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HISTOIRE
DES DUELS
ANCIENS ET MODERNES.
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(RooutAC. UiitUse Uttr* S;. )
Ouvrage du même Auteur, qui se trouxHi chc,
les mêmes Libixiircs,
PROJET DE CODE DE LA CHASSE y
i vol. m-8.^ — Prix : 1 fr. 50 o.
DOUAI, nonOHEBIS DE J. JACiQUART.
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HISTOIRE
DES DUELS
ANCIEJVS ET MODERNES,
CoMTniAXT %M TAtUA« M l'oMCIK* > DU fltOCMU ET M L*UrlllT DU D»£L tN ra MIca
tr BARS TOmS LU tAWntU VU MUXDC; ATtC HOTTS BT KCLAIKCISSKMIMS SUJl LA»
raiBcuAus comAT*. nacuus»», •wu* l'aktiqoitk jumiu'a not joua4.
Par m. FOUGEROUX DE CAMPIGNEULLES,
CfaâcilleK k U Guur ro^al» de Douai y. mvnbtc d« pituieurs Sociét«> sa« Moies.
TOME PREMIER.
PARIS.
JUST TESSIER , QUM DES AUGUSTINS , 27 ;
AB. CUERBUUEZ ET C.i% RUE DE SEINE, 57;
GENÈVE»
M£M£ MAISO»' DE COMMERCE, RUE DE LA CITK.
M DCCG WXV.
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r le d-océe/ir ,U^f7/o
^andieur le d^océetir .
de 1(1 ^ociel^ d é^//iu/a/e>ç
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C*B»T à voiis , mon ejcceltent ami , que j'ailresse-
à mon tour cet oui/inge. C'est un enfuiiLilet vàlieA,
vt , quelque peu digne qu'il puisse ètfe d'une aus^i
honorable Jlliation , 'vous ue pourjvz- désavouer
celle paternité.
Souvenez-voug qu'à lajin de lfi2&, vous m'at-oz
envoyé, sous la forme dédit:atoiro, votre savante
U-Ure sur les Duels judiciaires dans nos provinces
du Nord, en me faisant remarquer « combien ce
sujet mcriCait d'èlre médité tout à In fois par le
moraiiste et. par le juriscotisulie. »
Dans ma lettre de reiuercimens , j'ai appelé de
mon coté votre, allvntion sur ce gituid duel politique à
auquel uoas. assistions, depuis. bientôt quinze anx^
entre la presse périodique et une monarchie ile
quatorze siècles» Les chances semblaient encore
se balancer ; mais le résultat définitif était déjà
facile à prév^oir, et en vous Vannoîicant , je fus
prophète, comme tarît de monde poumit l'être alors •
Il se passe encore quelque chose d* analogue au^
jourdhui; mais ce nest plus seulement en figure
que le duel se montre sur notre scène politique,
c'est en toute réalité ; c'est ce duel du mojen âge
que vous avez si bien esquissé dans nos localités >
c'est la Force érigée en sjstème et reconnue pour
arbitre du dmit en politique, comme elle l'était aux"
temps de la barbarie dans les procès. François /."">
dans son fameux caitel à Charles- Quint, a-dit que
le combat était la fin de toutes les écritures. j4u^
jourd'hui il semble l'être aussi de tœis les discours.
Il y a deux ans, à la chue où je vous écris cette
lettre, à-peu-près à pareil jour, le duel faillit s'or^
ganiser à Paris sur une très^rande échelle* Il ne
s'agissait de rien moins que d'un combat général
entre tous les journalistes de la capitale. Un mou-^
vcmcnt progressif, imprimé en arrière , nous avait
Jait revenir aux combats des Sept, des Douze, des
Trente, des Cent contre Cent.... Il ne manquait
plus dans la lice que les Barbazan et les Beauma^
noir. Une nouvelle soif de sang semblait se ral^
huner. Mais sila partie s'était faite , tout celui des
I
'a
rombaJIans n'aurait pas sttjfi pour l'apaiser, «C
çuritpir nomvnii Tenteniac ne svraît bien vain»'
tHfnt reric dans cette terrible lutte ■• Boîs Iwn san^,
lo n'auras plus soif !
O spectaclf, je t'ctioue, m'a frappé. Je me suit
mil il pro fondement réfléchir sur ce noui-cau sjmp- '
tàme de notre crise sociale; je me suis i-essom-erm
de votre lettre de 1829 , je me suis dit ■• « L'autevT
a eu sans doute quelijue tnoùf particulier pour
mettre ainsi son Livre tous le patronage de mon
obtcurilé; c'est peut-être un tii>pel «/ait m'oulu me
faire. Eh bien, le temps est T'ciiud'jy répondre;»
Et cr fui alors que je me suis , trop aveuglement
peut-être, précipité dans cette lice que vous-mcmo
m'ai^vz OM-erle, et oit il faut bien que vous von-
seniicz à me servir de parraia.
Je M arrêtai d abord à une simple notice qui,
dans la même année, fui présentée, sous vos aus-
piics, à la Société savante tjuc vous présidez, et
honorée par elle de la palme académique.
Cet eticouragement et vos pressantes eoclior^
lotions, m'engagéivat à étendre cet essai jusqu'aux
pnportions historiques. VenUepiise était hardie,
témérairv même. Il fallait descendre dans les pi^j-
fondeurs de l'histoitv, interroger une Joule de chro-
niques, recueillir ime multitude défaits, en faîrv
uti choix jutlicicux , tes coordonner dans un oïdie
logique, les soumetfif à une disposition ratiotmcilc.
^
enjùi, en composer une espèce de mosaïque rcpro-'
duiscuit, dans la variélé de ses émaux et de ses
avives couleurs , toutes les configurations si variées
et si pittoresques que présente chaque époque de
l'histoire morale de notre pays»
J'ai plus (Tune fois senti défaillir mon courage
devront les difficultés d'une telle entreprise* Que
coulez-vous ?n..^
De9 veilles , des travaux im faible coçur s^élomie.*
Je n'ai pas non plus , comme vous, blanchi dans
les études laborieuses de la science archéologique ;
mon front n^est pas, comme le vôtre j couvert de
cette noble poussière*... J'étais loin d'ailleurs en
prenant la phime , d'em^isager toute l'étendue de
mon sujet. J'aidais quelque peine , en commençant ,
à me rendre compte de tout ce qui devrait entrer
dans le plan d* un pareil ouvrage, et des immenses
lectures qu'exigeait son exécution. Je croyais
n'avoir à rédiger qu'un simple recueil d'anecdotes
qui n'aurait satisfait au plus qu'une vaine curiosité.
Mais à mesuf^ que f avançais , foi vu le tlième
historique y que je croyais d'abord pouvoir ren^
fermer dans les bornes d^un seul volume, grandir
et s'étendre sous ma plume» J'ai comptis l'étroite
♦ J. B, Rousseau. Od, l.« Liy. III^
I
I
cotinejfitê du Duel at-ei: une Joule d'auVes insU~
liilioii.* fjui lui savent de cortège et d'u/r/jui; fa
fiu distinguer toutes tes inmijiititioiis de ce vieux
pir/ugé du point d'honneur si profondément en-
raciné dam nos mœurs et îi vainement combattu
jiar nos lois. J'ai reconnu ses rapports sympa-
thiques avec tant d'autres préjugés analogues
les diverses contrées du monde et notamment dfi I
l'Eurt^.
Il ne s'agirait donc de rien moins , pour traiter ]
d'une manière complète un sujet ainsi ei^'isagé^ |
ç«e de composer une histoire universelle de la j
morale et de la police des différens peuples. iHaii
je n'ai eu ni la volonté ni le pouvoir dedonuerà
mon travail des proportions aussi giganu-squet.
Aujourd'hui, les ouvrages étendus font peur aux
écrivains , comme aux lecteurs. Nos moniens sont
trop courts pour lire ou écrire long-temps , et nos
préoccupations trop fortes pour supporter de telles
distractions. J'ai foit ensortc de compléter le la-
bUau pour ce qui concerne la France ; le coloris
en est beaucoup plus faible pour les autres divisions
territoriales de l'Europe, et je n'ai tracé qu'une
simple esquisse pour les autres parties du Monde.
J'ai eu te bonheur d'être soutenu dans celte tdc/ie
difficile par la bienveillante coopération de véri-
tahlcî zélateurs des lettres. Je dois citer en pivmièie
ligne Mn Jullien (de Paris) et M. le marquis de
Fonia d'Urban^ noms chers à la science autant
quà leurs nombreux amis.
De tous les sennces qui m'ont été rendus, les plus
précieux sont ceux que je dois aux sa^^ans étran-^
gers qui ont dirigé mes pas incertains dans des
sentiers inconnus pour moi. Par eux , m'ont été
ouv^erts les inestimables trésors des lois, des mœurs,
des usages et des anciennes chroniques de diverses
contrées célèbres, au nombre desquelles sont celles
qui passent pour Oi^oir été le berceau du DueL
Je suis heureux et fier de citer en particulier les
noms de l'illustre Polonais Ldewel, du docteur
Gans de Berlin, de M% Reyphins , ancien pt^
sident de la seconde Chambre des Etats-géfiéraux
des Pays-Bas, de M. le comte de Sellon, fondateur
de la société de la paix universelle à Genèv^e, et
de M* Guillaume Préink, savant magistrat de la
même wlle*. L'autorisation, que m'ont donnée ces
hommes distingués de les nommer ici, est bien
moins un moyen pour moi de m'acquitter enx^ers
* Je dois à M, Bruneau, as^ocal, lùiérateur instruit et bien-
veillant, d'avoir été mis en rapport avec MAI, le docteur Gans
de Berlin , et Prévôt de Genève. M^ Duplessis , reclettr de l'aca-
démie de Vouai, a bien voulu m' aider aussi de sa Judicieuse
critii^u! et de sa vaste érudition. Enjîn, je n'ai eu qu'âme louer
du zèle et de l'obligeance de MM, les bibliothécaires de Cambial
et de Saint' Orner ^
■Vtj
ma reconnaissance.
r celle liste tle
liant ,
I!
r
p
I.
, fu un nouveau nu-e t
/'(MU t'Ojez, mon cher ami , que s\
bons offices, votre nom ne saurait s
meilleure compagnie.
C'est assurément là un passeport i
\ besoin, pour son livre, un auteur qui porte un nom
WtptaUmenl inconnu tiatts la republique des lettres.
Ce sera sa principale ivcoinmandation ; car il ne
p&ut compter sur celle d'aucune cole/ie litlératre ou
polititjue.
Ce livra, en effet, n'estpas une œuvre de parti ^
is de conscience i ce n'estpas u/ie spéculation de
libraire qui offre à l'acheteur moins de tcjrte que de
ftapier, ou qui suipreiid sa bonne foi par le chai-
talanisme d'un titre. Si c'est une œuvre de circons-
tance, ce n'eut pas parce qu'elleJlaUe les passiona
contemporaines , mais paive qu'elle exprime un
frcjoùi tle l'époque ; parce qu''eileJ'ormtde des voeux
qui sont au fonds de tous les cœurs, parce quelle
Uttd a rendre enpn applicables ces théories de paix,
de conciliation et d'humanité, sans lesquelles il n'y
aura jamais de bases solides pour les soriétàs et les
gpawmemens.
Jlparail d'ailleurs , et vous êtes de cet avis, qu'il
n'ejL-iste pas encore de vérilable liisloire des Duels.
On assure que ce sujet, qui, depuis si long-temps ,
joue un rote dans tous les h'rrcs et un plus grand
encore dans tous les èx^énemens d'une vie humaine,
n^a jamais été imité d'une manière générale. Si cet
ouvrage peut aspirer à F honneur de remplir une telle
lacune, ce sera sans doute un mérite assez rat*e
dans un siècle où, dit-on, H^njr a plus rien de nou-^
veau, dans ces jours de nudaise et d'ennui oit
Von voit se reproduire sous toutes les formes ,
^épuisement et la satiété •
J'ose encore, mon cher ami, ni abriter de la
palme glorieuse qui m'a été décernée, sous voiœ
sacerdoce, dans un des temples les plus célèbres
élevés en province au Génie des Sciences et des
Lettres» Puisse -t-eUe être pour moi, au sévère
tribunal du public , le rameau d'or de l'Enéide !
Recevez, mon excellent ami, le nouivel hontn
mage de mes sentimens les plus affectueux et les
fdus reconncUssans.
tToxioex^viçc de Oouipiaueiilïe^ •
Douai, le 21 février 1835.
HISTOIKE
DES DUELS
ANCIENS ET MODERNES.
INTRODUCTION.
Plan de Touvrage.
An 10.* siècle , dans la partie du monde la plus
civilisée , et en particulier chez un peuple qui
revendique le premier rang parmi les autres , pour
la sagesse de ses institutions , la rectitude et la
délicatesse de son esprit , la douceur et Turbanilé
de ses mœurs , règne encore un préjugé fatal ,
1
2 •^HISTOIRE DES DtELS.—
une mocle féroce , triste legs de Timlique barbarie ;
que la religion , que la philosophie combattent
en vain depuis sa naissance ; dont Tinjustice , dont
Vabsurdilé sont généralement avouées, mais dont
Tempire n^en est pas moins absolu ; qui brave ou
élude Fautorité des lois , qui commande à tous
les âges , qui subjugue toutes les conditions ; ce
préjugé c^est le point d'honneur, cette mode c^est
le Duu.>
Tout a été dit contre le duel en religion , en
pliilosophie , en morale. S^il u^est personne peut
être qui n^aft été convaincu , de combien de gens
pourrait-on dire qu^ils sont réellement convertis?
En théorie, qui songe à justifier le duel? Mais aussi
en pratique ^ qui ne se fait un mérite de Tavouer ?
Gesi donc un monstre en paroles et une divinité
en actions. Attaquer cette inconséquence , en
démontrer le néant et la folie ; désabuser ainsi
Topinion d'un préjugé funeste , le fléau des Etats ,
Teffroi des familles et Topprubre de la civilisation ;
ce serait , je crois , bien mériter des mœurs pu*
blxques et de Phumanité. Mais qui pourrait se flatter
d'y parvenir , quand les plus célèbres moralistes
Pont essayé en vain P II ne peut donc s^agir au^
jourdliui ni de reproduire des traits d'éloc[uence
ou de logique qui sont dans toutes les bouches,
— rsTRODrcTfoif.— 8
ni de refaire des livres qui sont dans toutes les
bibliotlièqnes. D'ailleurs , par le temi>s qui court ,
les traités de morale ont assez peii de faveur.
Les compilations encore moins.
Aussi n^est-ce pas Tinutile censure, mais Tliistoire
du duel cpie je me hasarde de présenter ici. J^en
rechercherai Torigine , j^en suivrai les progrès , j^en
indiquerai les phases diverses dans nos annales
nationales et dans celles des principaux peuples,
l'jifin j^essnierai d^en fixer Pétat actuel dans cette
sorte de statistique générale. On se rendra compte
ainsi de ce que c^est que le duel ; on le jugera
froidement avec les pièces du procès sous les veux ,
et en présence d'une nombreuse série de faits tant
anciens que contemporains.
CHAPITRE PREMIER.
Péfinition du duel. — Défis et combats singuliers à
la guerre chez les anciens et les modernes. — Ren-
contres fortuites. — Rixes armées. — Différences
avec le duel proprement dit.
Jb n^appelle pas duel toute espèce de combat
singulier. Je ne considère comme tel ici que raction
de prendre les armes pour arbitres d^une querelle
priyée , dans une rencontre préméditée de part et
d^autre.
L'histoire ancienne comme Thistoire moderne
nous a légué le souvenir de combats singuliers plus
ou moins fameux ; mais ce n'étaient que des épi-
sodes de guerres générales de peuples à peuples,
et ces combats avaient souvent pour objet de les
prévenir ou de les terminer.
Aux temps héroïques on connaît le combat
d'Achille et d'Hector , celui de Tumus et d'Enée ,
celui d'Etéocle et de Polynice , frères jumeaux
qui se disputaient le trône de Thèbes.
I
Dons la bible qn rcman^ue le combat de David
tl de Goliath.
L'histoire romaine nous olîre ceux des Iloraccs
et des Curiaces , de Manlius et de Valeriiis Corvus
contre des chefs Gaulois (I) ; de Se i pi on , de
Marceilus , de Slatilîijs couli'c d'autres chciâ eu-
uemis (2).
L'histoire grecque nous a aussi conservé le récit
du combat de Pi ttac us, chef desMylilénicns, contre
PhriuoD, chef des AlhéiùeDS. Pittacus avait caché
SUU8 son bouclier un filet qu'il jeta à la iàie de
sou adversaire , dont il eut ainsi bon marché. Cette
ruse envers un ennemi n'a point paru déloyale
selon le droit des gens d'alura (3) ; et n'a pas
etniH.'cbé Pittacus d'èti:e uo des sept Sages de la
Grèce.
On peut ranger dans la même catégorie divers
traits du même genre de notre liistoirc moderne ;
Icb que le fameux combat des Trcnie, et celui qui
«it lieu aous Charles VI entre sept français et si-pt
an^is , ayant k leur léte Arnaud de Ikrbazan el le
chevalier de l'Escale (4) ,
Il parait que jamais on ne se fil u» point d'hon-
neur d'accepter ou de refuser de pareil» combats.
Melellus défié en Espagitc par SertnriuR, Antr^
gone par Pyrrhus, et Auguste Césiir par Marc-
6 —HISTOIRE DES DOEI^S.—
'Antoine se contentèrent de répondre qu'ils n'étaient
pas encore las de vivre (5).
Marins fit à-peu-prés la même réponse à un chef
Teuton, en ajoutant que, si lui s'ennuyait de la
▼ie , il pouvait s'aller pendre (6) .
Edouard III, roi d'Angleterre, provoqua Phi-
lippe de Valois qui lui répondit qu'un souverain
ne se battait pas avec son vassal. Plus tard le sort
des armes ayant été favorable à Edouard , Philippe
voulut relever le cartel ; mais l'autre à son tour
lui fit répondre qu'il n'entendait pas compromettre,
dans les chances d'un duel , (es fruits d'une vic-
toire (7),
Ghristiem IV, roi de Danemarck , répondit à un
défi de Charles IX , roi de Suéde , qu'il prit de
Tellebore. C'est le Nax^igetAnticyram d'Horace (8),
Charles Gustave , roi de Suéde , répondit à up
pareil défi de Frédéric, roi de Danemarck, que
les rois ne se battaient qu'en bonne compagnie (9).
Dans le cartel quç François I.*' , roi de France ,
adressa à Charles-Quint , il eut beau lui dire qu'il en
awUt menki par la goi^e, le flegme du monarque
Castillan ne s'en émut en aucune façon (10).
Turenne ne se crut pas obligé de se mesurer
avec Téleci^ur Palatin du Rhin , qui lui demandait
raison de l'incendie de ses États (11),
Nftpoléon recul aussi im r;irltl du roi de Suédt;,
GuitUve IV, el il u'ciilil que rire (12).
Ainsi rliei les peuples anncnK et modernes on
a toujours cru pouvoir , sans rougir , refuser de
K meattrer seul ^ ^ut avec un ctmctni , et pourtant
de nos jours cucore on se croirnil perdu d'iiuimeur,
ii pour la moindre oflense on ti^iaîlait à se couper
la gorge avec un a
Noua ne pouvons encore donner le nom de dUcl
i ixs eon^aU impK-vus qui surviennent dans
! rencontre fortuite, suèkô surf^unle rixâ. Ces
> peuvent se lermincr pur dca blcH^ures ou des
neurtres ordinaires, que les lois de police de tous
les fieuitles réi>riment h - peu - prés de la m^me
C^est ainsi qu'CEtUpe tua , sans le cerutaltre , aon
père Laïus :
OsiLnt\\à disputer Anm un étroit p.iKitn^e
Oea veiMS honneurs du p.t^ le frivole avimUigc.
C*Mt ainsi que Milon , ayant dans une pareille
tcocortre tué Clodîus, dut se rL-»oudrc, malgré
IVloqucBce de Cîcéron , i aller cspier à Marseille
ce meurtre d'un citoyen romain.
CNst ainsi enfin qu'au tAmoignngc de Oiodorc
8 — HISTOIRE DES DUELS. —
de Sicile , de Slrabon , d^Alliénée et de Romus ,
en usaient entr^eux les anciens Gaulois , dont les
festins et les parties de plaisir se terminaient sou*
vent par des rixes sanglantes (13). Cet esprit se
conserva dans les guerres privées du moyen âge
et dans ces actes de violence si frëquens alors entre
les seigneurs français , et dont on trouve encore
plus d*mi exemple dans les siècles suivans (14i)*
Cest là sans doute ce qui a pu faire croire à
quelques auteurs que le duel était connu et pra-
tiqué des Gaulois avant Tinvasion des Romains (16) .
Mais s^il en avait pu être ainsi dans ces siècles ref-
oulés qui échappent aux investigations historiques)
il est certain qu^il n'en restait plus de traces au
temps de César. Autrement un trait de mœurs aussi
remarquable aurait-il pu se dérober à Tattention
du conquérant des Gaules y historien non moins
fidèle quMiabile guerrier , et qui s^est assuré , dans
ses immortels commentaires , une gloire bien plus
réelle par sa plume que par son épée ? . ,
Tout cela n^est donc pas le duel , tel que nous
Tavons défini en tête de ce chapitre. Nous verrons
au chapitre suivant s'il en a existé quelques traces
dans les institutions de Tantiquité.
CHAPITRE
I Ilf r.irili(}iiilû ri;lalivenic»t nu duel. — Tuiiips hcrob^ J
ijiici. — Histoire gretvjuc et i-()iu:»iiie. — Peuple juif, ■
Oa a dit souvenl que les nncicns n'«Taieiil pu <
coonu le duel. On peut alTirmcr nvec ccrtiludi
qu'ils ne l'ont pas mcme soupçonné. Jamais ei
effet, vérité historique n'& été établie par des Tnitv I
ph» coDcluans , par des liTii-mples plus dccisib.^
Il me sufUra d'en reproduire ici quelques-uns,
choisis dans les diverses époques des annales do<1
J'autiquUé.
Homère a immortalisé la querelle d'Ailiille et]
d'A^roemnon , pour la captive Briséis. C'eût été
de nos jours un beau sujet de duel. Le bouillant
Auliillc ne songea qu'il s'enfermer dans sa lenle , où
il eut boudé long-temps peut-éVre , s'il n'avait eu à
venger La mort de son ami Patrode.
Bientùl après le vainqueur d'Ileetor succombe
lui-même sous les coups du berper Paris. Deux
eliefs grecs se disputent ses arme», La ruse d'Uljsse
ronporte dans le conseil de l'armée sur la bra-
voure d'AJBx. Celui-ci furieux s'en prcmlii uu
10 -e- HISTOIRE DES DUELS. -«
innocent troupeau , sur lequel it se jette Tépèe à
la main ; puis il finit par la tourner contre lui-
inéme (16). Les anciens connurent de bonne heure
•
le suicide , s^ils n^eurent jamais Tidèe du duel (17) .
Frappe mais écoute; telle fut la réponse de
Thémistocle , chef des Athéniens , à Eurybiade ,
chef de la flotte de Lacédémone , qui , dans un
conseil, s^oublia jusqu^à leyer le bâton sur lui.
Eurybiade écouta , et Tavi» du jeune Thémistocle
ayant préralu , la victoire dç Sahmine fut le fruit
de sa modération (18).
n parait que les coups de bAtoa étaient de mode
alors chez les Grecs. Lycurgue en souffiril un \rè^
patiemment, quoiqu^il lui e<^t coAké un oeil.
Mêmes témoignages dans Phisloire romaine. Julea
César ne s^avisa point de demander raison à Caton
des apostrophe» qui lui fuurent adressées en plein
Sénat , sur sa secrète complicité ayec Calilina.
Quoique le même Caton dût regarder comme
des personnalités les sarcasoiea de Gicéron contre
les Stoïciens dans sa harangue pour Muréna , il se
contenta de dire , après Tavoir enieuduQ : Nous
€Ufons-là un bien plaisant consuU
L^illustre auteur des philippiques périt assas-
siné ; mais ce fut par les ordres et non par Tépéc
d'Antoine.
I
I
-ClàPIlttE II.- II
ngrîppa, l'uM lies prciniets Ik-iilenniis d'Aiiguslc,
iiffril patiemmeiil i|ue le fils de Cîcérun lui jelàt
lasse à la ti'lc duiis un repas. Il parait que
(-fin arrivait encore assez souycïiI parmi les gens
de la meilleure compagnie. On se coiilenlait de
riposter de la même manière. Le pacificjue Horace
rn prit l'itlanne h tel point , tju'il composa une ode
Imd exprès contre un usage aussi choquant pour
un dnciple d'Epicurc (10).
GèMT , dans ses commentaires , prend plaisir k
r»cooter commenl s'y prirent deux de ses plus
brsret cenlurions, PuUio clVarcnus, pour vider
des querelles anciennes et sans cesse renaissantes
eatr'eux. Ils convinrent de se jeler eiioemble liie
baûsée dans lea rangs des Nervicn» , où ils firent k
Pettvî des prodiges de valeur (^) .
Tite-Live raconte le combat qui eut lieu en pré-
sence de Scipion , entre deux Espa^^uls , Ircs-
procbes parens, nommés Orsua et Curbis , qui ae
disputaient la principauté de leur province. Scipion
fil de vains efforts pour les engager à accepter sa
mMîalioD. Ifon non, dirent-ils, nous ne voulons
recoanaitre d'autres juges ^uc le dieu Mars cl nos
cpécs (21). Ce combat rappelle celui d'Etéocle et
4e Polynicc ; ce ne fut pas un véritable duel.
On ne Irouvc {>as plus de traces du duel dans
12 ^HISTOIRE DES DUELS.—
riiisloire du peuple juif, le plus ancien de tous,
que dans celle des Grecs et des Romains.
Quelques vieux auteurs qui se sont occupés des
duels ont prétendu en faire remonter Forigine jua-
qu^aux premiers âges du monde. On a même élé
jusqu^à décorer de ce nom Fassasaînat d'Âbd p«r
Caîn. Quoique cette oinnion ait été partagée par
Basalte , écrivain de mérite (22) > on ne sait trop
sur quoi elle pourrait reposer ; car le texte de la
Généae n^a rien qui la rende même plausible (23).
CbcA les Juib , la ressource généralement usilée
pour se débarrasser d\m ennemi , était le meurtre.
Le précepte du décalogue, nom ocddes, ne s^aiq;»li-
quait, comme la prohibition de Tusure^ qpi^aux
Jiûfs entr^eux. Quant aux étrangers, il» étaient hors
la loi à leur égard, et tout moyen de s'en débire
était bon et licite. C^est ainsi que Moïse tua un
Egyptien qui maltraitait un de ses compatriote»,
après avoir toutefois regardé autour de lui, s'il
B^était vu de personne (24) . Les femmes mêmes se
signalaient par la ruse , k débuit de la force, contre
les ennemis de la nation. La conduite de Jahd
envers Sîsara, et de Judith envers Uolopheme^ sont
des traits caractéristiques (26).
La bible noua a cependant conservé le récit d^
taillé d^un combat singulier très-mémorable entre
David et le géant GoUatli.
-cnipiTBE rr. -
13
I
Galïalti ^it un guerrier pliilislin , qui , d'apréa
le lexlc sacré , nvait une taille de six coudées et
une paume , environ douze pieds el demi. Le Livre
des hois donne la description de son armure. Sa
cuirasse pesait 5,000 sidea , 1 50 livres ; et d'après
le calcul d'Hostius , le poids de toutes ses armer
réunies ne de^'ait pas être moindre de 272 livres.'
Fendant 40 jours , ce fier ennemi sYlail ])rê3enlEl '
MIS avanl-posteg israëlHes peur défier le plus brave"
d'cntr'eux , de ae mesurer avec lot en mmbat sin-'
pidier. Aucun preux du camp de Saûl n'avait os£
»e présenter pour répondre au défi- Mais David
alors simple pâtre , se trouvant au camp par hasard,
9t préaenLa devant Goliath qui, le voyant armé d''un
bAloa , lui demanda ironiquement s'il le prenait
pour un chien. Le géant ne remarquait pas que
•on chètif adversaire avait en même temps une
fronde , arme terrible et sûre , entre des mains
exercées comme celles d'un p.'ilre. David avait en
outre mis dans son sac de berger cinq ctiilloux
du plus beau poli, dit l'Ecriture , et choisis par
lui dans le torrent, il se donna bien de garde de
se placer t portée de la hallebarde du Philistin ,
dont le fer seul pesait 20 livres. A peine ce dernier
s'étail-îl levé pour s'avancer au devant de David,
qu'il avait déjà reçu au milieu du front une pierre
qui s'y fixa. La force du coup fui émie à l'adresse.""
14 — RfSTOItC DBS VVEtU-^
Le prix de la victoire devait être la maio de Mérob ,
fille de Saûl ; mais David n^en retira y comme on
sait , d^autre fruit que la haine et la jakNisie du
roi (26).
Ainâ , dans ce combat nngulâer , G<^th n^eut
d^autre avantage que celui de la taille ; celui bien
autrement décisif des armes q^partenait à David.
Du reste, comme Ton a vu au chapitre précédent ,
ce trait fut une rencontre à la guerre et non pas
un véritable duel.
CHAPITRE III
iniques. — Lullc. — Pugllnt.
du cirque, — Kulle trace du iluol.
Les anciens avak'nl des
sfireul rimage du duel ; n
publics qui
n'étaient que'
du jeux , quoiqu'ils se terminassent quelquefois
d'une roamére tragique. Tels Turent la lutle , com-
bat corps à corps, et te pugilat, combat au poing
nud ou armé.
L'Entide ( Ut. V) contient la description d'un
combat ui cette , entre Entelle et Darés , qui bien
que Tabulcui , indique assez comment cela k ]>as3aît
dans les combats réels (27) .
On trouve dans la phipait des historiens grecs
el romains, des descriptions fort curieuses de cesi
diven genres de combats, qui fcsaient partie obligée'
du programme des jeux olympiques. On connaît
ce (rail d'une mère, qui mourut de joie en cm-'
brassant son Bis, au moment où il venait déposer'
fttespieds la couronne de laurier qu'il avait obtenue'
^ l'un de ces jeux .
Nous ne copaaitaons plus dana nos terni» )*ctriels<
16 — HISTOIRE DES OUEL8. ••
de vestiges de ces anciens usages qui tenaient une
place si notable dans les mœurs antiques, si ce
n^est les luttes si originales des boxeurs anglais.
Le Box, combat à coups de poings, est encore
aujourd^Kui le duel populaire des compatriotes de
John-BuU (28).
Les exercices gymniques furent empruntés aux
Grecs par les Romains , dont la barbare curiosité
ne se contenta pas toujours du spectacle quelque*
fois terrible des combats du ceste. Bientôt vinrent
les horribles luttes des gladiateurs, dont on fixe la
première époque ë Pan 400 de la fondation de
Home. Ces combats furent d^abord institués pour
célébrer les funérailles ; peut - être par suite de
Fantique usage d^honorer les cendres des morts
par des sacrifices humains (20).
Les combats de gladiateurs devinrent progrès-^
aivement en grande faveur parmi les Romains. Le
plus mince patricien ne pouvait mourir conv^ia-
blement , sans avoir réglé cet objet par testament.
Bientôt comme de raison , le plus obscur pldl>éien
prétendit aussi se donner des gladiateurs. Mais
Tabus de ces combats fut porté à son comble sous
les empereurs , où ils devinrent de grands spec*
tacles et firent long -temps les délices du cirque..
A cette époque , c^était un besoin général pour
— cKAi'MHE m. — 17
louirs les clossea de la so<;iét^ romaiue. C'est ce
que Juvénal a rtsumé si l'-nergiquenieni daiis ces
deux muta ', Panent et ci/veiises.
Cette mode ae répandit bientôt de Rome dant '
taules les proTÎnues. Il n'y eut presque plus de ville,
■D^me du dernier ordre , qui n'eut son cirque et |
■es combats de gladiateurs. On voyait souvent dans
l'arène de sÎk cents jus<{u'ii seize cents piiires d(t j
comballana. Trajau donna une f^te qui dura cent I
vingt jours. On vit paraître dans l'amplutliÉàtre de
Rome , cinq mille couples de gladiateurs , et plu-
sieurs milliers de bctes K-roces. JustcLipse a cnlculi |
' que dans un mois , plus de vingt mille homraM |
«vateol été muissonnl!^s par le glaive des gladiateurs, '
ou la deot des animaux. Des malheureux, à leur ]
dÈbul, reculaient-ils devant Tépée nue qui étincclaft j
k leurs yeux novices encore , des esclaves armés de 1
loucts ou de barres de fer rouge , les excitaient pai^ J
derrière et les poussaient à un combat ji outrancâ. i
Les immenses tribunes et les milliers de siÉg«
de l'amphitliéâtre étaient garnis de spectateurs. Oa
y voyait figurer aux divers étages et selon leurs
rwiga , l'élite du palriciut de Rome , les diverses
dasMS du peuple , des femmes , des cnfans de tout
■esc et jusqu'aux vestoles elles - mêmes , voilées
comme les odalisques de l'Orient. Les assistnns
réunis dans ces vasU-s enceintes, dont quelques-
18 «-mSTOIRB DBS DUELS.—
unes comme le cotisée de Rome , pouyaient con^-
lenir jusqii^à cent mille spectateurs , s^enivraient à
longs traits du sang yersé s^èchappant à gros bouil-
ions j du cliquetis des armes , des hurl^mens des
bétes j des cris féroces des lutteurs et du râle des
mouvans. CeuxH^i dcTtàent tomber -avec grftce et
mourir sans fSEÛblesse. L^amphithéâdre retentissait
alors de cris de joie et de baltemens de mains , dont
Tempereur du haut de son'trAne donnait le^gnal ;
et un Tafi(te tonnerre d^applaudissemens roulant
d^étage en étage , sur les gradins de Tenceinte cîrcu^
laire , témoignait à la victime expirante T^uguste
satisfaction du Peuple-roi.
Ce peuple capricieux comme toùl ce tf^ est
puissant , n^épargnait pas son superbe mépris aiul:
instrumens de ses plaisirs. On sait avec quel dédain
il traitait les mimes , les danseurs , les joueurs de
flûte et autres altistes qu^il aimait aussi avec passion.
L^honneur de se faire tuer pour charmer ses loisirs
^^appartenait qu^aux esclaves ou aux condamnés.
Spaitacus était un gladiateur originaire de Thrace.
Prisonnier des Romains et condamné par eux à cet
humiliant emploi , il brisa ses fers , se mit à la tête
d'une troupe d^esclaves fugitifs, et fut long-^temps
la terreur de Rome.
a Les duellistes , dit Sully , ressuscitent le vil
métier de gladiateur, et sont plus méprisables et
k. cnAPfTBte m. -« 10
plus redoutables que ceux qui ont autrefois porté
ce nom. » {^Mémoires, liv. XXII)%
Ces combats des anciens ) ces jeux , ces spec*
tacles, ces mœurs féroces, ces habitudes sangui-*
naires, tout cela était horrible, hideux assurément ;
mais rien de tout cela n^était encore le duel. Dans
c:et immense cortège de crimes et de barbaries que
nous a légué Tantiquité , le duel seul manque à
rappel.
CHAPITRE IV.
Le duel institution moderne. -^ La Germnnie patrie
du duel. — Invasion et partage des Gaules par les
Oenuains.^ Gonséq[uences et résultats^
Si celle manière bisarre et cruelle de terminer
les différeiis entre citoyens du m^e pays , a été
tout-à-faH inconnue des anciens ; s^il n^en eiiste
aucune trace dans les monumens historiques que
nous ont laissés les Juifs , les Grecs et les Romains ,
il faut donc que le duel ne soit qu^une institution
moderne.
Cette conséquence est affligeante, mais elle est
sans réplique. Annoncerait -elle que les partisans
du progrés en civilisation ne poursuivent qu^une
chimère?...
Ce n^est que dans la vaste contrée du centre
de PEurope appelée la Germanie , que Ton ren-
contre les premiers vestiges du duel proprement dit.
Son origine s^y perd dans la nuit des temps ; mais
elle est garantie par trop de monumens historiques
pour qu^on puisse la révoquer en doute (30).
I
l,ong~(emps irritas jtlutût que subjugués par les
Komalua , les pciiiilcs gcrmaJun prirent leur re-
vanche des les premiers siècles (le rère chrétienne.
A^rèa (le fréquentes esciirsJtins, le Y,« siècle les i
fit s'ilaiiccr civ masse de Icur.s antiques for^ts^
himber de tuutcs parts sur le colosse décrépit d& |
Rome ; cl sembbtbles à la mngieicnne de la Table ^
rajeunir le vieillard en le dépéç.inl. Les Angio- j
SaxcH» envidtîrcnt la Gruudo- Bri:[agne ; l'Italie i
6i;hutaux,lléruleseluujLLumbards; le Portugitl aitiL
Sucvcs; rE!>]>agne ans Vaiidales et aux VÏKgotlis;
Ir Toste pays des Sarmalcs , aujoiird'liui Russie j
d'tluro[»e , fut la proie des Oslrogullis , qui s^ I
Bièlèreiit aux ScjUies. ïrws tribus principales *
psrtagèrenl la Gaule , les Francs , les Bourguignons
et une partie des ^'i^igotlls. Les Francs-Salicns e| I
les Fraucs-Ripuairca se confondirent sous Clovil'l
qui fil la guerre aux autres peuplades établies avant I
hii dans les Gaules, el finit par Içs soumettre fi la 1
Kule domination des Franrs (31).
Ce mélange ne pruiîtii pas égalentent aux con-
qiiérau& el aux peuples eonquis. Les Francs s'adou-
cirent h In limgue par le commerce des Gaulois ;
mais la rivilisalion si biea commencée par les lettres
nrmaincs et la prédication du clirisljanismc s'urrêta
hnil-à-coiip , et alla en déclinant jusqu'il Cliaile-
wasuc (32)
22 -«-HISTOIRE DE5 DIKLS. -r^
Le militarisme s^établit alors daiis les Gaules
avec toutes ses conséquences. Il fut te digne père
de la féodalité , qui n'a été dès son principe ,
que le droit du plus fort sur le plus faible , du
vainqueur sur le \aincu , du conquérant sur le
peuple conquis. Il prêta long-itemps son appui à
cette formidable institution qui avait jeté dans notre
sol de si profondes racines , et qui n^cn a pu être
arrachée que par une effroyable tempête. Enfin il
mit en fuite les lettres, les sciences et les arts enfaus
de la paiK ; il régna long-temps sans partage y et
n^estpas encore éteint de nos jours (33).
CHAPITRE V.
Premère période de l'hiHloîre des duel» en Franre.
— Moyen âge. — Légalité A\x dufinii nonibaU jutli-
ci«ires. — Inllucncc des iiiœurH et drsloisgcnDnineB |
4aiu le» Gaules. — Décadence du droit romain.
Les Celles ou ArboHgènes furent les premier» ,
habîlans connus de la Gaule. Us en occupaieiit \
eiicore une grande partie au temps de l'arrivée 1
te Rotnaina. Leur origine est incertaine : eui-
m^mes la Rusaient remonter , selon Cësar (de Belto
gall. , lib. VI) , à un dieu ipi'ila appelaient D'tf , et
qu'ils honoraient comniie le fondateur de leur
nation.
Eiivîfon 000 ans avant Ksus - Clirist , eurent
Keu les célèbres eip^ditions de Sigovèse et da \
Bellnvêsc , neveux d'Ambîgat roi des Bilurïges
habîlans du Berri actuet. Ces expéditions furent
bien moins des conquêtes que de vastes éniigraliont.
Tite-LÎTc , h». V; Justin, Hv. XX, et Plularque- 1
in Camiflo en ont fait mention, Bellovcsc s'établit
CO Italie , et Sigovèse envahit la plus giniule partîé
24 —HISTOIRE DES DUELS. —
de la Germanie. Les Germains en visitant les Gaules,
onze siècles après, ne firent donc que leur rap-
porter ce qu'ils en avaient reçu. Si ce fut deSigoyèse
qu^ils tinrent la pratique du duel , ils nous la ren-
dirent avec Pharamond et Clovis. (Voyez ci-dessus
Chap. I.").
C^est dans la confusion des guerres continuelles
que suscita dans les trois siècles de la première
race , le partage du trône entre les descendans
de Clovis ; cVst ensuite à travers Fanarchie féo-
dale du moyen âge qu'il faut chercher les pro-
grés et les développcmcns de la barbare coutume
des duels. Un peuple guerrier qui votait ses l(ûs
en agitant la framée ; un peuple nomade et con-
quérant n'avait point le caractère de se plier au
joug du droit, ni le loisir d'en étudier les subtilités.
Le fil de Fépée tranchait tous les difTérens (34).
C'était le droit du plus fort dans toute sa primitive
simplicité. N'en accusons pas seulement les siècles
barbares ; c'est encore le droit de la force , ou
en d'autres termes , la loi de la nécessité , qui
dans notre Âge de civilisation , a décidé et décidera
long-temps encore bien des questions.
c( Les Germains , dit Montesquieu , qui n'avaient
jamais été subjugués , jouissaient d'une indépen-
dance extrême ; les familles se faisaient la guerre
; V. - 25
^our des meurtres , des vols , dca injures. Ou
KidiËa celte coutume en mettant les guerres sous
i dt-s rugles. Elles se firent par ordre et sniis les ycus
du magistrat ; ce qui était préférable à une licence
gin^Tale de se nuire. » Voilà ce qui explique pour-
quoi les plus anciens duels , dont nntre liisloira
iKius ait conservé le souvenir, sont des tlucU judif
€ÛIÙCS~
Le duel commença donc par Hre U-gii(; plus liird i
il ful/^/vAïèi^,' ensuite il aélé(o/m!. H est à-pcu-prè» j
liim aujourd'hui. C'csl-là que nous e:
Le duel judiciaire ou légtd fut long-temps appela ]
Jt^einenti^Z>/eu. Les Germains, comme la plupart
dct peuples barbares, étaient falaliatcs. Dca impa^ I
tunle quem adcsse bellantibus ct-ediinl , dit Tacitq |
(35). Cette opinion élait tellement enracinée dans
les mœurs qu'elle eut beaucoup de peine à céder à
l'inSueoce du christianisme , dont les principe!
d'abord mal entendus semblaient l'aulùriscr. Le
Keu des chrétiens fut long-lempa appelé le Dieu
des armées.
N'oublions pas qtic lorsqtic les Germains envaiî I
hirent la Gaule , ils n'avaient aucun usage des lettres
ni de l'écrilure (36) ; que celte ignorance se per-
ptiua lon^-teoips ; que long-temps ils dédaigncreul
26; —HISTOIRE DBS D€EtS. —
tout ce qui était romain , langue , usages , mœurs et
lois. Une chose presque incroyable , c^st qu^il ea
èlaiv encore ainsi au oommencemenV delà seconde
Face. (( Sécle d'ignorance ! s-^crie te président
Hénaut ; elle était si profonde qu^à peine les rois ,
les princes, les seigneurs:, encore moins. le peuple
savaient lire (37). »
Le recueil des constitutions impériales avait dis-
paru dans le grand cataclysme de Tempire romain
en Occident, comme on vit un siéde plus tard* les
flammes du farouche Omar dévorer à Alexandrie ,
les trésors scientifiques et Uttéraires de Tantiquité.
Le Code Théodosien qui régissait, à Tépoque de
Pinvasion desFVancs, les Gaules devenues romaines
dans toute Facception du mot , disparut alors ,
excepté dans la Gaule Narbonnaise et les parties
méridionales soumises aux Yirigodis d^Espagne ,
où quelques vestiges des traditions romaines ré-
sistaient aux ordoni>ances abolitives de Chainda-
suinde et Rccessuindle (38). Aitisi le droit romain
sommeilla dans les Gaules pendant six siècles, jus«
qu^à la découverte du manuscrit du Digeste trouvé
à Amalfi en Italie, Tan 1137 (39).
Dans ce long intervaBe , il' n'y eut d^âutre droit
proprement dit que celui du glaive , tempéré par
<|iielque8 coutumes locales. Toute question se Té«
^CHAPITRE V. -ne yi7
duisant en fait, il n^y a^ait d^aulre preuiFe du fait
que le serment, ^it de la partie, soit de ses témpins,
quand elle en ayait, ou le combat (40).
Gondebaut, d|ins sa Ipî gambette j, pub^éç à
Lyon , le 29 mars 501 , institua le combat ou plutàt
en renouvela Finslitutioii. 11 en a donné , coRune
le remarque Montesquieu , U raison dans sa loi
même : c< C^est, y est-il di|, afiii qu^on ne base
«
plus de sermens téméraires sur des faits obscurs , et
de Csux «jÇimeny sui* des faiU certain^. » U (allait
o|>ler entre le meurtre et le parjure ; de deux inau^
ou cru| ainsi choisir le inpii^drç (41) *.
s:
CHAPITRE VL
^èf^les et formalités du combat judiciaire. — Epreuve»,
du fer chaud , de Peau qhaude , de Teau froide et
de la croix..
Le théâtre du combat était un espace appelé
champ clos, autour duquel on tendait une corde
^ic personne ne pouvait franchir* Prisutiyeinent
on voyait s- élever en t^te du champ clos., une po-
tence ou uu bûcher destinés aux vaincus* Deux.
sièges tendus de noir étaient réservés aux combat-
lans qui s^y plaçaient, pour les préliminaires diib.
combat consistant en discoura, formules et céré-.
monies religieuses ; telles^ que serment sur les évan-
gQes qu^ils n^avaient ni sorcelleries ^. ni maléfices , ni
incantations y etc. , etc. ; ce dont néanmoins on<
prenait la précaution de s?as8urer par une rigou-
reuse visite.
Cela fait, on partageait également aux adversaires.
Tespace , le vent , le soleil et quelque fois des sucre-
ries et autres friandises pour leur tenir lieu de
rafraichissemcns. On visitait et on mesurait leurs,
armes; après quoi le combat commençait k uU:
[.- 29
u donné par te morèclial du camp , qui criait :
f Laissez allerles bons combatlans .' (42).
n était esprcssîmcnt défendu aux assislans aouh
des peines trés-sévèrcs , de parler, lousser, cracher^
étcmuer, et faire tjuoiquc ce soit qui put distraire
ou inlcrroniprc les champions.
Celui qui ofTrait le rombal devait jeter quelque
chose h son adversaire , ordinairement un gant qu*
celui-ci ramassait pnur marquer son acceptation
du défi. Cela s'appelait gage île bataille. Cet usage
. t'est conservé dans les duels modernes (43).
I Chacun des comljallans choisissait aussil6l , un
ou plusieurs témoins. On les appela long-temps des
parrains , et ccuit-ci appelaient les autres leur»
filatls. N'était-ce pas en effet , un baptême de sang
qu'Us présidaient?....
Ces parrains n'eurent d'abord d'autre rôle que
de reiller au maintien des régies et formalités du
I Combat. Plus lard ils durent y participer et prendre
le fait e( cause de leun Jilleul s , soit pour les appuyer^
soit pour les venger. C'est rc dont on voit encore '
des exemples de nos jours (44).
Les champions devaient , avant de commencer
le combat , prendre Dieu , la Vierge et les Saints ^
et notamment Monsieur Saint Georges, che\'atieri
que leurs causes étaient justes et qu'ils ne s'en
déparliraienl pas (45) .
80 «^HISTOfliE DES DUELS. -*
Tout cela est amplement détaillé dans de longues
formules dont on trouve la nomenclature dans la
célèbre ordonnance de Philippe-le-Bel , consenrée
en entier au 'glossaire de Ducange (46).
Les combattans assistaient à la messe avant d^en-^
trer en lice ; et souvent même ih recevaient PEucha-
ristie en forme de viatique. On trouve encore dans
d'anciens missels le propre de cette messe intitulée
missa pix> duello. Après le combat le vainqueur
revenait à Téglise faire ses actions de grâces, et
y laissait quelquefois les dépouilles de son ennemi
vaincu comme ex vota.
Les armes ordinaires étaient pour les gentils-
hommes, Pespadon, épée large et à deux tranchans,
la cuirasse , le bouclier, et la lance quand on com^
battait à cheval. Les roturiers ou vilains ne pou"*
vaient se mesurer qu^avec le bâton.
Desfontained et Beaumanoir jurisconsultes , dont
l'un était contemporain de Saint Louis , et l'autre
écrivait peu de temps après vers 1283, nous ont
conservé les diverses formalités du combat judi-
ciaire , tel que Pordonnaient encore les tribunaux
de leur temps. Non seulement le combat avait lieu
entre les parties contendantes ; mais il pouvait
s^établir aussi entre Tune des parties et les témoins
produits par Tautre. Sur un démenti donné par
«lie-ci le combat commenraît; el si le témnîn étnii
Taincti , la partie était censée avoir produit un faux
témoin, el elle perdait son procès (i7).
Ce n'est pas tout : si le procès avait ^té jugé
en première instance sur une d^osilioii de t^oîns,
la partie qui Tavail perdu avait le droit dejausicr
•Dunédiatement le jugement, en donnant aujn^
un démenti au moment où il proiionrAJt sa sen-
tence (48). Alors le combat s'engageait avec hâ.
Dans tous les cas le champion qui succombait ,
n*en ^tait pas quitte pour les hasards du combat.
Pleetehatur el m œrc et in ente. Une gmsse amende
lui était imposée à titre d'épices ou autre. De~lk
vient le proverbe : les battus paient l'amende^
Cètait BÎmi tout fa la fois qu'on appelait et qu'on
prenait son juge k partie.
Le ma^atrat de son côté , s'il n'était pas obéi ,
s'en dédommageait par un cartel (49). On pouvait
ainsi lui fau-e raison d'une résistance. L'autorité
n'est pas de nos jours d'une aussi bonne com-
ponlion ; il n'y a plus d'autres intermédiaires entre
elle et le public , que l'épée d'un sergent de ville ou
les Terroux d'un geôlier.
n n'était pas permis au vassal de fausser le
jugement de son seigneur. C'eut été une félonie ;
d'où il suit que les serfa et les vilains se passaient
32 — HfSTOIBB DES DUEtS. -«
d'appel. // ji'j fl, dît Desfontaines , entre toi,
seigneur, et ton vilain autre juge fors Dieu ! Saint
Louis introduisit l'usage défausser, c'esl-à-dirc
d'appeler sans combattre. Ce changement , dit
Montesquieu , fut une espèce de réyolution.
On pouvait en certain cas se battre par pro-
cureur , notamment quand le procès concernait des
femmes ou des ecclésiastiques. Les procureurs
n'étaient pas alors des gens de plume , mais bien des
gens d'épée très-experts en cette partie ; on les
appelait champions; et quand ils étaient vaincus ^
ils avaient le poing coupé ; soit pour mieux les
intéresser k bien défendre leur partie , soit pour
qu'en cas de défaite, on ne fut plus exposé à se
servir d'un mal adroit. Cet usage existait encore
au temps de Beaumanoir (50).
Tout cela se passait ainsi en matière civile. En
matière criminelle la partie qui succombait, soit
elle-même , soit par son champion, était pondue ou
brûlée. Et cil qui sermt vaincu, portent les éla^
blissemens de Saint Louis, si serait pendu. Dans
aucun cas la mort ne pouvait perdre ses droits.
Pendant que les champions combattaient , les deux
parties étaient gardées hors la Uce , la corde au cou,
attendant la potence ou le gain du procès , seloi[i le
résultat de la lutte (61).
— CMAMTBE VI. — 38
Un gi?nlJI1ionime pouvait appeler au combat ,
un filaùi ; mais le geiililhontmc n'était pas tenu
de répondre h Tappel du l'tVfliVi. Quelle ressource
reHait-îl ki ce dcniicr i* pPobablemenl l'épreuve du
fer cliQud , de l'eau cliBude wu de l'eau froide.
C'était bien alors le cas de l'application de cet
■doge ■-Jaciamus experimcntiim in animd l'ili.
Dans l'épreuve du fer chaud , le plaideur devait
letûr d'une maîn un fer brîdaiit. Aussitôt après on
lui bandait cette main et on y apposait un c&chet.
Si trois jours après il apparaissait de quelque brû-
lure, il perdait son procès. Les hommes de peine
aux mains dures et calleuses , les forgerons surtout,
habitués à manier le fer cbaud, devaient être ceiis
qui avaient la main la plus heureuse.
L'épreuve de l'eau chaude consistait à plonger le
bras dans une chaudière en èbullition , pour en •
I retirer un anneau bénit. Celle de l'eau froide s'ac-
\ complissail en jetant le plaideur lié et garolté dans ,
, un réservoir profond : c'était mauvais signe pour lui
s'il surnageait ; ce qui dan-t la position où on l'avait
is ne pouvait giiéres arriver sans miracle. Comme
■reau dans laquelle on jetait le patient, avait été
^ie solennellement , on pensait que puisqu'elle
Me voulait pas le recevoir
xrtaiae qu'il avait tort.
c'était une
mar([ue
84 ~ HISTOIRE DES DUELS.—
II y avait encore d^autres espèces d^épreuves non
moins ridicules , telles par exemple que celle de la
croix. Les deux parties se tenaient les bras élevés
en croix ; ceUe des deux qui les laissait tomber la
première de lassitude ^ perdait sa cause.
Charlemagne ^ dit Montesquieu , ordonna que
s^il 9unrenait quelques dilTérens entre ses enians,
ils fussent terminés par le Jugement de la Croix.
Louis-le-Débonnaire son fils, borna ce jugement
aux aCEaires ecclésiastiques. Lothaire son petit-fils ,
Tabolit dans tous les cas, ainsi que Tépreuve de Feau
froide. (Loi des Lombards, liv. 11, tit. 55, § 81)*
On verra cMprés au Chap. XLIII, qu^on a trouvé
des analogies frappantes avec ces antiques usages,
dans les moeurs de certains peuples de Flnde.
I
CHAPITRE VII.
Principaux duelu judiciaires du ^ 1.' nu XL* siècles.
Les premiers siècles de la monarchie française
•ont ceux où l'on rencontre le ntuina d' exemple!
de duels judiciaires. Peut-i^lre Taut-il l'allribuer h la
rareté de nos monumens hieloriques sur ces époqviea
reculées. Dans le petit nombre d^événemens qui s'y
Irouvenl consenès , il en est mi'me qu'on a révo-
ques en doute, comme paraissant trop s'éloigner
des idées du temps , ou peut-^-tre même des nôtres.
Ce scepticisme s'est étendu à des faits bien posté-
rieurs au cj'clc dont il s'agil ici. C'est ainsi par
exemple que de graves historiens ont écarté comme
ua pur roman la célèbre histoire du duel mi-parti
qui eut lieu, sous Charles V, entre un homme et
un cliicn. Pour nous , ce dont nous voudrions pou-
voir douter, c'est qu'un roi de France, suroommé
le Sage, ait présidé ce combnl (52).
La chronique de Grégoire de Tours , la plus
ancienne et la plus authentique de noire histoire,
ne contient que deux faits qui se rapportent nu
duel judiciaire. Le premier est lui combat réel,
)e«eoond un simple di-ii.
Ver» l'an 580 , Contran , roi de Bourgogne ,
36 ~ HISTOIRE DBS DUELS. -^
chassant dans sa Torél royale des Vosges, trouva
les restes d^un buffle qu^un chasseur avait tué. Son
forestier en accusa Chundon, chambellan du roi.
Celui-ci, conduit à Châlons et confronté à son
accusateur , lui donne un démenti. Contran alors
ordonna le comI)at. Un neveu du chambellan lui
servit de champion. Dans la lutte , le forestier reçoit
un coup de lance qui lui perce le pied. Il tombe
à la renverse , et son ennemi se précipitant sur lui
pour Fachever , en reçoit un coup de couteau qui
lui ouvre le ventre. Les deux combattans restent sur
la place. A cette vue , Chundon veut chercher uii
asile dans Téglise de St.-Marcel. Mais le roi crie
qu'on Tarréte et le fait assommer à coups de pierres.
Le même roi reprocha un jour, dans une au-
dience publique, à un envoyé de son frère Chiide-
bert II , d^avoir pris parti contre lui pour Cxonde*
vald qui se disait fils de Clotaire. Celui-ci offrit de
se justifier par le combat singuUer. Geegor. Turobt.
Lw. Xel Fil, Clmp. XIV. — Voyez la note 97.
Mezerai , avec ce duel de Chundon , en cite un
autre de la cour de Lombardie , qui sera rapporté
ci-après Chap. XXXVI. Le roi Choroalde , dit-il ,
avait trouvé cet expédient raisonnable, à propos
d'une accusation d^adullére dirigée contre sa femme
Gundeberge , et après la victoire du champion de
la reine sur son accusateur Adalulphe , il lui rendît
toutes ses bonnes grâces. Hist, de Fr. , Tom. II.
I
— nuriTiiE VII.— 37
Ce combat (-tait l'ii cll't;! hciiui.'C)ii|) plus rtiiso/f
nabie que l'autre. Mnis il rallxit aussi que le b«n riM i
Chornalde le fui extri^mement de son cAlê , pour
en coiiidilèrer le rùsultal «rooime uiu; preuve sans I
rt'^tlitpic (le la Tcrhi de la reine.
" Ce» deui eicmplca, ajoute Mcicrui , n'c
p^i^cnt que les combnls ne st.- soient autorisésn
ilsrtel, n'ayant jusqu'alors èttijue fort rares, u
Bnuttàmo raconte un combat à-pcti-près som-
kliibki celui dont le résultat Funeste au Lombard
Adaluf{>l>e, rassura si bieu le rei Cliurooldc. lient
Kru en prisenre de Louis II , dil/e Jlr-gux. (2." rat:o
877à879>.
u lojielgerius , comte de Gnstinoia , ayant M
trouvé mort un beau matie k lu'ilé de sa femme , ua
nommé Contran, parent du dijfunt, aceusa la veuve
de ce! homicifle , cl en outre d'adultère ; c% offrit de
justifier son dire par le combat. Personne ne s'étant
pr^scot^ pour soutenir la querelle de la dame,
celle-ci mauda pré»d'clle le jeune comte d'Anjeu ,
Ingclgerius, qu'eUe avait tenu sur les saiiils fonds
df bapti'mc, lui donnant le nom de »on mari, et
qui n'avait pas encore seize ans. Celui-ci accepta
le ^Kge pour la querelle de sa marraine. Ayant oiu
In mcsae , se recommandant ii Dieu , ses aiunùucs
«Ctertcs cl dislribuî'os cl s'clant garni du victorieux
38 —HISTOIRE DES DURLfi. —
signe de Ib croix , entra en lice où il trouva son
ennemi Contran prêt à Passaillir. La dame comteaa^
de Gastinois fut mandée , et furent les sermens ao^
coutumes pris d^un cûté et d'autre ; puis les deux
champions sVntrecoururent fort rudement. Contran
atteignit le jeune comte sur son escu , si fort qu^ le
faussa tout outre , et le comte le frappa si impé-
tueusement, que ny escu ny hamois ne le purent
empêcher qu^il ne lui passAt la lance tout au trayers
du corps , et Tabattit de son cheval par terre. Lors
le comte descendit et lui coupa la teste , laquelle il
présenta au roy qui Taccepta de bon cœur, et en fut
trè»-joyeux , comme s'il lui eut fait présent d^un^
cité. La comtesse fut soudain mise en pleine déli*
vrance , laquelle humblement remercia le roy et
puis vint devant tout le monde , baiser et accoler d€
bon cœur son gentil filleul , auquel le lendemam M
donna par la volonté du roy , la seigneurie de Cha»^
teau-Landon et plusieurs beaux fiefs et Chastelleniea
en Castinois, etc. »
En 060 sous Othon I.^^, empereur d^ Allemagne^
eut lieu le célèbre duel dont le sujet était le drpit de
représentation entre héritiers en ligne directe. Les
docteurs étaient partagés d'opinions. Othon , pou^
les mettre d^accord , ordonna le combat qui décida
la question en faveur de la représentation (6S).
La plupart des chartes qui furent accordées h
diverses ItM'nliWs fi rî-pocjnc de IV't)il>lis3cn)ent dca
commimcft, mciiliuiiiietil le itucl jndiriaire, dont
elles confirment l'usage et rV-glpuI les formalilés.
Telks sont relies octroyiîies par Lwjis-lc-Gros ,
eiiII28,Ji la commune de Laon ; par Philippc-
Augurte, en 1 187, i la ville de Tournai, et en I195«
à celle de Saint-Quentin (54).
Cambrai est , au dire de phisieurs historiens , ta
première inlle de France qui ail eu une commune.
UndeseaévOqucs, Godcfroy de Fontaines, publia,
m 1227 , une ordonnance réglementaire du dticl ,
«pli le suppose i-tabli depuis long-temps (55).
Non seulement les ecclésiastiques de ce temps
Paient en possession de faire des ordonnance» sur
letluel , romme sur lou! autre oljjet de police , dans
les localités soumiacB h leur pouvoir temporel ; maii
il est Tmi de dire encore qu'ils n'èttdenl pas exempta
ou-m^mes de la loi commime.
Le président Hénaiit cite une charte de 1118,
sironlèe par Louis-le-Gros , à l'abliayc de Saint-f ]
Manr-dcS'Fosêés , près Paris. Uaheaiit bellaniii et\
tMiJicanrlî Uienliam. Ce sont les termes de va
ctiBTlc (pli accorde aux moines le privilège de faire 1
' battre Iciira «erfs avec des personnes rr8n<lies (56)J
Jean d'Ypres, dans sa c/irom'rjite de Saint -Berf in,
nconic qu'au XI." Bicele, celle al)liayc avait cà i
i Mirtaur un rumbat judieiairc au village de Cau-V \
40 •* HISTOIRE DES DUELS. «<•
mont, près d^Hesdin. L^abbé dç Sainl-Berlin élail
attendu pour assister au combat ; mais il ne venaîl
point , et l^heure fatale allait sonner. Toutr4i--coup
apparurent dans les airs deux colombes blanches
comme la neige, venant dç Saint-Bertin, et voltH
géant autour du parc où se tenaient les combattans^
Le champion de Fabbaye encouragé par ce miracle
•e serait élancé dans Paréne , et après des prodigea
de valeur aurait gagné la cause de Tabbé à coupa
de bâton.
On trouve un autre trait du même genre dans le
Chronicon de Balderic , évéque de Noyon. II Iq
rapporte comme ayant eu lieu de son temps in
Demensi territorio- La contestation intéreasaîl
Fabbaye de Saint -Vaait d^Arraa. Ce combat nq
pouvait encore se passer sans miracle y et surtout
pç pas tourner au profit de Fabbaye (57)*
Dèa 831 on avait vu un combat décider en
Espagne du choix d^un bréviaire. ( Voyez cî-apréa
Chap. XXXI),
Les abbayes de Saint-Germain^es-Près et de
Saint-Martin I k Paris , eurent long-rtemps dans leurs
enceintes des Uces ou champs clos à Fusage des
duellistes. On lit dans le manuscrit de Pierre
Lechanlre de 1180 : « Çuœdam ecclcsiiç hàbent
monomachias et indicant monomachiam débets
fieri guamlo que inter msûcçs suQs, etfç^çimi^ co*
Al
fafpîMV in cwid ecclesûvy in alrio epiicopi vcl
anlûMaconi, skutjit Paiisiis. »
Au cloître Sainl-Méry, à raris, dans la uhambro
OÙ Iv rhaitître doanait audJeuce un voyait peinta
va ftlafund des champions combaltaiis , ce qui élait
une marque de haute justice (58) -
Kn de Chartres reproelie aussi fa Tan^hev^quo
île SciM, et il révoque d'OrUans, la facilité avec
laquelle il* ordonnaîcnl le duel en matière civile.
u J'ai assex de témoignages , dit Lelabnureur
erolésiartique lui-même et d'un haut mérite, par
lia titre» de six cents ans et plus, pour dire avec
certitude que les églises avaient anciennement leurs
chamfiions, et que c^est te sujet de l'inalitution des
' viJanet et des aiîvouts deg abbayes. » (^Mém.de
>Cûsudiiait, Ut. VII. )
On Ta même jusqu'À prétendre que des ecclé-
Wïtiques, au mépris des lois canoniques et des con-
iciiances de leur état, desccnilircnl en personne
■iini U lice. On cite Renaud Cbcsncl, clore de
rtrtque de Saintes , qui se baltil contre Guillaume,
inuinc de Geoffroy , abbé de Vendôme (59) ,
On trouve aussi dans les constitutions de GuiN
l»ume-lc-Conquérfinl , un texte qui dérendait aux
l'Icrcs de combattre sans la permission de leur
fv^que. tt Si clericus duetltim sitie cfiscopi ticenlià
42 *^ HISTOIRE DES DUBbS. —
Enfin Brantôme qui , pour ne pas perdre Toc*
casion d^une saillie , aime à se passer de temps
à autre quelques petits mensonges , s^est même awé
de faire d*un aumAnier de son temps un maître
d'armes. (Y. le duel rapporté en la note 70^
Chap.VUI),
Quoiqu'il en soit de ces divers exemples, dont
quelques-uns ne reposent que sur des autorités plus
ou moins contestables , on ne doit pas oublier que
les prêtres catholiques ne sont que des hommes. Il
faut bien par conséquent qu'ils soient conmie tous
autres , les hommes de leur temps. Peutr*étre qu'à
cette époque comme aujourd'hui , leur répugnancet
à en adopter les idées , les a fait accuser de former
une classe à part et d'être séathnnaires. La TéritA
est que l'esprit d'un siècle s'étend à tout et partout ^
subjugue f gouverne et domine tout. Bon gré oU
malgré , plutôt ou plus tard , il faut en subir l'iné*
vitable influence. Le clergé n'a donc pu et ne
pourra jamais se dérober à ces vicissitudes qui sont
une des lois fatales imposées à la nature humaine.
Il n'y a d'immuable que la doctrinte de TEvangile
dont les prêtres sont les ministres.
CHAPITRE VlII.
■MnrcdesdaeU judiciauva tk'[iuis lo XI.'Ki^rle
jiuquau milieu du Wl.'— Oeriiitira combni» de l-o
genre.
Dmct» le tixiéme siècle jusqu'au aciiièmc , la
Fr»ir« , ou pour mieux dire l'Kuropc ne fui k
\ proprcnniil parler qu'un vaste ramp, Coitime lus
querelles des natiuns , les difTérens des parlieulien
le vîcUienl par la force.
L^usagr du combat aurait paru s'afTniblir sur la fln
d« la première race , par suite de l'influence du
àrrgé qui cherchait k y substituer le serment. Maîa
ChaHemagne, le sage Charlemagne , fut lui-méma
obligé de le rétablir sur les remontrances que lui
adresBèrent dans une assemblée du Champ-de-Mara
les baulfl barons de l'empire (60).
Air» les efforts de ce prince, pour abolirl'ab-
furdc coutume des duels juridiques , s'étaienl brisés
contre ropposition des seigneurs de sa cour. Ou a
*u su eltaphre Yl ci-deaaus ce m^me monarque
cliercher h substituer pour sa Tamille l'épreuve de la
civir à celle du combat. Quel siècle que celui qui
44 •«» HISTOIRB DBS DUBLi. —
nous montre le fondateur de Tempire d^Occident ,
dont la 8age33e égalait la puissance ^ réduit à se
réfugier dans une pratique burlesque , pour sou»-
traire son propre sang à la tyrannie d^un préjugé
barbare I
On peut ainsi fiver Tordre chronologique de la
décroissance des duels judiciaires.
En 1041 p-èue du Seigneur. C^était une loi de
Henri I.*', roi de France, qui défendait les. duels ,
depuis le mercredi jusqu^au lundi, en mémoire
de ce que ces joura avaient été consacréa par U
passion du Sauveur (61 )«
En 1167 édit de Louis-le<Jeune qui défend les
duels pour une dette moindre de cinq sous (62) .
En 1260 édit de Saint Louis quai défend les duels
ou gages de bataille ; mais dans sea domaines seu^
lement^ Le Roi n^avait pas ce droit qu n^osait U
prendre pour les terres de sea vassaux (63) ^
En 1303 édit de Philippe-le-Bel qui défend les
duels pour toujours en matière civile (64) «
En 1306 autre édit du même Prince qui le» ré-
tablit, mais les restreint à quatre cas et en rëglç
fort au l^ng le cérémonial (65)^
En 1386 arrêt du parlement de Pajns, qui or-
donne le duel entre les nommés Carouge et Legria«
La feoune de Carouge accusait Legn« de viol auprès
•-CHiPITBE Vlîl. — 45
I mari qiù revenait de la Terre-Sainte. Legris
tàii le fait; et sur !a plainte de Carouge, le parlement
I éckeait gage et ordunnale duel. Legns
f fui tué , et dans la suite il fut reconnu innocent ,
I le président Hénaut ,, ]>ar le témoignage de l'au-
teur m^me du crime qui le déclara en mourant. On
ordonna le duel à cette époque oii il commençait à
tomber en désuétude , sans doute par ce que le
crime dont était accusé Legris n'est pas de ceux
qu'il soit facile de prouver par témoins (66) .
Dès 1256 le parlement avait déj<i ordonné le
combat pouf cause d'adultère.
En 1 354 un duel fut aus.si ordonné pour viol , et
m 1404 un autre pour crime d'empoisonnement.
»Le Théâtre d'honneur et Je chwalerie parle d'un
lomini Jean Picard , accusé d'avoir abuse de sa
propre fille , et qui , par arr<^t de 1454, fut reçu h se
ballre contre son gemlrc qui était son dénonciateur.
Les roia et les parlemens ont ordonné un grand
nombre de duels k cette époque ; ils en ont aussi
iléfendu plusieurs.
Louis-lc-Gros ( Xli." siècle) ordonna Ji Hugues
•le Crécy de se purger par duel du meurtre de
Hilon de Montlhéry.
II abolit par une cliaric de 1 1 45 , l'usage d'npréa
I lequel le prévût de Bourges devait appeler en due!
l cdiiî qui D'obéissaît pas h ses mandats (67) .
46 — HtSTOIBfi DIS DUCU. --
Philippe de Valois ( XIV .^ siècle ) ordonna aiisdi
le combat entre deux chevaliers, Vervins et Dubois.
En 1400 ordonnance de Charles VI qui défend
les dueh , à moins qu^il n^ eût gage^jugk par le roî
ou le parlement.
Monstrdet de Cambrai et Juvenal des UrsinS
parlent de cette ordonnance. Suivant ces auteurs ^
les duels étaient trés-fréquens sous Charles VI ;
et on se battait à tout propos el pour la moindre
chose.
Des arrêts de défenses en matière de duek inter-
vinrent au parlement en 1806 , 1308 ^ 181 1 , 1888 1
1334, 1342 et 1442.
. Les causes de duek se discutaient k la grande
chambre. Il en fut plaidé en présence de Charles V
el de Charles VI , les 17 février 1375, 3 janvier
1376 et 0 juillet 1896.
Le règne de Henri II commença el finit par un
combat singulier , le tournoi qui coûta la vie à ce
prince, et le fameux duel de Jamac et de X^a Chalai^
gneraye en 1547. Ce duel eut lieu avec les formes
et l'appareil des combats judiciaires. UfutTundes
derniers de ce genre et mérite qu*on s^ arrête
quelques instans.
Oiabot de Jamac et Vivonne de La Châtaigne-
raye , jeunes seigneurs de la cour de Fraafoî» !.»%
>- aiAPiTne viii. — 47
jHsquw-lh liés d'une /troilc amitié , s'6taicni pris de
querelle pour des propos indiacrcU allribués à ce
dernier et publiquement dj^mentis par Jartiac. Ils
araicDl en vain suUicité du roi la permissiua de se
battre en duel, lia furent plus heureux suus le régne
de Henri 11 son successeur , qui autorisa le combat ,
lequel eut lieu i Saint-Gcrmain-cn-I.aye, en pré-
sence du roi el de toute sa cour. La Clialaigneraye
tpô -, k TAge de 28 ans , passait pour la meilleure
lame de son temps , rerut à l'improvisle de son
^L tdveiwire , im coup <)'t^péc au genou qui le mit
^^ftortde combat. De-là le dicton populaire coup de
^Hkmac. La blessure n'était pas mortelle; mais La
^H^aUi^utrBye au désespoir d'avoir été vaincu os
^VlDuIut rcceroir aucun iccoure : il arraclia les apjia-
■ Rtb de sa blessure et mourut trois jours après (A8) .
Henri 11 alors dauphin fut seul coupable de Tin*
ibicrétion qui coAta la vie â La Qiataigneraye ,
too bvori. Celui-ci en effet ne défia Jarnac que
pour é^'îler de donner un di-menli à son maître.
Le dauphin avait répandu le bruit que Jarnae obte-
nait [es laveurs de sa belle-mére , et qu'il s'en était
*anlé à La Cbataignerayc qui lui en avait fait !a
confidence.
On peut voir dans les commentaiivs de Lelabou-
reur, iur Casteinau (liv. VU, Chap. I."), les différons
cartels de déS échangés entre les partiça et surtout
48 -—HISTOIRE DES DUBL8. -—
le procè8-Y6rbal curieux et très-détaillé , qui fut
tenu du combat par les greflBiers et hérauts d^armes.
ce La Chataigneraye ^ dit-^il , était en estime de la
meiOeure épée du royaume^ et les mains lui déiitaii«>
geaient contre tout ce qui prétendait à la dendért
Taleur« »
Les suites funestes de la blessure dé La Chataî^
gneraye sont mèaie encore du Sait de Henri II , qui
au lieu de Caire cesser la lutte aussitôt après que mm
favori fut mis hors de combat, hésita long^tempaà
le recevoir des mains de Jamac qui Fen supplia à
plusieurs reprises en lui disant ; Sire, je vous le
donne ^ prenez4e pour Dieu et V amour que vous
tavez nourri ! Et le roi ne répondait pas. Pendaol
ce temps La Chataigneraye , qui conjurait en vam
Jamac de Pachever , perdit tout son sang ; ce qui
ne contribua pas peu à rendre sa blessure mortdie.
Enfin Henri II finit par dire à Jamac : Je Vœcepie ;
et en Tembrassant il ajouta : Fous a^z combattu
en César, eï parlé en Aristote.
Une circonstance singulière de ce duel , et qui
montre avec quelle faciUté on mettait alors Tèpée
à la main , c^est qu^il donna lieu à un autre combat
plus malheureux encore , entre deux officiers Piè-
montais qui avaient connu La Chataigneraye , et
qui, sur les premiers bruits qui coururent en Piémont
de sa mort , à laquelle personne ne voulait croire ,
— ciUpriKE VIII.— 49
■ M donnèrenl réciproqucmeiit dus démentis , ae
biUircnl et ■Vntretuérenl (69) .
Heim II qui avait lanl de rcpioches k se faire
relativement k la funeste querelle de Jarnae et
La Chataigncrayc , parut telkmenl touché de la
perte de son favori, qu'il fit serment de ne plus
■uloriser ces oortcs de combats.
Ce serment, dit Voltaire, Essai sur les mœurs,
I WK l'cmpécha pas de donner deux ans apri-s , en
il privé , des lettres patentes par lesquelles il
il enjnînl à deux jeunes gentilshommes, nommés
'jlles el d'Agaerrc, d'aller à Sedan se purger
par duel de certaine accusation qu'on n'ose Jndi-
({uer en boime compagnie. Le monarque croyait
ne pas te parjurer en ordonnant de se battre ailleurs
que dans son royaume. Brantôme qui raconte avec
n DÛvet^ ordinaire toutes les particularités de cette
ithire , dans ses Mémoires, ne donne pas les mêmes
loftsàHenri 11(70).
Ce qui est à peine croyable, c'est que la première
loi qui ait paru k nette époque contre les duels
toit si^ée de la main mi'me qui souscrivit l'ordre
de la Saint- Barthèlémi. Par un édit de 1569,
Charlea IX les défendit , avec réserve néanmoins
lit les autoriser eu connaissance de cause. Il jugea
50 *— HISTOIRE DES DUELS. —
bon d^user de sa royale prérogative dans une cir-
constance où il s'agissait d'une accusation de cons-
piration. Le cas en eCTei était sérieux. Pour un
politique tel que Charles IX , un duel devait être
un merveilleux expédient de se débarrasser hon-
nêtement d^un ennemi et peut-être de deux k la
JTois y ce qui précisément failUt d'arriver. Le com-
bat fut donc autorisé. Le roi voulut même s^eti
donner le spectacle et en faire jouir toute sa cour,
selon l'ancienne coutume à laquelle il eut été
extraordinaire que Charles IX voulût déroger. Les
circonstances de cette affaire ont été rapportées
par d^Âudiguier , dans son livre intitulé : Le vray
et ancien usage des Duels. Lelaboureur qui men-
tionne aussi ce combat dans son Commentaire, sur
Castelnauj liv. XI , civap. H, le place sous le r^ne
de Henri III. C'est sans doute une erreur. D^Âu-
diguier écrivait en 1617 p^u après Tévénement, et
doit en être cru préférablement. Son récit annonce
d^ailleurs que c'est lui qui est l'historien original.
Albert de Luynes , gentilhomme de la cour , avait
été dénpncé comme conspirateur par le capitaine
Panier , exempt des gardes - du - corps , à qui
il ofifrit de se 'justifier par le combat, ce qui fui
accepté. « Ils se battirent au bois de Vinccnnes,
dit d^Audiguier , selon la mode de ce temps. Je n'ai
point trouvé ce duel en aucune histoire ; mais je le
-CHAPITRE VIII. ■
51
»
n \\eu\ gentilhomme de f rovence qui estait
(lors à ta coiir, le quel n^a clitl que chacun |)»rianl
desjà la perte de Luynes , Panier hiy donna un fen-
dant sur la teste qui , outre la playe qui fut grande
et presque mortelle , luy Et ployer le genouil k
Icrre ; el <ltic les parrains accounirent pour les sé-
parer : Luynes les provenant , luy porta une si
niide estocade au travers du corps , qu'il Testendit
mort sur place (71)- »
Ce duel parait être le dernier qui ait eu lieu avec
des formes officielles. Ce serait donc Charles IX
qui aurait clos cette hce de meurtres juridiques
ouverte en France pendant onie siècles. C'était un
honneur qui lui reTenait de droit-
J'aroue que j'ai long-temps hésité k admettre ce
trait aixtsî que cous qui précèdent , au nombre des
iaéia judiciaires propremenl dils. Je ne m'y suis
d^enniné qiie parcequ'ils ont toujours été con-
sidérés comme tels par loua les auteurs , dont la
plupart ont même cité le combat de Jarnac et La
Qialaigneraye , comme le dernier de ce genre qui
ait eu lieu en France (72) . Il me semble que la fin
des véritables duels jiidiciair-es , c'est-à-dire, de
ceux qu'ordonnait la justice pour terminer les
procès, remonte !» une époque plus éloignée.
Celui qui eut lieu en !386 , a<»ii8 Charles VI , enhe
52 — «CSTOIRE DES DUELS.—
Carrougcs et Legris , en Tertu d^un arrêt du par-^
lement, et dont il a été parlé ci-dessus^ p^e ^t
pourrait justement passer comme ayant coinmelncé
cette période décroissante. Duclos s^exprime ainsi
à ce sujet dans les Mémoires de V Académie des
Inscriptions : « Le duel de Garrouges , précédé de
quelques autres ^ fit enfin proscrire le dud. Du
moins il cessa d^étre juridique, quoiqu^n en
Irouve encore d'autorisés sous François 1.®' et
Henri 11. » Duclos va trop loin à mon avis. Le
combat judiciaire fut si peu proscrit alors qu'en
1409 , Qiarles Vl fit une ordonnance pour réserver
au roi ou au parlement le droit d'autoriser le gage.
U est certain seulement que les cours de justice
n'en ordonnèrent plus que très-rarement , comme
on l'a vu ci-dessus au chapitre VIII (73) .
Dès les commencemens du seizième siècle les
•
rois seuls usèrent en France du droit de juger
les gages de bataille , qui devinrent ainsi un cas
privilégié. On pourrait faire de cette espèce de
duels , une classe particulière qu'on appellerait
duels roj€uix > mais j'ai préféré les laisser dans la
catégorie des combats judiciaires , puisque c'était
comme souverains dispensateurs de la justice que
les rois autorisaient ces sanglantes aprei/i^e^^ jugeant
eux-mêmes le procès d'après les résultats.
François I.*/ a eu le triste honneur d'exhumer
— CHAPITRE VIII.— 53
eette vieille prérogative royale , pres<{ue oubliée
depuis des siècles et dont ses prédécesseurs avaieol
jusqu^alors usé si rarement. Il a ordonné et présidé
plusieurs combat» en champ ctos dpnt je renvoie
les détails aux Éclaircissemens historiques (74) «
Ses successeurs Pont imité , |usqu^à Henri III qui
parut prendrQ le^ duels eu aversioii > après qu^ils
lui eurent moissonné quelques-uns de ses Cavoris.
Je reviendrai sur les duels du 16.^ siècle au cha-
y^\xt Xy I ci-après*
«s
CHAPITRE IX.
Tournois et joutes. — Leur esprit *, leur origine ; leurs
progrès. — Leur fin commune avec les duels judi-
ciaires.
Je crois devoir dire ici quelque chose des joutes
et tournois , simulacres remarquables des duels y et
qui furent au moyen âge ce qu^ont été les jeux
gymniques dans Tantiquité.
La galanterie qui n^est point Tamour , comme dit
Montesquieu , mais le délicat , le léger , le perpétuel
mensonge de Famour y présidait d^ordinaire à ces
sortes de combats. Ds donnèrent naissance à la
chevalerie qui eut une si grande vogue en E^agne ,
jusqu^à Tépoque où le célèbre roman de Don
Quichotte lui porta un coup dont elle ne se releva
pas (75).
Dans les tournois on combattait en troupe ; dans
les joutes qui souvent leur succédaient , on com-
battait deux à deux. Les joutes s^appelaient Pas
d*armes et plus communément Table ronde* On
peut voir dans Ducange , la description de ces
divers combats. Il parait que le nom de Table ronde
1 de ce cpi'apri^s le combat , vein qui y avaient
)mfl pari , venaieot soutier autour d'une (ahic ronde
chea l'auteur de la jollle. Ne aerait-ccpasià l'origine
de PusBge, qui existe encore de nus joiiru, de sceller
à table li:9. réconcilia ti ODS qiii Tort heureusement
pré\îennent ou terminent la plupart de nos duels i^
Je dois dire pourtant ijiic les Aaglaûs réclament,
pour le fabuleux Arthua , roi des Drctons , le Ro-
mulus de b Grande-Bretagne , Thonneur de l'în^
lentiou de la Table roitth- (76) , On montre encore,
lu lieux château de Winchester , une table de cette
forme i]u'un lui attribue. Mais plusieurs de leurs
tiistoHcns , tels que Cambdeii et Thomas de WaU
■ingham , l'ont trouvée d'une fabrique plus récente.
No< loijdns d'outre-mer ont toujours eu tm goût
déc»dé pour se donner des breveta d'invention.
Nous leur <lisputon9 avec avantage celle du jury ;
laixun& leur celle de la Table ronde.
Quelques auteurs ont altribuô l'invention des
Inumois il Henri !.•', roi de Germanie ou d'Alle-
magne , (\u\ régna de 876 h 936 , et qu'on a sur-
oommè f Oiseleur, h cause de sa grande passion pour
la chasse, D'autres en ont fait honneur à Geoffroy
de PreuiHj , mort en 1066; mais il parait rpie
eelui-ci fui scuicmeni le rédai leur du code de luis
il» Ipurnuis (77)
56 —HISTOIRE DES DUELS.-*
Quoi(|u^il en s>oit de ces divemes opinions dont la
solution est assez peu importante , il parait certain
que Tusage des tournois était connu dés les premiers
temps de la seconde race , puisqu^il est Cedt mention
d'un combat de ce genre qui eut lieu Ters Pan 858 ,
dans une entrevue à Strasbourg, entre GharlesJe^
Chauve et son frère Louis-ie-Germanicpie y roi de
Bavière (78). Cependant cet usage ne devint com<r
mun en France qu^au onxième ^ècle. De là il se
répandit en Allemagne et en Italie , vçrs 1130; en
Espagne et en Angleterre, ver» 1140, et dans le
Bas-empire, vers 1326. L^empire grec n'adopta que
très-tard les tournois. L'empereur Andrpnic i^yanl
épousé, en 1326, une princesse de Savoie, quelques
jeunes Savoyards donnèrent le i^ectacle d'un tourv
noi à Constantinople. Le» Grecs depuis lors s^ae*
coutumèrent à cet exercice militaire, qui cependant
pe leur apprit pas à résister aux Turcs (79).
Les champions dans les tournois, étaient bardé»
de fer. Le plus souvent on combattait à fer émoulu.
Quelquefois aussi on n^employait que des lance»
et des épées à la pointe émoussée , qu'on appelait
glaiues couriois. hfi but, le sublime et Iç couron-r
nement du combat était de rompre li^ lancç à forcQ
de s'en frapper. Malgré la solidité des armures et
l'épaisseur des cuirasses , il n'arrivait que trop SQU.-»
— ClUPiTRC IN.— 57
ml de graves acddens dans ces dangereux exer-
ices. Une foule de grands aeigncurs du temps j
bcrdirent la vie ou furent plus ou muîns griëvcmuiit
I, Un ambassadeur Turc qui assistait k un de
■ specTtacles , sous Charles VU , en parut fort sur-
pri» , el dit avec un grand sens pour un Turc : qu«
li c'éiail tout de bon , ce n'était pas assez et que
^m^ e'cUiil an jeu , c'était tiop (80),
^^K Od trouve dans le célèbre coneile de Rheinis , de
^^1148, deux canons remarquables, dont le G-^dé-
^H Icticl aux ayocals de prendre ou exiger desplaideur»
^f'wi'deUi de la taxe , et l'autre le l^.*^ défend les joitte»
et loumois ; le tout sous peine de privation de la
lèpulture ecclésiastique. Cette prohibition a plu-
sieurs fois été renouvelée depuis , notamment par
les papes Alexandre II , au concile de Latran, et
Qtmcnl V, d^os celui de Vienne (81).
Le danger de ces luttes simulées , pas plus que
tes censures ecclésiastiques, ne purent empêcher
divers monarques d'y prendre par).
En l'an 1274, Edouard I.*', roi d'Angleterre ,
t la létc de plusieurs anglais , combattit , k ChcUons-
lur-Saàne , le comte de Chùlons accompagné d\m
pareil nomlire de Bourguignons : plusieurs des eom-
balUns restèrent sur la place. On appela <'e combat
I i» i>clite guerre île Chàtom (82).
58 — HISTOIRE DEfi DUBL6. — •
En 1200 , Philippe- Auguste exigea de Louis et
de Philippe ses deux fils , le serment solennel de
n^aller en aucun tournoi (83).
Il y eut un grand nombre de joutes et tournoi^à la
cour de Philippe-le-6on , duc de Bourgogne , pour
réducatio^ de son fils le duc de Charolais , depui»
Gharles-le-Téméraire. Voici le récit fort original
qu^a fait Olivier de la Marche, écrivain contem-r
porain, d\ine joute entre ce jeune prince et messire
Jacques de Lallain , célèbre jouteur de ce temps.
(c Par délibération des seigneurs et dames de la
cour, ils furent montés et armés au parc de Brucelles
où furent le bon duc et la duchesse présens à cette
espreuve. Lances leur furent baillées; et à cette
première course le comte férit messire Jacques en
Tescu et rotnpit sa lance en plusieurs pièces : Et
messire Jacques cotfrut haut , et sembla au duc
qu^il avoit son fils espargné , dont il fut mal content^
et manda ^udit messire Jacques que s^'il vouloil
ainsi faire il ne s''en meslAt plus. Lances leur (ùreni
irebaillécs, et se rencontrèi^enl si vivement qu^ila
rompirent leurs lances tous deux en tronsons : El
de ce coup ne fut pas la duchesse contente du dici
messire Je^cques, mais le bon duc a^enrioit. Ainsi
esloient le père t\ la m^re en diverse opinion : Vusk
déaroit TespreuTe , Vautre la seure^ë. » Mémoù'es ^
lii'.I.^, c/Kip.II (84).
I
— Cii*piThF. is. — lia
Charies VI comballtt en personne , dans un tour-
('ambrai , en 1385 (85) ; François I."', en
1620 , cnlre Ardres et Guiiics : enfin Henri 11 , en
1559 , à Paris , on il fut bl«ssé par le cnmte de
Mont^onierT. capitaine de ses gardes , d'un éclat de
lance à l'œil dont il mourut 002e jours après (86) .
Cet accident ne mit pan euiore un ternie h la
nanie des tournois. Un an après la mort de Henri II,
OD nouveau tournoi eut lieu k Orléans , et rnùla la
\ie an prince Henri de Bourbon-Montpensîer qui
mourut des suites d'une cbùlc de cbeval. Il y eut
missi un Pas d'armes entre Charles IX et son Frère
Henri m , lin an après ta Saint- Parthèlèmi. Mais 01^
ne combattit pas à fer ramulu (87).
Enfin Henri IV hii-méme eut la faiblesse d'aiiv
loriaer une joute et d'y assister. Ce combat, par
son objet et ses circonslances , Tut presque im »èrï-
lable duel. H eut lieu entre le duc de Gutse et
Pasdompierre. S'il faut en croire cebii-cî dans ses
Mi-muires , année 1605 , il aurait eu Tbonneur ou le
malheur d'inspirer de la jalousie au roi au sujet de
la belle d'Enlragnes ; et ce serait par pure court!-
sannerie que le duc de Guise aurait entrepris ce
combat. 11 eut lieu dans la cour du Louvre , qu'on
dépava à cet effet. Bassumpicrrc reçut dans le venlre
un tronçon de la lance de son adversaire plus long
que Iç bras. Ses entrailles sortirent , et chacun le
60 — HISTOIRE DES DUELS. —
crut mort/ Il eut toutefois le bonheur de guérir,
u Ce spectacle ^ dit Basnage qui mentionne cette
joute j fit horreur à la cour , et le roi ne Toulut plu»
en donner de semblables. )) C'est en effet je pense
le dernier qu'on connaisse. On ne vit plus depuis
tors que des carrousels. (88) <
Les tournois y comme les jeux gymnique» des
anciens, paraissent avoir eu un but politique » celui
d'entretenir les peuples dans l'amour de la guerre
et en même temps de fortifier leurs corps et de les
exercer au maniement des armes. La vie de nos
ancêtres était une guerre perpétuelle : ches eux la
guerre était l'état normal ; habituellement elle avait
lieu en réalité sur les champs de bataille , et pendant
leurs courtes trêves en fiction dans les tournois.
C'est bien d'eux qu'on pouvait dire à juste titre :
MiUtia est vita hominis super tcynvn* (St. -Paul) .
Les tournois vécurent en France à-peu-près ce
que vécurent les combats judiciaires , et ils diqia*
Furent avec eux (80) .
CHAPITRE X.
Cbnp d'œil gcaéral sur les sièckn do mo^en l'igo
relativement an duel, — Lullc «le l'esprit religieux
pt féodal. — Itévolutioii uu 12.' siècle duns les
lois el dans lee mœurs. — Croisades. — Rcnaia-
Mnce du droit Romain.
L'vMee des combats judiciaires et des lourooia
M s^éleîgnit qu'insciisiblemenL et apros une luUe
de orne siècles entre l'espril religieux el la puis-
amce Kodale. Nous nous arrêterons ici quelques
tiuCana devant l'imposant spectacle de ce grand
duel, dont les chances furent diversement balancées
pendant cette longue période. C'est un sujet qui
loe parait digne d'un haut intérêt; car le duel ju-
riitique a été l'allribut dislinctif et le caractère le
plus saillant du moyen Sge. 1! peut presque il lui
seul en résumer toute l'histoire (90).
L'esprit du moyen Age fut éminemment guerrier.
On peut dire que les guerres privées , civiles ou
Hrangères le remplissent tout entier, à tel point
qu'une année peut-être ne s'est pas écoulée dansl'élal
(le paix. Cet esprit a passé naturellement dans toutes
62 — ntSTornE des dueis. —
les inslilulions , el comme les seigneurs du temps
sV'taient emparés de bonne heure du droit de rendre
la justice , dont il se firent ensuite conjointement
avec les fiefs une possession héréditaire , tous les
procès se jugcaint par eux militairement. Cette
grande usurpation de la puissance féodale ne date
réellement que de la fin de la seconde race. On a
depuis long-temps fait justice de Terreur qui Pavait
reportée à Tépoque de Pinvasion des Francs. Il est
certain qu^elle n^a pas eu une source aussi noble
que le droit de conquête (91).
Tout cela a été parCaitement èclaîrci par le judi-
cieux auteur de V Abrégé chronologique de Phistoire
de France. Quelques lignes de son lumineux ou-
vrage en apprennent plus sur ce sujet que les
longues dissertations de Mably , et même que plu-«
sÂeurs chapitres de Montesquieu qui n^a pas tou-
jours traité clairement ces points d^ailleurs si obscurs
de notre histoire (92).
« Sous la première race , dit le président Hé-
nault, et long-temps encore sous la seconde, les-
ducs et comtes , en qualité de gouverneurs dans les
provinces , administraient tous les droits royaume et
souverains dans Pétendue de leur duché ou' comté.
Ils donnaient les bénéfices militaire» quand vaca-
tion arrivait , jugeaient par jugement souvefmn les
appellations des centeniers , qui étaient les juges
— CnAPITRE 3t.— 63
ordinaires établis pnr le roi. Mais c'était toujours
ait ODin (lu Roi, parce qn'alnm i) n'y avait point
daulre justice que la royale Lorsque ces ducs
ri comtes profilant de In Taiblcsse du gouvernement
Kirrnt ériçc leurv offices eu propriété et patrimoines
hérèJtiaircs , ers m^mcs. droits , leiir dcmeurérenl.
Alors toutes les mar(|ues de TaTitoritè royale furent
cIEicées dans les provinces , excepté dans celles
({ue possédait Hugucs-Capct, comme duc et comte,
lorwju'il parvint k la couronne ; et à ces marques
de l'uilorité royale îa\ substitué un droit seigneu-
rial, rt
Lea centcnicrs , juges de première instance ,
hrenl bientôt remplaci's cux-mi^-mes par des sei-
gBCuneasuus ordre, tpii, par arriére délégation,
•e dièchsrgèrent de ce soin sur des baillis , hommes
de 6efc, etc. ; en sorte que l'usurpation fut com-
plète (03)
Comme ces mêmes seigneurs avaient Gdélement
cooMirè la tradition des mœurs Germaines rela-
lÎTCiBent au duel , ils trouvaient bon d'expédier
par celle voie la plupart des causes dont ils s'étaient
constitues ju{i;es souverains. U y avait encore un
autre moUf non moins déterminant pour eux de
procéder ainsi , c'est que n'ayant aucune teinture
de* lettres ni de l'écriture , encore moins dos loîa
cl de la jurisprudence , ils ii'avaienl guéres d'aulre
64 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
moyen d'exercer leur office , que de faire ballre
les plaideurs pour les accorder ainsi par le meurtre
de run d'eux (94).
Auprès du corps féodal , il en existait un autre
plus nombreux peut^tre y mais beaucoup moins
puissant , c'était le clergé. Ce corps se divisait en
clergé séculier et en clergé régulier. Les clercs
séculiers étaient les ecclésiastiques préposés au gou-
iremement des diocèses et des paroisses ; les régU"
liers ceux qui vivaient sous une règle monastique.
C'est des premiers que je m'occupe plus particu^
liérement ici.
Le clergé chargé d'une mission de paix et de
conciliation parmi les hommes , devait envisager
avec répugnance et même avec horreur la juris-
prudence du combat si chère aux seigneurs. Eccle'
sia ahhorret sanguine. Aussi y eut-il de sa part
opposition , et une opposition ancienne , unanime
et persévérante contre l'usage des duels et tout ce
qui y ressemble. Je prie qu'on ne voye pas de con-
tradiction entre ce que je viens de dire et ce que
j'ai rapporté des duels ecclésiastiques au Cliap. VI!
qui précède. Ces exemples fâcheux sans doute ,
n'appartiennent pas , quoiqu'on en ait dit , au corps
entier du clergé ; c'est ce qui sera plus amplement
démontré au cliapilre XII ci-après ; Ils venaient
— chamtbe X. — 65
plus parliculiéremciil des clercs réguliers des ab-
bayes , donl l'esprit el les intérêts temporels ne
sympatliisaieul pas toujours avec celui des ecclé-
nastiques séculiers. Ou verra d'ailleurs ci -après
combien était absolue el tyrannique l'autorité qui
avait inrroduil et qui soutenait le duc!, malgré toutes
les oppositions. On »erra que celle forme de pro-
céder fut imposée de force bu clergé lui-même ,
pour le punir de sa résistance (Ô5).
J'ai dit que l'opposition du clergé a été a
unanime et persévérante ; j'ajoute qu'elle a été efB-
cace. En voici les preuves principales (96) .
Grégoire de Tours , contemporain et ami du
ptpe Grégoire-le-Grand , fut un des prélats les plus
Shutres du clergé de France. II est le pérc de notre
hbloire : on ne sait sur nos premiers rois que ce
qa*U nous en a appris. Ce prélat, qui écrivait au
6.' âccle , n'a pas ménagé les usages de son temps
rctatiGi aax épreuves judiciaires , quoique celle du
combat fut fort rare alors , comme l'a remarqué
Me«r«. r.ci-^^.^m,i,pase37 (97).
Parmi les autres eccKsiastiques dont les écrits
témoignent de la même opposition , nn remarque
Âvitus , archevêque de Vienne en Dauphiné , et
neveu de l'empereur Romain du même nom.
Ce prélat , issu d'une famille illustre d'Auvergne,
5
66 — mSTOIRB DES DUELS. —
a laissé plusieurs ouvrages les plus anciens de notre
histoire. Il contribua à la conversion de Qovis,
et mourut en 525 (98).
Trois siècles après , Agobard , archevêque de
Lyon ^ publia plusieurs écrits contre les divers
genres d^éprem'es qui avaient repris faveur , et
notamment contre le duel. Le recueil de ses œuvres
contient une lettre qu'il écrivit à Louis-le-Débon-
naire , pour lui représenter les abus de la preuve
par le combat , introduite en Bourgogne par la loi
Gombetle, Il supplie le roi de permettre qu'on y
suive les formes de jurisprudence établies par la
loi ScUique ou la loi des Francs , qui , à la différence
de la loi des Ripuaires , dont Tédit de Gondebaud
n'était qu'une nouvelle édition , n'admettait pas
les preuves négatives et par conséquent le combat:
ce Si placeret Domino nostro ut eos transferrel ad
legem Francorum (99) . »
Les actes des conciles , qui avaient une autorité
bien plus étendue et plus positive que celle des
écrivains et même des rois , n'ont pas plus ménagé
les duels que les tournois. Dès 855 le concile de
Valence et en 994 celui de Limoges fulminaient
des anathèmes contre les duellistes de toute espèce.
Ces censures furent renouvelées souvent depuis
lors par les papes Nicolas L«' , Alexandre III ,
— cihhthe X, — 67
"CélcsUo m, Julc-8 U, et, en 1563, par le concile
tle Trente. Le chapitre XIX de (a 24.'"* acssinn cpii
contient celte prohibition appuyée d'une excom-
munication contre les rois qui pcrmeltaientlesduelB,
ne Dit pas reçu en France. Le roi Charles IX , qui ,
dans son édît de 1560 , s'est réservé dVutoriser
kc duels en connaissance de cause, fil protester
par 9o» ambassadeur Duferrier contre ces dispo-
àlîoiiB , comme attentatoires à ses droits et h son
honneur, et ce de l'avis des gens du roi et du
pariement (lOO).
Les autres genres d'épreuves judiciaires , telles
^que l'eau , le feu , la rrnix ont aussi été fa diverses
^KKpics l'objet des censures ecclésiastiques. « Si
fon trouve, dit Ducloa, un canon du concile de
Tholi , en 895 , qui les tolère , c'était povir ne pas
heurter absolument les lois civiles qui les ordon-
^_ aaienl. Le pape Etienne V, au neuvième siècle, les
^Vttndaoma comme fausses et superstitieuses, et Tem-
^PîtteuT Frédéric II les défendit comme folles et
n ntlioiles (101). n Ces prohibitions ontétèrenou-
Telè« au douzième siècle par les papes Innocent m
clllonorîus 111.
On a vu ci-dessus , pages 34 et 43, les cfTorls
qu'avait faits Cl larlemagne pour éteindre la fureur
tles fruerres privées , et substituer d'autres formes
judiciaires k IV-preuve du combat. Les capitulaires
PI-
T,
08 ** histoihe des Dinets. -«
de ce prince annoncent assez quMl cédait en ceU à
un sentiment religieux, qui remportait chez lui sur
Fesprit du temps (102) . Ce ne fut pas le seul de nos
monarquen dont le génie devança son siècle. Le
règne de ce grand prince fui comme un accident ,
une sorte dWachronisme au milieu des siècles du
moyen âge. Son flambeau jeta un éclat ai yif et si
pur au milieu de ces ténèbres palpables , qu^il fut
pris d'abord pour Taurore brillante de cette antique
civilisation grecque et romaine , dont on rêva un
instant le retour. Mais il s'éteignit avec lui , et il ne
resta de l'apparition de ce magnifique météore que
l'éblouissement qui suit le lumineux éclat de la
foudre au milieu d^un sombre orage (103).
Depuis cette époque , l'histoire nous a conservé
un précieux monument de l'influence de l'esprit
religieux pour ramener en France la paix publique
qui en était bannie depuis si long-temps ; c'est la
Treize de Dieu y Tréuga Dei, espèce d'ordonnance
ecclésiastique dont les divers points furent arrêtés
dans un concile tenu à Toulujes en Roussillon , en
l'année 1041. On composa en quelque sorte avec
le désordre ; on fit la part aii feu, et à cette hu-
meur inquiète qui fermentait incessamment dans les
têtes féodales. 11 fut arrêté qu'aux grandes fêtes de
l'Eglise et depuis le. mercredi soir jusc^u'au lundi
matin de chaque semaine, on s'abstiendrait de
m"'
69
l^Qnne^ suite à aucune querelle . Tout combal , toute
me de fait étaient al»ra si-vcrement interdits (104).
« Ce Téglement , dil Robcrtson , qui n'était
faburd qu'une convention parliculicrc à uaroy-
Mime , devint une loi générale dans toute la chré-
lieiité. Elle fut confirmée par l'autorité du pape qui
!naça des feudrea de rescùmmumcation quicon-
que la violerait. »
Plus loin il ajoute : « Une suspension d'hostilités
pendant trois jours entiers de chaque semaine ,
doanaitaus jwrsonnes oflenscca., un intervalle assez
coundi-rable pour laisser calmer les premiers mou-
rcmena du ressentiment ; de aorte (j^uc si celle Ti'èfe
f^ Diuu avait été esactcmcnt observée , elle eut
:iil-^tre suffi pour arrêter le cours des guerres
invées. Mais it en arriva autrement; les nobles,
égard à cette Tivis, poursuivirent leurs que-
lle» comme auparavant. 11 n'y avait point d'enga-
leut capable de contenir l'esprit de violeoce qui
i\ la noblesse » (105).
Le savant et iudicieuic auteur de / Histoire de
(luuies-Quint , que je viens de citer, a commis à
Bnin avis une erreur en attribuant \ Henri I ."' , roî
d'Angleterre, la première ordonnance restrictive
lie* duels judiciaires ; c'était sans doute Henri \." ,
i»i de France qu'il voulait dire ; car c'est sous le
rgne de ce prince que lut Taite la Tiim de Dieu on
70 — HISTOIUE DES Dl'KT.S. —
du Seigneur , et le président llénault en la citant
romme une loi du royaume , Ta rapportée à Tannée
1041 , ainsi qu'on Ta vu ci-dessus, page 44. Je crois
d'autant plus nécessaire de relever cette erreur,
que si la France esl peut-être la contrée de l'Europe
où les combats judiciaires ont eu le plus de vogue ,
elle est aussi Tune des premières qui en ail aban*
donné Tusage. Elle a du moins bien décidément cet
avantage sur rAnglcterre , ainsi qu^on le verra au
chapitre XXVIll. Voyez aussi le chapitre XXIX
relatif aux duels en Danemarck (106) ,
Un autre événement bien plus important , déter-
miné par Tesprit religieux , arriva tout à la fin du
11.^ siècle et prépara la grande révolution morale
qui s^accomplit dans le cours du 12.® : je yeux
parler des croisades. La première eut lieu en 1000 y
et la huitième qui fut la dernière finit avec St-Louis,
en 1270.
UEufo/je en tic te, a dit dans son style oriental
la princesse Anne Comnène , paniissait comme ar^
rachêe de ses fondemcns et prêle a se pfécipiter sur
VÀsie (107). Six millions d'hommes, suivant les
auteurs contemporains , prirent part à ces diverses
expéditions. Le bruit s^était alors répandu que la fin
du monde allait arriver, et il avait merveiUeusemenI
disposé les esprits aux prédications du célèbre
— CHAPITRE X.— 71
Pierre l'Heraiile- -La proposilion de la première
trciiuido fui faite en mars 1095, par le pape Urbain 11,
conrile de Plaisance qu'il présida el auquel
«aistèrect plus de (rente mille personnea. Elle Tut
lenouTelèe au mois de novembre suivant , à celui
de ClennoRt en Auvergne , qui tltait plus nombreux
encore ; et le mthne pape y fit sur la grande place
de la ville un discours qui produisit uti lel cntliou-
, qiie les assistaiis s'écrièrent tout d'une voix :
Dieuleveul! Dieu te veut .'
On ne perdit pas de temps : la première eupé-
dibon se mit en marche le 15 août 1090, sous les
iVnlres de Godefroy de Bouillon , doc de Lorraine ,
qui menait il sa suite une arm<^e de cent mille bom-
presquc entièrement composte de l'élite de la
koblesse d© France et d'Allemagne. Enseplembre
uhant, Uugues-le-Grand, fils de Henri l."' , roi
de France , partit avec le reste des principaux sci-
|^i«un du pays. Ces deux expéditions se grossirent
H M recrutèrent considérablement dans toutes les
parties de l'Eiirope qu'elles traversèrent avant d'ar-
mer en Palestine.
Lorsque les Croisés se furent élabKs dans ce
paya , ils s'occupèrent de rédiger un code des loîa
et coutumes «ju'ils suivaient en Fran<re. Ils n'ou-
Wièrcnl pas surtout le combat judiciaire dont les
(liiCTSes formalitîiB furent soigne usemciil réglées.
72 — HISTOIRE DES DUELS. —
Oïl appela ce code : Assises tl bons usages du
ro jaunie de Jérusalem. Il fui composé ep 1009, la
même année que le litre de rpi fut déféré à Godefiroy.
de Bouillon (108).
Cette frénésie des croisades , qui avait saisi en
même temps toute la noblesse européenne et qui
dura deux siècles , fut le premier coup porté à la
puissance féodale. Une foule de sei^eiirs, pour
subvenir aux frais de ces expéditions y vendirent
à vil prix des affranchissemcns à leurs serfçi, aiovi
qu^une partie de leurs droits utiles et même leurs
héritages , en vertu d^une autorisation spéciale qui
leur fut accordée par le roi avec divers autres pri-:
viléges et exemptions. Pendant Tabsence de ces no*
blés aventuriers , les peuples respirèrent. Un grand
pombre fut moissonné par le fer , les privations et
les maladies. Cçux qui reparurent dans leurs anti--
ques manoirs y rapportèrent des mœurs plus doucea
et des idées de justice et d^bumanité , quMls em-
pruntèrent aux diverses parties civilisées de l^Europo
visitées par eux dans leur long itinéraire (109).
Enfin vers le milieu du 12.^ siècle survint un
dernier événement dont Tinfluence a été beaucoup
plus rapide sur les mœurs et la législation ; ce fut
la découverte d^un manuscrit du Digeste , lors de
la prise d^Amalfi en Italie. Comm^ ou Ta déià yii^
ninipu,
Poélréc
B (m» I.
-tchai-itbe s.— 73
Il ilt-!uus pnge 26 , le fliimbcaii de ta jurisprudence
nimaJne qui régissait les riaiik-e fi l'épuqiic de l'ar-
nit-c des Gcnnaina , sVtail iicinl au milieu dea
Iniubles et des désordres de rinvasion. A peine
a*wl-oii conservé quelques vestiges du code Théo-
dosicn dans les pnrlics tnériditiimles , et dans les
tecueîlsdu droit canonique. Au niois d'avril 529,
U première édition du code de Juslinîcn avait él£
publiée h Conslanlinople. En janvier 633, parut la
cumpkUtioo de Tribonien , appelée Digeste ou
.faadecles. Ce corps de lois n'a guère» alors pé-
ra Occident; du moins il n'a pu s'y main-
tnir long- temps au milieu des ténèbres et des
Kènu de dévastation tpii suivirent les fréquentes
Il Btipations des barbares, sortis dès le siècle pr&r
HjlWnil des forêts de la Germanie.
^B £j| 1137, dans la guerre de l'empereur Lolhaire II
contre Roger, roi de Sicile, ijui aoulcnail l'antipape
^naclel , les troupes impériales prirent et pillèrent
ili Tille d'Amalfi. Des soldais Iroiivérenl un livre
^wcpuis long-temps oublié dans la poussière , et qui
^Kba leur attention h cause des figures coloriées qui
I^ « trouvaient sur la couverture ; c'étjuenl les l'an-
di-ctfs de Justiuîcn. On crut d'ubord ce manuscrit
I original mc'mc de Tribonien ; mais selon Topinion
lus probable de Terrasson, Hist. île la Jun'sp.
Ipm., cet exemplaire aurait été apporté h, AmalG ,
74 —HISTOIRE DES DUELS.—
par quelque liltéraleur Byzantin , voyageant alors
en Italie. L'empereur ne voulut, pour sa part du
butin, que ce précieux recueil dont il fit présent à la
ville de Pise, qui Tavait secondé dans son expédition.
De là vient que le Digeste fut d'abord appelé
Pandectœ Pisanœ : mais en 1406, les Florentins
s'emparèrent de Pise et enlevèrent le manuscrit des
Pandectes , qu'on appela depuis lors Pofidectœ
Florcutinœ (110).
Cette découverte fut le signal d'une ère nouvelle
dans toute l'Europe. On apprit alors, ou plutôt on
se souvint qu'il existait d'autre droit que la force ,
d'autre puissance que le glaive , d'autres argumens
que le meurtre ; on l'avait oublié pendant plus de
six siècles. À dater de cette époque on vit décroître
sensiblement cette antique institution de la preuve
par le combat , qui avait été si souvent combattue
tantôt par la religion , tantôt par ces éclairs de
civilisation qui scintillaient parfois dans cette pro-
fonde nuit du moyen âge , tantôt par l'impuissante
autorité des rois (111)*
IjCs réglemens de la T'/we de Dieu, comme Fa
remarqué Robertson , n'avaient pu contenir long^
temps l'humeur violente de la noblesse. Elle se riait
des prédications et m^mc des foudres ecclésiastiques.
En 1 167 , un siècle environ après la Trè^e de Dieu,
— CBAPITBE \. — 7.5
"^arul le premier édil réellement rcslrictif des ducla ,
celui de Louis VU , dit le Jeune, qui , en 1 147, aurait
[iiis i>art en personne à la seconde croisiide. Par
ccllG loi déjà citée plus haut , pag. 44 , te duel fut
défendu en matière ci\>le pour tuule dette qui nVx-
iCidoil pas cinq sols, environ 75 livres tournois (1 12).
k A l'époque oii inlervint celle ordonnance, TÉlude
da lois romaines avait déjà fait de rapides progrés
en Europe. Peu il^annèes après la découveite des
PaMlecles florentines, il s'était établi en llalie des
écoles où l'on enaei^ait le nouveau droit. Il y prit
bientôt une telle faveur , qu'il éclipsa la loi des
Lombards , sœur germaine de nos lois Saliqucs ,
rajeunie par Charlemagne. De là , il se répandit
en France vers 1150, et fut d'abord enseigné i
Toulouse et b MontpcUicr, même avant l'établis-
ictneat des universités (113).
U est vrai de dire que celle propagation du droit
■i|Otnaiu en France , soufTrit d'abor<l quelque oppo-
KBtJuudela part de l'aulorîlé ecclésiastique. En voici
llanison. Des les premiers siècles du moyen âge, le
I dcrgè, pour combattre la férocité des mœurs du
Eknips et suppléer à l'absence de toute législation ,
I avait établi successivement un corps de lois parti-
m tulières. cl même des tribunaux ecclésiasiiqucs pour
K les appliquer. Ce corps do lois qui fui Appelé par
Ik «uile Droit canon était un (.-omposc des dispo-
76 -î- HISTOIRE DES DUELS.-»
sillons les plus équitables du code Théodesîen et
des canons des conciles , auxquels on joignit plus
tard les décrétales de» papes. La compétence dç la
juridiction ecclésiastique s^était rapidement étendue
et ayait fini par embrasser le plus grand nombre des.
cas litigieux. On sollicitait même comme une faveur
^exemption de la juridiction civile ; et cela »e con-
çoil facilement . Ce n^cst pas là certes un des moindre»
services que le clergé catholique ait rendu à la cause
delà civilisation. Lesécrivainsprotestanseux-mémes
n^ont pas refusé cette justice à Téglise romaine. Je
renvoie aux Éclaircissemens historUjues la citation
du magnifique éloge que lui ivresse à cetégani
rilluslre Robertson (114).
A Fapparition des Pandectes , Tautorifeé ecclé-^
fîasti({ue fut effrayée de Tenthousiasme prodigieui^
qui les accqeiUit partout : son premier mouvemen|
fut de craindre la ruine entière de la juri^rudence;
canonique , et en conséquence de la protéger. Le
pape Ilonorius III , voyant Tétude du droit romain
faire en France de rapides progrès , publia la dé-
crétale Capîtc super spécula, lib. XF deprwileg. ^
qui « défendait à toutes personnes d^enseigner ou
d'apprendre le droit civil , à Paris et aux lieux cir-
convoisins, sur peine dVtre interdit de la profession^
d'avocat, et même dV-tre excommunié par Tévêque
diocésain. » On sait qu'alors la plupart des avocats-.
\ciercs. Celle décrélale ne &t pas grand effet,
cl il ne paraît pas que nos évoques aient songé à
user du droit extraordinaire quelle leur allribuait-
Aussi Montesquieu obsenre-t-il que « le nouveau
droit s'établit successivcnient et se maintint , maigre
la excommunications tics papes qui protégeaient
leurs cofwns» (115).
Saint-Louis , qui n'avait pas plus peur que de
raison de ces foudres .spirituelles , tout religieux
qu'3 était , fit traduire les codes de Justinien et
en fil un grand usage dans ses Établissemcns , Phi-
lippe-le-Bel son petit-fils , les fil enseigner pour
tenir Lieu de raison écrite dans les pays coutumiers
cl de loi dans les autres. On sait que les coutumes
étaient des usages qui s'étaient successivement établis
dans cbaquc localité pendant le cours du moyen
ige. La tradition seule les conserva long-temps,
rt cites s'amalgamaient tellement quellcment avec
lapralique des duels. Dés qu'on vil paraître le droit
romain OD s'empressa de les rédiger par écrit , soit
pour les opposer à ces lois étrangères que re-
poussait le préjugé national là où elles avaient tou-
jours été inconnues , soit pour montrer qu'on savait
w passer de leur secours (US).
CHAPITRE XI.
Continuation du même sujet. — Nouvelle révolution
morale au 15.* siècle. — Chiite de l'empire d'Orient.
— Découverte de rimprimerie. — Fin du moyen
âge et des duels judiciaires. — Puissance des ins-
titutions de cette épocpe*
La réyolution morale qui marqua le cours du
12.® siècle fut bien loin d'être décisive sur la marche
de la civilisation, principalement en ce qui concerne
les institutions judiciaires. Elle ne fut en quelque
sorte qu'une préparation à celle bien plus sérieuse,
bien plus radicale qui s'opéra dans le 15.*^ siècle,
et dont l'influence fut si puissante sur les âges
suivans.
II fallait bien d'autres secousses pour ébranler
dans sa basé cette redoutable féodalité , que l'auteur
de l'esprit des lois a comparée à un chêne antique
dont on aperçoit au loin le feuillage , mais dont les
racines se cachent dans les profondeurs de la terre.
Je crois que Montesquieu a pris pour le feuillage du
chêne, celui d'une plante parasite qui s'élève jus-
qu'à la cime de Farbre , se nourrit de sa substance
i XI. — 79
1 dessèclie le tronc, La plante parasite , c'est la
ft^dalilé que vante Monlesquieti, et le chêne majcs-
lucus c'est U nation franraiae. Ainsi prfsenli-e, celte
célèbre comparaison aurait eu le seul m6rite qui lut
manque, celui de la justesse (117).
En 1453, le tràne de Constantin s'écroula. On vil
UD héritier du nom et de la barbarie de Mahomet
profaner la reine de l'Orient , celte superbe Cons-
(anlinople que le sort des armes luf avait donnée;
on vil le turban asiatique détrùner le bandeau im-
périal et l'islamisme se couvrir de la pourpi^ de»
Césars. La civilisation fut refoulée vers TOccidenl ,
ou plutôt elle revint visiter son antique domaine,
d'où elle avait été jadis exilée par d'autres barbares.
Presqu'co m^me temps eut lieu l'événement le plus
décisif de tous Sur l'avenir de l'espèce humaine :
l'imprimerie fut découverte vers 1450 (118).
La civilisation jusqu'alors engourdie et pres-~
qu'immobile , va faire désormais des pas de géant.
Ses premiers progrès s'annoncent par le pontificat de
Léon X, par le règne de François I." et par l'em-
pire de Charles- Quint. Elle semble sortir alors des
Unges de sa longue enfance et prendre la robe pré-
texte de l'adolescence. Ce passage aurait été court
et elle aurait marché rapidement vers la virilité ,
^ elle n'avait eu k traverser les torrens de sang dont
IwguçiiesdJles de religion ont inondé le 16,* siècle.
Iv
80 *- HISTOIRE DÈS OUBLS.-^
Telle est la série des événemens qui ont précédé
ia clôture de la longue et intéressante période du
moyen âge. Dans un court espace de quatre années
On en trouve trois réunis qui caractérisent plus
particulièrement la grande révolution alors opérée
dans les mœurs , savoir : là découverte de ritn-
primerie en 1450 ; la chute de Tempire d^Orient
en 1 tWtiJllJll iÉI '"^'^T- — ^— ^-«* judiciaire connu,
ordoniliS ■M^^iMpl^ de Paris, en 1464. J'ai
déjà dit au chàpiEie VIII que les duels de la pre-
mière période du seizième siècle n'étaient pas de
véritables duels judiciai/'es , mais plutôt des duels
autorisé^iet présidés par des rois , c'est-à-nlire des
duels roycuix (HO)-
Une sage lenteur est nécessaire dans toute amélio-
ration sociale. L'extirpation des abus n'est jamais
plus sAre , plus définitive , plus irrévocable que
lorsqu'elle est progressive. La marche plus ou moins
accélérée du progrès est essentiellement subor-
donnée à l'espijprfin fsiècle. Toute action brusque
et improvisée finissant les mœurs , appelle une
réaction. Or, l'effet de la réaction est de faire revivre
l'abus , et qui pis est de le réhabiliter dans l'opinion.
Mais quelle est la main assez habile pour régler le
mouvement social et le mettre en parfait équilibre
avec l'esprit du siècle dans lequel il agit ?
I
»ciitPiTnz Kl,— 81
Od i>eut dire néanmoins que le progrès fut d'une
lenteur extràme et souvent déscqtérnnle pendant
la longue période que nous venons de parcourir.
Quelle était donc alors la force des institutions , et
tjiielles profondes racines elles avaient jetées dans
les mœurs ! Tout cela s'explique par un seul mot ,
l'esprit guerrier, les habitudes des camps , le mépris
de la vie humaine, le militarisme enGn (120).
A celle époque quelle était la nation irançaîse ?
Vue fanion de chefs militaires et de seigneurs dont
h rie K passait k la cour du prince ou dans (e
naiioir féodal. Guerres civiles, ou guerres étran-
gères, telle était leur unique occupation ; aussi ne
connaiasaieol-ils d'autre science que le roanicmeat
des antKS. Les lettres et l'écriture non-seulement
étaknl ignorées de la noblesse française ; mais elle
•e EaisaA même un titre d'honneur de les dé-
daigner. Il en était ainsi notamment à l'époque de
la seconde race , comme l'a remarqué le président
Hénault ; et cet esprit se conserva long - temps
encore sous la troisième. Dans le cours m^me du
dernier siècle , il n'était paa rare de rencontrer
des actes publics terminés par cette formule : £t
a Jècltirt: tte savoir signer eii sa tjiiaUlé de genlil-
tutmmc (121).
Que si queiqit'im venait ii se scandaliser de ce
discours , je lui rf-pondrnis ce qu'en pareil cas ré-
82 — HISTOIRE DBS DVRIS. —
pondait Montesquieu : Je supplie quon tie s*offense
pas fie ce que fai dit > je parle iV après toutes les
histoires. C'est encore d'après les témoignages his-
toriques les plus universels , les plus unanimes et
les plus dignes de foi cpie je continue (132).
Le peuple en masse irétait considéré que comme
un troupeau dVsclaves. Il se divisait à la vérité
en deux classes principales, les serfs et les hommes
libres ; « Mais, dit Robertson, la condition de ceux-
ci était elle-même si insupportable qu\)n les voyait
(souvent renoncer par désespoir à leur liberté et se
soumettre volontairement en qualité d'esclaves à
leurs tyrans. » Le même auteur ajoute diaprés
Montesquieu : « Le nombre des serfs chez toutes
les nations de TEurope était prodigieux. En France,
au commencement de la troisième race, la plus
grande partie de la classe inférieure était réduite
à cette conditimi. » (123).
Comme le peuple alors n'était rien, ne savait
rien et ne pouvait rien , c'était d'en haut que devait
lui venir la lumière. Mais envain levait-il les yeux ,
il n'en apercevait même pas l'ombre. Il dut donc
la chercher ou plutôt la créer lui-même. Ce fut la
nécessité , le besoin de l'émancipation , l'instinct
du bien-être, Tamour inné de la liberté qui lui
servirent de lanal dans cette profonde nuit. Mais
son éducation marcha lentement , et il le fallait
— CHAPITBE XI. ■
rWcn. La pi
la force qui marcltcni plus
>ftc que le rBisoiinemciiI el les doléances , où se
troiiTaient-elles i" Enirc lef
^ive, et le glaive était l'iiiiii
i mrtins qiii tenaient le
:|iie symbole de la force ;
c'était la dernière raison , la seule logique du temps,
mbre n'était rien en
ubima
du
ralio. L'avaiilag*
conipRraison (l!M).
L'aristocratie franraise avait toute espèce d'in-
lérét , comme on le verra ci-après , h la conser-
vation des institutions judiciaires et notamment de
celle du combat. Aussi la voit-on en opposition
permanente contre toutes les tentatives d'amélio-
rations , soit qu'elles vinssent du monarque , dont
die contestait l'autorité, soit qu'elles vinssent du
clergé qu'elle traitait en rival . Toujours compacte et
homogcne elle résiste durant plusieurs siècles à
Tiction du temps ; elle triomphe de la puissance de
Charletnagne , de la sagesse de Saint-Louis , du
despotisme de Philippe -le -Bel.
Dès le neuvième siècle on voit Charlemagne,
occupé k éteindre les guerres privées. Tentât il
cberclie k subsliluer ii l'épreuve du combat, celle de
la CToii , tarli'il il veut au moins arrêter l'eiTusion
dunng, CD remplaçant le glaive par le bâton. Vains
cffnrts ! l'espril du temps l'emporte. La noblesse en
Champ'dc-MaTs revendique aoii privilège ; on hii
Tciid le i-uml)al (125).
84 \ — HrSTOIBE PER PUKLS- —
Dann I(^ cours du dixième siècle , même réa»-
tanrc d^s seigneurs i\ toute tcntatiTe de rèffinne
de la pAI des successeurs de Charlemagne (126).
Le cli%it romain renaît en 1137. Saint -Louis
TaccueillK^ 1226 ; il profile de son influence pour
supprimer-^éfinilivcmeul en 1260 les duels judi-*
ciaires que^^èià son prédécesseur Louis-le^Jeutie
avait restreSMwWML:^^^^ saint roi allait encore
trop vite ; ilfUBMÎl slm tidècte , comme presque
tous les granij|i nomittes. Ses vassaux , les liaufs
barons du royii|mie se groupaient sans cesse devant
ses vues d^amtiiorations. La plupart refusent <ib«tî*
nément d^admelfrè les ÉîabUuemens dans leure
justices ; et le prîace est forcé de les borner à ses
domaines (127).;
Philippe-le-Bel^n petit-fils renouvelle sa dè«
fense, en 1308; %8é voit comme son père forcé
d'y revenir , en 13^ y et de rétablir encore le duel
pour certains cas. '\
Enfin la dernière iéte de Iliydre ne tombe que
vers 1550, onie càKWs environ après Tinvasion
des Francs dans lesÇdbles , et plus de trois cents
ans après la renaissance du droit romain !
On interroge la raison humaine à toute heure , et
chaque siècle répond vn mot. Nous marchons plus
vite à rheure qu'il esl^*
1
b
CHAPITRE XII.
IcsniHB des dcuv i^apilres prwuédens. — O^iniont
(les auteurs annîend et modernes sur le* dueU
judieiaircB du iBo\cu.à.^c- — Erceurs. — Lujuslicct.
- Objeetiuns^
Rltiistoirc des dueU au rnûyea illge|>eutse
rco quelques mots.
lolroduils ee Frauce par lea Germains , ils furent
tarvs pendant la durée de la prcmièce tace, «u
MrDoigBf^c de Méseraî , cité ci->deNstis page 37.
Ils repreHnext vigueur aou» Martel, et suÎTaot
une période ascendante sau» la secemïe race, ifs
arment it leur moA-imiim au commeitcemcnt de la
^inème , ()ui est aussi rép(4(]ue des dernières usur-
Itatioiude la féodalité (l!^)- Les efforts de Charle-
magne et de ses successeurs sont vain» pour jHTt-ter
ce lurreDt : ils. échttuent devant la résist^ce des
•cigneora.
En 1041 , ta Trêve dte Dieu suspend uo instant
l'efliel du mal ; mais elle ne peut sufBre pour mettre
«D freiit à la violence de la noblesse.
86 — HISTOIRE DES DUELS. —
En 1096 eut lieu la première croisade , et la
seconde en 1147. Uannée 1137 avait été marquée
par la découverte du droit romain; et en 1167,
Louis-Ie-Jeune, de retour de la seconde croisade ,
publie un édit restrictif des dueb.
En 1260, Saint-Louis veut purger les institutions
judiciaires qu^il réorganise, de Tépreuve du combat;
les barons du royaume rejettent ses ordonnances.
Philippe -le -Bel, son successeur, n^est pas plus
heureux. En 1303, il essaie de défendre de nouveau
les duels ; mais il se voit forcé d^en rétablir Tusage
trois ans après.
En 1386 , duel de Carrouges et Legris , qui comr
mence à faire ouvrir les yeux sur Tabsurditë des
Jugemens de Dieu Ad commence la période décrois-
sante des duels. Une ordonnance de Charles YI, de
1409, réserve au roi et au parlement le jugement
des gages de bataille.
En 1453, prise de Constantinople , qui marque
la fin du moyen âge. Vers le même temps Fimpri-
mené est découverte , et le dernier combat ordonné
jftix justice a lieu en 1454. Suivent les combats en
champ clos qui reçoivent un caractère particulier de
rintervention exclusive de raulorité royale, et même
de la présence des monarques qui se font un hon-
neur de les présider. Celte dernière période dure
un peu plus d^up siècle (129).
»
- 87
Oii peul remarquer pour acliever ce tableau ,
iju'uDC inlluence unique a soutenu les. duels judi-i
Claires pendant toule leur durée, ccihe de l'aristo-.
cratie; qu'une influence unique les a cumbaltus el> '
a. fini par en triumplier , celle du- elergé.. •
Quand on a parcouru altentivemeut culte longue'
période, toute sntâllÉe de sang cl encombrée de
csdavrcs, on reconsait sans h^siler que si le cbrift^i
liBoiamc ne s'cluit pas inlerpusé dans ces grandes |
dcslructiuBS , s'il n'avait \jas tempéré cette Fureup- '
meurtrière , si ses miniavres ne s'étaient pas Tait le»;
gardiens fidèles des vieilles tradition» , s'ils ii'avaicnl;
pas aauvé du naufragic quelques ntonumens de»
icieuces et des lettre», ai le clergé calholiqtic enfio:
n'avait pas caché dans son sein la dernière éliocelle'
du feu siicrë , c'en était fait h tout jamais de la civï-:
lisatiou et de l'espèce humaiue , qui aurait tini par
&'tleiudi;c dans celle longue extermiiialiuu (130).
Je crois devoir terminer ce résumé tic la première,
partie de celle liisloire , par quelques réOesions sur» i
les écrits des principaux auteurs qui se sont occupé»
Je» duels judiciaices. Je ne puis les citer tous , car
ils sont en trcs-grasd nombre. Dè^^ la renaissance dit
droit romain, ses premiers con>iiicn)a leurs n'unt
patt dédaigné cette matière. LcsBalde, Icsliartbole»
iriaprèscus Alcial, tous trois jurisconsultes italiens
88 —HISTOIRE DES DUELS.—
s^en sont occupés. Ce dernier esl l^auleur d^mi
traité spécial qui a pour titre : De sùig^lari^riaf
miriCf On cite encore parmi les écrivains de b^
même nation qui ont écrit sur ce sujet, le napo-s
litain Mutio , Pozzo , Paris de Puteq , el turlQuI
riUustre Scipion Maffei (131).
Il en existait aussi plusieurs en AUenu^poe el ei|
Angleterre ; tels que Smith , Selden , Gandoden ,
Thomas de \Valaingham et autres dont nous aurcMia
occasioa de citer les écrits. Parmi les jurisconsultea
Hollandais dont la plupart pnt traité disertemeni
plusieurs matières importantes du droit , je doit
citer particulièrement Janus Slicher et Paul Yoêl «
père du célèbre Jean Voët, compientateur du
Digeste. Paul Voêt a composé en latin un pielit
triMté des duels reinpli d^é|>udition , et dont (m tfQUrs
Tera quelques citations dans les notes.
Les anciens auteurs français dont les écrits sur iei^
duels ont été les plus remarqués sont La Béraudiére,^
Savaron , Dupleix , Basnage , et surtout d^Audiguier
et Brantôme. Ces deux derniers pi' ont fourni plu-t
sieurs anecdotes intéressantes (132) .
La plupart de ces auteurs notamnient Alciat,
d^Audiguier et Brantôme ont confondu dansleura
écrits tous les genres de combats singuliers. Ainsi ib
appellent duel le combat d^Achille et d^Hector,
ççlui dçs Hprtices et dçs Curiç^ces , celui de DtivH et
^CHiPITRE M..- 89
ie Golialli. En général ils vantetil cette institiitttm cl
pri-midml mi^c lui créer uiie uohlc cl antique
origine , en clicrt^hant h graiiiU frais d^èrucUlioit des
édtnis claiu raiiliquité la plusreciiléi;. Ou en a
qiH-lqitmuna reraonler pnr-delù le déluge et as-
gravcmcnt que Caïn en luanl son frcrc Abel ,
Tut le jimnicr des duellistes (l!i3)-
Je ne connaic aucun auteur moderne qui ait
|i»bbè d'écrit spécial sur le duel. Quel<jues bro-
, diurcs oubliées aujourd'hui ont jiaru en 1829, h
I roccasion de la présentation Ji la cliambrc des
jMÙrs, d'un pnyel de loi sur ce sujet (134). Mai»
il ni pbMietirs écrÎTaina qui ont parlé des conibala
iiidivîaim arec plus ou moins d'étendue. Je me
conteulerai de citer ici les deux plus célèbres ,
Itabertaon et Montesquieu. Le premier a traité cette
matière avec une incontestable Bupériorité dans son
inlnxhiciian b rtùstoire de Cliarlea^Quinl, qui passe
àbiin droit pour un chef-d'œuvre. On en \>eut jxigcr
par Ica oondireusei cîtaUous dont j'ai curiclii cet
(luvrage (135).
Cet écrivain profond, consciencieux et souvcraî-
oemenl impartial a tracé un admirable tableau des
ùcclcs qui oui précédé le règne de Charics-Quiiil.
Heiictmlrant les épi-euves judiciaires cpi en sont le
uliu importaut épisode , il eu a fait l'ubjel des
9ft — HKTOIKE DES DUELS-. —
reclierches les plus savantes et de la plus judicieuse
critique. (Test son ouvrage même qu^il faut lire pour'
bien apprécier Tesprit de Taristocratie et du clergé j
ainsi que Tinfluence exercée en sens contraire par-
ces deux corps politiques sur la civilisation du
moyen âge. Ce qu^il dit de Taristocratie » d'autant
plus de poids qu^en qualité d'anglais^ il ne peut être
suspect d^avoir sacrifié à Tesprit de caste ou aux
préjugés nationaux ; et son témoignage ea faveur
du clergé cadiolique est d^aulant plus irrécusable,'
qu^il était protestant et même ministre du culte
presbytérien en Ecosse (136).
. Quant à Montesquieu , je Pavais pris pour guide
en commençant cet ouvrage, avant d'avoir lu Ro-
bertson (137). Je regrette vivement d^avoir à remar-
quer qu^on ne retrouve pas toujour» Pimpartialité
et l'exactitude de Thistorien anglais, dans quelque»
passages de V Esprit des Lois relatifs aux combats*
judiciaires. Montesquieu était gentilhomme, mais il
n'était pa»courtisan. Dans son chef-d'œuvre si parfiul-
d'ailleurs , il a visiblement ménagé Faristocratie féo--
dale et traité fort sévèrement les gens de cour (138).
Quant au clergé , il lui est plus d'une fois arrivé de
le sacrifier à la noblesse , quand il le trouvait en*
contact avec elle. Mais on juge assex à Fembarra»
qu'il y met, qu'un motif particulier préoccupait
ce graad écrivaia. C'était sans doute cette fiftcheuse
— CHiPITRB XII.— 91
Rtol^rance justement rcpn»chùe aux cr<- liai astiques
B L'e temps, et dont Montesquieu a eu plus d'une
I pcrsuunellcment à souD'rir (130).
Au r.liapiire VU qui précède , j'aî rapporté avec
; scrupuleuse exactitude divers traits qui con-
-neiit les ecclésiastiques relativement auv combats
iiciaires. L'impartialité de l'historien m'en faisait
1 devoir. Je devais d'ailleurs exposer l'accusation
âms toute sa force , résolu que j'étais d'en placer
ici la défense.
Montesquieu était doué dVii trop bon esprit pour
te faire udc arme contre !e clergé de faits sem-
blables, et en prendre prétexte de l'accuser d'avoir
uuvertemenl favorisé les duels. Aussi n'en a-t-il pas
même dit un seul mut. U connaissait sans doute celle
H^ maxime de Saint Jean-Chrysusti^mc : Piof/Uir
iwioi sacerdotes ctiam malos honora. Chrvsost. ,
Bi MtiUli. 25. Mais il a fait aux ecclésiastiques du
nuiTen Age un reproche d'une aulre nature , et qui
est trop grave pour n'être pas ici soigne usemetit
ctaminé. On trouve le passage suivant au commeii-
ccmcnl du Cliap. XVIII, liv. XXVUI de VEsiint
dei Lois i
M Malgré les clameurs de» ecclésiastiques, ruBa;^c
du combat judiciaire s'étendit toujours eu France ,
et je vais prouver tout Ji l'heure que ce furent eux-
L
92 — l»VTOIIlE DES DUELS, ««i
mêmes qui y domièrent lieu ea grande partie. » le
supplie qu^on lise attentivement dans Montesquieu
lui-même la suite de ce chapitre, et Ton verra que
sMl a prouvé quelque chose , c^est précisément tout
le contraire de ce qu'il vient d^avancer. Il continue
ainsi : a C^est la loi des Lombards qui nous fournit
cette preuve. // s'était intraduit depuis long-iemps^
une détestable coutume, est-il dit dans le préambule
de la constitution d'Othon II , ^V^oue^si la charte
4^ quelque héritage était attaquée de faux , celui
qui la présentait faisait serment sur les Éi^angiles
quclfçét^it, vraie, et sans aucun jugement préalable-
U se rendait propriéiairede l'héritage; ainsi lespar^
jures étaient sius d'acquérir. Lorsque Pempereur
Othon t.^' se fit couronnera Rome Tan 902, le pape^
Jean XII tenant un concile , loua lea aeigneunt
d'Italie a'écrièrent qu^il Eedlait que Fempereur fil
une loi pour corriger cet indigne abua(140). Le
pape et Fempereur jugèrent qu^il fallail renvoyer
Taffaire au concile dç Ravenne. Ce concile eut lîett
l^Bin 967 . Là les seigneur» firent leamémea deasaoudest
et redoublèrent leur» cria; mais cette affaire fut
ajournée. En 988 , Othon et Conrad , roî de Bouiw
gogne , vinrent en Italie et eurent à Yéroime ua
coUocfue avec lea seigneurs. Sur leurs isalances;
réitérées , Tempereur , du consentement de tou»,
fit une loi qui portait que , lorsque sur une contesi*
*-cn*piTHE ^n.— 93
talion , une p&rtie produirait udc charte cl que
l'aulrc snuticti droit qu'elle éfnît fausse , l'affaire se
dffidçrail par le combat ; rjue les églises seraient
sujeiiej à la même loi, et qu'elles combattraient par
latrt champions. On voit que la noblesse demanda
Ik preuTB par le combat , ù cause de l'inconvénient
Je la preuve introduite dans les églises. »
Toute l'argumentation de Montesquieu est ren^
Cerrnéc dans cette dernière phrase. C'esl-lii la preuve
qu'il avait promise en commençant. L'argument
aérait sans rëphque, si rétablissement de la preuve
par serment était le fait du clergé- Or sur ce point
décisif Toici Topinion de Montesquieu lui-même.
On trouve ce passage remarquable vers la fin du
Btéme chapitre : njene dis point que ce fut le clergé
fui eûi ininx^û/Wo^edont la noblesse se plaignait.
Cette coutume ( le serment ) dérivait de l'esprit des
kn des barbares et de l'élabOssement des preuves
n^atirea. Mais une pratique qui pouvait procurer
rimp>milé à tant de criminels, ayant fait penser
<|ii*i] fallait se servir de la sainteté des églises pour
étonner les coupables cl faire pâhr les parjures, les
eccJésiastîques soutinrent cet usage et la pratique
«uquelil était joint; car d'ailleurs 1/5 ctaj>»to/)/}OJcj
mix preuves nvgati\-es. Nous voyons dans Bcau-
manoîr, Chap. XXXIX , p. 222, que ces preuves
ne fureof jamais admises dans, les tribunaux eccli--
04 —HISTOIRE DES DUELS.—
giastiqiied; ce qui contiihua sans doute beaucoup
à les faire tomber, et à afiaiblir la disjiosition des
codes des lois des barbares à cet égard. »
Quoi de plus décisif, quoi de plus honorable
pour le clergé de France qu^in pareil témoignage
dans la bouche de Montesquieu ? Remarquons
bien les conséquences irréfragables qui en résul-
tent. l.<> Le combat judiciaire était, comme Ta
très-bien dit Montesquieu , une suite de Tadmiasion
des preuves négatives , et cela est si vrai que la loi
Stdique qui repoussait ces preuves est muette sur le
combat, à la différence de la loi Ripuaire qui les ad-
mettait (1411) • 2.<» Le sermenX étant déiii^ Je Vesprit
des lois des barbares qui rapportèrent en France^
avec les divers genres ^épreuves y les ecclésiastiques
durent se soumettre à cet usage qui avait dé si
profondes racines dans les lois et dans les mœurs.
Mais pour en corriger Tabus , ils y ajoutèrent une
sanction et en firent un acte religieux. Ik cher-
chaient ainsi à faire taire la voix dVn coupjable
intérêt , en jetant dans la conscience humaine le
contre-poids de cette crainte si puissante alors ,
celle de la colère divine. 3.^ Le clergé était placé
entre Talternative unique d'appuyer de son suf-
frage le combat ou le serment, qui étaient les seuls
modes de preuve alors usités. Il était placé entre la
certitude d'un meurtre et la crainte d'un parjure.
-CHAPITRE Tll. .
Or, le clergé trouvait un bien mnindre mal h courir
celte dernière ehancc. Lo noblesse de son côté re-
îodjquait le meurtre. Qui
t tort ?
e meurt
dergé , ont dit les seigneurs, et après eux Mon-
leaquieu , ce qui est bien plus fAchcux . Ce n'est pas
lout , on voulut le punir de son oppoaitiun et il fut
décidé ^u' il ne serait pas liii-nicme cjrcmpl de la loi
commune : on lui imposa le combat; on voulut bien
aeiileinent par tolérance lui permettre un remplaçant.
Nous croyons rcver quand au siècle oii nous vivons,
se recontent de pareilles choses !....
« On voit , continue Montesquieu , (pjc la no-
blesse demanda la preuve par le combat , à cause
de rioconvénient de lu preuve introduite dans les
^ises; que malgré les cris de cette noblesse, malgré
r*bus qui criait lui - mOme , cl malgré l'autorité
tl'OUion qui arriva en Italie pour parier et agir en
■ultre, le clergé tiia fenne dans deux conciles;
que le concours de la noblesse et des princes ayant
forcé les ecflésiastii/ues it céder, l'usage du combat
judiciaire dut cire regardé comme un privilège de
b noblesse, comme un rempart conUe l'injustice,
fi une asiiwauce île sa propiicté et que dès ce mo-
mcnl cette pratique dut s'èiiitdre. El cela se fit dans
un temps ou les Empereurs étaient grands cl les
Pipts pcliu, dans un temps où les Otiion vinrent
rtlablir en Ilalic la dignité de l'empire, n (Ii2).
i
96 ^HISTOIRE DÉS DUELS.-*
Voilà je t>en9e une confirttiation bien compléfe
des divers (loinls posés plus haut d&ns Tiniérét du
rlcrgé. 7/ tint ferme long-iemps ; il fut enfin forcé
de céder à Fascendanl de la noblesse Ijui conserva
le combat comme son pii\^itége, MonietquÎMi a fort
bien expliqué tout cela ; mais en même temps A-t-Q
donné la preuve de ce qu^il avait prônas f À-tril
établi la faute ({u'ii reproche au deq;é P....
J^ai regret de le dire, il me sembla que l^îmmortel
auteur de V Esprit des Lois s^est laissé dominer dans
tout ce chapitre, par une inexplicable préoocnpation
dans Tin ter et de la noblesse. Et puis il appeHe le
combat un rempart contre V injustice , une sam^e^
garde de la proptiété. Il parait en un mot Tap-
prouver , et il accuse le clergé , contre toutea les
régies de Téquité et de la logique y d^avoîr été la
cause que cette pratique dut s'étendre !
Je prie le lecteur attentif à ce grave débat que
je n^aurais certes jamais osé soulever , si Mon-
tesquieu ne me servait à réfuter Montesquieu hd-
meme , je le prie , dis-je , de remarquer con^en
dans tout ce chapitre la préoccupation et la rapicfilé
se font à chaipie instant remarquer. On trouve cet
autre passage à la suite de celui qui vient d^étre cité.
u Je me suis pressé de parler de la constitution
d'Othon II y afin de donner une idée claire de ces
lemps-là entre le clergé et les laïques. Il y avait
jurei
— CHAPITRE XII.— 97
tu aiiparavADt mip conHtilution de Lolliairc l." ,
(ils lie Loiiî»-le-D6bbnnBire , qui , sur les mêmes
l'faiiilrs et les mi'mcs dtmélèa, voulant assurer la
propriété dos hîcns , avait ordonné que le notaire
jurerait que sa charte nVlail pas fausse ; et que s'il
it mort on ferait jurer les lémoinp qui l'avaient
Mais le mal restait toujours , il fallut en
'HKttirau remplie dont je vient depatier. n
Ce qiù se passait du temps de Lothaire , n'cs(-il
pas ce qui se passe enrore de nos jours ? Quelle
diflérence en vérité y a-(-il entre sa conalitulion et
notre code civil P Sur quoi repose aujourd'hui la
foi duc b un acte de notaire ? Sur le serment prêté
par cet oRîcier public ii son entrée en exercice.
Le notaire est-ii suspecté? On s'inscrit en taux
contre son acte , comme aulrcfois on faussait une
cliarte. Et quelle est la preuve qu'on admet ? Des
témoignages reçus sous la foi du serment. Pourquoi
donc ne pas se contenter de cette sage constitution
de Lothaire f S'il y avait di:s parjures , pourquoi ne
les poursuivre comme on le fait aujourd'hui ?
le ne leur appliquait-on le capitulaire de Charte-
magne et de Louis-le-Dt^bonnaire , qui punissait ce
TJme de la perle de la main droite (MS)?.... Mais
MunteEquicu, exclusivement préoccupé du danger
tte vdir les propriétés envahies par les parjures ,
iroure l>ou <|u'<in les ait adjugées aus S[)adassiiiB et
08 -— niSTlOrRE DBS DUELS. —
aux maîtres d'armes ; et c^est de la plume qui a èctiï
V Esprit des Lois , que s^est échappée cette phrase :
Le mai ivsinit toujours, il fallut en venir €Ui remède^
qui était le combat !!....
On retrouve du reste le génie de Montesquieu
dans les autres chapitres de ce livre contacrés aux
duels judiciaires , avec des réflexions du plus haut
intérêt sur les institutions Féodales, et les inutiles
efibrts de Charlemagne et de Saint^Louis pour les
améliorer (144).
CHAPITHE XIII
! période. — XVI.* Bi^cle. — PiahibittoH
kdrs duels. — Du dael propi-eineDl dit, ou duel
LfolontAire.
Le 16.* siècle se présente p5iir fermer In lice
du moyen âge. Il fui une Iransilîon entre le siècle
nÛTant , illustré par le magnificjiie règne de Tlenri-
W-Grand , el cette longue période de léncbrea , de
mlenees el de ruines tju'on vil commencer el finir
*ïec l'empire d'Orient (1 45) .
Quoique la prise de Constantinoplc date de 1453,
on pourrait croire que pour la France , le moyen
i(e a duré jusqu'à Henri IV el même jusqu'à
Louis Xlll , son Successeur. Car , comme on le
verra ci-après , la bonté naturelle du Béarnais ne
Iftnnit guéres aux édiU qu'il publia contre les duels
illire rcfTel (pi'eu attendait sa Sagesse et celle
y , son ami el son premier ministre.
^ Le» combats juridiques cl Ira tournois, ce dnnble
c de In barbarie du moyen Age , se traînèrent
iOO — tlTSTOIRE DES DUELS. —
encore pt'iiiblcmciit jusqu'au milieu du 16.'' siècle.
Vers cette ép«(|uc un événement immense arriva. Il
en est résulté dans Tordre moral une de ces grandes
secousses que produit dans Tordre physique , Té-
ruption d\m volcan. On vit couler tant de sang à la
Saint - Barthélémi que la mesure parut comblée,
quelque forte qu'elle fût. On se dégoûta ou oo se
lassa. Il s'en suivit une sorte de réaction ou plutôt il
y eut un temps d'arrêt. C'est un phénomène dont
on pourrait citer plus d'un exemple dans nos an-
nales nationdes. Le seizième siècle dans sa caducité
s'était ceint d'un bandeau sanglant au milieu de
l'horrible boucherie du 24 août 1572, comme le
dix-septième k la révocation de l'édit de Nantes
en 1685 , dans les proscriptions , les confiscations
et les dragonnades ; comme le dix-huitième aux
jours de la terreur en 1798. Ces trois siècles mar-
chent dans l'ordre chronologique avec ces insignes
au front. Eh bien ! qu'on regarde à leur suite , on j
apercevra la réaction dont je parle. La dernière se
fait sentir encore au moment où j'écris (146).
Le combat judiciaire était une institution émanée
de Tesprit guerrier, et appropriée à la rudesse
de mœurs d'un peuple nomade et conquérant.
Les tournois et les joutes étaient une image de la
guerre , un simulacre de ces luttes meurtrières dans
lesquelles se résumait alors le droit civil et criminel.
— ciiAi>[TiiE xiri. — 101
3 aîmail tellement les duels i[nc ne pouvant lou-
jtion» s'y livrer en réalité , on en nvait adopté une
Ëction , on en avait imaginé un jeu qui fil long-
temps fureur. Tout cela disparut avec les demiera
vestiges du moyen âge. La elirjsalide privée de soit
enveloppe devait périr en peu de temps. Le dtiel
seul resta, te duel proprement dit, le duel autre
^JMge plus vivante cneore de la guerre ; In guerre
^H^te , l« guerre individuelle , la guerre en temiM
^Rkpûx, qtiVn peuple belK(|ucux aime h se réserver
Kiîl eomme ressource , puaae-tcnips ou consolation
du repoa , soit comme réparelion nécessaire des
^^^jures, quand la loi la rcruse ou la mitrchaude.
^^Bl^rsque les duels furent ainsi devenus es-tra-
^^^dicUuras , une nuance presque insensible permit
^^nbord it peine de les distinguer de leurs aines,
^'ics rois et les tribunaux n\-iulorisuieHt plus oITi-
cieUenenl le combat , comme moyen de décision
iet pfx)cè9; mais on conlinua d'y recourir pour
»cr les diiïérens qu'on ne pouvait ou qu^o»
k voulait pas porter en justice réglée. Colle épuqtio
it même ccUc de la plus grande liccuec des duels,
^fiunrav on le verra ci-aprcs.
Les seigneurs d'alors n'étaient pas d'humeur k
ifrc long-tempa hors de cet éK-ment au milieu
ftAiijiicl Us étuicul nés et avaietil été nourris. Les
102 — HISTOIRE DBS DUELS. —
actes de violence de toute espèce étaient trop dans les
mœurs et les habitudes , pour qu'on pût absolument
s'en passer. Aussi ne tardèrent-ils pas à reprendre
plus de vogue que jamais. Et comme la justice n'în-^
tervenait plus dans les querelles pour en régler li|
réparation , la licence et Tabus furent pouiaèt à
Pextréme. Alors quand on ne se battais pas, oa
s'assassinait. Aussi un duelliste pouyaîtiâl se dopoer
comme un fort, honnête homme. On devait lui
savoir gré en effet, de n'être pas quelque choae
de pis (147).
On ne pourrait croire aujourd'hui à quel poÎB|
était porté le mépris de la vie d$ft autres et rin^n
souciancç de la sienne , si les mémoires conteau
poraips ne nous en avaient conservé une foule
de témoignages irrécusables. On peut consulter
principalement ceux des auteurs qui ont ècril
q)écialement sur les duels, tels que d^Audiguie^
et Brantôme. On y rencontre k chaque pas sur to
compte des principaux seigneurs du temps un^
multitude de traits oii la plus insigne déloyauté le
dispute i^ la plus froide barbarie. Pour la plupart
des chroniqueurs de ce siècle , ce n'étaient que
des espiègleries ou d'ipnocentes prouesses. Le tmi
d^insouciance et de légèreté avec lequel ils s'expri^
ment habituellement à cet égard , donne la mesure
de l'esprit public à l'époque où ila écrivaient (1^}^
— «aupiTAS iin.7- 19$
Les ohroniqiK» el les nèBKNret n^onl guère
lecuciltt que ce qui te paiMÛt dans bi capitale.
Des ade» de Tiakanee de tout geore détoUieat eu
tténe tempa lea prorâicet. Maît cmnme mt n^eo
failail que. dent la iMidilé qui ea était le Ihéélre^
9a étajent igneiés parH»ut ailleurt. La tradition en a
camenrè quelques uns qu^wa serait tenté de traiter
es Cddesc aM|jaurd'hiii. Tantûtc^esl un hobereau ea
mËtk afcc un de ses voisins^ qui le guette au sortir
dWe wtKtme el lui passe son èpée au IraTer» du
corpa, au moasent oàcelui^ lui présente de Teau
kéaîte. Tanl6l c^esl ua seigneur du clocher* qui litre
è tm sdgneuF de la terre un combat sanglant en
||pae é|^Use y pour ua droit d'eacensoia el de pre*
VÎer h«nc : ou biea c^esl un amateur de chasses qui
pivad pleisir k tirerea guise de gibier sur les paysans
qu^il trouTC sur soa chemin. L'impunité protégeait
dToadîaaîse dte pareils actes^ Us passaient inaperçus
mus le patronage d^ua homme de cour ou d'une fs*
idle ea crédit (14t).
Cétaienl-là des assassinats sans doute. Qu^on ne
eroîe paa pourtant qu'en m'y acrélant , je sois sorti
de maa sujet qui est de parler deaduels. On Terra
au chapitres XVU etXVllI que d'apaès la manière
dont on se comportait alors dans les combats sin^
guKera^ il n^y atait qu'use bien faible nuance qui
les séparât des véritables assassinais^
104 — IlfSTOIRE DBS DUELS. —
Celle é{>oque est pourtant ceUe des premiera
édits contre les attentats à la sûreté des personnes. .
On vit alors les souverains commencer à s^occuper
un peu sérieusement de la police de leurs états et
à pourvoir , par quelques lois fort mal exécutées
à la vérité , au maintien de la paiic publique*
Telles sont les ordonnances de François I.*', du
mois d'août 1539; de Henri il, de juiUet 1547 }
de Charles IX, des années 1561 , 1566 et 1869;
et enfin de Henri III , aux états de Blois , en 1579*
Par redit de Charles IX de 1669, U était expressé-
ment défendu « de poursuivre au sceau Fexpéditîon
d'aucune grâce , au cas où il y aurait soupçon de
duel ou rencontre préméditée, que le délinquant ne
fût actuellement prisonnier à la suite du rm ; sa
majesté se réservant d'accorder des lettres de ré-^
mission en connaissance de cause. »
Mais la plus remarquable des ordonnances de
Charles IX est celle de 1566, donnée à Moulins.
Ses dispositions pleines de sagesse et d'humanité
contrastent étrangement avec le caractère connu
du prince législateur. Tout s'explique lorsqu^on
se souvient qu'elle est l'ouvrage de l'immortel chao*
celier de L'hospital. On la trouvera aux Éclair»
cisscmens historiques (150).
Les articles 194 et 195 de l'ordonnance de Blois
portaient : u Les édits et ordonnances faits par les
1- l«ï
rois nos prMèccsseurs seront entiéremeni gardta et
observfa.tantconIrelcsprîncipBUJ auteurs que ceux
qui les accompli feront, pour ijuclque orcnsion ou
L frUtrttc que Icsdita meurtres puissent ^Ire commis,
|<Joit ftour l'cngfir ^iieivlle ou aulrcmciil. Pour le
f Kpird dtB assassius et ceux qui , h prix d'argent,
M louent ^OMr tuer, out/vigcr ou excéiUr tutcuns,
\ CnMmbte c«ux qui les auront lou6s ou induits pour
t et foire , nous voulons la seule machinntion et
[Mental être punis de mort ; dont nous n''entendona
Faacune grÂce ni rémission. Et où au<:une
rtunilé serait octroyée , défendons Ji nos
l-cPy avoir aucun ^gard , encore qu'elle Tut
Bgnéc de notre main et contre-sigii£-e par uti de nos
arcrètaires d'État. »
Que pouvaient de pareilles lois en préscnoc des
exemples contraires donnés par ceux-là mt-mc qui
les signaient Ê* François I.'^ qui faisait revivre dans
M personne cette vieille prérogative royale oubliée
depuis Louis-le- Bègue , de trôner dans les champs
elt»; Henri II , qui suivait le Funeste exempte de
tnn père , avaient-ils bonne grâce à publier de»
Mhs »è\'éres contre les homicides ? Que direi-je île
l'Hutcnr de la Saint - Barlhélémi , et de celui qui
Taisait égorger un duc de Guise au milieu mc^me
de l'assemblée des étals du royaume où d rcglc-
mnitait contre les assassius i'
)06 «»• lUSTOIRB DBS PUBLS. —
En vérité, je n^ai su long-temps quel nom donaer
à une pareille époque 1^ U me paraissait dffîcile de
placer au 16.® siècle le commencement de lu daur
çcième période de Thistoire dea duels en France ^
celle des prohibitions , puisque jamais peut-«étre le»
duels ne devinrent {^u& firéquena et surtout pkia
fitroces que lorsqu'ils furent défendu». CçpendanI
cette époque embrasse ua asse* long espace dOc
temps, et il n'est malheureusement qu^e trop yraî
qu'elle comprend même le r^ue 49 Henri IY« Dtm
cet inlerralle d'un siècle , ces iianl^mea de teîa ,
en dépit d'une sévérité qui n'était que.dawleurabar
pales formules, n'en imposèrent à per^pnne. Toul
ce vain appareil d'autorité venait se briser conlrq^
l'écrit général d^un siècle sans moraJie et sana freîiïu
Cette hypocritte légale durera jusqu'à {Uchelieu*
 peine avait-on vu a'évanouiir , Wrs de; VétaUi^iif
sèment d'une jus^ce régulière » ce prétexte die 1%
crainte des parjures qui avait soutemi si lMig-4eoapae
les duels publics et solennels appeléa comfyft,s judi^
ciaires, qu'on imagina uq nouvel exp&dieiit pou^
conserver cette autre e^èœ de dueli^ qui se pas^
sèrent à huis clos ^ et où il n'y eut d'aMte^ témoiui
que des complices, d'autres r^Ies que la hainiQ.
et la fureur des cliampion^. Qe nouveau prétextq^
fut nommé le pqini d'hQnn^^r* J« ^m efljsayer de ie
faire connaître.
i^aBsvaaava
CHAPITRE XIV,
De rhonneur oonsidérë Gomme mobile prineipal d«
Aiel. — c AoceplioQS diTemet de ce mol. — Ce que
cVtl cpe l^honneiir en morale et cbet les daelltttet.
r— Ervenre. ^- Préjugés. — * Abus. — Origine àm
poînl dliottneiir. — r Son incompalibiUlé iivcc te
;io4l ei U philosophie.
Cn MMit «M grande enirepriee que d^eattyer
d^eipliiiuer ce qu^on entend par le poimi iThontteur.
Mowlraqiiiett appelle la t'erfy , Tamour de la patrie
el rabii<|;atîaB de aoî-méme. Il n^a pas prédtèment
dèfiiii oe que o^eit que Vlumn^ur; nuûs il a dît que
$a natuwe est de demander des préférences ef de»
Ustimctians. Il 00 tVigit \k que 4e rhonneur
On peul se bhre une idée de la portée de ce mol
ftt OMMfrit ; mais en matière de duel il est plue
iMde 4*en iMliquer la yaleur que le irérîtable sens.
LliooDeuv , dans Pacoeptîon la plus vulgaire,
c^esl la bonne renomma , c^ett Testime d^autrui.
B consiste bien moins dans ce que nous sommes ,
i|Me dans ee que les autrcf pensent de nous. Je
1€8 — HISTOIRE DBS DUBL8. —
trouve entre l^honneur et la vertu cette différence
capitale qu^il y a plus d^apparence que de réalité
dans le premier , et de réalité que d^apparence dans
la seconde. Aristide qui aimait mieux être juste que
de le paraître, était un homme vertueux. On Fa
surnommé le juste; on ne le trouva pas honorablti
apparemment , puisqu^on lui fit subir Tostracisme.
On sait que Montesquieu a Cedt de Thoniieur Tattrihut
des monarchies , et a laissé la vertu pour apanage
aux républiques. Le même auteur ajoute que le
principe de la monarchie se corrompt quand PAori-
neur est mis en contradiction avec les honneurs, el
qu^on peut être tout à la fois couvert d*îafiEuiiie et
de dignités (151).
Le substantif honneur et son adjectif honomblù
sont aujourd'hui fort à la mode. Le mot est partout;^
la chose est peut-être beaucoup plus rare. La qualî*
fication d^ honorable se trouve dans toutes les bou-*
ches et on Tadresse à tout venant. On dit : Mœè
honorable collègue , mon honorable ami , et tout
cela sans conséquence. C'est une variante du sieur
ou monsieur, et Ton honore tout le monde , comme
on est de tout le monde le très-obéissant serviteur.
C'est une locution qui n'a plus de valeur.
Le mot honneur, excepté dans le langage poli^
tique , dans l'argot du jouroalisme ^ est en revanche
un mot trés-significalif (152). C'eat ce mot ma-«
Keu
;v. - 109
pque qui s mis et met encore si souvent lYpi'-e h. \a
mnin, qiii a divisé tant d'amis, qui a produit tant
tic catastrophes , qui a fait rouler tant de sang et
it de larmes. Ce mot me parait susecplible de
:ux signiGcalions qui sont loin de se ressembler.
J'envisage d'abord la première.
Ce tpi'on appelle honneur , en langage de duel ,
o'est le plus souTent que du respect humain ou de
l'amour - propre. Le resjiecl humain , c'est cette
mauvaise honte qui empêche de braver un préjugé
vulgaire. Qu'en dira-t-on?. ... Cela suffit pour faire
en un instant tourner la liîte la plus solide , pour
allumer le sang le plus froid. Ami, concitoyen,
père de famille , tout cela est oublié , tout s'évanouît
devant le mot Itonneur; et ce mot n'est lui-même
qu'un énorme contre-sens.
V amour 'piopiv consiste principalement dans
cette jactance du mépris de la vie, autre contre-
lens non moins bizarre. L'instinct de la conservation
ett te premier des gentimens naturels. Il n'a donc
ncD en lu^même dont on doive rougir. Mais comme
la bravoure ou valeur guerrière se tait un devoir
il'iiirroDler la mort , ce qui est une vertu quand
l'intérêt de la pairie l'exige , on a , par esprit d'imi-
lation, transporté ce sentiment dans la vie civile.
Cependant le motif n'est plus le miîme , et le sacri-
fice rc3te sans compensation. Celui pour qui la vie
llO -^HIStOtRÈ DES l>0fiLS. «»
n'es! d^aucuti prix prouve qu^il n'en datt pas Mer.
Chacun du reste estime sa tie ce qu'elle tbuI. Si la
taleur sait braver la mort , le courage plus grand
brate la mort et la vie. La valeur outragée se iréligt»
avec éclat et le courage pardonne en silence (158).
Envisagé dans sa seconde acception , le point
d'hondeur pourrait avoir quelque chose de plus
plausible. Le combat judiciaire Ait lon^-^tenipa fe
mode à-peu-près unique d'obtenir justice. Plus tard
la loi en indiqua d'autres et accorda jj^our les injures
certaines réparations; mais elle n^a pu prévoir toute»
les offenses , et dans la nomenclatai^ qu'elle en a
donnée^ elle en a omis volontairement du non un
asseï grand nombre. lien est d'auti^es pour lesquelles
elle n'a accordé qu^une réparation insuffisante ùa
illusoire ; soit que le législateur ait mal calculé TeffH
de ses dispositions , soit qu'il ait refusé de se «ou-
mettre au préjugé qui attribuait à certaines offiettaes
un degré de gravité qu'il n'apercevait pas lui-même.
Le caractère français , futia fnmeese , est trop
bouillant, trop impressionnable pour s'armer d'unfe
patielice inactive devant ces sortes d'injut^s. A dé-
faut de loi ^ il a cherché un autre mode de répa-
ration, n était tout trouvé dans le duel qui fut
conservé pour des cas de ce genre. On sci fit donc^
un point d'honneur de suppléer à cette lacune
de la loi. Son nlence n'en imposa pas; la t&ît-
\
— CRAI'ITbR XIV. — II I
|finimil£ fut déclarée tme faiblesse , et la patience
une Uchclé.
On alU bien plus loin encore , il y cul des caa
pnur lesquels ce fut presque une honte d'invoquer
Tappui des lois. L'intervention du magisiral fut
lepmiWe; on lui préféra celle du glaive. C'était
^«s eipéditif. Malheureusement celte façon d'agir
peut trouver une Sorle il'excuse dans la lenteur et
Is biMrrerie de nos formes judiciaires , j'ajouterai
tnéme dans la jurisprudence de nos tribunaux en
Anliére d'injures privées. Il est d'ailleurs , il faut en
convenir, certains griefs qui n'ont rien de Judi~
tiaire. L'honneur dans ces matières est quelque
chose de si subtil , de si délié qu'il échappe à toute
*lèGn>tioa légale. Ce senliment exquia et délicat
■uraîl iTaîDeurs tout h perdre dans des controverses
puMiqtics el dans les luttes du barreau. De pareils
piett ne paraissant du ressort d'aucun tribunal ,
il n'est resté d'autre juge que soi-mdmc. Il est à
craindre qu'il n'en soit encore ainsi de long-temps,
le reviendrai sur cet important sujet h la fin de cet
énvragc.
11 en est du point d'honneur en général comme de
l'pBUCoup d'usuges et de préjugés dont l'origine et
l'Hjinologie, quand on peut le» découvrir, frappent
[wirlnir étrangi'té et leur biiarrerie. Si l'on donnait
112 — BISTOIRB DES DUELS. -«
h lire à un duelliste de profession le cliapitrc de
V Esprit (les Lois , qui a pour titre : Origine dUipoi§àt
d'IiOiuieur, sa surprise serait grande peut-éire , et il
serait sans doute tenté de traiter Montesquieu de
rêveur et de songe-creux. Quel moyen en effet de se
déterminer k croire que des préjugés auxquels on
atlaclie une importance assex grande pour leur sa*
crilier k chaque instant sa vie , ont leur source dans
des institutions dont la raison humaine a fait depuis
long-temps justice ? Un amateur de duels poumit-il
aujourd'hui de sang froid s'entendre 4;onparer pour
les sentimens et la façon d'agir , à un aigrefin du
14.^ siècle ? Il en est pourtant ainsi : s^il y a quelque
différence, c^est seulement dans la forme et les épo-
ques ; et nos bruiteurs actuels ne sont bien réellement
que les successeurs des champions du moyen àg^.
L^originc du point d'honneur n'est pas chose
controversable, sur laquelle pourraient diversement
s'exercer les dissertations des érudits. 11 ne iaut pas
un grand effort de science pour la découvrir, et
Montesquieu en l'indiquant sommairement , n^a dit
que tout ce (}uc le monde savait ou était censé savoir.
Mais aussi peut-être personne n'y songeait aupara-
vant. Aujourd'hui mome réfléchit-on sérieusement
sur de pareils sujets P N 'est-il pas vrai que la préoo-
(rupation , cette maladie du siècle , nous absorbe à
tel point qu'elle équivaut presque k de l'ignorance ?
— OHIiI'lTnE 1
\
Il n'y a donc rien de plus rloir et de moins con-
Icilable que l'aflinitë qiii existe entre le combat
juridique et le duel de nos temps modernes. Celui-
ci lunriTBnt i son aine n'en a pas répudié rbéritage.
Il l'a même accepté sans bénéfice d'inventaire , et
k plus grande partie de ce qui avait appartenu
•u défunt a été conservée avec un soin reHgieux.
De toutes les gothiques maximes , qui mettaient
In vmes bui mains des preux du moyen âge ,
tut ijûle une collection quVn convint d^appeler
le point d'honneur.
Ainsi un coup de bâton ne déalionorait personne,
lu temps d^Âlcibiade et de Lycurgue. Iciusjastium
o^amiam non importât, dît la loi romaine (154).
Eh bien ! un coup de bâton prit chez nous le carao
lire du dernier outrage, non pas physique, mais
mors] ; ce qui suppose le coup le plus léger. Pour-
quoi celai*...- Parce que les gentilshommes ayant
#uls le privilège de se battre à cheval avec leurs
mnes , Inndis que les 'vilains combattaient à pied
uec le bâton , il suivit qu'un homme qui avait été
(rappé du bâton , avait été traité comme un vilain.
Ofaserrons la mi^me chose pour un démenti. C'était
par un démenti qu'on engageait le combat avec sa
partie adverse , qu'on l'engageait avec ses témoins ,
({iron l'engageait avec les juges quand ai\ faussait
leurs jugcmcns , c'esl-îi-dirc qu'on en appelait. Eh
8
m •— mSTOÎHE DES nUEL.^. —
bien ! le démenti est encore un cas de duel irrémis-
sible. Sxiblatd causa lollitiir effet tus, dit le proverbe
latin. Chez nous c^est le contraire; la cause dis-
parait , mais Teffet reste. Que d^exemples on en
pourrait citer !
L^homme-Dieu traîné devant Caiphe, par ceux
qui Taccusaient d^exciter le peuple à la révolte,
souffrit patiemment un soufflet, et sa sublime morale
recommande , lorsqu^on en a reçu un sur une joue,
de tendre Tautre : Si quis le perçussent in dex»
teram maxillam tuam, prœbe illi et alteram (1 65) .
Mais depuis il s^est trouvé que dans un pays qu^on
appelle France , les vilains combattaient à visage
découvert , à la différence des gentilshommes qui
avaient le privilège de le cacher. Or , comme il
n^y avait qu^un vilain qui p&t recevoir des coups
sur la foce , un soufflet devint une injure qui devait
être lavée dans le sang , parce que celui qui Tavail
reçu , avait été traité comme un vilain. De là le
proverbe : Jeu de mains, jeu de vilains.
Long-temps la grandeur des excès fit la grandeur
des outrages , dit Montesquieu ; ce qui parait assez
logique. Il n^en est plus de m^me aujourd'hui dans
notre siècle si rationnel. C'est tout le contraire qui
existe. Plus est in opinione quàm in veritate. Ainsi
prenez un bâton du plus fort échantillon , une
massue , un assommoir ; frappez de toute la force
-CHiPITSK XIV. —
115
de TOtre bras , l'injure sera U-gêrc. Mais elle aug-
menlera en proportion inverse tic la grosseur du
biloD : si ce n'est qu'une canne , une vergette ,
une cravache , vous êtes arrivé au maximum de
l'outrage.
Le coup de bâion est fmineminent contondant
en style medico-l^gal , c'csl-à-dire qu'il fait des
meurtrissures plus ou moins graves ; mais il est bien
moins injurieux que le coup de mains , qui ne peut
guère produire qu'une légère rougeur , tout au
plus une échymosc. Voulez-vous frapper de la
miin? gardez-vous de l'ouvrir; car alors c'est un
soufflet que vous donnez. Si vous la fermez, voua
Etre» plus de mal ; mais vous n'aurez donné qu'un
coup de poing. Or , la différence est énorme : un
coup de poing fera peu de bruit ; peut-être mémo
K contentera- t-on de vous en rendre un autre.
Miis la riposte d'un soufflet ne peut-être qu'un coup
d'^pée. C'est même un cas de duel ii mort ou au
dernier saiig (156).
Une injure qui est encore un sujet de duel fréquent
dans nos mœurs ; c'est l'épithéte de sot cl surtout
'■elle àefat : comme si la seule réfutation logique
«l'une telle expression n'était pas de nommer celui
^"1 l'emploie ; comme si le publie n'était pas le seul
jiiçe nalurel entre nn sot et un homme d'esprit. J'ai
li'crché quelle était l'origine de ce préjugé , et j'ai
116 — HÎ5T0IRK DES DUEL». —
cru ravoir trouvée dans ce passage célèbre du pre-
mier des livres :
« Audislis quià dictum esl antiquis : non occittes;
qui autem occident, reus erit judicio. Ego autem
dico vobis quià omnis qui irascitur fratri suo , reus
erit judicio ; qui autem dixcrit fratri suo : raca
reus erit concilio : qui autem dixeril : fatue, reus
erit gehennœ ignis (157).
Cette gradation est remarquable : la peine de la
colère est la même que celle du meurtre : reus
judicio* La cause la plus ordinaire et Peffet sont
ainsi sur la même ligne. L^injure simple raca,
c'est-à-dire homme nul , est de la compétence du
Sanhédrin : reus concilio. L'injure du dernier degré,
^ous êtes un fat, est digne du feu : Reus gehennœ
ignis. Cette injure était donc déjà d'une bien haute
gravité chez les Hébreux ! . . . . Quant à nous , si nous
avons pris l'exemple , nous ne paraissons guères
tenir compte du précepte (158).
On peut juger par ces diverses citations, si la
morale du christianisme est compatible avec le
préjugé du point d'honneur. Aimez votre prochain
comme vous-même ; pardonnez et l'on vous par^
donnera ; que le soleil ne se couche point sur votre
colère ; celui qui se sentira de Vépée y périra par
l'épée. Telles sont les maximes qu'on rencontre à
117
chaque pas dans l'ETangile. Quelle fut donc Taber-
raliou des siècles où le duel fui appelé Jugement
de Dieu , de ce Dieu qui a dit dans l'ancienne el la
aouvelie loit Tu ne terilems peu le Seigneur ! (150)
Ce que nous divinisons aujourd'hui sous le nom
depoinl d'ilonneur a ^té /■galemKnl proscrit parla
philosophie, comme indigne de t'humme. Hobbes
leul a eu le courage de l'approuver. C'est tme con-
i^uence de sa morale qui n'admet d'autre principe
([ue ]u Jorce (160).
I C'est un terme inhumain que celui de veii-
!, a ditSénéque. Une (îme grande et g6n(TCUse
jB^prise les injures. La vengeance la plus blessante
pour celui qui nous offense, c'est de le juger indigne
denousTeoger de lui» (161)-
^M Horacelui-mi''medontla morale n'est pas toujours
^HKUineii citer, appelle la colère imQ <ourie lUmence.
^^Êm colère est en efîvl l'ivresse de l'esprit. « Quand
^Hhlte passion n'ob^-it pas, dit-il , elle régne en tyran.
^Bwust ne doit-on épargner ni mors , ni chaînes pour
I l'en rendre toujours maiire» (162).
Montaigne a parfaitement développe cette pensée
^ d'Horace dans ce passage des Essais. << Aristole dit
^k-^e la colère peut servir d'arme k l'honneur et à
^~ k vaillance. Oui, mais c'est une arme de nouvel
\ *Mfe. Nous remuons les autres , celle-ci uous
u«((;e.
Kuiiie ; notre main ne la guide i
c'est elle (|U4
1 18 -^ HISTOIRE DES DUELS. —
guide noire main ; elle nous tient, nous ne la tenons
pas. » ZiV. II , Chap. XXXI.
La colère , la vengeance, ce sont bien là les deux
passions les plus fatales de toutes dans Tordre moral
et politique. Ne sont-elles pas en effet la source
commune du duel et de Témeute ? Elles ne laissent à
rbomme qu^elles dominent ni réflexion , ni juge*
ment, ni liberté. Aveuglé par elles , il accepte un
remède pire que le mal ; et pour éviter une ornière,
il se jolie dans un précipice. Comme toutes les pas-
sions la vengeance et la colère rougissent d^elles*
mi^mes ; elles aiment V incognito; et le nom qu^elles
adoptent , c^est le point d'honneur. Avec quelle
énergie un illustre pliilosophe que n^a pourtant pas
éclairé le flambeau de la morale évangélique n*a«
t-il pas flétri d'avance ce préjugé dans ce passage
admirable , et qu'on croirait écrit de nos jours :
<( Un homme d'honneur, dit Cicéron , ne trempe
jamais ses mains dans le sang d^un concitoyen. C'est
un sentiment bien plus doux pour lui d'avoir
respecté une vie dont il pouvait disposer , que de
ravoir sacrifiée quand il pouvait Fépargner. C'est
ainsi qu'en use un honnête homme envers ses plus
cruels ennemis; et il le fait autant par poi/it ifAo/i*
neur que par humanité » (163) .
Parmi les moralistes modernes l'illustre Puffen«
dorf a énergiquement attaqué le préjugé du point
— CHAPITRE XIV. —
119
dlionneur dans plusieurs chapitres du Droit delà
nauti-e et des gens . Il ne roil u aucun dc^lionneur k
nrfpriser des injures cl h s'abstenir d'en chercher
Il réparation dans un combat dnublemeul périlleux
par l'incertitude de ses chances et par lu sèvùrité
lies lois. )i
GmliusaiK-beaui'oup plus loin encore. Il affirme
que « l'honneur n'étant autre cliose que l'opinion
r[u'on a des qualités distinguées de ([uelqu'un, celui
qiû louffre patiemmcnl une injure , s'éléTC au-
dcmu du nulgairc, et signale ainsi son honneur
(u lieu «le le compromettre » (tCi).
1 Si les peuples les plus éclairés , les plus braves ,
Il plus vertueux de la terre n'ont pas connu le
IkI, a dit Rousseau , je dis qu'il n'est pas une ins-
ition de l'honneur , mais une mode affreuse el
riiare digne de sa féroce origine, n Tout le monde
tmait les pages élmpientes par lesqutllfs ce cé-
ï philosophe a flétri le préjuge qu'il déGuit ainsi,
Une puis qu'y renvoyer le lecteur.
Je pourrais multipUer ces citations par de nora-
bmii emprunts à la philosophie moderne; mais
^_j'ai promis de faire une histoire et non pas un traité
^HiinorHle. Quant aux anciens faut-il s'étonner qu'ils
^Wnent pas connu le préjugé du point d'honneur,
Iftreqiic leurs plûlosophes s'exprimaient comme
luQt hil ^nèquc et Cicéron ^ CIk-e eux pourtant
120 —HISTOIRE DES DUELS.—
toutes les divinités , les \iccs iiirme avaient leur
culte ; et pour plus de certitude de iroublier per-
floune ils consacrèrent un temple au Dieu inconnu y
ignoto Dvo* (Ihcx n«)us le Dieu inconnu c'eal l'hon-
neur : non-seulement nous lui élevons des autels ,
mais nous les arrosons de noire sang , préires t\
victimes à la fois,
CHAPITIIE XV.
Règles et rurmuliiéB
Lh duela modernes ont Iiôrilé des r^itles comme
i dn maximes des anciens combats judiciaire». Ce»
I rtglM n'ont jamais , je pense , élé formulées dans nii
1 Ctide particulier^ mais elles se sont cunservées par
Indilion. Le progrès en liumaiiitf- el en couiloisie
tn i beaucoup adouci la férocité primitive. Ou
l'^orge aujourd'hui plus poliment qu'aulrcfois.
1 Tout ce qui concerne l'envoi du carie!, le jet du
pnl api>elt jadis gage lio bataille, le clinix et la
wrisiiondestémoiiis, l'égalité désarmes, des cliuuces,
tic. , s'applique encore aux duels actuels.
Ainsi la proTocation en duel a encore lieu de
^cut manières , ou par lellrc missive ouparlcjit
n gant. La lettre missive s'appelle cailel du luwl
[ «lin rhartula. Les termes des divers cartels ont été
I >u>|;neusement tracés par les écrivains duellistes.
Minage eu a compté jusiju'à cinquante espèces.
0" en trouve les formules dans Alciat, avec celles
(Itt l«ltrc4 d'acceptatioD ou de refus. Elles consiittent
122 — msToiRF. nus dcrl«. —
en démentis réciproq^ics. Tels furent le cartel de
Franrois l,^^ k Charles * Quint et ceux échangés
entre Jamac et La Chataigneraye y qu^ont eu soin
de nous conserver plusieurs auteurs (165).
Le jet du gant pour provoquer en duel me parait
devoir remonter à une origine bien ancienne. On
en trouve en effet un exemple remarquable dans le
combat au ceste entre Entelle et Darès , si parfaite*
ment décrit au Liv. V , de VEuéide. Entelle jette à
Darés une paire de gantelets , pour lui marquer
qu'il consent à se mesurer avec lui. On a conservé
cet usage dans les plus anciens duels et dans les
tournois , où le gantelet faisait partie de Tarmuro^
des combattans (166).
Le jet du gant qui remplaça ensuite le gantelet,
est devenu plus rare de nos jours, cette forme ne
parait plus assez polie. On met aussi plus de réserve
dans les termes des cartels qui sont d'ailleurs aussi
courts qu'ils étaient longs autrefois.
Quand le combat est arrêté , on choisit de chaque
câté un ou deux témoins au plus. Ce choix est
important , et une telle mission exige beaucoup de
tact et de prudence ; car h moins qu'il ne s'agisse
d'offenses très-graves , ces tiers désintéressés exami*
ncnt raffaire et jugent quelle espèce de satisfactioa
peut exiger l'honneur des parties. Celles-ci se
soumettent ordinairement h leur décision. Lorsque
»
— CHApimE XV. ~ I2'l
le duel a lieu les témoitis règlent le choix des arme»,
ttiihlis^ent les distances ei prennent loute» lea [iK-
cautiona nécessaires pour (pie les chances soient
ptrCaitenient égales , sauf eependiinl In plus im-
portante de toutes , l'adresse respediiïc des com-
balUns qui ne dépend pas d'eux. 11 est assez rare
aujourd'hui que les témoins prennent part ii la lutte.
Il Ml plus rare encore qu'ils se battent en même
temps que leurs tenans , ainsi que cela se pratiquait
«ulrefois. On en trouvera de singuliers exemples au
clu[MlreBuiTanl,
Outre les armes usitées autrefois et indiquées ci-
dewis , pag. 30 ; chacun des combattans étiiil ordi-
nairement muni d'une dague ou poignard dont on
•e Knait pour achever son homme tombé par terre,
n arrivait aussi fort souvent que la fureur mettait
»ut prises les champions , et que le duel se termi-
■uit par une lutte corps à corps. Le poignard
bisnil alors son office (167).
Les seules armes admises dans les duels modernes
•ont le sabre, l'épée et le pistolet . Ces deux dernières
hdI les plus usitées. L'invention du pistolet date du
rtfne de Henri U. Cette arme est la plus meurtrière.
C'est souvent celle qu'on choisit, quand n'ayant
pa» l'usage de l'escrime , on croit avoir trop à
Craindre de la supériorité de son adversaire. Ce
ctloil n'est pas toujours juste, aujourd'hui surtout
124 — mSTOlTlE DES DUELS.—
cfiic le tir des armes à feu s^est aingulièremenl per«
feclionné (168).
Il fallait jadis être bien sur de soi, quand on
figurait en champ clos, et avoir le poignet solide , le
pied sur et des armes de la meilleure trempe ; car
s'il arrivait qu^on tombât , que Tarme se brisât ou
échappât des mains , on demeurait à la discrétion
de son ennemi , (jui d^ordinaire ne faisait pas de
quartier. Les anciens docteurs en matière de duel
sont là -dessus inexorables. Alciat qui s'est proposé à
cet égard un grand nombre de questions , les
décide toutes impitoyablement contre celui à qui ce
malheur arrive. Il faut, dit-il, se soumettre à la pro^
vidence qui Ta ainsi permis (169).
Celte raison en valait une autre quand les couh
bats s'appelaient Jugcmcns de Dieu. Les choses ne
se passent plus avec cette rigueur au temps présent.
Lorsque de pareils accidcns arrivent, le combat
cesse ou est suspendu. Celui qui passerait outre
s^exposerait à être poursuivi comme meurtrier.
Le duel serait alors jugé dîdojal (170).
Autrefois on connaissait deux sortes de duels , le
duel simple et le duel à outrance, Le duel simple
devait finir à la première blessure , ou quand Pun
des champions était mis hors de combat , ou enfia
quand les témoins déclaraient Taffaire terminée et
l'honneur des parties satisfait. Le combat à ouUraace
I
— CHAPITRE XV.— 125
ntscterminailqueparla mort. C'esl le dMeXaupre-
mieretau (/f/7*i>r Jrtw^ des li;mps modernes (171).
Aujourd'hui quand un rnmbat de ce dernier
Henre a lieu au sobre ou à IVpéc , et qu'il en esl r^-
mité une blessure assez grave pour rendre les
chances inégales , la iullc est 5us|)eiidue ; le bless6
n se faire panser et guérir , et l'on recommence
iprés jusqu'il ce que mort s'en suive (172).
Quand le combat a lieu au pistolet qui esl l'arme
Uplns usitée parce qu'elle esl la plus expéditive , on
«partage par la voie du sort deux pistolets, dont
l'un est chargé et l'autre ne Test pas. Les deux coups
partent en même temps et à bout portant à un signal
dntmë par les témoins. Tant mieux pour celui qui a
tu prendre le bon pistolet. Cliacun jytte ainsi sa tête
i croix ou pde ; c'est un suicide alternatif, c'est un
pacte de vie ou de mort (1 73) -
Pour donner une idée des maximes qui avaient
jadis force de loi chex les duellistes; j'en citerai
ipielques-uncs , d'après Braiilûnic, qu'on peut re-
garder comme le Jusiimen de ce nouveau Digeste.
Il commenre par recommander de bien se garder
dr te battre sans témoins , comme on le faisait quel-
quefois dans les combats qu'en Italie on appelait^ la
Il en donne pour raisou d'abord que c'est
public d'un beau spectacle , et ensuite que
126 — mSTOIRE DES DUELS, -^
c^est s^exposer a être recherché et puni comme
meurtrier. Branlûme aurait pu se contenter de ce
dernier moUf.
c( On ne doit pas y dit-il encore , prendre pour
témoins d^un duel un infidèle , parce que ce n^est
raison quMl soit spectateur et juge de reffusion de
sang chrétien , et qu^il en ait son plaisir ; ce qui
est fort abominable que cet infidèle passe son temps
à cela. »
c( Les combattans doivent être soigneusement
visités ettastés pour savoir s^ils n'ont drogueries,
sorcelleries ou maléfices. 11 est permis de porter
reliques de Notre-Dame-de-Lorette et autres choses
saintes. En quoi pourtant il y a dispute, si Tun
s'en trouvait chargé et Tautre non ; car en ces
choses il faut que Tun n'ait pas plus d'avantage
que l'autre. »
c( Il ne fallait point parler de courtoisie , con-
tinue notre auteur : celui qui entrait en champ clos
devait se proposer vaincre ou mourir , et surtout
ne se rendre point ; car le vainqueur disposait du
vaincu tellement qu^il en voulait ; comme de le
traîner par le camp , de le pendre , de le brûler ,
de le tenir prisonnier ; bref d'en disposer comme
d'un esclave. On dit que les Danois et Lombards
en prirent exemple d' Arhille , lequel après qu'il eut
vaincu Ilcrtor , l'attacha tout mort à la queue de
n charriot ou clieval , et le traîna trois fois par le
Lninp en signe de triomphe. »
i< Tout galant chevalier doit soutenir l'honneur
des dames, soit qu'elles raient forfaicl, soit que non ;
si c'est forfaicture it une gentille dame d'aimer biea
■on serviteur et amant. »
» Un soldat peut combattre son capitaine ', mais
pourvu qu'il ait ser^'i deux aus , et demande à sortir
t la compagnie. »
1 Si un père accuse son fils de quelque crime
dont il puisse être deslionoré , le fils peut appeler
justement le père en duel ; d'autant que le père lui
Ut plus de mal de le dtahuuorer , qu'il lui a lait de
I bien de le mettre au monde et donner vie. »
On voit que la logique de Brnntûme était tout
juite tu diapason de sa morale. 11 a 6tè fait du reste
une apphcation de cette étrange maxime , diins le
L duel rapporté au chapitre XXXII , entre le duc de
^fcfiueldreselBonlilB, en présence du duc de Uour-
■««ne (174).
1 On Terait un gros \oUimc des décisions diverses
des anciens casuisles eu matière de duel. La Bérau-
^— diêre examine aussi si un soldat peut provoquer
^■«1 duel son capitaine , et comme Brantâme , il se
^F^rononce pour Vatfirmulive, m<^mc sans conditions.
' Hasnage a pris la peine de réfuter longuement cette
wiitcncc. Alciat est d'avis qu'un chef militaire ne
nom
h
■ j ,
E
128 —HISTOIRE DES DUELS.—
peul c-lrc provoqué en duel , sauf quand il nVst
plus en exercice : Postjonclionem secits (175).
Le mime auteur pense qu^on ne peul refuser le
carlol d\m bàlard. La Béraudiére qui est d'un avis
contraire , conseille aux grands seigneurs de faire
légitimer leurs bâtards ^o^/r les rendre dignes delà
chevalerie et de r honneur des duels ^ Cet habile doc-
leur déclare nul tout cartel d'un roturier à un gen-
tilhomme. On a vu ci-dessus pag. 32 et 33 , que le
combat judiciaire était aussi un privilège exclusif de
la noblesse.
Brantôme n'a pas parlé du droit pour un gentil-
homme de refuser le cartel d'un roturier ; ce qui
pour lui ne faisait pas question. Mais il s'élève avec
énergie contre une prétention semblable des r/éco/ri
de son temps , à l'égard de ceux qui ne l'étaient
pas. (( Si ces gens dévoient être escoutés , dit-il , on
ne pourroit plus se battre. 11 en a tant et tant pul-
lulé qu^on ne voit plus que des chevaliers de Saint-
Michel et du Saint-Esprit. Tant on abusoit de ces
ordres par Tinjure de nos guerres civiles, et pour
gagner et entretenir des gens ; si bien cpi^ils ne se
donnoicut plus à la valeur et au mérite , mais par
compère et commère — » Et il en cite d'assez plai-
sans exemples. ?s e croirait-on pas vraiment entendre
une satyre coiilemporaine ;* (^'6).
11 parait que les orilres de chevalerie ont de tout
ips joué un rûle dans lus annales du poinl d'hoa-
iur. Arracher une décoration uu même la toucher,
tela est considéré comme une injure grave ; c'est un
préliminaire de duel. On en a vu de nos jours un
double exemple dans un duel politique , occasionné
par un article de journal. M . Gallois, colonel au ser-
vice de Pologne , ayant eu à se plaindre d'un article
du Figaro, s'adressa au rédacteur M . Nestor Roque-
plan et lui arracha le ruban de la Kgiun d'honneur.
Bendei^vous fut assigné au boia de Mcudon , le 12
•eût 1833. M. Roqueplan reçut trois blessures et
M, Gallois une au genou. Les deux létnoins de
H' Gallois avaient mis habit bas en même temps que
. et Toulaient se battre avec ceux de M. Doque^
qui refusèrent. L'un d'eux insistant déclara V
M. Léon Pillet, témoin de ce dernier et avec lequel
il était lié , qu'il entendait le forcer è se battre avec
lui, et il le pria de lui permelire de détacher de sa
boutonnière le ruban de la légion d'honneur qu'il
pitrtait. Il ne voulait , disait-il , que vaincre sa répu-
gnance à accepter le combat , ayant pour lui trop
d'estime et d'amitié pour se résoudre â l'outrager
autn;menl. M. Lion PiUel voulut bien se prêter
1 cette cérémonie , et tous deux mirent ensuite
i>péeàlamBin(I77).
Au temps où les insignes de la chevalerie n'étaient
pas encore une fHveitr royale, mais une gratification
KG
180 — HISTOIRE DES DUELS. —
du beau nexe, ceux qui s^en décoraient n'étaient
pas moins chatouilleux sur cet article que nos che-
valiers modernes. Le nœud de rubans qu'attachait
à la boutonnière d'un poursuivant d'armes la
dame de ses pensées , s'appelait Emprise ; et quand
on voulait faire armes pour l'amour d'elle , on se
mettait en quête de quelque preux dont on touchait
l'emprise. Si on avait été jusqu'à l'arracher, on n'en
était pas quitte pour quelques lances rompuea;
c'était alors un combat à outrance. Olivier de la
Marche explique tout cela fort au long dans ses
Mémoires, à Toccasion d'un combat célèbre ^pi
eut lieu à Ârras , en présence de Philippe-le-6on ,
duc de Bourgogne. Il y a toute apparence que
notre susceptibilité actuelle , dérive de ces ancmm
usages de la chevalerie. C'est un article de plus à
ajouter aux origines dont il a été parlé au précédeM
diapitre (178) .
CHAPITRE XVI.
(pparaiiOD des XV.* ei XVI.' sièHes. -~ PoUtiqu«
I roi» de France, depuis Charlee VI juiipi'à
ienrl lll , à l'égard des dueU, — Guerres d'Italie.
-Guerres de religion. — Leur influence relatÎTC
hnr La civilisation.
Je trouve entre le 15.* et le 16.* siècles la même
différence qu'entre le 17. • et le 18.* ; elles ne sont ,
•elon moi , ni l'une ni l'aulre k l'avantage du pro-
gris. On préférera encore Louis XI à Charles IX ;
on placera Charles VIH bien au-dessus de Henri II ;
François 1." ne fera point oublier Louis XII ; et
le» glorieux exploits des Français, sous Charles VH,
nous consoleront long- temps des malheurs de la
juerre civile sons Henri lll. Je ne crois pas néce»-
saire pour justifier la seconde proposition d'établir
de parallèle entre les régnes de Henri IV et de
Louis MV d'une part , et les temps de la régence
_cl de Louis XV de l'aulre. Ce qui n'est pas moins
ipiable c'est que la première période d'un
1 souvent beaucoup mieu^ valu que la se-
132 ^ niSTOIRE DES DTTIL^. -^
ronde. II v a donc action et réaction dans la marche
<le la civilisation et le torrent des Ages semble obéir
i\ la même loi que celle qui régie le mouyement
des flots de Tocéan !
Ainsi pour nous renfermer dans le sujet de cette
histoire, le 15.^ siècle peut passer pour celui où
les duels furent le plus rares , et le 16.* pour
celui où ils ont été le plus fréquens. Nous PaTons
déjà dit , la grande révolution morale qui marqua
le milieu du 15." siècle fut brusquement arrêtée
dans sa marche et refoulée sur elle-même par la
réaction qui souilla la seconde partie du seizième.
Oh ! quelles brillantes destinées étaient réserrées à
notre patrie si elle avait pu franchir cette période
fatale Si qiiafata aspera rampas I
Les cond:)at« judiciaires restreints par Ourles VI
tombèrent progressÎTement en désuétude sous les
règnes suivans. On ne les aurait pas vus se réreiller
sous une autre forme , pour arriver jusqu'à nous
avec ce prestige qui les environne encore , sans
une funeste série d^événemens dont il me reste à
retracer l'analyse.
Sous Charles VU ^ Paristocratie avait trop affaire
dans le grand duel ^ dans ce duel national engagé
entr^elle et TAngleterre depuis plus d'un siècle ,
pour s'occuper de querelles particulières. La no-
blesse française s'est acquise une gloire immortelle
— cnApiTHE \vi.— 133
a celte tiitle si longue et si brillante , où les dé-
rtre» de Poitiers . de Créci et d'Âzincourt furent
fÏRngés par rentière expulsion df s Anglais en 1430.
Quels hommes que les Dunois , les Saintrailles ,
lu l.shirc, les Jeanne d'Arc! toutefois cette der-
nière notait riu'unc pauvre paysanne. L'aristocratie
(dieva de s'épuiser dans ces énormes sacrifices
d'hommes et d'argent sans cesse renouvelés. Mais
ief peuples n'y ont rien gagné : rautorilé royale
tnde en proSla. C'est de ce n^gne que datent la per-
maneoce des armées el celle des impôts (179).
I^ politique de Louis .\t siil llror un merveilleux
pirij de cet état d'atîtiiblissement où i\ trouva l'aria-
iDcratie. Elle fut décimée par ce prince cruel qui
Ibnda sur les exécutions le deiipotisme royal. Le
même sang qiii avail coulé sur Le champ de halallle
{mur la difense du pays, arrosa les éctinfauds.
H n'en resta plus asscx pour les clianipa clos.
Siclielieu , comme on le verra au Chap. XIX , fit
(quelque chose de semblable un siècle après. Mais
ce ministre n^a encore été qu'un pâle imitateur
de Louis XI (180).
Toutes ces causes réunies avaient porté au duel
m coup mortel. Le préjugé s'alTaiblissail en même
Innps que celui qui soutient rariatocralie , ce qui
*ltf«te assez l'homogénéité de leur existence. Mai*
nous l«» verrons bientùl lussusciter Uius deux duut
134 — HISTOIRE DKS DUBL8. —
le cours du seizième siècle , au moyen d^une com-
mune transformation.
La France a toujours passe et passe encore pour
donner le ton à FEurope ; mais il s^est fait quelque
fois entre Tétranger et nous , un échange qui n^a pas
toujours été à notre avantage. Pour tout ce que
nous avons pu donner de bon k nos voisins , noua
ne leur avons guères fait que de fâcheux emprunt!.
Si c^est k la Germanie que nous devons les combats
judiciaires , ce fut en Italie qu^on alla chercher le
duel ordinaire qui leur a succédé. En même temps
que cette contagion morale gagnait la France à la
suite des expéditions de Charles VIU , Louis XII et
François I/', une autre contagion physique nous
arrivait par PEspagne (181). A peine la mode du
duel eut-elle ainsi franchi les Alpes ^ qu^elle com-
mença à s^effacer graduellement des mœurs italien-
nes : le stylet y remplaça Fépée , et s'il y eut plus de
férocité dans la vengeance , on y mit aussi un peu
plus de logique (182).
C'est du règne de Charles VIII que datent ces
guerres dltalie si funestes à nos armes et plus encore
à nos mœurs. L'ardeur de la jeunesse inspira à ce
prince le goût des expéditions étrangères. En 14ftd
il s'empara en courant du royaume de Naples, et
malgré des prodiges de valeur personnelle ^ il le
perdit aussi rapidement qu'il l'avait conquis. Le
I
— CHAPITRE XVI. — 135
duel était alors fort en vogue en Itulie. CYlait une
Indition des Gollis et des Lombards , el peut-être
■éme aussi une iaiporlatiun espapinle , à cette
époque où la «tievalerie eiurrait Uni d'iuQuenre
daus la péuiiiaule ibèni|uc. Oii ne vit que trop
nuvent les compagnous de Gonzaive de Cordoue
te mesurer en cliamp dos avec ceux de La Palice et
«ieBajard(I83).
Le d^sir de faire valoir les droits de son aïeule, la
<ttiébre Valcutiue , sur le duché de Milan , entraîna
Louis XII dans de nouvelles expéditions d'Italie ,
quoiqu'il se fût opiKisé à i-elle que son prédécesseur
voulait tenter encore sur la fin de sa vie. Ce fut dans
le cours de ces guerres qui uccupèrenl tout le règne
de ce prince, depuis 1499 jusqu'en 1515, qu'on
fit éclater de funestes CKcniples de duel dans les
rangs de l'armée. Le duc de Nemours qui la com-
naadait , en autorisa quelques-uns. Tous les grades
•béirent au nouveau prf^jugé , et l'illustre ISayard
hù-mAcne ne put s'exempter de lui payer tribut.
fuyez ci~aprés Cliap. XXXJf.
Les^erres d'Italie cunliuucrcnt sous Françoisl'%
et le caractère chevaleresque de ce prince fournît
aus duels un nouvel aliment. Non-seulement il en
autorisa et présida plusieurs , comme on l'a vu page
.52, mais il les encouragea mtmc par suu exemple.
Ion du fumeux cartel qu'il ciivuva ii ("liarles-Quinl ,
138 — mSTOIBK DES DUR1«. —
et qui n^eui pas de suites parce qu'aucune des deux
parties ne parait avoir eu Fintention sérieuse d*ea
venir aux mains (184). Cette bravade du roi n^em
eut pas moins une grande influence sur la conduile
des seigneurs du temps, et contribua beaucoup
avec les guerres d'Italie à remettre les duels à k
mode. « Un pareil exemple , dit Robertson , eut
tant d^autorité sur les esprits qu'il produisit une fé^
volulion sensible dans les mœurs de toute l'Europe.
Dès lors les duels qui ne pouvaient avoir lieu que
par Tordonnance du magistrat civil , s^engagèrent
bientôt sans cette iutervenlion , et s'étendirent à
plusieurs cas que la loi n'avait pas marqués. Ce qui
venait de se passer entre Charles et François accr^
dita singulièrement cette pratique. Le plus beau
sang de l'Europe fut versé dans les duels , et il y eut
des temps où les querelles d'honneur furent plus
destructives que les guerres nationales » (185).
François l.^' eut néanmoins asseï de sagean
pour s'opposer dans les dernières années de sa vie,
au duel de Jamac et La Chataigneraye. 11 prévit
sans doute tout ce qu'un éclat semblable aurait de
fâcheux pour le dauphin , qui s'était si fort compro»
mis dans cette querelle. Ce qu'il y a d'incroyable ,
c'est que celui-ci ne parut nullement comprendre
sa position. A peine son père avait-41 fermé les yeux
que devenu roi sous le nom de Henri II , il autorisa
•- CHAPITRE XVI.— 137
\t duel et voulut le présider k la téfe de toute sa
cour. On a vu ci-dessus , comment il s'y Hail con-
diiil. Il fut puni par où il avait péché. Douze ai»
iprés au tournoi du faubourg Saiiit-Anluîne , la
lauce de Monlgomery vengea La Cliataigiieraye el
Il morale publique.
Ce fui sous ce règne qu'on commença ii se servir
du pistolet. Cette arroe fut l'auTtiliaire du poignard
t( devint familière aux bandits qui désolaient le
royaume. Henri II fut forcé de publier des édita sur
l« port d'armes , et de défendre aux genlilstiommes
de« faire accompagner de gens armés avec lesquels
iti commettaient toute sorte de désordres. Voici ud
:u du triste tableau qu'en a tracé l'un de nos
graves Iiistoriens, l'abbé Velly : « Le commerce
de* Italiens parmi lesquels nos armées vivaient de-
[Hiis plus de cinquante ans, avait altéré de plus
«Tune manière le caractère national. Les hommes
^cnt devenus moins déhcals sur les moyens de se
venger. Les assassinats , les meurtres prémédités
devenaient de jour en jour plus fréquens. Déjà l'on
ne se contentait plus de guetter son ennemi sur un
^nd chemin ou de le surprendre de nuit dans sa
maison. C'était au coin d'une rue , dans une place
pubbque et sous les yeux de leurs concitoyens, que
des lionimes revêtus de fonctions publiques tom-
bateot 80U9 le fer d'un assassin. Des relais placés
^ itiCOE
1
188 •^HISTOIRE DES DUEL8. —
hors des murs de la yiile dérobaient le coupable à la
justice I et le crime restait impuni. Ce renTcrsement
de Tordre social demandait et les supplices les plus
effrayans et les dernières précautions. La loi pro-
nonça contre les auteurs et les complices de ce
crime, de quelque condition qu^ils fussent, le sup-
plice de la roue , etc. , etc » (186).
Tout cela ne fut qu^un vain palliatif. La fureur
homicide qui est le caractère distinctif de ce siècle
ne s^en rallenlit pas un instant et alla toujours en
progression ascendante , comme on le yerra aux
chapitres suivans.
François II , faible adolescent , mort à dix-huit
ans , après dix-sept mois de règne , ne figure guères
que pour mémoire dans la nomenclature de nos
rois. Son frère puiné , autre adolescent, maisd^un
caractère bien autrement significatif lui succède à la
fin de 1560. On connaît ce règne qui eut treize ans
de durée et s^éteignit dans le sang.
Charles IX fut le dernier roi de France qui permit
le duel et s'en donna le spectacle. Il fut aussi le pre-
mier qui songea sérieusement à le défendre. Son
ordonnance de 1566 est admirable ; mais le chaa-
ceUer de Lhôpital qui en fut Fauteur , n^eut pas le
loisir d^en assurer Texécution. Celle de 1660 où Ton
se réserve de faire grâce aux duellistes en connais^
sance de cause, accuse déjà Tabsence de ce vertueux
ministre (187).
— CHAPITBK X\l. — 139
On a vu Henri III figurer le dernier avec soû
frère Cliarlcs IX dans un tournoi. Comme ueluî-iû ,
il fit aussi des ordonoances contre les meurtriers et
■tsasaiiis, qui cependaut ne se raontrèrenl jamais
avec plus d'audace el d'impunité que bous ce règne
nii la France parut dcTcnir un véritable coupe-
gorge. Jamais prince ne montra plus de mollesse
envers tes spadassins. S'il finit par voir les duels de
maunùs ceil , ce ne fut que lorsqu'il se sentit blessé
dans ses affections personnelles par la perte de
plusieurs de ses indignes Favoris. Sans énergie pour
les venger , leur fin tragiqrie nVlail pour lui que
l'orcasion d'un nouveau si-andale qui éclatait dans
l'indécence de ses rcgrels. D'Audiguier a osé nom-
mer ce prince le meilleur roi du monde. Brantôme
•e borne à exalter sa clémence envers les duellistes.
" « Quant k noslre roy Henri III , dit-il , combien de
fois n"a-l-il pas faict d'ordonnances cl déFenscs de
c'enplusvenir làjcarjel'ay veuàlacour lepublier
phi3 de cent fois. Si aucuns y conlrevenoienl , il
éloil si bon qu'il ne les vouloit Faire punir k Ut*
^rigueur; car d aimoilsa noblesse, etc. » (188).
La Bévrc des duels ne parut même pas se calmer ,
pendant la longue période des guerres de religion.
Ces* qu'il n'en est pas des guerres civiles comme de
celles qu'on entreprend pour l'Iionneur national
coolie uu peuple ëlrangec, Quand cellea-ct éclatent,
140 —HISTOIRE DBS DOÛiS. —
les discordes s^appaîsent ; un seul intérêt domine ;
on réserve son sang pour la patrie ; fl n^ a plus de
duels. Mais quand une lutte impie met aux prfoes
les citoyens d'un même pays , toutes les passions se
déchaînent à la fois , il n^y a plus ni règle , ni frein ;
on se fait arme de tout , on ne se bat pas , on tue ; cm
ne soumet pas , on massacre ; et ce qpie le glaire a
épargné devient la proie de Féchafoud. Aussi Tho*-
micide se montra-t-il sous toutes les formes pendant
ces horribles convulsions qui marqpièrent la seconde
période du 16.^ siècle. Les meurtres et les guel-4-
pens se donnèrent la main avec les combats en
champs clos. Tous les instrumens de destruction
fonctionnèrent à la fois. Le poignard rivalisa avec
l'épée ; et comme nous devions déjà le duel à Tltalie,
une reine du nom de Médicis nous en apporta un
nouveau présent, Tassassinaf (180).
Tel est le tableau comparatif du 15.* et du 16.*
siècle , relativement au sujet de cette histoire. Pai
dû insister plus particulièrement sur cette partie et
lui donner quelques développemens, parceque c^esl
\h que se trouve le berceau du duel proprement dit.
Il fut le nourrisson de raristocratie qui s^en est
toujours constituée la gardienne exclusive. A la suite
du 1 5. « siècle il éprouva une révolution remarquable
qui lui fut commune avec elle. La noblesae fui
eàla
tIcsc
14t
»
cour par les careasefl du prince et l'attrait
4e3 plaisirs. L'austérité de la vie de province fit place
i la mollesse de la capitale. De féodale qu'elle était
l'arialocratie devint royale. Elle élait maîtresse , elle
ne fut plus qu'esclave . Elle régnait dans ses donjooa,
elle rampa dans les antichambres. II n'y eut plus de
seigneurs, mais des courtisans. Cette révolution a
été parlÎBitement décrite par le président Hénaull ,
dans son Abrégé chronologique , et par Mercier
dani son Tableau de Paris. On en trouvera des
eitrailsaux Eclaircissemens historiques (190).
On voit ee que va devenir maintenant le duel.
Autrefois grave , sérieux , solennel tant qu'il fut
fuuiliaire de la justice , ce ne sera plus désormais
qu'un passe-temps cruel et frivole pour une jeu-
■Kise désœuvrée , quelquefois un infâme métier
exploité par les aigrefins et les chevaliers d'industrie,
Itplufl souvent un instrument de mesquines ven-
geances ou l'aveugle arbitre de rivalités d'acti-
chainfarea et de boudoirs.
CHAPITRE XVII.
Principaux duels da XVI.* siècle.
Ce fut sous le règne de François L*' que com-
mencèrent à se multiplier les défis ou appels parti-
culiers. Les causes en ont été déduites au chapitre
précédent. On connaît en France l'empire de la
mode et de l'esprit d'imitation. D devait étrepro*
digieux lorsque c'étaient la cour et le monarque
lui* même qui donnaient le ton. Le cartel de
François I.^'^ à Charles-Quint électrisa toutes les
t<?tes; mais il eut des conséquences plus sérieuses
entre les gentilshommes qu'il n'en pouvait avoir
entre les deux souverains. Brantôme a mis sur le
compte du roi-chevalier une anecdote à-peu-près
du même genre , que son caractère rend assez vrai-
semblable. Ayant reçu avis que le comte de Saxe,
qui se trouvait à la cour de France, tramait quelque
chose contre sa vie , il l'aurait pris à l'écart dans
une chasse et lui aurait proposé de croiser leurs
— CHAPITBE XV!I . — 1 43
^{tfes, ainsi seuls et sons lèmoins ; ce que le comte
l'nurail pu garde d'accepter.
Voici lin exemple lire du m^me auteur qui don-
nera une id^e de la aingutaritë des moeurs du temps.
n fay ouy raconter à ce brave et gallant feu M. de
Cipiére, que du temps du roi François I."", il ciiyda
«Ire en une ir^s - grandinsimp peine pour a\oîr
■ppeliM. d'Andoiiig, par commission du viscomte
de Gourdon, vaillant homme qui suivoit feu M.
d'Oriéans (troisième fils du roi) avec M. de Cipiére.
Llfus quel appel fut-ce î" seulement M. de Cipiére
■kty dît : M. d'Andoing, je viens de laisser M- le
tÏBComtc de Gourdon qui m'a chargé de vous dire
qu^il s'en alloit oiiyr la messe à Saincl-Paul , et
que si tous y vouliez aller , là ensemble tous deux
TOtti l'ouyriez , et delà vous en îrei pourmener
jtnques hors la porte de Sainct- Antoine. Cette
intention d'appel encore quelle fust gentille , si
fut-elle fort Irouvéc mauvaise du roy , cl fallut que
M. de Cipiére s'ahscnli) de la cour. Mais par la
prière de feu M. d'OHémis , il Iny fut pardonné;
car il l'aymoil fort» (191).
Celle forme de cartel paraîlra sans doule des
plus originales. François 1." ne l'a trouvée si niau-
faite, que parce qu'il était fort jaloux de son au-
torité en fait de duel. On ne pouvait se battre sans
SÉ pemisàon , el souvent même il voidail que ce
144 — mSTOIRE DES DUEL&.—
fui BOUS ses yeux. Ou trouvera aux Édaiivisseinens
historiques y note 74, les détails de différenft duels
présidés par ce prince , et que pour cette raison
j'ai dû considérer comme des combats judiciairea.
Ainsi encouragés par Tindulgeace ou la faveur
royale , autorisés même par d^augustes exemple!
les duels firent fureur sous les régnes suivans. Les
écrivains contemporains tels que Cayet^ La Taille,
Pierre de TEstoile , Brantôme et d'Audiguier nous
en ont conservé une foule de traits , la plupart
d^une frappante originalité et qui ne laissent en
général que Tembarras du choix.
Le successeur de François I.^^, le Cuble et in-
conséquent Henri 11 acheva Fceuvre funeste com-
mencée par la politique chevaleresque de son pèro*
L'odieuse part qu'il prit dés les débuts de ioa
règne au duel de Jamac et La Chataigneraye eut
des conséquences pareilles à celles de rextravagaal
défi porté à CIiarles-Quint. Le duel devint déci-
dément une mode , et le moindre prétexte suflfil
pour rautoriser. Il n'y eut pas jusqu'aux princes
du sang qui ne lui payèrent tribut. On vit le prince
(Charles de la Roche-Sur-Yon , frère du duc de
Bourbon-Montpensier , se prendre de querelle dana
une chasse , à la suite du roi , avec François
d'Andelot , frère de Tamiral de Coligny , mettre
— CB*PITRE XVII.— HS
i'fp^p h ta tnain et occasionner une rixe .snnginnie ,
k laquelle firirenl part plusieurs seigneurs et dont
lui-même se retint blessé (102)-
La dernière année du règne de Henri [[, on vit
lin dtiel des plus bixnrres entre un jeune pupille
nommé ChiVteauneuf et Lachcsnaye son tuteur ,
ticiltard à^é de fpiatre- vingts ans , à l'occ-asion d'un
pn>cê»poiir compte de tutelle. <• Les champions, dit
Bnuitôme , «'étant donné rendez-vous à TUe Lou-
vien , fa Paris , ChAlcauneuf demanda à LachcsDaye
s'il »T«il tenu des propos qu'on lui attribuait ; celui-
ci les nia sur sa foi degentilhomine. Je suis donequen
amu-nt, dit Oullenuneuf. Non pas moy , répliqua
I l^tre, car puisque, vous m'airez donné la peine de
venir icy , je me veux battre. Que diraient de nous
tant Je genz assemblez d'un costé et d'autre deçà et
delà Veau d'estre iejr venus pour parler, et non
poar le baltrv ? flyroil trop de noslie honneur : Ç^
battons-nous. S'eslanI donc rats en présence avec
l'espèe cl In ilagiie, aucuns ouvrent le dicl Laches-
naye cryer haut ; A h paillard '.tu ^junxÀ (cuirassé) ;
l'aiaotljislévaiiiemenld'un grand coup tiré au corps.
Ak ! je l'aurai biin twii fuient. Et se mit il luy tirer
à la leste et ii la gorge , et il ne faillit rien qu'd luy
cmiput le sifflet , dont le dicl Cbflteauneuf ne s'es-
lc>nna nullement, Aîns redoublant son courage luy
tira une grande esloi-ade au corps, et le lun »
140 — HISTOIRR DES OURLS. —
liraulome tenait ce Irait du jeune Chàleauneuf lui*
mt-me , «{ui esloil son gratid €mty , ci qu^il jualifie
ihaudement du reproche d'avoir été cuii^issé dani
€eduei (198).
Voici un autre exemple tiré du même auteur et
qui appartient au très-court règne du succeaieur de
Henri II. « Un jour que le roy François II , apréa
quelques jours de la mort du roy ton père, estoit alli
au bois de Vincemies à la cbasse aux dains , avec le
jeune Achon dit Mouron , nepveu du maresehal de
Sainct* André , celui-cy s^estant retiré à part du roy
se mit à se battre sur la motte qui est là aveo un vicm
routier d^armes nommé Matas , lequel Tint à mener
et pourmener le jeune Achon de tel poinct qu^ luy
fit ToUer Tespée hors des mains, et luy dit : f^^
jeunehomme, apprends une autre fois à tenir ihiemjf
ton etpée, et à ne t'alUufuer point à un homme tel
fue mojr* Amasse ton espée, et vort-^n, je te par»
donne* Et s'en tournant pour monter à cheval sans
y penser , Achon ayant amassé son espée , courut
après luy et luy en donna un grand coup à traven
le corps , duquel Matas tomba tout roide mort par
terre. Et n'en fut autre chose, parce que Achon étoit
nepveu du maresehal de Sainct-André , et Tautre
parent de Madame de Valentinois (Diane de Poiliera)
qui , par la mort du roi Henri , avait perdu tout son
crédit. Si est-ce que le pauvre Matas ne laissa à
— rn*piTr.F. \vii.— li"
tHre bien plaint et regretlé. Toutefois il fut fort
blann^ mi*int- ile feu M. de (^niae-te-Grand, d'avoir
»in«y mcsprisé les armes et Ih bonne fortune qui luy
aToilfnissonenncmyit mert y Il ne faut pas aussy
que lea bravnsches et vicus rimliers abusent de leur
rnrtuiie el gourmandenl un jeune homme qui ne
hict €jue venir ; car Dieu s'en otlrisle. n
Même indulgence iurs d'un duel entre deux au-
lr*B fçcntilshommea d'Yvoy-Genlis et des Bordes
neveu du maréchal de Bourdillon , oîi tous deux
Ibrenl grièvement blessés, n M. de Guiec-le-Graod
l'en sCBiidalisa bien fort comme grand maître de In
ouison du roi, dit Brantôme, et pour ce fit informer
lUigeniinent sur celuy qui SToit porté la parole
d'appd ; et il se Itoutb estre M. de Gersay, qui , en
■ranl senti le vent, s'estoil un peu eschappé k l'écart.
Uaia au«ito«t, parce qu'il estoit l'un des plus favoris
du roy , il fut pardonné avec une remontrance que
M. de Guise luy fit deynnl le roy et M. le eardînal
qu'il o'eusl plus h. y retourner , ni nul autre ; car il
n'y alluit rien moins que la vie, disant que c'est un
cfimc capital. J'y eslois cl le m » (104).
■ Franrois 11 eut néanmoins le mérite de prévenir
Meastiite* de plusieurs querelles. La première s'était
Prélevée sou» le règne de son prédécesseur, entre l«
npîlflînc de Rancé et Laurent de MBu^iron, père
dr CM-lui qui succomba en l.'SVSdans le f^meuiducl
148 — HISTOIRE DES DUELS. —
des mignons de Henri III , ainsi qu'ion le verra eî-
«près. Le démêlé était d'autant plus sérieux , que le
«capitaine de Rancé avak à reprocher à son adver-
saire la perte d^un doigt. « Ce qui est un grand cas ,
selon Brantàme ; car un membre osié ne se peut
bonnement réparer par un accord , sinon qu^on oe
se batte ou par la loy du talion, membre pour mem»
bre ou par mort. )»
Une autre fois le roi avait défendu le combal
entre deux seigneurs de sa cour, de Loéet du Bueîl ;
« Mais il ne fut pas plutôt mort , dit notre auteur,
que Loê prenant Toccasion bien à poinct vint à
assaillir Bueil qu^il estendit mort sur le pavé , et se
«auva. Il y en eut aucuns qui trouvèrent ce fieicte»-
Irange , veu les défenses faictes , mais les raffinés et
entendus duellistes les renvoyèrent bien loing ,
comme je vis , et leur respondirent qu^ils estudiaa-
sent leur leçon ; car le prince auteur de là défense
étant mort , la défense n^avoit plus lieu , et les mains
liées se desliaient » (105).
Brantôme qui a vécu & la cour de Henri II ,
François II , Charles IX et Henri III , embrasse ces
(juatre règnes dans ses récits. Je laisse toujours
parler ce narrateur fécond et naïf : je me contente
de Tabréger quand il est trop causeur ; ce qui lui
arrive souvent.
a Du temps du feu roi Charles IX, dernier mort,
— CFAPtTHK ÏVIf. — 149
la\ faict un combat en l'iste du Palais, entre un
^tilhomme normand el le i)etiti.hevnlier de Ref-
fuge. Ainsy qu'iU -s'y fiijsoicnl passer eu baïelel lou*
ileiix seuls hius second», ils vircnl force gentils-
hamrues qui couroient sur le quay pour prendra-
do bateaux , et aller après eux les si^parer ; car
c'cMoil é l'heure que le roy se rciidoJt à la mesae eu
la ehapelie de Bourben. Us dirent au batelier tjcTit
l« passas! vîste ; car ils avcuent imeaH'aire d'impor-
tiarn. Et ayant pris terre , ils a'entredirenl seule-
^^JKnt ; Faisons pivnifUenient ; car vowi ces mrs-
^Hbim gui s'advancent peur nous sè/mier. Ils n'y
^BMIjr«tit pas ; car en quatre cuuj» d'espéc , ils s'ett-
trctuèrenl tous deux, n
Le même auteur parle encore d'un seigneur de
^HBcDMic , qui, voulani se battre contre deux h la fois,
^Bêcriait lorsqu'on te séparait : u ConiRK'nt ! n^'a-t-
^■t» juBinis veu un liomrae seul avoir affaire à deux ^
ht foi»? Eli niortdieu I les histoires en sont pleines. »
A quoi il ajoutait (jtiand on lui demandait ce qu'il
|>etuait faite : « Eh niortdieu ! je voulois me faire
mellre dans les chroniques, n
Mois ce qui pourra servir j) caractériser ptus par-
liculicrement le régne de Charles I\ el celui de son
ftncre Henri 111, c'est l'histoire du fanwux Duprat ,
bardii de Vitaux , Bis du chancelier Duprat , el l'un
des plus dftermin^ sicaivcs de ce temps. BranlAme
150 — HISTOIRE DES DUELS.—*
qui était son ami intime , nous a conservé les prin-'
cipaiix fait» et gestes de ce personnage dont il lait
presque un héros. 11 raconte d^abord comme quoi
il ayait débuté par le meurtre du jeune baroo de
Soupeft, avec qui il eut une querelle de table, et
qu^il tua de guet-à-pens à Toulouse, d^oU il se sàxwa
brai^ement en habit de damoiscUe; comme quoi en-
suite il tua un autre gentilhomme nommé Gonnelieu,
lavori du roi , qui voyageait en poste et qu^il attei-
gnit prés de Saint-Denis. Il était accompagné dans
cette expédition d'un jeune seigneur d'un grand
nom, nommé Boucicaut. Vitaux, scion notre auteur,
commettait ce meurtre pour yenger celui d^un de
ses frères , égé de quinze ans , tué par Gonnelieu.
Comme celui-ci était un des Cayoris du roi qui fîil
fort en colère de sa mort et en cuyda désespérer, le
meurtrier s'en alla faire un voyage d'Italie. Maie
il ne tarda pas à reparaître en France, ayant à
venger la mort d'un autre de ses frères , le baron de
Thiem , tué par Antoine d'Alègre , baron de Millau,
son proche parent. Millau était un seigneur d^ Au-
vergne que Charles IX avait appelé à Paris , pour
servir d'interprète aux ambassadeurs Polonaie,
lorsqu'ils vinrent offrir la couronne de Pologne , à
son frère le duc d'Anjou, depuis Henri lU. Il ne
s'était alors trouvé personne k la cour qui pût enlre^
tenir ces étrangers en latin (196)^
— CniPlTBH XVII, — 131
>• Entant (loue de retour d'ilulie , d!t Brantôme ,
il trcul qil'aprvs le âi-ge de la Bodielle , en 1573 ,
Millaud se puurmenoil dans l'aris à son ayse , qui le
pcitKiit eucorcbicaloiii, ne le jugcnni avoir la réso-
lution de retourner ii cause de la fureur du roy. Il se
pounneine par la ville en habit d'avocat , espie et
rrconnoist le lout. Il avait lai&sé venir sa barbe fort
luogue , si qu'il esluil irr^-coniiuissable. 11 se loge
l'eipace de quinze jours en celte petite maison qui
est ui bout du qua\ des Augiistios, vuidcirevoitt
H puMcr son homme pnr plusieurs fois, aiuRy qu'il
^■m'* dict depuis. Puis voyant suu bon temps il sort
^■■rec les deux Doucicaut , ff^rcs provenceaux ,
^Hmres et vaillans hommes , certes , qu'on appeloit
^Hn t^ons du baroD de Vitaux , et attaque Millaud
iMMiDt devant son lops , le charge , le tue avec peu
de réSMtaOCC , et «e sauve braveraenl hors la ville et
aux champs. Maïs le uudbcur fut pour luy qu'en
luaul ledit MiUaud , ua de ses coups d'estraïaaçonft
par cas turtuit tomba sur wn des Uoucicaut il la
ame et luy eausa , en marchaut par paya , un»
graadc cfTusiaa de sang doiil il fut couiruinet d«
l'arrêter pour Bc faire panser k quelt]ue pL-til barbier
de village. Ce (ftii fut cause qu'ayant esté pourmivr
parlepr^vost Tancbo», il fui pris il douxc UeueftdA
Paria , non trop à TniBe ; car il fit grande delTeiise
«l«iit il fut fwrt blewé , et fut mené à Paris au Fort-
152 «^ HISTOIRE DES DUELS. —
TEvéqne , en tel danger que du jour au lendemain
nous le tenions exécuté. Le voilà donc aux vesprêt
de la mort ; car le roy et le roy de Pologne (Henri ili)
criaient quil nieut^. Mais M. le Prévost de Paria,
son frère , qui tenoit en son logis les ambassadeurs
Polonais, s'advisa de les prier pour son frère et de-
mander aux deux roys sa vie, ce qu^ils firent. J'eatoit
en la chambre du roy de Pologne quand ils vinrent,
et je les vis haranguertout en latin très éloquenunenl
et avec telle passion et affection que le roy fut fort
empesché de respondre h leur requcatc , quMl n^ac^
corda sur le coup , mais leur donna grande eapé*
rance. M. de Thou , premier président, qui rainudt
fort, prit aussy son party , et remonstra aux roya qiM
s^ils eussent faict mourir Gonnelieu et Millaud, les
deux meurtriers de ses frères , il devoil mourir
aussi ; mais ne Tayant Caict , il falloit que la loy fut
esgale. Enfin par temporisement , sollicitationt et
prières, son procès demeura en suspens. Cepen-
dant le roi de Pologne qui cstoit son principal per*
sécuteur s'en va en son voyage. L^on fait son procès
à la voilée ; son pardon et grâce lui furent donnés et
bien entérinés. Le voilà pourmener par la ville et k
la cour mieux que jamais , bien veuu et arregardi
de tout le monde. »
LMssue de cette affaire devait être un encouna-»
gement plutôt qu'une leçon pour un personnage
I Jk rfite trempe. Aussi ful-il si peu corrigé qii'npiT
I it rfl'itir de Hei
illl,
I 1575,
niM'ii
lace d Bssassinor s
I pm
r îa%
i l.n
ViiHe
eiifcer du Cua§t, qui avait chert-li^ îi l'f
i^H.p
Vublcnir sa grAce. Excit6 par les iiiln^irs de riii-
e épouse de Henri IV , la célèbre Marguerite ,
il p^étra de force avec sept ou huit autres dans le
^^domicile de du Guast , el l'assassina dons son lit
^^paiec une esp6e fort courte et tranchante , dit
^fpMre auteur , laquelle en tel cas est estimt'e meil-
leurc q»ie la longue. » Et il a soin d'ajouter que la
tntà fut estimé de grande résoJiiUon et assuraiivr,
^^Uparaît que Henri III ne se mit pas en peine de
^Htaj^ la mort de ion faTori. Vitaux , après cette
^^■mvdle expédition , prit la poste el se réfugia
auprès du duc d'Alenron , qui lui lit un fort bon
accueil (197).
^_^ L'ii tel homme ne devait périr que par la ptitcuce ;
^^ku'est pas pourtant ce qui arriva. Il fut tué en duel
^■l 138», de la main du BU de ce baron de Millau
^^■^îl avait si lâchement assassiné huit ans aupara-
^^■Dt- Brantôme, pour compléter l'histoire nu plutôt
^H^panég^rique de son ami , nous raconte ainsi sa
^^b qui fut digne d'une telle vie.
^^p u L'n de ces ans fut appelle el dcfTié le baron de
Vitaux par M. de Milland , à se battre contre luy ,
à une hcuc de Paris, en beaux champs. Ne faut
154 —-HISTOIRE DES DUELS. <—
point demander s^il faillit k s'y trouyer ; car il estoîl
un des courageux gentilshommes qu^on eust tçeu
\oir : ses beaux faicts en sont la preuTe. Ils furent
chacun visitez des seconds. Aucims ont dit que
Millaud estoit couvert d'une petite légère cuirassine
sur la chair ^ laquelle estoit peinte si au naturel
que par ainsy le second fut trompé en sa reuê.
C^est à scavoir si on peut ainsi représenter une
chair sur du fer. Je m^en rapporte aux bons peintres.
Autres disaient qu'il y eut apparence en cela, d'au-
tant que resp6e du baron se trouva fort fauiaèe
par le bout. Voyant que par ses estoquades il n'y
gagnoit rien , il se mil aux estramaçons ; sur lesquels
Tautre parant , luy donna une grande estoquade de
laquelle il tomba ; et aussitost s'advaoçant de plut
près, luy donna trois ou quatre grands coupa d'espèe
dans le corps et l'acheva , sans luy user d^aucuœ
courtoisie de la vie. Ainsi mourut ce brave baron ,
le parangon (modèle) de la France. H n'y esloil
pas seulement estimé , mais en Itatte , Espagne ,
Allemagne , Pologne et Angleterre ; et desiroient
fort les étrangers venant en France le veîr, lant
sa renommée volloit. Il estoit fort petit de cerps ,
mais fort grand de courage. Ses ennemis diaoîeni
qu'il ne tuoit pas bien ses gens , mais par advan-«
tages et supercheries. Certes, je ticna de grand»
capitaines qu'une supercherie ne se devoit |Miyer
— ciuriTnr xvii. — 155
fit par Hemblable miintioye , vl qu'il n'y alioit
)K)iiil là de détihonneur >i (198).
» Qu'un ne croie pas que de pareils Irails ne fiissi^iil
que des aecidens iaoUn qui ne pourraient lirer à
loneùqiience pnur appréeier les mœurs de ce temps.
En ït)iei un uouve! exemple où l'on voit figurer
Innoms plus illuslres encore. C'est loujoura BniQ-
Umc qui pnric.
« M. le viscérale de Turcnnc , brave et vaillnnl
seigneur , Hyant esté appelé par M. dL' Duras, de la
fMrt de Sun [rcre M. de Rauzan , se plaij(iiil Tort
d'une grande supcrclieric qui luy fut faicle esUuit
tu combal ; car d'une embuscade sortirent cinq
M as qui le chargèrent et luy donneront dix nu
douM coups d'cspée, (ceux-là n'esloicnt pas bons
hteurfl , ny si bons que le baron de Vitaux ducpiel
j'ii parlé tantoit ) et le laissèrent en la place pour
tDort. Dont , depuis il voulut avoir la revanebe
m M. lie Duras; c*r il fit entreprise d'aller le
j hier dans aa maison, et le traiter en auperrherie
^L-ciumne il disoit avoir reçeu de luy. Et de faict
^P die esloil exÉcvlèe sans uo grand cerf qui estnit
" Jsn» le fos>£ , et lors en rut , lequel chargea si
rurieuierocnt ceux qui y esloient descendus qu'ils
•iwmèrent Tallarme et s'en allèrent sans avoir lieri
f^ tenter » (199).
Si Heori Ul parut peu sensible a la perle de son
1 56 — HISTOIRÇ DES DUEL». — >
premier favori , Bérenger du Guast , il le fut daran-
tage à celle de ses mignons qui succombèrent dant
ce fameux combat qui eut lieu le 27 aTril 1678, et
dont le récit se trouTe dans tous les historiens. Pen-
tremc^e ici les principaux traits de celui qu^en onl
donné Brantôme et d^Audiguier.
a Caylus et d'Entragucs étoient les principaux
querelleurs, et ce pour dames. Riberac et Schom-
berg , jeune allemand , secondoient et tierçoient
d^Entragues; Maugiron et Liyarot secondoient et
tier^!oient Caylus , qui , tous seconds et tiers, a^ofln-
rent à se battre plus par envie de mesler les mains
que par grandes inimitiez. Ce combat fut tréa-beau ,
et Taccompara-t-on lors à celui des Horaces et de»
Curiaces. Us combattirent vers les remparts et porto
Sainct- Antoine , à trois heures du matin , en été ; de
sorte quil n\ eut aucun qui les vit battre , que
quelques trois ou quatre pauvres gens, certes, chëtîb
témoins de la valeur des ces gens de bien, qu»
pourtant rapportèrent ce qu^ils en avoient vu telle-
ment (|uellement . »
« Sitost que les parties s'entrevirent , Ribemo
s'avance de vers Caylus et parlant à Maugiron : It
me semble y dit-il, que nous damnons plus tost ac^
corder ces gentilshommes que les laisser entretuer.
A qui Maugiron : //.' ne suis pets venu pour enfiler
des perles ; je me -veux battre. — Et à qui te veux^
•-CHÀi'tTnE xv:i.— 157
Vttbatlre, Maiigiron , tu n'as point d'iitlé/cst en lit
\ aaerelle, dil Kibcran. — C'est à loy, dît Maugiron.
- j1 moy , dit Rlberac , prions doticf/ups Difu. n
ic (lisant il tire son esp^c qu'il croise avec son poi-
urd, et se jettant ii fi;cnoux St sa prière assez
bnefre, mais neantinoius trop lonipie au gré de
Nlaugirou , qui s'escria en jurant que c'csloit trop
prié. Alors prenant ses armes , il enfonce furieu-
KmeQl Maugiron qui le reçoit de niesmc ; et s'en-
Imant tous dcus tombèrent morts sur la place. »
Il Schomberg s'éluit adressé à Livarot , et voyant
Itun amis aux mains : Ils se battent, dit-îl , çua
Jtnns-nous? — Battons-nous aussi pour nostre
miaaneur, rcspond Livarot ; reaponce qui fut trouvée
Pfcit estrange de ce temps \k où lesseconds n'avoicnt
point accoustumé de se battre. Mais on s'en éton-
ntroit biea davanlage , si l'un respondoit autre-
ment en celui-cy, où l'on ne pourroilavec honneur
t'iir battre ses amis les bras croisez , sans faire autre
choee qvie les regarder. Ils commencent donc à
>'tt>ltccharger. Seliomberg qui était allemand, d'un
coiip de taille à la mode de son pays ouvre à Livarot
loule la joue dn côté gauche. Mais Livarot plus
«'Iroii luy donne d'un estocade dans la mamelle qui
1* pi>rta mort par terre. Ainsi demeurèrent morts
L (UT la place Maugiron et Schomberg. Caylus qui
Innil afliiire à d'Lnlragues en recul plusieurs bh-*-
158 — -HISTOimE BVS DUEL«. —
Mires mortelles. Riberac fut porté k ThÀtel de Guise,
où il mourut le lendemain. D^Entragues se aauira
blessé k la faveur de M. de Guise, et bien luy en
prit ; car le roy Teust faict mourir pour la grande
affection qu'il portoit à Caylus auquel il donnoit les
bouillons luy-mesme , ayant promis cent mille escus
aux chirurgiens s'ils le luy rendoient guéri. »
Tout cela ne put servir qu'à lui prolonger la vie
de quelques jours. Caylus sur son lit de morlae
plaignoit fort , dit BrantAme , u de quoi il aToit la
dague plus que luy qui n^avoit que la seule espée.
Aussy pour parer et destoumer les coups que l'au-
tre luy donnoit , il avoit la main toute descoupée de
playes. » Avant le combat Caylus avoit dit à d'En-
tragues : Tu as une dague et moyje n'en aipainU
Tant pis pour tojr, répliqua Pautre , tu asfaiei mne
grande faute de fai^oir oubliée au /o^<>. Et malgré
cette inégalité le combat commença. Brantôme
n'ose décider si par gentillesse chet^aleresque, celui-
ci aurait dû ou n'aurait pas dû renoncer à l'avantage
de la dague. On voit qu'il attachait moins d'impor-
tance pour la règle de l'égalité au port d'un poi-
gnard qu'à relui d'un scapulaire.
(i Le roy , ajoute d'Audiguier , eust si grand
regret en la mort de Caylus et de Maugiron qu'il
défendit les duels partout son royaume ; et pour
célébrer leur mémoire avec celle de Sainrt-Mcsgrin,
-cnmTBE xvn.- 15!»
lutre Favori,- de sa mnjeslé , cl fies plus braves cou-
rages du monde, qui fut axanssiné rfans la même
innte , il les fit eslever eu marbre blanc , eu Téglisc
de Saincl-Paul , à Paris » (200) ,
Livarot ne gtièrit de ses bles.^urea que pour périr
deux ans après dans un outre duel. Son domes-
tique qui Taccompagnuit , furieux d'avoir vu aon
matlre eipirer sous ses veux , ramassa son espi'c
H eo porta un coup par derrière au vainqueur,
Bli atnë du marquis de Pienne, qui tomba roide
iDOrl. -Cest ainsi qu'on a vu ci-dessus un neveu
du marchai de Saint-André traiter son adversaire.
Hais moias beurcux , le domestique fut pendu sans
nis^ricorde.
On cKiimalt les aventures de ce Saint- Alesgrin , le
pkn chéri dea mignoos de Henri 111 , depuis la mort
de Câblas. Ce fut le duc de Guise qui le fil assas-
mer «nx portes du Louvre , et il reçut lui-même ,
ia ans après , la pareille de Henri 111. D'Audiguier
appelle Saint-Mcsgrin " l'un des plus braves cou-
ngn du monde , ne le cédant en valeur ni en
beauté iï Maiigiron ni h Livarot. » Ou en jugera
par un duel de sa façon aven un jeune seigneur
italien nommé Trnile des L rsins, page de François 11 .
Osl Brantôme qui le rapporte. C'eut M dommage
de priver la postérité de queUpies-uns des faits et
^atet de ces gens tic hivn comme il les appelle.
IfiO — HI<%TOIKE DES DCELS. «-^
«( Avant , dit notre auteur , mis dan» la lutte aoU
homme par terre , et n'ayant point de dague, il
ft'advisa de tirer une ^ine d'un buiason pour lui
cTcver 1rs veux, sur quoy Tautre lui demanda la tîs
qu'il lui octroya. Mais comme plus tard cclui^nF
s^cu vautoit , Tautre le niant , le roy ordonna des
juges pour les accorder , ce qui fut faict. » Scna
cette intervention du roi le combat aurait recon»*
mencé, et le roi tenait à son favori ; le fer des duel-
listes lui en avait déjà moissonné cinq.
On ne peut ^éres se faire une idée exacte des
querelles , des actes de violence et des atrocités de
tous genres qui régnaient alors dans la vie prinée des
c'itoyens , qu^en se rappelant les scènes horribles de
la vie publique de cette époque. On se querellait,
on se poignardait jusques dans les antichambres du
roi. Brantâme en rapporte plusieurs exemples dont
Tun se passa en présence d'une députation du par-
lement. Sur <pioi le premier président dit : « YqîUi
des gentilshommes qui font là de grandes fautes.
Que si dans nostre palais , il leur fust arrivé d^en
faire la moindre do celles qu^ils ont faites là , je leur
aurois hieniost faict leur procès. »
Selon le m^me auteur, Henri III lui-même, notant
cnrore que duo dWnjou , aurait eu une querelle à
table avec un seigneur nommé Besigny, en présence
de son frère Charles l\. Un duel devait avoir lieu
— cir^piTBE xvn.— 161
Bilr'cni ; Pi le prince iitsislatt forl pour se bnltre ,
Iniliiiil son ntlversoirc tic parleur et de médisant, et
lui off'ratil de. se rlépouiller tic sa grandeur et altesse
pour luY faire l'honneur de se battre à liiy, dans !a
fnr^l Je Rlois où l'on se trouvait alors. On conseilla
à llesigny de prendre In poste incontinent pour ac
il^fobcr à un aussi dangereux honneur (201).
Ce fui h dater du combat des mignons de
H«ri III, en 1578, que sV'tahlit la régie pour les
seconds de prendre le fait et cause de leurs tenans :
Jiuques-là ils n'avaient Hé que ifimoins. Le rôle
t|uc ce» messieurs jouaient prés de Henri III , n'ex-
cliiail pas la bravoure des duellistes. Le champ
tk« était leur principal champ d'honneur et pres-
f|ue tous y laissèrent leur vie. Nos jeunes contem-
IKiraÎDS qui prétendent au mt'me courage , mais qui
De X piqueraient guérea d'être gens d'honneur ii la
I fcron des Cayiuscl des Maugiron, ne se doutent
fu que ce soient là leurs modèles.
Celle innovation est venue d'Itahe avec le duel
nvxieme , comme on le verra au Cliap. XXXV.
Dam les combats singuliers qui avaient lieu ii Naplea,
lowFonds se tenaient à-peuprés les mêmes discours
qnc d'Âudiguier a mia dans la bouche de ceux de
^nlragues ; cl par forme de passe-lcmiis
■ni et s'entreluûieut avec les lum'ires
11
102 -* mSTOIRE DES DUELS« —
(le la qucicUc. u CVst une espèce de lAcheté, dil
Montaigne , Essais, Liv. Il, C/uip. XX Fil, qui i
introduit en nos combats singuliers cet usage de noui
accompagner des seconds cl tiers et quarts. C^estoîl
anciennement des duels ; ce sont à cette heure ren-
contres cl batailles. Outre Tinjustice d^une telle
action et vilenie d'engager à la protection de voire
honneur aullre valeur et force que la vostrc,je
trcuve du desadvantage a mesler sa fortune à celle
d'un second. Chacun court assex de hasard pour
soy , sans le courir encore pour un autre. »
Ce nouvel article du code des duels fut appliqpié
avec toutes ses conséquences dans un combat qui
suivit de près celui où il fut mis pour la première
fois en usage. Je laisse encore parler d'Audiguier :
a Comme le premier duel qui se fit sous Henri III
fut introduit par ses mignons , aussy celuy qui suiYit
après fut faict par les mignons de ses mignons; car
le baron de Biron au commencement qu^il vint à la
cour estoit des plus favoris du duc d'£pernon qui
tenoit alors la première place au cœur du roy . U eust
querelle contre Carency, fils aisnè du comte de la
Vauguyon cpii estoit de son âge et de sa volée. U ne
faut pas dire quel estoit le baron de Biron, car ayant
esté dt^puis admirai , marcschal , duc et pair de
France, sous le plus grand roy du monde , il a asseï
rempli la Icrrc de la réputation de son nom et de
I
■ *
TiTn. — 163
nknr. MaisCarency n'cstoit pas de la moindre espé-
face. On dit que rhéritîère de Caumont fut la cause
de kur querelle, parce qu^ilsla recherc*hoieiit tous
deux et ne l'eurent ny Tun ny Tautre. Et comme ils
aWient pas moins d'ambition que d'amour , ils
n'esloient pas aussy moins euTieux que jaloux. S'es*
tiDt rencontrez en cette humeur en un pacage asuez
csiroil, ib s'entrepousscrenl Pnn l'autre. Riron, soit
qu'il ne portast point d'espéc ou que la colère le
traniportast , invita Carcncy de se battre h riieure
intmeet â coups de poings sur la place. Mais fay
uneespée, respondit Carcncy en mettant la main sur
la girde de la sienne. Voilà le beau subject qu'on
nconte de cette dispute, laquelle fut dè<*idée de trois
i trois comme h précédente. De la part de Biron s'y
tromrérent Loignac et Janissac , et de celle de Ca-
rcDcy, d'Estissac et La Bastide. » Les quatre témoins
mirent Tespée à la main en m^me temps «pie les
cbcb de la querelle ; (c non qu'ils fussent ennemis ,
dit Brantâme qui n'a pas oublié ce trait , mais pour
faire fesie et par gaieté de cœur. La fortune fut si
bonne pour M. le baron de Biron et ses deux con-
fidens que chacun tua braTcmcnt son homme et l'es-
tendit mort par terre. Aucuns dirent (pie M . le baron
despécha le sien le premier, et alla aider aux autres.
En cpioi il fit tKrs bien et luonMra, qu'avec s«i valour
il avait du jugeuicul et Je la prc\o}aui*e. »
et
164 ^ HJSTOIIIE DIS DUELS. —
D'Audiguier termine son récit qui est Fort long par
ce dernier trait que je ne puis omettre : « Loignac
partie de d'Esiissac estant demeuré le dernier à le
vaincre , et l'ayant porté finalement par terre , luy
donna plusieurs coups d'espée sans le pouvoir
achever de tuer , tellement qu'il fut contraint de le
laisser en vie, voyant ses compagnons s^en aller,
après avoir demeuré longuement tout seul à cheval
pour le voir mourir. Loignac en a été puny en ses
successeurs ; car les derniers Loignac père et fils
ont esté tous deux tuez en duel depuis quatre ou
cinq ans, Tun en Rouergue par le baron de Megalas,
«t Tautre icy auprès de Bicétre par le baron de
Jlabat. » D'Audiguier aurait pu ajouter que ce
Loignac était à Blois , au nombre des assassins du
duc de Guise, qu^il frappa par-derrière. Il aurait pu
ajouter également que Biron aussi avait reçu sa puni-
tion : condamné à mort sous Henri IV, il ne montra
aucun courage dans ses derniers momens (202).
Qui n^a entendu parler des faits et gestes de ce
fameux Bussy d^Amboise , Tun des massacreurs
de la Saint-Barthélémy , où il égorgea entr'autres
Antoine de Clermont , son parent , avec qui il avait
un procès f C'était en outre un spadassin brutal
qui se distinguait parmi tous les autres par une
verve d'insolence sans égale , et qui , après nombre
d'aventures eu champ clos , finit par laisser sa vie
¥:
i..
dm une embuacade on Tattira la Tengcnnce d^JIk
■ut jaloux. Voici un des exp^'ilicnA h Taiflc des*
fÊà»û estrail en matière qiiaiMl il Toulait 9e iMittrc.
Un genlilhoinmc , nommé Saint -Phal, avait re*
Miquè des X sur une broderie. Rumir , pour lui
dwTcher querelle , lui sourient cpic eV*taient des Y.
là dessus dispute , cartel cl combat fie six contre
■X. Bussy se relire blessé , se fait panfier et guérir,
d ausiit^ appelle son adversaire li un nouveau
leades-vous. Un capitaine des gardes s\ trouve
paiir emp^lier la bitte; Bussy le prend lui-nirme
à partie et veut se battre contre lui. Il solUrite du
mîfai permission de reprendre son duel avec Saiut-
PM , el ne pouvant l'obtenir il finit par ajournée
•Qtt adversaire en pays étranger.
Favori du duc d^Alenron , frère de Ifenri If I , le
■arquis de Bussy se sentait une grande jalousie fie
métier centre les mignons du roi ffu^il {Mrovocpiait
MBS cesse, et Un jour le voyant entrer avec* celle
belle Cacon qui lui est nalurelle , te roi hii dit qu'il
voulait Paccordcr avec Cay lus — » Bussy lui répond
eflronlément : Sîre, s'il tous plait que je le baisr,
]j suis tout disposé « et accomodant les gestes avec
la parole , lui fit une embrassade li la pantalone. »
Celle qui s^exprime ainsi est la reine Marguerite de
Valois, qui fut maîtresse de Hussy, comme de bien
d'autres, et cpii ne s'en caclie pas dans nenMvinoi/vs^
186 —HISTOIRE DBS DUELS. ^ *
Le brave Grillon , Fami de Henri IV, était Vun
des tenans et des enthousiastes d^un pareil homme.
Un jour néanmoins il le rencontre à Paris , dans ta
rue Saint'Honoré : Bussy lui demande quelle heure
il est , d'un ton qui lui déplaît ; — Il est rheure
de ta mort, lui réplique Grillon ; et tous deux met-
tent répée à la main. Le combat fut terrible; mais
on les sépara.
Ce personnage, outre ses intrigues avec Mar*
guérite de Valois , en lia une autre avec la femme
du comte de Montsorcau , grand veneur du duc
d^Alençon. 11 s'avise un jour d'écrire à celui-ci
qu'il tenait dans ses filets la biche du grand veneur.
Le duc d'Alençon montra cette lettre à son frère
Henri III qui , pour faire pièce à Bussy quHl dé-
testait , la communique à Monlsoreau. Henri II avait
fait quelque chose de seml^lable pour faire battre
Jamac et La Ghataigneraie. Le mari outragé ae
venge en italien ; il cntrahie sa femme dans un châ-
teau écarté et la contraint d^y donner un rendes*
vous à son amant. Gelui-ci accourt avec sa confiance
ordinaire; mais au lieu d'une tendre maîtresse, il
ne trouve que des assassins (203).
La fin de ce règne devait être signalée par un
dernier trait dont la singularité passe peut*étre tous
les autres. Brantôme et d'Audiguier le racontent
avec quelques variantes, a II arriva dit celui-ci une
r
-rnminc xvii. - 167
^nJctli^olntinociirai'iitêe loyalp. te niriHcnr mj
monde (Henri III) iiyanl ktb proilîfcie use ment
iMinè{>ar le plus meschant inuyiii;i[uîf'ttt jiimais
iioit plongé un gra»d nombre d'Iiomincs ({ni le
«uiidicBt en nn dcnil public. » ItraBttlmc ODnliniie
ciMiiile ainsi : « Un jeune gentilhomme uunmtù île
l'Ifde-Murivimx ponr avoir (■M bien aimt de bod roy,
tIl'ayMit perdfi i-nlra «n un loi (.U'scspoil"de Irisk'sac
iju'il résolut de ne survivre nu dicl roy son maistrc.
lJ(HMir plus glnninisemciil mourir , il demanda si
luclqu'un ne voulttit point ac biiltre h reiironli*; dii
luy. Par cas se trouva lii le seigneur de Harollcs
jttine gcalilliommc brave el ri-solu cpii le prit au
Butnuasîlost. ii l.e résultat du duel fui la mitrt ({ue
lècidivit â ardemment cet înconsolahlc Hivori.
«TetM ces spadassins , dit l'Eatoilc , ne croyaient
Dieu ijuc sous b^tfice d'invenlatre »; enreptft .
Ice Hiberne qui, dans le combat dts Mi-
pxrodiait la dévotion de I9ayar<t , en se
*, pttur rtcitcr sa prière, une croix du poi-
ct de l'fpt'e <pril alluit cnfuuctT au seiiL
k Maogiroii (204) .
;* Teti furent les duels an 16. '"siècle, fhi voit cpi'ils
le transformation remarcfunblc lorsqu'ils
it cessé dVtre juridiques ; lorarpie les d^lensus
9 les exileront des places publii^ues dans
168 *— HISTOIRE DES DUELS.—
lefl réduits écartés ou à Tombre des forêts; lor»-
qu^on cessa d^y observer ces Formes antiques et
soleDucUcs qui en gênaient la pratique et en pré-
venaient les plus graves abus ; lors surtout que les
mœurs chevaleresques cessèrent de tempérer la
soif du sang et Tardeur de la vengeance.
Quand on vit les rencontres dégénérer en guel-
à-pens et en assassinats ; quand on vit comme s!j
conduisaient les principaux seigneurs de la cour,
des favoris de Henri IH, le fils d^m chancdier,
un neveu de maréchal de France ; un maréchal de
France lui-même , on se prit à regretter les combats
judiciaires ; on faligua les rois de chaleureuses re<*
quêtes pour les faire rétablir, on publia de ton-
chantes homélies en Thonneur du bon vieux iemps^
comme on en verra encore des exemples sous
Louis XIII ; enfin, la cour retentit de nouveau de ces
plaintes rajeunies de plusieurs siècles dont les hauts
barons importunaient Charlemagne, Saint-Louis
et Philippe-le-Bel. Ces remontrances avaient alors
produit leur effet. Elles avaient contribué à pro-
longer la vie du moyen âge qui avait bien assea
vécu. De nouveaux pas rétrogrades n^étaient plus
possibles. Le moyen âge était bien définitivement
mort ; et on ne ressuscite pas les morts.
On en était vers la fin du 16.® siècle, comme
on Test encore au commencement du 10.^, à une
— cn.\riTnE wii. — 109
de ces époques critiques (|iruii appollo Av tran-
sition, époque de malaise, irnnii<'lt*, île tiraillc-
mens, presque au^si Tatigniito p4>ur riiistcirieii «ililijçè
derétudier que pour len ronlrmporniii!! rondanuu'-s
à la subir. Celle dont il H^n^it ici ne st.* présentait
guêres sous une forme attrayante. Lciin de là clic
offrait plus d^un caractère «ranalogic avec crilc
qui marqua la transition du paganisme h la civi-
lisation chrétienne. Pendant ce période , on put
se croire, à Paris, transporté au milieu de la dé-
pravation de Rome sous les d(*miiTfl («és^irs. A la
cour , cYtait Timpudeur des .Mcssaline avec la
cruauté des Néron et la lubricitr des llrli«>!7nlialc.
if
On retrouvait la physionomie de ceux-c*i dans
Charles IX et Henri III. Quant à l'épouse de Claude
elle ne manquait pas d^émules sur les premières
marches du trône et sur le lrl^ne lui-mcme. Telles
on pouvait citer la reine Mar<;ueritc de Valois,
épouse adultère et incestueuse , di)^nc fille do
Callierinc de Médicis ; la jeune duchesse de Nevers,
sa compagne et sa rivale d'impndicité ; la duchesse
de Montpcnsicr de la maison de Guise, qui se livrait
à Jacques Clément , pour lui mettre le poignarda
la main ; et à leur tête cette Catherine de Médi(*is ,
infâme corruptrice des mtcurs de sa lille et de si*s
deux fils Charles IX et Henri III, qui au mouK-nt
même d'expirer disait ii celui-ci , lors qu'il vint lui
170 — HISTOIRE DES DUELS. —
apprendre h son lit de mort rassassinal du duc et
du cardinal de Guise : C'est bien coupé, mon^fils,
mais il faut coudre.
Telles étaient les femme»; cpi^on juge deshoin*
mes ! C^était des bras de celles-ci qu'ils sortaient le
plus souvent pour aller s'égorger au pré aux clercs
ou se poignarder au coin d'une rue. On jouait
avec la mort comme un enfant joue ayec un hochet.
Henri III portait un Icmg chapelet dont les grains
étaient des têtes de mort. Il en avait lait peindre jus-
ques sur les rubans de ses souliers.
Tout cela n'est encore qu'une bien faible es-
quisse du tableau hideux que présentent les mé-
moires du terai>s, notamment ceux de l'EsLoile et
de Brantôme , k ce raconteur cynique qui moulait
les vices des grands comme on prend Tempreinte-
du visage des morts. » Quelques-uns de ces trait»
sont reproduits avec ui»e admirable énergie de.
pinceau dans le 4.* volume des Études lUsloriques
de Châteaubriant (205).
Malheureusement on va retrouver une partie
de ces mœurs (hms le régne suivant. L'ombre san«-*
glantc du 16.^ siècle se reflète encore sur toute la
première partie du 17.^ C'est la fange impure de
régoût qui conserve quelque temps sa couleur
au nnilieu des eaux limpides du fleuve qui l'em^
porte en passant.
I
CHAPITRE XVIII.
XVIl.' siècle. — Principaux duels «lu règne ùo
Uonri IV. — InelBcacité de ses èdils.
Le plus grand roi dont la France s'honore , le
seul (irtol le peuple ait gardé In m/'inoire , est peut-
(Ire celui qui a exercé le moins d'inllucnce sur
^ l'époque qui fut témoin de son règne. Si la bonté
^Ê it son cœur , si la noblesse de son caractère , si la
^■-ftiuceur de sa politique lui ont conquis l'admi-
^Bntion de la postérité, ces vertus ont produit bien
H^Cu d'effet sur les mœurs contemporaines. Lea
*^^HicrfCB civiles des règnes précédens que sa sagesse
a pu «eule terminer , avaient trop proFondément
•Itéré le caractère national. Ilenri-le-Grand ne Fut
^Utn l'cKprcssion de son siècle , ce fut Ravaillac.
^V Celte Aggrippine italienne, dont la funeste fé-
^Tîôtidité donna succcssivemeni trois rois ii la France,
avait parmi nous nationalisé le poignard. Son époux,
Henri II , fut victime d'un meurtre involontaire.
. Les dcuK derniers Henri furent visités , selon la
«elle expression de l'auteur des Mlutlcs hùloiiquvi,
172 — HISTOIRE DES DUELS. —
par un de ces envoyés secrets de la morl qui met-
tent la main sur les rois. Ces hommes surgissent
soudainement et s^abiment aussitôt dans les sup-
plices. Rien ne les précède , rien ne les suit. Isolés
de tout, ils ne sont suspendus dans ce monde que
par leur poignard; ils ont Fexistence même et
la propriété d^un glaive; on ne les entrevoit un
moment q\i*h la lueur du coup qu^ils frappent. »
Quatre fois le nom de Henri a été fatal dans
notre histoire aux prii^ces qui Font porté. Le poi-
gnard a retranché le dernier rejeton des Valois)
il a frappé la première tige des Bourbons , et n^a
pas épargné de nos jours un des rejetons de cette
branche qu'on pouvait croire aussi le dernier.
Le Béarnais , pendant tout son régne , a vu le
poignard voltiger sur sa tcte. Deux fois il fut me-
nacé ; deux autres fois même il avait été frappé avant
ce dernier coup fatal , porté par une main plus sûre
que ceUe des Barrière et des Chatel. Le meilleur
des rois est donc, pour ainsi dire, mort cinq fois de
la propre main de ceux qu'il cherchait à rendre
heureux. Il a pu se trouver en France cinq hommes
pour tenter de trancher une vie si chère à la nation.
Qu'on juge d'un pareil siècle!...
On pourra en juger encore par ce court extrait
de la préface du traité de d'Audiguier , auteur
contemporain : u Âvaut (juc de m'enfoncer en
î x\iii. — 173
I etilv innombrable mullilitilu de duels qui se sont
■ bii'ls BOUS Henri-le-(iraniJ , je protesterai ains^
I i|ue j^ai déjà faîct çî-dcvROt , que comme je suis
^pt«é par-dessus une infiiitlé d'autres qui se sont
l&icls ECUS nos roys , ousay en ohmcttrai-jc plus
tjue je n'en mpporlerai de ceux-ci Apréa
ilone que le roy fut entré dans Paris, il y eust
par tous les endroits de la France un si grand
nombre de duels, qu'il se perdît plus de noblesse
a querelles particulières qu'aux guerres civiles.
El mmme la cour cstoit la vive ou plulost la mor-
telle >ource de ces combats dont les sanglans ruis-
1 luux abrcuvoicnl tout le royaume , aussy s'y en
faiwil-il plus qu'en toutes ses autres provinces. »
Parmi lee duels cités par d'Audiguier , on remar-
I fieccuxdeVillemor et de Fontaines qui se battirent
I tl l'cnlretuérent pour une querelle au jeu, quoique
I W roi leur eut fait donner des gardes ; de Varaignes
I ttdc Larligue qiû s'arrHchèrcnt aussi mutuellement
■ km avec une incroyable férocité; de Perrol de
Rulignac el de Saubcuf; des barons de Cisteme
cl (le Ferry contre Monmolou el Denac. Trois
J'ratr'euK demeurèrent sur la place.
On trouve aussi dans le même auteur les dé-
Ibili circoQStanciéa de plusieurs affaires du mi^me
LgniK,entre les sieurs de Terne eldeMuntgaillard;
I nirc les comtes de Saut et de Nantomllet ; entre
174 — mSTOIRE DES BUBLS. —
les barons de Brcssicux et de Balagny. Ce dernier
était lin des plus déterminés spadassins de ce temps.
Il tua son ennemi après avoir été accordé par
Tordre du roi et avoir donné sa parole de ne pas
se battre. Soupçonné d^avoir agi déloyalement
dans cette circonstance, il fut recherché et pro-
voqué par le marquis de Bressieux j frère de celui
qu'il avait tué; ce Mais le roy, dit d^Âudiguier,
commanda à feu La Condamine de lui dire qu'il
ne rechcrchast plus Balagny pour ce regard ,
altendu quil avoit tué son frère en homme de
bien. » Ce même Balagny après avoir figuré dans
une multitude de duels , finit par y laisser «a vie.
Le duel entre les comtes de Saut et de Nan-
touillet eut lieu sur le plus frivole prétexte. Vaine-
ment le roi leur fit donner des gardes , ils échap-
pèrent à leur surveillance, se rendirent à Saint-
Denis , y entendirent la messe , déjeunèrent en-
semble , puis s^écrivirent qu'ils se pardonnaient
réciproquement leur mort , qu'ils n'étaient pas
ennemis et n'avaient pas de querelle etc Le
comte de Nantouillet resta sur le champ de bataille,
atteint de plusieurs coups mortels ; son adversaire ,
quoique blessé lui-même , courut lui chercher un
prêtre , ayant plus de soin , ajoute l'historien , du
salut de celui quil aidait tué , que des blessures quil
en avait reçues (206).
— cn^ptTKE xyitt. — 175
» On lit dans les Mèmohts ik- Sully et dans le
nal lie l'Estoîle <. cjii'cii Mnra 1007, M. <le
lOménie supputa combien il avait pf-ri de gentils-
hommes français par les duels depuis l'avènement
■ Henri IV en 1589, et qu'd s'en était IroUT*
quatre mille de compte fnil ; ce qui pour une
npace de dix-huit ans , donne an-delJi de deux
cent ving;l par an. n Oii lit dans le journal de
i IV, à la date du 8 Août 160S : « En la
i dernière furent à Paris seulement commis
I plâtre assassinais et trois duels , sans aucune puni-
lien ni recherche. »
<^eux qui voudront faire une étude plus appro-
Inndîc des mœurs et des lois de police de ces
temps malheureux, pourront consulter le Chap. XL
I traité de d'Audiguicr , qui contient l'histoire
iule entière de deux gentilshommes , nommés
illes et Deuesc , dont les démêlés causèrent Tex-
ninatJoD de deui familles, Provoqué en due)
t Soeilles dont il avait séduit la femme , Deuese
n'avait feint d'accepter le défi que pour attirer son
ennemi dans une embuscade et le faire assassiner.
Celui-ci en fut quitte pour un coup d'épée qu'il
'eçul par-derrière. ISienlôt après il se rend ii Tarmèe
du roi , lors de la guerre de Sovoic , y reclicrchc
«>n ennemi , le provoque de nouveau et en reçoit
im coup de pislulel que ce dernier lui lire k l'im-
176 -*HIRTOIRR DES DUSLi. -^
provisle en prenant la fuile. Le roi , sur la plainte
de Soeilles , casse Deuese de l^armée où il était
cometle d\in régiment de cavalerie , et pemnet à
Soeilles , dit riiistorien , a de le charger en tel
advantage qu^il le trouveroit , et depuis , par arreat
du conseil , de prendre ses maisons , et le forcer
luy-mesmc dedans ; ce dont Soeilles sut si bien ae
préyaloir qu^il poursuivit son adversaire à outrance,
le dépouilla de tous ses biens et le prit luy-ménie
prisonnier dans sa maison propre. » Bientôt après
pn chercha à réconcilier ces deux ennemis. La
main d'une sœur de Deuese devait être le aceau
de cette pacification ; mais Soeilles qui ne cher-
chait qu'à assouvir son implacable vengeance ,
parvint à séduire cette femme et refusa ensuite de
Tépouser. U en fut cruellement puni par son frère
qui , dans un troisième et dernier guet-à-pens , finit
par se débarrasser de son ennemi. Ce meurtre fut
ensuite vengé par un parent de Soeilles, nommé
d'Âubignac , qui fit tuer Deuese d'un coup de
mousquetade. Ces actes d^extermiuation se répè*
tércnt h tel pohit entre ces deux familles y qu'il n'en
resta de toutes deux qu^une seule fille. La FendMa
ne produit pas en Corse , de plus terribles effets.
On voit que la guerre civile n'était pas finie. La
paix avait bien été conclue à la reddition de Paria;
mais elle n^avait pas été ratifiée au foyer domestique*
— cfapithb xvm. — 177
Pnrmi cefle miiItltutU- He traits d'incroyable har-
larie, j'en citerai encore quelques-uns qui sonl ca-
IBPlérMlîquea des mœurs du temps, de l'impuissance
its lois et de la tolérance du prince. Celui qui ta
nivre est extrait en abr^ë du Traité As d'Audiguier.
H Pendant le siège fie Paris , une querelle sV^leva
Brtre deux seigneurs de l'armée , Snincl-Just et
Poisé, à la suite d'un mauvais discours que l'un
mit fait du père de l'autre , qui pour ccste cause
kfitippcller du cnnsentcment de M. du Maine qui
Moit enrore k Paris ; el Sninct-Jusl recul l'appel
^ la àeiviission fia roy qui estoil lors à Sainct-
w titnvs. Xe duc du Maine fut parrain decestui-cy,
^■H le maréchal de Biron de celuy-là. Le combat se
^^A h eheval k la yeue des deux armées. On dit que
' leroTJouoilàla paume et que Saînct-Just prenant
iTOg* de Kiy pour aller combattre contre Fossé ,
M majesté dit ainsy qu'il partoit : P'oilà un homme
^i )'en va mourir Celuy-çy dans le combat
hÎM tomber son épèe , et demeura lii sans fuir , ny
nu* moyens de combattre. On dit que Fossé de-
neureil aussy, mais qu'à la persuasion deqnelques-
UDS des assîstans, il luy mit son épée au travers du
rorps, Ccux-lb violèrent les droits des duels quî
ilHcndenl aux a&sistans non-seulement de parler ;
"wis atissy de fwre signe , voire même de tousser et
ffii-her. Foaaé cusl tté plus louable s'il en eust usé
12
178 — HISTOIRE DES DUELS. —
comme fit ces jours passés Erany envers Ruberpré
duquel ayant faict voler Tespée , il ne le voulul
point frapper de la sienne, bien qu^il fust blessé luy-
méme : action que je trouve rare et digne d^une
place honorable en ce livre icy. »
Les véritables sentimens de Henri IV sur le duel
se révèlent encore mieux dans ce billet tout che-
valeresque qu^il écrivit à son ami Duplessis Momay ,
qui se plaignait d^avoir été outragé par un jeune
gentilhomme, v. Monsieur Duplessis, fai un esy
trente déplaisir de l'injure que vous a^ez reçue, à
laquelle je participe comme roi et comme voire ami'.
Pour le premier y je vous en forai justice et à moi
aussy; si je ne porlois que le second titre, vous n*en
ayez nul de qui Vépéefut plus prête à dégainer, m
qui y porta sa vie plus gaiement que moi. »
Comme son père le roi Antoine de Navarre qui ,
selon Brantôme, tira un jour à part un gentilhomme
de sa suite nommé Bellegarde , ayant à lui de^
mander quelque parole en galant homme, Henri IV
lui-même avait failli figurer dans un duel. Un jour ,
au temps de la ligue , il aurait voulu se battre de
concert avec le prince de Condé son cousin, contre
les ducs de Mayenne et de Guise ; mais ils en avaient
été empêchés par Henri III.
En novembre 1594 , le fils aine de ce même
duc de Guise , jaloux du comte Antoine de St.-Pol,
— nuMTniî xvrrt. — 179
ipir le duc de Mayenne vcDsit de nommer maré-
chal de France , lui chercha querelle dans les
ma Je Rheiois , cl lui passa sou épéc au travers
du rorps. Ce cnmtc de St. -Pot était l'ami de son
pérc, à qui il avait sauvé la vie it la journée des
barricades. Cela n'empêcha pas Henri IV d'ac-
t(inl<:r, deux ans après, au nteurtrier le gouver-
Srinent de Provence.
Voici une anecdolc racontée par Branlàme ,
^ui prouve que les princes du sang u'élaienl pas
kideniicrs h donner l'esemplc des querelles ;
vUndecesans, cnlacourdcuoslrc roy,lebalse
biunt, le seigneur de Oivry, gentil cavalier certes et
(jil accomply, ainsy qu'il avoit pris madamoiscUe
Je Grammont pour la mener danser la voile , voicy
BiDiineur de Soisaons (Charles de Bourhon premier
■icjrilon de vetlc branche) qui la lui prend et la
[Mène danser. Givry fullul qu'il laissas! sa prise et
t su prince , en disant seulement : Monsieur,
usez en cela du priiiU-ge de prince. Apréa
le bil finy el qu'on se reUroil, Givry qui se disoît
peu serviteur de madamoiselle de Grammont,
■Dsy qu'il la conduisoit sous le bras en sa chambre,
Monsieur de Soissons de rcchef vint et print la dicte
dotnuiselle. Givry lui dit : Monsieur, vous croirez,
i'il vous plaist 1 que je ne t'cndurerois de mon
paml, sans que nous ne vinssions au.T mains.
180 -- VlStOlKE DES miELS. —
Molmienr de Soidsôns lui dit : Gii'ry , quand voua
^voudf'ez, je ffit dérestirai de ma grandeur, pour
vous en donner du plaisir au Pré aux Clercs qm
est ouvert à tout le monde. L'autre hiy respondil t
Monsieur, puisque voîis me voulez faire cest hon*
neur, je V accepte, et sera lorsqu'il vous plaira me
commander. Le lendemain au matin Tun et Tautre
estoient prêts pour faire leur partie ^ si le roy qui
le sçeutl , ne leur eut entoyé faire la deffense. Dont
«n cesl exemple , faut louer grandement monsieur
de Soissons et sa générosité , en voulant s'abaisser
de Sa qualité pour montrer la grandeur de son
courage (307). »
I) existait sous ce régne un spadaâsin cèl^re , de
la trempe à-peu^prés de ce baron de Vitaux , dont
ftotis avons fait connaître les principaux explmta
au chapitre précèdent. H se nommait Lagardé
Yalon. n prit un jour fantaisie à un autre aigrefin
nommé Batanet de se mesurer avec ce Lagarde ^
qu'il ne connaissait pas, et n'avait jamais vu. Pour
ce Ikire, il lui envoya son chapeau orné d'un plu-
mail I en lui faisant savoir qu'il entendait ne le re*
couvrér qu'avec sa vie. Celui-ci se coiCfa du chapeau
et se mit en quête de Baxanez, qui le cherchait
partout de son côté. Après mille préliminaires
bixarres et des échanges de politesses que d'Au*
— CUAPITBE KT1I[, — Ig]
diguier racotile fort au long, Iouh deui ae rendent
au lieu du combat. « Dm promitT nbord, dit-ÎI,
Logarde perte une estocade à BiiEanez ilmis le-
tont; mais l'os fut plus dur qiie te fer <4 Gl re-
brouuer la pomle de l'espée. Au sei-out) raup, il
liiy donna dans le coips H luy dît : A'oilà fUQur le
tJiofteau. Au Iroisiénie, il ajoute : F'wià poiiiia
fliwte; rt ftoalemeut lui porte un quatriÉDoe cmtp.
en tliianl que c'esloil pour lu cotflvn. Lagarde œ
Uiwit que causer, el voyant le snng de son eniiemy
wnir par tant d'endroits , luy disoit qu'il le traitoit
<n courtisan , tjuc son chapeau lenoit -furl l>ic[i en
a leste. Baxanez se voyant si mal aceouatr<!^ ae jellc
■urwtn CBuemy , passe sur ses armes sans s'csferrer,
k porte par terre, luy met le poignard cnlre le col
et l'épaule «t le luy fait passer «a ëobarpe au,
lnitera<lu corps, 11 redouble cX luy baille quatorie
coups du mesme poignard, depui;* la gor^e jusqu'à
llceiuture. A tous les coups qu'il luy d^noit,Jt
hty diaott : Demande la vie ! tt l'autre ne répendoit
lUtre chose que Non, non. Q^pcmlant Lagarde luy
«■porta la moitié du menton avec les dejils, luy
CDfflDf^ le derrière de la teste avec te pomnKau de
<(>nc^>èe, et perdit pkilxtsllu vicquelecouragje. »
Pendant ce temps les deux seronds se traitaient ix~
peu-prés de la irM-me mnnivrc , el l'un d'eux restait
xir le champ de bat-iiUc.
182 -«HISTOIRE DES DUELS.—
D'Audiguier raconle ensuite diverses particu-
larités de la vie de ce Lagarde , son ami intime , et
qui plus d^une fois , après ses escapades , se réfugia
dans la ville de Najac, dont notre auteur avait le
gouvernement. Voici dans quel style cet honnête
brigand écrivait à ceux dont il avait juré la perte :
Ta maison en cendres y ta femme violée, tes enfans
pendus. Ton enncmjr mortel, Lagarde. » Quant
à Bazanez qui ne lui cédait guéres , il périt assassiné
quelques années après dans une embuscade (206).
En 1589 , un procès fut instruit au parlement
contre deux duellistes, et le 16 juin intervint un
arrêt de règlement ainsi conçu : « La cour procé-
dant au jugement du procès criminel fait à Hector
Durandi et Barth Aèmy Jully , mèmorative de plu-
sieurs procès criminels jugés en icelle, pour raison
des meurtres et homicides commis et perpétrés en
duel, tant en cette ville de Paris , qu^autres lieux et
endroits de ce ressort ; pour obvier à la fréquence
desdits meurtres , les défend sous peine de crime
de lèze-majesté , conflscation de corps et de biens ,
tant contre les vivans que contre les morts, etc. i>
Cet arrêt fut suivi bientôt après d^un édit du roi ,
du mois d^avril 1602 , qui confirma ces prohibitions
et ordonna à la partie offensée d^adresser sa plainte
au gouverneur de la province , pour être soumise
— cH4FrTnB rvin. — 183
■Il jugement des connèlablcs et mar^-cliaiis de
France. Ce fut Ih Torigiiie de la jundictimi du point
d'honneur , dont on trouve les premières traces
dans redit de Cliarics IX , du 10 février lôGÇ ,
niiporlé en lu note 150. Mab elle ne rerul une
urgauisalion définitive que sous Louis XIV, comme
on le vcrr» ci-aprcs.
Cet £dit fut renouvelé par un aiilrc du mois de
juin 1000, précédé comme le premier d'un lung
|iriacnbutc , et contenant un grand nombre de
■linpontions asscï sagement concertées ; mais aux-
quelles il ne nianc|ua qu'une seule chose, rexéculion.
On remarque dans ce préambule le passage
tuifonl , dont on peut apprécier la sincérité au
moyen des exemples cités ci-dessus : « l>avantage
pluÀeurs aussy maling» que téméraires, Irès-mal
iH/omiét tta vrtiy jugciiieiiV que nouf fuisons de
irmblablcs actions , s'y engagent et préeipilenl de
propos déUbéré , au péril de leurs âmes comme de
leun personnes , etc. » Les articles 5 el (( de l'édil,
ktiauicnl aux parties offensées la faculté de s'a-
dresser au roi dîrcelemeul, ou par l'cnlremiae de» '
mnéebaux de France , pour en obtenir le combM,
quand le différent ne pourrait se temniner autre-
inenl. L'article 9 portait m^me que <t celui qui
iWmanderail le cund)al et sérail jugé non-rcceval>le,
(mur s'être offensé trop légèrement, sérail renvoyé
184 — OISTOIBB DES IKIBi.S*-«
avec honte. » Mais , cooune Ta remarqué d^Audî-
guier, il n^y a eu, tous le règne de Henri IV, aucun
exemple d^une semblaUe autorisation. « Ne Fayaiil,
dit cet auteur , accordé à personne et Tayant mémo
refusé à j^usieurs , il donna sujet de croire qu^fl
n^en octroyerait point du tout , et que ceux qui h
demanderaient , auraient plus d^envie de s^accorder
que de se battre ; ce qui fit qu on aimât mieuE se
passer de permission (209) . >j
Ces édiis contre les duels furent portés à la woHMm
citation de Sully, qui s^était sérieusement occupé
de ce sujet , ainsi qu^on en peut juger par pliisîeuai
passages remarquables de ses Mémoires. L^illustre
ami de Henri lY n^a rien dissimulé de la faiblesse de
son maître en ce point comme en tant d^autres. « fl
est vrai , dil-il, ZriV. XXII ^ que les duels sont fort
anciens , mais seulement dans celte partie de TEu^
rope où rinondation des barbares qui sert d'époque
à cette odieuse coutume , prouve en même lempa
leur méprisable source... Le roi, je suis fâché de
le dire, tenait si mal la main aux édits que quelques^
uns de ses prédécesseurs avaient déjà donnés contre
cet usage barbare , qu'on voyait tous les joura
répandre beaucoup de sang pour des sujets tré»*
légers. . . . , La Cacililé du roi à pardonner les duels ,
dit-il encore , Li%^^ XXV , les multiplia tellemeni »
que ces funestes exemples perdirent la cour ^ lu
iriUe et tout le royaume « ju
vm. - 185
, L'empire du préjugé était si piiisaimt alors , que
%tt ugc ministre fut en quelque sorte forcé lui-
: de lui paj^cr tribut. U raconte foil îtig^ue-
■IMni, il la fin du Liv, I de ses lifémoucs , comnifi
P^Doi il fut sur le point de se brouiller s^^rieusemeat
irec licnri IV , « pour avoir eu rimprudciice de
coDscntir à ^Ire le témoin d'un duel. » U y eut pour
Gckde gros molfi entre le roi et lui. Hciiri IV alla
le jusqu'à le meDaeer » de lui faire couper la
IMle[H>ur g' être avisé, disait-il , de trancher ainsi du
•UKraîn jusque» daiia sa rour. » L'affaire lieu-
meiit fut arrangée pai- riutcrveittiua des
ÎDCfisses.
, Du reste , dans les deux édils de Henri IV ,
mme dau« l'arrêl du parlement qui leur avait
Kni de base , le but a tMi dépassé. Aussi ne fiit-îl
I>u attetut. La sivÉrilÈ des peines rendit toutes les
dèfcodci illusoires. Celle faute se perpétua dans
loutes les lois subs^-quentes, et en neutralisa toujours
friblL C'«st quelque chose de déplorable que cette
Il législateurs de notre pavs, de placer
B leurs prescriplions sous la sanctiou tles
• ; la nutrt , toujours la mori . Ou dirait un
naître iinpiloyable , oblige de discipliner un liou-
peau d'esclaves.
Sully n'avait pourtant pas, naérae sur ce sujet,
'pargué les rcpcéseululioiis à son maître- Mais elles
186 *- HISTOIRE DES DUELS.—*
furent perdues pour Henri IV comme pour se»
successeurs. « De tous ces différens édite , disait ce
grand homme d^état , aucun ne fit tant de bruit que
celui qui fut donné contre les duels. Le roi s^y
porta juscju^à ordonner la peine de mort contre les
coupables ; en quoi il ne suirit pas mon avis. Pai
assez donné h connaître ce que je pense de ce cruel
et barbare abus , pour nYtre pas accusé d^avoir
clierché à le lolérer. C^est que je prévoyais au
contraire que Texcês de sévérité diuis les moyens ,
serait cela même d^où naîtrait le principal <d38tacle
k Texéculion Souvent les peines qui font le
plus d'impression , sont celles pour lesquelles on
n'ose ou Ton ne peut demander grâce. »
« H est sûr , ajoute-l-il encore , qu^une répu-
tation décidée sur le chapitre de la valeur person*
nelle, était capable de donner aux ordres de
Henri IV contre les duels , le double de Pautorilb
attachée à la volonté des rois; mais celle du mattrer
des rois supérieure à la leur, n^avait pas réservé
cet abus à extirper au régne de Henri-Ie-Grand.
Méntoircs , ZiV. XIII ci XXII.
Le temps n^était pas encore venu. Les moeurs
étaient toujours plus puissantes que les lois : ci»
verra que la redoutable main de Richelieu lui-même
n^a pas sufll à cette tAcIie diilicile»
CHAPITRE XIX.
ûicipaoT duels du règne de I^ouÏr XIll. — Nou-
veau» édils. — Exemples de sévérité. — Pitlîliqae
4ieu k IVgard des ducllislCB et do Tiiria-
» apparut le règne de Louis XllI , ou plul&t
I «diù de son primipal minisire , dtml nous verrons
t<fc profonde politique se sîgnnler par des exemples
trires contre les duels , ou plulûl contre l'arîslo-
ïstie qui en était le berceau.
^ Deux rois de France avaient successivement péri
H le* coups d'obscurs assassins. Jacques Clément
S RaTaîUac crurent pouvoir en user envers des
« couronnées que le fanatisme désignait ii leurs
npoignarda , comme le taisaient à l'égard de leurs
cnotmis , des seigneurs de la meilleure compagnie.
. On continua sous le nouveau règne h s'assassiner
k ^'bo* les rues , ou èi s'enlregorger dans les luttes en
^Ptbamp clos. On ne faisait aucun cas de la vie,
m chez ceux-là mêmes qui paruisaaîeut réunir le plus
demovcnsde se faire une csistencc heureuse; ou
l'aposail tous les jours sous l« moindre prétexte
188 — nSTOIRB DES DUEU. ^
arec une légèreté , une insouciance qui ferait croire
qu^elle n^était alors qu^un fardeau. Ce goût du
sang j cette émulation de férocité , ce dédain de la
Tie s^appelaient noblesse de cœur, fermeté d^ime,
grandeur de courage. Cétait de la gentillesse cho'
valeresque à la mode du temps ; et Ton ne pouyait
jouir du crédit public qif après avoir tait ses preuTea
en ce genre. Telles étaient les mœurs de Pélile de la
société. Les traits nombreux que nous en ont ooo-
serrés les chroniqueurs contemporains, présentent
à-peu-près tous la même physiononûe. Toutes cet
anecdotes bizarres, entassées dans leurs édita,
fatiguent par leur uniformité , quand elles ne re-
poussent pas le lecteur par rhcurreuroule-d^goAl.
On trouve dans le Théâtre d'honneur de La
Colombîére, la description d'une lutte acharnée
entre quatre gentilsliommes , les sieura de Rouillac ^
Du Marais, de Saint-^Vincent et de Sainte-Maure ^
pour la possession d^une femme. Cekui^i tua Sainte
Vincent , et fut tué aussitôt après par RouîUac , qui
avait blessé mortellement Du Marais. Le même
auteur parle d^un duel entre deux provençaux ,
qui s'enfermèrent dans une barrique « -et se baHkent
ainsi à coups de couteaux. D^Audiguier rac(Nite un
combat entre deux seigneurs du même pays , le
vicomte d^ Allemagne et le sieur de La Roque » qui ,
ayant pris querelle pour une queiBliiMi de prêiéaoco
— CHAPITRE xrs.— 189
t Ictm Imillis , se poignardèrent tous deux en se
uni par la main.
^ Les deux auteurs que je viens de citer , nous ont
à conserrè les détaili de la fin tragique du baron
eLuz et de son Gis, tu^ au mois de janvier 1613 ,
I«r le chevalier de Guise.
i. Le premier combat , dit d'Audiguier, fut par
une rencontre avec le père pour queltpies paroles
qu'a avait dites de la mort de Teu M. de Guise
(amsmnè k Blois, par ordre de Henri III ). lisse
tfnconlrèrent un matin à la ^ande rue Saincl-
Honorë , le baron h pied et le chevalier k cheval ,
qui mit pied à terre et dit au baron qu'd misl
Il main h l'espèe , en tirant la sienne. Le baron ne
pmsoit à rien moins, et ne se pouvoil imaginer que
tt fusl à bon escient. II mit toutefois la main k
^'ofie, mais avec peu d'efTet; il cstoit déjà vieux
clhor* d'escrime depuis long-temps, pour se battre
wmlrt un jeune prince qui ne faisoit que sortir des
nerricc*. Aussy ne luy donna le chevalier qu'un
leiil coup au travers du corps , dont il alla tomber
■nort dans la boutique d'un cordonnier. Quant b luy
il rrmonta froidement ii rheval, et se relira le pas en
Ijigrande écurie du roy, comme s'il n'eut rien veu. m
Il Le baron de Lui , continue noire auteur ,
«Toit UD (ils du mi^me âge que le chevalier de Guise.
Il rcceut la uouvelle de ccl accident, avec la juste
190 — mSTOIRE DES DUElft. — ^
douleur qu^un fils unique peut ressentir de la mort
d^in père. Chacun parloit diversement decequMI
fcroit. Il avoit affaire avec un prince qu^il Calloit
qu'il tuast ou qu^il en fust tué. De le tuer , il u'y
avoit pied de terre en la chrestientë qui lui peust
être assciiréc après sa mort : d^en tirer plutost raison
par justice que par Fespée , il ne le Calloit pas
seulement penser. Le chevalier estoit en Thoatel de
Guise , où personne n'eust osé seulement Taller
demander. C^est le malheur des gentilshommes
d^avoir affaire contre des princes ; ce sont des vais-
seaux d^airain contre un pot de terre. Le roy doit
pourtant la justice h tous ses subjecls ; mais ses
subjccts doivent aussy respecter les princes. C'est ce
que j'ay ouy dire autrefois au feu roy avec ce beau
mot : Je vous puis faire tous grands; mais je ne
vous saurais Jairv princes. »
« Le jeune baron de Luz ayant célébré le deuil
de son père et fermant les yeux à tout ce qui pou-
voit arriver , envoyé finalement un cartel à son
cnncmy, lequel fust porté par son escuier. L^acUon
estoit périlleuse ; car s'il cust été reconnu , les plus
hautes fenestrcs de rhoslcl de Guise eussent été trop
basses pour luy. Le cartel disoit ainsy : Monsei-
gneur ^ mil ne peut cire plus Jidcle témoin du juste
subjccL de ma douleur tpie vous mesme. C'est
pourquoi i monseigneur, je vous supplie tœs^humr'
-chapitut! XIX.
I f}e pardonner i
I
191
mon ressentiment, si Je
I niejiiire tant d'honneur
in, pour tirer raison de la
mort lie mon père. L'estime que je fais de votre
courage méfait espérer que vous ne mettrez pas en
awmtvosltequahté, pour éviter une action niivostrc
honneur vous oblige. Ce gentilhomme vous mènera
au lieu oii je suis, avec un bon cfiet-al et deux espces
desquelles vous aurez te choix. Et s'il ne vous est
agréable, j'iraipartoul où vous me commandeivz.n
Le porteur de ce carlel ayant usé de sublcrfugc
||Hur s^inlroduire dans riiùlcl de Guise, fui ajiscz
Ikutcuï pour pouvoir pénétrer jusqu'au chevalier ,
qui ne fit aucune diJUcutlé de le suivre incoDtinent.
La rencontre eut lieu Ji cheval prés Picpus , et après
une luUe acharnée , celui qui avait tué le père en Jît
raison it son (ils, en le tuant lui-mfmc. Les deux
Iteoins du duel se battirent en même temps et ae
blusscrenl grièvement. D'Audigiiier vanle beaucoup
le courage du chevalier de Guise en cetle circons-
laocc, avec celle réflexion touleftHS que sa victoire
fiist été bien plus agréable à Dieu , s'il eusl corn-
hattu pour la querelle qui poria ses a'ieux en Pa-
hiine. Ce fut h l'occasion de ce dernier coinl>fit
Hirinlervinl l'édit du 18 janvier 1613 , cité ci-après
iiTCF plusieurs autres subséquens.
Les seigneurs de la maison de Guise avaient
192 '— HTSTOinE DES DUELS. -^
conservé jtisqirau commencement du régne de
Louis XIII y une partie de celte influence et de cet
ascendant qui les avaient rendus si redoutables
sous Henri III. Ce chevalier de Guise , dont il vient
dV'trc parlé , était pclit-fils de Henri de Lorraine ,
duc de Guise , qu^on surnommait te Grand, et qui
fut tué , en 1 503 , au siège d^Orléans , par Pohrot.
Son père Henri de Lorraine, dit le Balaffv, lut
assassiné à Blois , en 1588. Tous les deux éf aient
de trés-renommés duellistes. Leur avis qu^on pre*
nait toujours dans les cas importans , faisait au-
torité en matière de duel. Aussi , Brantôme ne parle
jamais de messieurs de Guise qu^avec une pro-
fonde vénération. On a pu juger de ce qii^était
le fils atné du Balafré, Charles de Lorraine , par
son assassinat du comte de St.-Pol , en 1594 , rap-
porté au chapitre précédent. I) fut^ à Paris, Tun des
nombreux amans de la célèbre duchesse de Mont*
pensicr. Richelieu , qui craignait sa turbulence ^
finit par Texilcr en Italie où il mourut en 1640. Son
fils , Henri de Lorraine II.* du nom , se rendit
célèbre par ses amours , ses profusions et ses aven-
turcs romanesques en différcns pays. Richelieu lui
fit faire son procès comme complice du comte de
Boissons , et condamner h mort par contumace en
1641. Obligé de quitter la France, il alla faire la
guerre en Italie oîi il fut fait prisonnier et conduit
193
[ en Espngne. On le verrn repnraîlrc sons le régne
L nivant pour figurer dans le fanieui carrousel de
IW62,rlpour hier en duel, en 1643, le comlcde
■ CDli^y , pelil-fils du célèbre nmiral , Tictime de la
■ llint-BnrUiélémy. Il mourut saus postérité en 1664.
En lui Gnîl la maison de Guise.
EnGn , un troisième fils du Balafré, Louis de
Lorraine , cardinal et archevèciuc de Rheims ,
^■Hntra sous l'habit ecoKsinsliquc des inolinations
BpB moins gtierriéres que son père. H combultit
^^taUTenl dans les rangs de Parmée et suivit Louis XIII
^^kiB l'expédition de Poitou, en 1621 , où il mourut
Hiprës aToir marché le casiioe en I^te h l'attaque de
Sûnt-Jean d'Angely. Ayant eu un procès avec le
duc de Ncvers au sujet d'un bénéfice, il lui lit
nOKr pliwieurs fois de vider ce différent l'épée k la
main. Ce belliqueux prélat, s'il avait continué de
TÎTpe , aurait pu servir d'aide - de - camp à son
collègue le cardinal de Richelieu qui faisait , en
I 1928, l'office de général au siège de la Rochelle ;
^Lmùs cV-tait beaucoup trop rétrograder que de
^Bouloir ressusciter par son exempte , comme
^ tPAudiguicr par sa plume , les anciens combats
judiciaires (210).
Ce d'Audiguier, dont le Traité contient sur les
iluels une foule d'anecdotes furieuses , était im
194 — HISTOIRE DES DUELS. —
gentilhomme de la cour de Louis XIII. L^objet
principal de son ouvrage était de démontrer la
nécessité de revenir aux anciens usages en matière
de duel , et de rétablir ces anciens combats so-
lennels autorisés et présidés par les rois. L^auteur
signale avec chaleur les inconvéniens et Finutilité
des prohibitions , et reclame surtout, au nom de la
noblesse française , la conservation du privilège de
pouvoir vider ses dilTérens par les armes, ce Sire ,
disoit-il dans son épttre dédicatoire , il y a un grand
procès entre la noblesse et la justice de vostre
royaume , dont autre que votre majesté ne peut-être
juge. La noblesse dit qu'un gentilhomme , dont
rhonneur est offensé, doit perdre la vie ou la réparer
avec Tespée ; et la justice au contraire qu^un gen«
tilhomme qui met la main à Tcspée pour réparer
son honneur, doit perdre la vie.... Et vous, me^
qui êtes chef de la plus généreuse noblesse qui soit
au monde , avez intercst h ne pas souffrir qu^on
émousse la poincte de son courage , et que , sous
ombre de la conserver , on la réduise , ou bien à
n^ avoir aucun sentiment de son honneur , ou bien à
le défendre par la plume à la façon du vulgaire , et
disputer le droit des armes devant les clercs.... »
Le même auteur s^efforce ensuite de démontrer
que les duels n^ont jamais été plus fréquens et plus
odieux , que depuis qu^ils étaient défendus ; et s^a-
— CHAPITRE XIX. — 195
■ jfressant cnrort* hu roi ii la iin de son lirre , il le
linpplie de permcllrc les iluels en ccrLiIns cas dont
I lerail juge , au lieu de s'exposer h i^lre désobéi
r des pruliibilions inutiles. Il asaure que , si les
Kfcnses nnt rendu les duels communs, la per-
miisioD les rendra rares. Il propose même au mo-
narque de s'en réserver la présidence , k l'exemple
de plusieurs de ses prédétesscurs. « Le public,
dil-i] , au lieu de ces (jiierelles qui liument son sang
et de ces procès c|ui dévorent son bien , vîvroit
tlUîvré de ces deux monstres , n'ayant d'aitlre
ambition que de tcsmoigncr son courage en vostre
terrice et sa valeur en vosirc présence, n
lCcs raisonne mens de d'Audiguier ne firent pas
. Les anciens édits contre les duels avaient
dtjà été renouvelés par des déclarations confirraa-
tivesdes I." juillet 1611, 18 janvier 1013, 1."
octobre 1614 et par un arrél du parlement du
27 janvier de la mi'me année. Ils le furent encore,
Blirès la publication de son livre , par déclarations
ib U juillet 1617, 2 août 1623, 25 et 26 juin
lfS24, et par arrêts du parlement des 6 mars 1621 ,
18 janvier 1625, 5 février 162d et29 mai 1634.
L'cdit de 1626 est l'un des plus remarquables
'If ceux intervenus sur la matière , avec celui de
Henri IV, du mois de juin 1609. Il contient quelques
(liiposilioDS qui semblent atténuer un peu ce qu'il j
106 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
Avait crabsolu et de trop sévère dans les édits da
règne précédent. On y établit quelque différence
entre tes appelans et les appelés. En certains cas,
notamment pour une première infraction et lors
qu^aucun meurtre n^avait eu lieu , les juges pou-
vaienl s^abstenir de prononcer la peine capitale.
Du reste , Tordonnance était terminée par de
longues et solennelles protestations de n^accorder
aucune grâce , remise ou modération de peine»
pour lait de duel. « Nous avons défendu , portait
l'article 13, et défendons à toutes personnes, de
quelque qualité et condition qu'elles soient , de
nous faire aucune prière au contraire; en décla-
rant infracteurs de nos lorx , ennemis de notre ré-
putation et indignes de notre bonne grâce tous ceux
qui Poseroient entreprendre, etc , ça » Puis
venaient les défenses d'usage, pour te chancelier et
les cours souveraines, de sceller ou enregistrer au-
cune lettre dérogatoire , quoique signée de la maiir
du roi, et ce, nonobstant toute injonction ou exprés
commandement, etc.
On trouve une formule de protestations à-pea-
près semblable dans l'ordonnance de Henri IV.
<Y Nous faisons défenses très expresses à toutes per-
sonnes , porte le préambule , et mesme à la rojme
fiostre très chère et aymée compaigne, comme à
tous les princes de notre sang , autres princes, prin-
»
s.- 197
cijiaux et spéciaux servilcurs de nous foire aucun»
fiiin rcqiieste ou supi>licaUou coutraire h icclle ,
nr peine de nou3 dùplairc , protataiU cl jumut par
k Dieu ■vivant de u accorder aucune grâce ilvs-
ngeante à la dicte prèse}Ue ordonnanae , elc. »
Mal^É (outea ces prutestolious ci impK'calions
Cftnire les insUuices de la reine uu tous autres ,
Henri IV laissa son édit ^-peu-près sans exécution.
Quant ik celui de Louis XIII , il cotumenee pu-
iccorder uoe amuistic pleiae clenlièrc k tous con-
damnés pour duel ; Et ce, y cst-tl dit , à auise de
tiustante piière qui nous en a i-téfaîie delapart
de noliv chère et bteii aimée sœur, la reine de la,
Grande Brrioff te, sur le point, et en considéralion-dc
son mariage, etc. On peut juger par là de ce qu'il
j atail de sérieux dans toul ce luxe dY'dits et dans
ccabsBates formules d'apparente SL'v6ritë, qui, dans
TancienDe aïonarcbic , u'uul (pic trop souvent dé-
grade la majesté des lois (21 1).
Toutefuis il s'est rencontré un OMnislre fameux
la politique sut Irouvet: dans cet arseotil , des
qui devinrent terribles entre ses mains. Le-
itinualcur de Louis XI n'avait garde de négliger
moyens contre celle aristocratie , rivale de
autorité , et dont il avait juré l'extermination.
11 savait bien quels avantages il se doiuiait sur ce
«iqis toujours remuant , qui l'unironnait iuocs-
jradc
. Tou
y dont 11
Hnantes
Bttontini
V bétels
ip tonau:
^^m
188 —HISTOIRE DES DUELS.—
sammcnt de dangers personnels , d^inirigues et de
conspirations , en attaquant un usage dont la no-
blesse ne pouvait se passer , et qui lui était plus cher
que la yie. On vit successivement tomber , sous
difTérens prétextes , les têtes des Marillac , des
Bouillon , des Cinq-Mars , des de Thou , des
Montmorency , et peu s^en fallut même , celle du
propre frère de Louis XIII. Ces victimes s^appelaient
des rebeUes ou des conspirateurs : quand on n^en
trouva plus de cette espèce , on prit des duellistes.
On connaît les aventures et la fin tragique du
jeune prince de Ghalais, de la maison deTalleyraiid.
Il tua en duel au commencement de 1626 , le comte
de Pont-Gibaut , petit-fils du maréchal de Schom-
berg. Saisi et arrêté, sa tête était promise à Pécha-
faud ; mais Ghalais était le favori de Gaston d'Or-
léans , frère du roi , et Tamant en titre de la fameuse
duchesse de Ghevreusc. Le cardinal-ministre se vît
obligé de relâcher cette proie. Ge ne fut pas pour
long-temps. Vers la fin de cette même année 1626 ,
il se trouva compromis dans une de ces intrigues
qui se renouvelaient sans cesse à la cour contre
l'autorité de Richelieu. Gelui-ci le fit juger à Nantes
par une commission , comme coupable de conspi«>
ration contre la vie du roi. Il fut condamné et
exécuté le même jour , malgré les larmes et les
supplications de sa mère. Ne trouvant pas de
t
xtx.— 109
bourreau, on pril dciiimQiraitciirs qiii donnèrent
■u pnlieni plus (le trente coups de liaclie avant de
lui arracher h \îe, et obtinrent leur grâce à ce prix.
Lfs détails de celle exécution font frissonner
d'horreur (212).
L'uinéc suivante, un coup d'autorité plus re-
marquable encore tint signaler la puissance et la
politique de l'impitoyable ministre de Louis Xllt.
FrtDçoîs de Montmorency, plus counn soua le nom
de Boulteville , jouissait d'une haute célébrité
eoinme duelliste. C'était le liérns de l'escrime : il a
dû de plus au nom qu'il portait , la triste gloire d'en
Are le martyr, (^ueliiues détails tirés des JUmioii-cs-
ihi ten^s , sur sca principaux exploits et sur sa (în
bt^que qui couronna le dernier, aclièTOi-ont le
toblemi de celle époque. Au li'mnignagc d'Aniclol
de L« tluussaye , il sulFisoil au comte de Uoutleville
f eolciidre dire : Un tel i:it brave; il s'en allait de ce
pas droit vers lui , et l'abordanl : Monsieur , disait-
il , on m'a dit i/uc vous étiez brave , fen veux jai
l'essai , quelles sont vos armes ?.... Tous les matins,
h» ratUHés d'honneur ainsi qu'ils s'appelaient , se
rassemblaient en son hiitel dans une grande salle,
où l'on trouvait toujours des rarraichissemetis tout
Krvis , avec des fleurets et autres armes au service
H i-« amateurs. Cette salle élttil te quar tiuf -gêné rai de
U jcuaessc ilorcc de ce lemps-là.
200 — HISTOIBE DES DUELS.—
Dès 1621 , Boiitteville et d'autres férailleura de
son école , dont Tépée ne rentrait jamais dans le
fourreau , avaient été Fobjet de plusieurs arrêts du
parlement pour fait de duel. En 1624, le propre
jour de Pâques y dit une relation de ce temps , il ne
laissa pas de contraindre le comte de Pont^Gibault
de quitter ses dé\^otions pour s'aller battre à Ven^
contre de lui. » Ce comte de Pont-Gibault est le
même que celui qui fut tué , deux ans après , par
le prince de Ghalais. Ils eurent pour sccoads , les
barons de Chantail et des Salles. Cette affaire donna
lieu à deux nouveaux arrêts du parlement , rendus
par contumace, les 24 et 29 a>Til 1624; ce qui
n'empêcha pas Boutteville d'aller son train , de se
battre, en 1625, contre le marquis de ?ortes, el
de tuer, en 1626 , le comte de Thorigny. En 1627»
il eut une nouvelle affaire à St.-Germain-en-Laye^
avec le baron de \ji Frette : son second y fui
tué (213),
Feu de temps après , une autre querelle s'élève
entre l'infatigable Boutlcville et le marquis de Bou*
Tron , parent du comte de Thorigny , qui cher^
chait à venger la mort de celui-ci. Mais comma
les duels précédens avaient fait bruit , et que dea
mesures sévères étaient prises pour l'exécution des
nouveaux édits , ils prirent le parti de se rendre à
Bruxelles pour se battre en tpute liberté. Le roi
— CHAI'ITHF. SIX.— 201
I ayant ilé Inrormf.- , écrivit k rarchiducliessc ,
kBitvemanle des fays-Itus , pour la prier cl« ne pas
trir que ilcus de ses sujels ne balti8!«enl sur eea
rrcA. La princesse chargea le marquis de Sptiiola
( les accorder. « CeliiUcî , dit la relalion déjà
rc, les engagea •■ dîner, les Iraila magniQqu entent
t les obligea par acrmeus qu'ils se fireni Tun h
' fiulre , et par leurs baisers cl embrassemcns , de ne
plus penser au sujet de leur querelle ; el ainsi les
•Ccorda en prt'Sencc de rumbassadcur de France ,
du grand écuycr de rarchiduclics-^e, et de plusieurs
gailtlshomnies français , es]iagiiolfl et flamands ,
wffà parurent très-joyeux de celle rûcoucilialinn ,
kquellc épargna le cbemiu , la dépense cl la peine
là plusieurs français qui étaient résolus de se rendra
i Flandres pour avoir part h ce combat. " Cela
f-i'cmpécba pas le marquis de Beuvron de dire k
IViutteville , avant de sorllr de la salle , quejiuiiais
d ne serait content au'tl ne J'eiil l'u t'vpée U la
nifuri.Mais Bouttcville ne voulut pas se battre h
bruxeUev, par égards pour rarchiducliesBe i» qui
iUvait engagé sa parole. Il sut même Tintéresser
lu point de lui faire écrire A Louis Xlil, pour en
obtenir la permission de retourner en France.
l'C roi réponilit k l'arcliidncliesse : Que tout ce qu'il
pouvail faire pour l'amour d'elle, c'était qu'il ne
inail ivc/tcivlier £outtc\iUe daiu son jvjaumci
202 — HISTOIRE DBS DUBL8. —
niais quil se donnai bien de garde de reparaître
à la cour
Beuvron étant retourné à Paris , écriyit jusque
huit lettres à Boutteville pour rengager à venir Py
rejoindre. Celui-ci ayant pris sa résolution , se met
en route. Dés son arrivée il court chez Beuvron,
qui propose de se battre sans seconds. Mais son
adversaire réplique que deux de ses amis voulaient
être de la partie et quil aurait affaire à euœ s'il
se battait setd. Le combat fut fixé au lendemain
12 mai, trois heures après-midi, sur la place Royale,
Boutteville ayant déclaré qu^il voulait se battre au
grand soleil. Les seconds de Boutteville étment le
comte de Rosmadec des Chapelles , son parent et
son compagnon habituel d^aventures , et un sieur
de La Berthe. Beuvron avait de son càté un ûeur
Choquet , son écuycr , et le marquis de Bussy
d^Amboise , nom célèbre dans les salles d^armes ,
qui tout malade, venait de s^arracherde son lit pour
rendre ce service à son ami. Le combat se fit avec
Tépée et le poignard. BautleviUe et Beuvron pas-
sèrent Tun sur Pautre et se coHetèrent. Chacun
d^eux jette alors son épée , et tenant le poignard
kvé Pun sur Pautre , ils se demandent récipro-
quement la vie. Pendant ce temps , le marquis de
Bussy reçoit dans la veine cave un coup d^épée de
Rosmadec. u Transporté chez le comte de Maur«
— CIIAPITBE \1S. — 203
jiron , porte la relaliun , il expire entre les bras du
père Cbaillou , minime. Apres le roup, il ne parla
(lus, il ne fit que lever les yeint au oiel et joindre
kl mains. De La Berllie, blcssi^ pnr Choquet , Fut
jwrié k riiôtel de Mayenne, Bcuvron se retira eo
mingîs de ta place Royale , altendant son carrosse,
e sauva avec le sieur Choquet en Angleterre.
IcHitieville se rendit au logis du baron de Chantaîl ,
ISin de SCS conûdcns, où i\ monta h cheval : puia
lUIa avec Rosmadec, chez les Guillcmin, bar-
hm, où ils Grent collation. Là on vint leur dire
Itw sauver , parce que le roi était h Paris. Ils ré-
^londirenl cju'ils le savaient bien avant de se battre ;
■ cela ne les empêcha pas d'aller encore à l'hôtel
ieMayense pour voir panser de La Certhe. Apres
^«Â ils partirent sur leurs chevaux jusqu^k la prc-
e poste de Meaux. »
Pendant que nos deux duellistes prenaient ainsi
leurs aises et s'éloignaient de Paris fort Iranquîl-
l Icmenl el au petit pas, le Prév»\t dcniôtel faisait,
^tn grand appareil , une descente au ch<1teau de
^Vn^ey qu'habitait BDulleville. Celui-ci , sans trop se
~ presser, gagnait la Lorraine avec son compagnon ;
mais arrivfrs k Vitry , un incident des plus bizarres
uut leur barrer le passage. A peine le marquis
<lc Bussy d'Amboise avait-il rendu l'âme, que la
jirtûdeute de Mcsmes sa sœur , chez qui il de-
204 ^mSTOIRE DES DUELS.-*
meuraii , avait expédié deux alEdés pour s^emparer
de ses châteaux et domaines avant la comtesse de
Vignory sa tante , qui pouvait prétendre part à
riiéritage. Ceux-ci, arrivés à Meaux, apprirent que
deux personnages venaient d^ passer. Ib se mi-
rent k leur poursuite , les prenant pour des cou-
reurs de la comtesse de Vignory qui avaient Iiji
m^me mission qu^cux. Les ayant atteints près de
Yitry , ils reconnurent les deux fugitifs. Us allèrent
alors avertir le Prévôt de la ville de la mort du
marquis de Bussy qui était gouverneur du pays ,
et firent arrêter Boutteville et Rosmadcc qu^oQ
trouva dans une lioteUcrie , où , après avoir lar-
gement soupe , ils venaient de se mettre au lit.
Ils furent conduits à Paris et mis à la Bastille,
(c Le même jour, le roi manda le parlement au
Louvre, et lui commanda de faire et parfaire le
procès aux deux accusés , toutes affaires cessantes
et sans désemparer. Le jeudi 3 juin , Pévéque de
Nantes eut permission d^aller les voir pour mettre
leur conscience en état. Il leur fit, à chacun d^eux,
écrire au cardinal de Richelieu une lettre qui fui
.sans effet. Le jour de la Fête-Dieu , après que le
roi eut oui la messe et communié , la dame de
Boutteville se jetta aux piedsdeS. M., qui passa outre
sans lui parler, et en passant dit ces mots ; La femme
me fait pitié ; mais je veux et je dois conseiver
— ciiAprTBE \ix.— 205
<t aulon'iè. Le 14 juin, la comtesse de Itoulleville
■nsl^e lie la princesse de Condè , des dames de
■tfonlintirenry et d'Angoulèmc , du cardinal de
La Valetle cl du comte d'Alais, présentèrent une re-
qiuMc au parlement pour récuser les juges ', maïs elle
fut mise k oéaut. Une autre rcquctc fut présentée
BU Garde-dcs-sccaux pour faire évoquer raffairc
BU conseil, et n'eut pas plus de succès, n L'arrêt
des deux accusas fut prononce le 21 juin , et
nèculè le lendemain sur la place de Grève avec un
^and appareil militaire. Uouttevillc avait été disposé
à la mort par l'évèque de Nantes, dont les cxhor-
UlîoDS lui inspirèrent un profond repentir et une
pande résigualion. Il voulait, raconte-t-on , con.-
I «rver sa moustache qui était grande el belle. Alon
^ub, lui dit le prélat, il nu faut plus penser h la
^BftÙ!; quoi '. vous j pensez encore ?.... (214).
P « Cette sévérité , observe le préaident Hénault ,
fi) plus d'effet sur les esprits que tous les édita qu'on
iivatl rendus ii ce sujet. » Il est vrai de dire ce-
pendant qu'on vit bien moins, dans cette double
c\écution, un acte dejustice qu'un nouveau trait de
Il «anguinaire tyrannie du cardinal , et de sa haine
coDirel'arblocratie. Quoique Goulteville lût un in-
corrigîMe duelliste, et que l'audace avec laquelle
3 seiiil>iiiit braver l'autorité fût d'un dangereux
excmiilc, sa conduite et celle de Jlusmadec, son
206 — mSTDIflE DES DUELS. —
compagnon , n'offraient rien qui s^éloignàt des
mœurs et des idées du temps. On y chercherait même
en vain des traces de cette férocité déloyale qui
n^était pas rare alors , et dont nous ayons déjà cité
tant d^exemptes. D^ailleurs , dans la dernière affaire
qui lui coMa la vie , Boutteviile n'avait pas été
l^agresseur. Le marquis de Beuvron, qui Tavait tant
de fois provoqué , en fut quitte à bien meilleur
marché. Il se tint un instant à Fécart, laissa passer
Torage, et ne tarda pas à reparaître à la cour,
comme les ducs d^Halluin et de Liancourt , autres
duellistes , dont les lettres patentes autorisaient le
retour , en même temps que s^élevait Téchsiaud de
Boutteviile et de Rosmadec (215).
Personne , au s^irplus , n^a cru à la sincérité du
zèle de Richelieu contre les duellistes. Quelque
peu de confiance qu^on puisse accorder à Tauteur
pseudonyme des Mémoires publiés à La Haye,
en 1680, sous le nom du comte de Rochefort,
on y trouve sur les motifs secrets de Texëcution
du comte de Boutteviile , des particularités qui ne
sont pas sans vraisemblance. Ces Mémoires , que
la critique a distingués pour le style et Pexactitude
historique dans la nombreuse collection du même
auteur , contiennent aussi quelques anecdotes
qui, si elles étaient vraies, offriraient des preuves
•- CHAPITRE SIX. -* 207
fort piquantes des sentimens secrets du cardinal ,
sur la violation de ses édiis contre les duek (216).
Ce ne fui donc pas un duelliste que la main
de Richelieu frappa dans Boutteville ; mais un
Honlmorency , mais un rejeton de cette illustre
fanille, dont cinq ans auparavant Péchafaud de
Toulouse avait moissonné la tige. Ce ministre, que
Châteaubriant appelle le G rand-maitre de l'écha^
faud, pratiquait cette célèbre maxime bien avant
le démagogue Danton , à qui on en a fait honneur :
EnpoUtique, il njr a que les morts qui ne re^^ien-'
nmt pas.
CHAPITRE XX.
Régne de Louis XIV . — Analyse des nouTennx édîfs
contre les duels. — Tribunaux du point dlionnenr.
— Politique de Mazarin à Tégard des duelUstes.
— Iiidulgeucc du roi. — Duels reittarq[uables.
Le despotisme de Ri(;helicu enfanta l^utocratie
de Louis XIV. Ce fut le prologue énergique d^un
fait naturellement progressif. L^absolutisme minis-
tériel servit de transition à Tabsolutisme royal.
La vieille liberté féodale venait de tomber sous Ift
faux monarchique, et Tégalité démocratique encore
en germe, n^était pas en mesure d^occuper sa place.
L^interrégne de ces deux puissances laissait le
champ libre à Tautorité sans contrôle et sans limites
du Grand-roi , dont le nom pesait assez dans la
balance de la renommée , pour remplir avec le plus
prestigieux éclat ce long intérim. Ce fut pendant
celle invasion d'un seul homme y dans Fantique
domaine de nos franchises cl de nos libertés , que
rindividualismc prit naissance. 11 se développa
pendant la vt)hiplueuse léthargie de Louis XV t
209
i prépara le trînniphc définitif de la Démocratie
ieu!i le sceptre affaibli de Louis XVI.
Rii'helieu mort , l'Aristocratie qui avait péri
me pouvoir rival du trAiiej va s'en faire an-
«pter comme l'ornement. 11 ne lui restera plus
daus l'étal que le rôle de ces rois captifs entourant
le char des iriomphateurs Romains. Toutefois, elle
L ptreitra se consoler encore de celte humiliation , en
^■tDVoyant à cette tourbe dV-sclaves i[ui marche à sa
^noile , les superbes mépris du vainqueur. Mais ceus-
I d briseront leurs fers , et l'Egalité plébéienne viclo-
rieutc h son tour, viendra fouler aux pieds le trûne
liiilvérisé du Patriciat et de la Monarchie (217) .
Louis XIV, dans l'inlérét de sa politîqiie guer-
rière, comprit tout le parti qu'il pouvait tirer encore
lit l'élément aristocratique dispersé soua son pré-
ilrresseur. Il s'empressa d'en rassembler les pâles
t-Iunglans débris, La Noblesse, dans ses mains, de-
(ini une institution purement militaire ; et il lui
•Wanda , pour restituer h In France ses limites
niilurellcs , les mêmes services que Charles Vil en
'\M obtenus pour la délivrance du territoire.
Ainsi fui reconstitué le Mitilaiîsme patricien, par
iniHntion de l'ancien jUilUaiùinc germanique ,
qiii liatail de la conquête des Gaules. Nous aurons
"ffaiion d'en suivre les phases diverses et d'en
influence k l'égard des duels, jusqu'à sa
14
210 — HISTOIRE DBS DUELS. —
transformation en Miluarisme plébéien à la fin du
18.- siècle (218).
Les troubles de la minorité de Louis XIY furent
le signal de la résurrection du Duel que la main
de Richelieu avait plutôt assoupi qu^étouffé. Comme
il trouve toujours son aliment le plus actif dans
les discordes civiles , il se reproduisit et se fortifia
dans Tanarchie de la Fronde , pendant la durée de
cette émeute mesquine , bizarre , ridicule , dont
les proportions comparées à celles d^une insur-
rection sérieuse ressemblent assez au Duel mis en
parallèle avec la Guerre. Ni plus ni moins qu^on
ferraillait contre un ami , on se révoltait contre un
ministre par partie de plaisir. Comme on s^em-*
brassait après une affaire d^honneur , on rappelait
Mazarin dans la capitale , on le fêtait , on Tapplau-
dissait. Ce peuple qui Pavait chassé , se serait fiait
volontiers écraser sous les roues de son carrosse.
€( Toute la France tomba à genoux , dit Anquetil.
Les Parisiens lui firent une amende honorable de
leurs insultes excessives , par des hommages qui ne
Tétaient pas moins. On lui donna une fête à THôld^
de-ville, où il fut traité comme un souverain, etc...>i
Faut -il donc s^étonner que cet Italien, matois i
professât un mépris si naïf pour les Français?... <
Ne sont-ce pas là de ces traits qui nous ont vaL^
— rilAPITRE xs. — 211
t loui lempa Ih ri-putalion du peuple te plus léger
W4e l'Europe f
l.niiis XIV ^lail trop jaloiii de maintenir son
otorilé comme aouveraîn , et la discipline militaire
mme conquérant , pour voir le Duel de bon œil.
Comme ses prédécesseurs , il cherclia h le combattre
[lar des ordonnances. C'était une ;^ierre qui n'en
imposait pas beaucoup ; car elle était si rarement
rictise. On trouva le secret de renchérir encore
r ce luxe d'édits et de déclarations du règne pré-
E^enl. Il semblait que n'osant pas aborder de front
I aussi redoutable ennemi , on voulût TétoufTer
tus des volumes de lois. Comme sous Louis Xlll ,
oyait à cbaqne duel marquant surgir un nouvel
,. U en fut promulgué sous Louis XIV , au-delà
;ur cette matière , outre de nombreux arrêts
erfglement. Tels sont ceux de juin 1643, 11 mai
|^64i, 13 mars 1646, septembre 1651 , mai 1653,
168, 13 août, 14 et 30 décembre 1679,
P4cembre 1704 et octobre 1711- Quelques-uns
Teiifcnnent plus de quarante articles développés
iTcc celte prolixité et celte exubérance de termes ,
alors k la mode dans la langue législative. La plupart
commencent , comme les deux édita de Henri IV,
parce protocole : Pivniièreme.nt , nous exhorions
laiu lias xujets, et leur enjoignons de l'jivw en paix,
union et concorde Et se terniineut comme ceux
312 — HISTOIRE DB9 DOBLt. —
de Louis XIII , par les protestations ordinaires
de n^accorder jamais grâce , suivies des très^a>
presses inhibitions et défenses aux gens de justice
d^avoir le moindre égard à toutes lettres à ce cou-
iraircs, etc. , etc. . . . On y voit aussi développé, dans
de longs préambules, Thistorique des désordres
toujours croissans causés par la fureur des duek^
avec un grand pathétique d^expressions de regref
pour rindulgence du passé et de menaces de sé-
vérité pour Tavenir. On jugera par Fanalyse qui
va suivre de Fesprit de toute cette légidation.
Le duel était , sous Pancienne monarchie, si bien
considéré comme Tapanage exclusif de la Noblesse,
que c^élait d^eUe seule que les lois semblaient s^oc-
cuper , quand elles sévissaient contre les duellistes;
On lit dans le préambule de Tédit de 1643 :
u N^ayant rien de plus il cœur que la conser-r
vation de notre noblesse , dont la valeur si célè-
bre et si redoutable par toute la terre n^est ternie
que par les déréglemens d^une si monstrueuse
frénésie ; après avoir demandé à Dieu ^ comme
nous faisons et ferons tous les jours de tout notre
cœur , qu^il veuille lui ouvrir les yeux pour dis*
siper ces damnables illusions qui la transportent
de Famour d^une fausse gloire , nous nous sommes
résolus, etc. »
Le même édit , ainsi que tous les autres , ne
-cniriTHE XX. ~ 21S
' ji»rlc que des gentils hommes , iic supposant pas
qu^il puisse se prësciiler de» ms de duel dans
r h classe rolurii>re (juî est laissée sous l'empire
gA> druit commun. Celui de 1651, Art. 15,
mlîent m^me à ce sujet les dispositions iiuivanles :
I W D'autant qu'il se trouve des gens de nnissanre
I ijptobie , el qui n'ont jtiuiiiiR porti; les armes ,
t assez insolens p<»nr appeler des gentils-
, lesquels refusant de leur fjiire raison ,
!t de la difTérencc des conditions, cesm^mcs:
mîmes suscitent el opposent contre ceux qu'ils
«ppeU-s , d'autres gcntilsliommes ; d'où il
''Wnsuïl qtieKpiefois des meurtres d'autant plus
détestables , qu'i!* proviennent d'une cause ab-
jwle ; nous yoidons et ordonnons qu'en tel cas
d'appel ou de combat, principalement s'ils sont
MÎrâ de quelques grandes blessures ou de morl ,
les dits ignobles ou roturiers qui seront duement
itteints et convaincus d'avoir causé et promu
de semblables désordres , soient sans rémission
pendus et étranglés, tous leurs biens, meubles:
(k immeubles confisqués ; permeUaiit en outre
aux juges d'ordonner sur les biens cortfistfués trlles
"compenses qu'ils aviseront caiwenables aux dé-
"vnciaieurs et autres qui auront découvert les dits
''as , afin que dans un crime si punissable , chacun
idit invité à la dénonciation il'icclui. >•
214 —HISTOIRE DES DUELS.—
Le règlement le plus général fut celui d^août
1679, appelé VEdit des duels. Ce crime y était
déclaré imprescriptible : la peine de mort était
prononcée tant contre ceux qui avaient coml)attu
que contre les seconds et tiers. Us encouraient
en outre la confiscation de tout ou partie de
leurs biens , selon les divers cas. Les fiefs étaient
réunis à la couronne ; les gentilshommes étaient
dégradés de noblesse, déchus de leurs armoiries
qui devaient être noircies et brisées par les mains
du bourreau. Le procès était fait à la mémoire
de ceux qui avaient succombé , et leurs cadavres
traînés sur la claie j puis jetés à la voirie. Le
pouvoir civil allait enfin jusqu\^« les déclarer exclus
de la sépulture ecclésiastique. La simple provo-
cation en duel non suivie d^effet , était punie du
bannissement et de la confiscation de la moitié
des biens. Quant aux commissionnaires porteurs
des cartels , et aux domestiques qui assistaient
leurs maîtres et qui jadis devaient être pendus ,
ils ne furent plus soumis qu^à la peine du fouet
et de la fleur de lys (la marque). Cette dispcv-
sition de Fédit fut celle qui a toujours été la
mieux exécutée. Une foule de précautions étaient
prises en outre , pour qu^il ne fut pas possible
d^éluder Fapplication de ces diverses peines , soil
en Caisapt passer les combats prémédités pour
— CHiPtTBG Xï. — 215
des rencontres fortuites , soit en allnnl se ballrc
hors du royaume.
Ce qti'il y aTait de vérilablemenl louable dans
cttte k'gislalion , c'étaient les mesures qu'elle pres-
crivait , afin d'assurer k l'honneur ofTensé une
légitime réparation. Ce fut l'objet spécial de la décla-
nlion de décembre 1704, sur les injures privées.
Les gens de robe qui se permeltaienl des oiitrages
par paroles , étaient soumis k des peines sévères.
Les démentis , coups de mains , ou coups de canne
ilaient punis de prison avec réparation d'iionneur
m sortant ; et mdme celui qui avait donné un
■oufflet devait se soumettre k en recevoir un pareil
de son adversaire. C'était la peine judakpic du
tdion qui n'a jamais été dans nos mœurs (219).
Ce fol. sous Loub XIV que les tribunaux d«
point d'honneur reçurent une organisation déii-
iVÎtive. L'édil de 1643 et ceux qui suivirent, eon»-
Stuérent le corps des maréchaux de France ,
juge suprême et arbitre souverain des différent
nirvenus dans l'étendue de leur juridiction. Ce
tribunal faisait citer devant lui les parties , les
tccordait si faire se pouvait , ou ordonnait en
IsTeur de l'ofTensé , telle satisfaction qu'il jugeait
convenable. Dans les cas graves, l'offenseur était
en outre passible de prison , amende ou bannis-
216 — HISTOtRE DES DUEI^. —
sèment. En cas de refus de comparaître deranl
les juges , il était envoyé aux récalcitrans des
gardes ou garnisaires , dont Tentretien demeurait
à leur charge pendant toute la durée de la con-
tumace. Depuis y il n^y a plus eu de tribumaux
du point d^honneur ; mais on a trouvé commode
leur forme de procéder , et on Ta conservée en
matière d^impôt et de recrutement.
Les maréchaux de France avaient mèoie
été investis du droit de faire des réglemens aui
les matières soumises à leur juridiction. Il en
intervint plusieurs , parmi lesquels on remarque
ceux des 22 août 1653 et 1679. Ces réglemens
avaient pour objet principal de prévoir les divers
cas d^injures , en leur appliquant des formes
convenables de réparation selon leurs dégrés de
gravité. C^était une espèce de code pénal du
point d^honneur. La juridiction des maréchaux
de France produisit quelques bons effets, sur-
tout dans les premiers temps de son organisation*
Quelques traits cités aux deux chapitres suivans^
feront juger de ce qu^elle était devenue peu de
temps avant sa suppression en 1790 (220) «
Toutes ces mesures contre les duels y étaient
toujours accueillies avec cette sorte d^enlhouaiasme
crédule , que fait naître le désir d^étrc déUvré
^ CnWlTRf. \\, —
tJ'uii dt-sordre univergeliemciil sciili. Tous les
écriU «lu lemps rctcnlissajcnl dos louanges du
{jrand-roî , dont le bras puissant avait enfui ébattu
iDuIeg les létes de l'hydre. On crojait si bien
CD 1071 à robolîtîon définitive du duel ,
(îéce de vers qui portait ce titre , oblint cette
véme année le premier prix de poésie qui ait
ia décerné par l'Académie franmlse (221).
. Mais les résultais élaicnl loin dV-Ire en rapport
iirec les brillanles dluaions auxquelles tous les
Orurs semblaient empressés de s\ibnndonner.
Plusieurs causes concouraient encore pour rendre
nines les précautions les plus sages , et ^-peu-
Lprés illusoires les dispositions les plus sévères :
H Celaient d'abord les moeurs du temps , et spé-
cialement celles de la Noblesse dont les exemples
tv aient une si grande influence. C'était aussi
une absence réelle non seulement de fermeté ,
■nais même de franchise de !a part du souverain.
On en a vu assez d'exemples sous le règne de
^ Henri IV.' Il n'en a pas manqué sous celui de
Louis XIV. On y trouve un peu moins de
luuer-aller , mais beaucoup plus de dissimulation.
C'était bien envain qu'on lisait dans les édita de
« régne des dispositions telles que eellea-ci :
u Et combien que nos sujets ne pussent Siiiis
^ninc être estimés avoir manqué à leur lionueur
218 — HISTOTKE DES DUELS. —
en obéissant à notre présent édh , et reccYant
en la forme susdite, la réparation et satisfaction
qui leur sera ordonnée par nos susdits cousins
les maréchaux de France , ou gouverneurs , ou
lieutenans généraux de provinces ; néanmoins ,
afin qu^il ne puisse rester aucun scrupule en
Tesprit même du plus pointilleux , nous déclarons
que nous prenons sur nous tout ce que Ton
pourroit imputer pour ce regard à celui qui
étant offensé , n^auroit pas fait appeler son ennemi
au combat , ou qui , étant appelé , aura par la
considération de ce qu^il doit à Dieu et à nous ,
refusé d^y aller et de se rendre coupable d^uoe
désobéissance divine et humaine. »
<c Et d^autant que ce faux point d'honneur
qui , par Tartifice du démon , a passé jusqu^ici
dans l'esprit de notre noblesse pour une inévi-
table quoique cruelle nécessité , est cause de la
maudite honte qu'ils ont de refuser ces dueb
abominables , comme s'il pouvoit y avoir de la
honte d'obéir aux loix les plus saintes de Dieu
et de son église et aux ordonnances les plus
justes de leurs princes et de leur patrie ; nous
déclarons et nous protestons solennellement que
nous tiendrons non seulement pour impies et
pour criminels , mais aussi pour lâches et san^
courage , ceux qui n'auront pas assez de gënè-
— CHAriTBE XX.— 210
foailé et de vertu pour surmonter ces faibles
iipiliJons , qii'im nbus déleslalite a tlabllcs niiitrc
lotrtc sorte de droit justice et conscience. »
Edâ de 1648, An. 12 e( 16.
Les sentimens et la conduite si opposes du
monarque législateur , « qui , k la date m^me de
KS édita, comme dit Mercier, signait des letlrcs-
patentes en faveur des maîtres d'ormes ; » l'espril
et [es habitudes de la cour, tout autorisait k ne
rousidèrer de pareilles phrases (|ue comme de
Syle dans les lois. On n'en tenait aucun compte
ri le courtisan qui , dans un cas de duel , aurait
eu la simplicité de compter sur l'opinion offi-
cielle du prince , ou sur sa bonne volonté à se
charger des consétpicnces morales d'un refus ,
D'aurait , en sus de l'infamie , recueilli que du
ridicule. Tout était doue mcusonge, hypocrisie,
comédie dans le langage législatif. Il s'y trouvait
quelque chose de pis encore. Que dire de cette
disposition de l'article 16 de Tédit précité ? n Nous
ordonnons et enjoignons très e^ipressémenl k ceux
qui seront appelés de nous en donner avis , au-
qurl cas nous accordons dès à présent , comme
pour tors , aux dits appelles toutes les charges ,
offices et pensions des appellans. La mOme pensée
K retrouve encore dans l'article 15 cité plus
liaut de l'édil de 1651 : et elle a même souillé
220 -- HISTOIRE DES DUBI.8. —
jusqu^au code militaire du 8 avril 1666 , qui
promet 150 francs de gratification et son congé,
à tout soldat qui dénoncera un cas de duel arrivé
dans son régiment.
Telles étaient les idées et beaucoup d^autres
bien plus étranges encore , dans lesquelles on
entrait le plus naturellement du monde au 17.*
siècle. On menaçait de partager à des délateurs
et des favoris de cour , les biens confisqués sur
les duellistes. On sait qu^à la révocation de Tédit
de Nantes, on ne s^en est pas tenu à de simirfes
menaces pour les biens des Protestans. Il m
s^agissait pas là de ces lumières qu^une tardive
raison n^avait pas encore fait briller aux yeux
de nos ancêtres. 11 s'agissait comme , dans la con-
duite de nos rois envers leurs maîtresses , et
dans ces hommages publics que celles-ci arra-
chaient à Fhonneur , au génie et à la vertu du
temps ; il s'agissait , dis - je , de ces principes
d'étemelle morale qui sont de tous les temps et
de tous les pays , et pour lesquels il n^est permis
à qui que ce soit au monde de prétexter cause
d'ignorance (222).
Comme nous l'avons déjà remarqué , le duel
trouva Palimcnt le plus actif dans les guerres ci-
viles de la Fronde qui ne furent cUes-mémes qu^une
— CTIAPITHE Sï. — 221
Liorie i]e duel collectif, enire dt^s rivalités de cour
Btde mesquines nitibitions de boudoirs.
H L'esprit de discorde el de faelion, dît Volliiire,
nit passé de la cour jti3(|ii'aiix moindres villes.
tt se disputait tout , parce qu'il n'y avait rien de
' riglé. n n'y avait pas justpi'auT paroisses de Paris
qui n'en Tinssent aux mains. Les processions se
ballaienl les unes contre les autres , pour l'honneur
de leurs bannières. On avait vu souvent les cha-
nnines de Notre-Dame aux prises avec ceux de la
Siinte-Chapelle. » Le duel ^ coups de livres, dans
ie Lutrin de Boileau , n'est donc pas en rivalité , un
^isode tout-à-fait fantasticiue.
"Le Parlement et la Cliambre des comptes s'étaient
btltiispour le pas, dans l'église de Notre-Dame,
le jour que Louis XIII mil son royaume sous la
protection de la Vierge Marie. Presque toutes les
I coBimunautés du royaume étaient armées ; presque
b^Iriis les particuliers respiraient la fureur du duel.
^pGelte barbarie gothique autorisée autrefois par les
mi» m^mea , et devenue le caractère de la nation ,
•contribuait encore , autant que les guerres civiles
Il étrangères , à dépeupler le pays. Ce n'est pas
Inip dire que dans le cours de vingt années , dont
<lii avaient été troublées par la guerre , il était mort
piutile gentilshommes français de la main des Fran-
'';■»» mêmes <pie de celle des ennemis. »
— HISTOIRE DBS DUBU. —
c( Nulle décence , dit encore le même auteur ,
nulle bienséance ni dans les procédés , ni dans les
paroles. Orner Talon rapporte qu^il entendit des
conseillers appeler, en opinant, le cardinal-premier
ministre yà^um. Un conseiller nommé Quatresous
apostropha rudement le grand Gondé en plein par-
lement. On se donna des gourmades dans le sanc-
tuaire de la justice. Il y avait eu des coups échangés
à Notre-Dame , pour une place que les présîdeai
des Enquêtes disputaient au doyen de la Grande-
chambre, en 1644.... Ce désordre, en tout geDre,
continua depuis 1644 jusqu^en 1658 , d^abord wum
troubles, enfin dans des séditions continuelles, d^un
bout du royaume à Tautre. Le grand Gondé s'ou*
blia jusqu^à donner un soufflet au comte de Rieux ,
fils du prince d^Elbeuf , chez le duc d^Orléans;
ce n'était pas le moyen de regagner le cœur des
Parisiens. Le comte de Rieux rendit le soufflet au
vainqueur de Rocroy , de Fribourg , de Norlingue
et de Lens. Gette étrange aventure ne produisit
rien. Monsieur fit mettre, pour quelques jours, le
fils du duc d'Elbeuf à la Bastille , et il n'en fut plus
parlé. Siècle de Louis XI F, Chap. II et V.
Il parait que les distributeurs de soufflets jouaient
un des principaux rôles dans la Fronde , et qu^ib
avaient adopté pour cliamp de bataille , le visage
des membres de la famille d'Elbeuf. Le duc de
— CHAPITRE x\. — 223
Beaurnrl , Gis d'un biilard de Henri IV, sumomniÉ
k liai des halles , k cause de Ib grossièreté de
•es manières , voyant que les esprits se rappro-
ehaienl , demanda au président de BeUiévre , s''il
K changerait pas la face des alTaires en donnant
ou soufflet au duc d'Elbeuf. — Je ne crois pas,
rr/jondit le magistrat , que cela puisse changer
autre chose que Ui face Je Monsieur le duc.
Plus lard en 1652, ce même due deBcaufortse
ktlit pour une querelle de préséance aTec son
beau-frère, le duc de Nemours, et le lua d'un
coup de pistolet. Ils avaient chacun quatre seconds
qui , selon l'usage , se battirent en même temps
qu'eux. Le marquis de Villars, qui secondait
Nimours , lua aussi son adversaire d'iléricourt ,
qu'il n'avait jamais vu auparavant.
On lit dans les Mémoires de M."* de Mottevaie,
que. Irais ans auparavant, ce Deaufort étail allé
ivec six de ses amis , insulter grossièrement le duc
lie Candallc , et avait ensuite refusé de se battre
ivec lui , sous le prétexte qu'd ^lait son cousin ger-
main. Peu de temps après , cet honorable chef de la
Fronde obtint la survivance de l'amirauté (223) .
Le cardinal de Retz était la l^te de cette sédition ,
dont Beauforl était l'un des bras. Le célèbre coad-
piteur savait manier l'épéc aussi bien que l'inlrigue,
comme on en peut juger par ses piqiians Mémoires,
224 — HISTOIRE DES DUELS. —
et il iiMiésitail pas à dégainer en <!lianip clos pour ses
opinions , comme sous Louis XIII , le cardinal de
Guise prétendait le faire pour ses procès (224).
Vers la fin de 1643 , il s^éleva une violente
querelle entre la belle duchesse de LongueYille^
sœur du grand Condé , et la duchesse de Mont*
bazon , belle - mère de madame de Cheyreuse ,
toutes trois célèbres par les intrigues dont elles
remplirent la cour d^Ânne d^Âutriche , régente du
royaume. Le sujet de celle querelle qui décida la
chute de la faction des Importons, était un billet
doux d^une main de femme , qu'on supposa tombé
de la poche du comte de Goligny , au moment oii
il sortait du salon de Madame de Montbazon. Ce
billet fut attribué à Madame de LongucTilIe , qui
apprit bientôt que des propos peu charitables
avaient été tenus sur son compte , par Madame de
Montbazon. Non contente des excuses qu'elle força
celle dernière à lui faire par ordre de la reine ,
elle exigea du comte de Goligny , son amant en
titre , d^appeler en duel le favori de Madame de
Montbazon , ce célèbre duc de Guise dont j'ai fait
connaître le caractère au précédent chapitre. Le
combat eut lieu en plein jour à la place royale.
Le comte de Goligny blessé mortellement d'un
coup d'épée , mourut peu de temps après. Les deux
seconds , d'Estrades et de Bridieu , se battirent en
CtliMTItl! M. — 22fl
t«tnp« : ce dernier fui bleni. Singulière
iCUalité 1 L'amiral ilc Coligny, la praniére et la
i|)]iis illiiiilrc viirlime du lu Saint- Riirlliél^my , est
•Tgh sous les jriix cl par \v» ordres d'un duc de
risc. A 70 ans dc-IA , c'est encore de In main d'un
itt-Uls de ce duc do (luise, que p^ril, dans un
ici , le petil'ftU de l'amiral de Coli^y .
Madame de Longneville iilturliiiit un grand pris
il ce combnt , dont on dit m^mc tpi'ellc voulut i^lre
limoîn derrière une jalousie. HUv n'en recueillit
^'•ulre fruit , outre la jicrte de son favori , qu'une
idianson fort omére dont elle fut l'objet i> cette
iwxasion , et que rapporte Madame de Motteville
idaiis SCS filr'-rnoires.
■ Le duc de Guise ne fut p.is plus inquiéta pour le
meurtre de Coligny , cptc ne l'avait Hé , sous le
«ègne procèdent , le chevalier de Guise , son oncle ,
|iour celui des deux baroui du Lus. Code violation
édits sÈvèrcs du fou roi Louis \til, qui avait
eoîtié la vie aux comtes de Itoutteviile et de Ros-
madec , domin lieu seulement k quelques informa-
ilinns du Parlement , qui nV-mpi^clu^renl pas le duc
;de GuÎM de se montrer en public cl de suivre , un
I m après , le dxiv d'Orl/'aikS nu siège de (îravclineii.
I D cat vrai que Ricliciieu t-tait mort l'année pré-
eMenlr. Quant ti d'Dsirades, second de Coligny ,
Bridicu, il devint par la suite ma*
\i
226 — HISTOIRE DES DUELS. —
réchal de France. Foyez, à Tégard de ce d^Es«
trades, la note 281 de la page 242.
Maiarin, dont le caractère politique fut la finesse,
comme celui de Richelieu avait été la violence , en
usait à~peu-près de même que son prédécesseur à
regard des duellistes, en substituant toutefois les
procédés italiens à Téchafaud. Il ne s^occupail
guéres de ceux qui se battaient ou s'assassinaient,
que quand sa politique y était intéressée. C^esl ce
dont le comte de Rochefort, qui était passé àscm
service après la mort de Richelieu, son premier
maStre , cite aussi plusieurs exemples dans ses Mé^
moires. En voici qui pourront Caire juger et delà
politique du cardinal , et de la vie privée que
menait encore alors la plus haute noblesse.
c( Le hazard ayant voulu que je fisse coterie avec
le comte dllarcourt, cadet du duc d'EIbeuf d*au«-
jourd^bui , je me trouvai un jour engagé dans une
débauche, où après avoir bu jusques à Texcés,
on proposa d'aller voler sur le Pont-Neuf. Cétaient
des plaisirs que le duc d'Orléans avoit mis à la
mode en ce temps-là. Le chevalier de Rieux , cadel
du marquis de Sourdeac, qui répugnait comme
moi à cette partie , ne fut pas plutôt arrivé sur le
Pont-Neuf, qu'il me dit que pour ne point faire
comme les autres, il nous fallait monter sur le
-ClIAPITRR XX.— 227
[llin ni <1e bronxc , et que de - \ii nous verrions
nt il notre aise ce qui se passerait. AussitAt dit ,
■sitùt fait ; nous grimpons du côté du cheval , et
lus servant des r^nes pour mellre le pied, nous
Pftnes si bien que nous nous assîmes tous deux sur
le cou. Les autres étaient cependant à guetter les
passans, et prirent quatre ou cinq manteaux. Mais
quelqu'un qui avait Hè voR- ayant été se plaindre ,
Ici ftrcIierB vinrent , et nos gens ne trouvant pas la
(partie égale , s'enfuirent d'une grande vitesse. Nous
nvnuliïmes faire autant; mais les rénea ayant cassé
IMS le chevalier de Bicux , il tomba sur le pavé
faidant que je demeurai perché comme un oiseau
ée proie. Les archers n'eurent que faire de lanterne
Bunle pour nous découvrir. Le chevalier de Bieux
<]m l'était blessé , se plaignait comme s'il eut été
(Mi'i de fendre l'âme, et étant accouma au bruit,
ils m'aidèrent à descendre malgré moi et nous
menèrent au Châtelet. »
I ftochcfori raconte ensuite comme quoi, grilccs
^■A l'intervention de Messieurs de Marillac et de
Vibzarin , il réussit h se tirer de ce mauvais pas ,
~ Dmobstant une information du Parlement et après
quatre mois de détention dans un cul de basse fosse.
Quant à Rieux , il avait été assez peu généreux
piiur se tirer d'embarras aux dépens de son compa-
r qui il fit enanrtc de rejeter tout l'odieux
r-
228 — mSTOIRE DFS DUELS.—
de cette affaire. Rochefort alla de ce pas le pro-
voquer en duel ; et comme il ne voulut pas se
battre , il lui donna du plat de son épée. Il s^adressa
ensuite au comte d'Harcourt, qui se rabattant sur
sa qualité lui opposa le même refus. Il s^adjoignit
alors un capitaine du régiment de la marine ,
nommé Des Planches , voisin du comte d^Harcourt,
en Picardie , et qui vivait mal avec lui. Nos deux
compagnons coupèrent ses arbres et dépeuplèrent
toute sa terre de gibier. Rochefort alla ensuite offiîr
ses services à un autre seigneur du même pays,
le comte de Créquy-Bernieulles , contre le marquis
de Sourdeac, frère du chevalier de Rieux, son com-
pagnon à Pexpédition du Pont-Neuf. « Ils étaient
non seulement en procès, dit-il , mais ils se faisaient
la guerre dans les formes. Ils allaient effectivement
en partie Pun sur Pautre , et souvent il y avait
quinze ou seize cents hommes de chaque côté ,
comme si Pon eut voulu donner une bataille rangée.»
c( Je crus , continue notre auteur , que j'en
avois assez fait pour témoigner mon ressentiment.
Etant revenu à la cour, M. le cardinal me demanda
d^oii je venois. Je n^osois pas lui avouer la vérité ;
mais je fus tout surpris quand il me dit que j^avois
bien fait , et quUl m^en estimoit davantage ; cpie
Le Sens de Folleville qui étoit un gentilhomme de
ce pays , lui avoit tout conté ; que je n^avois que
-CHAPITRE XX.- 229
bire (le rien craindre , et qu'iiu etnitrairo je pouvois
tieuiipter sur sa protection. Je le renterciai de sa
ruté, etc. »
liieiilôt après le eomie d'Ifarcourt qui cherehait
K<l0ule5 les oceasiona de se venger de Rocheforl ,
"'fcri dépêtTha un de ces bravaches , comme il n'en
manquait pas alors , nommé Bréanté , proche pn-
reut de ce marquis de Hréaulé , qui sYtait rendu
célèbre par des prouesses extraordinaires en fait
de duel , au siège de i!ois-Ie-Duc , et dont il sert
)wI6 au chapitre ^XIX. Ce Brèauté avait loujnuni
ila bouche le nom de son parent, dont il raeonlait
le* exploits et la mort glorieuse en champ clos ,
Briîoutant qu'on n'aurait pas de lui ai bon marché
^Ht autres Tan far o un ad es semblables. 11 vint donc, de
Il part du comte d'Hareourt, chercher querelle à
fiocliefort qu'il blessa gricTcment. Blcssil- lui-même
jll la cuiâse, il avait emporté IV-péc de sou adversaire
tes son patron , oii cette victoire fut célébrée par
e partie de débauche.
I Rochefurt avait reçu un coup d'épéc qui lui
tjaal traversé les poumons et loul le corps de part
I part, le mit long-temps en danger de mort.
K M. le cardinal, dit-il, qui baissait le comte d'ilar-
lurt et sa maison , parce qu'elle lui avait toujours
opposée , se déclara uuverleniciit pour moi ,
A dit eu présence de tout le monde : que Bréaulé
230 -* mSTOIAE DES DI7BLS« —
n'avait qu'à se bien cacher , ei que , a^il tombdl
entre ses mains , il lui apprendrait h queieHer les
gens de sang froid. Il n'en demeura pas là y et pour
faire dtpil au comte d'Iiarcoart , plutôt que par
Tamiliè qu'il avait pour moi , il m'envoya son chi*-
rurgien et une bourse de cinq cents écus. Des
Planches vint en outre m'annoncer que le cardinal
Pavait fait appeler , pour lui dire de se rendre en
sa terre avec quelques-uns de ses amis, lorsque
la campagne serait finie , et de faire tout ce qu^
pourrait pour faire enrager ce comte ; que Soik
Eminence souhaitait que je fusse de la partie , dèa
que je serais sur pied. En effet, l'étant allé fe«
mercier après ma guérison, il me dit qu^il aerail
bien aise que je fisse ce voyage. »
Rochefort se rendit en effet , après la campagne^
à la terre du comte d'Harcourt, de concert avec
Des Planches qui se faisait escorter de plusieufs
soldats de sa compagnie , pour y recomm^K^^
leurs avanies. Mais il arriva que , dans la route , ila
prirent querelle ensemble en sortant de table , se
jetèrent des assiettes au visage et se battirent à coupa
de poings faute d'épées. On se sépara fort ennenûftw
La partie néanmoins fut renouée bientôt apréa.
Des Planches qui , sous un prétexte , avait envoyé
Kochefort braconner seul sur les terres du comte
d'Uarcourt , se mit en embuscade avec ses gens i
d lui envoya une (lét:liarj!;e de ilvriiére une iiaie.
Il essaya ensuite de s'en excuser, en lui assurant qu'il
BTiiil cru tirer sur les gêna du comte d'Uarcourt.
« J'avais résolu , dit noire auteur , en partant de
diez lui , de tirer raison d'une telle siipercliene
dont je n'étais pas la dupe; mais M. le cardiual à
qui j'avais dit le sujet pour lequel je m'Étais retiré
I H promptement, m'en lit une si expresse d^feuse
^L|Be je o 'osai jamais y contrevenir. »
^B Le cardinal n'avait garde d'exposer ainsi des
I gens d(»ntU savait tirer un tel parti. CeDcsI'laiiehcs
M fut cassé de son réginienl qu'après la guerre ,
pour une querelle avec son colonel. Il reçut alors
<iuroi lui-même, devatitqui il avait osé se présenter,
me verte réprimande et l'ordre de se retirer dana
V M terres, « d'oii il ne sortit, dît RocheFort , que
^nttur venir épouser, k Paris, la fille de M. de Rrillae,
H tonacillcr de la grande Chambre. Mais sa femme
n'syaol pas eu te pouvoir de le retirer de la dé-
bwtrhe, il creva cinq ou six ans après, ïi furee
de boire (225). »
Tels étaient les aigrefins du temps , et le cardinal
Mazarin , leur protecteur. Rouhefort en était le
l> pe , comme les Vitaux , les Lngarde Valon et les
Boulteville sous les trois régnes précédens , comme
le duc de Richelieu, les olievaiiersd'Eon et de Saint-
Georges sous les règnes qui vont suivre. Chacun de
282 -^HISTOIRE DES D0BL6. —
ces personnages semble reproduire très-fidélemeiil
dans son caractère , toutes les nuances des mœurs
du temps où ils s^escrimaient.
Vers cette même époque, eut lieu à Bruxelles, oii
était le prince de Condé , le duel qui coûta la TÎe à
son écuyer Beauvais , à la suite d^une querelle avec
un gentilhomme qu^il avait voulu devancer en moDr
tant un escalier chez le prince. On se battit deux
contre deux. L^un des seconds fut tué , et Beauvais
reçut lui-même un coup de pistolet à la tête , dont
il mourut quelques jours après. Beauvais avait plu-
sieurs enfans d^une femme avec laquelle il n^était
pas marié, cntr^autres une iillc nommée Uraniei
qui épousa en 1682, Louis -Thomas prince de
Savoie , comte de Boissons , fils aine du prince
Eugène-Maurice, dont il va être ci-après parlé.
Le prince de Condé fut voir son écuyer au lit de la
mort , et fit tous ses efforts pour le déterminer à
recevoir un prêtre, et à légitimer ses enfans en épou-
sant sa concubine ; il n^en put jamais rien obtenir.
Malgré de tels exemples dont le bruit retentissait
sans cesse à la cour et ailleurs , le duc de Navailles ,
pair et maréchal de France , et dont un des ancêtres
avait perdu la vie dans un tournoi , avait le courage
de faire alors profession publique de n^accepter
aucun duel. Il raconte lui-même dans ses Mémoires,
-cniPiTnE XV. —
233
Miàf. fil, P^S^ '56, qu'il fut mi jour provoqué
Kpniclanl la campagne de 1654, riYlaiit encore que
Seutcnanl'génèral , par un de ses colléffues, M. de
U Salle , à l'occasion d'une diflicultù de préséance
dans le commandement. Ilrcj'usa, dit-il, pnrcequ'il
imail promis à Dieu , et qu'il ne tioulait pas iléso-
héir aux ordivs du roi.
Y.U 1661 , le m^me duc de Navailles fui encore
^t|rpelè en duel par le prince Eugéne-Miiurice de
SftToie , comte de Soissona , à la suite d'un démêlé
Mr«emi entre leurs femmes , dames d'honueur de
h reine, qui se disputaient l'Iionneur de lui pré-
KDter la chemise i\ sa toilette. Le duc de Navailies,
b^dil Madame de Motleville , i-efusa comme c/iréiien.
^F-'tie roi Jit semblant d'exiler le comte de Soissons.
La femme de celui-ci Était Oljnipe Mancini , nièce
de Mazarin , dont il eut , outre Louis-Thomas ci-
dessus nommé , le célèbre prince Eugène , dont les
talens militaires furent si funestes à la France. Le
plus puni fut encore le duc de Navaillca , qui , après
•Toiressuyé les plus humiliantes djsgriîces, fut aussi
iCurcè , lui et la duchesse , de quitter la cour (226) .
£n 1063, dit le Président Hènault, eut heu le
duel des deux Lafrclte, Saint- Aignan et
Argenlieu; contre Chalais, Noirmoutiers , d'Anlin
et Flamarcns. » Ce duel en cfTct iit grand bruit , et
quelques-unes de ses circonstances peuvent témoi-
»
234 —HISTOIRE DBS DUELS.—
gner du cas qu^on faisait à la cour des édita pro«
hibilifs , depuis même que le Grand-roi y avait mis
son nom. En voici les principaux détails tirés des
Mémoiivs de Rochefort.
<( M. de La Frette atné était au bal au Palak
royal. En sortant, il poussa M. de Chalais, à qui il
en voulait pour une maîtresse. S^ils avaient eu des
épées , il serait arrivé du désordre ; mais chacun
étant habillé pour le bal , ils nouèrent la partie pour
se battre le lendemain trois contre trois. Le roi en
fut averti , et envoya le chevalier de Saint-Aignen,
pour dire à La Frtlle qu^ii lui défendait les voies
de fait , et que s^il passait outre , il lui ferait couper
le cou. Saint-Âignan qui était son cousin germain ^
rayant trouvé , lui fit son compliment ; à quoi
La Frette répondit quMl était trop de ses amis pour
rompre une partie qui était faite, ajoutant qu^il
valait bien mieux qu^il en liA lui-même, et que
Chalais trouverait bientôt un homme à lui donner.
Saint- Aignan , sans considérer qu^il venait de la
part du roi , accepta la partie et Ton manda à
Chalais de chercher un homme de plus. Les huit
combattans furent La Frette, Ovarti son frère cadet,
depuis appelé d^Âmilly qui était lieutenant aux
gardes, le chevalier de Saint- Aignan, le marquis
de Flamarens d^une part ; et d'autre part, le prince
de Chalais , le marquis de Noirmoutiers son beau^
»
frcre, le mar(Hii8ii'Anliii,lrèredeM. de Mutilespan,
d le vk'omte d'Argeuliew . Le combal ne devint
fuDcsle qu'au marquis d'Âiilin , qui fut lue luut
raîde. Le roi Fui dans une fuiivuac colère , surtout
contre le cltevalier de Siiiut-Aigiian qui était aussi
plus k blâaier que les autres. Cependant leur sort
fut tgai ; car il fallut i]uMs aongcassent lous à quitter
le royaume (327).
Le duc de Saint-Aignan , quoiqu'il fût très en
(àTcur , ne voulut rien faire pour son fds , disant
qu'il n'avait que ce qu'ilmùrilait. Les deux La Frelle
qtii s'étaient réfugiés h Rome , furent plus heureux.
Eo 1670, la duchesse de Chaulnes pria son mari
tfâ y était ambassadeur , de faire une démarche
^rc» du Pape en leur faveur, « Clément X , dit
Saiol-Simon , s'entremit pour solliciter leur grAce
de Louis XIY, avec offre de le relever de son
lenncnt contre les duellisics. Le roi n'y pouvant
«miscntîr pour les conséquences, voulut bien néan-
IBoins les laisser revenir à Paris, it la charge do
changer de noms. Waîs un jour il arriva que
Mousicur, frère du roi, mécontent qu'on eût fouillé
tout le Palais royal , pour rechercher son premier
maître d'hûtel à l'occasion d'un autre duel, s'en
plaignit amèrement , ajoulant qu'on n'y regardait
de si prés pour les deux La Frelte, dont on
Idénut le séjour à Paris. Le roi rt'pondil gravement
23ft — HISTOIRE DBS DUELS. —
que la chose u^étail pas possible, que néannuMiii îl
s'en ferait informer. Il ordonna en effet qii^oa les
reclierchàt tous deux , mais après leur avoir fait
donner avis de disparaitre pendant les recherches ,
pour revenir aussitôt après. Mémoires de Sainl^
Simon, Tom. J.
Voltaire s'exprime ainsi dans le Siècle de
Louis XIF'y au sujet du duc! du chevalier de La-
Irette avec le prince de Chalais : « Ce fameux
combat, qui eut lieu en 1663 , fut ce qui détermina
Louis XIV à ne plus pardonner. Son heureuse sér
délité corrigea peu-à-peu notre nation et même
les nations voisines qui se conformèrent à nos sages
coutumes , après avoir pris nos mauvaises. U y a
dans TEurope cent fois moins de duels aujourd'hui
que du temps de Louis XIII. » Il n'y a de vrai dans
ce passage que la remarque qui le termine. Louis XIH
avait-il donc épargné les édits contre les duellistes ?
£t en fait de sévérité, Téchafaud de Boutteville et
de Rosmadec n'était-il pas autrement significatif que
le court exil des deux La Frctte ? Pourquoi donc
la sévérité de Richelieu aurait-elle été moins heu*
reuse que celle de Louis XIV ? L'effet se produitrîl
en sens inverse de la cause ? Si Ton a vu moins de
duels sous Louis XIV que sous Louis XIII , il y en
avait eu moins sous Louis XIII que sous Henri IV ;
comme il y en eut moins ensuite sous Louis XV (]ue
^ aUFITKB XX. — 2S7
Lrait XIV, €t MNit Louit XYI qne «mm
IxNnt XV. Cetl im progrès dont h canN sHdenliEe
«Tcc 1a filirdie graduelle de la raiaon huaname. Od
Terra cependant que la tévérité suÎTÎt tous ces dÎTcrs
régnes , une progretâon également décroisunle.
Quoique Voltaire, ainsi (pie beaucoup d'autres
Ustofiens, aient représenté Louis XIV comme ayant
«i imposer aux duellistes par la sagesse de ses édits
d sa fermeté à y tenir la main , il serait difficile de
ciier d^autre exemple de sérérité sous son règne ,
fat rezécution à Toulouse, en 1689, d^un marquis
de La Donie , condamné pour avoir tué déloyale-
Baenl en dud son beau frère. Si cette rigueur fit
ipidque effet sur le public , elle n'en fit guères sur
le patient. Comme son confesseur l'exhortait k de-
aModer pardon à Dieu du crime qu'il avait commis:
Stmdis I mon père, lui répondit-il , appete»^vùus
tfime le plus beaufait d'armes de la Gascogne ?•••
On ne saurait pourtant méconnaître que cette
■èccMité pour les duellistes de se cacher , et quel-
fois même de se condamner k un exil plus ou
long, n^ait produit quelques bons effets; ne
fat-ce cpi'en les obligeant à prendre des précautions
et en les empêchant de braver trop ouvertement la
BMirale publique. Mais il y avait de la part du roi
trop d^négalités et trop peu de franchise dans cette
sévérité à laquelle il voulait faire croire, pour qu'on
238 — HISTOIRE DES BUVL^w -^
ait pu avec justice lui faire honneur de résultais
qu^il n^a réellement pas obtenus. De nouveaux
exemples d'une date postérieure au dud des La
Frette , vont le démontrer suffisamment.
En 1689 , eut lieu un combat assez célèbre que le
Président Hénault a noté dans son Abrégé clirono-
logique, celui des comtes de Brionne et d'Uautefort.
Le dernier avait provoqué le premier par le motif
qu'il refusait d'épouser sa sœur, après avoir paru la
rechercher en mariage. Tous deux furent blessés.
Le Grand-Prévôt informa. Le Parlement évoqua
TafTaire ; les deux accusés tinrent prison quelque
temps ; mais tout se termina sans autre dommage
pour eux. âicmoùvs de M.^ de Lafayette^
Saint-Simon parle aussi , dans ses Màxnoires p
Tom. ly II cl III y de diverses affaires d'honneur
qui eurent heu vers la fin du règne de Louis XIV^
et dont les suites furent toujours à-peu-près lea
mêmes.
Lors du célèbre démêlé qui éclata en 1694 , rela-
tivement aux préséances des ducs et pairs , les duce
de Luxembourg et de Richelieu se lancèrent force
factums à la tête ; puis quand on fut las de grif-
fonner , on se provoqua. « RicheUeu , ayant ren*
contré au palais le duc de Luxembourg qui était
capitaine des gardes , fut droit k lui , et lui dit qu'il
ne le craignait ni à pied , ni à cheval , ni lui ^ uî sa
— cHAPirnE \x. — 239
lequelle, ni h la cour, ni h la ville, ni m^tnc à
l'irmée , quand bien mfmc il irait , ni en aucun lieu
du monde. » L'afTairc bc termina par des excuses
réciproques et la rétractation des J'aciums.
Il En I69S, ilarrivali Mcudon, eliezleDaupliin,
une scène fort étrange. On jouait après souper, et
noDseigneur était allé se coucher. Il survint un
i cmip qui occasionna une dis]nile entre le prince de
»Conti et le Grand-Prieur de Vendôme (arriére petit-
É) Ak Henri IV et de Gabrielle d'EsIrèes). Celui-ci
f l'iTant pris avec aigreur, s'attira une cruelle répartie
■iti le prioce de Conti (anrail k bout portant et sa
fiiiélilé au jeu , et son courage h. la guerre, l'un et
liutre à la vérité fort peu nets. Là-dessus le Grand-
Prieur s'emporte , jette les cartes et lui demande
ulîsEBction t'épée k la main de celte insulte. Le
prince de Conti , d'un sourire de mépris , l'avertit
qn'il lui manquait de respect , mais qu'en même
l«nps il était facile k rencontrer , allant partout et
loujouraseul. L'arrivée de Monseigneur, toutou en
ï de chambre , que quelqu'un alla avertir ,
k tous deux. Il envoya aussitôt rendre
''fwnpte au roi de ce qui venait d'arriver. Le lende-
main le Grand-Prieur fui envoyé à In ISasUlIe, et
u'ra sortit qu'à la cliargc de faire ses excuses au
pfÎDCc de Conti. » Celui-ci usait du privilège île
prince, comme le comte de Soissonssous Henri IV,
J
240 ^ HISTOIRE DES DT7ELS. -^
« toutefois la qualité de légitime ches un prince ,
peut lui donner droit d^insulte envers celui qui
ne Test pas.
L'année précédente , 1697, Emmanuel-Maurice,
fils aine du comte de Latour d^Âuvergne , lieu-
tenant-général, et lui-même Grand^croix- profite
de Tordre de Malte , avait eu une rencontre aree
le chevalier de Caylus , nom célèbre en eaciime.
u La querelle , dit Saint-Simon , était venue pour
du cabaret et des gueuses. D^ Auvergne acheva de
se déshonorer en courant éperdu par les rueS|
Tépée à la main , dont il s'était misérablement servi.
Caylus , qui était fort jeune et s^était bien battu , se
sauva hors du royaume , et le comte d^ Auvergne
profita de cette occasion pour que son fils n^y rentra
plus. » Il fut pendu en effigie à la Grève, et moiimt
peu d'années après. Caylus fit fortune en Espagne,
et ne revint en France que sous la régence.
c( £n 17C0 , le roi ordonna que les comtes d^Uiés
et d'Albert , pour s'être battus contre les comtes de
Bantzaw, danois , et de Schartzcnberg, autrichien,
se remettraieiil à lu Conciergerie : ils prirent Itt
large. Barbexieux envoya courre après son beau-
frère qui , sur sa parole , se remit. Le comte d'Al-
bert ne revint ({ue long-temps après dans la même
prison. 11 fut cassé pour sa désobéissance , et le roi
voulut que Monseigneur disj>osat de sQn régiment
— ntti-iTiiE ST.— 241
df rfrajfon*. A la fin ils sortirent l'un et l'autre ;
nuis d'Albert ne piil Jninais être rétabli. 11 /tait plus
■pie bien avoi- Madame de Luxembourg ; Ranliaw
niiwi. lïc-lii vint la querelle dont la raison fui açue
ilclnnl le monde et fit tm Mrange bruit. »
^iiil-Sttnon raconte encore , à la date de 1709,
li' Irait suivant, l'un des demien de ce régne et
)Kiit-étre le plus singulier en fait de duel. « M. de
lluÎMenil , éruyer du roi , accompagnant S, M, dans
snii voyage A Nancy, surprit un individti trichant
MJcu ; il le démasqua en pleine compagnie. Celuî-
ci en demanda raison. Boisscuil lui répondît qu'il
w «e battait pas arec un fripon ; — Celn peut éire ,
f»pli(|Ufl-t-il , mais je n'aime pas qu'on me le dise,
Ilsaftérent auMilàt sur le terrain. BoisscuJly rem-
Itourîa deux coups d'èpÉe de l'un desquels il pensa
mourir. Le joueur prit la fuite. Personne n'ignora
f cite aventure. Le roi qui la sçut des premiers, par
himlé pour Roisseuil , la voulut toujours ignorer, cl
jintia blessure pour ime maladie ordinaire (228).»
Je renvoie aux Éclaiitiisemens hisioriques la
plaisante histoire dn duel de Lafontaine avec un
•iciK capitaine de dragons qu'il croyait l'amant de
M femme. Ce trait n'est pas le moins original de
oetn qu'on remarqiic dans la \ic de l'auteur de
tsnl de naÏTCT et spirituelles êpigrammes contre In
(223).
242 *— HISTOIRE DES DUELS. —
On trouvera le récit dHui grand nombre d^autres
affaires d^honneur dans les Mémoires du temps,
et notamment dans ceux d^Artagnan , officier des
mousquetaires , qui nous a laissé aussi ses Cote-
fessions comme le comte de Rochefort , dont il eut
plus d^une fois Thonneur d^étre le rival ou le com-
pagnon d'aventures (230) .
Telle fut il Tégard des duels la politique réelle de
Louis XIV y et la manière dont il fit exécuter sei
nombreuses ordonnances. Son indulgence se signala
même envers plusieurs femmes qui jouèrent le rèk
de duellistes, comme on le verra au Cbap. XXYUI.
Jamais sous son règne un officier n^eut impunément
refusé un duel ; jamais aucun chef militaire n^eot
souffert qu^on s^abstint d^en proposer , dans tous les
cas où Fusage avait consacré cette forme de répa-
ration. L^officier chassé du régiment aurait çu
tout-à-fait mauvaise grâce de se plaindre en couTi
où ses doléances auraient été fort mal reçues; d
tout cela nonobstant les édits et ces scandaleuses
gratifications promises aux délateurs dans le code
pénal militaire, y. ci-dessus y Pag. 219 e/ 220.
Du reste cette extrême susceptibilité , déplorable
source de tant de querelles entre les particuliers , se
rencontrait jusques dans les relations des souverainSi
et pouvait s'autoriser de leurs exemples. On vit
'CHAPITRE IX. — 243
menacer l'Espagne d'une guerre pour
nccs diplomatiques, et exiger de la cour
Rome les plus liumilimitcs satisfactions pour une
Tclle de laquais (231).
La guerre est le duel des rois, avec celle difTé-
lieu d'une victime , il lui faut des héca-
ibes ; que les champs clos sont des provinces , et
le le peuple, comme ces C/iampions gagés du
lyen Age , se bal souvent pour des intérêts qui ne
it pas les iriens. En duel comme h la guerre , il
>mve ordinairement que le vainqueur n'est guéres
moins k plaindre que le vaincu, Lnuis XIV en £l
PexpérieDce. Son règne , comme celui de la plu-
part des conquérans, fut partagé À-peu-prés par
^ales portions entre les succès et les revers. Ses
furent heureuses tant qu'il combattit pour
ler des limites naturelles à la France , qui jouit
mcore aujourd'hui du fruit de sesconqui^les. Mais
Il fortune commença k lui devenir infidèle , quand
il tira l'èpée pour abaisser les Pyrénées. Son règne
commencé dans la gloire s'éleignil dans l'humilia-
lion. Le prestige de l'autorité s'était évanoui avec
relui de la victoire. Quand le Grand-roi mourut ,
l> Monarcliie parut descendre dans le sépulcre avec
lui. Ce peuple qui tremblait <i aon aspect insulta son
cercueil; el le Parlement , où il entrait le fouet à la
main, s'en vcugca sur son Icslanu'ul.
Linnea
Hirionne
CHAPITRE XXI.
Duels au XVIII. • fièole. — Régence. — Règne de
Louis XV. — Dernier édit contre le» duels. —
Principaux duellistes. — Tolérance cnnssante. —
Révolution dans les mœurs. — Influence de la
philosophie.
Un monument qiie n'ont arrosé ni les larmes, m
le sang des peuples y a été éle^é par le siècle de-
Louis XIY dans cette littérature admirable , magni-
fique , mcréèe , qui a mérité à ce prince , plutAt
que ses conquêtes, le surnom de Grand , et qui tens
toujours son plus beau titre de gloire. Ces (raifiibles
triomphes ont illustré la France sans TappauTrir ,
et les reyers de la fortune , qui ont renversé nos
trophées guerriers , n^ont jamais flétri nos lauriers
littéraires. Le Génie des lettres , des sciences et des
arts , bien plus sûrement que celui de la guerre , a
conquis à la France le premier rang parmi les
nations. L^Europe , qui a toujours repoussé la do-
mination de nos armes , s'est depuis long-temps
soumise à notre influence civilisatrice. Louis XIV
:.- 245
^vait pW-parée è devenir française «nus led pat
pgaiitcsqucs de NnpoUon , rommu l'Asie était
■ devenue grecque dnns la course d'Alexandre (232) .
Le 18.* siède fui une époque de criticisme à la
foispoUlique, moral et religieux. Pendant son cours,
Ici'orpssocialsubil une complète dissolution. C'était
■ opérattofi préliminaire d'une rénovation dont Is
terme marqué dans les dé-crets providentiels était
Dct:i>nipli ; c'était le préalable nécessaire d'une ré-
[»»tne radirale , comme la refoule sert à dég.içer ui»
uiclil précieux des souillures qui , pendunt un long
uiBge, en ont terni Téclot.
Celle époque ne fut qu'un pénible el laborieux
1 nTinteoietit ; et si on la considère indépendamment
L de SI r£sullats , on pourra dire qu'elle est la plus
Idffdorahle de nntre histoire. Quand clic eommcnça,
B Inng despotisme avait iibiUardi toutes les âmes ;
0 flail las de contrainte, r)LS3a.sié de grandeurs,
de gloire et on uc respirait plus que le
. L'exemple de Pliilippe d'Orléans, régent
b royaume pendant le iniuOrilé de Louis XV,
■ ttlraiaa toute la eour dans cette voie funeslc.
Louii XIV avait appelé sou neveu , un fiuij'aj-on de
■fices. Celui-ci o"o rien oublié de ce qui pouvait
jimifier un tel surnom. A la gal«ntcrie majestueuse
fi polie de l'ancienne coitr , il fit suceédcr une
drbuidie cynique. Le libertinage ne fut plu» un
246 — HISTOIRE DE5 DUELfl. —
ffcandale , mais une mode ; on tira vanité du vice et
on rougit de la pudeur comme d\m préjugé.
Insouciant par caractère , voluptueux par prin-
cipes , le Régent jouissait du présent sans soucis
pour Tavenir. Simple dépositaire du pouvoir , il
lui importait peu qu^il s'altér&t moralement dans ses
mains , pourvu qu^il en conservAt le mécanisme
matériel au jeune enfant dont il exerçait les droits.
Il s^habitua donc à fermer les yeux sur tout ce qui
ne blessait pas directement son autorité. Ainsi on le
vit s^affranchir à Tégard dos duels de ces faux sem-
blans de sévérité que, pour Thonncur des principes,
affectait Louis XIV. La tolérance devint plus franchci
et ne chercha plus à prendre le masque d'une feinte
colère. On se trouva donc beaucoup plus k Taise
pour se battre. L'exil volontaire ou forcé ne fut plus
à craindre. Il ne resta que le Parlement qui continua
d'informer pour la forme , mais avec lequel il fut
toujours assez facile de s'arranger.
La publication récente des Soui^enirs de la mar-
quise de Créqui , a jeté un jour nouveau sur cette
histoire du 18.*^ siècle, sujet qu'on croyait épuisé.
Les citations suivantes sont le tableau le plus piquant
qui puisse être présenté de l'esprit du temps , de la
poUtique du Régent sur les duels , et de la singulière
manière de procéder des juges du Point d'honneur.
■BE sxi. — 247
Il La fermel6 rigoureuse cl salutaire àe Louis XIV
lavutsibienamorli ta fureur des ttucls, eu arr<!lant
I et torrent de sang qui, depuis les derniers Valois,
I trait entraîné dans Kablme une si grande partie de
ftliiiobletse de Franre, qu'on n'avnilpas nui parler
d'un seul duel depuis dix-sept ans (233) . »
a Six semaines ou deux mois penl-étre après la
mort du roi , on apprit que deux ofReiers aux
Girdes françaises Tenaient de s'escrimer impcrli-
Inemmenl sur le quai des Tuileries, au-dessous de la
teiTuse , en plein jour cl en plein soleil d'Ht. Mois
«HDine il se trouva que e'étail deux jeunes gens de
■mille de robe, IM.Ieducd'Orl^ansselrouvasibien
Mp^tré dans ses obligations et ses combinaisons
piËtiques envers Messieurs du Parlement , qu'il se
eonlmU de les renvoyer du r/rgiment des Gardes et
de leur faire passer quinie jours en prison, 1,'nn
kfeux était M. Ferrand dont le père était conseiller
i la première des Enquêtes ; et l'autre un fits de
H. Girardin , l'intendant de manne à Toulon,
raurai l'occasion de reparler de celui-ci qui fut
Uessé grièvement ; et c'était pour la possession d'un
cbal d'Angola qu'ils s'étaient battus J> Pi-pée. M. le
Régent se les fil amener pour les chapitrer ; et vu le
beau sujet de la dispute , il leur dit qu'ils n'auraient
â s' attaquer qu'avec les ongles. Le tribunal de la
iConi>£t8i>lie ne s'tlail pas soucié d'inter\eiiir dans
248 ^ HISTOIRE DES OUEL8. —
leur aiïairc , sous prétexte que Tun de ces deux
assaillans u^était pas gentilhomme , et qu^il aurait jhi
décliner la juridiction des justes du Point d^honneur ;
ce qui n'était guèrcs à supposer , et ce qui fit penser
que la judiciaire des maréchaux de France avait
été rouilléc par le défaut d^excrcice (234) . »
c( Si nous savions combien la N oblessc des autres
pays nous envie cette juridiction de nos maréchaux^
et combien les étrangers admirent cette institution
du Point d'honneur qui n'existe qu'en France^ nous
en serions plus orgueilleux que de leur avoir fourni
PEncyclopédic et Vllonnne aux 40 ècus. Cette
autorité, qui ne s'étend que sur ki Noblesse, a son
origine dans la souveraine juridiction que la Gon-
nétablie exerçait jadis sur lesjugemens par chain*
pions — Kcoutez le récit d'une autre belle affaire
qu'on plaida l'année suivante à la Connétablie. »
c( M. l'abbé d'Aydie, qui n'avait d'un abbé que
le costume et deux prieuis^ commandataires , avait
reçu d^un jeune commis des finances , un coup
d'épée dans la cuisse. C'était chez une demoiselle
de l'Opéra. Madame la duchesse de Berry , fille du
Bégent , lui fit quitter le collet pour la croix de
Malte. On a parlé de lui pendant long-temps sous le
nom du chevalier d'Aydie , et puis sous celui du
comte de Riom ; car c'est un même personnage et
le même favori de cette folle princesse (23>).
I poursulLe ,
Depttift qii'il avait repris l'épée , le n
fuinDccs ^-hiit L'Oiiliimtillcmcnl h i
Tuukùt loujtiuTB le faire s'aligner. IM. d'Ajdie se
Ijattil \oloiitten> quoire uu cinq fois ; mais la du-
«-licsa«deBcrry liitil par en prendre de l'iiiquiÉtude.
J'^ilc fit déitoDcer la querelle au Point d'iionnour, et
voilà ces deux champions assignas devimt la C<m-
D^taUle. Celait le mart-chsd de Chamilly qui prë-
sidait le tribunal; et tout aussitùl qu'il eut appris
cjiie TadvcrBaire du clievaliejr n'était pas gentil-
iHHUmc, il s'écria : <i Que diable vicut-il faire iti?..,
Ll fiQurt/uoi /loas oftpelle-t-il Monseigneur}.., Est-
te ifiic lu pentes que nous serons ton jiiga? Est-ce
Tue tu nous pivnds pour un évctjae ou pour un
g ganle des tcaaujc ? Nous ne voulons pas que tit
^B tiwti ojtpeUes Monseigneur. ->.. El puis lu nous
^H. tieiu fUre que lu t'appcl/es Boulon. Est-ce que la
f^f prkrnds te moquer du monde?... — Et le voilà
il«nt une abominable colère, paroc que ce jeune
thumuie avait pris la liberté de l'appeler Monseî-
peur, el qu'il se domiait des airs de s'appeler
l^uloD. Il ne sortit pas tie-là. Mais il est bon de
■ovDÎr qi¥e cette qualification de Monseigneur n'est
iiTorilée par nous aux maréchaux, que pan'e qu'ils
■ont les yigea de la Noblesse, et que les uncieiia
a'iioiaieDt pas ii se la voir dunuer par des roturiers.
Jl'iuub dirai du reste , et saut respect pour le bAtuu,
250 — HISTOIRE DES DUELS. —
que le maréchal qui se montrait si pointilleux , ayait
nom Bouton de Chamilly. »
a Le tribunal eut la malice de recommander au
père de la duchesse de Berry , de vouloir bien faire
emprisonner Tamant de sa fille au fort de Ham , et
par lettre de cacliet , afin de lui apprendre à se con-
former aux édits ; et pour deux ans , portait la ce*
dule, attendu qu^il avait accepté de se battre avec un
roturier. La duchesse de Berry lui fit avoir sa grâce
au bout du semestre. Le commis avait été renvoyé
libre comme le nuage , parce qu'il n'était pas justi-
ciable du Point d'honneur. Mais la princesse du
chevalier d'Aydie le fit traquer , claquemurer ,
poursuivre par les gens du Parquet , et la méchante
ne prit nul repos qu'elle ne l'eut fait pendre ; ce qui
s'effectua le 19 juin 1719 , à l'horreur , au scandade
et à l'animadvcrsion de tout Paris. » Sou%^nirs de
MJ^ de Crcquiy Tom. I, Cliap. X.
Un mois après , jour pour jour , cette Messaline
expirait elle-m(?mc h l'âge de vingt-quatre ans
Voilh donc quelle était encore au 18,® siècle la ma-
nière dont on entendait les lois sur le duel ! Entre
l'échafaud de Boulle>ille et cet atroce gibet élevé
par la fille du Régent à la vengeance d'un amant ,
il y a toute la distaïK^e qui sépare le grand nom d'un
Richelieu, d'avec celui d'un Pliilippe d'Orléans.
Quel progrès depuis un siècle ! . . .
.- 251
1717, eut lieu un autre duel qui ne (ît pas
is de bruit que celui de Fcrraiid et de Girm-diii.
r Coiiladi'3 ol Brillae, dit Saint-Simon, ne pou-
raipnl 8c souffrir Vua raulre. Le samedi 1 2 juin , ils
e r«»direnl dan» une nie iiihabilùe prùa l'orangerie
«les Tuileries, et 1^ se ballirenl bel et bien. Brillae
Fui légèrement blessé et disparut aisément. Contadcs
ÉTut dangereusement, et il fallut le reporter ehe»
. Ce fut un grand vacarme. On les eiiIcTa, on
Jia Conlades dans le fonds de Thùlcl de Nuailles.
(Il se mil en compagne pour lui. Les Orammont,
Noailles, les Villars, le premier Président et
■n d'autres en Tirent leur propre affaire; et le
Bégenl n'ayait pas moins d'envie qu'eux de les ca
Urer. II encoàtadu temps, des peines et de l'argent,
cl l'nflaire s'en alla en fumée. A la fin de tout,
Conlades et Brillae parurent une fuis au Parlement
pour la forme , et il ne s'en parla plus. » Comme
d'F,slrades qui avait été le second de Coligny, ce
Conlades devint aussi maréchal de France.
ILes choaes se passèrent encore de m^mc k l'égard
de deux autres seigneurs, Jonzac et Villetle, frère de
U comtesse de Caylua , qui s'étaient battus en pleia
jour sur le quai des Tuileries. Ce dernier quitta le
riiyaurae , mais l'autre en fui quille pour se caciier
liirlquc temps, fut absous cl ne perdit point soB
rniplui à la cour. Aient, de Saùu-Siitioti , 'font Xf^m
232 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
Duclos s'exprime ainâ dans ses Mémoires sea^ets,
sur les senlimens du duc d^Orléans à Tègard des
duels. « Si le Régent eut eu dessein de maintenir
les lois et le bon ordre, il aurait profité du duel entre
Ferrand , capitaine au régiment du roi, et Girardin,
capitaine aux (lardes, pour faire un exemple ; mais
il se contenta de leur faire perdre leurs emplois.
Sans s'expliquer trop ouvertement , il insinuait </ue
les duels étaient un peu tivp passés de niode (236).»
c( L'habitude d'obéir sous Louis XIV , dit Vol-
taire , fit la sûreté du Régent et la tranquillité publi-
que. » Mais celui-ci ne comptait pas d'une manière
trop absolue sur ce moyen passif de gouyemement
Il sut prendre encore d'autres précautions contre
l'active mobilité du caractère national : il lui
donna pour aliment l'agiotage , comme il lui avait
donné pour distractions des orgies. L'Ecossais Law
de Lauriston qu'il mit à la tête des finances , avait
commencé à se faire connaître comme habile duel-
liste^ avant les exploits d'un autre genre qui lui
valurent une si triste célébrité. Néanmoins la paix
régna dans la rue Quincampoix où il avait établi ses
tripots. On n'y vit pas de duels ; mais il arriva qu^un
jour la sûreté en fut compromise par un assassinat.
Entre des joueurs acharnés, le poignard est une
arme plus logicpic que ri'pée. Il se trouva que Tua
drs mcurlii
beau
rs imil le t'omte ilo liorn , ji-une el
r belge, (ipparlennnt pnr iillianre niix
premières maisons de la cour el mùmc ii celle du,
Jt^gfrnl , qui n'en fut pas moins inexorable en celle
«,-irconstance. It r^sisla qux actives sollicitations des
personnages les plus élevés en crédit et en dignilé,
miiiquels se joignirent des dames de haut parage,
clonl <|uelques-unes traitaient le comte de liorn en
fiiiiori. La peine de la roue tut prononcée contre
!r coupable , et le duc d'Orléans ne consentit m^e
pas, malgré les clameurs de tant de familles qui se
cnnaienl déshonorées par cette condamnation ,
it ngner une commutation de cet ignominieux
supplice.
On 8Taîl cru jusqu'à présent que Philippe ne
^B l'était montré aussi inflexible en cette occasion ,
^H ijucpour l'amour de Laiv, et dans riutérét de sa
tH^ bloque. Mais la marquise de Créqui , parente du
nmdamné , el l'une des illustres solliciteuses dont
le wle avait si mal réussi , a donne dans ses Souvenirs
Va autre motif k cette sévérité qui nVtail pas dan»
I» habitudes du Régent. Suivant elle, le corote de
Hom , qui n'aurait fait que tuer dans une rixe un
luiT qui l'atait volé , avait ^tÉ sacrifié au ressen-
timent personnel du duc d'Orléans qu'il avait osé
hnver dans la circonstance suivante. « Celui-ci
'Vanl un jour surpris en lèle h tête aver la comtesse
254 — HISTOIRE DES DVELft. *^
de Parabére , Tune de ses favorites j — Sortez ,
Monsieur, lui dil-il , iVun ton méprisant : — Nos
ancêtres auraient dit : Sortons, lui répliqua fière-
ment Tamoureux jeune homme ; et dès ce moment
là y sa perte fut assurée (237). i>
a La fureur des duels, dit encore M"^^ de Créqui,
était si fort encouragée par la Caiblesse et rincurie
du duc d^Orléans , qu^on n^entendait parler que de
jeunes gens tués ou blessés ; et toutes les lamîUea &ï
étaient dans Tinquiétude et la désolation. La nôtre
eut k regretter la perte du chevalier de BreteuS
qui était le plus aimable jeune homme du monde,
et qui fut tué par un de ses camarades au régiment
des Gardes. Grêlait encore un des amis les plus (avo-
risés de M.°>® de Parabére, et Ton ne saurait ima-
giner combien elle en avait perdu de cette ma-
nière. » Souvenirs, Tom. I, Cliap. XV.
Louis XY reçut à sa majorité des mains du Ré-
gent un sceptre souillé et une couronne flétrie.
Il ne trouva pour composer sa cour que das roués
et des femmes perdues , et pour guides de ses pre-
miers pas que des professeurs de débauche. Placé
dans de telles conditions , le jeune monarque aurait
eu besoin d^une vertu surhumaine pour échapper à
une influence aussi délétère. Un assez bon naturel
Teu préserva d^abord pendant quelques années.
— CHAPITRE XXI. —
I règne eut d'heureux cnmmem
2r«>
qui lui
il décerner le litre de Bieit-Aimv. On n'aurnil
alors que celui qui s'anuonçiiil comme le
'Hus de son siccli; , en deviendrait le Sardanapalc.
Dans la première année de sa majonlè, Louis XV
loiivcja les aneiens édits cotilre les duels par
le déclaration du mois de Tivricr 1723. L'article 6
>rlait qu'en cas de prévention de duel par uoto-
:té , nul ne pourrait être renvoyé absous qii'aprcs
plus ample inrormé d'un an, pendanl lequel
temps il dcTaîl garder prison. D'après l'article 8,
lout gentilliomme qui en avait frappé un autre ,
devait être puni de dégradation d'armes et de no-
cl de quinze ans de j)rigon L'article 9
si conçu :
« Nous jurons et promenons en foi el parole de
roi qu'il ne sera accordé aucune rémission , pardon
ou abolition pour crime de duel. Uéreudons Irès-
npreasémeni h tous princes et seigneurs près de
nous, d'employer aucunes prières ou sollicitations
en TaTCur des coupables du dit crime , sur peine
d'encourir notre indignation. Protestons de rechef
que , ni en faveur d'aucun mariage ou uaissance de
princes ou princesses , ni .pour queiqu'autre consi-
d^alion , nous ne permettrons sciemment être
expédiées aucunes lettres contraires k notre pré-
Knie volonté, etc. , elc (238).
256 —HISTOIRE DES DUEtS. —
Le roi avait , selon Tusagc , juré la m^me chose
il son sacre. Ce serment fut avec tous les autres en-
registré par les historiographes ; mais on chercherai!
vainement des traces de son eiEcacitè dans les
archives des cours de justice.
Néanmoins , le Parlement de Grenoble , par
arrêt du 16 septembre 1769, condamna à la peine
de la roue un conseiller de cette cour^ nommé
Du Chelas, pour avoir tué en duel un sieur Lambert
Begfiin, capitaine au régiment de Flandres. Maû
cette condamnation prononcée par contumace,
ne fut exécutée qu^en effigie. La mémoire de Fho-
micidé fut supprimée par le même arrêt. Tout cela
ne faisait de mal à personne. Le bras delà justice
ne s^appésanlit sérieusement que sur le malheuren
domestique du conseiller qui avait assisté son
maitre. On le marqua sur Pépaule et on l'envoya
expier aux galères cet acte de fidélité.
Pendant cette période honteuse , où la débauche
ennoblie par l'exemple du Monarque secoua toute
pudeur et toute réserve , où Ton vit la galanterie
dégénérer en crapule et les prostitutions dorées de
la cour surpasser en eifronterie celles des rues , les
querelles eurent souvent pour sujet des roueries de
boudoirs et des intrigues de ruelles. QuMmporte
qu^un sang peu généreux ait parfois teint cette boue ?
— cHApmiE sxi. — 257
rCewrnil salir sa plume que d'es&aycr de la remuer.
Lldnns un toile sur ces Uiqjitudes; de pareils ta-
l'McBux sont indignes delà gravilé de Phisloire.
Le duelliste de celte époque dont la haute pou-
I tion cl les belles manières allircnt le plus les regards,
I c'en le duc de Richelieu , le roué par excellence ,
I b corrupteur de Louis XV , qui recul de aa main
f h première et la dernière de ses favorîtea.
Drà les premières aimées de la Régence en 1716,
L i yàne âgé de vingt ans , Kichelieu sVtail battu
[ «notre le comte de Gacé , fils atné du maréchal
[ et Matignon , k la suite d^utie querelle au bal
fc l'Opéra. Ils mirent i'épée h la main en pleine
nie,iou8 un réverbère : tous deux furenl blessés.
U Parlement informa; mais le Régent, afin de
kl ioustrfûre k sa juridiction , a^empressa de
l« eoToyer pour quelques jours à la Bastille.
L'affaire fut terminée par un plus ample informé.
[ Mmoiivs de Sain l -Simon , Tom. XIF , et de
[ Bichilieu, Tom. 1.
" M. de Richelieu , dit la marquise de Créqui ,
I M mourait d'enyie de chercher noise ^ à propos
I f une challemite , au comte de Bavière , colonel
u «crince de France , tué depuis d'un coup de
I cuon k la bataille de Laufelt, en 1743. Trouvant
I ^ la conduite du Régent n^étail pas découra-
[ |nul( , il allô s'élablir , eu grand équipage , sur la
17
258 —HISTOIRE DES DUELS.—
route de Paris à Chantilly, par où deTait déboucher
M. de Bavière ; et comme il avait eu grand soin de
faire encombrer et barrer la route par ses voitures ,
il en résulta des querelles entre les valets. Les
maîtres descendent; on se parle avec hauteur; on
se provoque , et voilà nos deux rivaux Tépée à
la main. — Halte - là ! Messieurs, de par le Roi,
s^écria-t-on dans la foule ; assignés vous êtes à la
Cùnnétablie de France au teime de huitaine par
nous clamant et proclamant le cheualier dAui^rajr,
lieutenant de Nos Seigneurs les maréchaux de
France et greffier du Point d^honneur. Il fallu!
rengainer, et se donner parole d'honneur de ne
pas se rejoindre , et même de s^éviter jusqu'au mo-
ment de Taudience , où toute la jeune noblesse
avait afflué des quatre coins de File de France
Tous les jeunes seigneurs étaient là sans épée,
tête nue , dans un grand silence ; et nos cousins
nous dirent que rien n'était plus imposant que ce
vieux Sénat de juges du point d'honneur. Il ne
s'agissait pourtant que d'instrumenter pour ou
contre deux étourneaux. Mais leurs ancêtres appa*
raissaient derrière eux , et la postérité se trouvait
en regard. Le duc de Richelieu fut obUgé de Eedre
des excuses au comte de Bavière Devenu doyen
des maréchaux de France , il fit à son tour mettre
à la Bastille le marquis de Créqui , mon mari ,
— cirApiTiiE xsr. — 250
r l'empèclier Je s'aller battre en duel. Sou-
, Tom. l, Chap. X.
• Ci'llc l'-pretive que venait de subir Richelieu ,
I tribiiTinl du Point d'honneur , n'avail pas f&it
ir lui grand effet, si l'on en juge par cette autre
tDGcdole relative au m^me personnage.
Le comte Albani , neveu du pape Clament XI ,
e trouvant ii la cour de France, cbercliait à s'in-
loduire prés de la marquise de Créqni-Blancherort,
Ipvcnte de l'Auteur des Souvenirs , et dont l'accès
■'était pas aussi facile que celui qu'on trouvait auprès
'(te la plupart des dames de ce temps. Ne sacbant
«ooimenl s'y prendre, il alla consulter Richelieu qui
Je fit habiller en domesli([ue , et l'adressa comme
kl n la marquise avec les plus pressantes recom-
mandations. Elle le prit à son service, et bientôt
une entreprise fort hardie de son prétendu laquais,
Ià laquelle elle n'échappa que par une assez rare
prtMnce d'esprit , vint Itii apprendre à qui elle
•tait affaire. Le duc de Richelieu fil l'étonné , et ne
voulut pas convenir de cette nouvelle rouerie. On
l'coïoya encore une fois à la Bastille. « A sa sortie,
•Eli' Auteur Acs Souvenirs , le marquis d'Aumont,
parentdeM.^^deCréqui, à peine âgé de seixcans,
Icgralifia d'un bon coup d'épêe dans la hanche.
D m faillit mourir , et l'on crut long-lemps qu'il en
I naisnixhoWiiux. Souvenirs, Tarn, I , Chap. XII,
260 — HISTOIRE DES DUELS. —
En 1734, nu si/^ge de Philipsboiirg , le duc de
Richelieu se battit encore avec le prince de IJxen,
^on parent, et le tua. Celui-ci avait tué quelque
temps auparavant, de la même manière, le marquis
de Ligneville , oncle de sa propre femme. Voici
le sujet de sa (juerelle avec Richelieu.
Ou soupait chez le prince de Conti. Richelieu
qui avait éprouvé beaucoup de fatigue dans la
journée , conservait encore quelques traces de
sueur au front. Le prince de Lixen , en réponse
à quelques épigrammes de celui - ci , lui dit de
«^essuyer , et ajouta qu^il était étonnant qu^il ne
fût pas entièrement décrassé , après Favoir été en
entrant dans sa famille. Le duc de Richelieu visait
de s^allier à la maison de Lorraine y en épousant
la princesse Elisabeth- Sophie , fille du duc de
Guise. Richelieu, dont le véritable nom était Yi*-
gnerod, montrait d'habitude une exlréme suscep-
tibilité sur de semblables articles. Il ne voulut pas
différer sa vengeance d'un seul instant. A minuit ,
les deux adversaires se rendirent à la tranchée,
ce Ce lieu , dit Lacretelle , qui devait le plus leur
rappeler que leur sang appartenait à la patrie,
fut le champ de bataille qu'ils choisirent. Le prince
de Lixen resta sur la place. Le maréchal d'Asfdd
n'osa punir Richelieu (239) . »
En second rang , et immédiatement après Riche-
■ ^aUPrrRE XXI.— 261
Itu, ÔQ aperccvail h la mur de Lnnh XV un per-
■niina^ beaucoup moins considérable ; mais qui
|nrYint à se créer une grande fortune avct; des
moyens qui semblaient renouvelés de l'époque de
flcari m.
Lancclol-Maric-Joscpli Du Yiglian , seigneur de
Liturriéres , était un gentilhomme Xaiulongcois
< C|iii c'avait que hi cnjia et l'épée, dit M."" de
Criqui ; mais comme il était ce qu'on appelle
Aûrmant, il eut bicnlùl les plus belles et les plus
(gr(-ablet chnses du monde h sa disposition. » Il
i'èchspiMi du eolLége du PIcssis [rour aller bnllre le
pstide Paris où les cochers de fiacre le ramassaient
iloivie, par des pluies battantes, pour avoir le
jlwàr de Toilurer gratis un autsi joli gan on. Cent
1 la femme d'un tailleur qui court ohei lut
^13 l'inlcnlion de lui fuirc une st^éne , au sujet d'un
■^oire de 4()0 l'rancs qu'il ne payait pas h son
Bari, et <fui laisse sur sa cheniini^e us billet de
NO francs qu'i-Ile allait toucher ailleurs, tant elle
t fascinée par un regard de cet Adoiiis.
Quand M. de Létorrières eut ses vingl ans, it
voulut se glisser ii In cour , et présenta à cet elfet ses
(Ruvesmi vérificateur Cbérin. Mais comme il savait
fue ses meilleurs Ulres étaient sur son visage , il
dKrcha à rencontrer les regards de Louis XV , qui
l"*])!!!! eu effet remarqué, deiuanda à son <.-onscilii'r
262 —HISTOIRE DES DUELS.—
Chérin ce que c'était qu^un genlilhomme du Poitou
nommé Létorrières. Le conseiller répondit qu^il
aurait de la peine à monter dans les carrosses,
parce que ses preuves n^étaieot pas tout-à-fait
— // est charmant , interrompit ce prince , et je
permets qu'il nie soit présenté sous le titre de
vicomte. Chérin l^inscrivit pour un certificat par
ordre; et M. le vicomte de Létorrières eut les
honneurs de la cour.
Il eut bientôt après un procès important au
Parlement de Bordeaux contre MM. de Pons. Sa
cause n^était pas soutenable ; mais le duc d'Orléans
trouva moyen de faire évoquer l'affaire au conseil
des parties casuelles ; et les sires de Pons ont perdu
leur procès. Il gagna autant de procès qu'il en en-
treprit contre les ducs de Uolstein , les princes de
Brunswick, etc. , etc.... Enfin l'archevêque de
Paris l'appelait le serpent du paradis terrestre»
« S'il a jamais affaire à mon officialité, disait-il, je
le ferai masquer d^un capuce de la tête aux pieds,
comme un pénitent noir. » Bref, la prude M.*^* de
Créqui déclare qu'on ne saurait imaginer le
nombre des succès en tout genre de ce persoiH
nage , qu'on n'appelait plus que M. le Charmant;
et elle ajoute qu'elle n'en parle elle-même quà
son corps défendant*
Ce Létorrières était un spadassin de Feq^ièce
I.- 263
b plus élégante, comme on l'élaît assez gdai^ra-
temenl alors ; car le genre féroce îles Vitaux et
«les Lagarde-Vnlon était passé de mode. Une fois
qu'on avait eu quelijue chose h démêler a^ec lui,
on n'avait giiêres rien de mieux à Faire que de se
battre. i( Aussi bien, dit M.""" de Créqui, toutes
[(lis qu'il avait des appels au tribunal du Point
d'Iiunneur, on était assuré d'avance d'avoir ii lui
^ra des excuses et des réparaliuns exorbitante»;
ce qu^oQ attribuait à la bonne gn'ice av«c laquelle
il Bvail suUicilé Nos Seigneurs les maréchauic. n
Cependant l'épée de AI. le Charmanl n'exerçait
pu la mi:me fascination que son regard , et n'était
JIM toujours heureuse , comme on va le voir.
En I77â, il reçut du comte de Mculan un coup
d'èpée dont il pensa mourir. Il s'»visa bienlùt après
d'adresser ses hommages à une jeune prince^e des
pIu) jolies et des plus considérables de la cour ,
Uademoiselle de Soissuns., Victoire-Julie de Savoie-
Cari^an. Celle-ci en devint si éperdu ment amou-
reuse ({ue la maréchale de Soiibise , sa tanlc , fut
obhgéc de la faire renfermer k l'abbaje de Munt-
;, sou» la garde d'un exennpt delaPrévùté. On
[grille entr'elle et son amunl, eunanie on avait
pour l'obbessc de Cikclles, l'une des filles
R^j!;ent. Mais les grilles s'abaissaient ou s'amoU
icnt devant le beau Létorrlérce. On surprit un
2S41 —HISTOIRE DBS D0BL8. —
message , on dècouirrit une échelle de corde. En&i
la famille Soubise finit par recourir à Tépée d'un de
ses gentilshommes, le baron d^Ugeon , pour mettre
notre amoureux à la raison. Un cartel fut lancé et
accepté. <( Mais la partie fut ajournée ^ dit M."^ de
Créqui y pour cause de la dernière maladie du Roi,
auprès de qui notre Galaor de Xaintonge aTait
obtenu de s^établir et de s'enfermer pour le soigner
de sa petite Térole pourprée ; ce qui fit révolter les
gens de cour , attendu qu'il n'aTait jamais eu iea
entrées de la chambre. »
c( Louis XV mourut, et cet infirmier du roi a*em*
pressa d'aller ferrailler atec le champion de SaTme,
qui lui fit deux blessures en un seul coup d'épée dans
le côté droit. On pansa M. de Létorriérea; on ferma
sa porte , et on publia qu'il avait pris la maladie du
roi. Les blessures étaient des plus grarea ; ce qui iM
Fempécha pas, après deux autres jours de pan*
sèment, d'aller escalader les murailles de Fabbaye
de Montmartre, et d'y passer la nuit auprès de
Mademoiselle de Soissons , sous la grande arcade
cintrée qui conduit du cloître au cimetière. «....•
Il parait que la princesse était (Nrudemment rentrée
chez elle avant le point du jour , et cette mal-
heureuse enfant n^a jamais plus revu son bel ami.
Les plaies de celui-ci s^étaient rouvertes; tout aoo
sang s^écoula pendant la nuit : il ne TOuhU a4ro-
— CHAPITRE XVI. — 285
ment appeler aucun secours. ï.c leixlcmain il fui
tpou*6 tlciiclu raidc mon sur lrn dalles du i-loitre.
On èloulTM cetlc horrible afluirc Ce cadavre
tait nwgnilîqnc ; on fil rapporter M . de Lélorrièrcs
dmi son lit, et l'on dit qu'il était mort de la
pctile vérole. »
« Mademoiselle de Soiuons Tiil ^gnrée par amour
a par inexpérience, ainsi qu'il y panit naturetle-
tDcnl et mallicurciiseinent au bout de quelques
mw, Oh tUl qu'elle avait l'esptl-rance cl peut-élro
I* promesse d'obtenir la protection du roi pour
*pm»cr M. de Létorrièrcs qui venait dV'tre créé
iwrqui» ci'Olbreuse. Elle a , ce me semble , i-pousô ,
éepm, M. le prince héréditaire d'Hilbourgtiauscn
MdcCobourg- »
« Le marquis de Lflorrièrcs et d'OIbreuse élait
devenu Mestre de camp de cavalerie. Commandeur
Jnflrdresunisdc St. -Lazare et de N. D. du Mont-
Cirmel, conseiiler-d'Etat d'épte , Grand-Scnèchnl
4'Auiiis, cl de plus abbé commandataire de In
T^té de VendAme. Il avait fini par se trouver
lire , et cependant , il ne laissa pas de quoi
IJCT «e« crénnciera, » Mém. de M." de Ci-équi,
'om. r.
Parmi les ferrailleurs d'un ordre plus secondaire,
I remarquait encore le comte de Turpin-Criss^ ,
l'on appdwt ausû le beau Tuqjiu, cl Puidlniu du
266 — HISTOIRE DES DUELS. — •
Sl.-Foix y Auteur des Essais historiques sur Paris.
II a parlé des duels dans cet ouvrage en austère
moraliste. Il a même proposé un moyen fort bizarre
de les empêcher et qui consistait « à faire battre
des champions gagés en décernant aux vainqueurs
une médaille pour récompense. Les gentilshommes
qui se battraient seraient tenus de porter la mé-
daille j et les duels tomberaient ainsi par la honte
et le ridicule. » Par une inconséquence asses
commune ches les écrivains , notre auteur se per-
mettait sans scrupule ce qu'il blâmait si sévèremeiA
chez les autres. 11 avait été mousquetaire, et s^eii
croyait autorisé à faire parade d^une insolence
cynique qui lui attirait à chaque instant de nou-
velles affaires, où il était presque toujours mait-
heureux.
Saint-Evremont , qui mourut la même année
que naquit Saint- Foix , 1703, s^était également
rendu célèbre comme bretailleur , et Ton ne par-
lait dans les salles d'armes que de la botte de
St.-E\'remout. A son exemple , TAuteur des Essais
était sans cesse en quête d'afTaires d'honneur comme
on recherche les bonnes fortunes , et quand il ea
avait trouvé , il en profitait ou les repoussait selon
son caprice du moment.
Un jour au café Procoi>e , rendez-vous littéraire
du temps , voyant quelqu'un qui prenait une ba-
— ClIAl'lTBE X\l.— 267
nroise k l'heure du dîner , il s'écrie bien haut
qiiec'csl un pauvre dîner qu'un dîner fait avec
nne bavaroise. L'autre se Fàclie ; un duel a' ensuit ;
Siint-Foix rembourse un coup d'ép^e cl obtient
de son adversaire d'en rester \k. Mais il lui répèle
«core : Quand vous m'auriez blé, avoues. Mon-
sieur, que ce n'en serait pas moins un pauvre tîîner
(jaun dîner Jait avec une bavaroise.
lloe autre fois , s'adressant à un gcnlilhomme ,
il lui demande pourquoi il puait si fort. La réponse
de celui-ci est un cartel que Saint-Fois refuse en
lui disant : Quand vous me tueries, vous n'en
pueriez pas moins; et si Je vous tuais, vous en
pueriez davantage.
Dana une autre circonstance, il lui prend fan-
i»c de provoquer un bomme de loi dont les
iniéres et la figure lui déplaisaient. Il l'aborde en
i disant ; Qu'il voulait avoir affaire avec lui.
Celui-ci prenant cette proposition équivoque dans
sens tout-ft-fait pacifique , ne se fait pas prier ,
an convient d'un rendex-vous. Ce malentendu
lena une série de quiproquo des plus plaisants,
0. se lennina pour Sainl-Foix par une mystification
qui oe le corrigea pas.
Tels étaient les duels à la Cour cl à la faille. Ces
idcux mots désiguaieal la France ; on ne s'occupait
208 -* HISTOIRE DES DUBU. —
guéres alors de la Province et de œ qui s^y panait.
C^étail là pourtant que le bras de la justice awt ses
coudées un peu plus franches , son action se trou-
vant moins souvent paralysée par les influences dd
cour. 11 suffira d^cn citer un exemple.
£n 1764 , une querelle survenue à Toccasion do
la vente d'un cheval , éclata entre deux habitana de
Saiut-LÔ , les sieurs de Bricqueville et de La Mau«-
gcrie. La lutte s^était engagée le 18 février en pleine
rue par des coups de pieds et de poings, et avait
lini par des coups dY*pée et de pistolet. Un attrou-<
pement ayant séparé les combattans , La Maugerii»
fut emporté du champ de bataille griéyemeni
blessé.
On porta plainte de part et d^autre. Plua de deux
cents témoins furent entendus; il y eut diveraea
sentences de la Connétablie et nombre d^arréta du
Parlement. Ce& arrêts furent cassés sur le pourroî
de La Maugerie et Tafiaire renvoyée aux Requêtes
de THôtel, où il intervint, le Umars 1768, arrél
défmitif qui confirma la sentence de la Coimétablie ;
déclara Bricqucviile atteint et convaincu d^avoir
excédé La Maugerie de plusieurs coups d^épée ; lo
condamna en cent livres d'amende, en 36,000 livret
de dommages-intérêts, ctàs'cloigtierpendant vingi
ans à une distance de trente lieues au moins de la
ville de SainL'Lô^
— CHAPirnE lïi- —
On voit que celte alfairo ii'ii pas duré moimde
«]UBlre années. Néanmoins la décision qui l'a Icr-
ninée est fort remarquable. De pareilles mesures,
quoiqu'elles passent h côté de la législation sur les
duflï, portent avec elles un cachet de prévoyani
tt ilVquitÉ qu'on trouve rarement dans les monu-
Difns judiciaires de cette épo(iue.
Les longs débals qui éclatèrent ciiîrc le Parlement
■le Rrclagne et le duc d'Aiguillon oeensionnèreul
"1*M cette province une grande fermentation. Des
Sul« d'encre et de fiel répandus dans de nombreux
pattipldels entretenaient l'irritation des esprits. Le
cours de la justice fut interrompu ; et comme toute
h noblenc du pays prît fait et cause dans cette
■Bure, on vit couler le sang dans des rixes jour-
uliéres et dans de nombreux duels (240) .
Ce fut pendant le trop long règne de Louis XV
qu'on vit se préparer cette grande révolution dans
le» mœurs et la politique , dont le principe remon-
tait au siècle précédent. En France, la gloire seule
est l'escuse de la Ijrannie. Ce n'est qu'à ce prix
qu'on y tolère les despotes. Sous Louis XIV des
chants de victoire étouflaienl les plaintes de la servi-
tude. Le joug de sou successeur , quoique bien
plus léger, parut insupportable, dépouillé qu'il était
des lauriers de la gloire. On avait pardonné au
270 — HISTOIRE DES DUELS. — >
Grand- roi d^avoir dit : V Etal y c*est moi; mais oti
s^indigna quand un gouverneur osa dire à son
arriére-petit-fils, en lui montrant le peuple assemblé
flous ses fenêtres : Sire, tout ce peuple est à "vous.
Bientôt ce même peuple apprit à rougir d^un tel
maître , bien moins encore parce qu'il vivait en
Sardanapale , que parce qu'il parut rapetisser la
France à sa taille dans l'ignominieux traité de 1783.
Ce peuple veillait pendant que le Monarque , sourd
au bruit des murmures avant-coureurs de la chute
du trâne , sVndormait sur l'oreiller des voluptés.
Tandis que les classes supérieures s'abdiquaient
dans la débauche , les classes inférieures marchaient
par la science à l'émancipation. Les unes s^eni-
vraient à la coupe du plaisir y les autres à celles da
savoir ; ccUes-ci fondaient leur avenir , celles-là
continuaient à vivre du passé.
Néanmoins les mœurs , en se relâchant de plus
en plus, parurent s'adoucir. L'immoralité fit des
progrés , mais la férocité diminua. On vit s'élever
des sérails , mais on abattit beaucoup de gibets.
Le poignard italien , importé par une Médicis |
commença à perdre de son prestige , et les orgies
du sang firent place à celles du vin et de la luxure.
11 n'y avait plus de duc d'Orléans qui poussât à
l'échafaud les complices abusés de ses maladroites
conspirations , abandonnant au Cerbère des têtes
[. - 271
g^èrcuses pour sauver la sienne; mais un prince
de ce nom faisail une Sndome de non palais, où
l'oD retrouvait jnsf|u'aui Gllesde Lolh (241).
On a vu , dans les chapitres précédens , le tableau
de la sociî'lé française avec ses principes , ses idées ,
ses mœurs et sa police. Au 18-' siècle il s'est ren-
conlr* de hautes intcHigcnces , des réformateurs au
R^ard hardi , à la plume de feu , qui , jetant les
yeiii sur tout ce passé de quatorze siccles , et n'y
apercevant que des ténèbres dans Tordre moral et
dugong dans l'ordre physique , se sentirent profon-
Jimenl émus. Us s'écrièrent toul d'une ymn que ce
iiVlaient pas lit les vénlablcs destinées de l'homme
sir la terre; qu'il n'y tenait pas le rang qui lui
appartient; que l'absurdité était partout à la place
de la raison, et la force au lieu du droit. Ce langage
^ODa d'abord par sa nouveauté; mais le peuple
iqui il s'adressait lui prt'la une oreille attentive.
Les réformateurs s'en prirent d'abord k l'ordre
politique , puis à l'ordre social tnut entier. Les
principes du gouvernement et des sociétés furent
jetés avec toutes les inslitulions dans )e creuset de
reuunea ; et comme l'autorité monarchique avait
placé aa source au sein de la divinité , on ne craignit
pas de s'élever justju'au plus haut des Cicux pour
ialerrogcr la divinité t-Uc-m^me. Le résultat de
272 — HISTOIRE DBS DUBLS. —
l^examen fut une négation hardie de tous les prin-
cipes qui avaient reçu la consécration des siècles ;
on fit partout table rase. Mais sur ce sol nu, personne
n^essaya de construire un nouvel édifice , et parmi
tant de démolisseurs il ne se trouva pas un seul
architecte.
La grande figure qui domine tout ce siècle est
celle de Voltaire. Il en fut en quelque sorte le roi,
et pourrait presque lui donner son nom. Il tenait k
Ferney une cour européenne ; il correspondait
avec tous les Souverains , échangeant avec eux
force coups d'encensoir , et en recevant aussi des
encouragemens plus positib , quoique moins philo-
sopliiques (242).
L'arme de Rousseau , son rival, était la logique;
la sienne était le sarcasme , arme moins noble ;
mais bien plus puissante et surtout plus française.
On admirait Rousseau , on se passionnait pour
Voltaire : Tun ne s^adressait qu'aux intelligences,
l'autre parlait aux passions : celui-ci s'escrimait de
l'épée y celui-là frappait sur le corps social à coups
mille fois répétés de poignard et de stylet.
L'Heraclite Genevois , quoiqu'infiniment plus
éloquent , fut bien moins populaire que le Démo-
cri te de Ferney. Vain, léger, vicieux, immoral;
cynique dans l'expression , essentiellement moc-
queur ; sans bonne foi dans la controverse ; ardent
E xsT. - 273
ri cmporlr ilanslapnl^miqiip; hninniTOl vimlicnlif;
tlMniT (In pouvoir, souple et rampant au^ pieds
dts rois, de leurs TaToris et de leurs Favoriles ; aWde
At distinctions aristocratitiues et de faveurs d'anti-
chambres , Voltaire était la complète personnî-
ficilinii de son siècle. Bousscau , plus ausière , se
fcnlt-rmail dans sa dignité d'homme et de philo-
tBf'he. Sa logi(]iie était inflexible, et tl la poussait
pM|u'k SCS plus cslri*mea limites. Rigoureux et
)lu dans les principes , il s'égarait quelquefois
ilâtisl'csagération des rnnsécjuences. Il posait har-
iliraent des théories, sans trop songer à la possibilité
^ prtsrnte de leur application. Il n'y avait d'actualité
^n» dana sa morale , comme quand il foudroyait les
VIrIs, réhabilitait le lien conjugal et réformait
' fédacation. En pnlilique , il se préoccupait peu du
prtaent; son regard d'aigle semblait percer dans
'«mir , et se fixer exclusivement sur l'ère de la
locratîe républicaine.
Houssenu préparu la réforme pohlique ; Voltaire
iplît une révolution religieuse. Il poussa l'al-
le jusqu'à l'outrage. La philosophie, sous sa
iimf, eut un caractère railleur, sophistique et
élroil; u mais elle mena néanmoins, dit Château-
Mit, h ce dégagement des préjugés qui devait
remiîr au véritable Christianisme (243). »
qu'U y cul de vraiment prodigious , c'est que
là
274 —HISTOIRE DES DUELS.—
ce fut bien moins le Peuple qui applaudit k ces
réformes encore au-dessus de son intelligence, que
ceux-mémes qui avaient rivé sa chaîne , et dont
les mains en serraient encore étroitement les deux
bouts. Cette Aristocratie, qui naguères avait accueilli
Luther avec tant d^enthousiasme , fut encore la plus
puissante auxiliaire de la Pliilosophie , qui n^était
que l'application des principes de la Réforme reli-
gieuse à la Réforme poUtique et sociale. Les domi-
nateurs eux-mêmes avaient soif d'un nouvel ordre
de choses ; car on se lasse de régner plus vite en-
core que de servir — Une société nouvelle s'ou-
vrait devant eux ; ils s'y jetèrent en aveugles, sans
s^occuper cette fois des places qu^ils pourraient y
occuper. Du scepticisme des sens , ik se plongèrent
dans le scepticisme des idées et des doctrines. Ds
n^ trouvèrent pas le repos , mais leur ruine.
Cette grande réaction morale sera bientôt suivie
d^une réaction matérielle. La Philosophie a opéré
la première , et la Révolution de 1789 va se charger
de la seconde. Mais ce qui fut toujours Técueil de
notre nation , cet enthousiasme , dont le plus dan-
gereux est encore l'enthousiasme du bien, fera mal-
heureusement avorter Fœuvre de notre régénération
sociale. On n^avait pas assez songé à ménager chei
ce peuple qu^on voulait émanciper une transition
nécessaire entre un long esclavage et une liberté
— CHAPITRE CTI, — 273
proTÎséc. Atissi celtp liberté va-l-elle devenir une
, un di-lire , une fr^n^sic. Ce sera clans des
a inexpérimentées un instrument de mort qui
tuera ceux-mêmes qui voudront s'en servir.
n y a péril pour les sociétés quand la force seule
K charge de tirer les conséquences des prémices
postes par rintclligence. Celle-ci suit ordinairement
une règle , celle-lk n'eu connait aucune : l'une pro-
chIc htcc synllicse , l'autre n'apercevant qu'un cûlé
ilï l'objet qu'elle veut faire passer violemment de la
llitorie h l'application , le juge mal et le dénature
roliérement dans l'opération. Le domaine de la
niMu fui -il donc jamais un champ clos ou un
champ de balaille ; et les armes de la logique une
torche ou un glaive.''... Ce n'était pas à l'école de
Hobbes et de Spinosa à venir installer celle de Bacon
fl de Leiboitz. Un sophisle avait osé dire : Tout
iltvient légitime et l'erlueux pour le salut public.
KouBseau répondit à Helvetius : Le salut public n'est
riai, si tous les particuliers ne sont en sûreté. Une
MKmblée politique , dont la grande maxime d'élat
brenl les supplices, plaça pourtant l'image deRous-
■Mu dans le lieu de ses séances. Elle avait oublié de
taire graver au bas celte autre maxime de l'auteur
du Contrat 50c m/ qu'elle a ai mal compris : La liberté
tenait encoiv trop e/ièrement achetée , si elle ne tle-
tWt eodier tpie le sang tl' un seul homme (244).
CHAPITRE XXII.
Règne de Louis XVI. — Son esprit de réformes. —
Opposition des courtisans. — Duels à la coar et
en province. — Désuétude des anciens édita. —
Duellistes célèbres. — Rapports de leur caractère
«vec la physionomie morale de chacpic siècle.
Lbs vertus de Louis XVI apparurent comnie
tin anachronisme dans la cour fastueuse et dissolue
de son prédécesseur. Son austérité étonna comme
une innovation; elle blessa comme un reproche;
elle alarma comme une réforme. L^avarice gémit i
Torgueil murmura. Tous les intérêts compromâ
se groupèrent en masse et organisèrent de concert
la résistance. La royauté n^étant plus le Veau dW^
cessa d^étre une idole, et la foi monarchique s^aSû-
blit visiblement quand elle n'eut plus pour aliment
le faste et la prodigalité. Le roi voulait sincèrement
tarir cette source honteuse de désordres danÉ Itê
finances et de corruption dans les mœurs; mais
ce fut envain qu'il s'applicpia , dés les premières
— cuiPiTun ïiK. ~ 277
Moahi (le son règne , & d^iorrasacr le trâiic de
telle daugcrcusc étreinte d'abus siitis nombre qui
l'y atlacliaiciit comme le lierre aux vieux murs.
S* Diaiu Irnp fuible ne put sufTire à la peine , et
U Feu des révoluliuus dévora tout.
Louis XV'l ne fui pas assL'i comprîa du peuple
Hle fui Irop de la cour. Tout lui devint emiemi ,
\ les prf'veutîons populaires , et Ica oppositions
Itrîtôeiuics. lunucentc et Tatalc victime , il su vit
Mlnniié k expier des fautes qui u'iituient pus les
es. Celui qui fut toujours si avare du sung Im-
versa le sien sur récliafaud , et le plus liutméte
4-1 liummes lut le plus uudbeureux deâ Rois (24-5) .
Dés les premières années du nouveau règne ,
seutiment de la grande lutte qui s'annon-
jl|^r taul de sinistres pri»<ige.s prt'ovxupnit déjà
les imaginations. La tiauquillilé régnait
is le calme nVtait qu'à la surface.
^Minbres nuages s'amoncelaient k Thorison, el
h Tcm respirait à peine k l'ap^iroclie de ces
( lourdes et suffocantes avant- coureurs des
». Les querelles particulières absorbées dans
(m abstractions politiques semblaient avoir perdu
leur aigreur avec leur importance. L'ipée reposait
dans le fourreau pendant celle active [uroientation
dia câ^ril^ Ot Uiédiluit dans uu silence sulenuel
278 — MSTOIBE DES DUELS.—
sur les droits du citoyen, et Ton préludait dans
Je calme de Texamen aux tempêtes de la discussion.
L^ Auteur du Tableau de Pans qui ne pouvait
deviner , en 1780 , les véritables causes de ce chan-
gement remarquable dans les mœurs du temps,
en a donné les explications suivantes :
ce Aujourd'hui la canne a remplacé Fépèe qu^on
ne porte plus habituellement , et Ton ne connais.
plus ces disputes et ces querelles si familières, il ^
a soixante ans , et qui faisaient couler le sang pouP*
de simples inattentions. Les mœurs ont opéré es
grand changement bien plus que les lois. On n^au—
rait réussi qu'avec peine à interdire le port d'armea*
Le Parisien s'est désarmé de lui - même pour si
commodité et par raison. Le duel était fréquent; 3
est devenu rare. Les lois sévères de Louis XIYn^ont
pas eu autant de force sur les esprits que la douce
et paisible lumière de la Philosophie. Les Parisiem
ont senti qu'ils ne devaient pas se déchirer comme
des bétes féroces pour une chimère qu'on appelle
Point d'honneur. On se contredit, on se dispute;
on y met même quelque fois un peu d'aigreur;
mais on ne croit pas qu'on doive pour cela se
couper la gorge. »
« L'esprit des duels , dit encore le même auteur,
est dérivé d'abord de l'esprit des tournois. Il agita
ensuite notre orgueilleuse noblesse , puis il eal
! XXII — 279
tendu chez les bourgeois. H est relégua maintenant
parmi les soldais aus Cardes. On croit devoir le
conserver encore dans les garnisons. Culte fureur
fpii égarait noire vaine nation , il n'y a pas un
aéclc , semble s'être concentrée là dans son der-
nier asile (246) . »
Mercier s'esl trop liiUé de conclure d'une simple
ffllermittence dans la fièvre des duels que cette
Biladie s'était lout-h~rail exilée de la société civile,
loin d'être reli-gué parmi le» soldats aux gardes,
a allons voir le Duel envahir jiiscpi 'aux marches
ia Irânc, et des priuccs du sang rojal payer un
fcibul inaccoutumé , non seulement k l'antique pré-
^gé du Point d'honneur , mais encore à l'Egalité
bOoreDe en croisant l'épée avec des inférieurs en
inde et en dignité.
' De tous les auteurs qui ont parlé du combat
Uébre qui eut lieu entre le duc de Bourbon et le
»mte d'Artois , le baron de Bcaenval , confident de
3e dernier, et qui a joué le r»Mele plus actif dans
Oulc cette affaire , devait sans contredit être le
bicuz informé. Il n'en est aucun d'ailleurs qui soît
entré sur ce sujet dans des dt:tails aussi circons-
tanciés. Veici la substance de son récit qui fait la
_ niatîire d'un long chapitre ao Tome II de ses Mé-
toires, et qui fera parfaiteiiietiL conuuttre (gomment
B traitaieul alors à lu cour les aRaiia d'Iiomieur.
280 — HISTOIAE DES DUELS.—
(( A un bal donné à TOpéra le mardi gras de
Tannée 1778 , le comte d^ Artois donnait le brasà
Madame de Canillac, tous deux masqués jusqu^aux
dents. La duchesse de Bourbon (née princesse
d^Orléans ) vient à les rencontrer , et les ayant
reconnus s^attache à leurs pas en les poursuivant des
mots les plus piquans que la liberté du masque
puisse autoriser. La duchesse de Bourbon avait pris
en antipathie M."^*" de Canillac, par le double motif
que celle-ci avait été la maîtresse de son mari et
qu'elle Tétait devenue du comte d^Artois, sur qui
elle se trouvait elle-même avoir des prétentions*
M."^^ de Canillac s^esquiva dans la foule , et la
duchesse de Bourbon , s'emparant alors du comie
d'Artois, prit la barbe de son masque et le leva avec
une telle violence que les cordons qui Tattachaieiit
se cassèrent. Hors de lui, furieux, il saisît de la
main celui de la duchesse , le lui écrase sur le visage
et la quitte sans proférer un seul mot. »
« Cette aventure fut d^abord à peine remarquée,
et la duchesse de Bourbon ne songeait pas à s'en
formaliser. Mais, deux jours après, piquée de quel*
ques propos , elle dit chez elle , en pleine table , au
miUeu d'un nombreux souper , que le comte d'Ar-
tois était le plus insolent des hommes, et qu'elle
avait pensé appeler la garde au bal de TOpéra pour
le faire arrêter. »
I
<( Le propos du souper se répiiiidil bieolnl dims
le monde el lil une grande sensation. Les fcnimiis
(urloul , doiil le procédé du comte d'Artois révol-
liiil l'amour propre , prirent fait cl cause cl se
ilteliuînércnt contre lui. Elles disaient publique-
nifiil <]u'on ne pouvait en resler là , et selon leur
coutume ordhtaii-e, elles voulaient k toute force que
M, le duc de Bourbon se battit. M. de Maurcpas,
^ui le prince de Coodé alla parler de cette all'airc,
iDuIut a'eu mfler et lui donna une tournure dont il
ttail diflicilc de comprendre le motif. 11 (lait en
Bégucialion que M. le prince de Condè viendrait
vtK tous les siens faire des excuses au roi , et il
>'agtBsail d'articuler que jamais ni lui ni ce qui lui
>ppartenail, ne manquerait ^ S. M. et à la famille
rojttle. Or , c'était ce taoifamiUe myale qui faisuit
l> pierre d'achoppement. »
it Eiifm , le samedi matin , le roi ordonna à M. Ib
prince de Condé de se rendre à Versaillea avec
Mutifieur et Madame la duchesse de Cuurbun, et
bayant fait entrer dans son rabinet où était M. le
tumic d'Artois , il signiiia non pas en père mais en
fi, qii'U voulait que le passé demeurât dans
fciiibli et surtout qu'on n'en reparlit plus. lie duc-
deBourbon voulut prendre la parole ; mais le roi
'ui imposa ailencc , et tout le monde surlil niéeon-
>m : cela devait cire, u
282 — HISTOIRE DES DUELS. —
c( Comme M."'* la duchesse de Bourbon en assu-
rant le roi que son intention n^ayait jamais été de
lui déplaire, n^avaitpas ajouté et àla famille rojate,
M. le comte d^Àrtois ne lui avait fait aucune répa-
ration. Par conséquent elle se tenait toujours pour
offensée , et M. le duc de Bourbon se croyait obUgé
d^en demander raison , tUnsi que ras^aient décide
te$ femmes.
c< Pappris bientôt que M. le duc de Bourbon était
Tenu à Bagatelle , maison de campagne du prince ,
et s^était informé de hii au concierge. Pallai le len-
demain à Versailles dans Tintention de FaTertir de
cette démarche et surtout des propos que tenaient
les courtisans et qui étaient parvenus à leur comUe.
En arrivant j'aperçus Campan (secrétaire du cabi-
net) qui me fit un signe de tête et me dit que la reine
voulait me parler. Il m'introduisit prés de S. M. qui
d'abord qu'elle me vit, me dit : Eh bien. Baron,
que pensez-^ous de la situation de monfrère7 Que
peut-on faire 7 Et quel parti va-t-^U prendre}
— Madame, lui répondis-je , il n'y en a quun. Il
faut qu'il se batte, — Je pense tout comme vous,
reprit-elle , et le Roi aussi. Mais croyez-^vous que
mon frère adopte ce moyen ? — Madame , répli-
quai-je , i7 ignore parfaitement tout ce qui se passe;
mais mon intention était de l'en av^ertir aujounPhui;
car j'aimerais encore mieux le voir mort que dé$^
l
— CHAPITRE XXII.— 283
honoré. Cependant comme c'est un grand parti,
y. Jtt, trouvera bon peut-être que je prenne l'a\iis
de M. le chei'alier rie Crussol (capitaine des gardes
du prince). — Oui, me dit la reine en me congé-
diant , voyez M. de Crussol et arrangez tout avec
ki (247). »
<i Je rencoDtrai le chevalier chez le comte Juin
de PoUgnac où il était avec Vaudreuil. Tous iroi» ;
furent d'avis comme moi que le prince devait se
battre, et Crussol ajouta : D'autant que les choses
n'iront pas plus loin; car aussitôt qu'ils auront
[épée il la main , je leur montrerai l'ordre écrit et
ligné flu roi d'en demeurer là. El sur cela il tira un
papier de sa poche, qui en effet i^lait im ordre de la
main de S. M. — Comment ! C/tet'alier, lui dis-je,
c'est donc une comédie que vous voulez Jaire jouer
h S, A. R> 7 Quant à moi je vous déclare que je
n'y donne point mon approbation. — Çuappelea-
vous , reprit Crussol , c'est assez pour le Prince de
te présenter. Son affaire est de -venir sur ie pré , et
eetle du roi est d'empêcher les suites qulpeuvent en
arriver. Le comte Jules et Vaudreuil appuyèrent
cette opinion. — Ma foi, Messieurs, leur répliquaï-
je , vous ne me ferez jamais comprendre celte
monde là. n
n Sur cela les ayant quittés , je pris le chemin de
l'ipparlemCQl du prince. £u rèHëchissant à ce qui
J
284 — HISTOIRE DES DUELS. —
se passait , je crus démêler que TafiTaire <lu combat
avait déjà été traitée j qu^on l^avait décidée avec la
belle restriction de Tordre écrit du roi , et qu^on
avait cliargé la reine de me sonder , plutôt que de
me parler ouvertement. A tant de petitesses je re-
connus rhomme de robe et le doigt de M. de Mail-
repas qui dirigeait tout. »
« Je trouvai M. le comte d'Artois dans son
cabinet; je Tinformai de la visite du duc de Bourbon
k Bagatelle , et je lui fis un détail exact de touA les
propos de Paris , sans rien pallier de ce quUls
avaient de fâcheux pour lui. Il m^écouta sansm'in-
terrompre , et quand j^eus fini il me demanda, pour
la forme et avec beaucoup de sang froid y ce qu^il y
avait à faire. — P'oici comme je pense , lui répondis
je : P^ous sentez que M. le duc de Bourbon ne vien^
dra pas vous fUtaquet' à Versailles. Puisqi^'U a
paru vous indiquer le bois de Boutogtie en allant à
Bagatelle, cUst là qu il faut vous monUnr. Demain
montez à cheval à dix heures du matin et allez-^
vous y promener une lieure ou deux» Il y a à potier
que Mm le duc de Bourbon se fait ins traitée dû vos
démarc lies , et que vous le i^ncontrerez pendant
votre promenade. Si vous ne le tiouy^ez pas , venez
dincr chez moi; ce sera lui donner toute facHité,
ma nmison n étant quà quatre pas du palais
Bourbon. — Tout cela me cornaient fort^ iœ ré-
— cn\piTnK s\ii.— 2S5
IKindit le prince , cl me serrant la mnin : J'irai lilner
thcz vous, ajouta-t-il , et vous savez bien que ce
~ a m'CC un grand plaisir. »
I Je monlai en voiture pour retourner i Paris ,
d'après la ri-solution que j'nvais prise de ne me
)omt trouver a» romlint , Jt cauac de cet ordre du
toi qui me désolait plus encore en cet instant où je
venais de trouver le prince aussi ner^■eux que je
(lOuvais le désirer. Je m'affligeais davantage qu'on
fil tourner contre lui une occasion dont il pouvait
r un si grand parti pour sa ri^putation. »
( Je me couchai fort agité de tout ee qui devait
Kpasscr le lendemain. Je me levai de bonne heure,
M sur les onze heures il m'arriva un piqueur de
H. le comte d'Artois , an grand galop. 11 me dit que
5. A. R. m'attendait au bois de Boulogne à la porte
dw Princes. Je partis sur le champ , et à la descente
6e l'Etoile je trouvai La Vaupalière qui m'arrêta
pour me dire avec enthousiasme : Ils se sont battus
ftmime ^eux grenadiers d'infanterie. Je joignis
hicntôl M . le comte d'Artois qui se promenait h, pied
Ma Crois d'Armenon ville. II courut à moi et se jeta
dans mes bras, ce qui me Et venir les larmes aux
ïïux- d'autant qu'aux bonlf-s qu'il rae témoignait ,
*^ joignait un certain air d'embarras occasionné
pw les louanges des gens qui l'entouraient. »
" Impatient d'^lre instmll , je pris à part le chc-
286 — S1STOIRE DES DUBLS. ~
yalier de Crussol , en lui disant : Coniez^moi donc
comment cela s* est passé. Ils se sorU donc battus?;
Et l'ordie du roi, et tous les beaux arrangemcns
d'hier, qu est-ce que cela est devenu?.* Au diable
sifjr comprends rien.
c( — Ce matin, me répondit le cheyalier, afanl
de partir de Versailles, j'ai fait mettre en secret
sous un coussin de la voiture sa meilleure èpèe.
Quand nous sommes arrivés à la porte des Princes ,
j'ai aperçu M. le duc de Bourbon à pied , avec asseï
de monde autour de lui. Dés que M. le comte
d'Artois l'a yu, il a sauté à terre, et allant droit à lui|
il lui a dit en souriant : Monsieur, le public prétend
que nous nous clierchons. — M. le duc de Bourbon
a répondu en ôtant son chapeau : Monsieur, je
suis ici pour recevoir vos ordres. — Pour exécuier
les vôtres, a repris S. Â. R. »
« Ils sont entrés dans le bois où ils ont bit une
vingtaine de pas. M. le comte d'Artois a mis l'épée
à la main, et M. le duc de Bourbon aussi. Ils allaient
commencer, quand M. le duc de Bourbon adret-
sant la parole à son adversaire lui a dit : Fous ne
prenez pas garde. Monsieur, que le soleil vous
donne dans lesjreux. — Fous auez raison, a rér
pondu S. Â. R. , allons vers le mur qui est plus
loin; nousjr trouv^eix>ns de V ombre puisqu'il ri y a
pas encore de feuilles aux arhes.m
— cniPiTiiK Txir. — 287
R Sur cela , chacun a mis son épéc nue sous son
bru, et les detix princes ont marche Tun à côté
de l'autre en causant ensemble , moi suivant
IM. le comte d'Ârlois, et M. de Vibraye M. le duc
de Bourbon. Tout le monde est demeuré k la porte
de» Princes. »
H ArrÎTés au mur, M. de Vibraye leur a re-
présenté qu'ils avaient gardé leurs éperons, et qu'ils
pourraient les géncr. J'ai àté ceux de M. le comie
d'Artois, et M. de Vibraye ceux de M. le duc de
Bourbon , service qui a pensé lui couler cher ;
cir en se levant il s'est attrapé sous Tœil h la pointe
de l'épée que M. le duc de Bourbon tenait encore
■DUS le bras : un peu plus haut il avait l'œil crevé.
It! éperons ûlés, M. le duc de Bourbon a demandé
permission à M. le comte d'Artois de quitter son
Aabit, soua prétexte qu'il le gênait- M- le comte
«l'Artois a jeté le sien , et l'un et l'autre ayant Ut
Irine découverte ont commencé à se battre, n
Il Us ont reaté assex long-temps k ferrailler. Toul-
^-coup j'ai vu le rouge monter au visage de
». A. R. , ce qui m'a fait juger que l'impatience
^ gagnait. En elFet, il a redoublé et pressé assez
%. le duc de Bourbon pour lui faire rompre la
ttesure. Dans cet instant , M. le duc de Bourbon a
ftaneelé, et j'ai perdu de vue la pointe de l'épée de
M. le comte d'Artois, qui apparemment a passé
288 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
SOI18 le bras de M. le duc de Bourbon. Je Tai
cru blessé, et me suis avancé pour prier les princes
de suspendre. M. de Vibraye en a fait autant.
— Ce nest pas h moi à ayoir un avis , a répondu
S. A. R. , c'est à M. le duc de Bourbon à dire
ce qu'il veut; je suis à ses ordtvs. — Monsieur,
a répliqué M. le duc de Bourbon en baissant la
pointe de son épée , je suis pénétré de reconr
naissance de vos bontés, et je n'oublierai jamais
l'honneur que vous m'avez fait. M. le comte
dWrlois ayant ouvert ses bras courut l'embrasser,
et tout a été dit. »
<c Je rejoignis le Prince arec M. de Crussol ,
et peu de temps après nous montAmes tous à cbeval
pour venir diner chez moi. En arrivant à la bar-
rière du Cours , nous trouvâmes M. le prince de
Condé et M. le duc de Bourbon qui avaient éti
s'habiller , et qui revenaient au-devant de S. A. R.
Du plus loin qu'ils Taperçurent, ils sautèrent à terre
de leur voiture , et M. le prince de Condé courant
h la botte de M. le comte d'Artois, les yeux rem--
plis de larmes , lui dit d'une voix entrecoupée
des choses rcs]>c(^tucuses et infiniment touchantes.
M. le comte d'Artois marqua de son côté beau-
coup de sensibilité, de manière que tout ce qui était
Ifi fut on ne peut plus attendri. Les Princes se sé-
parèrent, et charim continua son chemin. »
■ -cnKvnnE ^Tri. - 289
^B » rtiTnis rrril avimt le rombal une leltre k !a
^B Krinc, pour lui soumetlre une id^e qui m'était Tenue
^ il'ciigaji;er M, le comlc d'Artois h terminer ooble-
nifiil celle affaire par des excuses à IM."' la du-
|<'lics»e de Bourbon. Kn arrivant chei moi je trouvai
Campan , son secrétaire, qui m'apportait In réponse
^mn leltre. C'était une approbalion complète de
1» dtmarr-he en question. »
" Muni de cette autorité, je dis à M. le comlc
(l'Arlois qu'il n'y avait pas un moment à perdre
'1 qu'il fellait aller chex M."' la ducliesse de
Bourbon lui faire des excuses ; que cette démarche,
"prés ce qui venait de se passer, ne pouvait être
nllrïbuée qu'à la déférence , Jl la galanterie qu'on
(tnit atix femmes et le raccommoderait avec elles ,
miarju'elles étaient surtout déchaînées contre lui.
IVe le Irouvai Irés-docile k rcl avis, et nous nous
irr^Ames sur le champ Ji pied , par le boulevard ,
rrni le palais Bourbon, n
I Je lui recommandai de mettre beaucoup d'ai-
ince el de grAce dans sa contenance, ainsi que
htra sort discours , et surtout de commencer par
ri dire qu'il profitait du premier moment dont il
mu-ail di.iposer, pour venir ^r mettre à ses pied.r.
r l'Accompagnai jufiqti'Ji la porte du palarsBourbon ,
il ji" le laissai entrer avec le chevalier de Crussol.
I j resta un demi-quart d'heure, et me rejuiguit
19
290 — HISTOIRE DES DUELS. —
sur le boulevard où je rallendais. Crussol me dit
qu'il avait été parfait , et que M.™^ la duchesse
avait été bien dilTôrenle. »
c( En rentrant chez moi, je trouvai le comte Jules
de Polignac qui arrivait de Versailles et <jui me
dit , de la part de la Reine , qu'il fallait que M. le
comle d'Arlois écrivit au Roi sur ce qui venait de
se passer. Il était tard ; tout le monde mourait de
faim. Je laissai chacun se mellre h table , et je
courus minuter une lettre que le prince copia de
sa main après le dmer , et qu'il envoya au Roi par
un de ses gens. »
« J'ai oublié de dire que, dans l'audience que
j'avais eue de la Reine , elle m'avait consulté pour
savoir s'il ne fallait pas envoyer M. le comte d'Artois
à la Bastille au cas qu'il se battit ; ce que j'avais
totalement rejeté , comme inutile , en disant qu'il
suffirait de l'exiler pendant huit ou dix jours à
Choisy, pendant qu'en même temps on exilerait
le duc de Bourbon h Chantilly. »
« M. le prince de Condé ne mit pas assez de
réserve dans sa conduite. Au lieu de se renfermer,
il ouvrit sa porte à tout Paris , et l'affluence au
palais Bourbon fut énorme ; ce dont le roi el la
reine furent très-choqués. Je me crus moi-même
obhgé de faire comme tout le monde. M. le prince
de Condé , instruit que c'était moi qui avais fait
I
-nuPiTRE sxn.- 291
Il Ictlre (le M. le comte (i'Arlois au roi , me recul à
bras ouverts. M. le duc de Bourbon se crul acquitté
psr une révérence. Pour M."" la duthesHe elle con-
lerra avec moi l'air d'ironie qui ne ravail pas quittée
depuis le commencement de eelte alTaire. »
« Le lendemain M. le comte d'Artois reçut
Tordre d'aller en exil à Choiay , et M. le duc de
Buurbon h Chantilly. Ils y restèrent huit jours. »
'( M. de Crussol eut presque tout l'honneur de
nHlealTairc, et je n'en lirai que celui d'être con-
Itnt de moi ; ce qui me suffira toujours (248) . »
Le prÎDce de Condé , le m<?me que celui dont il
TÎtnt d'être parlé k l'occasion du duel de son fils,
I* duc de Bourbon , avec le comte d'Artois , se
mciura aussi en champ clos avec ie vicomte
<l'Agout, simple capitaine de ses gardes. Celui-ci
fà était en même temps capitaine aux Gardes-
Françaises, s'était attaché k une jeune veuve de la
I four de la princesse Louise de Condé , et lui avait
^m ptimis de l'épouser. Mais ayant cru dét^ouvrir que
^P^ttle dame partageait en secret ses a&eclions entre
~ ** prince cl lui , U éclata en reproches et retira
•■ promesse de mariage. Celle-ci s'en plaignit au
Prtiice de Condé, et lui fil un récit qui l'indisposa
k^otilre le vicomte d'Agotil , au point d'exiger de lui
IMOQ. M. d'Aguut la présenta un quitrt
292 — HISTOIRE DKS DUEL». —
d'heure après , cl Tayanl remise entre les mainii du
prince y il lui demanda respectueusement quel pou*
vait être le motif d'une pareille disgrâce. — Ccst,
répondit le prince, ifue je ne veujc sou ffiir auprès
ilc moi ni les menteurs ni les calontniateurs. — Je
"VOUS prie y Monseigneur, de tous soutenir qu'au
moment oit je tous ai fait cette demande, je n'avais
plus V honneur d'être à votre sennce, mais que je
suis gentilhomme. — Je vous entends , Monsieur,
et je suis prêt à soutenir ce que je vous ai dit par
toutes les voies qui pounvnt vous coni^nir. — -
Monseigneur , j*ose compter sur vos bontés.
Dès le soir même , le vicomte d'Agout alla à
Versailles s'assurer de» plus liautes protections en
cas d^èvénemens malheureux , et le lendemain se
présentant k la portière de la voiture du prince qui
relayait à Sèvres : Monseigneur , lui dit*il , je viens^
recevoir vos ordres* — Demain , Monsieur, à neuj
lieures du matin, je serai à l'entrée du bois de
Boulogne, près la porte Maillot.
M. d'Agout ne manqua pas de s'y trouver avec
son frère , aide-major aux Gardes du roi. Le prince
arriva avec un gentilhomme de sa cour , et tous les
quatre se rendirent dans une allée écartée. Le
prince , en se présentant sur le champ de bataille ,
remit à M. d'Agout un paquet contenant la décla-
ration qu^Jl avait été l'agresseur dans le combat et
I
l'avail provoqué , avec des tultres de i
tlation pour les dilR-rcules cours étrangères, ok |
Bun adversaire pourrait se retirer.
Ceiui-ci reçut le pnquct avet: respect et rccon^ 1
naiaeaBcevtmit bas suu habit. Monsieur, lui dit le I
prince, en quiunnl votre habit, c'esl me dîn- rl'eit
Jairr autant. — MvHSi-igneur , jt^ ii'ui pas lu droit
aérien ejtgcrile ^oUv ailles se, jii m'en mjipone à
sa to} aulé , el n'ai -voulu que lui firuuver la mienne.
Le prince de Condt st: déshabilla aussittil. Tous
deux mirent IY-|>ée à la main, et le combat eo m -
meu^ra de ta part de M. d'Agoitt avec un atjtiarue-
meut que pouvait expliquer sa position particubère.
Le prince reçut aussitôt une U'gère blessure. L«
létnoiiM se jetèrent alors cuire les combatlaos pour
les séparer. M. d'Agout fut promu peu de temps
après au grade de major des Gardes , sur la recom-
ntandabon mi'mcdu prîuec deCondé (240).
Cette kiTiure ûl grand bruit h, ia cour, où ell»
fui néanmoins diversement jugée. Les uns, n'en
apercevant que le c6tû cbevalcresque , louaient Ift (
prince d'avoir si noblement réparé ses torts , et !« I
comparaient à François I." qu'il avait miîme I
réellement surpassé. D'autre» ne virent qu'un daik"
gereux précédent et un sacrifice impulitii^uc aux j
idies nouvelles , dans cet oubli des distances entre
un prince du sang et un simple officier.
204 — HISTOtRE DES DUEL9. —
Quant fiu Monarque , dans cette circonstance
comme dans la précédente , le serment de son
sacre cl ses principes sincèrement religieux ne lui
permettaient pas d'avoir, comme ses prédécesseurs,
deux opinions , Tune odicielle , Tautre secrète.
Mais il est facile de comprendre toute la difficulté
de sa position. Ce ne sera pas là du reste le seul
ni le plus grave embarras où Pauront jeté succes-
sivement toutes les fautes de sa famille.
La grande renommée du chevalier d'Eon ,
comme duelliste appartient, plus encore au règne
précédent qu'à celui-ci. Il était né à Tonnerre ,
en octobre 1728 , et avait pour père le subdélégué
de cette ville. Il fut successivement avocat, cen-
seur royal, écrivain politi(fue, capitaine de dragons,
diplomate et maître d'escrime.
Ce fut en cette dernière qualité , et sous couleur
de donner des leçons au Grand-duc de Russie,
qu'il fut d'abord envoyé à St.-Pétersbourg avec
une mission secrète dont il s'acquitta avec assez de
succès pour obtenir le titre de secrétaire d'ambas-
sade. Il reçut aussi en récompense de ses services
diplomatiques , le brevet de capitaine et la croix de
Saint-Louis. On l'envoya ensuite en Angleterre , où
il fut un instant ministre plénipotentiaire, et eut
rhonneur de contribuer beaucoup à l'ignominieux
I
— ciuriTBE xxir.— 295
Irailé de 1763, œuvre bii-n digne assurimeiU du la
coop^tton (l'un paruil [>enioiiitiige.
Le dte?a!ier d'Eon cxcrllait dans 1l'3 eseniccs
du rorpa el surloiil dans l'arl de Teserime. Il enl de
nombreux diicU , oii su merveilleuse adresse lui
gnmiiUssail d'avuucu un triomplie assuré. Yti-s la
Gn du régne de LouiaXV, d ^luit culture attacbO •>
la K-^liuti française ii Londres. Il trouva mauvais
que lambassadcur ciimle de (juerchy voulut ré-
duire SCS di'penscs ; il lui en fit une scène violeiile
dans laquelle il s'oublia jug(|i)'ii lui dotiner un souf-
flet. Sur les plaintes de l'ambassadeur , il fui d^iridé
au ciuiscil dp Versiiilics que le clicTalier d'iiou serait
enleva et ramrnÈ en France. Mais Louis XV, avec
qui il *tait en correspondance secrète, lui ajant
dounO avis de cette rèsolutiun, il se retira dans la
otié de Londres où sa pers<iuue devenait inviolable.
S'^Qt oïisè d'en sortir un jour pour se batlrc en
pleine rue avec un français «ommi; de Vergy, il
eut beaucoup de peine h se retirer des mains des
conslables qui voulaient l'arrêter pour avoir Iroublè
tti peu'.v liu lloî.
IX'burrassè des aiTaires politiques, noire chevalii'r
se livra enliéremcnt ii l'csercice de l'escrime. Un
coup de fleuret qu'il reçut un juut au sein dans un
assaut, produisit une tumeur ghmduleusc qui exigea
UQO opération cbirurgienle. Ce Tut lit ce [[ui donna
296 *- HISTOIRE DES PUELS. —
lieu au bruit qui commença à se répandre qu^
n'était pas du sexe masculio. Chacun fit ses con-
jectures sur ce chapitre qui dc\int Tobjet de paris
considérables. L^incertitude s'augmenta de Tindif-
férence que d^Eon affecta pour tous ces bruits >
et de son refus obstiné de satisfaire par une expli*
cation catégorique à la curiosité publique.
Il parait que le duc d'Aiguillon , ministre des
affaires étrangères , avait cm dcTOÎr profiter de ces
bruits pour défendre à Tex-diplomate de reparaître
en France , si ce n'est en habit de fenmie. On s^est
épuisé en conjectures sur les motifs d'une mesure
aussi singulière. D'Eon chercha k faire croire que
c'était pour mettre à couvert Thonneur du cemie
de Guerchy qu'il avait si gravement insulté ; mais il
se pourrait bien que ce fut plutôt pour metire II
couvert Thonneur du cabinet de Versailles, en re->
jetant sur une femme la honte étemelle du trail6
de 1763.
QuoiquMl en soit , ce ne fut qu'après la mmi
de Louis XV et la disgrâce du duc d^Âiguilloa ^
que le chevalier d'Eon fut autorisé k revenir en
France, à la charge du secret le plus inviolable
sur tout ce qui lui avait été confié ; mais il ne profila
de cette permission qu'en 17/7, après la mort du
comte de Guerchv.
Rentré en France , il présenta au premier nû-
•itire Mnurepas une requëlu ussex^ cIcikIuc , |ioiir
obt«iir la rivocalioti de Tordre <]iii lui nvHÎl tté
pr^cMemment donni de porter des liiibils de femme.
Cïlle pièce bizarre se trouve en entier rajutnrtèc hu
luiiie V des Souvenirs de la marquise di; Crèquî.
Un y lit des passages tels que ceux-ei :
Il Je suis forcé de vous représenter trés-liumbie-
■ntnl, Monseigneur, que le temps de mun noviciat
lemclleélanl entièrement révolu, il m'est impossible
de passer k la profession. J'ai bien pu, par obèis-
•auce aux ordres du feu roi et de ses ministres,
nitcr en jupes en temps de paix ; mais en temps de
guerre, cela m'est impossible.... 11 importe k la
|leire de l'dlustre maison de Guercliy de me laisser
Hitiauer mon service militaire. Du moins c'est la
façon de penser de toute l'armée et , j'ose dire , de
toute l'Europe instivite.... J'ai toujours pensé et
^^^ comme Achille : je ne fais point la guerre aux
^■Virls , et je ne tue les vivans que lorsqu'ils m'ulla-
^■uent lea premiers, etc. , etc »
^ft Le cnmle de Guerchy était bien mort en eiïcl ,
^Bnis il avait un Ëls vivant , qui se montrait disposa
"Ir braver la redoutable épée du clievalîer d'Eoti ,
el plua jaloux de venger l'honneur de son père ,
qu'occupé des chances inégales d'une pareille lutte.
I leodreasc malemelle s'alarma de l'imminent
uigcr qu'allait courir un Gis , l'uiiiquc rejeton
I gucrr
b|leirc
BUontii
298 — însToinE DES nuELS. —
de la raniillc. La comlessc de Gucrchy coiinilic
jcicr aux pieds du Minisire , pour le supplier de
faire cnsorle d'empêcher celle renconlre. CcluMÎ
cnil cpi'il n'y avail pas de moyen plus sûr à prendre
que de maintenir ce qu'avail ordonné son pré-
décesseur, el la rcquélc du chevalier d'Eon fat
mise à néant.
II fallul prendre son parti el se résigner au co»-
Uime féminin. Aussi bien noire chevalière , p»
ordre , se trouvait élroilcmcnl enchaînée aux to-
lonlés ministérielles, par le brevel d'une penskiB
de 12,000 francs, fruil de la munificence du ï«
roi , cl ([u'on pouvait lui relircr d'un Irait de plume
si elle s'était montrée récalcitrante. Celle posilioo
é([uivo(|ue attira h d' F^on des scènes de toute espèce, j
Il cul h ce sujet une violente querelle au spectacle, ^
cl pour en prévenir les suites, on l'envoya à li
citadelle de Dijon.
A la révolution de 1789 , le chevalier d'B»»
retourna en Angleterre , où il se créa bienlW'
d'abondantes ressources en donnant des leçon»
d'escrime. H mourut à Londres, le 21 mai 1810»
âgé de 79 ans. Son sexe redevint alors le sujc*
d'une controverse toute nouvelle. Plusieurs arlidc»
qui parurent dans le Journal de l'Empire, les I»
et 21 juin 1810, approfondirent ctW^ grave qi^
lion , cl l'opimou Ircs-coucluanlc en pareille m*'
c itii père ElvsOe. cdlèhre itiirurgicii , flim;;é
raiilopsic ttu dérunt , vînt lermiiicr ciilin la
ii-ussioii en donnant gain de cause aux partisans
lu masculinité (250).
La marquise de Créqui parle ainsi du clicvnlier
£un dans ae9 Sotii-enirs : v II allait horriblement
iibit d'une robe de femme, une mi-chantc robe
avec la croix de Saint-Louis sur le cœui ,
ec ses cheveus gris dèrisoirement prostitués
ut une comelle sale. II allait ainsi faire assaut
irmcs en public , hélas ! de pair à confrère aYCc
pr**ol de salle , uu histrion d'escrime , un mu-
K appelé Saint-Georges. Quel oubli de la di-
Dobîiiaire, et quelle incouccTable dislrarlion
lutorilé royale!.... )) L'auteur de ce portrait
ffen récrie pas moins sur ce qu'elle appelle
ssibilitc sloiqne de IM. de Gucrdiy, et s"é-
quc l'ambassadeur de France ait montré de
|mgnancc h croiser l'èpée avec ce personnage,
^aii, dit-elle, cha-alier de Snint-Lotiis. Les
1 du siècle précédent s'autorisaient du mi.^mc
le pour refuser de se battre avec ceux qid
lient pas. Brantôme trouvait celle prétention
iplaisanle, et la manière dont il s'en mo<pic
it faire croire qu'il eut traité de minic la
[oe de M."" de Créqui , s'il en avait été
Mtcmporain. » y. li-ilv^sus , Pag. l'2H.
800 — HISTOIRE DES DUELS. —
Qui n'a entendu parler de ce Saint-Georges qui
s'appelait aussi, comme d'Eon, le chevalier de Sainl-
( xeorgcs ? Ces héros de salles d^armes jouiaraieDl
alors d^une vogue prodigieuse. On les applaudissait
avec fureur dans les assauts publics ; on les exaltait
dans les journaux ; on se les arrachait dans lesbou-
doirs. On était loin de traiter avec une égale dis-
tinction les plus habiles guerriers. Les noms de ces
chevaliers d'industrie sont écrits partout. Accueillis
dans toutes les biographies, ils sont destinés à passer
à la postérité dans le même cortège ou Ton admire
ceux'des vainqueurs de Fontenoy.
D'Eon et Saint-Georges , qui se donnaient ainsi
en spectacle , au grand scandale de la marquise de
Créqui , pouvaient alors passer pour rivaux ,, quoi-
que celui-ci fut de dix-sept ans plus jeune. Il était
né le 25 décembre 1745, à la Guadeloupe. Son
père M. de Boulogne , fermier-général , qui Tavait
eu d'une négresse, le mil de fort bonne heure entre
les mains du célèbre maître d^armcs Laboissière-
A 15 ans il battait déjà les plus forts tireurs. Il n^
larda pas à obtenir tous les succès possibles aupr^
des femmes qui ne s'effrayaient pas de ses cheveim ^
crépus , et de sa couleur beaucoup plus foncée
ne l'est ordinairemenl celle des mulâtres.
Saint-Georges devinl successivement écuyer
M.*°^ de Moutcssou ({ue le duc d'Orléans av
— ni*prrrp wix. — 301
fpoiisfe m 8«rret , puis capllaine des gardes de son
Gl», le duc de Chartres qiii en fît Sun ami intime, <> et
rpii le corrompait, dit la Biographie universelle ,
bniicoup plus qu'il ne pouvait lui-m^me corrompre
ce prince, n En 1776, il se présenta comme clief
il'iine compagnie de capitalistes pour régir l'ac^-
li^ic royale de musicpic. Mai« les actrices, et h
Ifur lêle M.*"" Aniould , (luimortl cl Rosalie,
l^cmpressérent d'adresser un pl.icel h la Reine, poin:
W rcprisenler que leur /(oN»ru relieurs privilèges
IM leur permellaieul pas dVlre «oumiscs à la direu-
tonii'un mulâtre.
On croit que le refus qiie Saint-Georges éprouva
*n cette circonslance peut avoir contribué à le
mulre plus accessible au\ opinions révolutionnaire»
qui étaient d'ailleurs celles de presque loua le»
hommes de couleur. Il prit part h toutes les
Wripies de répo«|ue , et joua im rôle principal
itos Ic« manœuvres donl le foyer était alors au
hlai» royal. Envoyé h Tournm, en 1791 , avec
uni: mission secrète du dtic d'Orléans près des
*niigrts qui s'y rassemblaient , il en fui fort mal
»«nieilli. On le repoussa ilc toutes les tables d'hôte ,
ci le conHnandant de la \-ilIelui fit même défendre
de se montrer en public.
Siint-Georges eul le bon esprit de se retirer sans
f»i[t dr bruit, et il chercha }i joner un ri\lc pins
302 — lUSTOlRE DES DUELS. —
lionornblc dans hi cnnipagnc qui s^ouvrit Tannée
Hiiivnnte. Il leva lui-mémc \in régiment de chasseurs
t^ elicval qiril commanda dans l^armée de Du-
moiiricz. Quoiqu'il eût dénoncé celui-ci à la Coa-
Ycntion , il n'en fui pas moins arrêté comme suspect
peu de temps après , et ne dut sa délivrance quW
9 Thermidor. Celui qui avait eu une existence si
brillante mourut dans Tobscurité et dans un état
voisin de la misère , le 12 juin 1799 , à Page de 54
ans. 11 existe une notice sur Saint-Georges k la tête
du Traité de l'art des armes, par Laboissière fils.
On a cité des prodiges incroyables de Tadresse
de Saint -Georges. Un de ses moindres tours de
fon^e était de frî\i)per deux écus jetés en Tair avec
deux pistolets diAV-rens. Il excellait de même dans
la musique et dans la plupart des arts d'agrément.
Du reste il avait des qualités morales qui ne per*
mettent pas de le ranger dans la classe commune
des spadassins , comme ses devanciers. Il était d^uik
caractère doux , humain et désintéressé , et Foi»
cite de lui des traits peu ordinaires de bienfaisance
et d'humanité. Chose plus rare encore, on lui».
rendu la justice qu'il n'avait jamais cherché ^
abuser envers qui que ce fut de sa force extra-
ordinaire dans le miiniement des armes.
Cet homme est le dernier grand artiste en es —
crime , qui , grâces Ix la légèreté de ses contem.—
ïit. - .ira
■fOnins autant peut-i-tre qu'ù son' adresse , ail pu
Ifltrindre k une aussi haute renommée. Le siècle
niviinl Ta devenir plus sfricus , cl riassera comme
Iflsdoivent IV'trc de scmblablea rairitts (351).
, H sV'Iait olors formé nu Palais royal une pclite
ir maie de celle de Versailles , et ([ui bienlôt en
wrba loute l'influence. On relronvail dans le ca-
cre des habitues de ce palais , un mcJange ilc
i des roués du Régent et des seigneurs UutU
aopelita soupers de Louis XV. Il s'y joignait une
"uwice de plùlusopliismc qui érigeait le TÎec en prin-
•^ct la corruption en svslcme. On raisumiailla
uiJuuche autant qu'on la pratiquait. Les romans
I w Faublas et des Liaisons dangareusus , sortis
^^us deux de cette école, sont une peinture asseK
^Bwe de la société d'alors, et surtout de celle où
m inaicDt leurs auteurs Louvel et Laclos (252) .
Les derniers vesligcs de la chevalerie avaient
'lisfraru partout , pour foire place à une certaine
'Muilé qui n'en était que la parodie. Toutefois,
le lUage austère de Louis XVI en imposait aux
«Hwtisans, et les obligi'ail h une certaine réserve.
Uséïcre économie du monaïque , son goût {mur
'" ^ic privée avaient banni l'appared de la repré-
wniiiion souveraine. Le vice et le scandale que
"i'Wrbail plus l'éclat de la majesté royale , cesse-
304 — TIISTOIRB DES DUELS.—
ren! de se monirer ci d^rcouvert. La comiplion
rougissant dVIIe-m^tne fut obligée de rcT^r des
formes et de s'étayer des conyeuances. C'était dans
les mœurs à -peu -près la même hypocrisie qiie
celle qu^avait introduite dans les consciences le
rigorisme des dernières années de Louis XFV.
La Cour perdit avec le prestige de son fiaste
une grande partie de Fascendant qu'elle avait m
long -temps exercé sur la Ville. L'étiquette dis-
parut; toutes les conditions se mirent peu-à-peu
nu même niveau , et le Tiers-Etat , qui s'était 8)p-
gulièrement grandi et avancé par la richesse et
Finstruction , se trouva bientôt en mesure de sou-
tenir la concurrence avec les classes supérieures.
La guerre de Flndépendance des Etats - Unis
acheva de mettre en vogue les idées d'égalité qui
ressortaicnt déjà de la situation. Elle produisit
France , sur la Noblesse , un effet analogue à cdii
des Croisades. La plupart des grands seigneu
de la cour qui y prirent part , rapportèrent d
Nouveau-Monde des principes et des goûts lo
nouveaux. Les idées américaines repassèrent
France avec les restes de Texpédition , et
vèrent les esprits parfaitement disposés à les
cueillir. Rient At elles se livreront combat avec I
idées anglaises qu'on allait aussi chercher de l'aul
coté du détroit , dans des voyages devenus à S^
— CHUPCTRE X\lt. — 305
ide ; el l'on verra celte lulle produire ce gou-
■nement anormal qui fui appelé Rf-puitlicain.
Un des seigneurs qui bc faisaient le plus remar-
er par son enthousiasme pour les instiluliont
mocratiqueg , ^lait le due de Lausiin , qui , sous
snom de duc de Biron, paya de sa t<^te cet engoue-
mt. Il conliauB néanmoins de donner le ton ii la
lur par l'^égance de se| manières et l'éclat de ses
IHHinet fortunes. C'était aussi un duelliste renommé
M io digne émule en long points du maréchal de
tichelieu. On peut en juger par ses Mémoires dont
Il publication Ct , il y a quelques années ^ une asseï
pinde lennation dans le inonde (253) .
Uq autre cor;pliée non moins célèbre de bou-
^ir» el de salles d'armes, fut le comte Alexandre
it Tilly , qu'on appelait aussi dan« «on tempe h
^iuu Tilljr. Ses Cotifessiont puliliées sous le
m de Mémoires , peuvent passeï' pour un« con-
tinuation de celles de Lausuci dont il était lui-
B^ la doublure. On y trouve un grand nombre
^ duels relatils pour la plupart à des intrigues
dt ruelles qui composent le fonda de ses récits,
vn ne pourrait gtières en excepter que les scènes
*)>■ il ne fut pas acteur, t«lle» qu'une alTaire où
1* c)ieTBlier de BoufUers rwiil un coup d'épée
"u ticomte de R onclH-rnllcs , jmi sujet <le la cbnn-
«w Les Jeuiios Cens du Sit*.le , dans latpielle c«
-20
306 — HISTOIRE DES DUEL9. —
dernier sVtc'iit apparemment reconnu ; telles qu^une
autre rencontre où le célèbre Champceuetz se fit
donner un coup d^épée pour des vers qui n'étaient
pas de lui. Tilly eut lui-même avec ce dernier
ime querelle littéraire qui faillit aussi finir d'une
manière tragique.
Ce personnage , qu'on retrouvera en Amérique ,
au chapitre XXXIX, pour jouer un râle de flibus-
tier à l'égard d'une riche famille de Pliiladelphie y
eut une fin digne de sa vie. Après avoir couru
les aventures et fait le métier de Lovelace dans
plusieurs cours de l'Europe , il finit par se ruiner
au jeu , commettre des escroqueries , et se brAler
la cervelle à Bruxelles en 1816 , pour échapper
à ses créanciers.
Un chapitre de ses Mémoires qui présentent
parfois des aperçus piquans et quelques faits eu»
rieux, est consacré h des réflexions morales sur
le duel, fort extraordinaires sous la plume d'un,
tel personnage , et qui rappellent assez les incon-
séquences de Poullain de Saint-Foix. En voici le^
principaux traits :
(( La France est la patrie des duels. J'ai par—'
couru la plus grande partie de FEurope ; ^^A
voyagé dans le Nouveau-Monde ; j'ai vécu paritÊM
des militaires et des courtisans , et je n'ai rencontra
nulle part ailleurs cette funeste susccpiibilUé , qui^^
~c.«Kvnr,v. XXII.- 307
I fihnqite pns , crî-e des oiTenscs , des insullps et
HprovocalioQS. D'où vieut dom* cette disposition
pirliculiére aux Franraîa, dont le cnrai:lére eat trop
lublc! pour ^Irc vindicatif , de se battre en duel
^r des sujets la plupart du temps si peu sérieux ?
Ctit rMucalion , c'est elle seule.... »
H Vous avez eu une discussion avec un ami
'blime. Quoiqu'elle n'ait pas excédé les bornes
me ccriaîite chaleur , les femmes y ont aperçu
\nuances injurieuses ; vous aimerez mieux tuer
ami ou vous faire tuer par lui que d'être soup-
fonnè de manquer de courage parles femmes qui
■ fcoonaissentsibien. »
u jeu , il est survenu un coup douteux ; il
J a eu malentendu. Un particulier de la galerie
I louri sardoniquement, il a parlé tout bas avec
* sœur qui a chuchoté avec sa cousine ; fait«s-
y>m tuer , car voua pourriez passer pour un fripon
M jeu , et rien n'éclaircil mieux une telle question
^u'im roup d'épée. »
Votre femme est - elle une coquette fieffée ,
Utei-vous tuer par son amant ; cela lui rendra
Vous avez vous-même séduit la femme
létc homme qui vous témoigne quelque
quelque humeur, tuez -le; car lui
*ï*nl ravi le bonheur cl la paix, ce n'est guércs
^ peine de marciiander sa vie. «
308 — ms'joinr. iu:s uurrs. —
c( Ces tableaux fionl-ils chargis.'... bien \iv\i :
et je n^ai pas parlé de cette classe odieuse de gens
appelés Spadassins qui font un métier du duel ,
et dont le regard insolent est une offense qui dés-
honore presque autant lorsqu^on s^en Tenge qutt
quand on ne s'en venge pas. » Mémoifesde Tilljr,
Tom. /, Ch. nu (254).
Du reste , les duels k la fin du 18.' siècle pa-
rurent assez souvent avoir perdu leur caractère
sérieux, et la gaietù française fit plus d^ufie fois
dégénérer les provocations en plaisanteries.
Beaumarchais , qui se vante dans ses Mémoires
d^avoir un jour , en Espagne , voulu forcer par
un duel un gentilhomme de la cour à épouser une
de ses sœurs ^ ce qui par parenthèse ne lui réussit
pas , s^exprime ainsi au sujet d^un cartel qu^il
avait reçu d'un de ses adversaires dans le procès
Goësnutti : c( Je n'ai piis dénoncé le cartel de
Bertrand au ministère public , comnne beaucoup
d^honn^'tes gens me le conseillaient. Il est encore
vrai que je n^ai pas sanglé un coup dV*pée d
la cuisse à Bertrand , faute d'avoir trouvé chec II»-
du cœur k pen;er ; mais j'ai fait sommer à ino
tour ce capitan par un caiiel timbré de se rendr
en champ clos dans la salle du palais , où mon pr<
cureur Fa vaiucmcnt attendu deux jours do suite.
— CHAPITBE \5il. — 3(13
On i.'OiiitHit l'espëdient dont s'avî^i* un jour
^iastru , U propos d'une [irovocation en duel
e lu part d'un n)<;dei:ln qu'il avait Imilî' de char-
plan. Prélcndanl qu'une ipiurclie mMiiiile devait
vider mcdiialtmcut , il proposa h sun adver-
laîre d'avaler luus deux i-ii mi'mc If^mps deux
>îlules dont l'une serait emiioisonuée , et dunl le
réglerait le chois. La peu position ne fui paa
IBrceplée, el le duel en reslu là.
Un jeune provincial se trouvant au liai de la
, fui l'ohJL't de qiielipies plaisanterie» sur an
«vanicrc uri^iuale de danser. — Mvnsifur, dît-il |
Aénnieiil k l'un de ceux qiiî le raillaient , s! je
! viat, je me bals bien. — Alors, rt'plitiiia '
l'autre avec un grand sang froid, hâtiez ~ vous l
m}outs H ne dansez jitinnis,
M. de Malscignc, oUicicr aux Oanlea-Franraisc»,
»)itnu depuis par le rûlc ttu'il joua lors de l'insu^
n de Naney, te battait fort souvent- Un jeiir '
K j) eut une querelle si violente avec un autre ofTicier
I (]u'ib résolurent de se biillre dans la chambra |
f iBéme où ils étaient. Après qiiehpies boites, l'ad-
, Ytreaire de M. de Malaeigue Le pressa de smi ép69,
d iinit par le lui enfoncer dans le cAté droit du {
ctiu et Tcneloua à la porte, ifestfort bien , ilon-
Mur, lui (Ut Maiwigne, main la tvlmite est OlJjUHc.
\.f marquis de Teiilcniac , geiitîllioinme Unston ,
310 —HISTOIRE DES DUELS.—
héritier du nom et de la bravoure du compagnon
de Beaunianoir dans le célèbre combat des Trente,
assistait un jour à la Comédie française et se tenait
dans les coulisses, selon la mode du temps. Le
parterre trouvant qu^il se montrait trop à découvert
se mit à crier dans un eiitr^acte : Annoncez ,
annoncez , V homme à riiahit gris , annoncez !
M. de Tenteniac s'avance alors d'un pas grave
au bord du Théâtre , fait un profond salut qui
produit aussitôt le plus grand silence , et dit d^uQ
ton élevé : a Messieurs, j^aurai Thonncur de vous
donner demain V Insolence du partent corrigée,
pièce en autant d'actes quMl vous plaira. L^auteur
demeure rue , etc. » Et il se retira respec-
tueusement , accompagné d'unanimes applaudis-
semens , à la place qu'il occupait précédemment.
11 resta chez lui toute la journée du lendemain ;
mais personne ne songea à prendre au sérieux
cette provocation, dont la forme originale et le côté
spirituel firent oublier la témérité.
Les exemples ci -dessus cités ont assez prouvé
qu'à Paris les lois prohibitives du duel étaient
tombées dans la plus complète désuétude. Il en.
était à-peu-près de même en province.
En 1 778 , la petite ville de Châteaudun fut I<?
théâtre d'un violent démêlé qui éclata entre deus.
— CHAPITRE XSIl. — 311
lie SCS prinopaiix liabilaiis. Uii sieur de Viaiiiville,
aridcti Cdiiseillcr au PiiHeincnl de McIk, ae croit
iiMuIlt par un geslo ftjuivoque (|iie lui fuit , en
pauaiil dans la puc , le sieur de PruiiCTille , sim
Tuisia, Celui-ci portait une ipie -. Vraiiiville rentre
cliei lui , prend la siumie , et ayant rejoint Pru-
ncTille dans la rue, un comliot s'engage entr'eux.
Tom deux sont blessés. Vrainvdle , qui l'avait été
pliii griéTcmciit , mourut dans les quarante jours,
>)ur la plainte de sa famille, un prui-'ès rrimmel
l'eulama au Parlement. L'aTOcal-géntral SégHÎer,
■lui portait la parnlu dans celte adaire, n'a pas
triiciilè dans son plaidoyer un seul mot du duel ,
m' des lois qui le proserivaienl. II s'est unique-
■neot Bttacliè Ji discuter s'il y avait eu ou non
iMSsiliat prémédil^, et si le dîfiml i^tuit mort de
'* blesnirc eu d'une fluxion de poitrine. U 6DiL
Il disant : « Voilà pourtant un combat : notre
ninitlêre nous vUigc de requîrir qu'il soîl fait
« itijonclions
: de Pruncville avec dé-
de plus à l'arenir user de pareilles loics de
^1. La justice sera satisfaite , et voire jugcmeut
■établira le calme dans la ville de Cliiïleaudun. i>
le 16 janvier 1779 , ai-ri?t conforme à ces con-
<^lusi(>nR qui m décharge Pruneville de l'accusation ,
't1 néanmoins lui enjoint d'être plus circonspect,
irtc dépens contre k famille Vrainville. »
312 ^HISTOdllC DES DUELS.—
En 1780, un sieur Diol de La Valette, avocat
à Loudun , reçut un cartel du cheralier de La
Coudraye , garde du corps , qui Taccusaît d'a^r
mal piuié de lui\ Vainement l'autre nie les propos ;
son adversaire insiste. Sur la plainte de ravocml^
intervient une sentence qui a fait défenses aux
parties d^en venir à aucunes voies de fait jsurtoui
qui puissent tendre au duel. » Lie chevalier n^ea
continue pas moins de harceler Tavocat, et de lui
faire des scènes partout où il le rencontre. Nouvelle
plainte ; nouvelle ordonnance du Juge qui mel
Tavocat sous la sauve-garde de la justice , hii per-
met de porter des armes pour sa défense et décréta
le chevalier de prise de corps. Celui-ci prend b
fuite, et néanmoins se porte appelant de la sentence.
Le 16 juin 1780, arrêt contradictoire, la Grande
Chambre et la Toumcllc assemblées , qui a Eût
défenses à La Coudravo d'insulter ou méfaire à
La Valette , lui enjoint dYtre plus circonspect »
le condamne en trois cents francs de dommage»^
intérêts api^licables aux {>auvrcs de Loudun ; fai-
sant droit sur les conclusions du Procureur*
général , déclare nulles les sentences des Juges
de Loudun , et leur fait défenses d^en rendre do
pareilles à l'avenir en leur hôtel (255) . »
Ces exemples qu^on pourrait muhiplier sufliscnl
pour donner la clef de la jurisprudence du temps.
— CHAPITRE SSCI.— 213
irnn les lois qui (léfendaicnt iiun-sculemcut le«luel,
lit m^e la simple provocation , ne trouvHÎeiit
pKret plus d'appui dani le pouvoir chargé de les
^iliquer que daiis celui dont elles émanaient.
On a vu dans le chapitre précédent quelle £UÎt
Il manière de procéder des Irihiinaux du Point
d'honneur. Cette juridiction , certc!) , avait bien
tilfl dégénéré de ce qu'elle avait dû ■'■Ire clans son
Bxiiliitiott primitive. Cet auguste sénat de maré-
duui , qu'on avait eliargè de veiller h l'honneur
lie la Noblesse , ne savait m^nic pas conserver aa
prupre di^iité. Ces hauts el puisions Soigneurs
'ft'cttient que des automates , que le pouvoir ou
h hveur faisaient mouvoir à leur guise ; et quand
H Inir arrivait de montrer de l'énergie , c'était
jeter l'insulte cl le mépris à la tête des justi-
ùhles, doimaiit eux-m£mcs l'esemple des méfaits
^'il* étaient chargés de punir.
Ce trdiunal ne présentait pas un aspect plus
digne aux derniers temps de sou existence. Ou en
jugera par ces deux exemple» :
H arriva un jour au comte «le Tilly , c'était en
I"S8, d'aller se battre i la frontière, avec un vi-
("Bile de Tilly-Blani , pour une discussiou généa-
"■^({ue. Celui-ci ne voulait pas le reconnaître pour
*°ti pireuL Quuiqu'il se battit tous les jours sau»
314 — MISTOrRE DES DUELS.—
coup férir à la barbe de Nos Seigneurs, la singii-
larité du fait attira cette fois leur attention. Tilly
prétend d^ailleurs qu^avant de partir pour la fron-
tière , il avait donné par lettre avis de son projet
au Roi et à la Famille royale. A son retour , un
exempt de la Connétablie vint Tappréhender au
corps , après Tavoir long-temps poursuivi et traqué
de châteaux en châteaux. Il subit un interrogatoire
et passa trois mois à la prison de FAbbaye-Saint-
Germain j d'ail il ne serait sorti qu^à la fiiveur
d^unc auguste intervention (256).
Le prisonnier s^était si mal trouvé de cette
épreuve qu^l en avait gardé une furieuse ran-
cune envers Tillustre tribunal. Il en distilla tout
le fiel dans un savant Mémoire quMl adressa mi
Parlement, par Tcnt remise du conseiller d^Espré-
ménil, et qu'il lit ensuite remettre à P Assemblée
Constituante.
(( C'était, disait- il, une véritable inquisition k
laquelle sY-tait soumise la noblesse française , sous
Forgucilleux prélcxle qu'elle était jugée par ses
pairs. On avait fait dégénérer un office purement
militaire en une autorité judiciaire et civile , dont
les abus étaient notoires — La plupart de ces grands
seigneurs , affaiblis par Tàgc et les infirmités , attei-
gnaient cette palme élevée au bout de leur carrière,
quand leurs mains débiles allaient bientôt la laisser
— CHAPITRE \MI. —
^'Iwpper. Sans éludes prt^limiunirtjs des lois cl de
la justice, leur honneur iiini:, leur loyauté cfac-
volernquc n^éUient pas un fannl assex brillnnl pour
InHairer. Les points difficiles étaient résolus par
un pManI de mntire des requêtes, ennemi naturel
de l» noblesse , étranger à la tacite qu^il avait à
nmplir par ses principes et son éducation. C'était
Ijiniun autre dédale pour les juges et les parties,
qtund il était vénal , passionné ou séductiblc. »
" Venaient ensuite une armée de subalternes et
it 9uppàts qui fermaient les avenues du tribunal ,
<l n'en ouvraient facilement les portes qu'avec des
i d'or, ils vendaient la faveur et les délations ,
ïipuséa qui faisaient absoudre , et les faux
qui faisaient condamner. Tourbe famé-
pie €l mercenaire qui vivait de fiel, de présens
Itorqué», de larcins et de rapines ! » Mciiioùts
'TiUj, Tom.II, Chap.XXII.
Il sufTirait, pour compléter ce tableau qui n'est
Burèment pas trop cbargé, de nommer celui qui
le tribunal du Point d'honneur jtiB<iu'à
|)ie de sa mort, en 1788. C'était, nouvelle
conséquence de ce temps ! le duc de Ricbcltcu ,
'jen de» marécbaux de France ; Richelieu , ce
"V^Mon doré , qui non-seulement aimait tant à
■fraiUer lui-mi'me , comme OD l'a vu au précé-
""UL diftpitrc ; mais qui , encore si l'uti eu croit ses
316 — HISTOIRK DES DUBLfi. —
Mémoires , faisait battre en son honneur jusqu^aux
grandes dames de la cour ; Richelieu , le plus
vicieux des courtisans , le souteneur et le confident
de rinfàme comtesse Du Barri, qui veillait pour die
au chevet de Louis XV agonisant ; génie infernal
apposté à un lit de mort pour en chasser le re-
pentir ; audacieux émissaire de Timpiété, qui venait
au moment suprême s^inteq>o8er , comme il Tavait
déjà fait k Metz , entre une conscience corrompue
par lui et le dernier cri du remords (257).
Voici comme ce digne chef de la Connétablie
remplissait ses devoirs et le cas qu^il faisait de sa
présidence. M. de Marcellus, gentilhomme Bor-
delais , père du comte de Marcellus d^aujourd^huj,
assistant à Paris , au spectacle , fut insulté par
un individu qui lui cracha au visage. Il alla s^en
plaindre sur-le-champ au duc de Richelieu qui
se trouvait en loge au même spectacle. Celui-ci
lui répondit bniscpiement en lui fermant la porte
au nez : P'ilain, va te laver*
M. de Marcellus professait des principes reli-
gieux qui ne lui permettaient pas de se venger
par un duel. L'affaire n'eut pas d^aulres suites.
Mais la convocation des Etats-généraux ayant eu
lieu peu de temps après, M. de Marcellus fut élu
député. Plusieurs gentilshommes de sa province,
qui avaient reçu le mcme mandat , lui rqpro-
— rniriTRE x\it,— 317
[ thrrptil ntnrs 1q rnndnilc quSl nvnit tenue dans
I h (irrnnslanoe dont il vient dVtre parl^ , et lui
I drolnr^rent fjii'ils no siégeraient pas avec lui.
I K. de Marcclliis, ne «aclianl comment sortir d'vme
iMIe position , du! se résigner i mettre Tépée i la
I avec l'un de ccti\ qui lui tenaient ce langage,
I il eut le mallieur de suecombcr (258) .
► Telles furent les mœurs des derniers Icmps de
ncienne monartrliie française. Les duels n'en for-
iul pas wulemenl un simple épisode ; ils en sont
t caractère le plus saillatil et le plus distinctif.
I Irait* si différen* de tous ces grands duel-
) p«M^ en renie depuis le 16.* siède, dans
■ chapitres précMens, ne présentent -ils pas un
ène moral digne d'attention ? Ne semblent-
k pas reproduire chacune des phases de la grande
période faimanitaiie?.... H y a, par exemple, un
progrès bien frappant dans la nuance si tranchée du
Caractère de Saint-Georges, mort dans la dernière
année du IS-'ciécle, quand, en le prenant pour
type de «on 6po<{ue , on le met en parallèle avec le»
Tilaux , les Lagarde-Vcilon, les Biissi d'Amboise, les
(outteville, les Beau for t , les {tîclteiieu, les d'Eon.
m(;me progression décroissaiile se fait remarquer
lans ie rang social de ces divers personnages qui
Hit cm devoir cherelier la célébrité dans une (elle
318 — HISTOIRE DES DUELS. —
Yoic. Il y a loin du fils du cliancclier Duprnt à celui
du subdék;gué de Tonnerre , et du comle de Mont-
morency-BouUeville à Saint-Georges le mulâtre.
Il va néanmoins se rencontrer sur cette route du
progrés social un grave accident de terrain. A peine
si les monceaux de ruines et de débris qui Ten-
combrcnt, permettront le passage. Là des monu-
mens , des cités entières ont disparu ; là une onde
fougueuse, dont la couleur est celle du sang, s^est
creusé un lit profond. Sur cette terre désolée, les
Omar et les Genseric sont venus se donner la main
avec les égorgeurs de la Saint-Barthélémy. Tristes
excès de la période révolutionnaire qui va clore le
18.^ siècle, excès à jamais déplorables, mais re^
présailles trop cruelles d^excés analogues dans le»
temps antérieurs !
Le corps social a passé trop brusquement d^un
régime extri^mc à un autre , d^une température
glacée à une atmosphère incandescente , de pro-*
fondes ténèbres à une éblouissante clarté. La Révo^
lution, ce fut le premier bond de la béte fauve
qu^on lance dans Taréne ; ce fut Texultation fré-
nétique de Tesclave qui vient de briser sa chatne;
ce furent les saturnales de la Liberté.
CHAPITRE XXIIf.
Ernlation Je 1789. — Duch poliiiques. — Décret
d^MiiiBistic du 17 sepletiibrc 1792, pour fait d6
duHs. — Aclre dt-crel du 29 Messidor an II. —
iaùf,Tation. — Cliûte de L' Aristocratie. — Ses con-
•éijaences.
' Les temps liaient aceomplia ; Tlieure de la ré-
nalion sociale avnil snnné. Tout ce sol de France
^ ^fond^nieiil miné recélnil des feux soiilerraiiis
qui n'attendaient qu'une étincelle pour s'allumer.
Timi cca élémens divers, où fermenlaienl l'horreur
fl le mépris du passé , rimpatieiice du présent et
le» espérances de l'avenir , se trouvent réunis A
combinés dans un congrès national. De leur con-
l»cl jaillit à l'instant la flamme électrique (pi'ac-
cotnpagne un violent coup de tonnerre. Ceux que
'> Catastrophe menace de plus prés se précipitent
pour la conjurer. Hlille bras réunis cherchent à pré-
'«lir l'explosion en la ctimprimant ; mais ils n'ont
Wt tju'eii redoubler la force , et l'avide cratère
'lu volcan les a tous dévorés.
320 — mSTOIBC DES DCCLS. —
Nous touchons ii une époque où le Duel w
subir une grande métamorphose , el se reproduire
avec une physionomie nouTeUe dans les discours
de la tribune , dans Tardente polémique des jour-
naux et dans les scènes sanglantes de la place
publique.
Déjà , comme Va remarqué TAuleur du Tableau
de Paris, dans le passage cité ci-dessus, pag. 278,
le duel était descendu de la Noblesse dans la Bour*
geoisîe , qui , bien loin de le ranger au nondire
des abus qu^il fallait détruire ^ n^y voyait qu*un
privilège quelle bridait de partager , par suite de
cet esprit d^imitation si naturel aux Français, de
toutes les conditions. Cette maladie si long-leni|if
concentrée dans la classe la moins nombreuie de
la société ^ va donc désormais s^éiendre et gagner
toutes les autres. Ce qui n^était qu'un préjugé de
caste envahira tous les dégrés de la hiérarehie
sociale. Le temps est passé où un gentilhonmei
en posant fièrement la main sur la garde de ses
épée, pouvait imposer à celui qui ne rétail pas.
Cette épéc a c^ssé d^étre une arme privilé|^»
Bientôt on la verra briller dans ces mains pléi-
béïennes qu^avait si long-temps avilies le bâton d«
moyen âge , et ses prodiges sur les champs de
bataille en effaceront Tantique injure.
Dès le 11 septembre 1790, la juridicliiMi da
-CUAPITRE X\ltl.-~ 321
PoinI d'honneur avait disparu nvcc It^s autres tri-
bunaux d'esceplion. Cri'f- pour prévenir les duels
entre les seuls gentilshommes , cl l'on a vu aux pré-
cédeiis chapitres comme il avait rempli celte mis-
■iun , ce tribunal ne devait plus exister le jour ofi
l'oD (lët^^rélait qu'il n'y avait plus de noblesse. De
r^galilé devant la loi va dériver celle du eharop
dos, et Ton ne songera plus b voir un scandale
dans CCS combats mi-partis si rudement mis hors
Il loi par les ëdils de Louis XIV (250).
Des colUsioiis individucDes vont devenir le pré-
lude de ces chocs terribles, où tes partis ne pouvant
tt ooDToincre chercheront ii s'exterminer. On verra
«a luUes reproduire dans leurs circonstances les
caractères variés et si tristement progressifs de cette
blantc époque.
I» Je n'entrerai pas ici dans le détail de ces conflits
\: que faisait naître sur tous les points du
0)a profonde dinsion des esprits aux prê-
tes de la Révolution . Ces incîdens par-
: trouvaient absorbés par les grandes
llcten du drame politique qui se jouait alors.
I B en est pourtant plusieurs qui ont eu quelque
I Mcnlissement , suit k cause de l'importance des
I pcnuiitiagca , soit h raisuu de leur connexité avec
I quelque événement historique. Ce sont ces der~
I nicn qu'il aullira de reproduire ici,
21
322. — lUSTOIHE DES DUEL5. — -
La plus grando figure , qui domine toute la
Révolution, est sans. contredit celle de Mirabeau,
(j^était lui qui en avait donné le signal , et il était
peut-éire le seul qui aurait pu la diriger. Il songeait
déjà à en enchaîner le mouvement, quand son
bras vigoureux se sentit paralysé par le bras plus
puissant encore de la Mort.
On verra au cliapitre XXYII , relatif aux Duds
parlementaires , avec quelle impassibilité cet Aigle
de la Tribune accueillait les interruptions pro-
vocantes qui lui arrivaient à chaque instant du
c6té droit de l'Assemblée Constituante. C^est là
sans doute ce qui a donné lieu à cette accusation
de poltronnerie que cherchèrent à accréditer ses
ennemis politiques. Mirabeau pourtant avait fait
ce qu'on appelle ses preuves. Rien n'a manqué
à son immense renommée , pas même la célébrité
la plus triste de toutes, celle des duels.
Le plus grand orateur des temps modernes avait
d'abord été capitaine de dragons, et s^était dis*
tingiié en cette qualité dans la campagne de Corse.
Son orageuse jeunesse fut marquée par plus d'une
aiTairc d'honneur. Il débuta , dès l'Age de 18 ans,
à La Rochelle , par une rencontre avec un jeune
oilicier comme lui , qu'il blessa légèrement.
Un jour qu'il subissait quelques mois d'exil hors
de sa province , il rompit son banc pour venir pro-
— CHArlTBE XXIII. — 323
T(K|tier un baron Je Villrncuvc-Moans qui avail
nuuHé sa sœur , e( il lui infligea , sur son refus ,
une correction tniHiaîre, Celle afl'aire lui valut sa
fireniicre incarcùration et un long prorès.
Plus tani, (laria Biiii inslnncc en siparation avci;
la romlesse de Mirabeau , il cul alTaîrc successi-
n^miTit k trois liabitans (V\\\ (jui avaient pria parti
wnlre biî , entr'aiitrea h un comle de GalifTct.
Après lui avoir aussi donné inulilemcnl plusieurs
Tpndn-vous , il fuiil par Talninlcr eu pleine rue ,
l'épée A la main. Son adversaire, après un combat
Iri»-vîf , reçut au bras une blessure qui le traversa
tic pari en part. Le lendemain, IMirabcau et lui
lurent consignas par le Grand -Prévôl. Quelque
I temps apr^s, d la suite d'explii:alions salisfaisantcs,
^■Éne oDtiére réconciliation fut conclue dans la mai-
^Pvn et par l'cnlremise de M. de La Tour, premier
~ pr^idenl et intendant de la province. Slt^moirci
Ac. Mirabeau, Tom. I , II el III.
Dans la vie pid>)iquc ou privée , dans IVnceiDte ,
comme hors de l'enceinte parlementaire , Mirabeau
ne BC piquait pus de se montrer très-mesuré dans
f«s expressions. La fougue de son imagination
tl l'audace de son caractère renlraiuaienl souvent
311-delii des bornes de la commune politesse. A
l'*porjHc du di-part du duc d''0rl6ans pour l'An-
Rkttrre , il lui adressa b ce sujet , dll la Biographie
824 —HISTOIRE DES DUELS.—
Universelle , des représentations d^une insolence'
énergique. Il envoya aussi un cartel au préâdent
de Frondeville, qui avait déposé contre lui dans
Tenquétc relative aux affaires des 5 et 6 oetdbre*
Cette provocation n^eut pas de suite.
Ce même président de Frondeville avait dit à
la tribune, dans la séance du 18 août 1790, en
faisant allusion k ces événemens , que les ^issassùis
des Prùices jjorcoufmcnt librement la capitale f d
étaient peut-être assis dans rassemblée. L^auteur
de cette apostrophe fut censuré.
A Tune des séances suivantes , un membre vint
dénoncer un pamphlet dans lequel le président
de Frondeville se déclarait lionoré de la censure
qu^il avait encourue. On proposa contre lui la peine
des arrêts ou de la prison. Il n^y avait pas encore
de précédens établis h ce sujet. On réclamait d^une
part le maintien de Tinviolabilité du député^
d'autre part le respect dû à TAssemblée. On dis-
tinguait parmi les partisans de la sévérité le célèbre
Bamave. « Quand on s'est honoré de la censure,
disait-il y la prison est la peine la plus douce». •••
— Ceci a l'air d'une guerre ouverte de la majorité
contre la minorité, interrompt M. de Faucigny,
et pour en finir, il ny a quà tomber le sabra
à la main sur ces gaillards là. »
Cette sortie occasionna un tumulte effroyable.
! xTiii— 325
M. de Faucigny , rcronnaissant ses loris , fil aes
excuMfl s^Dce tenaïUc. Plusieurs mombres , Mi-
rabcHU surtout, n'en insistèrent pas moins sur son
«Tcstatioo et celle de M. de FFondcvillc , pour
lefl soustraire, disait -on, ii une Tengeaiioc plus
terrible, celle du peuple. L'Assemltléc finit ii6an-
Bwini par accepter les excuses de M . de Fmicigi)y,
tl par ordonner huit jours d'arrêts k M. de Fruo.-
Lénille.
Ces mesures ne rendirent pas les déliliôratîons
la» calmes. Dans la s^-ancc du 13 novembre sui-
i, Mbabeau donna lui-miJme l'exemple des
tatités. U s'agissait encore d'infliger à un
kembre , M, Roy, une peine d'arr/'H ou de pri8()n ,
f'Ipour uee exclamation inconsidérée. Bamiive iu-
âslail de nouTeau pour une arrestation imm^diale.
Mirabeau adressait, du haut de la tribune , au niai<-
(|iiÎ9 de Foucault qui s'opposait h la mesure , des
phrases telles que colIc-ci : te P'oilU, Monsieur ^
ca que le pixifoiid rm'prU que Je dois à i-oiiv ttOn~
duiui ctà vos discourt m'ordonne de ivus adresser, »
Lcj^rf'aidcntle rappelle à l'ordre.
Mirabeau insiste pour que M. Boy soit immé-
diatement coaduit en prison. M. IMalouel parait
Il la tribune; ou ferme la discussion. Il veut parler,
t'D 'Irinaade (pi'tl suit chassé de lu tribune. M. tW.»-
tuunncl obtient lu parole pour un amendement ;
326 — UISTOIRE DES DUELS. —
il propose de substituer les arrêts à la prison.
Il est violemment interrompu. 11 demande alon que
TÂssemblée toute entière soit rappelée à Tordre.
11 s'agissait dans ces orageux débats, des suilet
d'un duel qui venait d'avoir lieu entre deux mein*
bres de PÂssemblée , MM. Charles de Lameth et
de Castries. L^irritation politique du moment n^étaft
pas étrangère à cette querelle, qui néanmoins n^ayak
pas pris naissance h la tribune. M. de Lameth aTait
d^abord refusé un cartel de M. de Chauvigny de
Blot. 11 accepta le lendemain celui de M. de CastrieSi
et en reçut une blessure au bras gauche. Au pre^
micr bruit de cet événement , un attroupement
considérable se porta à Thûtel de M. de Castries
qui fut ravagé de fond en comble. On allait mettre
le feu à la maison ; mais la municipalité et la garde
nationale arrivèrent , et Tordre fut rétabli.
Pendant ce temps, des députations d^assembléei
populaires se succédaient chez M. de Lameth.
Dans les harangues emphatiques qui lui étaient
adressées selon Tusage d^alors , on remarque une
énergique et imanime désapprobation des duels.
Le Moniteur du 15 novembre 1780, qui con-
tient tous ces détails , appelle aussi le duel uut
préjugé barbare qui ne mérite que la honte ou le
ridicule de Topinion. Mais il parle avec un ton
de laveur de ce sublime mouvement du peuple^
t'est assemblé avec une espace d'onliv, (jui s'est
aitivu/iè sans tumulte, etc., eto
Les marnes éloges se font remartiuer dans le dia-
ffoun prononcé le 13 Ji la tribune par Mirabeau :
F Vous devez établir, dit-il , dans l'cmjure l'ubéis-
loce aux autorités légitimes, et vous ne réprimez
tas dans votre sein une poignée d'iusulens cons-
pirateurs. Ah \ c'est pour leur propre salut que
j'invoque votre sévérité.... Savez-vous qu''au mi-
lieu de cette destruction ( nul n'osera dire la
dilapidation ) d'une maison proscrite , le peuple
s'est religieusement arrêté devant l'image du mo-
narque , que le portrait du chef de la nation ,
de l'exécuteur suprême de la Loi , a été dans ces
momens d'une fureur généreuse l'ttbjel de aB
vénération Y.... Savcz-vous que ce peuple irrité
.a montré à M.™' de Cuslrics, respectable par son
tge et son malUeur , les égards les plus alTectueui i'
SAvez-Tous que ce peuple en quittant celte maison
qu'il Tenait de détruire avee une sorte d'ordre
tl de calme, a voulu que chaque individu vidât
SCS poches , et conslalùt ainsi que nulle bassesse
n'avait soudlé une vengeance qu'il croyait juste P...
Voilà , Yoilîl de l'houneur , du véritable honneur
que les pr^ugés des gladiateurs et leurs rites
atroces ne produiront jamais ! »
N'e^-ce pas ainsi, que de tout temps ecituincs
328 — histoihe des duels. —
palettes intéressées ont dépeint les pillages et les
émeutes P Ce discours n^est-il pas le protocole obligé
de ces imprudens panégyriques que les courtisans
populaires , les plus serriles de tous , accordent si
libéralement à des scènes toujours funestes, fou*
jours déplorables, quelqu'en soit le motif?
Dans le cours de cette séance , rAssemblée reçut
une dépulation de la Municipalité de Paris ayant
à sa tête le maire Bailly qui donna lecture d*un
arrêté ainsi conçu :
« Le Corps Municipal , alarmé de la fréquence
des combats singuliers et des troubles qu^ils exci*
tent dans la capitale, a arrêté qu^il serait envoyé
à rAssemblée Nationale une députation de douM
membres, pour la supplier de rendre le plus
promptement possible , contre les duels , une leî
qui rappelle les citoyens aux règles de la morale,
et les prémunisse à jamais contre les suggestions
d^un sentiment incompatible avec le caractère d'un
peuple libre et bienfaisant. »
M. le président répond à la députation et IHnTÎle
aux honneurs de la séance.
M. Baillj : « Nous sommes bien sensibles à l*in-
vitation de TAssemblée ; mais nous lui demandons
la permission de retourner à PHôtel - de - Ville ,
c'est-à-dire à notre poste et à notre deyoir. »
(On applaudit).
— CH*riTRiî vxiir. — 829
*On sait que ce fui Dailly, qui , rannèc prùc6-
, avait présidé la célèbre TÉunion du Jeu tic
atmc. En 1793, ce peuple qu'il croyait Uhv
Vbienfaisant ^ a payé de l'èclmfaud cet immense
rrioe (260).
TToe des dëputations, qui étaient allÊ haranguer
de Lameth en son domicile, se présenta le même
ir à l'AsseitiblÉc Conslttuante. Elle apportait
k barre un arrêté de Section qui sollicitait un
d'eprés lequel quiconque à l'avenir pro-
[uerait en duel un membre de la législature ,
lit poursuivi comme criminel de Icsc-Nation,
iraleur de la députation appuya cette demande
n loDg discours dans lequel il demandait ,
{u'au moment ou le sang d'un représentant du
jple venait de couler pour venger une injure
liculiére, l'Assemblée s'expliquât sur ce barbare
des duels auxquels les législateurs doivent
ijours se refuser; qu'en m^me temps o;t armât
^aive de la justice contre l'homme pervers,
lequel la capitale exerçait aujourd'hui ses
igeances. »
Ce discours fut accueilli par les applaudissemens
tribunes auxquels se mêlèrent même ceux d'une
tic de l'Assemblée. Ce fui alors que M. Roy,
uté d'Angouléme, laissa échapper celle excla-
JOD ; // nj a (fue des scélvnils tfai puissent
330 — HISTOIRE DES DUELS.—
applaudir ! ^Assemblée la prit pour elle , et après
de longs débats elle en punit Pauteur de trois jours
de prison. M. de Murinais réclama les arrêts contre
M. Riquetti , ci- datant Mirabeau , qui aTait in-
sulté M. de Foucault ; mais on passa à Tordie
du jour.
L^éloquent Barnave prononça dans cette ora-
geuse séance un discours beaucoup plus digne et
plus mesuré que celui de Mirabeau.
(c S'il est un véritable moyen de prévenir les ven-
geances personnelles , disait-il , et douter de la main
. des citoyens les armes qu^ils dirigent contre leurs
concitoyens, ce moyen est d^armer la loi contr^eui.
Qu^elle punisse les injures , et bientôt on cessiei^
d^en faire. Que ce soit vous qui donniez Texemple
de la modération dans cette Assemblée , et bientôt
vous la verres régner partout.... J^ignore commeift
cela se fait ; mais il existe un système de provo-
cation dirigé contre les bons citoyens. Celui qiji
est maintenant gissant n^est pas le 3cul qui ait
éprouvé de ces attaques. Plusieurs d^entre nous ont
aussi été insultés aux Tuileries et dans les liei|X
publics. (Plusieurs membres répètent i A la trir
bune, à la uibutie me me, nous a^ons étéproi'oquési^
Je demande que rAssemblée prenne des mesures
pour arrtter Peflet des complots dont a.étè la vic-
time un homme chéri et estimé Je demande
331
W-^ae le monbrc, qui tout ii Tlicure a profiiiè de
1 4J basses ipjures contre l'Assemblée , suit arrêté k
'l'ioslaiil m^mc. » (Ou applaudit.) Moniteur ilu
Xânoi^en^re I7&0, N.- 319.
Ce menibre avait paurtatit tonte raison au fonds,
quoiqu'il eùl tort en la forme. Depuis lors on
culcndit sourent dans les débats parlementaires
, letCDtir le cri : ..^ l'Ahbaje!..,, Barnave ne pré-
tyail pas alors qu'il serait bientôt suivi de cet
Kcn: A l'èckafaud ! Il fut l'une des prcnoicres
limca de celle fatale violation de Tinviolabiliti
8 députés. Après la prison qu'il trouvait la peine
I b plas douce, vint la mort qu'«n proclama aussi la
plus douce des peines , puisqu'elle ne consistait
plus que dans la simple privation de la vie (26i).
L*aiiteur de cette exclamation historique : Ce sang
Mnû-il donc si pur'..... paya de sa It'lc cet oubli
des principes de r^tcmellt: morale que n'excuscut
pas même reifervescence el l'entraînement dca
passions politiques.
Trots mois auparavant , jour pour jour, Barnave
lui-même s'était battu au pistolet avec Cazalés ,
■on rival d'éloquence et de principes, à la suite
d'une discussion politique également ùtraAgère aux
débats parlementaires. Ce dernier reçut h la tête
1d balle de son adversaire , et n'en fut qu'assez
l^èremcul bleaeé. L'énitiutc du 13 novembre au-
832 — HISTOIKE DES DUELS. — '
rait eu sans doute un précédent , m c^eùl été à
l^orateur populaire que Taccident fût arrÎTé (2B2).
J^ai donné quelques déTeloppenens à ce curieux
épisode des débats si dramatique» de la première de
nos assemblées parlementaires , parce qu^on y toâI
déjà poindre Taurore sanglante du 81 asai , parot
qu^il fut le prélude de ce» effroyables tempête»,
où disparut la Gironde, où la Monêagne a^écrouU
sur la Plaine, et finit danaune dernière convulaioB
par réagir contre elle-même.
Le fait suivant peut servir à caractériser Tépo-
que de TÂssemblée Législative, qui fut la tranaîtieii
du régime constitutionnel de 1789 à Tétai répu-
blicain de 1793.
Dans la séance du 15 juin 1792, M. Guadet>
député de la Gironde , se présenta à la tribune
pour dénoncer un guet-à-pens, dont venait d^étre
victime un membre de la même députation de la
part d^un de ses collègues. « J^appelle FattentioB
de TÂsscmblée , dit-il , sur un trés^grand attentat
commis sur Tun de nous. Depuis long-temps des
patriotes sont désignés au fer des assassins , qui
se trouvent au sein même de la représeotatioa
Nationale. Hier au soir, M. Grangeneuve a été
assassiné par M. Jonneau qui , Payant pria à part
d'un air de fraternité , Va terrassé et meurtri de
H — CHWITBE XXIII. — 333
roii[>3 de pieds et <lc bâlon ; Inul cela pour un
(lisscntiTTicnt d'opinion sur raffairc d'Ailes Je
ncns demander rengeance de cet attentat , non
IBU au nom de M- Grcmgencuvc , mais au nom
4n Peuple français.... n
■ • Voilk donc encore un membre distingué de celte
«èlobre Gimnde qui vient , par l'exagération de
IDD accusation , fonder un de ces prëcédens qu'on
invoquera l'année suivante , pour l'envoyer lui et
«MJt son parti à l'échafaud ! —
L'Assemblée , sur celle dénonciation , décréta
iju'unc enquête aurait lieu dans la séance suivante.
U résulta des dépositions , et notamment de celles
lie plusieun députés témoins oculaires, que celle
icène ^asiossinat n'était qu'une simple rixe pré-
tédée de provocations muluellea. Dans une ex-
pUcslion amiable , Grangcneuve avait dit à son
collègue qu'd n'était qu'un /".... t^iédase, terme
li'nr^t du temps et qui était au genre familier ce
(juerépithètc de peivers était au style plus relevé.
Cïiui-ci lui répondit : f^ous venez de m'însulter,
èlfs-vous un galant homme ? — Oui. — Eh bien .'
l'ouvei-vous demain au bois de Boulogne avec
'''■I piftoicU. — Demain, it dî.r heures, je seraià
^liitemblée, répliqua Grangcneuve en s'avançant
^e b face contre son interlocuteur. — Mais on
'^ra i/ac 2'qus êtes un lâche. — El vous un J. F,
884 — HISTOIRE ms hvel^ —
A ce propos , Jonncau donne un soufflet à Gran«*
geneuTe. Celui-ci risposte en lui lançant un pa^é,
puis un second. On se prend au collet; mnoent
ensuite les coups de canne et de pieds. Plusieurs
personnes étaient accourues , entr^autrea le fieuaieus
Saint-Huruge qui frappait Jonneau , aidé de Bar-
baroux , autre Girondin. Saint-Huruge s^ëtait mis
en même temps h haranguer le Peuple : il Toulail
exciter une insurrection en hurlant qu'on assas-
sinait les députés patriotes. On sait que la GironJe
était la Montagne de la LégislatiTC et qu^elle devint
la Plaine de la ConTcntion.
Guadct n'en persista pas moins à réclamer un
acte d'accusation pour assassinat contre Jonneau.
Un grand nombre d'orateurs furent entendus , en-
tr'autres M. Henri-LariTiére. « Jonneau , dit^il ,
a commis une lâcheté en provoquant un homme
bible pour une misérable injure , puis une autre
lâcheté en le frappant. Il aurait dû imiter Turenne
qui, provoqué k un combat singulier, avait ré-
pondu : « Demain on livre bataille; tout notre sang •
doit être pour la patria ; nous xf errons qui de nous
saura mieux la itcjemlrc» Mais il y a loin de simples
voies de fait du ressort de la police correctionnelle
à un assassinat prémédité. Je demande que Jon-*
ncau soit envoyé pour trois jours à l'Abbaye, et
qu'on passe à Tordre du jour sur le reste. »
— CHAPITBF XXlll. — 33a
itAprce des débats fort nnim^'s qui se jirolon-
rent Iréa-nvant dans la nuit , rcUc proiiosition
l adoptée. Moniteur des 16 et M juin 171*2,
,<» 168 et 160.
jCe SaÎDt-Huruge , dont il vient d'tître parl^ ,
nniil joumcllemenl dans des sccncs de cette na-
«. U avail pourtant iiVi: militiiirc , et s'était m^me
I renfermer pour duel au chflleau de Dijon par
ciaion des Juges du l'oint d'honneur. Il venait
dtasiper une grande forlune quand la révolution
mmcnça. U se fit alors l'orateur des vafésetdes
ipol5 du Palais-Iloyal , où il reçut plus d'une fois
Boufflels et des coups de bâton. Rien n'Ciaît
iltant comme le cynisme de sa parole et de
e sa personne; mais un geste un peu expressif lui
lait la bouche. Il pérorait dans les rues, et sa
, retentissait dans le tumulte comme le mugîs-
enl d'un taureau. It était l'âme de tous Ica
jppemblemens, et marchait k leur télé pour visiter
I maisons suspectes et assommer leurs proprié-
tés. Il fui avec Camille Desmoulins, caractère
une toute autre trempe , le principal promoteur
I l'iasurrecUon des 5 el G octobre , dont le signal
Blîl du Palais-Royal.
Tels ètaicDl les aigrefins d'alors, dont le ci-devant
Ut]ui9 de Saint-Ilurugc peut passer pour l'un
■ nudêlcs- Leur main brandissait une pique
336 — MI&TOIRE DBS DUELS.—
en guise d^épée ; leur pauache était un bonnet
rouge, et le reste de leur accoutrement une car-
magnole, un large pantalon et des sabots (263)..
Quoique les duels offrissent toute espèce de
dangers à cette époque , où l^intervention populaire
détruisait toutes les chances d^égalité , il parait
qu^ils s^étaient assez multipliés pour donner lieu k
un décret d'amnistie de FÂssemblée Lègislatitei
dont Toici les dispositions :
« L'Assemblée Nationale considérant que, de-
puis les premiers momens de la Révolution^ Toppo*
sition momentanée des opinions a déterminé des
citoyens à des provocations qu^ils n^eussent point
faites , s'ils avaient eu le temps de réfléchir et de ne
consulter que leurs sentimens réels; qu^il en est
résulté des instructions criminelles qui ont enlevé
à la société des hommes qui pourraient lui être
utiles , et que l'indulgence nationale a le droit d*y
rappeler ; décrète qu'il y a urgence. »
€( L'Assemblée Nationale, après avoir décrété
l'urgence , décrète ce qui suit :
Art. I.^^ Tous procès et jugemens contre des ci-
toyens depuis le 14 juillet 1789 , sous prétexte de
provocation au duel , sont éteints et abolis.
Art. II. Le pouvoir exécutif provisoire donnera
les ordres nécessaires pour que les citoyens dé-
— nîAPiTiii: \Mii.— 337
I en «'ons/'inicnrc desdils procès cl jugomcns ,
il mis sans dtlai en liberté. »
n s'ngissail hit-n en cfTct au 17 (iècemltrc 1792 ,
punir k duc) quand l'aganssinat était k l'ordre
jour. Dès les premiers jours de ce moi» de
[libre mémoire , le satig ruisseLail dans les prisons
mgées en boucheries de chair liiimaine. Los
urtrcs en champ rios uY'taient que des baga-
les auprès de ceux de la place publique. CViail
qtie Danton appelai! ; La justice du Peuple,
ip lo duel est la raison du spadassin.
Bîenlât les féroces acteurs de ces drames san-
has s'enlregorgent comme les soldais de Cadmus-
t Bévolution , disait Camille Dcsmoulins , ref-
mhie à Saturne el dévore ses cnfans. On im-
Ble sur l'aulel de ki Liberté des hécatombes
■saînei , liùle réminiscence de» horribles hom-
que le« Druides gaulois rendaient à leur
EU Teulatéa.
tlaral s'appelait ators If Di\'in, el Robespierre
'neomiptibie. Marnt , qui avait été médecin ,
iHait le corps social comme te corps humain.
Ni régime de prédilection était ta saignée. 11 dé-
fendait SX cent mille têtes. Les Girondins vou-
icnl aiarcbiinder ; on commença par eux.
Voici le portraBt tpi'a tracé de Robespierre un
modcfne : «■ Qu'on s'imagine un honnne
22
888 —HISTOIRE DES DUELS.—
assez petit , aux formes grêles , à la physionomie
eflilée , au front comprimé sur les côtés comme
une béte de proie; à la bouche longue, pâle et
serrée , à la voix rauque dans le bas , fausse dans
les tons élevés , et qui se convertissait dans Fexal^
tation et la colère en une espèce de glapissemeiit
assez semblable à celui des hyènes.. Voilà R<d)e9-
pierre. Ajoutez à cela Tattirail d^une coquetterie
empesée , prude et boudeuse y et vous Taurez pres-
que tout entier. Ce qui caractérise Tâme, le regard,
c^est en lui je ne sais quel trait pointu qui jaillît
d^une prunelle fauve entre deux paupières con-
vulsivement rétractiles , et qui vous blesse en vous
touchant (264) . »
Cet homme avait péniblement concentré ks
sombres accès de jalousie que lui avaient inq[>irés
les grands orateurs de la Constituante. U avait
dévoré en silence les sarcasmes amers que leur
dédain laissa quelquefois tomber sur ses obscurs
sophismes. Il s^en souvint au temps de sa puissance,
comme il s^est aussi ressouvenu des grieb de
Favocat et même des injures de Técolier.
Il faisait beau le voir à la tribune des Jacobms
quand il préparait une mise hors la loi. U j
préludait ordinairement par de légères plaisan*
teries , afin de provoquer ceux qu^il voulait perdre
à lui répondre. Quand il avait attiré la vicliBKe
■«»-citAPrT(tE \\m. — 339
(tara le piège, san Ion, son air cl sa voix chan-
^'nient tout--t-c(tup ; on cntcnctait le cri du chacal
t[tii vient tie sntsir sa praic.
C'cal ainsi qu'il sacrifia Pliilippcaus et Camille
Desmoulins ses camarades de collège, puis Danton
(Inns lequel il \it un mal , et malheur aux rivaus
comme aux amis de Robespierre (265).
I Camille Desmoulins nVtait pas un démagogue
Hvdinnire. Celte étoile, avec quelques autres en-
core, ne doit pas ^Ire ronfondue parmi ces astres
tDJurieux qui composent la sanglante constellation
de la Terreur. Il fut le précurseur de Tallieii ,
auquel il applanit les voies et qui valait beaucoup
moins que lui. Ce fut Camille qui le premier osa
parier d'un Comité de clcinencc qu'il voulait
joindre aux deux autres , pour en Tormcr une sorte
Je Trinité gouvernementale. L'ancien Procureur
lie ta Lanterne venait de voir immoler les Qailly ,
les Barnave , les Duport-du-Tcrlre , les Rabaul-
Sainl- Etienne. La loi des suspecla encombrait les
ions. U osa proposer qu'on s'arrêlât pour réparer
1 le mal qu'il avait contribué ii créer , il ne
mandait k mettre en lumière que dix numéros
1 Fieux Co/delier; au septième il fui sacrifié.
I y a dans le journal de ce tribun des pages
nt réioquence ne serait pas désavouée par les
I Ue Aome el d'Athènes. Sa manière est celle
Hù ^ HlStQlUE D£S bUÉLS. «^
de TacRc , do|il il fait souvent le plus heureiuc
usage. Il lui cippruale ses énergiques couleurs pouif
tracer le portrait des Tibéres et des Phalàris dil
comité de salut public. Sa réplique à Barrère sur
les suspects, est enlr^autres uà morceau AcheYé»
Desmoulins marnait assez heureusç^foenl Tirooiç
et le sarcasme. 11 ne se piquait pourtant pas d^étrç
brave hors de propos et de fournir àes r&illeries
à coups d'épée. XJh dénivelé qu'il eut avec Naudel
et Désessarls de la Comédie-Frakiçaise , lui donnA
l'occasion d'exposer ainsi sa profession de foi à
c^ siyet.
Ci On peut braver la niort pour la libefté , pouf
)a patrie , et je ja\e sens U force do passer le cou
bfors ^e 1^ litière ^ 9I ^ comme Tpri^ur rom^ d^
t^pcbre la g^fge au glaive d'Aptoâne. Je me sem
\9k force de saomi? sur un éch^ud avec ut\ sentir
ment mè|è de plaîs^f. Voilà Tespéc^ de courafe
que j'aî reçu , laon pas de la nature qui friSBoon^
toujours à cet aspect, mais de la philosophie. £trf
^ssasmé par le spadas»n qui me provoque, c^est
mourir piqué de la tarentule. Il me faudrait passef
Wà v^ au bois de Boulogne , si j'é^iis dbligé .dç
rendra raisqp k tous ceux à qui mfi (ra^cbi|to dén
plaît. Qi^^Qi^ m'aocyse de lâcheté si Toin vwt..-*
je crajns biea que le temps ne soit pas loin , pu
les Qccasiçns de périr plus glorieuseiqeQ^et ph^
s\in.— $4^
■metil ne nous nuii](|ucroiil iiaS, Mors l'amour
! la pHtric me fera retrouver daiia mon sein co
lurage qui me ftl monter sur une table au l'alais-
toyal et (iTCudre le premier Va cocarite niilioiinle. n
C'était en- 1700 que Camille Desmoulins écrivait*
morceau , et il avait dé^k ce pressenlimet)t' Ab-
'. destinée qui revient souveul suiis sa pluttic.
I le retrouve encore dans ce pnssage final de son.
irnicr ttumfTO du f'iciuc Cuiiiclicr qui fui son,
bni du cygne. C'est un discourn qu'il met dans
Douche (k Pîti, s'exprimanl ainsi au l'itrlcmcitV
llngklerre : " Sericï-VQus maintenant' jaloux, de
tibcrtè dca Français!' Aimcricx-vous celte
altérée de sang dont le Gcand-pr^lre Hébert,
lomoro et leurs pareils osent (Icnuindcr que le
inple se construise, comme celui du Mexique,
BOBScmens de trois millions de citoyens, ctdistnb
ns cesse aux Jacobins ce que disaient les pri!tres-
^gnolali Mout^'zulna : J^^icux ont sQif7....n
èttiiipanoir, au lomliat. di-s TVcntf , s'écriait aussi :
■ai soif! — Bois ton scutg, lui répondait Tenlcniac,
? ta soif se passera. Les gladiateurs du, cirque
niventionncl s'enivraient de sang, maîs^leur suiT
TU éiait que plus dévoranle-
II y avait alors im duel h mort entre le f'icn.r
Tonlctier et cet inFAme journal connu sous le nom
'fttIfBwhdsne. Les deux réducleïifa y pét-ireht.
343 — HISTOIRE DES BUEtS. —
Desmoulins, par rinlempérance de ses sarcasmes,
s^était fait deux mortels emiemis. Il avait parlé
de soujffler sur Robespierre , et il disait de soo
lieutenant : Saint-Just regarde sa tète comme &i
pierre angulaire de la République , et U la porte
sur ses épaules a^^eç respect comme un SaùiiSa*
crement» — Je lui Jerai porter la sienne comme un
Saint^DeniSj avait murmuré dans sa barbe le sëidfi
du Mahomet de la Terreur.
Robespierre vint demander hypocritement par«
don au club des Jacobins, de ses liaisons aveo
Camille Desmoulins, dont il déplorait, disait-il i
les hérésies. Quant à Hébert, il lui reprocha d^aToir
été avec Chaumette à la solde de Pitt et Cohourg^
pour avilir la Révolution par le cynisme , Pun de
sa plume , Pautre de 9on impiété.
Ce n'était pourtant pas des subventions de FAn-
^leterre que vivait le Père Duchesne; car il résulte
d'un relevé des registres de la trésorerie que le
«ans-culotte Hébert recevait du ministre Bouchotle,
sur le^Jonds secrets de ce temps-là, cent vingt
mille francs par an qu'il appelait de (a bi'cUse pçut
chauffer ses fourneaux^
C'était par cette terrible révélation que Camilk
ripostait à la dénonciation civique de sou ad^er*
«aire , d^avoir épousé une femme qui lui avait
apporté quatre mille livres de rente. AUfinds-mei^
— ciiAViTnE x^TM. — 343
pèbiTt, je suis il toi ilnns un momcnl, criait le
yieux Cordelicr à non ronfrère , qiinnd cctui-ci
|| menaçait de sa pipe qu'il cumparait k la trom-
||Ale de Jéricho, parce qu'il lui suffisait île fumer
fis J'ois autour d'une tête pour la Jaire tomber.
XJn autre jour Legetnh-e dénonce Hébert aux
Cobîns comme un columniateur Ji gages. « Hébert,
1 Camille, est terrassé et ne sait que répondre.
Dmore, qui vient au sccourâ de sud embarras,
■r dit : Embrassez-^'Oiis tous deux et touchez-lit.
)fHX là le langage d'un Bomaia ou celui d'un
■KariiIe^... (260). »
Telles étaient les formes usitées entre les sans-
loties \ tels élaient li;iirs défis , leurs cartels ,
■ts annes et leur polémittue. Le combat engagé
% c«tle manière dans les feuilles, dans les clubs
I k la tribune , ne se termiuiiit que sur le champ
SB de l'éfhafaud. Voyez ci-aprés le Cbap. XXVII
Utif aux Duels parlementaires.
\fys»aà le drame de la Terreur fut joué, nu vit
lever, dans un des coups de théAlre si fréqiiens
WUc époque , les tréteaux du Directoire. Le pit-
|e organisé vint après les massacres. Les orgies
la luxure Hiccédèrcnl encore une fois à celles du
tt. On vil renaître la Régence en carmagnole cl
BalKits, la Régence qu'on avitit aussi appelée
Dûvctoire de la Monardiiv (2fi7) .
S44 -^HISTOIRE DES DOBLi. -«
Malgré le vœu si énergiquement exprimé deYaal
TAssemblée Coosiituante dans les 4ébata occa*
aionaéfi par la rencontre de MM. de Caatriea et
de Lameth 9 le pouvoir législatif ne s^est jamais
prononcé sur la question légale du duel , peiyiaat
le cours de la Révolution. Le Code pénal du 4 oc^
tobre 1791 est resté absolument muet sur cçtte huk
tière. C^est en vain, comme on le verra çi^>apr^
Chap. XX Y, qu^on a cherché dans le décret d^
pistie du 17 septembre 1792, rapporté ci^d
un argument pour expliquer ce silence en cç sent
que rhomicidç et les blessures résultant d\m di|e|
devaient rester sous Tempire du droit convQun.
Quant à la Convention , voici la seule ç^rcans*
tance 014 elle se soit occupée du duel. L^ 3l9 laest
sidor an II , elle Ait saisie par un référé du Iribunal
crin^nel de Versailles, de la questiou de savoir ai
Tart. 2 de la 4.^ aectioq du Code pénal miUmirôt
punissant les meni^ces par paroles ou par gçales c|
les voies de fait dVn militaire envers sou supérieur,
devait s^appliquer à la provocation eu duel pur la
militaire inférieur envers son supérieur hors le ca«
de service. I^a Convention , par le motif que fiai
dans le texte précité ne s^appUquiût ma% d^^ dé^
clara qiCil ny twaii Ueii, b, déUbércr, eu chargeonl
son comité de législation dç lui proposer des
surça contre le duel et les provocations (268)
^CHAPITRE XMIl.— 349
K-Toule la période révolutionnaire que nous venons
e parcourir n'o élé, h propremeiil parler, <|u'uno
mgue convulsion. Ce fut le règne de lo force
iDS le plus haut d^gré de ruilc-Bse cl d'énergie.
Ce n'était pas encore assez que le sang frunçaîs
P (p'^ii^^* '^> places publiques , on le vit bienlût
[couler par torrens sur les champs de halaille. Aux
reux désordres de la guerre civile , vinrept »e
îndre les maux d'une guerre extérieure. L'Aria-:
IcratJc avait appelé h son épée de la spoliation
B SCS anliquei privilèges. Mais son cartel, c'ai
I manifeste étranger; son c^ amp clos, c'est le
d ennemi, et, comme le duel, rémigralion est
ibcore pour clic une illusion de Thonneur. La
dei Croisades se rallume. Rome n'est plus
dans Rome ; la pairie c'est Cublentz. Là se forment
les notiveaux degrés d'une nouvelle arislocralie.
Lea premiers arrivés s'érigent rn suserains des
dentiers qu'ils traitent avec un insultant dédain.
Pour -vaincre leur répugnance , on leur avait en-
Toyé une qucnoudie et des fuseaux ; pour punir
leur liésitation , on ne leur épargne ni les mépris ,
lii le» d^gnùls. De là de nombreux duels el m^me
(l'affreux suicides (209).
Bientôt la guerre commence. Ce n'est pas unu
Iniiipe de femmes qui va courir au-devant de cette
ilivaaoïi de Coriulans , v'cet une intrépide jeuneew
846 ^ mSTOIRE DES DUBLS. —
à peine sortie de Tenfance , guidée par des
officiers improvisés et des généraux de vingt ans*
Ce fut le temps des prodiges. L^émancipatioa
plébéienne est désormais consommée, et Tégalàé
civile a reçu la consécration de la victoire.
Cest ainsi qu^est tombé ce chêne antique dont
Montesquieu admirait les profondes racines et le
feuillage majestueux. Dépouillé de ses rameaux les
plus vigoureux par la rude main de Louis XI et
de Richelieu, desséché dans sa sève par le (asis
orgueilleux de Louis XIV, gâté jusqu^au cœur dam
les orgies du Régent et de Louis XV , son vieux
tronc chargé de siècles a cédé à Teffort de h
tempête. Ne pouvant plier il s^est rompu, et h
foudre Ta consumé sans le déraciner. Né dans le
même sol , long - temps couvert par son ombn
protectrice , le Duel pourtant ne périra pas avec lui.
Cette institution, fille de la Féodalité, nourrie et ré-
chauffée dans son sein , lui survivra avec les autres
traditions germaniques dont elle est inséparable,
le goût de la vie militaire, la licence des camps, rot»
tentation du courage, Tirritabilité du caractèfei
Tamour des distinctions, de la renommée et du bruiti
le dédain des règles et Tinsouciance de la vie.
Bientôt même cet arbre si fameux, dont le flot
9
populaire avait dispersé les débris, se ranimera
dans sa souche , et le luxe stérile d'une végétation
EXMii.— 347
gourmiinde, inondant le sol d'un millier de rcjcious
[inniKitett , nihcvera d'en dévorer la sitbslancc. Les
(lécrcls de la Constiluanle seront enlcndus en ce
sens , non pas qu'il n'y a plus de nobles en France,
mais que tout le inonde doit l'^Ire. L'idole h peina
abattue sera bienlôt relevée par de nouveaux ado-
raleure. On continuera de sacrifier ii Ilaal , el ce na
sera plus seidemenl sur les hauts lieux. Cette no-
blesse qu'on croyait morte , n'aura faîl que changer
de place. Ccux-mi^mes qui l'avaient renversée s'en
disputeront l'héritage. L'un va s'enrichir de ses
biens, l'autre se parer de ses rubans ; celui-ci s'af-
' de ses titres , celui - là parodier ses airs,
lonne surtout n'oubliera d'exagérer ses vice».
pEn France , les privilèges ont toujours eu bien
iTKnns d'ennemis que d'envieux , el ce n'est jamais
que par esprit de conquête qu'on leur fait la guerre.
C'est toujours l'antichambre qui se pousoe au salon.
On ne bail pas, on convoite; on ne lutte pas de
principes , mais d'amour-proprc. La vanité , ce
tif incurable de notre nation, y est de tous les
tps, de tous les âges, de tous les rangs. Elley
end tous les masques, elley revêt toutes les Formes
el s'appelle de tous les noms. C'est un germe actif,
tccond el vivace ; c'est un cire indestructible, doiU
les reproductions bizarres semblent obOir aux lois
d'une éterocUc œètcmpsycuso.
CHAPITRE XXÎY.
///.' Période. ~ XIX."" siècle. — Liberté des. dM»-
r^ Qonçulat et goiji,vçrQQn^ei4 inipéirial.
CV^sT une question qui n^esl pas sans quchpie
difficulté cpic celle d^ savoir à quelle époque il
conviendrait de fixer le commencement de la troi-
sième période de celte histoire, la lihevié légaU
des duels. Si le sîlei^ce du code pénal de 1791 ^
qu'on retrouve dans celui de 1810, devait être în-.
terprété dans lo sens d\ii>e abrogation de toute
disposition prohibitive des combats singuliers , cc^
serait Tannée 1791 qu'il faudrait choisir. Maisa-t-il
pu , d^ fait, exister aucune liberté pour les duels
pendant la période révolutiounaire i^ On a tu au
chapitre précédent quel poids u|i nvaivement po-
pulaire , une apostrophe de c)ub ou de tribune
pouvaient jeter dans la balance entre deux a^dver-»
saircs d^opinioiis opposées. Il n'y a tien de plus
incompatible avec la liberté du champ clos que
les émeutes, les proscriptions en inasse et le tè-
girae des suspccis*
— tHAriTBE XXIV. — 349
la Terreur d« 1793 a lue la Libéria de 1780.
Dca SCS iiremicrs pas , ctllc-ci Fui arrcU-e par dea
monccauiL de cadavres ; Le pied lui a glissé dans
Après de lels prècédens, le Dcspolisme élait dans
l'ordre logique ; il arriva comme eons^-qucDce ,
comme réaclioa ou comme remède de dix années
df violence» cl d'anarchie. El comme la EèvoIuUou
Mit lire l'épée pour s'établir ou se consolider,
iful un despoUsme miUiaira qu'on eut à subir,
gtf.-à-cUre le plus dur el le plus dangereux de loua.
On se jeta dans les bras d'un despote pour se
Mfcr de ceux de la République qui nous en arait
mué des milliers. On préféra le jouji; du sabre à
^i de la hache , el la vie des campa au régime
■ écbafauds. Enivré par le prestige des trophées
jp-riers, on se jeta d'un extrême dans un autre.
pnmc aous Louiâ XIV, les hjmncs de la TÎctoirc
Brenl encore étouffer les gémisscmcus de la ser-
lode. La France, qui venait de subir les exagé-
fioDS de la liberté , ^lUil périr dans celles de la
■c el succomber sous son formidable luxe.
^^ Vo\ de notre pa)s n'est décidément point
IVOrable au Deapolismc. Cette plante exotique n'a
uns pu s y t
;climater. A deux siècles de distance,
jeux grands monarques ont cherché ^ l'y natura-
JK^ i Wi^ deux fois le pouvoir absolu est devenu le
S50 — niSTOtRK VIES DUCLS. —
tombeau de leur dynastie. Cette grande et solenndte
expiation n^atteignit Louis X[V que dans sa posté-
rité ; mais plus éclatante encore de nos jours , eHe
a trouvé une victime personnelle dans Napoléon.
Durant cette période de Tempire, si courte , mais
si riche de faits ; au milieu de cette histoire si ma-
gnifique et si retentissante , les duels ne peuvent
former qu^un épisode bien inaperçu. Us furent en
effet fort peu remarqués dans un moment où Pat-
lention était absorbée par le magique spectacle que
présentaient tous les jours des luttes bien autrement
sérieuses. H n^y eut guéres alors que des dueb
militaires dont à peine il s^est conservé qudqiiei
traces dans les souvenirs.
Après la grande figure de Napoléon , le person-
nage de cette époque sur lequel Tattention se fixe
avec le plus d^intérét j c^est le maréchal Ney dont
riHustrc front porte la double auréole de la gloire
el du malheur.
Voici un fait de duel qui le concerne , el quoi*
qu^il soit par sa date antérieur à Fépoque actuelfei
il ne pourrait , ce me semble , être placé conve*
nablement qu'ici.
<c Né à Sarrelouis, le 10 janvier 1769, la méat
année que Napoléon , Ney s'engagea le 1 .*' fïvrier
1787 , Agé de 18 ans , dans le régiment de Cok»^
— CM*prT«F. «If.— S91
ién^rAl ipii devint pins tnni \v. A.' <l« liusranb.
ne belle tenue , une grande clcxti-riti; it manier
, montant avec grâce et nmumnrc 1rs
leTAds les plus (Iniigçrem , eliorgù de dompter
ux qu'on d^esp^rnil de dresser, il fut bicnli'it
npiè do ses camarades pour son oplilnde h
I les ererciees du corps. Aussi , était-ce 11 lu
■i^c les corvtes d'honneur étaient rHcrylica. »
41 Le maître d'armes des cliasseurs de Vinlimille,
I garnison btcc le régimcnl de Coloncl-Gën^ral ,
t , comme tous ceux d'alors , un crâne dnn-
reux , toujours le sabre h la main , redotitnlile
aux jeunes recrues et m^mc ^ d'Iiabiles lireun ;
il avait blessé le maître d'armes de Ci>lonel-(i6-
ntral et insulté le régiment. Les sous-ofTicicr* se
mirent pour punir l'insolent. Le plus brave et
I plus adroit Tut choisi , et Ncy , fait brigadier
s peu , chargé de la vengeance de ses c«nii-
, Il accepte la mission avec joie. On est sur
) terrain, les sabres sont croisi-s. Toul-iiMMiup H
( «ml violemment tiré par la queue , il se rc-
anie; c'est son colonel qui le menace, le fait
r el jeter au cachot. »
Le duel était puni de mort. Ney était pris sur
! fait , en flagrant délit ; le cas oc pouvait être
s gnve ; mais il était aimé de ses chefs et il se
ait par délégation. Où l'hcrcha h le sauver : Ica
8Bà —HISTOIRE DSS DUSU. -^
SOU8 - officiers Tinrent en masse ches le colonel
demander sa grâce ; ce fut bicntût une affaire de
corps. Déjà on craignait dans Tarmée cpi^une trop
grande sétérilé n^eiaspérÂt les soldats» chex qui
fermentaient aussi des idées de révcriuAion , el une
longue captivité sauva Ney du conseil de guerre*
Mais à peine sorti de prison , le danger qu^il ve*
naît de courir ne put Fempécher de satîslaire à
une loi de Thonneur : il ne veut pas être prol^
par autre chose que par ses armes. Le combat sua*
pendu a lieu de nouveau plus secrèlement. Ney
est vainqueur : un coup de sabre sur le poigpMt
estropie à jamais son adversaire, qui, réformé par
suite de cette blessure, tomba bientôt dans la misère.
Mais le brigadier, devenu riche , B^oubUa pas soa
duel ; il chercha le malheureux qu^il avait puni» par-
vint à le découvrir , el lui fit une penaioa (270) . >
En mai 1802 , il y eut à Paris, entre lea géniaux
Rcynier et Dcstaing , un duel dont les suites bireot
bien plus funestes. L^origine de la qiierdle r^
montait à la campagne d^Egypte. Oa se battît aa
pistolet \ le général Destaing fut alleîat mertelr
Icment d^une balle à la poitrine. Son adwiaaiie
ne Eut Tobjet d^aucunc rcclierche \ mais il tomba
en disgr&ce prés du Premier Consod , lut obligé
de s'éloigner de Paris, et u'obciot de Remploi que
lung-tem|>s après.
! XXIV, — 3fS3
1 1812, ail Ipmps de Mural , il y eut un diicl
rcninn]uable h In cour de N.iplca , qui n'àtait ,
toutes Cfllca envaliies par la dynastie Napo-
ne , qu'une succursale de la cour impériale .
jour de Tan , le roi et la reine de Naples
donnaient aux ambassadeurs étrangers une aii-
<limce d'apparat. L'ambassadeur russe , cnmie
[>ulgoroucki , prit le pas , pour présenter son com-
]ilimenl, sur l'envoyé de France , le baron Durand
ili^ Mareuil, auquel cet honneur appartenait comme
Ambassadeur de famille. Celui-ci conserva pendant
la réccptioa une impassibilité qui ne se remarquait
{i»s au m<^me degré sur tes fronts rembnmis du roi
t\ de la reine ; mais le même jour il envoya un
cartel au comte Dolgoroucki. Quoiqu'il eût pris
in de ne signer la lettre que du nom de Durand,
\eier du génie , l'ambassadeur russe fit réponse
9 prendrait it ce sujet les ordres de sa cour.
\m général français Excelmans était alors ro-
el BU service de Naples. S'élant trouvé k la
cfition où il avait été témoin de l'algarade du
Me Dol^oroucki , il crut devoir s'adresser au
Die de Beckcndorf , premier secrétaire de la
|Mit>o ruase , pour obtenir raison de l'insulle
le à la Franee, dans ta personne de son jni-
Mre. Celui-ci consentit au combat, et chacun
d'amener comme l^moin son amhnwmdeur.
854 — HISTOIRE DES DOEI^. —
Le comte ttolgoroucki , voyant son secrétaire en-
gagé pour lui , se décide à accepter immédiatement
Je cartel du baron Durand. MM. de Beckendorf
et Excelmans ne se crurent pas pour cela dégagés
de leur parole , et convinrent de joindre au rôle
de témoins celui de seconds, selon Fancienne mode
Napolitaine. On se battit donc deux contre deu\
et à Tépée. Les ambassadeurs se blessèrent 1^-
rement. Mais le comte de Beckendorf fut atteint
d'un coup qui le traversa de part en part. Son
adversaire manifesta alors le plus violent désespoir.
Néanmoins , le diplomate russe eut le bonheur
de guérir d'une telle blessure. Les deux ministres
furent approuvés de leurs cours respectives. Peu
de temps après éclata la dernière guerre de Russie,
à laquelle cet événement ne fut peut «"être pas
étranger. Napoléon le prit du moins pour un aver-
tissement d'en accélérer les préparatifs (271).
En 1813, il se trouvait dans Tarmée un officier
connu pour rechercher les duels , où il se montrait
d'une habileté extraordinaire. Cet homme eut la
lâcheté de se cacher dans un fossé , pendant un
combat très-vif où périt la moitié de sa compagnie.
Il fut découvert et chassé du régiment. Napoléon
disait à ce sujet : Je nai jeûnais compté sur un
duelliste pour une action d'éclat. Latour-Maubour^
le bra^e des bravées, ne s'est jamais botta en dueL
— CHAPITRE \xiv. — 355
.Trlte ^-taii aussi t'opinioii de Diimourîcz , comme
le voit dans ses Alénioiiv.'i , Tom. 1.", P. 72.
Ile Fut auparuvniit celle d'un autre tacticien
distingué, ie chevalier de Fullard qui disait, en
[liirlaut des ordonnances faites par le duc de Gnise
<:nnlre les duellistes pendant sa célèbre défense de
Metz rontre Charles- Qui ni : n Les brelteurs étaient
fi>rt en vogue dans ce temps -là ; ils étaient re-
l^s comme la lie et le déshonneur des troupes ,
^toujours les premiers ii lâcher pied dans l'oc-
. » Comment, sur Poijbe , Paris 1728 ,
m, p. 161.
déjà été parlé , au chapitre 1 .", du cartel
le roi de Suéde, Gustave IV, s'était un jour
d'adresser k Napoléon qui se garda bien de
prendre la chose au aérieuï. Pour toule réponse,
il £t propnscr au Monarque suédois de se passer
celle fantaisie avec le premier maître d'armes d'un
is régimens, qu'il lui expédierait en qualité de
stre pl6nipotcntiaire. Napoléon pourtant était
c , mais ce n'était pas à la façon de François i.<<
loiivs lie Bouirienite.
^ le duel fut toléré dans rannée sous le régime
>érial , ce ne fut que comme un mal nécessaire,
1 est plus que douteux que la pohlique du chef
gouvernement l'eut souffert dans l'ordre civil ,
s'y était fait pai liculiércmcnl remarquer. Mats
âSft -*- msTOtiiB Des bmeis. -^
Wnlcrvenlion de l'autorilé ne fut pas nécessaire.
La paix publique dérivait naturellement de la
forme du gouvernement. Y a-t-il une tranquillilè
plus profonde que celle de la servitude ? —
Napoléon , en détrônant TÂnarchie , avait rude«
ment comprimé les factions et étouffé tout ferment
de discorde. Chacun vivait en bonne intelligence
avec son voisin, et toutes les dénominations de
partis étaient ensevelies dans Toubli avec les que-»
telles d^opinions. La vanité française trouvait son
aliment te phis naturel dans les distinctions mili*
taires. Une main de fer avait circonscrit les ann
bilions privées dans des limites rationndies. Une
politique de marbre glaçait leur ardeur , et leur
turbulente activité se taisait devant Timmobilité
gouvetfiementale .
L^aréne brûlante de la presse périodique n^étaîl
pas alors ouverte à toutes ces haines privées, à
toutes ces obscures jalousies qui s^y donnent au-
jourdliui rendez-vous sous le masque des intérêts
publics , et préludent à des scènes meurtrières
par les plus ignobles personnalités. On ne con-
naissait pas encore cette fièvre ardente du jour-
nalisme qui entretient si puissamment de nos jours
celle des duels et des suicides , o&ant dans les
honneurs d'une publicité quotidienne un nouvel
appAt à la vengeance , et une nouvelle prime d^en-
couragement au désespoir.
XXIV, — 357
La contagion de l'exemple gngne chaqitc jetir
I terrain, cl sa dévorante activité se signale par
prust-I} tisnte effrayant. Il est encore des Eros-
^Vsiles qni vculoni <i tout [trix [ias.tcr à la postérité.
semblent s'étudier, par rélraiigeté des scènes
et la biiArrerie des avcnturea, ii fixer l'uHentiotv
•ur leur inutile et ubscurc cxistetU'C- Us savent
qu'il s'est auruoe de leurs folica que la presse ou-
>lMicrB d'enregistrer- Heureux encore quand celle-ci
[»eul bie» iHuis faire grâce dca Sitions, pour s'ea
uir aux réalités ! Mais ses colnnnes ne sont qu»
op aouveot envalircs par lc& élucubrations ano-
jrmes d'écrivains sans conscience qui font mélicr
c broder «ur ta perversité humaiiK. Trop souvent
'audacieux faussaires y font accueillir des romans^
^«dieux ou ridicules , dont le mélange impur vient»
laque jour altérer les souices de Tbistoire coo.-*
Aussi, n'est-ce qu'avec une grande réserve qu'un,
irratcur de fitits &u un peintre de mœurs , devra
jpterrager cette multitude de documens si su^ccts,
.«t d'autant plus dangereux qu'ils en itnposcut par
lIb nombre , en se co|Maut les uu.s les autres. C'est
que je n'aurai garde de pcrdce de vue pour
il» époques qu'il tne teste k ilécrirc (272).
1
CHAPITRE XXV.
Suite du XIX.' siècle. — Restauration. — Duels poli-
tiques et littéraires. — Interrention des tribunaux.
— Conflits de jurisprudence. — Projet de loi
de 1829.
Mirabeau avait dit à son lit de mort qu^il em-
portait avec lui le deuil de la Monarchie ; Napoléon,
en descendant du trône, a pu dire avec bien autant
de vérité qu'il en emportait le secret. Il était en
effet devenu bien difficile de régner en France,
depuis que la Révolution avait mis à nu tous les
mystères de la royauté, depuis surtout que PEmpire
en avait usé tous les ressorts.
Néanmoins , le retour de Tancienne dynastie dés
Bourbons fut accueilli avec un enthousiasme que
bien des gens prétendent nier aujourd'hui , parce
qu'ils se croiraient obligés de rougir de Tavoîr par-
tagé. L'invasion étrangère, dont ce retour fut le
résultat sans pourtant en avoir été le but , ne parut
pas d'abord blesser la susceptibilité nationale ; ce
ne fut qu'après coup , et comme par réflexion.
— ciHPiTne XXV. — 359
Mais ce ijiii n'est ijue lioj) vrai , i:'(.'sl tm'il y cul,
sur Ic9 causes rutiles de cet eritliutiBiasmc , une
erreur Talale chcx les prinni-s qui en étaient Tulijet.
Us changcmeiis politiques de 1814 n'étaient ,
ilans l'esprit du plus grand uumbre, qu'une grande
réaction de la paix coiilic la guerre. Ceux qui
ti'nvuitrat jamius cunnu les Ilourbuns , cummc ceux
f|iii les avaient oubliés, n'y virent que cela. Cel
julérct domina tous les autres par son énergie et
Hin actualité. Sî ce fui sous ce rapport unique
iju'on envisagea ces changemens ciiez ceux pour
<]ui ils auraient pu <:tre uu sujet d'alarmes , on
j'en fil une idée bien dilTérente dans un inonde
DU ils avaient fait naître des espérances qui res-
■einbluient beaucoup k des spéculntlnus. Celte di-
Tursité d'u|)inioiis sur un point aussi capital , fut
la principale cause de celte fermentation sourde ,
{irufuiidc , active , incessante , qui , après avoir
ii}ptè S) long-temps le pays, aboutit à l'cxplosiuH
de 1831» (273).
I^ paix qui tut l'objet de tant de vtpux et de
si ^ands sacrifices, cette paix, dont l'impérieux
besoin précipita la chute du gouvernement im-
périal , ne Fut conclue qu'entre les Peuples , et fut
loin (fc s'établir entre les ciloyuus. Les qucicllcs
privées vont se réveiller avec une iiu^royalilc ar-
<lcur, quand elles auront pour nlimetit les passion»
8êO — BISTOIAB D£8 D1TSL«. -—
politiques , et la lutte, qui avait cessé sur les champ*
de bataille , se continuera dans les champs des.
Les premiers symptômes de coUision se maai-
festèrcnt à la suite de la rivalité qui éclata entre
les glorieux débris de Tancienne amée, et cette
jeunesse brillante qui entourait le nouveau Ir^^,
entre ceux qu^on appelait officiers avant et depuis
la paix. On n^enlendit long-temps parler à Paris,
que de rencontres entre des gardes-du-* corps et
des militaires congédiés , qui ne pouvaient vw
de sang froid ces nouveaux venus jouir d^un hoiw
neur qu^ils regardaient comme le prix de leurs
services. Geux->ci, qui n^avaient pas encore eu Toc^
casion d^étudier Tart de la guerre sur les chanta
de bataille , avaient pu déjà se former aux habn
tudes du duel dans les salles d^arvies, el leur
ardeur juvénile leur valut souvent une supériorilè
qui ne dépend pas de Texpérience stratégique, mais
de la vigueur de Tàge.
L^incertitude et la faiblesse du nouveau gou«
vemement, les variations continuelles de sa poli*>
tique , n^'étaient pas de nature è maintenir à Tintée
rieur cette paix et ce caUne admirables dont on
avait joui sous Tempire. Une agitation vague «mus
réelle préoccupa tous les esprits , quand on ne vit
plus rien de solide dans les institutions, de fixe
tlana les principes , d^asauré dans les existences i
— ciiapitui; x\v. — 301
rien m^me ilc (lé&nitif dans les succèg cL Ich rcvcrii
dt-s piiriii). Ct jiiii de basctilo , ces îiltcnialivta
coiilinuelleg de Itonnc et de nijuiviiii>e fiirtmic ,
itn faÎBBiil pnsMT tour h Uiur Ich factions de l'ivrcaso
ilfc la \ioleiice à rhiimilialion de la dCraile, nour»
^■neak-nt leur ardeur au lieu de lYpuiser, et eiw
ffretenaieot au sein de toutes les dusses une per<
[péluelle îrritatinn.
La tribune qu'on venait de relever et la prcsso
■ Bouvellcmenl imancipte , furent d'abord l'ar<^no
■bIi Ica partis ennemis eommcncèrent ii se mesurer,
'Ces lulles de la parole , ces guerres de plume ,
que nous ont enseignées nos voisins d'outre-mer,
ne se passent pas chez noua avec ce calme et co
fipgme naturels au caractère britannique. La fouguo
Irançaise, furiafiancese, les fait bientôt dégénérer
k«n ^meules séditieuses ou en sanglantes querelles.
I.ea précédcns de 17S9 ne seront pas oubliés;
les mêmes symptômes seront reproduits par des
causes analogues, et l'on verra, dans un violent
•ccéa de recrudescence, se rallumer la fièvre dea
duels politiques et parlementaires.
Parmi ceux de la première espèce , il en ettt
trois qui ont plus particulièrement fixé l'uttcution.
L'un a coûté la vie à M. de Saint- Mareelliu ,
jeune littérateur d'une grande espérance , tué pur
U. Fuyau , son ami. Le second fui égulcmuul
382 — niSTOIKE DES DUELS.—
fatal au comte de Saint - Morys , lieutenant des
(iardes - du - Corps , tué par le colonel Barbier-
Dufay. On trouvera les détails de cette affaire au
chapitre des Duels mililaires. On vit succoniber
dans le troisième , M. Beaupoil de Saint- Aulaire,
jeune officier de cavalerie , auteur d^un pam-
phlet politique intitulé : Oraison funèht-e du
iluc de Fcltrv,
La police mihtairc avait fait de vains efforts pour
empêcher ce combat ; elle réussit seidement à le
faire suspendre. M. de St. -Aulaire se battit d^abord
contre le fils du duc de Feltre , et le blessa légè-
rement au bras. A peine guéri de cette blessure,
il eut à répondre à une nouvelle provocation de
la part d\m cousin du défunt, M. de Pierrebourg.
Ils se rendent le 17 mars 1819 au bois de Boulogne
avec deux témoins. Ceux-ci , ne pouvant empêcher
le combat , exigèrent qu'il cessât au premier sang*
Une discussion s'éleva sur le choix des armes.
M. de St. -Aulaire proposa le sabre, M. de Pier-
rebourg voulait l'épée ; mais il céda à son adver-
saire , quoi(pril n'eût point l'habitude de cette
arme. Les deux combattans paraissaient du plus
grand sang froid , au point qu'ils changèrent de
place sur l'observation de M. de St.-Aulairc qui
avait remarqué que le soleil donnait sur les yeux
de son adversaire. M. de St. -Aulaire porta un
roup (le sabre sur le genou ciroil de M- île Pier-
rebiiurj:, qui, profilanl du monicnl uii son adver-
saire ttail découvert , ratlcigiiit d'un coup de
poinle enire la dnquîéine el sixième eûtes du côté
droit, AussitiU il jeta son snbre en disant : Je suts
bien Jàché, je crains que ta blessure ne soit trop
prvjontle. Les témoins de leur côté s'écrienl :
C'est bien malheiirrnx , mais tes choses se sont
passées dans les règles .'.... Ne rroil-on pas en-
leDiIre Texclamation de ce médcein <|uî se console
de la mort de son malade , parce qu'il a succombé
scloD Ions les principes de l'arl I — Le malheureux
M. de Sl.-Aulaire expira un quart d'Iicure après.
Volt;ûre a dit i « On doit des égards aux vi-
vants, on ne doit aux morts que la \éritÉ. » M. de
St'Aulaire avait mal parlé d'un homme d'élat, mort.
Avait-il tort ou raison T C'est ce que décidera la
postérité , seul juge compétent en pareille matière.
En allendant, on tua le jeune écrivain. Ce Tut le
preinier duel auquel donna lieu aous la Restauratioa
Ansge de la liberté de la presse (274).
^ÏVcsqii'en même temps on vit surgir un nouveau
^^icnre de collisions, h propos de débals litlérnires
ou scientifiques. II y avait long-temps qu'on n'avait
,TU des exemples de l'intervention du glaive dans
I domaine paisible de ta république des letlres.
t Lon lie la publication de VHisloiie <tc ta cam-
964 -^HISTOIRE DES W3KIB. -^
pagne de Russie, il s^éleya une ardeale polémique
entre M. le comte Pliilippe de Sègur, auteur de
cet ouvrage, et le général Gourgaud, anciea lâde^
de-'Camp de Napoléon. Une réfutaticm et un cartel
furent lancés tout à la fois contre cette relation.
Après quelque hésitation , M. de Ségur accepta
le défi de son adversaire, quoiquHl ne fiXt motivé
par aucun grief personnel , et il en fui quitte po^r
une légère blessure*
Le duc de Rovigo s^était montré moina scnjh
puleux en pareille occurrence. Il parle dans ses
Aîémoires, tome 111, Ghap. XXVIII, d^un cartel
qu^il refusa de la part d^Hl officier français, le
comte de Yilloutreys, qu^l avait personneUemeol
inculpé de la manière la plus grave à Toccasion
du désastre de Baylcn en Espagne (275),
La muse de la poésie n^est pas plus exeo^pte que
celle de Thistoire , des bizarres épreuves du chasip
clos. On a vu se résigner à y descendre Tun des
génies les plus élevés des temps modernea. On a
TU le plus sublime interprète du sentiment reli^
gieux céder aux exigences du Point d^hooneiir^
et accepter Tépée pour arbitre de Tindépendance
de Fécrivain. Le colonel napolitain Pépé s^avits
un jour de demander raison par un cartel h Tauteur
des Méditations , d^uuc apostrophe à l'Italie sur
sa décadence et son esclavage. Il obtint TbonDeur
\
— cnArrTep. xxv. — 365
i^^il sollicitait, cl il eut l'Qvant.ige de blesser ou
hras son illustre adTersnire (276).
On lit dans un journal du 21 février 1829, lirs
iHails suÏTaDs sur un combat dont le sujet était
Classiçue cl le tïomanli/jne . « Depuis quelques
jours , on s'entretient dnns les salons de Paris d'un
duel entre deux jeunes auteurs, tous les deux gêna
d'esprîl et de cœur , qui , h. propos d'une question
■uremcnl littéraire et déballue parmi nous depuis
ans sans aucun résultat , en sont venus à sb
ncr rendez - vous au bois de Boulogne. Le
tambat a été long et acliarné. Chacun des anta-
pistes a été h deux doigts de la mort. Ils ont
Ul feu l'un sur l'autre quatre fois de suite et à
distances très-rapprochées. Le combat ne se
ferait terminé que par une effusion de sang , si
I témoins n'avaient pas menacé de quitter la
■ce. On verra se reproduire des traits analogues ,
1 chapitre XXVI.
H y eut sous la Restauration fort peu d'exemples
; fonctionnaires publics , encore moins de ma-
ttrals, quittant leur siège pour descendre dans
■ champs clos. C'est un progrés qui ne fut re-
iHrtjuè que sous le régime qui va suivre. Vers
fin de 1829 , un juge-auditeur du ressort de
k cour de Montpellier et un officier de gendar-
306 — HISTOIRE DES DUELS. —
meric avaient cm ne pouvoir se dispenser de servir
de li'moins dans un duel. Le procureur-général,
instruit de ce fait , a traduit le juge-auditeur devant
la cour qui Ta censuré par mesure disciplinaire.
Le magistrat a été attaché à un autre siège et Tof-
fîcicr de gendarmerie changé de résidence.
Le 11 août 1828, M. Raynouard , commandant
la gabarrc la Caravane y se battit au pistolet avec
M. Garnerey, peintre du roi, envoyé à Navarin
pour faire un tableau du combat naval qui porte
ce nom. Celui-ci croyait avoir à se plaindre de
ses relations avec M. Raynouard pendant la tra-
versée, et il régnait beaucoup d^aigreur entre ces
deux Messieurs à Farrivée du bâtiment au lazaret
de Toulon. Le capitaine fit mettre à terre son
passager qui était malade , et qui , privé de Tassis-
iance du médecin du bord , écrivit pour demander
du secours , et ensuite pour se plaindre que les
soins indispensables dans sa position lui fussent
refusés. Celte dernière lettre écrite dans Tirritation
de la fièvre, eut pour réponse une provocation
en duel de la part de M. Raynouard. Le rendei-
yous fut donné pour Tun des jours qui suivirent
la sortie de quarantaine. M. Garnerey, dont Tio-
disposition n^avait point cessé , eut le triste avantage
de tirer le premier , et atteignit son adversaire au
flanc droit. Celui-ci néanmoins fit feu à son tour,
— rnvrirri \\v — 3(>7
f't rrromnicnra niriiir s.i (lrrliar*ç<* , le premier
<<Mip ayant porlé obliquement. Il mourut neuf
jours après , des suites de cette blessure (277).
On trouvera au chapitre suivant un bien plus
grand nombre d^affaires semblables entre des fonc-
tioDDaîres publics de tous les rangs.
Ce qui doit le plus particulièrement caractériser
Tépoque de la Restauration relativement au sujet
de cette histoire , ce sont les tentatives des pou-
voirs judiciaire et législatif pour réprimer le scan-
dale des combats singuliers.
Comme j'ai déjà eu occasion d'en faire la re-
marque au chapitre précédent , le Code pénal
de 1810 a gardé sur le duel le même silence que
ceux de 1701 et de Tan IV. Ce silence, il laul
le dire, avait été constamment interprété dans le
sens d'une liberté entière et absolue. Mais en
1818, tout-à-coup et comme sur un signal donné,
les foudres des parquets se réveillent. Des mandats
d'arrêt sont requis et lancés. Des citoyens qui ,
sur la foi commune, avaient fait ce que le Point
d'honneur commandait et ce que la loi ne paraissait
pas défendre , se voient menacés d'une accusation
capitale. Ils sont appréiiendés au corps selon la
coutume, et par provision placés sous les vcrroux.
Vaineinent , la cour de cassation saisie de leurs
368 — msTornc des duels. -»
pourvois annuité les procédures commencées ; la
guerre des réquisitoires contre les duels continue.
Une longue lutte va m^me s^établir entre la plupart
des cours royales et la cour suprême.
Le premier des arn^ts de cette cour a été rendu
le 8 janvier 1810, dans Taffaire du sieur Bnitus
Gazelles qui avait tué en duel, à Montpellier, le
24 ao&t 1818 , le sieur Ferret , officier de la légion
du Var. Cclui^i avait adressé le cartel suivant i
son adversaire : « Monsieur , ayant appris que
vous vous étiez permis de tenir des propos sur
mon compte, si vous avez de Ilionneur comme
vous voulez le faire paraître, vous ne vous refuserez
point à une explication , k une heure apràsHoaidî,
au café de FEsplanade ; dix années de salle ne
peuvent vous faire redouter. » Le duel ayant eu
lieu à Fépée, le sîeur Ferret avait succombé.
Par arrêt du 80 octobre 1818, la cour royale
de Montpellier renvoya Gazelles devant la cour
d^assiscs , comme prévenu d^homicide tH>kmtaipe»
Gelui-ci se pourvut en cassation. La cour, sans
se prononcer sur la question du duel , cassa Farrét
qui lui était déféré, par ce motif unique : que la
cour de Montpellier n^avait pas examiné le poiol
de savoir si le prévenu avait été ou non dans k cas
de la légitime défense. Un arrêt tout-à-Aôt sem-
blable avait déj.^ été rendu le 27 mars 1818.
T,M rmir de Tnulniiae , h laquelle l'afTairc Cazelles
Fui renvoyée, dédara en fail (pi'il y avait diicl;
(ju'en tiruit l'Iiomidde commis en duel n'était pas
cuempt des peines générales du code, et renvoya
fncore une fois le prévenu devant la cour d'assises.
Nouveau pourvoi et nouvel arrrt de la cour
de cassation, en dale du 8 avril 1819, qui, abor-
dant celle fois la question , décide conformément
Hu\ conclusions du procureur-général ; h que dans
le duel il y a toujours conveniion antérieure, in-
tmlioD commune, réciprocité et simultanéité d'at-
laqiie et de défense ; qu'un tel combat , quand il
a eu lieu avec des chances égales de part et d'aulre ,
Mins déloyauté ni perfidie, ne rentre dans aucun
des cas prévus par le code pénal ; » et casse en
conséquence l'arrêt de la cour royale de Toulouse.
On trouvera aux Eclaircissemens historiques le
lexle entier de l'arrêt de cassation , avec un estrail
lie l'Hoquenl plaidoyer de M. le procureur-général
Moutre (278).
*Le 21 septembre 1821 , le cour de cassation
icida que le A\iv\ pouvait , seion les circonstances,
e qualifié assassinat. Voici l'espèce de cet arrël.
e 29 juin 1819 , le sîeur Jean-Baptisie Treins,
■fteutenant d'artillerie , domicilié à Eygicton ,
«rendit dans le bureau du sieur Pierre Damnrzid ,
Twfttur de IVurcgistrcment au m^mc lieu. A l'oc-
24
870 — HISTOIRE DES DUELS. —
casion de quelques propos tenus enir'eux , Treius
provoqua Damarzid à un combat singulier qui fut
accepté pour le lendemain à cinq heures du matin.
Lorsqu^on fut sur le terrain , les témoins cherchè-
rent à concilier les deux adversaires, qui persistèrent
dans leur dessein et voulurent se battre au pistolet,
à six pas de dislance. Le sort ayant décidé que
le sieur Treins tirerait le premier , les assistans les
engagèrent encore à s^éloigiier davantage. Treins
s'y refusa formellement , et tira ^on coup de pis-
tolet dont la balle atteignit Damarzid à Pestomac.
Blessé à mort, celui-ci eut la force de tirer, à soa
tour , sur son adversaire , qui fut blessé au bras.
Damarzid tomba aussitôt après, et mourut dans
la soirée des suites de sa blessure.
La cour royale de Limoges , contrairement aux
conclusions du procureur-général , renvoya Treins
devant la cour d^assises, comme prévenu d^assas-
sinat. On trouvera aux Eclaircisseniens Iiistorigues,
les principaux considérans de cet arrêt, Tun des
plus fortement motivés qui aient été rendus en cette
matière (279).
Le procureur-général se pourvoit en cassatioB.
La cour rejette le pourvoi par ces motifs : a que
Treins a été le provocateur , qu'il a tiré le premier
et malgré les instances des assistans , à une distance
tellement rapprochée qu^il avait à-pcu-près la cer-
— CHAPITRE XXT. — 871
.tiliiiJc (l'altcîndrc son Adversaire ; que ces cîrcons-
mccs ainsi reconnues , fout sortir le combat siii-
[ulîer donl il s'agil , de la classe <les duels qui n'ont
fMs été compris parmi les faits qualifiés crimes et
t^nis par les lois actuellement en vigueur. »
La cour de cassation a ici considéré le duel
jcommeun aisassiaai, parce ^u'on s'était lire de trop
dirrï. La cour royale de Douai a jugé de même
^lAans une espèce où Ton imputait it l'un des com-
r^ltans d'avoir -visé liop long-temps. Le combat
^vait eu lieu ii Ldle , entre le sieur L"* , négociant
•4tt cette ville et le sieur H", son ami. Au pre-
aicr coup de feu , celui-ci avait succombé. Le
ieur L"' ne s'élant pas pourvu en cassation contre
Tarr^'l de mise en accusation , comparut, le 25 no-
.Venibre 1828, devant la cour d'assises, où il fut ac-
quitté sur la déclaration unanime du Jury (280) .
Par un autre arrêt du 19 septembre 1822, la
COUT de cassation décida encore qu'il y avait
yieurlre , et non pas duel , dans l'espèce suivante :
Le 28 juin 1822 , les sieurs Roqueplane et
Durré se battirent à Marseille au pistolet. Les té-
.^oins voulaient fixer la dislaiice à vingt-cinq pas ;
|Bais elle le fut à quinze, sur les instances de Durré.
Le sort donna le premier coup à Roqueplane qui
ilira en l'air. Durré insista pour qu'un second coup
(&t dirigé sur lui, cl malgré les prières renouvelées
S72 — mSTOÎRE DES IWELS. —
des lémoiiis , le pislolel Fui rechargé , fil long feu
deux fois , et partit enfin sans I^atteindre. Durrè tira
«lors à son tour sur son adversaire et l^ètendh mort.
La cour royale d'Aix ayail renvoyé Durré aux
assises , comme prévenu du crime de duel en con-
Iravenlion aux anciens édits de Louis XIV et de
Louis XV ; en second lieu, de meurtre pour avoir
tiré sur Roqueplane , dans un moment où il ne
ùùwxdt plus lui-même aucun danger. Le procureur*
général s^est pourvu en cassation contre le chef de
rarrél, qui avait dèdaré applicables les anciens
édits sur le duel, abrogés par le code pénal de 179 L
L^arréi a en effet été annuité sur ce premier chef
et maintenu sur le second.
Celte jurisprudence peut donner lieu à de bieh
graves réflexions. L^arbitraire qu'elle semble con-
sacrer dans l'appréciation des circonstances d'un
combat singulier pour en déterminer la criminalité,
a quelque chose de réellement effrayant. La con-
séquence la plus immédiate de ces décisions n'est-
elle pas de donner une sanction légale au Code
des duels ? Si ce code avait été formulé , not»
aérions sans doute condamnés à le voir figurer en
appendice à la suite du code pénal?... Maia il est
encore non écrit ; quelle sera alors l'autorité qui en
fixera les régies et en déterminera Tapplication.'^...
— CHAPITRE \xv.— 373
Je ne pnrle (wa de ccUe com-emiim mitèrieute
entre deux duellistes qui établit , selon th cour
is cassiitioit, une réciprucité d'allaquc et de dé-
fense aimuUanées , comme ai la vie des Immmcs
'^it dmis le commerce et pouvait Otrc ta matière
it\m contrai. Je ne parte pas de cttle 6trange cou-
IndicHon cjiii Tait ensuite laisser i\ l'écart cette con-
wnion a/ii^iieitic , pciiir déclarer nteurtrier celui
j|ui lue siin adversaire aprcs eu avoir essuyé l£ feu ,
trce que /f rlangcr est passé pour lui. Mais daug
1 Ici cumbal i}uelte sera In distance Jt iHCfucIIe
jpo devra se placer, cl e«mbicu de sei ondes au
juste auru-l-uii pour se viser, afiu de n'i'trc pas
pulé assassin t On ne sera pas répréhcnsible quand
e coraliat aura eu beu sans dèloytuitè ni pcijtdic ,
^Hand OD n'aura viulé aucune des règles du cliampi
los, quand il y aura eu parfaite î'gabtc dechan-
as, cominc s'il pouvait jamais y avuic des cbauce&
IrictcToent égales dans un duel \
Mais lorsqu'il a plu à deux adversaires die cheisir-
la distaiu.-e la plus rapprncliÉe , et (^ue te sort n
té^l<i «Htr'eus l'or<lrc de cumbat , où seraient la
dèluyauli et la perfidie ?... Une fois le principe
du duel rcconmi , qui Gxcra les limites de ce pactit
: uu de mort qiie tes [Kulics simt autorisées,
I & conclure f Qui les cmptcttcia de jeter leur X^h:
Ljh ccuia ou pitC) do vider leur fpiereik pur tiitc
874 —HISTOIRE DES DUELS.—
sorte de suicide alternatif? Voudrait-on que Ta-
dresse fût Tarbitre du combat plutôt que le hasard?
Un duelliste de profession serait donc plus {ayorisé
que rhomme étranger au maniement des armes,
et que sa mauvaise étoile a jeté dans les chances
d^un duel P. .. Il est impossible de sonder les abîmes
où Ton se précipite, à la moindre déviation des
principes , en jurisprudence comme en morale.
Je n^ai pas encore parlé des conséquences noo
moins inquiétantes qui pourraient dériver de cette
maxime , que le duel sera tenu pour criminel selon
les circonstances. Je ne sais s^il est en Europe un
Etat , sans même excepter la Turquie , où il existe
des lois criminelles diaprés lesquelles certaines ac-
tions doivent être réputées crimes selon des cîr-
constances qu^on ne définit pas.
Il faut le dire hautement , le jour où de pareilles
doctrines seraient mises en pratique , ce jour ver-
rait combler la mesure du pouvoir discrétionnaire
déjà si exhorbitant , dont jouissent en France les
Magistrats chargés de Taction publique. Un td
arbitraire serait surtout intolérable dans les temps
de discordes civiles, car alors les circonstances ^
ce sont les opinions (281).
La lutte de la cour de cassation avec les cours
royales s^est prolongée pendant dix ans. Dans cet
— ciui'iTBE XXV.— 375
intervalle , el le 2ïi août 1821 , celle cour a encore
rassé un arril de la cour royale de Douai , purlant
renvoi aux assises de St. -Orner , d'un habitant. de
ecttc ville qui en avait blessé un autre dans un duel
ail pistolet.
Le 21 mai 1810 , un arn't de mise en accusation
de la cour de Paris, avnil i^galemeiil été anuulé
sur le pourvoi de M. Harly de Picrrebourg qui
aiait été arrêté el écroué à la Force , immédia-
tement après son duel avec M. de Saint-Aulaîre ,
rapporté ci -dessus page 362. La cour royale
d'Amiens, h qui celte affaire fut renvoyée, rendît
xm arrêt acmblable h celle de Paris. Il fut de non-
tau cassé, sur le pourvoi de l'inculpé, par arrêt
1 4 décembre 1824 ; et la cour de Rouen ,
iâe de l'affuire , ordonna enfin la mise en liberté
B M. Harty de Pierrebourg.
y Le même jour, nouvelle annulation d'un arrêt
le la cuur royale de Douai, sur le pourvoi du
leur Burgtt'Camac , officier anglais , qni , k la stiite
m cartel donné en Angleterre , était venu se
Jre k Calais avec un sieur Gough , son camarade.
Selui-ci avait reçu une butle dans le gras de la
IpDbe , et la cour de Douai avait considéré ce fait
Comme une tcnlalive d'Iiomicide. Ces dcu\ derniers
êts de la coiir de cassation oui été rendus sec-
fions réunies.
376 —HISTOIRE DBS DUELS.—
Enfin , le 11 mai 1827 , la cour suprême cassa
un arrêt de la cour de Nancy y sur le pourvei
d'un sieur Laberilie qui avait tué en duel , d'un
coup de sabre, le sieur Mangin.
L^aifaire renvoyée devant la cour de MeU , fui
suivie d^un arrêt conforme au premier. Sur un
second pourvoi , Parrêt fut de nouveau cassA
le 8 août 1828 , et Taffaire renvoyée devant la
cour de Colmar qui rendit encore le 20 novembra
suivant un arrêt conforme à celui de Met»,
La cour de cassation, dans son dernier arrél»
avait décidé qu'il en serait référé au Roi pour être
procédé à Tinterprétation de la loi. On vit enfin
arriver la clôture de cet interminable conflil d^
jurisprudence. C'était ainsi qu'on procédait députa
environ trente ans à la cour de cassation. TeUo
avait été pendant cet intervalle la position des
malheureux inculpés , obligés de garder prisoa
pendant qu'ib avaient à subir ces ruineuses invo*
lutions de procédures , dont le mécanisme bizarro
lut même asse» long -temps un objet d'admis
ration (282),
En résumé , la doctrine des cours royales ten^
dait à établir que le meurtre ou les blessure ré*
sultant du duel , étaient prévus et punis par les
dispositions générales du code sur les attentats è
V.- 377
s personiies. On repoussait avec cesjstèmB
t Duel (le la tangue législative.
Le combat en lui-mi'me et la Htinplc provoralion
n'étaient pas punissables , mnis seulement leurs
^rùleris. Les partisans de cette opinion n'étaient
pas , il faut l'aToner , Irès-conséqviens avec cux-
0^mcs ; cur , après avoir ainsi posé le principe, ils
Reculaient devant les eunaé([ucncc9. Ainsi ils ne
taHaient pas de comprendre dans le» potirsuilcs
\et complices tels que les témoins. Ils laissaient
ni k l'écart les dispositions rigoureuses du code
■ la tentative. Or, législative ment parlant, tout
|ombat en duel constitue un homicide ou une
jMilative d'homicide aveu guel-ii-pens et prémè*
ptalion. Il n'y a pas de milieu.
Le principal pivot do cette doctrine était l'opî-
Ijktn émise par lo rapporteur de cette partie du
(rojel du code pénal au nom de la commission
I corps législatif. Yoici comme il raisonnait :
u Vous vous demandez peut-cire , Mes&icura ,
lurcpioi les auteurs du projet de loi n'ont paa
signÈ partie u lié rement un attentat aux personnes
rop mol heureuse ment connu sous le nom de Duel,
^est qu'il se trouve compris dans les dispositions
ioérales qiti vous sont soumises. Nus mis en créant
Bs juges d'exception pour ce crime, l'avaient prea-
} autobl).... Le projet n'a pas dû particuluriscr
378 -- HISTOIRE DES DOELS. —
une espèce comprise dans un genre dont il donne
les caractères. — Si Thomicide est le résultat de
la défense à une irruption inopinée, à une pro-
vocation soudaine ; il peut , suivant les circons-
tances, être susceptible d'excuse. — Si le duel t
suivi immédiatement des menaces, des jactances,
des injures , si les combattans ont agi dans Fébul-
lition de la colère , ils seront classés parmi les
meurtriers. — Mais si les coupables ont médité,
projeté , arr<^té à Tavance cet étrange combat ; si
la raison a pu se faire entendre et s^ils ont mé-
connu sa voix, ils seront des assassins En vain
voudrait-on invoquer une convention entre les
duellistes et la réciprocité des chances quMb on!
voulu courir , la loi ne saurait transiger arec uo
aussi absurde préjugé. »
Il est à remarquer que dans les discours des
orateurs du gouvernement , chargés de la présen-
tation du projet de loi , on ne trouve rien qui
se rapporte à cette opinion. C'est pourquoi les
partisans de la doctrine consacrée par la cour de
cassation , repoussaient Pautorité de ce document,
comme ne contenant que Popinion personnelle
du rapporteur , ou tout au plus celle de la com-
mission dont il était Torgane. Ils se prévalaient
en outre du décret de la Convention , en date
du 29 messidor an II , rapporté ci-dessus page 344»
— CHUPITRE KXV.— 379
<l le préaenlaietit comme mlerprélanl , dans le aena
de la liberté des duels, le sitcncc qu'avait gardé
le code pénal de 1791.
Cependant il ne s' agissait pas , dans Tespèce sur
iMjuelle est inten'enu ce décret , d'interpréter le
code de 1791 , mais bien le code pénal militaire
1793 relativement k l'insubordination des in-
ieurs envers leurs supérieurs. Le tribimal de
■Versailles demandait si une proi'ocntion en duel ,
fcors du service, était un acte d'insubordination.
La Convention , qui d'ailleurs ne se préoccupait
beaucoup des intérêts de la discipline mili-
taire , déclare qu'il n'y a lieu <i délibérer « par le
iDolir que l'art. 1 1 , sect. IV du code pénal militaire
contient ni sens ni expression qui s'applique
k la provocation en duel. » Elle a, il est vrai,
•envoyé à sa commission de législation i'exatnen
de« mesures qu'il conviendrait de prendre contre
les duels et les provocations. Celte commission
s'est pas plus occupée de cet objet que celles
<de l'Assemblée Constituante W qui il avait été fait
! pareils renvois. Mais il est évident qu'il ne s'agit,
ms tout ceci , que du duel proprement dit et
! la provocation au duel, indépendamment des
blessures et des homicides qui peuvent en résulter ;
et il n'y a aucun argument solide Ji en tirer contre
l'upinion qui regarde ces cas d'homicides el blés-
880 «-mSTOIBE DBS DOBLS. —
sures comme compris dans les disposiUons générales
du code pénal qui ne fait aucune exception en fin
\eur des combats singuliers.
Les partisans de Fopinion contraire repoussaient
avec plus de fondement , Targument tiré du décret
du 17 septembre 1702, en faisant remarquer que
ce décret prononçait à la fois une cunnUUey pour
tous faits de duels antérieurs ou postérieurs au
code pénal de 1791 , et une abolition de tous
jugemens rendus en cette matière, depuis le 14
juillet 1789. Ce décret était donc nécessaire pour
remplir le but qu'on se proposait dans Fintérél
de ceux qui avaient été ou pouvaient être pour-
jiiiV/x , ainsi que de ceux qui avaient déjà pu élre
condamnés pour duel ; car en admettant que k
code de 1791 vali!it amnistie pour des faita anté-'
rieurs qu^il ne considérait plus comme crimes^ il ne
pouvait valoir aholiiion des jugemens définitifs.
Enfin cette question si délicate et d^un m haut
intérêt , vient tout récemment de se reproduire en
Belgi(]ue , où les lois pénales françaises sont encore
en vigueur , et la cour de cassation de Bruxelles
Ta décidée dans le même sens que les cours royales
de France. Ou trouvera au chapitre XXX le texte
de cet arrêt, dont les eonsidérans sont nombreux
et très- développés. Ils renferment un argument
nouveau et péremploire fondé sur cette remarque ,,
XXV.- 381
1j|bi n'avait pas encore (lé Tailc, savoir : que l'an-
cienne législalion snr les duels était spéuiale pour
Ie4 gentilshommes et les militaires, lesquels élaieiit
Mukjusttciables des tribunaux du Point dMionneur,
Bbmme on l'a vu aux Clitip. X\I et XXII; que
tes combats si rares dans les autres classes, étaient
laissés MUS l'empire du droit commun qui ne les
punissait pas comme duels , mais comme homicide
ou blessures. C'est jusiemcnt de cette manière qu'il
lut procédé contre le ri\al du comte de Riora ,
loanl de la fille du Régent. A'. ci-Hessus page 250.
^Lcs tribunaux du Point d'honneur ayant été
«Mippnmés,cn 1790, avec les autres juridictions
d'exception , et l'abrogation de toutes les lois spé-
rîalcs k la Noblesse ayant été la conséquence de son
abolition , il semble qu'on en devait conclure que
toutes les classes de la société en France étaient
I [placées , quant aux duels, sous l'empire du droit
lun. Cet état de choses , tel qu'il résulte de la
ttrioc des cours royales de France et de la cour
Cassation de Bruxelles , n'aurait donc en réalité
D de différent de ce qui se pratiipiail autrerois
[fégârd des classes non privilégiées.
Par suite du référé qu'avait ordonné la cour
fc cassation , un projet de loi sur le duel fui pré-
en ftwicr 1829, ii la chambre des Pairs.
882 — HisToinc des duel&. — ^
Le gouvernement , dans ce projet, a paru prendre
trop à la lettre les argumens sur lesquels s^étaient
appuyées les cours royales, dont Popposition avec
la cour de cassation avait pour principal objet de
faire sentir la nécessité d^une loi spéciale. On traita
le duel comme un délit commun ; on lui appliqua
les peines du meurtre ordinaire ou des coups et
blessures, sans oublier le tarif de V incapacité de
travail personnel. On n^eut aucun égard au point
de vue sous lequel la cour de cassation avait
considéré les Caito qui se passent dans un duel , et
qui ont, disait-elle, un caractère essentiellemeni
spécial par leur nature y leur principe et leur fin*
On ne songea pas du reste à assurer aux citoyens,
par des mesures convenables contre les provo-
cations , une satisfaction légale qu^ils ne cherchent
ailleurs que dans le silence ou Finsuffisance de
la loi (283).
Le projet souleva une assez forte opposition par-
mi les divers organes de la presse. Il a été néaa-
moins adopté par la chambre des Pairs avec de
Ijiombreux amendemens qui n^en ont pas corrigé
le vice radical. La session fut close avant qu^iltit
pu être porté à la chambre des députés. Depuis ks
événemens survenus en 1880, il n^en a plus été ques-
tion. On trouvera le texte du projet avec les amen-
demens 9i\i\ Eclaircissemens historii/ues (p8i)»>
CHAPITRE XXVI.
DiUinuation du mùme sujet. — RéTolulion de 1S30.
— Nouveaux duels pnlitupien. — Duels de jaurna-
lîsles ; d'avocats ; de gens de iettres ; d'nrtisnns ;
de fonctionnaireB . — Duel sans témoins. — Duel
entre frères. — Nouvelles poursuites judiciaires.
— Pétitions aux chambres sur les duels.
Il n'entre aucunement dans le sujet de celle
^isloire , d'examJDer ni les causes ni les résultats
-yolitiques ou moraux de la Révolution de 1830.
Cel èuënement ne doit £tre envisagé ici que re-
ilivement à son influence sur la paix intérieure
n payi* Or, c'est un fait dont quelques-uns
^fiteot , dont le plus grand nombre gémit pour
le présent et s'alarme pour l'avenir , mais que
personne ne songe ii dissimuler , que , depuis l'ori-
gine de nos discordes civiles , autant de causes de
divisons n'avaient encore agité les esprits.
L'anarchie qui régne dans toutes les opinions ,
lu a confondues , bouleversées , brisées en un
nûUier de nuances aussi tranchées, aussi hostiles,
384 — HISTOIRE DES DUKtS. —
aussi inronoiliables que les milliers d'intérêts ou
de passions qu'elles représentent. S^il est vrai que
jusqu^ei la guerre ait été évitée au dehors , eUe a
pris sa revanche au dedans où elle s^est déchaînée
avec une déplorable énergie. Je ne parle pas de
Témeute et de sa répression. Le caractère de Tune
el de Fautre a certainement offert de nos jours
quelque chose d'inouï. Mais les terribles chocs des
masses armées sont des épisodes de la guerre civile
générale. Malgré l'affinité de leurs causes et de leurs
effets avec les luttes privées, ces scènes n^entrent
pas dans les modestes proportions du plan de cet
ouvrage qui ne comprend que les actes isolés de
la guerre civile individuelle. Le nond^re de ces
derniers est encore assez grand , les circonstances
en sont assez funestes, les conséquences assez graves,
et le tableau qui m'en reste à Gedre assez lugubre.
Depuis le court intervaUe de quatre ans , oa
a vu plus de duels en France que pendant ks
trente premières années du 10.* siècle. Jamais,
dans les temps modernes , cette frénésie ne s'ètak
montrée aussi générale , aussi aveugle , aussi dé-
Torante. Puisse -t -elle avoir atteint son dernier
paroxisme !
La plupart des combats singuliers , qui vont
figurer dans celte triste revue , ont eu pour cause
les passions poUtiqucs. Ils semblent en suivre les
— CHAPÎTHE XXVf. — 885
nombreuses oscillations et reproduire avec une
grande yérité , dans leurs p^'riodes et leurs inter-
mittences, tous les symptAmes de Firritation qui
travaille le corps social.
L^ordrc des matières me paraissant préférable
k celui des dates, je parlerai d^abord des duels
auxquels a donné lieu la liberté de la presse. Ceux
qui sont résultés des débats parlementaires seront
Tobjet du chapitre suivant.
Le plus remarquable est sans contredit celui
qui fut la suite de la polémique entamée dans les
journaux, relativement k Tarrestation de Madame
la duchesse de Berry. C'est de ce conflit et des
încidens auxquels il a donné lieu que m'est venue
la première pensée de cet ouvrage.
Le 2 février 1833 , plusieurs rédacteurs du
jcnimal légitimiste le Bevemutt, se présentèrent
au bureau de la Tribune, organe de l'opinion
républicaine, pour demander satisfaciion aux ré-
dacteurs , d'un article qu'ils regardaient comme
injurieux à l'honneur de la duchesse de Berry.
Ceux-ci déclarèrent ne point accepter de combat
individuel, mais un duel collectifauquel prendraient
part un certain nombre de champions des deux
partis , dont il serait fait choix sur une hste établie
de part et d'autre. Lii-dessus, débats et échange
de lettres dans les deux journaux. Ce fut alors que
k^ar
386 — HISTOIRE DBS DUELS. —
d^autres feuilles de la même opinion , quoique de
nuances diverses , déclarèrent prendre le fait et
cause de la Tribune et intervenir politiquement
dans la querelle. Un rendez-vous fut en consé-
quence assigné entre M. Armand Carrel , rédacteur
en chef du Naliofud, et M. Roux-Laborie, l'un
des rédacteurs du Rc\*enant* Les témoins de celui-
ci firent de vains efforts pour empêcher une lutte
qui paraissait leur inspirer d'autant plus de répu-
gnance , qu^aucun d'eux n'avait de grief personnel
contre M. Carrel, dont le journal s'était toujours
distingué par son respect pour les convenances.
Le duel eut lieu. M. Roux-Laborie , visiblement
moins exercé que son adversaire , reçut un coup
d'épée qui lui perça le bras droit. On s'arrêta :
M. Carrel dit alors qu'il se croyait touclié égale-
ment. En effet, il fut reconnu qu'il avait reçu une
blessure dangereuse au bas - ventre ; on ne s'en
était pas aperçu. A l'instant même , de nouveaux
rendez -vous furent proposés et acceptés par les
témoins eux-mêmes , bien qu'ils se rendissent res-
pectivement la justice que leur eonduite avaii été
parfaite . La lutte ne fut empêchée que par b
brusque arrestation de tous les champions.
Ce n'est pas tout. Des défis furent immédiatemeot
adressés par tous les écrivains de l'opinion républi'
caine à leurs confrères légitimistes de la capitale*
— cTuriTBE T\vi. — 387
■Des aUroupemens se formèrenl , cl on commençait
k Yoir se propager dans les masses , l'exaspéra lion
qui régnait dans ccrUiim journaux. On se porta
«n foule aux bureaux du Hevenanl, de la Quo-
tidienne el de la Gazette de France, cpii, trois
jours durant, eurent èi soutenir un siège en règles.
Celte nlTaire a tenu toute la capitale en suspens
pendant la première semaine de février. Pcut-^tre
ne lui a-t-il manqué pour devenir un grave événe-
nenl politique, que d'i'trc arrivée quelques mois
trop tard. On ne sait trop nn^me quel parti les
passions politiques auraient lire de ce commence-
■lenl d'effervescence , si le danger de la blessure
■^e M- Carrcl ne s'était promptemeiit dissipé.
La circonstance la plus singulière de celte col-
lÎHon , et qui témoigne de quelles conséquences
Bile pouvait être pour la liberté de la presse , c'est
Un interdit général et Irés-énergiqucmeiil formulé ,
*|ui fiil lancé dans la Tribune, par l'opinion répu-
blicaine , contre les feuilles légilimistcs. Cet interdit
pas de suites, parceque ceux qui s'en étaient
lardèrent pas à comprendre que toute
ilrave ou restriction apportée à la liberté d'écrire,
ke pouvait tourner qu'il leur propre préjudice.
La Gazette dt; Ffaitcc, fidèle aux maximes qui
'Ccmt la base de ses doctrines en religion , en morale
,cl CD politique , avnîl opposé h toutes les provo--
888 —HISTOIRE DES DUELS.—
cations , une déclaration de principes dans laquelle
elle désavouait le duel par les mêmes motifs qui
Jui font repousser l'émeute , la guerre civile , et
généralement toutes les voies de violence collective
ou individuelle.
La Quotidienne y plus préoccupée des traditions
du passé que consécjuente avec ses principes re-
ligieux, parut n'envisager que le côté chevaleresque
de ce débat qu'on voulait transporter de l'arène
des journaux dans la lice meurtrière des champs
clos , et de là sans doute sur un terrain plus brûlant
encore, celui de la rue. Elle se montra donc dis-
posée à accepter tous les cartels et à faire face à
toutes les agressions. Une profession de foi où ces
sentimens étaient nettement exposés , parut dans
ce journal , quoique avec des expressions de blâme
pour une lutte collective qui était quaUfiée de non-*
sens, d'anachronisme et d'impossibilité.
Par suite de cet article , un rendez- vous fui ac-
cepté par M. de Brian, directeur de ce journal ^
qui se rendit sur le terrain avec deux de ses colla^
borateurs. Il avait été arrêté la veille que le combat
aurait lieu à l'épée. Sur le terrain, une pièce de
monnaie jetée en l'air décida lequel de M. de Brian»
ou de M. N***, l'un de ses deux collaborateurs ^
mettrait d'abord l'épée à la main , l'autre ne pou-
vant se servir de cette arme pour raison de santé*
— chApitbe XXVI.— 389
H. fi*** ayant été désigné par le sort , recul de aon
t adversaire une blessure bu hrns droit, et le^ lémnins
dértaréreiil que l'olTuire élail terminée (285),
A-pcu-près k la mémiî époque , des rencontres
, Jetntttablea avaient lieu k Cacn , Rouen , Lyon ,
Marseille , Bordeaux , ce qui Ht supposer un instant
Putistcnce d'un complot tendant à amener par ees
1(1 tics partielles une collision générale. Le gouver-
nement s'en autorisa nK^mc pour commencer des
|>oumiilcB et ordonner des an- estations , qui con-
l*Tlmèrent au muîns b calmer une aussi dangereuse
cnervescenee.
En août de la mijme année, les scènes de duel
•^commencèrent sur plusieurs points du royaume.
On ■ fixé particulièrement ceux qui eurent lieu à
Ljon, entre les gérans du Ptvi-urscur cl du Cour'
«TÛ-'r, cl il Bourges, entre M. Miclict, avocat, et
•e rédacteur d'une feuille minisléricllc.
II y eut une nouvelle recrudescence en février
l^j, et clic eut pour signal le duel qui coûta la
*>e à M. Dulong, avocat et député de l'Kure. On
**"»iuïerB les détails de ce funeste événement au
<^liupitre suivant.
" Une déplorable manie de duel était dans l'air
tvllK semaine, disait un journal du 31 janiier IS3il
l'p jour même où M. Dulong était rrap|>é, au bois
de [loulogoc , par la liidle du général Itugeaud ,
390 — ttlSTOUE DES DUELS. —
deux ttudians en médecine se battaient à deux pat
d^eux , et l'un de ces derniers expirait , atteint ausn
d^un coup de pistolet à la poitrine. Ce matin , trois
duels eurent lieu à notre connaissance , dont un
a encore eu une issue funeste , et tous les trois
avaient une cause politique. Enfin y aujounThui
encore le directeur d^un théâtre du premier ordre
a dû se battre avec un journaliste. »
Le 17 février de cette même année 1834 j 3
y eut une rencontre entre un avocat de Terrasson,
auteur d'une pétition au sujet de la réforme élec-
torale, et le rédacteur du Mémorial de la Dordegfte,
En juillet suivant, duel à Agen, entre M. F***
et le docteur Vacquié qui fut tué. Ce cond>at fui
la suite de Félection de M. Merle - Massaneau ,
député ministériel. M. Yacquié, partisan de celui-
ci , s'était porté à des voies de fait envers M. F***|
qui appuyait un autre candidat.
A la même époque , autre duel entre un Teu-
lonnais et un Marseillais , à Toccasion des ovation»
décernées ii M. de La Boulie, pour son ékctioa
à Marseille. Le premier, blessé dangereusement,
fut transféré à Tllâ tel-Dieu. Une foule de personnel
s'y portèrent avec des oeillets blancs à la bouton-
nière , et suspendirent une couronne verte , entre-
lacée de fleurs blanches , sur le lit du malade.
Le 16 juillet 1834, fl y eut encore un combat
— ClUPITRE XXVI. -*- 881
à Marseille , entre M. Barthélémy y rédacteur du
Peuple Souverain, et M. David, gérant du Garde
National y journaux d^opinions opposée». Ce der-
DÎer atteint d'une balle dans le ventre , a succombé
à sa blessure. Le différent était survenu à la suite
(TuDC lettre peu mesurée , écrite par M. David
à M. Maillefer, gérant du Peuple Som^raùi, qui
se trouvait alors en prison. Celui-ci avait inutilement
sollicité la permission d'en sortir pour se mesurer
lui-même avec M. David. L^un des collaborateurs
du journal prit sa place. Le poète Barthélémy y
ami du défunt, prononça sur sa tombe un discours
eii Ton remarque ce passage : a Voilà encore une
victime immolée à Teffroyable divinité qu'on appelle
llionneur. EUevons tous un cri de douleur et de
supplications , ua cri qui retentisse jusqu^aux
oreilles de ceux qui font la loi. Périsse le préjugé
qui tue ! Périsse Pexccrable duel ! »
£n septembre suivant , duel au pistolet entre
Tancien et le nouveau rédacteur de la Gazette
de Périgord. Ce dernier eut les habits traversés^
d^une balle.
Une note , communiquée par les témoins et in-
sérée aux journaux du 24 octobre 1834, contient
les détails suivant siu* un nouveau duel entre
joumaUstes :
a Une rencontre a eu heu aujourd^iui à Cli-
392 "— HISTOIRE DES DUELS. —
gnaiicourt , entre MM. Capo de Feuiilide el Victor
Buhaiii. Il avait été couveim la veille entre les té-
moins , que le duel aurait lieu au pistolet k la dis-
tance de vingt-cinq pas, que les deux adTersaires
tireraient Fun sur l'autre , et que le sort désignerait
celui qui tirerait le premier. Le sort ayant fayonsé
M. Victor Bohain dans ces deux épreuves, M. de
Feuiilide a été atteint d'une balle au coté droit de
la poitrine, a Je suis touché, a-t-il dit, c'est à mon
tour de tirer; et il a fait feu sur son adversaire qui
n'a pas été atteint. La blessure , quoique grave,
ne parait pas mortelle. »
M. Bohain , ancien rédacteur du Figaro, et qui
fut ensuite quelque temps préfet , avait déjà figurfe
dans un duel de même nature. Apres celui qui
vient d'être rapporté et à son occasion , il fut qucs—
tion d'un nouveau combat entre MM. Bohain e^
Lcfebvre , par suite d'une discussion relative à une
lettre dont il aurait été fait usage sans l^aveu de
celui qui l'avait écrite (286).
En novembre 1834, il s'éleva une très- vive dis-
cussion de principes entre le Bon Sens et le Eéfof^
mateur , journaux républicains de nuances op-
posées. Les colonnes du journal ne suffisant pas à
l'ardeur de la polémique , un pampidet fut lancé
des presses du Bon Sens contre M. Raspail,
rédacteur du Réformateur , qui riposta aux per-
I
(VI, - 303
■onnalîtés dont il était l'objet par une accusulîtin
■(Je désertion de principes , d'nposlasic , de Ira-
bïson.clc., etc. M. Bodde , auleur de la pulé-
mi{[iie du côté du Bon Sens , demanda satisraelion
h M. Raspail. Celui-ci prolesta contre wne pareille
Forme , et ne fil pas mystère de la répugnance
pf lilosopliique que lui inspirait le Duel. Sur l'insis-
laucc de plus en plus vive du Bon Sens, M. Raspail
accepta le combat, mais récusa pour adversaire
M. Rodde , et demanda le gérant M. Cauchois-
l<cinaire. Vnc longue conlrOTCrse s'engngea alors
sur le chois des armes tjue les deux parties s'attri-
huQitnt , chacune se prélendant originairement
proToquôe. Enfio, M. Baspail ayant accepté l'arme
■fil pistolet, proposée par M. Cauchois-Lcmaire ,
le duel cul lieu au bois de Vincennes, le 30 déccm-
"K 1834, sans résultais funestes. Une note signée
<l<niétnoin3 et insérée aux journaux du lendemain,
(■«nlicnl les détails officiels du rombal (287).
Celte affaire fut, pour le Itrfornuiiritr, une oc-
(^«on de présenter une théorie fort curieuse sur
'e duel et les moyens de le prévenir. Cel objet
a fait la matière de plusieurs dissertations trcs-
approrondies dans divers N."' de janvier et de
février 1835. La base de celte Ihéorie esl l'exclu-
>ion absolue du duel dans les querelles privées.
U a'esl admis qu'une excepliun tcinpoi'au'e pour
I
894 — inSTOIRB DES DUELS.—
les débals politiques, doctrine très - conséquente
ayec Topinion qui professe de la manière la plus
absolue le droit d'insurrection* Quant aux duek
privés , on propose , pour les prévenir^ la for-
mation dans chaque localité d^un Jury bénéyoh de
conciliation, dont la mission serait d'éteindre, par
arbitrage amiable , toute querelle de personnes el
d^intéréts , ce qui comprendrait les procès de toute
nature. Plusieurs organes de la presse provinciale
ont répondu à cet appel. Il est bien à craindre
néanmoins , qu'une telle réforme ne soit qu'une
généreuse utopie qui viendra se briser, comme tant
d'autres, contre V IfuLiv^iduaUsme actuel (288).
L'indépendance du barreau n'est pas plus res-
pectée par le tyrannique préjugé du Point d'hoa-
neur , que celle de la presse et de la tribune.
Il existe un grand nombre d'exemples de conflits
semblables entre des avocats. En 1834, Iq Journal
des Débats en citait un qui avait été oMigé de
soutenir son plaidoyer l'épée à la main , en pré-
sence de plus de cent personnes. Je me bornerai
à rappeler l'un des noms les plus illustres du
barreau , celui de M. Berryer , à l'occasion du
cartel qu'il reçut , en 1829 , de M. Evarisie Du-
moulin, rédacteur du Conslitutiormel , à la suite
des débats d'un procès entre ce journal et la
Quotidienne (289).
Le symptôme le plus frappant qu'on remarque
«liins celle universelle agitalion , c'est qu'on ne
rnnnail plus dans la société Française , ni profession
quelque paisible qu'on In suppose , ni condition ,
que Iqu' inférieure qu'elle puisse ^tre, qui ail 6c1iappi
k lu manie du duel. Le Point d'honneur, cpiî ne
fut si long-temps qu'un préjugé aristocratique,
dans son essence comme dans son origine, non seu-
lement a gagné rapidement la bourgeoisie , depuis
la fin du dernier siècle , mais il est mc^me de nos
jours descendu jusqucs dans les classes populaires.
Chez l'habilant des villes, le bùton du moyen
Age commence h tomber dans un complet discrédit.
L'usage des armes naturelles , telles ([ue le pied
ou le poing , csl rélégué clies le peuple des cam-
■aagnea , qui bienlàt se civilisera k son tour. 11
nbaiidonncra ces tulles faciles , mais obscures ,
étrangères aux règles de l'arl cl par cela m^mc plus
égales. 11 y renoncera ne fut-ce que pour se mettre
à l'abri de l'action des tribunaux qui n'admettent
une excuse , quand , pour vider une querelle ,
bn ne s'est pas servi des armes les plus meurUicres ,
lelles que l'épée ou le pistolet.
Les armes les plus utiles dans la guerre, ont
ujours été celles qui donnent le plus sûrement
mort ; dans les luttes privées , elles sont le.f plus
jMi/ej. Qu'il en ail élé ainsi au moyeu âge oii
896 — HISTOIRE DES DUELS. —
I^on a vu de quel prix était la vie humaine , cela se
conçoit sans peine. Ne serait-ce pas un anachro-
nisme , aujourd'hui qu^on ne voit plus régner, dans
aucune des classes sociales, les instincts féroces, le
goût du sang, Témulation du meurtre, mais bien
plutôt la soif de Tor , des emplois , des honneurs
et des dignités ?
Je ne finirais pas vraiment , si je devais exhumer
des feuilles publiques les divers exemples de san-
glantes querelles qui éclatent journellement entre
nos concitoyens de toutes les conditions. On a vu.
des savans , des littérateurs , de paisibles C(Hn-
mcrçans et m<?me de simples artisans , sacrifier sans
hésiter et sous le moindre prétexte , à cette dévo-
rante idole du Point d'honneur.
Déjà, sous la Restauration, une question de préé-
minence entre le Classique et le Romantique , avait
été confiée aux chances d'un combat sîuguUer,
comme l'avait été, au dixième siècle , celle de la
Représentation entre héritiers. Quelque chose de
semblable est arrivé de nos jours , pour une ques-
tion de propriété lilléraire entre deux auteurs dra-
matiques , MM. Alexandre Dumas et GaillardeL
Ils se sont disputés devant les tribunaux d'abord,
puis en champ clos, la (Kiternité d'un drame intitulé
Lit Tour (le Ncsic. Deux coups de pistolet furent
échangés à la distance de quiuxe pas. L^un de ces
H — cnArrrnE ssvi. — 397
H Messieurs voulait que le rumbut c nu lî nu à t jusqu'à
I la mort. Mais les témoins s'y sonl opposés , elles
Hdeux adversaires insistant , ils se sont retirés on
Bmaportaot les armes (290).
K On lisait dans un journal du 17 juillet 1833 :
^b Une rencontre a eu lieu ee matin , entre un mar-
^Bjband de soieries de la rue Saint-Denis, et un
^puarcliand de bois, à la suite d'une discussion
Mir des opérations commerciales. Les deux cham-
pions avaient fait choix du pistolet ; le marchand
de bois a été grièvemcnl blessé k la télé.
En 1835 , le tribunal correctionnel de Doulogne-
wr-Mer condamna à une amende de cent francs
un entrepreneur de bains publics, pour outragea
fQTCrs un marchand Ihïencier qu'il avait inutile-
Qf^ul provoqué en duel , à l'occasion de la vente
J'iiD po^lc dont il était mécontent.
L'année précédente , la ville de Douai avait eu
t^ déplorer les suites fimestes d'un combat entre
tin marchand de draperies de cette ville , et un
ouvrier chaudronnier de Cambrai, lis se battirent k
l^pée dont aucun des deux n'avait l'usage. A peine
étaient-ils sur le terrain , qu'ils se sont précipités
Tun niT l'autre, tête baissée cl la pointe en avant.
L'ouTrier chaudronnier reçut le coup au côté de
flanc droit.
I
89S —HISTOIRE DBS DUBLf. ^
Obligé de faire un choix parmi les laits qu^îl
me reste à rappeler, je donnerai la préférence à
ceux où Ton a vu si souvent se mettre en scène
des fonctionnaires publics de tous les rangs. La
tolérance complète du gouvernement à leur égard ,
donnera la juste mesure de la liberté , pour ne
pas dire de la faveur, dont le duel jouit aujour-
d^iiui en France.
Vers la fin de 1832 , plusieurs officiers de police^
récemment décorés de Tordre de la légion d^hon-
neur, se transportèrent au bureau du Temps, pour
demander satisfaction d'un article où Ton avait
blâmé la distinction dont ils venaient d'être Fobjet.
M. Jacques Coste, gérant du journal, voulut en vain
se prévaloir des droits de la presse. On se porta
envers lui à d'indignes voies de fait pour le forcer
à accepter un rendei-vous. Mais cette incartade
brutale coûta cher à son auteur : on fut sur le
terrain , et Fofficier de police reçut une iialle qui
rétendit mort sur la place.
Un autre journal , le Courrier Français, avait
qualifié d'imbéciUe une ordonnance de police
sur les spectacles. Le préfet M. Gisqœt , auteur
de Tordonnance , se rendit auprès de M. CMtelaiD}
gérant du Courrier , et lui demanda satisfoctioD.
Des témoins furent choisis ; le général Darriiile
et M. Ganncron, députés, se présentèrent pour
— auwTm; xtvi.— 399
H. Cisqiict. M. Châtelain prit pour les siem, un
B^înipri^tdrcs du Courrier iA M. Carret , rétlar-
BiiT en chef du Nalionnl. Ces Mesaicura entrèrent
iconTèrence, comme il est d'usage entre témoins,
il résulta de leur discussion «pie la qualification ,
|oDl se plaignait M. Gisquet, ne raraclérisnil pas
nfTense personnelle excédant les limites du
Iroit d'examen appartcnanl à la presse , qu'en con-
l^quence il n'y avait lieu ii en demander réparatioa
les armes : l'affaire en resta là.
î Ceci se passait en février 1834. Au moyen Age ,
M plaideur mécontent pouvait appeler son juge
duel; le juge ne provoquai! pas ordinairement
k plaideur. Il n'y avait que le Prévôt de Bourges
|Hi eût cette facidlé. Mais ce privilège fut aboli
■r Louis-le-Gros , et l'on était alors en 1145!...
^oyez ci-dessus, Pag. ^ et la note 67.
En août 1833 , une question relative aux répara-
pna de l'église de St --Germain- l'Auxerrois occa-
teona entre M. Cedet-Gassicourt , l'un des maires
Paris, et M. Viguicr , son adjoint, une \ive
pwreile qui occupa les journaux etîjui se termina
r un duel.
Dans ce m^me mois d'août , une chanson contre
révolution de Juillcl fut le sujet d'un combat
i pi»tolet entre M. de Trobrinnt , ancien officier
! la Garde Royale , et M. Pélicicr, chef de bureau
400 — IIISTOIRE DES DUELS. *-
à l'Intérieur. M. de Trobriant voulait tirer en l'air«
— Point de Idclie condescendance, lui crie 'son
adversaire , ajustez - moi , Monsieur , fen ferai
autant. Le coup pari; M. Pélicier reçoit la balle
au front et expire. M. de Trobriant fut immédiate-
ment arrêté et écroué à la Force.
Le 2 août de la même année , le sous-préfet de
Bergerac se ballit avec M. C***, receveur particulier
des finances , et le blessa.
Ce fut encore dans ce même mois , qu^eut lieu le
duel rapporté ci-dessus, Pag. 120, etdanslequek
figura M. Léon Pillet , rédacteur du journal de
Paris, aujourd'hui maître des requêtes au Conseil-
d'Etat.
En février 1834, M. B***, sous-préfel dePAr-
gcntiére (Ardèche) , et M. T***, substitut du
procureur du roi , allèrent sur le terrain échanger
une balle a la dislance de vingt-cinq pas. Ce der-
nier reprochait au premier d'avoir provoqué sa
destitution. La balle du substitut effleura le ventre
du sous -préfet, et celle du sous-préfel sillonna
l'épaule du substitut. On voulait recharger les ar-
mes, mais les témoins réussirent à mettre fin au
combat (292) .
En juin 1834, M. C*** , substitut du procureur
du roi à Avignon, se battit au sabre avec M. d'H***.
11 reçut trois blessures , deux au bras et une à la
— CBUPtTBt JKVl.— 401
; son iKlvFnairc fut biimi l/-gvr(rinpnl blewè.
u M. C"* a eii de graniU loris, disait le Journal
d'Avignon , en rapportant ce duul , mais il les a
nolilement r^-jtarés. »
En décembre 1834 , pliineura journaux par-
lèrent d'un duel entre un prt-sidcnl de cour royale
tt un avocat, dont celui-ci aurait H(: le compéti-
ilcur nux élections muoicipali's. Le magistrat aurait
blessé (293).
On comprend sans peine quel efFel doivent pro-
lire sur l'opinion, des trails semblables, de la pari
4e ceux qui doivcnl au public le premier exemple
de la dignité, de la inmlcnttion el des botuies
moHirs.
L'une des inconséquences les plus étranges parmi
totiles celles qu'où rencontre à cliaque pas dans un
^reil sujet, c'est que, lundis que des fouctionoaires
iHcs de tous les rangs dunnent ainsi impun6-
it, cl sans m(îine cocourir aucune disgrAce, le
ktal exemple de te faire justice h soi-même, lea
tribunaux retentissent encore par fois de procès
,pour duel , qui , après avoir fraïkclii les degrés in-
iaires, arrivent jusqu'h la cour d'assises.
Le plus remarquable de ces procès est celui qui
intenté à M. le comte Léon, fils naturel de
apolèon , cl dont les dém^'l^s avec le colonel de
liniialc de Sainl-Dcnis , «ni long-lem|)s
2(1
■Mbl
BfaenI
402 <— HISTOIRE DBS DUELS. —
occupé les journaux et le Conseil-d^Etat. II s^élail
battu en 1833 , au bois de Yincennes « avec le
capitaine anglais Hesse , à la suite d^une perte au
jeu de 18,000 francs, éprouvée par ce dernier*
Les conditions du combat avaient été réglées
écrit. Les adversaires étaient placés à trente
de distance, et devaient marcher Tun sur Paul
jusqu^à dix pas. Mais si Tun tirait durant ce trajet
Tautre devait s^arréter et tirer de la place où i
aurait essuyé le feu de son adversaire. Ils avancèrent
Fun sur Pautre de trois pas , se visèrent , mais n
tirèrent pas. M. Hesse fit encore un pas, M. Léon
Pimita et les deux coups partirent presque en même
temps. M. Hesse reçut au sein gauche une blessure
dont il mourut trois jours après.
Madame Hesse, qui avait originairement porté
plainte , ne s^est pas présentée devant la cour
d^assises de Paris , oii les débats de cette affiire
eurent lieu vers la fin d^août 1833. Sur une courte
plaidoierie de M.^ Dupin jeune , M. Léon fot
acquitté (204).
Quelques jours auparavant, les 10 et II aoAt
1833 , la cour d'assises de la Marne s^était Clé-
ment occupée d'un duel dans lequel avait suc-
combé M. Lemerle de Sezanne. Les accusés étaient
M. Demony , chevalier de Saint -Louis, ancien
adjudant-major ; et son témoin , M. DerouMl i
— cb^pithe sxv(.— 403
Slfîien mililnire. lU étaient dèrundiis par M.' Gtiille-
nitt , avocat du barreau de Paris. S«n ronfrêre ,
l,« Cliaix d'l',st - Ange jflaitlaît pour la veuve,
■rtie civite. On a remarqué qiie M." liuillemin,
Dut en défcDdant des duetlisles , condamnait le
^ucl; tandis que M.* Cliaix, tout en faisant l'apo' •
logic du duel , voulait faire condamner les accusés
<|iii tous den\ ont été arquitlûs (295).
Enfin, plus H'cemmcnl encore, en octobre 1834,
tous les journaux ont retenti des débats judi-*
claires qui eurent Ucu Ji ta cour d'assises de Paris,
k l'oi^casion d'un duel sans témoins , et qui furent
terminés par une condamnation , exemple inoui
depuis tant d'années.
Le sieur Lethiiilber , tenant avec sa femme une
maison de santé à Pantin , logeait chez lui un aieur
Watlebaut , Se disant homme de lettres. Des liai-
sons d'amitié Irés-éiroites , fondées principalement
iur la sympathie de leurs opinions républicaines,
t'étaient établies entr'eux. L'ne mésinlelligence sur-
tint en octobre 1833; Lelhuillier en donna pour
cause des relations intimes qu'il soupçonnait entre
a feDameetWallebaul. lin jour , ii la suite d'une
•cène violente , on convint de se battre au pistolet.
■ Il fut résobi que ce serait sans témoins pour éviter ,
disait Lelliuillier, des tentatives de conciliation, ou,
I \VaUet>aiil, pour s'épargner une coiilidence
404 —HISTOIRE DES DUELS. —
relativement aux motifs du duel , el ménager ThoD*
neur de la femme Lelhuillier.
On se rendit le 22 octobre , entre midi et une
heure, dans un petit bois près celui de Romainviile.
Là , Wattebaut tenta de nouvelles explications. Le-
thuillier ne voulut rien entendre. Un coup de pis-
tolet fut tiré par Wattebaut sur son adversaire. La
balle l'atteignit de profil à l^œil droit, el traversant
les orbites et les fosses nasales , sortit par Tœil gau-
che. Depuis ce iemps Lelhuillier fui frappé d^une
cécité complète. Watlebaut Tayanl vu tomber se
serait enfui , le croyant mort , a-t-il dit : cependant
Lethuillier se releva , et parvint à atteindre le cime*
tière de Pantin. A ses cris, quelques personnes
accoururent , et il aurait répondu à leurs questions
qu'ail venait de se battre en duel.
Cependant huit jours après, le l.^^ novembre ^
Lethuillier porta plainte contre Watlebaut , Taccu-
sant d'avoir tiré sur lui par traliison et avant qu'il
ne fût en position. 11 prétendait même avoir voulu
se battre au mouchoir avec un seul pistolet chargé.
Wattebaut fut arrêté. 11 soutint qu^il avait été con-
venu de marcher Tun sur Tautre et de faire feu à
volonté , démentant sur presque tous les points le
récit de Lethuillier. Traduit devant la cour d'assises
de Paris , le 26 octobre 1834, il a été déclaré cou-
pable par le jury , de tentative de meurtre avec
I — CTiAPiTRB x»\r — 405
^KÙcenslauccs a 11^ au a nies', et coiidaniné à dis ans
■fc réclusion.
[P Malgré cet Rtrét , il est encore assez difTtcile de
bien apprécier tontes lus circoti stances de cette
fcîxBrre stTaJre. Le ptaiguaut était le principal et
pour ainsi dire runti|iie témoin k charge. II se
présentait aux débats environné de tout l'intérêt
que faisaient iiattre la nature et la gravité de ses
res. Sa déclaration donna tieu à quelques-
les de CCS vives émolioas d'audience , dont le jury
i-méme ne sait pas toujours se défendre. Cepeu-
int elle dut perdre beaucoupde son poids, quand,
IDS le cours des débats , LcthuiUier diïclura &ç-
mslituer partie civile (296) .
Cette triste notnenclalure de défis, cartels et cof-
Bons si diverses, sera terminée par un dernier
%ut qui prouve à quel point uous sommes er^
Vngrés dans la carrière du ducL On a pu quelque-
fci» entendre des provocations entre frères. Il était
fKtque inoui , jusqu^à ce jour , qu'on en fùtvenit,
■a cBets. Voici en ce genre un trait de férocité
1^ que les journaux publiaient tout récemment
■Xu les termes suivons :
« Us événement aH'rcux vient d'arriver dans
'fc^èpftrtement de U Dordognc. Le 25 février 1835,
''fs les quatre heures du soir, les deux frère»
'"■teste, de !a commune do St.-Méard-de-Garçon,
406 -^ UISTOIRE DES DUELS. —
arroïKlisscment de Bergerac , se sont rendus dans
la commune de Pizon , à trois grandes lieues de
leur demeure , et arrivés dans le bois appelé Au,
Tarnat, ils se sont battus en duel, au pistolet
Le plus jeune a tiré à son frère , dragon au 11.*
régiment, un coup de pistolet qui ne Va pas atteiut,
et aussitôt il Ta assommé h coups de bâton et ne
Ta abandonné que lorsqu^il Ta cru mort. On espère
sauver le militaire. Son frère a été arrêté et conduit
dans les prisons de Bergerac (3^7). »
Depuis quatre ans, plusieurs p<[*tilions ont été
présonlécs aux deux Chambres législatives, pour ré-
clamer une loi contre le duel. On peut citer no-
tamment celle de M. le pasteur Gardes de Nismes
qui a demandé que les duellistes fussent privés des
droits politiques, he Semeur , journal protestant,
a aussi plusieurs fois publié des articles dans le
même sens (298).
Dans la séance de la Chambre des Députés du
28 février 1835, il a été fait rapport d'une autre
pétition présentée par le sieur Monteil , et tendant
à ce quMl fût pris des mesures contre les duels,
principalement contre ceux des fonctionnaires pu-
blics. Le rapporteur, M. Teyssèro, a proposé, au
nom de la commission , Tordre du jour sur cette
pétition , par le motif que les mœurs , et non to
— CHAPITRE xxvr. "" 407
lois, peuvent seules dutniirc rimbitude du duel,
a Espérons, a-t-il ajouté , que dans un avenir
prochain , gr&ces aux progrès des lumières et de
la civilisation , le Point d^honncur consistera , non
k vider une querelle dans un combat , mais à s^en
remettre au jugement d^amis communs , et , au
dèfieiut de ce tribunal de famille ^ h un jury de
conciliation formé des citoyens les plus respec-
tables de la localité. Espérons surtout ({ue le Point
d^honneur consistera h ne jamais servir de lumoins
à ceux qui voudraient sacrifier à ce barbare
préjugé. »
La Chambre , après avoir entendu un discours
de M* de Lamartine contre Tordre du jour pro-
posé , renvoya la pétition au ministre de la justice.
Oa trouvera le texte de (*e beau discours aux
Eclairvissaucns hà 10/14/ ucs (20!)).
CHAPITRE XXVII.
Dueb parlementaires.
LV.POQUE de la renaissance du gouvememcnl
représenlalif en France louchait de bien près k
celle où le duel , avec les habitudes féodales dont
il dérive, fut le plus en honneur. Cependant, il
n^inspira gucres que du dédain aux orateurs lea
plus célèbres de la première de nos assembléet
poUtiques. Quoique, pour la plupart d'entr^eux,,
la parole fût une arme improvisée , ils surent s^en
contenter , et les palmes du courage civil suffirent
à leur ambition. Toutefois, les prétextes ne man-
quaient pas alors. Tant d^exaltation dans les esprits^
tant de préjugés froissés et d^intéréls compromis ,
tant de hardiesse dans Tattaque et d^opiniàtretè
dans la défense , auraient pu excuser bien des
provocations. On a vu d'ailleurs au chapitre XXIII
quels violens orages éclatèrent au sein de la Cons-
tituante. Chaque jour , au milieu d'irritantes dis-
cussions, les sarcasmes les plus amers, les inter*
— CHAPITRE IXVfl. — 40B
pellations \e9 plus passionnées s^échangeaîeni entre
ces deux côtés si célèbres , qui , rivaux de lalens ,
de principes et d^intéréts , sans cesse se mesuraient
de Vœ\\ , sans cesse s^attaquaient , ou du geste ,
ou de la voix.
La béte fauve de TAssemblée , disait un écrivain
moderne , Mirabeau , fougueux , échevelé , impu-
dent y choquait ^ blessait , renversait comme le
sanglier ^ aimant mieux encore être applaudi par
•es passions dans son cœur que par le peuple dans
les tribunes. Un jour Caillés Tintcrrompant lui
dit : M» de Mhnbeau vous clés un baxnird ci
wUlh tout. — M. le président , réplique froidement
i^dui-ci , faites donc taire M. de Cazalès.qui
m'appelle un bavard*
Mirabeau est un scélérat et un assassin , s^è*
criait M. de Guilhermy ; — Ce Mirabeau est un
grand gueux , répétaient MM. de Lautrec et
d^Ambly 9 M. de Mirabeau vous nous insultez ,
interrompait moins impoliment M. de Viricu
L^impassible tribun opposait à toutes ces saillies
insultantes un front d^airain. Son regard d'aigle,
tranquiUement fixé sur les interrupteurs, suffisait
pour les contenir , quand sa voix de tonnerre ne
leur jetait pas cet ordre superbe : Silence aux
trente voix ! Quelquefois il semblait prendre plaisir
à soulever d'un mot les flots tumultueux de TAs-
410 -* HISTOIRE DBS DUBL8.—
semblée , et y quand Torage paraiflsail à son plui
liaut degré , d'un seul geste il savait le calmer.
On sait avec quelle verre de gaieté^ il recevait
les cartels qui venaient Tassiéger jusques à la tri-
bune. Gomme ces guerriers qui ^ jaloux de ré-
server leur sang pour la patrie^ remettent les parties
d'honneur h la fin de la campagne y Porateur po-
pulaire renvoyait les provocateurs à la fin de lu
session , et , pour assurer leur tour , il leur oflirait
des numéros d^ordre (300).
Le vicomte de Mirabeau était un zélé chevalier
de Tesorime, ayant toujours flamberge au vent
On sait qu^il fut constamment l'adversaire politique
de son frère aine, pendant la session de PÂssemblée
Constituante où il se distinguait par sa pétulances
« La plus belle grâce qu'on puisse faire à M. k
vicomte de Mirabeau , s'écriait un jour le baroo
de Menou , est de croire qu'il ti était pas de
sang frais. »
M. d'Âmbly s'exprimait ainsi & la tribune :
« Elevé dans les camps depuis l'âge de douze anSi
je n'ai point appris k faire des phrases, mais je
sais faire autre chose*, •• »
Dans l'orageuse discussion du ^eto, où le comte
de Virieu laissa échapper une interjection éneijgi*
que qui excita le plus violent liunulte , le Monilatr
peignait ainsi rallilude d'un orateur ecclésiasIiqM^
— (IHAPn-BE WVIL— 411
w'-Im célèbre : « L'abbé Maury veul parler. — Ou
l^lemaude À aller aux voix. — Il entre en l'iiruur,
■ saisit la Iribune et l'ébraulc , comme pour la
muer sur le càlù gauche loiil eiilicr (301). »
Le trait, qui concerne le Giroiidiu Graugcneuve,
A Ail suffire pour rclraeer la pltysiouomiti de VAa-
*cnibl6elégislalive. P'oyez ci-tkasas , Pag.^A'l.
La CtmvenUun eut , pour l'iaviulabilitè de ses
tacmbres, !e mi;mc rcs|iccl qite pour celle du mo-
brque dont elle brisa le Irûne. Le lorubeau de
lUuis XVI élait un abimc toujours bôaut , nù vÏD-
U)t tour-h-tour a^cngloulir les plus inipitojables
; EC6 juges.
Ce fut alors qu'éclatèrent entre la Plaine et la
■Montagne, ces horribles luttes qui se préparaient
B0UIS les clubs et se terminaient sur l'écbafaud. Ta
^■n as menli , répli<piait de sa place le représentant
^^acot de Nantes, au vendéen Fayau , qui deman-
dait sa léte il la tribune. Nous sotnnivs dans une
saile d'armes ! s'écriait un Montagnard au milieu
M^'unc afTreuse mêlée. Ce n'élait pas pourtant le
^B^aive du spadassin qu'on voyait suspendu au-
dessus de la tribune convenliunnelte , mais la liacbe
du bourreau. Quand Talben donna le signal de In
jféflclion thermidorienne , ce ne fut [mis une épée
pie Robespierre vît éliucclcr dans ses mains , mais
412 ^HISTOIRE DES DUELS.—
Quels athlètes que ces audacieux ctieb de partis^
qui avaient fait alliance a\^c la mort, dont le gesl^-
énergique ou la voix tonnante faisait appel ,
plus fort de la lutte, à leurs seconds des Iribui
publiques, et à ces Parques wres et basses , qu
représentaient là les Tricoteuses /... Quel» draon
que ceux où Ton voyait d^autres organes du PeupFi
Souverain , ces représentans de la Commune ,
clubs ou de Tinsurrection , apportant à la
des insultes, des menaces, des cris de mort, (mj
la tête de Féraud aux courageux hommages du
président Boissy d'Anglas (302) !....
Au 18 brumaire, comme au 18 fructidor, la scène
politique avait changé de décoration. Les formes
parlementaires étaient devenues une farce gnh
tesque dont les compères, qui en avaient le secret,
Taillaient les bonnes gens qui les prenaient encore
au sérieux. Les partis ne perdaient plus de temps
à se combattre k la tribune par la parole ; on cher-
chait h se gagner de vitesse pour opposer la force
à la logique , et substituer au gouvernement re-
présentatif le régime des coups d^état.
La paix régna toujours avec le silence à la tri-
bune impériale. Le duel parlementaire ne date
donc chez nous que d'une époque bien plus ré-
cente , celle de la Restauration. Nous Pavons em-
H —CHAPITRE XXVH.— 413
" prunli- tk l'Angleterre avec Ic-s formes exotiques
J<-* son gouTernemenI représentai if : nous aurions
ntii'iix fait sans doute de n'en prendre que ce qu'il
y avnit de bon et de lui laisser le reste. Mais ce
'*^t presque loujours le conlraire qui arriva , toutes
I*?s fois que la France , enuuy^'e d'être elle-même,
Voulut tailler ses mœurs ou sa politique sur les pa-
'•XJiis de ses voisins.
A peine la Restauration cut-ellc relevé la presse
av«c la tribune, et proclamé riniancipalion de la
(pensée , comme de la parole , qu'on vit l'épée du
duelliste prétendre étouffer la voix de l'orateur ,
Cn m^me temps qu'elle essayait de briser la plume
*Ie l'écrivain. On verra de nos jours celte prélen-
•«on, après s'élre essayée en pratique, se poser
hanliment comme une tliéorie (303).
Les débals de la presse et de la tribune étaient
'oÎQ de se dessiner, à l'instant de la renaissance,
^vec ce caractère de violence qu'on leur voit au-
lounl'hui. Aussi, les duels politiques de la Rcs-
*ﻫiralion ne sont-ils pas ti comparer avec ceux de
'V-poquc actuelle. Les collisions nées dans l'en-
<-'eiiite parlementaire, s'étaient toujours, avant 1830,
^«miinées sans elFusion de sang.
Le général Foy ayant , dans un de ses discours ,
V*àt avec quelque amertume de l'ancienne ^i-
S''BliuQ, M. de Corday se crut insulté, comme
414 — mSTOTRE DES DUKIiT. —
émigré , et lui adressa de sa place une apostrophe
violente. La même chose est aussi arrivée à
M. Adam de La Pommeraye , à Fégard du général
Lafond qui lui paraissait s^étre exprimé avec peu
de mesure sur l'ancienne armée. 11 y eut des carteb
donnés et acceptés dans ces deux circonstances ,
mai» sans résultats fâcheux.
Une autre fois, M. Benjamin Constant défia,
à la suite d^unc vive discussion , le comte FoiiiiD
des Issarts. Ils échangèrent deux coups de pistolet.
M. Benjamin Constant, qu^une infirmité empêchait
de se tenir debout , essuya le feu de son adversaire}
assis dans un fauteuil.
Bientôt la scène change avec la politique , et le
drame des débats parlementaires va s^offrir avec
une physionomie bien autrement passionnée. L'ar-
dente polémique des journaux passera dans les
discours de la tribune. La fougue des interruptions,
le fiel du sarcasme, jelcront le désordre dans les
discussions et les feront dégénérer en luttes per-
sonnelles. Les hommes mêmes les plus graves ne
sauront se défendre de ce fatal entraînement. C'est
ainsi , par exemple , que dans la séance de h
Chambre des Députés du 6 avril 1833, on entendait
un ancien ministre de la justice adresser de sa phce
à un procureur-général , qui depuis liû succéda sa
— cniPiTiiF. XXVII, — 415
mniid^re, l'fpilhéte d^insnlcnt. Le président rap-
'i l'ordre Fauteur de l'alTcnsc ; mais au mi-me
islant , les amis politiques de ce dernier se levèrent
ftm niasse , demandant à être tous en masse rappelés
rk l'ordre avec lui.
> Dans la même séance, un autre membre de la
chambre quabfia d'impertinenl le discours d'un
autre orateur; mais k l'instant même, il en fit des
ticiiscs à !a Chambre et à son collcgue.
\]a noble exemple de modération avait été
<lunnè , dans une séance précédente , par uu dé-
puté qui eut le trop rare courage de refuser le cartel
'l'un de ses collègues, par des motifs dont il a rendu
'UTTipte dans une lettre adressée au président de la
thambrc (304).
Peu de temps après, la conduite politique et
ouUtaire du maréchal , duc de Dalmatie , ministre
"^ la guerre et président du conseil des ministres ,
"A , dans un discours de tribune , l'objet d'une
•dolente critique. Le fils du maréchal , le marquis
■ft Dalmatie, se cnil obligé d'en demander raison
I ■ "auleur du discours. Un rende»;- vous fut proposé
^* accepté. Les circonstances de ce duel sont forl
^marquables. Elles ont été publiées par les jour-
■•m sous la forme d'un buUrtin , signé des témoins
'W nombre desquels se trouvait un maréchal de
fumcc (305).
J
416 — HISTOfRC DES DUBU. -^
Le 28 janvier 1834 , eut lieu entre M. Dukmgi
avocat à Evreux y et le général Bugeaud , tous dcus
membres de la Chambre des Députés, le premier
duel parlementaire qui ait eu un dénouement blal.
Cette collision fut encore une suite de rarrestalion
de Madame la duchesse de Berry^ comme celles
qui y h pareille époque de Tannée précédente ,
avaient eu y à Paris, un si grand retentissement.
F'ojez ci'dessus , Pag» 885.
Il faudrait plus de calme et plus d^imparfiaKté
que n^en comporte la situation actuelle des esprits ,
pour apprécier , comme elles doivent Fétre y toutes
les circonstances de ce déplorable événement qui
a si vivement préoccupé tous les organes de Topi-
nion publique. Le temps , qui calme les xLouletirs
privées et les passions politiques , pourra seul per-
mettre à la vérité de s'exprimer dans un langage
exempt d'erreur ou dVxagération. En attendant,
il est du devoir de rhistorien de n'accueillir que
des faits généralement reconnus pour vrais , et de
se soustraire autant que possible à l'influence des
préoccupations contemporaines.
Dans une discussion relative à l'avancement des
ofEciers d'artillerie , qui eut lieu h la Chambre des
Députés dans la séance du samedi 25 janvier 1834,
des interruptions , comme il n'en arrive que trop
souvent, suspendirent le discours de M. Lardiity
— CffàPtTRC XTVft. — 417
f|ui occupait la tribune. Voici dans quels tennes
il en Fut rendu compte le lendemain matin par le
Journal des Débats :
M. SouLT : Il faut qii^un militaire obéisse.
M. Larabit : m. le président du conseil me fait
obaerver qu^un militaire doit obéir ; je le reconnais.
Mais quand on est dans son droit et qu^on veut
TOUS faire reculer , Messieurs , on renonce à Tobéis*
tance. ( F'oix nombreuses : Jamais , jamais. )
M. BoGEAUD : On obéit d'abord.
M. DuLONG , au milieu du bruit : Faut-il obéir
jusqu^à se faire geôlier (Tumulte) jusqu'à Tigno*
minie ?. . . .
n parait que cette interpellation ne fut entendue
que d^asseï peu de personnes, qu^elle ne le fut
pat notimament de celui qui en était Fobjet. Mais
de trop officieux collègues se seraient empressés
de Pen instruire, et auraient paru s^altacher, dés
ce moment , h faire dégénérer en querelle de parti
ce qui n'aurait dû être qu'une simple affaire pcr-
aonnelle. On vit alors le général Rugeaud quitter
•a place pour aller s'asseoir à côté de M. Dulong,
et, dans un instant de conversation, l'apostrophe
échappée à celui-ci aurait été expliquée ^ dit-on ,
d'une manière satisfaisante pour TofTensé.
La fatale publicité donnée à cet incident par un
journal du 26, changea Tétat des choses. M . Rugeaud
27
418 — HISTOtKB B» OUBLI. -^
se crut alors daAs Tobligation de demander une
explication écrite à M. Dutong. Celui-ci ne fit
aucune difficullë de déclarer, par une lettre adreMée
au journal qui seul avait rapporté Tiqpoatroplle ,
que la dernière partie en était fausse ^ en ajoulnli
pour la première : « Que, comme homme p<diiiqiM
et comme député^ il avait le droit de manifiorter
son opinion sur un acte politique émané d'an
autre député ; HUiis qu'il n'avait pas entendu porter
atteinte au caractère privé du général Bugeaud. »
Cette lettre remise au gtoéral lui-même, aunôl
été portée par M. de Rumîgny, aide-den^amp du
roi , au Journal des Débats.
Cet arrangement avait été convenu entre MM. le
général Bachelu et le colonel Desaix , pour M. Du-
long ; et MM. le général de Rumigny et le colonel
Lamy, tous quatre députés, pour M. Bugeaud.
Quelques heures après, le Bulletin ministind
du soir publia l'article suivant :
c( Le Journal des Débals a rapporté hier une
expression outrageante adressée par M. Dulong à
l'honorable général Bugeaud. Aujourd'hui on disait
à la Chambre que l'honorable général en a de-
mandé raison, et qu'il a exigé de M. Dulong une
lettre qui paraîtra demain dans le Journal des
Débats. »
Après avoir lu cette note, M. Dulong se crol
— cii»prr«ï «vit — 419
Mgr dYrrirc auJimmal il^s Dèhntu , pour qu'il
fi\l lionne aucune publii-ilé h m tlMaratioii ,
In lettre qui la runlentiit fut retirée le Icndc-
liii matin pnr le g/'néral ïtugcaiicl. Dans le rmin
de cette journf'C du 27 , ce dernier se rendit lui-
fme chez M. Uiilon;;, et aurnit continué de ma-
Tester les dÎNpoAitinns les plus cnnciliantes. Dana
Mtirée, MM. Georges l^a Foyellc et le colonel
inot, nouveaux témoins choisis par M. Didong,
«urcnl une entrevue avec eeyix du gtméral Bugeaud
qui avait déclaré s'en rapporter entièrement à leur
décision. Mais on ne pul tomber d'accord sur la
rédaction d'une nouvelle note explicative, et il fut
décidé que le lendemain on se battrait au pistolet.
On assure que le général ftugcaud mit le comble
i ses procédés, en avertissant M . Uulong que l'épéo
serait peut-i*trc cntr'eux une arme moins inégalo
que celle du pistolet, sur laquelle il avait ncqiits une
grande supériorité. Mais celte denûcrc étant la
«eule dont son adversaire put attendre quelque
ice, il Tallut bien Tadopter.
Le mercredi 28 , it dis heures du matin , les
IX adversaires se rendirent au bois de Boulogne,
lompiiigncs de leurs témoins. Ceux-ci, selon
Tuuge, réglèrent les conditions du duel, d'après
lescjucUca les combnltnns placés h quarante pas
, k uu «gnal donné , marcher l'un sur
4S0 — HISTOIRE DES DVEL9. —
Taulre , chacun pouvant tirer quand il le jugerait
convenable. Dés le second pas ^ le général Bugeaud
fit feu , et M. Dulong tomba sur le coup , sans
proférer une seule parole. La balle avait percé le
front un peu au dessus de Tœil gauche et étaii
restée dans la t^*te.
M. Jules Cloquet, chirurgien , qui assistait a
combat, s^empressa de prodiguer ses secours a
blessé qui fut ensuite ramené ches lui dans
Toiture de M. Georges La Fayette. 11 expira l
lendemain 29 , à six heures du matin , sans avoK :]
repris connaissance.
Le souvenir des sanglantes collisions, dont ■.<«
convoi du général Lamarque avait été le signaK ,
moins de deux ans auparavant , pouvait ta
appréhender que la cérémonie funèbre ne ae te
minerait pas sans de nouveaux malheurs. Mai» il
B^j eut d^autre manifestation que celle d'osie
sombre douleur et d^un profond recueillement
Six discours furent prononcés par les amis du
défunt , sur sa tombe. Un sentiment unanime j
domine , c^est celui de la réprobation contre ht
tyrannie d^un préjugé fatal à tant d'hommes hono-
rables (306).
Tel fut le dénouement de ce drame funeste au-
quel on vit , dés le début, présider une my siérieuie
— CHAPITRE XXïlT.— 421
fiilftlil/-. Envisagé eouH le rapport politique , il a
produit parloul une impression profonde qui pa-
rait devoir f-tre plus durable que celtes qui rë-
rltenl d'accidens du m^mc genre.
On a pousaé bien loiu la liardiesse des conjec-
tures et la vivacité des récrimintitions. L'histoire
contcmporaioe , qui voit encore ce spectacle de
trop prés , pour bien en saisir l'ensemble , doit
lettre plus de réserve dans ses jugemens. ... C'est
Men assez que le duel jouisse en France de la plus
rande bberlé , il serait trop pénible de supposer
a'il y soit l'objet de lu Eavcur royale. Le maintien
I paix au dedans, comme au dehors, n'est-il
,u même prix et subordonné à un intérêt iden-
, dans la politique actuelle!*... Ah! s'il fallait
mettre la possibilité d'une haute intervention dans
I ressorts secrets de celle trogédic , elle n'avait
|b*uu seul moyeu de se produire , pour t'hunneur
I trône, c'était en prévenant une collision dont
t résultat , qucl([u'il Tùt , ne pouvait qu'envenimer
h haine des partis, sans en servir aucun.
Un roi d'Angleterre, Charles I.*', eut le bon-
lur d'empêcher , entre les lords Rey et llamîlton ,
n combat ordonné par le Parlement ; et <;uand les
s de France pré^daienl tes duels judiciaires du
loyen âge, il leur suiBsait de jeter Leur sceptr(>
ice, pour st-parcr les cotnbiittans. f'ojes
Lci-apivs , Cluii>. XWII.
422 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
Du reste , il faut le dire , aucun des acteurs de ce
triste drame n^a paru comprendre le rôle que lui
traçaient sa position et la raison d^accord avec un^
sage politique. Une expression trop vive, échappée
dans la chaleur d^une interruption , pouvait d^au^
tant plus honorablement être rétractée qu^au fonds
elle n^avait même pas le mérite de la justene. Ont
appelle geôlier , Thomme préposé à la garde d^une
prison légale ; mais quelle application pouvait^on
faire de cette expression , à propos d^une misaioii
qui n^a de nom dans aucune langue y comme on ne
lui trouverait d^analogue dans aucune histoire ?
Une lettre , cette lettre si simple , si convenable,
qui réparait noblement une offense , sans compro-
mettre rhomme politique et sans humilier rhomme
privé , est rétractée par son auteur , parce qu^il
platt à un journal de la présenter comme exigée.
-— Des amis , dont la sage intervention avait amené
cet arrangement y disparaissent pour faire place
à des témoins qui semblent partager cette mal-
heureuse susceptibilité. — On en voit d^autres, du
côté opposé, encourir le grave soupçon d^avoir
mêlé Taigreur des passions politiques à une affaire
purement privée, et de s^étre montrés beaucoup
plus exigeans que le véritable intéressé lui-méme.-*-
Dans le règlement des conditions d^une lutte déjà
trop inégale, quel est le mode auquel s^arrétcol
I 16010108? C'est celui uù tmil l'avantage doit
irparleitir k l'Iiabilt: tiruur qiii seul peut fuire feu ,
c des chauces de succès, de la distuiice la plu»
feignée!
Ud avocal , qui n'avait jamais inniii^ qti'tiiiu
plurae, Bc voit ainsi condunin^- h se mesurer aveu
un homme de g\ierre, versé pnr pruFcssion et par
habitude dans le manictnent des arii»es. — El cette
lettre, Cjui reste eu la possessiuii do l'un des t^
noina, au lieu d'iilrc remise 6 eehii qiii uvnil le
tlroit de la rècloaicr en £cliangc du cunilial qu'il
acceptait ; cette IcUpc , ({u'on a dit iH-ût^e aux
Tuileries, on ne sait pnr qui ni pour({iioi, se trouve,
peu de jours après, publiée dans plusieurs journaux
de province. Ainsi le sacrifice m^me est devenu
lutile , et le malheureux Dulong se trompait ,
md il croyait racheter sa lettre au prix de son
; (307)
Tel fut le premier duel qui ail ensangluiilé la
tribune française. Sera-ce une leçon profitable ,
ou bien un précédent qoi doit entraîner les plus fu-
nestes conséquences pour l'avenir '. . . Il est constant
que , dans les detix mois «pii suivirent In mort de
, Dulong, il règiM diuis les dèljttU de la Chambre
I Députa un loi> d'ciaspérslion fort uflligetHil.
t la aéaoce du H février , il } cul échange des
424 — HISTOIRE DES DOELS. «^
plus amères personnalités entre te comte d'Argoul,
ministre de Tintérieur, et M. Cabet , député de
Dijon. Â la suite d^explications , une formule con-
venue de rétractation fut récitée , le lendemain , de
part et d^autre à la tribune.
Dans cette même séance , on entendit , sous la
forme d'un colloque parliculier , une vive aller*
cation entre M. Beslay fils et M. Barthe , ministre
de la justice.
Enfin , dans la séance du 12 mars 1834^ le comte
d^Ârgout s'écriait à la tribune : c< Puisqu'on m'in«
terrompt sans cesse , je répondrai , s'il le faut , par
des actes exlror-parlemcntaires à des attaques extra*
parlementaires. » Plusieurs voix : Explique z-^ous^%
D'autres ; A l'ordre, à l'ordre! (308).
Le duel parlementaire , comme le duel poli-
tique , serait-il donc destiné à passer dans nos
mœurs!*... S'il en doit être ainsi, c'en est fait du
gouYerncmcnt représentatif et de toute liberté en
France. Une fois le principe admis , les consé-»
quences arriveront en foule. L'injure ne sera plus
même la cause du duel , mais le moyen et le pré«
texte. L'épée et le pistolet deviendront un instru^
ment d'épuration à l'usage d'une majorité op-
pressive, et le champ clos, comme l'échafaud, aura
•es 31 mai. Le fer d'un bretteur habile pourra
Hinément Irnnclier une vie cliciv au (inys , lUml-
i vois g^iiércuBC, el rendre h un [Hiuvuir
^anniqiic le «:rvi<.-e commode de le d^barrasacr
iTun Irop redoutable advcrsnire.
Oii bien, pour échapper ù de lelles tnnsêquencr*
et rendre les clianrL-a plus égales, la science de*
arroci ne dcvra-t-cllc paa ^trc tme des première*
ronditions do l'admission dVn dépulèi' NWigera-
t-oo paa qu'il snche bien se biiUre , nimme il doit
■avoir parler cl écrire P Nesera-t-il pas très riKiu/i-
Km/ alors que les exercices du i-liamp eli»i Miicut
Hf^émenl obligé de toute éducalion puliliqtie , qu'il
y ail de* écoles de tir et d'cBcrime , comme d'élo-
quence cl de déclamation , et que l'art du tuer son
homme loit enseigné dans des gymnases , et honora
Hj^na des concours par des pidmi's académiques!'
^■àlors Peaceinte parlementaire pourra devenir une
^■ir^ne de gladiateurs. Les dilemmes seront dca
^■Dartcls, et les argumens des eoiqis de pistolet,
^t Voilà où aboutiront cea druils poliliijuea dont
nous sommes si jaloux, et cette liberté si cbéremenl
acquise. Qu'a donc de commun la puissance de la
parole avec celle du glaive , l'art des némostliéncfl
el dca Cicèron avec celui des Laboissiére el des
_ Donadtcu l* L'opinion , cette reine du monde , dont
s bommcs politiques briguent les faveurs, s'esl-cHo
I «baudunuée aux spadaaauisf
436 ^ mSTOIRB DB8 DUBU. —
Cette censure , ensevelie sous des pavés , doil-
elle secouer la brûlante poussière de Juillet, el ss
réveiller sous un nouveau nom ? Le sabre rempla*
cera-t-il les ciseaux, et, au Heu du despotisme d'ua
ministre , les écrivains auront-ib à subir rinsoleaoe
d^un maître d'armes f Fallait-il donc faire deux
révolutions I pour conquérir une telle liberté, cl
briser une antique Aristocratie , pour en voir génè^
raliser les plus révoltans abus? Fallait-41 proclamer
de si belles théories des Droits, pour ne trouvai
partout que la réalité de la Farce?
CHAPITRE XXVIII.
L'nsTiTL-nos du duel rfpntiduc en FAiriific ,
Mirrîe el propagée por le Germanisme, comme
B l'a vu au commencemenl de relie hietoira ,
ng-temps adoptée pour r^glc ii-pcu-pri-s unique
S la procédure judiciRirc au moyeu âge, s'était
lus partie uliércment conservée dans les mœurs
îlilaire«.
' On sait que la guerre fui long-temps l'état normal
t l'Europe. Ost par une longue guerre que los
Dfnains la soumirent ; c'est par la guerre aussi
■'elle secoua le joug de ces maîtres du monde.
Le signal de la délivrance fut donné par la Ger-
anie. De Ih , partit le premier cri d'émancipation
de liberté. Chez ces peuples, comme dam toute
race Scythe , chacun était soldai , sans avoir
Mrtanl d'autre règle A suivre que tm propre vo-
ttté dans le cliois du chef auqiu'l ou «'attucliail
it. Chaque individu Atait indépendant c(
428 — HISTOIKE DBS OUELf » *-
maître de ses actions , comme ratiesieni César et
Tacite qui nous ont conservé les formules de ces
anciens engagemens. Ce ne fut qu^aprés rétablis-
sement de la féodalité y comme on le verra ci-4ipré8
au chapitre XXXIV, que le service militaire de-*
vint une des obligations du vasselage, et le premier
article de la foi et hommage que le serf prétait
aux Leudes et aux Antrustions. ce La servitude
germanique , dit Chateaubriand , remplaça la ser-
vitude romaine. Le servage prit la place de VeS"
clawige. C^est le premier pas de raflranchissemeiit
de la race humaine, et, chose étrange, on le doit
à la féodalité ! Le serf, devenu vassal, ne futplui
qu^un soldat armé , et les armes délivrent ceux
qui les portent (309). »
Ce fut ainsi qu^une noblesse toute guerrière se
fit en Europe et en particulier en France , Fhé-
ritiére exclusive et la représentante du Militarisme
germanique. Cette prétention avait pris de telles
racines qu^elle fut presque indestructible , et que
TefTet survécut même long-temps à la cause (810).
Quand rétablissement des armées permanentes,
qui commença sous Charles YK et se déveloj^
principalcnienl sous Louis XI, permit de distinguer
davantage Tordre civil , Tespril guerrier se maintint
long-temps encore dans tout le corps de la nation.
; xxvTiT. — 429
Dclout temps, les (listinclions militaires y ont ëlë
l'objrt (l'une ardente émulntion. En France , ce
fut toujours lin honneur bien plulût qu'un devoir,
àc verser son sang pour In pairie. La valeur y
ni intlinctive cl non lièrédilaire.
Cependant le monopole et le privilège ont fini
par cnvaliir aussi la profession des armes. Ce fruit
honteux de l'intrigue et de la corruption de» cours
n'eut d'abord qu'une existence équivoque cl pré-
caire. Le droit restait toujours , et proleslait contre
le lut dont quelque» exceptions lempèraient par-
bii l'injustice. Au temps des guerres de Louis XIV,
M pouvait encore Baller le soldnl en lui montrant
diDf «on sac le bâton de maréchal. Ce compliment
pouvait être pris au sérieux , quand il sortait de
^ bouche de Fabert ou de Catinat. Mais k la Sa
i" 18,* «iècle , dans les conseils de l'infortuné
^uis XVI , il s'est trouvé un ministre qui a osé
oprimer au front plébéien une insulte que lui
*^l épargnée l'orgueil de Lotiis XIV. Une or-
donnance contresignée Ségur apprit un jour k la
France étonnée qu'on n'arriverait plus aux grades
nûlitairea que par la noblesse , tandis qu'autrefois
c'était par les grades militaires qu'on pouvait le
plus honorablement parvenir au palriciat (311).
Quelque temps auparavant, un autre ministre
de ta guerre, qui avait quitté la France dans sa
430 ^mSTOIRE DBS DUELS.—
jeunesse , à la suite d^un duel , pour aller servir en
Autriche et en Danemarck , le comte de Saint-
Germain , avait introduit dans Tarmëe des réforma
non moins odieuses. Il y avait établi la discipliDe
allemande et en particulier la peine du bâton , ce
qui faisait dire au soldat dans son énergique langage :
Sandis ! nous aimerions mieux le tranchant (812).
C'était par de telles mesures que le pouvoir iihh
narchique s'aliénait Tarrnée , son plus solide appui;
c'était ainsi qu'on donnait satisfaction aux idées
philosophiques sur l'égalité sociale, comme sous
Louis Xy , on répondait aux partisans des réformes
en humanité et en législation , en leur jetant le
bâillon de Lallv et la tête du chevalier de La Barre.
Il semble qu'au milieu de l'esprit de vertige qui
régnait alors, on n'était occupé que d'une chose ,
c'était d'amonceler des matières incendiaires pour
alimenter le feu des révolutions.
L'établissement de la Garde nationale , dont li^
pensée première était de rendre inutile les milices
permanentes et de composer une force armée d'élè-^
mena purement démocratifjues , contribua beau*-'
coup K réveiller Tcsprit militaire et h le propagea'
dans toutes les classes. L'ambition de Tépauletle ^
toujours singulièrement flatté la vanité nationale -^
Auprès des femmes surtout, il n'est pas de séductior^
plus irrésistible que ccllo de l'uniforme.
H^^^l xxTiti. — 431
^^tfeffjhases el les degrés divers «le IV'nllioiisiiisme
belliqueux ne sont pas loujoiira les mi^mes. Il s'af-
faisse ou se ranime à certains intervalles. De nos
jours, un illustre guerrier en a signalé la rapide
décroissance , dans un livre où il a indiqué les
moyens de le ranimer. 11 a été jusqu'à s'écrier Ji
la tribune qu'un gouvernement nouveau devait
toujours faire la guerre, môme sans motifs. Mais
yDeyrit militaire en France est un levier d'une puîs-
BllDce incalculable , que tes gouveniemens tiennent
CD réserve pour s'en servir selon les besoins de
leur politique (313).
Du reste , le ton , les airs et les attributs guerriers
piraissent et disparaissent , prennent ou perdent
Il Togue , et semblent suivre chez nous les légères
d capricieuses oscillations de la mode. On voit,
tclon les temps , la taille de nos jeunes gens
^*nltem^er dans le frac mitilaire , el leurs lèvres
'HnbrBger de la moustache , attribut caractërig-
l^uedes amateurs du genre terrible, et qui faisait
■"erreille sur la figure des Jules II cl des Richelieu,
•^s ce qui change le moins , c'est la jactance du
wurage. Là , oii l'on n'a pas h l'exercer contre
'cDDcDii, on a cherché k faire montre de résolu-
'wn et de sang froid dans les querelles privées. Des
""tarons de salles d'armes , en singeant le Ion mili-
•*«, ne nous en oui offert que la cnricalure.
J
432 — HISTOIRE DES DUBLS. —
Ce ridicule , que saisissent si bien les Trais mifi-
faîrcs , semble avoir rendu les duels beaucoup
moins fréquens parmi eux. Comme on se conmit
mieux Y on s^cstime davantage sous les drapeaui.
Le vrai courage croit volontiers au courage. D
est calme , il est mesuré , et sait* attendre le moment
solennel de se signaler, sans en quêter ridiculement
les plus mesquines occasions. Cette réforme dans
les mœurs militaires, date de la fin du dernier siècle,
et nous avons eu surtout Toccasion de la remarquer
au temps de PEmpire où les duels ont été si rares,
et oii Ton a vu Napoléon se montrer n exaspéré
contre le général Reynier, au sujet de son duel
avec le général Destaing (818).
Cet état de choses s'est maintenu dans l'armée
m<?me depuis la paix , et malgré les divirions iur«
venues depuis lors dans les opinions. C^esl là
d^ailleurs que les passions politiques ont le moins
d'empire. L'uniformité de la discipline , les hdn-
tudes de Tordre , et le positif de la vie des camps,
offrent peu de prises aux théories et aux idées
purement spéculatives. De tous les genres de com-
bats singuliers si multipliés de nos jours , le dud
militaire est donc le plus rare , et c^est ce qui doit
achever de démontrer le néant de Tinstitution.
Ln plupart des faiseurs de projets de lois contre
les duels , ont cru indispensable d'admettre des
cxcef>Uons pour ceux qui ont lieu tlnns) l'nrm^'c-
Lc duel , tlif-oriquemcnt parlant , est pourtant bien
plus r^pr^hensible chez les militaires que pariniit
nilleiirs. Ils abusent des armes conSées par la pairie
contre les ennemis du dehors, pour venger leurs
querelles personnelles, et c'est avec raison qu'on
a comparé un homme de guerre duelhHe, à un
i-aissier inMële qui se servirait des fonds de sa
caisse pour ses propres aflaires (31 -t).
On a vu ei-deisua , quel cas les guerriers les plus
ctièbres tels que Napoléon , Dumouriex , le che-
valier de Follard , faisaient des duellistes de pro-
feMÎoo dans les rangs de l'armilre. » Uu duel , a dit
auni le prince de Ligne , est souvent une affaire de
digestion plulût que d'honneur. Il n^cst pas juste
que celui qui se porte bien , périsse des mains de
celui qui se porte mal et qui n'a d'humeur que
pour cela. C'est assez dur d'être ennuyé par les sots
«uii encore se faire luer par eux. »
Le m^mc auleur propose , pour diminuer le
nombre des duels, un tribunal ou conseil composé
d'officiers qui seraient chargés de l'examen préa-
lable des affaires d'honneur. Celui qui aurait eu
plus de trois affaires , quand même il aurait raisun ,
•erait obligé de quitter le régiment. » Ce tribunal ,
«ile-l-il en paHant de la Connétablîe , n'aurait
D de cummun avec celui qui, dans certains pays,
484 «^ HISTOIAB DBS DUBLS* — *
ne scrl qu^ii olcr Thonneur au lieu de le cotiâerver.9
Aîèin. du prince ile Ligne, Paris IKi7^ Tom. IJL
Dii rohie, (|iit)iqu\)n puisse faire, ce sera tou-
jours chez les militaires qu^on parviendra le plus
diOicilemcnt à extirper les dernières racines du
duel. Il est bien douteux qu^on fasse jamais com-
prendre à celui qui porte sans cesse une arme h son
coté , qu^il ne lui est pas permis de s^en servir pour
repousser une insulte. On a vu au chapitre XX |
combien de fois il arriva h Louis XIV de transiger
avec la rigueur de ses édits qui, en fait de duel,
allaient juscpi^à offrir des primes honteuses à la
délation. On verra au chapitre XXXIV, combien
Frédéric II , roi de Prusse , habituellement inexo-
rable sur les fautes de la discipline, se relàchâil
aussi , dans Texécution , de la sévérité de ses rég^e-
mens en cette matière.
Toutefois, diaprés les exemples de duels, entre
militaires , qui ont déjà été cités dans le court de
cette histoire , et ceux qui vont être rapportée ci-
après , il sera facile , en comparant entr^elles les
diverses époques , de se convaincre qu^il y a infi*
nimentplus de progrès, sous ce rapport, dans lee
rangs de Tannée que dans Tordre civil.
Il y avait en France , avant la Révolution , des
régimens où le duel était tellement en honneur ,
— CHAPITRE ïxriii,— 435
u'on n'y soiifTrail aucun «ffîcicr qu'il ne juslifiât
Kwoir figuré dans un cerlain nombre d'aflaircs
fîDiDnncur. On les complaît alors, comme un vieux
soldat compte ses chevrom. Il 6tail d^l3age aussi
dans chaque corps , d'essayer la valeur des nou"
veaux venus en leur faisant mettre l'èpéc k la main.
On appelait làieuri ceux qu'on chargeait de cet
oBicc. Les lâteurs de nos jours ne ressemblent
L)f lus , à beaucoup près , ^ ceux d'autrefois.
H II y avait aussi , dans quelques garnisons , <tes
assofùetions d'officiers appelées CeUotes, et qui con-
sklaient à aoumellre Ji certaines pratiques bizarres
lous ceux qui passaient devant le café où l'asso-
^cîalion tenait ses scances. Un officier d'artillerie ,
-H. de Paris , se trouvant à Verdun , fut arrêté
dans une rue et somme de payer son tribut à une
Calote. Quoiqu'il put dire pour s'excuser , il dut se
soumettre k l'usage établi. L'^-preuve subie, il lui
prend fantaisie d'exiger du clief de cette réunion ,
one nouvelle représentation de la scène : celui-ci
Lreruse. Un duel s'ensuit k l'instant entr'eux ; le chef
^nde la Calole succombe. Un deuxième se présente ,
^■■puis un troisième ; tous les deux ont le m^me sort.
M . de Paris remonte alors en voiture , et on le
laisse partir (315).
n n'existe plus rien de tout cela dsns les usages
(des nulilnires de notre temps.
436 — HfSTOraE DIS docls. ^
On a TU ci-de88U8 , page 127 > que pluneor^
anciens jurisconsultes en fait de duel , tenaient poia.i
maxime qu^un chef jnilitaire ne pouyait se dispensai
d^accepter le cartel de son inférieur. On en jugeiul
à-peu-prés de même encore dans les derniers
temps de Tancienne monarchie. Le comte de
Tilly en cite plusieurs exemples dans ses Mémoires,
a Toutefois , ce cas était rare , dit-il , et ce n^était
que dans Thypothèse d^une insulte très-graye. Le
subalterne donnait alors sa démission , et rentré
dans la classe des hommes privés , il redemandak
son honneur à celui qui le lui avait âté ; c^est ce
que ne dédaigna pas de faire le grand Condè,
après la bataille de Steinkerque , avec un mousque-
taire qui mit son épée à ses pieds. » Gesi aussi ce
qui arriva au petit-fils de ce même prince de Gondè,
lorsqu^il accepta le cartel du vicomte d'ÂgouIt^ son
capitaine des gardes* /^. ci-dessus y Pag. 281.
Un M. de La Serne , capitaine dans un régiment
d^infanterie , s^étant cru mortellement offensé par
un ofRcier-général, le chargea le soir dans une rue,
Fépée à la main. Son adversaire, quoique armé,
refusa de se défendre, et, par amour de Tordre
et de la subordination , dénonça son agresseur.
Celui-ci fut mis à FAbbaye et s^y brûla la cerveOe.
Le vicomte de Noailles, commandant le régiment
des dragons du roi , dit un jour à table en présence
— ciiAPiTiiE \xviri.— 437
de la pluparL des ofTicicrs , qu'il mépriserait un
colcjiid qui reruserail de se mesurer avec un oflicier
qu^il aurait olTensé. « Mais, ajuuta-t^l, je perdrais
Mris rémission , celui qui m'appellerait en duel au
règiraenl même. A Paris, tu liabit gris, je serai
loujours aux ordres de celui qui voudra roc mener
promener au bois de Boulogne. » Ce propos fui en-
leotlu et retenu par M. de Bray, capitaine, qui h
q^x^que temps de là se crut offensé. 11 demanda
mislaction, l'oblint, el donna un coup dV'pée k
(On chef qui vCen voulut d'autre vengeance que
de faire nommer son vainqueur major en second.
\jc vicomte de N ouilles ne partit jamais de France
t d'aucun pays , depuis la Hèvolution , qu'il ne fit
Ure dans les gascllcs le jour et presque l'heure
•*« son départ : c'était ce qu'il appelait offrir tte
'^**4ire sa coiiijitfs dans tous les genres. Nous
_î***ou¥crons le vicomte de ]>ioailles ans Etats-Unis
mérique au chapitre XXXIX. Aléin, de Tilly,
. I, Chap. XIII.
i Convention, par son déiTcl<lu 29 messidor
1*0 11, rapporté page 344, a reconnu que la pro-
f tocatiou en duel , de la part d'un inférieur envers
<a mpérieur, hon le cai de service, n'était défendu
rpar aucune disposition du code pénal militaire
f> 1793.
De uos jours, on ne voil guèics d'otcmples de
1
488 ««HISTOIBE DBS DUBLS. «-
semblables provocations , si ce n^est de la part
élèves des écoles militaires , qui , non seulement
battent entr'eux , malgré la sévérité des défenses
réglementaires, mais savent garder asses long4empa
rancune à leurs surveillans, pour leur en demander
satisfaction au sortir de Técole (3i6).
Sous la Restauration , on vit un prince du siBg
placé dans une situation qui offrait quelque aaa*
logie avec celle du prince de Condé enTcrt son
capitaine des gardes , le vicomte d^Agoult. Mais s4|
y eut autant de générosité d^une part , il y eut plut
de modération de Tautre ; il faut en cela rçcoAUiaitrQ
un progrés réel«
Il était un jour arrivé, dans un moment dliumeufi
au duc de Berry de s'oublier en paroles contro
M. de La Ferronays, premier gentilhomme de sa
chambre. Il lui en fit ses excuses, lui offrant mkû»
le genre de satisfaction usité eqtre militairea. Celui*
ci , pour toute réponse , se jeta aux pieds du princQ
qui Tembrassa affectueusement (317)^
Il y eut, vers le commencement de la même épo«
que, un combat singulier qui fit beaucoup de bruit^
et oii rintervention de Tautorité militaire a^exerçt
d'une manière tout-à-fait officielle. Le ciMQite de
Saint-Morys, lieutenant des Gardes- du -rcorpa^
«yait été provoqué par le colonel B«rhier«Dii&ji
-» CHAPITRE XVVIIf . — 480
à Ift suite d*une discussion politique. Le prince
4e PoiXf capitnine de la compagnie, força M. de
Siunl - Morys dWceptcr ce dueV , dans lequel il
succomba le 21 juillet 1817. Sa veuye, née Vali-
eourt et nièce du célèbre ministre Galonné , porta
plainte , non seulement contre le colonel Barbier-
Dufay et lea témoins du combat , mais encore
eontre le prince de Poix qui Tavait ordonné.
L^affaire, en raison, de la qualité de ce dernier,
iat portée à la Chambre des Pairs où elle donna
Keu à des débals fort animés. La plainte de M .°^« de
Saint-Morys fut rejetée. Cellc-ri ne se découragea
pas;, elle prit la voie civile. Mais la cour de Paris
jugea de même , et décida que les anciennes lois
sur le duel avaient cessé dVtre applical>les. Foycz
ci-dessus , page 372 , Tarrêt de la cour de cassation,
€o date du 19 septembre 1822 , qui a cassé un
arrêt de la cour d^Aix, pour avoir jugé le coiv*
traire..
Le général Lamarque parle dans ses Souvenirs
fécemmeni publiés, d'un duel cpii avait eu lieu en
1821 , entre ce même colonel Barbier-Dufay et le
iricomte de Montélégier , aide-de-camp du duc de
Serry. Cette affaire (ut suivie d^une lutte judiciaire
pour diffamation. Le jugement qui la termina ,
condanmaM. Barbier-Dufay à 300 francs, et M. de
Modtélégier k 25 bancs d^amendo seulement. I/au-
440 — 1IIST0IRC DES DUELS. —
teur sV'st livré h des réflexions assez piquantes
cette clifl<6rence entre les deux condamnations.
J^ai une connaissance personnelle d^un duel qu
eut lieu , dans les premières années de la Restau-
ration , au régiment des cuirassiers de Condé.
Deux officiers, dont un avait donné un soufBeli
Tautre , commencèrent d^abord à se battre au pi»-
tolet sans s'atteindre. Ayant mis ensuite Tépée à
la main , Toffensé fut grièvement blessé. Âpres mni
rétablissement, nouveau duel, nouvelle blessure;
les deux officiers furent alors renvoyés du régirncBl.
U leur avait été enjoint de se battre au dernier sang,
et rhonneur n'était pas satisfait. Il semble que pour
décider ainsi de la vie d'un homme , et peut-être
même de deux à la fois , ce ne serait pas trop
d'un conseil de guerre.
L'anecdote suivante , dont la vérité m^est ga-
rantie par un témoin oculaire , témoigne d'une
férocité digne du temps de Louis XIII , où Ton ss
poignardait en se tenant par la main ou en se pla-
çant dans un tonneau. F', ci-dessus, Pag* 188.
Deux officiers , après s'être blessés morlellemeol
dans un premier combat, le continuèrent placés
en face l'un de l'autre sur deux matelas, et s'en-
tretuèrent.
On lisait l'article suivant dans plusieurs journaux
du mois de novembre 1829 : a Avant hier un dud
-CHAPITHE \
i eu lieu eolrc deux mililnires qui purlent l'uu et
■I^Biiirc un nom illustre, M. de M*** cl M. de L'
lii'achariiemeiit des comballaiia élail tel , que cinq
aups de pislolct tir/:s de jjart et d'antre, ne sutHrent
I pas h leur ressenlimeiit. La sixième balle a frappé
M. de M'**; on espère cependant que aa vie n'est
pas en danger.
l'C due) militaire le plus remarquable de toute
»^'^poque de la Restauration , et qui , je pense ,
9l*a été publié dans aucun journal , c'est celui qui
eut lieu en 1823, entre M. deC", «flicier d'un
régiment de chasseurs, en garnison k llesdin (Pas-
■ de— Calais) , et M. V*", de Cartrassoune.
■ Pendant un séjour de son régiment dans cette
j^mière ville, M. de C' avait fait connaissance
oe la demoiselle V*", et il paraissait la recher-
cher en mariage. Les relations devinrent si intimes
cntr'eux, que laD,'"' Vdul bienlùl s'attendre
" <^'tre mère. Le régiment quitta alors Carcassonnc
pour venir tenir garnison k liesdin. M. de C*
aurait de nouveau promis k la D.'"' V" de l'é-
pouser et de solliciter , h cet effet , le consentement
Ae M famille. La conclusion se faisant attendre ,
[ W frère de !a D.^"' V**, nncien sous-oflicier du
génie, se rendit k Paris où se trouvait M. de C**,
pour en obtenir une explication catégorique. Uo
premier reodes-vous aurait même été assigné au
bois de Boulogne, pour le battre. Ibis» Mr k
promesse expressément renouvelée p«r M. de €1*%
de foire ses diUgenees pour épouser ki D«^^ \^^
dans un délai fixé , le combat n^aurait pat en Ken.
Le délai expiré, M. V*"^ se rendit de Caroia*
sonne à Hesdin , accompagné de sa mère et ds
sa sœur ^ pour sommer M. de C** de sa parafe.
N'en ayant pas reçu de réponse satisfaisante , il b
provoqua en duel, et le lieu du rendes-vMia taà
assigné , pour le lendemain ^ sur les glaeia de h
Tille. M. y** en prévint le colonel et obtint son
autorisation. Il en prévint également le naire et
le commandant de la ville. A Theure fixée pour
le combat , plus de 1200 personnes se trouvèrent
réunies pour en être spectateurs. On avait prte la
précaution de consigner le régiment aux portes.
Arrivé sur le terrain , M. V** somma dç boih
veau , mais inutilement M. de G** de tenir m
promesse , en le prévenant que sa force était teik
sur les armes , qu^il était à-peu-prés certain de
le tuer du premier coup. Il lui fit même obeerver
que Tépée lui offrirait plus de cbancea que fe
pistolet f arme convenue entr'eux. Mais soa ad«
versaire qui , depuis Tentrevue de Paria, ii*«vall
cessé de s^exercer au tir de cette arme , dédam
s^en tenir au choix primitivement foit.
M. de G** fut désigné par le sort pour lirorla
-cHAmBE xwiii.- 443
premier , el sa balle rasa lu léle tic M. V* *. Celui-
î liru il son luur, el atlcigiill eu milieu du frout
V'IDu adversaire qui lumba roidc morl.
F,ii février 1833, la fièvre dca duels étail dans
Tair à Paris, h la suite de la pelile guerre civile
commencée cnlre les journalistes. Vers la fin de
ce mois, on entendît parler d'une provocation d'un
genre Irès-extraordinaire dans les annales du Poiut
d'bonneur. Elle a ni^me Hé l'objet d'un article
•cmi-olBciel au Moniteur, Un militaire du grade
tie marée bat -de- camp était en instance près du
niitiiilre de la guerre , le marécbal Soult , duc de
U»1inalie, pour obtenir de l'avancement. Le mi-
nislre n'entrant pas dans ses vues , et une pro-
moiioQ de lieul en ans-généraux , ayant eu lieu sans
tfi\\ y fût compris , il crut que le duel , dont on
parlait beaucoup alors , était un moyen comme
un Bulre de forcer la main au ministre. L'ùge et
1^ [lutilion de celui-ci ne lui permettant pas de le
pfOToquer directement, il envoya un cartel à son
'ils le marquis de Dalmatie que nous avons vu ,
li^iimois après, défendre , l'épée h la main , l'bon-
"tur de son père , mais qui cette fois, s'était bien
gardé d'accepter pareille parlie. Le provocateur
"' alors insérer dans un journal nue lettre oulra-
S^EUite pour le marquis de Ualoiutie , avec tnenacca
444 —HISTOIRE DBS DtJSLS/-*
de lui appliquer ce qu^on appelle , dans le langage
du duel , les conséquences d'un refus m Celte bixam
affaire ne parail pas avoir eu d^autres suites.
On lisait dans le Courrier Français du 23 juillet
1834 : a Une rencontre a eu lieu entre M. Fischer,
capitaine adjudant-major au 2.^ lanciers, en gar-
nison à Paris, et M. Gérard , capitaine de cavalerie
en réforme. Ce dernier, atteint d^une balle à h
poitrine , a succombé. »
Le 23 septembre 1834 , il y eut un duel entre
deux officiers du 23.^ régiment , en garnison à
Tarbes. Placés à cinquante pas , ils devaient mar-
cher Tun sur Taulre. A quarante, ils tirèrent tous
deux en même temps. Je suis blessé à la cuisse,
dit Fun des combattans ; on s^empresse de le se-
courir. Pendant ce temps, son adversaire , qui était
resté debout, immobile et la main collée à la tête,
tombe , mais c^élait pour ne plus se relever. La
balle , après avoir traversé le poignet , Tavait frappé
au front , et sY'tait frayé un passage jusqu^à Poc-
ciput , avec d^horribles fracas. Ce malheureux
jeune homme , h peine âgé de 29 ans et nouvel-
lement marié , a respiré encore pendant une demi-
heure — 11 portait la main à la tète , lorsqu^il a reçu
le coup fatal. Peut-être était-ce le geste de Pin-
fortuné Chénier , lorsqu^il disait en face de Péc^ia*
faud : Ilj avait pourtant là quelque chose !
— CHArlTRK XTVIII. — 445
D est arrivé plus d'une fois h des joumalisles,
d'avoir à rendre compte de leurs articles h dei
militaires , et même de se voir sur les bras tout
un corps d'offieiers. Le propriétaire d'un journal,
umsi provoqué dans une de nos villes du Nord,
crut devoir annoncer dans sa feuille qu'il ne sor-
Ijrait pfus qu'armé jusqu'aux dents , ofm d't^c
M mesure de repousser la force par la force.
Un officier, ayant i-té un jour diffamé par un
journaliste , reçut l'ordre de son colonel , M. G"* ,
d'en exiger une rélractalion ou un combat à mort.
Après de longs pourparlers , le journaliste se décida
pour la rétractation , ce (jue , dans cette profession,
cm tient k honneur de n'accorder presque jamais.
La chose s'est passée bien différemment , dana
«ne cireonatance à-peu-prcs semblable, au 52.' rép-
mcnl de ligne. Ce régiment se trouvait au mois de
fhrier 1834, à Dijon. Un sous-lieulenanl , M- De-
"wy, se tenant pour insulté par le SpecUtieur, jour-
mI ministériel de celle ville , en demanda raison au
facteur, et, sur son refus de se battre, lui infligea,
CD pleine me, une correction militaire. M. Demay
recul l'ordre du lieutenant-général commandant la
■■ividoQ, de se rendre en prison où il resta quinze
jours. Le cx>nseil de guerre le eondamna , pour la
Kràe des voies de fait, k un franc d'amende, i'iiu
^^, et par suite d'une enquête militaire, il dut
446 — HISTOIRE DBS DUELS. —
encore comparatlre devant le conseil d*h(mneur de
ta division , qui le condamna à Irois ans de mispea*
mon de son grade. «M. Demay, dit le Journal
de Dijon qui contient ces détails, est dèciMrè de
Juillet et appartient à Topinion républicaine, n
Le 14 février 1836, il y eut à Paris une sorte
de duel mi-parti ou quasi militaire, entre M. le
comte de Langle , capitaine de la garde nationale
à cheval , et M. le duc de Rovigo , lieutenant au
1 .^^ régiment des chasseurs d^ Afrique. Le sujet de
la querelle était un blâme exprimé sur les déco-
rations accordées à la Garde nationale. M. de
Rovigo reçut à la poitrine un coup d^épée qui fut
jugé n'être pas mortel.
Voici un second exemple d^un combat analogue
tiré d'une procédure correctionnelle que j'ai eue
sous les yeux.
Un sieur W** , avocat à Cambrai , soldai de k
Garde nationale , s'était pris de qnerdle dans h
service avec un sieur R*** , capitaine adjudànl-
major , qui , dans la dispute , le menaça de la main
et le provoqua en duel. Un sieur F***, sergent-
major , se mêlant à la querelle , donna un soufflet
au sieur W** qui , lui présentant l'autre joue , lui
dit : Je connais les lois , et je ne m'adiesserai
qu'à elles seules pour obtenir la trparation de vos
molcnccs.
k
«•cnJLpmK XTvm.— 447
Le weiir F*** fui traduit au conseil de dÎH-i-
^linc qui lu conilnmna it vingt-qualrc heures do
prison , pour avoir manque, de sang froùl ilaits
le se/vice. Mnis le sieur W** ne se lin) pas pour
(Btisrait d'une pareille condamnation , et porta
plainte au tribunal correctionnel , tant contre le
lur F*" que contre le sieur R"", avec qui la
[querelle arait commcnet.
Ce procès fit beaucoup de bruit à Cambrai ,
U fut traité comme une affaire de corps dans la
Garde nationale. Les prévenus d^-linaient la com-
pétence de la juridiction ordinaire et prétendaient
nVire justiciables que du rniiseil de discipline.
Le tribunal se déclara compétent h l'égard du sieur
F*** , et par le motif quM existait des circonstances
atténuantes , et t/ue le pirjudice causé n'excédait
pas vin ff.~cinq franc i , le condamna k dix jours
fie prison , 25 francs d'amende , autant de dom-
mages-intérêts ; et renvoya le sieur R • * " devant
le ctmseit d« discipline , comme pré^-enu d'injures
envers un infériear.
Ce jugement , sur l'appel de toutes les parties ,
lut confirmé par mrrH de Ir rniir royale de Douai ,
en date du 13 janvier 1832.
Ce trait est un exemple , [larmi tant d'autres, ilc
cette lenduice que montre parfois notre milice-
cilojeuue ^ s'a&similcr aui militaires. Elle pourrait
448 — BI8T0IRB DES WHOS: —
certes choisir y pour les imiter, un côté plus hono*
rable. On y voit aussi combien il y a de gens qui
sont tout de feu pour déclamer contre les duels ,
et qui se trouvent de glace quand il s^agil de
punir tant soit peu sérieusement les insultes qui
les provoquent.
Du reste , il est vrai de dire que de nos jours
les officiers, qui se piquent de savoir vivre, ne
recherchent plus les duels, et quand on en entend
parler encore dans les régimens , c^est le plus ordi-
nairement parmi les sous -officiers et les soldats.
Les chefs de corps jouissent d^un droit à-peu-prés
discrétionnaire , pour les punir chez ces derniers
ou les autoriser selon les circonstances. U est facile
de comprendre combien cet état de choses laisse
à rarbitraire et diversifie les usages reçus en cette
matière. Dans plusieurs corps , il est établi que
nul sous-officier ou soldat ne peut se battre , sans
en avoir prévenu le maitre d^armes du régiment.
Celui-ci est conslilué juge en premier ressort du
Point d^honneur. Il en référé ordinairement à la su-
prême décision du capitaine. C^est encore le maitre
d'armes qui règle les conditions du combat auquel
il doit toujours assister. II est douteux qu^un pareil
homme puisse faire un bon juge de paix (318).
CHAPITRE XXIX.
Duels de TemiiH-s.
L'nsAGE des combats particuliers dont la pos-
non des femmes a pu ëlrc l'objet ou le prix ,
monte il ia plus haute antiquité.
Merub fut promise ti David , en récompense de
k ?icloirc contre Goliath ; Hercule lutta contre
Acheloûs et Nessus pour Déjanire , et pour sa
trmrne Mégare contre Lycus. Thésée combattit
contre le Minotaure pour Ariadne ; Idas el Lyn-
c«us contre Castor et Follux , pour les filles de
Lfucippus ; Paris contre Métièlas pour Hélène ;
Enèe contre Turnus pour Lavinie, cX. tutti quanti.
Ctliathènes , tyran de Sycione , comme le firent
tUBBÎ bien d'autres qui n'étaient pas tyrans, pro-
posa , pour prix de la lutte aux jeux Olympiques ,
UmaÎD de sa fille Agaristia. Treize princes, seloa
Utrodole , vinrent combattre cl il nous importe
Uwi peu de savoir quel fut le vainqueur (319) .
Au temps des Paladins , c'était aussi pour l'amour
'Ifs Dames cl au prit d'un sourire et d'un ruban ,
^
40D '^mSTOTRE D1ES DUBLS. —
que les poiirsuivans d^armes quêtaient les ayen^-
turcs et jouaient gaiement leur vie dans les dueb
ou dans les chances presque aussi périlleuses d
tournois qui en étaient I^image. Réunissanl dans u
bizarre association la haine et Tamour , ils avaieKn
fait de ces deux passions , les plus tyranniqu ^
du cœur de riiomme, le principe de rhonnei«.r.
C'était alors le comble du mérite de combattre pour
sa maîtresse y de se parer de ses couleurs et de ies
rapporter teintes de sang. Cet esprit survécut long-
temps h la chàte de la chevalerie. Long-temps on
^e fit honneur et gloire ^ dans le monde fasliionable,
d^imiter cet instinct féroce des animaux qui se
déchirent pour une femelle , ou de tirer Tépée au
moindre caprice d*un sexe dont le n6tre aime à se
faire tour-à-tour l'esclave et le tyran (320).
Au temps où Mercier écrivait , il parait que les
mœurs, sous ce rapport , avaient déjà commencé à
changer de face, a On ne se bat plus aujourd'hui
pour les femmes, disait-il ; leur conduite a rendu ces
combats ridicules. Tableau de Paris, Chap, 228»
Cette réflexion est peut-être un peu trop absolue,
comme beaucoup de celles que faisait Mercier;
car, à cette même époque, il ne manquait pas encore
iï Hellènes à la Cour et à la Ville , comme nous
rapprennent les Mémoires du temps , notanuncDl
ceux de Richelieu , de Lausun et de Tilly (321)*
— CHAPITRE XXfX.— 461
Quoi qu^il en soit , les femmes ont pris elles-
mêmes leur revanche. On les a vues à diverses
époques chercher , dans les chances d^un combat
singulier , une vengeance contre un perfide , ou un
triomphe contre une rivale. J^aurai donc à parler
aussi des duels de Femmes. Ce sujet a trop de
réalité pour que la gravité de cette histoire en soit
compromise. Il ne pourrait même en être écarté ,
sans y laisser une lacune.
11 serait inutile de remonter aux temps antiques ,
et au siècle des Amazones , pour y trouver des
preuves de l'esprit belliqueux des femmes. On les
a vues souvent autrefois , comme aujourdliui ,
combattre dans les rangs des soldats sur les champs
de batailles , ou se signaler sur la brèche à la dé-
fense des villes. Les institutions politiques de cer-
tains peuples s'attachaient même h faire naître et
à entretenir cet esprit par une éducation toute
virile. On connaît les lois de Lycurgue et les exer-
cices gymniques des vierges de Lacèdémone. f^.
ci'^pr'ès , Chap. XXXrJI.
A Rome , on vit quchjuefois des femmes paraître
dans le Cirque et y jouer le rôle de Gladialriccs,
Dion-Cassius nous a conservé le récit d'un combat
de ce genre; et Atliénée parle d'un Romain (jui
avait ordonné par testament , de faire eomballre k
452 — mSTOIRB DES DUELS. —
ses funérailles de belles esclaves qu'il avait achetées
à cet effet (322).
Dans les temps modernes, on n'aurait pas besoin
de recourir aux fictions poétiques pour trouver de
pareils exemples. Sans parler des Clorinde , des
Armide , des Djaïda , héroïne du roman arabe
d^Antar , un grand nombre de nos villes n'ont-
elles pas conservé la tradition des exploits d'ama-
zones célèbres? Lille a eu sa Jeanne Maillotte,
Beauvais sa Jeanne Hachette , Orléans ou plutôt
la France entière sa Jeanne d'Arc , la Bretagne
sa comtesse de Montfort (323).
Au moyen Age , le beau sexe fut toujours exclu
des lices judiciaires. Femme, dit Bcaumanoir, ne
sepuet combaiu^. Elle devait choisir un champion
pour soutenir son procès , sans quoi on ne recevait
pas ses gages de bataille. Ce ne fut que plus tard,
à ce quMl parait , que le duel commença à tomber
en quenouille (324).
c< On parle à Paris , dit Guy-Patin , de deux
dames de la cour qui se sont battues en duel à
coups de pistolet. Le roi a dit en riant qu'il n'en
avait fait défense que pour les hommes.
M.*"® de Yilledicu a aussi fait mention d'un
combat à l'épée entre Henriette-Sylvie de Molière
et une autre dame. Toutes deux étaient habillées
en homme. Œuuœs complètes, Tom. VII ^ P. 82.
— CHAPITRE XXIX. — 458
On trouve dans les lellres de M."* Diinoyer,
les détails d^une rencontre entre une dame de
Beaucaire et une fille de condition , qui se battirent
à Fépée dans un jardin , et se seraient tuées , ta
Ton n^eût couru les séparer. Cctait un duel dans
les formes , et précédé d^un cartel.
Wulson de La Golombiére a aussi parlé de ce-
combat, ce La même chose arriva encore à Paris ,
ajoute^t-il , entre deux courtisanncs assez belles
qui se battirent avec de courtes épées sur le boule»
▼ard Saint-Antoine , et se firenl quelques blessures
à la gorge et au visage , où Tcnvie et la jalousie*
quMIes avaient Tune pour l'autre, leur faisaient
principalement diriger leurs coups. Une de ce»
femmes me montra, en levant son mouchoir de
cou, la blessure qu'elle avait reçue au cûté du
sein droit (325).
Saint-Foi X parle dans ses Essais sur Paris ,
d^uoe D.*^^*' Durieux qui se battit , en pleine rue ,
contre un nommé Antinotti , son amant-.
Mais la plus célèbre des duellistes en jupon-
est Tactriee Maupin , dont on a raconté en ce
genre des tours de force vraiment merveilleux. Cette
femme était née à Paris , en 1673. Son père se
nommait Daubigny. Elle se maria jeune, et ayant
envoyé son mari en province avec un emploi dans
les aides, elle entra en 16U8> comme actrice h
454 «- HISTOIRE DES DUELS. «■
rOpéra. Passionnée pour rcscrimc , elle se lia areo
Serauc , prevot de salle , et parvint bientôt à une
force à laquelle put à peine atteindre, après elle,
le chevalier ou la chevalière d^Eon. Insultée uq
jour par Tacteur Duméuy , son camarade , elle
Fattendil sur la place des Victoires , et n^ayanl pu
le décider à mettre Tépée à la main , elle lui em-
porta sa montre et sa tabatière. Un autre de ses
camarades Tayant également offensée , elle le forçu
de lui demander pardon à deux genoux.
La Maupin était une Sapho , sinon dans son
esprit , du moins dans ses mœurs , et elle avait
reffronlcrie d'çn tirer vanité. Se trouvant un jour
dans un bal , clic se permit envers une dame , d'in-<
décentes agaceries. Trois cavaliers , qui accom^
pagnaient cette dernière , voulurent en vain la
faire cesser ; elle les provoqua , les força de sortir
avec elle , et les tua tous les trois. Après celte expé-t
dition , elle rentra fort tranquillement dans la salle
de bal. « Elle obtint sa grâce du roi , dit son
biographe ; ce serait donc pour une femme de
mauvaise vie , que Louis-lc-Grand se serait dé-t
parti de sa grande sévérité contre les duels, n
La Maupin se retira h Bruxelles où elle devint roat-
trcsse de l'Electeur de Bavière. Rentrée h TOpéra
peu de temps après, elle mourut en 1707 (326).
Dans te cours du 18.<^ siècle, & cette épo^o
•-*• CHèPI THE XXII. -*- 435
M le boàu sexe jouait nu premier rùle à la Ceur^
comme à la Ville , oii la galanterie et quelque
chose de pis eorere , étaient uue si grande afluire ^
les querelles , les rivalit^'s et les débats de tout
genre entre les femmes, retentissaient sans cesse.
€k>mme on Ta yu aux chapitres. XXI et XXli , elles
faussaient leurs amans h se battre , et la moindre
hésitation de leur part était suivie d^uie disgrâce
•ans Mtout. Puis menait la comédie des larmes eb
des pâmoisons à la nouvelle du sang versé.
Parmi les combats où ces dames ont eu riion-
•eur de figurer en personne , je me bornerai k
nppeler ici , sur raulorité de S4>ulavie , r{'daeteur
des Mémoires du duc de Kirlielieu , le fumeux
duel au pistolet cpii aurait eu lieu, sous lu Uégencc,
entre la marquise de Nesie et lu cimitcsse de Po-
lîgnac. Je passe sur les détails que pourront cher-
cher à la source même , ceux à qui il ne sullirait
pas de savoir que le sujet de ce combat féminin.
B^était autre chose que la possession du duc de
JUchelieu lui-même (327).
De nos jours , la presse périodique a plus d'une
foiy signalé des duels de femmes , dont je n'oserais
pat toujours garantir Fauthenticité. Ceux que je
i^ais citer me paraissent les plus avérés.
En 1827 , M.'"*' U*^% ii Sl.-Rambert , a reçu un
eiXiei d'une autrci dame pour se baltre au pistolet.
458 ^ HISTOIRE DES DUELS. «—
Vers la même époque , une dame de ChAleau*
roux , indignée de ce que son mari refusait de tirer
par un duel satisfaction d^un soufflet , se présenta
elle-même en sa place au combat, et blessa son
adversaire d^un coup d'épée.
J'ai une connaissance personnelle d^un autre
combat ou deux dames se battirent encore en-
tr'elles à Pépée pour une riyalité de galanterie.
En mai 1828, une rencontre au pistolet a eu
lieu à Paris , entre une demoiselle et un Garde-
du-corps. Ce fut la jeune personne , amante trahie
et délaissée , qui envoya le cartel , donna le rendeir
vous et fit choix des armes. Deux coups furent
échangés , mais sans résultat, par suite des précau-
tions prises par les témoins dans le chargement
des armes. La demoiselle , qui ne soupçonnait pu
de supercherie , lira la première avec le plus grand
sang froid , et attendit ensuite tranquillement le feu
de son adversaire. Mais celui-ci , après avoir feint
de viser un instant pour éprouver Tintrépidité de sa
Clorindc , tira en Fair en signe de réconciliation.
Dans le même mois , un autre combat avait lieu
aux environs de Strasbourg, entre une Française
et une Allemande , toutes deux éperdument éprises
d'un jeune peintre. Les deux rivales se rendirent
sur le terrain , avec des témoins de leur sexe , pour
vider la querelle au pistolet. D^abord rAllemanda
— aiAPiTBE Titn.— 457
veut obslinément 9g baltrc è bout porUnt. Moîa
U jeune Française d'accord avec les (/-moins , ne
I conaeol au combat iju'à une dislnncc de vingt-cinq
. Elles tirent l'une sur l'autre il cette distance ,
wec un *gal acharnement, et se manquent. Alon
mpétueusc Allemande insiste vivement pour rc-
tnencer la partie , et pour k baltre jusqu^à
la mort. Mais les ti-moins s'y opposent et df-sttrmeDt
le» deux ennemies , sans pouvoir louterois opérer
enir'elles la réconciliation d'usage.
Il faut passer la mer pour rencontrer le premier
de ces combats fi^minins qtii aient eu un dénoue-
ment fatal. On en trouvera les détails ou Cb. XXXII
où seront rapportés les débats d'un procès criminel
qui fui jugé , en 1833 , aux assises de Lcinster en
Irlande, yuyez aussi pour les duels de femmes en
Scmàinavie, le Cl\ap. XXXÏll t328).
^■' L'amour-propre si fort dans le cœur des hom-
^MKS, et qui les rend quelque fois si faibles, prend
^blus spécialement chez les femmes le nom de vanité.
^HtC désir de commander d'une part , celui de plaire
de l'autre ; ici les rivalités d'amour et de toilette ;
là , celles des honneurs et de la fortune ; des deux
calés , et à un égal degré , l'envie et In vengeance ;
telle est la grande et souvent l'unique affaire de
ia TK cbe» l'uD et l'autre sexe. S'il ea est un que la
438 — HISTOIRE DES DUBIJ* —
nature n^u pas également partagé sous le rapport àt
la force, elle Ten a bien dédommagé sous celui
de radrcsse. Des charmes , voilà sa puissance; des
pleurs, voilà ses armes; Tintrigue, voilà se» duels.
Mais si la retenue , si la réserve naturelle à ce sexe
timide, ne devaient pas lui inspirer la plu» invincible
répugnance pour les voies de la violence ouverte ;
si les moralistes de cette école rénovatrice qiii traite
de préjugés absurdes la modestie et la pudeur^
parviennent jamais à faire goûter leurs idée» de
réforme et d'émanci{>ation , certes, on peut s'*y at-
tendre , la mode du duel , avant toute» les autres^
est destinée à jouer un rôle principal dans la vie-
des femmes. Elle deviendra une passion nouvelle-
qui , comme toutes les autres , s^exaltera clies elle»-
jusqu^à la frénésie. On les verra dans leurs liabi->
tudcs frivoles , courir aux armes sous les plus fri-
voles prétextes ; on les verra , ardentes à se bsMguei"
dans le sang d^une rivale , saisir le glaive de leur»
débiles mains , et se précipiter en aveugle» dans ces
lices meurtrières où les hommes depuis si long-
temps leur ont montré le clicmia.
riN DU PnKMlER VOLUME.
l
TABLE DES ClIAPITUES
iRTENLS DANS LE TOMK PItLMIER.
Utkosuctios. — Plan de l'o
CWI-ITEE PBEMÎEB. DéflDilit
inguliprg i la gucr
Il (I.iH, -
Hici les (
p.lg
Défis
rombats
's'-s lutidemcs. — Rencoiilrcs foi
I "»é«s. — Différcucesavctle ducl|]r<>i)r«iueut dil. 4
t***^tT>BU. De l'antiquité relullvement nu duel. —
r "©mpi héroïques. — Uistoire grecque et romiùno.
— Peuple juif. 9
tiiAi>ixiie m. Jeux gyinniquei. — Lutte. — Pugilat.
— Combata du cirque. — Nulle trnce du duel- IS
'^fiTRElV. Le duol iastitution muderae. — Recher-
l'iie» sur son origine. — La Germanie, patrie du
*l«>cL — Inyasiou et partage des Gaules par les
"crmains. — Conséqueneos et réaullula. 20
"^PITRE V. Première période de riiistoire des duels
^n France, — Moyen âge. — Légalité du duo! ou
k *^oiid)a(B jadiciaires. — Influcnee des loin genuaioea
K dniis les Gaules, — Décadence du droit ruiuaîn. 23
''■'AriTBB VI. Règles et rurinalités du combat judi-
*.'iairc. — Epreuves du fei- chaud, de Tcau chaude,
4« Toan froide et de la croii(, 2li
460 TABLE DBS CHlPmEB.^
OupiTRE VU. Principaux duels jndieîaires dm 6.* m
il.* sîècies. 35
Chapitre VIII. Décroissance des duels judiciaires
depuis le 11.* siècle jusqu'au milieu du 16.*—
Derniers combats de ce genre. 43
Chapitre IX. Tournois et joutes. — Leur esprit ; leur
origine ; leurs progrès \ leur fin commune avec les
duels judicmires. SA
Chapitre X. Coup d^œil général sur les siècles du
mo^en âge relativement au duel. — Lutte de Fesprit
religieu\ et féodal. — Révolution au 12.* siècle ^
dans les lois et dans les mœurs. — Croisades. -»
Renaissance du droit Romain. 61
Chapitre XI. Continuation du même sujet. — Nou-
velle révolution morale au 15.* siècle. — Chute do
Tempire d'Orient. — Découverte de rimprimerîe.
— Fin du moyen âge et des duels judiciaires. —
Puissance des institutions de cette époque. 78
Chapitre XII. Résumé des deux chapitres précédens.
— Opinions des auteurs anciens et modernes sur
les duels judiciaires du moyen âge. — Erreurs.
— Injustices. — Objections. 85
GiAPiTRE XIII. Deuxième période, — 16.* siècle.—
Prohibition des duels. — Du duel proprement dit,
ou duel volontaire. M
Chapitre XIV. De llionneur considéré comme mobile
principal du duel. — Acceptions diverses de ce
mot. — Ce que cVst que rhonneur en morale et
chez les duellistes. — Erreurs. — Préjugés. —
Abus. — Origine du Poiut d'honneur. — Son incom-
patibilité avec la religion et la philosophie. 107
TMLE DES CIlAPmtF-S. 461
CnApims XV. Règles et formoliiéH des duels. 121
CniPiTRE XVI. Comparnisnn des Ib.' et Ifi.' sièrlci.
— Politique des roîa de France , depuis ChnrlesVI
ius(|B'à Henri III , à l'égard des duels. — Guerre»
d'itnlic. — Guerres de religion. — Leur influence
relative sur la civilisation. 131
CniPiTHE XVII. Principaux duels du 16,' siècle. 142
CmpiTBE XVIII, 17.* siècle. — Principaux duels dn
règne do Henri IV. — Inefficacité de ses édils. 171
CntpiTRK XIX- Principaux duels du régne de Louis
XIII. — Nouveaux édits. — Exemples do sévérité.
— Politique de Richelieu à l'égard de» duelliste»
et de l'aristocratie. 187
Chapitre XX. Règne de Louis XIV. — Analyse de»
nouveaux édita contre les duels. — Tribunaux du
Point d'honneur. — Politique de Maiariu à l'égard
des duellistes. -—Indulgence du roi. — Duel» re-
tnarquablcs. 20$
(^■APiTHE XXI- Duels au IS.' siècle. — Régence.
— Règne de Louis XV- — Dernier édit contre le»
duels . — Principaux duellistes. — Tolérance crois-
■anie. — Révolution dans le» mœurs. — Influence
de 1a philosophie. 24i
Ch«i>itre XXII. Règne de Louis XVI. — Son esprit
de réformes. — Opposition des courtisans. — Duels
à la cour et en province. — Désuétude des ancien»
Mits. — Duellistes célèbres, — Rapports de leur
caractère avec la physionomie morale de chaque
siècle. lia
CRiriTRK XXIII. Kévolutiou de 1789.— Duels poli-
462 TABLV DBS CHAPmU. «.
tî(|iiOii. — Décret d^amiiistie du 17 scptombre 1792^
pour fait de duciR. — Autre décret du 20 messidor
nu II. — Kuu^rntion. — Chute de rAristocraiie.
— SoH ronséqiiences. 319
Chapitre XXIV. Troisième Période. — 19/ siècle.
— Liberté des duels. -—Consulat et gouTemement
îinpériaL 348
Chapitre XXV. Suite du 19.* siècle. — Restaura-
tion. — Duels politiques et littéraires. — Inter-
vention des tribunaux. -— > Conflits de jurisprudence.
— Projet de loi de 1829. 3â8
Chapitre XXVI. Continuation du même sujet —
Révolution de 1830. — Nouveaux duels politiques.
— Duels do journalistes ; d'avocats ; de gens de
lettres ; d^artisnns ; de fonctionnaires. — > Duel sani
témoins. — Duel entre frères. — Nouvelles pour-
suites judiciaires.^- Pétitions aux chambres sur
les duels. 38^
Chapitre XXVIl. Duels parlementaires. 40^
Chapitre XXVIII. Duels militaires. W^
Chapitre XXIX. Duels de femmes. ^^^9
riN i)K LA table du premier volume.
. tSgna.
10 La note (4) doil èm jilncéc après cp*
mots : àans une rencontre préméditée
de part et d'autre .
a 13 Ali lieu de -.^Xx^^. XUir, lisez '. Ch.lp.
XXXIX.
M 20 Ln note (53) doit étir pincée après Ira
\ mots : en Gastinois , etc.
* t\ 7 La note (58) doit être placée au § suivant,
après ces mots : en matière civile.
44 8 Au lieu de t C'était une loi do Henri L",
lisez : c'était une loi de l'EgliBC sous
Henri I-"
70 9 Au lieu de : au Chap. XXVUI , lisez .■ au
Chap. XXXII.
70 10 Au lieu de i le Chap. XXIX, lisez .- le
Chap. XXXIII.
181 2i Au lieu de i Chnp. XXXV , lisez .- Chap.
XXXV 1.
171 16 Au lieu de : Aggrlpinc , lisez t Agrippine.
i'i^ 11 Au lieu de : lo dernier rejeton, lisez : la
dernière souche.
175 S Au lieu, de : dans le journal do Henri IV,
lisez .- d.iDB le même jimrnal.
W 3 Au lieu de : ce ne fuL donc pas, lisez .* ce
ne serait donc pas.
'31 23 Au lieu de •■ Rochefort en était le type ,
lisez i Beaufort en était le type.
-*2 12 Au lieu de .- nu Chap. XXVIII , lisez -• au
Chap. XXIX.
i
A6& XML tt ATA. ^
Pages, lÀgnes.
274 lA '^u Uêu de t qn% pomraient y ocenpcri
Usez ! (juHlt pourraient y rempGr.
375 6 ^u lieu de i Xe^ contéquencet des pré-
micet 9 lUei : les conséqaenoet des pré-
misMt,
34i 18 Au lieu de : Part. 2 de la &.« sectioB,
lisez: Part. 11 de la &.* section.
369 20 jéu lieu de : le cour de cattation, lisezi
la cour de cassation.
3M IS Au lieu de : entre des aTOcats, lisez : che^
des aTOcats.
-*
HISTOIRE
DES DUELS
ANCIENS ET MODERNES.
• • • •
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.1
HISTOIRE
DES DUELS
ANCIENS ET MODEItlMES.
CHAPITRE XXX.
Dut-rs fil B.;lt;iqur el cii I!oU;uulo.
Lts pri'iniers pas qiie nous iiltnns faire hors de
'rancc , it la rcclierche des aucîcns usages relalila
*iix duels, cens conduisent nnturullcment dans les
•"tiennes (>rovincea. des Pays-Bas. Nousyrelrou-
V^ns encore la France, ([ui les a si long-trmps
.piuvcmées; car où ne la relrouve-l-cm pas iiujour-
■liui ? Nous y reui'oiilreitHis siu'tout uue t'oiiimu-
tault de mœurs et de syoïpalltie avec nos proviuLts
1
6 — ■mromv
du Nord| qui dîBèrait Imb
bdgîques que de mm yrofincei du Midi.
Le congrès de Vienne «vail compoeé, ea 18IS,
un royaume de la Belgique et de la HoUwide. Le
traité de Paris du 31 mai 1814 ^ qui en poiail les
bases |K>rtait : « La Hollande recetra un œcmtne-
Menf de territoire. y> Cet accroissement était la
Belgique , qui dcTcnait ainsi Vaccessoùre, quoique
sa population et son étendue fussent presque doubles
de celles de la Hollande dont on faisait le prindpd^
Le Tasselage de la Belgique fut consommé
Fimposition d^un monarque hollandais de cœur
de nation , qui , fidèle au protocole constitutif de
royauté , gouTcma V accessoire à-peu*prés coi
une conquête. Il prétendit lui imposer les
de son pays, son système d^impôts, ses intérêts
ses préjugés commerciaux, ses lois pénales miK—
tairas sans en excepter la bastonnade^ et mènn.^
jusqu^à sa langue (829).
Une telle suprématie était trop injuste et trop ab"
aurde pour durer long-temps. II y eut duel et duel
à mort entre la majorité soumise et la minorilé
dominante. Dans les prévisions logiques, la victoire
ne pouvait rester Iong*temps douteuse. Le ehn^d
renversera le emboîter, disait le ministre anglais Fittt
lorsqu^en 1790 on lui proposait une comfainaiipa
toute semblable entre la Belgique et la HoUande.
j — CUlPITRE JUlX. — 7
IiC cheval s'est senti plus Torl que le cavalier; une
Jiutde l'en a (lébarrassé , cl le coup de fouut fut
f^nné par la révolutiou de Juillet (330) .
<■ Si la Belgiqrte et la Hollande sont politiqucmcBl
fBrlant : Hes dissociables , elles ne le sont pas
Aislenquemcnl. C'est pourquoi je les Inisserai
Réunies dans ce chapitre qui comprendra ce qu'on
■celait les dix-sept provinces des Pays-Das.
I Ce territoire se composait de la plus grande
^Mrlie de l'ancien Belgimn de César, c'est-à-dire 1
dti pays desBataves, desEburons, desAU'napiens, I
des NervicQS , auquel il faut joindre celui des.
Alorins et des Atrèbates, qui Tut donné en dot par ,
Oiarlcs-Ze-CAouif;, à sa fille Juditti , mariée, en
|B63, À iiaudouin I.", Grand-Forestier de Flandre.
^tt conuail lu hiiute estime tpie faisait le eon-
|uèrant des Gaules de ces dilT^ïcns peuples, dont
h>{)iniAtre résistance tint si long -temps en échec
ItB arroes romaines. Selon Tacite, les Bataves se
listinguaient parmi tous les autres pox Icue bril-
hnle valeur (3S1).
V Ce pays a été le berceau tle la monarchie des
iPrancs. L'ancienne ville de Tournai, mentionnée
lliDS l'itinéraire d'Antonin et dans la onzième épilre
is St. -Jérôme, fut l'une des premières conquêtes
le Clodioo sur les Romains. On y découvrit eu
k Â
8 «- msTomE des duel». —
1053, le tombeau de Childeric !.«', et Im célèbre
ville d^ Aix-la-Chapelle , limitrophe duLimboui|;,
fut la capitale de Charlemagne,
Après rétablissement des Francs dans lesGaules^
leurs princes et notamment Charlemagne donDè*
rent la qualité de Forestier avec une partie de la
Flandre Belgique à leurs plus braves capitaines.
A ceux-ci succédèrent les comtes de Hollande , de
Hainaut , les ducs de Brabant , de Gueldres , eto.
Puis les Pays-Bas passèrent successivement sous la
domination de la maison de Bourgogne , sous cello
de r Autriche et de TEspagne (332) «
Le comté de Flandre était entré, dès Pan 138&-»
dans la maison de Bourgogne , par suite du ma«-
riage de Marguerite , fille unique du comte Louis
de Mâle , avec Plûlippe 1.^' ; et en secondes noce» 9
avec Philippe-/e-£fûrdi, père de Jean^sans^Pcur,
assassiné àMontereau, en 1419. Philippe--/!^^o;>3
fils de ce dernier, lui succéda, et aprés' lui Charles^
le^Téméraire y le dernier des comtes de Flandre
et des ducs de Bourgogne.
L'archiduc Maximilien , fidèle à la devise Au*
trichienne : Tu felix AuHrià nube, avait épourf
Marie, fille unique de Charles-/e- Téménure^ qui
lui apporta la Flandre en dot , le duché de Boui^
gogne ayant été réuni à la couronne de France
par Louis XI qui Taurait acquis plus juatemeot
— CIIAPITRE \XX-— îï
ei y aurait joint le comté de riiintlrc s'il n'iiv.iit
paH in»m]ué pour le DHiipliîii lu main de VUt-
riliére de Bourgogne (333).
En 1409, le miiriage de Ph\\ippe-le-Bel , lits
de Maximilien et de Marie de Bourgogne , avec
Jeanne d'Arragon, opéra la réunion de la souve-
raineté des Pays-lîas ii la couronne d'Espagne,
i qui elle demeura , sauf <|uclt|tjes vicissitudes suiv
venuea lora des IraitÉs de Niniégue ot de Kiswiek
en 1678 cl 1697, pour retourner à ia maison d'Au-
Iriche lora de la paix d'Ulrechl , en 1713.
Le territoire des dis-aepl provinces de» Pays-Bas
comprenait 212 villes cl 6591 villages. Au seizième
■técle, sept des provinces du Nord secouèrent le
jotig de l'Espagne , sous la conduite de Maurice de
N nssau , prince d'Orange , et formèrent la répu<-
t>lii|iie des Provinces-Unies qui prit son nom du
Comté de Hollande.
« Ce pays , dit Robertsion , était auparavant un
objet si peu considérable qu'à peine s'csl-il pré-
Bcnlé une seule occasion d'en parler. Mais après le
traité de CAte au -Cambrés! s , les maximes violentes
et superstitieuses de Plûlippc II ayant été mises en
pratique avec une rigueur impitoyable par le duo
d'AIbc, les Pays-Bas secouèrent le joug espagnol
^r^blirent leurs lois et leur ancienne liberlè. lia
lu défeodircot avec un icle infutigable qui occupa
10 —HISTOIRE DBS DUKLf . —
les armes d'Espagne pendant plus d^un demi-sièdei
épuisa les forces et flétrit la gloire de cette mo-
narchie. » Ces provinces furent pour FEspagnede
Philippe II y ce que TEspagne de Ferdinand YII
devint deux siècles après pour la France de
Napoléon.
Un empereur Turc entendant parler des torrens
de sang que répandaient les deux peuples, rtin
pour la domination , Tautre pour la liberté , crut
qu'ils se disputaient la possession des plus grandi
empires. Quelle fut sa surprise , lorsqu'on hs
montra sur la carte l'objet de tant de batailles
meurtrières ! Si c'était mon affaire, dit-il froide-
ment, j'enverrais mes pioniers, et je ferais jeUr
ce petit coin de terre dans la mer, — Mais ce petit
peuple trouva , dans sa topographie et dans le
courage que donne la haine de la servitude, le
supplément de son infériorité. On sait à quel haut
degré de splendeur il s'éleva successivement après
son aflranchissement ; on sait aussi le râle de supé-
riorité qu'il joua constamment dans les guerres cl
surtout dans les traités de paix sous Louis XIV.
Les sept provinces qui secouèrent les premières
le joug espagnol avaient été la Hollande, h
Zélandc, la Gueidre avec le comté de Zutphen, Is
Frise qui comprenait les Ommelandes , l'Orer-
Yssel j la seigneurie d'Utrccht et celle de Gro-
— CHAPITRE s%x. — Il
DÏngiie. Le sn'gnal de l'insurrcclion fui In Icnlalivo
lailc par Philippe 11 pour implanter le Saint-Ollice
dans les Pays-Bas. Une partie des calliuliques du
ItrabanI , (]ui n'en voulaient pas d'avantage que les
protestnns des provinces du Nord, entrèrent dans
la Ponféd^Talion et conclurent, en 1566, h Ger-
Iruydemberg la ligue des Cucu.r, nom que leur
avaient donné leurs ennemis et dont ils se firent un
litre d^honneur. Ce fut encore ainsi qu'en 1830, le
parti libéral et le parti catholique firent alliance pour
renverser la monarcliie de la maison d'Orange.
En 1568, l'Inquisition de Madrid porta une
kientcnce qui proscrivait en masse tous les peuples
4es Pays-Bas qui ne voulaient pas d'elle. Celte sen-
lence fui confirmée par un èdil de Philippe 11 ,
du mois de février , qui déclarait tous les Belges
criminels de lèse - majesté avec contiscation de
^ corps et de biens, sans distinction de proleslans
«t de catholiques. C'est là un exemple unique do
loiile une grande nation condamnée à mort par
' ira Bcul arrcl. On ne vit rien de semblable dans
les vengeances de Sylla et d'Auguste , dans les
caprices de Néron ni dans les saturnales de 1793.
Philippe U dépêcha aux révoltés, pour mettre
ion édit à exécution , le farouche duc d'Albe ,
•Sgne exécuteur de pareilles œuvres. Celui-ci dé-
buta dans son gouvernement par le supj>licc de»
12 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
comtes dTgmont et de Hom. Ce nonstre s^esl
lui-même vanté d'avoir fait périr dix-huit mille
personnes par la main du bourreau , et d'avoir
élevé les confiscations pour chaque année, k la
somme de huit millions d'or. Ces mesures acerbes
eurent pour ce pays le même résultat que produisit
en France la révocation de l'édit de Nantes. L'iiH
dustrie et le commerce des Pays-Bas se réfugièrent
en Angleterre , où la politique d'Elisabeth leur
ménagea le plus favorable accueil.
Philippe II envoya ensuite aux Flamands soa
frère bâtard Dom Juan d'Autriclie, pour succéder
au duc d'Albe qui, las de massacrer, avait lui^
même sollicité son rappel. Le nouveau gouveraeur
avait ordre d'essayer les voies de la douceur,
puisque celles de la rigueur réussissaient si mal
Mais celui-ci entré en Belgique sous la peau de
l'agneau, la quitta bientôt pour celle du renard
et y ajouta même les griffes du hon. Il s'appuyait
sur les Guises de France , et les insurgés travail*
laicnt de leur côté à s'assurer le patronage d'Eli*
sabeth. Dom Juan , après avoir remis en pratique
le système de proscriptions du duc d^Albe , fut
proscrit à son tour par les Etats de Flandre réunis
è Bruxelles en décembre 1577. Enfin, l'admini^
tralion prudemment paternelle d'Alexandre Far-
nése , duc de Parme , qui succéda à Dom JuaU}
- MArlTIIF T«. — 13
hnri en 1^78, permit au\ Flnmamls de renpirer.
ivcau gCMiviTneiir r^issil , h forre (l'ndrrssc,
l^ (Iflaclier »l<' In conr^di-rnlion les pruvinees mé-
dioiinlrs qu'il ciiiisfrvn nitixi ii l'p.xpngnc ; ri il
Ulul loiitc l'Iiubileté du pritu-f d'Ornogc pour
ftintenir l'indtpcndancc dcn icpt provinces dti
ord, f]ui pemiitcrenl h la di'rfi-ndre et pnHcrent
■ bases de leur nouvel Fini dons la célèbre union
ÉTlrecIrt, en 1579.
I^!9 Etals de [lollande , vainr|uetin en toulca
renconlres des armes de IT^pagne, bc firent tlf-C-
nitiTeinent reiH^nonitre par le traita de Munster ,
en 1648. La poswssinn de l'Artois r<:uni au eomli
de Flandre par les ducs de Bourgogne, puia con-
^mXpûs par Louis XI d'abord, et ensuite par Louis AIM,
^■rt misai conGmiéc k la France, en 1659, par
Hl traita des Pyrénées (»34).
^^ Il n'est pas de nations en Europe, si l'on en
excepte l'Espagne , qui ce soient montrées aussi
roDsIamment fidèles à leurs anciennes tnu^urs que
tes peuples de» Pays-BiiB. Tels ils ont été , tels
Lmi les retrouve toujours. Impatiens de toute espèce
Hdejoug, ardeiis zélateurs de l'indépendanee et de
Ta liberté , on leur a fait depuis long-temps une
renommée il'insuumissinn cl mémo de légérclé qui
I n'a rien de réel ; car leurs fréquente*
14 — HISTOIRE DBS DiniLS. —
révolutions peuvent s^eipliquer par ce trait saillint
de leur immuable caractère , qui consiste à ne rien
tolérer de ce qui peut blesser leurs principes,
froisser leurs préjugés , compromettre leurs in-
térêts collectifs et individuels, ou troubler seule-
ment leur bien-être.
Le Flamand est un peuple pour ainsi dire tout
neuf encore. La servitude féodale du mojren Age
ne lui a pas fait sentir comme partout ailleurs set
plus rudes étreintes. La suprématie des souverains,
tels que les Forestiers et les Comtes n^y fut pas,
comme en France , un étemel sujet de disputes
et de rivalités de la part des grands vassaux. Lo
donjons y jouèrent toujours un bien moindre rôle.
Les guerres privées y furent rares ; elles ont été
remplacées par de longues guerres civiles , notam-
ment par celle qui eut pour chef, au quatonième
siècle , le brasseur Arlcvelle , et par la grande lutte
pour Findépendance hollandaise qui dura prèsd*uQ
siècle , et ne fut aussi h proprement parler qu'une
guerre civile , comme Pavaient été les guerres de
France sous Charles VI et Charles VU pour Tex-
pulsion des Anglais du territoire (335).
L'Aristocratie Belge n^a jamais séparé ses intérêts
politiques de ceux de la Démocratie. Jamais Tune
n'a cherché h exclure l'autre de la juste part d'in-
fluence qui peut lui appartenir dans le gouTer-
— CHAPITUF, TXT.— 15
rt>Rt. Du moina , si de telles prélenlions ont
fu ^Irc tievixa quelque fois, coniinc aux lrtnp«
'des deux Artcvellc cl dcH Van iter Mentch, ellca
farent le résidlnt de l'eiTervescencc du momcnl ,
lis n'ont jamais pris racine duns kg esprits. I^
luvoir monarchique n'ayant point de rivaux ,
'avait aucun inItrA à semer la discorde entre le
peuple et les nobles, pour profiler de leura divi-
ûons d les aflaiblir lea uns pur lei autres. Les Piijs-
Bas ne connurent ni de Louis XI , ni de Ricliclicu ;
S» n'eurent pas à subir ensuite , comme la rraiice
de Louis XIV et de Louis XV , le despotisme du
sabre et celui des oiattrcBscs. La réaction du servage
fÉodal ou des privilèges liumiliaiis qui hii suc-
cédèrent, n'ayant pas eu lieu de s'y faire sentir,
OD ne vit éclater ni ces prorondes divisions , ni
CCS haines invdÎT^es , ni ce duel acharné des deux
pouToin patricien et plébéien qui ont déchiré n
cruellement la France , surtout depuis l'émigration
de 1760.
Le clergé belge , n'ayant pus eu h prendre parti
dans une telle lutte , ne s'est pas trouvé froissé
ir ce dangereux cotilacl. Il a conservé sur le
iple toute son influence primitive en ne parais-
Miil jamais »épurer ses intérêts des siens. Aussi , <.%
fui toujours un n'ile a'iif et principal qu'on lui
■ va jouor dans les révolutions du pays. 11 ; a
■peu]
' «aiil
16 — -msToniE des duels*-»
même plus d^une fois exercé une influéncfe dim
gcanle, notamment lors du Pairioù'sme de 1789,
par Tentremise des Van der Mersch , dès Van
der Nolt et du moine Van Eupen , qui formèrent
k triumvirat de cette courte insurrection. Celle
influence s^cst signalée d'une manière plus re*
marquable encore dans la dernière réTolution
de 1830.
La physionomie de ces divers éTénemeiis
est constamment la même , et Tesprit flamand s'y
montre avec sa perpétuelle immobilité. Cet esprk
semble avoir conservé Timpression du caractère
particulier des dififérens peuples auxquels la Bel-
gique fut incorporée. On y remarque un mélange
de la fierté castillane avec son égoïsme , ses haines
et ses préjugés nationaux , du phlegikie autrichien
avec sa franchise et sa bonhomie ^ de Pimpétuonté
française avec quelques dispositions à Toutrecui-*
dance et Firréflexion. Tels étaient les Belges, en
1336 , sous Jacques Artevelle , puis sous Philippe,
son (ils, en 1382; tels ils furent, en 1586, sous
Guillaume de 1\ assau ; tels ils étaient encore en
1789 et en 1830. I/insurrection de 1866 eut pour
cause principale Tctablisscment de Tlnquisition ;
celle (le 1789 , la suppression des couvens par
Jof»eph II; celle de 1830, la proscription de ren-
seignement catholique et Texclusion à-peu-préf
— CrilMTRE -xw.— 17
BOmitWte du clergé- de loule ïiarlicipnlion k l'ins-
u-tioii publique (336).
Comme l'esprit de cosle fut loujours /trnnger
% tous CCS mouvcmcns , ils furent bien loin d'ùclatcr
tnev. ce caractère d'acharnement brûlai qui a plus
^UDC fois rouvert la France de sang et de ruines.
Dn ne connaît en Belgique ni les proscriptions, ni
» conflsca lions en masse, cet actif aliment des
ïvululions. {■ne révolte chez noa voisins , cVst
t coup de boutoir du sanglier. L'émeute lue en
'nnre , en Belgique elle pille et dévaste,
t II n'y a nulle comparaison «i faire entre les ré-
volutions de ce pays et les niMres , parce qu'il
n'existe oucunc similitude entre les partis qui s'y
disputent l'influence et le pouvoir. Quant aux sym-
pathies de son gouvernement , elles n'ont d'autre
voleur que ccfle des protocoles diplomatiques.
J'ai cru devoir entrer dans ces détails pour
l'intelligence de ce qui va suivre , les époques où la
Belgique a éprouvé toutes ces vicissitudes étant
cellca où se rencontrent les principaux exemples
de duels que je vais avoir Ii <,ilcr. Par les mêmes
motifs , je réunis ici les faits de ce genre qui se
uni passés en Artois et dans les parties françaises
de la Flandre et du Hainaut , à l'époque oit ces
provinces étaient une dépendance des Pays-Bas
Is et autrichiens.
2
1
18 — mSTOIRB DBS DUELS. ~
Il n^y a aucune différence à signaler entre kt
Pays- Ras et les autres contrées occidentales de
TEurope , pour Torigine , les progrès et la cessatioD
des duels juridiques du moyen âge. Tout ce qui
a été dit pour la France , tout ce qui le sera pour
rAUemagnc est appliquable à cette contrée qui,
sous le nom de Gaule-Belgique et de BataTÎe, le
trouva long-temps partagée entre ces deux grandes
divisions territoriales, position funeste qui, dam
les guerres anciennes et modernes , lui valut le
triste honneur de servir de champ de bataille à
ses trop puissans voisins. Comme celui de h
riante Parthenope , le sol si riche de la fertile
Belgique , se trouve périodiquement sillonné par
la lave dévorante d^un volcan plus dévastateur que
le Vésuve.
Les combats judiciaires dans les Pays-Bas peu*
vent seulement offrir quelques circonstances spè-
ciales où Ton verra se refléter la nuance particulière
qui distingue le caractère de nos voisins. L^exem-
ple suivant peut témoigner de Tesprit religieux
quelquefois poussé jusqu^à la superstition , qui
régnait chez eux au moyen Age.
On trouve dans VHistoi/^ latine de PAbbaye de
Cambron en Hainaut, à la date de 1322, le long
et curieux récit d^un duel entre Jean-le-Flamend
et im Juif nommé Guillaume qu^on avait cru cou-
{
— rWAPITIlE XTT. — 19
verti BU clipislîanisinc , et qui ùlail accusé dWoir
propliané une image de la Vierge, placée dans
l'iglisc de l'Abbaye.
Suivant la légende, la Vierge de Cambron étanl
nppanie en songe à Jcan-le-Flamcnd , vieux char-
pentier des environs, lui avait révélé l'insulte faite
à son image , et lui avait dit qu'il vengeant la vilenie
H le ilexpit (fue li faux converti ti a\'alt fait. Sur
»pioi le nouveau clicvalicr de In Vierge Marie s'ache-
mina aussitôt vers l'abbaye , et étant entré dans
réglisc , il reconnut en effet sur Timage de Notre-
Dame la trace de cinq plaies faites avec un fer
de lance. La légende ajoute même que le sang
découlait.
Le Juif qu'on avait soupçonné d'être l'auteur
ce sacrilège , avait été appliqué & la question ,
ne put lui arracher aucun aveu. Jean-le-
lend ayant fait part de sa vision à l'abbé de
itnbron , celui - ci lui persuada que la volonté
<4e la Vierge était qu'il appelAt le Juif en champ
clos, f'a, lui dit -il, digne champion , fais lui
sauter la cervelle et coupe lui la trie. Le combat eut
lieu et le vœu de l'énergique abbé fut accompli par
Il vidoirc de Jean-le-Flamend qui combattait,
tjoulc rhîsloire , avec la protection visible du
Tria-Haul , divind coopérante gratid. Cet événe-
ncnl fui célébré par une espèce d'iiëroîde ea
I
20 — mSTOlBB DES DCK|f9- —
TraDcais demi wallon j dont cliaque strophe sert
de texte au récit. Ilisior. Camberon. Luteiiœ 1672*
Lib. I y Cap. 15 et seq. (337).
Outre V Histoire de TÀbbaye de Cambron, nous
avons encore, pour garant de ce duel qui peint
si bien les mœurs belges de Tépoque, une espèct
de Mémoire en forme d^ayis ou consultation sur
la pratique des combats singuliers , dont Tauteor
est Jean de VilUers, seigneur de risle-Adaaii
chambellan de Philippe-le-6on y duc de Bourgogne
et maréclial de France, u Le vieux Charpentier,
dil-il , combattit un Juif qui avait donné à Timage
de N.-D. de Ckmbron un coup de lance dont
le sang jaillit au front. Le vieux Charpentier en
accusa le Juif qui était un beau jeune homm« et
puissant, et Tabattit à Fescu et au baston, et bit
le Juif pendu au gibet entre deux chiens , comm
c'est la coutume» »
£n 1406, Guillaume YI, comte de Hollande d
de Hainaut, autorisa un combat judiciaire que n^
porte en ces termes Jean4e-Petit en sa ChroniquSm
ce Au dit an, il y eut une querelle entre deux gentils»
hommes de Hainaut , Tun accusant Tautre d^avoir
tué son parent. Là-dessus , le comte Guillaume leur
octroya le combat en la ville du Quesnoy. Le
vaincu, obligé d^avouer le fait, a été condamné pir
le Comte à être décapité comme criminel , ce qui
i
21
Ibt promplcment es^nilé. » Cfuvn. des Piw.-
Unics. Tant. I, pag. 337, Dordivchl 1601.
<( Fn Tautif-e 1358, dît Simon Lcboucq , le
second vendredi après la Chandetciise fut faict un
camp à oultraoclie sur le marclK^ de Valcntienne
entre Jean le Brisscur de llaussy (jui appela Jalce-
marl de Berry de paix brisict d'ung sien Trèro que
rassaillanl dtsoit que le tKfeadeur avoit occis ,
et fui le dit de Berry vaincu et bouté hors des
Ijfhcs par le susdit Le Brisscur, et lors les preuvost
jurés et csclieviua en feirenl jtiBtlce , et ordon-
m-irnt Irnîuer au relieur iccluy de ISerry, comme
■leurdrier ». Jiiu't/. (le Vuluiit. Mi. autogr. i/e
rimbrai. Tem. I^pts- 128.
L« 16 février 1375, il y eut encore un autre
eombal dana la mi'me ville entre Jnkemart de
Le Cappiellc et Jean llciino<[itin <]iii avait tu6 sa
jnopre femme. L'affaire Cul lermiu^e par une tran-
■etîen. LectAY. Duels juiiîc. du ^ord de la Fr.
^ Mais te plua remarquatitc de tous ces combats
Hns la province du llainaut,f 'est celui doutValcD-
■eones » eocore ^lù le théâtre en 1455. II csl rap-
'^rté par un asscs grand nombre d^crivains. Les
chroniqueurs originaux sont Matliicu de Goucy
rt Olivier de La Marche, oontemporaiMs de l'évinc-
ail. On en trouve également les délHils dans kf
uvres de Draaiûme cl de La C^Iombiérc , dnii-"
i
22 — HISTOIBE DES DUBLt. —
\t% Antiquités de Simon Leboucq et éuaVHistoin
de Falcnciennes de Henri d^OuItreman, publiée
à Douai en 1650 , par son fils Pierre â'Oullreman.
Ce combat eut lieu en vertu d^uitë ancienne
franchise concédée par des chartes impériales , et
qu'Ohvier de La Marche définit ainsi : « Quand
un homme en a occis un autre de beau faici , c^esft-
à-dire en son corps defiendant , il peut yenir de*
mander la franchise de Yalenciennes , et quMl Teut
maintenir à Tescu et au batton qu^il a faict k
meurtre de beau faict. Sur ce , luy est accordée la
franchise et ne luy peult nul rien demander pour
ceste querelle , sinon qu^on le maintienne à Fescu
et au batton , comme dit est , devant la loy de la
ville. » 11 arriva qu^au commencement de 1495,
un nommé Mahuot Cocquel, tailleur d^habits, viot
se réfugier dans la ville privilégiée , après avoir
tué Philippe Du Gardin, bourgeois de Tournai,
qui lui avait refusé sa fille en mariage. Jacotin
Plouvier , parent du défunt , ayant découvert sa
retraite, se présenta devant les magistrats et Paccusa
f( d'avoir faussement et traîtreusement meurdri Du
Gardin , d^aguét et de faict appensé sans eau»
raisonnable. » Les deux champions furent aussitôt
mis en prison , et on leur donna un breton i
chacun pour leur apprendre le tour de combaure,
L^ouverture du champ clos fut différée jusqu^tu
— ciUPiTRE sxx. — 23
USO mai 1455, le duc de Bourgogne, Philippc-Ie-
tn , et son fîlg le duc de Charolais , ayant mani-
lé l'intenlion d'y assister. Les deux princes s'y
Irouvéreiit en eflel accompagnés (l'une suite nom-
breuse. Une triple enceinte fut élevée sur la place
du marché. Dans le parc du milieu, on aTait ré-
pandu une couche épaisse de sable ; c'était 1^ que
les cliumpious devaient se battre. Le second parc
était destiné aux previjt , jurés et échevins et à
plusieurs seigneurs de raartjuc. Le troisième devait
recevoir les chevaliers, écuyers, notables bourgeois
|fk autres jus<[u 'au nombre de trois cents. Les trois
teru de la ville étaient rangés te long des
îcades qui garantissaient rhàtel-de-villc.
y Vers neuf heures du matin , les cliampiuns ap-
parurent dans la bce. Ils avaient les cheveux rasés
et étaient vt'ius de petits pourpoints de basane qui
ir serraient le coqis. Jacolin l'iouvier, appelant,
enlra le premier , accompagné de son bivlon et
d'un autre homme portant son éeu dans ud sac.
En etitranl au parc , il lit plusieurs signes de croix
et alla s'asseoir sur un siège couvert de drap noir
qui lui était préparé. Mahuot Cocquel vint ensuite
accompagné de ta même manière. Etant entré dans
la lice , il se mît k genoux , et fiiisaut le signe de la
croix , baisa la terre ; puis alla en faire autant au\
quatre coins du parc ; après quui il se plar-a comme
24 — HISTOIRE DES DUBL&. —
Jacolin sur son siège de drap noir. Le magistnl
vint alors recevoir le serment des champions.
Jacotin prit le livre des évangiles, le baisa el mettanl
la main dessus , jura que sa querelle était juste.
Mahuot Ct le même devoir , ajoutant que Jacotia
était un faux el vilain menteur; mais voulant baiser
de rechef Tévangile , on le vit changer de couleur
•
et devenir très-pale. Alors on fit oindre leurs habits
de graisse depuis la tète jusqu^aux pieds, afin qu^ib
ne donnassent point de prise et on leur frotta les
mains avec de la cendre pour que le bâton ne glissât
pas dans leurs poings. Ensuite on leur apporta à
manger dans deux tasses d^argent , et afin qu^ib
fussent certains qu^il n^y avait ni poison ni maléficei
on fit devant eux Tcssai de ces alimens. On leur mit
à chacun dans la bouche un morceau de sucre du
même poids, de peur que la chaleur ne leur des*
séchât le gosier. Cela fait, on les arma de bâtons
noueux parfaitement égaux en longueur et en
poids , et de deux écus peints en rouge ; mais ib
devaient les porter la pointe en haut , pour marquer
qu'ils n^étaient pas gens nobles.
Le prévôt de la ville, messire Melchior Du GardiOi
se mit alors à Tentrée du parc, et jetant le gant de
Jacotin , il dit à haute voix et par trois repriseS|
faites 'votre de\^ii\ A ce cri , les chanq>ions mar-
chèrent Tun contre l'autre. Mahuot débuta par
— ciunTBf: \\i.— sa
du uLtlc dans les yeux du Mta udveraairfi ,
le fra{i(»aiit eu même ttmpit ilc son liâltin , îl
fil uiic large pluie ii \a lî-lc. Jurotiii , sans perdre
>nlciioiice , Hc rue ii soit tnur sur Mahuot , lui
Buii éru et le Icrriuisc; MAlutot se relève,
est lerrassé de douvcbu. Jacolîn adiamé alon
sa proie , se mit à lui verser du sable dans les
'jeux , à lui mordre les oreilles, h lui meurtrir
lace i coups de poings. Philippe-!e-Bt>n , qui
a>olcmplait ce hideux spectacle ii travers les ja-
lousies de sa fcndtrc et qui entendait les tamcn-
lables cris de Mahuot Cocquel , en eut pitié. 0
envoya un de ses ofBcicrs demander au magistrat
s'il D'^tait pai possible de recevoir ce malheureux
à merci et de lui donner la vie sauve. Le magistral
fut inflexible , alléguant les privilèges de la ville.
CcpcDdanI Jacolin continuait de torturer son
adversaire. Après lui avoir enlevé plusieurs lam-
beaux de chair avec les dents et les ongles , voyant
que aea hurlcrocns commençaient h attendrir la
llilude , il lui enfonça des poignées de nb\é
is la bouche et lui tourna la face contre terre ;
ce qu'il ne put taire sans perdre un doigt que
Alaliuot lui coupa avec les dents. Celte mutilatiun
augmenta la fureur de Jacotin qui rompît le brus
et l'échiné de son ennemi , en sautant Ji pieds joints
■ur lui et eu lui vriaot : Hends-toi donc, UwOv,
que
^Mull
féant
26 — HISTOIRE DES DUELS. —
meiirdiier, et confesse lefaict; comtois, traitn,
cannois que tu as meurdri mon parattm A quoi
MahuoI répondit enfin : Je le confesse. — PaAt
Jiauty traître, s^écrie JacoUn, afin que F on puisse
t* entendre. — Je loi fait, je V ai fait, dil Mahuot ;
et se tournant vers la maison où était le duc :
O Monseigneur de Bourgogne, je "vous ai si ton
senà en voire guerre de Gand!.,* 6 Monseigneur,
je vous prie merchi, pour Dieu... sauvez-moi k
ofieî Le duc avait le cœur déchiré; il envoya dt
rechef supplier le magistrat d'accorder la vie à cet
homme , ou du moins la sépulture en terre sainte.
U n^ obtint ni Tun ni Tautre , parce qu^il&Jlail,
répondit-on, que la loi s'accomplit en tous points.
Jacotin acheva alors son adversaire en lui assénant
quatre coups de bâton sur la tète , puis le tirant par
les pieds, il le tratna hors du parc. On le croyait
mort ; mais après quelques instans , il reprit ânes
connaissance pour être confessé par un père canne
et pour réciter, dit Simon Leboucq, sa créanes
bien et intelligiblement. Il but ensuite quelques
verres de vin , pardonna sa mort à Jacotin Ploutier
et expira.
Durant ce temps , le magistrat montait en la
chambre du jugement, où il donna sentence contre
le vaincu qui fui condamné à être pendu et étranglé,
comme meurtrier ; ce qui fut aussitôt publié i la
ht-ettiiquc et exécuté pur le bourreau qui traîna
le cadavre sur une claie cl le conduisit au roUeiu;
Jacotin Plauvicr se présenta au magistrat pour
lui demander s'il avait bien fait son devoir. Le
prcAÛt lui répondit qu'oui , qu'il pouvait se retirer
où bon lui semblait et que jamais il ne serait re-
cherché pour ce Tait. En sortant de l'hûtel-de- ville,
il trouva Mathieu Charlon, son breton, qui l'em-
brassa el le conduisit en l'église de Nolre-Dame-Ia-
Grande où ils firent offrande d'un c/timn très-
pesant. Quand il eut accompli ces devoirs religieux,
Jacotin retournai l'hùtel-dc-viUe où il se dépouilla
J^ ses habits de bataille , et reprit ses vétemens
liiuires. Mcssire Sansc de Lalaing l'hébergea
sieurs jours en son hiUcl. Les écus, bâtons et
[es des champions furent placés dans la châ-
le de la maison écheviifale , et depuis , on les
tq>endil derrière le siège du magistrat , dans la
Te du jugement. Enfin, plus lard ils furent
tés dans le local où se donnait la (Question , et où
ion Leboucq déclare les avoir vus de son temps,
fier de La Marche , page de Philippe-lc-Iiun el
uile capitaine des gardes de son lils, Charles-le-
néraire , assistait avec ces deux princes à celte
tmonie dont les principaux détails sont tirés de
JHémoùvs (338).
^C'est il la porte du moyen âge rjue se rencontre
I
28 «^ HISTOIRE mS DUBU. -*
ce hideux combat. Geai un dernier effort, e*ci
presque un fruit posthume de la Barbarie. On w
voyait plus rien de pareil en France depuis lon^
temps , si même il y eut jamais quelque chose qu^sa
puisse y comparer, f^. la note 129.
Vers le milieu du 14.® siècle et le commea^
cément du 16.* , le duel en Belgique , comme ptr*
tout ailleurs , était à son apogée. La cmitagioB
avait gagné toutes les classes y depuis les dw'
pentiers qui se battaient pour la Vierge Marie i
les tailleurs qui s^assommaient en Thonneurdei
privilèges de Yalenciennes, jusqu^aux princes soih
verains qui faisaient entr^eux échanges de carieh
accompagnés de force démentis.
Philippe de Valois avait provoqué Edouard ID
d'Angleterre , qui s^était laissé proclamer roi de
France par le brasseur Artevelle (389) .
En 1402 et 1403, Louis, duc d'Orléans, fli
de Charles V , et Wallerand de Luxend>ourg i
comte de Saint-Pol , faisaient pleuvoir nombre de
défis injurieux sur Henri IV pour son usurpalioa
et sa conduite envers Richard II, leur parent
Apres la bataille d'Azincourt, le comte d'Ar-
magnac et le duc de Bourgogne, Jean-sans-Peur,
voulaient avoir leur revanche en champ clos W
Henri V, qui , prenant au sérieux les courtoisies du
— cnAi-TTiiE XXX.— 2y
flamand envers son bisaïeul Edouard 111, se
it de fait en possession de la couronne de France.
EniJin , un d^bat plus sérieux s'était élevé, en
\JtSt5, entre Philippe-le-Bon , duc de Hourgognc,
te duc llumpbrcy de Gloceslcr, frère de Henri V
règenl d'Angleterre pendant la minorité de son
ï?€u Henri VI.
Jacqueline de Bavière , veuve du Dauphin , fila
I Charles VI, et épouse en secondes noces de
lan de Bourgogne, duc de Brabant, s'était fait
riever par ie duc de Gloceslcr qui l'avait con-
RÏle el épousée en Angleterre. Cetle femme qu'on
Ipelait Madame Jacqueline, était la plus belle ,
plus riche et la plus dissolue princesse de son
Bps. Fitlc unique de Guillaume IV, comte de
iinaut , de Hollande , de Zëlande et de Frise ,
!• avait réuni , par son mariage , toutes les pro-
Bces des Pays-Bas sous un seul gouvernement,
uf le comté de Flandre qui apparlenait au
hc de Bourgogne Philippe-le~Bon , cousin ger-
de son mari. S'ètant dégoûtée de ce dernier,
Re prit pour prétexte qu'étant sa marraine elle
lie pouvait être sa femme légitime. « Elle se croyait,
disait-elle, en péché mortel, el elle tremblait comme
la feuille toutes les fois que le duc de Brabant
rttil dans sa chambre. >> Avec de telles dispo-
'ns elle n'eut pas de peine à se laisser débsu-
1
1
^ HfSTOniB DCS DVtLt; —
cher par le duc de Glocester. Celui-ci la quiia
bientôt après pour une autre, et Madame Jac-
queline sut encore trouyer un quatrième mari.
Le duc de Bourgogne, indigné de Taffront lui
h son cousin Jean de Brabant, envoya un carid
au duc de Glocester pour le forcer à lui rendre
non pas sa femme , mais le Hainaut dont celui-d
a^était emparé et auquel le duc Jean tenait beaucoup
plus. Les deux adversaires s^étaient, à ce sujet,
écrit plusieurs lettres qui sont rapportées en en-
tier dans V Histoire des ducs de Bourgogne, ptr
M. de Barante. ce Avec Paide de Dieu , disait TAii-
glaîs , de Notre-Dame et de Monseigneur Saàlt-
Georges , je vous ferai , par mon corps contre le
vAtre , connaître et confesser que j^ai dit vérité.
Quant au dit de Brabant, si vous osez dire iqu^ilift
meilleur droit que moi , je vous ferai confesser ptr
mon corps contre le vôtre que j^ai le meilleur droit.
J^assigne pour le camp , le jour de la Saint-Georges
prochaine ; s^il plait à Dieu , je serai prêt et n^
manquerai pas. »
Il y a pourtant manqué. Après avoir ainsi prii
jour pour le combat , il était allé faire en Angleterre
ses dernières dispositions. « Le duc de Boui^c^pe,
dit Moustrelet, s^apprétait de son côté. Tout habile
qu^il fôt aux joutes et aux faits d^armes, il selitra
avec ardeur aux exercices de chevalerie. Il manda
— CTIAPlmE TîliX.— 31
\ lui les maîtres les plus fameux ; h peine prenait-il
le temps de s'asseoir pour ses repas. Il avait fait
^labtir une forge dans son château il'Hesdin ; là ,
snuB SCS yeux on fabriquait toutes sortes d'armes et
<le harnais de guerre, magnifiques, commodes et
de résistance. i>
Mais pendant ce temps-là , le duc de Bedfort ,
qui se disait ri'genl de France pour Henri VI ,
Vippliquait h réparer le coup de ifte de son frère.
Il convoque à Paris une assemblée de prélats ,
comtes , barons , docteurs et licenciés en droit civil
et canonique , et leur fait décréter que te cartel
est nul et qu'il n'écket gage.
Le pape Martin V avait , à l'occasion de ce défi ,
adrnsè k l'Empereur et aux Princes chrétiens , une
lettre Irës-pressante qui sans doute ne fut pas étrati-
géte k ce pacifique résultat. On y remarque le»
passages suivans : x Nous avons appris avec douleur
'a convention scélérate qu'ont faite cntr'eux nos
chers fiU , les ducs Philippe de Doiirgogne et Hum-
phrey de Glocesler, d'entrer en champ clos pour se
"Itre en duel , et ce par l'instigation de Satan qui ,
Mn conteiit du sang des peuples cl des princes,
'Wt encore dévorer leurs âmes — Nous vous
puons par les entrailles de la divine miséricorde
•*le sang de N, S. J.-C. , et nous vous défendons
(■^élroîtement d'accorder sur vos terres aucune
I
— fiMToniE DIS mnsiitf.*-
place à aucun de ces ducs pour un ausn chnI
combat. . . Nous irons ordonnons au contraire, pour
riionnenr du nom chrétien , de faire TOtre potrible
afin de les réconcilier, etc. , etc.... » Cette kltrecA
datée de Rome du 29 août 1425. Le St-Péft
écrivit en même temps aux deux champions pour
leur défendre le combat sous peine d^excommniii-
cation (340).
On trouve dans les Anmdes de Flandre de
Buxclinus , d^autres duels du 14.* siècle d^uns
importance plus secondaire. 11 y en eut un, en 1 86fi^
k Cantin, village prés de Douai, entre Gilles de
Corbie et Jean Morel , pour un (ail toulrà-Ul
semblable au duel de Valenciennes, entre Mabuot
et Plouvier. Le sénéchal du Hainaut, le chAteUs
de Lille, le bailli et le prevât de Douai assislaiiait
au combat. On se battit vigoureusement de psrt
et d^autre et on finit ensuite par s^accorder. Le
même auteur rapporte une anecdote oit Ton foi
que la curiosité des habilans de Douai pour co
sortes de 8})ectaclcs, fut cruellement punie. Le jour
de Saint-Jacques, en Tannée 1810, une grande
foule était rassemi)lée sur un pont pour assister à us
duel. Le ponl sY^croula et entraîna dans sa chAle
la plupart des spectateurs.
Un autre combat qui eut lieu à Lille , veis h
mtme époque , eut encore une issue |dus fiinefllC'
— CirApITRE xxt. —
|lon le mi;mp auteur, Simon Rymn acrusait Jean
■lila , nublc Gantois comme lui , d'a\oir révélé
(klibi-ralion ae<.'rélc (ks lïlata de Flandre k
i lie Oand, et d'avoir ainsi causé le meurtre
1 sien oiicic. Jean Falcula fut tué , et personne,
puUi Ruxelinus, ne doula de sa culpabilité. CaUo-
buid. yifinal. Lil. fil et FUI. t)uaci , 1624,
Uonstrelct raconte encnie un Tait ii-pcu-prÉ5
plbloblc. Il s'est passé k Arrns, le 20 juin 1430,
(rc Maillotin de Bours et Hector de Flavy, qui
lit accusé par l'autre d'avoir chcrclié à lui faire
lïller le service du duc de Doiirgognc pour celui
I roi de France. Le duc mil fin au combat,
concilia lui-même les deux champions et leur
fendil toutes voies de fait sur peine de vie (341).
,Ce n'est pas là le seul exemple de la bonne
^nté que montrait le duc de Bourgogne , pour
paiaer , quand il le pouvait, les différens et em-
^lier les duels. Ce prince aurait sans doute jus-
! par cette conduite son surnom de le Son ,
B le traitement cruel que Min ûls fit subir sous
■ ycui , en 1466 , k la ville de DinanI (342).
« Un jour, dit Malliieu de Coucy, que le f^-
oi-te^iu Eberliard de 1^ IMarck , dont les seî-
leuries sont au pajs des Ardenncs et du Luxetn-
lurg , 9G trouvait en discorde avec deux seigneurs
e«)H«.tcs sires de MeidenniT et de Roll , le bon
3
I
34 — RISTÔniE BBS DUELS. —
duc Philippe le requit de demeurer en paix. H
voulut mt^me (ju'il prit pour arbitre le sire de
Hautbourdin, b<Atard de Saint-Pol. Mais, trouvant
qu^on ne lui avait pas fait bonne justice , La Marck
envoya un cartel de défi au bon duc. a II me
semble , disait-il , que mes adversaires sont gran-
dement soutenus contre moi ; je suis un jeune
homme, mais d'Age raisonnable, pau\Te d^argent,
et je n'ai pas assez de puissance pour endurer de
telles perles. Ainsi , je fais savoir k Votre Grâce
que, moi l'.berhard de ï^ Marck, je veux être votre
ennemi , moi , mes serviteurs et les serviteurs de
mes serviteurs, elc »
« Quand ce défi arriva à la cour de Bourgogne
il y excita de grandes risées. Chacun se raillait
d^un si petit seigneur attaquant un prince si puis-
sant , et demandait la commission d^aller le mettre
à la raison. Le duc fit bonne réception au héraut.
Mais à regard de son maître, il fit si bien sans Tallcr
combattre , qu^en peu de temps il se trouva ruiné
tout à plat, et honni pour avoir aussi témérairement
attaqué le puissant duc de Bourgogne (343). »
Les choses n^allaient pas mieux en ce temps-là
dans les provinces du Nord. Diaprés les anciennes
chroniques de la Frise et particulièrement du pays
qu^on appelle les Ommelandes , lorsqu'il survenait
— rntpmiE x\x.~ 35
^tlqiie diff6rem, nolammcnl pour la répudiation
■tfunc fccimc pnr son mnri, ou pour le consulat de
ville de Grnningiic cl du plat pays, lous ceux
^i ctaienl du nnîme sang prennient les armes pour
chef- On citait la famille , ou mi?me la ville
4le Groninguc , h paraître en armes dans un certain
Jour au lieu marijué. Une famille comballait contre
lutre, Cl le vainqueur renversait le chAtcau de
n ennemi. Ces querelles entre familles entières
nient fréquenlea en Allemagne cl s'appelaient
•eeydes (344).
En 1248, selon Basnnge , écrivain protestant,
Guillaume II, comte de Hollande, depuis empereur,
aTKnl été reçu chevalier par le cardinal Capuccio ,
l^al du pape , aurait prêté entre ses mains le scr-
mt de protéger la veuve , les pupilles et les
ihelîns , et de se battre en duel pour la défense
tous les innocens. DUsert. Sût. Chap. XII,
72.
La plus horrible provocation en duel dont l'hiS"
In ancienne et moderne ait fait mention , est celle
'un père k son 61s , dont la cour de Charles-le-
Téméràrc fui témoin en 1469. Plusieurs auteurs
en onl parlé, eutr'autres Pont ub-IIc utérus, I\cr,
Surguiid, Vom Plancher, //wl. du duché de Bourg,
'otuâte^ Essai sur l^s mœurs, et de nos jours
lie Darautc. Mais Pécrivain orij^oal est Philippe
I
1
n
M — HISTOIRE D&S DUSU. <—
de Commîne» , qui tH lui-même cet afireux scan-
dale se passer sous ses yeux.
Vers 1 456 , de grandes divisions avaient écialé
entre Arnold d^Egmont , duc de Gueldre et de
Zutphen , et son jeune fils Adolphe soutenu par les
intrigues de Callierine de Clèves sa mère. Après
une guerre cruelle entre le fils à la tête des gens
de Nimégue et de Venloo , contre son père que
défendaient les habitans de Ruremonde ^ Adolphe
avait reçu comme apanage la ville et seigneurie de
Nimègue. Ne pouvant y vivre en repos ^ il seretirt
h la cour de Bourgogne où il fut fort bien reçu,
et épousa Catherine de Bourbon, belle-aœur de
Charies-le-Téméraire. H partit ensuite pour un pé^
lérinage en Terre-Sainte où il se fit recevoir die»
valier de Saint-Jean-de-Jérusalem. A son retour^
en 1463, il feignit ainsi que sa mère, de se récoiH
cilier avec son père qui le reçut comme TEnfaot
prodigue. On se met en liesse , on immole le Veau
gras. La cour de Gueldre était alors à Grave, ville
du Brabant-HoUandais. Le vieux duc venait de se
retirer pour se mettre au Ut pendant que les diver*
tissemcns continuaient. Le perfide Adolphe s^es-
quive alors du bal. Il conduit une troupe de sicaires
dans la chambre à coucher de son père ; ils entrent
en brisant les portes. Enfans , disait le duc , je siàs
bien vieux pour dimser , laissez'^moi dormir»'^
— CHAPITRE \\%,-~ 87
fous êtes prisonnier, lui crièrent les conjurés en
M précipitant sur lui l'ùpée nue. — N'cit-il rien
arrivé à mon /Us?.... Tel fut son premier molj
^Êftr il l'aimait beaucoup , malgré leurs ciuelle»
llKtcordcB. Au même instant entre celui-ci : JUon
père, rendez'Veus , lui crie-t-il , il faut ifue cela
se fasse ainsi. — fhu: faites -l'ous Ici mon JUs7
fut la Kuie réponse du vieux duc. On le 6t lever,
I le plaça à peine T<^tu sur un ctievaf, et on le
■duiait au i:h&leau de Buren où il Tul jeté dans^
I cachot.
b<I^ duc Arnold passa six années dans cette dure
ton. Le jour cnlrail ii peine dans son donjon ,^
■parfois Ton vil son fds ^ travers les barreaux de
ftluc»nke, menacer son vieux [>tre et vomir cantr©
lui des injures, ainsi qtic l'a représenté un beau
tableau de Kcmbrandt |K-inl d'n|)rcs les cbroaiquei:
lODicmporaincs cl les Iraditiuns du pays.
k Pendant ce temps , ta guerre civile désola la
leldfe. Cliarles-le-Téméraire, tpù favorisait sous
^in beau - frère de sa femme , avait en vain
Ble réeenciher avec son père. EnTm, presaé
r rinctignation de toute la clyétienté, il résolut
de lemiiDCT cette guerre impie. Il commanda au
duc Adoljiltc de tirer son j>ère de prisou et de
r k Doulens. Lii , Cbarlcs fil au fils, de la
1 du père , des pruposilions ftul acceptables. Ou
38 ** UISTOIRE DBS DUELS. —
lui offrit de le faire Maimbourg ou gouverneur da
pays de Gueidre, en ne laissant à son père quels
titre de duc avec le revenu de la ville de Grave
montant à trois mille florins et une pension do
pareille somme. Mais Adolphe rejetait avec hauteur
toutes ces conditions et ne consentait tout au plm
qu'à la pension,
ce Je les vis tous les deux , dit Philippe de Com*
mines , en la chambre du Duc par plusieurs fois,
et en grande assemblée de conseil , où ils plai-*
daient leurs causes , et vis le bon homme vieil
présenter le gage de bataille à son fils. Le duc
de Bourgogne désirait fort les appointer et faT<H
risait le jeune Adolphe. Je fus commis pour porter
parole d'arrangement à ce jeune duc , lequel fit
réponse : qu'il aimeroit mieux avoir jeté son père
la tetc devant dans un puits et de s'être jeté après,
que d'avoir fait cet appoinctement ; qu'il y avoit
quarante-quatre ans que son père étoit duc , et
qu'il étoit bien temps qu'il le fût aussi , mais très*
volontiers il lui làcheroit trois mille florins par
an, par condition qu'il n'enlreroit jamais dans k
duché , et assez d'autres paroles très-mal sages. »
Mémoires de Commines. Tom, XI de la coU* di
Londres 1785, pag. 228.
Pontus-Ucuterus ajoute qu'après avoir proYO»
que son fils au combat singuhcr, le duc Arnold
i^Éolflra qu'il saurait bien trouver un gcnlilhomme
•j;iour lui scr\ir de cliampion , si sa vieillesse et
s tortures de sa longue di!:tentiou Faisaient pa-
lître la lulte trop inf'gale entre suo ûIb et lui.
en fui délibéré par le consi-ll qui reconnut que
lui naturelle ne pouvait permettre un tel combat.
iCharles alors, en vertu des pouvoirs qu'il tenait
llu Pape et de TEmpercur, rcndil une sentence
^iUuu le sens des propositions si Tavurubles qu'.V-
ulpbe avait rejetées.
Le duc de lîourgogne étant ensuite parti pour
iras où il se lit xuivre des dcui princes de GucU
re , Adulplie s'échappa travesti eu moine de
[.-François, et cbercliait ii regagner ses Etals,
irsqu'il Tut arri^të au pont de Namur sur ta Meuse,
L reconnu par l'imprudence qu'il cul de payer
a llorin pour son passage. Il fut conduit au cbf'i-
nxi de Namur , puis ^ Vilvurde ut à (.Jourlraî
Li il resta renferma' jusqu'à le mort du duc de
rgognc au siège de Nancy, eu 1477.
Cdui-ci s'était empressé de mettre de telles cir-
tmslances h profit. Le 7 décembre 1472, il tit
uuscrire au duc Arnold un acte de vente <i ré-
aÈté de tous ses Etats , moyennant 92,000 llorins
l'or du Rliin , avec rétention d'usulruil nu proiit
lu vendeur de la moitié de ses domaines. Trois
Bois après , le duc Ai'uold mourut , dcshérilaul
I
I
40 ^ HISTOIRE DES DUELS. «
son fils et reconnaissiini le duc de Boui^<^e pouf
son unique héritier.
Adolphe fut remis en possession de tes Etats
par Marie de Bourgogne , fille et unique hériliére
de Charles-Ie^Téméraire. Mais ce fils dènalufé n^eq
jouit pas long-temps , il fut tué sous les mun de
Tournai , le 22 juillet 1777, de la main d^un fraiH
çais nommé SauYager, en s^écriant : o QueUre,^
6 Gueldrç! Ce fut> dit Pontut-Heuterua , une juste
punition de Dieu pour le crime qu^il ayail commia
envers son père. Rer^ Bungujutic% lih. V^ Cap* 1%
On croit ii up tel récit , assister à upe révolutidi
de palais Y à Saint-Pétersbourg, aous Pwl I-^', Wk
h Tagonie de la monarchie espagnole, dma li^ TÎUd
de Bayopne, squs Napolépn (345),
Pendant le 16.^ siècle, ta guerre ciTÎle rendil
fréquens les duels dans les Pays - Bas. Mais de
pareils traits étaient absorbés par les acénes do
massacres que multipliait la férocité du duc d^Albe,
Quoique rinsurrection u^ait éclaté qu^en 1566 ^
la haine contre les Espagnols commençait à se pro-;
duirc dans un grand nombre d'occasions. Cest
ainsi qu^en septembre 1556, Richard de Mérode
défia Dom Rodrigue de Benavidèa. Il lui offrit troîa
diiférens camps à la mode d'Italie^ Les armes fu-
rent refuaéçs. Il y çut là -dessus de QQmbrçmie«
B xxit. — 41
CÔniuItations. On prit avis dca docteurs Ilalicna
les pluB renomméi en celle partie, Iclfl qui; Mulio et
^Kzio. La Culomdiéhe. Thépt. ti'hoit, et de chn-(tl,
mtom. H, Chap. II.
^ En 1 574 , au siège de Leyde , il y eut un combat
singulier entre le prince Louis , frère de Guillaume
de Nauau, el le comte de Gonïagtio. Le premier
avait dit que ceux qui obéissaient aux Yéniticna
étaient des poltrona. Voet de duell. , Chap. XIII ^
yag. laO.
" « Au siège de l'Ecluse en 1 491 , on vit ausd
tsietirs escarmouches et combats en duel. Un
î de la ville, armé d'une hallebarde et d'un©
, fut appelé par un soldat d'Autriche, ayant
pe pique , une èpèe et un poignard- L'Autrioliien
ona de sa pique au Iravera du ventre du Suisse,
[uclle entra si avant que cetui-ci ne put a^aider
1 hallebarde , tellement que l'Autrichien le ser-
rant de trop près, le tua de son poignard. " Metere».
fiisl.Selg.Lib. IX, f." 671. La Haye 1618.
wL « Pendant le gouvernement de Dom Junn d'Au-
Btichc, dit Brantôme, deux gentilshommes français,
1è chevalier d'Oraison el le seigneur de Houille ,
le plus renommé tireur d'armes qui Fus! en France,
viurent demander le camp au Prince espagnol
tttre MM. de Busay el de Fcrvacques qui se
mvoiçitl dans le p arli du duc d'Aleuçon frère de
I
m
42 ^ BISTOEBB DBS DIffLS. ~
Henri lU (depuis duc d^ Anjou , que les însuigés
de Brabant avaient mi& à leur tète en 1581). Dom
Juan leur permit librement et avec grande ayse,
pour avoir par là quelque occasion de faire af-
front à Monsieur d\Vlençon ou à ses gentilshommes.
Ce qu^estant venu h la connaissance de celui-cy
il mande à Dom Juan que la partie estoit trop
belle pour permettre qu^elle se figt sans luy etquil
vouloil en estre ; adjoutant que si luy Dom Juan
vouloit venir , il feroil le tiers. Dom Juan qui ne
s'esloit allendu nullement, ny proposé, ny advisé
qu'on en viust là , fui un peu esbahy pour le com-
mencement, voyant une telle conséquence advenir «
Toutefois comme brave , vaillant et généreux , eK-
comme fils de père , accepte le defly. Mais cç^
grands capitaines qui lors estoient prés de luy 9
compassaut bien toutes choses , comnve ils en sootft'
maislrcs , mcsme les soldats espagnols qui com.^ —
mcnraienl à faire rumeur et se mutiner , ne voa-^
lurent jamais permettre que leur général y poi&T
un léger poinrt d^honneur, s'allast ainsy perdre
et tout un Kslat. Parquoy il fust arresté et retenif
par les siens , quchpi^inslance qu'il fist de sortir. »
II parait (pie les chefs espagnols avaient trouvé
cet expédient pour s'aUribuer le mérite du duel
sans en courir les risques; car au Chap. XXXVl
on verra un défi avorter de cette façon , entre le 1;^^
1
1
-CniPlTBE XiX.- 43
■alicr de Vandencsse-La Pnlice el le marquis
de Pescaire , gt-iiëral de Clinrles-Quiiil.
« M. de Sninl-Luf, dit encore uolre Auteur,
cslanl à Anvers dans la chambre de Monsieur le
cnmte d'Alenron , il y eut quelques coups entre
lui et le sieur de Gauville. Le )>riiice d'Orange en
vil le jeu en sorlanl el s'en ealoiina forl , disant que
telles choses ne s'estoieut jamais veucs ny faites,
m la chambre, salle gu logis de l'Ëmperciu: son
naître , qu'autrement il eusl mal baslé pour Id
diliaquants. »
Amelol de La Uoussayc rapporte dans ses Slé'
moins, Tom, I, pog. 50, que cçs quehjiws coups
(tout parle Branli^mc , d'iaient un soitlllet. Saint-Luc
•unit alors répondu au prince d'Orange qu'il ne
lui appartenait pas de le bli'uner en cela , et que
■■ lui Prince avait osé Taire, du vivant de Cliarles-
Quint , ce qu'il avait fait de[)uis , contre le Gis
de ce monarque, celui-ci lui aurait fuit depuis long^
l^pi couper la télé. Œm'ivs dv Urartlôme ,
Tom. XIJ , pag. %il .
Il y avait eu aussi au temps du même empereur
Qiarlea- Quint, un duel prés de Bruxelles, entre
«kus gentilshommes français de la suite du cardinal
lie Lorraine , ambassadeur de Fraw-ois l."'. Ce
Irait , eo raison de la part personnelle qu'y prit
Tempereur, sera rapporté au chapitre suiviint.
44 -^ mSTOlKB DBS OUBLI. —
Le chevalier Bayard défendant Méiières en 18S1,
contre les troupes du même monarque , avait ^ale«
ment autorisé un combat entre Anne de MontmcH
reney et de Lorges, deux de set capitaines, et les
comtes d^Egmont et de Vaudray , seigneurs bel^
du parti des impériaux (84B)-
Du reste , ces sortes de combats entre militaires
de partis différens , participaient moins des duds
que des tournois qui eurent aussi une grande vogue
à la cour des ducs de Bourgogne. Les Aiétt^airei
d^Olivier de La Marche, Tun des sdgneurs de cette
cour , en donnent de longues et nombreuses des*
criptions.
On y admire en première Ngne les prouesses
du sire Jacques de Lallaing , dit le bon chei^aUer, le
plus renommé des poursuivans d^armes de Tépo*
que. Il était né au château de Lallaing , près Douai\
et se fit dés ses premières années remarquer à h
cour du duc de Bourgogne , à Bruxelles , par son
courage et son adresse dans les joutes et tournois.
Il eut Finsigne honneur d^étre choisi pour briser
la première lance avec le comte de Charolaia, fils
de Philippe*le-Bon , dans la joute rapportée au
Tom. I.®' , pag. 58. Il se distingua encore dans
celles d^Arras, en 1430, en présence du duo el
de la duchesse de Bourgogne. Il y avait à ce loumoii
— CUAPITBE XKX.— 45
^^ficf cheralient du parti du roi de France et aulaiU
de cflui du duc de Bourgnguc. Les jointes durèrent
cinq jours. Les sires d'Abrecy el de Meullion Turent
èvement blessés
En 1445, Jacques de Lallaingcomballit ii Gand,
pied el k eheval , le sigiior Jean de Bonifazio ,
lébre jouteur sicilien, avec qui il rompit vingt-
it lances , en présence de Philippe-le-lion et du
d'Orléans. Après ce combat , il se présenta
'ant le duc , son seigneur, et le requit dans la
forme accoutumée de lui donner l'ordre de la che-
valerie, ce qui lui fut ocirojé sur le cliamp. On
,Je vit encore se mesurer à Bruges , avec le même
ppareil , contre un écuyer du pays de Galles ^
leouru pour le combattre, sur la renommée de
■ hauts faits, et qui dut lui céder la victoire.
^£n 1446, il partit pour l'Espagne, où nous le
Irouveronsau chapitre suivant, ainsi qu'en Ecosse
I Chap. XXXUl. A son retour en Flandre, il
■Banda congé an duc , de terminer le cours de
■ aventures chevaleresques , par un paa d'armes
ht Fontaine des Pleurs, près Saint-Laurcnt-lez-
bollon, qu'il s'obligeait de soutenir pendant un
i contre tous les nobles hommes qui s'y préaen-
meiit. Dans cet espace de temps , il rompit bon
tre de lances, et quand le terme fut arrivé,
'f£un>t dans un Teslin tous les chevahers qui
J
avaient (^ombattu (*onlre lui , prit congé d^eux et
alla visiter «'i Rome , les tombeaux des SS. Âpàtres.
Biosçraph . Un ivers •
La cour de Milan n^avait rien en ce temp9*Ià à
envier k celle de Bruxelles. Elle possédait dans la
personne de Galeotto Baltazin, chambellan du dac,
un digne émule de Taventureux Jacques de Lallaing.
Comme il s'en allait de pays en pays chercher lei
faits d'armes et la renommée , il vint à Mons , en
novembre 1445, dans le dessein de passer en Aih
glcterre , s'il ne trouvait point d^adversaires pamd
les Bourguignons. Mais il ne pouvait en manquer.
Le sire de Ternant entr'autres , se présenta et obtint
la permission du duc pour faire une entrepriie
d'armes. Alors il s^attacha au bras gauche , connoe
gage de son emprise, la manchette d'une dame en
belle dentelle , bien brodée , suspendue à un nœud
de perles et de diamans. Son adversaire devait
venir lui signifier son défi , soit en touchant cette
emprise, soit en l'arrachant. Dans ce dernier cas,
c^eiit été la marque d'un combat k outrance qui ne
se serait terminé que par la mort. P^. ci-nlessus
pagr 12Î).
Le signor Galeotto Baltazin parut chez le duc,
où l'attendait le sire de Ternant ; Il s^avanca avec
une profonde révérence vers ce dernier, et lui dit
en portant la main h son bras : Noble chevalier, je
— cHÂpiTHB xmc. — 47
touche le gage de r*otrc emprise , et, au plaisir de
Dieu , f accomplirai ce {/ue vous désirez faire , soit
à pied, soit à chevaL Les conditions de la joule
forent ensuite discutées, écrites et scellées, et le
jour en fut pris pour le mois d'avril de Tannée
suivante , en la ville d'Arras.
L^Italien retourna dans sa patrie pour faire ses
préparatifs. A son retour , la lice fut disposée sur la
grande place d^\rras , et, selon sa coutume , le bon
Philippe ne manqua pas d'y assister. Le sire d'IIu-
mières , en Fabsence du maréchal de Bourgogne ,
parut k la tête des hérauts d'armes. On combattît
d^abord à pied , à la lance , puis à Testoc et è Tépée
et enfin à la hache. On y brisa trois lances et quatre
èpées. Le nombre des coups réglé par la loi du
Imimoi ayant été accompli , le duc jeta son bâton
dans la lice , et mit ainsi fin au combat qui recom-
mença , quelques jours après , à cheval , h la lance
et à Testoc , et se termina de la même manière que
le premier , lorsqu*on se fut rué le nombre de coups
convenus , dont il n'advint aucune blessure , parce
que les armures des champions se trouvèrent d'une
trempe supérieure à la vigueur de leurs bras. Voyex
aussi , dans les Mémoitvs d'Olivier de la Marche ,
la description des joutes de Y Arbre d'or célébrées
à Bruges, en 1466, pour le mariage du comte
de Charolais.
48 -* IIISTOIRC DES DUELS. —
II y avait encore en Flandre , au commencetiietit
du 15.*^ siècle, un célèbre jouteur , devancier du
sire Jacques de Lallaing; mais plus célèbre (Mir ses
fanfaronnades que par ses exploits réels. C^était Jeas
de Vcrcliin , sénéchal du Hainaut. U avait fait pu-
blier et afficlier dans toutes les grandes villes de
TEurope qu^il se battrait à outrance , seul ou lui
sixième avec Tépée y la lance et la hache , ofec
raille (le Dieu, île la Sic» f^ierge, de monseigneur
St.'- Georges et de sa dame.li avait assigné le camp
au village de Conchy, en Flandre. II en indiqua
ensuite un autre au château de Coucy , où il som^
mait tous chevaliers, écuyerS| gentilshommes de
noms et d'armes de se trouver , si bon leur sem-
blait , afin de se battre à lui en présence du duc
d^Orléans. Un Anglais, nommé Jean de Comou-
ailles , chevalier de grand renom et qui avait épousé
la sœur du roi d'Angleterre , se présente pour
répondre au défi. Mais Charles VI ayant entendu
parler de ce combat , voulut qu'il se fit en sa pré-
sence, a Les champions , dit Monstrelet , s'en
furent à Paris devers le roy pour parfaire leur
entrcprinsc. Et après ce qu'ils furent entrés su
camp et curent fait la révérence au roy , ils se pré-
parèrent tous deux pour aller jouster de fer de
lan(îc ; mais devant qu'ils s'esmeussent ii courre fut
«rie, do par le roy, ({ii'ils cessassent et n'allassent
— cnAPITBE Y\\.— 40
t>fiis avant en faisant îccllca armes. roiirlc(|iid en-
ih fiirenl Icins deux fort dcsplaisnits. Et cic rcchicf
Jiitcrii-eId(;ireniUi,dcparleroy,quc nul surpciiic
Pitale dorcsnavanl , en Inut son ruyaume , n'ap-
Al autrui en champ clos sans cause raisonnable.
I^ca champions s'en allèrent ensuite loua deux en
Angleterre, sur inlenlion de poursuivre cl accomplir
Jeun armes. Molstrelet. Citron. tom.I, chnp, 02.
■^Messiro Jean de Vcrcliin s'en fut ensuite au
Bjnume d'Espagne , terre classique de la che-
Iplcrie , faisant annoncer partout qu'il ferait jaâle
pootrc tout venant ii l'aller et nu rcinur , pourvu
quG cela ne le détournât pas de plus de vingt lieues.
Il eut le bonheur de trouver chemin faisant sept
jnûtcs où il se conduisit voillammeiit. Après quoi il
alla ofl'rir un bourdon à monseigneur Saint-Jucquen
tn Galice. « On voit par-là , dit Voltaire , que l'ori-
gnial de Don Quichotte était de Flandre. » Essai
Eflei mœurs, (ont, III, cliap. C.
Obli^ de circonscrire ce sujet dans les limites
m seul chapilrc , j'ai parcouru brièvement ce qui
•« trouve de plus digne d'inlérèt relativement aux
combats singuliers dans l'histoire des Pays-Bas pen-
dant le moyen âge , en y comprenant le 16.' siècle,
<|ui n'en est sous bien des rapports (pic la cunti-
iniiiiinn Voici un ^t du commencrmcul du 17.',
50 — HISTOIRE DBS DUELS. —
auquel la nécessité d^abréger m^oblige de borner kl
citations pour ce cycle particulier.
« En 1600, peu de temps après la prise du fort
Saint-André, en Tile de Bommel , par le prince
Maurice de Nassau , le marquis de Bréauté , capi-
taine d^une compagnie de cavalerie au senrice des
Etats , tenant garnison à Gertruydcmberg , reçut
quelques paroles de mépris d^un nommé Leker-
bitkem , soldat de fortune , lieutenant d^une com-
pagnie de Grodenbonc, gouverneur de Boi&4e-Duc.
Bréauté était un des braves gentilshommes qui fus-
sent en France de sa condition et de son âge ; car il
était encore fort jeune. Mais Fhistoire dit qu'il re-
cherchait les duels , et qu'il avait été obligé pour
ce motif de se retirer de la cour de France. » Fojtz
ci-dessus, pag, 229.
« Comme il aimait donc à se mesurer avec tout
le monde , il envoya un cartel à Lekerbitkem de
cinq contre cinq , dix contre dix , ou vingt contre
vingt. Ce fut cette dernière proposition qu'accepta
le lieutenant de Grodenbonc. Bréauté parvint à
sortir de la place en persuadant au gouverneur
qu'il avait le consentement du prince Maurice i
quoique celui-ci lui eût défendu ce combat, en
lui remontrant la légèreté de sa querelle et Tinè-
galité de la personne. »
Bréauté s'était signalé d'une grande plume blanche
— CHAPITRE XXX.— il
et Lekefbitkcm d^me rouge, ^'oici donc Bréatitè
cpii aflrontc son ennemi , lui donne du pislolet
dedann la visière ^ le tue et enfonce ses gens de telle
furie qu^il en demeura cinq de morts sur la place ,
dont le frère de Lekerbitkem. Mais Brëautè fut mal
assisté de ses amis qui s'enfuirent quasi tous au
deuxième eflbrt , et le laissèrent lui quatrième au
milieu de quinze , tellement qu'il fut pris avec un
sien cousin et deux autres, et conduit à Bois-lc-Duc.
Le gouverneur (irodenbonc étant au-devant de la
porte de la ville en attente du retour de son lieu-
tenant, ne le voyant pas revenir, demanda où il
était. On lui répondit qu'il était mort et son frère
aussi. Hé ! pourquoi na\^ez-a^ous tlonc tué ceux-ci,
dit-ill*... — Paroles aussilût exécutées que pro-
noncées ; car ses gens se jettent tous ensemble sur le
pauvre Bréauté et son cousin , et les massacrèrent
tous deux de sang froid. D^Audiguier. De l'Ane*
Usage des Duels, chap. XX.
Il y aurait ici un coup d^œil assez étendu à jeter
Mir Tancienne législation des combats singuliers
dans les Pays-Bas. Là , comme partout ailleurs , le
droit de les autoriser dérivait de la souveraineté.
Vredius assure qu^on ne pouvait jamais se battre
autrefois sans le congé des comtes de Flandre.
V»ED. Hist. coniii. Fland.
62 ^HISTOIRE DBS DUELS.—
Les labiés de lois du Brabant, dit Voet de Duett,
cap. 28, ne pcntiellaient le combat judiciaire que
sous certaines condilions. Diaprés ces réglemens,
toute injure entre militaires devait être déférée au
jugement des chefs de Farmée et conciliée si faire se
pouvait, f^ojez Tédit de Philippe II, du 22 juin
1 589 , et ceux d'Albert et Isabelle , de février 1610
et 1 1 juillet 1624. Zypœcs. Not. Jur. Belg.
On trouve dans un placard publié à Bruxelles,
le 23 novembre 1667, le préambule suivant: «Le
duel qui a pris naissance aux états voisins , étouflS
Ih , veut repulluler et ficher de nouvelles racines.
Nous aurions crainte d'attirer Tire de Dieu , et de
nous rendre responsables du sang qui s^y prodigue
si brutalement , si nous tolérions de si grands mé-
faits. » Suivent des dispositions qui déclarent les
duellistes coupables de léze-majesté divine et hu*
maine , les tient pour gens infâmes de fait et de
droit , prononce contre eux la confiscation de corps
et de biens , avec protestation de ne faire aucune
grâce.
Un placard du connétable de Castille , capitaine-
général des Pays-Bas, en date du 31 mai 1667|
consacrait une exception en faveur des militaires;
mais ce placard fut révoqué par un autre , donné
à Ypres , le 14 août 1671. Rec. des placards
de Brab.
— CIUPITRE \XN.— 83
Il existe aussi uue loi contre les ducla tlons les.
ConsU't. Ordin. Je Ilolliuule, itu lOmai 1641. F.
(Svi'œus, Not. Jui: Ilflf;.
Vocl, Çuœst. 32, parle d'un Belge qui, ayant
un duel avec un hi^rètiquc puiir cause de religion
Bl Pavait tué , obtint sa grâce de Marie-TWrcse ,
■eioc de I{tingric , et en outre un emploi important.
IjC mi^me auteur cite un autre exemple d'un
Ecossais, nommé Hanceck, également proToqué-
M lue en duel par un soldat flamaad , qui , pour ce-
, fut traduit h un conseil de guerre elarquilté.
reine Marie-Tliérése , dont il *icnt d'Otre parlé,
pourtant l'auteur d'une ordonnance qui cou-
Asmnait celui qui avait donné un soutllct à ca
jieceToir un semblable de la main du bourreau.
Il existe aussi plusieurs oliurtes particulières de
lilippe- Auguste et des eumtcs de Flaudre, qui
fecordent à cerlaises villes le droit de s'exempter
lu duc) judii'iaire. 11 y en a d'Hutres, qui con-
mnenl de trùs-sagcs dispositions sur la réprcssina
» injures et voies de fait, nutiimaicut pour les-
Des d'Ucsdia el d'Arras (347) .
Le duel cesse maintenant d'offrir une pbysio-
Knîe particulière. IL va d'ailleurs devenir rare,
ir suite des défenses si-vèrcs dtint nous venons
b voir qu'il doit ^trc désormais l'objet. On n'en
L
54 «i- HISTOIRE DES DUELS. —
trouvera plus guéres d^exemples chez des persoo*
nages connus. Le Belge prend les lois au sérieux,
et , comme il est essentiellement religieux , il se fait
toujours un devoir de conscience de les observer
à la lettre.
Cest ainsi (}ue le duel s^est assoupi profondément
sous la pacifique et paternelle administration de
r Autriche. Il s'est réveillé quelques instans pendant
la courte guerre civile de 1789 qui fut suscitée
par le xèle religieux contre Tesprit philosophique
de Joseph II , mais dans un esprit diamétralement
opposé à celui qui avait fait courir aux armes,
en 1566, contre le fds de Charles-Quint. Immé-
diatement après , est venue la réunion à la Franoe
pendant la durée de laquelle la Belgique a vu se
confondre avec les nûtres ses institutions, ses
mœurs et sa politique.
Un paroxisme plus remarquable s'est renouvelé
de nos jours après la révolution de 1830. l^
écarts de la presse et de la tribune sont venus,
comme chex nous , attiser le feu des passions el
exploiter cette foule d'intérêts toujours mis enjeu
dans les révolutions. La Belgique a , comme la
France , un duel parlementaire à faire enregistrer
par riiistoire, et ce cas, que je crois unique, a
été bien prés d'avoir un dénouement fatal , comme
celui qui s'est présenté en France Tannée suivante.
— CUAriTRE XXX.— 55
Dans la séance de la Chambre des Rcprùsentans
du 24 juin 1833, des pcrTOHnalitts furent ÉL-liangécs
■entre MM. Rogicr et Gendcbteu. Le 20, un duel
iau pistolet eut lieu ciilr'eux. Places b quarante pas,
ils avaient la faculté d'avancer chacun de diï pas^
H- Rogier lira le premier sans atteindre son advcr-
.jaire- Celui-ci restant k Irciitc-ciriq pas tira à son
< tour. La balle frappa M- Rogier ix la joue droite, fit
.«auler plusieurs dents et s'amortit dans la bouche.
,M> Gendebien vivement afTeclé s'abstint quelque
^mps de paraître à la Chambre et se retira il Mous.
M. Gendcbiea se vit peu après provoqué par
RI oflicier-g^néral français , h l'occasiiui d'uti dis-
^Cuur& où il blAmait le gouvernement de cunller
tk des Étrangers les principaux grades de l'armée^
/Mais l'oruteur de l'opposition repoussa le cartel,
hcD motivant cette fois suu relus siu* T indépendance
h de la tribuiK.
Avant les scènes inouies qui éclatèrent à Paiis^,
> k 22 mai 1835 , à la suite d'une séance de la
, Cliambrc des Députés , et dont le bruit retentît
dans nos provinces au moment même où j'écris,
pOtt pouvait dire que ta tribune française est un
.modèle de décence et de dignité auprès de celle
> de nos voisins. L'exemple suivant , pris parmi plu^
.«icurs autres , pourra donner lise idée du ton
iliabilucl de leurs débals parlementaires.
J
66 —HISTOIRE DES DOELS. —
Dans lu séance du 16 mars 1835, h propos d^iino
pétition contre Tarrestation d^un réfugié polonais,
le chef de la police , un ministre présent à la séance
et plusieurs députés entr^eux , devinrent Tobjet dei
plus grossières invectives. La discussion qui fut
longue roula principalement entre MM. Gendebien,
de Brouckère et Ernst , ministre de la justice. Uq
autre orateur, M. de HoflschHzt, voulut prendra
la parole pour mettre un terme par une motioo
d'ordre à ce scandaleux débat. 11 eut alors tout
le monde sur les bras et devint h son tour Tobjet
des plus vives récriminations. Enfin , on passa k
Tordre du jour. L'impassibilité du président de
la Chambre fut le lendemain hautement blâmée
dans les journaux de Bruxelles.
Des députés , appelés à représenter des principes
et des intérêts , ne devraient pas agir comme si les
passions de leurs conimettans étaient comprises
dans leurs mandats. Au commencement de 1831 )
des scènes d^anarchie , de pillages et de destruction
ont éclaté sur plusieurs points de la Belgique,
notamment aux environs de Mons , à Bruges et à
Ypres. Plus d'un orateur populaire en a parlé à la
tribune d'un ton de faveur qui ressemblait beaucoup
à un encouragement. Sous ce rapport seulement,
on peut compter quelques Mirabeau dans le parle-
ment Belge. Aussi les scènes d'anarchie ont-elles
wcowtmqicé k Bnnellesi en 1884. Dei «ctat et
milence îndiTÎduelle ont aum témoigné de Fezat^
pénition des esprits. Un homme de la classe iiilé«
rieure en a assassiné un autre en sortant du q^iectade,
parce qu^il refusait de se battre en duel.
Cette situation a attiré tout récemment Tattentioa
des pouvoirs législatif et judiciaire. Le 10 décembre
1884, M. de Pelichy, sénateur belge, a interpellé
le ministre de la justice sur les tristes éi^emens
4pti "venaient de porter le deuil dans plusieurs Jik*
milles. Il a demandé qu^il fut présenté, dans le plus
court délai, un projet de loi sur le duel. Le ministre
a répondu : c< Je partage Topinion du préopinani
•ur le duel ; mais une loi nouTclle n^est pas néces*
aaire pour le réprimer. La législation actuelle doit
iiiffire. J'ai déjà donné des ordres pour poursuivre
les duels avec vigueur. Depuis quelque temps , plu--^
sieurs cas se sont présentés en Belgique , et les
tribunaux ont appliqué les lois ordinaires. La cour
de cassation , qui bientôt doit être saisie de cette
question, confirmera, je Tespére, cette jurispru*-
dence« Dans le cas contraire , je m^empresserai de
vous présenter im nouveau projet de loi. sur cette
matièse. y^
Le ministre s'empressa , en effet, de donner par
une circulaire Tordre aux parquets de poursuivre
loua les cas de duel qui viendraient à leur con*
58 -^ HISTOIRE DBS DUBL8. —
naissance. Antérieurement déjà des poursuites sem-
blables avaient eu lieu. En 1833, la courd^appd
de Bruxelles, condamna M. Koelman, d^AnTWS,
à un mois de prison pour avoir blessé son adversaire
en duel. Mais la chambre d'accusation de la même
cour avait rendu le 7 mai 1831 , un arrêt en sens
contraire dans la cause des nommés Jean Overman,
Louis Hughe et Charles-Alfred Abousier. Ce liit
contre cette décision qu'il y eut pourvoi en cassatioD^
dans Fintérét de la loi seulement, de la part du
ministère public. Ce pourvoi n'a été jugé que plus
de trois ans après, par un arrêt du 12 février 1835
qui a cassé celui de la cour de Bruxelles.
Ce monument de jurisprudence n^est pas sans
intérêt pour la France , où la cour de cassation ee
a adopté une toute contraire. Il n'est pas non plus
sans autorité pour nous , puisqu'il a interprété des
lois qui sont encore les mêmes que les nûtres. On
trouvera le texte entier de cet arrêt aux Éclaù^
cisseniens historiques (348).
Va-t-on voir se renouveller en Belgique , ces
conflits de jurisprudence qui , après avoir régné en
France pendant dix ans, ont abouti à une complète
tolérance ? La chose est à craindre , et le conflit
existe même déjà entre la juridiction ordinaire et
les tribunaux militaires. Plusieurs cas de dueb ont
— CHAPITRE \XX.— 59
lé déférés à de« conseils de guerre , qui tous oui
déclaré n'y avoir lieu b leur appliquer aucune
peine. En amIcI uu exemple remarquable parmi
'plusieurs bi lires.
Le capitaine d'arlillerie Pariset avail reprocha
k M. Vaiiderslractcn , l'un de ses lieutenans de ne
■pas le saluer, en ajoutant ç«'iV n'était qu'un enfant.
Olui-ci provoque en duel son capitaine qui refuse.
Un autre capitaine du régiment , M. Eenens , prend
ife fait et cause du lieutenant , et force M. Pariset de
èe battre avec lui en le traitant de lâche. Le rendez.-
'^ous a lieu dans un bois de sapin , sur le champ de
Iwtaille de Waterloo. Les deux adveniaires fout feu
CD mOme temps. Le capitaine Pariset tombe ulteiut
'd'uQ coup mortel. M. Etinens traduit comme meur-
^Irier devant le conseil de guerre de la 3." division,
^Véant h Bruxelles , est acquitté par le motif que le
IDuel n'est puni par aucune loi (349).
' Tout récemment les journaux ont annoncé un
duel qui a eu beu ù Luxembourg, entre tebaroa
• de Tomaco et un capitaine bollandaîs. Ce dernier
^atteint d'une balle k la tOte , est resté sur la place. Il
lest peu probable que ce cas ait donné lieu ii des
'poursuites. Il en est de même de beaucoup d'autres.
'I^and il existe de pareilles incertitudes sur dos
Ipoiuts aussi graves , l'action publrquc n'a plus
'autre guide que le caprice e| l'arbitraire-
CHAPITRE XXXÏ.
Duels en Espagne et en Portugal.
L'histoire politique de l'E^agne étant beau-
coup moins compliquée que celle des Pay8-Ba8,
je n^aurai pas à me livrer à d^aussî longs déte-
loppemens pour en retracer Tanalyse en cotor
menrant ce chapitre. Sagonte , Numance , let
Asturics et Sarragosse , voilà les quatre grandes
époques de Thistoire d^Espagoe , voilà ses titres
à Tad mi ration de rEuro|>e.
Depuis les invasions des Carthaginois et des
Romains , jusqu^à celles des Maures au 8.® siècle,
et des Français sous Napoléon au 19.*, de longues
et cruelles guerres ont désolé PEspagne , et là , plus
encore peut-être que dans le reste de TEurope,
le sang humain a coulé par torrens. Mais FE^iagoe
n'a jamais courbé la télé sous le joug étranger;
elle n'a jamais cessé dV*trc elle-même. Là , deux
colosses, Carlhagc et Rome, se sont heurtés dans
leur course, et ont couvert de débris le théâtre
r
— cnxpiTBE xxsr, — 61
de leur lutte gigantesque. Lh , les pas rapides d'un
conquérant plus liabîle qu'Anniba) , plus ambitieux
fpie C^sar, ont 6tL- enchaînés par un indomptable
rouragc. Annibal cl Sagonte , Scipion et Numance,
Kapolèon et Sarragossc , voilà le plus sublime
exemple et IVHcrnelle leçon îles peuples dont on
«ttiiquc l'indépendance.
La domination des Carthaginois et des Romains
«n Espagne fut toujours incomplète , équivoque et
précaire. Celle des premiers dura environ 366 ans ,
si on la fait remonter jusqu'à l'époque de la des-
truction deTyr parNabuchodonosor, en Tan 567
avant J. C. Celle des seconds s'étendit dcpui»
^l'an 201 avant I. C- , époque où les Carthaginois
Kircnt entièrement chassés par Se ipi on- 1' Africain ,
jusqu'à l'invasion des Gotbs et des Vandales , en
Tan de 3. C. 411.
_ A la domination des Gotha , succéda celle des
^■^Arabes en 713 ; elle fut la plus longue et la plus
^E^tendue. Mais l'Espagne n'a jamais cessé d'exister
^r^DS les montagnes inviolables des Asturies. La
I m^me cause , qui avait placé la Péninsule sous le
B'joug des Maures, devint encore le principe de sa
^t^lélîvrance. Comme l'impudicité du roi Rodéric
F'avait suscité le traître Julien, celle du chef arabe
Mugnusa arma l'héroïque Pelage.
L'empire des Maures en Espagne, n'a cessé en-
62 — HISTOinC DES DUELS.—
liércmcnt après huit siècles de durée , que ptr
la prise de Grenade en 1494, sous le règne de
Ferdinand et Isabelle. Cet événement fut presque
aussi funeste pour ce pays que la découverte du
Nouveau-Monde qui avait eu lieu deux ans aupa^*
rayant. Les Arabes s^étaient fait pardonner leur
domination , par leurs admirables conquêtes dans
tous les arts des peuples civilisés. Leur expulsion
d'Espagne, où ils laissèrent un vide énorme, h
replongea dans la barbarie. Le moyen âge y re-
commença, quand il finissait partout ailleurs. H
répandit sur la Péninsule les ténèbres de son ign(H
rance , pendant qu'il se faisait de nouveau recon-
nattre par ses atrocités en Amérique.
En réunissant à ce tableau celui que présente
TEspagne sous les rois de la maison d'Autriche,
depuis Philippe \,^^ qui monta sur le trône en
1515 , jusqu'à la mort de Charles II , dernier prince
de celle maison en 1700, on trouve .un espace
de 195 ans. En 1700, Philippe V, petit-fib de
Louis XIV , fut proclamé roi d'Espagne , et la
maison de Bourbon a continué de régner jusqti^^
la mort de Ferdinand Vil, en 1829, sauf le temps
écoulé pendant l'invasion française de 1808 à I8U.
Le Portugal , ancienne Lusilanie, a suivi à-peu-
près constamment le sort du reste de la péninsule
Ibérique. Los Lusitaniens, comme les Celtibères,
— oiapithë xxti.— 63
distinguèrent pendant Toccupation Romaine
ir leur insoumission el leur impalience du joug.
Apres avoir é\è occupé par les Suéves et ensuite
par les Maures, ce royaume fut délivré de la domi-
nation de ceux-ci, dés le 12.' siècle, par Henri
de Bourgogne qui en fut le premier roi. 11 con-
tinua d'avoir un gouvernement particulier jusqu'en
1680 , qu'il fut conquis par le duc d'Albc et réuni
k la couronne d'Espagne par Philippe IL U y
demeura jusqu'en 1640, époque de l'expulsion
des Espagnols et de l'avènement de la maison de
firagance.
Les Romains avaient la plus haute idée de la
valeur des peuples de l'Espagne connus d'abord
ious le nom d'Ibéres , du nom d'anciens peuples
de l'ibèrie asiatique qui , selon Varron , Pline et
Joscphe , y avaient établi une colonie. U n'est pour
Ainsi dire pas un seul des historiens de Rome , dont
les ouvrages nous sont restés , qui n'aient parle avec
admiration el même avec une sorte d'effroi , du
caractère indomptable des différentes tribus espa-
gnoles, surtout de celui des Cellibères, peuples
de la Castille et de l'Arragon , des Cantabres qui
occupaient la Biscaye el la Navarre, et des Lusi-
taniens ou Portugais. Les poètes mêmes , tels que
Virgile , Horace , Lucaio et Martial , ont célébré
J
64 — HISTOTRE DES DUBL9. —
leur valeur comme quelque chose de proverbial.
Ou Irouve aussi dans Silius ItalicuB, un morceau
assez curieux sur les mœurs des Cantabres , les
plus féroces et les plus redoutables de toute la na-
tion Ibérique (351).
Florus appelle lesCellibères, la force d* Espagne,
Tite-Live dit que cette contrée était la mieux
opi>ropriée du monde entier pour y refaire une
armée , à cause de la disposition des lieux et du
caractère belliqueux des habitans. On peut con-
sulter Scnécjuc, Diodore de Sicile^ Strabon, Polvbe,
Dion - Cassius , Justin , Ptolémée , Pomponius*
Mêla, etc., (350).
Il existe dans Tite-Live un monument important
de Tétat des mœurs de TEspagne, à Tégard dei
combats singuliers , au temps de Scipion ; c^eat
celui des deux chefs Cellibériens, Orsua et Corbis,
qui vinrent mêler un combat sérieux à un spectacle
de gladiateurs ({ue donnait le général romain. Cette
anecdote est très-curieuse , quoiqu^il ne s^agissepas
d'un duel proprement dit , qui aurait eu pour objet
une querelle privée. Voici la traduction littérale
de ce morceau.
<( Scipion revint à Carthagène, pour y accomplir
le vœu cp^il avait fait aux Dieux de célébrer, par
un combat de i);ludiateurs , la mort de son père et
de sou oncle. Ce ne fut pjis un de ces spectacles où
— fiUTTrniî i\xf. — 05
Tfan ne voit figurer qm; ile« iniiîlrr-* «l'arme», de»
kIbvm nu des nlTriim lus, igni trafiquent de leur
'^vag. n n'y comparut que des hnmmes de bonne
■volnnlé et qui ne mcllaient leurs services k aucun
; car les petits ]irinccs du pays sVmprcsscrcnl
Vy envoyer des <-liBmpioris qui pussent Icsrepré-
lenter dignement et justifier In renommée guerrière
e leurs peuples. D'autres aussi brûlaient de com-
luttre pfiur le bon plaisir de leur général. Il y en
''eut enfui qui se piquèrent d'honneur , tes uns en
Vadrcsssnt des détis , les autres en ne voulant pai
psmtlrc les refuser.
Dcui cousins germains d'une noissnnrc Irés-
îUustrc , nommés CorMs et Orsua , voulurent pro-
itler de cette circonstance pour mettre k la pointe
e leur épée, le droit qu'ils prétendaient tous deus
a gouvernement d'une cité nppcléc Iben . . Scipion
Toulaîlles amener k des explications, calmer leur
' j^greur cl les déterminer k s'en rapporter li l'avis de
'parens communs. Mais ils répondirent qu'ils n'ac-
'Ccptcraicnl jamais, parmi les dieux ni parmi les
hommes, d'autre arbitre que Mars. Corbis avait sur
Orsua la supériorité de l'Age et des forces; l'aulro
ttionimit tonte la présomption de la jeunesse.
Chacun d'eux préférait In mort ii lliumilialion de se
reconnaître pour sujet de son compétiteur. l,a
Holencc de leurs reiwcntîmens ayant fait évanouir
66 —HISTOIRE DES DUELS.—
tout espoir de roiJ<:iliution , leur combat fut pour
rarni^e un spectacle iiioui et en même temps un
nouvel exemple des malheurs que cause parmi les
hommes rambition du pouvoir. Le plus âgé des
comballans , qui avait tout l'avantage de Thabitude
des armes et de l'adresse , triompha facilement de
rinexpérience de son adversaire. » ïit. Liv., /i6.38.
Ce morceau ne laisse rien à désirer , comme
trait de nururs , tant à Tégard des Romains qu^à
regard des lilspagnols. Il pourrait donner à croire
que les Goths et les Vandales n^ont rien appris
de nouveau k ces derniers , lorsqu^au 5.® siècle
ils leur apportèrent avec Thabitude du duel tous
les maux de la barbarie.
Nous passerons sur cette époque qui n^aurait
rien à nous révéler de nouveau ni d^ exceptionnel
aux autres pays de l'Europe, et nous arriverons
aussitôt au huitième siècle , époque de rétablis-
sement des Maures.
Il aurait assurément mieux valu pour TEspagne
et pour le comte Julien lui-même, qu'il eût pro-
voqué en duel le roi goth Rodéric pour avoir dés-
honoré sa iille , au lieu d'introduire les Arabes
dans sa patrie , les Arabes qui payèrent ce service
avec la monnaie dont se payent les trahisons.
Mais on n'en était pas encore au temps des pro*
— rniPtTHTî \\\i. — 67
Il07alcrcs<]ucs. Un si minre év^'oemenl eut
cept'itilnnl jiuur la Péninsule ot pniir une partie
(le l'Europe des (;Qn3L'<[uenre!i incalculables. La
guerre de Troîe, dont la cause fut à-pcu-près la
même , dura dix aos , mais ce fut pendant huit
sicclea que l'Espagne eut ^ subir le joug des Maures.
Grâces aux principes de l'Islamisme , la fusion n'a
|iu s'opérer entre les vainqueurs et les vaincus ,
malgré un aussi long espace de temps. Nous en
avons eu de nos jours un nouvel exemple dans
Grèce.
.Tout ne fut piis dommage , on le sait , pour
|>a^e dana celle longue occiipalîon. Du moins
il bien constant que le remède fut pire que
mal et que la Péninsule , après le départ des
Mittires, ne présenta plus que l'aspect d'un tronc
mutilé et dépouillé de ses plus ngonreux rameaux.
Plusieurs auteurs font aux Arabes Phonneur de
toriginc de la cbevalerie, cl leur atlribuent par
iséquent l'invention des tournois. Il n'est pas de
n sujet de discuter ce point , sur lequel on
LiTcra d'amples éelaircissemcns dans les savantes
lertations de M.M. de La Cume Sainte-Palaye ,
; Mémoires <lc l'Actul. tles Inscriptions. Je re-
rquerai seulcmeut que cette opinion , tndépen-
lenl des autres raisons qui peuvent militer en
bvcur , est devenue trés-probablc depuis lu tra-
68 *- HISTOIRE DES DUELS. -^
duction donnée en anglais, en 1816, et en franeail,
en 1819, du roman arabe iïÀniar, composé par
Asmnï, au serond siècle de Pllégyre, Fan 800 de J.G.
C*C8\ là que se trouve Poriginal des Clorinde et de(
Armide, avec divers autres épisodes et descriptions
de mœurs de la facture Homérique. On trouvera des
frugmcns de ce poème au Cliap. XXXI X ci-après.
Malheureusement il reste peu de documens fais*
toricpjes sur les premiers ugcs du séjour des Maures
en Espagne. Après la prise de Grenade par Goih
%alve de (^ordoue , en 1494, le cardinal Ximenès
donna Tordre de brûler tous les exemplaires de
TAlcoran qu^on pourrait trouver. Les soldats îgno-
rans ou superstitieux prenaient pour TAlcoran loul
ce qui était écrit en Arabe , et jetèrent au feu une
foule d'ouvrages en prose et en vers. On voit que
les Omar n^étaient pas seulement dans les rangs
des sectateurs du Prophète. Quelques manuscrits
seulement ont été sauvés et sont dans la biblio'
thèque de TEscurial , mais ils traitent presque tous
de la grammaire, de Tastrologie et de la tlièologie,
sciences en grand honneur chez les Arabes. Giinif
J^ibL Àrab. Hisp.
c( Une galanterie délicate et recherchée , dit Flo*
rian , rendit les Maures de Grenade fameux dans
toute PEurope, et formait un singulier contraste
avec la férocité naturelle à tous les peuples venus
•itiî xxsr. — 60
iTAfriquc. Ces Musulmans, qui dans les combats
BKrttaivnt leur gloire, leur adresse il couper habile-
ment des tvh^s qu^ils albiclinieut h l'urruii de leur
selle pour les euposcr ensuite sur les portes de
leurs palais , ëkiicot les. amans les |>lus tendres, les
plus soumis, les plus passioiuif-s. Leurs femmes,
mioiqu'à - peu - prés esclaves, devenaieul, lors-
qu'elles ttnient aimées, des souveraines absolues.
CV-lait pour leur plaire qu'ils cherchaient la gloire ,
qu'ils prediguaient leurs trésors , leur vie , et «pi'ils
rivalisaient eotr'eux parla beauté de leurs fi-tcs cl
b hardiesse de leurs esploils. Ce mi-langt: bixarre-
dc douceur et de cruaubé , de dillicatesse et de
barbarie venait-il aux Maures des Espagnols, ou
ecux-^i Tout-ils pris des Maures? je l'ignore. Mail
«M remarquant que ce cnroclérc n'exista jumais en
Asie, iM-ernicrc patrie de ces Arabes, tpi'un le h'ouve
viK'ore muiss es Afrique »ù leur conquête les a
Baluralist-s , j'^si quelque raison de penser qu'ils les
devaient aux espagnols. En elTet, avant l'invaaioiL
des Maure», la cour des rois Goths eu offre déjà
des exemples. Apres celte l'iwquc , bous voyons les,
princes, les chevaliers de Léoa, de Navarre, de
Castille , tous renommés piir leurs amours autant
^iie par leurs exploits. Le soûl nom du Cid rappelle
I fois des idées de tendresse et de courage, u
. PfcLLS hisl. sur les Alauivf,
70 —HISTOIRE DES DUELS. ^
I/auteur de Gonzalve de Conloue a semé dam
ce roman quelques épisodes de duels cheyale*
resques qu^on s^est toujours accordé à ne coiw
sidérer que comme de brillantes fictions , quoique
le récit s^en trouve dans plusieurs historiens espa*
gnols. La Colombiére dans son Thcdtre d'hotmeur
en a aussi décrit plusieurs. Il faut mettre en pre«
mière ligne le combat célèbre de quatre cheYalien
espagnols contre quatre arabes de la tribu des
Zégris , rivaux acharnés de celle des Abencérages.
On sait que ce combat avait pour objet la justifi*
cation de la sultane Zoraîde , accusée par les Zégrii
d'adultère avec T Abencérage Aben-Haraet, Uépoux
outragé fit décapiter ce dernier et exila tous les Aben*
céragcs. La reine avait pour perspective le supplice
du feu , s'il ne se présentait aucun champion pour
établir son innocence en champ clos. Elle aurait
alors écrit une lettre fort touchante à un chevalier
de la cour de Ferdinand , Jean Chacon de Cartha*
gène, qui lui répondit de la façon la plus galante,
et ne manqua pas de se trouver avec trois des siens
au jour et au lieu fixé pour le combat. C'était à
Grenade mcnie , sur la grande place de cette ville,
en face de TAlhambra. Toute la cour arabe y assis-
tait , ainsi que la belle Zoraîde placée sur un échan
faud tendu de noir en face d'un bûcher qui lui était
destiné , selon l'événement du combat.
— ciiAriTBE xx^t, — 71
Les liuil champions pariirenl dans la lice à clie-
il, arm^s de loulcs pièces el précèilts Ul'S juges du
combat. <i Ils commeiicL-rcnt une si turlc bataille,
dît La Colombicre d'après le tcxlc espagnol, qtiBv
ptinnis l'un n'eu avait *u de semblable , co sorte
pie les juges et tous les spectateurs demcuri^reut
bn long-lcmps il pouvoir juger de tjuel cûlii la
Sctoire demeurerait. Mais ciilin , les valeureux
Utevolierschrùlieiis, par rasaistance divine, eurent |
fun nprés raiilre victoire entière sur leurs ennemis,
il les ayant blessas mortellement et fait Iri-bucher
^)a renverse, les ubb^crunl à confesser leur tra-
■on. >. Thidt. ,ll>on., lt,m. Il, c/uif). 32.
Le m^me Auteur décrit ensuite un autre coiubal
|ai eul lieu au siège du Grenade , vers 1491 ,
|Ure le jeune espagnol Gorilace el un Maure de
viHe qui était venu ditier tes Castillans ; eclui-
K fut tué. Le récit de ce duel est eu vers arabes.
pWdinanil ordonna au vainqueur de prendre ,
^tour devise de ses armes, les lettres de i'Jiv Maria.
M. de Ch.'iteaubrinod a insér*, dans \Gi AvcttUues
i dninicr AbeniTiftgK , l'épisode d'un întéressatit
S^bat entre son bèrusAbcn-Hamct, et Don Carlos
iDl celui-ci reclrerchait la sœur en marTagc. La
renité des religions s'npposant à cette union ,
S)spagmil, au lieu d'un liymcn îmftossible , pro-
fi l'Abencèrage une paclic d'épéo. « Mann- ,
73 — HISTOIRE DES DCELS. "*
lui (lit-il , œnoncc à ma sœur ou accepte le combali
rends-moi raison des lamies que tu fais versera
ma famille. — Je le veux bien, répond Aben*
Hamct , mais , né d'une race qui peut-être a com^
battu la tienne, je ne suis pourtant point chô^
valier. — Cest-moi, réplique son adversaire , fuj
t armerai chei'olier ! tu en es digne, n
H Aben-Ilamet fléchit le genou devant Doa
Carlos qui lui donne Taccolade en lui frappant
trois fois Tépaulc du plat de son épèe ; ensuite DoQ
Carlos lui ceint celte même épée que TAbencérago
va peut-être lui plonger dans la poitrine. Tel était
ranticjue honneur, n
c( Tous dcu\ sYlancent sur leurs coursieTS , sor«
tent des murs de Grenade et volent à la fontaino
du Pin. Les duels des Maures et dea Chrétiens
avaient depuis long-temps rendu cette source o6«
Icbre. C^était là que Malique-Alabès s^était battu
contre Ponce de Léon , et que le grand-naaître da
Calatrava avait donné la mort au valeureux Abaya^
dos. On voyait encore les débris des armes de co
chevalier maure suspendus aux branches du PiUi
et Ton apercevait sur Técorce de Parbre quelques
lettres d^une inscription funèbre. Don Carlos
montra du doigt la tombe d^Vbayados à PAben-
céragc. Imite , lui cria-t-il , ce bravée Ififiilèle et
reçoit lo baptême et la mort de ma mainm — La
— chapitbk xkxi.— 73
pr( peut-être, répond Abcn-Ilamct , mais l'itv
ket ta Propfiéle..' u Et il aVlanue aiir son ad-
> avec furie, Ik n'avaient que leurs épËca.
I choc fut terrible ; le castillan est renversé de
nal ; eon adversaire quitte le sien et le combat
continue à pied. Aben-Hamct désarme Don Carloi
qui l'adjure en vain de fe frapper pour ne paa
lui devoir la vie. Le vaincu propose à Lautrec ,
•on second , de continuer le combat ; celui-ci s'en
excuse sur d'anciennes blessures et la courtoise
du chevalier maure. Le combat se termine ainsi,
nais AbcQ-tlamet n'épousa pas la steur de Don
Carlofl.
Cegrand-maîlrede Calatrava, dont il vient dVtra
parte , se nommait D. Kodérie Telles. U s'est rendu
tièbre par ses duels et tournois contre les Mu-
maos. 11 combattit entr'autres le frère b.îtard
iFlAndalle, lUs de MuUiazen , 19.'' roi de Grenade.
L Rodéric avait adressé son cartel au roi lui-même,
t fut k qui des chevaliers maures briguerait
rboDoeur de soutenir ce déû. Le sort en décida ,
cl ce fui U rciue qui tira les noms. Le roi fit au che-
valier castillan une réponse des plus polies. Il assista
au combat avec toutes les dames de sa cour placées
sur les terrasses de l'Alhumbra, et après quelques
blcMure», il réconcilia lui-m^nie les deux chuiu-
pioM 4 les obligea de s'embrusscr.
74 —HISTOIRE DES DUELS.—
L'autre (tombât, qui fut fatal à Abayados, anit
^lù iirovu(in6 par ce dernier qui voulait un dud
h mort et ({ui l'obtint. Le grand - maître donna
son gant pour gage, et l'autre sa bague. Lespor-
niins étaient le maure Alabès et le célèbre jouteur
Ponce de Léon. Ils se battirent en même temps
que leurs tcnans pour terminer un précédent dud
commencé cntr'eux , encore qucn ce temps4hy
dit rhistorien espagnol , les patrains n'eussent
point acvontnmê de se hallrc» Âlabez fut gricrc-
nieut blessé. AI)ayados atteint d'un coup mortel
demanda , avant d'expirer , à se faire chrétien. Le
grnnd-maitrc le baptisa a\ec Tcau de la fontaine
du Pin cl le nomma D. Juan. Ce trait a été célébré
dans plusieurs Iiéroïdes et ballades du temps. Ilist»
des Ghci\ ei\'. de Gnmade.
Un autre seigneur espagnol , D. ZînofTre de
Arria , fils d'un comte de Barcelonne , fut provoqué
par un Arabe du nom de Balzaro qui succomba.
Le comlc de Galera, grand-maréchal d'Espagne,
appela en duel D. Alphonse d'Aguilar qui avait
été chargé de Tarrcter. Mais le roi leur ayant fait
défense très-ei presse de passer outre , Gakra se
retira h la (!our du Sultan de Grenade qui permit le
combat. 1). Alphonse appelé de nouveau fut dé-
faillant au jour in(li({ué. Son adversaire en ayant
pris acte , (it attacher le portrait de celui-ci à la
THE X\XI. -
! de son cheval et le Iruina
I ville. TuBQUET, Hhi. irF.xp.,li\
i cics chefs Espagnols qui
75
ninsi aulnur ttc
. XXT, p. 2S0.
se disUngua le
pilus penilnnl la longue lutte de la Pt-ninaule contre
I Maures fut le Ciil, le héros de l'Espagne. U
conquit sur eux le royaume de Valence en leur
faisant la guerre pour son propre compte, et s'élaut
I tiabli dans cette ville , il y mourut la dernière
mée du onzième siècle.
Son histoire si populaire parmi les Espagnols
s offre deux exemples remarquables , l'un d'un
tuel proprement dit , l'autre d'un combat judi-
Ktiaire. Le duel et le mariage du héros rastillan
VBTec dona Ximena ont ètè immortalisés par l'un
\4hes chefs-d'œuvre de Corneille. Ce sujet avait déjà
été transporté sur le théâtre Espagnol par deux au-
teurs , DIamantc et Guitain de Castro , qui l'avaient
emprunté k Mariana. Vuici le récit de l'historien.
« Don Rodrigue Diaz de Bivar , surnommé
le Cid, nom arabe qui signifie Seigneur, avait de-
puis peu tué en duel le comte de Gormas en lui
passant son épée au travers du corps. Chimène,
fille du mort , fit tous ses elTorts auprès du roi
Ferdinand II, pour l'obhger h punir Rodrigue selon
rigueur des lois, quoiqu'elle fut touchée de son
iaérite et qu'elle l'aimât. Le roi , pour la contenter
t quelque manière , lui permit de clioisir ua
76 — HISTOIRE DBS DUBL8. —
champion , selon la coutume usitée en ce tentps4à^
à condition cju^cUc épouserait celui qui aoftirui
Yaînqueur de ce confiât singulier. »
Dans le texte de Mariana Ghinièiie demaDda
au roi qu^il fit punir le Cid suivant les lois ou qu^il
le lui donriât pour époux, ce Ella misma requirio
al Rey que se le diesse por marido, oie casbgaas
conforme a las leyes , por la muerte que die a su
padrc.» Maruna. Hist. de JEspàna, L* If^,^, C. 5.*
Li^historicn ne fait pas cennaitre le sujet du dud
entre le Cid et le comte de Gorma»; mais dan»
tes deux tragédies espagn€>lcs, connue dans la pièce
française , c^est un soufilet donné par ce dcraier
au père du Qd. Celui-ci , pour se justifier de et
meurtre , dut s^cxposcr par Tordre du reî à en
commettre un second. Mais: cette feia du moins
îl u^cut pas la main aussi malheureuse ; il réussit
à désarmer Don Sanclie , chanson de C^Mméae,
dont la main, selon la condition du combat, de«
vint le prix de sa victoire.
Or voit i>ar cet exemple que le duel, au cmdém»
siéi'.le , était déjà défendu )>ar les lois de TEspagne,
puis({uc Cliimèue en invoquait la rigueur ccMitre le
meurtrier de si)u )>ère. Il en était ainsi pour les
duels entrepris satis le congé du Pruice, de même
qu^cn France où les rois, au 15.* et 16.* siècles i
se réservaient le droit de les autoriser cemme un
|rauv<
— CHAPITRE XIÎXI. — 77
I plus beaux allribuls de leur couronne. On
1 ciïet dans la vie du Cid , plusieurs duels
î onl les caractères de combals judiciaires. Liii-
i soulînt un de ce genre pour décider
I la possession du dumainc de Talahora , entre
irdiiiand II c) Ramire , roi d'Aragon ; le Gid
i son adversaire.
Plus lard , deux jeunes seigneurs qui avaient
iDusé deux Clles du Cid , Klvire et Sola , con-
rent une haine furieuse contre leur beau-père,
li les avait raillts de leur poltronnerie en diverses
sessions. Chose étrange ! ils s'avisèrent de s'en
ngcr sur leurs propres femmes (ju'ils dépouil-
mt toutes nues et déchirèrent Ix coups de fouet,
I abandonnant en cet état dans un lieu écarlè.
' En réparation de l'affront fait au Cid et à ses
les deux gendres et l'un de leurs oncles
Mnphce de leur barbarie , furent condamnés par
t roi Alphonse VI à se battre en duel contre (rois
ipitaines du Cid, qui se présentèrent pour sou-
air ta querelle et l'honneur des dames. L'oncle
1 les gendres s'enfuirent li'ichement pour éviter
t combat ; mais le roi les força de s'y soumettre ,
l' tous trois furent tués. Celte fois du moins la
wace tourna bien, et le ginive des duellistes subs-
tué h celui de la justice, ne s'égara point.
, Le plus bizarre de tous les duels que l'on ron-
78 — HISTOIRE DBS DUELS. —
fitiissc fii( ordonné au XI. ^ siècle par Alphonse I/^
roi (le Castillc y h propos du choix d^un bréviaire.
Celui dont on sVtail toujours seryi dans les églises
d'Espagne s'appelait Muzarabique, du nom de Mu-
zarabes qu'on donnait aux indigènes qui s^ètaienl
soumis aux Maures sans renoncer toutefois au culte
chrétien. Le Pape soutenu par le Roi, -voulut y
substituer le bréviaire romain. Mais le peuple et
le clergé de Tolède tenaient à Tancienne liturgie.
La noblesse vint proposer de dénouer ce nouveau
nœud gordien par ses procédés ordinaires , c'est-
à-dire par le duel. Cet expédient s^étant trouvé
du goût du roi , deux champions armés de toutes
pièces entrèrent en lice. Celui de la liturgie mu*
zarabiquc , Jean Ruys de Matanca , eut le dessus.
Le roi néanmoins ne se tint pas pour battu. La
reine et farchevc que de Tolède ayant sollicité une
seconde épreuve , elle fut ordonnée , quoique
diaprés la loi celle du combat fut réputée en der-
nier ressort. On jeta au feu un exemplaire de cha-
que liturgie, et les flammes d'accord avec les armes
auraient, dit-on, dévoré le bréviaire romain, tandis
que Taulre en serait sorti aussi intact que Daniel
de la fournaise. Iioduig. de Tolède. liist. iVEsp»,
li\'. 6, c/uip. 26.
Un seigneur castillan , D. Rodrigue d'Avila , fut
accusé de félonie près du même prince , pour avoir
'. xx\i. — /y
j«lé sur son bouclier les armes de Portugal ,
Boic]u'il fiM vassal du roi de Casiillu. L'accusateur
^it de prouver son dire par témoins ou par le
■nbat, à la vnloiilé du Prince. D. Rodrigue de son
lié, accusa l'autre de conspiration contre le roi et
^t aussi la preuve par le duel. Après beaucoup
silation, Alphonse autorisa le combat qui se
feu sa présence et qui dura trois jours avec un
il acliamcment des deux côl^s. Comme il n'y
k aucun avantage marqué de part ni d'autre, il
renvoya absous les dcus champions , prenant celle
indécision de la fortune pour un double cerliCcat
d'ianocence en leur faveur. Pieuhe Messie apuit
t de duell. c. G, p. G6.
1 onûéme siècle , Major Munia , femme de
|lche m , roi de Navarre , ayant été accusée
dultérc, ce fut, selon la coutume du temps, un
I de duel. D. Bamire , fils naturel du roi , s'offrit
r champion; mais le combat n'eut pas lieu.
1 1266, UD chevalier nommé Lizana, offensé
r le roi d'Aragon Jacques 1.", eut la témérité
l'appeler en duel. Le prince assiège le che-
' dans son château et le fait périr avec sa
, Sec. d'anectl. c\p.
1358, Pierre IV, dit le Cérémonieux, roi
ragOQ, eovoie un cartel Ji Pierre-le-Cruel, roi
uCastille. Il en donnait pour motif la nécessité
80 — ^ niSTOIRB DES DUCLS. ^
dV*pargncr le sang espagnol , et offrait le dioii
cVun comI)at h outrance , soit de seul à seul , soit
de dix contre dix, de vingt contre vingt, ou de
cent contre cent. Le roi de Castille tourna le caitd
en plaisanterie.
En 1376, le même roi d^Aragon reprochait à
celui de Castille, Henri H dit de Transtamare,
d'avoir suscité la guerre du roi de Majorque. Un
chevalier Aragonais se présenta pour soutenir ce
dire par le combat contre un chevalier Castilhn.
Mais le champion d^ Aragon , désavoué par un ca*
price de son maître , fut obligé de retirer son défi.
Cet Henri II avait délrôné Pierre-le-Cruel , «m
frère naturel. Il le poignarda de sa main au mo-
ment où conduit dans sa tente après sa débite ,
Pierre s'élançait sur lui pour l'étrangler. En Espa-
gne , comme partout ailleurs , dans ces Ages de
barbarie , l'humanité n'était plus qu'un vain mot.
Les souverains de ce pays étaient également pos-
sédés de la fureur des tournois. Le 9 octobre 1S90)
Jean l.""^, roi de Castille, voulut faire parade
d'adresse et de bonne mine à un de ces jeux que
les Maures célébraient à Alcala ; il y mourut dHine
chute de cheval.
I-es joules pour lesquelles les seigneurs Espa-
gnols semblaient montrer le plus de prédilectioD,
— rnMrrnE xxxi. — 8t
raient poiirlaiit rien de bien noble on elles-
Doa; clic» consifltaicnt h se battre Ji coups de
iaiiï ou de b'ilons lil'gers qu'on se lançait en
ic de javelots. Cela s'appelait : Jeu ite cannes.
On voyait aussi assez fréquemment k celle épo-
e , figurer des seigneurs Portugais aux joutes et
tniois qui se faisaient dans les cours Olrangères.
t 1414, trois chevaliers de ce paya vinrent k la
iir de France , sous Cbarles VI , se battre avec
lis gentilshommes gascons , pour l'amour des
tmes.
'£n ce m^me temps, il y eut une autre joAte en
éseiice du mt^me prince , entre un antre Portugais
;GuUlaumc de La Haye, chevalier breton.
iSelon I.a Colombiére, les pères du concile de
le se seraient , en 1432 , dooni: la récréation
Bsister h un duel k ouirnncc entre le Portugais
ftn de Merle et Henri de Rnmestan , cbevaUer
urgilignon. Le combat se fit h pied et le Por-
|aia fiil vainqueur. La Colombière a emprunté
trnil fort peu vraisemblable, en ce qui concerne
I pères du concile de lîâle, à la grande Histoire
'^.tjpagne de Turquel de Mayerne qui était pro-
Rant comme lui.
L.e m^mc Jean de Merle s^étaif peu auparavant
esuré^ ebeval avec un égal bonheur, en la ville
rrna, contre Pii-rre de Beaufremont, seigneur
82 — HISTOIRE DES DUELS. —
de Chariiy, en présence du duc de Bourgogne,
Philippe-le-Uon. Thcâl.dhon., (ont* II, du 16,
pag. 266.
Vers le déclin du moyen Age , l'Espagne sous le
rapport de Tordre intérieur et de la police présentait
^i-{)cu-près le inéine aspect que la France sous
Jlenri II. Voici le tableau qu^en a tracé Robertson,
dans son Histoire de Charles- Quint.
<( En Castille, la funeste pratique des guerres
privées était autorisée par les coutumes et les lois
du royaume. » Lcg. Taur., til» 16, cum cominenL
jinLon. Gomezii, /;• 551 •
<( Dans le royaume dMiragon , la loi autorisa égt*
lement le droit de vengeance personnelle. Hyero^.
Blanca, de reb. Àrag. apud Sehott, "voL III, p. 733«
Il existe encore des actes de confédération entre les
rois d'Espagne et leur noblesse , pour rétablir la
paix en vertu de la Trêve de Dieu. »
c( En Tannée 1165, on vit le roi et la cour
d'Aragon se réunir pour abolir le droit de guerres
privées. Zurita, Annal, del Arag», %^oL I, p.li*
Mais le mal avait jeté de si profondes racines que
Charles-Quint, en 1510, se vit encore obligé de
publier une loi contre cet usage. » Fueros ed obser-
Qjantias , lib. 9, p, 183. B.
Les ravages continuels des Maures, dit encore
— CHAPITRE XHXf. — 83
i>l>erlson, le fKTiuil de iIisL'i|i1iiic deslroiipes, les
^visions meurtrières qui se rennurelaicnl sans cesse
(pire le prince et les nnbîea , et la fureur bdcc
iquellc les barous se faisaient la guerre , rcm-
p^ssaieitt de troubles et de confusion toutes les
'provinces d'Espague. Les dcs(Tiplions que doub
donnent les libtoriens espagnols de ecs anciennes
mœurs, épouvantent l'imaginulion et lui présentent
idée d'une société peu diHÏTeule de eet étal de
[puble el de confusion qu'on a appelé l'étal de
ure. Ces désordres devinrent si communs qu'il
Ittail Ji peine (]uelque communicnlion ouverte et
llkre d'un lieu k un autre. Ainsi la sôrcté el la pro-
iclion que les liommes ont clicretié surtout à se
rurer en formant des sociélés, furent presque
«Dties. ZvKvik, i4rinnl.,elc., lom. f, pag. 175,
■ Tant que les inslilulions féodales subsistèrent,
ne portait aucune alteotion au maintien de
xerdre et de la polii:e , el il n'y avait que faiblesse
Pvl négligence dang l'administra lion de la justice.
lies babitans des villes, dans l'intérêt de leur propre
OonserTation , cliercliérent un remède eslraordi-
Itttire à cet élal d'anardiie dont ils étaient les pria-
^nipaleA Tictimes, Dès l'an 1260, ils avaient formé
^FtD Angon, puis eu Castille , des associations qu'on
appela la Sainte Confrérie, Sania Hermaiultula,
AisvEOO, Connu, in lieg. fiisp. corisiû., p,230,
1012.
84 — mSTOIRE DBS DUELS.—
Ces associations instituèrent des juridictions ci
établirent des compagnies dMiommes armés quW
appela les archers de la Sainte -Hennandad, et
qui sont encore aujourdlnii la gendarmerie de
l'&pagne. Sans aucun égard pour les justices sei-
gneunales , on traduisait à ces nouveaux tribunaui
tons ceux qui violaient la paix publique. La tran-
quillité commença bientôt à renaître. Les nobki
seuls murmurèrent de cette innovation comme
d^une usurpation de leurs privilèges. Us résistèrent,
menacèrent les rois de refus d^impôts. Mais réta-
blissement se consolida peu-à-peu , et il devinl
déHnitif sous Ferdinand -le -Catholique , dont h
politique porta le dernier coup ë la juridiction
féodale des barons , qui n'était pas moins incom-
patible avec Taulorité du prince qu^avec Tordre
et rharmonie de la société, ânt. Nebriss. , m.
Hispan. ap, Schott. , tom. II ^ P^S* 849.
Ferdinand V fut le François I.«' de TEspagne,
moins la légèreté de caractère , les inconséquences
et les boutades chevaleresques du prince français.
Il prépara le beau siècle de Charles-Quint qui loi
succéda en 1516. Malheureusement le despotisme
superstitieux de PhiUppe 11 et la faiblesse toujours
croissante de ses successeurs, arrêtèrent ce progrés,
et conduisirent insensiblement TEspagne & cet
état de faiblesse et d'atonie où nous la voyons
aujourd'hui.
¥
T£XS1.— 85
La clieraleric 6lail arrivée h son apogl^e an com-
tnenccment du 16.' siècle. Des sommcU les plus
élvT^ (le l'aristocralic féudale , elle était , comme
le duel de nos jours, descendue dans les classes
inréricures et devenue littéralement populaire. Des
nuées de Dom Quichotte , dent le iHim seul est
d'inTeulîun , peuplaient les roules et les auberges.
La Smiitc-Hcnnamlad avait élé la Tiwe de Dieu
de PEsitagoe. Ce fut le présenatiC des crimes ,
comme le roman de Cervantes devint l'antidote
Folies du temps. L^ine uonlint les liandils,
Vitre lit rentrer eu eux-mêmes les extravngans.
La vie de Cita rie s- Quint , qui naquit la première
année du 16." siècle , en comprend toute la pre-
mière période ; ce ne Tut que dans la seconde que
Cervantes prit la plume. L'effet de son livre fut
>)tleclrîque, parce que la plus ingénieuse irome en
bit la bitse , et qu'il n'est pas de plus puissant cor-
rectif des abus que le ridicule. Ce fut, comme on
le Mil , une satyre dirigée contre le duc de Lerme ,
principal ministre de Pliilippe lll, fort cnticbé de
die^'aterie , comme tout le reste de la natimi. Celt«
faisait aussi tourner la tète aux souveraine
qui furent pcul-ctre les derniers h, s'en désabuser.
Cbarlcs-Quiut avait trop de bon gens et de poli-
ipie pour aimer à se donner des airs de capitan.
uc {lut éviter toutefois de pa) cr «ou tiibul à la
86 — HISTOIRE DES DUELS. ^-
raode , lors du cartel de Franrois 1.''. Il eut le lort
grave <le prendre assez au sérieux ce défi, pour
perdre en ambassades et en protocoles un temps
qu^il savait d'ordinaire beaucoup mieux employer.
Il fut plus avisé à propos d'un autre défi qu'il
avait reçu en 1521 , à la diète de Worms, de Robert
deLaMarok, duc de Bouillon, qu'on appelait le
SangltW (1rs A ni en nés y digne homonyme de cet
EbeHiarl de La Marck que nous avons vu au cha-
pitre pré(*t'dcnt, s'escrimer si bien en paroles contre
le duc de Bourgogne , Philippe-le-Bon. Ce défi
était une inspiration de Franrois I.*"^ , qui avait été
jusqu'à lui promettre de lui servir de second.
Larrey, Hisi, (PAngL, t. I^p. 148, Rotierd. 1697.
Poutus-Heutcrus raconte dans les plus minutieux
détails , riiistoire d'un combat célèbre qui se fit à
Valladolid , en 1522 , sous les yeux mêmes de
Charles- Quint. Deux jeunes seigneurs de Sarra-
gosse, Pierre TorelHus et Jérôme Anca, avaient
eu ime querelle au jeu pour laquelle ils s'étaient
battus en duel sans témoins, neniine conscio, To-
rellius désarma son adversaire qui consentit à rece-
voir la vie du vainqueur , à la condition expresse
que cela demeurerait entr'eux un secret inviolable.
Néanmoins il en transpira quelque chose , et To-
rellius irrité des malins discours dont il était devenu
l'objet , s'en prit à Anca qu'il accusa dejbiinentie
— CHAPITHE XXXI.— 87
*l provoipin malgré ses dénùgatîwns i un nouveau
combat sin^iUcr. Comme ils voulurent se ballre
cette fuis dans toutes les régies , ils présL'nlèrent
■^quitte à l'empereur pour le supplier do leur
leuorder le camp , selon ce <|ui ùtail usité aus:
koyaumeade Casiille et d'Aragon. Ce prince les ren-
voya au connétable de Castille qui avait ces sortes
PsITaiTes dans ses altribuIJons. Celui-ci fil beaucoup
felTorts pour réconcilier ces deux ennemis; mais
1 n'y gagna rien. Et , comme selon In loi il ne pim-
lîl éviter de leur accorder le combat , il assigna
camp sur la place du Valladolid pour le !£,9
lèccmbrc de l'année 152iiî.
t La lice fut disposée , comme il ^tnit d'usage à
pUe époque, et la description du cérémonial et
fe préliminaires observis, absorbe plus de deux
loones in-folio, dans le rtcil de Ponlus-llcuterus.
li^enipcrcur présidait eu personne ii cette eért-
■onie à laquelle assista en grand curtêge i'élile de
I uoblesso espagnole. Le combat fui des plus
Aamés ; après avoir inutilement croi»é le fer , les
kampions en vinrent it lutter corps à corps. Mais
fcnipereur les sépara en jetant dans la lice son
huii de commandement. Il leur adressa alors un
iicours pour les exliorler à vivre enlr'eus en
leilleurc iolelligenee et ix réserver leur sang pour
bmbnttre les eunemis du nom ebrètien. Mais il
88 "* IIISTOIRE DES DUEL8« **
nVn put rien obtenir. Il ordonna qu^on les rdinl
en prison jusqu^k parfaite réconcilialion ; ce qui ne
réussit pas mieux , car ils conservèrent jusqu^à la
mort leur implacable resscntiment.PoNTCs-HsoTEaus,
Jlcn Austruic, lib. FIJI, cap, 17, p. 205.
Il a été fait mention au chapitre précédent d'un
duel entre deux gentilshommes français attachés
à l'ambassade du cardinal de Lorraine, lorsque
la cour impériale se trouvait k Bruxelles. « L'un
des comballans, selon le récit de Brantôme, avaï
usé d'une grande courtoisie envers son ennemi qui
se trouvait assez grièvement blessé. Il Tavait cliargé
sur son cheval et ramené en croupe derrière lui
chez un barbier , Tayant fait fort curieusement
panser , dont il se guérit. »
(( L'empereur , ajoute Brantôme , en sceut le
combat et le trait , voulut voir ledit Sourdeval
qu'il loua devant tout le monde en sa salle , pour
sa valeur , sa courtoisie et sa gentillesse , et lui
fit présent d'une belle chaisne d'or, n
Il serait difllcile de trouver quelque chose à
reprendre dans toute celte conduite de Charles-
Quint. Il cédait aux lois et aux mœurs du temps f
mais ce n'était pas d'aussi bon cœur que son rival
François I.♦'^ F. tom. /, pag, 53,
La réputation du roi de France était en ce genre
ri bien établie que les amateurs de duela accou-
raient li sa cour de toutes les parties de l'Europe
puur lui en donner le spedaelv. C'cal ainsi que
pendant l'avanl-deniicre nnnée de son règne, en
J446, deux espagnols vinrent se ballre sous ses
yeux k Fontainebleau.
L'iiisloire de ee doel est rapport àc avec beaucoup
to détails dans un manuscrit <|ui se trouve aux
rliives de l'ancienne Chambre des coinples k Lille.
ÎB ne connais que d'Audiguier qtiî en ait parlé,
supposant par erreur que les deux combattans
lùcnt Italiens. Comme ce duel est le plus exlraor-
naire de tous ceux que François [."' prenait laut
B plaisir à présider, je donnerai quelque étendue
celte citation qui ne peut manquer de paraître
Tt curieuse. Le récit du manuscrit commence par
protocole suivant.
« Dès le matin sera crjt pnr le héraull estant
IDS le camp, comme le Roy a accordé cejour-
lluy quinzième jour de juillet 1546 k Julian Bo-
léro assaillant, et Antonio More delTendant , le
unp en ce présent lieu seur et libre k toute oui-
•nce , pour mettre fia au différent et querelle
donneur d'entre eulx , et est dclTcndu h toute
rsonne de quelque estât , quablé ou grandeur
i^elle soit, d'empcst'lier de fuict ny de pnrolle
diet combat, ne donner aulcun desluurbîer en
iOllQ affaire en quelque manière que ce suit. »
00 — HISTOIRE DRS DOELS. —
<( Après la dicte cryéc qui sera faicte à llieure
un jKu devant que les dicts combatlans entrent
dedans le camp , Tassaillant premier, accompaigaé
de 9on parrain et aultres de sa compaignye, après
avoir honorù le dict camp en la manière accous-
tum6e qui est de faire un j tour par dehors d^icelluy
avec sons de tambourins, phiffres et trompettes,
entrera en son pavillon , et le dict deflendant aussy
en son pavillon , et s'accorderont des armes def-
fensives. Après entreront au dict camp et iront faire
les sermons accoutumis. ...» Suivent les formules
des deux sermens.
« Kl (*ela fai(*t , sera cryé par le Hérault , lorsciuo
les dicts combattans seront tous au lieu dont ib
seront partiz pour faire les dicts scrmens il liaulle
voix et cry publicq , et après que les trompettes
auront sonné, que chacun ait à faire silence, et
que tantosl cjue les dicts combattans seront entrés
au combat , aulcun n'ait à tusser , cracher , parler,
ne faire signe de pied ny de main ou de Foeil qui
puisse nuyre ou prèjadicier à Pung ny à Paultre
des dicts «'ombatlaiis , et ce sur payne de vye. »
u Kl la dicte crvce faicte, sera le dict hérault
adverti par M.*' le Mareschal, deslors que les dicts
combattans seront prcslz de combatre, pour crycr
à haulte voîx : Laissez aller les bons combattans, »
u Après le quel combat faict , sera le vainqueur
— CHAPITRE XXTf.— 01
en grand trîumplie it sim loclgis arrom-
palgné des lif-rnuls d'nrmcs dn Roy les (picla ne
veulent point assister h aller «[utrir les diels com-
iHans ne les melire an dîct f^iimp, piiurcetjue
dcsploy de leurs l'olles d'anncs sera réservé à
illuy qui sera vainqueur. »
L'auteur de la relation raconte ensuite comme
loi le combat avait i.lé remis du 8 au lôjuillcl,
la demande expresse du roi d'Angleterre ,
Henri VIII, qui a ceste fin escrypi-it nu Itoy, pour
donner le temps ii l'un de ses sujets milurd Gauivet
d'y assister comme parrain de Julian de Romero.
Puis Tient l'énum^ralion des grands personnages
qui parurent i la cérémonie pour y remplir les
principaux rôles , tels que MM- de Guise , de
, de Tlieei, de Nevers, de Laval, d'Au-
lie , La Tremoille , etc. , avec une longue et mi-
nutieuse description de leurs insignes , costumes
cl flcroutremcns. Il n'y eut pas jusqu'au Daupliia
qui ne vînt prendre place à côté de son père pour
jouir du spectacle de ces jeux cruels dont il sci-a
bientôt lui-mi-me la victime.
« Environ une heure après le midi , le Roy
comparut avec le Oatilpliin et plus de quatre cent
^danacs sur un eschautraul, lequel avuit été dressé
r voir iceluy combat. El Ton mena par devers
les combatans pour faire les scrmeus en sca
pnnci
MBrissai
02 — niSTOIBE DES DUELS. — *
mains. El tcnoii M.*^ Tadmiral de Guyse le livre
des Evangilles sur lequel les dicts combalaDS ju-
rèrent en la forme ci dessus dicte. »
t( Les dicts sermcns eschevés, les dicts combatani
retournèrent en leurs papillons, et au même instanl
qu'ils voulurent monter à cheval pour le combal,
survint par voye de poste milord Ganivet, TÂnglojs,
parrcin du dict Julian y au lieu du quel on avoik
esté choisyr ung autre parce que Ton doutoil de
sa venue. Kt fust le dict Milord incontinent rec«
m
par le Roy le quel se retira d'hors son eschaulbuli
et avec luy M>' le Daulpliin , et parla assez lon-
guement au dict Milord qui luy présenta , coamie
il se dict , lettres du Roy d^ Angleterre. »
Après d'interminables discussions foiic&a/it ffirc-
tioii (Vannes qui consistaient en trois épées,un0
longue , une moyenne et une courte , pour chacun
des deux cliampions, et aussi sur ce que le cheval
de Tun d'eux avait quelques lignes de plus haut
que celui de Taulre , le duel enfin commença.
u Les deux combattans estant ii cheval ils furent
pour (iiiel(|ue temps sans se heurter ny approcher,
attendant Tuiifi; Tautre ({ui commenceroit le pre-
mier. Toutes lois enfin , Julian donna le premier
rop, et fut le coudict tel c{ue en peu de temps
Mauro blessa fort le cheval du dict Julian à la teste;
et si perdit le dict Julian ses dpux épées priucipallei
\-ïxi. - 93
:})iclles il rompit la première qui esloit celle qui
iclioil, en frappant sur le dicl Mauro. L^aiilre
ty tomba des mains en destournanl ung cop. Et
rur lors ud chalcun csUmoit ipie le dict Mauro
roit victorieulx , d'autant plua qiin le dicl Julian
Blant son cheval fort blessé , et destitué de ses
ux plus longues espées, se mit ii pied, tt fault
^ noter que le dîct Julîan desmonta fort dexlre-
Bnl de dessus son cheval et d'autre cuuslel que
Esloit son adversaire , tellement qu'en cela il ne
f sceut nuyre. »
« Estant le diet Julian à pied , il print la corte
pèe quy seullemeut lui restoit , et tira soit à la
nonne, soit au cheval de son ennemy le quel
■eval il blessa au proche de l'œil. Se voyant le
bt Mauro aiosy attaqué , il se mit k contomer à
blour du camp galouppant son cheval , à une fin
iVsloil de prolonguer le dict combat jusques
irés le soleil retiré, au quel cas il fut demeuré
Btorieulx , puisqu'il avoit démonté Julian de son
teval et fait perdre ses principales armes; de la
lelle chose le dicl Julian s'apperrut bien. Par
I sentant les quatre heures sunnéus et doublant
tomber en tel inconvénient , ît prînt de rechiet
nir pour aller resercher le dict Mauro , combien
6 jJi il fut longuement traveillé à le povoir ren-
slrcr. Toutes foîx ce fut en vain , le dict Mauro
Oi ^ HISTOIRE DES DUELS. —
gnloiippniU tousjoiirs à Tenlour du camp ets^escry-
ant piteusement : Non te quicrc, signor Juliano^
non te {/uicrc ; et le dict Julian oscryant : Joute
quierc. Fit en courant à longues passées, il releva
son cspùc d^armes que luy esloit tombée en terre
du commencement, et avec icelle et sa corte dague
pressa tellement le cheval du dict Maure qu^il le
blessa sur les jarretz dont le dict Maure s^estonna
grandement ruant quelques coups au conter. Et
sentant le dict Mauro sou cheval afTeiblyr, il voulust
descendre de dessus, et fut si peu advisé que il
desmonta du couslel où cstoit le dict Julian, le quel
sceut très-bien recueillir Toccasion qui se ofiEroit
de adommager son ennemy , luy courant sus sîtost
qu^il fust en terre. Et le poussant roidemcnl soubi
luy, luy traversa les jambes des siennes, et quant
et quant lui esta son gorgerin, luy mettant et alTutant
au col sa corte espéc , après luy avoir mis quelque
peu de sable par les yeux et en la bouche , que fut
pour Taveugler. »
<i Lors commença k cryer le dict Mauro qu'il
se rcndoil à luy recognoissant son meflait, et qu'il
avoit mal faict d^avoir délaissé le service d'Angle-
terre pour entrer en celuy de France. Eln ces en-
trefaictes, arriva M>^rAdmiral de Guyse, mareschal
du dict camp , au quel le dict Julian demanda
s'il tueroit le dict Maure; ^ quoy le dict sieur
— CHAPITRE HXXI. — 05
Admirai rfpondil que non. El en pr/'sencG d'i-
eeluy , le ilitt Maum se rendit de recliief et
ifcssB sont tort. Sur qii»y le dict Julian se leva
Gt alla au milieu du dict camp où il cryn par
plusieurs fois : f'ictoirv ! VA cola faict , se
rangea avec le dict sieur Adnura) afin que Tou ne
fist aulcun lort ; le quel le reoeul soubï la
'otectîon du Roy qui lors cscrya ii hatilte voix
que l'on ne Itiy fist aulcun tort sur painc de la
hart. Que Fust U cause que aiitcuns franco;» se
vouslurcnt esmouïoyr vi^ans la diulc victoire cl
que le leur (Mauro) demcuroit desliontë.
Lors les aulcuns parrctns du dict Julîan ciilrè-
rent au dicl camp et Tindrenl trouver Mauro, le
quel ils désnrmcrent de son Iiarnois. Et dicl alors
le dict sieur Admirai au dicl Julian qu'il admcnast
son prisonnier au Roy. A quoy le dict Julian satis-
faisant, vint trouver le dict Mauro le quel se pour-
menoit par le camp ayant encore ses trois espée*
que le dict Julien luy osta , cl le mena au dict
seigneur Roy au quel il le présenta. Puis adressa
son propos ii Madamoisellc de Travcs usant de
cca mois : Atadarnoisellc , i-ou.t ta-ez ce malin
eiK'oyé une cluihne d'or à Alanro , afin tju'il fut
hou dvbvoir contre nioy. El il t>ous avait promu
t'eus livrer ma leste avant rju'ii fust vingt-quatre
haïra,- mojr en contre c)mnge ji- t<ous tlonne la
06 — HISTOIRE DBS DDBL9. —
sienne ri son coij}s parce quil ne vaull rien, D
rcspoiidit le dict seigneur Roy au dict Julian qu'3
OToit faicl honneur à sa patrie par son bon debToir
dont il lui sa voit très bon gré , et Ten extimoil
homme de bien jusques au boidt. »
(c Cela faict , le dict Julian avec milord GaoÎYet
et les quatre mareschaulx retourna au camp yic-
torieulx , faisant trainer aprçs luy les armes de
Mauro. Kt fusl avec trompettes, tambours et plti«
sieurs autres instrumens conduit victorieulx en son
logis , auquel le Roy fit depuis donner une belle
chaisue d'or de trois cens écuz. n
(( Et le soir mesme Mauro fut pillé et saccagi
en façon qu'il demeura désuni de tous biens au
quel, comme il se dit, M.*^ le cardinal de Lorraine
envoya vingt-cinq écuz avec les quelz il s^est hon-
teusement retiré de nuict. Et à la vérité tous cetilx
d'ici ont été merveilleusement troublez de son re-
boutemcnt, car il estoit question de Fhonneurde
France et d'Angleterre dont Mauro avait quitté le
service , tellement q\ie luy s'appelloit le Franeoys
cl Julian TAngloys. »
Que dire d'un tel récit auquel on avouera que
ricii ne manque pas mcme une émeute, comme plus
lard lors du duel MM. de Castries et Laroeth. F,
lom, / , />fig, 820.
Cv seul Irait suduail pour peindre toute Tépoque
Franroisl.". ... Flail-ce bien la pinre d'un roi
' France de présider un Ici spectacle ? Il ne faut
fl juger les choses de ce temps avec les idées
I DÛIre ; c'est vrai. Mais en Espagne aussi peuples
rois n'élaient - ils pas infatués de clicvaleric ?
! monarque Français était-it nuire chnsc que leur
ipistc? Qu'on juge donc entre lui , d'après les taita
dessus rapportés, et CIiarles-Quint son rival '.
On vit auKsi 1res- fréquemment des clievalicrs
pagnols ou portugais figurer , en champ clo8 ,
IDS les divers pnvs étrangers où la fortune des
Inès les conduisait- Les histoires des guerres de
ice cl des Pajs-Bas, surtout celles d'Italie sont
eities du récit des prouesses auxquelles on se
Tait pour l'aniour tlvs Dames ou pour passer le
[Dps dans les momens de trêves.
Outre tes exemples déjà cités au volume précé-
dcnl pour ce qui concerne la France , on trouvera
dans Vlliftoire Universelle de de Thou , la men-
tion d'un duel entre Henri Manriquez, lieutenant
d'Avila , contre un capitaine français nommé
Randon. Ce combat eut lieu au siège de Metx ,
en 1552, avec autorisation du duc de Guise.
On trouvera aussi au Chap. XXXVl tes détails de
l« rencontre projetée entre Pierre III, roi d'Aragon,
el Cliarlcs d'Anjou , roi de Naplcs , ainsi (jue divers
7
96 — HISTOIRE DBS DUELS. —
traits ronrernant des ofllcicrs de Tarmce espagnole
commaiul^e par Gonzaive de Cordoue. Enfin ,
Turquel, dans son Histoire d Espagne , rapporte
plusieurs duels de D. Jean de Pimeniel , comte de
Maiorca , qui sYUiit fait un grand renom dans la
ciiamps clos et qui finit par succomber de la main
d'un de ses écuvcrs.
LV'sprit religieux se conciliait fort bien aulrefoii
avec les goûts chevaleresques. Non seulement les
combattans entremêlaient fréquemment dans leurs
rites féroces des pratiques de dévotion ; mais ils
étaient prêts quelquefois à faire du duel une croi-
sade, et à tirer Tépée pour la cause de Dieu. Cesk
ainsi qu'on lit dans la vie de St. Ignace de Loyola ,
qu'il voulut un jour se battre contre un Maure
qui avait nié la divinité de J. C. (351).
Dans le siècle suivant, en 1641 , le duc de Médina
Sidonia envoya de Tolède un cartel au duc de
Bragance , qu'il fit publier partout.
En 1G9G, il y eut près de Madrid, un combat
de cinq contre cinq. Ceux qui étaient bien en
cour en furent quittes pour quelques jours d'ar-
rêts chez eux , les autres passèrent le même temps
en prison.
Dès l'année 1584, il avait été promulgué en
Espagne un édit fort sévère contre le duel. Au
concile de Pennafiel , en 1302, on avait publié un
— chapitrï xsxi. — 99
conon qiit difentlnil il'np|)cler en duel les évoques
et lea chanoines. Cps [irohibitions furent rcnon-
Tclées en ICG9 , par rinTatil Don PMro.
h En Portugal, l'art. 43, liv. V, § l."du code
j^minel punit les duellistes de la peine de l'exil
en Afrique, aibitrio pnncipis, de la confiscation
fies biens et de la dégradation civique. Il n'y a
d'excnse pour les provocations que dans le cas
où elles auraient immédiatement suivi le premier
inouvcnicnt de la colt^re.
LDu reste, l'opinion publique chez les Portugais
■^ d'accord en cela avec la lot. Un duelliste serait
■ccueiili avec une extrême défaveur dans la société.
Lorsque le cas s'est présenté el que les circonstances
élaient graves , le coupable s'est vu fermer toutes
les portes ; ses amis mêmes l'abandonnaient et
rompaient tous rapports avec lui.
Comme la loi sur les duels n'a rten d'exagéré
dans ce pays, elle est littéralement exécutée. Chacun
ta prend au sérieux , et la crainle qu'on en éprouve
snfUt pour qu'on se tienne constamment sur ses
gardes et qu'on évite avec soin toutes les occasions
d'entrer en querelle.
y Dans la noblesse et chez les militaires , on voit
icore se présenter de temps à autre quelques ras
i qui ne surviennent ordinairement que
« les premier» ncccs de la rnlère , et il est excès-
100 ^HfSTOinE DES DUELS.—
sivemcnt rare que les rencontres soient concertées
de sang froid.
Dans la bourgeoisie on ne se bat jamais après
vingt-quatre heures de réflexion. Tout cas de rixe
est porté devant les tribunaux. Cette plainte s^ap-
pelle Qucrclar, et Toflensé ne réclame habituelle-
ment d'autre réparation que celle qui lui est faite
û la barre morne du magistrat. Ces rixes donnent
ordinairement lieu à un échange de quelques coups
de cravache de part et d'autre. Souvent les autorités
interviennent d'oflice et cherchent à concilier les
deux parties , en les obligeant à signer une décla-
ration ou promesse de vivre en paix bene vii'ere*
Celui qui viole cette promesse encourt une amende
sévère qui appartient toute entière à des établisse-
mens de charité. L'opinion se contente de ces
formes de réparation , et tient Fhonneur pour com-
plètement satisfait. On trouve des exemples de ces
réparations dans ce qui se passait au temps de la
Tfv\'e de Dieu et dans ce qui arrive encore au-
jourd'hui en Angleterre où le querelleur, comme on
le verra au chapitre suivant , est traduit en prison,
s^il ne donne caution de respecter la poia: du roi.
Les cas de duels ci-après sont peut-être les seuls
qui se soient présentés en Portugal , depuis environ
trente ans. Celui qui va suivre s^est même passé au
Brésil pendant le séjour de la cour de Bragance
\\\\.~- 101
Rin-Janelro, lors de l'iuvasion du Portugal par
les Français.
Le coidIl- D. Victorio de Limharès , alors colonel
^un régiment de ligne, se Tnisait remarquer par
DQ esprit et ses taleiis. Mais il était sujet Ji de coiï-
Duetles distractions qui furent cause qu'uu jonr,
[ans un bal où il assistuil , it bkssa sans le vouloir
) susceptibilité du Diarquis U. Antonio de Lavradio
|uî lui eu demanda sntisraetion. Un duel fut résolu ;
nais le lendemain le comte de Limharès s'élant
ricvement blessé dans une cliùte de cheval, son
lérc.àgé de quatre-vingt-deux ans, vint s'olî'rir pour
! remplacer. La rétlcsiun était venue, et le marquiâ
b Lavradio profita de cette circonstance pour
étirer «on défi.
D. Gaston de Camars , aujourd'hui comte de
'aypa et membre de la c1iand)rc des pairs, aimait
«aucoup la (xiésie. il lit un sonnet qui inilist>osa
outre lui U. Juan de Ciiïtcllo Druuco, major de
•valcric et fils du marquis de Délias. Va duel
'ensuivi! et l'auteur du sonnet fut blessé.
La mime chose arriva ii D. Diego Juse du. Sauça,
BBJor de cavalerie, appelé eu duel par le comtu
la Ponle , alors capitaine du même corps.
Deux bcaux-frércs, I). Jean Wartinho d'Azevedn
luntuury , genlilhomuie de la chambre du roi
Vt , cl D. Mathias Antonio da Sauça Lohatlio,
102 —HISTOIRE DES DUELS.—
se battirent au sabre sans témoins et s'étaient déjà
porté» (le graves blessures , lorsque la police les
sépara. Us furent sur le champ traduits en prison.
Le sujet de ce duel étaient des propos indiscrets
tenus par Tun des deux beaux-fréres et qui com-
promettaient la réputation de la fenmie de Tautre.
En Espagne , aujourd'hui , les mœurs sont bien
cliangées auprès de ce qu'elles étaient autrefois.
C'est de toute TEurope le pays où il y a le moins
de duels, u Ce changement, dit M. de Laborde,
s'est op:ré assez promptemcnt. Les duels jr éudeni
trcs^fréquens ; ils y sont maintenant fort rares*
A peine en entcnd-on pader. Les Elspagnols parais-
sent même aujourd'hui avoir autant de répugnance
pour ce genre de combat qu'ils eurent autrefois
d'empressement à en chercher les occasions. »
Jliner. descrip. de l'Esp.y tom. F ,p* 375,
On a vu pourtant de nos jours , dans cette hor-
rible guerre pour la succession de Ferdinand VU ,
dont la Navarre est le théâtre , un défi qui n'appar-
tient qu'aux temps chevaleresques et qui rappelle
ces guerres d'itahe où les Nemours, les La Palice
et les Fayard prenaient plaisir à se mesurer hors
des rangs avec les compagnons du grand GonzaWe.
Le 17 mars 1835, un cartel fut adressé par Don
C. O'Donnel , général de cavalerie de Dou Carios,
— cHiprTBK xx\r, — 103
lu brigadier Lnpez , commun dan t une division de
l'armée de la reine Christine. Ce cartel était ainsi
formulé.
^ H La cavalerie de l'armée de Don Carlos désire
■bec ardeur Poccasion de se mi-siirer contre celle
de Dona Clirislina. Mais comme les combats sont
■ni^^us, soit par la position, soit par te nombre
dea eombatlans , nous cticfs des deux partis nous
■MonionB , à limitation des anciens chcTiiIicrs ,
Bboiair un nombre égal ile soldais et décider seule-
ment par I» valeur, au combat h Tarme blartcbe.
Pour ma part je jure sur l'honneur de n'avoir sous
mes ordres (pie le nombre de troupes convenu , et
j'espère que mon ennemi en fera autant, A tous les
nombreux amis et compagnons d'armes que j'ai
dans l'armée Chtistina, je les sa Vue et leur souhaite
toutes prospéritt's, hors iliiHS les combats ; car je ne
lOnneis d'ennemis que sur les champs de halaille. n
ftCe cartel fui accepté par le brigadier chiiitiiiox.
b*empressa d'en faire l'objet d'une proclamation k
|.|rou|»e qui se terminait |)ar le passage suivant.
Tatlends la seule indication du lieu de ce duel
r TOUS conduire au combaL La mort est une
noble récompense pour celui qtii se sunt dans les
veines du sang csiwgnol. Vous yerrca !i votre ttte
dans ce duel romaiiti<[iie votre commanda ut-gé-
néral. Signe : Narcisse Lopea.
101 *» «8T0IRB DBS DUBL8. «^
Les journaux du 12 avril 1835, ont publié ces
deux pièces singulières, mais depuis ib n^ont pu
fait connaitre les suites du cartel. Peut-être doil-o&
à ce procédé chevaleresque d^avoir rapproché deux
partis acharnés à s^entre-déchirer , au point de leur
faire conclure cette convention récente par suite de
laquelle le sang des prisonniers doit être épargné.
Du reste , ce défi plus ou moins sérieux n^est pu
Tévéncmcnt le moins extraordinaire d^une guerre
qui avait pris le caractère d^une lutte d^extenni*
nation, d'une guerre où Ton a vu un général, Etpo»*
Y-Mina, prononcer dans une proclamation la peine
de mort contre tout médecin qui aurait donné ses
soins à un blessé de Tarmée ennemie. Il n^existe
que deux exemples d'une telle atrocité , en PruaiO
où Frédéric II s'était oublié jusqu'il prescrire qud«
que chose de semblable pour les blessés en duel,
et en France où un arrêté de la police parisienne
publié à la suite des événemens de Juin 1883,
ordonna aux médecins de lui apporter les nonu
de ceux dont ils seraient appelés à panser les
blessures (352).
chapithe xxxii
DucU en Angiclerre, Écc
et après lui Tacilu n'ont sans doulc pas
reoconirè plus de vestiges du Duel priipremcnt dit
dans TancienDc Drclagiie que dans la < jaule , puis-
^^^''il n'en est fait aucune mention , ni dans les
^^Commentaires , ni dans la vie d'Agrîcola ; et ,
^pSoninic l'origine des Bretons parait avoir étiï la
Toèmc que celle des Gaulois , U esl Iréa-probablo
que leurs moeurs et leurs coutumes avaient beau-
coup de rapports, y.ci-apivs f/i. ,VJ'.V/'^(353).
Il y a donc toute apparence que le duel a eu en
ADgleterre la m^me origine tju'cn France, c'csl-
t^fc-dire qu'il y fut apporté par les Anglo-Saxona,
.|WUpleB de race germaine comme tes Francs , et
dont la première descente eut lieu scus la con-
duite de Hciigîste vers 450.
Il régnait alors une effroyable corruption , non-
seulement parmi les Saxons idolàlrcs , mais encure
chci les Bretons , quoiijue déjà convertis au Chris-
Y
106 —HISTOIRE DES DUELS.—
tinnismc. «La tyrannie est sur le tràne, disait le
moine Gilclas , écrivain breton du VI.® siècle, Tin-
justice dans les tribunaux , IMnfidélité dans les ma-
riages ; on ne voit qu^extorsions , meurtres et adul-
tères. GihDks (le exci'd. Brilan, Londinm 1568.
On trouve dans les anciennes lois des Saxons
conservées en Angleterre, des traces de compo-
sitions ou amendes qui avaient été établies en Ger-
manie pour empt^clier de poursuivre par la voie
des armes la réparation des injures , comme od
le verra au clinpitre XXXI V. Ainsi une loi dUna,
roi de ^Vcstsex , estimait la vie une certaine somme
d'argent ou une certaine portion de terre (354).
Robertson parle aussi des Lettres de Slanes,
connues dans la jurisprudence d'Ecosse. C^étaient
des billets de sûreté pour lesquels les parens d*im
homme assassiné, en considération de Vj^ssy^Iimeni,
ou composition qu^ils avaient reçue , s^engageaicnt
h pardonner Toflense et à renoncer à tout acte de
vengeance , tels que duels , guet-à-pens , etc. Où
trouve dans Madox , Fomud. anglic. , iV.*^ 702
ci 705 , deux actes de celte espèce , Tun du régne
d'Edouard 1.**% Tautre du règne d'Edouard lU.
Les éj>rcuves par les élémens , tels que Feau et
le feu , appnrlieunent aux anciennes mœurs des
Saxons. Elles s'appelaient Ordalies y du mot teu-
toui(|ue Urdaly cpii signifiait jugement en général
— CHAPITRE XXXII.— 107
C« preuves ont élé fitablic» en AngUlerre avec
celles du comhiit sur la Cn de la monarcliie sa-
xonne. h'Oirlnlie ne fut abolie qu'en 1219, par
un statut de la 3.* année du règne de Henri 111.
Bapiv-Tmoibas, Nist. d'Aiigl., lom. I ,pag. M5.
I On cite une reine de la Grande-Bretagne (jui , à
^Rpexemple de plusieurs impi^ratrircs d'Allemagne, se
B^rait soumise il T^prcuvc de VOiiliilie. Emma, fille
de Ricliard, due de Normandie et veuve d'Elhel-
rede II et de Cnnut I." , fut accuaie d'un commerce
criminel avec Alwin , évi'qiie de Winthestcr.
Son fils, lîdouard 1.", ajant prètù l'oreille à cette
accusation, la reine s'en purgea en mari'liant pieds
nuds et sans en recevoir aucun dommage, sur des
charbons ardcns. L'évfque de ^\inclles(e^ 9e serait
^Bèlusë à subir la m^me Épreuve , en cilanl une
H|ttre écrite , en 887 , par le pape Etienne YI à
^T^MchcT<îquc de Mayence pour condamner cet
usage. Labhev , Hht. <V,1tigl., tom. II , png. 217.
On trouvera au chapiireXXXlV la mention d'un
duel entrepris par un jeune seigneur Anglais pour
purger d'une accusation semblable Guneliilde, fille
tle Carnit et femme de l'empereur Henri Ili.
Les Bretons impatiens de la domination romaine,
s'étaient donnés successivement aux Pietés et aux
Kcusaais , puis , pour se débarrasser de ceux-ci , aux
108 —HISTOIRE DES DUELS.—
Anglo-Saxons et en dernier lieu aux Danois. Les
Anglo-Saxons , dont la première descente eut liea
sous la conduite de Hengiste , vers 450 , donnèmU
leur nom aux Iles-Britanniques, dont ils renoiH
Tclèrcnt entièrement la face. Ils y portèrent leiui
mœurs et leurs usages qui s^y établirent avec dW
tant moins de contradiction que les vainqueurs en
avaient exterminé les habitans , dont une colonie
réfugiée en France vint donner son nom à la pitH
vince de Bretagne.
Les Danois , comme on le verra au chapitre
suivant , se distinguaient parmi les nations gernis-
niqucs par la pratique du duel. 11 était en grand
honneur chez leurs rois ou chefs militaires. Aussi
le plus ancien combat singulier, dont rhisUure
d^Vnglcterre ait fait mention , est-il attribué à Fun
des princes danois qui se partagèrent le royaume
avec les souverains d'origine saxonne. Ce combit
si célèbre dans les annales britanniques, quoique
révoqué en doute par plusieurs historiens , aurait
eu lieu entre Edouard 11 et Canut I.^', surnommé
le C^raiid , qui se disputaient le royaume.
Les deux compétiteurs, à la sollicitation des prin-
cipaux chefs de leurs armées fatigués de combattre
inulilcinent pour leur querelle , se seraient décidés
h la vider cutr'cux seuls. Us se seraient à cet effet
rencontrés dans la petite ile d'Ainey formée pir
ïxii. - 109
ht Saveme , près de Gloccsier. Ils comballirenl
avec IVpée, le casque et le bouclier k la vue des
leux années rangées des dcuit cAlés sur les deux
Edmond avail sur Canut la aupériorilé de
f force el de la taille. Mais celui-ci rachetait ce
lavantagcpar une plus grande adresse. Lcsbou-
ien se brisèrent dans la lutte qui Tut longue el
baméc. Le Danois, qui commenrait ix perdre
1 Icrrain , proposa le premier de ta terminer par
I accommodement. f-'aîHimt piince , dil-ïl à son
adversaire, nm-ons-nous pas assez combatla et
fait preuve égale de coumge. Témoignons notre
modération , et après nous être partagé le soleil et
veur de cette journée, quittons le champ de
pour nous partager le royaume. Ils jelèrenl
I leurs épéea et sVmbrassèrent cordialement.
I le partage qui cul lieu ensuite , le Nord du
j Tut cédé à Canut et le Sud demeura à
lond (355).
I combat , dont on fixe la date & l'année
n'a pas empécltè Jean Seldcn , auteur
I du 17.' siècle , de soutenir dans un Traité
r roTÏginc du duel que l'usage en était inconnu
i Angleterre avant la conqui?te de Guillaume de
kormandie. 11 cite à l'appui de celte opinion le déii
; celui-ci avait adressé h tlarold qui lui dispu-
1 la couronne , et dont ce dernier fut tellement
110 ~ HISTOIRE DES DUELS.—*
irril/' qiril Tnillil se venger sur le porteur du cartel.
O (Irfî , dont parlent la plupart des historiens, eut
ii\Mi immédiatement avant la célèbre bataille d^Has-
tin^.s ({lie le prince Harold perdit avec la vie, le
4 octobre lOGft. Guillaume lui proposait ou la
médiation du Pape, ou s^il préférait la voie des
armes , un combat en champ cloa. Le prioce
anglais, ajoute Selden, n^aurait osé se soustraire
h rappel du chef normand , si la nation avait fait
dépendre riioimeur et le sort du royaume d^un
combat singulier (356).
Mais on sait que ces sortes de provocations per^
sonnelles entre souverains ne tiraient pas toujours i
conséquence , et comme on Fa vu au comm^-
cément de celte histoire , les exigeances du point
d^honneur étaient loin d^étre aussi absolues pour
eux que pour leurs sujets. L^opinion de Selden ne
me parait pas plus fondée même en Tappuyant de
cette remarque , qu^il ne se serait trouvé aucune loi
sur les duels dans les anciens codes des Saxons du
temps d'Alfred-le-Grand, d'Edmond !.«' et d'Edgar.
Alfred et Edmond furent h la vérité de sages législa-
teurs ({ui cherchèrent & réprimer les meurtres et les
violences. Mais Edmond, qui le premier établit
en Angleterre la peine de mort, publia en 046 un
statut qui témoigne de Texistence de ce préjugé
germanique par lequel les injures personnelles
— cnApiTnE xïxii. — III
I devenaient communes i\ toute la Tainillc de l'ofTeiisé.
11 ordonna, pour désarmer la vengeance dea pii-
rens, que l'ofTenscur leur scrail livré et ne sortirait
de leurs mains qu'après avoir payé ta compo-
sîlioo réglée parles lois. Laurcv, fiist. ifÂngl.,
KM». / (357).
I) eiiste d'ailleurs dans le code des luis publiées
par St. -Edouard , le dernier des ruis Saxons, ptu-
itcurs régicmens sur les duels et les duellistes, u Ces
lois, dit Larrey, ne furent qu'un recueil de celles
(l'Edgar et des autres rois ses prédécesseurs. Elles
furenl appelées common htws , et elles devinrent
plus sacrées aux Anglais que ne l'avaient jamais
t,M le» lois romaines à tous les sujets de l'empire.
Guillaume lui-m^me , quoiqu'il joignit le droit
de conquête k ceux que lui donnait le testament
d'Edouard , dut adopter les réglemens de son pré-
décesseur. 11 est vrai de dire néanmoins qu'il y mêla
les mœurs et les coutumes normandes. Il voulut
même que la justice se rendit dans la langue du
TBÎDqueur, usage qui passa du barreau au parle-
ment où il existe encore. Il est également certain
que Guillaume encouragea singulièrement les voies
de violence en gouvernant bien moins avec son
sceptre qu'avec son épée , et en exagérant toutes les
conséquences du régime féodal au profit des sei-
s normands qui l'avaient accumpagné (358).
112 ^ HISTOIRE DSS DUELS. —
IjC duel était alors très pratiqué en Normandie,
comme il Test encore aujourd'hui plus qu'en au*
rune nuire province de France, et le duc Guil-
laume nYluit pas le dernier à l'autoriser par ion
exemple. Il ne serait donc pas étonnant que la
propagation de cet usage en Angleterre où il n'était
peut-iHrc que très-rarement pratiqué , comme eo
France aux temps de la première race , ait été un
des résultats de la conquête et de la fondation delà
nouvelle monarchie. Ce qui achève de rendre cette
conjecture très-probable , c'est une formalité fort
remarquable qui , selon Basnage , fut conservée
dans la cérémonie du couronnement des rois d'An-
gleterre. Un héraut d'armes parait à cheval armé de
pied en cap, et jette son gantelet pour ofiRrir le dud
à quiconque voudra contester que le duché de Nor-
mandie appartient aux rois d'Angleterre. Basnage,
Dissert, sur les duels , pag. 123 , Basic 1 740.
Quoiqu'il en soit , le combat judiciaire s'était
établi au moyen Age dans les institutions britanni-
ques , et ou trouvera dans les exemples qui seront
rapportées ci-après, les preuves qu'il s'y maintint
beaucoup plus long-temps que partout ailleurs. Les
bornes élroitcs d'un seul chapitre m'obligent à res-
treindre le plus possible ces citations.
On trouve dans le Glossaire du chroniqueur
anglais Spelmann , le récit d'un combat judiciaire
— CHAPITnF. XT\II. — 113
en 109fi, en présence de Guillaume II ,
dit le Koux , fils cl successeur de Guillaume-lc-
Con«|ti^ranl. Guillaume , comte d'Eu , était accusé
psr Godefroi Bayuard d'un complot tramé avec
Rolïcrl Mulbrer, comte de Nortliumberland , pour
Iflrôner le roi el proclamer en sa place Etieune
rAlhermale. Cette accusation Fut le sujet d'ua
EOrnbat qui eut lieu aux fîtes de l'Epiphanie dans U
rille de Salisbury , en présence du roi et de tous
I barons du royaume, Le comte d'Eu ayant été
fcincu, eut les yeux cl les testicules arrachés par
S du roi el de l'assemblée , et son écuyer fut
udcment fouetté, puis pendu, ti Jusxu que ideb
I et concilii, eiiciiiiitur îlli occuli tcsliculiqiie
tbscindunlur; dajiifero siio fViUelhino de Aldori,
Eh> amilœ ejus , sœi'iter flagellato el suspenso.n
Ile»! SpeLMAsK, Ms. in Biblioth. Lond. (359).
En 1163, sous le régne de Henri II, le comte
l'Kssex fut accusé devant le rni par Robert de
Ifonlfort, son parent, d'avoir par trahison laissé
tomber l'étendard qu'il porlnît dans une bataille
F donnée en 1157, contre les Ecossais, li oITrit de
justifier cette accusation par le combat , el le comte
d'Esscx l'accepla. La scène se passa dans une petite
ilc près de Tabbayc de Redding, en présence d'un
jp-and nombre de spectateurs. Le comte d'Esscx fut
laivt pour mort sur le champ de bataille. On le
S
114 «-HISTOIRE DES DUEtS. —
porta il Tabbayc pour lui rendre les derniers de*
\oirs ; mais on s^aperçut bienlôl qu'il donnait en-
core ([uelques signes de vie. Au lieu de Fatlacber
au gibcl , comme cela se pratiquait en France , on
le mit entre les mains des médecins et des cliirur-
gicns dont les soins lui rendirent bientôt la santé.
Néanmoins le comte d'Essex se regardant comme
mort au monde, ne voulut plus quitter Tabbaye
et il y acheva tranquillement ses jours. Labret.
Jiist. (Vjéngl.y tom. II,p(fg, 378.
Fn 1350 , lettres patentes d^Edouard III , portant
autorisation de se battre en duel entre TAngiaii
' Viscomt et Robert de La Marche, bâtard de France.
Rymeiv , Fa'dcra, toni, III y png. 54 (360).
Le A décembre 1361 , sous le roi Jean , il y eut
h Paris , aux lices de Fabbaye Saint-Germain-des-
Prés , un duel entre les ducs de Lancastre et de
Brunswick. Le roi prit connaissance du 4iff<^r^l
de ces seigneurs et leur permit le duel pour en
décider. CVtait un combat h outrance. Il se troun
une infinité de personnes pour en être spectateurs.
On cite comme un de ceux qui se distinguèrent par
une rare intempérance de curiosité , Févéque de
Paris , Jean de Meulan. Pour n'être pas le dernier
à prendre part au spectacle , il vint coucher à
Pabbaye la veille du combat. Il dut se munir au-
paravant de la permission de Tabbé de St. -Germain,
— CniTITRE IY\It. — 115
Kirnias de Lniidin; et ooliii-ci ne rrmscnlit b la
lUcr qu'en échnnge d'une reconnaissance signée
0e l'év^uc , porlniU (jiic son entrée el son séjour
l'abbnye ne tireraient pas h consf-qucncc
Contre SCS privilèges. D. Fei-iciës, TUst. de Parif ,
. f, li\'. 13,;)rtg. 648.
* Rirhard II , qui pnr\int au Irùne en 1377 , se ai-
<DAla par un grand icle pour maintenir la pain pu-
lliqne el privée dans son royan me ; il fut cependant
Ifthne (les dissentions civiles qui lui arrachèrent
B trt^ne el la vie, Dans le commencement de son
Higne, il avait parcouru l'Anglelerre en cherchant
^aappaiserlcB discordes et rccunimandnnl l'oubli des
injures. En 1392, il força le romle d'Arundel, qui
t'était porté le dénoncialcur du duc de Lancaslre,
h demander pardon à ce dernier en plein parle-
nt.
En 1398. nouvelle dénonciation de Ilereford,
tnte de Derby contre le duc de Norfolck, qu'il
■cuse d'avoir tenu des discours înjorieui au roi
isune conversation qu'ils avaient eue ensemble.
î renvoya cette alTnire à l'examen du parle-
t>t. Les deus parties ayant comparu, s'offrirent
MiiectiTcmcnt le duel qui fut autorisé scion l'usage
I temps. Le 16 septembre 1398, jour fixé pour
combat , une bec et un amphithéùtre furent
) k Covcnlry où il se rendit une foule de
116 — niSTOIRE DES DUELS. —
seigneurs et de chevaliers cl un prodigieux con-
cours (le tous les points du royaume. Les deui
comhaltaus parurent dans la lice avec ie cérémonial
actruutunié, et dcjii ils croisaient leurs épées lors-
qu\)n \i\ entrer le roi tenant la sienne haute. On
enlcuillt en même temps un héraut, qui marchait
devant lui , crier : Àrivtc ! Aussitùt les combattans
baissèrent la pointe de leurs épées. Le héraut lut i
haute voix la défense du roi , portant que S. M.
avait pris la (]uerelle des parties sur son compte et
leur diTcndait toutes voies de fait. Tous deux fu-
rent ensuite exilés du royaume (3G1).
Lors({ue la nouvelle de la fni tragique de Richard,
assassiué en 1 4(M) par ordre de Henri IV, usurpateur
de la couronne , parvint en France , elle y excita
la plus violente indignation. Le roi Charles VI, dont
Bi(*liard avait épousé la fille, en éprouva une nou-
velle atteinte de frénésie.Wallerand de Luxembourg,
comte de Saint-Pol , qui avait épousé la sœur durci
massacré, et Louis, duc d'Orléans , dont le fils en
épousa depuis la veuve, envoyèrent h Henri IV des
cartels conçus dans les termes les plus injurieux,
mais qui n'eurent aucune suite (362).
Ce fut pourtant sous le régne de Richard que fut
rédigée une nouvelle compilation des lois sur le
combat judiciaire. Thomas de Wodstock, duc de
Glocesler , oncle du roi , Tun des plus ardens fàu-
— CtUPtTIlE XÏXIt — 117
t des troubles (|iii agitèrent snin rùjçnç , se
•Iwrgen lui-mt;mc de lu r/'iliger. Il pronoiim U ce
iujct un discuiira Toit curieux qu'un Irouve dtins le
B/ossaire de Spcimnnu , a<." Campus.
< On a TU au chapitre prî'cétlcnl , pn^c 91 , la
nrl cju'a prise Honri Vllt au fameux duel des deux
Btpagnols prôsidé en 1546 par François I.*', roi
le France, en y envoyant une espL'ce d'ambas-
■deitr pour servir de parrain à l'un dts com-
tatlanft.
I En 1547, sous le ri^gne d'Edouard VI. fils et
Bccesseur (l'Henri VII!, deux gentilshommes Ecos-
iais, nommift Ne\\'lon el Ilamillun, s'accusaient
lécîprotpicment d'avoir fait une satire conlre le roi.
b prièrent milordGrey, son lieulcnanl en Ecosse,
le leur peroietlre de se purger par duel. Coloi-ci
B leur accorda cl vokilul mi'me présider le rombat.
^ dressa uut lice où les cbnmpions cntrèrcul, ayant
^ur armes le bouclier, l'épie et le poignard. La
Irictoire annbla d'abord se déclarer pour ilamlllon,
î mena sou ennemi ballant jusqu'au bout de la
:. Il n'avait plus qu'un pas U faire pour le pousser
dehors et rester maiire du camp , lorsque Newion
lui donna d'un revers sur le Jarret et le porta par
lerre. Il se jeta aussitôt sur son ennemi , et tiranl son
ignardil lui m per^a le cœur. Quelques gciilils-
, amis et pyreus du vaincu, voulaient
118 — IIISTOIBB DBS DUELS.—-
prendre sa place et le venger , mais on n^eul point
crègArd à leur demande qui fut jugée contraire aui
lois du duel. On proclama Newton victorieux , et
milord (}rcy lui fit présent d^une chaîne d^or et
d\nie coUc d'armes. Mais il ne jouit pas long-temps
de sa victoire ; il fut assassiné peu de jours après
par les amis dMIamilton qui le mirent en pièces. Oa
est frappé de Fanalogie de plusieurs circonslanees
de ce combat avec celui de Jarnao et La Qialâi-<
gncraye qui eut lieu la même année 1547, et qui
est Tun des derniers duels judiciaires qu'on ait vus
en France.
Kn 1571 , on ordonna encore un combat juri-»
dique en Angleterre sous l'inspection des juges du
tribunal des plaids conwwns. Mais la reine £Hsa«
betli inter{)osant son autorité ^ ordonna aux parties
de terminer leur différent à Tamiable. Cependant,
afin de conserver leur honneur , la lice fut fixée e|
ouverte et Ton observa avec beaucoup de céré-«
monie toutes les formalités préliminaires d^un com-»
bat. Spelmann, Gloss.^T.^ Campus*
Yoici un autre trait qui appartient au même
règne , mais (jui eut des suites plus sérieuses.
c( Kn 1 583 , deux seigneurs irlandais , de la fit-
mille d'O'Connor , Mîic-Cormock et Mac-Gil-
Falrick , n'ayant pu s'accorder sur un difiércnt ,
vinrent supplier le lord Député et le cposeil, de
î XXXII. — 1)0
leur accorder le duel. Ils oblJurcnl ce qu'ils de-
[Ivandaient; maïs ou ne les y força pas, comme
■le suppose Sullivan. Le combat se fit dans la c
Il cSiltcau de Dublin, en prf^SL'ncc du g«i
ks seigneurs du (-oiiseil et des principaux officiera
de guerre. Mac-Corinock recul deux blessures k
h jambe cl une dans l'œil sans avoir pu atteindre
nenncBii. Bientôl redoublant d'efforts, ilsaisitau
jorps Mac-Gil-Patrick, et cherclie à le terrasser;
■kaîs ceUii-ci plus fort parvient à le désarmer , cl ,
tte la propre Épée de ce malheureus , il lui coupe la
■te fpi'il porte toute sai>«:1aute aux lords Justiciers.
dann i Jliil, d'Aiigl. , loin, II, pag. 40i.
Les duels en Angleterre, comme en France,
tomme ce Italie et dan» prcstpie toute l' Europe,
aient fait des progris extraord in aires au com-
tenccmeiit du 17." sici-le. u Ils (taieut devenus
Ifr^quciis, dit Larrey , qu'en 1G14, souslc rè^e
I Jacques I-", la Chambre L'IoUée , l'une des
quatre cours souveraines de Westminster, dut s'as-
srmbler exlraordinoiremcnl pour aviser aux moyens
—de les réprimer. Le (hevalier Bacon , qui faisait
Hors les foni'tions de premier avocat-gtn^rid de
■t M. , saisit l'occasion du procès de deux mal-
1 pttbùieos traduits ii le suite d'uQ duel
naol la cour , pour attaquer de front cet usage. Il
120 *- HISTOIRE DES DUELS. —
sut prendre par son faible celle chambre si féodale
en lui peignant les inconvéniens de rcxtensioo du
duel à la classe des personnes de bas-métier base
miulùititl puMms. 11 prélendit d'ailleurs que estait
une manie , ou ignorée ou condamnée des païens
eux mêmes, de Rome et de la Grèce, ces deux répu-
bli(pies si sages et si jalouses de la véritable gloire;
que les Turcs encore aujourd'hui, ou n^en comuus-
saient ]>as la pratique ou la punissaient. Il citait
pour preuve de cette vérité un fetfa du divan
rendu contre deux Dassas dont Tun avait été tué
par Tautre , le divan ayant également fait le procès
au mort et au vivant. U ajoutait que cette fureur
avait malheureusement été autorisée dans les an*
ciennes guerres de N a pies , par le fameux combat
d\ui certain nombre d^Espagnols contre autant
d'Italiens, par les (jolhs et les autres nations bar-
bares du >iord , et enfin par les Espagnols, gens
cruels et vindicatifs. Enfin , il soutenait que même
dans les cas où Ton demande le duel pour ter-
miner une querelle , il n'est pas juste de l'ac-
corder , parce (]ue c'est tenter la providence. »
La iM>ur, sur de si sages remontrances, défendit
les duels et déclara coupables d'homicide et de
lèze-Majeslé tous ceux cjui contreviendraient di-
rectement ou indirectement à Tédit. Làrret, HisU
d'AngL, loin, 11 J, fjcig, 702.
gicler
I — CUM'ITllE XXXll. —
Cette iiraliibitiun est , selmi toute nppnrence ,
la premicre dont le duel ait Hé l'objcl en An-
gleterre. Il y fl lieu de croire qu'elle fut bien vile
iblîée , pLiîsfjue l'Iiisloirc de ce pays nous ollrc
t exemptes de pareils combats bien postérieurs
1 règlement de la Chambre Etoilée. C'eat ainsi
qu'un véritable duel judiciaire fut sur lepoint d^avoir
lieu la sîsicine année du règne de Cliarles 1.*' ,
Lm^est-ji-dire en 1630, eimrou 80 ans après que
HShtfSge en eut cessé en France. La scène se passa
cotre David Ramsey et le lurd Kcy, k la suite d'uae
accusation de conspiration portée par celui - ci
contre le premier et le marquis d'ilamillon. Tous
MX demandèrent à se juslIËer par le combat, et
I cause en fut plaidée avec une grande solennité
i ia Chatnbiv peinte de Westminster, Rcy et
Ky comparurent. Celui-ci donna k l'aulrc un
lenti et le traita d^iiJVime calomniateur ; mais
j soutint son accusation et se déclara prêt à
Hiepler le combat. Âpres les discours du grand
Mar6cbal et de VAlWntPj ou avocat du roi , on
entendit les témoins; on prit l'avis des juges de
.paix. Le duel allait être ordonné , mais U fut cm-
' par l'intervention du roi qui mit fin ii la
icédure. On lit dans une lettre de ce prince
Hamdtun son grand écuycr , ce passage
u-quoblc à plus d'un litre : « Tout était disposé
122 — HISTOIRE DBS OUBliS. «-«
pour cela , le jour pris , le lieu assigné , les armes
apportées , mais je n^ai pa» jugé à propoa de per«
mettre qu'il y eut du sang ré|mndu pour cette que«
rellc. » LvRREY, Ilist. d'AngL, u F, p. 42tl (363).
Voct de duell. cap* 28, en parlant de ce condlMt
ajoute que ce fut à la sollicitation de plusieuis ecclé^
siastiqucs que Charles I^' s'entremit pour Tempécher.
Sept ans plus tard on en vit encore un exemple.
RusiiwoRTii , Observ. on ihc staUU,, p^' 266.
Ainsi , si Ton ù\e en Tannée 1574 Tépoque du
dernier combat ordonné |>ar justice en France ,
y. loin. I y pag. 51 ^ on trouvera que sous ce rap
port le progrès social était bien en arrière du DÂIre
chez nos voisins d'outre-mcr , puiscfu^l iaudrail
supposer que Fusagc du duel juridique y a survécu
de près d'un siècle k son abohtion en France. Si Toa
ne considère comme juridiques que les combat»
ordonnés par la justice ordinaire et non par des
juridictions exceptionnelles ou par des souverains,
il faudrait fixer en 1571 , l'époque d'un des deraien
de ces combats en Angleterre. Il fut alors ordonné
par la cour des plaids communs, commori pleaSy
dans une contestation civile. Mais en ce cas, notre
supériorité sur l'Angleterre serait plus grande en-
core, caries derniers duels ordonnés en France,
en justice réglée , (latent de la fin du quatorzième
siècle , tels ({uc ceux d'un père accusé d'avoir vioK
E xxxit. — 123
rUIe qui comballil contre son gendre en 1354,
Carouge contre Legris aussi pour viol eu 138Q ,
m autre indÎTitlu accusé d'cmjxiisonDcnicnt en
llUM, toutes causes purement crimincllea et noQ
'ile». y. tom I , page 45 el la nota 1 29.
!l y a bien plus encore : chose cju'on aurait
le à croire , si l'on ne connaissait la scrupuleuse
itë des Anglais h leurs \icilles lois, l'uncieiiDe
Jalioa sur les combats judiciaires fut encore
kfoquée et appliquée en 1817. Voici à quelle
«ecasion.
L'D nommé Tlioruton, poursuivi criminctlemeot
pour le meurtre d'une jeune fille par le frère de
CcUe^, Fui acquitté par le jury. U y eut appel
«KevaDt la cour du banc du roi. \Jx, Tbomton
otTril de se justifier par le combat singulier. Lea
juges ajaiit consulté la loi, reconnurent que,
^loique tombée en désuétude , clic u'étail pas for-
lemcnl abrogée. En conséquence ils ordon-
:nlle duel. Mais l'adversaire se déxisla de l'ap-
combat n'eut pas beu. On songea alors k
r la loi , et ce ne fut qu'en 1819 que le
ml en prononça l'abrogation. Taiixanhieh,
pén. de Fr, et d'Angl., pag^ 23. PwU 1824.
» loumnis eurent aussi, pendant toute la duréu
1 moyen âge , uue grande vogue en Angleterre.
124 ^ HISTOIRE DES DUELS. —
N7'nnmoins Henri II , au 12.^ siècle , hésitait encore
il les autoriser. Il se contentait de permettre aux
seigneurs anglais de passer la mer et d^aller s^exercer
chez les autres nations. Richard-Cœur-de-LîoD ,
son (ils et son successeur , passe pour les avoir
établis. Un statut de ce prince en date de 1189,
« ordonne aux hommes d^armes du royaume de
faire dans les tournois Tapprentissage de la guerre,
afin que les Français nMnsullent pas les Anglais
comme des apprentis qui n^avaicnt aucune expé-
rience. » Celait de la pu ri de Richard , une rémi-
nis(*ence du tournoi de Messine qui tourna mal pour
les Anglais, comme on le verra au Chap. XXXVI.
Ainsi encouragés , ces exercices ne tardèrent pas
h faire fureur en Angleterre, comme ailleurs. lien
résulta souvent des désordres et de graves accideos.
En 1216, vers Tépoque où les Anglais ayant
chassé Jean-sans-ïerre pour avoir révoqué la con-
cession de la Orande Charte, lui substituèrent Louis
de IVancc, fils de Philippe- Auguste , un toumm
eut lieu près de Londres entre plusieurs seigneurs
français et anglais. Il en coûta la vie à cfuelques-
uns de ces derniers, entr^autres au comte Geoffroy
de Mandeville qui mourut des suites de ses bles-
sures. Mathieu Paris, en parlant de ces divers com-
bats , les appelle Hasiilucidia Mcnsœ rotundœ.
En 1279 , sous Edouard I.^' , un tournoi célèbre
» — CHAPITBE xxxir,— 125
ftit ex6cut£ au chAteau de Kcnil%vorlh. On y vint
lie tous les poÎDts de l'Europe- Le fameux Roger
■ de Morlimer y parut k la ttHe de cent chevaliers de
r fai Table ronde, qui cotuballircnt pour l'honneur
dce armes et pour l'amour des dames,
En 1286, Guillaume de Varenne , fUsatnëdu
comte de Surrey , fut tuî.' dnns un tournoi , à
Croydon , où il fut attiré , selon Thislorien qui en
bil mentioa , de dessein pr^'médilè et par suite
cTun lâche guet-à-pens. Larrey, Hist.tTAngl.,
tom. II, pag. 571 cl 579.
L'année suivante, un aulre tournoi d'un genre
fort extraordinaire fut donné a Boston. Teoanset
•ssaillansy parurent' habillés en chanoines, Celte
cérémonie n'était qu'un prétexte pour piller la
foire qui se tenait dans la ville. Pour mieui réussir
dans cette opération, on mil le feu à plusieurs quar-
tiers, et on Gt main-basse sur ceux qui cherchaient
à porter secours. L'incendie faillit dévorer la ville
entière. Un seul homme , celui qui avait publié
le tournoi, paya de sa l^lc cet audacieux brigan-
dage. Voyez, pour les exploits en Ecosse de Jacques
de Lallaing , seigneur Flamand , la noie 84.
L'esprit chevaleresque du roi Richard !.", qui
institua les tournois en Angleterre, est célèbre dans
l'histoire. Au nombre de ses nombreuse-s aventures
-figure une espèce de lutte ou joule è coups de
126 — nisrotRE dks duels. ^
cannes qu^il eut, en 1100, h Messine, arec la
célèbre français Guillaume Desbarres , et qui faillit
dégénérer en un combat sérieux , puis une ren*
contre cor|>s k corps avec le sultan Saladîn dans
une bataille en Palestine , et enfin le défi à un
combat de six contre six quMl fit vaguement pro-
poser, en 1195, au roi de France Philippe-Au-
guste. Le duc d^Vutriche , dont il avait foulé aux
pieds Télcndard au siège de Saint- Jean-d^Acre,
6c vengea sur lui de cet outrage en le retenant
prisonnier à son retour de la Terre-Sainte. Il lui
on olTril ensuite réparation en champ clos; mais
celle fois Richard crut devoir refuser la partie.
Kn 1416, douze Portugais vinrent combattre en
Angleterre un égal nombre d^Anglais. Ils y reçurent
Pacrueil le plus distingué , surtout de la part des
dames.
L^m des plus fameux jouteurs de cette époque
fut Jean de Astliley, écuyer. Il chercha en France
nombre d'aventures au nombre desquelles on re-
marque un combat qu'il soutint en présence du
roi Charles VII , le 28 août 1438, sur la place
Saiul-Aiitoine , h Paris , contre Pierre de Massé
qui fut lue. Il se mesura encore avec le même
avantage , le 30 janvier 1442 , dans la ville de
l^ondfos, en présence de Henri VI, contre Plû-
lippe Boyie , aragonais. Le roi , en récompense
— CIIAPITBE SXSII.— 127
vîcleire, lui donna une pension de 100 marcs,
le créa chevalier. Foyez aussi i la note 86 les
iloils du sire de Courteney. La CoLOMDii:fiF. ,
d'hon., loin. II.
On trouvera dans les diiTércnles liisloires d'An-
terre et dans le Glossaùv de Spelmonn , un
ind nombre d'autres tournois cùlôbris depuis
îl jusqu'en 1468. Celui de rcUc dernière annte
Cl en présence d'Edouard IV cl dura trois jours.
y vit figurer le fameux bAtard de Bourgogne qui
vaincu par milord Woodeville, baron de Scalcs,
■e de la reine. Edouard 111 prit pari en personne
:uxdeia42, 1350 el ISQ2. f'. tom. I ,pag. 57.
•Ta mode des tournois se passa beaucoup plus
n Angleterre qu'en France où il y en eul
« 80US le règne de Henri IV , en 1605. On n'y
1 pas ensuite la manie des duels s'y déchaîner
rec cette ftireur qui fut un des nombreux fléaux
i nog guerres civiles et religieuses. Les combats
hrliculiers n'onl jamais été trca-communs dans ce
■ où ils s'accordent assez miil avec le sang froid
lie phlegme britanniques. On en a vu fort peu
exemples à l'époque qui suivit la cessation des
iurDois et des combats judiciaires , m^mc nu
Uieu des discordes civiles qui agitèrent si souvent
9 pays.
128 — HisTOinr des dukls. — >
11 serait superflu de revenir ici sur les défis des
ducs de C}Ioccsler et de Brabant , dont il a été
amplement parlé au Chap. XXX.
Eu novembre 1509, deux gentilshommes, le
fils aiué du baron de Warlon et un écossais nommé
Stuart , se battirent sans témoins et s^entretuèrent.
a Ce fut , porte Tliistoire , à la suite de démentis
cprils s'étaient donnés en jouant aux cartes. Ik
nommèrent un certain champ oii ils allèrent, et
s'^aidèrout mutuellement à passer un fossé, com-
mandant à leurs laquais de se tenir de coté avec
leurs cho\aux. Ils visitèrent les épées Tun de l'autre
et leurs pourpoints, et puis s'étant embrassés ils
se mirent à ;:;cnoux , et après avoir faict leurs
prières dirent quels chirurgiens ils vouloicnt avoir.
Cela fairt , ils se jetèrent Tun sur Tautre h coups
<respécs , et après s\Hre donné deux ou trois
csto(*s , ils tombèrent tous deux morts sans parler.
Le roi , ceux de la cour et de leurs amis en ayant
oui iiailcr, furent fort tristes, et le roi commanda
qu'on eut ii les enterrer tous deux sans cérémonie.
iMi.TMiiN , ///a7. (Irs l\t) s-Bas , liv, 39, y**. 671.
In- ton , coudre et général de Cromwell , que
phfsicMU's historiens appellent le sage et vaillant
Irelon , rc< ut un eartcl de lord IIollcs , membre (lu
pai'lenu'ut et Tun des chefs du parti presbytérien.
Lu puritain austère, il rèptindit que sn conseieuce
— CHAPITBE TXXtt. — 129
ne lui pcmiettaîl pas de se battre en duel. Holles lui
répliqua en le prenant par le nei. : Ta conscience
deî^rait te dit/enclr-e cl\i^'oir des torts , si elle ne te
permet pas de les répatvr. Villemaix , liist. ilc
Ci'omwell. Flotte , Essais de philosophie.
Blackstone , Comment, laws of Engl. , voL V^
p€ig- 530, place au premier rang des outrages
Faction de prendre quclqu^un par le nez , comme
ailleurs c'est celle de le tirer par les oreilles. Irclon
néanmoins se montra insensible k ce procédé de
lord Holles. Il mourut peu après en 1651 , au siège
de Limerick , après avoir refusé une pension de
2,000 livres sterl. décrétée en sa faveur par le par-
lement. Son corps reçut les bonneurs de la sc'pul-
lure de Westminster, d'où il fut tiré en 1G60 pour
être «ittaché au gibet avec celui de Cromwell ,
ton beau -père. Hume et Aikins , Hist, d'AngL^
iom. XVIII y pag. 407,
Ce fut sans doute à Toccasion de ce défi ou
d^autres semblables que Cromwell publia Tordon-
nance suivante dont ou ne saurait trop admirer
la sagesse.
a. Le Duel sur des querelles particulières étant
une chose désagréable ii Dieu, malséante aux chré-
liens et contraire h tout bon ordre et gouvernemcnl,
pour empêcher que ce mal , qui commence i\ cir-
culer en cette nation, ne s^y eulrclienue ihivantage ,
U
130 — mSTOIRE DES DUCtS. —
il esl oriionnù par son Altesse le seigneur Protecteur
de la irpublique (i\\nglcterre , Ecosse et Irlande,
par Pavis et ronscntement de son conseil , que tous
ceux (|iii , après le 10 juillet prochain , appelleront
on feront appeler par message, parole, écrit ou
nuire voie, aiH'epIcroiil earlel ou le porteront,
seront mis en prison sans autre formalité, pour y
demeurer six mois entiers jusqu'aux prochaines
assises, et n\'n sortiront qu^en donnant caution de
se conduire pendant un an paisiblement et en gens
de hien. »
Teu de temps après la Chambre Etoilée con-
damna il 5, (KM) livres sterl. d'amende, un gentil-
homme qui avait provoqué en duel le duc de Nor-
thumberland.
Les duels sont encore aujourd'hui sévèrement
défendus par les lois anglaises , et riiomicide qui
en résulte est considéré comme félonie, mais arec
iHiirficv cil rival , vieille formule employée pour
modérer les peines d'après un ancien droit dont
jouissait le clergé. « Il est des cas, dit le criminaliste
anglais , où le meurtre accidentel commis pro se
ilcj'cntlcndo ^ rend coupable du crime d'homicide,
comme par exemple celui qui donne la mort à un
autre en combattant régulièrement avec lui. » Sui-
vent des distinctions fort subtiles et assez bizarnïS,
et des conseils aux parties de fuir, de se cacher de^
— aiAriTBE xxsri,— 131
^e an imir, un fossù , etc. , poor éviler le combnl,
mimenl, laws ofEiiglund. , vol. f^I, pag, 83,
Dans les temps plus modernes , on rencontre
!x peu de duels qui se fassent particulièrement
taiarqucr. 11 y a sous ce rapport progression sensî-
jAemeDt décroissante chez nos voisins dVutrc-mcr,
kèrac en matière pollliquc où les passions sont les
lus irritables; c'est re dont on se convaincra quand
■'agira ci-après des duels parlementaires.
Tout ce cycle peut comprendre le 17' et le 18."
|ëclc9 , et présente h-peu-prés la m»?me pliysio-
jnmie. En conséquence, je me reuTermerai dans de
{Wurteficitatious.
II existe dans la bibliotlièque de St. -Orner , sous
N-" 808, un manuscrit de Ilendricq, bourgeois
I celte ville , où Ton trouve le récit d'un duel
^rc deux Anglais, qui fil événement dans la loca-
M, Ters le commencement du 17.* siècle.
Les lords Douglas et Kennedy ètniciit deux
Bciers de l'armée anglaise au service du prince
Rurice de Nassau, dans la guerre de l'indépen-
tuyre des Pays-Bos. Ils curent une querelle dont
brigine, comme celle d'Achille et d'Agamemnon ,
Mratt avoir été lu possession de quelque Briséis qui
reste n*aimatt ni l'un ni l'aulrc. Une préférence
prince JMuuricc envers l'un deux , les ftl écloler.
1 32 — HISTOIRE DES DUELS. —
Dos (iï^fis sVnsuivirent. 11 fui d^ahord question deflê
ballre <mi Ani^lrierrc ; le roi Jacques I.*' en ayaiil
('\v informe» , leur fil drfcnscs expresses d'en Ycnir
aux mains. Ils se d(''tcrminèrent alors à franchir
le (Uiroit. Rlanl abordes â Calais, ils comptaient
y faire leur expédition ; mais le gouverneur , sur
les ordres qu'il avait rerus de la cour, chercha à
les faire arrêter. Ils se retirèrent alors à St.-Omrr
et choisirent pour champ clos une lande h peu de
distance de la ville , qui sert aujourd'hui de champ
de manœuvres aux troupes. Le combat se fit à
cheval et h Tépée , et Kennedy succomba. Il y eut
dispute ensuite pour la levée du corps , entre la
justice du village où il était gisant, et le bailiagede
Sl.-Omer.
Ceci se passait le 11 décembre 1610. Les deux
adversaires durent s'entourer des plus grandes pré-
cautions pour parvenir h leurs fins , car le 10 avril
précédent on avait pubhé a St.-Omer, par ordre de
l'archiduc , une ordonnance qui défendait le due]
sur peine de la hart (364).
II y eut il Londres , en 1661 , une querelle d'am-
bassadeurs ({ui fit beaucoup de bruit et qui faiOit
entraîner les plus formidables conséquences. La
plupart des historiens en ont parlé , mais il n'en est
aucun qui Tait fait d'une manière plus complète
que Basnage.
— ciurnuK \x»t[ — 133
Philippe [V avait envoyé le baron ilc Halteville
I en ambassade en Angleterre où était le comle d'Ks-
rades de la part de la Fninoc. Le comte de lïralié,
I ambassade tir de Suède, vint k Taire sa première
■ entrée k Londres. Les deux ministres voulurent se
■ disputer le pas. L'un et l'autre sYtudtèrcnt ii faire
mdre la file ii Icui's équipages immédiatement à
fit Builc du ministre suédois. Les gens du baron de
BatteviUc avaient coupé les truits des chevaux de
Tainbassadeur français ; et pour éviter une pa-
|. veille mésavcnlnre , lui-mt'me avait fait doubler
I siens avec des chaînes de fer, ensoile que le
comle d'Estrades demeura immobile.
Le roi de France rappela aussitt'il son ambas-
^■tdeur cl fit sortir du ro<iaumc le minisire d'Espa-
I avec une précipilaliim el une hauteur qui
l2>K'gércnt ses jours ; car il mourut en arrivant i
iambrai. Philippe IV qui sentait son alTaiblisso-
KOt , el qui avait fait la pais , afui de mourir plus
iquillcmenl, envoya le comte de Fueules à Paris
donner satisfaction h Louis \1V- BAs^Ar.E,
Anual. des Prov.-Vuies , toni. I, pag. 657. La
ilaje 1709.
^B Je cite ce trait comme un exemple négatif en fait
HBc duel , et pour qu'en le comparant k ce qui s'est
passe k la cour de Naplcs, en 1812, dans une
occurrence analogue , entre un ambassadeur rus>;e
pour
134 —IIISTOIur liES DUELS.—
et un iiiiiiislro fraiirais, on puiiisc juger de la diffé-
ri'ine des loinps et des persoiiiiuges. frayez loin. I,
L'aiiibassiidiMir de Louis XIV , le comlc d^Es-
lrad(*s , avait pourtant fait ses preuves dans une
querelle (|ui nVtait pas la sienne, celle du due de
(luise :ive(' le comte de Coligny. Il avait cette fois
bravé la rigueur des édits du roi sou naaitre, qui
peut rtre lui aurait su gré dans cette autre cireons-
tance, de sa>oir soutenir les armes à la main riion-
neur de sa couronne. /'. ibid, , png. 224.
Vaï l'Ecosse et en Irlande , les mœurs publiques
au temjis ])risent se prononcent fortement contre
Tusage des combats singuliers, et ils y dcvienoent
fort rares. La catastrophe du colonel Campbell,
pendu en Irlande pour fait de duel , a laissé dans
ce tiays une profonde impression. Le combat s^était
rjassé sans témoins , et le colonel avait tué son ad-
versaire. Il fut condamné et exécuté, malgré les
pleurs de sa femme et de tout son régiment composé
d'Kcossais de son propre clan.
Kn Kcosse , un (rcmibat qui avait eu des ré-
sultats aussi funestes, donna lieu à un procès dont
tous les journaux ont retenti. Celui qui avait eu
le mallieiu* de tuer son adversaire fut poursuivi
par voie (l'i/iilict/ncni et acciuitté par le jury, sur
une éloquente plaidoierie de lord Erskiue.
— CBM'ITRE \XXII. — ld->
Les duels oui or(liiiuin'mi.-nl lieu un pistolet, et
|p plus communément cotre cetii qui prélenclcnt
)t la qualilicalion de gonilv/naii , qui s'a[)pliquc cti
ftogletcrre ii tous ceux qui n'étnnt pas nobles se
>icnt néanmoins digues de l'c'trc. Uu reste, la
noblesse britannique est bien loin d'atl.icher au duel
mt^mc importance qu'autrefois. Elle se contente
uvciit de faire des excuses. C'est ainsi qu'un
nèral franrais assistant, il y a quelques unnùes , h
I banquet dîplomaliipie k Londres, entendit Ttin
» convives , lurd Cliiuidos , insulter dans l'ivresse
nation française. Il le somma de ac rttraelcr , et
r Mn refus il lui lança en pleine table uncbou-
tlo au visage. Tous les convives se levèrent; un
Iwel fut jugé indispensable cl un rendez -vous
■igné pour le lendemain. Le général franrais s'y
DUTB le premier. Lord Cliandos s'y présenta éga-
meiit; tnuis ce ne fut que pour faire des excuses
intîler le général ù un nouveau banquet. Celui-ci
^ut les excuses, mais refusa noblement l'invi-
iioD (365).
Le duel en Angleterre n'est pas poursuivi et
nui comme duel , mais comme boniieide ordinaire
Fec ou sans prémédilulioii selon les cireonstauecs,
U premier cas le crime s'appelle inurdeivr, au
icoud manslau(^hler- Dans les cas les moîus graves.
136 -^HISTOIRE DES DUELS.—
la proct'diire ri'arrétc des les commencemens,
comme duiis les cas de suicide , par une déclaratioi
de non lieu du Coroner. On sauve ainsi le principe
en même temps qu^on en élude rapplication.
Cependant , les champions ne sont pas toujoun
rassurés sur les suites que peuvent entraîner leur
désobéissance aux lois. Ils redoutent encore asm
les oonsécjuenccs d'un bill ofailaindcr, pour chcN
clier à s'y soustraire en venant se battre sur le coih
tincnt , surtout en France.
Il a déjà été fait mention au tome !.•', pag. 375,
d^un combat (|ui se fit à Calais , entre les sieun
Cough et Burgh'Camac, et de Tarrét de cassatiot
du 4 décembre 1824, qui en a été la suite. Le fait
suivant s'est passé à Boulogne en 1829 ^ et a au»
été Tobjct de poursuites criminelles, terminées par
un arrct de non lieu de la cour royale de Douai.
Le sieur Crowther , lieutenant en demi^solde
au service britannique, se trouvant à Boulogne ,
voulut se faire cidmettre dans une société ou cercle
anglais , que présidait le colonel Conwai. Ayant
appris que son admission souffrait des difficultés,
parce cpi\)u lui imputait d'avoir reçu à Cbeltenliam
des coiq)s de cravac^lie sans en avoir exigé répa-
ration , il en écrivit au colonel Conwai ainsi qu'au
iicur Helsham, capitaine de la milice irlandaise,
qu^on lui avait iudiijué comme l'auteur de cette
— CHAPITRE XXKII.— 137
!TJIiiUon. Hcisliam offrit de rétracler ce qu'il nvaîl
, si Crowlher poiivnit donner des preuves de la
Klé du fait qu'on lui imputait. Celui-ci accepla
Me condition cl se disposait h partir pour Londres,
i de s'y procurer les journaux où il avait fail
l6rer dans le temps une somnanlion h l'Iiornmc
lï l'avait attaqué et qu''il ne connaissait pas , d'in-
[uer son nom et sa demeure. Mais ayant parlé de
Ue alFaîrc au sieur Molony , l'un de ses amis ,
icier des gardes du roî , celui-ci le détourna de
^projet par le molif qu'il n'avait aucune preuve
fe , et que c'était à l'auteur de Timpulution à
■ouver la vcrilé,
Helaham ayant refusé de souscrire à celle con-
I fut proToqué en duel par Crowlher. H
itaa d'abord de se battre avec lui k rause de la
ne de Cheltcnham. Mais l'autre insistant et le
naçanl de l'insulter , il déclara n'accepter le
(tel que par pure condescendance. Le rende*-
is fut fixé pour le premier avril 18^9 , au pied de
EfM>Ionne. Les deux adversaires s'y Irouvèrenl
Mtmpagnés, Ciovrther du sieur Mulony, clHels-
n llu sieur Grady fils.
Le vicomte Bury , ami d'Helsliam , se trouva
Bi au lieu du combat avec le docteur Dunand
t Boulogne, pour le cas où los secours de l'arl
ùenl été ucccssaircs. Les témoins avuieut déoidà
188 —HISTOIRE DES DUELS.—
que le combat aurait lieu par étiquetle selon b
coutume anglaise, c^cst-à-dire au premier saitg.
Un débat sY*ngagea entre ceux-ci sur le choix
des pistolets. Molony en présentait qui étaient à
percussion ; Grady obtint lu préférence pour Ici
siens qui étaient à pierres. Ceux-ci étaient auni
il double détente , et quoique Grady eài averti de
cette circonstance , il parait que Crowthcr n^j
fit pas attention , car au signal donné son pistolet
partit avant qu^il eut mis en joue son adversaire.
Celui-ci fit feu immédiatement après, et Crowtlicr
ayant reçu la balle dans le cou , tomba mort i
rinstant.
Lii police de Boulogne ayant commencé des
poursuites, Ifelsham disparut, mais revint bientôt
après pour répondre aux mandats de la justice.
La cour royale de Douai , qui avait abandonné sa
jurisprudence première depuis la dernière décision
de la cour de cassation , déclara qu^il n^y avait lieu
à suivre par arrêt du 24 juillet 1829.
Eu 1830 , le sieur Ilelsham , sur une plainte
de la famille Crowther , fut poursuivi eu Angle-
terre pour le même fait devant le tribunal de spécial
conifiiission. Il lit lever alors au greffe de la cour
de Uouai une expédition des pièces de la procé-
dure pour établir sa justification.
Si les duels civils sont laissés par la loi anglaise
— ctiipiTHE sxxii.— 139
niB l'empire du droit commuu qui punit l'homi-
: cl les blessures, il n'en cal pus de tni-mc dis
I entre militaires. Ils sont l'objet d'un titre
k:îal dans le co<le appelé les jiiiivtes de guenv,
«ite injure est sùvèrcmcnl punie , tout duel et
e loul cartel expressément défendus sous peînc
I la perte du grade et d'emprisonnement h la
:r(tion de la cour martiale , avec assimilation aux
trevenam, des seconds, témoins, promoteurs
I porteurs de cartels et même de tout chef ou
|)érieur qui aurait souffert uu duet. On trouvera
texte de ce règlement aux Evlaircissemens
ittoriques (3C6) .
^Ceux de nos militaires qui ont eu le malheur
; prisonniers de guerre en Angleterre, con-
rvcront un incfTaçable souvenir de ces cloaques
B réclusion appelés pontons, où les confmail un
lUTcmemcnt qu'on appelle quelquefois humain
t généreux. Ces sépulcres flotlans ne furent pas
i l'abri des tristes passions que l'homme porte
rtotil dans son cœur. Lh, éclataient fréquemment
■ardentes querelles, d'horribles colhsions ; l<i , la
e , la haine , la vengeance se ressentaient de
ffaltation naturelle des esprits et des insuppor-
Mes souffrances du corps. Les duels y étaient
rribles. lis avaient tout le ponton pour témoin.
I bireur est si ingénieuse et la soif du sang u
140 —HISTOIRE DBS DUELS. —•
Umt irinstinct ! Les champions qui Toulaienl le
mesurer, iravaicnt ni épées ni sabres ; mais ils pre-
naient (les compas de mathématiques et des rasoin.
Une branche de compas attachée au bout d^un
bâton y tenait Heu d'épée ; ime lame de rasoir ,
emmanchée à Teitrémité d^un bout de fagot, fi-
gurait un sabre : reflet de ces armes était horrible.
£. D. GoRDii^RB, France mariUme.
II y aurait lacune dans cet ouTragc consacré k
la triste nomenclature de tous les genres de conflits
qui désolent Thumanité , si je passais sous si-
lence une espèce de lutte où Ton n^emploie que
les armes naturelles et qui est si populaire ehei
les Anglais. Le bo.ringy \isiblement emprunté av
pugilat des anciens , est le duel de John Bull.
Il nV'st pas un anglais de la classe immédiatemenl
au-dessous de celle des gentleman qui n^en coa-
naisse la théorie, et il en est peu qui n^y joigocDl
la prali({ue.
Lorsijue deux boxeurs se préparent à lutter en-
semble , ils se défont silencieusement de leurs habiU
qu^ils coniient aux spectateurs, relèvent les manches
de leurs chemises , se posent à deux pas Tun de
Fautre les deux poings fermés , Tœil fixe et le
jarret tendu. Les coups de poings volent, plcu-
vent avec la rapicUtc de Torage , les champioui
— CHAPITRE jtxxn. — 141
conscnmnl toujours leur sang froid el leur gravité.
Le combat ne se termine gndTcs que par l'épui-
lotal des forces de l'un d'eus. Conlusion«,
irtrisBurea , perle de sang par le nez , les yeux ,
itx>uche et les oreilles , tels snnt les résultais les
ordinaires de la lutte. Queliiuefoia il en coûte
membre , un œil et méroc la \ie.
;es batteries affrays sont punies d'amende et
Dprisonnement par la loi anglaise. Blachstonc ,
tmenl. laws of EngL, v. f-'l. Mais les mœurs
, plus puissantes que la loi qui reste le plus
mairement sans application.
Il^es pajsaiis des comtés de Norfolck el de Suf-
k. Bc livrent de véritables combats en champ
, hampiiig niatches , au poing, au bâton ou
lutte. On y retrouve imiU-s d'une maniera
mère les règles et les usages usités dans les an-
s duels Scandinaves. Edinburch Review 1834,
41 , /jog. 78 cf jcç. (367).
)n voit bien rarement chez nos voisins des
mples de ces duels politiques dont la polémique
journaux est si souvent chex nous l'occasioD.
liberté de la presse a bien aussi ses excès de
lire côté du détroit, mais elle est mieux comprise,
m sait en supporter les incoDvéniens avec plus
patience et de sang Troid. On ne voit gucrcs
142 —HISTOIRE DES DUBL9. --
éclater de pareilles collisions que là où se concentre
la principale activité de la vie sociale chez noi
voisins , c^cst-h-dirc dans les débats pariementaircs.
C^cst là que Ton peut étudier avec le plus de fruit
la physionomie particulière des mœurs britannique!
sous le rapport des duels.
Lliabitudc des discussions orageuses , Tusage
de parler de sa place au parlement , de s^'infer-
roniprc et de s'interpeller dans la chaleur des
débats , a donné lieu plus d^une fois à des alterca-
tions personnelles (Vunc nature plus ou moins
grave. La plupart se sont pourtant terminées sans
filchcux résultats.
L\m des plus anciens défis, dont les débals parle-
mentaires aient été le sujet , c^est celui qui fut
donné en plein parlement par le célèbre duc de
Marlhorougli à lord Powlet, en 1712. Les suites
en furent cmpc'chécs par Tintervention de la reine
Anne. Rapin-Tiioiras , Hist. d'Ângl., tom. XII,
p(if^, 55R.
La mrmc année , lo duc de Mnriborough ftit
encore rinsligatcur d'un autre duel entre le duc
dMlaiTiillon, chef des Torys, et lord Mohun^Fun
des principaux \Vi;;hs du parlement. La querelle
n'avait (Vautre cause réelle que Firritation politique
du moment , quoiqu'elle eut eu pour prétexte
quelques propos tenus l\ l'occasion d'un procès qoi
: \x\u. — 143
hrisaît les deux parties. Ils curcnl pour seconds
\e gî-néral Maoarlney et le cfitoncl ITamilton qui
tballircnt en m/me temps qu'eux , selon l'usage
roduit en France par les mignuns de Henri II) ,
ia qui commençait Ji tomber en désuétude, f.
i. /, pot^- Ifil.
CLe combat eut une issue bien runcstc. Les deux
ma, le duc d'Hamillon et lord Mobun, reslèrciit
k U place. Ce tragique événement fit grand bruit
Ui'S'^'C"'^- ^^ procès criminel fut commencé
e les deux seconds du duel , et le général Ma-
rlncy, que le bruit public accusait d'avoir lu£
duc d'Hamillon en trahison , fut proscrit pm:
reine Aime , et n'eut d'autre ressource que de se
bgicr en Hollande. RAnN-TiioinAS, loco ciUUo,
|. 074 (368).
lainaîs les débats parlementaires n'avaient pré-
llè un aspect plus animé que dans les sessions
1 1778 à 17S0, où les discussions s'envcnimcretit
m point extrême et prirent toute la couleur d'une
imoaité personnelle.
En 1778 , lord Germaine irrité de quelques
Érsonnalitt-s de M. Temple Luttrel son collègue
h Cliambrc des communes , le provoqua en
lel à haute voix en plein parlement. Tous deux
it rappelés à l'ordre , et le président leur de-
I4i — fllSTOIHE DES DUELS. "—
mnndn leur parole clMionncur de ne donner aucune
siiiu* ^1 cette afTaire. Lord Germaine le promit.
AI. Lutlrel ne s^y décida que lorsqu^il se ¥it sur
le point (Fctre arri^'tè et conduit dans la prison du
sergent (Varmos. Hume et Airins, Hist. d'jingf,,
toni. A'IA'*
Dans tous les débats de la session du parlement
en 1 788 , on se permit les plus licencieuses invec- i
tivcs , et il parait que le projet des membres de
l'opposition était de pousser les choses à Teitrême.
Kn consé(]uencc de quelques paroles dites le pre-
mier jour de la session et in&dèlement rapportées
par un journal , M. Adam appela en duel M. Fox
et le blessa légèrement. Ibidem,
Ce fut h celte même époque que lord Georges
Gordon s\ic(]uit dans la Chambre des communes
une si triste célébrité. 11 n^était ni wigh ni tory,
mais d'une sorte de tiers-parti qui n^était représenté
que i)ar lui. 11 était avant tout Anglican jusqu^au
Cuiatismc. Un bill de tolérance religieuse ayautété
promulgué en 1778, il n'eut plus de repos qu'il ne
Tcut l'ait rapporter ou modifier. Associations, péti-
tions, assemblées populaires, tout fut par lui mil
on (iMivre. Dans ces réunions extra-parlementaires,
tomnic à la (liambre , il traitait les ministres et
nu* me le roi de pa pin tes. 11 se permettait à cliaque
Miflnl ks anronsmcs les pins violcns et les plus
ArussiAres personnniilijs. Peu [iii importait d'être
Appela il Tordre. Il trcti continuait pas moins sci
iliatribes.
Le 2 jnili 17S0, il convoqua à Saint-Georges^
Fields, une assemblée populaire où il se réunit
|Mus de cent mille personnes, qui de-là se ren"
dirent tumultueusement au parlement pour y pré-*
■nier une pétition contre l« bill de tolérance.
iGordon déposa la pétition sur le bureau , et de-*
taianda quVlle Fût sur-le-cliamp prise en considé-'
ration ; ce qui était contraire aux usages parler
tnentaires. Cette proposition fut rejetéc , et lu dis--
Cussion njouniéc nu mardi suivant. Gordon vive-"
ment interpellé de disperser sa troupe , le promit.
Mais le jour lise pour la discussicni , un nouveau
nsscmblement plus considérable encore que \e
premier, se forma et vînt assiéger te parlement qui
refusa de délibérersous l'empire d'une telle violence.
Un membre , te ciipitaîne Herbert , fit obsenef que
Gordon portait Ji son chapeau une cocarde bleue,
iigne de rnllicment adopté par la multitude, et S
ajouin que s'il ne l'ûlaît pas a l'instant, il allait la
[t nrrachor. Le tribun s'cséculn de bonne gnîce el
itsa cocarde dans sa pocfie. Au sortir de la séance,
s voiture fut traînée en triomphe.
Daus la soirée du même jour, rémeulc prit Fe
10
146 — HfSTOIBS DES DUCU. —
<*.arartère «riine véritable ÎDSurrcf^lîon. Les pmoni
furcnl furcécs, un grand nombre de maisons sacca-
dées cl plusieurs membres du parlement violemmenl
mallraitùs. Le lendemain , la populace maiiresae
de I^ndres et de Westminster continua le pillage
et mit le feu sur plusieurs points. On allait Forcer h
banque, quand une proclamation du roi portanl
autorisation de faire feu sur les rebelles sans Tinter-
\ention de Tantoritè civile , mit fin au\ désordres.
Gordon fut arrêté et poursuiifi comme coupable de
haute trahison et acquitté en 1781 , après une élo-
quente plaidoierie du célèbre Erskine.
On trouve des analogues avec ces scènes aÎD-
gulières dans les débats de nos deux premières
assemblées législatives. V. tom. I, chap. XXIII.
Vers répoquc du plus haut crédit du célèbre
ministre Pitt^ il y eut un duel entre lui et M. Tiemey,
membre de la chambre des communes. H n'en
résulta aucun accident.
En 1809, lord Castlereagh etTillustre Canning»
tous deux ministres , se battirent à la suite d^uoe
vive querelle; le dernier fut blessé. La démission
de Tun et de l'autre avait précédé cette afiaire.
IIlme et AïKiNs , IJist. (VÀngL, iom» XX.
En 1829 y lord Wellington, alors premier mi-
nislre, envoya un cartel à lord Winchelsea, Tuii
de ses collègues à la Chambre des pairs, quiTavait
jtxxti. ■— 147
:iis^ d'avoir manqua h sa pnrnlp h l'oocnsion tic
lablÎMctni-nl d'une imitersilO h Londres. Le
mbnl ii'ciil niiciinc suite fAclieiisc.
On ne voil pa» qu'aucun de ces hauts personnages
I *l* inijuiélé h celte occasion. On ne sait ce
II) serait arrivé s'il t avait eti homicide , seul cas où
jurisprudence anglaise autorise les poursuites
iininelles en mntirre de dui-l.
fTtom In séance dn 10 février 1834, il sVIeva Ji ta
Siambre des comnuincs un débat (fune nature
S'S/rrieiise et dont les circonstances méritent d'être
lârliculicremenl remarquées. Void le compte qu'en
tt)t rendu les journaux an^lain.
M- Hili , menthre ministériel du parlement , dans
ri^unioQ puhlrtpic d'éleclenrs, accusa toute
I d^ptitation irlandaise d'avoir volé publiquement
iOntre le biU relatif aux troubles d'Irlande liiat nrt,
I Tapprouvaul en secret. Celte impul.-ilion
lieu d'abord it des explications extra-par-
k Dnw la séance du 5 février 18:34, M. O'Connctl
Merfïclla lord Altbnrp , chancelier de l'Ecliiquier ,
■ir la réalité du fiul. Lord Allliorp répondit vnguc-
Htii. Pressé davuntaj^e, notamment par M. Scheil
lin des députa irlandiiis, le minisire se leva et
piposdit que ce ilemirr Ouil précisément du nom-
148 -- HISTOIRE DES BUELS. ^
hrc. Je (hxlarc à la f arc du Ciflel du pays, s'écrit
alors M . Sclieil , f/uc ce pn^pos est une infâme
calomnie. Une grande confusion s'ensuivit. Lord
Altliorp cnergiqucmcnt interpellé de tous le» bancs
de la salle a assuré ({U'il tenait le fait d'une personne
digne de foi et qu'il en assumait personnellement
toute la responsabilité.
Arrivée h ces termes, la question prenait une
gravité que l'impression de ce qui venait de se passer
en France (le duel de MM. Dulong et Bugeaud)
rendait plus sensible encore. A partir de ce moment
tous les moyens de conciliation ont été essajéspar
les membres de toutes les opinions. Sir Aobert
Peel a cherché à donner à la réplique de lord
Althorp un caractère officiel qui la dépouillait de
toute personnalité. M. O'Connel a proposé un
comité d'enquête ; sir Francis Burdett a demandé
aux deux adversaires de déclarer qu'ils se soumet-
taient h la décision de la Chambre et renonceraient
h tout autre mode de satisfaction.
L'Orateur Speaker a essayé d'obtenir cette décla-
ration en ménageant l'honneur des deux parties,
et , sur leur silence , la Chambre a décidé i
l'unanimité que lord Althorp et M. Scheil seraient
placés sous la garde du Sergent d* amies, et dé-
tenus jusqu'à ce qu'ils eussent pris l'engagement
de renoncer à toute provocation. Cet ordre a été
— cnArîTBE xxxii — 149
létlinlemenl exécuté. Les oollégiics de tord
ibhorp se sont nsseniblés , lord C.pcy esl arrivé.
deux advcr^uires n'ont l'ait la déclarntiop de-
inifx que bien avant dnns la nuit , et ils unt ^lé
icueîllîs k leur rentrée par les félicitations de la
lambre el de TOralcur.
Le 14 féïricr, M. Grote n présenté le riipport
I la commission des privilèges sur celle aflaire ,
. a déclaré avoir acquis la certitude de Tinno-
bnce de M. Scheil. Lord Altborp s'est levé el a
qu'il avait pcul-étre agi avec imprudence ,
nme ministre , mais que , placé entre sa posilinn
ministre el son caractère (i'bommc , il n'avait
kll liésiter ii sacrifier la première au 9(mh de son
mnetir privé. Du reste , il a déclaré ne conserver
leun doute sur Tinnorence de M, Scheil et des
itrcs membres de la députation irlandaise qu'il
trait accusés. M. Siheil a pris 3a parole li son tour
a terminé son discours en disant : " Fiissé-je
r mon lit de mort , je me présenterais devartt
eu ea niant l'accusatioii qu'on a portée contre
» y,, np npplauchsstmcs.
Après une déclaration de M. Stanley, membre
i cabinet , qui trouve compléle et proclame hau-
ment la justificalion de M, Scheil, la Chambre a
tnné son approbation au rapport de la cammi»-
»n. The Momwg Çhi-onivle, \^ J'chi-uary 1834.
150 <«> HISTOIRE DES DUBXJ. «•
L'uiitii'c 1834 fut en Angleterre , comme et
France , une année fatale pour les provoeationa
parlementaires.
Eu mars il y eut un défi entre M. Stanley, doal
il Tient d'être parlé , et lord Alcomb ; TaBiEÙre
s'est arrangée.
Le 13 du même mois et à Toceasion des prov(H
cations antérieures, M. Duckingham annonça à h
Chambre des communes qu'il présenterait le 26 mai
suivant un projet de loi contre les duels (369).
Vers la fin de cette même année 1834 , les jour-
naux anglais ont rendu compte d^une démarche
assez significative de la part de sir Robert Peel|
récemment nommé premier ministre. L^honorable
baronnet ayant lu dans le Morning Cfifvnicle lo
com[)tc rendu d'un discours prononcé dans une
réunion politique par le docteur Stcphen Lus*
hington, membre de la Chambre des communes,
crut y apercevoir des allusions offensantes à h
personne, Le 12 décembre 1834 , il écrivit au
docteur une lettre où , après avoir retracé la phrase
du journal , il ajoutait ; u Je vous in\ite à vouloir
bien m'npprcndrc ai les expressions que j'ai citées
sont exactement celles dont vous vous êtes servi, n
Le docteur ayant répondu que rien n'avait été
plus éloigné de sa pensée que l'intention de faire
des allusions oflensuulcs pour la persouoe de Tho*
— CtlAptTBE SXSII,— 131
toerablc liaruiiiK'l , celui-ci fil publier celle cor-
■Brpondaitce duns les jiKirnaux. Oa devine assci
Icut élé le K'SuUnt d'uue (elle d*marc?ie, si U
ié|Miii»e dti dvH'lciir avait (:%(■ mutiis modOK-e.
M. l'ecl ne larda pas à se retrouver dam la
lèccsailé de mctlre de nouveau la main b la plume
^ir adresser une missive Diialuguc k M. Hume,
i «vail dit de lui il la Cliumbre des communes
na la s^'ancc du ^0 mars 1835 , qitc sa cundulte
lail pas celle d'uu luimme d'honneur, M. Hume
Il tiré d'alliiire eu Kpiimln»! au miiiislrc qu'il
iviùl pa9 eu liitiaiUvn d'attaquer son houiicui:
La fierté de celle attitude n'a pas prôsprvé le
■un minislére de M. PecI d'une cliùte qui, des
n avènement, parut ùiL-vîtalilc. M^gré loule sa
Kilurion, il a diV fuirc rcirnile devant les phalanges
rréea il*unc o)>posilioii liabilcmeiil dîrigL'e.
PeM do lein]M après , Éelala un T^rilflble duel
fflcmetilaire , le plus remarquuble de luus ceux
l'on ail vus en Angleterre daus le cours du siècle
Bhtel.
Lord Alvanley avait, dons un discours ii la
ihambre des pnii-s , perlé avec pew de m(-nagemoiil
M. Dauiei O'CuuneU , oiteï de l'uppositioti irlati-
isc fi la Chambre des communes. Celui-ci lui
{|90jls CD lui iufligeaul l'^ucrgiquc fpilliélc de
\^2 •=? HISTOIRE DES DUELS. -^
hloaivd bujfoon, qui ne se tri^duit qu^imparbiU-
pieiil e(i français par celle de paillassen
I^e nuble lord demanda par écrit une cxpliculioa
à M. O'Connel , qui ne répondit pas. Plusieurs
membres du club de Broocke , dont ce dernier
faisail partie , avaient déjà proposé que des mesures
fussent prises pour que lord Alvanley obtint la
satisfaclion qu'il demandait. Les directeurs du club
s'y étant refuses , celui-ci publia une nouvelle letlre
injurieuse à son adversaire. M. Morgan O'Connell,
fils de riionorable député d^Irlande, vint en de-
mander raison ii son tour à lord Alvanlev. Oa
• • • t/
convint d\in rendez-vous. Les deux témoins étaient
pour lord Alvanley , le colonel Bamer ; et pour
M. O'Connel, le colonel Hodges. La distance tut
fixée à douze pas. Au premier feu, M. O^Conodl
a seul tiré , parce que le signal n^a pi|S été bien
compris par lui ou par son adversaire. Les armes
furent rechargées et les deux coups partirent en-
semble , mais sans résultat. Le témoin de lord
Alvanley a alors déclaré qu'il consentait bien à
un nouveau feu, mais qu^ensuite il emméaerait le
ngble lord , ce qu^il fit après une seconde épreuve
qui n'eut pas plus de résultats que la première.
L'affaire s'est ainai terminée , mais sans excuses ai
explications.
Avant cette rencontre , le colonel Bamçr , témoin
— CHAPITME TtXSII. — 1"^
^e lord Alvanlcy, avuil icril à N. O'Connel pour
le prier de lui Taire conuailre les motiTit de non refus
d'urcfirder satisfaction auuobte lord, M. O'CunnetI
i répondit qu'il n'avait jamais refusé de fournir
plicaUoa pour touto injustice qu'il aurait pu
Bimettrc; maïs qu'il récusait les voies du duel
mme antipalliiques h ses principes et au serment
■'il avait fait de ne jamais les employer , depuis
iW avait eu le mallieur de tuer un homme ea
tabat singulier. Tlie Courrier caid True Sun,
may 1835.
Le lendemain, M. Morgan O'ConnolI reçut pour
! m^me sujet de nouvelles provocations , une
llr'autres d'un M. d'israeli. Deux autres fils de
lonorabis député d'Irlande forent également pro-
bl|ué9 et un couflil sérieux aliail s'engngor; mais
police y pourvut par rarrestation de MM- O'Con-
n. Son chois ne manqua pas de tomber sur
ippo»lion, comme cela était arrivé h Paris, en
lier 1833, dans une cireonslauce à-peu-près
nhlable. MM. O'ConncIl n'obtinrent leur liberté
l^aprés avoir fuurni caution de ne pas troubler
fpaîj^ du ivi (370).
^^Angletcrre a eu aussi ses duels de femmes.
n'eu citerai qu'un seul parce qu'il est au-
pliuue et que toutes sus circouslauces sonl d^s
1 54 ^ niSTOIRE DBS DUBLS. — '
plus singulières. Les Toici telles qu^elles sodI ri*
sultécs des débats de la cour d^assisea de Leioslier
en Irlande , publiées dans tous les journaux an-
glais.
Deux femmes de Dublin , jalouses Pune de Paa*
tre, se rencontrèrent le 6 décembre 1833 sur la
place du marché do cette ville , après a^étre hh
tées mutuellement pendant plus d^un mois. Uiroe
d'elles s'étanl emportée jusqu^au point de dcmncr
un soufflet à sa rivale , celle-ci lui en demandi
raison et lui ofTrit le choix des armes. Quatre joun
après , le coroner , appelé à visiter un cadavre de
femme, découvrit sous le sein droit une blessure
profonde de trois pouces et demi , qui avait pénétré
obliquement jus({u'au cœur. C^ était Marguerite Sjl-
vian, ennemie jurée de Jessy Rosa Crauby. G^est
donc sur cette dernière que s^est portée de suite
Tatlention de la justice. Rosa Craubj répond aTOC
assurance aux questions qui lui sont adressées ;
W. le président. — Quel âge avez- vous ?
L^accusée. — La demande est peu galante.
AI. le président. — 11 ne s^agit pas ici de galao-
tcrie ; uu sujet plus sérieux nous occupe.
L'accusée. — Comme les réponses ne sont pu
obligatoires, (]ue je sache, vous me permetlrei,
M. le président, de profiter de la liberté dont je
peux jouir ù cet égard.
^chahtâe WMÎ. — ISS
'Tsklenl. — WiHs ne \uulcx tiuno poînl
'i'r*.' \ • '{T'I *'Z*' '
V lioii.t ilil t'ila : nn:!» jo ne \i»î*
iiM-< »>ité (11* rti]»|i rendre à tous li-s
|iii whjI i«;i |>ré>i-n5 : t-nvoyci-nuii vi»lrc
.er, cl je le lui gliâicrai dans le tinau de
» oreille.
Pour satisfaire au rd^irne de la |>r<'\i'nne, le
greffier se dérange de ^a plaec afin irt-r«Miter sa
confidence, et la transmet ensuite au prt'si.leni, qui
]a couche sur le pripier. I/iiiterruiiafitire euntinuc :
D. Quelle es^l la profession de \otre mari.' R. Il
n^en a point. — D. Il s'oL-cupe pourtant de i]uelipic
chose? — R. Non, mun»ieur, il ne »\ieeupe de
rien; à moins cpic vous ne vouliei regarder i-oiiuno
une occupation les tourmens cpril fait endurer à sa
inalheureuse compagne , cl les allentions cpTil u
pour les autres femmes.
Edouard Crauby , interrogt^ sur les motifs du
jalousie qu^il a pu donner a sa fenune , refuse de
s^eipliquer , et une décision de la cour , priivoquée
par son défenseur, le dispense de répondre, à cause
du lien étroit qui Tunit à raccusée.
L'accusée se retire , et Tun procède ù Taudition
des témoins.
Up huissier. — Au nom de la loi et par le roi ,
166 — iiistoihe des duels* —
Jaincs-NicL Hervey el Georges- Arlliur-Necl Diclson,
comparaissez !
A cette sommation , les deux témoins s^ayancenl.
Voici la déposition de N ed Dickson :
« Je sais que , depuis long-temps , les 6poui
Crauby vivaient en fort mauvaise intelligence : le
mari passe pour débauché , et la femme pour très-
jalouse. Le 6 de ce mois , en passant sur la place du
manrhé , j^apercus celle demicre qui , appuyée
contre une pyramide de sacs de blé , parlait d^une
manière des plus véhémentes à la veuve SjlviiD.
Cuncux de connaître le sujet de leur conversation,
car elles étaient ennemies déclarées, el ne coo-
\crsaient jamais ensemble , je me plaçai derrière les
siics. 11 était environ six heures et demie du soir; les
marchands amhulans s'étaient retirés, et la place
était déserte de ce côté. — Vous me Pave* enlcrè,
disait la première , cY'st mon mari ; maintenant il
ne m^aime plus, il ne regarde plus ses enfans. Quand
il rentre , il a Pair soucieux ; si je lui parle, il ne me
répond point ; si je l'embrasse , il me repousse.
\ Ous m'avez rendue la plus malheureuse des
fcnnues et vous me devez une réparation pour tant
(le maux. — (]e n'est pas ma faute , répondit aa
ri>ale, si voire époux me trouve h son gré, el si
mon caractère lui plaît mieux que le vôtre. — N'avea-
\ous point de houle, reprit Kosa Crauby, de dé-
— CHAPITRE XXXtI.— l57
tourner un père de famille de ses devoirs et de
rafTection qu'il portait ii sa fenimc et aux pauvres
mnocens qui lui doivent le jour .^
<( Elle continua queU{ues minutes sur ce ton. A
tousses reproches, la veuve Svlvian ne répondait
que par un dédaigneux silence , ou par des éclats
de rire méprisans. Enfm Rosa sY*cria : Je ne puis
plus vivre ainsi ; il faut, ou que vous quittiez cette
ville, ou que je vous tue : choisissez ! — Je ne rerois
dWdres de personne, répliqua fièrement la veuve.
— Eh bien ! reprit Rosa, vous écouterez peut-être
le soin de votre conser>'ation : je vous déclare que
01 , dans huit jours , je vous trouve encore h Dublin,
vous ne respirerez pas le neuvième. — Quoi ! vous
prétendriez m^assassiner ? — Je prétends tout , je ne
connais plus rien ; je serais capable d'aller vous
égorger jusque dans ses bras. — J'en avertirai la
justice. — Ne le faites pas , ou je vous étrangle de
mes propres mains ! — Jamais je n'ai entendu de
pareilles menaces. — Jamais je n'ai vu une dépra-
vation si grande. — Vous m'insultez ! — Ne ni'avcz-
Tous pas déjà insultée vous-même , ne m'avcz-vous
pas outragée dans ce (jue j'ai de plus cher ? Et
pensez-vous que je puisse supporter long-temps ,
sans murmurer, sans me plaindre, et surtout .sans
me venger, le poids des tourmens dont vous m'ar-
cablex? 11 n'v a qu'un moven raisonnable de nous
138 «-IltSTOIRE DES HUSLS. -*
mcUrc (l^acroril : vous ne voulei point renoncer k
vos prétcnlious sur mon mari , et moi , je ne veui
point vous Tabandonncr. Vous avez appris ii tirer
répée ; je ne possède pas le même talent^ mais Tin*
digiit^tion soutiendra mon courage , c^t le ciel me
donnera de l'adresse en faveur de la justice de ma
cause. Décidez-vous promptement. Demain matin
de bonne heure , si vous y consentez , nous nous
retrouverons dans le champ des Deux^Poteaux, i
un quart de lieue de Leiplip. S'il le faut, je voui
supplierai même de ne point me refuser ce mojea
de terminer nos dilTèrens , je me jeteraî k vos
genoux , et je vous demanderai en grâce , au non
de Dieu, de m'épargner un meurtre ; car maintenant
j^ai Tespril à moitié tourné , et je ne sais pas à quoi
le désespoir pourrait me porter. »
L^accusée rentre : sesyeux sont rouges et gonflés;
elle parait avoir beaucoup pleuré. M. le président
rengage h se calmer, et surtout k se rassurer. uVous
nous avez promis tout à Theure , lui dit^il , de nous
révéler les moyens que vous comptiez employer
pour vous défaire de votre rivale. Je vous rappelle
rengagement que vous avez pris. »
I/aceusie. — Je voulais d'abord la tuer dans
la rue, d'un coup de pistolet, et me tuer après
elle ; mais j'ai abandonné celte idée. — D. P(Hir
<piello raison.* — R. Parce qu'elle aurait déversé
sn. - 159
' h liontc et le (li.'shnnnetir sur mes cnfans. — D. A
quel aulre parti tous ^^Icsvows ensuite arrêtée i* —
A celui d'un duel. Les hommes, me suis-je dit,
se battent entre eux pour les motifs tes plus futiles,
pourquoi tes Temmcs dc kg Jiailraipnt-elles pas
aussi , surtout fjuand elles en ont le plus grave
sujet!* Ce n'est pas Iq courage qui leur mnuquc ,
c'est ta singularilè du fait qui les étonne et qui
souvent les effraie ; car la morl ne se pr^ente pas
h leurs yeux sous un aspeet plus hideux que celui
sous lequel elle vous apparail. D'ailleurs le duel
me semLlail pallier la vJoIenee du moyen auquel
j'avais recours. — D. Savcx-vouB faire des armes ?
— R. Non , monsieur. — D. Cependant vous vous
He» battue à l'épée? — R. Il est vrai. — D. Pour-
quoi elioisir une arme que voua ne Bovet point
manîeri' — R. Quand on ne veut que donner ou
recevoir la mort , il est inutile de la donner ou de la
recevoir avec talent, avec grâce. — D. Pourquoi
D'avei-vous pas préféré plutât le pistolet ? Il ne faul
qu'avoir le coup-d'œil juste pour exceller dans le
tir, tandis qu'il n'en est pas de même de l'épée.
— R. «MTc Jwsàation : Je... je... n'aime pas les
«nnes qui.-, les armes Ji feu. — 1). Quoi ! pour me
•ervir (le vos propres expressions , vous ne craignez
ni de donner ni de rerevoir la mort , et vous ave»
peur de vous servir d'un pistolet s* L'accusée js^rde
le ailcDCc.
160 —HISTOIRE DES DUELS. -^
M. le président. — Qui a porté la premim
belle ? — Je ne saurai vous le dire , jY'tais ln»p
émue. Nous avons eommeiieé en même temps
Tune et Tautre. Mon cœur battait d'abord avec
force y et ma vue se troublait ; mais , après avoir
reçu une blessure assez profonde k Tépaule gaudie,
je ' repris toute ma fermeté , et je me précipitai
furieuse sur mon ennemie , qui me fit encore à la
main droite une autre blessure^ Je redoublai de
vigueur, et lui donnai un coup qui n^aurait su- *
rement pas porté ; mais par malheur elle voulut le
parer, et ramena sur sa poitrine Tépée qui sra
éloignait. Elle jeta un grand cri , et tomba à la
renverse. La croyant morte, je m^enfuis sans re-
garder derrière moi. Je ne sais comment elle aura
pu regagner son logis
Le procureur-général, dans un discours quia
duré plus de deux heures , s^est attaché priaci'
paiement à démontrer que Tassassinat était mani-
feste , puisque le meurtre avait été précédé d^uoe
longue préméditation , et que Faccusée déclarait
ellc-nirnic son intention de se défaire h tout pris
lie la veuve S>lvian.
Le (UTenseur a fait valoir la franchise des aveux
de sa <*lientc et les circonstances qui limitaient en
sa faveur ; il a [>rouvé (|uVIle ne pouvait être ac-
cusée de moni tre : 1 .« Parce qu^elle s'était ex-
— CIIATTrBF, XWIt — Ifil
j»osfp atilanl cl plus nirme que sa rivale , qui avait
sur elle l'immense nviinlage de savoir se servir d'une
arme qu'elle , Rosa , n'avail jamais appris fa manier;
2." pnrcc qu'elle ne pouvait i^lre convaincue de
diicl , et que la loi u'ayant poinl prévu le duel
itrc femmes, elle devait être absoute.
l^e jury , après une tr6s-courlc délibération , a
iquîtlë Jcssy Rnsa Crauby , b ta majorité de dix
BiK contre deux.
Weltc sentence n'a pas élé plutâl connue au de-
kn , que des nrat unanimes se sont fait entendre.
BÎthummes, qui allendaient Taecusée )i sa sortie
i l'audience , se sont emparés d'elle ; l'ont placée
ir un brancard , malgré sa résistance , et l'ont
triée ainsi en triomphe jusque chez elle , aux
ïplaudissemcns de la multitude.
^Ou peut conrlure des nombreux exemples cités
ne le duel n'a jamais en en Angleterre le même
bvetére qu'en France. Si la comparaison est loin
Itire II notre avantage , cela tient bien ccrlai-
it à des différences essentielles dans le ca-
rtérc cl les mœurs des deux peuples ; mais cela
nt surtout it la jurisprudenct^ des tribunaux bri-
Buiqucs sur les injures privées.
Le magistrat anj^lait ne refuse ni ne marchande
( reparution d'aucun tort. Lfi , le jury , il qui
il
162 — nrsToiRE des dubls. —
sont (liTérécs les muses criminelles de tous les dé-
grés el inrmc en certains cas des causes civiles,
comprend toute IV'tenduc de sa mission. Là , on
est bien moins souvent tenlé de chercher dans
les huzards d^un combat une satisfaction qu^on
est assuré d^obtenir par les voies légales; là, on
peut plaider en toutes matières sans craindre, ou
la capricieuse indifTérence du juge , ou les malins
commentaires de Topinion.
L^infidélité conjugale , par exemple , esl envi-
sagée dans les mœurs graves de nos voisins d^outr^
mer bien plus sérieusement que partout ailleurs.
On sait à quel taux énorme s^élcvent ordinairement
les condamnations pécuniaires en matière dWul-
tère criininal conversation, et Ton se souvient qu'un
monarque lui-même n'a pas craint de déférer au
parlement un procès de cette nature.
La caricature en Angleterre , au lieu de servir
à d'ignobles passions , y fait Toflice de Tancienne
comédie française ; casligat riderulo mores. Une
de celles qui eurent le plus de succès à Londres
dans ces derniers temps, représentait un mari qui,
après avoir provoqué en duel le séducteur de sa
femme , recevait de lui le coup mortel en s^écriant:
Je suis satisfait.
Une des nombreuses JRcvucs qui se publient dans
la Grande-Bretagne , ayant inséré en 1823 quel-
»- CHAWTRK xxxtt. — 163
qncs lignes offensantes pont la femme d'un gcfi-
tleman , lYcrivain poursuivi eti justice fui con-
damné p«nr le jury h une indemnité de 10,000 liv.
Blerl. (250,000 francs).
Un anglais nommé Watson , ayant insulté un
juge de paix qui venait de prononcer contre lui
une sentence , fut condamné pour ce fait à 3,000
livres sterl. de dommages-intérêts (75,000 francs).
On pourrait multiplier à Finfini des exemples
semblables qui prouvent avec quelle sévérité les tri-
bunaux britanniques répriment les injures privées.
LÀ tout est grave , tout se passe au sérieux. En
général on y fr.ippe fort sur la bourse , et c'est
là frapper juste (371).
CHAPITRE XXXIII.
DiH»ls en Daiioniarck , Islande , Suéde et Norwpgc.
Nors arrivons à TEurupe ccnlrale, à la Icrre
clas$i(}iie du duel, nous sommes dans Fancienne
Germanie. Les peuplades qui en habitaient la partie
septentrionale appelée Scandinavie , laquelle com-
prend le Danemarck, la Suède et la Norwègp; cellw
(|ui occupaient les contrées limitrophes, telles que
le Holslein , le Jutland , le INIecklembourg et la
Hassc-Saxc , d'où sont sortis les Anglo-Saxons cl
les Normands , se distinguaient parmi toutes les
tribus germaines par leur férocité. C'était Ih que
semblait s'clre conservé sans aucune altération le
type des mœurs primitives que ces hordes sauvages
avaient apportées de l'ancienne Scythie.
\u fonds de ces solitudes immenses , mysté-
rieuses , inexplorées, se cachait appuyée aux glaces
polaires et protégée par d'affreux climats, une iné-
puisable pépinière de barbares, ojfficma hominuni,
toujours hostile h la domination grecque ou ro-
— cn.ii'iTnp wxrrr —
aine. Depuis les icmps lus plus reculés , c
ri'paircs du Nord inucccssiltles aux armes des
conquéraDS de l'univers, comme ils l'uTaicnl éli
Ëea de Cynis, de Darius, de Philippe cl
andre-Ie-Grand, vomissaient périodiquement
Midi l'excMant de leurs populations ({u'ulti-
raicnl sur les lerrca de TEmpirc lesjouissanccadu
luxe et de la civitisalion. Les premières mi^alions
nbrigèreat nature llemcnt vers les parties les plus
lentrionales en longeant la mer Balliquc. Elles
iblaicnt soumises aux luis naturelles qui règlent
passage de ces grandes troupes d'oiseaux du
tl, qu'on voit loujours prendre leur vol vers des
Hrta analogues h ceux d'où les cliasscol les varia-
% des saisons. L'une des plus andennes eut lieu
I la couduile d'Odin ou Wooden, à qui ses
ploîls Ctent dCcerncr des honneurs divius cl qui
^le Mars de la Scandinavie.
jes peuples , qui ont étC- nos pères et qui existent
lore sous laul d'autres noms dans les deux pre-
a parties du globe, n'ont pns eu d'historien»,
me ces Grecs cl ces Rumains dont le nom cfTacé
r leurs armes viLloricuscs de la carte de l'Europe,
State plus tpie dans des mouumens littéraires qui
1 reodu leur langue immortelle. Nous u'iivuns
C nujounl'lnii sur les vainqueurs d'autre It'moi-
jc que celui des vaincus assez peu inlércssi-s sans
166 «- HISTOIRE DES DUELS. -^
doute h en flatter le portrait. Nous ne connaisscmi
sur ces races liyperborées des Scythes, desGétes,
des Da(*es , des Sarmatcs , quelquefois Taincui ,
plus souvent vainqueurs et toujours indomptables,
que ce que nous en ont appris Hérodote , Ctésias,
Pausanias, Dion-Cassius , Diodore de Sioile, Stra-
bon, Plutarque, etc., tous historiens ou géographes,
et mi^me plusieurs poètes.
Parmi ces derniers, le plus remarquable est Ovidoi
Condamné à vivre avec ces peuples dans un long
et douloureux eisil, mieux que tout autre il a en
le loisir et la facilité dVn étudier les mœun.
L'auteur dos Tristes qui mourut à Tomes , sur le
Pout-Euxin , vers PemboucliuFe du Danube , nous
a laissé une peinture assez sombre de ces contrées
inhospitalières. Ce qui s^ rencontre de plus pré-i
cieux pour le sujet de cette histoire , c^est ce dis^
tique significatif où le poète dit qifon ne con-»
naissait d'autre droit parmi ses hôtes que l^injuste
intervention du glaive , et que \e\xr forum se cliaH'*
geait souvent en une arène sanglante.
Adclc qiiod injustuin rigide jus dlcîtar ense,
Dautur et in medio vulncra sirpè foro.
Ces peuples n'invoquaient d'autre dieu que celui
des combats. Thcmis avec ses attributs eut été pour
çux une divinité tout aussi rationnelle, en auppo-
— CHAPITRE XXXIII.— 167
sant que Tèpée, qu^on lui mcltail dans la maÎQ
droite, n^était qu^un coulrc-poids pour la balance
quVlle tenait de Faulro.
Quelques temps auparavant , les Romains avaient
fait aussi connaissance avec deux tribus célèbres
d'origine Scythe ou Sarmate, venues des bords
de la Scandinaire , les Cimbres et les Teutons.
Ce fut la première irruption germaine qu^ait vue
le Midi de l'Europe , vers Fan de Rome 040.
Elle s'est divisée en deux branches dont Tune ,
après avoir ravagé les («aules, se jeta en Espagne
d'où elle fut chassée par les Ccllibéricns; Taulre ,
après avoir passé sur le corps de plusieurs armées
romaines, avait pénétré en Italie où elle fut exter-
minée par Marins. L'a.spect féroce, la haute stature,
la force de corps , les armes et la manière de
combattre de ces nouveaux ennemis, étaient pour
le» Romains un grand sujet d'étonnement. Aucun
de ceux-ci ne se montrait empressé d'accepter les
nombreux défis en combat singulier qui leur arri-
vaient à chaque instant des rangs opposés.
Quelquefois même ces défis consistaient à offrir
aux Romains de convenir d'un jour et d'un lieu
déterminé pour combattre avec un certain nombre
de troupes , comme celui ({ue Boiorix , roi des
Ombres , vint adresser h la tOte du camp h Marius ,
qui Taccepla. Plltarch. , i/t Mario , j)ai^> 140.
108 —HISTOIRE DES DUELS. «
Après lu double victoire des Romaini sur kâ
Cimbrc^ct les Teutons , ou vit un horrible spcctack
c[ui prouve cpie le suicide nY'Iait pas plus étranger
que le duel aux mœurs de ces barbares.
Les Teutons s^tant mis en ligne les premiers , fu-
rent les premiers exterminas. Pendant la déroule, iea
femmes grinçant les dents de rage et de douleur, et
jetant d'affreux hurlemens , frappent également'
avec des haches et des épées sur ceux qui fuieot
el sur ceux (]ui poursuivent ; elles se font liacher
en pièces et montrent jus<]u^à la mort un invincible
courage. Plltarch. , loco lU ypag. 127.
Arrivés h leur tour , les Gimbres éprouvent lo
mcme sort. Leurs femmes surpassèrent encore ea
(H>uragc et en desespoir celles des Teutons. De*
bout sur leurs charriots, vêtues de robes noires
et armées de longues piques, elles attaquaient les
fu}ards, massacrant leurs fils ou leurs pères, leurs
frères ou leurs maris. Elles étouffaient leurs pcliti
enfans de leurs propres mains , les jetaient soui
les roues des charriots et sous les pieds des chevaux,
et se tuaient ensuite elles-mêmes. Les unes s'entre*
gorgèrent avec les armes dont elles s'étaient saisies,
les autres s'étranglèrent avec leurs cheveux dont
elles se firent des cordes qu'elles attachaient aux
arbres ou au limon de leurs charriots. On en vit
une qui s'était accrochée au bout de son tiœou
— CHkPlTRB XXMll.— 109
is deux fils pendus h ses jikrds. Les liomnics
fnutc (l'arbr€9 où ils puBs<!iil sit pendre , se (luasniL'til
au cou (les sœudâ coulnne ([u'ila ulUioliaienl eux
Mme» ou aux jambes des birurs, ol piquant ensuite
Bto aiiimaux ils étaient ëcra^i^s ou ùlrangif's. Ce
qui put Échapper It ce désastre de Cimbres et de
Teutons se relira vers la grande presqu'île Scan*
dinavc, d'où ils étaient venus. Onus, lib F, cay, 26.
Florus, Mb. m ,
•ap.
S est impossible de suivre toutes les traosfor-
a quVnt subies les diverses cuntr^iis du nord
t lu Gurmanie, au milieu de ces inondiiliuns si
(kqucntes de populations étrangères qui se suc-
ient le» unes les autres , se poussant et se
|)ouB8ant , comme le flux et le reflux de In mer ,
ndantles siècles qui ont précédé cl suivi immÉ-
t la chàte de l'Empire lomoin. La con-
•ion , que des révolutions si Tréquentcs et si pru-
ides ont jetée dans les récits des historiens , no
ne que doutes et incertitudes. Cependant les
eienncs chroniques nationales du Danemarck el
I la Suède font remonter h des époques assez
lOuléea , la série des premiers cheFs on princes de
Ipays. Qnuique l'existence dt^ ces pcrsuiuiages el
plus forte raison les ai:tes qu'on leur allribue
Ù^UX rien d'aulliciiliquc , il se U-ou\o dans ces
170 — niSTOlRE DES DUELS.—
récits dos traits de mœurs qui offrent une couleur
\raiincut originale et qu^on ne saurait considérer
romme de pure imagination. Tels sont ceux qui
nous montrent l'usage des combats singuliers au
fonds des plus anciennes traditions Scandinaves.
Les rois ou chefs militaires s'en faisaient une habi-
tude et aimaient à se mesurer ainsi non seuIemeDt
cutr'eux , mais même avec leurs propres sujets
Va\ voici quel({ues traits lires des diverses chro-
niiiues des anciens peuples du Nord.
Je passe sur l'histoire du fabuleux Haldan ,
prince et géant suédois , dont on raconte eutr'autres
merveilles ({uc voulant ravir une fille de son pays,
et ayant affaire h douze champions qui la gardaient,
il coupa lui chone et s'en servit contre eux comme
d\mc massue. Olacs Magnls, Ilist. gent. scpicnU,
Ub. /', chap. \XI,
L'an 9GC avant J. C. , Skiold, fils de Lolher,
roi de Dancmarck , combat contre Skat , prince
des Saxons, pour la main d^Alwidc , fille d'un
chef germain.
Le roi Ifadding tue en combat singulier Taslon,
chef d'une troupe de brigands. An 816 avant J. G.
Le roi Frothon 1.^' répond à l'appel de deux
soigneurs danois ses sujets , et les tue Tun après
l'autre. An 762 avant J. C
L'an 595 avant J. C. Le roi (lelgon tue en duel
— CHIPITBE XXMir. — 171
mding, chef des Saxons, qui l'avait provoqué
îr été vainni par lui en bataille raiigév.
P Vers la iiii*me époque, Ubbon, Tut» des chefs
de Tarméc danoise , provoqué par un Vandale
d'une forée et d'une grandeur fxtraordinairea , se
Fuit avec lui el le tua. Les Vandales furent alors
ïîgés de payer tribut aux Danois.
Attila II , roi de Suéde , qui rfgnait vers l'an
du monde 8367, appela en duel F"rowin , préfet
de la Jutlie ou Julland , cl le terrassa.
L'ail 433 avant J- C. , Ilordenwil , souverain du
Jutland , appelle en duel Coller , roi de Norwège ,
et le lue. Cette nx^me province du Julland fut
réunie au Danemarclc, h )n suite d'un duel entre
Rov , prince danois , et Ilunding , chef des Sa-
■tau. Albert Krantk, rer, Cermanit. Script. Sa-
Htfiia, lib> I, cht^, IF', pag, 7.
HV^ennand , roi de Danemarek , était devenu
Hviigle, et son Gis Uffon passait pour insensé. Le
roi des Saxons voulut en profiler pour s'emparer
de la couronne. Il assembla une grande armée
et fit proposer un duel entre son fils et celui du
roi , pour décider b qui appiirliendrail la cou-
ronne. Uffon, présent au discours des andiassadeurs,
Eortaiil tout-Ji-coup de l'espèce d'imbécdtilé où nn
"le croyait, j^llcz dire à wVe maiti-e , a'écrie-l-il ,
] 72 — II ISTOIRE DES DUBLS. —
que TT'crmand a un fils en état de lui succéder et
quil ojjrc non seulement de se battre contre leJUs
de votre souverain , mais encore centra tel second
quil voudra choisir parmi les bravas de son pays*
On convint que le champ de bataille serait dans
Pile formce par le fleuve Eyder. Le combat eut
lieu en présence des deux armées et du vieux roi
aveugle , (pii avait juré de se jeter dans la rivière
si son ills succombait. Uflbn triompha des deui
champions qui entrèrent en lice avec lui. I^es
Saxons se soumirent dcs-lors au joug qu^ils avaient
voulu imposer à leurs voisins, u Ces combats sin-
guliers, ajoute rhistorien, étaient presque toujours
plus décisifs (pie des batailles générales, et les diffé-
rens entre les princes se terminaient promptcment
et sans beaucoup d^eflusion de sang. » Au 333
avant J. C. Ibîd. , chap, VJy pag* 8 et seq. (372).
Frothon 11 ayant entrepris de réunir la Norwêge
à ses états , appela en duel et vainquit dix des prio-
cipnux seigneurs norwégiens. Il lui restait à triom-
pher de Roger , roi de celle contrée, prince fameux
pur sa fore e et son adresse , et surtout par la répu-
tation qu'il avait croire magicien et invulDèrablc.
Frothon le combalùl et le terrassa , et la Norvège
fui le prix de ^es virloircs.
l'Eric , seigneur de Norwêge et favori de Frotlion,
cul à combattre les armes à la main tous les seigneurs
(Mil- 173
TIii parti opposi!-. Il resta Taiiir(iieur ilans tous ces
ddcis qui étaient olorfl fort comniims, ajoute Vhia-
torieii , puisque l'olTcnsÈ irnvnil aiii'iiii autre movcii
«l'obtenir salisrnction. Il uiirail pu ajouter que lu
force 6t)til la seule loi du temps Juan. Mabten. ,
tChrm. Norwfg.
tL'on I" de J. C. , Alaric, roi de Suède, en guerre
BC Gesliblind , roi des Goths orientaux , loi oITrit
de dtcider leur querelle dans un combal singulier.
Mais Eric, fevori et gtnéral de Frollion ill , mi
de Danemarck, allié de GestiblJud , ne voulut pas
que le roi qui était dans un fige avancé, s'exposilt
ainsi k une mort certaine. Il se proposa lui-même
pour le remplacer. Les dcus ehampîons en vinrent
aux mains en présence des armées. Eric fut d'abord
asaez dangereusement blessé ; mais devenu plus
terrible par ses blessures, il s'élnnra sur son ennemi
çl lui porta un coup furieuTt qui Tétendil mort it
I pieds. Frothon établit Eric , roi de Suède
ityennani un certain tribut. Joaines Magï^us
Kft. rcr. Suec., cbnp. II!.
rFrotboD III, qoi Fui tué l'an IS de J. C. pai
! sorcière, après avoir régné quatorze ans sui
iDanemarch , la Suéde , r.\ngk-lerre cl l'Irlande
l une loi qui punissait les voleurs du supplice
I la croix, et soumeltait toutes les cou lest niions
IK chance» du combal singulier. Ce prince fut
liaomoias surnumoié le l'acijiijiiv (373).
174 — IfISTOiRK DES DUBLt. -^
Le bnrdc Iliarn, ayant charmé les Danois par
ses po^\sies, en fut i*lii roi au prt'judice deFridlef II,
Iirrilier du Iroue. Celui-ci cul recours à l'expé^
dienl à la mode et appela en duel son compétiteur
qui périt de sa main. Olaï Rldbekii , Atlanùca
L'f)sal, 1685 , iti-f^. — Lyscander de Antiq. Danic,
Ce même Fridlef fut ensuite provoqué par uo
enchanteur nommé Gunholme qui passait pour
savoir charmer le fer et Tacier , et nVn pouvait
être percé. Son adversaire s'en étant aperçu , se
serait servi du pommeau de son épée pour Ta»-
sommer. On sait que cette opinion des armes
charmées se maintint en Europe pendant tout le
cours du moyen âge. Ibiihim.
En Tannée 47 , les Saxons refusèrent de payer
h Frothon IV , roi de Danemarck, le tribut auquel
ils s'étaient soumis envers UfTon , vainqueur de
leurs champions, comme on Ta vu ci -dessus.
Ilama, chef de leur révolte, appela de nouveau
en duel le roi danois qui accepta le dé6 ; mais
Slarcather son amiral , ne voulut pas laisser corn-
hatlre le roi contre un homme de la lie du peuple;
il prit sa phice , et luttant corps-à-corps avec le
chef saxon , il h' vainquit à la manière des athlètes.
On prétend (pie ce combat se donna près de llam-
b()ur<]j (*t que celte ville tire son nom de la défiiile
de Ilama. Ce (*oml)at a été décrit d'une manière
— CHAPITBE \SX]II.— 175
rt pilloresqiie, par Albcrl Kranlz ; on en Irouver;»
leste aux Éclaircissemctts hislorit/ue.i (374).
L'an 133, un fameux athlète de l'armùe de
■ic m, roi de Suède, difie Hnldan II, roi de
memarck qui le terrassa d'un eoup de massue-
Le même Halilan, en l'année 140, lue aucoes-
remenl de la mi^me manière Siwold et Harlhben,
^«9 Suédois qui t'avaient provoqué. " Il était
B-ordinairc, dit l'auleur de V Abrégé chronolo-
}ue de l'Histoire du Nord, de voir dans ces temps
Msiers des gens de néant appder en duel les
nonnes riches ou de quelque nom , uniquement
us la vue de s'approprier leurs biens , leurs
imes et leurs fdles. » C'était le droit du plus Tort
ss toute sa primitive simplicité. Lacombe, Abr.
bron., tom, J.
.'an 201 , Haldan III veut épouser Guritlic , fllle
i^oD et héritière du royaume de Danemarck.
s celle-ci .l'ajourne jusqu'il ce qu'il ait fail quel-
action d'éclat. Heldan s'en va alors défier Alver,
ice suédois, sort vainqueur du combat et re-
it épouser Gurithe. C'est là dèjji de la vraie
Valérie. Po^tanus et Medhshis. Ilisl. Danic ,
II. — Zeileh de rcgiio Danic , cap. If.
Bxon-le-Grammairicn , historien danois du 12."
|ple, parle encore de combats du même genre
(re deux Danois IJogin et Ililliin. Celui-ci avait
170 -^HISTOIRE DES DVCLS.—
reçu la vie de Tniitre dans une première rencontre.
SV'tanl battu de nouveau sept ans après, ils s'en-
tretuèrciit. S\xo-Gramm\t. , flist» Danic , Ub» H,
Il n'y a pas jiisqu'h Tlslande, ccUc UlUma Thulc
des Anciens, soumise aujourd'hui au Danemarck,
oîi Ton ne rencontre le duel èrigè en însUtiition.
Am«;rimus Jonas, astronome islandais, disciple de
Tycho - Hrahè , auteur d'une histoire dMsIande ,
imprimée en 1 643 , nous apprend que le combit
avait lieu jadis dans cette tic pour les controverses
d'héritages et répétitions de dots. Les biens du vaincu
étaient adjugés au vainqueur , et celui qui refunit
1c combat était traité en vaincu. Ârtsgr. lossSy
Histor. cl elcscn'/fl. IslaïuU p. 37. Amslelod. 1643.
Le dernier et le plus mémorable des duels en
Islande eut lieu entre les deux poètes Gunnlang (a
la langue de serpent) et Rafn. Ils se battirent pour
la main de la belle Helga aux cheveux blonds, et
tous les deux moururent dans le combat. Le sort
de ces deux jeunes amans excita un commisération
universelle , et il fut arrêté dans l'une des plus
grandes assemblées populaires qui aient eu lieu en
Islande et (raprês Tavis des sages de ce pays, que
drsoniHiis le duel > serait complètement aboli (374)-
r.el iis:ige était conforme à ceux de la métropole
ou le rt)nil)at judiciaire sV'tait établi comme dans
les aiilrrs coiUrécs de l'Kurope.
çl rcmp
— cnAptTftE xKsiii. — 177
Selon Saxon-Ic-rirnmmniricn, !n jireuve par le
combat aurait ^-lé nliulic en Dnncmarck dès 081 ,
çl remplacée par celle du fer chaud , coutume aussi
uirde, mais moîus barljare. Ce fui sans doute la
itqiience de rélablisacmeiit du cliristianifime qui
ne pénétra que vera celte époque dans celle partie
de l'Europe. Mais celte réforme ne parait pas avuir
^jçu plus de succès que celle qu'avait tentée Char-
BSemagne, au siècle précédent /'(i|c2 loin. l,fi, 34,
B^<>f67.
^L Les anciennes lois suédoises étaient fort larges
^Mlans l'indiralion des cas de duels connus. On peut
^«n juger par celles que rapporte J. 0. Stiernhook,
jurisconsulte de cette nation. L'une de ces lois
s'exprime en ces termes :
i Si un homme dit Ji un autre ces mots outra-
wnta ; yous n'êtes pas un homme igal aux autret
î'owj n'a%-ez pas le coeur d'un homme,
I (pie l'autre réponde ; Je suis un homme aussi
Ion tjue vous; qu'ils i^e rencontrent sur le grand
lemin- Si l'agresseur paraît, et que l'oiTensé soit
scDt, que celui-ci soit réputé pire encore qu'il
b'm été appelé ; qu'il ne soîl poinl admis ii dunner
témoignage en jugement , soit pour un homme , soit
pour une femme, et qu'il n'ait pas le droit de faire
^Lfu testament. Si, au conU-airc, la personne qui a
^Ur'jii l'injure paraît , et que celui qui l'a faite a'ah-
178 — niSTOIRE DES DOELS. —
simte ; que l'offcnst' appelle son adversaire trois fois
à haute \oi\ , et (|iril fasse une marque sur la terre :
alors que relui qui s'est absenté soit réputé infâme,
pour avoir pron(»ncé des mots qu'il n'a osé soutenir.
Si tous les deux paraissent armés comme il convienl,
et que TofTeusé soit tué dans le combat , Fagresseur
paiera pour sa mort une demi-composition. Maisa
ra<;rcsseur est tué , que sa mort ne soit imputée qu'i
sa témérité. La pétulance de sa langue lui aura été
fatale. Qu'il reste sur le champ de bataille, sans
cpTil soit exigé pour sa mort aucune composition. »
Lcx Vplandicu apitd Stiernhook de jureSuenonum
ci Colliorum velusto y L'b» /, cap. f^II^ pag.li*
Jlolmiœ 1682, m-4.o
En Norwége, celui qui refusait de donneras*
tisfaction k un gentilhomme , sur un terrain où
trois chemins se croisent , perdait sa loi, et ne
pouvait plus jamais se défendre par serment m
servir de témoin. Loccemls , Leges fVest^Gothicœ*
Upsal , in-J^.
Un recueil de lois, publié en 1817, à Clopen-
hague, et intitulé : Gula-things-laws , Leges Gukh
tliiiigcnscs , contient plusieurs dispositions relatives
aux duels. La lievue d* Edimbourg a rendu compte
de ce recueil en 1820. L'auteur de l'article a
démontré « que Fliypothése de Montesquieu , sur
la liaison du combat judiciaire avec les preuves
— ciUptthe xsxnr. — 179
pilîvea, ne ponvnil t*lre npittic.ililc h \a Scan-
îi l'e mode de décider les diflïreiis ne
tidait pas d'un 9)slt-me régulier , mais i^lait
b1»Ius souTCUt exlra-judtciairc. Quoique les Sagan
Tiissenl plusieurs exemples de duels pour des
disrussior^ où il s'agisaait de proprî^-lè , de délies ,
de contrais, d^isurnpions, il «'"arrivail pas moins
fréquemment qu'on seballit pour de simples în-
tfts. Ctiacun pratiquait lu maxime du roi Frolhon,
t la Jorce dans les contvstations est un bien
nllmr arbitre que les paroles (375) . »
ft parait que dans ces eonlrées modèles et véri-
lemenl elassiques en fait de duels, on tenait il
teïrvcr toute la pureté primitive des anciens
^63. Ainsi on ne pemicllait pns, comme partout
leurs, de se battre par procureur. « Il serait dilTi-
fe, dit la Revue d'Edimbourg, de eiter un seul
impie de l'emploi d'un champion en Scandinavie,
soins qu'on admette l'autorité d'une ballade da-
Ew dans laquelle, selon l'intrigue ordinaire des
nans, une femme est justifiée par le bras de son
•nt d'une accusation calomnieuse. Il est singuber
e, conformément aui routumcs tciitoniqiies, on
ccordflt pas de ibampion nu sexe le plus faible.
le femme appelée par nn bomme au combat était
Bgée de se battre en perNomic. Ou inventa nu
180 — HISTOIBB DES DUBLS. >-«
singulier eipèilient pour égaliser jusqu^ii un certain
point la force des rombattans. L^liomme était pour
ainsi dire planté dans un trou creusé dans le lerrain
et asficz profond pour qu^il y fût enfoncé jusque
la ceinture. Cela donnait un grand avantage à la
femme qui pouvait tourner autour de lui et loi
frapper la tête avec une courroie ou une fronde
garnie d^unc grosse pierre à son extrémité. L^bomme
était muni d'une massue , et si en cberchant à
atteindre la femme il manquait trois fois son coup,
de manière que la massue frappât trois fois le sol,
il était déclaré vaincu. Edimburgh Ilet'iew, aoà
1820, lom. XXXIV, p.\l% et siiw.
Le législateur du Danemarck , Cbristiem V, pu-
blia vers la fin du 17.® siècle, un code de lois qui
est encore aujourd'hui en vigueur. Le chapitre 8.*
du livre VI, traite du duel en quelques articles
dont la sagesse , la simplicité et la précision laissent
bien loin en arrière tout le luxe verbeux des ordou-
nanres contemporaines de Louis XIV. On trouvera
aux Eclaircissemens hislonques , le texte latin de
ce chapitre (376) .
Les lois de Suède de la même époque présentent
avec celles du Danemarck cette différence remar-
quable que celles-ci s'appliquaient à toutes les
classes de citoyens , tandis que les premières ^
— CK*piTnE xxxrn— 181
imme celles de Louis \l V, ne s'occupaietil que de
qui se passuil f>ormi les membres de la noblesse.
Le Duel cnirc GeniUshommcs , dit l'aulcur An
Yyibirgè ehivnolegù/iie de rilisluirc du Nord, est
puni d« mort en Suède , et la mémoire du défunt
comme du survivant est notée d'ioftlmic. Si aueuti
des deux anliigonistes n'est tué , ils sont uundnmiiés
à dcu^ ans de prison , au pain et k l'eau et à une
iBKBde pécuniaire. Toutes les uflàîrcs concernant
point d'honneur sont renvoyées b la cour nalio-
Ic <ic chaque parlic, où l'on oblige Tagresseur k
rétracter el k lairc une réparation pidiliquc
IPofleDsé. Lacomde, Abivg. v/imu.^tûin. 11.
L'époque du régne de Gustave H, dit le Grand ,
nilciii[»orain de Louis X 111 , fut celle de la plus
•»de ferveur du duel dans toute l'Europe. Ce
Hiartpie, jalnux , comme tous les princes guer-
tn , de maiitlenir une bonne discipline parmi
■ troupes et de réserver le sang de ses braves
mtre l'entiemi , avait défendu le duel sous des
aines sévères qui n'avaient produit ipie peu
teflel. On cite k cette occasion l'anecdote suivante
souvent exploitée depuis , dans les romans el
ir le tliéàtre.
Au temps de l'expédition d'Allemagne que les
uédois infectèrent de la euntagion du duel qui y
182 — IIISXOIJIE 1»FS DUELS.—
élait assoujiir ilepuis long-lciiips , cutnme on ie
verra nu cliapUre suivant, Ciuslavc apprit un jour
que deux ulUeiers de son armée s'étaient donaé
un rendeZ'Vous. IJ s'y trouve le premier : les cora-
baltaus arrivent k leur tour; mais déconcertés k
la vue du roi , ils veulent se retirer. Au même
instant ils aperçoivent le bourreau qui se tenait
debout auprès d'une potence au pied de laquelle
était un cercueil , le tout destiné au survivant.
A/ainlenantj Messieurs, leur dit le roi, vous pouviez
cotfimeiiccr. On pense bien que le duel eu resta li.
Gustave avait sans doute emprunté Tidée de cet
expédient, aux combats judiciaires du moyen âge
où Ton voyait toujours s'élever dans la lice, soit
une potence , soit un bûcher. Alors il n'y avait
pas besoin de bourreau , le survivant eu faisait
l'office. On avait vu d'ailleurs au siècle précédent
les généraux de François I.*' en user à-peu-prés
de même en Piémont , en forçant les duellistes à
prendre pour champ clos un pont très-étroit jeté
sur une rivière. /'. ci-aprcs c/uip, XAW'/^'J (377).
Le duel au temps présent n'offre rien de par-
licuhèrement remarquable en Suède et en Dane-
marck. 11 n'y est pas plus fréquent que dans les
Etals voisins de la Confédération germanique y où
nous allons le suivre. Ou le retrouvera dans cette
^CHAPITRE xyxiîi. — 183
partie cenlrale de l'Europe , avec ties caraclères
à-peu-près identiques pour les temps modernes ,
mais avec des nuances bien moins tranchées dans
les temps antérieurs. Les souverains de ces contrées
ne se feront pas un titre de gloire , comme les
chefs Scandinaves des habitudes du champ clos.
L^influence méridionale sur les mœurs se fera
particulièrement remarquer, et plus on avancera
Ters le Midi, plus on sentira s'adoucir cette aprité
primitive du Nord. On verra s'effacer graduel-
lement le vieux germanisme des enfans d'Odin.
11 avait bien pâli déjà aux temps de César et de
Tacite dans les physionomies d'Ariovisle et d'Ar-
miuius.
CHAPITRE XXXIV,
Duels en AHcmagno; Autriche. — Pruiio, -«Baviàrc,
— Etats-Confédérés,
Dr mémo que le» Cîmbrei , lea Teutoni , l«
Alains, les Hérules, les Lombards, les Angles oii
Saxons occupèreQt le nord de la GcrmaDÎe, uno
foule d^auires tribus barbares» de la même origine,
tels que les Huns , les Vandales , les Golhs , les
Suèvcs , les Francs , les Burgundes , les Allemands,
se répandirent dans les provinces du midi. Ces
derniers donnér<3nt leur nom h la plus grande part»
de la vaste contrée du centre , comme les Francs
le firent pour la partie occidentale.
Tous ces peuples vivaient ensemble dans un étal
de guerre continuelle , se renouvellant et se pout^
saut les uns les autres comme les flota de la mer.
Tacite remarque que quand une tribii gennaine
voulait entrer en guerre avec Tautre , elle cherehiit
h faire queUpie prisonnier qui put combattre avec
un des siens, et qu'on jugeait par révéncmeoi de
r combat du succès de l» guerre. Alcxandrc-
lL--<irai](l, Belon Pliilarfjuc, fit prt<-i*"^nieii1 la mi'mc
rlio»e avant d'aller comliatlre Dnrius (378).
1^ Depuis cette invasion des Cimbres et des Teutons
I^DÏ avait révëI6 aux maîtres de l'uuivera des
'ennemis dignes d'eux , une foule d'expéditions
romaines plus ou moins in truc lu eu ses , avaient
inutilement menacé celle terre de l'indèpendancc.
rKî Cé*ar, ni Drusus, malgré aon surnom de Ger-
■toanicus , ne purent y faire de solides conquf-les.
Cnligula ne s'y présenta avec deux cent mille hom-
mes que pour fuir sans combattre. Les Ariovistc,
,Jc» Arminius et les Civilis pouvaient placer leurs
IDnii k cdtù de ceux des plus habiles chefs de
himèe romaine.
• l>éjk bien auparavant, un autre moyen que lu
rce des armes avait ét6 tenté sous Auguste pnur
mmctlre les Germains. On avait cherché à changer
■ mœurs de ces peuples féroces <|ue la force dca
mes ne pouvait dompter. Avec beaucoup de
ttUence el de ménagement, par des cliangemcna
iiccessifs et imperceptibles, on voulait les rendre
tomains , avant qu'ils se fussent aperçus iju'Us no
{■semblaient plus h leurs anc(!'lres. Suivant Vcllcius-
telcrculus, un lieutenant de César, Scnltus Sa-
InitiHia , avait commencé ce grand ouvrage «veo
RKlijues sucucs. Mais il eut pour sueeesseur Quin-
IS6 — HISTOII^E nu DUCLf . —
tilius VariiN , |M!rs<»iinage beaucoup moins adroit ,
C'K qui ne «^c doutant pas a quel peuple il avait
afTaire, s'a\isa de vouloir brusquer les rëfunnes et
liuil par loi il perdre.
Varus afliclia d\tbonl la prétention de faire
renoncer ic4 peuples germains à Tusiige des Dueb.
Il voulut s\Ti;;er en arbitre de leurs diffèrens, et
k*ur faire goûter les formes de la jurisprudence
romaine ; c'était là précisément ce qui leur répu-
i;nait le plus. Néanmoins ils feignirent de s\' prêter
de bonne grâce. On les vovait accourir en foule
à Taudience de Varus , plaider devant lui , se sour
mettre à ses jugeroens et le remercier de Theureui
cliangemcnt (|u'il avait intro<luit dans leurs mcnin.
C'était une comédie qu'ils jouaient et autant de
procès imaginaires qu'ils inventaient pour douDcr
au gouverneur le plaisir de juger et entretenir m
sécurité. Hientôt après quand tout fut disposé |MHir
l'insurrcctitMi, ils se levèrent en masse au signal
d'Anniiiius et anéanlirent Varus et ses légions-
Vellliuîj-I'aikrc, Hisior., lit}, II ^ cap, 1 18 (379).
Apro les arnie'j roinaineii, vient la féodalité dont
le berceau se lioiive encore dans la belliqueuse
Ijermaiiie l'aciie en <i si;;iialé l'origine dans (*cs
ioinilc.s ou Noluhluiio qui engageaient leur f<ii
au i)nA ou chef, pour le ssuivrc à la guerre et que
*- CHAPITRE XXIUV.— 187
celui-ci récompensait en leur partageant les terres
des vaincus pour lesquelles on lui rendait liommagc.
L^hislorien romain a encore remarqué que la
plus grande injure chez les Germains était de dire
de quelqu^un qu'ail avait abandonné son bouclier.
Cette susceptibilité , qui s'accorde si bien avec les
mœurs toutes guerrières de ces peuples, était même
consacrée par leurs lois dont la rédaction est bien
postérieure au temps où Tacite écrivait.
ce Dçs peuples guerriers, dit Roberlson, étaient
extrêmement sensibles à tout ce qui pouvait blesser
leur réputation comme soldats. Si un homme eu
appelait un autre lièvre, ou s'il l'accusait d'avoir
laissé son bouclier au champ de bataille , il était
condamné à payer une grosse amende. Lcg. Salior.
tUm 32 f § 4, 6. Par la loi des Lombards, si
quelqu'un appelait un autre arga, c'est-ii-dire ,
qui n est bon à rien, celui-ci pouvait sur-le-
champ défier Tautre au combat. Leg. Longobm
/. 1 , tîL 5, §. 1. Par une autre loi des Salieus, si
quelqu\m appelait un homme cenitus , terme de
reproche équivalent à celui iïarga, l'amende qu'il
était obligé de payer était fort considérable. Tit. 32,
§. 1. On peut voir dans Paul Diacre l'impression
terrible que celte expression outrageante lit sur
Tun de ses concitoyens , et les funestes cllcls qui
iuitireut cette insulte. De Gcàl, Long. l. 0, c 24.
188 •* HISTOIRE DBS DUELS.—
Ainsi CCS principes du point d^honneur , que nous
sommes portés à regarder comme un raffiBemeiit
moderne , et Tusagc des duels qui en esl une suite,
furent le résultat des idées et des mœurs de nos
ancêtres , dans un temps où la sociabilité n^afait
encore fait ches eux que très-peu de progrès. HisL
de Charles^ Quint, totn. I , pag. 372. Paris 1827.
L^influencc du cluîstianisme lit s^élendre Tusage
des compositions en denrées ou en argent qui
diminuèrent les cas de duels par la satisTactioo
quelles donnèrent aux oflenscs. ce Ce fut, dit Ro-
bertson, le premier expédient ({u^un peuple grfMBor
imagina pour arrêter le cours du reasentimcDl
personnel et pour éteindre ces Jaidœ ou vengemcei
cruelles qui se transmettaient de parens à parois,
et ne s^appaisiiient que par le sang, n Uorigioe
de cet usage remonte jusqu^au temps des ancieot
Ocrmains et n^a pas échappé aux remarques de
Tacite (380).
Ces taxes furent d^abord établies par une con-
vention volontaire entre les parties opposées, ce
qui les fit appeler com/yo.v{7iWi5. La loi des Frisons,
tit. H , §. 1 , laissait toute la composition à la di»-
rrétion de rodensé avec lequel Toffenseur denit
s'arranger comme il pouvait, quoquo modo poluefi*
La seconde manière dont on fixa ensuite ces
amendes fut de s^en remellre à la décision de quel-
nv. - 18»
tfUB% arbitres ; de Ik vient le nom J'amialilc com-
IMiutcur , amicabiUs com/iosiuir. Oit trouve un
«xempli: de ces mMiatioiis <)»n8 une de ces formules
du VI.' néclc, nppek-es J-'ormulte Àiidcga^enses ,
qui se trouvent BU recueil de I). Bouquet, tom, IV,
pag. 566. Ces arbitres devinrent pur la suite do
virilables juges, et le droit de régler les cumposî-
lions fui une des principales branches des juridic-
tions seigneuriales.
Ce fut alors que s'élnblil une prestation d'un autre
genre qui devînt l'accessoire de la composition.
On l'appela /ra/um nu amende. Elle existait d/ji
(lu temps de Tacite (381). Mais alors elle se payait
è l'Etat. Plus lard , elle devint le profit Je celui
qui rendait la justice et fut une véritable âpice ,
en sorte qu'une fois le procès commencé, toute
riconcibation était interdite sans le consentement
du seigneur justicier à cause de son droit acquis
xaji-eilum. On en trouve un exemple remarquable
dans une charte accordée b la ville de Fribourg
en Briagnw, en 1120 (382).
On en trouve encore un autre exemple dons un
décret de Clotuire U de 59<i, cité par Montesquieu,
Eiprildes Lois.Uv. XXX, clui/i. 19, qui dcfcndit
en eas de vol de recevoir des compositions t'ii
secret et sans ordonnaure du juge.
(juand une composition avait été acceptée , toute
190 -* HISTOIRE DES DUELS.—
espèce d^lioslilités devait cesser immédialenient^ et
rofTcnsé devait confirmer par serment sa récon-
ciliation avec la partie adverse. La loi des Lombards,
/iV. I y fît. 19, §. 8, en contenait une disposition
expresse. La partie lésée devait même remettre k
celui qui avait payé la composition un billet de
sûreté dont Marculfe, /iV. //, §. 18, nous a con-
servé diverses fonnules. Toute infraction k cca
règles était traitée comme un acte de rébellion à h
loi et punie de peines sévères. Foyezla loi des Lom-
bards, /iV. I, fit. 25, §. 21 , et le capitulaire de
Oiarlemagne , de Tan 802 , chap. XXXII.
La môme chose avait lieu en France. Grégoire
de Tours donne les détails d^un procès oii une
partie perd la moitié de la composition qu^elle anit
obtenue, pour sVtre ensuite fait justice à eUe-méme.
Gregor. Turon , /zV. VII y chap. 47.
On trouve de nombreuses dispositions qui s^ap-
pliqucnt à ces formes de procéder dans toute Fan-
cienne législation germanique, notamment dans les
lois Salicpie, des Angles , des Bavarois , des Frisons,
des Burgundes ou Bourguignons , des Lombards et
des Allemands. Celte dernière loi permettait de se
faire justice à soi-même , mais seulement dans le
premier mouvement de la colère.
a Toutes ces lois barbares, dit Montesquieu,
étaient d'ime précision admirable. On y distingue
— CHAPiTRK xxxnr. — 191
a^ec finesse les cas ; on y pèse les circonstances. La
loi se met à la place de celui <{iii a été ufTensè, et de-
mande pour lui la satisFcU tion (|ue dans un moment
de sang froid il aurait demandé lui-mc^me. » On
trouvera aux Eclaircisscmvus hisioriquvs quelques
citations de ces vieux et iuléressans monumens de
la législation de nos pères , qui pourraient faire
iionte à la plupart de nos réglemcns de i>olice
modernes (383).
Lorsque ces codes eurent été établis avec les tri-
bunaux qui devaient les appliquer , le duel nY^xisla
plus que comme preuve des accusations criminelles,
quand on n'en trouvait pas d^autrc , ou (pie Tesprit
féodal en lutte avec Tesprit religieux fit rejeter le
serment et la preuve par les élémens ou Ordalie,
qui, sans être plus décisive que Tautre, épargnait
au moins le sang humain. Le zèle des seigneure
allemands pour défendre le duel judiciaire sans
cesse attaqué par le clergé , fut le même qu^en
France et en Italie comme on le verra encore ci-
aprés au chap. XXXVI.
Dans tout le cours du moyen Age l' Allemagne
fut désolée par les guerres privées que se firent
entr'eux les seigneurs. La Trêve de Dieu , Trelgi
Dei , vint aussi en tempérer la violence comme en
France. Un édit de Tempereur Guillaume de 1255
192 — niSTOlAB DBi DUELS. ^
Ict défendit , mais sans succès , et ce ne fut qu^eii
1405 y qu^on en vit cesser entièrement Fusage par
rétablissement d^une juridiction souveraine qui de-
vint Toriginc de la Cionfédération germanique.
Datt, de puce pubL imper» , Ub» lit et IF. —
Pfeffel , liisU du droit pubL d'Allem^ — Lscooq
DE Vellkrmy, Traité du droit pybl. de VEmp.
Les efforts , que fit aussi Charlemagnc pour res-
treindre Fusage du combat judiciaire en Allemagne
comme en France, n^eurent pas plus de succès,
et ses trop faibles successeurs se hâtèrent de la
remettre en honneur et de les encourager mèine
par leurs exemples.
En janvier 820 , Bera , comte de Barcelonne
et gouverneur de Catalogne pour Louis-Ie-Dè'
bonnaire, vint à Aix-la-Chapelle se purger par
duel en présence de PEmpereur , d^une accusation
de fraude cl de trahison. 11 succomba , mais il
reçut grâce de la vie et fut exilé k Rouen (38i)
c( Du temps de LothairCf fils du Débonnaire,
dit La Colombièrc , la pratique des duels était lurt
fréquente en Allemagne et les gages de batailles*;
jetaient par les gentilshommes de la même façon
quY*n France. Le même empereur remit le divorce
ciu'il voulait faire d'avec sa femme Tlielberge , à la
dérision des nrmes, et présenta ses gages de bataille,
quoi(|ue le pope Nicolas lui fit grande instance du
— CnjPITBE TXXIY — 193
contraire. Au lieu du rombal , on se conienta de
l'^retive par l'cnu bouilbnlc que le champion de
rimpèralricc ronsenlil à suliir pour elle el qui lui
fut favorable. Lultiaire rcpril sa femme ; mais deux
an.o après clic ûl elle-même l'aveu de sa faute, et
Lolhaire voyant que ces preuves ne prouvaient
rien , en abolit Tusage (386) .
Othon i." , fds de Henri-l'Oiseleur , premier roi
de Germanie, lequel descendait lui-m(?me d'un chef
de ces Saxons dècimîs par Cttarlemagne , s'empara
de la couronne impériale qui écrasait le faible front
des descendans de ce grand monarque. Ce fui lui
qui ordonna en 942, ce duel célèbre dont il a déjà
été fait mention au tome I.", page 38, et dont
l't^jcl était de décider une question de droit sur
■It Kprisentalion en ligne directe .
^ « C'était un sujet de doute et de dispute, dit
l^hifltorïen , que de savoir si les enfana du fils de-
vaient être comptés parmi les enfans de la famille
el pouvaient hériter k égale portion avec leurs
ies , dans le cas où leur père viendrait h mourir
idaDt que le grand père serait encore vivant.
tint une assemblée pour délibérer sur cette
ion , el l'opinion générale fut qu'on la ren-
lit à l'examen et à la décision des juges, Mais
tpereur voulant suivre une meilleure méthode
\t la vue de Wuiter honorablemeiU luit peupU
194 ' — itisToni« DBS nttLs.^
et ses nôhles ^ ordonria que la question aef Ait déri-^
dëe par le combat entre deux champions. Cehii
ipti combattit en fayeur du droit des enfans fîit
irictôrieux ; et Ton établit par un décret perpétod
qu^iis partageraient à Fayenir Théritage avec leur!
Dvcles. » WnrmnrD-CoiiBEiTt apiid Liurierb, Préf,
des ordonn.y iom. I , pag. 38.
Ce même Othon fit prou'ver par le duel Tînao-
ée6cc de sa fille unique. Heureusement lé chann
pion de la princesse fat tainqueur. DiTmOKi
Chràn., pag. 399.
Cet eidperear ayait établi dans séê états une loi
de policé non moins bicarré. En cas de cètîmié
délits y les gens de là haute noblesse étaient con-'
damtiés k porter un ohien galeux sur les épaules;
ceux de la bourgeoisie une selle ; les ecclésiastiques
tkù gros missel et lés paysans utie chai^rue. Cet
Othoi^ L^ fut surnomme le Grand / FlAnoABD^
LviTFHARb et Bxiiofrius, AnnaL Écclés.
Othon II , fib du précédent , surnommé le San^
guinairey fut un prince aussi lâche que cruel. Dans
ime expédition en France qu^il yint rayagei^ en 974
jusqu^aux portes de Paris , il fuyait honteusement
deyant Geofiroi , comte d^Ânjou , lequel ne poiH
yant Tatteindre , lui enyoya un cartel pour le forcer
à s^arréter. « Mais , dit Thistorien de sa yie , Olhoa
refusa le défi , soit qu^il cr6t sa dignité au-dessus
m-.- 195
d*iiit combnt avec Geoflroî , toil quêtant cruel
il ne fùl point courageux, ji Di-thmar , loco citato,
U. III, Francforl-sur-VOihr 1727, in-foUo.
ftieti nVst plus horrible qn^un duel dont parle
tnar et qui eut lieu aous Othon 1(. Un certain
Bile, nommé Waldo , arcusa devanl l'empereur
(. autre comie , nommé Gi!-ro , qui fut aussilAl mît
Kprison. Tous les princes furent appelés à Ma^*
ïourp , pour assister au combat des deux comtes
i eut lieu dans une île. Waldo reçut deux bles-
es i la t^te ; mais il n'en poiirsim-it son ndrer-
re c|u'aTec plus d'ardeur et finit par le terrasser
tn coup qu'il loi porta ii la If'le. Alors on demanda
\to s'il t\s\\\ encore en étal d<? comballre , et
Bitne il déclara ne pouvoir le faire , il fut déca-
R par les mains d'un bourreau, carnlfice quodam,
par Tordre de l'empereur et des juges (386).
Othon III succéda à son père Othon II , à l'âge
t trois ans. Ce fut lui qui , en 1)88, au colloque
I Vérone et !>ur la réclamation des seigneurs
talie , rétablit le duel judiciaire dans certain ras
|( oo avait essayé de lui substituer le serment.
\ totn. /, ptig. 92 el 95, et la note 142.
iCe «ouTerain eut pour femme Marie d'Aragon
î fut la Messaline de son siècle. Les hislnriens
sa lie racontent qu'elle entretenait prés d'ellv
^ jeune garçon déguisé en GUe , lequel ayant
196 — NISTOIRB DES DUELS. -*
été découvett , fut condamné à être br61é tîf.
Bienlàl après , elle s^avisa de jouer le rôle de la
femme de Putiphar à Tégard d^un comte de Mo-
déne , qui , nouveau Joseph , avait résisté à ses
cajoleries. Elle Faccusa près de son mari , d'avoir
voulu la séduire. Le comte admis k se purger par
la voie du combat judiciaire , fut vaincu et con-
damné k perdre la tête. Au moment de mourir,
il révéla 4 sa femme toute la vérité et lui confia
le soin de venger sa mémoire. Celle-ci prit la
tête sanglante de son mari , qu^dle fît cacher par
un de ses gens sous son manteau , et se présenta
à Taudience publique de Tempereur pour lui de-
mander justice de ce meurtre juridique. Othon
frappé de sa douleur , lui demanda de qui elle
avait à se plaindre. — Devons , César j lui dit-elle,
et faisant rouler devant lui la tête de son mari,
Foilà, ajoule~t-elle, Vosuvre d'une horrible inùfukéj
et je suis prête à soutenir par lépreux^ du feu
l'innocence de mon mari contre son meurtrier,
L^empereur y consentit. On apporta un brasier où
rougissait une barre de fer. La comtesse Taurait
prise sans s^émouvoir entre ses mains et n^en aurait
éprouvé aucun dommage. Puis se tournant vers
Othon épouvanté d^un tel spectacle , elle eut la
hardiesse de lui demander sa propre tête, selon
Varrêt qu'il avait rendu contre lui-même , puisque
^cHAwniB TXTnr.— 197
était COOTaificu par celte épreuve d^avoir fait périr
tm innocent. Mais ce mari désabusé se contenta de
CTondamner lui-même sa coupable épouse à être
brûlée vive , ce qui fut exécuté à Modènc , en 998.
Othon j s'il faut en croire Albert Krantz , fut long-
temps inconsolable de la mort du comte. Il se serait
imposé lui-mén>e une forte amende à titre d'aumône,
se que qui prœcipitassct senlcntiam magno œrc
mulctai^it. Quant à la veuve , il aurait clierché à la
eonsoler en lui faisant hommage de quatre châteaux
€11 Italie. Alb. Krantz, Saxon la, lib. ly, f^^» 94.
Le judicieux Muhatori , de Aritiq. IlaK , regarde
eette histoire comme une fable. Néanmoins plus
de vingt auteurs dignes de foi Font rapportée
comme vraie. Ployez Clspimanus, in Othone III. —
«
SiGOMCS, Hisl, Italie. — • Baromus , Annal, Eccles.
— DiTHMAR , Script, rcr, Germanie. — Maimdourg,
Hisl. (le In (lit:a(l, de rEmp,,
Cunégonde, femme de rempereur Henri II, fut
plufl heureuse, lorsqu'accusée d'avoir eu commerce
avec le diable qu'oft voyait , disait-on , sortir de
son Ut tous les matins sous Ta forme d'^un beau
soldat, elle s'avisa pour se justifier, de l'expédient
à la mode du temps , cpii était de saisir des barres
de fer rouge qu'elle tenait comme un bouquet de
fleurs, dit Baronius , Annuf, Eccles. — /'. ausyi
Suiuus e£ BoLLANDts , 3.* mcus, mnrl.j an. lOM.
106 «-mSTOlilB DES DUBLS. ««
En 1043 , l'impératrice Gunehilde , feamie da
Henri III cl fille de Canut I.", roi d'Angtetem,
fut encore accusée d'infidélité envers son mari.
(( Personne n'osait s'offrir pour son champion « dit
La Colombicre , à cause de la structure gigantine
de Faccusateur nommé Rodinger. Elle lui oppoA
un certain petit garçon qu'elle avait mené ano
elle d'Angleterre. Celui-ci, par un miracle dirin,
ne pouvant atteindre plus haut , coupa bravement
les jarrets du calomniateur ; ce qui fit voir pubti*
quement Tinnocence de l'impératrice. Malgré b
victoire de son champion , Gunehilde quitta b
monde et finit ses jours dans un cloître. Elle a t\i
mise quelque temps après au nombre dea saints, n
La Colombière, Thédt.dhoniinj tom% II, p^^lBi^
— L An RE Y, Hist^ d*AngL, tom, II xp% 208 (387).
Ce m^Mne Henri III , à propos d'une réclamation
de Henri l.^', roi de France, au sujet de quelques
provinces démembrées du royaume, lui Ct offrir
de décider la question par un duel , ce que celui-ci
refusa.
« Au commencement du 12.* siècle, Malhilde^
femme de Tempereur Henri V , fut de nouveau
accusée d'adultère par un gentilhomme allemand,
maître de la garde - robe impériale. Raymoad
Bérenger , comte de Barcelonne , s'offrit de coiih
battre pour Timpératrice contre son dénonciateur,
— CHUPITIIK XKXIT.— 1Ô9
^ le réfultal du duel fut favorulilc à l'aCcuK^-e. »
^M- Ullo* tlel veio hori. milii'tii.
II y avait en Alliïniagiie des lices établies ct.&iiéM
par des ordonnance» imi)6ri<ilc3 dam ccrtuinef
TÎlles, telles que Wmtïbourg ei» Fmnconie, Huile
et Anspach en Souabc. Ces cliarapa clos élaienl
aoumis à des n'-glemens fort biziiires. [I étail fait
expresse défense nui Giles et aux mineurs de douze
am d'assister aux combals. Pendant qu'ils avuîeut
ticu, des eccIi'SJasticpies portant une bicrre cpii altro-
dail le vaincu, chantaient Tallice des moiU. Les
vieilles archives de ces véritables cours maitiaUs
relatent une foule de faits curieux. On voit dans
celles de IlDlle qu'en lOO.ï, Georges Ilail et Jodocus
se battirent au camp de la ville, et que celui-ci
mourut de ses blciusurcs; que deux antres Mua-
chingeu et Knppcmburg furent ai-Cordis par le
sénat; qu'enCu un uoninié Grcutler vainqueur de
Bavasleilcr, se traîna à deux genoux jusqu'à t'églisc
Piotrc-Dame fart lïloîgnve de lu liic, pour y rcodre
ses actions de grâce». Le malbeiircui y arriva avec
tcsgcDouK dans un horrible tint, /L\c\s Sïtvics ,
ifl. Bohci
1 rang
, duc de Bohtiue ,
des saints, «uiait
qui
l\tt mi
t paru
* par
dans
f de cet lices , oit ta providence tie svcail sifjualéo
200 —HISTOIRE DES DVELS. —
par un miracle éclatant en sa fa^veur , s^il faut
croire Dubraw en son Histoire de Bohême. U avait
pour adversaire Radislas qui arriva sur le pré armé
de lOMtes pièces , la lance sur la cuisse et un grand
coutelas au côté. Venceslas , au contraire , n^élait
Yétu que d^un harnois léger par-dessus le cilice qu'il
ne <[uittait jamais. Radislas avait déjà la lance ea
arrêt et s^apprétait à charger son adversaire avec
vigueur, quand il aperçoit en son lieu et place deux
anges debout devant lui , et en même temps il crmt
entendre une yoix qui lui crie : jérréle ! Saisi de
terreur, il se jette la face contre terre, demamle
grâce et se remet à la discrétion de Venceslas, qui
le traite en vainqueur généreux. « Le bruit de ce
miracle , ajoute rhistorien , se répandit partout,
surtout à la cour de l'empereur ; les uns en furenl
pénétrés d'admiration , et quelques autres s^cn
moquèrent. Hœc in Germarnam celer iter nunùata
et in aulam Cœsaris, apud alias admiratione, apud
quosdam irrisione affeceiuiit. Dubrawius, HiA*
Bohem., lib. III, p. 187. Francofurti 1688.
St. -Venceslas ne fut pas aussi heureux en 936.
Le 28 seplembre de celte année, sa mère Drt-
bomire , la Frédégonde de FAIlemagne , de concert
avec son second fils Boleslas , Tattira dans un Ceslia
pour le faire assassiner. Il se réfugia dans une église
où il fut suivi par son frère qui le poignarda sani
— CHiprTBE sxxiv. — 201
■ecofitrer celte Fois des anges k iV'pte flanilxjyiitile
lui barrer le pnssage. WITIKl^n , lli'st. Sujoii.,
. J.- — Sigruert el Heiimanmis, Corit. wl un. 930,
jptuJUnsTisius , Scn'/it. rcr. Germanie.
Frédéric I.", dit Barberousse , qui occupa le
IrAne impérial de 1152 ii IISO, conrirma encore
l'ancienne législation snr le duel. Mais son petit-fils
ftSMdëricil, qui régna de 1210.'i 1250, fit tous ses
^BHforls pour en corriger les abus. It fut le premier
I qui établit en Allemagne quelques régies de police.
A la diète d'Egra , en 1219 , il Cl jurer ans grands
«eïgneurs de l'empire de ne plus piller et rançonner
lea voyageurs, ni faire de la fausse monnaie qu'ua
regardait alors comme le privilège le plus impor-
Rut de la puissance Féodale.
Frédéric II accorda aux habîtans de plusieurs
lies de l'empire , notamment k ceux de Vienne ,
des espèces de chartes d'affranchissement qui leur
permettaient de s'esempter d'accepter le duel. Il
lublia ensuite la belle collection de lois connue*
lOus le nom de Constitutions Siciliennes ou IVapo-
, et qui furent rédigées en latin par Pierre
wvignes. Elles contiennent sur le duel plusieurs
ffispositions rcslriclives dont on trouvera le teite
: Ecfairviisemens historiques (388).
r^ous avons déjà eu occasion de remariiuer au
202 ^HISTOIRE OBI DUBLf. -^
lomc I.^' , page SS j que Ilenri-rOiseleur , pcrt
d^Olhon !.*% ne fut pas, comme on Ta cru, V'uh
venteur des tournois. On en trouve une preun
sans réplique dans les Pcuidectœ trtumphales de
Modius de Bruges , qui . en parlant de Pordonnance
do ce prince portant établissement des tournois eo
Allemagne , ajoute que cet usage y était inconnu,
4ftioiqui//ùl li'ès'praiiqué parla noblesse de Franct
et d'Angleterre (389).
Ilcnri-rOiscIeur publia sur les tournois un ri«
gicment en douze articles , d'après lequel il en
devait ^tre célébré tous les trois ans au moim.
<( A iceux, dit Fabvyn, devaient être reçus princes,
seigneurs , barons et gentilshommes de noble ex<-
tractioii; exclus et forclos les blasphémateurs du
saint nom de Dieu ; ceux qui de fait et pensée
médiraient de la personne de l'empereur ; celui
qui outragerait de fait ou de parole Fhonneur d^une
femme; ceux qui auraient trahi leur seigneur , ou
se seraient rendus coupables de parjure ou de foi
mentie ; quicon(]ue aurait surpris en trahison son
ennemi a\'unt que ilc lavoir défié, arracherait sei
vignes et ses bleds , briganderait ou tiendrait kf
chemins — Tout gentilhomme, qui se trouvait dam
un de ces cas, était démonté, prive de son cheval,
barulé et pour note d'infamie condamné à che-
vaucher hors la barrière , le tournois durant, à
— ca»rnnE xxxiv.— 203
morgue de rassemblée. » FkD\ \ n, Tluài. H'hoiin,
l.dn cAcv., //A. .V, ct,ap. l/l, f,t,f-. 1774.
I Le premier de ces luumoig cul lii'u ù Magdc-
vrg, PU prÉseiice de (leiiri-l'Oiseltur , le I ,*' dî-
hnclicaprcH IcHRuiit, du Tan 938; le deniivr se fit
||^~o^mfl, en lifil. Fabvjii en dénombre jusqu'^
nie-tix. Il y arriva comme partout de nombreux
icideni : on cite ciitr'uutrcs le prince Fréd^-riL- ,
^gr«ve de Tliuringt; , qui y fui Im^ d'un coup
f lanue.
tft Let charlt'S et cbroniques du temps , dit
ji de Laveaux , tradueltur de l'Ui'-toi'e Jes /1lle~
pnds de Schmidt, nous prouvent sutlisammcnt
H fet meurtres étaient très - fr^qucus dans ces
Ktes d'exercices et qu'il y arait peu Je touruois
l il De restât plusieurs chevaliers sur la place,
fîlii pourquoi les pepea et les évi^qucg s'èlevéreut
|0C lant d'ardeur contre ces jeux, u
m Quoique presque toutes les grandies Tamillea
Aileoiagne , dit eucore le méoie auteur , perdîa-
Rl des princes dans ces exercices railituires , il
tse faisait cependant aucune rite , aucune assem-
^ de la noblesse où il n'y eut des tournois. Dans
i^diélea mêmes on y employait les momeas de
pir. u
iM- de LavenuK rapporte ensuite un grand nom-
<fi de ces louniuis c61èbri^3 chez plusicuri- peuple*
204 — mSTOIRB DES DVSLt.-»
de r Allemagne, surtout chex les Saxons, oii dim
le cours d^uuc seule année on compta jusqu^à seiie
chevaliers qui y furent tués (390).
Quand les tournois cessèrent en Allemagne, œ
fut prescfuc une révolution. « Ce fut alors, dit Sé-
bastien Munster, surnommé le Strabon de rADe-
magne , que Ton vit le commun de la noblesR
dégénérer et se plonger en tous vices et dennt
tout le monde. L^ignominie qu^ils recevaient publi-
quement en ces tournois, servait comme de caveçon
et de pas-d'ùne , pour retenir les gentiMiommes
aux. termes de Thonneur et de la vertu. Par Tab»-
lition de Tusage d^iceux , ils se sont prostitués en
toute vilenie sans tenir ni voie ni sentier. » Seusv*
Munster, Cosmograph,, liu^ HI»
Le droit moderne en Allemagne se compote
du droit romain , du droit canon et des lois de
FEmpire. Quand le duel cessa d^étre judiciaire vers
la (in du moyen âge , on admit les règles du droit
canon qui lo défendaient , notamment celles dn
concile de Trente qui n^étaient pas reçues dins
toute la chrétienté surtout en France. Voyez iomJ,
paf^. 67. En 1668, époque des ordonnances de
Louis XIV\ où Ton vit réglementer contre les coib-
bats singuliers en France , en Angleterre , en Et-
pagne et dans les Pays-Bas, une loi de PEmpiie
tint ajouter aux prohibitions canoniques des peines
temporelles contre le duel ; mais elle ne fut pas
promulguée. Des réglcmens spéciaux qui appar-
tiennent au dmit particulier de FAUemagne , ont
été publiés au 17." et 18.® siècles. MArmcRos^^ie
erim.y pag. 448! — Berliciiius , part. IFy conc. 27.
— FiUiiîïAcius , quœst, 18. — Mexochius , de arb.
cas*, cap* 362.
(Tétait absolument le m^me luxe qu'en France ,
ee qui dénote assez le même insuccès. Cela s'ex-
plique par Pextréme sévérité de ces divers réglc-
mens qu'on appelle en Allemagne Duell mandate,
mandats de duels. 11 y eut en Autriche des mandats
de duek de 1651 , 1682, 1712 et 1750; dans
la marche de Brandebourg, il en fut promulgué
m 1652, 1688, 1713 et 1721.
En Bavière, il y en eut un très-célèbre en 1779*
Ce dernier mandat punit les auteurs d'un défi ,
même s'il n'y a pas eu de duel, de la perte de
leurs charges et emplois; ceux qui n'en ont pas,
d^une captivité de trois ans et de la perte de leurs
biens; ceux qui n'ont pas de biens, d'une captivité
de six ans. Si le duel a eu lieu , même sans résultats
iMsheux, il y a peine de mort. Un code pénal fut
publié en Bavière en 1813, mais il est muet sur le
duel; ce qui n'a pas empêché les tribunaux du
pays d'appUquer, quand le cas s'est présenté, le
20G — HMTOIHK DKS DUBtf • '—
mandat de 1 770 , comme n^étant pas abrogé pr
le code pénal. Le silence de la loi générale s'inter-
prète de même en Belgique, ^.ci-dessus pag.Si.
Kn 1803 , un nouveau code pénal fut publié
en Autriche. On y trouve sur le duel des dispo-
sitions d^me clarté et d'une précision remarquables
et dont je renvoie le texte aux Eclaircissemem
historiques (39 1 ) .
£n Prusse, le code Frédéric punissait le survitsnt
dans un duel de la peine capitale portée contre
Tassassinat ou de celle de Thomicide simple à
raison de Tintention. Dans tout autre cas, le pro*
vocateur encourait la réclusion dans un fort pour un
espace de trois mois à six années. Tit. 20j euri. 668.
U était de plus enjoint, sous une peine grave,
aux chirur^ens et médecins appelés à donner des
secours à tout individu blessé en duel , d'en faire
la déclaration au juge du lieu. On a vu la même
chose à Paris dans une ordonnance de police à
Toccasion de nos derniers troubles civils. Mais il
est plus Tacilc d'imaginer de semblables mesures
que de les faire exécuter, f '. ci-dessus page 1(M.
On trouve dans un règlement fait en 1 744 pour
la cavalerie prussienne , cette disposition non moiiH
sinp;ulière. << Si quelque officier souffre une injure
sans y paraître sensible, le colonel en informera le
roi qui le fera casser , sans déroger cependant «
Mv. - 207
dit concemanl le» diiels donl S. M. confirme ici
lolc la Torce. ii Pnrl. 8, chup. 8, art. 0.
"Le code pénal artuel de la Prusse, publié en
Vi, punit ceux qui portent un déti d^une prison
l'trois it six ans. Cetle peine est d'un an b Iroii
■ pour ceux qui l'acceptent. Si du duel est rè-
lllée la mort, la peine est celle du meurtre or-
loaire , et, dans le cas contraire , une réclusion de
i ans au moins qui peut m^me être perpétuelle.
'y a lieu ta outre k la dégradation de tous titres,
«meurs et emplois , cl en cas de fuite k In con-
eetion des biens, Les témoins encourent aussi
le peine de 5 ans de réclusion , qui est doublée
I cas de meurtre par suite du duel. En 1828, il
encore été publié un onlfe de cabinet contre
i duels entre militaires.
•D est vrai de dire du reste que dans la jurîs-
'odence allemande la peine de mort en maliéra
S due! est purement comminatoire. Aucun tribunal
l manque jamais le cas échéant d'infliger cette
Ikie , mais ce n'cal que pour ta forme : le con-
nnè est envoyé dans une forteresse , et apréa
l AD OU deux le souverain hiï fait grâce.
Z-e trait suivant fera suffisamment connaître
innient Frédéric II faisait exécuter ses ordon-
Btoes si vantées relativement aux duels et à la
iciplioe militaire. » L'n capitaine nommé 5*** cul
206 — HISTOIBE DES DUELS. —^
le malheur de tuer un autre officier en duel. On
le prit , et on le mena h la grande garde. Frédéric
ne pouvait s^cmpécher de lui faire faire son procès
scUm les lois , et il devait périr. Ce prince qui aîmatt
le capitaine, parce que c^était un brave homme,
songea aux moyens de le sauver. Il fit insinuer
secrètement aux officiers de ses amis qu^il ne sertit
pas fâché que le prisonnier s^échappât. Us dis-
posèrent tout pour cette fuite. Afin de la faciliter,
Frédéric fit venir le capitaine qui était de garde
ce jour-là , et lui dit : Ecoutez , si vous laissez
écliOjyper S*** cette nuit, vous pouvez compter sur
ma parole que vous serez pour viiigl-quatre heures
aux arrêts. Le capitaine comprit les intentions du
roi. Vers les minuit , il engagea le prisonnier à
prendre un peu Tair devant le corps-de-garde. Ses
amis étaient à quelque distance avec une chaise de
poste ; ils s^approchèrent , lui rendirent compte de
leurs préparatifs, et remmenèrent. Le lendemain,
le capitaine fil au roi le rapport de cette évasion, et
Frédéric qui feignit d'être fort en colère contre lui,
renvoya aux arrôls pour vingt-quatre heures. » Fk
de Frcdcnc II , loin, IF, pag, 307. Strasbourg t
TiTuUcl 1787.
Ce roi philosophe, ce Salomon du Nordj comne
rappelait Voltaire , ne souffrait point que des
roturiers fussent officiers dans ses troupes , si ce
— cnAPtruE XTTiv.— 209
"n'est dans quelque» rorps. LoTMqii'aui revues, i)
vnyait «le nouveaux ofliciers , il leur dem.-uidait
leur nom , et quand ils n'élaieiil pan nnLIes , il leur
donnait un léger coup de cjtnne sur IV'paulc et les
renvoyait. Ibidem, page 329.
\'oiei un aiilre Irait bien dilT^rent du régne de
Jnsi'pli II, que je trouve dans un opuscule trop
peu connu cl que je viens de découvrir k l'instant
senlemcntoiircchiipilrevn être livré ii l'impression.
« Un olBcîer nvnit reçu un souIHet d'un de ses
camarades; l'empereur les fit venir tous les deux
il Vienne, l'n jour de parade, il se montra sur
le balcon de son palais avec l'officier offensé , et
en pr^ence d'une foule immense rtisscmbléc sur
la place, il l'embrassa. Au m^me instant, on vit
sur un échafuud dressé au-dessous du balcon , le
bourreau appliquer un soufflet it l'officier qui avait
frappa, et sur le champ il fut conduit dans unft
■brlereaae. Vuilà un jugement cl une conduite
dt^Gs d'un grand souverain (392) . n
Quant il l'élal acliicl de» mœurs cl de l'opinion
relativement au duel en .Allemagne , on en jugera
par les réflexions suivnnlcs que j'extrais d'une
Mire autographe d'un savant publiciste prussien,
le (locteur Gnns , professeur de droit il l'uniTcrsité
de lÏM-lin. Celle lettre, qui trouve assurément dans
le nom de son auteur une garantie phis que suffi-
U
210 — HISTOIRE DBS DUELS. —
saille, est d'ailleurs enlièrement conrorme Ji tous les
autres documens que j^ai recueillis sur TAIIeinagDe.
(( Le duel ne se pratique pas dans toutes les
classes de la société. Les paysans, les petits bour-
geois, les banquiers , les nègociaus , les iudustrieb,
même leurs commis, ne se battent jamais, et, si leur
honneur est lésé, c'est par le moyen des actions
en injures injuriarum actiones qu'ils cherchent à
le rètabhr. On voit quelques exemples de duels
chez les emplo} es , les artistes , mais ils sont
rares. Les classes de la société où les duels ont leur
siège proprement dit, sont celles des étudîans et
des officiers. C'est la guerre de trente ans et surtout
le séjour des Suédois en Allemagne qui a mis cette
habitude en vogue dans les universités. Je sais bien
qu'on cite les Staluta des universités de Padoue,
de Paris, d^Oirord, d'Ingolstadt , de Wittemberg
pour prouver que le duel est bien antérieur k h
guerre de 30 ans ; il faut néanmoins considérer
que les rixes, même celles à issue violente, ont
eu lieu dans tous les siècles, mais que ces combats
ne sont pas encore des duels (393) . »
c( Cette habitude des duels , qui a été extrême-
ment forte au 18.*^ siècle dans les universités, se
ralentit un peu à présent , et on peut espérer qu'elle
cessera tout- &- fait, lorsque la vie publique des
hommes sera d'une telle importance que les élu-
irv. - 211
diann n'aionl |)liifl ni le vouloir , iii le besoin de
s'itiflitiier une classe à [Hirl,
u Les duels enlre li'S ofTiciers sonl beaucoup
, c«r leur position est bcaurotiji plus cm-
NiiTsssante. Si un officier, dont Tbonneurcst atla-
i, ne se bal pas, on le chasse du régiment; s'il
ehal, il est enfermi!: dans une forteresse. »
Celte allernali\e bizarre que l'inennséquence
) législateurs a créée dans bien des pays , est
iexludlemenl (-erilc dans une loi prussienne, telle
que le W'glemcnl de 1744 cité ci-dessus et qui
ordonne k tout olTicicr île paraîtra sensible à une
injure, k peine d'être cassé, et néanmoins lui dé-
fend le duel. Montesquieu, dans ses Lettres Per-
sonnes, a fait la mi^nie remarque sur ce (jui se
passait en France. « Si l'on suit les lois de l'honneur,
écrit Usbeck , on péril sur un échafaud ; si l'on sviit
I, celles de la justice, on est banni de la société des
^bbomtnes. U n'y a d'autre alternative que de mourir
^Pou d'être indigne de vivre. » Lettre LXXX.
r Le duel n'est donc pas très-fréquent en Alle-
magne si l'on en excepte la Prusse et ta Bavière ,
L et surtout les Universités, C'est en Autriche qu'il
^BMt le plus rare. Partout il se concentre presque
V exclusivement dans les classes nobles, militaires
I el un iversil aires.
Les étudions se battent loiis les joiirs cl pour
212 —HISTOIRE DES DUELS.—
lii moindre chose , h Gœltingue surtout où il est
arriva' (juclquefois de voir jusqu^i trente dtiebdans
un jour. Le roi actuel d'Angleterre et pluflienrs
princes de la cour britannique , qui ont fréquenté
cette université , s'y sont battus plusieurs foi».
Depuis quelques années, une espèce de tribunal
d'honneur a été établi parmi les étudians pour
examiner les cas de duels. Il a même été rédigé
pour ce tribunal un code spécial appelé Comment
où la plupart des cas sont prévus.
Quand l'affaire n'est pas des plus graves , voici
à -peu -prés comment le» choses se passent. Le
combat une fois arrêté , les champions se rendent
avec leurs témoins dans quelque auberge ou esta*
minet de campagne et s'enferment dans une salle
particulière. Là , les bras nuds , les nnains gantées^
la tête couverte d^un large feutre , le cou protégé
d'une énorme cravate y et le ventre d'une large
ceinture , ils féraillent quelque temps jusqu'à ce
que les témoins décident que Thonneur est satisfait.
L'arme ordinaire du combat est tépée germaine,
espèce de rapière très-longue qu'on n'aiguise pas,
quand la cause du duel est légère. La large co-
quille , qui forme la garde de ces espadons , est
une sorte de bouclier qui , avec raccoutreroenl
des champions, rend les blessures assez rares. Il
&ut , pour le mol de béte , 24 marches ^ c'est-à-
-4.a*i.iir,e x%xxy.~ 213
lire auluiil de coupa du lY'pi-v ^eiinaluu. Puiir le
d'infâme, il faut vingl-qufltrc l'uup.s. On se
lal rarement au pialolel. A Wurlzboiirg , l^iia eb
îrlaDjea , on ne se bal qu'au fleurit et rarement
l^atolet, maiajaniaia k )V-ptegcrmiiiite.
L'Éludianl, qui a tué sou adversaire dnus un duel,
l chassé de l'Univcrsilé. On Lui impusic le consml
1 s'ea aller , tonsilinm abctuuU , cl il est furuA
de céder. Son renvoi tvlc^alio s'aftieiie en mauvais
laliu et il est envoyé à une autre Université. En
loB de récidive , il ne peut plus se présenter dans
' Dans le petit nombre de combats qui uni eu
uue issue funeste , on cile celui du comte Puchlo-
nusko qui tua son adversaire. T«us les journaux
InnrAÎs en ont \i»r\h en 1834.
Quelques années aupanivant , ît y avait iiGœl-
liiigue un spadassin célèbre , uummé l.nderf, d'une
■giljlè et d'une force iiHisculaire élunnautes. IL
passait pour le plusliabîte féraîlleur de LWlIcmagnc,
et éUil la terreur de rUoivcrsîté. Il eut une foule
de duels ou l'avantage lui resta toujours. Il lui.
arrivait souvent de couper des nuiiiis et des bras
k KB antagonistes pur la violeiKe du mouvcmcnk
qu'il isiprimait ii son épée gerniuiiie.
L, Voici quelques traits les plus dignes de i-omarqtn.-
21 A —HISTOIRE DES DUELS. —
choisis parmi les combats singuliers qui onl eu lieu
le plus récemment en Allemagne.
En novembre 1833, on trouva dans un bob
écarté , prés de Dreisen , ville de Prusse , dans h
marche de Brandebourg , le cadavre du HeutOMiil-
colonel Frédéric de Keunaw percé d'un coup
dV^pée et baigné dans son sang. On Tavait cru
d^abord assassiné ; mais une instruction judiciaire
fit connaître quMI avait péri victime d'un duel.
Voici dans «{uelles circonstances. Un conseiller
nommé Von Zahn recherchait en mariage la fille
d'un baron de lloller, sur laquelle avait aussi jeté
ses vues un baron de Linsmar , ami de Von Zahn.
Celui-ci, pour écarter son concurrent, eut recours
à une ruse diabolique. Il avait des relations avec k
lieutenant-colonel Frédéric de Keunaw qu'il safait
habitué à manier les armes , tandis que Linsmar,
son rival, en ignorait Tusage. Il sut adroitement mé-
nager des rapports entre Tun et Tautre , et souflSaat
entr'eux la discorde , il les amena au point de se
battre en duel, il voulut lui-même aervir de té-
moin k son ami Linsmar qu'il comptait bien voir
succomber , et il sut arranger les choses de ma-
nière h rendre impossible toute conciliation. Mab
la fortune vint déjouer cet infernal calcul eo se
déclarant pour le moins adroit.
Les investigations de la justice réussirent beu-
— CHAPITBE ÏSXtV. — 215
*teU9cmenl k percer ce mystère d'iniquité. Le ju-
gement qui inlervinl condamna ie conseiller Von
Zalin b la peine de mnrt pour avoir provoqué le
iduel dans son intérêt piirlicuîier, et À dix années
Kulemenl de réclusion dans une Torlerease l'auteur
I meurtre , le baron de Linsmar , fjour sa part
Ktiie et attentla son ignorance r/es lois sur le Duel.
Selon l'usage constant en cas de duel, ces peines
ODt été commuées par le roi , et réduites i 30
innées de réclusion pour Von Zalio, et à 8 auiiû'ea
pour le baron de Linsmar.
Plusieurs journaux allemands du mois de no-
membre 1834, ont publié de longs détails sur un
■double duel accompagné de circonstances assez
nomanesqiies , qui aurait eu lieu dans les Etats
prussiens. Un baron de Traulmanstlorf enlrclenail
des rclnlions d'amour avec la jeune rnmiesse
-Xodoïska de K"*, veuve d'un général polonais.
WU n'attendait que sa nomination il une place de
necrélaîre d'ambassade pour répouscr. Mais dans
Pinlervalle, un baron de Ropp veut faire h son tour
■gréer ses hommages à ia jeune veuve , et , dans
: pièce de vers qu'il lui adresse, il cherche k
r du ridicule sur son rival. Celui-ci en ayant
é informé , lui envoie un cartel. Ropp l'accepte;
aïs arrive au lieu du rcnde»-vou3 il obtient de
s battre pour lui un de ses amij. Ti'aulinansdorr
216 -* HISTOIRE DBS DUELS.»
succombe : sou lémoin iudigiiè de la lâciielé de
Ropp , le provoque et le force de Dielire Tépèe
à la main avec lui. Mais ce témoin n^étail autre
({ue Lodoïska elle-même qui avait pris un dégui-
sement masculin pour assister soo amant. Elle
tombe atteinte d^un coup mortel , et Ropp Tay ant
reconnue à ses derniers accens ^ tourne son épèe
conlre lui-même , et leurs derniers soupirs s^ex^
baient en même temps.
Dans le cours de la même année , le comte
Prosper d'Aubrée ^ attaché à Tambassade française
«I Bade, cl le comte Gustave de Blucher, petit-'fiia
du célèbre fbld-marécbal prussien , eurent une
vive discussion, à la suite de laquelle ils Tinrent
se battre en France dans Tile du Rhin , entre Kelh
et Strasbourg. Us avaient pour témoins, les comlea
Edgar de Luckner et Emmanuel de Groucliy,
M. Prosper d'Aubrée fut tué. 11 n^avait que 27 ans.
Le 13 novembre 1834, le journal de Francfort
publiait Tarticle suivant : u Rien n'est plus rare
qu'un duel dans la pacifique république de Franc-*
fort. Ou n'en avait pas vu un seul depuis celui qiâ
eut lieu eu 18-U , entre un oSicier polonais msU
traité par un oillcier de hussards, et dans lequel ce
dernier resla sur la place frappé d'une balle à la
tête. Mais dimanche dernier deux officiers du bt-
taillon des troupes de li^e de Francfort , MM. de
i XXXIV.- 217
SL-liweiscr et Surraxiu , se sont bulliia au salire. Le
|jrcu>ier a eu la muitié du nez empurlé. Ces deux
mcsoieurs suiit aux arrOls forcés. Ou îi^uore encore
(quelle est la peine qui les sllend. Mais, comme
'Je balaillon faisait partie tious Tenipiie du i-^gimeiit
du priuce l'rimat et a conservé le règlement mili-
Isire français, ou espère qu'il en sera de même
quant à la juridiclion. »
M. de Rotachild, peu de temps après avoir ilé
rèèbaron par l'empereur François 11, Tul provoqué
1 duel par un seigneur de Vienne , à qui il avait
efusé de prêter de l'argent ; il riTiisa ce singulier
xlel, et fui uppruuvt^ généralement (394).
Je crois ne pouvoir mieux lermîner ce chapitra
que par la citation suivante du célèbre ouvrage
de Madame de Staël sur rAllemagne.
» La marche philoBopliique du genre humain
parait devoir se diviaer en qunlre ères différentes :
les temps héroïques , qui fondèrent la civilisation ;
le poiriotisme, qui &t la gloire de l'antiquité; la
chvvalcrie, qui fut la religion guerrière de l'Europe ;
et l'amour de la liberté, dont t'Iiistoire a commencé
vers l'époque de la réformation. j)
ti L'Allemagne, si l'on en excepte quelques cours
ivides d'imiter lu France , ne fut point atteinte par
latuité , rinuiiuralilé cl l'incrédulité, qui, dcjmis
218 — HISTOIRE DBS DUELS. —
la régence , avaient altéré le caractère naturel dci
Français. La féodalité conservait encore chei
les Allemands des maximes de chevalerie. On s^j
battait en duel , il est vrai , moins souvent qu^en
France , parce que la nation germanique n^est pis
aussi vive que la nation française , et que toutes les
classes du peuple ne participent pas, comme en
France, au sentiment de la bravoure ; mais Topinioa
publicpie était plus sévère en général sur tout ce
qui tenait à la probité. Si un homme avait manqué
de quclcpie manière aux lois de la morale , dix
duels par jour ne l'auraient relevé de Testime de
personne. On a vu beaucoup dliommes de bonne
compagnie , en France , qui , accusés d^une action
condamnable, répondaient : // 5e peut que cda
soft mal, mais per'sonne du moins n'osera me k
(lire en face. Il n\ a pas de propos qui suppose une
plus grande dépravation ; car où en serait la société
humaine s^il sufTlsait de se tuer les uns les autres
pour avoir le droit de se faire d^ailleurs tout le
mal possible ; de manquer à sa parole , de mentir,
pourvu qu^on n^osât pas vous dire : « Vous en avei
menti ; » enfui, de séparer la loyauté de la bravoure,
et de transformer le courage en un moyen d'im-
punité sociale f »
u L'esprit de chevalerie règne encore chei !«
Allemands pour ainsi dire passivement ; ils scmi
— CIIAVITRE XXXIV.— 219
ii:a|>ablt;s de trtimjicr , et leur lovnult; serelnuive
«tniis Ions les r»|)|)()rls iiitinifs; mnis celte ^iiergto
:vcre, qui commandnit aus lioititnes lanl de sa-
crifices, aux femmes tant de vertus, el raisaît de
» vie enlièrc une truvre sainte où dominait loujoui'S
la mi?me pensée; celle énergie chevaleresque de»
lrmj>9 jadis n'a laissé dans l'Allemagne qu'une
empreinte uffacÈe. Bien de grand ne s'j fera désor-
mais que par Timpulsion libérale qui a succéda
doDS l'Europe h la chevalerie. »
Il n'est pas étonnant d'entendre Pilluslrc CIiA-
tcaubriand s'écrier : ii J'aime l'Allemagne, j'admire
I vertus domestiques, ses mœurs hospitalières,
«on sentiment poétique et religieux , et son amour
de la science. On y éprouve cette puissance îiivi-
Mble qui vous cache le positif du monde elle pro-
Hisme de la vie. » Etudes fu'sioi
iques.
Ajoutons qu'il n'est pas de cour en Europe plu»
|iure que celle de Vienne , comme il n'y avait pas
(l'administration plus paternelle , de mœurs plua
louées et plus palriarchales que celles du dernier
empereur François II , dont on vient d'annoncer la
lort. Jamais et eu aucun len][>s, dans aucune des
cours de l'Allemagne, on ne vît de ces débauches et
de ces atrocités qui ont si long-temps déshuiiuré
celles de France, d'Angleterre, de Russie el d'Italie.
£t l'uu parle d'aller lègcnérct un tel peuple !
CHAPITRE XXXV.
Duels en Suisse.
Lfs Ilulvétiens, peuple de race germaine, don-
nèrent leur nom à cette partie de la Gaule Iran-
salpiue où le Khône ci le Rliiu prennent leur source.
Ils ne Poccupaient pas encore au temps de Polybe.
Leur d^*placemcnl parait devoir être fixé à Fépoque
de la première invasion des Cimbres dont le débor-
dement les accula aux montagnes qui séparent k
( jcnnanie de la Gaule et de Tltalie. Polyb, , lib. X,
cap, 8. — Strabon, lib. I^,pag* 135.— Plctascb.
in Mario, pag. 139. — Du Bcât, UisU anc^ Jts
J^ctip. {le VEur,, liw IF' y chap. 4.
Le gouvernement de rilelvétie au temps de
Jules-Cèsar ressemblait assez à celui qu^eQe poi«
bède aujourd'hui. Le général romain la troutt
divisée en quatre cantons , m quatuor pagos. Les
liiibitans de Tun de ces cantons appelé Tigurinus,
qu'on croit le canton de Zurich, ayant fait vcrtf
Tau 5S avant J. C. , une première irruption dans
(— (TIHPITRE XXXV. — 221
ks Hauleg sous la rondnîtc d'un chef nommé
Divicon , avnienl surpris et laillè en pièces une
armée romaine cl fnil pnsser sous le joug le consul
L. Casaiiis avec un grand nombre de prisonniers.
On leur avait demanda des otages , et Divicon
avait répondu : Les Siu.tscs en reçoivent , mats n'en
donnent pas.
Dés les premières années du gouvernement de
César , une armée beaucoup plus considérable
Toulut tenter le passage sur les terres de la province
romaine , pour aller s'élablir dans le midj de la
Gaule ; mais elle fut repoussée et taillée en pièces.
Ce Tilt le premier exploit de César dans les Gaules
vl celui dont il parle avec le plus de complaisance
dans ses Commentaires. On peut juger de l'impor-
tance qu'avait alors la nation belvétienne par le
dénombrement des forces de l'expédition d'après
un état en langue grecque trouvé dans le camp des
vaincus. Elle montait à trois cent soixante - huit
mille personnes , dont quatre-vingl-douie mille
combattans , et il n'en rentra en Suisse que cent-dix
mille. Les Helvétiena , d'après le témoignage même
du vainqueur , étaient les premiers des peuple.^
Celtiques pour la valeur guerrière. Ils se trouvaient
trop i l'étroit pour leur nombre et leur murage dans
lin Mpacc de soixante lienca de long sur quarante-
cinq de large, et n'aspiraient qu'i en sortir (395).
222 — HISTOIRK DES DUKL». — »
Le projet de celle expédition avait été poiir
Orgetorix , qui tenait le premier rang parmi les
Ilelvétiens par sa naissance et sa fortune , un pré-
texte de chercher à s^emparer du rang suprême.
II sY'tait (îoncerlé à cet effet avec Dumnorix d'Au-
lun et Casticus , chef des Séquaniens , h qui iL avait
inspiré la même ambition. Mais les Helvétiens ayant
découvert les menées d^Orgetorix , s^assurérent de
sa personne et se préparaient à lui faire son procès.
Le feu devait être la peine du coupable. Le jour
fixé pour le jugement , Orgetorix convoque pour j
assister jusqu'à dix mille personnes prises dans sa
famille et dans sa chentelle , et en impose assex par
ce moyen pour se soustraire au jugement. La cité
de son cûté recourt aux armes pour que force
demeure à justice , et les magistrats rassemblent le
plus de monde possible dans les campagnes voisines
pour Topposer au parti d^Orgetorix. Mais la mort
de celui-ci mit lin aux débats. On le soupçonna
de s'être empoisonné. César, Comment., lib. I,
cap, 2 et 4.
Tel est le plus ancien monument qu^on trouve
dans les historiens romains, sur les formes judi-
ciaires de rilelvétie.
Tacite a rendu le témoignage suivant de la nation
Suisse. Uch'clia, gallica gens, olini armis vins-
que, mox nieniorid nominis clavaAX rend compte
! x\xv.- 223
Kcnixiîtp <lu Irnitcment cruel que ce peuple éprouva
■ de la part de Cécinn , lieiilenant de Viteliius,
p^ur avoir pris le parti de Galha contre ce dernier.
Des ambassadeurs hclvéliens essayèrent envaiti de
Bècliir l'empereur, dont la suite se porta envers
eux k d'indignes Iraitcmens. On ose leur mettre
KTépée et le poing sous le nez ; te/a ac numus
■m ora Irgatonim intentant. Un pareil traitement
■eut encore été supportable de la part des com-
BpagnoDS de gloire d'un César , mais de la part
■jfes compagnons de table d'un Viteliius!... Taut. ,
l»>Mr. , lib. I, cap. 67, 68 (■( 69.
P Lct Helvéticns décimés par les armes romaines ,
allèrent en s'affaiblissant , et Cliarlemagne trouva
leur pays tellement dépeuplé qu'il y transféra , en
I 804 , une partie des Saxons échappés à ses armes
^victorieuses. Mezebay , Abieg. chioii. , toin. l,
'g, 283. Antsterd. 1712.
LIIelTélie deyint ensuite une province germa-
que. Au commencement du 14.' siècle, Guil-
: Tell , SloufTachcr . Furst et Mcicchtal la
livrèrent du joug autricliien. Trois cantons ,
Pnterwald, Ury et Schwytz, ayant proclamé leur
ndépendance, formèrent la première Confédération
isie. Ce dernier canton eut la gloire de donner
k nom Ji la nation régénérée, parce qu'il avait
6té le tliéAtre des deux principaux combats ou h
liberté renit la sanction de la victoire.
I^c gouverneur autrichien Gessier , le tyran de
la Suisse , n^avait relevé le défi que lui porta Giiil*
laume Tell en lui montrant la flèche cachée qu'il
lui destinait y si la première s'était égarée sur la
tète de son (ils , qu'en le mettant aux fers. Mais il
n'échappa pas plus tard au trait vengeur du héros
hcivéticn qui le tua comme on tue les tyrans (398).
Les Suisses assurèrent leur indépendance par des
exploits d'une valeur inouie. Ils renouvelèrent deux
fois le dévouement de Léonidas au défilé de Mor-
garten , où nOO des leurs arrêtèrent Tannée autri-
chienne ; et plus tard en 1444, 1,200 Suisses
périrent à Bottelem, après avoir fait éprouver k
Farméc française une perle de 6,000 hommes. Ce
trait de courage leur valut l'admiration et la dan-
gereuse amitié de Louis XI qui prit des troupes à
sa solde , premier exemple des Capitulations que
les rois de France ont imitées depuis.
Ia's Suisses aciievérent de s'assurer un rang dis-
tingué dans la polilicjue européenne par la glorieuse
guerre qu'IN soutinrent contre le dernier duc de
Roiugognc, Charles dit le Hardi, le Guerrier , le
Tcnihlc, le Tvmôrairc. qui venait de faire trem-
bler la Fraiire el sa capitale après la virloire de
Monllhrry. Abandonnés par Louis XI , leur alli^,
(T - 225
' CM inlrépidps monlagnard.s NuppK'cnt an nombre
por l'iiilr^pidilé, et les cliampa célèbres de Granson
cl «le Moral devicnncnl le terme de la course aven-
lurcuac de rimpëlueux Bourguignon , qui la vit
bientôt après se terminer avec so vie devant Nancy ,
où il retrouva encore les Suisses et leur indomptable
roura^c.
Le sujet de celle guerre avait Hè une querelle
entre un unisse, marchand de peaux, et les péagers
d'uo seigneur voisin , vassal du duc de Bourgogne.
Va ossuaire célèbre en conserva le souvenir jus-
qu'en I7yS , que des soldats de la république
rrançaisc crurent l'Iionneur national intéressé k
renverser ce monument de la victoire d'un peuple
libre sur un tyran.
François I." éprouva encore, en 1515, le cou-
rage des Suisses il la célèbre bataille de Marignan,
que le maréchal de Trivulce appela un combatde
gèans. Us furent vaincus malgré des prodiges de
valeur , laissant quatorze mille morts ou blessés sur
le champ de bataille. Mais celte fois ils ne com-
ballaient pas dans leurs montagnes et pour la
liberté. Ils veillaient dans l'intérêt de la cour de
Jtomc à la porte de l'Italie, dont ils défendaient
rentrée aver cet intrépide sang froid et celle iné-
branlable fidélilt' qu'on retrouva toujours en eux ,
quand un leur confia la garde du palais des rois.
-— 15
226 — niilTOIRB DBS DUELS.—
Les mœurs suisses n^ont rien qui les distingue de
celles des autres peuples de PEurope, pendant d
depuis le moyen Age , relativement aux duels.
« Libres sur le sol natal , dit Mexeray , ils serrent
partout ailleurs. » Néanmoins ils gardent à titre
de privilèges leurs usages nationaux partout où le
besoin de vivre les force à accepter une solde
étrangère. En voici un exemple remarquable
donné par un des régimens suisses de la garde de
Louis XVI , quelques années avant le licenciement
de 1792.
Deux officiers de ce régiment , le chevalier d'Er-
lache et le comte de Salis étaient liés de la plus
étroite amitié. Un jour au spectacle quelques paroles
vives qu'autorisait leur intimité , firent croire qu^
s'était élevé entr'eux une querelle qui pouvait avoir
des suites. Des officieux leur firent envoyer immé-
diatement des gardes de la Connétablie. Le len-
demain ils comparurent au tribunal des maréchaux
de France , qui , persistant toujours malgré leurs
explications à les considérer comme brouillés , leur
enjoignit de se réconcilier et de s^embrasser, ce
qu'ils firent de la meilleure grâce, puisque cette
affaire n'avait à leurs yeux aucune importance.
Cependant les officiers du régiment regardant
cette intervention du tribunal des maréchaux de
France comme une atteinte à leurs privilèges et use
— cujjpitbe wxv. — 227
THtlaltnn do leurs capitulations , s'assemblent et
«notent que In récondliation serait considérée
nulle , éinnt faite sous Tautorilé d'un tribunal in-
compétent, et que les deux «(liciers seraient tenus
de se lintlrc en présence d'un certain nombre de
}tun rnmaradcs , sous peine d'(?lre renvoyés el
dénoncés aux Cantons comme complices d'infrac-
tion aux prérof!;ntivrs nationales. Ceux-ci durent
M soumettre h cette étrange décision. Le duel eut
lieu et se termina par un coup d'épée que reçut le
eomle de Salis et qui mit ses jours dans le pliis
prand danger- Son malbeurcux ami témoigna le
plui violent désespoir, et lui prodigua pendant sa
maladie tous les soins de l'amilié. Tous deux cn-
Yoycrent ensuite d'un commun accord leur démis-
noD ; mais on ne voulut pas l'accepter. Ils cédèrent
aux instances du corps où ils continuèrent de jouir
d'une estime générale. Ptirii , T'enailles el tes
Provinces, tom. tl , pag. 94.
La législation suisse n'esl pas plus uniforme ii
l'égard des duels qu'en toute autre matière civile
et criminelle- Chaque canton a ses lois de police
particulière, et jouit d'une entière indépendance
«o tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions
du pacte fédéral. 11 y a surtoul de notables dif-
lèrcnce* entre les caotonB de la Suisse orientale
228 — mSTOlBE DF5 DimL5. —
oij Ton parle allemcind et ceux de la partie occi-
ili'iilaU' (|iii se servoiil de la langue française.
l.rs hornf's rtroites de ce chapitre m'obligent
il nr i'<»nsi(l6rcr plus particulièrcmenl que ce qm
se passe anjourd'luii dans trois Cantons, Bàle,
Vaud et ( icnrvc. Il v a assez de ressemblance dans
les lois et les mœurs des étals compris dans chacune
des deux priui'ipales divisions de la Suisse, pour
qu'à Taidc des document particuliers à un ou deux
Cantons , on puisse tirer des conclusions générales
à regard du corps entier de la Nation.
Le canton de Uale est un de ceux où la langue
Allemande esl en usage. Sa population n'^est que
de 43,000 ùmes, donl 12,000 pour la ville qui lui
a donné son nom. Jusqu'aux troubles qui ont agité
ce canton en ISiîl et qui Tonl séparé en deux
parties , Haie ville et Baie campagne , le duel y
était à-peu-près sans exemple. De dix en dix ans
à peine y entendait- on parler d'une provocation,
et encore était-on sur que d'une manière ou d'autre
on parviendrait h en empêcher les suites. Drt
troupes fédérales vinrent alors occuper Bàle pour
y maintenir Tordre , et les divisions politiques
donnèrent lieu à plusieurs duels entre des olFiciers
de la garnison et des militaires balois. En voici
qurhpies exemples.
l n habitant de Baie, membre du tribunal cri-
— CHAPITRE XXÏV. — 229
Utel ci eu KK^rnc temps liciileiiunl dnns la milifïe
lurgeoiae, se troiivunl dans un cnTé avec quel-
les amis, fut provoqué en duel par un uffi<'îer
I (roupcs TMèralcs. On alla se baltrc ii Siuiil-
[Hiis, terre de France. Le provocateur fut blessé
kl mnia.
Un aide-major bâiois ayant appris qu'un officier
isse avait tenu des propos insutlnn? pour la garde
Id^ don! il faisail partie, Fa sommé de se ré-
fcter ou d'accepter un rendci-vous. Celtu-ci n'u
iulu faire ni l'un ni l'autre , e1 quoique provoqué
îu rien se m eut par son advcrsiiire , il a persisté
'■l'affaire en est reslûe 16.
ÏLe tn^mc aide-major eut encore une diflïcutté
c UQ autre oDicier suisse et tous deux conviurenl
kller se bnllre sur le territoire du grand-duché
I «adc.
Un magistral de BAIe campna;ne ayant insulté
H un arlii-le de journal «m ollîriur bernois, il
ksun-it nne rencontre dans laquelle le magistrat
Ibis fut blessé ii la joue.
meus officiers supérieurs , Piin de liàle ville ,
BMtc de BAIf rampajjuo, à rocciisiou du partage
M'arscnal entre les dcuTc cantons , allèrent encore
i battre h Saint -Louis en France. Le dernier
I blessé.
'IVpuis 1821 , hi k-islatiou de H/ilc puuil le duel
230 — niSTOIRE DES DUELS. — *
de un H ([iialre ans de détention , dont la durée
doit s'élever de quatre û huit ans, en cas de bles-
sures grîives ; et si les blessures sont mortelles, il
y a lieu à une peine de huit à douse ans de fers.
Mais ces peines ne sont qu^une pure menace et
n'ont jamais été appliquées. On yient de proposer
un nouveau projet qui les fait descendre de plu-
sieurs dégrés dans la vue d^en faciliter rapplication.
Les injures privées sont très-rares dans ce canton
entre les personnes qui ont reçu de Féducalioib
Elles donnent aussi rarement lieu à des actions
judiciaires dans les classes inférieures. Quand lo
cas se présente , le juge saisi de la plainte or-
donne une ré|>aration d'honneur séance tenante;
il y joint une légère amende et dans les cas les
plus graves un court emprisonnement.
Le duel est encore plus rare dans le canton de
Vaud , pays de langue française et qui compte
180,000 habitans. Il n'est l'objet d^aucune pro-
hibition particulière et reste ainsi y k raison de ses
résultats éventuels, sous l'empire du droit commun.
On n'en cite guères qu'un seul qui ait fi\é fat-
tcntion dans le cours du siècle actuel. 11 eut des
suites bien malheureuses quoi({ue la cause en ail
été des plus minimes. La querelle s^était élevée
au sujet d'un chien de chasse. Les adversaires
— CUAPITRE XXYV. — 231
tenaient tous deux le rang le plus distingué dans la
•uvi^lé. Un combat cul lieu dans lequel l'un d'eux
resta sur la place. Un piocès criminel fui d'abord
instruit par contumace contre le survivant , qui
obtint ensuite un sauF conduit ptiur venir la purger.
Il fui cundanmé à la peine de plusieurs années
de fers et s'expatria de nouveau pour éviter de la
subir. Il attendait en pa^s étranger l'expiration du
Icnne de vingt ans fixé par le code , pour la pres-
cription, cl qui était près de s'accomplir, lors-
qu'À la sollicitation de ses enfans , le Graud-Conseil
lui accorda sa grâce eu 1827 ou 1828.
La législation du caiilon de Vaud contient sur
les injures privées des dispositions assez remar-
({uables dont on trouvera le texte aux Eclaiivis-
semcns hisioriijues (397).
La difiaroalîon écrite est l'objet d'une loi spé-
ciale qui régie la police de la presse. La poursuite
n'a iieu que sur la plainte de riitl'cnsé. Depuis
quatre bus que la presse est pleinement bbrc dans
le canton de Vaud , ou n'y a vu qu'un seul exempte
de procès de ce genre.
I
he canton de Genève qui comprend 50,000
ilana , dont lu moitié est renfermée dans les
de U ville , se rapproche beaucoup de la
iiicc, dont il a fait partie pendant 15 ans, soit
232 —HISTOIRE DES DUELS.—
par ses mœurs et ses habitudes , soit par sa Kgit-
iatiou. Néanmoins, le préjugé du point dlionncur
est loin d'y exercer le même empire. L'amour-
propre y est moins susceptible et impreasionnable
même dans la haute société qui ne le cède en rien
à celle de France , pour le ton et la polîtesBe.
Le Genevois est réfléchi : il se donne le temps de
peser le pour et le contre avant de se livrer à
une première impression.
Les actions judiciaires pour injures privées se
circonscrivent en général dans la classe inférieure,
et on n'en voit guères d'exemples que de la part
des gens h gages ou des femmes d'artisans qui
peuvent croire leur réputation rétablie par un ju-
gement. On n'applique d'autre loi que le code
pénal français de 1810. Il n'y a point de législation
spéciale qui punisse la difTamation par la voie de
la presse. Les condamnations se bornent à quel*
ques légères amendes et à quelques francs de dom-
mages intérêts envers le plaignant. On trouvera
aux Edaivcissernens historiques un tableau statis-
tique des procès , pour injures privées , qui ont eu
lieu à Genève depuis dix ans (398).
On ne se souvient pas dans ce canton qu'aucun
conflit particulier soit résulté de la politique et des
discussions parlementaires. Les rivalités d'amour
ont eu bien rarement de pareilles suites. On ne
s'est guère» battu de mémoire dMiomire que piiur
tics querelles de lidile ou de jeu , et puur quelqui»
_J)ravndes mililniics.
' Pannï les Irails de ce genre dont le souvenir
l corscpvt , Toirî les plus remarquables.
y a environ 45 ans , deux Genevois de In pre-
; classe de la soeitlè, se fiant h leur loyauté
ïciproquc , se battirent sans témoins k la fluilc
l'une rivalité d'amour, et en faisant tenir h l'écart
urs cochers qui les avaient amenés au lieu du
mdei-vous. Le combat fut terminé par un voiip
irrè, mais qui n'eut aucune cousiqucnce grave.
On cite aussi deux amis qui, seul ii seul dans leur
(Cambre, s'étant pris sérieusement de querelle sur
un démenti, en vinrent immédiatement aux mains
1 ne »e relircreut qu'après que l'un d'eux fui
l)te>>é , sans que personne se fût douté de leur
Siercation.
Lors de l'organisation de la Garde Nationale
rançaise il y a environ 80 ans , on vil plusieurs
tdueis parmi quelques jeunes gens oisifs qui s'y li-
^traicnt par passe temps et comme pour faire l'cssiii
de leurs nouvelles armes. Mais ces écarts passagère
d'uD enthousiasme juvénile n'eurent jamais de
suites fâcheuses. Un officier des mihces genevoises ,
|)|]uî s'él&ît tait souvent remarquer dans ces déinons-
rlmlîoos, eut, en 1810, une all'airc plus sérieuse
234 — IIISTOIRE DES DOCLS. —
avec un jeune homme d^un rang èk^é : tous dnn
furent blesst'rs. Cet officier , homme du resie fort
hraye et loyal , est le premier aujourd'hui k traiter
le duel de préjugé et à en blâmer riaunoralité.
En 1812, deux jeunes gens des meilleures la-
milles de Genève échangèrent quelques coups de
pistolet sans résultats , à la suite d'une perte au jeu.
£n 1816 , un combat semblable eut encore lieu
et se termina de même.
En 1819, un membre du tribunal de Genève
se battit pour un démenti avec un officier de la
milice qui fut blessé à la main.
tin 1822, deux jeunes avocats faisant partie
d\me société de droit , à la suite d'un propos
insultant proféré par Tun d'eux dans une délibé-
ration de la société , se rendirent à la frontière
pour se battre ; mais on ne fit que se mettre en
garde. L^aflaire se termina par une explication
dont TofTensé fut satisfait.
En 1829, on vit à Genève un duel pour ain«
dire littéraire , mais qui parut alors un fait unique.
Un littérateur distingué, auteur de notes historiques
d'un grand prix , se trouva offensé par un article
inséré dans une Revue française. Il s^en prit au
correspondant de celle Revue, à Genève, savant
historien et d'une réputation plus qu'européenne.
Celui-ci , sans vouloir se reconnaître auteur de
I —CHAPITRE XXXV.— 233
rarlicle , consentit ii donner la satisfaction qui lui
est demandt^. Une renronlre au pistolet eut lieu
sur le territoire du caiitoi». Deux coups de pistolet
Aartireiit ensemble ii un ^gnnl donné, mais aucun
Il4'eux ue porta. Dans une seconde décharge, le
pistolet de ToiFensé fit faux feu et son adversaire
tira en Tair. L'alTaire dut en rester iJi , malgré
■le regret de rofTcusè de ne pouvoir la pousser
ijplus loin.
L' Le seul combat singulier qui ait eu un cnractéro
grave h raison de sea circonstances et de ses ré-
sultats, eut lieu en 1818 entre deux Français du
département du (ïard , <i la suite de quelques pro-
lenua par l'un sur la niuilresse de l'autre. On
battit près de la ville en présence de deux témoins
genevois, eufiena militaires, réputés pour que-
relleurs d'habitude. Le plus jeune des combattans
fut tué. Son adversaire et les deux témoins prirent
b fuite. La clameur publique s'éleva contre ce
duel ; on parlait de coups de canne donnés avant
ie combat à la victime, comme pour l'étourdir,
ou criait à la trahison... Une procédure criminelle
fut commencée. Des mandais d'amener furent dè-
lés contre le meurtrier et les deux témoins ;
lis ils n'ont pu jusqu'ici être mis à exécution , et
ils sont restés annexés â la procédure justiu'i l'cx-
piratiOD du terme de la prescription.
d^
^ fut Cl
beerni
P«uis
236 — HISTOIRE DES DUELS. —
C^est là le seul exemple de poursuites judiciaires
pour duel cpron ait pu découvrir au greffe du
tribunal de Genève depuis au moins vingt ans.
IXi reste , il n'y a pas plus de loi spéciale sur cet
objet dans ce canton que dans celui de Vaud.
Le code p6nal français de 1810 y est encore en
vigueur avec celte seule modification que les juges
sont autorisés pour tous les cas k faire descendre
les peines au-dessous du mininum (399) .
Depuis que j'ai rcimi ces documens, les journaux
français ont publié les détails suivans sur une col-
lision funeste qui s'csl élevée en août 1834, cuire
doux hommes de lellrcs résidant à Genève. L'un
d'eux, M. Sambuc , qui s'élait fait remarquer k
Paris dans les premiers temps de la révolution de
1830 par Texallalion de ses opinions républicaines,
paraissait dévier depuis quelque temps de la ligne
politique qu'il s'était primitivement tracée. Ce
changement d'opinion se signala plus particulière-
ment dans un procès qu'il intenta h Tun de ses
anciens amis. M. Allier , rédacteur de VEwope
Centrale y journal qui se publiait à Genève, fut l'un
de ceux cjui lui en témoignèrent hautement leur
désapprobation. M. Sambuc s'en vengea par un
cartel , et Ton se rendit à Crassier sur la frontière de
France^ pour vider ce (lilférent.
Les témoins avaient ainsi iixé les conditions du
— CH^FtTBF. \V\V.— 2;Î7
ocl. Deu\ barrières dcvaiciil tire placées à ïio^-
ii(| pas l'une de l'aulre. ChacMin des tronibnltuns ,
s'être éloigné de vîngt-cint] pas de la limite ,
nii rnpproclierail et lîrerait ii volonté ; mais le
r qui aurait tiré, devait se rendre aiiprés de
I barrière. Les roup^f qui feraient fiuiK feu ne
l^viiienl pas compter. Le sort avait décidé qu'on se
Irvirait des pistolets de M. Allier. Ce réglemcut
i fait, les combattans partirent au signal con-
. Sambuc arrivé h quatre pas environ de la
Vmile, tandis que M. Allier était à-peu-prés arrivé
à laoJennc, lira le premier et manqua son adversaire,
iKjis se rendit immédiatement h In plaee prescrite.
Hi> Allier tira ii son tour, mais sun pistolet étant
Kce qu'il parait en mauvais état, brûla sucnesûve-
ment trois amorces. M, Sambuc consentit alors &
donner l'arme dont il s'était servi. Elle fut chargée
et remise ■) M. Allier qui tira ainsi une quatrième
H8. Le coup partit et attei^it M. Sambuc h la
tftTtie supérieure droite de la Icle. Conduit à Nyon,
I expira deux jours aprcs.
M. Dumont , traducteur et commentateur de
mtham, l'un des publicistcs les plus célèbres de
mcTC , a donné le plan d'un nouveau code pénal
mur ce canton , <l'après les principes exjiosés dans
!8nnmbreuinu\rngcs sur la législation. Son pro-
238 — HISTOIRE DKS DUKLS. ^
jet classe le duel parmi les délits, et le punit de
quatre ans de bannissement. La peine serait doublée
en cas d^homicide. Tout proyocateur serait puni
de deux ans de prison , s^il a eu des torts grayes.
On appliquerait la même peine k celui des deux
adversaires qui refuserait de souscrire à la dédsion
des témoins. Tout cas de duel frauduleux ou sans
témoins resterait soumis au droit commun qui
punit le meurtre , les blessures ou les coups. Enfin,
M. Dumont est d^ayis que , hors le cas d^homicide,
le délit de duel ne doit donner lieu è aucune pour-
suite d^office de la part du ministère public.
cesl
CHAPITRE XXXVI.
Bfrl» en Itnlie ; RoyDilme dp Nnples el do Sir
États Romains, Loiuljiirdie , Piémonl, lies de i
daigne et de Corse.
St l'oQ remoule aux plus anciennes traditions
W premiers peuples de l'Italie , on n'y rencontre
'mitres vestiges du duel que le combat des Huraces
1 dea Curiaces entre Albe et Rome pour la aou-
eraineté du Latium. En péDétraal davantage en-
Dre dans les temps fabuleux , on trouve le combat
inngulier de Turnus et d'Enée el une image nssc*
fidèle des joutes du moyen âge dans la lutte
cesie entre Entelleel Darés, Ces personnages ii'i
18 doute existé que diins l'imagination des poêles
des historiens romains. Mais Iniil re qui concerne
les Horaces et les Curiares aussi bien que Romuli
Itii-m^me , le fondateur de la Ville flernellc n
giières d'autres garanties que ce m^me témoignage.
Romniiis passe pour s'^trr débarrassé par
meurtre de son frère Rcmus, ïoii compélileur
240 — HISTOIRE DES DUELS. —
gouvernement du nouvel Etat. Il nVst pas bien
certain d\iprès le riVil même de Tite-Live, « ce
meurtre eut lieu en trahison et h la manière italienne
moderne ou s'il fut la suite d'un comhat entre les
deux frères. Des deux traditions citées par This-
torien , la seconde qui suppose le cond^at , est la
plus probable (400).
La conduite de Sextus Tarquinius envers Lu-
crèce, celle d'Appius envers Virginie, ne furent
pas , comme elles le seraient de nos jours, le sujet
d'une rencontre en champ clos , mais le signal de
deux grandes révolutions.
Ce n'est qu'au temps des premières invasions
de ritalic par les peuples Celtiques de la Gaule,
qu'on commence à rencontrer des exemples au-
thentiques de défis ou provocations en combat
singulier d^ennemis h. ennemis. Dès la plus haute
antiquité , c'était là chez les peuples d'origine ger-
manique non seulement un mode de venger les
injures , de terminer les procès , mais encore d'in-
terroger le sort. l)e-lk vient qu'on en fit ensuite un
Juge f fient (le Dieu,
I-'an de Rome 3G2 , une armée de ces Gaulois
depuis long - temps établis en Etrurie , assiégeait
Clusinm, principale ville de celle province. Fabius
qui avait été envoyé vers eux comme ambassadeur
se mcle aux assiégés, et lue dans une sortie l'un
— rnAriTRF nxtvi. — 241
ilirh ^niilois avof lequel il roml)»! rnr[)S-U-
rni|t<i, lîrcnmis , nlicf de rexpfililîon , prend net
iictp pour une vi'ulalion «lu ilroil des gens el rmni
sVii venger par l'incendie de Rome.
Quelques annLxs plus lard, ['an de Rome 3fl2 ,
d.-itiH une seconde invasion des Gaulois. Tiin d'eux
d'une taille et d'une forri; ctiranrdinaires dffie le
plus hrave des Romains. T, Miinliu^ se prèsenle,
le lue et lui enlève une cliaine d'or qui lui valut
di^iis le surnom de Toiquntits. Les Gauloit
prirent ce rèsullal pour im présage funeste et se
relirèrenl sans romliallre.
En 4(U , nouveau défi el nouvelle lultc entre
UD «titre Gaulois et M. Valérius, qui en sort en-
core vainqueur et ajoute h son nom celui de
Con'u.i, d'un corbeau qui pendant l'action sérail
venu prendre sa difcnse contre le Gaulois. L'avan-
tage dans tous ces combats ne manque jamais d'ap-
^Btrtenîr ii la nation de riiisloricn qui les raconte.
^|(A Is suite de ces défis de IV-trangcr, les troupes
romaines avaient pris goût pour les combats par-
ticuliers, et cette mode avait fait assez de progrés
pour compromettre la discipline. Le consul T,
Manlius se vit obligé d'\ mettre ordre en défendant
:i qui que ce fut de combattre hors des rangs ,
ne qiiif extra orilînem piignaret. Cet ordre do
Ahmliuf fut ffllul ■> son fdsqui, lU-l'ii- par le Tusrulan
242 — HISTOIKE DES DUELS. —
Meliiis , rrui pouvoir imiter rexemple de son père
cMi arrcpUint le cartel d^in eiiiiemi. 'Comme son
|)(Te ausr^i , il fut vainqueur , mais il paya de sa
tête sa di'sobèissanre. Le père avait disparu pour
faire plarc au consul (401).
Les Romains n\>nt pas connu d^autres duels que
ceux-là. CV'tait chez eux de la logique plutôt que
du respect pour la vie humaine. On ne prévoyait
pas alors qu^il viendrait une ^"poquc de haute civi-
lisation où le îiec plus ultra de la vengeance con-
sisterait à recevoir la mort de la propre main de
son ennemi. Quand on avait une injure à venger,
on se conduisait comme Milon envers Clodius,ou
bien Ton attendait qu^il se publiât quelque taUe
de proscription où Ton courait inscrire le nom de
son ennemi , comme dans nos temps moderoes
on glissait celui d'un riche voisin sur une liste
dVanigrés.
Sous les empereurs , les tribunaux n'offraient
déjà plus que des ressources assez équivoques i
ceux qui avaient à invoquer leur justice. Un poète
comique en a fait la remarque.
Nescis quam meticulosa res sit ire ad judicem.
Plact.
11 faut bien se garder du reste déjuger des mœurs
des Romains par les écrits de leurs pliilosophes qui
— thapithe xxxvi. — 243
miivuiit ^'laieiil loin cus-mOmcs île niellre leur
cdikIiiiIc vm lianiioiiii^ avec leurs maxiint^s. Ou a vu
au tome l.", page 117, celle» de Sénéque et clo
I^K'èrnii sur la vciigcaucc. On peut y joindre ces
tlcux vere de Martial si applicables aux duettistes :
Noio vinim facili tpii redimit saiijïiiinc ramam ;
Hanc ïolo Inudari i|iii sine Marie polesl.
Martial écrivait aous Pomitien , dont il a Tait
kilogc pendant sa vie et la satyre après sa mort.
l Si les Romains n'ont pas connu le duel propre-
fit dit , ils s'en sont bien dédommages par les
ibata des gladiateurs. On a tu au tome [,",
: 16, en quoi consistèrent ces cruels passe-
temps des compatriotes de Sénèque et de Cicéron.
Quand il y eut disette de chair humaine , ils mirent
^au» prises des bétes fauves. Ce qu'ils pr^Kraienl
^Htant tout, c'étaient les combats mixtes d'hommes
^^R d'animaux. Ce furent les premiers chrétiens qui
Breut presque tous les frais de ves représentations.
I.'ampliillicûtre, où furent immolés des hécatombe»
de martyrs, existe encore presque en entier dans la
lapitalc du monde clirélien. Ainsi , L'un des cliefs-
fVuvrc les plus remarquables de In rivitisation de
icienne Rome que le temps ail épargné , est uit
lonumcnt de sa barbarie !
244 — msTOiBS dbs do^ls. •=-
Celte civilisalion , qui n'avait d'autre règle qoc
le rationalisme et d^autre flambeau que la philo-
sophie paycnne , aTait atteint son dernier période,
quand rEyangilc apparut pour renouTeler la face
de la terre. Cette merveilleuse cÎTÎlisation n'anil
produit d'autre fruit qu'un effroyable luxe dont les
écarts incroyables, prodigieux , inouïs, menaçaient
une société dégénérée d'une complète dissolution.
Luxuria incubait victuin que ulciscitur orbem.
1/an du monde 1656, un déluge universel Tint
purger la terre des crimes de ses habitans. Plus
tard, en 2138, cinq Tilles de Judée, Sodoinei
Gomorrhe, Adama, Seboïm et Segor, sont déyorto
par le feu céleste, selon la Genèse. Strabon porte
à treiie le nombre de ces villes qu'il dit s'être
abîmées dans un lac formé par une éruption vol-
canique. Strabo, de situ orbis , Ub. V^
A quarante siècles environ de son origine, le
monde est cxindamné à subir encore une de ces
grandes exécutions de la providence. On a pu juger
des mœurs de Sodomc par la conduite de ses ha-
bitans envers les compagnons de Loth et par celle
des filles de ce patriarche envers leur propre père.
Cependant, quelque hypothèse que puisse créer
l'imagination , il n'est pas facile de croire que ces
villes aient jamais surpassé tout ce que nous
ïsvi,- 245
\oi)G de Ih Uome des (lésHrs, Les ïaint)ueiir3 de
I J'uaivers avaient rapporU- et ciitussé p^L'-niùle daits
■,leur capitnle loua les vires duii naliniis subjuguées,
Itftvec leurs rivlies dcpoiiiHcg. Lk se forma un iiii-
! Toyer de corrupliun, où l'on vit dwis une
longue fermcnlalion 8>x;il(cr jusqu'à un df-grè
inouï, les él^mens les plus aiitils d'une complète
«lÉsorganisation socîule.
Ce n'est pas te feu cOleale qui va dévorer la mci-
^rne Sodume, c'est la torche incendiaire d'Alarie,
jt'esl la foudroyante ^'pée d'Attila. L'un se dit ponssi^
ners Rome piir nue force invincible , l'antre se fait
pppclcr la terreur de rniiivera et le fli^au de Dieu ,
UeUis orbis et Jlitgellum Dei. Genséric parlant du
port de Cartlingc, abandoime sen vaisseau au ra-
Bcice des fluls pour aborder, disait-il , où le pnns-
l U colère divine, i/uô Deux impnUrU (402).
y, Lu moitié de la population curopËenne fut mois-
lonnée pur la fuuts impitoyable de ces «balteurs
fJiomiDes, cl celle de Rorh: , qui devait com-
reodre au moins quatre millions d'Iiubitans, fut
léduile h 80,000. Quand il n'y avait plus d'en-
tcmis à fgorgcr, rinraligiible ^pèe des Barbares
B luurnftit coulr'eus mèmcN , et c'était par le duel
lU le suicide qu'ils se consolaient de leurs défaites.
s liistoricns romains portent ii 240,000 la perte
les Cimbrcs et des Tcutun& dans leur première
246 — HISTOIRE DES DUELS. —
expédition contre Tllalic. Mais le désespoir des
vaincus cl surtout celui de leurs femmes , eut plus
de part à celle boucherie que le glaive des soldais
de Marius. Quand en 405 , la victoire de Stilicoa
fit manquer la première attaque des Goths contre
Rome, 30,000 barbares s'égorgèrent dans la retraite.
Zo'/iM., lib. V^ p. 802. — Oros. , lib, VII y cap. 37.
En présence de ces scènes de carnage , auprès
de ces grandes immolations , qu'élaient-ce que des
meurtres individuels ? Qui pourrait suivre le cours
des infortunes particulières, absorbées qu^elles soal
dans le torrent des calamités publicfues : La musc
de riiisloire aurait-elle une larme h donner à la
perte d^un homme , lorsque des nations en maasQ
disparaissent de la face de la terre ?
Quand Touragan du Nord eut dispersé les débris
impurs de la grandeur romaine ; quand les enfaus
de la Scylhie furent transplantés sur ce sol illustre
de rautiquc civilisation , la loi évangélique vint
dompter ces populations farouches et renouveler
leurs mœurs. Le christianisme, après avoir triompîié
de Rome par le sang de ses martyrs , triompha des
vainqueurs de Rome par la douceur et la pureté
de sa doctrine. Les Goths , quoique les plus re-
doutables d'entre les barbares par leur férocité,
furent les premiers que la morale du Christ conquit
— CIMPITBË XSXVI,— 247
li la civitisaliuii. L'empereur Valent avilît cni les
vaguer eu leur euvojant de bunnc liuure des mis-
hîoniiaircs ariens qui Kpiuidi rciit parmi eus lus
premières semences <le In Tui. C\'st niiisi que les
vis qui gouvenièreiil la péiùiisule nprês l'invasion
des Oslrogullis ou Gotlis uritnlauK , professcrciil
(Parisnisnie. Le plus illuslre Tul mins runtrcdit Th^o-
doric, vainqueurct successeur de riKrulcOdoacrG,
iremicr roi de l'Italie.
Les mœurs de ces nouveaux liabilnn:^ /'t.iiciit
Ûtjh bien adoucies sous le n'-giie de Théodoric
U commencement du VI. " siéile, si l'on en juge
nr une de ses lellres <[ue noua a cuiHcrv^es son
sitiislrc Cassiodorc. Voici ce (ju'il Écrivait , par
■ plume de ce dernier, aux tribus barbares de
1 Hongrie soumises f> ta moaarcbic des Ooths.
« Vous dcvcï exercer voire valeur conirc les
nneniis cl non contre vons-nn'mos, Ln dilKrenl
itgev ne doit point vous porter aux dernières ex-
Irtoit^s. Repnsez-vous sur lu justice qui fait la
loÏQ cl la tranquillité du monde. Pourquoi nves-
Tous recours aux duels , puisque les charges ue sont
point vénales, ni les juges ctirrupliblcs dans mes
éUta !* Quittez les armes, piiis(|ue vous n'avez point
«Temiemis réels. Vous commettez un crime en
levanl la main et l'épéc coulre vos parcns pour
lesquels il est glorieux de mourir Pourquoi
218 — UISTOIRE DES DOELS. —
VOII.S servir d'une main armée , puisque tous iTei
une langue pour défendre yotrc cause i* Imitez les
Coths qui savent également combattre les étraupn
et i>ruti(iuer la modération et la douceur dans leur
nation (403). »
Ce n'est plus dans ce style que les souyeraina
acluels correspondent avec leurs sujets. On cher-
eherait envain de pareils monumens dans nos ftjea
de civilisation ; ils apparaissent dans ces cycles
hislori(|ues , comme les pyramides ou les oasis dans
les solitudes égyptiennes.
Lu savant distingué de Tépoque actuelle,
M. Ampère, a découvert récemment à Cassel en
W'cslphalie , sur la couverture intérieure d^un ma*
nuscrit provenant de l'ancienne Abbaye de Fulde,
un Fragment de poésie gothique relatif à un duel
du règne de Théodoric entre un père et sou fil8«
Ce fragment assez étendu , dont le grand style rap^
pello Técole homérique, est écrit en haut Allemand
M. Ami>ère en a donné une traduction qu'ion trouve
au tome III des E tuiles liisioriqucs de M, de CIuU
teaubriand (404).
Ces belles lois , dont le génie précoce de Thé(H
doric avait doté T Italie et une partie de T Allemagne»
s'étaient bientôt évanouies avec la monarchie des
Goths au miheu de ces guerres d'extermination
qui étaient l'état normal de cette époque.
wsvt.— 249
Les LumbiirJs , la plus faillie , mais In plus
guerrière- des tribus germaines , scluii Tin-ile (4()5),
uvuietit etiTnlii l'ilalie eu 568 , sous la «^unduito
d'Albuiti , leur rui , qui y avait été ap|icl6 pur
'eunuque Narsca mécontent de Juslinicn. C'élniciil
les anciens fp'cnilcs tjui habilaicnl la SciindiiiaviQ
cl qui s'appelèrent ensuite Loiighaiih du nom de
leurs longues pertuisanes qu^ils nummnieni barilvn,
U s'établirent dans la partie de l'Italie lung-temps
appelée la Gaule cisalpine et lui donnèrent leur
C'est dans les monumens de leur K''^i!>laliun
[pi'on retrouve les traces les plus étendues du duel
et de la féodalité germaniques.
Il Rolliaris , qui usurpa le Irûne en 638 , dit
Sigonius, rappela dans ga mémoire et rétablit les
anciennes lois de ses pcrea qui n'étaient pas écrites.
Cc9 lois étaient semblables à celles des nations qui
jfll^iMient du Nord, u Sicon. ila i-eguo JtuL, t'A.
m et 114 .
■V C'apréfi les lois de Rotharia, les peines en matière
criimnellt: étaient des amendes el le combat servait
de preuve. En matière civile, celui qui avait possédé
un bien meuble ou immeuble pendant cinq ans
devait , en cas de revendication , se purger par
duel. Ces m^'mes lois consucrcnl le droit ded femmes
■voir des champions. i.('^. Luii^., lili. If, lit. 35.
ha coinbat le plus remarquable de telle époquo
250 —HISTOIRE DES DUELS.—
esl celui qui eut lieu vers 626 , pour purger d^adul-
tère (lundeberge, femme de Kliaroald, ou plutôt
d\\rio\vald , comme Tobserve judicieusement Mu-
ralori . Ce duel esl rapporté d'après Paul Diacre par
Frédégaire , dont voici la traduction.
(( La reine Gundeberge, épouse de Kharoald,
roi des Lombards, princesse remplie de vertus, de
grâces et de beauté , avait chassé de sa présence
un Lombard nommé Adalulf , qui avait osé lui
proposer Tadultère. Celui-ci dans son dépit, va h
clénoiircr au roi et lui dit quV*lle veut Tempoisonner
pour épouser ensuite le duc Tason , son amant.
Kharoald trop crédule exile son épouse et la Eût
enfermer dans une tour , quoiqu'elle soit la parente
des rois Francs. Mais un envové de Clotaire dit
h Kharoald : 2\t pounnis mettre un tcmie au scan-
dalc de cette ajjalrc. Ordonne que cet homme (jM
t\i mpj)orlé de tels propos, se présente anné et quwi
autre homme prenant parti pour la reine, se mt'
sure contre lui en combat singulier, afin que le
juf^enient de Dieu prononce entre les deux cham-
pions et fasse connaître si la fvine Gundeberge
est innocente nti coiqudyle de celte faute* Ceci ayant
plu à Kharoald et aux principaux des Lombards,
il enjoint à Xdahilf de s'armer pour combattre, et
lui cousin i\e ( iundcbcrgc , nommé Pitton , attaque
Adahdf. Ayant donc combattu ensemble, Adalulf
tel
Ici
— CHAPITRE XÏSVI.— 231
Cfll lut par PitloQ. Cnndeberge cal aussitôt nn»-
pelte de l'esil après trois ans el replncéc sur le
trône. FHEtiEoAB. , Chroiiic, tiiap. Ll {406).
Griinoald, en 668, fit quelques cluuigcmona aux
lis de Rotlmris, cl eonfirniH aux femmes adul-
tères le droit de choisir un champion pour réparer
leur honneur.
Luitprand, en 713, affermit l'usage du duel,
is supprima la conQseation des bicua du vaincu.
'« Nous ne sommes pa? assurés, porte sa lai, du
jugement de Dieu, et nous avons appris que des
■nooccns ont péri en défendant une cause juste;
mais cette coutume est si ancienne dans lu nation
des Lombards que nous ne pouvons la changer,
maigre son impiété. On voit que la foi antique,
que le fatalisme germanique commencent à s'é-
llintnler (407).
Chartemagnc mit fin au royaume des Lombards
en détrânant, en 774, Didier, leur dernier roi.
Une grande partie se dispersa comme les Juifs dont
ÏIb devinrent les émules dans l'art du Iralic et de
rru«ure.
Charlemagne, comme on l'a vu ci-dessus p. 192,
de \ains etibrls pour abolir ou restreindre l'usage
du combat judiciaire tant en Italie qu'en France.
furent les seigneurs ituliens qui niirenl le plus de
[Clialeur à lui représenter la oéceesilé de revenir
252 *— HISTOIRE PES DUBLfl. —
k rancienne coutume. Les réglemens que publia
à cette occasion Chariemagne , ont fait Tobjet de
plusieurs capitulaires ajoutés à la loi des LombarcU.
Leg, Longob., liw II ,ut. 55, §. 23.
On trouve dans le Traité de Paul Voët , Ténu*
mération des cas assez bizarres où le combat judi-
ciaire avait lieu suivant les lois des Lombards (406).
D^Audiguicr parle d'un combat singulier de
Fan 807 , entre Evrard de Médicis , chevalier fran-
çais , première tige de cette illustre maison , et un
brigand nommé Mugel qui désolait un canton du
territoire de Florence qu'on a toujours depub
appelé Mugello, Celui-là au moins était un boa
duel, un duel tel qu'on en voyait aux temps
d'Hercule et de Thésée. Les Médicis ont bien dé-
généré depuis. Ane, usage des Duels , chap. A'X*
Vinrent ensuite les Olhons qui s'emparèrent de
ritaUe , quand l'Empire eut passé dans la race
germanique. Ce fut encore sur les réclamalions
pressantes de la noblesse italienne qu'Othon II,
dans la célèbre assemblée de Vérone , en 988 >
rétablit l'usage du combat dans toute sa rigueur
primitive et sans exception pour personne , pas
même pour les femmes et les ecclésiastiques. Les
réflexions de l'Auteur de V Esprit îles lois k cet
égard ont été rapportées et discutées au tome I/S
chap. Xll et en la note 140.
— ciulpithe ïytvi.— 203
LVmperetir Fr^cU-ric 1,", dil Barherousse, fil
Ava règlemcns confîrmntifs des duels , comme on
l'a vu ci-deasus png. 201 . Son fiîs, le cruel Henri VI,
accnrda , en 1195, à la ville de Pavie le tlroil
d'életlion du conseil chorgt de lu police des champs
clos. Mais Frt'déric II , son successeur, fil tous ses
efforts pour corriger ce qu'il y avait de plus ré-
voltant dans CCS usages , comme on peut le voir
par plusieurs articles de ses Consiitiitioiis Napo-
litaines rapporlies en la note 388.
A cette même époque les épreuves par les élé-
mens ou Ordalies se mêlaient à celles du combat ,
mais elles commençaient aussi ^ décroître.
^D En 1103 , Luilprand , préirc de Milan , avait
^■iccusé de simonie Grosulan , son archevêque ,
crflrant de prouver son accusation en traversant
un bùclier enflammé, ce qu'il fit. Le Papea'étant
fait informer de celle aiTaire , n'en prononça pas
moins l'absolution de l'archevêque et exila son
accusateur. MuRAToni, Scriptor. ivr. Italie.
Georges Acropolite , dil Logolhele , parle d'un
archevêque d'Italie qui engageait un de ses diacres
k se soumettre à l'épreuve du fer chaud. Celui-ci
B^lArit de prendre le Fer , mais de la main du prélat
Vipit alors n'insista plus cl convint qu'il ne fallait
pas tenter Dieu. Logotu. , apiul fijsaril. Ilistor.
Scn'ptor.
254 — HISTOIRE DES DITELS. —
En 1137, on avait fait à Amalfi la découverte
d'un manuscrit des pandectes. L'influence de cet
événement sur la civilisation de TEurope et ia
cessation des combats judiciaires, a été examinée
au tome I.^^, page 73 et suiv.
Lorsfiu'à la suite de cette découverte , il se fut
établi des écoles où Ton enseignait le droit romaiiii
la vieille législation des Lombards reçut un coup
mortel. Cependant , comme il arrive toujours dans
toutes les révolutions, soit morales , soit politiques,
les anciens usages rencontrèrent de chauds par-
tisans. L^un des principaux fut Charles dit Tocco,
fameux docteur Napolitain , qui continua d'eo-
seigner le droit lombard , et soutint qu'on devait
surtout conserver l'usage des duels , quand même
il serait mom'ais» Maffei , délia Scienza caval-
leresca y lib, II, cap. 3, pag* 165.
Aux 13.® et 14.*^ siècles, s'escrimaient de leur in*
tarissable plume les jurisconsultes Balde, Bartolle,
Alcial , Mulio , Pozzo , Paris de Puteo et une foule
d'autres qui firent du duel Tobjet de longues et
profondes dissertations où Ton retrouve toutes le?
bizarreries et les subtilités du temps. Il ne faut pas
confondre avec ses lourds compilateurs qu'on ne
lit plus , le docte Scipion Maffei , auteur d'un
excellent Traité contre les duels , intitulé Ddla
Scienza carallcresca. Rome 1710^ in-i.^
— CHAPirnE sxsvi. — 255
Ce qui contribua le plus h faire cesser co Italie
Tusagc des combala judiciaires, ce fut l'établis-
• flement des communes qui commença dés le 11.*
■iécle et ne fut imil^ en France qu'au siècle suivanl.
Déjli sous Frédéric 1.^', l'iiistonen allemand OUion
de Freisingcn représentait ainsi l'état de l'Italie :
Lc9 villes ont tant d'amour pour la liberté et
^c haine contre l'insolence du pouvoir, qu'elles ont
icoué toute autre autorité que ri^llc de leurs ma-
Ùtrals, de sorte que luule l'Italie est actuellement
mplie de ailles libres. A peine y a-t-il un seul
noble , le marquis de Mont-Ferral , qui ne soît pas
raoumis au gouvernement d'une cité. » De Gest.
' Frùlvr. I, lih. 11 , iuip. 13 , f>n^. 453.
Du reste , les communes de France ne purent
jamais atteindre au même degré d'indépendance
que celles d'Italie , qui non seulement s'adminis-
traient , mais se gouvernaient elles-mêmes et jouis-
^liaient d'une pleine souveraineté. Telle fut l'origine
PP^es nombreuses républiques qu'on vit succcssive-
ment dans la péninsule pendant le cours du moyen
âge- P'ojez MuRATom , .-fini,/, liai., toin. W,
pag. 5 et 159.
F Toutes ces causes réunies, sans omettre les croî-
ides dont il a été parlé au tome I."', chap. X,
i)lirent, comme partout ailleurs, la puissance
•dale en Italie, et par contre-coup l'usage des
256 *- nisToiRF Dcs buëls. —
rdinbats jiKliCiaires 8>n ressentit. Celte puisnnre
st» réveilla pourtant, avec tous les désonlres qiri
rarrcimpngncnt , dans le cours du 13.^ siècle, lu
milieu dos querelles qui s^élerérent pour la wo
ccssion au trône de Naples , après la mort de
Fr/>dcric II. Mainfroi, son fils naturel, masacn
Pcmpcrcur Conrad. Appelé par le pape Urbain IV,
Charles d'Anjou, frère de Saint-Louis, Tainquil
et tua Mainfroi et s'empara de la couronne de
Na])l(^s au préjudice de Conradin , dernier rejeton
de la maison de Soiiabe , qu'il fil décapiter sur
la place publique de Naples, en 1269.
Ce prince , âgé de 17 ans, jeta son gant du haot
de Técliafaud sur la place publique pour défier
son meurtrier , et appeler sur lui la vengeance de
sa famille. Un cavalier eut la hardiesse de prendre
ce gant et de le porter au gendre de Mainfroi,
Pierre III , roi d'Aragon. Celui-ci vengea la mort
de Conradin par lesV<?pres Siciliennes, en 1282.
Il releva ensuite le défi de ce jeune prince par un
cartel qu'il envoya h Charles d'Anjou , âgé déjà
de 00 ans et qui l'ac^cepla , quoique Pierre n'en eut
que 40. iMais celui-ci éluda ce combat par une ru«e
moins chevaleresque que castillanne dont Meieny
rend compte en ces termes.
<( Il s'avisa d'un vilain stratagème qui lui conserva
la Si<ile aux dépens de son honneur. Il envoya
— CltlPITHB XKÏVf. — 257
offrir il Charles de viiiilcr re grand diflïretit par
cDmbttt (le leurs personnes , asatstf s chucun de cenl
tJievaliers d'élite. Celui - ci plus brave qu'avisé ,
lepla le dffi malgré le Lonseil et les défensoB
iléréesdu Pape. Le roi d'Angleterre, Edouard !.•',
ircnt de tous les deux , leur assura le camp b
rdennx. Le jour fut assigné au I ."juillet 1282,
sur cette parole d'un perfide, Charles leva ira-
■udcRiment te siège de Messine et accorda la trêve
int son ennemi sut profiter. Cependant le pape
déploya loulc« les foudres de son autorité sur la t^te
de l'Aragnnais, l'excommunia et le dégrada de la
royauté. Mais à tout cela d était bien préparé, et
r raillerie du pape il ne se faisait plus appeler
ifl le chevalier d'Aragon. »
« Le jour du combat venu , Charles entra
ina le camp avec ses cent chevaliers et y de-
eura depuis le soleil levant jusqu'au soleil cou-
l^tnl. L'Aragonaia n'avait garde de paraître; mais
par le soir il arriva en posie , et s'en étant allé
iver le sénéchal de Itordeuux , il prit acte de
qu'il s'était présenté , et lui laissa ses armes en
loignage. Cela fait , il se relira en grande hâte
fwgnant d'avoir peur de quelque surprise du roi
4e France. Bel acte de cttmpnrulion et digne d'ua
rince h qui ses sujets uni donné le nom de
17
288 — fltSTOlRB DBS DUBtf.— -
Brantôme prétend que Pierre arrÎTa un moment
avnnt le coucher du soleil. « Il entra au camp,
dit-il , et n^y trouTant point son ennemy y brafe
et piafle dedans à la mode espaignole , prend acte
de son dcbvoir et diligence et s^en retourne comme
il était venu. »
Il avait été convenu que la peine du vaincu
ou de celui qui manquerait au rendez-vous sertit
dVtre réputé parjure , faux , infidèle , traitre ,
éternellement infâme , indigne du nom et des
honneurs de roi , incapable de toute dignité, con-
damné enfin à n^avoir désormais pour toute suite
qu^un seul sergent ou valet. Rymer , Fœdera»
tom, ly pars II, pag. 213.
Le pape Martin IV mettait une telle importance
à empêcher ce combat , qu^aprés avoir inutilement
dépéché à Charles d^ Anjou, le cardinal Gaiétan,
depuis Boniface VIII, pour Ten détourner, il sV
dressa au roi d'Angleterre pour quMl eût à défendre
le camp , le menaçant même d^excommunication
en cas de refus. Celui-ci protesta d^abord quHl
abdiquerait plutôt sa couronne que de présider un
tel combat , mais il finit enfin par laisser faire son
sénéchal de Bordeaux , qui y tint la cour en son
nom. Cette lettre du pape, la réponse d^Edouard I**
et les autres actes relatifs à cette affaire , se trouvent
au recueil de Rymer , loco citato.
i de Frnnre, Pliilippe-le-Hardi, accotn-
|iagnn son neveu Clinrlts datis la lice, t-e qui fît
sans (loule si grande peur h l'Aragonais. Celui-ci
totil firr du succès de celte farce plus digne d'un
écolier que d'un monarque, ae rail h lancer des
fhctiim contre son adversaire qui lui rispota. On se
fil ainsi une guerre de plume et les detts princes
inondèrent l'Europe de manirestes. Chacun prit
parti selon ses intérêts et ses affections. Le grave
Alcial, après avnîr pesé le pour el le contre, a
trouvé le cas douteux. Dabitaliimfult utrtus causa
etsct juslior. Alciat. , ele aing. certam. , cap. 41 .
Depuis celte époque , les maisons d'Aragon et
d'Anjou se diBputèrent pendant près de deux siècles
la couronne de Naples. La victoire étant restée à
la première , le roi de France Cliarles YIII vint b la
fin du 15." siècle, comme héritier de Louis XI,
cessionnaire dt;3 droits du dernier prince de la
maison d'Anjou , réveiller la querelle et léguer à
■es successeurs des guerres ruineuses qui, après
un demi-siècle , se terminèrent , comme toutes nos
guerres modernes dans la péninsule, au désavan-
tage de la France.
H Louis 1." , qui fut le chef de la seconde maison
B^Anjou au trûnc de Naples, ne s'est pas montré
plus avisé que Charles, son prédécesseur, chef
de la première lirani-he. Kn 1382 , il se laissa auiii
260 — mSTOIKE DES Dunj. *-
duper pnr un clùfi de son compétiteur Charles lU,
dit de Duras. Après avoir échangé ensemble une
série de cartels de plus en plus bizarres où ils s^eii-
tredonnaicnt force démentis , ils convinrent d*un
rendez-vous. Mais Charles, au lieu de s^y rendre,
profila de Télat de famine et de maladie où toutes
ces temporisations avaient placé Tarmée de soo
adversaire pour Fattaquer h Timproviste en ba*
taille rangée. Louis y fut blessé et mourut pea
de temps après. On trouve dans d^Audiguier touf
les détails de cette affaire avec les formules de
cartels échangés entre les deux princes. Ane. usag*
des Duels, chap. XII T.
Robert d'Anjou, dit le Sage, petit -fils de
Charles !.•', mort en 1343, défié par le vicomte
de Milan qui ^assiégeait dans G^nes , refusa le
cartel. Il en fit de même à Tégard de Frédéric,
roi de Sicile , qui pour ce défi fut excommunié par
le pape Jean XXIL Muràtohi , Script, rer. Italie*
A cette époque , comme au temps présent ,
cVtait à Naples que le duel semblait s^étre cen*
tralisé. Cette ville était la salle d^armes de Htalie.
Là, se dessinaient les plus habiles maîtres d^escrime,
là, dissertaient les plus subtils docteurs de laScienza
cm»alleresca. Albéric Balbiano, connétable de Na-
ples, institua sous Tinvocation de Saint Georges >
-cniPiTivE xsivr. - 261
ilron des clievaliers, une esuèce d'ordre mitî-
ire dont la tnissiun principale i^tnil la dfTcnBe
) l'antique instilulion du duel. Lca nouveaux
levalierB vivaient de pillage , raDçnnnaienl le
lye et otîmient le comlmt k loua ceux qui ne
trouvaient pas anti^raîla de leur visite
Derius, professeur de droit à Bologne, noua
conservé la formule de riîeeption du clievalier
qui on doit dire en le rrapjjiint de Tipte : « Le
Hip qtic je VUU9 donne est le dernier outrage
te vous devez soufl'rîr avec patience. » t'oyez
Iaffei , dctla Svienza ca%-aUei-e.ica,
tt Aux combats d'un h un, dit LaColombiére,
B Italiens Taisaient merveille. lia avaient des coups
et quelques-uns savaient faire tomber Tèp^e
mains des plus forts ennemis. D'après Aleiat,
(t^hanpîon ainsi désarmé ne devait attendre aucun
.rtier. /'uj es tome I, page 124 et la note 169.
I Si , par l'établissement des communes , l'Italie fut
larrassée de bonne heure de ces guerres privées
donjons qui désolèrent la France jiisc]u'à
XI, elle eut en revanche beaucoup à suuf-
de luttes acharnées entre celle foule de petites
E|Mibliques enfantées par les communes et qui se
'oraienl dans l'anarcliie ou se déchiraient dans
flétcrncllcs collisions.
Vers le même temps surgirent les Guelphcs et les
262 «^ HISTOIKE DBS DUELS. —
Gibelins , factions rivales , qui pendant près de trois
siècles couvrirent Pltalie de sang et de ruines. On
fait remonter leur origine assez incertaine h PèpKH
que de la guerre entre Lothaire II et Roger , rm de
Sicile, qui soutenait Fanti-pape Anaclet, de 1180
k 1138; mais ce ne fut que dans le siècle suivant,
lors des démêlés de Grégoire IX et de Frédéric II ,
que leur fureur fut à son plus haut période. Les
Guelphes soutenaient la cause des papes et les
Gibelins celle des empereurs germaniques. Les
premiers représentaient la Démocratie italienne ,
les autres TAristocratie.
Depuis les concessions de Pépin et de Charlc-
magne , le Saint-Siège était devenu une dualité qui
renfermait le pontife et le souverain. L^un invoquait
le dieu de paix, l'autre le dieu des armées. On
croyait encore voir sYlever au Panlhéon les auteh
de Minerve et de Bellonne. La Rome des papes
n^avait pas cessé d^tre la Rome du Polylhéisine.
Tandis que le pontife lançait Tanathéme contre
les meurtriers des champs clos et des tournois,
le souverain les encourageait sur les champs de
bataille. Il combattait tout à la fois armé des foudres
spirituelles et temporelles. On vit même encore au
16.® siècle , le célèbre Jules II commander une
armée et rapporter du combat dans une église
comme ex voto un boulet qui avait failli le tuer.
-CHAPITRE XKVI.-
Tout ce qui précède peut expliquer comment
I Français , lors des expéditions de Charles VIII ,
|e Louis XII, de François !.'■ et de Henri 11,
Irouvèrent Tusage du duel si bien établi et devenu
général dans la péninsule.
 celte époque de transition du moyen âge ,
I pontiGcat de Léon X , les mœurs des peuples
liions et espagnols au milieu desquels vivaient
■ troupes françaises , formèrent avec tes nàtrcs un
lièlaDge unique. Ou peut facilement distingiier dans
que nos armées en rapportèrent en France . une
imbinaison de l'honneur chevaleresque desCastil-
n avec l'égoisme rusé des disciples de Machiavel.
Proscrits de bonne heure par les souverains et
rtout par les papes, les duels se réfugièrent aux
amps, derrière leshalcs et les buissons, où souvent,
lieu de se ballre, on s'assassinait. Ces rencontres
pienl lieu sans témoins, ou, si l'on en amenait,
pétaient des comb a ttan s de plus qui formaient une
irtîc liée. Tous liraient l'épée en même temps et
dui qui avait le ptulàt fmi allait aider aux autres,
Hortc qu'une seule partie se trouvait souvent
!0>r à la fois deux ou trois adversaires sur les
as. Ce fut celte belle mode que nos guerrier*
pportérenl en France et ce fut au duel des
ignons de Henri 111 en 1547 , qu'un en Qt le
essai- /^. tome f , pryc 161.
264 — HIStOIRB DES DUELS. «^
u L'on s'advisa à Naples , dit Brantôme , el s^uw
fort aujourd'iiuy d^unc autre manière de combats
qui se font par appels et seconds hors des lilles
aux champs , aux forêts et entre les haies el buissons
d'où estoit venu ce mot : Combatere à la mazxa^
Or ces combats sont fort désapprouyés par les
docteurs duellistes , d'autant qu'ils se faisoîent sans
armes défensiTes et couvrant le corps que Poq
requiert fort en champ clos, disant qu'autrement
c'est combattre en betcs brutes qui se Tont eq
aveugles se précipiter à la mort. » JKémoivsà
ioui: fiant tes (fuels.
Montaigne raconte ainû une anecdote de famitle
qui se rapporte au même sujet el qu'il fait précéda
de quelques réflexions, ce C'est aussy une espèce
de lâcheté , qui a introduit en nos combats sin*
guliers cet usage de nous accompaigner de se^
conds et tiers et quarts. C^estoient anciennement
des duels , ce sont à cette heure rencontres et
batailles.... Outre l'injustice d'une telle action et
vilainie d'engager à la protection de vostre honneur
autre valeur et force que la vostre, je treuve du
desadvantage à un homme de bien d'aller mesldp
sa fortune à celle d'un second — Partout où il y s
compaignic le hasard y est confus et mcsié »
« J'ay interesi domestique à ce discours; car
mon frère y sieur de Matecoulom , fust coavic i
— CHAPITRE XflVT. — 265
tme h seconder un geulilhotnme qu'il ne con-
ÎS3QÎ1 guén;s. ( Je voudrois ({vi'un mt: ftet raison
ces luis d'honneur qui \nTil si souvent cliucquaiil
troublant celles de la rnÎROD.) Après s'estre
faict de son liomme , voyant les denx maiatres
I la querelle en pîcds encore et etiliere, il alla
•charger «on cumpagnon . Que poovoii-ii moins ?
EToit-il BC tenir coy et regarder dcfl'aire , ai le sort
lut linsy voulu , celuy pour la deffcncç duquel,
itlà veoui'-.. AuBsy fViit-il dclivr^ dcsprisona
Italie par une bien soudaine et solcmne rccom-
indalion de noalre roy. Indiscrète nation ! Nous
t nous contentons pas de faire savoir nos vices et
Nés au monde par réputation : nous allons aux
liions étrangères , pour les leur faire voir en pré-
DCe. Mettes trois François aux déserts de Lybic ,
I ne seront pas un mois ensemble sans se harceler
a'esgratigner. » Montaigne, Essuis , In: Il ^
ç. 637. Paris 1604
«Voici, dit Brantôme, un miracle de trois combats
ul-à^-coup que j'ai ouys conter )t Naples d'un
tnlilhommc plein de foy et vérité et de là mcsmc.
[!e gentilhomme appelé par un nuire pour quelques
irolea , s'en fust luy tout seul au camp où il trouva
ipjielant avec un second et tiers. 11 tue son ennemy
s'en voulant retourner. Toul beau , lui dit (e
COQâ , U me Hesplaii oit fort île n'ofoir vengé la
286 — HISTOIRB DES DUBLt. —
mort de mon ami. A quoi Taulre tout firoidemeiil :
S* il ne tient qu'à cela, je le "veux, et Tenant aux
mains le gentilhomme le tue auasy de gallant
homme. Le tiers aussy caillant que les autres luy
dit : Fraiment , si "vous n'étiez si las , il me plairoii
île vous oster la moitié de vostre heur et honneur,
mais remettons la partie à demain. A quy le gea-
lilhomme : Nenny, je ne suis las. J'ayme autant
me battre tout c/uâud et à ceste heure; pourquoj
passons nous nos fantaisies. L^autre le prit au
mot. Le Napolitain lui en fit comme aux deux
autres , et le tua de pareil heur , les laissant là tous
trois morts à la garde de Dieu. »
Le même auteur parle encore d\m comte Claudio
qui rencontra un jour à la campagne quatre soldati
italiens se battant deux contre deux dans un parc
h moutons dont ils avaient fait un champ clof«
Il voulut les séparer, mais ceux-ci le chargéreot
avec furie et il n^eut que le temps de se mettre
en défense. Il en tue deux et oflre aux autres d^en
rester \h. Ceux-ci refusent, un troisième tombe
mort , cl le quatrième grièvement blessé n'échappe
que pour servir de témoin à ce brillant exploit.
Les Mémoires touchant les Duels du sire de
Bourdeille , ubbé de Brantôme , sont en grande
partie consacrés au récit des exploits des duellistes
italiens que le narrateur salue toujours des noms
F
■ H»
Pkpi
»!!1
P^
— CHAPITB2 XXXVI.— 2fi7
les plus glorieux , comme tlant sans rivaux dans
«elte partie. La plupart de ces tiauls faits oiit^të
rei:ueiUis par lui-même lorsqu'il alU au siège tic
Ite , en 1565 , comme amnteur apparemment
luisfju'il itail abbô. II fut même témoin oculaire
de quelques-uns. Son frère , le capitaine Boui^
deille , dont il parle souvent , eut plusieurs affaires
de ce genre en Piémont.
<( J'en ai ouy beaucoup discourir, dit-il , d
iprÏB de grands capitaines ilal ieiia <pu ont élf: jadis
1e« premiers fondateurs de ces combats et de leurs
poinctitlcs, et en ont très bien sreu le» théoriques
et pratiques. Les Espaignols aussy, mais non tant
'eux, Aujourd'huy nos braves franrois en sont
meilleurs maistres. Les Italiens qui sont un peu
plus froids et advîsés en ces cboses que nous autres
et aussy un peu plus cruels , ont laissé celle ins-
truction aux donneurs et cspargneurs de vies que
ie plus beau ît l'endroict de soa ennemy vaincu est
Ue le laisser là estendu, en ayant soin de l'estropier
des bras et des jambes avec une grande eslalilade
»ur la naze et le visage pour servir de mémoire. »
Selon Paul Yoct, c'est en Italie que l'art de
aurait pris naissance. 11 en fait même re-
nier l'origine au temps de l'ancienne Rome ,
'après un texte de Valèrc-Maxime {409). Il est
irtoiu qu'au 15.' et 16.' siècles, les plus liabiles
268 — msTOiBE DES Dinsu. —
prévôts (le salles d^armes étaient italiens. On panait
les .Vlpcs pour aller étudier Fart de se tuer propre-
ment , comme plus tard on passa le détroit pour
aller apprendre à penser, a Nous allons , dit Mon-
taigne j étudier en Italie Part de rescrime et Teier-
cons aux dépens de nos vies. Avant que de le
sçavoir , nous trahissons nostre apprentissage.
L'honneur du combat consiste en la jalousie du
courage non de la science. » Montaigne , Essais^
/iV. //, chap. 27 y pag. 629.
Jarnac, en 1547, se prépara pendant plusieuis
mois à se battre contre La Chataigneraye. Ce fut«
dit Brantôme, du capitaine Gaize, italien, qu^il
apprit son coup de jarret qui depuis porta soo
nom. Ce coup était décisif à une époque où ToQ
combattait encore couvert d^armures et où il suffi-
sait d'avoir mis son homme hors de combat , pour
en être le maître et en faire à sa guise, u IJa
autre , dit-il encore , le seigneur Pierre Stroui
(depuis maréchal de France) , lorsque mon oncle
La Chataigneraye avoit reçu défenses du roi Fran-
çois L^i^ d'en venir aux mains avec Jarnac, luj
conseilla de fausser cet ordre et de tuer son homme
iii ognimodo. C'esloit un conseil italien. »
« La dernière fois c|uc je fus à Milan ^ continue
noire auteur, tournant au secours de Malthe, j'y
demeurai un mois pour apprendre à tirer des
\x\vi.— 269
armes du grand Tajipe , irés bon tireur alors.
Mais Je jure que tant qtic j'y fus , il ne se passa
jour que je ne visse une vingtaine de quadrilles
I ceux qui avoienl querelles, se pourmener par
>ille , et se rencontrant se haltoient et se luoieni
bien qu'une inrmitë restait cstcndue en place
r le pavé , mesme qu'on en a tus qui se louoient
mme serviteurs et vallets, s'allant offrir h ccus
1*118 senloient avoir querelle et vivant de cela
inme locataires & ce mAtier. n La même chose
ifiassail en Espagne, f^ojez la note 352.
Cette férocité dans les mœurs et celle déloyauté
kis tes procédés, qui se propagèrent en France
i 16.' siècle, existaient déjh bien antérieurement
i Italie. Brantôme parle d'un certain comte de
irtinengo, Vénitien au service de France, grand
telliate et déterminé sicaire qui en usait parfois
rvera ceux qui avaient affaire à lui , comme ce
iron de Vitaux , seigneur de la cour de Henri 111 ,
ntt il a été parlé au tome 1." , chapitre XVII.
On peut encore juger de l'ilalie de celte époque
V la manière dont s'; prit Lampugnano, pour
liner , en 1476 . le duc de Milan Galeas
rie Sforce. «Il le fit peindre, dit Brantôme,
is un tableau fort au vif contre lequel il donnoit
la dague k toutes fuis qu'il y pcnsoit et s'cs-
^oit de la sorte , et tant ainsy continua que se
270 — niSTOfBB DES DUBLS..—
voyant bien asseuré , il ne failKt Paborder éam
une église et liiy en donner sept coups à bon e»'
cicnt dont il tomba mort par terre foui eslendu.
Quel essay ! le sieur de Montaigne n^en a jamais
faict ni escrit de pareil parmi les siens. »
Il n^est aucune des plus célèbres renommées
militaires de Tépoque qui ne se trouve mêlée à des
combats particuliers en Italie , soit pour y prendre
part , soit pour les autoriser. On y voit figurer trois
rois de France , les deux Nemours dont Tun Louu
d^Armagnac, dernier rejeton de la race Mérovin-
gienne, tué à la bataille de Cérignolles en 1503,
Fautre Gaston de Foix , tué à celle de Ravenne en
1512, puis les Lautrec, les Trivulce, lesStrozxi,
les Chabanne La Palice , les Bonnivet , les de Guise,
d^une part ; les Gonzalve de Cordoue , les Pescaift,
les Philibert de Châlons , prince d^Orange , de
Faulre.
En 1528, quatre Florentins combattirent devant
ce dernier. L^un d^eux criait à son adversaire qu^il
avait mis par terre de se rendre. Je me rends à
M. le prince y répondit celui-ci, — // ny a ici
d'autre prince que moi, répliqua Tautre , et il fallut
qu^il se rendit dans une autre formule.
Gaston de Foix, duc de Nemours, la veille de
la bataille de Ravenne qu^il gagna et où il fut tué
h FAge de 23 ans , avait défié le vice-roi de Naples
— CHÂirraE KHTvi.— 271
'Je sa personne à la sienne; maU il lui fut répondu
par le marquis de Padulphe « que le YÎce-roi ne
se fiait pas lant k sa personne qu'il put y condes-
cendre. »
Voici un Irait où le m^mc duc de N^emoura et
le capitaine Bayard ont joué un rôle aascr remar-
quable et qiie BrantAme raconte en ces termes,
d'après la yie de Bayant par son loyal serviteur.
« Lorsque M. de Nemours esinit à Ferrare , il y
euM deux braves et gallanls capitaines , qui avoient
nom AxeTedo et Saincte-Croix , les quels par la
grande renommée de la valeur et prudliommie de
ce brave prince, ayant une grande querelle, s'ad-
vîsérent de lui demander )e camp; ce qu'il leur
accorda fort courtoisement l'ayant préféré aux
Espaignols k lui grands adversaires voire k leur
roy Ferdinand. »
<( Le jour assigné pour le combat, la diichessie
de Ferrare (Lucrèce Borgia) s^y voulut trouver,
la quelle estoit pour lors des plus accomplies prin-
cesses de la chrestienté. Aussy M. de Nemours en
estoit épns vm peu beaucoup , et en porloît ses
couleurs gris et noir cl tmc faveur qu'il avoil sur
•oy k la bataille de Ravennc. Le combat ayant
esté donc galamment entrepris, la capitaine Saincle-
Croiic reçut un tel coup sur la cuysse qu'il en
eust tout le haut coupé jusqu'il l'os dont jaillit si
Z73 — BISTOIIB DBS DCBLS. —
grande abondance de sang , qu^'ainsT qu^9 cuydi
marcher pour se Tenger , il lomba. Quoy voyant
Azevedo lui dit : Rtrnds toi Saincte-Ctmx , oii ft
te tuerai. Mais il ne respondil rien ; aîns tenoit
toujours son espée au poing délibéré plulosl mourir
que de se rendre. Sur quoy Madame la ducbese
pria à joinctes mains M. de Nemours qu^il fisl
départir le combat. I^lais il luy respondit k cda :
Madame y vous ne doubtez point combien je vous
suis serviteur y mais en ceci je ne puis rien et ne
dois ni offenser la ior du combat , ni honnestemetU
prier le vainqueur contre la raison , ny hty osteree
qui est sien par le liazard de la vie. Mais le parrain,
par une invention toute gentille , s^advança et dit :
Seigneur Azes^edo , je connois bien au cœur de
Saincte^C/Xfir , monJiUeul, qu'il mtKirroif pluiost
que de se rendre; mais je me rends pour Uiy.
Ainsy demeura victorieux Azevedo qui en readii
grâces à Dieu , et fust mené en triomphe avec clai-
rons et trompettes au logis de M. de Nemours
qui le festoya avec grand honneur. Et fust soudain
pansé Saincle-Croix et ses gens remportèrent atec
ses armes , les quelles Azevedo, s^estant oublié de
les emporter avec hiy , envoya demander pour
s\*n triomplier. Mais on ne les voulut rendre; dont
les plaintes estant venues i M. de Nemours H
au duc de Ferrare, le bon capitaine Bavard, qui
au vu
— rn^piTBE xxxvt. — 273
mil eMf !c mcsirc cl ^nrdc du ramp , eiist commis-
in d'aller dire à Saincte-Croix qu'il cusl il les
que s'il y conlredisoit , il scroit rapporté
iiis le camp où luy seroil sa plnye descousiie,
le metlroil en la même sorle et estai que son
ennemy l'avoil laissé. Quoy voyant Saincto-Croix
fiist forcé de les rendre à M. de lîayard qui les porta
au vainqueur ainsy que la raison le vouloit. fie
Bayat-d par son loyal sen'ileur. D'AuniGuiEii ,
XXyi. La Colombier Ë, lom. Iî,cha\>. XFl.
On trouve encore dans les écrits de BrantAme
el La Colombicre ainsi que dans les Mémoires du
maréchal deLamarck, la description d'un <;ombat
Knlrc deus Espagnols Dom Péralle et Dom Aidano ,
l'un du parti tie Louis Xll , Tautre du pape Jules IL
M. de Chaumont, lieutenant-général du roi, leur
avait octroyé le camp. Les deux champions étaient
secondés chacun par un Albanais dont im resta sur
la place. Ces mcmes auteurs rapportent encore une
foule d'autres combats du même genre où furent
tués plusieurs seigneurs de distinction (409).
Dom Ferdinand d'A valus , marquis de Pcscaire ,
général des troupes de Charles-Quint , reçut un
cartel de Jean de Chabannes Vandcncsse , b l'occa-
don du pillage de Corne que Vandenessc lui avait
,rendu à composiliou. n Pour réponse, dit d'Au-
Ktdigiikr , le marquii luv manda que s'il vouloit
t 18
1
274 -* HISTOIRE DBS DUELS. —
seiislcnir que ce sac fut advenu par son cooh
mandemeiU ou permission , il a\oit menti. La mort
de Vandcnesse tué peu après à la retraite de Roma-
gnano avec Bayard , laissa impunie Farrogance
dont le marquis avoit voulu couvrir sa lâcheté. »
Selon Brantôme , Pescaire n'aurait été empêché
de répondre au défi que par l'opposition unanime
de son armée dont il était le pèœ et le plus aimé
général* BbaktÔmb, Mém, sur les Duels , pag. 212.
D'après les maximes de chevalerie en vigueur
il cette époque , on tenait pour lâcheté de refuser
un cartel d'ennemi à ennemi. Je laisse à penser ce
qui pouvait en résulter pour la discipline militaire.
Pescaire , que Brantàme appelle le grand chasseur
des Français en Italie, a mérité, quoiqu^en dise
d'Audiguier, la réputation d'un des plus braves et
des plus habiles généraux de son temps. Il ne refusa
pas, comme on le verra ci-après, de jouter dans
un tournoi qui fut presque un duel , contre le duc
de Nemours, adversaire plus digne de lui. Cette
fois il aima mieux vaincre et faire prisonnier
François 1.*' à la bataille de Pavie , que prêter
le collet h un simple capitaine du roi de France.
François l.^^ lui-même eut été plus avisé s'il eût
suivi les avis de Lautrec et ceux du brave et sage
maréchal de Chabannes La Palice, qui était frère
de ce Vandcnesse et à qui cette funeste bataille
1 xxxvt. — 275
9tan In vie, miilliPiir |i1ii!t irrfparnlile nssiirémenl
M! la raptivil^ tlu roi. On connail la clioti.son
ipulairc faite ii Toccasion de ciHe mort. C'Mait
ni que noire trop I6gùre nalioii sr consolait de
perle de ses li^ros.
Datard Ggura aussi pour sa part dans deux duels
I Italie. On verra par le rf'cit naïvpmeni original
k lo^al senîiait dans sa /'ie tir Jioynrd, récit
produit par Itroulôme dan» sq» Atihuoii-es sur les
■els , fomment le chevalier sans pctir et sans
l|iroclie se comporlail en cliamp clos.
I n Pnrmi les fairts mémorables <\ii M. de Bavard ,
•c parle d'un beau combat de luy qu'il fisl au
^aumc de Nnpies, contre un gallant capilains
(MÎgnol qui se nommoit D. Alonxo de Solo-Maior,
l|ue1 ayant eslë prisonnier de guerre de M. de
lyard et en a^anl pris quelque méconleniemeni ,
pliant qu'il l'avolt très mallraité el non en cava-
ir qu'il dcvoit être. C'éluit pourtant contre raison
pW disoit cela ; car au monde il n'y eusl plus cour-
n que M. de Bayard. Par quoy luy bien ennuyé
npropfls qu'en tenoil l'Espaignol, l'envoya deffier
BM personne ti la sienne en ramp clos; ce que
Rilre accepta , fust à pied , futtl it cheval el brava
Wt, el qu'il ne se desdiroil oncques de fe qu'il
^il diol de Iny. Le jour donc assigné ëtanl venu,
i. de I-a Palice ncfiompagiii- de dem cent gentils-
276 — HISTOIRE DES DUBLS. ^
hommes, emmena M. de Bavard, monté sur un
beau coursier , et yeslu tout de blanc par humiliîê,
Encores n'esloit venu le seigneur Alonzo. On en-
voya le haster par un trompette qui estoit au sei-
gneur La Palicc , et qu^on appelloit La Lune ,
au quel il demanda en quel estât estait le seigneur
de Bayard ; il respondit qu^il estoit à cheval en
habillement d'homme d'armes. Comment , dit-il,
c'est à moj à eslii^e les armes et à luy le cfiamp.
Trompette , va luy dire que je veuljc combattre à
pied. Or , quelque hardiesse que montrast le sei-
gneur Alonzo , il eust bien voulu n^en estre pas
venu si avant. Il vouloit combattre à pied parce
qu'il n'estoit si adoict à cheval que M. de Bayard,
et qu^il sçavoit que ce jour là estoit son accès de
fiebvre quarte qu^il avoit gardé deux ans , dont
estant plus foible il pensoit en avoir meilleur
marché. )>
c( La Lune vient vers le bon chevalier auquel
il dit : Capitaine j il y a bien des îiou\^elles ; voslre
homme dict à ces te heure quil veut combattre à
pied et quil doit eslire les armes, Aussy estoit-il
vray, et comme il avoit esté auparavant conclud que
le combat se feroit à cheval , par-là scmbloit advis
que le seigneur Alonzo vouloit fuyr la lice. Quand
iceluybon chevalier eust escouté le trompette, il
demeura pensif un bien peu , car le mesme jour
I
xxsvi. — 277
BToit eu sa fieb^re. Nëanmoings d'rm couraige de
lyon , respondit : La Iaihc , mon amy, allez le
haster et luy dicies qu'il ne dcinctiivin pas pour
cela que mijourd'/tur ne répare mon honneur
ajrâant Dieu ; et si le combat iw hty plai.il à che-
val, je le ferai tout ainsy qu'il atlvisem.
l\ y eust pour garde du camp M. de La Palîce
î Irès-Iiieii s'enlcndoît en ces choses là, el Tespai-
lol D. Francisque dWlteméxe. Chacun se mit
^à genoux pour prier Dieu ; mais M. de Bayard
\mt courba de son long pour baiser la lerrc, el en
^#e levant fil le sigue de la croix , puis niarcha droiet
à son ennemy aussy asseuré rorrime s'il fusl esté
dans un palais à danser parBiî les dames. <>
D. Alonzo de son costé , s'advança aa de-
it el luy demanda : Segnar Bnjanlo que me
lieres ? Il luy respondit : Je veux tteffendre
mon honneur, el sans plvis de paroles s'appro-
chèrent el se ruérenl chacun plusieurs coups.
Tous deuT sToient bon pied , bon œil et ne vou-
loîent ruer coup qui fusl perdu. Si jamais feurent
'veus en champ deux champions mteuls semblans
preudhummcs, croyez que u»u. Plusieurs coups
K nièrent l'un sur l'autre sans eul\ atteindre. Le
bnn chevalier voyant qu'il ne hiy pouvoil porter
dommage s'advisa d'une Itnesse ; il laissa passer le
coup de son ennemy en tenant son estoc es l'aii'»
278 — HISTOIRB DES DUELSi —
el le prenant à descouvert , luy va donner un n
merveilleux coup dedans la gorge que nonobstaDt
la bonté du gorgerin , Festoc entra de quatre bons
doigts , si qu^il ne le pouvoit retirer. D. Alonzo sa
sentant frappé h mort, saisit au corps M. de Bayard
qui le prit aussy comme par manière de luicte , el
se pourmenérent si bien que tous deux tombèrent
à terre Fun près de Tautre. Mais M. de Bayard,
diligent et soudain , prit son poignard et le mit
dans les nazeaux de son ennemy en luy escrianl ;
Rendez^vous seigneur Alonzo , ou vous êtes morî%
Mais il n'avoit garde de parler, car déjà es!oit
trespassé. »
c( Lors son parrain commença à dire : Segnor
Bajardo ja es mueno y vencido hav^ejs; ce quy
fust trouvé incontinent, car plus ne remua pieds
ne mains. Quy fust bien desplaisant , ce fust le
bon chevalier , car s^il eust eu cent mille éciis ,
il les eust voulu avoir donnés , et qu^il Peust pu
vaincre vif. Ce néanmoins , en reconnaissant la
grâce que Dieu luy avoit faicte , se mit à genoux
le remerciant très humblement , puis baisa par trois
fois la terre. Après tira son ennemy hors du camp
et dict à son parrain : Seigneur D. Diego en aj-je
assez Jaict ? le quel respondil piteusement : Hoiio
y demasiado > Segnor Bajardo ^ por la honra de
Espagna. Vous savez , adjouta le chevalier Bayard,
; xx%vi.- 279
qu'il est k moy à faire du corps ii ma vulonlé ;
tnulerois je vous le rends el vrajinenl je vouldroia
mon honneur sauf qu'il fusl autrement. »
^11 Bref les Espaignols emportèrent leur cliam-
npion en luraenlablcs plaints, et les François em-
menèrent le leur avec trompeltfs et clairons jus-
quVn la garnison du bon seigneur La Police, où
avant autre cliuse le bon chevali<!r alla h l'É^lisu
Mjgeeinereier N otre-Scîgneur. i>
^^ Il est parlé dans la f j> ile Bayait/, par le président
d'Eipilly, d'un autre combat qu'il soutint en Italie
contre un gcntilbomme milanais nommé lliacinllio
Simoneta. Le loyal seniieur oe dit rien de celte
•anecdote dont l'époque devrait être fixée irers
ITannée 1499. Alciat et La Colombiérc, qui en font
lUssi mention , n'en nnt donné aucun détail.
I. le marquis de Fortiit d'Urlian y a suppléé dans
B F'ie de Crillim où il dit qtte ce Simoncla était
tétri de sufTisance et de vanité , el qu'ayant ulfeusè
layard il eu fut tué en champ clos, fie de C/iUon ,
. If, pag. ail (410).
Il a été bit mentioa ri-dessus , page H , d'ut»
wmbal de deux capitaines français , autorisé , en
I&21 , par le chevahcr Bavard , contre deux sei-
;iicurs Qmnauds , {tendant te siège de Mczîéres.
>n trouvera aussi eu la note 34(> , quelques détail»
lar les tournois auxquels a pris part lu boa chcvuliett
280 — HISTOiRB DES DUELS. —
Chose digne de remarque ! Dans un siëck
où les duels élaient autorisés par tant d^illuslrci
exemples , on ne vit jamais le chevalier Bayard
iigurer dans* un seul combat de français conUt
Trançais. u II est facile de juger, dit M. le marquis
de Fortia d'Urban , par les pieuses démonstratioiM
de Bayard qu^il ne soupçonnait rien de répréhensible
dans ces combats où il s^agissail de querelles per^
sonnellcs. Il les croyait permis devant Dieu, comme
ils Tétaient devant les hommes. Cétait le préjugé
commun de son temps. » Fie de Crillon , loco
çUato y page 364.
Lors de l'expédition du duc de Guise , sous
Henri 11, en 1557, il y eut un duel à Ferrare en
présence du duc Hercule d'Est et de son frère le
cardinal. On se battit aux flambeaux dans une salle
close que le duc avait fait préparer à cet effet.
 la même époque , un capitaine gascon nommé
Prouillan se battit au Monle-Rolundo près Rome,
avec un capitame italien au service de France. « Le
subject de leur querelle étoit grand , dit Brantôme ,
car Prouillan s'esloit cschappé à dire que tous les
Italiens esloienl b.... ; c'csloit trop. M. de Pieaoe
fusl parrain de Prouillan et Paulo Jordan de Pltalien.
Celui-ci fut vainqueur et s'en alla à Rome où il
entra avec grande resjouissance et applaudissemeos
des siens et grands cris qu'un chascun faisoit *
F'icloria! Victoria! llionor délia patiia saU'a* a
-CNAPiTRi: xxwi.- 281
Le Piémonl fui occupù jiar les armées rriiiii'HiM:<i
Liil la plus gnmdf pnriii: île In prcniii^re p^TÎode
16.' siéfle. " l.e duel y aToit la plus grande
;ue, dit Brantâme , eî bien qu'on disoit ca
™*erbe : Gardez-i'iMS li'tin liulît tht Pii-iiioiU.
'estoit à chaque iiisluut des «buâ , insolences , es-
iDdales, esclandres, superebcrics, cslretlcs, aller-
Il3 el meurlrea. ii Noire auteur en donne pour
!uve une foule de duels qu'il raconte avec sa
prolixité ordinaire , nolammenl plusieurs alTaîres
de son frère le capilainc Bourdeillc , grand brelleur
du temps, et le combat de ucs deux oQiciers Piè-
mODlais au sujet de la mort de sou oncle La Cba-
■■îgneraye, dont il a èlé parlé au tom. 1.", png. 48.
■ Le prince de Melfe-Caraccioli, qui commanda
en Piémont pour François I."^, depuis 15-45 jus-
qiiVn 1550, lit divers nSglemens pour amorlir les
duels sans en obtenir beaucoup de succès. Comme
lieu le plus ordinaire des rendez-vous était le
du Pô hi TurÎQ , te gouverneur s'avisa de
difendre sous les peines les plus sévères de se battre
partout ailleurs que sur le garde-fou même du
poni , comme aussi de porter secours ix celui qui
ant le dessous ou perdant seulcnienl l'équilibre,
iSombcroit dans la rivière (411).
Le meurtre de deux ambassadeurs français ,
:<Siucoa et Fr{'gosc , ordonné en i^A'l par Du G&sl ,
duels
2S2 -* HISTOIRE DES DUELS. —
gouverneur de Milan pour Charles-Quiul , fui le
signal d'une nouvelle guerre entre ce monarque
et François I.^'. Il avait été aussi le sujet d^un
cartel envoyé à Du Gast par M. de Langeay,
prédécesseur de CaraccioH dans le gouvemenieat
du Piémont. Des manifestes furent publiés k celte
occasion et envoyés à la chambre impériale oii
M. de Langeay voulait obtenir justice du refus de
son adversaire. Mais la mort du premier arrivée
sous ces entrefaites , mit fin au débat.
Les choses ne se passaient gucrcs mieux en Savoie
où les souverains donnaient eux-mêmes Texemple.
Dans un des fréquens démêlés survenus entre
Amédée V, dit le Grand, comte de Savoie, et le
dernier dauphin de Viennois , Humbert II , qui fit
en 1343 cession du Dauphiné à la France , celui-ci
ayant reçu un cartel , fil cette réponse au héraut
qui le lui apportait : Mon amyy di à ton maistre
(jfue la vertu d'un Prince ne consiste point en ta
force corporelle et gués' il se veut tant vanter d'eslrt
fort, nerveux et robuste, je luj responds que je
naj taureau qui ne soit plus fort et roide que luj :
Par quoy, quand il s'y voudra esprxru\^r , je luy
en env^oycrai. » Ce trait est rapporté dans la ChrO'
nique de Savoie.
De Thou , dans son Histoire Universelle sous h
\vi,- 283
' date de juin 1590, parle d'un caïk-l iidressii par
un autre Améd^-e , dm; de Savuie i un f;ciiti1lioiiimo
pommé Saint- Jcui's , et qui non plu» uVut paa
l «le sttilea.
Charles de Crétjui , duc de Lcadigiiières , pair
rt maréi-lial de France ayant, en lQtJ7, einpurlâ
le fort dc8 lïaneaux aur le duc de Savoie, Don»
Philippin, frère bâtard du duc, faillit ^trc pris et
^Ltte réussit h s'éclinppcr qu''t;n cliangcanl d'iiabita
^B^vec un soldat qui fut trouvé parmi les morts.
Pliilippin n'avait pas pris garde «ju'il laissait ii va
•otdat une riche écliarpe de femme qui fut remise
I à Créquî.
Kl Le lendemain , il envoya un trompette pour rË-
Hnlsmer les morts ; Créqui chargea celui-ci de dire à
philippin qu'il fût plus soigneux it l'avenir de garder
le« faveurs des dames. Piqué de celte plaisanterie,
I Philippin envoya un cartel à Crèqui qui s' (tant
^feferésrnté au rendes-vous, ny trouva pas Philippin
Ht|ue le duc son frère avait empêché de s'y rendre.
L'année suivante , Créqui fut fait prisonnier du
duc de Savoie et la querelle de l'écharpc recom-
mença. On convint d'un nouveau rendez -vous
I le fort des barreaux d'où Pliilippin au lieu
rik son écharpe ne rapporta qu'une blessure à la
Le duc de Savoie , qui s'était upposé au premier
284 — niSTOinE des duels. —
rendez-vous , trouva mauvais celte fois que son
frère dut Tavantage de la vie à Créqui , d^autant
plus qu'on accusait celui-ci de s'élre vanté d'avoir
eu du sang de Savoie , et il lui signifia qu^il eut
à recommencer, quand il serait guéri. En consé-
quence, nouveau combat qui se fit dans un ilôt
du Khone au-dessous Saint-André , et oii Philippin
resta sur la place. D. Montfkucoîc, tom. f^, p, 394.
Selon Brantàme , Créqui aurait achevé soi
homme étant par terre , et notre auteur ne manque
pas de le blâmer d'avoir la première fois laissé la
vie à Philippin. Mais d'Audiguier , qui raconte
ce duel dans les plus grands détails, assure que
« Créquy luy planta l'espée dans le corps de telle
roideur, qu'il le renversa et le cousut contre terre.w
Puis il ajoute : « Tous ceux de sa part luy crièrent
alors qu'il le tuast; mais le second de ïHiihppin
au contraire demanda sa vie. Créquy dit à Philippin
qu'il la demandasl lui-même, mais c^en estoit déjà
faict. Les religieux de Saint- Pierre -Chastel lui
refusèrent la sépulture selon les constitutions de
PEglise. Le duc de Savoie , par remords de cons-
cience ou par advis de son confesseur , avoit des^
péché un courrier pour dcflendre le combat , mais
il esloil arrivé deux heures trop tard. » D'Audiguier,
j^nc. usasse des Duels ^ chap. XIX,
Pirantômc parle encore d'un capitaine de Savoie^
(V., - 285
inmmé Viry « qui s'advisa d'envoyer une dcIGaiice
1 duc de Bourbon , ce qui fusl trouvé fort iiou-
Mii , mauvais et eslrange de la part d^un simple
ntilliomme envers un aussy grand Prince. »
Pendant que les Italiens trouvaient amplement
ttalisfaire dans les duels leurs gofits innCs de
ingcancc, ils avaieni aussi les tournois, genre de
l'^ectacle , qui llallait leur vanit6 et où ils croyaient
■gnaler leur courage qui coitsisle beaucoup plus
CD jactance qu'en réalité. La perCdie italienne fit
plus d'une fois dégénérer ces combats en véritables
duels, cl m^me quelque chose de pis. C'était ii Cé-
mne que se réunissaient les plus renommés joù-
lurs. Gabr. Naudœls, fie Stutiio militari , JV".' 07,
En 1190, il y eut k Messine un tournoi célèbre
aire les Français et les Anglais. Ceux-ci s'en
ouvéreul fort mal et éprouvêrenl une perte con-
■dérable. Ce fut Va la source de la mésintelligence
i^i éclata plus tard entre Richard Coeur-de-Lyon
d Philippe-Auguste , tous deux présens au tournoi.
yoytfz ci-dessus pag. 125 (412).
Les tournois d'Italie les plus remarquables eurent
lieu pendant les eipédilions françaises en Itabe au
16/ siècle. Ils participaient tout îi la fuis de la joAlo,
du duel et même de la guerre, car c'était le plus
ordinairement d'ennemi it ennemi qu'on comballail,
286 —HISTOIRE DES DUXL§. — •
soit pour faire montre de courage, soit pour Famoiir
lies (lames , ou seulement pour passer le temps.
I/un des plus remarquables de ces combats est
relui du g^*néralissime espagnol , marquis de Pes-
caire avec le duc de Nemours, Gaston de Fois.
Voici quelques traits du récit qu^en a fait Brantôme
dans la Vie de ce dernier au tome IX de ses Œu%rcs
complètes*
ce Le marquis de Pescaire, qui estoit certes un
très brave et très généreux prince , ayant receu la
renommée des vaillantises de M. de Nemours se
Toulu esprouver contre luy pour en augmenter
sa gloire, et pour ce, en toute gentillesse de ca-
valier, l'envoya deffier un jour lui et quatre contre
autant ou davantage à donner coups de lances
à fer esmoulu , fusl, ou pour Tamour des Dames,
ou pour la querelle générale. Le combat e«t aus-
sitost accepté et le trompette pris au mot. Par quoy
M. de Nemours paroit devant Ast où estoit le
marquis qui se présente en fort belle contenance,
la quelle bien qu'elle fusl très belle , comme dict
est , ne paraissait pas tant que celle de notre prince.
II avoil esté réglé que, qui par accident tueroit
le cheval de son compagnon paicroit 500 esciis.
S'estant donc tous deux mis sur le rang et en
carrière , coururent de fort bonne grâce , et si ru-
dement qu'ils en rompirent leurs lances et les esclals
Lda!
1"
xxicvt. —
«>n nllèreni fort haut en l'qir sans s'endommager
l'un l'autre. Après la course levèrent leurviaiérc
el a'enlr'embrassérenl Tort coudoiscment et se mî-
nnl h deviser ensemble pendant cjuc les autres
nisoiei]t leurs rourscs. »
(( Ce fust le sieur de Aassé qui courut après contre
le marquis de Malespina, lequel rompît sa lance
sur le dict de Vossè , et en perçant son liaussc-col
mtra bien demi-pied de lance dedans , dont ce
jeune seigneur mourut quelques jours après. »
Ensuite courut le capitaine Manetz contre Dom
Albe dont il reçut un coup de lance au cou, duquel
il mourut le qualriéme jour.
n Le dernier qui courut fusl Du Moucha, enseigne
de M. de Finars , de Tasge de 50 bonnes années
contre le quel se vint présenter le comte Carafle ,
napobtam, nepvcu du pape pour lors (Paul IV),
au quel le seigneur Du Moucba féril si ^rand coup
de lance qu'il lui perça le bras el le corps de part
en part, de sorte que la lance se monstroit outre
par derrière plus de quatre pieds, dont le seigneur
comte demeura mort sur le citamp. Et ainsy se
déroesia le combat par victoire doubteuse et chacun
se retira, n
n y eut encore en 1502 , un autre combat demi-
idael et demi-tournoi de 13 Français contre 13 Es-
ignols et Italiens, >idu quel ccus-ry, dit Brant6me,
288 —HISTOIRE DES DUELS. —
s'en donnent tout rad\autiige et gloire ainsy mesme
qirils Pont es(!nt; maid les François ne content
pas ninsy. » Au nombre des Français figuraient
Bavard , Chabanncs La Palice , d'Urfc , Torsy et
Mondragon. Us avaient été désignés par le sort.
D'après les lois de la chevalerie il était expressément
défendu de tiivr aux chevaux • D'un autre côté,
celui qui était démonté était censé hors de combat
et ne pouvait plus y prendre part. « Les Espagnols
pourtant , dit Brantôme , n'observèrent cette belle
loy ; car s'estant fort bien amusés à tuer les chevaux
ils en abattirent jusqu'au nombre de onze , et ne
se trouvèrent à cheval que messieurs de Bâyard
et d'Urfé. Celte tromperie ne servit de rien aux
Espaignols ; car oucques plus leurs chevaux ne vou-
lurent passer outre voyant les autres chevaux morts,
quelques cou{»s d'esperons qu'on leur donnast. »
Les deux cavaliers français manœuvrèrent habile-
ment pendant plus de quatre heures en se faisant
un rempart des chevaux de leurs compagnons et
gagnèrent ainsi rheure fixée pour la durée du
combat (413).
Dans un assaut subséquent consenti par Gon-
zalve de Cordoue entre 12 Français et 12 Italien?,
<'eux-ci furent presque tous culbutés au premier
choc ; mais par une autre violation plus perfide
encore des lois de la chevalerie, les cavaliers Av-
— ciiAriTBE xxwi. — 2oB
thoiilt» se gliW-rciit entre les combattant et perçant
le ventre aux chevaux de leurs ennemis à Taide de
iililels , ussurèrent une facile victoire à leurs cham-
pions- Il n'v avait plus moyen de continuer k jouter
contre de pareils adversaires. /-'. Guichabdis, Hht.
tl'f/alie; u'ExPiLLï, TU- de Bajard et Muhatori,
Annales d'Italie.
Il y eut en 1507, un vf'ritable tournoi Icnu h
Milan, par Galéas de Sainl-Séverîn cl aulrcs sei-
gneurs dp Lombardie. n Le roi Louis XII , dit Jean
(l'Aulon, ètoit ]h présent en son cschalTaud : Les
Dames à pleins eschafTauds y (toienl aussi tant
^^gorgiales que c'esloit une droiirlc faycrie. » Jeah
^fcAiTOK, fie de Louis XII, /mg. 270.
^B Louis II, fils de Louis d'Anjou, roi de Naple*'
^■l de Sicile , et le prince Charles son frère reçurent
^^Pordre de la chevalerie dnns un tournoi célébré en
I France, en 1388, et y combattirent avec Charles VI
ClIcducd'Oriéiins. A', la note S5 du tome I (414).
Aujourd'hui les duels sont aussi rares en Italie
u'ils étaient communs aux 15. • et 16. • siècles;
; n'est plus Tépée qui tranche les dilTérens par-
Iculiers ou philiM qui les venge , c'est le poignard.
I A Mcwiiic ou fi N aples , dit Rousseau , un attend
1 homme au coin d'une rue et on le poignarde
r (linrièrc. Cela s'appelle ^tre brave en ce pays
le
590 —HISTOIRE DES DUELS. —
là ; et riionneur n^y consiste pas à se faire tuer par
son ennemi , mais h le tuer lui-même. » Aoui'.
JJéloisCy Lettœ LVll.
On ne rcconnaitrail plus dans ritaiicn de nos
jours celui du moyen âge. Il n^est pas de peuple
moins accessible à la tyrannie des préjugés. Pour
lui le quen dira-t-on? est un mot yide de sens.
Cette opinion d^autrui dont on est esclave ailleurs ^
n^exerce en Italie aucune influence sur les actions
privées. Aussi n'y voit-on presque personne songer
à exposer sa vie pour une injure de peur de passer
pour lâche. On trouve bien plus simple de con-
centrer sa vengeance , de la dissimuler habilement
et d^attendre patiemment une occasion de Texercer
à coup sur et sans danger pour soi.
c( C'est , dit Beccaria , de la nécessité des suffrages
d'aulrui que naquirent les combats singuliers qui
s'établirent précisément dans Tanarchie des lois....
Mais c'est en vain qu'on a cherché à arrêter les duels
par la peine de mort ; elle ne détruira point une
coutume fondée sur ce que les hommes craignent
plus que la mort même. Pourquoi le peuple imite-
t-il rarement les grands dans Tusage des dueb.^
C'est parce qu'il a moins besoin de l'estime des
autres que ceux qui étant d'un rang plus éleré
se voyent avec plus de défiance et de jalousie. »
Bjbccaru f Traité des délits et des peines, § AT.
■HK IXXVI. — 291
LYmule de Reccnna , le publicîste ilnlien Filan-
, tout en blAmaiil le duel , propose de le con-
Itrer non comme «n crime , mnis comme un dol
B la part de l'agresseur, el comme une faute àt
I part de l'oiTensé, s'il a tué ou mutilé son ennemi ,
~ ee que pait-eiiv, dit-il , // pouvait se dispenser de
faite. " On ne doit , ajoule-l-il , supposer ici que la
hnle, parce que l'action qui a produit l'un de ces
BÉeus maux, n'a pas ètè entièrement libre, parce
H^ue l'offensé a été pour ainsi dire forcé par Topi-
nion de recourir au duel.... Enfin, celui des deux
qui aura violé les lois de l'honneur relatives au duot
a puni comme assassin. » Ces distinctions subtiles
t assez peu logiques se ressentent de l'ancienne
icole italienne. Filakoiehi , Science de la Légist,,
n. r, pag. 156, Pnns,an f'II (415).
Celle révolution que nous venons de remarquer
hns les mœurs italiennes, aurait commencé vers le
nilieu du XG.' siècle , k l'époque de la renaissance.
I Quand Bajard acquérait le haut renom de
prouesse , dît M. de Cliûleaubriand , c'était au
milieu de l'Ilalie moderne, de l'ItaUe dans toute
U fraîcheur de la civilisation renouvelée ; c^était
4 l'époque où l'on déterrait les statues et les monu-
mena de l'anliquilé , tandis que les Gonzalve , les
Trivulce, les Pcscaire, les SUozxy combattaient,
t/ue les aiiistes se faisaient justice de leurs rifouX
292 — niSTOIKE DBS DUKLS. —
h coups dv poignatri, » Chatfaubri.knd , Eluda
/n'storù/urs , lom, //-', pof;. 255.
Ce ne fut pourtant pas dans celte forme nouvelle
que Michel-Ange de Caravage voulut tirer Tcn-
geancc du chevalier d'Arpino , dit le Josepin , son
ennemi et son rival, qui avait blàiné avec peu de
mesure un de ses tableaux. Il lui envoya un cartel
que Tautre refusa par le motif que celui qui le
provoquait n^était pas comme lui chevalier de Saint
Michel. Caravage se pique au jeu et court à Malte
se faire recevoir chevalier servant. Là, il eut une
violente querelle avec un chevalier de distinction
et fut mis en prison. II s^échappa et vint se réfugier
à Rome où il avait déjà tué un jeune homme. Il eut
encore quelques affaires fâcheuses que lui attin
la violence de son caractère, et finit par mourir
sur un grand chemin en 1609, à TAge de 40 ans.
Le grand nombre de révolutions qu^à subies
ritahe, ces rivalités continuelles entre une foule
de petites répubhques qui sVn étaient partagé le
sol au moyen âge, ces guerres d'un demi-aècle
où elle fut le champ de bataille de la France et
de TËspagne , ont dû influer sur le caractère des
habitans. Attaqué au dehors par mille ennemis,
déchiré au dedans par des discordes civiles , partout
ayant à craindre dq perfides alliés, des maîtres et
ïvi.- 293
3c3 iTrana, l'Italien pour se dtrcntire a dû opposer
ia ruse à la forre. Trop faible pour provoijner tnnl
d^ennemis, il a dû cherctierà lea surprendre philût
HH^li les combattre. De-lit l'art des n^gocintions , cet
Bpril d'intrigue cl cette politique sourde que con-
naît si rarement un peuple guerrier. L'école de
Machiavel a fait le reste ; des carrefours , cet auteur
a fîttil passer Tassassinat dans les cabinets de la di-
lomatie. Par lui le meurtre est devenu une sdenee
Dsaie Tescriine est un art.
>J}*autrcs auteurs italietis, outre ceux des 13.* et
' siècles cités ci -dessus, page 254, ont traité
Emalière du duel et des injures privées dans un
HÎl qui se trouve souvent beaucoup moins d'ac-
d avec les intérêts du la morale qu'avec la morale
I intérêts. Tels sont Antonio Massa , le poète
nponio TorcUi , Pigna , Daria Allcndolo , Suxio
htaMirandolu, Fausto da Loujinno, Poasevino,
laldo Corsa et le marquis Fabio Albergoti. Parmi
K productions de ces auteurs il en est deux assca
larquables, La première a pour titre : Tratiato
nie privalc mppacijicazioni , CoriTggio là35
1." ; la seconde : Tratlalo fiel modo di riililore
ice le ïnitiiiuizie piii'atc. Bergamo 1587 «Vi-S."
i^«z au surplus la liste complète de cuii auteurs
I MiPPKi, (ktlaS^irnzn cas-allensin l'Oritl/ .
^vnlo 1717.
294 *— KISTOIHE DES DUELS.—
AU temps présent , les Etats Romains sont le pays
de ritalie où les exemples de combats singiilicn
sont les plus rares. Ils sont sévèrement défendus par
les canons des conciles dont les dispositions ont
déjà été précédemment citées, notamment celles do
concile de Trente. Vojez la noie 100. 11 n'y a
guères de duels à Rome que parmi les étrangers
qui la fréquentent et qui ont le plus de facilités
pour se soustraire à Faction des tribunaux.
Aujourd'hui comme autrefois , c^est encore à
Naples qu'on se bat le plus souvent , et que Fart
de rescrime est le plus en honneur. On n'y
connaît plus de docteurs dont la plume s'exerce
théoriquement sur ce sujet, mais la pratique n'y
a rien perdu pour cela. II y eut en 1812 à la cour
du roi Murât, un duel célèbre entre les ambas^
sadeurs de France et de Russie et où les seconds
niirent aussi l'épée à la main selon l'ancienne mod«
napolitaine. Ce combat a été rapporté au tome
I.«S page 353.
D'après des notes recueilles en Savoie près
d'un savant magistrat de ce pays , le duel n'est pas
très-fréquent en Piémont. II Tétait davantage avant
l'occupation française , et il n'est pas sans exemple
que des magistrats chargés de le punir , se soieol
rendus eux-mêmes sur le terrain avant l'audience.
A celte dernière époque , tout docteur et élève d©
»vi. - 205
•l'L'niversilé portait l'épÉe dont il se croyait par-
là m^me autorisé h se servir en tontes rencontres.
Aujourd'hui le duel n'a giicres lieu qu'entre le*
militaires du grade d'ofHdcr , car les soldats se
baltcat Irés-raremeiit , ou bien encore entre ofB-
ciers et bourgeois. Il est à-pt'u-prcit inuui qu'uD
homme marié ou d6j^ avancé en âge , ait été forcé
d'aectpler un duc) ; ce sont prcsijue toujours ou
, des éludiuns ou de jeunes avocats ([ui se mesurent
,«*ec des officiers de leur ilgc.
I En Piémout comme eu Sa\oie , c'est ordinai-
rement dnns les repas , dans les bals , que les que-
relles prennent naissance. Les rivalités d'amour
Jf jouent le principal rôle. Les duels d'opinion
ou duels politiques sont inconnus, du moins on
n'oserait point avouer que ce fût lii le motif du
■Jcombal. Les duels h mort sont des plus rares ;
Terme ordinaire est le sabre o>i t'épée, celle du
pistolet n'est pas encore enticrcmenl à la mode.
Quoique le duel soit puni de mort par led
royales ConsUuaions Sardes , on ne connaît aucun
c»s où il cit ail été fait api^icalion. L'otTicier qui
refuse un cartel est cbassé du corps. S'il se bat , it
cal condamné Ji trois ou six mois de Fenesircllcf
( forteresse du Piémont ) , eut-d même tué son
itlversaire. Les bourgeois vont se battre ît la fron-
ire; on fci-mc les yeux sur leurs rencontres cl
296 — HISTOIRE DES DUELS* —
une courte absence les met à Tabri de toutes pour<*
suites. Il en est même qui croient pouvoir négliger
cette précaution.
Les mœurs de la Savoie et du Piémont relative*
ment aux injures privées ressemblent beaucoup à
celles de la Suisse. Ce n^est guéres que dans la
classe des paysans que des délits de cette nature
donnent lieu à des actions judiciaires. Il y a une
nuance particulière pour le Piémont où Parme
familière de la P'endeUa^ le stylet, fait plus souvent
son olBce qu'en Savoie (416).
On trouvera aux Eclaircisscwens hisioriqucs un
tableau complet de la législation actuelle sur le duel
pour le Piémont , la Lombardie , le duché de Mo-
dénç et le royaume de Naples (417).
C'est en Corse que ce goût pour la vengeance
semble être entré le plus profondément dans les
mœurs. Ce pays, avant d'être réuni k la France
au siècle dernier , fit long-temps partie de Pltalie ,
et il en a conservé Tespril cl le langage. Les Corses
pratiquaient encore le duel au temps de Brantôme
qui en rapporte un exemple , dont il fut lui-même
témoin : c< Deux soldats se battirent , dit-il , en ma
présence , en enragez et vrays corses , la quelle
nation certes a renom des plus courageuses et
braves de Pltalie, sans faire tort aux autres. Estant
— CHAPITRE XXXVI.— Î197
entrés dans le camp fort solemnellement , ils ti-
rèrent plusieurs coups sans se blesser. Quoy voyant,
le plus fort et bon lutteur s'en vint aux mains et aux
prises, et tous deux toml)èrent ensemble. Le mal-
heur fust pour le plus fort qui en tombant se
rompit un bras, re (jui fust fort heureux pour le
plusfiaible. Ce fust à eux de s'aider de la poin<ie de
leurs dagues entées aux murions , et s'en entre-
donnèrent tant parmy le visa<;e , dans le cou et
aux bras, que tous deux demeurèrent outrés de
playes et n'en pouvoient plus. Les parrains les sé-
parèrent en si misérable et pileux estât. Il y en eut
un qui rendit TAmc au bout d'un mois , dont son
compagnon en cuyda mourir de tristesse et d'enuuy,
estant redevenus comme auparavant grands amis. »
La Corse , sous la domination de (lénes qui
précéda sa réunion à la France, fut livrée à tous
les genres de brigandages. On ne pouvait obtenir
satisfaction de cette république de marchands, chez
qui tout s'achetait à prix d'or , sans nu-me en ex-
cepter rimpunité de tous les crimes, (/.hacun alors
prit le parti de se faire justice à soi-même. I)e-là
Torigine de la terrible f^endclta, si féconde encore
aujourd'hui en scènes tragiques , surtout chez les
montagnards qui forment un peuple h part de
rhabitant des villes.
Jusqu'au dernier siècle , la / aulclia avait cou-
298 — niSTOIKE DES DUELS.—
flcrvé quelque chose des anciennes formes chcTa-
leresques. Les partis ou familles se déclaraient la
guerre. Il y avait échange de cartels avant d^en
venir aux mains. Puis c^étaient des rencontres,
des combats , des embuscades , des sièges , des
champs ravagés , des maisons en cendres , des
femmes et des enfans égorgés. Des familles entières
disparaissaient dans ces grandes scènes de duels.
Les haines se perpétuaient de génération en géné-
ration jusqu'à Textinclion complète d'une des races
ennemies, à moins d'une paix régulière stipulée
par actes authentiques , comme il en existe dans
les archives d'Ajaccio.
Aujourd'hui le Corse qui veut se venger, sur-
prend son adversaire à Timprovistc , l'assassine cl
gagne les bois où il échappe long- temps aux re-
cherches de la justice. Il devient alors Bamielto,
proscrit ; et s'il est pris et condamué le préjugé na-
tional Tabsout et on lui donne l'épithcte d'Ao//a-
ralo. Cette passion de la vengeance semble , en
Corse , absorber toutes les autres. Le vol , par
exemple , y est aussi rare que le meurtre y esl
commun. Quand au duel on n'en connaît pas
d'exemples mrme dans les hautes classes de la
population indigène.
La justice est impuissante contre la ^endetta.
Long-temps, le chef du parquet de la cour de Basiia
— CHAPITRE XXXVt.— 299
I reçu du ministère des instructions partimlicrcs
pour fermer les yeux sur l\'îvasion des haïuUtll et
même pour leur procurer les moyens de quitter
nie. Ce fut aussi le motif du régime cxce])tionnel oii
Fut long-temps placée In Corse relativement h Tins-
litution du jury qui n'y est établi que depuis la
résolution de 1830. Il ne se passe pas de sessions
fc la cour d^assises de Bastia où Ton n^ait <H juger
des F^endetta^ Dernièrement à une séance où lo
jury venait de prononcer un verdict d'acquittement,
cm entendit le plaignant , fils d'un juge de paix ,
crier d^une voix terrible à l'accusé : Le jury t\ib^
soui et moi je te condanuic. L'auditoire frémit
connaissant toute la portée de ces paroles (418).
CHAPITRE XXXVII
Duels en Grùce , Iles lonienues , Ile de Malte.
La Grèce ancienne , comnie la Grèce mocleme,
csl de toutes les contrées de l'Europe la plus étran-
gère à Tusage des duels. Sous ce rapport, comme
sous beaucoup d'autres , les Grecs senïblenl ne
faire ({u'un seul peuple avec les Romains^ et la
plupart des observations placées en UHe du chapitre
précédent leur sont applicables.
Plusieurs traits disséminés dans le cours de cet
ouvrage , appartiennent à Thistoire grecque el ser-
vent à caractériser ces combats singuliers qu'on
rencontre si rréqueniment au fonds des plus an-
ciennes traditions de ce pays. Ainsi , les exploits
d'Iïercule, de Thésée, de Persée el autres per-
sonnages des temps mythologiques , quand ils
combattaient des monstres ou des brigands, ne
ressemblaient en rien à nos duels modernes. Celait
ordinairement i\ la voix de la patrie ou de l'hunia-
nité souiîrante ([ue ces héros prenaient les armes
— CH»PIT11E XXS111, — 30!
"h lion pour faire moiilre de cuiii-agc ou salisrairc
iiit ressentiment particulier. Le cumbnt de l'auli-
guité fabuleuse qui ressemblerait le plus au duel
t celui d'KU'OcIe el de Polynice \m\iT le 1r6ne de
Ibébcs. Mais ce ne fut lii , comme on l'a dtjà vu
fécédemment au lomc I.", page 4, quViii épisode
lerrier , et le combat singulier des deux frère»
8 ne ressemble pas plus à un duel que celui
de Corbis et Orsua qui combeltireiit en Espagne
devant Seipion peur la souveraineté de leur pays.
^&yfz ci-dessiii page 65.
^Jc ne reviendrai pas sur les divers combats qui
l i\é célèbres dans les poèmes d'Homère et où
[Braient des demi dieux, ainsi que les principaux
tonnages de la guerre de Troie. Il a suffi de les
tDtionner aux cbapîtrcs I, U et XXIX du tome
. Aucun de ces traits des âges héroïques n'a de
toporl avec le duel. Il en est de m^mc de ces luttes
vidueUes qu'on trouve dans les Ages pns-
ieurs et qui survenaient d'ennemi k ennemi, à
la suite d'un déG ou d'une rencontre sur le champ
de bataille. Le combat de Pittnius rentre Phrinon,
mentionné au lome 1,", page 5, révèle déjii cet
fil de ruse et de supercherie qu'on a si souvent
proche à la nation grecque. Le Irait de Thèmis-
ole indiqué il la page 10, est une preuve sans
pliquc de l'absence complète du préjugé du
302 — HISTOIRE DES DURU. —
point d'honneur dans les mœurs helléniques. Dans
nos li'mps modernes , tout homme , ne fut-il même
pas militaire , qui eut souffert comme le lièroi
athénien un outrage tel que celui d^Eurybiade ,
aurait été déshonoré dans tout pays.
Les Gaulois, qui envahirent plusieurs fois laGrèce
et pillèrent dans une de leurs expéditions le riche
temple de Delphes , ne purent y naturaliser le duel
qu'ils avaient emprunté dans leurs fréquentes com-
munications avec les Germains. Leurs mœurs fé-
roces étaient pour les peuples envahis, un sujet
d'étonnement et d^horreur , et c^est dans ce sens
qu^en parlent les historiens de cette dernière nation.
f^'ojez Atiienée, Dipnosoph, j lib. XII (419).
Les Grecs n^ont pas été aussi étrangers aux autres
genres d^épreuvcs connues sous le nom û! Ordalies,
sans cependant les prendre pour arbitres de leun
causes civiles ou criminelles. Ils ne les considéraient
que comme des présages. C^était une façon d^in-
terroger le sort , comme les auspices et les anis-
piccs. Dans VAntIgouc de Sophocle , des gardei
oflrent de prouver leur innocence en maniant le
fer (!haud et en passant îi travers les flamme».
Slrnbon parle des prêtresses de Diane qui mar-
chaient sur des charbons ardens sans se brûler.
Str^do, (le si lu orbis , lib, V,
Aristole dit que celui qui jurait devait écrire
^n serment sur un billet qu'on jetait dons l'eau.
t papier sum.igeait si le jurement était véritable ,
t disparaissait s'il était faux. Cela pourtant devait
ttaucnup moins dépendre de la nature du serment
[ue de la qualité du papier.
H y avait pour ces épreuves des temples consacr(-s
lUx dieux Palifjues. 11 en existait un Irés-anciea
l «O Sicile qui fut long-temps considérée comme
partie intégrante de la Grèce. On y voyait deux
bassins d'eau bouillante très-profonds et qui, dit-
on , restaient toujours pleina sana jamais déborder.
On Taisait dans ce temple des sermcns solennels , et
les parjures y étaient sur le champ punis de quelque
grande peine. Diodoh. de Sic. , ÏJiiior., Ub. II.
C'est il CCS temples que se rapportent ces vers
(de Silius Italicua :
N'est-ce pas là l'origine des épreuves de l'eau
froide et de l'eau bouillante!* Cette hypothèse est
•u moins plus probable que celles de l'évéque
Htncmar qui a cherché ses analogies dans les eaux
du déluge et dans celles de la mer rouge où furent
L submergés les Egjpliens. Him-.mab. , Opéra, Ub. f'II,
p<,S.^m.Parisus\m{.
Et qui pra^senti domitant perjura Pt
Peclora supplieio
PuniçQf., lib.XIV,
304 -^RiSTOiitR DES Dnin.!r. —
Knfiii , \le\aii(lrc-lc-(iraiid pnrail avoir eu lui-
niriiio lin s4Mip(*oii de ce mode guerrier d^inlerroger
le sovX , umU' clieK les (lermains au lémoignage de
Tiu'ittî. / oyi'z ci^lfssus page 185 et la noie SK*
Il lit roinbntirc , dit Plutarque , deux de ses sddati
dont l*un rcprcscntait l^armée des Grecs cl Tautre
celle des Pei-ses. Le champion des Grecs ayant été
vainqueur , Alexandre regarda comme certaine b
défaite de Uarius. Plltxroiu, in Âlvxand^
Ce qu'on trouve de plus remarquable dans In
Annales de la (irèce, relativement au sujet de cette
histoire, ce sont les jeux gjmniques dont les plus
célèbres étaient ceux d'Olympie , en Elide , qui
se célébraient tous les quatre ans. Ce furent là les
tournois de Tantiquité.
Les difTérens peuples de la Grèce y envoyaient
leurs députés. Toutes les villes épuisaient leurs
trésors pour briller dans cette illustre assemblée oii
la mngnificonre et la variété des jeux attiraient les
nations et les rois.
La frlo s'ouvrait par des courses ii pied et à
cheval. Gcllc des chariots était la plus noble et la
plus intércssiuito parce que c'était sur des chars
qu'on croyait que les dieux et les héros allaient
aux <*niTihals. Los rois y venaient disputer le priï
et Ton \il des fonnncs Spartiates remporter la paltnc
de In Ticioirc.CepHi tnntd^-sir^ ^Init nnc coiirnnno
tl'itlivicr. Le vHîtiquctir éltiit conduit au sou dci
JnArumens dans le stade qui retenliXHait <rnp]ilaudis'-
(Biens. Sa patrie associée h sa gloire lui décernait
i«on retour une pompe triomphale. Il entrait par
be liréehe faite à la murniile, comme un coti'
[nérant dans imc ville prii^c d'assaut , et il par-
fDurait les plaeea et les rues monté sur un char
t quatre chevaux.
h A Pes courses succédaient les combats des
bhlclcs, qui consiMaieiil dans la lutte, le piigitnt
le paniralium. Le pugilat était un etereicc de
jbrce et d'adresse où Ica Alhicles comliattaient îi
lupB de poings. Dans la suite ils s'armèrent de
Wsles, espèces de gantelets garnis de plaques de
de plomb ou d'airain. Le grand art des coni-
gitans était de défigurer le visage de leurs adver-
pres ; il éliiit glorieux de leur Taire sortir un œil
c la télé ou de leur briser la mdehoire. Plusieurs
imbaient morts on mourans sur l'arène, f'ojez
la nule 27 le trait concernant le lutteur Arrachion.
La lutte était un exercice qui se faisait dans
Xyste , portique couvert, où deux Alhlélcs em-
iloyaient la force et l'adrewc pour se terrasiier
m l'autre. L'origine de re eiimbaf est attribuée
)l(Tliésèe , du moins ne fut lui qui en fit un exercice
l'iidreMc triomphait souyent de 1» force, het
866 — HISTOIAB DKS DOELS. —
luUeurs étaient Duds , oints d^huile et d'une pous-
sière qii^on tenait en réserve. Quand le lutteur
terrassé entraînait son adversaire dans sa chute,
on recommençait le combat. Il fallait le terrasser
trois fois sans tomber , pour remporter la palme.
Le vaincu élevait le doigt , et ce mouvement éliît
un aveu de sa défaite. II y avait deux espèces de
lutte , Tune où les combattans luttaient debout |
l'autre où ils se roulaient à terre.
Le Pancratium était le combat qui demandait
le plus de force ; il participait du pugilat et de
la lutte. Les combattans pour vaincre pouvaioit
employer le secours de leurs pieds , de leurs dents
et de leurs ongles. Aussi Taréne était souvent en-
sanglantée. Dans ces jeux inhumains, les yainqueuri
obtenaient les applaudissemens de toute la Grèce.
Toutefois , il y a encore loin de ces exercices i
ceux des gladiateurs que les Grecs n^ont pas connus.
Lucien , le plus original , le plus spirituel et le
plus ingénieux des moralistes de Tancienne Grèce,
a saisi avec sa sagacité habituelle le côté ridicule
de ces usages ; les luttes et les lutteurs lui ont fourni
dans ses Dialogues des morts y des traits d^une satyre
mordante et pleine de verve. « Â qui donc en
veulent ces jeunes gens, dit Anacharsis à Solon,
de se mettre si fort en colère , de se rouler dans
la boue comme des pourceaux et de chercher i
— nr*PiTiiE «T\ii. — 807
éVloiiffer dun* leurs rudes étreintes''... Ils s'entre*
rhnc|iicnt rommc des béliers ; l'un élevant son
homme en l'air , le laisse tomber h terre dans une
seconsse violente et le tenant ù la gorge rempi'fhe
de se relever , de sorte que je crains qu'il ne
l'Houffc, quoifjue Vautre lui Trappe sur l'épaule
pour en obtenir merci , s'arouant vaincu. Après
s'être bien frottfs d'huile, ils se couvrent de boue
M ils me font rire quand je vois qu'ils esquivent
les mains de leurs compagnons comme des an-
^îlles que l'on presse. En voilii qui se roulent dans
le sable tomme des poules avant que d'en "venir
an combat, et couverts de poussière ils s'enlre-
fassent à coups de pieds et poings sans essayer de
•c Tenverscr comme les premiers. L'un crache ses
dents avec le sable cl le sang d'un coup qu'il a reçu
sur la mâchoire, l'autre sa*ite en l'air comme un
baladin et Tnit voler des nuages dépoussière, sans
*|ue l'homme velu <Ic pourpre rjui préside & ces
nerrices se melle en peine de les séparer. » Ll'oiE!!,
Diaiog. VII.
Les jeux olympiques se célébraient tous les
quatre ans et cet espace fominit ime olympiade,
manière de supputer les années qui fut en usagd
en Grèce juiwjii'k la 3()4.', espace qui comprend
1216 ans, depuis l'nn 7T0 avant l'ère chrélieniie
jus(|tte9 \l fan 340 de Jéons-^^lirisl. Cfs jeux le
808 — 1ÏISTOIRB DES DirSILS.-*
célt'braicnl vn Thonneur de Jupiter et prenaient
son nom du temple fameux qu'il avait h Olympie.
Il y avait aussi des jeux isthmiens qui se donDaieot
en rhonneur de Neptune dans Tisthme de Corinthe*,
des jeux néméens dédiés à Hercule dans la forêt
de Néméc , et les pylhicns à Apollon en mémoire
de sa victoire sur le serpent Python. ^. Scaugee de
emendat. tempor., Ub, I el V. Robinet, Dict* liislor.
Les jeunes gens étaient formés de bonne heure
à ces divers exercices dans des écoles publiqueif
appelées gymnases ou palestres, et ils étaient sounui
à toute la régularité de la discipline militaire. Les
filles elles-mêmes participaient à ce genre d'édu-
cation , et , d'après les lois de Lycurgue , dlei
paraissaient toutes nues dans le Xyste péle-mèle
avec les horaimes. Euhipid. , in Andromach. Pur-
TÀRCH. , Apophiliegm, , in Lycnrg.
De même que le satyrique grec Lucien a décril
les gymnases d^hommes, le poète latin Properce
a tracé le tableau suivant des palestres féminins k
Lacédémone :
MuUa tuœ , Sparte, miramur jara palestre,
Sed mage virginei tôt bona gymnasii,
Quod non infâmes exercet corpore ludoi
Inter luctantes nudic paella viros.
Cùm pila veloces fallit per brachia jactus ,
Increpat et versi clavis adunca trochi,
— CBAT-mip. TXTvn.— S09
Pulveruleutaquoade'Ltremns atntrK'niiuamelns,
Et patitur duro vuliiera PnnurAllo.
Nuiic ligat ad cesluiu gaudculîn bracliia loris;
Missile uunc diâc> pondus iii orW rutnt,.
Propert., lit), m, Eleg. 13.
Il n>st pfi9 surprenant que des peuples flerés
de cette maniùre aient ndnùs pnmiî leurs fables
ecUc des Aniazoncs, q«e Its romanciers grecs ont
fiiit venir de Scylhie, sur li;s bords du fleuve Ttier-
mudoon, dans In Cappaduce. De graves auteurs,
^|ris fpie Hérodote , Hîppofratc , "Oiodorc du Sifiîe
Cl Justin ont parlé fi^rieuscmeiit de ces fcmmus
gnerrières qui se brûlaient k mamelle druitc pour
mieux lancer le javelot. Ils ont célËbré lus exploits
et la beauté de leur rciue Aniiopc , d'Orylliie qui
lui succédb et Fut vaincue par Thésée , rfe Pen-
thésilée luéc bu siège de Tioie , etc. Mais plusieurs
autres auteurs ont fait juslicu de loulcs ces fliMes.
f^ojvz SriiAiroN de situ orbis, lib, yit et Xltl ;
»Palbi'Ratiis rfc incredihiL histor. , pag. 118. ^nu-
Klod. Elzevlr. 1649, in-12-.
' Quintc-Curce a été jusqu'à ressusciter tts Ama-
sones dont on ne pnrlait phis depuis long-temps ,
pour faire rechercher i Thalcstrfs , leur reùie ,
Il'iilliHnce d'Alexandre, et faire amener à ce priuL-e
«ne centaine de filles viîtucs en guerrières. Mais
Mltti erreur n été relevée par Arrieii , et ces lilk-s ,
810 — BisTOiRK Dw noms. —
s'il est vrai qu^on eo ait amené à Alexandre , ne
pouvaient être que des Sauromates , peuplades
Scythes dont les femmes , selon Hérodote , étaieot
aussi belliqueuses que leurs maris. Qoint. OniT.|
Histor., Ub, V, cap* 5. Ârriàn. , in AlexoMià.^
lib. IV, pag. 327, Leyd. 1704, in-folio.
Le témoignage d^Âlexandre4e-Graad lui-màne,
qui se connaissait en valeur guerrière , n^est pu
plus favorable à ces exercices que celui de Luciea
et de Properce. Voyant k Milet un grand nombre
de statues de lutteurs , vainqueurs aux jeux olyv*
piques , Ou étaient donc vos braises , s^écria-t-il ,
quand les Perses assiégeaient leur ville ? PLUTÀxai.|
Apophthegm* , in Alexand^
Cest à Tépoque des croisades , à la fin du XI.*
siècle , qu^on doit fixer la date de Timportation du
duel dans la Grèce moderne. Je ne reviendrai pai
sur ce qui a été dit au tome L^', chap. X, de^ mœurs
des croisés , de leur licence , des désordres et de
la corruption qui signalèrent leur passage à travers
FEmpire grec qu'ils traitèrent à-peu-près coaune
la Palestine. Quoique le terme de leur course fut
Jérusalem , ils s^emparèrent de Constantinople ea
1203, en furent chassés et la reprirent en 1204,
fondèrent TEmpire latin qui eut cinq empereurs
et prit fin, ca 1261 , lors de la reprise de Coofr
— CBAnTBE XÏÏVll.— 31 t
tantinople par Michel Paléologue. Toule celle
é[io((ue du Bos-Hmpii't: n'est qu'ui>e lun«au série
d'horribles guerres, d'aflVeux massacres, delâdits
assassitiHU, de hideuit supplices, de crimes cl d'al-
lenlats de loute espilcc.
D'Audiguier el La Colombièrc onl décrit plu-
Lwetir^épisodes di;s guerres des (-ruisi^, et ont rap-
irté plusieiirB df'fis et renconli'es entie ceux-ci
let Grecs ou les Sarraziiis, nolammciit an sif'ge
RMnlioGhc. Ces anecdutcs n'ofTreut rien de re-
irquable (420).
H a déjà él6 observé au tome I.", page 57,
re TEmpire grec n'adnpta (jue fort tard l'usage
8 loumois qui eut à peine le temps de s'y établir.
i^ojez la note 79.
Il n'y avait pas encore 200 ans que Constan-
lÏBOple était rentrée sous la doniinalitiu des ('irpcs,
[qu'elle fut prise, en 1453, par Maliomet II,
inr Constantin Paléologne , qui s'ensevelit coura-
isemcnt sous les débris de son IrÔBe et de aa
Cet érétiement fui l'époque d'une ère BouTelle
d'une grande rc^olulion eu Euro|>e. LxCrétHi
^IropreiDCnt dite , c'est-à-dire la presqu'île dit
Pélopfliiése ou Mor^e , a subi |H:nduHt près de
«juati'C siècles le joug musulman , et vient d'eu t'tre
délivrée de nos jours, iprés des prodiges de brt*
Toure qui rappelenienl les siédes de Tbéqûriock
et de Léonidas, si les stigmles d'uoe «usa kHigiii
senrilude profoodénieiit anpreinls dans les ombui
de ce peuple , pouTsieni être effiicés psr le seul
courage guerrier. Quant k la captale de TEoipire ,
elle attend aussi sa déUffance ateo les sicli^ pro-
vinces qui Tentourent. Cette heure si long-lempi
désirée est peut-être k la veille de sonner^ h^imtu^
biiité a désormais cessé pour TOrient ; àtj/k lu
événemens semblent y niarcher ausà vite que dan
potre Europe occidentale* L^islamisme n*a pha
d'autre soutien que les jalousies diplomatiques d»
princes chrétiens* Qu^un isul mot soil prmionoii
et c^en est fait du trône de Mahmoud qui déjii da^
mine bien moins mi aéraîl c|ue Tsutocrate de k
Russie,
La plupart des illustres voyageurs qui ont viaM
la Grèce , depuis M. de Chateaubriand jusqai
M. de Lamartine, n^y ont rencontré que rombis
d^un grand peuple qui semble errer pâla et àt^
colorée au milieu des ruines gigantesques de m
gloire éclipsée. CVst dans leurs ouvrages c^esl dsai
V Histoire d^ la Grèce de M. de Pouqueville quï
faut étudier les mœurs des modernes Hellànes qui
renemblent beaucoup k celles d^un peuple asrf
— CHAPITRE XXÏVII.— 313
qu'il s'agit de reconquérir à la civilîsntion. On ne
trouve dans ces divers Périls aucune trace de duels
i\ moins qu'un ne duuoe ce nom ^ quelques ^-pi'
•udea isolés de pillages, de piraleries et de scènes
d'anarchie qui ont succédé dans cette trop mat-
lieiireusc conlrée aux avanies musulmanes.
Toutefois , je m'estime heureux de pouvoir citer
le fait suivant lire d'un journal grec intitule VAmi
mIb la Loi, sous ta date de janvier 1U26 , F4 ." 176.
(E Deux jeunes Souliolles de la garnison de
Issolonghi se trouvant un jour à table , prirent
lt|uerelle et Étaient prélsJi s'alitr battre. Fiwe, dit
plus jeune, si lu es un brave, nvus n'aiviis pas
soin de nous battre l'un contre l'autre, et de
lus exposer ainsi à mourir acec ignominie. Mais
archons à l'ennemi, et là nous verrons quel est
plus braire de nous deux. — A la bonne heure,
vèpoadit l'autre. Aussitôt, ils tirèrent leurs sabres
coururent vers le camp des Turcs. Le plus âgé
>rés avoir tué cinq des soldats ennemis , tomba
i-méme atteint d'une balle : mais le pUis jeune,
^^i en avait déjà tué dix , voyant son compagnon
ndu par terre , se dirige vers lui , l'emporte sur
i épaules, et gagne les retranchemens , n'ayaot
ttlé que blessé d'un coup de pistolet dans sa retraite-
Voilà uu trait de générosité antique et qui
Ivappclle l'anecdule de Pid&o et Yarenus des C'om-
814 — JIISTOIUI DSI DVILt.—
mémoires de Céaur. /^, iome Ip page 11. Une tdle
conduite ches un peuple de pillards et de forbans,
comme on n^appeUe que trop souTent les Greci
de nos jours, pourrait être offerte pour modèle
k beaucoup d^autres trop fiers de leur civiliaatioa
qui peut-être Sera pitié à leurs descendans.
L'tle de Malte , quoiqu^on y parle la langus
italienne, m^a paru devoir être claaeée dans es
chapitre avec les lies Ioniennes , parce que topogra-
phiquement et moralement parlant , elle m plus de
rapports avec la Grèce qu'avec Tltalie.
Cette ile , après avoir successivement «ppartena
aux Carthaginois , aux Romains , aux rois de Tunii
et aux Espagnols , ne commença k avoir de Tioi-
portance que lorsque Charles-Quint la donna aux
chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem en 1530.
Les mœurs des insulaires se sont ressenties de
ces variations dans le gouvemement. Le duel ne
parait avoir été connu k Malte que lorsque les die-
valiers s'y furent établis. BranlAme cite quelques-
uns des combata qui eurent lieu dans cette ile,
«ntr'autres une querelle d'on chevaKer espagani
liommé D. Juan de Gusman avec un de aea com-
patriotes qui n'était pas chevalier. « "N^e pouvant,
dit notre auteur, se battre h Malte, en Italie, ni
•en aucun lieu de la chrcstienié , à cause du dernier
— CIIIPITHB XXXVII.— 315
concile de Trente, ils s'assignùrtiiit le rombdl à
Lft Vallonné, pa^s du Grand - Seigneur, et en-
\o_véi'enl dcmaiider le camp ù un Saugiac , renégat
espagnol qui là coininaudoit en quelque place , ce
qu'il leur accorda eu toute acurcté. Mais la justice
cl iaquisition du royaume de Naplcs l'osant sceu ,
leur en fil la dclTtinsc sur peine de la vie par ban-
dons et allÎL'Iica , si bien qu'ils n'osèrent passer
oullre. u
Au temps des chevaliers, le duel élnil proscrit
sévéremeul à Malte. 11 y avait pourtant dan» la
ville un lieu {irivîU^gié pour tes duellisles oii l'on
pouvait se ballre impuuLment, Ou l'appelait la
Straiia strewt, étroite et longue ruelle qui n'avait
de largeur que tout juste autant qu'il en fallait pour
que deux hummes pussent se uiclhc en garde et
croiser le fer. Us ue pouvaient reculer, et les tL^muins
arrêtaient les passans pour empèelier qu'on ne les
dérangeât. On avait toléré cet usage 'd Malle, afin
de diininuer le nombre des duels et pour qu'on ne
pût attribuer i une rencontre fortuite les combats
qui auraient beu partout ailleurs. Du reste, il y
avait peine de tnort contre quiconque se présen-
terait dans la Slrada WeLla avec des poignards
ou des pistolets.
Le duel était donc tout à la fois iuterdil et toléré
à Malte ; mais celte tulérooce u'éuit qu'indirecte :
S16 •— HI8T0IAB DES DVBtS. -«
on n^osail point Fayouer, on en parlait avec une
aorte d^embarraa honteux , comme d*un attentat
contraire à la charité chrétienne et malséant dam
le elieriieu d^un ordre religieux et hospitalier.
Voici une anecdote fort curieuse relatÎTe à celle
célèbre Strada stretta; malgré sa couleur ftnia»-
tique elle ne paraîtra pas , je Fespére , déplacée
dans ce chapitre.
Il y avait à Malte , un commandeur espagnol
nommé Dom Louis de Lima Vasconcellos, frère
de Dom Jaimez de Lima Soto-Maior , ambassadeur
dTspagne à Paris, depuis 1747 jusqu^en 1764. 1
se prit un jour de querelle avec un autre ceiiH
mandeur français , nommé de Foulquerre , qui
entrant avec lui dans une église , arttt offert de
Teau bénite à une jeune dame dont TEspagasl
suivait les pas.
Ce Foulcpierre était Tun des principaux habitués
de la Strada sîretta et passait pour entretenir ptr
ses principes et ses exemples la fureur du duel parmi
les chevaliers français, ses compatriote». Néan-
moins , provoqué au combat par le commandeur
espagnol , il se rendit à la Strada stretia d^asseï
mauvaise grâce , et k peine j fut-il qu^ s^écria ea
voyant son adversaire se mettre en garde : Comment,
segnor commaridador, vous tirez Vépé^ un f^en*
dtvdi-Saint ! Ecoutez, il y a six ans qme je ne me
— f,n*piTinî ixxvLt.— 317
\ dit conjexsionnnl , je suis èpouituité
de i'éuit de ma conscience. Mais dans trais jours
»'.... Interrompu brusquement par son adversaire
quJ ne voulut rien entendre et foroè <lc se mettre
en défense, le rommandeur de Foulquerre tomba
bientôt percé de part en part. L'n f'endrediSaùu ,
('écna-l-il a\ant d'eipirer ! Puisse le Ciel vous
pardonner!.,. Portez mon èpée à Téte-Foulqtws ,
et faites dire cent messes pour le ivpos de mon eiine
dans la chapelle du cltdteau.
L'Espagnol ne fit pas grande attention à cei
paroles. 11 fît Ha déclaration au chapitre de l'Ordre
dans la forme convenue, et trois jours après il fut
promu k la dignité de Grand-Prieur de Majorque.
Dans la nuit du vendredi au samedi suivant, il se
retrouva en songe dans la Slrnda stretta, et crut
entendre le commandeur lui adresser de nouveau
d'une vois défaillante ces paroles ; Portez mon
Tête'Foulgucs,etc.... Cette vision se répéta
lepuis r^uliérement et avec les mêmes circons-
Unces tous les vendredis.
Vasconcellos ne savait ce que c'était que Tète-
Foulques , mais s'en élanl informé , des chevaliers
Poitevins lui apprirent qu'on appelait ainsi un
TÎeux château, situé !i quatre lieues de Poitiers,
i«u nulieu d'une forêt , tt dont on racontait dans
■le pays des choses cxiraordinaires. On y voyait
_ d'uni
SIS *- ff fSTomff D«8 mn.î. —
hcancoiip d'objet* cwriciix notamment Parmufe A\t
Fameux Foulques Taillefer arec les armes de loin
les gtieiTÎcrs qu'il araît tués. Du reste , Viisagc
îmmérmorial de tous les Foulqnerre à qui appar-
tenait ce ch&teau , ar ail toujours été d^y faire di-
poser les armes qui leur avaient servi , soit k h
guerre , soit dans les combats singniiers.
Le Grand-Prieur ne sachant comment se débar^
rasser de sa vision , se décida enfin à se rendre
à ce château de Tête -Foulques avec Fépée da
commandeur. I! n'y trouva pour habitant qu'un
concierge et un chapelain à qui il fit part de Tobjel
de sa visite , et qui l'introduisirent dans une grande
salle, appelée Varmurie, où Ton n'entrail januô.
Des deux cAtés d'une immense cheminée , étaient
placés le portrait de Foulques Taillefer , Grand-*
Sénéchal de Poitou , et celui de sa femme Isabelle
de Lusignan. Le sénéchal était représenté armé
de toutes pièces et saisissant sa rondache armoriée
de trois Nons léopardés, momés et dîfbmés. La
plupart des épées étaient réunies et ajastées en
trophée au bas de ce portrait.
Le Grand- Prieur, après y avoir déposé Pépée
du défunt qu'il avait apportée , se mit à réciter sofl
bréviaire , comme il est d'usage parmi les chevaliers
profés. La nuit était venue et il allait se retirer ,
quand fixant les deux portraits du sénéchal et de
— rnAriTRE xînvii.— 319
sa femme, il croil y voir remuer des yeuï el des
lèrres et hientAt enlcndre relie ronTersalion en-
tr'eiix 1 Bl'amie , disait le sénéchal , que vons
sicmhle ile l'oullrecurdative ilu Kastillan, le quel
se wenl héberger el gobergrr en mort c/iasiel, apretz
kavoyr occiz h commandeur el sans luy vouUoir
octroyer conjécion ? — Mesaire , rfpondit aigre-
ment le portrait féminin , m'est eîAviz qu'ieeiiij
Kastillanjistforfaiclure en ce rencontre, el vraye-
ment seroU mal à poinct qu'il se dexpartist de
cèaiits sanz t/ue le gnnt luy jectiez.
Vasconcdlo3 se retourne alors vers la porte ,
mais cHe se trouve barrée par le sénéchal qui lui
jette rudemenl un gaolelet de fer au -visage et tuï
présente sdencieuscment la poinle de sa rondache.
L'Espagnol , obligé de songer à la défense, arrache
une épéc du trophée d'armes; elle se trouve être
celle du commandeur qu'il venait d'y déposer , et
tombant sur son fantastique adversaire, il lui sem-
blait l'avoir pourfendu ; mais lout aussîtt^t il res-
sentit au dessous du cœur un coup de pointe qui
le brùIa comme un fer rouge, et il s'èvanouil.
lorsqu'il reprît ses sens, il se trouva chez le con-
cierge qui élait venu l'enlever de la salie; mais il
n'avait aucune blessure , et celle qu'il avait cm
recevoir n'était qu'une fascination.
Le Grand-Prieur étant retourné en Espagne ,
•unpi continué d^étre obiédè de cel étrange (Sm-
ebeniar qui ne céckità aucun rem^e, ni à aucune
pratique de dévotkm. Il avurail que dan» la nuit
de chaque vendredi, il n^âmt jamaia manqtaé de
ae retrou¥er aux priiea avdc oe mém^ Foulquei
Taillerer et de reaentir ce brûlant coup d^épée
qu^il avait cru recefoir dans Vt^mÊurie du chéleta
de Tëte-Foulquea (421).
AujounThui Ttlé de Malle , c6inme lea Uei lo^
niennes , est soumise à la dominaiioa Anglaise. La
mœurs et la législation britanniques j exercent me
influence exclusive. On v^y remarque rien au lenfi
présent dans les principes el dans les usages es
les, qui soit iusceptible dediinner lieaàès
itions particuUéreSé
'• t
CHAPITRE XXXVMI.
1 Russie et en Pntngne.
Les Russes occupent mijourd'hiiî In plus ^ande
partie de l'anuiennc Sc\l!iic, de cette terre du Nord
autrefois si féconde en populations barbares, de
ce payi de fabrique humaine , ojfîcinn hominum ,
comme rappelaient les Romains, dont les produits
depuis les temps les plus reculÉs se versaient h flots
pressés et inlarissables sur l'Ouest et le Midi .
Toute celte partie de l'Europe septenlrionale
serait donc la terre primitive , le véritable berceau
du duel , suivant ce qui a été observé au chapitre
XSXIII, et surtout selon le distique d'Ovide rap-
porté k la page 166.
Toutefois, les historiens sont loin d'être d'accOrd
■ur la position eiacle de l'ancienne Scythie ; ce quî
n*a rien d'étonnant , puisque la plupart des Scythes
ilaîcnl des peuples nomades qui changeaient de
place k chaque instant , ii-peu-près comme ces
«tpppea arides qu'ils habitaient et que le Tent
21
S8S «A'HiiivniB ras wtkA. •-•
du nord chasse devant lui. On a le plus commii-
nément distingué cette vaste contrée en deux partiel
principales , la grande et la petite Scythie. La pre-
mière devait comprendre le plateau septentrional de
TAsie, aujourd'hui appelé Tartarie ; on désignait pv
la seconde , dont les limites sont plus incertaines,
la partie méridionale de la Sarmatie européenne ,
et les terres adjacentes aux Palus Méotides et ta
Pont-Euxin vers Fembouchure du Danube. Ceit
de ce dernier pays fommnt le littoral de Tanciaiie
Mysie y qu^a parlé Ovide. Ceit la Moldavie et k
y^achi^ d^aujourd'huL
Quelques auteurs ont étendu les limilefl de la
Soyihie juLsqu^à la Germanie. Rudbeck, entr^autrcsi
^ prétendu q;ae la Suéde était la véritable Scytkîe
des Ancien» et quei s'il y a eu des peuples appeUi
Ççytbea entre la mer ^oîre et la Bier Babiqae,
ç^est pfurcq qu^ib^aveienl été «lubj^igiiée pi^^ks vén^
tables Scythes qui habitaient le nord de FEurope.
{luDBECRii , AtUuitica, tome I^ pi 57, VpsaL , 1679»
Du reste , si Ton veut étudier à fonds toutes ki
questions aussi ardues que compliquées qui se
rattachent k cette matière , on consultera avec frul
la savante Histoire des anciens-peuples de t Europe^
par le comte Do, JBuat s tomes IV cl /^. Paris 9
Desaitu, 1772.
Je q^e bomeraii, pc|iir 9e paa trqp étendie et
: XTXvnr. — 323
Biijel, h prisenler ici les observations im^dilcs que
l'illustre Polonais Lolewt;! n bien voulu m'adresaer
flur la race Slave, d'où sont sorlis les Polonais,
les Litbuaniens et une partie des Busses.
H Les Slaves, connus sous ce nom depuis le VI.*
siècle , furent indigènes de toute cette étendue qui
est entre la mer Baltique et le Danube. Ils portaient
le nom de G^tes ou Daces au Midi ; au Nord , ils
avaient d'autres dénominations variables , telles que
V^édes, Lysicns, etc. »
<i Lorsfju'ils prirent le nom de Slaves vers 550 ,
Qs étaient partagés en différentes sectes , cultes et
religions. Ceux des environs de Kiow étaient tout-
à-rail idolâtres. Ailleurs, ils furent plutiït dtisles,
cl leur mythologie ne présentait que des obscurités
impénétrables. Aux environs de l'Oder eï de la
Vîstule , il y avait schisme armé ènlre ceui qui
eoterraîbnt leurs morts et ceux qui brûlaient les
cadavres. Vers l'embouchure de l'Oder, il existait
une autre secte qui observait un culte indien avec
on mélange de cbrisUanismc. Vous savez que les
lois des Indiens , même de Manou , admettaient
lea épreuves connues sous le nom de Jugâmens
de Dieu, mais je ne saurais vous dire si les Slaves
lés ont pratiquées. Il existe un passage remarquable
dans Helmold , écrivain du 12.* sièclt , sur les*
tribunaux slaves qui plaidaient devant leur divinitë'
SStA — RISTOIKE DBS DUKLS. —
Prove ou Pravop qui signifie Droit. » f^. Helmolim
Chronicon Sclavorum , a^i/ii scriptor, rer. Bivns»
^^'ic• de LeibnilZj tom» Il.Hatioi'er, 1707, m-foUo»
c( Pour les Slaves qui ont pris le nom de Rusaiens
ou Russes , il faut consulter Evers , Histoire de
Russie, et mieux son analyse par P&àwda Rcsii
intitulée : De la loi priiuitù^e des Rut/ieniens. Ces
ouvrages sont en Allemand. On y voit coQunent
les lois étrangères furent établies en Russie. »
En remontant dans les Annales Moscovites de-
puis le régne de Pierre I*% on retrouve k chaque
pas les vestiges des mœurs féroces , des Goths, des
Huns et des Yandaks, lorsqu^ila vinrent se par*
tager les dépouilles de la civilisation romaine qui,
dans le cercle où elle gravitait, se trouvait avoir
atteint cette limite où les extrêmes se toucbeat^
C^est-à-dire à la barbarie , son point de départ.
Saint Wolodimir ou Wlodomir fut le premier
souverain de la Russie converti au christianisme.
Les Mahométans , les Juifs , les Grecs et les Latins
tâchèrent à Penvi de Pattirer dans leur religion.
Lit-dessus , il fit examiner par ses ambassadeurs
laquelle était la meilleure. Ceux qu'il avait envoyés
pour cela à Constanlinople, charmés de la manière
dont ils virent célébrer le service divin , en firent
yn rapport avantageux à leur maître qui embrassa
k religion grecque. 11 abandonna alors ses femmes
; TUTvni — 325
cl SCS concubines au nombre de plus tic huit cents,
et épousa la princesse Anne , stpur des cmpereurt
Basile et Constantin. Il prit le nom de Basile 4 son
hoptème et fit embrasser In religion grecque aux
Moscovites dont il di^truisit les idoles.
Ce prince étant en guerre avec tes Petcliénfgues,
leur rlief lui proposa de la lermîncr par un duel.
AVolodimir l'accepta : deux gnerrievs entrent eo
li<.e et combattent en prfsciice des deux armées. La
victoire demeura au cliampiun moscovite. CnoBtEn,
Polonfa. — IhmBEBSTF.iN , de leh, Mu-icwitic,
Quant aux duels judiciaires, ils furent pratiqués
dans les provinces russes vers la m^-me époque
qu'en Pologne , comme on le verra cî-après.
En prenant l'histoire de la Russie au rt-gne de
V\tm \." qui en est réellement le fondateur, on
retrouvera encore la mi'mc férocité, sans que la
emiisation dont il chercha h doter l'Empire ait
paru beaucoup Tadoucir. Ce prince fut appelé
/« Grmi/f; on aurait pu le surnommer le Cruel,
tout aussi jiistcmenl que son homonyme , le roi de
Castillc, qui n'a pas du moins trempé ses mains
dans le sang de son propre fils.
Pierre I." faisait de l'ordre public en Russie
avec des supplices el des tortures , el il ne dé-
daignait pas de faire lui- m ("me l'ofrue deJ>ourreau.
Voici un écliautitlou de ws procédés espédilifs
82A ->n9T<^B PM 9VSU.—
à l'occasion d^une émeute des StriliU , ses garder
prétoriennes. II les fit envelopper et désarmer par
les troupes étrangères et par celles qui étaient
restées fidèles. Dans un même jour , deux raille
furent pendus et environ cinq mille eurent la télé
tranchée. Le czar donna le signal de TexécutioD,
en prenant une hache dont il coupa lui-même
une centaine de tètes, ordonna à ses courtisaDi
de suivre son exemple et abandonna le reste à
d^autres bourreaux moins distingués. Toutes cet
têtes furent mises sur des pointes de fer autour des
murs de Moscou , et on en composa un charnier
pareil à celui de la Sublime-Porte à Constantinople.
DucLOs, Mém.Sccrets, tom, II ^p* 318. Paris 1791.
L^autocrate Russe ne mettait pas beaucoup de
recherche dans ses formes envers les femmes, m
anême à Tégard des membres du haut clergé de
son empire. 11 soupait un jour chez MenzicoflTqui,
de garçon pâtissier , était devenu son ministre et
son favori. 11 y vit une jeune esclave nommée
Catherine , fille d'un paysan de Livonie , que Mcn-
zicofi* avait retirée des mains d'un soldat qui en
avait fait sa femme. 11 la trouva à son gré, lui dit
en sortant de table de prendre le flambeau pour le
conduire dans sa chambre , et lui fit partager son
lit. Il en fut tellement satisfait qu'il songea bientèi
à lui faire aussi partager son trône. Lorsqu'il fiil
— CHAPITHB SX5VIII. — 827
décidé à lYpuuser , il fit vemr l'ardievi^que de
Nuvogorod pour procéder à la uèrèmonie du ma-
riage. Celui-iû voulant profiler do celle circons-
tance pour obleitir tiii titre pliiR élevé, représenta
au czar qu'une tulle ronction n'apjHirtGnait qulhl
un palriarcbe. Pierre , pour toute réponse , lui
^>pliqua quelques coups de canne et l'arclievi^que
donna la bénédiction nuplinlc. Jbii^em,pageiidO.
11 n'y a rien de plus bizarre que la conduite
de Pierre I," but un point délicat qui dcTail l'in-
téresser au plus haut degré non seulement comme
mari , mais surtout comme souverain. Lorsqu'it
eut épousé Catherine qui déjà se trouvait élre 1«
ime légitime d'un soldat de MenzicolT, ta nol^^
Vslle impératrice conlinua de voir en secret «ont
premier mari. Lo czar les ayant surpris ensemble,
leur donna des coups de bâton cl envoya le mari
iSibérie. Jbidcm ,]iag.Z'2S.
Voilii ou en était le point d'honneur en Bunie,
t commencement du 18.* siècle. On peut voir
dans le même auteur , comment l'autocrate en us»
envers sa première femme , rimpératrice liudoxie,
et envers la princesse Marie, sa propre sœur. Il'
répudia la première et la fit ensuite condamner
par uue assemblée d'évoqués à recevoir Ib disci-
pline par les mains de deux religieuses, ce qui fut
exécuté eu plein cliapiirc. La seconde fut éj|;ale-
988 -«HliTOimB IIB8 BlfKLft.^—
ment condamoée à recevoir cent coups de bi«
guettes qui lui furent appliqués sur les reins eo
présencç du cwav et de toute la cour.
Duelos s'est livré à des déyeloppemeos ânes
étendus sur Thistoire de Russie qui avait de 8<m
temps tout rintérét d^une nouveauté depuis le rè«
cent voyage de Pierre I.*'^ à Paris. Il raconte um
anecdote fort curieuse et presque incroyable do
la longanimité du ciar comme époux.
Ce prince avait accueilli à sa cour un gentilhomme
breton nommé Yillebois, qui, ayant fait la contre-
bande maritime dans son pays, s^était vu obligé
de s'es^patrier. Yillebois avait d^abord été pr^poiè
en Russie au commandement de quelques galérei;
plus lard, il s^ était insinué dans la confiance do
Tempereur qui le chargeait souvent de commissions,
Vn joqr , peu de temps après son second maria{;€,
le czar Tenvoya à Strelemoitz , maison de plaisance
QÙ était la csbarine , pour lui communiquer une
affaire dont elle seule devait avoir connaissance.
Le CQinmissionnaire aimait à boire , comme son
mattre; le firoid étant très^vif, il avait bu chemia
faisçinl beaucoup d^eau^de-vie. Â son arrivée, il
fut introduit immédiatement près de Timpératrice
qui était au lit , et qui avait fait retirer ses femmes.
Yillebois commençait à s'acquitter de sa mission;
mais à la vue d'une femme jeune et belle , dans
-ciupiTBE \TS\vm. — S29
un élal plus que négligé, une nouvelle ivresnc le
saisit; ses idées se confondent, il oublie le »iijcl
du meBsage, le lieu, le rang de In personne, et
ne précipite sur elle. Etonnée, elle crie, appelle
au secours; maia avant qu'on Mt arrivé, tout ce
qu'on eut voulu empêcher était fait. Villebois est
saisi et jeté dans un cachot. Le czar instruit do
loutes les particularités de l'événement , accourt
sur les lieux ; il Tait comparaître Villebois , Tin-
terroge et admetlani pour excuse son étal d'ivresse ,
»e contcnle de l'envoyer sur les galères qu'il com-
mandait auparavant ; six mois après il lui rend
lotîtes ses bonnes grâces. I.a czarine lui pardonna
sans doute aussi , car dans la suite clic le combla de
faveurs et se chargea même de le marier (422).
Un dernier trait servira k faire bien connaître
la cour de Russie et l'état des mœurs a l'époque
de Pierre I". On lit dans les Mémoii-cs rèccramenl
publiés sous le nom de la marq^iise de Créqui , que
U Clarine, lors du voyage de Pierre I," fa Paris, était
accompagnée d'une suite nombreuse composée de
dames de la plus haute naissance dont plusieurs
allaitaient des poupons ; et lorsqu'on avait l'air de
s'en apercevoir, elles vous disaient à l'envi l'une
de l'autre avec une fierté jubilaloire : « C'est S. M.
l'Empereur qui m'a fait l'honneur de me faire cet
enfapt là. 11 Mém.dti iil.'^de Civtfui, loi». I.
880 — mcionui d» pubuu—
Ce souveraioQ est uéanmoms Tauleur de té^
mens trés-sévéres contre les duels, dont on troutort
le texte aux Eclaircissemens historiques (428). T*
au surplus Lascbbrti , Mém. sur la Russie.
Pierre I.®' eut pour successeur Catherine I, m
seconde femme , qu^il a^ait épousée après la ré-
pudiation de rimpëratrice Eudoxie. Elle d^enipsrt
du trâne au préjudice de Pierre II Alexiowilz , et k
Faide de son ancien maitre Menzicoff. Catberios
passe pour n^avoir pas renoncé à cette pren^éro
inclination et pour avoir, de concert aTeo ce faYorii
ménagé à Pierre I.*' un de ces genres de mort
dont rinvention a été trouvée assez bonne pour c»
faire par la suite plus d^une application aux auto-
crates russes.
La nouvelle impératrice commeaça son régne
en faisant abattre les potences et les roues dont
son époux avait couvert la B:ussiQ, tardive ex^a-
tion de sa conduite envers Tinfortuné prince Alexis^
fils de son mari, qu^elie fit, en manâtre impitoyable,.
sacrifier aux intérêts du sien. Peu de temps après
celte horrible exécution , ce fils ohérî fut tué d^ua
coup de tonnerre entre les bras de sa nourrice.
Néanmoins, sa fille Elisabeth monta sur- le tràoe
après les régnes de Pierre II et d^Anne Iinraoovma,
fille d^I wan qui était frère de Pierre I*'* Elisabeth aidée
d'un français nommé Lefprt y son favori , s^empara
— CBiPlTBE \XXVIII-— 331
de la couronne impériale par un coup de main ,
le 6 il^ccnibre 1741 , et cavoya le lllulnirc Uvau VI
& Sclilussclbourg, prison ordiitairc des autucrales
dépossédés, où il mourul assassiné le IQ juillet
1764 , par ordre de Catherine II.
Les cruautés de Pierre I.*"^, celles de lîircn ,
ministre d'Anne Iwanonna , avaient produit une
telle lassitude eu Russie qu'il s'eusuivil une espèce
de réaction Fort remarquable sous Elisabeth. L^abo*
lilion de la peine de mort sous son régne , est peut-
être l'iTénemenl le plus eilraordiuaire de Thisloire
de Russie. Elle fui la suite d'un tœu que la ciarinc
avait fait h l'image de Saiut-Nicolas , de ne signer
aucune sentence capitale. Celle mesure aurait
exercé une influence incalculable sur l'avenir do
la Russie, sans la réaction en sens contraire qui
s'accomplit sons Catherine U-
Elisabelh régna jusqu'en 1762. Pendant sa longue
administration , la mort lente de ta Sibérie sup-
pléa celle des échafauds; on porte h dl\-sept mille
le nombre des Russes qui allèrent alors en peupler
les déserts. On vit retrancher deux mille langues,
autant de paires d'oreilles , fendre des nez , couper
des pieds et des mains, donner le knoul aux femmes
grosses, attacher des hommes en croix, et sans
les tuer, les abandonner au fd de Peau sur let
fleuves qui traveiseut les déserts. Pendant ce temps,
dS2 — HISTOIRE DES 01TEL8. -^
rîmpératrice s^agenouillait devant Timage de Sainte
Nicolas ou de la Vierge, lui parlant et rinteirogeant
pour savoir dans quelle compagnie des Gardes eHe
irait prendre le favori du jour. Elle n^eul aucuii
époux en titre , mais elle avait pour mari secret
un soldat qui jouait bien du serpent , et pour
fieivoris déclarés tous ceux qui lui tombaient sous la
main. Cette vie se termina par des excès plus dé-
gradons encore, ceux de Tivrognerie. La mémoire
d^Elisabeth est adorée en Russie. Elle y est sur-
nommée la Clémente. G^est une clémence relative.
C'est dans le long règne de Catherine II , sur-
nommée la Grande, que se trouve la meilleure
étude des mœurs russes au 18.* siècle.
Sophie d'Anhall Zerbst, née à Stettin en Po-
meranie , le 25 avril 1729 , avait épousé le fils
d'Anne Petrovs^na , fille ainée de Pierre I.«^, qui,
ayant été adopté par Elisabeth , lui succéda sous
le nom de Pierre lll. En devenant Grande-duchesse
de Russie, Sophie quitta sa religion et son nom
pour prendre celui de Catherine Alexiowna. Sa
conduite fut quelque temps un modèle de régularité
au milieu de la cour dissolue d'Elisabeth.
Après plusieurs années de mariage, la Grande-
duchesse n'avail pas encore eu d'enfans. Un jour,
le chancelier Butuscheff vint lui notifier au nom
— cniTiTRE :(\Tviii.— 335
h qui il desline le titre de Tzarewilch. Pendant
re icmjïs, IV-nergiqtie activité de Callierinc a su
prévenir !e danger qui la menace. L'empereur
absent de sa capitale , ne devait plus y rentrer. Sa
femme se souvient du coup de main d'EUsabclli,
elle cndoa*e un uniforme , s'arme d'une *pée à
laquelle un simple oflieier, Potemkin, obtient d'at-
tacher sa dragonne ; elle soulève les Gardea h clicvat
avec le secours des cinq fri^rts OrlolT, ses favoris.
La révolution s'accomplit , Pierre lli est déposé
et emprisonné. Catherine proclamée autocratrice
se hàle d'eipédier à son mari Alexis Orloff qui
revient déposer aux pieds de sa maitressc la cra-
■vatle du prisonnier; c'ilait l'instrument de son «ip-
plice. Les Orloff étaient lespctîls-fHs d'un StrtiîlK,
et les Slrélitx les Mamcloucks des autocrates.
Le premier acte de la nouvelle souveraine est
de rapporter Tâdit d'Elisabeth qui avait aboli la
peine de mort en Rusaie. Le &ut venait de précéder
ie droit.
_, Catherine continue de marcher dans cette Toie,
Hl elle adopte pour forme invariable de gouver-
nement les supplices et la corruption , armes ordi-
naires des despotes qui sntent raisonner la tyrannie.
Le sang coule par torrcns sous son règne , et il
s'y commet des atrocités qiii n'ont d'analo^e dans
aucune hiatoirc. Elle accueille les Jî-suites et cor-
respond avec les Philosophes. La recomnaîssMicé
de ceux-ci lui décerne par Torgane de Voltaire,
de d' Alemberl et de Diderot, les titres de Sémiratms
du Nord, d* Etoile polaire, de CiUherine4arGrande.
Mais cette étoile du Nord , a dit une to» contem-»
poraine , ne s'est élevée sur cet empire sauvage que
pour réclairer de cette lueur fousee et blafarde que
répandent les aurores boréales. On peut voir du
reste, à la note 342, à quel prix s'achetaient cet
louanges de nos philosophes, qui s^étaient fait assel
peu philosophiquement les historiographes à gagci
des autocrates russes.
Cependant , dans les premières annéeè de son
règne , Catherine , à la suite d^Un congrès coin
voqué à Moscou dans la salle du Kremlin , avait
fait rédiger cette célèbre Instruction du Code pii-
bUée à 20,000 exemplaires, et répandue en Europe
au bruit des acclamations louangeuses de toute U
lilléralurc subventionnée* En France , on Pappeia
la Men'cille des siècles , et Frédéric de Prusse en
déclarait Tauteur supérieur à Lycurgue et à Solon.
C'était faire beaucoup trop de bruit pour ce qui
ne devait rester qu'un projet : ci Catherine trembla^
dit M."**^ la duchesse d'Âbrantès , comme une
femme qu'elle était, à la première menace de la
noblesse rassemblée. Au premier rugissement du
peuple prononçant le mot liberté, U souveraine
~c.tîktiTKT. xxwiii.— 337
•esin immoliile; tmit 8'arr(?la <-omme elle, et ses
ïflsles plans pliiluntropique.^ Turent frappas de mort
Jês leur crtatioa. Le congrès se termina par la dis-
IribuUon aux députés de médailles d'or h l'efTîgie de
rimpéralrice. Ceux qui les rerurenl les avaient dèjk
vendues^ desJuîFs polonais avant de quitter Moscou.
Quel commentaire à Y Instruction du Code ! n
On lit du reste sur le frontispice de ce monument
celle maxime d'une haute sagesse : Il faut t/u'un
gqnvememenl soit tel qu'un citojen ne puisse
craindre un nuire citoyen , mais que tous craignent
la loi. Cette pensée me parait admirable de vérité ,
de logique et de précision. Je ne connais rien qui
lui soit comparable dans les codes d'aucun peuple ,
ni dans les écrits d'aucun publiciste. Voilà ce qu'il
faudrait écrire en t^tc de toute loi sur le duel !
Le chapitre M , article 234 , contient sur ce genre
de délits la disposition suivante : <c Quant au duel ,
le meilleur moyen de le prévenir est de punir
l'ngresscur, et de déclarer innocent celui qui sans
qu'il y ait eu de sa faute , s'est vu forcé de défendre
son honneur. «
* Voici maintenant ce qu'on trouve dans im ukase
■fe Catherine postérieur à Tinstruction ;
' n Celui qui insultera ou frappera un bourgeois
at-ec la main di-tnrmêe, lui paicrA ce que le bour-
geois paie annuellement k l'Ktal. »
888 — HlftTOIRV DBS DUSU. —
r( Celui qui insultera ou bien outragera la femme
ou la fille d^un bourgeois, paiera le double pour
la femme et le quadruple pour la fille de ce que
le bourgeois paie annuellement à TEtat. »
Ce tarif de Catherine pour les injures est asseï
remarquable ; il y a là quelque chose des anciennes
compositions germaniques.
On cite peu de duels sous ce règne, mais les
noirceurs, les trahisons, les empoisonnemens, les
guet-à-pens , les exécutions publiques ou secrètes
se succèdent par milliers et absorbent les scènes
bien secondaires des champs clos. Je passe sous
silence des anecdotes relatives à des combats sin-
guliers de peu d'intérêt , pour en citer de bien
plus extraordinaires où il u^ en eut pas.
Le règne de Catherine fut moins une autocratie
qu^une lénocratie, c'est-à-dire, un gouvememeot
de débauchés , un régime qu'exploitaient , sous k
titre d'aides-de-camp de T Amazone moscovite , des
favoris bien autrement avides et despotes que les
courtisanes de VOEU de Bœuf. C'était Tenvers des
sexes à Pétersbourg et à Versailles. Mais si des
jurons retentissaient quelquefois aux oreilles de
Louis XV, Catherine avait à dévorer des coups
de canne. Celui qui se passait cette licence envers
elle, était Grégoire Orloff, le plus redouté , quoique
le moins aimé de ses favoris. Sa main, sans être
inii. — 839
ann^e d'un ^nntclet de fer, laissa plus d'une foit
sur les hrtta de l'impératrice des traces profondes
de tes rudes ùiroinles
Lrfl amans de Catherine ne se d^-cimaient point
dans des duels rommc les mignons de Henri lU.
Ils nvaieiit pour se supplnnler des mojens plus
expi^diliTs et plus sûrs. On jugera de leur audace
par les deus traits suîvans.
La Clarine aimait à passer sucressiTcment entre
les bras des cinq rrércs Orloff; mais les deux pré-
ffrréa ulaicnl (îrégoire cl Alexis. Elle venait de leur
adjoindre le Tameux Polemkin , ce galant ofitcier
(les Gardes , qui avait attaché sa dragonne h IVpée
dont elle s'arma pour arracher la couronne k son
mari. Néanmoins, Icsdeus premiers conservaient
encore toutes les apparences de leur faveur , quand
éclata an palais une scène des plus singulières qui
ctit pour résultat l'éloignemeDl momenlanà du
nouveau favori.
Jouant un jour au billard avec Alexis OrloST,
Potemkin prit de l'humeur en perdant quelques
parties et laissa échapper de ce» mots injurieux
qu'il est impossible de ne pas comprendre. Alesis
naturellement brutal répondit par une inaiille. La
querelle s'échauiïa ; Potemkin reçut ii l'œil un cqup.
As ift queue de billard que tenait OrloH'. La bita-
nii«,ilfiiii0rav«. On aipar» les deu» wIveTsairu;^
lis étaieiit igfllemeni furieux, et dans aa coléie
PotemkÎD eut le tort de ittéler le nom de FimpA^
rairice à sa querelle. Quoiqu^il fût tard, Alexis alb
^r le champ trourer son frère. Instruit par hd,
Gi^égoire se rend k Tinstant même cliex Catherine ,
•t du ton de hauteur dont il lui parlait quand 1
Tonlaît être obéi , il exigea sur l'heure Fexil de
Potemldn , et Catherine frémissant dé colère n^ov
le refuser. Elle sacrifia TamAnt aimé à Tamant
détesté , et avant le jour Potemldn était en route
pour Smolenrico, sa patrie, où il devait passer le
temps d^un exil indéfini* H ne rentra en fiiteor
qu^uh an après et avec tm cril de moins*
n s^est passé juiqu'au renyoi définitif d'Orloff,
les scènes les plus scandaleuseé entre Potemldn et
lui. Orloff ne gardait pas plus de mestire enrefs
aon rival qu^envers Catherine elle-même. Viwê
celui-ci demeurait impassible pouf ces nouveaus
griefs, comme il Pavait été pour son exil et la perte
dé son oeil. Il se contentait pour toute vengeance
d^accabler le fougueux Orloff de tout le poids de
son immense faveur.
La retraite de ce dernier fut décidée à roccanoD
du trait suivant, plus extraordinaire encore qud
le précédent*
Potemldn avait cédé Catherine à Lanskoî, aimaol
mieux gouverner Tétat quç le cœur d'une sultaoe
— ciupiTBi! xMvrii. — 341
■uFannée. Grégoire OrlolT de son cùIé, n'ayant plus
rien de mieux ii fuire, iivait tiiti par se marier et
s'était mis k voyager. Il vint ii la cour de Louis XV,
k Versailles ; il s'y présenta avec un frac de gros
drap lout uni^ el avec un Ion el des manières tt
favenant, dans l'intention innnitestc d^insullcr le
roi de France dont le ministre, M. deChoîseul,
B^était exprima rtieemmcnt d'une manière peu flat-
teuse sur le compte de Catlierioe. Dans cette cour,
eu mille épf'cs se levaient au moindre signe d\ine
prostituée , il ne s'c<t pas trouvé un seul homme
pnur punir cette insolence.
En passant h Lausanne pour retourner en Ruasî»,
OrloET perdit sa femme. Le jnur de son arrivée &
PÉtersbourg , nn donnait une fc'te au palais de
^-Txa^co-Zt•lo : il lui prend fantitisie de s'y présenter
•«a grand deuil , la clievelnrc en d^Hordre et le
visage couvert d'une piikur de morl. Il apparait
comme un spectre aux regards de Catherine qui
prenait part a la fête , appuyée sur le bras de
XiaBskoi. Eh! bien, Kaltaga, lui dit-il d'un air
égaré, x<ous avez donc toujours le g'>ût de la danse 7
youlez-a-ous Toiseraxcc moi'J vous hésitez.... Est-
ce que mon habit vous fait peur? El il fixait alter-
nalivemeul son habit noir et CalUerine. .Vof (ci-vo«/,
lui crie-t-il d'uue voix lugubre , que ma femme
.élttit inoile, iesavii:z-voux'i.,,. Et si vous le st{-
vi&z, comment m^x-^vous asi damier cetteféie}.**
Et il prend une chaise qu'il brise sur le parquel.
Lanskoî veut s^ëlancer Ten lui , Catherine le re-
tient avec force , et répond à Orloff d^une voix
tremblante qu^elle ignorait que sa femme fut morte.
•^ Oui, elle csi morte, ajoute celui^cî, en aecouaol
la tête et joignant les mains , eUe est marte, et moi
je suis resté..: Je suis bien malheureujc, Katinga,
car je f aimais bien ma femme, je Vaimaisanw
passion Et cet homme féroce pleurait c<muBe
un enfant.
Tout -è -coup, ses yeux rencontrent ceux de
LaMkoi , et il se met à rira. Ah, ah f wnlà donc
le nouveau, "venu Hum ! fnms êtes bien jeune,
mon enfant» Pauvre étaumeau , comment voas
éies^^ous laissé prmtdre au trébucfiet? Et redou-
blant ses éclats , il tint des discours tellement iiH
sultans pour Timpéralrice et d'une si grande licence
que Lanskoî , dont les sœurs étaient dans la pièce
voisine , paraissait décidé à employer la force pour
le mettre dehors. Il l'entendit , et le regardant avec
une expression de mépris accompagnée d'un geste
significatif. — Fais un pas seulement, et je te jette
par celle fem^U-e — • Orloff, O/iaff! s'écria
Catherine en fondant en larmes , et s'adressent k
Lanskoî : Que lui veaa>tu ? il est fou. — Oh ! ami,
je suis fou, dit Orloff, avec un rire amer. Puis
— CHAPITRE TITVIII.— 343
il ajoute en se baissant vers l'impératrice : ^tais
qui m'a ivndujbu ? I^'cst-ce pas pour tôt, Knlinga,
que j'ai été légiciric , assafnln ? Et mnintennnt ,
femme , tu dix que je suis fou .',.,, Et il leva ^a
main.... Cattieriiie jela un cri et retomba sur son
sofa. OrloH" s'uloigne alors en silenctr, et se retire
en traversant les grouiies joyeux sur lesquels il jette
des regards qui glacent d'épouvante.
Catherine fol lonp;-teiniJS terrifiée de celte ap-
parition. Orloll'reviul encore quelquefois à la rour,
et elle n'osait pas loi en iulerdiie l'entrée. Enfin,
elle se décida , après lu rttoup de plusieurs scènes
de ce genre , k le faire partir de force pour Moscou
où il mourut dans un délire frénétique vers le com-
meacement d'a-vri! 1785.
■ Dans aucune de ces incroyables silunliona, comme
IHûs ta balnillL* k coups de rpieucs de billiard
iftHrc Ali'Tiis et l'otcmtctn , on nVnlcndît prononcer
le mot de duel on de carlel. S'il en avait été au-
trement , Cniherine aurait eu plus de nerf pour
sauver ses favoris de leurs fureurs, que Henri 111 ne
montra de résolution pour empi'cher ses mignons
de ne décliirer ou pour venger leur mort.
Peu de temps après , Lanskoî subitement attaqué
d'une maladie violf nie , mourut lui-m(*me en quel-
ques jours dans les bras de Calherine , el rassura
Potemkin devenu jaloux , non des afledioas de
S4i -*- USTOUE DES DUELS. «—
la femme , mais de cellea de la souYeraiDe. Le dé-
sespoir de Catherine fut affreux ; elle poussait des
cris aigus et sauvages, refusait toute nourriture^
s'ensevelissait dans Pombre et parut quelque temps
insensée de douleur. On croit que ce fut alors
que Potemkin Tépousa en secret.
Parmi les favoris déclarés de la Messaline russe,
on en cite jusqu'à douze qui eurent des noins
célèbres , sans compter d'obscurs caprices qu'eUe
aimait souvent à se passer en secret. Comme les
douze Césars , ils ont peut-être trouvé un Suétone
dans une femme, dont la plume sévère a tracé de
celle cour un tableau qu'on croirait presque fan*
taslique , tant il est horrible. Voyez Ctaherin&lU
par MJ^ la duchesse d'Ahratilès , p«gr» 209 et pat^
^i/n, Paris 1834.
Les richesses dévorées par ces vampires de la
Russie dépassent tout calcul. Catherine leur je-
tait à chaque instant des millions en pierreries,
en roubles, en somptueux palais, en paysans;
car c'est ainsi qu'on compte dans ce pays où les
hommes ont une monnaie courante.
Les frères Orloff reçurent 45,000 paysans pou«
vant produire un revenu de 40 millions. Potemkin
fut gratiCé d'un palais estimé 600,000 roubles,
d'un habit brodé en diamans qui en valait 200,000.
U reçut pendant les dix-huit années de sa faveur
— CHM-ITBE \X!i.Vlfl.— 345
50,000,000 de roubles el 200,000 paysans. Ou éva-
lue la Tui'lune (ju'il luîssa à sa morl h 300,000,000
tle francs. Sa tuble seule lui eu ùlHJt 1,000 luuhles
par repas. Le rouble en or valait iilors riiiq fraucs.
S'il élail possible d'évaluer le« prudigalitès de Ca-
iherine pour lous ses favoris réunis, elles dépas-
Bcraient la somme fabuleuse de plusieurs milliards.
Parmi les atrocilés que ce monstre femelle faisait
marcher de pair avec ses dévorantes débauches,
on cite, outre le meurtre de son mari, celui de
la femme de son fils <jui fut depuis Paul I.". Elle
la fit périr avec $on fruit par les mains d'une accou-
cheuse de son choix, trouvant ainsi le secret de
placer la mort dans les sources mêmes de la vie.
Après celte exécution, elle fait croire à ce fila
désolé que sa femme portait dans son sein le fruit
d'un adultère. Catlierine s'y connaissait. Ce trait
::Aatanique est d'une affreuse vigueur dans la réunion
hle ceux qui forment son portrait.
.1 On cite encore le supplice d'un de ses favoris
qui , pour sV'lre marié sans sa permission , fut
arraché du lit conjugal avec sa compagne et tous
deux battus de verges jusqu'à la mort ; celui d'une
iille de l'impératrice Elisabeth , qu'Alexis OrloIT
vint enlever dans les états de Toscane, par un de
ces hardis coupa de main qui depuis servit du
modèle au gwl-ijpeas d'Elenheim. La malheureuso
"MB '*- RlSTOtAB DE! VÛKLS. —
eut un sort pire que celui de la fille de
Après avoir été défliiotiorée par son bourreau , dk
fut cruellement fustigée et jetée dans un cadiot
des bords de la Newa oii une inondation du fletm
Tint finir ses tourmens (424).
Cest au génie de Potemldn que sont dûs lo
événemens qui donnèrent un vernis éclatant aux
dernières années de ce règne célèbre. C'était Idi
qui caressait dans ses rêves la conquête de Cods-
tantinople. A sa mort, Catherine trouva plus facik
et plus court de se jeter sur la Pologne. Ce futaa
gAteau que la diplomatie européenne voulut jeler
à la hyène du Nord, pour détourner ses regarà
du chemin de Bysance , après avoir eu soin toute-
fois de s^en réserver une bonne part.
L^amante de Poniatowski lui avait dit un josr
dans un de ses ébattemens : Tu seras roi ! EUe
lui tint parole , et lui fit donner à garder pour elle
le trône de Pologne. La Sémiramis de Tzarco-Zelo
avait pu lui appliquer alors avec un légère variante,
ce vers que Ninus adresse à la Sémiramis de
Babvione :
Quand il en sera temps , je t^en ferai descendre.
Le drame de J'exéculion de la Pologne fut divisé
en trois actes. £lle mourut de trois coups de pot-
I — cnsprTBE xxsviTi. — 347
l^aivl que lui porta Catherine par les dignes mainii
des Repnin , des Diewili et des Suwarow- Ces
trois bourreaux , dceoris du nom de généraux
russes, y eiercérent des alrocil^s fabukuses. Dre-
witz choisissait les plus nobles d'enli-e les Polonais ,
leur coupait lui-minie les mains et les leur allach&it
derrière le dos. Il s'en faisait précéder à son enlrée
à Varsovie , ou bien il les faisait écorehcr tous
vivans, de manière à ce que leur peau représentiît
Dur eux Phaliit polonais. D'autres ^'taiciit enchaînés
cAle-à-càte par gradation de laille, et leurs idtea
décollées avec une adroite svniél lie , servaient aux
jeux de ee monstre , digne 111s de ces barbares
Scythes qui buvaient jadis dans le erâne de Icura
ennemis.
Ce tigre à face tiumaine était sans courage.
Jamais il ne comballait de sa personne. Pris deux
fois par un héros polonais , le jeune Pulawski ,
deux fois il en obtint ta vie qu'il lui demanda h
genoux. Ce fut ^ la suite do cette campagne qu'on
\it éclater à Moscou, les premiers symptômes de
la ftesie russe , qui n'était que le choléra moderne
donl nous a gratifiés une nouvelle extermination
polonaise.
Le dernier soupir de la Pologne s'exhale sur
le champ funèbre de Maciéjowice. Son intrépide
défcuscur Koiuiueko , couvert de blessures , est
S48 «^msTOiRB WÊé
retrouvé parmi les cadaYres de tes frères. Pragt
est emporté d^assaut par Suwarow qui fail égoi^
hommes , femmes , enfilas et vieillards au nombre
de vingt mille. Il entre à Varsovie précédé de
quinze bourreaux , portant quinze tètes illustres
pour trophées. Catherine récompense ses exploits
par le grade de feldHOUuréchal.
En 1706 , au milieu des préparatifs d^une guene
contre la France , la ciarine succombe à une
attaque d'apoplexie et laisse le trâne à son fils
Paul 1.*' , que sa politique ombrageuse tenut
éloigné d^elle de son vivant , le faisant "voyager
comme on dit en Russie. On connaît la fin tragiqse
de ce prince dont le régne fut court et qui mourot
en 1801 , comme meurent ordinairement les au-
tocrates.
Son fils , Alexandre L^' , fivait des idées che*
valeresques et même philosophiques , mais non
pas de celles qui font une loi à un fils de punir
les meurtriers de son père. Cet aSîreux scandak
au début de son r^gne , attira sur lui d^odieux
soupçons qui ne sont pas plus éclaircis que k
genre de mort dont il finit lui-même sa carriéie
à Taganroik.
Parvenu au tràne à Tàge de 24 ans , il fut k
premier souverain russe qui ait toléré le duel doot
«-cHXPîTiiE xxTvm.— 849
fa pratique sympalliisait avec Bon goM pour lu
chevalerie. H ne sf-rissait contre les duellistea que
lorsque la discipline niililaîre y ùtnlt inl^ress^e ,
notamment quand un chef avait ^lè provoqué par
un subalterne pour alFaire de service.
Les duels tes plus remarquables de cette époque
formeraient un volume. £n voici quelques-uns qui
m'onl paru offrir un caractère particulier.
Le chevalier de Saxe se trouvant à la cour de
Catherine 11 , portait ombrage au prince ZoubolT
qui était alors favori en titre. Un jour, M. de Saxe
était à cheval à une promenade fréquentée par !■
cour le premier mai de chaque année. Le jonne
prince Scherbatuff le rencontre , l'aborde et s'in-
forme de sa santé. Le chevalier lui répond avec
hauteur , fait volte-face et disparah. Le soir , il
•y avait spectacle h l'Ermita^ (chAteau impérial).
Le prince ScherhalolT, qui sortait à peine de l'en-
iuce, avait été choqué de l'insolence de M. do
Saxe ; il l'arrête au sortir du spectacle , l'apos-
trophe vivement, et bientôt le lumuhe devient si
gtand autour d'eux , malgré la présence de l'impé-
Mtrice, que Zouboif crul p()u%oir profiler de cette
occasion pour donner à M. de Saïc l'ordre de
quitter immëdialement la Russie.
L'affaire en resta lii jusqu'à l'avènement au trâne
de l'empertiur Alexandre. Zouboff disgracié ren-
SBO -MiuvoimB DBf
contre alors le cheTalier en Allemagne ; odin-ci
kii envoie un cartel , prétendant que c^étail lui qui
Tavait empêché de laver Tinjure qu^il ayail reçue
du prince Scherbatoff. Le duel a lieu, et Zoubol
est légcrement blessé. A la nouTelle deaa déEsôte^
St^herbatoff demande à TempeMur la permission
de voyager , et celui^ei tout en devinant le motif
de celte demande , la lui accorde à Tinstant. Scher*
batoff retrouve le chevalier à Prague , le provoque
à son tour et le tue en combat singulier*
On a vu au tome L«' , page 353, quelle avait été
en 1812 la conduite du ewnte Dolgorouddy am-
bassadeur de la cour de Russie ii Naples, enven
celui de France, le baron Durand' dé Mareuil. Ea
1808 y le père de ce même personnage fut èm[doyé
en Finlande , comme général-major (maréchal-dé^
camp ) lors de la dernière guerre des Russes arec
les Suédois. Sa hauteur et sa présomption déplai-
saient h la plupart de ses compagnons d'armes;
mais il jouissait à la cour de la plus haute faveur
et chacun s^empressait autour de lui.
Pariùi les principaux officiers de Tannée de
Finlande , se trouvait un vieux militaire biaochi
sous le harnois qui se nonunait Zass, avait rang
de lieutenant - général et commandait un corps
d'armée. Il reçut un jour du prince Dolgoroucli
un ordre qui coitoariait CAtiér^etnent son plaa
Kviii. - 351
d'opérations, et il rcTusa d'obéir. Ce refus donna
lieu à une cxplicalion Iréa-vive qui finît de la part
de Dolgoroueki par une provoculion en duel.
Eu ce moment mcme, on enlendîl gronder le
canou suédois , et Ton apporta la nouvelle que
l'ennemi allaquail une redoute russe près de Niens-
cliaiilz. Prince , dit alors Zass ii son adversaire ,
^lous ne pouvons nous battre en duel dans un
moment où le devoir nous appeih ions deujc à la
tétede tios troupes; ce serait donner un mauvais
exemple aux soldats et un avatitago aux Suédois,
Mais voici ce que je vous propose; allons nous
placer dans les embrasures de celte batterie sur
latjuelie l'ennemi paraît concenUer son attaque.
Nous jr resterons jusqu'à ce <juui\ boulet vienne
rent'erser l'un de nous deux.
Dolgorouckî accepta : ils partirent , se placèrent
le plus en évidence qu'il leur fut possible, revêtus
de leurs insiguea, afin de servir de point de roirc
aux Suédois qui redoublèrent d'efforts ^ leur vue.
Depuis plus d'une demi heure une grêle de boulets
et d'obus venait tomber on plein sur la batterie :
les deux adversaires, debout l'un vis-à-vis de
l'autre, une main appuyée sur la hanche ae mesu-
raient d'un regard fier et immobile , lorsqu'un
boulet vint couper en deux le prince DolgoroucLi,
Toute l'arioée apploudil 'à ce nouveau genre de
duel , et Tempereur Aleiiandre en fut pénétré
d^admiralion.
Ce trait ne vaut pourtant pas celui des dent
centurions de César, Pidfio et Tareiiua, ni cefaâ
des jcfunes Souliottes rapporté au chapitre pré-
cédent, n y a là du courage Btihé doute , mais c'mI
celui du suicide, et si tous les officièTs-généraui
se comportaient ainsi devant Tennetni , on peut
penser quel avantage lui serait assuré. G^est trahir
son pays que de ne pas tovdit lui faire le sacrifice
de ses ressentimens privés. Ce grand intérêt doà
passer même avant celui de llidnneur.
Voici un dernier trait d^un genre non moini
singulier. Le cdmte Théodore de Tolstoy état
un navigaleut plein de hardiesse et d'intrépidité.
Pendant un voyage qu'il fit autour du Monde, I
souleva contre le capitaine l^équipage du vaissetu
qu^ii montait , et il fut pour cela relégué dans use
lie déserte de TAmérique , ce qui le fit surnomoê
VAttiéricain. Sa vie pleine d^avetitures dénote âne
force de caractère extraordinaire et que d'autre
circonstances auraient peut-être pu développera
son avantage . II s'est battti dit-sept fois en dud,
et il a presque toujours eu l'avantage sur ses adrer*
saifes. C'était la terreur de Moscou.
S'élûnt un jour pris de qdetelle avec un officier
de marine , il lut envoya un cartel que celui-<i
refuM , donnanl pour raisnn que le r«mle (lait
Irop connu pour son adresse cl que les chances
dti combat seraient cnlr'eux trop inégales. Tolsloy
tiii proposa alors de se battre an pistolet k bout
porlant; mais roflîcier de marine déclara qu'il ne
consentirait il se ballre qu'à la manière des marins,
c^esl-à-dire que les adversaires se prendraient au
corps et se jcteraieni k i'onu , la vicloire devant
rester à celui qui parviendrait ii surnager dans cette
lutte aquatique. Tolsloy répondit qu'il ne savait
piLS nager ; mais son adversaire lui ayant Fait en-
tendre que cVlait avoir penr, il se jelle sur lui,
le saisit dans ses brn9 et l'enlratitc dans la mer.
On parvient bientôt i les repécher encore vivans ;
mxis l'olficiiT de marine , soit de frayeur, soit par
la violence de la chute, Tut retiré souQrnnt , et deux
jeun après il n'existait plus.
Les hordes de Cosaques asiatiques et européens
forment une partie notable de la population russe ,
et jouent un rAle important dans l'armée comme
troupes légères. Parmi ces dernières, les plus nom-
breuses sont celles du Don. Voici un trait qui
•emble annoncer de leur part beaucoup moins de
ftrocilé que ne leur en donne leur K-putalion ,
surtout depuis la double visite qn^ils firent eu
Fnuce en 181^ et lâld.
3M — BtnofitB DES Dimts. —
Toutes les fois qu^une querelle porte les Cost-
ques à s'altaquer inulueilemenl , ils oombaUent
avec leurs poings comme en Angleterre ; jamais
ils nVmpioient le couteau, ni le poignard, ni tout
autre instrument tranchant Cet usage forme un
trait tellement caractéristique des mœurs de celte
nation qu^il a donné occasion à un pari trés-
remarquable entre deux conseillers privés de Ca-
therine 11 , Teplof et Gelagin. On venait dénoncer
à rimpératrice le meurtre d^une jeune fidle par un
moine cosaque du couvent de Saint-Alexandre-
Newski. Teplof paria contre Gelagin que ce moine
n^était pas Cosaque. Il fut en effet reconnu pour
être Russe. Interrogé par Catherine conunent il
avait pu si bien deviner, ce C^est que , dit-il , jamaii
Cosaque ne tuera une femme, et s'il le faisait, ce
serait avec la main et non avec un couteau. »
Clarke, f^ojage en Russie»
Le même auteur en parlant des Kalmouks,dtt
que ces peuplades, quoiqu'elles soient portées à
la colère, sont très-* sociables entr'elles et vivent
dans la meilleure intelligence, ^oyez, pour les
autres tribus asiatiques, le chapitre suivant.
Telles sont les mœurs de la Russie, tel est Télat
actuel de ce grand empire relativement au sujet
de cette histoire.
En présence de ce tableau de là cour de Samt-
— rn^piTRE xxxvrn. — 355
ri^iersbourg (loiil je n'ai pu tracer qu'une esquisse
hieii K^Rère; k la vue de ces incroyable!! d^rdres
qui oui d('sIionnrt les règnes si ndmirés de Pierre I.",
d'Elmliclh et des deux Catiierines, la France de-
vrait juger pcut-élrc aveo quelque indulgence ses
souverains de la m(>me èpnque. Qui pourrait gagner
il la comparaison, des favoris ou des TaToHles,
lies Orloff el des Ponipadour, des exils en Sibérie
et des lettres de cachet , des prodigalités de Péters-
liotF et de celles de Versailles , des prostitutions du
l'arc-au-Cerf el des bacchanales de Tsarco-Zelo !*
Pendant que la monarchie française était tempér^-e
par des rliansons, l'aulocratic russe l'était par le
poignard coDime le dcspolisme turc par le lacet,
Il me reste ii parler de la Pologne, s'il existe
cucore Bujuurd'liui une Pologne ailleurs que dans
les fastes de l'hisloire el dans la stërde admiration
des conleniporaiiis. ^ious avons vu naguéres res-
susciter cette héroïque nation pour mourir une
quatrième fois de la main d'un nouveau Suwarow.
Praga devint encore le théâtre de la gloire el le loni'
beau des Sis de PulawsLi et de Kosciusko. Notre di'
plomatie contemporaine est jalouse de la honte de
Louis XV; elle a laissé écraser la Pologne à qui elle
aurait bien voulu peuj-clre aumi^ner la protection
deKs |>TOlocoles, comme elle le fait pour laTurquie,
8S6 — iifanromB ras 9u«l8* —
comme elle s^esl bien lard aura résignée k le faire
pour la Grèce ; maïs le cœur (ut a failli, et la voii de
la t>eur a parlé plus haut que celle de rinlérél.
Un ministre français avait fait entendre à la tri-*
bune ces paroles tiistoriques : La naùonaù'iê polih
naise ne périra pas ; et quelques jours après on
entendit sortir de la même bouche ces mots noa
moirts mémorables : L'ordre ivgne à f-^arscni'e.
Grêlait Tordre des catacombes , c'était la paix de
la solitude dont les Néron et les Domitien gratifi-
aient le monde au temps de Tacite.
Ecoulons encore ici Lelewel : c'est une des
gloires de la malheureuse. Pologne. Sa voix n'a
pas seulement l'autorité de la science , mais encore
celle de l'infortune. H peut parler de Tanlique
splendeur de sa pétrie , celui qui a risqué sa léte
pour lui restituer son nom ; il peut peindre ses
mœurs , ses coutumes et ses usages , celui dont Ths-
bile main en a déjà buriné l'histoire. Assis sur une
terre étrangère , nourri du pain de l'exil , ce grand
homme peut s'écrier avec ses compagnons , comme
les Israélites sur le bord des fleuves de Babylone :
Illîc sedimus et flevimns douce rccordaremur
Sion, PSALM. cxxxvi.
Encore , si les vengeances moscovites leur per-
mettaient d'y respirer en paix^ si elles n'exploi-
taient pas ou la peur ou la ruse pour poursuivre
— CHAPITH! \X\VIII.— 357
de pays en pnys cea inrnrtunès débris éolisippf-s
aii\ réactions des gihcis nu à la foudre des t^haiiipK
dv batailles. Heureux les diTiiîers llls de la l'ologiie
qui n'uni pas vu se chuiigcr coiitr'eun en haine
luricuiie la froide iudifférence dos cabinels !
« L'état Kodal, dit M. Lelcwd, dans la lettre
eulograptie qu'il a bien voulu m'adrcsscr, a cer-
tainement des relations intimes avec le duel ; mais
j'îidople l'epiniun et l'cipression de l'historien
miglnis Hallam (nu plutùt du moraliste Hall) <|ui dit
que s'il faut clierclier en Kuropc un élat h Toppo-
eite ÙM feuclalisntc , on a la l'ulugne. Il a trés-hien
opprécié IVlal social de notre p;»y3. En Pologne,
l'homme ne dépendait point de l'homme. Le ci-
toyen n'élail engagé dans aucune dépendani'e en-
\er8 ses cooeiluyens , nî mi^mc envers le souverain.
Celui-ci n'avait aucun ttroil sur les terres qui appar-
Icnaieol en pure piopritlé allodi^ilc ^ leurs pos-
sesseurs. Quant aux autres classes d'habitaus , il
faut remarquer que l'esclavage fut supprimé ; mais
avec le temps , te seiva^e des paysans s'est aggravé.
Il fui tel aux 16. ■ et Ï7.' siècles tpi'ils rcdevinrcnl
presque des esclaves, u l'ojez, pour plus amples
dé\eloppemen3 sur ce sujet, I'Essm historique de
Lelcwcl sur la léi^islulion pulonaise, depuis 730 jus-
qu'en 1430 , inséré dans le Tableau de la Pologne,
par Mittlc^Siuii, t. AI, édil, dti Lùoiiai'd Citodsko.
858 — HISTOIRE DES DUBLSi —
On voit dans cet ouvrage que la Pologne fui
décliirée par une espèce de schisme législalif , la loi
nationale et celle du pays allemand , source de
longues contestations entre les nobles et les cita-
dins. La législation nationale ne connaissait pas les
combats juridiques , et celle de TÂlIeniagne les
introduisit. Sous le roi Alexandre, en 1505, les
statuts de la diète abolirent toutes les pratiques
judiciaires de la législation allemande.
La Pologne eut aussi , comme tant d'^autres pars
d« TEiirope, ses reines adultères avec des champions
pour établir leur innocence à coups d'épée ou de
massue. Iledwige , femme de Jagellèn, Grand*duc
de Lithuanie , à qui Cromer et les autres historieoi
polonais donnent le titre de sainte , se trouva dans
ce cas en 1390. Douze des principaux seigneurs du
pays voulaient, selon la mode étrangère , la purger
d^accusation en champ clos. Mais la loi du pays
prévalut. Un jugement rendu dans les formes, con-
damna Taccusateur à se placer sous un banc en
posture de quadrupède , et dans cette position à
désaboyer ses propos ; c'est-à-dire , à déclarer pu*
bliquement quil avait menti comme un chien.
Chômer, Po/o/t/a. ^ Dlugoss. , Ilistor. Polon,,
lib, III, cap. 4. Franco/uni 171 1 , in-folio.
ce Le combat de deux, continue Lelewel, fui
connu sur le c/iamp de guerre dans toute la Sla-
— cbapithe xxrv-iri. — 3oU
ironie el en Pologne ; mais le duel du poînl d'hon-
neur pns plus que le duel judiciuirc ne fut reconnu
parla loi naliunate. Cependonl, malgré la dt'fense
légale , les seigneurs qui cherchaient à se distinguer
des autres, professaient In théorie du point d'hon-
neur et la pratiquaient. Cromer dît que du temps
de Sigismond I.^'suruoramé l'Ancien ou le f^iena;
il fallait la permission du roi pour se battre en duel.
^ Je TOUS recommande le petit et précieux ouvrage
^e Cromer intitulé Polonia en deux livres; il se
trouve dans In Jiépiil>lif/w des Elzévirs, »
On trouve dans In Chronitjnc de Hongrie de
.^huroL'ius, un passage impurlant qui conlîrme Kctte
itfeniarqiie de M. Lclewcl, relative à ranliquilë
\Jéa duel sur te champ tle gaeirc en Pologne , et qui
témoigne de Pinfluence qu'exerçait déjà sur celte
coutume le chriatinnismc lout récemment établi dans
:«epa^9. Il s'agissait de savoir en Tannée 1022, sî la
iPoméranie paierait un tribut ii la Pologne. Cette
'gestion devait se décider par le duel ; mais Misea ,
duc de Pologne , el ses fils répugnant comme chré-
tiens à se Boumeltre à cette condition, un chef polo-
nais nommé Bela s'offrit de combattre en leur
place, et le duc de PoinéraDie, qui élait pa)en ,
ayant été vaincu, s'avoua coupable (425).
Ce Irait s'applique également au combat judi-
ciaire , et il y a toute appareuce ({ue l'usage de ce
aOO —mnoiRB DB9 pans. «•
geare d'épreuve faisait partie des mœurs slaves et
en fut extirpé par les prédications chrétiennes.
Bodinus et Camerarius, au témoignage de Voet
de duclUsj cap. F et VI, s'accordent à dire que
]a preuve par le combat était également pratiquée
en Moscovie , s'il n'en existait pas d^autre , ii d^
causa allier non liqueret, (426) .
Voyez au surplus le savant Commentaire du
baron d'IIcrberstein de rébus Muscoviticis , apud
rcr* MuscoK'itic. scriplor. var. Francofuiti 1700.
<( La Lithuanie, dit encore Leiewel, qui étendait
sa domination sur la Russie par la défense des li-
bertés des villes contre les usurpations des Czars, fut
changée en une monarchie féodale par Gedimin vers
1320. Sa réunion avec la Pologne en 1383 , affaiblit
ce nœud féodal et le fit dissoudre. Â Tépoque de
l'union, en 1569, le vasselage des citoj'ens fut sup-
primé déGnitivemcnt. On conserva toutefois le ser-
vage des paysans. Depuis lors, Tétat de la Lithuanio
et ses institutions furent les mêmes qu'en Pologne, m
« Les institutions républicaines repoussaient U
susceptibililé de l'honneur personnel , et la langue
ne possédait guéres d'expression analogue à celle
du Point d honneur. Elle accepta le terme étranger
honor pour exprimer une idée étrangère. Le répu-
blicanisme exigea que le caractère du citoyen fut
^iitacl. Le mol çzczé qu'il faut lire tzchestz et qui
— CtllMTBE \1\V1I1.— !îfll
est il l'oppnsitc de t'infamie zbczvzescié, zhezeciiiè,
exprimait une idée sublime : vile iR'signail l'homme
vertueux , loyal , irréprochable , sanx tâche , et ipii
réunissait dans sa personne toutes les qualités du
parfait citoyen. »
C'était là la i'crlu dont parle Montesquieu, f.
tome I, page 107; c'était VInVgcr viiœ scclcrù
que punis d'Horace, ou le Juste de rialoii , ou
enfm Aristide.
« Chacun, continue Lelewel, devait rechercher,
conserver et défendre sa considération , et , s'il était
déshonoré comme citoyen , il lui était impossible
de rétabliras czézé par le combat. Le calomniateur
qui outrageait la czézè d'autrui , perdait la aienne
et était réputé infâme. »
u Mais les seigneurs qui fondèrent raristocratie,
Bc battaient quelquefois eotr'eux. Le fameux duel
entre Samuel Zboronski et Jenn Tencsiuski au
château de Cracovic , qui eut Heu à l'arrivée do
Henri de Valois et causa la mort de Vanowski,
est généralement connu. »
u Du temps de Sigismoad III vers 1600, le vieux
Zamoiski voulait provoquer en duel le duc Charles
de Sudermanie qui avait usurpé le In^ne de Suéde.
Mais Charles refusa le Ciirlel par le motif qu'il y
avait trop de di^lance d'un simple gentilhomme à
uO duc. Zamoiaki , qui avait refusé le titre de prince,
360
gcure dïprcuve fainit parli' oblenîr
en fia extirpe- par Ici prèd' ^irer en
Bodiniw et Camerar ^ Dal n ci*
ile ducltis^ cap. y f
la preuve par le / / - , sèparakni
en Mc«oTic. r ,. ' 3é,dernoii.
causa altier i ' . j^ ^- Vn
^•enl peu de cas. u
VoTcm r . , ,
• ^ « je puise dans un opuscule
.. seigneur italien et dédié au oac
^jtwick Ce seigneur dont je ne me rappelle
^ le nom . Tovai^eant en Polosrne , fut accueilli
-" jioc de grandes dênionatrations de cordialité chei
J^ puissant prince Zborowsld. Il y devint bientùk
Tobjet des plaisanteries de la maison , et on alla
m^me jusqu^à en faire un Téritable jouet. Ob en
jugera par le trait qui Ta suÎTre. »
CL Un jour, à la suite d*iin somptueux diner,
on lui barbouilla tout le corps de miel et on lâcha
sur lui des ours bien dresses. Lics ours se mirent
à léoher le miel . et faL^ient éprouver au patieut
par le jeu lîe leurs lanzues des sensations insup-
porl.ihles dont il avait beau se défendre. PenJâut
ce temps-là , il tiait l'objet de la risée de toute la
comp.î^iie. !ik: .;iïê d'un tel traitement, il voulut
à l'iii<i.i:ii pren-.lr'? cons:^ de son hôte qui redoubla
d'insi.uiocs pn-r le retenir et fit même démonter
le» rouos de sa voiture. C'était la civilité nationaie-
— CnÂPITRB XXXVMt. —
L'Italien rfussît enfin li s'esquiver tic celle
et k peine en riil-il driiors qu'il envoya un rartd
il Zborowski , avec une copie de sa gfntniogie
pdur prouver que l'illustration de sa familli- était au
moins 6gale h la sienne. Le duc rt>giiant de BruQB-
wick consentit sur sa prière à lui servir de témoin ;
mois Zborowski n'eut gnrde d'accepter le due! , et
rien ne put le dÉtermincr à se battre. »
" Cependant les combats de deux, surtout dans
les temps de la décadence de la république , furcnl
fréquents. Les Jésuites aimiiient la gymnastique et
le combat su b^^lon , et cela pouvait avoir son
influence. On se battait pour montrer son adresse
ovi par suite d'une querelle , surtout lorsqu'on se
trouvait échauffé par la boisson. On se passait de
témoins , et on ne suivait aucune régie. L'arme
était le sabre et souvent l'adresse terminait le com-
bat sans elTusion de sang, n
M Je me souviens d'avoir entendu parler , élant
encore jeune cnrant , d'un duel qui eut lieu au
temps de Stanislas- Auguste et qui causa un granil
flcandalc. Le motifdu combat qui se fit au pislolcl ,
était une ofiense k rhonncur personnel. Il fut trcs-
acbarné et ne se termina que par la mort d'un
des comballans. Le surrivanl fut condamné comme
« Il est vrai de dire que les combats singuliers
. I
ê
384 «-miTOfRB DBS DUKLS. — >
n'ont commencé à deyenir frèquens qti^aprcs la
chute de la république , et malheiireuaenient notre
émigration contribue beaucoup à les multiplier, n
Cette mélancolique réflexion de notre ilUutre
exilé pourrait s^appuyer de trop d^exemples. Mon
respect pour de nobles infortunes me fait un de? oir
d^étre sobre de citations. Je ne rapporterai qu'un
seul fait qui s'est passé récemment parmi les réfugiés
polonais du dépôt de Bourges.
Le 18 août 1834, deux officiers, M. Miecxnie-
kowski, lieutenant au I.*' régiment de chasseufs
à cheval , âgé de 30 ans , et M. Stuart , sous-
lieutenant au 2.^ lanciers, âgé de 21 ans, eurent
une querelle pour un motif frivole. Le lenderoaio,
les deux adversaires se rendirent sur le terraio.
Les conditions étaient qu'ils marcheraient l'un sur
Tautre et pourraient avancer jusqu^à une distance
de huit pas, qu'ils tireraient chacun deux coups
et que si ni l'un ni l'r» Ire n'était touché, on dé-
clarerait l'airaire terminée , ou bien que le combat
continuerait au sabre. M. Stuart tira le premier,
et frappa sou adversaire qui tomba sans faire un
mouvement. La balle était entrée par l'œil et ^lail
restée dans la telc (427).
c( On se battait beaucoup plus sous Napoléon
que sous les Russes , ajoute encore M. Lelcwol
en terminant sa lettrie , et on se bal dans l'épi-
— citAriTBE \K\viii. — 365
^lîoh par oisiveli;, par suile de cet ftal de soiif-
fraiice et de déinoralisiition qui rend luules les sus*
cepllbjlités ai farilemenl irritables, n
Du rcite , pns une plainte dans celte noble lettre
«juc je conserre comme le plus précieux monu-
oient de i'amilié d'un grand homme , pas une
parole d'impatience ou mi'ine <!c surprise pour ces
douloureux mécomptes qui oui accueilli sur la
terre d'ail les vénérables débris du la nationalité
polonaise. Il faut être Russe ou diplomate pour ne
pas comprendre une telle magnanimité.
Pendant la lutte héroïque engagée nagiiéres entre
la Pologne et la Rus»e , il y eut plusieurs rencontres
îndÎTiduelles qui rappellent tes anciens combnls
sur le cJuimp de guerre dont a parlé M, Lclewcl.
Dans la campagne de 1831 , un cousin du dernier
prinee PoninlOMski , capitaine commandant un
escadron de lanciers, eombatlit seul k seul avec
un chef cosaquo , chacun en face de leur escadron .
Je terminerai ce chapitre par un dernier Irait ,
fort remarquable tiré d'un journal anglais. Il pourra
donner une faible idée de ce que les malheureux
Polonais avaient à endurer dans la vie publique et
privée de leurs oppresseurs , et de i'anlipalhte
profonde qui séparait les deux peuples.
Un jeune oITieier polonais qui, du temps de
TEmpire , avait servi dans la Garde impériale frau-
— mSTOIRB DES DUBLt» —
çaise , recherchait en mariage une jeune el belle
personne de Varsovie qui fut enlevée par un offi*
cier russe. Après de longues et inutiles rechercheii
le lieu de sa retraité fut révélé par une femme
de cliambre complice de renlèyement. L^officiw
russe offrit d^épouser la jeune fille , mais celle-ci
jrefusa. Il envoya alors un cartel à son rival qui
Faccepta.
Le lieu du combat fut fixé dans une forêt i
quatre lieues de Varsovie. A huit pas de distance,
on piqua des sabres en terre. Les adversaires placés
à une distance plus éloignée et armés chacun d'un
pistolet devaient marcher Tun sur l'autre jusqu'au
but , mais pouvaient tirer à volonté. Le Russe fit
feu le premier , traversa la poitrine de son en-
nemi et lui fit perdre Téquilibre. Viens te faiit
tuer, misérable y. s^écna. l'ofiicier polonais, il me
reste encore assez de vie pour {arme lier la tienne.
Mais le Russe remonta à cheval et se liala de
s'éloigner. Ses témoins indignés dirent à ceux du
blessé : Coûtez à sa poursuite ^ point de piuê,
c*est un déloyal , nous i^ous l'abandonnons. Ils
ne perdirent point de temps ; poussant leurs che-
vaux à toute bride , ils reparurent bientôt et leurs
sabres ensanglantés apprirent à leur ami que son
adversaire ne devait plus exister. Un instant après,
l'officier JTusse qui n'était que blessé, fut apporté
«CBiprmE xxxviii. — 367
dans une aubei^e uù l'un venait de dOposer le
polunais mourant. Celui-ci h l'aspect de son en-
nemi recouvre un resle de force , se lève , saisit
une fpée , s'élance vers son rival , le frappe ot
expire.
L'officier russe a survécu à ses blessures et a
encore traîné une déplorable existence pendant
environ dix années. Les deux Polonais témoins
du combat fureut obligés de s'exiler. On rendît
Ia jeune lille it ses parcus. JUackvi-ood' s Magazine.
\Sepix:mb. 1834 (428).
•rr-' r-
CHAPITRE XXXIX.
T)i\ch en Asie , Afrîqne , Amcrîqtie et Océanîe.
• Je réunis ces quatre parties du Monde dans
un seul chapitre. Il faudrait pourtant plusieurs
\ctlumes pour approfondir un tel sujet. Mais je
n^ai qu'une rapide esquisse à tracer des mœurs
des principaux peuples étrangers à notre Europe.
hh où l^anlique civilisation s^est retirée , là où la
civilisation moderne n^a pas encore pénétré, ces
mœurs , en ce qui touche le sujet de cette histoire,
se ressemblent à-peu-près partout.
Toutes ces innombrables populations peuvent
être classées dans trois grandes divisions à raison
du culte qu'elles observent , le paganisme ou boud-
hisme , Tislamismc et le christianisme.
Là où s'est établie la religion chrétienne , on
retrouve les mœurs de l'Europe sur les injures et
les susceptibilités du point d'honneur. L^islamisme
s'appuie sur la doctrine du fatalisme. Il recom-
mande la justice en théorie et ne pratique en réalité
— CHlLVITKE XS\[S.— 309
que la Force. Dnns le paRniiismc cl le boiidlitsme
on rclroiive d'une part l'i-lal de nalure avec lous
les f'cnrts de la férocité (irimilive , cl d'nnlrc part
les absurdités du fùlîcliisme. Il faut toutefuis faire
uDu escepUon pour la Cliine-
Occupons nous d'abord de l'Asie. On rcticonlrc
encore ici les Scythes dont l'Asie est le vi-rital>le
berceau. C'est d'eux que sont sortis les Chinois,
les Torlarcs el les Turcomana, qui tomposenl In
phis grande partie de la population asiatique.
Ce serait déjà un bien long travail que de pré-
lenter ici seulement l'analyse des savantes recher-
ches auxquelles s'est livré sur l'origine de ces
peuples 1; comte Du Buat , dana son Histoire
»Cficivnne fies peuples de l'Europe. Si l'on consulte
cet oiiTrage notamment au tome III , lîv. IV , on se
convaincra de l'analogie qui existe entre l'origine
des Germains cl eelle des Cliinuis et desTorcomans,
et par conséquent de U similitude que devaient
présenter leurs mœurs h des époques reculées.
u On trouve, dit M. Du lluat, dans les environs
et au nord de la mer Caspienne, des monumens
antiques qui ne nous permettent pas de doulor
que celle région n'ait été habitée autrefois par
une nation policée , savante dans plusieurs arts et
iDjme IcUréc. Cet état s'nppcluit le Lî-Kcn, et fut
24
870 — HiJproniE oes mncL». —
ensuite noTrim6 Ta-'tsin. Il était connu des Chinois
dans le temps des J/an > une de leurs dynasties
qui commence 207 ans avant notre ère. »
c( Ces peuples n^étaient autres que des Huns,
appelés depuis Tarlares. Les historiens chinois en
content des merveilles incroyables. Selon eux , la
capitale des Ta-tsins avait cent lieues de circon-
férence et contenait cinq palais à dix lieues de
distance Tun de Tautre. La richesse , le commerce
et les forces militaires de ces peuples étaient en pro*
portion. Chaque jour le roi se transportait dans un
ces palais pour y rendre la justice. Devant son char
se tenait un oflicier qui portait un sac dans lequel
on jetait les placels qu^on lui présentait. Le roi les
examinait, lorsqu^il était rentré dans son palais. Lei
habitans de ce pays étaient grands et bien faits
comme les Chinois j ce qui leur avait fait donner
le nom de Ta4sins. Ta signifie grand, et tsin désigne
la Chine. » Hist, ancienne des peuples de l'Europe,
Liv. IF , chap. 3, pa§. 334, — Tables chronol. de
Vemp, Cliin. , /iV. /, §. 8 , pag. 27.
« Les Aorses, dit encore M. Du Buat, méri-
tèrent plus que les Romains rattenlion des auteurs
chinois. Pline , Tacite, et Strabon en ont aussi fait
mention. Ils formaient plusieurs royaumes dont
le moins puissant mettait sur pied deux cent mille
hommes de cavalerie. C'est la ménie nation que
— cHAPiTBK xx\n.— 871
Toflrph dit ttre sortie de la Scytliie asiatique pour
s'élnblir près des Palus IMéoltdes. »
(1 Si l'on joint aux peuples que je viens de
nommer , les Daces , les G^tes , les Parlhes , les
Etsedons , les Sannalcs et les Lygiens , on nura
i-peu-prés le dînombremcnl de lous les peuples
auxquels Tinvasion des Vve-Chi ou CItinois , im-
prima un mouvement violent qui les dissémina
vers tant de contrées difTi.^ renies. Celte invasion
des Yïe-Chi mil fin à l'ancienne domination d'un
autre peuple Irés-puissant , les Su ou Suions dont
Tacite a décrit les mœurs. » Germania, cap. 14,
(I Les Suions fugilifs , comme le furent ensuite les
Ilérulcs , passèrent comme eux dans la Scansie.
Ils y portèrent leur langue , la doctrine et les fables
de leur Bouàha. De-là l'histoire et la religion de
fl'ooHen ou Odin cjut n'est autre chose que
Boudha. » Ibidem , prig. 353.
On sait que le Boudliisme s'étend encore sur la
plupart des contrées que n'a pas envahies l'isla-
mîsnie avec lequel il se partage l'Asie à-peu-prês
par égales portions. Il régne en particulier dans
plusieurs parties de la Bnuekarie et de l'Indoslan ,
el surtout dans le vaste empire de la Chine. Les lois
de Manou recueillies et publiée^<i par M. Loiselenr
de Longchamp contiennent sue les rixes, batailles
et injures privées , des dispositions fort rcmar-
372 -«' HISTOIRE DBS DUBI-S» —
quables dont on trouvera quelques citations wÈ,
Evlaircissemens historiques (429).
La Cliine mérite une mention particulière pannî
tes contrées asiatiques soumises à Finfluence du
Boudhisme. Cest sans contredit le pays qui esl
resté le moins en arrière dans les voies de la civilisa*
lion. Elle le doit à ses trois principaux philosophes
et législateurs, aux doctrines de Fohi, de Lao-tsée
et de Koung-tsèe dont on a fait Confucius.
Trois sectes qui prennent leur nom de ces phi-
losophes , forment avec le boudhisme la base de
la religion et de la morale des Chinois.
Ne faites pas aux autres ce que "vous ne i»oii-
driez pas qu'ion vous fit, tel est le principe fon-
damental de la doctrine philosophique de Con-
fucius. Le grand objet de ses leçons esl de porter
les hommes à un amour tendre et mutuel , com-
plément de tous les devoirs , source et perfection
de toutes les vertus sociales.
La guerre est une des institutions pour lesquelles
Confucius montre Taversion la plus décidée. D
voudrait qu^on n'y eût recours que dans une né-
cessité absolue et après avoir épuisé tous les moyens
de conciliation. Ce raisonnement était lié aux
grands principes de ce philosophe sur la tolérance^
la haine , la vengeance et le pardon des injures ;
: wxm. — 373
n Teut non seulement qu'on les oublie, mais encore
qu'on y réponde par des bieitHiils , c'esl-à-dire
qu'on rende le bien pour le niiil. Notice fie l'Y-
Iking, pag. 425. — Lun-t'u, part, VII > pag. 108.
Confucius poussa celte tolûrance morale jus-
qu'aux usages les pins indilTiTcns de la vie sociale.
(( La sagesse et la pruliité ne plaisent , disait-il ,
souvent qu'autant qu'elles se plient aux attentions
de la bienséance. De-Ui , le code de la politesse
dea Chinois.
n y a en effet en Chine un code spécial qui règtc,
m^e dans les plus minutieux détails, les moindres
rapports des citoyens entr'eux. On ne s'étonnera
pas que dans un pays soumis à une telle police,
le duel soit inconnu.
Le code des lois criminelles définit avec une «d-
nirable précision presque toules les nunuces de
[ -ilèlils, et se distingue surtout p»r une graduation
RijSe peines qu'on regrette souvent de ne pas ren-
contrer dans les lois pénales des peuples les plua
■Tancés dans In civiliselino.
La peine de mort dans les matières de grand
criminel n'est pas prodiguée , comme cHe l'esl en-
core de nos jours dans la plupart des Etats de
notre Europe moderne- » Faut-il , dit Voltaire ,
recourir aux lois de la Cbinc pour voir comlnen
le sang des hommes csl ménttgô ? H y a plus de
372 -- HIWOIBF
quakies dont on Inr .« tribunaux de cel cmfi'itc
Etlaircissemems / .oa» plui de quatre miUe am
pas un TÎIlageoÎB à VexlrèmiVè dt
La Chine «s envoyer son procès ii l'Empereur
les eonlr^ .* examiner troii fois par un de ses tribu-
Boudb' .^pf'és quoi il signe Tarrét de mort ou de
Mi|/ j^utation de peine , ou de grâce entière, u
t* iii^r^i*E 1 Comment, sur le /<V« des délits et des
^es, tom. IF, pag. 869, édit. de 1770.
La peine ordinaire en matière correctionnelle
est le bambou qui est en Chine ce quo le Knout
est en Russie. C^est ce qui a fait dire à Monlesquiea
avec plus dVsprit que de justice : u J^ignore ce
que c^est que Thonneur chez cette nation à qui
on ne fait rien faire qu^à coups de bâton. » Mon-
tesquieu aime-t-il mieux les peuples qui usent de
Fépèe, du pistolet, du poignard, du stylet. Une
faut pas d^ailleurs aller aussi loin qu^cn Chine pour
trouver Pusage du bâton adopté comme moyen
de gouvernement.
Le nombre de coups est toujours indiqué par
la loi et proportionné & la gravité du délit. Ainsi
les injures verbales , réciproques ou non , donnent
lieu à Tapplicalion de 10 coups. L^action de
frapper de la main ou du pied est passible de
20 coups. Celui qui arrache plus d'un isun
(3 ceulimclres 8 millimétrés) de cheveux , est pnui
— cniPiTiiE xxxis.— 375
de 50 coups. Le d^lit de jck-r des nrdures au
visage eal puoi de W) coups. Enfin, cewx qui je
battent doivent recevoir lumme punition autant
de coups qu'ila en Ont porté. /'. Thomas Stadstoh,
J.ois criminelles da ta Chine, tom, II , chop. f^
Paris 182».
On connaît l'ancienne et constante répugnance
des habitaiis de VEmpiie céhUe h lier des rap-
ports avec les Européens. L'étonnemenl que leur
causent les perpétuelles contradictions de notre
conduite avec nos principes moraux et religieux,
surtout en ce qui concerne l'humanilâ et les iu-
jures publiques cl privées, entre pour beaucoup
dans cette politique traditiounellc de la cour de
Pi-king (430).
Après Tempirc chinois viennent en Asie, dana
Tordre de la force et de la puissance, les deux
grands boulevards de l'islamisme , la Perse et la
Turquie. Le colosse russe pèse déjà de tout son
poids sur ces deux états jadis si puissnns ; ses deux
bras étendus vers l'Orient et rOceidenl en détachent
cliaquc jour quelques parcelles. Dejh m^me te vas-
selage moscovite est étnlili k Constautinople et h
Téhéran. L'immobilité de l'îslamîsmc a produit
tout cela ; ses desttiiîcs sont accomplies i:l un nou-
vel uvcnir se prépare pour l'Oitenl.
876 — aMTOlAE DBfl DOSLS. -*
Oii sait que la Perse est en étal de achisme reli*
gieui avec la Turquie. L^uné a pris Ali ei Fautn
Omar pour interprète de TÂlcoran. Uantipalhie
de ces deux sectes entr^elles est peut-être plus pro«
fonde encore qu^envers les cultes les plus dissidens.
Il y a lieu de s^aflliger et même de s^étonner
qu^un pays, qui a eu Zoroastre pour législateur,
soit tombé sous le stupide joug de la loi de Mahomet,
On n^est pas d^accord sur Tépoque où a paru ce
grand philosophe que les uns font contemporain
d^ Abraham, les autres de Moïse, d'autres de Cyrus,
Le savant Iluet a même cru qu^il n'était autre que
Moïse lui-même , et Grégoire de Tours ne Teut voir
en Zoroastre que Cham , Tun des fils de Noé«
Enfin , plusieurs auteurs , pour concilier la chra«
nologic , ont admis deux Zoroastres , dont luQ
aurait été Vauteur et l'autre le réformateur du culte
des Mages (431),
Quoiqu'il en soit , Zoroastre est encore aujour-
d'hui en grande vénération , même parmi les sec-
tateurs de rislamisme , dans la Perse et dans
l'Indostan. On lui attribue un ouvrage qui reu-
ferme sa doctrine et qu'on appelle le Z end- A\ esta,
\\ est divisé en vingt et un livres qui portent des
noms différens. Le SocI-hIcv en est un abrégé divisé
en cent articles appelés poitcs. Le docteur Hyde cd
0 donné une traduction laline, et un exemplaire du
THE XXXIX- — 377
Xend-Avesta en snnBcril a fié apporté en France
pur Aiii)uc-til-Ditpcrron qui en a publié une Ira-
duclion fraoçatac. En voici quelques cilationa :
Jour et nuit pciisc à Tuirc du Lien. La vie eA
courte. Si , devant servir aujourd'liui Ion procimin,
tu allcnds à demain, fuis pénitence. Sad-derlJ'port.
(( Fais en sorte de plaire au Feu , de plaire à
l'eau , de plaire à la terré , de plaire aux bestiaux,
de plaire aux arbres, de plaire a rhomme pur, etc.»
FemlidadS.idé , furganl IX, pag. 361 .
On se rend coupable si on se permet la raillerie ,
la médisance, les discours calomnieux, ai entraîné
par la colère ou se répand eu propos injurieux.
leschu Sad-der , pag- 30 fi suiy. — Sad-dvr,
port. AX/7, fiag. 477.
On commet VAgnéivfté en formant la résolution
de frapper et V Eumvifschtc en l'exécutant. Au
premier cas, on est puni de cinq eoups et dans
l'autre de dix. U y a dix ou quinze coups pour un
second délit, quinxe ou trente pour un troisième
cl ainsi de Buile par gradation. f'eitdidadSadé ,
fars.iy.pag.-lMV.
Si en frappant un cause une blessure qui dure
plus de deux jours de guérisoit , c'est un Aredosck,
&i l'on 8 frappé par-derrière , c'est un Khor. Pour
le premier Aivdo>.ch , on subil quinze coupa , pour
le deusiéiae trente, ctsucccssivemeut jusqu'il deux
9JS — HISTOIRE DES DUCL8. —
cents. Le nombre de coups est de trente pour le
premier Khor, cmquanle pour le deuxième cl
ainsi de suite. Les coups s^appliquent ayec une
courroie.
On rencontre dans les historiens grecs et romaios
des traits qui annoncent que le duel sur le champ
de guenv fut autrefois pratiqué en Perse et dans
rinde , notamment pendant l'expédition d'Alexan-
dre qui tua d'un coup de lance dans une lutte
individuelle le persan Spithrobates , et qui aurait
reçu aussi un défi de Porus , roi des Indes, f^'ojez
DiODOR. DE Sic. , lib, III , et Quint • Cuit. ,
Ub. VIIT.
Ce pays a conservé quelque chose des anciennes
compositions en usage chez les barbares et surtout
chez les peuples d'origine Scythe. c< En Perse,
dit Chardin , un meurtrier est encore aujourd'hui
Kyré aux parens de celui qu'il a tué et ils le mettent
à mort de leurs mains. S'ils refusent pour compen-
sation une somme d'argent, le souverain tout absolu
qu'il est, ne peut pas faire grâce au meurtrier. »
Le même voyageur a été témoin d'une fêle
donnée a Ispalian pour la réception d'un ambas-
sadeur. Elle fut ornée d'exercices de lutteurs et
de gladiateurs, u La lutte , dit cet auteur , faisait
paiiic de l'éducation des gens du commun , les
autres apprenaient à manier le sabre et à tirer de
Kxsii:. - 379
l'arc... La lot morale des Persans admet sept pré-
ceptes principaux ; le premier est de ne donner
aucun égal ù Dieu, le deuiième de ne pris tuer....
Leur respect pour la vie liumniiie ct<t tel que ceux
qui la perdent de la main d'autrui , sont révéra»
comme martyrs. Ils uut des mnrtyrs militaires cl
des martyrs civils Chaudin , l oj âge en Perse ,
tom. Illtpog. An, é(lii.\lS5, in-i." — f'ojagei
de Taventicr, Uw, f, chap, f'ci X, , ,..,„
..I
La doctrine de l'Islamisme repose sur le dogme
de la fatalité et ne reconnaît, par voie de consé-
quence , d'autre principe et d'autre arbitre des
BClions humaines, que laj'orve. C'est aussi par la
force des armes que la loi de Mahomet s'eal établie.
Elle est donc conséqueute avec sou principe. Ce-
pendant le Coran , qui du reste vaut beaucoup
mieux que la manière dont on l'entend et surtout
dont on le pratique, renferme des maximes qu'on
pourrait comparer pour la pliilantropie k celles de
Confucius et de Zoroastre, En voici quelques-unes :
« Recherchei qui vous chasse, doiinei à qui
TOUS Ole, pardonnez k qui vous offense, faites du
bien k tous , ne contestes point avec les ignoraus. i>
Mahomet aurait dû peut-îlre aussi recommander
de ne point disputer avec les savaitsj mais aluis
il n'y avait point de savuns.
S80 ■— HfmHAB DBS wnsts, «»
c< Si vous TOUS vengex , que la yengeance ne
passe pas l'offense. Ceux qui souffiriront ayec pa-
tience , feront une action plus méritoire, i» Coran,
tom. II, Cliap. XVI, 'vers. 127, pd^« 24, trad.Je
Sa\^ary. Paris 1786 , i>i-8.«
u O croyans ! ne tous moquex point de im
frères : souvent celui qui est Tobjet de ves raîlleneB
est plus estimable que vous. Ne vous diffamea point
mutuellement , ne vous donnes point de noms vib.
Un terme de mépris ne convient point à celui qui
a la foi. Ceux qui ne se corrigent paa de ces vices
•ont prévaricateurs. » Ibidem, chapm IX, 'vers. L*',
j>ag. 303.
Il n^y a rien qui dans tous les temps ait caué
plus de surprise aux Musulmans que nos préjuj^
du point d'honneur et nos usages sur le duel.
J'ai cité au tome I.*' , page 57 , le mot d^un ambas-
sadeur turc , à propos d^un tournoi dont il avait
été témoin à Paris.
On en trouve ime preuve bien plus remarquable
encore dans les Leltres du baron de Busbecq y am-
bassadeur de la cour de Vienne prés de Soliman II,
en 1560. Ce savant diplomate était né à Comincs
en Flandre, patrie du célèbre historien de Louis XI.
Il était fils naturel du seigneur de Busbecq, petit
village voisin , et fut élevé à la cour d^ Autriche
par les soins de Charles - Quint. Ses talens et la
— ciiAprxnE xsxnt.— 881
bonne coniluite le firent bienlôl élever nux plus
liants emplois. Il fut succcssiveioenl umbassadeur
de Ferdinand l." , à la cour de Constantinoplc ;
puis k celle de France où il oondnisit la princesse
Elisabelli , fiancée au roi Cliarles IX. Il mourut
en 1592, à Saint-Germain près de Rouen, k la
suite d'une indigne avanie qui lui ftit fuite par des
soldats ivres. 11 était Tami cl le correspondant de
tous les savans, ses contemporains, et en parti-
culier de Juste-Lipse et de Scsliger. Sa mémoire
fiit long-temps cltère aux gens de lettres dont il
était le protecteur et aux bons citoyens dont il ^tait
Teiemple.
Il B laissé eotr^autres ouvrages une relation de
SK légation en Turquie , écrite en latin avec une
grande pureté de style, et aussi recommandable
par la fidélité que par Tinlén't du récit. On y
trouve l'anecdote suivante relative à Vi.'libeg san-
giac de Hongrie pour le Grand-Seigneur. Celui-
ci ayant eu de très-Tifs dém(''lés avec un autre
sangiac voisin nommé Arslambeg^ l'avait plusieurs
fois provoqué k se mesurer avec lui en champ
clos. Il fut pour ce fait mandé à Constanlinople et
réprimandé dans ces termes en plein divan par les
Bâchas ; ii Quoi 1 lu as osé appeler en combat
singulier ton compagnon de service ! manquait-il
donc de chrf'tiens contre qui tu pus tirer l'épée l"
882 — HIWOIRR DES tnîKLS. —
Vous qui \ivcz tous deux du pain de Sa HautesM,
TOUS nuriex osé mellre voire vie aux hasards d^uo
combat ! de quel droit 1* Et où en aTez-^TOus pris
rexemplc f* Ignoriez - vous que quelque fut celd
qui aurait succombé , c^était une perte pour votre
maître 1* >»
Après cette mercuriale , les Bâchas firent mettre
en prison Vélibcg qui n^en sortit que plusieurs
mois après , et perdit la plus grande partie de son
honneur et de son crédit.
Busbecq ajoute cette réflexion : « Parmi nom
il y a bien des gens qui se font un nom pour avoir
tiré Tépée contre un de leurs concitoyens, sans
avoir vu jamais le visage de Tennenii. O temps!
6 mœurs ! Les vices prennent la place de la verta^
et ce qui mérite châtiment tourne à honneur et
gloire. » BcsBECQuit, Légation, Turc. Epist. Illf
png, 200. Amstclod, , Elzéi*ir. 1660 , m-32.
On comprend bien que dans un pays où Ton
se sert d^une logique pareille à celle de ces Bâchas,
il ne peut être question du duel. Aussi Brantôme
s^cn formalise-l-il beaucoup dans ses Mémoires où
il dit : « Les Turcs se moquent fort de nos que-
relles, duels et tueries. Au combat de feu mon
oncle La Chataigneraye , parmy la grande et su-
perbe assemblée qu'il y avoit, s'y trouva quantité
d'ambassadeurs , voire celui du grand sultan So«
— ciiAriTBT; WTTx.— 383
Ivman , )e quel s'cstonmi fort du ce combat de
fraiirois k françoit) , et surtout de favory de ray k
uo autre , les allant le roy cspuser à un tel carnage
el massacre. » â/èiii., loin. .Vf, pa^. 198.
La Circassie est une des provinces de l'empire
turc qui fit partie de celle contrt'e jadis appek'C
Tn-tsin, dont il a été parlé ci-dessus. La relij^ion
Hctuclle des Circassîcns est un mélange de paganisme
et de clif tstianisme . Ils sont três-helti[|ucux el re-
ligieux observateurs du serment- Les familles et le>
tribus se lient par des sermcus d'union. Ce serment
a pour cfTel principal de terminer avec une justice
réciproque tous les différens qui peuvent s'élever
entre les membres des deux tribus. Jouriuil ih la
Soc. asial. de Londres ViiAi.
Quant auK combats singuliers sur le champ de
guerre, on peut voir dans les histoires des croi-
sades les défis asscx rarement suivis d'effet , qui s'é-
changeaient entre les paladins chrétiens et lescbe-
vnliera sarrazins , notammenl ceux des Godefroî
et des Tancréde , et les rencontres de Bichard-
Cœur-de-Lion avec Saladin , dont il a été parlé
au chapitre XXXII.
On trouvera aussi dans Paul-Emile, Branlâme et
d'Audiguier le long récit du siège d'Antioche par
les croisés , et les cartels de défia adressés par les
chevaliers chrétiens, au cht-f sarrazin Corhanc qui
884 -^mntMit dis mnoa. «-
j commandait , avec la réponse qu^il leur fit. Bti5«
Tâiwe , Mcm, sur les Duels , pga. 200. d^Audiguiek ,
jlnc. usage des Duels, Paul * Éifiu , Histm Je
France, tom. I.
Quand on entend parier de duels en Turquie, ce
n^est que parmi les étrangers qui s^y trouTent. Oa
peut lire dans les Mémoires du duc de Rovigo, les
détails d^un duel quHl eut à Smyme , et à la suite
duquel le pacha lui signifia Tordre de partir dans
les vingt-quatre heures. Mémoires , tom* FIII^
chap. XVI.
J^ai déjà parlé au tome I.^'^ du roman bédouio
Û^Antar qui passe , depuis sa récente publication
en Europe , pour Tun des plus anciens et des plus
précieux monumens de la littérature arabe au temps
des kalifes où Ton sait qu^elle fut si florissante. Ce
roman poème, écrit du style le plus pur et le plus
élevé, peut être mis au nombre des productions
les plus parfaites, a dit sir Williams Jones dans ses
Commentaires sur la poésie asiatique. Il a été com-
posé vers Tan 800 de noire cre , et il nous transmet
une foule de faits et d'opinions dont Tépoque est
intérieure h Mahomet. I/aiileur est Asnia'i le gram-
mairien , lecteur du kalife Âroun-^al-Hacbed i qui
il était chargé de raconter des histoires.
Le héros de cette épopée n'est pas un personnage
imaginaire. Antar est connu dans tout TOneot,
— m*piTiie ixiiK.— 385
comme un guerrier cf iùbre cl comme l'niileiir d'un
(li-'S sept moallacats ( poomen ) suspendus Ji lit
Mecque dans la Caabn, muison carrée, bâlie selon
les Musulmans par Abraham et son fils Ismaèl.
L'historien Alboulfeda en fait mention. On peut
consulter à ce sujet la notice du savant orientaliste
M. Hammer, dans son catalogue raisonné des livres
de la Bibliothèque ImpCriale de Vienne, et la tra-
duction en anglais A^Aiitar, par Terrick Ilamilton.
II en a paru une traduction française en 1819,
i Paris, chez Arlhus Bertrand. 3 vol. in-S".
Le roman d'.4niar présente le développement
d'une grande moralité. On y voit un homme , privé
désavantages de la figure et de la naissance, qui
parvient par la force d'âme et par un indomptable
courage à être jugé digne du premier rang parmi
les hommes. On retrouve dans les mceurs des chefs
arabes, dans celtes d'Antar surtout, une analogie
frappante avec celles de nos paladins du moven
Age. Aniar combat toujours à cheval ; son coursier
■e nomme Ahjer; son ^pée qui vient d'Asie, c'est
D/iamy. Les guerriers arabes s'esercenl dani les
tournois , et se défient avant de combattre. Les
femmes sont pour eus des espèces de divinités qui
influent sur toutes leurs actions. Elles imposent des
preuves il leurs amans cl tous s'y soumellent avec
joie et respect.
25
L'épisode le plus altachanl de ce lÎTre singulier
est celui de Khaled ei Djaîda ^4 présente une
uarnition complète, et l^on y trouTe clairemeot
exposés rindépendance dont les femmes joiiissaieDt
autrefois en Orient ainsi que Tappareil des mœurs
chevaleresques de TArabie après Mahomet. Cet
épisode est dans les mêmes proportions que le
roman qui est fort étendu. Je ne puis en présenter
qu^une courte analyse, en consenrant toujours au-
tant que possible le texte original.
Khaled et Djaîda étaient enfans de deux frères.
Des raisons de famille avaient fait cacher le sexe de
cette dernière qui fut élevée comme un garcoo
sous le nom de Djouder, et formée de bonne heure
à la pratique de tous les exercices en usage panai
les cavaliers arabes. Quand Khaled et Djaîda furent
en âge d^étre mariés , leurs mères résolurent de les
unir ensemble et se préparèrent à révéler à Khaled
le véritable sexe de sa cousine. Ici commence Tea-
trevue et le récit :
<( Khaled alla aussi voir son cousin. Il la salua,
la pressa contre son sein et lui donna un baiser
entre les deux yeux, croyant que c^était un jeune
homme. Il prit le plus grand plaisir à être avec elle
et resta dix jours chez son oncle , pendant lesquels
il eut des engagemens et jouta de la lance avec les
jeunes guerriers. Quant à sa cousine , dès qu^elie
— c;n*piTnF xsxix.— 387
eut TU rombioti Khalcd /tait bcnu et vaillant, elle
devint passion n^-ment amoureuse de lui.... »
[ci Djaïda fuit cunfidonce de ses amours h sa
mère qui en parle h celle de Klialed. Celle-ci ayant
proposé k son CIs la main de Pjaïda, il la refusa (out
net , ne pouvant se résoudre à vuir une femme dans
celle qu'il avait traitée comme un compagnon ,
et aussilùt il prit congé de stm oncle. Instruite de ce
d^nrl, Djaïda devint furieuse. <( Méie,jemesciis
mourir, dit-elle, et ce misérable K/ialed vit encore !
je veux, si Dieu m'en accoivie le pouvoir , lui faire
goûter l'ivresse de la mort, l'amertume de la puni-
tion et de la torture. »
Il Parlant ainsi elle se leva comme une lionne,
mit son armure , monta son cheval en ajoutant à sa
mcre qu'elle partait pour la chasse. Rapide, elle
parcourut sans s'arrêter les rochers et les mon^
lagnea ; elle courut vers les habitations de son
cousin.... Déguisée, elle se présente aux exeruices
du combat , défie plusieurs cavaliers et étonne tous
les spectateurs par son adresse et sa bravoure.
Khaled voulut aussi se mesurer avec elle ; loua deux
déployèrent toutes les ressources de l'attaque et de
la défense jusqu'au moment où les ténèbres de la
Dutt les séparèrent , sans qu'on sût qui des deux
£iail vainqueur — Djnîdn demeura Iroîs jours cliex
son cousin. Cliaquc malin , clic se préscnloil devant
388 •^aisTOiBS dbs dokls. —
lui et ne cessait de le tenir sous les armes juaqa*!
la nuit. Sa joie fut grande ; toutefois elle ne se fit pas
connaître , et sa visière fut toujours baissée comme
celle d^un cavalier du Hijaz. »
u Le matin du quatrième jour , Khaled passant
près des tentes réservées aux hôtes , vit Ejaïda moiH
tant k cheval. U la salue et lui dit : Noble Arabe,
au nom Je Dieu qui "vous a donné une si grandit
dextériié dctns les armes , dites^moi qui "vous êtes
et à quels nobles princes vous êtes cdlié? Djaida
sourit , et levant sa visière : K/uded, répondit-elle,
je suis une femme ei non pas un guerrier. Je suis
Djaida qui s'est offerte à vous et que vous iwez
refusée. Elle dit et tournant bride lout-à-coup,
elle piqua son cheval et courut k plein galop vers
son pays. »
ce Khaled tout confus se retira , ne sachant que
faire y vi ce quHl deviendrait avec Tamour pas-
sionné qui s^était tout-ii-coup développé en lui.
Il se sentit de Thorreur pour toutes ses habitudes
et ses go&ts guerriers qui Tavaienl réduit à la triste
situaticm où il se trouvait. Son éloignemenl pour les
femmes s^était converti en amour. »
Khaled fit part de ses nouvelles dispositions h
sa mère qui Fencourage , et court se jeter dans
les bras de sa belle-sœur, en lui demandant de
Bouveau pour son fils, la main de Djaida. Mais
— CHAPITRF XWIX. — 889
ceUe-ci toujours piquée , repousse Ji pon loiir ces
propositions el proteste «pi'elle ne sera iamais 4
Khaled , rlilt-elie boiri' la coitpc de la moil.
Ce n'étaienl que paroles de femme. IlîentAt
Tiennent les caprices , el la belle Arabe en fit
endurer de bien cruels au pativre Khaled.
« Mon père, dit-elie à Znbir qui ne voolait
pas que sa fille restât sans mari, si mon coum'h
dèiire de m'ohtcnir en mariage, je n'eitUvrai pax
dans sa tente jusffu'ù ce au'il soit en mesure-
d'égorger à Ui J'éte fie mes noces un millier da
chameaux, de ceux quiappanienaent à Gheshm^
pis de Malik , surnommé le branelisseur de tances.
Khaled «e soumit à cette conditioa ; il partit k
l'instant suivi d'un millier de cavaliers avec Icsipicls.
il vainquit la tribu cl'Aarair, Après avoir blessé en
trois endi'oils le brandisseur de lances et lu& uti
grand nombre de ses héros , il pilla leurs bien»
el rapporta de leur pays jilus de richesses encore
que Djaïda n'en avait demandées. Mais quand il vint
les déi>flser k ses pieds , elle lui tint ce discours : Si
vous désirez niiwoirpour épouse, obéissez d'aboirl
A toutes mes volontés /e i-tux- que le jour de
mon mariage, lajille d'un prince tienne la bride d»
mon chameau , ajut que je sois honorée au-dessus
de toutes les Jilles de l'Arabie. »
Il Kheled obéit encore. Le ;ittar mûinii il |Mi'lil
^ VISTOtRB DBS J>imLft. —
avec ses cavaliers ^ traversa les plaines et les yallies
et alla attaquer la tribu - famille de Moawich,
fils (le Miial. 11 se jeta sur eux eomme un torrent
de pluie, et se faisant jour avec son épée au milieu
des cavaliers , il fit prisonnière Amima , fille de
Moawich. »
« Âpres avoir accompli des faits cpie les jrius
anciens héros n^avaient pu mettre à fin , après
avoir dispersé toutes les tribus et enlevé les richesses
de tous les Arabes de cette contrée , il rentra dan
son pays. Mais tandis que tous ses compagnons
se livraient aux divertissemcns et aux festins,
Khaled accompagné de dix esclaves , se mit k par-
courir les lieux sauvages et marécageux pour aller
attaquer les lions à lui tout seul dans leurs ci-
vernes , pour surprendre les lions et les lionnes
avec leurs petits , et en distribuer la chair préparée
à ceux qui assisteraient à ses noces* »
a Djaïda eut connaissance de ce projet. Elle m
déguisa sous une armure , monta à cheval , quitta
les tentes et courut vers Kbaled dans le désert
L^ayant rencontré dans une caverne , elle se jelt
sur lui avec Timpétuosité d^une béte sauvage et
Tattaqua en lui criant avec force : Arabe descends
de ton che\*al , rends moi ta cotte de tnailles et
ton armure, ou si lu tardes h le faire y je te passe
celte lance au trai^ers de la poitrine^ »
~~ CBiPiTnE TcxTcnt. — SOI
Klialcd était d^termint- à lui rcsiMer. Ce fut alors
qii'tk 9c livrèrent le plus fiiricnx rombal. Il dura
plus d'une heure ; après quoi le guerrier api-rrul
dans les yeux de so» advei-saire quelque chose
qui l'effraya. Par ta foi d'un Arabe, s'ôcria-t-î! ,
€}uel cavitUer ii:i désat éies-vous donc ? Je sens
que «oi/v atutque cl fos coiipx sont iinîxistiblfx^
— A CCS rools , Djaïdn leva su visîèrc et luissa Toir
n figure. Par la fui d'un Arabe , dit Khalcd ,
cst-ii quelqu'un dans cette contrée qui tous ait
dt-fiér, où eU-s-t'OHs venue teiitrment ici potir me
faire voir jusquoit l'a l'olrc hrai-omc? — Je ne
sais venue dans ce tiéseit, répondit Djaïda , que
pour vous ailler il chasser les hctes saitvngcs , rf
i^în -qite vos guerriers n'aient aucun nprvche à
•VOUS faiiv si vous m'avez pris pour femme. »
« A ces mois, Kliakd se seiilit ptnùlrè d'^ton--
nemeut et d'admirnlion. Tuus deux desi.-endircnt
i\c t-tieTal el enlrèrcnt dan» une oavcrne. Là,
Khalcd saisit deux biHes fi^roces el Djaïda s'em-
l>ara d'un lion et de deux lionnes Djaïda se
seulit heureuse d'être auprès de Khaled. Alain-
tenant, dit-elle , je ne i'ohs pernielierai de cuiller
nos tentes e/u'apris nnlir mariage. Ils repartirent
msuitc en toute hâte pour se rendre ii leurs liabi-
latious. Les tèlei se cutilinuérent et tous les nssixtans
l'eriirenl itn arcncil ma^iiiriqite- Le» Utivs raimient
388 — lusToms des dous. ^
retentir les cymbales , les esckiTes brandissaient
leurs épées en Pair , et les filles ainsi que les demoi*
selles chantaient jusqu^au soir. Ce fut au milieu
de ces réjouissances que Djaïda et Kbaled furent
mariés. 'Amima , la fille de Moawich , tint la bride
du chameau de la jeune épouse dont la gloire
fut également célébrée par les femmes et par Ici
hommes. )i
La Revue Fixmcaise a donné en juillet 1830 une
analyse étendue du poème àHAntar. M. de Lamar^
tine en a aussi publié quelques firagmens dans son
f'ojrage en Orient,
Les Arabes ont encore aujourd'hui des jeux pu*
blics qui ont quelques rapports avec ces anciens
exercices. On les nomme Djerids du nom d'une
javeline que lancent en courant les cavaliers,
M. de Lamartine a été témoin de plusieurs de ces
courses pendant son dernier voyage en Orient.
Voyez au tome II de ses Souvenirs la poétique
description du Djerid et du magnifique costume
semi* guerrier et semi- féminin d'une Amazone
d'Alep, M."*^ Jorelle, femme d'un consul européen.
Aujourd'hui encore les Arabes ou Bédouins ne
sont pas aussi étrangers que les Turcs au préjugé
du point d'honneur. Voici ce qu'en rapporte un
voyageur célèbre.
u Dans la vie privée , chaque homme ou du
— CHAPITRE KXIIT. — 393
moins chaque famille , est le juge et le vengeur
de sa propre cause. Celte susicpliliililé de l'houacur
cjui calcule l'outrage plulAt que le tort, envenime
Its querelles de ces Arabes. L'honneur de Icura
femmes et celui de leurabarbes se blessent aisément.
Une parole de mi^pris ne peut cire expiée que par
le sang du coupable, et telle est la pulicnce de
leur haine qu'ils attendent dea mois et mt'me des
années entières l'occasion de se venger. Les barbares
de tous les siècles ont admis une amende ou com-
position pour le meurtre. Mais en Arabie , lea
parcns du mort sont les maitrcs d'accepter la salis-
faction ou d'exercer de leurs mains le droit da
représailles. Leur profonde méchanceté refuso
même la tétc de l'assassin. Elle substitue un innocent
«u coupable, et rejette la peine sur l'individu le
meilleur et le plus considérable de la race dont
ilfl ont k se plaindre. S'ils viennent ii bout de le
tuer , ils se trouvent exposés à leur tour au danger
des représailles. Les membres de l'une ou de l'autre
famille passent leur temps h combiner de noira
projets, et ce n'est quelque fuis qu'au bout d'un
demi siècle qu'on solde ce compte de la vengeance.
Cet esprit sanguinaire qui ne connaît ni lu pitié ,
ni le pardon , s'est pourtant alTaibli par les maximes
de l'honneur qui exige dans tuutcs les rencontres
privées une soilc d'égalité d'âge et de forces, do
394 — mSTOIKK DS9 mnBjB.^—
nombre et d'armes. » Niémtsr, Descript. deVArabk,
pageW.
La relation du dernier Toyage de M. de Lamar-
tine^ qui fait en ce moment one si grande sensation
dans le monde littéraire , contient une descriptioD
intéressante des mœurs et des coutumes des diffé*
rentes tribus du Liban , telles que les Maronites et
les Druzes. Les Maronites pratiquent le christianisme
primitif. Les Druzes ne sont ni chrétiens , ni mu-*
sulmans ; leur religion comme leur caractère offre
quelque chose d'indéfinissable. Ces peuples ont
établi parmi eux une poUce admirable et Tirent
dans la plus parfaite union. C'est parmi les Druzes
qu'a fixé son séjour la célèbre lady Stanhope,
nièce de Pitt, femme aussi indéfinissable qu'eux.
f^ojrage en Orient , tome II.
J'aurais encore infiniment h m'étendre , si je
n'étais renfermé dans d'aussi étroites limites, sur
la physionomie particulière que présentent les
mœurs dans toute celle partie méridionale de l'Asie
qui avoisine la mer des Indes et renferme tant de
nations si diiférentes et autrefois si célèbres. Là
régnent en suzerains les Anglais, comme les Russes
dans la partie septentrionale. Le principal état de
rindoslan est celui du Grand Mogol qui ne gou-
verne que sous le bon plaisir de l'Angleterre, et
avec le sort de Tippoo-Sacb en perspective.
Les Mognia sonl de la secte musulmane d'Ali
comme les Persans , cl la plupart den cnutiimes de
ces derniers leur sont communes. « En^n^ral,
dil Pabl)^ Prfv•^l, les Mo3;oia el tous les Maures
indiens ont l'iiumeur noble, les manières polies,
el la contersalion fort agréable. On remarque do
la gravité dans leurs actions et dans leur liahil-
letnent qui n'est point sujet au caprice des modes.
Ils ont en horreur Tinccste, rirrognerie el toutes
sortes de (juereilcs. Hiftoire gênéralr tics foyagr-s,
tom. X, png. 203. Edii. 1752, in-i.-
X.es Mngols sont comme les anciens Romains
passionnés pour les combats d'animaux cl mt'me
aussi pour les combats mixtes d'iinmmcs el de
b^t es féroces. L'exemple suivant fera juger comment
les choses s'y passaient à l'époque du voyage de
Mandcsiu en 1638.
Sclia-Coram qui régnait alors, avait un goùl par-
ticulier pour ces cruels exercices, mais, k la dif-
férence des Néron, des Domîlien et des Culigula,
il Toulait que le combat fàt volontaire de la part
des hommes qui paraissaient dans la lice.
Mandeslo fut témoin de plusieurs de ces lombals
cxi-cutés en présence du Grand Mogol. Un jour ,
après nvoir fait combattre un taureau sanvage contre
un lion, puis un liun contre un tigre, le principal
niinislrt: s'avauçu \urs le Peuple cl déclara du nom
S96 — HISTOMB DBS OUMÈM. ^
de l'empereur que m parmi tes sujets il se trou?ait
queiqu^un qui eût asses de cœur pour âfiTronter
une des bêles, il obtiendrai! pour récompense la
dignité de Kan et les bonnes grâces du sultan.
Trois Mogols s^élant offerts , le ministre déclara que
^empereur n^admeltait pour armes que le cimeterre
et la rondache sans c6le de maille , afin que le$
avantages fussent égaux. Le Grand Mogol eut été
loui-à-faii conséquent en interdisant toute espèce
d^armes à ses Tolontaires , et en les obligeant de
combatlre unguibus et rostro.
Ilamh des Mogols étant alors entré en lice contre
nn lion , en fut attaqué si violemment qu^il lui lui
impossible de se serrir de son arme pour se dé-
barrasser des rudes étireintes de son ennemi. 0
allait périr , s'il n'eut tiré im poignard qu'il teosit
caché et dont il porta au lion un coup dans h
gueule , qui le força de làclier prise. Il l'abattit
ensuite avec son cimeterre.
Sa victoire fut célébrée par de grandes accla-
mations. Mais l'empereur l'ayant fait appeler, lui
dit avec un sourire amer : // est vrai que tu as
vaUlamment combattu ; mais nat^ais-je pas réglé
les amies ? D'où vient que tu as usé de ruse?
Tu ne t'es pas conduit en 1u>mme d^ honneur et
tu as tué mon lion en assassin. Là-dessus, il or-
donna qu'on lui fendit le tendre , et il fit promener
— CHAPITRE \XÏ1T.— 307
le corps par toute la ville pour servir d'exemple.
Ibidem, pag. 81 c/ 82.
Le même recueil décrit divers autres combats
du m^me genre , notamment des combats d'él6-
plians fort en vogue îi Siam. On trouve aussi dans
une relation latine d'un voyage hollandais aux Iles
Molucqucs, d'intéressans détails sur des exercices
gymniques auxquels les liabitans se livraieut en
présence et en l'honneur du commandant de l'ex-
pédition. De Bby , Descript. Ind. Orient, /». 276,
Fnuicojhrti 1607,
S'il fallait en croire Montaigne , inhnimcnt plus
digne de foi comme moraliste que comme géogra-
phe , il y aurait eu un tout petit coin de l'Indostan
où le duel était prestju'en aussi grand honneur de
■on temps qu'à la cour de France.
« Au royaume de Nnrsingue, dil-il , non seu-
lement les gens de guerre, mais aussy les cour-
tisans, d esmcsl en t leurs querelles à coups d'espëe.
Le roy ne refuse point le ramp k qui se veull
battre, et il y assiste quand ce sont personnes de
quahté , eslrennant le victorieux d'une chaisne
d'or; mais pour la quelle coiiqucsrir le premier
à qui il en prend envie peult venir aux armes
avecqnes celuy qui la porte , et pour s'cstrc dé-
faict d'un combat il en a plusieurs sur les bras. »
HoTtTïtRnp. , EtsaiSf lit: //, chtip. XXf'H.
98S -^msTomc dbs dsbl». —
Alexandre de Rhodes rend un témoignage tout
opposé d^une contrée de Tlndoslan située dans li
presqu^ilc orientale, Narsingapatan se trouTant dans
la presqu'île occidentale, au royaume de Golcond&
« Les soldats du royaume de Tonquin, dit-il , d^a3*
leurs fort courageux contre Tennenii , traitent les
duels de barbarie. » Itin,, Ub. II, c«6. Puffendoiup,
Droit de la Nat., /iV. rill, chap. IK, §. 8.
On connaît le mode tout à £ait singulier adopté
au Japon pour terminer les querelles particulières.
Les deux adversaires conviennent de a^ouvrir le
Tentre en même temps ; la palme de Phonneur est
pour celui qui s^expëdie le plus vite. Le duel et le
suicide sont frères : les Japonais les ont réunis.
Les querelles sont rares dans ce pays , parce que
la police y est parfaitement faite. Chaque rue d'une
^lle a ses officiers et ses réglemens. Le principal
officier d^une rue se nomme tOttona. S^il survient
quelque contestation entre les habitans de sa rue ,
il appelle les parties pour leur proposer un ac-
commodement ; mais il n^a pas le droit de les v
contraindre. Il punil les fautes légères en mettant
les coupables aux arrrls ou en prison. Hisi. géné-
rale des Voyages y tom, X, pag. 572.
Toutes les fois qu'il sYlcve une rixe dans une rue,
les voisins les plus proches sont tenus de séparer
les comballans. Si Tun des deux adversaires vient
— CnAMTBE STXTT, — 3îM>
è luer Taulrc, il pnie ce rrlme de m U'ie, n'eul-il
taix que se dcfendrc, et les trois famUlcs les pliin
voisines du lliùùlre du meurtre subissent une espèce
tl^arrèls Forcés de plusieurs mois , se trouvant
bloqu£-s dans leurs maisons dont la police fait cnn-
damncr les portes et les fenèlres. Tous les autres
babitans de la rue ont aussi pnrl h la punition.
Ils sont condarani^s à de nides corvÉes plus ou
moins longues , ii proportion de ce qu'ils auraient
pu faire pour arrêter la querelle.
A la mort du plus simple Japonais , tous les
membresde sa compagnie sont appclt's pour rendre
témoignage qu'il est décidé nalurcllemcnt. A Nan-
gasaki et dans quelques endroits du Ximo , l*usage
est de visiter les cadavres pour s'assurer qu'ils
d'odI aucuDe marque de mort violente. KtEiri'Fn,
f^oyage au Japon, toffi. //, pag. 71. La Haye
1732, iH-12.
|h 11 existe en France une loi établie sur le même
ri'piiiicipe , c'est celle du 10 vendémiaire an IV qui
rend une commime rc»iponsablc de tout atteolat
cfHnmis par allroupcmcns sur son terriloirc coutrc
I le> personnes et contre les propriéti!-s.
Le point de contact le plus remarquable que
présentent les mœurs des peuples asiatiques avec
celles des Européens du movcn Age, c'est l'usage
400 -«RiffroiiiB DBS Myn«« -»
des ^rem'cs dans les insUlutîons judidairei. Ce
seul fait suffirait pour prouTcr PhomogèDéîlé de
leur origine. Un grand nombre d^obtenrations cu'
rieuses ont £16 faites à cet égard par les Toyageon.
Ainsi , pour n^en citer qu^un petit nombre , ki
Siamois, afin de connaître de quel c6té est la justice
dans les affaires civiles et criminelles, se servent
de certaines pilules purgatives qu^ils font avaler
aux deux: parties ; celle qui les garde le plus long*
temps dans son estomac sans les rendre, gBgne soa
procès. C'est là sans doute que Ckigliostro a pris
ridée de son duel médical. ^* tom» I y pag. 908.
Saint-Foix , Essais sur Paris 3 tom. Ij pag. 217*
u Nous ne voyons pas, dit Voltaire, tju^aucon
peuple de TÂsie ait jamais adopté les jugemensde
Dieu par Tépée ou par la lance. Ce iut une coutume
inventée par les sauvages qui détruisirent Tempire
romain. En revanche , les épreuves si connues
autrefois sous le nom de l'eau bouillante et du fer
chaud étaient trés-pratiquces dans Tlnde. Tout nous
vient d'Orient , le bien comme le mal. L'épreuve la
plus commune était celle de l'eau bouillante, etc.
Voltaire, Fixigmens sur C Inde , a^'t» XXX.
c< On trouve encore au bout de l'Orient , dit le
même auteur, dans le Malabar et le Japon, des
usages semblables fondés sur la simpUcité des pre-
miers temps et sur la superstition commune à toutes
— cirtiiTiiE \x\T\.~- 401
les nations. » Essai sur les inœiiis et l'rs/iril des
mitions , lom . /,/irt^. 231. Ed. de 1770.
K Au royaume de Tliibul, dit Diiclos, lorsque
deux parties sont en |irocès oit jt:tle dans uuc l'hau-
dtérc d'eau bouillante deux pièces, l'une blanche
cl l'autre noire. Les deux parties plongent ensemble
le bras dans l'eau ; celui qui rencontre la pièce
blanche , obtient gain de cause , et pour l'ordinaire
lis sont tous deux eslropi^s. Mém. de l'Acad. des
Insc. , tom. ,\'K, pa^. C19 et luiV.
Si dans les instllulîons judiciaires de l'Asie, un
procès peut coûter un membre, dans cetlcs de l'Eu-
rope on est aouTcnt exposé k perdre toute sa for-
tune. On a raison de plaindre les plaideurs, car ils
sont malheureux partout (432).
Les marnes observations sont applicables h plu-
sieurs |>euptes de l'Afrifpic. » Les hommes, dit
encore Duclos , ont toujours aimé h prendre le
aorl pour arbitre, et les peuples les plus anciens
ont eu leurs épreuves. Elles sont encore pratiquées
en Ethiopie et dans les royaumes de Congo et
d'Angola. Ce n'est pas que ces nations aient pris
ces usages des anciens peuples; maïs il y a dans
Tesprit humain des germes universels de folie ipii
^closent d'eux-mêmes. » Ihiilrm.
L'Afrique n'est giiOres suseeptible que de deux
20
^IS — HISTOIRE DBS DOTSLS. —
grandes divisioDs , rislamisme cl le paganisme , sans
compter quelques points maritimes occupés pardes
colonies européennes. Au paganisme, appartiennent
la plupart des peuples du Congo, de la Nigritie,
de la Guinée, de la Cafrerie et de Tintérieur de
TAfrique avec la grande Ue de Madagascar. Uisla-
misme comprend le reste.
u Le sauvage , dit Robertson , ne croit pas avoir
seulement le droit de venger ses propres injures,
il embrasse avec la même vivacité les querelles de
ses parcns, de ceux avec qui Phonneur, TintérA
ou le sang Ta lié.... La seule apparence d\iQ
dommage ou d^un affront fait à sa famille ou à sa
tribu, allume dans son cœur une fureur subite , ctil
en poursuit les auteurs avec un ressentiment impla-
cable. Il regarderait comme une lâcheté de remettre
ce soin en d^aulres mains que les siennes, et comme
une infamie de laisser à d^autres le droit de décider
quelle est la réparation qu'il doit exiger ou la ven-
geance qu'il doit tirer. RoiiERTSCv, Hisl. de CluuiiS-^
Qui/U^ Jnl/ocL, toni» Jj pag. 58.
Les Arabes a.siatiques passèrent en Afrique vers
Tan ^S de J. C. , environ cent ans après que
Bélisaire en eut chassé les Vandales qui s^y étaient
élablissous Genséric, deux siècles auparavant. Les
ravages et les dépopulations que ceux-ci y exer-
— rR*PITBE SSSIV.— 403
cèrrnl , seraient presque FabuleiiT , si les traocs nVit
existaient encore aujourd'hui. Les ruines de Car-
tlinge, d'I'tique , d'IIippone et de tant d'autres
cit6s célèbres qui s'étendaient le Inng des cAles de
la Barbarie, en sont de muets el /'Inqucns lëmuins.
Ces contrées jadis si florissautes ne sont plus qu'un
■»aa(e dî'sert. Quand les Vandales assiégèrent Hip-
pone qui leur opposa une vive risislance , ils ne
trouvèrent d'autre moyen de s'en rendre maîtres
que d'enlasaer des monceaux de cadavres contre
les remparts pour infecter la place. Cinq œillions
d'hommes périrent dans cette guerre. S. Auenst. ,
opcr., tom. X , pag. 372, édit. 161G. — Procop. ,
apad Bysant. script., tom. 1, pag. 315,
IjCB mœurs des Arabes d'Afrique onl beaucoup
de rapports avec celles des peuples du m^me nom
restés en Asie, lisse disent aussi descendus d'Ismaël.
Us sont ordinairement maigres , aces et basanés ;
ils ont un regard farouclie et portent une longue
barbe qui est parmi eus une chose sacrée ; c'est par
leur barbe qu'ils jurent ; In salir ou même y porter
la main , est ii Iturs ] evtx la plus grave injure.
It y a une assez gronde différence entre les
Arabes habitons des villes et ceux de la campagne.
Les premiers sont policés , font te commerce et
cultivent les sciences el les arts. Les autres, plus
connus Eous le nom de Bédouins, ne vivent que de
404 — «TiTOItB on DVKLS. •-
rapines et de brigandages , et sont reiiroi des catin
vanes. Ils mènent une TÎe nomade , passent leoit
nuits sous des tentes et les joumëea à chetal. Di
aiment passionnément leurs chemux dont ils font h
généalogie y bien que souvent ils ignorent le non
de leur propre père. Au reste , ils vivent parmi eui
en bonne intelligence, et ils n^en veulent qu^so
étrangers qu'ils Tolcnt sans les tuer. Le duel al
inconnu parmi eux. A la guerre, ils ont conserri
Tusage des combats singuliers, et ils aiment passioa*
nément les jeux guerriers qui en sont le sinuilacie.
Ces peuples sont la terreur des cAtes septca*
trionales de TAFrique , à qui ils ont fait donner k
nom de Barbarie ou Etats barbaresques* Ils aUi*
quent indifféremment les Turcs et les GhrétieDs;
on est toujours leur ennemi dès qu^on possède
quelque chose. Cest ce qui rendra toujours fort
problématique la réussite de toute entreprise de
colonisation dans ces contrées.
Les principaux Etats barbaresques sont , k Voo
cident , les royaumes de Fei et de Maroc , et k
Torient, ceux d'Alger, de Tunis et de Tripoli.
Le principal et pour ainsi dire Tunique pen-
chant de ces peuples est le toI. II n^y a parmi ki
Marocains ni amitié ni confiance ; ils ne connaissent
que les passions féroces qui portent la division
dans les CuniUes et le trouUe dans les sodélés.
— CHAriTBE xxxrt.— 4nri
Les gens du peuple se volent cntrVux avec beau-
coup d'adresse. CuiMnn , f'oyage à Mui-oc.
Voici un trait d'une gruuilc sagesse cl qu^on ne
devait pas s'attendre h rcnrunlrer dans un pnys
d'une si tiaute civilifiotion au &iéL-le des Massinissa
et des Jugurtha , et «n'-nic enrorc au temps des
Maures conqu^-caDS de Tlispagne , mais qui est bieiv
(k'cbu de celle ancienne spluudeur depiu's qu'il a
élé la proie des Bî-douins.
lîn 1690, une querelle s'ttaiil Élevée entre Ala-
horact et Maimiin, tuus deux fiLs de Mulcy-Ixmar'l,
roi de Marne , i\s en vinrent aux muins. Celui-ci les
fit cumparaiire en sa présence chargés de chaînes;
cl leur tînt ce discours : Je suis bien aise de vous
l'oir encore au. monde, fous dt^-iez pt-irliv la vie
dans ivire combat. Il seutble que vous afcz cru
n'avoir plus de père , on bien vous avez oublié
i/ue Je le suis- Dou.r comme dvs agiieau.v dci'Wit
moi, vous êtes des Wons rugissoMS dès que je suis
éloigné. Je vis encore, et voas osez prendtv les
armes .'..., 11 se lit ensuite apporter des bâtons et
leur ordonna de se battre en sa présence. Anec-
dotes Africaines , tom. f, pii^- 137^
La prise d'Alger par les Fruu^ais a été certai-
nement le plus beau l4iil d'armes des temps mo-
derato- Ses conséquences en Taveur du commerce
européen, sont inappréciables. On s'en était aussi
406 ^HlfTOIKB DSS mJBIit.—
promis des mer? eillet dans rinlérét du commerce
national et de la cÎTilisation. Mais un mauyais génie
a soufflé sur tout cela ; toutes ces illusions semblent
détruites , et déjà la France entend sans s^èmoa-
voir mettre en question Tabandon de sa glorieuie
conquête.
Quel est Pesprit qui dirige Fadministration d^ÂI»
ger ? G^est le provisoire qui plane sur toutes nos
institutions, qui paralyse toutes les actions , comme
il desenchante toutes les idées. Qu^STons-nous porté
h Alger depuis bientôt cinq années d'occupation ,
si ce n^est des exemples d^injustice et de cruauté
qui nous ont aliéné les naturels du pays ? Le duel
même n^a pas été oublié.
i( La manie des combats singuliers a passé li
mer , disait le Sémaphoœ de Marseille du 10
août 1834. II y a eu jeudi, 1." août, une ren-
contre , à la porte Babeloned, entre M. Tintendant
civil Genty et M. de Maisonneuve , inspecteur-
général des finances. Les témoins étaient , pour
M. Genty, M. le baron Bondurand, intendant en
chef de Tarmée ; pour M. de Maisonneuve , M. le
colonel Duvergcr, ciief de l'état- major général.
L'affaire s'est arrangée sur le terrain. A la suite
de cette rencontre , M. Genty s'est retiré à la cam-
pagne, laissant l'administration ^ M. Bondurand. »
« Les duels se multiplient d'une manière ef-
-,:iiAriTn,: xvM^ - 407
fraraiilc , disait f'Eiliùmur ilc Tniiliin , ir»prôs
une lettre d'Alger du 27 décembre 1834. Le pré-
jugé et le faut poiitt d'Iiimneur ont OunJuil sur
le terrain deux jeunes pt-ns pleins de vie , dVs-
pérance et d'Iionneiir , M.M. Massoii , I)::iitcvint
du gtnie, et Desmolins , proprii^liiirc. Dans ctllu
lulle barbare et surtout absurde au lU." siccle ,
M. Desmolins a siiceombt'. n
Vers la niL^me époque , un autre duel a vu ItCti
au bois de lîouloipic, entre deux fonctionnaires
supérieurs qui aTaicnl ^lé cmployfs h Al^i'r. I-«
contestation avait pris naissance au sein de lii com-
mission instituée ii Paris, pour etaminer la question
de colonisation (433).
L'Amt^rique se divisait natureUcincnt il y a pcw
d'années en peuples sauvai|;cs ou indigènes, et en
colonies europ'^cniics se prèlondant eivilisî-es. Il y
a une catt-goi-it: de plus k faire aujoiird'Iiui. f'ii
y compte plusieurs Etats libres et ind^-pcndatis
formas d'anciennes colonies dêlaebi^cs de la mère-
pairie. Les Ftats-t'nîs oiU donné le signal et ont
servi de modèle. Malheureusement le modèle n'a
pas loujuurs été fidèlement imité. Cela s'explique
par des ditTèrcnces essentielles dans les positions
gtographiejucs et dons les caractères des peuples.
Les inslilutions républicaines ue s'aevlioiatenl ja-
3
406 — UISTOIRB DES OUBLS. — >
mais aussi parCeiiteineni dans le Midi que dans
le Nord.
Quand IWmérique fut découverte, on n^y ren-
contra d'autres traces du duel dans les mœurs des
inc^éncs, que celles qui ont pu être observées chei
tous les autres peuples sauvages. Ce que Robertsoo
a dit ci-dessus des naturels de TÂfrique s^applique
entièrement à ceux de rAmérique , sauf quelques
nuances qui se distinguent à peine.
Ainsi , au Mexique , Cortei a observé une grande
propension de la part des cbets ennemis à sortir
des rangs pour venir défier les plus braves £spa«
gnols à la manière des Gaulois et des Germains.
Leurs instances duraient peu , et la plupart se hâ-
taient de faire retraite lorsqu'on se disposait b leur
répondre. Il y avait dans leur fait plus de fan-
faronnade que de bravoure véritable. Il y eut pour*
tant un de ces aventuriers qui fut tué h la suite
d^un défi semblable par un jeune espagnol à peine
âgé de 17 ans, nommé Jean Nunez de Marcado.
Hist. générale des Fojages ^ tom* XII, V^* ^'^*
Le caractère le plus distinctif des Péruviens au
temps de la découverte , était une disposition re«
marquable à la paresse, à Tindifférence et à Tapa*
thie. Rien ne pouvait les en faire sorlir , ni la
crainte, ni Tintérét, ni la cupidité, ni Pambibon.
Chez un tel peuple, il ne pouvait rien exister qui, de
— CHAPITRE XXÏLX.— 409
près ou de loin , rcsscmblùt le moins du monde k
ce qu'on appelle le point d'honneur.
Au Brésil , on connaît les comfiositions ger-
maines ou plutôt les •veitge^nci-s du sang des
mœurs Iifbraïqncs. S'il s'élève une querelle et que
quelqu'un y pèrisac , son meurtrier est livré aux
parens du mort qui l'immolent ^ Icnr vengeance.
Ensuite, les deux familles s'assemblent, pleurent
et se réconcilient dans un repas. Ravnal, Bût.
plulos. et polit. > tom. II,
On trouve à-peu-près les m^mcs observations
dans la relation du vojnge de Léry.
Un autre auteur s'exprime d'une manière plus
générale encore. « Les habitans de l'Amérique du
sud sont implacables dans leurs rcsseutimens , et
le temps ne peut éteindre , ni mi^me affaiblir le
désir d'une juste vengeance. C'est le principal hé-
ritage que les pères en mourant laissent à leurs
enfans , et le soin de venger un alTront se transmet
de génération en génération. » Chahlevoix, Joant,
hisl., yag. 334. Paris 1744, irt-4."
Les sauvages indigènes de rAmérique n'occu-
pent plus aujourd'hui qu'une trop petite place
sur cette terre arrosée de leur sang depuis tant do
siècles, pour qu'il y ait lieu de s'occuper de l'étal
actuel de leurs mœurs (434).
Dans loultis les parties où les r.urupéeiis ont
4IV HinMliB Bfes MtiOnBJf^"^
pénétré «t ont fmnfr det élaKIiflftenieDS , ib y otil
apporté leurs mœurs et leurs ooulamei indigénesy
sans oubKer surtout leurs passions qui dans ks
colonies s^exaltent jusqu^àu plus haut degré. Sois
€0 rapport , TAniérique a bien cessé d'être on
KouTeau-Monde , mais c*est 'encore un monde à
part. Dans ce pajrs où l^omme n'est «pi^une choie,
le mot humanité est rayé du dictionnaire ; on y
traiterait la philanthropie de niaiserie si on ne la pre-
nait assez au sérieux pour en faire un crime d^élat
Là on ne connah que deux espèces d^aristocratie,
celle de Pargcnt et celle de la peau. Des deox,
celle-ci est la plus intraitable. Elle est la pient
angulaire de tout le système colonial , et rien oc
saurait peindre Textravagance de ses prétentions.
R y a peu d^années , un fonctionnaire de Tordre
judiciaire de ma connaissance , s^étant permis d^ia-
Titer k diner chez hii un mulâtre, fut presque h
Tietime d^une émeitte. Il fut fort heureux d^en être
quitte pour être traduit au conseil colonial qui le fil
embarquer et renvoyer en France.
Pour un Colon la plus grave de toutes les injures
est dY'tre appc!è mulâtre. G^est un crime digne de
mort , si Pinjure sort de la bouche d^un homme de
couleur , et un cas de duel au dernier sang si elle
est adressée par un blanc. Le général Haïtien
Lapoinle fit un jour scier les jambes à un nègre qui
I
SIX.- 411
l'avait appelé mulâtre. MALENFAnT , Constd. sur
Saint-Domingue, p. ^\. Paris 1815. f^o^ez sur le»
mœurs haïtiennes, lc3 Mémoiivs de M. le général
Pampiiilc Lacroix el V Histoire de Saint-Domingue,
par M. Charles Malo.
Comme toutes les passions aont portées dans les
colonies k un digré bien supérieur ii ce qu'elles
-peuvent être partout ailleurs , la manie du duel
y est poussée jusqu'à la frénéaie. On»e bâti chaque
«nstant parmi les Colons, el les gens de couleur
te mesurent aussi très-souvent cntr'ciix. Les duels
>OBl lieu le plus ordinaiirement au pistolet , el it n'est
■pas un Colon qui n'ait fait une étude approfondie
de cette arme ; la plupart s'en servent avec une
grande habileté. Souvent les combats se passent
comme au moyen Age, en public, avec apparat
et grand concours de spectateurs.
Les fasliionables de salles d'armes aux Colonies
prennent souvent plaisir à s'attaquer aus militaires
étrangers en relilche ou en garnison. Un olËcier de
marine résolut un jour de donner une leçon h un
-^rsoniiage de cette espèce. Il lui emporta son
chapeau, ce qui lui valut un cartel comme il s'y
était bien attendu. Il s'empressa d'accepter, k con-
dition qu'on se battrait au pistolet et ii bout portant.
Le spadassin refusa et fut déslinnoré.
£u 1829, il y eut k Saint-Pierre Martinique un
412 — HISTOIAB DBS DinOLS* —
duel entre M. T.*** , subtiitut du procureur du roi,
et le comte de P*"*^*, pour des plaisanteries que celui-
ci s'était permises dans un bal. Deux coups de
pistolet furent tirés en même temps, et le comte
de P***y qui néanmoins passait pour être d^une
grande force sur le pistolet, fut atteint d^une balle
au cœur et expira sur le coup.
Deux hommes de couleur qui avaient pris que-
relle ensemble aux Antilles françaises, vinrent jus-
qu'à Paris, en 1834, vider leur différent par un duel
au bois de Yincennes. Celte rencontre eut lieu entre
AIM. Gicéron et Bissette. Une contestation s'élen
sur le choix des armes qui resta à ce dernier. Il
opta pour le sabre et blessa son adversaire au bras.
Une note communiquée , selon un usage assez sia-
gulier qui commence à prendre racine, fut adressée
aux journaux sur cette affaire.
Il y eut en 1830, à la Jamaïque , un duel fort
extraordinaire entre deux Colons anglais qui s^étaut
enivrés dans une orgie , convinrent de se battre
immédiatement aux flambeaux et au fusil à lajaiwt
des lankées, porte la relation. Les témoins prenant
en considération l'état d'ivresse des deux cham-
pions, avaient eu la précaution de ne charger les
armes qu'à poudre. Néanmoins, les deux cou|>3
étant partis à un signal donné , Tun des deux
Anglais tomba mort le corps traversé d'une balle
— rHAriTRE XWIX. — 413
q«ii était entrûe par-derrière. La douleur el la
B)ir|jnse des lémoitis fut au Lomble. On fil des
rcclierches ; biciilùl on dt'cuiivrit un nègre cnché
derrière un arbre ii peu de dislance du liou du
combat et armé d'une carabine qu'il venait de
décharger. C'était un acte de vengeance que ce
malheureux venait d'exercer pour un motif non
moins singulier. Celui des deu\ colons qui ^tait
encore vivant, passant la veille devant un gibet où
était suspendu le cadavre d'un nègre , lui avait mis
■<ine pipe à la bouclie el avait continué son chemin.
lUn ami de ce nègre l'ayant aperçu , avait résolu de
Tenger cet outrage et ayant entendu parler du
>duel projeté, il avait pro6té de cette occasion pour
etsayer de le faire sans danger pour lui. Protégé
par l'obscurité , il était venu se poster , armé de sa
carabine , en face de celui h qui il destinait la balle
Il dont elle était chargée; mais dans les ténèbres il
K trompa de victime, el ayant fait feu au signal
donné pour que l'esplosion de son coup se con-
fDndit avec les deux autres , il atteignit par-derrière
celui qui lui tournait le dos, au lieu de frapper celui
plus éloigné qui lui faisait face.
. Voici un dernier trait qui achèvera de peindre
ir les mœurs des Colons , dont il est assez difficile de
se faire une idée , même approsimalive , dans
l'élot actuel de nos mœurs en Europe. Il est tiré
414 -* «mens mBB 0MBL#« -^
d'une Reî^ue de Londres, et il est aion rapporté
par un capitaine de la marine anglaise qui en (iit
le témoin oculaire.
c( Peu de temps après mon arrirée en Amérique,
mes affaires m^appdérent à Kingstown , dans Tlle
de la Jamaïque , et quoique je n'eusse pas une
seule lettre de recommandation, je fus accueilli au
bout de quelques jours dans les meilleures sociétés
de la ville. A cette époque (1817),rhospitalité amé-
ricaine s'exerçait d'une manière on ne peut plus
aimable envers les étrangers. Un jour , un des
plus riches négociaps de la ville .m'invita à diner;
nous étions vingt-cinq à table : il y eut de la joie,
de l'entraîné , du bonheur. On chanta plusieurs
chansons, et au moment où l'Amphitryon proposait
à la société d'aller rejoindre les dames , quelqu'un
demanda qu'avant le café , le capitaine Stewart eût
la bonté de chanter une chanson gaélique. Celui-
ci assura que quoique Ecossais , il parlait avec diffi*
xmlté la langue de ses compatriotes, et qu'il ne savait
pas une seule chanson montagnarde. Celte réponse
satisfit tout le monde , excepté M. Henri d'Egville ,
qui le premier avait demandé la chanson. »
« M. d'Egville était un colon de Saint-Domingue,
qui , lors de la révolution qui eut lieu dans cette
ile, vint chercher bien jeune encore un refuge à la
Jamaïque. C'était un homme auquel, à la première
Kix.- 415
Tuc , V01I4 eussiez donne plus de ciiiquautc ans , k
cause lie ses longs et noirs sourcils, de ses ycuc
éteints, cl de son teint basané; mais avec un peu
d'altention, il était facile de voir qu'il n'avait pas
(li-pussû la quarantaine. 11 était d'un cmbonpbint
remarquable , et il n'était pas mal aisé de distinguer
que l'iulempéraiice , et non les années , avait éteint
le feu de SCS yeux. »
<( Cependant d'£gville insista fortement pour
que le capitaine chantât une clianson écotsaise;
l'amphitryon et quelques convives intervinrent et
firent de vains oËTorts pour faire entendre raison k
d'Bi^ille. Au milieu du tumulte que causa cette
Bcâiie fâcheuse, Stcwarl prononça (juelques mois
en souriant , et dit qu'il allait tâcher de se rappeler
une clianson. Le silence se rélabbt alors , non sans
peine , et le capitaine qui avait annoncé sa chanson
tous le litre de la Dometles montagnes d'Ecosse,
entonna une ode d'Anacréon. Il est impossible de
décrire l'eflut que produisit celte ruse ; l'éducalion
de dXg^'ille , comme celle de tous ceux qui ont été
élevés auY colonies , se borne à la connaissance
d'une ou deux langues, et à quelques agrémens
extérieurs ; de sorte que l'ode d'Anacréon pouvait
fort bien passer pour une chanson montagnarde,
avec d'autant plus de raison que le vin commençait
à faire perdre la tète à la plupart des convives.
416 — fffsrofnB m» mmu. —
Quatre ou cinq personnes de la sociëlé connaissaient
h noble langue dans laquelle chantait le barde de
Samos , et ceux-ci derînant Tartifice du capitaine
se contentèrent de sourire. »
« La prétendue chanson écossaise finie , ks
braTOs , les applaudissemens éclatèrent aTec eiH
thousiasme , mais nul ne se montra plus empressé à
témoigner sa satisfaction que d^E^grille. »
<c L'heure de se retirer arriva : comme je derais
prendre du cûté de la baie pour retourner chez moi,
j^accompagnai le capitaine Stewart, qui devait se
rendre à bord d'un beau vaisseau des Indes qu'3
commandait , et qui était & la Teille de mettre k
la voile pour TEurope. En cheminant , je le ièlicilii
de son ingénieux stratagème , et d'avoir si bien
amusé la plupart des convives en substituant une
ode grecque à une chanson montagnarde. »
a Le capitaine me dit que , peu d'années après
être entré au service , il avait presque entièrement
oublié ses études classiques ; mais qu'en 1814 ,
ayant passé quelques mois en station sur les cèles
occidentales de Tendroit, il avait renouvelé connais-
sance avec ses amis de la Grèce et de Rome ; et vous
▼oyez y continua-t-il , que Tun d'eux est parvenu
k me tirer d^in mauvais pas, car M. d'Egville est
un homme dangereux , c'est un dueHiste de pro-
fession. »
'. wax. — 417
— Un diiellisic! m'érnai-je.
— Oui , monsieur , un duelliste ; et un homme
de celle sorte ne devrait jamais dtrc admis dans une
société de gens comme il faut. Mais le misérable
d'Egville est plus qu'un duelliste ; c'est tm assassin ;
ciir c'est ainsi que j'appelle nn homme qui , k
force de a'escrcer au pislolet, est sûr rie percer
l'as rie cœur h la distance de vinf;t pas. Cet homme
aVst fait une telle habitude du duel , qu'on le Toit
rire, plaisanter et prendre une prise de tabac au
moment de faire feu sur son adversaire. On l'a vu
s'accoutrer d'une façon bizarre pour attirer les
regards , afin de provoquer les gens qu'il voyait
rire de aon costume. \\a h rendre compte du sang
de plus de vingt victimes !
Les paroles du capitaine avaient fait sur moï une
■vive impression , et je l'éroutais sans l'interrompre.
(I Quelques-uns de cce spadaisins ont une cons-
cience, continua-l-il ; mais lui, il est dépourvu
de tout sentiment humain. On peut dire qu'il est
sans cesse en quête de nouvelle» victimes , et il n'est
jamais plus heureux que lorsqu'il se trouve k la
dislance de quinze pas de son adversaire. Il est
bien étrange, n'est-ce pas, que ce d'F.gville quia
tué tant de braves gens , cherche encore a ajouter h
aes crimes i' » Stewart s'arrêta un instant , cl puis il
reprit d'une voix que l'émotion rendait tremblante :
27
c< Tandis que moi , qui ai eu dans tua jéunelse le
malheur de tuer uh homme en dud , je n^ai phis
maintenant un moment de repoe ; cet affligeant soih
Tenir me poursuit sans cesse. » H se fit encore quet*
ques inslans de silence, et puis le capitaine conlî-
nua : a Et cependant, diaprés ce qu'on est convena
d'appeler Thonneur, le bon droit fut de mon cAlâ»
Un de mes camarades de collège, appelé Camé*
ron , aTait insiiltë une dame au spectacle ; je pris
la défense de cette dame , et Caméron leva la nuda
sur moi. Je hiî demandai raison de cet outrais ;
la rencontre eut Ueu le lendemain , et quoique je
n'eusse jamais tiré le pistolet , au premier coup de
feuj^atteignis Caméron à la poitrine. Monmalhe»-
reux ami tomba , et après quelques instans d'ago*
me , il rendit le dernier soupir entre mes bras.
Le souvenir de cet affireux événement remplit mei
jours d'amertume ; pendant mon sommeil je vois
en songe le corps de Caméron lutter contre le tré-
pas , j'entends le ràle de la mort qui s'arrache péni-
blement de sa poitrine , et quand je suis souffraol,
ou mé^e seul , je le vois tomber frappé du coup
mortel , et>son pistolet fumant qui s'échappe de n
faible main. Souvent, pendant une belle nuit|
quand l'Océan est éclairé par les rayons de la lune ,
je crois voir son cadavre sortir du fond des eaux et
s'élever au-dessus de l'horixon. n
\
— cnAPirne itxxix. — 419
« Nous marcliûmcs quelque temps en silenre , li~
ytHU nos réflexions, et nous ntleignimes la clialnupe
qui «levait porlt-r mon onmjingncm à boril. Je me
prt-parais Ji prenilre congé t)e lui , quand il m'invita
k nller nvee lui ù boni du Plunleiir (i.-'est le nom du
vniMeau delà compagnie dea Indes dnni il triait It^
rapilaine. ) Comme il avait [>lii en ahnndnncc dans
1b journée , el qu'on voyait de tous ci^téa dans l'air
des nuages de mousquitcs , j'acceptai avec plaisir la
proposition de mon compagnon, pour lequel je
meaenlaia déjii un vifatlachcmeat. Jemonlai donc
avec lui dans la chaloupe , et quelques minutes
après nous Étions sur li; navire. »
Cl Le Planteur ayant reçu toute sa cargaison ,■
Stcwart était peu occupa ; aussi nous passâmes toute
la matinée à deviser. Le cnpit.tine était un homme
fort aimable ; i) avait souvent des idées singulières ,
el si elles n'élaient pas toujours justes, elles étaïent-
du moins originales, n
— Qui peut donc ainsi venir a nous dans ime
légère embarcation , s'écria Stewarl en regardant
dans Ba lunette P C'est , Dieu me pardonne , le
capitaine Wiltborpe.
■ — Quel homme est-ce?
— C'est un officier au service de la république
de Colombie , et le digne ami de notre duelliste. Le
bruit court qu'il a lue un officier d'un coup d«
420 ««i- HlilO»B DBt BVXLf . — *
pistolet chargé de quatre quartiers de balle réunis.
Il est facile de devioer le but de sa Tisite.
c( La petite embarcation était parvenue au pied
du navire , et celui qu^elle portait demanda si le
capitaine Stewart était à bord. Sur la réponse affir*
malive, il monta rapidement Téchelle. Wilthorpe
(car c^ttait lui) avait une tounfure efféminée , et
pour déguiser ce défaut , d^immenses favoris et une
énorme paire de moustaches lui ombrageaient le
visage ; il portait la tête haute y et cherchait k se
donner un air militaire. Vous eussiez dit d^un
aoldat qui veut imiter un officier. »
— Ai-je rhonneur de parler au capitaine Stewart?
dit Wilthorpe en s^avançant vers nous.
— Oui , monsieur^ dit le capitaine, en s^inclinant
légèrement.
— Dans ce cas , reprit Wiltliorpe , je Toudrais
avoir Thonneur de vous entretenir en particulier.
— Je ne sache pas , répondit Stewart , qu'il
puisse y avoir entre nous aucune affaire dont
monsieur ne puisse être informé.
— Oserai-je vous demander si monsieur , reprit
Wilthorpe en tournant ses yeux vers moi , a Thonneur
d'être votre ami ? et il appuya sur ce dernier mot.
— Ceci , monsieur , n'est d'aucune importance
pour vous. Veuillez dire promptement quelle
njBaire vous amène ici.
; XKsix.— 421
A ces mois , WiUhori>e kva la léte de toute sa
liaulour , se posa dans sa cravule , et prenant un air
grave , tira ientemenl de la pocliu d'un portefeuille ,
uti petit billet qu'il pr^-sciila au capitaine, en disant ;
« Ayei la bonté, nionneur, de lire ceci, n Slewart
lut ces mots :
n Le porteur , monsieur le r.-ipituine Willlioipe ,
mon ami, est charge de l'aiTaire d'hotuieur entre
le capitaine StG\Yart cl moi.
Sif^nè : Henri D'Ecvo-le. »
n Je ne sais, me dit Stcwnri, ce qu'on pourra
I ^nser de ma conduite ; mais , ayant une Toiit ven>6
le sang de mon semblable , ma conscience m&
défend d'accepter un antre duel. D'ailleurs, la vie
«rt un trop beau présent de la divinité pour que je
consente ii en faire le sacrifice en donnant satis-
faction il im homme que je méprise. »
« C'était assurément une belle n^solntion ; maia
Stewart ne dcTait pas tenir sa promesse. Une heure
après, mon ami se rendit sur le port pour donner
SCS deruiers ordres avant de mettre k la voile ; je
raccompagnai. Nous avions à peine mis pied K
terre, que d'Egville, que nous n'avions pas aperçu,
parut devant nous et appliqua un coup de cravache
•u visage de Slewnvt ; aiissitt^t il monta sur un
cheval qui l'alleudiiit, et s'enfuit an galop. Ceci
ae passa eu préscuce de plusieurs personnes , et en
4S0 —uticnB
bien moins de tempt que nous n^cn avons nùi à
le raconler. »
c( Je parvins à entraîner dans nui maimo , sitoèe à
quelques pas de^là , le capitaine qui ilail dans un
état d'exaspération difficile à décrire. Je le aupplisi
de se calmer ; mais rien ne pouvait modérer m
fureur. Il se promenait k grands pas dans mon
appartement , il murmurait des expressions de co^
1ère. Tout-à-coup il s^arréta. « Oui , c^est résolu,
dit- il, je délivrerai le monde d'un assassin, aui
dépens de ma vie « » Et puis , serrant ma main arec
une force presque convulsive : « Voulea-vous,
contînua-t-il , me servir de second ?» Je fis ua
signe affirmatif ; et il m'instruisît avec le plus grsnd
sang-froid du projet qu'il avait conçu. D'Egvilk
• devait périr dans cette rencontre , mais le trépas de
mon ami était également inévitable. »
ce Le projet était si affreux, que je refusai d'abord
de servir de témoin. Mais après quelques momens
de réflexion , je crus avoir l'espérance que mon
ami ne périrait pas dans cette rencontre. « Je serti
votre second , » lui dis-je. Stewart ne répondit
rien , mais il m'embrassa. Puis : « U faut envoyer,
dit-il d'une voix ferme , quatre matelots creuser
à une fosse qui puisse contenir deux corps. Ayes la
bonté d'écrire mon testament ; vous transmettret
mes ordres au lieutenant du PUmtwr. N'oublies
— CIIAPITBE \\\l%. — «KJ
pas que noire rendez- vous esl pour six heures , H le
lieu sur la baie , tierricre le rocher d'Iguannu, a
Et il Borlil. »
H J'allai aussilAtJi la demeure de dTgville, et Je
rfus biciitt\t en sa présente, n
' » Quoiqu'il ïiil deux heures après-midi , je te
ilrouvai en Irain de déjeuner. II se leva quand
j'entrai, et m'invita k m'asseair à sa table. Je k
^Temeretai, et lui dis <pie le capitaine Stewart m'avait
ichargé d'tm message pour lti>. »
t — Eh ! consent il eitCti à se battre avec moi? Je
m'^lonne qu'un oflicier de sou rang m'ait donné
itBDl de peine pour le forcer à agir comme un
ikomme d'honneur.
I — Vous avez deviné la cause de ma visite. Vous
nous IrtHiverez donc au lieu qu'6 choisi le capitaine
|\Vilthori?e.
— Vous pouvez y compli;r.
' — A siï heures, derrière le rocher d'Iguanna,
' — A six heures, j'y serai.
> « Je fis une iiiclinalion , et je le quittai. En sor-
JanI , je l'entendis appeler snii domestique , lui de-
'mander de préparer ses pistolets ; el en mifme temps
rH envoya chercher Willlmi'pe qui était dans la suite
Mie billard. »
■ H A six heures, d'F.g\ille , Willhorpe , Stewart
et moi , uous étions sur la baie , derrière l
immense
I
421 ^Hi0xoiK x>es DqCLS. —
rocher noir d'Iguanna. A quelques pas de-là, lur
les bords de la mer , on voyail un mooceau de terre
fraîchement remuée , et une fosse capable de con-
tenir deux cor|>s. Les combattans devaient se placer
en travers de la fosse , tenir chacun de la main
un coin d'un mouchoir , et {aire feu à un signal
donné. La mort de tous les deux était par coih
séquent inévitable. »
« Le soleil brillait encore dW vif éclat. Je ik
Stewart jeter, comme pour la dernière fois, un
regard mélancolique sur Tastre étincclant du jour,
et il me sembla que ses lèvres murmuraient une
prière ; néanmoins sa contenance restaût ferme,
assurée. II n^en était pas ainsi de d^EgviUe ; celui-d
semblait comme frappé d^immobilitè et de stupeur.
Cependant Wilthorpe et moi nous chargeâmes les
pistolets ; ensuite il fut convenu de décider à tête ou
pile qui de lui ou de moi donnerait le signal de
faire feu , car je redoutais quelque noire perfidie de
la part de roflicier colombien. Wilthorpe jeta eo
Tair une pièce d^argent ; Je dis : Tête ! et la pièce
s^étant tournée de ce câté , ce fut à moi à donner le
triste signal. Alors on s'avança vers la fosse ; d'£g-
fille et Stewart se mirent de chaque côté ; chacun
prit un bout du mouchoir , et nous mimes les
pistolets dans leurs mains. Cétait un moment
terrible. »
— ciuiiTBB'xxxix. — 425
— McMicure, ^Ics-TOità prêta:' m'écriai-jc. —
Oui , r^pondircnl4lN d'une v^^x k peine inlcIUgibiii.
« Noa yeux mouillés de tonnes liaient imtemcnt
Gsé« sur eux. La pliysionodùc de Siewart £lait
calme et assurée, et une prurofajc pâleur se peignait
■ur relie de d'Egville ; il n^ipinbla que aes dents
claquaient, il était aisé de voif (ju'il s'cfl'ori'ait de
faire bonne contenance. U était en proie à une
émotion visible , el qui croissait par dégrés. Je ne
me pressai point de donner le Funeste signal- Son
agitation devenait de plus en plus forte; bientôt je
vis SCS traits s'altérer profondément , ses dents cla-
quer avec force, et tout son curpsircnibla comme
la feuille ; puis le moucboir et le pistolet s'échap-
pèrent de ses mains; ses genoux plièrent sous lui,
SCS jambes refusèrent de le P^rAnMrijjjÉpmba et
roula dans le tombeau. » ' ' '^-"''
(I Henri d'Egville , le redoutable spadassin qui
avait versé le sang de plus de vingt victimes, qui
trouvait du bonheur dans un duel , était maintenant
étendu sans connaissance sur la terre qu'il avait si
long-temps souillée de ses crimes; on eut dit qu'il
avait été soudainement frappé de mort. Stewart,
voyant le misérable état de son ennemi, dit avq
un accent plein de noblesse et de générosité j
créature, tu es un objet trop digne de p
exciter ma colère ! et à l'instant il jeta son pistolet
loin de lui. »
k
— CHAPITRE XXXÎX. — 427
TTient sous ce tilrc : Vc la (Irniocidlic
par M. (le rocciucvillc ; je ne puis
'e lecteur. Tout ce que je pourrais
^^ faire apprécier ce peuple, me
"^V ' ce court passage que je viens
>^ ^^^*^ » 'ins confondent dans leur
^ y» la liberté , et il est im^
oir Pun sans Fautro.
éehauflc sans cesse
. » Cet esprit républicain
..iciU de celui qui se donne ce nom
m9 certains pays de TEurope (435).
On sait que les lois de police et mémo les cou-
tumes , varient beaucoup dans les divers Etals dont
te compose la Confédération américaine. Je ré-
péterai ce que j^ai déjà dit au chapitre XXXV,
pour les cantons suisses , qu'il serait impossible
d'examiner en détail pour chacun d^eux ce qui
s'y passe relativement au duel. Je suivrai donc iei
le même plan.
A une époque encore peu éloignée , les duels
étaient trcs*fréquens aux Etats-Unis. L^isolement
des individus, la grande dislance qui existe entre
la plupart des habitations et les villes où siègent
les tribunaux, ont fait éprouver à chacun le besoin
de ne se reposer de la défense de sa personne et
de sa propriété que sur ses forces individuelles.
426 — HISTOIRE DES DUEL». —
c< J'entraînai mon ami Tere la chaloupe qui n'était
pas éloignée de la baie, et nous nous embarquâmes,
laissant le misérable spadassin aux soins de soo
digne ami. » Monihtj Magazine. Januar. 183L
La nation des Etats-Unis est assurément ceDe
qui tient aujourd'hui le premier rang en Amé-
rique. L'élude de ses mœurs est un sujet digne
du plus haut intérêt , et il me reste à les interroger
pour achever ce chapitre , et remplir le cadre de
cet ouvrage.
Quoiqu'on ait beaucoup écrit sur la Nord-Amé-
rique , elle n'est pas encore connue en Europe,
comme elle devrait l'être. Elle y rencontre chaque
jour ou d'aveugles enthousiastes ou des détracteuis
passionnés. C'est sur les lieux mêmes que ce peuple
doit être étudié, et il est impossible de s^en rapporter
entièrement à Topinion des voyageurs et des pu-
blicistes sur son caractère et même sur ses insti-
tutions. On a fait beaucoup de bruit d'un ouvrage
publié il y a peu d'années en Angleterre , par
Mistriss Troloppe qui a parlé des Américains,
à<peu-près comme lady Morgan parle habituel-
lement dans un autre genre de la France et des
Français. A mon avis, le meilleur ouvrage moderne
qui se soit exprimé avec convenance et impar-
tialité sur les Etutb-Unis , c'est celui qui a été publié
— oiapithe xxsrx. — 427
tout récemment sous ce lîlrc : De la tléinocmlic
en Ainèiiquc , par M. de Tocqucville ; je ne puis
qu'y renvoyer le lecleur. Tout ce que je pourrais
en Gxtniire, pour fuirc apprÉ<;icr ce peuple, me
parait renfermé dans ce court pnssage que je viens
<l'y lire : « Les Américains coorondent dans leur
e^qirit le cliristianismc et la liberté , et il est im-
possible de leur faire concevoir l'un sans raulro.
Chez eux, le zèle religieux s^éuhauITe sans cesse
RU foyer du patriotisme. » Cet esprit républicain
est bien dilFérent de celui qui se donne ce nom
dans certains pays de l'Europe (4â5).
On sait que les lois de police et même les cnu-
lumes , varient beaucoup dans les divers Etats dunt
j compose la Confédération américaine. Je rè-
lÉlerai ce que j'ai déjà dit au chapitre XXXV,
tour les cantons suisses , qu^il serait impossible
»d*examîner en détail pour chacun d'eux ce qui
ftaVf passe relativement au duel. Je suivrai donc iù
i m<?me plan.
A une époque encore peu éloignée , les dueU
(éUienl trés-fréquens aux Elals-Unis. L'isolement
des individus, la grande distance qui existe entre
la plupart des habitations et les villes où siègent
les tribunaux, ont fait éprouver à chacun le besoin
■ide ne se reposer de la défense de sa personne et
[ de sa propriété que sur ses l'orccs individucllei.
428 -^HlflTOMB DBS DOBLS. — .
Le congrès ne s^est occupé de lois générales
sur cette matière qu^en ce qui concerne les mi-
litaires ; il a suivi à cet égard la législation anglaise.
f^ojez ci'^dessus page 190 et la note 366.
Mais la législature de chaque Etat a porté à
diTcrses époques des lois particulières pour la ré-
pression du duel. La première de ces lois , dam
Tordre chronologique , remonte au temps du ré-
gime colonial et fut TOtée en 1719, dans TElit
du Massachussets. Elle a été depuis remise en
vigueur par deux promulgations successives , Tuoe
en 1784, Tautre en 1805. Diaprés ses termes,
toute personne convaincue d^avoir pris part d^une
manière quelconque à un duel , est suspendue
de ses droits politiques pendant vingt ans , et le
corps de Findividu tombé dans le combat est aban-
donné aux cabinets d^anatomie.
L'Etat de Tennessee vient d^adopter une cons-
titution dont Fun des articles est ainsi conçu :
c< Toute personne qui se sera battue en duel , qui
aura porté , envoyé ou accepté un cartel sera inha-
bile à remplir les fonctions rétribuées ou hono-
rifiques. »
A N ew-Yorck , les duels sont rares et la crainle
de la peine de mort portée contre les duellistes est
assez puissante pour prévenir toutes discussions
qui pourraient entraîner à des voies de fait.
— CHAPITRE \XXIT.— 429
En Virginie, on a pris le parti d'exiger de tout
fonctionnaire public le serment de ne jamais »c
batlre en duel. Le Chief- Justice de cet Elal
écriTait en 1833, à M. Livingston, ambassadeur
des Etals-Unis k Paris , que u depuis cette mesure
le duel autrefois si fréquent y était maintenant
presque inconnu, et que l'opinion publique à cet
égard était entièrement changée. »
En octobre 1834, les journaux de la Nouvelle-
Orléans annonçaient n qu'on avait le projet d'y
établir des cours d'honneur destinées , au moyen
de réglemens spéciaux , <S réprimer la manie du
duel qui allait toujours croissant. »
M. Livingston , qui vient de cesser ses fonctions
d'ambassadeur, a publié, en 1831, un opuscule sur
les moyens d'cmpi!cber les duels, fojez aussi le
Système lîe Législation pénale du même auteur,
1 -vol. iVi-S.", Paris, Itaynouard 1829.
Voici ce qu'on lisait dans une noie adressée
d'Amérique à l'Institut de France, par M. Dupont
de Nemours.
« La dÎTersitë des opinions politiques rend les
duels assex tréquens dans les Etats-Unis de l'Ame.,
riquc septentrionale, »
« II y a quelques années que le général Hamilton,
homme de l'esprit le plus distingué, ancien ministre
des fînaDces , a péri de la main du colonel Burr
430 — HtlTOniV DB8 DOKLS. —
dans un de ces duds. Deux ans auparaTant le fib
aine de ce même général avait été tuè de même, n
« La plupart des Etats-Unis ont établi contre ks
duels la peine de mort destinée aux meurtres volon*
taires. Cette peine n^est que comminatoire, parce^
qu^on Tévite en choisissant pour le lieu du combat
un Etat dont on n'est pas citoyen , et en se reliraot
ensuite dans celui dont on est justiciable, mais qui
n^a point à connaître d^ùn délit commis hors de son
territoire ; car les lois en ces matières ne sonl pas
encore applicables ë la république entière : chacun
des dix-huit Etats confédérés a les siennes. »
c( D'ailleurs , Pexpérience de TEurope a prouié
que la mort intimide peu des gens qui ne se battent
que parce quMIs ne craignent point, ou Teulent
fiiire croire qu^ils ne craignent pas la mort. »
« Les mœurs des Virginiens les disposaient en-
core plus aux duels que les autres Américains , et
l'étendue de leur pays y rendait moins commode
leurs voyages hors de la frontière : quand on veut
se battre , on fait semblant d^étre pressé. »
c( La législature de Virginie a cherché dans la
nature du cœur humain une peine moins cnielle,
qui inspire aux juges moins de pitié et qui, par
cette raison même , devienne plus efficace. »
« Elle a considéré qu'un homme , qui , pour des
sujets souvent frivoles, ou des différences d'opinion
— cnuPiTBK xï-îiv.- 431
qne les lois lolérenl, autorisent m^me, s'expose
h mourir, ou à tuer 9<m semblable, est tombé dans
une véritable et dangereuse folie. En conséquence ,
la loi actuelle déclare insensés et mineurs les liuel-
lisies et leurs tî-nioirif; les destitue des Fonctions
publiques dont ils auraient été revêtus , les met dans
l'incapacité d'en occuper d'autres, et ordonne qu'il
leur sera nommé rfcu.r tuteurs qui prendront l'ad-
ministration de tous leurs biens , qui décideront de
l'argent qu'on peut leur confier, et sans le con-
sentement desquels ils ne pourront faire aucune
dépense. Je n'ai pas entendu dire que depuis celle
loi il y ait eu aucun duel en Virginie, n Biblîoth.
Vniv., 1816, tom. 1, png. 429.
J'ai promis au tome I." , page 306 et 437, de
revenir ici sur le compte de deux fameux duellislea
MM. Louis de Noailles et Alexandre de Tilly.
Ces personnages se IrouTaicnt a Philadelphie pen-
dant le temps de l'émigration. Le \icomle de
Nuaillcs était admis chez M. William Bingham ,
l'un des plus riches négocians de la Pensylvanie,
elqui était en même temps sénateur. 11 y présenta
le comte de Tilly qui bientôt plut singulièrement
à Madame et i M.'"* Maria Alalhilda , sa lille
unique. L'adroit séducteur avança si bien ses af-
faires qu'il persuada k cette jeune personne, encore
mineure , de s'unir Ji lui par uu mariage clandestin
432 — HisTomv dm dobls.. *>
qui fui contracté le 11 a^ril 1709. Dans Fade
reçu par un ministre du culte protcatanl qui se laisia
gagner , Tilly prit un faux prénom , afin d^avw
une porte ouverte pour quelque faux-fuyant.
Quand ce mariage fut connu , la famille Bingham
tomba dans le plus violent désespoir. La mère en
mourut de chagrin, et cet événement a pu con-*
trîbucr aussi à la mort du père en 1804. Il y eut
entre les parties de longs pourpariers et des dis-
cussions très-animées pour amener la rupture de
ce nœud clandestin. Dans une de ces explications,
M. Baring, chef de la maison de banque sous ce
nom à Londres , et membre du Parlement , s'em-
porta jusqu'aux voies de fait cuvera celui qui avait
si indignement abusé de la confiance de ses hôlea.
Le comte de Tilly céda enfin à des arguroens de
ce genre, et finit par souscrire un engagement en
forme de traité qui fut rédigé par M. de Noailles.
Voici cette singulière transaction copiée sur la
pièce originale.
Je demande les choses suivantes :
« l.o Cinq mille livres slerl. , argent comptant,
pour payer mes deUes. »
« 2.** Vn traitement annuel de cinq cents livres
slerl. , payable où je voudrai. »
« 3.** Je demande en outre que M. Barinij
m'écrive ou me fasse dire par le général de Xonillei
(xis - 433
qu'il m'a poustr ilnna iiii iiKimctil de liimiillc. A
vta conditions, jv mVngngr ii «jnillcr immfiiltalc-
menl rAmériqiie. » A/t-m . tle Tilly , t. HI, p. 255,
Cette iiffnirc (il grnnd bniîl daus rAiictcti lomme
dnns ti; Nouvenu-Mondc , à cause des relations
itnineDscs du la inaitton lîitigliatn dans les deux
li^misplièrcs. Ct-lalcnt là les cseinptca d'iionneur
et de dùlicnlesse t|u'ollaicnt donner nu-dctà des
mers des gentilshommes franrnis, qu'on a tus aux
ciinpilres XXII et XX\III, si cliatomllcus sur le
point d'Iiiinnenr. C'est avec des traits semblables
qu'on peut se faire une idée exacte de tous ks
élÉmens (]ui doivent entrer dans l'organisation d'un
ducllislc.
Les combats singuliers aux Elals-Uois ne pr6-
Laenteut du reste dans leurs circonstances rien de
l'fMrlicubércment remarquable. On y connaît pou
d'exemples de duels parlementaires, quoique les
disnissions des deux chambres soient souvent trés-
animf-es. Du moins les contlits qui peuvent survenir
Bonl ordinairement le rêsullnl d'un premier mou-
vement , et il est rare que les choses aillent bien loio
après un instant de réflexion. En 18^, les journaux
parlèrent de violens et scandaleux dùbata entre
deux membres du Sénat qui se gourmèrcnl i\ la
sortie d'une séance,
Unns te eours de féTrier 1S3&, M. Labrnuob,
28
^
4S4 — insit>iiiE DBS fumLS. —
président de rassemblée législative de la Lottisiaiie,
nu moment où il montait au fauteuil , fut attaqaè
par M. John Grymes, esq. , qui leva sa canne su?
lui pour l'en frapper. Pour prévenir le coup , il lira
de sa poche un petit pistolet et Gtfeu surTagresseur,
mais sans Talteindre. M. Grymes dirigea aussitôt
sur le président un pistolet de cavalerie légère,
chargé à balle et à plomb. La balle efiBeura la téta
d'un des membres de la chambre siégeant à càté
du président, et deux plombs allèrent frapper le
bras et la main de cdui-ci. La chambre nomma
immédiatement un comité chargé d'instruire contre
Tauteur de cet attentat (436).
il y a moins de quatre siècles , rAmérique s'est
offerte aux regards de l'Europe comme une
vierge sortant dans tout l'éclat de son imposante
majesté du sein de la création. Elle était fière de
sa magnifique couronne végétale , et de ses fleuves
immenses qui enfermaient son sein dans leurs vastes
réseaux. Elle comptait de florissans états dont la
civilisation n'avait rien à envier à celle du moyen
Age où nous croupissions encore quand le Nouveau-
Monde fut découvert. Ce fut alors que le vautour
européen rasant les mers vint s'abattre sur celle
proie. L'Amérique fut envahie , ravagée, dépeuplée
parce qu'elle avait de l'or ; elle a subi le joug d'une
— cHikPmc Trn«. — 435
pntjrfi^ d* fltbiialiert . pnrcc ipi'clle n'avxtt pM fie
fer. Ce» alroctlrs fabulrusn , ces barbaries exeirècs
sur dts peupW sans clHense , malçrf l'ang^lique
inlerceasioD de Timmortel LasCaïas , sont la hoDie
^lernelle de la civilisalion. Ce crime de lése-hu-
nuiiiléa été cruel lem en l expié; l'or de l'AmMque
B corrompu nos mœurs, et un mal inconnu qu^eile
fiOKs a l^iè , a vicié nuire sang. C'esl la robe de
Neasus qu'elle a jclèe sur rEurojïe.
Quant à l'Océanie , dont il me reste h parler
pour avoir rempli le programme de ce chapitre ,
il me suffira de remarquer que chez le^ indigiines
la Férocilè esl plus grande encore que cher aucun
peuple sauvage. La Nouvelle -Hollande est aussi
pauvre de prodiiclions naturelles que d'habilans.
Les rares peuplades qui s'y trouvèrent k l'époque
-de la découverte, étaient au physique et au moral
en rapport parfait avec leur affreux climat, et leur
•ol inhospitalier.
La Nouvelle-Zélande présente un aspect beau-
coup moins sauvage. Les Zélandais sont essen-
tiellement belliqueux; leurs chants, leurs danses,
leurs jeus ne respirent que la guerre. Depuis peu
de temps , ils ont adopté l'usage des armes Ji feu
qui font ilan.i leurs lana;* des mv«,içes terribles. Ces
iauidaires sont ennemis implacables M épar^enl
488 --aiSTOIMI DB8 DUSLS.—
rarement les vaincue. Plus d^un équipage européen
en a fait la Irisle expérience. Diaprés les récenlcs
découvertes du capitaine Dumont d^UrviUe, ce
serait dans leurs parages qu^auraient péri les yais-
seaux de Tinfortuné Lapeyrouse. V. les F^oyages
de Cook.
Dans ces contrées toutes guerrières deux vaillans
adversaires Cbounghi et Pomaré se sont long-temps
disputé le pouvoir. Ce dernier dans un engagemeat
individuel avec son compétiteur, fut frappé d'une
balle en 1826. Le féroce Chounghi lui coupa la
léte y et en but le sang qu^il laissa découler dans ai
main. Eyriès, Voyages motlernes, tom. P^J^p,88y
Paris 1823.
Une telle contrée a été jugée digne par les An-
glais de servir de bagne à la métropole et de re-
cevoir Técume de son exubérante population.
Quoique composée de tels élémens , la popu-
lation de Sydney ou Botany-Bay présente , dit'-oD
aujourd'hui , un coup d'œil étonnant et pourrait
avec avantage soutenir toute comparaison avec
plus d'une cité de la même importance dans noire
Europe. Ce sont du reste les mœurs de TAngle-
terre avec une police extrêmement sévère, qui
ne laisse guères de liberté aux combats singuliers
et aux actes de vengeance privée. Il existe en
Angleterre un recueil intitulé Jnnual Register de
— CHAPITRE XL. — 487
1756 à 1834 , destiné à publier dans les plus
minutieux détails , les duels de la Métropole et
des Colonies. Il s'en trouve quelques-uns dont
celles de la Nouvelle-Hollande ont été le théAtrc.
Je regrette de n'avoir pu consulter un document
de cette importance (437).
>J
CHAPITRE XL.
Conclusion. — Progrès comparatifs de la ciTilisntion
universelle à l'égard du Duel. — Des moyens de le
prévenir par les mœurs ; difficulté de le punir par
les lois. — Considérations sur rinviolabilité de la
vie de l'homme et l'avenir des sociétés.
De tout ce qui précède, de la statistique générale
du duel dans toutes les contrées connues et sur-
tout dans celles de l'Europe, il est facile de conclure
que c'est la France qui tient le premier rang parmi
les nations pour la pratique des combats singuliers.
Ce n'est non plus qu'en France que cette infraction
à la loi naturelle n'est pas directement ou indi-
rectement réprimée par la loi. C^est pourtant la
France qui marche à la tête de la civilisation eu-
ropéenne : elle le dit du moins , et souvent elle
le prouve. La question, si elle pouvait s'agiter de-
vant un jury désintéressé , serait susceptible de
controverse en ce qui touche sinon l'élégance, du
moins la gravité des mœurs.
Après la France, c'est l'Angleterre qui se préseule
la première dans Tordre du progrès social. Là
— CHAriTBE St.— 4dW
BiiHon briinnnique pourrait aussi aspirer au pre-
B)ier rang après nous dans la carrière du duel.
Viennent ensuite parmi les Elals du premier et
du secoïKl rang et dans un ordre décroissant, les
Pays-Bas, la ['ussie, la Suùde et le Dancmarck ,
l'Italie, la Prusse, rAulriclie et l'Espagne. Quant
i la codiQcatioD , ceux qui m^nternicnt lu piilme
pour la spécialité du duel , ce sont l'Autriche et te
Daaemarck. l'ojez les notes 376 et 391..
Tous les auteurs qui ont écrit sur le duel , s'ac-
cordent à reconnaître l'exlrénne difRcullé ou pour
mieux dire l'impossilnlilé, de Vcxlirper par Us lois.
Ce D^estpas pourtant qu'il s'en suit rencontré qui
aient professé le dogme de raDai>chie dans les
champs clos , en repoussant toute mesure légis-
lative eo celle malière. Loin dc-lii ; le plus grand
sombre signale comme une laciute dnngcrcusc, et
m^me comme un scaivJale , l'absence de dispQ-
•iliuns de ce genre dans un code de lois crinn-
Belles. Mais il en est peu qui soient d'accord sur ce
que ces dispositions devraient contenir pour leur
assurer quelqu'elTicacilé.
Plusieurs projets ont été présentés, et il en est
quelques-uns qui paraitraieni biiuirres si j'avai&à
les reproduire ici. Les plus remarqiulilfs sont ceux
de iMM. DumonI de riciiéve, Livinaglon et Loîscau,
44D — HrSTOlKB DBS OOKLS. ««
outre celui qui fut présenté , en France , à la
Chambre des pairs , en 1820. Voyez ta noie 284.
J^ai déjà eu occasion de faire connaître le pre«
mier de ces projets au chapitre XXXY , page 237.
Quant à celui de M. Livingston, c^est inconles*
tablemcnt le plus logique et le plus applicable.
M. Livingslon s^éléve avec raison contre rassimi-
lation du duel au meurtre ordinaire dans la pénalité,
c< Si Ton veut qu^il soit puni , dit-il , il doit rètre
sous son propre nom. » Toutefois , il propose dans
rarticlo 17 de son projet, de considérer comme
assassinat tout homicide commis dans un de ces
duels atéiHoùvs où Tune des parties a donné la
mort à Tautre sans aucun risque pour elle-même,
comme lorsqu^il a été convenu qu^on se servirait
de pistolets dont un seul serait chargé. Cette dis«
tinction me parait pécher quelque peu sous le
rapport logique. Si Ton devait considérer comme
assassinat tout duel suivi de meurtre, oit les chances
n'auraient pas été égales , dans quelle ralégurio
devrait-on placer un combat où riiabilelé dans le
maniement des armes ne serait que d'un seul cùtc ^
/'oyez au surplus, au chapitre précédent, ce qui
a été dit de la législation des divers Etats de TUnion
américaine sur les duels.
Quant au projet de M. Loiseau , avocat h la cour
de cassation, auteur d'une brochure qui a paru
— CHAPITRE )il. — 441
en 1829, il l'occasiun du projcl de lui snumis u
la Chambre des pairs, il me |>arail beaucoup au-
dessous des deui; premiers. I\I. Luiscau proposo
duns ce projet formulé pur arlîiies, d'assimiler lu
duel au meurtre el aux blc^urcs ordinairea, aveu
une eKccpliuii en faveur des militaires pour qui il
serait autorisé à ccrlainea conditions. Or, c'est
précisément dans l'armée que la potili([ue de plu-
■ieurs gouvernemeus a toujours clicrelxj à les pré-
venir par tous les moyens possibles notamment en
Prusse et en Angleterre. f''ovez l'Og. 139 cl 206.
Je ne viens pas ki proposer mou projet apréa
ceux de tnut d'habiles publidstus tpii mil pru-
foodémcut médité sur cette malicrc. Ce n'est pua Ui
d'ailleurs que se trouvera la plus graude diUieulU^ ,
le jour oi] notre gouvernement croira devoir
écouter des vccus qui viennenl de haut et dont
paguères encore nous entendions l'énergique cx-
ression h la tribune nalionatu. A', ia note 2Q0.
Ce qui dans le moment actuel devrait le plus
■rieusenient préoccuper uu législateur habile ,
prévoyant et jaloux de triompher de ce raucer
icial que tant d'inutiles remèdes ont l'uil juger
iDcxlirpable , ce serait d'agir gruducllemeut aur
l'ofMniun, ce serait de disposer les mœurs ii recevoir
itiie loi que leur intérêt ap|>clle, mais à laquelle
elle» Bout loin d'i>lrc préjHirées. l'uutc mesure tégi»<
#4tt — wsvoiu un mmui. *-
latnre prise au temps actud ccmlre les dudi ne
pourrait être que protisoire. H serait urgent ,
par exemple , que le gourerttemeiit fit donnor
Pexemple par les fimctiMmaires publics dont 1
di^ose. Il serait temps de fiùre cesser le scandde
de ces duels pour faits de diaige ou autres , qu'on
Toit se reproduire chaque jour , moins escue
dans Fétat militaire que dans Tordve civil et judi-
ciaire. Un ordre du jour du ministre de la guerre,
Vient de proscrire le duel entre les -officiers de dif-
férens grades dans riatërét de la discipline (438).
Je ne sache pas que M. le garde des sceaux ail
encore songé à prendre des mesures pour em-
pêcher des préddens de cour royale et même des
officiers amoyibles du parquet de prêter le collet
à des avocats. V. le chapitre XXFI et la note 293.
Quand ces mesures seront prises , il sera temps
d^aviser & d^autres expédiens. On commeneen
peut-être alors à s'occuper d'assurer aux citoyens
dont on attaque Thonneur , une satisfaction aa
moins égale à celle sur laquelle ils ont droit de
compter pour ce qui concerne des biens d^un
beaucoup moindre prix. Qu'on jette un regard sur
notre système de lois de police relatives aux injures
privées , et qu'on se demande , s'il est un citoyen
arisé qui voulût courir la chance d'une lutte ju-
diciaire pour obtenir l'espèce de satisGEiction qu'elles
— chapituf: XI.. — 44S
lui promeltent ! Croirnil-on nitinc que dnns cet
étrange système, une parlîe civile soit placîc pour
la défense de ses intéréis sous tii tulellu du rainislére
public ? Qu'elle n'ait pas plus dt; libre arbitre qu^ua
miueurl' Et qu'il ne lui suit purmis d'intervenir au
procès que pour répondre de fritis énormes qu'elle
ne peut faire clle-nii-mc , mais cpi'un fonclionnaire
qui peut avoir d'autres intéréls que les siens, ft^ra
sans elle et malgré elle (439) .
u Si le législateur, a dit Benlliam, cul toujours
appliqué convenablement un s\»li'inc de salis-
faction, on n'eut pas vu naître le duL-l qui n'a été
et n'est encore qu'un supplimenl à l'iusullisancc
dea lois. Jebem. Bb^thah , Trailè de la Icgisl. dv,
et pen. , tom. II , pag. 325.
Mercier se plaignait en ces termes de la législation
de son temps sur les injures privées : « N'usl-il pas
Traî que la loi actuelle ne protège guéres que les
iulérèts pécuniaires, qu'elle ne s'occupe que des
dommages appréciables ji prix d'argent , et que
l'intérêt le plus cher h l'homme , la plus sacré , celui
de l'honneur n'a d'autre protection que celle qu'il
est obligé d'emprunter de son courage. » Tabkaa
de Paris, chap. CCCXLIII.
Joignons h, ces graves autorités celle plus impo-
sante encore du sage et vertueux Sully.
K Je priais le roi , dit-il , dans la ieltrc que je lui
itAA — HISTOIRE DBS DUELS. —
écrivais sur la nécessité de renouveller Tédit coDlre
les duels , de défendre qu^on poursuivit autrement
que juridiquement toute parole d^injure et dé-
fense ; mais aussi de faire en sorte que la justice
qu'on obtiendrait, fut assez prompte et assez
bonne pour appaiser le complaignant et faire re-
pentir l'agresseur* »
Quant à nos cours de justice, qu^elles prennent
exemple des tribunaux d^Ângleterre, ^vojyezp, 161;
que nos magistrats aussi veuillent bien se pénétrer
de ce passage dVn publiciste illustre.
ce II faut infliger des peines trés-rigoureuses à
ceux qui osent faire quelqu'une de ces injures aux-
quelles on attache une grande ignominie dans le
pays où Ton vit. Autrement, je ne vois pas comment
un magistrat peut user avec raison de sévérité contre
ceux qui repoussent les atteintes données à leur
réputation conformément à la coutume et aux idètô
reçues, pendant que lui-même néglige de punir
ces sortes d^insultes qui déshonorent si fort dans
Tesprit du commun des homtmes. » Puffendorf,
Droit de la NaL.,li^. Il y ch. /^, §. 12.
Tout Etat qui voudra fonder la paLx: civ^ile, sur
des bases solides , adoptera en matière d'injures
privées lui système de législation plus rationnel et
mieux entendu (|ue celui qui a été suivi jusqu'à
ce jour en Europe.
La base de ce système pourrnit élre un genre itc
peine connu clans l'ancien ctroil rrnnrnis , mnis
donl il ne resle qu'un veslige presqiie imperccp-
lible dans le code acluel , c'eal le bnnnissemcnt à
l'inl^'rieur. Cette mesure a le double avantage d'agir
comme peine et comme remède. Il n'est pourtant
qu'un seul ces où notre code pfnal de 1830
l'autorise assez limîdemenl , c'est' celui où uu ma-
gistrat aurait Été Frappé dans l'exercice de ses fonc-
tions. D'après l'article 229, le coupable peut ftrc
condamné h s'éloigner temporairement h une dis-
tance de deux myriamclres seulement du domicile
du magistrat. Selon la gravité des cas el le plus
oti moins de probabilité de la récidive , le bannis-
Kment s'étendrait aux différentes circonscriptions
territoriales depuis la commune jusqu'au dcpar-
Meis il ne sufGra pas d'avoir garanti par une
bonne loi l'Iionneur des citoyens, il faudra n'en
lîonfier l'application qu'A des magistrats conscien-
cieux qui n'opposeront pas leurs caprices h ses
volontés , qui ne chercheront pas à l'éluder par
une indififérencc coupable ou par une connivence
plus coupable encore avec lea préjugés vulgaires.
Il faudra en un mol garantir les justiciables de ce»
dénis de justice cju'oii sait toujours colorer de
^écieux prétextes; car c'est encore bien moins
^46 — mSTOfBB DES DUELS. —
les institutions qui manquent aux hommes que les
hommes aux institutions.
Il sera temps alors de s^occuper d^une loi sur
le duel. Le législateur pourra parler en maître ,
et il sera sûr d'être obéi. Quand il ne s^agira plus
que de déterminer les bases de la loi , la question
sera bien simplifiée. Il sera d^abord nécessaire de
reconnaître au délit de duel un caractère spécial,
et , comme dit Livingston , de le punir sous soa
véritable nom. La pénalité n^admettra aucune peine
affîctive. Comme le duel est un abus, une corrup-
tion du principe de Thonneur, corruptio optimi
pessima , c^est par-là même qu^il faut le punir.
Le duelliste serait donc atteint dans sa considération
personnelle , or , c^est de ce côté qu^il doit être k
plus vulnérable. Il serait , selon les circonstances,
déclaré déchu à perpétuité ou à temps , du titre de
citoyen et inhabile à toute fonction publique. En cas
de récidive, la peine du bannissement pourrait être
apphquée. Celui qui se constitue en état de rébel-
lion ouverte contre le repos de la société, n^est pas
digne d'y rester et de participer à ses avantages.
Mais m'objeclera-t-on quels moyens efficaces le
législateur aurail-il de disposer l'opinion à une
bonne loi sur le duel ? Malgré toutes les précau-
tions, une telle loi ne serait-elle pas trop forte pour
le tempérament aclucl de notre société f El si,
— CHAPITBE XI..— 447
comme loutes les précédentes , celte loi reste sans
Pïéciilion, ne sera-ce pas un nouvel aveu d'im-
puissance, un nouveau mensonge législnlif ajoulè
j) lanl d'autres, et l'hypocrisie 16gale n'est -elle
pas la pire de toutes? Celle objection est sé-
rieuse , et loin de moi rinleiilion d'en dissimuler
la gravité. Je dirai plus, elle est conforme à celle
du savant publiciste prussien dont j'ai di^jà cité
l'opinion sur les duels en Allemagne, f'ajez page
209 et la noie 393.
« Quant à moi, dit-il , j'ai les opinions du code
français, je ne le punirais pas (440). C'est peut-
^Ire le seul moyen de le faire cesser ; car rien
n'est plus misérable que des peines dont on se
moque en ne les appliquant pas , et une impunité
qui est la conséquence nécessaire du mensonge de
la loi. Que dire d'un pays où les lois mentent ? a
Gans, Lell. autograplt. du Ï9 juin 1833.
Je réponds que les lois menlent quand elles sont
en contradiction avec leur principe, quand elles
feignent de proléger des intérêts dont elles n'ont
nul souci , quand , par exemple , elles consacrent
dans leurs dispositions sur le meurtre le principe
de l'inviolabilité de la vie humaine , et qu'elles
donnent elles-mêmes l'exemple de cette violation
en décoriint le meurtre légal d^un nom digne de la
chose, celui de vùulicte publique. A qui un légis-
448 — mrronic dys nmts. «-
Inlcur fera-t-il croire qu^ît a horrciir du sang, quand
il le donne lous les jours en spectacle sur la place
publique? Ne devrail-on pas supprimer le meurtre
ofliciel , Tassassinat légal , pour avoir le droit de
proscrire le meurtre individuel , Tassassinat privé ,
en duel comme partout ailleurs ? Quand on ne
verra plus un fonctionnaire public qu^on appelle
bourreau, tuer les gens en cérémonie, la vengeance
particulière cessera peut-être de les immoler dam
des combats singuliers ; on y regardera h deux
fois pour sacrifier la vie d^un compalriole aux in*
tér^ts de son honneur , quand on la verra préférée
h un intérêt bien plus cher encore, Pinièrét générai.
Quelle est donc la destinée le riiomme en pa-
raissant sur la terre? Quelle est rimporlance de
sa vie ? Est-ce un simple accident , est-ce un pur
don du hazard que Ton reçoit, que Ton perd,
sans aucune conséquence pour le passé , le présent
ou Tavenir, sans aucune importance réelle pour
rhumanité toute entière ? L'espèce humaine n'e«it-
clle qu'une simple variation du genre animal /
N'a-t-elle sur les autres espèces d'autre avantage
que de raisonner le meurtre , que de tuer avcr le
fer , quand celles-ci n'ont que leurs armes natu-
relles, les dents et les ongles, pour sYntre di*-
rhirer ?.... Voilà des questions dont la solution se-
— CHAPITRE KL.— 449
mit l>>en aflli|;eat)te sans doute , si Ton ne consullait
(|uc les traités de philosophie , les masimes du ra~
tionaiUme , l'hisloire des anciens peuples ou les an-
ciennes religions qui ont pr^'cédé le Christian inné.
Et DOS maîtres nos prédécesseurs en civilisation ,
ces Grecs et ct-s Romains qui encourageaient la
suppression ou l'oLposilion de part, qui accordaient
droit de 'vie et de mort aux pères sur les enfans ,
aux maîtres sur les esclaves, qui s'étaient fait un
jouet de la vie humaine et de l'Iiomicide un spec-
tacle , nous ont donné la mesure de leurs principes
en cette matière. A Athènes et à Rome, Thommc
serrait à l'homme comme une chose ; c'est un
meuble qu'on brise quand il devient inutile, un
animal dont ou se dèfail quand il est à charge, une
plante que l'on coupe quand elle gène , ou un
vermisseau qu'on écrase ilu pied selon son caprice.
Dieu aurait-il donc créé l'homme k son image
pour de pareilles destinées ? Et si ce ne sont pas Ik
les destinées de l'homme, quel est le peuple qui
en aurait reçu la révélation :* Quelle est la tradition
religieuse qui nous les aurait couservéesi' Est-ce
l'ancienne loi de Moïse.' — Là. je trouve écrit
cnmme règle immuable, rorame principe général
et qui n'admet daits ses termes aucune exception :
« Tu ne tueras point. » Non ot-cù/e.t. C'est là la
vonaiccMiw) divine de la vie huoiaiRe- Ce que
S»
Di€U « créé, l'homnic ne pcul le détruire. Je
TOÎ8 encore dans Thisloire du peuple juif que Gain
tua son friTe Abel , et qu^il fut pour cela maudit
de Dieu , lui et toute aa race. Mais d'^autre part,
je trouTC le meurtre établi partout dana les mœun
des Israélites , et leur législateur lui-même tue un
homme en trahison. Voyez tome I, page 12. Ce
peuple valait donc beaucoup moins que sa loi. Non
seulement il extermine les nations dont il convoite
le pays, mais il se décime lui-même par des
immolations en masse ; des tribus entières sont
moissonnées par le glaive ; le sang coule sous le
moindre prétexte et au moindre signe d'un chrf
ou d'un prophète , qui parle au nom de Dieu.
Il y a plus, ce peuple admet dans sa loi des
Tcnf^mrs du son g. Tout meurtrier volontaire doit
être livré à la famille de celui qu^il a tué et misa
mort. Propinquus occisi statim ui irwenerit eum
juguliihil. KiMEK., cap. XXXF'y v. 16 et 17.
Point de refuge , point d^asile pour le meurtrier.
Mittent scuiores et arripient eum de loco rejugii,
tracent que in manu proximi eu jus sanguis effusus
est , et morietur, Decter , cap. XIX , t>. 12.
La Bible consacre en termes formels la peine du
talion. Elle demande membre pour membre, dent
pour dent, œil pour œil. Exod. , cap^ XXI ^ r. îi»
Tel est le peuple à qui EMeu a intiiiié cdie
T! -. - 451
défense ; ?fnn occidex. Exoo. , XX,v. 13; k qui il
a ()il : A/ea e.tl tillio, et fgo relribuam. Deutm. ,
cfj}>. XX-VtlI , i>, 35 ; pour qui a élé fait ce pré-
cepte ; IVon oderif fralfem tuun in corde tuo. Ifon
qnoei-es ultioitem , nf:c niemor cris injuriœ riViurM
tunrum. Leïit. , cap, XIX, v. 17 et 18.
La nation juive n'a donc eu que des idées confuses
et imparfaites sur la vériliiblc destinée de l'homme ,
MIT rimportaiicG cl la di^iitè de son être. Il fallait
qu'un Dieu lui-mi'me se fil homme pour apprendre
à l'homme ce qu'il était et le convaincre par sa
morale et son exemple (441).
Qu'aurait dit cet admirateur d'FTomére qui trou-
vait que les héros de l'Iliade avaient dix coudées de
haut, s'il avait lu l'Evangile? — Qu'esl-ce donc
que cette race humaine pour la rédemption de
laquelle un Dieu vient sur la terre et meurt sur une
croix ? Qu'est-ce que ce corps chétif cl périssable
k qui la divinité s'unit dans un incompréhensible
mystère , el à qui elle promet une seconde vie qui
doit Olre éternelle i*...-
Le Christ ne se contente pas de reproduire le
priceple de l'ancienne loi : Tu ne tueras point,
il met l'homme, m>'me le Samaritain , même le
Gentil , sous la snuve-garde de la chanté ; il défend
l'injure et proscrit la vengeance. /^. tom. J,p, 1 10.
Le« premiers chiéliciis ont scellé leur foi de leur
452 ^nsTOfiii VB8 ik«ls. -^
sang. Ces témoins se sont laissés égorger , el ils ont
ainsi rendu de leur culte le plus sublime témoi-
gnage au dire de Pascal. Mais après avoir ëè
persécutés , iU devinrent eux-mêmes persécuteun.
Comme le christianisme , le paganisme eut ses mar-
tyrs. Libaniusnous a conservé la lamentable hisloirc
des réactions chrétiennes sous Théodose, comme
Lactanee , celle des réactions païennes sous JuKen.
On vit le peuple transporté de cette rage aveu^e,
obéissant à cet instinct de la destruction qui le suit
partout , s^acharner au meurtre des femmes , dei
enfans , des vieillards , k la ruine des temples et dei
plus beaux monumens de Fantiquité païenne (442).
On vit ensuite se déchaîner les haines des sectes
dissidentes, s^allumer les bûchers des héréliquci
et partout couler des flots de sang qui ont souillé
le berceau du christianisme , et qui sont deveom
là semence trop féconde de ces guerres religieuses,
de ces proscriptions en masse , dont Faction et h
réaction se sont étendues jusqu^à nos jours.
Ce n^était pourtant pas là la profession de foi des
premiers chrétiens , quand ils demandaient compte
aux empereurs de leurs sanglantes persécutions.
€< Aimant notre prochain comme nous-mêmes,
écrivait à Marc-Aurèle le philosophe chrétien
Athenagoras , nous avons appris à ne point frapper
ceux qui nous frappent y k ne point faire de procès
-cMU'iTnB Ti..- 458
k cCHï qui nous cléi>niij lient. Si l'on nous donne
un soufflet , nous (cndoiis l'autre jmie ; w l'mi noua
demande noire tunique , nous offrons encore noire
manteau*... Nous avons renoové k tus spei'iacles
eusunglantés , croyant qu'il n'y a guères (le rfttl^
rence entre regiirder le meurtre et le commettre.
Noua tenons pour liomicides les femmes qui se font
avorter et nous pensons que c^est lucr uo enHint
que de l'exposer. Nous sommes égaux en tout ,
obéissant k la raisoa sans prËlendrc la gouverner, n
ATHBsicoti. , Li^at. pro Christian. Oxfoi-â 1700,
in-8.'',c( apiid Bibiioîh. Piitr. — Fleury , Hist.
ecclesiast. , tom. I, li\'. III, pftf;. 389.
C'est dans cet acte célèbre d'expiation impoié
par un yéritable apôtre de l'Evangile à l'empereur
Tbéodose aprùs le ma»<sacre de Thcssalonique ,
que se rèvéte l'esprit et la pitissnuce de la religion
proleclrice de l'Iiumanité. Ecoulons cuoore ii cet
égard la baule parole de Châlcaubtiond :
Il C'est là un de ces faits complets, rares dans
Iliisloire où les trois vérités, religieuse, philoso-
phique et poliiitjue, ont agi de cuncerl. L'action
de Saint Ambruise est une artion féeonde qui
renferme déjà les actions d'itii mOnde k venir ;
c'est la révélation d'une juiissanee engendrée dans
la décomposition de toutes lus autres. >■ EtitJta lu's-
loritfiics, iQin. II.
454 *- BISTOI&B DBS DUSU. •*
Au 18.* siècle, il s^esi trouTé des phUaiilhropet
qui n^oDt pu pardonner à Théodose de s^élre laissé
faire la leçon par un prélre. S^ils avaient vécu alors,
ce prince leur aurait fermé la bouché avec une ckf
de chambellan*
Pourquoi donc le sang a-t-il encore coulé après
la victoire du christianisme ? Pourquoi le nouveau
culte n^a-t-il pas accompli sa mission de paix sur
la terre ? C'est que Phomme a manqué à la loi,
C^est que le christianisme même n^a pas encore
été compris, ni sincèrement appliqué , et j'entends
aujourd'hui de graves publicistea s'écrier que sa
mission est terminée ! . . . .
c< 11 3'est établi , dit l'illustre auteur des Etudes
historiques^ une libation de sang perpétuelle. La
guerre l'a répandu ainsi que la loi. L^homme s'eâ
arrogé sur la vie de l'homme un droit qu'il n'ayait
pas , droit qui a pris sa source dans Tidée cod«
fuse de l'expiation et du rachat religieux. La ré«
demption s'étant accompUe dans l'immolation du
Christ , la peine de mort aurait du être abolie :
£l.I.E M$ s'est perpétuée QUE PAR UNE SORTE DK
CRIME LÉGAL, Le Christ avniit dit dans un sens ath
solu : Vous NE TUEREZ PAS. )) Etudes hîstor. loc. cit.
Une fois que le droit de vie et de mort fut
conservé dans le monde , malgré l'appUcation qui
— CHXPITTIF o , — 435
en avait élé fuite au Juste par cxcelltncc , on vil
les iioiDtnes s'ingénier h truuver des prétextes pour
a'inimoter les uns les autres, tanlul par le gtaive
lies combats , taulàt por celui de la justice. Ou
inventa les crimes de lèie-divinité, de lèzc-majoilé,
de léze-iiiiliun. Kn Espagne et eu Italie , oit biîilait
pour crime d'itérésie; on décapitait en Angleterre
pour erime de haute trahison , et en France , ii la
fin du siècle dernier pour incivisme , fanatisme ou
conspiration. Depuis le supplice de Jésus-Chnst
jusqu'à vclui de Louis XVI, est-il une seule de
ces exécutions (pti ait obtenu le suffrage de la pos-
tèritéi' Loin dc-lk , elle a été jusqu'il réhnbililer
de vrais coupables , uniquement parce que le litre
de leur condamnation appartenait k la polttî<iue
ou k la religion.
Qu'esl-il adrcim de tontes ces immolations?
En C8t-il une seule qui ait prt)fit'^ aux partis qui
^cu Étaient fait un instrument po[i)ir[iif i^ N'esî-il
pas Trai plulût qu'elles ont fondé de funestes pré-
Cédeus qui plus tard ont été invoqués contre ccux-
k|4b mêmes qui s'en étaient servis. Les massacres de
' ..'la terreur ne fureut qu'une réaction de ceux de
la Saint-Darthéléroi , et le décret de proscription dos
prêtres une rcprésaîlle de la révocatien de l'édit
de Nantes. Quand les liirondiii.i furent envoyés k
l'échafaud, ils iinoquaiciit K-nr juviolabilili); une
vois t^éleYa qui fil la rainan|iie qu'eux -mèinet
«Taient provoqué la mite en ju^iemeat de Harat
a Votre exemple a Cul planche , d leur cria-1-OD ,
Patere legem quam ipse tukris. G'esl aiofi que Toa
a TU toutes les factions s^entre détruire , comne
ces insectes qui se dèroreîit jusqu^au dernier,
quand ils ont fiut leur palure d'un cadavre.
Aujourd'hui encore, les souvenirs de 93 ne sont*
ils pas le plus insurmontable obalacle à la propa-
gation des théories républicaines ai séduisantes pour
des cœurs généreux ? Qui les repousse , si ce n'est
le spectre sanglant de la Terreur f Que voitH>n eotn
-cette forme de gouvernement et la France , si os
n'est une mer de sang P.... (443).
Une agitation sourde fermente au aein du corps
social en Europe. Le pillage est au fonds de la po*
litique des partis. La plupart se contenteraient du
trésor public ; il en est qui voudraient y joindre les
propriétés privées. Les moyens d'action sont ks
supplices et les émeutes. Faut-il s'en étonner, quand
tout s'est matérialisé dans les gouvememens. L'or
et le glaive, la corruption et l'échaCsud sont encore
tout le secret de leur politique , et ils osent même le
dire tout haut ! De tous les partis qui se disputent
en France , la scène politique, y en aurait-il un qui
consentirait à inscrire sur sa bannière le précepte
de l'ancienne et la nouvelle loi: Tune tueras poùu?
Qu'il s'avance , l'avenir est à lui.
■^ CllAI-ITIlE XL.— 457
n exnle au Ictnps actuel une école cIl- pnbliuistes
qui réclament aveu îtislaiice la proi'lamulion im-
médiate du grand principe de l'inviolabilité de la
vie bumaine. A leur télé est te vertueux Trney, dont
les principes en ce point, <^'omme en tous les autres,
ne se sont jamais démentis. Dans ks rangs de ces
apàlres de Thumanité on distingue les Paslortl ,
les Chateaubriand, les Lamartine et les La Mennaia.
Les écrits de M. Paslorel eonlre In peine de mort
sont connus ; on a pu juger des senlimena de
l'auleur des Etudes historir/uct pur le passage
rapporté ci-dessus. « Notre ii-gislalion criminelle
est toute enlit-^re Ji refaire , a dit Lamartine , la
peinedemort surtout à effacer. Ayons le courage de
tenter cette suppression du sang dans nos lois.
Une législation sanglante ensanglante les mœurs;
une législation de douceur, de ihiirité, d'indul-
gence, de repentir, d'épuration et non de vea-
geance et de mort , les tempère et les adoucit. »
L'auteur du J'oyageen Oiietil disait encore tout
récemment : « L'heure serait venue d'allumer le
phare de la raison et de la mornlc sur nus tempêtes
])oIiti(]ucs, de formuler le nouveau symbole social
que le monde commence à pressentir et à com-
prendre, le symbole d'amour et de charité entre
les hommes, lflpoliti(]UC évangéliquc (444). »
11 est un penseur profond , au coup d'œil d'uigle.
496 — ttlSTOIRB DBS IKrBI.S. —
k la pensée hardie, à la voix mâle et austère, qui
a sondé cette plaie la plus funeste de noire gèn^
ration, le hideux iniUuidaalisme. Voici le conseil
qui s^échappait naguères de ceUe plume de feu.
ce Si qiielqu^un meurt , ne dites pas comme ce
mouton qui voit le loup enlever son frère : Qu'estr
ce que cela me fait à moi , j^en aurai plus d'Iierbe.
Ceux qui parlent ainsi , seront la proie de la bête
qui vit de chair et de sang. » Paroles tTun croyanU
II est dans une autre école des génies également
supérieurs qu^on regrette de ne pas voir partager de
telles convictions. Que dire d^entendre des pliiloso-
plies de la trempe des de Maistre et des de Bonald,
ces ardens zélateurs du calhoUcisme , professer des
principes diamétralement opposés. Le cœur se serre
quand on entend Tun appeler le bourreau , la clef
de lyoÛLe de Vèdlfice social^ et l'on a peine à com-
prendre Tautre quand il ne voit dans la peine de
mort appliquée au sacrilège que Vaclion de remoj er
le criminel à son juge naturel. Qui vous en a
chargé ?. . . Qui vous a constitué le pourvoyeur de
l'éternelle juslicc ? De quel droit venez-vous placer
votre échafaud enlre le repentir de Tliomme et
la vengeance du Ciel ? Je concevrais votre langage
dans la bouche d'un matérialiste ou d'un athée pour
qui la mort n'est que le néant ou le sommeil éternel.
Mais vous , qui crpyess aux peines et aux récom-
— '—-CHAPITRE lA.— "iSO
penses Ae Pautre vie , quelle incouséqiienue est In
T^lre ! Non ce ii'esl pas Dieu qui condamne ce
criminel que vous lui renvoyez; c'est vous, <]ui
tvex prononce son arrêt, el Ditn uVn esl plus que
l'enéculeur.
A)i ! ne faites pas intervenir la divinité dans vus
jeux cruels, dans vos tortures «t vos supplices, ou
si vous invoquez soa saint nom, que oesoîl pour
proclamer ses préceptes divins qui dérendi?nt à
l'homme de disposer de sa vie et de celle de son
semblable , qui commandent la cliarilé et pros-
crivent la vengeance. Ccssex de blasphémer Dieu
et de le travestir, en lui prùtanl vus tristes passions
el vos préjugés aveugles, en l'appelant Dieu des
■nnées, Dieu vengeur ou exlerminaleur.... II y a
bien de la vérité dans ce mot d'une Femme célèbre :
u Si Dieu a fait l'homme a son image , l'homme le
lui rend bien. »
J'ai dit quels sont les vœux de l'opinion pour la
suppression graduelle de la peine de mort. Us ont
toute l'autorité de la raison , toute la force que peut
donner l'énergie de l'expression , toute l'impor-
tance qu'Us peuvent emprunter de l'illustratioii des
hommes qui se sont chargés de les formuler. 11 me
reste encore a parler de nos espérances. Ces vtrui
seront-ils entendus.* Et alors pouvons-nous espérer
de voir le légialuteur attaquer séricuseuienl, logique-
400 — HISTOIRE DES DUBLS. ^
ment et efficacement cette lèpre invétérée du diiei,
qui depuis tant de aiéclet ronge le corps social ?
II semblerait que TaffirmatiTe ne peut être douteuse^
quand on aperçoit à la tête des aCEaires des hommes
qui se sont signalés par des écrits célèbres contre la
peine de mort et qui peut-être leur doivent leur
renommée et leur fortune. Mais les principes au*
jourdMmi changent avec les positions. La logique
de Fattaque est tout autre que celle de la résis-
tance , et ce qui était bon pour s^emparer du pou-
voir, ne Test pas pour le conserver. On croit
très-politique de maintenir la peine de mort en
politique, sinon en réalité du moins comme une
menace. Immédiatement après la révolution de
1830, une proposition fut faite à cet égard à la
Chambre des députés. Elle fut accueillie et prise en
considération avec un enthousiasme général ; mais
quelqu^un s^étant avisé d'observer que la première
application devait sVn faire aux ministres signa-
taires des ordonnances , il ne fut plus question de
la proposition. Ceci rappelle ce vole d'un conven-
tionnel qui , après avoir prononcé la peine de mort
contre Louis XVI, en demandait la suppression
pour l'avenir . 11 est un homme qui avait fait la
même demande à TAssemblée Constituante , cet
homme c'est Robespierre (445) .
Naguères encore , un débat aotennel s^ost engagé
— CIUMTRB TCL. — 461
i la Chambre des députés aur ce grave siijcl, à
propos (le la pénalité (Ihiis la loi sur la TcsponsaLilîlé
ministérielle. On demiin<]a la siipprrsxion do Taniole
qui infligeait la peine capitale nn ministre privari-
caletir. La plupart des oratt-iira appuyèrent cette
proposition par d'ùloqiiens disioors. Les niinislrcf
trouvèrent que la peine de mort était une fort
bonne chose appliquée même •■ de? ministres, cl
comme d'ordinaire la majoritù fui de leur ayis. La
proposition avait été repoussée en 1830, comme
inoppoitune ; elle l'a é\è eu 1835 , comme ptë-
maluive (446).
Tnutefois que les amjs de l'humanité , du progrès
social et de la gloire nationale ne perdent pas cou-
rage. Un grand pas, un pas immense a été fait
depuis cinq ans. Le bon sens populaire a renversé
l'èchafaud politique ; peu importe que la sanctiou
législative ne soit pas encore intervenue. Il serait
bien hardi celui qui songerait h le reconstruire.
Non , en dépit des sinistres prédictions d'un
poète politique , nous ne reverrons plus le triatigie
d'acier décimer les citoyens et déshonorer nos
places publiques dont il est pour jamais exilé. NoHi
cette hideuse machine, digne création des philan-
thropes du 18." siècle (417) n'y étalera plus se-i
deux grands bras maigres cl rnugcs, h la lionlc de la
I
4lBS — msToms des dubu. — ^
civilisation du 19«. Il faudrait un aulre courage qu«
celui d^un transfuge , pour accomplir cet exécrable
Tœu ou réaliser cette impuissante menace. Peuple
généreux , dont le bras terrible a bien au dans un
instant de colère renverser un trône , tu ne le 80uf«
frirais pas !
Te
Purpurei metuunt tyranni ,
Jujurioso ne pede ptoruâs
S tantom columnam
HoRÀT. ) Ub^ Jj od. 19.
Nul pouvoir en France n'a résisté à cette fatale
épreuve de la justice politique. Elle n^a sauvé ni
Ténergique Convention , ni le trône Impérial , ni la
Restauration à qui de si belles destinées étaient
promises , et qui pour avoir accepté ses dangereux
services , n'a pas su les accomplir.
Peut-être dans plus d'un conseil secret de la
haute politique , a-t-on rêvé depuis lors de placer
de nouveau l'intérêt du moment sous la protection
des supplices ; mais il est une yoix , celle de Tin-
fortuné Charles I.«' qui vient glacer plus d'un cou-
rage. Planez garde à la hache!.... Que ce cri
formidable soit la leçon de Tavenir , puisqu'il ne
l'a pas été du passé !
O vous dont j'ai dit les vœux et les nobles espé-
rances , vous dont je me fais gloire de partager les
— CTAPITBI! TL. — 463
généreuses syinpolhics , vous tous, flmis el com-
pngnona «l'^gCi qui appaiicnei h ce 10.» siècle,
qui doit voir tact de prodiges el réniiaer tiiiil d^cfipé-
rnnces, c'est à vous qu'il apparlicul d'nchevcr celte
rt'g^niTotion sociale déjà si lieureusemeni cmb-
iticnrfe !
No»s qui n'avons rien de commun avec les
sanglantes folies de l'autre siècle, ni comme victimefl,
ni comme complices , c'est l\ nous de commencer
une ère nouvelle. « Nous montons sur la scène du
monde , a dit l'un des noires , k imc époque pleine
d'avenir , cl bientôt nous l'occuperons seuls. Nous
aurons <i Gxer pour de lon;^s siècles le sort de la
civilisation. Calmes, rcli^cux et forts, préparons-
nous dignement h cette grande mission (448). n
Dégage on s- nous surtout de cet i'goïsme «ec el
Froid qui nous isole dans la vie , el nous en fait
perdre tout le cliarmc. Aimons nos frères , pra-
tiquons la cliarilé , ne séparons jamais leurs in-
téréts desnàlres. Soyons unis, el nous serons forts.
Souvenons-nous que « l'esprit publie fut tou-
jours chc2 un peviplc en proportion égale avec Ie«
mooiirs privées, » Waltëb Scott, fie df. Napolêoii.
Souvenons-nous que " le progrc§ avant de ec
manifester dons le monde social , doit auparavant
fl'acciimpUr dans le monde des inlclligences. »
Lamcnkus , Nouveaux méltuigrs.
Ne perdons pat de Tue enfin que la guerre,
comme me récriyaîl naguère! .tm aèlé phOanthrope,
le comte de Sellon de Genève ^ que la guerre ,
dis-je , le bourreaix el la 'duel ae liennent par la
main , que les cbampa de balaillea , lea diampi
clos et réchafaud , c^est tout un.
Chea let barbares qui furent noa pères et qui
nous ont légué le Duel atec la guerre et les sup-
plices , rhonneur ne consistait que dana Je dédain
d^une vie purement i^ysique. Ghes bous^Hunh
neur doit consister à saTCnr ftâre un bon vmfgt
de Pexistence dont nous connmsiOM nûeux la
prix parce que nous Temployona mieux. Noua
nous sommes à jamais dégagea de cea langes du
matérialisme , de cette grossière isnTeloppe de Pea-
lance des sociétés. L'Age du spiritualiame a^ouirs
devant nous ; nous entrons dana la ^inîe des vé-
ritables destinées de l^omme » et , comme nés
devanciers , nous ne cherchons plus k fiûre une
ridicule parade d^indiJOTérence pour le bîeniaitde
la vie , pour ce premier don du wi ^ d'où dé-
rivent les premiers des liens naturels^ la paternité
et la filiation , ainsi que le plus précieux des avan-
tages sociaux, la qualité de ciloy^u
FIN DES CnAPITBES,
NOTES
ET ÉCLAUCISSËMËNS HISTOBIQUES.
(1) Je donne celte défïnitian du Duel comne !■ nianns;
Voici celle île Ducange , d'aprti Jean de Linlano : Pugna
torporaSis deiiLerata hiric irtdè dtloruntf tui iHirgalïonâM j fff(H
riant Vtl oïlii aggrtgaliimem. DuCiBOB, Clou. ,v,* DutU.
Voici maioicnant celle de Bonicina : Puipia lingalarù de-
liierata ab ulrdgue pailM , i/ionre et ex çondiclo iiucepla cum
fjtricala occiiioiùi , l'et mutilaliaHÙ aut i-ubirrii. Cette dctiùéia
définition eit pTéfcnUte 4 l'autre. Bon 1.CIBI , lom. I,foL 597,
Duel rient de ducUion, mot de la l>aue loliniié. Plante s'en
•ert pour beUum ei monomaclUa , Amfbith. , ocl. II, tcen. I.
fojea Vowos, aper. magn. oraL , tib. IF. TaoLoaA», ,
Sr«tagm.jurU. unù'., la.XLtllI, Cap. Xyi. Fb»o». , Part. /,
lib. I, dUp. a. FUTD-i , de veii. ligmf.
Fuit tiùm prior^Ha illù steadit duellum iiveniuM , ut veritai
fuce e»c< duhia , fieret manifttta , tu ùiaoccnlia cuiiptt lula
farel ,- M improiiu caltiniiualor, p<mai tuent une teiHtrùaUi.
Vait, de duellû. Cap. I , pag, a. Ubrajccli lâSS. Bocaaoi ^
(fa duea. , Cap. 1.
(^) l'ayez lome II, pag. a^i > et Plotakch. , in WoMtUi).
(3) /( iram Phrinone Aûumeaiium date cerialunàt, eui in
catùdt piscii imaguitcida eral , nU in âtadium dcUdU , «t «ctl-
tnoiu le pitcan pcure , euBi reli iiivoluil , nci/uo n tilricare nu-
tUnteia coa/ècii. Alciat d'aprài Thocididb, de lingid, cei>-
buw. Cap. XXXIX.
(4) Le combat dei Trente eut lieu an i35a; il Ml f,ta6-
toiement counu , *e uauiaut d^ccil ilaut pieii(ue lout lei bii-
30
ton«n8| notamment dans MmtmmAM^Mr^ cknm., tom. m,
fiag. 903 f éUit. 1719. kwqvKTtv^ ton. m f pag. 166. Gdn^
en a donné les détails les plat éteadsa et les pims exacts est
ViLTy Hisi. de France, Xiqm. IX, peg. 11 ec avÎT», d'aptes
DAEOBvmiy ^tft. tU BrtL
Richard Bembro , capitaine anglais , mminiidant de k
garnison de Ploërmel > br&lant da désir de Teiiger la mort de
TThomas Dagarne , son compagnon d^antea, tué derant Aarsj,
portait la terrenr et le rarage dans tons les eorironSy masia-
ciant indistinctement les marchands ^ les nrtîaans et les
laboomirs. Le sirs de Beanmanoir, gentilhomase breton,
demanda nne conférence à Bembro aTec on sovf conduit , et
l'ayant ebtenne, il Ini reprocha de frire moÊivmùe guerre en
•ttaqnent des gens incapables de se défendre. Le fier An^ais
ne crat intnfté rt répondit à Beanmanoir qn^ ne Ini appai-
tenait pas Ini et les sfena de ae pamngtmer (comparer) aai
Anglais» Beanmanmr répliqna par un défi 4}m litt eccepté par
BembMK Le Ken d« rendex-Tons f^t tndiqné piéa d'en chêae
#ntre Plofinnel et Jœseiin. Il iPy tronva trente oombattans des
deux oftiéa. Lee historiens en donnent la liste arec qaelqacf
^NMriantea sar denz nomSi et sans tomber d*accord sar le poist
de ssToir si le combat eat Hem à pied on à cheTSl. Toate la
«obleaae de la contrée y asslaia a^cc des sattf-condnits.
Atant de donner le s^àl , Bembro eat m acrvpale; il firt
ttOBTer Beanmanoir et Ini £t qn*il croyait ce combat ùrigdtet
«l'ayant pas obtenu le con^ des princes , et proposa de re-
mettre la partie à nne antre fois. Mais le Breton répondît qa^
JM s*en retonmerait point aanr mener tes mains, ef sçmw fd
mndr im pins hetk tome. Les compagnons de Beanmanmr lareat
de l*aTis de lear commandant. Bembro inaistant anr ce qae»
aana le congé des Princes, la qnerelle de cenx-ci ne seisit
pas terminée, celnl-ci répliqna qa'H ne ^agUsaU pas de k
^fuereOe des princes, mais de l'honneur de la Bretagne,
Là desaas le combat comment et fiât des plus acharnés.
— 3 —
PrMijae rnni In Angluîi retitrenl nue le iliamp île bitiîlle;
crux qui te^piraient encore forent esiommé» on égorgé* p«r
le TaiHqncnr. Bcnibro fut tué de la main d'Alain de Knë-
renrecb au momoni où ii l'élan^aii lur BeaumaDOir. Cefui-ci
ayant reju une bleitnrc qui lui tuuil perdre beaucoup d*
aang , demanda k boire, Btauuuinoir, boii ton lang , lui cria
l'un dti iieni, <i la loi/ se paisera. Velï attribue ce propoaà
Geoffroi Duboli ; d'autrca biilorieni le mènent ilani la bouche
dn si(e de Tenienûu:.
Mer^iai rapporte en note qne Bertrand Dn Gnetclin emt
pitti lard lin duel arec le même Benibro qn'il lua. Vely relèTe
celle erreuf et liûi obiciter que l'adveriaire de Da Gueidin
fut Guillaunte Bembio, parent île Richard, qui fut réellement
taéau eoia\ut AeaTreme.DAtataTui, Hùt. de Bivt.^SAr.VUt,
Clup. XXXIV. FaoïssiKD, fie Je Du Gueidin. M. S.
Quant au combat ietSijX , aucun de) a nieuri précédemment
citéi ne le lappoile. Héhavi-t le mentionne eu ion Abrégé
chivn., à la date de ti^i- Il eut Hgu 1« 6 mai de cette année,
devant le cbllean de Montendre en Xainionge Le roi Charlei
Vil avait cboîii Arnauld Guilbem de Barbazen ponr £tre chef
des tix autrei cbevalien franjaii et conibatlre autant de che-
Taliert angldîa dont le cbcf était milord Scalei ou de l'Escale.
On le battit ï U l'ie dei deux armée* de France et d'Angle*
terre, et en préience de Jean de Harpedène, aénéchal da
Xainionge ; et dn comte de Ruiland , commiiuirei délégué!^
l'un par le nn de France , l'autre par le roi d'Angleterre.
Charles VII récompenïa celte victoire et lea autres exploits
de Barbaidn contre lei Anglaii par des honneurs dignei d«
loas les deux. Tar lettre* patentes du 10 mai i^ïa, il fut
■utori]^ â se qualîEer chci-alitr ioia reproche, à porter trois
Beu's de lys lam barre dana »es armeii et voulant, porte le
charte , 911 'ii toïl enscvely en VfgUte de Smnct-Denyï, en nowpe
cluiiielle et à aottre c6lé, etc. Celte cliartc est rjpporttfe toute
eolière par Moaxai , v.* Barbtami.
— 4 —
. (5) / oyei TfTK-Li¥» et PLWàmQVi.
(6) Voyez lom. II*, pag. 167.
(7) Voyez LjlBrbt, Hht. éTAn^., tom. TI, p«g. 67?.
(8) ' Voyez Datsigity, HigL ww. de t Europe ^ t. Il , p. 171:
(9) Voyez Ift note S76.
- (10) Ge cartel fat envoyé ptr François I.«r à CharleM^Mit
qui l'eyent âiit pritoiinler, s'était conduit à son égard moins ea
roi qu'en corsaire , et lui ayait fint reprocher par son ambts-
aadenr d*avoir Tiolë sa parole dans Texécutlon des condttîoei
alipiilëes ponr sa rançon; ce qui n*était que trop Trai. ¥m»
1^8 !.•', pour recourrer sa liberté , arait tout promis, et
«quand il se tit libre, il n'exécuta rien. T! 8*excusa sur la
Yiolence morale, et le roi chcTalier crut avoir mis son honnear
à couvert par un défi. Un chevalier romain n'aurait pas ima-
giné cet expédient au temps de Régulns.
Voici la formule du cartel 1 ce Nous François par la grâce de
Dieu, etc. à vous Charles par la mesme grâce roy des Espagnes,
TOUS faisons entendre que si vous voulec charger que iamais
ayons faîct chose qu'un gentilhomme aimant aon honnear ae
doive faire, nous disons que vous avez menti par la gorge et
qu'autant de fois vous le direz, vous mentirez : estant detli-
béré de deffendre nostre honneur jusqu'au bout de nostre vie»
protestant que si après cette déclaration , en aultres lieax,
vous écrivez ou dites paroles qui soient contre notre honnear,
la honte du délai du combat en sera vostre ^ veu que veaant
au dict combat , c'est la fin de toutes les escritnros. t»
Du reste , cette afifaire se passa en paroles. Malgré maints
messages , on ne put de part ni d'autre , tomber d'accord sar
les formes et les conditions du combat.
Tous les historiens ont parlé de ce cartel. V, D'AvDionm,'
Jnc. Usag. des Duels, et Vsly, Uist, de Fr. , tom. XXI V,
pag. 225, 334 et suir. , et VoLTaïas, Essai sur les Ateeurs.
(11) Voyez He VÀULT, j4br. chron,, pag, 5o4, édù. lySa, iii-ia.
(12) Voyez Chap. XXIV, pag. 355.
{131 Consuevemnt çuoqui lumpio cièo ad vêtianm^prviit
eatuâ intiiUc, covcrialionem lurf^iites, ax pi'omeau'oiit ecrtart in-
vica», mUd hatiul viia cura. Dion. Sicul , Rcr. aiui^. , lib. Vt.
MarlÙ tludio et auiaua-um, anicm imiielu. En imfKer h ^piii
tôt iiTÎekl, adunati ivgaai pariter inriint, Aperli i/uidcui niliil-
fua firameJUali. Undi contri te militare voiciuiùM uuuuuelî
at/niii UactaLiUi fitml. Stixio, de iiiu Orbit , lib. ly.
Sic igiOtr Gain vêtent Cnecit iilii npmhendimtur ai^n in
tjutdem adiia tocictmem Geruuini Jrairrs à Taeilo vocmntiir
fmni/ue el ebrietatit tl coaUiitioiiii nomine acvuiantur. R&Mm, de
munibus vêler. GaU.
Foya anisi Athihée, DipHoioph. , là. f, et M qaia été
dit dca eipédïtioiii f>aut(naei en Grèce , tara. II , pug. 3o*,
(14) l'<yat,leiChap.XletXin, et fMuim,
(lli) Les tcitei cités en la note li ont Éait croire k (luel-
(|uei écrivains, Dolamment i M. de Morinconrl, aulciir d'une
Hittoiie de la Guide, récemment publiée ta trois voliimei
in-S.°, (|u« le Duel existait chei les (iiuloia urant l'invasion
des GermaiRs; mais ces lûet tanglantei n'èuicuc pai de
vériubles dueU.
C'était plutilt chei l'ennemi que anr le territoire qae lea
Gaulois M liirsicnl enu'eux à ces ■clr« de violence*. L'an de
Rome ^3 , une nombreuse umée de Gaulois deiant laquelle
siaient [ui les Ronitins, s'exteTniitii toute entiése en faca de
l'ennemi ûIj Builc d'une de cei rtxei do lable.TiTE-LiT», {iit.X.
(Ifî) l^n;'»lIoiiàaE, (V)'ii«,ct IcCUap. XXXVII.
(17) La ylupari de* philesoplios ont bit l'éloge dn saiciila.
An temps de Taciio , c'était on moTen d'éviter la con&acation,
prtliaiH Jestinandi.
(15) foyez TnuCTDtne, et le Cliiip. XXXVU.
Sonate répondait à quelqu'un ijui l'engageait à poiter
plaints en )ustice pour un coup igu'il aiait re^u de lu tusib
d'un brutal ; Si un ane wi «ijir/i.i/vc du iiied , me Jènei-voiit
filaidtr contre bu ?
— « —
(19) Cette )olie ode est U sa.* dn Ut. I.
(20) Vorez CoMiLA» db Bftf. i^M.^ Hh., V, C^. XUF.
(U) Ce combet est rapporté aa Ckap. XXXIf pi^. 65.
(22) yoyn BAsviLOB » DâMerr, «mt Im Affb ^ CSuip. L«
(23) Dûù 9iie C0M 0d AhdjTÊÊnm mmm f EgrtdmmÊt
Jhràt. Cûmfm€êâetam0igro€(mmarr$xàC0fn
nuim Abd0iin»0ifpcU cm». Gbvm.| G^, /#% v« 8.
(24) Cùm qmcirctÊmtpejnnm kàf Mtfm tfftt eC
•^ is.
(25) Keres JvwTs , Cbep. VU et XVI» tt VOimmt ém
Juifs, de JocBW*
(26) Fcyt% lelAredbt Jloèi, lir. I, Cka^ XVH.
(27) Le TJeil gnteUe ea préeeatat poiar owfcigtte lkrè%
Itti Jette sott cette o« gaatelet de Sui mm ecm»>ce pet là
Torigiae dm )et da gant daaa ati diaala WÊudmKmm \
Voîd iMi trait qai t^iaoigaa do Vtnàmm&m^tz da tm
•omiNitt chea loe Graca. AMmùàam teMa« «ikléia maà
ianané toaa aaa adveiaairea aajt îant olyaipi^^ea» lie darner
^mi lai restait i( Taincie arait élé mit lic»a de oaoïhat ci
a^était atome Tabicm \ mait «arptemaat AjimicUtfMa ^ tiail
ceaté de le pretter, il le prit à la gorge e% rétrmngkaiflc
•et onglet^ ht prix de la Tictoîre lut méamimoÛMi adjagé à
Arrachiom , <|ai fat déclaré Ttimatur aprèa aa n«ort.
(28) Kqres Chap. XXXII, pag. i^xk
(29) Dana lea premiers tiéclet de Rome « om iaimolait dti
captift tmr lea tombeaux^ Gkea lea Trojaaa, les kwamu
a^oaTraîemt lot Teiaea poar anotas do loar asa^ lat Mchtfi
de leart maris. La chote ae paate oacore plaa aécieiacaieal
chea let Toafoa da Malahar^
I/emperear Commode prit part ea poiaoMic aaa comhitt
de gladiateart. Fqym Bérodim, Ltr^ I et kt ujarfan é
^mJûuHcêâ, an tomel, pag. 45i,
(30) Ces témoignagea acait rapporiéa «sa Cba^ ttyip
at XXXIV leifwm.
kl Gauki, Lit. I, |i3g. 9, in-4.*.
(32) yoya. G.Boo». Tu.os. ;«i«™, la noie 36 et 1»
Ctup. X.pig. 6ij.
(33) Koj ei Cbap. XI el XIII , peg. Si « î^î.
(31) rc.;es les [ciieiûlëiHnCbap. XXXIV et lUxaMU
379 et 33o.
(35) l'iy-M TiciT. Germonûit, Cap. P/.
(36) CloTJt n'av«il lucune teinture Je 1 tciUMiitdA IVeiir
•ure. Cbarle[nB(;iie inime ne invait pai signer «on noin, fayea
cepeniUnt lur ce point ce qu'a dit Ciutbi(i«iiiabu, EiuiL
Via., tom. m.
(37) t'ojex. Il noto cî'deNUS et te Cliap. XI, pag. St.
(3S) f'o)ez MoiTTinjviEii t Esprit Jet Loii, LtT. XXVIH,
Chip. VU.
(39) foja Chap. X , pag. 73.
(40) l'of-ci MosTtiKjuiBV , fipnï f/ci £011, Lir. XXVIO,
•t RoisaTiOB t //iM. £/c Charla-Quiiilf tom. 1.
(41) La loi GomhUe ne fut qu'une oidoiinnnce de réfor-
vation. Le* loii laliqucs, lipuaitas el autre! lois biibaras
tlisLiient long-lcmpt aup«iiis«nCi maift on cioil iiu'rllea nO
firent rédigùei que tom Cloiii. t-'ojei Leg. Lansub. , lit.
tl', ait. =3.
(42) f^or e: t'ordonnanctt de Philipp^-ls-Bel tut 1m cAtt-
vonics du iluel apuii Duca.>oa, G^ij. v.' DutUuin, et Bur
xici, Ditsert. tur Ut Diieli, pag. ijOfliaiie I74p>
(43) f'ojrn la note a?.
(44) ro^M Tom. I , pag. t6i , «l Ton. II , !>■£. l64^
(45) fo,«Unole4î.
(46) Toutes cet liirmaliciïa étaient le« mêmes d«nt tonta
l'Entope et a'obser>aieut à. in letlie avec one pottclualit»
Minirqiuble. t'oya, le» Cbap. XXXt et XXXII.
(47) yoyei Bituuisaii., CuitCume de ËvuifoiiU et lei
Auuts dt JiiHtalcin.
— 8-—
(48) On peut TOtr \m direnef formnlet de oeê ûémmti»
clans Bba VMiLVOiB. Voici celle des Assises de Jértttalem .* « Le
gnarant que l'on lie? e » si corne es parfur doit respoadre à qo|
ly lieve : n Tu menu ,€lje suis prêt de défendre mom cors co»-
tre le tien, elle rendi'oi mori ou recréant en une ourc dou /oêt ,
et vessi mon gaige. » Lors s*a|>enoaTlle l'apeleoir , et loi tead
■on gaîge. i» Chap. LXXIX et LXXXVIL
(49) Foyez tome I » pag. 45.
(50) yojre* BBA.UIUSOIB. | snr la Couiume de JBem0oint,
Chap. LXI| pag. 3i5.
(51) Le sort du Tsinca était le même pertoat cà le combat
)«diciaire était pratiqué. On ne différait qae aor le genre de
•npplice I la décollation on la pendaison. Dana quelques Uenz
comme à Cambrai , on traînait snr la claie, f^ajrez note 55.
En continuant cet usage i Saint-Louis, dont TaBtipatkie
contre les duels se réréle dans tons ses édita , uurait-il foala
dégoiiter les duellistes par la crainte du supplice? Un maré-
chal de France tenta la même chose en Piémont. (Foyx* noie
4ii). Mais c*est là un faux calcul *, dans Tordre moral comae
dana Tordre politique, le bien ne fient jamaia de l'excès
du mal.
(52) Quelle que soit l'opinion qu'on puisse aroir aujonrd'hai
sur l'authenticité de l'histoire du Chien de Montargis, elle
n'en a pas moins été tenue pour yraie par lea plua grarei
historiens. Elle est et elle restera long-temps encore une dei
légendes les plus populaires de notre pays. Les circonstances
de cette affaire sont trop connues pour qu'il soit utile de les
rappeler ici. Tous les chroniqueurs qui ou ont parlé , s'accor-
dent à dire que le roi Charles V présida le combat qui se pasu
dans l'ile Notre-Dame à Paris, l'an 1371. Le cheyalier Macaire
yaincu par le chien d'Aubry de Montdidier, fut enroyé sa
gibet. D. MovTrAVCOH dans ses Motuanens de la Monardu
franc, y tom. III, pag. 69, en a donné une grarure d'après
un tableau conserré an château de Montargis. Il a puisé sou
r^titiInnad'Acuiavtiii.^oc:. I/mii;. dci Ihicli , Ctiap. XXIII,
lequel a été reproJuii a loa tour |mi 1..v CouoHiihHE , TAftK.
ilhon., tom.II.Cbip. XXtIl, |.rig. Soo. Lci ccii*ùii> origl-
oiux «onl Olivier de U Udiilio ei Julei Source
(iiS) Ce técit te uouïc auai liam Li CoLowdàm»,
Thrdt. d'hon. L'eciÎTiin oiiginil ed Jeun de Bouidigae ,
auteur de VlJiiloirt tic Poitou, dont le texte lalin se troui*
■D recueillie O. Bouquet, Scripbir. rtr. /raitcic, lom. IX ^
pag. aC el 37. Dan« l'Jri de viiifter Ut dMist, Ingelgeiiu e«
appelé Geofiroi,
(54) Voytzc6%<^u\e\tiViReattildtt Orâann,
(âa) Ce fut l'an 1076 que l'établit U commune de Cimbrd.'
« Il existe, dit M. Lsolat, dam la Lcwc uir la Dad»
judiciairti du nord de ta Fr. , dont il m'a tait l'iionneuc ila
n'olTriT la dédicace , une ordonnance ré^^teinentaïre fort cu-
rieuse qui n'a jaumia été imprimée. Elle est «an* date et ae
trouTe écrite 'a U tuite de la loi Godefroï avec r.e titre : OeM li
ordvnnance et ii usaîgei det ^liaut de balaidc , campel cl det
caiiifiiunt Je le cite de Cambray. Elle contient 36 art. doul
l'un prescrit en cm tcrmei de (raln«r le raincu lur la claie ;
El ijna/ui U baluiUe eiljaile, li prouvas doà a\'oir afipanllitt
etporveat aucoittt mon ligueur, kevid, goheiiaui el traii ioii/Ji-
aanttuent pour celuyj'aire traùner là vaincus est.
{66) On trouve un tuez grand nombre il« cet choftea
mentionnées dans une foula d'biitoirei et de cluoniqiiet.
Le Recueil des Ordonaaacct en contient une fort curieuae
de Philippe ■Auguste , donnée ponr le Languedoc.
(57) Je luis tombé ici dam une orreur qui m'en com-
mune avec M. TaiEaai, dans m !•;.' Lciirc tur VHiil.de Fr.,
où il fait de BjlJcric un évéque, quoiqu'il ne lui a|iparllenn«
en réalité que le litre modeste de ainiple cluntre. M. Leoi^t
leléie avec sa ugacité ordinaire celte erreur dans la prébce
de son édition de Bii.i>ekic» Cambrai i3j4 i d'jprci le*
BoUaadiMçi et D. Bit£I.
. (88) Voftik RiLOVBiv» GImsmô«v.« CT<iyiVn>,
(60} r^r<«D. I.«ll'AiaantT,4MMbf.,tMi^Vin,etla
Vie d9^ Cnlhtif fMtf M. de Fèrtia^
IdÊL leMre d*Y?M d0 QwrWt tt trowe an. Meatil de Dti
CBBMI9 , ^iMk Frmne.,9 wrifi.., tooi. IV, peg. fl4s.
Oa y 9eaianyi,e ce peiMge qel pvoiive combien U.doclite
eoBiae UdiKipUee eoclMMtiqae wraieiU tpajoart été oppor
âéet «oie dAelei màlgté Ket <c«Kti imdjlfidmile de qnelqicft
ipembree da de^ y
iddi jiur^knU ùOerfifenMf. rsbdtrtÊm nobU quod «ocIm
fWJtm dtÊm. ptrugemUth mfmomfÊckim etnutifupriu Qaod m*
^mnUê valdè nUraii mmttê, dm. mowmmchhi vix œa mm/jumik.
^inc êqnguùUê ^ushm trqmigi Ww^. JmdipHim. vtrà. umgàék
mr%fmnda Pçtrum, ëutodU» ojcneot. ^igàqre prakSbeq/L M
latkani conirà Theoèergam rtgùum :n.M<(momaiAuim,m kgm,
m>n asuÊmùmu quam mnêoce$wtX$. mfttros. mjnimè «coqpw»
«fgnoscimus». n,
(60) «Mentleeseiilaiiicle.etftàBOaottlliE faLpIedtit^u^
kabuimm i» a»iio pn»terito » et dîctpuo est ibi , ju ptlM
ipparet, qiu>d am ille-qoi crimea in^erit, an» lile qpii ae tiIi
de£en4ere , i^vare ae debeaii meli^.Tiaimi est «t in caflif(k
cem (ÎLStibtu parier coAtendanfc, qp&m perindaia jic^tieal
Ifi abscostfo. Leg. Ltmgo^,,, bb. //, dt^ LF ^ f . aS..
(61) a Arma qobqne non ierret ;: dîrepte non xepetiereti
ani sanguinic tsI cnjiuUbe» ]»roxîini «ûniv^ nitor ezîsteaa
percnssoribua cogeretiuc iadnJgere. •...••Qaod qal noUel
ehristianîtate priTaretnr et exeuntem. de aiecnio nnllus ▼»-
taret neç tepuIlaraB traderet. u. Tela sont les termes de la
Trh^ de Dieu, ordonnance eccléatastiqiie rendse soas le
règne de Henri L*', et qoî devint loi da^ xoysome. Fcjcz
lom. I, pag. 68.
(62) Ceue ordonnance fiU csndiuB pour la réfocmation de
la coiAtume d*Orléan«»
— !1 —
(C3) ATant celM wdotiiuDcc , en lajS, Saini-Losii aiaii
permis un duel )iou[ !■ juitification de Hugues de LsaJgnnn,
comio de U Uu-clie, acciuédevant lui de Uatiiion. Malliiuu
Paris qui cite ce fait ajoute que le combat n'eut ]ia* lieu.
En laSf , Saint-Louii accorila bue tiabiiana de Suini-OmM
«ne cbtrle qui le« dùpensoit do ■« hattre en duel lion d«
leur TiJle. SiyU du Parlanent, pavt. I| CItAp. XVI.
(64) £d 1393, luifani la Chromqut de yaiigû , ua dael
C^Utiio aiait eu lieu ■ Giwri le jour do la Pentecàie en pifr-
MDce du lUi. Le dûbat s'était Élevé entre loi comte* de Foix et
d'Aimagnw pour !■ autceuion de Bàam. Toui deux entrérenl
CD Jice et conbatlireni à clioal j maia le rolj à la prière du
comte d'Artois , St ceuer le couibAi.
(60) Ce fut, laloD Bashaob, Diuert. tùst., à cause il*
l'oppoxilion de la noblcsac du. royaume, cooime il arriva
■ous dtarlemofine , ton* OtUon et aoua Saint-Louis qu*
Fbilipi>e-Ie-Bel fut forc4 de revenir sur son ordonnance d«
i3o3. Il chetcba à râgnkriier un liéaonlre qu'il ne poitvaîl
sni^antir.
(66) c'est JuiïMc uaa Uast» qi^, dans aon histoïM
de Cborlei VI , témoigne en ces letmet de l'innocence da
JjCpris : n Depuia ou sceut véritable ment i^u'il n'aïaît oiio
^ues commis le cas et qu'un autre l'avait Faict, lequel uio«a
rut de la maladie en aon lict ei en l'article de 1* mott, U
confessa devant gens que ce avjJi-il l'uû. u
(67) a&ia,rMiiiait.v,Eip>iid<ii Lou,lÀi. XXVUI.ClMp,
XVUI.
(68j ftgra BiAVT&x( , a'Aifi>iCGt£a et I» pUpatt dea
kislorieoa,
(69) yoftt BiJtBTd», Duc. tur le* DueU , pag. 66.
(70) Braiiiôme dit que Henri II refusa le camp toiu ù i-lta,
Lef circonstances de ce du,el aont assci curieujet. Il eut
lieu le aS aoAt 1549 , en grand appareil , et lut précédé de
loute* le* cétémoniet en lujge en |urcil cas. Fendille taUcK
par d*Àgnarre demaiida grftc« de la Ha et liif }eté bot èm camp
par-dcnma l^nceînte comme mn mc db Mbi#j porte la telatioÉ.
Cette reletioa a été imprimée à Sedan en i^Sao afec tomi let
dëtaîli de la procédure. Bf. Fortia d^Urbatt Pa leprodaite eiî
m yk de CnlUm, tom. m, pag. 5o et toir.
(71) La conspiration dont FaeiereccBaaitAJbeit de Layaes
est celle -de Laa&ole et Coconat, qni eot lien en 1574.
Cette circonatanca n^ett pat la «eale oh Charles IX se senit
aenri de l*épée des dnellistes ponr se débarrasser de cevx «fd
lai portaieat ombiage. Georges de Villeqnler, neren de cda
fai an jonr poignarda sa femme en plein Lovrre , feçat Pte-
dce dn rot I dans nne partie de chasse , de proroqoer en dnd
le jeune Lîgnerollcs , favori et confident du dnc d^Anjoe,
et le tua. On connaît auui les exploita dn Cinienz Maarerel
fn*on appelait publiquement à la eoar I0 Taetir du Jki. Ai-
QUSTiJL, HitU dôFr., tom. VI, psg. 336.
(72) Cette erreur qui fnt commune aux Meaeray, sax
Vely et aux Anquetil a même été encore tout récemment re-
produite par les auteurs du Recueil des anciennes Loisjrmnf^ûseff
MM. IsAMaaaT et om Causr. yojm tom. Vn, png. 199.
(73) Il ne parait pas dn reate que rordonnance restrictifs
de Charles VI ait été motirée par la duel de Garronges et dt
I«egris. D'Audiguier affirme quelle fiu la suite de Pextrarsgfliit
défi» publié par Jean de Verchin, sénéchal dn Hainaut , et
qni fit dire à Voltaire, Essai sur Us Mœurs , qoe l'original dt
Hoo Quichotte était de Flandres. Fojre^ an tom. Il , Chjp.
XXX.
(74) Le récit de d'Audiguier est fort long et surchargé de
fastidieux détails. Il suffira de ssroir qa*un de ces appels
eut lieu psr autorisation du roi entre lea aienra de la Per-
rine et de Vanlay. Celui-ci proroqua Tautre pour en aroir
été accusé d'un vice infâme que l'histoire ne dit point. Le
iour fixé pour le combat , François !.•' se rendit en grand
appareil arec toute la cour pour le présider» mab Vaniiif
— Î3 —
Si r.iute. n Qnelquet-nns ont cru, dit d'AudiguIer, qnt ce
ne fui pu liiDie île courage, mnii parce que Vanlay nviit t^ié
a jTCrti que le roi lui en TOulaii a l'occasion de M.""> la rtgenio
et qu'il reùt fait plulâl cambaiCre par un bourrenn qae pat
son ennemy. u
En i5Î7, François I." assiiia i on combat réel entre tet
aicnrs i!c Veniera et Je Satiay. Ce combat eut lieu à Monlina.
On tin d'abord l'ëpce i maia ni lui ni l'autre ne xacbant l'eit
Mrvir , on s'arma de poignarda. Le roi lii alora cesser le com-
bat en jetant le Mton ; mais Venieri aFtii reja une blectura
ilont il mourut quinte ]ttat$ tprii. Ànc. Uiag. detDueli,
«bap. ÏXV.
(75) fojei, far l'origine et lea d^veloppeinen* de la
ctieraletie , la (aTanie iliuertation de MM. de U Corne-
Sle.-Paleye Mimoini de fAcad. du Inic. et da ieUti-ttura.
(76) fojezhAtitmr, /hit. dAngUi., tom. Il, pag. 477.
(77) tfyc%OrtoYt.waodes«ii-F<'dtrieI,Cap.XXyin,
t^S- *'^
l'iqex antd tom. II, pag. 9oa.
(78) f'o/es HènaiiU , Meuray , Fefy et Ampiaîl.
(79) « Diù «nté Manuelem Comneniiim in uni fuére Ia>
dicri quidam ludi Suetonio haMid vocati, pcr crrorem i q>i-
bBadam dicti acttexi ; bodU rocabulo minus letina Torneu'.
jnaita appellau. » Vobt , Je dutU. , Cap. /.
(80) foyn Hkh»OLT. Abr. cfcion.
(81) Voici le texte de l'acte du ii.* Concile général de
X.atTan du i4 de* calendes d'airil 1179: DeialabUet Uiat min-
dinai vetjtrioj quai vuigù tomcameata vobml in ipdiul miiilet
<x condicttt convemrc lolenl, tt ad oiunlalionan virium luanwi,
et audaeiœ Itmtrc congixdi, undè maries hominum cl animai-uM
pmnda iitpè f/roivai'unt ,Jieri prohiirinui.
(82) Long'tempi avant Js peltief;tcri<e(/e C/uUont , Geoi-
froy'Ie-Bcl dil Flantafteoct , chef de la brandie de ce nom ,
<iui tigna en Airgictcrie , lïiit dit faire un c^lCbie (ournoi
^ 14 —
«HT kl fçrèté d« Môiit-Sl^Bllicliel t- •« Hcntmmmàiè. Ce cmM
fHt avtn aéneux q«e IHistio et c(»fttm la vie à platientU
cettx qui y prirent iitrt.
£aii74,UyMtàBeMRaini«m toutméidam^é pn HêêûU,
foi d*Aiigleterre f oà figurèrent dix mille co«ilMmMi| ta
yhiâflaft rtMèreot nir te plaee*
Ém ifl4o f k Knp , |irès Cologne , nn tooraoi coûta II ?ièi
eoixsMte cBersiiert»
(S3) «c Ass rcgUtrts de la ccMtr il ee troeve q«e ledkt Ai*
gmste prit f mm moii de mai 1909 de MM. Iionii , m fit iH
et PUlippe, coiate de Bologne, eoti file pefaé qae nai M
congé ils nirment ea ««ciin tonmoy ; qne éliê fVa ftiioîMl
linéiques est aeprèt d'cex , ile lee poàrraieiit elier toit mm
y porter deê anaei aiasy qne dtevaliere , mhm ankmm o
lulecretet«rBMt.»FABTT«.TMéL êTketm^ppêg. i9o3L
Ea 1960 » Adot-LoBitt eelon ICatvisv Paait » at vit obligé
de défendre lee tonmoie poar devz aae. Son eaceeaieer, PU-
lippe-Ie-Hardi y ordonna an toamoi es 1979 en l'hoaeearéi
fNTÎnce de Saleme, fils dn roi de flictie, Chariee d'Aafoa.Ui
des princes da eeag y £it tellement autltraité fv^ y cmnâ
/crtuns (k la vie, OvnjLkvnm na N ASOie. f^ dt PUfpt-
U^ardiy Chep. XXV.
(84) Voyec ear les entrée exploite de Jaoqnee lie LslisiB,
en Espagne et en âcossOi LâCoLone. TfUéU €thomu^ «M. Di
Cbap. XXXI.
(Sô) Les détails originaux des (étee et tonraoîe, célébréf
à Cambrai en présence de Gharies VI | ont été iccaeiiUs par
nn abbé de St.-Aebert 9 contemponda et eéeioia ocaleiief A*
ae tronyent dans les pièces justificatîree de i*ihg9oire ds Ci»-
hrai^ par CiLnrBirrian , pag. 5i et 54*
Charles VI aimait les jeux militaires et tons lee ezerckei
Tiolens arec passion. Il conbettit encore ea penoone arec le
dnc cl*OrIéanS| son frère, dans an toaraoi célébré en iSSSi
et qni dure trms joure. Loais II d'Aajon , roi de tf aples, et le
— IS —
(irince Charlei, son frère, 7 réfutent l'ordre <l« lj clienlcrie
Pluiienc* dtmex I dit le moine deSaint-Denii, en la yie de
Charla VI 1 accoinpignércnt lei rheitlien juiqn'il la barrière
et tirèrent de leur >cin diverse* livrées deruliansct île galon*
«le loie [K>ur récompeiuer la valear de cei nolilea cliampioni,
I.ea Hamef même* formaient nne etpèce de iiibanal qui dé-
ceniaît les cottronnes au Tsinquenr, Ufiiicl let iaûa, (lit la
chronique, coauru il etlaii accoiaïunê, et /M erii Monl/o/re l
moiiU hautemtnl.
(36) Il y eut divei* aairci duel* da tempi de Charlea VI,
dont fui le Uoiistrelet,et d'aprèl \ai V ki.ttit.1 . Hist. de Paris,
tom, [I, liT, XIV, pag, 7D0, ï'oj^i noiammentceuz de l'anfilnit
JeandeCourlenay, contre les leigneois de laTtcmouilleet de
CXtr}. Ce dernier fut ajourné à la cour pour l'être battu «ans
le congé du roi ; tiuùi eniuia , dit La Colombiére, U roi U
reprit engrâce et rroufa Aon ce qa'd ai/ait J'iàu
(S7) y<^ei\'%^i.UUU de Fiance.
(8S) Il f eni notamment plaiicnra cirrouieli aon« Loui*
XIV, qui, par ces exercices, aimait à entretenir «a coor d«ns
le golït des tubitndei militairei. V-oltaisb. Euai wr la
Mveurt, Cbap. XCIX,
(S9} Pour se faire une idée complète dei toumoia atw
âi<erM9 époques de l'andenne tnonarcbie, il faut contulter
le Thi4lrt d'honneur et de Chevalerie de Lk Cou)m«i1>e,
qu'on peut regarder comme le recueil le plus complet en
cette matière.
(90) L'ignorance au moral , la force au phyaîque , c'était
là tout lo moyen-ige ; aussi fut'U l'dge d'or du duel.
CJi) yoycs l'Encyclopédie nUlhod. i« FcoiLilité.
(92) Le lÎTce Je l'abbé Ouboa, que Monteiquieu (rai»
liabitaeUemeni arec tant de oévérité , contient sur cette ma-
tière des documena qu'on consulterait avec plus de fruit que
YEiprit dei lait lui-même.
(93) yoyez Hi»*ni.T. Akr. cUrm., p.g. V, iiUt- de 175»,
•*. !6 —
(M) yajraliovTànnLtJaLn, Hùtaù^ de Cane. , gom, de
(95) Fbr^tom.lypÉK.setniT.ceqiiis'etf puiéamaMh
pèt de VéfOBBe tout OiImni.
(96) Lêt prevTêt ptrticaUéret te troateat à diaqae pti
êrnuB l'histoire. Le plan drconacrit de célIe-ci pennct k pebe
de les indifiuer.
(97) En généiml , Grégoire de Toart en ynremeni Bini-
tenr, et je dois conrenirqn'il laisse an lecteur même le soinds
juger les actes qa'U se borne à exposer arec «ne niÛTe simplicité.
Comme la remarqae en a déjà été fiûte an tome I, page. 35,
mt ne troete dans son Utto que deux cet de duels fort nies
•lors. A l'égard dn premier il signale le repentir que le roi
Contran a manifesté dPsToir fiût égorger dans nn duel na de
eea oflkiers pour le meurtre d*nn buffle. Voici à Tégstd da
second le discours qu*il met dans la bouche de Boeon, dénia-
dant à Contran à se Justifier par le duel d^aToir ÀTorisé le
yerti du prétendant Gondebaud. « Tu Donodana et tes, ia re-
^ali solio résides 9 et nullas ad ea quse loqnetia anaus est tes-
pondère. Insontem enim me de bftc cansft ptofiteor. At n eit
aliqnis similis mihi qai hoc crimen impinfpit oec«ltè |featat
aune palàm et loqnatnr. Tu rex piissîme , ponens Koe m dd
ftu&io^ ut ille discernât cùm nos in ualna eam|n planide
vident dimicare. » Gaaooa. Toaoïr. , lt6. yit, Cëp. XIV,
Il est parlé dans la Tie de Saint-Austragésîle » ârcheTéqse
de Bourges , mort en 6a4 « ^'i^n ^^^^ V^^^^ devait avoir ea pré-
aence du roi Contran. Mais son ennemi , courant contre loi,
fit une chute de cheval qui empêcha le combat. Bollaso*
in vilà Su,''/iusttvig,
(98j Ce prclst fit des remontrances à Gondeband an sniet
de son ordonnance de Sot institutive du duel indîciaire. Ce-
lui-ci loi répliqua qu'il n'y avait pas plus de mal de termiser
les iliifcrens particuliers psr le duel que ceux des rois par It
f»ucrre , et il se prévalut de l'exemple du combst de Dsrid
contre Goliath. Foyez Us txm*re$ de St,'Avit^ in-^* Paiis^ i6}3.
— 17 —
(09) r'")e:UtmMtsd,,g,Aai-d,éJit.del!«hte, ,666.
(100) y-ofn HiBAVLf.Mrchtxn. , p«fi,îî5. ti/ii.dt ,75,.
(101) f'ojt, u texie dei Cantiùutiont napoUlainei e» la
noie as.
(10-J) ^ojes Je Cpitulâire Ae 801 , .yrt, île D.Iuï*.
(103) On ne lannit trop »'*tonner qtie le gnnd tégnt de
ChirUmagne n'iii p» encore trouvé cbcï nom un bIjiori«n;
(104) rorc:b,nou6,.
Il y eut luin dei imf j ,/a tvi , et det Wtfef* ^aitumnet
qu'on exige«ii d«i p«nîei en <|uci«ll« pont prérenit entr'ellct
lei collUioni.
(105) /'otaIIuiktuiv, //ji(m/e de C/iarhi-Quinl, tom, t,
(106) To^n encore loi r6flenon3 sur l'étu cempu<iir<ls
la driliHtioii HUiferaelkal'éprilileidBeU, tom. II,ti*|[. 4IB,
(107) ^o/ei IM «uTre» d'-i/HH: f-Hu-i/w , «/«ni tf.i/op;
Jt^ioat. Seiifiur,
(108) ^oja U formule Je <l«i tirée Jca Atiùei dt Jém-
taleia en U note 48.
(109) ^<i;-TsMiCBAvn,//ùt.(^OwM<:/ef,ctRoBn*MW^
Kù*. dt ChaHn-Qiam, ton. I.
(110) D«> écrÎTuiM modernei ont MmwauqDs !•* P>«<
declet n'iTueni ianisi* 6té perdaea. C«» aloù qns da »M
{ttari 00 *eut teUre rtùMoire.
(111) L-e iadidenx Biimmi , dan* u Ditttrt. htu. mrUê
Attt, conlevie en Tiia l'inlBeDCe de U décoarerte d« droit
renun \ai la cetutâon de* dneli jadiciairci, en objectant (|aa
ccue époque fat celle de l'MiblineaMat dea lonraoU. Ceit*
abfectîan pr«a>e pcécit^meni contre 100 npinloa, |iuUi|ue lei
•Mtfaei* étaient aae «oiK de figan dei duel* da«tlaè« k nm-
placer la réaUi^; d'aillenrt le* ttratnoôj n'éuienl pn du» ma'
hUie d> décider lei pneé». •
(113) rorei le Btfurg dfi Onkmnamt, . fa». I. fé^J'^ltl'
(113) f'fyrzDfaazTiHitl.da Drmlftmt^t. '''*
31
i
^ IS —
(114) «« Le pen de loinièfet ^1 g«IMc tét boannct dfiif
CCS siècles de lénélifM, étÊêt €m éép*r dMM In eddérf».
tiqnei Ut poMédaieal ttal» 1m rirtetid* la fvmptadfeaw
aacteDiie. Ce fiit tnr Ict Mâshnet de cet ttmti&m tfÊàmu*
qu'ils formèfeiu «a coda da laie loaJMniB a«K gfaadt fifa-
4pc< de réqaiié..... « »*aet éo«e «pae étMHMnc ^aa la jarfi-
pradeBcaaccléiiaiti^aa iilt ^ataaaa Pa^at da faJMhaiiaa d
^a retpact det peaplet. « RûEMM-rtom^iMÊiêt. 4m rftaràitjfcâa,
lam. I, peg. tt.
; <il6) £^»«r^fc»IeM,tif.XUItaM9.XXVHL
(116) rcresUaaMé}.
<I17) £ipril4k$Lai$p Lifw It Char* ^US^
(1 18) Loaîs XI accaeilllt aa Fiaaea Tart ém inaipriaMrie,
#t Prea^aû I«S Ir pini dbt lf«yat|a«rait«a«hi
lu .prami^ aaa layuM^ CgATaiHiaf agp>»
f taai* IV»
(119) Ja daia plaearid la fadâfaaàos ^laaaaMard^
qalia<ro»fa Mpiiii fÊ^i^mM^ fasariii
fa'apcit Pimpraetioa da «isti; Ja i
dlMatafac'fdiité^ C^êM liySÉÉi'aa w wiww ■■ ^» «nv^f
taatat lei édiliaae de rj;^Mi* a# Iw JfaMW, ladbMlda
Mittd , aooasé4*avait abaaé ^ ii.fiapia ftUa , «ai piMài it
da 1454. Vokaha , fai la. cHa «ipféa la TWdav érto*
da U Colomètèrê a*afaic fatfffit la falaa^aa vente
laïaaie oà il aanit troaté iSfi^ac aaa 1454. Caat la dael^ds
MiaTftar at da Biakaat Coe^^ aat liaa à ValuaMWia
aa i4i5 » y*oa yeat f lae taMiaiaat fuypdar coanaa J^ dit
4af Bien daeto otdoaaée par fanica»
I (120) La figaear dee iattJtaliaai dm aïojaaant viia'
dMdtywlaa aa gfaad écriveiai da aa ^à aatta dpafa» !•
civittMtioa était aa pfcgffairtaa Mceadaatas la jaiblaietii
vanatilité det iettitntioat lodaniae appartjtadiaiaat A la pi-
liade datcaadABCe. CaA.TaAvaaiA«ar<
(121) UivÂV&T, Mr. cAiap. peg* lia.
— 19 —
(15Î) Le coinitile BoulainTiIler«,(|ui n'Mt pat jotjicct
en celle matiète, ■ dit : •> L'ij^noranctt a élé la principale causa
Ae II chuie de la noblcsie. En effet ni lei princes, ni les «i-
gneuri, ni let rois mime, ne connaiaiaiene ce qui leurap.
I>«rtenaii qnc par l'uuge et li poiieMion , aucun ne unh lire
ni itgner ion non. » Dt l'aïK. gom: de U France, ton. I,
pag. 3a8.
(123) RoaialtOB , J^ùtoirei/E Charla-Quinl ,tam. T.
(124) Malgré la tendance si oppostedei mœuri moderne*)
nous aroni enlendu de nos joar» une sorte de réhabilitation
«rRcietle de cette logigue du moren-ïge qui amt conaicré la
supériorité de \tJorce sur le drnit.
(126) yoytz MoNTEiQviBV, Eiprit dei Loù, Lii. XXVin,
Chap. XVII.
(l2fl) fof'M tom. I ptg. ga et U note i4<».
(127) ^<ycï 1, note 63.
(128) La {«bleue de Louis le Ddbonnairo, contribua prrÎB*
cîpileuiant ï multiplier lej duel) lous U denii^me race.
. (129) roxezlt.aou i,q.
(130) n Quiconque a lu Grégoiie de Tourt, Ftéd'gaûei
lc( Annale* de St.-Bcitin , »tii que du VI. • an X.* aièctea, la
Tiiiiabie histoire de la lociété e»t dans celle des églitei.»
GviioT , Prt/'are de la CoU. da Mêmoim.
forez auui dam le BecutU des ane. Loîi /rarlçaûet , par
UH. UaNibaT et Db Cidit, Ioiu. V et VU in p. p.' plaaieura
•avantet diuerutiont aot le* setTÎcei lendu* par le clergé à la
ôriUsaiion depuis le régne de Cloiis-
(131) Sdpion MaiTei tu auteur d'un liire curieux sut le*
dueU, qui s pour litre : DeILt Scicnta Cavalkrttco.
yoyci U notice des autres auleurs iialieni, ton. II, pag. 29),
(132) Le Livre de La Beraoditre a pour tiite ■- Pu CobUmI
de leid à teul^ celui de Sararon: Traici dei Duelt ; ct\ai d*
Dupicii 1 7>uiU de la Science mililaire ; celui de Ba*nage :
Vmei-iuUQit Uttoriqut tur Ut DacU. Je doi* ajoulei à celle liii*
-»» —
\m des» Tkèàtrt éThamnemr ti éê €%mmkine , de Fabtyn et èa
La ColombiéM. V% lineitoctlvl-ci eit em deuv«l«net Hi-f».
Le premîeff ttaite ezcluivelBeet de lé adenee héreldi^Be; le
aecond» qeoî^ee écrh ea iiyle diika et iocomctf côetef
«ne foele de fiMieceriem f«l ie fv|>^6iteiit eMx deelt et au
toernois de Metet lit dpefeet et de toes lev pe^t.
(133) yioyêM tom. I , pag. te.
(134) Xfli en ee perticmller eoet lee yeux vne l^rechaie
de BL SflleviUe» et une emtre de M. Loieeaii , eTocet à la coir
de ceeaatioft. €et!ie dereièfe eeeteneit ma pre jet de loi dent îl
e éfié perlé teaie H, page 44e. Depide Pfmpretaioii de moa
premier Teleiee, M. le mer^ab de Vbrtia iPOrbaB a bien ▼oala
n^nbetaer aa FS> dit Orflto , en t roit ToImaBea ia-8», enrichie
de aoitea d*«ne grande émdftien oè ae trovrent reUtét lee
frindpenn dnela de fidsabirede France cteaaéa eoaa cfaaqie
tégne. Je regrette de n'aToir paa en pina tdt cmmaiBatnce de
«et envrage ^aé donne beenconp pIna qne eon titre ne pronec.
U m'anrait épargné de longnet et laberienaee inetierchea,
(135) Jn ne parle id que dea écrite <|id ont enHugé le
dnei aona le tappert Ueiniifne. Qnant à enm qni eppartiea-
neniàla)nrîepfndenoe, fd eonfent en oocatfon de dtarkf'
ylnn anciene en detei eenn de Dnefonrimne et de Biiv«
jiAvoia.
<136) I?hiiteire de Charlet-Qnhit n pem en 1769 : l'aa-
tenr eat «on en 1793.
(137) J^avone n*eveirln le cbef-d'eenTre de Rebertaoa
qnTaprèa rimpreaaion dea prennera cbapltrea de cet onnage.
• (198) On a adreaaé de née }eure bien d'entrée reprecket à
Blenteequien* En général en n*a pea en eaaen d*^eid aa
tempe oè il éerîvait.
(139) Fhj^%^dm9\MOèJkmedel'Bafn^dgsl4df,}nikt^
dee démêlée de Meateeqnieu arec la Sorbonne.
(1 M) m Ab ItaHaa prooeribna eet ptudamamm nt imperater
aanctna mntafà lege teinne indignnm deetnterec » Ug-
Umgoh.^ m. II 9 ta. LXr, Cap. XXXIF.
— î» —
• Ciim in hoc sb omnilini impcTinlcj nure* paturcntu . w
MbiJ. Ceti te paiwit â l'atM-mblcB de \iroaj\e.
(141) ^1^(2 lome I, p*K. 66.
(112j IdOB(e«iiaicii parle ici axec beaucmip tFop ie coin-
^jiunceJesOLhon.Voici le texte daUconitiiutiorurOilion IT.
Quneumi/ue Uge irM eliom i-oinanA in oauii ivg'io ilalico hoiito.
vittrii hae oamia ut ia hit cafiiiuUt pcr pugnain deca-iàimu.
çBicivare pracipimus.
(143) f'oyti le Hecueil ilei CapiMiUires, éiÙi. de tUm»,
(144) Fq;ei tiouiDmeiitletilerniei:icliiip.du.lîr.XXVIlI.
(145) L'opinion U ^u&commune (ilace la fin du moycn-
Ige H la priie de Coniiantinople en i^&îj il'iuuies ia Gxeni à
b (lécou.TeTtfl du nanreau monda en 140^
(146> Cotte réaction d'humanité i^iii (Tcat manîleiléc d'un»
monii^re ouiai éclatante à la aiuia de reiplonion de juillet
iS!k>, eat un phcnoroâno unique Jana l'kiiuiire. Elle a UÎoin-
j/tià, et, elle coDiiauera. Je iiianiflieT dei paation* ^lilîqiiea
et dea exigence) de* pactis.
(147) Le déioidre bit pooaié à tin tel point, qu'on regtett*
■érieuaemsnt que le duel eQi cvasé d'ftie iuridii)ue. D'Aii-
digukCr iLCompoié son livre I DtV Ancien uiage deiDacU, paut
•Bgifiet Louû XJII à rétablir cette iniiituiion. fi'vf.tt toin. I^
- Wî- "Qî-
(t4S) Parmi ces. dcrÎTaJna, BranlAme eib colui dont la cy.
■urne est le plu) choquant. On en tronrara plu) d'uneicnipl»
auK chapitre» XVII et XVIIU
(149) 11 eit peu. d« biaillaa en Fiuice oiune se conaer\enb
encore de pjreillea traditioat. Jutqn'an XVII* siècle il u'j; eut
chcs nom aucune police j la vie comme la lorluie det ci?
(Djenj n'ï jouisMit d'aucune garantie réelle.
(150) a Le coi , déairam. faire vivre ■■. nobleaM en boan»
^ix et union, etleiadre eLWaopïr le* qperelles-ct n<»*ei ....,
firohibe et défend tiéi-eipreifément à touigentih horamei et
Auuet I que wiu couleur deaiiij.uua cttorti ^u'il* [OtinBienft
prétendre leur «voir ètéfiûu» iU ■*«s6at à fiUre ««case tnem-
blé« de persoopet et ports dWflMt , me pareilleaMmt tuajtt
Je Tokler leuri qoerellet par afmei b« coaiWcl Let^vdlet
Toyes de fût, le dict teigeciir déCuMl à toatse penoBvea, de
qaelqae qo4lité oa cooaHtkm q«^U eaîeat, aor peine de la ▼«.
Et pour ce que la aenroe et foedeoMitt de qoerelle procède
erdinairement dfs déinentfec qi|i «e àomnétn » ledkt êtip/tu
inlûlM et défend , aar lea peines qne deesaa , ^«e œlmy àqii
Udkte démentie anre ea|é doaâée, mtm rmante parlai
>npea> m^t se retire défera MM* lea eomnmMMmê et auié-
c1mw( de France , povf en décider aiaai qm^ TonoAt en eitia
de raison^ ^
(151; Esprù dbt Loi^, Ut. VIO, Ohnp. Vn«
(16^ Je parle de rnbMqn* IVNafint Icnu 1m {oondAVOt
Jicnimir dans 1« polénûqne dee partie.
(|53) yoyêM^omnàjitliom.M^L
(154) L. aa M Dt <<<; 4i< y» tn/liaiiil ■ninia>« .
(15^ Matth*» oi^. Vi v« 39*
(IM) «I Encore a«J[,Vm,«aiécUi» — oWea wiit cet» ce»»
Tenance, qu'ojn n*aiiroit {anuûa parti «a aeml coup de canne à
foelqa'an qni n*a?oit paa la doa toaraé, on aHrarait pea foak
i^ezpoeer k frapper Mcc «n hktfm sor la nanga 4*oa
•n n^ poafoit toucher qa*aTec U auûa.» Sommmvv db ,
4$ Créf» » tom. IY| Ciiap. VI, pag« «50.
(157) Matth^» Ct, v^ T. a^
(158) Foyez Cbap. XL.
(159) Dominam Deam tamm aaa itatiMe»
(160) Hosina» ded^^O^I,^ Imrimhwm, Ct^JOU.
(16i) Sinnç., d9VÂ,Uh.U,C^ XXXIl.
(162) Jrafiavr ireifU. UonAT.
{%ti3ù U teztf de Gicéffoa parte : PMiem
aaMidt qtie J'ai traduit par fùùd «niommm\
(164) 6noTiva,4icf.XVI|37^
— 23 —
(iSCj In (n«t!iiirD geminoi imnuni pontterB ceirua
Projecil Vl»o. Eiieid. ht. I'.
(107J On iroueera dans la coim de ccMe biMoite de»
tzemplei même content poraini de ccs^uangci tuites.
(168) M Dulong, disputé de l'Eure, en a.fai( d« tuM joun
■ne ftineite expérience.
(lo9) n Divino judicio Irîbnendum qui hune catiun iitbii*
voluil. * Alcijit., de ling. cerf. Cap. Xtlt.
(170) Une cour rojmie a auui jugé ite noijourt^ qu'il
■Mit dcl-ifauté i. *i>eT lon adveriaire. l'oyez tom. I, pag. 37t.
(171'} <■ Qu'en veut-lu taire de ce ung , bdte féfoce *
«eux-iu le boire! u Rocuiav, Leiireà D'AUmbcrl.
(472) Un trait de ee génie ett rapporté au cli«|ntre d«a
Durli luHilaireJ , lom. I, piig. 440.
(173) La jurisprudence actuelle tend aitui i coniiddrar
celMetp^ce de duel comme déloyale , quoiqu'il loii trat da
djte qu'il n'f en ait point où lei cbancet aoiçnt plua rigoui
leusemeut égalet.
(174) yojet BiibtBui , Diicourt tur la Duels.
(i7o) Li.KKkTiDttKt,DuComiiadtieulàseid. Part. 11^
Cbap. VII, pag. 16. Alciàt de tiigut. certain. Cap. XXVII.
(176) BiANTaMi,/>ùc.<M'^ Ou(^.0B.a.plu9ienri fois
•uayé d'aitflchet aux dicoratioat.J'orJret ({oelquei prîvilégea
phis pontifs que celui d'attaclier un ruban it ion habit. Soua
le régime impciial , Ici décorés jouirent d'une ppniiun et ilu,
droit de porl^d'armea sani rétribution. Ili ont encore aujour-
d'bui le privilège de foire élerer leu» eaEa(il un itûi (I«
réiac.
(177) M. Léon PiHet est aujourd'hui) je crois, maître dea
leinéte* au conietl d'éut.
(178) foyei le récit du duel ou lournw lipporté au
Win. II, pjg. 46, entre lË cbe'alicr d« Ternant et l'IiaTien
Galcolio BalULJn.
(179) Nou i«iUeinenl l'impât Aeruil-ptrmaïKiii , nuit il
I
-14^
f ttft iOêgal, car oa coinoiâa$« à !• Im^r êêmm le cbMmdet
£lite géoéraaz.
(MO) Là tyrannie de mcMies reneontn mam beaaôMp
*plat forte opposition qae celle de Loaia XI. Uj m lahi èi
jpatience chei noiu poor tupporter le deepotianie «iaiMériel
qae le despotisme royal,
(181) Le mal Ténérieuiqu^ appelle dftiterA leamliEf
mtUnUf commença à Atre oonev taiTent lea réfpatree de psf-
lement en 1494. Hànkvir , Jirm dknm%f peg« «91,
(182) « A Naples on assassine som eapem deniAce ans
kome. Cela s'appelle être brate en ce piQ^^^UU « RovssuOf
(183 Plus heureux que Ghaiiem^ne, Gkerlea Vfll nsat
de tronver un historien digne de lui dans M « 4e Sé£ur«
(184) F'i^cz note lo.
(185) RoaaaTSOV» JFfsfoiyvil» Cftffnb^-QuMC^tOBi, I«
(186) Vblt, i^Mtoirv d^ Frodce.
(187) ^of» le texte de lV>rdonn« àe 1S66 i U note tâo.
LhôpiUl avait quitté les sceanx en iâ68.
(188) DAvoiovisai Jmc^ U$ag^ dta Jh^H»^ Bu^mftiiit
■
JHs€. sur Us DneU»
(189) JSd lu récemment une réhsViliiatioa de U mteoiie
de Catherine de Bflédîcis dans Tifûlonne des Fra»K«M| 4»
H, ikSùmontlf^ Celle de Charles IX ne se font aena doute pu
long-temps attendre.
(190) « Les grands seigneurs | devenus oi«i£i dans leurs
terresjt commencèrent à s*y plaire moins ; ils se repprocbèreai
de la cour où ils furent attirés par les charges et par les biea<«
fMtSyOt où IVm clierchs à les reteuir per le plaîaic. Iiix4f lt^
Jàr. chron*
(191) Dùc^ uir le* Duidi, pag. lyÂ*
(193) Jhidem » pag. a86i
(193) IHdem, pag. 207.
(194) Ihidmf ^ig. a8o.
— JS —
(195) lii<lem,pêg. aai.
(196) FiLitiBn, Hùtaire de Paris, tato. H, pag. iiaS.
(197) Mbibkav, yfir. </o /'Aiif. dt /'iw», tom. III,
Dt Thod, iï^. un»'., Li>. Vl.Cliap. LXXVUl. MàKoûntik U
rtine Maioobiiti, pag. tai cl auiv.
(19S) BBasT&iiB, Duc. surlts Duclt, pog. iiûet iuIt,
(199) Jfi:^eoi,p«g, 191.
Ce trait ta auui rippoité aux Elmltt hioor. de Ca^TSAV-
(3Q0) Cea «cBndalcui monumenB de) déi^Umen* d'un
toi, furent détniiu lois du aoulèvenieiil papnlûie, ^uiiuiiit
l*aiiatiinil du duc do Guiae itux éuti de BluU.
(?01) Diic. tur Ut DtKlt , fn, !>3^
(202) l'efei aux Éludât hulort l'admirable labJMB d« l'a».
tuiinat du <ii)c de Ouite rui éuu de Bioi),
(203) AicqDBTii. , Uù\. de fra/ie* , loin. VII , pag. 73.
(204) f oj'M pour le duel de risJe-UajîianK. Bbantôhi,
fiff. iur ^ Oiicji , pag. 60, cl d'AoDiooiBB , ^iic. I/m£. dea
VutU, pig. 4ia. Celui-ci n^ittibae pw ce duel bux ni6aie4
motifs qu* Brantàme,
(200) Au momeiil où j'écrii , la drame exploite k r«Dvi
«ette 6poque. Malheuceusement U létitt liUloii%ue h'mi qu«
trop touient déSguriîc. Il est pourtant Uieo lupei&u d« dur*
ger un paieil tableau.
<20G) L» récit de ce* di>er* duelt «e tiooira auM *ie«
quelques larianiea duu le ThciU. d'Iwii in La CobOMUiKii
tom. U.Clup. XLII.
(207) Viu. iiir /» £>in:/i, pag. 334.— Ce m&nie comte ds
SoîMons, re^ut un jour un cartel du comte d'Auvergne, de la
Bioiioa de Valoii. Moii indigné de ce que le cojdIc aireciait
IVgalitâ entre lui et un prince légiliioc , il t'en plaignit au toi
Jlcnri IV qui eûla Valois en Autcrgne. Ahqubtil, Jùtt. da
t'rance , tara. VIII , [lag. 3o.
(205) Ob trouYcn nue loule d'«ttU:ea iraiu Boaloguci do
— » —
férocité dAns NkàMmkr ^Aèr. de tSuf. dà Frmnce^èom^V^
pag. 199. itVQvm&y Mù^ tk F^aftce^ to«. .VII,. pig. 6..
' (309) DjkVDiouvn évalan à ^«atonè niiUfi lo^ hcmbImc 4»
grâces acoocdéet poa^ 4PKil aOM ll«wi:iy. Jnc. Umg. du
Dath^ Chap. 3s.
(211) To«M ces é4îts etantrae mr leidaels ont éf^ i^as&.
Hws «B recueit en an Tolnme !«•»• Forù 1689. On les troart
-*Msi sniZecMol <£0r«ic«^Iocl»7?i0i^.iper BU^ Isambbst et
Da Ca VST.
(^12) Un ao^e prince d» Qhabûs Qu» es t603, le ^adpal.
tenant dn dnel célèlire de q[aatre cootre qsatre rapporté sa
tom. I, pag. nS^êtsahr^
fZl'SD lia moaoaanie du dnel semble cTors^evmr été héré-
■dKtairedans certaines Amitiés. On Temuencore deoz Ea Fceu»
ij^nver dans lethul de 166S dté ea U MU» précéetense»
' (914) Ko^iBs k nota 916;
(215) Le retour des dacs d'Hsllnin et de linaoonrt hk
entorisé par letlres-|i8tentes dn «4 >b*^ 1697.
(tM) Ltetenr des Mémoim dt Bods^brt^ d^ÂrUÊgmm.
et antres personnages psendonymes» estStodras des Conrtils.
Vof€at son article dans la Biognphia md^eneUc de Michand, at
dans le Bictùmnaire des Anonywê€9^ de Barbier. Ces Mùhoùts,
*fnoiqne traités de romans dans ces artidea » ont été dtéi
pinsienrs fois psr de grares historiens» entr'antres- par Aa-
'^etil. On y trouve diverses anecdotes rebtÎTea aux nombnoa
duels de Rocfaefort et d*àrtagnan sons Bicfaelieii et Massris.
A fai suite dVne de ces affaires, BxcheHen | qm renaît de £iiie
exécuter tes comtes de BontterîUe et de Hosmadec , s*étak
^m obligé de fiûre incarcérer pour la forme Rocbefort-, toa
confident. Celui-ci rend compte à cette occasion des motift
particniiers de celte exécntimi. 611 dot i*0a croire , ces pei;-
• w 2T w
•ennagH annlMt été TÎettmea de* rei«enrinieni de RtchelleB
contre les Condéi doni ils étiient pfwliei p^rcni.
(217) On lioui« giir ce oiiet >l«t f •i|;ea ac}niiril>lei d<(<i
le IV.< TOl. dei Suidci hiitor, de CK*Ti:itr«iiAai>.
(318) Ce MditarisHU! compiuerB touM la ptiîode de tVm-
pire, f'fya le Chdp. XXIV.
(219) On iroHro bien pluj de lageue dans le trùt de
Joteph II npporlé nu tooi. Il , pig. aoij.
(230) L'inatituiion de la jniidiction des naréchinv 4a
Fnnce Temonle i Cliarle* IX. yoyt% l'Ordonnaace de i5é6
portée à la noie i5o.
(221) L'auteur de «elie pièce , qui eit génératcmeDl mi-
«fiocre, eil La Monnoye.
(222) n Noua loininei injusiea , dit Cbitcaubriand , Étad.
hiilori^uci,toni.lV, pag, 43i. (jaind nou« jugeont noi deram*
ciera par dea lumières qu'ils ne pouraicni avoir ei par dea
idée* qui n'étaient p*< encore nëu.u Ce* rcHexioni aont rratea
dan* leur généraliléi mail je ne puis lei admettre dans l'ap-
plication qu'en fait ISlloïtre écrirain aux écarts de b) cour dtt
Louii XIV.
(223) Le procédé do Beaufort consiiia 1 aller renversct
«ne table à Uqaetle le duc de Candslle était utia avec pl«>
(234) Le caidinal de Reta cite déKS cncoiuuncM «& il
•Vu battu e& duel dans sa icuaease.
{325) yoj-e» tai }<» Mématreide Roch^ort , (HT SAMoKi*
jtM* CooaTiLz, la note 9i6
(226) VoyezltiMémoirtiJuducdeSai'aiUti.
Selon tel Mèmoirti dt madame dt MoUéi'itlc et de Sl.-Sums»
le prétexte de cet eiit aanit été une hardiesse de mailiime
de NaTailles, qui avait fait supprimer une communication
entre lea apparlemens du loi et ceux des filles d'Itonnear de
U reine,
(327) Etocfaefoit amre dant son récit «[«'il lUvui d'abonl
— Î8^
trovfé cImm loi yiailo»rfy pnéiMlB <• la
C» yi lui fatoi»€tte préféf •■ta » c^wi y^
p»wt U£rettti|,<|MffaUMHr AlvMlMkfltkMMMv^tfa
•kM. Colvi-d MraU e«g4 ^pia^ C0l tester ocmb^m Ot de mit
..i^MM yw>»l»qmi iPtaii; éUiBé» t«M a^.iiMr ^ MaJnllM
fH iMi nuyripûi cU Bl^f^ •» ^ ••• ttraOwb 4%M ■■ii^ff
UÊtm pUînalB. Gtlai-d ▼Mudt daptrte WM ia«^ Matff»
.4k Paj-^GMai^aa iâS4* Fi»wnaé |Mir itateH— » il iii mÊtcit
a» bean matin an chinugiea aiaiû 4t iPKt II • iaHiwMi
.^Jléianaîf ai> fpar an» •ppiiatîaa, »t fp» déc tort> ai^iir linioB^
,^laptf^di>aMfyu» do-airfial, a» lai wayoi aaa jpwlf
. foar ^M lat cbaaottduc^ooi^fafieat^ffiUa •ati^Bas.Cett»
-ipUâMBianii 6icéfiiéclv»le pnMOBGOMJE» a^rMUrttarfMl»'
.. (228) ya tgaii^ ja^ftipaanng»» à pm prta.aaiWiWt^
amyé 4r aAt. ipoTH «"^«^ puante — i>Mi Mttitépfwpaiyc
ceUM.qaî; poawîen^ Ut»^ n, cnallanao^ répeaiv* Pécaptr 4e
-fcaait W 4c ««.iélîMeat^aUiA dnivulaaMya, X^i- tiptste
• ^ **S pr<ainri< riaw.aw fflk>a4# la capital* par «n Immu par-
aDnnage> diplooutiqa^ conni^ par T^rigiB^iaé à& aaa koa&
]BNHa««â(uX aû#.à,la porta poar a*è|«a paraMtw 4p tôckar aa
jfra arec aiana^et de- le- jeter p^ les (Mièin»a« a*ii aaaift ^j tt-
r paôtenaer. Il oourat Mre par]» de «amiSiaïaatare ^ soa^pfV^VjL
ir priapt de liv dire ce qu'il anui àfidra* CeloLci lai répoaiiit
^fement i Dtimef UmU et ^ /e pui» «mi«^ cwuipi0b> c^etc i'e
(229) Qn conaak nndifféreaca^ et toute U. a^ia de« it-
. <royablea.di«ira(Ctjiopa.deXafontaiiie eaitara aa, feiDaie..IUàae,
le ma^ Mçoate néanmoina. na. tiagiijlier trait da ialooaie de U
part de ce aiari si déboanaire et ai iasouciant aur la mofaie dOi
liea copîagal* U« raptainft de 4cigpaa« nomi^ Ppv^^>^
l
- Î9 _
vieux miliuire, Toysil aiaiilAmenl maiUme Lafontaine. Son
mati Ht s'tn ÉpwceTttii point; mBλ on l'en fit «pprcevoir. On
lui periHitta néne ^m'ÎI Jenit li son honneur (l'oiger un«
Mli«fiirtlon. Pftoorapé Ae cette idée , le bon Laronixine , ijui
aimait uni i ilormir, te Idie <le gT*ni( malin , il trmter te
ca|MUinc, U prenc de l'hiMIIer, de prendre son ^p4e et d« ■•
•■livre. Ilisonent, et ne lont pas plustOt horsde la *tl1«, qtt»'
LafonUin«ilil ■ Poignini; Il /imt qiit je mt halle avec uni ;
on m'a aiiurt qiÊt fa nepouvaù m'en rKtfvnter. Il lot eneipli-'
qui (iriéTcment leiDMSr, et MU* lui ilonner 1« tempitlerépii''
tfatj, il met IVpée i U main. Le rapîlsjne, forcé de le <Wfen-
■be, fait MKier d'an lenl coap l'éixïc' de Laibntainv, et profite'
de l'initant où ion adverinire est déurmé pour entrer 4n ei--
|ilicaiian ircc lui ei tui faire sentir le ridicule île sa conduite.
Il proteiie au anrplus, <|ue ptuM]u'il a pu trouhler iitnai M
trani|killité, tl n« lemettra plui Ic) pieds chea \ui.Au ron(ratr«t
iiu dit La/ormàne, /'ni yitil ce qu'rma txigf Ht mai : maii ae~
luelieiMent jt vaur qw luui foyet plut ijue jumaïi aiiidu f-kn
moi, laiu quoi/* Mtéaarai encart, La récoacilUtioo faientièr»
•t parfaite.
(230) L'antenrUet M^Bioiretd'.^riagnan,cemmc<l«tcaK
de Rxlitfofi, est S*aoKJit dm CocaTit-i!, dont l'autociiè-
hiiloii^i eti d'aiseï peu de Taleitr , comme la remarque •»
a déjà été faite en I* note ai6.
(231) I^ Journal Ueli-étitpus , dt Fétrier 17^0, pa^. 109, a
porté le )ugenieDt niivani nr la politique de Louit XIV h
l'égard det duelliste* : « Ce prince a publié nombre d'édîn
contre lei combat* lingiilierti il fMraiatah * cet égard fort
jaloux de son autorité , maii il n'était pasflcbé, dans le foml
<lu cœur, de voir la noblesia Tort délicate tnr le point d'iimi*
neur. Aussi on voyait bien des gens s'exposer à U rigueur des
édits, pour «Tolf iiuelque part k t'«itime intérieure iix *oa-
(Î32) piyaXtt Élutlei hiKor. de CaATEiiJ»iii*»D, tom.
lV,p-g.<36.
.(S33) Le tédttggr dt Simwmn^à»' ■■Jiwg de Cké^'
iTttl tm»pé à cel éiprd «bmI Mini ^«« VoltirfTOi fait trop
«n^éfé ISnflaeiioe ôméSuéè fMritXIV. FbfM. umb.1, fi^
•|6. n a*6tt pM mom plat tafci db dto fA I^tvéatnnt db
LqniiXV,o»»%fU pt mtmim fÊém <'mi awa a— liepaii
din tffpifraii»» téoMÎM c— K »n wmn ■»•»! ippuiiéi à fefa
(l3A)vXi» coot» 4a Titlf aPtvalt pat meiltewe opftaioB ^
la vi«rqa|9a d^Gréqai db ta jaridictieii da pohtt Jhaaaear.
jq9nts la paiMga da ait aiéaMifiM dlé aa «ooi. n, pijp StS»
..(S35> f>^^ tar oa lUaip at laÉ axMvapfMaa da la da-
cliilMa di. Banj4 te Jf(fiiiÉv*da MBptg aaiÉÉnMBt caaa de
Daclaib
..(236) J'aaiai plot d^MMfiotetaeiM èranÉirtw dacteer Ut
Jltoifli^tJtcrwii, pabUéttaat laao«daDaeloa»ptr8aBlinB^
^fdaa l» Bàfgttftkk mtkurwÊUê f » par touraaa da Mmf,
■iloa la/MsfjMPiaaùvdMilaâilpatf daBàfidar.
: Ct37} &M«PClwvd^ik«Mr9UM9ACM9li^tal■.I»Glulp.ZIV
tl XV««VpMf9f ajaata raa|aar,daBt.aa#ttoM| bm cMt aa
)oar catta aiéma réponte qa^ Teaait dTappraadfa at qi^aa
ittribaait aa caata da Cbabot aafan M. la priaot de CStati.
«-•iloa €im Voltaira^ lai Tëpoadif^arfl'Sr avai^tta viaaa \wSi
f»i aPappalati SftWaioa et qai dûaiti M m'jr a ràm db mmmm
mm tt êoleiL »
'. ^8) fTayn eu Meéuea dêê OtdbnHaneêt sq aatra éàit
d*aTril i7a3t tar laa injarat et lat Toîat da«fiâta dent les dii-
pafîtioiia aoat fort ■aget*
i (239) UoaBTa&ba» H»ml du XVm.« êiMâ^ umb. U^^Êi,
1». ^■
. . (240) Ihidmn^ tonu IV « pag. lai.
(241) Gaito»| d'Orléaaa, Mre de Loaia Xm, fat l'tae
d'aae foale d'intrigues co|i)tie la miaisièia de Richaliea, qnt
n'osait tVn prendre qu*à ses iastramens. Les parties de plaisir
de ce prince consistaient, salon les méaMùat da temps, k
aller arec 9^ affidés , Toler des aiaateaai sar le Pùot-Meat
» 31 —
^^1) Scion DbcIm , Voltaire éuît à U solde île l'impé-
ratrice Éliiibeib , et l'entremetteur était le clicvalicr il'Eon.
AtriHoirei lecrtU, toro. Il, pag. 3iî.
(^43) Êtudei }iituyfii]ati ,toia. IV,
itVi) ftOuMBit; , Conm» loci'oL
(Î4i>) n te TOi reganlerait, comme un it«( sucera le» |i1d«
heoreus de l'cxpédiiioii , qu'elle pût iue tctminde sani ittill
en eût coDlé la lic à un seul homme, m Jnitrucliom* i
la Pry rouie, ierita de la moin tic Limii XVI.
•> Non , Monsieur, ce n'eit pat moi ^oi ai fait eonler te
•ang. u Répaïue de touîs XVI ou prrtideal de la Convention.
(246) MsaciB», TaMeaude ParU, Chap. CLXXXVlI«t
HCXLI, CI lom. Xn, ptg aSl.
(^47j S'il faut ajouiet foi «a récit de Bevenval , la rcina
lui aurait ciprimé mtme^ur leUiv une opinion bien pluj cx-
|>reuive encore lar la néceiiilé d'un duel entre IcJ deua
(%4S) On lrO«Te dam un de* nunriros de 1834, de U Rav
rilivipectifc , nne relation asset étendue d« ce duel célèbre.
> (249) Cette relation eic tirée ila recueil inlliuté : PariSf
yeruiiUei et la Protvicei, tMn. I, pag. tgS. Édit. de iSa.'i.
(2o0} Vo^es lei Mémoiiti publié* loui le nom du cbe-
valier d'Eon.
(Î51) yoytt t'articte St.-Ceorga, dani la Biograplue unw.
(23!1) Foya dan* lea Mèmoiiti du comte Alcijnilra
Da Tit.LT tes confidence» i lui fiitei, par l'auteur dei I^iùoiu
dangereuiei , lui Ic« moiifi'de cette publication. A'^ealuiii
J'arU Louvet , dam la BiografAie unit-erielU,
(753) Cei HénairM ont paru en 1819 en d<H« lot. tn4*.
Lear vogue a été tin puiuant encottngcmcnt pour le* pnbli •
catioti* de cette nature qui n« ae «ont que trop louUiplice*
depuii.
(7â4) Cette nonle, a part le* démenti) qu'elle p««i '••
cetoit du caraclére de celtû qui la profeue , a quelq«e cboM
— » —
de pivt déciiif peut-être contre les doeU q«e Péloquece
aiêeie de J.- J. Rostsera.
(KS) Cet deux errétf | tree let etpècee qui y oet dmaé
lien I sont repportéa dam U CoHedion de Juritpmdmn de
DtvifimT.
(SM) Cette iater?eiitUni était œlle de U reine llerie-
Antirfnettei aHl fiuu ee croire Tilly.
(257) Ce iîit de It main de Riclielien que I.oaia XV le^tt
•a première et ta dernière maltrette , la dndiesse de Cliàteaa-
roBS et la comtetae Du Barri. Ce fnt loi qui , lora de la ma-
ladie dn roi i MetSy cherdia de concert OTec la dnchene,
â éloigner de lui let teconrt et let conaeilt de U religion.
(268) Je croit cette anecdote inédite. Je la cite d'ivre!
vn témoignage digne de foi.
' (259) rayes l'article i3 de Pédit. dé i65i cité ci-detiai»
■
peg. ai3«
(260) On connaît let drconttincet de Pezcntioa de BaîIlTf
ibnt Patrodté le ditpnte à i^niqnité de ta oondamnatioB.
(261) Ce tont let termet dn détret de PaiecmMée ooai-
litBante.
(282) Foye» au Chap. det Duèb pariemÊcntmireê ^ tom.If
pég. 406, d^auttet traita dé l'époque de faeaeiiiblée coaid-
taante.
■ *
(263) P^ojre» au Journal de U Rh^obtÊioHf de Puvoboxki i
iet détailt det dirert confliu indindnela prodnsu par l'efier*
Tetceuce det pattiont politiqnet du tempe.
(26A) Ce morceau est de M. Cliarlet Nodier*
(265) yoyezVHist.parlem,dtURévolulùmJraneaùct^
IflM. Bûchez et Roux,
(266) royez le f^ieux Corddkr, de CamiUe DeamouUnf ,
dans la ColU des Mémoùts rtlatifs à U Réuoiution /huÊemx ^
de MM. Berrille et Barrière.
(267) Cette époque ne prétente ancna trait remarqntble
en lait de dueit
~ 33^
tî6S) Ce *fcfêt, qni n'« pii été intéeé an BuBflm dcsLoù,
■e trouie ilanl la CMtcliaa de Baudouin, tom. XLIV, pag. asj.
(?(Î9) rb^ïi VHiit. de rÉmignuiim , par M. de Uontrol.
(270) Ce trait eit tiré dei Alcmoirçt du maréchal Nef,
tom. I, pag. 17.
(^71) II eiîiuît <1a lempt de l'empire un mijar, de B***.
qui aimait beaucoup te* iluelf. Un jonr, la b^le de ion pia-
tolel Tient l'amortir contre quelquet pi^ei de monnaie, qua
•on adieriaire aiaït dans la poche : foui aitz U, lui dil-il,
A l 'argent bien placé.
(272) Celte fièvre de publlcationa paeudonjoiea au mo-
fneni où j'écris et» noiei ( diïcembre iSSi), comnieiice poor-
bni ^ di'crolire. Le dé);out public en a bit juitice.
(773) Cette peniéc a é\é fort Iiabitemenl développée dana
nii article de la Bévue européenne, par M. L. de Carné.
(?74) Le motif de ce dael fut un reproche adresié par
U. Fayau, à M. de St-Mdrcellin, d'écrire dani te Contervauur,
(275) Le mime duc de Roriga éprouva, pendant aon
•é)Our k Smyme , de grand* déMgrémeui à la ntite d'un duel
■rec un ofEcier franjait. Il en e*l parte dau* «ea Mémoira.
(276) Le cbefalier de Boufflen, dut auasi mettre Vépia
k ta main , pour ta cbanion : Lei jeurui Gens du Siècle, foyet
tom. I , pag. 3oJ.
(277) Tout lei iournau du tempi ont donné let détail*
de ce fnnette conbai.
(278) n Ce (jn'il faut pour détruire ce cruel préjugé, a dit
H. le procureur-généril , c'eit lit toice de l'éducation et de U
norale , c'eit de Taire «entir de bonne heure à la )ena«*M CO
~^ue ce préjugé a d'jbaurde et de barbare, c'eit aortout
avant tout de bire du peuple binait an peuple religiesk.»
H Cet! au poBtoii Icgitlalif, a dit la cowr de caïaaiion dan*
aon arr*i,ii ing"i *'i' convientdecompléter notre légisUtims
pat «iiel<iirepre*ii«e,que U religion, U norate, l'intérél de
U «Oct<ité et c«lui ds* tamille* puiiiueat réclamer, at 4 réglor
32
par quelles meHirM doivent être iicéT«A«i.ott -{mM des Ut
qui ont un caractère tpécial par leur nttnre 9 lemr principe- et
leur fin.» 81 ait, /Zéc. deê Arrêté, 1819 » première pertîe^
pig. lU.
(%79) Après âToir reconntt Talirog^oii dee ewiennei Ui
tir le duel» le tcmr de Liaogee e posé en principe «qee le
deel| en loi-mèniey ne conititaait ni crime ni délit, que aei
riadiau teult tombaient dans les prénaione de U loi pèaak;
qu'en effet 1 on ne peut tuppoeer que le iégieleteiir ait touIi
conitituer chaque citoyen juge et Tengenr de aa propre que-
relle I donner à chacun d'eux droit de TÎe et de mort tar ki
•ntret , et répandre ainsi dans Focdre aocial d'intarissaUcs
■ources de haine et de jrengeence » etc*
(280) Ce combat avait une cause bien firiTole , L'^^ arail
plaisanté H** «nr mê rapports avec une dame. Celui-ci rarait
unité d*en£uit. H'^ 7 avait répondu par Tépithète de polissoo.
Bu le termio les témoins ne purent obtenir U rétmctatîoB ds
ce pcopoe. Un cultitatenr, occupé à labourer son champ, as
]|eu à leurs genoux pour les empêcher do te battre , il ùx
repoussé.
. (281) Les difficultés que présente cette metière, et que je
pB puis qu*énonoer sommairement, semblent inextricaUsSi
J*ai indiqué au tome H , pag. 4^9 et saiv. lea moyens dVa
retondre quelques-unes.
(^2) Depnis cette époque, une loi noiiTeUe est venae
iréglerles conflits de jurisprudence, et e apporté d'heuieax
chaagemens au mode .d*interpréution des lois»
( &S&) Fuyez rairèt.du 8 avril 1819 cité à ie note vfi*
(284) Voici Je texte du pn^et de loi sur le duel, préseaté
à le chambre des pairs , le 14 février 1809 :
- Anv. i.«v Lorsque des blemnres auront été faîtes , on Itn-
^nn homicide aura été commit dans un combat aingnUer
«être deux personnes , soit à l'arme. blanche, aoit avec des
à fes, let laits tenmt coastalét et les inculpét teroat
— 35 —
îMtTTOgpi et arrêté* , «'il y • liou , tuiT*nI lei formel prM-
criiei par le code d'iniiniciion eriminellF.
9. Si ta chambre d'accuntlon reconnali qu'il existe contra
le (irérenn desintlitesmfKssna du lait ïncriniiné, elle tentent
l'alfafre derint la cour d'iisiaei , Ion mf me qu'il ne ('agirait
que de tileï«ure> qni n'aDciieni occaiionné aitcune maladie ou
h>ca|iaciié de ti»ji1.
Elle no pourra avoir égard j aucnne det eiceptiooa qaii
•iti termes do code pénal , Qtent an Tait le caraciire de la cri-
Diinalitë.
3. Le iury <era toiijauri interrogé aur ta queition «le urotr
1^1 eKine dei ciTConiUncei qui rentlrnl le fait excuttble.
Indépendamment des fait* d'ciciue , énoncé! au code pétut*'
Mra conilitétée comme drconitance qui rendrait le fait escti'
Mille, la prorocation par outragea et injures grave).
Si \a céponic du jury eai ailiaiatire aur cette quetlion , tit
cour prononcera, canfarméRient a l'article 3a6 du code pénat.'
Tontefoit , a'il y a un homicide , lei coupablei leronl interdit!
deë droiii ciTk|uea , civil* et de Ikmille, pendant un tempi qui
ne pourta excéder dix ant, ni étie moindre de cinq an*. Il<
pourront n'être interdits que d'une p«rlie de cet droita, et
pour un tempi qni ne pourra excéder cinq ana, ni <tra
moindre de troia ana , s'il n'a été bit que des blessures.
Le projet a été adopté dans la séance du 14 mira ■ le mi-
joiité de gS voix contre yS, mais jTec pluiteuri amendemeiu»
dont ie plus important était celui'Ct :
•c Sont compcia dîna les fait! que le code pénal qualifia
délits ou crimes, ou leniatiiesde crime>,el puniicommeteli,
les faiii résultant du duel entre deux ou plusieurs peiMttnes f
aoii que le duel aitea lieu à l'druie blanclie, on avec leiumet
à feu. »
(2âf)) Quelques mois plua tard , un maître des requîlet
«H conseil d'état, dénon{a anx ttlbuniux un article difla-
matoire de la Quotiiiûnim. L« directeur du journal ne mao-
qni pas d'oQtir nne réperation en cbainp clos qui lut reluiée.
~ S6 —
y<^ez let diT.erset profenÎ6iu de foi de U Qu^Udieimt mt
le duel , aux numéros 3 ^ 4 1 ^ t ^ '^^ 7 fi&vrier 1^31.
(286) En férrier i833| «n «Toué firovoqiiA es d«el, cv
pleine me, le substitut d« prqcuettr da roi prè« le
de CbarleTille. U avait été eApemrant fNMweiiiTi pour si
epTers le président de même tribanel |> et le léqeialloive de
eubstitat était le motif de cette profocetioiu I«*SEvaeé fiitceiK
damné, correctionnellemeiit. â^ dnq ena d*em|iriaQeMmeeb
Cazetiedei 7\î6unaux^ çmaraiftSS» «««alÔo»
(287) Le balle de BdU CaeqlMÎa-Lemeîfe empeite lecoUei
di rhabît de M. Rcspafl.
(288) Teett cette tliéesîe, fwe te iftyiirmaiiÉi eeoetfeeé
^défelepperdenaeeeleegM série de aaseéroe, «Vi pes ee
4e aaite,ei le joecMl liî-fliè»e a Ueatte e|née cessé de
fieraltre.
<289) Be ieiUH i83S| ke feimuiex fireei »eetioBd*BB
4eel» oii figeraient plesieers arocats de PoUiers, et ^ doeaa
eiième Uee à des fMNurseitee |ediciairee« •
: (3iM)) Geitte eiaira» «oaïuee cela eei éereev chuage, e
ité robjet d^■ll ertkle offidel, signé ^e Déeselm et iasésé
4ens tous les )oanuiiXé •
. <29â) La pfolioe ee oonteeteèe dreseer pieeèe-^cMI de
cet éTéoemeot. Un'y eut ascèse posissiee fedicieiiew
. (292) LesdétaUsdeeette affûreeet étéfsppoKtéeparle
jkfunmt de rjrdêcke.
(293) U s'était éleré, à Poccasioa des dlectioBa» sm pe-
Mmiqae înilente entre M. Le^agneer, préaidest de dumbce
k U Gosr royale de Meie» et Bi. Domés, avocat à le mésM ceer
fsécrk de M» DornéSi qet contenait ratteqse et le vépoese ds
M* Legagnesc f ont été insérés teztoeUeaMst dess r/sdih
pendani dt la MoêeUe , ds lo déceedire 1834, svec ss pceoé^
^Forbalt contenant toss les détaile ds dsel, et ^aé de éi
téoHsns. Le combet est lies es pistolet} M» Legegseer cet
le eeisie dieîle t«nrefiée d'eee baUe»
— 37 —
^19à,) foyez la Cautu de Fiance <Ia a8 aofit i83J. ' '
{in) Ibidtm.
(296) Foyet ta. CnscMe dtt TrOunaui (tu aS.MIobre i834.
(297) liidem, mtf a i%i5.
(298) f'o^es pliuiciui numéro! d« leptemlire iSII.
(299) On [cmjrquc les [«isnget suirans dans le iJJKOlira,
de M. An Lamartine.
n Un nouTcL organe ils collision l'est conttilné ontra les
titoyeni dan) la.pr(iM et dans. le jouinoliime. L'iiijure main-
leoant «stéctite, elle retentit dans toute la Franue el pro-
voque des récrimina lioni et dci venf;eance>. La loi doit mul'
liplleriesprécsuliol» contre deioccaïiona qiù leninltiplieni.ii.
n Je aais qu'il y a plui de courage a reAtser un duel qu'L
«n accepter dix. Dans un paya oii l'honneur est plus clicr igii»
laTie, c'est le courage de ce rcTui quu la loi doit suppléer.
Klte doit elTrayer par dus peines réelles, par des amendea.
■aineuses, tes provocateuii et les (Amoias ■.
u A débux de la Ugialation que Ton déclare impuiManttf^
•mployon*. cette force d'aMOciacton , la force la plus irrttil'
tible des temps modccnea^ cl que noua vovotii ri heurcoM-
nent appliqué à l'amorti sterne ni îles vices populaires chez
les peuples voisina. Des sociétés de tempiSriuice ont presque
éteint t'ivreisc en Angletorro «t en Am^iique. Le vice a été
vaincu pai t'smour propre. J'ose espiïrer,quedes assoiiatioua.
du même genre itouf la- suppreiaion du. duel, préviendraient
«c crime de nos moiui's et épargneraient le sang humain, u
Le 13 mata iS3S, il fut bit rap|>ori a la chambre des.députéf,.
-d'une tiouielle pâtiiion de M. de Rougement, contre les duels.
Vordie du jour fut encore proposé, mai* U> Dupin , pr<-
•ident de l^cliambre, quitta le fauteuil, et dans un diicour*
-tréc-iemaTqiiable, deroand.) ei olilinl le renvoi de la. pétition.
■n ministre de la jtutiïe. Uaas la siSance du 19 juin suivant,
|« mime renvoi fut ordonnA sans discnuien pour une yt-
liiiiiii de U. Baril, biioutier à Paiis.
— 38 —
(300) Voy» r«riMe MiibMB| dans U Bù>gràfikk
(301) Séance da ai ocidive 1790W Monùteur^ u* 99$.
(302) yoyn les débâti de laCmi? eatKNi MtiiMuileiMitoat
^ndant lea derniert mois de 1794 » M lea ÉUidtê kiaêorifteM
de ChAteaubriand.
(303) Fojrt^ ton. I , pag. 388.
(304) Cette, lattire était de M. Raynonard , dépaté et le-
Cfétairerg^néral du miaittre de la jnttice , qui a«rait été fie-
^•qiié|iar«oii,co)légiie»M.daLadr«|.doiit il «Tait deoMadé
lê.irappal à |*oidre«
(305) Y<Mçl celte piéca enfpyé^-àionf lea iomnums i
m Lea attaquée directea-de^Af^i V»: eokwel ,d» BdqaamUti
•caotitt le nsiuréclial miaiatve.^ la gaeive^ dana aon dîaMait
du ieadi i3 jnia à la chambre dea députée » uyuut leada îa*
diapen^bla pipar m* léjpargaiade Palaialie» le beaabid*ana
aatislâctîoii 1 ape .rencontre a ea lien au boia de Boalogee
, «ntre caa bpnprablei adyertaireu qui» api^ airoir choî l'épée
pour arme, oui. coauneocé iiii:;Maibal ^ui • dmré. plai da
dix mînates.M. de Oalmatîetflyaot dauf un mouvemenii rea-
contré une pierre, eit tombé à lafenTerae» M« Briq^OfiDa i^ett
ulora empreiié de lui tendre la OMÎUy et de le replacer aar la
bon terrain. Le combat a reoeaunancéb Cette fixa Fépée de
AL BriqneYiile t'éiant , après une aatea longue lutte » eagif»^
;daaa celle de M« de DalaMtie, a*est échappée de aea mains.
Il «*eft avancé droit tur son adYersaîrei qui lui remit aon onne
UTec empressement. Après un instant de repoa que néceadtait
«ue attaque aussi Ti?e , le combat reprit de noureau. hm aé-
TOrsaires se précipitèrent l*an sur Tautre» etarrÎTèrent bieatèt
.à aa saisir corps à corps. Daas cette aitoation lea témoinai qai
•étaient d'une part pour M», le marquis, de Oalmatie^ JL le
■laréchal Clauzel et le général Jacqneminot, d'autre psn,
JUL le général. Excelmans al M» Baeot^ député ^.ae jélércat
ontr'euzi etdédarèi^nt qu'eu gens d^honeanc ila.ue^defaiaat
enç.igetneni h
— 39 —
pal p«nneltre la conlînuaiiot
■litre. Le 1 deux coinlutuni te *onC «ouniii ^ celle déciiion ,
et le Hnt «^paTÏ) en se donnant léciprot^uement Ici mafqaea
d'ane ùutcbe et loyale estime.
Signet: maréi^hal Cddibl, JACQviMiBftTi
C. BtCOT, ExCEUtA»,
(306) Les ptua remarquables de ces diicouii fatentpr*-
nancéa par MU. Dupont, BTOcat, Tardicu , député de b
UeuTthe , el Armand Cairel , directeur du Kaiiooal. lit ost
été ropportci dans loua les journaux du lemps.
(307) Il y eut autant d'à reugle ment de la pari des pnttia
à précipiter la catastrophe de Dulong, que de tÉmétUé j en
placer les cause* dans tes lianlei régions île la |iolili(|ue. C'eit
la funeste entraîneirent de no* discordes ciiilei qu'il ÙM
•eut accuser du sing leraé.
(SOS) On a attribué à celle occasion dans le* joarnanx
ptusienn duels au conite d'Argout , nn enlr'aulre* qu'il
«nrail en ciant préfet du Gard , av«c te grand prëvAl de son
dépailement , et où ce dernier aurait succombe.
(309) Étudti hiilorifua, tom. II.
(310) f'oj-n tom. I , pag. Hj.
(311) U. Philippe de Ségur, dana ses Souvenirt, tom. I,
ftg. 3o8, a esijyi de iuslifier U méinoire de aou père, de
cette iaipoliiique ordonnance.
(312) l'ojtz l'article du comte de Sl.-Germein dans la
ttiogra/'lûe wiiVcrje/fc.
(313) « La gloire est an ciment si puissant, a dit le
géni^ral Lamarqne, elle enTironne un irAne d'une li lirilUnte
■aréole, elle fait pousier des racines si profondes à une dy-
aaatte nouvelle, qu'il ost politique de vouloir la guerre m<m«
■an* motifs- •> Séance de la Cluuaii-e da Dé^mlit du i5 jan-
vier i83t.
(31&) Cette comparaison cit de M. Salaville, auteur d'una
brochure sui le duel , qui a para en i&aq.
(315) Parit, rêrmUkM. H k* Fra^rnsM. Édtam. dt lU.
ton. n,p«g. 19^
' (316) Lt fnrear dn daely pttmil les élèrM de« écoici 9iB-
Uiret, Tfl quelquefois si lotiii qa*on Uns « tu «sgttiitt le^
Wig«ettet de leun fafUt ^poiic t'en «ervir ca «luivip dot k
*diiiut d^Aiitret avoiet.
(317) M. de C1iAtea«brieBd| qui reppeyrte ce tnh ^eatki
'Mèmcùrf sur k dite de Berry, ea nfiporie »n teisbleUe enue
tienri IV et Schomberg. Première pert.. Ut. I , CSbipu XII.
(S18JI n 7 eut à Angeitt , en 1809^, un dmal
célèbre , entre deen coloaelf » poor mae qiaer«tl# ^d
leléreaaer riioaaear de leaie r^îiaeiif^ On ee beitît à e»»
'tranqi i plasieare coapt de pUteleit farant écheagéi «■•
Vfltteindre^ On mil enenîle l'épèe à U meJiv et epcèt aa comi
\Êt de Tiagt nûaateei le comte de Iaa>oaiie|a , eokeed de
a8.« léger, fut tné.
(319) Qa iroareia plaikert mil» iatéreeaaae ear le njei
'de ce chapitre daat le DiiçtiMumr9 des, Fomm^s célèiru^
(3t0) raye^ r&ikcwv de U C&ewalpKb , par MH. d»
Le Carne-Ste.-Peleje, eux Mémcires 4f V Académie dnJbuek
(321) DiTefstnSudece«M«aûx(0Btdiècit6«aaCh«p.
zxn.
* (3SS) Per id tempai fiiciam eti malieraa» cevlamee«M.^
CàBi|cradele pagnaniaenl esaent qaa ob ean caaaem iaia
cmteraa nobîlÎMÛDaa Saminaa coaTÎciia coaseclatm , caataa
att ne qnm malier niquàm in reliqaaoi teopaa naneribwi
gla&loria fangereiar^ Dio,CA»êivê^BùUrom^id^lJaX\\
Quidam letlamenia formoaiBÛama HMlîevea qaaa ea^rat ce
pugum geaeve confiigere inter se slilaîl. ATaav « U^ IV»
(323) Dans aoire hisleire, U esl pea d^iréaniaent mîK
turcs imporiana oà Von n^iii va igarer dea Ceauaee ^pMlqae-
foia même an premier rang. Leur béroSsaie aVal encore ft>
gnalé dans les dernières guerres de la rèrolaliQii^
— 41 —
(3'2i) BEtuMAHoiii Coiu. de Be<i>v., Ch.>p. LXU.
(S'ÎS) 7-A^«(™ rfAonn.«rferAn..,lom. H.
(3^6) Bingr. anûf,, art. Matit>in.
(327) Mràoo-ci iA< lAïc a!t Richtlûu, win. Il,
(3Î8) ro;«i auiii «D Uun. I, p»t;, >%t > la notice t«r !•
tbevalier dïloB, dont 1« aese • ct£ û l«ng-temp« Kn graift
(32Q] Uoairôtt,ilu « aoAl 1814, avait rtmla appJkaliIe
k ta Belgique la code loUitaiie bollandaîa. Plu) laril, nn autre
ttHtb ptetciiTil l'aiage de I* langue kollandaite poar lea
•ciea publics dgni lonte l'ctenilae du royaume de* PayaBaa.
<330) Tout c«>a B éii païUilemeni dtielopiié dam u»
éciit de M. Nothomb, membre de la clwnbre dea repi<iea>
la»* belgct.
(331) Omniam harum gsnlîum vifMM prsKipBl Battfi,
Ik mor. Ge™. Cap. XXIX.
(332) M. le chanoine de But ei plnaienra uitrea crilii)U«i(
«ni tiiceminenl attaqué rnittcnce deijhreiiien de Flandre).
Ceit un point de conuaTCcse iûitoiique qui nVu |ia« de œoa
■«jet.
(333) Conme l'a lemarquA Chateaubriaud , la polilique
de Louia XI n'était paa de l'a^randii au dcUoci, nuis de
cODililnei la monaichie «baolKe tur lea luinea de U (èodalitt.
SiMil./ua., tom. VI I pag. uf.
(334) J'ai cru nécesBure d*eDlre[ dan* ce* délailt biito-
rique* pouf t'inietligence de ce qui va laÎTrc. Ce conri pré-
KmiBaïre ■ éti l'objet d'une ciîtique dca plu bienTeillante*
de la pari de M, le baron de Reîlîenbeig , ancien recteur de
ItJniTeraité de LoBiain, à qui je r>ii soumii pendant l'imprca-
ùondet inUt.K.de Keillenberg ricuseiuttoutle témoignage
de RoberuoiT et celui de Voltaire , en ce qui louche l'impor-
tance des Fays-Baa afani Philippe U<
M, de ReiSfenberg le propoia de réhabiliter, soua cerlaina
npporU , U méraoiie du duc d'Albe , qu'il croit calomnié.
Cett BB point de nut hittariqa* qvM a éàik îpâiqmé itm u
•Btante HùêmPêdê la Toimn ifor,
(335) ArtSTelle, et aelott d^luiCree Artevelde, état te
gentUhoaune ^ iPéteit Mt iflcrira deM la aiécièr de bnnevi
poBr aniTer eux aiegîmetBi^ amBJrfpBlee et aagnMBler aoi
lef BeBce. Cette iBflBBBce deebnmefi est edcocv trée-gmèi
BBJOBrd^hai ob BelgiqBe. Bile {oœ nm riMa pincipel daaf tel
électioBt. Ob b BBid testé léoeaunent de léhaliilîteff la aè*
moire dTArtereUe.
(S30) 8i cette BiclBtieB Butait pat- eacafaAtécoBacNaaiB
de fait , oa peat dire BéaBiaelBa «{ae le clergé en natie poa*
wt l'èntreroir e« foad de la politiqaa de la nuûaon d*Ûcan^.
(337) Ob troare aae ifttératiaBte deacrîptîoa de ce dad
dans aae aotîce intitalée : Re^êrehês mtr Isa Juifs dès Pn^s-Bs^
par M. le baraa de Rûffeaberg. jtrMixs Aûfort^tfej ,toai. V,
pag. 3o3.
(338) Cette notice , est à pen de chose prés , conforme s
celle de M. Legtay , dans sa Lettrû air ies Dtseis fudicààres.
(339) Cette proTOcatioB fut rédproqae. J^o^^cs ton. I|
pag. 6 et la note 7.
(340) RATVALDit LinXLn, %^^^HiâU des Papes^UmVl^
pag. 83.
(341) yojrez Bababtb i Hisi. dès Ducs de Bourgogitek
(342) Le dac de Charolais fit mettre le feu à la TÎUe, et
son père eat le barbare coarage de se fidre porter ea Utléie
poar assister k ce crael spectacle,
(343) y^yez BAaAKTBi HùL des Ducs de Bourgogtte,
(344) Foxez Basvâox , Disseri* kittor, , et Roacarsov»
BùL de CharUs-QuifU , tom. I.
(345) Il exisie plusieurs chartes qui dispensent les nlles
de Flandres des lois sur le duel. On en cite une de 1117, de
Gaillanme de Normfindie , comte de Fiandrea , et une aatre
de Philîppe*âttga8te» de 1187 accordée à la Tille de ToarniL
Poaniv I HSit. cfe Toccmot | tom, II 1 pag. ia«
t- 43 —
(366) En i5i4, J«8n Je Héiiio ■ Lii'tiiril , sei|;nenr de
Boaisu, m Hninaut , asiisUit j Brugci à un I>«l nusqué <le la
cour dé l'eaipereDr Chotlei-Quint. Pousté a buut p^r le> ■ga-
leries il'un niwque, il l'appela en chani]! cloa pour le lea-
demaîii : Je y ici'oy, Ëouuu , lui répliqua le masque en loi
«errant fortement la main. Le lenilemain, Jean de Hénin
courut au rendez-foua , où il trouva un ctieialier armé de
ie toutes pîdces qui l'attendiùt. Quelle fui m lurpriie , quand
le clievalier a;ant levé m Tisicre, il reconnut Ici traiu d*
l'empereur qui lui dit en riani : Comte de Boiam, i/uand fe
voui ditoit que je y aeray. Le comte se précipita aux genoux
du monarque^ et lui demanda comme gritce particulière d«
prendre pour cri de tes armes le ; Je y leray Bouiiu , en «on-
venir étemel de l'honneur insigne qu'il avait bien *outu loi
faire. Celte deiise est encore celle des armes du comle Man-
ricc île Caraman, poasesseur actuel du domaine de Boussn.
^njiù^i hiit. du Sord de la France.
(367) « Plusieurs villes des Pays-Bas , dit M. de ReifTen.
berg, araient autrefois le privilège du champ clôt, Bruges eo
jonisaait, et c'est une des raixons qui ajoutèrent ■ l'importance
de cette Tille. Le champ de bataille , dans le Hainaut , était
Valenciennes. En Hollande c'ëiaicnt Leyde, Delft, Lu Haye et
Marlem. Ce dernier Était le plus cèLèbre. La maison de Wat-
aenaere a long-temps poBséJÉ la chargi? de Kred-lf''aanUr,
c'est-à-dire d'inspecté ni des duels, u HUtoire duCommurcu de*
Payi-Bai aux X^.' et AT/.' tiède , pag. 35.
(34â) L'arrêt de la cour de Bruxelles a été rendu dana
l'intérêt de la loi SEulemonL Ses consîdérani sont Irès-éten-
dus. Ils reproduisent les mêmes srgunicni que ceux îles coure
royales de Franco , à l'excepU'»' <^ celui-ci qui m'a para
entièrement neuf.
■ Attendu d'ailleurs que l«s dispoiiiionc dei lois antérieure*
■ut le duel, étaient rcstreinlei aax combau dans lo*queb
figuraient des gentilsbommei; que le* combat* singulierieutie
.4ivMl»Mt a>KÎtlii0afc ytoinny te ■•lli^i■
iJKltfihtfto fnadnîft» pir là Btfhrtinii fnpiriii^ «tifiâmi^
.xiMîiidvMi il«- hdMiM di^dippoiiiioM.4u8 le». kfeaiM*
. (3A9Jir<9(Mà.U.itf^»43a,l>HdBt-dib jow.d«.B^^
ilii,giMUir« d» Fgmc», 4» ijetdHuw fmfflrgton— dodtfifc
.feiftritv oivtttMa tapéfiewev
.. (?aO> CMWfcfcmairtèaÉMWWy iiiPiwIi tym mumÊtu^ fiait ipa
r IimtcaMft&aii^tid«iwMt«MiÛÉC0'P«dk
ea Bspagntp. à. qaelyiM nq<nc<t nrè>.y on. milwB da-tosMi.
(?52> li aaôMe. eotre ie< oMt«it. etptgaol— e% iialieBMi.
I^lns d*uA trait dp. coii6Mriiiité..CeftauiM4||L'oi& ]f pgati^we «tnL
«deprâ loBg-tempa. 1& terrible f^tndttta,. Des eîciiiet y Cml
•frofeMion paibjtqi^ de ae loeer pmur L'esofces e«. profit dai.
.fertiet infcéreiiéei» on iea appelle Banâderu.
(352} Si l*oa ea croU lytelqeet liittocieiia;, PAnglatane^
eorait eu aussi set amazooei. Voy^z les exploite de kLaeiaa
iVoedicéy à la tète de citM| eùllft englaite^dena I^Ajuun« Wsl
éTJfigU^ tom. II 9 pag. 27.
(354) U loi d*iiia (/« ^MKatvi(iftiis.ettd«.liiiÂtidaie ûbiÀ^
— 45 —
'J^aytt ini>i celtci <l'Edniani) Jini le ilnd^m? «i<c>« rfe Bomi-
cidto , et ce]J«s il'KJoiuid*daiis le onutfme i/e ;wce rrgit, tpad
L*Hna[> I pBg- 3, ?a, 196 et laS.
(355) Selon Ripin-Thoiru il n'y ■niait pu en de cooibtt
entre Eilmond et Canut 1 miia un limple Aéh. Il cite â l'appni
de celle opinion Etbe1r«i)e,H9niiiignRelMathien de Weti-
vinsrer.
(3^6) Sblbbs , «f lU duetto or ting. Comb,, C. VI.
(3â7) H En Anfileterro , dit Robertton , lei principes de»
Saxon* lur la vengeance personnelle , lur le droit de* gu«Te«
priiÉcs et lur U composition due à la partie oHenfie , païaîi*
•aient avoir <té à peu pi4) loi mimes qne ceux des peuple* dn
continent, a
(358) D'iLiYMn.! , Hittor. of/end. prvpert. Gip. t^II,
(309) Es 1109, A6& ite Louii-le-Groi, roi de France, k
Henri T.*', roi d'Angleterre. Ducbbsve, Hiit. de Fr.,\(ttn. IV,
Chap, XV, pag. 396. GoreOT, CWt A Màn., tom, VIII, pag .54.
(360) On trouTC daiu le mime recneil et dani !a col-
lection bien ptui co(nplette(/iu<A»/tMonù,un grand nombre
de monuioeni teinfalablei.
(361) Rapin-TIioîra* a relevé k ce lujet une errear «M
Polfilara Virgile , qai avait attribué la dénonFiation an comtA
de Norfolk. Hùt. d'^ngt., tom. III , pig. ïiS.
(362) LaanBT,7/ùt. <rjn^'., ton. II, pag. 76B.
(363) foyez au tom. I , pag. 5o le récit d'nn Juel , dont 1*
M)et fut abaolument le même , et qui eut lieu en ptéience d«
loi Charles IX.
(364) Tous les détail* du duel de Doogla* et Kennedy,
■ont rapporté* d'aprt» la mttinscrit d'Hendrick , dans le* fa.
néiér tàitori'pia dt Si.-Omtr, par M. Pieta, LibUolhécaire do
cette fille.
J'ai auiri rencontré , dans le pcécienx d*p&l de* archivei
de l'ancienne cbanlte de* complet 11 L
leilrcile tarlcl Ue Konbroï , comte de Ni
mal d'un
igliaoi, mu^cbat
tf Aagjeterm ttia e<Wfcte àê Békmmn » ééë ée Comej. Gècuttl
••I écrit cUnt la forme ofdrâiAre«Il4||iktédâ loiavtieriSI}.
(36Ô) On Ut dam la via da onite d*IIaiBUtM« placée ea
tête det JfaaMwr» da caaitedeOiaaiaiOBt, par M. Aager,!!
Mît iltigatter tar la aMoléie doat oelal-ci épèvaa la aoerdif
L*aatia. l<e comte de OramaMmt, apcéa «voir po«r eiaii At
cooda cette «aioa, avait chaagé d*avU. Il diercba aiiêiBe è
iffuqahrer de Loadfet poar t'Éfinmchir ide 'cet éufftgtmeA
Hait HamiltoB le toivit i et abocdaat le oomteVui nMMaeatoèa
SMttait le pied earlevaiweaa qai devait le taaieaer eaFIruoe:
IWamyrAi Monaimar, M dit-il| d'aa tim aigniftcatiryvoat
eMWfli 9M0I9M0 dboM. -- C'ait am, rdpliqaa l*a«re /fia M
^ipouÊtr mmdemoiêelh voftvjoBuryetilreumnuiàliaHlretoi
il a^exécaia de bonae grâce.
. (3fi6> ▲aT.i«r.-ABcaa officier o«idiaat«*«BlB|ariemu
OTapOf oa le.pgovoqaera de gertea ea depanleoyaoBipeiiet
poar aa officier,d'étre mit aaa arrAlti etpo«r va aoldatyd^ltiv
•mpriaonaé et denuader pardoa 4* la partie offeneée» ea fié*
eanoe de toa offider comoiaadaat; •*-' *
a» Aacmi officier oa aoUat ae doaaera ai* nVureiia de
eortelitoatpeiae'ipoar aaofllGief^d^êfre oané» et poaria
eoldati de taliîr «ae peiae corporelle à la diaorétioA de la co«r
aurtiale.
3* Toat cffider qai aonfirira qa*aae peraosae ee batte ea
diiel f ' aeta coaaidéré comme aatear*
■ 4* Il ea aéra de même de celai qai en inaoltera aa aatra
poar avoir refuaé an cartel 1 etCt| etc
, (367) f^o^ la aote 375.
(368> f^oy^ VUist» itAngL 1 de Hox a et Smo&btt;
' (369) Lea joamauz da a3 juin x834 oat parlé de ce profeti
doat la base éudt Tin tti talion de coara d'hoanear, poar \ager
lea querelles entre partiénUers. Lea peitiea poar lea fonction-
«airea deraient être la privatioe dea emploie» et poar lea par-
ticaliera, celle dea droita dvila et poiitîqvet. Il paiatt qae ce
projet n*a pat ea de faite.
— 47-
(370} LenjonrnRUxangUùiIumt
toure II corrcsponilniice qui eut lieu
(371] Lei mœur* anglaisci ont ci
réprimer l'arileurdes gens à humeur
3 ont publié
Je ce (Ivfi.
e moyen d«
tdiquc CI queielleu^e.
Il consiitB i lei consiiKrer caoïroc absens. Oii oppose i
lencc tjitimilique i touiea tcurt pToiotitions, On tait *em-
Uanl lie ne Ici voir ni les entendre, et on agit en tontenver*
eux coairoe l'ili n'exîitaicnt paa, CeU l'appelle emvfv à
Covailiy.
(37?) foyi aniû l'.45r. chron., de LicowiK.
(373) SoBi le mémo roi, on (cigniur, nommé Greppa,
«ccuié d'iToir violé la reine , appela en duel ton acciiuieBr^
qnoiqae le fait fût constanl. Saio Gi-amm., Hùt, Jan., L, IL
Froihon puae pour le lë^ilaieur dea dueli icandinavei. On
til dana Voit de dueliU, Cap. fl : n Protlio eam tnlit legcm
Ht omnei lilei lingutari ceriamine deceniereotur tpecionai
liribui quam yerbia conHigendum eate raïui. u
D'aprÉi cette loi , leacombattana devaient £tre reaencaJans
■n petit espace couvert par une peau de neuf aune* de loa-
gueur. Celui dont le pied lenlemeni a'éciiioit de l'eapace,
élail conaidéré comme Taincu. Êdinhurgk Rewiew , aoAt iSio.
(374) yo)-n le recueil dea lois intilnléi Legci Guialhia-
gtiats, cité BU tom. II, ]>ag. 178.
(375) Les paysans norwégieni se battent entr'eun au cou-
teau. Cette arme pend tonjourt à leur ceinture. On ataure
qn'arant de combattre , chacun tance aon couteau contre uua
table , et que le point d'honneur leur défend d'enloncer
Tarme dans le corps i!e l'adiersaiie ptua «vaet qu'elle n'eat
entrée dans le tioïs. Eigiiiiut du If<ii^d, par M. AxrL».
(376) Art. )*'■ Duellatomm uierquc liim protocani ,
qniaquii ut equeasiie pedei, tum proiocatiu , aeu voce , sive
lilieria,ab oRiciiiiuis renoiendiel bonis ommbn«,<ina morte
pro drcomslantiis cauts cognitte, mutclundi sunlo>
3. Propugnaioresbii^dopiaiiqui in loco eonfliïiioniiptwiii
^«8 —
tarant I «iti deœrtttwot inigaft fvobibeant , poosâ mvktaitor
connmili*
3. 81 ^it pffOTOCgtkMit hand ptnierit smllit iàeà imborui
ccNlUBieUit lacenuidmt ctUK
Leg^ dmde* Ed. HoyMmd, Bmamm 1710.
(377) Ce trait àê OvMTa a été Pèbict tf'ka MMceaa et-
Henx , imliUé par la iUime èriiÊtmigm, €m oMnra 18S4.
(378) Alexafldtr ëinkatarva cwb furaiimai legtDm
daot prodasdt adl^tqaoïmBi alteraum pefaonam aailiaim»
alter Daitt...». P&vTAftC«»| imviU Ah»% la^wf.
Vold le texte de Tadte e Bjaa geatia ^àA beUvai est cip-
Hrmai ^ao^ao OMido iaterceptafli ona elcctt» popakriaa
aaoraai patriit qaeatcaai^aearadi coauidttmt.Victoria haja
tal illiat pro prttjadido acdpitar. ih Mer, Gmm., lik L
(379) « At ilU in maubA feritate Tertatiariflû aatas ^
meadado genat , rimakatet fictaa Xitàmm wiiM et aaac fM*
Tocantet alter atterem injariAi aaac ageatea gfatiaa faedien
roHMaA jattitiA finiiat et aolita arada ditœnd {«• tendai-
leatar, ia aamnuun •ocofdiaai perdaaira Qriiicfillaw. »
(380) « Saadpere taai Initniciriai aen patria» aea ynifim^
qnàm amidtiat aeceaee ett| nec iaplacabilea damât. liaitar
•nim etiam hondckliam oerto ameatomaa ac p^coni— ai-
■Mro 9 redpit qae aatiafiietioneai mai?ena domna. • Taot^
de MoTm Gérai*! Cap, XXlm
(381) <i Lerioribat delictit pto OKido poawtfaaiy eqaanDB,
peconim qae namero convicti malctaatar. Bue makt» it^
Tel cÎTiuti I part ipâ qai Tindicatar rai propiaqni ejat cnot-
TÎtnr. «• Tacit., ibidem,
(382) Robertaon cite cette charte d'apcéa Scsiimnri
Histor, Zaringo-Bad, v« 5» pag. 55.
(383) « Si qait iageaaaai hooûaeoi tali pnMaaiptioiie
percustarit per tuigalot ictat» tiagulot aolidoa aolfat. »
« Si quit ingiennum hominem per capitloa arripaerîti d ib^
maaa, II tolidoi îaferat \ ù «tiàqa«t IV* M «kt» ai
soUdot VI. M
« Sif»r>ai infrcnBBDi hominem pvgno pefCUHiirit, cfeïitda
fiiiiei accipiil. ■> Leg. Burgund.. uï. V.
« Si quii lioiDinein libErnm aubità snrgent« rii) pcrcniferit
♦t litoren «nt nilnu» feceril pro uni TerilS componal «I
toliilf» Il : Si duLii soliao) VT : li ire« IX ; li qnaïuor XH ;
ai Terùatnpliùs non numeranlui, leiiait cantentut. u
n Si t\n\» alium pu^no percuiierir componat iolido* lit, «I
aUpam iledetii lolitlot tV. » Leg. Langni, lii. f'i, Cip fil,
Li loi de* Bjvaroii icconlait une coin|)oiilion double k
plusienii bniîlJeSfdont clic Honnc lei nomt , tellei que
Hozidta, 0*i«,Sagiiiia , elr. Elle en accoriliit une qaadrapl«
av( Agîiotlingseï qui étnieni de la tare ducale, »ftc na
«ippifinent d'an tien en su( pour le duc lui-même.
(3$4) R In palaiin quoqiie Sera coines Bareinonen.'iit, cùn
impFiereiur ■ qnodam Sunili et infideltUtii itrguerciur, cum
«ai|PTnKcunJunile|;em propriiin,ut potëqnia ulcrqueGotbn*
eral, equeitri proelio congrenus eal et Ticlai. » Tnioaa, ût
Itlâ Liidovici pïi.
En S3i le duc Bernard demanda an mémp monarqne i te {m-
lifierpaTdue),nwv Franrij loAVo, d'une accuiattûn temblable.'
AncBA champion oe l'éunt oITert p«ur le combattre il faC
déclara innocent dan* une aiMnbtée prëiid^e par l'eapereur
i TIiJonTlIle. DccniivB , Script, rtr. franc., (om. Il, fatio 3oS>'
(3S5) La CotOMtiâkl, ThéiU.ifhoim.etdeChei' tom.II.
(386) Ce duel , dit DKbmar, fut blumë de font le monde
ai ce n'en d'Adalbert , arctietèqae da Magdebourg et du Uar-
gTBTe-Tbiorti.
Il paraltnii que Ici dueli avaient troaré plui de {**enr prèa
dei évêqset lUenianda , qu'en ancnn autre pay* de ta chré-
tienté. Une conititution de Burfliardui , ét#que de Wormi ,'
ctdonnut mâiae ie combat dans ceruinei ci rconi tance*. En
£x n^ira liicHi dunlHU ttilîmoniû tho fligaiilur ad fMgnam
(1 ruw diitllo litim ilrctiiinnt , tt cu/ut ramjiiv Jt^dtril ffndM.
33
X3S7) VHuioirt ikê Àlkmmuh^ tnSmit» de Schaûdc « v»
li. de Ijifemz » omtîeBt «m §fnà womhn èm traîti fin et
ttoiMcnrieu «m CUt de dpelf qe^îl «inic îflipoeAle de ce-
lirodeire id. le iMl bernerai à dlv lecenbec d» DtaMri frète
de Bemerdt dec deSuM, efeemade eee leieeem aeeuid
âraeld , ^ VwecmaA dlleidélM eatere PeapaM». DHiur
f»t ted par MW edferaaire. le «lleni «booi« le défi de Ro-
delphe de Seei^ à rafif wur Heari » tid,epff«e Feriirac-
«rpcé, M fit remplioer per me cbaspâm* Gee deas tnnis tom
tiret de le Chramqmê f de LaaAertat » ess enaèee 1048 eiio^
(38^ ti ProBdîCtani îglmr probetkHiie modiinr pcr ygiim
^delioei fBO \tLrt Praecoram TifeelMe hMSt/màm edébantir
tàm cifcà priiidpalea peraooea eam ailii ûiTioeai effsceado
^«àm dfcàperaeees taetànm isvfeem prodactorwÉi tàn n à-
Tilîbet^pUai ie Griflûealilvet cnuia» decMMte ^àUnntm
eablatnm. w (km$L Sk^^ Uh. MI 9 dt. H.
M BSonomachiam qa« velgariter daellDni dicitar paeds ^u-
bnadani caaîbnt ezceptis inter baronet regai Boalr« dftioù
■abiectoa ia perpetaaia Tolamat locam nos feeVereb Ab bifat
eetem aaactionia lauaaailate prwdedJame luMakiidaty et a
per pMftMdoaea aoa pottiit fiudsat coaipciobeffi » taac daate
ad pegnti iadkiaa ladidit pcttcadeaiibat deeeeadataK^liîtf.,
9k.XXIU.
(389) m DecrerU idem impanier gtetificatarae heapitibtt
«ait mertM Germmmê ad tmm dum ùuoUtum^ eed aobîlititi
GalH» BrâcaBBiM^ae atSiatam indaoerei eolettaHms legîbai
eqaettri decardoae certandi..«...« » Pmmdecu friMa^i ia-Cv
f^wKof. 1586.
<399) Le même aateer rapporte plnaiean textee d*£îaii
Sjrltws^ qai proaTonf qael iri6le important joaeieac let teer-
noit dant la ne dea aeiKoean alleamadt. Albert Mergrata de
Brandebourg, {oAta à ontrance inaqu'à dîx-aept fioéa. L*em-
perear Masinûliee !.•* aiouêt cet ezerdcea avec paaaioo ety
figura toafeatea pertoane.
-^ fil —
. Tbi#TTÎ, iiebf^^qnp H^ Miyince, donna on tournoi en cette
Tillp en 1480, et il écritit au pape S'ixté ,que coinnie on en
•xclnaii les gens d'une Inconiluîta notoire, cela contribuait
1 ramener bennconp de monde dnna le droit chemin, Uitt. dtt
jHUinamlt, tom. V, )Hig. 48)
Wichmann, >tchevC<juc de Migdebonrf;, condnroruît an
cancriiire ces exetcîrci, £n 1 175, un fili de Thierri Margrafa
de Misnie , uyani àti loi duni une joute, ce prélat lefuu
d'absoudre le mort de l'excommunication , à molni que toit
pire et plusiouri teigneurt de sa rumilte ne promissent pai
•ermont de no plus faire de lournoin, Chivitic, Moiuù Streni
ofHuI Ml(r«m« , Ftr. Gei-m. Seri/it. , tom. II.
(391) f i\o. Celui qui, pour quelque canse que ce soit^
ptoToquc quclqu'nn à se baitte avec de» armes raenrtriëre*, et
qui , après un semblable AéR se présente au combat, commet
le délit de dael.
■ 41. Si le délit reste sum suites, la peine est ta réclusion
■ 4a. S'il en i^snlle une bleuure , la rdclnsioi ier« de ciHi|
■ 43. S'il j a meurtre , la réclusion sera de dii à *ingl au«^
M le cadavre du mon sera g^ktoU lion du cimetière.
i4t. Dans tons les cas le ptovocatenr doit étro |>nni plu
M^vé rement.
1 45. Celui qui 8 contribué i la proiOMtion , on qui menaça
de méprit celui qui rcfuie an duel , est puni de prison.
Técli
\f}. Les témoins du duel sont pnnis d'un an !
<B(it la giattu- de ce qu'ils ont fait c
In (pal qot
(392) L'uuleur de cei opi
le litre Je : Hfjlaioni d'uii lut
la Miuiqut , '■ J'" fl ^ l>'"l
pjles, pTOcbe patent
meiulifc d« l'Institut
li: qui a paru en iSia aomt
du monde sur tci SpectacUi,
M. le comte Je Forlia de
énr table insiquii de Fonia d'Uili«ii|
(393) Uilfl«ci/'i$JWoiir||fc»lMkZLI.|M«.78eli^4
contient nna notice en pine gnnd intifét wmt Icn dnele dent
les nnireraicéa «lleouiadet. £Ue a trop d'éfeadiM powèucid
nnnlyaée* Let OMrpOMliOM omumms eoae to Moai é& MundÊm,
•ont MMimiaet à nne eipèce èe ténlemot nppaM fîbef , fd
contient do nonUunnuoi diipoeiliQni «nr te 4neL 0'n|lfèt et
codop fininre la plnt gnwo «C U fnnKficntioa do Anar
AMife(ienneliéte).
(394) Il ternit fiidle de Hudliplior cee cttotione ponr l*é|io-
^no nuiderne; meit ie m'en «bftien», rnnioffîté dee fonnini
#è M ponnièit lea pniier n^éunt pât tott}4mre «no gerantit
«ifiSsante.
iS96) Qoà de cêMMk Helfoln qmo^no roliqvoo Gellm m-
iKtepieiçeduttt. Cbiae. Comm,, U. #. e« a» .
(396) Je parle ^« ee trait comoM ae liant HtfûnMentè
fhiaioire de U SnisaOi mait mm lion préînger .anr mm «nitaf
(397) « L*inînre , qni ne con^sto pet dont rnccntatioa
fpédale d'nn cruno coaunia , eat dé la conpétODoe dn {nge de
pain. Dana le oaa oontraiie, la connaiaaanco en appaitientaa
IlilMuai Qîfil.^La ptenTO dea fints in)nrioax a'oat pat adnûie.
— 8i la demande en réparation otttrottféo fondée, la défendev
•at tann de comparaître ponr dédaver qne contra la Téiité
il a bletaé PiMMinear dn demandenr. En cat de folna il atf
condamné à dix îoura de priaoa. «•
Lea procéa en réperatioa d'hoaneor aoat extrêmonMnt rarei
dana le canton de Vend. Le magîatrat qni m*a donné coa dé-
tailai n*a m qn*nn aenl exemple oà. IWEure ait été paniria
}ttaqn*à aon dernier terme pendant hait ana q«*il a aiégé aa
Iribanai de Laaianne.
(398) Il y ent à Genève, de 1819 à i8a8 daiu nu espace de
dix anai qnatre procéa en dénonciiUha calomnieuse, aoixante-
dottse en ajomnieê, et cent trente-dens en i/^uresetmemmcm*
(399) Je doit U plupart dea renaeignement dont j'ai §ml
— 53 —
■Mge&MM chiffre, ;> la tiienTeilIanre de M. GuJIUnn*
Prëvôl, juge iD tribunal ciril ilc Gcnéie.
Du reste , cet honorable niagiitraE eit penniilë i|He toat*
pouDuil» pour ilufl , aauf le ca< de d^loyautiS ei île pertûtie^
•enit «ana réiultau ilerant lei ttibunsui de son paji.
(400) Inde cum altercaiione congreasi ccrlamîne îrarnia
«d ceedem TCTluniut. T. lÂv. Lih. I.
(401) Meiiui arail ■dresat' ca iMR ^Manlio» : VU M M
Ipie congredi macnto uc noitro duoroM jam hinc erento cei-
'■atnT «luantùin equei iMinna Romann preestcL Ibidem,
(402} Foyn te niagniRquc tableau de ce»iniaaù>ii9iUiia
■et EluJet hitlorîipKi de M. île ChMcoubriand.
(403) CiMiODOK., £j'Â, Tlt , Ep. x\, p.ig. 43.
(A04) Ce morceau est d'une grande bemlé. Comtoa il eu
4leiidn cl qu'il ae tiou«a aujourd'hui dam un litre qui eai
•ntre lea maini de tout le manda , j* ■n'âbitiena de le tepro-
dnire.
(40â) • Contra Langobardoi paucila* nobîlilat qnod plu-
rinii ac valeniiiainiia nationibut cincti , non pe> obanjmnn
»eà prtelSa et petictîtando tuli snol, ■■ TaciT., de mor,G«rtn.f
Cap. XL.
(400} k\moin,HiH. tk f)-ance. Li». tr, Cbap. XX, dt»
cette anecdote avec quetquea fatiantea. 11 donne pour cliam-
pîon à la reine ion câuiûi Aribert.
(407) « Sed propter coniueiadinem gentil noatr» Lang»-
bardonm I^geH împiaro «eiare noa poaaumas. » L^- taigo6.t
Lib. I de Monomach.
(lOS) Mulicii accnuw de toblato per *enenum narita
lîcebat ae purgare per jnranientntn >el per campîonem. Irera
qui alium cucidlwn Tocauet tenelwlor pet dueltun probato
Temm id etae.VosT dt Dueit. Cap. yi^-^Ug- Long, de Malef.
lih. 1. _ Ftrtdor., til. 17.
(409) p. Rntiliui coniul etemplnm aecntua e> Inda C.
4«i«lii Scaui docMnbM gladiatoriua acceuili* titamll U-
— £4 —
^me infertsdi iclM tiUrtilitaara l«gtbmt iageBftr«TiU Won-dt
ihielLCap,y,
Athéoie fait hosMor 4e TinfCiilkM de IVtcrime à llcf-
mippat de Mantinée*
(410) Voyez %%t cette vie de CrilU» » publiée à Fluîi m
i8a5» lavote i34,
(4H) f^q^esBÀAVTAM^ZMfc, jMribff l'kMlh
(&i2) Ko^es hàMMMt 9 jyûc d'Jttgjkt.^ to«« n,
(413) Cea diTft coatoi ecttit a«irt rapportée d— • b Vie
de Bayaid par le loy^ JcnvMa^ et vepredaitep«r M. de fiortii
drUrben dana m ykd$ Cr^Um, mm. Il» f tft.
(414) Oo contmltem «fec firait ev le* d«ele M lei
dtt moyen-âge en Iulît| VHùêoin dbt ildjpMMiyMt
par M« de Siaoïoedi.
(415) ml/êxiMme^êmhprmétriimêktkPÊmm^iktfîà^
fifmif hl>roê9Uiim4$c$tkoà9Mlfp^tmm 4^mk et h t^iiti
tmm'ê 1$ dUfx^, m Gwaieat doac cf paMkiile aV-vU n
dsM le d«el qaVtt «M o» nmm/mÊfP^
(41tt) Je dok cea fenaeigeemeat as wiisa aMf^klHtfn
aiVidcMiBé ««« aar la Saiw» » VU Om^Ummm grtvtt» jage*
Gtaéve.
(417) Le chapiue V dea coaaliiBtioiia dm Pitetat , dt
ij octobre 1642 , contient cin<} artklea aar le daeU La pnae
de aort| arec confiacatlon de biena^ eat pronoacée cOitre
toate pertonne qui donne oa accepte an cartel » wèaie cœtie
ceux qni aerriraienf dç accondaoa punidpavaîeat pu <}boî qae
ce toit aa coabat.
La Lombardie eat aoamiae aaioaid^ai an oode péaal n-
trichien , dont lea di^iaiîiîoiia aar le dael acwic dtéea ca U
aoie 391.
Le liTre V, titre V da code d'EM» pablié ea 1791 pwtf U
duché de Modène » contient qaatre artklea aar le dael qu
•embient calquéa aar les conacitutions da Piéaoat.
Le rojaame de Naplea eat aoaaua ponr le dael à qaaue
— ÛJ ^
gragmaltquet de* j juin 1540, J ileteinliie i63i,9 nai et iS Aé-
La [ixctaiéit pnagnuUique infligeait MH doeltictet la-peia»
de mon -, U MConUe a réiliut ceue peina >• uiie reltS^atioB 6»
e amenda de deux rnilJo Aut
I^ uoiuènie fitagmaùiiiu double la. peine de U cél^golioa
«I de l'ameiula en caa de récidive.
EnfiA le c|uuriènie pragmaiiiiut , puni.de dix •ni. de r£l^
aujon et de deux mille diuiU d'-imende, le* tecondi i|ni
coinbutent en. inéiiie tempt que la* partie) principale*.
(4LS} Je doîi U plupart de ces intéreiiaïuidocBmeBi tat
U Cône A l'eitiâme obligeance de M. Eougeroiu neieu , in*'
peclenr géniraj de» financea, j qiii une auai longue récidcncs
en Cor*e, ■.peunia.d'étudîM avec fiait le* qimiwa de repaya.
(419). fcTTcx auwi lai lea ntauxi de* ancien* GuiloU IH
■otc* de* clupiue* IV et V.
C420) rojes lom. U , pag. Saî.
(ISlJ J'ai puiaé ce Irait dana le* Somtniri de la maryuiM
tle Ci-igui, ^Bl le t^ppoiU d'»Eiii* de» Mi'Hoirci inéiUt da
Caglio.!™.
(422J Docto», «<■«, icoeu, «an. li, Lif. YI , pag. 338.
^itit. dt lyi)).
(423) Le code pénal militalM, irapriné l|Oor la.pîemiÉT»
bU à Daulzick le 3o mars i7.6d'«piè» l'original «giift Je I*
■laîn de Pierre If', toniicni uiLcbapilrc ans k di>el où l'oa
semariiu le* diipociiiont tiÙTanle* :
Ajit. 6, Quiconque jKOvoq^eia ton anncmî sd daal , »er«.
|CndiL, loi» même qpe le duel n'aura paaen lieu,
7. Le* Umeip* doiw»i.»ut»i( 1« oiÈine peine *'ili n'onl p*«
Uit ton» leur» efibil» pour cmpitlier le combat.
8, En cal de diipBlei et de «oiei de iaii, l'a(y;te»*enr doit
deaiander publiquement pardon * roUenu: , en i>rËtence du
tribunal miUuite.
La. Celui iDÙ donne lui M>urH«i,doit ubii lapeiuedutalioB,
<H gifiacKc de* tiawU* de l'oUtiu*.
(404) Vof^ OAmimll, par Ifr^ la^aolMtMdPAtaMèa.
(425) Le chrUtianiime^fut éubli en FolofÇM e» çfiflw H m
!•&<«■ FoMennîe ^*mi coniscBceaieiit dm Xn.« tiède*
(436) BoMwvt, êàBi^fUk.ir, p«g.743.^CAUMufii
• Hor. 5ii5eM., C. JTM.
(437) M. I.el«w#, à ^al l'ai oMmmiqvé c« dMfte
Afant l'imprettîoii des aotatt wH iiit TOflULn|«cr ^«e pmli
4cnt WaMmU pow Wafvwtki » et ^w Sboivwaid aVPiil
pat la titra da |iriaca«
(438) M. Lalawel a ralavé «M a«ti« «rvasr teM Partiia-
^•Êfkim da qaal^aaa vou |M>loaait chéa duM oa chaplMiio-
tamiMBt pov la bmi «Mâchas ttaa da tstmà, ^aa fw Mt
(439) «UaBraluMM,aafi«ia à ItewBd# daSopaaM,
avoir oatnié sa kaaiaw da la daaaa Milicaiia» dt iS
fioar aa hoMoia da la claaaa caiaianaata, da ta paar a
aoAdra. m
• Poar a?air laiarié aa haai^a da la anéaM riam fat hii
ma Dwîd)a tara condaaHié à ta paaat d^aaMada. »
« Si UB homme reproche à an entra d*étre Itorgaa, boimit
aa d'enâr nne infirmité tembleble , biea qaHI dite la fMté|
il doit payer l'amende d*an carchapana. »
« S an homme égratigne la peaa d*ana partoaae de m
cUsae , et iHl lait couler ton Mng , il doit èua coadatiié à
loo panât d^amende ; ponr nne blessure fui a pénétré daas k
chair à six nichcas *, pour la fracture d*nn ot, aa bâPuittcaicaT ■
Manava'DarmtL-SaMtrm, Liv» VllL
(430) n Les Chinoit tout aatureUaaMnt Tiadicatlfty lil
Oéroellî, mais ils ne se fengent qu'uTOC méthode tant aa ftair
aux Toies de fiiit. i> La ■▲«?■« JSfiji. fgènèrmU des Fçyt^t
tom. VII , pag. 3.
(431) J^ojreM le TrmU de M. PAttoret tar Zoioatm | Ctt*
fiicius et Mahomet.
(433) f^ojrn sur les épraarat la chapitra YI aa ton. U
<43S> Ortef A
d*e*cUTC« m
|lqa« Wgtrie ^ '*B"* *"■■ "
(136) 1^ io"»*! «
|«« déuiU nivaM (Bf
ian* le» derajett marâ d« lïW :
Ua toiu-lieaieuBC de mniac rcMoaiaîi la ifritre k botd
d'un b*[ejuiTipear.ïéuat|iriide qaeiTUearec tnriiputifen
dont ileni éuicDl 6*Tea, bb dael f»i lauitdt proposé. On ta
bit mtnrt » une. Le licoteiunt rr^it iTabord ane balle à la
liancbe, U fait fen lai-méme , et l'aD dei deui Mrti tomba
rjide mort. Le ttcaui le priwrne ponr trengcr êon frère tt
•uccombe à ««a toar. Le ttoiiiéme luTTiont m bai •»»« Ifl
téoioia dD lieaienaai, ei le frappe d'une balle « 1* poitrine,
EnHn le Ifenlenant, i^uoiqae fpuîié par la perts de «on —n/lt
a encore !■ force Je le mesuier itcc ton dernier anlagont*M(
qu'il bleue tnortellement.
(U7) Un outrage , récemment publié tur le Groanlmdt
^r M. Corail •'explique aiiui anr lea mœuri de co [Mf* i*!**
tàreBent an duel,
a Lei GroenUDdui n'ont teconri ni au {riitolBl , ni k Vif**
^m
«tant %
. m, km p#prii dM tég?<fcdit^to> tnlwHhiatloi»!
colonel a oté pcoroqmor Ofidwl «OftM|iér|««r, |Jfi
Miri flKdieoXf qid canif p^poffiic «misM klii dl^cii^
cMDt. aiérilial wMBWiitkMiiaDiuilc-ot céwAno^ Iojbbbim
:«init d'MoiHMff qfM- oo U—kumuiIé roloapi jM^tndwit dcricl
.«»copsti| d#-g««PKQaciiàaAnféri9«r9f|«i|iowr«i|MJirfjl
.é» l'ftsioriié-4oii» l^ouiM^ ki.lo&.«à«oii 8!<ic4^ %«aila oo»-
4otcoa4fl»^4ii^ réponde àcoilo ptovocafios t ^ aen-pMi pas
ilÉ,porto 4# aoAOwploi, oiilaaiiéaQipt» ofib^tsidet cQffpt|f«
•• te «mt p«i oppotéâ àcotanoMCOBtaii giinUiOBt ]m vsén
de rigocmr peadanft <|idiiie iofMei.«f •• m.
(439) Sw ct^poui^ çomm0 mu beaucoup dlN^tret., toa»
,90tre légitlalioa.tiir la. procédure, cofuîpelle.eat â refaûe*
(440) Il &*ett poa bien ceruin qp^ le codl» français aU
Urdetsua iwe- opinion. Ce point dn ettte a ét^ long-temps co»
trorertë.. To^rcz le chiipitre JU^V» et l'arrêt du la» cour de casr
•ation (leBelgiqn^i rapportift en Unotie 34A..
(441) yoy€2i le Cçmmfimoirc de (a i9i!&fei pan O.CalmeL
(44^ C^tia r4dcllan e^été décrite admicableim&nt. dans l«i
, ttudes. kUtoriqu/^ de M., de €haleaabriaiid«.
(443) Une école d'écrixaifia. i*éteit pcopoaé de noa jonxi
la triste tache di& séhabilitec la mémoire dea liAmiB^a de saog
les pi na célèbres de l*époqfie sévola^oonaire..
(444) «. Liiommey dit Becçaria. ^ n*a pu (dk>nner à, on êMUt
lK>mme le droit de disposer de sa vie. Si cela était , commcni
le principe l'accocderait-il avec la jnaiime qiii déiseod le vé-
— 50 ««
cUie 1 Ou l'homme peut dUpoiet de >a propre vie , ou il nVi
|iu ilonner à d'auirea un ilioii qu'il n'amîi pu iDÎ-mAoïe. ■
l'nùlè lit* dHùl et lia /KÙift
(A4â) Le diKOuri, qui conikeM te voeu Je Robetplerte,
eut du 3o moi i7qi< Il l'a (i>|i[ielé liu-mime loi* de iod toM
pourU moti de LouU XVI.
(146) Cette diuDnion a eit lieu dau la idance du «i ■°***
iSiS. L'iuleuT de la piopoiition élJÂt U. Chappaii JUonh
brille, a J'élablinia bb premier oïdte el on th^e abioluCi
d■Mi^■l| fiBiiolalulitâ de la tie humaine. 11 n'apparliesl ea
eflet qttt Dieu de repxenJre ce que lut leul a pu donner. •
Le dioil de grlce, par la manière dont le gou<ememen|
IVeicTce depui* tB3o, tempère autant <]ue pouiUo Ihutteiible
rigueur de notre code crimiiicl i mail c'est une politique qui
»'a d'autre gamolie de dnrâe (|ue U rolonli d'un homme.
(447) On aiiure que l'tnTcnieur de cette uacUioe eu mMt
de chagrin de lui SToir tu donner son nom.'
(448) Cette citation en tirûedSindiicounaur l'fxffïtfenee
Ju Couragt cû-U, par M. Corne, iiriiident du uibNnal de
Doiui I •)» a obtenu l« |irU ptoftai «u celM queniao par
U Sodélé de U morale ductienne.
FIN UfiS noTEt.
• >. •
• -i »
* » ••. 1 •
••lii .î *4 ti^t ff-»! *■ T fi;.' -S-^^-t" I I.'. .* .«,•! »
contnnvê mâu
-li'-J' . . ; ;' > •■■ ■ ' ■ ■■ • ■ ■_ -•• i"
. ' . lîi .. - : J .-■i...- . ■■ ..,...'■
r., :. :: '.t * I jl ... '■■!:.# r .', .. . ' ^
'j'*! ■* *■ 4 •'»; ^ 'i
• /
1... ': '
• • I
' SnMMMi
Caàfmm XYT^T Dwb w DiBMMtrdL* lifavrie.
CUlnn» XXXIT. 9«ib es ABMMgâe , Aotriebe |
P^«sM » BtYièra, Etalt-CoandèrAk 184
Céafisu XXXV. Dvdt «a SoiMe.
OunTiK XXXVI. Dntli n Itidie i royauHM èb
Kapkft et de Siotle » EUU-Rooiaint » Lbmbirdie»
PSteooC » Uet te SardUdgM «I do Cône. 239
CkAFiTAS XXXVU. Dueli en Grèce» Uos loiiîeiioei»
ne de Halle. 30»
CiAPiTU XXXVUI. Dnds eo Rastie et eo Pologne.
321
CiApiTMB XXXIX. Doeb ea Am» » AInc[ae , AmM*
^m el Oeéenie. 3i(&
CflAPmc XL. CoMluion. — Progrès comparatiffl
de U dvilisatioa oniTendle à Tégard da du«l.-«
Dei moyens de le priTenir par les mœurs ; difiî-
calté de le penîr par ka lois. —Considérations
aar nnTiolabîlité de la TÎe de rkoniiDe et TaTcnir
des fociétéi. 63S
rm DE ti TÀBLI.
mimmimmimmmmmmÊmÊmÊÊtmii/iÊmmÊiimmmimÊmÊiÊmmmmimt
ERRATA.
M ' ô Smpprimet la nota 231.
110 IS Am lieu de : En t^appayanl , lUet : en
Tappnyanl.
124 26 j/ulieude: HasUhicidia, Usez: hasti*
ladia.
U2 23 Au tieu de : Rca est , i!ms : res lit.
273 2i Supprimez la noto A09.
ÏS7 10 Supprimez ces moiê : (Oa platAt da mo*
raliM UaU. )
f
h P
t \