herbes redressées et souvent rameuses ; 
leurs feuilles sont amplexicaules ou sagittées, oblongues , entières, 
dentées, sinuées ou même pennatifides; leurs grappes terminales et 
multiflores s'allengent après la fécondation; les pédicelles sont fili- 
formes et nus, les fleurs jaunes. 

Ce genre est très-distinct de tous les autres : il diffère du Myagrum 
par sa silicule polysperme, et il n’est pas pleurorhizé comme les 
Cochlearia, les Draba et les Alyssum. 

Il peut être facilement divisé en deux sections : 

1° Les Chameælinum, à silicule ovale ; 

2° Les Pseudolinum, à silicule globuleuse. 

Les Chamælinum comptent quatre espèces appartenant au même 
type, qui ont toutes les silicules bordées, le style conique, le stig- 
mate simple et les feuilles plus ou moins sagittées. La principale 
d’entre elles est le Sativa, qui vit dans nos cultures, et surtout parmi 
nos Lins, avec lesquels elle naît, croît et dépérit. C'est une plante 
effilée, à fleurs petites, d’un jaune d’or, dont le torus est chargé de 
deux petites glandes vertes , et dont la silicule est marquée de quatre 
arêtes ; elle se ramifie plus ou moins selon la richesse du sol, et répand 
ses graines à la même époque que le Lin. On dit que la variété velue 
reste toujours sauvage, tandis que la glabre se trouve dans nos 
moissons et nos Lins. 

La seconde espèce est le Dentata, qui diffère de la cultivée par ses 


Re. | 
feuilles dentées, et qui habite également nos cultures ; la troisième 
est le Microcarpa de la Podolie, à siticule plus petite et marquée 
seulement de deux arêtes, et la dernière enfin, l'Armeniaca, trouvée 
dans l'Arménie par Tourneront, est distincte des précédentes par 
ses feuilles entières et ses silicules un peu allongées pendant la ma- 
turation. 

Ces quatre plantes n’offrent aucune différence essentielle. Toutes 
sont annuelles, à racine amincie et blanchäâtre, à feuilles glanduleu- 
ses sur les bords; toutes ont leur calice à demi fermé, velu et médio- 
crement bosselé. Leurs fleurs sont jaunes et un peu veinées; leurs 
étamines latérales sont chargées de glandes nectarifères ; leurs sili- 
cules sont marquées d’arêtes, formées surtout par le prolongement 
extérieur de la cloison ; leurs valves tombent avec la partie du style 
à laquelle elles adhéraient,. 

Les Pseudolinum diffèrent des Chamælinum, non-seulement par 
leur silicule, mais encore par leur style filiforme et leur stigmate 
capité. Ce sont des plantes vivaces, à feuilles amplexicaules, légère- 
ment sagittées, et dont De Canporre mentionne deux espèces, 
l Austriaca etle Barbaræa de la Sibérie orientale, mais cette dernière, 
examinée avec plus d'attention, se trouve avoir une silicule quadri- 
valve et des graines à peu près quadrisériées et pendantes sur des 
pédicelles libres et capillaires. On vient donc { Annales des Sciences 
naturelles. Déc. 1835), d'en former, sous le nom de Tetrapoma, un 
nouveau genre; enfin je vois, dans nos jardins, sous le nom de Came- 
lina Laxa, une crucifère à feuilles simples, velues, allongées et 
sagittées , à fleurs paniculées jaunes et à silicule arrondie lisse, portée 
sur des pédoncules filiformes et étalés; mais ces plantes doivent être 
placées parmi les Vasturtium , comme l'a fait Kocx pour l'Austriacum, 
parce que leurs cotylédons sont accombants et non pas incombants. 


SECOND GENRE. — /Veslia. 


Le Neslia a le calice ouvert et non bosselé, les pétales entiers, les 
étamines non dentées, la silicule coriace, indéhiscente, à peu près 
globuleuse, aplatie et biloculaire; la cloison est placée dans le plus 
grand diamètre du fruit, et quelquefois tellement avortée, que la 
silicule devient uniloculaire ; les valves sont concaves et indistinctes, 
les semences solitaires dans chaque loge; si lasilicule est uniloculaire, 
elle ne renferme qu'une seule semence globuleuse, pendante et 
latérale. 

Le MVeslia est un genre très-distinct du Camelina, par sa silicule 


— 941 — 


indéhiscente et monosperme; il ne renferme qu'une seule espece, le 
Paniculata, qui se trouve dans toute l'Europe, croissant au milieu 
des blés et des cultures, dans les terres légères et sablonneuses. Sa 
racine est annuelle et pivotante, ses feuilles sont sagittées et amplexi- 
caules, ses grappes terminales et allongées, ses pédicelles filiformes 
et nus, ses fleurs petites, jaunes et chargées de deux glandes sur 
leur réceptacle. 

Ce genre offre l'exemple d'un double avortement, qui dépend des 
circonstances, et qui s'opère, pour ainsi dire, sous les yeux de 
l'observateur; je veux dire celui de la loge et celui de la graine: 
quand la cloison subsiste, il y a deux graines ; quand elle s'oblitere, 
il n'en reste plus qu'une. Mais quelle liaison y a-t-il entre la soudure 
des valves et le nombre des semences ? Pourquoi, lorsqu'il n’en reste 
plus qu’une, les valves sont-elles toujours soudées? 

De Canpozze et la plupart des botanistes ont attribué au ÂVeslia 
des cotylédons toujours notorhizés; mais Scakuxr remarque que la 
radicule n’a pas ici une position constante, et qu'elle est, au contraire, 
tantôt pleurorhizée et tantôt dorsifère. 


Neuvième tribu. — NOTORHIZÉES ANGUSTISEPTES, ou LÉPIDINÉES. 


Les Lépidinees ont une silicule oblongue, ovale, didyme ou légè- 
rement cordiforme; leur cloison est très-étroite; leurs valves sont 
fortement concaves ou carénées; leurs semences, plus ou moins 
nombreuses et quelquefois même solitaires dans chaque loge, sont 
ovales et non bordées ; leurs cotylédons sont planes, entiers, trilo- 
bés ou incisés. 

Les Lepidinces représentent, dans les Votorhizees, les Thlaspidees 
des Pleurorhisees. Les genres des deux tribus ont de même leurs 
correspondants, ainsi les Th/aspi monospermes sont analogues aux 
Lepidium , es Teesdalia aux Æthionema , etc. 


PREMIER GENRE. — Sencbiera. 


Le Senebiera a un calice ouvert et non bosselé, des pétales entiers, 
des étamines non dentées et réduites quelquefois à quatre ou deux 
par avortement, des silicules didymes, légèrement aplaties, évalves, 
aptères, biloculaires, indéhiscentes, presque globuleuses, ridées ou 
légèrement appendiculées ; les loges sont monospermes, les semences 

Le 16 


— 942 — 
globuleuses, triquètres et pendantes, les cotylédons linéaires et 
plissés en deux au moins dans les espèces indigènes. 

Ce genre contient des herbes annuelles et bisannuelles, ramifiées 
et souvent couchées, glabres ou un peu velues; leurs feuilles sont 
allernes, tantôt linéaires et entières, tantôt dentées, incisées ou 
même pennatilobées. Les grappes sont courtes et opposées aux feuilles, 
les pédicelles nus, les fleurs blanches et très-petites. 

Les Senebiera forment un genre très-distinct, non-seulement par 
la forme de leurs fruits, mais aussi par leur inflorescence et leur port. 
Les huit espèces qui le composent aujourd'hui sont beaucoup plus 
dispersées que celles des autres genres; les unes se trouvent en Amé- 
rique, les autres au Cap, à Madagascar, à Sainte-Hélène et en Egypte. 
L'Europe n’en contient que deux. 

DE Canpozze les divise en trois sections, dont deux sont indi- 
gènes : 

1° Le Nasturtiolum, à silicule échancrée au sommet, et à cloison plus 
courte que les valves ; 

2° Les Carara, à silicule non échancrée, aplatie, ridée et relevée 
en arête sur le dos. 

La premiere section a pour principale espèce le Pinnatifida, qui 
se rencontre sur les bords de la mer et dans les décombres de toute 
l'Europe. Il paraît être originaire de l'Amérique, puisqu'il n’est point 
indiqué par les anciens botanistes, quoiqu'il soit très-commun au- 
jourd'hui. C'est une plante qui pousse de son collet plusieurs tiges 
diffuses, couchées et rameuses ; à feuilles irrégulièrement pennatifides 
ou dentées, à rameaux multiflores, courts et opposés aux feuilles ; 
ses fleurs à peu près apétales m'ont offert deux étamines anthérifères, 
opposées et correspondantes à l'échancrure, c'est-à-dire aux grandes 
étamines, comme dans le Linoides, et quatre filets sans anthères, qui, 
au lieu d'être rapprochés deux à deux, se trouvaient placés à droite 
et à gauche des deux anthères, où elles représentaient sans doute les 
pétales, et s’étalaient au lieu de tomber après la fécondation; le stig- 
mate était globuleux et comme enfoncé dans l’échancrure, et les valves 
des silicules paraissaient bien marquées. Les autres espèces de AVas- 
turtiolum appartiennent au même type, ou plutôt peuvent se partager 
en deux sous-types, celui du Linoides à feuilles entières, et celui à 
feuilles pennatifides : ce dernier renferme notre espèce européenne, 
le Pectinata, qui n’en est guère qu’une variété, et l'Heleniana de l'ile 
Sainte-Hélène. 

Les Carara ont pour type le Senebiera coronopus , qui vit, comme 
le Pinnatifida, dans les décombres, le long des murs et des chemins 


— 243 — 

de presque toute l'Europe, d'où il a probablement passé en Amérique, 
comme le Pinnatifida en Europe. Ses feuilles sont aussi pennaufides 
ou pectinées, à pétioles dilatés et à dentelures glanduleuses. Elles 
forment sur la terre des rosules d’un beau vert, du milieu desquelles 
sortent des tiges à grappes latérales et presque sessiles. Les pétales 
se rapprochent après l'inflorescence et ne tombent que pendant la 
maturation ; les silicules, réunies au nombre de sept à huit par pa- 
quets, ne sont point articulées sur leurs pédicelles, et ne s'ouvrent 
point, quoiqu'elles conservent la trace des valves. On remarque dans 
la fleur épanouie, quatre jolies glandes opposées aux quatre pétales et 
qui semblent y adhérer ; les anthères sont bleuâtres et les silicules 
légèrement aplaties portent trois rangs de tubercules. Le Coronopus 
se sème en automne, et fleurit pendant tout le cours de l'été. 

Les Senebiera offrent, parmi les Cruciferes, l'exemple assez rare 
de plantes qui développent leurs feuilles aux dépens de leurs fleurs. 
Les premières, en effet, sont toujours grandes et nombreuses, 
tandis que les autres non-seulement sont très-petites, mais perdent 
quelquefois par avortement quelques-uns de leurs organes. Si le 
Pinnatifida cessait d’avoir ses deux dernières étamines fertiles, il ne 
se reproduirait plus, puisqu'il n'est pas vivace et ne donne pas de 
rejets. Il disparaîtrait ainsi pour toujours, comme ont peut-être déjà 
disparu un assez grand nombre de plantes. 

Les deux loges qui forment la silicule se séparent de la cloison 
qui les unissait, et se sèment sans s'ouvrir dans le Pinnatifida, et 
sans doute aussi dans quelques autres espèces, mais non pas dans le 
Coronopus. 


SECOND GENRE. — Capsella. 


Le Capsella a le calice égal, les pétales entiers, les étamines non 
dentées, la silicule aplatie, triangulaire, tronquée au sommet, la 
cloison membraneuse et presque linéaire, les valves carénées, aplaties, 
non ailées, et le stigmate très-court; les semences sont nues, nom- 
breuses et marquées, selon GÆrrNeRr, de raies parallèles. 

Ce genre ne comprend qu'une seule espèce, le Bursa pastoris, plante 
annuelle fort variée dans son port; les feuilles radicales disposées en 
rosule, sont tantôt entières, tantôt incisées, tantôt pennatifides, à la 
manière du Senebiera coronopus ; les caulinaires sont éparses, sagittées 
et oblongues; les pédicelles sont filiformes, nus et AE plus 
longs que la cel les fleurs sont petites et blanches. 

Cette plante, la se commune de toutes les Cruciferes, vit dans les 


— 944 — 
cultures et le long des chemins, où elle fleurit depuis le premier prin- 
temps jusqu'aux approches de l'hiver. De là, sans doute, elle s'est 
répandue dans presque toutes les parties du monde, dans les Indes, 
le Japon, la Sibérie, la Perse, le Cap, les îles Maurice, le détroit de 
Magellan et l'Amérique. Mais elle est restée confinée dans les plaines, 
et ne s'est pas élevée sur les hauteurs. 

Elle manque de grâce et d'élégance, quoique ses feuilles radicales 
forment sur le sol des rosettes très-régulières, et que ses silicules 
soient disposées très-symétriquèement sur leur axe allongé. On la voit 
souvent attaquée par l'Uredo candida des Cruciferes, qui s'y trouve 
quelquefois en si grande abondance, qu'il la détruit partiellement. 

Les pétales et les calices du Capselle n'ont pas des mouvements 
organiques; les petites étamines portent à leur base une glande necta- 
rifère peu visible, et les grappes florales disposées d'abord en corym- 
bes, s’allongent beaucoup pendant la maturation : j'ai vu après l'hiver 
rigoureux de 1837 à 1838, un grand nombre de Capselles dont les 
anthères étaient avortées, quoique les stigmates eussent conservé 
toute leur vie; leurs grappes se sont ensuite allongées, mais toutes 
leurs siliques étaient avortées. 

Jacquix a observé quelquefois, aux environs de Vienne, vers la 
fin du printemps, des Capselles à fleurs apétales, à dix étamines, 
dont quatre provenaient des pétales transformés. Cet exemple, 
comme tant d'autres semblables, prouve la grande analogie des 
pétales avec les étamines. 

DeCanpozreavaitplacéle Capselle parmi les Pleurorhizees, d après 
l'opinion de GærTxer, entre le T'hlaspi et l'Hutchinsia, à cause de ses 
rapports apparents; mais d'après les observations de Scakunr, de 
Gay et Monvarp, que j'ai aussi vérifiées , cette plante, qui a les coty- 
lédons réellement dorsifères, doit être reportée, comme nous l'avons 
fait, parmi les Lepidinees , et l'on doit, selon Kocx, ajouter au genre 
Capsella le Lepidium procumbens de Lan, etle Pauciflore de Y Alle- 


magne, qui n'en est peut-être qu'une variété. 
TROISIÈME GENRE. — Lepidium. 


Le Lepidium a le calice non bosselé, les pétales entiers, les éta- 
mines non dentées, la silicule ovale, aplatie, déhiscente, à valves 
carénées, tantôt aptères, tantôt légérement aïiées au sommet, la cloison 
membraneuse, étroite, égale aux dre ou même plus petite, le style 
à peu près nul ou filiforme, les semences solitaires dans chaque loge, 
pendantes, aplaties ou LC triquètres, les cotylédons oblongs 
et lineaires. 


Les Lepidium sont des herbes ou de petits sous-arbrisseaux à tiges 
cylindriques et rameuses ; leurs feuilles sont simples et de forme 
variée, leurs grappes terminales, droites et allongées à la maturation, 
leurs pédicelles filiformes et nus, leurs fleurs blanches et petites. 

Ce genre, confondu souvent avec celui des Thlaspi, en diffère non- 
seulement par la position de sa radicule, mais encore par ses loges 
constamment monospermes. Les espèces qui le composent sont ré- 
pandues dans l’ancien et le nouveau continent. L'Asie en renferme 
quinze ; le Cap de Bonne-Espérance, sept ; l'Australasie, neuf; l'Amé- 
rique, onze ; l'Europe, seulement dix. De Ganpozce les distribue en 
cinq sections : 

1° Celle des Cardaria , à silicule ovale, cordiforme, à valves aptères 
et un peu enflées, à style filiforme ; 

2° Celle des Cardamon, à silicule sous-orbiculaire échancrée, à valves 
naviculaires ailées et à cotylédons divisés ; 

3° Celle des Lepia, à silicule sous-orbiculaire échancrée, à valves 
naviculaires, ailées et adhérentes au style, à cotylédons entiers; 

4° Celle des Dileptium, à silicule sous-elliptique, légèrement échan- 
crée au sommet, à valves carénées et aptères, à style très-court; 

5° Celle des Lepidiastrum, à silicule sous-elliptique et très-entière, 
à valves carénées et aptères, à style trés-court. 

Le Cardaria ne renferme qu'une seule espèce, le Draba des champs 
et des cultures de l'Europe australe, plante remarquable par ses 
grandes feuilles amplexicaules, auriculées, et par ses longues grappes 
de fleurs petites et d’un beau blanc. Elle est annuelle, et fleurit depuis 
la fin du printemps jusqu'au commencement de l'automne; son style 
est persistant et assez allongé; ses valves sont plutôt concaves que 
carénées ; ses cotylédons sont entiers, épais et obtus. 

Le Cardamon ne comprend qu’une espèce européenne, le Lepidium 
sativum, qui croit dans tous les jardins et dont la patrie paraît être 
la Perse et l’île de Chypre, où il vient au milieu des moissons. Il est 
annuel, rameux, glabre et couvert de poussière glauque; ses feuilles 
sont plus ou moins incisées, quelquefois frisées; ses pétales et ses 
calices se resserrent contre la silicule avant de tomber, et son torus 
est dépourvu de glandes. Cette plante est surtout distinguée par ses 
cotylédons ordinairement trifides, quelquefois bifides et rarement 
entiers ; souvent l'un des deux est trilobé et l'autre entier , et quand 
ils sont tous les deux divisés régulièrement, ils sont disposés en ver- 
ticille autour de la jeune tige. Le Spinescens , qui se trouve aux envi- 
rons de Damas, dépend du même type, et se reconnaît à ses rameaux 
divariqués , endurcis et légèrement épineux. 


— 246 — 

La troisième section , ou celle des Lepia, compte six espèces, dont 
la plus connue est le Campestre , à silicules chargées de poils et de 
glandes très-petites et transparentes. Ses feuilles sagittées, dentées et 
blanchâtres, portent aussi des glandes, et ses téguments floraux se 
rapprochent de la silicule avant de tomber. On le trouve dans tous 
les champs argileux, où ses grappes, qui fleurissent long-temps, finis- 
sent par avorter au sommet. L'Hirtum, qui dépend du même type, 
croit dans l'Europe australe, et principalement dans la région des 
Oliviers ; il est caractérisé par ses calices et ses siliques recouvertes de 
poils droits et rayonnants. L'Humifusum, originaire des montagnes 
de la Corse, diffère des deux autres par ses racines vivaces et ses tiges 
couchées; enfin le Spinosum , de l'Orient et de la Grèce, a ses feuilles 
radicales pennatiséquées et articulées, ses silicules oblongues, échan- 
crées et prolongées en deux cornes et ses petites fleurs blanches dis- 
posées en épi. Ces quatre espèces ont les cotylédons entiers, et trois 
d’entre elles sont annuelles. 

Les Dileptium se reconnaissent non-seulement à la forme de leur 
silicule, mais à leurs fleurs très-petites, dont les pétales avortent 
quelquefois , et dont les étamines sont souvent réduites à quatre ou 
même à deux. On y distingue deux types : le prenrier, à feuilles 
linéaires, contient plusieurs espèces ; la principale est le Ruderale des 
masures de toute l'Europe et même de la Sibérie, dont les fleurs plus 
petites à mesure qu'elles approchent du sommet, sont aussi plus avor- 
tées et finissent par disparaître; la seconde est le Subulatum, plante 
sous-frutescente, indigène de l'Espagne; les autres sont étrangères 
et se réunissent au V’érginicum, qui habite les masures de l'Amérique, 
et dont les cotylédons ne sont pas exactement notorhizés. Le dernier 
type de cette section est lié au premier par des espèces intermédiaires, 
et il est représenté par le Perfoliatum et le Cardamines qui habitent 
tous les deux en Espagne , et qui ne diffèrent guère des autres que 
par leurs feuilles pennatiséquées à la base, arrondies ou amplexicaules 
vers le sommet. Ces plantes, annuelles pour la plupart et à cotylédons 
entiers, donnent presque toujours des fleurs fertiles, parce que leurs 
anthères répandent immédiatement leur pollen sur un stigmate papil- 
laire très-bien conformé et placé à la même hauteur qu'elles. Jai 
remarqué que dans le Ruderate les deux étamines sont placées en face 
des grands côtés de la capsule, et par conséquent représentent les 
quatre grandes. 

Les Lepidiastrum, qui forment notre dernière section et qui ont la 
silicule entière, non bordée, et le stigmate à peu près sessile, sont 
aussi réunis sous deux types : celui à feuilles larges, ovales, lancéo- 


leés ; et celui à feuilles pennatiséquées à la base et linéaires sur la Lige. 
Le premier comprend le Latifolium, plante élevée, à grappes nom- 
breuses et garnies, à racine vivace et épaisse, à fleurs petites très- 
rapprochées, et à torus chargé de quatre glandes vertes. Elle croît 
dans les pâturages succulents de toute l'Europe, et on lui associe le 
Crassifolium des marais salés de la Hongrie, à racine vivace, à feuilles 
glauques, long-temps attachées au bas des tiges. Le second type ren- 
ferme le Graminifolium de Gaunix, ou l'Jberis de De CanDozze, qui, 
comme la plupart de ses congénères, vit le long des murs et des 
décombres, et qu’on reconnait à ses tiges très-rameuses et très-effilées, 
à ses fleurs petites, blanches et quelquefois teintes en pourpre, comme 
les calices et les tiges. Ses pétales et ses étamines avortent souvent en 
partie, et sa racine est vivace, comme celle du Latifolium. Les plantes 
qu'on joint à ce type sont le Suffruticosum et le Lineare, toutes les 
deux vivaces et originaires de l'Espagne. 

Les fleurs des Lepidium se referment après la fécondation, dans 
plusieurs espèces ; mais elles n’ont pas le mouvement alternatif et 
diurne des Barbaræa et des Cardumines. Elles sont dressées avant et 
aprés l'épanouissement; pendant la maturation leurs grappes s’allon- 
gent , et leurs pédoncules grandissent en s’écartant. Les espèces où les 
pétales et les étamines avortent sont surtout celles dont les grappes 
sont trop serrées pour nourrir toutes leurs fleurs, qui, quelquefois 
même, tombent sans s'ouvrir; mais celles qui restent sont presque 
toujours fertiles, parce qu’elles ont été sans doute réciproquement 
fécondées. Je n'ai pas examiné en détail les glandes du torus, mais j'ai 
noté que le Lepidium Iberis en avait deux, à droite et à gauche des 
petites étamines, et qu’elles donnaient en abondance l'humeur miellée. 

On ne rencontre ni dans ce genre, ni dans celui des Senebiera, ni 
dans ceux qui composent le reste de la tribu , aucune fleur à pétales 
agrandis ou doublés, parce que la végétation se porté naturellement 
sur les feuilles, et que les fleurs épuisent, par leur multitude, la sève 
destinée à les nourrir. 

Ces plantes répandues en grande abondance dansles diverses parties 
du monde, le long des murs, des masures et sur les bords des mers, 
sont presque toutes dépourvues d'éclat et d'élégance. 

On peut remarquer que les feuilles du Lepidium sativum sont inci- 
sées à la manière de leurs cotylédons, en sorte que la force quelconque 
qui a déterminé leur division a aussi influé sur celle des lobes de 
l'embryon. Les graines de cette plante, plongées dans l’eau , se recou- 
vrent promptement de mucosité, et germent quelquefois dans l’inter- 
valle de vingt-quatre heures. 


= 64 — 


QUATRIÈME GENRE. — Divonæu. 


Le Bivonæa a un calice à peu près égal, des pétales onguiculés, un 
peu échancrés sur leurs bords, des étamines simples et non dentées, 
une silicule aplatie, ovale, échancrée, à style très-court et stigmate 
en tête, une cloison oblongue, à valves carénées, ciliées sur le dos 
et déhiscentes, quatre ou six semences ovales et pendantes dans chaque 
locule. 

Ce genre n’est composé que d'une seule espèce, le Bivonæa lutea, 
herbe annuelle, glauque, glabre et d’un tissu che, trouvée par Bivona 
dans les environs de Palerme. Sa tige est filiforme et peu rameuse, ses 
feuilles pétiolées à la base, deviennent, vers le sommet, cordiformes 
et amplexicaules ; ses pédicelles sont filiformes et nus, ses fleurs petites 
et jaunes. 

On la place parmi les Lépidinées, à cause de ses cotylédons dorsifères, 
de sa silicule ovale et de sa cloison étroite; elle a le port et la fleur de 
quelques Draves , et les valves carénées des Thlaspi. 


CINQUIÈME GENRE. — /Zthionema. 


L'Æthionema a un calice inégal, des pétales entiers, six étamines, 
dont les plus grandes sont réunies entre elles, ou dentées intérieure- 
ment ; la silicule est aplatie, ordinairement échancrée, couronnée par 
un style court, tantôt biloculaire, polysperme et déhiscente, tantôt 
uniloculaire, monosperme etindéhiscente; ses valves sont naviculaires, 
ailées ou aigrettées sur le dos; ses semences, rarement solitaires dans 
chaque loge, sont ovales , oblongues et finement chagrinées. 

Les Æthionema diffèrent des T'hlaspi non-seulement par leurs coty- 
lédons dorsifères et leurs grandes étamines réunies et dentées, mais 
encore par leur végétation et leur port : ce sont des herbes annuelles, 
vivaces ou même sous-frutescentes, rameuses, diffuses ou redressées; 
leurs feuilles sont glauques, sessiles, entières, ovales, oblongues et 
quelquefois opposées à la base ; leurs grappes sont serrées et comme 
terminales ; leurs fleurs sont très-petites, pourprées, roses ou même 
blanchâtres. 

Ce genre contient jusqu’à présent neuf espèces, originaires princi- 
palement des montagnes ou des collines arides et sablonneuses de la 
Méditerranée, du Mont-Liban et de la Perse. Elles sont tellement liées 
les unes aux autres à certains égards, et tellement séparées à d'autres, 
qu’elles ne peuvent pas être partagées en sections. 


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La principale et la plus connue de ces espèces, est l'Æthkionema 
saxatile ou le Thlaspi saxatile de LiNNÉ, plante vivace et un peu fru- 
tescente qui habite les rochers de l'Europe australe et les pentes méri- 
dionales des Alpes. Ses fleurs d'un rouge blanchâtre sont disposées en 
grappes allongées qui fleurissent par le haut, en même temps qu’elles 
se sèment par le bas; ses feuilles charnues , articulées et glauques pren- 
nent souvent en vieillissant une teinte pourprée; ses filaments sont 
élargis à la base, et les plus grands ont au-dessus du sommet une dent 
qui fait paraitre les anthères latérales; ses pédoncules sont articulés, et 
ses silicules, redressées et fortement ailées, renferment deux ou trois 
graines dans chaque loge. On peut rapprocher de cette espèce le Ho- 
nospermum d'Espagne, qui en a tout-à-fait le port, la végétation et les 
feuilles ; mais dont les silicules uniloculaires par avortement sont mo- 
nospermes et par conséquent indéhiscentes. 

Le Coridifolium du mont Liban est vivace et demi-frutescent ; ses 
fleurs d’un rose pourpré, sont grandes et disposées en longues grappes, 
ses quatre étamines principales sont élargies et non pas réunies à la 
base, et ses silicules biloculaires et dispermes sont ailées sur le dos, ses 
feuilles sont glaucescentes et linéaires. 

La dernière espèce d’Æthionema que je veux mentionner ici, c’est 
le Buxbaumii, originaire de l'Ibérie, et qui fleurit aussi dans nos 
jardins ; c’est une plante annuelle et de courte durée, dont les fleurs 
sont roses et les étamines dentées, comme celles du Saxatile; ses 
rameaux, d'abord corymbifères, se transforment après la floraison en 
une grappe conique semblable à celle du Houblon, dont les écailles 
sont des silicules orbiculaires, échancrées et fortement ailées, et dont 

chaque loge contient d’une à trois graines pendantes et chagrinées. 
= Sa fécondation est immédiate, et ses anthères placées à l'entrée du 
tube recouvrent de leur pollen le stigmate semblable à une petite 
coupe. 

A la dissémination, les valves des silicules se détachent de la cloison, 
emportant avec elles leurs graines. 

Ce genre n'est pas fondé comme les autres sur la silicule dont la 
forme est inconstante, ni sur les semences dont le nombre est très- 
variable. Il repose presque entièrement sur la structure des étamines 
et sur le caractère de ses feuilles toujours consistantes, glauques, 
sessiles, articulées, caduques et entières : cette observation sert à 
prouver que les organes de la fleur ne doivent pas être seuls consi- 
dérés dans la création des genres. 

Du reste, on apercoit bien que la silicule, dont la forme est en 
apparence très-variable, a cependant, dans toutes les espèces, la même 
organisation primitive. 


— 250 — 


Dixième tribu. — NOTORHIZÉES NUCAMENTACÉES, ou ISATIDÉES. 


Les Jsatidees ont la sicule uniloculaire, monosperme, à valves in- 
déhiscentes et quelquefois non distinctes, les semences ovales, oblon- 
gues et non bordées. Elles forment, parmi les Cruciferes, une petite 
famille naturelle et distinguée par ses tiges herbacées, ses feuilles 
glauques, entières ou dentées, pétiolées à la base et sagittées au- 
dessus ; elles renferment deux genres européens : l’/satis et le 
Myagrum. 


PREMIER GENRE. — Jsalis. 


L'Isatis a un calice ouvert et non bosselé, des pétales égaux et 
entiers, des étamines non dentées, un ovaire aplati, un stigmate 
sessile, une silicule entière plus ou moins oblongue, uniloculaire, 
monosperme, aplatie, subéreuse ou membraneuse, et comme foliacée 
sur les bords; les valves sont fortement carénées et à peine déhis- 
centes, la semence est pendante et oblongue, et les fruits mûrs ressem- 
blent tout-à-fait à ceux du Frêne. 

Les /satis sont des herbes annuelles ou plutôt bisannuelles, élevées, 
droites, rameuses, à racine fusiforme, à tige cylindrique et blan- 
châtre; leurs grappes terminales et multiflores sont disposées en 
panicules lâches, droites et allongées ; leurs pédicelles sont filiformes, 
dépourvus de bractées, dressés pendant la fécondation et penchés 
ensuite ; leurs fleurs sont jaunes et petites. 

Elles forment un genre très-naturel, composé d'espèces fort rap- 
prochées, dont un petit nombre habite l'Europe, et dont les autres 
sont répandues dans l'Orient et la Sibérie. PERsooN n'en décrit que 
six, De Cannoze en compte actuellement dix-huit, qu’il range sous 
deux sections : 

1° Les Sameraria, à silicule ovale ou orbiculaire, entourée d’une 
aile grande, membraneuse et foliacée ; 

2° Les Glastum , à silicule ovale et subéreuse. 

Les Sameraria comptent cinq espèces, quatre de l'Asie occidentale 
et une cinquième du Portugal, qui diffèrent principalement par leur 
silicule et les oreillettes de leurs feuilles. L'espèce européenne, long- 
temps confondue avec d'autres, est entièrement glabre; ses silicules 
pendantes à la maturation, sont cunéiformes à la base et orbiculaires 
au sommet; leur loge centrale est enflée, oblongue et légèrement 
striée. 


— 251 — 


Les Glastum sont compris sous treize espèces, dont plusieurs sans 
doute ne sont que des variétés, et qui se distinguent principalement 
en trois types : 1° celui de l’4/pina du Piémont et des Apennins, dont 
la silicule demi-foliacée forme un passage entre les deux sections; 
2° celui de l'#/eppica, plante grêle de l'Asie mineure et de la Grèce, 
fort remarquable par sa silicule linéaire huit fois plus longue que 
large ; 3° enfin, celui du Tinctoria répandu sur les pentes rocailleuses 
et découvertes de l'Europe australe et tempérée : c’est de ce dernier 
type que dépendent la plupart des autres espèces de la section. 

Le Tinctoria, plus rustique et plus commun que les autres Isatis, 
est seul employé pour la formation du pastel. La plante cultivée a ses 
feuilles plus larges et plus glabres. Le Suuvage, qui porte quelquefois 
une grande quantité de poils articulés, ne paraît pas d'abord appar- 
tenir à la même espèce. 

Les feuilles des /satis sont épaisses, d’un vert obscur, qui semble 
indiquer déjà le principe coloré qu’elles contiennent. Celles du bas 
naissent à demi roulées sur leur surface inférieure; mais celles du 
sommet, ainsi que celles qui enveloppent les panicules, ne sont ni 
roulées, ni plissées; les fleurs sont très-nombreuses, serrées au 
sommet des tiges et garanties contre la pluie par la matière résineuse 
qui les enduit. Les fleurs d’un jaune d'or ne se referment pas à l'obscu- 
rité, mais s'inclinent seulement sur leurs pédicelles ; les calices sont 
colorés, les pétales étalés, les étamines saillantes, les glandes necta- 
rifères, petites ou même nulles. 

A l’époque de la maturation, les pédoncules épaissis se recourbent 
fortement, et les silicules sont pendantes dans toutes les espèces : 
cette disposition ne tient pas primitivement à la pesanteur, puisque 
les fruits qui avortent s’inclinent comme les autres; mais elle est favo- 
risée par la forme de la silicule amincie à la base et élargie au sommet- 
A la maturation, le fruit noircit, et bientôt après le pédicelle se rompt. 

L'ovaire de l’satis est naturellement formé, comme tous ceux des 
Crucifères, de deux loges séparées par une cloison dont l'on aperçoit 
toujours la suture, mais qui se rétrécit beaucoup, tandis que les 
valves se creusent fortement en carène à peu près comme dans le 
Capsella Bursa pastoris; cette déformation s'opère de [très - bonne 
heure , cependant on apercoit encore dans l'ovaire, comme l'a remar- 
qué d’abord Scaxuxr, et comme je l'ai vérifié, une graine au moins 
dans chaque loge, mais bientôt il n'ya plus qu'une seule graine placée, 
non pas dans une des loges, mais au centre de la suture même où elle 
est cachée comme dans un nid. Cette conformation appartient pro- 
bablement aux /satis, dont les capsules toujours attachées à des pédi- 


— 252 — 


celles flottants, tombent ordinairement indéhiscentes et présentent 
quelquefois, mais très-rarement, deux semences. 


SECOND GENRE. — WMyagrum. 


Le Myagrum a un calice légèrement entr'ouvert, des pétales 
oblongs, à peine saillants hors du calice, des étamines simples dont 
les deux plus grandes sont presque réunies à la base; l'ovaire est 
turbiné, oblong et couronné par un style fortement conique; la sili- 
cule est coriace, subéreuse, à valve aplatie, uniloculaire et mono- 
sperme à la base, dilatée au sommet, en deux locules stériles ; la se- 
mence est oblongue et pendante; les cotylédons sont un peu recourbés. 

Ce genre, ainsi déterminé, est formé d'une seule espèce, le Perfo- 
liatum, plante annuelle qui croît dans les moissons du midi de l'Europe, 
et se distingue par ses feuilles glabres, glauques, amplexicaules et 
auriculées le long des tiges. 

Les fleurs petites et jaunes sont disposées à peu près en grappes au 
sommet des tiges et des rameaux axillaires; les silicules pédonculées 
sont serrées contre la tige pendant la maturation : en les examinant de 
près on y reconnait deux valves séparées par une suture d’où s'élève 
au sommet un style conique, endurci et terminé par un stigmate en 
tête. La semence, qui m’a paru solitaire même dans les très-jeunes 
silicules, a une radicule recourbée et supère qui se trouve placée 
dans la partie inférieure de la silicule, dont le sommet est plein de 
parenchyme. 

Sckuxr assure que l'ovaire renferme d'abord deux ovules que 
Je n'ai pas su apercevoir, parce que la déformation s'opère de très- 


bonne heure ; la silicule se désarticule aussi promptement, et tombe 
sans S'OUVTIr. 


Troisième onDRE. — ORTHOPLOCÉES ou (0 »}> ). 


Les Orthoplocees ont leurs cotylédons incombants, souvent échan- 
crés, plissés en deux, et contiennent dans leur pli la radicule notho- 
rhizée ; leurs semences sont ordinairement globuleuses, le style est 
souvent renflé, et renferme à sa base une loge séminifère, toujours 
indéhiscente. 


— 253 — 


Onzième tribu. — ANCHONIÉES. 


Les Anchoniees ont la silicule ou la sitique séparée transversale- 
ment en articles monospermes, des cotylédons planes et incombants, 
des semences ovales. 


Goldbachia. 


L 

Le Goldbachia a les étamines libres, la silique articulée et le style 
à peu près nul, les fleurs petites et d’un blanc rosé. 

Ce genre comprend trois espèces annuelles, le Zævigata des sables 
d'Astracan, à semences lisses, pendantes, et dont les articulations 
sont rétrécies ; le Torulosa de l'Orient, dont les siliques toruleuses et 
à peu près cylindriques se séparent à peine, et le Tetragona à pédon- 
cules recourbés et siliques redressées sans articulations marquées, 
mais dont les semences sont chacune entourées d’une membrane 
propre, les feuilles ovales, allongées et amplexicaules sont entière- 
ment lisses et glaucescentes, les fleurs, très-petites et violettes, ont 
leur limbe droit et la fécondation intérieure. 


Douzième tribu. — ORTHOPLOCÉES SILIQUEUSES, ou BRASSICÉES. 


Les Brassicees ont la silique allongée, à cloison linéaire et à valves 
longitudinalement déhiscentes. Les genres qu’elles renferment sont 
tellement rapprochés, qu'on ne peut guère les distinguer par des 
caractères tranchés. Cette tribu est analogue à celle des Arabidees 
dans les Pleurorhizées , et à celle des Sisymbrées dans les Notorhizces ; 
en poussant plus loin la comparaison, le Brassica représentera le Chei- 
ranthus et l’Hesperis; le Sinapis, le Sisymbrium et le Nasturtium ; le 
Diplotaxis , le Turritis, etc. 


PREMIER GENRE. -— Prassica. 


Le Brassica a un calice égal, droit, rarement entr'ouvert, des pé- 
tales ovales, des étamines libres et entières; sa silique, à peu près 
cylindrique, est biloculaire, bivalve, à loges polyspermes, à valves 
concaves ou légèrement carénées ; son style est persistant, conique et 


— 254 — 


quelquefois monosperme à la base; ses semences sont unisériées et 
presque globuleuses. 

Ce genre comprend des plantes bisannuelles, rarement annuelles, 
vivaces ou sous-frutescentes ; les feuilles radicales sont souvent 
pétiolées, sinuées ou même pennatifides ; les caulinaires sont entières, 
sessiles ou amplexicaules; les grappes sont allongées, les pédicelles 
nus où filiformes, les fleurs jaunes ou rarement blanches, jamais pour- 
prées ou veinées. 

Le Brassica se distingue du Sénapis par son calice droit ou seule- 
ment entr'ouvert, et par son organisation générale. Il est formé d'un 
grand nombre d'espèces quelquefois fort rapprochées, et dont la 
culture a souvent altéré le type primitif. 

En attendant, nous le diviserons, selon DE Cannozze, en trois 
sections assez naturelles : 

1° Les Brassicastrum , à silique sessile , et bec nul ou asperme; 

2° Les Erucastrum , à silique sessile et bec monosperme; 

3° Les Micropodium , à silique légèrement stipitée. 

Les Brassicastrum , se divisent physiologiquement en deux grands 
groupes ; celui des espèces cultivées et celui des espèces sauvages. Le 
premier présente, au plus haut degré, l'exemple des altérations ou des 
changements que l’industrie humaine opère sur les végétaux, selon 
les usages auxquels elle les destine. On voit, en effet, tantôt leurs 
racines, tantôt leurs tiges, leurs feuilles ou leurs fleurs, grossir ou se 
multiplier aux dépens des autres parties, et perpétuer même à l'in- 
défini, par les semences, les nouvelles formes qu'elles ont acquises ; 
phénomène rare dans le règne végétal, et qui ne peut guère avoir 
lieu qu’en vertu d’une organisation spéciale. 

Au moyen de cette disposition, le genre Brassica, qui occupe, en 
apparence, si peu de place dans la famille, est devenu une des bases 
sur lesquelles reposent la nourriture et l'entretien des hommes et des 
animaux ; c'est ce qu'on verra plus clairement, quand j'aurai passé en 
revue, d'après DE Ganpozze, les variations ou les transformations 
principales de quatre ou cinq espèces de ce genre. 

La première et la plus importante de ces espèces est le Brassica 
oleracea, originaire des rochers maritimes de l'Europe, et distingué, 
dans son état de nature, par ses feuilles toujours glabres, charnues, 
recourbées, lobées et couvertes d’une poussière glauque. Il a produit 
dans les jardins, où il est cultivé depuis un temps immémorial, cinq 
grandes races : 1°l Acéphale ou le Chou commun, vert, blanc, pourpré, 
à tige simple ou ramifiée, à feuilles lyrées, pennatifides et laciniées ; 
2° Je Bullata ou le Frisé, à tête ronde ou oblongue, à jets et rejets 


— 255 — 


gemmifères, aux aisselles des feuilles ; 3° le Capitata ou le Commun, 
à grosse tête souvent aplatie, quelquefois ovale ou conique, blanche 
ou plus rarement rouge ; 4° le Caulo-Rapa ou Chou-Rave, à tige renflée 
au-dessus du collet; 5° le Botrytis ou le Chou-Fleur, dont les corymbes 
charnus sont raccourcis et serrés en masse, et le Brocoli, dont les 
rameaux sont seulement charnus au sommet, et dont les fleurs avor- 
tent. Ces cinq races, comme il est facile de le comprendre, ne se con- 
servent pas pures. Ainsi, par exemple, le Chou-Frise ou de Milan, le 
Chou-Fleur donnent des Hybrides. 

La seconde des espèces tranformées est le Brassica campestris , indi- 
gène des champs d'Europe, et distingué du précédent par ses feuilles 
moins épaisses, ciliées ou chargées , dans leur jeunesse, de poils épais 
et assez rudes. Il a produit, à son tour, trois variétés principales : 
l'Oleifere ou le Colza, si connu par l'huile que l’on extrait de ses 
semences ; le Pabularia ou le Chou-à-faucher, destiné spécialement à 
la nourriture des bestiaux , et enfin le Vapo brassica ou le Navet, qu'il 
ne faut pas confondre avec le Caulo-Rapa ou le Chou-Rave, et qui, 
avec le Rutabaga blanc ou pourpré, est si précieux dans l’économie 
rurale. 

La troisième espèce est le Brassica Rapa, qui, selon quelques au- 
teurs, croit naturellement dans les champs de l'Europe, et se reconnaît 
à ses feuilles radicales, lyrées, rudes au toucher et dépourvues de 
poussière glauque. Elle s’est moins transformée que les deux autres, 
et ne se divise qu'en deux variétés : l'Olérfere ou la Navette, qui se 
sème dans les vallées méridionales du Dauphiné, et la Rave propre- 
ment dite, à racine ovale, aplatie ou oblongue, et dont la culture est 
moins étendue depuis l'introduction de la Pomme de terre. 

La quatrième de ces espèces est le Brassica Napus, dont la patrie 
n'est pas non plus bien connue , et qui est caractérisé par ses siliques 
divariquées et ses feuilles glabres et glauques, lyrées à la base, lan- 
céolées et amplexicaules au sommet. Il a aussi donné naissance à deux 
variétés : l'Oléifére, à racine amincie, cultivée dans les sols légers sous 
le nom de Navette d'hiver, et l Esculenta, à racine enflée au-dessous 
du collet, désigné particulièrement sous le nom de Vuvet, et souvent 
confondu avec le Vapo brassica et le Rapa oblonga. 

Enfin, la cinquième et dernière espèce transformée par la culture, 
est le Brassica præcox, dont l'origine est aussi incertaine, mais qu’on 
peut distinguer du précédent à ses siliques redressées. Il n'est cultivé 
que comme plante oléifère, mais comme il croît vite, il se sème, au 
printemps, dans les champs montueux, où il réussit mieux que les 
autres , quoiqu'il donne des récoltes moins abondantes. 


— 256 — 

Les. espèces sauvages propres à l'Europe sont toutes sous-frutes- 
centes, et vivent la plupart sur les bords de la mer ou sur les collines 
montueuses des provinces méridionales. Elles sont, jusqu’à présent, au 
nombre de sept qu’on peut classer en trois sous-types : 1° le Cretiea, 
l'Insularis de Sardaigne et le Balearica, à feuilles glabres, glauques et 
charnues; 2° l’Zncana et le Gravinæ du midi de l'Italie et de la Sicile, 
à feuilles velues ou hispides, irrégulièrement sinuées à la base; 
3° l'Humilis et le Repanda du midi de la France, à feuilles épaisses 
et pennatifides, et fleurs portées sur des hampes peu élevées. 

Les Erucastrum sont tous sauvages et originaires de l'Europe cen- 
trale ou méridionale. Leurs espèces, jusqu'à présent mal déterminées, 
peuvent se classer sous deux types : le premier comprend les sous- 
frutescentes à feuilles glabres, glauques et un peu charnues, dont le 
bec contient deux ou trois semences, comme le Richerii et le Mo- 
nensis ; le second, celles dont les feuilles radicales sont hispides et 
pennatiséquées, telles que le Chetranthus des collines de la France 
méridionale, le Cheiranthifolia des sables d'Olonne et d'Espagne, le 
Tournefortia, le Lævigata et le Valentina, tous trois originaires des 
sables d'Espagne, enfin l'Erucastrum de Lin et de Gaupin, com- 
mun dans la Suisse occidentale, où il fleurit des le printemps et se 
reconnaît à ses feuilles d’un vert noir et à sa corolle jaune, de moitié 
plus petite dans l'espèce ou la variété Ochroleuca. Quelques-unes de 
ces plantes, dont la synonymie est peu fixée, ont le calice entr'ouvert 
et s'approchent ainsi des Sénapis. 

La troisième section ou celle des Macropodium , a beaucoup de rap- 
ports avec les Diplotazis, et comprend deux espèces appartenant au 
même type : l'Elongata des sables de la Hongrie, et le Sabuluria du 
Portugal, l’une et l’autre sont bisannuelles, ont leurs feuilles radicales 
pennatifides, velues ou hispides, leur calice entr'ouvert et leur silique 
amincie. La première est cultivée en Hongrie comme plante oléifère ; 
parce qu’elle réussit dans un sol maigre, que ses siliques ne s'ouvrent 
que tard et donnent beaucoup de graines. 

Les Brassica ne forment pas, comme l'on voit, un genre naturel; car 
les trois sections qui les composent pourraient facilement être réunies 
sous autant de genres. Toutefois, la plupart des espèces qui appar- 
tiennent à la première section sont assez bien réunies entre elles, soit 
par leurs feuilles glauques et consistantes, soit par la forme de leurs 
siliques. 

Les pétales des Brassica ne sont pas affectés par la lumière, et ne se 
referment pas à l'obscurité; mais ils persistent quelquefois assez 
long-temps, et alors ils blanchissent; leurs calices sont peu ou point 


— 257 — 


bosselés, et cependant leur torus est chargé de belles glandes necta- 
riféres, deux en dedans des petites étamines et deux en déhors des 
grandes; les étamines se tordent quelquefois à la fécondation, en 
sorte que l'ouverture des loges est opposée au stigmate; mais alors 
l'extrémité supérieure de l’anthère s'incline en dedans, et la poussière 
sort du côté du stigmate. 

M. Server a observé ( Bulletin botanique, mars 1830 ) dans le 
Brassica campestris ; variété Colza, comme dans le Cheiranthus cheiri, 
variété Grandiflora , plusieurs fleurs qui portaient huit étamines dis- 
posées par paires entre les quatre pétales et sur deux rangs bien pro- 
noncés; il n'y avait d’ailleurs rien de changé aux sépales , aux pétales 
et aux glandes du torus. J'ai trouvé à la même époque des fleurs de 
Cheirt à huit étamines, dont six valvaires et deux latérales ou placen- 
taires; j'ai vu de même des fleurs de Colza soudées deux à deux et 
formées de six sépales, six pétales, deux pistils et douze étamines. 
Quel.est donc l’état normal de la fleur des Cruciferes ? Est-ce celui 
que nous venons de décrire, ou bien est-ce celui de fleurs réunies 
trois à huit, comme nous l'avons vu dans les Arabis et d'autres 
genres ? Je l'ignore, mais je remarque que ces déviations dans la 
structure ordinaire de la fleur entraînent presque toujours la dévia- 
tion des autres organes, et rendent la plante inféconde : serait-il donc 
vrai que Ja fleur eût besoin de perdre sa forme primitive pour devenir 
fertile ? 

Le phénomène le plus remarquable du genre est celui que présen- 
tent ces graines logées hors de la cloison, et dans la cavité du style. 
Étaient-elles ori ginairement attachées au placenta de la cloison, ou en 
étaient-elles de. Dans le premier cas, on ne com het 
pas comment elles s'en sont séparéés , et dans le second, on est obligé 
d'admettre deux systèmes de graines, et par conséquent deux systèmes 
de vaisseaux spermatiques, dont les uns conduisent l’Aura seminalis 
aux placentas de la cloison, et les autres aux graines solitaires, 
géminées ou même ternées de la base du style; cette anomalie n’est 
pas rare dans les Cruciféres ; on la retrouve dans les Sinapis, dont le 
style renferme quelquefois une graine solitaire. 

Les Brassica , surtout ceux de la première section, n’ont pas, 
comme on l'a vu, la saveur âcre et piquante des Crucifères, er leurs 
graines , par conséquent, ne peuvent pas remplacer celles des Sinapis ; 
leurs fleurs sont peu odorantes et ne doublent pas ordinairement ; 
cependant les champs recouverts, au printemps, des grappes dorées 
du Colza, produisent un effet très-agréable dans un moment où la 
campagne n’est point encore parée. 


I. 17 


— 258 — 


M. Gay remarque ( Ann. des Sciences naturelles, vol. 2, pag. 412) 
que le style du Brassica oleracea est souvent séminifère, et que ses 
graines sont recouvertes d’une membrane qui adhère à la paroi inté- 
rieure du tégument, dont elle est sans doute un simple appendice. 

Les Brassica cultivés supportent bien nos hivers; cependant je les 
ai vus succomber à un froid de 14 à 16 degrés. 


SECOND GENRE. — wWferigma. 


Le Sterigma a ses grandes anthères soudées deux à deux jusqu'au 
sommet, et sa silique, à peu près cylindrique, rompue dans la dissé- 
mination en plusieurs articles. 

Ce genre est formé de quatre espèces bisannuelles et homotypes, 
originaires de la Syrie ou de la Perse et des environs de la mer 
Caspienne ; leurs feuilles sont entières dans l'Elichrysifolium , et plus 
ou moins sinuées et pennatiséquées dans les autres, leurs fleurs sont 
d'un jaune soufre, et leur conformation générale les avait fait placer 
parmi les Cheiranthus, dont leur caractère générique les sépare. 

Le Torulosum, que je vois vivant, a un stigmate saillant à deux 
grands lobes papillaires et réfléchis, quatre anthères extrorses par 
retournement, qui l'entourent et le surmontent en même temps que 
leur sommet recourbé le saupoudrent de leur pollen ; les filets sont 
soudés deux à deux jusque près du sommet, et les anthères des deux 
petites étamines sont introrses, et par conséquent non retournées. 

La silique est toruleuse et irrégulièrement recourbée à la dissémi- 
nation. 


TROISIÈME GENRE. — Sinapis. 


Le Sinapis a un calice ouvert et non bosselé, des pétales à limbe 
ovale; des étamines libres et non dentées, une silique plus ou moins 
cylindrique, biloculaire, bivalve, polysperme, à valves concaves ou 
légèrement carénées dans leur milieu, un style tantôt court et aigu, 
tantôt prolongé en bec subulé, conique ou ensiforme, asperme ou 
monosperme ; les semences des loges sont unisériées et à peu près 
globuleuses. 

Les Sinapis sont des herbes annuelles ou bisannuelles rarement fru- 
tescentes ; leurs tiges sont droites, rameuses , glabres et plus souvent 
velues; leurs feuilles sont lyrées ou incisées, leurs grappes nues et ter- 
minales, leurs fleurs jaunes. 

Ge genre est composé d’un grand nombre d'espèces d’une organisa- 


Lande 
tion variée, réunies en genre par un seu caractère artificiel, qui se 
retrouve dans d’autres plantes, surtout dans le Brassica ; c'est pour- 
quoi il sera plus tard subdivisé : voici, en attendant, les sections dans 
lesquelles De Canpozze le donnee 5 

1° Les Melanosinapis , à style court, petit et dépourvu de bec; 

2° Les Ceratosinapis, à style ae né ou subulé, bec non sémi- 
nifère ; 

3° Les Hirschfeldia, à style ovale, court, bec monosperme ; 

4° Les Leucosinapis, à style ensiforme et bec ordinairement mono- 
sperme ; 

5° Les Dissaccium, à style épais et très-court, calice bosselé. 

De ces cinq sections, quatre sont européennes, la cinquième appar- 
tient à l’île de Madère, et se forme d’une ou deux espèces frutescentes 
qui n’appartiennent pas probablement aux Sénapis, maïs qui en ont 
pourtant le port, les calices étalés et les fleurs jaunes. 

La première section ne compte qu'une espèce européenne, le 
Sinapis nigra, plante annuelle, commune dans les champs où elle 
fleurit dans les mois d'été, et qui se reconnaît à ses siliques glabres, 
presque tétragones, serrées contre leur pédoncule, et à ses feuilles 
lyrées à la base, lancéolées, entières et pendantes sur les rameaux ; 
ses fleurs sont petites et jaunes, ses semences globuleuses et finement 
ponctuées ont'une saveur brûlante. Les cinq autres espèces se trou 
vent principalement au Cap et sur les côtes de la Barbarie. Le Geni 
culata de la Barbarie pourrait bien n'être qu’une variété du Vigra, 
mais non pas le Turgida, si remarquable par son style conique et for- 
tement strié, et qui doit être rangé dans la section suivante. 

Les Ceratosinapis, ou Sinapis à style conique et plus ou moins 
_aplati, renferment plusieurs espèces étrangères, et sont représentés 
en Europe par l’Arvensis, à peine distinet de l'Orientalis, et répandu 
en grande abondance dans nos champs, qu'il infeste en se ressemant 
sans cesse. Les autres espèces indigènes, au nombre de trois, habitent 
l'Espagne et ne peuvent guère être rapprochées sous un seul type ; 
ce sont le Pubescens, plante vivace toute recouverte de poils mous ; 
le Subbipinnatifida , à le pennatipartites, et dont le style n'est pas 
toujours asperme, enfin le Lævigata , g glabre dans toutes les parties, 
et qui se range assez bien dans le groupe des Sinapis de la Chine et 
du Japon, séparé des autres par ses feuilles glabres. 

Les Hirschfeldia ne comptent que deux espèces appartenant au 
même type : l’/ncana de l'Europe australe, et l'Heterophylla, qui n’en 
diffère que par ses siliques pubescentes. Kocx a fait de cette section 
son genre £rucastrum, qu'il caractérise par une silique linéaire à valves 


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uninervées, et dans laquelle il fait entrer le Sésymbrium obtusangulum 
de Lin; le Pollichit, qui est la variété Ochroleuca du Brassica erucas- 
trum de Gawpin , et le Sénapis incana de Lin, les deux premières 
vivaces, la dernière annuelle. Leurs semences sont unisériées, et leurs 
cotylédons plissés et canaliculés. 

Les Leucosinapis , qui pourraient former un genre à part ou être 
réunis aux £ruca, se distinguent par leur silique bosselée, à style 
ensiforme; ils sont au nombre de trois, l'Æ{ba, l'Hispida, qui n’en 
est peut-être qu'une variété, indigène de l'Espagne, et le Dissecta. 
La première de ces plantes est répandue dans les moissons et les dé- 
combres de l'Europe méridionale, et se cultive pour ses semences, 
qui tantôt fournissent la moutarde blanche, et tantôt une huile sem- 
blable à celle du Colza ; ses siliques sont remarquables par les poils 
blancs qui les recouvrrent; son style est quelquefois monosperme , 
tandis que celui des deux autres espèces l’est toujours; et l’on observe 
que la semence solitaire du Dissecta, quoique pendante, est pourtant, 
comme dans le Crambe , attachée à un funicule qui naït de la base. 

Les Sinapis, dont l'on compte déjà une quarantaine d'espèces, et 
dont le nombre ne tardera pas sans doute à s’accroître, habitent prin- 
cipalement les bords de la Méditerranée , l'Égypte, l'Orient, le Japon, 
la Chine et les Indes. On en trouve une ou deux espèces au Cap, une 
aux Antilles et une à la Nouvelle-Hollande. La plupart sont an- 
nuelles ou bisannuelles , et se plaisent au milieu de nos champs et de 
nos semailles , auxquelles elles ne nuisent que trop souvent. La culture 
n'a point entrepris de les changer, et jusqu'à présent l'homme s'est 
contente d’en retirer les avantages qu'elles offraient naturellement ; 
il s’est servi de leur feuillage pour la nourriture de ses bestiaux, et 
quelquefois pour la sienne; leurs graines âcres et brülantes, lui ont 
fourni tantôt de l'huile, tantôt des rubifiants, et plus souvent un 
assaisonnement recherche connu sous le nom de moutarde.On l'extrait 
en Europe du Sinapis nigra et de l'4lba, et ailleurs, des autres 
espèces, telles que le ant Il y a peu de genres dont la détermina- 
tion des espèces soit plus difficile, parce que les principaux caractères 
qu'on est obligé d'employer, la pubescence des surfaces, la forme des 
feuilles, celle des siliques, etc. sont extrêmement variables. Les espèces 
anciennes ont souvent une synonymie embarrassée, et les nouvelles 
sont encore trop peu connues pour être définitivement fixées. Je suis 
porté à croire qu'en les examinant de près, on y trouvera plusieurs 
variétés, comme cela arrive dans les genres nombreux. 

Le caractère qui paraît le plus constant dans les Sénapis , c'est l'écar- 
tement à peu près horizontal du calice pendant la floraison. Il s'ouvre 


— 261 — 


comme par charnière, sans entraîner avec lui les pétales qui sont tou- 
jours redressés, et il reste dans cette position jusqu’à ce qu’il se détache 
du pédicelle. On ne doit guère imaginer qu'une disposition si régulière 
n'ait aucun but, et l'on n'en peut soupconner aucun autre que celui 
de la fécondation ; mais comme ce mouvement des sépales ne peut être 
attribué ni à la pression des pétales, ni à celle des étamines, il ne 
peut guère provenir que du sépale lui-même dont la base élastique se 
débande au moment mème de l'épanouissement. 

Les fleurs des Sinapis ont presque toujours quatre glandes très- 
apparentes qui donnent une assez grande quantité d'humeur miellée : 
deux sont intérieures aux petites étamines, et deux extérieures aux 
grandes; les anthères, naturellement introrses, deviennent souvent 
extrorses par le contournement de la partie supérieure du filet, comme 
on peut le voir dans l’4ba, le Turgida, etc., et lorsque les quatre 
supérieures, les seules qui puissent se retourner, répandent leur 
poussière, elles embrassent quelquefois le sommet du style, qui est 
toujours à leur hauteur et ne grandit que plus tard. Les poils des sili- 
ques ne s’étalent d'ordinaire qu'après la fécondation. 

Les pétales sont dépourvus de tout mouvement organique; mais 
les siliques, dressées pendant la floraison, se resserrent ensuite contre 
la tige, ou bien s’étalent de diverses manières, par une suite de 
mouvements bien plus réguliers que les formes des feuilles; les grappes 
s'allongent plus ou moins selon les espèces ; et les pédoncules s'épais- 
sissent quelquefois. 

Lorsque lé style est ensiforme, comme dans le Sénapis arvensis , il 
est articulé à la silique, comme celle-ci l'est au pédoncule, en sorte 
que ces trois parties ne forment pas un tout continu. A la dissémina- 
tion, les valves se détachent d'abord par la base, mais le style ne 
s'ouvre point, quand même il ést séminifère, comme cela a lieu dans 
l'Arvensis, et sans doute dans plusieurs autres Ceratosinapis. 

Quoique les racines des Sénapis soient amincies, elles ont cependant 
toujours, comme celles des Brassica, quelque tendance à grossir, et 
elles servent souvent, comme les tiges et les feuilles, d'habitation et 
de nourriture à plusieurs sortes d'insectes. 

Ds Canpoze dit qu'il a vu quelquefois une des petites étamines 
du Snapis juncea changée en un pétale frangé qui avait fait disparaître 
Ja glande nectarifère correspondante, et M. Alphonse DE CannoLLe 
a observé des graines de Sinapis ramosa du Bengale, soudées deux à 
deux dans toute leur longueur, et germant avec deux, trois ou quatre 
cotylédons plus ou moins déformés. 

Quelle est la cause du plissement longitudinal des graines du Sina- 


— 262 — 


pis et en général des Brassicées, et comment est placée leur radicule 
par rapport à la cloison ? est-elle parallèle ou perpendiculaire, interne 
ou externe? sa disposition est-elle constante ou variable? c’est ce que 
j'ignore. Dans l’Incana de la section des Xtrschfeldia la graine est pen- 
dante, et la radicule supère descend parallèlement aux valves; mais 
comme la silique est cloisonnée , la situation primitive est quelquefois 
un peu dérangée. Je vois bien dans le bec les deux semences dont 
lombilic est attaché à à la continuation de la cloison, et qui avortent 
souvent en tout ou en partie; mais l’on ne RTE pas bien com- 
ment, d'un côté, le bec est organisé en deux valves à la manière des 
siliques, et comment de l’autre il est articulé. 


QUATRIÈME GENRE. — Moricandia. 


Le Moricandia a un calice fermé et bosselé, des pétales entiers et 
étalés, des étamines libres et non dentées, une silique aplatie, tétra- 
gone, allongée, linéaire, biloculaire, à deux valves planes ou légè- 
rement carénées ; la cloison est membraneuse, le style conique, aplati, 
asperme ou rarement monosperme, les semences ovales, petites et 
bisériées. 

Ce genre est formé de trois espèces autrefois éparses dans divers 
genres, et qui diffèrent du Prassica et du Sinapis par leurs graines 
bisériées, leurs siliques. tétragones et la couleur de leurs fleurs. Ce 
sont des plantes bisannuelles ou sous-frutescentes, glabres et ordi- 
nairement glauques; leurs tiges sont cylindriques, blanchtres, 
droites, rameuses et peu consistantes, leurs feuilles sont épaisses et 
leurs grappes terminales; leurs pédicelles sont nus, filiformes et tou- 
jours redressés , leurs fleurs grandes et pourprées. 

La principale espèce et la seule européenne est le Moricandia arven- 
sis, répandu dans les champs humides et argileux de l'Europeaustrale, 
en Espagne, en France, en Grèce, en Italie, et jusque dans la Mau- 
ritanie. C'est une belle plante herbacée dans sa jeunesse, et plus con- 
sistante dans la suite; ses feuilles glauques et assez épaisses sont 
ovales et étalées à la base, cordiformes, amplexicaules et entières vers 
le sommet. Ses grappes sont lâches et allongées, ses fleurs belles, 
grandes et violettes ; leur calice, serré et un peu capuchonné au 
sommet, porte à la base deux bosses prolongées qui correspondent 
à deux glandes vertes placées à la base des petites étamines; les 
anthéres, dont les latérales sont de moitié plus longues et ont par 
conséquent les filets plus courts que les autres, sont chargées exté- 
rieurement de glandes jaunâtres; la silique est longue, droite et 


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terminee par un style conique, dont les deux faces opposées sont creu- 
sées en gouttière et fortement papillaires. 

Lorsque cette plante croît dans les champs, elle est herbacée; mais 
lorsqu'elle vient sur les collines arides et montueuses , elle est sous- 
frutescente. | 

Les deux autres espèces du genre habitent l'Égypte ou les déserts 
qui l’avoisinent; l'Hesperidiflora appartient au type de l’Arvensis ; le 
Teretifolia, à feuilles multifides et lobes filiformes, ne dépend peut- 
être pas du même genre; au moins, ses cotylédons n'ont pas encore 
été examinés. 


CINQUIÈME GENRE. — Diplotaxis. 


Le Diplotazis a un calice lâche et non bosselé, des pétales entiers 
etétalés, des étamines libres et non dentées , des siliques linéaires, 
aplaties, biloculaires, à nervure médiane et cloison membraneuse ; 
le style est conique ou très-court, et contient rarement une ou deux 
semences ; les graines sont ovales, petites, bisériées ou unisériées par 
avortement. 

Les Diplotaxis sont des herbes droites, rameuses, glabres ou his- 
pides ; leurs feuilles sont souvent un peu charnues; leurs grappes sont 
allongées, leurs pédicelles filiformes et nus, leurs fleurs presque tou- 
Jours jaunes. 

Ce genre, créé par De Cannozze et adopté par plusieurs botanistes, 
est formé d'espèces auparavant éparses dans les Brassica , les Sinapis 
et les Sisymbrium, et réunies par le caractère commun de leurs graines 
bisériées; leur calice est plus ouvert que celui du Brassica, et moins 
que celui du Sinapis, il n’est pas bosselé comme celui du Moricandia. 

On partage les Diplotaxis en deux sections très-naturelles : 

1° Celle des Catocarpos, à siliques pendantes, et stigmate à peu 
près sessile ; 

2° Celle des Anocarpos:, à siliques redressées et stigmate conique. 

Les Catocarpos sont composés de quatre espèces , toutes indigènes 
des bords de la Méditerranée, deux de la Sicile ou de l'Espagne, et 
deux autres de la Barbarie ou desenvirons du Caire. Ce sont des herbes 
bisannuelles, à feuilles irrégulièrement dentées ou incisées, et ordi- 
nairement recouvertes de poils un peu rudes; leurs fleurs, disposées 
en panicules lâches, sont jaunes et petites; leurs siliques deviennent 
pendantes dans la maturation : cette section paraît ne former qu’un 
seul type. 

Les Anocarpos sont plus nombreux et habitent principalement 


— 264 — 


l'Europe méridionale, On y distingue d’abord l'£rucoïdes de l'Espagne 
et de l'Italie, qui se fait remarquer par ses feuilles lyrées, son style 
ensiforme, $es fleurs blanches long-temps épanouies, et ses semences 
irrégulièrement bisériées. Ensuite viennent le J’érgata et le Catholica, 
tous les deux annuels, originaires de l'Espagne, distingués des suivants 
par leur tige feuillée, leur style allongé, cylindrique ou ensiforme, 
leur silique linéaire et leurs semences régulièrement bisériées. | 

: Mais le type le plus marqué de ce genre, est celui des espèces à tiges 
presque nues, à style courtet ordinairement filiforme, à feuilles lyrées, 
pennatipartites, glabres et épaisses. On peut le représenter par le 
Tenuifolia, plante vivace, qui orne, pendant tout l'été, de ses grandes 
fleurs d’un jaune citron, les décombres, les bords des murs et les 
graviers de l'Europe. Auprès d’elle se place le Muralis , plus petit dans 
toutes ses parties, maïs fleurissant à la même époque et dans les mêmes 
localités. Il se distingue aisément à ses racinés annuelles, à ses pétales 
moins grands et d'un jaune plus pâle. Les autres espèces sont le Barre: 
lieri de l'Espagne, reconnaissable à ses feuilles radicales, hispides 
principalement sur les pétioles et les nervures; le Scaposa de l'ile de 
Lampedouse, remarquable par sa petitesse; le Viminea des vignes et 
dés cultures de la France et de l'Italie, enfin le Saxatilis, vivace comme 
le Tenuifolia, et habitant les rochers et les collines méridionales. Il a 
le port des autres Diplotaxis, mais ses semences, bisériées au sommet 
de la silique, sont unisériées à la base. 

Ce genre possède à un assez haut degré, comme on peut en juger 
par le Tenuifolia, la saveur âcre et piquante des Sénapis ; mais ses 
diverses espècés ne sont ni cultivées, ni admises dans les jardins 
d'ornement, 

Les principales observations physiologiques auxquelles il donne 
lieu, concernent le mouvement des pétales, qui, dans le Tenuifolia, 
se ferment vers le soir et s'ouvrent dans la matinée, et la torsion des 
filets qui nuirait à la fécondation, si les anthères devenues extrorses 
ne repliaient, du côté du stigmate, leur extrémité supérieure. 

Les anthères se retournent souvent en dehors dans ce genre et dans 
quelques autres, sans doute afin que le pollen puisse tomber en 
partie sur les glandes du torus; c'est pour faciliter cètte communi- 
cation que les pétales s’écartent du style, comme on peut le voir, par 
exemple, dans le Tenuifolia. 

Presque tous les Diplotaxis portent sur leur torus quatre belles 
glandes vertes, deux sessiles entre le pistil et les étamines latérales , 
et deux pédicellées plus saillantes hors des grandes étamines: Les 


styles, dans lès mêmes espèces, sont souvent séminifères ou aspermes ;' 


x 


HG 


les siliques, presque toujours sessiles, sont un peu stipitées dans le 
Tenuifolia, et les graines pendantes ne sont pas placées régulièrement 
sur deux rangs dans toutes les espèces. 


SIXIÈME GENRE. — Æruca. 


L'Æruca a un calice droit, des pétales entiers à limbe ovale, des éta- 
mines libres et non dentées, une silique ovale, oblongue, biloculaire, 
bivalve, à valves lisses et concaves, un style ensiforme, aptère, pres- 
que aussi long que les valves. 

Ce genre diffère du Brassica, non-seulement par la forme de son 
style, mais encore par son port, et il s'approche des Vella par sa 
silique et ses pétales veinés. Il est composé de trois espèces indigènes 
de l'Europe australe, qui sont toutes des herbes annuelles, droites, 
rameuses, à pédicelles nus et filiformes, pétales blancs ou jaunâtres 
et toujours veines. 

La principale et la plus connue de ces espèces est l'Eruca sativa, 
cultivé de temps immémorial. C'est une belle plante qui s'élève jusqu'a 
trois pieds, ét qui varie extrêmement, soit pour la couleur des pétales, 
soit pour la forme de la silique ; ses feuilles plus ou moins velues sont 
lyrées, pennatipartites ; ses fleurs sont portées sur des grappes allon- 
gées, ses pédoncules hispides sont plus courts que le calice, qui est 
livide ou bleuûtre, et serré contre les pétales; son torus est chargé de 
quatre glandes nectarifères disposées comme dans les Diplotaxis. Les 
siliques sont droites et raccourcies, les-valves se séparent comme par 
élasticité, et la cloison demeure attachée inférieurement à la base du 
fruit et supérieurement à son bec. On reconnaît, à la vue simple; 
que les cotylédons sont incombants, condupliqués, et que la radicule 
est fort saillante. Les semences sont souvent bisériées. 

Les deux autres espèces d'Eruca sont l'Hispida du royaume de 
Naples, variété du Sativa et plus petite dans toutes ses dimensions, 
et le Vesicaria de l'Espagne, très-remarquable par son calice persis- 
tant, qui se dilate un peu après la fécondation, pour protéger la sili- 
que hispide et renflée, dont la cloison a été déformée par les graines. 

La fécondation du Vesicaria est immédiate : les anthères, cartilagi- 
neuses extérieurement, serrent, pendant tout le cours de la floraison 
et long-temps après, le stigmate qu’elles recouvrent de leur pollen 
jaunâtre et adhérent, et le calice protége assez long-temps le jeune 
fruit. 

Les fleurs de l'£ruca sativa ont l'odeur de celles des Orangers. 


— 266 — 


Treizième tribu. — ORTHOPLOCÉES LATISEPTES, ou VELLÉES. 


Les Vellées ont une silicule à cloison elliptique, à valves concaves 
et déhiscentes en longueur ; leurs semences sont globuleuses et leurs. 
cotylédons condupliqués. 

Les Vellées ont la cloison elliptique et les valves concaves des 
Alyssinees ; elles forment un petit groupe de Crucifères sous-frutes- 
centes et herbacées, particulières à l'Espagne. 


PREMIER GENRE. — Ÿ’ella. 


Le Fella a un calice droit et non bosselé, des pétales à limbe en- 
tier ou échancré, six étamines dont les quatre grandes sont réunies 
par paires; l'ovaire est ovale, le style élargi et foliacé, la silicule ovale , 
aplatie, la cloison mince et bordée de placentas qui se réunissent en 
un style plane, foliacé, terminé par deux stigmates ; les loges renfer- 
ment une ou deux semences globuleuses et pendantes; les cotylé- 
dons sont foliacés et bilobés au sommet. 

Ce genre ne comprend qu'une seule espèce, le 7’ella Pseudo-Crytisus,, 
petit arbrisseau de deux ou trois pieds, qui croît en Espagne, sur 
les collines gypseuses des environs d’Aranjuez, où il fleurit dès l’entrée 
du printemps; ses tiges sont droites et rameuses, ses feuilles petites, 
nombreuses, ovales, entières, persistantes, ee sur les bords et un 
peu ue sur Lx deux surfaces ; les grappes sont droites, allon- 
gées et comme terminales ; les: vai sont très-courts, garnis de 
quelques bractées dans le bas et nus vers le haut; le calice est persis- 
tant, les pétales ont leur limbe jaune et leur onglet blanchätre en 
dedans du calice et pourpré en dehors; leurs semences naturellement 
géminées dans chaque loge, sont quelquefois solitaires par avor- 
tement. 

Le J’ella est un exemple rare de Cruciferes arborescents ; il est aussi 
remarquable par son mode de végétation que par la conformation de 
ses fleurs à étamines soudées et anthères libres. DE Canpozre observe 
qu’on trouve quelquefois aux aisselles de ses jeunes feuilles des fleurs. 
éparses et solitaires. 


SECOND GENRE. — Doleum. 


Le Boleum, réuni autrefois au /’ella, a aussi le calice droit et non 
bosselé, les grandes étamines réunies par paires, et l'ovaire ovale; 


— 267 —- 


mais son style est une languette étroite et presque subulée; sa silicule 
est ovale à valves indéhiscentes et concaves, sa cloison est mince et 
elliptique; ses semences varient d’une à deux dans chaque loge. 

Cette plante est, comme le 7’ella, un sous-arbrisseau des collines 
caillouteuses et stériles de l'Espagne ; ses rameaux sont droits, courts, 
hérissés de poils, comme les feuilles qui sont lobées à leur base et 
entières près du sommet. Les fleurs sont disposées en corymbes qui 
ne tardent pas à s'allonger, et dont les pédicelles inférieurs portent 
des bractées ; les pétales sont d'un jaune pâle et marqué de veines plus 
foncées ; les siliques sont globuleuses et hérissées de poils. 

Ce genre a tout-à-fait le port et l'organisation du Fella, dont il ne 
diffère que par son style beaucoup plus étroit, et sa silique à peu 
près indéhiscente. 


TROISIÈME GENRE. — Carrichtera. 


Le Carrichtera a un calice droit et légèrement bosselé, des pétales 
entiers, des étamines libres, un ovaire ovale, un style plane, foliacé 
et persistant, une silicule ovale, biloculaire et bivalve, des valves 
concaves et déhiscentes, une cloison membraneuse, quatre semences 
globuleuses et pendantes dans chaque loge. 

Ce genre ne contient non plus qu’une espèce, le Carrichtera Vellæ, 
plante herbacée qui fleurit à la fin de l'hiver dans les champs sablon- 
neux, sur les décombres et au milieu des chemins de l'Espagne méri- 
dionale, des iles Baléares, de la Sicile, de la Grèce, de la Mauritanie et 
de la Syrie. Elle est annuelle, rameuse et toute couverte de poils pi- 
quanits; ses feuilles sont bipennatipartites, alternes et un peu hérissées ; 
ses rameaux sont opposés aux feuilles quoiqu'ils paraissent terminaux ; 
ses fleurs sont petites, à calice fermé, valvaire et caduc; ses pétales 
jaunâtres, à veines pourprées ; sa silique est pendante sur le pédon- 
cule et recouverte de poils longs et coniques, ses semences plongées 
dans l'eau chaude se recouvrent d'une pulpe glutineuse, comme celles 
du J’ella et du Boleum. 

Je n'ai pas vu cette plante vivante, et je ne connais pas sa féconda- 
tion; il faut qu'elle soit assez remarquable, puisque son style coriace 
et foliacé finit par se rouler en limacon. Qu'est-ce que le stigmate, 
et comment est-il disposé à l'égard des anthères qui sont appen- 
diculées ? 

Les cotylédons sont fortement bilobés, comme dans les deux genres 
précédents, et l'extérieur plus charnu est bombé sur le dos. 


— 268 — 


QUATRIÈME GENRE. — Succow#iu. 


Le Succowia a le calice droit et légèrement bosselé, des pétales 
entiers, des étamines libres, un ovaire ovale, un style tétragone, 
subulé, une silicule ovale, globuleuse, biloculaire, bivalve, à valves 
concavés, déhiscentes, hérissées ; la cloison est membraneuse; les se- 
mences solitaires dans chaque loge sont globuleuses et pendantes. 

Le Succowia, dont on ne connaît non plus qu’une espèce, le 
Balearica, habite les Baléares, l'ile de Ténériffe, et se retrouve en 
Sicile comme en Sardaigne. Cette plante annuelle est au Carrichtera 
ce que le Boleum est au Vella ; ses tiges sont glabres et rameuses , ses 
feuilles pennatipartites, ses grappes opposées aux feuilles, droites et 
allongées ; ses pédicelles filiformes et nus, ses fleurs petites et jaunes. 

Le Succowia diffère du Carrichtera non-seulement par la forme de 
son style conique et subulé, mais encore par ses semences solitaires 
et non quaternées dans chaque loge. 

Ses cotylédons sont conformés comme ceux de la même tribu. 


Quatorzième tribu. — ORTHOPLOCÉES NUCAMENTACÉES, ou ZILLÉES. 


Les Zillées ont la silicule indéhiscente, à peu près globuleuse et 
formée d'une ou deux loges , dont les valves ne sont pas distinctes ; 
les semences sont globuleuses et solitaires dans chaque loge. 

Cette tribu ne diffère presque de celle des Vellées, que par son 
fruit indéhiscent et monosperme. Elle est composée de {rois genres. 
et d'autant d'espèces, dont deux habitent les sables de l'Égypte ou de 
l'Afrique boréale ; l'Europe n’en contient qu’une. 


PREMIER GENRE. — Zülla. 


Le Zilla a une silicule indéhiscente à deux loges monospermes, 
son fruit est à peu près celui du Crambe, et ses épines ressemblent à 
celles de l’Æ/yssum epineux. 

Le Zilla myagroides, ou le Bunias spinosa de Lanx, la seule espèce 
de ce genre, est une plante annuelle à tige glabre, feuilles épaisses et 
linéaires, et rameaux terminés par deux ou trois pointes qui ne par- 
tent pas du même point; ses fleurs placées près des épines et quel- 
quefois à leur aisselle sont d’abord blanchâtres et passent bientôt au 


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rouge violet; les anthères sont jaunes et introrses, un peu élevées 
au-dessus d’un stigate allongé et papillaire qu’elles recouvrent de 
leur pollen, les glandes nectarifères sont placées à la manière ordinaire, 
deux en dehors des grandes étamines et deux en dedans des petites ; 
le pistil qui paraît d'abord régulier se déforme dans la maturation, et 
devient enfin unesilicule te et biloculaire qui est sans doute trans- 
portée au gré des vents, à travers les sables de l'Égypte, où habite 
exclusivement cette plante, 


SECOND GENRE. — Calepina. 


Le Calepina a un calice non bosselé, des pétales ovales, un peu 
agrandis à l'extérieur, des étamines non dentées, un ovaire ovale, 
un style conique et très-court, ou même nul, une silicule coriace, à 
peu près globuleuse, indéhiséentes nriloetlère et monosperme; une 
semence SA pendante et tronquée au sommet, des cotylédons 
incombants, recourhés, tronqués et légèrement con du pliuiiés sur les 
bords. 

Ce genre ne compte qu’une seule espèce, le Calepina corvini, 
plante annuelle qui croît dans les champs, les vignes, les sables et les 
décombres de l'Europe australe ; ses feuilles radicales sont sinuées et 
s'étendent en rosule sur le sol; les autres sont entières, arrondies et 
très-obtuses ; la tige, d'abord penchée, simple ou rameuse, porte, 
vers le sommet, des feuilles amplexicaules et légérement auriculées; 
les fleurs, très-petites, sont disposées en grappes lâches et terminales 
sur la tige, et les rameaux à peu près axillaires et assez allongés ; leur 
calice est blanchâtre et fermé, leurs pétales sont blancs à onglet dilaté, 
leurs étamines incluses etun peu élargies à la base; les silicules petites, 
réticulées, ridées, dures, osseuses, recouvertes d'une pulpe verte et 
adhérente , ne s'ouvrent jamais, quoiqu on trouve à leur surface des 
traces évidentes de suture. 

Cette plante a été successivement placée dans divers genres , et n’a 
vraiment de rapport qu'avec le Crambe, dont elle diffère encore par 
sa silicule sessile, uniloculaire, et par ses étamines non dentées. Elle 
s'écarte de toutes les Cruciferes connues, par la structure bizarre de 
ses cotylédons repliés peut-être sur les bords par le resserrement de 
la silicule. 

On peut remarquer ici que les Cruciferes, dont la silique a conservé 
sa forme primitive, appartiennent surtout aux zones froides et tem- 
pérées, et que les autres habitent de préférence les contrées méri- 
dionales. Le climat at-il quelque influence sur ce genre d'avortement ? 


— 270 — 

Apawsox dit que le torus du Calepina est chargé de quatre glandes 
cylindriques; Gauwnin, qui a décrit la plante fraîche avec beaucoup 
d'exactitude, ne fait aucune mention de ces glandes, que je n’ai pas 
non plus apercues. | 

La fécondation est directe, les anthères s'élèvent à la même hauteur 
que le stigmate qui est élargi, tronqué, et paraît porter à son centre une 
petite pointe ; à la dissémination, la silicule se sépare du pédicelle. 

Le Calepina est bisannuel, puisqu'il fleurit au premier printemps. 
Sa racine porte au sommet un tubercule assez allongé, sur lequel sont 
comme implantées les feuilles radicales qui tombent de très-bonne 
heure. 


Quinzième tribu. — ORTHOPLOCÉES LOMENTACÉES , ou RAPHANÉES: 


Les Raphanées ont la silique ou la silicule divisée transversalement 
en articulations monospermes ou polyspermes, et renferment des 
semences globuleuses. 

Cette tribu approche, pour la structure de son fruit, de celle des 
Cakilinées , dont elle diffère essentiellement par la forme de ses coty- 
lédons. 


PREMIER GENRE. — Crambe. 


Le Crambe a le calice ouvert et légèrement bosselé, les pétales 
entiers, les grandes étamines souvent dentées latéralement près du 
sommet, l'ovaire ovale, le style court ou nul, le stigmate en tête, la 
silicule coriace , à deux articulations indéhiscentes et uniloculaires, 
l'inférieure avortée en forme de pédicelle, la supérieure globuleuse et 
monosperme; le funicule naît de la base et se recourbe au sommet, où 
il porte une semence globuleuse et pendante; les cotylédons sont 
épais, un peu foliacés et profondément échancrés; les articulations 
se rompent à la maturité, selon GÆRTNER. 

Ce genre, qui est très-naturel et se distingue par son port et la sin- 
gulière conformation de sa silicule, est formé de plantes herbacées ou 
sous-frutescentes, à feuilles épaisses ou minces, velues ou glabres, 
pétiolées, incisées, lyrées ou pennatifides; leurs grappes allongées 
forment, par leur réunion, une panicule lâche, à pédoncules filiformes 
et fleurs blanches. 

Les Crambe habitent les bords de la Méditerranée , depuis les Cana- 
ries, où se -trouvent les espèces frutescentes, jusqu’à l'Asie orientale 


— 271 — 


et la Perse, qui en renferment d’autres annuelles ou seulement vivaces. 
Le Maritima croît sur les rivages de l'Europe boréale, et le Filiformis 
dans la Patagonie. 

On peut commodément, selon DE Canpozze, diviser les Crambe 
en trois sections naturelles : 

1° Les Sarcocrambe, à silicule dont l’article inférieur est aplati et 
épais, le stigmate sessile, et les grandes étamines dentées; leur racine 
est vivace et branchue au collet ; 

2° Les Leptocrambe à silicule dont l’article inférieur est cylindrique, 
allongé, le stigmate sessile, les étamines dentées ou non dentées ; leur 
racine est annuelle ou bisannuelle, leur tige solitaire; 

3° Les Dendrocrambe, à silicule dont l’article inférieur est court 
et filiforme, et le stigmate légèrement pédicellé; leur tige est frutes- 
cente. 

Les Sarcocrambe sont formés de huit espèces appartenant à peu 
près au même type, et qu'on distingue à leurs feuilles plus ou moins 
divisées, à leur surface ordinairement glabre et glauque, quelquefois 
âpre au toucher et même hérissée de poils rudes. La principale de ces 
espèces et la seule un peu connue , estle Maritima, qu'on cultive dans 
les jardins et dont l’on mange au printemps les jeunes pousses étiolées. 
Ses fleurs paraissent dans le mois de mai, et se font remarquer par 
leurs grands filets bifurqués et même trifurqués, assez dilatés pour 
entourer entièrement l'ovaire, qui se termine par un beau stigmate 
globuleux et papillaire. Les anthères sont plutôt latérales qu'introrses, 
et le torus est chargé de quatre glandes, dont les plus marquées sont 
extérieures aux grandes étamines. Les autres espèces sont l'Orientalis, 
qui ne diffère du Maritima que par ses feuilles chargées de quelques 
poils rudes; le Pinnatifida de la Hongrie et des déserts du Caucase, 
à peu près moyen entre les deux précédents; le Tutaria, indigène des 
mêmes contrées, à feuilles radicales décomposées ; lÆspera et le Juncea 
de la Tauride et de l'Ibérie, tous les deux recouverts de poils rudes, 
et dont le premier a la silicule ridée ; le Cordifolia, des environs du 
Caucase, remarquable par ses feuilles cordiformes et par la petitesse 
de son article inférieur ; enfin le Grandiflora du Pont-Euxin, dont les 
pétales sont très-grands, mais qui n'appartiendra définitivement aux 
Crambe que lorsqu'on aura examiné sa silicule. Toutes ces plantes, 
comme je l'ai déjà dit, sont des herbes vivaces dont le torus est chargé 
de glandes, et dont la silique se détache tout entière et se sème sans 
s'ouvrir. 

La fécondation des Dendro-Crambe est extérieure : les antheres, 
glanduleuses postérieurement, recouvrent de leur pollen la tête admi- 


1979. — 
rablement papillaire du stigmate, et en laissent tomber en même temps 
une partie sur les glandes du torus. 

Les Leptocrambe, à tige mince et solitaire, et à racine annuelle, 
sont réunis sous trois espèces qui appartiennent au même type : 
l’Hispanica de Y'Espagne, le Reniformis des rochers de l'Atlas, et le 
Filiformis à rameaux filiformes, de la Patagonie. Ce sont des hérbes 
hautes de deux ou trois pieds, à feuilles inférieures lyrées, pennati- 
fides et rudes au toucher, à silicules petites, globuleuses et lisses. Les 
deux premières ont leurs’grandes étamines dentées; mais dans la troi- 
sième , les dents sont souvent avortées. 

La fécondation du Filiformis est intérieure : les anthères laissent 
tomber leur pollen sur le disque jaunâtre et papillaire du stigmate 
sessile, qui ne tarde pas à se dessécher et à sortir de la fleur par l’allon- 
gement de son article inférieur. 

Enfin, les Dendrocrambe, ou Crambe frutescents , habitent exclusive- 
ment le groupe des Canaries, et se composent de deux espèces à feuilles 
plus ou moins divisées, blanchâtres et recouvertes de poils roides. La 
première, ou le Fruticosa des rochers élevés de Madère, a les filets 
dentés et la silicule lisse; la seconde, ou le Strigosa des plaines 
humides de Canarie ou de Ténériffe, a les filets tantôt dentés, tantôt 
non dentés, la silicule ridée et comme réticulée. Le style est persistant 
jusqu'à la maturité dans l’une et l’autre espèce. 

Les silicules des Crambe varient non-seulement pour la forme, mais 
encore pour le mode d’avortement; l’article inférieur, ordinairement 
vide, est primitivement séminifère dans le Maritima , selon GÆRTNER, 
et le supérieur contient d’abord deux loges et deux semences dans 
chaque loge. C'est une singulière transformation que celle dont la 
dernière phase s'opère ici sous les yeux, et il serait bien intéressant 
de voir les silicules des Crambe ramenées à leur état primitif par quel- 
que monstruosité ; mais il paraît, comme on peut aisément le conce- 
voir, que plus un organe s’écarte de sa structure primitive, plus aussi 
il devient difficile de l'y rappeler. Si l'on examine une silicule de 
Crambe maritime, un peu après la fécondation , on trouvera qu’elle est 
déjà fortement déformée, quoiqu'’elle contienne encore des traces de 
ces deux loges, et l’on reconnaîtra, je pense, que ce cordon funiculaire, 
auquel est suspendue la semence supérieure, est l’un des deux placen- 
tas de la cloison détruite, et qu’il communique évidemment à la graine 
inférieure qui prend d'abord quelque accroissement, mais dépérit 
pour l'ordinaire ; on verra dans une cavité supérieure de la graine 
supérieure les premiers rudiments verdâtres de l'embryon, et l’on en 
conclura que cette silicule, primitivement régulière, a été déformée 


2, 
par des développements et des accroissements insolites, mais qu'en 
même temps elle conserve toujours au moins une graine par laquelle 


elle se reproduit. Y a- -t-il des plantes qui aient été détruites par défaut 
de semences fertiles ? 


SECOND GENRE. — Enarthrocarpus. 


L'Enarthrocarpus a une silique à deux articulations, l'inférieure 
raccourcie renferme deux ou trois graines, la supérieure plus longue 
en compte neuf à dix, séparées par autant de loges. 

Ce genre est formé de trois petites plantes annuelles, homotypes et 
assez semblables pour être considérées comme de simples variétés ; 
leurs feuilles radicales sont lyrées ou pennatifides, leurs feuilles 
jaunes et rougeâtres ; elles croissent au milieu des blés dans l'Égypte, 
la Crète, etc., et se reconnaissent tout de suite à la singulière confor- 
mation de leur capsule recourbée. 


TROISIÈME GENRE. — /apistrum. 


Le Rapistrum a un calice lâche, des pétales onguiculés et entiers, 
des étamines non dentées, une silicule coriace, iomentacée et formée 
de deux articles monospermes à peine séparables, l'inférieur est à peu 
près conique et souvent stérile, le supérieur presque globuleux, ridé 
et terminé par un long style filiforme ; la semence du locule inférieur 
est pendante, celle du supérieur est droite. 

Ce genre diffère du Crambe par son port, ses feuilles non charnues, 
ses étamines non dentées et ses fleurs jaunes. Il est principalement 
formé de deux espèces européennes, annuelles ou vivaces, à tiges ra- 
meuses, à feuilles pubescentes ou velues, lyrées ou pennatifides , à 
grappes allongées, à pédicelles filiformes et redressés. 

Le Rapistrum rugosum, indigène de l'Europe centrale et méridio- 
nale, habite les champs sablonneux et les masures, où il fleurit tout le 
long de l'été; c'est une plante annuelle sans apparence , dont les nom- 
breux rameaux nus et effilés sont couverts de petites fleurs jaunes ; ses 
silicules appliquées contre les tiges ont leur article inférieur mince et 
cylindrique, le supérieur globuleux, renflé et marqué de six à huit 
sillons obtus. Le Perenne, qui a été souvent confondu avec le Rugo- 
sum, et qui se trouve à peu près dans les mêmes localités, où il est 
plus rare, en diffère par sa racine vivace et profonde, ses feuilles 
pennatifides et non lyrées, sa silicule glabre, à deux articulations lisses, 
légèrement aplaties et à peu près semblables, lorsqu'il n’y a point 

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d'avortement. Les autres espèces de Rapistrum , telles que l'Orientale 
de la Sardaigne, peuvent être considérées comme des variétés du 
Rugosum. 

La fécondation du Rugosum et du Perenne est directe comme celle 
de la plupart des Cruciferes ; j'ai remarqué que non-seulement les an- 
thères se recourbent au sommet, mais qu'elles tordent leurs filets afin 
de présenter leur ouverture en dehors. 

Dans la dissémination, l'articulation supérieure se détache et se sème 
sans s'ouvrir, mais l'inférieure s'ouvre en deux valves qui représentent 
une silicule ; on doit supposer, comme dans le Cakile, que l'articulation 
supérieure est un prolongement de la cloison dont les deux placentas 
se sont rapprochés. C’est une chose bien remarquable que cet avorte- 
ment constant dans les genres que nous décrivons. 

Les calices des Rapistrum sont un peu bosselés, leurs pétales échan- 
crés ont un onglet presque pédicellé, et leur torus est chargé de 
quatre glandes. 

DE Canpoze avait d'abord placé ce genre à côté du Cakile, parmi 
les Cruciferes à cotylédons oblongs etaccombants; mais À NDRZE1OWSKI, 
l'a rapproché du Raphanus, à cause de ses cotylédons condupliqués. 


QUATRIÈME GENRE. — Worisia. 


Cette singulière plante, qui avait d'abord été rangée parmi les 
Rapistrum , a été dédiée au botaniste Moris, à qui nous devons une 
Flore complète de la Sardaigne. Elle croît sur le rivage méridional 
de la Corse, etc.; et a été décrite par Vivranr sous le nom d’Erucaria 
Epigæa, parce que ses cotylédons sont incombants et condupliqués 
et non pas repliés en spirale; ses feuilles sont découpées et disposées 
en rosette, à peu près comme celles du Capsella Bursa pastoris , et ses 
fleurs sont pédonculées, solitaires et jaunâtres. Après la floraison, leur 
pédoncule se renverse et tourne contre la terre une silique arrondie, 
formée de deux articles, le supérieur souvent monosperme, asperme 
ou avorté; l'inférieur ordinairement à deux loges dispermes ; la silicule 
ne tarde pas à s'enfoncer dans la terre où elle dépose ses semences : 
c'est là une forme de dissémination qui se trouve bien dans quelques 
autres familles, mais qui est, je crois, unique dans les Cruciféres. Du 
reste, la forme des deux articles et le nombre de leurs semences est 
assez variable. 

Le Morisia Epigæa est vivace et fleurit de novembre en juin; sa 
rosule s'accroît à mesure que ses silicules se sèment, et ses nouvelles 
feuilles , qui sortent toujours du centre et remplacent les anciennes, 


— 275 — 


s'étendent sans plissements. On en distingue deux variétés : le Radi- 
cars, dont les pédoncules uniflores naissent de la racine, et le Cau- 
lescens, dont quelques-uns naissent d'une tige très-raccourcie. 


CINQUIÈME GENRE. — Aaphanus. 


Le Raphanus a un calice dressé, un peu bosselé à la base, des pé- 
tales ovales ou cordiformes, des étamines non dentées, une silicule 
cylindrique, évalve, coriace ou subéreuse, biloculaire ou uniloculaire 
par avortement, tantôt continue, tantôt étranglée cà et là dans sa 
longueur ; le style est conique, les semences unisériées sont globu- 
leuses et pendantes, les cotylédons sont épais et échancrés. 

Les espèces de ce genre sont des herbes annuelles, droites et ra- 

_meuses, glabres et légèrement hispides, à rameaux cylindriques et 
divariqués ; leurs racines pivotantes et plus ou moins charnues sont 
coléorhizées; leurs feuilles inférieures pétiolées et lyrées; leurs grappes, 
tantôt opposées aux feuilles et tantôt terminales, sont allongées et por- 
tent des pédicelles nus et filiformes; leurs fleurs jaunes, blanches 
ou pourprées, sont grandes et ordinairement veinées. 

Ce genre a été divisé par De Canpozze en deux sections : 

1° Celle des Raphanis, à silique feutrée, biloculaire et rarement 
étranglée ; 

2° Ceile des Raphanistrum, à silique coriace, uniloculaire et ordi- 
nairement articulée à la maturation. 

La première section comprend le Raphanus sativus, plante origi- 
naire de la Chine et du Japon, cultivée aujourd'hui dans tous les 
jardins, où elle se reconnait promptement à ses fleurs d'un rouge 
violet et quelquefois blanchâtre, ainsi qu’à ses siliques cylindriques 
et biloculaires, dont les semences sont séparées par des cloisons 
transversales. Elle présente, comme les plantes cultivées, plusieurs 
variétés, dont les principales sont le Radicula, à racine charnue, 
blanche ou rose, et le Niger ou Radis noir, à racine plus dure et beau- 
coup plus âcre. La première est aussi cultivée comme plante oléifère, et 
alors elle prend , ainsi que le Colza, une racine amincie ; la dernière 
est regardée par quelques botanistes comme une espèce. 

Dans la seconde section, on range trois espèces européennes, dont 
la plus connue est le Raphanistrum proprement dit, plante qui est 
restée toujours sauvage, et qui vit parmi nos blés qu'elle infeste ; ses 
fleurs sont ordinairement d’un jaune citron, et ses silicules, couron- 
nées par un style persistant, sont régulièrement striées. Les deux 
autres espèces qu'on associe au Raphanistrum, et qui dépendent évi- 


Lo] 


Pb 

demment du même type, sont: 1° le Maritimus des rivages de l'An- 
gleterre et de la France occidentale, qui paraît vivace, et dont les 
feuilles sont irrégulièrement lyrées ; 2° le Landra des moissons de la 
Lombardie, dont les siliques sont légèrement striées, et dont les 
feuilles, semblables à celles du Maritimus, sont mangées en salade 
par les pauvres. 

Les Raphanus ont quatre glandes nectarifères, deux entre les petites 
étamines et la silique, et deux plus marquées en dehors des grandes 
étamines ; les veines de leurs pétales sont penniformes, et partent 
toutes d’une veine principale qui divise en deux le limbe; les siliques 
portent des traces manifestes de valves, quoiqu'elles ne s'ouvrent pas, 
parce que les sucs nourriciers qui s y dirigent en abondance obstruent 
les soudures ; la cloison s'aperçoit presque toujours avant la maturité, 
et les graines qui deviennent libres par la destruction du fruit, ne 
germent point dans l'intérieur des locules ; les grappes m’ont semblé 
souvent terminales, et j'ai remarqué sur les bords des feuilles, des 
glandes très-apparentes et quelquefois rougeîtres. 

Les diverses parties de ces plantes ne m'ont pas présenté de mou- 
vements organiques ; les calices ne s'ouvrent point ; les pétales ne se 
referment pas non plus, lorsqu'une fois ils sont épanouis ; mais ils se 
roulent sur leurs bords en se desséchant. 

Le Raphanus sativus offre dans sa racine un phénomène, dont 
l’on trouve l'exposition dans les Opuscules Phytologiques de Cassini, 
vol. 11, pag. 380. Cette racine, dans les espèces du genre, est constam- 
ment coléorhizée, c'est-à-dire revêtue d’une gaine ou d’une écorce, 
qui ne se continue point sur les racines proprement dites, mais s’ar- 
rête et s'ouvre à la base du caudex, et se détache ensuite depuis cette 
base jusqu’au sommet, pour se diviser en deux lanières longitudinales 
très-régulières et correspondant exactement aux deux cotylédons. J'ai 
remarqué dans la radicule de la graine non encore mûre, la trace de 
la fente ou la rainure qui devait diviser ensuite la coléorhize, et qui 
était donc antérieure au développement de la graine. 

La coléorhize, que l’on avait eru d’abord propre aux Monocotylées, 
lesquelles avaient en conséquence recu le nom d'Endorhizes , n'appar- 
tient pas seulement aux Raphanus ; on la trouve encore dans le Sinapis 
arvensis et dans l' Alba, et l'on en apercoit des traces dans quelques 
autres Crucifères, telles que le Malcomia maritima où Gazon de 
Mañon. 

Turin ( Annales des Sciences naturelles, novembre 1830), prétend 
que la coléorhize des Dicotylees n’a aucun rapport avec celle des 
monocotylées, et qu’elle est uniquement produite par la rupture de 


— 277 — 
l'écorce d’un premier mérithalle ou entre-nœud descendant, c'est- 
à-dire allongé au-dessous. Pourquoi s’apercoit-elle dès les cotylédons, 
et pourquoi la vraie racine ne commence-t-elle que plus bas, immé- 
diatement après le dernier nœud? 

La déformation des siliques des Raphanus s'opère avant la florai- 
son : à cette époque, les sutures sont déjà effacées, et les graines sont 
enveloppées par les replis membraneux de la cloison; ensuite la cloison 
s'épaissit, les valves de la silique deviennent succulentes surtout vers 
le bas, les graines se détachent de leurs sutures, et enfin la silique se 
perce et se fend irréguliérement pour l'émission des semences. Au 
contraire, on trouve constamment dans le Raphanistrun, une silique 
uniloculaire dépourvue de cloison , et remplie en si grande abondance 
de la substance même du péricarpe, que les funicules sont souvent 
détruits avant que les graines aient pu être fécondées. 

Sracx prétend que la silique du Raphanus est toujours articulée, 
mais que l'articulation, qu'il ne faut pas confondre avec les étrangle- 
ments et qui est située près de la base, s'oblitère assez facilement dans 
les variétés cultivées, et Kocun assure que, dans plusieurs espèces du 
genre, les étranglements se séparent naturellement. 


QuaTRIÈME ORDRE. — SPIROLOBÉES. 


Les Spirolobees ont leurs cotylédons incombants, linéaires, roulés 
en spirale, et leurs semences à peu près globuleuses. Ces plantes for- 
ment un ordre très-peu nombreux, qui ne contient que deux tribus : 
celle des Vucamentacees et celle des Lomentacées , lune et l'autre 
représentées par un seul genre. 


Seizième tribu. — SPIROLOBÉES NUCAMENTACÉES, ou BUNIADÉES. 


Les Buniadees ont une silicule lomentacée, indéhiscente , à deux 
ou quatre loges monospermes. 

On ne peut guère douter que cette tribu ne soit formée de plantes 
dont l'organisation primitive a été, en grande partie, détruite; car 
il ne contient qu'un très-petit nombre d'espèces, et dans ces espèces 
mêmes , la silicule-est si bizarrement et si différemment conformée, 
qu’elle a évidemment subi des altérations considérables. 


— 278 — 


Bunias. 


) 


Le Bunias a un calice non bosselé, des pétales onguiculés, des éta- 
mines non dentées , une silicule nucamentacée, indéhiscente, évalve, 
plus ou moins tétragone, biloculaire dans sa jeunesse, ensuite qua- 
driloculaire par le cours du développement. Les semences sont arron- 
dies, les cotylédons linéaires et roulés en spirale; la radicule est 
conique et prolongée en bec. 

Les Bunias sont des herbes à tige droite et rameuse, à racine simple 
et perpendiculaire, à tiges cylindriques, recouvertes près de leur 
sommet de glandes rousses et sessiles, et vers la base de poils simples ; 
les feuilles sont entières, pennatifides ou en rondache; les grappes 
sont allongées, les pédicelles filiformes, nus et assez étalés, les fleurs 
petites et jaunes. 

Ce genre est séparé de tous les autres par son port et ses caractères, 
et quoiqu'il soit formé d’un très-petit nombre d'espèces, il se partage 
commodément en deux sections naturelles : 

1° Celle des Erucago, à silicules quadriloculaires, tétragones, 
étroites et ailées; 

2° Celle des ZLælia, à silicule biloculaire et ovale. 

La première section est formée du Bunias Erucago, plante annuelle 
qui fleurit au printemps sur les bordures des champs et des chemins 
de l'Europe australe; ses feuilles radicales sont en rondache, et for- 
ment sur le terrain une rosette du centre de laquelle s'élève une tige 
glanduleuse et velue. Les fleurs, disposées en corymbe lâche, sont 
jaunes, penchées et fermées pendant la nuit, droites et ouvertes 
durant le jour. Leur torus est chargé de quatre glandes vertes, dont 
les plus grandes entourent la base des petites étamines. On joint à cette 
plante, comme variété, l’Aspera du Portugal, dont les feuilles sont 
quelquefois toutes laricéoléesl 

Les Lælia ne renferment non plus qu’une espèce, l'Ortentalis des 
champs et des prés de l'Europe orientale; elle fleurit à la même époque 
que la première, mais elle est vivace et plus élevée; ses feuilles infé- 
rieures sont irrégulièrement pennatilobées et chargées, ainsi que le 
reste de la plante et même le fruit, de ces petites glandes brunes et 
verruqueuses qui sont un des caractères du genre; la silicule est sou- 
vent monosperme par avortement. 

Ce genre, qui ne paraît pas artificiel, puisque les espèces qui le 
composent conviennent pour les fleurs, les feuilles et les aspérités 
glanduleuses, présente, comme les précédents, un bel exemple d'avor- 


— 279 — 


temens déterminés par le grossissement extraordinaire du péricarpe : 
lorsque sa paroi intérieure pénètre à travers les loges, elle les divise 
chacune en deux locules monospermes; lorsqu'elle surabonde, elle 
oblitère une des loges, et divise l'autre en deux locules superposés, 
dont le supérieur est souvent vide, ou ne renferme qu'une graine 
avortée. Le premier cas est celui des Erucago , l'autre appartient aux 
Lælia. } 

Si l’on examine la silique de l’Erucago avant que la fleur soit épa- 
nouie, on lui trouve la forme linéaire et allongée du péricarpe des 
Cruciferes, et l'on distingue très-bien la cloison qui la divise en deux 
dans toute son étendue. La déformation ne commence que plus tard, 
lorsqu'on voit paraître sur la surface de cette même silique quatre 
raies longitudinales, qui formeront ensuite quatre rangs irréguliers 
de tubercules. Les semences, d'abord assez nombreuses et symétrique- 
ment rangées, se déplacent ensuite et avortent en partie. 

Je ne peux guère concevoir les cotylédons spirolobés comme une 
forme primitive; j'imagine qu'ils ont été formés, dans le cours du dé- 


veloppement, par une pression longitudinale qui les a roulés dans un 
état de mollesse. 


Dix-septième tribu. — SPIROLOBÉES LOMENTACÉES , ou ÉRUCARIÉES. 


Les Erucariées ont la silique lomentacée , à deux articulations : l'in- 
férieure cylindrique et biloculaire, la supérieure uniloculaire et ensi- 
forme ; les semences sont légèrement aplaties, et les cotylédons repliés 
et légèrement roulés en spirale au sommet. 

Cette tribu est ainsi presque moyenne pour la forme des cotylédons 
entre les Spirolobées et les Diplécolobces, et assez voisine, pour le péri- 
carpe, des Cakilinees et des Raphances. 


Erucaria. 


L'Erucaria a un calice droit et non bosselé, des pétales ovales et 
longuement onguiculés, des étamines non dentées et plus grandes 
que le calice, une silique cylindrique à deux articulations, l’inférieure 
bivalve, biloculaire, à cloison membraneuse, et la supérieure ou Île 
bec, évalve, ensiforme et renfermant un petit nombre de graines 
dressées et non pendantes, comme celles de l'articulation inférieure. 

Ce genre est formé d'herbes annuelles, glabres, droites, rameuses, 
dont les tiges cylindriques et blanchâtres s’'endurcissent en vieillissant ; 


— 260 — 


les feuilles sont incisées ou plus souvent pennatipartites et plus ou 
moins charnues ; les grappes, qui s’allongent à la maturation, sont 
opposées aux feuilles et terminales; les pédicelles sont courts, nus et 
très-droits ; les fleurs sont d'un blanc pourpre. 

Les Erucaria; qui ont tout-à-fait le port du Cakile, habitent les 
déserts sablonneux de l'Orient, et se divisent en deux sections : 

1° Celle dont l'articulation supérieure se prolonge en un style fili- 
forme ; 

2° Celle dont l'articulation supérieure se termine en stigmate 
sessile. 

La première section renferme la principale espèce du genre, l'4/e- 
pica, des environs d'Alep, de la Syrie, de la côte occidentale de l'Asie 
mineure et même de l'Archipel; articulation inférieure de sa silique 
est déhiscente, et contient communément dans chaque loge quatre 
graines oblongues; l'articulation supérieure, au contraire, qui se 
sépare naturellement de l’autre, est indéhiscente, uniloculaire, et 
comprend un ou deux locules superposés et moncspermes. Les coty- 
lédons, selon Gærrver, sont roulés en spirale dans les graines pen- 
dantes, et simplement plissés en deux sur leur longueur dans les 
graines redressées, ou de l'articulation supérieure. Le Latifolia, indi- 
qué dans les mêmes lieux, appartient évidemment au même type, et 
présente seulement quelque différence dans les feuilles. v 

La seconde section est formée du Crassifolia, indigène de l'Égypte, 
où il est très-commun, et de l'Ayrcanica, qu'on croit habiter le nord 
de la Perse. Iis diffèrent par leurs feuilles plus ou moins divisées; et 
ils ont l'un et l’autre l'articulation supérieure, évalve, polysperme, 
séparable et terminée par un stigmate sessile. 

Les Erucaria offrent l'exemple unique de siliques moitié déhiscentes 
et moitié indéhiscentes, On peut remarquer que l'articulation infé- 
rieure, toujours déhiscente, renferme aussi un plus grand nombre de 
graines qui se sèment sur place, tandis que celles de l'articulation 
supérieure, enveloppées dans le péricarpe, sont dispersées par les 
vents. j 

L'Alepica se cultive dans les jardins de botanique, et présente le 
phénomène de ses quatre grandes étanines soudées deux à deux par 
leurs filets, et libres par leurs anthères, Les autres espèces sont encore 
tres-peu connues, 


— 281 — 


CiNQUIÈME ORDRE. — DIPLÉCOLOBÉES. 


Les Diplécolobées ont leurs semences aplaties, leurs cotylédons in- 
combants, linéaires, deux fois plissés transversalement, et non pas 
longitudinalement, comme dans les Orthoplocees. Elles se distinguent 
des Spirolobées par leurs cotylédons qui ne sont pas roulés en spirale, 
et dont la radicule n’est jamais détachée. 


Dix-huitième tribu. — DIPLÉCOLOBÉES SILIQUEUSES , ou HÉLIOPHILÉES. 


Les Heliophilées ont une silique allongée, plus souvent oblongue ou 
ovale; leur cloison est linéaire ou ovale, leurs valves sont planes, 
dans les siliques oblongues, et un peu convexes dans les allongées. 


PREMIER GENRE. — Âeliophile. 


L'Héliophile a un calice plus ou moins redressé et bosselé, des 
pétales à limbe ovale, étalé, à onglet cunéiforme, des étamines laté- 
rales, dentées ou non dentées, une silique biloculaire, bivalve, à 
cloison membraneuse, et qui varie beaucoup en forme et en déhis- 
cence ; les semences sont unisériées, pendantes, aplaties et souvent 
ailées ; les cotylédons au moins deux fois aussi longs que la radicule, 
sont désignés par le mot de Bicrures, à cause de leur double plissement 
en largeur. 

Ce genre comprend des herbes annuelles et des sous-arbrisseaux à 
feuilles très-variables, à grappes allongées, à pédicelles nus et fili- 
formes, à fleurs jaunes, blanches, roses et souvent d'un bleu de ciel. 

Il se réduisait autrefois à deux espèces; aujourd'hui il en renferme 
environ quarante, toutes originaires du Cap, recueillies successive- 
ment par divers botanistes, et surtout par Burcnezr. On peut dire que 
ce genre est éminemment multiforme, et qu'il présente dans ses huit 
sections le modèle abrégé des tribus dans lesquelles nous avons divisé 
les autres ordres : les Si/iqueuses , les Latiseptes, \es Angustiseptes , les 
Nucamentacees , les Septulatees et les Lomentacées. Exemple remarqua- 
ble de la correspondance des avortements dans les différents ordres , 
ou, si l'on veut, de l'analogie qui existe entre leurs diverses tribus. 

Les Heliophiles sont peu répandus dans nos jardins de botanique, 
où l’on n’en connaît encore que quatre ou cinq. J'y ai vu fleurir, un 


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mois ou deux après sa germination, l'Amplexicaulis à feuilles opposées, 
glauques et lancéolées, et dont les fleurs, d’un violet blanchâtre, étaient 
disposées en grappes lâches au sommet des tiges ; les étamines avaient 
les anthères diversement contournées; l'ovaire légèrement pédicellé 
portait à sa base quelques glandes peu apparentes, et s’allongeait 
promptement après la chute des téguments floraux ; il devenait enfin 
une silique aplatie, bosselée et comme articulée entre les graines uni- 
sériées, à peu près au nombre de douze ; à la maturation, cette silique 
s'ouvrait à peu près comme celle des Cardamines, quoiqu'elle fût 
très-différemment conformée. 

L’Amplexicaulis , comme la plupart des espèces de ce genre, étale 
ses fleurs à la lumière et les referme à l'obscurité. C’est la même chose 
du Pilosa à tige herbacée, hérissée de poils comme les feuilles, ordi- 
nairement simples, et qui se distingue par ses siliques linéaires et ses 
pétales d’un beau bleu deux fois aussi longs que le calice. 


SECOND GENRE. — Schizopetalon. 


Le Schizopetalon a un calice cylindrique, fermé et non bosselé, des 
pétales ovales , incisés et comme pennatiséqués, des stigmates épaissis 
et rapprochés. 

Ce genre, que BarrLinG a réuni aux Heliophilees à cause de ses 
semences à cotylédons deux fois plissés transversalement, est une 
herbe annuelle, originaire du Chili, qui fleurit quelques semaines après 
avoir été semée, et dont la tige molle et velue porte des feuilles 
linéaires et des fleurs pédonculées et solitaires dans les aisselles supé- 
rieures, et réunies en petits corymbes au sommet. Ces fleurs jaunâtres 
et assez semblables à celles de l'Erinus Lychnoidea, ont le limbe penna- 
tiséqué, et s'ouvrent le soir comme celles des Silènes ; les étamines, qui 
m'ont paru portées sur des glandes écailleuses, se terminent par des 
anthères introrses et allongées qui ferment le haut du tube, et au- 
dessous desquelles est placé un beau stigmate à deux lobes latéraux et 
appliqués contre une silicule allongée, velue, et dont les semences sont 
nues et à peu près ovoides. 

C'est un genre très-remarquable dans les Cruciferes, soit à cause de 
ses fleurs fermées au milieu du jour, soit à cause de ses pétales penna- 
tiséqués. 

On peut remarquer que l'intérieur de la corolle est toujours ferme 
par les faces extérieures des anthères introrses, qui recouvrent immé- 
diatement de leur pollen le stigmate placé au-dessous et hors de l'in- 
fluence de l'atmosphère humide de la nuit. 


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Dix-neuvième tribu. — DIPLÉCOLOBÉES LATISEPTES, ou SUBULARIÉES. 


Les Subulariées ont une silicule ovale , à cloison elliptique, à valves 
convexes , à loges polyspermes et stigmate sessile. Leurs cotylédons 
sont deux fois plissés. 


PREMIER GENRE. — Subularta. 


Le Subularia a un calice à peu près droit, des pétales ovales et 
amincis à la base, des étamines non dentées, une silicule ovale, 
biloculaire , bivalve, à cloison membraneuse et elliptique; les valves 
sont ventrues, les semences ovales et quaternées dans chaque loge, 
les cotylédons linéaires; le style manque et le stigmate n'est qu'un 
point. 

Le Subularia aquatica, seule espèce du genre, est une très-petite 
herbe aquatique, glabre et dépourvue de tige; ses racines sont fasci- 
culées, fibreuses, simples et blanches, ses feuilles radicales linéaires 
et subulées, sa hampe pauciflore, ses pédicelles filiformes et nus, ses 
fleurs blanches et petites. 

Elle habite au fond des fossés inondés , des lacs, des ruisseaux et 
des rivières de l'Europe boréale. C'est la seule Crucifére européenne 
qui ait ses cotylédons diplécolobés. 

Dr Canpoze l'avait d’abord placée parmi les Draves, dont elle a, 
en effet, le port et la hampe; mais il en a fait ensuite le type d'une 
tribu, d'après la structure de ses cotylédons, qui la rapproche des 
Heliophiles , dont ses autres caractères l’éloignent beaucoup. Link 
assure dans sa Flore de Laponie qu’elle fleurit au fond de l’eau , phé- 
nomène très-remarquable et qui n'appartient, je crois, à aucune autre 
Crucifère. I! serait important de vérifier le fait et de s'assurer en même 
temps comment il s'opère, et quelle est la conformation des anthères 
et du stigmate. Il ne serait pas impossible non plus que le Subularia ne 
se multipliàt par des rejets, lorsque ses fleurs seraient infécondes. 
C'est à ceux qui pourront observer cette plante en vie, à vérifier ces 
conjectures. 


SECOND GENRE. — Zelrapoma. 


Le Tetrapoma a un calice à quatre sépales ouverts, quatre pétales, 
six étamines, une silique à peu près sphérique, à quatre valves, un 
stigmate en tête aplatie et à peu près sessile, 


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Ce genre, dont le fruit ne ressemble à celui d'aucune Crucifére, est 
formé de Tetrapoma barbarææfolium , herbe annuelle qui a le port des 
Myagrum, et dont les fleurs petites et jaunes ont un péricarpe qui 
s'ouvre en quatre valves caduques, entre lesquelles sont placées quatre 
cloisons qui partent du centre et portent sur leurs deux bords des 
graines nombreuses : il y a donc ici huit rangs. Je ne connais pas la 
structure de la graine et la patrie de cette plante qui n’est pas encore 
décrite dans le Prodrome. Je l'ai indiquée dans le Camelina sans savoir 
encore la place qu'on lui assigne. Sracx la range à côté des Camelines. 


Douzièeme famille. — Capparidées. 


Les Capparidees ont quatre sépales égaux ou inégaux, presque libres. 
ou réunis en tube à leur base, quatre pétales disposés en croix, souvent 
onguiculés et inégaux, des étamines à peu près périgynes, insérées 
au fond du calice, rarement tétradynames, presque toujours quater- 
naires et multiples, un pollen ellipsoïde à trois plis, avec ou sans 
papilles, un torus hémisphérique ou allongé, souvent glanduleux, 
un thécaphore aminci ou un ovaire à deux carpelles étroitement 
soudés. Le style est nul ou filiforme, le fruit siliqueux ou bacciforme, 
uniloculaire, rarement monosperme, indéhiscent ou déhiscent, et 
formé de deux placentas polyspermes et intervalvulaires; les semences 
sont ordinairement réniformes et dépourvues de vrai albumen ; l'em- 
bryon est recourbé; les cotylédons sont foliacés, plus ou moins planes 
et incombants. 


Cette famille se divise en deux tribus : celle des C/eomees et celle- 
des Cappareées. 


Première tribu. — CLÉOMÉES. 


Les Cléomees ont un fruit capsulaire, à valves déhiscentes et amin- 
cies. Elles comprennent cinq genres, réunissant entre eux environ 
soixante-douze espèces, qui sont des herbes ou des sous-arbrisseaux 
dispersés dans les deux Indes, au Cap, en Arabie, en Afrique, ou 
en Orient. 


Cette tribu me parait fort remarquable par le grand nombre des 


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types qu'elle présente en raison des variations de ses organes floraux, 
de ses étamines et de sa silique ; elle mérite donc l’attention des bota- 
nistes observateurs. Malheureusement ses espèces sont étrangères et 
ne se trouvent pas en grand nombre dans nos jardins; la seule indigène 
est la iolacée, petite plante annuelle du Portugal, à fleurs solitaires, 
pédicellées aux aisselles voisines du sommet; du côté supérieur du 
torus, sont placées trois glandes sphériques et glutineuses. L’ovaire, 
d'abord très-court, s'allonge ensuite en se recourbant et se termine 
enfin en un stigmate papillaire, fécondé par le pollen briqueté de 
cinq ou six étamines recourbées. L’ovaire articulé à la base se déjette 
perpendiculairement, et devient un cylindre à nervures longitudinales, 
qui renferme un grand nombre de graines recourbées sur deux pla- 
centas opposés : je décris cette plante comme exemple. 


PREMIER GENRE. — (Veome. 


Le Cleome a un calice de quatre sépales ouverts et même réfléchis, 
quatre pétales, un torus presque hémisphérique, six et rarement 
quatre étamines, une silique déhiscente, stipitée ou sessile. 

On divise ce genre en deux sections : 

1° Les Pedicelluria , à torus élevé et thécaphore allongé ; 

2° Les Siliquaria, à torus peu apparent et thécaphore nul ou court. 

La première, dont l'Heptaphylla peut être considéré comme le 
type, est formée de sous-arbrisseaux et d'herbes vivaces ou annuelles, 
à feuilles digitées, articulées, à trois, cinq et ordinairement sept 
folioles pubescentes ou même recouvertes de poils glanduleux; les 
fleurs, disposées en grappes terminales, ont leurs pétales supérieurs 
redressés , leurs filets allongés et leurs anthères latérales; le pollen 
jauvâtre tombe sur la tête papillaire du stigmate et sur le torus, qui 
distille abondamment l'humeur miellée ; la silique amincie, longue- 
ment recourbée, stipitée et bivalve, a son placenta intervalvulaire 
chargé d'un grand nombre de semences. 

Les Siliquaria, beaucoup plus nombreuses que les Pedicellaria , et 
aussi plus dispersées, forment différents types encore mal déterminés 
et presque tous composés d'herbes annuelles : le Violacea du Portugal, 
la seule espèce indigène, se reconnait à ses fleurs terminales, corym- 
biformes, et à ses feuilles trifoliées, recouvertes de poils glanduleux, 
comme l'/ferica, qui n’en diffère que par sa silique pédicellée et re- 
courbée. 


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SECOND GENRE. — Polanesia. 


Le Polanesia a un calice de quatre sépales étalés, quatre pétales, 
huit à trente-deux étamines, un torus peu marqué, une silique à peu 
près sessile et terminée par un style distinct. 

Ce genre, qui se divise en deux sections fondées sur la grandeur du 
style relativement à l'ovaire, est formé de plantes la plupart originaires 
des Indes : une des plus répandues est le Dodecandra, dont les pétales 
unilatéraux sont toujours tournés du côté du nectaire, et dont les an- 
thères répandent immédiatement leur pollen jaunâtre sur le stigmate 
papillaire et les poils visqueux qui recouvrent l'ovaire; une seconde 
espèce est le Graveolens, à feuilles aussi trifoliées et silique glandu- 
leuse. L’une et l’autre sont annuelles. 


TROISIÈME GENRE. — Gynandropsis. 


Le Gynandropsis a un calice de quatre sépales étalés, quatre pé- 
tales, un torus allongé, six étamines et une silique stipitée. 

L'espèce la plus répandue de ce genre est le Pentaphylla, qui se 
trouve souvent dans nos jardins, où il se fait remarquer par la singula- 
rité et l’irrégularité de ses fleurs portées sur de longues grappes termi- 
nales ; cette plante annuelle et qui ne s’'épanouit que tard, a d'abord 
toutes les parties de sa fleur égales, ses filets très-courts et son péri- 
carpe à peu près sessile; ensuite elle se développe en une fleur forte- 
ment irrégulière, à anthères libres, allongées et biloculaires, stigmate 
glutineux et discoïde et péricarpe longuement stipité : ce péricarpe, 
assez semblable à celui des Chélidoines , est formé, comme dans les 
autres Cléomées, de deux valves très-amincies, séparées par une lame 
placentaire chargée d’un grand nombre de semences pédicellées. 

Les feuilles du bas ont cinq folioles, les supérieures trois, et les flo- 
rales sont entières. 


Seconde tribu. — CAPPARÉES. 


Les Capparees ont leur fruit indéhiscent, plus ou moins charnu, 
et se distinguent des Cléomées par l'ensemble de leurs caractères. Elles 
comprennent environ cent cinquante espèces, arbres et arbrisseaux, 
originaires des tropiques, et réunies sous une douzaine de genres, 
dont le plus important et le plus riche est le Capparis. 


— 287 — 


Capparis. 

Le Capparis a un calice à quatre divisions, quatre pétales, un torus 
peu marqué, un thécaphore aminci, un grand nombre d'étamines, 
une silique stipitée et bacciforme. 

Ce genre comprend des arbres ou sous-arbrisseaux, à stipules sou- 
vent épineuses, à feuilles simples, entières et ordinairement coriaces, 
à fleurs solitaires ou en grappes paniculées et corymbiformes, ter- 
minales, axillaires et extra-axillaires, accompagnées de bractées, et 
ordinairement blanchâtres. 

Les Capparis sont répandus par groupes dans l'ancien et le nouveau 
monde, en sorte que les espèces semblables habitent les mêmes con- 
trées, et que celles qui n’appartiennent pas aux mêmes types sont 
dispersées dans des régions différentes. Des six sections dans lesquelles 
De Caxpozce les partage, la plus connue et en même temps la plus 
étendue est celle des £ucapparis, dont les espèces sont indigènes de 
l’ancien monde ou de la Nouvelle-Hollande, et qui comprend le Spi- 
nosa, originaire, dit-on, de l'Orient, et acclimaté aujourd'hui sur 
toutes les côtes de la Méditerranée, où il est quelquefois cultivé. 

Cette plante est un arbrisseau à tiges allongées et demi-grimpantes, 
qui aime à croître sur les murs et les rochers, où il fleurit depuis la 
fin du printemps jusqu’au milieu de l'été. Ses feuilles, alternes , pétio- 
lées et épaisses, sont plissées en deux dans la préfoliation, et se désar- 
ticulent en automne; ses fleurs, grandes et blanches, sont solitaires 
dans les aisselles inférieures; les deux pétales supérieurs ont leurs 
bords rapprochés, et forment une rainure très-marquée, qui aboutit 
à une glande du torus, et d’où sort, à l'époque de la fécondation, la 
liqueur miellée ; les anthères sont introrses, et les filets, recourbés 
ayant l'épanouissement, grandissent ensuite tout-à-coup; le style est 
terminé par un petit corps conique d’un rouge brun, qui doit être le 
stigmate. , 

La fécondation de chaque fleur dure deux jours : les filets des 
étamines se contournent d'abord circulairement, comme dans les 
Cistes, et leurs anthères ne s'ouvrent guères que le second jour. Le 
pollen blanchâtre adhère long-temps aux parois. Le stigmate noirâtre 
et légèrement papillaire est porté sur un renflement glanduleux qui 
retient la poussière fécondante, et les deux pétales supérieurs se 
réunissent pour former un beau sillon creux tout recouvert de poils 
humides et sur lequel s'incline le stigmate. 

Le péricarpe est une baie uniloculaire, traversée par un axe ver- 


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dâtre et dont les graines nombreuses, à embryon demi-circulaire, et 
entourées d'une matière pulpeuse, paraissent adhérer à toute l'étendue 
des parois ; le pédoncule est articulé, comme dans toutes les espèces 
du genre. 

L’estivation du calice est embriquée; les deux sépales intérieurs 
sont recouverts par les extérieurs , dont le plus grand enveloppe tous 
les autres. La corolle est aussi embriquée et non plissée; les stipules, 
d’abord molles, s’endurcissentinsensiblement, et manquent même quel- 
quefois, ce qui montre qu’elles ne forment pas un organe nécessaire, 

La végétation du Capparis spinosa commence au printemps, et se 
termine aux premiers froids : les tiges, après s'être développées autant 
que l'ont permis le climat et la température, et avoir donné leurs fruits, 
se dessèchent près du sommet, et sont remplacées par d’autres qui 
naissent des bourgeons axillaires inférieurs. Dans le midi de la France, 
on protége, contre la rigueur de l'hiver, les Capriers qu'on cultive. 

Les espèces les plus voisines du Capparis spinosa sont le Rupestris, 
qui n’en diffère que par ses épines non piquantes, et qui croit sur les 
rochers de la Crète et de l'Archipel ; ; celui de Des Fonraines, des 
rochers de la Mauritanie , à stipules-crochues et à feuilles 'cordifor- 
mes ; enfin l'Ægyptia, ilée déserts de la Haute- Égypte, à feuilles 
légèrement cunéiformes et mucronées, épines recourbées et dorées. 
Les Eucapparis , à pédoncules solitaires, ne se distinguent guëres les 
uns des autres que par la consistance de leurs épines , la longueur de 
leurs pétioles et de leurs pédoncules, la forme plus ou moins ovale de 
leurs feuilles glabres , velues ou blanchätres. 

Les autres Eucapparis ont la même conformation générale; mais ils 
sont distribués en trois groupes : le premier comprend les espèces 
dont les pcdoncules uniflores sont placés dans la même aisselle, lon- 
gitudinalement les uns au-dessus des autres ; le second, celles dont 
les pédoncules multiflores, disposés en grappes ou en corymbes, ont 
les étamines nombreuses; et le troisième enfin, celles dont les pédon- 
culles sont ordinairement multiflores, et dont les fleurs n’ont que 
huit étamines. Ce dernier groupe , qui pourrait former une section; 
appartient uniquement au Cap. 

Les espèces de Capparis ne sont pas assez caractérisées pour qu'on 
n'y puisse pas soupconner un grand nombre de variétés ; mais elles 
sont jusqu'à présent trop peu connues pour que ces variétés puissent 
être exactement déterminées. DE Canoe remarque, je crois avec 
raison , que les pédoncules unisériés, uniflores, du second groupe des 
Eucapparis , doivent être considérés comme des pédoncules multi- 
flores, soudés conire la tige, et servant de passage entre les deux 


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classes de pédoncules, qui dépendraient ainsi primitivement de la 
même forme. C'est là un exemple de soudure que l’on retrouve dans 
d’autres plantes, comme les Solances. 

J'ai peu d'observations physiologiques à présenter sur cè genre ; 
je remarquerai seulement que ces stipules plus ou moins endurcies, 
plus ou moins allongées et recourbées, selon les espèces, offrent une 
preuve remarquable des transformations que peut subir un même 
organe, et qui sont quelquefois si bizarres, que dans l’AHeteracantha , 
par exemple , l'une des épines est droite, et l’autre crochue. 

On peut ajouter que, dans les Capparis et la plupart des genres de 
la même famille, le nombre des étamines présente de grandes varia- 
tions : Auguste Sainr-Hivaire et Moquin TEnpoNn ( Bulletin de 
Férussac t. 24, p. 179 et suiv.), ont cherché par des dédoublements 
à ramener ce nombre à celui de quatre, qui appartient également au 
calice et à la corolle, et ils expliquent les aberrations des étamines 
par le développement de la glande nectarifère qui se trouve sur le 
torus des Capparidees. 

Du reste, c'est dans le fruit bacciforme et stipité que doivent se 
trouver les variations les plus remarquables du genre, et en effet, la 
troisième section a pour péricarpe une silique longue, cylindrique 
et charnue; dans la sixième, cette silique est même déhiscente, et 
l'on trouve dans la première le Zeucophylla des environs de Bagdad, 
qui a un péricarpe à six valves dont les bords sont chargés d'un pla- 
centa bisérié, et qui présente par conséquent à l'intérieur six rangs 
longitudinaux de semences bisériées. 

Les Capparis vivent principalement dans les terrains arides et 
pierreux, et sur les rochers des bords de la mer, où leurs feuilles 
épaisses se nourrissent, comme celles des plantes grasses, aux dépens 
des gaz atmosphériques. Leurs fleurs, remarquables par leur grandeur 
et leur beauté, s’'épanouissent successivement et sont rapidement 
fanées. 

On cultive, en Europe, le Capparis spinosa, dont les jeunes boutons, 
confits au vinaigre, sont un assaisonnement agréable. Dans les Indes 
orientales, on emploie le Sepiaria pour les clôtures. Quelques autres 
Capparis à pédoncules multiflores, comme le Pulcherrima, Y Odoru- 
tissima, le Cynophallophora, etc., sont aussi remarquables par l’excel- 
lence de leur odeur que par la beauté de leurs fleurs, et pourraient 
faire l’ornement de nos serres, comme elles font la brillante parure 
des lieux dans lesquels elles croissent et se multiplient naturellement. 


T. 19 


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N'reizième famille. — Céstinees. 


Les Cistinées ont cinq sépales continus au pédicelle et souvent 
inégaux, deux extérieurs plus petits que les autres, et quelquefois 
avortés, trois intérieurs en estivation tordue; cinq pétales hypo- 
gynes, caducs, égaux et tordus en sens opposé du calice; des étamines 
hypogynes, droites et ordinairement très-nombreuses; des anthères 
ovales, biloculaires, insérées parleur’ baseet ouvertes au sommet par des 
fentes longitudinales; un pollen ellipsoïde à trois sillons, un ovaire 
libre, un style filiforme, un stigmate simple, une capsule à trois ou 
cinq valves, très-rarement à dix; le placenta est appliqué longitudi- 
nalement sur le milieu des valves, ou bien s'allonge en cloison, et 
forme alors des loges plus ou moins complètes ; les semences sont 
petites et nombreuses , tantôt attachées au placenta pariétaire, tantôt 
à l'angle interne de la cloison; l'albumen est farineux, l'embryon 
roulé en spirale ou recourbé dans l'albumen; la chalaze très-peu 
apparente est opposée à l'ombilic, et par conséquent la radicule est 
supère. 

Cette famille comprend des herbes annuelles ou vivaces et des sous- 
arbrisseaux, à feuilles simples, penninerves, entières ou légèrement 
dentées, toujours opposées à la base, rarement alternes au sommet, 
et accompagnées de deux stipules foliacées toutes les fois que les 
pétioles ne sont pas amplexicaules; les fleurs, disposées ordinairement 
en grappes latérales, se développent comme dans les Borraginees ; 
les pétales s'ouvrent le matin et tombent vers le milieu de la journée : 
ils sont blancs, jaunes, pourprés, et souvent tachés à la base. 


PREMIER GENRE. — Ciste. 


Le Ciste a un calice de cinq pièces sur deux rangs, l'intérieur de 
trois sépales égaux, et l'extérieur de deux qui manquent quelquefois ; 
les cinq pétales sont caducs et légèrement cunéiformes; les étamines 
nombreuses naissent souvent d'un disque glanduleux; le style est 
filiforme et le stigmate est une tête aplatie et tuberculée; la capsule 
recouverte par le calice est formée de cinq ou dix loges et d'autant 
de valves loculicides ; les semences sont ovales, anguleuses, l'embryon 
est spiral et filiforme. 

Les Cistes sont des arbrisseaux et des sous-arbrisseaux à feuilles 
opposées, nues, entières ou légèrement dentées; à pédoncules axillaires, 
uniflores ou multiflores. On les divise en deux sections : 


ENT NE 

1° Les Erythrocistus, à pétales roses et capsules à cinq loges; 

2° Les Ledonia, à pétales blancs ou jaunâtres et capsules à cinq ou 
dix loges. 

La section des Ærythrocistus comprend à peu près douze espèces, 
presque toutes originaires des deux bords dela Méditerranée, et qu'on 
reconnaît à leurs sépales extérieurs, plus étroits ou plus petits que les 
autres, comme aux intérieurs, concaves à la base et scarieux sur les 
bords. Ils appartiennent évidemment au même type et ne différent 
que par leur surface plus ou moins velue et cotonneuse, leurs pédon- 
cules axillaires ou terminaux, solitaires, géminés ou ternés, leurs 
feuilles plus ou moins ovales et engaînantes, et enfin leurs pétales plus 
ou moins pourprés et échancrés au sommet. 

Les Ledonia, à peu près aussi nombreux que les Ærythrocistus, se 
distinguent non-seulement à leurs pétales blanchâtres ou jaunûtres, 
mais encore à leurs deux sépales externes, tantôt avortés, tantôt grands 
et aigus, à leurs étamines nombreuses plus longues que le pistil, à 
leur stigmate presque sessile, enfin à leurs feuilles souvent glutineuses. 

On peut les distinguer en quatre groupes : 

1° Celui du Salvifolius, dont les pédoncules sont nus à la base, et 
portent souvent vers le milieu deux feuilles opposées. Il est formé de 
sept espèces originaires de la France méridionale et de l'Espagne. Une 
seule, le Forentinus , est indigène de l'Italie ; 

2° Celui du Zongifoliuset du Populifolius, dontles pédoncules portent, 
à la base, des bractées caduques, concaves et coriaces, et au-dessus de 
la base, deux bractées opposées plus grandes que les autres; 

3° Celui du Laurifolius , du Cyprius etdu Ladaniferus, dont les calices 
n'ont que trois sépales , et dont les pédoncules inférieurs sont courts 
et uniflores, les supérieurs axillaires et solitaires, ou terminaux et mul- 
tiflores ; 

4° Enfin, celui du Clusii, espèce d'Espagne et de Barbarie, distincte 
des Ledonia du troisième groupe par son style cylindrique, égal aux 
étamines et terminé par un petit stigmate. Cette plante a le caractère 
des Cistes, les feuilles linéaires’ et roulées des Helianthemes et le port 
de l’Helianthème libanotis. 4 

Les Cistes sont tous des arbrisseaux à racine ligneuse, qui ne don- 
nent pas de rejets souterrains, mais qui repoussent perpétuellement 
du mème pied, ou, si l'on veut, du même rhizome. Leurs tiges etleurs 
rameaux se développent sans rupture, et se terminent par des fleurs 
solitaires ou réunies en petit nombre; mais ensuite elles se détruisent 
au sommet, et sont remplacées par de nouvelles pousses sorties des 
aisselles supérieures, et ainsi sans interruption pendant toute la vie 


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de la plante. Les pédoncules sont simples ou plus ou moins ramifiés, 
souvent chargés de bractées, ordinairement articulés dans leur lon- 
gueur, comme les tiges ; ils se dessèchent à la maturité, et se brisent 
irrégulièrement dans le cours de l'hiver ou au printemps de l'année 
suivante. Les feuilles sont opposées et convolutives, tantôt libres et 
pétiolées , tantôt simplement sessiles, connées ou engaïnantes; leurs 
bords, presque toujours entiers, sont quelquefois denticulés, ciliés ou 
roulés; leur surface est souvent recouverte de poils allongés, ras, 
blanchâtres ou même étoilés ; les sommités de leurs tiges fournissent 
dans plusieurs espèces, surtout dans le Zudanum, un suc glutineux et 
résineux qu'on recueille, en Orient, à cause de son odeur et de ses 
propriétés médicinales. 

Les feuilles des Cistes se reconnaissent facilement à leur substance 
un peu épaisse , ridée, sèche et plus ou moins marquée de trois ner- 
vures principales ; elles se détachent , à la fin de l'hiver , de leur tige 
articulée, et celles qui les remplacent protégent, au printemps, les 
jeunes boutons qui n’ont point d'autre enveloppe dans la préfo- 
liation ; elles sont opposées sur toute leur surface, roulées sur leurs 
bords, ou demi-embrassées. 

L’estivation du calice est embriquée et non pas tordue comme dans 
les Helianthèmes ; les pétales sont aussi embriqués, tantôt plissés 
comme les Pavots, tantôt raccourcis jusqu'au moment où ils s’épa- 
nouissent; ils se détachent quelques heures après leur développe- 
ment , mais le calice persiste au contraire, et, par un effet de cette 
organisation supérieure que nous sommes loin de comprendre, il se 
referme après la floraison, en comprimant contre la capsule les éta- 
mines desséchées. 

Je n'ai point apercu de nectaire dans les Cistes, mais j'ai remarqué 
que les anthères extropses latérales, au moins dans plusieurs espèces, 
répandaient, en M sur leurs filets, une grande quantité de 
pollen jaunâtre qui recouvrait la tête tuberculée du stigmate, en 
sorte que la fécondation était toujours directe; ces mouvements or- 
ganiques ont déjà été observés par plusieurs botanistes et en parti- 
culier par Paz qui, dans sa Dissertation sur les plantes volubles, assure 
qu'elles se redressent et environnent les stigmates jusqu'à ce que la 
fécondation soit accomplie ; qu'ensuite, par une secousse assez forte, 
elles se couchenthorizontalement sur les pétales. 

Les capsules des Cistes sont toutes à cinq loges, excepté celles du 
Ladaniferus , qui paraissent en avoir dix ; les divisions du stigmate 
correspondent à celles des capsules, toutes les fois que celles-ci ont 
cinq loges. Il serait curieux de vérifier si le stigmate du Zadaniferus a 


— 293 — 


aussi dix lobes ; s’il n’en avait que cinq, cela indiquerait que ces dix 
loges, phénomène singulier dans ce genre, ne sont que cinq loges 
divisées. . 

La dissémination des Cistes a lieu assez promptement après la flo- 
raison: lescalices s'entr'ouvfent et les capsules redressées ouvrent leurs 
valves ; les semences sortent ensuite à la moindre agitation de l'air. 

La classification des Cïstes , fondée sur la couleur de leur corolle, 
paraît d’abord purement artificielle ; cependant elle renferme d'autres 
caractères qui la rendent plus naturelle; puisque les botanistes remar- 
quent que les espèces des deux sections ne se mêlent pas entre elles, 
tandis que celles de la même section sont tellement rapprochces et 
confondues par des fécondations artificielles qu'il devient très-difficile 
de les bien distinguer. Bexrnam dans son Catalogue des Plantes des 
Pyrenees, dit que les bois de Fonfroide, près de Narbonne, abon- 
dent en hybrides de Cistes, dont quelques-unes n'ont rien de cons- 
tant, tandis que les autres peuvent, au contraire , être considérées 
comme des espèces permanentes. Telles sont , dans ces dernières , le 
Ledum qui provient du Monspeliensis et du Laurifolius , le Longifolius 
qui est né du Monspeliensis et du Populifolius , le Florentinus qui doit 
probablement son origine au Monspeliensis et au Salifolius, et ne 
diffère, selon Cawsessénës, du Monspeliensis, que par ses fleurs 
moins nombreuses , disposées en corymbe et non en cyme. Les mêmes 
observations pourraient être faites sur les Erythrocistes , dont les es- 
pèces sont aussi voisines que celles des Ledoniu. 

Non-seulement la nature produit elle-même, tous les jours, des 
variétés de Cistes ; mais les jardins en fournissent continuellement de 
plus nombreuses et de plus belies que celles des forêts du midi de 
l'Europe. J'ai devant les yeux une monographie des Cistinees , qui se 
publie actuellement à Londres , et dont les figures coloriées repré- 
sentent non-seulement les anciennes espèces du genre, mais encore 
celles qui naissent dans les jardins des amateurs, et dont le nombre 
tend sans cesse à s’accroitre ; elles renferment souvent des fleurs ma- 
gnifiquement doublées. 

Puisque nous voyons les Cistes se multiplier, pour ainsi dire, sous 
nos yeux, dans le grand laboratoire de la nature, nous pouvons en 
conclure qu'ils se sont également multipliés à des époques antérieures, 
et, par une analogie plus générale, que le nombre des espèces, ou pour 
mieux dire, des variétés voisines entre deux véritables espèces, bien 
loin d’être permanent dans la nature, tend, au contraire, chaque 
jour à s’accroitre. 

Si ces plantes ne servent pas à satisfaire immédiatement nos besoins 


— 294 — 


corpor +: , elles jouent un grand rôle dans les scènes brillantes de la 
nature : -lles couronnent de leurs belles fleurs presque tous les co- 
teaux s_-riles de l'Espagne et du midi de la France, où leurs espèces 
se succedent comme celles des Ærica de Clermont à Limoges et de 
Limoges à Bordeaux; ici c'est le Crispus, là le Salvifolius , plus loin le 
Monspeliensis, Y Albidus, etc., qui dominent et déterminent la nature 
du tableau. Ce charmant spectacle, qui dure plusieurs semaines à la 
fin du printemps , commence le matin au lever du soleil et se termine 
au milieu du jour , où ces mêmes collines, qui avaient paru si décorées 
quelques heures plus tôt, sont entièrement défleuries. Plus tard, 
et pendant tout le reste de l'année, on n’apercoit aucune fleur de 
Ciste. 

Les Cistes donnent naissance au Cytinus, plante parasite de la 
famille des Raflesia , qui se développe sur leurs racines et fleurit aussi 
au mois de mai ; on la trouve indifféremment sur les diverses espèces 
du genre, telles que le Sulvifolius , le Monspeliensis , Y Albidus , et 
comme elle s'y présente toujours sous la même forme, on peut en 
conclure au moins que ces différents Cistes ont une organisation très- 
rapprochée. . 

Ce genre ne m'a pas offert un grand nombre de remarques phy- 
siologiques ; ses tiges , ses rameaux et ses feuilles sont d'une cons- 
truction lourde, sans grâce, et je crois aussi sans mouvements ; ses 
pétales seuls et ses étamines ont de la souplesse et de l'élégance. J'ai 
vu la poussière anthérifère, qui est toujours jaune, adhérer long- 
temps aux filets, et j'ai soupçonné que la tache jaune ou pourprée de 
l'onglet des pétales pourrait bien jouer quelque rôle dans la féconda- 
tion : du reste, le stigmate, qui est manifestement papillaire, peut 
lui-même absorber les vésicules du pollen. 


SECOND GENRE. — Âelianthemum. 


Les Hélianthèmes ont un calice à trois sépales égaux ou à cinq 
sépales inégaux et placés sur deux rangs , cinq pétales souvent dentés 
irrégulièrement sur les bords, un stigmate en tête, un style tantôt 
presque nul, tantôt droit, tantôt oblique ou même recourbé à la 
base, un ovaire triquètre, une capsule à trois valves loculicides 

; ; P ; 
des semences anguleuses et glabres, un albumen farineux, un em- 
bryon recourbé , quelquefois fléchi en crochet , une radicule centri- 

2 2 
fuge. : 
Ce grand genre est formé d'herbes annvelles ou vivaces , de sous- 
arbrisseaux et d’arbrisseaux la plupart originaires de l'Europe australe 


— 995 — 

et des deux bords de la Méditerranée. Il est très-voisin du Cüiste, 
dont il diffère principalement par sa capsule à trois loges et par son 
port. Ses nombreuses espèces différent par leurs feuilles opposées ou 
alternes, nues ou stipulées, trinerves ou penninerves; leurs pédi- 
celles, très-souvent garnis, à la base, de bractées opposées , sont 
quelquefois opposés à des bractées ou même à des feuilles alternes ; 
ils varient beaucoup aussi dans leur inflorescence, les uns sont so- 
litaires , les autres réunis en ombelles, en grappes, en corymbes 
et en panicules. C'est en conséquence de ces variations que Dunaz, 
dans le Prodrome de De Canpozze, divise les Hélianthèmes en trois 
séries : 

1° Celle des espèces à style droit, très-petit ou du moins plus 
court que les étamines, et stigmate en tête. Elle renferme trois sec- 
tions, dont deux européennes : les Halimium et les Tuberaria ; 

2° Celle des espèces à style droit de la même grandeur ou plus 
long que les étamines. Elle comprend deux sections européennes : les 
Maculuria et les Brachypetalum ; 

3° Celle des espèces à style fléchi à la base. Elle est divisée en quatre 
sections : les Fumana, les Pseudo - Cistus, les Euhelianthemum et les 
Ericcarpum ; la dentière appartient à l'Ég gypte, à la Barbarie et aux 
Canaries. 

Ces trois séries sont évidemment fondées sur un caractère artificiel, 
qui ne parait point tenir à l'organisation générale, Cependant les sec- 
tions dans lesquelles elles se partagent sont assez naturelles, comme 
on pourra facilement en juger. 

La première, ou celle des Halimium, a un calice de trois pièces ou 
rarement de cinq, dont les deux extérieures plus petites; les pétales 
sont presque toujours jaunes’, et chargés , à la base, d’une tache d’un 
violet ou d'un jaune foncé; le style est droit, court ou presque nul; 
le stigmate est légèrement trilobé; les semences sont noirâtres, cha- 
grinées, plus ou moins anguleuses et toujours en petit nombre. 

Les Halimium sont des arbrisseaux ou sous-arbrisseaux, originaires 
de l'Espagne et du Portugal. Ils ont le port des Cistes et la capsule 
des Helianthèmes ; leurs feuilles, toujours opposées‘et marquées de 
trois nervures, sont velues ou tomenteuses et non stipulées; leurs 
pédoncules d'une à trois fleurs sont axillaires, solitaires ou ombelli- 
formes et rarement paniculés. Dunaz en compte treize espèces ou 
variétés qu'il sépare en deux groupes : celles dont le style est marqué 
et le stigmate petit, et celles dont le style est nul et le stigmate 
grand. 


Toutes ces plantes me paraissent appartenir au même type, car les 


— 296 — 


principaux caracteres par lesquels on les distingue, le mode d'inflo- 
rescence , le nombre des sépales, la villosité de leur surface , la forme 
de leurs feuilles et les taches de leurs pétales, sont extrêmement 
variables. On pourrait les diviser en espèces à tige presque glabre, 
comme le Libanotis ; à tige recouverte de poils blancs, comme l’A/ys- 
soides ou le Lasyanthus; enfin à tige et feuilles lépreuses, comme 
V’Atriplicifolium où Y Halimifolium. Le plus beau des Halimium paraît 
être le Formosum du Portugal, dont les pétales grands et jaunes por- 
tent à la base une large tache noir-pourpre. 

Les Tuberaria ont un calice à cinq pièces, dont les extérieures, 
plus petites ou plus grandes que les autres, sont ordinairement éta- 
lées. Leurs pétales jaunes, entiers ou denticulés, sont souvent tachés 
à la base; leurs étamines nombreuses sont plus grandes que le pistil; 
leur style est presque nul; leur stigmate est en tête; leur capsule est 
trivalve, et leurs semences sont petites et jaunâtres, Dunar en compte 
neuf espèces, que BenræAm réduit à peu près à cinq, et qu’on partage 
assez bien en deux groupes : celui à racine vivace et ligneuse, et celui 
à racine annuelle et herbacée. 

Le premier est formé de deux espèces : le Globulariæfolium du 
Portugal, et le Tuberaria, répandu encore en France et en Italie; ils 
se distinguent non-seulement par leur durée, mais encore par leur 
grandeur, leurs feuilles non stipulées, leurs tiges velues seulement à 
la base , leurs fleurs peu nombreuses, pourvues de bractées et légère- 
ment paniculées. 

Le second groupe comprend trois espèces, qu’on reconnait à leurs 
feuilles supérieures souvent pourvues de bractées, ainsi qu'à leurs 
grappes unilatérales et terminales. Ce sont des plantes à tige mince et 
effilée, fort remarquables par l'élégance et la délicatesse de leurs fleurs. 
La principale est le Guttatum, répandu dans plusieurs contrées de 
l'Europe, et très-commun d'Antibes à Nice, où il borde toute la 
route, et tourne le matin ses fleurs du côté de la mer. Son efflores- 
cence est centripète, et à mesure qu'il se développe, il abaisse ses 
longs pédicelles inférieurs, qui se brisent et répandent leurs graines , 
avant que le reste de la plante ait achevé de fleurir. Les autres espèces 
présentent les mêmes phénomènes; elles sont tellement unies entre 
elles, dit BENrHam, qu'il est impossible de les séparer en espèces dis- 
tinctes, et qu'il est mêmedifficile de trouver deux échantillonsquiaient 
exactement les mêmes caractères. Les principales variétés que l'on 
peut y reconnaître sont le Plantagineum, à feuilles très-larges, et l'Incon- 
spicuum , à fleurs très-petites; l’une et l'autre originaires de la Corse. 

Les Brachypetalum ont le calice à cinq pièces, les deux extérieures 


— 297 — 


petites, les autres acuminées et marquées de trois nervures; les pétales 
sont jaunes, ordinairement plus petits que le calice et quelquefois 
tachés à la base ; les étamines sont peu nombreuses; le style est droit 
et épaissi au sommet; le stigmate est simple, l'ovaire triquètre à angles 
souvent velus; la capsule est glabre et plus ou moins brillante; les 
semences sont nombreuses, petites, pâles et anguleuses. 

Ces plantes, toutes annuelles, ont leurs feuilles stipulées, pétiolées, 
penninerves, opposées à la base et alternes près des fleurs; leurs 
stipules assez étroites s'allongent vers le haut; leurs pédoncules sont 
uniflores, courts et solitaires, rarement axillaires, souvent opposés 
aux feuilles ou aux bractées. 

On divise cette section en trois groupes : le premier comprend le 
Villosum et le Niloticum , indigènes surtout de l'Espagne, à pédon- 
cules médiocrement redressés et plus courts que les feuilles ; le second 
est formé du Sanguineum et de l Ægyptiacum , aussi originaires de 
l'Espagne, dont les sépales intérieurs sont marqués de quatre nervures, 
et dont les pédoncules, d’abord penchés, se redressent pendant la flo- 
raison et se réfléchissent ensuite; le troisième, enfin, est celui de l'/n- 
termedium, du Denticulatum et du Salicifolium, qui sont peut-être 
trois variétés de la même espèce, et se distinguent des autres groupes 
par leurs pédoncules plus longs que les feuilles et les bractées, re- 
dressés pendant la floraison et étendus ensuite horizontalement. La 
plus répandue est le Salicifolium, qui fleurit dès l'entrée du printemps, 
et dont la capsule est exactement uniloculaire. 

Les Macularia ont le calice formé de cinq pièces, dont les intérieures 
sont striées ; leurs pétales sont tachés; leur style droit est deux fois 
aussi long que l'ovaire; leur capsule est lisse. Ils ne diffèrent presque 
des Brachypetalum que par la forme du style, et ils ne comprennent, 
jusqu'à présent, qu'une espèce, le Lunulatum, petit arbrisseau tortu 
des Alpes du Piémont, à feuilles penninerves, planes, dépourvues de 
stipules , à fleurs solitaires ou réunies trois à quatre sur de courts 
pédicelles. à 

Les Fumana ont un calice à cinq pièces tordues, dont les intérieures 
sont marquées de quatre à cinq stries ; leurs étamines sont peu nom- 
breuses, et leur style, oblique pendant la floraison , se redresse plus 
ou moins ensuite. 

Ce sont de petits sous-arbrisseaux à feuilles linéaires et presque 
sessiles, à pédicelles glanduleux, uniflores, d’abord penchés, relevés 
ensuite et réfléchis pendant la maturation. Leur corolle, qui s'ouvre 
de bonne heure, tombe très-promptement, et leurs rameaux minces, 
rabougris et peu élevés, sont sans cesse chargés, à la base, de nou- 


— 298 — 


velles pousses gemmiformes ; les feuilles épaisses et lisses sont appli- 
quées deux à deux ; les pétales sont fortement roulés en sens con- 
traire du calice, qui ne se contourne plus après la fécondation, et dont 
les deux sépales extérieurs restent réfléchis. 

Ces plantes habitent l'Espagne, l'Italie et le midi de la France; 
leurs espèces, qui s'élèvent à dix ou douze dans la Monographie de 
Duraz, ont été réduites à deux par Benrxaw : 1° le Fumana, qui se 
distingue par ses feuilles alternes, dépourvues de stipules, et auquel 
on réunit, comme variétés, l'Ericoides de l'Espagne, et le Procumbens 
du midi de la France; 2° le Lævipes, à feuilles stipulées et fleurs 
disposées en grappes latérales ; il comprend, selon Benrxam, tous les 
autres Fumana, dont les variétés sont de quatre sortes : 1° les gluti- 
neuses, à feuilles allongées ; 2° celles à feuilles tres-courtes ; 3° celles 
à feuilles inférieures glabres ; 4° les lisses, dont les pédoncules et les 
calices sont seuls glanduleux. Si ces plantes ne sont pas aussi rappro- 
chées que le prétend cet auteur, du moins elles appartiennent incon- 
testablement au même type, sans en excepter l’Arabicus de l'Arabie 
et de l'Espagne, qui a les stipules du Lævipes, mais dont les tiges 
sont velues et les pédoncules solitaires. SPAcx ajoute que les étamines 
extérieures des Fumana sont stériles, et que leurs filets très-déliés sont 
moniliformes. 4 

Les Pseudo-Cistes ont un calice à cinq pièces, dont les intérieures 
sont marquées de quatre nervures; leur style, souvent plus court que 
les étamines, est tordu, fléchi à la base et au sommet; leur stigmate 
est en tête trilobée. Ils se distinguent à leurs tiges vivaces, consis- 
tantes et souvent sous-ligneuses ; leurs feuilles pétiolées, penninerves 
et opposées, sont presque toujours dépourvues de stipules; leurs fleurs 
sont disposées en panicules ou en grappes unilatérales, et leurs pédi- 
celles, d’abord recourbés, se redressent ensuite et se réfléchissent 
pendant la maturation. Ces plantes sont droites ou couchées. Les pre- 
mières habitent plus généralement l'Espagne et la Barbarie , les autres 
s'avancent plus au nord et remontent jusque sur nos montagnes, où 
leurs feuilles et leurs tiges, recouvertes de longs poils blanchätres, 
bravent toutes les intempéries. Les dix-sept espèces qu'elles contien- 
nent,etqui ontétéréduites à dix par Arnorr et BENrHAM, comprennent 
trois ou quatre types, parmi lesquels on doit distinguer surtout celui 
du Canum et de l Ælandicum de nos montagnes, et sous lequel on 
peut ranger une grande partie des espèces de la section. é 

Enfin, les Euhelianthemum ont un calice légèrement tordu, dont les 
trois sépales intérieurs sont marqués d'arêtes relevées et souvent 
velues ; leurs pétales sont plus grands que ceux des Pseudo-Cistes ; 


— 299 — 


leur style est fléchi à la base et plus ou moins renflé au sommet; leur 
capsule recouverte par le calice, est trivalve, uniloculaire, et s'ouvre 
au sommet. Ils forment la section la plus nombreuse du genre, et 
comprennent des espèces vivaces plus ou moins frutescentes, à ra- 
meaux nombreux, ordinairement droits et quelquefois couchés; leurs 
feuilles opposées, légèrement pétiolées, et plus développées au sommet 
qu’à la base, sont souvent roulées en dessous et toujours pourvues de 
stipules linéaires ou lancéolées ; leurs fleurs jaunes ou jaunûtres, 
blanches, roses ou rouges, sont disposées en grappes simples, termi- 
nales, et tournées d'un même côté; les pédicelles, garnis de bractées, 
sont d’abord penchés, puis redressés, et enfin réfléchis. Les trente- 
huit espèces dans lesquelles Duwaz les distribue, et qui appartiennent à 
peu près toutes à l'Espagne, au midi de la France ou aux îles de la 
Méditerranée, ont été réduites par BENTHAM à treize principales, qui 
sont encore très-rapprochées. Le principal type qu’on y distingue, 
c'est celui de l'Aelianthemum vulgare, sous lequel se réunissent plus 
de douze espèces du Prodrome, en particulier, le Grandiflorum, si 
commun sur nos pelouses, où il fleurit une grande partie de l'année, 
et dans lequel je place aussi le joli sous-type du Mutabile, à fleurs 
blanches, roses, rouges et quelquefois jaune soufre. 

Le vaste genre des Helianthemes descend par nuances insensibles , 
depuis les arbrisseaux de la section des Halimium jusqu'aux simples 
herbes des Brachypetales ; mais ilest surtout riche en sous-arbrisseaux 
peu élevés et rampants, tels qu’on les trouve dans nos trois dernières 
sections. Les racines des Hélianthèmes, quoique ligneuses et persis- 
tantes, ne paraissent pas participer à la nature des rhizomes, et rece- 
voir des accroissements successifs par la transformation du bas des 
tiges ; elles ne s'étendent pas non plus sous le sol par des rejets sou- 
terrains ; mais elles conservent la même forme en donnant sans cesse 
de nouvelles tiges qui remplacent les anciennes, et fleurissent ordinai- 
rement la seconde année. Cependant il est assez probable que les 
espèces rampantes , comme le Canum, se propagent par les longues 
tiges dont elles recouvrent le terrain. 

Les tiges, toujours articulées comme dans les Cistes, se développent 
tant que la saison est favorable , et ne se rompent jamais au sommet ; 
les feuilles, opposées deux à deux, sont plus ou moins roulées en 
dehors selon les espèces ; celles du bas des tiges se désarticulent dans 
l’année , les autres persistent souvent l'hiver, ou bien elles tombent 
promptement, comme dans les Fumana; les calices sont plus ou 
moins tordus selon les sections et les espèces ; leurs sépales extérieurs 
sont ordinairement libres , petits et homogènes ; mais les autres sont 


— 300 —. 


formés d'une substance sèche et scarieuse, marquée longitudinale- 
ment de trois ou quatre nervures vertes et relevées, parallèles et non 
pas penninerves, comme celles des feuilles. 

Les feuilles des Helianthèmes sont souvent accompagnées de deux 
stipules latérales , vertes et semblables à de petites feuilles; ces stipu- 
les, dont je ne comprends pas l'usage, et qui manquent dans les Cistes, 
se présentent ici sous une forme très-variable : tantôt elles accompa- 
gnent toutes les feuilles de la même espèce, tantôt elles manquent 
vers le bas et ne reparaissent que près du sommet. Quelquefois enfin 
elles manquent entièrement dans des espèces qui paraissent d’ailleurs 
très-voisines des autres. Elles sont ordinairement persistantes , et se 
développent en même temps que les feuilles, sur lesquelles on les 
voit d'abord couchées sans plissement. 

La fleur des Helianthèmes est toujours formée de cinq pétales min- 
ces, gazés , très-caducs et quelquefois plissés. Elle présente la même 
organisation et les mêmes mouvements que celle des Cistes ; mais elle 
est moins régulière : non-seulement ses sépales sont inégaux, mais 
sa capsule n’est formée que de trois valves. Quelle est la raison de ces 
anomalies si constantes ? pourquoi les deux sépales extérieurs sont-ils 
toujours plus petits, et pourquoi la capsule est-elle constamment 
trigone et trivalve dans les Hélianthèmes et non pas dans les Cistes ? 
Je l'ignore; mais je remarque que le stigmate a une conformation 
correspondante à celle de la capsule ; il a toujours trois lobes et non 
pas cinq, comme dans les Cüstes. 

Les pédoncules, qui, dans les premières sections, paraissent toujours 
redressés comme dans les Cistes, ont au contraire des mouvements 
très-marqués dans les Brachypetalum, les Fumana, les Euhelianthe- 
mum et \ Intermedium en particulier, où, d'abord redressés, ils se cour- 
bent ensuite à angle droit pour favoriser la maturation. Ces mouve- 
ments , très-réguliers et très-semblables aux mêmes époques de la 
végétation, sont un exemple frappant de cette vie végétale qui a été 
placée fort au-dessus des simples combinaisons de la matière; car, 
comment expliquer pourquoi, au moment même où la poussière des 
étamines va se répandre, le pédoncule se redresse, le calice se déroule, 
les pétales s'épanouissent ; et pourquoi ensuite, après la fécondation, 
les pétales tombent, les calices se referment , et les pédoncules se dé- 
jettent ? à 

Les étamines des Hélianthèmes , dont quelques-unes sont souvent 
dépourvues d'anthères comme dans le Fumana et l'Hirtum, présen- 
tent les mêmes signes d'irritabilité que celles des Cüstes ; maïs elles 
n'ont pas, je crois, été mieux observées à l’époque où elles s'agitent 


— 301 — 


spontanément. Hope, dans l'English Bot. 19, tab. 1321, dit que celles 
de l’Helianthemum vulgare , touchées avec la pointe d’une aiguille, 
par un temps chaud et serein , s'éloignent des pistils pour se coucher 
sur les pétales, et l'on ne peut guère douter que ce mouvement, 
relatif à la fécondation, ne s’observe aussi dans la plupart des espèces 
du genre, dont les étamines souples et délicates se prêtent facilement 
à ces mouvements. 

Le style varie beaucoup dans les Helianthèmes : tantôt il est petit 
et peu apparent ; tantôt, au contraire, il est allongé et plus grand 
que les étamines ; quelquefois il est un peu renflé en massue , comme 
dans les Euhelianthemum ; mais ordinairement il est plus ou moins 
fléchi à la base et au sommet, comme dans les quatre dernières sec- 
tions. Cette dernière forme pourrait bien tenir à l’état de gêne où il 
s'est trouvé avant l'épanouissement ; mais elle peut aussi avoir pour 
but de rabaisser le stigmate au niveau des étamines. Dans quelques 
espèces, le style se redresse pendant la floraison ; dans d’autres, 
comme l'/rconspicuum et je crois aussi l'{ntermedium, les pétales 
avortent en tout ou en partie ; la fleur ne s'ouvre pas et la féconda- 
tion a lieu intérieurement par l'application immédiate des anthères 
sur le stigmate. 

Le stigmate, qui tombe avec le style , est formé d’une substance 
papillaire et humide, propre à recevoir et à absorber le pollen ; il se 
divise , comme je l'ai dit, en autant de lobes que la capsule porte de 
placentas. Je n’ai pas vu les mouvements fécondateurs des étamines, 
mais J'ai bien remarqué que, dans l'Hélianthème commun et dans les 
espèces voisines, le style se déjetait, de manière que le stigmate se 
trouvait caché au milieu des anthères, et recouvert de leur pollen. 

Les capsules des Hélianthèmes s'ouvrent plus ou moins à la matu- 
rité , et leurs valves , plus minces que celles des Cistes, se réfléchissent 
et se tournent contre terre dans les Fumana , et s'écartent seulement 
dans les Æuhelianthemum ; leurs placentas varient aussi beaucoup : 
ils sont prolongés en cloison complète dans les Fumana, incomplète 
dans le Canum, Y Ælandicum , et plusieurs autres espèces de la même 
section , et à peine visible dans le Salicifolium , dont la cloison est 
parfaitement uniloculaire. 

Après la fécondation, qui s’accomplit toujours le matin d'assez 
bonne heure, les trois sépales intérieurs se rapprochent de l'ovaire 
qu'ils embrassent étroitement pendant tout le cours de la maturation, 
mais dont ils s’écartent plus ou moins aux approches de la dissémi- 
nation. Les deux sépales extérieurs ne participent point à ces mouve- 
ments, mais ils restent indépendants comme deux petites bractées, et, 


— 302 — 
de même qu'ils ne se sont point tordus pendant l'estivation, ils ne se 
resserrent point dans la maturation. 

Les Hélianthemes comme le Fumana, le Grandiflorum , le Mutabile, 
etc., refleurissent souvent en automme, ce quiest rare dans les Cistes. 

J'indique dans ce genre deux principaux objets de recherche. Le 
premier est la raison pour laquelle certaines espèces ont des stipules 
tandis que d’autres en sont privées , et le second est relatif au style ; 
pourquoi est-il tantôt droit et tantôt plus ou moins recourbé P a:t:l 
été aplati dans sa préfloraison, ou bien est-il fléchi afin que dans la 
fécondation les anthères soient plus rapprochées du stigmate ? Qu'y 
a-t-il de vrai dans l'irritabilité que quelques auteurs attribuent aux 
étamines , quand a-t-elle lieu et dans quelles espèces ? Enfin je remar- 
que qu'il y a peu de genres dans lesquels les cloisons de la capsule 
soient plus variables , depuis le point où elles sont nulles et où les pla- 
centas sont véritablement pariétaux, jusqu'à celui où elles se réunis- 
sent au centre du péricarpe : cette structure est-elle liée avec les for- 
mes de dissémination? Il me semble qu'il en est ainsi au moins dansles 
Hélianthèmes Fumana, mais cette structure confirme que les placentas 
ne sont pariétaux que par l'avortement des cloisons. 

C'est un phénomène qui se répète souvent, que la variation du 
même organe dans des espèces à peu près semblables, et sa constance 
dans les divers individus de la même espèce. On l'explique en suppo- 
sant qu'il y a dans chaque espèce une force ou une puissance qui 
modifie toujours de la même manière la forme primitive. C'est cette 
puissance qui a sans doute déterminé les trois loges de la capsule non 
symétrique des Helianthèmes , et qui, en même temps, a soudé les 
valves par leurs bords, et les a divisées par leur milieu. 

Les Helianthemes ne fleurissent pas tous à la même époque, et ne 
sont pas, comme les Cäéstes, relégués dans les mêmes contrées; leurs 
diverses sections présentent, au contraire, d'assez grandes différences 
à cet égard comme à d'autres. Ainsi, les Halimium, qui ont le portet 
à peu près la consistance des Cistes, habitent, comme ces derniers, 
les côtes occidentales de la Méditerranée , et s’'épanouissent à peu près 
dans le même temps. Les Brachypetalum, qui sont des plantes 
annuelles, prolongent plus long-temps leur floraison et se font remar- 
quer par la délicatesse de leurs fleurs élégamment tachetées, et les 
mouvements variés de leurs pédoncules. Ils contrastent avec les Fu- 
mana, petits arbrisseaux rabougris et à peu près dépourvus de mou- 
vements, qui se plaisent sur les collines stériles, où ils fleurissent 
souvent une grande partie de l'année. Les Pseudo-Cistes, beaucoup 
moins ligneux, mais aussi vivaces, recouvrent de leurs feuilles vertes 


— 303 — 

ou plus ou moins velues, les collines méridionales et les pentes de nos 
montagnes, où leurs fleurs s'épanouissent chaque matin pendant les 
derniers mois du printemps et les premiers de l'été. Il en est de même 
des Euhelianthemum, dont les espèces communes vivent auprès de 
nos habitations, le long de nos chemins et sur nos pelouses, qu’elles 
embellissent long-temps de leurs grandes fleurs d'un jaune d’or. Ces 
différentes scènes ne sont pas aussi brillantes que celles des Cistes, 
mais elles sont plus étendues et plus diversifiées. 

On a même introduit, depuis quelques années, dans nos jardins, 
le petit groupe des Helianthemes changeants, si voisins de notre 
Helianthèeme grandiflore, et Yon en a formé des plate-bandes de fleurs 
rouges, roses, jaunes, souvent variées dans le mème individu, et 
très-remarquables par leurs beaux pétales, qu'on est parvenu à 
doubler. 

Les Helianthèmes des diverses sections ne se multiplient guère que 
par semences , si l'on en excepte quelques espèces de Pseudo-Cistes , 
qui paraissent être des plantes sociales. Ils sont, du reste, très- 


robustes, et ne sont guère affectés par la sécheresse, la chaleur ou 
le froid. 


Quatorzième famille. — Viofariées. 


Les Violariées ont un calice à cinq sépales persistants, libres ou 
légèrement réunis à la base, et souvent prolongés inférieurement ; 
une corolle de cinq pétales , alternes au calice, hypogynes, insérés 
sur le torus, égaux ou inégaux, et dont l'inférieur est souvent épe- 
ronné; cinq étamines, à anthères biloculaires, adnées, appliquées 
contre l'ovaire, souvent dilatées ou monadelphes à la base; un ovaire 
uniloculaire, à trois placentas pariétaux, une capsule trivalve et ter- 
minée par un seul style, un albumen charnu et un embryon droit. 

Cette famille comprend des herbes, des sous-arbrisseaux, ou des 
arbrisseaux à feuilles ordinairement alternes , stipulacées et simples, 
à fleurs droites ou penchées, à pédoncules solitaires ou nombreux, 
simples ou ramifés. Elle est divisée en trois tribus, et formée d'un 
grand nombre de genres répandus sur les différentes parties du globe, 
principalement dans l'Amérique méridionale, sur les côtes d'Afrique 
et dans la Nouvelle-Hollande. Le plus nombreux de ces genres contient 
plusieurs espèces européennes, et c'est celui dont nous allons parler, 


== 304 — 


PREMIER GENRE. — Viola. 


Le Viola ou la Violette a les sépales inégaux, prolongés inférieure- 
ment en appendices, des pétales inégaux en estivation convolutive, et 
dont l'inférieur est éperonné, des étamines dilatées à la base, allongées 
au sommet en membrane scarieuse, et dont les deux antérieures se 
prolongent dans l'éperon en appendices nectarifères; un ovaire tantôt 
supère, tantôt enfoncé dans la cavité du torus et par conséquent 
semi-infère; des valves élastiques après la maturation, des semences 
carenculées, plus ou moins ovoïdes et brillantes, un embryon oblong, 
une radicule à peu près cylindrique, des cotylédons oblongs et orbi- 
culaires. 

Les V’iolettes sont des herbes vivaces, très-rarement annuelles, à 
tige tantôt très-courte et comme souterraine; tantôt élevée et même 
un peu souligneuse; leurs pédoncules sont solitaires, axillaires, uni- 
flores, non articulés, recourbés au sommet et chargés de deux brac- 
tées; les fleurs sont penchées, les feuilles séminales sont oblongues, 
ovales et pétiolées. 

Ce beau genre se divise actuellement en cinq sections, dont trois 
sont européennes : 

1° Les Nominium , ou Violettes de mars, à stigmate en bec percé 
d’un trou terminal, à style aminci de la base au sommet, et capsule 
ordinairement trigone ; 

2° Les Dischidium, à stüigmate bilobé au sommet, percé d’un trou 
entre les lobes, style aminci de la base au sommet, capsule ordi- 
nairement trigone , et renfermant un petit nombre de semences ; 

3° Les Melanium ou les Pensées, à stigmate urcéolé, chargé laté- 
ralement de poils en faisceau, style aminci du sommet à la base, et 
capsule légèrement hexagone. | 

Les Nominium forment une section très-nombreuse, répandue prin- 
cipalement en Europe, dans l Amérique septentrionale, et le nord de 
l'Asie. Leurs espèces européennes, qui s'élèvent à peu près à quinze, 
peuvent être commodément partagées en deux groupes : celui des 
Violettes sans tiges, et celui des ’iolettes caulescentes. Les premières, 
dont les feuilles grandissent après la fécondation pour l'accroissement 
de leurs racines ou de leurs stolons, me paraissent former deux types 
principaux : celui du Viola pinnata , à tige ligneuse et à feuilles mul- 
tifides, qui ne contient qu'une seule espèce indigène des Alpes; et 
celui de l'Odorata, dans lequel je comprends le Pyrenaica des Pyré- 
nées, le Palustris des marais du Jura, et l'Hirta des ombrages et des 


— 305 — 


forêts humides. La Violette odorante, que tout le monde connaît, et 
dont la variété à fleurs blanches est aussi très-répandue, se distingue 
de toutes celles du même type par ses longs rejets, qui en font une 
plante sociale; mais cette propriété appartient aussi, en partie, à 
l’Hirta, dont les rejets sont, il est vrai, fort peu développés; au 
Palustris, dont les racines sont rampantes et, par conséquent; les 
rejets souterrains, et à la Pyrenaica, qui n'en est qu'une variété. 
Ces plantes fleurissent au premier printemps, et généralement avant 
leurs congéntres. 

Le second groupe des VNominium, qui se distingue du précédent 
non-seulement par ses tiges, mais encore par ses stipules plus ou 
moins dentées, a, pour espèce principale, le Viola canina, qui croît 
en grande abondance dans nos buissons et dans nos haies. J'y recon- 
nais trois types principaux : le premier, formé du Canina, de nos 
haies et de nos bois; du Pumila, des lieux stériles et des marais 
tourbeux, de l’Arenaria du Vallais et des basses montagnes de la 
Provence, et du Nummularia des Alpes du Piémont; le second, du 
Mirabilis, qui renferme une seule espèce remarquable par son port 
et ses larges feuilles capuchonnées, et enfin, le troisième, du Mon- 
tana , dont l'on distingue plusieurs variétés, réunies entre elles par 
leurs tiges et leurs feuilles allongées, et dans lequel je place encore 
l'Arborescens du midi de la France et de la Corse, à tige sous-frutes- 
cente, à feuilles lancéolées, amincies à la base, stipules longues, 
adhérentes. Ces plantes, sans odeur, à fleurs grandes, d’un violet 
blanchâtre , paraissent généralement après que les premières ont 
passé. 

Les Dischidium ne comprennent que trois ou quatre espèces, et 
sont rèprésentés en Europe par le Viola biflora , originaire des mon- 
tagnes de la Sibérie et de l'Europe, où il recherche les expositions 
fraiches et humides. Il fleurit à la fonte même des neiges, et il est 
très-remarquable par son pédoncule biflore, ses jolies fleurs jaunes 
et sa tige délicate, chargée de deux feuilles réniformes et forte- 
ment crénelées. La forme de son stigmate est très-singulière, et 
son style, qui va bien en s'amincissant, est fortement coudé à la 
base. 

Les Melanium, dont l'Europe est la véritable patrie, se distinguent 
à la forme de leur stigmate urcéolé, à leurs étamines triangulaires et 
réunies, et surtout à la structure de leurs fleurs, dont les deux pétales 
supérieurs sont redressés en étendard, et les trois inférieurs, barbus 
à la base et pendant en lèvres. Leurs tiges sont triquètres, leurs 
stipules dentées ou plus ou moins pennatifides, et leurs feuilles ont 

le 20 


— 306 — 


une texture plus molle que celle des deux premières sections. Les 
Melanium dérivent à peu près tous du Tricolor, qui prend des appa- 
rences très-diverses, selon qu'il croît dans les champs, les montagnes 
ou les jardins, et près duquel on place successivement le Rothoma- 
gensis, qui n'en est peut-être qu'une variété vivace ; le Declinata des 
Alpes de la Hongrie et de l'Italie; l 4/taica de nos jardins, à fleurs 
trés-grandes et du plus beau pourpre; le Grandiflora de nos pâtu- 
rages alpins à fleurs jaunes ou teintes de jaune et de pourpre, ou 
d'un violet pourpré; le Calcarata des pâturages de nos Alpes, à tige 
presque nulle, et le Cornuta des Pyrénées et du mont Atlas, à tige 
plus marquée, à éperon tubulé et allongé. 

Enfin, on peut regarder comme un dernier type de cette section, 
le Cenisia, à tiges filiformes, simples et couchées, à stipules entières, 
à fleurs d’un bleu foncé, deux ou trois fois aussi grandes que celles 
de la Violette de mars, et auquel on doit réunir le Valderia des Alpes 
du Piémont, qui n’en est qu’une variété. 

Les Violettes sont dispersées dans les quatre parties du monde, 
où elles habitent principalement les zones %empérées , les plaines 
élevées et les pentes fraîches des montagnes. Elles comptent déjà près 
de cent espèces, la plupart originaires de l'Europe ou de l'Amérique 
septentrionale, et toutes vivaces par leurs racines, à l'exception, je 
crois, du Viola tricolor. Elles ont été surtout destinées à embellir le 
spectacle de la nature, et à fournir à l'homme ces jouissances douces 
et pures qu'il trouve si souvent quand il sait les reconnaître. Dès le 
premier printemps, il voit naître dans les vergers, les prairies et les 
lisières des bois, la Violette odorante, cachée dans les herbes, mais 
qui se trahit par son délicieux parfum, que tout le monde se plaît 
à respirer. Lorsque cette modeste plante a accompli sa destinée, elle 
est remplacée par d'autres espèces du même genre, le Canina surtout, 
plus apparent et plus frais, mais à peu près sans odeur. Ensuite on 
voit paraître, en grande abondance, dans les champs un peu mon- 
tueux , le Viola tricolor, d'abord faible et peu remarquable, mais s’em- 
bellissant à mesure qu'il atteint des localités plus élevées, et présentant 
ensuite une fleur admirable en richesse, en variété et en distribution 
de couleurs rayonnantes. Enfin la scène se transporte sur les sommités 
des montagnes, qui sont cà et là recouvertes des splendides tapis du 
Cenisia, du Cornuta et surtout du Calcarata auquel rien ne peut être 
comparé. 

Pour reproduire ces divers effets, au moins en partie, on a cultivé 
dans les jardins, les deux espèces principales de Violettes : \ Odorata , 
qui y fleurit plusieurs fois l'année, et le Tricolor, qui s’y est, pour ainsi 


— 307 — 


dire, établi. Mais l'on est encore loin d'avoir retracé avec tous leurs 
charmes, les touchantes scènes de la simple nature. 

Ce qui distingue surtout les #’iolettes de toutes les autres plantes, 
c'ést leur fleur irrégulière et symétrique, composée de cinq pétales 
inégaux et toujours disposés en estivation valvaire. On peut croire que 
cette forme bizarre est le résultat d’un développement inégal, et qu’ori- 
ginairement les Violettes avaient cinq pétales éperonnés comme les 
Aquilegia ; c'est au moins ce que l'on voit assez fréquemment dans 
certaines monstruosités de l’Hirta, du Rothomagensis et de quelques 
autres espèces. 

La même force qui a opéré ce dérangement, peut bien avoir aussi 
influé sur la capsule, qui devait régulièrement être formée de cinq 
valves, et qui n'en a jamais que trois loculicides. 

Les organes foliacés présentent assez de ressemblance; dans la plu- 
part des espèces de ce genre, les racines, presque toujours persistantes, 
sont de petits rhizomes qui s'accroissent sans cesse en hauteur, et 
qui tantôt jettent des filets souterrains, comme dans le Palustris, et 
tantôt, comme dans l'Odorata, donnent de véritables drageons; les 
hampes sont toujours latérales, et par conséquent doivent être consi- 
dérées comme de simples pédoncules, et les feuilles dépourvues d'arti- 
culations se dessèchent en laissant sur la tige l'extrémité de leur pé- 
tiole. On ne peut guère douter que la distinction entre les espèces à 
tiges et sans tiges, ne vienne de ce que ces dernières s'épuisent en 
fleurs ou en rejets ; car, en retranchant les fleurs et les rejets, on par- 
viendrait sans doute à donner des tiges aux espèces qui en sont en 
apparence privées. 

Les feuilles toujours glanduleuses sur leurs bords , sont accompa- 
gnées de stipules simples dans les deux premières sections, et 
plus ou moins incisées dans la dernière. Ces stipules, qui paraissent 
comme entassées dans les violettes dépourvues de tiges, se distin- 
guent des feuilles , non-seulement parce qu’elles ne sont point cré- 
nelées , mais surtout parce qu'elles ne sont jamais involutives. 

Les fleurs des ’iolettes sont penchées sur leurs pédoncules , pen- 
dant tout le cours de la fécondation, qui n’a pas, je crois , encore 
été bien observée. J'ai vérifié que toutes les espèces ont leurs étamines 
terminées par des appendices roussâtres et membraneux , destinés à 
recouvrir la poussière fécondante. J'ai vu de même que le stigmate 
penche toujours son bec ou son extrémité sur la poche du pétale 
éperonné , et qu'au moment de la floraison , les appendices des deux 
étamines supérieures laissent échapper de leur glande latérale, l'hu- 
meur miellée. Enfin j'ai vu le pollen pulvérulent sortir comme par 


— 308 —- 


jets, soit entre l'ovaire et les appendices membraneux qui terminent 
les filets des étamines, soit entre les intervalles qui à cette époque 
séparent les filets des deux étamines inférieures ; et l’on peut toujours 
observer à la floraison, et dans le voisinage du stigmate, un pollen 
abondant attaché surtout aux poils du fond de la corolle. La fé- 
condation n’a lieu qu'après la sortie du stigmate , et l'on voit alors 
aisément les boyaux fécondateurs s’insérer dans ses papilles. 

Ce qui rend la fécondation des Violettes encore plus digne d'examen, 
c'est le phénomène qu’offrent plusieurs espèces de la première sec- 
tion , en particulier, le Mirabilis , le Montana , Y Hirta et même 1 Odo- 
rala ; qui portent souvent deux espèces de fleurs, les inférieures 
complètes et les supérieures avortées, c’est-à-dire privées de pétales , 
mais non pas de stigmate. Il arrive toujours dans ces espèces, que les 
fleurs supérieures, quoique apétales, sont cependant fertiles, tandis 
que les autres sont quelquefois infertiles. Or en admirant de près ce 
phénomène dans le Montana, par exemple, et surtout dans le Mira- 
bilis , on trouve que ces fleurs supérieures, quoique dépourvues de 
pétales, ont cependant leurs anthères chargées de pollen et leurs stig- 
mates bien conformés ; au contraire les fleurs radicales du Mirabilis 
ont leurs anthères et leurs stigmates à demi avortés, et doivent par 
conséquent être très-souvent infécondes. 

Le style et surtout le stigmate sont si variables dans les Violettes, 
que l'on a fondésur ces deux organes, les sections et les principales 
divisions des sections du genre : 

Dans les Nominium, c'est un bec recourbé et percé au sommet ; 

Dans les Melanium, c'est une tête globuleuse, vide en dedans et 
ouverte inférieurement par un grand pore toujours plein d'humeur 
visqueuse et entouré de poils humides pour absorber le pollen. 

Dans le Biflora , qui appartient aux Dischidium, c'est une tête de 
bélier prolongée et ouverte en dessous par un pore tubulé. 

Dans toutes les /’iolettes la fécondation est directe ; le stigmate sort 
d'entre les appendices membraneux avant l'ouverture des anthères ; 
le pollen se répand ensuite soit intérieurement sur l'ovaire, soit exté- 
rieurement par l'ouverture que laissent entr'elles les deux membranes 
correspondantes au nectaire ; il arrive de là au stigmate toujours 
penché sur le nectaire, et toujours humide pour absorber le fluide 
fécondant , ensuite le pore se referme ou s’oblitère, les étamines se 
séparent et se détruisent par l'accroissement de l'ovaire, long-temps 
caché sous les écailles membraneuses. 

Les anthères, placées près de la base des filets, sont grandes, bilo- 
culaires et remplies d'un pollen granuleux , blanc et transparent, qui 


— 309 — 


ne sort que tard et recouvre entièrement la surface de la capsule. 
Leurs cinq filets sont toujours terminés par une membrane sèche et 
roussâtre, et les deux supérieurs se prolongent en un appendice vert 
et épais, qui porte, à son extrémité et sur chacun de ses côtés, la 
glande nectarifère ; si la fleur se déforme , ce qui arrive quelquefois, 
chaque pétale éperonné est pourvu d'un appendice , ce qui prouve le 
rapport qui existe entre l'éperon et le nectaire. 

Lorsque la fleur des Violettes est fécondée, le pédoncule se redresse 
avec la capsule, au moins dans toutes les espèces pourvues de tige ; 
car dans les autres , comme l'Odorata, V'Hirta, le Collina, il conti- 
nue à se pencher, et finit par enfoncer en terre ses capsules dont les 
parois s’épaississent et se colorent en brun sale ; C'est dans cette posi- 
tion qu'elles mûrissent et se détruisent enfin, en répandant leurs 
semences. Mais les capsules des l’iolettes caulescentes, qui sont bien 
plus nombreuses , mürissent en plein air, et un peu avant la complète 
maturation , elles étalent leurs trois valves et exposent au soleil les 
graines qui les recouvrent ; ensuite les valves se contractent et leurs 
bords se rapprochent tout-à-coup avec tant de force et de prompti- 
tude , que les graines sont souvent lancées à deux ou trois pieds de 
distance ; enfin, les valves se séparent et tombent débaurassées de 
leurs graines. Ce phénomène, qui a été souvent observé, et que 
je décris d'après l'excellente monographie de M. De Gineixs, est 
l'exemple frappant d'une cause finale qu'on ne saurait révoquer en 
doute. 

Le nombre des graines, qui varie selon les espèces , s'élève à plus 
de soixante dans le Tricolor. Ces graines , presque toutes de forme 
ovoide , sont suspendues par leur petit bout à un funicule très-court, 
emboîté, à la base, d’une caroncule très-marquée dans les espèces 
sans tiges, et moins visible dans les autres; le cordon ombilical se 
prolonge sous l’épiderme du côté inférieur en un raphé qui s'épa- 
nouit au sommet de la graine, où il forme une aréole un peu ridée, 
qu'on peut considérer comme le véritable ombilic; cette marche du 
cordon s'apercoit très-bien dans l’ovule. 

La germination a lieu assez promptement, au moins dans quelques 
espèces, comme le Tricolor. La graine se gonfle d'abord, puis l'épi- 
derme se détruit par places ; enfin, la radicule perce la tunique 
interne et le test, pour venir de là s’enfoncer en terre ; lorsqu'elle 
s'est enracinée , elle élève ses cotylédons , qui paraissent au jour en- 
core coiffés de leurs téguments ; les feuilles primordiales naissent 
opposées, mais ne se développent que l'une après l’autre , comme 
cela arrive peut-être dans toutes les plantes à feuilles alternes ; tandis 


— 310 —- 
que dans les autres, les Labiées par exemple, les feuilles primordiales 
se développent simultanément. Cette observation de M. De Giwerns 
peut servir à distinguer, à l'époque même de leur germination, les 
deux formes de végétaux. 

L'estivation du calice est différente de celle de la corolle. Dans le 
premier, trois des sépales sont extérieurs, deux en bas, un en haut, 
les deux autres sont intérieurs et latéraux ; dans la seconde, le pétale 
éperonné est roulé sur ses deux bords et enveloppé par les quatre 
autres, qui se recouvrent par paires.et se déplient dans le même ordre 
où ils étaient plissés : après la fécondation, les pétales se roulent sur 
leurs bords; ils ne tombent que tard. 

Je n'ai pas apercu d'autre mouvement organique dans les Violettes, 
que ceux du pédoncule, qui se redresse après la floraison, ou qui, 
dans les espèces dépourvues de tiges , se penche vers la terre, ou en- 
fin se tord pour placer la fleur sous l'influence directe de la lumière. 
Cette torsion s'opère avant que les pétales soient sortis du calice, et 
l’on voit le long de nos haïes, au premier printemps, toutes ces fleurs 
penchées du côté du chemin et redressant leurs pétales du côté op- 
posé. 

Les feuilles du Viola tricolor, du Calcarata et probablement encore 
celles de quelques autres espèces, sont attaquées sur leur surface in- 
férieure par un Æcidium , que De Canvozze désigne sous le nom 
d'Æcidium violarum. 

J'observe en finissant qu'à peu près tous les Vominium portent 
deux espèces de fleurs, les premières qui paraissent au printemps 
sont pétalées, à feuilles longuement pétiolées et stipules agrandies; 
les autres, qui se développent plus tard, non-seulement sont dépour- 
vues de pétales et n'ont guère que deux étamines, mais sont placées 
sur des tiges rameuses dont les feuilles ont des pétioles raccourcis et 
des stipules plus petites. Les Dischidium et les Mélanium ne m'ont 
rien offert de semblable. | 

On cultive dans les jardins de botanique quelques espèces étran- 
gères, qui n'ont pas tout-à-fait le port et la structure des indigènes : 
telles sont en particulier l'Hederacea de la Nouvelle-Hollande à racine 
rhizomatique, éperon avorté, stigmate en trompe d’éléphant et 
dont les deux anthères inférieures s’écartent beaucoup pour l'émission 
du pollen; l'Erpetium reniforme de la Nouvelle-Hollande, non décrit 
par DE Cannozze, à calice et corolle à peu près régulières, stigmate 
filiforme et penché sur le pétale inférieur creusé en cupule mais dé- 
pourvu d'éperon : ces deux plantes peu élevées se multiplient par des 
rejets, et la dernière qui fera un jour un genre, n’a pas les prolonge- 


— 311 — 


ments des anthères et écarte ses étamines pour la fécondation. On 
cultive surtout plusieurs Violettes de l Amérique septentrionale, telles 
que le Canadensis, le Palmata , le Cucullata , et surtout l'4ltaica 
de la Sibérie à fleurs grandes et tricolores; celles de la Jiolette com- 
mune et des espèces voisines qui n'ont point de tiges, doublent 
aisément ; mais je n'ai pas encore aperçu de Melanium ou de Pensées 
à fleurs doubles. 


Quinzième famille. — Hésédacées. 


Les Reésédacées ont quatre à six sépales persistants et continus avec 
les pédicelles, autant de pétales alternes aux sépales hypogynes : les 
supérieurs à onglet écailleux et limbe multifide, les latéraux bilobés, 
ou trilobés, et les inférieurs très-petits et entiers. Les étamines, qui 
varient de dix à vingt-quatre, sont hypogynes; elles ont leurs filets 
plusou moins réunis à la base, leurs anthères biloculaires, leur pollen 
ovoide à trois plis. Le nectaire est une écaille épaisse et tres-obtuse, 
appliquée sur le côté supérieur du torus, tantôt très-rétréci, tantôt 
stipité; les ovaires, qui varient de trois à six, sont quelquefois libres, 
monostyles et appliqués au sommet du torus; quelquefois, au con- 
traire , ils sont réunis par leurs valves en un ovaire unique, couronné 
de trois à six styles courts, coniques et contigus aux sutures des 
valves ; les carpelles, dans le premier cas, sont libres, folliculaires, 
oligospermes et ouverts intérieurement; dans le second, ils sont 
soudés par des sutures indéhiscentes, et forment une seule capsule 
de trois à six valves, ouverte au sommet, uniloculaire, polysperme 
et couronnée par autant de styles qu'il y a de valves; les placentas 
sont solitaires et oligospermes dans les fruits à plusieurs carpelles , et 
égaux au nombre des valves, dans les autres. 

Les semences sont bisériées, légèrement pendantes et recouvertes 
d'une enveloppe crustacée ; l'albumen est nul ou aminci et membra- 
neux; les cotylédons sont charnus, l'embryon est arqué et la radicule 


supère. 


LA LA 
PREMIER GENRE. — hReseda. 


Ce genre se divise en quatre sections”: les Leucereseda, les Rese- 
dastrum, les Luteola et les Glaucoreseda.ii 


— 312 — 


Les Leucoreseda, qui se font remarquer par leurs fleurs blanches 
et leurs feuilles pennatipartites et plus ou moins ondulées, sont prin- 
cipalement l'4/ba des sables maritimes, l'Undata qui n’en est qu’une 
variété, mais dont les capsules sont plus grosses et les feuilles plus ondu- 
lées, le Fruticulosa, de l'Espagne , à souche ligneuse; enfin le Pinna- 
tifida, le Glaucescens, et le Virescens, dont je parlerai ensuite, et 
qui ne sont sans doute que les mêmes formes différemment mo- 
difiées. Ces plantes, dont les fleurs sont à peu près régulières, ontleurs 
cinq ou six pétales trifides semblables, dix à douze étamines jaurâtres, 
bisériées, des capsules tétragones, médiocrement ouvertes et toujours 
redressées. 

Les Resedastrum, qui ont six sépales, trois et rarement quatre 
stigmates, renferment quatre espèces à grappes lâches et capsules 
penchées : ce sont l’Odorata , originaire de l'Egypte et de la Barbarie, 
mais cultivé partout à cause de son excellente odeur, et distingué par 
ses anthères briquetées;le Phyteuma, des terrains sablonneux, à calice 
agrandi et fleurs inodores; le Mediterranea, qui en est très-voisin, 
mais qui s’en distingue surtout par ses calices raccourcis, et enfin le 
Lutea de nos chemins et de nos murs, à fruits triangulaires et tron- 
qués au sommet. 

Ces plantes annuelles se sèment continuellement et fleurissent 
quelquefois pendant tout l'hiver; les capsules des trois premières, 
qui sont très-ouvertes, se renversent de bonne heure pour répandre 
leurs graines; mais celles du Lutea, qui sont fortement bordées et 
médiocrement ouvertes, n’ont pas besoin de se retourner pour ré- 
pandre leurs graines. On rend ces plantes vivaces en les empêchant 
de fleurir, ou seulement en retranchant quelques-unes de leurs 
grappes. On ne voit dans les Resedastrum aucune trace de ces renfle- 
ments qui couronnent les capsules des Luteola. 

Les Luteola doivent leur nom au Reseda luteola, cultivé sous 
le nom de Gaude, pour la couleur jaune qu'il fournit; on le ren- 
contre sur le bord des chemins, où il se reconnaît à sa racine 
pivotante et bisannuelle, ainsi qu’à ses tiges élevées, ses feuilles 
entières et ondulées, et surtout à sa capsule coriace, toujours 
redressée et fermée par trois cornes foliacées, qui alternent avec 
trois tubercules charnus , recourbés en dedans et renflés par l'hu- 
midité. 

Les fleurs sont petites et presque sessiles ; le pétale inférieur avorte 
presque toujours, et le supérieur est beaucoup plus grand que les 
autres. À la dissémination, les cornes s'écartent un peu, les tuber- 
cules charnus se flétrissent, et les semences sortent par les inter- 


— 313 — 


valles ; le moindre mouvement de l'air suffit pour agiter les longs 
épis de cette plante. | 

On doit ranger parmi les Luteola, le Crispata, herbe annuelle à 
feuilles allongées et entières; son épi aminci porte des fleurs à quatre 
sépales bilabiés , le supérieur fortement quadrilobé , et les trois autres, 
entiers, allongés et filiformes. Les étamines ont leurs anthéres cou- 
chées sur les trois lobes déjetés du stigmate; la lame nectarifère est 
élargie; la liqueur miellée remplit le cuilleron du pétale supérieur. 
Pendant la maturation, la capsule s’élargit et s'entr'ouvre à la base, 
comme dans le Luteola. Celui-ci est beaucoup moins déformé que les 
autres espèces du genre, car sa lame peu apparente ne m'a pas paru 
nectarifère, et ses élamines , qui entourent de tout côté l'ovaire, ne 
se renversent pas en haut, comme on le voit dans le Lutea, l'Odo- 
rata, etc. Je crois remarquer que sa fécondation estindirecte , et que les 
stigmates des fleurs inférieures ne sont pas encore développés lorsque 
les anthères déjetées s'ouvrent pour répandre le pollen. 

Les Glaucoreseda ne renferment que le Glauce des collines caillou- 
teuses des Pyrénées, qu'on distingue par sa couleur glauque et prui- 
neuse. Ses racines sont vivaces, ses tiges diffuses etses feuilles linéaires ; 
ses fleurs blanches sont médiocrement déformées. 

Ce genre est très-distinct des autres par la structure variable de sa 
fleur , son nectaire scutelliforme, tapissé d'un duvet humide, sa flo- 
raison, ses pétales valvaires, qui ne se développent que tard, enfin 
par ses étamines, dont les anthères sont constamment découvertes 
pendant la préfloraison. 

Plusieurs botanistes ont tâché de découvrir, au milieu de ces défor- 
mations nombreuses, la structure primitive de la fleur des Resedas. 
Hooker, en la comparant à celle des £uphorbes, a imaginé de consi- 
dérer son calice comme un involucre commun, et ses pétales comme 
les restes d'autant de fleurs avortées, et dont une seule a conservé ses 
étamines et sa capsule. 

Jules DE Trisran, dans les Ænnales du Musee, vol. 18, page 392, 
Linorey, dans la planche 22 de sa Collection botanique, et R. Browx, 
dans ses Votes sur les Voyages de Denham et Clapperton, se sont 
ensuite occupés de ce sujet difficile, sur lequel ce dernier surtout a 
répandu une grande lumière. 

Auguste Sainr-HiraiRe, qui leur a succédé, m'a paru avoir enfin 
mis en évidence cette structure primitive que les précédents auteurs 
n'avaient fait qu'entrevoir. Cet habile physiologiste, dans un mémoire 
sur la structure et les anomalies de la fleur des Resédacees ( Voyez le 
13° vol. des Annales de la Société royale des sciences d'Orléans), établit 


— 314 — 


que cette fleur était primitivement formée de six verticilies à cinq di- 
visions : le premier, celui du calice; le second, celui des pétales; le 
troisième , celui des écailles opposées aux pétales ; le quatrième, celui 
des écailles alternes aux pétales; le cinquième, celui des étamines, et 
le dernier celui des carpelles. 

Ces divers verticilles, dont l’on trouve des traces dans tous les 
Résedas, ont été plus ou moins altérés selon les espèces; principale- 
ment les deux écailleux, c'est-à-dire le second, et le troisième dans les 
Leucoreseda, moins déviés que les autres du type primitif, principale- 
ment dans le J’irescens et le Glaucescens, très-voisins de |’ 4/ba et de 
l'Undata ; on y reconnait, en effet, cinq sépales avec lesquels alternent 
cinq pétales à onglets allongés et lames trifides, un nectaire lamelleux, 
élargi et appliqué du côté supérieur , dix à douze étamines, et ordinai- 
rement quatre stigmates ; en sorte que le troisième verticille a disparu 
presque entièrement, et qu'il ne reste du quatrième qu'un lobe 
épaissi et redressé, Dans les Resedastrum, où la déformation est plus 
frappante, parce que les pétales sont très-irrégulièrement divisés, les 
deux écailles du troisième verticille sont appliquées à la base des pétales 
supérieures, devenus ainsi plus consistants, et l'écaille supérieure du 
quatrième s'étend en un large nectaire duveté qu'on ne retrouve pas 
aussi prononcé dans les autres. Enfin, dans toutes les sections du 
genre, les carpelles , au lieu d'être séparés comme dans l’Astrocarpe , 
sont au contraire soudés par leurs bords, de manière à former des 
capsules à quatre, trois ou même deux valves toujours ouvertes au 
sommet et indéhiscentes sur les bords. Voilà ce qui concerne les prin- 
cipales anomalies des fleurs des Résedas. 

Lorsque la fleur a ses deux premiers verticilles à peu près réguliers, 
comme dans les Leucoreseda, et que la lame nectarifère est redressée 
et non feutrée, la fécondation est directe, et les étamines, dont le 
nombre ne s'élève guère au-delà de douze, et qui ordinairement sont 

"successivement alternes et opposées aux pétales, répandentleur pollen 
sur les stigmates qu'elles entourent et qui s'arrondissent de bonne 
heure en têtes papillaires ; mais lorsque le verticille floral est irrégulier, 
comme dans les Resedastrum, alors ces mêmes étamines, beaucoup 
plus nombreuses, et qui d'abord étaient disposées régulièrement 
autour du pistil, se déjettent du côté inférieur pour faire place à un 
beau nectaire épais, qui s'étend en écusson contre les pétales supé- 
rieurs, dontla base est devenue lamellaire et un peu mellifère pendant 
le cours du développement floral. Au moment où commence la fécon- 
dation, on voit les étamines presque toutes déjetées, redresser et ren- 
verser leurs filets, afin que les anthères puissent répandre leur pollen 


BON ee 

sur la plaque duvetée et profondément mellifère du nectaire. On doit 
observer encore qu’à cette époque, les stigmates ne sont pas entière- 
ment développés, et qu'ils ne deviennent papiilaires qu'après l'émission 
du pollen sur la lame nectarifere. 

Ce qu'il y a de plus remarquable ici, c'est que la fleur déformée 
est beaucoup plus féconde que la fleur régulière , tandis que, dans 
toute la section des Leucoreseda , spécialement dans l4/ba, l Undu- 
lata, le Virescens , etc., les capsules souvent avortées , sont tou- 
jours grêles, paucispermes et redressées ; dans celle des Resedas- 
trum , elles sont au contraire renflées et inclinées sur le sol pour 
répandre plus facilement leurs nombreuses graines. C'est là un nou- 
vel exemple de ces altérations si communes dans lesfleurs, et presque 
toujours destinées à la conservation des espèces. 

Dans le Luteola , qui forme avec le Crispata une section, à cause 
du nombre de ses folioles calicinales et de ses pétales , ainsi que de la 
forme bizarre de sa capsule, la symétrie des verticilles extérieurs est 
également dérangée par le développement du nectaire; c’est pour- 
quoi les étamines, d'abord déjetées , se réfléchissent vers le haut, et 
les graines sont fécondes et nombreuses ; mais les capsules droites 
sont fermées jusqu'à la dissémination. 

Dans les sections où les étamines se redressent en se rejetant vers 
le haut de la fleur, on observe que les anthères sont primitivement 
toutes introrses , mais que les inférieures en se relevant se retournent 
sur leurs filets, afin qu’en passant du côté opposé du stigmate , elles 
deviennent introrses et non pas extrorses , comme elles l'auraient été 
naturellement ; on peut suivre ce mouvement dans le Lutea , le Phy- 
teuma ,  Odorata , etc. 

Le Glaucescens de la Sicile appartenant à la section peu déformée 
des Leucoreseda , a les fleurs presque entièrement régulières à cinq 
sépales et cinq pétales, d'un beau blanc, divisés chacun jusque près 
de la base en cinq lanières étroites. Les étamines, au nombre de dix, 
sont alternativement opposées et-alternes aux pétales ; l'ovaire tétra- 
gone est terminé par quatre stigmates à tête blanche et papillaire ; le 
nectaire n’est point placé au haut de la fleur, mais chaque étamine est 
nectarifère et écailleuse à sa base ; les capsules allongées , régulière- 
ment tétragones et fermées pendant la maturation, portent leurs 
graines sur les quatre arêtes qui alternent avec les stigmates et for- 
ment les quatre sutures des valves ; chaque stigmate est ainsi bifide 
et correspond à deux arètes. 

Les anthères sont introrses et arrangées autour du pistil qui 
reste droit, en sorte qu'il n’y a aucune déformation; cette plante, 


— 316 — 


qui présente cà et là dans quelques-unes de ses fleurs, des étamines 
surnuméraires et placées dans un rang intérieur, est donc le véritable 
type normal du Réseda. 

On cultive au jardin de Genève, sous le nom de Reseda virens, une 
plante qui s'y conserve depuis long-temps et qui fleurit à peu près 
tout l'été ; son port , ses feuilles , ses fleurs appartiennent au Reséda 
blanc , dont elle présente, je crois, la forme primitive; les six sépales 
alternent avec autant de pétales réguliers trilobés et rarement qua- 
trilobés; le pistil est au centre, entouré de six étamines symétriques, 
sans aucune trace de nectaire. Mais cette fleur, en apparence très- 
bien formée , n'a guère que des stigmates avortés, des anthères sans 
pollen et des capsules infécondes; toutefois j'ai apercu, dans quelques- 
unes de ces capsules flasques et aplaties, des graines avortées et d’au- 
tres qui pouvaient bien être fécondes. 

Je remarque enfin que la déformation des Reésedas , qui acquiert son 
plus grand degré d'intensité quand la grappe est en pleine floraison, 
et que la température est la plus favorable, disparaît en grande partie 
dans le cas contraire. A l'entrée de novembre, et plus tôt, je vois les 
fleurs supères du Lutea et du Luteola perdre leur nectaire et une partie 
de leurs pétales , en conservant encore leur calice, leurs stigmates et 
leurs étamines bien conformées ; dans le Lutea, on distingue alors 
facilement que les pétales sont indépendants du torus; que celui-ci 
règne dans tout le contour des organes sexuels, mais qu'il acquiert 
une plus grande largeur vers le haut de la fleur, où il est sensiblement 
nectarifère, et que l'irrégularité dans la position et le mouvement des 
étamines est essentiellement son ouvrage. 

M. Edmond Boissier a rapporté de son voyage en Espagne deux 
Resédas ; le premier, qu'il appelle le Complicata, et qui me paraît 
voisin du Lutea, a des calices à six divisions fort allongées, un 
nectaire marqué, bordé vers le haut de trois pétales élargis à la 
base, des filets nombreux et qui ne m'ont pas paru se déjeter, une 
capsule linéaire allongée, terminée par trois becs raccourcis, et 
ouverte au sommet ; elle renferme des semences qui pourraient bien 
avorter. 

La seconde espèce est une plante très-effilée, à feuilles linéaires, 
et fleurs très-petites, légèrement pédonculées et bractéolées au sommet 
des tiges; ses fleurs régulières m'ont paru formées d'un calice à cinq 
ou six divisions égales, d'une douzaine d’étamines à anthères jaunes 
et introrses, d’un ovaire à quatre ou cinq lobes coniques , divariqués 
et terminés par des stigmates sessiles et papillaires. Je n'ai su y voir 
aucune trace de déformation ou de nectaire ; il appartient donc à la 
section de l’Ælba; c'est l Undata. 


— 317 — 


SECOND GENRE. — Astrocarpus. 


L'Astrocarpus a quatre à six sépales inégaux, et dont les supérieurs 
sont laciniés, douze à quinze étamines ; quatre à six carpelles portés 
sur un torus stipité, étendu horizontalement et s’ouvrant par une 
fente intérieure ; une ou deux semences, lenticulaires vers le milieu 
de chaque carpelle. 

Ce genre a été détaché de celui du Reseda, à cause de la structure 
de son fruit, qui n’est point unicapsulaire et à valves soudées sur les 
bords, mais qui est au contraire formé de quatre à six carpelles uni- 
loculaires, plissés dans leur milieu , et ouverts intérieurement comme 
ceux des Hellebores. 

Il renferme jusqu'à présent deux espèces vivaces : le Canescens de 
l'Espagne et le Sesamoides, beaucoup plus connu, et dont l'on dis- 
tingue deux variétés, le Stellatus à feuilles radicales, ovales, oblon- 
gues, et le Purpurascens, à feuilles radicales, à peu près linéaires ; 
on pourrait y joindre peut-être quelques espèces étrangères , telles 
que le Bipetale du Cap de Bonne-Espérance,etc.; mais je ne les connais 
pas assez pour rien affirmer à leur égard. 

Les Astrocarpus ont des calices petits, des pétales très-inégaux, à 
onglets nectarifères vers le sommet de la fleur et dans le voisinage du 
vrai nectaire. On remarque de plus que leurs carpelles, quoique dis- 
tincts, s'ouvrent également vers le sommet pour mettre à découvert 
leur graine à radicule recourbée, placé un peu différemment que dans 
les Resedas. 

Pourquoi, au milieu d’une déformation aussi semblable, les valves 
des carpelles, au lieu de se souder entre elles, sont-elles restées dis- 
tinctes et renferment-elles un si petit nombre de graines? C'est ce que 
je ne concois pas encore, et qui doit tenir à la fécondation. En atten- 
dant, j'observe qu'on peut suivre à l’œil toutes les déformations suc- 
cessives du fruit des 4strocarpus , depuis l’époque où les carpelles sont 
encore redressés, jusqu'à celle où ils s’étalent en rayons et s'ouvrent 
au sommet (Voyez Ann. du Museum, v. 18, p. 192.) 


A —— 


— 318 — 


Seizième famille. — Droséracées. 


Les Droséracces, qui forment une famille nouvelle, établie par De 
CaNDOLLE, ont un calice à cinq sépales persistants, à estivation 
embriquée; cinq pétales distincts ou rarement soudés, hypogynes, 
alternes aux sépales, et, pour l'ordinaire, marcescents ; les étamines, 
qui persistent également, sont libres, tantôt alternes aux pétales, 
tantôt deux, trois ou quatre fois aussi nombreuses; les anthères sont 
biloculaires , extrorses, et percées de deux trous; l'ovaire est solitaire 
et sessile; les styles, qui varient de trois à cinq, sont réunis à la base 
ou distincts, bifides ou rameux; la capsule est formée d’une à trois 
loges et de trois à cinq valves, qui s'ouvrent par le sommet, et se 
roulent plus ou moins sur leurs bords; les placentas sont tantôt placés 
à la base, tantôt longitudinalement, sur le milieu des valves; les 
semences, bisériées sur les valves, ou entassées à la base de la capsule, 
sont ovales, brillantes, nues ou enveloppées d’un arille mince et fol- 
liculé; l'albumen est cartilagineux ou charnu ; l'embryon est droit, 
amin@i, central, dicotylé; les cotylédons sont assez épais, la radicule 
est obtuse et dirigée vers l'hilus. 

Les Droséracées diffèrent entre elles, comme l'on voit, par plusieurs 
caractères essentiels tirés du nombre des étamines et des pistils, de la 
conformation de la capsule, de la situation du placenta et de la 
structure des semences nues ou arillées, mais elles sont plus liées par 
leur mode de végétation, leur port, leurs habitudes, etc. Ce sont 
des herbes vivaces ou annuelles, à feuilles radicales, dont les fleurs 
sont toujours portées par des hampes. 

Des huit genres qui forment la famille encore mal circonscrite des 
Droséracées, quatre appartiennent, en tout ou en partie, à l'Europe; 
les quatre autres sont dispersés dans l'Amérique septentrionale, au 
Cap, dans la Nouvelle-Hollande et les iles adjacentes à la Sibérie orien- 
tale. Tous sont plus ou moins remarquables par la singularité de leur 
port, les poils glanduleux et quelquefois irritables de leurs feuilles , la 
conformation de leurs fleurs, enfin leur forme de végétation. Presque 
tous, avant leur développement, ont les feuilles et les hampes roulées 
en spirale, comme les Fougères. 


PREMIER GENRE. — Droseru. 


Le Drosera a un calice et une corolle sans appendices, cinq étamines, 
trois à cinq styles divisés en deux. 


— 319 — 


C'est le plus étendu des genres de cette petite famille, car il compte 
plus de trente espèces dispersées dans presque toutes les parties du 
monde, et qui habitent à peu près toutes dans les tourbières et les 
marais recouverts de mousse. On les reconnait à leurs feuilles radicales 
disposées en rosule, ainsi qu’à leurs hampes courtes, grêles, élégantes 
et roulées sur elles-mêmes avant leur développement; les feuilles por- 
tent, sur leurs bords et sur leur surface, des poils ordinairement rou- 
geâtres et terminés par de belles glandes transparentes. 

Ce genre a été divisé par De Canpoze en deux sections : 

Celle des Rorella, à styles simples ou à deux et trois divisions, ter- 
minées par de petits renflements en tête ; 

Celle des Ergaieium, à styles capillaires, multifides et pédicellés au 
sommet. 

La première section , de beaucoup la plus nombreuse, se divise, 
comme la seconde, en deux groupes : celui des espèces à tige, et 
celui des espèces à hampe. Le dernier, le seul européen, est formé 
de vingt-une espèces ou variétés, originaires principalement du Cap, 
de la Nouvelle-Hollande et des deux Amériques, et distinguées entre 
elles par la forme de leurs feuilles et de leur hampe, ainsi que par 
leurs fleurs plus ou moins nombreuses. Trois seulement sont indi- 
gènes et appartiennent évidemment au même type, sinon à la même 
espèce : ce sont le Rotundifolia, le Longifolia de Link, et l'Anglica. 
Kocx y ajoute l'Obovata et l'Intermedia , et il distingue ces diverses 
espèces par leurs stigmates échancrés ou non échancrés, en massue 
ou obovoiïdes ; mais ces deux dernières sont évidemment homotypes 
aux trois premières. 

Ces trois espèces diffèrent les unes des autres par leurs feuilles 
longues ou ovales, leurs stigmates entiers en massue, ou cunéiformes 
et divisés. Elles habitent même souvent ensemble, et j'ai cueilli plu- 
sieurs fois réunis le Rotundifolia et le Longifolia ou l’Intermedia de 
DE CanDozLe, qui est, en effet, moyen entre les deux autres. Toutes 
les trois fleurissent au mois de juin, et une seconde fois en automne, 
quand la saison est favorable. Leur efflorescence est centripète, et 
leur hampe se déroule successivement; les fleurs, d'abord légèrement 
penchées, se redressent pendant la maturation, où la capsule est re- 
couverte par le calice et les pétales desséchés. Les graines du Zongi- 
folia et de l'Anglica sont nues, selon Gaunix et la plupart des bota- 
nistes ; au contraire, celles du Rotundifolia sont enveloppées dans ur 
sac ou une membrane réticulée; mais il est difficile de concevoir une 
telle différence d'organisation dans des plantes d’ailleurs si semblables, 
et je suis bien plus porté à croire, d'après GÆRTNER, que cette mem- 


= D — 
brane existe primitivement dans toutes les espèces, mais qu'elle se 
sépare souvent avant la complète maturité des graines. Elle est très- 
distincte dans le Rotundifolia, où je l'ai vue plusieurs fois, et elle 
ressemble beaucoup à celle des Orchidées, du Monotropa, des Pyroles, 
et, en général, de toutes les plantes à semences scobiformes. 

Les feuilles des Drosera , épaisses et onctueuses au toucher, sont 
d'abord pliées transversalement sur leur face inférieure, et bordées 
sur l’autre d'un renflement formé de poils glanduleux fortement cou- 
chés en dedans : ces poils ou ces spinules rougeâtres recouvrent en- 
suite toute la surface supérieure, et distillent constamment de leur 
sommet renflé une liqueur gluante qui s'étend en filets sur les corps 
qui la touchent. Plusieurs botanistes disent qu'ils sont irritables, et 
Rorx, selon Porrer, Dictionnaire Encyclopédique , vol. vr, pag. 298, 
assure que si un insecte se pose sur les feuilles d’un Drosera, à l'ins- 
tant ces poils glanduleux, par un mouvement dirritabilité, se flé- 
chissent et l’enveloppent , qu’ensuite la feuille elle-même se replie 
pour incarcérer entièrement le petit animal, comme dans le Dionæa 
muscipula. Mais si on observe ce petit phénomène de plus près, on 
verra que c’est l’insecte lui-même qui, en touchantles poils glanduleux, 
s'enveloppe insensiblement dans leurs filets gluants, et détermine par 
ses mouvements les feuilles à se rouler du sommet à la base sur leur 
face glanduleuse. 

La fécondation des Drosera a lieu par le pollen sphérique et comme 
quädriloculaire, que les anthères extrorses laissent échapper d'une fente 
longitudinale sur les stigmates fortement rejetés en dehors : après l'épa- 
nouissement; qui est très-court et qui a lieu vers le milieu du jour, les 
anthères serrent de tous côtés les stigmates filiformes et papillaires, et 
les saupoudrent enfin entièrement de leur pollen qui est une poussière 
fine et adhérente ; les semences recouvrent, comme le dit GÆRTNER, 
tout l’intérieur des valves, et ne m'ont pas paru placées sur deux 
rangs, comme l'affirme De Canpozre ; mais j'ai constaté que les 
valves variaient de trois à cinq, ainsi que les styles et les stigmates ; 
toutefois, lorsqu'il y a cinq stigmates, il n’y a cependant que trois 
styles dont deux sont bifurqués. 

Les Drosera européens fleurissent deux fois l'année, à la fin du 
printemps et au commencement de l'automne ; j'ai trouvé en septem- 
bre, sur des touffes de Drosera dont quelques hampes avaient déjà 
donné leurs graines, de jeunes Drosera dont les uns avaient quatre 
feuilles, les autres seulement deux : ces feuilles pliées en deux comme 
les autres avaient déjà leurs poils rouges et glanduleux, la racine 
assez allongée était flottante. 


— 321 — 


Auguste Sarnr-Hirater, qui a rapporté du Brésil plusieurs espèces 
nouvelles de Drosera ; observe que les mêmes espèces, comme l’/nter- 
media, sont quelquefois répandues dans les deux mondes, et que le 
genre lui-même, comme ceux qui vivent auprès des eaux , est dispersé 
presque indifféremment dans toutes les latitudes. Il ajoute que les 
Drosera ont réellement une tige, que leur hampe n’est qu’un pédon- 
cule, et qu'enfin les deux sections que nous avons établies ne sont 
pas toujours distinctes. On doit donc, comme le docteur Hwussenor 
(fascicule des plantes de Lorraine), considérer les racines des Drosera 
comme des rhizomes, qui, selon les circonstances, développent plus 
ou moins leurs feuilles presque toujours disposées en rosettes, et dont 
les aisselles donnent naissance à des hampes qui paraissent successi- 
vement. 

Les Drosera européens ne se multiplient point par des rejets, et 
ne sont pas en conséquence des plantes sociales; cependant ils se trou- 
vent en grande abondance dans les lieux qu'ils habitent. Les espèces 
étrangéres, lorsqu'elles sont vivaces, doivent, au contraire, croître 
souvent en touffe, comme le Linearis du Canada, et donner des dra- 
geons ou des racines latérales. Il n'est pas douteux qu'elles ne présen- 
tent aussi plusieurs phénomènes intéressants et encore peu connus. 


SECOND GENRE. — Æ/drovanda. 


L'Aldrovanda a cinq sépales et cinq pétales non appendiculés, cinq 
étamines et cinq styles courts, filiformes et terminés par autant de 
stigmates obtus; sa capsule, globuleuse et uniloculaire, s'ouvre à 
cinq valves et renferme dix semences attachées aux parois. 

Ce genre ne comprend qu'une seule espèce, l'{/{d{rovanda vesiculosa, 
des lacs et des eaux stagnantes du midi de la France, du Piémont et 
de l'Italie. C'est une plante grêle, faible et flottante, à tige simple ou 
peu rameuse, à feuilles disposées en verticilles plus ou moins garnis, 
renflées en vessie au sommet, et portées par des pétioles bordés de 
longs cils près du limbe. Le pédoncule est axillaire, solitaire, cylin- 
drique, plus long que les feuilles, et terminé par une fleur blanche 
assez petite. 

Cette singulière plante ressemble au Drosera pour la fleur, mais non 
pas pour la végétation. Îl parait, dit De Canpozze, qu'elle germe au 
fond de l'eau, et qu'elle y végète jusqu'au moment de sa floraison ; 
qu’ensuite , ne pouvant ni s'allonger assez pour atteindre la surface du 
liquide, ni fleurir au fond même de l’eau, elle se sépare de sa racine, 
près du collet, pour venir fleurir et fructifier en plein air, à peu près 

x. 21 


— 322 — 


comme le Valisneria. Cette explication, trés-ingénieuse et très-natu- 
relle, sera complètement vérifiée, lorsque, d'un côté, on aura vu 
germer des graines d'Aldrovanda, et que, de l'autre, l'on aura trouvé 
au fond de l’eau leur racine vivante, prête à donner de nouvelles 
pousses. 

Je n’ai jamais vu cette plante, et par conséquent je ne peux rien dire 
sur sa fécondation. A-t-elle des nectaires , étale-t-elle et referme-t-elle 
ses fleurs ? Ses vésicules se détruisent-elles pendant le cours de la végé- 
tation ? Comment sont constituées ses graines, et quel est son mode 
de germination ? Ces questions, ainsi que les précédentes, doivent être 
résolues par ceux qui auront le bonheur d'observer la plante dans les 
lieux qu’elle habite. Je remarque, en finissant, que le pédoncule est 
latéral et non pas terminal ; ce qui semble indiquer que la tige se con- 
serve après la floraison. 


TROISIÈME GENRE. — Drosophyllum. 


Le Drosophyllum a cinq sépales et cinq pétales à onglets rapprochés, 
dix étamines et cinq styles filiformes, une capsule uniloculaire à cinq 
valves qui se recourbent en dedans par leurs rebords, et forment ainsi 
cinq loges imparfaites. 

Cette plante, qui a été séparée des Drosera à cause de ses dix éta- 
mines, de ses styles simples et des valves recourbées de sa capsule, 
croît sur les collines ou les sables du Portugal, et par conséquent ne 
parait pas avoir l'organisation intérieure des Drosera ; cependant elle 
s'en rapproche pour la forme et la conformation de ses feuilles, qui 
sont entières, très-étroites, et recouvertes de poils glanduleux. 

Le Drosnil Lyllum est EE nhcens et se multiplie par des rejets 
souterrains ; ses fleurs, disposées en corymbe lâche, sont grandes et 
d'un jaune soufre. Je ne l'ai jamais vu. 


QUATRIÈME GENRE. — Dionæa. 


Le Dionæa a cinq sépales et cinq pétales, dix à vingt étamines dont 
les anthères s'ouvrent latéralement, un style terminé par un stigmate 
orbiculaire et frangé, une capsule uniloculaire à cinq valves, un grand 
nombre de semences, à demi plongées dans une substance celluleuse 
qui remplit le fond du péricarpe. 

Le Dionæa est une plante vivace qui se multiplie par ses racines et 
par ses graines; ses feuilles, disposées en rosette sur le sol, comme 
celles du Drosera, ont leur pétiole ailé et articulé au limbe d’abord 


— 323 — 


plié en deux, roulé sur les côtés et couché horizontalement sur le 
pétiole qui le protége; insensiblement ce limbe se redresse, et s'étale en 
deux lobes demi ovales qui se referment exaciement avec leurs cils, 
lorsqu'on les irrite. La hampe qui naît du milieu des feuilles est nue, 
grêle et porte à son sommet cinq à sept fleurs blanches, pédonculées, 
dont l’ensemble forme un corymbe lâche. 

Cette plante croît dans les lieux humides de la Caroline septentrio- 
nale, autour de la ville de Wilmington, où elle occupe, dit Bosc, dont 
j'emprunte les expressions, une surface de deux ou trois lieues carrées ; 
c’est le seul lieu du monde où on la rencontre, mais elle y vient en si 
grande abondance, qu'elle recouvre souvent tout le sol. 

La surface extérieure des deux lobes foliacés n’a rien de remarquable, 
mais l'intérieure est formée d’une substance épaisse, cornée, humide 
et tellement irritable , que le moindre contact suffit pour y déterminer 
un mouvement ; lorsqu'un insecte vient s’y poser, les lobes se replient 
aussitôt, croisent les cils épineux qui les bordent, et retiennent ainsi 
ou même tuent leur prisonnier par leurs piqûres : tant que l'insecte 
se débat, les lobes restent fermés, mais lorsqu'il cesse de se mouvoir 
ou qu'il est mort, ces lobes s’écartent d’eux-mêmes. Ce joli phénomène 
n’a lieu dans toute son étendue, que pendant la végétation et surtout 
la floraison de la plante ; il disparaît en automne, lorsque la fructifica- 
tion est entièrement terminée. | 

Le Dionæa a souvent été apporté en Europe, où il a fleuri en pré- 
sentant les mêmes phénomènes, mais il ne s’y est jamais conservé au- 
delà de quelques années, parce qu'il a besoin , comme le Drosera, d'un 
sol tourbeux et humide. 

Quel est le but de cette propriété si remarquable? C’est sans doute 
d’écarter les insectes qui nuiraient à la végétation et à la fécondation 
de la plante, Mais de quel genre seraient les désordres qu’ils pourraient 
y causer ? c'est ce que j'ignore. En attendant, c’est un spectacle singu- 
lier que celui de tous ces Dionæa pliant et dépliant sans cesse leurs 
feuilles, dans ce coin du monde où ils ont été relégués. 


CINQUIÈME GENRE. — Parnassia. 


Le Parnassia a cinq sépales, cinq pétales et cinq écailles nectari- 
fères opposées aux onglets des pétales, cinq étamines à anthères 
extrorses, quatre stigmates sessiles , une capsule uniloculaire à quatre 
valves loculicides, des semences enflées ou folliculées. 

Ce genre, qui a des rapports un peu éloignés avec les Drosera, est 
formé de six ou sept espèces appartenant toutes au même type; une 


— 324 — 


seulement habite l'Europe, une autre la Sibérie, et les cinq dernières 
l'Amérique septentrionale. Ce sont des plantes vivaces, consistantes, 
entièrement glabres, à feuilles radicales entières, plus ou moins 
ovales, à hampe anguleuse, uniflore et chargée d’une feuille sessile. 
Leurs principales différences consistent dans la forme de leurs pétales 
sessiles ou onguiculés, nus ou ciliés, et surtout dans le nombre des 
glandes qui terminent les écailles. 

La Parnassie européenne ou Palustris, que je prends ici pour mo- 
dèle du type de ce singulier genre, est fort répandue dans les marais 
humides et montueux, où elle fleurit depuis le commencement de 
l'automne; sa racine est une petite bulbe qui donne naissance à quel- 
ques feuilles radicales laurinées, un peu glanduleuses au sommet, et 
d'où sortent latéralement de petits bourgeons, qui contiennent les 
nouvelles pousses et les jeunes feuilles roulées sur les côtés. 

Du milieu des feuilles radicales s’élève une hampe ou une tige trian- 
gulaire au-dessus de la feuille qu’elle porte. Cette tige uniflore se con- 
tourne plus ou moins, sans doute par l'effet de la lumière sur la fleur, 
dont les pétales sont blancs, coriaces, veinés et persistants. A leur 
base, on voit autant de nectaires formés d’une écaille verdâtre, et 
frangée de cils symétriquement terminés par des globules glanduleux; 
ces cils, qui varient ici de sept à treize, et qui sont toujours en nom- 
bre impair, se réduisent à trois dans presque toutes les espèces étran- 
gères; devant les nectaires sont les étamines, qui entourent un ovaire 
légèrement tétragone, terminé par quatre stigmates sessiles. Il n’y a 
rien de plus élégant que toute cette structure. 

Les phénomènes physiologiques que présente le Parnassia se rap- 
portent principalement à la fécondation. Lorsque la fleur est épanouie, 
les filets, d'abord fort courts, grandissent tout-à-coup, et viennent 
placer l’anthère au-dessus de l'ovaire, en sorte que tous les globules 
glanduleux, et surtout l’écaille qui les porte et qui est recouverte de 
gouttelettes emmiellées, puissent dissoudre le pollen dont ils sont 
saupoudrés ; l'opération achevée , l'anthère tombe en se désarticulant, 
et le filet reprend sa première place; chacune des anthères exécute 
séparément le même mouvement; mais celles qui se succèdent sont 
alternatives et non pas contigués ; en sorte que la marche du phéno- 
mène n'est jamais troublée. 

Les anthères sont extrorses et un peu latérales ; la poussière ne peut 
pas par conséquent tomber sur le stigmate, mais elle se répand sur les 
nectaires qui en sont comme ternis, et dont les émanations peuvent 
seules, je crois, féconder les stigmates. Il serait difficile, du moins, 
d'assigner une autre fonction que celle de l'absorption de la poussière - 


— 325 — 


fécondante, à ce nectaire si remarquable et si constant dans toutes 
les espèces du genre. 

Ce qui confirme ma conjecture, c'est que les stigmates ne sont point 
du tout visibles, tant que les anthères répandent leur poussière; et 
qu'ils ne commencent à se dérouler et à étaler leurs languettes papil- 
laires, qu'au moment où J'émission est achevée. Bientôt après, la 
capsule ouvre ses quatre panneaux, au sommet desquels on apercoit 
encore les stigmates desséchés, et dont les graines , régulièrement 
placées sur les quatre placentas et au milieu des valves, sont enve- 
loppées, comme celles de la plupart des Drosera, de ce même sac mem- 
braneux qu'on trouve dans les Orchidees, les Pyroles, etc. J'ai inutile- 
ment tenté de les faire germer, parce que je ne les ai pas placées dans le 
sol humide et spongieux qui leur convient; car je ne puis douter 
qu'elles n'aient la faculté de reproduire la plante. 

La déhiscence de la capsule s'opère ici, comme dans quelques Cam- 
panulees et en particulier dans le Walhenbergia, au moyen des pla- 
centas, dont les extrémités supérieures non séminifères sont fortement 
cornées, et se recourbent élastiquement en se fendant par leur 
milieu. 

La Parnassie d'Europe, et peut-être aussi les autres espèces du 
genre, sont des plantes tardives et qui ne paraissent que lorsque la 
plupart des végétaux sont déjà défleuris. Elles ferment ainsi le cercle 
de l'année, et elles se font remarquer par l’élégance et l’admirable 
conformation de leurs belles fleurs blanches, qui se succèdent assez 
long-temps, et qui sont toujours plus ou moins réunies dans les 
mêmes lieux. 

Je n'ai apercu aucun mouvement dans les calices et les pétales de 
la Parnassie, dont les fleurs et les capsules sont toujours redressées ; 
mais l'on ne peut s'empêcher de reconnaitre comme dépendant 
d'une force vitale, ce mouvement de l’étamine qui va s'appliquer si 
fortement contre le stigmate, qu’on ne pourrait l’écarter sans la rom- 
pre; elle reprend ensuite naturellement, et sans effort, sa première 
place. 

On peut remarquer que la capsule de cette plante devrait être ré- 
gulièrement formée de cinq valves. Celle qui manque a-t-elle avorté ? 
ou le péricarpe n'avait-il primitivement que quatre pièces ? 


— 326 — 


Dix-septième famille. — Polygalées. 


Les Polygalées ont un calice de cinq pièces, deux intérieures, sou. 
vent pétaliformes, trois extérieures ordinairement plus petites et dis- 
posées de manière que l’une est supère et les deux autres infères ; les 
pétales, au nombre de trois ou quatre, sont hypogynes, plus ou moins 
réunies au tube staminifère et rarement distincts; les filets des étamines 
sont adhérents aux pétales, monadelphes et divisés au sommet en deux 
phalanges égales; les anthères, au nombre de huit, sont uniloculaires, 
insérées à la base et ouvertes au sommet; le pollen est sphérique ou à 
peu près en forme de cylindre, avec un assez grand nombre de plis lon- 
gitudinaux ; l'ovaire est libre et presque toujours biloculaire ; le style 
est recourbé, le stigmate infondibuliforme ou bilobé, le péricarpe 
capsulaire ou drupacé, biloculaire ou uniloculaire par avortement ; 
les cloisons naissent du milieu des valves ;les semences, solitaires dans 
chaque loge, sont pendantes, souvent caronculées ou arillées à la 
base, quelquefois velues ou aigrettées; l'embryon est droit et plane, 
tantôt placé dans un albumen charnu dont il forme comme l'axe, 
tantôt, mais rarement, dépourvu d'albumen, et recouvert d’un endo- 
plèvre un peu renflé. 

Les feuilles des Po/ygalees, qui varient très-peu, soit pour la forme, 
soit pour l'organisation, sont alternes, très-rarement opposées, en- 
tières et articulées à la base; les fleurs axillaires, solitaires ou rassem- 
blées en grappes au sommet des rameaux, ont leurs pédoncules arti- 
culés sur des consoles. 

Cette grande famille, qui comprend déjà près de trois cents espèces 
plus ou moins connues, et qui s'accroît tous les jours, est formée 
d’arbrisseaux ou d'herbes vivaces, quelquefois annuelles, réunies sous 
dix ou onze genres répandus dans les diverses parties du monde, où 
ils font souvent des groupes distincts. 

Les Polygalées forment une famille très-naturelle, et qui n’a pas 
des rapports bien marqués avec les autres. Sa structure est tellement 
bizarre, qu'il est très-difficile de la rapporter à une forme primitive et 
art et de lui trouver de vraies affinités même avec les familles 
dont elle semble au premier coup-d'œil être le plus rapprochée, c'est- 
à-dire, les Papilionacees et les Fumariacées. Mais ce qui est digne de 
remarque, ici comme ailleurs, c'est que la nature a tiré de cette 
forme primitive, si étrangement altérée, une forme symétrique très- 
régulière, très-agréable à voir et très-bien accommodée aux vrais 


— 327 — 


besoins de’ la plante, c'est-à-dire, sa fécondation et sa reproduction. 

Je dois ajouter ici que la structure irrégulière des fleurs des Poly- 
galées ‘a été ramenée par Auguste Sainr-HiLaïRe à sa forme primi- 
tive d'un calice et d’une corolle à estivation quinconciale, avec des 
avortements variés selon les genres. 


PREMIER GENRE. — Polygala. 


Le Polygala a des sépales colorés et inégaux , dont les deux inté- 
rieurs sont latéraux et ont la forme d'ailes ; les pétales, au nombre 
de trois ou cinq, sont réunis au tube des étamines , et l'inférieur a 
l'apparence d'une carène ; la capsule est aplatie , elliptique , ovale ou 
un peu cordiforme ; les semences sont caronculées, velues et non 
aigrettées. 

Ce grand genre se divise actuellement en huit sections, qui forme- 
ront peut-être un jour autant de genres, deux seulement, celle des 
Polygalon et celle des Chamæbuxus, renferment des espèces euro- 
péennes. 

La première de ces huit sections, ou celle des Psychanthus , ne 
comprend que des arbrisseaux originaires du Cap, un seul excepté, 
et son caractère consiste dans une carène fortement et élésamment 
frangée , une capsule glabre et échancrée, et trois bractées ordinai- 
rement persistantes à la base des pédoncules. Ses nombreuses espèces, 
dont plusieurs ne sont que des variétés, diffèrent surtout par la 
forme de leurs feuilles rarement opposées , leurs bractées caduques 
et persistantes, et leurs grappes florales allongées ou raccourcies , là- 
ches ou serrées. On les cultive dans nos jardins, où elles se font remar- 
quer par la singularité de leurs belles fleurs pourpres , diversement 
tachées de violet et de blanc. Les plus communs sont le Bracteolata, 
l'Oppositifolia et le Speciosa, dont la corolle ressemble beaucoup à 
celle de notre Polygala vulgaris, mais dont le pinceau , très-élégam- 
ment frangé, est implanté sur le pétale inférieur. Le stigmate , tourné 
en dedans de la fleur, est formé de deux lèvres, l’une supérieure, 
droite et demi-cylindrique , l’autre inférieure et pendante. 

En analysant ces plantes, on y trouve les traces des cinq pièces qui 
formaient primitivement la corolle, un étendard fort court, bilobé et 
réfléchi, deux ailes réduites à deux appendices allongés et légèrement 
recourbés, et une carène à deux pièces; les huit étamines sont à peu près 
entièremeni libres ; les filets sont renflés dans le milieu, les anthères 
originairement biloculaires s'ouvrent au sommet et répandent leur 
pollen jaunâtre sur le stigmate recourbé en dedans; le fond de la 


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fleur est urcéolé ; le pédoncule est entouré à la base de trois bractées 
qui distinguent la section , et l’on remarque de bonne heure dansles 
anthères du Speciosa par exemple, les traces de cette déformation 
d'où résulte la déhiscence au sommet; le pédoncule se tord comme 
dans les autres sections du genre. 

Les feuilles de ces plantes sont fortement articulées ; leurs grappes 
sont terminales , leurs pédoncules colorés, flottants , déjetés et arti- 
culés'comme les feuilles ; les fleurs ont les mêmes mouvements que 
celles de nos Polygala ; leurs ailes s’écartent pendant la fécondation 
et se rapprochent ensuite. 

La première section européenne est celle des Polygalon, très-rap- 
prochés des Psychanthus, et qu'on reconnaît à leur carène en pinceau, 
à leur capsule glabre , ainsi qu'à leurs bractées situées à la base des 
pédicelles et prompiement caduques. Elle se compose d'environ une 
vingtaine d'espèces , dont quelques-unes appartiennent à l'Asie tem- 
pérée , mais dont la véritable patrie est le bassin de la Méditerranée. 
Les unes habitent les sables et les rochers , tandis que les autres, au 
contraire, s'élèvent sur les collines et les pentes des montagnes, où 
elles forment de petits sous-arbrisseaux , des herbes dures, à demi 
ligneuses , ou enfin des plantes annuelles. Tous les Polygala euro- 
péens appartiennent au même type, celui du ’ulgaris, qui se pré- 
sente sous un grand nombre de variétés, et près duquel on place 
successivement | Æmara, distingué par ses feuilles radicales, arron- 
dies et d'une saveur amère ; le Major, des prés montueux de l'Italie, 
à fleurs grandes d’un rose pourpre ; le Flavescens , à fleurs jaunes, 
de l'Italie méridionale ; le Saxatilis des rochers du midi de la France, 
à tige sous-frutescente et à grappes pauciflores ; enfin, le Monspeliaca 
et l'Exilis de la même contrée , deux plantes annuelles qui se plaisent 
dans les terrains secs et sablonneux. 

Le Polygala vulgaris a une racine ligneuse, qui, selon les cir- 
constances , peut devenir un rhizome, et qui pousse sans cesse de 
nouvelles tiges de sa base; ses feuilles , régulièrement disposées en 
ordre quaternaire , sont simples, entières et légèrement recourbées 
sur les bords, avant leur développement. Elles subsistent toute l’an- 
née, et tombent en automne ou au printemps, un peu après les 
rameaux desséchés. Les tiges, toujours terminées par les fleurs, sont 
ordinairement simples , parce que les boutons qu’on apercoit aux 
aisselles des feuilles ne se développent que rarement. 

Les grappes, d'abord serrées, s’allongent insensiblement, et chaque 
fleur s’écarte de la tige en retournant son pédoncule et en perdant les 
trois bractées colorées, qui l'avaient jusqu'alors protégée. Le pédicelle 


— 329 — 


sort d'une console ou d’une saillie qui appartient , je crois, à tous 
les Polygala , et qui se retrouve à la base des feuilles. Bientôt après , 
s'ouvrent les deux ailes qui forment les deux grandes pièces du calice, 
et dont l'estivation est telle, que l’un des bords enveloppe, tandis 
que l’autre est enveloppé. Enfin , paraît le pétale débarrassé des ailes 
qui l'avaient jusqu'alors recouvert, et formé d'un tube terminé par 
deux lèvres, la supérieure à deux divisions couchées l’une sur l'autre, 
et l’inférieure très-élégamment frangée sur ses bords et chargée à sa 
base d’un godet cartilagineux, qui s'ouvre et se ferme, et contient 
d'abord les organes sexuels. L'appareil de la fructification est placé à 
l'ouverture même de la corolle ; il est composé d’une capsule aplatie 
à deux loges monospermes, surmontées d'un style simple, caduc, 
légèrement coudé, et de deux stigmates , dont le supérieur, en demi- 
cylindre, n’est qu'une simple lame, tandis que l’inférieur, pendant et 
papillaire, forme, comme dans les Psychanthus , le véritable organe 
stigmatoïde; les huit anthères uniloculaires, réunies en deux corps, 
et portées par deux petites lames élastiques et un peu glutineuses en 
dehors, enveloppent le stigmate, et viennent déposer, sur sa surface 
humide, la poussière qui sort par de simples pores, et qui ne manque 
presque Jamais de féconder les graines. 

Ce qui est digne de remarque, c’est que dans les Polygalon, comme 
dans les autres sections du même genre, la lèvre inférieure , ou le 
véritable siége du stigmate, est toujours tournée en dedans ou du 
côté de la tige, apparemment pour recevoir l'influence du nectaire, 
avec lequel elle communique ainsi plus immédiatement. 

Lorsque les anthères sont près de répandre leur poussière, la fleur, 
d'abord droite, se penche, et les ailes s'ouvrent en même temps que 
les pinceaux rayonnants s'écartent pour découvrir les organes sexuels. 
A l'entrée de la nuit, les ailes se rapprochent, les pinceaux se resser- 
rent, le godet est fermé, et les organes sexuels ont disparu ; ce joli 
spectacle dure deux ou trois jours, jusqu'à ce que la fécondation soit 
accomplie; enfin les ailes perdent leurs vives couleurs, s’épaississent 
et deviennent d'un vert livide. Dans cet état, elles s’appliquent contre 
la capsule, qu’elles protégent jusqu’à sa maturité. On les voit pendre 
le long de l'axe floral, en se recouvrant les unes les autres, jusqu’à ce 
qu'elles tombent avec le péricarpe, par la rupture du pédoncule 
articulé. 

La capsule ne s'ouvre guère qu'après sa chute; les graines qui sor- 
tent par les bords élastiques des valves, sont pendantes, velues, 
attachées au sommet de leur péricarpe et entourées , au point de 
suture, d'une caroncule charnue à trois prolongements inégaux. On 


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voit le raphé ou cordon ombilical courir le long de la graine et s’en- 
foncer dans la chalaze, qui est à peu près opposée à l'ombilic; les deux 
valves sont planes, loculicides, réticulées où ponctuées. Auguste 
Sainr-Hiraire observe que, dans le Polygala et les autres genres de 
la famille dont la capsule est déhiscente, la graine a deux téguments, 
l’un extérieur crustacé et l’autre intérieur membraneux, et que ce 
dernier manque dans les graines dont la capsule est indéhiscente. 

Les fleurs des Pol/ygalon sont primitivement disposées sur leur pé- 
doncule en ordre quaternaire, comme les feuilles; ensuite elles se 
tournent du côté de la lumière , et ne forment plus qu'un épi unila- 
téral qui conserve la même apparence jusqu’à la fin. Dans l’estivation, 
les deux sépales latéraux enveloppent, comme je l'ai déjà dit, le reste 
de la fleur, et la lèvre inférieure est repliée en dedans du tube avec 
ses pinceaux. Le calice et la corolle ont, à cette époque, la même 
couleur et lz même consistance , mais bientôt la dernière tombe, 
tandis que l’autre au contraire acquiert un plus grand développe- 
ment. C'est là une disposition dont le but final n’est pas difficile à 
saisir. 

Le nectaire des Polygalon est une glande qui entoure la base de 
l'ovaire , et qui donne son humeur miellée à l'époque de la féconda- 
tion. Îl est trés-visible dans les grandes espèces, comme le Rosea , le 
Flavescens, etc., et il communique sans doute avec le stigmate, du 
côté où celui-ci se déploie, c’est-à-dire du côté intérieur. 

Le Polygala vulgaris est une charmante plante, qui fait l'ornement 
de nos chemins, de nos prairies et des bords de nos bois , depuis le 
commencement du printemps jusqu’à la fin de l'été, et dont les fleurs 
varient du rose au bleu ou même au blanc, sur des plantes d’ailleurs 
entièrement semblables et placées les unes auprès des autres. L’ Amara 
est plus rare, et ne se trouve guère que dans les prairies humides ou 
même montueuses, et sur les sommités de nos Alpes. Le Grandiflora, 
qui croît en [talie avec l'espèce commune, dont il se distingue par son 
ovaire stipité, est très-remarquable par ses grandes fleurs d’un rose 
pourpré, et le Flavescens, facile à reconnaître à ses ailes aiguës plus 
longues que la corolle, est très-abondant dans le midi de l'Italie et sur 
les pentes des Apennins. Je ne crois pas qu’il diffère réellement du 
commun. J'ai même vu le passage des deux espèces sur les Apennins, 
entre Bologne et Florence. En partant de cette dernière ville, on ne 
rencontre d'abord que le Flavescens, à fleurs jaunes, ensuite ces 
fleurs deviennent d'un blanc sale, enfin elles sont tout-à-fait roses. 


Cette remarque pourrait, je crois, s'appliquer à plusieurs autres 
plantes. 


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Les Chamæbuxus, qui forment la seconde et dernière section des 
Polygala européens, ont leur sépale inférieur capuchonné et chargé 
d'une glande à sa base intérieure; leur carène est légèrement frangée 
ou seulement renflée au sommet; leurs fleurs sont grandes et peu nom- 
breuses ; ce sont des herbes ou des sous-arbrisseaux dont les espèces, 
quoique peu nombreuses, sont dispersées principalement dans les 
deux Amériques; une seule d’entre elles a été séparée de ses congé- 
nères et reléguée sur nos montagnes, dans nos bois de sapins, où 
elle vit au milieu de plantes avec lesquelles elle n'a aucun rapport. 

Ce singulier Polygalu tapisse, dès le premier printemps, les lieux 
qu'il habite, de ses jolies fleurs jaunes, tachées de blanc et de pour- 
pre, qui paraissent avant les feuilles ; ses tiges ligneuses se développent 
sans cesse du sommet, et ses racines, qui sont de vrais rhizomes, s'é- 
tendent beaucoup sous terre, tandis que ses tiges recouvrent au loin 
le sol ; ses feuilles sont dures, persistantes et assez semblables à celles 
du buis ; ses fleurs, qui naissent des aisselles supérieures où elles sont 
géminées et ternées , se font remarquer par leur grandeur comme par 
leur forme, et portent à leur base trois écailles ou bractées blanches, 
qui les protégent avant leur développement ; les deux ailes, de la 
même couleur que les bractées, renferment une nacelle d’un beau 
jaune, dont l'extrémité devient ensuite orangée, et qui est comme 
soutenue par les deux sépales inférieurs raccourcis. Les franges qui 
ornent les carènes de la plupart des Polygala, sont ici remplacées par 
six ou sept dents obtuses, lesquelles conservent, en le modifiant, un 
des principaux caractères du genre. 

Les anthères, distribuées lâchement en deux corps, sont extrorses, 
biloculaires et libres, mais dans la fécondation elles se replient, de 
manière à répandre immédiatement leur pollen sur le stigmate re- 
courbé en dedans et terminé par une glande stigmatoide visqueuse.. 
La fécondation s'opère avant l'épanouissemént, et la base supérieure 
de l'ovaire est nectarifère dans ce Chamæbuzxus , comme dans les 
Polygala. 

Les fleurs, dont le pédoncule est tordu, sont articulées sur une 
petite console, qui persiste long-temps après leur chute, et qui est 
elle-même articulée à la tige, dont elle se sépare beaucoup plus tard. 
Les feuilles, également articulées, tombent au printemps à l'apparition 
des nouvelles pousses, et les tiges stériles de l'année précédente se 
terminent par un bourgeon, qui se développe après les fleurs des 
aisselles , et qui est aussi articulé, tellement qu’on peut juger de l'âge 
d’une tige par le nombre des anneaux qu’elle porte. Enfin, à l’aisselle 
des feuilles qui n’ont pas donné de fleurs, on apercoit des bourgeons 


— 332 — 


destinés à l'accroissement ultérieur de la plante, et développés plus ou 
moins selon les circonstances. Cette forme de végétation, qui ne 
ressemble point à celle des autres Polygala, présente un type très- 
distinct. Appartient-elle aux Chamæbuzus étrangers? c'est ce que 
j'ignore. 

La capsule du Polygala Chamæbuxus est échancrée et à peu près 
cordiforme, les semences sont oblongues et pubescentes. La caroncule 
est trifide, et les deux divisions latérales descendent assez bas le long 
de la graine; du reste, sa dissémination est celle des Polygalon, etlYon 
remarque très-bien le raphé qui va de la base au sommet de la graine. 


SECOND GENRE. — MWurallia. 


Le Muraltia a un calice glumacé, formé de cinq sépales inégaux, 
trois pétales réunis, dont l'intérieur est bifide, à lobes obtus, un ovaire 
couronné de quatre cornes ou tubercules, une capsule bivalve et bilo- 
culaire, à quatre cornes ou tubercules. 

Les Muraltia sont tous des arbrisseaux ou sous-arbrisseaux origi- 
naires du Cap, et que Linné avait réunis aux Polygalu, dont ils diffé- 
rent cependant à plusieurs égards. Ils ont un port élancé, des feuilles 
dures et amincies, et des fleurs petites, axillaires, serrées contre les 
tiges. On en compte à peu près trente-sept espèces plus ou moins bien 
connues, qui renferment sans doute plusieurs variétés, et que DE 
Canpozze divise en deux groupes inégaux, d'après la considération 
de leurs feuilles mucronées ou obtuses au sommet. 

Les Muraltia du premier groupe, beaucoup plus nombreux que le 
second, sont souvent cultivés dans nos serres, où ils se font remar- 
quer par l'élégance de leur port et la singularité de leurs fleurs. 

L'une des espèces qui s'y rencontrent le plus souvent, est le 
Stipulacea ou le Polygala stipulacea de LiNNÉ , qui a tout-à-fait l’appa- 
rence d'un Erica : ses feuilles, à peu près fasciculées, sont subulées 
et presque cylindriques; ses fleurs, toujours axillaires, ont leur pétale 
inférieur terminé par deux lobes représentant la houppe des Polygala, 
et appliqués l’un contre l’autre dans l’estivation; le stigmate formé de 
deux lèvres, dont l’une seule est papillaire, s'étale au-dessous de ses 
huit anthères placées sur deux rangs et à peu près sessiles : tout 
l'appareil de la fécondation est caché dans l'intérieur d’un godet à peu 
près fermé que forme à sa base le pétale inférieur. 

La fleur, qui d'abord avait son pétale inférieur appliqué contre la 
tige, se tourne sur son court pédoncule, comme dans les Polygala, et 
probablement dans tous les genres de la famille. 


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L’Heisteria , à feuilles mucronées et triquètres, a les cornes plus 
longues que la capsule, mais il est, dans tout le reste, analogue au 
précédent. 

Le Muraltia mixta, qui me paraît du reste fort semblable au 
Stipulacea , fleurit dans nos serres, dès le mois de septembre et pen- 
dant le cours de l'automne, qui correspond au printemps du Cap; 
ses tiges sont effilées, comme celles de l'espèce précédente; ses feuilles 
linéaires, épaisses et cylindriques sont ponctuées et étalées quatre à 
quatre en forme d'éventail; ses tiges se développent indéfiniment et 
sans rupture, et ses fleurs , solitaires à chaque aisselle, sont placées 
à quelque distance du sommet : elles m'ont paru monopétales, à trois 
divisions , l’inférieure, prolongée en lèvre et creusée à sa base en un 
sac qui renferme les étamines et le pistil, est terminée par un appen- 
dice teint en rouge, à deux lobes bifides dont la réunion forme quatre 
lobes ; le calice, composé de cinq pièces membraneuses et assez dures, 
est entouré, à sa base, de quelques écailles très-petites ; le stigmate, 
déjeté contre la lèvre supérieure, est verdâtre, allongé et entouré 
d'anthères jaunes portées par des filets assez élastiques et qui semblent 
réunis en un seul corps. On apercoit les quatre tubercules au sommet 
de l'ovaire. 

La structure primitive de la fleur de toutes les Polygalees a été plus 
ou moins déformée dans les genres différents dont elle est composée, 
mais cette déformation a toujours eu pour but d'assurer la féconda- 
tion; ainsi le pétale supérieur, qui est devenu l'inférieur par la torsion 
du pédoncule, et dont la base renflée en tube corné renferme les 
organes sexuels, a pu écarter ses appendices pour que la fécondation 
s'opérât à l'air, et qu'en même temps la capsule du stigmate fût pro- 
tégée. Qu'on se rappelle les divers phénomènes floraux que j'ai indi- 
qués, et qu'on y ajoute tous ceux qu'une observation plus étendue 
fera découvrir, et l'on verra s'ils ne doivent pas leur origine à cette 


déformation de la fleur : cette remarque s'applique également à tous: 
les genres déformés. 


Dix-huitième famille. — Péttosporées. 


Les Pitiosporées ont un calice caduc formé de cinq sépales embri- 
qués, tantôt libres, tantôt réunis jusqu'à la moitié de leur longueur; 
leurs pétales au nombre de cinq sont embriqués, hypogynes, conni- 


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vents ou même quelquefois soudés par leurs onglets, mais étalés dans 
leur limbe; les cinq étamines sont hypogynes, distinctes et alternes 
aux pétales ; l'ovaire est libre et renferme deux à cinq loges et autant 
de placentas polyspermes; le style est solitaire et les stigmates sont 
toujours en même nombre que les placentas; le péricarpe est une 
capsule ou une baie à loges polyspermes et quelquefois incomplètes ; 
les semences sont ordinairement enveloppées d'une pulpe glutineuse. 
L'embryon est placé près de l'ombilic dans un albumen charnu. 

Les Pittosporées sont tous des arbrisseaux ou de petits arbres de 
l'Afrique, de l'Asie et surtout de l'Australasie; ils comprennent cinq 
genres et plusieurs espèces cultivées dans nos jardins, surtout à 
cause de leur odeur. 


PREMIER GENRE. — Sol/ya. 


Le Sollya a un calice quinquéfide, cinq pétales connivents, cinq 
anthères conniventes soudées au sommet et dont les ouvertures 
sont apicilaires, un ovaire cylindrique et biloculaire, un stigmate 
bilobé, un péricarpe cartacé, sec et polysperme. 

Ce genre ne comprend encore que l'Hétérophylle de la Nouvelle- 
Hollande, sous-arbrisseau à tige cylindrique et grêle, à feuilles entières 
et articulées ; ses fleurs d’un beau bleu et semblables à celles des Cam- 
panules, ont leur stigmate recouvert d'une substance muqueuse, et 
enveloppé par les anthères qui s'ouvrent à leur sommet intérieur par 
deux fentes longitudinales, et répandent par jets sur le stigmate un 
pollen granuleux et blanchâtre ; le stigmate fécondé sort ensuite de 
sa gaine; le péricarpe marqué de cinq côtes et couronné par le style 
est rempli d'une pulpe résineuse odorante. 

Le principal des phénomènes qu'offre cette plante, c'est celui de 
ses filets arqués à la base, afin que les anthères ne s'élèvent pas au- 
dessus du stigmate et ne nuisent pas à la fécondation. 


SECOND GENRE. — Pitlosporum. 


Le Pittosporum a un calice de cinq pièces ; cinq pétales connivents 
par leurs onglets, un péricarpe capsulaire ou bacciforme, de deux à 
cinq loges souvent incomplètes et qui le font paraître uniloculaire, des 
semences attachées à un axe central et engagées dans une pulpe gluti- 
neuse. 

Ce genre est composé d'une douzaine d’arbrisseaux à feuilles en- 
tières et persistantes , dont le plus grand nombre croit dans la Nou- 


— 335 — 


velle-Hollande, mais dont deux sont originaires de l'Afrique et trois 
des Canaries ou de Madère; leurs fleurs blanches ou jaunâtres ont 
souvent l'odeur du jasmin, et leurs feuilles froissées entre les mains 
sont quelquefois aromatiques. 

Le Pittosporum roulé dela Nouvelle-Galles, quifleurit dans nos serres 
en janvier, a ses tiges garnies, près du sommet, de corymbeslatéraux et 
développés indéfiniment sans rupture ; les fleurs, d’un jaune sale, dont 
les cinq pétales sont roulés en dehors sur leur limbe, ont une fécon- 
dation directe ; les anthères introrses recouvrent de leur pollen la tête 
élargie et glutineuse du stigmate; le germe est porté sur une glande 
fortement nectarifère, dont l'humeur recouvre même les pétales 
roulés; la capsule est velue et le pédoncule articulé; les fruits ressem- 
blent à de petits citrons rugueux à quatre lobes ; ils s'ouvrent en 
deux valves, et découvrent des graines nombreuses, pisiformes, 
attachées sur deux rangs de chaque côté de l’axe. En coupant les 
capsules avant la maturité, on y distingue déjà la substance qui 
remplit à peu près la moitié des loges, et devient ensuite une pulpe 
glutineuse. Les autres espèces ont à peu près la même confor- 
mation. 


TROISIÈME GENRE. — Pursaria. 


Le Bursaria a un calice à cinq dents, cinq pétales séparés, une 
capsule aplatie légèrement stipitée, biloculaire, bivalve et cordi- 
forme comme celles du Pol/ygula, des semences enduites de résine. 

Ce genre ne comprend que le Spinosa, petit arbrisseau épineux et 
très-ramifié de la Nouvelle-Hollande, à feuilles cunéiformes et échan- 
crées ; les fleurs disposées en belles panicules ont une corolle de cinq 
pétales amincis et d’un beau blanc ; les étamines alternes aux pétales 
portent des anthères introrses ; l'ovaire est placé sur une glande for- 
tement nectarifère ; le style qui va en s’amincissant est terminé par 
un point papillaire et la fécondation est directe; les feuilles sont 
fasciculées. 

Je n'ai pas apercu de mouvement organique dans les feuilles ou 
dans les fleurs. 


— 336 — 


Dix-neuvième famille. — Frankéniacees. 


Les Frankeniacées ont quatre ou cinq sépales redressés , égaux, 
linéaires, aigus, et réunis à la base en un tube canaliculé. Les pétales, 
en même nombre que les sépales avec lesquels ils alternent, sont 
hypogynes, onguiculés, étalés et garnis de quelques écailles à leur 
ouverture ; les étamines hypogynes et filiformes, sont tantôt alternes 
et égales en nombre aux pétales, tantôt augmentées d'une ou deux 
autres opposées à ces mêmes pétales ; les anthères sont arrondies et 
extrorses à pollen ovoide; l'ovaire est libre, le style filiforme, bifide 
ou trifide; la capsule enveloppée par le calice persistant est ovale, 
oblongue, uniloculaire, polysperme ; légèrement trigone et formée 
de deux, trois ou quatre valves septicides qui portent des placentas 
sur leurs bords; les semences sont petites, l'embryon, selon GÆERTNER 
fils, est droit et placé au milieu d’un albumen engaïnant divisé en 
deux lames ; la radicule est courte et dirigée du côté de l'ombilic. 

Les Frankéniacees forment une famille distincte des Caryophyllees, 
soit par leur port, soit surtout par leurs semences attachées aux 
bords , et non pas au milieu des valves comme dans les Wiolariees , 
avec lesquelles elles ont encore moins de rapports qu'avec les Caryo- 
phytllées. Elles ne comprennent que trois ou quatre genres, dont le 
plus nombreux a donné son nom à la famille. 

Ces plantes sont ordinairement des herbes vivaces et quelquefois 
des sous-arbrisseaux, à tiges cylindriques et très-ramifiées. Leurs 
feuilles opposées ou verticillées, et toujours dépourvues de stipules, 
sè prolongent, à la base, en une membrane amplexicaule ; elles sont 
oblongues, entières, plus ou moins élargies , roulées sur leurs bords, 
et souvent glanduleuses ; les fleurs terminales, ou sessiles dans les 
dichotomies des rameaux, sont petites, ordinairement violettes .et 
et toujours accompagnées de bractées. 


Frankenia. 


Le Frankenia a un style trifide, à lobes oblongs et intérieurement 
papillaires ; sa capsule s'ouvre en troïs ou quatre valves et renferme 
plusieurs semences. 

Ce genre contient quinze ou seize espèces, dont le plus grand nom- 
bre habite le bassin de la Méditerranée, mais dont les autres sont 


per. 

dispersées sur les côtes d'Afrique , au Cap, à la Nouvelle-Hollande, 
ou même dans l'Amérique méridionale. Les espèces européennes, 
qui appartiennent au même type, et qui peut-être ne sont que des 
variétés les unes des autres, vivent dans les sables des bords de la 
Méditerranée : la principale et la plus commune est le Lævis , glabre 
dans toutes ses parties, et dont les tiges longues de quelques pouces 
forment un gazon bien garni sur le terrain où elles sont couchées ; 
ses feuilles sont étroites , opposées, verticillées et comme fasciculées; 
ses fleurs d’un rouge violet à anthères jaunes , sont solitaires et pres- 
que sessiles ; l'Hirsuta en diffère par ses tiges hérissées, ses fleurs 
réunies en faisceau et ses calices recouverts dé poils blancs ; le Pulve- 
rulenta , par ses feuilles courtes et poudreuses , ainsi que par ses fleurs 
plus petites et plus pâles ; enfin , l'/rtermedia a les tiges veloutées et 
les calices hispides. 

Les espèces étrangères vivent dans les mêmes localités queles euro- 
péennes ; quelques-unes d’entre elles se rangent dans le même type, 
et ne sont peut-être que des variétés des précédentes. Mais d'autres 
forment évidemment des espèces distinctes : telles sont, par exemple, 
le Corymbosa des côtes de la Barbarie, à fleurs disposées en corymbe; 
le Microphylla de l Amérique méridionale, à feuilles ovales, embri- 
quées sur quatre rangs ; le Fruticulosa de Sainte-Hélène, à tiges 
droites et sous-frutescentes, et enfin le Tetrapetala de la Nouvelle- 
Hollande , à calice de quatre pièces et fleurs de quatre pétales. 

Toutes ces plantes sont vivaces, à l'exception du Pulverulenta, qui 
est annuel ; mais, comme il ne diffère point d'ailleurs organiquement 
des autres espèces du même type , on doit admettre qu'il serait égale- 
ment vivace, s'il portait un moins grand nombre de fleurs, ou si ses 
tiges étaient moins développées. 

Les styles, selon Auguste Sainr-Hirarre, ne sont pas, en appa- 
rence, très-distincts des stigmates , ou plutôt les papilles stigmatoides 
s'appliquent intérieurement et longitudinalement, depuis une cer- 
taine hauteur, sur les branches du style qu’elles accompagnent jus- 
qu’au sommet. Ces branches se roulent-elles en spirale, comme dans 
la plupart des Caryophyllées , ou bien restent-elles sans mouvement 
pendant le cours de la fécondation ? C’est ce que j'ignore. 

Ce qui me paraît plus clair, c'est que les onglets sont le siége de 
l'organe nectarifère, car ils sont creusés en gouttière et logés dans 
les cavités correspondantes des sépales. Or, je n’ai presque jamais vu 
de fossettes ou de sillons canaliculés dans l’intérieur d’une fleur, que 
je n'y aie incontinent apercu des traces d'humeur miellée distillant 
par ces fossettes ou ces sillons. Je recommande donc aux botanistes 

É. 22 


— 338 — 


curieux d'observations semblables, de s'assurer , à l'époque de la 
fécondation , si les onglets des Frankenia sont nectarifères, et de 
constater en même temps si les anthères sont introrses ou extrorses, 
et si elles répandent leur poussière immédiatement sur le stigmate, ou 
bien dans le fond de la corolle , comme les écailles qui ferment son 
ouverture semblent le faire présumer. 

Le Frankenia pulverulenta est une plante annuelle qui croît abon- 
damment aux salines de Hyères, et étend sur le sol ses rameaux fili- 
formes et noueux ; elle étale dès le mois de juin ses jolies fleurs bleuä- 
tres et probablement météoriques. Je n'ai pas vu sa fécondation , mais 
j'ai observé que ses feuilles ovales et épaisses étaient repliées sur 
leurs bords et recouvertes en dessous de poils blanchâtres. 

Le plus remarquable des quatre genres qui forment actuelle- 
ment la famille des Frankeniacees, est le Luxemburgia du Brésil méri- 
dional, dont Auguste Sainr-HiLarRE a décrit cinq espèces qui sont des 
arbrisseaux glabres à grandes fleurs jaunes, étamines variables en 
nombre, capsule uniloculaire , polysperme et trivalve , feuilles alter- 
nes, dentées et coriaces, et stipules persistantes ou caduques. 

Le Frankenia présente un exemple de soudure dans sa capsule, qui 
devraitavoir régulièrement cinq valves, et qui n’en a ordinairement que 
quatre, trois ou même deux; et un exemple d'avortement dans ses 
étamines, dont le nombre naturel était double de celui des pétales, 
mais qui se réduisent à six ou sept, parce que, comme dans quelques 
Alsinées, les autres ont disparu. Il est aussi probable qu'il y a eu quel- 
que altération dans le nombre variable des branches du style. 


Vingtieme famille. — Caryophyllées. 


Les Caryophyllees ont un calice persistant de cinq et rarement de 
quatre sépales continus à leur pédicelle, tantôt réunis entre eux par 
un tube à cinq ou quatre dents, et tantôt séparés jusqu'à la base ; les 
pétales, en même nombre que les pièces du calice, sont hypogyÿnes 
et insérés sur un torus plus ou moins élevé, que les botanistes dési- 
gnent ordinairement sous le nom d’Ændrophore ; ils sont alternes aux 
sépales, onguiculés, entiers ou bifides, et quelquefois garnis, sur leur 
limbe, d’écailles pétaloïdes ; les étamines sont au nombre de dix : cinq 
alternent avec les pétales et se développent les premières ; cinq autres 


— 339 — 


leur sont opposées et adhèrent par leur base ; les filaments sont subulés 
et quelquefois légèrement réunis près du torus, où ils s’insérent; les 
anthères biloculaires et introrses sans retournement, et dont le pollen 
est ordinairemnt ovoïde à trois plis, s'ouvrent par deux fentes et sont 
souvent implantées par leur extrémité inférieure; l'ovaire, placé 
au sommet du torus ou de l'androphore, est simple, ovale ou oblong, 
formé de deux à cinq valves et couronné par autant de styles fili- 
formes, qui portent, au-dessus de leur insertion et sur le côté interne, 
l'organe stigmatoïde formé de poils papillaires ; quelquefois, au con- 
traire, les papilles sont placées au sommet des styles terminés en 
massue ; la capsule s'ouvre au sommet, à l'époque de la dissémination, 
et présente souvent un nombre de dents double de celui des valves. 
Elle est ordinairement uniloculaire, mais quelquefois elle se divise 
intérieurement en autant de loges complètes ou incomplètes, qu'il y a 
de valves; le placenta est central et presque toujours polysperme ; 
les semences sont disposées sur les côtés du placenta, où elles forment 
autant de séries à deux rangs, qu'il y a de styles; elles sont ovales, 
arrondies, plus ou moins aplaties et presque toujours tuberculées ; 
leur embryon est tantôt semi-annulaire, tantôt seulement recourbé, 
très-rarement droit et axile; la radicule est tournée du côté de l’hilus 
ou de la cicatricule ; le périsperme est farineux et ordinairement 
central. 

La structure organique du péricarpe des plantes de cette famille a 
été l'objet des recherches spéciales de De Canpozre et d'Auguste 
SainT-HiLAIRE, qui ont constaté tous les deux, à la même époque(18 16), 
que les placentas étaient toujours en même nombre que les styles, et 
qu'avant la fécondation, on pouvait observer à la loupe et quelquefois 
même à la vue simple, le styles se prolonger dans l'intérieur de l'ovaire 
en filets blanchâtres, qui, arrivés aux placentas, s s'y ramifiaient en autant 
de branches qu'il y avait de graines à féconder; qu'ensuite, soit par 
l'allongement de la capsule, soit en vertu de leur organisation, ils se 
rompaient par le milieu, et disparaissaient enfin entièrement, à la 
maturité du fruit. 

Ces deux auteurs ont représenté, par des figures très-exactes, non- 
seulement les différents modes de rupture de ces vaisseaux conduc- 
teurs de l’ Aura seminalis , mais encore leurs diverses associations dans 
l'intérieur des péricarpes, en sorte qu'on y voit également l’impor- 
tance que met la nature à la fécondation, et la nécessité de ce grand 
acte pour le développement des graines. 

Pour expliquer les diverses apparences de la capsule, uniloculaire 
ou multiloculaire des Caryophyllées, De Canpozce suppose qu'elle 


— 340 — 


était primitivement formée d'autant de carpelles qu’on y observe de 
valves, et qu’elle porte de styles : mais que, par la suite des développe- 
ments, les cloisons ou les rebords recourbés des valves ont été plus ou 
moins détruits. Ce qui confirme cette explication, c’est que l'on trouve 
dans ces capsules des divisions de toute forme et de toute dimension. 
Loi les cloisons sont entières et arrivent jusqu’à l'axe central ; là elles 
sont incomplètes ou même manquent entièrement ; et comme l’on ne 
peut guère supposer que des variations si considérables appartiennent 
à la forme primitive, l’on est conduit à recourir à des avortements, 
qui, dans ce cas, comme dans d’autres, s'opèrent à peu près sous nos 
yeux. Enfin, pour se rendre un compte encore plus complet de Ja 
forme et de la situation des placentas centraux des Caryophytllees, De 
Canpozze dit que la partie inférieure des cloisons, celle qui portait 
seule les graines, a disparu dans les péricarpes uniloculaires, par le 
développementextraordinaire des placentas, qui conservent cependant 
encore leurs graines sur deux rangs, comme les placentas intervalvu- 
laires où les cloisons ont aussi avorté. Dans cette famille, les vaisseaux 
nourriciers de la graine sont, je crois, toujours insérés au même point 
que les cordons pistillaires. 

Les ovaires des Caryophyllées changent de forme après la féconda- 
tion; dans l’Arenaria serpyllifolia et dans le Lychnis flos cuculi, ils 
deviennent coniques ; dans l’Agrostemma githago , is perdent la forme 
pentagone et prennent la tétragone , etc. Ordinairement la capsule 
grandit et laisse entre les placentas et le sommet, un espace vide, très- 
considérable dans quelques espèces, comme l’'Agrostemma githago et 
le Lychnis dioica. 

Les Caryophyllees sont des herbes annuelles ou vivaces, rarement 
des sous-arbrisseaux ; leurs tiges sont effilées, dures, articulées ou 
nerveuses ; leurs feuilles, souvent connées ou vaginantes, sont tou- 
jours opposées et entières, ordinairement étroites et linéaires, mais 
quelquefois plus élargies et moins consistantes, comme dans les 
Alsinees. 

La végétation des Caryophyllées est assez remarquable : chaque 
tige, après avoir acquis une certaine hauteur , se termine par une fleur 
pédonculée, et pousse en même temps de chacune de ses deux ais- 
selles supérieures, un rameau qui porte de même une fleur à son extré- 
mité. Cette forme de végétation, qu’on peut appeler dichotomique , 
continue sans interruption jusqu'à ce que la plante soit épuisée, ou 
arrêtée par des circonstances atmosphériques. L’efflorescence est alors 
centrifuge; mais comme l'accroissement est rapide, les fleurs des diver- 
ses aisselles, s'atteionent bientôt mutuellementet forment un bouquet 


— 341 — 


plus ou moins étalé, auquel on est convenu de donner le nom de Cyme. 

La famille des Caryophyllées compte aujourd'hui environ mille 
espèces distribuées inégalement dans vingt-huit genres, dont quel- 
ques-uns, très-nombreux,ont été divisés en sections, et dont d’autres, 
au contraire, sont réduits à une ou deux espèces. De ces genres, six 
sont entièrement étrangers, six autres complètement européens, et 
seize moitié exotiques et moitié indigènes, en sorte que sept cent 
quarante-quatre Caryophyllees habitent l'Europe et lesiles de la Médi- 
terranée , et deux cent soixante-six l'Asie, l’Afrique ou l'Amérique: 

Cette famille se divise en deux tribus : celle des Silenées et celle des 
Alsinées. Les Silénées , d'une organisation plus forte et d'un feuillage 
moins délicat, habitent principalement les plaines découvertes, les 
collines stériles et rocailleuses des bords de la mer du bassin de la Mé- 
diterranée; quelques-unes s'élèvent aussi sur nos montagnes, dont 
leurs fleurs, ordinairement blanches ou rouges, recouvrent les pentes 
ét les sommités. Les 4/sinées préfèrent les bords de nos haies, Îles 
lisières et les ombrages de nos bois, ou même nos champs cultivés et le 
voisinage de nos maisons; leurs feuilles sont en général plus vertes, 
plus élargies et plus molles, et leurs fleurs ont une organisation plus 
gracieuse et plus délicate. 

Les Silénces fleurissent en général à la fin du printemps et dans le 
cours de l'été; les 4/sinées sont plus hâtives, et plusieurs d'entre elles 
parmi les Stellaria, les Cerastium et les Holosteum , etc., annoncent le 
retour des beaux jours. 

Ces plantes, qui ont de si grands rapports dans leur mode de végé- 
tation et dans la structure de leurs fleurs, présentent, tantôt dans 
leurs genres et tantôt dans leurs espèces, différents phénomènes phy- 
siologiques propres à fixer notre attention, et qui concernent surtont 
leur floraison, leur fécondation et leur dissémination. Nous en parle- 
rons dans les genres qu’ils concernent. 

Le seul que nous voulons mentionner ici, parce qu'il s'applique au 
très-grand nombre des espèces de la famille, c'est celui de ces étamines 
alternativement plus grandes et plus courtes, qui s'ouvrent à deux épo- 
ques différentes, pour que la fécondation soit plus assurée, dans des 
plantes dont les fleurs en général ne se referment pas, parce qu'elles 
n’accomplissent pas leur fécondation en.un seul jour. 

Les Caryophyllées sont à peu près sans usages économiques, mais 
on en cultive plusieurs, soit pour la beauté de leurs fleurs, soit pour 
l'excellence de leur odeur : dans leur nombre, on place quelques 
espèces de Cerastium, de Gypsophila, de Suponaria et surtout de 
Lychnis ; mais le genre le plus remarquable de toute la famille, c'est 


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celui des Dianthus, dont les diverses espèces font, une grande partie de 


l'été, un des plus beaux ornements de nos parterres, par la richesse et 
le parfum de leurs fleurs. 


Première tribu. — SILÉNÉES. 


Les Silénées ont leurs sépales réunis en un tube cylindrique, divisé 
au sommet en cinq ou quatre dents. 


PREMIER GENRE. — Gypsophile. 


Les Gypsophiles ont un calice campanulé, anguleux, termine par 
cinq lobes membraneux sur leurs bords, cinq pétales non onguiculés, 
dix étamines, deux styles et une capsule uniloculaire. 

On les divise en deux sections : 

1° Les Struthium dont les calices sont dépourvus d'écailles ; 

2° Les Petrorhagia dont les calices portent à la base deux ou quatre 
écailles scarieuses et opposées par paires. 

La première section, de beaucoup la plus nombreuse, comprend 
à peu près trente espèces, dont plusieurs sont européennes, et dont 
les autres habitent l'Orient, la Sibérie et principalement les environs 
du Caucase. On peut assez facilement diviser les indigènes en trois 
groupes, dont le plus apparent est celui des espèces à tiges droites, 
élevées et paniculées , à fleurs petites et étalées. Il comprend princi- 
palement le Paniculata des sables de la Sicile, le Perfoliata et le Stru- 
thium de l'Espagne, le Fastigiata de la France, auxquels on peut 
réunir le Scorzonerifolia,  Altissimu, Y Acutifulia et \ Ascendens de la 
Sibérie et du Caucase : ce sont des plantes très-remarquables par leurs 
panicules indéfiniment divisées, et par la multitude de leurs fleurs 
qui ressemblent de loin à un nuage blanchâtre, et sont souvent, 
comme dans le Paniculata, dioïques par avortement. 

Le deuxième groupe, mal séparé du premier, se compose d'es- 
pèces à racines ligneuses et traçantes, à tiges rampantes et couchées, 
à feuilles glauques et épaisses , à fleurs plus grandes, étalées en tapis 
sur le terrain. Sa principale espèce est le Repens des Alpes et des Pyré- 
nées, auquel on associe le Prostrata de Lin et le Dubia de Wirne- 
NOW, qui sont peut-être autant de variétés du Repens. 

Le troisième et dernier groupe de la section est formé de plantes 
annuelles, à feuilles amincies et tiges filiformes : telles que le Muralis, 
qui est commun dans nos champs; le Compressa, originaire de la 


— 343 — 
Barbarie, et quelques autres espèces étrangères et mal déterminees, 
comme l'Elegans, etc. 

Les Petrorhagia ne comprennent que trois espèces, dont deux 
étrangères, à fleurs rapprochées en tête et formant par conséquent 
un type distinct, et une troisième européenne, le Saxifraga, qui 
recouvre les rochers de l'Europe australe, et qui se rapproche des 
Dianthus, non-seulement par les écailles de son calice, mais encore 
par ses semences aplaties d'un côté, convexes de l’autre, son embryon 
droit et son ombilic logé au milieu de la surface convexe. C'est pour- 
quoi Kocu en a fait, sous le nom de Tunica, un genre qui diffère 
des Gypsophiles par ses quatre écailles calicinales , et des Dianthus par 
son calice évasé et par ses pétales rétrécis insensiblement et dépourvus 
à peu près d'onglet. 

Les Gypsophiles, dont Linné comptait à peine dix espèces, se sont 
fort multipliées de nos jours : Des Fonraines en a rapporté quelques- 
unes de la Barbarie, et Marsnazz du Caucase; les recherches de 
Srzven, de Fiscmer et des botanistes russes en ont fait connaître 
d’autres; en sorte qu'actuellement elles s'élèvent à trente-six, toutes 
originaires de l'hémisphère nord de l'ancien continent; mais il n'est 
guère douteux que, dans le nombre, il n'existe des variétés que j'ai 
déjà entrevues et qu'un examen ultérieur fera mieux reconnaitre. 

Ces plantes, comme l'indique leur nom, se plaisent sur les rochers 
calcaires et gypseux; elles recherchent encore les graviers des torrents 
desséchés, où elles se nourrissent par leurs feuilles épaisses, et les 
terrains arides et sablonneux où elles enfoncent leurs fortes racines. 
Des quatre espèces que comptent la France et la Suisse, une seule, le 
Muralis , petite plante annuelle, vit au milieu de nos cultures , où elle 
se ressème continuellement. 

Les Gypsophiles vivaces ont une racine ligneuse et pivotante, dont 
le collet forme un rhizome et donne un grand nombre de tiges souvent 
gazonnantes, mais jamais traçantes; les unes se chargent de fleurs à 
leur sommet, les autres restent stériles et remplacent les premières 
l'année suivante, et ainsi de suite à lindéfini. Les tiges sont renflées 
à leurs articulations et se coudent en divers sens, selon les besoins de 
la plante et l'influence de la lumière; les feuilles, variées dans leurs 
dimensions, mais jamais articulées, se détruisent irrégulièrement dans 
le cours de l’année; en sorte que la tige florale est souvent nue, tandis 
que la stérile est feuillée. 

Les extrémités supérieures des tiges sont toujours dichotomes ; 
lorsqu'il n’y a point d’avortement, on trouve à la base de chacune de 
leurs divisions , de petites bractées scarieuses et opposées, qu'on doit 


— 344 — 
considérer comme des rudiments de feuilles : on remarque, de plus, 
dans les entre-nœuds de quelques espèces, comme le Glauca, l'Acu- 
tifolia et \ Armerioïdes, ces enduits visqueux qui se présentent souvent 
dans les Silene. 

Les feuilles , avant leur développement, sont opposées deux à deux 
et un peu recourbées sur leur surface supérieure; les divisions du 
calice, toujours scarieuses sur les bords, sont en estivation quincon- 
ciale, c’est-à-dire que deux sont extérieures , deux autres intérieures, 
et qu'une dernière est recouverte d’un côté et recouvre de l’autre; les 
pétales ont, au contraire, l’estivation tordue des Dianthus. 

Le nectaire des Gypsophiles , qui est peu apparent, réside, je crois, 
dans l'androphore : du moins j'ai vu sortir de ses bords une liqueur 
jaune et miellée, et je n’ai jamais apercu à la base des principales éta- 
mines, c'est-à-dire de celles qui alternent avec les pétales, excepté 
toutefois dans le Repens, ces glandes qui sont si communes dans les 
Alsinées, mais qu’on trouve ici à la base de l'ovaire et de l'androphore, 

Je n’ai pas non plus observé des mouvements dans les fleurs, qui 
sont indifféremment tournées de tous les côtés, et qui, malgré les 
variations de la température et de la lumière, ne se referment pas 
lorsqu'une fois elles sont ouvertes. Cependant dans quelques espèces, 
comme le Paniculata, les pétales se roulent en dehors en vieillissant, 
et dans d’autres, comme le Fastigiata, les feuilles se tournent du 
côté le plus éclairé. 

Les étamines sont plus sensibles que les pétales ; leurs filets, d’abord 
recourbés intérieurement, se redressent aux approches de la féconda- 
tion, et rapprochent ensuite successivement leurs anthères du pistil, 
dont les styles se roulent en spirale, pour mieux présenter leurs stig- 
mates au pollen. Lorsque les anthères sont défleuries, les étamines et 
les styles ne tardent pas à tomber; mais les pétales se dessèchent, et 
le calice, d'abord évasé, se resserre contre le fruit. 

La capsule est toujours redressée à l'époque de la maturité, et, 
quoique formée de cinq valves, elle ne s'ouvre cependant qu’en quatre 
pièces. Les semences assez grosses, sont noires, ponctuées et quel- 
quefois striées ; l'embryon est contourné en spirale dans les Struthium ; 
mais dans les Petrorhagia, il est à peu près droit, comme dans les 
Dianthus. 

Les Gypsophiles présentent peu de remarques physiologiques. Le 
Paniculata est dioique par avortement, de même que la plupart des 
espèces, telles que l'4/tissima, le Scorzonerifolia, etc. C'est la raison 
pour laquelle on apercoit dans les mêmes espèces, tantôt des étamines 
et des stigmates saillants, tantôt sur d’autres fleurs ces mêmes organes 


— 345 — 
avortés. Le Muralis s'ouvre le matin et se referme le soir dans les 
jours sereins; l'Arenaria de la Hongrie à les tiges fortement diva- 
riquées. 

Les Gypsophiles ne fleurissent guëre qu'à la fin du printemps et 
dans le cours de l'été, parce que leurs fleurs terminent toujours les 
pousses de l’année, mais quelquefois elles refleurissent, en automne, 
par le développement de nouvelles tiges. L'espèce qui paraît la der- 
nière est le Muralis, plante véritablèment annuelle, qui naît au prin- 
temps et ne fructifie que dans l'arrière-saison. 

Les Gypsophiles ne sont guère cultivées dans nos jardins, parce 
qu’elles manquent d'odeur, et que leurs fleurs sont petites et sans 
éclat. Cependant les grandes espèces européennes, comme le Fasti- 
giata', le Paniculata , le Struthium, et surtout celles de la Sibérie et 
du Caucase, sont pleines de grâce et d'élégance; leurs fleurs, d'un 
blanc pur ou rayé de rose, forment un agréable contraste avec leurs 
feuilles minces et bleuâtres. Le Repens orne admirablement de ses 
touffes fleuries et de ses larges gazons, les bords des torrents de nos 
Alpes et des rivières de nos plaines, où ses graines sont quelquefois 
transportées par les eaux; et le Saxifraga, qui se multiplie par des 
rejets souterrains, étale, presque toute l'année, sur nog terrains sablon- 
neux et sur les bords de notre lac, ses jolies fleurs roses. 


SECOND GENRE. — Üianthus. 


Le Dianthus a un calice tubulé à cinq dents, embriqué à sa base, de 
deux à quatre écailles opposées, cinq pétales longuement onguiculés, 
dix étamines, deux styles, une capsule uniloculaire, des semences 
aplaties, convexes d’un côté et concaves de l’autre, un embryon à 
peine recourbé. 

On divise ce grand genre en deux sections inégales : 

1° Celle des 4rmeriastrum , à fleurs en tête ou en corymbe, sessiles 
ou pédonculées ; 

2° Celle des Caryophyllum , à fleurs paniculées ou solitaires. 

Les {rmeriastrum se subdivisent en trois groupes : le premier, dont 
les fleurs sont enveloppées de bractées ovales; le second, dont les 
bractées sont lancéolées et aiguës, les calices velus et striés; le troi- 
sième, enfin, dont les bractées sont ovales ou lancéolées, et les calices 
glabres et à peine striés. 

Le premier groupe ne renferme qu'une seule espèce européenne, 
le Prolifer, petite plante annuelle à feuilles légèrement dentées, qui 
fleurit, au commencement de l'été, au bord de nos champs et de nos 


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blés , et qui a recu son nom de ce que ses fleurs sessiles et renfermées 
dans une enveloppe de quatre bractées élargies et scarieuses, parais- 
sent les unes après les autres, et non pas toutes à la fois, comme 
dans la plupart des espèces de la section, ce qui fait que la féconda- 
tion est toujours directe, Ces fleurs sont petites , d’un rose pâle, échan- 
crées et non dentées. Morts en ajoute une seconde, le V’elutinus de la 
Sardaigne et du midi de l'Italie, qui se distingue du Prolifer par sa 
tige pubescente et ses fleurs pédicellées. 

Le second groupe ne renferme non plus qu’une espèce européenne, 
l’Armeria , annuel comme le Prokfer et habitant les mêmes lieux; ses 
fleurs, qui paraissent aussi successivement, et dont par conséquent la 
fécondation est aussi toujours directe, forment un bouquet terminal, 
composé de trois ou quatre petits faisceaux enveloppés chacun de 
deux bractées étroites et allongées ; ses écailles sont velues comme le 
calice ; ses pétales sont petits, rouges, dentés et semés de points blancs. 
Le Pseudo-Armeria de la Tauride, qui se cultive dans les jardins 
botaniques , appartient au même type, mais paraît former une espèce 
distincte. 

Le troisième groupe et le plus nombreux en espèces, contient 
trois types européens : 1° celui du Carthusianorum, dont la principale 
espèce, répandue dans les terrains stériles de toute l'Europe, se dis- 
tingue par ses feuilles linéaires à trois nervures, et par ses fleurs bar- 
bues plus longues que les écailles; on y joint le Ferrugineus des 
Pyrénées, à fleurs d'un jaune ferrugineux, et l'Atrorubens des bords 
de la Méditerranée, à fleurs plus foncées, qui me paraît former une 
véritable espèce ; 2° celui du Barbatus, à fleurs agrégées, fasciculées, 
à écailles aussi longues que le calice, à feuilles élargies et lancéolées, 
L'espèce principale, originaire de l'Allemagne et de la France méri- 
dionale, a été transportée dans nos jardins, où elle a recu le nom 
d'OEillet de Poëte, et où elle se fait remarquer par ses nombreuses 
fleurs agréablement panachées de blanc et de rouge. Les autres variétés 
ou espèces du même type sont le Japonicus à tige courte, assez 
cultivé dans nos jardins; le Latifolius, V Aggregatus , le Balbisii des 
environs de Nice; le Polymorphus du Caucase, qui paraît dioïque ; 
et l'espèce moyenne entre ce type et le précédent, est le Collinus 
des collines stériles des Alpes de la Lombardie; 3° enfin, celui des 
espèces sous-frutescentes et même frutescentes des iles de la Méditer- 
ranée et principalement de la Crète, qu’on distingue à leurs écailles et 
à leurs feuilles glauques, un peu charnues et piquantes. La plupart des 
plantes de cette division ont les fleurs petites, sans éclat et sans odeur; 
il faut en excepter toutefois le Rupicola des rochers de la Sicile, qui 


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appartient au type des espèces arborescentes, et dont les fleurs sont, 
dit-on, très-odorantes. 

La fécondation de ces plantes est variable ; lorsque leurs fleurs sont 
fasciculées, comme dans le Barbatus , les étamines sont saillantes et 
répandent leur pollen avant que les stigmates soient formés et sortis 
du tube. Au contraire, dans le Carthusianorum et ceux où les fleurs 
ne paraissent que successivement , les étamines sortent en même temps 
que les stigmates déjà bien conformés : il peut y avoir des exceptions 
à cette règle, mais elles sont dues sans doute à des conformations 
particulières, que l’on reconnaîtra en les observant séparément. 

Lasectiondes Caryophyllum a été divisée par Seriner, dansle Prodro- 
me de De Cannozce,en deux groupes: celui des espèces à pétales dentés 
et celui des espèces à pétales frangés; mais je crois plus convenable d'y 
distinguer également différentstypes ou espècessemblablementconfor- 
mées, présentant à peu près les mêmes phénomènes physiologiques. Le 
plus remarquable de ces types, celui quiaétélepremier observé et qui a 
donnéaux Dianthus la réputation dont ils jouissent dans nos jardins, est 
celui du Caryophyllus, qui paraît croître naturellement sur les vieux 
murs du midi de la France, etquisereconnaiît tout de suite à ses grandes 
fleurs, àses écailles courbéeset quaternées,ainsiqu'àses feuilles linéaires, 
étroites, canaliculées et glauques. On doit y réunir, comme espèces, 
au moins très-rapprochées, d'abord le Sylvestris de nos Alpes et de nos 
collines stériles, qui est peut-être la véritable souche du Caryophyllus, 
quoiqu'il n’ait pas une odeur aussi marquée ; ensuite le Longicollis des 
environs de Naples, très-remarquable par ses six écailles acuminées et 
fortement aplaties, ainsi que par ses pétales lancéolés et irrégulière- 
ment échancrés. Le second de nos types est celui du Deltoides, à 
tige gazonnante et rameuse, dont les pétales, inégalement crénelés, 
sont marqués d’une raie transversale, anguleuse et pourprée, et dont 
les fleurs s'ouvrent dans la matinée et se referment le soir, quoique 
moins régulièrement que celles du Pomeridianus de la Palestine. Le 
troisième est celui du Cæsius de nos collines montueuses, à feuilles 
gazonnantes, épaisses, glauques, à fleurs odorantes, recouvertes, à 
leur ouverture, de poils longs et pourprés. Le quatrième, qui en est 
assez voisin, est celui du Plumarius, dont l’on ne connaît pas la patrie, 
mais qui est cultivé sous le nom de Mignardise dans tous les jardins, 
où il forme, dès le milieu du printemps, des bordures charmantes, et 
où il répand l'odeur suave et particulière qui le caractérise. Le cin- 
quième est celui du Superbus , aussi distingué par la grandeur de ses 
fleurs élégamment frangées que par le parfum qu'il exhale. Il vit dans 
nos bois, qu'il embellit dès la fin de l'été, en conservant sa forme pri- 


— 348 — 


mitive que l'art n'a point essayé de changer. On range tout auprès, 
quoique dans un rang inférieur, le Monspessulanus des Pyrénées et du 
Jura, ainsi que le Plumosus du mont Baldo. Enfin, le sixième et dernier 
type est celui du Chinensis, plante annuelle, cultivée depuis long- 
temps dans nos jardins, pour la singularité et l’éclat de ses fleurs magni- 
quement veloutées en pourpre et en rose, mais qui malheureusement 
n'ont pas d'odeur. 

Je place dans ce même type, quoiqu'avec un peu de doute, le 
Glacialis de Gaunix , et l’Alpinus de Kocx, qui tapissent les pelouses 
du mont Cenis de ses fleurs d’un rouge ponceau, et dont les quatre 
écailles sont aristées et à peu près égales ; le bord de son tube floral est 
teint en bleu noir, et ses pétales sont roulés en cornet sur leurs deux 
côtés après la floraison. La fécondation est directe comme celle du 
Chinensis , car ses stigmates s’épanouissent à l'entrée du tube, et ses 
anthères placées un peu au-dessus répandent leur pollen bleuâtre sur 
la tache d’un bleu noir qui distingue cette espèce; au contraire, dans 
le Superbus, les anthères sortent successivement, les cinq principales 
les premières, et ce n’est que lorsqu'elles ont répandu leur pollen blan- 
châtre et farineux, que l'on voit les stigmates qui souvent avortent, 
développer leurs papilles et se contourner sur eux-mêmes. Dans ce 
cas , la fécondation est aidée par les onglets, qui se recourbent forte- 
ment pour mettre à découvert leurs stigmates encore enfoncés dans la 
corolle. 

Les Dianthus, qui, dans le Prodrome de DE Cannozze, s'élèvent 
déjà à plus de cent dix espèces, habitent, en grand nombre, les îles 
et les côtes de la Méditerranée, et sont, de plus, répandus, selon 
leurs différents types, dans l'Europe centrale, la Tauride, l'Asie mi- 
neure et la Sibérie. On les retrouve au Japon , à la Chine et au Cap; 
mais ils paraissent à peu près étrangers à l'Amérique, aux Indes et à 
la Nouvelle-Hollande. Les espèces dont les feuilles sont glauques et 
épaisses, se plaisent sur les rochers, dans les sables et les plaines sté- 
riles; les autres habitent nos bois ou les bords de nos haies, et plutôt 
les expositions sèches et découvertes que les terrains riches et pro- 
fonds. Mais ces diverses plantes, tant annuelles que vivaces , ne fruc- 
tifient guère qu'à la fin de l'été ou dans le cours de l'automne, parce 
que leurs fleurs sont toujours terminales. 

Les Dianthus ont tous la même organisation générale. Leurs racines 
ligneuses ou simplement fibreuses donnent rarement des rejets, quoi- 
que leurs feuilles inférieures soient souvent gazonnantes; leurs tiges 
minces et fortement genouillées , ont les rameaux régulièrement op- 
posés; toutefois il arrive souvent que l’un des deux avorte, et que la 


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fleur paraisse réellement solitaire; d'autres fois la tige ne se ramifie que 
vers le sommet, et les rameaux sont alors si courts et si rapprochés, 
qu'ils forment tantôt une seule tête, tantôt une agrégation de quelques 
têtes allongées et fasciculées, comme on le voit dans la section des 
Armeriastrum; mais , dans chaque dichotomie, la tige centrale périt 
et ne se termine pas par une fleur, comme dans les Silene. 

Les principales différences qui distinguent les espèces de ce beau 
genre, sont tirées de la forme de l'inflorescence, de celle des feuilles 
et des écailles de la fleur. Mais il faut convenir que ces caractères sont 
toujours variables, au moins dans certaines limites, et que, parmi 
les espèces, plusieurs ont une synonymie embarrassée, et ne sont 
guère que des variétés dépendantes de la nature du terrain et de celle 
de l'exposition, ou même des hybrides qui se forment facilement tous 
les jours entre des plantes d’une organisation d'ailleurs si semblable. 

Les corolles des Dianthus ont souvent leur limbe marqué de cercles 
concentriques de couleur variée, et très-remarquables dans les nom- 
breuses variétés du Chinensis; leur stigmate est une lame papillaire, 
qui, comme dansles Silene, reste long-temps cachée entre les gaines lon- 
gitudinales du style avec lesquelles on la confond ; mais en général ces 
plantes ne présentent qu’un petit nombre de phénomènes physiologi- 
ques, parce qu'elles ont entre elles un trop grand nombre de ressem- 
blances. Leur calice ne s’ouvre jamais que médiocrement, et se referme 
toujours après la fécondation. Leurs fleurs n’ont pas non plus de mou- 
vements sur leurs pédoncules, et elles restent droites ou du moins 
légèrement penchées, soit quand elles s'épanouissent, soit quand elles 
fructifient; la plupart même ne se referment point quand une fois 
elles sont épanouies. Cependant celles du Deltoides , à pétales blancs 
et à couronne pourprée, s'ouvrent, comme je l'ai dit, dans la matinée, 
et se referment le soir. Celles du Superbus, au contraire, s'ouvrent le 
soir et se referment ou plutôt se chiffonnent irrégulièrement dans les 
heures chaudes du jour. Le Pomeridianus est encore plus remarquable 
à cet égard; il s'ouvre, dit-on, à midi et demi, et se referme à six 
heures. L’Armeria , \ Arenaria, etc., et surtout le Chinensis, au lieu 
de fermer leurs pétales, les roulent, au contraire, en dedans, à la 
manière de plusieurs Silene, et les déroulent ensuite à la lumière. 
D'autres espèces ont des mouvements moins marqués, mais pourtant 
très-sensibles. 

L'estivation du calice est à peu près valvaire, et celle des pétales 
est tordue d’occident en orient ou de droite à gauche. L'ovaire est 
porté sur un androphore très-marqué, à la base duquel sont insérées 
la corolle et les étamines; et pendant la dissémination, la capsule qui 


— 350 — 
reste redressée s'ouvre en quatre lobes d'autant plus écartés que la 
sécheresse est plus grande. 

La fécondation des Curyophyllum est ordinairement réciproque: les 
cinqétamines principales sortentles premières, etrépandent leur pollen 
blanchâtre et onctueux sur les pétales hérissés de poils et tapissés à la 
base d'un vernis verdätre et visqueux ; les cinq autres s'ouvrent suc- 
cessivement dans l'intérieur du tube qu’elles tapissent de leur pollen; 
enfin les stigmates commencent à développer leur rainure papillaire 
et à se contourner en s’allongeant. Toutefois dans le Mensposulanus, 
cette fécondation m'a paru directe. . 

On observe cinq glandes jaunâtres à la base de l'ovaire, dont le con- 
tour est emmiellé, et c'est pour faciliter la communication du pollen 
avec ces glandes que le tube de la plupart des Dianthus présente ces 
cinq tubulures si remarquables dans les Convoloulacées. On peut voir 
même les pétales du Dianthus Carthusianorum portant sur leur milieu 
une lame destinée à former les parois de ces tubulures, mais dans le 
Monspesulanus ; À n’y a ni glandes ni tubulures, et l'ovaire est légère- 
ment pédicellé. 

Les pétales des Dianthus se dessèchent sans tomber, et le calice 
recouvre constamment le péricarpe. Mais la capsule grandit, comme 
dans la plupart des Caryophyllees, et finit par s’ouvrir au sommet 
en quatre valves. Les graines m'ont paru avoir constamment la même 
forme; elles sont minces, concaves d'un côté, convexes de l’autre, 
et renferment dans leur intérieur un embryon droit ou du moins peu 
courbé. Lorsque la pluie survient pendant la dissémination, la capsule 
se referme. 

Les tiges des Dianthus périssent après avoir donné leurs graines, 
et les racines repoussent, de leur collet-ou de leur rhizome, de nou- 
veaux jets qui se fortifient pendant l'automne, et redonnent, au prin- 
temps, des tiges florales. C’est sur ce principe qu'est fondée l'opération 
du marcottage, si connue des jardiniers, et si fort employée pour la 
multiplication des Dianthus. Les espèces sous-frutescentes conservent 
leurs tiges qui repoussent de plus haut, et j'ai vu en Italie des pieds 
de Caryophyllus, qui n'est pourtant qu'à demi ligneux, étendre leurs 
tiges le long des murs qu'ils garnissaient, et donner de tous côtés de 
nouvelles pousses. Je ne connais aucune espèce du genre qui se mul- 
tiplie par des rejets. 

Les feuilles des Dianthus sont appliquées deux à deux et un peu 
recourbées avant leur développement. Les écailles, qui ne sont que 
des feuilles avortées, comme on peut le voir distinctement dans quel- 
ques espèces où elles sont agrandies, servent à protéger les fleurs dans 


— 301 — 


leur premiére jeunesse, et ne se séparent jamais de la plante. Il y a 
même quelques Dianthus étrangers, comme celui de Burchel et le 
Micropetalus, tous les deux originaires du Cap, dans lesquels toutes 
les feuilles sont changées en écailles. 

L'inflorescence des Dianthus est, comme je l'ai dit, constamment 
dichotome. Des deux fleurs qui terminent les rameaux de chaque 
dichotomie, celle qui est la plus voisine de la tige principale s'épanouit 
la première, et la dichotomie supérieure fleurit avant les autres, 
comme on peut le voir dans le Chinensis , l'Armeria, le Plumarius , 
le Caryophyllus, et mêmele Barbatus, dont les fleurs, au premier 
coup-d'œil, paraissent toutes sortir du même point. 

La dissémination ne m'a rien offert de remarquable : le calice tou- 
jours redressé se dessèche sans se fendre, la capsule devient cartilagi- 
neuse et s'ouvre au sommet en quatre valves qui s’étalent fortement, 
et les semences se répandent par la simple agitation de l'air. Mais ces 
semences , quoique sorties de la même capsule, produisent souvent 
des individus qui varient, par le nombre des écailles calicinales, la 
couleur des pétales etleurs découpures (Voyez Bulletin de FÉrussac, 
v. 24 , page 337). 

Les Diunthus ont été destinés, comme tant d’autres plantes, à 
embellir la demeure terrestre de l’homme, et il faut convenir, comme 
nous l'avons déjà entrevu, qu'ils contribuent beaucoup à diversifier 
les scènes brillantes que cette terre nous offre à chaque pas. Je passe 
ici sous silence les 4rmeriastrum, quoique plusieurs de leurs espèces, 
le Carthusiunorum par exemple, et surtout le Barbatus de nos jardins, 
méritassent d'être distingués, et l’eussent été sans doute si leurs fleurs 
étaient odorantes. Mais qui est-ce qui peut rencontrer, sans l’admirer 
et le cueillir, ce Superbus, magnifique décoration de nos bois, au 
moment où ils ne renferment presque plus de fleurs; ce Sybvestnis, 
dont les fleurs roses revêtent si élégamment la nudité de nos rochers 
ou de nos sables, et ce Deltoides, si remarquable par sa couronne 
pourprée, étalée sur des pétales d’un ,blanc pur. Si de ces tableaux 
champêtres, je passe à la pompe de nos jardins, jy découvre d'abord 
le Chinensis, peint de couleurs vives, assorties avec la même bizar- 
rerie que celle des peintures grotesques de sa patrie; ensuite, le Plu- 
marius, si parfumé et si brillant de fraicheur dans les mois du prin- 
temps, et enfin j'arrive à ce roi du genre, à ce magnifique Caryophyllus, 
qui revêt, à la volonté de l'homme, toutes les formes et toutes les 
couleurs ; qui, simple et modeste dans les jardins ou sur les fenêtres 
du pauvre, brille d’un si grand éclat et étale tant de merveilles dans 
les magnifiques parterres des riches. Qu'on suppose un moment que 


! 


— 352 — 
les plantes se multipliassent toutes sans fleurir , à la manière des Fou- 
gères ou des Mousses, et lon comprendra combien la nature nous 
paraîtrait alors triste et dépouillée, Elle ne serait jamais nue, mais eile 
n'offrirait jamais de printemps. 

J'ajoute, en finissant, que les Dianthus de la seconde section dou- 
blent plus facilement que les autres, et qu’en particulier, les pétales 
du Caryophyllus s'augmentent tellement, qu'ils forcent le calice à se 
rompre. Quelquefois ce sont les écailles qui se multiplient, et les 
fleurs , au contraire, qui avortent. Les tiges se terminent alors par des 
épis écailleux, qui ne ressemblent pas mal à ceux des Crucianelles. 


TROISIÈME GENRE. — Saponuria. 


La Saponaire a un calice tubulé, nu à la base et terminé par cinq 
dents, cinq pétales onguiculés, dix étamines, deux styles et une 
capsule uniloculaire. 

Ce genre est formé d'espèces qui n’ont pas le même port et la même 
structure ; en conséquence il a été divisé en quatre sections : 

La première est celle des J’accaria, à fleurs paniculées, calice 
anguleux et glabre ; 

La deuxième, celle des Bootia , à fleurs paniculées et fasciculées, 
calice cylindrique souvent velu; 

La troisième, celle des Proteinia, à fleurs axillaires et solitaires, 
calice rarement glabre; 

La quatrième, celles des Bolanthus, à fleurs agrégées, calice cylin- 
drique et velu, et feuilles gazonnantes. 

La première section comprend seulement deux espèces, le Saponaria 
vaccaria , qui habite nos blés, et le Perfoliata des Indes orientales, qui 
n'en est peut-être qu'une variété, La première est une plante véritable- 
ment annuelle, qui naît au printemps et se ressème pendant la moisson. 
Ses feuilles glauques, épaisses, pointues et engaïinées, sont roulées en 
dehors dans leur premier développement, et se font remarquer parleurs 
nervures longitudinales et leur contour légèrement cartilagineux ; ses 
tiges cylindriques et fortement genouillées se ramifient seulement vers 
le sommet, et ses fleurs paniculées, presque nivelées, sont toujours 
solitaires sur leurs pédoncules : la première qui paraït est celle de la 
dichotomie du rameau supérieur; elle est remplacée successivement 
par celle des autres dichotomies, en sorte que l'efflorescence est cen- 
trifuge pour chaque rameau ; quelquefois il ÿ a des avortements, mais 
l'on reconnaît toujours la fleur de la dichotomie à son pédoncule dé- 
pourvu de bractées. 


— 353 — 


Les pétales, qui sont nus, légèrement dentés et d'un rouge agréable, 
s'ouvrent le soir et se referment aux approches de la nuit, mais ils 
ne s'étalent jamais, parce que le calice n’est que légèrernent quin- 
quéfide; ils se dessèchent ensuite sans tomber, tandis que le calice, 
d'abord étroit et à peu près fermé, se renfle pour l’accroissement de 
Ja capsule, et devient enfin yet et pentaèdre. 

La fécondation est directe, les anthères rouges et introrses répan- 
dent abondamment leur poussière à l'entrée de la corolle ; les stigmates 
qui sortent dans le même moment ont leurs houppes papillaires placées 
sur presque toute la largeur des styles, dont l'extrémité est ordinaire- 
ment roulée en spirale; le nectaire est formé de dix glandes sessiles 
à la base interne des étamines; enfin la capsule, au fond de laquelle 
on apercoit les rudiments de trois ou quatre cloisons, et qui est 
toujours étroitement enveloppée de son calice, s'ouvre au sommet 
en quatre lobes ; les graines sont noirâtres, chagrinées et portées 
séparément sur un funicule redressé qui part de l'axe central à 
différentes hauteurs : l'embryon est périsphérique et la radicule cen- 
tripète. 

Les Bootia, qui contiennent quatre espèces toutes européennes, 
ne sont pas, comme les Vaccaria, formés d'un seul type : ils en ren- 
ferment, au contraire, deux très-distincts, et peut-être même un 
troisième. 

Le premier est celui du Saponaria officinalis ou de la Saponaire 
commune, qui se trouve sur le bord des chemins dans presque toute 
l'Europe, où elle occupe souvent un espace considérable, et forme 
des touffes de tiges élevées et terminées par des fleurs grandes, roses, 
en panicules fasciculées ; ses feuilles ovales, lancéolées et marquées 
de trois nervures, sont demi-embrassées dans leurs premiers dévelop- 
pements ; ses pétales à écailles étroites et linéaires sont dépourvues de 
tout mouvement; ses étamines, glanduleuses à la base, sont saillantes 
et plus longues que les styles; sa capsule, qui porte aussi des traces 
de cloison et s'ouvre en quatre valves, est oblongue et sillonnée ; ses 
semences sont noires et chagrinées. 

Le second est celui de l'Ocymoides, qui forme également des gazons 
très-étendus, et dont les nombreuses fleurs, d'un beau rouge, pro- 
duisent un effet charmant sur les pentes qu'elles recouvrent dès 
l'entrée du printemps. Ces fleurs sont dépourvues de tout mouve- 
ment, mais leur calice se renfle et se déjette pour faciliter la dissé- 
mination ; les cinq étamines secondaires sont logées dans les onglets 
canaliculés des pétales et retenues par les dents ou les écailles qui 
ferment l'entrée du tube; les cinq autres sont soudées au torus et 

I. 23 


— 354 — 
articulées sur autant de glandes nectarifères qui ressemblent à celles 
des Alsine. 

Les racines de cette plante sont de vrais rhizomes, dont les tiges 
étalées donnent sans cesse de leur base de nouveaux jets, qui subsis- 
tent l'hiver et fleurissent au premier réveil de l'année; les feuilles sont 
petites, engainées, ovales, lancéolées et demi-embrassées. 

Pendant la maturation, qui s'opère assez promptement, les calices 
enflés se dessèchent, et les capsules cartilagineuses sortent enfin par 
le sommet et s'ouvrent en quatre valves. L’A4lsinoides de la Sardaigne 
ne diffère presque de l'Ocymoides que par son port plus grêle et les 
onglets de ses pétales non saillants. 

Le troisième type de la section est formé par le Glutinosa, qui est 
annuel ou bisannuel, et croît sur les montagnes de la Tauride. Je ne 
le connais pas assez pour le décrire. 

Les Proteina comptent, dans le Prodrome, quatre espèces, qui pa- 
raissent toutes appartenir au même type, et dont deux européennes 
habitent l'Illyrie et la Crète; le Porrigens, originaire de l'Orient et 
assez commun dans nos jardins, a le port et les habitudes des 
grandes Gypsophiles ; c'est une plante élevée, quoique annuelle, 
dont le calice est légèrement campanulé comme dans les autres espèces 
de la section, et dont les rameaux très-divariqués portent des feuilles 
lancéolées, linéaires et visqueuses; sa corolle est nue, petite, rou- 
geâtre et toujours ouverte, ses styles sont divariqués et ses stigmates 
latéraux se terminent par de petites têtes; ses nectaires, placés sans 
doute comme ceux des autres Saponaires , donnent une humeur 
abondante. 

Ce que cette plante présente de remarquable, c'est l'allongement de 
ses pédoncules placés aux angles de toutes les dichotomies, et qui se 
développent successivement du sommet à la base ; au moment où les 
fleurs sont sur le point de paraître, ils s’allongent considérablement, 
er ensuite ils s'inclinent à peu près horizontalement, en offrant, pour 
ainsi dire, leurs capsules à l'observateur. Ce petit phénomène, qui 
caractérise toutes les espèces de la section, se rencontre aussi dans 
l'Orientalis de l'Orient et de la Carniole, qui me paraît différer peu du 
Porrigens , quoiqu'il soit plus petit dans toutes ses parties. 

On range encore dans la même section deux espèces nouvellement 
reconnues et cultivées dans les jardins botaniques, le Cerastioides, à 
fleurs roses très-petites et dépourvues d'écailles, et le Sicula ou 
Calabra à pétales spatulés d’un beau rouge , écailles petites et 
saillantes. La première a la fécondation directe et à peu prèsintérieure 
du Porigens , mais dans la dernière, les étamines élevées et redressées 


— 355 — 


au centre de Ja fleur, se déjettent comme pour féconder les fleurs 
voisines, et lorsque ces étamines sont flétries , il sort enfin du même 
calice deux longs stigmates contournés, qui vont recevoir le pollen 
des autres anthères. Ces plantes sont annuelles, comme la plupart 
des Proteina, et leurs capsules s'ouvrent ordinairement en quatre 
valves. 

Les Bolanthus , qui forment la dernière section des Saponaires, com- 
prennent six ou sept espèces qui habitent sur les bords de la Méditer: 
ranée, mais dont deux sont originaires de l'Orient. Elles paraissent 
appartenir au même type, et forment toutes sur les rochers de nos 
montagnes élevées, des touffes de feuilles serrées, à tiges à peu près 
nues, comme les Draba ou quelques Silene. Celle que je prends ici pour 
type est le Lütea des Alpes du Piémont et du Valais, dont la racine 
ligneuse et divisée s'enfonce profondément dans les rochers; ses feuilles, 
très-nombreuses, sont glabres, redressées et linéaires; ses tiges cylin- 
driques, hautes de deux ou trois pouces, et chargées, à la base, de 
deux ou trois paires de feuilles connées, se terminent par une petite 
tête ornée de pédoncules simples ou ramifiés, ertremêlés de bractées 
linéaires ; le calice est cylindrique et velu; la corolle, d'un jaune pâle, 
porte à son entrée des écailles très-marquées, que traversent de grandes 
étamines violettes à anthères jaunes; les styles sont allongés, blanchä. 
tres, roulés en spirale et à peine renflés au sommet. Cette conforma- 
tion est, à peu de différence près, celle du Cespitosa des Pyrénées, à 
fleurs roses; du Bellidifolia des monts élevés de l'ftalie, à pétales et 
anthères jaunes ; enfin du Depressa des pentes de l'Etna. 

La fécondation des Saponaires varie selon les types : dans l'Ocy- 
moides les filets sont très-saillants et les anthères, versent leur pollen 
brunâtre sur les dents dela corolle, avant que les stigmates soient sortis. 
Il en est de même de l'Officinalis, où les cinq premières étamines pa- 
raissent toujours avant les autres; et en général, aucune des espèces 
de ce genre ne m'a présenté de fécondation directe. 

Pendant la maturation, les calices de la plupart des espèces com- 
mencent à se fendre pour laisser sortir la capsule, et l'on ne peut pas 
dire que ce soit la capsule qui ait déterminé cette fissure, puisqu'elle 
commence par le haut et fort au-dessus de l'ovaire. Toutefois, l’'Ortien- 
talis et l'Officinalis que j'ai devant les yeux, conservent jusqu’à la fin 


leur calice cylindrique, qui enveloppe étroitement une capsule ouverte 
au sommet en quatre valves. 


"356 — 


QUATRIÈME GENRE. — Cucubalus. 


Le Cucubalus a un calice campanulé à cinq dents, cinq pétales on- 
guiculés et bifides, une capsule charnue et uniloculaire. 

Ce genre, autrefois très-nombreux, est actuellement réduit à une 
seule espèce, le Cucubalus bacciferus du midi de l'Europe, plante sin- 
gulière qui a mérité de former un genre à part, à cause de son port 
et surtout de la structure de sa capsule, 

Elle croît au pied des haies, où seule de sa famille, elle s'attache par 
ses longues tiges articulées et demi-sarmenteuses, et qu’elle couronne 
ensuite de ses fleurs pendant les derniers mois de l'été, Ses genoux 
sont enflés, ses feuilles lancéolées et un peu velues; son calice a l’esti- 
vation valvaire des Silene Behen, et ses fleurs, qui naissent solitaires 
dans les diverses dichotomies, sont grandes, étalées, toujours ouvertes 
et inclinées vers la terre pour assurer la fécondation qui est à peu 
près directe. 

A cette époque, les pétales étroits, irrégulièrement bifides et d'un 
blanc verditre, étalent presque horizontalement leur limbe couronné, 
sur lequel s'étendent des anthères blanches et introrses; en même 
temps l'androphore, qui est très-saillant, distille en abondance l'hu- 
meur miellée de ses glandes jaunâtres. 

Lorsque la fécondation est accomplie, le calice renflé se déchire 
au sommet pour donner issue au péricarpe, qui, d'abord semblable à 
celui des Silene, prend successivement beaucoup d'accroissement en 
épaisseur, et devient enfin une espèce de baie noire et succulente ; 
cependant il conserve encore sous cette apparence toute l’organisa- 
tion d'une capsule, son réceptacle est central, ses graines, logées 
dans l’espace vide, sont portées sur des funicules recourbés, et ses 
parois intérieures conservent les traces des trois loges qui distinguent 
les Silene. 

Il y a donc ici deux phénomènes remarquables : le premier est 
celui d’une transformation et d’une soudure de péricarpe qui s'opère, 
pour ainsi dire, sous nos yeux; le second est celui d'une préordina- 
tion dans les diverses parties de la fleur; le calice s’enfle et les pétales 
s'écartent, comme s'ils savaient à l'avance que le fruit doit se trans- 
former en baie. 

La dissémination n’a lieu que très-tard, car la baie, quoique libre et 
débarrassée de toute enveloppe, ne s'ouvre ni ne se détache naturelle- 
ment : les oiseaux qui s’en nourrissent transportent cà et là ses graines 
brunâtres et luisantes. 

Toute la plante a une odeur vireuse qui lui est propre 


CINQUIÈME GENRE. — Silene. 


Les Silene ont un calice tubulé, nu et terminé par cinq dents, cinq 
pétales onguiculés, bifides et très-souvent écailleux, dix étamines, 
trois styles, une capsule triloculaire à la base, et ouverte au sommet 
en six dents. 

Ce vaste genre, composé actuellement de plus de deux cents 
espèces, la plupart européennes, a été divisé par Orrx en huit sec- 
tions, la plupart naturelles, et dont voici le tableau : 

1° section. Vanosilene. Tige à peu près nulle, pédoncules uniflores, 
calice légèrement enflé. 

2me —_ Behenantha. Fleurs solitaires ou paniculées, portées sur une 
vraie tige, calices renflés. 

3me — Ouites. Fleurs en épis verticillés. 

4me — Conoimorpha. Calice à peu près conique et ombiliqué à la base. 

5me —_ Stachymorpha. Fleurs axillaires et non opposées, disposées 
en épi, calice à dix stries. 

Gme — Rupifraga. Tiges amincies et rapprochées, pédoncules fili- 
formes, calices cylindriques ou campanulés. 

7€ — Siphonomorpha. Fleurs paniculées, rarement solitaires, pé- 
doncules courts et opposés, calice tubule. 

8me —— Aiocion. Fleurs en corymbe, calice en massue à dix stries. 

Les Nanosilene sont formés de deux espèces, dont la plus com- 
mune est le Silene acaulis des rochers élevés de nos Alpes, où elle 
forme des tapis serrés de petites feuilles d'un vert gai, recouvertes, 
au printemps , de fleurs roses non roulées sur leur limbe. Cette plante 
vivace, à racine ligneuse, la dernière que DE SaussurE rencontra 
dans son ascension au Mont-Blanc, produit sans cesse, de son collet, 
de nouveaux rejets, qui se changent insensiblement en rhizomes. Dès 
que la fécondation est accomplie, on voit naître, des dernières ais- 
selles de ses petites tiges, de jeunes pousses destinées à remplacer les 
anciennes, qu'elles ne tardent pas à surpasser. La capsule pédicellée 
se dégage alors de son calice, et s'ouvre à six valves pour répandre, 
à l'entrée de l'automne, des semences assez grosses, attachées par 
leur funicule à un réceptacle central. Cependant j'ai vu, au mois de 
juin, sur le Simplon, les capsules encore chargées de graines, à peu 
près en même temps que les fleurs de l'année s'épanouissaient. 

Cette plante est dioïque, d’après les observations des botanistes 
modernes ; la fleur mâle a les étamines saillantes, l'ovaire et les éta- 
mines avortées ; la fleur femelle, plus petite et presque sessile, manque, 


— 358 — 
à son tour, d'étamines. Mais elle a, comme cela était nécessaire, les 
stigmates fort saillants, velus, papillaires, latéraux , et par conséquent 
contournés au sommet. Kocx dit qu’elle est polygamo-trioique, c’est- 
à-dire sur'trois pieds. 

Le Pumilio, dernière espèce de la section, vit dans les Alpes de la 
Carinthie, et ne parait différer de l'Acaulis que par ses feuilles plus 
élargies, ses calices enflés et velus; car il a aussi les fleurs terminales 
et solitaires. Toutefois Kocx le range parmi les Behenantha, à cause 
de son calice enflé et de sa capsule sessile. 

Les Behenaniha comprennent un grand nombre d'espèces éparses 
en Orient, dans la Sibérie et les îles de la Méditerranée. Ils se divisent 
assez bien en deux types. Le premier est caractérisé par ses andro- 
phores raccourcis ou nuls, ses pétales nus et jamais roulés, sa tige 
non visqueuse sous les articulations, et son calice valvaire renflé en 
vertu d’une organisation particulière et non par la pression de l'ovaire ; 
ils sont représentés par le Si/ene inflata ou le Cucubalus Behen de Linwé, 
plante multiforme, et ils admettent comme sous-types les Fimbriata, 
très-remarquables par leurs pétales élégamment frangés, et dont l'or 
compte trois ou quatre espèces, qui, comme le Silene inflata, ont 
presque toujours les organes sexuels incomplets, des styles saillants 
avec des étamines avortées ou des étamines sailiantes et des pistils plus 
ou moins avortés ; ce qui rend leur.fécondation indirecte. 

Le second type des Behenantha a des calices striés, des pétales 
appendiculés et des ovaires ou sessiles ou portés sur des androphores ; 
les plantes qui le composent habitent l'Espagne, l'Italie, la Sibérie, etc., 
et pourraient bien former plusieurs types. Une des espèces les plus 
remarquables de cette division est l’Irdica, du Népaul, dont les fleurs, 
d'un rouge sale, ne se referment point et dont les pétales courts, 
larges et fortement bifides, portent chacun deux écailles sur les- 
quelles se dépose le pollen des grandes anthères à demi saillantes. Les 
autres restent dans le tube, où elles fécondent les stigmates qui s'ou- 
vrent très-tard. Tant que dure la fécondation, la fleur est renversée 
sur le terrain, ensuite elle se relève. 

Le calice des Behenantha de notre premier type reste libre, évasé 
et non adhérent. Il se dessèche insensiblement, et il est à demi détruit 
lorsque la capsule s'ouvre au sommet en six valves; les graines se 
répandent par la simple agitation de l'air. 

Les Otites forment une section assez nombreuse , dont la véritable 
patrie est Ja Sibérie, et qui comptent seulement deux espèces euro- 
péennes. On les distingue à leur port élancé, à leurs feuilles radicales 
nombreuses, comme à leurs tiges presque nues, simples et non dicho- 


— 359 — 

tomes; les pédoncules naissent aux aisselles des deux feuilles opposées, 
où ils se bifurquent et se divisent de manière à imiter en petit l'inflores- 
cence des autres Silene; mais comme leurs divisions sont raccoureies , 
les fleurs paraissent irrégulièrement verticillées à chaque nœud, et 
prennent ainsi un aspect rare dans les Caryophyllees. La principale 
espèce de cette section est l'Otites, plante vivace, fort répandue dans 
les terrains stériles et sablonneux du midi de l'Europe, où elle fructitie 
dans les mois d'été, en offrant plusieurs variétés. Ses fleurs, d'un 
jaune sale, à pétales linéaires et nus, sont dioïques; les mâles ont 
leur calice à peu près fermé, et au contraire leurs étamines saillantes 
et très-divariquées ; les fleurs femelles, dont les calices sont aussi fer- 
més, et qui, comme les fleurs mâles, allongent leurs pédoncules les 
uns après les autres, ont les stigmates papillaires de tous les côtés, 
afin de mieux recevoir les influences du pollen. Pendant la maturation, 
le calice s'amincit et se fend irrégulièrement, ensuite la capsule sessile 
s'ouvre en six valves. 

La plupart des Otites ont leurs tiges allongées, glutineuses, à peu 
près nues, leurs étamines saillantes, leurs pétales étroits, entiers ou 
bifides : ce sont des plantes qui n'ont ni légèreté ni élégance, parce 
que leurs tiges sont simples, et que leurs fleurs peu apparentes fleu- 
rissent successivement et non simultanément dans chaque verticille ; 
cependant le Viscosa, qui est une seconde espèce européenne, et 
qu'on trouve en Italie, en Angleterre et ailleurs, se distingue des 
autres par ses fleurs penchées à pétales grands et bifides, par les 
poils visqueux qui le recouvrent dans toutes ses parties et surtout 
par ses étamines aggrandies et déjetées sur le côté inférieur , 
et ses stigmates qui ne se développent guère qu'après l'émission 
du pollen, comme cela à lieu aussi dans la plupart des éspèces 
de la section. 

Les Otites ont les feuilles roulées sur leur bord supérieur et les tiges 
ordinairement dépourvues d’articulations glutineuses; les tiges sont 
simples et allongées, les pétales étroits et roulés dès le matin, etcomme 
les fleurs ne se développent que successivement dans chaque verti- 
cille ,elles n’ont dans leur ensemble ni grâce ni élégance. Leurs diverses 
espèces ont tantôt un androphore bien marqué, et tantôt un andro- 
phore à peu près nul, ce qui prouve qu’elles ne sont pas homotyÿpes. 

Les Conoimorpha, qui forment notre quatrième section, ne comp- 
tent que tinq espèces, dont deux européennes, appartenant au même 
type : le Conoidea et le Conica, plantes annuelles qui habitent les mois- 
sons et les bords des champs de la France, et qui se distinguent de la 
plupart des autres Silene par leur éalice conique, rayé de trente stries 


— 360 — 


et comme tronque à la base. La forme singulière de ce calice, qui 
constitue le caractère principal de la section, provient de l'absence 
presque complète de l'androphore et du renflement de la base de la 
capsule, dont le sommet pointu s'ouvre à six dents, et dont les graines, 
légèrement contournées comme l'embryon, s’échappent par l’ouver- 
ture du péricarpe, sans que le calice s'ouvre sensiblement; ces plantes, 
dont les fleurs s’épanouissent le soir, comme dans la plupart des 
Silene , ont la fécondation indirecte, car leurs étamines sortent avant 
les styles. 

La section des S{achymorpha, qui compte à peu près cinquante 
espèces, est caractérisée par ses calices à dix stries etsesfleurs axillaires 
disposées grossièrement en forme d'épi. Orrx la divise artificiellement 
en deux groupes, d'après la conformation du calice. 

Le premier, qui comprend les espèces à calice cylindrique, et qui 
renferme principalement le type du Gallica, est formé d’une dizaine 
d'espèces à tiges simples, deux ou trois fois divisées au sommet, où 
leurs fleurs s’entassent de manière à former une espèce d’épi souvent 
déjeté. Ce sont des plantes annuelles, à feuilles petites et velues, à calice 
cylindrique plus ou moins renflé, à pétales irrégulièrement divisés et 
souvent renversés à la maturation, à capsule sessile et poils ordinai- 
rement articulés ; elles se ressemblent si fort, que Bexrxam, dans son 
Catalogue des plantes des Pyrénées, rapproche sous la même espèce le 
Quinquevulnera , le Cerastoides, le Gallica, le Lusitanica et le Tri- 
dentata , qui ne diffèrent que par leurs fleurs; on peut voir, à ce qu'il 
assure, réunies dans le même lieu ces prétendues espèces, présentant, 
d'un côté, toutes les nuances de couleur, depuis le blanc le plus pur 
jusqu'au pourpre foncé, à peine bordé d'une teinte plus claire, et 
de l’autre, toutes les modifications de limbe entier, cordiforme et 
bifide. 

La fécondation de ces plantes a lieu ordinairement dans l'intérieur 
du tube, dont les stigmates non saillants occupent le fond, tandis que 
les anthères sont placées au sommet. À l'époque de la dissémination, 
la capsule médiocrement renflée s'ouvre ,en même temps que le calice 
veiné se fend irrégulièrement : toutefois, dans le Vocturna., la fécon- 
dation est extérieure et indirecte, et la fleur s'ouvre le soir. 

Les pétales de la plupart de ces plantes, le VNocturna et quelques au- 
tres exceptés, se disposent irrégulièrement sur un plan plus ou moins 
incliné, et quelquefois presque vertical. Ce mouvement ne dépend pas 
des heures du jour, comme celui des autres Silene, mais il se déve- 
loppe tard et il est durable. Je l’ai vu également dans le Trinervia. 

Le second groupe des Stachymorpha comprend un grand nombre 


— 361 — 


d'espèces, dont plusieurs habitent les îles de la Méditerranée et les 
côtes adjacentes; plusieurs aussi, comme l'Obtusifolia , le Bellidifolia 
et le Lateriflora, errent dans nos jardins sans qu'on puisse assigner leur 
véritable patrie. Ces plantes, presque toutes annuelles, ont les fleurs 
ordinairement unilatérales, blanches ou pourpres , leurs pétales s’ou- 
vrent le soir et se roulent le matin; leur calice est en massue, et leur 
androphore grandit assez dans la maturation pour dégager au moins 
le sommet de la capsule ; leur fécondation est toujours indirecte, parce 
queles étamines sortent long-temps avant les stigmates ; les plus remar- 
quables sont le Pendulu, à fleurs pendantes du midi de l'Italie; le 
Coiorata de Maroc et de l'ile de Scio, à pétales roses; le illosa de 
l'Égypte; le Canescens et le Trinervia de l'Italie, et sans doute aussi 
le Vocturna. 

Le Colorata se distingue des autres par son mode de fécondation; 
ses anthères, portées sur des filets lâches, s'ouvrent à l'entrée du 
tube, et répandent leur pollen blanchâtre sur les stigmates placés au- 
dessous, et dont les lobes papillaires en-dedans ne sortent que très- 
tard, mais ouvrent dans l’intérieur du tube leur rainure stigmatoïde. 
Le Trinervia, à fleurs d'un rouge sanguin, ouvre bien aussi ses an- 
thères dans le godet cylindrique formé par les dix écailles, mais ses 
longs stigmates ne se forment que très-tard et hors du tube. 

Les Rupifraga, qui ont recu leur nom de ce que plusieurs d’entre 
eux croissent sur les rochers, se reconnaissent, au premier coup-d'œil, 
à leurs tiges effilées non glutineuses, et à leurs pédoncules filiformes. 
On y distingue comme premier type, les espèces vivaces qui habitent 
ordinairement les côtes escarpées et humides de nos Alpes; telles 
que le Rupestris, le Quadridentata, Y Alpestris, le Glaucifolia, le 
Saxifraga, le Petræa et le Campanula, tous remarquables par 
l'élégance de leur port, leurs feuilles lisses et souvent glauques, et 
leurs jolies fleurs d’un blanc de lait. Le Rupestris, plus abondant que 
les autres, se plait dans les vallées granitiques ; le Quadridentata, plus 
effilé , plus délicat et plus rare, décore les flancs humides des rochers ; 
le Saxifraga, à pédoncules très-allongés, habite les pentes méridio- 
nales des Alpes, de même que le Campanula, à calices grands et cam- 
panulés. Ces plantes, si gracieuses, ont les fleurs terminales et axillaires, 
les pétales plus ou moins divisés et couronnés, les ovaires sessiles ou 
pédicellés, selon que les calices sont campanulés ou renflés en massue. 
Quelques-unes présentent des aberrations qui méritent d’être remar- 
quées : ainsi la capsule du Quadridentata porte quelquefois quatre ou 
même cinq styles; le Sazifraga a souvent cinq étamines stériles, et 
l'Alpestris se reconnait à ses graines ciliées. 


— 362 — 

Les plantes de ce premier type ont des corolles non météoriques , 
qui restent ouvertes pendant tout le cours de la floraison; leurs éta- 
mines sont toujours saillantes, mais les cinq principales paraissent 
avant les autres, et dans le Rupestris, par exemple, les stigmates ne 
sont développés que lorsque les cinq étamines secondaires ou oppo- 
sées aux pétales répandent leur pollen. Il en est de même de l 4ltaica, 
très-voisin du Dentata, mais dont les dents sont plus allongées, et 
dont la fécondation m'a paru médiate, et la corolle, par conséquent 
très-évasée. 

Le second type de la section comprend des herbes annuelles qui 
habitent nos champs, et se font remarquer par leurs tiges paniculées 
et leurs petites fleurs rougeâtres à peu près de la grandeur du calice. 
Telles sont l'/Znaperta de la France, qui n’a souvent que cinq éta- 
mines, et dont le Polyphylla n'est qu'une variété; le Clandestina, du 
Portugal, à feuilles étroites, et enfin F Antirrhina de la Virginie, à 
pétales couronnés. Ces divers Silene ont la fécondation directe et 
intérieure, et le Quadridentata a comme l'Alpestris ses graines ciliées ; 
le premier a de plus les calices campanulés et les capsules sessiles. 

Les Siphonomorpha, qui forment la septième section des Silene, se 
partagent en trois groupes : 1° celui à fleurs penchées et calices cylin- 
driques ; 2° celui à fleurs redressées, calices courts et terminés en 
massue ;3° enfin, celui à fleurs redressées et calice prolongé en grande 
massue, 

Le premier groupe est représenté par le Silene nutans , plante qui 
se trouve dans toutes nos prairies sèches, et monte jusque sur les 
Alpes; ses racines sont des rhizomes couronnés par un grand nom- 
bre de feuilles spatulées, et ses fleurs d'un blanc sale, pendantes à 
chaque dichotomie, se redressent durant la maturation; elle a pro- 
duit un grand nombre de variétés, qui diffèrent surtout par leurs 
feuilles élargies ou étroites, glabres ou velues, et qui toutes ont la 
tige glutineuse aux articulations supérieures , et les pétales bifides, 
réfléchis et roulés pendant le jour. On lui associe, comme espèces ou: 
comme variétés, l'{rsubrica à fleurs plus grandes et tiges non gluti- 
neuses , le Longifolia et le Viridiflora du Portugal, le Quadrifida des 
envions de Vérone, le Rubens de Clagenfurt, le Chlorantha et le Ni- 
cæensis des environs de Nice, qui n’en est qu'une variété altérée par 
le voisinage de la mer, et qui présente le singulier phénomène d’arti- 
culations visqueuses d’un seul côté. 

J'ai remarqué que des dix étamines du Vutans, et des autres espèces 
du même groupe ou des autres groupes, les cinq principales sortent 
long-temps avant que les stigmates soient développés, et que les 


— 363 — 


einq autres ne paraissent que lorsque les styles étalent leurs bran- 
ches, ‘en sorte que les fleurs ne sont pas sans doute fécondées par 
leurs propres anthères. J'ai fait la même observation sur le Ramosis- 
sima de Des Fonraixes, qui dépend du même groupe, dont les fleurs 
comme celle du Vutans, se déroulent le soir et se roulent le matin 
pendant plusieurs jours, et qui m'a présenté de plus le singulier phé- 
nomène d'une capsule sessile , fermée, je crois, par un couvercle, et 
non fendue en cinq valves, comme l'a décrite T'illustre auteur, dont 
cette plante rappel le AS L'espèce la plus remarquable de ce groupe 
est le Saponaniæfolia, qui appartient par ses feuilles ra et son 
calice lisse et renflé aux Behenantha, mais dont la fécondation indi- 
recteest tout-à-fait celle du Silene nutans ; ses fleursfortement penchées 
et ouvertes dès le soir, redressent leurs pédoncules dans la matura- 
tion, et les calices se fendent pour donner issue à la capsule sessile 
ovale et triloculaire; la fleur blanche roule ses pétales à peu près nus. 

Le second groupe ne diffère du premier que par ses fleurs redres- 
sées pendant la fécondation et ses calices terminés en massue, Il ren- 
ferme principalement trois types. Le premier est celui du Catholica, 
à tige droite et paniculée, fleurs étalées et dépourvues d’écailles, arti- 
ei burs glutineuses, fécondation directe etextérieure; le art , est 
celui du Moctiflora, qui a le port du Lychnis dioica et dont les calices 
sont renflés et irrégulièrement veinés; les fleurs ne s'ouvrent que le 
soir, et les étamines, comme les stigmates papillaires de tous les côtés, 
ne sont jamais saillantes ; le troisième, est celui des espèces à tiges 
effilées, feuilles linéaires et glabres, telles que le Glauca qui a la 
fécondation intérieure du ÂVoctiflora, le Pubescens, le Corsica, le 
Sericea,  Ornata du Cap, qui épanouit dans nos terres, dès le pre- 
mier printemps, ses fleurs d’un beau rose; le Picia, à pétales rou- 
geâtres ; le Zicolor, qui s'ouvre le matin et se ferme avant dix heures; 
le Muscipula et le Stricta de l'Espagne. Les tiges de ses plantes, et en 
particulier celles du Muscipula et du Picta, ont leurs articulations 
glutineuses, et arrêtent ainsi les insectes qui voudraient sucer leurs 
fleurs. 

Le troisième groupe des Siphonomorpha, a les fleurs redressées du 
second; mais il se distingue du premier par ses calices fortement 
cylindriques, à androphore allongé et chargé de capsules renflées. 
Je le divise également en deux types : le premier est celui des espèces 
à tiges élevées et paniculées, comme l'Jtalica, commun en Italie; le 
Bupleuroides de la Perse, à fleurs grandes et paniculées , et tiges glu- 
tineuses dans les entre-nœuds; le Paradoxa du Dauphiné, ainsi 
nommé, parce que ses écailles demi - avortées le placent entre Îles 


epr = 

Cucubalus et les Silene de Linwé; le Polyphylla de l'Autriche et quel- 
ques autres espèces à fleurs blanchâtres et roulées. Le second est celui 
du Vulesiaca, des Alpes du Valais, à racine ligneuse, pédoncule bi- 
flore, pétales rouges et bifides , calice très-allongé et capsule renflée ; 
on doit peut-être y réunir le Fruticosa de la Sicile, et le Capsica des 
environs du Caucase. Les plantes de ce groupe ont, je crois, toutes la 
fécondation indirecte et les pétales roulés pendant le jour. 

Enfin, les Atocion, distingués par leurs fleurs en corymbe et leur 
calice en massue à dix stries, sont formés principalement de trois 
types. Le premier compte deux espèces annuelles, l’Atocion et le 
Pseudo-Atocion, Yun et l’autre à fleurs couronnées et disposées en 
corymbes lâches. Le second est celui des Armeria, qui ne contient 
qu'une seule espèce caractérisée par ses tiges annuelles, glabres et 
visqueuses, ses corymbes fasciculés, ses fleurs rouges et couronnées, 
et ses feuilles glauques. Le dernier est celui du Cespitosa, à racine 
ligneuse, enfoncée dans les rochers, à feuilles petites, ordinaire- 
ment linéaires, et à fleurs rouges , bifides, couronnées et peu nom- 
breuses. Les autres espèces de la section sont des plantes étrangères 
ou trop peu connues pour pouvoir être rapprochées; mais elles ont, 
en général, comme les autres Atocion, leur tige visqueuse aux articu- 
lations, leurs fleurs petites et sans mouvements, et leurs calices en 
massue; elles sont aux Silene, ce que les Armeriastrum sont aux 
Dianthus. 

La fécondation des Atocions est indirecte : dans l'Armeria que 
je prends pour exemple, les cinq étamines principales sortent long- 
temps avant que leurs stigmates soient développés! et répandent par 
conséquent leur pollen sur les stigmates des autres fleurs rapprochées 
en faisceau ; les cinq autres étamines qui paraissent ensuite, restent 
toujours plus courtes ; à la dissémination, le calice se fend, l'andro- 
phore s'allonge et la capsule reste à découvert. | 

Les Silene forment, comme l’on voit, un genre bien circonserit, 
et qui préserite peu d’aberrations dans les caractères; mais autant il 
y a de facilité à reconnaître un Silene dans la famille des Caryophyl- 
lées, autant il y a de peine à déterminer l'espèce à laquelle il appar- 
tient. Les embarras proviennent, en partie, des variations naturelles 
à la plupart des plantes de ce genre, et en partie de l'inexactitude des 
descriptions, où les caractères constants sont souvent omis, tandis 
que les autres sont longuement exprimés. 

Il ya peu de végétaux plus simplement organisés que les Caryo- 
phyllées et surtout que les Silene. On n’y trouve ni stipules, ni brac- 
tées, ni glandes, n1 nectaires. Leurs tiges sont toujours primitive- 


2 68. — 

ment dichotomes, leurs pédoncules solitaires , leurs feuilles simples 
et entières; leurs fleurs régulières et semblablement conformées, sont 
disposées en cymes quelquefois fortement développés, d'autres fois 
tellement réduits qu’on n’y trouve presque plus que la fleur centrale 
et solitaire; les variations qui concernent les organes sexuels consis- 
tent, soit dans le nombre des styles, qui s'élève à quatre ou cinq dans 
le Rupestris, soit dans celui des étamines, dont cinq manquent quel- 
quefois et qui avortent toutes dans les espèces monoïques ou dioï- 
ques. 

Les différences spécifiques des Silene ont été jusqu'ici cherchées 
dans l’inflorescence , la forme des feuilles, des calices, des pétales 
étroits ou élargis, nus ou couronnés; mais on en aurait obtenu de 
plus constantes peut-être, dans les mouvements des fleurs et les diver- 
ses circonstances de la fécondation. 

Le principal phénomène physiologique que présente ce genre, est 
celui de l’'irritabilité des pétales, qui se roulent sur eux-mêmes, pen- 
dant le jour, et dont les mouvements paraissent organiques et indé- 
pendants de tout agent extérieur, puisqu'ils ont lieu par un temps 
couvert et pluvieux comme par un ciel serein, et dans l'obscurité 
comme en plein jour. Mais pourquoi certaines espèces, au lieu de 
rouler leurs pétales, les tordent-elles, à la manière du Quinquevulnera ? 
Pourquoi d’autres n’ont-elles aucun mouvement ? Je l'ignore entière- 
ment; mais je remarque qu'en général , les pétales sont irritables dans 
certaines sections, et non pas dans d'autres; ainsi les Vanosilene, les 
Rupifraga, et la plupart des Atocion ou des Silene fasciculés, sont 
dépourvus de mouvements, qu'ils n'auraient pas pu facilement exé- 
cuter. 

Les pédoncules , à cet égard, ne sont pas moins remarquables que 
les pétales. Quelquefois ils restent penchés pendant la fécondation, 
et se relèvent après, comme dans le Si/ene nutans; d'autres fois, au 
contraire, ils sont d'abord redressés et se déjettent ensuite. Ces mou- 
vements opposés ont sans doute rapport à la fécondation, qui tantôt 
s'opère mieux à découvert et par les étamines redressées, tantôt est 
plus favorisée par l'obscurité et le renversement des étamines. Enfin, 
un dernier phénomène qui me paraît caractériser plusieurs sections 
de ce genre, c'est celui de leur capsule pédicellée; quand le calice 
est renflé, comme dansles Behenantha, le support est presque nul, 
parce que la capsule peut s'ouvrir facilement et répandre même ses 
graines dans l'intérieur du calice ; il est encore nul dans les espè- 
ces qui, comme le Vocturna, le Gallica, etc., ont un calice qui se 
fend aisément ; mais dans d’autres espèces , ce support s'accroît 


— 366 — 


tellement qu'il chasse la capsule hors du calice, ce qui est une des 
nombreuses formes de dissémination employées par la nature dans le 
règne végétal. 

Les tiges des Silene sont souvent glabres ou simplement velues ; 
mais ordinairement elles sont visqueuses, surtout près du sommet ; 
quelquefois aussi, comme dans l’A4rmeria, le Picta; le Muscipula, 
le Nutans , etc., cette viscosité ne recouvre que la partie voisine de 
l'articulation, qui reste glutineuse pendant tout le cours de la fécon- 
dation et se dessèche ensuite. On voit de plus que la bande d'où est 
sortie l'humeur visqueuse , reste brunâtre et altérée. 

C'est à l'androphore qu'il faut attribuer la plupart des différences 
qu’on remarque dans les calices des Silene. Lorsque cet organe est 
à peu près nul, et que la capsule se renfle à la base, il en résulte la 
forme qui caractérise la section des Conoimorpha; lorsqu'au contraire, 
il est allongé et terminé par une capsule renflée, on a les calices en 
massue si communs dans cette famille. On comprend que tous les 
intermédiaires entre ces deux formes extrêmes peuvent être expliqués 
par les variations relatives de l'androphore et du fruit. 

La capsule, en grossissant , rompt le calice, qui, d'après son mode 
d'organisation, se fend facilement par ses sillons membraneux; en 
sorte qu'un calice strié indique d'ordinaire une capsule qui se renfle, 
tandis qu’un calice lisse annonce, au contraire, une capsule qui reste 
à peu près cylindrique, comme celle des Dianthus ; toutefois l'on doit 
ajouter que la fleur mâle de l'Otites et celle du Lychnis dioica ont 
aussi leur calice strié, mais jamais enflé. 

La capsule des Silene est sèche, cartilagineuse et primitivement tri- 
loculaire, en sorte que des six lobes qui forment son ouverture, trois 
correspondent au milieu des valves et trois autres aux sutures; elle 
s'ouvre par la sécheresse et répand ses semences par la simple agitation 
de l'air; après la dissémination, elle se sépare du pédoncule qui se 
rompt irrégulièrement. 

Les graines de toutes les espèces que j'ai examinées, m'ont paru 
contournées à peu près de la même manière que l'embryon. Leur sur- 
face est comme ciselée d’arêtes élégantes et longitudinales, et leur 
ombilic est constamment placé du côté concave, comme dans les 
Dianthus. | 

Les appendices, qui bordent souvent l'entrée des corolles, n'ont 
rien de nectarifère, et paraissent destinés, soit à fermer le tube de la 
fleur, soit à maintenir les étamines dans une position verticale. Ils 
varient beaucoup de forme et de grandeur ; pour l'ordinaire, ils sont 
composés de deux lames, qui s'appliquent l’une contre l’autre dans la 


LE 
préfloraison ; mais quelquefois ils manquent ou sont remplacés. par 
de simples tubercules. 

Les fleurs des Silene durent ordinairement deux jours, parce que 
les grandes étamines se développent un jour avant les petites, et tant 
que leur floraison n’est pas accomplie, les mêmes pétales se déroulent 
le soir et s'enroulent le matin. La fécondation tantôt directe, comme 
dans les Rupifraga et quelques autres espèces, est ordinairement in- 
directe et réciproque. Les cinq étamines principales fécondent les 
styles déjà développés des fleurs voisines; les cinq autres plus tardives 
fécondent quelquefois leurs propresstyles, alorssaillants et contournés; 
plus souvent encore elles avortent avant que leurs stigmates soient 
bien conformés, et répandent ainsi leur pollen sur les fleurs en état de 
le recevoir, comme on pouvait déjà le conclure par l'observation des 
plantes dioïques ei monoïques, qui ne sont pas rares dans ce genre. 
Du reste, on peut croire qu’en observant les divers Silene sous ce 
point de vue, on y découvrirait d'autres arrangements qu'on ne soup- 
conne point encore, et qui donneraient une idée bien plus grande 
de la richesse et de la variété que le Créateur a mises dans ses ou- 
vrages, que ne peuvent le faire les différences de feuilles ou d'inflo- 
rescence. 

La plupart des Silene sont dispersés cà et là dans le midi de l'Eu- 
rope, dans les îles de la Méditerranée et dans la Sibérie, où ils vivent 
solitaires, se reproduisant par leurs rhizomes et presque jamais par 
des rejets; mais il en est d'autres plus rapprochés de nous, et qui 
forment des tableaux plus variés; tel est d'abord le Silene acaulis, si 
commun sur les rochers de nos montagnes alpines et si remarquable 
par ses gazons serrés, tout brillants de fleurs roses ; tels sont ensuite 
les Rupifraga , à feuillage si élégant et à fleurs d’un blanc si pur; tel 
est l'/nflata de nos prairies et des bords de nos champs, qui serait 
bien plus admiré par son feuillage et ses grandes fleurs blanches, s’il 
était moins répandu ; tels sont les Quinquevulnera le Cerastioides, etc., 
espèces annuelles qui couvrent deleurs jolies fleurs rouges les champs 
du midi; tel est, enfin, l’4rmeria des collines caillouteuses et stériles, 
qui a mérité l'entrée de nos jardins, conjointement avec le Bipartita 
de la Barbarie, et qui étalent, une grande partie de l’année, leurs 
nombreuses fleurs d'un beau rouge. 

Du reste, ce genre a besoin d'une nouvelle rédaction, parce que, 
d'un côté, il ne contient pas les espèces ou nouvellement découvertes, 


ou mieux observées, et que de l'autre, ses diverses sections ne sont 
pas suffisamment circonscrites. 


— 368 — 


SIXIÈME GENRE. — lychnis. 


Le Lychnis a un calice tubuleux, à cinq dents, cinq pétales ongui- 
culés et ordinairement couronnés, dix étamines, cinq styles, un 
androphore long ou nul, et une capsule dont le nombre des loges 
est variable. 

On le divise en quatre sections : 

1° Les Viscaria, calice cylindrique terminé en massue, capsules à 
cinq loges incomplètes, et androphore allongé; 

2° Les Eulychnis, calice cylindrique terminé en massue, capsule 
uniloculaire , pétales couronnés, androphore allongé ou raccourci; 

3° Les Agrostemma, calice ovoïde terminé par des dents courtes, 
capsule ordinairement uniloculaire , androphore nul ou très-court; 

4° Les Githago, calice coriace, cylindrique, légèrement campanulé 
et terminé par des découpures très-allongées, capsule uniloculaire et 
androphore nul. 

Lés Vüiscaria ne renferment qu'une espèce qui habite les prés 
secs et sablonneux de l'Europe centrale et méridionale; ses feuilles 
radicales sont entassées en gazon au-dessus de sa racine ligneuse; sa 
tige est simple et fortement glutineuse sous les articulations; ses 
fleurs, d'un beau rouge et disposées en verticilles irréguliers comme 
celles des Otites , ont leurs pétales non roulés, plus ou moins échan- 
crés et couronnés d'’écailles bifides; son calice, tubulé et rougeûtre, 
est marqué de dix côtes peu saillantes, et sa capsule , à cinq loges in- 
complètes, se renfle en massue; c'est une plante vivace, qui double 
facilement dans les jardins, et qui présente sur des pieds différents ou 
sur le même des fleurs à pistils avortés et d’autres régulièrement her- 
maphrodites à stigmates contournés et saillants, mais dont la fecon- 
dation est indirecte. Le calice se fend et l'androphore grandit à la ma- 
turation. 

Les Eulychnis, plus nombreux, se rangent assez bien sous deux 
types ; le premier est celui du Cæli rosa, plante annuelle des côtes de 
la Barbarie, à pédoncules aliongés et penchés avant l'épanouissement ; 
le second est celui du Chalcedonica, plus généralement connu sous 
le nom de Croix de Malte , et remarquable non-seulement par ses fleurs 
d'un rouge éclatant, ramassées en tête serrée, mais encore «par ses 
calices à côtes relevées ; on peut y joindre le Lychnis flos Jovis, plante 
alpine, à feuilles tomenteuses et fleurs fasciculées , à laquelle je réunis 
le Coronaria de la troisième section, le Fulgens de la Sibérie ;‘à pétales 
quadrifides, et enfin le Grandiflora de la Chine et du Japon, trés-belle 


— 369 —- 
espèce à port élevé, dont les fleurs grandes et comme peintes, sont 
d’un rouge de brique. 

Tous ces Lychnis vivaces, à tige et calice secs et coriaces, sont dé- 
pourvus de mouvements, et je crois aussi d'organes nectarifères : leur 
fécondation est presque toujours indirecte; ainsi par exemple, dans 
le Chalcedonica et le Fulgens, les anthères seules sortent du tube et 
se couchent à son entrée, en répandant leur pollen sur les écailles; 
ensuite on voit paraître les stigmates qui s'étalent, et sont fécondés, 
soit par ses fleurs latérales, soit par le pollen accumulé entre les écailles ; 
dans le Cœli-rosa, où la fécondation est à peu près semblable, les 
stigmates allongés et introrses sont velus comme dansle Githago ; tou- 
tefois j'ai noté que, dans le Fos J'ovis, la fécondation était intérieure, 
et que les stigmates, comme les anthères, restaient dans le tube 
corollaire. 

La troisième section, encore plus nombreuse que la seconde, est 
formée principalement de trois types européens : premièrement, celui 
des espèces dioïques par avortement, telles que le Dioica, à fleurs 
blanches, qui croît le long des chemins ; le Syvestris, à fleurs rouges, 
qui habite les pentes de nos basses montagnes, peut-être encore le 
Diclinis du royaume de Valence. Secondement, celui du Flos cuculi 
des prés de l'Europe, très-remarquable par ses pétales quadrifides et 
frangés. Enfin, celui du Pyrenaica des rochers des Pyrénées, ou de 
l’ Alpina des pâturages élevés des Alpes et des Pyrénées, plante remar- 
quable, qui devrait former un genre à part, à cause de ses calices 
campanulés, deses fleurs dioïques dont les stigmates, papillaires sur la 
face supérieure, s’étalent fortement en dehors, de sa capsule nettement 
operculée au sommet et légèrement pédonculée. Les autres espèces 
comprises dans la section, comme l’Apetala de la Laponie, à fleurs 
apetales ; le Zæta du Portugal, qui est probablement le Corsica du 
Prodrome; le Pusilla, dont la conformation est à peu près celle des 
Githago , et le Magellanica , dont les organes sexuels restent cachés 
dans le calice, ont sans doute des formes variées de fécondation ; 
mais je ne les connais pas assez pour rien affirmer à cet égard. J'ai 
noté seulement que dans certains pieds du Flos cuculi, les anthères 
sortaient à peine du tube, et qu'elles étaient défleuries avant l'appari- 
tion de leurs stigmates qui s’étalaient beaucoup, et que dans d’autres 
individus, les anthères saillantes répandaientabondamment leur pollen 
d'un violet foncé sur le limbe de la corolle, tandis que les stigmates 
restaient avortés, en sorte que la fécondation était imparfaitement 
dioique. 

Enfin, les Githago ne contiennent qu’une seule espèce, qui vit dans 

I. 24 


0. — 

les blés, avec lesquels elle croît et se resseme, et se distingue de ses 
congénères par ses longues lanières qui forment son calice; ses grands 
pétales, d’un rouge veiné, sont dépourvus d'écailles et de mouvements, 
et ses styles sont recouverts de poils blanchätres qu'il ne faut pas con- 
fondre avec la bande papillaire et intérieure du stigmate. Cette espèce, 
qui forme un véritable type, a la fécondation directe et l'inflorescence 
assez remarquable ; les aisselles supérieures fournissent deux jets 
opposés, dont l'un continue la tige et l'autre est un pédoncule : cette 
disposition, qui est constante, se répète plusieurs fois. 

Les Lychnis, qui, comme on le voit, ne forment point un genre 
naturel, mais sont au contraire composés de plusieurs types très- 
distincts, ont l’organisation des Caryophyllees , et en particulier, celle 
des Silene ; leurs tiges dichotomes, à pédoncules insérés dans les 
divisions des branches, se terminent en panicule, en corymbe ou en 
fascicules, selon le mode de développement des rameaux qui avortent 
quelquefois au point que la fleur paraisse solitaire ; les feuilles, simples 
et élargies plutôt qu’étroites, varient de consistance : pour l'ordinaire, 
elles sont dures, épaisses, velues et cotonneuses comme les tiges ; mais 
quelquefois aussi elles sont linéaires, presque glabres; les fleurs sont 
grandes, d'un rouge plus ou moins éclatant, rarement roses ou 
blanches. 

La plupart des Lychnis sont vivaces et se conservent par leurs 
racines, sans donner toutefois de rejets. Ceux qui vivent parmi les 
blés, comme notre Githago et le Cæli-rosa de la Sicile, sont, au con- 
traire, annuels, et le premier disparaîtrait de nos climats, s'il n’y avait 
plus de culture. 

Les calices, ordinairement coriaces et chargés de côtes membra- 
neuses, qu'on ne retrouve point, je crois, dans les autres Caryophyllees, 
sont simplement striés dans le Dioica, V Alpina et le Flos cuculi. Leur 
forme dépend de celle de l'androphore, qui varie considérablement 
dans ce genre : tantôt il est nul ou à peine visible, et alors le calice 
reste tubulé ou campanulé, comme dans l'Æ/pina, le Diclinis, le 
Fulgens , le Githago, etc.; tantôt, au contraire, il est très-long et 
très-marqué, comme dans le V’iscaria , le Grandiflora , le Cœli-rosa et 
le Chalcedonica, dont le calice se fend pendant la maturation. Ces 
différences, toujours constantes, sont la base des sections ou plutôt 
des types que nous avons cherché à établir. 

Les pétales varient ici comme les calices; ils sont bifides dans le 
Chalcedonica , le Cœli-rosa , le Dioica, le Sylvestris, V Alpina et le 
Læta ; quadrifides dans le Fulgens , profondément et irrégulièrement 
découpés dans le Flos cuculi ; entiers ou seulement échancrés dans la 


ES 
plupart des autres espèces. On ne trouve pas plus de régularité dans 
les écailles que dans la forme des pétales : quelquefois elles manquent 
entièrement, comme dans le Githago; quelquefois elles sont tuber- 
culées, comme dans l'#/pina, ou quadrifides comme dans le Dioica; 
mais, pour l'ordinaire, elles sont bifides, redressées et acuminées. 
Enfin, la capsule, primitivement quinquéloculaire, devient, par avor- 
tement, plus ou moins uniloculaire, à cinq valves bifides ou dix dents. 

La fécondation ne paraît pas s’opérer dans les Zychnis avec la même 
régularité que dans les Silene. Celle du Grandiflora ne ressemble pas 
à celle du Pusilla; celle du Pusilla n’est pas celle du Githago; celle 
du Gäühago n'appartient pas au Cœli-rosa; et enfin, ni les unes ni 
les autres ne ressemblent à celle du Flos cuculi. Mais c'est surtout 
celle des espèces dioïques que je veux mentionner ici : dans le Dioica 
et le Sybestris, qui n’en est peut-être qu’une variété, les stigmates 
très-allongés et papillaires de tous les côtés, s'étendent et se divari- 
quent, afin de recevoir plus facilement le pollen des fleurs mâles qui 
est déposé par les anthères à l'entrée du tube de la corolle; quelque- 
fois le calice se fend, et les anthères, dont les filets sont toujours 
très-amincis et très-faibles, sont mises à découvert avec leur pollen. 
On voit les fleurs femelles se dépouiller de leur corolle pour que leurs 
stigmates, encore en pleine vie, puissent recevoir l'influence du pollen 
des fleurs mâles, qui se développent le soir et sont défleuries à la fin 
du jour suivant, où elles tombent désarticulées. 

On peut remarquer aussi que les fleurs mâles du Zychnis dioica , 
ainsi que du Sylvestris, portent au fond de leur corolle et à la place 
de l'ovaire, un godet jaunâtre nectarifère qui imprègne de son humeur 
les étamines velues à la base, et sans doute aussi la corolle et ses 
écailles, qui conservent long-temps le pollen onctueux dont elles sont 
recouvertes. 

Les pétales des Lychnis sont presque toujours insensibles à l'in- 
fluence de la lumière et de la température : ils restent ouverts à peu 
près horizontalement, et leur consistance est telle, qu'ils supportent 
assez long-temps, sans s’altérer, les variations atmosphériques. J'en 
excepte toutefois les espèces dioïques, dont les pétales se déroulent 
le soir comme ceux des Silene , avec lesquels ils ont de grands rapports. 

Les pédoncules, qui n'ont pas plus de mouvements que les pétales, 
restent constamment redressés ; les capsules, quoique plus épaisses 
en général que celles des Silene , répandent leurs graines de la même 
manière, par une ouverture ordinairement élargie. 

Les nectaires des Zychnis, beaucoup plus distincts que ceux des 
Silene, sont placés à la base des grandes étamines. Dans le Flos Jovis, 


HE dope de 
ils forment deux petites glandes latérales. Dans le Grandiflora et le 
Githago, la liqueur parait sortir entre l'androphore et l'ovaire, etc. ; 
mais j'avoue que je n’ai rien remarqué de nectarifère dans le Lychnis 
alpina , sans doute parce que je n'ai vu que les fleurs femelles dont les 
étamines sont avortées. 

Ge genre ne m'a présenté qu'un petit nombre de phénomènes phy- 
siologiques, dont le plus remarquable est, sans contredit, celui de la 
capsule operculée de l’Æ/pina. On peut citer ensuite les articulations 
glutineuses du J’ïscaria, qui se rapproche ainsi de quelques Silene ; 
les variations si nombreuses des androphores, le prolongement si 
extraordinaire des lobes du calice, dans le Githago, et surtout les 
écailles pointues et cornées du Coronaria, qui forment d'abord comme 
un cône grillé au centre de la corolle, et qui, au moment où la fécon- 
dation commence, s’étalent et découvrent dans l’intérieur du tube 
cinq beaux stigmates latéraux, fortement roulés, et qui ne sortent 
jamais. Les autres espèces présentent-elles des mouvements semblables? 

Dans la plupart des Zychnis, le calice se fend pendant la maturation, 
pressé par la dilatation de la capsule; dans quelques autres, comme 
le Dioica et le Sylvestris, il s'amincit ét se change en une pellicule 
desséchée et peu apparente, et l'on peut remarquer que dans ces 
dernières espèces , les fleurs femelles sont à peu près sessiles dans les 
dichotomies de la tige, mais qu'il n’en est pas de même des fleurs 
mâles où il n’y a point de dichotomie bien marquée. 

Le calice du Githago reste entier et coriace , mais la capsule s’allonge 
et étale au-dessus les six lobes dans lesquels son sommet se partage. Si 
on l’ouvre à cette époque, on trouvera qu’elle est toute remplie de 
graines tuberculées dont les pédicelles sont placés à différentes hau- 
teurs : ces graines se détachent d’elles-mèmes avant la dissémination et 
sont chassées par le vent. On ne voit plus à cette époque aucune trace 
de ces styles changés en cordons ombilicaires et destinés à charrier les 
émanations du pollen. Dans le Fos Jovis, le calice se fend aussi, mais 
la capsule sessile s'ouvre en cinq valves. 

Enfin, si l'on compare l’androphore des diverses espèces de ce 
genre avec le calice qui le renferme, on devinera facilement ia raison 
pour laquelle il est nul, médiocre ou allongé. Ces deux organes sont 
en rapport parfait avec la dissémination, qui est ici le principal but de 
la nature. 

Les Lychnis sont sans usages économiques, et quelques-uns même, 
comme le Githago, nuisent beaucoup à nos blés, qu'ils inféstent; 
mais ils contribuent à l'ornement de nos jardins, par la beauté de 
leurs fleurs. On doit citer avant tout le Chalcedonica, ou la Croix de 


— 373 — 

Malte, qui s'élève jusqu'à huit pieds, et dont les fleurs fastigiées for- 
ment un bouquet d'un rouge éclatant; ensuite le Grandiflora de la 
Chine, à corolle d’un rouge briqueté et comme vernissé; enfin le 
Fulgens , ainsi nommé de l'éclat de ses fleurs. Après ces magnifiques 
plantes, viennent les Lychnis du midi de l'Europe, tels que le Coro- 
naria , le Flos Jovis, qui lui ressemble beaucoup, et le Cæœli-rosu, 
plus élégant et plus gracieux que les deux autres ; enfin, les espèces 
communes, le /’iscaria, le Flos cuculi, et le Dioica, qui, quoique 
moins brillantes que leurs congénères, forment des touffes mieux 
garnies de fleurs plus fraiches et souvent doublées. 


SEPTIÈME GENRE. — V’elezia. 


Le Felezia a un calice longuement tubulé, terminé par cinqou six 
dents ; cinq ou six pétales courts, à limbe échancré, à onglets filifor- 
mes et barbus ; cinq à six étamines, et une capsule uniloculaire cou- 
ronnée de deux styles. 

Ce genre est formé-de deux petites plantes annuelles , dont l'une est 
le Felezia rigida, du midi de la France, et l'autre le Quadridentata 
de l'Asie mineure, distingué par ses pétales à quatre dents et ses 
calices renflés en massue. 

Le Rigida, qui vit dans les lieux arides et sablonneux, s'élève à 
deux ou trois pouces sur une tige striée etrameuse,, dont les articula- 
tions sont chargées de feuilles en alène soudées à leur base, et dont 
les fleurs axillaires et sessiles ont leurs pétales chargés d’une petite 
écaille, comme les Silene, GÆrTNER a observé que la capsule, sessile 
au. fond: du calice, était uniloculaire, quadrivalve, à réceptacle 
linéaire et libre; que les semences, au nombre de dix à douze sur 
deux rangs, étaient allongées, pointues, convexes d'un côté et cana- 
liculées de l'autre, que l’ombilic se trouvait du côté concave, comme 
dans les Dianthus ; enfin, que: l'embryon était droit et la radicule 
supère. 

Le V’elezia rigida.a Yes habitudes des Dianthus, dont il diffère sur- 
tout par l'absence des écailles calicinales, la forme du réceptacle et 
le nombre des étamines. Cependant Sisrnorr et Suirm ont observé 
que dans la Crète, où.elle se retrouve, cette plante a toujours dix 
étamines; celles qui manquent sont sans doute les secondaires, qui 
doivent être considérées comme avortées, 


-— 374 — 


HUITIÈME GENRE. — Drypis. 


Le Drypis a un calice tubulé à cinq dents, cinq pétales onguiculés, 
à limbe bifide et bidentés à la base; cinq étamines, trois styles, une 
capsule uniloculaire , monosperme et ouverte hofôbalineie, 

Le Drypis ne contient qu’une seule espèce originaire de l'Italie, de 
lIstrie et dela Mauritanie, aussi remarquable par sa conformation, 
que son genre l’est déjà par ses caractères. C’est une plante rameuse, 
à tiges noueuses, tétragones , paniculées , sèches, dures et long-temps 
persistantes. Les feuilles sont opposées , linéaires et pointues au som- 
met; les supérieures, épineuses à la base, soutiennent de petits 
paquets fasciculés de fleurs blanches ou rougeûtres , presque sessiles 
et enveloppées de bractées, de même forme que les dernières feuilles. 

Le Drypis spinosa est bisannuel et a ses tiges dichotomes comme la 
plupart des Caryoplillées, mais les dernières dichotomies sont telle- 
ment rapprochées, que les fleurs paraissent comme fasciculées, les 
pétales portent chacun à l'entrée du tube deux squamules très-mar- 
quées, les étamines sont très-saillantes et ont leurs anthères bleuâtres, 
mais les stigmates ne sortent et ne se déroulent que tard , en sorte que 
la fécondation est toujours indirecte; les fleurs une fois ouvertes ne 
se referment plus. 

Cette plante a été placée , comme d’autres, sur la limite et non pas 
au centre de la famille, dont elle diffère par sa conformation exté- 
rieure, par sa capsule ouverte horizontalement, et enfin par sa 
semence solitaire. GÆRTNER dit que cette semence, grosse et réniforme, 
est portée par un funicule qui naît du fond de la capsule et s’insère 
latéralement ; que la radicule est infère, et que l'embryon, enveloppé 
extérieurement d’un albumen très-blanc, forme, avec ses cotylédons 
linéaires, trois tours complets de spirale. 

Du reste, la capsule operculée du Drypis appartient aussi, comme 
nous l'avons vu, au Lychnis ulpina et peut-être encore au Silene ramo- 


sissima; lon peut conjecturer qu’elle n’est ici monosperme que par 
avortement. 


Seconde tribu. — ALSINÉES. 


Les Alsinées, qui forment la seconde tribu des Caryophyllées, dif- 
fèrent des Silénées par plusieurs caractères, dont le plus remarquable 
est un calice à quatre ou cinq sépales , quelquefois légèrement réunis 


— 9379 — 
à la base. Ces plantes, qui sont pour la plupart des herbes, ont leurs 
tiges et leurs rameaux articulés et leurs feuilles opposées, entières et 
presque toujours dépourvues de ‘stipules; ce qui les distingue phy- 
siologiquement, ce sont les mouvements variés de leurs pédoncules, 
que j'ai décrits fort au long dans l'Holosteum, et qui appartien- 
nent également à l’Ælsine, à l’Arenaria, etc. Plusieurs d’entre elles ont 
une fécondation qui dure deux jours : dans le premier, les étamines 
alternes aux pétales approchent leurs anthères des stigmates ; et dans 
le second, ce sont les anthères opposées aux pétales qui les rempla- 
cent. On peut remarquer, avec Kocx, que le nombre des valves des 
capsules est ordinairement égal à celui des styles, ou double de ce 
même nombre, lorsque sans doute ces valves se sont divisées en deux. 


, 
PREMIER GENRE. — (ouffeia. 


Le Gouffeia a un calice à cinq divisions étalées, cinq pétales entiers, 
dix étamines, deux styles, une capsule globuleuse, uniloculaire, 
bivalve, à une seule semence. 

Ce genre est formé d’une petite plante qui fleurit au premier prin- 
temps, sur les collines rocailleuses des environs de Marseille , et dont 
les tiges, hautes de trois à quatre pouces, sont ramifiées, diffuses et 
un peu visqueuses au sommet ; les feuilles sont courtes et rétrécies ; 
les fleurs petites, nombreuses, terminales; les pédoncules grèles et 
disposés en panicules ; les pétales ovales, blancs et persistants; les 
sépales striés et aigus. 

Ce qui distingue ce genre, c'est principalement sa capsule globu- 
leuse, qui se fend longitudinalement en deux parties à la maturité, et 
qui ne renferme qu’une seule semence. La plante qui le forme a le port 
de l’Ærenaria tenuifolia. 

Le Gouffeia arenarioides a le port des Arenaria, des Alsine, et de 
la plupart des plantes de sa tribu; ses tiges faibles, diffuses et ram- 
pantes, sont articulées et donnent à chaque articulation des rameaux 
florifères et souvent dichotomes; ses pétales, assez agrandis, sont 
cordiformes et plus ou moins échancrés ; les étamines, opposées aux 
sépales, sont fortement glanduleuses à leur base; les deux styles diva- 
riqués ont leurs stigmates latéraux et allongés en massue; la capsule 
s'ouvre latéralement en deux valves hémisphériques , et découvre à sa 
base une ou deux semences turbinées assez grosses, avec les rudiments 
de quelques autres. 

Les pédoncules qui naissent des dichotomies se réfléchissent forte- 
ment aprés la floraison, et les fleurs, une fois ouvertes, ne se refer- 


— 376 — 


ment plus; la fécondation dure plusieurs jours, et les calices protégent 
la capsule pendant la maturation : cette plante forme une singulière 
aberration dans une famille d’ailleurs tres-naturelle. 


SECOND GENRE. — Puffonia. 


Le Buffonia a un calice à quatre pièces, quatre pétales entiers, 
quatre étamines, deux styles, une capsule aplatie, uniloculaire, 
bivalve, à deux semences. 

Ce genre est composé de quatre espèces fort rapprochées : deux 
originaires de la Perse, et deux du midi de la France. Ces plantes, qui 
pourraient bien ne différer que par les lieux où elles croïssent, ont le 
port de l’A4renaria fasciculata où du Juncus buffonius ; leurs tiges sont 
droites, filiformes , presque rameuses à chaque nœud; leurs feuilles, 
amincies, réunies à la base et presque stipuliformes au sommet; leurs 
fleurs, terminales ou axillaires, sessiles ou légèrement pédonculées; 
leurs sépales, rayés de stries plus ou moins convergentes, scarieux et 
blanchâtres sur les bords; leurs pétales, blancs, très-petits et comme 
avortés; leurs semences, aplaties et marquées d’arêtes tuberculées et 
concentriques. 

Je n’ai pas observé ces plantes fraiches, et je ne connais pas les 
diverses circonstances de leur floraison ; je vois seulement que leurs 
calices se ferment après la fécondation, et que leurs deux ovules com- 
muniquent avec les styles par les filets conducteurs, comme dans le 
reste de la famille. 

Les semences sont fixées par un funicule au fond de la capsule; leur 
embryon est allongé et presque circulaire, leur radicule est infère. 

Gærrner observe que quelquefois deux des quatre étamines avor- 
tent. 


TROISIÈME GENRE. — Sagina. 


Le Sagina a un calice à quatre ou cinq divisions, quatre ou cinq 
pétales et autant d’étamines; la capsule, qui s'ouvre à quatre ou cinq 
valves, est uniloculaire et polysperme. 

Les Sagines comptent une dixaine d'espèces, qui sont toutes des 
herbes très-petites , à feuilles vertes et amincies, à pétales blancs très- 
peu apparents et souvent avortés. Deux d’entre elles sont étrangères ; 
les autres habitent les terrains sablonneux de l'Europe. 

Je distingue ces dernières en deux types : le premier est celui de 
l'Erecta, formé d’une seule espèce qui a le port du genre, mais qui 


— 377 — 


est caractérisée par ses fleurs plus grandes et surtout par sa capsule 
oblongue, transparente au sommet et bordée à son ouverture, comme 
celle du Cerastium, de huit petites dents. Ce dernier caractère, qui la 
sépare des autres Sagines, l'a fait considérer par quelques botanistes , 
comme formant un genre particulier, qu'ils désignent par le nom de 
Mænchia. 

Le second type compte deux espèces, le Procumbens et l’Apetala , 
qui ne méritent guère d'être séparées, et vivent dans nos terrains 
sablonneux et nos cultures. Elles se distinguent des autres A/sinées 
par leur calice ouvert et plus grand que la corolle, leurs quatre styles 
simples et leur capsule à quatre valves, tellement étalées à la maturité, 
qu’elles ressemblent à un second calice. 

Le Sagina procumbens de nos cultures, que GauDiIN considère avec 
raison comme vivace, est souvent apétale, et par conséquent sa fleur 
ne s'ouvre pas : sa fécondation est donc intérieure, et en examinant 
une fleur très-jeune, on trouvera déjà ses quatre anthères appliquées 
contre les quatre stigmates filiformes et papillaires qu'elles recouvrent 
de leur pollen. Après la fécondation, on voit paraître au sommet de la 
fleur, toujours fermée, une tête stigmatoïde à demi détruite et pour- 
tant encore recouverte de pollen ; à la dissémination, le calice s'étale 
horizontalement, et la capsale s'ouvre en quatre valves de consistance 
papyracée. 

Les Sagina fleurissent de bonne heure, et se reproduisent dans 
nos champs jusqu’à la fin de l'automne. Leurs pédoncules ne sont pas 
insérés aux dichotomies des branches, mais aux aisselles des feuilles, 
dont chaque paire émet ordinairement , d’un côté, une fleur longue- 
ment pédonculée , et de l’autre, un rameau. Les pétales ne s'ouvrent 
guère qu'à une vive lumière , et ne tardent pas à se refermer. 


QUATRIÈME GENRE. — ÂMurhingia. 


Le Mærhingia a un calice profondément quadrifide, quatre pétales, 
huit étamines, deux styles, une capsule uniloculaire, polysperme et 
quadrivalve. 

Ce genre, qui ne comprenait autrefois qu'une seule espèce, le 
Muscosa, en compte à présent deux autres ; le Sedoides des Alpes 
de Tende, à feuilles plus charnues et fleurs plus petites , et le Séricta 
de l'ile de Crète, à feuilles raides, scarieuses et ciliées à la base ; mais 
comme ces plantes appartiennent toutes trois au même type, et que 
les deux dernières ne sont peut-être que des variétés, nous nous 
contenterons de décrire la première. 


— 378 — 


Le MoϾrhingia muscosa a la conformation des Caryophyllees : sa 
tige principale se prolonge jusqu'au sommet, où elle se termine par 
une fleur solitaire qui paraît la première; elle est suivie de la fleur 
centrale des autres dichotomies , en commencant par le haut ; mais il 
ÿ a, en général, peu de régularité dans l’inflorescence, à cause du 
grand nombre des avortements. Cette plante fait un des principaux 
ornements des pentes de nos montagnes et de nos rochers, par son 
port plein de grace et de légèreté et ses fleurs d’un blanc pur qui 
contraste admirablement avec le vert glabre et foncé des feuilles. Elle 
est vivace, et ses tiges amincies se dépouillent successivement de leur 
écorce pour se changer en rhizemes, qui s'étendent quelquefois au- 
delà de trois pieds entre les débris pierreux des montagnes. 

Le pédoncule du Mærhingia reste toujours redressé, et ses pétales 
ne se referment point pendant toute la durée de la floraison. Le 
calice, d'abord serré contre la capsule, s'écarte au moment où celle-ci 
ouvre horizontalement ses quatre valves , et répand ses nombreuses 
graines, dont le funicule est fort court, l'embryon pétisphérique et 
la radicule infère. J'ai noté que la cicatricule avait la forme d’une 
capsule transparente à rayons nombreux et bien marqués. Mais cette 
observation mérite d’être vérifiée. 

Les filets sont blancs et réunis à la base en urcéole; les anthères 
sont arrondies et introrses ; les stigmates sont en tête, et le nectaire 
est placé à la base des quatre grandes étamines. C'est une glande ou 
fossette ouverte du côté extérieur, et qui, au moment de la féconda- 
tion, porte une belle goutelette d'humeur miellée. Les pétales échan- 
crés à la base, forment par leur ensemble quatre fossettes qu’on 
apercoit très-bien au fond de la corolle, et qui recoivent l'humeur 
miellée, Une disposition semblable se remarque dans une foule de 
plantes, les Convolvulus, par exemple. 


CINQUIÈME GENRE. — Holosteum. 


L'Holosteum a un calice de cinq pièces, cinq étamines, dont une 
ou deux avortent quelquefois, trois styles, une capsule uniloculaire, 
qui s'ouvre au sommet en cinq dents, un embryon replié dans 
l’albbumen. 

L'Holosteum compte quatre ou cinq espèces encore mal déterminées 
et dispersées dans les diverses parties du monde ; la seule qui doive 
nous occuper, est l'Umbellatum des murs et des champs stériles, qui a 
été souvent réuni aux genres voisins, avec lesquels il a d'assez grands 
rapports. 


— 379 — 

Cette plante porte à sa base une rosule de feuilles ciliées , spathulées 
et glauques, d’où sortent des tiges cylindriques, fortement articulées 
à leur base , terminées par une ombelle simple, garnie à sa naissance, 
de quelques petites bractées, et composée de sept à huit rayons in- 
égaux et uniflores. 

Les pédoncules sont d'abord pendants le long des tiges; celui qui 
fleurit le premier et qui répond au centre de l'ombelle, se redresse et 
étale à la lumière ses petits pétales échancrés d'un blanc souvent lavé 
de rose; ensuite il referme son calice, puis reprend sa première posi- 
tion en même temps qu il s'allonge et se roidit. Les autres pédoncules 
exécutent successivement et avec beaucoup de précision les mêmes 
mouvements, jusqu'à ce que la floraison soit achevée. Alors le premier 
se relève verticalement et ouvre sa capsule pour répandre ses graines ; 
il est suivi du second, et celui-ci du troisième, et successivement dans 
un ordre très-régulier. Enfin, les pédoncules se dessèchent avec les 
tiges et les feuilles, et dès le mois d'avril, la plante a disparu jusqu'au 
printemps suivant. 

Ces divers mouvements, qui ont toujours lieu de la même manière, 
et qui ne sont jamais troublés que par de fortes intempéries, ont 
évidemment pour but de favoriser les trois opérations importantes 
de la fécondation , de la maturation et de la dissémination. Et comme 
il serait impossible de les expliquer par des causes mécaniques, il 
faut bien qu'ils aient lieu en vertu de cette organisation supérieure; 
dont j'ai déjà parlé, et qui se trouve fort au-dessus de notre portée. 
L'acte de la dissémination est encore favorisé dans l’Holosteum et les 
genres voisins par l’amincissement des valves, qui acquièrent un si 
grand poli et une si grande élasticité, que le plus léger mouvement 
suffit pour détacher et lancer au-dehors les graines , comme on peut 
s'en assurer, si l’on prend la peine d'observer leur départ. 

Je remarque, en finissant, que les tiges glutineuses de l Holosteum 
ne sont point dichotomes, comme celles des Curyophyllées, mais sim- 
ples et terminées réellement en ombelle; qu'elles se coudent à la base 
pour être moins gènées dans leur développement ; que les styles sont 
papillaires intérieurement et se recourbent au sommet sans se rouler 
en spirale; que les étamines sont glanduleuses à leur base, enfin que 
les semences, nombreuses et tuberculées, sont marquées inférieure- 
ment d'un sillon relevé, qui est dû à la radicule repliée sur elle- 

à 
même. 

Lorsque les fleurs de l'Holosteum umbellatum doublent, ce qui arrive 
quelquefois naturellement, leurs pédoncules conservent-ils les mêmes 
mouvements ? 


— 380— 


L'Holosteum Heuflesii, qui se sème dans nos jardins, est une 
espèce rabougrie qui a les feuilles et le port de l Umbellatum , mais ses 
ombelles ne sont guère formées que de trois ou quatre fleurs dont 
les pédoncules allongés se déjettent également à la maturation, et se 
relèvent pour la dissémination. 


SIXIÈME GENRE. — Spergula. 


Les Spergula ont un calice à cinq divisions, cinq pétales entiers, 
cinq à dix étamines, cinq styles, une capsule uniloculaire, polysperme, 
ouverte à six valves, comme celle de l'Holosteum. 

Ce genre a été divisé en deux groupes : 

1° Celui des espèces à feuilles verticillées et stipulées ; 

2° Celui des espèces à feuilles opposées et dépourvues de stipules. 

. Le premier groupe est formé de deux espèces appartenant au même 
type, l’Arvensis et le Pentandra, qui ne diffèrent que par le nombre 
de leurs étamines et la forme de leurs semences ailées ou seulement 
bordées. L’Arvensis, qui est la plus commune, a une consistance 
molle et un peu succulente; ses feuilles allongées et canaliculés, c'est- 
à-dire fortement plissées en-dessous sur leurs deux bords, sont réel- 
lement opposées par paires; mais elles portent, à leur aisselle, des 
rameaux raccourcis qui prennent la forme de verticilles, en laissant 
un vide dans la place qui correspond aux paires supérieures et infé- 
rieures. La première section est liée à la seconde, où l'on aperçoit 
également des rudiments de verticille. 

L'inflorescence des Spergula verticillés est dichotome; chaque bifur- 
cation est chargée d'un pédoncule qui se déjette et se relève, et dont 
la fleur ouverte à la lumière, se referme à l'obscurité, exactement 
comme dans l’Holosteum , avec lequel le Spergula verticillé a de 
grands rapports pour tous ses mouvements organiques. 

Les étamines du Spergula arvensis, qui sont régulièrement au nom: 
bre de dix, avortent quelquefois en partie, comme celles du Pentan 
dra, auquel l’ Arvensis ressemblerait alors si ses semences ne l'en dis- 
tinguaient suffisamment : elles ont la forme d'une boîte à savonnette 
aplatie, et partagée dans son milieu par un petit rebord ailé; je les 
ai souvent vues germant dans la capsule qui s'ouvre en cinq ou six 
valves; leur surface est d’un beau noir parsemé de points brillants, qui 
paraissent autant de glandes. 

A la dissémination, les pédoncules et les pédicelles sont redressés , 
et les capsules papyracées ont leurs cinq lobes divisés jusqu'à la base. 

Ces plantes, comme celles du second groupe, ont les étamines 


— 381 — 


alternes , glanduleuses, et les pétales échancrés à la base, pour faci- 
liter la communication de l'humeur miellée avec les stigmates, 

Les Spergula du second groupe différent des autres, non-seulement 
par leurs feuilles non stipulées, mais encore par leur organisation et 
leur port. Ce sont, en général, des plantes vivaces, qui se plaisent 
dans les marais ou les lieux humides, dont les tiges minces et fili- 
formes sont couchées sur le terrain, et dont les feuilles linéaires et 
glabres sont souvent entassées aux articulations inférieures et à la 
base des jeunes rameaux. Leurs pédoncules, toujours allongés et soli- 
taires dans les dichotomies, paraissent quelquefois terminaux par 
avortement. Leurs fleurs, d’une coupe élégante et d'un beau blanc, 
n’ont point les mouvements de celles de la première section, et leurs 
semences sont lisses, à peine tuberculées et bordées. On en compte 
principalement quatre : le Vodosa des marais tourbeux, le Saginoides 
des rochers humides des Alpes, le Subulata des sables humides, et le 

. Glabra des prairies humides et élevées des Alpes, dont les fleurs sont 
météoriques comme celles des autres espèces du genre. 

La fécondation de ces plantes est toujours directe : leurs stigmates, 
légèrement renflés près du sommet et toujours contournés, ont leurs 
papilles latérales étalées au moment où les anthères répandent leur 
pollen, et où leurs belles glandes répandent l'humeur miellée : toute- 
fois j'ai observé que, dans le Vodosa, la fécondation était intérieure, et 
que les stigmates s'étalaient dans le tube autour des anthères. A la 
dissémination les cinq valves amincies s’écartent assez pour que les 
semences sortent au moindre vent, au moins dans le Saginoides , qui 
se reproduit de rejets, et qui est quelquefois dioïque par avorte- 
ment. 

Les Spergula du premier groupe sont recherchés par les bestiaux, 
et lArvensis est souvent cultivé dans les sables humides, tandis que 
les espèces du second groupe sont absolument sans usages; mais ces 
dernières, aussi remarquables par l'élégance de leur tige que par le 
beau vert de leurs feuilles, décorent, dans les mois d'été, les bords 
des marais de leurs fleurs d'un blanc pur : au contraire, les Spergula 
du premier groupe, dont la corolle est presque toujours fermée, et 
dont les rameaux et les panicules sont constamment divariqués , n’of- 
frent, comme les Holosteum, ni grâce ni symétrie. 


SEPTIÈME GENRE. — lLarbrea. 


Le Larbrea a le calice quinquéfide et urcéolé à la base, cinq pétales 
bifides, dix étamines périgynes comme les pétales, un ovaire unilocu- 


— 382 — 
laire, polysperme et surmonté de cinq styles; une capsule ouverte au 
sommet en six valves. . 

Ce genre n'est composé que d'une seule espèce, l'Aquatica, qui 
croit dans les lieux froids , humides et un peu montueux ; ses racines 
sont annuelles , ses tiges nombreuses, diffuses et quadrangulaires ; ont 
leurs bifurcations chargées de bractées blanchâtres, du milieu des- 
quelles naissent des pédoncules solitaires; les fleurs ont leurs calices 
blanchâtres sur les bords, leurs pétales bifides et leurs capsules ovales, 
ouvertes à six valves. 

Mais ce que le Larbrea présente de remarquable, et qui a été d’abord 
observé par Auguste Sainr-Hrcatre (Mémoires du Musée, tome x, 
page 26), c'est l’organisation de sa fleur, dont le calice est urcéolé à la 
base, et dont les étamines et les pétales sont périgynes et non hypo- 
gynes, comme dans toutes les espèces de la même famille, le Cherleria 
excepté. 

Ces étamines et ces pétales périgynes sont une conséquence du 
calice urcéolé et quinquéfide, ainsi que de la capsule qui, amincie à la 
base, s'enfonce plus profondément dans le disque périgyne qui appar- 
tient à toutes les Æ{/sinées ; c'est pourquoi Kocx ne sépare pas les 
Larbrea des Stellaria , mais il se contente d'en faire une section dans 
laquelle entre le Stellaria aquatica et même l'Uliginosa des prairies 
marécageuses de l'Allemagne, qui n’en est, je crois, qu'une variété, et 
il ajoute même que l’ordre éntier des 4/sinees a ses fleurs périgynes, 


HUITIÈME GENRE. — Slellaria. 


Le Stellaria a un ealice de cinq divisions, cinq pétales bifides , dix 
étamines dont plusieurs avortent souvent, trois styles, une capsule 
uniloculaire, polysperme, ouverte au sommet en six valves. 

Ce genre compte dans le Prodrome cinquante-six espèces , les unes 
européennes, les autres étrangères et dispersées principalement dans 
la Sibérie, les deux Amériques et sur les Cordilières. Les indigènes, 
au nombre de dix ou douze, peuvent êire réunies en quatre groupes. 

Le premier, ou celui des Stellaires à feuilles élargies, compte trois 
espèces, le Stellaria nemorum, plante à racine traçante et écailleuse, 
qui vit dans nos bois montueux ; le Pentagyna de Gawnin ou le 
Cerastium aquaticum de LiNNÉ, qui a bien cinq styles, mais qui a tant 
de ressemblance avec le Stellaria, qu’on ne peut guère l'en séparer; 
et le Montica qui a de même cinq styles et que Kocx a réuni à 
l'Aquatica de Lan, pour en former le genre Malachium, distingué 
des Stellaires, non-seulement par ses cinq styles maïs encore par sa 


— 383 — 
capsule à cinq valves bifides , et non pas à dix, comme dans les Ceras- 
tium, où elle est de plus prolongée ou recourbée, lorsqu'elle n’a pas 
ses dents tordues. Ce groupe, qui se retrouve au haut des Andes, où 
il est représenté, en particulier, par le Cuspidata, qui n'est peut-être 
qu'une variété du ÂVemorum , est distingué par ses grands pétales 
profondément bifides et dépourvus de tout mouvement. 

Le second type, peu différent du premier, est celui du Stellaria ou 
de l'Æ{sina media de LinNÉ, qui fleurit presque toute l’année autour 
de nos habitations, et qui se fait remarquer par ses petites feuilles 
ovales et succulentes d’un beau vert, et par ses tiges chargées de deux 
rangs opposés de poils blanchâtres. Cette plante annuelle, dont les 
étamines avortent presque toujours partiellement avec les glandes qui 
les portent, et dont les pédoncules ont les mêmes mouvements que 
ceux de l'Holosteum, est unique dans son type, au moins en Europe. 

Le troisième type est celui des espèces à tige amincie , à feuilles 
étroites, dures et un peu cartilagineuses dans les bords, comme 
l’Holostea de nos buissons, le Graminea de nos prairies et des bords 
de nos bois et le Glauca moins répandu que les deux autres. Ces 
plantes, auxquelles on peut réunir encore diverses espèces étrangères, 
sont les unes annuelles, les autres vivaces et semblables à celles du 
premier type; toutes sont dépourvues de mouvements dans leurs 
pétales. 

Enfin, notre quatrième et dernier type est celuë du Sfellaria ceras- 
toides , qui se reproduit par des rejets souterrains, et qui forme sur 
les Alpes des gazons serrés et très-glabres. Ses styles varient de trois 
à cinq, et ses pétales , à peu près doubles du calice, sont légèrement 
bifides, comme ceux du Cerastium. Le Cerastoides est unique dans 
son type comme le Media ; car le Radicans de La Prvrouse, qu’on 
pourrait y joindre, n’en est qu'une variété, au moins selon BENTHAM. 

Les Stellaires forment un genre jusqu’à présent mal défini, et dont 
les espèces présentent un grand nombre d'anomalies, soit dans le 
nombre des étamines et des styles, soit dans la forme et les divisions 
de la capsule. Pour le circonscrire avec plus de précision, il convien- 
drait , selon DE Canxnorze, d'y comprendre toutes les espèces dont 
la capsule se fend jusqu'à la base en un nombre de valves égal à celui 
des styles ou même quelquefois double de ce nombre, et de placer 
parmi les Cerastium celles dont la capsule cylindrique et plus ou moins 
allongée en bec s'ouvre au sommet en un nombre de petites dents 
double de celui des styles. On ferait cesser ainsi l'incertitude où l'on 
se trouve pour classer les espèces qui ont indifféremment trois ou 
cinq styles, et l'on aurait encore l'avantage de restreindre au seul 


ads 
genre des Cerastiurn , le caractère physiologique de l'allongement de 
la capsule après la fécondation. 

Ces plantes sont principalement répandues dans les zones tempérées 
de l’ancien et du nouveau continent, où elles recherchent de préfé- 
rence les localités fraîches et ombragées, les pieds des montagnes, 
les bords des rivières et des bois. Quelques-unes s'élèvent sur les 
pentes et même sur les plus hautes sommités ; d'autres, au contraire, 
vivent autour de nos maisons ou de nos cultures. 

Les Stellaires ont à peu près toutes un feuillage d'un beau vert et 
un port plein de grâce et d'élégance. Elles ne se trouvent pas dans nos 
jardins, parce qu’elles manquent d'odeur, et que leurs fleurs, toujours 
simples, ne sont ni assez grandes ni assez durables ; mais elles parent, 
pendant une grande partie de l'année, nos bois et nos prairies. Y a-tl 
rien de plus gracieux, par exemple, que ce Selluria nemorum étalant 
ses touffes si blanches et si légères sous les ombrages de nos monta- 
gnes, ou que cet Holostea couronnant nos buissons, autour desquels 
il entrelace de mille manières ses nombreux rameaux. Les autres 
espèces ne sont pas, à la vérité, aussi brillantes; mais toutes nous pré- 
sentent cette végétation fraîche et verdoyante, qui appartient à l'Eu- 
rope, et se trouve si rarement entre les tropiques. Tel est le Graminea 
de nos prairies , si voisin de l’Aolostea et beaucoup plus commun, tel 
est,en particulier, cetavant-coureur du printemps, ce modeste S{ellaria, 
qui semble se plaire à étaler sous nos yeux ses fleurs si délicates et si 
sensibles à la lumière; telles sont enfin plus ou moins toutes les espèces 
de ce genre répandu si abondamment par la nature. 

Les Stellaires sont des herbes annuelles ou vivaces, très-ramifiées 
et long-temps fleuries. Leurs racines sont rarement traçantes, comme 
celles du Bulbosa des Alpes de la Carinthie, ou celles du Vemorum, 
dont les premières feuilles se transforment en écailles blanches et 
épaisses, qui portent, à leur aisselle, tantôt des rameaux avortés, 
tantôt de vrais rameaux. Leurs tiges, quelquefois irrégulièrement 
quadrangulaires et à demi-grimpantes, comme dans l'Holosteu, sont 
dichotomes et chargées à chaque embranchement de pédoncules soli- 
taires. Leurs fleurs, ordinairement dépourvues de mouvement, s’ou- 
vrent et se ferment dans le Media, et peut-être aussi dans quelques 
autres espèces; mais ne se roulent jamais, comme celles des Silene. 

A l’époque de la fécondation, qui ne dure qu'un jour et commence 
dès le matin , le Media ouvre ses fleurs et répand le pollen blanchâtre 
des anthères violettes sur les trois stigmates étalés et fortement papil- 
laires ; l'Aquatica, au contraire, fleurit pendant deux jours et ne 
ferme jamais ses fleurs : ses anthères latérales ne répandent leur pollen 


— 389 — 
qu'après avoir tourné leur ouverture sur les stigmates; dans le Gra- 
minea , la fécondation est indirecte, car le pollen se répand avant que 
les stigmates soient bien conformés , ce qui prouve que le Stellaria 
est un genre à différents types. 

La fécondation s'opère en plein air, et les grandes étamines répan- 
dent leur pollen au moment même où leurs glandes nectarifères don- 
nent si abondamment leur humeur miellée ; ensuite les étamines 
secondaires s'ouvrent, et les styles se déploient. Quand une grande 
étamine avorte, sa glande manque aussi, comme on peut le voir dans 
le Media. 

Les feuilles des Sfellaria sont appliquées par paires légèrement 
recourbées, et plus ou moins réunies à leur base. En les examinant 
après leur développement, on trouve que leurs bords sont membra- 
neux, quelquefois un peu dentés, et que leur extrémité porte une 
glande plus ou moins marquée. 

Le Stellaria media, indiqué par les auteurs comme annuel , est au 
moins bisannuel, car j'ai vu à l'entrée du printemps ses tiges, étalées 
en gazons fort étendus , pousser des fleurs dès qu'elles étaient débar- 
rassées de la neige qui les recouvrait; le Graminea et l'Holostea, qui 
sont vivaces, donnent après la floraison de longs rejets stériles. 

La dissémination doit s’opérer un peu différemment, selon les espè- 
ces : dans le Media, comme nous l'avons dit , les pédoncules dejetés 
se redressent; au contraire, dans le Graminea, ses pédoncules 
redressés se déjettent fortement par le moyen d’une articulation ren- 
flée qu'ils portent à leur base, et en même temps ouvrent en six valves 
leur capsule renfermée encore dans le calice; enfin, dans le Nemo- 
rum, Va capsule papyracée à six valves reste redressée et encore 
entourée de son calice desséché. 


NEUVIÈME GENRE. — ÆArenaria. 


L’Arenaria a un calice de cinq pièces, cinq pétales entiers, dix 
étamines , dont quelques-unes avortent quelquefois ; trois styles, une 
capsule uniloculaire, polysperme, formée de trois à six valves. 

Ce vaste genre se divise en deux sections : 

1° Celle des Spergularia à feuilles entourées, à la base, de stipules 
scarieuses , et capsules constamment trivalves ; 

2° Celle des Arenarium à feuilles dépourvues de stipules et cap- 
sules de trois à six valves. 

Les Spergularia comptent douze espèces ou variétés irrégulièrement 
dispersées en Égypte et en Amérique ; ce sont de petites plantes pres- 

ie 25 


— 386 — 

que toutes annuelles et remarquables par leurs feuilles linéaires et les 
stipules scarieuses qui entourent les nœuds de leur tige. Les espèces 
européennes se réunissent sous deux types : 1° celui du Segetalis, 
qui vit dans les moissons de la France et de l'Espagne , et se recon-: 
nait à ses petites fleurs blanches ainsi qu'à ses feuilles subulées et ordi- 
nairement unilatérales ; 2° celui du Rubra, qui ne comprend guère 
non plus qu’une seule espèce modifiée selon les localités ;'et distinguée 
par ses tiges couchées et glutineuses, comme par ses panicules en 
grappes’axillaires ou terminales, chargées de petites fleurs rouges. 

Ces plantes, et sans doute aussi celles qui appartiennent à la même 
section, ont des mouvements organiques très-marqués : non-seule- 
ment leurs pédoncules serenversent après la floraison, mais leurs fleurs 
s'ouvrent et se ferment avec beaucoup de régularité. Je trouve, dans 
Linxé, que le Segetalis épanouit sa corolle depuis trois heures jusqu’à 
neuf heures; et le Rubra, depuis neuf heures jusqu’au milieu du 
Jour. | 

La fécondation de l’Arenaria rubra est immédiate et ne dure qu'un 
jour; les dix étamines, dont les bases ne m'ont pas paru glanduleuses, 
étalent leurs anthères introrses sur les trois lobes divariqués et papil- 
laires des stigmates. 

Cette première section diffère essentiellement de la suivante par sa 
forme d'organisation, et surtout par ses tiges, dont les articulations 
sont garnies de bractées destinées à envelopper primitivement les deux 
feuilles principales, de même que les secondaires qui naissent souvent 
fasciculées à leurs aisselles. 

Les Arenarium, qui forment tout le reste du genre, c'est-à-dire 
environ cent vingt espèces, se rangent sous trois groupes : 

1° Celui des espèces à feuilles de graminées ; 

2° Celui des espèces à feuilles subulées ou linéaires ; 

3° Celui des espèces à feuilles lancéolées, ovales ou arrondies. 

Le premier groupe est étranger à l'Europe, et appartient presque 
entièrement à la Sibérie ou aux contrées qui avoisinent le Caucase. 
Les vingt-neuf espèces qui le composent sont presque toutes vivaces, 
et ont des feuilles amincies et allangées. La plus répandue est le Gra- 
minifolia, du Caucase, à fleurs blanches, dont les stigmates sont 
papillaires et allongés, et dont les anthères m'ont toujours paru avor- 
tées; ce qui indique qu'elle est réellement dioïque. Le ZLongifolia , 
qui n’en est probablement qu'une variété, a aussi ses tiges et ses 
feuilles très-allongées; la fleur femelle a ses trois stigmates saillants, 
même avant le développement de la corolle, et ses étamines à anthères 
avortées ont cependant conservé leurs cinq beaux nectaires. 


NE — 

Le second groupe compte plus de cinquante espèces, la plupart 
européennes, et que je réunis sous deux ou trois types : le premier 
et le plus marqué est celui des espèces sous-frutescentes, dont les 
racines forment des rhizomes, et dont les tiges sont sans cesse rempla- 
cées par de nouveaux rejets qui portent des fleurs l'année suivante. 
Ces plantes, qui couronnent les sommités de nos montagnes, sont 
principalement l'Arenaria grandiflora , le Laricifolia, V'Austriaca, le 
V’erna , le Recurva, etc., à feuilles gazonnantes , subulées et sépales 
striés ; elles ne diffèrent presque les unes des autres que par la pubes- 
cence de leurs tiges, la grandeur de leurs corolles lisses ou rayées et 
la forme plus ou moins cylindrique de leurs capsules. Elles ont toutes 
des glandes jaunâtres et ouvertes, et des styles allongés, qui ne s’éta- 
lent que tard; et elles se distinguent de leurs congénères par leurs 
fleurs légèrement météoriques, et leurs pédoncules dépourvus de 
mouvements; leurs capsules, ordinairement trivalves et cylindriques, 
sont allongées en tube, et à peine quinquéfides dans le Grandiflora. 

Je place, dans mon second type, le Polygonoides, plante vivace à 
racine sarmenteuse, qui habite les pâturages caillouteux des Hautes- 
Alpes, et que Kocu range parmi les Mæhringia, quoique son calice 
ait cinq divisions, que ses étamines soient au nombre de dix et que sa 
capsule soit constamment trivalve. Les fleurs blanches et médiocres 
sont dépourvues de mouvements comme celies de notre premier 
groupe. 

Mon troisième type, beaucoup plus marqué que le précédent, est 
formé d'espèces annuelles ou vivaces, à tiges minces, fasciculées et 
dichotomes, à feuilles sétacées , à calices étroits et striés, à fleurs très- 
peu apparentes ; il comprend principalement quatre espèces : le Tenui- 
folia, des bords de nos murs; le Fasciculata, des contrées mon- 
tueuses , qui fleurit en automne et répand ses graines en hiver; le 
Mucronata , qui habite les mêmes lieux et n’en diffère guère que par 
ses tiges vivaces et ses feuilles plus roides; enfin, le Setacea, des col- 
lines voisines de Paris. Ces plantes, dont les pédoncules sont toujours 
droits, ouvrent leurs fleurs pendant la matinée, et les referment 
promptement, comme l’Arenaria Segetalis, à laquelle elles ressemblent 
d’ailleurs assez par le port. 

Les Arenarium du troisième groupe, ou ceux à feuilles élargies, 
forment à peu près soixante espèces , les unes européennes, les autres 
étrangères et dispersées dans le Groenland, le Kamchatka, et sur 
les montagnes de l'Amérique méridionale : les indigènes, qui sont les 
plus nombreuses, peuvent se réunir sous trois types assez distincts, 
quoique fort inégaux. 


— 3883 — 

Le premier ne comprend qu'une seule espèce : le Tetraquetra, des 
montagnes stériles du midi de la France, qu'on distingue de toutes les 
Arenaires par ses feuilles ovales, carénées, imbriquées sur quatre 
rangs, et ses fleurs disposées en tête ou en petits faisceaux au sommet 
des tiges. Gay observe que cette plante est polygame, et que sa fleur 
est formée de quatre sépales, quatre pétales et huit étamines légère- 
ment périgynes ; elle ne s'élève guère qu’à demi-pouce, tandis que sa 
variété, qui était autrefois le Gypsophila aggregata de Linvé, est 
à peu près quatre fois plus grande. 

Mon second type, formé d'espèces à feuilles arrondies et couchées 
sur le terrain , est représenté par le Biflora, dont les styles varient de 
trois à cinq, et dont les tiges filiformes et comme sarmenteuses jettent 
cà et là des rameaux courts, chargés, à leurs aisselles supérieures, 
d une, deux, ou trois fleurs. Il s'étend en tapis sur les sommités de 
nos A et il est voisin du Balearica, qui croît aux Baléares et dans 
l'île de Corse, mais dont les rameaux ne porient qu’une seule fleur. 
Les botanistes remarquent que le Balearica incline son pédoncule et 
penche sa capsule après la floraison ; je n'ai pas observé s'il en est de 
même du Biflora. 

Les espèces de ce second type, auxquelles je joins le Ciliata, le 
Cerastiifolia et le Repens à fleurs dépourvues d’étamines glanduleuses 
et déjetées après la fécondation, ont une végétation qui leur est pro- 
pre; leurs tiges, après avoir donné des feuilles qui tombent aux appro- 
ches de l'hiver, poussent, de leurs aisselles inférieures, des rameaux 
qui se fixent en terre par des radicules, et forment ainsi des gazons 
très-étendus et toujours renouvelés. 

La plus élégante des espèces de ce type après le Biflora, c'est le 
Balearica, qui couvre de ses tapis verts et de ses rejets les rochers 
des îles de la Méditerranée sur lesquels elle aime à s'étendre ; ses 
feuilles sont plus petites, plus délicates et plus ailées que celles du 
Serpyllifolia, et ses fleurs, d’un blanc de neige, ont les glandes stamini- 
fères , mais ne se referment pas. 

Mon troisième type est celui de l’Arenaria serpyllifolia , plante 
annuelle à feuilles ovales, qui croît sur les murs et les champs sablon- 
neux de toute l'Europe. On place auprès le Trinervia, aussi annuel, 
mais plus frais et plus délicat, et qu’on distingue à ses feuilles glan- 
duleuses, marquées de trois à cinq nervures; le Spathulata des sables 
de la Barbarie, et quelques autres espèces moins connues : ces diffé- 
rentes plantes, dont Kocx compose presque entièrement son genre 
Arenaria, ouvrent et ferment leurs fleurs selon l'heure et la tempéra- 
ture du jour. 


— 389 — 


Les tiges de ces plantes ne présentent pas des divisions bien régu- 
lières, en sorte qu’on a quelquefois de la peine à y reconnaître les 
dichotomies qui caractérisent leur famille ; les rameaux avortent si 
fréquemment, et les tiges restent si courtes, qu'elles sont souvent 
chargées d’un petit nombre de fleurs latérales, terminales, solitaires, 
fasciculées, etc., selon les espèces. Je ne voudrais pas nier que quel- 
ques-unes n’eussent réellement les fleurs axillaires, comme le Biflora, 
par exemple, etc.; mais je crois qu'il ne serait pas difficile de retrouver, 
dans la plupart, la forme primitive dichotome qu'on apercoit très- 
bien dans quelques espèces dont les pédoncules paraissent d’abord 
axillaires, comme ceux du Trinervia. 

Les Arénaires diffèrent beaucoup dans leurs mouvements organi- 
ques : les unes, comme la plupart des espèces vivaces qui croissent sur 
les rochers, ont les pédoncules et les fleurs à peu près immobiles ; les 
autres, en plus grand nombre, comme les deux types des Spergularia, 
les Arenarium annuels, à feuilies subulées, tels que le Fasciculata et 
le Mucronata, de même que ceux à feuilles ovales, sont éminemment 
météoriques. Leurs fleurs se referment quelquefois avec tant de régu- 
larité qu’on ne peut pas distinguer une fleur non épanouie d’une autre 
qui a déjà été ouverte. Ce mouvement dépend, il est vrai, principale- 
ment du calice, que les pétales ne pourraient pas ouvrir s'il opposait 
trop de résistance ; mais il réside sans doute dans les deux organes qui 
l’exécutent, avec un grand accord; et il ne dépend pas uniquement de 
l'action directe de la lumière, puisqu'il a lieu, par exemple, dans 
l’'Arenaria tenuifolia et le Serpyllifolia, mis à couvert dans un jour 
pluvieux. Du reste, si l'on place ces plantes et d’autres semblables dans 
une obscurité profonde, comme l'a fait De CaNporre, on remarque 
que leur mouvement s'affaiblit graduellement et finit enfin par se dé- 
truire; ce qui prouve quil tient à l’état de santé, et à une espèce d’ha- 
bitude qui ne peut pas être tout-à-coup changée. 

Les principales aberrations que présente la fleur des Arénaires, se 
rapportent aux étamines, dont les cinq secondaires avortent souvent 
en tout ou en partie; aux styles, dont le nombre s'accroît quelquefois 
d'une ou deux unités ; à la capsule, dont les valves ou les dents ne 
sont pas toujours constantes; et enfin, aux pétales qui avortent, ou 
qui, dans le Tetraquetra, se réduisent d’un cinquième, comme les 
calices et les étamines. 

Les capsules varient aussi selon les espèces ; lorsqu'elles sont cylin- 
driques et coniques au sommet, leurs filets conducteurs s’apercoivent 
facilement ; lorsqu'au contraire elles prennent peu d'accroissement et 
restent sphériques ou aplaties, le placenta en remplit toute la capacité, 
et les filets conducteurs sont peu visibles. 


—‘390 — 


Les pétales des Arenaires sont blancs et rarement rouges, comme 
dans l’Arenaria rubra de notre première section ; souvent ils sont lisses 
et d'un blanc de lait; quelquefois ils sont rayés longitudinalement et 
d'un blanc cendré; tantôt ils sont échancrés à la base pour mettre à 
découvert les glandes nectarifères ; tantôt, au contraire, ils sont étroits 
et linéaires, ce qui forme deux organisations très-différentes. 

La fécondation qui s'opère ordinairement dans un seul jour a lieu 
au moment où la fleur s’épanouit; les cinq étamines principales 
s'avancent les premières vers les stigmates et sont bientôt remplacées 
par les cinq autres ; le pollen des anthères introrses tombe en partie 
surles glandes nectarifères, et se répand ensuite en émanations sur les 
stigmates qui se développent souvent assez tard. 

J'ai remarqué que dans plusieurs espèces les stigmates se prolon- 
geaient jusqu'à la base de la capsule, dans l'intérieur de laquelle les 
styles se réunissaient en un seul corps, et que dans le Rubra et le Ser- 
prlifolia, les capsules qui s'ouvrent par la sécheresse et se ferment par 
l'humidité se détachaient de la plante encore en pleine végétation. 

Enfin j'observe que la division des Arenaria en deux sections, dont 
la première ou celle des Spergularia a les feuilles entourées à la base 
de stipules scarieuses, n'est pas entièrement exacte puisque le Liniflora, 
du Jura, si voisin du Laricifolia , a les feuilles entourées de petites 
stipules membraneuses , quoiqu'il soit rangé dans la seconde section, 
c'est-à-dire parmi les Ærenarium. J'ai cru voir aussi que dansle Marina, 
qu'on regarde comme une variété du Rubra, les étamines n'étaient 
pas plus glanduleuses que dans l'espèce principale, mais que les 
semences étaient bordées. 

Les Arénaires ne se plaisent pas dans les mêmes localités : les unes, 
en grand nombre, habitent les rochers des montagnes élevées de 
l'ancien et du nouveau continent, où elles fleurissent depuis la fin du 
printemps jusqu’au commencement de l'automne ; les autres, en plus 
petit nombre, bordent les rochers et les îles de la Méditerranée. Les 
Spergulastrum vivent dans nos moissons, et le Serpyllifolia , ainsi que 
le, Trinervia, autour de nos cultures ou de nos bois. Ces diverses 
plantes ne manquent pas de grâce, quand on les considère séparé- 
ment ; mais comme elles forment rarement des touffes et qu'elles ne 
fleurissent qu’à certaines heures du jour, elles ne produisent pas 
d’effet agréable, excepté sur les rochers nus qu’elles revêtent de leurs 
tapis verts et long-temps fleuris. L'espèce qui m'a le plus frappé, c'est 
le Biflora,, qui étend, sur les pelouses alpines, ses longs rejets ornés 
de feuilles élégamment distribuées, et d'où partent des rameaux char- 
gés régulièrement de deux jolies fleurs blanches. On dirait une cou- 


— 391 — 
ronne virginale, brillante de légèreté et de fraicheur. Le Balearica ,. 
qui appartient au même type, se sème ordinairement sur les vieux 
murs qu'il tapisse de ses feuilles gazonnantes ; mais il est loin de pro- 
duire le même effet, dans nos jardins , que le Biflora sur nos mon- 
tagnes. 


DIXIÈME GENRE. — Ædenarium. 


L'Adenarium a un calice de cinq divisions, cinq pétales entiers , 
adhérents au fond du calice, dix étamines insérées avec les pétales, 
trois à cinq styles, dix glandes entourant l'ovaire, une capsule unilo- 
culaire de trois à cinq valves , et un petit nombre de semences. 

Ce genre ne renferme qu'une seule espèce : le Peploides , plante 
vivace à feuilles charnues, à fleurs blanches et solitaires, qu'on trouve 
en Europe sur les rivages de l'Océan. 

L'Adenurium a été séparé des Arenaria à cause de la conformation 
singulière de sa fleur dont le calice est monosépale, et dont les pétales 
et les étamines sont périgynes, comme dans le Larbrea. On y remar- 
que de plus un nectaire très-différent de ceux des Arenuria et des 
autres plantes de la même famille. Toutefois Dr Cannorre le range 
parmi les Arenarium, parce que son nectaire, quoique plus mar- 
qué, n’est pas conformé différemment que dans les autres espèces, 


ONZIÈME GENRE. — (Cerastium. 


Le Cerastium.a un calice de cinq divisions, cinq pétales bifides, dix 
étamines et cinq styles ; sa capsule uniloculaire, cylindrique ou globu- 
leuse , s'ouvre au sommet en dix dents redressées ou roulées sur leurs 
bords. 

Les Cerastium se divisent. en deux sections : 

1° Les Strephodon à capsule cylindrique et dents roulées sur elles- 
mêmes ; 

2° Les Orthodon à capsule plus ou moins recourbée au sommet et 
dents droites ou roulées sur leurs bords. 

Les Strephodon sont annuels ou. vivaces et à peu près inconnus à 
l'Europe : leur patrie est à peu près exclusivement la Sibérie et le 
Caucase; la seule espèce qu’on peut regarder comme indigène, parce 
qu’elle habite la Grèce en même temps que les sables de la Sibérie et 
de la Barbarie, c'est le Perfoliatum à feuilles connées, élargies et 
glaucescentes, à fleurs disposées en ombelle au sommet des tiges , à 


— 392 — 
pétales plus courts que le calice et capsule allongée en bec redressé 
divisé au sommet en dix dents profondes. 

Les Orthodon, beaucoup plus nombreux que les Strephodon, sont 
répandus dans l’ancien et le nouveau monde, mais la Sibérie et sur- 
tout l'Europe sont leur véritable patrie. 

Les Cerastium européens se divisent en deux groupes : 

1° Celui dont les pétales sont à peu près égaux au calice; 

2° Celui dont les pétales sont plus grands que le calice. 

Les Cerastium du premier groupe sont presque tous annuels, à 
feuilles et tiges velues et souvent visqueuses ; ils fleurissent au premier 
printemps, le long de nos murs et autour de nos cultures, et sont 
tellement rapprochés les uns des autres qu'il est très-difficile de les 
séparer en espèces distinctes : les plus constantes et les plus détermi- 
nées sont le V’ulgatum , que Link et De CaAnnozLE regardent comme 
annuel, mais qui repousse chaque année des aisselles inférieures de 
ses tiges d'abord desséchées et plus tard rhizomatiques; le Viscosum, 
qui en diffère surtout par ses tiges visqueuses, plus ramifiées et plus 
velues ; le Brachypetalum, dont les calices, barbus sur les bords, sont 
plus longs que la corolle ; le Semidecandrum , qui n’a ordinairement 
que cinq étamines et qui se distingue encore par ses calices scarieux et 
ses pétales raccourcis; enfin, l'Androsaceum , de la Corse, et le Mu- 
rale, des environs du Mans, qui n’est peut-être qu'une variété du 
Vulgatum , lequel m'a souvent présenté deux sortes de fleurs les unes 
à étamines avortées , stigmates allongés recouverts à peu près de tous 
les côtés de poils papillaires , les autres à étamines bien conformées 
et stigmates petits avortés en tout ou en partie : du reste plusieurs 
auteurs considèrent le Vulgatum, le V’iscosum, le Semidecandrum, etc., 
comme une seule et même espèce. 

Le second groupe est formé de plantes qui sont aussi tellement 
voisines qu'on n’y peut guère distinguer les simples variétés des vraies 
espèces. Les plus communes et les plus généralement recues sont 
l’Arvense, à tiges couchées, ou l’Arvense proprement dit; le Strictum, 
à tiges redressées; l’Æ/pinum, plus ou moins laineux, à pédoncules 
ordinairement ternés et garnis de bractées; le Latifolium, du som- 
met de nos Alpes, qui varie beauconp, mais qui se distingue toujours 
à ses feuilles rudes et elliptiques, ainsi qu’à ses capsules enflées, et ses 
pédoncules dépourvus de bractées; le Tomentosum , cultivé dans nos 
jardins, et remarquable par la blancheur de son duvet cotonneux qu'il 
perd cependant quelquefois; enfin, l'Hérsutum, du Samnium, fort 
semblable au Tomentosum, mais dont les pétales sont au moins dou- 
bles du calice, et dont toutes les étamines n’ont paru dépourvues de 
glandes nectarifères. 


— 393 — 


Les Cerastium européens se reconnaissent à leur consistance her- 
bacée, à leurs feuilles élargies, épaisses et ordinairement velues, 
ainsi qu’ à leurs pétales bifides et toujours blancs. Ceux du premier 
type vivent sur les bords de nos haies, dans nos champs et le long de 
nos murs; les autres recherchent les lieux montueux et les expositions 
des nai 

Les espèces de notre premier groupe oùvrent et ferment leurs fleurs 
selon les heures du jour et les influences de la température. Leurs éta- 
mines s’'approchent et s'éloignent successivement pendant toute la 
durée de la fécondation; ensuite leurs calices se referment, leurs 
pédoncules s’inclinent, et leur capsule ne se redresse que lorsqu'elle 
est sur le point de répandre ses graines. 

Il n’en est pas de même de celles du second groupe, qui ne me 
paraissent pas susceptibles de mouvements : leurs tiges, plus réguliè- 
rement dichotomes, restent toujours droites, ainsi que leurs capsules, 
et leurs pétales ne se referment pas; cependant leurs étamines s’éloi- 
gnent et s'approchent comme celles du premier groupe. 

Les nectaires des Cerastium sont très-marqués à la base des grandes 
étamines, où ils distillent une humeur assez abondante, principale- 
ment au commencement de la floraison. Je ne connais pas bien les 
phénomènes de la fécondation, mais je SRE qu'ils sont les mêmes 
que dans les genres voisins. 

L'estivation des pétales est en recouvrement, comme celle des 
calices : les feuilles, dans la vernation, sont opposées deux à deux, 
un peu recourbées sur les bords, les unes en avant, les autres en 
arrière, et toujours chargées au sommet d’une glande très-marquée. 
Le placenta est couvert de plusieurs rangs doubles de semences dont 
l'embryon est demi-circulaire. On voit distinctement dans les jeunes 
capsules, les filets conducteurs qui communiquent à chaque rang de 
graines, et qui disparaissent bientôt avec les styles. 

Mais le phénomène le plus remarquable de ce genre, c'est celui 
que présente sa capsule, qui, d’abord ovoïde, s'allonge insensible- 
ment, et finit par se terminer en un tube plus où moins recourbé 
en trompe, et divisé ordinairement en un nombre de dents double 
de celui des styles. Cette singulière configuration sert d’abord à pro- 
téger les graines, et favorise ensuite la dissémination, au lieu de la 
contrarier. Les parois du tube recourbé sont, en effet, si minces et 
si élastiques, qu'à la moindre agitation de l'air et quelquefois même 
par le temps le plus calme, on voit les graines s'échapper en glissant 
rapidement le long du tube, dont la structure augmente leur mou- 
vement. Je les ai souvent voulu suivre à la loupe, et elles m'ont tou- 


— 394 — 
jours échappé par leur extrême rapidité. On aurait dit qu'elles étaient 
lancées par une force inconnue. 

La plus remarquable des espèces, est à cet égard le Dichotomum de 
l'Espagne, voisin du Vulgatum, dont les capsules cartilagineuses se 
terminent en pointe droite et aiguë, et dont la fécondation a lieu avant 
l'épanouissement ; si l'on ouvre de très-bonne heure un bouton, on 
trouve au fond de la fleur une capsule très-raccourcie, entourée de 
cinq petites étamines à anthères peu apparentes, mais dont le pollen 
tombe immédiatement sur les cinq stigmates déjà développés. La fé- 
condation accomplie, la capsule allonge son col cartilagineux et re- 
dressé d’où sortent enfin les graines. 

Les Cerastium du premier groupe sont des plantes sans port et sans 
élégance; mais les autres forment souvent sur nos rochers de beaux 
tapis de fleurs très-nombreuses et presque aussi blanches que la neige. 
C’est pour cela qu’on les a transportés dans nos jardins, où leur princi- 
pale espèce, le Tomentosum, connu sous le nom d'Oreille de souris , 
forme des touffes très-brillantes. 


DOUZIÈME GENRE. — Cherleria. 


Le Cherleria a un calice de cinq pièces, cinq pétales très-petits et 
échancrés, ou plutôt dix glandes cylindriques remplaçant les pétales 
et entourant le germe, dix étamines à anthères latérales, trois styles, 
une capsule à trois valves et trois loges qui s'ouvrent par la base 
et renferment chacune deux semences anguleuses. 

Ce genre contient principalement le Cherleria sedoides , qui tapisse 
les rochers des plus hautes Alpes, où il forme des gazons extrêmement 
serrés, sur lesquels il étend , dès le mois de juiliet, ses petites fleurs 
jaunâtres. Son port et ses habitudes le rapprochent beaucoup du 
Silene acaulis , sa racine ligneuse s'insinue de même dans les fentes 
des rochers, et pousse de son collet une multitude de petits rameaux 
fortement serrés les uns contre les autres et recouverts de feuilles 
opposées et engaînées ; les aisselles supérieures donnent chaque année 
une fleur latérale, qui, lorsqu'elle a répandu ses graines, périt avec 
son pédoncule, tandis que la tige elle-même. se prolonge au sommet, 
pour donner l’année suivante une nouvelle fleur. Cette forme de végé- 
tation appartient à plusieurs plantes alpines, dont le bas des tiges se 
transforme.insensiblement en rhizomes long-temps chargés de feuilles 
desséchées. 

Les pétales qui manquent souvent et sont toujours très-petits, s'in- 
sèrent devant les étamines intérieures comme dans les autres A/sinees, 


— 395 — 
et les grandes étamines, ou celles opposées aux sépales , sortent d'une 
glande échancrée. 

Gax a vérifié que le Cherleria des Pyrénées a les pétales et les éta- 
mines insérés sur le calice, qui forme à sa base un petit godet ; ses 
fleurs sont polygames; les femelles portent des filets avortés trois fois 
aussi courts que le calice, tandis que les mâles ont des anthères parfai- 
tement conformées; la capsule est uniloculaire, trivalve; l'axe est 
central, libre et chargé de cinq à six semences, les pétales sont tantôt 
entiers, tantôt échancrés obliquement, et l'ovaire offre à sa base dix 
glandes alternes aux étamines. 

Le même auteur ajoute que le Cherleria imbricata des Alpes du 
Tyrol, dont Kocx a fait son 4/sine aretioides, a les étamines hypogynes 
et ne diffère pas des Mæhringia pour le nombre des parties de la fleur. 
Le Cherleria des Alpes est-il le même que celui des Pyrénées ? 


Vingt-unième famille. — Élatinées. 


Les Élatinées ont un calice de trois à cinq divisions, autant de pe- 
tales hypogynes, un nombre double d'étamines, trois à cinq styles à 
stigmates en tête, des ovaires de trois à cinq loges à valves loculicides, 
des semences attachées à un axe central et dépourvues de périsperme, 
un embryon légèrement recourbé, à radicule dirigée vers l'ombilic. 

Cette nouvelle famille formée de trois genres, dont un seul est euro- 
péen, comprend des plantes radicantes, à feuilles non stipulées, 
opposées et fleurs axillaires : elle doit être placée après les Ca- 
ryophytllees. 


PREMIER GENRE. — ÂÆlatine. 


L'Elatine a un calice profondément divisé en trois ou quatre lobes, 
trois ou quatre pétales sans onglets, des étamines ordinairement en 
nombre simple ou double des pétales, trois ou quatre styles terminés 
par des stigmates en tête, une capsule à trois ou quatre valves et trois 
ou quatre loges polyspermes, des semences cylindriques striées en 
longueur ou en largeur ; un embryon droit et une radicule infère. 

Ce genre compte quatre espèces, toutes européennes, et qu'on 
peut diviser en deux types, celui des 4/sinastrum à feuilles verticillées, 
et celui des Aydropiper à feuilles simplement opposées. 


— 396 — 


Le premier n’est formé que d’une seule espèce, l'Elatine alsinas- 
trum, qui croît dans les mares et les fossés inondés, où elle se conserve 
par ses racines. Ses feuilles sont disposées en verticilles plus ou moins 
garnis; les inférieures, plongées dans l’eau, sont amincies, capillaires 
et réfléchies; les autres, qui varient de trois à douze dans chaque 
nœud, sont ovales, entières et raccourcies ; les fleurs, presque sessiles, 
sont petites et verticillées, à pétales blancs et persistants ; les quatre 
styles sont très-courts, la capsule est arrondie et aplatie. 

L’Alsinastrum fleurit au-dessus de l’eau et s'allonge continuellement 
par le haut, tandis qu'il se détruit par la base. Les racines, qui sortent 
constamment des nœuds inférieurs, le rabaissent successivement en 
même temps qu'ils lamarrent, à peu près comme dans les Ranunculus 
Batrachium. 

Le second type des Ælatine compte trois espèces : l'Hydropiper, 
l’Hexandra et le Triandra, qui ne paraissent différer que par la lon- 
gueur des pédoncules et le nombre très-variable des parties de la fleur. 
Ce sont des plantes rampantes sur la surface des mares ou des étangs 
desséchés, dont les tiges articulées poussent sans cesse de nouvelles 
racines, et se perpétueraient indéfiniment, si elles n'étaient détruites 
par les gelées ou les intempéries. J'ai vu l'Hexandra sur les bords de 
notre lac, tapisser, dès le commencement de l'automne, de ses fleurs 
rouges, des étendues assez considérables, végéter avec vigueur Jusqu'à 
l'approche de l'hiver, et périr ensuite, à peu près sans retour, par un 
froid de quelques degrés. 

Cette jolie planteales feuilles succulentes chargées de glandes à leur 
face supère; l’estivation de son calice et de sa corolle est plutôt imbri- 
quée que valvaire, et ses pédoncules, d'abord recourbés, se redressent 
à la floraison pour s’incliner ensuite. 

Sa fécondation est directe, les six étamines à anthères introrses et 
biloculaires répandent immédiatement leur pollen sur les trois stig- 
mates papillaires, peu apparents et recourbés entre les anthères : la 
capsule est aplatie, uniloculaire sans doute par avortement, et s'ouvre 
irrégulièrement en trois ou quatre valves pour la sortie des semences. 

On peut remarquer que ses fleurs solitaires portent à leur base des 
stipules blanches et transparentes qui accompagnent également les 
feuilles. 

L’Alsinastrum n’a-t-il les feuilles verticillées qu'en apparence, et 
l'Hexandra a-t-il réellement des stipules (Voy. CamBessénës, Mémoires 
du Museum, tom. 18, pag. 225 et suivantes ). 


— 397 — 


SECOND GENRE. — Mollugo. 


Le Mollugo a un calice profondément quinquéfide, une corolle 
nulle, sans doute par avortement, des étamines qui varient de trois 
à cinq, une capsule trivalve à trois loges polyspermes. 

Ce genre est composé d’une trentaine d'espèces presque toutes 
originaires du Cap, de l'Amérique méridionale et des Grandes-Indes 
ou des îles adjacentes. Il est formé d'herbes, la plupart annuelles et 
couchées sur le terrain, à tiges noueuses, à feuilles entières, amincies, 
opposées ou verticillées , mais jamais stipulées ; les fleurs sont petites, 
très-peu apparentes, axillaires ou terminales et souvent disposées en 
ombelle. 

De Canpoze divise ce genre en deux sections : celle des Mollugo 
proprement dits dont ies pédoncules sont uniflores et verticillés, et 
celle plus nombreuse des Pharmaceum, dont les pédoncules sont 
ramifiés en grappes ou en ombelles. 

La seule espèce européenne qui appartienne à ce genre, est le 
Mollugo cerviana , qui croît dans la Russie de même qu’en Espagne, 
et que j'ai vu fleurir dans notre jardin botanique. C'est une très-petite 
plante qui se sème en avril, et se ressème en juin pour fleurir au moins 
deux fois dans l’année ; ses feuilles sont linéaires, verticillées et d’un 
vert glauque; ses tiges filiformes, nues et renflées à la base, se rami- 
fient une ou plusieurs fois en ombelles de trois à quatre rayons qui 
exécutent divers mouvements relatifs à la fécondation et à la dissémi- 
nation. Les calices s'ouvrent et se referment plusieurs fois, jusqu’à ce 
._qu’enfin ils s'appliquent fortement contre les capsules, qui sont trilo- 
culaires, à valves loculicides. 

La fécondation est immédiate, l’ovaire est terminé par trois stig- 
mates à peu près sessiles et entouré de cinq anthères jaunâtres. A la 
dissémination, on voit les semences attachées par des funicules à l'axe 
central de la capsule; elles sont brillantes, recourbées sur le dos, 
légèrement concaves du côté opposé, qui est celui de l'insertion, et 
auquel correspond la radicule. 

Le Verticillata, qui appartient à notre première section, tandis 
que le Cerviana dépend de la seconde, a les tiges très-noueuses, à 
feuilles verticillées, et à pédoncules uniflores, disposés autour de 
chaque verticille; du reste il a la fécondation et la dissémination du 
Cerviana. 


— 398 — 


TROISIÈME GENRE. — Drymarta. 


Le Drymaria a un calice profondément quinquéfide, cinq pétales 
bifides , cinq étamines et trois styles, une capsule fortement trivalve 
et polysperme, un embryon périphérique. 

Ce genre, tout-à-fait semblable pour l'organisation aux Spergules 
ou aux Holosteum , est formé de cinq ou'six plantes annuelles, diffuses, 
rameuses et amincies, dont les pétales, d’un beau blanc, ne s'ouvrent 
qu’à la chaleur du jour, et dont les feuilles opposées, sessiles ou pé- 
tiolées , glabres ou légèrement duvetées, sont toujours accompagnées 
de stipules pétiolaires, géminées ou plus nombreuses; les calices striés 
se referment exactement après la floraison ; enfin les pédoncules tom- 
bent avec la capsule. 

Les Drymaria croissent principalement sur les hauteurs et appar- 
tiennent à la côte occidentale du sud de l'Amérique. Le Gracilis, que 
je vois fleurir et qui ne me parait pas différer beaucoup du Cordata , a 
ses rameaux amincis et dichotomes, ses feuilles pétiolées et cordifor- 
mes, ses articulations renflées et entourées de cinq ou six stipules 
sétacées, ses stigmates à peu près sessiles, fusiformes et fortement 
papillaires. 


Vingt-deuxième famille. — Zinées. 


Les Linées ont ordinairement cinq sépales en estivation imbriquée 
ou tordue, et continue avec le pédoncule; cinq pétales en estivation 
tordue, alternes aux sépales hypogynes, onguiculés et légèrement 
adhérents; cinq étamines monadelphes à leur base et séparées par des 
appendices qu'on pourrait considérer comme des étamines avortées ; 
des anthères tantôt droites, tantôt incombantes, biloculaires et dé- 
pourvues de connectif; un ovaire à peu près globuleux et partagé en 
autant de loges qu'il y a de styles ; un pollen ovoide à trois plis; cinq 
stigmates en têtes papillaires et souvent allongées en massue; des 
capsules à peu près sphériques à valves repliées sur les bords; cinq 
loges divisées chacune par une cloison incomplète qui adhère aux 
parois ; des semences solitaires dans chaque locule ou géminées dans 
chaque carpelle et attachées près du sommet; un albumen presque 


— 399 — 


toujours remplacé par un endoplèvre renflé et charnu ; un embryon 
droit, plane et charnu; une radicule dirigée vers la cicatricule; des 
cotylédons elliptiques et foliacés dans la germination. 


PREMIER GENRE. — /inum. 


Le Linum ou le Lin a cinq sépales , cinq pétales, cinq étamines, cinq 
et très-rarement trois styles. 

Ce grand genre est divisé, par DE CanDoLLE, en trois groupes arti- 
ficiels et très-inégaux : 

1° Celui des espèces à fleurs jaunes ; 

2° Celui des espèces à fleurs bleues ou rougeîtres ; 

.3° Celui des espèces à fleurs blanches et feuilles opposées. 

Le premier est formé d'un grand nombre de plantes originaires du 
bassin de la Méditerranée, ou dispersées en Russie, dans les deux 
Amériques et au Cap de Bonne-Espérance. Les espèces européennes 
sont, les unes annuelles, les autres vivaces et sous-frutescentes ; dans 
les premières , on place le Gallicum du midi de la France ; lAureum de 
la Hongrie, le Luteolum de la Tauride, le Setaceum du Portugal, qui 
ont tous les pétales deux fois plus longs que le calice, et enfin le 
Strictum à panicule resserrée, feuilles pointues et ciliées, et pétales 
égaux en calice. Parmi les secondes , on range le Maritimum à feuilles 
glabres et panicules lâches, l'4fricanum du Cap, à feuilles élargies, 
sépales ciliés et styles réunis, et le Glandulosum, à feuilles glandu- 
leuses, et dont l'on distingue plusieurs variétés qui n’appartiennent 
pas aux mêmes contrées. Ces plantes ont la corolle deux ou trois fois 
aussi longue que le calice. 

Dans ce groupe de Lins à fleurs jaunes, je ne saurais m'empêcher de 
mentionner comme type, le Linum trigynum des montagnes des Indes, 
qui fleurit dans nos serres la plus grande partie de l’année, etquiest un 
véritable sous-arbrisseau. Il a toute l’organisation florale des Lins, 
mais son pistil est trigyne, et il porte à la base de deux de ses étamines 
une glande nectarifère très-marquée. 

Le second groupe, ou celui-des Lins, à fleurs bleues et rougeâtres, 
peut-être partagé en trois types : 1° celui du Suffruticosum de l'Espagne 
et du Tenuifolium de nos collines, qui sont très-voisins, et ont tous 
les deux les feuilles rudes et sétacées, les sépales chargés de cils glan- 
duleux, et les pétales rougeûtres trois fois aussi longs que le calice; 
2° celui de l’Hirsutum et du Viscosum, plantes vivaces, à fleurs d’un 
bleu rougeûtre , et remarquables par leurs feuilles lancéolées, rayées 
de trois à cinq nervures, et recouvertes, ainsi que la tige, de poils 


— 400 — 


glanduleux ; 3° celui des Zins communs, à fleurs d'un bleur d'azur, dont 
la’ principale espèce est l’Usitatissimum ou le Cultivé, répandu dans 
toute l'Europe, et nulle part indigène. On lui associe le Narbonense, 
l’'Angustifolium, le Montanum, \ Anglicum, Y Austriacum , le Sibiricum , 
l'Alpinum, etc., qui sont tellement rapprochés, qu’on doit peut-être 
les considérer comme autant de variétés, et les désigner,avec BENTHAM, 
sous le nom de Perenne , tandis qu'on donnerait celui d'Annuum au 
Lin cultive. 

Le troisième groupe ne comprend qu'une seule espèce, le Cathar- 
ticum , plante annuelle, très-commune dans les champs, et qu’on dis- 
tingue facilement à ses petites fleurs blanches, sa tige filiforme et 
dichotome, et ses feuilles glabres toujours opposées. On pourrait com- 
poser un dernier groupe du Monogynum , de la Nouvelle-Zélande, 
à fleurs blanches. 

Les Lins forment une famille très-naturelle, et qui se distingue de 
toutes les autres par sa végétation, et surtout par sa structure florale; 
ses tiges sont dures , amincies et cylindriques, ses feuilles linéaires et 
entières ; ses fleurs, disposées en cymes paniculés, plus ou moins four- 
nis, sont très-régulièrement conformées en verticilles quinaires. Les 
seules espèces qui s'écartent de ce type primitif, sont le Lin trigyne 
et le Radiola, qui forme aujourd'hui un genre séparé. 

Ces plantes ont toutes des racines fibreuses, amincies, dépourvues 
de stolons ou de rejets tracants; les espèces sous-frutescentes au vivaces 
présentent souvent trois formes de tiges, celles de l'année précédente 
qui ne sont pas encore détruites, celles de l'année actuelle chargées 
de fleurs ou de graines, et enfin celles qui doivent fructifier l'année 
suivante ; les stipules sont nulles; les feuilles qui ne se désarticulent 
que dans les Lins vivaces, sont d’abord repliées sur leurs bords, et 
présentent tantôt une surface glabre, tantôt des cils et des poils glan- 
duleux, ou de véritables glandes, comme dans le Glandulosum. Les 
fleurs souvent rayées et toujours délicates et fragiles gardent constam- 
ment la même couleur, au moins lorsqu'elles sont jaunes ou bleues, 
car les rouges sont variables. 

L'estivation des calices est quelquefois imbriquée, et souvent tor- 
due de gauche à droite en sens contraire dela corolle. Aux approches 
de la fécondation , qui est toujours extérieure, le calice, animé d'une 
force vitale, s'étale horizontalement. La corolle prend la forme cam- 
panulée, les étamines étendent leurs filets, et les stigmates dévelop- 
pent leurs papilles dorées. Cet épanouissement de toutes les parties de 
la fleur a lieu au commencement de la journée; le soir, lorsque la: 
fécondation est opérée , les pétales tombent, les calices se referment 


— 401 — 


fortement, et les anthères déjettent leur pollen dans le fond de la fleur. 
Les mêmes phénomènes ont lieu sur les autres fleurs, le lendemain et 
les jours suivants, jusqu'à ce que la fécondation soit terminée. On 
peut remarquer alors, dans les champs de Lin, tout le terrain jonché 
des pétales tombés. 

En examinant de plus près ce qui se passe dans l'intérieur d'une 
fleur de Zir épanouie, on trouve des différences, selon les espèces ; 
ainsi, dans quelques-unes, comme dans le Trigynum , le Narbonense, 
etc., les anthères sont extrorses; dans d'autres, comme le G/andulo- 
sum et le Cultivé, elles sont latérales; mais, pour l'ordinaire , elles 
s'ouvrent à l'intérieur, et répandent par deux fentes longitudinales 
un pollen globuleux, jaune, bleu ou blanc, selon la couleur de la 
fleur, Ces anthères restent immobiles dans le Tenuifolium, elles ser- 
rent et enveloppent les stigmates dans le Varbonense, tandis que dans 
le Maritimum, le Catharticum , etc.; elles s'approchent tour à tour 
des’stigmates; car dans ces dernières espèces, les stigmates restent 
fixés au centre de la fleur, tandis que dans la première, les styles 
divariqués dès la base, ont jeté les stigmates sur les bords de la 
corolle, 

Ces stigmates, constamment jaunâtres et papillaires de tous les 
côtés, sont cylindriques, en tête ou en massue. Dans certaines espèces, 
telles que le Montanum, le Sibiricum, le Gallicum, le Maritimum , 
le Strictum, ec. , ils présentent le même phénomène que les Pri- 
mula, c'est-à-dire des individus dans lesquels les stigmates sont 
inférieurs aux anthères, et d’autres dans lesquels ils leur sont supé- 
rieurs. Dans le premier cas, les anthères réunies laissent tomber leur 
pollen sur les stigmates placés exactement au-dessous, et alors la 
fécondation est immédiate ; dans d'autres espèces, comme le Cathar- 
ticum, les stigmates sont à peu près au niveau des anthères, et dans 
le Tenuifolium, ils sont extérieurs à ces mêmes anthères, au-dessus 
desquelles ils s'élèvent le long de la corolle. 

En continuant d'observer l’intérieur d’une fleur de Lin épanouie, 
on trouve quelquefois les étamines distinctes et élargies à leur base, 
comme dans le Muritimum, mais plus souvent réunies en un anneau 
auquel adhèrent aussi les pétales, et séparées entreelles par des appen- 
dices qu’on peut considérer comme autant d’étamines avortées. Sur cet 
anneau, et du côté extérieur, sont placées des glandes ou des enfon- 
cements nectarifères, répondant à autant de fossettes formées par les 
onglets relevés en arêtes des pétales , et tout-à-fait semblables à celles 
qu’on trouve dans les Convolvulus, les Gentianées, etc. ; elles divisent 
le fond de la corolle en cinq tubulures, qui correspondent une à une 

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aux glandes nectarifères que nous avons dit être placées sur l'anneau 
des étamines. f 

Le but final de ces tubulures ést relatif à la fécondation. Dans le 
moment où elle a lieu, les anthères s'ouvrent exactement au-dessus, 
et laissent tomber, comme dans le Catharticum, par exemple, une 
grande partie de leur pollen, immédiatement absorbé par l'humeur 
miellée que distillent les glandes. C'est sans doute cette humeur qui 
recoit les globules polliniques dont elle renvoie les émanations ou les 
boyaux aux stigmates en tête papillaire, qui sont ainsi fécondés. 

On ne peut guère douter de ce mode de fécondation, et l’on ‘en 
sera, je pense, convaincu , lorsqu'on aura vu de ses yeux le joli phé- 
nomène que je viens de décrire. Du reste, ce mode ne s'applique 
qu'aux espèces dont les fleurs sont tubulées, les autres en présentent 
peut-être de très-différents. 

Les Lins, avant la floraison, ont souvent, comme le Catharticum 
et le Cultive, le sommet de leurs tiges déjeté et comme replié en bas ; 
mais à mesure que les fleurs s'épanouissent, leurs pédoncules se 
redressent, et après la fécondation, pendant la maturation et la dissé- 
mination, ils restent constamment redressés. La plupart des espèces 
ont leur pédoncule articulé un peu au-dessous du calice, et c'est sou- 
vent par cette articulation que se séparent les capsules, qui, pour l'or- 
dinaire, se dessèchent sur la tige, après avoir répandu leurs graines ; 
les onglets sont de même articulés sur l'anneau qui les porte. 

La capsule est une sphère plus ou moins aplatie sur ses pôles, et 
presque toujours couronnée par la base persistante du style. Elle est 
primitivement composée de cinq ovaires ou de cinq carpelles, qui se 
replient sur leurs bords et forment ensuite autant de loges demi- 
ouvertes intérieurement : chacune de ces loges contient deux semences 
séparées par une demi-cloison , en sorte que la capsule renferme régu- 
lièrement dix semences lisses et brillantes. Cette organisation, qui 
ressemble un peu à celle des Malvacees , ne varie guère que par le 
ombre des loges, qui se réduit à trois dans le Lin trigyne, à quatre 
dans le Radiola, etc. Et l'on peut remarquer en passant que les Lins, 
comme les Malvacees, ont pour l'ordinaire leurs fleurs fertiles. 

A l'époque de la dissémination, les valves se désoudent et s'écartent; 
bientôt après les semences sortent favorisées par l'agitation de l'air; 
ou bien, si la pluie tombe, ou seulement si l'air est humide, les valves 
se rapprochent en attendant des circonstances plus favorables. C'est 
l'axe central qui sert ici de support aux cordons pistillaires, en même 
temps qu'aux vaisseaux nourriciers, et l'on peut remarquer sur le dos 
de la graine la cicatrice par laquelle les vaisseaux nourriciers et les cor- 
dons pistillaires arrivaient à la radicule. 


— 403 — 


Les glandes nectarifères ne sont pas toujours aussi marquées et aussi 
régulières que je l'ai supposé : souvent on ne les apercoit qu'avec 
peine, et quelquefois même elles semblent avoir disparu , comme dans 
l’Hirsutum ; mais alors elles sont remplacées par des filets renflés et 
jaunâtres au-dessus de la base, ou par de véritables glandes placées 
sur le côté extérieur des étamines, ainsi que je l'ai remarqué dans le 
Trigynum ; et je ne doute pas qu’en y regardant de près, on ne voie 
que, lorsque les glandes manquent, l'humeur miellée se répand par 
d'autres moyens ; ainsi j'ai observé, dans le Lin cultive, que les pétales 
légèrement nectarifères à la base, avaient encore leur onglet bordé 
de poils. 

La principale remarque que m'ont présentée le Linum Narbonense 
et l’4/pinum est celle de leurs pédoncules opposés aux feuilles et non 
placés à leur aisselle. S'applique-t-elle aux autres espèces ? 

Mais ce qui est surtout digne de considération dans ce grand genre, 
c'est la structure de la capsule. Est-elle réellement formée de cinq car- 
pelles, comme l’affirment la plupart des botanistes, ou bien doit-on 
l'envisager comme composée primitivement de dix carpelles? Dans le 
premier cas, je ne saurais me rendre compte des cinq demi-cloisons 
qui partagent ces carpelles, d'où viendraient-elles ? et comment 
auraient-elles été produites ? Mais dans le second, elles sont pour 
moi de véritables cloisons qui ont avorté en partie, et je suis confirmé 
dans cette opinion, soit par les semences qui seraient alors solitaires 
dans chacune des dix loges, soit encore par ces cinq valves principales 
qui sont presque toujours bifides. Il faudrait, afin de résoudre com- 
plètement la question, trouver des Lins dont les cloisons fussent pro- 
longées jusqu’à l'axe, ou bien plutôt examiner des capsules dans leur 
première jeunesse, et voir si alors leurs demi-cloisons ne sont pas plus 
marquées. 

Au reste, la capsule à huit loges du Radiola, qui n'a que quatre 
stigmates , lève tous mes doutes. 

Les Lins se plaisent sur les collines arides, sur les pentes peu élevées 
des montagnes, ou sur les rochers maritimes des zones tempérées ; 
mais ils fuient les lieux cultivés ou marécageux, ainsi que les climats 
ou trop froids ou trop chauds. Ils fleurissent à la fin du printemps ou 
au commencement de l'été, et ils revêtent de leurs brillantes couleurs 
les flancs décharnés des collines et des pentes rocailleuses où la nature 
a fixé leur demeure. Leurs fleurs, qui se succèdent long-temps, et 
qui, chaque matin, se présentent fraiches et nouvellement écloses, 
ajoutent encore quelque chose à cet éclat, et je connais peu de plantes 
plus gracieuses qu'un Lin dans toute sa parure matinale. Kocx, dans 


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sa Flore d'Allemagne, distingue deux variétés du Lin cultivé: Ve Vul- 
gare, à capsule toujours fermée, et le Crepitans, dont les capsules 
ouvrent leurs valves élastiquement. 

De toutes les espèces que renferme ce beau genre, la plus estimée 
et la plus connue, c'est le Zn cultivé, qui semble un présent du ciel, 
puisqu’on ne sait d'où il vient et qu'il est resté annuel au milieu de ses 
congénères vivaces, afin qu'il püût être plus facilement cultivé et 
transporté dans tous les lieux. 

La plupart des Lins ont une floraison diurne, et ils étalent le matin 
des pétales qui tombent le soir ; dans d’autres espèces, comme l’A4fri- 
canum du Cap , la fécondation est plus prolongée et les pétales ne se 
détachent pas à la fin de la journée. Est-ce parce que la fécondation 
n'est pas terminée ? 


SECOND GENRE. — Radiola. 


Le Radiola a un calice quadrifide, dont les lobes sont trifides, quatre 
pétales égaux au calice, quatre styles courts, quatre stigmates en tête 
papillaire, une capsule à huit loges et huit semences. 

Ce genre ne contient qu'une seule espèce, le Radiola linoïdes , qui 
croit dans les sables humides et inondés. Sa tige amincie, annuelle et 
à peine haute de deux pouces, se ramifie depuis la base en bifurcations 
très-régulières ; ses feuilles sont petites, entières et opposées; ses fleurs 
sont blanches, nombreuses, pédicellées et solitaires dans les diverses 
dichotomies ; ses anthères sont jaunes et sa capsule arrondie est 
sillonnée. 

Cette plante, que je n'ai jamais vue vivante, a l'inflorescence des 
Caryophyllees , et se rapproche à plusieurs égards du Lin cathartique, 


Vingt-troisieme famille. — Ffalvacées. 


Les Malvacees ont un calice à cinq pièces, très-rarement à trois ou 
quatre , plus ou moins réunies à la base, disposées en estivation val- 
vaire et souvent involucrées; les pétales alternes aux divisions du 
calice sont hypogynes et tordus avant leur développement, quelque- 
fois entièrement distincts, et plus souvent adhérents à la base; les 
étamines sont hypogynes, indéfinies, ou égales au nombre des pé- 


— 405 — 


tales, ou enfin multiples de ce même nombre; leurs filets réunis infé- 
rieurement, et pour l'ordinaire avec les pétales, vont en décroissant 
de longueur de la circonférence au centre ; leurs anthères sont uni- 
loculaires, plus ou moins courbées , et toujours ouvertes par une fente 
transversale ; le pollen est hérissé et sphérique ; le disque hypogyne 
est nul; l'ovaire est formé de plusieurs carpelles souvent verticillés 
autour d’un axe central, quelquefois libres, mais pour l'ordinaire 
soudés sous diverses formes et renfermant une ou plusieurs semences; 
les carpelles monospermes ou dispermes s'ouvrent par leur suture 
centrale, les autres ‘sont tantôt loculicides, tantôt réunis en une 
capsule ou baie irrégulière ; les styles, en même nombre que les car- 
pelles, sont distincts ou plus ou moins réunis, et toujours terminés 
par des stigmates dont la forme varie beaucoup selon les genres; les 
semences ovales et plus ou moins triquètres sont quelquefois recou- 
vertes d'un épiderme velu ou pulpeux; l'albumen est nul, ou selon 
Auguste Sarnr-Hizaire (Bulletin botan., janvier 1828), formé dans 
les Malvées d'une lame amincie ; l'embryon est droit, la radicule eylin: 
drique, et les cotylédons recroquevillés sont courbés sur la radicule. 

Ces plantes, dont l'on compte aujourd'hui près de sept cents 
espèces, réparties en vingt-cinq genres, ont été inégalement répandues 
sur la surface du globe ; on n’en trouve point ou presque point dans 
les zones froides, ou sur les montagnes élevées; mais elles habitent 
les contrées chaudes des zones tempérées, et surtout les régions 
situées entre les tropiques. On peut leur assigner quatre centres prin- 
cipaux : 1° l'Amérique méridionale, en y comprenant le Mexique et 
les Antilles; 2° les Indes orientales et les îles adjacentes ; 3° le Cap et 
les côtes de l'Afrique, avec les iles Bourbon; 4° enfin, le bassin de la 
Méditerranée prolongé jusqu'en Égypte et en Syrie. De ces quatre 
localités , la première est la plus riche en espèces, et la dernière est la 
plus pauvre ; car la France n’en renferme guère que vingt-cinq, dont 
quelques-unes même sont étrangères, et dans l'Europe entière, on 
n'en trouve non plus qu’une cinquantaine, appartenant presque toutes 
à la division des Malvees ou des Malvacees à calice double. 

Les espèces indigènes habitent le long de nos haies et de nos 
champs, dans les terrains stériles, sur les bords des bois et quelque- 
fois dans le voisinage de la mer. 

Les Malvacees sont des herbes rarement annuelles, quelquefois des 
arbrisseaux ou même des arbres; leurs feuilles, toujours alternes et 
pourvues à la base de deux stipules ordinairement libres et persis- 
tantes, sont en général pétiolées, articulées à la base, dentées sur les 
bords, plicatives avant leur développement, arrondies, palmatipartites, 


— 406 — 


diversement lobées et recouvertes de poils rameux et étoilés; leur 
consistance est épaisse et parenchymateuse , leur saveur douce et 
mucilagineuse, et leur contour souvent glanduleux au sommet des 
nervures. Je n'ai pas apercu qu'elles fussent douées de mouvements 
bien marqués, cependant j'ai observé que le haut de leur pétiole était 
un peu renflé, et qu'il se recourbait plus ou moins en dehors ou en 
dedans, pour que le limbe de la feuille fût plus écarté de la tige, et 
plus sensible aux impressions de la lumière; cette conformation est 
surtout très-prononcée dans les genres Sida, Malva, etc. 

Les fleurs sont toujours axillaires quoiqu'’elles paraissent quelquefois 
disposées en grappes ou en épis par l'avortement des feuilles; les 
pédoncules sont solitaires ou réunis, et toujours articulés de manière 
à se rompre facilement lorsque la fécondation n’est pas encore opérée, 
ou plus tard lorsqu'elle a eu lieu ; l'inflorescence est centripète, en 
sorte qu'il n'est pas rare de voir sur la même tige des pédoncules 
desséchés dont les carpelles ont déjà répandu leurs graines, et d’au- 
tres dont les fleurs sont loin d'être encore ouvertes ; lorsque les fleurs 
sont nombreuses à la même aisselle, elles s’épanouissent les unes 
après les autres, comme dans la Mauve, et alors l’inflorescence est 
plus compliquée. Quelquefois, comme dans ces mêmes Mauves, 
l'aisselle qui a donné des fleurs fournit encore des rameaux, et la tige 
se conserve; d'autrefois, au contraire, comme dans l'Hibiscus syriacus, 
qui est pourtant un petit arbre, l'aisselle florifère ne fournit pas de 
nouvelles feuilles, et alors la tige périt jusqu’à une certaine hauteur. 

Les tiges de cette plante, et sans doute de celles qui lui ressem- 
blent, se rompent au sommet, et sont chaque année remplacées par 
de nouveaux rameaux qui subissent le même sort; en sorte qu'en 
examinant l'intérieur de l'arbre, on le trouve tout chargé de vieux 
bois, ou de tiges mortes que le temps détruit successivement. On y 
trouve aussi, en grand nombre, les lenticelles de De CanDoLze, que 
J'ai aussi remarquées sur quelques Malvacees herbacées, comme le 
Malva sylvestris, \ Althea rosa , et qu'on retrouve sur d’autres plantes 
herbacées d’une consistance un peu ligneuse, par exemple, le Sam- 
bucus ebulus. 

La fleur même des Malvacees présente plusieurs phénomènes dignes 
d'attention : le premier etle moins remarquable, est celui de ce double 
calice qui distingue les Maivees des Sida, et qui peut être considéré 
comme un involucre. Le second est celui de ces plaques glanduleuses, 
si régulièrement placées à la base du calice, entre les pétales bordés 
en ce point de poils blanchâtres d'une consistance molle et destinés à 
s'imbiber de l'humeur miellée sortie abondamment des écailles necta- 


— 407 — 

riferes. Lorsque les anthères s'ouvrent, ces poils reçoivent en grande 
quantité les granules sphériques du pollen, qui se rompent et d'ou 
proviennent sans doute des émanations destinées à la fécondation des 
stigmates. Toutes les Malvacées que j'ai pu examiner, et dont la corolle 
est pourvue de poils, ont aussi des écailles mellifères ; toutes celles, 
au contraire, dont la corolle est nue, sont privées d'écailles, et pres- 
que toujours aussi leurs pétales sont étroitement unis dans une grande 
partie de leur longueur. 

Un:troisième phénomène, lié au précédent; concerne la fécondation 
proprement dite ; tantôt les anthères s'ouvrent au moment où:les stig- 
mates sont entièrement dégagés du fourreau staminifére, et cela a 
lieu surtout dans les Malvacées dépourvues de nectaire; tantôt, au 
contraire, les stigmates ne sortent que: beaucoup plus tard, et long- 
temps après que les anthères ont répandu leur pollen ;:on croirait alors 
que la nature a manqué son but, et que la. fleur doit avorter ou être 
fécondée par les anthères non encore ouvertes des fleurs voisines; 
mais. si l'on y regarde de plus près, on s'apercevra qu'au moment où 
les stigmates commencent à sortir du milieu de ces anthères à demi 
flétries, une partie de leur pollen est déposé sur les poils nectarifères, 
tandis qu’une autre reste encore attachée sur ces anthères déformées, 
afin de se déposer sur les stigmates au moment de leur apparition ; 
c'est là un arrangement très-remarquable, et qui tient à ce que le pollen 
sphérique des Malpacees est hérissé d'aspérités. 

La structure du pistil varie beaucoup selon les genres : dans ceux 
où les carpelles sont verticillés et distincts, la partie inférieure du style 
forme un disque charnu autour duquel viennent s'arranger les ovaires, 
et qui subsiste jusqu’à la dissémination ; dans les Hibiscus, des sections 
Abelmoschus, Ketmies , Trionum, etc., où ces carpelles sont soudés 
et réunis en capsules , ce disque.entre dans l’intérieur des fruits, où il 
prend la forme d’un axe central; dans les Sida, il disparaît très-promp- 
tement après la fécondation, et laisse au centre un espace vide, qui 
s'étend jusqu’à l'endroit où les cordons pistillaires entrent dans les 
graines; dans les {noda, il n'arrive que jusqu’à la surface du péricarpe; 
dans d’autres.genres, il est tronqué horizontalement , à peu près à la 
hauteur des carpelles qui l'entourent. Sous ces différentes formes, on 
reconnaît les modifications d'un même plan, et l'on peut ajouter que, 
lorsque les carpelles sont intimement réunis, et ne forment qu'une 
seule capsule, comme dans les Hibiseus et la section des Mauves, qui 
porte le nom de Spkæroma, on observe toujours que les cloisons sont 
formées de deux lames superposées, qui sont les prolongements 
recourbés des valves. 


— 408 — 


Les stigmates des Malvacees diffèrent à plusieurs égards : les uns, 
tels que ceux du Malva sylvestris, ete., sont latéraux sur la face interne 
du style, à peu près, comme dans les Caryophyllées ; les autres for: 
ment de petites têtes papillaires peu visibles, ou, comme dans les 
Hibiscus, représentent de grosses massues admirablement veloutées, 
et qui s'inclinent fortement sur les anthères qu'elles couronnent; ces 
diverses apparences sont toutes relatives au mode de fécondation, 
comme nous le verrons dans l'exposition des genres. 

Les anthères varient comme les stigmates; elles sont extrorses ou 
introrses, unilobées, contournées en demi-cercle, et elles s'ouvrent 
longitudinalement et sans retournement de parois, par une suture 
médiate, visible de bonne heure. Én les considérant de près, on trouve 
que leur surface extérieure est finement chagrinée, et que leur ligne 
d'ouverture répond à une demi-cloison intérieure assez saillante, et, si 
l'on examine les filets au point de leur insertion, on verra souvent qu'ils 
sont rapprochés deux à deux, et que les anthères ne sont unilobées 
que par dédoublement. On doit ajouter que c’est, dans la structure du 
fruit, que la nature s’est plu à déployer ici ses deux grands instru- 
ments de soudure et d'avortement, dont elle se sert si souvent, pour 
mettre dans ses œuvres ces nombreuses variations, toutes plus ou 
moins remarquables par les différents buts auxquels elles tendent. 

Lorsque les stigmates sont sortis d'entre les étamines, et ont recu 
au moins une partie de leur pollen, la corolle se roule comme dans 
l'estivation, et les anthères, serrées contre les stigmates, complètent 
la fécondation ; ensuite la corolle se détache avec le tube staminifère 
auquel elle est souvent unie, et les calices se referment étroitement 
pendant la maturation; les pédoncules sont redressés, et ils restent 
dans cette position, jusqu'à ce qu'ils se séparent de la tige; un peu 
auparavant, les calices s'ouvrent et la dissémination commence. Dans 
les espèces à carpelles monospermes ou dispermes, comme les Mauves, 
les Alihées, et le grand nombre des Mulvées, les carpelles ne s'ouvrent 
pas, mais ils restent constamment attachés à leur graine; dans les 
autres, tels que les Ketmies, les Sida , les Hibiscus , etc., ils s'ouvrent 
en dedans, et se détachent de leur axe, afin de répandre plus facile- 
ment leurs graines ; dans le Gossypium , ces graines, comme celles des 
Saules, sont entourées d'un duvet floconneux, au moyen duquel elles 
se disséminent au loin. 

Ces graines, en général, sont ovales, aplaties dans les carpelles 
monospermes , et obscurément triquètres dans les autres ; leur ombilic 
est placé intérieurement, à peu près à mihauteur, à l'endroit où les 
cordons pistillaires se détachant du style, entrent dans le carpelle; cet 


— 409 — 
ombilic, assez enfoncé, ne m'a rien offert de remarquable, excepté 
ce raphé extérieur, qui distingue la plupart des Géraniées , et qui 
conduit les vaisseaux depuis l’ombilic jusqu’à la base de la graine, où 
aboutit la radicule; mais ici il est relevé en membrane, et couvert 
avant la maturité par la caroncule. 

Les Malvacées européennes sont des plantes peu apparentes, à fleurs 
ordinairement bleuâtres ou rougeâtres, et qui ne paraissent qu'au 
milieu de l'été, parce qu’elles sont, pour la plupart, annuelles, et que 
leurs fleurs sortent aux aisselles supérieures; toutefois les deux 
Mauves Moschata et Alcea, produisent un assez bel effet sur les 
chemins qu’elles bordent de leurs tiges élevées, et de leurs grandes 
fleurs roses; mais c'est dans les contrées équatoriales que brillent du 
plus bel éclat ces magnifiques Hibiscus, ces Malvaviscus, ces Sida, etc., 
qui font dans les derniers mois de l'été l'ornement de nos jardins, et 
plus tard celui de nos serres. On ne sait ce qu’on doit y admirér de 
préférence la beauté du feuillage, le brillant de sa fleur ou l'appareil 
si singulier des étamines et des pistils. | 

La fécondation dure plusieurs jours dans la plupart des espèces de 
cette famille, et c’est pourquoi la corolle ne tombe que tard. 


Première division. — MALVÉES ou MALVACÉES à calice involucré. 


PREMIER GENRE. — Malope. 


Le Malope a un involucre triphylle , à folioles cordiformes, et plu- 
sieurs carpelles monospermes réunis en tête. 

Ce genre, qui ne diffère de celui des Mauves que par ses carpelles 
rapprochés en tête et non pas verticillés autour d’un axe commun, 
est actuellement formé de quatre espèces, dont trois habitent l'Es- 
pagne et la côte d'Afrique, et dont la quatrième, le Malacoïdes, est 
commun à la France et à l'Italie, d’où il s'étend jusqu’à l’île de Scio. 

Ces quatre plantes, désignées sous les noms de Malacoïdes , Stipu- 
lacea, Trifida et Multiflora, appartiennent évidemment au même 
type. Ce sont des herbes annuelles, à tige peu élevée, à fleurs 
grandes, rouges et blanches, à pédoncules solitaires et agrégés dans 
le Multiflore, à feuilles ovales, arrondies, et trilobées dans le Trifide, 
introduit dans nos jardins à cause de ses belles touffes couronnées tout 
l'été de fleurs rouges très-brillantes. Morts, dans sa Flore Sarde, dit 
que le Stipulacea et le Trifida ne se distinguent pas toujours du Mala- 
coïdes , dont les stipules sont très-variables. 


— 410 — 


Les Malopes peuvent être considérés comme des Mauves dont les 
carpelles trop nombreux ont perdu leur disposition primitive, et au 
lieu de s'arranger circulairement autour d'un axe commun , se sont 
entassés les uns sur les autres; leurs anthères, comme celles des 
Mauves , naissent au sommet et à la surface du tube staminifère; leurs 
carpelles sont évalves, monospermes et égaux en nombre aux stigmates, 
et l'on ne peut douter que leurs sépales ne soient nectarifères, car 
leurs pétales sont bordés de poils ciliés. La seule différence organique 
quime semble exister entre ces deux genres, c'est que dans les Mauves, 
les cordons pistillaires se détachent au même point, et que, dans les 
Malopes, ils viennent aboutir à des carpelles placés à des hauteurs et 
des distances différentes. 

À ces quatre espèces anciennement connues, on peut ajouter le 
Grandiflore du Népaul , qui devient arborescent lorsqu'on le cultive 
en pot, et qui se distingue des autres Malopes, et peut-être de toutes 
les Malvacees, par ses anthères bilobées, réunies en cinq corps allongés, 
qui correspondent aux intervalles des pétales et aux poils humides 
et nectarifères sur lesquels tombe en grande abondance le pollen 
sphérique. On voit après sa dispersion, les styles s'élever au centre des 
cinq groupes staminifères, et se recourber en dehors pour recevoir 
les émanations du pollen sur leur rainure longuement papillaire; ses 
carpelles, irrégulièrement disposés en séries linéaires, forment entre 
eux un cône tronqué; ils sont rayés de stries transversales, et portent 
sur leurs dos les traces de la suture des deux valves; dans la dissémi- 
nation, ils s'échappent séparément du calice et de l’involucre dessé- 
chés et persistants. 


SECOND GENRE. — Mauve. 


Les Mauves ont un involucre formé de trois et très-rarement de 
cinq ou six folioles oblongues ou même sétacées, et de nombreux 
carpelles presque toujours disposés circulairement autour d’un axe 
central. 

On distingue ce genre en quatre sections : 

1° Celle des Malvastrum, carpelles à valves uniloculaires, mono- 
spermes et réunis ; 

2° Celle des Maluchia, carpelles à valves uniloculaires, mono- 
spermes, distincts et peu nombreux, involucre de cinq à six pièces ; 

3° Celle des Sphæroma, carpelles uniloculaires, polyspermes, 
réunis en un fruit globuleux ; 

4° Celle des WModiola, carpelles bivalves, dispermes, valves biaristées 
et rentrantes. 


— All — 


La première comprend seule des espèces européennes, les trois 
autres sont entièrement étrangères. 

Les Malvastrum se subdivisent en sept groupes, dont quelques-uns 
sont un peu artificiels ; les autres sont de véritables types. 

Le premier est celui des Chrysanthes ou des Mauves à fleurs jaunes , 
qui comptent dans le Prodrome dix-neuf espèces ou variétés presque 
également répandues dans l'Amérique méridionale et les Indes orien- 
tales, où elles forment des herbes et de-petits arbrisseaux à feuilles 
entières, trilobées, lisses, velues ou recouvertes de poils étoilés ; les 
fleurs, presque sessiles, solitaires ou réunies dans les aisselles supé- 
rieures, sont quelquefois disposées en épis par l'avortement des 
feuilles; leurs carpelles sont lisses ou velus, mutiques ou cuspidés. 

Les Chrysanthes les plus cultivés sont le Tricuspide et l'Américain, 
annuels et homotypes. Le premier s'épanouit rarement, en sorte que 
je n'ai pas encore vu ses fleurs ouvertes ; son calice n’a pas des écailles 
nectarifères marquées , néanmoins ses pétales ont leur base élargie et 
ciliée de quelques poils, par lesquels peut s’'introduire la liqueur 
miellée qui suinte entre le calice et le torus; les anthères jaunes et 
fortement courbées s'ouvrent en deux sacs concaves, et répandent 
leur pollen sphérique sur les têtes blanches et papillaires des stigmates 
qui paraissent à l'époque de la fécondation; les carpelles verticillés 
n’ont pas d'abord des pointes bien marquées; le centre du torus est 
enfoncé, l'axe est très-court et les carpelles se détachent les uns des 
autres pour la dissémination. L'Americana , à fleurs presque solitaires 
et ouvertes, n’est guère qu'une variété du Tricuspidata. 

Le second groupe des Malvastrum, désigné sous le nom de Cym- 
balaires, à cause de sa ressemblance de portavec le Linaria Cymbalaria, 
ne comprend encore que trois espèces homotypes : le Leprosa de l'ile 
de Cuba; le Sherardiana de la Bithynie, et le Cretica de l'ile de Crête; 
les deux premières vivaces et la dernière annuelle. On les reconnaît à 
leurs fleurs rougeâtres ou blanchâtres, à leurs pédicelles solitaires et 
uniflores ; à leur involucre triphylle, ainsi qu'à leurs feuilles à peu 
près arrondies. La première est remarquable par ses feuilles et ses 
rameaux tachés de croûtes blanchâtres ; la seconde, par ses pédon- 
cules recourbés, et la dernière, par ses tiges redressées. Ce second 
groupe, plus artificiel que le précédent, ne se distingue guère de 
ceiui des Fusciculees que par ses pédoncules solitaires. 

Les Bibracteolatæ, ou le troisième groupe des Malvastrum, sont 
annuels, indigènes de l'Espagne, et répandus aussi sur le bassin mé- 
ridional de la Méditerranée; leurs fleurs blanches ou rougeätres ont 
les pédoncules uniflores, et on les distingue des Cymbalaria par leurs 


— 42 — 


feuilles presque toujours divisées‘, et surtout par leur involucre 
diphylle; on en compte six espèces qui différent entre elles par leurs 
stipules et leurs feuilles, ainsi que par la proportion de grandeur entre 
la corolle et le calice. 

Les Bismalvæ , ou les Malvastrum du quatrième groupe, habitent 
le bassin septentrional de la Méditerranée, et comprennent cinq 
espèces homotypes ; on les reconnaît à leurs fleurs rougeâtres ou blan- 
châtres, à leurs pédoncules solitaires et uniflores, ainsi qu'à leur 
involucre triphylle et à leurs feuilles fortement divisées. Ce sont le 
Tournefortiana , \ Althæoïdes et le Fastigiata , indigènes de l'Espagne 
et de la France, l’Alcea et le Moschata à feuilles odorantes, qui 
croissent sur les hords de nos chemins, où leurs belles fleurs s’épa- 
nouissent depuis le milieu de l’été jusqu'au commencement de l'au- 
tomne. Leurs écailles nectarifères sont très-marquées, et pourraient 
presque être détachées du calice qui les porte; leurs anthères recour- 
bées et grisâtres s'ouvrent avant la sortie des stigmates, et répandent 
en abondance leurs granules sphériques sur le fond de la corolle, 
ainsi que sur les stigmates internes et papillaires qui se contournent 
fortement; après la fécondation, la corolle tombe et le calice se 
referme, et, à moins d'avortement, les pédoncules ne se désarticulent 
que lorsque la dissémination est accomplie. GErTNER observe que, 
dans la Mauve alcee, les carpelles glabres se rompent par les côtés, et 
que les graines, en se semant, n’emportent avec elles que le côté exté- 
rieur du carpelle appelé scutum ou bouclier; l'intérieur reste attaché 
au réceptacle. Je ne sais pas si les carpelles velus du Moschata ont la 
même forme de dissémination. 

Les Fasciculata , que l'on range dans le cinquième groupe, se dis- 
tinguent par leurs feuilles anguleuses, cordiformes , à cinq nervures, 
et surtout par leurs pédoncules axillaires, nombreux et uniflores; on 
en compte quinze espèces ou variétés : herbacées , annuelles, bisan- 
nuelles, ou vivaces, et irrégulièrement répandues sur la surface du 
globe;'principalement dans l'Europe centrale et tempérée. Ces dernières 
se rangent sous un seul type, représenté par notre Mauve des bois, à 
laquelle on réunit celle de Mauritanie et celle d'Henning des envi- 
rons de Moscou. La fécondation de ces plantes est en général sembla- 
ble à celle des Bismalvæ , leurs calices sont nectarifères, et par consé- 
quent leurs pétales ciliés; leurs anthères s'ouvrent avant l'apparition 
des stigmates, qui sont des lames papillaires contournées en spirale 
et placées naturellement du côté interne des styles. J'ai remarqué que 
dans le Malva rotundifolia de notre second type, le carpelle ne recou- 
vre que la partie extérieure de la graine, et qu'il se soulève un peu à 


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l'époque de la fécondation, et que, dans le Mauritanica, les papilles 
recouvrent tout le bord des longs stigmates. 

Les Fasciculées présentent un second type, celui des espèces à 
fleurs petites, sessiles et agglomérées aux aisselles; on y range le 
Parviflora , ou le Borealis de Kocn, à carpelles ridés, le Rotundifolia, 
le Mareotica de V'Égypte, le Crispa, le Brasiliensis, le Nicæensis, le 
Verticillata de la Chine, qui est le Glomerata des jardiniers, etc. ; 
cette dernière présente deux particularités physiologiques qui appar- 
tiennent plus ou moins à ses homotypes ; la première, c'est que ses 
fleurs s’'épanouissent les unes après les autres dans la même aisselle, 
et qu’elles allongent successivement leurs pédoncules lorsqu'elles sont 
sur le point de répandre leurs graines ; la seconde, c'est qu’elles n'ont 
point de poils nectarifères entre les lobes de leur corolle, et que les 
stigmates sortent de leur fourreau en même temps que les anthères 
répandent leur pollen, en sorte que la fécondation a lieu en plein air, 
au-dessus de la corolle. 

Celle des Mauves fasciculées de notre premier type paraît d'abord 
indirecte : les anthères s'ouvrent et répandent, avant l'apparition des 
stigmates, leur pollen au fond de la fleur, sur les poils nectarifères 
très-élégamment grillés, et lorsque ces stigmates paraissent enfin, ils 
se penchent, comme une chevelure éparse, sur les anthères dont ils 
recueillent le petit nombre des granules encore adhérents, et dont ils 
se recouvrent tout le long de leurs bords; on voit alors ces granules 
éclater et se fondre sur les stigmates papillaires. 

Les Malvastrum du Cap ou les Capenses , de notre sixième groupe, 
ont les fleurs roses ou blanches, les feuilles anguleuses ou lobées, la 
tige frutescente, l'involucre triphylle et les pédicelles solitaires rare- 
ment géminés ou ternés ; en sorte qu'ils diffèrent des autres Malvas- 
trum , plutôt par leur port et leur végétation, que par des caractères 
bien tranchés. Ils ont été réunis par De Cannozce sous quinze espèces 
ou variétés , qui ne se distinguent que par leurs feuilles plus ou moins 
lobées, à surface glabre, velue, cotonneuse, rude ou glutineuse; 
leurs involucres sont plus ou moins lancéolés, leurs pétales plus ou 
moins foncés, et enfin leurs pédoncules plus ou moins nombreux dans 
la même aisselle; c'est pourquoi on doit les considérer, selon l'opinion 
de ce même botaniste, comme des variétés produites par la culture, 
ou des fécondations adultérines, et non pas comme des espèces pro- 
prement dites; d'autant plus que toutes, sans exception, sont origr- 
naires de la même contrée. 

Ces Malvastrum sont de petits arbrisseaux qui se développent sans 
cesse lorsque leur végétation n’est pas suspendue par le froid, et 


— 414 — 


dont les pédoncules effilés sont articulés dans leur milieu ; leurs feuil- 
les, pourvues à la base de deux bractées et plissées irrégulièrement 
en deux dans la préfoliation, se recourbent pour protéger les fleurs ; 
les calices portent des écailles nectarifères, correspondantes aux cils 
des pétales, et l'humeur miellée s’infiltre par un conduit semblable à 
celui des autres Mauves ; les stigmates, qui sortent un peu après l'émis- 
sion du pollen, sont de petites têtes papillaires d’un beau rouge, et 
non pas des bandes latérales, comme dans la plupart des autres Mauves ; 
ces têtes s'inclinent et se serrent contre les anthères pour mieux rece- 
voir le pollen. 

La seule espèce que je veuille mentionner ici est le Balsamica, petit 
arbrisseau à feuilles légèrement pétiolées, quinquélobées et tronquées ; 
ses fleurs sont solitaires aux aisselles supérieures ou au sommet des 
rameaux, et ses stigmates , au nombre de huit à dix, ont la fécon- 
dation directe; néanmoins l'appareil des poils et des glandes existe 
au fond de la corolle; ses feuilles et ses calices portent même des 
glandes sessiles, résineuses et un peu gluantes auxquelles la plante 
doit son nom. 

Enfin , le dernier groupe est celui des Multiflores, ou des Malvas- 
trum , à feuilles anguleuses, fleurs rougeâtres ou blanches, pédoncules 
axillaires et multiflores; ces plantes, dont six sont originaires du 
Pérou, et une du Mexique, se séparent de toutes les autres du même 
genre, par leurs pédoncules ramifiés et chargés d'un plus ou moins 
grand nombre de fleurs ordinairement assez petites. J'y distingue trois 
types : 1° celui des Frutescentes, à feuilles anguleuses et pédoncules 
paniculées, qui comprend trois espèces : le Lactea, le Capitata et le 
Miniata; 2° celui des Herbacees , à tige droite, épis axillaires et uni- 
latéraux, formé de deux espèces homotypes : le Limensis et le Peru- 
viana; 3° Y Operculata, à carpelles recouverts, comme dans le Stegia ; 
et qui pourrait bien un jour former un genre; enfin l’Acaulis, plante 
fort élégante, qui croit sur les Andes, et dont les pédoncules radi- 
caux sont multiflores ; exemple rare de déviation dans un genre dont 
les espèces sont d'ailleurs si ressemblantes. 

Le Miniata a Vinvolucre sétacé et caduc, et le Limensis, ainsi que 
le Peruviana, que j'ai observés vivants, ont une fécondation directe, 
des stigmates en tête repliés sur les anthères encore chargées de leur 
pollen, qui tombe dans le fond de la corolle et dans les fossettes nec- 
tarifères remplies de poils humides et grillés ; ensuite la fleur se res- 
serre, et les stigmates, pressés de toute part par le pollen des anthères 
humides, sont infailliblement fécondés. Le fruit du Miniata renferme , 
sous une forme arrondie et semblable au Spkæroma, un grand nombre 


— 415 — 


de carpelles serrés et dispermes ; maïs le calice du Limensis est angu- 
leux et ses carpelles sont monospermes. 

J'ai remarqué que, dans le Zactea, les pédoncules grandissaient 
pendant la maturation, et que les fleurs trop entassées s'isolaient ainsi 
les unes des autres. 

La seconde section des Muuves, ou celle des Maluchia, ne contient 
que deux espèces homotypes originaires de l'Ile-Bourbon, dont l'in- 
volucre a cinq ou six folioles, et dont les cinq carpelles séparés sont 
monospermes et indéhiscents. 

La troisième, ou celle des Sphæroma, compte déjà dix ou douze 
espèces, dont je réunis les cinq du Prodrome sous trois types; le 
premier est représenté par l’Angustifolia a feuilies allongées et recou- 
vertes de poils cotonneux, et calice chargé à la base d’une couronne 
écailleuse et nectarifère, qui imprègne de son humeur les cils des pé- 
tales ; les stigmates sont papillaires et recourbés sur les anthères qui 
répandent une poussière jaunâtre à granules très-petits. Le second type 
des Sphæroma est l'Elegans, du Cap; et le troisième est l’Umbellata, 
remarquable par ses feuilles arrondies, à cinq lobes, ses pédoncules 
ombellifères et surtout ses grandes fleurs d’un violet ardent. Jussieu 
fils a fait de cette division son genre Sphæralcea , qu'il distingue des 

Mauves, par son péricarpe globuleux, renfermant dans une enveloppe 
plusieurs carpelles renflés et polyspermes. 

La section des Modioles, la dernière du genre, comprend quatre 
ou cinq espèces originaires des contrées chaudes de l'Amérique, et 
qu'on reconnaît à leurs carpelles dispermes, à deux valves aristées 
au sommet et recourbées en dedans, de manière à former ainsi deux 
demi-loges; elles sont, je crois, homotypes, annuelles ou vivaces, à 
fruits presque toujours velus, feuilles lobées, tiges couchées et pé- 
doncules uniflores. La principale est le Caroliana , à fleurs rougeûtres, 
stigmates veloutés et pourprés, et carpelles fortement aristés. Son 
involucre est formé de trois folioles avortées, sétacées et prompte- 
ment caduques; sa fécondation directe s'accomplit après la floraison, 
lorsque les pétales, déjà flétris, se rapprochent et serrent fortement 
les anthères contre les stigmates; le fond de la fleur est entièrement 
recouvert de pollen; les carpelles sont d'abord réunis en sphère aplatie 
et leurs arêtes ne paraissent que tard. 

Ce genre contient des espèces frutescentes et des herbacées vivaces 
ou annuelles, à tiges dures et feuilles épaisses, qui supportent assez 
bien les intempéries ; les espèces vivaces, comme la Mauve à feuilles 
rondes , donnent chaque année de leur collet des pousses qui couvrent 
la terre en automne; ou bien, comme dans le Caroliana, s'étendent 


— 416 — 


en rejets d'où partent sans cesse de nouvelles radicules; celles dont les 
tiges résistent à l'hiver, redonnent souvent des mêmes aisselles, comme 
les Mauves du Cap, des fleurs et des rameaux floriferes. 

Ces plantes ont des caractères qui semblent les rapprocher des végé- 
taux arborescents ; leurs pédoncules se rompent, et leurs graines se 
répandent sans que les rameaux qui les ont portées paraissent en 
souffrir; l'on trouve même, sur plusieurs espèces herbacées, et en 
particulier sur le Malpa sylvestris, ces lenticelles qui recouvrent les 
troncs des arbres. 

Les feuilles sont alternes, pétiolées, plus ou moins articulées sur 
leurs tiges et plissées sur leurs nervures ; leurs pétioles ordinairement 
assez allongés, se renflent vers le sommet et se fléchissent en dehors 
ou même en dedans, comme dans le Sylvestris, et l'on aperçoit pres- 
que toujours, à l'extrémité de leurs principales dentelures, des glandes 
verdâtres qui, dans le Malva lactea, occupent tout le contour. 

On ne peut considérer ces feuilles, presque toujours recouvertes de 
poils plus ou moins étoilés, comme primitivement formées d'autant de 
folioles digitées qu'elles portent de lobes ou de nervures ; en effet, 
ces nervures, comme celles des autres feuilles, donnent ici naissance à 
des nervures secondaires et pennées qui s'anastomosententre elles aux 
points de soudure. On peut même ajouter que leurs plissements con- 
firment cette idée; car ils ont toujours lieu sur les nervures princi- 
pales. J'ai devant les yeux des feuilles de Mauves, séparées en folioles 
distinctes et pétiolées, et cette décomposition est ici l'ouvrage d'un 
insecte. 

Les pédoncules des Mauves, soit uniflores, soit multiflores, sont 
articulés à différents points de leur longueur; lorsqu'ils sont réunis 
dans la même aisselle, ils grandissent les uns après les autres, et se 
redressent, à l'époque de la floraison, en conservant à peu près la 
même direction jusqu'à la fin ; cependant ils se réfléchissent dans quel- 
ques espèces à tige rampante, comme le Rotundifolia, ou se recourbent 
en arc comme dans le Sherardiana. 

L'inflorescence des Mauves à pédoncules solitaires est simplement 
centripète ou indéfinie; mais celle des espèces à pédoncules réunis 
dans la même aisselle est un peu plus compliquée, parce que leurs 
fleurs ne s’y épanouissent que successivement. Ces fleurs sont d'autant 
plus petites qu’elles sont plus nombreuses, car autrement elles se 
seraient mutuellement embarrassées ; leurs pétales, peu sensibles à 
l'action de la lumière, s’étalent au jour et se referment à l'obscurité; 
mais cet effet n’est pas toujours très-marqué, et la fleur reste à demi 
ouverte jusqu'à ce qu'elle se roule en se desséchant. 


— 417 — 


L'involucre protége et recouvre ordinairement les fleurs jusqu'à 
leur développement; ses folioles s'écartent ensuite pour toujours, 
tandis que les sépales se rapprochent et se resserrent après la féconda- 
tion et la chute de la corolle; quelquefois même ils se détruisent au 
lieu de s’étaler, lorsque les carpelles se détachent de leur axe. L'invo- 
lucre, qui paraît un organe accessoire, puisque plusieurs genres de 
Malvacces en sont dépourvus, est si constant dans les Mauves, qu'il 
sert en grande partie à caractériser leurs sections ; ainsi, dans les 
Malvastrum, il est formé de trois folioles; de deux ; dans les Bibrac- 
téolees , et de cinq ou six dans les Maluchies. 

Le calice est en estivation valvaire ordinairement relevée en arête 
sur les bords ; la corolle, au contraire, est tordue de droite à gauche; 
les pétales, toujours soudés à la base et au tube staminifère avec 
lequel ils tombent, sont ordinairement échancrés au sommet, et 
rayés dans leur longueur ; ils se séparent au-dessus de la base, où ils 
sont toujours bordés de ces poils dont nous avons déjà assigné 
l'usage. 

Les anthères extrorses , comme toutes celles des Maivacees , s'ou- 
vrent, sans se rouler, par une fente longitudinale qui les partage en 
deux parties égales , et laissent échapper un pollen sphérique, dont 
les molécules visqueuses et hispides, se groupent en grappes lâches, 
sur les valves de l’anthère défleurie. J'ai mdiqué ailleurs le but de ce 
singulier arrangement. 

Les stigmates se présentent sous deux formes; tantôt, comme 
dans les Sphæroma, quelques Mulliflores telles que le Lactea , et peut 
être encore d'autres espèces, ils forment une tête sphérique et pa- 
pillaire ; tantôt, et pour l'ordinaire, ils sont disposés en bandes laté- 
rales, velues et internes ; cette différence en produit une autre dans 
la fécondation : les stigmates latéraux et allongés ne paraissent que 
tard au-dessus des anthères, sur lesquels ils se contournent et se dé- 
jettent de manière à représenter une tête chauve au sommet de la 
colonne anthérifère dont ils recoivent ainsi facilement le pollen, 
comme on peut le voir dans le Malva rotundifolia, le Moschata , 
l'Aicea , etc.; souvent aussi ils sortent du milieu des anthères , et ils 
se recourbent sans se contourner ; enfin les anthères du WMalva lactea 
s'inclinent vers le fond de la corolle, avant de répandre leur poussière. 

Les carpelles des Mauves varient beaucoup en nombre et en struc- 
ture; on peut, Je crois, y reconnaitre deux formes principales : celle 
des carpelles réunis en tête sphérique qui caractérise les Sphæroma , 
et celle des carpelles verticillés qui appartiennent aux trois autres 
sections ; mais, dans les Maluchia, ils sont séparés et au nombre de 

1. 27 


Sr 


cinq, et dans les Madivles, ils sont bivalves, dispermes, à. valves 
biaristées et réfléchies; dans les Malvastrum, ils sont étroitement 
verticillés autour d’un axe central, dontils se séparent ordinairement 
sans s'ouvrir; cependant l’on observe presque toujours les traces de 
la suture des deux valves dont ils étaient primitivement formés, et 
l'on remarque quelquefois, comme dans le Malva alcea, le carpelle 
détruit sur les côtés, et couché sur le dos de la graine dont il se sépare 
facilement. 

Les graines prennent la forme du carpelle, et ressemblent à un 
coin dont le tranchant est placé du côté de l'axe, et la tête du côté 
opposé ; leur point d'attache, que l'on reconnait très-bien, se trouve 
vers le bas du tranchant, et le raphé se prolonge jusqu’à la base, où 
est logée la radicule dont l'extrémité amincie communique avec la 
cicatrice. Ces graines ne sont pas toutes fertiles, et l'on reconnait les 
stériles à l'aplatissement du carpelle resserré et comme étouffé par 
les carpelles voisins. 

La dissémination varie selon la forme du fruit : dans les Malvastrum 
de tous les groupes, les carpelles, qui sont monospermes et en général 
indéhiscents, se sèment avec leurs graines ; il en est de même des 
Maluchia, dont les cinq carpelles monospermes sont indéhiscents ; 
mais les Modiola, dont les carpelles sont dispermes, s'ouvrent en 
deux valves, et nous avons vu plus haut la dissémination des Sphæ- 
roma, dont les carpelles polyspermes sont enveloppés par une mem- 
brane épaisse qui est sans doute un prolongemont du torus. 

Kocx décrit le fruit des Malvacees comme formé d'une capsule 
orbiculaire et multiloculaire, dont les dissépiments sont les bords 
rentrants des valves et dont les semences sont attachées à un axe 
central, et il ajoute que ces valves, séparées les unes des autres, 
séparent à leur tour les carpelles. Mais cette manière de concevoir 
l'organisation du fruit ne peut guère s'appliquer aux Spkæroma à 
carpelles réunis en sphère et recouverts d'une enveloppe, non plus 
qu'aux Maluchia dont les carpelles sont séparés, ou aux Modiola où 
ils sont bivalves et dispermes. Elle ne concerne donc que les Bismalvæ 
et les Fasciculatæ qui forment les deux sections de son genre. 

Le problème le plus curieux à résoudre ici, c'est celui des granules 
sphériques du pollen; s’ouvrent-ils d'eux-mêmes, et répandent-ils 
leurs boyaux sur les stigmates voisins, par l'effet de leur élasticité ? 
S'ouvrent-ils par l'intermède de la liqueur miellée, et lancent-ils égale- 
ment leurs boyaux sur les corps environnants? Il faut sans doute 
Yintervention de l'humeur miellée dans le grand nombre des cas. 


— 419 — 


TROISIÈME GENRE. — Âéaibelia. 


Le Xïitaibelia se distingue par son involucre de sept à neuf divi- 
sions profondes, et ses carpelles capsulaires monospermes, réunis en 
une tête à cinq lobes. 

Ce genre, si remarquable, est formé du Xitaibelia vitifolia , herbe 
vivace, élevée , toute recouverte de poils glanduleux; ses feuilles, à 
cinq lobes aigus et dentés, ont leurs pétioles articulés à la base, ren- 
flés et relevés au sommet; ses stipules sont bifides, son involucre 
agrandi et ses lobes légèrement dentés; son calice, plus petit que 
l'involucre, porte sur chacun de ses lobes un nectaire lamelleux, sur 
lequel reposent les poils de la corolle sans cesse -humectés par l’hu- 
meur miellée, et recouverts ici par le pollen jaunàâtre des anthères 
contournées comme celles des autres Malvacees ; les styles, terminés 
par de petites têtes papillaires et un peu cylindriques, ne paraissent 
qu'après l'ouverture des anthères dont les granules sont très-petits. 

Mais l'organe le plus remarquable du Xitaibelia, c'est sa capsule 
formée de la réunion de cinq carpelles bosselés et adhérents seule- 
ment entre eux par leur partie intérieure et centrale ; chacun de ces 
carpelles renferme à peu près dix graines disposées sur deux rangs, 
èt revêtues d'une enveloppe propre qui, à la maturité, s'ouvre en 
deux valves pour laisser échapper une graine disposée à peu près 
horizontalement, et pourvue, comme celles des Mauves , d'un ombilic 
et d'un raphé. On peut considérer aussi cette capsule comme ayant 
une conformation moyenne entre celle des Mauves et celle des 
Hibiscus. À la dissémination, le pédoncule ne se désarticule point. 
et l'involucre ne s'étale pas plus que le calice; mais ils se détruisent 
l’un et l’autre, et les graines sortent à travers leurs débris. Le Xitaibelia 
a été trouvé dans l'Esclavonie par Wazpsrerx et Krra1Ber, et se cultive 
aujourd'hui dans tous les jardins ( Voy. Flore de Hongrie ). 


QUATRIÈME GENRE. — Ælthæa. 


L'Althæa porte un involucre monophylle de six à neuf divisions, 


des carpelles capsulaires, monospermes et disposés circulairement 
autour d'un axe central. 


On partage ce genre en trois sections : 
1° Les Althæastrum, carpelles échancrés, sans rebords membra- 
neux , involucre à huit ou neuf divisions ; 


— 420 — 


2° Les Alcea, carpelles entourés d'un rebord membraneux et 
sillonné, involucre à six ou sept divisions; 

3° Les Alphæa, carpelles ridés et non échancrés, involucre à cinq 
divisions. 

Les Althæastrum comprennent jusqu’à présent six espèces euro- 
péennes, que je divise en quatre types: 1° celui de l'4/hæa officinalis, 
dont les stigmates ne se développent que tard, et auquel j'associe le 
Taurinensis et le Narbonensis, plantes élevées, à feuilles mollement 
tomenteuses, plus ou moins lobées et pédoncules axillaires, multi- 
flores, tantôt plus courts, tantôt plus longs que les pétioles ; 2° celui 
du Cannabina, qui ne comprend qu’une seule espèce, à tige roide et 
divariquée, feuilles palmées, et pédoncules axillaires ordinairement 
biflores ; 3° celui de l'Hirsuta, à feuilles cordiformes à la base et quin- 
quélobées au sommet, à poils rudes, pédoncules longs et solitaires ; 
4° celui de l'Althœa Ludwigii, que je ne connais pas bien, mais qui 
paraît différer des précédents par ses feuilles glabres, cordiformes, 
lobées et dentées, ainsi que par ses pédoncules petits et réunis au 
nombre de deux à cinq dans la même aisselle. Les deux premiers types 
renferment des herbes vivaces, les deux autres n'en contiennent que 
des annuelles. 

Les Althæastrum ont l'apparence des Mauves, et les calices, chargés 
d’écailles nectarifères, sur lesquelles reposent les poils blanchätres et 
humides de la corolle. Les stigmates qui sortent du sommet, plus 
tôt, ou plus tard, selon les espèces, sont latéraux, papillaires, 
allongés, et se replient différemment pour mieux recevoir le pollen 
globuleux ; mais, dans les espèces du premier type, les corolles ne se 
referment pas, tandis que dans le Cannabina elles se resserrent après 
l'émission du pollen, et favorisent ainsi la fécondation. L’Hirsuta a 
des stigmates latéraux et velus qui s’étalent avant l'émission du pollen, 
et une corolle qui s'ouvre le matin et se referme le soir. Je n'ai pas 
observé vivante l’Althæa Ludivigii. 

Les Alcees, ou la seconde section des 4lthæa, comprennent onze 
espèces, la plupart originaires de l'Orient, et dont une seule, le 
Pallida, appartient à l'Europe ; elles sont toutes annuelles ou bis- 
annuelles, à feuilles cordiformes, arrondies, plus ou moins lobées, 
à tiges élevées, fleurs grandes et solitaires dans les aisselles supérieures. 
Le type de la plupart d’entre elles, est l'4{{{hæa rosa, plus connu des 
jardiniers sous le nom de Passe-rose ou Rose tremière, et qui décore 
depuis le commencement de l'été, nos grands jardins de ses magni- 
fiques grappes de fleurs jaunes, blanches, rouges, violettes, simples 
ou doubles. Cette belle espèce, sous laquelle on doit ranger le Pallida 


— A21 — 


de là Hongrie, le Sinensis, le Ficifolia et peut-être encore plusieurs 
autres, a, comme le reste des Malvacées , son efflorescence centripète; 
ses feuilles, irrégulièrement plissées, sont articulées sur une console 
fort saillante, ses tiges portent des lenticelles assez grandes quoique 
peu visibles; ses fleurs sont pourvues d'un assez long pédoncule, et 
enfin ses calices sont couverts d’écailles nectarifères correspondantes 
aux poils cotonneux des pétales; sa fécondation n'est pas toujours 
directe, car lés anthères répandent souvent leurs granules sur le fond 
de la corolle, avant que les styles soient sortis de leur fourreau, et 
l'organe stigmatoïde, qui réside essentiellement sur le côté interne 
des styles, ne se développe pleinement que lorsqu'il peut s'étendre en 
plein air ; il recoit alors les granules attachés encore aux anthères, et 
la fleur qui se ferme à cette époque aide aussi à la fécondation. 

Les carpelles sontnombreux et recouverts exactement par le calice; 
la colonne pistillaire ne s'enfonce pas jusqu’au torus, mais elle s’étale 
latéralement pour atteindre les graines recourbées et comprimées, 
dont l'ombilic et le raphé sont placés à la manière ordinaire, et qui 
se sèment étroitement unies à leurs carpelles ; les fleurs non fécon- 
dées tombent de bonne heure en se rompant à la base, et le pédon- 
cule endurci et grossi adhère à l’aisselle long-temps après la dissémi- 
nation, quoiqu'il paraisse enflé et comme articulé à son milieu; les 
stipules de sa base sont maltifides. 

Le Rosa sinensis a une fécondation différente, car son pistil 
s'allonge beaucoup, et ses stigmates se déjettent sur les anthères 
placées à différentes hauteurs le long du tube staminifère. 

Les Alphæa forment deux espèces, qui ne sont peut-être que des 
variétés, et dont l’une appartient au Cap, et l’autre aux îles Bourbon ; 
Je ne connais aucune des deux. 

Les Althæa forment, comme on le voit, un genre fondé plutôt sur 
le nombre des divisions de l'involucre que sur des caractères essentiels 
et organiques; ce qu'elles ont en commun, ce sont des carpelles mo- 
nospermes et verticillés sur un axe central, des stigmates latéraux et 
des fleurs quelquefois très-grandes, maïs qui, à quelques exceptions 
près, sont dépourvues de mouvement, et ont toujours leurs pédoncules 
redressés. La première section appartient exclusivement à l'Europe; 
Ja seconde à l'Asie, et la troisième à l'Afrique. 

L'Alihæa hirsuta , qui est bien un type dans le genre, a les fleurs 
ouvertes le jour et fermées la nuit ; à l'époque de la fécondation, qui 
dure plusieurs jours, ses stigmales unilatéraux, papillaires, velus et 
déjà saillants, se chargent dans toute leur longueur de granules sphéri- 
ques; les anthères, observées lorsqu'elles étaient à peine visibles, 


— 422 — 
m'ont paru nettement biloculaires, comme celles des autres 4lhæa, 
qui ne deviennent uniloculaires que par dédoublement. 

On apercoit très-bien dans l’4/thæa rosa ou le Passe-rose , le canal 
qui contient l'humeur miellée, depuis l'écaille nectarifère du calice jus- 
qu'au dessous de l'élégant grillage qui réunit à leur base les lobes de la 
corolle. 

L'Althæa cannabina m'a présenté un phénomène qui m'a paru nou- 
veau dans les Walvacees, c'est celui d'un fil roide ou d'une nervure 
attachée à l'axe séminifère et appliquée par son autre extrémité au dos 
de la graine ; à la dissémination, le carpelle flotte suspendu à ce fil, qui 
se prolonge en longueur dans toute son étendue et se déroule insen- 
siblement; on ne remarque rien de semblable dans l’Hirsuta ni dans 
le Rosea, dont les carpelles se détachent successivement de leur axe 


par la simple} agitation de l'air, et s'ouvrent ensuite par leur rai- 
nure longitudinale, 


CINQUIÈME GENRE. — Lavatera. 


Les Lavatères ont un involucre de trois à six divisions peu pro- 
fondes, des carpelles monospermes et disposés circulairement autour 
d’un axe différemment conformé. 

On les partage en quatre sections, qui feront peut-être un jour 
autant de genres : 

1° Les Sfegia, axe ou réceptacle du fruit étendu au sommet en un 
disque qui recouvre les carpelles ; 

29 Les Olbia, réceptacle du fruit central, conique et saïllant; 

3° Les Axolophes, réceptacle tronqué au sommet et prolongé sur 
les côtés en autant d'arêtes membraneuses qu'il y a de carpelles; 

4° Les Anthema , réceptacle petit, non saillant, ‘creusé en fossettes 
et dépourvu d’arêtes. 

Les Stegia comprennent deux espèces : le Trimestris, de la Sar- 
daigne, de la Syrie et de l'Espagne, et le Pseudo-Olbia, dont la patrie 
est inconnue et qui se cultive dans quelques jardins. Le Trémestris, 
ainsi appelé parce qu'il est annuel et fleurit très-promptement, forme 
des touffes brillantes de feuilles d’un beau vert, couronnées de grandes 
fleurs roses ou blanches et météoriques; il est surtout remarquable par 
l'expansion de son axe pistillaire qui recouvre entièrement les car- 
pelles, et qui, dans le Pseudo-Olbia, est beaucoup moins étendu ; le 
calice de ces plantes porte des écailles nectarifères, recouvertes par les 
poils cotonneux des pétales; leurs styles sortent tard, et leurs stig- 
mates allongés et papillaires ne s’étalent que lorsque les anthères ont 


répandu leur pollen au fond de la corolle; en sorte que la fécondation. 
ne peut guère être immédiate ; le pédoncule, selon CavaniLres, n'est 
pas articulé, et le pistil se rompt de bonne heure au-dessus du disque. 

En examinant comment pouvait s'opérer la dissémination, j'a 
trouvé que le plateau ne tombait pas, mais que les carpelles striés en 
largeur et ouverts du côté de l'axe, se détachaient de dessous l’oper- 
cule, et se répandaient débarrassés de leur enveloppe cartilagineuse, 
en même temps que l'opercule se noircissait et abandonnait son axe. 

Les pédoncules sont quelquefois soudés au pétiole jusqu'à une cer- 
taine hauteur, et par conséquent ne se désarticulent pas ; les calices 
ne sont pas non plus exactement valvaires , et leurs lobes débordent 
sur les côtés et principalement au sommet. 

La seconde section, ou celle des Olbia, renferme plusieurs types, 
dont le premier, ou celui des espèces arborescentes, comprend le 
Lavatera Phænicea, des côtes septentrionales de l'Afrique et de Ma- 
dère, remarquable par ses grandes fleurs écarlates, portées de trois à 
cinq sur des pédoncules solitaires. Le second est celui des Olbia pro- 
prement dits, à fleurs solitaires plus ou moins pédonculees, feuilles 
lobées et cotonneuses. 

Le troisième est celui des espèces à fleurs terminales, disposées en 
grappes, telles que le Lavatera Lusitanica et le Micans , ainsi appelé 
des points brillants qui recouvrent ses feuilles à sept lobes plissés et 
et cotonneux. Enfin le quatrième est formé des espèces à tiges her- 
bacées et fleurs ordinairement solitaires , mais quelquefois réunies en 
fascicules, telles que le Thuringiaca, le Biennis, et le Punctata, dont 
l'involucre est relevé en chapeau ; on peut y ajouter peut-être le Flava 
de la Sicile à fleurs jaunes et agrégées, et enfin le P/ebeia de la Nou- 
velle-Hollande, à feuilles quinquélobées, pédoncules axillaires agrégés, 
stigmates allongés et velus sur leurs bords. 

Ces diverses plantes vivent en général sur les côtes de la Méditer- 
ranée, et leur fécondation est semblable à celle des Mauves ; leur calice 
est nectarifère, les pétales sont ciliés à la base, les stigmates latéraux 
sortent plus tôt ou plus tard du fourreau des étamines, enfin les car- 
pelles, plus ou moins nombreux et manifestement bivalves, sont 
engagés autour d'un axe qui se relève en cône, et porte à son sommet 
ja cicatrice du style rompu. 

Les Axolophes sont caractérisés par leur réceptacle tronqué au 
sommet et prolongé latéralement en autant d'arêtes qu'il y a de 
carpelles ; leur principale espèce est le Maritime, à pédoncules soli- 
taires et feuilles cotonneuses, obscurément lobées; les trois autres 
sont le Triloba, à pédoncules agrégés, de la Sardaigne et de l'Espagne; 


Le. ADD — 


l'Oblongifolia, à pédoncules solitaires, de Boissier, et le Subovata des 
côtes d'Afrique, à feuilles aussi tomenteuses mais plus fortement 
lobées et pédoncules solitaires ou géminées; toutes sont homotypes, 
frutescentes et recouvertes de poils cotonneux et étoilés; leur axe 
central ou le réceptacle du fruit se prolonge à la base en autant de 
rayons qu'il y a de carpelles, ou plutôt d'intervalles entre les carpelles. 
J'ai remarqué que le Maritima, pendant la fécondation, avait son tube 
staminifere déjeté. 

Enfin les 4nthema comptent cinq espèces méditerranéennes, arbo- 
rescentes ou herbacées, mais vivaces et qui ont aussi les feuilles coton- 
neuses plus ou moins lobées et les pédoncules agrégés, excepté 
l'4mbigua des environs de Naples, où ils sont solitaires; l'espèce la 
plus répandue est l'Arborea, dont les nectaires sont très-marqués , et 
dont les calices très-courts ne recouvrent pas entièrement le fruit. 

Dans la fécondation de la plupart de ces plantes, les stigmates sor- 
tent du milieu des anthères fleuries sur lesquelles ils se couchent pour 
mieux recevoir le pollen, et les poils humides nectarifères du fond de 
la corolle remplissent leur fonction accoutumée. 

Pendant la maturation, les calices restent redressés et appliquent 
leurs lobes sur le péricarpe qu'ils protégent ; ensuite ils se dessèchent 
et deviennent comme papyracés; enfin les carpelles s'ouvrent par la 
base, et les graines s’échappent les unes après les autres du milieu de 
leur enveloppe demi-élastique. 

Les Lavatères, assez semblables pour leportetl'apparenceextérieure, 
diffèrent beaucoup, quant à la forme de leur axe central que j'ai décrit 
dans les deux premières sections, et qui est comme ailé dans la troi- 
sième; elles s'éloignent encore de la plupart des Mauves par la forme 
de leur involucre qui est lâche, monophylle et fortement lobé. 

Leurs nombreuses espèces appartiennent la plupart à l'Europe 
australe et croissent le long des haies ou sur les rochers maritimes ; 
les herbacées ne fleurissent que tard, les autres poussent de bonne 
heure des rameaux aux aisselles des tiges stériles de l’année précédente. 
Les fleurs, grandes et rougeâtres, ne sont presque jamais odorantes. 

Je connais peu de faits particuliers sur les Lavatères, qui, dans 
les trois dernières sections, sont à peu près dépourvues de mouve- 
ments organiques. J'ai noté que les pédoncules sont ordinairement 
articulés dans le voisinage du calice; que l’on apercoit cà et là sur les 
tiges non annuelles des cavités elliptiques qui sont des restes de lenti- 
celles, que le Lavatera micans, et quelques autres espèces voisines, 
ont leurs feuilles parsemées en-dessus de points brillants; que les 
carpelles varient considérablement en nombre, selon les espèces ; 


— 495 — 
qu'ils sont tantôt nus sur les côtés, comme dans le Lavatera de Thu- 
ringe, l'Ambigua, etc., tantôt entièrement recouverts, ainsi que 
dans l’Arborescens , etc.; qu'on y trouve quelquefois les traces de 
cette nervure que j'ai remarqüée dans l'Althæa cannabina, et qu'ils 
sont enveloppés d'ordinaire jusqu’à la dissémination par le calice 
accompagné de son involucre. 

Cavanirres observe que, dans la dissémination, les graines de 
l'Olbia sont comme renfermées dans une nacelle, parce que la partie 
inferieure de leur enveloppe est restée adhérente à l’axe séminifère, 
et CaMBEssÉDEs, dans sa Flore des Baléares ( Annales du Museum, 
14, pag. 335 ), fait remarquer que, quoique son Minoriensis ait, 
comme le Flava et l'Hispida de Des Fonraixes, l'involucre tripartite 
des Malva, on doit cependant rapporter ces trois plantes aux Lavatera, 
à cause de la forme étroite et écartée de leurs divisions calicinales. 

Je termine en observant que, dans ce genre, la dissémination des 
carpelles est fort variée, et ne ressemble pas en général à celle des 
autres Malvees. 


SIXIÈME GENRE. — ]Malachra. 


Le Malachra a un involucre général de trois à cinq pièces, des fleurs 
en tête, séparées par des folioles sétacées qui sont autant de stipules 
des feuilles de l'involucre, ou de feuilles avortées, cinq ou six car- 
pelles monospermes autour d’un axe central. 

Ce genre compte treize à quatorze espèces originaires du Brésil, 
des Caraques et surtout des Antilles, presque toutes annuelles, et dont 
le caractère est un involucre commun; on peut y distinguer deux 
types : celui à feuilles d'A/cea, qui comprend trois ou quatre espèces 
assez rapprochées, et celui à feuilles ovales ou cordiformes, qui paraît 
devoir être divisé en deux ou trois sous-types. 

Les Malachra ont les fleurs petites, généralement jaunes, quelque- 
fois cependant blanchâtres ou roses; leurs carpelles s'ouvrent, dit 
Des Rousseaux , dans le Dictionnaire encyclopédique, par le côté 
intérieur, et CavaniLces observe que le Malachra capitata n’épa- 
nouit ses fleurs qu'une seule fois et pendant six ou huit heures dans 
nos climats. On ne peut guère douter qu'il n’en soit à peu près de 
même des autres, dont les fleurs sont toutes renfermées dans un invo- 
lucre commun; quelques espèces, comme l'Urens, ont les poils des 
Orties, les tiges et les feuilles d’un très-grand nombre sont velues 
ou même rudes au toucher. 


Le Malachra heterophy lla est une plante annuelle peu élevée, à tige 


— 426 — 

courte, épaisse et ramifée ; ses feuilles sont hérissées et divisées en 
cinq lobes irrégulièrement dentés ; ses fleurs roses et réunies en tête 
involucrée , souvent double ou triple au sommet des rameaux, ont 
un calice campanulé à cinq divisions, entouré d'ur involucre particu- 
lier, velu et sétacé; elles s'ouvrent médiocrement dans les heures 
chaudes du jour, et ont un calice à rebord nectarifère, des pétales ciliés 
et humides à la base; les anthères à deux divisions distinctes et comme 
lobées , se déijettent fortement sur le fond de la corolle, en même 
temps que les styles sortent de leur fourreau et s’élèvent perpendicu- 
lairement; les stigmates, comme dans les Hibiscus, sont des disques 
aplatis, bordés de cils papillaires; les carpelles, au nombre de six, 
sont monospernes et s'ouvrent du côté intérieur. 

Cavanizes, qui a donné la description et la figure de plusieurs 
espèces, observe que leur involucre est velu ou quelquefois plumeux. 


SEPTIÈME GENRE. — Ürena. 


L'Urena a un involucre à cinq divisions, plus grandes que le calice, 
au sommet du tube staminifère, cinq carpelles rapprochés, mono- 
spermes et souvent hérissés de poils piquants et rayonnants. 

Les Urena sont des arbrisseaux ou des herbes annuelles et vivaces, 
presque également répandues dans les deux Indes et toutes étran- 
gères à l'Europe. On en compte à peu près vingt espèces ou variétés, 
que l’on divise un peu artificiellement en deux groupes : 1° celui à 
feuilles entières ou légèrement trilobées ; 2° celui à feuilles profon- 
dément lobées et sinuées; ce dernier ne contient que six espèces 
homotypes qui ne sont peut-être la plupart que des variétés, quoi- 
qu’elles habitent des contrées différentes. 

On les rencontre peu dans les jardins d'ornement , parce qu'elles 
n'ont rien de remarquable dans le port, et que leurs fleurs manquent 
également d’éclat et d'odeur; toutefois elles présentent plusieurs par- 
ticularités physiologiques : ainsi, par exemple, leurs feuilles d'ordi- 
naire plus découpées au sommet qu'à la base, portent sur leurs ner- 
vures inférieures une ou trois glandes, d'où découle un suc propre; 
leurs carpelles sont ordinairement hérissés de piquants, et leurs stig- 
mates en tête sont formés par dix styles, qui se réunissent deux à deux 
avant d'arriver aux carpelles ; enfin, leurs fleurs, presque toujours 
axillaires, sont solitaires, géminées ou ternées , jaunes ou rouges ; 
leurs anthères sont réniformes et unilobées ; leurs carpelles indéhis- 
cents ont souvent les graines très-finement striées. 

Cavanizzes observe que le calice des Urena est chargé de cinq 


— 427 — 


glandes à sa base, ce qui suppose que les pétales sont ciliés, quoiqu'on 
n'apercoive pas dans les figures des auteurs, les poils humides du 
fond de la corolle. 


HUITIÈME GENRE. — Puvonia. 


Le Pavonia a un involucre de cinq à quinze folioles, cinq styles 
bifides terminés par dix stigmates, cinq ou très-rarement quatre car- 
pelles capsulaires, bivalves et monospermes. 

Ce genre se divise en trois sections : 

1° Les Typhalea , carpelles hérissés d’épines roides ; 

2° Les Malache , carpelles nus, involucre plus court que le calice ; 

3° Les Cancellaria, carpelles nus, involucre plus long que le calice. 

Les Pavonia, dispersés presque également dans l'Amérique du 
sud, les Indes orientales, les îles Bourbon et le Cap, sont des arbris- 
seaux ou des herbes vivaces et annuelles, à feuilles entières , rarement 
divisées ou lobées; les pédoncules, ordinairement axillaires, sont 
uniflores ou multiflores, quelquefois paniculés ou agglomérés, les 
corolles sont jaunes, safranées, blanches, roses, violettes, ou écarlates. 

Ils paraissent plus élevés dans l'organisation végétale que la plupart 
des plantes de la même famille; non-seulement leurs fleurs, qui se 
tournent vers la lumière, ne s'ouvrent que tard et tombent prompte- 
ment; mais leur pistil s'incline dans la plupart des espèces des trois 
sections, parce que les anthères sont dispersées sur toute la longueur 
du tube staminifère, et non pas réunies au sommet, et l'on voit 
même les stigmates se recourber pour recevoir le pollen globuleux 
et hérissé. 

Les carpelles des Pavonia sont de véritables capsules bivalves, 
articulées sur un axe central, et qui s'ouvrent à la dissémination, ou 
semblent s'ouvrir comme dans l’Hastata. Les Cancellaria présentent 
alors le joli phénomène de graines renfermées comme dans une grille 
et s'échappant à travers les barreaux des involucres qui ne s’écartent 
ni ne se détruisent. 

Les pédoncules sont ordinairement articulés ; dans quelques espèces, 
comme le Papilionacea, ils sont renflés et fort allongés, dans d'autres, 
par exemple, le Coccinea, ils se redressent en girandole au-dessous 
de la fleur. 

La section des Cancellaria est très-remarquable ‘par son involucre 
de huit à quinze folioles qui persistent après la fécondation, et forment 
une petite sphère grillée enveloppant les graines. J'ai devant les yeux 
un Cuncellaria annuel, à feuilles cordiformes et pendantes, qui porte 


— 128 — 


le nom de Pavonia rosea, à cause de ses fleurs roses, et qui me paraît 
très-peu différer du Zeylanica. Quand on veut saisir son fruit à travers 
les barreaux, on voit les cinq carpelles inermes dont il est formé se 
détacher séparément et disparaître entre les grilles. 

Le Pavonia hastata, qui appartient à la section des Malache et 
fleurit en été, a ses feuilles glanduleuses vernissées et fortement 
rabaissées sur leur pétiole renflé au sommet; l'involucre est égal au 
calice, et les fleurs roses et médiocres n’ont ni leurs pétales ciliés à 
la base, ni par conséquent leur calice à cinq écailles, quoiqu’on y 
apercçoive une couronne de glandes ; les stigmates, fort élevés au- 
dessus des anthères avant l'émission du pollen, sont des têtes papil- 
laires, toutes recouvertes d’un duvet violet, et qui sortent d’une 
gaine pentagone et comme ciliée sur les bords. 

La structure du fruit du Pavonia hastata est très-remarquable; 
l'ovaire, d'abord pentagone, est formé en apparence de cinq carpelles, 
qui, pendant la maturation, étalent insensiblement leur face exté- 
rieure, et finissent par présenter un péricarpe à cinq valves étalées par 
la sécheresse et refermées par l'humidité; on voit au centre les cinq 
carpelles attachés à un réceptacle étoilé et s'ouvrant à la base en deux 
valves; la semence, semblable à celle des Malvacees, a un ombilic 
enfoncé et latéral. 


NEUVIÈME GENRE. — Malvaviscus. 


Le Malvaviscus a un involucre polyphylle et des pétales presque 
toujours auriculés et redressés en estivation enveloppante, dix stig- 
mates et cinq carpelles ordinairement réunis en un péricarpe baeci- 
forme à cinq loges. 

On le divise en deux sections : 

1° Celle des Achania, à pétales auriculés; 

2° Celle des Anotea, à pétales non auriculés, que je ne connais 
pas. 

La première comprend onze espèces ou variétés, qui sont de petits 
arbres ou des arbrisseaux, originaires des Antilles, de l'Amérique 
sud et surtout du Mexique; ils se distinguent par leurs fleurs allon- 
gées et comme demi-fermées, ordinairement redressées et quelquefois 
pendantes , et par leurs pétales non adhérents au tube staminifère. 

Les Malvaviscus ont le tube staminifère, tordu autour du pistil; les 
pédoncules articulés , ainsi que les feuilles dont le pétiole est naturel- 
lement renflé au sommet. 

Le Mollis, qui ne diffère presque de l’Arboreus que par ses feuilles 


— 429 —- 


moins rudes et ses sépales étalés en rosette et non redressés, a ses 
stigmates en cuillerons admirablement pénicillés sur leurs bords; ses 
filets réunis et tordus sur le style deviennent libres près du sommet, 
où ils se déjettent en étalant leurs anthères à deux loges séparées par 
une cloison ; le pollen se répand sur les stigmates et sur les corolles 
dépourvues de poils à leur base; les glandes qui entourent l'ovaire dis- 
tillent abondamment une humeur miellée qui pénètre dans l'intérieur 
de la fleur; la fécondation est donc directe, mais elle peut être aussi 
réciproque par le grand nombre de fleurs qui se développent à la 
même époque. 

La fécondation du Malvaviscus arboreus est aussi directe, parce que 
les pétales sont serrés contre le pistil; en sorte qu’il n’y a presque 
aucun espace libre en dedans de la fleur; on voit le style entouré de 
ses anthères et couronné de ses stigmates s'élever au-dessus de la fleur; 
les filets, étroitement réunis et roulés en spirale , se déjettent séparé. 
ment, et se terminent chacun par une anthère à deux valves, qui 
s'ouvrent horizontalement comme une coquille, et exposent long- 
temps à l'air leur pollen sphérique. Cette déhiscence a lieu au moment 
même où les anthères sortent de la corolle, et où la tête stigmatique 
à cinq lobes d'un beau rouge recoit immédiatement le pollen; le style 
ne m'a pas paru tordu comme les filets, et j'ai remarqué, autour du 
fruit, formé de cinq carpelles réunis, cinq belles glandes qui déposent 
leur humeur dans une fossette formée par les cinq oreilles des pétales; 
mais je n'ai trouvé aucun poil entre les lobes de la corolle. 

Ces magnifiques plantes décorent souvent nos serres, où l’Arboreus 
en particulier fleurit toute l'année. Je ne connais point encore 
la cause finale de la torsion de leur tube staminifère et de leurs 
pétales auriculés. Les espèces à fleurs pendantes, comme l’4rboreus , 
sont fécondées directement par la chute du pollen sur les stigmates 
aigrettés placés plus bas; le fruit, recouvert par le calice dans la matu- 
ration, est formé de cinq carpelles osseux, fortement soudés et mo- 
nospermes par avortement. Je n'ai pas vu la dissémination. 


DIXIÈME GENRE. — /libiscus. 


L'Hibiscus a un involucre ordinairement polyphylle, quelquefois 
monophylle ou formé d'un petit nombre de folioles, des pétales dé: 
pourvus d'appendices et adhérents au tube staminifère, cinq stigmates 
en tête, une capsule à cinq loges presque toujours polyspermes, et 
dont les valves sont loculicides, des graines réniformes, quelquefois 
laineuses ou furfuracées. 


— 430 — 


Ce vaste genre se divise en onze sections, qui formeront peut-être 
un jour autant de genres : 

1° Les Cremontia; corolle demi-fermée, comme celle des Malvavis- 
cus, mais dépourvue d'oreillettes, cinq stigmates et cinq loges poly- 
spermes ; 

2° Les Pentaspermum ; corolle étalée, capsule demi-cloisonnée, 
semences solitaires dans chaque demi-loge; 

3° Les Manihot ; capsules ou carpelles à semences nombreuses et 
glabres, involucre de quatre à six folioles, calice spathacé à cinq dents, 
fendu longitudinalement; 

4° Les Ketmia; corolle étalée, capsules ou carpelles à semences 
nombreuses et glabres, involucre de cinq à sept folioles et calice à cinq 
lobes, non fendu longitudinalement; 

5° Les Furcaria; capsules ou carpelles à semences nombreuses et 
glabres, folioles de l'involucre appendiculées ou fourchues au som- 
met ; 

6° Les Abelmoschus; corolle étalée, capsules oulcarpelles à semences 
nombreuses et glabres, ou marquées sur le dos d’une bande de poils, 
involucre de huit à quinze folioles entières ; 

7° Les Bombicelles ; corolle presque toujours étalée, carpelles po- 
lyspermes, étamines laineuses ou cotonneuses, involucre de cinq à 
dix folioles; 

8° Les Trionum; corolle étalée, carpelles à semences nombreuses 
et glabres, calice enflé pendant la maturation, involucre polyphylle. 

9° Les Sabdariffa; capsules à semences nombreuses et glabres, 
involucre polyphylle à plusieurs dents ou divisions; plantes herbacées 
ou annuelles ; 

10° Les Azanza; semblables aux Sabdariffa, mais arborescents 
ou frutescents ; 

11° Les Lagunaria; involucre à simple rebord, entier ou denté ou 
monophylle et caduc. 

La première section , ou celle des Cremontia , réunit douze espèces, 
la plupart arbrisseaux ou herbes vivaces, originaires des îles Bourbon, 
du Cap et du Sénégal; une seule se trouve aux Philippines, une autre 
aux Indes orientales, et deux seulement au Mexique; elles ne paraissent 
avoir de lien commun que leur corolle à demi fermée et non auriculée, 
car elles diffèrent par leur involucre, ainsi que par leurs feuilles ordi- 
nairement cordiformes et le nombre des fleurs réunies à chaque ais- 
selle; le pistil, tantôt saillant, tantôt renfermé, est le plus souvent 
droit, quelquefois incliné, comme dans l'Urens ; les anthères, rangées 
élégamment autour du tube roulé en spirale, dans le Spéralis , se re- 


— 431 — 


dressent aussi souvent et se dirigent du côté des stigmates; les pédon- 
cules articulés près de la fleur ou plus bas, comme dans le Membra- 
naceus , sont ordinairement renflés ou genouillés au sommet, et le 
Lampas a ses feuilles ponctuées en dessous. 

La seconde section, ou celle des Pentaspermum, à cinq loges mo- 
nospermes et bivalves, compte six espèces, dont cinq éparses dans les 
Indes, au Cap, à la Caroline et à la Jamaïque, et dont la dernière, 
ou le Palustris, à stipules caduques, vit dans les marais de l'Étrurie 
et des environs de Venise. Ces plantes paraissent mieux liées que celles 
de la section précédente, car ieurs feuilles sont cordiformes et leurs 
fleurs ordinairement solitaires dans les aisselles supérieures; leurs 
fruits, qui varient beaucoup pour la forme extérieure, sont quelque- 
fois hispides ou tomenteux , leurs pistils sont droits ou inclinés, ce 
qui indique des modes différents de fécondation. 

Les Manihot comprennent cinq espèces originaires des Indes ou 
des îles adjacentes, et se distinguent par leurs feuilles grandes et 
palmées , ainsi que par leurs tiges ordinairement frutescentes ; mais ils 
varient par le nombre des divisions de leur involucre persistant ou 
caduc, ainsi que par leur tige glabre ou aiguillonnée; leur caractère 
distinctif est un calice spathacé, qui s'ouvre longitudinalement et qui 
suppose un grand développement dans la corolle, laquelle est en 
effet fort apparente et différemment colorée selon les espèces; les 
fruits sont gros et plus ou moins allongés. 

Le Manihot proprement dit, a ses feuilles pennatifides, ses capsules 
pyramidales et velues, ses pédoncules et ses involucres pentaphylles 
recouverts de poils rudes ; ses calices membraneux et spathacés sont 
fendus longitudinalement; ses fleurs grandes et jaunes ne s'ouvrent 
qu’une fois, et ses nombreuses semences sont bisériées ; mais on ne 
trouve point au fond de sa corolle ces poils humides et ces écailles 
nectarifères si communes dans les Malvees ; ses antheres sont à peu 
près sessiles sur toute la longueur du tube staminifère, et ses cinq 
stigmates , en languettes épaisses et violettes, réfléchissent fortement 
leur face supérieure velue et papillaire sur les anthères dont ils recoi- 
vent et absorbent lentement le pollen ; il n’y a ici aucun doute sur la 
forme de fécondation, puisque les stigmates sont immédiatement 
renversés sur les anthères ; le pédoncule est incliné à la maturation. 

Les Xetmia, au nombre de sept, habitent exclusivement les Indes 
orientales et les iles adjacentes, comme celles de Bourbon ; une seule, 
le Syriacus, croît en Syrie et s’avance jusque dans la Carniole : elles 
forment toutes, à l'exception du Pruriens, des arbrisseaux ou des 
arbustes qui paraissent avoir entre eux de grands rapports, soit pour 


— 432 — 


la coupe des feuilles, soit pour des caractères plus essentiels. Le 
Syriacus supporte très-bien nos hivers, et ses fleurs blanches ou 
pourprées, sessiles et à peu près solitaires dans les aisselles, sont 
réunies trois à trois vers le sommet des rameaux de l’année; les 
anciennes aisselles donnent des rameaux ou seulement comme dans 
le Melese , chaque année des feuilles qui s’étalent en rosette, et sortent 
de boutons axillaires écailleux et cotonneux; les tiges se rompent au 
sommet, et celles qui ont porté des fleurs périssent toujours jusqu'à 
une certaine hauteur. 

Les feuilles irrégulièrement trilobées sont parsemées de glandes 
transparentes et visibles à la loupe; les fleurs s'ouvrent le jour, et se 
referment le soir ; la fécondation est directe; les stigmates, qui sont 
des têtes papillaires très-élégamment conformées, sortent de bonne 
heure du long étui staminifère, et se recourbent pour recevoir le 
pollen blanchâtre et globuleux qui tombe promptement; le fond de la 
corolle, d’un rouge de sang , est tapissé de poils blanchâtres sans cesse 
humectés par le nectaire, qui est une bande circulaire duvetée et 
sillonnée par intervalles de raies d'où paraît sortir l'humeur miellée. 

J'ai remarqué que les étamines étaient en général géminées, plus 
ou moins soudées par leurs filets ; que, lorsque la soudure était incom- 
plète, l'anthère était unilobée, et que, lorsqu'elle était entière, comme 
cela arrive souvent, surtout à la base de la colonne staminifère, 
l’anthère était manifestement bilobée, ce qui tendrait à prouver que 
les anthères de cette famille ne sont unilobées que par dédoublement. 

Amici assure ( Annales des sciences naturelles, tome 30, page 331) 
que, dans l'Hibiscus syriacus , les boyaux qui partent des granules du 
pollen s’allongent dans l'intérieur du style jusqu'à se mettre en contact 
avec l'amande, et que chaque ovule a son boyau correspondant. 

Les Furcaria, au nombre de neuf, habitent les Indes orientales ou 
les bois de la Guiane; un seul se trouve au Mexique, et un autre 
s’avance jusque dans les marais de la Caroline; ils sont presque tous 
de petits arbrisseaux à tiges souvent aiguillonnées ou tuberculées, à 
feuilles palmées et lobées, à calice hérissé et fleurs jaunes, roses, 
rouges à fond noir et pourpré, ordinairement plus grandes que le 
calice, mais six fois plus petites dans le Bicuspis ; le caractère qui les 
distingue est assez variable, puisque, dans le Suratensis , les folioles 
de l’involucre, au lieu d'être bifurquées, sont irrégulièrement appen 
diculées ; que, dans le Furcellatus et le Dodon, les folioles sont cylin- 
driques à leur base; que, dans le Furcellatus, elles portent sur le 
dos une arête crochue, et que, dans le Radiatus, on aperçoit à peine 
un appendice. 


pet : 


Les Furcaria se trouvent rarement dans nos jardins, et c'est pour- 
quoi j'ignore la structure de leurs fleurs. Je vois que dans le Surat- 
tensis, comme dans les autres, elles ne s'ouvrent qu’une fois et se 
ferment de bonne heure. 

Les Abelmoschus , qu’on peut considérer comme les vrais Hibiscus, 
parce qu'ils comptent à peu près vingt-cinq espèces, se divisent en 
deux groupes plutôt artificiels que naturels : celui à tige tuberculée 
ou aiguillonnée, et celui à tige lisse ; le premier est formé de plantes 
quelquefois frutescentes ou même arborescentes, mais pour l’ordi- 
naire annuelles , et qui habitent les Indes orientales, les Antilles, ou 
FAmérique méridionale , et très-rarement la Nouvelle-Hollande; elles 
varient beaucoup pour les feuilles, les calices, les involucres et même 
les capsules ; leurs fleurs solitaires sont grandes, jaunes, rouges, 
blanches, et pour l'ordinaire violettes à la base. On peut y distinguer 
surtout deux types : 1° celui de l’Heterophyllus à feuilles linéaires, 
lancéolées, piquantes, et quelquefois lobées ; 2° celui des Vütifolius 
obtusifolius et Heterotrichus, remarquables par leurs fleurs penchées 
et leurs capsules velues à cinq ailes. 

Le second groupe, qui comprend le reste des Abelmoschus, peut 
se pariager en plantes annuelles, vivaces ou frutescentes; les pre- 
mièrès, au nombre de deux, sont l’£sculentus dont l’on mange les 
fruits confits, et le Zongifolius qui en est très-voisin ; elles ont l’une 
et l’autre les calices spathacés et les dix folioles de leur involucre 
promptement caduques. 

Les espèces vivaces appartiennent toutes à des zones tempérées, six 
se trouvent dans les marais de l'Amérique septentrionale, principa- 
lement dans la Caroline et la Floride; des deux autres, l’une croit 
dans les marais de l'Ombrie, et l’autre en Gascogne, sur les bords de 
l'Adour; ces plantes, la plupart homotypes, ont les fleurs axillaires, 
grandes, jaunes , blanches, roses, presque toujours d’un noir pourpre 
à la base ; leurs feuilles déjetées sont épaisses, ovales, cordiformes et 
plus ou moins lobées, et leurs pédoncules, toujours épais, sont soudés 
aux pétioles jusqu’à une certaine hauteur dans le Moscheutos , et entie- 
rement libres dans les autres ; le Palustris, qui supporte très-bien nos 
hivers, a des écailles peu saillantes, mais fortement nectarifères, 
correspondantes aux cinq grandes ouvertures par lesquelles la liqueur 
miellée pénètre à travers les pétales imberbes; les filets sont ordinaire- 
ment soudés deux à deux, et les anthères unilobées, mais manifeste- 
ment divisées en deux par une cloison; enfin, les cinq stigmates for- 
ment chacun une tête jaune papillaire fortement inclinée sur la 
colonne staminifère et bordée de cils très-minces et très-élégamment 


I. 28 


— 434 — 


distribués ; les grains de pollen sont gros, sphériques, jaunâtres et 
adhérents aux parois des anthères relevées sur les bords; les filets 
forment dans leur ensemble, un arbre en miniature. 

Les Abelmoschus frutescents comptent seize espèces, répandues 
dans les deux Indes ouau midi de l'Afrique, et distinguées parleur port 
et la beauté de leurs corolles; leurs feuilles sont presque toujours cor- 
diformes et plus ou moins lobées, leur involucre est sétacé et leur 
capsule hispide ; on y remarque les Mutabilis des Indes orientales, 
dont la corolle, blanche le matin, pàle au milieu du jour, est le soir 
d'un beau rose ; l'Abelmoschus des deux Indes, dont les graines 
musquées portent le nom d'ambrette, et s'emploient contre les 
morsures du Crotalus horridus ; enfin, le Clypeatus des forêts de la 
Jamaïque, dont la capsule est turbinée et trorquée au sommet; les 
stigmates de ces diverses espèces ne sont pas toujours au nombre de 
cinq; on n'en compte qu'un seul dans le Lambertianus, tandis qu'il 
y en a plusieurs dans le Sulphureus , et qu'ils varient de trois à cinq 
dans l'Affinis. 

A l’époque de la dissémination, les cinq carpelles, toujours étroite- 
ment unis, s'ouvrent au sommet en cinq valves loculicides, et mon- 
trent un grand nombre de semences pédicellées sur l'axe central, dont 
elles se détachent successivement. On peut remarquer que, dans le 
Palustris , les bords des valves loculicides sont ciliées en dedans, et 
que leur ouverture se ferme en cas de pluie; les calices m'ont paru 
entr'ouverts, mais non pas réfléchis. 

Les Bombicelles , ainsi appelés de leurs semences laineuses ou coton- 
neuses, sont inégalement dispersés dans les deux Indes, l'Arabie et le 
midi de l'Afrique, où ils forment des arbrisseaux à feuilles ovales ou 
cordiformes et à fleurs axillaires; ils n'appartiennent pas sans doute au 
même type, puisqu'ils présentent séparément divers phénomènes 
physiologiques, ainsi l'Unilateralis a ses étamines tournées du même 
côté, et a probablement aussi ses pistils inclinés; le Micranthus a sa 
corolle réfléchie, tandis que celle du Clandestinus reste cachée dans 
l'intérieur du calice. Ces plantes, qui forment, par leurs semences 
laineuses , le passage naturel des Hibiscus aux Gossypium, n'ont pas 
des fleurs aussi remarquables que les Abelmoschus ; cependant le 
Phæniceus des Indes orientales est cultivé dans nos jardins. 

Les Trionum forment la huitième section, et se distinguent facile- 
ment à leur calice enflé, transparent et réticulé; ils sont représentés 
par deux espèces homotypes et annuelles, le Trionum et le V’esiculatus, 
qui habitent l'Afrique, d'où la première s'est sans doute répandue 
dans l'Italie, la Carniole , etc.; leurs feuilles sont lobées, leurs pédon- 


=> 435 — 


cules solitaires et articulés, leurs fleurs mélangées de jaune et de 
pourpre, ne s'ouvrent qu'une fois aux rayons du soleil, et leur calice 
promptement refermé reste penché jusqu'à la maturation. Les pétales, 
continus et non ciliés à la base, portent cinq renflements circulaires 
qui pourraient être un peu visqueux et remplacer les écailles nectari- 
fères, qui, comme le fond de la corolle, ne se retrouvent pas dans la 
section ; on remarque de plus sur le tube staminifère des glandes blan- 
ches, articulées, renflées, mais très-variables pour la forme, et qui 
sont sans doute destinées à retenir les globules ‘du pollen, puisqu'on 
les trouve également à la base du calice. Les cinq stigmates sont 
saillants, papillaires, visqueux et d’un pourpre éclatant; les anthères 
sont unilobées, à poussière jaunâtre et adhérente, et les semences 
sont pyriformes. 

A l'époque de la dissémination, qui est successive, parce que les 
Trionum fleurissent long-temps , le calice s'ouvre au sommet, et les 
capsules étalent leurs cinq valves loculicides ; on voit, sur le milieu inté- 
rieur de chaque valve, le placenta chargé de deux rangs de semences 
et séparé de l'axe central auquel il était d’abord contigu. On peut re- 
marquer ici, comme une prévoyance de la nature, le renflement des 
calices, qui n'est pas l'effet de la pression du fruit, mais qui était pré- 
paré pour le recevoir; il ÿ a peu de fleurs plus belles que celles des 
Trionum pleinement épanouies. 

Les Sabdariffa ne forment encore que deux espèces homotypes et 
annuelles, l'une des Indes et l’autre du Brésil; leurs fleurs sont blan- 
ches ou rougeätres, et leurs feuilles, fortement divisées, ont une 
glande à la surface inférieure. La première, ou le Sabdariffa des Indes, 
porte le nom d'Oseille de Guinée rouge, et la seconde, ou la Drgitée 
du Brésil, s'appelle Oseille de Guinee blanche, à cause de la couleur 
de sa fleur. 

Les Azanza, originaires des deux Indes, ne différent guère des 
Sabdariffa que par leurs tiges frutescentes, ou même arborescentes ; 
leurs feuilles sont corditormes, leurs stipules grandes et caduques, 
et leurs belles fleurs changent souvent de couleur dans le cours de 
leur durée. 

Le vaste genre des Hibiscus, qui compte déjà plus de cent vingt 
espèces, dont plusieurs, il est vrai, ne sont que des variétés, a été 
répandu sous les tropiques, dans l'Amérique septentrionale, et même 
en Europe où quelques-unes de ses sections ont leurs représentants. 

Il peut se diviser en trois grands groupes, tantôt réunis, tantôt 
séparés physiologiquement, savoir : celui des espèces annuelles, celui 
des vivaces, et celui des frutescentes qui sont les plus nombreuses, 


— 436 — 


et il présente plusieurs sujets de recherches. Les premiers concer- 
nent les formes de végétation, et s'appliquent surtout aux espèces 
frutescentes ; ont-elles des boutons, et ces boutons repoussent-ils des 
mêmes aisselles ? Les tiges se développent-elles indéfiniment, ou se 
rompeñt-elles ? Conservent-elles leurs rameaux fleuris, ou les perdent- 
elles ? Les racines donnent-elles des rejets ou vivent-elles solitaires ? 
Enfin les tiges sont-elles toujours chargées de lenticelles, comme dans 
le Syriacus ? La seconde classe de questions est relative au dévelcp- 
pement des feuilles, des involucres et des calices : Les feuilles sont- 
elles toujours semblablement plissées ? Les involucres sont-ils toujours 
droits ? L'estivation des calices est-elle toujours valvaire, bordée, et 
les pétales sont-ils toujours tordus ? La troisième concerne les mou- 
vements organiques : Les feuilles des espèces arborescentes ou même 
vivaces tombent-elles toujours? Les pédoncules sont-ils toujours arti- 
culés, et les pétioles renflés et recourbés au sommet ? Les Manihot, 
à calice spathacé et caduc, ont-ils la même floraison, la même matu- 
ration et la même dissémination que les autres, et quelle est la cause 
de la structure si remarquable de leur calice ? Quelles sont les espèces 
dont les fleurs s'inclinent pour la floraison, et se redressent ensuite ? 
Quelle est la cause finale de ces mouvements, et pourquoi sont-ils 
si variables dans des végétaux d’ailleurs si semblables en apparence ? 
Pourquoi les fleurs de la plupart des espèces, s’ouvrent-elles une seule 
fois, et tombent-elles le jour suivant, tandis que celles du ÆRosa 
sinensis , etc., restent immobiles ? Enfin, pourquoi les étamines sont- 
elles quelquefois unilatérales, les styles tantôt droits et tantôt inclinés, 
et quels sont les mouvements relatifs des anthères et des stigmates ? 
Enfin, la dernière classe de questions est relative à la structure de la 
corolle : Trouve-t-on, dans quelques Hibiscus, ces nectaires écailleux 
et ces cils entre les pétales si communs dans les Mauves, les Althœa et 
les Lavatères ? Y a-t-il beaucoup d'espèces de ce genre qui aient les 
glandes cornées et visqueuses des Trionum , et dans celles qui en sont 
dépourvues , comment est remplacé l'organe nectarifère ? Est-ce par 
ces fossettes, que l’on voit à la base du fruit de l'Hibiscus palustris P 
La teinte noire violette, qui est si commune au fond de la corolle de 
ces plantes, est-elle un enduit visqueux qui fixe et arrête le pollen ? 
La poussière est-elle toujours formée de globules hérissés, et les 
parois des anthères sont-elles, ici comme ailleurs, chargées de cils 
destinés à retenir ces globules ? Les cils des stigmates qui s'inclinent 
de si bonne heure sur les anthères, et dont l'organisation paraît si fine 
et si délicate, ne sont-ils pas destinés à fixer immédiatement le pollen 
après sa sortie ? Les anthères sont-elles véritablement uniloculaires, 


LS AS ee 
et pourquoi ? Comment s'opère la fécondation ? Les involucres qui ne 
tombent pas, s'écartent-ils? Les calices s’ouvrent-ils dans les espèces 
où ils ne se rompent pas, et laissent-iis aux graines un espace suffisant 
pour sortir de leur enveloppe ? Les semences cotonneuses des Borm- 
bicelles se sèment-elles comme les autres ? Enfin, les cordons pistil- 
laires pénètrent-ils de la même manière dans les diverses capsules, et 
n'y a-t-il pas bien des différences à cet égard ? 

Tel est l'aperçu des principales questions que présente ce genre, et 
qui ne peuvent être complètement résolues que par l'examen attentif 
des espèces dans les diverses phases de leur développement; elles font 
de la botanique une science longue et difficile; mais elles donnent une 
magnifique idée des richesses de la nature, et de sa prodigalité dans le 
choix des moyens par lesquels elle a diversifié à l'infini les espèces 
végétales, et pourvu en même temps à leur conservation, ainsi qu'à 
leur reproduction. 


ONZIÈME GENRE. — (rossypium. 


Le Gossypium a un calice en gobelet, à cinq dents obtuses, et un 
involucre à trois divisions cordiformes, incisées et dentées; ses 
stigmates varient de trois à cinq, ainsi que ses carpelles réunis et 
polyspermes ; ses semences sont entourées d'une laine cotonneuse. 

Les Gossypium sont répandus dans les deux Indes, les îles avoi- 
sinantes et dans tous les climats chauds, excepté peut-être l'Amérique 
occidentale et l'Afrique orientale; la culture s'en est emparée depuis 
un temps immémorial , et les a transportés successivement en Egypte, 
dans les îles de la Méditerranée, le midi de l'Espagne et de l'Italie ; 
il est résulté de ces diverses migrations, ainsi que de plusieurs fécon- 
dations artificielles, une foule de variétés placées entre les espèces 
primitives, et tellement rapprochées, qu'il est devenu à peu près 
impossible de les décrire botaniquement. C’est ce qui arrive ordinai- 
rement pour les plantes cultivées depuis long-temps. 

DE Canvocze réduit à treize ious les Gossypium aujourd'hui 
connus, dans lesquels il distingue des espèces arborescentes et d'au- 
tres herbacées, annuelles ou bisannuelles , beaucoup plus nombreuses 
que les premières ; mais il avertit en même temps que ces espèces sont 
la plupart fondées sur des caractères très-variables, et que ce genre 
plus que tous les autres, a besoin d'une monographie exacte; il 
observe encore que la plupart des espèces ont les feuilles chargées 
d'une glande sur la principale nervure inférieure, et que leurs fleurs 
sont ordinairement jaunes et tachées de rouge dans le fond. 


— 438 — 

Les naturalistes qui ont voyagé dans les lieux où l'on eleve les 
Cotonniers , et qui, comme DE Roxe, à l’île Sainte-Croix, ont cultivé 
toutes les espèces qu'ils avaient pu rassembler, s'accordent à dire que 
la forme des feuilles, celle des stipules, la présence ou l'absence des 
glandes et même leur nombre, sont des caractères très-inconstants, et 
qu'on ne doit guère compter pour déterminer les espèces, que sur la 
forme des graines, la nature et la couleur du coton. 

Les treize espèces du Prodrome, admises par la plupart des bota- 
nistes, peuvent se diviser en deux sections, ou en deux types : celui 
à cinq logés, et celui à trois loges ou trois valves, beaucoup moins 
étendu que le premier. 

Les principales différences concernent ici la forme des feuilles, la 
présence ou l'absence des glandes et des poils, enfin le nombre et la 
grandeur des divisions de l'involucre; ies espèces annuelles peuvent 
facilement, à ce qu'il paraît, devenir bisannuelles ou même trisannuelles 
dans les circonstances favorables ; les arborescentes ne s'élèvent pas 
au-delà de dix à douze pieds, et les branches qui ont porté des fruits, 
périssent ensuite jusqu'à une certaine hauteur, comme la plupart des 
Mauves , des Lavatères et des Hibiscus arborescents. 

Certaines espèces ne fournissent qu’une récolte, d’autres en don- 
nent deux, d’autres enfin sont continuellement en fleur et en fruit ; 
les Herbacées ne fleurissent généralement qu'une fois, tandis que les 
Arborescentes poussent continuellement de nouvelles branches ; les 
récoltes durent plusieurs jours, et les plus précieuses sont celles dont 
les fleurs ne se désarticulent pas, et dont le coton non sak par les 
pluies ou l'exposition à l'air libre, se détache facilement. 

Les graines , qui varient de six à huit dans chaque loge, sont arron- 
dies , un peu allongées, chagrinées et noires, ou lisses, et d’un brun 
noir; On y distingue très-bien l’ombilic qui s’allonge souvent en une 
arête plus ou moins prononcée, selon les espèces; la surface elle- 
même de la graine, indépendamment du coton dont elle est entourée, 
est souvent encore chargée de trois substances distinctes : 1° le duvet, 
qui est en forme de chevelure courte, crêpue et colorée en rouille de 
fer; 2° les poils, beaucoup plus longs que le duvet et qui s’amincis- 
sent de la base au sommet; 3° le feutre, duvet plus lisse et plus serré 
que le duvet ordinaire. 

Le coton proprement dit est formé de fils soyeux, ordinairement 
blancs, quelquefois roux ou jaunâtres; c’est la partie précieuse de la 
semence, il sort naturellement du carpelle qui ne peut plusle contenir, 
et paraît destiné à disséminer la graine, comme la bourre des Peu- 
pliers et des Saules. Toutefois, en réfléchissant sur le grand nombre 


— 439 — 


de Gossypium répandus dans les climats chauds, et sur leur facilité 
à recevoir les soins de la culture, on ne peut guère douter qu'il ny 
ait eu ici un but principal relatif aux besoins de l'homme ; mais il ÿ a 
un grand choix à faire dans les espèces, tant pour l'abondance que 
pour la qualité du produit; quelques-unes n'en fournissent qu'une 
once par plante, et d'autres en donnent jusqu à huit; les plus pro- 
ductives sont l’Herbacé, le Sorel rouge, celui de la Guiane , Indien 
et le Siam blanc. 

Les fleurs des Gossypium, d'un blanc sale ou jaunâtre, plus ou 
moins taché de pourpre, changent de couleur en vieillissant, comme 
la plupart des Hibiscus, et ne tardent pas à tomber ; les styles, qui 
varient de trois à cinq, sont souvent soudés , et se terminent par des 
stigmates en tête de clou; la colonne staminifére est souvent renflée 
dans son milieu, et recouverte, dans toute son étendue, d'anthères 
portées sur des filets très-courts. Je ne connais pas les divers mouve- 
ments des stigmates, et la manière dont s'opère la fécondation; mais 
je vois que les calices eu même les involucres sont nectarifères, et je 
ne doute pas que les pétales ne se rétrécissent à la base ou qu'ils ne 
soient pourvus de ces poils si communs dans les Walvées. 

Les Gossypium ne fournissent pas de rejets, et par conséquent ne 
sont pas des plantes sociales, et ils ne pourraient l'être avec leurs 
nombreuses tiges et leurs larges feuilles; cependant De Rom fait 
mention d’un Gossypium de Guinée, qu'il appelle Sarmenteux, et 
dont les tiges rampent au loin sur le sol. Il dit qu'il fournit un coton 
très-beau, et qu'il prospérerait sur les pentes des collines, et dans 
les lieux battus par les vents. 

Les Gossypium aiment à vivre à découvert, et ne supportent pas 
aisément l'air vicié de nos serres; l’Herbaceum est peut-être la seule 
espèce qui donne des fruits dans nos contrées méridionales. 

L'Indicum a la tige basse, hérissée plutôt que velue; les feuilles, 
de trois à cinq lobes, et non glanduleuses, sont accompagnées de 
deux bractées, l’involucre a trois folioles irrégulièrement frangées au 
sommet et scutellées à la base; le calice tubulé à cinq dentelures, 
serre étroitement la corolle qui, dans l’estivation , forme un cône aigu 
d'un beau blanc cotonneux ; le fourreau staminifère, épaissi et renflé 
à sa base, est recouvert d'étamines ponctuées en noir, comme le 
calice, et disposées sur cinq rangs; les intervalles entre les sépales 
sont chargés de quelques glandes glutineuses et recouverts de poils 
humides auxquels s'attache le pollen; le style, qui s'élève au-dessus 
du fourreau, se termine par cinq stigmates papillaires sur leur face 
antérieure ; la capsule est recouverte de glandes noiïrâtres comme tout 
le reste de la plante. 


D 

En examinant avec plus d'attention la même éspèce dans la préflo- 
raison, on voit le calice en forme de cône épais et comme feutré, 
serrant étroitement la corolle, et en ouvrant la capsule à la même 
époque, on observe que les nombreuses semences sont sphériques 
entièrement lisses et dépourvues, soit sur leur surface, soit dans leurs 
intervalles, de ces productions cotonneuses qui n'apparaissent que 
plus tard. 

J'ai trouvé, à la base de la capsule et entre les folioles de l'involucre, 
une belle glande pourprée, et j'ai reconnu que les scutelles glandu- 
leuses placées à leur base devaient maintenir les folioles redressées 
pendant tout le cours de leur durée. SPacx distingue, dans les Gos- 
sypium, les espèces dont les graines ont une bourre qui se détache 
d'elle-même à la maturité, et celles dont la bourre reste attachée à la 
graine. Il est clair que ces dernières ont conservé leurs semences dans 


l'état naturel, car la bourre était primitivement destinée à la dissémi- 
nation. 


Deuxième division. — MALVACÉES à calice nu, ou SIDÉES. 


PREMIER GENRE. — ÆAnoda. 


L'Anoda a un calice quinquéfide, à lobes aigus et très-ouverts pen- 
dant la maturation; sa capsule, presque hémisphérique à la base et 


aplatie au sommet, se compose de nombreux carpelles uniloculaires;, 
soudés et monospermes. 


On le divise en deux groupes : 

1° Celui des espèces à carpelles épineux; 

2° Celui des espèces à carpelles non épineux. 

Les Anoda | qui pourraient former une section dans les Sida, sont 
des herbes annuelles, originaires du Mexique ou de la Nouvelle-Espa- 
gne; leurs feuilles, qui varient beaucoup dans la même espèce, sont 
larges, velues, molles, cordiformes, acuminées, plus ou moins has- 
tées et toujours rabattues sur leur pétiole cartilagineux et renflé au 
sommet; leurs pédoncules sont dépourvus d'articulation, et leurs 
fleurs d'un bleu violet sont quelquefois un peu jaunâtres ou incar- 
nates. 

Les carpelles dans leur jeunesse sont souvent recouverts de poils 
rudes, jaunâtres et couchés de la base au sommet du fruit où ils vien- 
nent se réunir. 


La fécondation a lieu comme dans la plupart des Malvacees : les 


— 441 — 


nombreux styles se font jour à travers les anthères, et les stigmates 
en tête de clou, glutineux plutôt que papillaires, se déjettent de 
bonne heure sur les anthères bleuâtres , contournées et unilobées par 
soudure; une partie du pollen se répand sur les poils de la coroile 
sans cesse humectés par les écailles nectarifères du calice ; une autre 
partie reste adhérente aux paroïs des anthères, en s’attachant plus 
tard aux stigmates. 

Les péricarpes forment dans leur ensemble un disque plane, dont 
les carpelles monospermes , à enveloppe mince et membraneuse sont 
mutiques ou prolongés en pointe, selon les espèces; à la dissémina- 
tion, les sillons enfoncés qui séparent les carpelles s'ouvrent et lais- 
sent sortir chacun une graine piriforme, pointue à son extrémité 
supérieure où aboutit le cordon pistillaire ; tandis que les vaisseaux 
nourriciers arrivent de la base en rampant sous l'enveloppe. La radi- 
cule est supère, allongée et flexible; les cotylédons sont recourbés 
et repliés, la déhiscence est loculicide, et l’on apercoit entre les sillons 
qui s'ouvrent les sutures soudées des valves. 

La fécondation se modifie un peu selon les espèces : ainsi, dans le 
Triloba à grandes fleurs bleues, les anthères ont à peu près répandu 
leur pollen avant que les stigmates sortent de leur fourreau; au con- 
traire, dans l’Hastata , eic., les stigmates saillants s’inclinent de bonne 
heure sur les anthères non entièrement défleuries ; aussi dans la pre- 
mière, les poils nectarifères sont beaucoup plus nombreux; mais, 
dans les diverses espèces que j'examine, je vois toujours le fond de la 
corolle, et les cils des pétales tout recouverts des granules sphériques 
du pollen dont les émanations arrivent au stigmate. 

Le genre Cristaria de Cavanizes et de De CanpozzE ne peut 
guère être séparé de l’Anoda. 


DEUXIÈME GENRE. — Sida. 


Le Sida a un calice quinquéfide, souvent anguleux, un style mul- 
tifide au sommet, cinq à trente carpelles verticillés et uniloculaires, 
tantôt obtus, tantôt prolongés en barbe, monospermes ou polysper- 
mes, et plus ou moins adhérents. 

Ce genre polymorphe se divise en trois sections, qui formeront 
peut-être un jour autant de genres : 

1° Celle des Malvinda ; cinq à douze carpelles monospermes et non 
enflés ; 

2° Celle des Abutiloides ; quinze à quarante carpelles monospermes 
et enflés; 


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3° Celle des 4butilon ; cinq à trente carpelles polyspermes et sou- 
vent enflés. 

Les Malvinda comptent près de quatre-vingt-dix espèces, que DE 
Cannozce réunit en divers groupes, d'après la longueur de leurs pé- 
doncules et la forme de leurs feuilles allongées , cordiformes, hastées, 
lobées ou même pennatifides. Ce sont des herbes annuelles et vivaces 
ou des arbrisseaux à fleurs ordinairement jaunes, axillaires, solitaires, 
géminées ou ternées; quelquefois même, mais rarement, disposées 
en épis, en grappes ou en corymbes, etc., et dispersées en nombre 
presque égal dans les Indes orientales et les îles voisines, au Cap, 
aux Antilles et dans l'Amérique méridionale; deux ou trois se ren- 
contrent dans l'Amérique nord, autant à Madère et aux Canaries ; 
aucune, je crois, ne se trouve en Europe et dans le nord de l'Asie; 
mais plusieurs fleurissent dans nos jardins; telles sont, par exemple, 
l'Angustifolia à cinq carpelles bicuspidés, et petites fleurs jaunes; le 
Malvæfolia à fleurs violettes, petites, dépourvues d'écailles calicinales, 
et par conséquent de cils entre les pétales, le Zanceolata à feuilles 
appliquées contre la tige et non pas déjetées, à pétales jaunes et chargés 
dans leurs intervalles de poils qui arrêtent le pollen et correspondent 
à autant de nectaires peu visibles. On ne peut guère douter que les 
nombreuses espèces de Malvinda ne puissent être distribuées en types 
plus en rapport avec leur organisation primitive; mais les Sida ne sont 
pas encore assez connus pour être classés physiologiquement. En 
attendant, je voudrais qu'on étudiât leurs divers modes de féconda- 
tion et de dissémination ; ainsi, par exemple, le Bivalvis, à coques 
adhérentes et déhiscentes séparément, n’est pas conformé comme les 
espèces à coques solubles et indéhiscentes, ni le Dioica, comme les 
espèces hermaphrodites. 

Le principal phénomème de cette section est celui du Sida dioica, 
de l'Amérique nord, homotype au Sida napæa, dont les fleurs sont 
réellement dioïques; ce qui suppose une organisation un peu diffe- 
rente dans les organes sexuels de la fleur. 

Les Abutiloides, beaucoup moins nombreux, habitent tous sans 
exception l'Amérique méridionale ou les Antilles, et sont pour la plu- 
part des arbrisseaux tomenteux, à fleurs jaunes, pédoncules axillaires, 
uniflores, ordinairement solitaires et quelquefois géminés, ou ternés ; 
le principal caractère de la section consiste dans une capsule arrondie 
ou enflée, renfermant de quinze à quarante carpelles, et par consé- 
quent contenant des espèces fort distinctes. 

On y distingue deux types principaux qui forment dans Kuwru 
autant de genres, celui du Gaya et celui du Bastardia ; le premier 


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contient quatre ou cinq espèces frutescentes de l'Amérique méri- 
dionale, et remarquables par leurs carpelles à trois valves, celle du 
milieu carénée, les latérales membraneuses et plus grandes; le second 
ne renferme que deux ou trois espèces, qui se distinguent par leurs 
valves loculicides; disposition qui se rencontre aussi, comme nous 
l'avons dit, dans quelques Malvinda, comme les Bivalves et quelques 
Abutilons, comme le Triquètre. Les autres Abutiloides ont les carpelles 
conformés à la manière ordinaire. 

Les Abutilon, dont les carpelles diffèrent beaucoup, soit pour la 
forme, soit pour le nombre, comprennent une grande variété d'es- 
pèces, originaires des Indes, de l'Afrique, et surtout des Antilles et 
de l'Amérique méridionale; une seule espèce, qui a donné son nom à 
toute la section, se trouve dans les Indes, la Sibérie et le midi de 
de l’Europe ; les pétales jaunes, échancrés à leur base, sont séparés par 
cinq ouvertures ou fossettes , qui communiquent aux écailles nectari- 
fères du calice, ainsi qu’à des points mellifères qu'on apercoit tout 
autour de l'ovaire ; les anthères sont légèrement contournées, et les 
stigmates en tête papillaire sont divariqués entre les étamines avant 
l'émission du pollen ; après la chute de la corolle, on remarque un 
grand vide au centre des carpelles, parce que tout le système pistil- 
laire qui aboutissait à l'ombilic, a été détruit ; cependant l’on aperçoit 
encore au-dessus l'axe conique qui portait le pistil, et les traces des 
cordons fécondateurs. On voit aussi distinctement le raphé, qui con- 
duit de lombilic au bas de la graine, où est placée la radicule; il est 
légèrement ailé et faisait partie d’un corps allongé et épais qui s'est 
détaché plus tôt. 

Les carpelles, qui s'ouvrent du sommet à la base, renferment trois 
ou quatre semences assez grosses et attachées à l'angle interne, où 
l’on observe encore l'insertion des cordons pistillaires. L'embryon à 
cette époque est un peu recourbé, ses cotylédons légèrement inégaux 
sont étendus, opposés et non plissés; ils se replient peut-être plus 
tard. 

Les Sida, qui forment un vaste genre, dont les espèces ont été 
abondamment répandues dans les contrées intertropicales, principa- 
lement dans les deux Indes, sont des plantes quelquefois frutescentes, 
mais ordinairement herbacées, vivaces ou annuelles : les premières 
peuvent, je crois, se diviser en deux groupes, dont l’un comprendrait 
les espèces qui perdent chaque année leurs rameaux floriferes, et en 
repoussent de nouveaux, à la manière de plusieurs autres Malvacees ; 
l'autre, beaucoup moins nombreux, serait formé de celles qui, comme 
Y'Hibiscus syriacus ou le Rosa sinensis, redonneraient de nouvelles 


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fleurs des mêmes rameaux, l’Arborea, par exemple ; mais je n'ai pas 
encore eu occasion de vérifier cette remarque. 

La nature n’a pas beaucoup varié l’organisation végétale des Sida ; 
ils ont presque tous une tige cylindrique, des feuilles ordinaire- 
ment cordiformes, depuis la figure allongée de l’Angustifolia jusqu'à 
la palmatifide du Z’itifolia ou du Ricinoides ; ces feuilles souvent co- 
tonneuses, à poils radiés, sont accompagnées de deux stipules libres, 
excepté peut-être dans le Phyllanthe, où elles sont adhérentes et dans 
l'Extipulée où elles manquent entièrement; les pédoncules fréquem- 
ment axillaires ne deviennent terminaux que par avortement; ils sont 
solitaires ou multiples, uniflores ou multiflores, en grappes ou en 
corymbes, et toujours articulés ou au moins annulaires. 

Le calice est à cinq divisions ; la corolle monopétale est intimement 
unie au tube staminifère avec lequel elle tombe, entraînant dans sa 
chute tout le système pistillaire; les étamines sont nombreuses, et 
partent uniquement du sommet du tube staminifère, les anthères 
sont uniloculaires et légèrement contournées et les carpelles sont 
verticillés au haut d'un axe central, qui ordinairement disparaît et 
laisse à sa place un espace vide. 

La fécondation m'a paru immédiate; les anthères répandent leur 
pollen jaune sur les stigmates en tête. Je n’ai apercu dans aucune 
espèce ces poils cotonneux si communs dans la tribu des Malvees, 
mais on remarque, comme je l'ai déjà dit, sur le calice de | 4butilon et 
d’autres Sida une couronne feutrée plus ou moins élargie, qui com- 
munique à la corolle par les cinq fossettes que forment les échan- 
crures des pétales. 

Les carpelles diffèrent beaucoup, tant pour le nombre que pour la 
forme. Ils varient de cinq à trente, et paraissent assez constants dans 
les mêmes espèces; quelquefois ils adhèrent immédiatement à la 
graine; et dans ce cas, ils sont monospermes; souvent ils sont renflés, 
soudés et forment des capsules monospermes ou polyspermes. Dans 
l’Abutilon, is sontaplatis etse prolongentextérieurement en pointes, 
qui représentent autant de styles endurcis; les uns et les autres ont 
deux valves, qui se séparentlorsqu’elles renferment plusieurssemences. 

Les graines sont peu nombreuses, et toujours attachées à la base 
de l'angle interne de la capsule, où l’on voit adhérents les axes pédon- 
culaires qui donnaient passage aux deux systèmes de vaisseaux; l’em- 
bryon avant la maturité est souvent un peu recourbé, et ses cotylédons 
légèrement inégaux sont étendus et non encore plissés : ils se plissent 
sans doute plus tard. 

La dissémination s'opère de diverses manières : souvent chaque 


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carpelle se détache séparément; quelquefois, au contraire, les car- 
pelles restent réunis et s'ouvrent par leur milieu ; les valves sontalors 
formées de deux demi-valves soudées, et appartenant à deux carpelles 
différents; cette forme de déhiscence est appelée loculicide par 
Ricnanp, et les espèces chez lesquelles élle a été reconnue composent 
dans Küwrx le genre nouveau des Bastardia, qui ne saurait, je crois, 
être admis à moins que ses espèces ne forment un seul et même type, 
ou n'aient entre elles d'autres rapports. 

Les Sida ont presque tous les tiges droites, sans drageons ni rejets, 
et sont par conséquent des plantes non sociales : on doit en excepter 
pourtant quelques espèces couchées sur le sol, ou qui jettent même 
des radicules comme le Radicans , l'Hederacea , etc. ; il y en a d'autres, 
qui vivent sur les Andes du Pérou, et dont les tiges sont gazonnantes, 
les feuilles pennatifides, les fleurs axillaires, solitaires, et les racines 
rhizomatiques ; tels sont le Phyllanthe, l Acaulis et le Pichencha; si 
elles deviennent plus nombreuses et mieux connues, elles formeront . 
sans doute un véritable genre. 

Les Sida ne présentent qu'un petit nombre de phénomènes phy- 
siologiques : certaines espèces comme le Spinosa de la Jamaïque, 
l'Angustifolia et celles du même type, portent au-dessous de leur pé- 
tiole deux à trois tubercules ou pointes épineuses, distinctes des sti- 
pules, et dont il n’est pas facile de deviner l'usage; le Bracteolata du 
Brésil a deux stipules, l’une linéaire, l'autre subulée; et l'Auricu- 
lata du Bengale, deux stipules larges et auriculées ; quelques autres, 
comme le Calyptrata et l Occidentalis, ont une carpelle à trois valves 
bizarrement conformées ; le Triquetra se reconnait à ses rameaux 
triquètres, comme le Gigantea, le Reflexa, etc., à leur corolle réflé- 
chie; l'Extipulata de l'ile Bourbon est entièrement dépourvu de sti- 
pules; l'Urens de la Jamaïque porte des poils qui piquent comme 
ceux de l'Ortie; celui à calice membraneux de la Nouvelle-Hollande a 
le calice prolongé en membrane, après la fécondation ; le Glauca a les 
pédoncules inférieurs plus courts et les supérieurs plus longs que le 
pétiole, tandis que ceux de l’Æ/bicans des Canaries sont au contraire 
tantôt plus courts et tantôt plus grands que les pétioles ; le Muliifida 
a les carpelles bizarrement ailés ; enfin l’Æbutilon et peut-être aussi les 
autres espèces à fruits renflés ont les folioles calicinales plissées en 
deux pour céder à la dilatation du fruit. 

Les Sida sont plus ou moins sensibles aux impressions de l'air etde 
la lumière : d'abord leurs pédoncules ordinairement droits s'inclinent 
quelquefois et même se coudent, comme on le voit surtout dans les 
espèces, qui, telles que le Crispa, Y'Hirta et le Populifolia, ont les 


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pédoncules filiformes et les fruits globuleux ; ensuite leur calice, pour 
l'ordinaire fermé, se réfléchit quelquefois, comme dans le même 
Crispa; enfin la fleur s'ouvre à des heures déterminées, et presque 
toujours une seule fois ; les pétales se rapprochent ou se flétrissent et 
tombent le lendemain. 

Les feuilles ont aussi des mouvements qui dépendent d'un renfle- 
ment corné et basilaire, semblable à une glande arrondie ; son effet 
consiste à relever ou rabaisser, sur son propre pétiole, le limbe de la 
feuille ; il s'élève ordinairement le jour et s’abaisse la nuit, comme 
on peut le voir dans l’Abutilon, l'Angustifolia, etc. Mais ces oscilla- 
tions méritent d'être mieux étudiées. 

Il n’est pas douteux qu'il ne se passe aussi des phénomènes curieux 
dans la fécondation des diverses espèces, dont les stigmates en tête 
veloutée, papillaire et souvent violette, se font jour latéralement à 
travers les anthères, au lieu de se diriger vers le sommet ; ces anthè- 
res presque toujours insérées à l'extrémité supérieure du tube stami- 
nifère, se déjettent pour atteindre les stigmates qu’elles fécondent. C'est 
un phénomène remarquable dans cette famille, que celui du Sida 
dioïque , dont les fleurs femelles ont des étamines stériles, tandis que 
les fleurs mâles n'offrent pas même des rudiments d'ovaires; mais 
les pétales velus à la base, n’ont pas de cils proprement dits, et le ca- 
lice campanulé est de même dépourvu de glandes nectarifères ; le pol- 
len, sans doute plus aminci et plus léger que dans les autres espèces 
du genre, s'échappe de l’anthère ouverte, pour féconder les fleurs 
femelles placées à sa portée. 

Le pédoncule, qui est toujours articulé ou annulaire, se rompt 
souvent avant la dissémination, et lorsque par quelques circonstances 
la fleur est restée inféconde, comme" cela arrive à la plupart des Wal- 
vacces. La déhiscence est tantôt nulle, tantôt interne ou externe, 
valvaire ou loculicide, et sous ces diverses formes, elle indique divers 
modes de fécondation qu'il serait intéressant d'examiner de plus près. 

L'estivation des Sida n’est pas aussi fortement tordue que celle 
des Mauves ; dans l Abutilon, un pétale m'a semblé extérieur, un autre 
intérieur et les trois autres intérieurs-extérieurs; celle des calices est 
valvaire, relevée sur les bords, etavant leur développement les feuilles 
sont roulées assez irrégulièrement sur leur face supérieure. 

Quelques espèces de Sida, comme l'Arborescente , sont remarqua- 
bles par leur beauté, d'autres en petit nombre répandent, comme le 
Fragrans, une odeur agréable ; mais en général leurs fleurs jaunes et 
rarement blanches, roses, écarlates ou pourpre, s’étalent peu ei se 
fanent très-promptement. Les feuilles ont ordinairement des nervures 


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bien marquées et un tissu parenchymateux finement réticulé; elles 
sont souvent hérissées de poils rudes ou mous et glutineux, comme 
ceux de l'Abutilon; les extrémités des dents et des crénelures sont 
glanduleuses. 

Les Sida habitent les plaines, les bords des bois ou des ruisseaux; 
leurs fleurs, qui commencent chez nous à paraître à la fin de l'été, 
se succèdent long-temps sans interruption, et les espèces frutescentes 
ou vivaces portent en même temps des fleurs et des fruits. 


Vingt-quatrième famille. — Fombacées. 


Les Bombacees, nouvelle famille établie par Kunrx, ont un calice 
nu ou entouré à sa base d'un petit nombre de bractéoles, et formé 
de cinq sépales réunis en un tube urcéolé, campanulé, ou cylindri- 
qué ; ces sépales, tantôt tronqués au sommet, tantôt irrégulièrement 
imbriqués ou disposés en estivation à peu près valvaire, s'ouvrent en- 
suite latéralement, les pétales au nombre de cinq manquent quelque- 
fois, et alors le calice estintérieurement coloré; les étamines, qui varient 
de cinq à quinze et au-delà, ont leurs filets réunis en un tube continu 
aux pétales, comme dans les WMalvacées , mais se divisant pour l'ordi- 
naire au sommet en cinq adelphies formées d'une ou plusieurs anthères 
uniloculaires, au milieu desquelles on apercoit souvent des filets 
stériles ; le pollen est ovoide à trois plis, l'ovaire est formé de cinq, 
rarement de dix carpelles, quelquefois un peu distincts, mais plus 
souvent soudés et s'ouvrant de diverses manières ; les styles, en même 
nombre que les carpelles, sont ou séparés ou plus ou moins réunis; 
les semences, souvent enveloppées de laine ou de pulpe, sont les 
unes dépourvues d'albumen à cotylédons irrégulièrement plissés , les 
autres albuminées à cotylédons planes. 

Ces plantes, comme l'on voit, ont un petit nombre de caractères 
communs, et se rapprochent plutôt par le port et la végétation, que 
par leurs organes floraux et reproducteurs; elles sont voisines des 
Malvacées par leurs anthéres uniloculaires, leurs étamines monadel- 
phes, leurs pétales roulés en cornet spiral et leur structure générale; 
mais elles en différent surtout par l’estivation de leur calice et leur 
tube staminifère divisé ordinairement au sommet en cinq adelphies. 


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Les Bombacees, qui sont des arbrisseaux , ou plutôt des arbres, ont 
été disséminées entre les tropiques et se reconnaissent à leurs feuilles 
alternes, bistipulées et presque toujours recouvertes , comme le reste 
de la plante, de poils étoilés. On les partage dans le Prodome en 
quinze genres, tous étrangers et à peu près inconnus à l'Europe. — 
Nous n’en mentionnerons que trois. 


PREMIER GENRE. — Adansonia. 


L'Adansonia a le calice nu, caduc, à cinq divisions, cinq pétales 
réunis presque jusqu'au milieu et roulés en dehors; des étamines 
très-nombreuses monadelphes et portées sur un tube fort dilaté au 
sommet ; un style très-long, dix à quatorze stigmates , une capsule in- 
déhiscente, ligneuse à loges polyspermes, pleines d'une pulpe farineuse. 

Ce genre ne comprend que l'Adansonia digité du Sénégal et peut- 
être aussi de l'Ésypte, qui s'élève à la hauteur de cinq pieds dès la pre- 
mièreannée,etacquiert enfin un tronc dont le diamètre a plus de vingt- 
cinq pieds; ses feuilles digitées, à cinq ou sept folioles, portent à 
leur base la tache blanchâtre et ornée quiindique leur sensibilité à la 
lumière; elles tombent en novembre et repoussent ensuite, un mois 
avant l'apparition des fleurs, qui portent des fruits mûrs en octobre 
et novembre. Cet arbre le plus grand des végétaux connus et dont la 
durée est presque indéfinie, est sujet à deux maladies mortelles, la 
carie et le ramollissement; on creuse dans son tronc des chambres où 
l'on suspend et dessèche les cadavres. 

L'Adansonia pousse de son tronc des branches qui s'élèvent jusqu'à 
quatre-vingts pieds, et de sa racine pivotante un grand nombre de 
racines traçantes qui s'étendent fort loin et forment ainsi d'un seul 
arbre uneespèce de forêt. Ses fleurs dont le diamètre est de six pouces, 
sont blanches, axillaires et solitaires sur le nouveau bois, et les ra- 
meaux se terminent par autant de boutons stipulacés. Ce fruit porté 
sur un pédoncule recourbé, atteint la longueur d’un pied, son écorce 
est ligneuse et ses loges sont égales en nombre aux stigmates; les 
semences, dont l'ombilic est étoilé, sont éparses sans ordre dans une 
pulpe farineuse, roussâtre et acidule; ses cotylédons sont plissés en 
chrysalides comme ceux des Malvacces , les stigmates sont caducs, 
et le style s'incline en se coudant pour atteindre les anthères placées 
fort au-dessous. Il a été et est encore cultivé en Europe, où je ne crois 
pas qu’il ait fleuri. C'est le Baobab des botanistes. 


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SECOND GENRE. — Carolinea. 


Le Carolinea a un calice persistant et légèrement tronqué, cinq 
pétales cotonneux et très-allongés , des étamines réunies à la base et 
séparées au sommet en plusieurs adelphies, un style de la longueur 
des étamines, cinq stigmates, une capsule ligneuse multivalve, poly- 
sperme, uniloculaire peut-être par avortement, des semences nues et 
probablement arillées, des cotylédons plissés et inégaux, dont l’exté- 
rieur enveloppe l'intérieur et la radicule. 

Les espèces de ce genre encore mal connu habitent les Antilles, 
ou le nord de l'Amérique méridionale, où elles forment des arbres de 
médiocre grandeur, à feuilles digitées et articulées à la base, boutons 
stipulés, stipules pétiolées et caduques. On les rencontre dans les 
lieux humides et sur les bords de la mer, où ils se font remarquer par 
leur beauté et les dimensions de leurs fleurs, comme par l'élégance 
de leurs nombreuses étamines. 

On en cultive principalement deux espèces dans les serres d'Europe, 
l’Insignis de la Martinique, à feuilles septénées, luisantes en dessus 
et glauques en dessous, et le Princeps de la Guiane, qui a fleuri en 
janvier 1836 dans les serres d'Europe; ses feuilles digitées, ternées 
ou quinées, portent à la base une tache cornée; ses fleurs terminales 
et solitaires ont leurs pétales étroits et roulés enfin en dessous; le 
faisceau staminifère se termine par une immense aigrette d'étamines 
blanches de la plus grande beauté. 

Les fruits ont la forme et le volume d’un gros melon à cinq côtes, 
et contiennent de trente à cinquante graines bonnes à manger. 


TROISIÈME GENRE. — Bombat. 


Le Bombax a un calice nu, légèrement quinquéfide ou tronqué, 
cinq pétales réunis entre eux et à la colonne staminifère, un grand 
nombre d'étamines tantôt simplement monadelphes, tantôt pentadel- 
phes au sommet, une capsule grande, ligneuse, à cinq valves et 
cinq loges polyspermes, des semences dépourvues d’albumen et enve- 
loppées d'une laine épaisse. 

Les Bombax, qui habitent presque tous le nord de l'Amérique méri- 
dionale, sont en général de grands et beaux arbres, à écorce lisse ou 
armée d'aiguillons, et souvent chargée de taches blanches qui sont au- 
tant de lenticelles ; leur bois mou et très-léger, comme celui de toutes 


Ne 29 


— 450 — 
les Bombacees, sert à la construction des canots, leurs feuilles digitées 
et leurs folioles dont la base est articulée tombent chaque année, de 
même que les stipules ; les fleurs grandes et d'une rare beauté parais- 
sent à différentes saisons, ainsi que les fruits, dont quelques-uns 
fournissent un beau coton. L'espèce la plus connue est le Ceiba des 
Antilles, qui s'élève jusqu’à quatre-vingts pieds, et dont le tronc très- 
épais ne donne des branches latérales qu'à une assez grande hauteur. 

Dans cette famille, dont les espèces sont les géants du règne végé- 
tal, les genres sont mal formés, parce que les fleurs et la fructification 
sont très-variables, tandis que la structure générale est au contraire 
très-constante. Il faut donc rapprocher les espèces d'après l’organisa- 
tion végétale, plutôt que d'après la forme des fleurs et des fruits. 
Cette remarque s'applique à la plupart des grands végétaux. 

Les Bombaceées doivent présenter dans leur végétation, et surtout 
dans leur fécondation, un grand nombre de phénomènes physiologi- 
qués, qui ne peuvent être étudiés que par ceux qui auront le bon- 
heur d'observer ces plantes dans leur climat natal. Je vois dans les 
serres l’'Erianthus à tige droite, simple et chargée de piquants. 


Vingt-cinquième famille. — FHytinériacées. 


Les Byttnériacees ont un calice tantôt nu, tantôt involucré qui est 
formé de cinq sépales valvaires plus ou moins réunis à leur base; 
cinq pétales hypogynes alternes aux sépales, en estivation envelop- 
pante, variables pour la forme et quelquefois nuls; des étamines 
égales en nombre aux pétales, ou doubles, triples et en général mul- 
tiples de ce même nombre ; des filaments réunis à la base, et quel- 
quefois en partie stériles ; des anthères extrorses et biloculaires , des 
styles distincts ou réunis, un albumen oléagineux ou charnu et rare- 
ment nul; un embryon droit; une radicule infère ; des cotylédons 
foliacés, planes ou plissés, et enveloppés autour de la plumule, mais 
très-épais lorsque les semences sont dépourvues d'albumen. 

Cette famille soutient d'étroits rapports avec celle des Malvacees, 
à laquelle elle pourrait être réunie , de même que celle des Tiliacees, 
puisqu'elles ont toutes les trois un calice valvaire, des pétales enve- 
loppés et qu'elles se ressemblent d'ailleurs beaucoup pour le port. La 
principale différence entre les Malvacces et les Byttnériacées consiste, 


Rep e e 

selon la plupart des botanistes, dans les anthères uniloculaires des 
premières, et biloculaires des secondes ; mais je crois avoir montré 
que ces anthères des Malvacées ne sont souvent uniloculaires que par 
dédoublement, et je montrerai, dans l'exposition successive des 
genres, que, tandis que le système sexuel est à peu près uniforme 
dans les Malvacées , il est au contraire varié de mille manières dans les 
Bytinériacées , et qu’il donne ainsi lieu à des remarques aussi nouvelles 
que curieuses. 

Pourquoi dans ces familles l'estivation du calice est-elle valvaire, 
tandis que celle de la corolle est tordue? C'est sans doute parce qu'il 
n'y a d'estivation valvaire que dans les péricarpes et les périgones con- 
sistants, et que la substance de la corolle est trop délicate pour se 
prêter à une disposition de ce genre, d'autant plus qu’elle doit être 
aggrandie pour renfermer des organes sexuels très-développés. Les 
coralles flosculeuses des Synantherees ont bien, il est vrai, l'estivation 
valvaire, mais les bords de leurs lobes sont épaissis par des nervures, 
et leur système sexuel présente peu de développement. 


Première tribu. — STERCULIÉES. 


Les Sterculiées ne se distinguent guère des Malvacees que par leurs 
anthères biloculaires et extrorses; leurs fleurs, souvent unisexuelles 
par avortement, ont un calice nu, caduc et quinquélobé ; leurs éta- 
mines, dont le nombre est très-variable, sont monadelphes et réunies 
en un urcéole court, sessile ou stipité; l'ovaire, ordinairement pédi- 
cellé est formé de cinq carpelles distincts ; l'albumen est nul ou oléagi- 
neux : dans le premier cas, les cotylédons sont inégaux; dans le 
second, foliacés et très-épais ; l'embryon est droit, et la radicule 
raccourcie; la déhiscence des carpelles précède ordinairement la matu- 
rité des graines. | 

Cette tribu renferme trois genres ; nous ne parlerons que d'un seul. 


Sterculia. 


Le Sterculia a un calice légèrement coriace, des étamines mona- 
delphes, disposées sur un urcéole sessile ou stipité; dix, quinze ou 
vingt anthères à un ou deux rangs , séparées ou réunies trois à trois, 
et s'ouvrant par une large fente supérieure; des carpelles folliculaires, 
distincts et uniloculaires, monospermes ou polyspermes; des semences 


= 452 — 
dont l’albumen est oléagineux, et dont les cotylédons sont planes, 
foliacés et égaux. 

Ce genre n’est pas encore assez connu pour être divisé physiolo- 
giquement. 

Les Sterculia sont la plupart de grands arbres, originaires des Indes 
orientales, des côtes de l'Afrique ou de la Guiane, et qui doivent sans 
doute leur nom à l'odeur désagréable que répandent leurs principales 
espèces, et surtout le Fætida. On en compte déjà une trentaine d’es- 
pèces qui diffèrent beaucoup pour la fleur et le fruit, mais dont la 
corolle est toujours nulle, et dont les cinq carpelles sont folliculaires 
et monospermes. 

Les Sterculia ont tous, à l'exception du Fætida, les feuilles simples, 
cordiformes et plus ou moins lobées ; leurs fleurs sont ordinairement 
paniculées ét terminales ; leurs étamines raccourcies sont placées près 
de la base de l'ovaire qui avorte quelquefois en tout ou en partie, et 
forme ainsi des plantes polygames ou dioïques; les pédoncules s’incli- 
nent souvent, -et les stigmates se replient sur les anthères; les fruits, 
qui ne s’accroissent guère que long-temps après la fécondation, s'ou- 
vrent en cinq coques déjetées , et présentent ainsi comme extérieure 
leur déhiscence introrse ; ils sont souvent revêtus à l'intérieur de poils 
roussâtres, et portent sur leurs bords des graines sphériques, grosses 
et peu nombreuses. 

Ces plantes ont les stipules caduques, les feuilles articulées, le 
tronc chargé d'un grand nombre de lenticelles, et des carpelles pé- 
dicellés sur un pédoncule commun. Le Crinita a ses ovaires et ses 
pédoncules recouverts de poils roussâtres, qui forment enfin à la 
base des capsules des touffes longues et soyeuses ; le Monosperme ou 
le Nobilis est remarquable par ses fleurs verdâtres à odeur de vanille; 
l’Hetérophylle a deux sortes de feuilles, les entières et les trilobées ; 
l'{vira et quelques autres ont les capsules revêtues intérieurement de 
poils piquants, et le Balanghas , que je vois en fleur dans nos serres, 
et dont les panicules sont pleines d'élégance, a un calice campanulé 
dont les lobes amincis et allongés se renversent pour former, par 
leur réunion, une grille, au-dessous de laquelle on apercoït un pédi- 
celle évasé en un urcéole chargé de dix anthères sessiles et extrorses. 
Je n’ai apercu aücune trace d'ovaire, en sorte que je crois la plante 
unisexuelle ou polygame. 

Le Platanifolia de la Chine, la seule espèce acclimatée, ombrage les 
promenades de Gênes, et fleurit au milieu de l'été; ses grappes paniculées 
ont un calice quinquéfide , en estivation valvaire ; un stigmate pédi- 
cellé entouré d'une douzaine d’anthères introrses qui rendent la 


— 4153 — 
fécondation immédiate. Il se dépouille chaque année de ses feuilles, 
qui laissent leur cicatrice terminée par un bourgeon grossièrement 
formé des rudiments des nouvelles feuilles. 

Les botanistes modernes ont divisé le Sterculia en plusieurs genres, 
fondés principalement sur les graines ailées et non ailées, la forme 
des carpelles, le nombre des anthères, le sexe, etc., et Spacu a fait 
du Sterculia platanifolia, son genre Firmiana, dont les carpelles s'ou- 
vrent avant la maturité. 

Deure observe, dans son Memoire sur les acclimations (août 1836), 
que le canal médullaire du Platanifolia, et peut-être celui des Mal- 
vacées arborescentes, ne prend point d'augmentation en diamètre. 


Seconde tribu. — BYTTNÉRIÉES. 


Les Byttnériées ont cinq sépales en estivation valvaire, cinq pétales 
souvent concaves, voûtés à la base et prolongés en languette au 
sommet; des étamines qui varient de cinq à trente, et dont les cinq 
opposées aux pétales sont ligulées et stériles ; les autres sont alternes, 
sessiles, solitaires ou pentadelphes et terminées alors par trois ou seu- 
lement une étamine ; l'ovaire a cinq loges ordinairement dispermes, 
les cotylédons sont tantôt épais et dépourvus d'albumen, tantôt 
foliacés, planes ou roulés et albuminés; l'inflorescence est presque 
toujours en cyme, et les pédoncules sont souvent extra-axillaires. 

Cette tribu appartient principalement à l'Amérique du sud et aux 
Grandes-Indes; elle renferme des arbres et des arbrisseaux que DE 
CanDoLLE renferme sous six genres, dont nous ne mentionnerons 
que trois. 


PREMIER GENRE. — 7 heobroma. 


Le Theobroma a cinq pétales voûtés et allongés en languette 
spathulée ; l'urcéole des étamines porte cinq prolongements, entre 
lesquels sont placés des filets chargés de deux anthères, et opposés 
aux pétales ; le style est filiforme, le stigmate quinquéfide, la capsule 
a cinq loges indéhiscentes, les semences sont placées dans une pulpe 
butyracée, l'albumen est nul, les cotylédons sont épais, oléagineux 
et rides. 

Ce genre comprend cinq espèces, qui sont toutes originaires de 
l'Amérique du sud, et ont à peu près les mêmes propriétés. La seule 
cultivée est le Cacao, qui, comme ses congénères, ne s'élève guère 


= A9 0e 
qu'à vingt pieds, et forme souvent de petites forêts; ses fleurs, peu 
apparentes et axillaires, naïssent dès la troisième année, et sortent 
ensuite continuellement du vieux bois. On récolte toute l’année ses 
fruits à enveloppe ligneuse et indéhiscente, qui renferment une 
vingtaine d'amandes nichées irrégulièrement dans une pulpe buty- 
racée , parce que les parois des loges ont avorté. 

Cet arbre, qui végète continuellement, a ses feuilles articulées cadu- 
ques, et ses stipules géminées et pétiolaires. Il est cultivé depuis un 
temps immémorial, mais il n’a pas encore paru en Europe, parce que 
ses graines perdent promptement la faculté de germer; son bois mou 
est cassant, comme celui des Malvacees. 


SECOND GENRE. — Bytineria. 


Le Bytineria a un calice pétaloïde et persistant, cinq pétales ventrus 
à la base et prolongés au sommet en longue pointe, dix étamines 
fertiles , réunies en urcéole à leur origine, cinq styles et cinq capsules 
chargées de piquants nus ou très-peu velus. 

Ce genre est formé d’une trentaine d’arbrisseaux ou sous-arbris- 
seaux, la plupart peu connus et originaires de l'Amérique sud, de 
la Nouvelle-Hollande et des Grandes-Indes. Ces dernières ont pour 
l'ordinaire les tiges nues; les autres sont armées de piquants sur leurs 
rameaux, leurs pétioles et même leurs nervures ; leurs stipules sont 
caduques, leurs feuilles simples et quelquefois glanduleuses, leurs 
fleurs petites, axillaires , extra-axillaires, géminées, ternées, etc., sont 
presque toujours disposées en ombelles ; leurs fruits hérissés avortent 
souvent, au moins en partie. 

Ces plantes, qui fleurissent très-bien dans nos serres, nouent rare- 
ment leurs fruits; leur ovaire renferme ordinairement deux semences, 
dont une seule est fertile; les capsules s'ouvrent du côté intérieur, et 
les cotylédons, à peu près planes, ont la radicule infère. 

Ce genre mérite d'être étudié surtout pour sa forme de fécondation : 
les pétales se recourbent en arc pour protéger les anthères, et l’urcéole 
est sans doute nectarifère, 

Le Bytineria dasyphylla a ses anthères bilobées, ouvertes latérale- 
ment, et répandant leur pollen dans la concavité mielleuse des pétales 
qui les recouvrent comme une voûte; les stigmates sont enfoncés et 
cachés aussi par les pétales ; en sorte que la fécondation ne peut guère 
avoir lieu que par le concours de l'humeur miellée, 


— 455 — 
TROISIÈME GENRE. — Ayenia. 


L'4yenia a un calice quinquéfide, des pétales onguiculés à la base, 
élargis en voûte au sommet et surmontés de glandes pédicellées, un 
urcéole de dix à quinze dents, dont cinq ou dix sont obtuses et stériles, 
et les autres alternes et monanthères; le style est unique, le stigmate 
pentagone, les cinq carpelles sont bivalves, monospermes et réunis en 
un fruit un peu hérissé et globuleux ; l'albumen est nul, les cotylédons 
sont foliacés et roulés sur eux-mêmes, la radicule est supère. 

Ce genre comprend des petits arbrisseaux ou même des herbes 
originaires des Antilles et de l'Amérique du sud; leurs feuilles sont 
simples et recouvertes de poils étoilés ; leurs stipules géminées et 
caduques, leurs fleurs axillaires et ordinairement réunies en ombelles ; 
les carpelles s'ouvrent souvent élastiquement en deux valves, et les 
semences ont la radicule enveloppée par les replis des cotylédons. 

L’Ayenia pusilla, la seule espèce herbacée et annuelle de toute la 
tribu , a ses tiges droites peu élevées, et chargées aux aisselles de deux 
ou trois petites fleurs qui paraissent successivement ; le calice est étalé, 
les pétales ont des onglets filiformes dont lensemble présente une 
grille, et qui se réunissent au sommet en une voûte chargée de cinq 
glandes pédicellées, entourant le stigmate pédicellé et conique; les 
anthères jaunes et bilobées sont, placées au-dessous, et répandent 
insensiblement leur pollen dans l’urcéole nectarifere. 


Troisième tribu. — LASIOPÉTALÉES. 


Les Lasiopetalees ont un calice à cinq divisions pétaloïdes, persis- 
tantes ou marcescentes, des pétales petits, écailleux et rarement nuls, 
des filets réunis à la base, tantôt au nombre de cinq opposés aux 
pétales, tantôt au nombre de dix alternativement stériles et fertiles ; 
les anthères sont incombantes à deux lobes contigus, l'ovaire contient 
trois à cinq loges, les carpelles bivalves sont ordinairement soudés, 
les semences sont strophiolées à la base, l’albumen est charnu , l'em- 
bryon droit, et les cotylédons sont planes et foliacés. 


. LA 
PREMIER GENRE. — Lasiopetale. 


Le Lasiopetale a un calice persistant, cinq pétales en forme de 
glandes, cinq filets libres, des anthères ouvertes intérieurement par 


— 456 — 
deux pores, un ovaire triloculaire, des loges à deux ovules, une cap- 
sule à trois valves loculicides, des semences à strophiole laciniée. 

Ce genre comprend le Ferrugineux et le Parviflore , qui fleurissent 
dans nos jardins, et qui sont de petits arbrisseaux non stipulés, à 
feuilles alternes et lancéolées ; l'inflorescence est en cymes opposés 
aux feuilles, les pédicelles sont inarticulés, et les bractées tripartites 
sont placées à la base des calices. Le Purpurascens est une troisième . 


espèce, à feuilles stipulées etfleurs pourprées; il est tomenteux comme 
les autres. 


DEUXIÈME GENRE. — Guichenotia. 


Le Guichenotia a un calice persistant, cinq pétales glanduliformes, 
cinq filets libres, dont les anthères s'ouvrent par des fentes latérales; 
un ovaire à cinq loges, contenant chacune cinq ovules revêtus inté- 
rieurement d'un duvet dense , qui s'étend sur toutes les parties de la 
plante. 

Ce genre ne renferme que le Ledifolia de la Nouvelle-Hollande, 
petit arbrisseau extipulé, à feuilles ternées ou verticillées, et roulées 
sur leurs bords, à rameaux intrafoliacés et non axillaires, à grappes 


penchées , unilatérales , intrafoliacées, et fleurissant de la base au 
sommet. 


TROISIÈME GENRE. — Ÿhomasta. 


Le Thomasia a un calice persistant et veiné, cinq pétales qui avor- 
tent quelquefois , cinq ou dix filets réunis, des anthères ouvertes laté- 
ralement, un ovaire à trois loges renfermant chacune plusieurs ovules, 
trois valves loculicides et des semences strophiolées. 

Ce genre est composé dans le Prodrome de cinq arbrisseaux, à sti- 
pules foliacées et persistantes, feuilles lobées recouvertes de poils 


roussâtres , étoilés et hispides; l'inflorescence est en grappes opposées 
aux feuilles. 


On le divise en deux groupes : 

1° Celui à cinq étamines, style allongé et semences géminées dans 
chaque loge ; 

2° Celui à dix étamines, style court et trois à huit semences dans 
chaque loge. 

L'espèce la plus répandue est le Solanacea, du second groupe, ori- 
ginaire, comme toutes les autres, de la Nouvelle-Hollande. Ses grappes 
latérales ont leurs pédicelles déjetés, et leurs pétales tournés vers la 


— 457 — 
terre; cinq de ses dix étamines sont dépourvues d’anthères, les autres 
ont leurs anthères biloculaires, noires et cornées en dehors, mais 
ouvertes intérieurement près du sommet en deux tubes qui lancent 
contre la petite tête du stigmate un pollen dont il est recouvert. Je n'ai 
apercu aucun nectaire , mais j'ai remarqué que les feuilles, très-agran- 
dies, portaient à leur base deux bractées persistantes. 

Le Triphyllum, qui se rencontre aussi dans nos jardins, est un 
arbrisseau touffu, à feuilles sinuées, comme celles du Chéne, exacte- 
ment roulées sur leur face infère, et renfermées d’abord dans deux 
stipules persistantes ; les fleurs, qui paraissent terminales au premier 
coup-d'œil, sont réunies à peu près trois à trois; le calice entier et 
épaissi à la base, se prolonge en membranes pétaloïdes; la capsule est 
triloculaire. Après la fécondation, la tige continue à grandir, et les 
fleurs deviennent latérales. 


Quatrième tribu. — HERMANNIÉES. 


Les Hermanniees ont les fleurs hermaphrodites, le calice valvaire, 
persistant, quinquélobé, nu ou légèrement involucré, cinq pétales 
en estivation tordue, cinq étamines monadelphes à la base, opposées 
aux pétales et terminées par des anthères ovales et biloculaires, cinq 
carpelles réunis en un seul fruit, un albumen charnu et farineux, un 
embryon recourbé, une radicule ovale et infère, des cotylédons folia- 
cés, planes et entiers. 

Cette petite famille renferme six genres répandus dans l'Amérique 
du sud et dans les Indes orientales; nous n’en mentionnerons que 
trois. 


PREMIER GENRE. — ÂMelochia. 


Le Melochia a un calice quinquéfide, nu ou garni d’une à trois 
bractées, cinq pétales ouverts, cinq étamines monadelphes à leur base, 
cinq styles, une capsule à cinq loges et valves loculicides ou septicides, 
une ou deux semences dans chaque loge. 

Il comprend des arbustes stipulacés, des Antilles ou des contrées 
environnantes, à feuilles simples dentées et plus ou moins recouvertes 
de poils étoilés; les fleurs petites et diversement colorées forment des 
panicules ou des cymes resserrés et opposés aux feuilles ; les pédicelles 
sont bractéolés à la base. 


La plus répandue des cinq espèces renfermées dans le Prodrome est 


— 458 — 

le Pyramidata, à fleurs petites et d'un rouge violet; ses anthères bilo- 
bées et extrorses répandentleur pollen à!la base des pétales nectarifères 
et creusés en cuiller; les stigmates sont filiformes et papillaires, et les 
styles pénètrent par le centre de la capsule jusqu’au milieu de la face 
intérieure des carpelles, d'où ils arrivent aux semences à peu près 
géminées dans chaque loge : les capsules s'ouvrent par leur milieu, 
qui s'amincit insensiblement, et leur ensemble forme une pyramide 
pentagone à cinq renflements sur le dos. 

Les feuilles, d’abord plissées en deux, se déjettent ensuite sur leur 
pétiole long et genouillé au sommet, comme dans les Malvacees; les 
pédoncules se divisent en cinq ou sept pédicelles bractéolés. 

Le Corchorifolia, non décrit par De Canpoze, diffère du Pyra- 
midata par ses feuilles glabres et fort amincies au sommet ; ses pédon- 
cules sont géminés, et l’un des deux est extra-axillaire; les fleurs. en 
cymes se déjettent pendant la maturation, et les calices se renflent de ma- 
nière à former enfin une pyramide pointue à cinq angles rentrants, par 
le milieu desquels s'ouvre la capsule à cinq loges loculicides, à peu 
près dispermes; ses tiges sont dépourvues de ces poils unisériés que 
l'on trouve dans le Pyramidata. 


DEUXIÈME GENRE. — Âermannia. 


L'Hermannia a un calice à peu près nu, campanulé et quinquéfide, 
cinq pétales, cinq étamines monadelphes, souvent dilatées à leur 
base, cinq styles réunis en un seul, une capsule à ciagq loges poly- 
spermes et cinq valves loculicides. 

On divise ce genre en deux sections : 

1° Celle des Trionelles, à calice rentlé, comme ceux des Hibiscus 
trionum , et filets fortement dilatés ; 

2° Celle des Hermannelles, à calice non renflé et filets non dilatés. 

Les Hermannia sont des arbrisseaux ou des herbes vivaces, qui se 
sont multipliées par des fécondations artificielles ; leurs fleurs axillai- 
res, géminées et plus ou moins pendantes, sont petites, jaunes, à 
pétales creusés en cuiller sur leur onglet, et fortement roulés sur leur 
limbe ; les feuilles nues ou cotonneuses, à poils étoilés, sont simples, 
dentées, différemment incisées, souvent irrégulièrement trifoliées et 
pennatifides; leurs tiges ordinairement droites et frutescentes , maïs 
quelquefois couchées et demi-herbacées, sont dépourvues de lenti- 
celles et se défeuillent de bonne heure; les rameaux florifères sont 
chaque année remplacés par ceux qui naissent des aisselles inférieures ; 
les feuilles sont plissées et plus ou moins roulées avant le déve- 


— 459 — 
loppement , et leurs dents ne sont pas véritablement glanduleuses. 

Les deux sections de l'Hermannia sont très-distinctes, et supposent 
évidemment une fécondation assez différente ; le renflement des 
calices doit être attribué sans doute à un godet nectarifère dans les 
espèces de la première section, et peu visible dans la seconde. 

Aux approches de la fécondation, qui est toujours intérieure, le 
pédicelle du Disticha, qui appartient aux Hermannelles, s'incline et 
renverse sa fleur ; c’est dans cette situation que les anthères lancent, 
par l'ouverture de leur sommet, un pollen qui tombe immédiatement 
sur le stigmate papillaire et visqueux placé alors plus bas; après la 
fécondation , la capsule se redresse ; puis à la maturation elle écarte 
ses cinq valves loculicides ; les semences sont attachées par leur face 
interne un peu plus bas que leur milieu; la radicule est infère en 
même temps que centripète; ce petit arbrisseau, qui fleurit dans nos 
serres dès le milieu de janvier, perd chaque année ses rameaux flori- 
fères, successivement remplacés par de nouvelles branches sorties des 
aisselles inférieures ; en sorte que la végétation continue indéfiniment. 
J'ai remarqué que les rameaux florifères avaient leurs bractées étroites 
et persistantes, tandis que celles des tiges étaient allongées et cadu- 
ques. Est-ce la même chose des autres Hermannia ? 


TROISIÈME GENRE. — Muahernia. 


Le Mahernia a un calice nu, campanulé et quinquéfide, cinq pétales 
à onglet redressé et limbe tordu en spirale, cinq filets monadelphes 
à la base et renflés plus haut en cupule ou tubercule cordiforme, cinq 
styles quelquefois réunis, une capsule à cinq loges polyspermes et 
cinq valves. 

Les Mahernia habitent le Cap, mêlés aux Hermannia, avec lesquels 
ils ont de grands rapports, et dont ils ne diffèrent guère que par leurs 
étamines renflées en tubercules et non uniformément dilatées. Ces 
petits arbrisseaux, dont l’on connaît déjà une vingtaine, donnent 
sans cesse de nouveaux jets de leurs aisselles inférieures, et fleurissent 
dans nos jardins une grande partie de l’année ; quelques-uns, comme 
le Glabrata, répandent une odeur agréable. 

Leur calice est en estivation valvaire, et leurs pétales contournés 
en spirale sont pourprés ou quelquefois jaunes, et souvent penchés 
comme ceux des Hermannia. 

L'espèce la plus répardue est le Bipinnata, à feuilles allongées, 
pennatifides ou plutôt bipennatifides; les renflements de ses filets, 
comme ceux des autres espèces , sont des scutelles épaisses et velues, 


— 460 — 


sur lesquelles s'élèvent les véritables filets; les cinq étamines s’ap- 
puient contre le style quiest un fil très-délié, terminé par un point 
globuleux, à peu près comme dans les Cyclamen; les anthères en 
forme de flèche s'ouvrent au sommet et latéralement ; en même temps 
les glandes nectarifères, placées à la base extérieure des cinq anthères, 
répandent abondamment l'humeur miellée qui couvre le torus et 
s'élève par les onglets fortement canaliculés des pétales jusqu'aux con-- 
soles qu'elle emprègne; enfin les cinq styles sont réunis en un seul, 
et la fleur reste droite tant que le stigmate n’a pas traversé les anthè- 
res, dont il recoit alors une partie du pollen ; ensuite elle se renverse, 
pour que le stigmate puisse recevoir le pollen lancé par jets suc- 
cessifs. 


Cinquième tribu. — DOMBEYACÉES. 


Les Dombeyacees ont un calice à cinq lobes, cinq pétales planes, 
légèrement inégaux, à estivation convolutive, des étamines multiples 
du nombre des pétales , unisériées, monadelphes et souvent avortées 
en partie, des styles libres ou réunis, et qui varient de trois à cinq, 
des ovules bisériés, géminés ou plus nombreux. 


PREMIER GENRE. — Pentapetes. 


Le Pentapetes a un calice caduc, entouré d’un involucelle tri- 
phylle et unilatéral, cinq pétales, trois étamines anthérifères entre 
chaque étamine stérile, cinq styles, quelquefois réunis en un seul 
terminé par cinq dents stigmatoïdes, une capsule à cinq valves et cinq 
loges polyspermes, des semences nues et non ailées. 

Ce genre ne comprend guère que le Phæniceu des Indes orientales, 
distingué par ses feuilles hastées et dentées, ainsi que par ses pédon- 
cules axillaires, d’une à deux fleurs penchées; ses styles sont réunis, 
et ses cinq filets stériles et claviformes sont deux fois aussi longs que 
les quinze anthérifères et un peu plus courts que les styles; mais les 
fleurs grandes et écarlates sont penchées. 


DEUXIÈME GENRE. — Dombeya. 


Le Dombeya a un calice persistant, profondément quinquéfide, 
entouré d'un involucelle triphylle et unilatéral , cinq pétales, quinze 


— 461 — 
à vingt étamines légèrement réunies à la base, et dont deux ou trois 
fertiles sont placées entre les stériles, un style divisé au sommet en 
cinq stigmates un peu réfléchis, cinq carpelles bivalves, monospermes 
ou polyspermes et fortement serrés entre eux, des cotylédons bifides 
et chiffonnés. 

Ce genre est formé d'arbrisseaux ou sous-arbrisseaux de l'île Bour- 
bon, une seule espèce est originaire de Madagascar, et une autre 
des Indes orientales : on y a ajouté dès-lors le Dombeya reginæ de 
Madagascar et l'Erythroxylon de Sainte-Hélène, quoiqu'il ait cinq éta- 
mines fertiles et cinq stériles. 

On le divise en deux groupes : 

1° Celui dont l'involucre a les folioles élargies, ovales ou cordi- 
formes ; 

2° Celui ou elles sont étroites, lancéolées ou linéaires. 

L'Erythroxylon appartient au second groupe et se fait remarquer 
par ses étamines fertiles déjetées, et ses anthères biloculaires et 
extrorses ; son ovaire est arrondi, son style est unique, et son stigmate 
est formé de cinq lobes allongés et papillaires. Je n’ai pas vu denectaire, 
mais je présume que l'humeur miellée sort après la floraison; car il 
n'est pas facile de comprendre autrement la fécondation, puisque 
les stigmates sont placés au-dessus des anthères, et que la fleur reste 
droite. 


Vingt-sixième famille. — Téfiacées. 


Les Tiliacees ont un calice nu, quatre à cinq sépales en estivation 
valvaire, autant de pétales alternes, souvent creusés en fossette à la 
base et avortant quelquefois, des étamines hypogynes, libres et quel- 
quefois indéfinies, des anthères ovales, arrondies, biloculaires et 
s'ouvrant par une double fente, quatre ou cinq glandes opposées aux 
pétales et adhérant au thécaphore de l'ovaire formé de quatre à dix 
carpelles fortement soudés, les styles réunis et les stigmates ordinai- 
rement libres, une capsule multiloculaire et polysperme dans chaque 
loge, un albumen charnu, un embryon redressé, des cotylédons 
planes et foliacés. 

Les Tiliacées, dont on compte aujourd'hui un grand nombre de 
genres, sont des arbres ou des arbustes et rarement des herbes; leurs 
fleurs sont axillaires , et leurs feuilles simples, bistipulées. 


PREMIER GENRE. — Sparmannia. 


Le Sparmannia a un calice de quatre pièces, quatre pétales arrondis, 
un grand nombre de filets stériles renflés et un peu adhérents à la 
base, plusieurs étamines anthérifères et introrses, une capsule 
hérissonnée, à cinq angles et cinq loges renfermant chacune deux 
semences. 

L'Africana , seule espèce du genre, est un arbrisseau qui croît sur 
les pentes des montagnes du Cap; il a le port et quelques-unes des 
habitudes des Sida, et il se développe sans cesse du sommet sans 
former jamais de bouton; ses feuilles sont alternes, caduques, cordi- 
formes et pendantes sur un pétiole allongé et un peu renflé au som- 
met ; les pédoncules extra-axillaires se divisent en un grand nombre 
de pédicelles dont la réunion forme une ombelle involucrée, assez 
semblable à celle des Geranium ; les fleurs, d’un blanc jaunâtre, redres- 
sent leurs pédoncules à l’époque de l'épanouissement , penchent leurs 
fleurs pendant la fécondation, et redressent enfin leurs capsules pen- 
dant la maturation, à la manière des Dodecatheon. 

Cette plante est surtout remarquable par ses filets stériles, et recou- 
verts de glandes nectarifères destinées à faciliter la fécondation ; à cette 
époque, les anthères fortementirritables, répandent leur pollen sur les 
glandes des étamines stériles, et sur le stigmate qui est une tête globu- 
leuse et papillaire ; l'opération est encore facilitée par la position ren- 
versée de la fleur et la longueur du style. On remarque, dans les filets 
stériles , que l’anthère s’est changée en une glande dont on peut suivre 
tous les passages, et l'on voit même quelquefois les filets métamor- 
phosés en pétales étroits, dont les anthères dépliées forment le limbe. 
L'estivation du calice est valvaire, indupliquée, et celle des pétales est 
chiffonnée ; le pollen jaune est granulé, comme celui des Mulvacees, 
et les filets des étamines sont écartés et rayonnants. 

Le Sparmannia est fort commun dans nos serres, où ses filets stériles 
d'un beau jaune contrastent admirablement avec ses étamines pour- 
prées et ses pétales d’un blanc de neige; ses fleurs ne se referment pas 
pendant la maturation qui dure plusieurs jours, et son calice n’est pas 
nectarifère; mais les poils de l'ovaire sont humectés par les glaniles 
qui l'entourent. Après la fécondation, les pétales se rapprochent, 
ainsi que les étamines qui répandent encore leur pollen sur le stigmate. 


— 463 — 


DEUXIÈME GENRE, — Corchorus. 


Le Corchorus a un calice caduc à cinq pièces, cinq pétales, un grand 
nombre d'étamines, un style court ou même nul, deux à cinq stig- 
mates, une capsule allongée ou arrondie de deux à cinq valves, et 
autant de loges loculicides, des semences bisériées. 

Ge genre, qui se divise en cinq sections fondées principalement sur 
la forme des capsules, contient un grand nombre d'espèces, les unes 
arborescentes, les autres herbacées ou même annuelles, et toutes 
étrangères à l'Europe; on les trouve dispersées au Cap, au Sénégal, 
en Arabie, aux Indes orientales, et surtout dans les vastes plaines de 
l'Amérique du sud. 

L'espèce la plus répandue est l'Olitorius, qu'on cultive comme 
légume, et qui croît abondamment sous les tropiques, où il se ressème 
dans les jardins et le long des clôtures; c’est une plante annuelle à 
fleurs jaunes, comme celles de tous les Corchorus , et dont les pétioles 
renflés au sommet portent deux stipules filiformes; les fleurs extra- 
axillaires et à peu près solitaires, renferment une dizaine d’anthères, 
entourant un ovaire allongé, terminé par cinq stigmates rapprochés ; 
la capsule réfléchie sur son pédoncule renflé est nue, très-allongée , 
et s'ouvre en cinq valves, portant sur le milieu d’une cloison avortée 
deux rangs de semences. Le Triloculuris me paraît homotype à l’Olito- 
rius, mais sa capsule est triloculaire, unisériée et redressée ; en général, 


dans ce genre, c’est la capsule qui a été déformée par suite de divers 
avortements. 


TROISIÈME GENRE. — Triumfetta. 


Le Triumfetta a un calice à cinq sépales obtus ou souvent appendi- 
culés près du sommet, cinq pétales qui manquent quelquefois, dix à 
trente étamines libres ou à peine réunies à la base, un ovaire arrondi 
surmonté d'un seul style, quatre carpelles plus ou moins réunis en 
une capsule hérissée de poils crochus, des semences solitaires ou gémi- 
nées dans chaque loge, un embryon à radicule supère. 

On le divise en deux sections : 

1° Les Zappula ; fleurs apétales, carpelles non séparables et semence 
solitaire dans chaque loge; deux ou trois espèces ; 

2° Les Bartramea ; fleurs pentapétales et carpelles séparables à la 
maturité en quatre loges, dont les semences sont souvent géminées ; 
vingt et une espèces ou variétés. 


— 464 — 


Ce genre est formé d'arbrisseaux et quelquefois d'herbes annuelles, 
répandues sur toute la zone équinoxiale, principalement aux Indes, 
aux Antilles et dans l'Amérique du sud; on en trouve deux dans l’île 
Maurice, une dans l'Arabie heureuse et deux au Népaul. 

Ces deux dernières sont annuelles, comme l'Ænnua de Java, et par 
conséquent peuvent vivre dans les zones tempérées. Le Trichoclada de 
laseconde section, qui a recu son nom dela ligne de poils qu'il porte sur 
ses tiges, s'élève jusqu’à deux pieds, et ses feuilles pétiolées ont leur 
limbe réfléchi comme celles des Sida ; ses fleurs axillaires et terminales 
sont ordinairement réunies trois à quatre par un involucre sétacé, 
son calice est valvaire, ses dix étamines ont les anthères biloculaires 
et introrses, la capsule est légèrement stipitée, et l'on voit à sa base 
une couronne de cinq glandes nectarifères qui sans doute favorisent 
la fécondation. Le Trilobata , à fleurs jaunes, qui doit appartenir à la 
même section, a ses fruits pédicellés, globuleux et hérissés de cro- 
chets, recouverts eux-mêmes de poils rudes et recourbés. 

Ces carpelles, avec leurs poils crochus, qui distinguent les Trium- 
fetta, sont disséminés par les hommes et les animaux; on peut remar- 
quer que ceux qui restent réunis, et par conséquent se transportent 
tous ensemble, sont monospermes; tandis que les autres sont presque 
toujours dispermes dans chaque loge et restent évalves. GÆRTNER dit 
que les Bartramea ont leurs pétales glanduleux et nectarifères à la 
base. 


QUATRIÈME GENRE. — Grewia. 


Le Grewia a un calice coriace et coloré intérieurement, cinq pétales 
glanduleux ou écailleux à la base, des étamines nombreuses, insérées 
au sommet du torus et terminées par des anthères arrondies, un stig- 
mate quadrilobé, un drupe à quatre lobes et quatre noyaux, réduits 
souvent à trois ou même à deux par avortement ; chaque noyau ren- 
ferme deux loges à deux semences, dont l’une avorte quelquefois ; 
l'embryon est droit. 

Les Grewia sont des arbrisseaux originaires des contrées équi- 
noxiales de l'ancien continent, et dont les feuilles simples, alternes et 
stipulées sont souvent recouvertes de poils étoilés; le calice, ordinaï- 
rement caduc, est velu intérieurement; les pétales sont pourprés, 
rouges, blanchâtres, etc., l'ovaire est stipité, les pédoncules axillaires 
sont chargés d’un pius ou moins grand nombre defleurs, qui parais- 
sent terminales avant l'allongement de la tige. 

On en compte environ cinquante espèces , plus ou moins connues, 


— 465 — 


qui renferment sans doute plusieurs variétés, et que DE CAnDoOLLE 
range sous quatre sections d'après la présence ou l'absence des pétales, 
le nombre des nervures des sépales et des feuilles. 

La principale espèce est l’'Occidentalis du Cap, qui fleurit dans nos 
jardins, et dont les tiges sont recouvertes de lenticelles et les feuilles 
caduques chargées de glandes sur leurs bords; les pédoncules arti- 
culés portent à leur sommet trois ou quatre fleurs pédicellées , à peu 
près disposées en ombelle, et qui s’'épanouissent successivement ; les 
pétales pourprés ont à la base une écaille épaisse, nectarifère et velue 
en dehors; la réunion de ces cinq écailles recourbées forme un godet 
constamment rempli d'une humeur miellée, qui imprègne les poils 
feutrés de l'extérieur; et les anthères bilobées et fortement recourbées 
répandent leur pollen jaune au moment où la fleur s'épanouit, et où 
le stigmate aplati, glutineux et frangé, est assez peu élevé au-dessus 
des anthères pour ne pas recevoir immédiatement leur pollen. Le 
Flava de la même contrée a la même forme de végétation et de 
structure florale ; mais ses écailles nectarifères ne sont pas velues. 


CINQUIÈME GENRE. — Tilia. 


Le Tilleul a un calice caduc et quinquéfide, cinq pétales nus ou 
écailleux, un grand nombre d'étamines libres ou légèrement polyadel- 
phes, un ovaire globuleux et velu, chargé de cinq loges dispermes et 
terminé par un seul style; le péricarpe est une noix coriace, qui 
devient uniloculaire par avortement, et contient une ou deux se- 
mences à cotylédons sinués ou dentés. 

On le divise en deux sections : 

1° Celle des espèces européennes, à pétales nus ; 

2° Celle des espèces européennes ou américaines, à pétales écailleux. 

Les espèces du premier groupe, qui pourraient bis n'être que des 
variétés, quoiqu'elles se conservent de temps immémorial, sont le 
Microphytlle ou le Parviflore de nos montagnes, le Platyphylle ou le 
Grandiflora, originaire des mêmes contrées, mais plus répandu dans 
les plantations et les promenades; l'Intermedia, originaire de la Suède, 
et le Rubra, découvert par Srewen dans la Tauride, et désigné encore 
sous le nom de Tilleul de Corinthe. 

Les principaux caractères qui distinguent ces sous-espèces, sont la 
longueur proportionnelle du pétiole et du limbe des feuilles, les poils 
qui récouvrent plus ou moins les bases des principales nervures, et 
les fruits globuleux, lisses ou chargés de côtes saillantes. Scaxurr 
observe que le Platyphylle a les filets réunis en cinq fascicules, formés 

1, 30 


= 4ÿ6 — 
chacun de deux ou trois étamines, et qu'au contraire , le Microphylle 
a tous ses filets libres; que le premier a les lobes de ses stigmates 
redressés, tandis qu’ils sont étalés dans le second. 

Les Tilleuls à pétales écailleux paraissent différer plus fortement 
entre eux que ceux à pétales nus; l'Amérique du nord en compte 
quatre : le Glabra, à pétales crénelés et tronqués au sommet; le 
Laxiflora, à pétales échancrés plus courts que le style; le Pubescens, 
à pétales échancrés et feuilles pubescentes en dessous ; enfin l'Hetéro- 
phrylle , à feuilles tantôt cordiformes, tantôt obliquement et également 
tronquées. Les européens sont au nombre de deux : l'Argentea de la 
Hongrie, remarquable par le duvet blanc qui recouvre la face infé- 
rieure de ses feuilles, et le Petiolaris d'Odessa, qui n’en est peut-être 
qu'une variété distinguée par la longueur de ses pétioles. 

Les Tilleuls sont de grands arbres, à écorce lisse et recouverte de 
lenticelles très-apparentes ; les sommités de leurs pousses se rompent 
de bonne heure, et se terminent alors par un bouton originairement 
latéral, et formé par les stipules endurcies des feuilles; les pousses 
annuelles portent régulièrement sept à huit feuilles, et lorsqu'on les 
taille de bonne heure, elles donnent de leurs aisselles inférieures de 
nouveaux jets, qui se terminent encore par un bouton latéral. 

Les feuilles, à dentelures plus ou moins glanduleuses, sont à peu 
près cordiformes ; leûrs nervures, qui partent d'un point central, se 
ramifent en un réseau très-marqué sur la face intérieure , et qui, dans 
les espèces européennes, porte des houppes de poils aux angles des 
nervures principales. 

Chaque feuille est pourvue de deux stipules caduques, au-dessus 
desquelles entre le pétio'e et le bourgeon de l'année suivante. On voit 
sortir, dans les tiges florales, un pédoncule ailé où une bractée blan- 
châtre, dont le contour est cartilagineux et la surface marquée de 
nervures semblables à celles des feuilles; ce pédoncule se sépare de la 
bractée dans son milieu, et se divise en pédicelles ombelliformes 
chargés de fleurs ; j'ai remarqué que, dans le Microphylle, le pédon- 
cule naît à côté de la feuille et non pas à l'aisselle, qui porte elle-même 
un bouton. 

Les pédoncules, toujours axillaires sur le bois de l'année, sont au 
nombre de quatre ou cinq dans chaque bourgeon; au point où ils se 
séparent de la bractée, on apercoit un bouton qui ne se développe 
jamais, mais qui semble prouver que le pédoncule n’est qu’un rameau 
avorté. Ce bouton existe-t-il dans toutes les espèces ? Je ne l'ai pas 
apercu dans le Microphylle, et il pourrait bien ne pas se trouver non 
plus dans les espèces étrangères. 


— 467 — 

Les fleurs sont formées d'un calice à cinq pièces en estivation val- 
vaire et de cinq pétales de même couleur, mais moins consistants: les 
étamines ont leurs filets différemment pliés, et surmontés d’anthères à 
deux loges divariquées. 

Le nectaire des espèces européennes de notre premier groupe, réside 
en dedans des sépales épais, concaves, et toujours tapissés de poils 
blanchätres et humides, qui recouvrent également l'ovaire dans le 
cours de la fécondation, et recoivent directement le pollen, dont ils 
renvoient les émanations au pistil, qui est une tête obtuse, papillaire 
et obscurément pentagone ; c'est dans l’intérieur de ce calice, qu'on 
voit s'insérer les insectes qui viennent sucer l'humeur miellée. 

Le nectaire est encore plus marqué dans les espèces étrangères, par 
exemple, dans le Glabra de notre second groupe, le seul que j'aie 
encore observé; ses sépales plus fortement creusés portent, chacun 
dans leur cavité, deux glandes mellifères; les pétales eux-mêmes n’ont 
rien de nectarifère; mais on remarque, au-devant de chacun d'eux, 
un second pétale plus aminci, traversé longitudinalement par une 
rainure imprégnée d'humeur miellée ; les étamines, à peu près au nom- 
bre de trente, sont ordinairement trifides et réunies en différents 
corps ; les anthères ne diffèrent pas de celles des espèces européennes; 
l'ovaire est également recouvert de poils laineux et humides, et le 
stigmate est une tête à cinq lobes assez marqués. 

Le fruit des Tilleuls est une capsule demi-ligneuse, ordinairement 
velue, lisse ou plus ou moins sillonnée de cinq côtes ; on y voit dis- 
tinctement avant la maturité, cinq loges à deux graines , mais qui se 
réduisent ensuite à une seule loge indéhiscente, monosperme ou 
disperme ; cette coïncidence de graines qui avortent, et d’une capsule 
qui ne s'ouvre point, montre que la même volonté, qui a formé la 
capsule indéhiscente, avait également déterminé qu'elle n'aurait pas 
besoin de s'ouvrir. Ordinairement le pédoncule qui la porte reste atta- 
ché sur l'arbre jusqu'aux approches de l'hiver, où il se brise irrégu- 
lièrement ; les cotylédons sont très-remarquables par leurs cinq divi- 
sions profondes, et l’on suit les cordons ombilicaux, pénétrant par 
l'axe central, jusqu’au tiers de sa hauteur, et descendant ensuite par le 
côté interne, jusqu'à la base où est logée la radicule. 

On voit trés-bien dans les Tilleuls d'Europe, et sans doute aussi 
dans les autres, les graines avortées et pendant encore le long de 
l'axe central détruit; le cordon pistillaire s'insère un peu au-dessous de 
la pointe, à l'endroit précis où est logée la radicule; l'embryon, 
plongé dans un albumen charnu, monte, en se recourbant un peu, 
jusqu'aux trois quarts de la hauteur de la graine, dont l'enveloppe 


— 468 — 
extérieure est amincie, et se détruit par plaques ; on remarque, vers sa 
partie supérieure, une grande cicatrice par laquelle elle était sans doute 
fixée à l'axe central, et qui recevait les vaisseaux nourriciers, comme 
les cordons pistillaires. 

J'ai vu, à la fin de l'hiver, les pédoncules des Tilleuls d'Europe se 
désarticuler à la base, et tomber encore chargés de leurs pédicelles et 
de leurs graines, et j'ai remarqué quelquefois les péricarpes ouverts 
irrégulièrement en quatre valves, pour répandre leurs semences ; mais 
presque toujours on sème le péricarpe indéhiscent, que perce la 
radicule à la germination. 

Les feuilles, plissées en deux sur leur nervure principale se renflent 
souvent en capuchon, par l'effet de l'inégal accroissement de leur 
contour et de leur centre; les bractées se contournent fortement du 
côté de la lumière, tandis que les feuilles qui les AÇÉCIPAENENS se 
jettent toujours du côté opposé, 

Ces plantes, qui font l’ornement de nos campagnes et de nos 
hameaux, par la fraicheur de leur feuillage et le parfum de leurs fleurs, 
prennent, à la fin de l'hiver, une forte teinte rougeâtre, qui annonce 
le retour du printemps. 

Kocx dit que le calice des Tiliacees est quelquefois tétrasépale, et 
que l'ovaire varie dans le nombre de ses loges, depuis une à dix ; sans 
doute qu'il ne l'a pas examiné dans son premier développement, où il 
m'a toujours paru formé de cinq loges. 


Vingt-septieme famille. — Cametlliées. 


Les Camelliees ont cinq à sept sépales imbriqués, concaves, co- 
riaces, caducs et graduellement plus grands, cinq à neuf pétales 
alternes au calice et souvent un peu adhérents à la base, des étamines 
nombreuses, à filets monadelphes ou polyadelphes, des anthères 
ellipsoïdes et versatiles, un ovaire ovoïde, trois à cinq styles plus ou 
moins réunis, une capsule de trois à cinq loges ordinairement 
trisperme par avortement, à valves tantôt loculicides, tantôt septi- 
cides, des semences attachées au bord central des cloisons, et dont 
l'albumen est nul , des cotylédons épais, huileux et articulés à la base, 
une radicule très-courte et une plumule à peine visible, 


— 4691 — 


Cette famille est formée d'arbres ou d'arbrisseaux toujours verts, 
originaires des Grandes-Indes et surtout de la Chine et du Japon. 
Elle se divise en deux genres : le Camellia et le Thea. 


PREMIER GENRE. — Camellia. 


Le Camellia a un calice recouvert de quelques écailles imbriquées, 
des étamines monadelphes ou polyadelphes à la base, une capsule de 
trois à cinq valves, qui laissent à découvert après la déhiscence un axe 
ordinairement triquètre. 

Ce genre est composé de sept à huit espèces, dont deux sont prin- 
cipalement répandues en Europe, le Japonica des forêts et des jardins 
du Japon, où il s'élève jusqu’à dix pieds, et le Sesanqua des environs 
de Nangasaki, plus petit que le précédent, et à fleurs naturellement 
blanches. 

Ces deux arbrisseaux, cultivés dans leur patrie depuis un temps 
immémorial, ont été depuis plusieurs années admis dans nos serres, 
dont ils font l’ornement par la beauté de leurs fleurs variées de mille 
manières, et qui se succèdent depuis l'entrée de l'hiver jusqu'au milieu 
du printemps. Ce sont des plantes à feuilles ovales, glabres, laurinées, 
dépourvues de stipules, et dont les tiges, rompues à l'extrémité, se 
terminent par un ou plusieurs bourgeons allongés, écailleux et primi- 
tivement latéraux; les boutons à fleurs beaucoup plus renflés, naissent 
solitaires, géminés ou ternés aux aisselles supérieures; les feuilles, 
roulées les unes sur les autres, ne se développent qu’un peu après les 
fleurs, et tombent le printemps de l’année suivante. 

La fécondation des Camellia est difficile à observer, parce que les 
fleurs sont rarement simples; cependant je l’ai vue quelquefois, et 
j'ai remarqué que les anthères sont extrorses, et que les premières qui 
s'ouvrent sont les plus éloignées du centre ; mais par un mouvement 
qui n’est pas rare, les anthères se retournent vers le centre de la fleur, 
et présentent ainsi les unes après les autres leur ouverture aux 
stigmates. 

On peut remarquer que les semences des Camellia, qu'on obtient 
souvent dans le midi de l'Europe, sont dépourvues de périsperme; 
parce que leurs cotylédons épais et oléagineux fournissent naturelle- 
ment à la plantule tout l'aliment nécessaire à son premier deve- 
loppement. 

Ces végétaux, qui se reproduisent, dans nos climats, de racines, de 
marcottes et même de boutures, ont des fleurs éclatantes tout-à-fait 
semblables extérieurement à nos roses doublées ; mais ils manquent 


= 5 

souvent d'élégance dans le port; leurs feuilles, roides et coriaces, 
n'ont ni grâce, ni fraîcheur; et l’on dirait en les voyant qu'ils sont 
plutôt le produit de l’art que de la nature; ils sont en général inodores, 
quoique certaines variétés répandent un parfum assez agréable. 

On a introduit depuis quelques années dans les jardins d'Europe, 
deux autres espèces de Camelliu, le Réticulé et Y'Oleifera, Vun et 
l'autre originaires de la Chine, et destinés à orner encore les jardins 
des amateurs. 


SECOND GENRE. — Jhea. 


Le Thea a cinq ou six sépales, cinq à neuf pétales légèrement adhé- 
rents et disposés sur deux ou trois rangs, des étamines nombreuses 
et presque libres, des anthères arrondies, une capsule à trois coques 
loculicides, et dont les cloisons sont valvaires, c'est-à-dire formées 
par les bords réfléchis des valves. 

Ce genre contient trois espèces : le Chinensis ou le 7 iridis, à feuilles 
allongées et persistantes, le Bobea, à feuilles elliptiques, persistantes 
et d'un vert sombre, et enfin l'O/eosa, des environs de Canton, à 
fruits indehiscents. 

Ces trois plantes ont une grande ressemblance pour le port et l'or- 
ganisation générale; mais elles diffèrent assez pour la conformation 
de la fleur ; la première à un calice à cinq ou six divisions, des pétales 
qui varient de six à neuf, des pédoncules axillaires et solitaires, re- 
dressés pendant la fécondation et penchés ensuite ; la seconde, dont 
les sépales et les pétales sont moins nombreux, a de plus les pédon- 
cules solitaires et terminaux ; enfin la troisième a les pédoncules axil- 
laires, triflores, et les fruits indéhiscents. 

Le Thé de la Chine ou la principale espèce, est un arbrisseau de 
dix à douze pieds, qui croît le long des haies ou des champs, et sur 
les collines peu élevées; on cueille ses feuilles deux ou trois fois l'année, 
et on taille souvent cet arbre pour en recueillir un plus grand nom- 
bre de feuilles. 

Il est cultivé depuis assez long-temps dans les serres d'Europe, où 
il mürit souvent ses fruits; ses feuilles sont persistantes, et ses fleurs 
très-nombreuses et blanches, sont odorantes, et apparaissent dès le 
mois de septembre. | 

La fécondation est directe; après l'épanouissement, les anthères 
introrses latérales répandent leur pollen granuleux et doré sur les 
stigmates, dont les filets sont plus ou moins soudés, et qui sont eux- 
mêmes filiformes et légèrement papillaires. Le torus distille assez abon- 


mr, = 
damment une liqueur miellée qui humecte le fond de la fleur agréa 
blement odorante. La fécondation dure plusieurs jours, au moins 
dans nos serres. 

On connaît peu les deux autres espèces de Thé découvertes par 
Lourernro, et dont la dernière fournit une huile qu'on pourrait retirer 
sans doute de toutes les espèces du genre. Cette huile, qui s'altère 
promptement, comme celle du Cacao, rend infécondes les semences 
du The transportées des Indes en Europe. 


Vingt-huitième famille. — Aewantiacéees. 


Les Aurantiacees ont un calice de trois à cinq dents, urcéolé ou 
campanulé et marcesceni, trois à cinq pétales élargis à leur base, libres 
ou légèrement réunis, et dont les bords se recouvrent un peu dans 
l'estivation; des étamines hypogynes égales au nombre des pétales ou 
multiples de ce nombre, et dont les filets aplatis près de la base sont 
tantôt libres, tantôt différemment réunis ; des anthères introrses laté- 
rales insérées extérieurement un peu au-dessous du sommet, un ovaire 
ovale et multiloculaire, un style simple, un stigmate épais, et en 
apparence entier. Le fruit, qui porte chez quelques auteurs le nom 
d'Aurantium, est formé d'une enveloppe dense, glanduleuse et indé- 
hiscente, qu'on doit peut-être regarder comme un prolongement du 
torus, et qui renferme ordinairement autour d'un axe idéal, plusieurs 
carpelles verticillés souvent séparables par déchirement; les semences 
nues ou enveloppées d'une pulpe charnue, sont plongées au milieu 
de vesicules enflées, pyriformes et adhérentes aux parois; elles s’atta- 
chent à l'angle intérieur du carpelle, et renferment quelquefois plu- 
sieurs embryons, leur spermoderme porte ordinairement une chalaze 
cupuliforme et un raphé distinct ; l'embryon est droit, l'albumen nul, 
la radicule supère est tournée du côté de l'hilus ; les cotylédons sont 
droits, épais et pourvus de deux oreillettes plus ou moins marquées. 

Cette famille est composée d'une cinquantaine d'espèces, rangées 
sous douze genres, et à peu près toutes originaires des forêts des Indes 
orientales, et des îles adjacentes de la Chine, du Japon, de la Cochin- 
chine, etc. Ce sont des arbres ou des arbrisseaux à feuilles glabres, 
dures, brillantes, et qui portent à peu près sur toute leur surface des 
glandes vésiculaires d'huile volatile ; ces feuilles alternes, articulées sur 


— 172 — 


la tige et persistantes, sont ordinairement ailées, sur un pétiole dilaté; 
mais souvent on n'y retrouve que la feuille terminale articulée ou 
non articulée sur son pétiole. Ces mêmes feuilles portent presque tou- 
jours à leur aisselle des épines, qui ne peuvent être considérées comme 
des stipules, puisqu'elles disparaissent par la culture, ni comme des 
branches, puisque les nouvelles branches naissent toujours entre 
l’épine et la branche-mère, 

Les genres de cette famille sont fondés sur le nombre trinaire, qua- 
ternaire ou quinaire des diverses parties de leurs fleurs; sur les éta- 
mines entièrement libres ou réunies, sur le nombre des carpelles, 
celui des semences nues ou entourées de pulpe, et enfin secondaire- 
ment sur le port et la forme des feuilles simples ou ailées, articulées 
ou non articulées. 

De ces divers genres, le seul cultivé en Europe, c'est le Citrus, dont 
l'on compte actuellement au moins cinq espèces, toutes rangées sous 
le même type : 

1° Le Medica ou le Cedrut, qu'on reconnait à ses pétioles nus, et 
surtout à ses fruits oblongs, à écorce épaisse et ridée, et pulpe aci- 
dule ; 

2° Le Limetta ou la Bergamotte, à fruit globuleux, couronné en 
bouclier ; 

3° Le Limonum ou Citron, à pétioles légèrement ailés, fruits 
oblongs, recouverts d'une écorce très-mince et renfermant une pulpe 
très-acide ; 

4° L'Aurantium ou V'Oranger, à fruits globuleux, d'un jaune d'or 
foncé, et pulpe douce; 

5° Le Vulgaris ou le Bigarade , à pétioles aïlés et fruit tuberculé, 
renfermant à l'intérieur une pulpe amère. Risso , qui a donné une his- 
toire spéciale des Orangers, compte trois variétés de la première 
espèce, sept de la seconde, vingt-cinq de la troisième, dix-neuf de 
la quatrième, et enfin onze de la derniére. 

Le caractère botanique du Citrus, le seul genre de la famille que 
nous devions mentionner ici, consiste dans un calice urcéolé de trois 
à cinq divisions, une corolle de cinq à huit pétales, vingt à soixante 
étamines à filets aplatis et plus ou moins réunis à la base ; un style cylin- 
drique, un stigmate hémisphérique et un fruit en baie de sept à douze 
carpelles polyspermes et pulpeux. 

Les cinq espèces qui le composent , et que nous avons mentionnées 
plus haut, sont toutes des arbres ou des arbrisseaux à épines axillaires 
et à feuilles simples par avortement, c'est-à-dire, dont toutes les folioles 


ont avorté, excepté la terminale; qui est articulée à un pétiole sou- 
vent aile. 


— 473 — 

La fécondation de ces plantes a lieu un peu avant l'épanouissement ; 
on voit alors les anthères biloculaires latérales introrses, couvrir de 
leur pollen un stigmate épais et toutimprégné d'une matière visqueuse; 
et l'on remarque en même temps la glande du torus, distillant une 
humeur mielleuse, qui s'étend en gouttelettes sur la base des pétales, 
et favorise encore la fécondation. 

Les diverses espèces de ce beau genre sont cultivées depuis un temps 
immémorial dans les Indes orientales, et ont été tirées des bois pour 
être employées comme clôture ou comme ombrage, et surtout pour 
fournir aux hommes des fleurs parfumées, en même temps que des 
fruits délicieux ou rafraïchissants. Depuis qu’elles ont été introduites 
en Europe, elles se sont acclimatées dans les iles et sur les côtes de la 
Méditerranée, et chaque année, elles donnent abondamment des 
fruits que le commerce répand dans les différentes parties du monde, 
et qui servent à un très-grand nombre d'usages. Ces fruits, dont les 
fleurs paraissent au milieu du printemps, et qui restent à peu près 
quinze mois avant de müûrir, se détachent naturellement à la maturité, 
mais se recueillent avant cette époque, lorsqu'ils doivent être trans- 
portés. Les fleurs sortent également des pousses de l’année et du bois 
de l’année précédente ; ces dernières sont les plus nombreuses, mais 
les autres nouent mieux; les feuilles tombent l’année qui a suivi leur 
développement, et elles se séparent de leur pétiole articulé et de la 
tige qui les porte. 

L'ovaire des Citrus, et sans doute de la plupart des Aurantiacees, 
repose sur une belle glande blanchâtre et nectarifère, qui contribue 
au succès de la fécondation. En ouvrant le fruit avant la maturité, on 
le trouve sphérique, déjà enveloppé de son écorce glanduleuse et ren- 
fermant à l'intérieur une substance épaisse et charnue; autour de 
l'axe central, qui n'est pas encore détruit, sont placés huit à trente 
carpelles, portant chacun deux rangs de graines, et l’on voit très-bien 
les rayons pistillaires qui arrivent du style à l'axe central ; pendant la 
maturation , la substance épaisse et charnue disparaît, poussée vers 
l'enveloppe par l'accroissement des carpelles, et elle se réduit en 
feuillets lâchement appliqués contre l'écorce interne. Les graines pré- 
existent à la fécondation , mais avant cette époque, l'embryon trop 
petit ne peut être apercu. 

Ces plantes, auxquelles il ne manque que la grâce et l'élégance, 
pour occuper le premier rang parmi tous les végétaux, sont bien plus 
brillantes dans leur patrie, où elles se développent en toute liberté, 
que dans notre climat et dans nos serres, où elles forment trop souvent 
des végétaux rabougris, luttant sans cesse contre le manque d'air et de 


— 474 — 
lumière ; leurs feuilles , leurs pédoncules et leurs fleurs, sont, je crois? 
dépourvus toujours de mouvements, et leurs troncs sont exposés, au 
moins dans nos climats, à plusieurs maladies; telles que la transsudation 
gommeuse, le chancre et la jaunisse; on doit ajouter que, dans les 
serres , elles sont tourmentées par les Gallinsectes , dont on ne peut les 
débarrasser que par de fréquents lavages. 

Elles se multiplient de graines, plus facilement que de marcottes ou 
de boutures; on les greffe ensuite, lorsqu'on veut obtenir des variétés. 
C'est un phénomène remarquable que ce grand nombre d’embryons 
contenus quelquefois dans les graines; De CanDoLce croit qu'on peut 
l'expliquer en imaginant la soudure de plusieurs semences, qui n’ont 
conservé qu'une enveloppe commune, et, comme ces semences sont 
dépourvues d'albumen, chaque embryon peut se développer séparé- 
ment sans nuire en aucune manière à ceux qui l'avoisinent. Les coty- 
lédons sont assez épais pour fournir seuls à la plumule et à la radicule 
l'aliment convenable. 

Le Bon Jardinier de 1827 observe que, lorsque la pulpe est amère, 
les vésicules de l'écorce sont aplaties ou même concaves, et que, lors- 
qu'elle est douce, elles sont au contraire convexes, et que le Cedratier 
de Florence, et quelques autres perdent leurs fleurs et leurs fruits mûrs, 
par un froid de quelques degrés, tandis ‘ ‘ils conservent leurs jeunes 
fruits à la même température. 

Les tiges se rompent au sommet, et le bouton axillaire le plus voisin 
se développe en longueur; les épines sont placées hors de l’aisselle, et 
les anthères introrses se terminent par un point glanduleux. J'ai ouvert 
beaucoup de graines, où je n'ai pas su observer plusieurs embryons 
distincts, mais seulement un seul à deux cotylédons épais, chargés 
chacun à leur base d'oreillettes qu'on prendrait facilement pour 
autant de cotylédons, comme le pense GÆRTNER, parce qu'ils ne parais- 
sent pas tenir au cotylédon principal; et j'observe en même temps, aux 
extrémités de la graine, deux prolongements assez marqués; le pre- 
mier et le plus apparent, est celui par lequel entrent les vaisseaux 
nourriciers, et qui est contigu à la radicule; l'autre pourrait bien 
appartenir aux cordons pistillaires. GÆRTNER dit, en effet, que la 
seconde enveloppe de la graine porte à cette extrémité une chalaze 
trés-distincte, qui indique sans doute le point d'entrée de ces 
vaisseaux. 

Risso, dont quelques-uns de ces détails sont tirés ( Annales du 
Museum , v. 20 ,année 1813), observe qu'au printemps et pendant la 
floraison, les fruits perdent une partie de leur suc, qui est repompé 
par la sève, mais qu'ensuite ces fruits grossissent et s’'avancent vers leur 


— 475 — 
maturité conjointement avec ceux de la nouvelle année; les premiers 


peuvent rester long-temps sur l'arbre, en sorte qu'il n’est pas facile de 
fixer l'époque précise où leur maturation est accomplie. 


Vingt-neuvième famille. — Æypéricinées. 


Les Hypéricinées ont un calice persistant, ponctué et glanduleux, 
de quatre à cinq divisions, ou de quatre à cinq pièces, dont deux sou- 
vent plus petites et externes, et deux ou trois autres plus grandes ; les 
pétales alternes aux divisions du calice sont hypogynes, en estivation 
tordue, ordinairement jaunes et veinés, quelquefois marqués de taches 
noires ; les étamines sont nombreuses ,indéfinies et polyadelphes à leur 
base, rarement libres ou monadelphes ; les filets sont roides etamincis, 
les anthères oscillantes, jaunes et petites, l'ovaire est unique et libre; 
les styles membraneux, allongés et alternes aux cloisons, sont quel- 
quefois réunis en un seul ; les stigmates sont simples et rarement en 
tête , le fruit est une capsule ou une baie multivalve, multiloculaire, 
dont les loges sont égales en nombre aux stigmates ; le placenta est 
entier, central ou multiple, et attaché aux bords rentrants des valves; 
les semences sont très-nombreuses, ordinairement cylindriques et 
rarement aplaties, l'embryon est rectiligne, la radicule infère et l'al- 
bumen nul. 

Les Hypéricinees sont éparses dans toutes les parties du monde, 
mais elles ont été principalement répandues en Europe, en Asie et 
surtout dans les deux Amériques, où l'on trouve plus de la moitié 
des deux cent cinquante espèces qui composent actuellement toute la 
famille, et dont quatre sont communes à l'Europe et à l'Asie, et une 
seule, ïe Perforatum , aux trois parties de l'ancien continent. Mais 
ces espèces, loin d'être indistinctement disséminées, ont été, au 
contraire, souvent rapprochées, d'après leurs rapports naturels ; 
ainsi, les Æaronga ont été rélégués dans l'île de Madagascar; les 
Vismia, dans l'Amérique méridionale et surtout dans les bois de la 
Guiane; l'on remarque même que les diverses sections du vaste 
genre Hypericum, qui a des représentants dans presque tous les 
lieux , sont distribuées assez généralement selon les climats, quoiqu'il 
y ait à cet égard des exceptions remarquables. 

Ces plantes sont des arbres, des arbrisseaux , des sous-arbrisseaux 


et même des herbes vivaces et annuelles; les premières appartiennent 
presque exclusivement aux contrées équinoxiales, les autres sont 
principalement répandues dans les climats tempérés de l'Europe et 
de l'Amérique septentrionale. On n’en trouve à peu près aucune sur 
les montagnes élevées ou près des pôles; mais elles se plaisent prin- 
cipalement sur les lisières des bois, le long des haies et des rochers 
maritimes, dans les terrains stériles ou ombragés, presque jamais 
dans les marais , les Elodea exceptés. Les feuilles sont toujours sim- 
ples, entières, opposées, si ce n’est dans l’4/ternifolia qui n’appartient 
peut-être pas à ia famille; elles sont de plus imprégnées d’un suc 
résineux, ou couvertes sur presque toutes leurs parties de glandes 
de la même nature, les unes transparentes et intérieures, les autres 
opaques, noirâtres et extérieures ; les fleurs, pour l'ordinaire disposées 
en cyme ou en panicule terminale, quelquefois, au contraire, simple- 
ment axillaires, sont pédonculées ou sessiles, nues, feuillées ou sim- 
plement garnies de bractées. 

Les vraies Hypericinees sont divisées, par DE Canpozze, en six 
genres, partagés en deux ordres : 1° celui des Ÿ’ismiées , qui comprend 
deux genres étrangers : l'Haronga et le Vismia, distingués par leur 
tige arborescente ou frutescente, leurs fleurs en cymes paniculés, et 
leur fruit bacciforme ; 2° celui des Hypéricées, herbes ou sous-arbris- 
seaux à fleurs terminales ou axillaires et fruit capsulaire : ce dernier 
est formé de quatre genres, dont trois en partie européens , que nous 
allons décrire. 


PREMIER GENRE. — Androsæmum. 


L'Androsæmum a une capsule bacciforme et qui ne renferme 
guère qu'une loge à trois placentas; son calice est à cinq divisions 
inégales et sur deux rangs; sa corolle est pentapétale; ses étamines 
sont nombreuses et réunies à la base en cinq corps; ses styles sont au 
nombre de trois, et les semences sont attachées à trois placentas 
oblongs, portés sur autant de lames qui naissent des parois. 

L'Androsæmum, qui a le port et les caractères des Hypericum, dont 
il ne diffère à peu près que par sa capsule bacciforme, est un sous- 
arbrisseau du Caucase, et qui se trouve assez abondamment dans 
l'Italie et le midi de la France, où il fleurit, dès la fin du printemps, 
parmi les buissons des prairies humides. Ses feuilles sessiles, entières 
et légèrement cartilagineuses sur les bords, sont dépourvues de glandes 
noirâtres, mais percées de glandes fines et transparentes; ses tiges, 
glabres et lisses, comme le reste de la plante, portent deux arêtes 


— 477 — 


saillantes , qui correspondent aux pétioles, et varient par conséquent 
selon les entre-nœuds; ses pédoncules en cime terminale, solitaires, 
ternés et même quinés, sont toujours articulés au-dessous du sommet; 
le calice qui se déjette de bonne heure, et laisse la baie à découvert, 
est foliacé, à divisions inégales, arrondies, entières, mais jamais ciliées 
ou glanduleuses; les fleurs, d’un jaune d’or, sont toujours redressées 
sur des pédoncules bractéolés à la base ; les stigmates sont de petites 
têtes papillaires et promptement déjetées. 

Cette plante forme un petit arbrisseau touffu, qui rougit de bonne 
heure en automne, et qui repousse chaque année de la base de son 
cyme floral desséché; la disposition qui m'a paru ici la plus remar- 
quable, est celle du calice réfléchi, mettant à découvert la baie qui se 
détache naturellement, ou s'ouvre d’une manière assez irrégulière ; 
les feuilles se disposent souvent sur un même plan par la torsion des 
entre-nœuds. GÆrTNER observe que l'Androsæmum diffère de l’Hype- 
ricum , non-seulement par la conformation de son fruit, mais encore 


par sa radicule centrifuge, et le raphé qui parcourt la graine dans 
toute sa longueur. 


DEUXIÈME GENRE. — Âypericum. 


L'Aypericum a cinq sépales plus ou moins inégaux, cinq pétales, des 
étamines ordinairement nombreuses et polyadelphes à leur base, 
presque toujours trois à cinq styles, une capsule membraneuse de 
trois à cinq valves. 

On divise ce genre nombreux en cinq sections : 

1° Les Asyreia, a sépales inégaux et réunis à la base, étamines 
nombreuses, trois à cinq styles ; 

2° Les Tridesmes , à sépales égaux et entiers, étamines réunies en 
trois corps, péricillés au sommet ; 

3° Les Elodea , à sépales égaux et entiers, neuf à dix-huit étamines 
fortement réunies, fleurs axillaires, ou terminales et ramassées ; 

4° Les Perforaires , à sepales entiers, dentés ou glanduleux sur les 
bords, étamines nombreuses, presque toujours trois styles ; 

5° Les Brathys, à sépales entiers et foliacés, étamines nombreuses, 
presque toujours trois styles. 

Les Asyreia sont de petits sous-arbrisseaux dont l’on compte actuel- 
lement vingt-six espèces répandues dans l'Amérique septentrionale, 
les Indes, le Japon, la Chine et les îles adjacentes ; quelques-unes sont 
établies dans les Canaries, et une ou deux s’avancent dans la Grèce, la 
Sicile et le midi de l'Italie. Leurs tiges s'allongent jusqu'à ce qu’elles 


— 478 — 


soient arrêtées par la floraison, leurs feuilles développées sont opposées 
deux à deux et un peu bombées dans le milieu ; leurs fleurs sont peu 
nombreuses et souvent assez grandes, les glandes extérieures et noi- 
râtres manquent souvent, mais les autres sont visibles par transparence 
dans la plupart des espèces. Quelques-unes, comme le ZLanceole ‘de 
l'île Bourbon, sont arborescentes et donnent une résine précieuse ; 
l’Hircinum de la Sicile exhale une forte odeur; le Balearicum est re- 
marquable par les verrues qui recouvrent ses feuilles et sa tige, etc.; 
presque tous ont le calice déjeté de bonne heure, et présentent des 
observations physiologiques dans le phénomène de la fécondation, 
ainsi que dans l'organisation de la capsule. 

On divise toute la section en deux groupes artificiels, fondés sur 
le nombre ternaire ou quinaire des styles. 

Le premier est formé de dix espèces de l'Amérique du nord, des 
Canaries et de la Méditerranée; la principale est l'Hércinum, aussi 
remarquable par la beauté de son port et l'élégance de ses feuilles, 
que par ses fleurs portées sur des pédoncules articulés et munis de 
deux bractées ; l'odeur de bouc que répandent ses feuilles dès qu’on 
les touche, doit être probablement attribuée aux glandes parenchy- 
mateuses, que l'on découvre en regardant par transparence, ou mieux 
encore en Ôtant légèrement l'épiderme; la capsule renferme trois pla- 
centas pédonculés, dégagés de tout axe central et chargés de graines 
nombreuses très-menues. 

Le second comprend seize espèces, presque toutes étrangères, et 
appartenant à divers types. Une des plus remarquables est le Chinense, 
à feuilles glauques et styles réunis jusque près du sommet; ses anthè- 
res, comme celles de plusieurs autres espèces du même type, le Lan- 
ceolatum et l'Angustifolium, par exemple, sont surmontées d’une 
glande sphérique, qui me paraît remplir les fonctions de nectaire; les 
pétales, découverts de bonne heure par le calice déjeté,; sont d'abord 
verts, ensuite verts et jaunes, et enfin jaune orangé et même jaune 
rouge; leur substance coriace distille continuellement de grosses 
gouttes de cette même résine liquide qu'on recueille avec soin dans le 
Lanceolatum ; les fleurs terminales sont en apparence solitaires, mais 
on voit qu’elles étaient primitivement disposées en une ombelle, ou 
plutôt un cyme, de quatre ou cinq pédoncules articulés, et dont plu- 
sieurs ont avorté; on peut même retrouver la trace de ces avortements 
dans les aisselles inférieures. 

Le Calicinum de l'Orient est remarquable par la grandeur et la 
beauté de ses fleurs terminales et solitaires; sa tige tétragone est cou- 
chée ; ses feuilles ovales et coriaces sont entières et un peu cartilagi- 


-— 479 — 


neuses sur les bords ; son calice s'étale avant l'inflorescence, et sa cap- 
sule ne tarde pas à se pencher, pour répandre ses nombreuses graines 
attachées sur deux rangs à l'extrémité des parois recourbées. On peut 
remarquer encore un second calice à deux pièces qui ne sont que des 
rudiments de feuilles, et des étamines nombreuses, sans cesse agitées 
et terminées par des anthères ovales et chargées de glandes necta- 
rifères. 

Cette plante, qui se reproduit continuellement par ses racines, a ses 
tiges penchées sur le sol et terminées ordinairement par une très- 
grande fleur. Après la dissémination, qui a lieu en automne, les feuilles 
disposées sur le même plan par la torsion des entre-nœuds émettent de 
leurs aisselles des bourgeons qui perpétuent la plante, dont le sommet 
se dessèche et se rompt, et dont les anciennes feuilles périssent. 

La dernière des espèces de ce groupe, que je me propose de men- 
tionner, est le Balearicum , de l'ile Majorque, qui fleurit une grande 
partie de l’année; il s'éloigne de tous les Aypericum par sa tige et ses 
feuilles chargées de verrues assez grosses, qu'on peut considérer comme 
des glandes engorgées ; la fleur est terminale et solitaire; les étamines 
sont à peu près libres ; après la rupture du pédoncule, la tige repousse 
des aisselles supérieures. Cette plante me parait dépourvue de mouve- 
ment. 

Les Tridesmos ne contiennent que deux espèces, l’une de la Chine 
et l'autre de Madagascar, sous-arbrisseaux homotypes, quoique diffé- 
rents à certains égards, et qui se distinguent de la plupart des autres 
Hypericum, non-seulement par la singulière conformation de leurs 
étamines, mais encore par leurs fleurs axillaires longuement pédon- 
culées. 

On pourrait y placer encore plusieurs autres espèces : l'Elodes, le 
Tomentosum , et en particulier l'Ægyptiacum , à tige frutescente, 
articulée, feuilles glauques, ponctuées, perforées et fleurs terminales. 
Cette plante, que De Canpozze range dans la section des Perforaria, 
a sesétamines réunies en trois faisceaux pénicillés, desanthèresextrorses 
qui répandent leur poussière jaunâtre, non pas immédiatement sur les 
trois stigmates infères , divariqués et axillaires, mais sur trois glandes 
très-marquées au bas de l'ovaire entre les faisceaux staminifères , ainsi 
que sur les écailles nectarifères des pétales. Ces nectaires et ces écailles 
appartiennent également à l'Elodes, comme l'a déjà observé Soyer 
WiLzLEMET. 

Les Elodea, qui forment notre troisième section, sont des herbes 
vivaces ou sous-frutescentes de l'Amérique du nord, où elles vivent 
dans les marais et les lieux humides; elles se font remarquer par une 


TS 
corolle d’un jaune rougeätre, plus ou moins campanulée et même 
tubulée ; le Virginicum porte de plus entre ses étamines des poches 
nectarifères qui appartiennent peut-être aussi aux deux autres espèces. 

Les Perforuria, qui comprennent à peu près la totalité des Hypert- 
cum européens, se divisent artificiellement plutôt que naturellement 
en deux groupes: celui à sépales entiers et celui à sépales dentés, 
frangés ou glanduleux. 

Le premier, qui comprend presque cinquante espèces, la plupart 
de l'Amérique du nord, renferme principalement trois types euro- 
péens : 1° celui du Quadrangulare , très-commun dans les lieux 
humides, et remarquable par ses tiges anguleuses , ses petites fleurs 
et ses panicules resserrées; 2° celui de l'Humifusum , à fleurs météori- 
ques, quadrifides ou quinquéfides, souvent axillaires et solitaires, 
calice foliacé et inégal, tige d'abord droite, ensuite couchée, et feuilles 
persistantes en hiver; enfin 3° celui du Perforatum, le plus commun 
et le plus répandu, qui se reconnaît à sa tige marquée de deux arêtes, 
et aux nombreuses glandes, soit transparentes, soit noirâtres, qui 
recouvrent toutes ses parties. Des deux autres espèces européennes 
que renferme ce groupe, la première, ou le Dubium de nos montagnes, 
appartient au type du Quadrangulare ; et le Crispum à celui de l'Hu- 
mifusum. 

Les Perforaria du second groupe comptent un grand nombre 
d'espèces, qui habitent presque toutes l’ancien continent, et sont 
principalement répandues en Orient et au midi de l'Europe. Je les 
range sous quatre types : le premier est celui de l’Hérsutum, d'où 
dépend le Tomentosum, et qui se reconnait à ses feuilles velues ou 
cotonneuses , ainsi qu’à ses fleurs météoriques; le second est celui du 
Fimbriatum ou du Richeri, à capsule tachée, sous lequel je range le 
Pulchrum, le Barbatum etle Montanum, tous les quatre à tige cylin: 
drique et droite, feuilles amplexicaules, lisses et plus ou moins cordi- 
formes; le troisième est le Vummularium , du midi de la France et des 
rochers du Piémont, remarquable par ses feuilles orbiculées et pétio- 
lées, ainsi que par ses calices ovales et obtus ; le dernier enfin est le 
Coris, de l’orient et du midi de l'Europe, plante trés-élégante à fleurs 
météoriques, tige demi-ligneuse , feuilles roulées, linéaires et quater- 
nées, ou plutôt opposées et accompagnées de deux stipules; c’est à 
ce type que je rapporte l'Empetrifolium, à feuilles ternées, roulées 
sur les bords, calice étalé et glanduleux au contour, fruit formé 
de trois carpelles presque distincts et élégamment striés sur les côtés. 

Les Brathys , qui sont tous étrangers, forment de petits arbrisseaux 
à feuilles dures, souvent roulées et ponctuées; on en connaît dix, 


— 481 — 


vriginaires des Andes, à l'exception du Revolutum des montagnes de 
l'Arabie, et du Fasciculatum de Y Amérique du nord; ils se plaisent 
dans les lieux frais ét montueux, où ils se font remarquer par leurs 
rameaux quadrangulaires, aplatis et chargés des cicatrices des ancien- 
nes feuilles ; leurs fleurs assez grandes et terminales en apparence, 
deviennent souvent latérales et solitaires par l'allongemeñt des tiges. 
Je n’en ai observé aucune espèce vivante. 

Le grand genre des Hypericum est, comme on le voit, dispersé 
dans les diverses parties du monde : les 4scyreia , dans l'Amérique 
du nord ; les Tridesmos, aux Grandes-Indes; les Æ/odea, dans les 
marais de la Caroline ; les Brathys, aux Cordillières; et les Perforaria, 
à calice entier et surtout glanduleux, dans les régions méditerranées 
de l'Europe. 

Ces plantes sont des arbrisseaux, sous-arbrisseaux ou des herbes 
vivaces : une seule, le Simplex de l Amérique, est peut-être annuelle ; 
les premières, la plupart étrangères, donnent chaque année de nou- 
veaux rameaux de leurs aisselles supérieures, et portent, à côté de leurs 
tiges fleuries, des tiges stériles destinées à les remplacer l’année sui- 
vante; les autres, au contraire, ne repoussent que du bas de leurs tiges 
ou même de leurs racines, qui doivent alors être considérées comme 
des rhizomes. Dans le Quadrangulare, le Perforatum, etc., le bas de 
la tige se coude, et au-dessus de l'angle, sur la tige de l’année et 
même au-dessous , on apercoit, dès la fin de juillet, les rudiments des 
nouvelles pousses qui se développent pendant l'automne, de manière 
à former quelquefois un gazon serré; ensuite, à la fin de l'hiver, on voit 
sortir des aisselles de toutes les feuilles à demi détruites de jeunes 
rameaux, en nombre presque infini, dont quelques-uns sans doute 
périssent, mais dont d’autres deviennent de vraies tiges toujours 
dépendantes de la même racine. Dans l'Hircinum , etc. , les feuilles se 
disposent sur le même plan par la torsion de la tige, et elles tombent 
par une désarticulation très-apparente, ainsi que dans le Perforatum, 
et les espèces qui perdent promptement leurs feuilles ; maïs non pas, 
par exemple, dans le Tetragone, et l'on peut remarquer que les diverses 
espèces de ce genre ne présentent que rarement dans leurs racines 
ces tubercules, ou ces drageons souterrains qui caractérisent les 
p'antes sociales. 

Les tiges, dont la consistance est ligneuse, et qui subsistent dessé- 
chées une grande partie de l'hiver, sont quadrangulaires et même 
ailées, ou cylindriques ; mais dans ce cas, souvent marquées, ainsi que 
les rameaux, de deux nervures opposées qui aboutissent toujours à la 
nervure principale des feuilles de la paire supérieure ; la plupart des 

1. 31 


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espèces ont les tiges droites ou ascendantes; cependant elles sont 
fortement couchées dans le Calicinum , Y Humifusum , le Repens , etc. 

L'inflorescence est ordinairement terminale et en cyme, et alors la 
floraison est centrifuge, c’est-à-dire que la fleur qui paraît la première, 
est la plus centrale; mais lorsque les fleurs sont axillaires, comme 
cela arrive quelquefois dans l'Humifusum, principalement dans les 
Brathys, la floraison est au contraire centripète. Les corymbes sont 
redressés depuis la floraison jusqu’à la maturité, cependant dans le 
Calicinum , et peut-être aussi dans toutes les espèces à tiges couchées, 
la capsule est penchée, ou même dirigée vers la terre, sur laquelle 
elle répand ses graines. 

Les fleurs sont ordinairement sans mouvements, Aééeile l'époque 
où elles s’épanouissent jusqu'à celle où leurs pétales se détachent ; 
mais l'Aumifusum ferme ses corolles chaque soir, comme l'Hirsutum, 
l'Elodes, et probablement les espèces du même type. Quelquefois les 
calices se réfléchissent fortement pendant la fécondation, et ne se 
relèvent pas ensuite; mais quelquefois aussi, et surtout dans les 
espèces rampantes, comme l’Humifusum , ils protégent exactement la 
capsule jusqu’à la dissémination; les pédoncules participent à l'immo- 
bilité des fleurs, rarement ils sont articulés, mais ils portent souvent 
de petites bractées. 

Les étamines, plus ou moins polyadelphes, sont souvent réunies 
en trois ou cinq groupes très-marqués, et diffèrent considérablement 
pour le nombre qui est quelquefois réduit à neuf, mais qui, pour 
l'ordinaire, paraît indéfini. 

L'ovaire est surmonté de trois à cinq styles rapprochés, ou même 
réunis, mais plus souvent divergents. Ce nombre peut varier dans 
la même plante, comme, par exemple, dans le Fimbriatum ou le 
Richeri, dont la fleur centrale a quatre ou même cinq styles, tandis 
qu'on n’en trouve que trois dans les autres; les stigmates sont simples 
ou arrondis en tête, ou aplatis ou évasés et presque toujours élégam- 
ment papillaires. Ils survivent assez long-temps à la fécondation avec 
les styles, les étamines, la corolle et le calice. 

Au moment où la fleur s'ouvre, les styles auparavant rapprochés 
divergent ets'étalent entre les vides que laissent les groupes des anthè- 
res ; et les étamines, couchées les unes surles autres, ou même tordues 
comme dans l'Hircinum, s'écartent en rayonnant; en même temps 
on remarque, dans ces étamines à filets enroidis, allongés comme dans 
la plupart des espèces du genre,un mouvement d'irritabilité ou d’agita- 
tion, très-distinct chez la plupart des Ascyreia. Dans l'Hircinum, les 
anthères extérieures, qui s'ouvrent les premières, se rapprochent des 


— 483 — 


stigmates au moment où elles répandent leur poussière, tandis que 
les intérieures qui fleurissent les dernières s'en écartent, jusqu'à ce 
que les autres soient flétries ; le même phénomène a lieu dans lHumi- 
fusum , et probablement dans toutes les espèces où il y a, comme dans 
celles-ci, un enlacement de filets qui ne peut-être attribué à d’autres 
causes. 

L'épanouissement de tous les Hypericum que j'ai observés, a lieu 
dans les heures matinales, un peu plus tôt ou plus tard, selon la saison 
et l’état du ciel. Toutes les fleurs qui doivent s'ouvrir dans la journée 
s'étalent à peu près au même moment; quelques heures plus tard, les 
anthères se fendent en repliant leurs parois, et en:lancant leur pollen 
autour d'elles et en particulier sur les houppes stigmatiques, qui en 
sont comme saupoudrées; elles étaient premièrement d’un rouge 
brillant, elles deviennent alors grisâtres ; toutefois les anthères, dans 
quelques espèces, s'ouvrent lentement, surtout dans les temps humides 
où elles sont long-temps recouvertes d’une partie de leur pollen. — 
Est-ce que les fleurs de l'Aypericum tomentosum et des autres espèces 
qui se referment, ne protégent pas ainsi leur fécondation, qui est 
moins terminée dans la journée que celle des autres espèces ? Est-ce 
que les espèces dont les fleurs se referment ont aussi leurs stigmates 
étalés et leurs filets rayonnants ? Oui, mais ces stigmates se rappro- 
chent en même temps que les fleurs se referment, et la fécondation 
se parachève à l’intérieur, 

L'organe nectarifère varie beaucoup dans ce genre; quelquefois, 
comme dans les Ælodea, les Tridesmes, V Ægyptiacum et Y Elodes, 
on observe à la base de l'ovaire trois glandes arrondies, placées entre 
les faisceaux des étamines, et de plus à l'onglet de chaque pétale un 
petit tube écailleux qui paraît nectarifère. Plus souvent, au contraire, 
on ne remarque rien qui indique la présence de la liqueur miellée, 
ou bien elle est seulement fournie, comme dans l'Hircinum, par des 
glandes très-peu visibles entre l'ovaire et la couronne des étamines. 

Lorsque la fécondation est terminée, les styles se rapprochent et 
redeviennent parallèles, au moins dans les espèces dont les corolles 
se referment ; mais dans le Perforatum, le Quadrangulare , et celles 
dont les corolles restent ouvertes, ils se tordent et se déjettent irré- 
gulièrement, sans doute parce qu'ils n’ont pas, comme les autres, une 
fécondation à perfectionner. 

Les pétales de ces mêmes plantes se tordent aussi et se roulent 
séparément, pendant que les étamines tombent et que la maturation 

qu 
s'opère. 


Les capsules des Hypericum sont en général ovoïdes ou coniques, 


— 484 — 


lisses et brillantes, ou recouvertes de glandes jaunâtres; elles s'ouvrent 
ou s’entr'ouvrent à la maturité en autant de valves qu’il y a de loges 
ou de styles, et l’on reconnaît alors distinctement que les parois de 
ces loges étaient formées par les bords rentrants des valves; mais ces 
bords, tantôt se prolongent jusqu’au centre, et alors leurs placentas 
se réunissent et forment un axe central à six ou dix rangs de graines, 
ou bien, au contraire, ils n’atteignent point le centre, et alors on 
n’apercoit aucun axe, et les valves portent leurs graines sur leurs 
bords rentrants et recourbés. Ces diverses apparences, dont je n'in- 
dique que les extrêmes, dérivent de la même conformation primitive, 
et elles prouvent évidemment que, dans ce cas, les cloisons sont les 
prolongements des valves, et que les bords de ces valves sont sémi- 
nifères. 

Les capsules restent toujours droites, au moins dans les espèces 
non rampantes , et répandent long-temps leurs graines qui sortent par 
l'agitation de l'air, lorsque la température n’est pas trop humide; ces 
graines sont petites, nombreuses, cylindriques, ovoides, lisses, 
ponctuées, hérissées, brunâtres ou noirâtres ; leur albumen est nul, 
et leur radicule est toujours tournée vers le point d'attache. 

Le principal caractère auquel on reconnaît promptement un Hype- 
ricum, est célui de ces glandes qui recouvrent toutes leurs parties, et 
sont, comme je l'ai déjà dit, transparentes ou noirâtres ; les premières, 
logées d'ordinaire dans le parenchyme et sur le bord des feuilles, 
s'apercoivent très-bien par transparence ; certaines espèces, comme 
le Perforatum , en sont pour ainsi dire criblées; d’autres, comme le 
Dubium , en paraissent presque entièrement dépourvues; mais je suis 
porté à croire qu'elles sont alors si petites, qu’elles échappent à nos 
instruments, puisque l'Aypericum laricifolium, où l'on ne les voit pas, 
possède les mêmes propriétés que les autres espèces , et fournit même 
à la teinture ce suc jaune, analogue à la gomme-gutte, que contien- 
nent les glandes transparentes. 

Indépendamment de ces glandes vésiculaires et résineuses, plusieurs 
Hypericum portent sur leurs ovaires, leurs capsules et leurs pétales, 
des bandes ou réservoirs résineux ; d’autres ont encore sur les bords 
de leurs feuilles, de leur calice, de leur corolle et jusque sur leurs 
anthères, des points noirs et arrondis, ordinairement sessiles, mais 
quelquefois aussi pédonculés, et qui me paraissent être les excrétions 
de certains pores de la plante; ce qui semble confirmer ma supposition, 
c'est que le Balearicum et encore quelques autres, transsudent des 
‘ molécules, plus grosses, il est vrai, et verdâtres, mais pourtant rési- 
neuses. Pour vérifier mes conjectures , il faudrait observer ces glandes 


— 485 — 

ou plutôt ces excrétions, depuis leur première origine jusqu'à leur 
entier développement. Ce qu'on peut dire en attendant, c'est qu'elies 
paraissent de très-bonne heure, qu'elles affectent toujours les mêmes 
positions sur les bords des feuilles, des pétales et surtout des calices ; 
qu'elles sont tantôt plus, tantôt moins nombreuses, et qu'elles ne sont 
pas irrégulièrement disposées, comme de simples déjections, mais 
qu’elles entrent dans le parenchyme des feuilles. 

La famille des Hypericum a été enrichie de nos jours, et en parti- 
culier depuis la publication du Prodrome, d'un grand nombre d'es- 
pèces étrangères qui ont été distribuées par Sracn en plusieurs genres 
nouveaux, dans lesquels sont admis encore plusieurs espèces an- 
ciennes ; mais ces genres, qui ne comptent quelquefois qu'une espèce, 
chargent la botanique de nouveaux noms qui en rendent l'étude tou- 
jours plus pénible, et engendrent une confusion que de pareilles 
innovations accroitraient chaque jour. Sans doute qu'il y a des genres 
dont les espèces ont des caractères particuliers, mais il faut considérer ‘ 
ces espèces, comme des sections, si elles sont nombreuses, ou comme 
des types si elles le sont moins; car les véritables espèces ont presque 
toujours des caractères propres, et si on voulait les séparer on aurait 
alors presqu’autant de genres que d'espèces. Il faut donc tenir ici un 
certain milieu , et ne perfectionner qu'insensiblement la nomenclature, 
qui, quoi que l'on fasse, restera toujours tres-imparfaite. Surtout il 
faudrait s'appliquer à grouper les espèces d'après leurs caractères 
physiologiques. 

La famille des Æypericinees mérite d’être étudiée avec plus de soin, 
pour tout ce qui concerne ses organes sexuels et ses formes de fécon- 
dation : j'ai déjà remarqué que certaines espèces, comme les Æ/odea, 
avaient des nectaires, tandis que d'autres en étaient privées ; que les 
Ascyreia étaient pourvus d'étamines irritables; que, dans d’autres, 
les étamines extérieures, qui fleurissent les premières, s’approchent 
du centre de la fleur, au même moment où les intérieures s’en écar- 
tent; que, tantôt les stigmates se divariquent fortement comme pour 
aller à la rencontre du pollen, et tantôt restent rapprochés, parce 
que les étamines ont-elles mêmes des mouvements propres, etc. 
Mais ces divers mouvements organiques, qui appartiennent plus ou 
moins à nos espèces européennes, ne sont pas les seuls qu'on apercoit 
dans les Hypericum; il en est de plus remarquables qui distinguent 
ces belles espèces étrangères que nous voyons rarement fleurir dans 
nos serres, et que je recommande aux botanistes qui pourront les 
observer, avec tout ce qui concerne les glandes vésiculaires et noi- 
râtres, et la végétation elle-même. Ainsi, par exemple, jé vois actuel- 


2 18 — 


lement un Hypericeum hircinum , dont toutes les feuilles sont redressées 
sur un même plan par l'effet de la lumière, et non-seulement ces 
feuilles sont renflées et comme genouillées à la base, mais les entre- 
nœuds même de sa tige se sont encore tordus séparément pour favo- 
riser le mouvement des feuilles. 

Les Hypericum sont peu cultivés dans nos jardins, parce qu'ils sont 
inodores, et ont peu d'apparence; toutefois il faut en excepter quel- 
ques espèces étrangères, comme l'Aircinum , V’ Angustifolium, le 
Canariense et le Calicinum , qui font l'ornement de nos bosquets, et 
dont les fleurs épanouies ont beaucoup d'éclat. 


TROISIÈME GENRE. — ÆsCyrum. 


L'Ascyrum a un calice à quatre pièces, dont les deux extérieures 
sont plus petites et quelquefois presque avortées, quatre pétales et 
un grand nombre d'étamines à peine réunies en quatre corps, un à 
trois styles, et une capsule à deux, trois ou quatre valves déhis- 
centes. 

Ce genre, qui a toute l’organisation des Hypericum, dont il ne 
diffère que par le nombre des parties de la fleur et des valves de la 
capsule uniloculaire, est actuellement formé de huit à neuf espèces, 
originaires de l'Amérique septentrionale, et qui sont des arbrisseaux 
ou sous-arbrisseaux ; les uns, à tige faible, penchée ou couchée, et 
pédicelles réfléchis ; les autres, à tiges et pédicelles redressés. 

Ces plantes, qui varient assez pour le nombre des styles et des 
stigmates, ainsi que pour celui des valves, ont l’organisation des 
Hypericum, quoique leurs glandes transparentes ne soient guère visi- 
bles que dans l’Aypericoides ; les autres se trouvent seulement sur la 
surface inférieure, où elles sont quelquefois si abondantes, qu’elles 
la recouvrent entièrement; les styles et les stigmates varient de deux 
à quatre, et les placentas sont situés sur les bords mêmes des valves, 
parce que celles-ci n’ont point de prolongement intérieur. 

Les feuilles de tous les Ascyrum sont sessiles, et entières et d’un 
vert foncé; leurs fleurs, peu nombreuses, sont terminales ou axillaires, 
et toujours étalées; les tiges cylindriques sont marquées de deux 
arêtes; les pédicelles sont souvent munis de deux bractées, et les 
capsules sont protégées pendant la maturation par les deux sépales 
intérieurs qui les surmontent ; les semences sont petites, ovales, 
allongées et marquées ordinairement de points excavés. 

Les feuilles des Ascyrum portent à la base deux glandes, et sont 
ponctuées comme les sépales de glandes transparentes. Je ne sais pas 


— 487 — 
si le torus de ces plantes est nectarifère, et si leur fécondation donne 
lieu à quelques observations physiologiques. 

Dans le Crux Andreæ de la Virginie, qui porte deux stigmates , les 
capsules uniloculaires s'ouvrent en deux valves, sur les bords des- 
quelles sont attachées des semences dont la radicule est par conse- 
quent centrifuge et non pas centripète. Les autres espèces ont leur 
capsule ini ou quadrivalve selon le nombre des styles ou des 
stigmates. 

On ne peut pas dire que les 4scyrum aient une capsule vraiment 
uniloculaire , puisque leurs nombreuses semences sont attachées aux 
intervalles qui séparent les valves; ce sont des capsules de deux à 
quatre loges, dont les valves ne se sont que très-légèrement replies, et 
dont les cloisons sont par conséquent avortées. 


es AT 


Trentièime famille. — Ffalpighiacées. 


Les Malpighiacées ont un calice à cinq divisions et pour l'ordinaire 
persistant, cinq pétales onguiculés, alternes aux lobes du calice, insé- 
rés sur un disque hypogyne, quelquefois inégaux et rarement nuls ; 
dix étamines alternes aux pétales,” naissant sur le même disque et plus 
ou moins réunies à la base; trois styles quelquefois soudés, trois car- 
pelles monospermes, dont un ou deux avortent assez souvent; des 
semences pendantes et dépourvues d'albumen, un embryon droit ou 
plus ou moins recourbe , une radicule courte, et des cotylédons folia- 
cés où un peu épais. 

Cette famille est actuellement formée d'environ trois cent soixante- 
dix arbres ou arbrisseaux, souvent volubles ou sarmenteux, et dont 
le très-grand nombre appartient à l'Amérique équatoriale; leurs 
rameaux sont presque toujours noueux; et leurs feuilles opposées 
sont pétiolées, simples et rarement dentées ou lobées; leurs stipules, 
qui manquent quelquefois , sont petites et lisses, leurs pédicelles arti- 
culés sont pourvus de bractées. 

Nous diviserons cette famille en deux tribus : celle des Malpighices 
et celle des Banisteriees. 


— A88 — 


Première tribu. — MALPIGHIÉES. 


Les Malpighiees, qui ont trois styles distincts ou réunis et un péri- 
carpe charnu, indéhiscent, sont comprises sous trois genres, dont 
nous ne mentionnerons qu’un seul. 


Malpighia. 


Le Malpighia a un calice à cinq divisions glanduleuses, cinq pétales 
onguiculés et étalés, dix étamines fertiles et légèrement monadelphes, 
trois styles libres, un drupe à trois noyaux monospermes. 

Ce genre, qui contient une vingtaine d'espèces à pédoncules axil- 
laires, uniflores ou ombellifères, a été partagé par DE CANDOLLE en 
deux groupes : 

1° Celui à saies roides et piquantes, comme celles des Oriies ; 

2° Celui des espèces glabres ou dépourvues de soies piquantes. 

L'espèce la plus répandue de notre premier groupe est l’Urens, à 
feuilles ovales, chargées à leurs aisselles de petits paquets de fleurs. 
d'un blanc teint en rose, et dont les cinq divisions calicinales portent, 
chacune à leur base, deux glandes qui, pendant à l’anthère, distillent 
un suc visqueux, propre à arrêter les insectes; les pétales, en estiva- 
tion imbriquée comme les calices, et creusés en cuilleron, sont 
consistants et ont leurs onglets étendus en étoile; les dix étamines 
entourent les trois styles qui, d'abord rapprochés, s'écartent forte- 
ment pour la fécondation. On voit alors les dix filets se rapprocher 
trois à trois de chaque style, et les anthères d’un beau jaune répandre, 
sur les stigmates glutineux qu’elles recouvrent, un pollen sphérique, 
qui sort en masse nuageuse de toute la masse antérieure des deux 
lobes qui s'ouvrent comme un sac, tandis que la face opposée repré- 
sente le connectif; la dixième étamine reste libre au centre. Ce joli 
phénomène, unique, je crois, dans son genre, s'opère pendant et 
après la fécondation. 

Le Glabra, qui appartient à notre second groupe, mais dont les 
calices n’ont que six glandes, deux sur deux divisions, et une sur les 
deux autres, car la cinquième division en est dépourvue, a proba- 
blement une forme de fécondation à peu près semblable à celle de 
l'Urens; toutefois je vois un Malpighia qui a tout-à-fait le port du 
Glabra, mais dont les calices sont chargés de dix glandes comme ceux 
de Y Urens, et dont trois ou seulement quatre étamines sont fertiles, 


— 489 — 
et emettent, par les deux fentes latérales de ieurs anthères, des flocons 
d’un pollen nuageux, à molécules sphériques, dans lesquelles restent 
long-temps plongés les stigmates visqueux d’un drupe triloculaire et 
bisperme. 

Le principal phénomène de ce genre est celui de ces poils nommés 
Malpighiani , qui sont des glandes serrées, d’où sort une soie hori- 
zontale , tubulée à l'intérieur et renfermant une liqueur âcre, qui en 
sort pour entrer dans le corps étranger qui la presse. 

Les feuilles des Malpighies sont équitatives, et se débarrassent au 
moment où elles se développent du coton brun qui les recouvrait. 


Seconde tribu. — BANISTÉRIÉES. 


Les Banisteriees ont trois styles distincts, des carpelles secs, indé- 
hiscents, monospermes et prolongés en ailes; leurs feuilles opposées 
sont quelquefois verticillées. 


PREMIER GENRE. -— Duanisleria. 


Le Banisteria a un calice chargé à la base de huit à dix glandes, 
des pétales onguiculés, fimbriés et arrondis, dix étamines à filets 
subulés et cohérents par la base, trois styles à stigmates lamelliformes, 
des carpelles séparés à la dissémination, et prolongés en une aile 
membraneuse, épaissie du côté supérieur, une semence pendante, 
des cotylédons épais et inégaux. 

Ce genre, qui comprend aujourd'hui plus de soixante espèces , est 
formé d'arbrisseaux, la plupart sarmenteux ou grimpants, presque 
tous originaires de l'Amérique équatoriale. Ils ornent les bois de leurs 
fleurs d'un jaune éclatant, et dont les grappes ou les panicules retom- 
bent en festons; leurs tiges amincies s'élèvent à une grande hauteur, 
et forment des berceaux de verdure entre les arbres qui les soutien- 
nent; leurs feuilles souvent glanduleuses à la base, sont simples, 
entières, ovales, cordiformes, anguleuses ou rarement lobées; leur 
surface est lisse, velue, cotonneuse ou quelquefois piquante, comme 
celles des Malpighia, avec lesquels les Banistéries ont de grands rap- 
ports. Je n'ai vu vivante aucune espèce de ce genre. 


— 490 — 


SECOND GENRE. — Heteropteris. 


Les Heteropteris ne diffèrent des Banisteria que par leurs carpelles 
ou leurs samares épaissis postérieurement et non antérieurement ; on 
en connait déjà une trentaine d'espèces, dont la plupart sont des 
arbres ou des abrisseaux grimpants et sarmenteux, à pédicelles arti- 
culés et pourvus de bractées, comme dans les Malpighia. 

Le Chrysophylla du Brésil a les feuilles laurinées, les fleurs termi- 
nales en corymbes, ou axillaires , etalors moins nombreuses; le calice, 
à cinq divisions bifides, présente l'aspect d'un calice à dix divisions ; 
la corolle jaune est formée de cinq pétales fortement onguiculés, et 
déjetés dans la fécondation ; les cinq étamines alternes aux pétales, 
ont leurs filets élargis, solides, cartilagineux, appliqués contre l’ovaire 
velu qu'ils recouvrent, et terminés chacun par deux anthères bilobées, 
horizontales et introrses; les trois stigmates saillants sont recouverts 
d'un pollen onctueux, l'ovaire est triloculaire et ses loges m'ont paru 
monospermes ; les fleurs sont axillaires et paniculées, et les feuilles 
recouvertes en-dessous d'un dûvet doré, ont les pétioles trés-courts 
et chargés de deux glandes. 

Pourquoi dans les Banisteries l'aile des carpelles est-elle épaissie 
antérieurement, tandis qu’elle l’est postérieurement dans les Hete- 
ropteris ? Ces ailes sont évidemment destinées à la dissémination des 
carpelles, qui, dans ces deux genres, tombent séparés. 


Trente-unième famille, — Acérinées. 


Les Acérinées ont un calice de quatre à neuf et ordinairement de 
cinq divisions, des pétales en nombre correspondant, insérés autour 
d'un disque hypogyne, alternes aux divisions du calice et quelquefois 
avortés; des étamines qui varient de cinq à douze, et dont le nombre 
ordinaire est de huit; des anthères oblongues, un ovaire didyme, un 
style simple et des stigmates géminés; le fruit est formé de deux et 
rarement trois carpelles indéhiscents, séparables à la maturité et 
allongés en samares membraneux, épaissis du côté inférieur, et ren- 
fermant une ou deux semences attachées à la base des loges; l'endo- 
plèvre est charnu, l'embryon recourbé ou roulé sur lui-même; les 


— 491 — 
cotylédons sont foliacés et irrégulièrement ridés, la radicule cylindri- 
que est dirigée vers la base de la loge. 

Les Acérinees sont des arbres à feuilles opposées et presque toujours 
simples; leurs fleurs, en grappes ou en corymbes axillaires, sont quel- 
quefois apétales, souvent polygamiques ou dioïques par avortement. 

Cette famille est formée de deux genres : l’ Acer et le Negundo. 


PREMIER GENRE. — cer. 


L’Acer ou l'Erable, a les fleurs polygames , le calice à cinq lobes 
plus ou moins profonds, sept à neuf étamines , rarement cinq. 

On le divise en trois groupes : 

1° Celui à fleurs en grappes ; 

2° Celui à fleurs en corymbes ou en fascicules ; 

3° Celui à fleurs en ombelles paniculées. 

Les Erubles sont des arbres originaires de l'Europe ou de l'Améri- 
que septentrionale, et dont quelques espèces ont été dispersées en 
Asie ou au Japon; on en compte plus de trente, dont plusieurs ne sont 
peut-être que des variétés, et dont d’autres, comme celles du Japon, 
sont encore peu connues ; je les divise d'après le port et la végétation, 
en sept principaux types. 

Le premier est celui des Ærables arbustes ; à feuilles petites et un peu 
coriaces , comme le Campestre , la plus répandue de toutes les espèces, 
le Creticum, le Monspessulanum , Y Opulus , Y Opulifolium , le Neapoli- 
tanum ou l' Obtusatum , etc., tous ou presque tous, originaires de l'Eu- 
rope, et habitant de préférence le bas des montagnes ou les expositions 
sèches et abritées; leurs bourgeons, souvent pubescents, sont velus 
dans le Campestre ; leurs fleurs, disposées en corymbes, et rarement 
en grappes droites , naissent au sommet des ramilles, et paraissent en 
même temps que les feuilles cordiformes ou lobées ; leur bois est dur, 
leur écorce ridée, et leurs semences divergent plus ou moins à la ma- 
turation. 

Le second type est formé de véritables arbres, tels que le Dasycar- 
pum , le Platanoïdes, leSaccharinum , le Nigrum, le Rubrum , etc., dont 
les fleurs sont disposées en corymbe, et dont la sève fournit au prin- 
temps, une matière sucrée. [ls appartiennent tous à l Amérique septen- 
trionale, le Platanoïdes excepté; leurs feuilles cordiformes sont ordi- 
nairement glabres, et quelquefois glauques en-dessous ; les pétioles du 
Platanoïdes sont lactescents. 

Le troisième comprend des arbustes, tels que le Pseudo-Platanoides, 
et surtout des arbres, comme le Pseudo-Platanus , le Spicatum et le 


— 492 — 


Latifolium à feuilles cordiformes, lobées ou même déjetées, épis droits 
ou pendants, et qui tous, à l'exception du second, reconnaissent 
l'Amérique pour leur véritable patrie. 

Le quatrième est celui de l’ Acer Striatum ou Érable jaspé de l Amé- 
rique, qui se distingue de tous les autres par son port et sa végétation; 
son tronc et ses principales branches, sont d'un vert glauque, relevé 
de stries blanchâtres ; ses feuilles sont fortement élargies et divisées 
en trois lobes aigus; ses fleurs, qui pendent en grappes vertes, laté- 
rales et terminales, sont hermaphrodites, ou ont les anthères avortées; 
les fruits, à ailes recourbées, sont marqués d'une large fossette sur 
leurs Fe latérales ; les Dire. s'appliquent après la Fpot haut et 
les samares ne Pr qu'au printemps. 

Le cinquième ne renferme non plus que le Tataricum, petit arbre 
à feuilles larges, vertes, cordiformes, irrégulièrement dentées et assez 
semblables à celles du Charme ; les fleurs terminales sont disposées en 
corymbe, et les pétales rougeâtres et toujours connivents, ne s'en- 
tr'ouvrent que pour donner passage aux étamines ou aux stigmates; 
la fécondation s'opère ainsi à l'extérieur par les fleurs mâles ; car les 
anthères des fleurs femelles, quoiqu’en apparence bien conformées, 
restent cachées entre les pétales, et l'ovaire, à deux lobes légèrement 
velus, est couronné de stigmates one 

Le sixième est celui des Érables du Japon, qui sont des arbres de 
moyenne grandeur, assez semblables entre eux, et dont les fleurs et 
les rameaux sont souvent remarquables par leurs belles teintes rou- 
geätres. 

Le septième est celui du Spicatum du Canada, à grappes pendantes, 
fleurs très-petites et dioïques, étamines très- dei dans les fleurs 
mâles. Édouard Sracn ( Bulletin des Sciences, octobre 1834), divise 
les Érables en deux sections inégales : la premiere , de beaucoup ja 
plus nombreuse, est celle des espèces polyg ames, dont les feuilles 
naissent avant Lé fleurs ; la seconde, qui comprend l’Acer rubrum , 
l'Eriocarpum , l'Opulifolium et le us cuineum , variété du Rubrum , 
est celle des espèces dioiques, dont é fleurs Soon au contraire, 
avant les feuilles. Il n’est pas besoin de remarquer cette belle cause 
finale, qui, pour faciliter la fécondation, n'a placé parmi les espèces 
dioïques que celles dont les fleurs sont épanouies avant les bourgeons. 
L'Acer opulifolium où Vernum de REGNIER, qui appartient à cette 
seconde division ; est aussi dioïque; Gaupix dit que ses samares sont 
stériles , ce qui ruir bien signifier la même chose. 

Taie les Érables sont liés par un ensemble de caractères qui les rap- 
prochent en même temps qu'ils les éloignent des autres genres; leurs 


— 493 — 


feuilles simples, cordiformes ou lobées sont toujours opposées; leurs 
boutons sont toujours formés d'écailles rougeâtres très-marquées, et 
leurs fleurs verdâtres ou jaunâtres sont réunies en grappes ou en 
corymbes. 

Les tiges sont toujours terminées par trois boutons, dont les deux 
latéraux plus petits; on ne remarque point dans leur intérieur la 
bourre laineuse des Æsculus où Maronniers, mais on y trouve des 
feuilles nues, plissées en éventail sur leurs lobes, glanduleuses dans 
leurs dentelures, et qui tombent généralement dans le courant de 
l'automne, mais qui se conservent plus long-temps dans les espèces 
de notre premier type, et enfin qui persistent jusqu'au printemps 
dans le Creticum. 

Les boutons des Érables portent les uns des feuilles et des fleurs , les 
autres seulement des feuilles; ces derniers, plus petits et plus nom- 
breux, sont placés généralement dans les aisselles inférieures; les uns 
et les autres sont formés d'écailles opposées, et dont le nombre est 
très-variable. 

Le Strié n’en a que quatre, quelques autres en ont six à huit au 
plus ; leur surface extérieure est lisse dans le Srié, pubescente dans le 
Campestre , l'Opulifolium , etc. ; les écailles intérieures sont plus élar- 
gies que les autres surtout vers les bords, afin sans doute de préserver 
encore mieux les feuilles non développées. 

Les fleurs, qui paraissent de bonne heure’au printemps , et avant 
les feuilles dans les espèces polygames, sont terminales sur les tiges 
et les rameaux; leurs diverses teintes verdâtres, jaunes ou jaunâtres, 
contrastent très-agréablement avec le vert foncé du reste de la plante, 
et forment une des premières scènes de l’année. 

Ces fleurs offrent de si nombreux exemples d’avortement, qu’elles 
ont été placées par Livné dans la polygamie ; quelquefois les grappes 
sont toutes hermaphrodites, quelquefois les unes sont hermaphro- 
dites, et les autres mâles ou mêlées; quelquefois un individu a toutes 
les fleurs hermaphrodites, et un autre de la même espèce en porte des 
femelles ou des mâles, ou des femelles et des mâles; en un mot, il 
n'est aucune disposition des organes sexuels qu'on ne puisse rencon- 
trer dans les espèces de ce genre : toutefois l’on voit toujours dans les 
fleurs mâles des rudiments de pistil, et dans les fleurs femelles des 
rudiments d'étamines; mais ce qu’il y a de singulier, et ce qu’on peut 
remarquer dans le très-grand nombre des espèces c'est que les éta- 
mines des fleurs mâles sont saillantes, et que celles des femelles, quoi- 
qu'en apparence bien conformées, entourent l'ovaire sans s'ouvrir. 

L'inflorescence générale est simultanée, mais dans les grappes ou 


—494 — 


corymbes, les fleurs mâles paraissent les premières et tombent aprés 
la fécondation, par une rupture régulière du pédicelle; dans le Pla- 
tanoïdes, par exemple, elles sont si abondantes que la terre en paraît 
jonchée; les fleurs hermaphrodites ou femelles, persistentau contraire 
en resserrant leurs pétales, et bientôt après on voit s'élever de leur 
centre des samares à teintes rougeâtres, qui se mélangent très-agréa- 
blement au vert toujours plus foncé des feuilles. On peut remarquer 
en général, que, lorsque les fleurs mâles sont nombreuses, elles 
paraissent avant les femelles, et plus tard si elles sont moins abon- 
dantes. 

La fleur elle-même, qui n’a rien de constant dans le nombre de ses 
pétales et de ses étamines, est très-remarquable par le disque charnu 
qui entoure l'ovaire , et sur lequel sont empreints des enfoncements 
d'où sortent les étamines; ce disque éminemment nectarifère, est 
quelquefois formé de glandes distinctes, quelquefois, au contraire, 
il est peu apparent. 

A la fécondation, les étamines 5 ‘approchent une à une du pistil, 
dans les fleurs hermaphrodites de l'Érable strié et de la plupart des 
autres espèces; mais ces mêmes étamines, dans les fleurs mâles, sont 
fortement saillantes, et répandent au loin le pollen de leurs anthères 
jaunes et bilobées ; les fleurs femelles, de leur côte, étalent au-dessus 
de la corolle leurs deux stigmates diétbsés velus et papillaires ; telle 
est la forme générale de féchudalsoin des Érables ; mais on ne peut 
guère douter qu ‘il n’y aitici, selon les espèces, de nombreuses modi- 
fications, qui n'ont pas encore été étudiées. Ainsi, les Érables à fleurs 
nee ne peuvent pas être fécondés de la même manière que ceux 
à fleurs redressées ; ni ceux en grappes, comme ceux en corymbe. 
Mais ce sont là des phénomènes curieux qui s'éclairciront par le temps 
et l'étude; en attendant, je mentionne ici, comme hermaphrodite, 
et digne par conséquent d'être observé, l'Acer Læselii que Tewor m'a 
montré à Naples, et comme véritablement hybride, l’Acer kybridum, 
dont la patrie est inconnue, et dont les fleurs femelles ont comme les 
mâles leurs stigmates avortés. 

Les Érables de mes deux premiers types, tels que le Monspessula- 
num, \ Opulus, le Platanoïdes et \ Opulifolium, ont les fleurs du même 
corymbe mâles ou femelles , les premières avec des anthères saillantes 
et presque dépourvues de tout rudiment de pistil, les autres avec des 
anthères bien conformées, mais avortées autour d’un bel ovaire, dont 
les stigrnates sont des languettes allongées et papillaires en dessous. 
Le nectaire y est peu marqué, parce qu'il ne coopère pas à la fécon- 
dation. 


— 495 — 

Dans ces deux types, les fleurs mâles ont leurs pédoncules arti- 
culés à la base; mais ceux des fleurs femelles ou hermaphrodites sont 
continus et plus épais; aussi ces derniers appartiennent-ils toujours 
aux divisions principales, tandis que les autres sont formés par les 
divisions secondaires. La même observation s'applique sans doute à 
toutes les espèces de notre troisième type, par exemple, au Pseudo- 
Platanus, dont les fleurs mâles sont aussi sur des pieds distincts, et 
les femelles sur d’autres , où l'on remarque pourtant encore quelques 
fleurs mâles plus ou moins avortées. Le nectaire de ces dernières est 
un plateau épais et tout imprégné d'humeur miellée, et celui des 
femelles est remplacé par les poils épais et humides qui recouvrent 
l'ovaire; cette forme de fécondation appartient également au Cam- 
pestre, dont les corymbes mâles sont entièrement séparés des femelles. 

L'intérieur des Samares est lisse ou velouté, comme dans les Cha- 
taignes; l'on voit distinctement le cordon ombilical arriver de l’arête 
supérieure et interne à la base de la graine, où est logée la radicule ; 
les cotylédens , qui varient beaucoup, sont quelquefois simples et plus 
souvent plissés, ou roulés en spirale, etc. IT serait intéressant de voir 
si ces variations ont quelques rapports avec nos différents types, et 
j'ai déjà vérifié que l'embryon du Strie n’était pas conformé comme 
celui des autres Érables. 

La dissémination s'opère plus tôt ou plus tard, selon les espèces ; 
en général, les samares, au milieu ou vers la fin de l’automne, se déta- 
chent un à un par la base , et abandonnent leur pédoncule sur lequel 
ils flottaient. J'ai remarqué "dans plusieurs espèces, une cavité oblon- 
gue et très-sensible sur le côté intérieur, et j'ai vu qu’elle se liait à une 
conformation particulière de l'embryon. Après la dissémination, les 
samares se partagent en deux lobes égaux, et mettent à découvert la 
graine enveloppée d'un parenchyme brun et desséché. 

Ce genre présente quelques phénomènes physiologiques; ainsi, par 
exemple, les lenticelles très-marquées sur les jeunes pousses s’effacent 
promptement sur les autres, excepté peut-être dans l’Acer opulifo- 
lium ; les pétioles et les feuilles du Platanoides et du Campestre don- 
nent un suc laiteux ; les feuilles de plusieurs autres transsudent une 
espèce de manne recueillie par les abeilles; la variété panachée du 
Pseudo-Platanus se multiplie par les semences ; le Srriatum porte sur 
ses tiges des bandes blanchâtres et d'autres verdâtres, qui changent de 
couleur selon les saisons, etc. 

L'inflorescence des Érables est toujours terminale sur les brindilles, 
les pédoncules, qui ont porté les corymbes ou les grappes, se dessè- 
chent et se détruisent après la dissémination, et les deux feuilles 


— 496 — 
opposées les plus voisines, et qui sont souvent les seules du rameau, 
portent chacune à leur aisselle un bourgeon, par lequel le rameau 
floral continuera à végéter l'année suivante. 

L'Érable commun oule Campestre a l'écorce chargée d’une substance 
tubéreuse, semblable au Ziége ; cette excroissance, qu'on ne voit 
plus dans les vieilles tiges, est produite par une surabondance de 
parenchyme, qui tantôt sort par les lenticelles, tantôt s'épanche 
longitudinalement au-dessous de l'écorce, laquelle ne tarde pas à se cre: 
vasser. 

La principale remarque physiologique qu’on peut faire sur ce genre, 
c'est celle de ces avortements toujours partiels, au milieu desquels 
se conservent les espèces. 


SECOND GENRE. — Vegundo. 


Le Negundo a les fleurs dioïques, un petit calice de quatre à cinq 
dents, une corolle avortée ou nulle. Ce genre, autrefois confondu avec 
celui Fa Érables, en a été séparé par DE CannozLe et ensuite par 
d'autres botanistes, quoiqu'il ne renferme que le Fraxinifolium de la 
Pensylvanie et de la Caroline ; des deux espèces qu'on lui associe, le 
Mezxicanum n'en diffère que par ses feuilles trifoliolées, et le Cochin- 
chinense ne lui appartient peut-être pas. 

Le Fraxinifolium n'a pas l'organisation des Érables , ses tiges sont 
bien terminées semblablement par des bourgeons foliacés qui les con- 
tinuent; mais les bourgeons latéraux, au lieu d’être saillants comme 
ceux dés Érables, restent au contraire long-temps cachés sous les 
pétioles de l’année précédente, et les feuilles sont ailées sans impaire ; 
les boutons à fleur entourent le bouton terminal, et sortent des 
aisselles supérieures un peu avant les feuilles; les fleurs mâles, qui 
naissent à peu près cinq à cinq d'un bouton écailleux, et dont les 
pédicelles très-nombreux s’allongent à la fécondation, ont un calice 
quinquéfide, et des anthères fortement pendantes; les femelles, à pé- 
doncules ramifiés et plus ou moins redressés, se reconnaissent aux cinq 
divisions élargies de leur calice, ainsi qu’à leur ovaire à deux lobes 
saillants, chargés d'un stigmate géminé, ligulé et papillaire seulement 
à l'extérieur. 

La fécondation à lieu au printemps; les quatre ou cinq anthères, 
flottantes et brunâtres, ouvrent longitudinalement leurs lobes, et 
répandent, à la faveur du vent, sur les stigmates humides et différem- 
ment contournés, un pollen farineux, qui s'échappe insensiblement 
plutôt que par des jets successifs. 


= 499 — 

Je n'ai aperçu, ni dans les fleurs mâles, ni dans les femelles, aucun 
indice du nectaire glanduleux des Érables ; c'est pourquoi le calice 
est constamment fermé dans la fleur mâle, et appliqué contre le fruit 
dans la femelie. 

Cet arbre est fort commun dans nos bosquets, où il se fait remar- 
quer au printemps par ses feuilles d'un vert léger et brillant ; ses 
fleurs, qui ont peu d'apparence, intéressent le physiologiste par leur 
conformation singulière; les fruits, qui ne tombent qu’au printemps, 
et qui ont tout-à-fait la structure de ceux des Érables, sont presque 
toujours vides à l'intérieur, quoiqu'en apparence bien conformés : 
cela vient:il de ce que la plante est éloignée de son climat natal , ou 
de ce que les fleurs mâles sont souvent trop distantes des femelles ? 
Les jardiniers observent aussi que les Negundo se multiplient facile- 
ment de bouture, tandis que les Ærables ne se reproduisent guère 
que de semences : ce qui sert à prouver encore la différence d'orga- 
nisation des deux genres. 

Quoi qu'il en soit, il est difficile de ne pas remarquer ici ces fleurs 
qui sortent avant les feuilles pour faciliter la fécondation, et ces 
pédoncules longuement pendants, qui portent, dans l’intérieur d’un 
très-petit calice, des anthères à filets papillaires et flottants. 


À — 


Trente-deuxième famille. — ÆZéppocastanées. 


Les Hippocastanées ont des fleurs polygames monoïques, un calice 
quinquélobé à estivation valvaire, quatre à cinq pétales inégaux et 
hypogynes, sept à huit étamines hypogynes, libres et inégales, des 
anthères ovales, un pollen ovoiïde à trois plis, un ovaire arrondi et 
légèrement trigone, un style unique et terminé par un stigmate peu 
distinct, une capsule formée primitivement de trois valves loculicides 
et de trois loges à deux ovules attachés aux bords des cloisons , Mais 
qui, dans la maturation, avortent en grande partie avec les loges ; les 
deux semences, qui restent ordinairement dans la capsule, sont 
grosses, arrondies et recouvertes d'un test coriacé, qui porte à sa base 
une large cicatrice arrondie et grisâtre ; l'embryon est recourbé, l'al- 
bumen est nul, les cotylédons sont charnus, très-épais et fortement 
soudés; ils restent en terre pendant la germination, et Ja plumule, 
qui perce la radicule dans laquelle elle était d'abord renfermée, pré- 

I. 32 


— 498 —- 


sente, dès son origine, deux feuilles semblables à toutes les autres, et 
semblablement plissées; la radicule aboutit sans doute d’abord à 
l'extrémité des cordons pistillaires, mais l'irrégularité des avortements 
l’éloigne ensuite plus où moins de sa situation primitive. 

Cette famille est composée d'arbres ou d'arbustes, presque tous 
originaires du nord de l'Amérique , et réunis autrefois sous un seul 
genre, mais aujourd'hui séparés en deux ou trois, dont les espèces ou 
variétés, à peu près au nombre de vingt, se ressemblent soit pour la 
forme des fleurs, soit surtout pour l'organisation générale. Ce sont 
des plantes à feuilles palmées , à fleurs disposées en grappes terminales 
et légèrement paniculées. 


PREMIER GENRE. — /Æsculus. 


L'Æsculus a un calice campanulé, quatre ou cinq pétales à limbe 
ovale et étalé, des étamines déclinées et ascendantes, des capsules 
hérissées de piquants, des folioles sessiles ou presque sessiles. 

On en compte jusqu’à présent cinq espèces homotypes, les unes 
originaires de l’ancien, les autres du nouveau continent, et dont la 
plus répandue est l'Hippocastanum du nord de l'Inde, acclimaté depuis 
près de deux siècles en Europe; on y joint le Rubicond, dont la patrie 
est inconnue, mais qui se distingue par ses fleurs rouges tétrapétales, 
ses huit étamines et sa floraison d'un mois plus tardive. 

Les Æsculus de Y Amérique nord, moins élevés que les autres, sont 
jusqu’à présent le Glabra, le Pallida et celui de l'Ohio ; on les recon- 
naît à leurs fruits plus petits, à leurs longues étamines, à leurs pétales 
rapprochés et jaunâtres, enfin à leurs feuilles à cinq folioles; ïis ont, 
comme les Pavia , une glande nectarifère, des pétales inférieurs. plus 
ou moins velus et souvent imprégnés d'humeur miellée. L'Hippo- 
castanum , qui forme un type, est la seule espèce du genre qui soit 
dépourvue de glandes nectarifères, au moins en apparence,,car.les 
taches de ses pétales sont veloutées, et sa corolle est chiffonnée d'une 
manière très-bizarre, qui pourrait bien avoir quelque rapport. avec 
sa fécondation. 

Les piquants des capsules de l’'Æsculus ne se développent que pen- 
dant la maturation. 


SECOND GENRE. — Pavia. 
Le Pavia a un calice tubulé, quatre pétales étroits et redressés., 


des étamines droites, des capsules lisses et des folioles légèrement 
pétiolées. 


— 499 — 


On en compte principalement quatre espèces, qui appartiennent 
toutes au midi de l'Amérique nord, et que je divise en deux types : 

Le premier comprend le Flava, le Rubra et l Hybrida , qu'on recon- 
nait à leurs étamines raccourcies et à leurs fleurs jaunes, rouges ou 
tachées de ces deux couleurs; le second est formé du Macrostachya, 
arbrisseau de trois ou quatre pieds, à racine stolonifère, fleurs blan- 
ches et six étamines deux fois aussi longues que la corolle ; les hota- 
nistes modernes en ont fait le genre Macrothyrsus, par allusion à la 
longueur de sa grappe, et l'ont distingué par sa capsule inerme, ses 
pétales égaux, dont les deux supérieurs ont les onglets aplatis et 
non canaliculés. 

Les Æsculus et les Pavia sont unis par un si grand nombre de 
rapports, qu'il aurait été peut-être plus convenable de les considérer 
comme deux sections du même genre ; ils passent par tous les degrés 
de grandeur, depuis l'Héppocastanum , qui forme un arbre très-élevé, 
jusqu'au |Macrostachya, qui n’est qu’un arbuste ; mais ils ne diffèrent 
presque point dans leur végétation et dans leur floraison, qui est tou- 
jours en grappes terminales; leurs feuilles opposées sont formées de 
cinq à sept folioles, plissées sur leur nervure moyenne avant le déve- 
loppement, et appliquées les unes sur les autres, comme les côtes 
d'un éventail; elles sont amincies et renfermées dans un bouton fort 
gros à écailles nombreuses. Au premier printemps et avant de s'ouvrir, 
ces écailles, au moins dans l'espèce commune, sont couvertes d'une 
couche gluante de gomme résine. 

Les boutons, comme les bourgeons de l'Hippocastanum, qui s'ou- 
vrent avant ceux des autres espèces, sont remplis d'une bourre rous- 
sâtre qui enveloppe entièrement les feuilles, et disparaît à mesure 
qu'elles s'étalent à l'air libre ; elle remplit si bien sa destination, que 
les feuilles ne souffrent point de l'hiver, quelle que soit l'intensité du 
froid. À l'époque de l'épanouissement, les écailles ont perdu le vernis 
résineux qui les avait recouvertes, et la bourre qui revêtait les jeunes 
feuilles , ainsi que les pédoncules, a totalement disparu, sans que j'aie 
pu y apercevoir aucun point d'attache avec les parties qu’elles proté- 
geaient. Cette remarque s'applique aux Pavia, comme à l'Hippocas- 
tanum , mais dans le Megalothyrsus qui fleurit beaucoup plus tard, le 
bourgeon n'est formé que d'un petit nombre d’écailles sèches, dont 
les supérieures, fort agrandies et rougeâtres, s’étalent et même se 
déjettent. : 

Les tiges de ces plantes ne présentent jamais de rupture, et dès le 
commencement de juin, on apercoit le nouveau bouton terminal, 
tantôt foliacé, tantôt florifère, mais qui annonce toujours que la végé- 


— 500 — 
tation de l'année est accomplie , et qu'il n'y a point de pousse 
automnale. On observe souvent, dans quelques espèces, des rameaux 
terminés par deux boutons, et l'on pourrait croire que la cicatrice qui 
les sépare a été produite par une rupture de la tige, et qu'elle appar- 
tient au pédoncule détruit de l’année précédente. 

L'inflorescence générale des Hippocastanées est simultanée, car 
toutes les grappes fleurissent en même temps; mais, dans la grappe 
même , les fleurs inférieures paraissent les premières, et dans chaque 
grappille la fleur terminale s’'épanouit avant les autres, sans doute parce 
qu'elle appartient à un cyme partiel; dans l'espèce commune, la 
grappe fleurit peu de jours après sa sortie du bouton; dans les autres, 
elle ne se dégage que lentement des feuilles qui l'entourent, et dans le 
Mégalothyrse en particulier, elle ne s’épanouit que vers le milieu de 
juillet. 

Les fleurs offrent des différences encore plus grandes ; non-seule- 
ment leur calice varie beaucoup pour la forme, mais leurs pétales dif- 
fèrent en nombre et en proportion; ceux de l'Aippocastänum, à peu 
près égaux et régulièrement placés dans leur calice encore fermé, se 
frisent bientôt sur les bords, se colorent diversement, et se disposent 
en deux lèvres, dont la supérieure est formée de deux pétales diva- 
riqués, et l'inférieure de deux pétales pendants; les taches de ces 
dernières sont d'abord jaune pâle, ensuite jaune foncé et enfin rouges; 
les autres espèces présentent aussi entre elles des différences que 
nous ne pouvons pas détailler, mais en général toutes on des co- 
rolles irrégulières et plus ou moins bilabiées. 

Les étamines des Hippocastanum, d'abord droites et assez égales, 
se déjettent ensuite contre la lèvre supérieure, et se recourbent du 
côté opposé, comme celles des espèces à étamines non saillantes; ce 
mouvement doit être attribué au nectaire, qui entoure la base infé- 
rieure de l'ovaire, et sur lequel les anthères vont répandre leur pollen 
briqueté. Quant aux espèces à longues étaminés, comme le Macros- 
tachia où Megalothyrsus , leur calice et leur corolle ne sont point 
déformés; quoique leur pistil avorte toujours, excepté dans quelques 
fleurs inférieures ; mais les anthères briquetées sont à l'ordinaire fer- 
tiles, et fécondent indistinctement les stigmates des fleurs voisines. 

Dans le Pavia rubra et \e Flava , les deux pétales inférieurs forment 
entre eux comme une gaine dilatée et velue où les étamines sont 
engagées ; à l'époque de la fécondation, les anthéres déposent sur 
cette gaine leur pollen, qui est retenu par l'humeur miellée ascen- 
dante de la glande nectarifère. 

Le style est conique, plus ou moins velu, et terminé par un 


— 01 — 

stigmate qui paraît souvent une pointe avortée; j'ai examiné de près 
cet organe, et je l'ai vu rarement dans un état de vie; ordinairement 
le style et le stigmate manquent, et l’ovaire se termine par un point 
rougeâtre; je n'ai en conséquence trouvé dans la plupart des espèces, 
que trois ou quatre fleurs qui nouassent, et même dans l'Hybride, je 
n'ai jamais vu que des ovaires avortés. Les fleurs fertiles sont situées 
près de la base, à l'endroit où la grappe est la plus forte, et elles se 
reconnaissent à la roideur de leurs pédicelles; les autres tombent 
promptement par la rupture de leur articulation, et leur chute était 
nécessaire, car, d'un côté, la grappe n'aurait pas pu porter tous les 
fruits, et de l'autre, les fruits n'auraient pas tous trouvé une place 
pour mürir. 

Les capsules présentent les mêmes exemples de déformation que 
les fleurs : elles sont d’abord trivalves, triloculaires, à valves loculi- 
cides et loges dispermes ; peu à peu les valves se soudent, les cloisons 
s'effacent, et les six semences se réduisent à deux, dont les cotylé- 
dons épais sont soudés; c'est dans le jeune fruit que l'on voit cette 

déformation primitive, car plus tard tout est méconnaissable; les cor- 
dons pistillaires ne s’apercoivent plus; la radicule parait débarrassée de 
tout lien, soit avec les styles, soit avec les vaisseaux nourriCiers ; 
enfin sa germination, qui présente la plumule sortant de la radicule 
dans l'intérieur de laquelle elle avait été renfermée , ressemble plus à 
celle des monocotylées, qu'à celle des dicotylées. On peut remar- 
quer que cette plumule était logée dans une cavité destinée à la 
recevoir, et qu'en sortant, elle soulève un lobe triangulaire, dont les 
bords se rompent par une suture préparée. Je ne sais pas si les semences 
des Pavia présentent exactement la même forme de dissémination que 
celles de l'Hippocastanum que je viens de décrire; mais je finis en 
remarquant que le petit nombre des semences que donne une grappe 
d'Hippocastanees dépend, soit du sol, soit du défaut de sucs nourri- 
ciers; car DE Canpozzr a obtenu des fruits à trois, quatreetmême cinq 
semences, en pratiquant au-dessous de la grappe du Pavia rubra une 
incision annulaire qui empêchait la sève de redescendre. 

Les Hippocastances n’ont pas des mouvements bien marqués; leurs 
fleurs ne se referment pas, leurs étamines ne se rapprochent pas du 
stigmate, quoiqu'elles se recourbent sur le nectaire, et leurs grappes 
restent toujours droites; leurs folioles, cartilagineuses à la base et 
rangées autour du disque charnu qui termine le pétiole commun; 
sont pendantes à leur développement; mais elles ne m'ont pas paru 
avoir ensuite des mouvements en rapport avec les variations atmo- 
sphériques, et ordinairement elles tombent réunies, 


— 902 — 


Les lenticelles sont très-apparentes sur les jeunes tiges, où l'on 
observe long-temps les cicatrices des pétioles désarticulés, qui repré- 
sentent un fer à cheval avec ses clous disposés circulairement, c'est- 
à-dire avec les sections de tous les vaisseaux rompus; les feuilles, 
quoique enveloppées d'une épaisse bourre, n’en sont pas moins 
vertes, lorsqu'elles sortent de leurs bourgeons. 

Il n'y a rien de si agréable au printemps qu'un Marronier paré de 
son brillant feuillage, et couronné de ses magnifiques fleurs blanches 
tâchetées de jaune et de rouge ; les autres espèces sont moins remar- 
quables, mais le Wacrostachya porte des grappes aussi légères qu'élé- 
gantes. 


Ces plantes ont besoin d’être ençore étudiées sous le rapport de la 
fécondation. 


Trente-troisième famille. — Sapindacces. 


Les Sapindacees ou les Savoniers sont polygames ou dioïques; leurs 
sépales, qui varient de quatre à cinq, sont libres ou légèrement réunis 
à la base ; leurs pétales, presque toujours en même nombre que les 
sépales, avortent quelquefois en tout ou en partie, et sont hypo- 
gynes, nus ou glanduleux, velus ou appendiculés ; le torus porte ordi- 
nairement un anneau nectarifère, inséré entre les pétales et les étamines 
qui sont hypogynes, libres et doubles en nombre des pétales ; l'ovaire 
est arrondi, le style unique ou fortement trifide; le fruit est un drupe 
ou une capsule triloculaire, qui se réduit par avortement à une ou 
deux loges; les semences solitaires, attachées à l'angle interne des 
loges, sont dépourvues d'albumen et plus ou moins caronculées; la 
radicule est dirigée vers le fond de la loge; les cotylédons sont droits 
ou plus ou moins repliés sur la radicule. 

Les Sapindacées, dont on connaît déjà près de deux cent cinquante 
espèces, sont dispersées dans l'Amérique équinoxiale , ou plus rare- 
ment en Afrique, aux Indes, et dans la Nouvelle-Hollande; ce sont 
des arbrisseaux droits et grimpants, et rarement des herbes. DE Cax- 
poLLE les divise en trois tribus : les Paulliniees, les Sapindees et les 
Dodoneacees , que CamBesséDès réduit aux deux dernières. Nous ne 
mentionnerons ici que le Cardiospermum, qui appartient aux Paulli- 
nices et le Kolreuteria, rangé parmi les Dodoneacées ; mais nous ajou- 


Er, 
térons que la structure régulière et primitive de la fleur est celle d'un 
calice à cinq pièces, d'une corolle pentapétale, de dix étamines et d’un 
disque nectarifère; les formes existantes sont dues à des avortements 
et à des soudures, déterminées principalement par l'anneau necta- 
rifére du torus. 


PREMIER GENRE. — (Cardiospermum. 


Le Cardiospermum, qui a recu son nom de la cicatrice en forme 
de cœur que porte sa semence, a quatre sépales dont deux ordirai- 
rement plus petits, quatre pétales appendiculés et chargés intérieu- 
rement de deux glandes, huit étamines, trois styles, trois carpelles 
renflés, membraneux, réunis à l'axe, indéhiscents, ailés sur le dos 
et renfermant chacun une semence globuleuse qui avorte quelque- 
fois; les cotylédons sont épais et inégaux, le plus grand renferme le 
petit. 

Les Cardiospermes sont des herbes vivaces ou annuelles, ordinaire- 
ment grimpantes et pour la plupart originaires de l'Amérique équi- 
noxiale, et surtout de la Guiane; une seule appartient aux Grandes- 
Indes et une autre à la Guiane; ces deux espèces sont annuelles, les 
autres sont vivaces. 

On les partage en deux sections : celle à glandes allongées et celle 
à glandes arrondies ; les unes et les autres ont les feuilles biternées ou 
décomposées, les fleurs blanchâtres, en grappes axillaires, pédon- 
culées, rameuses, chargées de bractées et pourvues de deux vrilles 
opposées, qui sont des pédicelles avortés. 

L'Halicacabum, des Grandes-Indes, cultivé dans nos jardins, a la 
tige faible, allongée et tordue; ses pétioles se divisent en trois bran- 
ches, chargées chacune d’une feuille trifoliée ; les feuiiies supérieures 
portent à la base deux stipules latérales promptement caduques ; à 
leur aisselle, un rudiment de rameau, et sur le côté, un pédoncule 
roide, allongé et divisé vers son sommet en trois branches, dont les 
deux latérales, d’abord enveloppantes, sont des lames aplaties, carti- 
lagineuses , fortement roulées en dehors et destinées aux fonctions de 
vrilles ; la troisième, qui est florifère, se bifurque deux ou trois fois, 
toujours accompagnée dans ses divisions d’un petit involucre triphylte 
et caduc; les fleurs, dont l’efflorescence générale est centripète, et la 
particuïère centrifuge, sont portées sur des pédicelles fortement arti- 
culés, et flexibles dans tous les sens; leur calice ou première enveloppe 
a ses quatre folioles opposées et inégales sur deux rangs, ses quatre 
pétales blancs, petits et chiffonnés du côté antérieur; on apercoit à 


— 904 — 

la base de l'ovaire, des glandes qui sont des étamines transformées, 
et deux prolongements pétaloïdes, terminés par un appendice cordi- 
forme, jaune, épais, qui remplit peut-être aussi les fonctions de nec- 
taire; Îes sept ou huit étamines sont courtes et appliquées contre 
l'ovaire velu, et leurs anthères bilobées et latérales répandent leur 
pollen blanchätre sur les trois lobes stigmatoides élégamment pana- 
chés et fortement papillaires; la capsule, dans sa jeunesse, est triquètre, 
à loges loculicides; les semences sont attachées à l’axe central, et les 
fleurs sont polygames, comme dans le Xo/reuteria ; les capsules se 
désarticulent plus tôt ou plus tard sans s'ouvrir, et elles restent long- 
temps tendues et renflées, sans doute pour leur dissémination; car 
leurs semences sont toujours solitaires dans chaque loge. 

Ce qu'on doit remarquer surtout ici, ce sont ces capsules si admi- 
rablement conformées pour le but qu’elles avaient à remplir, celui de 
soutenir les fleurs et les fruits d’une plante faible et grimpante. Ces 
mêmes vrilles géminées et crochues se retrouvent à la base des épis du 
Paullinia, arbrisseau grimpant de la même tribu ; les autres espèces 
du genre, à peu près au nombre de dix, ont également les deux pédi- 
celles inférieurs avortés et vrillés, mais elles présentent sans doute des 
phénomènes appropriés à leur conformation et à leurs besoins. 


SECOND GENRE. — Âolreuteria. 


Le Kolreuteria a cinq sépales, quatre pétales irréguliers, légère- 
ment glanduleux, huit étamines, un style court et épais, une capsule 
triloculaire enflée, des semences ovales pénétrées par l’endoplèvre 
qui, comme un axe, forme le centre de l'embryon contourné en 
spirale. 

Ce genre est formé du Paniculata, originaire de la Chine et la seule 
Sapindacée qui supporte le froid de nos hivers; elle est souvent repré- 
sentée sur les papiers peints de la Chine, et se distingue par ses pani- 
cules jaunes et ses grandes capsules triangulaires et vésiculaires; ses 
feuilles sont ailées avec impaire ; ses folioles ovales, grossièrement et 
profondément dentées, se retournent et se renversent facilement, 
quoiqu'or n'apercoive aucune articulation, ni sur le pétiole commun, 
ni sur les pétiolules. 

La fécondation m'a paru indirecte : j'ai remarqué un grand nombre 
de fleurs à étamines redressées et saillantes, dont les anthères introrses 
latérales donnent un pollen briqueté et adhérent, et dont le stigmate 
reste caché au fond de la corolle où il avorte; les fleurs avortent aussi 
en grand nombre, et il n’en reste guère dans chaque grappe que quatre 


— 905 — 


ou cinq qui aient le stigmate bien conformé. La même disposition a 
lieu, comme nous l'avons vu, dans les Hippocastanees. 

La capsule, fortement renflée et pendante dans la maturation, a son 
pédoncule articulé près du sommet, et présente trois grandes valves 
membraneuses et comme papyracées, séparées dans toute leur lon- 
gueur, long-temps même avant la dissémination; chacune de ces 
valves porte sur son milieu une cloison avortée au tiers de sa hauteur; 
les semences, peu nombreuses dans chaque loge, sont attachées par un 
pédicelle épais et un peu recourbé à l'extrémité de l'axe central, au 
point précis où la capsule n’a plus qu’une seule loge. 

On voit très-bien ici que les loges sont loculicides, pour faciliter la 
dissémination ; les graines qui, à la maturité, atteignent la grosseur 
d'un petit pois, sont d'un violet foncé, et renferment d'abord un 
embryon latéral et recourbé, dont la radicule est voisine du point 
d'attache; peu à peu, cet embryon s'allongeen se recourbant en spi- 
rale, et à la maturité il remplit tout l'intérieur de la graine, dont les 
cotylédons allongés occupent le centre : on remarque entre ses révo- 
lutions une pellicule brunâtre, qui n’est autre chose que l’endoplèvre. 
Les étamines portent à leur base, ainsi que le fond de la fleur, des 
poils humides destinés à retenir le pollen. 


Trente-quatrième famille. — Méliacées. 


Les Méliacées ont quatre ou cinq sépales plus ou moins réunis en 
calice monophylle, autant de pétales alternes aux divisions du calice, 
connivents ou soudés et rapprochés en estivation valvaire, des éta- 
mines régulièrement multiples des pétales et toujours réunies au som- 
met en tube anthérifère, des anthères terminales et sessiles, un ovaire, 
un style et des stigmates distincts ou réunis; le fruit est une baie, un 
drupe ou une capsule à valves loculicides , qui devient souvent unilo- 
culaire par avortement; les semences sont ordinairement albuminées, 
et l'embryon dicotylé a une forme variable. 

Cette famille renferme déjà cent vingt espèces, qui habitent la zone 
torride des deux continents, et dont une seule croît dans l’Europe 
australe ; les plantes qui la composent sont des arbres ou des arbris- 
seaux, à feuilles alternes, simples ou composées, mais toujours 
dépourvues de stipules; les fleurs sont disposées en cymes ou en pani- 
cules latérales et terminales. 


— 506 — 


Melia. 


Le Melia a un calice quinquéfide, cinq pétales oblongs, linéaires ou 
étalés, dix étamines réunies en un tube dentelé et anthérifère inté- 
rieurement, un ovaire placé sur un torus assez élevé, un style filiforme, 
un stigmate en tête pentagone, un drupe osseux à cinq loges mono- 
spermes, un albumen charnu , des cotylédons planes et foliacés, une 
radicule supère. 

Les Melia, dont on connait actuellement au moins sept espèces, à 
peu près homotypes, sont des arbres ou des arbrisseaux des Grandes- 
Indes; leurs feuilles sont une ou deux fois ailées; leurs fleurs, dispo- 
sées en grappes axillaires ou terminales, et qui se succèdent long- 
temps, sont d'un bleu violet, rarement jaunâtres ou blanches ; leurs 
tiges, chargées de lenticelles, se rompent au sommet; leurs feuilles 
sont caduques, et leurs nouveaux boutons axillaires et très-marqués, 
renferment en même temps les fleurs et les fruits. 

L'espèce la plus répandue est l’Æzederach , qui s'élève dans sa patrie 
Jusqu'à trente ou quarante pieds, mais qui, dans nos contrées méri- 
dionales, où il est acclimaté, n’en atteint guère que quinze ou vingt. 
Il est cultivé pour l'élégance de son port et le parfum de ses fleurs, 
dans la plupart des établissements européens, en Asie, en Afrique et 
en Amérique. 

La fécondation s'opère, à l'entrée du tube staminifère, par les 
anthères introrses et bilobées, qui entourent le stigmate et le recou- 
vrent de leur pollen d'un blanc jaunâtre à molécules brillantes; ce 
stigmate, qui s'en imprègne, est une tête aplatie, glutineuse, et 
chargée à sa base d'un anneau crénelé ; le tube staminifère se rompt 
après la fécondation ; le fruit sphérique et verdâtre dans la matura- 
tion tombe sans s'ouvrir, et renferme évidemment cinq loges mono- 
spermes, dont une ou deux perfectionnent leurs semences ; on voit 
au centre le canal par lequel les vaisseaux nourriciers arrivent de la 
base au sommet de la semence, dont la radicule est supère. 

On trouve encore dans nos serres le Sempervirens de la Jamaïque, 
qui n'est peut-être qu'une variété du précédent, quoiqu'il soit beau- 
coup plus délicat; il fleurit à l’âge de deux ans et à la hauteur d'un 
pied; ses fruits servent à le multiplier comme le précédent. 

Les fleurs des Melia, dépourvues de mouvement, restent toujours 
droites et ouvertes après l'épanouissement ; ses pétales sont en estiva- 
tion quinconciale, et les connectifs appendiculés des anthères recou- 
vrent le stigmate avant la fécondation. 


— 507 — 
Les fleurs des Meliu ne sont pas sensiblement déformées , parce 


qu'elles sont dépourvues de nectaire proprement dit, et que la fécon- 
dation s'opère immédiatement à l'entrée du tube anthérifère. 


Trente-cinquième famille, — Ampélidées. 


Les Ampélidées ont un calice petit, entier ou légèrement denté, 
quatre ou cinq pétales alternes aux divisions du calice, insérés sur un 
disque glanduleux qui entoure l'ovaire, et quelquefois réunis en corolle 
monopétale et valvaire; les étamines en même nombre que les pétales 
auxquels elles sont opposées, avortent quelquefois, mais sortent tou- 
jours du disque nectarifère. Les anthères, qui s'ouvrent par deux 
fentes, sont vacillantes, ovales et insérées sur le dos; le pollen est 
ovoïde à trois plis, l'ovaire est globuleux et libre, le style très-court 
et presque nul, le stigmate simple, la baie globuleuse, indéhiscente, 
est biloculaire dans sa jeunesse et uniloculaire à la maturité; les 
semences naturellement géminées dans chaque loge, avortent plus ou 
moins, et sont attachées à l'axe central par un funicule raccourci; 
leur albumen est dur et charnu, leur embryon droit et de moitié plus 
court que l’albumen, la radicule est cylindrique et infère, les cotylé- 
dons sont lancéolés, carénés d’un côté et planes de l’autre. 

Cette famille, qui offre un passage entre les plantes à étamines péri- 
gynes et hypogynes, parce que l'ovaire y est enfoncé dans le disque du 
torus, est formée de végétaux, la plupart sarmenteux et grimpants, à 
feuilles stipulacées, simples ou composées, et alternes vers le sommet ; 
les pédoncules , rameux et opposés aux feuilles , se changent souvent 
en vrilles, et les fleurs sont généralement petites et verdâtres. 

On la divise en deux tribus : celle des Sarmentacées, qui comprend 


trois grands genres, et celle des Léeacees, très-peu connue et dont 
nous ne parlerons pas. 


SARMENTACÉES, 
PREMIER GENRE. — (issus. 
Le Cissus a un calice à peu près entier, quatre pétales qui s'ouvrent 


du sommet à la base, quatre étamines, un ovaire à quatre loges, et 
une baie d'une à quatre semences. 


— 508 — 

On range ses nombreuses espèces sous cinq groupes d'après la com- 
position des feuilles : 

1° Celui à feuilles simples; 

2° Celui à feuilles trifoliolées ; 

3° Celui à feuilles palmées à cinq folioles ou à cinq divisions pro- 
fondes ; 

4° Celui à feuilles pédiaires de cinq à neuf divisions, dont la 
moyenne est solitaire ; 

5° Celui à feuilles pennées ou bipennées et folioles opposées. 

Les Cissus sont répandus dans les climats chauds des deux conti- 
nents, l'Europe exceptée; leurs principales habitations sont les forêts, 
les buissons et les haies des Indes orientales et des Antilles, où ils 
s'élèvent souvent fort haut au moyen de leurs vrilles et de leurs tiges 
sarmenteuses; il ne paraît pas que leurs différents groupes affectent 
des localités particulières, car excepté les espèces à feuilles pédiaires, 
qui ont été confinées dans les Indes, les autres sont indistinctement 
éparses en Asie et en Amérique. 

Ces plantes varient beaucoup en grandeur; les unes sont des arbres 
proprement dits; les autres, comme le G/andulosus et le Tuberosus, 
qui ont leurs racines tubéreuses, ne s'élèvent qu'à quelques pieds, 
mais toutes ont une tige ligneuse et persistante. 

Leur organisation et leur végétation les rapprochent des Clematis ; 
en effet, leur tige sarmenteuse, formée de nœuds qui donnent exclu- 
sivement naissance aux feuilles et aux boutons, consiste dans un 
large canal médullaire, percé dans une substance ligneuse, légère et 
criblée de trous longitudinaux, comme la Vigne et les Clematis ; 
c'est par ces tubes visibles à l'œil que s'élève, dès le premier printemps, 
la sève qui abonde dans les Céssus et les plantes semblablement con- 
formées. 

Le développement des Cissus, comme celui de la plupart des plantes 
sarmenteuses, est à peu près indéfini, et ne se suspend guère dans 
les climats chauds que par l'effet des variations MNT e UT es : 
cependant les diverses espèces du genre portent souvent, comme la 
Vigne, à leurs aisselles, des boutons revêtus en dehors de deux 
écailles au-dessous desquelles on en remarque d’autres plus petites, et 
chez nous l’Orientalis perd en automne le haut de ses tiges, ses feuilles, 
et la plupart de ses vrilles pour développer au printemps ses nouveaux 
boutons. 

Sans doute que cette conformation est loin d’être générale, et que 
plusieurs Cissus ne donnent pas de bourgeons, et conservent même 
les sommets de leurs tiges; mais nous connaissons si peu les espèces 


— 509 — 


de ce genre, et elles ont encore été si peu étudiées dans leur climat 
natal, sous le rapport physiologique, qu'il serait imprudent de rien 
affirmer sur ce qui les concerne, à cet égard comme à tant d'autres. 

Dans l'Orientalis, la seule espèce qui soit à ma portée, chaque 
feuille a sa vrille correspondante et opposée, à partir de la quatrième 
depuis la base; car les vrilles inférieures auraient été inutiles; ces 
vrilles , avant leur développement, sont couchées et s’accroissent en 
même temps que les feuilles d'abord plissées sur leur côte principale, 
comme dans le reste de la famille; eiles sont de plus contournées et 
régulièrement divisées et terminées d’abord par des fleurs; mais à l’ex- 
trémité des branches, les fleurs avortent, et dans.des intervalles elles 
sont demi-avortées. Dans d'autres espèces, la vrille distincte du pédon- 
cule naît à côté de ce dernier, tantôt à l’aisselle, tantôt à l'opposé; et 
il n’est pas douteux qu’on ne trouvât une foule de variations dans les 
moyens que la nature a employés pour soutenir les tiges faibles et 
allongées de ces plantes. 

L'inflorescence des Cissus a la forme d'ombelle et rarement de pani- 
cule;les pédicelles revêtus de bractées se réunissent en cymesnombreux 
et peu garnis; lesfleurs, qui naissent aux différents nœuds, sontquelque- 
fois polygames, monoïques ou même dioïques, ordinairement petites 
et verdâtres, mais quelquefois aussi jaunes , rouges, violettes et assez 
grandes. Les baies sont souvent teintes en pourpre, et à leur matu- 
rité elles servent de nourriture à une multitude d'oiseaux, ou même à 
l’homme; cependant on n’emploie guère pour les usages domestiques 
que le Quadrangularis de l'Inde, et l'Acidus de l Amérique, dont les 
jeunes pousses et les feuilles remplacent très-bien l'Oseille. 

Les fleurs de l'Orientalis, qui naissent toujours sur le bois de 
l'année , s’épanouissent dés le mois de juillet, les inférieures plus tôt, 
les supérieures plus tard; elles sont, comme celles de l'4mpelopsis, 
disposées en cymes irréguliers, ou mieux en petites ombelles, dont 
l'efflorescence générale est simultanée, tandis que la particulière est 
à peu près centrifuge. Le calice est un renflement à peine sensible, les 
pétales qui s'ouvrent du sommet à la base, sont verts, à estivation val- 
vaireet promptement caducs; les quatre anthères sontintrorses, ovales, 
bilobées, opposées aux pétales, et s'épanouissent à peu près avec la 
fleur. Le style est assez allongé, le stigmate est une tête visqueuse et 
légèrement papillaire, qui peut recevoir immédiatement le pollen 
jaunâtre des anthères ; le torus ou la glande circulaire d’où sortent les 
étamines, distille sans cesse une grande quantité d'humeur miellée, 
qui sort sans doute à la fécondation. 

Les principales différences qui existent entre les Cissus, sont fon- 


— 910 — 


dées sur la forme des feuilles et la nature de leurs surfaces glabres, 
velues, tomenteuses ou même ferrugineuses ; sur leurs tiges et leurs 
rameaux cylindriques anguleux, quadrangulaires; etc., sur leur mode 
varié d’inflorescence, sur leurs fleurs hermaphrodites, polygames,etc., 
vertes ou colorées, enfin sur la structure de leurs baies. On ne peut 
guère douter que, si l’on connaissait mieux ces plantes, dont plusieurs 
ne sont sans doute que des variétés, on ne parvint à trouver entre 
elles des caractères encore plus marqués, sur lesquels on fonderait 
des sections, ou au moins des groupes plus naturels que ceux que 
l'on a établis jusqu’à présent. 

Ces plantes présentent cependant déjà à l'observateur quelques 
phénomènes physiologiques; leurs tiges, dont les lenticelles sont 
plus multipliées auprès des nœuds, et qu’il ne faut pas confondre avec 
de petites taches noires et arrondies, se tordent quelquefois, et leurs 
pétioles genouillés facilitent les mouvements des feuilles ; leurs pédon- 
cules sont de même articulés, en sorte que leurs fleurs prennent 
toutes sortes de positions. 

Les Cissus, qui n’ont pas assez d'apparence pour briller dans nos 
jardins, s'étendent en longues lianes dans les forêts primitives, où 
leur ombre forme souvent un asile impénétrable aux rayons du soleil. 
On n’en connaît guère en Europe que trois ou quatre espèces, l'Orien- 
talis d'Asie, l'Acidus d'Amérique, et l'Antarcticus de la Nouvelle- 
Hollande; le Repens du Malabar est peut-être la seule espèce rampante. 

Les feuilles de l'Orientalis sont saupoudrées, à l'époque de leur 
développement, de cette poussière sphérique et résineuse que l’on 
retrouve sur plusieurs autres plantes, et en particulier sur quelques 
Astragales, et sur l'Ampelopsis hédéracé. 


DEUXIÈME GENRE. — Ampelopsis. 


L'Ampelopsis a le calice à peu près entier, cinq pétales ouverts du 
sommet à la base, cinq étamines, un style, un stigmate en tête, un 
ovaire dégagé du disque du torus et renfermant deux à quatre 
semences. 

Ce genre, beaucoup moins nombreux que le précédent, se divise en 
trois groupes : 

1° Celui à feuilles simples ; 

2° Celui à trois ou cinq folioles palmées ; 

3° Celui à feuilles ailées. 

Les Ampelopsis, comme les Cissus, ont été dispersés dans les deux 
continents, mais l'Afrique et les Indes n'en contiennent qu'une 


— Dli — 
espèce, tandis que l'Amérique en renferme cinq; ils ne paraissent 
pas appartenir au même type, car ils diffèrent, non-seulement par 
leurs feuilles, mais encore par leurs habitudes; en effet, le Cordata, 
qui croît dans les buissons de l'Amérique septentrionale, et qu'on 
cultive dans les jardins d'Europe, ne ressemble point à l' Hederacea 
du Canada et de la Virginie. 

Ce dernier, que je vais décrire physiologiquement avec quelque 
étendue, parce qu'il est comme acclimaté en Europe, a été destiné 
par la nature à recouvrir de ses belles feuilles lustrées, les troncs des 
arbres et les murs contre lesquels il s'élève à une grande hauteur ; 
pour cet effet, les jeunes tiges ont été pourvues, depuis la quatrième 
ou cinquième feuille, de vrilles d’une forme particulière, qui man- 
quent régulièrement à une feuille sur trois, et qui sont d’abord 
logées dans une petite rainure pratiquée le long de la tige aplatie ; 
elles se composent de cinq ou six petits filets, dont l'ensemble imite 
assez bien une main, et qui, partant d'un pédoncule commun, se 
terminent en crochets recourbés, évidemment destinés à s'attacher 
aux corps qu'ils rencontrent, et qui se roulent les uns sur les autres, 
lorsqu'ils ne sont pas parvenus à se fixer; dans le cas contraire, ils 
grossissent visiblement et se changent en autant de petites pelotes 
d'un beau rouge, fortement appliquées contre le corps qui leur sert 
d'appui; le pédoncule commun continue cependant à s’allonger, mais 
ne pouvant pas s'étendre parce que les pelotes sont déjà fixées, il se 
roule en spirale à la manière des vrilles, Il n’y a rien de si régulier, 
et peut-être de plus elégant que l'arrangement sur la surface d’une 
muraille, de ces petites mains qui ne tombent jamais, car elles ne sont 
point articulées, mais qui, lorsque les tiges ont pris assez d’accroisse- 
ment pour se soutenir par elles-mêmes, se détachent du mur où elles 
s'étaient fixées, et flottent souvent renversées avec les tiges. On voit 
alors leur face inférieure terminée en disques aplatis, recouverts 
encore du mortier blanchätre que le suc visqueux distillant de la 
palette avait fixé. Je remarque enfin que ces singulières vrilles se déve. 
loppent, soit sur la tige principale, soit sur les rameaux qui en avaient 
besoin pour se soutenir. 

L'étendue du développement de cette plante est très-variable : lors- 
que ses jeunes tiges ne rencontrent pas de corps où elles puissent 
s'accrocher, leur végétation est languissante; elles ne croissent que 
de quelques pieds; mais lorsqu'elles réussissent à trouver des points 
d'appui, elles poussent des jets très-étendus, et atteignent dans leur 
patrie, la hauteur des plus grands arbres, et dans nos climats celle 


des murs les plus élevés ; elles se rompent en automne à leur dernier 
nœud. 


— 512 — 


Les feuilles, en ordre ternaire, sont toujours couchées contre la 
surface sur laquelle rampe la tige légèrement comprimée. La jeune 
pousse a son extrémité constamment repliée en arrière et comme 
appliquée sur elle-même, précaution indispensable pour qu'elle ne 
fût pas, dans son état de mollesse, arrêtée par un obstacle qui aurait 
pu la détruire; elle se redresse à mesure qu’elle se développe. 

Les bourgeons sont placés au-dessus de la cicatrice des anciennes 
feuilles, et leurs écailles sont des stipules plutôt que des feuilles 
avortées. Îls ne contiennent pas, comme ceux de la Vigne, une bourre 
cotonneuse, et ils manquent régulièrement à deux aisselles sur trois: 
arrangement remarquable, qui permet à la plante de se développer 
sans embarras. 

Les folioles sont plissées sur leur nervure principale, et placées 
côte à côte avant leur déploiement; à cette époque, elles sont recou- 
vertes de molécules sphériques, transparentes et légèrement gluti- 
neuses ; les dentelures du contour sont également glanduleuses. 

Les fleurs, placées aux extrémités des rameaux et disposées en 
cymes étalés et irrégulièrement ramifés, naissent de boutons qui ne 
contiennent que deux ou trois feuilles, et leurs pédoncules ne peuvent 
pas, dans ce cas, être assimilés aux vrilles, qui sortent des nouvelles 
pousses du côté opposé aux feuilles, et ne terminent jamais les 
rameaux. Ici donc les vrilles sont un organe particulier, et non pas 
des pédoncules avortés, et je crois que personne n'a jamais vu ces 
vrilles porter des fleurs, ou les vrais pédoncules s'allonger en vrilles ; 
celles-ci se dessèchent et se détruisent, lorsque leur appui est devenu 
inutile ; ceux-ci, au contraire, tombent après la maturation par une 
rupture préparée. Ainsi la nature modifie sans cesse ses lois selon les 
besoins de la plante, et les autres Ampélidées, si je les connaissais 
mieux, me fourniraient sans doute plusieurs faits analogues. 

La floraison a lieu à la fin de l’été, les fleurs de la même grappe 
s'épanouissent irrégulièrement, selon leur exposition, plutôt que 
d’après une loi particulière. L’estivation est valvaire indupliquée ; les 
étamines sont opposées aux pétales qui contiennent chacun dans leur 
cavité une anthère introrse, à parois repliées et recouvertes d’une 
poussière jaunâtre ; le stigmate est une tête de clou légèrement papil- 
laire, et on aperçoit autour de l'ovaire dix gouttelettes très-brillantes 
qui couronnent autant de nectaires rougeâtres et ouverts. 

La fécondation est intérieure; au moment où la fleur s'ouvre, les 
anthères ont déjà fécondé l'ovaire, et les étamines ne tardent pas à 
tomber; l'ovaire, naturellement formé de cinq loges à deux ovules, se 
change, pendant la maturation, en une baie violette, à noyau osseux 


— 513 — 
et biloculaire ; souvent même la cloison avorte, et le noyau ne ren- 
ferme plus qu’une graine à albumen blanc et radicule infère ; ordinai- 
rement la cloison est verticale, et l’on voit descendre le cordon 
pistillaire qui jette quelques processus dans l’albumen. On remarque 
de plus, à la base de la baie, deux petits corps cylindriques qui parais- 
sent autant de graines avortées. 

Les tiges de l’'Ampelopsis hederacé ne sont pas fortement sarmen- 
teuses, mais seulement légèrement enflées au point d'insertion de 
chaque pétiole canaliculé : elles poussent naturellement des racines 
qui partent des nœuds et peut-être d'entre les lenticelles qu'on y 
trouve accumulées. Les tiges ne s’allongent que par leurs extrémités, 
puisque les vrilles restent fixées sur les murs. 

Cette plante sert, en Europe, à former des tonnelles, et surtout à 
tapisser les murs ; les feuilles prennent en automne de belles teintes 
roses qui font une des parures de la saison. 

L’Ampelopsis cordata n’a pas des rapports étroits avec l’Hederacea ; 
ses feuilles cordiformes et légèrement trilobées, ont leurs nervures 
inférieures velues; ses grappes sont deux fois bifides, et ses vrilles, 
opposées aux feuilles, manquent surtout dans les nœuds où les bour- 
geons n'ont pas avorté. Ces bourgeons sont saillants, pointus et formés 
d'un petit nombre d'écailles. 


TROISIÈME GENRE. — V'élis. 


La Vigne a un calice à cinq dents , cinq pétales adhérents au som- 
met et séparés à la base, cinq étamines, un style, une baie bilocu- 
laire à quatre semences qui avortent souvent en partie : 

Ce genre se divise en deux groupes : 

1° Celui des espèces à fleurs hermaphrodites, originaires de l’ancien 
continent ; 

2° Celui des espèces américaines, à fleurs dioïques ou polygames. 

Le premier groupe comprend à peu près douze espèces, la plupart 
indigènes des Indes , et renfermant sans doute plusieurs variétés. La 
principale de ces espèces est le Vänifera, répandu aujourd'hui dans 
les différentes parties du monde, et confiné autrefois dans les Grandes- 
Indes, sa véritable patrie. Cet admirable végétal, dont la culture a 
obtenu un nombre infini de variétés, n’est arrêté dans son développe- 
ment que par l'abaissement de la température, car, dans les régions 
équinoxiales, il végète sans cesse; mais cette disposition nuit au per- 
fectionnement de son fruit, et surtout au vin qu’on en retire; parce 


I. 33 


— 514 — 
que des grappes qui se succèdent ne müûrissent point à la même. 
époque. 

Quoique la Vigne commune appartienne aux climats chauds, son 
organisation lui permet toutefois de supporter le froid de nos hivers; 
ses articulations supérieures se rompent, il est vrai, aux premières 
gelées, mais celles qui se sont endurcies et solidifiées n'éprouvent 
aucune altération à cette époque ; la sève qui, pendant la végétation, 
abondait dans les jeunes branches, descend alors dans les racines, 
qui, comme le sarment, sont percées de tubes étroits, destinés à la 
recevoir jusqu'aux premières chaleurs du printemps, où, sous le 
nom de pleurs, elle s'élève abondamment dans les tiges. Tant que les 
bourgeons n’en sont pas pénétrés, ils n'éprouvent presque aucune 
altération de la gelée ; mais aussitôt qu'ils ont commencé à se gonfler, 
ils sont détruits à deux ou trois degrés au-dessous de zéro. 

Les jeunes pousses, qui souffrent également de cette température, 
sont enveloppées à leur naissance de ce même duvet roussâtre qui est 
si abondant dans les bourgeons ; les feuilles sont plissées sur leurs 
principales nervures, et un peu recourbées en dedans, pour mieux 
défendre les nouvelles grappes; les trois ou quatre premières sont 
dépourvues de vrilles dont elles n’ont pas besoin ; dans les deux ou 
trois suivantes, ces vrilles sont changées en pédoncules plus ou moins 
florifères, selon la richesse du sol et la maturité du vieux bois; car la 
grappe est la dernière partie qui se forme dans le bouton; les vrilles 
suivantes portent quelquefois des grains épars, qui prouvent leur dou- 
ble destination; les autres se divisent, s’allongent et se contour- 
nent pour trouver des appuis, et elles se dessèchent lorsqu'elles en 
manquent. 

La Vigne se développe dans nos climats dès le mois d'avril, et fleurit 
dans les deux mois suivants; elle répand alors une odeur suave qui 
approche de celle du Réséda et qu’on reconnaît de loin; on voit alors 
les étamines s'étendre comme autant de ressorts, pour se débarrasser 
de la corolle capuchonnée qui les recouvrait, et l'on peut remarquer 
autour de l'ovaire cinq écailles nectarifères, jaunâtres et alternes aux 
étamines. 

La fécondation a lieu en plein air, immédiatement après la chute 
des pétales, quise détachent par la base et tombent réunis au sommet; 
les filets s’éloignent alors du pistil, et les anthères introrses répandent 
leur poussière jaunâtre sur le stigmate, qui est une tête papillaire 
toute couverte d'humeur glutineuse. 

Dans notre variété sauvage, à fruit rouges, petits et doucâtres, la 
fécondation est intérieure, et les étamines ne se déploient qu'après 


— b15 — 
avoir répandu leur pollen sur le nectaire, qui est une couronne 
orangée continue et non pas une réunion de cinq écailles; le stigmate 
manque entièrement, mais il se trouve sur d’autres pieds qui souvent 
sont privés d’étamines à anthères fertiles; en sorte que cette variété 
sauvage est comme dioïque ou plus exactement polygamique à pieds 
mâles ou femelles, comme on peut le confirmer par la maturation. 

On trouvecette espèce dans la plus grande partie de l'Éurope centrale 
et méridionale; je l'ai observée abondamment en Piémont et en Savoie. 

La variété sauvage à fruits blancs et acerbes, qu'on rencontre aussi 
dans les lieux non cultivés, est-elle aussi dioique? Ou n'est-elle , 
comme Je le crois, qu'une dégénérescence de notre 7: igne cultivee P 

Je n'ai apercu dans la Vigne d'autres mouvements que celui des 
pétioles qui se contournent en tout sens, et celui des vrilles qui 
s'étendent comme des fouets, jusqu’à ce qu’elles rencontrentun appui. 
Les tiges perdent leurs nœuds en vieillissant, ‘et les boutons ne 
naissent naturellement que sur le bois de l’année précédente; mais 
lorsqu'on le retranche, ils sortent des vieilles souches dans les points 
correspondants aux anciens nœuds. 

La Vigne cultivée m'a présenté trois espèces de maladies : la pre- 
mière est celle de points noirs et circulaires, semblables à des plantes 
parasites, et recouvrant à la maturité les baies, sur lesquelles elles 
s'étendent, principalement du côté de la queue. La seconde est la 
brülure , qui se manifeste dans les mois d'été par les teintes rougeâtres 
des feuilles, et qui est due à une altération de la sève ou des vaisseaux 
séveux, et non pas, comme on le croit quelquefois, à des alternatives 
de soleil et de pluie. La troisième est le velouté ou la lèpre, c'est-à-dire 
une croûte duvetée et blanchâtre, qui se forme à la surface inférieure 
des feuilles qu’elle détruit, lorsqu'elle est trop abondante. Cette lèpre, 
qui paraît formée d'un amas de grains parenchymateux, mêélés de filets 
difformes et transparents, n’est pas plus que les deux autres particu- 
lière à la Vigne, car elle se retrouve dans plusieurs autres plantes, 
par exemple sous les feuilles de l’Aune, et sur celles du Noyer. 

Les grappes mûres ne se détachent pas naturellement de leurs pé- 
doncules , mais les baies se séparent une à une de leurs pédicelles ; 
elles ont un axe central, auquel adhèrent les pepins osseux, qui sont 
naturellement au nombre de quatre, mais qui avortent souvent en 
partie ou même en totalité, comme dans la variété Apyrena ; ces pepins 
sont canaliculés à une de leurs extrémités, et percés dans leur milieu 
par le cordon ombilical; les cotylédons sont de moitié plus courts que 
l'albumen, et la radicule est infère. 


Pour expliquer l'origine de ces grappes ou de ces vrilles toujours 


— 516 — 


opposés aux feuilles, Auguste Sarnr-Hiraire et Turpin supposent 
qu'elles étaient originairement terminales, et qu’elles ne sont devenues 
latérales que par le développement du bourgeon primitivement opposé 
à la feuille, et qui a continué la tige. Ce développement a eu lieu dans 
un temps antérieur à celui où il aurait pu être apercu, par la vue 
simple ou même par les microscopes. Je ne nie pas ce fait, qui peut 
ètre conclu par analogie de quelques autres plantes, où il est plus 
sensible. — Je me contente de remarquer que ces mêmes feuilles, 
dont les bourgeons se sont développés de si bonne heure, portent 
ensuite d'autres bourgeons, et que si cette suite d'avortements a eu 
lieu, elle était en rapport avec la forme de végétation primitive de la 
Vigne. 

Les Vignes dioiques ou polygames appartiennent presque toutes à 
l'Amérique du nord et sont encore très-peu connues. Pourquoi ces 
plantes, de même que plusieurs autres Sarmentacées, ne se dévelop- 
pent-elles pleinement que lorsqu'elles sont soutenues par un appui? 

Les autres espèces de Vignes hermaphrodites, si l'on en excepte la 
Laciniée ou le Cioutat, qui n’est probablement qu’une variété de la 
Vigne commune, sont encore trop peu connues pour être décrites 
physiologiquement ; elles fournissent des baies plus ou moins agréa- 
bles au goût, et qui dans leur climat natal, servent de nourriture 
aux oiseaux. 

Quoique la J’igne soit un arbrisseau grimpant , elle se rompt natu- 
rellement au sommet, comme on peut le remarquer facilement dans 
les plantes sauvages ; chaque aisselle est chargée d’un bouton axillaire, 
et porte de plus tantôt une vrille, tantôt une jeune branche, dont le 
bouton pédonculé avorte souvent. 


Trente=sixieme famille. — Geraniacées. 


Les Geraniacees ont un calice persistant, imbriqué et formé de 
cinq pièces, dont la supérieure est souvent prolongée en un éperon 
étroit uni au pédoncule; les pétales au nombre de cinq et rarement de 
quatre sont alternes aux divisions du calice, égaux et hypogynes, ou 
inégaux et insérés sur le calice; les filets plus ou moins monadelphes, 
doubles ou même triples du nombre des pétales, sont égaux ouinégaux, 
hypogynes ou périgynes, et quelquefois stériles; l'ovaire est formé de 


= 
cinq carpelles membraneux, indéhiscents biovulés, dont les styles 
réunis sont appliqués le long d'un axe aminci et pentagone, qui est 
regardé comme le prolongement du torus, et se terminent en autant 
de stigmates papillaires et rayonnants. Pendant la maturation, ils se 
séparent dela base au sommet, et se contournent de diverses manières, 
entraînant avec eux les carpelles détachés de la base du torus, les 
semences sont solitaires, rarement géminées, pendantes et dépourvues 
d’albumen ; l'embryon est recourbé, la radicule fléchie et dirigée vers 
le fond du carpelle. Les cotylédons, quelquefois lobés, sont ordinai- 
rement foliacés, contournés ou différemment roulés sur eux-mêmes. 

SERINGE ( Annales des Sciences naturelles de la Sociéète d'agriculture 
de Lyon, juillet 1838 ) croit que l'axe aminci et pentagone, sur lequel 
s'appliquent les styles et que l’on considère comme un prolongement 
du torus, est uniquement formé par les cinq carpelles réunis, et dont 
à la dissémination la valve extérieure, devenue libre, se détache avec 
la graine, et se contourne ensuite de diverses manières. Il appuie son 
opinion par l'exemple d'un Geranium colombinum monstrueux, dont 
les cinq carpelles séparés les uns des autres laissaient le centre de la 
fleur vide, et dont quelques-uns s'étaient même entr'ouverts de ma- 
nière à faire voir qu’ils n'étaient primitivement qu'une feuille repliée ; 
les cinq cannelures profondes, qui sillonnent l'axe, ne sont ainsi que 
les cinq carpelles dépouillés de leur valve extérieure, et ils ne portent 
point de semence, parce que chaque carpelle n’en renferme qu'une 
ou deux près de sa base. 

Ces plantes sont des herbes ou des sous-arbrisseaux, dont les jeunes 
tiges se renflent aux articulations, et se séparent facilement, comme 
celles des Ampelidées ; les feuilles des nœuds inférieurs sont opposées, 
les autres souvent alternes, et dans ce cas, elles sont opposées aux 
pédoncules, qui ne se transforment jamais en vrilles, mais dont les 
pédicelles sont ordinairement disposés en ombelle. 

On divise les Geraniacées en cinq genres, dont un seul appartient 
à l'Amérique du sud, et ne contient que deux espèces ; les quatre 
autres sont indigènes ou cultivés. 


PREMIER GENRE. — ]Monsonia. 


Le Monsonia a un calice de cinq pièces égales et mucronées, cinq 
pétales égaux et doubles en longueur du calice, quinze étamines 
monadelphes à la base et souvent à demi réunies en cinq faisceaux. 

On partage ce genre en trois sections : 

1° Celle des Sarcocaulon ; tige charnue, frutescente et épineuse, 


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feuilles ovales, entières ou légèrement dentées, pédoncules uniflores, 
étamines seulement monadelphes ; 

2° Celles des Holopetalum; tige herbacée, feuilles ovales dentées, 
pétales entiers, étamines réunies en cinq faisceaux. 

3° Celle des Odontopetalum ; tige herbacée, feuilles lobées ou mul- 
tifides, pétales oblongs ou dentés, étamines réunies en cinq faisceaux. 

Les Monsonia, originaires du Cap et cultivés dans nos jardins, ont 
le port et l’organisation des autres Geraniacées , ainsi que les fruits 
des Erodium et des Pelargonium ; is se font de plus remarquer par la 
grandeur et l'élégance de leurs fleurs bigarrées de diverses couleurs. 

Le Speciosa, qui appartient à notre troisième section, porte des 
pédoncules uniflores , chargés à la base de leur articulation de feuilles 
persistantes, palmées à cinq divisions, tripartito-pennatifides comme 
les autres; le calice campanulé est allongé; les pétales agrandis sont 
rouges et promptement caducs; les étamines, réunies en cinq corps, 
ont leurs filets amincis et terminés par autant d’anthères pivotantes , à 
loges réfléchies et pollen sphérique; le fruit est formé de cinq carpelles 
soudés, à styles réunis, stigmates allongés, épais et recouverts des 
granules du pollen orangé. Je n’ai vu au fond de la fleur ni glande 
visqueuse, ni organe nectarifère , semblable à celui des Pelargonium ; 
en sorte que la fécondation est immédiate ; je présume que, pendant 
la maturation, les calices s’étalent, les étamines se flétrissent, les styles 
s'allongent et se détachent enfin les uns des autres en se tordant, et 
peut-être en développant des poils intérieurs, semblables à ceux des 
Erodium et des Pelargonium. 

L'Ovata de la seconde section, qui a la même structure florale, 
porte aussi cinq carpelles, qui se détachent par la base, et dont les 
arêtes velues en dedans se tordent en différents sens. Il se propage 


de rejeton, dit le Bon Jardinier , tandis ‘que le Speciosa se multiplie 
de graine. 


Ces diverses plantes, qui ne sont pas déformées comme les Pelar- 
gonium, me paraissent avoir toutes la fécondation immédiate. 


DEUXIÈME GENRE. — Pelargonium. 


Les Pelargonium ont un calice quinquéfide dont la division supé- 
rieure, droite et allongée , se termine inférieurement en un tube nec- 
tarifère , décurrent sur le pédoncule, auquel il est étroitement uni; 
cinq et rarement quatre pétales égaux ou inégaux, régulièrement ou 
irrégulièrement disposés ; dix filets inégaux et monadelphes, dont 
sept seulement, quelquefois quatre, cinq ou six sont fertiles; cinq 


— M9 — 
styles appliqués contre un axe central, souvent garnis de poils sur 
leur face intérieure, et tordus à la maturité, comme ceux des Æro- 
dium ; cinq stigmates allongés et papillaires. 

Ce vaste genre, qui compte actuellement près de trois cents espèces, 
a un nombre double ou triple de variétés, les unes et les autres ori- 
ginaires du Cap, ou au moins de l'Afrique et de la Nouvelle-Hollande, 
et journellement multipliées par les soins des fleuristes, a été partagé 
par De Canpozce en douze sections, qu’on peut considérer comme 
autant de types primitifs , et que j'indiquerai brièvement. 

La première est celle des Hoarea , qui se reconnaissent à leurs deux 
pétales supérieurs, allongés et parallèles, ainsi qu'à leurs étamines 
longüement cylindriques et avortées en grande partie; ils forment 
actuellement plus de cinquante espèces ou variétés, qu’on partage en 
trois groupes d’après leurs feuilles oblongues, sagittées ou pennati- 
sectes; leurs racines, qui sont des tubercules nus ou écailleux, don- 
nent chaque année de nouvelles feuilles, et leurs pédoncules radicaux 
se terminent en ombelle. Une seule espèce, le Dioïcum, est annuelle, 
et mérite d'être examinée physiologiquement. 

La deuxième est celle des Dimacria, encore peu nombreux, et 
qu'on reconnaît à leurs cinq pétales inégaux, dont les deux supérieurs 
sont connivents et étalés au sommet ; ils ont cinq étamines fertiles, la 
supérieure très-courte et les deux inférieures plus grandes que les 
autres ; leurs racines tubéreuses sont aussi dépourvues de tige, mais 
leurs feuilles sont beaucoup plus divisées que celles des Hourea. 

La troisième est celle des Cynosbata, dont l'on ne connait encore 
que trois espèces ; ils ont cinq pétales ovales, presque égaux et à peu 
près doubles du calice, cinq étamines fertiles, comme les Dimacriu, 
des tiges droites et frutescentes, des feuilles cordiformes et plus ou 
moins lobées, et un tube nectarifère très-peu marqué; ils se rappro- 
chent des Erodium, pour le port et la structure florale. 

La quatrième est celle des Peristera , qu’on distingue à leurs pétales 
légèrement inégaux, à peu près de la longueur du calice, à leurs quatre 
ou cinq étamines fertiles plus longues que les autres, ainsi qu’à leurs 
tiges herbacées rampantes, et à leurs feuilles cordiformes plus ou 
moins lobées; leur port est celui des Geranium colombins, ou quel- 
quefois celui des Erodium cicutins, leur tube nectarifere est aussi peu 
distinct que dans les Cynosbata, etl'une de leurs six espèces homotypes 
est | Australe de la Nouvelle-Hollande. 

La cinquième ou celle des Oridia, a les pétales linéaires à peu près 
égaux, plus longs que le calice et pourvus d’une oreillette à la lèvre 
supérieure ; des dix étamines redressées, cinq sont fertiles; des einq 


— 920 — 


autres, deux supérieures sont spathulées ou subulées , et trois infé- 
rieures sont raccourcies. Ces plantes, au nombre de six, sont frutes- 
centes et charnues ; leurs feuilles sont alternes, épaisses , pennatifides ; 
leurs fleurs petites et blanchâtres sont tachées à la lèvre supérieure; 
leur tube nectarifère assez allongé est peu visible. 

La sixième ou celle des Polyactium, ne comprend que le Multira- 
diatum, à racine tubéreuse, légèrement caulescente, feuilles penna- 
tisectes et pennatifides, ombelles de vingt à trente rayons et calice 
roulé en dehors; ses cinq étamines fertiles sont plus courtes que les 
autres, ses pétales ont une tâche noirâtre sur les bords, et son tube 
nectarifère a quatre fois la longueur du calice. 

La septième ou celle des sopétales, ne renferme non plus que le 
Cotyledonis , arbrisseau charnu de l'ile Sainte-Hélène, à tiges nues 
et rameuses , feuilles cordiformes et ombelles composées ; ses pétales 
sont blancs et égaux ; ses dix étamines, dont cinq ou six sont fertiles, 
se recourbent vers le haut, et la division supérieure de son calice est 
creusée en fossette nectarifère et non pas en tube. 

La huitième ou celle de Campylia, a les cinq pétales inégaux, les 
deux supérieurs plus grands et légèrement auriculés; ses cinq éta- 
mines fertiles sont velues ou pubescentes et redressées, et les deux 
supérieures sont recourbées en crochet. On en compte quatorze 
espèces mal liées entre elles, et dont les deux plus cultivées sont 
l’'£ latum à tige frutescente et le Tricolor , tous les deux distingués par 
leur corolle à lèvre supérieure rouge et inférieure blanche. Ces deux 
plantes, qui forment dans Linpzey la subdivision des Phymatanthus, 
ont un nectaire tubulé très-raccourci, des carpelles ordinairement 
féconds et enveloppés dans leur jeunesse d’une bourre laineuse, d'où 
sort un style à stigmates’étalés et fécondés immédiatement; ensuite 
ces carpelles deviennent sensiblement lisses, et quoique je n’aie pas 
vu leur dissémination, je ne crois pas que leurs barbes se détachent 
et se roulent spiralement en développant des poils. 

La neuvième comprend les Myrrhidium qui ont quatre et très- 
rarement cinq pétales, dont les deux supérieurs sont allongés et sou- 
vent rayés, les deux ou trois autres linéaires et beaucoup plus petits; 
leurs tiges sont frutescentes ou herbacées, leurs feuilles pennatifides 
et même quelquefois multifides, leurs pédoncules ordinairement 
biflores à pétales blancs veinés de rose, et leurs étamines anthérifères, 
quinées ou septénées. La plus remarquable des neuf espèces qui com- 
posent la section, est le Cunariense, à tige sous-frutescente et feuilles 
trifides. 

La dixième est celle du Jenkinsonia, formé du Quinatum, dont les 


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deux pétales supérieurs, plus grands que les autres, sont rayés de 
pourpre et échancrés au sommet, et dont les sept étamines anthéri- 
fères, ascendantes ou étalées sont plus longues que les trois autres ; 
ses feuilles sont palmées et quinquéfides, ses fleurs jaunâtres et 
veinées. 

La onzième ou le Chorisma, ne comprend non plus que le Tetra- 
gonum , très-caractérisé par sa tige tétragone et charnue, ainsi que 
par ses deux pétales supérieurs longuement onguiculés ; ses dix éta- 
mines, dont sept fertiles, et deux inférieures libres , se réunissent en 
un long tube incliné vers le bas et genouillé au milieu, ce qui indique 
sûrement un mode particulier de fécondation. 

La douzième, ou celle des Pelargium, renferme deux fois autant 
d'espèces que toutes les autres ensemble , et comprend les vrais Pelar- 
gonium, qui se distinguent par leur hdi à cinq pétales inégaux et 
bilabiés, ainsi que par leurs sept étamines anthérifères et inégales ; elle 
se partage en un grand nombre de groupes dans lesquels on distingue 
différents types ; les plus remarquables sont : 

1° Les Ciconia, à pétales unicolores, dont les deux supérieurs sont 
plus petits et plus étroits, et deux étamines inférieures plus courtes 
que les autres ; ils comprennent onze espèces ou variétés, parmi les- 
quelles se trouvent l'4cetosum, le Zonale et l Inquinans , cultivés dans 
nos jardins, et qu’on reconnaît à leurs tiges frutescentes, leurs feuilles 
épaisses, arrondies et souvent tachées de brun. 

2° Les Jsopetaloidea, à pétales à peu près égaux, parmi lesquels 
on distingue 1° les 4/chemilloïdes, à feuilles épaisses et odorantes, 
tiges herbacées, fleurs petites et rayées ; 2° les Athamahtoides, à 
feuilles pennatisectes et multifides, tiges sous-frutescentes, fleurs 
petites et souvent tachées; 3° les Gibbosa, à tiges irrégulièrement 
renflées, et dont la principale espèce répand le soir une odeur très- 
agréable; 4° les Tristia, si remarquables par leurs fleurs livides, qui, 
comme toutes celles de la même teinte, sont fortement odorantes le 
“soir ; 5° les Fulgidu, multipliés dans nos jardins à cause de l'éclat de 
leurs fleurs écarlates ou sanguines, et dont les nombreuses espèces, 
souvent hybrides, ont les tiges plus ou moins charnues, et les feuilles 
divisées et incisées; 6° les Bicolor, presque tous hybrides et sous- 
frutescents, à pétales marqués de grandes taches pourpres sur un 
fond ordinairement blanc; 7° les Cortusina, ainsi appelés de la ressem- 
blance de leurs ombelles à celles des Cortuses ou des Primules, et 
dont les racines sont des tubercules fasciculés, et les tiges celles de 
sous-arbrisseaux frutescents ou charnus, à feuilles cordiformes ou 
incisées ; 8 enfin les Pinguifolia, à feuilles épaisses et peltées, tiges 
frutescentes et charnues, 


— 522 — 


Les fleurs des 4/chemilloides de notre premier type, sont bilabiées ; 
celui que je vois a les feuilles, veloutées, épaisses, cordiformes et 
lobées ; ses deux pétales supérieurs sont ovales, rayés et divariqués, 
les trois inférieurs linéaires et allongés. C'est le long de la rainure 
formée par ces derniers, que sont couchées sur deux rangs les sept 
anthères , dont quatre plus élevées ; elle s'ouvrent les unes et les au- 
tres du côté supérieur, en face du tube nectarifère, et répandent, à 
travers leurs parois qui se détruisent plutôt qu'elles ne s'ouvrent, un 
pollen jaunâtre et granuleux qui tombe en partie dans le tube necta- 
rifére, et reste en partie adhérent; assez long-temps après, les stig- 
mates s'étalent et sont fécondés soit par l'aura qui sort du tube, soit 
par le pollen encore adhérent, soit enfin par les anthères voisines. 

3° Les Platipétales , à pétales supérieurs et élargis, courts et très- 
obtus; ils renferment deux espèces à pétales rayés de pourpre:et tige 
sous-frutescente. 

4° Les Anisopétales , à tige sous-frutescente et pétales supérieurs, 
allongés et élargis. Cette division , la plus nombreuse de toutes et qui 
comprend près ‘de cent cinquante espèces, se distingue en sept sous- 
types : 1° les Glaucescentia, à feuilles glauques, épaisses et presque 
toujours glabres ; 2° les Lineata, à pétales supérieurs, marqués de 
raies parallèles, feuilles épaisses, ovales ou cordiformes ; 3° les Tomen- 
tosa, à pétales blancs, étroits et feuilles cordiformes, mollement 
tomenteuses ; 4° les Papilionacea, à feuilles cordiformes et dentées, 
pétales inférieurs linéaires, supérieurs pourprés et rayés; 5° les Pur- 
Purascentia , à fleurs pourprées, pétales inférieurs oblongs ou ovales, 
feuilles cordiformes ou cunéiformes, dentées ou lobées ; 6° les Crispa, 
à feuilles lobées, finement dentées, souvent relevées ou imbriquées 
sur les bords ; enfin 7° les Radulæ, à fleurs pourprées ou blanchâtres, 
feuilles divisées au-delà du milieu, lobes dentés, incisés ou penna- 
tifides. 

On ne peut guère s'empêcher de croire que les nombreuses espèces 
de Pelargonium , qu’on trouve originairement presque toutes réunies 
dans une petite contrée du midi de Afrique, ne soient dues en 
grande partie à des fécondations adultérines, comme celles des Oxalis, 
des Erica et d'autres plantes du même climat où la température favo- 
rise si puissamment la végétation , et où l’atmosphère, presque toujours 
agitée, disperse au loin les poussières fécondantes. Cette opinion est 
d'autant plus fondée, que plusieurs d’entre elles sont des hybrides de 
parents reconnus, et que chaque jour nous voyons naître dans nos 
Jardins de nouvelles hybrides ou plutôt de nouvelles variétés de Pelar- 
Sonium, qui se multiplieraient bien plus si plusieurs d'entre elles 
ne restaient infécondes. 


— 523 — 

Ces diverses monstruosités naturelles ou artificielles n’altèrent guère 
la forme actuelle du genre, car la plupart de ses caractères extérieurs 
restent constants, ainsi que la symétrie de la fleur, son tube necta- 
rifère, ses carpelles avec leurs styles velus et tortillés; cependant ces 
Pelargonium, dont nous ne pouvons pas changer essentiellement la 
structure, ont subi dans les mains de la nature une altération primor- 
diale; car leur fleur, d’abord composée d'un calice à cinq divisions 
égales, de cinq pétales égaux et semblablement placés, de dix éta- 
mines à filets libres, ou peut-être soudés, a été transformée en une 
fleur à calice inégal et nectarifère, dont les deux pétales supérieurs 
ont seuls conservé leur forme, et à étamines, dont les unes sont 
avortées, tandis que les autres prennent des positions très-variées. 

La cause de ces transformations, qui s’opèrent en partie sous nos 
yeux, et en partie à une époque où elles ne peuvent être apercues, 
est sans doute due à la présence du tube nectarifère qui n'existe pas 
dans les autres Géraniacées ; comme la liqueur dont il est rempli devait 
jouer un rôle principal dans la fécondation, il importait qu’elle com- 
muniquât librement et immédiatement avec les deux organes sexuels; 
en conséquence, les pétales supérieurs se sont redressés, les inférieurs 
se sont fortement abaissés, les anthères inférieures ont aussi disparu, 
et les autres ont pu exécuter avec facilité leurs divers mouvements ; 
car tous les organes floraux se sont subordonnés à celui qui était 
chargé du rôle principal. 

Mais il y a eu de plus un grand nombre de modifications relatives 
à la fécondation elle-même, au nombre des étamines fertiles, aux 
anthères d’abord latérales introrses, dans lesquelles on aperçoit encore 
les traces de leur première ouverture, et qui exécutent des mouve- 
ments plus ou moins compliqués; celles qui étaient placées sur les 
bords du tube nectarifère ont retourné leur ouverture contre le tube ; 
les autres se sont allongées pour l’atteindre plus facilement , toutes se 
sont déjetées, d’abord du côté du tube avec les stigmates, puis du côté 
opposé, lorsque la fécondation a été terminée. 

Je n'entre pas ici dans des détails très-remarquables qui diffèrent 
beaucoup selon les sections, et souvent aussi selon les groupes ou 
même les types. Je me contenterai de faire observer la fécondation des 
espèces dont le tube nectarifére est raccourci ou à peu près nul, celle 
du Chorisma ou Pelargonium tetragonum, et celle où les étamines 
agrandies accompagnent les styles dans leurs divers mouvements, et 
jajouterai que les fécondations sont souvent indirectes ; car les 
anthères, dans plusieurs cas, ont déjà répandu leur pollen , lorsque les 
lobes du stigmate ne sont pas encore épanouis ; quelquefois, au con- 


— 924 — 


traire , ces lobes sont épanouis sans que le pollen soit sorti de l’anthère. 

Avant l'épanouissement, les fleurs, d’abord contenues dans la 
collerette ou les stipules de la base de l'ombelle, s'en dégagent succes- 
sivement, et après être restées quelque temps pendantes, elles redres- 
sent leurs pédoncules et leurs fleurs plus ou moins inclinées; lorsque 
cette opération est achevée, les carpelles se déjettent quelquefois, 
comme dans les 4/chemilloïdes, mais plus souvent ils se relèvent les 
uns aprés les autres, sans présenter toutefois ces pédoncules coudés 
qui distinguent les Erodium ; ensuite, ils se détachent par la base, et 
les styles se contournent en restant suspendus à leur sommet; enfinils 
se sèment, comme les Ærodium, de manière que la pointe la plus 
aigué de la graine est toujours celle qui s'enfonce dans le sol et qui 
correspond à la radicule; cette opération dure plus ou moins long- 
temps, selon le nombre des rayons de la même ombelle, et dans celles 
qui sont bien garnies, ainsi que celles du Triste, il y a souvent des 
carpelles détachés, et d’autres dont les fleurs ne sont pas encore 
épanouies ; dans le Capitatum, au contraire, qui est peut-être un 
hybride, toutes les fleurs paraissent en même temps. 

Les Pelurgonium diffèrent beaucoup pour l’époque et la durée de la 
floraison, les Hoarea et en général ceux à racine tubéreuse, repoussent 
toutes les années de nouvelles feuilles et de nouvelles fleurs ; en sorte 
que, sous ce point de vue, ils ressemblent aux annuels; les autres 
donnent des fleurs toutes les années, quelquefois à une époque déter- 
minée, mais souvent pendant plusieurs mois et quelquefois la plus 
grande partie de l’année ; ces fleurs sont toutes, je crois, sans mouve- 
ment, et ne durent guère plus d'un jour, au moins lorsqu'elles se déve- 
loppent en liberté dans leur climat natal; en général, elles sont 
inodores et ne se distinguent qu'à l'éclat de leurs couleurs, mais quel- 
ques-unes, comme les Tristia, ont, au contraire, des parfums très- 
suaves. 

Les pédoncules sont axillaires, et l'efflorescence est centripète; 
cependant les tiges n'acquièrent qu'une certaine hauteur; il faut donc 
que leurs sommités se rompent, ou que les tiges florales périssent ; 
quelques espèces, comme le Scutatum , ont les tiges sarmenteuses, et 
par conséquent beaucoup plus développées. 

Les feuilles affectent mille formes différentes, depuis la plus simple 
à la plus composée ; maïs elles sont toujours plissées sur leur nervure 
principale, ou sur les principales nervures quand elles sont lobées ; 
leurs surfaces glabres et plus souvent velues portent ordinairement 
des poils glanduleux, comme les stipules, les calices et même les den- 
telures; le Zonale et quelques autres sont marqués de taches brunes 
et circulaires. 


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Les étamines des Pelargonium sont périgynes, si du moins on consi- 
dère le fond du nectaire comme la base de la fleur, et en effet son inté- 
rieur est tapissé par la membrane du torus, et ses parois extérieures 
sont évidemment calicinales; les pétales et les étamines adhérent au 
calice, et les pistils eux-mêmes, au lieu d'occuper le centre de la fleur, 
sont portés sur une saillie de ce même calice; les fleurs sont sans 
doute naturellement diurnes, comme celles des Erodium et des Gera- 
nium, mais comme elles ont été déformées, soit par la nature, soit par 
des fécondations adultérines , et qu'elles ont toutes un plus ou moins 
grand nombre d'étamines avortées, il s'ensuit que leurs pétales restent 
souvent plusieurs jours sans tomber; mais cette altération dans les 
étamines ne nuit point à la dissémination qui s'opère, comme dans 
les Erodium, par la torsion des styles et la rupture de la gaine qui 
renfermait les poils, au moyen desquels les semences se dispersent. 

Le principal phénomène que présente ce genre, c’est celui de ce 
singulier nectaire qui, sous des formes assez variées, accompagne 
toutes les espèces, et parait uniquement destiné à recevoir le pollen 
des anthères qui s'inclinent toujours sur ses bords. Que devient ensuite 
ce pollen ? Cette question m'a d'abord assez embarrassé : j'ai cru qu'il 
s'y dissolvait comme l’eau dissout le sel, et qu’il émettait ensuite des 
émanations par lesquelles les stigmates étaient fécondés ; aujourd'hui 
je suis persuadé que ses globules se rompent sur la surface de la 
liqueur miellée, et que les boyaux qui en sortent, soit par leur propre 
légèreté, soit parles mouvements successifs de dilatation et de contrac- 
tion des globules ouverts, arriventimmédiatement sur l'organe stigma- 
toïde, au moins dans le très-grand nombre des plantes. Il reste à expli- 
quer les diverses dispositions des anthères autour du tube mellifère, 
leur nombre dans chaque espèce ou du moins dans chaque type, 
leur rapport de grandeur, etc.; mais dans l’état actuel du genre, et 
d’après le nombre des espèces adultérines dont il est chargé, un tel 
travail est impossible; ce qui reste évident, c'est qu’au milieu des alté- 
rations qu'ont subi et que subissent encore ses diverses espèces, toutes 
celles qui sont restées-fertiles présentent des anthères qui, à l'époque 
de la fécondation, se relèvent contre le tube nectarifère pour répandre 
leur pollen dans la liqueur miellée. 


TROISIÈME GENRE. — Geranium. 
Le Geranium a un calice de cinq pièces égales, cinq pétales égaux, 


dix étamines alternativement plus courtes et presque toujours fertiles, 
cinq glandes nectarifères à la base de grandes étamines, cinq carpelles 


— 526 — 
à styles glabres, et qui, dans la dissémimation, se roulent en spirale 
de la base au sommet. 

On partage ce genre en trois groupes : 

1° Celui des espèces vivaces, à pédoncules uniflores ; 

2° Celui des espèces vivaces, à pédoncules biflores ; 

3° Celui des espèces annuelles, à pédoncules biflores. 

Les Geranium sont des herbes vivaces ou annuelles, et rarement 
des arbrisseaux, à tiges articulées et feuilles bistipulées opposées près 
de la base et alternes au sommet. Ces feuilles, toujours simples et pé- 
tiolées, sont quelquefois irrégulièrement pennatiséquées,: mais pour 
l'ordinaire divisées en trois ou cinq lobes subdivisés, et à nervures 
palmées; leurs fleurs, presque toujours d’un rouge violätre, sont 
régulières, hermaphrodites et portées sur des pédoncules uniflores ou 
plus souvent biflores, qui naissent à l’aisselle des feuilles ou qui leur 
sont opposés. 

Les espèces du premier groupe, qui ne paraissent pas appartenir 
au même type, et qui sont dispersées dans la Nouvelle-Zélande, les 
Andes, le détroit de Magellan, la Sibérie, et en général les régions 
élevées et froides des deux continents, sont des herbes vivaces, ram- 
pantes ou même dépourvues de tiges. 

La principale et peut-être la seule espèce européenne de ce groupe 
est le Sanguineum , qui croit dans les expositions chaudes et stériles, 
sur les bords des bois et au milieu des rochers où il fleurit au prin- 
temps; sa racine est un rhizome épais d'un beau rouge, comme les 
tiges et les pédoncules; ses feuilles, recouvertes de longs poils blan- 
châtres, sont arrondies et divisées en cinq ou sept lobes trifides, et 
ses pédoncules uniflores par avortement, comme dans la plupart des 
espèces du groupe, portent quelquefois deux fleurs en ombelles, que 
l'on peut toujours apercevoir dans le premier développement des bou- 
tons. 

L’estivation du calice est quinconciale, les deux sépales extérieurs 
portent trois stries, les deux intérieurs n’en ont qu’une, et le dernier, 
moitié intérieur et moitié extérieur, en a deux ; la corolle est en esti-, 
vation tordue, et les pétales sont légèrement plissés dans le calice ter- 
miné par cinq arêtes. 

Les anthères sont naturellement introrses, et les cinq principales 
se couchent horizontalement, pour répandre leur pollen bleuâtre et 
globuleux sur l'humeur miellée, qui sort en abondance des cinq 
glandes placées à la base extérieure des cinq grandes étamines; les cinq 
autres anthères se renversent également, et répandent leur pollen de, 
la même manière, au moment où les stigmates sont encore roulés les 


— 527 — 

uns sur les autres, et par conséquent hors d'état de recevoir le pol- 
len ; en sorte que la fécondation ne peut avoir lieu que parles anthères 
des autres fleurs ou par les émanations du pollen tombé dans l'humeur 
miellée. Il n’y a rien de si élégant que cette plante, étendant sur les 
rochers ses feuilles couronnées de fleurs épanouies et d’autres plus 
avancées, répandant en pleine liberté leurs graines échappées des 
carpelles renversés. 

Les Geranium de notre second groupe, qui ne peuvent pas être 
séparés physiologiquement des premiers uniflores par avortement, 
ont etre eux de grands rapports pour l'inflorescence et la forme géné- 
rale des feuilles; ils perdent leurs tiges en hiver et repoussent de leurs 
racines, qui sont autant de rhizomes, les uns tronqués à la base 
comme les Batrachium de Kocx, les autres à racines fusiformes, fortes, 
descendantes, simples ou rameuses, ainsi que les Batrachioïdes du 
même auteur. 

On les trouve dans les climats tempérés, auprès des ruisseaux, à 
ombre des bois et dans les prairies élevées qu'ils embellissent de leurs 
fleurs bleues, rouges ou blanchâtres et souvent rayées; ils sont très- 
nombreux et dispersés çà et là dans l'ancien continent; mais leur 
véritable patrie est l'Europe et la Russie méridionale; ceux qui nous 
appartiennent, et dont nous devons surtout nous occuper, peuvent 
être rangées sous quatre ou cinq types, celui des Batraciens indiqué 
depuis long-temps, celui des Batrachioïdes, celui des Reflezum , celui 
de l Aneémoiïdes et celui du Macrorhize. 

Celui des Batraciens , le plus riche en espèces, comprend le Sy{va- 
ticum , le Strictum, le Nodosum , le Palustre , Y Aconitifolium, le Pru- 
tense, le Longipes à pédoncules très-allongés et quelques espèces du 
nord de l'Asie, telles que le Dahuricum , le Bifolium, le Cristatum de 
l'Albanie, le Vapaulense, à pédoncules fortement divariqués, et le 
W'allichianum à stigmates très-allongés. Ces diverses plantes ont les 
feuilles assez épaisses, velues ou plus ou moins lobées; les fleurs 
grandes, étalées et non réfléchies , ordinairement rougeâtres ou pour- 
prées, quelquefois blanchâtres, comme dans le Striatum et l Aconiti- 
folium; celui des Batrichioïdes n’est guère formé que de l’Argenteum 
et du Pyrenaicum. 

Leur fécondation ne diffère pas de celle de notre premier groupe; 
au moment où les fleurs s'épanouissent, les cinq anthères principales 
se couchent horizontalement, pour répandre leur pollen bleuâtre sur 
les poils humides qui bordent les onglets des pétales, et qui sont 
placés exactement au-dessus des cinq glandes nectarifères; les cinq 
autres renversent leurs anthères dans le même but, et les cinq stig- 


ME”. 


mates, qui ne sont papillaires qu'en dedans, ne s'ouvrent qu'après 
l'émission du pollen dont les molécules sphériques adhèrent toutefois 
long-temps sur les parois retournées et déjà flétries des anthères. Cette 
fécondation dure deux jours, comme celle du Sanguineum, et les stig- 
mates ne s'étalent que le second jour, et souvent après la chute des 
pétales; on voit bien les granules du pollen se rompre sous les poils 
humides qui en sont saupoudrés, et dans le Wallichianum du Népaul, 
à pétales d'un beau pourpre, on peut remarquer que les stigmates 
violets et fortement päpillaires, dès la première émission du pollen, 
s'étendent et se recourbent vers le bas pour recevoir les granules eux- 
mêmes ou leurs émanations. 

Le deuxième type, ou celui des Refléchis , est principalement formé 
de deux espèces : le Reflexum ou le Phœum, dont le Lividum n'est guère 
qu’une variété. On les reconnaît à leurs feuilles opposées aux fleurs, à 
leurs carpelles striés transversalement, sans doute par défaut de déve- 
loppement, et surtout à leur corolle d'un brun foncé qui, dès qu'elle 
s'ouvre, réfléchit fortement ses pétales par le mouvement élastique de 
leurs onglets. A la fécondation , les filets d’abord lâches se redressent, 
les anthères entourent le stigmate non encore développé, s'ouvrent 
bientôt en dehors, et laissent tomber leur pollen sur le fond velu de 
la corolle, et sur les cinq nectaires à bouche béante qui entourent 
l'ovaire; enfin le stigmate étale ses cinq lobes papillaires, fécondés, 
par les émanations des granules sortis de l'humeur miellée, et 
peut-être par les anthères des autres fleurs, et c'est là sans doute la 
cause finale pour laquelle les pétales sont ici réfléchis et les anthères 
extrorses. Ces pétales, en conséquence, restent long-temps sans 
tomber. 

Le troisièmetype est celui de l’Anemonefolium ou Balmatum de 
Cavawizzes, plante frutescente des Canaries, dont la tige cylindrique 
s'allonge chaque année par le développement des feuilles qui naïssent 
à son sommet , où elles sortent de l’aisselle d'une bractée élargie et per- 
sistante ; c'est de l’aisselle de ces mêmes écailles que s'élèvent plustard 
des pédoncules à pédicelles biflores. Les fleurs grandes et pourprées 
ont les glandes nectarifères des autres types, mais sont dépourvues de 
poils ciliés ; les étamines toutes placées sur le même rang n'ont pas 
leurs anthères renversées régulièrement , et les stigmates creusés en 
gouttière ne sont que légèrement papillaires. Il y a donc ici une forme 
différente de fécondation , et qui consiste principalement dans l’éga- 
lité des étamines et l'absence des cils ; les lobes du stigmate ne s’é- 
tendent que long-temps après l'émission du pollen sphérique, jaunâtre 
et adhérent, et le tube floral est percé de cinq petits canaux cylin- 


— b29 — 


driques , qui communiquent directement avec les glandes. Après la 
fécondation et pendant la maturation des graines, la végétation est 
suspendue , et il se forme au sommet de la tige un bourgeon écail- 
leux , qui commence à se développer en automne. 

Enfin, mon dernier type est celui du Macrorhkiza, qui a recu son 
nom de l'épaisseur de son rhizome, et qui est originaire du midi de 
l'Europe, où il se fait remarquer par l'odeur bitumineuse de ses poils 
glanduleux ; son calice est renflé, ses pétales sont à peine ciliés, son 
long style se recourbe et se déjette avec les étamines avortées souvent 
en partie; sa fécondation est indirecte, car les stigmates ne sont pas 
encore développés quand les anthères ont déjà répandu leur pollen, 
etils ne peuvent ainsi que recevoir le pollen des étamines voisines, 
qui, à cette époque, sont toujours redressées et rayonnantes ; aux 
approches de la dissémination, le calice qui était resté toujours fermé 
s'ouvre horizontalement, et les carpelles détachés et roulés sur leurs 
arêtes, laissent échapper leurs graines nues, comme dans les autres 
espèces du genre. Toutefois, la fécondation pourrait s’opérer aussi par 
l'humeur miellée, 

Le principal phénomène des plantes de ce second groupe, c'est 
celui des mouvements variés de leurs pédicelles: au moment de l'inflo- 
rescence, ces deux pédicelles jusqu'alors rapprochés s’écartent, pour 
que les fleurs soient moins gênées dans leur développement ét puissent 
mieux recevoir l'influence salutaire de la lumière; elles s’épanouissent 
toujours l’une après l’autre, et celle qui se montre la première est celle 
qui est la plus voisine de la tige, et dont le pédicelle est le plus 
raccourci. Quelquefois, comme dans le Pyrenaicum et la plupart des 
Batraciens, les pétales sont régulièrement disposés ; quelquefois, au 
contraire , comme dans le Macrorhize, ils se séparent en deux lèvres 
plus ou moins marquées ; enfin, souvent ils se rapprochent la nuit et 
s'écartent le jour; dans le Phœum et les espèces homotypes, ils se 
rejettent fortement en arrière durant la fécondation, parce qu’autre- 
ment leurs anthères déjetées n'auraient pas pu exécuter leurs mou- 
vements. 

La reproduction de ces Geranium a toujours lieu parleurs semences, 
et quelquefois aussi par leurs rhizomes ; j'ai vu ceux du Phœum, rom- 
pues en petits fragments épars sur le sol, développer séparément de 
nouvelles pousses, comme on l’observe aussi dans les Sedum , les 
Polygonatum et diverses Anémones. 

Les Geranium biflores, annuels ou plus souvent bisannuels, qui for- 
ment notre troisième groupe , comprennent dans le Prodrome treize 


de 34 


=— 530 —- 
espèces, la plupart indigènes et presque toutes européennes, que je 
range sous trois types : 

Le premier est celui du Molle, du Pusillum et du Rotundifolium , 
qui habitent le long de nos murs et de nos haies, où ils fleurissent 
pendant tout l'été et se ressèment continuellement ; aussi forment-ils 
dés l'automne de jolies rosules de feuilles arrondies, légèrement 
lobées, et du centre desquelles naissent des tiges pédonculées et pro- 
tégées d'abord par des bractées; leurs anthères, dont cinq avortent 
communément dans les deux premières espèces, versent immédiate- 
ment leur pollen granuleux sur les stigmates étoilés, papillaires et 
quelquefois ciliés, comme dans le Rotundifolium. On trouve cependant 
au fond de toutes ces fleurs des glandes nectarifères recouvertes de 
poils qui recoivent les granules tombés des anthères. 

Le second est celui à feuilles fortement lobées ou même multifides, 
et tiges simples, souvent divariquées; on y place le Divaricatum , le 
Columbinum , le Dissectum, le Bohemicum , tous indigènes, et le Caro- 
lianum de Y Amérique septentrionale; ces plantes ne sont pas gazon- 
nantes et hybernales comme celles du groupe précédent, mais elles 
périssent en automne et reparaissent au printemps dans nos champs 
et nos cultures, en sorte que leur floraison est assez tardive. Leur 
fécondation se rapproche de celle de nos Geranium vivaces, c'est-à- 
dire que les cinq anthères intérieures répandent promptement leur 
pollen , et que les cinq autres se renversent pour le laisser tomber sur 
les glandes nectarifères et les cils des pétales. 

Le troisième type est formé de deux plantes annuelles ou plutôt 
bisannuelles : le Lucidum , à feuilles arrondies et calices pyramidaux 
repliés transversalement, et le Robertianum, si commun autour des 
haies et des rochers humides, et remarquable par son odeur, ses 
feuilles à lobes trifides, pennatiséqués, et les longs poils étalés qui 
recouvrent toutes ses parties. La fécondation de ces plantes ressem- 
ble à celle des Geranium annuels de notre premier type : les dix 
anthères introrses serrent de près le stigmate étoilé sur lequel elles 
répandent immédiatement leur pollen briqueté, et les pétales im- 
berbes forment par leur ensemble, surtout dans le Robertianum , cinq 
tubes cylindriques qui aboutissent à autant de glandes nectarifères. 

Le Robertianum , et probablement aussi les espèces du premier type, 
ne périssent qu'après avoir fleuri, parce que leur tige est centrale; j'ai 
vu dans les bois le Robertianum se conserver plusieurs années, parce 
qu'il ne fleurissait pas. 

Après la fécondation, les calices se referment étroitement, et à 
l'époque de la dissémination, ils s'ouvrent horizontalement et comme 


LÉ Den 


— 531 — 


par le ressort de leur nervure moyenne endurcie; ils découvrent 
leurs carpelles ridés et réticulés qui se désarticulent de leurs arêtes ; 
les carpelles du Robertianum restent alors suspendus et flottants sur 
deux filets blanchâtres , et l’arête se dégage ensuite du sillon où elle 
était retenue. 

Les diverses espèces qui forment notre dernier groupe, quoique 
fort communes et vivant les unes auprès des autres, restent toujours 
très-distinctes, et leurs fleurs régulières au moment où elles s'épa- 
nouissent ne durent jamais plus d’un jour. 

Le phénomène le plus remarquable que présentent les Geranium , 

‘c'est celui de leur dissémination : lorsque la maturation est achevée, 
la coque membraneuse et ouverte inférieurement qui renferme les 
graines non adhérentes, se détache du torus sur lequel elle était fixée 
par sa base ouverte, et le bec qui la termine se dégagé par un mou- 
vement élastique du sillon de l'axe central dans lequel il était ren- 
fermé ; ensuite il se roule rapidement sur lui-même, et par la secousse 
qu'il lui imprime, il dégage la graine de sa coque ouverte qu'il ramène 
vide et retournée près du sommet de l'axe central. Il n’y a rien de si 
digne de fixer l'attention de l'observateur que la précision avec laquelle 
ce mouvement s'exécute, si ce n'est peut-être la cause finale pour 
laquelle il a lieu : les graines, qui devaient sortir de leurs coques sans 
être transportées au loin, n'avaient pas besoin d'un bec qui se roulât 
en spirale, en développant au-dehors une aigrette de poils qui le 
soutint dans les airs, comme cela a lieu dans les £rodium et les Pelar- 
gonium, dont les coques n'abandonnent jamais leurs graines. Quelle 
convenance entre le but et les moyens ! 

Les Geranium annuels de notre troisième type, c'est-à-dire le 
Lucidum et le Robertianum , sont, je crois, les seuls dans lesquels les 
arêtes ne se roulent point, parce qu’à la dissémination leurs calices 
s'étalent horizontalement, tandis que dans les autres espèces, les car- 
pelles ont besoin d'être dégagés de l'intérieur des calices qui restent 
redressés, Cet épanouissement des folioles calicinales qui précède la 
dissémination, et qu’on peut voir non-seulement dans le Robertianum , 
le Lucidum , mais aussi dans le Macrorhizon à calice enflé, s'exécute au 
moyen des filets qui, au lieu de se dessécher après la fécondation, 
comme dans les autres espèces, s’épaississent au contraire à la base, et 
deviennent enfin des arêtes cartilagineuses et élastiques, qui, en se 
débandant, écartent fortement les sépales, ensuite les achénes se déta. 
chent du bec en restant suspendus à un filet, et les coques qui ne sont 
pas ouvertes à la base se sèment avec leurs graines. Lorsque les filets ne 
s'endurcissent pas, mais se dessèchent, comme cela a lieu dans le 


— 532 — 


grand nombre des espèces, les folioles du calice s'écartent d'elles- 
mêmes, ainsi qu'on peut le voir dans les Dissectum , etc. 

Le Cristatum de Y Albanie, dont le portet l’organisation générale sont 
tout-à-fait semblables au Pyrenaicum, a ses coques chargées sur le dos 
de crêtes relevées comme celles de l'Onobrychis caput galli; par consé- 
quent le bec ou le style ne se déroule pas, mais il se flétrit avec l'axe 
qui le porte et les lobes du calice; les coques se détachent ensuite, 
en laissant voir sur leur face infère une ouverture qui correspond à la 
graine; on remarque enfin que les pédicelles se recourbent près du 
sommet, et accrochent ainsi les calices à l'époque de la maturation. 

Les Geranium, commeles Erodium,ont presquetouslesfleursdiurnes; 
l'épanouissement a lieu dès le matin, à peu près en même temps que la 
fécondation, et les pétales tombent le soir. Toutefois il ÿ a des excep- 
tions à cette règle, car dans le Phœum et le Reflezum, ils persistent 
plusieurs jours, étalés horizontalement ou même réfléchis par l'effet 
de la courbure de la lame élastique qui forme la base de l'onglet; en 
conséquence, leur fécondation ne s'opère pas en un seul jour : les deux 
phénomènes sont ainsi intimément liés. 

On peut remarquer enfin que les coques des divers Geranium cor- 
respondent aux intervalles des lobes du calice, et qu’ainsi leur retour- 
nement devient encore plus facile. Koom subdivise les trois sections de 
ses Gerantum d’après la considération de leurs valves ridées, plissées ou 
lisses ; mais la forme extérieure de ces valves ne me paraît pas avoir des 
rapports avec l’organisation générale, et par conséquent n'entre pas 
dans notre plan. 


QUATRIÈME GENRE. — Ærodium. 


L'Erodium a cinq sépales égaux, cinq pétales réguliers ou irré- 
guliers, dix étamines légèrement monadelpes, et dont cinqanthérifères 
et alternes aux pétales sont glanduleuses à la base; cinq styles barbus 
sur leur côté intérieur et roulés en spirale à la dissémination. 

On divise artificiellement ce genre en deux groupes : 

1° Celui à feuilles pennatiséquées ou pennatipartites, c'est-à-dire 
partagées ou non partagées jusqu'à la nervure principale ; 

2° Celui à feuilles entières ou plus ou moins lobées. 

Les Erodium , réunis autrefois aux Geranium, en ont été justement 
séparés par L'Héririer, soit à cause de leurs pédoncules multiflores 
et de leurs cinq étamines avortées, soit surtout en raison de la confor- 
mation de leurs carpelles. Leurs nombreuses espèces , qui s’accroissent 
tous les jours, habitent principalement les deux côtes de la Méditer- 


— 533 — 
ranée, les îles et les montagnes adjacentes; d'autres sont dispersées 
dans la Russie européenne et asiatique, etc., deux enfin se trouvent 
au pied des Andes, et trois au Cap de Bonne-Espérance. Le Cicutaria, 
le plus commun de tous, est répandu sous plusieurs variétés en 
Europe, en Orient et sur les côtes septentrionales de l'Afrique. 

On peut séparer ces plantes en plusieurs types d'après leur port, 
leurs feuilles et d’autres caractères non moins importants; je me 
contente d'en remarquer sept : 

1° Celui des espèces dépourvues de tige, à feuilles pennatiséquées, 
à pédoncules presque toujours pauciflores, et parmi lesquelles je place 
le Supracanum de l'Espagne, le Glandulosum à feuilles pubescentes 
de la même contrée et des Pyrénées, le Petræum du Languedoc, à 
pétales tronqués deux fois aussi longs que le calice, et enfin le 
Chrysanthum du Parnasse, à feuilles soyeuses bipennatiséquées et fleurs 
jaunes ; 

2° Celui des Cicutaria ou des espèces caulescentes, à feuilles plus 
ou moins pennatiséquées et pédoncules multiflores très-allongés. J'y 
place comme espèces ou comme variétés le Moschatum à odeur de musc, 
le Fordilioides des pentes rocailleuses d'Alger, le Botrys de l'Italie méri- 
dionale , de la Corse et de la Mauritanie, tout hérissé de poils hispides 
et réfléchis au bas des tiges, le Cicutarium lui-même à formes très- 
variables, mais distingué par ses pédoncules nombreux, ses pétales tou- 
jours un peu inégaux, et enfin le Ciconium des bords dela Méditerranée, 
dont les sépales portent de longues barbes, et dont les deux pétales supé- 
rieurs sont légèrement échancrés. Dans ces plantes, et celles qui leur 
ressemblent, les étamines fertiles ont la base plus ou moins dilatée; 
les anthères répandent immédiatement leur pollen sur les stigmates 
étoilés, sur les cinq glandes du torus et sur les cils qui bordent les 
onglets des pétales; il arrive même assez souvent que le pollen sort 
des anthères, avant que les stigmates soit entièrement développés; 
mais toujours les stigmates se referment dès qu'ils ont reçu les glo- 
bules fécondateurs , soit immédiatement des anthères, soit médiate- 
ment des cils placés à la base des pétales ; 

3° Celui des Gruinum , à feuilles trilobées, dont la principale espèce 
est le Gruinum de la Crète, de l'Espagne et du nord de l'Afrique, et 
dont les autres sont le Murcicum de l'Espagne et des côtes voisines de 
la Barbarie, le Chium de l'Archipel et des environs de Naples, etc. 
Toutes ces plantes annuelles ont la même fécondation que les Cicu- 
laria, et se distinguent par leurs dimensions plus fortes, leur bec 
plus long et plus épaissi. J'ai remarqué que le Gruinum renfermait 
dans on carpelle deux graines que leur pression mutuelle dé- 
formait ; 


De 50 

4° Geluides Malachoïdes, qui ontleportetlesfleursdes Cicutaria, mais 
dont les feuilles sont cordiformes, crénelées et quelquefois légèrement 
trilobées : ce sont le Malachoïdes proprement dit, des deux côtes 
de la Méditerranée, à étamines toutes lancéolées, le Malopoides de la 
Sicile et des côtes d'Afrique, recouvert d’un duvet soyeux , le Mervu- 
losum de la Sicile, et deux autres espèces, le Glaucophyllum de 
l'Egypte et l Ægyptiacum à tiges redressées , feuilles lobées et pédon- 
cules à peu près triflores, et enfin l'Hélintropoides dont la patrie est, je. 
Je crois, encore inconnue, et qui mérite d'être distingué de toutes 
ses congénères par ses aigrettes plumeuses et non pas simplement 
velues ; 

5° Celui de l'Aymenodes , qui croît sur les pentes de l'Atlas, et au- 
quel je joins le Gussoni, des environs de Naples. Ces deux plantes 
vivaces ont les pédoncules multiflores des Cicutins, et les feuilles plus 
ou moins trilobées; mais ce qui les distingue, c'est une corolle à peu 
près labiée, qui porte à sa base des taches pourprées nectarifères, et 
sur lesquelles sont semées de petites écailles allongées et brillantes. 
Les cinq glandes nectarifères de leur torus sont chargées des cinq 
étamines fertiles, et non pas des cinq stériles, qui sont représentées 
ici par cinq corpuscules allongés et blanchâtres, destinés sans doute à 
tenir en place le style. La fécondation paraît indirecte, car les cinq 
anthères pivotantes répandent leur pollen briqueté sur les tâches vio- 
lâtres du torus, avant que les stigmates soient ouverts ; 

6° Celui du Chamædrioïdes, formé de deux petites plantes à racines 
rhizomatiques, le Maritimum, des côtes de la France et de l'Angle- 
terre, et le Richardi ou le Chamædrioïdes de L'Héritrer, qui se font 
remarquer par leurs arêtes lisses et non barbues ; ce dernier a les 
feuilles arrondies et crénelées, les fleurs petites et blanchâtres , les 
pédoncules uniflores, coudés, stipulacés et radicaux, les carpelles 
velus et les stigmates étalés de bonne heure; ses étamines se déjettent 
après avoir répandu leur pollen, et ses arêtes se tordent comme dans 
les autres espèces, quoiqu'elles soient dépourvues de poils ; maïs les 
carpelles velus portent à leur sommet une houppe qui s'étale à la 
dissémination ; 

7° Enfin celui du Viveum , herbe annuelle cueillie par Bové, dans 
le désert de Tor en Arabie ; et remarquable par le duvet qui recouvre 
ses tiges et ses feuilles entières, opposées et inégalés, surtout par ses 
quinze étamines fertiles , réunies trois à trois à la base; ses cinq stig- 
mates rapprochés en tête, et ses cinq carpelles hispides sont pourvus 
d'arêtes barbues jusqu’à la base, mais nullement tordues. 

La plupart des Erodium subissent des altérations marquées, selon 


Mon ‘rs 


— 535 — 


les lieux dans lesquels ils croissent ; quelquefois ils paraissent entière- 
ment dépourvus de tiges, maisils deviennent caulescents lorsqu'ils 
sont favorablement placés; ainsi le Cicutaria, qui, dans les terrains 
secs et stériles, ne présente qu’une rosette de feuilles, forme dans les 
sols riches et cultivés une plante dont les tiges s'étendent sur le sol, et 
donnent sans cesse de nouvelles fleurs. On distingue ces plantes 
d'avec les Geranium, à leurs larges stipules qui renferment avant leur 
développement les feuilles et les fleurs. 

Les pédoncules, qui varient beaucoup selon les espèces, sont d'abord 
courts et serrés les uns contre les autres; bientôt ils s'écartent pour 
fleurir en commencant près de la tige, ensuite ils se déjettent en 
s'allongeant, puis ils se relèvent horizontalement, et enfin ils se 
redressent de manière à former par leur réunion une girandole dont 
la pointe regarde le ciel : tous ces mouvements s’exécutent très-régu- 
lièrement sans qu'on apercoive dans les pédoncules autre chose que 
des renflements, à la base et au sommet; quand ensuite les graines 
sont répandues, ces mêmes pédoncules se redressent dans toute leur 
longueur en conservant les mêmes renflements qui sont, il est vrai, 
moins marqués. 

Lorsque la dissémination s'approche, on voit ces carpelles, soudés 
à leurs graines, se détacher par leur base, et en même temps leurs 
arêtes se dégager de la gaine dans laquelle elles étaient d'abord renfer- 
mées et dont les deux bords s’écartent en même temps; mais au lieu 
de s’enrouler verticalement, comme ceux des Geranium, ils s'entor- 
dent de droite à gauche, de même que l'axe central, et mettent ainsi 
à découvert les poils de leur face intérieure, qui s’étalent en aigrettes; 
on voit alors les carpelles flotter dans les airs, couronnés de leurs 
jolies houppes, et retomber ensuite sur le sol, où ils s’enfoneent 
toujours plus par la torsion de leurs arêtes. On peut remarquer que 
ces divers mouvements sont arrêtés par l'humidité, et favorisés au 
contraire par la sécheresse ; que tous les Erodium, à l'exception du 
Maritimum , et je crois aussi du Chamadrioïdes, ont les arêtes barbues 
intérieurement; qu'elles sont même plumeuses, comme je l'ai dejà 
dit dans le Glaucophyllum et \ Heliotropoides, et enfin que ces poils, 
avant leur développement, sont redressés et couchés dans la gout- 
tière intérieure du style, et que la membrane transparente qui les 
recouvrait se déchire par la torsion. 

Les Erodium européens sont la plupart des plantes bisannuelles, 
dont les graines se sèment en été et germent en automne; plusieurs 
espèces ont leurs cotylédons lobés. Il n’y a rien de si élégant, et en 
même temps de si régulier, que les rosules du Cicutaria, avec ses 
stipules recouvrant et protégeant les ombelles centrales. 


508 

Les fleurs de la plupart des £rodium sont diurnes, elles s'épanouis- 
sent le matin et ne tardent pas à répandre leur pollen sur les stigmates 
étalés en croix; ensuite les pétales tombent. 

Le phénomène physiologique le plus remarquable dans ce genre 
est celui de ces pédoncules, qui, d’abord redressés dans la floraison, 
s’étalent ensuite horizontalement dès leur base , et se redressent enfin 
à angle droit près de leur sommet, pour reprendre , après la dissémi- 
nation, leur position première. Ge mouvement dépend en partie des 
renflements qu’on apercoit à l'extrémité inférieure des pédoncules, et 
qui grossissent encore après la fécondation, comme on peut le voir 
dans le Gruinum, et de cette force encore inconnue qui ramène les 
fleurs à la position verticale, lorsqu'un obstacle ne s'oppose pas à 
leur redressement. Ces mouvements me paraissent appartenir à pres- 
que tous les Erodium , car je les vois indiqués dans le Cheilanthifo- 
lium et le Daucoïdes , nouvelles espèces à racines rizhomatiques et à 
tige avortée, que M. Borssrer vient de rapporter de la Sierra Nevada, 
et qui doivent dépendre de notre premier type, très-voisin des Cicu- 
lariu. 

Le second phénomène, qui me paraît digne d’être noté, c’est celui 
de ces deux taches d’un beau rouge qui distinguent certaines espèces, 
eten particulier le Bimaculatum , qui, comme le Bipinnatum de Cava- 
NILLES, le Stephanianum , etc., ne me paraissent guère que des variétés 
du Cicutin. 

Ces taches sont d'autant plus remarquables, qu’elles sont presque 
toujours accompagnées d'une rupture de symétrie dans les pétales, 
dont les deux supérieurs, ceux qui portent les taches, se séparent 
un peu des autres, et forment alors une des deux lèvres qu’on remar- 
que dans la fleur. Ces espèces, que je viens de nommer, ont aussi 
cinq glandes nectarifères bien marquées, des poils formant un élégant 
grillage, un pollen qui se répand avant que les stigmates soient for- 
més , et en général tout ce qui indique l'humeur miellée comme agent 
de la fécondation. 

Les cotylédons des Cicutins sont souvent trilobés ou quinquélobés, 
ainsi que ceux de plusieurs autres espèces d’'Erodium, et Kocx observe 
que le Moschatum a ses étamines fertiles, dilatées et bidentées à la 
base. J'ajoute que ses étamines anthérifères sont toujours alternes aux 
pétales, et par conséquent correspondantes aux cinq glandes necta- 


riféres et aux poils qui les recouvrent; elles concourent ainsi à assurer 
la fécondation. 


— 537 — 


Trente-septième famille. — Tropæolées. 


Les Tropæolées ont un calice coloré, à cinq divisions libres ou 
diversement réunies, et dont la supérieure est éperonnée postérieu- 
rement ; cinq pétales inégaux et irréguliers, deux supérieurs hyÿpo- 
gynes, et trois inférieurs placés sur le calice et quelquefois avortés; 
huit étamines libres et entourant le nectaire , autant d’anthères ter- 
minales , oblongues , redressées , biloculaires et s'ouvrant par une 
double fente ; un pollen prismatique et triangulaire, trois ovaires 
réunis, trois styles soudés, trois stigmates aigus et autant de carpelles 
uniloculaires, monospermes et attachés à l'axe du fruit; des semences 
dépourvues d’albumen, recouvertes d’une enveloppe épaisse, con- 
sistante et sillonnée , des cotylédons droits, épais , séparés dans leur 
jeunesse et ensuite fortement unis entr'eux et au spermoderme ; une 
radicule cachée dans les plis des cotylédons, et marquée de quatre 
tubercules , d’où sortent autant de racines secondaires. 

Cette famille renferme deux genres dont le Tropæolum est le seul 
bien connu. 


Tropæolum. 


Le Tropæolum a un calice dont la division supérieure est éperon- 
née , cinq pétales inégaux , trois supérieurs plus courts et quelquefois 
avortés, huit étamines libres, trois carpelles sillonnés, indéhiscents 
et un peu bosselés. 

Il contient à peu près quinze espèces, que l’on divise en deux 
groupes artificiels : 

1° Celui à feuilles peltées, entières ou lobées ; 

2° Celui à feuilles peltées , à lobes profonds et plus ou moins in- 
cisés. 

Les Tropæolum sont des herbes annuelles ou vivaces , à feuilles 
opposées à la base , alternes sur la tige , simples et rarement digitées ; 
leurs pédoncules sont nus, axillaires, solitaires et uniflores, et leurs 
feuilles primordiales sont bistipulées. 

Ces plantes homotypes ont une grande ressemblance dans le portet 
leurs divers organes foliacés ou floraux, leurs tiges sont molles et 
succulentes ; leurs feuilles rarement velues sont presque toujours 
recouvertes de cette poussière glauque, qui est commune dans les 


— 38 — 


plantes , et leurs différences ne consistent guère que dans la forme 
des feuilles et des pétales plus ou moins inégaux et ciliés. 

Leur végétation, comme celle de la plupart des végétaux grim- 
pants, ne s'arrête que par un froid de deux ou trois degrés, qui détruit 
la plante exposée à l'air libre, mais qui ne lui cause aucun dommage 
lorsqu'elle est renfermée dans une serre, surtout lorsqu'elle est dou- 
blée et que ses semences ont avorté. 

Les feuilles, comme celles des végétaux grimpants et dépourvus de 
bourgeons, sont d'abord très-petites et légèrement plissées sur leur 
face supérieure; les calices sont en estivation à peu près valvaire, et 
les deux pétales supérieurs renferment les autres roulés encore sur 
eux-mêmes. Après la fécondation , toutes les enveloppes tombent avec 
les étamines et le style; enfin les graines, préservées par leur enve- 
loppe endurcie, se détachent avant leur complète maturité, et germent 
chez nous au printemps. 

La fleur des Tropæolum, comme celle des Pelargonium , paraît avoir 
été déformée en raison de son nectaire ; pour s'en convaincre, on n'a 
qu'à l'ouvrir avant l'épanouissement , et l'on verra que ses étamines 
sont régulièrement disposées , que ses pétales sont cordiformes, peu 
ou point ciliés, insérés à peu près sur le même cercle ; que le nectaire 
est à peine visible; enfin que les carpelles, nettement séparés à la base, 
ont encore une surface lisse ; ce n’est que beaucoup plus tard et pen- 
dant la fécondation que les pétales se distribuent en deux lèvres, et 
que les étamines se recourbent pour jeter leur pollen dans le nectaire. 

Les Tropæolum à feuilles peltées comprennent le plus grand nombre 
des espèces, et en particulier le Maÿjus , le Minus de nos jardins, l4- 
duncum , le Tuberosum, le Bicolorum, le Tricolorum , etc. Ceux à 
feuilles incisées sont au nombre de trois dans le Prodrome, et la prin- 
cipale est le Pentaphyllum; les unes et les autres appartiennent à la 
côte occidentale de l'Amérique méridionale , principalement au Pé- 
rou , au Chili et aux Andes. 

L'Aduncum a la corolle bilabiée et le nectaire fortement recourbé 
en crochet; ses étamines couchées st la lèvre inférieure, avec le stig- 
mate bilobé ou trilobé, se redressent pour répandre leur pollen à l’ou- 
verture du nectaire devant lequel elles sont placées. Le Pentaphyllum 
est très-remarquable par la persistance de son calice qui subit un 
changement considérable pendant la maturation. ( Voyez Annales des 
sciences natur. , année 34 , page 230 ). 

Les graines des Tropæolum , qui avortent quelquefois en partie, 
présentent divers phénomènes reconnus d’abord par GÆrTNER et en- 
suite décrits plus exactement par Ricnarp, surtout par Auguste 


— 539 — 
SainT-HiLarRE dans le 18° vol. du Annales de Museum. Je vais les in- 
diquer sommairement. 

Après la fécondation , on trouve dans l'intérieur de ces graines un 
embryon en forme de lave batavique , nageant dans l’amnios, et dont 
la partie inférieure, qui correspond à la radicule, adhère à un filet 
blanchâtre ou cordon pistillaire qui va , en se repliant, aboutir à l'om- 
bilic ; en même temps on remarque deux cotylédons cordiformes et 
étalés , entre lesquels est logée une plumule presque invisible ; dans 
le cours de la maturation ces cotylédons s’accroissent , se bifidentet se 
rapprochent ; le cordon pistillaire se replie et ramène laradicule d’a- 
bord infère auprès de l'ombilic, qui est devenu latéral par le dévelop- 
pement en hauteur de la graine, dont l'embryon est alors ce que les 
botanistes appellent suspendu ; ces changements , ainsi que d’autres 
semblables, appartiennent au moins en partie à un assez grand nom- 
bre d’autres graines. 

Mais ce qui caractérise surtout les Tropæolum c'est leur germina- 
tion ; dés qu’elle commence , on voit sortir du sein des deux coty- 
lédons, fortement soudés et quadridentés à cause de leur échancrure, 
une radicule coléorhizée , qui s'ouvre bientôt pour montrer la vraie 
radicule ; lorsque celle-ci commence à se recourber pour s’enfoncer 
dans le terrain , la tige de la plumule s'est agrandie et la gemmule a 
commencé à sortir de sa cavité , à l’aide des cotylédons dont les pé- 
tioles d’abord peu visibles se sont sensiblement allongés ; dans cet état 
elle est recourbée , mais elle ne tarde pas à se redresser et à montrer 
ses deux, feuilles primordiales opposées, et dont les deux petites sti- 
pules semblent indiquer un nouveau rapport entre cette famille et la 
précédente ; on voit enfin paraître, à la base de la radicule, quatre 
renflements verticillés, d’où sortent autant de radicules secondaires 
coléorhizées , comme la radicule principale, et qui montrent que la 
division des plantes en endorhizes et exorhizes n’accompagne pas tou- 
jours les autres rapports naturels , puisqu'elle rapproche ici la famille 
des Graminees , et en particulier les Cereales, des Tropæolum qui en 
sont si éloignés sous d’autres rapports. En ouvrant une graine avant 
sa maturité , on peut remarquer que ses cotylédons ne sont pas encore 
soudés. 

Les stipules que nous venons d'observer dans les feuilles pri- 
mordiales du Tropæolum majus ne lui sont pas particulières, car je 
vois que le Ciliatum des bois du Chili a toutes ses feuilles stipulées , et 
que ses fleurs sont encore pourvues de bractées. Auguste Sainr- 
Hivaie assure que, dans les Tropæolum , comme dans les Pelar- 
gonium, les deux pétales supérieurs sont les seuls qui n'aient pas subi 


— 540 — 


d'alteration ( Ann. des scienc. natur., v. 26 , ann. 1832, p. 314). Ces 
; > s P 

plantes introduites de bonne heure en Europe sont encore l’ornement 

de nos jardins et de nos chaumières, principalement le Majus et le 

Minus. 


Trente-huitième famille. — Æafsaminées. 


Les Balsaminées ont un calice irrégulier, persistant, à estivation 
imbriquée et formé de cinq sépales, dont les deux voisins du pétale im- 
pairavortent ordinairement , et dont l'impaire , beaucoup plus grand 
que les autres , est éperonné ; trois pétales dont le supérieur est symé- 
trique , les deux latéraux bifides, non symétriques et formés chacun 
de deux pétales soudés, ensorte que la corolle est réellement composée 
de cinq pétales dont deux réunis ; les cinq étamines hypogynes entou- 
rent étroitement l'ovaire, les anthères biloculaires et plus ou moins 
connées s'ouvrent par des fentes longitudinales ; l'ovaire est formé de 
cinq loges à ovules nombreux et pendants ; la capsule à cinq valves 
s'ouvre élastiquement ; les semences sont dépouvues d’albumen ; l’em- 
bryon est droit, la radicule est dirigée sur l'hilus, et le placenta 
central se prolonge , comme dans les Caryophyllées , en filets amincis 
qui arrivent jusqu'à la base des stigmates. 

Cette famille renferme des herbes molles et succulentes, dont les 
feuilles alternes ou opposées sont toujours dépourvues de stipules, et 
dont les pédoncules sont axillaires : elle ne renferme que deux genres; 
le Bulsamina et\ Impatiens. 


PREMIER GENRE. — Balsamina. 


La Balsamine a cinq anthères biloculaires , cinq stigmates distincts, 
une capsule ovale dont les valves à la maturité se roulent en dedans 
du sommet à la base. 

Ce genre se divise en deux groupes à peu près égaux: 

1° Celui des espèces à pédicelles agrégés, géminés, triples ou mul- 
tiples ; 

2° Celui des espèces à pédicelles solitaires. 

Ce genre contient à peu près dix-sept espèces , toutes annuelles , la 
plupart mal connues et dont quelques-unes ne sont sans doute que des 
variétés : elles sont exclusivement répandues dans les Indes orientales, 


— 541 — 


la Chine , le Cap, l’île de Madagascar , etc. ; et paraissent appartenir au 
même type ; leurs différences ne consistent guère que dans la forme 
de leurs feuilles opposées ou alternes , le nombre de leurs pédicelles , 
la grandeur de leurs fleurs , la structure de leur nectaire, etc. ; on les 
rencontre principalement dans les bois et les terrains frais ou humides; 
quelques-unes sont cultivées dans les jardins de la Chine, du Japon et 
de la Cochinchine; une seule l'Hortensis a été introduite en Europe, 
où elle se distingue par l'éclat de ses fleurs souvent doublées et pana- 
chées des plus belles couleurs. 

Cette plante , dans sa forme naturelle , a une glande jaunâtre, qui 
remplit d'humeur miellée, même avant la fécondation, le tube au 
fond duquel elle est logée. Les cinq anthères biloculaires , et oblique- 
ment disposées sur deux rangs pour mieux correspondre au tube mel- 
lifère , serrent étroitement, avant la fécondation , le stigmate visqueux 
et conique, qu'elles recouvrent de leur pollen blanchâtre et onctueux 
sorti uniquement du sommet; à la fécondation même, les filets des 
anthères se rompent à la base et le capuchon anthérifère s'étale en- 
suite de manière à laisser le stigmate à découvert ; l'humeur miellée 
humecte sans cesse les anthères , et recoit le pollen qui tombe dans le 
tube nectarifère fortement évasé. Kocx dit qu’il a souvent observé, 
dans la variété à fleurs pleines, les deux sépales supérieurs qui avor- 
tent à l'ordinaire et qu'il les a aussi trouvés pourvus de leur éperon. 

Nous considérerons physiologiquement cette famille dans ie genre 
suivant. 


SECOND GENRE. — Jmpaätiens. 


L'Impatiens a cinq stigmates réunis, cinq anthères biloculaires, pla- 
cées les unes et les autres devant le pétale supérieur, une capsule 
allongée dont les valves sont roulées en dedans de la base au sommet, 
et dont quelques-unes sont de plus contournées en spirale. 

Ce genre, autrefois réuni au précédent, est formé d'espèces assez 
nombreuses et beaucoup plus dispersées que celles du Balsamina ; 
les unes appartiennent aux Indes et surtout au Népaul ; les autres ha- 
bitent l'Amérique septentrionale ; une seule est commune à l'Europe 
et à la Sibérie. 

Les ]mpatiens sont des plantes annuelles qui , indépendamment des 
caractères énoncés, diffèrent des Balsamines par leurs fleurs souvent 
jaunes et tachées, leurs capsules glabres , leurs pédoncules toujours 
rameux et multiflores , enfin par leurs feuilles constamment alternes, 
au moins au sommet ; les caractères des espèces consistent principa- 


— 542 — 
lement dans la grandeur, le nombre et la couleur des fleurs, dans la 
forme des cornets et celle des feuilles toujours simples et dentées. 

Leur inflorescence générale est centripète , et la particulière centri- 
fuge , en observant toutefois que les fleurs de la même ombelle ne se 
développent que successivement ; les pétales , avant leur développe- 
ment, sont irréguliérement plissés et comme chiffonnés ; les feuilles, 
roulées d'abord sur la face supérieure , ont des dentelures glandu- 
leuses et des pétioles chargés quelquefois de vraies glandes; leurs 
tiges, qui s accroissent en hauteur jusqu’à ce qu'elles soient arrêtées par 
la température, portent assez souvent des renflements dont je ne 
connais pas le but. 

Les Zmpatiens , comme les Balsamines , sont déformées en raison de 
leur sépale supérieur, éperonné et nectarifere; dans le Parviflore de la 
Sibérie , qui a tout-à-fait le port de notre espèce commune, toutes les 
fleurs sont fertiles, et toutes les anthères biloculaires , à loges laté- 
rales, entourent l'ovaire, et s'ouvrent par le sommet, de manière à 
recouvrir le stigmate de leur pollen ; le nectaire est droit, la capsule 
s'ouvre par le haut en cinq valves amincies et étroites , qui se roulent 
de la base au sommet; les semences, au nombre de quatre ou cinq, 
sont pendantes ou attachées par leur sommet, qui est le lieu de la 
radicule. 

Le phénomène de l’enroulement élastique des panneaux de Ja 
capsule, dont le but manifeste est la dissémination, dépend principa- 
lement de l'enveloppe interne, dont les nervures desséchées se contrac- 
tent, tandis que l'enveloppe extérieure s'étend toujours plus; de ces 
forces opposées il doit résulter une rupture entre les deux surfaces des 
valves, et en conséquence un enroulement; mais pourquoi cet enrou- 
lement a-t-il lieu de la base au sommet dans l'/?mpatiens, et du sommet 
à la base dans le Balsamina ? C'est ce que j'ignore. 

Un phénomène particulier au Voli tangere ; et qui n'appartient pas 
au Parviflore, c'est celui de ses fleurs latérales qui ne s'ouvrent jamais, 
et qui pourtant ne sont pas stériles, leur fertilité s'explique naturelle- 
ment par la disposition des anthères couchées sur le stigmate, qu’elles 
recouvrent d'une abondante poussière; lorsque la fécondation est 
accomplie, l'ovaire prend de l'accroissement, et rejette en dehors les 
étamines et les téguments floraux, qui tombent adhérents les uns 
aux autres. Dans le Parviflore, au contraire, dont les fleurs sont 
beaucoup plus petites, le capuchon anthérifère est seul entraîné par 
l'allongement de la capsule; mais dans ces deux espèces, les anthères 
sessiles sont réunies autour du stigmate, qu’elles recouvrent de leur 
pollen onctueux, sorti uniquement par le sommet; car elles se fondent 


— 543 — 


sans s'ouvrir. J'ai remarqué, comme RoEPer , que ces anthères étaient 
toutes biloculaires, et je vois, dans la Balsamine des jardins, que la 
base intérieure du chapeau anthérifère est une matière visqueuse 
qui recouvre toute la surface des stigmates. 

Le cornet anthérifère est toujours rempli de l'humeur miellée, qui 
sort d’une belle glande jaunâtre, et monte par un sillon longitudinal 
que l’on aperçoit aisément. On ne peut guère douter que les anthères, 
qui sont sans cesse penchées sur ce cornet, ne le recouvrent de leur 
pollen, et que les granules ne s'y rompent, et répandent ensuite leurs 
émanations ou leurs boyaux sur les stigmates qu’elles fécondent. Par 
rapport aux anthères qui enveloppent immédiatement le stigmate, on 
peut supposer, ou que ce stigmate est lui-même imprégné d'humeur 
miellée, ou qu’elles sont elles-mêmes imbues de cette matière vis- 
queuse. Les fleurs latérales du Voli tangere, qui elles-mêmes ne s’ou- 
vrent pas, et qui pourtant sont fécondes, doivent sans doute aussi 
recevoir l'humeur miellée, si elle n’est pas du moins fournie par les 
stigmates eux-mêmes. 

Les Impatiens, comme les Balsamines, habitent les lieux frais, ou 
ils vivent solitaires ; car leurs racines, presque toujours annuelles, 
ne sont pas tracantes. L'espèce européenne, ou le Noli tangere, qui 
a été comme égaré au milieu des autres espèces, vit aussi loin des 
villes, dans les prairies montueuses et ombragées, où il se fait remar- 
quer par ses grandes fleurs jaunes et pendantes, ainsi que par ses 
feuilles supérieures déjetées et protégeant les jeunes fleurs placées au- 
dessous. 

Plusieurs espèces de cette famille offrent des phénomènes qui méri- 
tent d'être notés; ainsi les Balsamines de la côte de Malabar, qui 
paraissent former un type, ont leurs pédicelles fortement réfléchis; 
d’autres ont leurs éperons bossus ou roulés en spirale; toutes ont les 
pédoncules articulés sur une console assez saillante, qui pourrait bien 
être un rameau avorté, et lorsque ces pédoncules ne sont pas soli- 
taires, leurs fleurs se succèdent à d'assez grands intervalles, pour que 
l'épanouissement ne soit jamais gêné. 

Ces diverses plantes ont des tiges succulentes et aqueuses, qui 
périssent au premier froid. Gaupix dit que l'?mpatiens noli langere est 
vivace ; j'ajoute qu'il en est de même du Parviflora, qui fleurit chaque 
année dans notre jardin, à la même place. 


— 544 — 


Frente-neuvième famille. — Oxralidées. 


Les Oxalidees ont un calice persistant à cinq pièces ou divisions 
imbriquées et égales , cinq pétales hypogynes égaux, à onglets droits 
et lames ouvertes, à estivation tordue en spirale, dix étamines à filets 
subulés, souvent monadelphes à la base, cinq extérieures plus courtes 
et opposées aux divisions du calice, cinq intérieures plus longues et 
opposées aux pétales; des anthères biloculaires et non adnées ; un 
pollen à trois plis, un ovaire libre à cinq angles et cinq loges, cinq 
styles filiformes, tantôt plus courts que toutes les étamines et appelés 
alors très-courts, tantôt plus longs que les étamines extérieures et plus 
courts que les intérieures, et désignés sous le nom d'intermédiaires, 
tantôt enfin plus longs que toutes les étamines et nommés très-longs; 
cinq styles, autant de stigmates en tête pénici!lée ou légèrement bifides, 
une capsule ovale ou à peu près pentagone à cinq loges, cinq ou 
dix valves qui s'ouvrent longitudinalement au sommet des angles, des 
semences peu nombreuses, ovales , striées , attachées à l'angle inté- 
rieur des loges, et renfermées dans un arille charnu qui s'ouvre élas- 
tiquement au sommet; un albumen charnu et cartilagineux, un em- 
bryon inverse aussi long que l'albumen, des cotylédons foliacés, une 
radicule supère et allongée. 

Cette famille est formée de quatre genres, dont trois étrangers 
habitent les Indes orientales ou l'Amérique du sud; le quatrième est 
dispersé sur les deux continents et principalement aux environs du 
Cap. Les plantes qui le forment et qui s'élèvent déjà à plus de deux 
cents espèces, sont quelquefois des sous-arbrisseaux, mais ordinaire- 
ment des herbes vivaces, rarement annuelles, à feuilles souvent 
alternes, simples ou différemment composées. 


PREMIER GENRE. — ÜOxalis. 


L'Oxalis a un calice à cinq sépales, cinq pétales, dix étamines, des 
filets légèrement monadelphes à la base, et dont les cinq extérieurs 
sont plus courts, cinq styles, une capsule ovale, oblongue. 

Ce vaste genre a été divisé par DE CanDozce en dix groupes, que 
nous indiquerons pour faire reconnaître les diverses formes de végé- 
tation des plantes qui les composent : 

Le premier est celui des Hedysaroïdes, à pédoncules multiflores, 


— 549 — 
tiges souvent sous-frutescentes, feuilles trifoliolées et la moyenne sou- 
vent pétiolée; ces plantes, toutes originaires de l'Amérique équi- 
noxiale, ont leurs carpelles souvent monospermes. 

Le deuxième comprend les Corniculees, à tiges herbacées , racines 
non bulbeuses, pédoncules rarement uniflores , feuilles trifoliolées , 
folioles sessiles et obcordiformes ; elles sont dispersées dans les deux 
continents , et l’on trouve en Europe le Corniculata et le Stricta, à 
fleurs jaunes , la première annuelle avec une racine fibreuse et des 
pédicelles déjetés, l'autre bisannuelle, stolonifère, à pédicelles re- 
dressés. 


Le troisième est celui des Sessilifoliees , à racine bulbeuse, tige 

>) 2 
allongée, feuilles sessiles, trifoliolées, velues, non glanduleuses, et 
pédoncules axillaires uniflores. 


Le quatrième, ou les Cauliflores, n'appartiennent pas au même 
type, quoiqu’elles habitent toutes l'Afrique ou le Cap ; leurs tiges sont 
allongées, leurs feuilles supérieures pétiolées, sont à trois ou cinq 
folioles , et leurs pédoncules sont constamment uniflores. 

Le cinquième, ou les Caprina du Cap et surtout du Mexique et de 
l'Amérique du sud, sont dépourvues de tiges, et ont une souche 
feuillée seulement au sommet; leurs pédoncules sont souvent multi- 
flores, leurs feuilles radicales pétiolées sont ordinairement trifoliolées ; 
la plus commune est le Cernua, de nos jardins. 

Le sixième est celui des Simplicifoliées, à feuilles pubescentes, 
simples et pétioles échancrés, qui ne sont pas non plus homotypes, 
car les unes sont caulescentes, les autres privées de tiges ; les unes ont 
les hampes uniflores et les autres pluriflores. 


Le septième, ou les Ptéropodes , sont dépourvus de tiges et portent 
des pétioles ailés de deux à trois folioles, ainsi que des hampes uni- 
flores. 

Le huitième, ou les Acetocelles, ont les hampes uniflores, la tige 
nue ou faiblement stipitée, les feuilles trifoliolées à pétioles non bor- 
dés; la principale espèce est européenne. 

Le neuvième, ou les Ædénophylles, ont les pédoncules uniflores ; 
les folles linéaires chargées au sommet de renflements glanduleux 
situés sur leur face inférieure. 

Le dixième, fort distinct des autres, est celui des Palmatifoliees, 
à tige nulle, ou stipitée et feuilles pétiolées de cinq à treize folioles non 
glanduleuses, palmées ou peltées; elles appartiennent au Cap ou à 
l'Amérique du sud, et forment différents types, comme la plupart 
des groupes précédents. 

Le 35 


— 546 — 

Les espèces nouvellement décrites par Auguste Sarnr-Hizaine et 
d'autres botanistes ne sont pas comprises dans ces divisions. 

Les Oxalis, qui forment un genre très-distinct et qui manquent 
presque entièrement aux régions asiatiques, se partagent en un grand 
nombre de types qui ne correspondent pas toujours aux groupes du 
Prodrome, tels que nous venons de les circonscrire. 

Les habitations de ces plantes sont assez varices; quelques-unes, 
comme celles de l'Amérique méridionale, vivent sur les bords des 
fleuves ou sur les pentes élevées des montagnes ; celles du Cap recher- 
chent les lieux secs, les collines et surtout les sables des bords de la 
mer ; l'Oxalis natans est la seule qui croisse dans les eaux, et par 
conséquent elle ne doit pas être organisée comme les autres. 

L'organe qui varie le plus dans ce genre me paraït être la racine, 
fibreuse dans quelques espèces annuelles, comme le Corniculata, mais 
formant dans le grand nombre, comme le Purpurea du Cap, des rhi- 
zomes souterrains, à renflements tout-à-fait semblables à ceux du 
Solanum tuberosum , et chargés d’yeux correspondant aux aisselles des 
feuilles dont les pétioles se sont détruits par l'abondance du dépôt fari- 
neux; dans lAcetosella , la racine est formée de tubercules coniques, 
velus à leur extrémité, et d'entre lesquels sortent des radicules fibreuses 
et des rejets lâächement renflés qui s’enracinent assez loin de leur ori- 
gine; dans le Stricta, indigène comme l'Acetocella , mais seulement 
bisannuel, les stolons légèrement charnus se conservent pendant 
l'hiver, et donnent ensuite naissance à une nouvelle plante; dans le 
Deppii, la racine porte des bulbes formées, comme celles des Lis, 
d’écailles étroites et épaissies, dont la base charnue, fusiforme et garnie 
de chevelu est couronnée en automne d'une multitude de bulbes qui 
se détachent successivement; en général, les espèces du Cap ont une 
racine bulbeuse, formée de quatre ou cinq écailles charnues amincies 
aux deux extrémités, et portant quelquefois les mêmes glandes jaunä- 
tres que les feuilles, dont elles sont sans doute une simple transfor- 
mation; du centre de cette bulbe, sort une tige qui s'allonge souvent 
en racine épaissie à son extrémité inférieure, mais qui quelquefois ne 
paraît pas donner de racine. A l’époque de la floraison, l'enveloppe 
extérieure de la bulbe se détruit, et l’on voit à la base un ou deux 
gemmes blanchâtres, qui sont les rudiments d’une nouvelle bulbe; on 
peut remarquer en même temps, dans la partie inférieure et non 
feuillée de la tige, comme sur la racine, un chevelu qui constitue les 
vraies racines, et sur ce chevelu des gemmes épars et dont quelques- 
uns forment déjà de vraies bulbes; en sorte qu’en général les Oxalis 
sont des plantes éminemment sociales, dont la puissance reproductive 


— b47 — 
est telle, qu'un seul individu remplit bientôt de ses bulbes et bulbilles 
la terre du vase dans lequel il a été placé. On comprend que je ne pré- 
sente ici qu'un apercu général de la reproduction de ce singulier genre; 
que plusieurs espèces, comme l’A4cetosella et le Stricta, que j'ai déjà 
cités, offrent des modifications à la forme commune; que le Repens, 
en particulier, a des bulbes d'où sortent en même temps des tiges et 
des racines rampantes bulbifères, et que d'autres enfin donnent plu- 
sieurs racines de la même bulbe, ou plusieurs bulbiiles agrégés sortant 
de la même bulbe. Il y a donc dans ces racines d'Oxalis la même diver- 
sité que l’on trouve dans les autres organes des plantes, et cette diver- 
sité se rapporte toujours aux besoins de la plante qu'on peut souvent 
apercevoir; ce qui donne à la botanique un charme toujours nouveau, 
qui la rattache sans cesse à des considérations très-relevées sur l'intel- 
ligence suprème de la puissance créatrice ( Voyez sur la radication de 
l'Oxalis Deppeï, les Annales d'agriculture de Lyon, par Héwox. 1838). 

Les feuilles des Oxalis sont en général molles, amincies et sembla- 
blement conformées; leur pétiole est fortement articulé, et leur 
pétiolule porte aussi une articulation à la base ; les pédoncules et les 
pédicelles sont de même articulés ; mais les feuilles sessiles, simples 
ou composées, n’ont point d’articulation, non plus que les pédoncules 
de l’'Oxalis natans, comme on pouvait bien le prévoir. Avant leur 
développement, ces feuilles sont plissées sur leur nervure moyenne, 
comme celles des Medicago ou des Trefles, et leurs folioles rappro- 
chées sont roulées en spirale sur leur pétiole; cependant, dans les 
tiges feuillées à pétioles nus ou raccourcis, les folioles ne sont ni exac- 
tement plissées, ni serrées les unes contre les autres, ni déjetées. 

Les folioles sont toujours entières sur leurs bords, et leur surface 
est lisse ou velue; l’on y observe souvent des glandes transparentes, 
logées dans le parenchyme, ou d'autres colorées, éparses sur les 
bords, principalement à la surface inférieure ; quelquefois ces glandes 
se rassemblent au sommet, où elles forment ces callosités et ces ren- 
flements qui caractérisent le groupe des Ædenophrylles ; elles sont 
géminées et allongées à l'extrémité des lobes du calice de la Tétra- 
Phylle. 

L'inflorescence est tantôt axillaire et latérale, tantôt radicale et ter- 
minale ; il est, du reste, facile de ramener ces deux formes à une seule, 
en supposant ce qui est vrai, que, si la souche s'était prolongée, les 
hampes seraient devenues des pédoncules axillaires, et l'on peut éga- 
lement concevoir que tous les pédoncules étaient primitivement om- 
bellifères, et que les uniflores ne sont devenus tels que par avorte- 
ment. On voit, en effet, dans ces derniers, comme dans les autres, 


= Hs 
des bractées qui indiquent le point où le pédoncule se divisait ; tou- 
tefois on n’y aperçoit pas toujours d’articulation , et les deux bractées 
sont souvent éloignées l’une de l’autre. 

Le premier mouvement organique qu'on peut considérer dans ce 
genre, est celui de ces pétioles, qui, dans plusieurs espèces caules- 
centes, s'élèvent ou s’abaissent selon les heures du jour; le second 
ou celui des folioles, varie beaucoup, il est peu marqué dans le 
Purpurea à folioles arrondies et rhomboïdales, mais il est au contraire 
très-prononcé dans les autres Acetosella et dans les Caprina, comme 
le Cernua, dont les folioles à peu près horizontales au lever du soleil, 
se rabaissent le soir et pendant toute la nuit sur leur pétiole com- 
mun, de manière à former enfin une pyramide triangulaire, dont 
chaque face est plus ou moins repliée en dedans; au contraire, dans 
le Corniculata, les folioles se rabaissent le jour et se relèvent la nuit. 

La cause de ce phénomène n'est pas facile à trouver; je remarque 
seulement qu'il se continue dans les feuilles à demi flétries, tandis 
qu'il cesse entièrement dans celles dont le pétiole a été blessé. On 
pourrait croire qu'il se passe ici quelque chose d'analogue à ce qui a 
lieu, dans les insectes, et que, de même qu'il existe dans les nervures 
de leurs ailes un fluide, qui, par sa présence ou son absence, les 
tend et les détend , ainsi il pourrait se trouver, dans les vaisseaux des 
feuilles de l'Oxalis, un fluide qui eût des rapports avec la lumiere, et 
dont les articulations des Oxalis et des plantes semblablement con- 
formées sont peut-être les réservoirs. Cette observation peut s’appli- 
quer aux Averrhoa et au Byophytum, deux genres de la même famille, 
dont les feuilles, comme celles des Mimosa, sont très-irritables par 
l’attouchement. 

Mais la fleur des Oxalis est peut-être encore plus météorique que 
les feuilles : les pétales, toujours tordus dans le même sens, se dérou- 
lent sous l'influence toute puissante du soleil ; quelquefois, comme 
dans le Cernua ou le Purpurea, une forte chaleur le remplace, ou 
bien comme dans le Tetraphylle, la lumière du jour suffit pour l’épa- 
nouissement. Les fleurs s'ouvrent plusieurs fois, en reprenant, lors- 
qu’elles se referment, leur estivation primitive; ensuite, lorsque la 
fécondation est terminée, elles se dessèchent et tombent ; mais l’on 
peut remarquer avec étonnement que, dans la multitude des espèces 
étrangères, et principalement dans celles du Cap qui fleurissent si bien 
dans nosserres, il n’en est peut-êtreaucune qui perfectionne ses graines ; 
une telle anomalie a-t-elle lieu dans les contrées d’où ces plantes sont 
originaires, et ne tient-elle pas à la multiplication extraordinaire de 
leurs bulbes? Ce qu'il y a de certain, c’est que nos trois espèces 


4 


— b49 — 
européennes, le Corniculata, le Stricta, et l’Acetosella, dont la pre- 
mière est annuelle, la seconde bisannuelle et la dernière vivace, mais 
non bulbeuse, donnent constamment des graines fécondes. 

Les pédoncules ont aussi des mouvements variés, et qui tiennent 
sans doute à la fécondation, à la maturation et à la dissémination des 
espèces auxquelles ils appartiennent, mais ils ne s'exécutent sans 
doute dans toute leur étendue, que lorsque les fleurs sont fécondes ; 
ce qui, comme nous l'avons vu, est rare dans nos climats pour les 
espèces étrangères. Mais dans notre Acetosella , le pédoncule, d'abord 
penché, se redresse pour la maturation ; il en est à peu près de même 
du Stricta, dont les pédoncules chargés de deux à cinq fleurs pédi- 
cellées, s’étalent plus ou moins pendant la maturation, tandis que 
ceux du Corniculata se contractent assez fortement. 

Les diverses espèces de ce genre présentent également dans leur 
végétation, des phénomènes qui seraient plus nombreux si ces espèces 
étaient mieux connues; ainsi, par exemple, dans le Laxa, les jeunes 
feuilles longuement pétiolées, sortent d'entre les cotylédons portées 
sur un petit stype qui donne naissance à la tige et aux autres 
feuilles; dans le Micrantha, du jardin de Turin, les tiges à racines 
fibreuses poussent continuellement de leurs sommités épaissies des 
feuilles et des pédoncules articulés qui se ramifient au sommet, et 
donnent naissance à des pédicelles allongés, terminés par des fleurs 
jaunes très-petites ; dans le Stricta , la tige principale s'élève perpen- 
diculairement avec des fleurs axillaires et pédonculées, ensuite les 
feuilles inférieures se désarticulent ou se détruisent, et l'on voit 
sortir de leurs aisselles de nouveaux rameaux chargés de fleurs dé- 
pourvues de cornets, parce qu'elles n’ont pas à la base les cinq ren- 
flements glanduleux si prononcés dans les autres espèces. Ces exem- 
ples, que je présente au hasard, suffisent pour montrer ce qu'on 
pourrait obtenir d'observations curieuses par l'examen attentif des 
autres espèces. 

La fleur des Oxalis est très-régulièrement formée d'un calice à cinq 
divisions, qui portent souvent à leur sommet deux glandes jaunûtres, 
d’une corolle pentapétale et de dix étamines libres ou plus ou moins 
réunies et placées sur deux rangs, cinq extérieures opposées aux 
sépales et cinq autres plus grandes et plus intérieures opposées aux 
pétales; les premières , souvent dentées , sont aussi souvent chargées ; 
chacune à leur base, d'une glande nectarifère ; mais ce qui caractérise 
les Oxalis, c'est la symétrie de leurs étamines, dont chaque rang 
atteint la même hauteur; tandis que les stigmates sont tantôt plus 
courts que les petites étamines, tantôt plus élevés que les grandes, 


— 50 — 
tantôt enfin intermédiaires aux deux rangs. Cette disposition a fourni 
à Jaquix le principal caractère de sa Monographie du genre; toutefois 
les botanistes qui l'ont suivi ne l'ont pas adopté, et je ne crois pasavoir 
non plus trouvé la même régularité dans la hauteur des étamines rela- 
tivement aux stigmates : d’ailleurs ce caractère artificiel altère fréquem- 
ment les rapports naturels qui existent entre les espèces du genre. 

Ce qui m'a paru surtout difficile à expliquer dans cet arrangement, 
c'est la manière dont s’opérait la fécondation; je comprenais bien 
comment, dans le cas où les stigmates étaient placés au-dessous des 
petites étamines, ils pouvaient recevoir le pollen qui tombait de toutes 
les anthères ; mais lorsqu'ils étaient intermédiaires, les anthèrés infé- 
rieures devenaient inutiles, et lorsqu'ils s’élevaient au-dessus des unes 
et des autres, ils ne recevaient naturellement plus de pollen. Pour 
résoudre la difficulté, j'ai d'abord imaginé que la fécondation avait 
heu avant l'épanouissement, à l'époque où les stigmates n'ayant pas 
encore grandi étaient enveloppés du pollen des diverses anthères, ce 
que j'ai vu avoir effectivement lieu dans un grand nombre d'espèces ; 
ou bien il faut supposer, ce qui doit aussi arriver souvent, que les 
fleurs qui se ferment chaque soir rapprochent les stigmates des deux 
systèmes d'anthères, qui se débarrassent ainsi d'une partie de leur 
pollen. 

Mais, en examinant de plus près la conformation de la fleur, j'ai 
reconnu que, semblablement à celle des Convolvulus, des Gentianes, 
et de plusieurs autres genres, elle était divisée intérieurement en cinq 
cornets, dont chacun aboutissait à l’une des cinq glandes nectarifères 
du torus, et que c'était la liqueur miellée qui recevait elle-même les 
granules de pollen échappés des anthères ouvertes ; que ces granules, 
rassemblés au fond des cinq tubulures que présente la fleur, s'ouvraient 
ensuite sous l'influence de l'humeur miellée, et répandaient incon- 
tinent sur les stigmates papillaires leurs émanations polliniques, ou 
leurs boyaux fécondateurs. 

En confirmation de ma conjecture, j'ai vu que les filets des étaines 
étaient presque toujours divariqués à leur sommet, afin, sans doute, 
que les anthères répandissent plus facilement leur pollen, et que les 
stigmates globuleux se placaient d'eux-mêmes à l'ouverture des tubu- 
lures pour y recevoir les émanations prolifiques, et j'en ai conclu qu'un 
arrangement si remarquable n’était pas l'effet du hasard, mais était 
sans doute destiné à remplir le but que je viens de décrire. 

L'examen ultérieur de la fécondation des diverses espèces confir- 
mera ou modifiera mon opinion; en attendant, j'observe que, dans 
le Corniculata, les stigmates papillaires et hérissés sont tournés en 


— b51 — 


dehors ainsi que toutes les anthères, et que le pollen tombe dans le 
fond nectarifère de la corolle, et non pas immédiatement sur les stig- 
mates ; que, dans le Deppii, les stigmates élevés au-dessus des deux 
rangs d'anthères, se déjettent de manière à venir se placer à l'ou- 
verture des tubulures. 

La capsule des Oxalis est conformée semblablement dans presque 
toutes les espèces : à son centre, est un axe formé sans doute par le 
prolongement du torus, et qui présente cinq angles saillants et cinq 
sillons, dans la longueur desquels sont attachées deux ou plusieurs 
semences ovales, aplaties, striées et renfermées chacune dans un 
arille charnu. Au moment de la dissémination, la capsule se redresse 
d'ordinaire, l’arille s'ouvre du côté extérieur en deux panneaux qui se 
roulent sur eux-mêmes avec une forte élasticité, et lancent au loin les 
graines qui s’'échappent à travers les sutures membraneuses élastiques 
et entr'ouvertes des valves. Qui est-ce qui a coordonné toutes les 
parties de cet admirable appareil, qui a logé les graines dans Îles 
arilles , et leur a en même temps préparé un passage entre ces valves, 
dont les bords amincis s’entr’ouvrent avec tant de facilité au moment 
convenable ? 

Voici la description que Jaquix fait des Oxalis dans sa Mono- 
graphie : 

Par cunctis facies, qualem.decet esse sororum , 
Una fere est ætas, eadem quoque gratia formæ , 
Ut mox agnoscas , quali sint de stirpe creatæ. 
At nomen dare cuique suum quod scparet omnes , 
Hoc opus , hic labor est ; tentavi plurima casso 
Successu , donec ventum est ad viscera floris 
Intima , et ad gemini penetralia intèma sexus ; 
Tunc sedes stabilita fuit, speciesque reperta. 


Mais, comme nous l'avons vu, cette subordination des stigmates 
aux étamines n'apprend rien sur les rapports naturels des espèces, ni 
sur les diverses formes de fécondation. 


Quarantième famille. — Zygophytllées. 


Les Zygophyllées ont un calice à cinq sépales distincts ou légère- 
ment réunis à la base, cinq pétales alternes aux divisions du calice 


— 502 — 


et insérés sur le réceptacle, dix étamines distinctes et hypogynes, un 
ovaire à cinq loges, cinq styles réunis ou quelquefois un peu séparés 
au sommet, une capsule à cinq carpelles polyspermes, ou rarement 
monospermes, plus ou moins adhérents soit entre eux, soit à l'axe 
central, un disque hypogyne crénelé ou glanduleux, des semences 
non arillées , un embryon droit, une radicule supère, des cotylédons 
foliacés et un albumen qui souvent disparaît entièrement. 

Cette famille, qui renferme à peu près dix genres, la plupart étran- 
gers, se divise en deux sous-ordres : 1° celui des vraies Zygophyllees, 
à feuilles opposées; 2° celui des fausses Zygophyllées, à feuilles 
alternes : nous en mentionnerons quatre, dont trois appartiennent 
à la première division. 

Adrien De Jussieu observe (Mémoires du Museum , vol. 12, p.395) 
que, dans ces plantes, les pétales, d’abord très- petits et entièrement 
cachés par le calice, n'acquièrent leur complet développement qu'à 
la floraison. 


PREMIER GENRE. — Yyibulus. 


Le Tribulus a un calice caduc, cinq pétales étalés, dix étamines, 
un seul style, cinq carpelles heat à l'axe, ae ae e je 
hiscents, durs, épineux, tuberculés ou ailés, rarement uniloculaires, 
mais des intérieurement en plusieurs loges transversales ; les 
semences, solitaires dans chaque ioge, sont placées horizontalement 
et dépourvues d'albumen; les cotylédons sont un peu épais. 

Ce genre comprend dans le Prodrome sept espèces dispersées dans 
les deux Amériques, l’Afrique et l’île de Ceylan; l'Europe en ren- 
ferme une seule qu’on retrouve en Barbarie, au Sénégal, à l'ile Mau- 
rice et jusqu’au Thibet. 

Les Tribulus sont des herbes diffuses, la plupart annuelles, et qui 
paraissent appartenir au même type; leurs feuilles, opposées et iné- 
gales, sont ailées sans impaire, leurs folioles sont entières et non 
ponctuées, leurs stipules pétiolaires et membraneuses ; leurs pédon- 
cules axillaires portent une fleur ordinairement jaune, et quelquefois 
blanche; l'ovaire est entouré de cinq glandes placées devant les éta- 
mines extérieures. 

Les principales différences entre les espèces concernent le nombre 
des paires des folioles qui varient de huit à trois; la surface extérieure 
des carpelles lisses, ailés, tuberculés ou chargés de deux à quatre 
épines, enfin le nombre des divisions transversales du fruit. 

Les pédoncules des Tribulus ne m'ont pas paru articulés, mais leurs 


— 553 — 
pétioles sont renflés et cartilagineux, et leurs folioles se couchent les 
unes sur les autres à la manière des Mimosa. Les feuilles, toujours 
opposées, sont inégales; celles dont l'aisselle est fiorifère sont beau- 
coup moins développées que les autres. 

La fleur des Tribulus est régulière, je crois toujours météorique ; 
elle s’ouvre tard et se referme de bonne heure. Les grandes étamines 
cpposées aux sépales portent extérieurement une dent semblable à 
celle des Oxalis, et ont de plus à la base intérieure une glande nec- 
tarifère ; le stigmate sessile est formé régulièrement de cinq arêtes 
relevées, et de dix dans le Maximus d'Amérique qui a, en consé- 
quence, dix carpelles. Kunrx remarque que les cloisons transversales 
des carpelles ne se forment que tard, et que l'ovaire est d’abord 
charge d'ovules contigus et adhérents à l'angle interne du fruit. 


DEUXIÈME GENRE. — fagonia. 


Le Fagonia a un calice caduc, cinq pétales onguiculés, dix étami- 
nes, un style, une capsule plus ou moins pentagone, formée de cinq 
loges bivalves et monospermes, un albumen charnu, un embryon 
droit et central. 

Les Fagonia, dont l'on compte actuellement près de dix espèces, 
six à feuilles trifoliolées et quatre à feuilles simples, sont des her- 
bes annuelles et vivaces, ou des sous-arbrisseaux, originaires du 
bassin méridional de la Méditerranée, et qui s'étendent par l'Arabie 
et la Perse jusqu'au Mysore; elles habitent principalement les contrées 
stériles et montueuses, etappartiennent toutes au même type, malgré 
les différences qui existent dans leur durée, et la forme de leurs 
feuilles. On les reconnaît à leur consistance sèche et demi-succulente, 
à leurs tiges dures, genouillées et anguleuses, enfin à leurs feuilles 
opposées et entourées de quatre stipules plus ou moins épineuses ; 
elles se distinguent par la longueur relative de leurs pédoncules axil- 
laires, uniflores, ainsi que par la forme de leurs ovaires lisses, velus 
ou glutineux; les unes sont des herbes rampantes, les autres des 
arbustes épineux, qui s'élèvent jusqu'à cinq pieds; toutes ont les fleurs 
rouges ou jaunes. 

Le Fagonia cretica, dont l'Hispanica n'est sans doute qu'une 
variété, habite les collines de la Crète, et se retrouve dans la plupart 
des jardins botaniques; c’est une plante faible et couchée, dont les 
tiges, les pédoncules, les feuilles et les folioles sont articulés et facili- 
tent ainsi ses divers mouvements, parmi lesquels le plus remarquable 
est celui du pédoncule, qui, après la floraison se déjette, et va cacher 


— 554 — 


au-dessous des feuilles sa capsule, qui s'ouvre et répand ses graines 
dans cette situation. 

Cette plante, la seule des Fagonia qui soit européenne, s’est con- 
servée au moins pendant deux ans dans nos serres, quoiqu'elle passe 
pour annuelle; ses feuilles, avant le développement, s'appliquent par 
paires et sans plissements sur leur surface supérieure, et sont entou- 
rées à leur naissance de stipules sétacées, qui se roidissent en vieillissant. 

Je ne connais point les mouvements de la fleur et les circonstances 
de sa fécondation; je sais seulement que le torus est dépourvu des 
écailles qui distinguent les Trébulus. Les péricarpes s'ouvrent en dix 
panneaux naviculaires, et les graines, avant la maturité, montrent 
distinctement leurs feuilles séminales et leur radicule, attachée au 
cordon pistillaire qui, comme je le vois dans GÆRTNER, s’insère au- 
dessus de l’ombilic. 

Le tégument le plus extérieur de la graine du Fagonia est composé 
d'un tissu cellulaire qui se gonfle dans l’eau, et se présente sous l'ap- 
parence de mammelons mucilagineux, d’une extrême transparence. 


TROISIÈME GENRE. — Zygophyllum. 


Le Zygophyllum a un calice de cinq pièces, cinq pétales, dix éta- 
mines appendiculées, un torus nectarifère, un style et un stigmate 
simples, une capsule oblongue et pentagone, à cinq loges et cinq valves 
à peine séparables, des semences nombreuses , placées sur deux rangs 
dans chaque loge, et attachées à l'angle interne. 

Ce genre est formé d'une vingtaine d'espèces, dont la véritable 
patrie est l'Afrique, et qui sont dispersées dans les sables de l'Égypte, 
de la Mauritanie, de la Barbarie et surtout du Cap; une seule se trouve 
comme égarée au Mexique, une autre à Surinam, une en Espagne et 
deux dans la Nouvelle-Hollande. On peut les distribuer en deux 
groupes : celui à feuilles simples, et celui à feuilles bifoliolées. Ce der- 
nier, beaucoup plus nombreux, forme deux divisions : celle à feuilles 
planes, et celle à feuilles cylindriques; les unes et les autres ont des 
capsules semblablement conformées, des pédoncules allongés, et des 
feuilles entières, cartilagineuses sur leurs bords. 

Ces plantes sont des herbes presque toujours vivaces et souvent 
des sous-arbrisseaux à tiges amincies et noueuses, à pétioles arti- 
culés comme dans le Fagonia , à feuilles épaisses, stipulées, à 
pédoncules renflés, axillaires, uniflores et ordinairement solitaires ; 
elles vivent dans les lieux arides et les sables des déserts, où elles se 
vourrissent comme les plantes grasses, des gaz atmosphériques qu'elles 


— 555 — 


décomposent ; leur saveur est amère et un peu âcre, c’est pourquoi 
elles ne sont pas attaquées par les troupeaux. 

La principale espèce de nos jardins est le Fabago de la Syrie et de la 
Mauritanie, qui se conserve en pleine terre et se fait remarquer par 
ses petites fleurs mélangées de blanc et de rouge; les deux folioles, 
articulées sur un pétiole commun et appliquées l'une contre l’autre 
avant le développement, sont séparées par une arête qui n’est autre 
chose que le prolongement du pétiole commun avorté; les fleurs, 
placées aux aisselles supérieures et qui se succèdent long-temps, sont 
portées sur des pédoncules séminés ou ternés, et souvent unilatéraux ; 
le calice imbriqué est membraneux sur les bords, et la fécondation est 
extérieure, Avant l'épanouissement , le style est contourné en spirale, 
et les filets sont recourbés, ensuite les unes et les autres s'étendent, 
et en même temps la fleur se renverse; les anthères introrses et 
oscillantes répandent leur pollen rouge, ellipsoïde et à trois sillons, 
soit sur le stigmate papillaire, qui parait simple mais qui doit être 
réellement quinquéfide, soit sur l'appareil nectarifère logé au fond 
de la corolle et formé de cinq écailles membraneuses, déchirées sur 
les bords et entourant l'ovaire. Dans un cercle plus intérieur , on voit 
un disque annulaire qui fournit une grande quantité d'humeur 
miellée , et qui doit sans doute concourir à la fécondation. 

Cette description s'applique plus ou moins à tous les Zygophyllum, 
dont le fruit est toujours une capsule membraneuse allongée à cinq 
angles aigus ou même ailés. Cette capsule à cinq valves loculicides ou 
plus souvent septicides , renferme dans chacune de ses cinq loges des 
semences plus ou moins nombreuses et toujours attachées à l’axe 
central. La radicule est supère, les cotylédons sont planes et foliacés. 

Les Zygophyllum ont, comme les Fagonia, des mouvements très- 
marqués dans leurs pédoncules tantôt droits et tantôt réfléchis. 


QUATRIÈME GENRE. — Melianthe. 


Le Melianthe a un calice agrandi et quinquéfide, persistant, et 
dont la division inférieure, plus petite que les autres, est renflée et 
renferme une glande nectarifère très-marquée; les cinq pétales sont 
languettés, et les quatre inférieurs sont inclinés et réunis jusqu’au mi- 
lieu ; le cinquième ou l’antérieur, est très-petit et manque quelquefois ; 
les étamines sont didynames et hypogynes, les deux supérieures ont 
leurs filets distincts, les deux autres sont soudées à la base; l’avaire 
porte quatre stries; le style est unique, le stigmate quadrifide, la 
capsule membraneuse, quadrilobée et quadriloculaire; chaque loge 


— 056 — 


renferme deux ovules, dont l’un avorte; les semences sont ovales et 
brillantes, la radicule est allongée. 

Ce genre est formé de trois espèces homotypes, originaires du Cap, 
et formant de petits arbrisseaux toujours verts à racines traçcantes, à 
feuilles pennatifides et fortement dentées ; ce sont le Major, à feuilles 
glabres des deux côtés, et stipules grandes et soudées, le Minor, 
à feuilles blanchâtres seulement en dessous, stipules distinctes et 
amincies, et enfin le Comosus , à feuilles velues en dessus, cotonneuses 
en dessous, stipules distinctes et cordiformes. 

Ce genre, placé parmi les Zygophyllees, en diffère évidemment 
par sa conformation générale et la structure de sa fleur, qui doit sans 
doute son irrégularité à sa poche nectarifère, autour de laquelle se 
sont subordonnés les autres organes floraux. L'enveloppe extérieure, 
à laquelle on a donné le nom de calice, est colorée et légèrement 
consistante, tandis que l’autre ou la corolle est formée de lames 
coriaces et peu flexibles; les quatre pétales inférieurs bordent et 
revêtent la poche nectarifère, tandis que le cinquième est logé entre 
les deux sépales opposés. 

A l’époque de la fécondation, l'humeur miellée est si abondante, 
qu'elle remplit, non-seulement toute la cavité du sépale inférieur, 
mais qu'elle répand encore sur le sol une rosée continuelle que les 
Hottentots recueillent avec soin, et emploient comme un aliment 
stomachique; elle absorbe en même temps le pollen et inonde le 
stigmate de ses émanations, à peu près comme l'humeur miellée 
inonde la fleur des Asclepiadees, et surtout des Hoya. Entre les éta- 
mines supérieures soudées, on trouve dans le Major un appendice, qui 
pourrait bien être le rudiment d'une cinquième étamine. 

Les tiges du Mélianthe s'allongent sans cesse et portent à leur extré- 
mité un bourgeon de feuilles enveloppées de leurs stipules ; les fleurs, 
toujours axillaires, quoiqu'en apparence terminales dans le Major, 
sont formées de grappes plus ou moins garnies, d’un brun foncé et 
noirâtre; les feuilles sont sessiles et bordées à leur base de bractées 
intra-axillaires, qui, quoique non articulées au moins sensiblement, 
se détachent pourtant plus tôL ou plus tard, en laissant sur la tige leurs 
cicatrices. 

Ces stipules sont soudées dans le Wajor, où elles forment par leur 
réunion une manchette qui entoure une grande partie de la tige; mais 
elles sont libres, quoique différemment conformées dans les deux au- 
tres espèces. Leur usage est sans doute de protéger les jeunes feuilles, 
mais comme elles sont intra-axillaires, c'est la feuille supérieure qui 
est enveloppée, et non pas l'inférieure. 


— 557 

Les feuilles des Mélianthes sont pennatisectes, et leurs lobes, plus 
ou moins libres, ne sont pas articulés à la base, et par conséquent 
ne sont pas susceptibles de mouvement; leurs dentelures sont carti- 
lagineuses et non pas glanduleuses ; leur surface lisse et glauque 
dans le Major, est velue en dessous dans le Minor, velue en dessus et 
cotonneuse en dessous dans le Comosus ; elles ont une grande ressem- 
blance, pour la forme et le plissement, avec celles des Aigremoines, 
et répandent, lorsqu'elles sont broyées, une odeur forte et dés- 
agréable. 

J'ai sous les yeux une fleur de Mélianthe qui va être fécondée; les 
anthères sont dressées contre la lèvre supérieure, et ont leurs lobes 
parallèles ouverts du côté antérieur, en présence du stigmate déjà 
penché au sommet, mais non pas encore divisé, et par conséquent 
nor papillaire; l'humeur miellée est réunie en grosses gouttes à la base, 
et va absorber le pollen qui tombe du sommet de la fleur ; plus tard, 
le style se recourbe fortement, et le stigmate, déjeté sur l'humeur 
miellée qui détrempe toute la fleur, ouvre légèrement ses trois lobes 
pour recevoir sans doute les émanations du pollen ; mais je vois que 
la capsule est stérile, et que par conséquent la fécondation n’a pas 
été accomplie. 

L'examen du Mélianthe et de la plupart des fleurs irrégulières 
pourvues de nectaire, me fait conjecturer que ces fleurs, d’abord régu- 
lières, ont été altérées dans leurs formes par l'organe nectarifère, qui 
est venu s'intercaler dans leur intérieur , pour remplir la fonction 
dont il était chargé, c'est-à-dire, celle de préparer les globules à s'ouvrir 
pour la fécondation. 


Quarante-unième famille. — Fufacées. 


Les Rutacees ont un calice de trois à cinq pièces, diversement réu- 
nies, des pétales en même nombre que les pièces du calice, souvent 
distincts et onguiculés, un disque charnu et glanduleux qui porte les 
étamines ordinairement en nombre double des pétales, et quelquefois 
en nombre triple; les carpelles, en même nombre que les pétales, et 
qui avortent souvent en partie, sont distincts ou plus ou moins 
réunis; le style en apparence unique est formé d'autant de styles qu'il 
y a de carpelles; ceux-ci à la maturité sont ordinairement distincts, 


— 558 — 
uniloculaires, déhiscents et bivalves; les semences sont attachées à 
l'angle interne du carpelle ; l'embryon est arqué, les cotylédons foliacés 
et la radicule supère. 

DE CanpozLe partage les Rutacces en deux DES les Diosmees et 
les Cuspariees; mais Adrien De Jussieu en a formé deux familles : 
celle des Rutces , qui comprend principalement la Aue et le Peganum, 
et celle des Diosmées , qui réunit tous les autres genres du Prodrome. 
Les Autces sont des herbes ou des arbrisseaux dont le nombre ne 
s'élève guère au-delà de trente et qui se distinguent par leur forte 
odeur ; leurs feuilles glanduleuses sont simples ou composées, et tou- 
jours dépourvues de stipules ; leurs fleurs hermaphrodites, régulières 
et terminales, sont jaunes ou rarement blanches, et presque toujours 
disposées en cymes ; l’endocarpe de la capsule ne se sépare pas du 
sarcocarpe. 


Première tribu: — RUTÉES. 


PREMIER GENRE. -— Aulu. 


La Rue a un calice persistant à quatre divisions, rarement trois ou 
cinq, autant de pétales onguiculés, et dont le limbe est creusé en 
cuiller, des étamines doubles des pétales, et auxquelles correspondent 
autant de pores nectarifères, placés sur le support court et épaissi de 
l'ovaire ;'un style , une capsule à peu près globuleuse divisée en autant : 
de loges qu'il y a de pétales, un albumen charnu , un embryon arqué; 
une radicule allongée et des cotylédons linéaires. 

Les Rues, autrefois peu connues, comptent aujourd'hui à peu près 
trente espèces, dont plusieurs ne sont peut-être que des variétés, mais 
dont les autres sont réellement très-distinctes. On pourrait les consi- 
dérer comme ne formant qu'un seul type, à raison de leur organisa- 
tion générale, et de la structure si caractérisée de leurs fleurs ; mais 
il est plus convenable d'y reconnaître avec De CanDoLLe quatre types 
ou sous-types, distingués principalement par la coupe des feuilles. 

Le premier est celui des feuilles véritablement ailées, à folioles 
réellement articulées; il ne comprend qu'une espèce, indigène des 
Canaries. 

Le deuxième est celui à feuilles décomposées ou différemment divi- 
sées ; il compte une dizaine d'espèces assez voisines, toutes originaires 
du bassin de la Méditerranée, dont les plus répandues sont le Gra- 
veolens et le Montana, à pétales non déchirés. 


— 559 — 


Le troisième est celui des Trifoliacées ou Tripartites, dont les 
feuilles supérieures sont simples et les autres formées de trois folioles 
distinctes ou réunies; il contient, dans De Cannozze, trois espèces : 
l’une du Padouan, l’autre de la Perse, et la troisième des environs 
de Madrid. 

Le quatrième est celui des feuilles entières, ovales ou linéaires, dont 
deux espèces seulement appartiennent à l'Espagne, et les autres habi- 
tent le bassin oriental de la Méditerranée, ou s'étendent dans la Perse, 
le midi de la Sibérie, la Russie australe et asiatique. Adrien De Jussreu 
a fait du Rosmarinifolia, de YEspagne, son genre Æplophyllum, à 
racine fusiforme et feuilles linéaires allongées. 

Ces plantes sont des herbes vivaces et demi-frutescentes, toutes 
reléguées dans les climats chauds, la zone tempérée de l’ancien con- 
tinent, et principalement dans les iles et les bords de la Méditerranée, 
où elles recherchent les pentes arides et les côtes caillouteuses, parce 
que leurs feuilles épaisses se nourrissent moins du sol que des émana- 
tions atmosphériques. 

On les distingue presque toujours à leurs feuilles glauques, à leurs 
pétales jaunes et singulièrement conformés, et surtout peut-être à 
leur port roide et dépourvu de toute élégance; leurs tiges florales se 
dessèchent irrégulièrement chaque année, et les nouvelles pousses ne 
forment que tard des têtes arrondies et fleuries. 

Les racines des Àues sont fibreuses, rarement fusiformes ou tuber- 
culées; leurs tiges, à peu près cylindriques, sont terminées par des 
panicules courtes, épaisses, corymbiformes et souvent dichotomes; 
leurs feuilles articulées tombent irrégulièrement, et leurs folioles, 
dépourvues de renflements, ne se meuvent point comme celles des 
Légumineuses ; enfin les fleurs ne se referment point, quand elles sont 
une fois ouvertes. 

La capsule n’est pas enveloppée du calice pendant la maturation, 
mais elle est protégée contre les pluies et les intempéries par l'épaisseur 
de ses valves, et par les tubercules résineux dont elle est recouverte, 
ainsi que toutes les autres parties de la plante, les tiges, les rameaux, 
les pétioles et les feuilles. 

La première fleur qui s'épanouit, dans le Ruta graveolens , et sans 
doute aussi dans la plupart des espèces, est la fleur centrale, placée à 
l'angle de la première dichotomie ; elle est seule quinquépartite ou 
formée d'un calice à cinq divisions, cinq pétales, dix étamines et cinq 
loges; celles qui succèdent, et qui par l'allongement des pédoncules, 
s'élèvent plus haut, n'ont que les quatre cinquièmes de ce même 
nombre. 


— 560 — 


Cette différence entre la fleur centrale et les latérales appartient- 
elle à toutes les espèces de Rue, et dépend-elle d’une préorganisation 
ou d'unavortement? Est-ce la fleur supérieure qui a dédoublé quelques- 
uns de ses organes, ou sont-ce les latérales qui ont perdu quelques- 
uns des leurs? Je ne puis le dire, mais j'affirme que les unes et les 
autres sont en apparence parfaitement régulières, et qu'à aucune 
époque de leur développement on ne remarque des organes qui avor- 
tent ou qui se dédoublent. 

Les pétales de la Rue sont toujours creusés en cuiller, et souvent 
dentés ou ciliés; l'ovaire est fortement quinquéfide ou quadrifide, et 
dans ce dernier cas, il est partagé en deux sillons par un plan vertical; 
le torus qui le supporte est pareillement marqué, selon le nombre 
des pétales, de dix ou huit cavités d’où sort en abondance l'humeur 
miellée à l'époque de la floraison. 

Les étamines, alternativement opposées aux divisions du calice et 
aux pétales, sont logées avant leur développement dans les cuillerons 
de ces derniers ; elles s’approchent une à une du stigmate qui est un 
point glanduleux ou papillaire, sans doute quadrifide ou quinquéfide, 
et elles restent fixes jusqu’à ce qu'elles aient répandu leur pollen ovoide 
à trois plis; celles qui sont opposées aux pétales se trouvent naturelle: 
ment engagées dans les sillons creux de la corolle, et ne pouvant pas 
en sortir à cause de leur longueur, elles replient en dehors leurs filets 
pour les accourcir, et lorsqu'elles sont délivrées de leur prison, elles 
se replient fortement en sens contraire, et viennent se jeter contre 
l'ovaire : c'est là un joli phénomène que tout le monde peut contem- 
pler à loisir, et auquel concourent les pétales en se renversant aussi 
en dehors, jusqu à ce que l’anthère soit dégagée ; il ne s'explique, je 
crois, par aucune loi mécanique à notre portée, et il prouve qu'il y a 
dans les plantes, indépendamment de leur structure générale, une 
organisation supérieure, dont nous ne pouvons guère rendre compte. 

On n'apercoit sur les filets des étamines aucune articulation par 
laquelle s'opérerait ce mouvement ; leur base n’est pas soudée au torus 
par un empâtement qui s’allonge ou s’élargisse dans les espèces à filets 
dilatés; lorsque les dimensions du torus se sont accrues, et que les 
points de contact se sont ainsi rompus, on voit les filets se séparer et 
tomber incontinent ; c'est par le même mécanisme qu'on doit expli- 
quer la chute des pétales, dont les points d'attache, en tout sembla- 
bles à ceux des étamines, sont long-temps apparents. 

L'estivation des calices est à peu près valvaire, mais celle des pétales 
est différente : lorsqu'ils sont au nombre de quatre, l’un est intérieur, 
l'autre extérieur, et les deux derniers moitié intérieurs et moitié exté- 


— 361 — 
rieurs, mais lorsqu'il y en a cinq, ils sont mutuellement recouverts, et 
leurs franges ou leurs cils contribuent à les serrer plus étroitement. 

Dans la préfoliation, les folioles ne sont jamais plissées et n’ont 
point de nervure moyenne sensible, mais elles se recourbent dans le 
même sens, se protégent mutuellement, en remplissant à peu près, 
les unes envers les autres, les fonctions des stipules dont elles sont à 
peu près privées. 

La fécondation a lieu à l'extérieur, et les anthères sont exactement 
latérales ; celles qui s'ouvrent les premières, sont opposées aux divi- 
sions du calice, les autres ne s'approchent que plus tard, et lorsqu'elles 
ont été dégagées; mais comme les quatre ou cinq divisions du stigmate 
ne sont pas encore formées lorsque les anthères s'ouvrent, le pollen se 
répand tout entier sur la base renflée et abondamment mellifère de 
l'ovaire, et ses granules rompus envoient ensuite au stigmate leurs 
émanations ou leurs boyaux fécondateurs. 

Le fruit de la Rue doit être considéré comme un ovaire unique, 
parce que les carpelles, quoique séparés en apparence, sont pourtant 
tous dépourvus de style, et que les cordons pistillaires déscendent 
jusqu'au gynobase où ils se réunissent aux vaisseaux nourriciers, pour 
pénétrer ensemble dans chacun des carpelles. 

Les carpelles sont bivalves, et l'on apercoit bien la ligne de suture 
qui partage longitudinalement chacune des loges; on remarque en 
même temps que les semences unisériées sont logées à l'angle interne, 
et que les cloisons ne sont que les bords rentrants des valves septi- 
cides ; l'embryon est recourbé, et la radicule supèré est tournée 
du côté de l’ombilic; les capsules s'ouvrent au-dessous du sommet à 
l'angle intérieur, et laissent sortir par l'ouverture ovale leurs graines 
bosselées et scrohiculées; elles se referment ensuite exactement par 
l'humidité. Ù 

Parmi les particularités que présentent les Rues, on peut remar- 
quer les filets ciliés de plusieurs espèces, les bractées arrondies du 
Bracteolata, les divarications un peu épineuses du Corsica, les longs 
poils du Villosa, les six pétales et les douze étamines du Dahurica, 
les tubercules du Tuberculata et l'odeur particulière du Suaveolens , la 
seule espèce dont les émanations soient agréables. 


DEUXIÈME GENRE. — Peganum. 


Le Peganum a un calice persistant à cinq divisions allongées et sou- 
vent dentées à la base, une corolle pentapétale, quinze étamines à 
filets dilatés inférieurement, un stigmate triquètre, une capsule 


I. 36 


— 562 — 
arrondie, légèrement stipitée, triloculaire et trivalve, des semences 
nombreuses attachées à l'angle interne des loges. 

Ce genre ne renferme que l' Harmala , originaire de l'Orient, et qui 
se retrouve dans les sables des environs de Madrid, et dans quelques 
autres contrées de l'Europe australe; c’est une herbe vivace à feuilles 
glauques et multifides, à corolle grande, d’un blanc un peu sale. 

Cette plante, dont la variété Chritmifolium habite les bords de la 
mer Caspienne, a l'odeur forte et désagréable des Ruta, ainsi que les 
mêmes glandes résineuses ; ses pétales sont également creusés en 
cuiller, mais je ne sais pas si ses élamines sont irritables, et si son 
torus est chargé de glandes nectarifères; cependant je le crois en 
raison de la conformité de structure. 

Ce qu'elle présente de plus remarquable, c'est une capsule trilo- 
culaire avec des téguments floraux quinquéfdes et des étamines en 
nombre triple de ces mêmes téguments ; pour ramener ces différents 
organes à une symétrie primitive, il faut supposer que les étamines se 
sont accrues d'un tiers, et que les carpelles ont au contraire diminué 
de deux cinquièmes; or, cette hypothèse est plus difficile à admettre 
pour des fleurs terminales et régulières, que pour des fleurs axillaires 
et irrégulières ; quelques-unes des étamines avortent fréquemment. 

Le Peganum est cultivé dans nos jardins, où il repousse chaque 
année de ses racines ligneuses. Je ne l'ai pas observé exactement, 
mais j'ai noté que ses filets étaient élargis à la base en forme de 
cuilleron nectarifère, que ses anthères étaient extrorses et son style 
aplati; je vois de plus que les valves de sa capsule sont loculicides. 


TROISIÈME GENRE. — Üictamnus. 


Le Dictamne ou la Fraxinelle a un calice à cinq divisions caduques, 
cinq pétales inégaux et symétriquement placés, dix étamines à filets 
glanduleux, un style incliné et strié longitudinalement, un stigmate 
simple, une capsule à cinq carpelles réunis intérieurement, aplatis et 
renfermant chacun deux semences à cotylédons ovales et réniformes. 

Ce genre ne renferme non plus que le Dictamnus fraxinella, dont 
l'on distingue deux variétés, le blanc sale et le pourpré, qui croissent 
l'un et l'autre dans les bois de l'Europe australe; cette planté, qui 
forme un véritable type dans la famille des Rutacees, est remarquable 
par ses grandes feuilles vertes et ailées à la manière de celles du Frêne, 
et par les belles grappes florales et composées qui les couronnent; 
aussi at-elle été transportée dans nos jardins, dont elle fait l'ornement 
dans les derniers mois du printemps. é 


— D63 — l 

Sa racine est formée de tubercules allongés, légèrement fasciculés, 
et qui émettent toutes les années plusieurs tiges; ses feuilles, en ordre 
quaternaire, ne sont pas articulées, et par conséquent ne tombent 
pas naturellement ; leurs lobes, assez semblables à des folioles, ont 
les dentelures glanduleuses , et portent de plus sur leur face infère 
des glandes blanchâtres à peine visibles à la loupe. 

Les fleurs veinées ont les quatre pétales supérieurs réunis en casque, 
et le cinquième rabaissé en forme de lèvre inférieure; les étamines, qui 
avant l'épanouissement étaient couchées sur cette lèvre, se relèvent 
ensuite à angle droit, et quand leurs anthères sont à peu près toutes 
ouvertes, le style se redresse aussi pour se mettre à leur portée, et l'on 
ne tarde pas à voir paraître une grande abondance de pollen verdâtre, 
visqueux,sphérique et peut-être hérissé, comme celui des Malvacces ; 
les anthères terminales sont pivotantes sur leur filet recourbé. 

Le nectaire est un renflement du torus, qui entoure la base supé- 
rieure de l'ovaire, où il forme un godet qui donne, pendant la floraison, 
une grande quantité d'humeur miellée ; le pollen tombe en partie dans 
le godet du fond de la corolle, et s'attache en partie aux glandes bru- 
nâtres, arrondies, résineuses et humides qui recouvrent les extrémités 
des filets ; lorsque les anthères à parois retournées ont cessé de l’émet- 
tre, on voit le stigmate, dont le sommet est formé des cinq styles 
soudés, s’incliner à son tour, pour recevoir les émanations des globules 
polliniques qui ont éclaté sur l'humeur miellée, et qui sont autant de 
boyaux fécondateurs. 

Immédiatement après la fécondation, les pétales et les étamines 
dont la rupture était préparée tombent, en laissant leur empreinte sur 
le torus; le style se sépare ensuite, et l’on remarque au sommet 
intérieur de chaque loge, le point d'attache de la division correspon- 
dante du style, et par conséquent la route des cordons ombilicaux de 
chaque placenta. 

La capsule est veloutée extérieurement, et ses carpelles s'ouvrent en 
dedans à la manière des Rues; ils renferment originairement plusieurs 
ovules ; dont deux et quelquefois un seul sont fertiles ; les semences, 
très-lisses et très-brillantes, sont enveloppées d’un endocarpe transpa- 
rent, qui disperse enfin les semences, dont l'émission est encore favo- 
risée par l’élasticité des valves. Je n’ai pas suivi la route des vaisseaux 
nourriciers et des cordons ombilicaux dans {l'intérieur des carpelles, 
mais j’observe que l'ombilic est une écaille élargie et très-distincte. 

Dans l’estivation , qui diffère de celle de la Rue, le pétale inférieur 
recouvre les quatre autres, et par conséquent s’épanouit le premier; 
les deux supérieurs sont recouverts par les latéraux, et dans la pré- 
foliation , les feuilles sont roulées sur leur face supère. 


— 564 — 


La déformation de la fleur du Dictamne ne peut guère êtreattribuée 
qu'au godet nectarifère placé à la base supérieure de l'ovaire, et qui, 
comme nous l'avons vu, contribue puissamment à la fécondation. 

Les sommités des tiges, les pédoncules, les calices, les filets et les 
péricarpes des deux variétés de la Fraxinelle, et principalement de la 
pourpree, sont recouvertes de glandes d'une huile résineuse, qui s'en- 
flamme à toutes les heures du jour, lorsqu'on en approche un corps 
incandescent, comme l’a prouvé Bior, dans les Nouvelles Annales du 
Museum (vol. 1°, 1832, p.273), où il établit qu’il ne s’exhale point 
de ces glandes, comme on l'avait cru ; un gaz résineux et inflammable; 
ces glandes enflammées sont détruites pour toujours. 

On a trouvé dernièrement en Sibérie | Angustifolius à grappes sim- 
ples, sépales presque égaux et lobes des feuilles lancéolés, et l’on en 
trouve encore, dans la Russie asiatique, une troisième espèce que je 
ne crois pas encore décrite. 


Seconde tribu. — DIOSMÉES. 


PREMIER GENRE. — Î)iosma. 


Le Diosma a un calice quinquéfide, cinq pétales hypogynes, cinq 
étamines anthérifères alternes aux pétales et cinq autres stériles diver- 
sement conformées, un style sans doute soudé, cinq et rarement 
deux ou quatre carpelles comprimés et déhiscents, une ou deux se- 
mences lisses dans chaque loge, des cotylédons allongés et légèrement 
convexes. 

Ce vaste genre comprend aujourd'hui plus de cent espèces ou 
variétés, presque toutes originaires du Cap, et qu'on partage en cinq 
sections plus ou moins naturelles, et fondées principalement sur la 
forme des cinq étamines stériles. 

1° Les Adenandra ; étamines stériles portant des rudiments d’an- 
thères , fleurs grandes ét très-souvent terminales, feuilles alternes à 
peu près planes ; 

2° Les Barosma ; étamines stériles pétaliformes, fleurs axillaires et 
pédicellées, feuilles opposées, planes et glabres ; 

3° Les Agathosma ; étamines stériles pétaliformes, feuilles alternes, 
fleurs terminales en ombelles serrées ; 

4° Les Dichosma; étamines stériles avortées, pétales onguiculés et 
divisés en lobes linéaires ; 

5° Les Eudiosma; étamines stériles avortées ou réduites à des 


— 565 — 


rudiments d'écailles, pétales entiers et presque sessiles, fleurs petites 
et terminales, feuilles opposées ou alternes. 

Les Diosma sont des arbrisseaux à fleurs axillaires ou terminales, 
blanches ou roses; leurs feuilles, quelquefois très-nombreuses, sont 
simples, entières ou légèrement crénelées, plus ou moins ciliées, 
d'une consistance demi-cartilagineuse, et toujours ponctuées de ces 
glandes résineuses auxquelles on doit attribuer l'odeur agréable que 
répandent les :4gathosma, surtout l Ambigua. 

Les feuilles persistantes sont d'abord appliquées les unes contre les 
autres et légèrement recourbées sans plissement ; les tiges se dévelop- 
pent indéfiniment dans les espèces à fleurs latérales, et repoussent par 
les aisselles supérieures dans les autres. 

Les fleurs m'ont paru dépourvues de mouvements; leurs anthères 
sont introrses , leur ovaire est porté sur un disque nectarifère souvent 
festonné ou crénelé sur les bords; les anthères qui s'ouvrent dans leur 
longueur conservent long-temps leur pollen jaune et humide, qui se 
répand sur le stigmate en tête pentagone; les cinq étamines stériles 
sont souvent terminées par des têtes glanduleuses qui favorisent 
sans doute la fécondation, comme on peut le remarquer dans l Umbel- 
lata ou le Speciosa de la section des Adenandra. 

La capsule des Diosma est formée de carpelles qui s'ouvrent inté- 
rieurement par le haut, et dont les semences sont renfermées dans 
des endocarpes élastiques et bivalves; mais le nombre des carpelles, 
comme nous l'avons déjà énoncé, varie plus ici que dans le reste de 
la famille; cependant, l’on doit remarquer que les autres organes flo- 
raux ne participent point à cette irrégularité ,et qu'il n’y a dans la fleur 
même aucune cause au moins apparente qui puisse déterminer cet 
avortement des carpelles. 

La fécondation doit donc varier ici selon l'organisation de la fleur, 
et sans doute que les glandes des filets stériles des 4denandra doivent 
y jouer un rôle ; sans doute encore que les espèces dioïques, comme le 
Dioica de la section des Barosma, et le Linearis de celle des Eudiosma, 
ne peuvent pas être fécondées comme les autres; mais dans un genre 
dont les espèces sont si peu connues, il est difficile de rien préciser à 
cet égard; je me contente de remarquer que, si la fécondation ne 
s'opère pas immédiatement par le stigmate, elle doit avoir lieu au 
moyen du pollen que les anthères répandent sur le torus fortement 
mellifère, et probablement encore par les poils imprégnés d’hu- 
meur miellée qui recouvrent les bases des étamines de plusieurs 
espèces, en particulier du 7’illosa de la section des Adenandra, ou 
enfin comme dans le Lineuris, par les [squamelles nectarifères placées 
entre les carpelles. 


— 066 — 

Ces charmants arbrisseaux fleurissent une grande partie de l'année 
dans nos serres, où ils sont mélangés avec les Erica, les Gnidia , etc. 
Ils se multiplient facilement, soit de marcottes, soit de boutures; 
soit enfin de graines semées à l'époque de la maturation, et ils ont 
une si grande ressemblance de structure florale et de port, qu'on ne 
peut guère douter que le grand nombre ne soient de simples variétés, 
ou même des hybrides. 

Sracx a formé des genres de la plupart des sections des Diosma, 
mais les espèces de ce genre sont tellement liées entre elles qu'il est 
difficile de les séparer par des caractères tranchés; celles que j'ai exa- 
minées physiologiquement m'ont paru varier tellement sous ce rap- 
port, et en particulier sous celui de la sexualité, qu'il n’y a guère 
moyen de lesréunir en groupes et en types, avant de les avoir obser- 
vées vivantes. 


DEUXIÈME GENRE. — Crowea. 


Le Crowea a un calice quinquéfide, cinq pétales sessiles à estivation 
quinconciale, dix étamines à filets subulés, aplatis à la base et pro- 
longés au sommet en appendices velus, cinq carpelles réunis en une 
capsule à cinq angles et cinq loges. 

Ce genre n'a compris long-temps que le Saligna, petit arbrisseau 
de la Nouvelle-Hollande, à rameaux triquètres, feuilles alternes, 
allongées et entières ; ses fleurs rouges solitaires et presque sessiles 
aux aisselles, sont comme recouvertes extérieurement d'un. léger 
vernis. 

Sa fécondation est intérieure; ses dix étamines appliquent exacte- 
ment leurs anthères bilobées et introrses contre le stigmate à peu près 
sessile, capitellé et papillaire; les dix glandes qui entourent la base 
de l’ovaire répandent en même temps une humeur miellée, qui 
imprègne le fond de la fleur ainsi que les poils épais qui terminent 
les filets, et cachent, comme les Verium , en se tordant, l'ovaire et 
les organes sexuels; la fleur ouverte ne se referme plus, parce que 
Jes stigmates sont entièrement abrités. 

Il est presque impossible de ne pas reconnaitre ici que ces poils 
épais et tordus sont destinés à recevoir les globules du pollen, dont 
les émanations sont les boyaux fécondateurs qui pénètrent ensuite 
par les stigmates jusqu'aux ovules. 

On cultive aujourd'hui dans nos serres le Vereifolia, seconde et 
dernière espèce du genre. : 


— 567 — 


TROISIÈME GENRE. — Ærioslemon. 


L'Eriostemon a un calice quinquéfide, cinq pétales, dix étamines à 
filets ciliés ou nus et anthères terminales, un style très-court, cinq 
carpelles soudés à la base, des semences géminées dans chaque loge: 
ou solitaires par avortement, un embryon légèrement courbé et une 
radicule allongée. 

Ces plantes sont des arbres ou des arbrisseaux de la Nouvelle- 
Hollande, qui ont de grands rapports, tantôt avec les Crowea, et 
tantôt avec les Diosma. Ils se cultivent dans nos jardins, où ils se 
distinguent par leur port, leur pubescence étoilée et leurs fleurs d’un 
blanc de neige. 

On les partage en deux groupes très-inégaux : 

1° Celui à étamines hispides ou ciliées, feuilles entières , non squa- 
mellées. 

2° Celui à étamines glabres, feuilies et calices squamellés. I ne 
contient qu'une espèce, 

La fécondation est intérieure, les filets des étamines cachent le stig- 
mate, et recoivent sur les poils recourbés le pollen qui sort des 
anthères, et dont, comme dans le Crowea, les émanations arrivent 
au stigmate. 


QUATRIÈME GENRE. — Boronia. 


Le Boronia a un calice quadrifide et persistant, quatre pétales ovales 
et persistants, huit étamines fertiles, rarement quatre fertiles et quatre 
stériles, dont les filets sont ciliés et recourbés ; quatre stigmates 
redressés, rapprochés et quelquefois soudés en un seul, autant de 
carpelles bivalves, réunis intérieurement en une capsule quadrilobée 
et quadriloculaire, des semences à peu près solitaires dans chaque 
loge, un embryon redressé dans un albumen charnu et une radicule 
infère. 

Ce genre, formé de petits arbrisseaux presque tous originaires de 
la Nouvelle-Hollande, contient des espèces à feuilles opposées, pé- 
doncules axillaires et fleurs ordinairement pourprées. 

On le divise en deux groupes, formant entre eux treize espèces : 

1° Celui à feuilles ailées, avec une foliole terminale sessile ; 

2° Celui à feuilles simples. 

Le Boronia pinnata , la principale espèce du genre et qu'on cultive 
dans nos serres, a les feuilles véritablement ailées, c’est-à-dire à 


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folioles articulées sur un pétiole de deux à quatre paires; les fleurs, 
d'un beau rouge, à pédoncules opposés deux à deux, et qui me 
paraissent terminer les tiges, ont des ovaires entourés de huit étami- 
nes à filets élégamment ciliés et régulièrement recourbés; leurs an- 
thères sont introrses, pédicellées et cartilagineuses en dehors; le 
stigmate capitellé recoit immédiatement le pollen jaune et adhérent, 
en sorte que la fécondation paraît directe; le fond de la corolle est 
nectarifère, quoiqu’on n’aperçoive pas de glandes saillantes; la sur- 
face inférieure des feuilles est recouverte de glandes. 

L'Alata, à feuilles ailées, qui appartient aussi à notre premier 
groupe, a une structure florale un peu différente ; ses carpelles séparés 
sont portés sur une belle glande saillante, ses anthères sont légère- 
ment latérales et non pédicellées, enfin les poils qui recouvrent ses 
filets sont mous et humides de l'humeur qui distille du nectaire. 

On peut remarquer que les feuilles du Boronia ont leur pétiole 
commun articulé, de même que leur pétiolule ; aussi ce pétiole com- 
mun est-il susceptible de mouvement comme les folioles. 

Les anthères du Pinnata sont pédicellées de manière à pouvoir faci- 
lement s'incliner sur le stigmate placé à la même hauteur; il n’en est 
pas de même de l’4lata, dont le mode de fécondation doit par consé- 
quent différer. 

Dans le Pinnata , le connectif tapisse tout le côté extérieur de l'an- 
thère. Est-ce la même chose dans l’A4/ata, dont les anthères sont à peu 
près latérales? Et peut-on dire que toutes les anthères, dont la face 
extérieure est demi-cartilagineuse, ne se retournent jamais du côté du 
style ? 

Il y a ici un problème à résoudre : celui de la fécondation. A quoi. 
servent les filets élégamment ciliés et recourbés des anthères? Ne doi- 
vent-ils pas concourir à la fécondation, puisqu'ils sont humectés de la 
liqueur miellée? Et leur rôle ne consiste-t-il pas à recueillir les globules 
du pollen, pour transmettre ensuite leurs émanations au stigmate ? 
C'est un fait à constater. 


CINQUIÈME GENRE. — Zieria. 


Le Zieria a un calice quadrifide, quatre pétales insérés sur un disque 
hypogyne, quatre étamines opposées aux lobes du calice et dont les 
filets glabres portent une glande à leur base intérieure, un style chargé 
d'un stigmate quadrilobé, quatre carpelles réunis intérieurement en 
une capsule quadrilobée, quadriloculaire, à lobes divariqués, des 
semences aplaties et solitaires dans chaque loge. 


— 569 — 

Ce genre est formé d'arbrisseaux ou d'arbres de la Nouvelle- 
Hollande à pubescence étoilée, feuilles opposées, ponctuées, pétio- 
lées, trifoliolées et simples au sommet; leurs pédoncules axillaires sont 
souvent trichotomes, et leurs fleurs toujours petites et blanches. 

L'espèce la plus répandue dans ce genre, qui paraît homotype, est 
le Lævigata ou le Trifoliata des jardiniers, sous-arbrisseau semi- 
glutineux de nos serres, dont les pédoncules, placés aux aisselles 
supérieures, sont deux fois trichotomes; ses tiges et ses rameaux sont 
tuberculés, et ses feuilles , qui portent de petites houppes velues, 
sont chargées de glandes, transparentes, qui répandent une odeur 
agréable lorsqu'on les broie. 

Sa fécondation me parait immédiate; les quatre anthères bilobées, 
introrses et recouvertes extérieurement de leur connectif comme 
d'une lame, se couchent sur le stigmate pour répandre leur pollen 
d'un jaune d'or, qui retombe aussi sur l'humeur miellée dont le 
fond de la fleur est entièrement imprégné. 

Pour savoir si la fécondation est vraiment immédiate, il faudrait 
s'assurer si le stigmate est déjà formé lorsqu'il recoit le pollen; car 
autrement ce serait l'humeur miellée qui recevrait d'abord les glo- 
bules polliniques, et transmettrait plus tard leurs émanations au 
stigmate. 


SIXIÈME GENRE. — (Correa. 


Le Correa a un calice persistant à quatre dents, quatre pétales 
plus ou moirs réunis à la base, et formant un long tube, huit éta- 
mines insérées sous un disque à huit angles, un ovaire duveté marqué 
de huit sillons, un style persistant, une capsule à quatre carpelles 
tronqués et aplatis; des semences brillantes, à cotylédons ovales et 
convexes. 

On sépare ce genre en deux petits groupes : celui à fleurs courtes, 
et celui à fleurs allongées ; le premier comprend deux espèces de la 
Nouvelle-Hollande, et l’autre trois. 

Les Correa sont des arbrisseaux à feuilles opposées, recouvertes 
principalement en-dessous de poils cotonneux, disposés en flocons, 
qui s'étendent aussi sur les pédoncules, les calices et l'extérieur de la 
corolle; leurs fleurs sont tantôt axillaires, et alors la plante se déve- 
loppe indéfiniment, tantôt terminales, solitaires ou iernées, comme 
dans l'4{ba, et dans ce cas, les aisselles les plus voisines donnent de 
nouvelles pousses ; les fleurs sont blanches, rougeâtres, rouges, vertes 
et toujours inodores, les anciennes feuilles tombent au printemps 
après l'apparition des autres. 


— 570 — 


La fleur a un calice cotonneux et plus ou moins tronqué, quatre 
pétales plus ou moins soudés à estivation valvaire légèrement endu- 
pliquée, quatre étamines opposées aux pétales et logées, au moins 
dans l'4lba, au fond d'un sillon allongé ; le pollen jaunâtre des 
anthères introrses, qui s'ouvrent sur la petite tête quadrifide du stig- 
mate, pénètre aussi, à travers les huit ouvertures tubulées de la 
corolle, jusque sur le disque nectarifère, qui entoure la base de 
l'ovaire, et remplit le tube floral d'humeur miellée; la fleur ne se 
referme pas, et la fécondation est sans doute indirecte, et s'opère, 
comme dans les Convolvulus et toutes les fleurs à cornets intérieurs, 
par l'humeur miellée qui recoit d’abord les globules. : 

Les capsules sont formées de quatre carpelles, soudés dans la plus 
grande partie de leur longueur, et qui s'ouvrent intérieurement en 
deux valves; leurs semences ne sont point enveloppées d'un endo- 
carpe élastique et bivalve, et par conséquent le Correa appartient à 
la tribu des Rutees, et non pas à celle des Diosmees. 

Ce genre, très- FEES par ses verticilles floraux et sexuels toujours 
quaternés, ne dépend peut-être pas de la famille des Rutacées. 

Les pédoncules du F’iridiflora et du Pulchella sont pendants, et ont 
des corolles fort allongées, ce qui indique peut-être un mode propre 
de fécondation dans ce type. 

Ces plantes, peu apparentes et peu gracieuses, se multiplient de 
graines, de marcottes et de boutures. 


Quarante-deuxième famille. — Zanthoæylées. 


Les Zanthozylées, famille établie par Barrziwe et par Jussrev fils, 
comprennent le Zanthoxylum et la plupart des Préleacées de DE 
Canvozce et de Kunrx. Elle renferme des arbres et des arbrisseaux 
à rameaux ordinairement cylindriques, feuilles éparses ou opposées, 
simples ou plus souvent composées, presque toujours ponctuées et 
dépourvues de stipules. 

Leurs fleurs, unisexuelles par avortement, sont régulières, axil- 
laires ou terminales; leur calice inadhérent est formé de cinq ou quatre 
divisions en estivation ordinairement imbricative; leurs pétales hypo- 
gynes sont en même nombre que les divisions du calice; les étamines 
sont rarement en nombre double, 


— 971 — 


Les ovaires, quelquefois en nombre moindre que les pétales, sont 
disjoints ou plus ou moins soudés ; les ovules ordinairement géminés 
sont attachés à l’axe central, les styles et les stigmates sont distincts 
ou soudés, les péricarpes sont des baies ou des capsules de deux à 
cinq loges, et plus souvent des carpelles disjoints, bivalves, dont 
l'endocarpe se sépare du sarcocarpe; les graines solitaires ou géminées 
dans chaque loge sont souvent lisses, l'embryon rectiligne ou légère- 
ment curviligne a la radicule supère. 

Les principaux genres des Zanthoxylées, qui contiennent à peu 
près soixante et dix espèces, sont le Zanthoxylum, le Brucea, le Ptelea, 
l'Aylanthus ; nous y ajouterons le Cneorum, dont la place est encore 
indéterminée. 


PREMIER GENRE. — Zanthoxzylum. 


Le Zanthoxylum a les fleurs hermaphrodites ou plus souvent 
dioïques par avortement, un calice de trois à cinq divisions, autant 
de pétales quelquefois avortés, autant d’étamines opposées aux divi- 
sions du calice et avortées dans les fleurs femelles, des ovaires tantôt 
en même nombre que les sépales, ou plus souvent en nombre 
moindre, des styles et des stigmates libres ou soudés, des graines 
solitaires ou géminées, dans des carpelles bivalves dont l’endocarpe 
se sépare souvent du sarcocarpe. 

Ge genre est composé actuellement d’à peu près cinquante espèces, 
la plupart originaires de l'Amérique équinoxiale , et que De CANDOLLE 
partage en quatre groupes : celui à feuilles simples, celui à feuilles 
trifoliolées, celui à feuilles ailées avec impaire, et celui à feuilles ailées 
sans impaire, On comprend que cette division, purement artificielle, 
éloigne souvent des espèces véritablement homotypes, et n’apprend 
rien sur la composition des fleurs et sur l'arrangement de leurs organes 
principaux; mais ces plantes sont encore trop peu connues pour que, 
dans l’état actuel de la science, on puisse aller beaucoup au-delà. 

Afin de donner quelque idée des formes de végétation et de fécon- 
dation des Zanthoxylum, je décrirai avec quelques détails le Fraxini- 
folium, arbrisseau du Canada, assez répandu dans nos bosquets, et 
qui appartient au troisième groupe du Prodrome; ses rameaux 
tortueux et irréguliers sont chargés d'espace en espace de deux 
piquanis opposés, qui tombent la troisième ou quatrième année, et 
entre lesquels se trouvent les cicatrices des anciennes feuilles ; au- 
dessus sortent les nouveaux bourgeons, d'abord cachés dans l'inté- 
rieur de l'écorce, et recouverts en-dehors d’écailles d’un beau rouge; 


— 572 — 


ses bourgeons sont placés indistinctement sur le bois de l’année et sur 
celui des années plus anciennes , aux points mêmes qui ont déjà donné 
des pousses, en sorte que la plante est chargée de bourgeons tout le 
long des rameaux. 

La tige elle-même se termine par un bourgeon foliacé, imprégné de 
substance résineuse et dont les feuilles alternes sont pourvues de deux 
piquants qui remplissent les fonctions de stipules ; les bourgeons laté- 
raux sont, au contraire, recouverts de petites écailles, et ne donnent 
que des feuilles fasciculées, comme les Mélezes et la plupart des 
plantes qui repoussent chaque année de leurs anciennes aisselles, 

Au moment où les feuilles des bourgeons latéraux écartent leurs 
enveloppes, les fleurs paraissent disposées en manière d'ombelles, 
parce qu'elles naissent toutes de rameaux avortés du vieux bois; elles 
sont petites, jaunâtres, pédonculées, tantôt réunies aux feuilles et 
tantôt logées dans des boutons séparés ; leur calice de cinq pièces est 
dépourvu de corolle; les mâles ont cinq étamines saillantes qui entou- 
rent un ovaire avorté et représenté par quatre ou cinq mamelons 
arrondis; les femelles manquent entièrement d’étamines, mais elles 
portent quatre ou cinq ovaires, dont les stigmates sont des têtes glu- 
tineuses ; la fécondation a lieu avant le développement des feuilles, 
comme dans la plupart des plantes dioïques, et lorsque la fleur mâle 
n'est pas placée dans le voisinage de la femelle, cette dernière avorte ; 
cependant j'ai vu, dans notre jardin, un pied femelle qui jusqu'alors 
avaitavorté , donner une année deux graines qui, semées, ont produit 
deux individus mâles. Cette fécondation peut-elle être attribuée aux 
étamines inaperçues qui se seraient trouvées dans la fleur femelle ? 

Les folioles sont appliquées par paires sur leur face inférieure, et la 
feuille entière est roulée extérieurement sur son pétiole, comme les 
Fougères ; elle se développe ensuite à la manière des feuilles ailées, et 
elle est sans doute susceptible de quelques mouvements; car ses folioles 
sont articulées sur le pétiole commun ; on les voit couvertes dans leur 
jeunesse de quelques glandes sphériques non adhérentes, qu'il ne faut 
pas confondre avec les glandes demi-transparentes engagées dans le 
parenchyme et qui appartiennent au grand nombre des espèces; le 
pétiole commun est hérissé, tandis qu’il est pour l'ordinaire chargé de 
piquants dans les autres Zantho zylum. 

Les carpelles, ponctués de glandes résineuses et biorihtet s'ou- 
vrent avant la maturité en deux valves, et découvrent une graine 
brillante et arrondie, qui achève de mûrir, suspendue horizontalement 
par son cordon nourricier, dont l'on suit la trace de la base jusqu'au 
sommet du carpelle, où est logée la radicule; les autres espèces pré- 


Den 
sentent des apparences à peu près semblables ; leurs carpelles, d'abord 
sessiles, deviennent souvent pédonculés, et presque toujours lors- 
qu'ils s'ouvrent, leurs teintes noires contrastent avec la couleur de 
la semence dont la radicule est supère. 

ILest facile de comprendre combien de phénomènes curieux pré- 
senteraient la plupart des autres espèces, si elles pouvaient être obser- 
vées depuis leur naissance jusqu’à la dissémination; car on ne peut 
guère concevoir qu'une espèce qui, comme le Fraxinifolium , croît 
dans le Canada, soit conformée de la même manière que celles des 
tropiques. 

Les Zanthozylum sont en général des plantes sans élégance dans le 
port et sans éclat dans leurs fleurs, quoique leur feuillage, d’un vert 
gai, ne manque pas de légèreté. 

J'observe en finissant que la fleur femelle du Fraxinifolium porte 
un disque nectarifère, qui manque en grande partie dans la fleur mâle, 
ce qui semble prouver que la liqueur miellée n’est pas destinée ici à 
attirer les insectes pour faciliter la fécondation. 


DEUXIÈME GENRE. — Ptelea. 


Le Ptelea a les fleurs dioiques, le calice court, quadrifide ou quin- 
quéfide, quatre ou cinq pétales étalés, quatre ou cinq étamines plus 
longues que les pétales et opposées aux divisions du calice; des filets 
épais et hérissés inférieurement dans la fleur mâle, qui n’a que des 
rudiments de pistil; un ovaire à deux loges biovulées et des rudiments 
d’étamines dans la fleur femelle ; un style court et un stigmate bilobé. 
Le péricarpe est une samare renflée au centre, réticulée et ailée au 
pourtour, et renfermant deux loges monospermes. 

Le Ptelea trifoliolé , qui est probablement l'unique espèce du genre, 
est un arbrisseau de l'Amérique septentrionale, dont les tiges sont 
recouvertes de lenticelles roussâtres et terminées par des corymbés de 
fleurs verdâtres, au-dessous desquels on apercoit des tiges stériles, 
d’où sort l'année suivante un rameau de sept à huit feuilles, terminé 
à son tour par un corymbe. 

Les feuilles, d'abord très-petites et non plissées, s'étendent insen- 
siblement, et le pédoncule commun ainsi que les pédicelles sont 
genouillés; les feuilles elles-mêmes sont ponctuées de glandes qu'on 
aperçoit trés-bien par transparence, et leur face infère est marquée 
de nervures proéminentes; le pétiole commun est souvent déjeté, et 
l’on trouve engagé dans sa base, le bourgeon de l’année suivante. 

Les pétales sont allongés et un peu repliés sur les bords, les anthères 


— 574 — 


introrses et pivotantes répandent leur pollen sur leurs filets velus, 
humectés de liqueur miellée et sans doute aussi sur le stigmate bifide 
et papillaire des fleurs femelles, dont les samares sont recouvertes à 
cette époque de glandes résineuses. 

La dissémination a lieu vers la fin de l'hiver, le péricarpe entouré 
d'une aile membraneuse semblable à celle de l'Ormeau, se désarti- 
cule, et devient le jouet des vents qui emportent quelquefois le 
corymbe irrégulièrement brisé; ensuite l'aile se dessèche, et ne pré- 
sente plus qu'un élégant réseau de nervures qui renferment une 
samare à deux graines. Ces deux graines germent-elles, ou l’une 
d'elles reste-t-elle stérile ? 

L’inflorescence générale du Ptelea est centrifuge, mais la particulière 
est à peu près'simultanée; la préfloraison est tordue et convolutive- 
Cet arbrisseau supporte très-bien nos hivers, et embellit au printemps 
nos bosquets, de ses feuilles vertes et brillantes , ainsi que de ses 
fleurs qui répandent une excellente odeur. 


TROISIÈME GENRE. — ÆAilanthus. 


L’Ailanthus a des fleurs polygames, un calice à cinq dents, cinq 
pétales en estivation valvaire endupliquée, un disque annulaire à cinq 
plis, dix étamines, deux à cinq ovaires à style latéral, qui deviennent 
dans la maturation autant de samares oblongues, acuminées et indé. 
hiscentes ; la semence, placée sur le côté intérieur du fruit, est aplatie, 
dépourvue d’'albumen, et marquée d'une tache rousse; l'embryon est 
droit et la radicule supère. 

Ce genre comprend quatre arbres originaires des Indes orientales, 

et qui appartiennent au même type par leur port et leur organisation 
‘ générale; leurs feuilles sont ailées avec ou sans impaire; leurs fleurs 
sont verdâtres et disposées en élégantes panicules, et leurs samares 
ressemblent à celles du Fréne. La seule espèce cultivée en Europe est le 
Glandulosa, arbre élevé, fort semblable aux Sumacs ailes, par la 
contexture de son bois, l'abondance de sa moëlle, ses boutons cachés 
dans l'intérieur des pétioles et la forme de ses feuilles. 

Il est aujourd'hui acclimaté dans nos bosquets, où il se propage 
par ses racines stolonifères, et se fait remarquer par sa grandeur 
et la beauté de son feuillage qui rougit fortement en automne; sa tige 
est chargée de lenticelles, et les dentelures de ses folioles portent à 
leur face inférieure des glandes bosselées, enfoncées et verdâtres. 

Les fleurs mâles ne renferment aucun rudiment de stigmate, mais 
elles ont un torus verdâtre, épais, entouré de poils, et qui, pendant 


— 075 — 

l'émission du pollen jaunâtre, est entièrement recouvert d'humeur 
miellée. Après la fécondation, ces fleurs se rompent promptement à 
la base; la fleur femelle se trouve probablement sur des pieds séparés 
qui portent peut-être aussi des hermaphrodites, et j'ai remarqué que 
des dix étamines, cinq étaient opposées aux divisions du calice qui 
les abritait, que toutes avaient leurs filets plissés pendant l’estivation, 
et s'étalaient ensuite fortement pour répandre au loin leur pollen. 

C'est un phénomène bien commun, et pourtant bien digne d’être 
consigné, que celui de ces plantes, qui d’ailleurs semblablement con- 
formées portent les unes des fleurs mâles, et les autres des fleurs 
femelles ; le phénomène est encore plus digne d'attention, lorsque 
les unes, comme l'Ailunthus, portent uniquement des fleurs mâles, et 
les autres des fleurs femelles et des hermaphrodites. La fleur femelle 
est encore très-rare en Europe; je ne l'ai jamais vue. 

La fécondation dans ce genre a lieu sans doute par le torus des fleurs 
mâles, entièrement recouvert d'humeur miellée, et dont les poils 
humides recoivent les globules du pollen qui doivent ensuite féconder 
les fleurs femelles ; mais comme les fleurs femelles sont encore très- 


peu répandues, cette fécondation doit avoir rarement lieu dans nos 
climats. 


QUATRIÈME GENRE. — Drucea. 


Le Brucea a un calice quadrifide, une corolle tétrapétale et un 
nectaire quadrilobé, tant dans la fleur mâle que dans la femelle; le 
fruit est un péricarpe à quatre loges monospermes souvent réunies 
en un seul drupe, la radicule est supère. 

Ce genre, qui doit son nom au voyageur Bruce, est formé prin- 
cipalement d’un arbrisseau de l'Abyssinie, à rameaux opposés, feuilles 
imparipennées et recouvertes dans leur jeunesse d’un duvet de poils 
roux; les fleurs mâles, disposées en petits paquets sur des pédoncules 
assez semblables à ceux des Chätaïgners, sont vertes, petites et 
chargées chacune de quatre à six étamines opposées aux lobes du 
calice ; les anthères sont bilobées, rougeâtres et introrses ; les fleurs 
femelles ont quatre ovaires et quatre stigmates papillaires sessiles. 
Cette belle plante fleurit très-long-temps, parce que ses nombreuses 
fleurs ne se développent que successivement. 

Comment les étamines fécondent-elles les stigmates des fleurs 
femelles , puisque les anthères sont introrses? Apparemment que, 


dans cette espèce, les fleurs mâles sont sur le même pied que les 
femelles. 


— 576 — 
On compte deux autres espèces de Brucea, appartenant aux Indes 
orientales, mais qui jusqu’à présent sont peu connues. 


CINQUIÈME GENRE. — Cneorum. 


Le Cneorum a des fleurs hermaphrodites, un calice petit et persis- 
tant de trois à quatre dents, autant de pétales en estivation imbriquée, 
un torus légèrement globuleux, un ovaire pédicellé, trois à quatre 
étamines , autant de stigmates et de drupes bacciformes, adhérants à 
un axe et formés de deux loges monospermes; la semence est pen- 
dante, l’albumen charnu, la radicule recourbée vers le haut, et hors 
des cotylédons. 

Ce genre est formé du Tricoccon, de l'Europe australe, et du Pul- 
verulentum, des rochers de Ténérife, qui sont des sous-arbrisseaux 
à feuilles épaisses, étroites, non ponctuées, et fleurs axillaires, et 
terminales; leurs tiges cylindriques se dessèchent au sommet sans se 
rompre régulièrement, et les fleurs qui se succèdent long-temps ont 
leurs anthères introrses, leurs stigmates papillaires et trilobés, et leur 
torus, chargé d'une glande d’où sort l'humeur miellée; les cordons 
pistillaires pénètrent par un trou intérieur un peu au-dessous du som- 
met, et le péricarpe osseux ne s'ouvre point. 

Le Pulverulentum est homotype au Tricoccon, dont il diffère sur- 
tout par le nombre quaternaire de ses téguments floraux, et ses pédon- 
cules adhérents au pétiole de la feuille florale; il est aussi beaucoup 
plus grand, et son écorce se détache par lambeaux. La fécondation 
peut être médiate, car le pollen se répand sur l'ovaire et sur la glande. 

Ces petits arbrisseaux paraissent avoir de plus grands rapports avec 
les Zanthoxylees qu'avec les autres familles; leurs feuilles articulées 
ne tombent qu’au printemps, et ils sont presque toujours chargés de 
fleurs et de fruits. 


SIXIÈME GENRE. — Schinus. 


Le Schinus est dioïque, à calice quinquéfide et corolle peatapétale ; 
ses fleurs mâles ont dix étamines et un rudiment d'ovaire, les femelles 
ont les étamines stériles et l'ovaire sessile, terminé par quatre stigmätes 
réunis en un seul point; le fruit est un drupe globuleux, à noyau 
monosperme et osseux, la semence est attachée à un funicule qui 
nait de la paroi latérale, l'albumen est nul et la radicule infère. 

Ce genre comprend quatre arbustes du Brésil ou du Chili, à feuilles 
ailées avec impaire, et fleurs disposées en grappes ou panicules axil- 


— 577 — 


laires ; le Molle de nos serres a les grappes élégantes, nombreuses, 
latérales et terminales; ses fleurs sont blanchâtres, et de ses dix 
étamines, cinq sont opposées aux pétales ; ses anthères à pollen orangé 
sont introrses latérales, et son ovaire est couronné par un stigmate 
capitellé, Je n’ai apercu aucune trace de nectaire, mais je n’ai vu, je 
crois, qu'un des deux sexes. 

Ces plantes sont remarquables par leur saveur poivrée et aroma- 
tique. 


Quarante-troisième famille. — Coriarices. 


Les Coriariees ont les fleurs hermaphrodites, monoïques ou dioïques 
par avortement, un calice campanulé, monosépale, à dix divisions 
dont cinq extérieures plus grandes, cinq autres plus petites, glan- 
duleuses et considérées par quelques botanistes comme autant de 
pétales, dix étamines, les unes opposées aux divisions du calice, et 
les autres aux pétales; des filets amincis, des anthères oblongues, 
introrses et bilobées à la base, un ovaire pentagone à cinq'loges, un 
style nul, cinq stigmates allongés, veloutés et papillaires, cinq ear- 
pelles légèrement séparés à la maturité, indéhiscents, monospermes, 
entourés de pétales agrandis et charnus ; une semence pendante, un 
albumen nul, un embryon droit, une radicule supère et deux coty- 
lédons épais. 

Cette famille, dont la place dans l’ordre naturel est encore incer- 
taine, mais qui se rapproche assez des Kutées pour la forme de sa 
capsule, n’est formée que d'un genre. | 


Coriaria. 


Le Coriaria compte au moins sept espèces, dont l’une appartient 
à l'Europe, une habite la Nouvelle-Zélande, une le Mexique, et les 
quatre dernières le Pérou. Ce sont des arbrisseaux ou des arbres 
dépourvus d'épines, à rameaux tétragones et opposés, quelquefois 
ternés à la base, à feuilles simples, entières, opposées, rarement 
ternées , à trois ou cinq nervures; leurs boutons sont écailleux , leurs 
fleurs disposées en grappes terminales, leurs pédicelles opposés et 
quelquefois alternes près du sommet, portent une bractée à la base ou 

1. 37 


— 578 — 


deux sur leur milieu, et leurs feuilles non plissées, sont articulées 
avec quelques rudiments de stipules ; ils paraissent appartenir tous 
au même type, quoique celui de la Nouvelle-Zélande soit sarmenteux, 
et que les autres aient leurs grappes tantôt droites et tantôt penchées. 

Le Myrtifolia, qui vit le long du {bassin de la Méditerranée, ne 
s'élève qu’à deux ou trois pieds, parce que ses rameaux fertiles se 
rompent chaque année, et que les autres périssent après avoir donné 
des fleurs; ses boutons et peut-être aussi ceux de ses congénères sont 
réunis deux à deux, l'un à droite, l’autre à gauche à l’aisselle des 
feuilles; ses carpelles persistent pendant l'hiver, et ne se détachent 
qu'à l'entrée de l'été, lorsque leurs grappes se sont fortement colorées. 

La fleur femelle a un calice à cinq divisions extérieures et cinqautres 
intérieures, alternes aux premières, et qui ne m'ont pas paru nectari- 
féres; ce calice étroitement fermé contient cinq carpelles, à style 
court et stigmates divariqués, fortement papillaires et d’un rouge 
foncé, les anthères, en apparence bien conformées et renfermées dans 
l'intérieur, sont bilobées et introrses, mais dépourvues de pollen; 
en sorte que les fleurs ne sont dioïques que par avortement, car l'in- 
dividu mâle a ses étamines saillantes et ses pistils avortés; la fécon- 
dation ne peut donc s’opérer que par les pistils divariqués d’un 
Coriaria voisin , fécondé par les étamines d’un autre, ou bien par les 
fleurs mâles souvent mêlées aux femelles sur le même pied. 

L'efflorescence est centripète dans l'ensemble et dans chaque 
. Srappe. 

Le principal phénomène du genre consiste pour moi dans les chan- 
gements que subissent les pétales des fleurs femelles , qui, d’abord 
glanduleux et nectarifères, s’allongent en s’épaississant, et viennent 
enfin avec le calice recouvrir les carpelles, dont le beau noir contraste 
alors avec les teintes rouges des enveloppes florales; ces carpelles res- 
tent adhérents au torus jusqu’à la dissémination; c’est alors qu'ils se 
détachent de la pulpe où ils sont engagés. 


FIN DU TOME PREMIER. 


ns. ‘ins En 


TABLE DES MATIÈRES 


DU PREMIER VOLUME. 


INTRODUCTION. . + «+ » « + 
SECONDE INTRODUCTION . . . . 
RENONCULACÉES » « + + + + + + 
Clématitées. . .. . . «ee. +. 
CiEmALIS D: el: ei ceie 
Anémonées. « ee. +" 
Thalictrum. . . . .. De ds 
Anemone. . .« « «+ - . ire 
Hépatique. . . ... . . . . . 
AO NE RE 
Renonculées . . É 
Myosure............ 
Cératocéphale . . . . . . . . . 
RICAINES A: eus ielete ee ne eee 
Renoncule. . . . . .. . . .. 
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7 | Candollea . . .... D TT LOUE 
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15 | Macnozrackes. . . . . . . . . 86 
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32 | MÉNISPERMÉES. . . . , . . . . O6 
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44 | Ménisperme. . . . - . . .". 
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NTMIRBErTDerIS ee MCE 10I 
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Doi Nandimauevst. 2SERIEPETE 106 
DOM EÉONHICE te saone Pure 107 
54 | Epimède. . . .. M el uN ee 108 
55 | PonoPHYLLACÉES. . . . . . . . 110 
56 | Podophyllum:. . ; . : 1." 111 
6o | NYMPHÆACÉES . . , . . . . . . 112 
64 | Nélumbonées. . . . . . . . .. 116 
70 | Nelumbium . . . . . .. SU RTID 
TOME MphEESe. EME SEEN 118 
TOMMEMTYALE ne 2 eMeteners els ve 118 


— 580 — 


Pages. 
Nymphæa. . ......... 119 
Nuphar,. .. ce epegete 122 
PAPAVÉRACÉES « , . . . . . - 12/4 
PavOLt 5... 07.4 #10 EU. 126 
Argémone . . . . . CN ET 131 
Meconopsis . . - - - ... . . : 132 
Sanguinaria . . . . . . . . .. 133 
BoOecoma ET. eee 134 
Rœmeria. : .". 4m 20, à 135 
Glauciumr en 136 
Pétystemen: 00 20e) MRC 137 
Chelidonium. . ........ 138 
Eschsholzia . . . . . . . . .. 139 
Hypecoum. . . . ....... 140 
FumMARIACÉES. . . . . . . . . . 142 
EME A ORPI TETE 144 
AUMIA LE a see 146 
Cysticapnos . - ... . . .. ... 147 
Corydalis . ... . . .. os = pts ES 
Sarcocapnos. . . . . : - . 152 
Farariass JV. US EE 152 
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Pleurorhizées. . . . . . . . .. 165 
Akabidées Lai deve eue siecle 165 
MAthioles.… 0. (ete. ed 165 
Cheiranthus 1"... 2 170 
INASIUT RUE RE EE 171 
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ARABES Eee seit ee ANSE 176. 
Cardamine. .......... 183 
Pteroneuron. . ........ 187 
Dentaire. . . .. RER ON Etc 187 
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SiRapiS 2:50. 244 ONE 258 


— 581 — 


Pages 
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Diplotanis. |... dryots 263 
EnREARTEEN e e . «1.265 
MENÉS ER ET 266 
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Boleum : . . . . .,.2elosne 266 
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MAGEOWIA. . . - Me -. + fn 04 268 
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MAIEDINA. . .. » . + sale 269 
RanRances.. à à à - e », +. folle 270 
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Rapistrum. .......... 273 
Monisias 1: ©... .. chou 274 
Raphanus . : . . ......... 275 
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Buniadées. , ......... 277 
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HEMEATIA.. : à. . « open 279 
Pimiécolobées.. : 0e 281 
Héteophulées . . . . . . sue 281 
Héhophile. . . . . . 1 281 
Schizopetalon . ........ 282 
Subulariées ..... ...., 283 
Subularia -.: . 0: : . sys ABS 
Tetrapoma. . . . ... .... 283 
CAPPARIDÉES. . . . « . “st0284 
Gléomees. Ni ee etre 28/4 
Gléome:.. . .  : 0. . +20 0e 285 
Palanesia . 420, - . . scie 286 
Gynandropsis . . . . . . . .. 286 
Capparées . . . à... .ets + 286 
Gapparis. : : 2 4... e «fr 287 
CISRINÉES NE CU Cie 290 
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Helianthemum. . ... . ... 294 
VIOLARIÉES . . . . . . . 303 
Viola. . . . .. SEA TS 304 
RÉSÉDACÉES . . . . . . . . . . 317 
ESE dat MEN MUC 311 
ASEMOCATEUS Ce Malle 317 


Pages 
DROSÉRACÉES. . . . . . . . . 318 
DnOSerA .. ee ne 00 RS 318 
Aldrovanda . . . . . . . .. 327 
Drosophyllum. 322 
DONNE A ARTS 322 
Patnassig: Lee 0.. tie 323 
POLYGALÉES eue ne ve ce ve 0 326 
Rolygala. 00.) .08 327 
Muralta ne NN 332 
PITTOSPORÉES. . . . , . . . 333 
SATA ME us 22e ae vespee tee 334 
BiHOSROrUM.. 22)... 6/00 334 
Bursarias. es e 335 
FRANKÉNIACÉES. . . « « « « 336 
Érankeniars eme. lee ire 336 
CARYOPHYLLÉES . . . . . . 338 
SIETE CS Rss enter ee le roles ee 342 
GYPSOpilE 1 REn 342 
Dignthus 25444 40130 345 
SANONITIA.. 200.4. ee 352 
Cnçubalus.....1. 4,706 356 
Silene.....nss. eu LARENR 357 
ENChRIS....,. 10h. ie 368 
Velezraiit.. 4010. 373 
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AISITCES. Le ve 0e 0. ÉOLON 394 
Gouffeia. 4... 200,14 37h 
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Holosteum. . . . . . . . . . 378 
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Adenarium. 0-24" 24 391 
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Hbisense te N)RE 429 
Géssypiun.. … ... 20 437 
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BOMBACÉES.. .. . -. .: AA 447 
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BYTTNÉRIACÉES. . . . . . . 450 
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Bryttnériées. . .. . . . . .. 453 
Ebeobroma:.t,, 41.048 453 
Bytinénan.s.. tel te SRE 454 
MVÉRAOM. :-seedaitene te re eee 455 
DENOpERIECSS er 0 etperte 455 
Hasiopétale 5... LR 455 
Guichenotia. .. . . . . . .. 456 
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Hermanniées, .. .. .. .. 457 
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Hermannia. . . . . . . . .. 458 
Mahernia . . . .. . . . .. 459 
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Pentapetes”. 4... : .° 4 46o 
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Sparmannia . . . . . .. . . 462 
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Pages 
DA Men. ee 0e LÉO 465 
CAMÉLLIÉES . . . , . . . .. ° 468 
Gamellia. +44," 469 
Dhéa hs. ce UE k70 
AURANTIACÉES . . . . , . . + L7x 
HYPÉRICINÉES . . . . , . . . 475 
Androsæmum ........ 476 
Hypericum.: .:. ,@: : : 40 477 
ASCYEURT. +900 es TE 486 
MALPIGHIACÉES. . . . . . . . 487 
Mülpiohées +. 3000 488 
Malpighias.:. 144008 488 
Barustériées. > : 4 2 2 00 489 
Bamisteria:.… + + 20000 489 
Heteropteris …  : +21. 000 490 
ACÉRINÉES 4 + 5 3 4 MU 490 
AGE. recu ee 2e 05 Ve OUR 49r 
Nésund6:. . 4: 4 2 0 496 
HxPPOGASTANÉES . . , . . , . 497 
HESculuss:- ess 2 © TR 498 
Paviat sen. 0 0 53 2 02 498 
SAPINDACGÉES , . . . . . . . . bo2 
Cardiospermum . ...... bo3 
Kolreuteria . ..... ... 5o 
MÉDIACÉES 1. à : : 4 0 0 bo 
Meliasefer sus Se. RON 506 
AMPÉLIDÉES . . . , . . . . . 5o7 
Sarmentacées. . .. . . . .. bo7 
CISSUS Mes 1 7 2 101000 bo7 
Ampelopsisi 2 ::,4 Ru bro 
MAS A 14 0e 2 2e 513 
GÉBANIAGÉES. +, +: 5 5% 20 516 
Monsonia : +... : +1: M D17 
Pelargonium. . . ... ... 518 
Gératium. 4, 4: 2 0 525 
BÉOdiIU, "4.0 5 6 « 0 vSR 532 
TROPÆOLÉES . . . . . . . . . 537 
Erspaolum.: +1: : 1422 537 
BAZSAMINÉES . . . : . 54o 
Balsamina: .: 21." : : NM 54o 
Ifipañens: 1417 :1120e b4r 
OXABIDÉES 7.0.1 412 1: 2 0 544 
OxANISESe, 0 fe a 2 ER 544 
ZYGOPHYLLÉES . . . . . . . . 557 


— 583 — 


Pages 
BDSM NUE RE 552 
TETE NN 553 
Zysophyllum. : ©... : 554 
Melianthe! > 4.0.0 0, 555 
RIURAGÉES ELU... bb7 
RÉEL 558 
IRD SONO HER 558 
eanum le 08 . - : 20. bGx 
Dictamnus :. : . . . , …:, 562 
DSC SN NU NU. 564 
DOS MANN) UN 564 
BLDWEAS. 5... . , , 1, 566 
Exiostemon, .. . . . . . .. 567 


Pages, 
Boronia 4:41 10/14 INOOURRS 567 
ZIGPIA: 1: ee Ve EE 568 
Corréa, A eee 569 
ZANTHOXYLÉES". 0 UE TUE 570 
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Btéle re. AMENER 573 
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BEUCEA: 7.120 2 NPA 575 
Cnecorum:..2.1 "0, 200 576 
SCRINUS Eee ee. UE 576 
CorraRes, "0100 2e TU 597 
CORIAIA EL IS NAS 577 


FIN DE LA TABLE. 


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