Skip to main content

Full text of "Influence de la fixation pleurothétique sur la morphologie des mollusques acéphales dimyaires"

See other formats


Rene are or sr war Ter se bu de dr ra ET SE 
eat en at Des 


PR 2e 78 dnlrun 

21 DR 
ns de ET Re 
ele vez 


tete 
: 


DPI 
Zap 


or 
ER 


PL 
ESS 


.” 
FR 
f£: 
Le de 7 
Rad 85825] 
EE 2 
\4®, 4 ca / 
\ 2 x 
ES a: A 


si 
lu À 


# 
“4 rue Sp 


À fl  , . 


/ 


— — ré 


Ein À 


William Healev Dall 


Division of Mollusks |!!! 
Sectional Library 4 


LA à 


un 


. é S 
Fa Re 1 de 
l | 


el 


» Si : “5 nr jh 


si 


EN 


RES 


ss pa 
LS f' | { | 
sil cs 


5 


L 
OUT 
The 


ANNALES 


DES 


SCIENCES NATURELLES 


ZOOLOGIE 


ii 


PALÉONTOLOGIE Division of Mollusks 
Sectional Library 


COMPRENANT 


L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION 
ET L'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX 


PUELIÉES SOUS LA DIRECTION DE 


M. EDMOND PERRIER 


—————————— 


EXTRAIT 


PARIS 
fFOSS 
MASSON ET CF, EDITEURS 
LIBRAIRES DE L'’ACADÉMIE DE MÉDECINE 


120, Boulevard Saint-Germain (6e) 


Conditions de la publication des Annales des seiences naturelles 


HUITIÈME SÉRIE 


BOTANIQUE 


Publiée sous la direction de M. Pn. VAN TTEGUEM. 


L'abonnementest fait pour 2 volumes gr. in-8°, chacun d'environ 
400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. 

Ces volumes paraissent en plusieurs faseicules dans l'intervalle 
d'une année. 


ZOOLOGIE 


Publiée sous la direction de M. EpmMonD PERRIER. 


L'abonnement est fait pour 2 volumes gr. in-8°, chacun d'environ 
400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. 
Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle 
d'une année. 
Prix de l'abonnement annuel à chacune des parties, zoologie 
ou botanique 


Paris : 30 francs. — Départements el Union postale : 32 francs. 


ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES 


Dirigées, pour la partie géologique, par M. HéBerr, et pour la partie 
paléontologique, par M. À. MizNE-EDWARDS. | 


Tours 1 à XXII (1879 à 1891). 
Chaque volume..............-..:.. 15 1r. 


Cetle publieation est désormais confondue avec celle des Annales 
des Sciences naturelles. 


Prix des collections 


PREMIÈRE séRE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Rare). 


DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. 
TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. 
OUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. 


CINQUIÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. 
SIXIÈME SÉRIE (1874 à 1885). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. 
SEPTIÈME SÉRIE (1885 à 1894). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. 
GÉOLOGIE, 22 volumes....... RARE Le SNS 330 fr. 


MEN 

fo à 

105 

DUPTT US A, N° 497 


“mme  THÈSES 


PRÉSENTÉES 


À LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS 


POUR OBTENIR 


LE GRADE DE DOCTEUR ÈS SCIENCES NATURELLES 


mn. 
R. ANTHONY Dh 
DOCTEUR EN MÉDECINE, AO fre 
PRÉPARATEUR AU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE, - a. 
LAURÉAT DE L'INSTITUT 


— 


1° THÈSE. — INFLUENCE DE LA FIXATION PLEUROTHÉTIQUE SUR 
LA MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES ACÉPHALES 
DIMYATRESS 


2° THESE. — PROPOSITIONS DONNÉES PAR LA FACULTÉ, 


Soutenues le juin 1903 devant la Commission d'examen. 


RAR Dee CO up Président. 
MAD Cv M ds 
MATRUCHOT (Re CETPRISRESS 


QUerelriere iris tsle 


PARIS 
MASSON ET C*, ÉDITEURS 


LIBRAIRES DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE 


120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 


1905 


UNIVERSITÉ DE PARIS 


FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS 


MM. 
Doyen... us ee P. APPELLE. 20 Mécanique rationnelle. 
Doyen honoraire........ G. DARBOUX, Profes. Géométrie supérieure. 
1 { L. TROOST. 
Professeurs honoraires. } Ch. WOLF. 
| LIPPMANN............ Physique. 
| BOUT eus res Physique. 
| BOUSSINESQ.......... Physique mathématique et 
+  Calculdes probabilités. 
PICARDEEEREERRE EC.. Analyse supérieure et Al- 
s gèbre supérieure. 
IMHABOINCARE NE NE Astronomie mathématique et 
k Mécanique céleste. 
Yves DELAGE........ Zoologie, Anatomie, Phy- 
siologie comparées. 
G-:BONNIER En Botanique 
DASTRE- 6-0 Physiologie. 
DIMM obassagoct eco Chimie. . 
GARDES EEE nv Eee Zoologie, Evolution des êtres 
organisés. 
KOPNIGS Re rreec re Mécanique physique et ex- 
, périmentale. 
| VÉLAIN.............. Géographie physique. 
IRCGOURSATEAPEE ANRT Calcul différentiel et calcul 
ProlessEUTS re ere ( intégral. 
ACEATINP EEE ao ce Histologie. 
PÉDIATRIE A Physique. 
MALDER TN AMIE Chimie organique. 
HÉMOISSAINECE CEE Chimie. 
JOANNIS-RRRR EE "ete Chimie (Enseignt P. C. N.) 
TANID DR eee rec Physique — — 
WALLERANT......... Minéralogie. 
ANDOMBRETEr-- rc. Astronomie physique. 
PAIINRMERE- Se -0"0E Mathématiques générales. 
HAUTE EE EC eCcRe Géologie. 
PACURTEEE CETTE. Physique. 
TANNERV 0... i0r Calcul différentiel et caleul 
intégral. 
RARENIRPR CPE Application de lAnalyse à 
la Géométrie. 
HOUSSAMEF ECC CE Zoologie. 
LAN RUN Re rene Chimie biologique. 
NS EME ee M rAbre Zoologie, Anatomie, Phy- 
siologie comparées. 
/ PUISEUXS CR" RE" Mécanique et Astronomie. 
(MARIFANNENTE CREER" Chimie analytique. 
LCÉDUCE MENACE .… Physique. 
| HADAMARD.......... Calcul différentiel et calcul 
Professeurs adjoints DH RP 
rolesse J 2 M MATRUCHOMEEPERATE Botanique. 
MICHBIRE RES PET Minéralogie. 
DAGUILLON.......... Botanique. 
| BOUVEAULT......... Chimie organique. 
\MBOREEEr"- PACS RE Théorie des fonctions. 


SBCLÉLAIRE 0 te eee re 5e A. GUILLET 


A LA MÉMOIRE DE MON MAITRE 


E. J. MAREY 


À M. LE PROFESSEUR 


Eu. PERRIER 


DIRECTEUR DU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE 


INFLUENCE DE LA FIXATION PLEUROTHÉTIQUE 


SUR LA 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 


ACÉPHALES DIMYAIRES 


Par R. ANTHONY. 


INTRODUCTION 


Sans doute la Morphologie (avec ses subdivisions, Morpho- 
logie externe, Anatomie, Histologie), l'Embryogénie et la 
Physiologie ont par elles-mêmes un grand intérêt; toutefois, 
l'étude des formes, des processus de développement et des 
fonctions ne fournit en somme que des matériaux dont la 
synthèse permet l'explication des formes animales et l'établisse- 
ment des lois qui les régissent. On supposait déjà depuis 
Lamarck, et de nombreux travaux ont contribué après lui à 
‘établir d’une façon qui semble définitive, que ce sont les 
causes matérielles, mécaniques, physiques où chimiques qui, 
agissant sur les organismes et les organes au cours de leur 
développement, déterminent la forme adulte. La Morphogénie 
est précisément cette science qui s'occupe de rechercher les 
causes matérielles des dispositions morphologiques. 

Ses moyens d'investigation sont, comme pour les autres 
sciences, la méthode d'observation et la méthode expéri- 
mentale. | 

En observant simplement les faits de développement, on peut 
en effet arriver à surprendre les causes morphogéniques sur le 


166 R. ANTHONY 


fait pour ainsi dire, parvenir, comme je l'ai montré pour les 
Tridacnes, à suivre la progression des changements de forme 
sous l’action continue de la pesanteur, par exemple, sur un orga- 
nisme en vole de croissance : c'est le mode d'investigation qui à 
été Jusqu'à ce Jour le plus employé par les morphogénistes; il 
le sera souvent au cours de ce travail. 

Lorsque la succession des faits embryogéniques ne peut être 
constatée, on peut encore par l'observation simple des faits mor- 
phologiques chez l'adulte, arriver, dans une certaine mesure, 
à découvrir les causes morphogéniques. Soit par exemple une 
série d'animaux qui, appartenant à des phylums très différents, 
vivent et se développent dans des conditions analogues ; s'ils 
possèdent un certain nombre de caractères communs, on pourra 
induire que ces caractères sont en relation avec ces conditions 
d'existence communes et saisir ainsi la nature de ces rapports, 
c’est-à-dire les causes déterminantes de ces caractères. J'aurai 
souvent recours à cette méthode comparative, surtout pour les 
cas où 1} m'aura été difficile de suivre le développement. On 
concoit d’ailleurs, sans qu'il soit besoin d'y insister, combien 
l'observation des faits morphologiques seule est inférieure à 
l'étude du développement au point de vue de la valeur des hypo- 
thèses formulées. 

En Morphogénie, comme partout ailleurs, la méthode d'ob- 
servation ne peut suffire; elle a besoin du contrôle de la 
méthode expérimentale. On change au cours du développement 
les conditions d'existence d'un organisme et, l’âge adulte une 
fois atteint, on recherche quelles ont été les modifications 
morphologiques corrélatives aux changements provoqués dans 
la marche du développement. 

Rappellerai-je que la voie morphogénique n’est pas nouvelle, 
et que nombreux sont les auteurs qui s'y sont déjà engagés? 
Sans remonter à Lamarck, qui l'un des premiers à tenté d’ex- 
pliquer rationnellement les formes vivantes, il est indispensable 
de citer dans cet ordre d'idées et plus près de nous, l'École néo- 
lamarckienne d'Amérique avec Cope, Osborn et tant d’autres. 
l'École allemande de Roux dont les travaux sont connus de 
tous. En France, les recherches morphogéniques retrouvent 
actuellement, auprès de nombreux savants, l'accueil favorable 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 167 


qui, depuis plusieurs années, n’a cessé de leur être réservé à 
l'étranger. 

Au point de vue plus spécial de l'application de la méthode 
expérimentale à la Morphogénie, on ne peut passer sous silence 
les travaux de Fick, un véritable précurseur qui, dès 1857, 
étudiait expérimentalement à l'Université de Marburg, la genèse 
de la forme du crâne et plus généralement des os. Quant aux 
travaux de mon regretté maître E.-J. Marey, ils sont aujour- 
d'hui devenus classiques. 

J'omets volontairement bien des noms que, dans une étude 
bibliographique de la question, on ne pourrait se dispenser 
de citer. Je veux montrer simplement que ce genre de recher- 
ches est loin d'être nouveau, que les meilleurs esprits, ceux qui 
se sont montrés le plus positifs et le plus ennemis des spécu- 
lations métaphysiques, n'ont pas craint de s'y adonner. 

Les auteurs de l'École de Roux semblent s'être bornés dans la 
plupart des cas à l'étude morphogénique de la différenciation et 
de la tectologie des blastomères. On ne saurait nier cependant, 
et les morphogénistes américains l'ont bien compris, que l'évo- 
lution ontogénique de lindividu et de ses organes ait aussi son 
intérêt à ce point de vue. Mais il importe alors d'en faire une 
étude vraiment cinématique, en ÿ comprenant toute la succes- 
sion des changements qui se produisent dans l'organisme pen- 
dant son existence, aussi bien pendant sa croissance que pen- 
dant sa décrépitude. Ainsi définie, l'ontogénie est, on le conçoit, 
plus variée suivant les différents animaux ; elle sort des limites 
trop restreintes qu'on lui assignait naguère et embrasse les 
différents stades morphologiques par lesquels un individu passe 
depuis la fécondation de l'œuf jusqu'à la mort par sénilité. 

Ce qui à plus spécialement attiré mon attention au point de 
vue morphogénique, ce sont précisément les stades de déve- 
loppement qui se succèdent depuis l'établissement de la vie libre, 
ceux pendant lesquels l'animal est soumis aux causes extérieures 
les plus nombreuses et les plus variées, ceux pendant lesquels il 
acquiert véritablement ses caractères particuliers. 

J'ai voulu que dans ce mémoire les descriptions des disposi- 
tions morphologiques soient autant que possible suivies de leurs 
explications rationnelles. Cet essai d’interprétations a été lidée 


168 R. ANTHONY 


directrice de ce travail, et, les faits ne doivent-ils pas être eonsi- 
dérés surtout en vue de l'explication qui peut en ressortir et des 
généralisations auxquelles ils conduisent? 

J'aurais tout naturellement voulu employer pour ces recher- 
ches de Morphogénie, comme je l'ai d’ailleurs fait déjà à l’occa- 
sion d'autres études analogues sur les Mammifères (1), non 
seulement la méthode d'observation mais aussi la méthode expé- 
rimentale. Mais les expériences de Morphogénie sont malheu- 
reusement à très longue échéance, en raison de l'obligation où 
l'on est d'attendre l’âge adulte pour constater les résultats obte- 
nus d’une expérience faite sur l'animal jeune {et l'on sait com- 
bien lente est la croissance des Acéphales). Celles que j'ai entre- 
prises sur ces animaux sont done encore actuellement en 
cours : des mémoires ultérieurs seront consacrés à l'exposé de 
leurs résultats. 

Bref, ce mémoire contiendra trois sortes de résultats : d’abord 
des faits positifs qui n'avaient pas encore été mis en lumière 
concernant la Morphologie, l'Embryogénie et la Physiologie des 
animaux dont je me suis occupé; ils ont leur importance en 
eux-mêmes. En second lieu, au point de vue morphogénique, 
des tentatives d'explications rationnelles. En troisième lieu, 
enfin, les indieations qui en découlent au point de vue des 
affinités. 

Certains naturalistes purement descripteurs ne voudront 
peut-être retenir parmi mes résultats que les faits positifs, sous 
le prétexte que l’on ne peut savoir comment et sous l'influence 
de quelles causes se sont constituées les formes animales, et que 
l'on ne peut faire à ce sujet que des hypothèses. Il serait 
superflu de défendre ici la valeur et l'importance de l'hypothèse 
comme moyen de recherche et d’insister sur les différences 
fondamentales qui existent entre les vues 4 priori et les hypo- 
thèses destinées à relier les faits d'une façon d’ailleurs toujours 
provisoire. Celles-ci, même fausses, ont souvent conduit à des 
recherches intéressantes, à l'établissement de données positives 

(4) Je fais ici allusion à mes travaux sur la Morphogénie du crâne et 
l'origine des tendons, parus en 1902-1903-1904, dans les Comptes rendus de 


l'Académie des Sciences, les Comptes rendus de la Société de Biologie, le Journal 


de Physiologie et de Pathologie générales, le Bulletin de la Société d’Anthropo- 
logie, etc. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 169 


que la connaissance des faits seuls n'aurait jamais pu permettre 
de découvrir. Dans le cas spécial de la Morphogénie en suivant 
les stades de développement et en appliquant la méthode expéri- 
mentale, on peut d’ailleurs donner aux hypothèses le maximum 
de probabilité. 

Néanmoins, probabilité n’est pas certitude, et, c'est sous ces 
réserves expresses que se présentent les conclusions formulées 
ici relativement à la Morphogénie et aux affinités naturelles. 


Avant d'aborder le sujet de ce mémoire, il est de mon devoir 
de témoigner ici de toute ma reconnaissance à l'égard de mes 
maîtres, MM. les professeurs Marey et Edm. Perrier, sous les 
auspices desquels j'ai accompli mes derniers travaux. 

Je dois également exprimer à M. le professeur Giard, ma plus 
vive gratitude pour les conseils et les encouragements qu'il ne 
m'a point ménagés au cours de mes recherches. 


PREMIÈRE PARTIE 


CHAPITRE PREMIER 


But de ce mémoire. 


Je me suis proposé dans ce mémoire de faire une étude 
aussi complète que possible, étant donnés les matériaux que 
j'avais à ma disposition, des caractères d'adaptation et de 
convergence des Mollusques Acéphales dimyaires actuels fixés 
en position pleurothétique. Leur connaissance, restée jusqu'ici 
très imparfaite, pourra peut-être aider à mieux comprendre 
les formes fossiles, les Rudistes par exemple, sur lesquels les 
paléontologistes ont tant discuté et discutent encore. Dans la 
atégorie des Dimyaires pleurothétiques fixés peuvent être grou- 
pées un certain nombre de formes à affinités familiales diffé- 
rentes-et dont l'énumération sera donnée plus loin. 

Mon intention eût été de traiter en même temps et d'une 
facon également complète, de leur morphologie, de leur embrvyo- 
génie et de leur physiologie, mais je n'ai malheureusement pu 
me procurer pour la troisième partie de cette étude qu'une 
quantité bien restreinte de documents. 

J'ai fait en sorte que ce mémoire contienne dans leurs grandes 
lignes les monographies des types dont je me suis OCCUPÉ; mais 
désirant conserver l'orientation générale que j'ai essayé de 
donner à mes travaux antérieurs, je n'ai pas voulu me borner 
aux simples constatations de faits morphologiques, embryolo- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 171 


giques où physiologiques, ni donner une trop grande place à 
ceux de ces faits qui, n'étant pas particuliers aux animaux dont 
je m'occupe, ne pouvaient avoir en raison de leur généralité 
que peu d'intérêt au point de vue de l'explication possible de 
leurs formes, et me paraissaient au contraire de nature à 
compliquer l'idée d'ensemble que l’on peut s'en faire. 

J'ai voulu, en un mot, leur appliquer les méthodes de 
recherches de là morphogénie, c'est-à-dire, par les procédés 
ci-dessus indiqués, essayer de me rendre compte des facteurs 
déterminants possibles de leurs formes et, de par le’fait que 
j étudiais l'influence des causes mécaniques sur la morphologie, 
j'ai naturellement été amené à saisir un grand nombre de ces 
faits de convergence sur lesquels A. Giard (04) a été l'un des 
premiers à attirer l'attention. 

À ce propos 11 m'a semblé plus naturel et plus logique d’étu- 
dier l'effet d’un ensemble de causes connexes, c’est-à-dire d’un 
mode de vie déterminé sur des organismes d’affinités diffé- 
rentes, que d'examiner l'action de causes variées sur des orga- 
nismes de même souche. Par cette méthode. J'ai pu mettre en 
évidence ces nombreux faits de convergence, qui prouveraient 
déjà par eux-mêmes, l'efficacité réelle des causes matérielles 
en morphogénie. Les résultats que m'aurait donnés l'autre 
méthode eussent 6{6 moins intéressants et surtout moins 
frappants. C'est cette considération qui explique que J'aie 
choisi comme groupe spécial d'étude les Dimyaires fixés en 
position  pleurothétique, de préférence aux Cardiidæ où aux 
Cyrenidæ par exemple, qui constituent des familles natu- 
relles, dont les divers éléments sont adaptés suivant différents 
sens. 

Dans le deuxième chapitre de ee mémoire, je donnerai 
un certain groupement des Mollusques Acéphales dont la 
signification exacte à besoin d'être nettement précisée. 

L'on à souvent dit, et avec raison, que l'idéal pour toute 
classification systématique serait d'être un arbre généalogique 
parfait. Inutile d'ajouter qu'il est vraisemblable que cet idéal 
ne sera Jamais atteint, en raison de l'insuffisance des docu- 
ments embryologiques et surtout paléontologiques qui sont à 
notre disposition ; néanmoins il est entendu que tous nos efforts 


172 R. ANTHONY 


doivent y tendre. Pour se rapprocher autant que possible de ce 
but. il est évident qu'une classification doit être basée sur ceux 
des caractères morphologiques qui mettent le mieux en relief 
les rapports de parenté ou phylogéniques. Or, quels sont les 
caractères qui mettent le mieux en relief les rapports phylogé- 
niques, Si ce ne sont ceux qui ont le moins varié au Cours 
des générations, ceux qui, par conséquent, ont le moins subi 
l'action modificatrice des causes morphogéniques? Chez les 
animaux, d'une façon générale, les organes de mouvement ou 
de soutien, les museles et les différentes pièces squelettiques 
sont, on le sait, ceux qui possèdent la plus erande plasticité ; 
leurs caractères ne doivent done pas être choisis pour servir de 
base aux classifications systématiques. 

Pour le cas particulier des Moilusques Acéphales, de toutes 
les nombreuses classifications proposées, celle qui découle des 
recherches de Pelsencer et de Ménégaux (1), basée sur la struc- 
ture de la branchie, paraît être de beaucoup la préférable, en 
ce sens que c’est elle qui semble rendre le mieux compte des 
affinités familiales des diverses formes. Je l'admettrai donc 
d'une facon générale dans ce travail : je reconnais d'ailleurs 
qu'il convient toujours, pour l'établissement d'une classification 
phylogénique, de tenir compte, si possible, de tous les carac- 
tères sans exception, tout en attribuant à chacun d'eux une 
valeur d'autant plus grande qu'il est moins variable. 

De ceci il résulte, qu'il n'est pas juste de croire que les clas- 
sifications doivent être basées sur les caractères les plus impor- 
tants au point de vue vital : des organes ou des systèmes essen- 
tiels au fonctionnement de la vie, peuvent être très plastiques, 
très profondément modifiables par les causes extérieures, et, 
on arriverait ainsi à rapprocher par le fait de leurs conver- 
gences des animaux très éloignés au point de vue de leur 
origine. 

A côté de ces classifications à signification phylogénique et 
en dehors d'elles, ne peut-on admettre sans tomber pour cela 


(1) IL est évident que le principe de toutes les classifications des Acéphales 
basées sur les caractères des dents de la charnière ou des impressions MuSsCU- 
laires, et qui sont si commodes pour les paléontologistes, ne peut ètre admis 
au point de vue zoologique. : 


D — 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 173 


dans l'erreur de d'Orbignv (52) qui divisa les Acéphales en 
Orthoconques et en Pleuroconques, qu'il est intéressant de 
constituer des groupements animaux pour létablissement 
desquels on se basera non plus sur les caractères les moins 
variables, mais tout au contraire sur ceux qui possèdent la plus 
grande variabilité. De par le fait même de leur origine, les 
groupements ainsi obtenus n'auront en eux aucune signification 
phylogénique etaucune valeur au pointde vue de Ki systématique 
rationnelle. Bien plus, ils en seront exactement lantipode (1). 
En effet, à l'encontre des classifications. vraies qui placent au 
premier plan les caractères familiaux, ils mettront en relief 
les caractères de convergence, et, alors que les premières 
réunissent des individus de même souche et à adaptations 
différentes, les deuxièmes rapprocheront des individus de diifé- 
rentes souches présentant, par le fait de Paction des mêmes 
‘auses extérieures, des caractères identiques. 

C'est un groupement du genre de ces derniers que Jai essayé 
de faire, bien loin de vouloir par conséquent présenter une 
nouvelle classification systématique des Acéphales. Prenant les 
choses à un point de vue tout autre que mes prédécesseurs 
dans l'étude de ces animaux, je n'ai pas cherché à mettre en 
relief les caractères de parenté, mais surtout ceux de conver- 
gence; j'ai essayé de montrer comment des types de souches 
très différentes pouvaient, placés dans les mêmes conditions, 
soumis aux mêmes agents morphogéniques, arriver à se res- 
sembler, et, pour un groupe de ces Eypes convergents, Les 
Dimyaires, fixés en position pleurothétique, fai poussé dans 
ses détails l'étude de ces analogies. 


MI 


Division du sujet. 


Le plan de ce mémoire sera le suivant : 
D'abord j'ai cru devoir, ainsi qu'on Pa vu, le faire précéder 


(4) Néanmoins, comme on le verra par la suite, ils permettent souvent 
d'arriver indirectement à des notions importantes sur les affinités. 


174 R. ANTHONY 


d'une introduction, dans laquelle ilm’a paru nécessaire d'exposer 
l'idée générale directrice de mes travaux, ce qu'il faut entendre 
par la Morphogénie, son objet, ses méthodes. 

Après avoir précisé le but que je me proposais de remplir, 
j'indique ensuite la provenance des matériaux que J'ai uti- 
lisés et les méthodes, tant générales que spéciales, que J'ai 
employées, aussi bien pour mes recherches de Morphologie, 
d'Embrvogénie et de Physiologie, que pour celles de Morpho- 
génie. 

Ces préliminaires posés, je passe en revue dans le cinquième 
chapitre les différents {ypes de constitution des Mollusques 
Acéphales, en rapport avec leurs conditions d'existence et leurs 
attitudes. J'ai donné à ce chapitre le nom d'/atroduction à 
l'étude générale de la morphogénie des Mollusques Aréphales. 
I m'a paru très important et à nécessité beaucoup de travail, de 
recherche de tout ordre (anatomie proprement dite, histologie, 
physiologie, embryogénie, examen x situ des animaux). Cest 
dans ce chapitre qu'est exposé le groupement des formes 
convergentes dont il vient d'être question. Une fois ee travail, 
que lon peut appeler en quelque sorte un travail de mise au 
point, accompli, il ne me restera qu'à choisir parmt tous les 
types énumérés un groupe de formes convergentes me parais- 
sant plus intéressantes que d'autres à étudier en détails: je 
me réserve dailleurs ultérieurement de faire la même étude 
sur les autres groupes, dans Pespoir, un peu trop ambitieux 
peut-être, d'arriver à constituer ainsi un essai de morpho- 
logie et de morphogénie générale et rationnelle de tous les 
Acéphales. 

Mon choix s'est fixé sur les Dimyaires fixés en position 
pleurothétique, pour des raisons qui seront expliquées ulté- 
reurement. Leur étude fait lobiet de la deuxième partie de ce 
travail que j'ai divisée en autant de chapitres, inégaux dail- 
leurs, que le groupe comprend de familles naturelles. Dans un 
dernier chapitre, jindiquerai les déductions qu'on peut tirer 
de ces études relativement à lFexpheation des Dimvaires fossiles 
fixés en position pleurothétique. 

Ce dernier chapitre sera suivi des conclusions qui seront 
relatives aux Dimyaires fixés en position pleurothétique seule- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 175 


ment; le chapitre IT de la F* partie ne comporte pas en effet 
de conclusions spéciales, par le fait qu'il est lui-même un 
résumé des résultats obtenus dans les recherches que Je 
poursuis depuis cinq années sur les Mollusques Acéphales en 
général. 


III 


Matériaux utilisés. 


Les matériaux que j'ai utilisés pour cette étude, entreprise 
au début de l'année 1899, proviennent des établissements sui- 
vants : 1° Muséum d'histoire naturelle de Paris (laboratoire 
d'Analomie comparée et de Malacologie, où je me suis procuré 
les formes actuelles, coquilles sèches et parties molles : labo- 
ratoire de Paléontologie dont la collection n'a servi pour 
l'étude de quelques formes fossiles); 2° École Nationale des 
Mines (laboratoire de Paléontologie où se trouve, Je crois, une 
des plus belles collections de Rudistes du monde que J'ai lar- 
gement mise à contribution) ; 3° Faculté des sciences de Paris 
(laboratoire de Géologie) ; 4° Faculté des sciences de Grenoble 
(laboratoire de Géologie où j'ai spécialement étudié les formes 
enroulées de la fin du Jurassique et du Crétacé inférieur telles 
que Diceras, Requienia, Toucasia, étenr 

Toutes mes recherches de Physiologie ont été accomplies à 
la Station physiologique du Collège de France à Boulogne- 
sur-Seine, où, depuis 1899, j'ai été le collaborateur de mon 
regretté maitre le professeur E.-J. Marey. 

Plusieurs laboratoires maritimes de Zoologie ont mis soit 
leurs matériaux, soit même leurs locaux à ma disposition ; 
ce sont ceux de Saint-Waast-la-Hougue (chaire d'Anatomie 
comparée du Muséum d'histoire naturelle de Paris) où J'ai fait 
quelques expériences de physiologie qui ne pouvaient être faites 
à la Station physiologique du Collège de France; du Portel 
(chaire de Zoologie de la Faculté des sciences de Lille), de 
Banyuls (chaire d’Anatomie comparée de la Faculté des sciences 
de Paris). Dans les deux premiers de ces laboratoires, j'ai 


176 R. ANTHONY 


| 
rassemblé moi-même de nombreux matériaux et fait de nom- 
breuses observations éthologiques. 

En dehors de ces laboratoires, j'ai aussi recueilli d'im- 
portants objets d'étude en Bretagne (Finistère), sur les côtes 
de la baie de Douarnenez, depuis Douarnenez jusqu'à Morgal 
(e*est à où j'ai fait toutes mes observations sur les Moules 
dites de roches) et à l'embouchure de FAulne et de la rivière 
du Faou. 

Enfin, j'ai utilisé plusieurs collections particulières que 
MM. Dautzenberg et Bonnet ont aimablement mis à ma dis- 
position. 

J'exprime ici toute ma gratitude aux directeurs des différents 
laboratoires dont je viens de citer les noms, pour l'amabilité 
avec laquelle ils ont bien voulu mettre leurs matériaux d'étude 
et leurs collections à ma disposition: Je dois une reconnaissance 
toute particulière à M. le professeur Douvillé, de l'École Natio- 
nale des Mines, dont la compétence est si connue relative- 
ment aux Rudistes, pour toutes les facilités de travail et les 
précieux conseils qu'il m'a donnés. 

J'adresse également mes remerciements les plus vifs à 
M. Ch. Gravier, qui m'a procuré et a même récolté exprès pour 
moi, au cours de sa mission dans le golfe de Tadjourah, les 
nombreux exemplaires de Tridacnes et de Chames qui m'ont 
permis de mener à bien mon travail, et à MM. Chevalier et 
Decorse auxquels je dois de nombreux exemplaires d'Æthéries 
provenant de leur mission dans l'Afrique équatoriale. C'est de 
ces mêmes explorateurs que je tiens aussi en grande partie les 
renseignements précis que Je donnerai ultérieurement sur le 
mode de vie des Tridacnes, des Chames et des Æthéries. 


ID 
Exposé des procédés de recherches. 
Les recherches que j'ai accomplies peuvent être divisées en 


quatre catégories : 
2. Des recherches morphologiques ; 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 177 


5. Des recherches embryogéniques ; 

y. Des recherches physiologiques : 

9. Des recherches morphogéniques. 

Je vais indiquer ici les procédés que j'ai employés dans ces 
divers ordres de recherches, pour ne point avoir à y revenir 
lorsqu'il sera question des résultats. 

a. Procédés de recherches morphologiques. — Sous le nom de 
recherches morphologiques, je comprends évidemment non 
seulement les recherches de morphologie extérieure, mais aussi 
celles d'anatomie et d’histologie que j'ai dû faire. 


Pour la morphologie extérieure, il m'a suffi le plus souvent 
d'observer les formes soit de la coquille, soit des différents 
organes visibles sans dissection préalable. Toutefois dans bien 
des cas l'observation pure et simple à été insuffisante à me ren- 
seigner. Certains détails, comme, par exemple, ceux de la sur- 
face interne de la coquille, m'apparaissaient d’une facon insuffi- 
samment nette el il m'était difficile de me rendre compte de 
leur valeur. Pour les mettre en évidence et les comprendre, j'ai 
dû confectionner soit en plâtre, soit en cire ou en gélatine, des 
moules internes; pour les formes fossiles je me suis servi des 
moules internes naturels, lorsque j'ai pu m'en procurer. Sur ces 
moules internes, artificiels où naturels, j'ai pu, comme sur la 
coquille elle-même. et plus facilement, prendre des mesures, 
faire des sections souvent très instructives au point de vue des 
conséquences morphogéniques à tirer (Voyez Tridacnes et 
Hippopus). 

De même, pour étudier la cavité palléale dont la forme change 
dans une si grande mesure avec les différentes adaptations, et 
ses nombreux replis, j'ai dû employer encore la méthode des 
moulages soit au plâtre, à la cire ou à la gélatine. J'ai appliqué 
plus spécialement cette méthode à l'étude de la cavité palléale, 
si compliquée chez les Tridarnidæ, et c'est gràce à elle que j'ai 
pu aussi étudier en détail la forme de la même cavité palléale 
chez les Moules et les Modioles, par exemple, ainsi que chez les 
Mytüilimorphes des différents phylums. 

Tous ces moulages peuvent S'accomplir suivant les procédés 
ordinaires connus de tous ; toutefois, il me semble intéressant 

ANN. SC. NAT. ZOOL. 1, 12 


178 R. ANTHONY 


d'indiquer ici la façon dont je mY suis pris pour obtenir le 
moulage de la cavité palléale des Mytilus et des formes voisines, 
pération qui nécessite l'emploi d'une technique un peu spé- 
ciale. Je commence par choisir un animal bien vivant ; à l’aide 
d'une vrille d’ouvrier en métaux, je perfore de deux trous l’une 
des valves de la coquille en ayant soin de pratiquer les perfora- 
tions à une certaine distance de la masse viscérale ou du muscle 
adducteur postérieur; puis 
| après avoir déchiré le manteau 
au fond des orifices à l’aide d'un 
instrument quelconque , une 
aiguille lancéolée par exemple, 
je plonge l'animal dans un li- 
quide fixateur où je le laisse 
seulement quelques minutes, 
dans le seul but de le faire mou- 
Fig. 1. — Schéma destiné à montrer Ja rir en contraction : après un 
facon dont on peut mouler la cavité - Pre 
palléale d’un Acéphale. Les grisailles lavage rapide à l'eau courante, 
uen chape de Gr cétemé je Lui tie solidement Les valves 
nues coaptées à l'aide d'un fil. La flèche à l'aide d'un fil afin de les main- 
se Rodin lequel on verse le {nircoaptées (Voy. fig. 1). Cela 
fait, j'entoure de plâtre la co- 
quille en ayant soin de laisser libre les deux orifices précités. 
A l'aide d'un petit cornet de papier jouant le rôle d'enton- 


noir, je verse très lentement — en ayant soin, afin d'éviter 
la formation de bulles, d'imprimer de temps en temps à la 
coquille de petites secousses, — du plâtre tres liquide, de la 


cire fondue ou de la gélatine par l'un des orifices, et, je conti- 
nue cette opération jusqu'à ce que la masse du moulage appa- 
raisse par l'autre ; je bouche alors ce dernier avec de la cire à 
modeler et je verse par le trou d'entrée un léger excès de 
masse. Après une attente de quelques heures, je brise la chape 
entourant la coquille et détruis cette dernière ainsi que les 
parties molles de animal à l'acide azotique fumant, par 
exemple s'il s'agit de plâtre; 1l ne me reste plus alors que 
le moulage interne de la cavité palléale. Les quelques détails 
que je donne sur la technique de cette opération un peu 
délicate m'ont paru utiles à consigner; pour d'autres cas spé- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 179 


Claux je me suis inspiré des circonstances et il pourrait paraître 
superflu d'insister davantage sur cette question. 

Dans beaucoup de cas et aussi souvent que je l'ai pu, à propos 
des T'apes notamment, j'ai suppléé à l'insuffisance de l’observa- 
tion visuelle pure et simple qui ne donne souvent que des à 
peu près, par des mensurations précises et exactes faites sui- 
vant les règles ordinaires de Ia biométrie. 

Pour lutilisation de mes chiffres, Je me suis naturellement 
conformé aux méthodes rationnelles employées en statistique, 
faisant tantôt des moyennes, tantôt des sériations. 


Au point de vue anatomique, j'ai employé les deux méthodes 
connues: la dissection que pour les petits sujets je pratiquais 
à la loupe binoculaire de Zeiss, et la méthode des coupes que 
Je faisais tantôt sans inclusion préalable sur des animaux 
durcis à l'alcool formolé. | 


RO UNIES RTE OR URLS. Me Are 1000 
AIAÉRN de OMIQUEMTNLES ea «1. rad 40 


(Gros animaux comme les Tridacnidés et les Pinna) (1), tantôt 
après inclusion à la paraffine ou au collodion pour les animaux 
de plus petite taille. Les coupes d'animaux durcis à l'alcool for- 
molé étaient effectuées comme de juste à main levée: celles après 
inclusion étaient faites les premières de préférence au micro- 
tome parallèle de Minot, les secondes à un microtome à glisse- 
ment quelconque. Les coupes après durcissement à l'alcool for- 
molé pouvaient être, en raison de leur grande taille et de leur 
épaisseur, examinées à l'œil nu ; l'examen decelles au collodion 
et à la paraffine nécessitait toujours l'emploi d’un microscope 
à faible grossissement ou d'une loupe très forte. 

Le collodion m'a paru pour l'étude de l'anatomie microsco- 
pique topographique, souvent préférable à la paraffine parce 
qu'il permet l'inclusion d'animaux plus considérables que cette 
dernière et modifie peut-être moins les formes et les rapports 
des parties. Le fait qu'il ne permet pas de faire des coupes aussi 

(1) J'ai conservé, pour les collections d'Anatomie comparée du Muséum, un 
certain nombre de ces coupes. De très grandes Pinna m'ont été très aimable- 


ment procurées dans ce but par mon ami M. Boutin, pharmacien-major à 
l'hôpital militaire de Bizerte. 


180 R. ANTHONY 


minces que la paraffine ne constituait pas pour mon cas particu- 
lier un gros inconvénient. 

Avant l'inclusion je pratiquais le plus souvent la coloration en 
masse au carmin boracique; lorsque je colorais les coupes une 
fois faites et que j'avais affaire à de très petits animaux, J'em- 
ployais presque constamment l'hématoxyline ou le bleu de mé- 
thylène comme colorants nucléaires, léosine comme colorant 
plasmatique, vieux procédés extrêmement simples, insuffisam- 
ment précis peut-être pour qui veut faire de la fine cytologie, 
mais qui, de tous ceux que j'ai expérimentés, mont semblé 
donner encore le meilleur résultat pour le but auquel je visais. 

L'emploi des coupes m'a donné de très bons résultats et 
elle complète très utilement, à mon sens, méme pour les très 
gros animaux, les renseignements que la dissection donne, en 
ce sens, qu'à l'encontre de cette dernière, elle ne change pas les 
rapports des organes les uns avec les autres, rapports utiles à 
connaître d’une facon très exacte, en raison des conclusions 
que l'on peut en lirer au point de vue morphogénique. Pel- 
seneer (91) et Kellog (92) avant moi ont d’ailleurs employé avec 
succès et préconisé cette méthode pour l'étude des mêmes 
animaux. 

Parmi les coupes que j'ai effectuées, il en estune, la coupe 
sagittale passant entre les deux valves, qui m'a paru partieuliè- 
rement instructive, je la donnerai souvent au COUFS de ce 
travail, et, c’est par elle que Je schématiserai, en quelque sorte, 
l'ensemble de l'organisation d'un Acéphale. 

J'ai fait pour les galeries d'Anatomie comparée du Muséum 
un grand nombre de coupes sagittales d'Acéphales qui, rappro- 
chéesles unes des autres, permettent de saisir d'un rapide coup 
d'œil les principaux caractères morphologiques du groupe. J'en 
ai représenté quelques-unes dans ce travail. 

En raison du genre d'études que Je poursuivis, les recherches 
histologiques proprement dites ne devaient dans mon travail 
tenir que peu de place. IL est heureux, d'ailleurs, qu'il en ait été 
ainsi, car, n'ayant eu le plus souvent à ma disposition que des 
matériaux non fixés et conservés depuis longtemps dans l'alcool 
souvent trop faible, il m'eût été très difficile d'obtenir, au point 
de vue ustolegique, des bons résultats satisfaisant. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 181 


Comme pour l'anatomie microscopique, j'ai généralement 
employé pour mes recherches histologiques les méthodes des 
coupes à la paraffine et au collodion. Cette dernière surtout m'a, 
pour les cas où j'opérais sur des matériaux mal fixés, comme 
ceux que l’on trouve le plus souvent dans les collections 
lorsque l’on s'adresse à des animaux rares, rendu de réels 
services. 

Au point de vue histologique J'ai plus particulièrement exa- 
miné la structure des muscles adducteurs, sur laquelle j'ai fait 
paraître, en 1903, une note générale dans le Bulletin de la Société 
Philomathique, et pour l'étude que j'ai faite de ces museles sur 
les Chames et Æthéries, j'ai utilisé les matériaux recueillis et 
fixés par MM. Ch. Gravier, Chevalier et Decorse au cours de 
leurs missions. Je n'ai pas tardé à m'apercevoir que, pour 
cette étude spéciale, la dissociation simple me donnait des résul- 
tats supérieurs à ceux obtenus par la méthode des coupes : 
celles à la paraffine notamment nécessitent l'emploi d'un 
réactif qui, éclaireissant toutes les parties d’une façon égale, 
empêche de distinguer nettement, même après coloration, 
les parties claires des parties sombres des fibres striées. Le 
chloroforme employé comme éclaircissant à la place du xylol, 
du toluène ou de l'essence de cèdre, quoique donnant un 
résultat supérieur pour le but que je me proposais d'attendre, 
laissait cependant encore beaucoup à désirer. J'ai donc été 
amené, pour cette étude des fibres musculaires, à employer 
presque uniquement les dissociations. Pour ces dernières J'utili- 
sais l’action de l'acide azotique fumant à 20 p. 100 dans l'eau 
distillée et agissant 12 à 24 heures. J’examinais ensuite sans 
colorant, dans l'eau distillée légèrement additionnée d’al- 
déhyde formique, cette dernière substance étant destinée à 
rendre possible la conservation des préparations. 

Pour mon étude générale de la structure des muscles adduc- 
teurs des Acéphales, j'ai toujours opéré lorsqu'il s'agissait d’ani- 
maux de nos contrées sur des portions de muscles frais, prises 
sur l'animal vivant et plongées directement sans fixation préa- 
lable dans l'acide azotique dilué. Pour les Dimyaires fixés 
en position pleurothétique {(Chames et Æthéries), n'ayant eu à 
ma disposition que des pièces conservées dans l'alcool, après 


182 R. ANTHONY 


ou sans fixation préalable, les dissociations à l'acide azotique 
dilué ont semblé me donner des résultats moins bons, mais 
j'ai toujours pu néanmoins me rendre suffisamment compte 
de la striation et de sa forme. 

Pour conserver mes préparations je lutais à la benzine ou le 
sulfure de carbone caoutchouté (solution très épaisse). Je recom- 
mande en passant ce dernier procédé pour la conservation, des 
préparations dans l’eau ou la glycérine antiseptisée : la benzine 
caoutchoutée est très solide, imperméable, plus propre et plus 
facilement maniable que la paraffine ou la cire. Elle ne fond 
pas aux températures extérieures et peut être employée en 
couche mince. 

Les préparations de muscle strié d'Acéphale, et, cela est sur- 
tout important pour les muscles à striations obliques, doivent 
être examinées à un très fort grossissement en diaphragmant le 
plus possible. J'ai eu souvent recours aussi, pour les observations 
de ces striations musculaires, à l'emploi des objectifs à immer- 
sion; la lumière polarisée m'a rendu également des services 
réels. 

Tout dernièrement, M. Marceau, de Besançon, à qui J'avais 
signalé l'intérêt que pouvait présenter l'étude détaillée, à la 
fois histologique et physiologique, de la striation chez les 
Mollusques Acéphales et qui, après mot, s'est occupé également 
de cette même question, m'a dit que les striations lui étaient 
apparues avec une grande netteté sur des coupes colorées 
à l'hématoxyline au fer. Bien que reconnaissant la qualité de 
ses résultats, il ne m'a pas semblé qu'ils soient supérieurs à 
ceux que j'ai obtenus par la simple dissociation. Cette der- 
nière méthode est plus rapide, plus simple, moins artificielle et 
a l'avantage de permettre de voir une fibre entière avec son 
relief. 

6. Procédés de recherches embryogéniques. — Les premiers 
stades embrvyologiques ne sont pas de ceux qui m'intéressent 
pour le but que je me suis proposé de remplir; Je me suis 
borné à l'étude des stades avancés et plus spécialement des 
prodissoconques et des coquilles définitives à Pétat très jeune. 
Dans la plupart des cas, je n'ai pu me procurer que des coquilles 
vides et il n’y a guère que chez les Jeunes Mytilus edulis Linn., 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 183 


. 


et les Glochidium d'Anodontes que j'ai pu observerles animaux 
eux-mêmes. Pour les autres, j'ai dù me contenter des coquilles 
provenant des sables de dragage de Saint-Waast-la-Hougue que 
M. Malard, chef des travaux au laboratoire maritime du Muséum, 
m'a procurées. Pour l'étude spéciale des formes Jeunes de Chames 
et d’Æthéries, je me suis servi des matériaux rapportés pour moi 
par M. Ch. Gravier (Chames) et par MM. Chevalier et Decorse 
(Æthéries). De plus, sur de nombreuses coquilles de Chames 
et d'Æthéries appartenant aux collections de Malacologie du 
Museum et provenant les premières de l'Océan Indien, les 
secondes des fleuves d'Afrique (missions diverses), Jai rencontré 
certaines formes jeunes mais déjà fixées qui m'ont permis de 
contrôler mes résultats déjà obtenus. Enfin M. le professeur 
Joubin a eu l’obligeance de mettre à ma disposition un 
certain nombre des jeunes coquilles recueillies par F. Bernard 
et qu'une mort prématurée à empêché ce dernier d'étudier. 
Parmi ces coquilles j'ai trouvé une valve d’une jeune Chame 
vraisemblablement actuelle, ce qui m'a permis encore de con- 
trôler une fois de plus mes diagnoses. M. le professeur Douvillé 
enfin a bien voulu me communiquer une forme Jeune très 
intéressante semblant être une Dunya. 

La difficulté de pouvoir mettre un nom sur une forme jeune 
d’Acéphale recueillie dans des sables de dragages ou à la sur- 
face d’un polypier n'échappe à personne. Comme F.Bernard, jy 
suis à peu près toujours arrivé d’une facon certaine en me 
basant à la fois sur lhabitat, les ressemblances avec les 
formes adultes et surtout, lorsque je possédais une série, sur les 
transitions insensibles. Enfin, sur certains exemplaires adultes 
bien conservés on peut apercevoir le contour et la forme des 
coquilles jeunes jusqu'à la prodissoconque même parfois. [l'est 
alors facile de se baser sur ces formes et ces contours pour 
déterminer les jeunes exemplaires. Lorsque J'ai pu avoir de 
Jeunes animaux munis de leurs parties molles, Je les ai étudiés 
soit par la méthode des dissections à la loupe stéréoscopique, 
soit par celle des coupes après décalcification à l'acide azotique 
à 20 p. 100, coloration en masse au carmin boracique et inclu- 
sion au collodion ou à la paraffine ; dans d’autres cas, j'ai rem- 
placé la coloration en masse par des colorations sur les coupes 


184 | R ANTHONY 


toujours à l'hématoxyline ou au bleu de méthylène et à l'éosine. 
Ces deux méthodes {dissections et coupes) combinées m'ont 
donné de très bons résultats se complétant les uns les autres. 

Pour l'étude des coquilles sèches, j'ai beaucoup emprunté à 
la technique de Félix Bernard, c'est-à-dire que, comme lui, 
je faisais à la loupe le triage des jeunes coquilles que je recueil- 
lais, à l'aide d'un fin pinceau de blaireau humecté, dans les 
sables ou sur les polypiers pour les jeunes Chames. Mais, pour 
ce travail j'ai remplacé la loupe ordinaire dont se servait F. Ber- 
nard par la loupe stéréoscopique de Zeiss qui n'existait pas au 
moment où 1l fit ses recherches et dont je ne saurais faire trop 
d'éloges. Je nettoyais à l’eau de Javel très diluée (1) les jeunes 
coquilles recueillies, puis je les examinais toujours à l’aide de 
ce même instrument qui m'a rendu de grands services, aussi 
bien pour le triage que pour l'étude, en me permettant de 
voir des détails qui sans son secours m'auraient peut-être 
échappé. 

y. Procédés de recherches physiologiques. — Vs ont consisté 
au premier chef en observations éthologiques que j'ai pratiquées 
comme Je lai dit pour les animaux marins sur différents points 
de nos côtes françaises. Pendant mes nombreux séjours au bord 
de la mer, J'ai pris de nombreuses photographies d’ani- 
maux en place et l’une d’entre elles sera reproduite dans ce 
travail. 


(qe) 


Malheureusement il m'a été impossible d'observer vivants et 
in situ les animaux qui précisément m'intéressaient de la façon 
la plus spéciale, à savoir les Dimyaires fixés en position pleuro- 
thétique. J'y ai suppléé par les renseignements très précis qui 
m'ont été fournis, ainsi que je l'ai dit, pour les Chames par M. Ch. 
Gravier, pour les Æthéries par MM. Chevalier et Decorse surtout. 
Avant son départ pour la mer Rouge, j'avais mis complètement 
M. Ch. Gravier au courant de mon travail et des recherches 
que Je poursuivais, de telle sorte que les renseignements qu'il 
m'a fournis m'ont rendu presque autant de services 
que si je les avais recueillis moi-même. Bien plus, il m'a 

(1) faut prendre soin de diluer extrèmement l’eau de Javel. Trop concen- 


trée elle dissoudrait les jeunes coquilles ; lorsqu'elle est extrêmement diluée, 
le nettoyage est plus long mais offre toute sécurité. 


RE EE 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 185 


rapporté, aussi souvent qu'il Pa pu, les animaux dans leur 
position naturelle les uns par rapport aux autres, des blocs de 
Chames, des bouquets de Vulselles où de Malleus, ete. Ces 
matériaux et les photographies qu'il m'a communiquées ont été 
pour moi de la plus grande utilité au point de vue des études 
éthologiques. 


Outre ces observations sur le mode général de vie, j'ai dû 
faire des recherches de physiologie spéciale. 

A ce sujet se posait une question éminemment intéressante en 
raison des conséquences qu'elle peut avoir au point de vue mor- 
phogénique : celle du mode et plus particulièrement de la direction 
de l'ouverture et de la fermeture des valves chez les Acéphales. 

Il s'agissait en un mot de savoir si, l’une des valves étant 
supposée immobile, l'autre valve s'abaissait souslinfluence de la 
contraction d’un ou des deux adducteurs dans le même plan que 
celui dans lequel elle s'était élevée sous l'influence du ligament, 
ou, au contraire, si au moment de la fermeture elle ne s'inchinait 
pas, soit en avant, soit en arrière, basculant en quelque sorte 
autour d'un axe dorso-ventral. : 

Lorsque ce mouvement de bascule est lent et très accusé 
on peut s'en rendre compte de visu comme cela à lieu pour les 
Myes, les Lutraires et plus encore les Pholades. Mais l'inspection 
seule est insuffisante quand le mouvement de bascule est 
rapide et peu accentué. Pour pouvoir le saisir et l’analyser J'avais 
d’abord pensé à employer la chronophotographie. 

Pour cela sur un bloc de cire molle ou de glu marine, je dis- 
posais l'Acéphale que je voulais étudier de façon que son plan 
sagittal, c'est-à-dire le plan passant entre les deux valves, soit 
parfaitement horizontal. Souvent même sur la valve supérieure 
je fixais à la cire horizontalement encore et parallèlement 
à la charnière une petite tigelle métallique suffisamment légère 
pour ne pas gêner par son poids les mouvements, mais d’un ci: 
mètre suffisant cependant pour ne pas vibrer au moment de la 
fermeture. D'un côté, soit à l'avant, soit à l'arrière, Je fixais à la 
valve inférieure près du bord libre immédiatement en dessous 
et parallèlement à la première tigelle une autre tigelle sem- 
blable. Toutes deux dépassaient la coquille de longueurs égales 


186 R. ANTHONY 


(Voy. fig. 2). J’immergeais l'animal ainsi préparé dans un 
aquarium dont les parois strictement planes et verticales étaient 
faites de glaces polies ; l'animal était placé de facon que le bord 
libre de ses valves soit en avant. Devant cet aquarium je 
braquais un chronophotographe à pellicule (modèle de Marey 
ou de Lumière), et, dès l'ouverture spontanée de l'animal 
je commençais à prendre des images successives Jusqu'à l’ou- 
verture complète. Puis priant un aide d’exeiter le sujet en 


Fig. 2. — Représentation schématique du dispositif employé pour l'inscription 
chronophotographique des mouvements des valves chez un Acéphale. 


expérience, Je continuais à prendre des images successives pen- 
dant la fermeture de ses valves, en avant soin de tourner cette 
fois plus rapidement la manivelle de lappareil, la fermeture 
surtout lorsqu'elle est provoquée étant toujours plus rapide que 
l'ouverture (1). Je développais et fixais ensuite la pellicule ainsi 
obtenue suivant les procédés photographiques ordinaires ; puis 
Je projetais successivement toutes les images sur une feuille 
de papier blanc fixée au mur en avant soin que les contours 
du bloc-support, de la valve immobile et de sa tigelle, soient 
toujours superposés; pendant les projections des différentes 
images, Je marquais les différentes positions de la valve 
mobile et de la tigelle qu'elle supportait. Sur le graphique aimsi 
obtenu il m'était facile de voir si pendant la fermeture la 
Uüigelle de la valve mobile cessait à un moment quelconque d’être 
parallèle à celle de la valve fixée, et si par conséquent il y avait 
eu ou non rotation autour d'un axe dorso-ventral et quelle 


(4) Le fait de tourner à la main la manivelle de l'appareil ne pouvait avoir 
aucun inconvénient, puisque, pour ce que je recherchais,*la notion de temps 
m'était indifférente. 


| 


/ 


| 


( 
{ 
il 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 187 


avait 66 la valeur de cette rotation. Plus simplement on peut 
remplacer ces graphiques obtenus par projection des images par 
de simples mesures au compas d'une tigelle à l'autre en différents 
points symétriques sur les images elles-mêmes. Pour les cas où 


Fig. 3. — Représentation schématique du dispositif employé pour l'inscription 
graphique des mouvements des valves chez un Acéphale. 


la rotation était très faible, ce procédé chronophotographique ne 
m'a pas donné — et cela en raison des difficultés de placer 
l'appareil exactement en face de l'animal en expérience, de 
prendre des mesures exactes et de superposer exactement les 
images pendantles projections, — les résultats que J'enattendais, 
et je lui ai préférédans la plupart des casl'inscription graphique 
x ee 1 4 1 2 

à l’aide d’un stylet. 


Ce procédé n'a pas lexactitude mécessaire et la précision de 


la méthode chronophotographique dans laquelle aucun orga- 


nisme mécanique n'est interposé entre l'image représenta- 


tive obtenue et l'objet qui la donne, mais il a l'avantage d'am- 
plifier considérablement le mouvement et de rendre la rotation. 
lorsqu'elle est faible, plus appréciable. J'opérai de la facon 
{ 


188 R. ANTHONY 


Suivante : Sur un bloc de plomb, par l'intermédiaire de cire 
molle ou de glu marine, je fixais un Acéphale par une de ses 
valves. Sur la valve libre après l'avoir soigneusement desséchée 
je fixais à l’aide d'une goutte de glu marine une petite tigelle de 
cinq à dix centimètres de long (suivant la taille du sujet en étude) 
sans poids appréciable par conséquent et se terminant par 
une petite plume à double plicature de la forme indiquée sur 
la figure 3. Cette plume, qui était introduite dans une fente du 
bambou, était soiten celluloïde, taillée dans une pellicule chrono- 
photographique hors d'usage, soit mieux encore en métal, taillée 
dans une mince feuille d'acier très légèrement trempé. J'orien- 
tais cette plume sur la valve de l'animal de facon que sa direction 
soit parallèle à la charnière. La position de la tigelle de bambou 
sur la valve n’est pas indifférente. Il ne faut pas en effet quelle 
soit placée sur l'axe de rotation possible dorso-ventral de la 
valve, mais nettement en dehors. Pour la Lutraire, par exemple, 
où la rotation est très considérable, on placera la tigelle à une cer- 
taine distance de l'axe # y au point marqué d’un x (Voy. fig. 13). 
On conçoit de plus que si j'avais orienté la plume de façon que 
sa direction soit perpendiculaire à la charnière, ilY aurait eu des 
acerocs et des ressauts sur le plan où l'inscription devait se faire 
chaque fois que la plume aurait progressé dans un certain sens 
la pointe en avant. Au-dessus de la plume je disposais une plaque 
de verre enduite de noir de fumée que je maintenais à l’aide d'une 
pince de bois soit horizontalement, soit légèrement oblique 
lorsque l'amplitude du mouvement d'ouverture était consi- 
dérable. 

Pour pouvoir plus commodément conserver mes tracés, J'ai 
remplacé souvent la plaque de verre par une petite plaquette 
de bois bien plane et bien polie sur laquelle, à l'aide de punaises 
nombreuses, je tendais aussi bien que possible une feuille de 
papier spécial pour inscriptions ; graphiques, préalablement 
noircie à la fumée : cette feuille de papier offrait l'avantage de 
pouvoir être noircie au cylindre, ce qui assure, comme l’on 
sait, la régularité de la répartition du noir de fumée. 

Une fois prise dans la pince je descendais la plaque de verre où 
la plaquette de bois parallèlement à elle-même jusqu'à ce qu'elle 
soit arrivée au contact de la plume, l'animal étant au repos; 


me, TT 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 189 


lorsqu'il écartait ses valves, la plume se déplaçait en se rappro- 
chant du support; lorsqu'il Les rapprochait, elle faisait le même 
chemin en sens inverse, revenant au point de départ. Le 
tracé une fois obtenu, Je le fixais suivant le procédé habituel 
par le: passage dans du vernis blanc à clichés. La double plica- 
ture de la plume avait pour but de lui permettre de décrire dans 
son déplacement une ligne droite et non un are de cercle 
qu'elle aurait mfaillement tracé si elle n'avait été coudée qu'une 
seule fois. De cette facon dans les différentes positions de la 
plume, l’une des deux courbures compensait l’autre et la ligne 
était une droite. 

Mais Je ne tardais pas à m'apercevoir qu'une plume ainsi 
faite, quoique donnant des indications acceptables, avait à mon 
sens des défauts qui diminuaient dans une certaine mesure la 
valeur des renseignements fournis. D'abord il était impossible 
qu'elle n’eût un certain jeu au point où elle se reliait à la tigelle, 
et ce jeu, quelque léger qu'il fût, déformait nécessairement quel- 
que peu le tracé, ce qui ne laissait pas d'avoir des inconvénients, 
l'appareil étant destiné à mettre en évidence des déviations 
souvent extrêmement peu considérables. 

De plus, lorsque les mouvements d'ouverture étaient très 
amples, comme cela à lieu chez les Pectens par exemple, l'angle 
de la plicature de la plume pouvait venir toucher la plaque de 
verre où le papier enduit de noir de fumée, salir ou effacer 
même complètement le tracé obtenu quelques moments aupa- 
ravant. 

Pour parer à ces inconvénients j'étais obligé d'incliner la 
plaque destinée à recevoir l'inscription et de calculer son ineli- 
naison de telle sorte que l’extrémité seule de la plume la touchât 
et la touchàt toujours dans quelque position que ce fàt. Cela 
n'était pas toujours facile à réaliser. 

Pour mes dernières expériences j'ai trouvé plus simple et plus 
avantageux de me faire construire par Fun des mécaniciens du 
laboratoire du professeur Marey une plume spéciale dans laquelle 
tout jeu était supprimé et grâce à laquelle on pouvait inscrire sur 
un plan toujours horizontalles mouvements de la plus grande am- 
phtude. Cette plume avait de plus l'avantage de pouvoir inscrire 
aussi bien, si on le désirait, sur un plan vertical. Toutefois, bien 


190 R. ANTHONY 


que l'inscription verticale donnât des résultats aussi précis et aussi 
exacts que l'inscription horizontale, j'évitais en général de l’em- 
ployer, ce procédé n’offrant aueun avantage sur celui que Jjem- 
ploie habituellement, et présentant au contraire de nombreux 
inconvénients, dont les principaux sont les suivants : d’abord 
la nécessité de l'emploi d'une tige doublement coudée, à angle 
droit, ce qui est le seul moyen de pouvoir prendre des tracés 
tout en laissant l'animal dans l'eau, ce qui est indispensable: 
ensuite la fatigue plus grande pour Panimal qui n’ouvrait que 
difficilement ses valves en raison de la longueur du bras de 
levier au bout duquel se trouvait l’objet destiné à être soulevé. 

L'idée de cette plume dont je me suis servi pour mes dernières 
expériences n'est pas neuve. Plusieurs fois en raison des nom- 
breux avantages qu'elle présente, je l'ai vu employer comme 
instrument d'usage courant à l’Institut Marey, où l’on exige dans 
les recherches qui y sont faites, en raison même de leur nature et 
de leur but, la précision la plus absolue. Il me semble toutefois 
utile d'indiquer brièvement 1er sa construction, pour pouvoir 
donner une idée exacte de la précision à laquelle je me suis 
astreint, el pour montrer les légères modifications que J'ai dû 
faire subir à l'instrument en usage à l'Institut Marey pour 
pouvoir l’approprier au but spécial que Je voulais atteindre. 
L'instrument que j'ai fait construire est composé de deux parties 
métalliques, l’une supérieure, l'autre imférieure (Voy. PL L fig. 1). 
réunies par une légère tigelle faite de bambou ou constituée 
de préférence par une paille. La partie métallique supérieure se 
compose d'une petite pièce métallique formée de trois branches 
dont une horizontale et deux verticales se réunissant à angles 
droits. La branche horizontale porte en son milieu une petite 
douille destinée à recevoir la paille et les branches horizontales 
présentent sur leurs faces internes deux godets symétriques 
destinés à recevoir une petite goupille qui ÿ tourne librement. 
Au milieu de cette goupille est soudée à angle droit une aiguille 
dont l'extrémité inscriptrice est rectiligne et terminée en pointe 
fine, alors que l'extrémité opposée est courbe, un peu déviée 
latéralement pour pouvoir se replier le long de la paille. Elle est 
destinée à jouer le rôle d’un contrepoids. 

La partie métallique inférieure est composée d'une petite 


0 — = © 
——_—_ ce. 


Te 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 191 


douille dans laquelle s'enfonce la tigelle. Elle se termine infé- 
rieurement par un certain nombre de branches divergentes et 
malléables qui, engluées de cire à modeler, où mieux de glu 
marine, servent à maintenir l'appareil fixé sur la valve de 
l'Acéphale que l'on étudie. 

Le fonctionnement de cet appareil est aisé à concevoir et les 
avantages qu'il présente sont évidents : tout jeu y est sup- 
primé et de plus la longueur, que l'on peut rendre aussi consi- 
dérable que lon veut, de la tige inscriptrice, fait que l'on est 
toujours assuré d'avoir un tracé complet même sur un plan 
horizontal et quel que soit l'amplitude des mouvements d'ou- 
verture de l'animal étudié. De plus, l'appareil peut être, malgré 
sa complication relative, d'une légèreté extrème. La figure 1 
(Planche 1) montre, l'appareil fixé sur une valve operculaire de 
Pecten marinus Linn. et prèt à fonctionner. 

Mentionnerai-je enfin que séduit un instant par la précision, 
l'exactitude et je dirai même l'élégance des méthodes d’inscrip- 
lion optique qui comme la chronophotographie offrent l'avan- 
lage de la non interposition d'un organisme mécanique entre 
l'image obtenue et l’objet qui la donne, j'avais songé à les uti- 
liser pour cette étude. Mais dans mon cas particulier leur appli- 
calion pratique soulevait de telles difficultés que j'ai dû y renon- 
cer; je l'ai fait avec d'autant moins de regrets que J'étais très 
Satisfait des résultats obtenus par l'inscription graphique. 

À propos des méthodes physiologiques, je dois citer aussi les 
mulilations que j'ai pratiquées dans le but de rendre des 
Isomyaires fonctionnellement Anisomyaires ou Monomyaires, 
pour pouvoir étudier ensuite sur ces animaux ainsi transformés 
les modifications survenues dans le fonctionnement des valves. 
J'ai expérimenté uniquement dans ce cas sur des Anodonta 
cygne Linn. et des Cardium norwegicum Speng. J'ai choisi 
les premiers en raison de la facilité que l'on a à se les procurer 
et à les faire vivre dans les aquariums d’eau douce, et aussi en 
raison de la facilité d'exécution de l'opération, les fibres du 
muscle adducteur antérieur (celui que je supprimais le plus 
souvent el de préférence {totalement ou en partie pour me rap- 
procher des conditions naturelles des Anisomyaires et des Mo- 
nomyaires) s'insérant {oujours très près du bord libre sur une 


192 R. ANTHONY 


1 


surface plane et non pas, comme chez les Unios, au fond d’une 
cavité. Le Cardium Norwegicunr Speng. présente également 
ce dernier avantage. Comme l'Anodonte, il est facile à se pro- 
eurer en hiver et est assez robuste; Île laboratoire de Sant- 
Waast-la-Hougue m'en à fournit en assez grand nombre. En 
rasant au scalpel et intérieurement l'une ou l'autre valve d'un 
de ces animaux maintenu ouvert à l'aide d'un petit coin de 
bois, je pratiquais le décollement du muscle adducteur d'une 
de ses insertions. L'animal, en général, se remettait assez vite 
et vivait quelques jours pendant lesquels je pouvais étudier le 
mode d'ouverture et de fermeture de ses valves, que je com- 
parais à ce que l'on constate d'une part chez les Isomyaires nor- 
maux, d'autre part chez les Anisomyaires et les Monomyaires. 

5. Procédés de recherches morphogéniques. — Comme 1l à été 
dit dans l'Introduction de ce travail, Jai voulu mettre, pour mes 
recherches morphogéniques, à contribution l'observation et l'ex- 
périmentation. 

L'observation consiste simplement, on le sait, en la mise en 
œuvre des matériaux fournis par l'étude des faits morpholo- 
giques, embryogéniques el physiologiques : elle n'offre rien de 
spécial dans son application ici et je n'y insisterai pas. 

J'ai tenté aussi desexpériences morphogéniques, mais COMME 
ces expériences, ainsi que Je l'ai dit, sont par essence même des 
expériences à très longue échéance. ilne me sera pas possible, 
à mon grand regret, d'en relater ici les résultats, qui feront 
l’objet de mémoires ultérieurs. Je me bornerai à les signaler. 

Dans une première série d'expériences, Jal essayé de faire 
vivre dans des conditions anormales, c'est-à-dire éloignées les 
unes des autres sur des plaques de verre de très jeunes Myli- 
lus edulis Linn. provenant de lizone supérieure des rochers de la 
baie de Douarnenez et habituées à vivre réunies en bouquet. 
J'employais pour cela Île procédé qui consiste à tapisser de 
plaques de verre Île fond d'un cristalloir contenant ces jeunes 
animaux. Ils se fixaient d'eux-mêmes sur les plaques de verre 
qu'on recueillait ensuite et qu'on disposait dans des aquarium à 
eau de mer. 

Dans une autre série d'expériences, et pour tenter de réaliser 
dans une certaine mesure les conditions d'existence des Acé- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 193 
phales fixés en position pleurotéthique, J'ai fixé à l'aide de 
ciment par une de leurs valves à la facon des Huitres ou des 
Æthéries, sur de grosses pierres de très Jeunes Anodontes, 
de très jeunes Unios et même de très jeunes Dreyssensies, que 
Je conserve dans des bassins et des aquariums au laboratoire 
d'Anatomie comparée du Muséum et à la Station physiolo- 
gique, me réservant d'étudier dans quelques années seulement 
peut-être les modifications consécutives à ce changement de 
position. Ce dernier ne va pas sans entraîner une certaine 
gène chez les animaux soumis à l'expérience : sur dix sujets, 
il en meurt environ huit et même souvent davantage, et, J'ai 
remarqué que la résistance était d'autant plus grande que la taille 
du sujet était moindre. 

J'ai essayé aussi de faire vivre des Cardium ROTICEGICUIR 
Speng, chez lesquels j'avais, comme il à été dit plus haut, 
détaché le muscle adducteur antérieur d'une de ses insertions, 
afin de pouvoir voir après plusieurs années les modifications 
résultant de cette mutilation. 

Enfin au laboratoire maritime de Saint-Waast-la-Hougue 
j'ai inclus dans des blocs de plâtre des Tapes decussatus Linn. 
laissant un simple passage aussi étroit que possible pour les 
siphons. Ces animaux ont, on le verra plus loin, les siphons 
séparés, et, J'ai voulu reproduire pour eux les conditions d’exis- 
tence des T'apes pullastra Mig var. perforans et même des Pho- 
lades. 

Le bloc d'inclusion est fait en deux parties, deux valves 
réunies par une petite quantité de plâtre étendue sur la ligne 
de jonction ; on peut les séparer à volonté et constater de temps 
en temps les modifications extérieures subies. La même expé- 
rience à été répétée à la Station physiologique du Collège de 
France sur des Anodontes. 

Dans toutes ces expériences où l'on emploie le ciment ou 
le plâtre, il est bon de mettre, les premiers Jours du moins, 
dans l’eau courante les animaux et le bloc qui les supporte ou 
les contient. 


Tels sont les principaux procédés de recherches que Jai 
employés au cours de ce travail. J'ai cru devoir, pour ne point 
ANN. SC. NAT. ZOOL. 1, 15 


? 


19% R. ANTHONY 


encombrer les résultats de détails qui leur soient étrangers, en 
indiquer du moins le principe et traiter dans ce chapitre spécial 
la partie purement technique de la question. Peut-être aurai-Je 
à reprendre, au moment d'indiquer les résultats, quelques 
petits points de détails de ces techniques qui, si j'en avais parlé 
maintenant, n'auraient pu être saisis avant que les questions 
anatomiques et physiologiques fussent traitées. 


CHAPITRE II 


INTRODUCTION A L'ÉTUDE GÉNÉRALE DES CARACTÈRES 
DE CONVERGENCE ET DE LA MORPHOGENIE 
DES MOLLUSQUES ACÉPHALES-: 


Puisque l'étude des eauses (morphogénie) ne doit ralion- 
nellement venir qu'après celle des faits, il est naturel de se 
demander d'abord st la morphologie, l'embryogénie et la phy- 
siologie des Acéphales sont actuellement assez avancées pour 


justifier l'étude de leur morphogénie. 


Si l'on consulte un récent traité d'Anatomie comparée ou 
de Zoologie, on peut croire qu'actuellement l'organisation, 
c'est-à-dire la morphologie des Acéphales est suffisamment 
connue dans ses grandes lignes. Les études générales de mor- 
phologie extérieure, d'anatomie, d'histologie dans lesquelles 
on s'est occupé de ces mollusques, les monographies com- 
plètes ou partielles dont ils ont été l'objet sont nombreuses 
et la plupart du temps d'une grande exactitude ; les plus petits 
détails y ont été le plus souvent, particulièrement dans les tra- 
vaux récents, mentionnés el Siminutieusement décrits qu'il sem- 
blerait même que les zoologistes aient pu croire depuis quelques 
années que rien plus n'était à faire sur ces animaux tant leur 
étude paraît avoir été délaissée d'un accord presque com- 
mun. Toutefois, ce dédain de la plupart des zoologistes 


mare = 
Roma = s 
rene 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 195 


contemporains à l'égard des Acéphales me semble loin d'être 
justifié et, en entreprenant ce travail, je n'ai pas tardé à m'a- 
percevoir que si d’une part certaines questions générales avaient 
été insuffisamment creusées, d'autre part, certains groupes par- 
ticuliers (Ætherüdæe, Chamidæ, Triducnidæ. par exemple, pour 
n'en citer que quelques-uns) étaient très insuffisamment 
connus au point de vue même morphologique. J'ai dû, de 
mon mieux, combler ces lacunes par des recherches per- 
sonnelles ; seules celles qui se rapportent aux Mollusques 
Acéphales Dimyaires fixés en position pleurothétique, trouve- 
ront place 1c1 dans la deuxième partie de ce travail. 

En compulsant la bibliographie de la morphologie des 
Acéphales durant ces dernières années, on rencontre à peu 
près louJours les mêmes noms, ceux de Lacaze-Duthiers, de 
Pelseneer, de F. Bernard, de Dall, de Drew, de Ménégaux, etc., 
qui sont les auteurs des travaux anatomiques les plus 
récents ayant trait à ces animaux. Pour l'indication de 
leurs mémoires, ainsi que de ceux des autres auteurs, 
on se reportera à l'indice bibliographique placé à la fin de 
cette étude. 


Comme leur morphologie, lembryogénie des Acéphales à été 
l'objet de nombreuses recherches dans lesquelles on constate le 
même souci d'exactitude que dans les travaux de morphologie. 
Toutefois on est obligé de reconnaitre que les faits embrvogé- 
niques, touchant les Mollusques Acéphales, sont encore moins 
complètement connus que les faits de morphologie et que les 
lacunes à combler sont là plus nombreuses encore. 

Comme pour tous les groupes animaux, d’ailleurs, l'embryo- 
génie des premiers stades, qui en somme ne varie entre deux 
groupes voisins que d'une façon relativement peu importante, 
a été faite d'une façon suffisante. Celle des stades finaux, au 
contraire, des formes dites jeunes, qui intéresse surtout le mor- 
phogéniste et le phvlogéniste, semble avoirété systématiquement 
laissée dans l'ombre. Les remarquables travaux, de Jackson, 
de Munier-Chalmas et de F. Bernard sur le développement de 
la coquille en général, ainsique quelques mémoires se rapportant 
à des types particuliers, tel celui de Jackson (88) pour l'Huitre, 


196 R. ANTHONY 


viennent à peu près seuls éclairer l'histoire des derniers stades 
de leur développement. 

Il y à done beaucoup à faire encore dans cette voie, et un 
certain nombre des résultats que j'ai déjà obtenus, pour difté- 
rents types, se trouveront brièvement indiqués au cours de ce 


chapitre. 


Quant à leur mode de vie, à leurs mœurs, au fonctionnement 
de leurs organes, à leur physiologie, en un mot, elle est à peu 
près inconnue; bien plus, les zoologistes semblent, à part de 
trop rares excepÜions, laisser dans l'ombre, d’une façon presque 
systématique, toutes ces questions pourtant si intéressantes : on 
ne se rend guère compte de la facon dont vit et se meut un 
animal dont beaucoup de naturalistes ont disséqué ou examiné 
les organes par les procédés de l'anatomie microscopique et de 
l'histologie. 

Il y a toutefois à signaler plus particulièrement dans cet ordre 
d'idées le remarquable travail de Coutance sur la physiologie 
des Acéphales, dans lequel il s'occupe plus spécialement du 
Pecten mazimus Linn., et les recherches de Jolyet et Sellier sur 
les contractions des muscles adducteurs. Quant au mémoire de 
Picri sur les Tapes? I renferme, à côté de faits intéressants, la 
relation d'expériences sans grande portée, à mon sens du moins, 
ettendant à établir l'action des différentes substances de la ma- 
bière médicale sur l'organisme des lanimaux étudiés par cel 
auteur. Les autres travaux $e rapportant à la physiologie des 
Acéphales seront énumérés à l'index bibliographique. 


En résumé, il semble, et à un examen superficiel, que les 
Mollusques Acéphales soient actuellement bien connus; mais 
lorsqu'on considère les choses de plus près, avec l'idée de 
vouloir comprendre leur organisation, de saisir, en un mot, leur 
morphogénie, ons aperçoit, d'une part, qu'il y a dans le domaine 
des faits aussi bien morphologiques qu'embryogéniques et phy- 
siologiques, beaucoup de lacunes, ce qui rend toute explication 
souvent difficile; d'autre part, que certains autres faits. dont 
l'étude a été poussée très loin, n'ont, au point de vue des expli- 
cations morphogéniques, qu'une importance minime. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 197 


Cette insuffisance réelle de documents, opposée à son abon- 
dance apparente, tient en grande partie à ce défaut d'idées 
générales qui fait que certains naturalistes, restant complète- 
ment et volontairement étrangers à Lout ce qui peut mener à 
une explication possible des formes, pensent qu'actuellement 
rien plus n’est à faire en morphologie en dehors de la eytologie 
la plus fine. IIS s'occupent uniquement à des constatations de 
points de détails, alors qu'ils passent souvent à côté de faits 
importants sans les soupçonner. 


Avant de commencer cette étude générale des caractères de 
convergence et de la morphogénie des Mollusques Acéphales, il 
ne me semble pas superflu d'indiquer la façon dont je com- 
prends l'orientation de ces animaux. Cette façon me semble si 
rationnelle et si simple que j'aurais même jugé superflu d'en 
parler si je n'avais rencontré dans des mémoires même très 
récents et postérieurs au travail de Nætling (02) sur ce sujet, 
des opinions qui m'ont paru vraiment extraordinaires. Il m'a 
semblé utile, en raison de cet état de choses et pour éviter toute 
confusion, de bien dire une fois pour toutes ce que j'entends 
par région antérieure, postérieure, ventrale et dorsale d'un 
Mollusque Acéphale. 

Pour déterminer lorientation des Acéphales, les conchylio- 
logistes s'en tenant à l'examen de la coquille seule, procèdent 
généralement de la façon suivante. Supposons que l'animal ait 
comme l'Anodonte ou la Tridacne une forme sensiblement 
allongée : 1ls mènent le grand axe et toute la région qui con- 
tenant la charrière se trouve d'un côté de cette ligne est pour 
eux la région dorsale, toute celle qui se trouve de l’autre côté, 
le bord libre, est la région ventrale. Cette façon de procéder, 
dans laquelle on ne tient aucun compte des organes les seuls 
importants au point de vue de lembryogénie et de la mor- 
phogénie, me parait devoir être abandonnée par les anato- 
mistes. C'est elle qui à conduit à dire que la Tridacne et l'Hip- 
popus élaient retournés dans leur coquille, et j'espère facile- 
ment montrer qu'il n'en est rien. En réalité, lorsqu'il s'agit 
d'orienter un Acéphale, il faut uniquement tenir compte, 
comme on le fait d’ailleurs pour tous les autres animaux, de la 


198 R. ANTHONY 


position de sa bouche (stomodeum) et de celle de son anus 


(proctodeum) pour déterminer son axe longitudinal. Les 
organes internes doivent seuls entrer en ligne de compte, 
comme l'a très bien fait remarquer Lacaze-Duthiers dans son 
mémoire sur les Tridacnes, à l'exclusion de la coquille avec ses 
diverses parties, crochets, corselet, lunule et bords libres. Cette 
dernière n’est en somme, en effet, que le produit de sécrétion du 
manteau et son crochet, qui semblerait devoir en être consi- 
dérée comme la partie la plus importante puisqu'elle est le 
centre véritable de la calcification, n'affecte pas de rapports 
constants avec les organes internes : chez le Cardium edule 
Linn., par exemple, en face du crochet sont l'estomac et le 
foie: chez les Tridacnidés, c’est la bouche. Quel que soit l'Acé- 
phale auquel je m'adresse, je me sers, suivant en cela l'exemple 
de Lacaze-Duthiers (03) et de Nœtling (02), de la position de sa 
bouche et de celle de son anus pour déterminer son axe longi- 
tudinal : la bouche marque la région antérieure, l'anus la région 
postérieure. J'appelle bord dorsal celui qui va de la bouche à 
l'anus en passant par le cœur, bord ventral celui qui va de la 
bouche à l'anus en passant par la cavité palléale. Les côtés droit 
et gauche se définissent d'eux-mêmes et répondent aux valves. 
En appliquant aux Tridaenidés cette méthode très simple d'o- 
rientation, je crois être arrivé, comme je le montrerai au cours 
de ee chapitre, à rendre plus simple et plus intelligible Ki mor- 
phologie de ces animaux et à préciser les raisons de leur appa- 
rence parfois paradoxale. Comme on le voit, je ne lens 
nullement compte, pour l'orientation, du crochet. Je définirai 
la lunule, la région située entre le crochet et la bouche; chez 
les Tridacnidés, elle est nulle puisque la bouche est au crochet. 

J'appliquerai à tous les Acéphales cette méthode d'orientation 
que Jai cru indispensable d'indiquer ici une fois pour toutes. 


Au point de vue du sens général de leurs adaptations, on peut 
diviser les Mollusques Acéphales en un certain nombre de 
catégories renfermant chacune des types convergents mais à 
affinités familiales très différentes. On peut considérer comme 
les deux principales de ces catégories : 

Les Dimvaires qui ont deux muscles adducteurs ; 


DRE AE RE 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 199 


Les MoxomyaIREs qui ont un seul muscle adducteur, les 
seconds dérivant très certainement des premiers. 

Si celte division à au point de vue qui est envisagé ici, et 
qui est celui des adaptations, un grand intérêt, elle n’a, ne crai- 
gnons pas de le répéter, au point de vue systématique général 
aucune valeur, et, c’est à tort que dans les traités de Zoologie 
les auteurs se basent encore quelquefois sur les caractères tirés 
du nombre et du développement relatif des muscles adducteurs 
pour établir la classification des Acéphales. Les organes de la 
vie de relation, et les muscles plus que tous autres, sont d'une 
façon générale en effet trop malléables pour servir de bse à une 
classification zoologique; on doit leur préférer les organes les 
plus fixes, les moins changeants, ceux sur qui les causes mor- 
phologiques ont eu le moins de prise, ceux qui par conséquent 
ayant le moins varié dans le cours des générations nous appren- 
nent le plus sur là phylogénie des êtres, toute classification, 
on le sait, devant se rapprocher dans la mesure du possible 
d’un arbre généalogique. 

Bref, les termes dimynires et monomyaires ne doivent indi- 
quer que des types généraux d'organisation en rapport avec 
des conditions d'existence déterminées, types convergents que 
l'on peut rencontrer dans tous les groupes, dans toutes les 
familles d'Acéphales par le fait de causes identiques agissant 
sur des êtres appartenant à des phylums différents. C’est 
ainsi que les Arches parmi les Filibranches, les Cardiums et 
les Cyrènes parmi les Eulamellibranches sont des Dimyaires. 
D'autre part, les Placunes sont des Monomyaires filibranches, 
tandis que les Mulleries tout aussi monomyaires ont des bran- 
chies treillagées d'Unionidés. 


Dimyaires. 


Les Dymiaires peuvent être répartis en deux sous-catégories : 
Les HoxouYaiREs où IsomyYaIREs, dans lesquels les deux mus- 
cles sont égaux où à peu près. 


200 R. ANTHONY 


Li 


Les HéréRoMYAIRES où ANISOMYAIRES, dans lesquels les deux 
muscles sont franchement inégaux, chacun de ces trois types 
d'organisation, Dimyaires isomyaires, Dimyaires anisomyaires 
et Monomyaires répondant à des conditions d'existence déter- 
minées. 

1. ISOMYAIRES. 


La forme Dimyaire isomyaire, que, par abréviation, j'appel- 
lerai au cours de ce travail Diisomyaire, et dont il va être 
question d'abord, est la forme la plus primitive des Acéphales. 

Les Imisomyaires comprennent eux-mêmes, au point de vue 
du sens général de leurs adaptations, deux grands types : 

Le TYPE EUTHÉTIQUE OÙ NORMAL; 

Le TYPE PLEUROTHÉTIQUE. 

1° DusomYAIRES EUTHÉTIQUES. J'appelle normal le premier type 
pour plusieurs raisons. D'abord, la plupart des animaux sont 
d'une façon générale euthétiques, ce qui constitue par conséquent 
la règle. De plus, en tenant compte des formes fossiles, aussi 
bien que des formes actuelles, on voit que le plus grand nombre 
des Acéphales diisomyaires le sont également. C'est aussi le 
cas parmi les Acéphales actuels de ceux dont l’organisation 
est la plus primitive, et, il en devait être de même incon- 
testablement des formes ancestrales, les Mollusques les plus 
primitifs connus étant nettement euthétiques. Enfin les Acé- 
phales qui sont pleurothétiques à l'âge adulte présentent à un 
moment donné de leur évolution ontogénique les caractères 
anatomiques des animaux euthétiques ; cela sera démontré au 
cours de ce travail pour les Diisomyaires fixés en pleurothé- 
tisme. Les formes pleurothétiques sont toujours, en somme, 
chez les Acéphales, des formes euthétiques modifiées. 

Le mot euthétique vient de deux mots grecs : eù — bien, et 
zidnu: — position, animaux en bonne posilion, c'est-à-dire en 
position normale, habituelle. 

Les euthétiques peuvent être définis : ceux qui dans les con- 
ditions normales de leur existence se trouvent constamment 
placés de telle façon que leur plan sagittal (bucco-ventro- 
ano-dorsal) soit perpendiculaire au plan sur lequel 1ls reposent 
ou progressent; les lois de la pesanteur faisant que les animaux 


| 
{ 
! 
il 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 201 


ne peuvent, à part exceptions, reposer ou progresser que sur 
un plan sensiblement horizontal ou légèrement incliné, on peut 
être amené à dire que les euthétiques sont ceux dont le plan 
sagittal est vertical dans les conditions ordinaires de la vie. 
L'ancêtre hypothétique qui aurait donné naissance aux Acé- 
phales d'une part et aux Gastéropodes diotocardes de l'autre, de- 
vait vraisemblablement posséder, comme l'ont encore aujour- 
d’hui les Mollusques les plus primitifs (Chitonides, par exemple), 
un pied rampant à la facon de celui des Chitons et des Gasté- 
ropodes. Cet animal devait done progresser à la manière de ces 
derniers, c'est-à-dire le ventre sur le sol, et dirigeant en avant 
son extrémité antérieure, comme sont naturellement amenés à 
le faire pour chercher leur nourriture les animaux qui se dé- 
placent parallèlement à un plan. De ce mode de locomotion, 
Sagittal par conséquent, il a dù résulter deux choses : d'abord 
l'allongement antéro-postérieur dans le sens de la progression, 
ensuite la symétrie par rapport au plan sagit{al; ce dernier ca- 
ractère se rencontre également chez les Chitonides et les Gasté- 
ropodes diotocardes les plus anciens, tels que le Bellérophon, par 
exemple, le rejet latéral de la masse viscérale étant une modi- 
lication secondaire qui se produit chez les Gastéropodes plus 
évolués et dont on n'a pas à s'occuper ici. Cette symétrie par 
apport au plan sagittal s'établit parce que l'animal, placé 
dans un milieu homogène et se tenant posé sur sa sole ventrale, 
les deux régions de son corps situées de chaque côté de cette 
base de sustentation sont soumises aux mêmes influences méca- 
niques; la pesanteur, ainsi d'ailleurs que toutes les autres 
forces physiques pouvant s'exercer dans un milieu homogène, 
s’exercent de la même façon en « qu'en 4, en d qu'en 4, de telle 
sorte que le plan sagittal, dont la trace sur le papier est repré- 
sentée par 7 (fig. #) est le lieu géométrique des points {els que 
a, 0, c, d. Wen résulte que de chaque côté du plan sagittal les 
deux moiliés du corps sont symétriques, c'est-à-dire de même 
surface el sensiblement de même poids : la charge se répartit en 
quelque sorte d'elle-même; on appelle ces deux moitiés du 
corps droite et gauche. Les Aréphales dinyaires euthétiques sont 
donc obligatoirement symétriques Dar rapport à leur plan sagittal 
(Voy. fig. 4). Ils le sont, pour les mêmes raisons que le {as que 


202 R. ANTHONY 


l'on obliendrait en faisant tomber verticalement, avec une 
vitesse toujours égale et sur un plan parfaitement horizontal, 
du sable fin strictement homogène par une ouverture située 
exactement au-dessus d'une cloison verticale, le serait par 
rapport à cette cloison. La pesanteur 
semble donc jouer, comme on le voit, le 
plus grand rôle dans la morphogénie gé- 
nérale des Dimvyaires euthétiques vivant 
sur des plans horizontaux. 

Un Acéphale diisomyaire euthétique est 
donc essentiellement caractérisé par un 
contour sagittal sensiblement circulaire 
ou du moins ovalaire à grand axe antéro- 
postérieur et la similitude et Pégalité des 
deux moitiés droite et gauche de son 
COrps. 


2e 


Fige he Schéma enr ) Les Diisomwaires euthétiques peuvent 
expliquer la symétrie par J 


rapport au plan sagitl être abdominothétiques ou céphalothé- 
chez les Dimyaires euthé- : : 
tiquesabdominothétiques. tiques; les premiers sont ceux qui dans 
les conditions ordinaires de la vie repo- 
sent sur le bord ventral de leur plan sagittal (Nucules): les 
seconds sont ceux qui reposent sur Le bord céphalique ou buccal 
de ce même plan sagittal (Fapes). Les uns et les autres sont, 
comme on la vu et pour les mêmes raisons, symétriques par 
rapport à ce plan. 

2. Düsomyaires euthéliques abdominothétiques. — Les Diso- 
mvaires euthéliques abdominothétiques sont libres comme la 
Nucule ou fixés d’une facon relative et ils le sont alors comme 
les Arches à laide d'un organe filamenteux spéeml appelé 
byssus. 

Abdominothétiques libres. — Les abdominothétiques libres 
sont en général considérés comme des animaux marcheurs et 
quelque peu fouisseurs. 

Dans les traités généraux de Zoologie et d'Anatomie com- 
parée, ilest même dit que la Nucula. qui peut être considérée 
comme le type de ce groupe, possède une véritable sole pé- 
dieuse analogue à celle des Gastéropodes que son mode de vie 
lui aurait probablement permis de conserver, souvenir de ses 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 203 


ancêtres les plus immédiats. En réalité, les recherches récentes 
prouvent qu'il n'en est rien. Les Nuculidæ ne possèdent pas 
de sole pédieuse analogue à celle des Gastéropodes, et il en est 
de même des Pectuncwlus. Quant au pied des Trigonidæ, qui 
semblent être également, au point de vue de l'attitude, des ab- 
dominothétiques, il a subi des modifications l'éloignant davan- 
lage du pied reptateur. 

Le pied des Nuculidés diffère par des caractères morpho- 
logiques très importants de celui des Mollusques rampants 
(Gastéropodes) et leur locomotion, quoique s'effectuant dans 
une position analogue à celle qui caractérise ces derniers, 
en diffère par des caractères physiologiques essentiels. Cette 
locomotion, qui à été étudiée ces temps derniers, d'abord par 
Drew, ensuite par un jeune naturaliste, F. Vles et enfin par 
moi-même, dont les observations corroborent absolument 
celles des précédents auteurs, est une sorte de fouissage, 
l'animal restant en position abdominothétique et progressant 
en avant. Quand on le trouve en place, 11 est en général 
enfoncé dans le sable, ne laissant paraitre que ses deux cro- 
chets à l'extrémité d'un sillon tracé qu'il vient de parcourir. Il 
est inutile d'insister ici davantage sur le mode précis de loco- 
motion de la Nucule, étant donné qu'il importe peu pour le 
point de vue auquel je me place, qu'il soit fouissement ou 
replation, puisqu'en tous cas, il est toujours abdominothétique. 
Pour de plus amples détails sur ce point, le lecteur peut d'ailleurs 
se reporter à la récente note de F. Vles sur la locomotion de la 
Nucule (Voy. Bibliographie). Il est probable que le Pectunculus, 
sinon les Trigonüdiæ, ont un mode de locomotion absolument 
comparable à celui des Nucules et qu'il faut dès maintenant 
renoncer à l'attribution à ces Acéphales qui se trouvent être 
en fait les plus primitifs, d'un pied reptateur de Gastéropode. 

Les abdominothétiques sont dépourvus de siphons, ils ont 
une seule ouverture palléalé et, pendant la fermeture, leurs 
valves sont absolument coaptées. 

Tous sont des animaux à organisation très primitive sem- 
blant dans notre faune actuelle comme des survivants des âges. 
passés. Leur aspect primitif n'a rien qui doive surprendre : 
en effet, bien que le pied de ces animaux ne soit pas à propre- 


204 R. ANTHONY 


ment parler reptateur, que Fon se place au point de vue de la 
forme aussi bien qu'à celui de la fonction, 1 n’en est pas moins 
vrai qu'il se rapproche plus que celui de tous les autres Acé- 
phales de celui des Chitonides. La forme spéciale qu'il affecte 
semble n'être, en somme, qu'une assez légère modification du 
pied reptateur des ancêtres directs des Acéphales en vue d'un 
mode de locomotion tout spécial qui ne peut être comparé au 


Fig. 5. — Coupe sagittale de Pectunculus glycimeris (Linn.). — 1, bouche ; 2, anus; 
3, pied; #, muscle adducteur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur 
contenu dans le péricarde et traversé par le rectum. 


fouissement des Céphalothétiques, mais que, par certains points, 
l'attitude dans laquelle il s'effectue a pu ètre rapprochée de la 
reptation des Acéphales primitifs descendants directs sans 
doute des Mollusques plus primitifs encore dont les Chitonides 
actuels peuvent nous donner une idée. Ils devaient être euthéti- 
ques, abdominothétiques et rampants. Des deux lignées auxquel- 
les ils ont donné naissance, celle des Gastéropodes et celle des 
Acéphales, la première est restée euthétique (en faisant abstrac- 
tion de la torsion) et abdominothétique. L'autre a modifié plus 
lard dansdiverssens son attitude, mais les plus primitifs des Acé- 
phales actuels tout en modifiant légèrement la forme de leur 
pied par l'usage spécial qu'ils ont dû en faire, sont restés comme 
leurs ancètres euthétiques et abdominothétiques ; tout d'ail- 
leurs dans leur organisation, les branchies foliacées particu- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 205 


lièrement s'accordent pour faire des Nucules des animaux 
voisins, malgré leurs modifications secondaires, du type 
ancestral. 

Quant aux Pectuneulus et aux Trigonies, qui me semblent 
aussi devoir rentrer dans ce même groupe, ils possèdent des 
branchies filamenteuses, c'est-à-dire des 
organes respiratoires arrêtés au premier 
stade de la modification partant des bran- 
chies foliacées du type nucule, pour 
aboutir aux branchies lamelleuses et fenê- 
: trées des Cardiums et même par régression 
aux cloisons musculaires des Septibran- 
ches. Les Diisomyaires abdominothétiques 
libres représentent en somme le type d'or- PRADA EN ONE Pots 


ganisation le plus primitif des Acéphales du moule interne d'Arca 
telragona Poli destinée 


actuels. à montrer l’aplatissement 
Abdominothétiques firés. + On peut dorso-ventral sous l'in- 
flueñce de la pesanteur 


encore les appeler byssifères, parce que x y. Trace du plan sa- 
chez eux la fixation se fait à l'aide d'un au VRAI 
organe filamenteux spécial, le byssus, qui 

ne semble être autre chose que le produit de sécrétion durei 
et aggloméré des glandes du pied, la glande à byssus semblant 
être l’analogue de l'ensemble des glandes du pied des Gastéro- 
podes. 

Ge groupe est personnifié par la famille des Arridæ, à l'excep- 
üon d'une part des Pectuneulinæ, lesquels semblent en somme 
être des A7cidæ qui, par le fait de conditions d'existence par- 
liculières, seraient redevenus libres et chez lesquels le pied 
aurait pris une forme et une constitution se rapprochant de 
celle qu'il possède chez les Nucules, d'autre part des Dimyidæ 
qui seraient des Arcidæ secondairement fixés en pleurothétisme 
comme nous le verrons. 

Les Arches sont des animaux qui habitent, en général, la zone 
du balancement des marées ou les régions immédiatement 
suivantes. Elles sont fixées généralement soit sur le sol, soit 
sur des rochers ou des débris de coquille, à une certaine distance 
is unes des autres, et on les prend à la drague. 

L'abondance de nourriture au lieu où eiles vivent semble 


206 R. ANTHONY 


pouvoir être considérée vraisemblablement comme une des 
causes de leur immobilité, à la suite de laquelle le pied semble 
devoir avoir diminué de volume, réduit la surface de sa sole ; 
ses glandes distantes et séparées vraisemblablement chez les 
formes hypothétiques primitives se seraient rapprochées et 
aggelomérées, et leur sécrétion ayant pris, pour une raison qui 
nous échappe, un caractère spécial de dureté en aurait fait ce 
qu'on appelle le byssus. 

Les Arches ont été considérablement modifiées dans leur 
forme par ce genre de vie, el pour citer un seul exemple, une 


Fig. 7. — Coupe sagittale d'Arca barbata Linn. — 1, bouche; 2, anus: 3, pied: 
4. muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; au milieu le 
byssus compact surmonté de ses rétracteurs antérieur et postérieur. La coupe n’a 


pas passé par le cœur. 


espèce méditerranéenne, l'Arca tetragona Poli, que le labo- 
ratoire de Banyuls m'à fournie en assez grand nombre, affecte 
la forme représentée dans la figure 6. Elle est affaissée en 
quelque sorte sous son propre poids. On trouvera une modifi- 
cation analogue dans la morphogénie des Tridarride. 

Les Arcidæ sont à tous points de vue des formes très primi- 
tives. A leur sujet, la question suivante peut se poser : 
Dérivent-elles d'animaux analogues aux Nucules? Je ne Île 
crois pas etilme parail plutôt que leur descendance puisse être 
établie de la facon suivante : au début de la série des Acéphales, 
il semble que lon doive placer, ainsi qu'il a déjà été dit, un 
groupe d'animaux primitifs à branchies foliacées et à cœur 
dorsalement placé par rapport au tube digestif, comme les 
Nucules, mais chez qui le pied n'ayant pas subi les mo- 
difications qui caractérisent celui de ces derniers animaux 
posséderait encore les caractères du pied vraiment replateur 
des Gastéropodes. On peut désigner sous le nom de Pronu- 


| 


"#0 
TE … A A <  _,_ — ç — —  — 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 207 


culidie ee groupe hypothétique. Les Pronuculidæ auraient donné 
naissance à deux séries divergentes, des abdominothétiques 
libres et des abdominothétiques fixés. Les premiers com- 
prennent, comme on la vu, d'abord les Nwewlide. Les se- 
conds, adonnés à la vie sédentaire, auraient vu leurs glandes 
pédieuses s'agglomérer et le produit de sécrétion de ces glandes 
se solidifier. Ainsi se serait constitué le groupe des Protarcide, 
qui auront donné d’une part des formes anisomyaires, les 17/yti- 
lidæ, et par une complication de la circulation branchiale 
(Voy. Ménégaux) des formes isomyaires les Arcidæ. De ces 
dernières, une branche divergente, les Pectuneulinæ, aurait 
fait retour à la vie libre, tandis qu'une autre branche encore 
aurait constitué, par l'intermédiaire de formes analogues à nos 
Limopsis actuels, les Dimyidæ (4), fixés en position pleuro- 
thétique (Voy. le tableau de la fin de ce chapitre). 

Outre les Arcidæ, dont les affinités probables viennent d’être 
brièvement indiquées, le groupe des abdominothétiques bvssi- 
fères comprend un certain nombre de formes moins impor- 
lantes, qui sont incontestablement des Céphalothétiques reve- 
nus à l’abdominothétisme et chez lesquelles le byssus aurait 
réapparu. 

6. Düsomyatres euthétiques céphalothétiques. — Dans cette 
catégorie des Céphalothétiques, qui comprend le plus grand 
nombre des Acéphales, je puis ranger les animaux fouisseurs 
à quelque degré que ce soit, aussi bien les Anodontes et les 
Unios, qu'on trouve tantôt et par exception posés sur une de 
leurs valves, tantôt et le plus souvent, enfoncés l'orifice buc- 
cal en bas, dans le sable ou la vase, que les Pholades et les 
Tarets qui passent toute leur vie dans les galeries qu'ils se sont 
creusées, lélargissant à mesure qu'eux-mêmes grandissent et 
n'en sortant Jamais. 

Suivant le degré de leurs modifications, sous l'influence de 
l'enfouissement céphalothétique, on peut diviser pour la com- 
modité de la description ces animaux en trois groupes. 

1) Le premier groupe comprendra un certain nombre d'Acé- 
phales, que l’on range parfois parmi les Asiphoniens ou Inté- 


(1) Les Dimyidæ semblent être (rès anciens puisqu'on en trouve déjà dans 
le Bathonien. 


208 R. ANTHONY 


oripalliés, ce qui pourrait tendre à les faire passer à tort pour 
de vrais abdominothétiques. 

En réalité, ils font incontestablement partie intégrante des 
Céphalothétiques et forment la transition aussi bien au point de 
vue morphologique qu'au point de vue éthologique et fonc- 
tionnel, entre le premier de ces groupes et le second. Dans ce 
groupe de transition, il semble que lon puisse placer les Unio- 
nidæ. les Carditidæ, les Astartidæ, les Crassatellidæ, les Cyre- 
nids, les Cyprinidæ, ete, qui constituent aussi ce que beau- 
coup d'auteurs appellent les Submytilareu. 

Pour se rendre compte de ce qu'est exactement le mode 
de vie céphalothétique le plus simple est de s'adresser aux 
Unionidés qui de tous les animaux faisant partie de cette pre- 
mière catégorie de transition sont ceux dont il est le plus aisé 
d'observer le mode de vie; un grand nombre d'Unionidés vivent 
dans beaucoup de rivières el de cours d’eau de notre pays: 

Si l'on regarde avee soin le fond vaseux où sablonneux d'une 
rivière habitée par des Unios ou des Anodontes, on peut y voir 
deux choses, d’abord de larges sillons tortueux et peu profonds 
qui sont la trace de la progression de ces animaux, à l’aide de 
leur pied; ensuite, çà et là de petits groupes de papilles courtes 
et peu mobiles, émergeant au fond de l'eau de la surface hbre 
de la vase et la dépassant à peine de quelques millimètres. Les 
sillons y aboutissent. De plus près on voit que ces papilles sont 
disposées sur deux rangs, séparés par une fente qui parait 
profonde. Au delà des papilles, la fente se continue de l'autre 
côté d'une mince cloison. On voit done, en résumé, deux orifices 
dont l'un, le plus considérable, est entouré de papilles. Par ce 
dernier s'établit un courant d'entrée; par le second, un courant 
de sortie qui fait tourbillonner les particules solides contenues 
dans l'eau aux alentours. Une telle disposition à la surface de 
la vase, au fond de l'eau, indique à coup sûr la présence d'un 
Unionidé enfoui verticalement la région buccale en bas et ne 
laissant dépasser qu'une toute petite partie du bord postérieur 
des lobes de son manteau. Cette région postérieure est d’ailleurs 
la seule où normalement les bords libres du manteau ne soient 
pas rapprochés et coaptés, la seule par conséquent qui permette 
à l'eau d'entrer et de sortir. 


À 
; 


| 
| 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 209 


Si on suit le bord palléal d’un Unionidé, on voit qu'en dehors 

de la région cardinale, les deux lobes du manteau sont libres. Ils 
ne sont réunis l'un à l'autre que par deux commissures, l’une 
assez forte, qui se trouve au point où les branchies se ter- 
minent en arrière, l’autre d'importance secondaire et située 
dorsalement par rapport à la précédente. 
Ces trois commissures déterminent trois orifices ; l’un très 
considérable, antéro-ventral et même légèrement postérieur, 
qui sert à la fois à la sortie du pied et à l'entrée de l'eau dans Ja 
cavité palléale ; l'autre postérieur, qui sert à la sortie de l'eau de 
la cavité palléale ; le troisième orifice est un orifice supplémen- 
taire dépendant de l'orifice expirateur. Le premier de ces trois 
orifices tend chez les Unionidés à se diviser en deux : un orifice 
antéro-ventral considérable servant exclusivement à la sortie du 
pied et un orifice postérieur servant à l'entrée de l'eau. Anato- 
Miquement, ces deux orifices sont confondus, mais au point de 
vue physiologique ils sont séparés, puisque quand le second. 
l'orifice inspiraleur, est largement ouvert, le premier, l'orifice 
pédieux, est fermé par le rapprochement et l'accolement des 
deux bords du manteau. De plus, là partie du bord palléal qui 
dépend de la région qu'on peut en somme appeler inspiratrice, 
estgarnie de papilles, alors que les bords de lorifice pédieux en 
sont totalement dépourvus. | 

Les Unionidés ne possèdent done pas de siphons morpholo- 
giquement parlant, mais ils vivent néanmoins enfouis en cépha- 
lothétisme, laissant émerger les papilles postérieures de leur 
manteau, rudiment d'appareil siphonien en voie d'apparition et 
vers lequel ils tendent incontestablement. Cette disposition des 
orifices palléaux (confusion de l'orifice pédieux avec l’'orifice 
inspirateur), caractérise les céphalothétiques de la 1°° calégorie. 

Comment les Acéphales ont-ils pu être amenés à passer de 
l’abdominothétisme au céphalothétisme? Comme il à été dit, 
la Nucule, lorsqu'on la rencontre en position normale, est 
enfoncée dans le sable de telle sorte que les bords libres de 
sa coquille sont inférieurs, le plan sagittal étant perpendicu- 
laire à la couche de sable (abdominothétisme) : ses crochets sont 
visibles à l'extérieur. Supposons que, pour une raison quel- 
conque, un animal plus ou moins analogue à la Nucule s'enfonce 

ANN. SC. NAT. ZOOI.. 1, 14 


210 R. ANTHONY 


davantage en profondeur dans le sable. De par ce fait que le 
pied sort toujours de la coquille par la région antérieure de 
celte dernière, et que c'est par lui que s'accomplit l'enfouisse- 
ment, la région antérieure de l'animal se portera obligatoire- 
ment en bas, et la région postérieure restera en haut. A partir 
de ce moment, le céphalothétisme aura remplacé l'abdomino- 
thétisme. C'est probablement quelque chose d'analogue qui à 
dû se passer en réalité. Pour des raisons que noûs ignorons, 
tenant probablement à la nature des substratums, des Acéphales 
abdominothétiques, vraisemblablement des byssifères, ont fait 
de leur pied un usage qui en à amené à nouveau le développe- 
ment, le byssus est disparu, et ces animaux ayant dû avoir à 
enfoncer davantage en profondeur, leur région antérieure s'est 
par ce seul fait portée en bas, ils ont en quelque sorte basculé 
en avant et sont devenus céphalothétiques (1). 

Voyons maintenant comment l'organisation caractéristique 
des céphalothétiques à pu prendre naissance. Pour cela prenons 
l'animal abdominothétique dont.les deux lobes du manteau sont 
séparés sur toute leur longueur. Au point de vue de ses bran- 
chies comme à celui de beaucoup d'autres de ses organes cel 
Acéphale présente des caractères primitifs indiseutables. Ses 
branchies sont filamenteuses (Pectunculus) où même foliacées 
(Nucule) et flottent librement dans la cavité palléale unique. 
Par le fait de l'enfouissement céphalothétique, les orifices d'en- 
trée et de sortie de l’eau se trouvent rapprochés et limités à la 
région postérieure située en haut. Pour que l'eau, arrivant par 
l'orifice d'entrée puisse aller jusqu'à la bouche située en bas, il 
est de toute nécessité que le courant d'entrée et le courant de 
sortie se canalisent en quelque sorte : une cloison se forme entre 
les deux. C'est à cela que se rattache la complication de la bran- 
chie filamenteuse qui ne larde pas à devenir fenestrée. 

Les filaments se réunissant par des anastomoses et les bran- 
chies devenues ainsi lamelleuses adhèrent par leurs bords au 
manteau d'une part, à la masse viscérale de l'autre, divisant la 


(1) Certaines formes fossiles de Trigonies présentent dans la région posté- 
rieure de leur coquille des traces incontestables de siphons, disposition cadrant 
parfaitement avec les modifications du pied de ces animaux qui rappelle celui 
des Céphalothétiques [Voy. Pelseneer (91)]. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES D11 


cavité unique en deux cavités, l'une antébranchiale ou palléale 
proprement dite, l'autre rétrobranchiale. La première reçoit 
l'eau chargée d'oxygène et de matières alimentaires ; ces der- 
nières sont recueillies par les palpes buccaux et l'eau traverse 
alors les lames branchiales par les fenêtres dont elles sont per- 
cées; c'est là que que se fait l'hématose. Une fois dans la cavité 
rétrobranchiale, l'eau impropre à la respiration se charge des 
produits d’exsécrétion et des déjections qu'elle déverse à l'ex- 
térieur. Cette division en deux parties de la cavité palléale qui 
produit un réel perfectionnement de l'organe respiratoire est le 
premier stade dans la différenciation des siphons. La division 
de la cavité primitivement unique se poursuit Jusqu'au bord 
palléal en arrière et détermine ainsi la production de deux ori- 
lices, l'un inspirateur et pédieux, l'autre expirateur. 

Lorsque l'animal est enfoui ne laissant émerger du sable ou 
de la vase qu'une petite partie du bord postérieur de son man- 
teau, cette petite partie plus que toute autre se trouve exposée 
aux contacts étrangers, ce qui peut y déterminer la production 
de petites papilles probablement sensitives, analogues à celles 
qui viennent d’être signalées chez les Unionidés et qui chez les 
Céphalothétiques plus évolués atteignent des dimensions consi- 
dérables. On les rencontre chez les Unios et les Anodontes à 
orifice inspirateur seulement, l'orifice expirateur en étant 
dépourvu. On peut done dire que la complication de la branchie 
et là première apparition des siphons semblent être liées à 
l'existence céphalothétique. 

À cette apparition débauche Siphonale s'ajoutent chez les 
Céphalothétiques de la 4° calégorie d’autres modifications en 
‘apport encore avec le céphalothétisme qui sont, par exemple : 
la transformation du pied qui perd sa forme élargie et son 
byssus pour prendre l'aspect spécial en fer de hache, en soc de 
charrue qui à fait donner aux Acéphales la dénomination 
générale de Peléeypode ;: l'allongement antéro-postérieur de la 
coquille, son raccourcissement dorso-ventral qui amène le cœur 
au contact du tube digestif qui le traverse, ce qui n'existe pas, 

“Comme on le sait, chez les Nucules dont le cœur est dorsal par 
rapport au tube digestif comme chez les Gastéropodes, et son 
élargissement bilatéral. Chez les Céphalothétiques de ce premier 


19 


212 R. ANTHONY 


groupe, les valves sont encore au moment de la fermeture 
parfaitement coaptées comme chez les Abdominothétiques et 
le ligament très développé allongé d'avant en arrière. 

On voit done combien il est facile de passer des Abdomino- 
thétiques aux Céphalothétiques par l'intermédiaire des Unio- 
nidés et plus exactement de tout ce groupe qu'on appelle les 
Submytilacea. Le retour à la vie Hibre qui a comme conséquence 


Fig. 8. — Coupe sagittale d'Unio pictorum Linn. — 1, bouche; 2, anus; 3, pied; 
4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur: 6, cœur. 


la perte du byssus et la nécessité consécutive de l'enfouisse- 
ment, semble pouvoir expliquer ce passage. L’Anodonte qui 
présente déjà tous les caractères des Céphalothétiques est un 
type de transition vers les formes nettement siphonées. La 
tendance manifeste qui s'accentue davantage dans les groupes 
suivants semble donc être le calibrage dans un tube; l'animal 
tend à devenir un corps allongé parcouru par deux courants 
d'eau parallèles et de sens inverse. 

2) Le deuxième groupe de Céphalothétiques comprendra les 
formes vraiment siphonées en tout analogues aux précédentes, 
avec cette seule différence que les siphons existent réellement. 
De plus, le siphon inspirateur qui chez les Unios communiquait 
largement avec l'orifice du pied, est ici fermé ventralement. 
Les Cardüdæ, les Donacidæ, les Veneridæ (sauf certains comme 
les Tapes pullastra Ulg. var. perforans, les Mactridæ (sauf Lutra- 
ri), les Tellinidæ peuvent être rangés dans ce groupe tout artifi- 
ciel, d’ailleurs, puisque d'une part les Cardüdæ confinent au pre- 
mier groupe et les T'ellinidæ au troisième. Ces animaux vivent 
enfouis dans le sable ou la vase et présentent tous une organisa- 
tion générale très voisine de celle des types du groupe précé- 
dent. Comme il a été dit, leurs siphons sont complets; de plus 
ils sont parfois très développés, longs, ayant la forme de deux 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 213 


tubes musculeux, l'un d'entrée, l'autre de sortie, terminés par 
des couronnes de papilles sensitives, parfois même d'organes 
de sensibilité spéciale. 

Comment peut-on expliquer rationnellement cet allongement 
des siphons qui caractérise les Céphalothétiques de ce deuxième 
groupe. 

Ne peut-on admettre qu'il puisse arriver qu'au cours de son 
développement, l'animal vivant dans un sable vaseux très 
liquide soit entrainé par son propre poids par exemple et s'y 
enfonce davantage. Il faudra toujours, en {ous cas, pour que 
l'entrée et la sortie de l’eau puisse se faire, qu'une petite partie 
de son individu reste à la surface de la couche vaseuse; dans 
ces conditions, les siphons s'allongent, s'éürent, et les efforts que 
fait l'animal ne peuvent-ils être considérés comme favorisant le 
développement de la musculature? Nous arrivons ainsi au type 
du Curdium edule Linn. par exemple, où les siphons sont 
déjà constitués quoique encore assez réduits. 

A mesure que les siphons s'allongent, leurs muscles rétrac- 
teurs se développent davantage, leur surface d'insertion s'élar- 
git; elle s'enfonce de plus en plus à l'intérieur de la coquille 
par le fait des mouvements répétés de rentrée et de sortie que 
l'animal fait effectuer à ses siphons. C’est le sinus palléal qui se 
conslitue, et, s’il est à peine ébauché encore chez le Cardium 
edule Linn., il sera très marqué chez les types suivants plus 
évolués, auxquels on donne parfois le nom de Sinupalliés. 

À partir de ce moment où les siphons sont constitués, deux 
directions peuvent être suivies: certains animaux se développent 
dans une vase très hétérogène mêlée de gros graviers ou de 
débris de coquilles, d’autres, au contraire, dans une substance 
très homogène, vase molle, sable fin, ou roche. Chez les pre- 
miers les siphons habitués à serpenter en quelque sorte entre 
les pierres, à chercher leur route, si Je puis m'exprimer ainsi, 
acquerront une plus grande liberté, l'un par rapport à l’autre, 
ne se soudant pas, restant même divergents, comme c'est le cas 
des Tapes decussatus Linn.; chez ceux. au contraire, qui se 
développent dans une substance plus homogène, l'adaptation à 
la vie en galeries, est plus avancée que chez les précédents, 
les siphons sont rectilignes et parallèles, allant par le plus 


214 R. ANTHONY 


court chemin à la surface libre. Ils s’'accolent comme les canons 
d'un fusil de chasse, chez les Tapes pullaster Mig. par 
exemple, et l'animal tout entier, en quelque sorte, tend à se 
calibrer, s'allongeant d'avant en arrière, diminuant au contraire 


Fig. 9. — Coupe sagittale de Tapes decussatus Linn. — 1, bouche ; 2, anus; 3, pied; 
4, muscle adducteur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur ; 6, cœur. Les deux 


siphons sont séparés. C’est le type de vase hétérogène. 


sa longueur dorso-ventrale, augmentant son diamètre trans- 
versal. 

J'ai étudié biométriquement la forme de la coquille chez 
Tapes decussatus Linn. et chez Tapes pullaster Mtg., lun 
vivant dans le gravier grossier, l'autre dans le sable fin homo- 


Fig. 10. — Coupe sagittale de Tapes pullastra Mtg. — 1, bouche: 2, anus; 


3, pied; 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur ; 6, cœur. 
Les deux siphons sont réunis. C’est le type de vase homogène. 


gène. Malgré le caractère général que je compte conserver à ce 
chapitre, 11 m'a paru intéressant de résumer ici les résultats de 
cette étude. J'ai pris deux lots de ces animaux, l'un de 100 T'apes 
decussatus Linn., provenant des pierrailles du vieux port de 
Saint-Waast-la-Hougue, lautre de 100 Tapes pullastra Mig, 
provenant des sables fins d'Aumeville-Crasville près Saint- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 215 


Waast-la-Hougue. Sur la valve gauche de chacun de ces ani- 
maux j'ai mesuré avec beaucoup de soin, à l’aide d’un pied 
à coulisse, la distance dorso-ventrale maximum (en prenant 
comme point de repère dorsal le point le plus proéminent du 
crochet), et la distance antéro-postérieure maximum. J’obte- 


13 


RENE EN" CC TEST Ar 14 Jé JE? e0 TE VA 


Fig. 11. — Le trait plein indique le Tapes pullasltra Mtg.; le trait pointillé indique 
le Tapes decussalus Linn. 


 nais ainsi la hauteur et la longueur maximum de mes animaux, 
que je désignais par H et L. En divisant par L, la quantité H 
| préalablement multipliée par 100 afin d'éviter l'introduction 
de décimales gênantes pour les calculs, j'obtenais une certaine 
quantité T, un indice comparable à celui que Nœtling (99) calcula 
sur les arches. Calculé sur 100 Tapes decussatus Linn., cet indice 
| m'a donné une valeur moyenne de 76.82, et sur 100 T'apes 
pullaster Mig. une valeur moyenne de 65.92. Ce qui revient à 
dire que les Tapes pullastra Mig. sont par rapport à leur hauteur 
plus longs que les Tapes decussatus Liun., ce qui paraît d’ailleurs 


{ 


216 R. ANTHONY 


avec une grande évidence au seul examen du profil sagittal des 
coquilles. 

Si, au lieu de faire la moyenne brute des indices, on recherche 
quel est l'indice qui existe Le plus souvent chez Tapes decussatus 
Linn. ou chez Tapes pullastra Mig., c'est-à-dire la fréquence, 
on voit que pour le premier de ces animaux l'indice 75 à été 
rencontré 22 fois sur 100 et pour le second l'indice 6% à été 
rencontré 14 fois sur 100. Le tableau de la figure 11 repré- 
sentant la courbe des variations de cet indice dispense d’ailleurs 
de plus amples explications. Le Tapes pullastra Mig. marque 
donc par la forme de sa coquille, comme par celle de ses 
siphons, un stade plus avancé que le Tapes decussatus Linn. 
dans l'adaptation à la vie en galerie. Il commence déjà à 
prendre la forme du trou dans lequel il vit et l’on concoit que 
creusé dans une substance molle et homogène ce trou doive 
avoir une section géométriquement arrondie, à l'encontre de 
celui creusé dans le sable mêlé de graviers, et dont un obstacle 
peut déranger à tout instant la régularité. se calibre en quelque 


sorte, sa coquille s'allonge d'avant en arrière, se raccourcit 


dorso-ventralement, augmente son diamètre bilatéral et ses 


siphons s’accolent. Il tend, en un mot, à prendre la forme d’un 
cylindre dont le périmètre serait partout égal. 


Dans le second groupe de Céphalothétiques, ainsi que dans 


le premier, lorsque l'animal rapproche ses valves, il les coapte 
d’une facon parfaite et le ligament est toujours très développé, 
allongé d'avant en arrière et externe. Ce n’est que dans certaines 
formes (Wactridæ) plus évoluées et tendant au troisième groupe, 
que la partie élastique du ligament tend à devenir interne, à 
se réduire, à prendre en un mot la forme que nous verrons 
chez Lutrari. On attribue parfois aux Abdominothétiques, aux 
Céphalothétiques du premier groupe et à quelques-uns de ceux 
du second, la dénomination d'intégripalliés, venant de ce que 
leur impression palléale est dépourvue de sinus, opposée à celle 
de sinupalliés s'appliquant aux Céphalothétiques de la troisième 
catégorie et à quelques-uns de ceux de la seconde, venant de 
ce que leur impression palléale présente un sus plus ou moins 
profond. Ces deux expressions sont extrêmement défectueuses 
et doivent être évitées. Elles tendent en effet à impliquer l'ab- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 217 


sence ou la présence de siphons, alors qu'en réalité l'absence 
de sinus n'est pas toujours liée à celle des siphons. Ces derniers 
peuvent exister très nettement sans qu'il y ait de sinus palléal. 
C'est le cas de la plupart des Cardiidæ, tels Cardium edule Linn. 
Cardium norwegicum Speng., Cardiumtuberculatum Linn., pour 
n'en citer que quelques-uns. En réalité, le sinus palléal, qui 
n'est autre chose que la limite d'insertion des muscles rétrac- 
teurs des siphons, n'existe que lorsque ces derniers sont suffi- 
samment aliongés. 

Les dénominations d'asiphoniens et de siphoniens ne sont guère 
préférables aux précédentes : l'on peut dire que les Siphoniens 
commencent avec la deuxième catégorie des Céphalothétiques. 
Ces expressions ne peuvent, sous aucun prétexte, entrer dans 
aucune classification systématique rationnelle : elles expriment 
des caractères vraiment trop variables avec les conditions 
d'existence, puisqu'on voit dans là même famille naturelle des 
Cardüdiæ, par exemple, des animaux à siphons très courts comme 
le Cardium edule Linn., et des animaux à siphons très longs 
comme l’Adacna de la mer Caspienne. De même parmi les 
Unionidæ (Céphalothétiques de la première catégorie), dont 
l'Anodonte peut être considéré comme le type, se trouvent de 
véritables Siphoniens, les Muteles. 

3) Le troisième groupe comprendra les formes chez lesquelles 
le céphalothétisme, l'enfouissement et la vie en galeries ont 
amené les modifications les plus profondes. On peut y ranger, 
par exemple, le T'apes pullastra Mig. var. perforans de la 
famille des Veneridæ, les Psammobiidæ, qui ne sont, eux, que 
des Tellinidæ plus évolués dans le sens de l'adaptation à l'en- 
fouissement et au céphalothétisme, les Myidæ, à l'exception 
de Corbula qui est devenue secondairement pleurothétique, 
les Solenidæ, les Anatinidæ. les Gastrochænidæ, les Pholadidæ. 
les Teredinidæ et aussi les Septibranches. Au point de vue 
éthologique, ces animaux différent grandement par la nature 
des substances dans lesquelles ils s'enfouissent : les uns, 
comme Mya, se trouvent dans l'argile ou la vase molle des 
estuaires ; d’autres, comme Lutraria, se rencontrent dans le 
sable fin avec les Solen. Les Psammobia se trouvent souvent 
dans le sable grossier mêlé de débris de coquilles avec le 


218 R. ANTHONY 


T'apes decussatus Linn., vers lequel ils convergent d’ailleurs par 
l'indépendance de leurs tubes siphonaux; le T'apes pullastra Mig., 
var. perforans est fréquemment rencontré dans les roches cal- 
caires molles; les Gastrochæna dans les roches plus dures ou 
dans des galeries creusées dans l'épaisseur même des coquilles 
vides d’autres Lamellibranches, d'Huîtres, par exemple, ou de 
Gastéropodes. Quant aux Pholades, elles habitent généralement 
des roches dures ou de largile compacte; les Tarets enfin 
creusent, on le sait, leurs galeries dans le bois. 

De ces différents modes de vie paraissent avoir résulté des 
différences d'organisation secondaires. Toutefois ces animaux 
ont un certain nombre de caractères communs : c'est d'abord 
la longueur remarquable des siphons chez tous, sauf chez les 
plus évolués des Solenidæ, le genre Solen, par exemple, où la 
longueur démesurée de la coquille et par conséquent du corps 
tout entier en compense la brièveté ; leur accolement en canons 
de fusil, qu'on à déjà vu chez le Tapes pullastra Mig., sauf chez 
certains groupes, comme les Psammobüdæ et les Soleno- 
curlus, par exemple parmi les So/enidæ où ils sont très diver- 
gents par le fait d'un mécanisme analogue à celui qui en 
produit la divergence chez le Tapes decussatus Linn. qui a, 
d'ailleurs, le même mode d'existence; leur tendance à égaliser 
leur diamètre avec le diamètre du corps, tendance qui atteint 
son maximum chez le Taret; la nature des valves qui ne restent 
épaisses chez la Pholade que dans la région antérieure et leur 
transparence ; leur réduction qui s'accuse déjà chez les Pho- 
lades et qui atteint son maximum chez le Taret où elles sont 
réduites à leur extrémité antérieure seule, leur bâillance 
qui, nulle chez les T'apes pullastra Mig. par exemple, devient 
appréciable quoique modérée chez les Psammotia et atteint son 
maximum chez les Pholades, les Gastrochænes et les Tarets ; 
la position interne (sauf chez quelques-uns, les Psammobia) et 
la réduction du ligament qui, déjà très réduit chez les Lutraires, 
disparaît complètement (du moins sa partie élastique) chez les 
Pholades ; la régression du pied et sa transformation en une 
ventouse dont l’ébauche peut être nettement vue chez le Tapes 
pullastra Mig. var. perforans et qui atteint son maximum chez 
les Pholades ; et enfin la canalisation des courants d’eau d'entrée 


mr 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 219 


et de sortie qui, chez les Septibranches où la branchie est trans- 
formée en une sorte de cloison musculaire, devient parfaite. 

Par quel mécanisme ces différentes modifications qui carac- 
térisent les Céphalothétiques du troisième groupe ont-elles pu 
se produire? L’allongement des siphons, leur accolement en 
canons de fusil, a déjà été expliqué et ces caractères existant 
déjà dans le groupe précédent ne font que s'affirmer ici. Mais, 
à partir du moment où l’on atteint ce troisième groupe, les 
siphons augmentent de volume. 

En même temps le volume du corps de l'animal lui-même 
diminue; le processus de calibrage en un mot s'accentue, 


Fig. 12. — Coupe sagittale de Pholas dactylus Linn. — 1, bouche : 2, anus; 3, pied 
transformé en ventouse: #, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur 
postérieur ; 6, cœur. 


l'animal tendant à remplir complètement la galerie dans 
laquelle 1l vit. Les valves déjà allongées du Tapes pullastra 
Mtg. s'allongent davantage chez la Lutraire, leur courbure 
latérale augmente et il arrive à un certain moment que l'animal 
complètement calibré arrive à prendre cet aspect allongé et 
vermiforme qui caractérise les animaux vivant dans des galeries, 
à quelque groupe, à quelque phylum qu'ils appartiennent, les 
Vers en général, les Cécilies et même les Tarets. En même temps 
les valves qui, au moment de la fermeture étaient parfaitement 
coaptées chez Tapes pullastra Mtg. et chez tous les Céphalo- 
thétiques précédents, restent constamment bâillantes. Cette 
bâillance, qui était encore modérée chez les Psammobies, s’ac- 
centue chez les Lutraires et devient considérable chez les Pho- 
lades. Elle tient sans aucun doute à ce fait que les siphons 
ayant augmenté de volume par le fait du calibrage dont il a 
été parlé plus haut, écartent davantage postérieurement au 
moment de leur sortie les bords de la coquille, qui au con- 
traire se rapprochent antérieurement. C'est à cette bällance 


220 R. ANTHONY 


continuelle que doit être rattachée la régression du ligament 
encore très étendu et allongé dorsalement chez le Tapes 
pullastra Mg. En effet, par le fait de leurs dimensions consi- 
dérables, les siphons lorsqu'ils sont étalés, écartent posté- 
rieurement les valves, ce qui distend le ligament dans toute 
sa région postérieure ; bientôt il finit par disparaître, ou mieux 
il ne se forme pas dans toute la région distendue. Les 
siphons étant d’ailleurs le plus souvent hors de la coquille, 
cette dernière reste toujours bâillante, et les nouvelles couches 
calcaires qui se forment pendant son accroissement se dis- 
posent de telle façon que les deux bords postérieurs des valves ne 
peuvent plus se coapter même lorsque les siphons sont rétractés, 
ils prennent cet aspect de bords évasés très nettement caractérisé 
chez les Myes et les Anatines. D'autre part, lorsque le pied effec- 
tue sa sortie par la région antérieure de la coquille, il se produit 
une bâillance antérieure pendant laquelle les bords postérieurs 
de la coquille tendent au contraire à se rapprocher, exerçant 
une certaine pression sur les siphons. Il résulte en somme de 
tout ceci, que chacune des valves dans les différents mouve- 
ments qu'elle accomplit, tourne autour d'un axe 77, passant 
par le crochet (Voy. fig. 13), et que le ligament sans cesse 
distendu dans sa région postérieure se réduit en quelque sorte 
(igament fibreux) à un point, à un pivot situé exactement en 
face des crochets. C’est ce que l’on observe chez les Lutraires où 
par la chronophotographie et l’inscription graphique, et su vant 
les procédés énoncés au chapitre T, j'ai mis en évidence cette rota- 
tion autour de l'axe zy pendant les mouvements des valves. Chez 
ces animaux, le ligament élastique est, comme l’on sait, interne 
et extrêmement réduit. La bâillance étant surtout postérieure, 
c'est-à-dire se produisant d'une façon plus étendue et plus con- 
tinue en arrière qu'en avant, les deux valves de la coquille sont 
le plus souvent au contact en avant qu'en arrière. C’est ce qui 
explique la présence de dents exclusivement dans la région cardi- 
nale et dans la région latérale antérieure; les dents postérieures 
disparaissent toujours (Voy. Lutraria elliptica Lmck.). On pour- 
rait croire que le ligament doive être complètement détruit par 
le fait de cette bâillance exagérée, alternativement postérieure 
et antérieure. Il n’en est rien; chez les Lutraires, il se conserve 


Q 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 291 


par le fait de la fonction qu'il possède encore, et qui est celle 
de l’écartement passif des valves. Mais par sa distension déme- 
surée 1l s'est en quelque sorte rompu au point que chez Lutraria 
elliptica Lmck. par exemple, sa partie élastique est formée de 
deux troncs de cône s’insérant aux deux valves par leur plus 
grande base et S'opposant par leur base plus petite. Ces deux 


Fig. 143. — Vue intérieure d’une valve gauche de Lutlraria elliplica Lmck. — 
A, muscle adducteur antérieur; P, muscle adducteur postérieur; xy, axe de 
rotation dorso-ventrale. La petite croix indique l'endroit où doit être placée la tige 
inscriptrice. 


troncs de cône sont simplement disposés l'un en face de l'autre 
séparés par une fente. 

Si l’on se rapporte à l'explication qu'a donnée F. Bernard 
de la rotation des crochets, on concoit facilement pourquoi le 
crochet des Céphalothétiques de la troisième série, dont le liga- 
ment interne tend à être symétrique par ‘apport au plan coro- 
nal, est très réduit, et absolument droit. 

Du fait que chez les animaux comme la Lutraire chacune des 
valves bascule autour de l'axe zy, le ligament fonctionne de 
moins en moins; en effet, la bâillance postérieure étant conti- 
nuelle, les valves sont en quelque sorte continuellement entr'ou- 
vertes, elles ne se rapprochent que sous l'effort de la contraction 
du muscle adducteur postérieur; mais pendant ce rapproche- 
ment les valves tournant autour de l'axe xy S'écartent en avant. 
Si à ce moment le muscle adducteur antérieur se contracte, elles 
S'écarteront à nouveau en arrière. En somme, lorsqu'elles sont 
bâillantes en arrière elles sont rapprochées en avant et inver- 
sement; la bâillance alternativement antérieure et postérieure 
s'effectue par l'effet de la contraction alternative des muscles 


229 R. ANTHONY 


di mm 


adducteurs qui suffisent ainsi à écarter les valves, etle ligament 
élastique ne fonctionne plus pour ainsi dire. 

Sion considère la figure 13 représentant une valve de Lutraire, 
on s'aperçoit que les muscles adducteurs sont disposés suivant 
le type des animaux de la catégorie précédente, €'est-à-dire ne 
sont pas situés sur la même ligne que le ligament, le point de 
pivotement. Cette condition est, on le conçoit, défavorable au 
mouvement de rotation; aussi lorsque le mouvement s'accom- 
plit sont-ce les fibres Les plus ventrales de Padducteur postérieur 
et les plus dorsales de l'adducteur antérieur qui fonctionnent 
le plus. Par ce fait, elles se développent alors que les autres 
tendent à disparaître ; ilen résulte que les museles tendent en 
somme à se déplacer, de facon à se mettre en droite ligne avec 
le point de pivotement, eest ce qui se produit chez la Pholade 
oùle muscle adducteur antérieur est devenu tout à fait dorsal. 
Les conditions sont à ce moment les plus favorables pour le 
mouvement de bascule. Mais pendant que ce mouvement s'ef- 
fectue Le ligament élastique est sans cesse distendu d'un côté et 
écrasé de l'autre; de plus, comme 1} à été dit, son rôle est nul, 
les muscles suffisant à écarter les valves; dans ces conditions, 
il ne peut se développer, e’est ce qui existe chez les Pholades où 
la partie fibreuse du ligament seule existe. C'est le type qu'on 
peut appeler Pholadoïde. À ce caractère de première impor- 
tance s'ajoute la diminution d'épaisseur de la coquille, sa colo- 
ration blanchâtre et sa transparence qui caractérisent d’une 
facon générale les animaux enfouis. Une seule région de la 
coquille, Fantérieure, devient rugueuse et reste plus épaisse: 
quant à la postérieure, S'amineissant progressivement, elle finit 
par disparaître et Pantmal a alors l'aspect complètement vermi- 
forme qu'atteint Le Taret qui semble le terme ultime de Fadap- 
tation à l'enfouissement céphalothétique et à la vie en galerie. 

Chez tous ces animaux céphalothétiques, et par le fait des 
excitaltions extérieures, la sensibilité se porte, comme 1l à été 
dit, sur lextrémité des siphons et ce sont les Pholades qui attei- 
enent le maximum de spécialisation dans ce sens. L'extrémité 
de leur siphon s'arrondit, prenant un aspect de symétrie radiure 
qui les font ressembler à une Actinie, par exemple lorsqu'on 
n'y regarde pas de très près. Le pied enfin, déjà réduit chez les 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES “A 


Lutraires, disparait faute d'usage, ou se transforme en ventouse 
comme chez les Pholades, les Gastrochænes eUles Tapes pullastra 
Mig. var. perforans. 

Chez d'autres Pimmobilité semble avoir provoqué la réappa- 
riion du byssus qui chez les Céphalothétiques n'existe plus 


Fig, 14 — Vuc intérieure d'une valve gauche de Pholas dactylus Linn. — 
4, muscle adducteur postérieur; 5, muscle adducteur antérieur. 


d'ordinaire qu'à l'état de vestige, les Sariraridæ en sont un 
exemple. 

En résumé, 1! semble que lon puisse établir Le tableau suivant 
qui rend compte des modifications graduelles des Acéphales, 
sous l'influence de l'enfouissement céphalothétique. Naturelle- 
ment les tvpes énumérés 1er ont été choisis dans différents phy- 
lums et il ne faut nullement donner à cette sériation la valeur 
d'une filiation naturelle possible. 


\Valves coaptées au moment de la fermeture. 
! Un seul orifice palléal. Pied byssifère. 
Valves coaptéesau moment de la fermeture. 
Céphalothétique, 1° catég. : Ano- Deux orifices palléaux (1) (4 pédio-inspira- 
NUE NÉE ) teur, 1 expirateur). Pied adapté au fouis- 
\ sage. Ligament externe. 
Valves coaplées au moment de la fermeture. 
Céphalothétique, 2 catég. : Tapes \ Trois oritices palléaux. Siphons de dia- 
FT CULE OU LOSC SERRE mètre réduit. Pied adapté au fouissage. 
Ligament externe. 
(Valves bâillantes. Siphons de diamètre très 
« fort. Pied encore adapté au fouissage. Li- 
 gament élastique réduit et interne. 
Valves bâillantes. Siphons de même dia- 
mètre que la coquille. Pied transformé en 
Céphalothétique, 3° catég.: l'holas. © ventouse. Partie élastique du ligament 
disparue. Muscles sur la même ligne que 
le ligament fibreux. 
Valves bâillantes, très réduiles. Siphons 
Céphalothétique, 3° catég.:Teredo. : très longs et très gros. Pied nul. Liga- 
ment disparu. Corps vermilorme. 


Abdominothétique : Arca........ 


Céphalothétique, 3° catég.: Lutra- 


(1) I est fait abstraction ici de l’orilice postérieur supplémentaire. 


22 R. ANTHONY 


Enfin il estutile de dire que ladaption au fouissage n’atteint 
pas seulement les Diisomyaires. Le Lihodomus par exemple, 
est un Dianisomyaire voisin des Hytilus adapté secondairement 
à l’enfouissement céphalothétique ; il converge ainsi vers les 
Diisomyaires dont il vient d'être question, par une tendance 
manifeste au développement des siphons, 
ainsi que le montre là figure 15. 

9° [rISOMYAIRES PLEUROTHÉTIQUES. Le 
mot pleurothétique vient de deux mots 
grecs : 7hivo6v == CÔtÉ, flanc, et sibnu — je 
place. Animaux reposantsur le côté, sur le 
flanc. Les Pleurothétiques peuventen effet 
ètre définis ceux qui, dans les conditions 
normales de leur existence, se trouvent 
constamment placés de telle façon que 
leur plan sagittal (bucco-ventro-ano-dor- 
sal) soit parallèle au plan sur lequel ils 
reposent ou progressent. 


Les lois de a pesanteur faisant que les 
animaux nepeuventfacilementengénéral, 
Fig. 15. — Coupe sagittale < F - ; SJ e 
de Lithodomus lithophagus Là part desexceptions quine nous intéres- 
Linn.— 1, bouche:2,anus; sent pas, reposer que sur un plan sensible- 
3, pied ; #4, muscle adduc- 3 RUN t SRE 
teur antérieur; 5, muscle menthorizontaloutrèslégèrementincliné, 
adducteur postérieur ; 6, ee LR RAP A LE Ne 
cœur:8, siphon expirateur. On Peut être amené à dire que les Pleuro- 
thétiques sont ceux dont le plan sagittales 
sensiblement horizontal dans les conditions ordinaires de la vie. 
Les Mollusques Acéphales dimvaires ne sont pas Les seuls ani- 
maux qui présentent parmi eux des formes pleurothétiques; les 
monomyaires d’abord le sont presque tous. En outre, on sait 
qu'il existe des formes pleurothétiques de Poissons téléostéens ; 
ce sont tous ceux que l’on désigne sous le nom de Pleuronectes, 
la Sole, la Limande, le Turbot, la Flondre, ete. Tous les Echi- 
nodermes enfin seraient, d'après l'hypothèse d'Edmond Perrier, 
des Vers adaptés à l'existence pleurothétique et les Vertébrés 
eux-mêmes devraient, d'après le même auteur, avoir à leur 


origine des ancêtres pleurothétiques (1). 


(4) Voir au sujet de la Pleurostose chez les Poissons téléostéens et les Tuni- 
ciers À. Giord [04}, page 171. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 227 


Quoi qu'il en soit et quel que soit le groupe dans lequel on 
l’envisage, le pleurothétisme semble toujours secondaire, les 
pleurothétiques provenant tous d’ancètres euthétiqués. Quelles 
sont les causes qui ont pu amener des animaux euthétiques, à 
mener une existence pleurothétique ? Elles sont variables suivant 
les groupes, mais pour les Mollusques dimyaires, il semble que 
les choses puissent être expliquées très simplement de la ma- 
nière suivante : On doit remarquer tout d'abord que si on prend 
un Disomyaire euthétique quelconque, soit un abdominothé- 
tique, soit un Céphalothétique de la première ou de la deuxième 
catégorie el qu'on l'abandonne à lui-même, il reposera tout 
naturellement et de par le fait de sa forme seule, sur une de 
ses faces latérales, une de ses valves. Si donc un animal primi- 
tivement euthétique se trouve placé sur un substratum dur, 
comme par exemple un rocher situé dans la zone de balancement 
des marées où dans un rapide d’un grand fleuve, il sera dans 
l'impossibilité absolue, étant donnée la dureté du substratum, 
de s’enfouir, et, par le fait de sa forme même, 1] prendra la 
posiüon pleurothétique. 

La cause possible du pleurothétisme étant connue, reste à 
décrire les modifications anatomiques que ce mode d'existence 
peut amener dans un organisme d'Acéphale dimvaire. IL suf- 
fira ici de les indiquer par anticipation, en quelque sorte, leur 
étude détaillée devant faire l'objet de la deuxième partie de ce 
travail. 

En première ligne de ces modifications il faut mettre la 
subütution d’une symétrie coronale à la symétrie sagittale des 
autres Acéphales. Il à été expliqué un peu plus haut, comment 
il se faisait que les animaux euthétiques aient obligatoirement 
une symétrie sagittale. Pour les mêmes raisons, les Pleurothé- 
tiques tendent à avoir une symétrie coronale : la bouche est 
toujours antérieure, l'anus postérieur et la ligne qui les rejoint 
détermine avec sa projection sur le sol un plan de part et d'autre 
duquel, l'animal étant supposé placé dans un milieu homogène, 
les influences mécaniques extérieures s'exercent identiquement : 
la pesanteur entre autres s'exerce encore ici de la même facon 
en € qu'en 4, en d qu’en 4 et le plan coronal devient le lieu 
géométrique des points tels que 4, b,cet d. I en résulte que 

ANN. SC. NAT. ZOOL, 1, 15 


226 R. ANTHONY 


de part et d'autre de ce plan, les deux moitiés du corps doivent 
être symétriques et que Le côté ventral et le côté dorsal doivent 
tendre à se ressembler et à figurer des côtés latéraux; les 
anciens côtés latéraux d'autre part, soumis à des influences 
différentes, deviennent dissemblables, l'un, tantôt le droit, 
tantôt le gauche, devient supérieur, l'autre prend les caractères 
d'une face inférieure, et la symétrie ancienne tend à s’effacer. 
Ce processus de substitution de symétrie due au pleurothétisme 
peut être aussi nettement suivi chez tous les Poissons pleuro- 
nectes que chez les Acéphales dimyaires. 

Chez les Acéphales pleurothétiques les principales manifes- 
tations de la disparition de la symétrie sagittale et de son rem- 
placement par une symétrie coronale, sont la régression des 
muscles rétracteurs du pied toujours plus avancée du côté corres- 
pondant à la valve devenue inférieure et le plus grand déve- 
loppement du lobe du manteau correspondant à cette mème 
valve. 

Les Acéphales dimyaires pleurothétiques peuvent ètre 
divisés en deux catégories : 

Les formes libres, 

Les formes fixées. 

Toutes deux accusent la tendance plus où moins marquée 
à la symétrie coronale, mais la fixation à amené chez les 
secondes l'apparition de caractères SPÉCIAUX. 

1° Düsomyaires pleurothéliques el libres. — Hs sont peu nom- 
breux et on peut citer parmi eux les quelques types isolés 
suivants : 

Quelques espèces d'Arca (fam. des Arcidæ). 

Corbula (fam. des Myidæ). 
Myodora 

Pandora (fam. des Anatinidi). 
Gresslya (A) 

Outre le caractère de la symétrie coronale commune à tous 
les Pleurothétiques, les Diisomyaires pleurothétiques libres 
présentent, lorsqu'ils proviennent de formes siphonées, une 
réduction de l'appareil siphonien et au moment de la ferme- 


(1) La Gresslya devrait peut-être plutôt être rapprochée des Pholadomyidæ. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 227 


ture, leurs valves ne restent plus bâillantes ; ils perdent en 
somme les caractères des Céphalothétiques, dont ik ne font plus 
partie etacquièrent par contre un aplatissement de la valve supé- 
rieure qui tend à prendre Ja forme d’un opercule, un creusement 
de la valve inférieure, Ces modifications se voient très nettement 
chez les Corbules qui ne sont en somme que des Céphalothé- 
tiques adaptées à l'existence pleurothétique et qui, ainsi que l’a 
dit Douvillé, retournant à l'enfouissement el au céphalothé- 
tisme auraient donné les Myes. Les modifications qui caracté- 
risent ces animaux se retrouveront chez le Pecten marinus 
Linn., monomyaire pleurothétique. 

2° Düsomyaires pleurothétiques et firés. — Les Diisomyaires 
pleurothétiques et fixés peuvent être répartis de la façon sui- 
vante : 

Dimyidæ (se rattachent à la fam. des Arcid el plus spé- 
cialement peut-être aux Pectunculinæ) 

Chondrodontidi (se rattachent aux Pinnid:e d'après Douvillé), 
aux Dianisomyaires par conséquent. 

Myochamidæ (se rattachent à la fam. des Analinideæ) . 

Chamostreidæ (se-rattachent à la fam. des Anulinidi). 

Chamide (se rattachent probablement à la fam.. des Cardiidi) . 

Ætherüdæ (se rattachent à la fam. des Unionidæ). 

Budistæ. 

Par quel concours de circonstances des Diisomyaires ont-ils 
pu aboutir à la fixation ? 

ILest d'abord à remarquer que loutes ces formes ont des con- 
ditions d'existence à peu près identiques, qui se résument à 
ceci : une température élevée et des eaux très agitées et peu 
profondes. En effet, d’une part, on trouve ensemble sur toute 
la côte sud d'Australie des Myochamidæ et les Chamostreidæ. 
animaux exclusivement actuels. D'autre part, parmi les C'Aa- 
midie, les Cham actuelles se rencontrent surtout dans la mer 
Rouge, l'Océan Indien, la mer des Antilles, les côtes du Paci- 
fique et de l'Atlantique, suivant une large zone s'étendant assez 
loin de part et d'autre de l'Équateur, où avec les Polypiers elles 
contribuent à la formation de récifs. Quant aux Diceras. Requie- 
na, Toucasia et autres formes fossiles analogues qui semblent, 
Jusqu'à plus ample informé, devoir être rallachées à ce groupe, 


228 R. ANTHONY 


ds vivaient à la fin du Jurassique et au début du Crétacé sur des 
récifs analogues aux récifs actuels et où les conditions d’exis- 
tence étaient apparemment les mêmes. 

Les Dimyidæ du Bathonien et de FEocène supérieur accom- 
pagnent toujours la faune des mers chaudes et la seule Dinrya 
actuelle a été draguée dans la mer des Antilles. 

Quoique fluviatiles les Æthéries vivent dans des conditions 
absolument comparables à celles des animaux précédents, leur 
aire de répartition est, au point de vue de la latitude, à peu près 
la même: on les trouve dans la zone équatoriale africaine el 
son voisinage, dans les rapides des erands fleuves, le Nil, le 
le Sénégal, etc, où les eaux sont violemment agitées. 

Quant aux Rudistes du Crétacé supérieur, 1 étaient également 
comme les Chamidæ des animaux de mer chaude, de récifs. 

IL est facile de concevoir comment cette condition d'existence, 
une haute température, à pu amener la fixation des Acéphales 
dimyaires. Une température élevée favorise, comme l'on sait, la 
surproduetion de calcaire dont la fixation semble être une consé- 
quence naturelle, les animaux ne pouvant, en raison du poids 
qu'acquiert ainsi leur coquille, se déplacer que difficilement el 
se trouvant condamnés à passer leur existence placés au mème 
endroit. Il paraît naturel de penser que le contact prolongé avec 
le substratum doive par un processus que nous ignorons, d'ail- 
leurs, amener la fixation, laquelle est toujours pleurothétique, 
puisque l'Acéphale, en raison de la forme même de sa coquille, 
qui est généralement aplatie d'un côté latéral à l'autre, tran- 
chante sur les bords, ne peut être posée, comme il à déjà été 
dit, que sur l’une de ses valves. 

Le choc des vagues brise et détruit bientôt les formes les 
moins solidement fixées ; les plus solidement fixées se sélec- 
tionnent ainsi naturellement et c’est de cette façon que sem 
blent avoir dû se constituer les types pleurothétiques fixés. 

Nous avons vu quelles ont été les conséquences du pleuro- 
thétisme sur la morphologie de l'animal (substitution de la 
symétrie coronale à la symétrie sagittale). Voyons maintenant 
quelles sont celles de la fixation. C’est d’abord la tendance à 
l'acquisition de la forme arrondie. Il est à remarquer, en effet, 
que comme toutes les formes animales fixées, d’une façon géné- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 299 


rale (Balanes, Anthozoaires, Ascidiens, par exemple) les 
Dimyaires fixés et pleurothétiques tendent d’une facon générale 
à arrondir leur base (Voy. à ce sujet Jackson (91) et Hæckel). 
Comment peut-on expliquer cet arrondissement ? Supposons 
le cas, qui est d’ailleurs le plus fréquent, où le plan sur lequel 
repose l'animal est horizontal : l'arrondissement peut être 
expliqué par l'homogénéité des conditions ambiantes: par le 
fait qu'il est fixé, l’animal n’a aucune raison de s'allonger ou 
de se raccourcir dans un sens plutôt que dans l'autre, antéro- 
postérieur ou dorso-ventral, comme l'animal qui se déplace: 
l'action de la pesanteur qui seule peut agir sur lui est préci- 
sément dirigée perpendiculairement au plan horizontal sur 
lequel il repose et ne peut, par conséquent pas modifier la 
forme de son périmètre. Le Dimyaire pleurothétique fixé sur un 
plan horizontal, et{out animal d'une facon plus générale, s'arron- 
dit pour les mêmes raisons qu'une goutte de cire chaude tom- 
bant sur une table de marbre. 

Si le plan sur lequel repose l'animal est légèrement incliné 
sur l'horizontale, les conditions seront les mêmes, sauf en ce 
qui concerne l’action de la pesanteur, et la base de l'animal au 
lieu d’être une circonférence sera une figure voisine de l’ellipse, 
ellipse dont l’excentricité croîtra avec l'angle d’inclinaison du 
plan sur l'horizontale. 

Outre l'inclinaison du plan de fixation, différentes autres 
causes peuvent intervenir encore pour altérer la forme du péri- 
mètre de base : des obstacles existant dans le voisinage de 
l'animal au moment de son développement, ainsi qu'on voit le 
fait se produire souvent chez les Æthéries qui, très nombreuses 
sur un espace restreint, se gênent mutuellement dans leur déve- 
loppement, peuvent aussi en effet être des causes d’altération 
de la forme circulaire. 

Il sera montré en détail, dans la deuxième partie de ce travail, 
comment la forme circulaire s'établit chez les Dimyaires fixés 
en position pleurothétique. 

L'acquisition de la forme arrondie n’est pas la seule consé- 
quence de la fixation pour les Dimyaires pleurothétiques, il faut 
Y ajouter la disparition progressive du pied faute d'usage, et les 
modifications des valves dont l'une, l'inférieure, tend à prendre 


230 R. ANTHONY 


la forme d’un cornet contenant l'animal ; l’autre, la supérieure, 
tendant à s’aplatir, à devenir operculaire. Il semble qu'il faille 
admettre que ces modifications sont dues à l’action de la pesan- 
teur qu'Edm. Perrier (04) explique de la façon suivante : « Le 
Mollusque suspendu à cette valve (operculaire) devient de plus 
en plus convexe du côté de la valve appliquée sur le sol, valve 
qui se moule sur lui et devient ainsi extérieurement de plus en 
plus convexe par une action indirecte de la pesanteur. » 

Telles sont les modifications morphologiques principales 
qu’entraîne le pleurothétisme d’abord, la fixation ensuite chez 
les Dimyaires; je n’y insisterai pas davantage ici; l'étude des 
Dimyaires fixés pleurothétiques devant faire l’objet exclusif 
de toute la deuxième partie de ce mémoire, les questions de 
détail y seront traitées. Je me bornerai tout simplement à faire 
remarquer, pour le moment, que le plissement des branchies 
des Æthéries, comparable à celui des fraises et des collerettes 
du xvi° siècle, peut être rapporté, comme pour les formes 
monomyaires d’ailleurs, à l'arrondissement. À l’arrondisse- 
ment semble se rattacher aussi le passage du cœur ventrale- 
ment par rapport au tube digestif. 


2. ANISOMYAIRES. 


Les Dianisomyaires sont, comme leur nom l'indique, des 
Acéphales dont les deux muscles adducteurs sont inégaux, 
l'adducteur postérieur étant considérable, l’adducteur antérieur, 
au contraire, très réduit. 

Parmi eux, on ne peut guère distinguer, au point de vue du 
mode d'existence, comme parmi les Isomyaires, les deux caté- 
gories des euthétiques et des pleurothétiques. Tous les Acé- 
phales franchement anisomyaires connus sont euthétiques, 
et, en outre, ils semblent vivre le plus souvent en position 
céphalothétique. Il semble toutefois qu'il y ait à cette règle 
quelques exceptions ; c’est d’abord celle constituée par le genre 
Bartlettiu, d'une adaptation toute spéciale, et dont la morpho- 
logie et la morphogénie probable seront exposées en appendice 
à la fin de ce chapitre. C’est ensuite celle du genre Chon- 
drodonta qui, d’après Douvillé, serait une Pinna fixée. Enfin, 


Dennese nnue-——u 0 


A A A TT 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 24 


les Chames elles-mêmes sembleraient, au cours de leur déve- 
loppement, passer par un stade rappelant les Lithocardium, 
qui sont des formes franchement anisomyaires. 

Par le fait qu'ils sont euthétiques, les Dianisomyaires sont, 
pour les mêmes raisons que les Diisomyaires, euthétiques 
symétriques par rapport à leur * an sagittal. En effet, leurs 
valves sont égales et semblables, & Len est de mème de loutes 
les parties droites et gauches de leur corps. 

Outre ces deux SN res, inégalité des deux muscles adduc- 
teurs et symétrie sagittale, il convient de citer comme leur 
appartenant, d'abord ce fait, conséquence directe de l'inégalité 
des deux adducteurs, que chez eux l'extrémité antérieure de la 
coquille, celle où se trouve placé, chez les Isomyaires, l'adduc- 
teur antérieur, tend à se rapprocher du crochet et même à se 
confondre avec lui, ce qui fait que chez les Anisomyaires très 
évolués le musele adducteur antérieur réduit et la bouche se 
trouvent placés au niveau du crochet; puis la présence d’un 
byssus que l'on constate chez toutes les formes anisomvyaires 
actuelles et qui existait aussi, vraisemblablement, chez les fos- 
siles ; la régression du pied enfin, en rapport avec la présence 
du byssus. 

Il semble évident que les Anisomyaires proviennent des 
Isomyaires et qu'ils tendent aux Monomyaires. Ils se rattachent 
aux premiers par les animaux de forme #nodiole el aux seconds 
par ceux de forme avirule. 

La forme anisomyaire est très répandue chez les Acéphales, 
et beaucoup d’entre eux convergent vers ce genre d’organisa- 
üon. Il est superflu, il me semble, d'insister sur ce fait que 
toutes ces formes anisomyaires sont simplement convergentes 
et n'ont entre elles aucun lien de parenté comme semblent 
encore trop souvent le croire ceux qui mettent les Dreyssensia, 
par exemple, parmi les Mytilus. Les mêmes causes ont sim- 
plement produit les mêmes effets dans des groupes différents. 

Certains Anisomyaires, comme les Dreyssensia, qui pourraient 
bien provenir des Cyrènes, les Byssocardium et les Tridacnes 
qui très certainement dérivent des Cardium, possèdent un 
byssus, bien que les animaux desquels ils paraissent provenir 
aient perdu depuis longtemps cet organe par le fait de l'adapta- 


202 R. ANTHONY 


tion à l'enfouissement céphalothétique. Il est possible que, pour 
des raisons que nous ignorons, le byssus se soit développé à 
nouveau, comme cela d’ailleurs se produit pour les Saricavidæ 
qui restent céphalothétiques, chez certaines Cyrènes el certains 
Cardium, et que ces animaux s'étant trouvés soumis aux mêmes 
causes aient subi les mêmes modifications que celles qui, dans 
le phylum de Protarcidæ, ont fait les Mytilus. 

Ci-joint un tableau des principales formes convergentes 
anisomyaires. 


Phylum Phylum Phylum Phylum Phylum 
es HE des des des 
Protarcidæ. des Carditidæ. | Cyprinidæ (?). | Cyrenidæ (?). Cardiidæ. 
Modiolimor-| Area obli- | Mytilicar- | Hippopo- Lithocar- 
phes. qua (Gray). dia. dium. dium. 
Modiola. 
| 
du | 
Mytilimor- | Mytilus Myoconcha.| Dreyssen- | Byssocar- 
phes. Septifer (?). sia (1). dium. 
Congeria. 
| 
Tridacna 
Hippopus. 


2 


(1) Une raison qui pourrait faire éloigner les Dreyssensia des Gyrènes estlasui- 
vante : chez les Dreyssensia les siphons sont complètement développés alors 
qu'ils sont encore à leur premier stade d'évolution chez les Cyrènes. Pour faire 
descendre les Dreyssensia des Cyrènes, il faudrait pour le moins admettre, ce qui 
n’est pas impossible, le développement secondaire des siphons chez ces formes 
anisomyaires. 


On va d'abord examiner cette première question de l'origine 
probable des Anisomyaires pour pouvoir examiner ensuile la 
facon dont les modifications qui les caractérisent ont pu se 
produire. 

Il semble en effet de toute évidence, comme il à été dit plus 
haut, que les anciens Acéphales aient été des Diisomyaires d'un 
type différent et plus primitif que celui des Nucules qui se trou- 
vaient être, de tous les Acéphales actuels, ceux qui possèdent le 
plus de caractères communs avec les Gastéropodes diotocardes. 

J'ai appelé Pronuculidæ ces formes Acéphales hypothétiques 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 233 


et on pourrait leur attribuer comme caractères, ainsi que Je lai 
dit, les branchies foliacées, le cœur dorsal au tube digestif des 
Gastéropodes, avec peut-être un pied vraiment replateur n'ayant 
pas encore subi les modifications spéciales qui ont fait le pied 
des Nucules. 

En se plaçant au point de vue de la réparlilüon géologique 
on s'aperçoit, de plus, que les plus anciens Acéphales semblent 
avoir été des Diisomyaires. 

L'anatomie comparée et la paléontologie ne sont pas les 
seules qui s'accordent à nous donner toutes les raisons de croire 
que les formes diisomyaires aient été les plus anciennes. 

L'embryogénie vient encore apporter à celte opinion sa part 
d'arguments. En effet, tous les Anisomyaires sont, à un certain 
moment de leur existence, des Isomyaires plus ou moins parfaits 
et chez une forme donnée, telle que Mitylus edulis Linn. ou 
Dreyssensin polymorpha Bened. par exemple, il est facile de 
suivre la série des stades de développement qui nous conduisent 
d'une prodissoconque, et même d’une Jeune coquille définitive 
à peu près équilatérale, à la forme si caractéristique et si nette- 
ment inéquilatérale de l'adulte en passant par une forme ana- 
logue à la Modiole. J'ai constaté ces faits sur les Mytilus edulis 
Linn. qui vivent à la baie de Douarnenez (Finistère) dans la 
zone du balancement des marées, et que dans le pays on appelle 
moules de roches par opposition avec les moules dites de vase qui 
vivent à l'embouchure des rivières et présentent une forme 
moins irrégulière. Les résultats de ces recherches seront exposés 
brièvement plus loin. 

En résumé donc, l'anatomie comparée, la paléontologie et 
l'embryogénie s'accordent pour faire des Anisomyaires des types 
de formation secondaire. 

Comment peut-on expliquer la transformation d'une forme 
isomyaire en une forme anisomyaire ? Quels sont, autrement 
dit, les facteurs mécaniques qui ont pu déterminer cette trans- 
formation qui artificiellement peut êlre considérée comme se 
faisant en deux stades, l'un, le premier, que l'on peut appeler la 
modiolisation, l'autre plus avancé auquel on peut donner le nom 
de mytilisation? 

Avant d'entreprendre l'étude de la marche et l'explication 


DL R. ANTHONY 


des processus de modiolisation et de mytilisation, 1l est imdis- 
pensable de définir ce que j'ai appelé l'angle de modiolisation et 
l'angle de mytilisation des Anisomyaires. 


Si on trace, en le suivant exactement, le contour extérieur de 


C. 


77L. 


?: 
117. 


Fig. 16.— Angles de modiolisation et de my- 
tilisation. — I, Arca barbala Linn.:; Il, Mo- 
diola gallica Dautz.; II, Mytilus edulis 
Linn.; cpa, angle de modiolisation; », angle 
de mytilisation. 


la coquille d'un Acéphale di- 
myaire quelconque, en ayant 
soin de marquer les points 
culminants de lumbo et des 
extrémités antérieures et 
postérieures on obtient trois 
points, tels que r, 4, p. 

En réunissant € à p et p 
à « on obtient un angle 
pa dont la valeur, très 
appréciable chez un Isomy- 
aire, devient chez un Ani- 
somyaire de plus en plus pe- 
üite par le fait de la diminu- 
ton de volume et du refou- 
lement du muscle adducteur 
antérieur. C'est l'angle de 
modiolisation. 

Quand il est réduit à 0 
c'est que le muscle adducteur 
antérieur est situé à peu 
près sur le crochet et que 
l'extrémité antérieure et le 
crochet se confondent. La 
coquille à alors acquis la 
forme en coin, ou en poire, 
qui caractérise la moule. 

J'appelle alors angle de 


mylihsation Vangle que fait la direction de la charnière avec 
celle du bord ventral. Le sommet de cet angle est représenté 
par le crochet et l'extrémité antérieure de la coquille réunis. 
Douvillé s’est occupé de l’origine de ce qui vient d'être appelé 
la modiolisation et il donne de ce fait l'explication suivante : Il 
suppose un Isomyaire muni d'un byssus, comme le sont encore 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 9239 


les arches, comme semblent l'avoir été les Protarcidæ descen- 
dants directs des Pronurulidie et ancètres communs vraisem- 
blablement de tous les Acéphales à l'exception de la Nucula et 
peut-être aussi des Trigonies. 

Il le suppose fixé dans une région littorale où les eaux sont 
très tourmentées. De ce fait pendant son développement, sa 
croissance, cet animal sera sans cesse secoué à l'extrémité de 
son byssus. Or ce dernier, par le fait même de la position de la 
glande byssale qui est plus rapprochée de l'extrémité antérieure 
du corps que de son extrémité postérieure, exercera une pression 
continuelle sur le muscle adducteur antérieur dont il détermi- 
nera l’atrophie ou pour mieux dire empêcherale développement, 
l'obligeant à se rapprocher de plus en plus du crochet. Comme 
conséquence le manteau diminuera détendue dans cette région 
antérieure et la coquille prendra alors naturellement, puisqu'elle 
se moule sur le manteau qui la sécrète, la forme caractéristique 
des Anisomyaires. Cette ingénieuse hypothèse me paraît très 
soutenable, et, elle est d’ailleurs parfaitement d'accord avee les 
faits. En effet, d’abord tous les Dianisomyaires actuels, e’est-à- 
dire les seuls dontil soit possible de connaître l'anatomie, sont, à 
part les cas particuliers, des Bartlettia et des Chondrodonta, 
byssogènes ; de plus, la plupart des Anisomyaires marins sont 
des animaux vivant dans la zone du balancement des marées: 
de plus encore, chez les Anisomyaires il semble que la partie 
disparue du muscle adducteur antérieur soit précisément celle 
qui se trouve le plus près de la région byssale; enfin au point 
de vue particulier, les Mytilidæ, qui constituent un groupe 
important parmi les Anisomyaires, semblent bien évidem- 

| ment avoir avec les isomyaires byssogènes des  carac- 
ières communs. À cette action invoquée par Douvillé, qui me 
paraît infiniment probable, il me semble que l'on pourrait en 
ajouter une autre secondaire, c’est celle de la force centrifuge : 
lorsqu'un Acéphale est suspendu par son byssus et secoué par 
les flots de la mer, il est évident que la masse viscérale tend à se 
porter de plus en plus à la périphérie et cette action peut servir 
Jusqu'à un certain point à expliquer la forme élargie en arrière 
des Modioles et des Moules. Outre cela, même si l'animal est 
suspendu au-dessous d’un plan horizontal, ce qui dans la pratique 


TL 


un 


236 R. ANTHONY 


arrive rarement il est vrai, la pesanteur peutaussi Jouer un rôle 
et contribuer également à donner à ces animaux leur forme 
spéciale. Cette succussion continuelle de l'animal au bout de son 
byssus peut avoir aussi pour conséquence la dissociation de ce 
dernier, dont les filaments sont très écartés chez les Moules, les 
Modioles, les Dreyssensia, alors qu'ils sont coalescents, forment 
un corps en quelque sorte compact chez les Diisomyaires bysso- 
gènes comme les Arches. Nous retrouverons le byssus compact 
chezles Tridarnes qui comme les Arches et en raison deleur poids 
sont à l'abri de toute succussion. Le type modiolimorphe est 
donc caractérisé par la présence d’un byssus, le rapprochement 
de l'extrémité antérieure et ducrochet et la diminution du musele 
adducteur antérieur. 

Pourprendre des exemples concrets, je dirai les résultats que 
j'ai obtenus en mesurant sur quelques Acéphales d’affinités 
voisines, l'angle de modiolisation. C'est d'abord sur PArca bar- 
bata Linn. qui est un Disomyaire à peu près parfait, où il 
atteint une moyenne de 34° sur cent individus. C'est ensuite sur 
la Modiola adriatica Lmck. qui est une Modiole dépourvue de 
drap marin el qui fait passage aux formes équilatérales. Je me 
suis procuré cent exemplaires adultes de cette espèce dans les 
collections du Muséum. En moyenne brute, la valeur de l'angle 
de modiolisation chez cet animal est de 7°,5. D'autre part, la 
valeur de cet angle que j'ai rencontrée le plus fréquemment est 
aussi 7°,3 (vingt-cinq fois sur cent). Si au lieu de prendre la 
Modiola adriatica Lmek. on s'adresse à la Modiola barbata Linn. 
qui existe à Saint-Waast-la-Hougue et, qui, pourvue d'un drap 
marin très développé, s'éloigne davantage par sa forme des 
Isomvaires, on trouve que la moyenne de l'angle de modioli- 
sation calculée sur cent individus adultes est de 6°,5 alors que 
l'angle le plus fréquemment rencontré est celui de 5° qui à été 
trouvé vingt-huit fois sur cent cas. 

De l'Arca barbata Linn. à la Modiola adriatira Lmck et de 
la Modiola adriatice Lmek. à la Modiola barbata Linn. l'angle de 
modiolisation s’abaisse done. tombe à zéro dans cent pour cent 
des cas chez toutes les espèces de Aytilus et son abaissement à 
zéro peut même être considéré comme la définition de la forme 
mytilimorphe (Voy. fig. 16). 


a 
0 TE TT 


/ MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 27 


Le tableau suivantmontre, sans impliquer aucune opinion sur 
la filiation réelle, Pabaissement graduel de l'angle de modioli- 
sation etle passage de la forme isomyaire à la forme anisomyaire. 


D 


ANGLE DE MODIOLISATION. 
L Moyenne. Fréquence. 
| 
TC ORTOMLAINRE EL A OR LL AUX 340 
| 
Modiola-adriaties Lmck:. 2221: | 7.5 | 70,5 
Moov arouta nn EU | 60,5 | 59 
MS eds ÉTAIT UNIL. | o° | 0° 


La mesure de l'angle de modiolisation permet donc de mettre 
en évidence un rapprochement graduel de lextrémité anté- 
rieure de la coquille et du crochet, depuis les formes isomyaires 
jusqu'à la Modiole et mème la Moule. 

La modiolisation s'étant ainsi produite, la réduction graduelle 
du muscle adducteur antérieur et la confusion du crochet avec 
la partie antérieure de la coquille peut transformer ce type 
modiolimorphe en type mytilimorphe. 

Ce dernier, dans un cas particulier, et par le fait d’un genre de 
vie tout spécial, aboutit à la forme Tridacne. 

L’explication des phénomènes par lesquels à pu se pro- 
duire le passage des formes isomyaires aux Modioles, vient 
d’être donnée ; 11 n'y sera pas revenu. Mais quelles sont 
les causes mécaniques qui ont pu produire la transformation 
du type modiolimorphe en type mytlimorphe, qui ont pu 
amener le bord antérieur de la coquille et le crochet à se 
confondre ? 

Pour pouvoir répondre à cette question, que j’examinerai 
plus spécialement pour le phylum des Hytilidæ, 1 est indispen- 
sable d'attirer l'attention sur les conditions habituelles d’exis- 
tence des Mytilus edulis Linn. 


238 R. ANTHONY 


Au point de vue éthologique, les Mytilus edulis Linn. de 
nos côtes océaniques, et plus particulièrement celles que j'ai 
étudiées :sur les côtes du Finistère, comprennent deux types 
principaux bien distincts : les unes vivent soit fixées aux bouées 
flottantes, soit agglomérées à l’aide de leur byssus, en paquets, 
qu'on rencontre le plus souvent aux embouchures des rivières : 
ces agglomérations sont constituées de telle façon que les ero- 
chets de tous les individus qui les composent sont dirigés 
vers le centre; les autres vivent fixées à des rochers à l’aide 
de leur byssus, le crochet dirigé vers le substratum et serrées les 
unes auprès des autres. Les Moules de la première catégorie, qui 
vivent dans des eaux tranquilles, sont en générallisses, de forme 
régulicre et de grande taille, avee un angle de mytilisation assez 
élevé. On les appelle souvent, dans le pays, Moules de vase 
et ainsi que l’a justement fait remarquer Pelseneer (93) elles 
rappellent la Mytilus qallo-prorinciolis Lmck. de là Méditer- 
ranée. Celles de la deuxième catégorie sont plus petites, 
irrégulières, de surface souvent rugueuse ; leur angle de myti- 
lisation est plus réduit et leur crochet, non seulement est aigu, 
mais encore est souvent recourbé en avant (Voy. PI I). Ce sont 
ces dernières qu'en Bretagne on désigne sous le nom de Moules 
de roches, par opposition aux premières. 

Malgré ces différences de forme foutes deux font incontesta- 
blement partie de Pespèce Wytilus edulis Linn. qui à si souvent 
été subdivisée à tort par les conchyliologistes (voy. à ce sujet 
Pelseneer (95). 

J'ai étudié d'une facon plus particulière, sur les côtes de la 
baie de Douarnenez (Finistère), les conditions d'existence de 
ces Moules, dites de roches. Si Fon parcourt une des plages de 
la région nord-est de celte baie, où les rochers, constitués de 
schistes siliceux très durs, forment des pointes déchiquetées 
qui, à marée haute, s'avancent dans la mer et sont complète- 
ment découverts à marée basse, on s'aperçoit que ces rochers 
sont recouverts de petites Moules de forme irrégulière, et dont 
la coquille est lapissée parfois d’incrustations d'algues calcaires 
ou de Balanes. 

Leur disposition sur Îles rochers est la suivante : 

Supposons la coupe schématique faite d'un rocher à marée 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 239 


basse, depuis le sommet de la falaise, où la flore et la faune 
terrestres commencent, Jusqu'au sable de la plage. 

Supposons que le niveau des plus hautes mers soit à mi-che- 
min de la paroi verticale. Au point de vue des algues et des ani- 
maux qui vivent sur ce rocher, son profil peut être divisé en deux 
régions : d'abord une région inférieure, sans cesse découverte 


Fig. 17. — Coupe schématique d’un rocher de Pentrez (Finistère) à marée basse. 
Les parties indiquées par un trait plein sont celles que recouvrent les Moules. 


et recouverte chaque jour par la mer, qui est surtout caracté- 
risée par la présence des Fucus resiculosus Linn. et serratus 
Linn.; ensuite une région supérieure, arrosée chaque jour par 
les embruns à marée haute, et recouverte seulement aux très 
grandes marées, qui est caractérisée par la présence de Pelretia 
canaliculata Dec. et Thur., algue brune sensiblement moins 
vigoureuse que la précédente ; parfois même, et dans les régions 
les plus élevées, cette deuxième zone estdépourvue de toute algue. 
Dans l’une et l’autre de ces régions, on peut signaler là présence 
de Mytilus edulis 1ann., accompagnant d’autres nombreux 
animaux, dont l'énumération n'a pas d'intérêt au point de vue 
spécial auquel nous nous plaçons ici. Dans ces deux régions, 
les Moules sont réparties de façons très différentes. Dans toute 
la région inférieure, là où les Fucus sont nombreux, très vigou- 


940 R. ANTHONY 


reux et très développés, recouvrant complètement le substratum 
comme une sorte de chevelure (1), on peut apercevoir, en les 
écartant, une couche continue, une nappe pour ainsi dire de 
Moules, s’étalant sur tout le rocher, aussi bien sur ses parties 
saillantes que dans ses anfractuosités. 

Dépassons la zone des Fucus : là seulement où il y à une 
région en retrait, une anfractuosité, une fissure (IT), on est sûr 
de rencontrer des Moules. 

Plus on monte, plus elles deviennent rares et petites, et 
bientôt on ne les trouve qu'en regardant avec soin et minutie 
dans les fentes les plus profondes. À partir d'un certain point 
même, on n'en rencontre plus. 

Ce qui est figuré sur cette coupe, qui est celle d’un rocher de 
Pentrez, peut également se constater en un point quelconque du 
littoral, depuis Douarnenez jusqu'à Crozon (lieux dits Lestrevet, 
Pentrez, Cameros, Kerrie, Porz-Lous, Rostegoff, Lecaon, etc.). 

De l'observation de ces faits, deux conclusions sont à 
tirer : 

1° Que la variété de Mytilus edulis Linn., qui vit sur les 
rochers de la baie de Douarnenez est adaptée à des conditions 
d'existence spéciales consistant en une immersion et une émer- 
sion alternatives. En effet, tous ces individus passent une partie 
de leur existence (d'autant plus grande qu'ils habitent une 
région plus élevée du rocher), au moment des marées basses, 
complètement hors de l'eau; on n'en trouve aucun dans les 
flaques où l'eau est d’ailleurs à une salure très variable par 
le fait des évaporations et des pluies, et pourrait peut-être, 
par ce simple fait, ne pas convenir à leur existence. Quoi qu'ilen 
soit de l'importance de cette variabilité de salure, pour Pexplica- 
tion de la non-existence de Moules dans les flaques, 1l est un fait 
certain, et que j'ai souvent expérimenté par moi-même, c'est 
qu'une Moule prise en un point quelconque de la surface du 
rocher et mise brusquement au fond de l'eau, même renouvelée, 
ne tarde pas, dans la plupart des cas, à périr au bout de 
quelques jours. Les formes de Mytilus, au contraire, qui, comme 
le Mytilus galloprovincialis Lmek., de la Méditerranée, vivent 
toujours sous une certaine couche d’eau, se sont adaptées à 
d'autres conditions d'existence et ne pourraient vraisemblable 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 241 


ment supporter celles qui sont indispensables à la vie des indi- 
vidus dont il vient d'être question. 

2° Que, quoique n'étant pas continuellement immergées, les 
Moules doivent, pour vivre, être constamment maintenues à 
l'humidité. : 

Voyons si loutes celles que nous avons rencontrées sur notre 
profil remplissent ces conditions. D'abord, celles qui vivent 
dans les régions inférieures, uniformément répandues à la 
surface du rocher, ne sont hors de l'eau qu'un temps très court, 
puisque lorsque la mer monte, cette région est recouverte la 
première, el qu'au moment où la mer descend, elle est décou- 
verte en dernier lieu. Pendant le court intervalle où elles se trou 
vent à découvert, les Moules n’ont donc pas le temps de se dessé- 
cher à l'air, ni même au soleil, d'autant plus que les Fucus, très 
touffus, les recouvrent complètement, empêchant encore ainsi 
l'humidité de disparaitre et les rayons du soleil de les atteindre. 

A mesure que l'on monte, le rocher se trouve êlre découvert 
chaque jour pendant un temps de plus en plus long, les algues 
deviennent de moins en moins touffues et vigoureuses, et à 
partir d'un certain niveau même, disparaissent complètement. 
Les Moules ne se voient plus alors à la surface des rochers, on 
ne les rencontre plus guère que dans les fentes et les anfrac- 
tuosités, où le soleil ne pénètre pas el où l'humidité à quelques 
chances de se conserver, 

ÎLest évident que les jeunes Moules, dont les facultés de dépla- 
cementsont, comme je l'ai observé, très considérables, beaucou 
plus que celles des Moules adultes, se rendent d’elles-mêmes 
pour y effectuer leur développement dans ces anfractuosités où 
les conditions sont plus propices à leur existence, et, que celles 
qui, par hasard, sont restées sur les parties convexes des rochers 
meurent rapidement par dessiccation. En résumé, outre l'im- 
mersion et l'émersion alternatives, l'humidité continuelle est 
nécessaire aux jeunes Moules de roche pour leur développe- 
ment et leur existence, et, comme cette humidité ne peut exister 
que dans des anfractuosités, c'est là que les Moules viennent 
d’elles-mômes se fixer, se pressant les unes contre les autres. 

Il a été dit plus haut quelle était l'attitude des Moules fixées au 
substratum. Cette fixation se fait louJours de telle sorte que la 

ANN. SC. NAT. ZOOL. 1, 16 


242 R. ANTHONY 


région antérieure et le crochet confondus soient du côté de ce 
substratum, tandis que la région postérieure du corps, celle par 
laquelle se font l'entrée et la sortie de l'eau, soit dirigée du côté 
opposé, c'est-à-dire en haut. C'esten somme le céphalothétisme. 

Ilen résulte que les Moules agglomérées dans des espaces res- 
treints, se pressent les unes contre les autres; leurs extré- 
mités antérieures se resserrent de plus en plus, tandis que leurs 
extrémités postérieures, celles qui forment la périphérie, s’élar- 
gissent, s'épanouissent comme des fleurs dans un bouquet. Ce 
mode d'existence caractérisé, en somme, par la compression 
de l'extrémité antérieure, est particulièrement marqué chez les 
Moules de roches des régions supérieures. 

Existant chez des animaux du type modiole, il à pu, en déter- 
minant le resserrement de l'extrémité antérieure, amener la 
confusion des points & et €, et ipso facto La transformation du 
tvpe Modiole en type Moule, c'est-à-dire faire descendre Jusqu'à 0 
la valeur de langle de modiolisation. Ce premier résultat 
acquis, les conditions d'existence restant constantes, ‘s'accusant 
même davantage, un autre résultat a pu être obtenu, c’est celui 
de la diminution de valeur de Fangle de mytilisation. Égal chez 
les Moules de vase recueillies à l'embouchure de la rivière du 
Faou à 45°, il tombe chez les Moules de roches de la zone infé- 
rieure, dont il vient d'être question plus haut, à 38° en moyenne. 
(Ces moyennes ont été faites sur 100 individus de chaque caté- 
gorie pris au hasard). Parmi ces dernières, celles de la zone 
supérieure qui se trouvent être les plus comprimées arrivent 
même à avoir une extrémité antérieure contournée, c'est le 
Mytilus incurcatus Pen. Pelseneer (93) a montré comment ces 
différentes espèces ne sont que des variétés dues à des habitats 
différents. 

Si lon s'adresse à un autre phylum qui comprend lui aussi 
des formes mvtiliformes, les Dreyssensudæ, on voit que les 
choses se passent tout à fait de même façon. En effet, chez les 
Dreyssensin polymorpha Bened. vivant distantes les unes des 
autres, le long des parois verticales des bassins d’eau de Seine 
de Gentilly, l'angle de mytilisation calculé sur 100 individus 
est égal à 58°,28 en moyenne. L'ayant mesuré par contre sur 
quelques spécimens faisant partie d'un groupe formé d’indivi- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 243 


dus fixés en bouquet sur un caillou et appartenant aux collec- 
tions de Malacologie du Muséum d'Histoire naturelle, j'ai trouvé 
qu'il était au contraire en moyenne de 4#%° environ. Les pre- 
mières de ces Dreyssensia rappellent par leur forme les Moules 
de vase de Bretagne, ou, mieux encore, les Mytilus galloprovin- 
cialis Lmck. de la Méditerranée; les secondes sont analogues 
aux Moules de roches de la baie de Douarnenez. 

En résumé, le type mytilimorphe semble devoir sa consti- 
tution même (réduction à 0 de l’angle de modiolisation) à la vie 
en groupes, l’agglomération, laquelle amènerait encore en plus, 
lorsque le resserrement des individus les uns contre les autres 
devient, par le fait de circonstances extérieures, extrêmement 
considérable, la réduction progressive de l’angle de mytilisation 
qui est d'autant plus fermé que l'agglomération est plus serrée. 

La vie agglomérée aurait été l’origine de la formation du 
type myülimorphe. Le type une fois constitué, les conditions 
extérieures ont pu imposer un autre genre de vie aux 
Mytilimorphes, dont la forme s’est modifiée en conséquence 
(Voy. Dreyssensia du bassin de Gentilly). 

Outre ces deux modifications principales, agglomération peut 
en produire encore d’autres secondaires. Au nombre de ces 
dernières, il convient de citer : l'élargissement de la partie pos- 
térieure de la coquille corrélatif du rétrécissement de sa partie 
antérieure, lallongement postéro-umbonal de l'animal, qui 
est l’analogue de lallongement antéro-postérieur des Diiso- 
myaires céphalothétiques, la disparition du drap marin res- 
semblant à un revêtement pileux qui existe chez la Modiola 
barbata Linn., et qui se retrouve chez la variété dite de roches 
de Mytilus edulis Linn. à un certain stade de développement, 
comme 1l sera montré plus loin. Ce drap marin disparait dans 
la région antérieure de la coquille par le fait de la pression 
réciproque des individus et dans la région postérieure par l'action 
balayante et polissante en quelque sorte des vagues de la mer. 
Cela est si vrai que l’on peut voir que les individus qui se sont 
développés dans des positions et dans des régions telles que 
les vagues se brisent avant de les atteindre, derrière un rocher 
ou une touffe d'algues qui les abrite par exemple, ont conservé 
souvent ce drap marin Jusqu'à un âge auquel leurs congénères 


244 R. ANTHONY 


l'ont en général perdu depuis longtemps. La chose est si remar- 
quablement nette qu'il ne semble pas que l'on puisse attribuer 
à une autre cause qu'à l’action de la vague, La disparition du 
drap marin sur la partie postérieure de la coquille des Wytilidæ. 
Sans cesse balayées par les flots, les Moules littorales s’usent de 
la même facon que les Chames se roulent sur les récifs des 
mers tropicales. 

Les Moules de vase n’ont pas plus que les Moules de roches de 
drap marin, quoique vivant dans un milieu extérieur moins 
agité. Cette particularité tendrait à faire admettre qu'elles l'ont 
perdu jadis, à une période de leur développement phylogénique 
où elles vivaient fixées sur les rochers, dans la zone de balan- 
cement des marées. De plus, l’action continue d'un courant, 
comme celui existant à l'embouchure des fleuves, exerce aussi, 
comme l’on sait, une action doucement polissante (Voy. Æthe- 
ria Petrelinnii Bet.). 

Dans tout cet exposé, j'ai cherché à montrer comment la 
forme Moule à pu provenir d'une forme Modiole, provenant 
elle-même d’une forme Isomyaire ; j'ai cherché de plus à expli- 

quer les causes de cette transformation. Mais outre ces argu- 

ments trés de l'anatomie comparée, il en existe d’autres à 
l'appui de cette manière de voir, que l'embryogénie peut nous 
fournir et grâce auxquels le processus d’anisomyairie {modioli- 
sation et mytilisation) peut, en quelque sorte, être pris sur le 
fait. 

C'est encore sur les Moules de roches de la baie de Douar- 
nenez que J'ai effectué cette étude d’embryogénie dont les ré- 
sultats vont maintenant être très brièvement résumés. Je ne 
m'y occuperai naturellement que de l'établissement de la forme 
générale à l'étude de laquelle seule ce chapitre est consacré, et, 
je n'aurai en vue que la coquille. Tous les matériaux dont je 
me suis servi pour cette étude ont été recueillis par moi-même 
sur les roches de Pentrez ou de Cameros (baie de Douarnenez). 

Chez le Mytilus edulis Linn. la prodissoconque est subsymé- 
trique, possédant un provinculum garni de dents transversales 
et divisé en deux parties par une fossette primitive légère- 
ment plus rapprochée de l'extrémité postérieure que de l'extré- 
mité antérieure. J'ai souvent observé cette prodissoconque 


TT TT — 
A ee ai 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 249 


Il Il PE 
ayant des dimensions comprises entre p°t " de millimètre. 


Je n'y insisterai pas davantage, mes observations coïneidant 
avec celles des auteurs, notamment celles de F. Bernard (98). 

Au stade prodissoconque fait suite ce que certains auteurs ap- 
pellent le stade népionique, suivi lui-même du stade néologique. 

La distinction de ces deux stades me semble quelque peu 
artificielle ; leur hmite est difficile à concevoir, et même à saisir 
chez les Acéphales d’une façon générale. Chez le Mytilus edulis 
Linn. en particulier la délimitation semble impossible, aussi 
n'emploierai-je pas ces dénominations et me contenterai-je de 
parler seulement de la coquille définitive faisant immédiate- 
ment suite à la prodissoconque. 

Les plus petites coquilles définitives qu'il m'a été donné d’ob- 


/ 


mur l ee 
server ont été des individus de - de millimètre de longueur 
( 


dans leur plus grande dimension. Ces coquilles n’ont pas préci- 
sément l'aspect de Disomyaires parfaits com- 


see ae: 
plètement équilatéraux ; elles forment, en quel- 
que sorte, au point de vue morphologique, la 
transition entre les Diisomyaires et les Diani- 
somyaires. La coquille est lisse, le pied long 
et très agile; lanimal se déplace sans cesse, P: 
brusquement, et ne semble pas faire un usage Fig. 18.— Jeune Myk- 
important de son byssus. lus edulis  Linn. 
ee (valve droite, vue 


L'angle de modiolisation que J'ai réussi à intérieure) de 1/4de 

mesurer, grâce à la chambre claire, chez quel- millimètre environ. 

= NE ; F y — apc, angle de 
ques individus m'a paru égal à 29° en moyenne  modiolisation. 


etenviron (Voy. fig. 18). 


I Jp . 
A - de millimètre, la forme est à peu près la même, mais le 


point et le point « se rapprochant, l'angle de modiolisation 
tombe à 25°. 


| Le à 
A ë millimètre, la forme a encore peu changé, mais la ten- 
dance à l'anisomyairie s’est encore accentuée. 


Ü 


€ 


A 7. de millimètre, à peu près, on voit apparaître un drap 


246 R. ANTHONY 


marin analogue à celui dont on à constaté la présence chez 
Modiola barbata Linn. Comme chez ce dernier animal, il se 
développe surtout sur les régions dorsales et postérieures. En 
même temps, les points c et « se rapprochent de plus en plus. 
Sur deux ‘individus où je lai mesuré, l'angle de modiolisation 
était égal à 12 et à 14°. A ce stade, la forme générale de l’ani- 
mal rappelle à s'y méprendre la Modiola barbata Linn. adulte, 
avec la seule différence que 
chez cette dernière l'angle de 
modiolisation est plus réduit 
encore (Voy. fig. 19). 

À partir de ce stade, à me- 
sure que les individus grandis- 
sent el sont, par conséquent, 
par le fait qu'ils ne disposent 
Fig. 19. — Genre Mytilus edulis Linn. que d’un espace restreint, obli- 

(valve droite, vue extérieure) de 1 mil- Pie 

limètre. — epa, angle de modiolisation. 565 de se serrer de plus en plus 

On aperçoit le drap marin et le byssus. [as uns contre les autres, l'angle 

de modiolisation diminue pour 
atteindre 0, lorsque la longueur totale de l'animal est de 


l "1e : È 
; centimètre environ. Un peu avant ce stade, la jeune Moule, 
19 


à moins, comme il à été dit plus haut, qu'un accident du 
rocher ne l'ait protégée contre la vague, à perdu son drap 
marin par le fait probablement de l’action polissante des 
vagues. 

Lorsque l'angle de modiolisation à atteint 0, l’angle de myti- 
lisation qui chez les individus de : centimètre atteint en 


moyenne 50°, diminue de plus en plus à mesure que l’animal 
augmente de taille pour s’abaisser sur les formes adultes de 
3 à 4 centimètres Jusqu'à 38° environ et en moyenne. 

Cette étude trop résumée ici du développement ontogénique 
de la forme Mytilus edulis Linn. montre bien que cette espèce 
dérive sans aucun doute d’une forme isomyaire et qu'avant 
de devenir Moule, elle passe successivement par les stades 
isomyaire et modiole {modiola adriatira el modiola barbata) ; 
elle permet, en outre, de saisir sur le fait pour ainsi dire 


_— ET 


=. 2 … — —  —— — — 
— D. A | Te TV 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 247 


les causes morphogéniques et de s’imaginer comment réelle- 
ment les choses ont pu et ont dù se passer, comment la 
forme moule à pu se cons- 
tüituer. 

Ce processus de mytilisa- 
üon n'a pas dù être spécial 
aux Mytilimorphes du phylum 
des Protarcidæ. 

J'ai fait sur de jeunes 
Dreyssensit provenant de sa- 
bles de la Saône, recueillis à 
Saint-Jean-de-Losne, une étu- 
de analogue à celle que j'ai 
faite sur les Moules de roches 
de Pentrez: elle m'a conduit 
au même résultat. La forme 
mytilimorphe Dreyssensia est 
précédée d'une forme mo- 
dolimorphe à angle de modio- 
lisation évaluable. 

Dans la famille des Myti- 
lidæ, 11 convient de citer le 

; : Fig. 20. — Coupe sagittale de Mylilus edulis 
genre Lithodomus dont il à Linn. — 1, bouche; 2, anus: 3, pied: 
été question déja et qui est … mage aiduetour air; à muscle 
une forme secondairement  expirateur (position physiologique). 
adaptée à  l'enfouissement 
céphalothétique et à la vie en galerie. Le Lithodome possède 
comme les Diisomyaires un corps allongé, cylindrique calibré, 
des ébauches de siphons, et son bord abdominal, au lieu de 
rester rectiligne au voisinage du crochet, comme ilest chez la 
Moule, se courbe faisant ressembler le profil sagittal de cet 
animal à celui d'un Diisomyaire dont le crochet est séparé de 
l'extrémité antérieure. 


Sous l'influence de conditions d'existence spéciales, certains 
types mylilimorphes peuvent prendre des caractères spéciaux. 
C'est le cas des Tridacnes. 

La Tridacne n'est, en réalité, autre chose qu'une Moule, au 


248 | R. ANTHONY 


même litre que les Mytilus, les Seplifer et les Dreyssensis. Chez 
la Tridlacne comme chez tous ces animaux, la partie antérieure 
du corps est, en effet, confondue avec le crochet et le muscle 
adducteur antérieur, au lieu d’être simplement diminué comme 
chez le Mytilus edulis Linn., est complètement absent comme 
d'ailleurs chez certains Mytilus. 

Li forme Tridacne est donc une forme anisomvaire où myti- 
Himorphe, mais une forme mytilimorphe qui, au point de vue 
morphologique, se distingue des autres, par la réduction de 
son diamètre postéro-umbonal ou antéro-postérieur, l'aug- 
mentation de ses diamètres transversal et dorso-ventral, enfin 
l'augmentation considérable de son angle de mytilisation, 
qui chez les plus grandes formes de Tridacnes et les Hippopus 
peut atteindre Jusqu'à deux angles droits. 

La forme Tridacne n'est réalisée que dans deux genres, le 
genre Tridacna etle genre Hippopus, très voisins l'un de l'autre, 
et, tous les deux constituant la famille des Tridacnidaæ. 

Certains naturalistes pourront s'étonner de me voir placer 
les Tridacnes et les Hippopus parmi les formes anisomvaires et 
en faire les analogues des Moules. Ime semble indispensable 
de me justifier à ce point de vue. 

De tous temps, les Tridacnes ont frappé les zoologistes 
non seulement par leur grande taille, mais encore par la 
disposition spéciale de leurs organes. Le premier auteur qui 
se soil sérieusement occupé de Forganisation de ces animaux 
est Mac-Donald, qui, en 1857, en donna une bonne quoique 
incomplète description. En 1865, L. Vaillant, dans un mé- 
moire qui reste encore aujourd'hui l'ouvrage le plus complet 
au point de vue descriptif, parmi ceux qui traitent de ce suet, 
étudia en grand détail leur anatomie. 

Un fait l'avait frappé, c'est que lorsqu'on écarte les valves 
d'une Tridacne, laquelle, par sa forme générale et à première 
vue, rappelle grossièrement un Diisomyaire équilatéral quel- 
conque, on constate que l'orifice buecal est au niveau de la 
région cardinale où plus exactement du crochet et que le cœur 
se trouve être du côté du bord libre des valves, l'inverse par 
conséquent de ce qui existe chez les autres Acéphales auxquels 
une Tridacne parait ressembler. Considérant done la région 


= 
— 
a A 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 249 


droite de la figure 21 comme l'avant, la région gauche comme 
l'arrière, le bord inférieur comme le dos et Le bord supérieur 
comme le ventre, il conclut, étant donnée la disposition des 
organes, que l’animal était absolument retourné dans sa co- 
quille. 

Cette conception devenue classique depuis lors, fut adoptée 
encore en 1898, par Grobben, qui, dans un bon mémoire 


Fig. 21. — Coupe sagittale de la Tridacna elongata Linck. L'animal est en position 
physiologique, le crochet en bas. — 1, bouche; 2, anus: 3, pied; 5, musele 


adducteur postérieur; 6, cœur: T7, orifice inspirateur; 8, orifice expirateur: 
9, orifice byssal ; 10, ganglion nerveux viscéral : 41, foie : 12, organe de Bojanus. 


donne des détails anatomiques complémentaires sur l'organi- 
sation de ces animaux. 

Enfin tout récemment, M. Boutan et la Direction des Ar- 
chives de Zoologie expérimentale ont publié un mémoire pos- 
thume de M. de Lacaze-Duthiers (04), où le savant zoologiste 
prend à tâche d'éclaireir la question si obscure et si embrouillée 
de la morphologie des Tridacnes. Guidé par le principe de l'unité 
de plan de composition des êtres vivants et par cette idée si émi- 
nemment vraie que les organes e{ non la coquille doivent servir 
de base pour l'orientation d'un Acéphale, il arrive à établir que 
la Tridacne, considérée jusqu'ici comme un type aberrant, n'est 
pas, en somme, plus aberrante que l'Huître et la Chame, par ” 
exemple, et que son organisation rentre bien dans le plan 
général de celle des autres Acéphales. 

Mais de Lacaze-Duthiers ne va pas plus loin, il montre que la 
Tridacne n'est pas le type si particulier qu'on avait voulu en 


250 R. ANTHONY 


faire, qu'il n'est nullement zetourné, mais il ne donne pas la 
véritable signification de son organisation. Plusieurs années 
avant de Lacaze-Duthiers, un géologue, M. Tournouer, semble 
avoir entrevu la solution de la question, en montrant le passage 
des Lthocardium aux Tridacnes par l'intermédiaire des Bysso- 
carduon. 

L'an dernier enfin, dans une note à l'Académie des Sciences 
sur la morphologie et la morphogénie des Tridacnidés, j'expo- 
sais la façon dont jecomprends l'organisation de ces animaux. 
J'ai appliqué pour leur orientation les notions exposées au 
début de ce chapitre. La région de la bouche à été ainsi 
dénommée tout naturellement région antérieure, celle de l'anus 
et du siphon expirateur région postérieure. Le nom de bord 
dorsal à été donné à celui qui va de la bouche à l'anus en pas- 
sant par le cœur (ancienne région postérieure), celui de bord 
ventral à celui qui va de la bouche à l'anus en passant par la 
cavité palléale {ancienne région antérieure). Les régions qui 
répondent aux valves ont été désignées comme droite et gauche. 
Dans cette orientation, il n'est nullement tenu compte, comme 
on le voit, de la coquille, de ses différentes parties et de leurs 
rapports avec les organes. 

Cette mise en place des Tridacnes, application particulière 
de la règle générale émise plus haut, pour l'orientation de ces 
animaux, diffère sensiblement de celle proposée par M. Vaillant, 
de celle aussi proposée par M. de Lacaze-Duthiers, comme un 
simple coup d'œil jeté sur la figure que je publie et sur celle 
contenue dans le mémoire de cet auteur, permet de s'en rendre 
compte. 

Considérons maintenant quels sont les rapports que la 
coquille affecte chez ces Acéphales, avec les différentes parties 
du corps qui ont servi de base à la mise en place de l'animal. 

D'abord en face de la bouche est Le crochet, et en arrière 
d'elle est immédiatement placé le pied, puis le byssus. A 
l'opposé de la bouche est le muscle adducteur postérieur et le 
rectum qui affecte avec lui les rapports habituels. 

Il résulte de ceei que chez les Tridacnes la coquille affecte 
avec les organes internes exactement les mêmes rapports que 
chez le Mytilus edulis Linn. La forme Tridacne est donc de 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES AD 


toute évidence une forme mytilimorphe (Rapprocher la figure 21 
de la figure 20), mais un mytilimorphe d'aspect spécial dans 
lequel les diamètres verticaux ont diminué alors que les dia- 
mètres horizontaux (dorso-ventral et transversal) ont aug- 
menté. 

Il résulte de ceci qu'il n'existe pas de lunule chez les Tridae- 
nidæ. La plupart des auteurs, se fiant à une vague ressemblance, 
appellent lunule de la Tridacne la région par où sort le byssus et 
de Lacaze-Duthiers, tout en semblant cependant entrevoir l'er- 
reur, a malheureusement encore employé ce terme dans son mé- 
moire précité pour l'appliquer à la même chose. 

Qu'est-ce en effet qu'une lunule, sinon la région de la coquille 
comprise entre le crochet et l'impression du muscle adducteur 
antérieur, c'est-à-dire la bouche qui dans la plupart des cas 
affecte avec ce muscleles rapports constants que l’on connaît. 
Chezla Tridacna pareonséquentlalunuleserait la région comprise 
entre le crochet et la bouche. Or, chez cet animal cette l'ÉSION 
est réduite à néant, tout comme chez la Moule d'ailleurs, et, ce 
qu'on appelle à tort la lunule de la Tridacne correspondrait chez 
les Cardium, par exemple, à une partie du bord libre des valves 
partant de l'extrémité ventrale du muscle adducteur antérieur et 
se dirigeant vers le siphon inspirateur. 

Au point de vue de leurs affinités les Tridarnidæ doivent être 
rattachées, ainsi que je l'ai dit plus haut, à la famille des Car- 


| dudie; ce sont des Mytilimorphes de Cardium. 


Il n'entre pas dans le cadre de cette étude, qui n’est en somme 
qu'une introduction, d'énumérer les nombreux caractères de 
parenté qui unissent les Tridacna aux Cardium : je me réserve 
de le faire dans un mémoire futur qui traiterafen détail la morpho- 
logie et la morphogénie de ces animaux. Toujours est-il que 
depuis le Cardium jusqu'à l'Hippopus il existe toutes les formes 
de passage que l’on peut sérier de la facon suivante : 


Cardium. 


DS 


Lithocardium. 


| 
Byssocardium. 
| 


| 
Tridacna. 


Hippopus 


259 R. ANTHONY 


— 


Le Cardium estla forme isomyaire de la série. Le Lithocardium 
(Anisomyaire) y représente la forme modiolimorphe ; c'est un 
type exclusivement fossile qui, tout porte à le croire, ne possé- 
dait pas encore de byssus ou en possédait du moins un très ré- 
duit qui n'a pas laissé de traces sur la coquille. 

Quant au Byssocardiun également fossile, c'est une forme à 
byssus comme son nom l'indique etcomme le prouve la forme de 
sa coquille, mytilimorphe typique n'ayant pas subi les modifi- 
cationssecondaires qui caractérisent la Tridacne. L'angle de myti- 
lisation plus petit que chez la Tridaene est, chez le Byssocardium, 
de 90° environ. Il semble évident que le Byssocardium soit 
l'ancêtre direct des Tridacnes. 

Quant à l'Hippopus, €'estune forme de Tridaenidé plus évoluée 
encore que la Tridacna et dépourvue de byssus. 

En résumé, done les Tridacnidés sont des Cardiidæ mytül- 
morphes qui présentent, par le fait de l'action de conditions 
d'existence spéciales que nous allons exposer maintenant, une 
morphologie toute particulière. 

Les renseignements que j'ai eus sur les conditions d'existence 
de ces animaux proviennent surtout de deux sources. D'abord, 
j'ai mis à contribution le savant ouvrage de Saville-Kent (93) 
sur la grande barrière récifale d'Australie ; ensuite J'ai utilisé 
les renseignements si complets et si précis que M. Ch. Gra- 
vier avait recueillis à mon intention au cours de sa mis- 
sion dans le golfe de Tadjourah. De ces documents ainsi 
que des autres renseignements que jai pu me procurer, 
il résulte les faits suivants absolument indiseutables : les Tri- 
dacnes se rencontrent fixées parmi les Polypiers, à l'aide de leur 
byssus, en céphalothétisme ; fait capital, elles sont isolées, à 
l'encontre de ce qui se passe chez les WMytilus edulis Linn. 
par exemple qui vivent toujours agrégés, chaque exemplaire 
étant toujours distant d'un autre individu. Les Polvpiers les 
entourent de telle sorte que, de tout l'animal le bord libre des 
valves parait souvent seul avec ses sinuosités, et, les valves 
entr'ouvertes laissent quelquefois paraître retournés en dehors 
les bords du manteau dont on connait les couleurs éclatantes 
qui se mélent à celles non moins vives des iPolypiers et 
empêchent souvent de reconnaitre à première vue la présence 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 259 


de la Tridacne. Ces animaux sont exclusivement littoraux, 
vivant, soit dans la zone de balancement des marées, soit dans 
celle qui la suit immédiatement, n'étant recouverts en tous cas 
d'une façon permanente que par une mince épaisseur d'eau. 

Au point de vue morphogénique il est parmi ces conditions 
d'existence un fait capital à retenir, c’est qu'au lieu de vivre 
agelomérées en bouquets comme les Hytilus et souvent les 
Dreyssensia, les Tridacnes vivent isolées. Cette circonstance, à 
laquelle vient s'ajouter le grand poids de l'animal, permet, il me 
semble, d'expliquer la forme particulière des Tridacnes qui sont 
en somme des formes mytilimorphes étalées, écrasées sous leur 
propre masse. En effet, comme il a déja été dit plus haut, si l'on 
compare une Pridacna à un Mytilus, on voit que le premier de ces 
myülimorphes diffère du second, par l'accroissement de ses 
diamètres dorso-ventraux et latéraux et la réduction de son 
diamètre antéro-postérieur. Autrement dit, les dimensions 
horizontales de l'animal ont augmenté par rapport à ses dimen- 
sions verticales qui, elles, ontdiminué. Quant à l'angle de mylili- 
sation, 1l s'est ouvert de plusen plus et atteint en moyenne 
chez la Tridacna elongata Lmek. adulte par exemple la valeur 
de 150°. 

Ce processus d'étalement peut être suivi très facilement sur 
un seul et même individu par la seule inspection des stries 
d’accroissement de la coquille. La jeune Tridarna elongata, 
Lmck. de deux centimètres de long par exemple dans ses 
plus grandes dimensions {diamètre dorso-ventral), est très aplatie 
d'un côté à l’autre par rapport à sa dimension antéro-posté- 
rieure, elle est également plus courte dorso-ventralement et son 
angle de myülisation très voisin de celui du Zyssocardiun (90°) 
ne dépasse pas 100° ou 105°. À mesure que l'animal grandit 
les diamètres horizontaux augmentent de plus en plus par 
rapport aux diamètres verticaux et l'angle de mytilisation 
atteint 150° chez un animal de 13 centimètres (dimension 
dorso-ventrale). Chez les formes de plus grande taille, Tridaena 
gigas Linn. par exemple (voir les exemplaires de Saint-Sulpice 
du Muséum et de l'École des Mines), le poids augmentant, l'étale- 
ment augmente dans un même rapport, l'angle de mytilisation 
atteint deux droits etle byssus devenu inutile disparait. 


254 R. ANTHONY 


A cet élalement doit encore être rattaché l'écartement des 
deux branchies, et leur forme spéciale en bourrelets. Enfin il 
reste à citer le fait que comme les Arches, Les Tridacnes ont un 
byssus compact qui semble prendre cel aspect par le fait de 
l'immobilité de l'animal maintenu en place par sa forme, son 
propre poids et les Polypiers qui l'entourent. 

IL est également facile de passer de la Tridacne à F'Hippopus. 


Fig. 22. — Coupes coronales médianes de moules internes atificicls. — T, de 
Tridacna elongata Lmek.; H, d'Hippopus maculalus Lmck. adultes. 


L'AHippopus est en effet un Tridacnidé dans lequel les dimen- 
sionshorizontales ontaugmentéencore plus quechez les Tridacna 
par rapport aux dimensions verticales. 

En effet, si on appelle E indice bilatéral, le rapport de l’épais- 
eur bilatérale maximum à la longueur antéro-postérieure 
maximum (dimension verticale), ii 

+ épaisseur X 100 

= longueur antéro-postérieure 
on voit que cet indice est de 79 chez la Tridacna  elon- 
gata Lmek. et de 88 chez l'Hippopus maculatus. Lmck. 
De même si l’on désigne sous le nom d'indice dorso-ventral, le 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 299 
rapport de la dimension dorso-ventrale à la même longueur 
antéro-postérieure, 


__ dimension dorso-ventrale X 100 
longueur antéro-postérieure 


on voit que cet indice est de 207,52 chez la Tridarna elon- 
gata Lmck. en moyenne, alors qu'il est de 157,38 chez l'Hip- 
popus maculatus Lmek. Les Hippopus différent encore des 
Tridacnes par l'étendue de leur angle de mytilisation qui, chez 
l'Hippopus maculatus Lmck. adulte, atteint en moyenne 160°. 

Enfin, une dernière différence entre les ippopus et les Tri- 
dacnes est, qu'alors que les seconds ont un byssus, les premiers 
n'en n'ont plus. Il est aisé de déduire de l'ensemble de ces carac- 
tères que les Hippopus sont en somme des Tridacnidés chez les- 
quels l'étalement, dont on peut suivre par les stries d'accroisse- 
ment les différents stades sur la coquille, est plus accentué 
encore que chez les Tridacnes ; chez ces animaux à base s élar- 
gie, le byssus n'ayant plus raison d'être comme organe de fixa- 
üion à disparu. Les Hippopus sont done actuellement le terme 
ultime de la série des Cardiidæ anisomyaires. 


Avant de clore la question des Anisomyaires, il convient de 
s'arrêter un instant sur un type tout à fait spécial et peu connu, 
qui me semble devoir être classé parmi eux; je veux dire le 
genre Bartlettiu. 

Cet animal, que l’on rencontre uniquement dans les rivières 
d'Amérique du Sud, semble indubitablement appartenir au 
groupe des Urionidæ ainsi d’ailleurs. que les Æthéries africaines 
dont il à été question un peu plus haut. Comme les Æthéries, il 
est fixé, mais la zone de fixation, au lieu d'occuper toute la 
surface de l’une des valves, est limitée à la région qui répond à 
l'insertion du muscle adducteur antérieur. L'impression de ce 
muscle sur la valve est d’ailleurs infiniment plus réduite que 
celle du muscle addueteur postérieur, c'estee qui me fait ranger 
la Bartlettin parmi les Anisomyaires. Il semblerait que la partie 
hbre du corps de l'animal se soit épanoute en quelque sorte 
au-dessus de la zone de fixation très limitée, qui par le fait de la 
fixation même, s’est arrondie. Peu à peu, il semble que lépa- 
nouissement augmente, que la zone de fixation se rétrécit, la 


256 R. ANTHONY 


partie qui relie l'animal au substratum faisant de même, de telle 
sorte que l’on arrive à une forme monomvaire, la Mulleriu qui 
parait fixée au bout d'un grêle pédoncule, répondant à la région 
antérieure de Fanimal. Les Bartlettin sont donc ainsi des 
formes anisomyaires parüculières donnant, elles aussi, comme 
les autres Anisomyaires, naissance à des Monomyaires égale- 
ment spéciaux, et par un processus tout différent du proces- 
sus ordinaire qui fera l'objet du paragraphe suivant. 

Quant aux Chondrodonta que Douvillé vient de nous faire 
connaître, elles semblent être également des Anisomyaires, 
peut-être des Pinnidiæ Hxés en position pleurothétique. 


Il 


Monemyaires. 


On doit considérer les Anisomyaires comme des types de 
transition faisant en quelque sorte le passage insensible des 
Disomyaires aux Monomyaires (1). En effet, siles uns, comme 
certaines Cardites, Cardila calyqulata Linn. par exemple, 
comme les Æippopodium etles Modiola, tendent manifestement 
vers les Diisomyaires, d'autres, comme les Mytilus, tendent, par 
la perte deleur muscle adducteur antérieur, à se rapprocher de 
plus en plus des Monomyaires. La forme Avicule dont les types 
les plus anciens (Voy. Bernard, Traité de paléontologie) possé- 
daient encore un muscle adducteur antérieur, peut être considé- 
rée comme étant précisément à la limite de l’un et l’autre groupe. 

Le groupe des Monomyaires comprend entre autresles familles 


el genre suivants : 
Aviculidæ (2) et ses subdivisions. 
Limidæ. 
Pectinidæ. 
Ostreidæ. 
Anomiidæ. 
Mulleria (famille des Ætheriidæ). 


(1) I semble en effet que les Monomyaires, à part certaines formes spéciales 
comme la Mullerie, dont l'évolution probable vient d'être indiquée, dérivent 
de formes Anisomyaires mytilimorphes. 

(2) Il semble que les différentes tribus (Vulsellinæ, Inoceraminæ, Ambony- 
chinæ, etc.) que l’on rattache en général aux Avicules, doivent en être éloi- 
gnées. Dans un mémoire ultérieur je compte revenir sur cette question. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES Fa pl 


Comme on le voit, dans le groupe des Monomyaires plusieurs 
phylums se trouvent représentés tout comme dans le groupe 
des Dimyaires. Les Mulleries, en effet, ne sont que des Unionidæ 
à un seul muscle, et, sans qu'on puisse déterminer actuellement 
d'une façon certaine le phylum auquel doivent être rattachées 
les Avicules etles Huitres, il semble qu'il ne faille pas, en rai- 
son de la constitution spéciale de leur branchie, leur attribuer 
la même origine qu'aux Pectens, aux Spondyles, aux Anomies 
et aux Placunes qui semblent plutôt devoir comme les Moules, 
et, en raison de la constitution très simple de leurs organes res- 
piratoires, être rapprochées des Acéphales filibranches, par 
conséquent plus primitifs. Ainsi que la déjà fait remarquer 
Pelseneer [91], les Monomyaires sont donc incontestable- 
ment polyphylétiques. 

Les caractères communs des Monomyaires sont les suivants : 
d'abord, comme leur nom l'indique, ils ne possèdent plus qu'un 
seul muscle adducteur qui est toujours l'adducteur postérieur, 
lequel tend constamment à se rapprocher du centre de figure de 
la coquille. Ilen est encore loin chez l'Avicule, s'en rapproche 
chez l'Huître et l'atteint tout à fait chez la Placune. De plus, chez 
les Monomyaires, la forme générale tend à devenir plus ou moins 
arrondie, le profil'coronal à s'aplatir, l'intestin à s'éloigner du 
cœur el à passer dorsalement par rapport à lui, comme chez 
l'Huître par exemple; le ligament à se réduire et à limiter sa 
présence à la région médiane de la charnière: les branchies se 
trouvent être généralement plissées, qu'elles soient filamen- 
teuses ou treillagées. Jamais il n°y à de siphons (1), et l'im- 
pression palléale est dépourvue de sinus. Les Monomyaires les 
moins évolués, c'est-à-dire ceux qui se rapprochent le plus de 
la forme anisomyaire, possèdent encore un byssus, organe 
caractéristique de ce groupe (Avicules et certains Pectinidæ tels 
| que le Pecten vurius Linn. et le Pecten opercularis Linn.). Ils 
le perdent bientôt et deviennent alors les uns libres (Pecten 
marimus Linn.), les autres fixés (Huitres). 


y LesDiisomyaires, on l’a vu, sontles unseuthétiques, les autres 


(4) S'il existait des Monomyaires dérivant de formes dimyaires céphalo- 
thétiques de la 3° catégorie, ils posséderaient évidemment des siphons rudi- 
mentaires et le fait n'aurait rien qui doive étonner. 

ANN. SC. NAT, ZOOL. 17 


—" AT me 


258 R. ANTHONY 


pleurothétiques: les Dianisomyaires sonttous euthétiques; quant 
aux Monomyaires, ils sont tous pleurothétiques. Chez la plupart 
d'entre eux, le pleurothétisme est frane et continuel (Ostreidie) ; 
chez d’autres, comme les Avicules et les Pertinidæ à bvssus, le 
pleurothétisme end seulement à s'établir. On peut dire qu'il 
est intermittent. 

IL est intéressant de voir, comment les types monomyaires, 
possédant les caractères convergents qui viennent d'être Sign à- 
lés, ont pu s'établir et comment ces types une fois constitués 
ont pu acquérir leurs caractères fondamentaux. 

Il suffit de jeter un coup d'œil sur une coupe sagittale de 
Mytilus edulis Linn., pour voir immédiatement la disposition 
du ligament et des muscles addueteurs : d'une part, la partie 
fibreuse dorsale du ligament qui commence au même point 
en avant que la partie élastique s'étend beaucoup plus loin en 
arrière ; d'autre part, des deux muscles, lun, le plus considé- 
rable, le muscle postérieur, se trouve situé en dehors des 
limites de la charnière en p; Pautre, l'antérieur, très réduit est 
en #. La fermeture s'opère, comme l'on sait, par la contraction 
des muscles, et l'ouverture par laction, quelle qu'elle soit 
d'ailleurs, du ligament. Supposons, pour la commodité de 
l'explication, l'animal maintenu immobile et fixé par une de 
ces valves. La valve supérieure peut être considérée comme 
un bras de levier dans lequel le point d'appui est au milieu du 
ligament fibreux, la résistance au milieu du ligament élastique, 
et la puissance quelque part entre p et en un point très 
voisin de p, puisque 4 est pour ainsi dire négligeable par 
rapport à p en raison de sa petite taille et de son rapprochement 


du point d'appui. 

La fermeture, ou rapprochement des valves, se produit done | 
sous l'influence d’une force F, dirigée de haut en bas et repré- 1 
sentant la somme des deux muscles, à laquelle s'oppose la | 
force R (force expansive du ligament) dirigée de bas en haut. | 

Si on remarque la disposition respective des trois points, | 
(point d'appui, résistance et puissance), on voit qu'ils ne sont ! 
pas sur la même ligne, le point marquant là résistance étant | 


rejeté en avant de ry. | 
[L résulte de cette disposition des muscles et du ligament qu'il 
| | 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 259 


doit se passer au moment du rapprochement des valves chez 
le Mytilus edulis Linn., ainsi que chez tout autre Anisomyaire 
myüilimorphe, puisque le ligament élastique se termine toujours 
moins loin en arrière que le ligament fibreux, un mouvement 
de bascule (très peu accen- 
tué 1l'est vrai mais cepen- 
dant suffisant pour avoir 
un effet morphogénique) 
de chacune des valves 
suivant lequel les extré- 
mités postérieures s’abais- 
sent, C'est-à-dire se pressent 
l'une contre l'autre, pen- 


Y- 


dant lee xtrémités Fig. 25. — Schéma destiné à expliquer les 
dant que les extrémités mouvements des valves chez le Mytilus edulis 
antérieures s'élèvent, c'est-  Linn. — «, muscle adducteur antérieur; 


FR PE * Lo p, muscle adducteur postérieur; xy, ligne 
à-dire s'écartent. Pour qu il indiquant la direction du bras de levier. 


n y ait pas de mouvement 
de bascule il faudrait que les trois points soient en ligne droite 
suivant 77. Voyons si l'expérience directe confirme les don- 
nées de la théorie. Ù 

A l'aide du dispositif décrit au chapitre If, j'ai pu inscrire les 
mouvements d'ouverture et de fermeture des valves chez le 
Mytilus edulis Linn., en avant soin naturellement de placer la 
üge inscriptrice le plus loin possible du lieu où Je Supposais 
passer l'axe dorso-ventral de ce mouvement de bascule. Au 
début de Fexpérience, les valves sont coaptées, puis l'animal, 


| 
| 


ne se sentant plus inquiété, relâche peu à peu ses muscles, les 
valves S'écartent et le stylet décrit une ligne. Si, lorsqu'il est 
| arrivé en un certain point, on touche le bord du manteau en 
quelque région que ce soit, où même si l'animal rapproche 
spontanément ses valves, le stylet décrit une autre ligne qui ne 
coïncide pas avec la ligne d'ouverture, mais se trouve toujours, 
si l'animal est sain et vigoureux, située postérieurement par 
rapport à elle (Voy. IE et IV, fig. 31). Au moment de la. 
fermeture, chacune des valves accomplit donc un mouvement 
3 rotation (si léger, qu'impercepüble à l'œil il n'en existe pas 


moins), et, l'expérience confirme la théorie. Suivant les Cas. 
la boucle est plus où moins ouverte, mais elle existe toujours 


260 R. ANTHONY 


pourvu que la tige inseriptrice n'ait pas été posée sur le passage 
de laxe même de rotation. Le résultat de ce mouvement de 
rotation si léger est aisé à se figurer : les parties les plus anté- 
rieures de la coquille tendent sans cesse à s'écarter lune de 
l’autre, de telle sorte que Le ligament tend de moins en moins 
à exister dans sa région antérieure, sa partie élastique s’amin- 
cissant de plus en plus en avant, s’épaississant au contraire 
de plus en plus en arrière, ce qui a pour effet de rapprocher la 
résistance de la ligne zy. D'autre part, le développement du 
muscle antérieur devient de plus en plus difficile, et, Pani- 
mal passe donc en un mot insensiblement de la forme 
myülimorphe à la forme aviculimorphe, perdant amsi tout 
son prolongement antérieur et tendant déjà, et par ce seul 
fait, à s’arrondir. 

Ainsi donc, on le voit, le mode de rapprochement des valves 
peut dans une large mesure contribuer à expliquer le passage 
de la forme anisomyaire à a forme monomyaire. D'autres 
causes encore, d’ailleurs, peuvent être invoquées comme con- 
courant aux mêmes effets : c’est d'abord ce fait, sur lequel, 
Jackson (91) et Sharp (88) ont attiré déjà l'attention, que 
par sa position même et la brièveté de son bras de levier, le 
muscle adducteur antérieur Joue un rôle à peu près insigni- 
fiant dans l'acte de rapprochement des valves et le maintien 
de leur coaptation; son peu d'importance fonctionnelle est | 
done encore pour lui un motif de disparition. Enfin, la pres- 
sion réciproque des Mytilimorphes suivant leur région anté- 
rieure, conséquence de leur genre de vie, peut aussi dans une | 
certaine mesure être invoquée comme facteur déterminant de | 
leur transformation en Monomyaires. 

Le type Monomyaire, une fois constitué ainsi, acquiert un! 
certain nombre de caractères secondaires. Cest d'abord le 
rapprochement du muscle adducteur postérieur devenu unique 
du centre de figure de la coquille. Cette situation du muscle 
unique est, on le conçoit, éminemment favorable au fonction-| 
nement des valves, puisque dans le levier formé par une des; 
valves, mobile sur l’autre, elle met en ligne droite le point! 
d'appui, la résistance et la puissance. Mais le fait qu'une dispo-| 
sition est favorable à l'existence ne peut servir à expliquer son 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 261 


apparition; quels sont donc les facteurs mécaniques qui lont 
produite. 

Si, par le procédé qui m'a servi à étudier le mode de rappro- 
chement des valves chez le Mytilus edulis Linn., on l’étudie chez 
un Monomyaire tel que l'Ostrea edulis Linn. ou le Pecten maxi- 
nus Linn. par exemple, on s'aperçoit que les choses se passent 
sensiblement de la même façon que chez les Anisomyaires. 
Reprenons, en effet, en 
l'appliquant aux Mono- 
myaires, la démonstration 
de tout à l'heure. 

Chez le. Pecten marimus 
Linn., par exemple, la 
fermeture des valves et leur 
maintien en  coaplation 
s'effectuent par la contrac- 
ton du muscle unique situé 
légèrement en dehors du 

à ; Fig. 24. — Coupe sagittale d’Avicula radiata 
centre de figure de la co- Desh. — 1, bou che; 2, anus; 3, pied en 


quille l'ouverture se pro- dessous duquel est le byssus; 5, muscle ad- 
ducteur postérieur; 6, cœur. 


duit par le fait de la résis- 
tance à l'écrasement du ligament élastique, lorsque la partie 
lisse du muscle adducteur à relâché sa contraction. 

Or, chez cet animal le ligament est constitué de la façon 
suivante : d'abord, s'étendant tout le long du bord droit de la 
charnière, est un ligament fibreux qui relie les deux valves ; 
dans le levier constitué par la valve mobile, c’est lui qui con- 
stitue le point fixe. Outre le ligament fibreux, existe le Higament 
élastique qui, par sa force expansive, soulève la valve opercu- 
laire chaque fois que par sa contraction le muscle adducteur 
ne S'y oppose pas. 

Au moment de la fermeture, la valve libre du Pecten mari- 
mus Linn. est donc sollicitée à s'abaisser par une force M 
représentant le muscle adducteur unique. Là encore le point E 
(résistance) est en avant de FM et il doit en résulter une légère 
rotation autour de l'axe dorso-ventral (1) (Voy. fig. 25). 


(1) Pour la simplicité de la démonstration, il n’est pas tenu compte du poids 
de la valve. 


262 R. ANTHONY 


Comme pour le Mytilus edulis Linn. l'expérience directe con- 
firme la conception théorique (Voy. fig. 31. VI). Chez l'Ostrea 
edulis Linn. les choses se passent de la même façon quoique 
la rotation soit moins accusée (Voy. fig. 31. V),et, bien que Je 
n'en aie pas fait l'expérience pour tous les Monomyaires, il 
parait évident que tous ceux qui sont construits sur le type 
du Pecten doivent présenter la même particularité physiolo- 
gique. 

En supposant done un Monomyaire quelconque fixé par une 
de ses valves, l'autre valve sera seule mobile et constituera au 
moment de la fermeture un levier dont le point fixe sera au 
milieu du ligament fibreux, la résistance au milieu du ligament 
élastique et la force en M (muscle). Par le fait de l'existence du 
mouvement de rotation se produisant au moment de la fer- 
meture, le ligament élastique tendra de plus en plus à ne pas 
se développer dans sa partie antérieure, où les valves ten- 
dent toujours à s écarter et, au contraire, à se développer uni- 
quement dans les régions où cet écartement est le moindre ou 
même n'existe pas, c'est-à-dire à se rapprocher de laxe de 
rotation : il résulte de tout ceci une tendance manifeste des 
trois points F,E,M à se mettre en ligne droite. Cet idéal une 
fois réalisé, il ne peut plus y avoir de mouvement de rotation, 
par conséquent plus d'écartement latéral des valves s'opposant 
au développement du ligament. La boucle tracée par le stylet 
inscripteur, dans mon expérience, esl d'autant moins ouverte 
que l'alignement est plus près d'être réalisé : chez l'Huitre elle 
est plus fermée encore que chez le Pecten marins Linn.. 

Ce ne semble donc pas être en réalité — et je ne saurais trop 
insister là-dessus — le muscle qui se déplace pour s’aligner avec 
les deux parties du ligament, mais le ligament élastique qui se 
déplace pour s'aligner avec le musele et le ligament fibreux. 
Cette tendance est très manifeste chez le Pecten marimus Linn. 
chez lequel, comme pour réaliser cet alignement, le ligament 
prend souvent une position oblique en arrière. 

De plus, au cours de la monomyairisation, les parties anté- 
rieures de l'animal ont été peu à peu et en quelque sorte chas- 
sées en arrière, etle muscle s'est, de par ce fait, trouvé entouré 
et parait être finalement sensiblement au centre de la coquille. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 263 


Même lorsqu'ils vivent agglomérés comme les Vulselles, les 
Monomyaires ne peuvent, en raison de leur forme déjà tant soit 
peu arrondie, former des bouquets analogues à ceux que con- 
stituent les Mytilus et certaines Dreyssensia; ilen résulte qu'ils 
ne peuvent, comme ces animaux qui se soutiennent en quelque 
sorte les uns les autres, vivre en céphalothétisme et qu'ils 
tombent de toute nécessité sur une de leurs valves affectant la 


| 


h Fig. 25. — Schéma destiné à montrer la marche de la monomyairisation (Pecten 
maximus Linn.) — F, ligament fibreux; E, ligament élastique; M, muscle 


adducteur postérieur. 


position pleurothétique. De cet habitus pleurothétique résulte 
l'apparition d'un certain nombre de caractères. D'abord, par le 
| fait de la position pleurothétique, le byssus qui, lui, reste atta- 
| ché au substratum horizontal, creuse en quelque sorte son sillon, 
sa trace, son passage sur la valve devenue inférieure, sur 
laquelle on peut voir, chez les Aviculidæ et les Pectinidæ à byssus, 
une encoche très nette et très caractéristique qui n'existe pas 
sur l’autre valve. Puis, sur les Monomyaires plus évolués, le 
byssus devenu inutile, disparait et, avec lui, le dernier vestige 
de l'adaptation anisomyaire. 


264 R. ANTHONY 


De plus, comme chez les Diisomyaires pleurothétiques, la 
symétrie coronale tend, pour les mêmes raisons, à remplacer 
la symétrie sagittale: les deux valves s’éloignent morpholo- 
giquement l'une de l'autre ; chez l'Avicula radiata Desh., lune, 
la supérieure, la gauche est toujours plus bombée que l'infé- 
rieure., La mème particularité peut être constatée, plus accen- 
tuée même, chez le Pecten opercularis Linn. et le Pecten varius 
Linn. qui présentent aussi un aplatissement d'une des valves, 
l'inférieure, c’est-à-dire celle qui porte l'échancrure byssale. 
Tout en réalité se passe comme si l'animal, sans cesse secoué 
par les vagues au bout de son byssus, retombait au moment du 
calme sur une de ses valves, laquelle prendrait, au cours de son 
développement, par le fait de la pression sur le sol, une forme 
aplatie. Avec l’aplatissement de la valve droite se produit natu- 
rellement, chez l'Avicule et les autres Monomyaires les moins 
évolués, l'aplatissement de toute la partie droite du corps, laquelle 
se traduit par la réduction progressive de tout l'appareil muscu- 
laire de ce côté. Ce processus de réduction de l'appareil muscu- 
laire peut être aisément suivi dans la série des Monomyaires. 

Prenons comme point de départ un Anisomyaire typique, 
bien symétrique par rapport à son plan sagittal, le Mytilus 
edulis Linn. par exemple. Si l'on ne tient pas compte des 
muscles du manteau, on peut voir qu'il existe chez ces animaux 
les muscles suivants : 


1 adducteur antérieur. 
1 — postérieur. 
2 rétracteurs antérieurs du pied. 
2 — postérieurs du pied. 
2 — du byssus. 


Ces muscles sont, comme tous les autres organes de l'animal 
d'ailleurs, symétriques parrapportau plan sagittal(Voy. fig. 26,1). 

Chez l'Avicula radiata Desh (fig. 26, Il) la disposition est sen- 
siblement la mème, avec cette différence que l'adducteur anté- 
rieur est absent (passage à la monomyairie), que les rétracteurs 
du byssus sont réduits et plus où moins confondus avec les 
rétracteurs postérieurs du pied (disparition progressive du 
byssus en rapport avec le pleurothétisme des Monomyaires) et 
enfin que le rétracteur antérieur du pied du côté de la valve la 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 265 


plus aplatie est complètement atrophié, transformé en tissu 
fibreux (Voy. fig. 26). 

Chez le Pecten opercularis Linn. (fig. 26. III) la régres- 
Son est encore plus marquée; avec le byssus, les rétracteurs 


Fig. 26. — Régression de l'appareil musculaire chez les Monomyaires sous l'influence 
du pleurothétisme. — I, Mytilus edulis Linn.: II, Avicula radiata Desh. 
IT, Pecten opercularis Linn.; IV, Ostrea edulis Linn.: p. pied; m, muscle 
adducteur postérieur: s, rétracteur supérieur; à, rétracteur inférieur. 


du byssus et les rétracteurs du pied ont complètement dis- 
paru. Des rétracteurs postérieurs, celui-là seul correspondant 
à la valve supérieure existe encore; c'est, nous dit Jack- 
son (90), parce qu'il se trouve être dans le plan de traction 
(Voy. fig. 26). 

Chez l'Oxtrea edulis Linn. (fig. 26, IV) enfin, où le pleu- 
rothétisme a alteint son maximum de caractérisation, et où 
la fixation existe, le pied et le byssus ont complètement 


266 R. ANTHONY 


disparu et avee eux toute leur musculature; le muscle 
adducteur postérieur reste seul. 

- JLa été dit un peu plus haut comment, par le fait seul de la 
monomvyairisation, la forme arrondie tend déjà à s'établir. Une 
autre circonstance peut amener l'arrondissement à un état de 


OS 
ne 
on 
Hors Coupe sagittale de Peclen opercularis Linn. — 1, bouche; 2, anus; 


3, pied (la coupe n'a pas passé par le byssus); 5, muscle adducteur postérieur ; 
6, cœur. 


perfection plus grande, et continuer ainsi, en quelque sorte, 
l'œuvre morphogénique de la monomyairisation, c’est la fixation 
qui se produit pour certaines formes, comme les Huiîtres et les 
Spondyles par exemple. Chez les Monomyaires la fixation pleu- 
rothétique tend à amener l'arrondissement pour les mêmes 
causes que chez les Dynuaires, et cet arrondissement, poussé 
dans ses dernières limites, entraine aussi les mêmes modifica- 
tions organiques : €’est ainsi que la branchie se plisse, quelle 
que soit d'ailleurs sa structure (Huitre, Mullérie), que le cœur se 
projette ventralement par ra pport à l'intestin qui nele traverse 
plus. 

Comme chez les Dymiaires aussi, outre l'arrondissement, la 
fixation pleurothétique entraine l'aplatissement de la valve deve- 
nue supérieure, qu'on appelle pour ce fait opereulaire, etle creu- 
sement de la valve devenue inférieure (Voy. Edm. Perrier (04). 


en nd D QE ee fe 
“ 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 267 


En résumé, donc, les Monomyaires sont tous pleurothétiques 
et possèdent de ce fait une symétrie coronale. Au point de vue 
de leur adaptation ils peuvent être divisés en trois catégories : 


Les byssifères (semblant être les formes primitives et de passage avec 
les anisomyaires). 
Les libres 


Le $ ériver remiers. 
Les fixés € semblant dériver des pre 


Les 4yssifères possèdent, comme leur nom l'indique, un 
byssus qu'ils tiennent de leurs ancètres dianisomyaires, et chez 


Fig. 28. — Coupe sagittale d’Osfrea edulis Linn.. — 1, bouche ; 2, anus : 5, muscle 
adducteur postérieur ; 6, cœur. 

eux c'est la valve inférieure qui est aplatie par a pression sur le 

sol auquel le byssus Paccole. Le musele est encore éloigné du 

centre de figure de la coquille. 

Chez les libres et les firés, c'est la valve supérieure qui est 
aplatie; la valve inférieure se creuse, au contraire, le byssus 
n étant plus là pour l'accoler au sol et en maintenir rapproché 
le bord libre. Comme chez les Dimyaires fixés en pleurothé- 
üisme, cette modification est vraisemblablement, comme la 
expliqué Edm. Perrier (04) sous la dépendance de Faetion indi- 
recte de la pesanteur agissant sur la masse des organes. Le muscle 
unique est sensiblement rapproché du centre de figure de la 
coquille. 

Les formes libres et les formes fixées dérivent vraisembla- 
blement de formes byssifères ayant perdu leur byssus. 


268 R. ANTHONY 


Il est, parmi les Monomyaires, un phylum éminemment inté- 
ressant, dont l'évolution semble avoir été toute différente de 
celle des autres Acéphales du groupe et qui mérite, de ce fait, 
une mention toute particulière, c'est celui des Anomidæ. 

Les Anomüdæ sont, comme on le sait, des Monomyaires 
fibranches qui présentent une structure de branchie extrê- 
mement primitive. Is possèdent un byssus, devenu souvent 
pierreux, extrêmement solide, et qui, passant par un orifice 
de Ja valve inférieure, S'attache sur des coquilles d’autres 
Acéphales, très souvent sur nos côtes sur celles du Pecten 
marimus Linn.. Leur valve aplatie est la valve inférieure, 
comme chez les Monomyaires byssifères d'ailleurs, les Avicules 
et les Pectens à byssus. On comprend aisément comment 
l'appheation de animal au substratum, par son byssus, peut 
amener cel aplatissementau cours du développement. L'organi- 
sation étrange des Anomies semblait une énigme à tousles z0olo- 
gistes, lorsque M. de Lacaze-Duthiers (54) fit paraître son 
remarquable mémoire dans lequel il explique si nettement leur 
morphologie. En se développant, la coquille entoure peu à peu 
de ses couches calcaires successives le byssus qui, à un certain 
moment, semble sortir par un orifice percé dans la valve. 

Comment se fait-1l que les Anomies n'aient pas perdu leur 
byssus pour les mêmes raisons que les autres Monomyaires? La 
chose semble pouvoir S'expliquer par ce fait, que les Anomies 
S'attachent, comme on le sait, très souvent sur Les valves oper- 
culaires de Perten marins Linn.. Ces derniers exécutent des 
mouvements très violents: dans ces conditions, la persistance 
du byssus était utile, pour ne pas dire indispensable, et on peut 
concevoir que, afin de ne pas être détachée et lancée au loin, 
à chaque mouvement de son hôte, l'Anomie ait augmenté peu à 
peu sa sécrétion byssale dont le produit aurait pris une consis- 
tance particulière, En se développant, la coquille ayant, comme 
chez tous les animaux fixés, la tendance à prendre la forme 
arrondie que l'on sait, aurait contourné et entouré le byssus de 
ses zones calcaires, et ainsi se serait établie la disposition que 
de Lacaze-Duthiers à si bien mise en lumière. 

Mais, supposons que certaines Anomidæ aient cessé de vivre 
sur le Pecten marinus Linn. et autres animaux analogues, et 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 269 


se soient fixés à un autre substratum, un rocher, par exemple. 


Dans ces conditions le 
byssus devenait inutile, 
l'animal reposant sufi- 
samment par l’une deses 
valves, et ne devait pas 
tarder à entrer en ré- 
gression. C'est ce que 
l'on constate d'ailleurs 
très bien chez les Carolia 
fossiles, chez lesquels on 
peut suivre l'oblitération 
progressive de  lorifice 
byssal de la valve infé- 
rieure el la régression 
des muscles rétracteurs 
du byssus. La régression 
de l'appareil byssal est 
complète chez la Plu- 
cuna où les deux valves 
sont devenues  sembla- 
bles, la valve supérieure 
ayant perdu la convexité 
qui caractérise les Ano- 
müdeæ. 

On peut done établir, 
au point de vue de l'ori- 
fice byssal seul, la série 
suivante : 


Forme Anomia. 


Forme Carolia. 


Forme Placuna (1). 


En même temps que la 
régression de lPappareil 
byssal se produit, le mus- 


Fig. 29. — Figurc destinée à montrer la progres- 
sion du muscle adducteur versle centre de figure 
de la coquille. — A, Anomie; C, Carolie; P, Pla- 
cune. Le ligament fibreux est marqué par un trait 
plein, le ligament élastique par des hachures, 
le muscle par un grisé. 


(1) Voy. particulièrement à ce sujet le travail de Fischer (80). 


270 _R. ANTHONY 


cle adducteur unique semble, comme dans toutes les autres 
séries de Monomyaires, se rapprocher de plus en plus du cen- 
tre de figure de la coquille, et le phylum des Aromüdie pré- 
sente ceci de très particulier qu'il est le seul où, dans le genre 
Placuna, le centre de figure de la coquille est mathématique 
ment atteint par le musele adducteur unique. Chez les Placuna, 


Fig. 30. — Coupe sagittale de Placuna sella Lmck. — 1, bouche; 2, anus; 3, pied 
5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur. 


les trois points (appui, résistance, puissance) sont en ligne droite 
etilestcurieux de suivre les modifications subies par le ligament 
par le fait de Pétablissement de cet état de choses particulier. 
Chez l'Anomie, le muscle adducteur est encore loin du centre 
de figure de la coquille, et le Higament à une forme allongée et 
très légérement courbe. Chez la Carolie le muscle adducteur 
s'est rapproché du centre de figure de la coquille, et le Higament 
prend la forme très nette d'un croissant à concavité ventrale. 
Enfin. chez la Placune, le muscle adducteur à atteint le 
centre de figure et le ligament est nettement divisé en 
deux parties situées chacune de part et d'autre du musele 
(Voy. fig. 29). Cette disposition me semble facile à expliquer 
par l'écrasement s'exerçant toujours au même endroit que doit 
produire la contraction du muscle unique. C’est un exemple 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 21 


de Fadaptation à la compression, analogue à ceux que j'ai 


/ | 
h 
| Ÿ 7 ; 
| 
HN" 2 ao VZ 


Fig. 31. — Tracés des mouvements d'ouverture et de fermeture des Acéphales 
suivants. — I, Psammobia : Il, Lutraria elliptica Lmck.: IL et IV, Mytlilus edulis 


Linn; V, Ostrea edulis Linn.: VI, Peclen maximus Linn.. La flèche qui monte 
indique l'ouverture et celle qui descend la fermeture : agrandis du double. 


mis en lumière à propos de la morphogénie des muscles des 
Vertébrés. 


279 R. ANTHONY 


La Placune, par sa forme parfaitement arrondie, son muscle 
exactement central, son double ligament, est donc la forme la 
plus évoluée des Monomyaires, celle qui, en quelque sorte, elôt 
la série. C’est le type schématique, parfait en quelque sorte, des 
Monomyaires, comme le Pectuneulus que nous avons trouvé au 
début de la série des Acéphales est le type parfait et schéma- 
tique des Dimyaires, et il est curieux de comparer lun à l'autre 
ces deux types simples, tous deux de forme arrondie, l'un qui 
ouvre la série et l’autre qui la ferme. 

Chez le Pectunculus, les deux muscles adducteurs sont égaux 
et la résultante (F) des deux forces qu'ils représentent se trouve 
être exactement sur la ligne passant par Pappuret la résistance. 

Là aussi les trois points sont donc en ligne ; Pinscription du 
mouvement de fermeture est un simple trait, le tvlet passant, 
au retour, par le même chemin qu'à laller. n'y a pas de rota- 
tion des valves. 

Chez le second, la Placune, 1 n°4 à qu'un seul musele adduc- 
teur, mais, par contre, il y à deux ligaments dont la résultante 
tomberait également sur la ligne déjà nommée, et les trois points 
sont encore icien ligne droite. Il semble évident que si j'avais 
pu étudier le mode de fermeture de la Placune, je n°v aurais 
pas plus trouvé de rotation des valves que chez le Pectunculus. 

Enfin, comme {vpe éminemment spécial dans le groupe des 
Monomyaires, il convient de citer encore les Mulleries. Ce semble 
être des Monomyaires qui, par une exception qui ma paru 
unique, dériveraient de formes anisomyaires qui le seraient 
devenues, non par le fait de Ta présence d'un byssus, comme 
c'est le cas général, mais par le fait d'une fixation pleurothé- 
tique étroitement limitée à la région antérieure. Leur mor- 
phogénie possible à 616 exposée au paragraphe des Dianiso- 
myaires, je n'y reviendrai pas. | 

En terminant cette trop longue introduction à l'étude de la 
morphogénie des Mollusques Acéphales, il me semble indispen- 
sable de bien mettre, une fois pour toutes, le lecteur en garde 
contre une erreur d'interprétation possible el qui consisterait 
à regarder comme des faits acquis toutes les hypothèses qui 
ont été émises ici pour essayer de donner une idée de la 
facon dont ces formes diverses ont pu se constituer. Je crois 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 273 


aussi devoir le prévenir que cette étude générale que je viens de 
tenter de faire est encore loin d'être complète et ne doit point 
être considérée comme telle: bien des points de détail ont 
été laissés à dessein dans l'ombre, afin qu'en soient plus nettes 
les grandes lignes de l'évolution du groupe telle que je la com- 
prends, et bien des animaux, bien des types d'organisation 
SpéCIaux, où n'ont pu, faute de documents, être examinés, 
ou, en raison de leurs particularités mêmes, ont été négligés. 
Cette introduction n'a donc pas la prétention d'être un exposé 
complet, c'est simplement un ensemble d'indications qui m'ont 
semblé importantes. 

Enfin, j'ai cru bien faire en résumant dans un tableau 
Synoplique qui n'a, comme je l'ai déjà dit, rien de commun 
avec une classification systématique, les différents types d’or- 
ganisation d'Acéphales envisagés indépendamment de leurs 
affinités. 


!: Abdomino- \ tunculus. 


| ( ‘Libres : Nucula, Peë- 


thétiques. } 
Byssifères : Area. 


Eu- ! 1° Catég. : Unio, Cardi- 
thétiques. | ta. 
Céphalo- 2e Catég. : Cardium, 
Déc | thétiques. | Venus. 
+ ... | myaires. 3° Catég. : Lutraria, 
. |Dimyaires. / \  Pholas, Teredo. 
un 
ei 
= / Libres : Corbula, Pan- 
& dora. 
ë 
k | Pleurothétiques ....... Fixés : Chama, Æthe- 
| ria, Hippurites, Myo- 
 chama, Chamostrea, 
| Dimya. 


| Dianisomyaires : Mytilus, Dreyssensia, Tridacna. 
 Byssifères: Avieula, Anomia, Pecten opercularis Linn. 
Monomyaires... : Libres : Pecten maæimus Linn. 


Fixés : Spondylus, Ostrea. 


AE A 


J'ai, de plus, essayé d'appliquer à la connaissance de Ia phy- 
logénie les notions morphogéniques précédemment acquises, 
d'esquisser la marche de l’évolution possible du groupe des 

ANN. SC. NAT. ZOOL. 1,18 


274 R. ANTHONY 


Acéphales, du moins des formes principales de ce groupe, de 
celles que j'ai pu étudier au point de vue spécial auquel je me 
suis placé. 

Les animaux primitifs abdominothétiques qui paraissent 
avoir été les ancètres de tous les Acéphales et qu'on peut se 
figurer comme des sortes de Nucules à pied vraiment replateur, 
semblent s'être différenciés dans deux directions, celle des 
Nueules qui, tout en ayant conservé un grand nombre de carac- 
tères primitifs se sont adaptés à un mode de locomotion tout 
particulier dont il a été question plus haut, et celle des Protar- 
cidæ qui, par la perte de leurs facultés de locomotion, ont vu 
leur pied diminuer de volume, leurs glandes pédieuses s'ag- 
elomérer et le produit de sécrétion de ces dernières se solidi- 
fier. Ces abdominothétiques devenus  byssogènes semblent 
avoir évolué aussi dans deux sens différents, en faisant abstrac- 
tion du phylum particulier des Axomtidæ, les Anisomyaires 
(Mytilidæ) et les Céphalothétiques chez lesquels le byssus est 
entré en régression. Toutefois l'on doit dire qu'entre ces Pro- 
tarcidæ abdominothétiques et filibranches et les Submytilacea ii 
ya un fossé profond. On ne connait pas, en effet, ainsi que 
Pelseneer l'a, d'ailleurs, constaté pour la branchie, la forme 
de passage d'un groupe à l'autre : de la forme abdominothétique 
on passe immédiatement aux Céphalothétiques francs, des Fili- 
branches les plus primitifs aux Eulamellibranches parfaits. 

Certains types de ces Céphalothétiques ont donné naissance, 
soit à d’autres Anisomyaires chez lesquels le byssus s'est déve- 
loppé à nouveau (Tridacnes qui proviennent des Cardium), 
soit à des Pleurothétiques (Chames). Les Anisomyaires prove- 
nant directement des Euthétiques byssaux ont donné toute la 
série des Monomyaires, sauf un seul type, les Mulleria qui 
semblent, par une exception curieuse, provenir directement 
de formes fixées en pleurothétisme. Ges hypothèses concor- 
dent en grande partie avec celles que Pelseneer à émises au 
cours de ses remarquables travaux et auxquelles d'ailleurs il est 
arrivé par une voie toute différente. 


DEUXIÈME PARTIE 


Dans le précédent chapitre j'ai essayé d’esquisser les grandes 
lignes de là morphogénie probable des principaux types d'Acé- 
phales. On à vu, brièvement exposé, comment sous l’action des 
causes extérieures où du fonctionnement particulier de leurs 
organes, des animaux appartenant à des groupes naturels très 
différents ont pu converger vers des types d'organisation ana- 
logues. Reste maintenant pour chacun des différents groupes 
énumérés, à reprendre les choses avec plus de détails, en étu- 
diant dans ce qu'elles peuvent avoir d'inédit et d'important 
pour le point de vue spécial auquel nous nous placons, la 
morphologie, Fembryogénie et la physiologie de chaque type. 
afin de pouvoir établir ainsi pour chacun d'eux, d’une facon 
précise et aussi complète que possible, les caractères de conver- 
sence el, autant que faire se pourra, les causes morphogéniques 
qui ont déterminé l'analogie de leurs formes. 

J'ai choisi pour le moment le groupe des Acéphales diiso- 
myaires actuels fixés en position pleurothétique. 


On peut se demander Pourquoi J'ai choisi pour cette étude 
ce groupe de préférence à tout autre. Les raisons déterminantes 
de ce choix ont été les suivantes : d'abord ces animaux sont, 
au point de vue morphologique {morphologie extérieure, ana- 


tomie, histologie), [très peu connus, comme on le verra plus 
loin; de plus, les conditions d'existence élant à peu de chose 
près identiques pour tous, on se trouve sans cesse en présence 
de faits de convergence remarquablement nets et abso- 
lument probants ; les causes morphogéniques sont également 
en ce qui les concerne relativement simples et faciles à mettre 
en évidence; le fait que le groupe est très nettement circonserit 
faisait encore qu'il se prêlail bien à une étude d'ensemble : enfin 


276 R. ANTHONY 


j'ai pensé que l'étude comparée de ces formes actuelles pouvait 
présenter un intérêt spécial pour les géologues et les paléonto- 
logistes, en leur fournissant des documents pour l'interpréta- 
ion de l'organisation et la détermination des affinités des 
Rudistes qui ont tant d'importance pour eux. 

J'avais d'abord songé à étudier le groupe des Dianisomyaires 
sur lesquels j'ai recueilli de très nombreux et très intéressants 
documents ; mais la tâche eût été trop longue pour faire l'objet 
d'un seul mémoire, et, J'ai dû y renoncer pour l'instant, me 
réservant de reprendre cette étude plus tard : les faits de con- 
vergence en outre sont moins nets, et, le groupe est moins net- 
tement limité présentant des transitions insensibles vers les 
Isomyaires par Îles Modioles, vers les Monomyaires par les 
Avicules et autres formes voisines. Les types d’Acéphales 


dimyaires fixés en position pleurothétique constituent six 


familles, dont voiei les principaux genres M}: 


AS MIND D Le Era eee Dimya. 
APT PLEIN ER NS MS LE LL EN D Dimyodon. 


DO HAMIDEL. Un bete ee Chama. 
Diceras. 
Heterodiceras. 
Requiena. 
Toucasia. 
Gyropleura. 
Bayleia. 
Plagioptychus (?). 

Etc. 
30 MYOCHAMIDÆ ....:-.....-+ Myochama. 
40 (HAMOSTREIDÆ. ..-....-"" Chamostrea. 
Bo ÆTHERNDÆ(2)........-...-.: Ætheria. 
Go Runisre (9)... Mes Hippuriles. 
Sauvagesia.. 
Radiolites. 
Biradiolites. 

Etc. 

70 CHONDRODONTIDE (4#)............ Chondrodonta. 

(1) Les noms de genre en italique se rapportent à ceux existant encore à 


l'époque actuelle. 
(2) Le genre Mulleria qui est Monomyaire, et le genre Bartlettia qui est Dia- 


nisomyaire peuvent ètre rattachés en raison de leurs caractères anatomiques 


à la famille des Ætheriidæ. 
(3) Le principe de la répartition des genres dans les deux familles des 


Chamidæ et des Rudistæ sera expliquée et commentée plus loin. 
(4) Les Chondrodontidæ semblent ètre, d'après les recherches de Douvillé, 
des Dianisomyaires voisins des Pinnidæ fixés en position pleurothétique. 


CHAPITRE PREMIER 


DIMYIDÆ 


Historique. — La première fois qu'il est question de Dinyidæ, 
cest dans un travail de Rouault (50), datant de 1850, sur 
les fossiles de l'Éocène des environs de Pau. Il y est décrit 
l'espèce Diomya Deshayesiana (Rouault). Depuis, en 1886, 
Munier Chalmas décrivit une autre forme de Dimyidæ du 
Bathonien, dont 1l fit le genre Dimyodon. Tout dernièrement 
enfin, Cossman (92) décrivit une Dimya provenant de l'Éocène 
supérieur des environs de Paris, la Dimya Bonneti (Coss- 
man) (1). L'Anomia intustriata (Rouault), décrite dans le même 
mémoire que la Donya Deshayesiana (R), paraît également être 
une Dimya quoiqu'il me semble que l'on doive faire toutes 
réserves à ce sujet (en tous cas, ce n’est point une Anomie), 
l'Acéphale en question pouvant fort bien au surplus être une 
Plicatule. En plus de ces formes fossiles Dimya et Dimyodon, 
il existe aussi une Dinya actuelle qui a été draguée dans la mer 
des Antilles, par le « Blake », et à laquelle Dall (82) en 1882 
a donné le nom spécifique de Dinya argentea (Dall). Cet auteur 
fournit au sujet de cet animal d’ailleurs un certain nombre de 
renseignements anatomiques qui seront énumérés plus loin. 


Morphologie. 


Pour la description morphologique des Dinyidæ, 1 convient 
de se reporter aux figures qu'en ont données Rouault (50), 
Munier-Chalmas (86), Cossman (92) et Dall (82). Pour l'étude 
personnelle que J'ai voulu en faire, j'ai dû me contenter, en 
premier lieu de l'examen de quelques exemplaires semblant se 
rapporter à l'espèce Anomia intustriata de Rouault et provenant 
de l'Éocène supérieur des localités suivantes : Pont du Louër. 

(1) L'exemplaire d'après lequel Cossman a fait sa description appartient à 
M. Bonnet qui me l’a aimablement confié. C'est d'ailleurs le seul exemplaire 
certain de Dimya que j'aie eu à ma disposition. 


278 R. ANTHONY 


Bos d’Aros, villa Marbella, qui ont été aimablement mis par 
M. Douvillé à ma disposition. 

Sur la plupart de ces exemplaires la région cardinale extrê- 
mement mince à été brisée; il en résulte une apparence d'échan- 
crure située dans la région cardinale de la coquille; par la pré- 
sence de cette échancrure et l'ensemble des autres caractères, 
les individus de Bos d’Aros et du Pont du Louër sont abso- 
lument semblables aux animaux auxquels Rouault, prenant 
vraisemblablement, ainsi qu'on peut s'en rendre compte par 
l'examen de la figure qu'il donne, cette cassure cardinale pour 
l'échancrure byssale des Anomies, à donné le nom d'Anomia 
intustriata (R). Toutefois un certain nombre de valves intactes 
que J'ai eu la chance d’avoir, m'ont permis de voir bien nette- 
ment qué ces animaux n'étaient en rien des Anomies et de 
redresser ainsi l'erreur de Rouault. 

Par leur aspect général les formes de Bos d'Aros et du Pont du 
Louër semblent bien être, soit des Dimya, soit peut-être des Pl 
catules, l'impossibilité de voir les impressions musculaires empé- 
chant detranchercatégoriquementcettequestion. Les exemplaires 
de Villa Marbella ne présentaient pas davantage d'impressions 
musculaires visibles, de telle sorte que dans lincertitude, je 
ne décrirai aucune des formes provenant de ces trois localités. 

Outre ces exemplaires imparfaits et douteux, et pour lesquels 
en l'absence d'impressions musculaires nettement visible, on 
pourrait en somme hésiter entre Dinya et Plicatula, J'ai pu 
examiner une superbe valve de Dynix Bonneti (Cossm.) indu- 
bitable celle-là, provenant du Lutétien des environs de Paris, 
que M. Bonnet à mise à ma disposition. C’est justement celle qui 
a déjà été décrite et nommée par Cossman. N'avant pu étudier 
lexemplaire de Dimyodon Schlumbergeri (Mun.) provenant du 
Bathonien d'Hérouvilette, nila Dimya Deshayesiana de Rouault, 
ni la Dynia argenteu (Dall) actuelle, draguée par le « Blake » 
dans la mer des Antilles, c'est à cela seul que se réduisent 
mes documents personnels sur les Dimyidæ. 

Coquille. — La Dimya Bonneti (Cossm.) est représentée par 
une valve gauche complète et un fragment de valve négligeable. 
Cette valve gauche était une valve libre. En effet, d'après les 
exemplures décrits et figurés par les auteurs, ainsi que d'après 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 279 


ceux moins certains qui m'ont été confiés par M. Douvillé et 
dont il vient d’être question plus haut, les Dinyidæ (Dinya et 
Dimyodon) sont toujours fixées par leur valve droite et la 
zone de fixation très considérable s'étend aussi bien en avant 
qu'en arrière (Voy. fig. 57). Chez la Dimya Bonneti (Cossm.) 
la valve qu'on possède est à peu près arrondie, quoique, comme 
tous les autres Diniydæ, légèrement allongée en arrière suivant 
un axe oblique. Sa face extérieure présente à considérer un 
crochet peu marqué silué à peu près dans le milieu de son 
bord dorsal, et possède aussi des stries d'accroissement très 
visibles. Sa face antérieure très légèrement creuse (l'animal avait 
comme toutes les Dinya une forme aplatie de droite à gauche) 
présente des côtes rayonnantes qui ne sont pas visibles sur la 
face extérieure. Ce caractère semble d'ailleurs commun à toutes 
les Dimya connues, y compris les fausses Anomia intustriata 
de Rouault. D'après Munier-Chalmas (86), le Dimyodon ne pré- 
senterait pas ces côtes radiales internes. Sur la Dimya Bonnet 
(Cossm.) les deux impressions musculaires sont très visibles : 
l'une l'antérieure est plus étroite et plus rapprochée de la région 
cardinale que la postérieure. Ces caractères se retrouvent 
d'ailleurs chezle Dinyodon Schlumbergeri (Mun.-Chalm) et chez 
les Dimya Deshayesiant (Rouault) et argentea (Dall). Toutefois 
ces deux derniers animaux présentent en dedans de l'impres- 
sion de l'adducteur postérieur une autre impression musculaire 
décrite à part par les auteurs et que n'ai pas retrouvée chez 
Dinya Bonneti (Cossman).Ilsemble évident que l'interprétation 
de ces dernières impressions doit être la suivante : ou la plus 
postérieure correspond à la partie lisse du muscle adducteur., et 
l'autre à sa partie striée ; ou la plus postérieure correspond au 
muscle adducteur, alors que l'autre correspondrait à un rétracteur 
postérieur du pied. Cette dernière opinion semble peu probable, 
les Dimya devant avoir en raison de leur fixation un pied très 
réduit, L'impression palléale, très nette, est dépourvue de sinus. 

La région cardinale est très intéressante: d'abord le bord mar- 
_ ginal de la coquille est assez fortement épaissi et présente au 
| voisinage de la région cardinale, en avant et en arrière, de 
très fines dents transversales souvent peu visibles. Au milieu 
de la région dorsale à peu près, ces deux bords se reJoignent, 


280 R. ANTHONY 


laissant entre eux une petite fossette triangulaire, dans laquelle, 
malgré la fossilisation, a persisté un reste de Tigament. Cette 
disposition de la région cardinale de la Démya Bonneti Cossm. 
se retrouve chez mes types incertains ainsi que chez les autres 
Dimya représentées par les auteurs. Seul, le Dimyodon Schlum- 
bergeri (Mun.-Chalm.) présente de chaque côté de la fossette 
ligamentaire une grande dent cardinale garnie elle-même de 
pelites denticulations transversales. Ce détail a son importance, 
comme on le verra plus loin. 

Parties molles. — Je serai bref sur la description des parties 
molles de la Dimya argentea Dall. Tout ce que nous en con- 
naissons a été dit par Dall (82) et est d’ailleurs, semble-t-il, 
un peu insuffisant. Qu'il suffise de rappeler que d'après cel 
auteur, le muscle adducteur postérieur semblerait formé de 
deux parties nettement distinctes. Les deux lobes du manteau 
sont séparés, le pied est absent et les branchies, filamenteuses, 
comme celles des Arches, seraient réduites à une seule lame de 
chaque côté, chose remarquable et qui aurait besoin, dit Pelse- 
neer (88), d'être contrôlée à nouveau. 

Les autres détails de l'organisation, ne semblent pas impor- 
tants au point de vue des affinités ou de la morphogénie. 


Embryogénte. 


Les formes jeunes des Dinyidie sont complètement mconnues. 
La forme la plus petite de Dimya que je connaisse est ce spécl- 
men provenant du Pont du Louër, de détermination incertaine. 
C’est une valve fixée sur un gros Foraminifère qui présente à 
peu près 3 millimètres de long (diamètre antéro-postérieur). 

Cet animal a dù se fixer à un âge très jeune. Il présente les 
caractères des formes adultes, avec cette particularité qu'on 
semble y voir, fait qui serait très mtéressant, un reste des deux 
dents garnies de dentieulations, caractéristiques des Dimyodon. 
Les formes adultes recueillies au même endroit ne présentent 
plus trace de ces dents. 


Physiologie. 


Tout ce que lon peut dire au sujet des Dimyüdæ, c'est 
qu'elles ont été et sont encore des formes de mers chaudes. 


—— 0. es FC EST 


De 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 281 


Les Dimyodon etles Dimya fossiles les uns dans le Bathonien, 
les autres dans l'Éocène, ont toujours été rencontrés avec les 
formes ordinaires des mers chaudes. 

La Dimya argentea all à été draguée, comme lon sait, dans 
la mer des Antilles, dans la zone équatoriale par conséquent. 

Ces animaux vivent fixés sur des roches ou des débris de 
coquilles, par une de leurs valves, par conséquent en pleuro- 
thétisme. La zone de fixation est toujours très considérable, 
s'étendant également en avant et en arrière. De plus, les couches 
calcaires sont toutes adhérentes au substratum. La valve par Fa- 
quelle se fait la fixation est foujours, comme on la dit, a valve 
droite. L'étendue de la zone fixée fait supposer que là fixation 
doit être très précoce (Voy. fig. 57). 


Affinités. 


D'assez nombreuses opinions ont 6t6 émises sur la place qu'il 
convient de donner aux Dinyide dans la classification. 

Rouault (50), le créateur du genre, les considère comme 
des formes anormales de Monomyaires, et, se basant sur 
la disposition de leur région cardinale ainsi que sur Îles or- 
nements extérieurs de leur coquille, 11 les place auprès 
des Pecter, des Spondyles et des Plicatules. Dans son traité 
de conchyhologie, Woodward (56) adopte cette opinion. Un peu 
plus tard, Fischer (83), Zittel (87) et Bernard (95) font de même, 
Pelseneer (88) semble suivre la même tendance, et, tout der- 
nièrement enfin, Cossman (92) reprit avec beaucoup plus de 
timidité, il est vrai, l'opinion de Rouault. Stoliczka d'autre part, 
attachant avec raison une plus grande importance à la pré- 
sence des deux muscles adducteurs, avait voulu rapprocher 
les Dinya des Myochamu«. 

De tous les auteurs qui se sont occupés des Dinmyidæ, le plus 
aple à donner son avis sur leur position systématique est 
incontestablement Dall (82), qui seul à pu étudier anatomique- 
ment la Dimya argentea Dall draguée par le «Blake » et dont 
la coquille est absolument semblable à celle de la Dimya 
Deshayesiana (Rouault). 

Il semble par conséquent raisonnable de supposer que les 
caractères dont 1l à constaté la présence chez la première de 


282 PR. ANTHONY 


ces espèces aient aussi appartenu à la seconde. Or, Dall, après 
avoir énuméré les caractères anatomiques de la Dimya argenteu, 
S'abstient de donner catégoriquement son avis sur ses affinités. 

Que convient-1l, en résumé, de penser de la position systé- 
matique à donner aux Dimyidæ? 

Il est d'abord un fait important de leur organisation à re- 
marquer, c'est que ce sont des Filibranches. Ce simple fait 
suffit à infirmer Popinion de Stoliczka et à les éloigner des 
Myochamidæ qui se rattachent, ainsi que nous le verrons plus 
loin, aux Axatinidæ et sont par conséquent des Eulamelli- 
branches très évolués. 

Quant à la présence de deux muscles adduoteurs, elle me 
semble avoir une bien plus grande importance que celle que 
Rouault paraît lui attribuer. 

Les Acéphales monomyaires provenant indubitablement 
d'Acéphales  diisomyaires par Fintermédiare d'Acéphales 
dianisomyaires, on ne peut admettre que dans un seul groupe 
de Monomvaires, et, par le fait d’une anomalie dont on ne pour- 
rat d'ailleurs expliquer l'origine, et se transmettant hérédi- 
tairement, les deux muscles aient réapparu. ne me semble 
pas non plus qu'on doive avec Pelseneer (88) les considérer 
comme des ancêtres des Pectinidés, ces derniers ayant dù 
passer comme tous les Monomyaires par une forme aniso- 
myaire à laquelle ne parait pas conduire la fixation pleurothé- 
üique. C’est donc, à mon sens, parmiles Fihbranches dimyaires 
que les proches parents des Dinya doivent être recherchés. 

n'existe que deux familles de Filibranches dimyaires : les 
Trigonideæe etles Arridæ. 

La première, en raison de ses caractères tout particuliers, me 
semble devoir, jusqu'à plus ample informé, être éliminée, bien 
que toutefois les dents de Ta charnière des Donyodon ne soient 
pas sans rapports avec celles des Trigonies. 

Reste Ia. famille des Arrcidæ. C'est d'elle, en effet, que les 
Dinyidæ doivent, à mon avis être rapprochées. Comme elles, 
les Dimyidæ sont dimvaires et filibranches, et le fait, S'il est 
confirmé, qu'elles ne possèdent qu'une seule lame branchiale 
de chaque côté alors que les Arcidæ en ont deux, ne doit pas 
les faire écarter de ces dernières surtout lorsqu'on sait combien 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 283 


peu d'importance peut avoir ce fait au point de vue systé- 
matique : chez certains Lucinidiæ il n'y à qu'une seule lame 
branchiale alors que chez d'autres la lame branchiale externe 
est, comme on sait, complète. 

Au point de vue des dents de la charnière, on pourrait 
objecter que chez les Dinyidæ, on ne peut distinguer nette- 
ment les dents en séries caractéristiques des Acide. A peut 
fort bien se faire qu'elles aient disparu. D'ailleurs sur l'exem- 
plaire de jeune Dünya (?) du Pont de Louër dont Jai parlé, 
il existe un reste de plateau cardinal portant une série de petites 
dents, peu accentuées 1lest vrai, de chaque côté. Le Dinyodon, 
d’ailleurs plus ancien que la Dimya, possède de chaque côté 
de son ligament une grande dent portant de petites dents 
transversales un peu analogues, on l'a dit, à celles que l'on 
trouve chezles Trigonies. 

Quant au ligament qui semble formé, d'après les exemplaires 
fossiles que j'ai eus sous les yeux et d’après la figure de Dall, 
d'une petite portion triangulaire logée au fond de la fossette 
cardinale, ilne semble pas impossible de le rattacher, en sup- 
posant l'intervention d'une réduction, à celui des Pectuneulus 
et des Limopsis. 

Parmi les Arcidæ, l'animal qui se rapproche le plus des Dimya 
est le Lonopsis, dont il existe au Muséum d'Histoire naturelle 
un cerlain nombre d'exemplaires provenant des dragages du 
« Talisman ». Comme les Dimya, les Limopsis sont aplatis 
latéralement, quoique d'une facon moindre: leur contour 
Sagittal est arrondi, tout en présentant une légcre obliquité 
en arrière; l'impression de l'adducteur antérieur est plus 
petite et plus rapprochée du ligament que celle de l'adduc- 
teur postérieur, Les seules différences à signaler tiendraient 
aux branchies dont les deux lames existent chez les Limopsis, 
ainsi que j'ai pu le constater après Pelseneer (88), à la pré- 
sence du pied et à la forme différente du ligament, toutes 
différences pouvant être expliquées par la fixation el ses consé- 
quences. 

En résumé, les Dinyide semblent être des Arcidæ fixées 
par une de leurs valves, en position pleurothétique. Les Dinyo- 
don peuvent être au point de vue anatomique, comme au 


284 R. ANTHONY 


point de vue géologique d’ailleurs, considérés comme les 
formes primitives de la famille. 


Morphogénie. 


Les Dimyidæe semblent pouvoir s'expliquer de là façon sui- 
vante: lArcidé qui s'est fixé en pleurothétisme parait avoir 
déjà possédé une forme arrondie et aplatie analogue à celle 
du Pectuneulus où du Limopsis. La fixation par ensemble de 
la valve à eu pour effet de parfaire en quelque sorte cel arron- 
dissement. Chez les Azcidæ du tvpe Limopsis, les crochets étant 
droits et le ligament étant disposé d’une façon à peu près symé- 
trique de part et d'autre, l'arrondissement à pu s'acquérir très 
simplement par la répartition égale suivant les rayons partant 
de l'umbo des zones concentriques de substance calcaire. In°v 
a pas 11 d'enroulement ni de pseudo-plicature comme chez les 
animaux qui seront étudiés plus loin. 

Lorsque l'arrondissement du bord cardinal est complet, on 
conçoit qu'au moment de lécartement des valves (surtout si cet 
écartement est considérable), ces dernières ne peuvent se 
toucher que par un point et que le ligament doit tendre à se 
réduire à ce point. Cette tendance se manifeste déjà chez les 
Pectunculus et les Lunopsis, elle s'accuse davantage chez les 
Dimya. 

Le pied devenu sans usage chez un animal fixé ne {tarde pas 
à disparaitre. 

Ainst, la fixation explique à la fois la disparition du pied et 
la forme arrondie, cette dernière expliquant en outre la ré- 
duction du ligament. 

Des conditions d'existence spéciale, des courants lents et con- 
üinus (1) par exemple, peuvent dans une certaine mesure expli- 
quer ce fait que les zones calcaires successives restent toujours 
adhérentes au substratum au Heu de se relever comme dans 
lÆtheria Caillaudi (Feruss) ; la forme aplatie de laquelle dé- 
pendrait la disparition de la lame branchiale externe dont par le 


(4) C'est de la même facon qu'il semble que lon puisse expliquer, 
ainsi qu'on le verra plus loin, la forme spéciale de l'Ætheria Pettretini 
Bet. : 


e] 


ta — "ll 


A … — 0 
D 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES loi 


Dall et peut-être aussi celle des dents de la charnière pourrait 
également être expliquée de la même façon. 


En résumé, il semble qu'on puisse dire que les Dinyidæ sont 
des Arcidæ probablement voisins des Limnopsis qui ont acquis 
par le fait de la fixation pleurothétique leurs caractères spéciaux. 


CHAPITRE II 


CHAMIDÆ 


Je réunis sous le nom de Chamidæ un certain nombre de 
genres dont les principaux ont été énumérés un peu plus haut. 
Peut-être ce groupement est-1l complètement artificiel et doit- 
on plutôt au point de vue des affinités naturelles mettre dans 
une famille les Chama seules, et dans une autre famille 
toutes les autres formes plus anciennes telles que les Dicerus, 
Heterodiceras, Toucasia, Requiena, ete, ete... C'est l'opinion 
de quelques auteurs. La question, en tous cas, est assez 
difficile à juger d'une façon définitive, par ce fait que 
toutes Les formes que l’on réunirait dans ce deuxième groupe 
sont des formes exclusivement fossiles et que leur organisation 
ne peut, faute d'éléments de comparaison, être rapprochée de 
celle des Chames. On est obligé de s’en tenir à la comparaison 
seule des ornements de la coquille, du ligament et des dents de 
là charnière. Or, précisément, le ligament et les dents de la 
charnière sont de même type dans les deux groupes. Il n'y a que 
les ornements de la coquille qui diffèrent, et encore, sont-ils 
ares les cas où, chez les formes fossiles, on peutles voir. Mais 
je ne crois pas qu'on doive attacher à ces ornements une trop 
grande importance : les animaux réunis sous le nom de Vénéri- 
de, par exemple, ont des ornementations bien différentes et 
on ne peut cependant les séparer en raison de la forme des 
dents de leur charnière. Ces différentes raisons m'ont fait 
grouper dans la même famille les Chames et les Diceras sous 


286 R. ANTHONY 


le nom de Chamidiæ. On peut leur attribuer les caractères 
communs suivants : 

Mollusques acéphales, dimyaires, fixés en position pleurothé- 
tique, tantôt par l’ensemble d'une de leurs valves, tantôt par Le 
côté antérieur seulement; suivant les cas leur plan sagittal est 
par conséquent parallèle ou oblique au plan de fixation. Dans 
les cas où leur plan sagittal est horizontal, ils sont fixés dans 
des polypiers à la facon d'un nid d'oiseau dans des branches 
(Chama brassica Reeve).Ce sont des Acéphales marins, de forme 
arrondie, l'arrondissement étant obtenu par une sorte d'enrou- 
lement en hélice plus ou moins serrée. La charnière présente 
deux dents cardinales à une valve avec une fossette intermé- 
diaire, une seule où deux dents cardinales à lautre valve. Les 
dents latérales antérieures ont toujours disparu ; les dents laté- 
rales postérieures existent. 

On peut diviser cette famille en deux tribus : 

les Chamineæ, 
les Diceralinee. 

Cette réunion des Chamineæ et des Diceratinæ dans une seule 
et même famille une fois admise, une autre question se pose, 
c'est à savoir si les Chames et les Diceras font partie d'une 
seule et même lignée. La plupart des auteurs résolvent cette 
question par la négative, el je crois qu'ils ont raison. À ce point 
de vue, en effet, la question de lornementation peut entrer en 
ligne de compte, et, elle est très différente chez les Chames 
et les Diceras: de plus enfin, argument capital, les Chames 
tout en étant au point de vue de l'adaptation à la fixation pleu- 
rothétique moins évoluées que les Direras et surtout les Æe- 
quiena, ont au point de vue géologique fait leur apparition 
beaucoup plus tardivement qu'eux. En effet, les premières 
Chames on fait leur apparition à la fin du Crétacé et existent 
encore aujourd'hui, tandis que les Dicératinés constituent un 
phylum bien distinct qui à débuté à la fin du Jurassique et n'a 
pas dépassé le Crétacé inférieur. Les Chames peuvent en 
somme être considérées, et c’est l'opinion la plus généralement 
admise, comme les formes de début d’une nouvelle série de 
Dimyaires fixés en position pleurothétique et arrondis par 
enroulement, qui est en train de se constituer. Elles semblent 


PT " 
Go 9 oo 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 287 


provenir de la même souche que celle qui à donné, à la fin du 
Jurassique, la série dont les Diceras ont marqué l'origine. 

Dans ce chapitre, j'étudierai, aussi complètement que je le 
pourrai et que cela sera nécessaire pour le point de vue auquel 
Je me place, les Chaminæ actuelles (Cham). 

Historique. — Les Chama ne sont guère connues que par leur 
coquille; leur anatomie n'a été que très peu étudiée, leur embryo- 
génie et leur physiologie sont presque entièrement à faire. 

Au point de vue anatomique on doit signaler le livre de Poli 
(91) sur les Mollusques des Deux Siciles, et qui contient quelques 
indications sur lanatomie des Chames. Signalons aussi les 
quelques renseignements anatomiques trop succincts que don- 
nent à leur sujet les traités de malacologie : le moins bref à ce 
point de vue est celui de Woodward (56). Différents auteurs 
enfin fournissent sur elles quelques renseignements de détails, 
tels T. Barrois (85), à propos de l'appareil byssal, Grobben, à 
propos des glandes péricardiques, Lacaze-Duthiers, à propos 
de l'appareil génital, Ménégaux (90), à propos de Fappareil cir- 
culatoire. 

Au point de vue embrvogénique les seuls renseignements 
que je connaisse viennent de Jackson (90) etde F. Bernard (97). 
Sur leur mode de vie et sur leur physiologie spéciale enfin, 
on naque peu de détails, et les seuls renseignements précis 
que j'aie pu trouver à ce sujet (sur leur mode de vie exclusi- 
vement) émanent de Saville-Kent (93) et de François (89). 

Étant donné que je n'ai point l'intention de me placer dans 
ce travail au point de vue de la nomenclature, je ne décrirai pas 
ici, je n'énumérerai même pas les nombreuses espèces actuelles 
du G. Chama, renvoyant pour cela aux traités spéciaux de 
détermination, comme Reeve où Martin et Chemaitz, par 
exemple. 

À ce propos toutefois, je me vois dans l'obligation de signaler, 
ayant malheureusement eu à en faire l'expérience, l'insuffisance 
des monographies de ce genre contenues dans les traités pré- 
cités et l'intérêt qu'il v aurait à faire actuellement une revision 
complète du G. Chama, au point de vue systématique. 

Les espèces sur lesquelles ont plus spécialement porté mes 
recherches sont les suivantes : 


288 R. ANTHONY 


Chama Lazarus Lmck. 

Chama brassica Reeve. 

Chama iostoma Conr. 

La première existe en grand nombre dans les collections du 
Muséum (provenant de la Guadeloupe) ; les deux autres ont été 
rapportées en assez grand nombre aussi par M. Ch. Gravier, de 
sa mission dans le golfe de Tadjourah. Les collections du Muséum 
en possèdent également un certain nombre d'exemplaires pro- 
venant des voyages de MM. Jousseaume et Coutière, dans Îles 


mêmes FÉSIONS. 


Morphologie. 


Coquille. — Chez les Chames, la fixation se fait tantôt par une 
valve, tantôt par l'autre. Dans la plupart des espèces, la valve 
fixée est la valve gauche, mais dans quelques autres, la fixation 
se fait par la valve droite. 

En lous cas, dans la même espèce, c'est toujours la même 
valve qui est fixée et il n°y à pas de variations individuelles sur 
ce point (}); de plus, quelle que soit la valve qui est fixée, droite 
ou gauche, elle possède toujours des caractères déterminés qui 
ne sont donc pas propres à la valve droite où à la valve gauche, 
mais à la valve libre ou à la valve fixée. Il sera revenu, à propos 
des dents, sur ce caractère extrèmement important. La fixation 
peut se faire suivant deux modes, soit par la région antérieure 
de la coquille seulement, comme chez les Chama Ruppelli 
Reeve., et les Chama iostomn (conr.), par exemple, et alors le 
plan sagittal est obliquement incliné sur le plan de fixation; 
soit par toute la surface de la valve comme chez les Cham bras- 
sir Reeve, par exemple, et alors Île plan sagittal est parallèle 
au plan de fixation. Dans ce dernier cas, toutefois, la fixation 
n'est pas aussi intime que dans le premier, et La Cham, au 
lieu d'être appliquée et collée pour ainsi dire au substratum 
plan, est fixée à d'autres coquilles, à des branches de polypiers 
morts, sy tenant un peu à Ja façon d'un nid d'oiseau dans un 

(4) D’après Woodward (56) dans certaines espèces de Chames la valve 


jixée serait indifféremment la droite ou la gauche ; je n'ai jamais rien con- 
staté de semblable. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 289 


buisson. Dans ce dernier cas, el lorsque le plan sagit{al est à peu 
près horizontal, le contour valvaire est arrondi. Dans le premier 
Cas, au contraire, c’est la surface antérieure fixée seule qui tend à 
s'arrondir et le bord qui la sépare de la zone postérieure non 
fixée (qui est plus où moins perpendicu- 
laire à la zone fixée) décrit une spirale 
telle que celle qui est représentée sur la 
figure. Dans ces conditions, le contour 
valvaire, au lieu d’être arrondi, présente 
une forme allongée dorso-ventrale avec 
pointe ventrale correspondant au sommet 
de l'angle dièdre constitué par les régions 
antérieure et postérieure. 

L'uneet l'autre valves sont généralement Fig. 32. — Région anté- 
épaisses comme dans la Chama brassiea TR EAP à À 
Reeve, par exemple: mais dans les CABANE E  meprÉsen tele 

: : : imite de la région anté- 
où la fixation se fait par la légion anté-  rieure et de la région 
rieure seule, la zone fixée est en ÉULE DIMPSTE A MM ENt ES 
amincie. 

Les ornements consistent en stries d'accroissement très con- 
sidérables portant le plus souvent des épines {rès irrégulières, 
aplaties, tuberculeuses ou feuilletées; sur les individus qui attei- 
gnent une taille considérable, les ornements extérieurs de la 
coquille sont souvent, soit usés par l'action polissante des flots de 
la mer (Chama Ruppelli Reeve), soit cachés par des polypiers, 
des tubes d'Annélides, des fragments d'Éponges vivant avec les 
Chames sur les récifs, et qui rendent souvent la détermination 
spécifique de ces animaux extrêmement difficile. Les stries ra- 
diales visibles sur les formes jeunes, comme il sera dit plus 
loin, ne le sont pas le plus souvent sur l'adulte. Le mécanisme 
de leur disparition sera expliqué au paragraphe de l'embrvo- 
génie. Extérieurement comme intérieurement, les Chames pré- 
sentent des couleurs variées souvent très vives qui changent 
d'une espèce à l'autre. 

Des accidents du substratum, la pression réciproque des indi- 
vidus les uns contre les autres, l'inclinaison du plan de fixation 
peuvent, dans certains cas, altérer la pureté de la forme arrondie 


que prennent les Chames, suivant leur surface de fixation. 
ANN. SC. NAT, ZOOL, 40 


290 R. ANTHONY 


Des deux valves des Chames, celle qui est fixée est générale- 
ment plus profonde, surtout dans la région du crochet, que la 
valve libre, qui est plus aplate, tendant en quelque sorte à 
prendre la forme operculaire. 

Si on considère par sa face extérieure une valve fixée de 
Chama brassica Reeve, par exemple, après l'avoir soigneu- 
sement débarrassée de toute la gangue qui la recouvre, on 
s'aperçoit que son crochet est fortement enroulé en avant et en 
hélice, c'est-à-dire nettement prosogjre: Cet enroulement en 
hélice du crochet est absolument comparable à celui des 
Isocardia où mieux encore des Diceras, avec cette différence 
que le pas de l'hélice est chez les Chama beaucoup moins 
considérable que chez ces derniers. 

Si, toujours par sa face extérieure, on considère une valve libre 
du même animal, on s'aperçoit que son crochet est exactement 
enroulé comme celui de la valve fixée; mais l'hélice suivant 
laquelle se fait cet enroulement, est extrêmement surbaissée, 
tellement surbaissée même qu'elle tend à la spire. 

Si maintenant, enfin, on regarde en vue postérieure les deux 
valves coaptées du même animal (Voy. fig. 33) et qu'on suive 
l'interligne valvaire depuis le point de terminaison postérieure 
du ligament /, on s'aperçoit que les bords des valves, suivant 
lesquels s’insère ce dernier, d'abord au contact l'un de l’autre, 
S'écartent à partir d'un certain point /', pour suivre les lignes 
d'enroulement hélicoïdal du crochet. En suivant ces lignes, on 
aboutit aux points met mr, c'est-à-dire aux crochets eux-mêmes. 
A l'intérieur de l'angle m l'm les bords antérieurs des valves 
droites et gauches arrivent au contact. Si au lieu de s'adresser 
à la Chama brassica Reeve on s'adresse à la Chama 1ostoma 
Conr., c'est-à-dire à une Chame chez qui la fixation se fait 
par la région antérieure seule, la disposition est absolument 
la même, avec cette différence que le crochet de la valve fixée 
S'enroule à plat sur le substratum. 

La charnière des Chames est très particulière : la valve 
fixée, qu'elle soit droite ou gauche, présente toujours deux dents 
cardinales séparées par une fossette assez profonde. Pour se 
conformer aux notations de F. Bernard et de Munier- 
Chalmas, on doit désigner ces dents par les chiffres 2 et #. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 291 


La dent # est peu marquée et se trouve immédiatement en avant 
de la nymphe ligamentaire : la dent 2, au contraire, est très 
puissante et sa face dorsale, qui forme la paroi ventrale de la 
fossette, est creusée de sillons assez nets dirigés ventro-dorsa- 
lement d'une valve à l’autre avec une légère obliquité d’arrière 
en avant. Félix Bernard désigne cette dent 4 des Chames par 
le signe 4 4. Cette désignation me semble pour le cas parti- 


Fig. 33. — Schéma destiné à montrer l'enroulement des crochets et la division liga- 
mentaire chez la Chama brassica Reeve. — 4, valve libre ; 2, valve fixée; 3, ligament : 
4, strie d'accroissement, 


culier d’une précision trop grande, étant donné qu'il est difficile 
de savoir quelle partie de la lamelle 4 lui donne naissance. Ces 
dents sont supportées par un plateau cardinal assez bien 
développé. 

Outre cet appareil cardinal, il existe une dent latérale posté- 
rieure (L P 2) qui, sur certains individus, est parfois très peu 
marquée. Il n’y à pas de dent latérale antérieure, bien que 
F. Bernard (97) en signale une existant parfois à la valve 
libre. L'étude de l'embryogénie des Chames, ainsi que celle de 
la morphologie des Dicératinés ne semblent pas corroborer 
celle opinion ; ce qu'il à pris pour une dent latérale antérieure 
est, Sans aucun doute, la dent cardinale { dont un léger vestige 
existe parfois chez certains exemplaires de Chames. 

La valve libre présente une seule dent cardinale, la dent 3, 
qui se loge dans la fossette précitée. 


292 R. ANTHONY 


Cette dent est très forte, parfois recourbée dorsalement et 
présente sur sa face ventrale des saillies et des sillons qui épou- 
sent leurs homologues de la face dorsale de la dent 4 à la valve 
fixée. 

F. Bernard reconnaît dans cette dent 3 deux subdivisions 34 
et 34. Pour la même raison que précédemment, nous ne croyons. 
pas devoir imiter cette précision trop grande. 

ILexiste une dent latérale postérieure L P 1, qui semble sou- 
vent être dans la continuation de la dent cardinale. 

La formule dentaire du G. Chama serait donc la suivante : 


LA (ee LP 
V. fibre. A OT LE EN L 
V. fixée: Ciara ne 


Cette formule ne comporte pas, comme on le voit, de dent 
latérale antérieure, et celle que F. Bernard désigne ainsi ne 
peut être, à mon avis, qu'une dent cardinale. La question 
de sa signification sera d’ailleurs de nouveau agitée au cours 
de ce chapitre. 

Les impressions des muscles adducteurs sont grandes, 
ovales, régulières, légèrement déchiquetées, persillées sur leur 
bord interne : celle du muscle antérieur se prolonge sur la face 
ventrale de la dent 2. L'impression palléale est entière, ne 
présentant qu'un très léger vestige de sinus. 

Ligament. — Le ligament des Chames est externe à la facon 
de celui des Cardium quoique présentant néanmoins une très 
légère tendance à devenir interne. Il ressemble en cela à celui 


des Tridacnes. Si l’on considère à nouveau la figure 33 qui | 
représente une coquille fermée de Chama brassica Reeve en | 
vue postérieure et qu'on suive le ligament en remontant en | 
quelque sorte son cours depuis sa terminaison /, on s'aperçoit || 
qu'en /'ilse divise et que ses deux branches divergentes, suivant || 
les deux bords antérieurs des crochets enroulés en hélices, abou- | 
tissent respectivement aux points # et" terminaisons des cro- | 
chets. Il est inutile de dire, je pense, que la partie du ligament | 


seule fonctionnelle est la partie /'/; les parties #1! et nl sont{| 


les reliquats du ligament aux différents âges, comme on le verra 
plus loin. Elles ont d’ailleurs très souvent disparu, soit empor-|| 
tées par l’action corrodante des flots, soit recouvertes par les: 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 293 


différentes productions calcaires qui enrobent la coquille chez 
un très grand nombre d'espèces. 

En coupe transversale, le ligament a la forme d’un arc dont 
les deux extrémités reposent sur les valves. Ces extrémités 
S étendent surtout dans là région postérieure, où la surface 
d'insertion du ligament prend une forme élargie avec une 
légère pointe ventrale (Voy. fig. 34). 

En coupe sagittale, le ligament paraît formé des deux parties 
constituant {ous les ligaments d'Acéphales : une partie fibreuse 


Fig. 34. — Région cardinale de Chama brassica Reeve, valve gauche. — 2, dent 


cardinale 2; 4, dent cardinale 4 ; p, dent latérale postérieure : l, ligament en coupe 
sagittale. 


dorsale de couleur brune, constituant le point fixe dans les 
mouvements de la valve operculaire, et une partie élastique 
ventrale, incrustée de calcaire, de couleur nacrée, et présentant 
la structure connue des ligaments élastiques d'Acéphales ; c’est 
cette deuxième partie qui constitue l'organe actif de l'ouver- 
ture des valves. Cette partie élastique s'arrête moins loin en 
arrière que la partie fibreuse, au point où l'élargissement de la 
surface d'insertion commence. 

La composition du ligament est donc constante de / en /' 
(Voy. fig. 33). Au delà, c'est-à-dire dans les régions 72/' et nl 
où 1l est dédoublé, sa constitution est difficile à étudier. Fait 
important à signaler, il n'y a pas de partie fibreuse ventrale 
antérieure comme chez la plupart des autres Acéphales. Si cette 
partie existe, elle ne peut être que dans le voisinage du crochet, 
par conséquent là où le ligament est divisé. 

Manteau. — Les deux lobes du manteau des Chames sont 
réunis sur tout leur pourtour, ressemblant en cela à celui des 
Curdium et mieux encore des Tridacnes par exemple. Sur la 


294 R. ANTHONY 


= © 


zone de soudure répondant aux bords libres des valves, on 
rencontre trois ouvertures. La première en partant de lextré- 
mité antérieure de l'animal se trouve située immédiatement 
en dessous du muscle adducteur antérieur qui la imite en haut; 
c'est l'ouverture dite pédieuse, quoique vraisemblablement elle 
ne doive guère servir chez les Chamidés au passage du pied, 
cet organe étant très réduit et fonctionnant probablement 
très peu; sur les animaux adultes de # à 5 centimètres de 
diamètre, elle mesure environ un centimètre de longueur. 
Après elle, mais située à mi-chemin à peu près de la distance 
séparant le milieu de lanimal du bord inférieur du muscle 
postérieur, se trouve l'orifice inspirateur qui se présente sous 
la forme d'une fente à peu près arrondie de 5 à 8 millimètres 
de long et dont les bords, sur les animaux ayant séjourné dans 
les liquides conservateurs, sont invaginés en dedans. Vient 
enfin l’orifice expirateur qui possède une forme plus réguliè- 
rement circulaire et dont le diamètre est encore inférieur à 
celui de l'orifice précédent ; il est limité supérieurement par le 
bord inférieur du muscle postérieur et ses bords étaient égale- 
ment invaginés en dedans sur les exemplaires que j'ai étudiés. 
Ces deux derniers orifices représentent les deux siphons réduits 
à leur plus simple expression (Voy. fig. 35). 

La lame qui réunit les deux lobes du manteau et qui est 
interrompue par les orifices ci-dessus décrits, la commissure 
en un mot, est recouverte de courts tentacules tuberculiformes. 
Elle est limitée par deux bords saillants qui se réunissent et se 
confondent au niveau des adducteurs. 

Les deux orifices inspirateur et expirateur ont leurs bords 
garnis de denticulations plus fines pour le premier que 
pour le second. Leur face externe, celle qui était inva- 
ginée sur mes exemplaires, est lisse ; leur face interne égale- 
ment; toutefois leur base est intérieurement garnie de ten- 
lacules tuberculiformes disposés pour lorifice inspirateur 
suivant une seule série, un peu épars pour lorifice expi- 
raleur. 

Par son pourtour ventral el suivant une ligne qui suit inté- 
rieurement le bord saillant précité, le manteau s'insère sur la 
coquille par l'intermédiaire de fibres musculaires lisses; c’est 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 295 


l'impression palléale qui présente en arrière, comme il a été dit, 
un très léger sinus. 

Du manteau dépend souvent une double lame dorsale très 
mince, s'insinuant entre les dents cardinales de la charnière, 
el, qui comprend quelquefois une cavité close entre ses 
feuillets. C'est la lame intercardinale dont la présence semble 
inconstante et la disposition très variable. 

Des deux lobes du manteau, celui qui correspond à la valve 
fixée est toujours plus développé que celui qui répond à la valve 
hibre. La chose est naturelle, puisque le manteau suit, comme 
l'on sait, les inflexions de la coquille qu'il séerète. 

La musculature du manteau et plus particulièrement de sa 
commissure, est très compliquée. Je l'ai étudiée sur un exem- 
plaire de Chama iostoma Conr. En faisant abstraction des 
muscles adducteurs qui, en raison de leur importance, feront 
l'objet d'un paragraphe spécial; les muscles propres du man- 
teau localisés dans la commissure peuvent être répartis en trois 
catégories : 

4. Muscles radiaux. 

6. Muscles longitudinaux (antéro-postérieurs). 

y. Muscles circulaires (entourant les orifices). 

a. Ce sont les plus superficiels et ce sont eux qui par leurs 
insertions déterminent l'empreinte palléale de la coquille. Is 
sont disposés en série suivant une ligne courbe continue, depuis 
le bord ventral du muscle adducteur antérieur jusqu’au bord 
ventral du muscle adducteur postérieur, près duquel la ligne 
courbe subit, comme il à été dit, une légère inflexion, vestige 
du sinus palléal. 

Au niveau de cette inflexion qui se trouve située exactement 
en face de l’orifice expirateur, Les fibres musculaires radiales 
du manteau, plus nombreuses et plus longues, représentent un 
reste du muscle rétracteur des siphons. Ces fibres radiales sont 
de deux sortes, les unes externes, peu nombreuses, se dirigent 
vers le bord proprement dit du manteau dans lequel elles se 
perdent, les autres internes gagnent la commissure palléale, 
s'intriquant parfois avec celles du côté opposé dans les ré- 
gions où 11 n'y à pas d'orifices. Dans la région des siphons, elles 
n'atteignent pas la ligne médiane. 


296 R. ANTHONY 


B. Les muscles longitudinaux de la commissure palléale 
débutent en avant par deux faisceaux qui partent ensemble de 
la face antérieure du muscle adducteur antérieur et au voisi- 
nage de laquelle ils s’insèrent sur les valves; ils passent de part 
et d'autre de l'ouverture pédieuse. Arrivés en un certain point, 
à mi-chemin de l'ouverture pédieuse et de l’orifice inspirateur, 
sur l'individu que j'ai observé, chacun des deux faisceaux se 
divise en deux parties, les parties internes s’entrecroisant et les 
parties externes suivant leurs directions premières. Bientôt la 
partie interne du faisceau gauche se réunit à la partie externe 
du faisceau droit et inversement. Les deux faisceaux ainsi 
reconstitués longent les bords de l’orifice inspirateur au delà 
duquel ils se croisent à nouveau. Avant d'arriver à cet orifice 
ils reçoivent des faisceaux de renforcement dépendant des 
muscles radiaux, dont celui répondant à la valve operculaire 
est le plus développé sur l'animal que j'ai sous les yeux. 

Au delà de l'orifice inspirateur, c'est-à-dire à partir du 
point où se fait le deuxième entrecroisement, la disposition est 
très compliquée, par suite de l'insertion de la membrane en 
Ivre dont 1l sera parlé plus loin. Les deux faisceaux que nous 
avons suivis depuis leur origine en avant, semblent ne plus 
exister et être remplacés par un faisceau unique partant du 
point d'entrecroisement, et qui bientôt se divise en deux 
branches entourant l'orifice expirateur ; il passe ensuite en 
arrière du muscle adducteur postérieur et vient s'insérer sur 
les valves. 

y. Les muscles circulaires sont très réduits et constituent des 
sortes de sphincters superficiels entourant les orifices inspira 
leurs et expirateurs. L'orifice pédieux m'a semblé en être 
dépourvu. 

Les muscles siphoniens des Chames sont donc, comme on 
peut s'en rendre compte, réduits à leur plus simple expres- 
Sion. 

À cet ensemble de faisceaux musculaires doivent être ajoutés 
ceux de la membrane en lyre dont il sera parlé à propos des 
branchies. 


Toutes les fibres musculaires dépendant du manteau sont 
lisses. 


ee to AT 
“ 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 297 


Muscles adducteurs. — Les muscles adducteurs sont très con- 
sidérables, plus en général, que chez les autres Acéphales, par 
rapport à la taille de l'animal ; leur section qui est très étendue 
a généralement la forme d'un ovoïde à grosse extrémité ven- 
tale et dont l'extrémité dorsale la plus effilée forme parfois 
pour le muscle antérieur un léger crochet dirigé en dedans. 
La section de ce muscle adducteur antérieur est, en général, 
sans que cela soit constant, plus étendue et de forme plus 
allongée que celle du postérieur. 

Les surfaces d'insertions de ces muscles sont très marquées 
sur la coquille ; elles sont à peu près planes, formant même par- 
fois un relief légèrement convexe : sur la valve fixée, la partie 
en crochet de l'impression antérieure empiète souvent sur la 
partie antéro-externe de la dent cardinale 2. Souvent du côté 
central l'impression musculaire parail plus où moins déchi- 
quetée, et, dans cette région du muscle, les faisceaux de fibres 
sont écartés, séparés par du tissu conjonctif; sur les coupes 
sagittales de l'animal qui sont transversales pour le muscle, 
cette disposition se traduit par un persillage très nettement 
visible que l’on retrouvera d’ailleurs plus accusé encore chez les 
Æthéries, où, sur l'impression coquillière, il simule une fine 
dentelle. 

Les deux muscles adducteurs sont souvent dorsalement très 
rapprochés l’un de l’autre, conséquence naturelle de la forme 
arrondie de l'animal (Voy. lig.135). 

Comme chez les Æthéries et les autres formes arrondies telles 
que beaucoup de Lucines, l'adducteur antérieur est tout entier 
situé ventralement par rapport à la bouche {Voy. fig. 35). 

Comme tous les adducteurs d'Acéphales, chacun de ces 
muscles comprend deux parties, l'une périphérique par rapport 
au centre de figure de l'animal, nacrée et qui peut être consi- 
dérée comme un épaississement des muscles radiaux du man- 
leau avec lesquels elle se continue, l'autre centrale, d'aspect 
opaque; ces deux parties macroscopiquement très distinetes ne 
sont cependant pas séparées par du tissu conJonctif, comme 
cela arrive pour quelques {ypes, ceux notamment chez 
lesquels la différence de structure est considérable, comme le 
Pecten (Voy. à ce sujet: R. Anthony. Note sur la forme et Ja 


298 R. ANTHONY 


structure des muscles adducteurs des Acéphales. Bull. Soc. 
Philom., 1904). 

Au point de vue de l'anatomie microscopique et de Fhisto- 
logie, j'ai examiné avec beaucoup de soin à l'aide des procédés 
indiqués au chapitre I (plus spécialement dissociation à l'acide 
azotique à 20 p. 100), les muscles provenantdes Chama iostoma 
Conr., rapportés du golfe de Tadjourah par M. Ch. Gravier 


et fixées par lui au liquide de Perenyi. Lorsque j'en ai le loisir 


Fig. 35. — Coupe sagittale de Chama brassica Reeve. — 1, bouche; 2, anus; 3, pied 
rudimentaire : 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 
6, cœur; 7, orifice inspirateur; 8, orifice expirateur. En avant du muscle adducteur 
postérieur est le ganglion viscéral ; à la base du pied est le ganglion pédieux. 


et pour des recherches générales, c'est, de préférence, sur 
des animaux frais que j'étudie la structure des fibres muscu- 
laires des adducteurs, évitant les fixations et plongeant direc- 
tement le tissu frais dans l'acide azotique à 20 p. 100. En dépit 
de la fixation préalable au Perennyi et du séjour prolongé 
dans l'alcool à 70°, j'ai, dans le cas particulier, pu nettement 
découvrir dans les fibres opaques la striation en mosaïque, si 
nette chez la plupart des autres Acéphales, et dont j'ai fait l'an 
dernier une étude raisonnée (Voy. Indice. bibl. précédente) qui 
a été ensuite poussée plus loin au point de vue des détails par 
Marceau; les fibres nacrées sont absolument lisses, et, au sur- 
plus, la structure des muscles des Chames est identique à celle 
que l'on trouve chez beaucoup d'autres Acéphales, notamment 
chez le Cardium edule Linn. Il n’y à donc pas lieu d'y insister. 


sp 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 299 


Quant aux autres parties de l'appareil musculaire constituées 
par les muscles moteurs du pied, elles vont être décrites à propos 
de ce dernier organe. 

Pied. — Le pied est très réduit chez les Chames, mais c'est 
dans cette réduction même que réside tout l'intérêt de son 
étude. Je l'ai étudié dans les trois espèces dont il a été question 
plus haut et où il diffère peu d’ailleurs. 

In'estreprésenté que parune petite languette musculaire située 
sur le bord antérieur de la masse viscérale qui présente exté- 
rieurement, sur mes échantillons, des plissements {ransversaux 
nombreux et assez profonds, dus vraisemblablement à la rétrac- 
lion sous l'influence de réactifs fixateurs ou conservateurs. À 
l'état vivant, cette languette doit être allongée et flexueuse, 
rappelant peut-être d'un peu loin, quoique plus courte, le pied 
des Lucines. Elle doit être considérée comme représentant le seul 
vrai reste fonctionnel du pied. À ce pied rudimentaire se ratta- 
chent un certain nombre de muscles, rudimentaires également, 
el qui représentent, sans aucun doute, les restes d’un appareil 
musculaire jadis plus développé. Suivant les individus. ils sont 
plus ou moins réduits, et je vais les décrire dans les cas où ils 
atteignent leur maximum de développement. 

2. Rétracteurs postérieurs du pied. — Sur la face antérieure du 
muscle adducteur postérieur, dans la région qui le séparerait en 
deux parties égales, l'une dorsale, l'autre ventrale, on voit un 
assez gros faisceau musculaire qui le rencontre suivant un angle 

presque droit {Voy. fig. 35). Les fibres de ce faisceau s'écar- 
lent lorsqu'elles s’approchent du muscle adducteur et se 
disposent suivant une sorte de cône très aplati, les plus péri- 
phériques se perdant à sa surface et les centrales, qui sont 
les plus nombreuses, s’insinuant entre les faisceaux du muscle. 
A partir du moment où ces fibres musculaires entrent dans le 
muscle, elles s'écartent davantage les unes des autres, s'amin- 
cissent ; le faisceau est comme laminé, et, remarquable exemple 
d'une loi que j'ai émise ailleurs, elles sont, à partir de leur 
pénétration dans l'adducteur, complètement transformées en 
fibres conjonctives qui se perdent insensiblement par atté- 
nualion progressive avant d'avoir atteint la face postérieure du 
muscle adducteur. Après sa sortie de l’adducteur postérieur, le 


A A TS — 


300 R. ANTHONY 


faisceau musculaire décrit, qui n’est autre chose que les deux 
rétracteurs postérieurs droit et gauche du pied réunis,*s'étend 
le long du bord postérieur de la masse viscérale, donnant à 
droite et à gauche des fibres rares et distantes qui, sur le bord 
antéro-inférieur de cette masse viscérale, en dessous du pied, 
S'entrecroisent et se confondent. Très espacées en arrière, elles 
se rapprochent et deviennent plus fournies à mesure que l'on se 


dirige vers le bord antérieur 
de la masse viscérale. De ce 


Hs DER. A 4 

D / mème muscle rétracteur pos- 

Z UN 
Æ sp] » dé SI æ 
Z térieur dépendent aussi quel 
HI ques fibres qui viennent se 
VA1/ : : 
DL y terminer le long du bord 

RE 


postérieur de la languette 5 
(Voy. fig. 36). 

Telle est, chez la Chame, 
la constitution rudimentaire 
du muscle rétracteur posté- 
rieur du pied, si développé 
chez les Acéphales euthéti- 
ques. Pour être complet, il est 
nécessaire d'ajouter que sur certains exemplaires on voit, sur 
la masse viscérale, quelques fibres dépendant, morphologique- 
ment, du rétracteur postérieur du pied et qui n’atteignent pas 
le muscle adducteur postérieur, Ce sont des fibres du musele 
postérieur qui ont perdu leur portion aborale, et elles se termi- 
nent sur les côtés de la masse viscérale par atténuation pro- 
eressive. Il y à de ces fibres de part et d'autre (dorsalement et 
ventralement) du rétracteur postérieur du pied proprement dit, 
C'est-à-dire de part et d'autre de celles qui vont jusqu'au 
muscle adducteur postérieur. 

8. Rétracteur supérieur du pied. — Ce muscle est encore plus 
réduit que le précédent. Le long du bord postérieur de la masse 
viscérale, à la réunion de son tiers inférieur avec son tiers 
moyen à peu près, existe une petite languette, longue de 3 milli- 
mètres environ et large de 2, formée de fibres musculaires diri- 
gées dans le sens de sa longueur. Parmi les fibres qui prennent 
naissance dans cette languette, les unes, les plus postérieures, 


Fig.36.— Musculature du pied chezla Chama 
Lazarus Lmck. — 1, branchie; 2, pied; 
3. rétracteur antérieur: #4, rétracteur pos- 
térieur : 5, rétracteur supérieur (Profil). 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 301 


comme on Fa vu, vont faire partie du muscle rétracteur posté- 
rieur, les autres plus nombreuses croisent en diagonale celles 
du muscle précédent et se dirigent du côté de la bouche. Parmi 
elles, .un faisceau plus important que les autres se dirige vers 
la commissure buccale, mais ne semble pas, dans la plupart 
des cas, aller jusqu'à la coquille pour s'y insérer. 

Ces fibres sont les restes du muscle rétracteur supérieur du 
pied et, comme on le verra plus loin, à propos des branchies, 
la languette 5 n’est que l’amorce sur la masse viscérale de la 
membrane interbranchiale, 

v- Rétracteur antérieur du pied. — C’est le plus réduit de tous 
les muscles du système pédieux. Sur la face antérieure de la 
masse viscérale on peut apercevoir quelques rares fibres qui, au 
niveau du pied, commencent à devenir plus denses et finissent 
par constituer un feutrage assez épais. La plupart de ces fibres, 
les plus centrales se déviant de leur direction, pénètrent dans 
le pied et y constituent les fibres longitudinales de cet organe, 
les autres continuent leur direction et forment ses premières 
libres transversales. En coupe, le pied parait done être consti- 
tué de fibres transversales et de fibres longitudinales, mais tel- 
lement enchevêtrées les unes avec les autres à l'extrémité de 
l'organe, qu'il est difficile d'établir leur disposition précise. 

L'appareil pédieux est done, comme on le voit, très réduit 
chez les Chames, et son développement semble, en général, à 
peu près égal des deux côtés. | 

Cette description se rapporte aux individus chez lesquels Jai 
rencontré l'appareil pédieux le plus développé. Mais il peut y 
avoir tous les intermédiaires entre l'absence absolue, d'une 
part, de fibres dépendant des muscles pédieux et recouvrant la 
masse viscérale, le pied rudimentaire et la languette 5 restant 
seules présentes, et, la disposition ci-dessus décrite d'autre part, 

Cest chez la Cham lazarus Lmck. que j'ai d'ordinaire ren- 
contré l'appareil pédieux le plus développé. C’est chez la Cham 
iostoma Reeve que je l'ai trouvé le plus réduit d'une facon 
presque constante. 

Toutes les fibres musculaires dépendant du pied sont lisses. 

Ainsi que T. Barroïis (85), je n'ai pas rencontré de glande 
byssogène rudimentaire. 


302 R. ANTHONY 


Appareil respiratoire. — L'appareil respiratoire est composé de 
deux branchies dont la direction générale est un peu différente 
de celles que ces organes affectent chez les Acéphales du type le 
plus commun, comme le Cardium, par exemple. En effet, l’'ex- 
trémité antérieure de chaque branchie semble s'être éloignée du 
bord ventral du musele adducteur antérieur pour se diriger du 
côté du crochet. Il en résulte que la branchie, au lieu d’avoir 


ASS 


c É—T 


DRE 
54 


Fig. 37. — Organisation externe de Chama iostoma Reeve. Une fenêtre a été pra- 
tiquée dans un des lobes palléaux pour montrer la direction dorso-ventrale de la 
branchie et le pied rudimentaire. — 3, pied; 4, muscle adducteur antérieur ; 
5, muscle adducteur postérieur; 13, palpes labiaux ; 14, branchie. 


une direction antéro-postérieure, présente ici une direction 
sensiblement dorso-ventrale (Voy. fig. 37). Au lieu de débuter, 
comme c’est l'ordinaire chez les Acéphales, dans l'espace situé 
entre les deux palpes labiaux, elle débute en arrière d'eux, et 
si, la lame interne a encore une petite partie de son extrémité la 
plus antérieure logée entre les palpes, la lame externe n’a plus 
aucun rapport de contiguité avec eux. Il sera, d’ailleurs, revenu 
un peu plus loin sur cette disposition. 

Les connexions des branchies avec les parties anatomiques 
avoisinantes sont les suivantes : d'abord l'axe des branchies est 


a — © ———— 
Æ 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 303 


parcouru dans toute sa longueur par un gros faisceau qui suil 
dans la région dorsale le bord interne de sa lame externe et 
vient finalement s'insérer à la coquille auprès du muscle adduc- 
teur postérieur ; c'est le suspenseur de la branchie. Elle est rat- 
lachée en outre à la masse viscérale par un repli ou meso 
riangulaire analogue à celui qui existe chez tous les autres 
Acéphales et qui va de l'axe branchial à la paroi de la masse 
viscérale. Le bord postérieur libre de ce meso est occupé par le 
nerf branchial comme chez les autres Acéphales (Voy. fig. 39). 

Une chose remarquable à propos de l'appareil respiratoire 
des Chames est cette tendance qu'ont les branchies de ces 
animaux à rompre leurs connexions avec les parties avoisi- 
nantes, à devenir complètement libres et flotter dans la cavité 
palléale, comme cela se produit d'ailleurs aussi dans un 
groupe d'Acéphales à tous points de vuetrès différent, celui des 
Aviculidés. Cette disposition tend à s'établir chez l'Avicuta 
radiata Desh. et, chez les Pinna elle atteint son maximum 
de netteté. Chez un Cardium edule Linn. au contraire, par 
exemple, chaque branchie est reliée en dedans à la masse viscé- 
rale en avant et à son homologue en arrière, en dehors à la face 
interne du lobe palléal. Lorsque la zone d'union de la branchie 
droite à la  ranchie gauche est suffisamment étendue en lar- 
geur, elle peut prendre le nom de lame interbranchiale. Cette 
lame interbranchiale existe très développée en largeur chez les 
Tridacna et les Hippopus. L'ensemble de ces connexions forme 
avec la surface des branchies une sorte de cloison très compli- 
quée qui sépare en deux parties la chambre palléale : la chambre 
palléale proprement dite (ventrale) et la chambre rétrobran- 
chiale (dorsale). Cette cloison se continue par la lame de sépa- 
ration des siphons. 

Si l'on considère une C'hama appartenant à l’une des espèces 
que j'ai étudiées, on voit que la cloison formée par l'ensemble 
des branchies et de leurs connexions présente fréquemment des 
solutions de continuité. La plus importante est celle que présente 
souvent la lame d'union du feuillet réfléchi de la lame interne 
avec la bosse viscérale ; la lame d'union du feuillet réfléchi de la 
lame externe avec le lobe palléal ou la face antérieure de l'ad- 
ducteur postérieur en présente également souvent une autre 


204 R. ANTHONY 


interrompue dans certains cas par un ou deux pelits ponts 
membraneux. Si ces deux solutions de continuité existent et se 
prolongent tout le long des bords latéraux des branchies, si 
en même temps la zone d'union interbranchiale, qui chez les 
Chames est très étroite, a disparu (Voy. fig. 39), il arrive que les 
branchies se trouvent absolument libres des parties avoisinantes 
et flottent dans la cavité palléale, n'étant plus reliées au reste 
du corps que par leurs extrémités antérieures et leur méso, 
comme cela existe chez les Pinna. La solution de continuité 
qui apparaît la première semble être l'interne, entre le feuillet 
interne et la bosse viscérale en avant; celle qui se produit 
ensuite est celle par le fait de laquelle la branchie rompt ses 
connexions avec le lobe palléal. À un troisième stade enfin la 
zone d'union interbranchiale disparaît et la branchie peut alors 
flotter librement dans la cavité du manteau. 

Au point de vue de la disposition de la branchie, il peut donc 
ÿavoir parmi les individus que J'ai étudiés trois formes : 

2) Celle dans laquelle les solutions de continuité antéro- 
internes existent seules. C’est celle qui se rencontre le plus 
souvent chez la Chama iostoma Reeve ; 

8) Celle dans laquelle les solutions de continuité internes et 
externes existent ensemble ; 

y) Celle dans laquelle enfin les branchies, retenues par leur | 
seule extrémité antérieure, flottent librement dans la cavité 
palléale. C'est une disposition que lon rencontre souvent 
chez la Chama lazarus Lmck. Dans aucun cas je n'ai trouvé 
sur la Chama iostoma Reeve, ni sur la Chama lazarus Lmck. 
l'intégrité complète du septum de séparation de la cavité 
palléale. 

Lorsque la disposition 7 est réalisée, on peut apercevoir une 
sorte de membrane s’insérant perpendiculairement sur la com- 
missure palléale entre les deux orifices siphoniens et orientée 
suivant la direction de la lame interbranchiale. J'ai étudié plus 
spécialement la disposition de celte membrane chez la Chama 
lazarus Lmck. dans les sujets où les branchies sont com- 
plètement libérées de leurs connexions latérales et postérieures. 
Chez ces sujets cette membrane a la forme d’une sorte de Iyre 
étendue suivant sa longueur sur une surface cylindrique, etJ 


| 


| 
( 


TE 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 305 


dont les branches en forme de cornes très aiguës s'insèrent 
par leurs bords externes sur la face antérieure du muscle adduc- 
leur postérieur. Les bords externes du corps de la lyre qui se 
continuent avec les bords externes des branches s'insèrent sur 
la commissure palléale parallèlement au bord libre des valves 
entre les deux orifices inspirateur et expirateur. Le bord infé- 
rieur enfin de la lyre s'insère sur la commissure palléale entre 
les deux orifices précités. Quant aux bords internes des branches 
etau bord supérieur du corps qui présente un petit prolonge- 
ment médian, ils sont libres. Dans les cas où les connexions de 
la branchie ne sont pas rompues, le bord interne des branches 
de la lyre se continue avec le feuillet réfléchi de la lame 
externe de la branchie et le prolongement médian du COrpS 
s'insinue postérieurement entre les deux branchies en arrière. 

La membrane en Iyre est donc le reste de la membrane de 
séparation des deux cavités palléales de laquelle la surface 
branchiale s'est détachée. 

Cette membrane contient une musculature assez nette. En 
son centre est un entrecroisement de fibres musculaires duquel 
part d'abord un faisceau impair médian très nettement indivi- 
dualisé (Chama  lazarus Lmck., Chama iostoma Conr.) qui 
se dirige vers le prolongement médian. Chez la Chama iostomn 
Conr. où, comme je l'ai dit, la lame interbranchiale est géné- 
ralement sans solutions de continuité depuis la bosse viscérale 
jusqu'à la commissure palléale, J'ai vu que ce faisceau impair 
n'était autre chose que la continuation du petit prolongement 
postérieur de la masse viscérale dont il a été question à propos. 
du pied (5). Viennent ensuite déux faisceaux latéraux à peu 
près égaux qui vont s’insérer avée les muscles radiaux sur la 
coquille en avant de l’adducteur postérieur, et laissant en 
dehors d’eux la couche des muscles radiaux du manteau ; en troi- 
sième lieu, deux autres prolongements dirigés en sens inverse et 
Qui par rapport aux muscles radiaux se comportent de la même 
façon ; enfin deux autres prolongements moins importants qui 
entourent lorifice inspirateur de chaque côté duquel ils se 
perdent par atténuation progressive. 

Il reste en somme que les branchies ne sont plus dans les cas 
extrêmes reliées au corps que par Le suspenseur, les mésos et par 

ANN. SC; NAT. ZOOL. 1,320 


306 R. ANTHONY 


la continuité de tissu en haut et en avant avec les téguments de 
la masse viscérale. 

La figure #, PI XXII de Pol, donne une excellente idée de a 
forme des branchies chez la Chama gryphoïdes Lin. 

Comme il a été dit au début de ce paragraphe, les branchies 
des Chames se divisent chacune en deux lames. 

La lame interne débute seule, on l’a vu, entre les palpes 
labiaux. Elle se dirige d'abord d'avant en arrière, puis, Chan- 
ue geant bientôt de direction, elle suit un 
trajet dorso-ventral; après avoir par- 
couru une certaine longueur, elle se 
recourbe à nouveau en arrière pour se 
diriger du côté de l'orifice expirateur, 
en avant duquel elle se termine en s'in- 
sérant, lorsque ses connexions ne sont 
pas rompues à la base de la lame en Ivre. 
La lame externe débute en arrière de la 
précédente, laissant même entre elle et 
cette dernière au niveau de son origine, 
un espace libre ayant la forme d'un 


Fig — Schéma montrant : 3 : : rue 
la disposition des lames triangle isocele à base supérieure, et 


branchiales chez les Chami- 
dæ (coupe transversale). — 
1, lame interne; 2, lame 
externe ; 3, nerf branchial : 
4, vaisseau efférent ; 5, 6, 
vaisseaux afférents. Le bord 


dont la présence indique la séparation 
et l'éloignement des filaments bran- 
chiaux internes et externes en cet en- 


libre de la lame interne 
présente le sillon décrit. A 
signalerles solutions de con- 
tinuité entre la branchie 
d’une part, et le lobe pal- 
léal et la masse viscérale 
d'autre part. 


J, par exemple que I 


fig. 37). Au point de vue de leur 


droit. Cette lame, qui part du lobe pal- 
léal au voisinage du crochet, suit une 
direction dorso-ventrale d'abord, puis 
antéro-postérieure ; elle épouse la forme 
de la lame interne dans sa deuxième el 
sa troisième partie et à la forme d'un 


a lame interne a la forme d'un S (Voy. 


longueur, ces deux lames sont 


donc inégales. Elles le sont aussi au point de vue de leur 


dimension transversale, comme le montre la coupe schéma- | 
tique transversale (Voy: fig. 38) 


de l'organe. 


Les branchies des Cham 
Cardiums et aussi comme celles 


passant à peu près au milieu 


des Huïtres et des Æthéries ; 


es sont plissées comme celles des 


em "© Ge, 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 307 


mais les plis sont moins profonds aux deux extrémités de l'or- 
gane el plus particulièrement à l'extrémité antérieure que dans 
la région moyenne. Au lieu d'être rectilignes, ces plissements 
sont eux-mêmes très légèrement sinueux. et dans beaucoup de 
cas contournés en S, comme cela peut se voir sur la figure 37. 
Sur un exemplaire de Chama iostoma Conr., j'ai compté 
pour la lame interne de la branchie gauche 97 plissements 
el 83 pour l'externe. Chaque pli du fond d'un sillon à celui du 
sillon suivant, comprend environ dans la région moyenne de 
l'organe 20 à 25 filaments, 

Si nous considérons à nouveau la figure 38, nous voyons que 
le bord libre du feuillet branchial interne présente un sillon 
assez profond, divisant en deux moitiés les éléments ; ce sillon 
n'existe pas au bord libre du feuillet branchial externe, ce qui 
semblerait prouver que la lame interne seule possédat un véri- 
table feuillet réfléchi, suivant la signification précise que l’on 
attribue à ce terme. On retrouve la même disposition chez les 
Cardidés et les Tridacnidés qui, par l'ensemble de leurs carac- 
tères anatomiques, semblent être très proches parents des 
Chames. 

Au voisinage du bord libre de la lame externe, les plis s'atté- 
nuent et-disparaissent même tout à fait. 

Les Chames sont des Eulamellibranches : leurs branchies, 
formées de filaments juxtaposés, sont treillagées, c'est-à-dire 
qu'elles présentent des jonctions interfilamentaires qui forment 
des lignes parallèles à leur surface et, rencontrant perpendicu- 
lairement les filaments, déterminent la présence de fenêtres rec- 
tangulaires allongées suivant la longueur de la lame. En plus de 
ces Jonctions interfilamentaires, il existe des Jonctions inter- 
foliaires qui consistent en des lames s’insérant sur les fonds de 
deux plissements situés en face l'un de l'autre et divisant la 
partie intérieure de chaque feuillet branchial en loges. Pour la 
branchie interne, ces cloisons interfoliaires existent dans la 
région moyenne de l'organe tous les cinq plis; dans sa région 
antérieure, c'est-à-dire à l'origine, elles sont plus fréquentes, 
el il en est de même dans la région postérieure, c’est-à-dire à 
la terminaison. Ces cloisons interfoliaires croissent d'épaisseur 
d'avant en arrière. 


308 R. ANTHONY 


La branchie externe présente les mêmes cloisonsinterfoliaires ; 
loutefois, ces cloisons sont plus nombreuses et à chaque plisse— 
ment il en correspond une. 

Les cloisons interfoliaires de la branchie interne n'atteignent 
pas tout à fait le bord libre du feuillet réfléchi, comme le montre 
la figure. 

En plus de ces connexions interfilamentaires et interfoliares, 
il existe d’autres connexions auxquelles on peut donner le nom 
de connexions interplicaturales. Ces connexions réunissent les. 
fonds de deux sillons consécutifs. Dans la lame externe, elles. 
sont peu développées; dans la lame interne, au contraire, elles. 
sont très considérables, et, dans les parties voisines de l'axe, 
elles sont très larges et forment une sorte de voile étendu sur 
toute la partie supérieure des oouttières. 

L'innervation et là circulation des branchies seront décrites. 
à propos des appareils nerveux el cireulatoires. 

Tube digestif. — La bouche est située immédiatement au- 
dessus du musele addueteur antérieur et dorsalement par rap- 
port à lui. Nous constaterons chez les Æthéries la présence du 
même caractère. 

Elle est entourée des quatre palpes labiaux assez courts, dont 
les bords antérieurs ét dorsaux sont, sur presque tout leur par- 
cours, soudés au manteau, autre point de convergence avec les. 
Æthéries. Ces palpes présentent, sur leurs faces d'accolement 
et sur cette face seule, des plissements (transversaux. On voit 
entre les deux palpes d'un même côté, l'origine de la lame bran- 
chiale interne. 

Chez la Chama iostoma Conr., où j'ai étudié le tube digestif 
en détail, à la bouche fait suite un court œsophage, après lequel 
on pénètre dans l'estomac, lequel présente un léger diverti- 
eulum antérieur. L'intestin sort de la face ventrale de l'estomac 
et sa direction fait un angle à peu près droit avec celle de l'æso- 
phage. Il se rapproche de la face latérale gauche, c’est-à-dire 
de celle qui répond à la valve fixée ; arrivé à l'extrémité ven- 
trale de la bosse viscérale, il se recourbe et remonte parallèle- 
ment à sa première direction, en se rapprochant de la face 
latérale droite; puis bientôt il regagne le plan sagittal, traverse 
le cœur, passe en arrière du muscle adducteur postérieur et se 


| 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 309 


termine enfin à l'anus situé légèrement au-dessus de l’orifice 
Æexpirateur. 

Foie. — Le foie est assez peu développé chez les Chames et 
ne présente rien de particulièrement intéressant pour le point 
le vue envisagé ici. Comme chez les autres Acéphales, c'est une 
glande acineuse dont les cæcums ne sont pas dans le cas parti- 
culier nettement séparés. Elle est noyée dans la glande 
génitale et débouche à l'intérieur de l'estomac par deux orifices 
assez symétriques. 

Organes génitaux. — Ainsi que l'a vu, en 1859, H. de Lacaze- 
Duthiers, les Chames sont des Acéphales monoïques. Exté- 
rieurement, il est difficile de distinguer les mâles des femelles, 
si ce n'est par l'aspect de la glande elle-même, dont il m'a 
semblé que les acini étaient plus visibles chez les femelles. Chez 
les mâles, la glande à une apparence unie et homogène qui ne 
trompe pas. 

Comme chez tous les autres Acéphales, les glandes génitales 
sont des glandes en grappe, et, je n'insisterai pas sur leur des- 
cription qui ne présente rien de particulier, ni d'intéressant, 
pour le point de vue auquel je me place. Ces glandes géni- 
tales occupent dans la bosse viscérale toute la place qui 
n'est pas occupée par le tube digestif, le foie, l'organe de Bojanus 
et les organes de la circulation. 

Chez la Chama iostoma Conr., les organes génitaux s'ouvrent 


à l'extérieur par deux orifices, l'un droit, l'autre gauche, qui 


débouchent dans une petite papille située dans la cavité bran- 
chiale, à l'angle que forme la paroi de la bosse viscérale avec 


| le méso suspenseur de la branchie. Dans cette papille s'ouvre 


| également le conduit exsécréteur de l'organe de Bojanus. En 


dedans est le canal génital, en dehors le canal sécréteur 


M(Voy. fig. 39). 


{ 


Péricarde où cavité générale. 
spacieux chez les Chames ; c'est une petite cavité allongée 
d'avant en arrière et qui se trouve située dans la région 
umbonale entre les extrémités dorsales des deux muscles adduc- 
teurs. Il est limité dorsalement par une partie cardinale du 
| sur laquelle s’insère la membrane intercardinale, Sa 
[paroi ventrale repose sur la glande génitale et dans ses parois 


Le péricarde n’est pas très 


310 R. ANTHONY 


latérales on aperçoit, par transparence, la couleur brune des 
organes de Bojanus. 

Dans la région antérieure du péricarde se trouvent les deux 
orifices bojano-péricardiques, très difficiles à voir d’ailleurs chez 
toutes les Chames. 

Grobben (86) à signalé la présence de glandes péricardiques. 

Organe de Bojanus. — L'organe de Bojanus à chez les Chames 


Fig. 39. — Branchies et régions avoisinantes chez la Chama lazarus Lmck. — 1, bran- 
chie (lame interne); 2, branchie (lame externe). On y voit très nettement les 
jonctions interfoliaires et interplicaturales; 3, ganglion viscéral d'où part le nerf 
branchial suivant le bord antérieur du méso ; 4, glande génitale, vue par transpa- 
rence; 5, papille bojana-génitale ; 6 et 8, muscle rétracteur supérieur; 7, muscle 
rétracteur postérieur. 


une forme allongée dorso-ventralement, son extrémité dorsale 
élant plus grosse que son extrémité ventrale. On laperçoit par 
transparence dans la paroi latéro-ventrale du péricarde. 
L'organe de Bojanus s'ouvre d’une part, dans le péricarde 
(région antérieure) ; il débouche d'autre part à l'extérieur, au 
niveau de la papille déjà signalée en dehors du canal génital. 
Chez les Chames, les deux glandes bojaniennes droite et 
gauche sont nettement séparées l'une de l'autre. | 
Appureil circulatoire. — L'appareil circulatoire des Chames {| 
ne présente rien de particulier. Il a été étudié chez la Chama 
Rupellii Reeve par Ménégaux (90). 
L'étude que j'en ai faite à porté surtout sur l'espèce Chama 
tostoma Conr. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES a11 


Le cœur se compose, comme celui de tous les Acéphales bien 
évolués, d'un ventricule petit, arrondi, musculeux et épais, que 
traverse le tube digestif. Ce ventricule est relié à la paroi ven- 
trale du péricarde qui, se relevant en cette région, constitue 
une sorte de colonne à base très élargie, au centre de laquelle 
se trouve la portion ascendante du tube digestif. Ce dernier 
traverse le cœur, labordant donc par sa face inférieure ou ven- 
trale, et le quittant par la dorsale. Aussitôt sa sortie du cœur, 
l'intestin se dirige en arrière pour longer le bord postérieur du 
muscle addueteur postérieur. Le ventricule communique laté- 
alement avec deux oreillettes à parois très minces, sensible- 
ment égales, et qui ne se réunissent pas ventralement. Les 
orifices ventriculo-auriculaires sont munis d'un anneau muscu- 
leux très fort dépendant du ventricule et possédant des valvules. 

Le ventricule émet deux aortes, lune antérieure, à l'origine 
de laquelle est une valvule, l'autre postérieure. Ménégaux a 
pu étudier d'une façon plus complète que je n'ai pu le faire 
ces artères et leurs branches, ayant eu à sa disposition des 
matériaux en meilleur état que les miens et se prêfant mieux 
aux injections. 

Sur les animaux que j'ai étudiés, l'aorte antérieure suit un 
peu à droite (du côté de la valve libre par conséquent), au-dessus 
du tube digestif, la dépression cardinale. Sur la Chama Ruppelli 
Reeve qui est celle qu'a étudiée Ménégaux et où la fixation se 
fait par la valve droite, elle suit un peu à gauche la même 
dépression. Bientôt elle donne des artérioles destinées aux lobes 
palléaux et dont la plus considérable se rend au lobe palléal 
répondant à la valve fixée. De l’aorte antérieure partent aussi, 
près de sa naissance, des artérioles destinées à la membrane 
interbranchiale. 

Vient ensuite l'artère viscéro-pédieuse qui, passant du côté de 
la valve fixée par rapport au tube digestif, irrigue les palpes 
labiaux, le tube digestif, le foie, la partie antérieure de la glande 
génitale et le pied. 

À sa terminaison, l'aorte antérieure donne les deux cir- 
cumpalléales antérieures qui naissent au niveau de l'extrémité 
supérieure du muscle adducteur antérieur qu'elles irriguent. 
Elles suivent la commissure palléale. 


312 R. ANTHONY 


L'aorte postérieure est très courte; elle est située ventra- 
lement par rapport au tube digestif et donne bientôtles deux 
circumpalléales postérieures qui s'unissent le long de la com- 
missure palléale aux deux circumpalléales antérieures. Aupa-° 
ravant, elle à émis une branche qui, passant en avant du muscle 
addueteur postérieur, l'irrigue ainsi que le ganglion viscéral. 

De ces différentes artères, le sang passe dans les lacunes dont 
la plus importante estle sinus rénal situé en avant du muscle 
adducteur postérieur. Le sinus pédieux est extrèmement réduit. 

Du sinus rénal ou lacune médiane, le sang passe dans les 
vaisseaux afférents (artères branchiales), lesquels suivent le bord 
supérieur des feuillets réfléchis des branchies. 

IL y à quatre artères branchiales, deux droites et deux gauches. 

De ces quatre grandes artères, le sang se distribue dans le 
système capillaire des branchies suivant le mode déerit par 
Ménégaux et gagne enfin les vaisseaux efférents ou veines 
branchiales, au nombre de deux, l'une droite, l'autre gauche, 
situées à la base de la cténidie, dans le méso-branchial et 
qui communique largement avec l'oreillette. 

Le sang suit donc un trajet en tout analogue à celui qu'il par- 
court chez les autres Acéphales : parti du cœur, il passe par les 
artères, irrigue les organes, passe dans les lacunes, puis dans 
les branchies, où il s'hématose, et, de là, retourne au cœur. 

Système nerveur. — Le système nerveux des Chama ne pré- 
sente rien de spécial. Je lai particulièrement étudié chez la 
Chama iostoma Conr. 

Les ganglions cérébro-palléaux se trouvent situés de chaque 
côté de la bouche, au-dessus de laquelle passe la commissure 
antérieure. Chaque ganglion cérébro-palléal émet en avant un 
nerf qui longe la face postérieure du muscle adducteur antérieur 
et bientôt se divise en deux branches. C'est le nerf palléal anté- 
rieur. Du ganglion cérébro-palléal part également le grand 
connectif cérébro-viscéral qui, situé profondément, repose 
en avant sur le foie, passe en pleine glande génitale et rejoint 
le ganglion viscéral unique constitué par la réunion des deux 
ganglions droit et gauche. Ceganglion repose sur la face anté- 
rieure du muscle adducteur postérieur comme chez les autres 
Acéphales. En dehors des connectifs cérébro-viscéraux, ce gan- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES Es: 


glion émet plusieurs branches : le nerf palléal qui suit laface an- 
térieure du muscle adducteur postérieur etgagne bientôt, après 
s'être divisé en deux branches, sa face postérieure, et le nerf 
branchial qui suit le bord postérieur libre du méso-branchial. 

ën plus du nerf palléal antérieur et du connectif cérébro- 
viscéral, chaque ganglion cérébro-palléal émet un connectif céré- 
bro-pédieux très mince. Les deux connectifs cérébro-pédieux 
aboutissent à un ganglion pédieux unique situé à la base du pied 
et duquel partent quelques filets nerveux destinés à l'innerva- 
tion de cet organe rudimentaire. 

L'état des pièces que j'avais à ma disposition ne m'a pas 
permis d'étudier les organes des sens. 


Embryogéne. 


En dépit du grand intérêt qu'elle semble devoir compor- 
ter en vue de l'explication possible des formes fossiles, lem- 
bryogénie des Chames semble avoir été singulièrement né- 
gligée (Voy. Jackson (90) et F. Bernard (97). L'embryogénie des 
premiers stades paraît 4 priori devoir se rapprocher beau- 
coup de celle que l'on observe chez les autres Acéphales; 
nous ne nous en occuperons pas; celle des derniers stades au 
contraire nous intéressera, et, plus particulièrement l'histoire 
du développement de la coquille. 

Sur les polypiers et sur les coquilles des différents Lamelli- 
branches rapportés du golfe de Tadjourah par M. Ch. Gra- 
vier, J'ai, à l’aide de la loupe binoculaire de Zeiss, pu décou- 
vrir des Chames de tout âge, depuis la prodissoconque, 


qui à envion 3 de millimètre de long, jusqu'à la forme ayant 


1 millimètre et plus (dimensions auxquelles on peut considérer 
que l'animal a à peu près acquis les caractères de l'adulte). 

Je ne veux point insister sur la difficulté de cette récolte, 
sur les accidents de toutes sortes, causes d’amères déceptions, 
qui peuvent survenir aux échantillons si petits et si fragiles 


que le moindre souffle peut les emporter, mais je üens à 


répondre par avance à une question que beaucoup de lec- 


teurs se poseront peut-être et à laquelle j'ai déjà répondu, d'ail- 


314 R. ANTHONY 


leurs, en partie dans la chapitre I, à propos de l'exposé de mes 
méthodes de recherches. On pourrait se demander comment, 
lorsque l'on à affaire à une forme jeune de Lamellibranche 
provenant de la mer Rouge, on peut reconnaitre qu'elle appar- 
lient à une espèce du genre Chama? D'abord, si l'animal est 
déjà fixé il n'ya pas de doute possible, les Chames étant les 
seuls Acéphales dimyaires fixés en position pleurothétique 
existant dans la mer Rouge et le golfe d'Aden et leurs formes 
jeunes ne pouvant être confondues ne serait-ce qu'à cause de 
leur dentition, avec celles des Spondyles, des Huîtres ou de 
Plicatules. Lorsque, par contre, l'on à affaire à un animal non 
encore fixé, la diagnose est plus délicate et, dans ce cas, on doit 
se fier aux ornements de la coquille qui sont précisément 
pour les jeunes Chames très particuliers; de plus, par la mé- 
thode des comparaisons d'individus de dimensions €rois- 
santes, on peut arriver à établir une série de formes qui se 
relient les unes aux autres et finissent par aboutir à une forme 
adulte connue ; de plus, enfin, les différentes formes aux diffé- 
rents stades de développement peuvent bien se discerner sur 
les jeunes coquilles de 1! millimètre de diamètre, ce qui permet 
de reconnaitre et de déterminer les individus arrêtés à un 
stade ontogénique moins avancé. 

Ces procédés sont aussi, ainsi que je l'ai dit, ceux qui furent 
employés par F. Bernard, et on sait ce qu'ils lui ont donné. 
Enfin, ayant comparé les formes de jeunes-Chames que j'avais 
recueillies à deux jeunes individus vraisemblablement fossiles 
recueillis jadis par Félix Bernard et qu'il n'a pas eu le temps 
d'étudier d'une facon complète, je me suis aperçu que j'étais 
complètement d'accord avec lui. Je crois par conséquent que 
l'identité de mes matériaux ne peut être mise en doute. 

IL m'a été impossible de mettre des noms spécifiques sur 
ces formes jeunes de Chames que j'ai étudiées. En effet, 
M. Ch. Gravier a recueilli des Chames appartenant à plusieurs 
espèces différentes dont Je donnerai, d’ailleurs, ultérieurement 
la liste, et une forme jeune quelconque aurait pu être attribuée 
avec autant de raisons à l'une ou à l'autre de ces espèces. 

1° Prodissoconque. — La prodissoconque de Chama sp. — 
j'ai pu en recueillir 6 exemplaires — est une petite coquille 


TV A _  _— — — — — 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 319 


équivalve et équilatérale de de millimètre de long à peu près, 


allongée d'avant en arrière. Elle est lisse, dépourvue de tout 
ornement et ne possède pas de dents, comme c'est la règle pour 
toutes les prodissoconques d'Hétérodontes. A son sommet Je 
n'ai pu distinguer la limite du protostracum dont F. Bernard a 
signalé l'existence pour plusieurs espèces. D'après Jackson (90); 
p. 370, les crochets seraient dirigés en avant. Il ne m'a pas 
paru en être ainsi sur mes exemplaires. 

2° Dissoconque. — Dansle développement de la dissoconque 
ou coquille définitive, il ne me semble pas nécessaire d'admettre 
pour le genre Chama, ni pour d'autres d'ailleurs, les deux stades 
népionique et néologique qu'a distingués Jackson (90). Ils 
seraient d’ailleurs, dans ce cas particulier, difficiles à séparer, 
et, il semble plus simple de considérer pour les Chames deux 
stades, l'un qui précède la fixation, l'autre, l'adulte, qui la suit. 

a. Coquille définitive avant la fixation. — Je n'ai pu en recueil- 
lir qu'un seul exemplaire heureusement complet et #4 valves 
isolées, 1 droite et 3 gauches, de mème taille. C'est d'après 
l'exemplaire complet, qui est d’ailleurs représenté dans la 
figure #1, que je fais cette description. Pendant un certain temps, 
après le développement de la prodissoconque, la coquille défi- 
nilive conserve sa forme équilatérale. Mais bientôt, à partir à 
peu près du moment où elle atteint 2 millimètre de diamètre 


— 


antéro-postérieur, les zones d'accroissement se développent 


davantage dans la région postéro-ventrale et de moins en moins 


FPE RCE 
en avant, ilen résulte que lorsque la coquille à atteint = ou 3 de 


millimètre de diamètre, ce qui marque à peu près le stade 
à partir duquel elle se fixe, elle affecte la forme inéquilatérale 
d'un Anisomyaire très voisin encore des Isomyaires, quelque 
chose rappelantun Lithocardium encore peu évolué. Les valves 
de cette petite coquille, que l'on peut désigner sous le nom 
de forme inéquilatérale où Lithocardioïde, sont à peu près égales 
etsemblables, très bombées, rappelant même par leur profil 
coronal la forme d'un petit Cardium. Elles ne présentent pas 
l'arête dorso-ventrale, si aiguë, qui est la caractéristique des 


316 R. ANTHONY 


Lithocardium, mais une arrête sensiblement plus mousse ; 
ventralement elles se terminent comme eux par une partie 


légèrement en pointe ou même en cro- 
YARIS chet. À ce stade inéquilatéral les jeunes 
Chames ont encore la forme des Acéphales 
Ki euthétiques, c'est-à-dire que leurs deux 
1e valves sont semblables, qu'elles sont symé- 
nig 4 GRR E ont semblables, qu'elles ont ymé 
versale de jeune Cha lriques par rapport au plan sagittal. Leur 
na sp. avant la fixa- RP RERES ENT Re : SEE a se à 
tion. Cette figure est PTNeMentation est très spéciale et ne rap- 
destinée à montrer pelle en rien celle des Chames adultes; elle 
l’arête mousse dorso- . À . : e 
AE consiste en côtes radiales bien marquées, 
analogues à celles des Cardium en géné- 
ral: mais ces côtes au lieu d'être conti- 
nues sont croisées et même souvent interrompues par des stries 
d'accroissement très accusées dont le relief est peut-être aussi 
marqué que le leur. Il en résulte un aspect d'ornementation 


Fig. 41. — Vue intérieure de deux valves (individus différents) de Chama sp. avant 
la fixation. — I, valve devant être fixée ; II, valve libre; 1, dent 1; 2, dent 2; 
3, dent 3; 4, dent #4: p, dent latérale postérieure. À remarquer les limites de la 
prodissoconque ét l’ornementation de la dissoconque, vue par transparence. 


extérieure qui rappelle un peu, quoique moins vigoureux, 
dans la famille des Veneridæ, celui des Venerupis, auxquels 
Jackson (91), F. Bernard (98) et moi sommes d'accord pour 
les comparer. Sur de jeunes Chames déjà fixées, représentées 
par Rouault dans son mémoire sur l'Éocène des environs de 
Pau, on retrouve figurées ces mêmes ornementations qui 
d'ailleurs chez les Échinochama adultes sont encore souvent 
visibles. 

Sur ces jeunes coquilles il m'a été impossible de distinguer 
nettement les traces des impressions musculaires, mais 1l est 
possible, même probable, que, comme chez les Lithocardium 


EE 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES Di7 


adultes, le muscle adducteur antérieur soit chez les jeunes 
Chames moins développé que le postérieur. 

Les dents de la charnière rappellent celles de la Chame 
adulte, mais sont moins fortes et plus nettement individua- 
lisées. 

La formule dentaire est la suivante : 


LA c LP 
V dr. QAR 2785 ae 
V g. ORAN AE 


Comme on peut s'en rendre compte, cette formule très voi- 
sine, par l'absence de dents latérales antérieures, de celle des 
Lithocardium, est semblable à celle des Chames adultes, avec 
celte différence qu'à la valve droite il existe du moins sur les 
individus que jai observés une dent cardinale de plus, la 
dent 1. Chez les Chames adultes, en effet, cette dent 1 n'existe 
pas ; dans certains cas, Je Pai vue ébauchée mais jamais elle ne 
présente la netteté de celles des formes jeunes avant la fixa- 
tion. Chez les Dicératinés, au contraire, cette dent existe et il 
est précisément intéressant de rapprocher à ce point de vue les 
formes jeunes des Chaminés des Dicératinés. F. Bernard (97) 
avait également constaté la présence de la dent cardinale 1 des 
Diceras sur les formes jeunes de Chames. Nos observations 
concordent donc. 

De plus, à ce stade, la dent cardinale # à paru à F. Bernard (97) 
comme à moi extrèmement réduite. Elle doit vraisemblablement 
prendre son complet développement plus tard (Voy. fig. 41). 
Les dents des jeunes Chames à ce stade ont un volume moins 
considérable que celle des Chames adultes par rapport aux 
dimensions de la coquille. La figure 41 dispense, d’ailleurs, de 
plus amples développements. 

Comme chez les autres Acéphales, et ainsi que l'ont montré 
Munier-Chalmas (95) et F. Bernard (95), le ligament existe au 
début dans une petite fosselte triangulaire située au niveau du 
crochet et légèrement dirigée d'avant en arrière. Peu à peuil se 
développera d'avant en arrière tout en tendant à devenir exté- 
rieur. Rien de particulier n'offre, pendant ce stade antérieur à 
la fixation, le développement du ligament chez les Chames. 

8. Coquille définitive après la fixation. — J'ai pu recueillir un 


318 R. ANTHONY 


grand nombre de jeunes Chama iostoma Conr. fixées, depuis 


ja plus petites jusqu'aux formes adultes, ayant atteint leur 
9 


l 
maximum. Lorsque la jeune Chame à atteint à peu près—- ou 3 


de millimètre de diamètre antéro-postérieur, elle se fixe par une 
de ses valves; sur l'espèce que 
J'ai étudiée à ce propos (Chama 
iostorma), la valve par laquelle la 
fixation s'opère est la gauche, et 
cette fixation se fait heure par 
la région antérieure exclusive- 
ment. Chez d'autres espèces, — 
Chama Brassica  Reeve, par 
exemple, — la fixation se fait par 
toute la surface de Ja valve. Dans 
Fig. 42. — Jeune Chama sp. aprèsla l'un et l’autre cas, aussitôt la fixa- 

RntRe re libre LE lion produite, la région de la co- 

p, prodissoconque; /, limite de 

la dissoconque] avant la fixation quille qui est fixée tend manifeste- 

caraciépsée par #08 OR ment, par la disposition, de ses 

LAN Hi ee zones  d'accroissement  succes- 
sives, à prendre la forme arrondie. J'ai eu la chance de pouvoir 
suivre le processus par lequel cet arrondissement s’accomplit. 

Comme il vient d'être dit, chez les Chames, comme d’ailleurs 
chez tous les autres Acéphales, le Higament qui ue au niveau 
du crochet s'étend peu à peu d'avant en arrière. Les zones 
d'aceroissement de la coquille, ainsi que l'a reconnu pour 
l'ensemble des Acéphales F. Bernard (95), débutent, d'autre 
part, en arrière, au point où le ligament s'est arrêté après 
chaque période d’accroissement : le ligament S'avance en même 
temps qu'une zone calcaire se forme ; le ligament avance 
à nouveau et il se forme en même temps une nouvelle zone 
calcaire et ainsi de suite. Si le ligament et la coquille croissent 
avee une rapidité ou mieux une intensité à peu près égale, 
il est facile de concevoir que le premier s'étendra suivant une 
ligne à peu près droite d'avant en arrière, qui rencontrera per- 
pendiculairement les zones d’accroissement. C'est ce que l'on 
observe chez l'Anodonta cygnea Lmck, par exemple, dont le 
ligament est à peu près rectiligne. Mais, cet équilibre entre 


TT mm, 


TE  — ——  o —  —  — S 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 319 


l'intensité de croissance du ligament et l'intensité de croissance 
de la coquille peut, dans certains cas, ne pas exister ; c'est ce 
qui se produit, par exemple, pour un certain nombre d’Acé- 
phales, comme l’/socardia, par exemple. Chez les Chames les 
choses ont une tendance manifeste à se passer de la même 
facon. Lorsqu'elles se fixent, quoiqu'encore de petite taille 
! 2 ee | 

3 US de millimètre) elles sont, au point de vue ontogé- 


_ 


nique, déjà assez avancées et après la fixation, le ligament conti- 
nue à croitre avec une inten- 7 


sité telle que la coquille 
semble ne pas pouvoir le sui 2 
vre. Une couche calcaire se 
dépose eten même temps Île 
ligament parcourt un grand 2 
espace le long du bord posté- 
rieur de la coquille, avant que 
la couche calcaire suivante 
n'ait commencé à se dévelop- 
EE Il en résulte HUE le liga- Fig. 43. — Schéma destiné à indiquer le 
ment au lieu de suivre une mode d’enroulement des crochets chez 
noidroite comme tichez enr sr cb entoure 
S , côté postérieur; 1, ligament ; 2, couches 
l’Anodonta cygnea Lmck, calcaires concentriques. 
suit une ligne courbe le long 
du bord postérieur de la coquille et que chaque zone calcaire con- 
centrique de cette dernière commence toujours de plus en plus 
ventralement. Lorsque la coquille à en somme { millimètre de 
diamètre, son ligament s'étend suivant une ligne courbe depuis 
son crochet le long du bord postérieur de la coquille et les zones 
d’accroissement calcaire, au lieu de le rencontrer à peu près 
perpendiculairement, comme chez l'Anodonta cygnea Lmck, le 
rencontrent suivant un angle très aigu (Voy. fig. 43) (1). 

F. Bernard à montré que dans un Acéphale à ligament 
rectiligne, les choses se passaient absolument comme, si les 
valves tournant autour du higament comme autour d’une char- 
nière ets’écartant progressivement l'une de l’autre, la substance 


(4) ILest important de ne pas oublier que des phénomènes de croissance de 
la coquille et du ligament sont absolument concomitants. 


320 R. ANTHONY 


calcaire tendait à remplir continuellement l'espace laissé libre 
entre les bords. 

Chez la Chame, par le fait que le ligament au lieu de suivre 
dans son développement une marche rectiligne, suit une marche 
curviligne, l'axe autour duquel tournent les valves tend à se 
déplacer progressivement d'avant en arrière, restant toujours 
tangent au bord ligamentaire ; il s'ensuit que les valves tendent 
de plus en plus à s’écarter Pune de l'autre en avant et que le 
ligament se fend de plus en plus dans sa partie antérieure, 
c'est-à-dire la plus ancienne. En outre, comme chaque nouvelle 
couche calcaire tend à remplir constamment l'espace laissé 
libre par l'entrebäillement des valves, ils s'ensuit que Papport 
de calcaire s'étend de plus en plus en avant à mesure que le 
ligament se déplace vers l'arrière, empiétant toujours sur la 
partie antérieure divisée de ce dernier. ILest facile de se rendre 
compte qu'un enroulement dans le sens de la flèche est le 
résultat final de tout ceci et que le contour sagittal arrive à être 
complètement arrondi. 

En résumé done, la fixation semble provoquer une tendance 
à l'acquisition de la forme arrondie qui s’acquiert par enrou- 
lement, lequel est rendu possible par la rapidité et l'intensité 
de croissance du ligament, qui doit être un fait propre aux 
Chamidés comme aux /socardin par exemple. 

A mesure que l'animal vieillit, Le point l' se déplace vers l’ar- 
rière et la partie / #2 "du ligament décrit une hélice (Voy. fig. 23). 

Lorsque la fixation s'est établie, d'autres caractères appa- 
raissent. Ce sont d'abord ceux des ornements extérieurs de la 
coquille : les couches calcaires concentriques se déposent avec 
une telle rapidité et sont tellement serrées que les stries 
rayonnantes ne sont plus visibles; de plus, elles deviennent 
irrégulières, se couvrent de productions diverses el l'on arrive 
ainsi à cet aspect extérieur si particulier qu'ont les Chama 
iostoma Conr. par exemple, caractérisé par l'absence de stries 
radiales, et la présence de stries concentriques irrégulières 
couvertes d'épines, de tubercules ou de lames. 

Outre cela, les dents de la charnière changent d'aspect; à la 
valve fixée la dent cardinale 2 prend des dimensions CONSI- 
dérables ; à la valve libre, la dent 1 disparait, n'existant plus 


«à 
ss ee 
TS — ie TT — 

= AT A 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 321 


chez l'adulte qu'à titre d'exception, et encore très réduite ; la 
dent 3 etla dent latérale postérieure tendent à se confondre ; et, 
ainsis'établit la formule dentaire connue du genre Cana adulte. 


Physiologie. 


N'ayant pu me procurer de Chames vivantes et n'ayant pu, 
à plus forte raison, les observer dans leur milieu, j'ai dû 
nalurellement laisser de côté l'étude de leur physiologie spéciale 
qui, vraisemblablement, ne doit guère différer de celle des 
autres Acéphales, et me contenter au point de vue éthologique 
des observations des autres. C’est ainsi que je me suis rapporté 
aux descriptions de Saville-Kent (93) concernant les Chames 
qui vivent sur le grand récif-barrière d'Australie el à celles de 
François (89) qui, dans une correspondance qui fut publiée 
dans les Archives de Zoologie expérimentale, donne des détails 
sur le mode d'existence des Chames d'Océanie. Maïs c'est à 
M. Ch. Gravier surtout que Je dois les plus nombreux et les plus 
précis de mes renseignements éthologiques. M. Ch. Gravier, 
en effet, à accompli durant l'hiver 1903-190%, dans le golfe 
de Tadjourah, une mission du Ministère de l'Instruction 
publique. Je Jui avais indiqué avant son départ d'une façon 
tellement précise les renseignements qu'il m'était utile d'avoir, 
que les observations qu'il a recueillies ont à mes yeux une valeur 
sensiblement égale à celle qu'elles auraient pu avoir si elles 
avaient été prises par moi-même. 

Les Chames sont des Mollusques marins qui ontune aire de 
réparlition assez étendue suivant une large zone disposée de 
part et d'autre de l'Équateur. Elles sont déjà presque rares 
dans la Méditerranée et au delà, c’est-à-dire dans l'Océan 
Allantique, elles sont rarissimes [Voy. Chama Nicolloni (Dautz) 


signalée par Dautzenberg (92)]. I semble qu'il leur faille une 


certaine température et ce sont d'ailleurs, comme les Diceras et 


les Rudistes de jadis, des Mollusques constructeurs de récifs. 

Elles sont fixées en position pleurothétique par l'une de leurs 
valves, le plus souvent la gauche, quelquefois la droite sui- 
vant les espèces (1). 


(1) Je n'ai jamais constaté que dans la même espèce il y ait des individus 
fixés les uns par une valve, les autres par l’autre. 


ANN,. SC. NAT. ZOOL. AE | 


D9 R. ANTHONY 


La fixation se fait, pour un certain nombre d'espèces, par la 
région antérieure de la valve seulement, pour d’autres par l'en- 
semble de la surface valvaire. Chez les premières le plan sa- 
gittal est oblique par rapport à la surface de fixation ; chez les 
secondes, il est parallèle, C'est-à-dire le plus souvent hori- 
zontal. | 

Les Chames sont des animaux essentiellement littoraux qu'on 
trouve, soit dans la zone de balancement des marées, c'est- 
à-dire recouverts d'eau à haute mer, découverts à mer basse, 
soit dans la zone qui suit celle du balancement des marées, €’est- 
à-dire constamment recouverts d'une certaine épaisseur d'eau 
même pendant les marées les plus basses. À basse mer cette 
épaisseur ne dépasserait jamais, d'après M. Ch. Gravier, trois ou 
quatre mètres. 

D'après ce même auteur, les Chames auraient dans le golfe 
de Tadjourah deux habitats principaux : 1° sur les parties 
mortes des polypiers, et elles semblent rechercher les formes 
massives, ceux qui sont eux-mêmes le plus solidement fixés; 
ce sont les formes fixées par l'ensemble de leur valve (Chama 
brassica Reeve) qu'on trouve fixées aux polypiers comme un nid 
aux branches d'un arbre. Elles ne découvrent jamais complè- 
tement à mer basse. 

2 Sur des plateaux calcaires, et ce sontles formes fixées 
par la région antérieure seulement et qui découvrent à chaque 
marée. Lorsque les vagues ont dénudé un de ces plateaux cal- 
caires dont est formé le sous-sol de la région, on est à peu près 
sûr de trouver ce plateau recouvert d'un véritable champ de 
Chames fixées d'une façon si solide que l'intervention du 
ciseau et du marteau est presque toujours nécessaire pour les 
détacher. 

Celles qui se trouvent dans la partie haute du plateau, c'est-à- 
dire celles qui restent découvertes le plus longtemps à marée 
basse, sont le plus souvent logées dans de petites euvettes où 
elles peuvent conserver leur humidité, fait à rapprocher des 
conditions ordinaires d'existence déjà signalées des Moules de 
roche dans la baie de Douarnenez. M. Ch. Gravier a observé de 
ces champs de Chames au plateau du Serpent et aux îles Musha. 

Les formes de cette deuxième catégorie sont lisses, semblant 


— ee 2 —— 
| 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 123 


_ 


roulées, alors que les premières, qui vivent toujours sous une 
certaine épaisseur d'eau, présentent des ornements qui seraient 
très nets sans la gangue calcaire qui les recouvre. 

La raison de cette différence d'aspect est aisée à comprendre 
et fait songer que peut-être bien des espèces créées en raison 
de l'absence de tout ornement à la surface de leur coquille ne 
devraient pas exister. 

D'après M. Ch. Gravier, les Chames vivant sur les plateaux 
calcaires se rencontreraient souventgroupées par deux individus 
qui seraient de taille inégale. 

En somme, les Chames sont des animaux littoraux recherchant 
surtout les eaux chaudes et agitées et par conséquent claires et 
bien aérées. C’est l'éthologie habituelle des Dimyaires fixés en 
position pleurothétique. 

D'après les documents que j'ai consultés, il semble que pour 
les Chames les conditions d'existence soient à peu près les 
mêmes partout. 


Affinités. 


La question des affinités des Chames constitue un grave pro- 
blème. 

La plupart des auteurs s'accordent à faire des Chames des 
Cardiüdæ. C’est à côté de ces derniers d’ailleurs qu'on les classe 
le plus souvent dans les traités de Zoologie et dans les galeries 
de collections. 

Voyons sur quoi l'on peut baser cette opinion. 

Lorsqu'on écarte les deux valves d’une Chame d'espèce quel- 
conque et que l’on dilacère l’un des lobes de son manteau, la 
première chose qui saute aux yeux de l'observateur, c’est la 
branchie, grâce à laquelle on est immédiatement obligé de 
classer l'animal dans le groupe des Eulamellibranches, c'est- 
à-dire des Acéphales à branchies tretllagées. On ne tarde pas à 
S'apercevoir ensuite que les deux lobes palléaux sont réunis, 
ne laissant que trois ouvertures, deux siphonales et une pé- 
dieuse, ce qui oblige immédiatement à penser que les Chames 
Acéphales fixées en position pleurothétique dérivent d’ani- 
Maux primilivement céphalothétiques. La séparation très nette 


324 R. ANTHONY 


entre l'orifice inspirateur et l'ouverture pédieuse, nous font éli- 
miner parmi ces derniers, tous ceux de la première cätégorie 
(Submytilacea et surtout les Carditidæ dont on pourrait être 
tenté de les rapprocher (1); le peu de longueur des tubes 
siphonaux, la disposition du ligament, nous font également 
éliminer ceux de la troisième, parmi lesquels, au contraire, doit 
être recherchée l'origine des Myochamidæ et des Chamostreidæ 
dont il sera question plus loin. Les Chames semblent donc être 
dés céphalothétiques de la deuxième catégorie adaptés à la fixa- 
tion pleurothétique. 

Examinons maintenant les différents organes ef appareils de 
Chamidés en essayant de les rapprocher de ceux des animaux 
de ce groupe avec lesquels ils peuvent avoir quelque affinité. 

Coquille : Un caractère qui au point de vue de la recherche 
des affinités peut avoir une grande importance, est celui qu'on 
tire de leur ornementation. Sur les Chames adultes, l'ornemen- 
tation est difficilement caractérisable. Outre que la coquille est 
le plus souvent recouverte de différentes productions qui en 
cachent les détails, les épines, les lames et tubercules des stries 
concentriques prennent une telle importance que beaucoup 
de détails des stries radiales deviennent méconnaissables. Ce 
n'est donc pas sur les coquilles de Chames adultes qu'il semble 
qu'il faille rechercher les caractères de parenté. Sur les formes 
jeunes au contraire non encore fixées, les ornements sont très 
spéciaux el se rapprochent infiniment de ceux que l'on rén- 
contre à l'état adulte chez certains Vénéridés, comme s'accordent 
à l'affirmer Jackson (90), F. Bernard (97) et moi-même; 1ls 
n'ont aucun rapport avec l'ornementation des Cardidés ainsi 
que Douvillé en fait la juste remarque. Mais la dentition des 
jeunes Chames se rapproche absolument de celle des Cardüdæ 
adultes, et plus particulièrement de celle du genre Zitho- 
cardium, chez lequel comme chez les Chames la dent latérale 
antérieure à disparu. 

Ligament : Chez les Chames, le ligament est comme chez les 
Tridacnes, un peu moins externe que chez les Card. 


(1) Il ne serait pas admissible en effet que des Carditidæ aient pris par le fait 
de la fixation pleurothétique une disposition caractéristique des formes 
céphalothétiques déjà très évoluées. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 325 


. Manteau : Nous n’y reviendrons pas, il rappelle absolument 
par la disposition de ses orifices, les Céphalothétiques de la 
deuxième catégorie, dans laquelle entrent les Cardium. 

Branchies : Chez les Chames, nous l'avons dit, les branchies 
sont treillagées, plissées et la lame interne possède à l'exelu- 
sion de la lame externe le long de son bord libre une gouttière 
longitudinale. Chez les C'ardium et chez les Tridacnes ces mêmes 
caractères existent. (Voy. au sujet du plissement des bran- 
chies des Chames, Tridacnes et Cardiun, Pelseneer (91). 
La branchie de la Chame est très semblable à celle d'un 
Cardium. 

Tube digestif : Le tube digestif des Chames est par rapport à 
celui du Cardium edule (Linn.) et du Cardium Noriwegicum 
(Speng.) où nous l'avons étudié, extrêmement simple [Voyez à 
ce sujet, la figure de Johnstone (00). Mais cette considération 
ne suffit pas pour éloigner les Chames des Cardidæ, chez les- 
quels d’une espèce à l’autre les plus grandes variations existent 
dans la disposition du tube digestif. 

Organes excréteurs et génitaux : Les organes excréteurs et 
les organes génitaux n'offrent rien de particulier chez les 
Chames. Comme chez elles, ils débouchent chez le Cardium 
Norwegicum (Speng.) dans une papille unique semblablement 
placée. 

En résumé, par leurs caractèresles plus généraux, les Chames 
sont, Sans qu'il ÿ ait aucune espèce de doute possible à ce sujet, 
des Dimyaires céphalothétiques de la deuxième catégorie fixés 
en posilion pleurothétique. La forme et la place de leur liga- 
ment, la disposition de leurs orifices palléaux le prouvent. 

À un point de vue plus particulier, elles semblent être des 
descendants de Cardidæ etles arguments qui militent en faveur 
de cette manière de voir peuvent être tirés surtout de la cons- 
litution des branchies, de la disposition des dents, de la char- 
nière. 

Quant à la position du ligament, à l'ornementation de la 
coquille jeune qu’on ne retrouve pas identique chez les Car- 
ddæ et chez les Chames et sur laquelle on s'appuie parfois 
pour séparer ces deux groupes, je ne crois pas qu'il faille leur 
attacher une trop grande importance. En ce qui concerne l'orne- 


326 R. ANTHONY 


mentation en particulier, n'en voit-on pas dans à seule famille 
des Vénéridés de très différentes (1). 

Il me semble, en somme, que les Chames actuelles peuvent 
être considérées comme provenant probablement de Cardüde 
analogues par leur forme aux Lithocardium, c'est-à-dire 
inéquilatéraux. Il est d'ailleurs à remarquer que les Tridacnes 
qui viventsensiblement dans les mêmes régions que les Chames 
proviennent aussi et avec plus de certitude de formes litho- 
cardioïdes. 

Leur apparition brusque avec tous leurs caractères dans les 
couches de Gosau (Crétacé supérieur) empêche de les consi- 
dérer comme des ancêtres des Dicératinés qui ont débuté à 
la fin du Jurassique, beaucoup plus tôt par conséquent. Les 
Chaminæ et les Diceratinæ semblent être deux branches sœurs 
provenant de la même souche, s'en étant détachés à deux 
époques différentes, mais ayant évolué à peu près dans le même 
sens. L'évolution du phylum des Chames est actuellement 
moins avancée que ne l'était celle du phylum des Diceras au 
moment de leur disparition. 


Morphogéne. 


Deux conditions d'existence ont pu contribuer à l’établisse- 
ment de la forme spéciale des Chames, c'est à savoir le pleuro- 
thétisme et la fixation. 

Le pleurothétisme, comme il à été dit plus haut, amène la 
substitution d'une symétrie coronale à la symétrie sagittale 
primitive. Les deux valves semblables chez les formes eu- 
thétiques, deviennent ici de plus en plus dissemblables, la 
supérieure tendant à s'aplatir et à prendre la forme opercu- 
laire et l'inférieure, par le fait de la pesanteur agissant sur 
les organes tendant à se creuser de plus en plus [Voy. Hyatt 
(80) et Edm. Perrier (04), à propos du rôle morphogénique de 
la pesanteur sur les formes fixées]. En même temps, les deux 
extrémités antérieures et postérieures tendent à se ressem- 
bler. C’est donc une tendance à l'établissement de cette symé- 


(1) Les jeunes Tridacna elongata Lmck. d'ailleurs ont une ornementation 


qui ressemble singulièrement à celle des jeunes Chames avant la fixation. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 97 


trie radiaire qui parmi les Rudistes atteint la perfection pour 
ainsi dire chez les Puonæa et les Barretia. 

Quant à la fixation, elle peut, comme je l'ai dit plus haut, se 
faire chez les Chames suivant deux modes : 1° par l’ensemble 
d'une valve, et alors le plan sagittal est parallèle au plan de 
fixation ; 2° par la partie antérieure seulement d'une valve, ce 
qui, d’ailleurs, est le cas le plus fréquent, et alors le plan sagittal 
est plus ou moins incliné sur le plan de fixation. Suivant l’un ou 
l'autre de ces cas, la morphologie de la Chame est modifiée 
d'une façon différente. En tous cas, il est certaines modifications 
qui sont constantes quel que soit le mode de fixation, c'est à 
savoir la régression des siphons caractéristiques des formes 


céphalothétiques ancestrales et celle du pied que nous avons 


suivie plus haut avec détails. 

Comment est-1l possible d'expliquer que certaines Chames se 
fixent les unes par l’ensemble d’une de leurs valves et les autres 
par la région antérieure seulement. 

Les premières, on se le rappelle, semblent, d’après les obser- 
vations de M. Ch. Gravier, se trouver uniquement dans les 
polypiers (Chama brassica), les autres au contraire sur des 
plateaux calcaires plans (Chama iostoma et Chama Ruppelli) . 

Les une et les autres affectent très vraisemblablement avant 
leur fixation une forme lithocardioïde. Si donc, une jeune 
Chame de forme lithocardioïde tombe sur un fond recouvert de 
branches de polypiers, on conçoit qu'elle sera arrêtée par ces 
branches sur lesquelles elle à toutes sortes de raisons de rester 
posée de telle façon que son plan sagittal soit à peu près hori- 
zontal à la facon d'un nid dans un buisson. Si, au contraire, elle 
tombe sur une surface plane, on conçoit que, de par le fait de sa 
forme même, elle ne pourra reposer que sur la partie antérieure 
ou la partie postérieure d’une de ses valves. Or, la fixation se 
fait toujours par la région antérieure. On pourrait se demander 
pourquoi. La raison en est extrêmement simple, semble-t-il : 
comme chez tous les Acéphales, chezles jeunes Chames, l'entrée 
et la sortie de l’eau se font exclusivement par la région posté- 
rieure, Il est donc naturel que cette région soit dirigée en haut ; 
si elle était dirigée en bas, l'entrée et la sortie de l’eau ne 
pourraient facilementse faire. Les efforts de la jeune Chame non 


328 R. ANTHONY 


encore fixée, dont le pied doit d’ailleurs être plus développé que: 
celui de l'animal adulte, doivent donc tendre à lui faire occu- 
per la position qui lui est la plus favorable à l'entrée et à l'éva- 
cuation de l'eau. C’est la réalisation de l'attitude avantageuse 
sur le rôle de laquelle, dans la constitution des formes ani- 
males, Edm. Perrier à tant insisté. 

Lorsque la fixation se fait par toute la valve entre les branches. 
d'un polypier, c’est le contour sagittal qui s’arrondit et l’arron- 
dissement se fait de la façon décrite au paragraphe de l’em- 
bryogénie; chez la Chama brassica Reeve représentée dans la 
figure 8 de la planche IT il est pour ainsi dire parfait. 

Lorsque la fixation se fait par la région antérieure de la valve, 
c'est cette région seule qui tend à s'arrondir. Dans ce cas, on 
se Le rappelle, la région fixée fait avec la région postérieure qui 
ne l’est pas, un angle approchant souvent de 90°. L’arète de cet 
angle dièdre qui sépare les deux régions antérieure et posté- 
rieure, correspond à l’arête des Lithocardium. Seulement, au 
lieu d'être droite comme chez les derniers, elle est courbe, 
décrivant une spire ainsi que le montre la figure 32. C'est par 
cette direction spéciale de larète valvaire que se caractérise, 
dans le cas de fixalion antérieure, la tendance à l’arrondisse- 
ment de la région fixée : voyons en effet comment dans ce 
cas l'arrondissement s’accomplit. Aussitôt la fixation produite, 
la coquille commence à se développer suivant le mode naturel 
dont il à été question et caractérisé par l'accroissement rapide 
du ligament qui s'étend d'avant en arrière, suivant une surface 
courbe, rencontrée par les couches calcaires successives sui- 
vant des angles aigus ; les crochets commencent à s'enrouler 
en avant. Chaque nouvelle couche calcaire se dirige d'abord 
suivant le plan postérieur, c’est-à-dire vertical, puis, arrivée 
au point de rebroussement se replie pour suivre la direction 
du plan de fixation. Ces points suivant lesquels les couches. 
calcaires se replient se disposent les uns à la suite des autres, 
mais au lieu de se disposer en ligne droite, 1ls se disposent de 
telle facon que la surface de fixation tend à se rapprocher 
de plus en plus d’une surface circulaire. Chaque point de 
rebroussement est, en somme, sollicité d'une part par le fait 
de la fixation, à suivre la direction d’une circonférence, 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 329 


d'autre part, il est sollicité à continuer la direction de la zone 
d'accroissement, il s'ensuit que la limite externe des deux 
zones, fixée et non fixée, serait en quelque sorte la composante 
de ces deux directions. 

Ainsi s'explique la forme spéciale des Chames fixées par leur 
région antérieure, leur pointe ventrale etl’obliquité de leur plan 
sagittal. 

De plus, par le fait de la pesanteur et de l’action corrodante des. 
eaux agités, la surélévation de la partie postérieure au-dessus 
du plan de fixation tend à diminuer, et le plan sagittal tend à 
devenir de plus en plus parallèle au plan de fixation. 

Le rapprochement des deux muscles adducteurs en arrière, 
la libération des branchies, l'accolement des palpes labiaux 
aux lobes palléaux semblent en rapport avec l'arrondissement. 

Il ne semble pas que les plissements des branchies puissent 
ètre considérés comme une conséquence de l'arrondissement, 
puisque ces plissements existent déjà chez les Cardüun. 

Les valves fixées des Chames ne présentent pas la structure 
cloisonnée qui est la caractéristique de celles de beaucoup 
d'Acéphales fixés, tels les Huîtres et les Æthéries. 


CHAPITRE III 


MYOCHAMIDÆ 


Historique. — Ce sont des animaux rares et vivant sur 
une aire de répartition peu étendue. Ils ont été extrèmement peu 
étudiés. En faisant abstraction des mentions et des descrip- 
lions de coquille qui en sont faites dans les ouvrages de détermi- 
nation et de systématique pures, on ne peut trouver à leur sujet 
qu'un seul mémoire anatomique de Hancock (33), se rapportant 
à la Wyochama, qui est le seulgenre de la famille. Quoique peut- 
être insuffisant, ce mémoire constitue, surtout si l'on tient compte 
du temps où il a été écrit (1853), un document morpholo- 
gique précieux. 


390 R. ANTHONY 


Inutile d'ajouter que l'embryogénie et la physiologie de ces 
animaux sont totalement inconnues. 

Il n'existe pas de Myochama fossiles. 

La Myochama à Yétude de laquelle je me suis attaché, est 
la Myochama anomioïdes Slutch. dont un certain nombre 
d'exemplaires (coquilles sèches seules) existent dans les collec- 
tions de Malacologie du Muséum et de Paléontologie de l'École 
des Mines. 


Morphologie. 


Coqlle. — Les Myochama anomioides Stutch. sont fixées par 
leur valve droite sur les coquilles d'autres Mollusques. La surface 
de fixation est large, s'étendant aussi bien sur la région posté- 
rieure que sur la région antérieure de la coquille. La valve fixée 
est généralement mince, et cette minceur atteint parfois un de- 
gré tel que les différents ornements de la coquille sur laquelle la 
Myochama vit fixée s'impriment sur la face intérieure dela valve 
de cet animal. Les ornements extérieurs de la valve libre con- 
sistent essentiellement en stries radiales souvent bifurquées sur 
lesquelles on peut apercevoir, les croisant perpendiculairement, 
les stries d’accroissement. De plus, comme on l'observe chez les 
Anomia, lornementation de la coquille sur laquelle se fixe la 
Myochame influe sur l'ornementation de cette dernière. C'est 
ainsi qu'aux stries radiales propres de la Myochama viennent se 
superposer sur la valve libre d'autres stries qui sont la con- 
tinuation de celles, radiales ou concentriques, de la coquille 
Servant de substratum. Suivant la position et l'orientation de la 
Myochama, ces dernières croisent suivant un angle variable 
les stries radiales propres. 

Les Myochama sont légèrement nacrées sur leur face inté- 
rieure. Leur forme est irrégulière, mais présentant une ten- 
dance marquée à l'arrondissement. Toutefois, elle n'a pas 
encore complètement perdu sa forme allongée d'avant en 
arrière, caractéristique des formes céphalothétiques dont elle 
semble provenir. L'allongement porte tantôt sur la région anté- 
rieure, tantôt sur la région postérieure; et, le polymorphisme 
de ces animaux atteint un degré tel, que je ne serais pas éloigné 
de croire que toutes les espèces décrites de Myochama se rap- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES sd 


portent à une seule et même espèce, diversement modifiée par la 
forme du substratum et des conditions de fixation multiples. 

Les crochets ne sont pas enroulés. 

La charnière des Myochama est simple. 

Elle ne comprend pas de dents à proprement parler. Souvent 
néanmoins, de chaque côté de la fossette ligamentaire, dont il 
sera question tout à l'heure, existent deux crêtes allongées mal 


Fig. 44. — Reconstitution d'après les données de Hancock de la coupe sagittale 
possible de la Myochama anomioïdes Stutch. — 1, bouche ; 2, anus ; 4, muscle adduc- 
teur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur; 7, orifice inspirateur; 8, orifice 
expirateur ; 9, orifice pédieux; x, quatrième orifice palléal. 


limitées sur la valve fixée et qui s’introduisent dans deux ca- 
vités semblables de la valve libre. Toutefois cette disposition ne 
semble pas constante. 

Le ligament, très réduit comme chez les Céphalothétiques les 
plus évolués, est logé dans une fossette triangulaire. N'ayant 
eu que des coquilles sèches à ma disposition, 1l m'a été impos- 
sible de faire de ce ligament une étude telle que j'aurais désiré 
la faire. Sur les bords de la fossette s’insère la partie fibreuse 
de ce ligament. Quant à sa portion élastique, elle s’insère au 
fond de la fossette sur l’une et l'autre valve. À son intérieur est 
un pelit osselet de forme pyramidale, dont la pointe est dirigée 
dorsalement alors que la base regarde le bord libre des valves. 

Les impressions des muscles sur les valves sont étendues, sub- 
arrondies et l'impression palléale possède un sinus très marqué. 

Parties molles. — Je vais me borner à décrire ici très briève- 
ment l'anatomie des Myochamidæ d'après Hancock (53). 

Chez ces animaux, les lobes du manteau très inégaux sont 


292 R. ANTHONY 


minces et translucides ; ils sont réunis, ne laissant entre eux 
que quatre orifices, deux siphoniens, un pédieux, et un qua- 
trième tout petit situé entre l'orifice pédieux et l'orifice inspira 
teur. Les siphons n'ont pas encore complètement disparu et se 
présentent sous la forme de deux tubes séparés assez allongés, 
surtout l’expirateur. Des deux muscles adducteurs, l'antérieur 
estsouvent plus allongé en coupe transversale que le postérieur. 

L'après les figures de Hancock (53), la bouche semblerait 
dorsalement disposée par rapport au musle adducteur antérieur. 
Elle est munie de quatre palpes dont les antérieurs ne semblent 
pas, comme chez les Chames, adhérents aux lobes palléaux. Les 
branchies seraient, chez les Myochama, assez compliquées ; 
elles sont treillagées ; chaque branchie se compose, comme d'ha- 
bitude, de deux lames ; la lame interne, semblable à celle des 
autres Acéphales, ne présente rien de particulier, la lame ex- 
terne, au contraire, très peu développée, est réduite à son 
feuillet direct; la disposition est un peu analogue à celle des 
Chames, mais la réduction de la lame branchiale externe 
semble encore plus accentuée. La membrane interbranchiale 
est percée d’un orifice faisant communiquer les chambres 
rélro-branchiales et palléales. Les branchies présentent des 
plissements transversaux. 

Le pied est petit, triangulaire, rappelant un peu celui des 
Chames. 

L'auteur ne donne aucun détail sur les appareils digestifs, crr- 
culatoires et nerveux. 


Embryogénie. 


L'embryogénie des Myochama est complètement inconnue, 
et, les matériaux qui avaient été mis à notre disposition ne nous 
ont pas permis de combler cette lacune. Notre plus petit exem- 
plaire avait encore 7 millimètres de longueur maxima et ne pré- 
sentait aucune différence avec les adultes. 


Physiol qgie. 


La Myochama anomioïides Stutch. a une aire de répartition 
assez restreinte. On la trouve uniquement localisée en un point 


oo TS TE OS — A 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 339 


des côtes d'Australie. Elle vit fixée, toujours par sa valve droite, 
sur des coquilles de Gastéropodes ou d'autres Acéphales telles 
que des Trigonies, des Pectunculus. Étant donnés les animaux 
sur lesquels elles se fixent, tout fait supposer que les Myochames 
vivent non loin des côtes dans la zone qui suit immédiatement 
celle du balancement des marées. 


On conçoit combien il devait m'être difficile de traiter la 
question des affinités des Myochamidæ, n'ayant pu avoir à ma 
disposition d'animaux pourvus de leurs parties molles. 

J'ai donc dû pour cela me baser uniquement sur les carac- 
tères de la coquille, et, quant à ce qui concerne les parties molles, 


* 


Jai dù tabler sur les seules descriptions de Hancock (53). II 


est d'abord un caractère qui semble peu se modifier suivant le 
genre de vie, puisque des Acéphales de toutes adaptationsle pos- 
sèdent : c'est celui de la présence de la nacre. De quels Acéphales 
dimyaires nacrés peut-on rapprocher la Wyochama? Les Trigo- 
nies, en raison de la structure primitive de leurs branchies et 
la forme spéciale de leurs dents, les Unionidæ, pour des raisons 
multiples (deux ouvertures seulement au manteau, existence 
fluviatle.…..) doivent être éliminés. Il ne reste plus alors que le 
groupe des Aratinidæ. Un autre caractère extrêmement impor- 
tant vient encore affirmer la parenté des Myochames et des Ana- 
tines, la présence d'un lithodesme dans le ligament élastique. 
Or, de tous les Acéphales, les seuls qui possèdent ce caractère 
semblent être les Anatinidæ et les Tellinidæ avec leurs alliés. 

La parenté des Myochama avec ces deux groupes très voisins 
est done des plus probables. Elle S'affirmera bien davantage 
lorsque l’on aura fait remarquer que, comme les Anatinideæ 
et les Tellinidæ encore (à l'exception des Psammobia), les 
Myochamidæ possèdent une lame branchiale externe dépourvue 
de feuillet réfléchi et dorsalement ascendante. Au point de vue 
du développement de la nacre, elles tiennent le milieu entre les 
Anatnes si admirablement nacrées et les Tellines à coquille 
porcelainée. 

Enfin, le sinus palléal qu'elles possèdent encore vient avec la 


394 R. ANTHONY 


longueur de leurs siphons fournir un nouvel argument à cette 
manière de voir, en indiquant bien nettement, ainsi que leur 
ligament externe, qu'elles proviennent de Céphalothétiques de 
re troisième catégorie. 

En résumé donc, les Myochames semblent être des Anati- 
nidæ modifiés par la fixation pleurothétique. 


Morphogénie. 


Quelles modifications la fixation pleurothétique a-t-elle fait 
subir à ces animaux qui semblent avoir été primitivement des 
Céphalothétiques de la troisième catégorie. 

Le pleurothétisme seul semble d'abord avoir amené, comme 
c’est le cas général, une substitution de la symétrie coronale à la 
symétrie sagittale. Cette substitution se manifeste par une dis- 
semblance des deux valves, dont l'inférieure, fixée par toute son 
étendue, épouse le substratum. 

De plus, le côté antérieur et le côté postérieur tendent à se 
ressembler. De même, le lithodesme symétrique, par rapport 
au plan sagittal et asymétrique par rapport au plan coronal des 
Anatines, tend à devenir symétrique par rapport à ce dernier 
plan en prenant la forme d'une pyramide presque régulière 
à base carrée et orientée comme il l'a été dit. 

La fixation, d'autre part, amène, elle aussi, un certain nombre 
de modifications. C’est d’abord l'arrondissement de la surface 
de fixation. Cet arrondissement s'accomplit d’une façon assez 
simple : par le fait que l'animal duquel dérive les Myochames 
semble avoir été un Céphalothétique de la troisième catégorie, 
son ligament devait être assez réduit dans le sens antéro-posté- 
rieur et situé exactement en face de crochets, comme cela existe 
chez les Anatines, par exemple. De cette disposition il résulte, 
comme l'on sait, que la croissance de la coquille doit se faire 
chez des animaux de ce type d’une façon symétrique, c’est-à-dire 
qu'elle croît à peu près autant en avant qu'en arrière et qu'il 
n'y a pas la moindre tendance à l’enroulement des crochets 
en avant. 

Lorsque des animaux de ce type se fixent comme le font les 
Myochames par toute la surface d'une de leurs valves, la forme 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 3930 


arrondie s'acquiert, par une simple disposition régulière des 
couches calcaires, lesquelles deviennent de plus en plus étroites 
en arrière eten avant, et, au contraire, de plus en plus larges 
dans la région ventrale. On conçoit que par ce processus, en 
tout analogue à celui par lequel s’accomplit l'arrondissement 
des Dimya, la coquille puisse arriver à prendre un aspect tout 
à fait arrondi sans qu'il y ait enroulement ou pseudo-plicature ; 
les crochets restent droits et le ligament déjà réduit presque 
à un point, et pour des raisons tout autres expliquées précé- 
demment, chez les Céphalothétiques ancestraux, conserve à peu 
près sa forme. 

Enfin, toujours sous l'influence de la fixation, les siphons et 
le pied diminuent. 

La grandeur relative du pied, des siphons et l'arrondissement 
encore imparfait des Myochames montrent que ce sont, comme 
le prouve d'ailleurs la date de leur apparition, des formes 
éminemment récentes. 


CHAPITRE IV 


CHAMOSTREIDÆ 


Historique. — Comme les Myochamidæ, les Chamostreidæ 
sont des animaux rares et, comme eux, ont été extrêmement peu 
étudiés. 

Le seul mémoire anatomique qui les concerne est encore de 
Hancock (53), et contient les principales indications morpho- 
logiques intéressantes ayant trait à ces animaux. 

Leur embryogénie et leur physiologie sont comme celles des 
Myochamidæ totalement inconnues. 

Il n'existe pas de formes de Chamostreidæ fossiles connues. 

La Chamostrea à l'étude de laquelle je me suis attaché est la 
Chamostrea albida Lmck dont quatre exemplaires (coquilles 


sèches seulement) existent dans les collections de Paléontologie 
de l'Ecole des Mines. 


3306 R. ANTHON 


Morphologie. 


Coquille. — Les coquilles de Chamostrea albida Lmcek. pré- 
sentent extérieurement une teinte rosée et leur intérieur est 
généralement nacré. Tous les exemplaires qu'il m'a été donné 
d'observer étaient fixés par la valve droite, et Hancock (53) 
avait, d'ailleurs, fait la même constatation sur ceux qu'il avait 
eus à sa disposition. De plus, la fixation se fait toujours par la 
région antérieure, et, comme chezla Chama Ruppellü Reeve par 
exemple, la région postérieure fait un angle dièdre à peu près 


CL ZA 
LLL LL LL 
ZI 
Fig. 45. — Coupe transversale de Chamostrea albida Limck. en position fixée. Les 


hachures indiquent le substratum. — f, surface antérieure fixée ; 4, muscle adduc- 
teur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur. 


droit avec cette région antérieure fixée; il en résulte une sorte 
d'arète courbe parcourant la valve fixée depuis le crochet 
jusqu'au milieu de l'impression palléale ventrale, arête qui 
rappelle celles que nous avons vues chez beaucoup de Chames 
et qui, chez les Toucasia et les Gyropleura attemt son maximum 
de netteté. 

Les ornements extérieurs de la coquille consistent en stries 
d'accroissement très nettes sans la moindre trace d'épines ou de 
stries rayonnantes. Dans la région antérieure de la valve les 
striesd'accroissement ontl'apparence plissée, froncée en quelque 
sorte. Les crochets sont très visibles et nettement prosogyres. 

Le contour sagittal, allongé dorso-ventralement, se termine 
dans la région ventrale, comme chez les Chames fixées par leur 
région antérieure, par une partie anguleuse correspondant à 
l'arète courbe dont il vient d'être question. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES A1 


La charnière de la Chamostrea albida Lmck. est très spéciale. 
À la valve libre elle présente une cardinale antérieure qui s'in- 
troduit dans une cavité correspondante de la valve fixée : en 
arrière de la dent, est la surface d'attache du ligament élastique. 
A la valve fixée, en arrière de la cavité, est une autre cavité 
plus spacieuse sur là paroi supérieure de laquelle $'insère égale- 
ment le ligament. 

Étant donné l’état des matériaux que j'avais à ma disposition, 
Je n'ai pu étudier ce ligament, d’ailleurs relativement réduit, 
comme je l'aurais désiré. Tout 
ce que je puis dire à son sujet, 
c'est que sa partie élastique est 
interne. Elle s'insère, d'une 
part, sur la surface signalée 
de la valve libre et sur la paroi 
supérieure de la cavité liga- 
mentaire de la valve fixée, 
d'autre part, sur la face supé- 
rieure d'un osselet réniforme 


Fig. 46. — Reconstitution d'après les 
données de Hancock de la coupe sa- 


dont la concavité est dirigée gittale possible de Chamostrea albida 


Lmck. — 1, bouche ; 2, anus : 3, pied; 


en arrière el dont l'une des 4, musele adducteur antérieur : 5, mus- 


extrémités emplit la cavité cle adducteur postérieur: 7, orifice 


L : AS expirateur: 8, orifice inspirateur:; 9, ori- 
ligamentaire de la valve fixée.  fice pédieux. 


Chez les Chamostrea albida 

Lmck., les impressions musculaires sont très nettes. Celles 
des addueteurs sont grandes et celle de l'adducteur antérieur 
est très allongée dorso-ventralement. L'impression palléale est 


dépourvue de sinus. 


Parties molles. — C'est encore uniquement d'après Han- 
cock (53) que je vais résumer l'anatomie des Chamostreidæ. 
Elle à, d'ailleurs, beaucoup de rapport avec celle des 
Myochanmide. 

On y retrouve les quatre mêmes orifices du manteau, mais 
là, les tubes siphoniens sont beaucoup plus réduits que chez 
les Myochamu. 

La position de la bouche par rapport au muscle adducteur 
antérieur est la même. 

Les branchies aussi sont identiques à ce qu'elles sont chez 


ANN. SC. NAT. ZOOL. ie 


339 R. ANTHONY 


les Myochama, avec cette différence toutefois que le feuillet 
réduit est libre du côté externe, comme cela se passe souvent 
chez les Chames. 

On retrouve, en somme, chez les Chamostreidæ les mêmes 
caractères généraux que chez les 17 yochamideæ. 

J'ai cru bien faire en essayant de reconstituer la coupe sagit- 
tale de ces animaux en me servant des dessins publiés par 
Hancock (53) et des indications anatomiques qu'il donne. 


Embryogéme. 


On ne connait rien de l'embrvogénie des Chamostreidæ, mais 
tout porte à croire que le développement de la forme générale de 
la coquille définitive doive se faire d'après un processus très 
analogue à celui qui se produit chez les Chames fixées égale- 
ment par la région antérieure de la valve. 


Physiologie. 


Il n'y à également que très peu de chose à dire sur l'éthologie 
des Chamostrea, et la question semble épuisée lorsque l'on à noté 
que leur aire de répartition est à peu près la même que celle des 
Myochama, et qu'elles vivent fixées dans les conditions énoncées 
plus haut. Toutefois, la fixation, au lieu de se faire sur les valves 
d'autres Mollusques, se fait directement en sénéral sur le rocher, 
eLil ne serait pas étonnant que, ainsi que les Chames fixées 
par la région antérieure de leur coquille, elles soient des ani- 
maux de la zone du balancement des marées, alors que les 
Myochames seraient, comme Îles Chames, à zone de fixation 
totale des animaux ne découvrant jamais. 


Affinités. 


En dépit des hésitations de Hancock (53), qui fut, à mon 
avis, trompé par des caractères de convergence avec les 
Chames, je crois qu'il n'est pas possible d'hésiter à rapprocher 
les Chamostrea des Anaiinidæ. Leur parenté avec ce groupe 
me semble appuyée par les mêmes raisons, que celles qui en ont 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 339 


fait rapprocher les Myochumna. Leur mode de fixation, et 
peut-être la forme possible des types ancestraux, comme 
nous allons le voir, peuvent expliquer les différences entre les 
Myochames et les Chamostrées, ces dernières étant de beau- 
coup les plus évoluées. 


Morplogénie. 


Étant donné que les Chamostrea sont toujours, comme le sont 
un certain nombre de Chames, fixées par la région antérieure 
d'une de leurs valves, leurs caractères morphologiques peuvent 
s'expliquer d'une façon tout à fait analogue à celle dont on 
explique ceux des Chamidés fixés de la même facon. 

Toutefois, 1l est intéressant de faire remarquer qu'étant donné 
que les animaux, dont les Chamoslreidæ proviennent possèdent 
un ligament interne, on ne trouve pas chez ces Chamostreidæ la 
spirale ligamentaire des Chames et des Dicerus. 

Ce fait du ligament interne n'empêche pas d'expliquer l'en- 
roulement de la coquille. D'ailleurs, n°y a-t-il pas des formes 
voisines des Anatines, les Verticordiüdæ, qui, par l'enroule- 
ment très accentué de leurs crochets, rappellent les /socardia? 
Les Chamostrea ne pourraient-elles provenir de formes ana- 
logues, et ne pourraient-elles, au cours de leur développement, 
avoir un stade précédant la fixation et se rapprochant plus 
ou moins du stade lithocardioïde des Chames, ce qui expli- 
querait la constance de leur fixation antérieure ? 


CHAPITRE V 


ÆTHERIIDÆ 


La famille des Æheriidæ comprend les trois genres suivants : 

Ætheria (Düsomyaire vivant dans les fleuves de l'Afrique 
équatoriale : Niger, Nil, Sénégal, ete.). 

Bartlettia (Dianisomyaire vivant dans les fleuves de la Sud- 
Amérique équatoriale). 


340 R. ANTHONY 


Mulleria (Monomyaire vivant dans les fleuves de la Sud- 
Amérique équatoriale: Smith (98) et Woodward (98)-en ont 
récemment cependant décrit une forme vivant en Asie, aux 
Indes anglaises. 

Ces deux derniers genres s'éloignent du cadre de mes 
recherches. Leur morphogénie possible à d’ailleurs été briève- 
ment exposée dans la première partie de ce travail. 

Les conchyliologistes ont divisé le genre ÆTheria en nom- 
breuses espèces que Bourguignat (80) répartit en quatre sous- 
genres. ILme semble qu'il y ait là une exagéralion considérable ; 
toujours est-il qu'après une revision soignée de ce genre, Je 
suis arrivé à penser que toutes les Æthéries pouvaient être 
considérées comme constituant une seule et même espèce, 
toutes les formes différentes que l'on observe étant des modi- 
fications dues à l'action mécanique des eaux et au genre de vie. 

Au surplus, on trouvera dans le travail de Bourguignat (80), 
cité dans la bibliographie, l'énumération de ces nombreuses 
‘espèces. 

J'ai groupé les formes différentes que peuvent présenter les 
Æthéries en trois catégories correspondant à trois genres de vie 
différents et bien déterminés, et, pour lesquelles je prendrai 
respectivement comme types les rois espèces suivantes des 
auteurs : 

Ætheria tubifera Sow. 

Ætheria plumbea Sow. 

Ætheria Petretinn Bgt. 

Dans le premier groupe je comprends toutes les formes à 
épines tubuleuses vivant dans les eaux relativement tranquilles, 
comme par exemple l'Ætheria lubifera Sow. Certaines de 
ces formes peuvent atteindre des dimensions considérables par 
l'allongement de leur talon, comme l_Ætheria  Caillaudi 
Féruss. 

Dans le deuxième groupe je comprendrai les formes érodées, 
usées, roulées, vivant dans les courants violents et les rapides, 
comme l_Ætheria plumbea Sow. 

Le troisième groupe, enfin, comprendra la seule espèce 
Ætheria Petretini Bgt. qui possède l'épiderme, que les formes 
du groupe précédent ont souvent perdu, mais n'a pas d'épines. 


re ge mms EE 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 341 


Elle vit exclusivement fixée dans les conduites d’eau de 
Ramlé (Haute-Égypte). 

Les Æthéries sont des formes relativement récentes; elles 
ont fait leur apparition à l’époque quaternaire. 

Historique. — Ce sont des animaux très peu connus au point 
de vue anatomique, et je n'ai pu trouver à leur sujet qu'un 
seul mémoire anatomique, d'ensemble d’ailleurs insuffisant, 
contenant même quelques erreurs, celui de Rang et Caillaud 
datant de 183%. Pour être complet, ajoutons les détails que, 
dans un récent travail, Reis (02) donne sur le ligament des. 
Ætheride. 

L'embryogénie et la physiologie de ces animaux m'ont paru 
totalement inconnues. 

L'étude anatomique plus complète, que je crois avoir faite de 
ces animaux, m'a été rendue possible par ce fait que le Muséum 
d'Histoire naturelle en possède un certain nombre d’'exem- 
plaires bien conservés provenant de différentes missions et 
que M.Joubin à mis aimablement à ma disposition. En outre, 
les Æthéries étant très communes dans les fleuves de nos 
colonies africaines, 1l m'a été facile de m'en procurer en assez 
grand nombre, fixées et conservées d’après les procédés dont 
usent couramment les, histologistes, grâce à l’amabilité de 
M. Chevalier et du D' Decorse, médecin de l'armée coloniale. 
Pour l'observation des coquillessèches, j'ai utilisé les collections 
du Muséum et de l'École des Mines. 


Morphologie. 
Coquille. — Les Æthéries sont des Acéphales fixés par une 


de leurs valves, qui est tantôt la droite, tantôt la gauche, avec 
une fréquence à peu près égale ; dans la même espèce certains 
individus sont même fixés par une valve alors que d’autres le 
sont par l’autre, contrairement à ce qui se passe chez les 
Chames où tous les individus de la même espèce m'ont semblé 
toujours fixés par la même valve. La fixation se fait par une 
région très étendue de la coquille, s'étendant autant en avant 
qu'en arrière. Cette dernière est subarrondie et, comme 
beaucoup de coquilles d'Acéphales fluviatiles, elle est extérieu- 


342 R. ANTHONY 


rement verdâtre, et intérieurement toujours admirablement 
nacrée, comme celle des Unionidæ en général. 

Étudions séparément les caractères de cette coquille dans les 
trois formes : plumbea, tulifera et Petretinu. 

Bien que la forme {ubifera semble devoir être considérée 
comme la forme souche, nous commencerons, pour la com- 
modité de la description, par la forme plumbeu. 

2. Forme plumbea. — Dans la forme plumbea la coquille est, 
extérieurement, d’un vert sombre, et sa nacre interne d'une 
couleur que l'on peut qualifier de plombée ; il semblerait qu'elle 
ait été frottée de mine de plomb; c'est vraisemblablement en 
raison de cette particularité, et peut-être aussi en raison de la 
densité de sa coquille, que le nom de plumbea lui à été donné 
par Sowerby. Lourde et compacte, peu boursouflée, cette 
coquille rappelle souvent à première vue, et avant qu'on ail 
écarté ses valves, par son aspect condensé en quelque sorte, 
l'Ostrea edulis Linn. ou la Gryphea angulata Lmek. Sur cette 
forme on ne rencontre pas les épines tubulées caractéristiques 
de la forme {wbifera ; le mécanisme deleur disparition sera expli- 
qué plus loin. Toutefois, il est certains cas dans lesquels on en 
trouve des vestiges, ce qui m'autorise à supposer, avec Rang 
et Caillaud (34) d'ailleurs, que les épines tubulées sont carac- 
téristiques du genre ÆZtheriu et que, lorsque l'on n'en trouve 
pas, c’est qu'elles ont disparu mécaniquement. 

La valve libre tout entière, et les bords de la valve fixée, 
sont profondément érodés. roulés en quelque sorte. La forme 
du contour sagittal de la coquille qui est, comme il à été dit, 
subarrondie, est très variable, presque carrée dans certains cas, 
plus allongée dans d'autres, gauche et tourmenté, d'une forme 
indéfinissable dans quelques autres, semblant, en.un mot, 
épouser la forme du substratum sur lequel elle repose. La valve 
fixée, qui est toujours plus épaisse que la valve libre, présente 
souvent, et surtout dans la région dorsale, un feuilletage tres 
serré, un peu analogue à celui des Huitres et qui, comme la 
dit Jackson (90), est caractéristique de formes acéphales fixées. | 

Si on considère postérieurement une Ætheria de forme | 
plumbeu fermée et préalablement dépourvue de son ligament, | 
on s'aperçoit d'abord que les crochets sont absolument introu- | 


angle plus aigu. Il résulte de Fig. 47. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 349 


vables, ayant disparu probablement par le fait des érosions: 
on peut deviner toutefois leur place en se guidant sur le sens 
et la direction des stries d’accroissement. Un peu en arrière de 
cette place, où devraient exister les crochets, on voit que la 
valve fixée présente une sorte 
de sillon assez profond dont 
les bords sont arrondis etdont 
les parois ne tardent pas à 
s'accoler; ce sillon se dirige du 
substratum à l'espace interval- 
vaire et d'avant en arrière. La 
valve libre présente aussi un 
sillon dirigé de la même façon 
que celui de la valve fixée et 
aboutissant au même point de 
l'espace intervalvaire. Ce sillon 
est plus court en général que 
celui de la valve fixée et forme 
avec le plan intervalvaire un 


Ætheria plumbea Sow. (vue pos- 
ett lis ti FAURE térieure). — I, le ligament a été enlevé 
celle GISPOSILION Qu à eut pour laisser voir la pseudo-plicature ; 


point de rencontre les deux II, ligament en place ; a, arète liga- 
F mentaire : s, valve supérieure ; ?, valve 

sillons formentun angleouvert inférieure. 

en avant (Voy. fig. 47). En 


suivant le bord cardinal de Ja valve fixée, lequel à une épaisseur 


appréciable, on rencontre immédiatement en avant du sillon 


une sorte de gouttière très peu profonde et dont le fond serait en 
coupe une portion de circonférence de rayon très étendu. Cette 
gouttière est parallèle au sillon et existe aussi, quoique très 
courte et peu marquée, sur la valve libre. Enfin, en avant de 
cette gouttière, et parallèlement à elle, existe sur l'une et 
l’autre valve une sorte de bourrelet très peu marqué, arrondi. 
Le contour du bord cardinal d’une valve d’Æthérie ou, ce 
qui revient au même, la coupe du talon chez la forme {wbifera 
offre donc l'aspect représenté sur la figure 48 ; l'épaisseur déme- 
surée de la valve inférieure fait que ces différentes inflexions, 
sur lesquelles s'étend, ainsi qu'on le verra, le ligament, devien- 
nent un sillon, une gouttière et une crête. 


344 R. ANTHONY 


Si on considère maintenant une valve libre ou fixée d’'Ætheria 
plumbea Sow. par sa face intérieure, on y remarque d'abord 
l'aspect nacré et les boursouflures qui ont déjà été signalées ; 
on y voit, en outre, les traces des insertions des muscles adduc- 
teurs antérieur et postérieur, déchiquetées sur leur bord 
intérieur, celle du muscle antérieur étant souvent, fait très 
important, divisée en deux parties, l'une ventrale, plus allongée, 
l'autre dorsale, plus courte. L'impression palléale est très nette, 
discontinue, et sans sinus. La charnière est nulle, en tant que 
l'on désigne par ce terme l'ensemble des dents de la région 
cardinale, et il n’y a que dans certains cas que l’on remarque 
la présence d'une sorte de crête allongée, postérieure, qui 
pourrait peut-être représenter la grande dent latérale posté- 
rieure des Unio, bien qu'il semble plutôt que cette crête, 
contingente d'ailleurs, soit un simple accident en rapport 
avec la forme tourmentée de l'animal. Enfin, le bord cardinal 
donnant insertion au ligament présente un aspect tout spécial 
en rapport avec le sillon, la gouttière et la crête décrits plus 
haut. C’est d'abord une sorte d'éperon (sillon), puis, plus avant, 
une ligne courbe convexe (gouttière), enfin une ligne courbe 
concave (crête). (Voy. fig. 18, PL. IT.) 

Je n'ai point eu la prétention de faire ici une description 
complète et détaillée pouvant servir à la systématisation des 
coquilles d’Æthéries. C'est simplement une vue d'ensemble que 
j'ai voulu donner, m'occupant seulement des caractères qui, au 
point de vue de la compréhension de la forme Æthérie, peuvent 
avoir une certaine importance, et négligeant naturellement les 
multiples accidents que peuvent présenter les coquilles de ces 
animaux et qui sont en rapport avec la forme du substratum. 

Toutes les formes que J'ai groupées dans la même catégorie 
que lÆtheria plumbea Sow. ont, quant à leur coquille, la même 
forme générale que lÆ1heria plumbea Sow. elle-même. 

B. Forme tubifera.— Dans cette forme, qui semble devoir être 
considérée comme la forme originelle, la coquille est plus 
légère que dans la forme précédente, feuilletée, très boursou- 
flée sur sa face intérieure, donnant souvent même la sensation 
d'une sorte d'écume qui semble avoir valu au genre son nom 
d'Ætheria. La valve libre est très mince, la valve fixée est au 


Er 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 349 


contraire souvent plus épaisse, présentant parfois ce que les 
conchyliologistes appellent un talon et qui n’estautre chose qu'un 
accroissement en épaisseur de la zone de fixation. Ce talon, dont 
la production sera expliquée ultérieurement et qui peut 
parfois être très développé, est muni de cloisons transversales 
très nombreuses qui ne sont autre chose que des zones d’ac- 
croissement et que lon peut comparer à celles de certains 
Rudistes et de certaines Huitres. 

La couleur extérieure des valves est d’un vert clair; à 
leur surface on distingue un épiderme toujours très bien 
conservé; elles sont recouvertes d’épines tubuleuses qui pour- 
ralent peut-être Jouer un rôle dans la fixation de l'animal. 
Comme l'a fait remarquer Simroth (90), les épines tubuleuses 
qui garnissent le bord libre pourraient jouer le rôle de siphons 


et servir au passage de l’eau lorsque le poids des couches de 


limon empêche les valves de s’entr'ouvrir. Jamais ces coquilles 
ne sont roulées comme le sont celles des Æthéries de la forme 
plumbea ; leurs plus petits ornements sont souvent même admi- 
rablement bien conservés. La nacre interne ne présente pas la 
teinte plombée de celle des animaux se rattachant à la forme 
précédente. Les impressions musculaires et la région cardinale 
n'offrent rien de particulier. 

n’y aurait plus rien à diresurles Æ#heria de forme {uhifera, 
si une espèce, qui me semble devoirse rattacher à cette forme,ne 
présentait par le fait du développement considérable de son 
talon un intérêt tout particulier. Il s’agit de l'Ætheria Caillaudi 
Féruss. que je crois devoir décrire en détail, du moins au 
point de vue de sa coquille. La valve fixée de Ætheria Cail- 
laudi Féruss. présente un talon considérable qui peut atteindre 
parfois jusqu'à 50 ou 60 centimètres de long, et la valve fixée 
prend alors l'aspect d'une colonnette au sommet de laquelle 
se trouve une loge contenant l'animal. Cette colonnette est en 
général plus étroite à sa base qu'à son sommet où elle s'élargit, 
prenant ainsi en quelque sorte l'aspect d'un cornet de papier ou 
d'un tronc de cône renversé. La concavité qui la surmonte est 
en général assez profonde ; son ouverture, qui répond naturel- 
lement au plan sagittal de l'animal, au lieu d’être orientée sui- 

ant un plan horizontal (en supposant l'animal fixé perpendi- 


346 R. ANTHONY 


culairement à son substratum) comme chez les Rudistes, est 
orientée suivant un plan très oblique, se rapprochant même 
sensiblement de la verticale. Le contour de cette cavité est 
elliptique, et, les deux extrémités du grand axe de lellipse 
sont placées de telle façon qu'elles marquent le point le plus 
élevé et le point le moins élevé de ce contour. À Pintérieur 
de cette cavité, on retrouve les mêmes détails (impressions 
musculaires, etc.) que ceux qui ont déjà été signalés à lin- 
térieur des valves des autres Æthéries. La pointe lhigamentaire 
y est cependant beaucoup plus développée. 

Le bord supérieur de la cavité est souvent légèrement évasé 
en dehors et présente quelquefois de ces longues épines 
tubulées dont la cavité semble communiquer avec la cavité 
palléale et auxquelles Simroth (90) à attribué le rôle que lon 
sait. Si on fait une coupe longitudinale de cette valve pas- 
sant par le grand axe de l’ellipse, on s'aperçoit que la colon- 
nette comprend des cloisons transversales légèrement con- 
caves, tout à fait analogues à celles des Rudistes et de certaines 
Huîtres (Voy. fig. 23, PL. IT). Sion fait maintenant une 
coupe transversale de la colonnette passant à peu près par 
son milieu, on s'aperçoit que cette coupe n'est pas circulaire, 
mais affecte à peu près la forme d'une circonférence 
aplatie sur une certaine longueur de son parcours; la ré- 
gion aplatie correspond à la partie la plus inférieure de 
l’ellipse figurant le contour sagittal. En un des points où la 
partie courbe rencontre la partie droite, il existe une inflexion 
en pointe suivie d'une cavité, puis d’une légère convexité. On 
reconnait à ces détails la place du ligament. Sur la colonnette 
ils se traduisent par un sillon suivi d'une gouttière et d’un 
léger bourrelet. On peut dire en résumé que la colonnette pré- 
sente deux faces : une face que l’on peut appeler /unulaire, 
puisqu'elle va du crochet (ou de la place qu'il devrait occuper) 
au muscle adducteur antérieur et qui est aplatie, et une face 
que lon peut appeler dorso-ventrale et qui est arrondie. La 
première présente nettement les traces des cloisons transver- 
sales; la deuxième, couverte d'épines tubulées, présente des stries 
d'accroissement qui correspondent à ces cloisons transversales, 
les unes et les autres marquant les stades successifs du déve- 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 347 


loppement de la coquille et les positions qu'elle occupait aux 
différents âges de l'animal. 

La valve libre est aplatie; elle recouvre l'ouverture de la 
loge comme un opereule (Voy. fig. 2%, PL. IT). On y reconnait 
les mêmes détails que sur la valve fixée (impressions des muscles, 
pointe ligamentaire, ele.) ; sa région lunulaire se prolonge par 
une sorte de talon muni, comme celui de la valve fixée, de 


Fig. 48. — Coupe transversale du talon de l'Æfheria Caillaudi Féruss. — 1, sub- 


9 
D, 
stance fibreuse du ligament; 2, substance élastique ; 4, arète ligamentaire. 


cloisons transversales. Ce talon est très aplati et le contour 
de sa coupe transversale présenterait à cela près les mêmes 
détails que celui de la valve fixée. IE devrait théoriquement 
descendre plus bas qu'il ne descend en général, mais 11 à 
toujours été détruit par des érosions continues dans toute sa 
partie inférieure. En résumé, la valve libre est analogue à la 
valve fixée, avec cette différence qu'elle est beaucoup plus 
aplatie. 

y. Forme Petretini (Voy. fig. 20 et 21, PI. III). — Dans 
l_Ætheria Petretinü Bet., la coquille est mince, assez régulière 
(c’est la moins irrégulière des Æthéries), et il semblerait même 
qu'elle tende à reprendre la forme allongée d'avant en arrière 
des Unionidie normaux. Elle n’est Jamais roulée, et possède 
toujours, sur la valve libre du moins, un épiderme verdàtre qui 
laisse voir nettement les stries d'accroissement. La valve fixée 
présente toujours une large surface de fixation, est plane et 
relativement peu épaisse. L'intérieur des valves ne présente 
rien de particulier. 

Sur la valve libre le crochet est nettement visible et les pre- 


348 R. ANTHONY 


miers stades de développement de la coquille peuvent même y 
être reconnus. 

Il est évident qu'à aucun moment de son développement 
lÆitheria Petretinii Bet. n'a possédé d'épines tubulées. Ces 
épines, qui d’ailleurs semblent dues à des reploiements des zones 
d'accroissement postérieures’ à la fixation, ne se produisent 
qu'assez tard; elles ne semblent pas avoir eu le temps de se 
développer en raison de l'action polissante des eaux que ces 
animaux ont eu à subir sans discontinuité depuis leur naissance. 

Enfin lÆteria Petretinii Bgt. possède une légère inflexion 
antérieure que l’on retrouve souvent chez les formes jeunes 
d'Æteria Caillaudi Féruss. | 

Ligament. — Si on considère en vue postérieure une coquille 
fermée d'Æ{heria de forme plunbea, on y voit très nettement 
le ligament. La partie seule visible, c'est-à-dire dorsale, de 
ce dernier se présente sous la forme d’une sorte de triangle 
isocèle dont le sommet répond au point de l'interligne valvaire 
où se rencontrent les deux sillons des valves, et dont les côtés 
égaux répondent aux sillons eux-mêmes (Voy. fig. 47). Le 
lroisième côté est dirigé en avant. Au lieu d'être plan, ce 
triangle est incurvé de telle sorte qu'il peut être comparé à une 
portion de cône (le cône ayant été sectionné par un plan pas- 
sant par son sommet et le diamètre, ou une corde de la circon- 
férence de base). Cette surface triangulaire conique présente 
de nombreuses lignes parallèles à son côté antérieur et, qui, se 
trouvent être dans le prolongement des stries d’accroisse- 
ment des valves considérées dans la région postérieure de la 
coquille. 

Le long des sillons des valves, au delà du côté antérieur du 
lriangle, on voit des débris de substance ligamentaire qui ne 
sont autre chose’ que les restes du ligament, tel qu'il existait à 
un stade moins avancé du développement de la coquille. 

À l'intérieur de la concavité du triangle ligamentaire, 1l existe 
une autre partie du ligament qui n’est pas visible sur la coquille 
fermée et qui le sera très nettement sur une coupe sagittale de 
l'animal. En effet, en sectionnant le ligament entre les deux 
valves, on s'aperçoit qu'il est formé des trois parties suivantes : 
d'abord, postérieurement, une partie noire mince qui s'insère 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 349 


jusqu'au fond du sillon ligamentaire, e’est le triangle déjà 
décrit; en deuxième lieu, une partie d'apparence argentée 
formée de lamelles disposées les unes à côté des autres, et 
dont chacune présente de petites stries transversales. Cette 
partie s'insère au fond de la gouttière à fond arrondi, qu'elle 
remplit, et ses lamelles sont disposées par rapport à la partie 
fibreuse comme le montre la figure 48. En troisième lieu, 
enfin, une partie noire lamelleuse qui s'insère sur la crête 
mousse disposée antérieurement par rapport à la gouttière 
précitée (Voy. fig. 48). Les deux parties (1 et 3) sont for- 
mées de substance non élastique; la partie (2) incrustée de 
calcaire est formée de substance élastique. C’est la partie (1) 
seule qui est visible sur l'animal lorsque les valves sont rap- 
prochées et qui constitue le triangle ligamentaire ci-dessus 
décrit; elle recouvre les deuxième et troisième parties. Aux 
paragraphes où seront traitées lembryogénie, les affinités et la 
morphogénie des Æthéries, il sera montré comment ces trois 
parties correspondent aux trois parties du ligament des Unio- 
nidæ, et comment elles ont pu prendre la forme spéciale qu'elles 
affectent 1er. 

Chez les Ætheria de forme {ubifera, le ligament offre le même 
aspect que chez les précédentes. Toutefois, chez lÆTheria Cail- 
laudi Féruss, qui n’est, en réalité, autre chose qu'une variété 
d'Ætheria tubifera Sow., le ligament prend, en raison du grand 
développement du talon, un aspect tout spécial. Lorsque la 
coquille est fermée, on voit toujours le triangle ligamentaire et 
ses débris le long de ses anciennes positions ; si l’on regarde 
séparément l'une des valves, on voit qu'elle est parcourue 
dans toute sa longueur par l'ancien ligament actuellement sans 
fonction. La valve fixée en effet présente, suivant une des gé- 
nératrices du cylindre auquel elle peut être assimilée et à la 
limite de la région aplatie avec la région bombée, une sorte 
de trainée ligamentaire composée, ainsi que la constaté 
Reis (02), des trois bandes {deux non élastiques extrêmes, dont 
l'une répond à larête ligamentaire, etune élastique médiane) qui 
ont déjà été mentionnées (Voy. fig. 23, PL IT). À Pintérieur 
de la valve, la première traînée se prolonge par léperon 
ligamentaire déjà décrit. Cette trainée représente les positions 


350 R. ANTHONY 


Je 


successives que le ligament à occupées aux différents stades de 
développement de l'animal. La même disposition se répète sur 
la valve operculaire et les deux traînées ligamentaires se font 
face, réunies seulement dans la région lxplus proche de l'animal, 
chaque partie avec son homologue. 


I m'a semblé utile, en traitant de la coquille et du ligament, 
de distinguer trois formes principales d’Æthéries. Au point de 
vue de l'anatomie des organes internes, aucune différence n'exis- 
tant entre les Æthéries des différentes espèces, cette distinction 
n'a pas lieu d'être faite. 

Muscles adducteurs. — Les muscles adducteurs, surtout l'an- 
lérieur, sont de section assez considérable (1). Cette section 
a généralement la forme d'un ovoïde à grosse extrémité ven- 
trale pour le muscle postérieur; elle à au contraire la forme 
d'une ellipse très allongée pour le muscle antérieur, ellipse dont, 
dans certains cas, le grand axe serait recourbé suivant une ligne 
qui affecte souvent l'aspect d'une branche d'hyperbole. Les 
surfaces d'insertion sont généralement planes; dans certains 
cas elles sont convexes. 

Du côté central, la coupe de ces muscles adducteurs présente, 
comme ceux des Chames d'ailleurs, un aspect déchiqueté per- 
sillé comme si le tissu conJonctif s'était infiltré peu à peu entre 
les faisceaux de fibres, cette disposition étant encore plus accusée 
que chez les Chames. Il semblerait que ces muscles disparaissent 
peu à peu du côté central. Parfois même, on voit de véritables 
ilots de substance musculaire détachés, et, très souvent, la 
section transversale du muscle antérieur ou sa surface d'in- 
sertion, ce qui revient au même, semble divisée en deux, quel- 
quefois même en plusieurs tronçons; la division en deux du 
muscle adducteur antérieur est extrêmement fréquente. On la 
retrouvera d’ailleurs plus accusée encore dans tout un groupe 
de Rudistes. 

(1) Cette assertion est en désaccord avec ce que dit P. Pelseneer aux 
pages 113 et 141 du fascicule Mollusques in Traité de Zoologie de Raph. Blan- 
chard ; d’après cel auteur le muscle adducteur antérieur des Æthéries serait 
très réduit et même souvent nul. Il y a donc lieu de croire que les exem- 
plaires d'Æthéries que Pelseneer a eu entre les mains aient été exceptionnelle- 


ment déformés. Il se plaint d'ailleurs dans un autre mémoire (91) de n'avoir 
pu étudier, faute de matériaux, l'anatomie de ces animaux. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 391 


Comme chez les Chames et comme chez les Acéphales de 
forme arrondie, d'une façon générale, le muscle adducteur 
antérieur est tout entier situé ventralement par rapport à la 
bouche. L'explication possible de cette disposition sera donnée 
au chapitre traitant de la morphogénie. 

Au point de vue de la structure, chacun de ces muscles com- 


Fig. 49. — Coupe sagittale d'Æthema plumbea Sow. Dans la région dorsale est le 


ligament avec ses parties caractéristiques. — 1, bouche ; 2, anus; 4, muscle 


adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur. 


prend encore, comme tous les adducteurs d'Acéphales, deux 
parties : l'une périphérique, qui, sur les animaux frais, doit être 
nacrée, l'autre centrale qui, sur les mêmes animaux, doit pré- 
senter l'aspect opaque. Ces deux parties sont macroscopique- 
ment très distinctes, même sur les animaux mal fixés et ayant 
séjourné longtemps dans l'alcool faible. 

La partie nacrée, beaucoup moins considérable que la partie 
opaque, n'en est pas séparée par du tissu conjonctif, et la 
ligne de démarcation de ces deux substances est une ligne 
courbe légèrement concave en dedans. 

J'ai examiné, après dissociation dans l'acide azotique à 
20 p. 100, des fibres nacrées el des fibres opaques provenant des 
Æthéries rapportées par MM. Chevalier et Decorse de leur mis- 
sion au Chari et fixées par eux suivant les procédés courants de 
l'histologie. Un séjour prolongé dans Palcool avait rendu les 
détails de structure de ces fibres difficiles à constater. Toutefois 
j'ai pu me rendre compte des faits suivants : les fibres opaques 
présentent la structure en mosaïque habituelle de Ta zone 


352 R. ANTHONY 


intérieure des muscles adducteurs d'Acéphales, et les fibres 
nacrées sont absolument lisses. 

Manteau. — Le manteau à naturellement la même forme que 
la surface intérieure de la coquille, puisqu'elle est le produit de 
la sécrétion de son bord. Il est constitué de deux lobes complè- 
tement séparés suivant leur pourtour, sauf en une toute petite 
région dorsale correspondant à la zone ligamentaire et au 
point de terminaison des branchies situé un peu ventralement 
par rapport au musele adducteur postérieur (disposition des 
céphalothétiques de La première catégorie (Submytilacea). 

La cavité palléale comprend donc en réalité deux grandes 
issues, l’une palléale ou d'entrée, antérieure et ventrale, l'autre 
branchiale ou de sortie, postérieure. Des deux lobes du man- 
teau, celui qui correspond à la valve fixée est généralement le 
plus développé. Cela est naturel puisque cette valve fixée est géné- 
ralement plus creuse que la valve libre. Dans la région cardi- 
nale où les deux lobes se rejoignent, on aperçoit le moulage en 
relief des éperonsligamentaires qui sont en creux sur la coquille. 

Le manteau s'insère sur la coquille, suivant une impression 
discontinue dépourvue de sinus. Son bord libre est formé de 
deux lèvres, l'une extérieure, coupante et mince, l’autre inté- 
rieure, plus épaisse et garnie de petits tubercules disposés sur 
un seul rang. Cette disposition est tout le long du bord palléal 
identique à elle-même. 

La musculature du manteau est très simple: elle comprend, 
outre les deux muscles adducteurs qui ont été décrits à part, 
de pelits faisceaux musculaires dont l'ensemble des impres- 
sions constitue l'impression palléale. Au lieu d'être, comme chez 
la plupart des Lamellibranches, accolés les uns aux autres, for- 
mant une impression palléale continue, ces petits faisceaux 
musculaires sont séparés, et limpression palléale discontinue. 
Chacun des faisceaux musculaires est constitué de deux sortes 
de fibres, les unes allant à la lèvre extérieure, les autres à la 
lèvre intérieure du manteau. 

Les fibres musculaires du manteau sont lisses. 

Pied. — Chezles Æthéries, le pied à complètement disparu, 
il n'en existe pas la moindre trace, el ce que Rang et Caillaud 
(34) décrivent comme tel dans leur mémoire est tout simple- 


EEE AR ne pt Me “— - Ur M me ee À We = 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES PE 


ment la bosse viscérale qui, chez ces animaux. est extrêmement 
proéminente. 

Chez la plupart des exemplaires, j'ai observé les rétracteurs 
postérieurs du pied existant encore avec une grande netteté. 
L'ensemble de ces deux muscles à pris la forme d'un petit fais- 


Fig. 50. — Ætheria plumbea Sow. extraite de ses valves. Une fenêtre a été pratiquée 
dans un lobe palléal pour montrer la cavité rétro-branchiale et le péricarde. — 
4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur (ventri- 
cule et oreillettes) ; à, branchies (on voit le mésobranchial et les jonctions inter- 
foliaires); p, impression palléale discontinue. 


ceau en y, dont la branche solitaire dirigée en avant se perd, par 
de fines fibres en éventail, sur le bord postérieur de la bosse 
viscérale. Ses deux branches postérieures vont tantôt, rappe- 
lant ce que l’on observe chez les Chames, aborder à angle droit 
la face antérieure du muscle adducteur postérieur, et leurs fibres 
se perdent alors entre deux faisceaux, tantôt se terminer im- 
médiatement au-dessus de ce muscle adducteur postérieur et 
s'insérer sur les valves. Dans certains cas les deux branches. 
qui représentent, l'une un rétracteur postérieur droit, l'autre 
un rétracteur postérieur gauche, sont égales et paraissent éga- 
lement musculaires. Dans d’autres cas, au contraire, celle de 
ces deux branches qui répond à la valve fixée est atrophiée et 
n'est plus représentée que par un tendon. Cette particularité 
m'a semblé se montrer surtout dans les gros spécimens. 
C'est tout ce qui reste chez les Æthéries de l'appareil muscu- 
laure du pied, 
Appareil digestif. — Xci encore, comme chez les Chames, la 
ANN. SC. NAT. ZOOL. PR 


394 R. ANTHONY 


bouche est entièrement située dorsalement, ainsi qu'il à été 
dit, par rapport au muscle adducteur antérieur. 

Cette bouche a la forme d’une large fente transversale, en- 
tourée de palpes labiaux finement striés sur leurs faces d’acco- 
lement, lisses sur leurs faces externes. Leurs bords dorsaux 
sont sur tout leur trajet soudés au tégument, dans l’espace 
situé entre le manteau et la bosse viscérale. 

Après un court mais très large œsophage, on pénètre dans 


Fig. 51. —T rajet du tube digestif d'Ætheria plumbea Sow. l'intérieur de la bosse 
viscérale. — À, bouche; 2, anus; 5, muscle adducteur postérieur. 


un estomac spacieux et de forme irrégulière, possédant à son 
intérieur un certain nombre de piliers entourés à leur base ven- 
trale d’un repli semi-lunaire. Dans cet estomac débouchent des 
conduits hépatiques, et, de sa face ventrale part l'intestin, 
dont la direction fait à peu près un angle droit avec celle de 
l'œsophage. Cet intestin, suivant à peu près le plan sagittal du 
corps, longe à une certaine distance le bord antérieur, puis la 
courbure ventrale et enfin le bord postérieur de la bosse viscé- 
rale. À partir d'un certain point, il se replie postérieurement 
et revient sur lui-même, s'insinuant entre son trajet précé- 
dent et le bord postérieur de la bosse viscérale ; lorsqu'il à 
atteint la base de cette dernière, il quitte brusquement le 
plan sagittal et s’infléchit nettement à gauche (du moins sur 
l'animal sur lequel je lai disséqué), contournant ainsi 
la première partie de son trajet. Après en avoir fait Île 
demi-tour, il passe en dedans d’elle, formant une CIrCONVO- 
lution qui lui est concentrique et toujours située dans le plan 
sagittal. Quelquefois, au lieu de présenter cette inflexion à 
gauche, il se porte directement à droite et passe en dedans 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 39) 


de la première partie de son trajet. Quoi qu'il en soit, que la 
lixation se fasse par la valve droite ou la valve gauche, le sens 
de ce mouvement ne m'a jamais paru renversé. Il m'a semblé 
toutefois que, lorsque la fixation se faisait par la valve gauche, 
la légère inflexion gauche n'existait pas aussi nettement accusée ; 
du point où nous l'avons quitté, l'intestin se replie deux fois 
pour se relever enfin et, quittant la masse viscérale, se di- 
riger, par une ligne légèrement courbe, du côté de la région 
postérieure de l'animal. C’est le rectum, qui ne traverse pas le 
cœur, mais est placé dorsalement par rapport à lui: suivant la 
disposition normale chez les Acéphales, ce rectum contourne 
en arrière le muscle adducteur postérieur et se termine par un 
anus placé comme le montre la figure. 

L'intestin postérieur est parcouru par un Lyphlosolis très 
marqué comme chez les Unionidés {Voy. fig. 54). Il est à re- 
marquer aussi que tout le long de son trajet, l'intestin posté- 
rieur est dévié du côté de la valve fixée (Voy. fig. 54). Il n'existe 
ni cæcum stomacal, ni tige cristalline. 

Foie. — Le foie des Æthéries est une glande en tube, comme 
d’ailleurs chez tous les autres Lamellibranches, mais les cæcums 
y sont remarquablement distincts les uns des autres. 

Cette glande est formée de lobes nettement séparés, entou- 
rant l'estomac et noyés dans la glande génitale. Elle m'a paru 
dans la plupart des cas un peu plus développée du côté répon- 
dant à la valve fixée. 

Les canaux exsécréteurs du foie débouchent dans la r'Églon 
antérieure del'estomac, comme chez la plupart des autres Lamel- 
libranches. 

Apparel respiratoire. — Les deux branchies des Æthéries 
sont absolument semblables et égales. 

Elles sont divisées chacune en deux lames dont les externes 
sont toujours plus étroites que les internes. Comme celles des 
Chames, elles ont généralement la forme d'un S$S allongé 
dorso-ventralement, mais, comme les Æthéries sont beau- 
coup plus polymorphes que les Chames, l'S qu'elles forment 
est tantôt très accusé, d’autres fois extrêmement allongé, si 
allongé qu'il peut arriver qu'il ne soit même plus reconnais- 
sable, la branchie prenant une direction à peu près antéro- 


356 R. ANTHONY 


postérieure avec une légère incurvation à concavité dorsale. 

Alors que chez les Chames, les branchies tendent à rompre 
leurs connexions avec le manteau, la masse viscérale et elles- 
mêmes et à flotter librement comme cela se voit chez les Avi- 
cules ou les Pinnes dans la cavité viscérale, les branchies des 
Æthéries ont conservé toutes leurs connexions. Leurs lames 
externes (feuillet réfléchi) sont intimement unies avec le lobe 
palléal ; leurs lames internes sont danslarégion antérieure unies 
à la bosse viscérale et dans la région postérieure entre elles par 
l'intermédiaire d’une lame interbranchiale linéaire. Il résulte 
dececi que chez les Æthéries le grand septum interpalléal cons- 
titué par les branchies et leurs connexions, est absolument 
sans autre solution de continuité que les fenêtres formées par 
l'entrecroisement des filaments et des jonctions interfilamen- 
taires. 

Les branchies, au lieu de débuter, comme chez la plupart des 
Lamellibranches, entre les palpes labiaux, débutent, comme 
chez les Chames un peu en arrière, mais leur disposition se dif- 
férencie de celle qu'on observe chez ces dernières par ce fait 
que les deux lames de la même branchie débutent à peu près 
au même endroit et non l’externe sensiblement en arrière 
de l'interne. | 

Les branchies se terminent en arrière, au-dessous du muscle 
adducteur postérieur. Leur terminaison constitue la commis- 
sure palléale unique divisant l'ouverture du manteau en deux 
orifices, comme on l’a vu. 

Enfin les branchies sont reliées au corps, d’abord par les con- 
nexions dont il a été question plus haut, ensuite par un repli 
ou mésobranchial très développé ressemblant beaucoup à 
celui des Anodontes. 

Les branchies des Æthéries sont plissées, et ce caractère, qui 
saute pour ainsi dire aux yeux dès qu'on entr'ouvre les valves 
d'une Æthérie, est peut-être pour quelque chose dans l'erreur 
que beaucoup semblent être tentés de faire et qui est de rap- 
procher les Æthéries des Huitres, d'en faire des Huîtres à deux 
muscles, ainsi qu'on à fait souvent des Dimyidæ, des Percten 
à deux muscles. Ces plissements, très accentués dans la r'ÉgION 
postérieure de la branchie, le sont beaucoup moins dans la 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES Jo 


région antérieure, c'est-à-dire au voisinage des palpes labiaux, 
où elles sont à peu près planes. Sur un exemplaire adulte 
d'_Ætheria plumbea Sow., j'ai compté du côté droit, qui se trou- 
vait être celui répondant à la valve fixée, 133 plissements sur 
la lame externe et 158 sur la lame interne. Ces nombres, qui 
d’ailleurs sont approximatifs, doivent varier suivant les indi- 
vidus. Aux bords libres des branchies les plis- 
sements s'interrompent; le bord libre de la 
lameinterne seul est parcouru par une dépres- 
sion en gouttière longitudinale. 

Au point de vue de la structure, les bran- { 
chies d’Æthéries sont sensiblement des bran- : HN) 
chies d’Anodonte, mais des branchies d'Ano- OU 
donte plissées. J'ai compté sur Æ{heria 
plumbea Sow les filaments que comprenait 
un pli du fond d’une gouttière au fond de la 
suivante, et, j'ai trouvé que le nombre en variait 


de treize à dix-huit. Les tigelles chitineuses qui 2 
les soutiennent sont plus solides et plus épaisses Fig: 52. — Fragment 
de surface bran- 


dans les filaments des gouttières que dans ceux 
des crêtes. Comme chez tous les Eulamellibran- 


chiale (près de l’ex- 
trémité antérieure 
de l'organe) d'Æthe- 


ches, les filaments sont réunis les uns aux 
autres par des Jonctions interfilamentaires qui 
les croisent perpendiculairement, déterminant 


ria CaillaudiFéruss 
montrant les fila- 
ments et les jonc- 
tions interfilamen- 
taires. 


ainsi à la surface de l'organe des fenêtres rec- 

tangulaires à grand axe perpendiculaire au 

grand axe de la branchie. Ces jonctions interfilamentaires sont 
le plus souvent dans la continuation les unes des autres de 
telle sorte que leur succession forme des sortes de lignes paral- 
lèles à son bord libre. 

En plus de ces Jonctions interfilamentaires, il existe des 
Jonctions interfoliaires, c’est-à-dire allant, dans chaque bran- 
chie, du feuillet direct au feuillet réfléchi. Elles se présentent 
sous l’aspect de cloisons longitudinales {Voy. fig. 50). Ces 
cloisons interfoliaires sont de deux sortes : les unes, les gran- 
des, qui parcourent toute la hauteur de l’espace interfoliaire 
commençant au niveau de l'axe branchial pour aller jusqu'au 
bord hbre ; les autres, les petites, qui commencent simplement 


393 R. ANTHONY 


au milieu de l’espace interfoliaire. Les premières se rencontrent 
tous les deux plissements et les secondes s'intercalent entre elles, 
de telle sorte que, si l’on fait une coupe de la branchie près de 
son axe, On voit que chaque chambre interfoliaire comprend 
deux plissements, alors qu'elle n’en comprend qu'un seul, au 


Fig. 53. — Coupe très grossie de la lame interne d'une branchie d'Ælheria Bourqui- 
gnati Rchbr.. En bas, feuillet direct; en haut, feuillet réfléchi. — 1, filament 
branchial; ÿ.p, jonction interfilamentaire: /f.v, jonction interfoliaire; €, cavité 
branchiale ; o, œuf. 


contraire, si la coupe passe près du bord libre. Les cloisons 
interfolaires de la lame interne sont beaucoup plus larges que 
celles de la lame externe, de telle sorte qu'alors que les feuillets 
de la première restent considérablement distants ceux de la 
seconde paraissent presque accolés. 

Enfin, outre ces deux sortes de jonctions qui viennent d'être 
décrites, il en existe encore une troisième catégorie que nous 
pourrons appeler, comme pour les Chames, Jonctions interpli- 
caturales: ces jonctionsrejoignent les fonds de deux gouttières 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 399 


voisines du même feuillet. Elles sont larges et assez près les 
unes des autres, laissant entre elles des fenêtres arrondies. 
Elles sont plus accusées sur la lame interne que sur la lame 
externe et sur le feuillet direct que sur le feuillet réfléchi. Les 
branchies droite et gauche paraissent semblables. 

La circulation branchiale sera étudiée à propos de l'appareil 
circulatoire. 

Cavité générale. — Le péricarde, seul reste chezles Acéphales 
de la cavité générale, est assez spacieux.Il n’est pas traversé par 
le rectum et les figures 49 et 50 renseignent suffisamment 
sur sa forme. Dans sa région antérieure se trouvent les orifices 
bojano-péricardiques. 

Système circulatoire. —1. Cœur. —Chezles Æthéries, comme 
chez tous les autres Acéphales, le cœur est dorsal, situé au voi- 
sinage de l'extrémité dorsale du muscle adducteur postérieur. Il 
est logé dans un péricarde assez vaste et est formé d’un ventri- 
cule et de deux oreillettes. Le ventricule est dorsalement situé 
par rapport aux oreillettes qui sont situées en dessous de lui et 
de part et d'autre. 

La paroi du ventricule est épaisse, musculeuse, et, sur les 
animaux que J'ai eus à ma disposition, elle était, probablement 
par le fait de l’immersion brusque dans l'alcool, fortement con- 
tractée, ce qui donnait à cet organe une forme sensiblement 
arrondie ; celle des oreillettes est au contraire mince et la cavité 
de chacune de ces dernières est beaucoup plus vaste que ne l'est 
celle du ventricule. Les deux oreillettes sont sensiblement 
égales. Contrairement à ce qui se passe chez l'Anodonte et 
l’'Unio, desquels, comme on le verra plus loin, il y a lieu de 
rapprocher les Æthéries, le cœur n’est pas traversé par le rec- 
tum, mais se trouve situé ventralement par rapport à lui. 

Le ventricule présente quatre ouvertures: deux supérieures 
dont l’une est antérieure et munie d’une valvule, l’autre posté- 
rieure, et qui conduisent dans les aortes antérieures el posté- 
rieures ; deux latérales inférieures, l’une droite, l'autre gau- 
che, par lesquelles les oreillettes communiquent avec le 
ventricule. 

Les oreillettes présentent chacune deux orifices, l'un supé- 
rieur par lequel elles communiquent avec le ventricule, l'autre 


300 R. ANTHONY 


inférieur par lequel elles communiquent largement avec Île 
grand vaisseau branchial efférent. 

2, Système artériel. — Comme il à été dit, partent du cœur 
deux gros troncs vasculaires, l'aorte antérieure, qui à son ori- 
gine possède une valvule et l'aorte postérieure. 

L'aorte antérieure, après sa sortie du cœur qui s'effectue dans 
le plan sagittal, se place au-dessus du tube digestif. Elle ne 
tarde pas à prendre bientôt, avant même d'avoir dépassé les 
limites du péricarde, une direction latérale qui est tantôt 
droite, tantôt gauche. Puis elle donne une branche princi- 
pale, l'artère viscérale, qui irrigue la masse viscérale tout en- 
tière, et les palpes labiaux; elle donne aussi auparavant Îles 
deux circumpalléales antérieures très réduites. 

L'aorte postérieure sort également du cœur dans le plan 
sagittal, mais ne le quitte pas. Elle reste toujours et continuel- 
lement en dessous du rectum, c’est-à-dire ventralement située 
par rapport à lui. 

Arrivée au niveau du bord dorsal du musele adducteur pos- 
térieur, l'aorte postérieure se divise en deux branches qui 
suivent les arêtes des angles dièdres que fait la face posté- 
rieure du muscle adducteur postérieur avec le bord du man- 
teau. Ces deux branches, qui sont les circumpalléales  posté- 
rieures, irriguent en passant l’'adducteur postérieur, le bord du 
manteau et, par des branches internes, le rectum ; elles se 
continuent en avant avec les circumpalléales antérieures. 

3. Système veineur. — Des artères, le sang passe dans les 
lacunes dont la plus importante est le sinus rénal, situé en 
avant et en bas du muscle adducteur postérieur. L'absence du 
pied entraine celle du sinus pédieux. Des lacunes, le sang est 
ramené, par l'intermédiaire des artères branchiales, aux bran- 
chies où il s'hématose. Les artères branchiales suivent Îles 
bords des feuillets réfléchis. 

Des branchies, le sang est ramené au cœur par l'intermé- 
diaire des vaisseaux efférents qui, suivant les mésobran- 
chiaux, vont finalement se jeter dans la veine branchiale en 
communication avec l'oreillette. 

Organes excréleurs. — Les organes excréteurs, ont comme 
chez les Unionidés, la forme de ARS sacs repliés et à deux 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 


301 


orifices. D'une part, ils s'ouvrent par deux ouvertures situées 


dans la région antérieure du péri- 
carde, seul reste de la cavité géné- 
rale des Mollusques Acéphales, d'au- 
tre part dans le prolongement antéro- 
externe de la chambre palléale, c'est- 
à-dire dans l'angle que fait le méso- 
branchial avec la paroi de la bosse 
viscérale. Cet orifice est très réduit 
et est situé notablement en dessous 
et un peu en dehors de loriice de 
sortie de la glande génitale : et par 
rapport à la bosse viscérale, 11 se 
trouve situé à peu près à l'union de 
son quart antérieur avec ses trois 
quarts postérieurs. 

Organes génilaur. — Les sexes 
semblent être chez les 
Ætherudæ, bien que je ne puisse me 
déclarer d’une façon absolument po- 
sitive sur ce point, étant donné le peu 
de valeur de mes matériaux pour les 
études histologiques. Comme chez les 
Unionidés, tous les interstices laissés 
entre les organes sont comblés par 
des ramifications de la glande géni- 
tale qui s'étend même jusque dans le 
manteau. 

La glande génitale s'ouvre dans la 
cavité branchiale par deux très petits 
orifices situés à un millimètre et demi 


séparés 


Fig. 54. — Coupe 


c transversale 
d'Ælheria plumbea Sow. pas- 
sant au niveau du cœur. — B, 
branchie; C, cœur; G, glande 
génitale: 1, intestin (l'intestin 
postérieur est muni d'un typhlo- 
solis ; M, manteau dont le lobe 
correspondant à la valve fixe 
est le plus développé; N, con- 
nectif cérébro-viscéral: 0, oreil- 
lette; P, cavité péricardique ; 
R, organe de Bojanus: S, sinus. 


au-dessus et un peu en dedans des orifices bojantens. Ces orifices 
ont la forme de fentes allongées d'avant en arrière. 
Les œufs que j'ai eu la chance de pouvoir observer seront 


décrits à propos de l'embryogénie. 


Système nerveur. — Le système nerveux comprend, comme 
toujours trois paires de ganglions : les deux cérébro-palléaux qui 
sont petits ; lesdeux viscéraux, plusgrands, sont plus développés 


302 R. ANTHONY 


et tendent à se confondre; les deux pédieux qui sont extrème- 
ment réduits et très rapprochés de la bouche. 

De chaque ganglion cérébro-palléal partent : le nerf palléal 
antérieur longeant la face postérieure du muscle adducteur anté- 
rieur; deux nerfs destinés aux palpes labiaux ; la commissure 
cérébrale qui passe au-dessus de la bouche ; le grand connectif 
cérébro-viscéral. Dans la région antérieure de l'animal, c'est-à- 
dire au niveau de la masse viscérale, les deux connectifs sont 
naturellement, et par le fait de la présence de la bosse viscérale, 
très distants lun de lautre; à parüur du moment où la masse 
viscérale finit en arrière, ils se rapprochent et marchent parallè- 
lement l'un à l'autre jusqu'aux ganglions viscéraux. Le ganglion 
cérébro-palléal donne enfin le connectif cérébro-pédieux très 
fin et très court qui aboutit à un ganglion pédieux très réduit 
situé immédiatement en dessous de la bouche. 

Chaque ganglion viscéral donne, outre le connectif cérébro- 
viscéral déjà décrit, un nerf branchial qui suit le bord posté- 
rieur du mésobranchial et un nerf palléal qui, suivant la face 
antérieure du muscle adducteur postérieur, se divise en deux 
branches, l’une latérale, Pautre postérieure. L'état de mes 
matériaux ne m'a pas permis de pousser plus loin létude de 
ces différents filets nerveux. 


Embryogénie. 


I m'a été impossible de faire, faute de matériaux, l'étude des 
premiers stades de développement des Æthéries. Il est facile de 
concevoir, en effet, qu'il ne doit pas être aisé de se procurer des 
larves d'Æthéries, voire même de formes jeunes non fixées, et, 
comme on le verra par la suite, d'ailleurs, il seraitmalaisé, même 
si on en rencontrait, de savoir si l’on à réellement affaire à des 
Æthéries. 

J'ai donc dù me borner à l'étude des stades déjà fixés. 

Avant d'entreprendre cet exposéembryologique, je ne dois pas 
toutefois passer sous silence l’heureux hasard qui m'a mis en 
présence d'œufs d'Æthéries. En effet, parmi les Mollusques rap- 
portés par la mission Chevalier, se trouvait un lot d’Æthéries 
CÆthena Bourquignati Rehbr. et d'Urionidæ que compte 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 303 


déterminer M. le D'T. de Rochebrune), recueillis par le 
D’ Decorse, en janvier 1903, dans les Rapides du Bas-Gribingi. 
Les branchies de ces Æthéries et de ces Unionidæ étaient bour- 
rées d'œufs qui se trouvaient sensiblement au même point de 
leur développement, d'ailleurs très avancé. Les œufs des Æthé- 
ries étaient d'un diamètre environ six fois plus faible que ceux 
des Unionidæ et leur surface, au lieu d'être lisse, était recou- 
verte de rugosités assez régulières qui pourraient être com- 
parées à de courts piquants. Chez les Æthéries comme chezles 
Unionidæ la cavité branchiale joue donc le rôle de cavité incu- 
batrice, c'est là un point important établi. 

IL est regrettable que la récolte du D° Decorse n'ait pas été 
faite quelques jours plus tard, au moment précis où les larves 
écloses ne sont pas encore sorties de la cavité branchiale de la 
mère. Cela nous aurait peut-être permis d'observer des glochi- 
dium d’'Æthéries. Il serait intéressant, en effet, de savoir si les 
Æthéries présentent ou non comme les Unionidæ, le stade glo- 
cladium. Leurs affinités avec ces derniers, qui seront exposées 
plus loin, permet en tout cas de le supposer, et la présence dù- 
ment constatée de ce glochidium eût constitué un fort appoint à 
cette manière de voir déjà si probable et qui consiste à faire des 
Æthéries des Urionidæ fixées. 

La figure 53 représente une coupe d'un feuillet branchial 
d'Ætheriu Bourquignati Rehbr. dont L cavité contient des 
œufs. 

Les matériaux que j'ai utilisés pour mon étude embrvyo- 
génique des Æthéries sont constitués par de jeunes Æthéries que 
J'ai trouvées fixées sur des coquilles d'adultes appartenant au 
Muséum d'Histoire naturelle. ai pu me procurer tous les stades, 
depuis celui qui n’atteint que # où 5 millimètres en diamètre 
antéro-postérieur maximum jusqu'à la forme adulte la plus 
développée. Les espèces dont j'ai pu observer les formes jeunes 
sont les suivantes : Æ{heria plumbea Sow. et Ætheria 
Caillaudi Féruss. 

Quoique n'ayant pas eu à ma disposition d'individus non 
encore fixés, il m'a été possible, grâce à la netteté des stries 
d'accroissement, de me rendre un compte exact de la forme 
que ces animaux affectent avant la fixation. 


904 R. ANTHONY 


Quelle que soit l'espèce envisagée, la jeune Æthérie est avant la 
fixation absolument semblable à une Anodonte. Comme elle, 
elle est nacrée, de couleur verdâtre extérieurement, franche- 
ment allongée d'avant en arrière, parfaitement symétrique par 
rapport à son plan sagittal, et sa charnière est dépourvue de 
dents ou ne possède qu’une longue dent latérale postérieure très 
peu accentuée, dans laquelle on pourrait peut-être voir la lon- 
gue dent latérale postérieure des Unionidæ. Souvent à ce stade 
la jeune Æthérie présente une sorte de vallonnement dorso- 
ventral que l'on retrouve chezbeaucoup d'Unionidés adultes. 

C'est à peu près lorsque l'animal à 2 à 3 millimètres de long 
(longueur antéro-postérieure) que la fixation se produit. Au 
lieu d’être, comme souvent chez les Chames, uniquement anté- 
rieure, la fixation est chez les Æthéries toujours à la fois 
antérieure et postérieure. La figure schématique 57 permet 
de se rendre aisément compte de cette disposition et la 
figure 25 PI IT, montrent très nettement sur une jeune Æthe- 
ria les limites de la zone fixée. 

À partir du moment où la fixation s’est produite, l'animal 
commence à s'arrondir et cet arrondissement s'accomplit par 
l'intermédiaire d’un processus auquel j'ai donné le nom de 
pseudo-plicature parce que, comme on l’a vu précédemment, le 
bord dorsal de la coquille adulte semble s'être replié sur lui- 
même. 

Les zones d’accroissement de la coquille que le manteau 
sécrète, comme on sait, dans toute la région de la valve, ne 
donnant pas insertion au ligament, commencent peu à peu à 
remonter dorsalement par rapport à ce dernier. Lorsqu'un 
certain nombre de couches se sont produites, 1l existe en arrière 
du ligament un véritable pli en forme d’éperon au fond duquel 
se trouve l'extrémité postérieure ligamentaire. Ce ligament, qui 
se développe, on le sait, d'avant en arrière, est donc, par le fait 
de cette pseudo-plicature de la coquille, hmité en quelque sorte 
par cet obstacle dans sa croissance antéro-postérieure. Toute- 
fois, comme il se forme toujours néanmoins de la substance 
ligamentaire nouvelle, il arrive que, dans quelques cas, l’extré- 
milé postérieure du ligament parvient à contourner la plicature, 
et, c'est pourquoi, chez les adultes, on voit parfois la substance 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 369 


ligamentaire fibreuse s'étendre sur le bord postérieur du 
sillon ligamentaire et mème le dépasser un peu. D'autre part, 
les couches de substance élastique augmentent également ; 
gênées dans leur développement  antéro-postérieur, elles 


Fig. 55. — I, disposition du ligament chez l'Unio: IT, disposition du ligament chez 
une jeune Ætheria Caillaudi Féruss peu de temps après la fixation ; IE, dispo- 
siion du ligament chez une Æfheria Caillaudi Féruss adulte. 


repoussent d'une part en avant le bord cardinal de la coquille 
qui s’incurve, d'autre part en arrière le ligament fibreux 
dorsal qui se rompt, se détachant de son point d’origine 
au niveau du crochet, et on arrive ainsi à avoir la dispo- 
sition représentée dans la figure 55 de la coupe du ligament 
chez les Æthéries adultes. Cette figure donne en effet Les diffé- 
rents stades de développement du ligament et la constitution 
de l’arête ligamentaire chez les Æthéries. 

Après la fixation, la coquille continue sa croissance, et, 
la plicature s’accentuant et se resserrant, chaque nouvelle couche 
tend à parfaire cette forme arrondie qu'elle n'atteint jamais 
complètement, en raison des obstacles nombreux qu’elle ren- 
contre. 

Chez certaines Æthéries, la croissance semble être très lente 


306 R. ANTHONY 


el ne pas dépasser une certaine limite. Chez d’autres, au 
contraire, les formes à long talon (Æ{heria Caillaudi, Féruss.), 
les couches calcaires se succèdent rapidement et, lorsque l'animal 
a atteint une certaine taille, ces couches calcaires concentriques 
cessent d'adhérer au substratum et se relèvent ; il en résulte 
une forme en cornet, des couches calcaires venant à mesure, 
comme chez l'Huitre, combler la partie inférieure de ce cornet ; 
la forme connue de l_Æheriu CaillaudiFéruss. se constitue avec 
son long talon coupé de cloisons transversales, son arète ligamen- 
taire, son ligament longitudinal et sa valve operculaire dont la 
partie inférieurese détruit peu à peu (Voy. PL IN fig. 22; 23; 24). 


Physiologie. 


Comme pour les Chames, il m'a été impossible pour les 
Æthéries de me procurer des spécimens vivants et d'observer par 
moi-même leurs conditions d'existence. Mais, là encore, J'ai 
pu avoir des renseignements précis. Ils proviennent de 
MM. Chevalier et Decorse, qui ont pu les observer longuement 
au cours de leur mission en Afrique équatoriale. M. T. de 
Rochebrune, assistant au Muséum, et mon excellent ami le 
lieutenant de cavalerie Zerbini, m'ont aussi fourni des rensei- 
oenements précieux à ce sujet. 

Le genre Ætheria est exclusivement africain. On le trouve 
uniquement dans les grands fleuves de l'Afrique équatoriale. 
Il en à été recueilli, par exemple, des exemplaires dans le Nil, 
en amont des cataractes, dans le Sénégal, le Niger, le 
Congo, etc. 

Les Æthéries vivent fixées par une de leurs valves, tantôt 
la droite, Lantôt la gauche avec une égale fréquence, et dans la 
même espèce on trouve des imdividus fixés par lune et d’autres 
fixés par l’autre valve; leur surface de fixation très étendue 
s'étend, ainsi qu'il à été dit, aussi bien antérieurement que 
postérieurement, au contraire de ce quise passe chez les CAa- 
mostrea et la plupart des Chames fixées par leur région anté- 
rieure seulement. De la facon dont elles sont fixées résulte en 
grande partie, comme on le verra plus loin, la morphologie 
des Æthéries. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 307 


D'après ce que m'ont rapporté les différentes personnes 
avant voyagé en Afrique, la forme roulée, aplalie et compacte 
est particulière aux rapides, aux cataractes, en somme aux en- 
droits où les eaux sont très agitées. La orme, au contraire, 
épineuse, légère el souvent à long talon, rappelant les Hippu- 
rites, se trouve dans les eaux tranquilles et parfois même 
vaseuses ; ceci est d’ailleurs d'accord avec l'opinion de Simroth 
(90). Lorsqu'un fleuve à cours rapide fait une anse à un certain 
endroit, dans cette anse les eaux sont plus tranquilles et la 
vase s’y accumule; c’est là que l'on rencontre les Æthéries à 
long talon formant des sortes de bouquets dont Ia base 
est souvent attachée au substratum rocheux du fond. Lorsque 
les eaux sont basses, on voit alors ces Æthéries enfoncées 
dans la vase de telle sorte que la loge contenant l’animal 
émerge seule à peu près au-dessus de son niveau. Lorsque 
les pluies violentes arrivent, entraînant une quantité de 
limon plus considérable que d'habitude, les Æthéries sont subi- 
tement recouvertes et périssent. Simroth (90), dans une note 
intéressante sur les Æthéries des chutes du Congo dit que celles 
qui se trouvent fixées dans les endroits où les eaux sont tran- 
quilles, se trouvent parfois recouvertes d’une couche de limon 
qui empêche par son poids l'ouverture de la coquille. L'entrée 
et la sortie de l’eau se feraient alors, d’après cet auteur, par 
les épines tubulées du bord, dans lesquelles doivent pénétrer des 
prolongements du manteau. (Il est peut-être intéressant de 
rapprocher cette particularité des canaux des Rudistes). 

Enfin, il est une forme d’Æthérie, lÆtheria Petretinn Bet., 
dont les caractères morphologiques spéciaux ont été signalés 
et qui présente un mode de vie également spécial. L'Æ%eria 
Petretinii Bgt. a été exclusivement rencontrée dans les tuyaux 
de conduite en fonte de Ramlé, près le canal de Mahmoudieh, 
en Égypte. Sa forme spéciale est sans aucun doute en rapport 
avec son mode de vie tout particulier dans une eau peu agitée 
mais sans cesse animée d’un mouvement régulier et toujours 
dans le même sens. 

En résumé, 1l semble que deux conditions d'existence soient 
particulières aux Æthéries : 1° la chaleur des climats tropi- 
eaux; 2 les courants rapides et les eaux tourmentées, pour la 


368 R. ANTHONY 


) 


forme plumbea:; les eaux tranquilles et vaseuses, pour les 
formes tubifera et sa variété Caillaudi; le cours régulier.et con- 
{inu des conduites d’eau de Ramlé, pour lÆheria Petre- 
lin Bgt. 


Affinités. 


L'opinion des personnes étrangères aux sciences naturelles et 
auxquelles on présente une coquille d'Ætheria plumbea Sow.. 
par exemple, est immédiatement que Panimal en présence du- 
quel on les met est une Huiître. Or, comme on Fa vu d’après 
l'exposé des caractères des Æthéries, cette opinion ne peut 
être soutenue. En dehors de la disparition d'un des muscles 
adducteurs de l'Huître, ce qui pourrait n'être en somme qu'un 
caractère d'adaptation, 1lest à noter le mode de vie (aquatique 
pour les Æthéries), la forme et la structure de la coquille et 
de la branchie qui éloignent d’une facon complète les Æthéries 
des Huitres. Le seul caractère commun qu'aient ces animaux 
est la fixation pleurothétique qui, comme on le sait, peut se 
produire chez des animaux aussi différents que possible. 

Considérant la fixation pleurothétique et la présence des 
deux muscles, Lamarck en fit des Chamidés. Comme on a pu 
le voir au cours de ce travail, cette opinion ne peut être soutenue. 

Actuellement on s'accorde en général à faire des Æthéries 
des Unionidæ, el voici quels sont les arguments qui peuvent 
maintenant être fournis à l'appui de cette manière de voir. 
On peut les tirer à la fois de leur morphologie, de leur embryo- 
génie et de leur physiologie; nous allons Jes examiner : 

1° MorPHoLOGIE. — 4. Coquille. L'aspect général de la coquille 
est à peu près le même chezles Æthéries que chez les Unionidæ. 
On y trouve, chez les formes non roulées comme lÆ#heria 
Petrelini Bet. où l'Ætheria Caillaudi Féruss, le même épi- 
derme verdâtre. Comme les Anodontes, les Æthéries n'ont pas 
de dents à leur charnière. Enfin, comme les Unrionidæ, elles 
ont la coquille superbement nacrée à l’intérieur. Cet argument 
uré de la présence de la nacre à une grande valeur. Les seuls 
Acéphales nacrés sont, en effet, avec les Unionidæ, qui sont 
des Eulamellibranches, et les Anatinidæ, autres Eulamelli- 
branches qui ne peuvent avoir avec les Æthéries aucun rapport 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 309 


de parenté, des Filibranches comme les Trigonies, les Ano- 
mies, les Avicules et leurs alliés, auxquels on ne peut songer 
lorsqu'il s’agit d'établir les rapports de parenté des Æthéries. 

8. Branchies. Les branchies des Æthéries présentent, ainsi 
que les figures permettent de s'en rendre compte, les mêmes 
caractères généraux que celles des Unionidés. Ce sont, comme 
celles de ces derniers, des branchies d'Eulamellibranches. 
Leurs caractères parliculiers consistent uniquement dans leurs 
plissements, que arrondissement peut expliquer et les 
Jonctions interplicaturales qui en sont la conséquence. Les 
branchies des Æthéries, comme celles des Urionidæ, jouent le 
rôle de cavité incubatrice. 

+. Orqunes génitaur. Au point de vue sexuel, les Æthéries 
paraissent être dioiques comme les Urionidæ ; elles sont très 
probablement vivipares et, en tout cas, leur branchie joue, 
comme 1} à été dit, pour les produits génitaux Le rôle de cavité 
incubatrice, caractère très spécial aux Unionideæ. 

2° EMBRYOGÉNIE. — Par leur embrvoginie, les Æthéries sont 
absolument des Unionidæ. 

Sans revenir sur le fait très important et déjà signalé de 
lincubation branchiale commune aux Unionidi el aux Æthé- 
ries, Je me contenterai de rappeler que la jeune coquille des 
Æthéries est, avant la fixation, semblable à celle des Unionidæ. 
Ce n'est qu'à partir du moment où la fixation s'est pro- 
duite qu'elle perd ses caractères spéciaux (Vo. fig. 25 et 26, 
PCT). 

3° PaysioLo@ie. — Au point de vue du mode d'existence, 
enfin, les Æthéries se rapprochent encore des Unionidæ. 
Comme eux, elles habitent exclusivement les eaux douces. Or, 
parmi tous les Acéphales qui habitent les eaux douces, les 
Unionidæ sont les seuls auxquels on puisse comparer les 
Æthéries. 

En résumé, la présence de la nacre, la constitution de la 
branchie, l'existence fluviatile et surtout le développement 
embryogénique ne permettent d'élever aucun doute sur les affi- 
nités réelles des Æthéries, qui ne sont en somme que des Unio- 
nidæ adaptés à un genre de vie spécial. 


ANN. £C. NAT. ZOOL. 1, 24 


370 R. ANTHONY 


Morplogénie. 


Par la mise en action de quels facteurs cette transformation 
a-t-elle pu se produire, des Unionidæ ont-ils pu devenir des 
Æthéries? Supposons que, par un procédé quelconque, des 
Unionidæ semblables à ceux qui vivent dans la vase des grands 
lacs de l'Afrique équatoriale se soient trouvés transportés dans 
un des fleuves avec lesquels ils sont en relation, tels le Nil, 
le Niger, le Congo. Ces fleuves sont, on le sait, en certaines 
régions, parsemés de rapides, de chutes, de cataractes, où Peau 
sans cesse renouvelée et oxygénée est particulièrement favorable 
à l'existence, Les Urionidæ qui s'arrêtent en ces régions ne 
tardent pas à pulluler, et comme, grâce au mouvement conti- 
nuel de l’eau, la vase ne peut se déposer dans ces rapides, ïls 
ne peuvent, comme leurs congénères des lacs, s'enfouir et 
prendre la position céphalothétique ; fatalement, et de par le 
fait de leur forme même, ils tombent sur une de leurs valves. 
D'autre part, l'eau en ces régions est sans cesse chauffée par 
les rayons du soleil tropical, et, cette élévation de température 
provoque, pour les animaux qui nous occupent, une surpro- 
duction de calcaire qui semble devoir aboutir, Fanimal étant 
en pleurothétisme, à la fixation. Par le fait de la sélection 
naturelle, les formes solidement fixées et celles qui se trouvent 
placées en des points d’où le flot ne peut les entrainer, seules 
se perpétuent, les autres sont arrachées et périssent. 

Chez les Unionidæ la fixation se fait par l’ensemble de la 
valve, simplement à cause de la forme aplatie de cette der- 
nière, de même que chez les Chames, par exemple, la forme 
lHithocardioïde primitive entraine la fixation antérieure. C'est 
la fixation pleurothétique qui est chez les Æthéries l’origine de 
toutes les modifications morphologiques. 

Ainsi qu'il a été dit plus haut. le pleurothétisme tend à faire 
disparaître la symétrie sagittale et à la remplacer par une 
symétrie coronale. Cette tendance s’accuse par ce fait, chez les 
Æthéries, que les deux valves qui, chez les Unionidés, sont sem- 
blables, deviennent ici dissemblables, lune tendant, comme 
chez l'Ætheria Caillaudi Féruss, par exemple, à s’aplatir, à 


RE TS A 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 311 


devenir en un mot operculaire, alors que l’autre s'allonge en 
forme de colonne, se creuse sous l'influence indirecte du poids 
des organes qu’elle contient (Voy. à ce sujet Hyatt (80) et 
Edm. Perrier (04). En même temps le côté antérieur et le côté 
postérieur tendent manifestement à se ressembler, indice cer- 
ain de l'établissement de la symétrie coronale. Ces modifica- 
ions caractérisant la coquille se constatent aussi sur les parties 
molles : les deux lobes du manteau sont franchement inégaux 
(Voy. fig. 54). 

La fixation d'autre part tend, comme on sait depuis Jackson 
(90) et Hæckel, à faire prendre aux organismes la forme 
arrondie. Or, comme chez les Æthéries la fixation est à la fois 
antérieure et postérieure, c'est la surface totale de l'animal 
qui s’arrondit et non pas seulement la région antérieure, comme 
chez certaines Chames et chez les Chamostrea. 

Ce mode de fixation, ainsi que le développement  antéro- 
postérieur du ligament, l'absence de tendance à lenroulement 
que présentent tous les Urionidæ, déterminent le mode 
d'arrondissement qui est celui de la pseudo-plicature. Ia été 
indiqué plus haut comment se produisait cette  pseudo- 
plicature, par l'extension postérieure et dorsale toujours crois- 
sante des zones calcaires. Il a été vu comment la formation 
d'une arète ligamentaire pouvait en résulter : le ligament est 
arrêté en arrière dans sa croissance antéro-postérieure par 
le fait de cette pseudo-plicature; sa partie élastique repousse 
en avant le bord cardinal de la coquille qui s'incurve, en 
arrière la partie fibreuse dorsale qui se rompt, se détachant de 
son origine. Ainsi s'explique la constitution du bord cardinal 
des Æthéries qui, comme on sait, présente d’arrière en avant 
un profond sillon où s’'insère l'extrémité postérieure de la 
partie fibreuse dorsale du ligament, une concavité où se loge 
le ligament élastique et une convexité légère sur laquelle s'in- 
sère Fa partie ventrale du ligament fibreux. Ainsi s'explique 
également le triangle ligamentaire dorsal, qui n’est en réalité 
autre chose que la partie fibreuse dorsale du ligament détachée 
de son origine umbonale. 

À l'arrondissement se rattachent également un certain nom- 
bre de caractères particuliers aux Æthéries. C'est ainsi que 


D. R. ANTHONY 


s'explique le passage du tube digestif dorsalement par rapport 
au cœur, Entrainé par le déplacement de l'extrémité posté- 
rieure, le tube digestif s'est peu à peu rapproché de la région 
cardinale tout en s'éloignant du cœur, comme cela se passe 
chez les Huîtres : de même, par le fait de l'arrondissement, les 
branchies se sont plissées comme une collerette autour du cou, 
les palpes labiaux se sont accolés par leurs bords dorsaux aux 
parois palléales; les deux muscles adducteurs antérieur et 
postérieur se sont rapprochés par leurs extrémités dorsales, 
de telle sorte que, comme chez les Chames, le muscle rétrac- 
teur postérieur du pied se trouve souvent au niveau du milieu 
de l'adducteur postérieur au lieu de se trouver nettement en 
avant de lui. A la fixation, d'autre part, doit être rapportée 
la disparition du pied qui est entré en régression faute d'usage 
et l'absence totale de papilles siphonales qui figurent, chez 
les Unionidés céphalothétiques, une première ébauche de 
siphons. 

La pseudo-plicature est également la cause enfin du rappro- 
chement du muscle postérieur du ligament, rapprochement qui 
a pour conséquence la diminution de volume et d'importance 
de ce muscle adducteur postérieur devenant ainsi de moins en 
moins efficace au moment de la fermeture. De même, dans 
l'adducteur antérieur et pour la même raison, toute la partie 
dorsale tendra à disparaître faute d'usage, alors que la partie 
ventrale au contraire, la plus active, tendra de plus en plus à 
se développer. Il en résulte en quelque sorte un déplacement 
dorso-ventral de ce muscle le long du bord des valves. Au lieu 
de se trouver situé dorsalement par rapport à la bouche 
comme chez les autres Acéphales, il se place de plus en plus 
ventralement par rapport à elle; son impression s'étend le plus 
possible vers la région ventrale, se divise même souvent en 
deux parties extrêmement nettes (Voy. fig. 56, 1). 

L'origine des cloisons de la valve inférieure à été expliquée 
au chapitre de l'embryogénie par le relèvement des couches 


calcaires. 


RÉ 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES +13 


CHAPITRE VI 


CONSIDÉRATIONS MORPHOGÉNIQUES SUR LES FORMES 
FOSSILES DIMYAIRES 
FIXÉES EN POSITION PLEUROTHÉTIQUE. 


Les notions que nous venons d'acquérir sur la morphologie 
et la morphogénie des formes dimyaires actuelles fixées en 
position pleurothétique semblent pouvoir, dans quelque me- 
sure, éclairer sur la signification probable de certaines parties 
des formes fossiles également dimyaires, pleurothétiques et 
fixées. 

Ces formes se rapportent aux familles suivantes : 

Dimyidæ, Chamidæ, Rudistæ, Chondrodontide. 

Dimyidæ. — Les Dimyidæ fossiles sont à tous points de vue 
semblables aux Dimyidæ actuels. Ilen a été question plus haut ; 
il est donc inutile d'y revenir. 

Chamidæ. — Quant aux Chamideæ, je comprends dans cette 
famille toutes les formes enroulées dont les caractères ont été 
donnés plus haut, c'est-à-dire, outre les CAama, les formes 
exclusivement fossiles suivantes : Diceras, Heterodiceras, Re- 
quienia, Toucasia, Apricardia, Valletin, Gyropleura,  Bay- 
leix, etc., qui constituent, à côté des Chaminæ, la tribu des 
Diceratinæ. 

Je n'ai pas l'intention de faire une monographie de ces der- 
niers, mais d'insister seulement sur les détails que l'étude des 
Chaminæ m'a permis de mieux comprendre, renvoyant pour 
le reste aux travaux si complets et si remarquables de Douvillé 
et à ceux de Pâquier. 

Le caractère commun de toutes ces formes, caractère qu'elles 
partagent d’ailleurs, comme l’on sait avec les Chaminés, est 
l’enroulement, la division ligamentaire qu'il produit, et lab- 
sence de la dent latérale antérieure. Leurs caractères propres 


914 R. ANTHONY 


et qui permettent de distinguer les animaux de la tribu des 
Diceratinæ de celle des Chaminæ est, outre une ornemen- 
tation toute différente, la présence constante à l’âge adulte de 
la dent cardinale 1 qui, comme nous l'avons vu, disparaît 
généralement après la fixation dans le genre C'hama (Noy. em- 
bryogénie des C'hama). 

Un autre caractère particulier de ces animaux est l'étendue 
du pas de leur hélice qui est généralement beaucoup moins 
aplatie que celle des Chames qui tend souvent à la spire. Cet 
enroulement beaucoup plus che fait que chacune des bran- 
ches provenant de la bifidité du Higament, au lieu de décrire une 
spire ou une hélice à pas très court, décrit comme la coquille 
elle-même une hélice à pas très étendu. [en résulte que l'angle 
formé par les deux branches divergentes du ligament est beau- 
coup plus ouvert qu'il ne l'est généralement chez les Chames 
(Moy ::PINIIENS-215): 

Chez quelques formes, telles les Reguienia etles Tourasia, Va 
valve supérieure reste aplatie et le ligament y marque sa place 
suivant une spire. 

Comme les Chames, ces animaux, au lieu d'être fixés par la 
région antérieure et postérieure de leur coquille, le sont seule- 
ment, ainsi que je l'ai vu d’une façon qui m'a semblé constante, 
par leur région antérieure. Mais, alors que chez les Chames et 
chez les Chamostrea d'ailleurs, les couches calcaires successives 
de la valve fixée restent d'ordinaire au contact du substratum 
auquel elles adhèrent, 1! n'en est pas toujours ainsi chez les 
Dicératinés. C'est ainsi que si, chez les Gyropleura, es choses 
se passent généralement de cette facon, chez les Diceras, les 
Heterodiceras et les Requienia par exemple, les couches cal- 
catres S'écartent au bout d'un certain temps du substratum. 
Il en résulte qu'à partir d’un certain point la coquille s'élève 
en quelque sorte et la spire de la valve inférieure devient une 
hélice à pas très étendu; et au lieu d'être la partie fixée seu- 
lement, c'est le contour sagittal tout entier qui tend alors à 
S'arrondir. 

Chez les Toucasia, les couches successives, tout en ne restant 
pas fixées au substralum, v restent accolées, et c'est ce qui 
explique la carène et la région antérieure constamment aplatie 


D) L 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 219 


de ces animaux qui, par leurs autres caractères, sont si près des 
Requienia. 

Chez les Direras et les Heterodiceras, la dent 2 de la valve 
gauche, qui répond à la grande dent de la valve fixée des 
Chames, qui est, comme on sait, sur sa face postérieure creu- 
sée de petits sillons, est souvent creusée sur sa face ventrale 
d’un profond sillon. Elle est très longue et parfois même recour- 
bée dorsalement. Ce sillon qu'elle présente, ainsi que son grand 
développement, semble devoir être en rapport avec la fixa- 
tion de l'animal. Dans un autre groupe en effet, celui des 
Monomyaires, les Spondyles, qui par tous leurs caractères se 
rapprochent des Pectens et qui vivent, eux aussi, fixés en po- 
sition pleurothétique, présentent deux grandes dents recour- 
bées et munies chacune d’une encoche. Ces dents sont mème 
tellement grandes et recourbées que souvent l’on ne peut sé- 
parer les deux valves sans briser la coquille. Les Hinnites pré- 
sentent déjà une ébauche de la disposition caractéristique des 
Spondyles. Ce point de convergence des Diceras et des Spondy- 
lidie était intéressant à signaler. 

Au sujet de ces formes fossiles que J'ai rangées parmi les 
Chamidæ (Wibu des Diceratinæ), il est un certain nombre de 
questions, dont je ne m'occuperai point, létude des formes 
actuelles ne m'avant fourni aucun renseignement à leur sujet, 
c’est à savoir : le mode d'insertion du muscle adducteur pos- 
térieur qui, chez les Diceras, les Requienia, les Toucasia. s'in- 
sère sur un plan situé en dessous du plateau cardinal et sur 
une légère apophyse myophore analogue par exemple à celle 
des Cucullæa parmi les Arridæ et, qui, chez les Æeterodi- 
ceras remonte au contraire dans le plan du plateau cardinal; 
la fixation, qui est indifférente par lune ou l'autre valve 
chez les Diceras, la dentition étant caractéristique de Ia valve 
droite et de la valve gauche, l’une ou Fautre pouvant être 
fixée, caractère qui est parfaitement réglé, au contraire, chez 
les autres formes de ce groupe dans lesquelles la valve fixée 
a toujours la même dentition comme chez les Chama; les 
canaux de la coquille des Baylein analogues à ceux des Ru- 
distes. 

Les seuls caractères sur lesquels létude que Jar faite des 


310 R. ANTHONY 


Chaminæ m'a éclairé sont, en somme, le processus d’arron- 
dissement et les modifications dentaires. 

En me plaçant donc uniquement à ce double point de vue, il 
me paraît qu'on puisse dire des Diceratinæ, comme on la dit des 
Chaminæ, qu'ils proviennent d'animaux chez lesquels les 
crochets avaient déjà une tendance manifeste à lenroulement 
en avant, comme chez les /socardia par exemple, c’est-à-dire 
d'animaux chez lesquels le ligament se développait avec une 
grande rapidité et une grande intensité par rapport aux cou- 
ches calcaires successives de la coquille; chez eux comme 
chez les Chaminæ, cette tendance héréditaire à l’enroulement 
est accentuée par le fait de la fixation antérieure. L'arrondisse- 
ment qu'elle entraîne se fait tout naturellement par enroule- 
ment, puisque la tendance naturelle est déjà lenroulement. 

La fixation antérieure semble avoir été déterminée chez 
les Dicératinés comme chez les Chames par la forme même de 
leur coquille avant la fixation qui semble avoir été aussi aniso- 
myaire el lithocardioïde, ainsi que tend à le prouver l'absence 
de dent antérieure. 

L'allongement du pas de hélice qui caractérise certaines de 
ces formes semble en rapport avec une croissance plus 
rapide du ligament par rapport aux zones calcaires que chez les 
Chames, el avec ce fait que les différentes couches calcaires suc- 
cessives, au lieu de rester toujours adhérentes au substratum 
comme chez les Chama, les Gyropleura et le Chamostrea, se 
redressent de plus en plus. 

Bref, en résumé, les Dicératinés semblent, par tous les ca- 
ractères, être très proches parents des Chaminés, et 1} semble 
que lon puisse admettre pour les deux tribus une origine com- 
mune. 

Rudistes. — Je comprends dans cette famille toutes les 
formes fossiles dimyaires fixées en position pleurothétique, 
chez lesquelles l'arrondissement semble s'être fait non par un 
enroulement, mais par pseudo-plicature (1). La plupart des 
auteurs les réunissent aux Chanideæ (Chaminæ et Diceralinæ) : 
j'ai cru bien faire en les séparant provisoirement, et, les raisons 
de cette manière d'agir seront données plus loin. Elles com- 
prennent les principales formes suivantes, toutes fossiles 


TE TT 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES di 


Monopleura, Caprotina, Polyconites, Hippurites, Sphærulites, 
Sauvagesia,  Bournonia,  Radiolites,  Birudiotites,  Lapetrou- 
sia, ele., qui s'étendent dans toute la hauteur du Crétacé. 

Pas plus que pour les Diceratinæ, je n'ai l'intention de faire 
ici une monographie complète des Rudistes, qui contiendrait 
beaucoup de redites étant donnés les travaux de Douvillé aux- 
quels je ne puis mieux faire que de renvoyer. 

Ce ne sont plus les Chames actuelles qui m'ont éclairé sur 
l'appréciation des caractères morphologiques des Rudistes, 
mais bien les Æthéries, Mollusques acéphales fluviatiles devant 
être incontestablement rattachés aux Unionidæ, qui sont par 
conséquent très loin des Rudistes au point de vue des affinités, 
mais qui présentent des caractères de convergence si remar- 
quables avec eux qu'on ne peut guère hésiter et par analogie à 
conclure des unes aux autres. 

Les caractères communs des Rudistes sont nombreux. Au 
premier chef est la présence d'une arête ligamentaire qui dispa- 
rait chez les formes les plus évoluées, de canaux plus où moins 
développés dans le test dans les formes les plus spécialisées, de 
deux dents cardinales à la valve libre et d'une seule à la valve 
fixée, etenfin d'une particularité sur laquelle on n'a pas insisté 
encore et dont l'importance est cependant considérable et qui 
est à savoir le fait que la fixation semble se faire, non comme 
chez la plupart des Chames, les Diceras et les Chamostrées, 
par la région antérieure d'une des valves, mais par Pensemble 
de la valve comme chez les Æthéries ; ajoutons-v encore cette 
forme spéciale de la coquille dont la valve supérieure est 
aplatie opereuliforme et dont la valve inférieure très allongée, 
munie de cloisons transversales, prend la forme d'un evlindre 
droit. 

Les caractères de convergence que les Æthéries ont avec les 
Rudistes sont les suivants : d'abord l'arête Higamentaire que 
les Æthéries possèdent, quoique à un degré moindre, comme 
les Rudistes; la forme des valves dont la supérieure prend Ta 


(4) Chez certaines formes, comme le Plagioptychus, par exemple, il est par- 
fois difficile de se rendre compte si l'arrondissement s’est accompli par enrou- 
lement ou par pseudo-plicature. L'étude des Dimyaires fixés en pleurothétisme 
n'ayant pu me renseigner à leur sujet, je ne m'en occuperai pas ici. 


318 R. ANTHONY 


forme aplatie d'un opereule et l'inférieure S'allongeant pré- 
sente de nombreuses cloisons transversales; la réduction du 
musele adducteur postérieur et l'allongement ainsi que la divi- 
sion en deux parties du muscle adducteur antérieur ébauchée 
chez les Æthéries et qui atteint chez les Sphærulites une si 
grande netteté (Voy. fig. 56); enfin la fixation par la tota- 
lité de la surface d'une valve. Les Æthéries ne possédant mi 
canaux du test, ni dents à la charnière, il ne sera done 
question à propos des Rudistes ni des uns n1 des autres (1 E 

Le mode d'existence des Rudistes est très comparable à celui 
que nous constatons chez les Æthéries; stles uns vivaient jadis 
sur les récifs battus par les flots des mers chaudes crétacées, les 
autres vivent actuellement dans les rapides des fleuves de 
l'Afrique équatoriale. I n’est done pas étonnant, étant donnée 
l'identité des conditions d'existence, que les uns et les autres 
aient pris des caractères communs. Les Æthéries proviennent 
incontestablement, ainsi qu'il à été prouvé au cours de ce 
Laval, d'Unionidæ aplatis bilatéralement et de formes telles 
qu'abandonnés à eux-mêmes ils reposent Loujours sur une de 
leurs valves et de telle façon que leur plan sagittal soit horti- 
zontal : c'est ce qui explique que pour elles la fixation se fasse 
par l'ensemble d'une des valves. IPest vraisemblable que les 
Rudistes, chez lesquels la fixation semble se faire également 
par l'ensemble d'une des valves, proviennent aussi de formes 
aplaties bilatéralement à crochets droits, à ligament al- 
longé rectiligne d'avant en arrière, et se raltachant peut- 
ôtre aux Cardide. C'est ce mode spécial de fixation qui sem- 
ble avoir amené, par un processus qui à 616 déjà exposé, chez 
les uns comme chez les autres, la formation de l’arète liga- 
mentaire (conséquence de l'arrondissement) dont l'évolution 
a été étudiée chez les Æthéries. À son début chez les Capro- 
tines, elle atteint son complet développement chez les Sphæru- 
lies, entre en régression chez les Radiolites et les Biradiolites où 
l'arrondissement est à peu près géométriquement parfait. 

La disparition de l'arète ligamentaire, due à l'arrondisse- 
ment de plus en plus parfait du contour sagittal, amène comme 


(4) I y aurait peut-être cependant lieu de rapprocher des canaux des Ru- 
distes la particularité signalée par Simroth (90) et dont il a dèjà été question. 


A pm Li 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 319 


Fig. 56, — Evolution des muscles adducteurs chez les Æthéries et les Rudistes. — 
I, Ælheria plumbea Sow. :; 11, Sphærulites radiosus Desm.: IT, Biradioliles 
cornupasiaris d'Orb.; a, arèle ligamentaire ou sa place: #4, muscle addusteur- 


antérieur ; 5, place du muscle adducteur postérieur. 


380 R. ANTHONY 


conséquence nécessaire celle du ligament déjà réduit chez les 
Æthéries. La valve supérieure est alors un véritable opercule 
qui, au moment de l'ouverture, n’est plus mû d’un mouvement 
angulaire, mais bien d’un mouvement parallèle à lui-même. 
La formation de l’arète ligamentaire rapproche, chez les Ru- 
distes comme chez les Æthéries, le muscle adducteur postérieur 
du point de rotation de la valve et, à mesure que ce muscle s'en 
rapproche, son action tendant à devenir de moins en moins 
efficace, il entre en régression. Déjà légèrement réduit chez les 
Æthéries, 1l diminue encore chez les Sphœrulites où il est souvent 
difficile de trouver une trace évidente de ses impressions, à 
quelque valve que ce soit. Il me semble donc, et je me permets 
d'insister tout spécialement sur cette opinion à laquelle l'étude 
dos Æthéries m'a conduit, qu'à partir des Sphærulites radiosus 
Desm. le muscle adducteur postérieur doit être extrêmement 
réduit. En même temps que, chez les Æthéries, le muscle adduc- 
teur postérieur, se rapprochant du point de rotation, tend, en 
raison de son inutilité croissante, à disparaître, le muscle 
adducteur antérieur, au contraire, tend, par un mécanisme 
déjà expliqué, à se répartir, en quelque sorte, de chaque côté 
de ce point de rotation et à remplacer fonctionnellement 
l'adducteur postérieur disparu. Déjà, chez PÆthérie, on le voit 
allonger son impression, écarter en quelque sorte ses fibres, 
contourner le bord antérieur de la valve et, chez beaucoup 
d'individus, 1lest nettement divisé en deux parties. Chez le 
Sphærulites, la même division de ce muscle S'observe ; ses 
deux parties sont plus étendues que chez lPÆthérie, et la 
partie la plus ventrale atteint et dépasse même souvent de son 
bord distal la ligne médiane dorso-ventrale. Chez l'ÆHippurites 
cornu vaccinunt Goldf., le muscle antérieur est déjà en face 
de larête ligamentaire. Chez les Æadiolites et les Biradiolites, 
ne peut-on admettre que sa partie la plus ventrale, s'écartant 
de sa congénère, ait atteint le bord postérieur de la coquille, 
de telle sorte que les deux parties du muscle adducteur anté- 
rieur se trouvent réparties de part et d'autre de larôte. 
Suivant done cette conception naturellement explicable, à 
laquelle les faits observés chez les Æthéries semblent donner 
quelque fondement, les Spheruliles posséderaient un muscle 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 381 


adducteur postérieur très réduit, et les deux muscles des Radio- 
liles et des Biradiolites seraient non un addueteur antérieur et 
un adducteur postérieur, comme le veulent les auteurs, mais 
un adducteur antérieur dédoublé. 

On conçoit combien cette manière de voir, donnée sous 
toutes réserves, doit changer, si des faits ultérieurement cons- 
tatés la confirment, l'idée que l’on doit se faire de l'orien- 
ation du Rudiste à l'intérieur de sa coquille. 

Myochamidæ et Chamostreidæ. — Les familles des Myocha- 
midæ et des Chamostreidæ ne présentent pas de formes fossiles ; 
il n'y à pas lieu d’y insister 1er. 

Chondrodontidæ.— Ces formes exclusivement fossiles n'ayant 
rien d'analogue dans la nature actuelle, il n'en sera pas 
question. 


CONCLUSIONS GÉNÉRALES 


(Relatives à la deurième partie) (1). 


1° Les Mollusques Acéphales qui, dansles conditions ordinaires 
de leur existence, sont orientés de telle sorte que leur plan 
sagittal (bucco-ventro-ano-dorsal) soit parallèle au plan sur 
lequel ils reposent, sont dits pleurothétiques, par opposition 
avec ceux dont le même plan sagittal est perpendiculaire au 
plan sur lequel ils reposent'et qui sont dits euthétiques. 

2 Il peut exister des formes pleurothétiques dans tous les 
groupes, parmi les Dimyaires comme parmi les Monomyaires. 

3° Les Acéphales pleurothétiques peuvent être libres comme 
la Pandora et le Pecten marimus Linn. ou fixés comme les 
Rudistes et les Huitres. 

ï° Les Acéphales dimyaires fixés en position pleurothétique 
sont les suivants : 

1. Dimyidæ ; 

>, Chamidæ; 

3. Myochamidæ; 

x. Chamostreidæ; 

5. Ætheriidæ (à l'exclusion de Auwleria, qui estune forme 

monomvaire) :; 

6. Rudistæ : 
1. Chondrodontidæ. 

(Les groupes avant des représentants actuels sont en carac- 
tères gras.) 

5e Les affinités de ces différents groupes sont les suivantes : 

1) Dimyidæ. — Les Dimyidæ sont incontestablement des 

(1) Ainsi qu'il a été dit, la première partie ne comporte pas de conclusions 
spéciales, étant elle-même un ensemble de conclusions et un résumé. — De 
plus, désirant donner à ces conclusions un caractère exclusivement général, 


je n'y rappellerai pas les faits positifs morphologiques, embryogéniques ou 
physiologiques établis au cours de ce mémoire. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 3093 


Arcidæ (dimyaires, filibranches, dents de la charnière rappe- 
lant chez les Dimyodon et les jeunes Dinrya celles des Per- 
tunculus. Ligament rappelant probablement celui des Limopsis. 
Lobes du manteau libres comme chez tous les Arcidæ). 

2) Chamidæ. — Les Chamidæ (Chaminæ et Diceratinæ) sont 
très probablement des Cardüdæ (Eulamellibranches, trois ou- 
vertures palléales dont deux courts siphons chez les Chames 
comme chez les Cardin. Dentition des jeunes Chames rappe- 
lant sensiblement celle de Cardium adultes, chez lesquels la 
dent latérale antérieure aurait disparu (Lithocardiunr) |. Une 
forme originelle lithocardioïde, semble aVoir donné deux 
branches divergentes : l’une qui, à la fin du Jurassique, aurait 
donné le phylum des Diceratinæ par la conservation de Ja 
dent cardinale 1, l'autre qui, à la fin du Crétacé, aurait donné, 
par la suppression de cette même dent cardinale 1, le phylum 
des Chamidæ. Par beaucoup de caractères fondamentaux, les 
Chamidæ se rapprochent des Tridacnidæ (branchies, dentilion, 
ligament, ouverture palléale, ornement de la coquille) qui pro- 
viennent aussi vraisemblablement d'une forme lithocardioïde. 
Je ne serais donc pas éloigné de croire que les Chamidæ et les 
Tridacridæ, qui sont aussi voisines des Cardium, aient une 
origine commune : les uns se seraient adaptés à la fixation 
pleurothétique, les autres à la fixation euthétique et byssale. 

Le tableau suivant rend compte des relations familiales pos- 
sibles de ces différents groupes d'animaux. 


Forme lithocardioïde 
_ originelle. 


Diceratinæ. 


Byssocardium. 
Tridacna. 


fiippopus. 


Chaminæ. 


304 R. ANTHONY 


3 et 4) Myochamidæ et Chamostreidæ. — Ces deux familles 
sont incontestablement des Anatinidæ. (Persistance des siphons 
surtout chez les Myochama ; eulamellibranches avec forme spé- 
ciale de la branchie: quatre ouvertures palléales comme chez 
les Anatinidæ ; nacre ; Hithodesme.) 

5) Ætherüdæ. — Les Ætherüidæ sont incontestablement des 
Unionidæ. (Existence fluviatile; nacre; épiderme verdàtre ; 
constitution du ligament:; structure de la branchie qui, comme 
chez les Urionidæ, joue le rôle de cavité incubatrice ; deux ou- 
vertures palléales seulement comme chez les Urionidæ ; forme 
des individus jeuñes qui sonten tous points des Anodontes de 
taille réduite.) 

6) udistie. — Semblent devoir être considérés comme des 
Cardidæ (??) avant avec les Chames et les Diceraxs des rapports 
de parenté simplement collatéraux:; ne dérivent très probable- 
ment pas, comme chez les Diceras, les Chames et les Tridacnes, 
d'une forme lithocardioïde, mais bien au contraire d’une forme 
nettement équilatérale et homomyaire à crochets droits et à 
ligament rectiligue. L'ignorance dans laquelle on est de lorga- 
nisation anatomique et des formes Jeunes de ces animaux ne 
permet pas de se prononcer catégoriquement sur leurs affinités. 

1) Chondrodontidæ. — Les Chondrodontidæ se rattache- 
raient, d'après Douvillé, aux Pinnidæ. 

6° Au point de vue éthologique, les conditions d'existence 
des formes Acéphales dimvaires fixées en position pleurothé- 
tique peuvent se résumer ainsi: eaux agitées et très chaudes. 

7° La fixation pleurothétique peut en effet, chez eux, 
s'expliquer de la manière suivante : supposons ces animaux 
qui, tous, proviennent d'organismes euthétiques, se trouvant 
placés sur un fond dénudé par les flots et par conséquent dé- 
pourvu de vase où de sable; 1ls ne pourront S'y enfoncer et, par 
le fait même de leur forme, tomberont et reposeront sur une 
de leurs valves. C'est le pleurothétisme. 

Supposons en outre qu'ils se trouvent, ce qui est générale- 
ment le cas, dans des eaux très chaudes où la sécrétion du 
calcaire est abondante, ils ne larderont pas à se fixer, et, puis- 
qu'ils sont déjà en pleurothétisme, la fixation sera pleurothé- 
lique. Par le fait de la sélection naturelle, les formes les moins 


ee RE 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 38) 


solidement fixées disparaîitront, et se constitueront ainsi les 
formes pleurothétiques fixées. 

L'agilation et la haute température de l’eau semblent donc 
être les facteurs de la fixation pleurothétique. 

8° La fixation pleurothétique peut se faire, tantôt par une 
valve, tantôt par l'autre. Dans certains genres, la fixation se 
fait toujours par la même valve ; dans d'autres, elle se fait in- 
différemment par l'une ou l'autre valve. C'est le cas des Æthé- 


Fig. 57. — Schéma indiquant le mode de fixation en pleurothétisme des différents 
types d’Acéphales dimyaires. — 1, Dimyidæ, fixation totale: II, Myochamidæ, 
fixation totale : II, Chamidæ, fixation antérieure : IV, Ætheriidæ, fixation totale. 
La zone fixée est indiquée par des hachures. 


ries où, dans la même espèce, certains individus sont fixés par 
une valve et d'autres par l’autre. En tout cas, sauf chez les 
Diceras, la valve fixée, qu'elle soit droite ou gauche, a tou- 
Jours des caractères qui lui sont propres et ilen est de même 
de la valve libre. 

9 La fixation se fait soit par l'ensemble d'une des valves 
(Myochama, Ælhéries, Rudistes, certaines Chames, et dans ce 
dernier cas elle est tout à fait spéciale), soit par la région 
antérieure seulement d’une des valves (Dimya,Chamostrea, a 


plupart des Chamidæ). 

10° Le mode de fixation totale où antérieure est déterminé 

par la nature du substratum et la forme de la valve qui se fixe. 

Lorsque la valve est lithocardioïde et le substratum plan, la 

fixation est antérieure [Chama iostoma Conr. Chama Ruppellii 
ANN. SC. NAT. ZOOL. 1, 29 


386 R. ANTHONY 


Reeve, Chamostrea]. Lorsque, la valve étant lithocardioïde, 
le substratum est hérissé d'irrégularités (polypiers), la fixa- 
tion peut être totale Chuma Brassira Reeve. Lorsque la valve 
est à peu près plane, quelle que soit le substratum, la fixation 
est toujours totale (Æthéries, Rudistes, Hyochama, Dimya). 

11° Les modifications dues au pleurothétisme (caractères de 
convergence) consistent surtout en la substitution d’une 
symétrie coronale à la symétrie sagittale. 

Les deux valves droite et gauche, ainsi que les lobes du 
manteau, tendent à devenir de plus en plus dissemblables, Pin- 
férieure prenant, par le fait de l'action indirecte du poids des 
organes, la forme d'une coupe creuse el la supérieure celle 
d'un opercule. En même temps, les côtés antérieurs et posté- 
rieurs de la coquille tendent à se ressembler. 

12° Les modifications dues à Ia fixation (caractères de con- 
vergence) sont l'arrondissement, la perte du pied et la rétrogra- 
dation des siphons, vestiges de ladaptation céphalothétique 
ancienne (Myochama et Chamostrea). 

13° L'arrondissement peut s'accomplir suivant trois pro- 
cédés, directement (Dimyidæ, Myochamidæ), indirectement, et 
alors il peut se faire par enroulement (Chamidæ, Chamostreidæ) 
ou pseudo-plicature (Ætherüdæ, Rudistes). 

1% L'arrondissement direct semble être en rapport avec un 
ligament primitivement réduit, des crochets droits et une 
coquille sensiblement symétrique par rapport à une ligne 
dorso-ventrale partant du crochet. 

13° L'arrondissement par enroulement semble en rapport 
avec une coquille ayant déjà une tendance marquée à l'enrou- 
lement en avant des crochets et par conséquent avec un liga- 
ment curviligne. 

16° L'arrondissement par pseudo-plicature semble en rap- 
port avec une coquille à ligament longitudinal antéro-postérieur 
et droit. | 

17° De plus, la fixation totale semble favoriser l'arrondis- 
sement direct et l'arrondissement par pseudo-plicature, alors 
qu'au contraire la fixation antérieure semble favoriser larron- 
dissement par enroulement. 

18° L'arrondissement entraine les modifications suivantes 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 387 


caractères de convergence): rapprochement des extrémités 
dorsales des deux muscles adducteurs; diminution, chez les 
formes à arête ligamentaire, du musele adducteur postérieur, 
qui semble finir par disparaître, et augmentation parallèle du 
muscle adducteur antérieur qui tend à s'éloigner de larète 
ligamentaire (position ventrale par rapport au tube digestif 
chez l'ensemble des Dimyaires fixés et pleurothétiques), à faire 
en somme, en suivant le bord ventral, le tour de la coquille, à 
se répartir enfin de chaque côté de l'arète ligamentaire (Radio- 
lites) ; plissement de la branchie (Æthéries) et sa libération des 
parties avoisinantes (Chames) ; accolement des palpes labraux 
aux lobes palléaux ; éloignement du rectum du cœur ; (chez la 
forme très évoluée des Æthéries, le rectum passe dorsalement 
par rapport au cœur). 

19° Dans le cas de pseudo-plicature chez les Æthéries, le liga- 
ment, arrêté dans sa croissance antéro-postérieure, augmente 
d'épaisseur dorso-ventralement, et, sous la pression de la sub- 
stance élastique, la couche fibreuse dorsale éclate. 

20° Chez les Æthéries, l’arête ligamentaire est la conséquence 
de larrondissement par pseudo-plicature. Elle caractérise 
les formes chez lesquelles l'arrondissement s'obtient par ce pro- 
CessUs. | 

21° Chez les Æthéries, l'arête ligamentaire est occupée par l'ex- 
trémité postérieure de la substance fibreuse dorsale du higament. 

29° Chez les Acéphales fixées en pleurothétisme, lorsqu'au 
bout d’un certain temps les zones calcaires cessent d’être adhé- 
rentes au substratum, la vàlve inférieure se développe en lon- 
gueur (Æthéries, Hippurites) et chaque zone calcaire Y 
détermine une cloison transversale [cameraled structure de 
Jackson (90). 

23° Dans la régression du pied et de sa musculature, ce sont 
les muscles adducteurs postérieurs qui persistent le plus long- 
temps (Chames, Æthéries). 

24° En résumé, les caractères communs des formes Acéphales 
dimvaires, fixées en position pleurothétique sont les suivants : 
symétrie coronale substituée à la symétrie sagittale ancienne 
(pleurothétisme), forme arrondie (fixation), réduction des appa- 
reils siphoniens et pédieux. 


388 R. ANTHONY 


25° Les Diceratinæ fossiles, qui, au point de vue familial, 
semblenttrès près des Chamninæ, semblent également avoir une 
morphogénie semblable à la leur. 

26° Les Rudistes, au contraire, qui ne semblent pas pouvoir 
provenir, directement du moins, des Dicératinés, mais consti- 
tuer plutôt une branche divergente ayant avec ces derniers des 
ancêtres communs, paraissent avoir une morphogénie vraisem- 
blablement très analogue à celle des Æ{heriidæ actuelles. 
Comme elles, ils se fixent le plus souvent par l'ensemble d’une 
de leurs valves, s'arrondissent par pseudo-plicature et semblent 
présenter la même régression du muscle adducteur posté- 
rieur, accompagnant le même développement progressif de 
l'adducteur antérieur. 


LISTE DES PRINCIPAUX OUVRAGES CITÉS 
ET CONSULTÉS 


. Anaws, List of Land and Freshwater shells coll. by E. Bartlett in the. 


Upper Amazons. Proc. Zool. Soc., 1866. 


. Apawsow, Histoire naturelle du Sénégal, 1757. 

3. Axrnony, Org. et morphogénie des Tridacnidés. C. R. Acad. Sc., 1903. 

. In., Org. et morphogénie des Æthéridés. C.R. Acad. Sc., 1904. 

. Ip., L’acquis. de la forme arrondie chez les Moll. Acéph. Arch. de Zool. 


exp. et gén., 190%. 


5. In., La constitution de l’arète ligamentaire. C. R. Acad. des Sc., 1905. 
. 1n., Forme et struct. des muscles add. des Moll. acéph. Bull. Soc. phi- 


lomathique. 


. T. Barrois, Anatomie du pied des Lamellibranches. Bull. scient. du dép. 


du Nord, 1879. 


5.In., Les glandes du pied et les pores aquifères des Lamellibranches. 


The doct. sc: 


5. F. Berxar», Première note sur le développement de la coquille chez les 


Lamellibranches. Bull. Soc. géol. 


. In., Deuxième note sur le développement de la coquille chez les Lamel- 


libranches (Taxodontes). Bull. Soc. géol. 


. In., Troisième note sur le développement de la coquille chez les Lamel- 


libranches (Anisomyaires). Bull. Soc. géol. 


. In., Quatrième et dernière note sur le développement de la coquille 


chez les Lamell. Bull. Soc. géol. 


. 1n., studes comparatives sur la coquille des Lamellibranches. Journ. de 


Conchyl. 


. In., Sur le développement de la coquille des Lamell. Bull. Mus. Hist. 


nat., 1895. 


. Ip., Sur la signification morphologique des dents de la charnière chez 


les Lamellibranches. C. R. Acad. se. Paris, t. CXXV, p. 48-51. 


. 1n., Sur la coquille embryonnaire prodissoconque des Lamellibranches. 


C. R. Acad. se. Paris, t. CXXIV, p. 1165-1168. 


. In., Sur quelques coquilles de Lamellibranches de l'ile Stewart. Bull. 


Mus. Hist. nat., 1897. 


. In., Recherches ontogéniques et morphologiques sur la coquille des La- 


mellibranches. Ann. se. nat. Zool. (8), t. VII. 


5. In., Traité de Paléontologie. 
2. Bicurs, Adaptation of Mollusks to changed conditions. Nautilus, 


vol. XVI, p. 112-114, 193. 


. Borissack (en russe), Introduction à l'étude des Pelecyp. fossiles (em- 


bryogénie, anatomie comparée, influence des conditions d'existence, 


390 


R. ANTHONY 


classification naturelle). Phyl. Verh. min. Ges. Saint-Pétersbourg, 
vol. XXXVIL p. 1-14#. 


. Bou, Ueber die Fauna der Per. Schich. Zs. D. Geol. Ges., 1901 (Dim yo- 


don angulatus, nov. spec.). 


. Boxxer, Der Bau und die Cireul. der Acephal. Morphol. Jahrb., 1877. 

. BraiNvize, Dict. des sc. natur., article MoLzLusQuE. 

. In., Manuel de Malac. et de Conchyl. 

; Bou RGUIGNAT, Description de plusieurs Æth. nouvelles. Matériaux pour 


servir à l'histoire des Mollusques acéphales du système Européen, 
1880. 


51. BraxcuarD, Organisation du règne animal. Mollusques acéphales. 

52. Bronx, Die klass. und Ordnung, der Weichthiere (Mollusca). 

. Caitraup, Voyage à Meroë, vol. IL (Ætheria), 1826. 

2, Carazzi, Contributo all. istol. e all fis. dei Lamell. Int. Mon. f. Anat. und 


Plys., 1902. 


92. Cossmaxx, Catalogue illustré des fossiles éocènes des environs de Paris, 


fase. [, Bruxelles. 


. CourTaxcez, De l'énergie et de la structure musculaire chez les Mollusques 


acéphales. Baïllière, Paris. 


. Cuvier, Anatomie comparée, 1800. 
2. Daurzex8erG, Description d'une nouvelle espèce du genre Chama des 


côtes océaniques de France. Bull. Soc. Sc.nat. 0. de France, et Journ. 
conchyl., vol. XLE. 


. Dar, On the hinge of Pelecyp. Amer. Journ. Sc. 
95. {n., À new classif. of the Pelecyp. Trans. Wagn. free Inst. sc. Philadel- 


plie, vol. IL. 


. Ip., The morphol. of the hinge Teeth of Bivalves, Amer. Natural., XXXV, 


p. 175-182, 1901. 


. In., Report on the Moll. Bull. Mus. Comp. z0olog., XII. 
95. Decace, Une nouvelle science : la Biomécanique. Rev. gén. des sciences, 


1895. 


90. Douvizzé, Étude sur les Rudistes (1r° part.). Mém. Soc. géol. (Paléontolo- 


gie), vol. I. 


. In., Étude sur les Rudistes (2° part.) Mém. Soc. géol. (Paléontologie), 


vol. IL. 


3. In., Étude sur les Rudistes (3° part.). Mém. Soc. géol. (Paléontologie), 


vol. IL. 


.In., Étude sur les Rudistes (4° part.) Mém. Soc. géol. (Paléontologie), 


vol. IV. 


.In., Étude sur les Rudistes (5° part.). Mém. Soc. géol. (Paléontologie), 


VOLANE 


7. lo., Étude sur les Rudistes (6° part.) Mém. Soc. géol. (Paléontologie), 


vol. VIL 


. In., Sur quelques formes peu connues de la famille des Chamidés. Bull. 


Soc. géol., 3° série, t. X. 


. In., Études sur les Caprines. Bull, Soc. géol., 3° série, t. XVI. 
. Ip., Essai sur la morphologie des Rudistes. Bull. Soc. . géol., 3e série, 


t XIV. 


2. [n., Sur le genre Chondrodonta. Bull. Soc. géol. 
. In., Essai de classification phyl. des Lamellibranches. C. R. Acad. des 


Su 1898. 


19}, Car act. nat. des Sauvagesia. Bull. Soc. géol. 

3 In. Obs. sur la charnière des Lamell. hétérodontes. Bull. Soc. géol. 

. I., Classification des Radiolites. Bull. Soc. géol., 4° série, t. IL, p. 464-477. 
- Ip., Sur un nouveau genre de Radiolites. Id., p. 478-482. 


99: 


. GROBBEN (H 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 391 


2, Downixe, Variation in the posit. of the add. museles of Anodonta grandis. 


Amer. Natur. 

. Drew, Yoldia limatula. Mém. Biol. Lab. J. Hopkins Univ., IV, 3. 

. In., Some observations on the habits, anatomy and embryology of mem- 
bers of the Protobranchia. Anat. Anz., Bd XV, 1899. 

. In., The life hist. of Nucula delphinodonta. Q.J. M:Se.,4901. 


2, In., The cireul. syst. of Lamell. Sc. N. $., vol. XV. 
. Desnaves, Obs. sur les anim. de quelques genres de Mollusques acé- 


phales. Proc. Zool. Soc. Lond., XXI. 


.In., Article Conchifera in Todd's Cyclop. of Anat., vol. I, 1836. 

. In, Traité élémentaire de Conchyliologie. 

.In., Mollusques de l'Algérie, 1848. 

. Drew, Locomotion in Solenomya and its relatives. Anat. Anz., Bd X VIT, 


none 


. Ferussac, Notice sur les Æthéries trouvées dans le Nil par M. Caillaud. 


Mém. de lu Soc. d'Hist. nat. de Paris, t. je 


. Fiscuer (P.), Manuel de Conchyl. et de Paléont. conchyl. Savy, Paris. 

. In., Note sur le genre Coralia. Journ. Conchyl. - 

. Francois, corresp. publiée dans les Arch. zool. expér. 

.Frrrez, Les Chamacés, leur rôle comme organismes constructeurs à 


l'époque secondaire. Le Naturaliste, ann. 23, 1901. 


. Garxer, On the Anatom. of the Lamell. Conch. Trans. of the Zool. Soc. 


London, vol. IL. 


.In., Malacal. notes. Ann. and Mugaz. Nat. Hist., sér. 4, t. XIX, 1877. 


. Gansraxe (W.), The morphology of Mollusca. Sc. Progr., vol. V. 


. Giarp, Controverses transformistes. 


. Guen, Adapt of the shell of Placunomia to that of Saxidomus. With 
remark on Shell adapt. in general. Trans. N. Y. Acad. Sc., vol. XVI, 
DES 

. Groësex, Die Pericardial druse des Lamell. Arle Zool. Inst. Wiens., 
1888. 

.), Beiträge zur Morphologie und Anatomie der Tridacniden 
(Exped. S. M. Schitf. Pola in das Rothe Meer). Deutsch. k. Ak. «. 
Wiss. Wien, math. nat. CI., Bd EXV, 1898. 

.Iv., Zur Kenntniss der an und Morph. Meleagrina. Anz. kais. Akad. 
Wiss. Wien, 1901. 

. Haxcock, On the animal of Myochama anomioïdes. Ann. and Mag. of Nat. 
ist sers 2, XL. 

.In., On the animal of Chamostrea albida. Ann. and Mug. Nat. Hist., 
ser. 2, t. XL. 


5. Hvarr, Terminol. proposed for Deseript. of the shell in Pelecypoda. 


Proc. Americ. Assoc. adv. Sc., 4kt* Meet, p. 145-148. 
.In , Transf. of Plarnobis at Steinheim with Rem. on the eff grav upon 
the form of the shell Proceel Americ. Ass. Ado. Se., vol. 29, 1882. 
. Jacxsox, The Dev. of the Oyster. Proc. of the Boston Nat. His. Soc., 
vol. XXIIE. 
. In. (A. T.), Phyl. of the Pelecyp. The Aviculidæ and their allies. Mem. 
Bost. Soc. nat. Hist., vol. IV. 
. 1n., The Méchanichal origin of struct. in Pelec. Americ. Nutur., vol. XXV. 
. Jouxsroxe, On the Cardium and Life history of the comm Cockle 
with on App on the Lancashire Cockle fish. Rep. 1899. Lancashire 
sea Fish, p. 34-117. Trans. Liverpool biol. Soc., vol. XIV, 178-216, 
1900. 
Jouver et Seuuer. Contrib. à l'étude de la Phys. comp. de la Contr. mus- 
eul. chez les Invertébrés. Th. du labor. d'Arcachon. 


R. ANTHONY 


90. KezcoG (J.-L.), À contribution to our; knowleedge of the Morphol. of 


Lamell. Moll. Bull. U. S. Fish. comm., vol. X. 


36. Lamarck, Histoire naturelle des animaux sans vertèbres. 
54. M. pe Lacaze-Durniers, Mém. sur l’organis. de l'Anomie. Ann. Sc. nat. 


Zool., t. If, 4° série. 
3. [n., Morphol. de Tridacna elongata et Hippopus. Arch. Zool. expérim. êt 
Gé LO 08: 


5. 1n., Mém. sur l’org. des Bojanus des Acéph. Ann. Sc. nat. 
54. In., Rech. sur les org. gén. des Acéphales. Ann. Se. nat. Zool., série 4, 


toile 

3. R. Lankesrer, Encycl. Brit. Mollusca, 9° éd., vol. 16. 

- LAMEERE, Évolution des Mollusques. Ann. Soc. roy. Zool. et Malac. Bel- 
gique, 1903. 

. Lax6, Lehrbuch der Vergl. Anat. (Mollusques). 


57. J.-D. Macnoxarn, On the Anatomy of Tridacna. Ann. and Mag. of Nat. 


Hist., sér. 2, t. XX. Analysé in Royal Socicty, 18 juin. 

. MÉxÉGaux, Rech. sur la cireul. des Lamell, marins. Thèse doct. sc. Be- 
sançon. 

. Mrrsuxur, Struct. and signif. of some aberrant forms of Lamell. Gills. 
Quart. J. Min. Sc., t. XXI. 


56. Monicaxn, Description de quelques nouvelles espèces de coquilles du 


Pérou. J. de Conchyl., 2 série, t. I. 


56. Morse, On the relat. of Anomia. Proc. Bost. Soc. Nat. Hist., vol. XIV. 
55. Morrcn, Sur les classifications modernes des Mollusques. J. de Conchyl., 


t. AH. 


5. Murzer, Ueber die Schalenbildung bei Lamellibranchiaten. Zool. Beit. 


von A. Schneider, Bd I. 


95. Muxier-Cnarmas, Note préliminaire sur le développement de la charnière 


des Acéphales. Bull. Soc. géol. 
. In., 2° Note préliminaire sur la charnière des Moll. Acéphales. Bull, 
Soc. géol. 


2. In., Sur le genre Byssocardium. Bull. Soc. géol. Fr., 1882, vol. X. 


3. NeuMavrk, Zur Morph. des Bivalvenschlosses. Sitz. d. k. Acad. Wien, 
_ Bd LXXXVII. 

. In., Beitr. zu einer Morphol. Einth. des Bivalven. Deuts. der kais. Acad. 
Wissensch. Wien, t. LVII. 


2. NorrixG, Beiträge zur Morphol. der Pelecypodes. Neu Jahrb. f. Mikr. 


(Greol. und Paleont., 1902. 
- Ip., Notes on the Morphol. of Pelecypodes. Paleontol. Ind, vol. I. 


2. [n., Beitr. zur Morphol. des Pelecypodenschlosses. Neu Jahrb. Min. geol. 


Pal. Berl., Bd XII, p. 140-184. 

9. D'Orgiexy, Dict. d'Histoire naturelle. 

3. In., Sur la st. normale des Moll. Bivalves. C. R. Acad. Se. LAVE 

. Paquier, Sur les relat. du gr. inv. avec le gr. normal chez les Chaminés. 
Bull. Soc. Géol., 1901. 

S. In., Sur les Rudistes urgoniens de Bulgarie, de Suisse et de France. 
Bull. Soc. géol. Fr., 4° série, t. I, p. 286. 

. Io., Sur quelques Dicératinés nouveaux du Tithonique. Bull. Soc. géol. 
Fre, A XXXN: 

5. [o., Note préliminaire sur quelques Chamidés nouveaux de l'Urgonien. 
Ettr. des C. R. des séances de la Soc. géol. de France, n° 5, p. 49. 


96. In., Sur quelques Rudistes nouveaux de l’Urgonien. C. R. Acad. des Sc. 


Paris, 1896. 
. R. H. Peck, The minute struct. of the Gills of Lamell. Mollusca. Quart. 
Journ. Min, Sc., vol. XVII. 


MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 393 


94, Persexeer (P.), Introduction à l'étude des Mollusques. Bruxelles, Mém. 


97: 
88. 
89. 


91. 
93. 


99: 


de la Soc. roy. malac. de Belgique, t. XXVIL. 

Io., Les Mollusques. Traité de Zoologie de Blanchard. 

In., Report on the anatomy of the deepsea Mollusca. Challenger, 1888. 

Ip., Sur la classification phyl. des Pélecypodes. Bull. se. N. Fr. et Belg., 
t. XX, 3° série. 

In., Contribution à l'étude des Lamellibranches. Arch. de Biol., t. XE. 

Id., Sur la forme des variétés chez la Moule comestible. Soc. malac. 
Belgical, t. XXII, 1893. 

In., Recherches sur les Mollusques archaïques (Mémoire couronné). 
Acad. Sc. de Belgique, LVII, n° 3, 1899. 


. In., Classification des Lamellibranches d'après les branchies. Ann. Suc. 


roy. z0ol. et malac. Belgique, 1903, t&. XXXVIIL. 


. Pur, Beitr. sur Morph. und Phyl. de Lamell. Zeit. D. géol. ges., 1900. 
. Paravicxr. Ass. filog. in Moll. Miluna, 1899. 

- Pin, Recherches physiol. sur Tapes decussata. Thèse doct. Sc. Paris. 
5. Prare, Bemerk. über die Phyl. and die Ents. der asym. der Moll. Zool. 


Jahrb. Abth f. Anat. und Ontog. 


. Pour, Testacea utr. Siciliæ corumque historia et Anatomia, Bd IE, 1791. 
2, E. Perrier et Cu. GRAVIER, La lachygénèsa. Ann. Sc. nat., 8° série, t. XV. 
.Id., Sur les causes phys. qui ont déterminé la constitution du type Mol- 


lusque. C. R. Acad. des Sc. Paris. 


3. In., Traité de Zoologie. 
. Id., Les forces physiques et l'hérédité dans la production des types orga- 


niques. Rev. Scientif. 


. Poucuer, Recherches sur l'anatomie et la physiologie des Mollusques. 


Rouen. 


. Puscu, Pol. Palæont. Stuttgardt. 
. Quoy et Gaimarp, Voyage de découverte de l « Astrolabe », t. IL. 
. Raxc, Mémoire sur quelques Acéphales d’eau douce du Sénégal. Nouv. 


Ann. Mus., t. II. 


. Raxe et Carrraur, Mémoires sur le genre Æthérie. Nouv. Ann. Mus., 


3esérie, vol. II 


. Reis, Das Ligament des Bivalvien. lahresheft Ver. f. Vaterl. Naturkun- 


den in Wurtemberg, 58 Jahrb, 1902. Analysé in Zool. Centralbl., 
9 septembre 1902. 


4. LoweLzz REEVE, Conch. Iconica. 
2, Rinewoop, On the structure on the Gills of the Lamellibranch. Trans. 


R. Soc. London, 1902, vol. LXX, p. 499-500. 


. DE RocnesruxE, Observations sur le genre Bartlettia. Bull. Mus. Hist. 


nat. Paris, 1904. 


. Rouaurr, Description de fossiles du terrain éocène des environs de Pau. 


Mém. Soc. géol., 2° série, t. II (Dimyidæ). 


. Rvoper, On the mode of fixat. offry of the Oyster. Bull. U. S. Fish., 


vol. IL. 


. E. Surru, Note on a large sp. of Hippopus. and on a large sp. of Tridacna 


gigas. Proced. Mal. soc. 


. Sowergy, Descript. of Tridacna obesa. Proc. Mal. Soc. 
. SABATIER, Anatomie de la Moule commune. Ann. Sc. nat. Zool., 6° série, 


VI, t. V. 


. SHANEFFER, Ueber Æth. Novagr. Sitz. d. Ges. Dresden, 1865. 
3. Sasst, Zur Anat. von Anomia ephippium. Arb. Zool. Inst. Wien, t. XV, 


p. 81-96. 


. Savize KENT, The great Barrier Reef of Australia. 
. Simrotu, Ueber einig. Æth. des Congofallen. Zool. anzeig., p. 662. 


R. ANTHONY 


. SimroTH, Ueber die Morph. Bed. der Wei. Samml gem. Verh. Ham- 
bourg, 1890. 

. SuarP, Rem.on the Phyl.of Lamell. Proced. Acad. Nat. Sc. Philad., 1888. 

. Suiru, Description of Mulleria Dalyi from India. Proc. malac. Soc. Lon- 
don, vol. IE, p. 14-16. 

. STEMPELL, Beitr. zur Kentn. der Nuculidæ. Zoo!. Jahrb. Fauna Chilensis. 

. Taies (J.), Zur Phylog. des Byssus app. des Lamell. Verh. Deuts. Zool. 
Ges. 2 Jahr. zu Berlin. 


2. [n., Beitr. zur kentn. d. Mollusk. Zeit. Wiss., 2-62. 
3. In., Die syst. der solenog. und die Phylog. d. Moll. Zeit. Wiss, 2-72. Bd. 


p. 249, 1903. 

. Toucas, Sur l’évolution des Hippurites. Bull. Soc. géol. Fr., 4° série, 1, 
p. 454-155. 

. Tryo, Catal. of the family of Chamidæ. Proc. Acad. Nat. se. Phil., 
vol. VII, 1872. 


2. Tourxouer, Surunenouvelle espèce de coquille des marnes de Gaos (Bys- 


socardium). Bull. Soc. géol. Fr., vol. X. 
. VaizranT, Rech. sur la fam. des Tridacnidæ. Ann. Sc. nat. zool., t. IV. 


5. Verril, The Moll. Archet. consideredas a Veliger like form. Ann. J. 


Sc., 1896. 


4. F. Vis, Locomotion de la Nucule. Bull. de la Soc. de zool., 1904. 


. J. Wicsox, On the dev. of the common mussel (Mytilus edulis) 5. Ann. 
Rep. of the Fish Board for Scotland, Edimburg. 

. Woopwarb, On a proposed classif. of the Pelecyp. Nat. Sc., vol. VII, 
p. 239-247. On Dalls classification. 


98. In., On the Anatomy of Mulleria Dalyi. Proc. malac. Soc. London, vol. V, 


p. 87-91. 

. Ip., À Manual of the Mollusca, 1856. 

. Ip., Descript. of Cert. gen. of Conchifera. Ann. of Nat. Hist., vol. XVI, 
1855. 

. Ip., Notes in Tapes Pullastra. J. Conchyl., IX, p. 365, 1900. 

. Zirrec, Handbuch der Paläont. (Mollusca und Arthropoda). München 
und Leipzig). 


5. Zirrez, Die Bivalven der Gosaugeb. Denk d. K. K. Akud. Wiss. Wien. 


Bd. XXV. 


EXPLICATION DES PLANCHES 


PLANCHE VII 


Fig. 4. — Pecten maximus Linn. muni de l'aiguille inscriptrice et prêt à 
inscrire son mouvement d'ouverture. (Station physiologique du Collège de 
France.) 

Fig. 2. — Mytilus edulis Linn. de la zone supérieure (Pentrez). 

Fig. 3. — Dreyssensia polymorpha Bened. réunies en bouquet provenant de la 
Seine. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle. ) 

Fig. 4. — Mytilus edulis Linn. type de vase. (Embouchure de la rivière du 
Faou.) 

Fig. 5. — Mytilus edulis Linn. type de roche, zone supérieure (Pentrez). 

Fig. 6. — Dreyssensia polymorpha Bened. type isolé. (Bassin de Gentilly.) 

Fig. 7. — Dreyssensia polymorpha Bened. type aggloméré provenant du bloc 
représenté dans la figure 3. 


PLANCHE VIII 


Fig. 8. — Chama brassica Reeve valve fixée montrant les dents dela charnière. 
(Golfe de T 1h. Gravier. — Collections de Malacologie 
du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 9. — Chama brassica Reeve valve libre montrant les dents de la charnière. 
(Golfe de Tadjourah. — Mission Ch. Gravier. — Collections de Malacologie 
du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 40. — Diceras valve fixée montrant les dents de la charnière. (Collections 
de Paléontologie de l'École des Mines.) 

Fig. 14. — Diceras valve libre montrant les dents de la charnière. (Collections 
de Paléontologie de l'École des Mines.) 

Fig. 12. — Heterodiceras fixé sur un polypier. (Collections de Paléontologie de 
l'École des Mines.) 

Fig. 13. — Diceras vue postérieure des deux valves montrant la division du 
ligament et l’'enroulement des crochets. (Collections de Paléontologie de 
l'École des Mines). 

Fig. 1%. — Myochama anomivides Stutch. fixée sur la valve d'un autre Acéphale. 
(Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 


Fig. 15. — Vue intérieure d'une valve de Myochama anomioides Stutch. (Collec- 
tions de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 46. — Chamostrea albida Lmck. valve fixée montrant les dents de la 
Char nière. (Collections de Paléontologie de l'École des Mines.) 

Fig. 17. — Chamostrea ulbida Lmck. valve libre montrant les dents de la 


charnière et le lithodesme. (Collections de Paléontologie de l'École des 
Mines.) 


396 R. ANTHONY 


Fig. 48. — Ætheria plumbea Sow. valve fixée, vue intérieure, montrant les 
impressions musculaires, le ligament et son arète. (Collections de Malaco- 
logie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 19. — Ætheria plumbea Sow. valve libre, vue intérieure, (Collections de 
Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 


PLANCHE IX 


Fig. 20. — Ætheria Petretinii Bgt. valve fixée, vue extérieure montrant la 
surface de fixation. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire 
Naturelle.) 

Fig. 21. — Ætheriu Petretinii Bgt. valve libre, vue extérieure montrant la 
régularité de la forme générale. (Collections de Malacologie du Muséum 
d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 22. — Ætheria Caillaudi Féruss. valve fixée, face ventrale montrant les 
stries d’accroissement. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire 
Naturelle.) 

Fig. 23. — Ætheria Caillaudi Féruss. valve fixée, face lunulaire montrant les 
cloisons {ransversales, la loge terminale, le ligament longitudinal et ses 
trois bandes. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 24. — Ætheria Caillaudi Féruss. valve libre, face lunulaire montrant 
l'aplatissement de la valve, l’arête ligamentaire et la réduction du talon. 
(Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 25. — Ætheria Caillaudi Féruss. Forme jeune peu de temps après la fixation. 
Valve fixée, vue extérieure destinée à montrer l’étendue et la disposition de 
la surface de fixation, les limites et la forme anodontoïde de la coquille 
non fixée. (Collections d’Anatomie comparée du Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 26. — Ætheria Caillaudi Féruss. Forme jeune peu de temps après la 
fixation. Valve libre, vue extérieure. (Collections d'Anatomie comparée du 
Muséum d'Histoire Naturelle.) 

Fig. 27. — Bartlettia stefanensis Mor. valve fixée, vue intérieure destinée à 
montrer la forme du ligament et la réduction de la partie antérieure. 
(Collections de M. Ph. Dautzenberg.) 

Fig. 28.— Mulleria lobata Féruss.valve fixée, vue intérieure, destinée à montrer 
la forme du ligament et la réduction ad ae de la région antérieure. 
(Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) 


CORRIGENDA 


Aux pages 21% et 215, au lieu de pullaster, lire pullastra. 

A la page 232, au lieu d’Area obliqua, lire Arca obliquata. 

Aux pages 301, 302, 304, au lieu de Chama 1ostoma Reeve, lire 
Chama iostoma Conr. 


Aux pages 378, 379, 380, au lieu de Sphærulites, lire Hippurites. 
A la Planche IX, intervertir les chiffres 25 et 26. 


TABLE DES MATIÈRES 


Pages 

LCI MERS ASS OPEN PT TRS AS PR SR AE 165 
PREMIÈRE PARTIE 

DUR ENS EP ee MR RP Re TR RU EUR À CAR qe tee rt ne 170 

AB utide’cernreMOILe Re ee RE rer RAP 170 

DEP PAVISIONE UE S UE EE PRE NS Pr MANN Ps 173 

Matériau eus SRE NE EE EE 175 

IV. Exposé des procédés de recherche................... 176 


CHaPiTRE [I — Introduction à l'étude générale des caractères de conver- 
gence el de la morphogénie des Mollusques acéphales. 194 


NE SE CR ne Se OR RE RTE à, 199 
ES RER TR Re EE or TES 256 


DEUXIÈME PARTIE 


SE BIEN M Mn esta SU Dai avadre Dane Det ea 200 à en re ah 277 
CU D nr en ER ARE RL ne Lee 285 
AS M Cha nnide  RORAT E AT RS de Son 329 
0 CAO ITA ME A CR Re. Le ue a d'au ct 335 
dE. A M ae de Dur one ee 339 
— VI — Considérations morphologiques sur les formes fossiles 

Dimyaires fixées en position pleurothétique........... IE 


D SSI ERMÉRAESS REX 2 OR IN ER PRUn AR on NT RE RM AA 382 


DEUXIÈME THÈSE 


PROPOSITIONS DONNÉES PAR LA FACULTÉ 


BOTANIQUE. — DÉVELOPPEMENT COMPARÉ DES MUSCINÉES ET DES 
CRYPTOGAMES VASCULAIRES. 


GÉOLOGIE. — MoRPHOLOGIE DES RUDISTES. 


Vu et approuvé : Paris, le 10 Mai 1905. 
Le Doyen de la Faculté des Sciences, 


Pauz APPELL. 


Vu et permis d'imprimer : 
Le Vice-Recteur de l’Académie de Paris, 


L. LIARD. 


CorBEIL, — Imp. En. CRéTk, 


Ar 4 0 
re Se 
; 


Ann. des Sc. nal. 


9e Série. 


Masson et Cie, Editeurs 


Zoo 1 POPI VI 


Phototypie Berthaud, Paris 


Ann. des Sc. nat. 9 Série. 


Zool. T. I. PL VIII 


18 


Masson et Cie, Editeurs 


19 


Phototypie Berthaud, Paris 


Ann. des Sc. nal. 9e Série. 


ZOOLNT UP IX 


Masson et Cie, Editeurs 


Photoiypie Berthaud, Paris 


MASSON et Cie, Éditeurs, Boulevard Saint-Germain, PARIS 


EXPÉDITIONS SCIENTIFIQUES 


DI 


TRAVAILLEUR ET DU TALISMAN 
PENDANT LES ANNÉES 1880, 1881, 1882 ET 1883 


Ouvrage publié sous les auspices du Ministère de l’Instruction publique, sous la 
direction de M. A. Mrxe-Épwarps, membre de l’Institut, président de la com- 
mission des dragages sous-marins, professeur-administrateur du Muséum d'his- 
toire naturelle : 


Poissons, par M. L. VaïLLanT, professeur-administrateur du Muséum d'histoire 
naturelle, membre de la Commission des dragages sous-marins. 1 fort volume 
in-#4, avec 28 planches...... RTE RO PASS le ne etes Pate HAE NOÉ EO PE 50 fr. 

Brachiopodes, par M. P. Fiscner, membre de la Commission des dragages sous- 
marins et D.-P. OEuLerT, membre de la Société géologique de France. 1 vol. 

RE NEC SE DIN HES SP FE er eee es ua ee SoBor ve 20 fr. 

EÉchinodermes, par Edm. Perrier, professeur-administrateur au Muséum d'histoire 
naturelle. { vol. in-4, avec planches noires et en couleurs............. 50 fr. 

Mollusques testacés, par Arnould Locarr. Tome I, 1 fort volume, gr. in-4 avec 
24 planches hors texte..... TRES ÉOLE TT à die ete ECS 50 fr. 

Tome IL. 1 vol. gr. in-4 avec nombreuses planches hors texte (sous presse). 

Crustacés décapodes. Première partie : Brachyures et Anomoures, par A. Mrexr- 
Enwaups, et E.-L. Bouvier, professeur au Muséum. 1 vol. in-8 avec 32 plan- 
GEL SPP OS Re EU ER A Ua ire Rte PAR ERESS ES TC RL OOPT PEN 0-1 o0Rin: 

. L'ouvrage comprendra en outre : {ntroduction. — Bryozoaires, Annélider, 

Eponges, lFProtozoaires. 


La Géographie 


BULLETIN 


DE LA 


Société de Géographie 


PUBLIÉ TOUS LES MOIS PAR 


LE Barox HULOT, Secrétaire général de la Société 
ET 
M. CHarces RABOT, Secrétaire de la Rédaction 


ABONNEMENT ANNUEL : Paris : 24 fr. — DéPparTemMENTs : 26 fr. 
ÉrRancer : 28 fr. — Prix du numéro : 2 fr. 50. 


Chaque numéro, du format grand in-8, composé de 80 pages et accompagné de 
cartes et de gravures nombreuses, comprend des mémoires, une chronique, une 
bibliographie et le compte rendu des séances de la Société de Géographie. Cette 
publication n’est pas un recueil de récits de voyages pittoresques, mais d’obser- 
vations et de renseignements scientifiques. 

La chronique, rédigée par des spécialistes pour chaque partie du monde fait 
connaître, dans le plus bref délai, toutes les nouvelles reçues des voyageurs en 
mission par la Société de Géographie, et présente un résumé des renseignements 
fournis par les publications étrangères : elle constitue, en un mot, un résumé du 
mouvement géographique pour chaque mois. 


A LA MÊME LIBRAIRIE 


Traité de Zoologie, par M. Edmond P£rrier, membre de l'Institut, directeur du 
Muséum d'histoire naturelle. 2 vol. gr. in-8. 


FascicuLe. I. — Zoologie générale, avec 458 figures dans le texte, ...... 19#fre 
FascicuLe IL. — Prolozsoaires el Phylozsoaires, avec 243 fig. dans le texte. 10 fr. 
Fascicuce II. — Arthropodes, avec 218 gravures................ RTE 8 fr. 
FascicuLe IV. — Vers, Mollusques, avec 566 gravures........,.1,..:.,.2: lEnre 
Fascicuze V. — Amphioxus, Verlébrés, avec 97 gravures..........,... 6 fr. 
Fascicue VI. — Vertébrés (sous presse). 


Les Colonies animales et la formation des Organismes, par M. Edmond PERRIER, 
imvmbre de l’Institut, professeur au Muséuuw d'histoire naturelle. 2e édition, 
avec ? planches hors texte et 158 figures dans le texte. 1 fort vol. gr, 
RE OT ON TT PT PR RAP ne DT PR SELON ET Er 18 fr. 


Les Enchaîinements du Monde animal dans les temps géologiques, par M. Al- 
bert Gaupry, de l'Institut, professeur au Muséum d'aistoire naturelle. 

Fossiles primaires. 1 vol. gr. in-8 avec 285 figures dans le texte...... 10 fr. 

Fossiles secondaires. 1 vol. gr. in-8 avec 304 figures dans le texte... 10 fr. 


Mammifères tertiaires. 1 vol. gr. in-8 avec 312 figures dans le texte.. 10 fr. + 


Essais de Paléontologie philosophique, par A. Gaupry, membre de l'Insüitut de 


France et de la Société royale de Londres, professeur au Muséum d'histoire : 


naturelle. 1 vol. grand in-8 avec 204 gravures dans le texte..........….. 8 fr. 


Traité de Géologie, nar M. A. pe LappARENT, membre de l'Institat, professeur à . 


l'école libre des Hautes Études. Ouvrage couronné par l'Institut. 4° édition, 
entièrement refondue et considérablement augmentée. 3 vol. grand ïin-8, xiv- 
1912 pages avec 850 gravures dans le texte....,.... DAS SA) orne Éd NTI 


Cours de Minéralogie, par M. A. De Lapparenr, 3e édition très augmentée. 1 vol. 
grand in-8 de 650 pages avec 619 gravures dans le texte et une planche chro- 


molithographiée.......... Mroeie er de ee in ce ee ee 150fr. 


Traité de Botanique, par Van TiwGnem, membre. de l'Institut, professeur au 
Muséum d'histoire naturelle. Deuxième édition entièrement refondue et cor- 
rigée. 2? vol. grand in-8 avec 1,213 gravures dans le texte............. 30 fr. 


Nouvelles Archives du Muséum d'histoire naturelle, publiées par MM. les pro- 
fesseurs-administrateurs de cet établissement : 

11 paraît chaque année 1 vol. gr. in-4, publié en? fascicules avec planches en noir 
et en couleurs. Chaque volume séparément.….............,... acte 40 fr. 


Archives d'anatomie microscopique, fondées par MM. Bazgrant ET RANvisr, pu- 


bliées par MM. Ranvir et L.-F. Hennecuy, professeurs au Collège de France. 
Les Archives d'anatomie microscopique forment par an 4 fascicules in-8, d'environ 


150 pages, paraissant à des époques indéterminées avec planches en noir et en 
couleur. Paris, Dép. et Union postale ..... SHOT TO ASTON 20. . 90 fr 


Guides du Touriste, du Naturaliste et de l'Archéologue, publiés sous la direction 
de M. Marcellin BouLe : 

Chaque volume, cartonné toile anglaise ................ OC sue A Er 00 

Le Cantal, par MM. Marcellin Bouce et Louis FarGes. 1 vol. avec 85 dessins et 
photographies et ? cartes en couleurs. 

La Lozère, par MM. Ernest Cor et Gustave Corp, avec la collaboration de 
M. Armand Viré. 1 vol. avec 87 dessins et photographies et 4 cartes en 
couleurs. 

Le Puy-de-Dôme et Vichy, par MM. Marcellin Boure, Ph. GLAnGEAuD, RoucnoN, 
A. VERNIÈRE. 1 vol. avec 109 dessins et photographies et 8 cartes en cou- 
leurs. 

La Haute-Savoie, par M. Marc LE Roux. 1 vol. avec dessins et photographies et 
4 cartes en couleurs (sous presse). vf 


4049-02. — Conserr, Imprimerie En. Créé. 


Lt Lg WP ae dns corvrtodt ii Meur id ss 


À 
2 
= 


\,4 


JC 


Je DS 
JEAN 


Put 


5 it gore 


P 


ë 3 
oo, 
ME É 


K EE 


Li] 


Lo 
| ne #, Ÿ 
: qi % © 


ù 


Se | | EX, 
‘ “y 
( 5 9 


L 


À 


| 


xl, | | ; ; | | (ll 
All till 
Z il | | | $ | ll ! 
Fos l'IE VA DS 


S 


RTS 
CEE A 
EE 
es 


il 


90 


lin | 


8 28 À 


|