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JOSEPH II.
UND
LEOPOLD VON TOSCANA.
IHR BRIEFWECHSEL
VON 1781 BIS 1790.
HBRAU60E0EBEM VON
ALPRED RITTER VON ARNETI.
1786—1790.
WIEN, 1872.
WILHELM BKAUMÜLLEK
K. K. HOP- UND UNIVKR8ITÄTSBUCHHÄNDLER.
1786.
Ce 5 janvier 1786.
Tr^s-cher frere. Pour aujourd'hui je n'ai rien encore a ^^^ LeTpoia
vous envoyer que les pieces ci-jointes et les gites que la
Marie veut faire, mais qui sont bien trop lopgs pour pou-
voir etre atteinte dans cetta saison, oü tout est couvert^
de neige et oü le froid est k dix degr^s sous le point de
cong^lation. Tout ce que j'ai regu de Naples est incroyable;
il est heureux qu41 n'y a rien d'ecrit, car cela ferait la
fable de FEurope. Pour tous les acteurs la treve, sur-
tout pour le cong^ a donner a Acten, qu'on promet eternel,
est une charmante id^e. Je pr^vois qu^ils ne feront rien
et que meme Sambuca restera en place.
Dans ce moment je regois deux de vos cheres let-
tres. Je suis bien fäch^, mon eher frere, que derechef
vous ayez ete attaqu(5 de cette vilaine coHque; cela me
parait d'une trop grande importance pour ne pas tÄcher
d^en deraciner la source, et ne voudriez-vous pas m'en-
voyer un detail que Lagusius ferait bien circonstan-
cie, de cette incomraoditö, pour que je puisse consulter-
V. Arneth. Joseph u. Leopold. II. 1
— 2 —
Störck*) et quelqu' autre bon m^decin et vous en en-
voyer les id^es que vous feriez voir a Lagusius pour en
adopter ce que vous Irouveriez ä propos. Cela ne.peut point
faire de mal et pourrait pourtant op^rer un grand bien,
qui serait celui de vous garantir de pareilles rechutes.
Pardonnez k mon amiti^ cette proposition; je vous
promets qu'on n'en saura rien, meme si vous me Ten-
voyez. Pour moi avec votre fils et votre future belle-
fiUe, nous nous portons tous bien, et en vous embrassant,
de mime que votre ch^re ^pouse, de tout mon coeur, je
vous prie de me croire pour la vie votre ....
Ce 14 janvier 1786.
Joseph Tres-cher fr^re. Par ce courrier qui va relever Tautre
an Leopold. * *■
a Naples, je n'ai rien de bien important a vous mander.
Je vous joins ici les objets du moment; vous y verrez
ma r^solution pour la Hongrie**), qui fera un peu de
bruit; mais malgr^ cela il faudra que cela aille et qu'une
bonne fois la monarchie ne fasse qu'une province ^gale
dans toutcs les dispositions et charges. Vous verrez aussi
une lettre circulaire qu'on a ^crite ä tous les ministres, une
espece de r^plique a la derni^re pifece prussienne. Elle me
parait claire et convaincante ; je d^sire qu'elle soit connue.
*) Der Hofrath und erste Leibarzt des Kaisers, Anton Freiherr
von Störck.
**) Josephs Handschreiben vom 6. Januar 1786 an den ersten
ungarischen Vicekanzler Grafen Karl Palffy wegen Einführung eines
neuen Contributionssystems in Ungarn.
— 3 —
La Marie et le prince se portent ä merveille et me
paraissent Contents de se retrouver k Vienne,
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse tendrement;
m^nagez bien votre sant^ et croyez-moi pour la vie votre. . .
Ce 16 janvier 1786.
Tres-cher frere. J'ai Thonneur de vous renvoyer ci- ^n josepu.
Joint difF^rents papiers et entre autres une lettre de la
Reine de Naples k votre adresse et un paquet du comte
de Richecourt au prince Kaunitz, qui me sont venus de
Naples par une occasion extraordinaire. Le marquis de
la Sambuca a enfin ^t^ cong^di^, et le vice-roi de Sicile,
marqais Caraccioli *), a eu sa place, et cela contre Tavis
de la Reine, k ce qu'elle m5me m*a ^crit, qui ne le croit
pas propre pour cette place. Le vice-roi de Sicile n'est pas
encoro nomm^ , mais on croit que ce sera le cardinal
Spinelii**), Qravina ou le g^ndral Pignatelli. Voila tout
ce qu'on en sait pour a präsent. Ce changement s'est
fait k Tinsu du Roi d'Espagne, et malgr^ cela on craint
a Naples sa d(5sapprobation. En attendant sur toutes les
affaires d'Espagne et Pissue de la mission de Pignatelli,
on n'a d'autre assurance que ce qu'il en dit lui-meme,
n'ayant rien rapporte par öcrit, et quoiqu'on assure toujours
que Las Casas a ^te disgraciö k cause de cette affaire,
*) Domenico Marchese Caraccioli, geboren 1715, war lange
Zeit Botachafter in Frankreich und dort in enger Verbindung mit den
hervorragendsten Schriftstellern.
**) Ferdinand Spinell!, geboren 1728, zum Cardinal ernannt 1778.
1*
- 4 —
il est toujours en'core a Rome et n'a ni pr^sentö ni en-
voyö ses lettres de r^cr^ance. En attendant je vous pr^-
viens, mais en vous priant de ne pas en faire semblant
a la Reine de Naples^ qu'elle s'est plainte ä moi de ce
que vous comptiez et aviez arrang^ un mariage entre la
fille de la Grand e-Duchesse de Russie et mon second
tils Ferdinand, et cela a son insu. Je lui ai r^pondu,
comme vous pouvez bien le croire, que cette nouvelle
^tait entierement fausse , mais je ne comprends point qui
peut lui donner de pareilles nouvelles, et comment eile
peut les croire et s'en inquieter si facilement.
Ce 26 janvier 1786.
an Leroid Tr^scher frfere. Bien oblig^ pour votre obere lettre
et les papiers avec la lettre de la Reine qu'elle conte-
nait, je vous joins ici le peu de nouvelles de la semaine.
Ce qui se passe a Naples ne peut se concevoir que quand
on connait comme nous deux les personnages principaux;
il faut attendre Tissue de la- chose. L'id^e du mariage
entre Ferdinand et une princesse grecque qui a deux
ans est comique. La Marie se porte tres-bien avec le
prince; vous la connaissez fort allante; aussi nous allons
voir toutes les nouvelles bätisses, et les soirs eile est
aux bals et soupers. Pour moi, je me dispense de ces
deux derniers, et ce ne sera que lundi que j'entendrai
le premier violon, puisqu'il y a un petit bal de quatorze
. paires que je donne pour la princesse et pour votre fils.
Je desire bien d'avoir bientot des bonnes nouvelles de
~ 5 -
vos coliques, et je parlerai a ces Messieurs de ce que vous
m'en avez öcrit. Je suis trop intdress^ ä tout ce qui vous
regarde pour ne pas y porter toute Tattention. Adieu . . .
Ce 23 fövrier 1786.
«
Trfes-cher frfere. Je suis bien fächd de la confusion ^n Lwfpoid.
qui s'est faite dans mes lettres pour vous et pour la
Reioe. J'ai dtd tout de suite revoir mon protocole, et j'ai
trouvd que comme c'etait le jour que j'ai dtö avec la
Marie voir les hopitaux, qu'il y a eu de la presse et que
mon secrdtaire a fait cette bdvue. Je suis bien dtonnö
de ce que vous m'dcrivez de la Reine par le courrier
garde-noble au sujet de ses iddes d'etablissement pour ses
filles; cela n'a pas de combinaisön. Le prince Antoine
de Saxe est veuf et a trente-un ans ; comraent voudrait-il
attendre que la fille Louise*) de ma soeur soit nubile?
II faudrait trois ou quatre anndes ; cela n'est pas naturel, et
pour son ainde**) il ne me parait aucunement convenable
de s'engager a quelque chose d'avance pour Ferdinand,
d'autant plus que ses circonstances sont bien difFdrentes des
votres, et qu'en le mariant il faudra penser non-seulement
a lui, raais a tout Tentretien des enfans qu'il pourra avoir.
Le carnaval se passe saus que j'en täte; la Marie
est de toutes les bonnes fetes. Adieu ....
*) Sie wurde im J. 1790 mit dem Grossherzoge Ferdinand von
Toscana vermalt.
**) Maria Theresia, geb. 1772, im J. 1790 mit dem Erzherzog
Franz vermalt.
— 6
Ce 2 mars 1786.
an Leopold. Tres-chcr frere. J'ai re9u votre chere lettre et les
papiers en retour qui y ^taient joints. Je suis charm^
que vous et votre chere. famille jouissent d^une bonne
saute. Ci -Joint vous trouverez les objets du moinent. La
sant^ du Roi de Prusse baisse qu'on atteiid une fin assez
prompte. Je vous joins ögalement rimprim^ du rescrit
envoy^ en Hongrie pour la commensuration et Pestima-
tion gön^rale des terres. Cela fera parier et erier, mais
n^anmoins je crois que cela se fera sans difficultö reelle.
Le prince Albert est parti pour dix jours en Boheme,
oü il verra son r^giment et les nouvelles forteresses. Cela
est un veuvage pour ma soeur, auquel depuis la guerre
eile n'en avait pas ^prouv^ un pareil. Dimanche eile part
pour Brück, oü se rendra ögalement la Marianne, et elles
passeront deux jours ensemble.
J^ose vous joindre ici une lettre pour Richecourt qui
ne contient que des complimens pour le Roi et la Reine
sur rheureuse d^livrance de la derni^re. Je suis charme
que cela soit termin^, et je d^sire bien que la Reine n'ait
plus d'enfans; autrement eile pourrait une fois avoir un
accident bien fächeux.
Adieu, raon eher frfere; je vous embrasse tendrement^
de m§me que votre chere ^pouse. Croyez-moi pour la
vie votre ....
Mes yeux vont mieux, quoiqu'ils ne soient pas tout
a fait naturels encore.
— 7 —
Ce 23 mars 1786.
Trfes-cher frere. Pour aujourd'hui je ne puis que vous ^^ J^eTpoid
envoyer les pieces ci-jointes. La Marie continue heureu-
sement son voyage; j'en ai eu des nouvelles de Payer-
bach; eile a le plus beau temps du monde, car il fait
tout k fait printemps. Pour iei je ne saurais rien vous
mander d^ntdressant, sinon que je suis toujours apres a
pousser, k faire aller et ä faire reussir au moins en partie
les vues salutaires que vous me connaissez; a cela il faut
constance et patience.
La Marie, avant son ddpart, a eu une lettre du duc
de Courlande*) qui lui annonce avoir entendu dire (cela
est donc bien vague) que Ton marierait les deux princes
de Saxe a la fois, que Faine, Antoine, dpouserait votre
fiUe Thdrese, que le second, Maximilien, öpouserait la
fiUe ainde de Tlnfante de Parme, mais il dit cela avec
un grand ddsir de secret, puisque si TElecteur s'apercevait
que Ton en süt quelque chose, il serait capable de n'en
plus rien faire.
Voila tout ce que cette lettre contient; il n'y a donc
qu'k attendre tranquillement si et comment ils viendront
a nous en faire la demande. J'ai voulu vous en prövenir
en attendant en vous embrassant, de meme que votre
chere dpouse, de tout mon coeur
• • •
*) Prinz Karl von Sachsen, geb. 1733, Titularherzog von Kur-
land, dessen Besitz er im J. 1763 dem aus Sibirien zurückgekommenen
Herzoge Ernst Johann aus dem Hause Biron hatte abtreten müssen.
8
Ce 26 mars 1786.
au Leopold. Tres-cher frfere. Vous allez voir arriver un courrier;
vous direz : voici des nouvelles. Point du tont; je n'ai
rien pour le prösent k vous mander, et ce garde va sim-
plement relever Tautre a Naples. La commensuration va
commencer le 1" d'avril en Hongrie, et malgr^ toutes
les oppositions vous verrez, mon eher ami, que cela ira.
Nous avoDS le plus beau temps du monde, et c'est un
temps excellent pour ensemeneer^ car il pleut parfois sans
que froid succfede. De Naples j'ai eu par le Roi et
par la Reine la nouvelle qu41s comptaient changer notre
Somma contre un certain Gallo*), et que le premier
deviendrait ambassadeur k Paris. D'Espagne j'apprends
que Ton est tres-m^content de la tournure qu'ont prise
les affaires a Naples, et Ton ne cessera pas de tourmenter
ma soeur et le Roi, hors qu'ils ne prennent le parti de
ne plus r^pondre du tout k tout ce qu'on pourrait leur
öcrire ou faire dire, qui eüt trait aux affaires d'ad-
ministration interne de leur royaume, mais avec le plus
grand respect toujours parier dans leurs lettres de sant^,
de chasse et du temps. Voilk, je crois, le seul moyen
honnete de se rendre le maitre chez soi, surtout si Ton
continue a agir comme on le croit convenable, et que,
sans se fächer, les personnes affich^es du contre- parti
on ne les avance ni distingue en aucune occasion.
^) Marzio Mastrilli Marchese, später Duca di Gallo, durch seinen
Antheil an dem Abschlüsse des Friedens von Campio Formio, sowie
durch seine späteren Erlebnisse berühmt geworden.
- 9 —
Adieu, mon eher ami ; j'ai des nouvelles de ma soeur
Marie de Katisbonne, oh eile ^tait arriv^e en parfaite
sant^. Je vous embrasse de tout mon coeur ....
Ce 6 avril 1786.
Tres-cher frere. Je vous joins ici les nouvelles de j^^ ^opoid.
la semaine. J'ai fait copier en entierune lettre d'O'Kelly*),
notre nouveau ministre k Dresde. Vous y verrez ce qu'il
^erit au sujet du mariage; c'est du voyage et des rela-
tions de Marcolini que probablement la decision d^pendra.
Vous ferez done avec cet homme ce que vous jugerez
eonvenable; vous verrez les propositions qu41 fera, et
pourvu que Ton fasfee un sort eonvenable a votre fille,
je crois qu'il ne faudra y meler autre politique entifere-
ment diff^rente des liens de mariage et de parentd a
eontracter. Voulez-vous me faire Tamitie d'avertir la Reine
de ee que vous avez appris de Marcolini et des vues
qu'il a sur sa fille ain^e, afin qu'elle en seit prevenue?
Je ne veux point lui en öcrire moi-meme, pour que Ton
ne eroie point k Naples que je veuille rae m^ler, sans
en etre priö, de pareilles affaires. Au eas que la chose
put s'arranger, on pourra faire coneevoir k la Cour de
Saxe qu'elle n'aura pas besoin de chercher ses princesses
plus loin qu'k la fronti^re de Boheme, esp^rant que raes
nieces passeront chez moi et me ehargeant de les faire
mener jusqu'aux frontieres de mes Etats.
*) J. Dillon Graf O'Kelly, kaiserlicher Gesandter in Dresden.
— 10 —
La sante de la Reine de Naples m'inquiMe vraiment.
Aujourd'hui nous avons eu sept heures de conseil^ et
attendant vos ult^rieures nouvelles, je vous embrasse, de
meme que votre chere ^pouse, de tout mon coeur ....
Ce 10 avril 1786.
an Leopold Tr&s-clier frerc, J'ai regu votre chfere lettre et je
pense comme vous au sujet de la sante de la Reine de
Naples^ qui m'inquifete beaueoup, et plus encore la ma-
lade que la maladie, quoique celle-ci seit trfes-s^rieuse ;
mais pour obtenir d'elle de la tranquillite et de la mo-
d^ration, il faudrait la refondre. L'oecasion s'ötant pre-
sent^e, j'envoie un jeune homme, fils d'un confiturier de
la cour k Florence, et de lä je le ferai passer ä Naples
pour y apprendre k faire surtout tous les genres de glaces,
Oserais-je vous prier, mon eher frfere, de lui permettre de
travailler et pratiquer dans vos offices; il s'appelle Zigen-
haim; on doit parfois rafratchir ses gens, et pour cela
ritalie est la meilleure ^cole. Le charg^ d'aflfaires, Veigl,
auquel je le ferai adresser, pourra vous en dire plus de
d^tails. Adieu ....
Ce 13 avril 1786.
Joseph Trfes-cher frfere. ün leudi saint nos Operations vous
an Leopold. *'
sont connues, je ne vous dirai done qu'un petit mot en
vous envoyant ces extraits. J'ai re9u votre eh&re lettre
— 11 —
et vous en rends mille gräces. La confiance que voub
voulez me t^moigner, lue fait d'autant plus de plaisir que
je Bens la m^riter. Jusqu'a present, depuis ce que je vous
ai envoyö, je n'ai rien appris de Saxe, et probablement
que le voyage de Marcolini d^cidera nos doutes. L'Elec-
teur est si singulier; il est si combattu entre les ministres
tout prussiens qui Tentourent, qu'il ne pcut se d^cider,
attribut des ämes faibles d'etre m^fiant.
Je suis charmö que la Keine de Naples se porte un
peu mieux; il faudra du temps pour la remettre.
Adieu, je vous embrasse, de m^me que votre obere
epouse, de tout mon coeur; croyez-moi pour la vie votre...
Ce 18 avril 1786.
Tr^s-cher frere. J'ai recu votre ch^re lettre du 6 de ^1°^°^^,
* an Joseph.
ce mois avec les papiers qui y ^taient joints et que j'ose
vous renvoyer, k la r^serve de la copie de la lettre du
ministre a Dresde, O'Kelly, que j'ai cru devoir garder,
vu Tafifaire dont il y est questiou. Je ne puis que con-
tinuer a vous rendre mille gräces des soins que vous
voulez bien vous donner pour retablissement de ma Th^-
rese; ce sera a vous seul que nous serons redevables
d'un aussi bon Etablissement pour eile, si, comme je Tes-
pfere, cette affaire a lieu. Vous pouvez etre sür que quand
Marcolini y viendra, nous lui ferons toutes les politesses
possibles, et que, sans y mettre la moindre politique ou
secret, nou» traiterons avec lui directement de Tafifaire
- 12 —
du mariage^ en rassur.ant que nous le desirerions pour
Petablissement de noti'e fille, pourvu qu'il soit conve-
nable, et que certainement il n*y a ni vues de politique
ou secondes uns de meines. Je vous rendrai compte de
toutes les propositions qu'on nous fera et de nos r^ponses^
et attendrai sur tout vos ordres d^finitifs, ne voulant
Jamals rien faire ni decider Sans votre approbation. Je
ne manquerai pas dans peu dejours d'ecrire ä la Reine
de Naples selon vos ordres par une occasion süre pour
lui donner part des intentions qu'on a pour sa fille, mais
je crains seulement qu'elle pourra prendre en mauvaise
part que je lui en donne part moi, puisque vous savez
bien qu'elle a toujours eu Tidee de marier sa fille ain^e
a mon second fils, et qu'elle trouvera peut-etre mauvais
qu'on ne recherche sa fille que pour le prince Maximi-
lien, tandis qu'on demande la mienne pour son frere ain^.
Au cas que, oomme je l'espere, les choses puissent s'ar-
ranger, c'est avec bien de la reconnaissanee que nous
acceptons, d^s a present, Tofifre que vous vpulez bien
faire de vous charger de faire mener et consigner vos
nieces aux confins de Boheme ; on ^pargnera par la tous
les frais, embarras et histoires d'un voyage d'^pouse en
grand public, qui est tres-coüteux et embarrassant pour
ceux que cela regarde, et pour les pays par oü Ton passe,
et je suis persuade que la Saxe Tacceptera ^galeraent
avec bien de la reconnaissanee.
Oserais-je vous prior de me communiquer les nou-
velles ulterieures que vous pourrez avoir de Saxe sur
cette affaire et les vues de cette cour, et le voyage de
Marcolini, afin de pouvoir me regier en cons^quence?
— 13 —
A Naples la Reine se porte mieux; mais les intri-
gues continuent, et on lache de mettre de mauvaise
humeur le Roi de Naples, en hii faisant sentir que la
Reine, en se melant des afiFaires, lui attire tous ces em-
barras, dont sans cela il serait exempt.
Ici, gräce k Dieu, tous mes enfans continuent k se
porter k merveille, et ma femme me charge de vous
präsenter ses respects et de vous rendre mille gräces
des bont^s et soins que vous voulez bien vous donner
pour r^tablissement de la Thdrese, qui lui tient infini-
raent k coeur.
Ce 25 avril 1786.
Tres-cher frere. Je profite du garde qui revient de ^J^j^g^^^,
Naples pour vous remercier de votre chere lettre et des
papiers qui y ötaient joints, que j'ose vous envoyer. Per-
suad^ et convaincu en toutes les occasions de vos boutds
pour moi et mes enfans, je repose entiferement sur les
peines que vous voulez bien vous donner pour faire rdussir
Tetablissement de la Ther^se en Saxe, et sur vos bont^s
a nous faire savoir tous les d^tails relatifs a cette n^go-
eiation, pour que je puisse nie regier ici en cons^quence
vis k-vis de Marcolini.
De Naples la Reine est remise, inais fort faible, et
ses jambes sont encore tres-faibles. Les tracasseries y
continuent toujours, et ceux qui entourent la Reine, la
flattent; eile parle facilement et ils en abusent, et au
lieu de la fermete, on se contcnte k se chicaner r^ci-
— 14 —
proqucment. De Naples on a fait d^fendre k Rome au
marquis de Cr^qui, d'une des premieres maisons de France
et homme 5e cour qui voyage en Italie, de venir ä
Naples, puisque, par une lettre intercept^e d'un Espagnol
de Rome, on avait vu qu!il j avait mal parl^ d'Acton.
D'un autre cotd, le Roi d'Efipagne n'^crit plus du tout
au Roi de Naples; k Naples on cong^die tous les Espa-
gnols qui sont au Service, en Espagne on veut faire la
meme chose aux Napolitains qui y sont. Le Roi de Naples
a envoy^ M. de Brissac, Frangais et connu pour intri-
gant et mauvais sujet, a Paris avec une lettre pour M. de
Vergennes, oh il se recommande a lui pour que le Roi
de France, comme chef de la maison de Bourbon, s'in-
terpose pour accommoder ces affaires avec TEspagne. Cette
derniere d^marche, que la Reine avec raison n'a pas pu
approuver, est bien incons^quente de toutes fa9ons. On
n'est pas fort content de Caracciolo; les finances vont
etre donn^es en ferme a Greppi et C'® et on va creer
du papier monnaie. Et ce qui est pire, c'est que Ton
täche coüstamment d'indisposer le Roi contre la Reine,
de lui inspirer que c'est eile qui, en se m^lant des affaires,
lui cause tous ces embarras, et qu'il est d'une humeur
terrible vis-a-vis d'elle, ce qui, avec le caract^re vif de
la Reine et violent du Roi, pourrait un jour ou Tautre
avoir des suites ddsagreables, et que toutes ces aflfaires
sont publiques et forment les discours de tous les ^tran-
gerö et de tout le monde en Italie.
J'ai averti la Reine par un de mes gens, que j'ai
envoy^ k Naples, selon vos ordres, de la venue de Mar-
colini, et je täche de la conseiller autant que je puis de
— 15 —
n'^tre pas si prompte et de se m^nager, mais cela sera
difficile, car on cherche visiblement a la pousser k bout,
et le ministfere d'Espagne, qui connait son caractere,
cherche par ses ämiBsaires et alentours ä Tanimer et k
la pousser k faire quelque d^marche violente^ qui puisse
la rendre odieuse et d^goüter le Roi.
Je Yous prie de ne pas faire usage de ces noticcs
que j'ose vous confier pour vous prdvenir, mais qui* sont
süres. Je täche d'avertir la Reine autant que je puis,
mais la poste n'est pas süre^ et presque toujours les con-
seils viennent trop tard.
Ce 27 avril 1786.
Trfes-cher frfero. Je vous loins ici les obiets de la '^^«•p**
^ «^ an liOopoM.
semaine ; vous y trouverez la oopie d'une lettre d'O'Kelly
de Dresde, que je vous envoie pour la garder. Je suis
enchant^ que vous et votre chfere ^pouse approuviez mes
d^marches pour P^tablissement de Th^rese. Je continuerai
avec le meme zfele, et quand il s'agit de vous, mon eher
ami, vous u'aurez jamais lieu de douter de mon amiti^
efficace et süre.
Nous avons le plus beau temps; je suis ^tabli k
TAugarten; le 15 mai je vais pour un mois k Laxen-
bourg ; votre fils sera des notres , il a besoin de voir un
peu de compagnie pour lui enlever de sa timidit^ outr^e.
Adieu ....
— 16 —
Ce 4 mai 1786.
aa Leopold. Tres-cher frere. Voici les nouvelles de la semaine;
je ne m'attends a rien de bon du cöt^ de nos bons amis de
Naples. IIb fönt toujours des sottises et puis ils vous de-
mandent conseil. La Reine vient de me demander par le
courrier si je croyais bon qu'ils envoyassent un homme
en France pendant qu'il y a un mois qu'il y est. C'est
une.sottise; naais quoi dire quand eile est faite. Je tremble
pour la paix domestique, la Reine joue un gros jeu et eile
en raourra de chagrin; mais comment lui Taider? Cela
est absolument impossible. J'en suis vraiment triste, car
je Taime et son coeur mdrite de T^tre; du reste rien de
nouveau, hors que nous sommes en crainte pour les
vignobles et arbres fruitiers. II a neig^ vingt-quatre heures
et toutes les montagnes sont blanches ; une gelee perdrait
tout, ce qui serait d'autant plus fächeux que les appa-
rences ^taient süperbes. Adieu ....
Ce 11 mai 1786.
Joseph Tres-cher frere. Voici les nouvelles courantes: au reste
an Leopold. '
je n'ai pour aujourd^hui rien d'extraordinaire ä vous mander.
Le beau temps est revenu, mais un ouragan venu avec un
orage a cassd nombre d'arbres et ddcouvert meme des toits.
Nous allons toujours le 15 a Laxenbourg, une compagnie ä
peu pres de quarante personnes; votre fils sera des nötres,
cela le degourdira un peu pour la compagnie, et il fera ses
visites exactement a la princesse qui n'en peut etre. Adieu. . .
— 17 —
Ce 14 mai 1786.
Trfes-cher frfere. Quoique je n'aie rien de bien int^- 1^„ lmpoW.
ressant ä vous marquer, j'exp^die pourtant ce courrier
pour rester en regle et relever Fautre. Mes affaires en
Hongrie vont avec peine, mais toujours en riant; je laisse
gronder, mais j'arrive au but un peu plus lentement, mais
toujours sürement. Le 1®' de mai les nouveaux tribunaux
juridiques ont commenc^ de m^me que la Gerichtsordnung j
en Transylvanie de mSme, et le gouvernement a et^
r^uni k la chambre, et les nouveaux commissaires mis
en activitd. L'essai et Tapprentissage de d^put^s de tous
les comitatß pour Farpentage et les fassions n^cessaires k
la nouvelle imposition terrestrale viennent de s'achever
au mois d'avril, et tous les ing^nieurs et sous-commissions
sont en mouvement pour mesurer dans tous les comitats
•
k la fois. La navigation sur le Danube croit journelle-
ment pour le Levant et la Crira^e ; il y a une diligence
aquatique de r^gl^e, et une compagnie qui, k ses frais,
arme douze vaisseaux de mer pour les tenir k Tembou-
chure du Danube et y faire les transports des produits
et marchandises qui y d^fluitent {sie), L'industrie et les
manufactures croissent k force de toutes les marchandises
d^fendues. Beaucoup de Nurembergeois , de Souabe et
mSme d'Angleterre, qui vivaient de ce qu'ils fournissaient
k ces pays, viennent de s'^tablir ici pour y fabriquer, En
Italic, mon nouveau Systeme, assimil^ k celui de ces pays,
vient de commencer aussi. Je suis apres pour les m§mes
arrangemens aux Pays-Bas, et alors tonte la monarchie
ne fera qu'une masse dirigee ^galement.
V. Arnetb. Joseph n. Leopold. II. 2
— 18 —
En fait de politique, il n'y a rien; la mort du Roi
de Prusse ne pourra faire de changement notable; son
successeur par lui-m§me ou par ses entours pensera et
agira k peu pr^s de m^me. Ädieu ....
Ce 18 mai 1786.
Joseph Tres-cher frfere. Je commence d'abord par vous prier
an Leopold. *" ^
de faire agr^er k votre chfere ^pouse mes plus sincferes
et tendres remereimens pour la bont^ qu'elle a eue de
m'^crire pendant votre absence; je sens avec reconnais-
sance cette marque de son amiti^. Voiei les pieces de
la semaine ; mais il faut que je porte k votre connaissance
une d^marche de la part du premier ministre du Roi
d'Espagne, comte Florida Bianca, qui me parait forte,
mais qui est prouv^e et süre, car j'ai vu les originaux
de la lettre du ministre de Prusse, Sandoz de Rollin. Or
le comte Florida Bianca fit venir ce chargö d'aflfaires et
Tavertit qu'il ^tait assur^ que FElecteur de Saxe pensait
de marier son frfere, le prince Antoine, et qu'il avait
pour cela en vue une de vos fiUes; qu'il en pr^venait k
temps le Roi de Prusse, afin qu'il fasse, par son influence
k la Cour de Dresde, les d^marches n^cessaires pour
Tempöcher, vu que le Roi d'Espagne s'int^ressait plus k
la conservation des liens du Roi de Prusse avec la Saxe,
qui en pourraient un jour souflfrir, que de T^tablissement
d'une de ses petites-fiUes qui, portant le nom d'archi-
duchesses et ^tant de la maison d'Äutriche, lui ^taient
odieuses.
— 19 —
Voilk le fait; jugez de Ik, mon eher frfere, eu quelles
mains est votre beau-p^re, et je laisse k votre arbitre
et k celai de votre chfere äpouse k en faire ou k ne pas
faire usage de ce que je vous mande. Je ne puis croire
que ceci seit Tintention du Roi; au moins il aurait bien
d^naturä sa bont^ paternelle pour une fiUe et un beau-
fils^ qui ne lui ont que donn^ tout sujet de tendresse.
La haine implacable conti*e la maison d'Autriche dans
cette occasion de pure convenance domestique et de
famille^ ne se con9oit point, et si tout cela, k Tinsu du
Roi, provient de ce coquin de Florida Bianca, il me parait
que ce serait lui rendre un grand Service que de le
d^masquer k ses yeux. Enfin faites ce que vous trou-
verez bon et pour le mieux. Marcolini n'^tait point parti
encore par les dernieres lettres.
Adieu; je vous embrasse tous deux de bon coeur.
Nous Bommes actuellement k Laxenbourg par un temps
charmant. Fran9ois est des notres et il s'en tire passa-
blement. Croyez-moi pour la vie votre ....
Ce 22 raai 1786.
Trfes-cher frfere. Je profite de Toccasion de la poste ^«op^i^
'■an Joseph.
süre pour vous rendre mille gräces die vos trois gracieuses
lettres que j'ai re9ues et par la poste et par le garde, et
vous renvoyer tous les papiers qui y ^taient joints, et je
suis enchant^ et pour le bien de TEtat et pour votre
propre contentement et tranquillit^ que vos Operations
2*
- 20 -
en Hongrie, et poiir le cadastre et pour le commerce,
finances et manufactures avancent si heureusement , taut
en Hongrie que dans tous les pays h^r^ditaires. II n^y
avait que votre activit^, fermet^, soin et application qui
pouvaient mettre en mouvement et faire r^ussir k la fois
tant d'objets si difficiles et diff^rents, et vaincre tous les
obstacles que la mauvaise volonte et Timp^ritie de ceux
qui devaient Tex^cuter, y opposaient.
Ici nous n'avons absolument aucune nouvelle, atten-
dant toujours celle du voyage de Marcolini qui ne peut
plus guere tarder. Je me suis acquitt^ de votre commis-
sion envers la Reine de Naples pour ce qui regarde la
mission de Marcolini; eile m'a repondu la lettre ci-jointe
que je vous envoie teile qu'elle m'est parvenue, vous
priant de me la renvoyer et de me faire savoir vos
ordres positifs sur la r^ponse positive que la Reine exige
de moi, relative k son projet de mariage de sa fiUe ain^e
avec mon^fils Ferdinand, et pour ce qui regarde son
ctablissement, sur lequel, n'y ayant Jamals encore pens^,
j'avais toujours repondu en g^n^ral a la Reine selon ce
que vous en aviez ordonn^ de lui dire Fannie pass^e ä
Mantoue; mais a präsent je vois que la Reine, pour
prendre son parti et disposer de sa fille, veut une r^ponse
positive, et celle-lk ne peut d^pendre que de vos ordres
que j^attendrai.
A Naples les histoires continuent toujours, et vous
avez bien raison qu'il est difficile d'y conseiller. J'ecris
autant quejepuis, pour engager la Reine a mod^rer son
extreme vivacite et promptitude, k ne pas tant se confier
a tout le monde, et surtout aux etrangers, k qui eile
— 21 —
parle de toutes ses affaires, et a tächer de gagner son
mari et se maintenir dans son credit prfes de lui, car il
est certain qu'k präsent on fait Timpossible pour T^loi-
gner de la Reine peu a peu. La Reine a, dit-on, ddsap-
prouvd la mission de Brissac k Paris, qui doit avoir ete
faite contre sa volonte.
Demierement, sur des soupgons de correspondance
a Rome, on a arr^t^ sept ou huit employ^s k Naples;
deux du bureau des aflFaires dtrangeres, un de la poste,
un chapelain des cadets, le secr^taire de la princesse
Yaci et le fils de la princesse Cariati-Spinelli, qui a dt^
bien des ann^es au service d'Espagne et faisait tous les
soirs la partie du Roi, et on les a imm^diatement trans-
förös dans des chäteaux et forteresses ^loignös en Sicile
et aux Presidj. Cela a et^ fait sans proces et a caus^
du bruit et formera de la mauvaise humeur en Espagne et
a Naples, et je crains qu' encore cette fois-ci on est all^
trop vite. Je Tai marqu^ a la Reine, mais trop tard; cela
^tait fait, et on indispose toujours davantage le public et
donne prise k la cabale espagnole. Enfin je d^sire bien de
tout mon coeur que toutes ces affaires de Naples finissent
bien, mais je crains qu'avec son excellent coeur la Reine,
par son imprudence et vivacit^, n'ait k se repentir de sa
conduite, surtout si Ton d^goüte une fois le Roi, et alors
il n'en sera plus temps, et ne se pr^pare un avenir mal-
heureux. Je le lui ai öcrit bien clairement et souhaite
qu'elle en profite pour son bien.
Ma femme me charge de vous präsenter ses respects.
Elle se porte, gräce k Dieu, bien, de meme que mes
enfans, dont trois ont un peu de rhume avec alt^ration,
— 22 —
vu la fratcheur survenue toat k coup, mais qui, ä ce que
j'espfere, n'auront pas de suite.
Continuez-moi, je vous prie, voß bontös, et soyez
persuad^ du sinc^re, tendre et respectueux attachement
avec lequel je suis ....
Ce 25 mai 1786.
an Leopold. Trfes-cher frfere. Cette semaine je suis pauvre en
nouvelles, et ce n'est que Textrait ci-joint que je puis
vous envoyer. Nous sommes k Laxenbourg, et Fran9oi8,
pour la premifere fois qu'il est dans le monde, s'en tire
assez bien. II u'est pas galant^ mais il est poli, assez par-
lant, et il parait s'amuser. II va souvent voir la prin-
cesse qui, avec Mademoiselle de Chanclos, me fönt les
mines les plus aigres que possiblfe, ne pouvant dig^rer de
ne pas en ^tre aussi, mais je suis inexorable, et je ne me
d^partis point de mon Systeme pris. C'est toujours pour
Päques dans un an, savoir Tannöe 1788, que j'arrange
pr^alablement toute chose pour leur mariage. Je compte
avec grande satisfaction de vous y voir, mon eher ami,
et que, le mariage fait, vous menerez les öpoux a Flo-
rence et les pr^senterez a votre ch^re öpouse.
Recevez ici tous les deux mes tendres embrassemens
et croyez-moi pour la vie votre ....
— 23 —
Ce 28 mai 1786.
Tres-cher frire. Je vous rends mille gräces de Taf- »^jlseph
faire et conduite du comte de Florida Bianca dans votre
id^e de mariage avec la Saxe, dont vous avez voulu me
donner part. Je Tai communiqu^ ä raa femme qui, comme
vous pouvez bien vous le figurer, en a ^t^ fächle et
choqu^e au dernier point. Je suis bien persuad^ que ce
n'est peut-§tre ni les sentimens ni les intentions du Roi
d'Espagne, qui n'a jaraais eu de raotif de se plaindre
de moi, et qui a constamment t^moign^ dans tous les
discours la plus grande tendresse pour ma femme; mais
le Roi n'y est plus, et il est entierement gouvern^ par
Monnino, lequel ne lui laisse meme voir que ceux
qu'il veut. II a aussi entiferement gagn^ le prince des
Asturies, homme faible et inappliqu^, en secondant sous
main tous les petits caprices et fantaisies de la princesse
qui, vaine et ^tourdie et faible, gouverne pourtant son
mari. Les propos de Monnino au ministre de Prusse lui
ressemblent et sont tout k fait dans son caract^re faux,
de m§me que la haine qu'il t^moigne pour notre famille
et qu'il a su inspirer au Roi dans les affaires de Parme
et de Naples, dans laquelle il a os^ se vanter k ses cor-
respondans a Rome qu'il ne cesserait point de tripoter
et intriguer contre la Reine jusqu'a ce qu'il n^aurait pas
reussi a la pousser k bout, et k la faire r^pudier, renvoyer
ou enfermer, comme la Reine de Danemarc; ce sont ses
propres termes.
Aprfes en avoir parl^. avec ma femme, nous sommes
pourtant convenus que, comme nous n'avons rien en main
— 24 —
qui puisse prouver cette histoire et propos de Monnino,
qu'il est entieremerit maitre du Roi, et que toutes les let-
tres passent par ses mains, qu'on ne gagnerait rien k
P^crire au Roi, lequel ne le croirait pas, le dirait k Mon-
nino et lui ferait voir la lettre, et on ne gagnerait rien
du c5t^ du fioi, qui n'est plus capable de fermet^, et on
ne ferait qu'irriter Monnino au point de s'en faire un
ennemi irr^conciliable et capable d'animer le Roi d'Es-
pagne, de lui faire accroire mille choses contre nous et
de causer k ma femme des chagrins pour rien, ddjk que
Ton voit par les affaires de Naples qu'aucune infamie lui
coüte pour seconder ses caprices.
Ce P' juin 1786.
Joseph Trfes-cher frfere. Voici les extraits de la semaine, de
an Leopold.
m^me que la lettre de la Reine de Naples que vous
avez bien voulu me confier. Je crois qu'il faut rdpondre
a la Reine tr^s-positivement, comme eile le d^sire, qu'elle
ne devait point, sur Tid^e trfes-^loign^e et vague d'un
Etablissement de sa fille avec votre fils Ferdinand, n^gliger
les autres partis qui pourraient se präsenter; que nous
ne pouvions pas m§me d^terminer si votre second fils
se mariera un jour ou point, encore moins le temps ni le
genre d'Etablissement qu'il aurait; que nombre de circon-
stances le d^termineraient, parmi lesquelles le plus ou
moins d^apparence de fertilite de TEpouse de Fran9ois
donneront la d^cision; que ce temps, se trouvant fort
reculE au moins, il se pourrait aussi qu'il se renconträt
— 25 —
ou quelque inclination ou quelqae parti avantageux a
un cadet pour lui^ qui fissent döcider du choix de la
personne.
Voila, je crois, honn^tement et franchement ce que
je crois qu'il faut lui r^pondre pour lui laisser le champ
libre k sp^cüler k l'^tablissement de ses filles.
Les affaires de Naples sont embrouilläes d'une fa9on
qu'il ne reste plus que des d^sirs pour le bonheur de la
Reine ; et les probabilit^s m^mes s'en ^loignent, mais
nous n'avons rien k nous reprocher. J'ai dit et ^erit k
ce sujet tout ce qui ^tait en mon pouvoir, mais en vain,
et vous de m^me, mon eher ami. Ici nous continuons
assez agr^ablement notre sdjour; le 14 nous rentrons en
ville, et apr^s la procession^ le 16, je compte partir pour
ma grande toum^e.
Adieu; je vous «mbrasse, de meme que votre chere
^pouse, de tout mon coeur ....
Ce 5 juin 1786.
Tres-cher frere. J'ose vous renvoyer le papier ci- ^®^p®^^
•^ x^ x^ an Joseph.
Joint que vous m'avez fait parvenir avec votre chere
lettre du 25 du mois passö, de laquelle je vous rends
mille gräces. Je puis ais^ment me figurer que la prin-
cesse n'aura pas et^ bien aise de n'^tre pas venue k
Laxenbourg, ce qui k son äge est bi^n naturel. Quant a
Tid^e du mariage de mon fils Franfois, cela dopend en-
tiferement de vos ordres; mais quoique je sois persuad^
que la princesse trouvera un peu long le dölai jusqu'ä
— 26 —
Päques 1788, je crois que pour Fran9oi8, qui est encore
si jeune, eela sera tr^s-utile et lui donnera le temps
n^cessaire de s'appliquer et former davantage de toutes
fa9ons, ce dont il pourra bien d^jk profiter cette annde,
oü vous aurez la bont^ de le mener avec vous k Laxen-
bourg et au camp de Pesth. C'est avec bien du plaisir
que je me ressouviens toujours de votre promesse de rae
faire venir pour assister en personne au mariage, et pour
conduire d'abord ensuite les epoux avec moi en Italie,
pour les präsenter a ma femmp et au reste de leurs
frires et soeurs, ce qui sera fort utile pour eux-memes,
pour les tirer des premiers embarras oü se trouvent tou-
jours des nouveaux mari^s, et fera le plus grand plaisir k
ma femme, qui est entiferement d'accord. Dans cette occa-
sion je me flatte de pouvoir vous amener deux autres
de mes tils, ainsi que vous me Tavez r^p^t^ plusieurs
fois. Je me flatte que jusqu'ä ce temps-la ce seront deux
recrues dont on pourra tirer parti et dont vous serez
content. Vous pensiez alors de prendre Leopold et Joseph,
Charles vous ayant paru fluet et peu sain; mais si vous
ne le d^sapprouvez pas, et si les circonstänces ne chan-
gent pas quant k leur sant^, jusqu'alors ce sera Charles et
Leopold que je vous am^nerai. Le premier est devenu
sain, fort et a un talent et application sup^rieurs k tous
les autres, et Joseph serait encore trop jeune, et Leopold
et pour la sant^ et fermet^ de caract^re et talent j'en
r^ponds, et me flatte que vous pourrez les employer
k votre service et en ^tre content avec le temps.
Je d^sire bien savoir des nouvelles de Marcolini, le
voir arriver ici et savoir a quoi nous en sommes, car il
— 27 —
m'est revenu sous main que de Turin on attend la d^ci-
sion de Marcolini ici pour nous faire faire des proposi-
tions pour le duc d'Aoste; ainsi il faudra voir si jamais
l'affaire de Saxe rdussissait; peut-ötre cela me procurerait
roccasioD de mener ma fille jusque dans vos Etats, d^ja
que vous avez d^clar^ de vouloir alors vous en charger
jusqu'aux confins, et par Ik me procurerait le bonheur
de vous revoir et vous präsenter mes respects.
De Naples il n'y a rien de nouveau^ on assure le
grand-^cuyer Dietrichstein*) k Terracina mieux, mais pas
hors de danger.
Ce 8 juin 1786.
Tris-cher fr^re. J'ai reyu votre chfere lettre et vous ^a Leipoid.
en suis trfes-oblige. Je vpus joins ici les nouvelles de la
semaine et en m^me temps une lettre pour la Reine de'
Naples, qui peut ^tre confi^e au courrier d'Espagne. J'ad-
»
mire vos bonnes raisons de ne vouloir point ^crire au
Roi d'Espagne ce que je vous ai mand^, et pourvu que
la chose se fasse, savoir que Th^r^se soit ^tablie, on
pourra laisser dire k Florida Bianca ce qu'il voudra.
II sera pourtant utile de s^en Souvenir dans Foccasion,
puisque, tant que ce gueux sera tout-puissant en Espagne,
il faut regarder cette puissance pour ennemie, et par
*) Der kaiserl. Oberststallmeister Johann Baptist Karl Walter
Fürst Dietrichstein, geboren 1728, vermalt mit Marie Christine Gräfin
Thun, geboren 1738» Sie starb schon 1788, ihr Gemal aber im
J. 1808.
— 28 —
cons^quent contrecarrer tous les avantages les plus eloi-
gn^s qii'elle pourrait se procurer.
Notre sdjour continue heureusement a Laxenbourg;
Fran9ois s'en tire assez bien; il s'est fait tirer aujourd'bui
une grosse dent toute cari^e qui pendant deux jours
Tavait fait souffrir, et il y a eu tout le courage et la fer-
mete ndcessaires.
Adieu; prösentez mes hommages a votre chfere öpou^
et croyez-moi pour la vie votre
Ce 11 juin 1786.
an Joseph. Trfes-cher frfere. J'ai re9u par la poste süre votre
lettre du 1®' de ce ^ois et les papiers qui y ^taient
joints, que j'ose vous renvoyer aujourd'hui. Je ne manque
pas de r^pondre a la Reine de Naples sur les id^es de
mariage dans les termes pr^cis, et les m^mes que vous
me le marquez. Je suis entiferement d'aecord avec vous
sur ce point, et me fais un devoir et un plaisir que mes
sentimens se trouvent conformes aux votres. Quant k
Naples, il y a toujours des histoires; on a ^loigne plu-
sieurs personnes, arret^ des lettres et fait brüler aux
confins toutes les lettres adress^es a une personne qui
se trouvant Thomme d'affaires d'une quantit^ de gens,
toutes leurs lettres d'affaires ont aussi ^t^ brOl^es avec.
Je souhaite que cela finisse bien, mais je crains bien que
non. Pour moi j'avertis, je conseille et je pr^che la Reine
autant que je puis, mais je crois que cela ne fait gu^re
d^effet. Elle est trop vive et de trop.premifere impression,
- 29 —
soupjonne trop, et en m^me temps se confie trop facile-
ment a tout plein de gens qui ne le m^ritent point, et
en abusent; racontant m@me des d^tails incroyables ä
des ^trangers, qui souvent en abusent.
La semaine pass^e le marquis de Breme*); ministre
de Turin k Naples, qui retourne ä präsent k Turin et
va ensuite k Vienne, est pass^ par ici; il est venu voir
ma femme et lui a fait de lui-mSme des propositions de
manage pour ma fille avec le duc d'Aoste, disant quil
savait pour sür qu'on ne pensait plus k la princesse de
France**), la princesse de Pi^mont***) s'y ^tant oppos^e;
que de Parme et de Naples on avait des propositions k
Turin, mais que sa Cour n'^tait intentionn^e pour aucune
de ces princesses, craignant que surtout celle de Naples,
que la Reine tient präsente, k ce qu'il a dit, k toutes ses
audiences et lorsqu'elle parle d'affaires, ne prenne un
goüt de vouloir se meler des affaires, ce qui ne convien-
drait pas k la Cour de Turin, et qu'il savait pour sür
qu'on d^sirait ma fille. Ma femme (car k moi il ne m'en a
pas parl^) lui a dit qu'elle prenait tout cela pour un simple
discours, mais que, si jamais on avait des intentions, tout
de bon on devait s'adresser directement k vous comme
chef de la maison, et de qui nous voulions d^pendre en
tout, et sur cela il est parti. Deux jöurs apr^s, Marcolini
est arrivd; je Tai su par Hasard; je Tai fait venir chez
*) Louis Joseph Arborio Gattinara, marquis de Brenne^ unter
Napoleon Minister des Innern und SenatsprSsident des Königreiches
Italien.
**) Elisabeth.
***) Deren Schwester Adelheid Clotilde von Bourbon.
— 30 —
moi et Tai fait venir diner k la campagne avec nous. II
m'a paru content et flatt^ des politesses qu'on lui a faites,
car il y est fort sensible, car, quoique de peu de talent,
il se donne beaucoup d'air, et fait sonner fort haut son
credit. II a fait quelque temps le myst^rieux, mais lui
ayant dit que je savais le sujet de sa mission, il n'en
iit plus, m'assura qu'il d^sirait ce mariage, et faisait tout
son possible pour le faire r^ussir, et se servait k cet effet
de tout son credit pres de TElecteur, et qu'il se flattait
que M. O'Kelly, qu'il loua beaucoup, vous en aurait rendu
compte, de meme que de son z^le et attachement pour
votre Service. II m'assura qu'il avait beaucoup d'ennemis
ä conibattre dans cette affaire, personnels k lui, et le
parti prussien, que TElecteur ^tait mefiant, craintif et
soupyonneux et difficile k se d^cider, qu'il n'avait pas de
commission de traiter le mariage, mais seulement de sonder
le terrain et voir ma fille.
Je la lui fis voir k diner et apr^s tout k son aise;
eile lui plut de figure et par ses fayons et discours. II
m'assura qu'il la trouvait beaucoup mieux de figure, et
surtout pour ses yeux, qu'on ne lui avait dit. II ne parla
aucunement des conditions, ni de trait^, mais me demanda
par qui et comment il fallait traiter cette affaire, et s'il
fallait envoyer un ministre dans les formes ici pour faire
la demande. Je l'assurai que cela n'^tait pas n^cessaire,
qu'on pouvait traiter directement avec moi par ^crit, et
sur cela il se chargea de se mettre en correspondance
avec moi, m'assurant qu'il ferait voir toutes mes lettres k
l'Electeur, et m'avertissant qu'il soupyonnait toujours qu'on
ne veuille y meler de votre part des vues de politique
— 31 -
dans ce mariage^ ce que TElecteur craint furieusement.
Sur cela, en cons^quence de ce que vous m'aviez d^jk
öcrit il y a deux mois, je Tassurai que je savais pour
sür que vous d^siriez ce mariage pour ^tablir une de vos
ni^ces, mais que vous-möme m'aviez ^crit de Tassurer
qu'il n'y avait pas la moindre vue ni id^e de politique
dans cette affaire, qu'il pouvait traiter directement avec
moi, mais qu'il n'aurait jamais mes röponses qu'apr^s
que je vous aurais communiquä ses lettres et re9u vos^
döcisions, puisque et par devoir et par attachement per-
sonnel je ne faisais jamais en rien un pas sans votre
consentement, dont pourtant d'avance j'ötais sür de vous
dans tout ce qui ^tait juste et raisonnable. II a ^t^ en-
chant^ lorsque je lui ai dit que^ si le mariage avait lieu,
il n'y aurait ni ambassadeurs ^ ni fetes, ni ^tiquettes,
ni voyage dans les formes, et que vous vouliez bien
vous charger de consigner votre niece aux confins de la
Saxe. II m'a assur^ que cela ferait le plus grand plaisir
a TElecteur, et pour la döpense et pour les seccatures,
de m^me que ma forme r^solution de ne jamais envoyer
avec ma fiUe de chez moi ni dames ni personnes de Ser-
vice pour rester avec eile.
II s'est beaucoup plaint de la fa9on dont on avait
^t^ tromp^ dans le choix de la princesse de Turin, e£
pour la figure, le caractfere et tout le reste.
Sur le projet de prendre une fiUe de la Reine de
Naples pour Tautre prince, il n'a rien dit, mais il ne m'a
pas paru content des affaires de Naples, ni de T^ducation
que la Reine donne a ses fiUes qui, a ce qu'il croit, de-
viendront trop intrigantes.
— 32 -
J'ai vu qu*il d^sire sincerement que le mariage avec
ma fille r^ussisse, et qu^il esp^re par Ik faire ses affaires^
se faire m^rite aupres de vous et s'^tablir toujours plus
dans la confiance de TElecteur.
II est all^ faire un tour k Pise et k Livourne, re-
viendra dans trois jours, en restera quatre ici et ira par
chez lui k Dresde sans s'arreter ni aller nulle autre part.
On voit qu*il est fort press^ ot qu'il n'a d'autre objet
que de voir ma fille pour en faire un rapport de bouche
a FElecteur, et qu'k son retour les propositions viendront
par son canal, que Tfilecteur d^sire ce mariage, mais
que Tunique chose qui le retient, sont les craintes que le
parti prussien lui inspire, qu'on veuille m^ler de la poli-
tique dans cette affaire, et par Ik obliger TElecteur k
s*unir avec vous dans les affaires de TEmpire. U m'a
confi^ surtout que TElecteur ^tait fort sensible k des
nouvelles citations qui avaient 6t6 faites dans Taffaire
des comtes de Schaumburg et qu'on avait täch^ d'enve-
nimer. Si Marcolini, au retour de sa tourn^e, me fait
quelqu' autre proposition, je ne manquerai pas de vous
aviser toujours exactement de tout.
Au camp k Ebersfeld, ce 23 juin 1786.
Joseph Tres-cher frfere. Je ne serai pas long, ^tant fort
an Leopold. * ^'
occup^. J'ai reyu hier par le courrier votre chÄre lettre,
et je m'empresse d'y rdpondre par cet autre garde que
je fais expedier de Vienne. Si Ton vous fait des propo-
sitions raisonnables pour T^tablissement de votre fille.
— 33 —
je croirais qu'il faudrait les accepter, et par consdquent
votre amiti^ et d^licatesse peuvent §tre entiferement a
l'aise, car, des ce moment, vous avez k ce sujet mon
plein consentement de faire et disposer ce que vous
jugerez convenir. La proposition du ministre de Sar-
daigne, je la regarde pour une finesse qu'il a employde
pour savoir de quoi il ^tait question avec la Saxe ; mais
Marianne*), votre seconde fiUe, n'est pas si contrefaite
m
qu'elle ne püt se inarier et valoir un de ces dösagr^ables
petits princes de Turin; ainsi on pourrait y penser. Vous
pouvez hardiment tranquilliser sur les vues politiques, et
surtout que la fameuse et insignifiante confdd^ration ger-
manique ne sera pas troubl^e par un mariage.
Adieu, mon eher ami, je pars dans ce moment pour
la Croatie. Faites mes excuses k votre chere äpouse que
je ne puis lui ^crire. Je vous embrasse tous deux ten-
drement et suis votre ....
Laxenbourg, ce 28 aoüt 1786.
Trfes-cher frfere. Arriv^ ici de ma tournöe, le m'em- j^^^\.
' «^ an Loopold.
presse de vous envoyer ce courrier pour vous en donner
part et en meme temps vous remercier de Texactitude avec
laquelle vous avez bien vovilu continuer a rae donner
part de tous les objets int^ressants. Ma sant^ est par-
*) Geboren 1770. Sie wurde im J. 1791 Aebtissin des Damen-
stiftes zu Prag, resignirte im Jahre 1800 auf diese Würde, lebte einige
Jahre zu Rom und starb im Jahre 1809 zu Neudorf bei Tcmesvar.
V. Aineth. Joseph n. Leopold. II. 3
-- 34 -
faite, et malgrd le temps ex^crable qu'il a fait et les
pluies et d^bordemens continuels, je n'ai pas 6t6 incom-
mod^ que d'un froid que j'avais pris k T^paule gauche, oü
j'ai eu un rhumatisme, mais qui ^galement s'est dissip^.
Fraii9ois s'est assez bien tirö pour la premi^rä fois de ces
evolutions militaires; il vous envoie ses journaux, lui
ayant conseillä de le faire. Ils sont originaux et vous j
verrez son style et sa maniere assez critique, mais juste^
de voir les choses. II a du talent, de Tesprit, mais pas
une id^e de vivaciti dans rexecution, ni pour d&irer une
chpse. Je suis sür qu'au s^minaire, si Ton Vy mettait, il
ferait ^galement ses ^tudes de th^ologie, sans plus penser
k r^tat militaire. Peut-§tre qu'avec Tage son caractere
deviendra plus d^cid^, car il est encore enfant, et sans
la moindre vell^it^ d'un jeune homme pour aucun plaisir
que pour celui de ne rien faire et de tripoter avec de
Teau, de clouer quelque chose dans sa chambre, de ranger
de vingt fa9ons diff^rentes ses livres ou papiers, de donner
a manger k un oiseau, etc. Ni chasse, ni Texercice du
cheval, promenade, spectacle, musique^ compagnie ne
Tattire de preförence. II est grandi, et sans engraisser il
devient plus fort et nerveux.
La mort du ßoi de Prusse ne laisse que le regret
de ce qu'il a vöcu si longtemps*). Cela ne changera rien
*) Nach dem Eintreffen der Todesnachricht hatte Joseph am
21. August eigenhändig an Kaunitz geschrieben:
„Mon eher Prince. Comme militaire je plains la perte d*un
^grand homme, et qui fera ^poque k jamais dans Tart de la guerre.
„Comme citoyen je regrette qu^elle est arriv^e, cette mort, trente
paus trop tard; Taun^e 1756 eile aurait ete autremeut avantageuse
J
— 35 -
k la Situation politique; son successeur parait s'^tre jetä
entre les bras de Hertzberg, par consequent, sans les
meines talens et encore moins la r^putation, il fera de
m@me et cherchera des petits moyens, s'ii n'en trouve de
grands, pour nous nuire. Les premiferes lettres de P^ters-
bourg me parleront de Teffet que cette mort y a prodult.
Le projet du voyage de Cherson existe toujours encore
pour le printemps prochain; je dois y ^tre invit^ solen-
nellement par Tlmp^ratrice au premier jour; cela est
un peu genant, il faudra que je täche de m'en tirer le
moins mal que je pourrai, et au pis aller il faudra que
je me d^cide^ k aller voir rimp^ratrice k son passage k
Kiew, car pour la tourn^e qu'elle veut faire, cela est
ibipossible, puisque, outre Cherson, eile veut faire tout
le tour de la Crim^e et revenir par Azow et les d^serts
qui sont vers la mer Caspienne jusqu'k Moscou.
La Reine de Naples est r^tablie, ce dont je suis bien
enchant^, mais je crains bien qu'avec sa fa9on d'etre,
cela ne sera pas de longue dur^e. Le Roi m^a fait esp^rer
de venir Y6t6 prochain avec la Reine me voir et assister
a un camp, pour ensuite se rendre k Paris au sdjour de
Fontainebleau. Cette idöe m'a surpris, mais eile fait
plaisir, pourvu qu'elle se rÄalise. Des brouilleries avec
FEspagne, je n'y ai jamais rien compris, et je suis encore
„qnVn 1786. Je n'ai pas la moindre esp^rance de son successeur, et
ntant que Hertzberg sera Tarne de tout, il faudra s^attendre encore k
„pire. Au reste, pour le moment, comme vous dites tr^s-bien, il faut
„le voir venir et agir alors en cons^quence.
„Adieu, mon eher Prince, croyez k ma sinc^re amitie et par-
„faite estime.- j^,gj,j.jj
3*
— 36 —
au m§me point. Les moyens conciliatoires, propos^s par
la France, sont inconcevables; vous les saurez sans doute.
II s'agit de faire ^erire au Roi de Naples qu'il veut ren-
voyer Acton par d^förence pour son pfere, ce qui est un
mensonge, et le Roi d'Espagne doit r^pondre qu'il priait
le Roi de Naples de le garder, le connaissant un bon et
z^M ministre, autre mensonge. N'est-ce pas comique? La
premi^re lettre est partie. Dieu sait ce qui arrivera.
Les pr^parations anatomiques en cire viennent d'ar-
river, selon le rapport qu'on- m'en fait, parfaitement bien
k Vienne, sans dommage. C'est une Obligation continuelle
que je vous ai, mon eher ami, de permetti:e que je les
fasse copier. Je ne compte retourner k Vienne que pour
une demi-journ^e et partir tout de suite pour la Moravie
et Boheme, d'oü vers le 12 d'octobre je serai de retour.
Adieu, je vous embrasse tendrement et vous prie
de me croire pour la vie votre ....
Prague, le 4 octobre 1786
Josepii Tris-cher frfere. Je viens de recevoir votre chire
an Leopold.
lettre par le courrier; je ne cesserai pas k vous faire des
excuses et des remercimens de ce que vous avez bien
voulu nie continuer vos chferes nouvelles, pendant que,
depuis tant de temps^ je n'ai pu y r^pondre. Quant k ce
que vous me marquez de Naples, tout est inconcevable,
et la lettre que je viens de recevoir de la Reine a Tem-
preinte de la plus parfaite confusion et ind^cision. Aprfes
— 37 —
avoir fait toutes les d^marches pour se r^concilier, eile
en parait fächle et d^sirer que le Roi d'Espagne ne les
accepte point/ Elle ne peut rien d^eider pour leur projet
de voyage non plus. En attendant, selon leurs premi^res
intentions, je leur ai couch^ un itin^raire que je leur
envoie en italien par ce courrier, et j'ose, mon eher ami,
vous en joindre Pesquisse en allemand. De cette fagon
ils verraient et pourraient s'amuser en m^me temps. Je
ne sais ce qu'ils feront, mais je crois que de tout ceci
il ne s'en fera rien.
Je n'ai plus entendu le mot de Saxe, et Marcolini,
autant que je sais, n'est point encore revenu. Ce sont
tous des fripons, et nous faisons tres-bien de les voir
venir et de ne pas nous laisser achalander au plus offrant.
Je verrai n^anmoins de presser la chose et d'avoir une
r^ponse de probabilitd au moins. En attendant m^nagez
la Cour de Turin, que je ne crois pas plus sincfere au
reste que Tautre.
Je me porte k merveille de toutes mes courses; le
froid commence k se faire sentir. Je pars demain d'ici pour
Budweis, Linz, d'oü dans dix jours k peu pr&s je serai
k Vienne. En attendant je vous embrasse de tout mon
coeur; croyez-moi pour la vie votre ....
Voudriez-vous faire agröer k votre chfere ^pouse mes
hommages et mes excuses; faute de temps je ne puis
avoir le plaisir de lui ^crire.
— 38 —
Ce 23 octobre 1786.
an Leopold. Trfes-cher frfere. Pour aujourd'hui je puis vous donner
part que cette fi^vre que j'ai eue, n'a ^t^ qu'^ph^mfere,
et que dhs le lendemain je me portais ddjk parfaitement
bien. Mon fr^re Ferdinand et son ^pouse sont arciv^s
avant-hier en parfaite sant^; il est un peu maigri, ce
qui ne lui fait point de mal. Je ne sais combien de temps
qu'ils comptent rester ici, mais je crois quelques semai-
nes. Pourquoi ne puis-je avoir cette satisfaction de vous
poss^der avec votre chfere ^pouse aussi comme cela chez
moi? J'en sens fort bien les difficult^s, mais mon d^sir
n'en est pas moins vrai et sinefere.
Aujourd'hui le nonce s'est mis en public, et aura son
audience solennelle. Adieu ....
Ce 26 octobre 1786.
an Leopold Trfes-cher frfere. Pour aujourd'hui je puis me reraercier
de votre chfere lettre, et en mSme temps me r^jouir que
votre fluxion a la t^te soit pass^e. J'esp^re qu'elle n'^tait
qu'aux dents et qu'elle ne tenait pas du genre d'^r^sip^le,
car sans cela, vu que cela revient volontiers, je vous
plaindrais beaucoup. Pour moi, j'en ai 6t6 tourmentö long-
temps, mais ä cette heure voilk presque deux ann^es
que je n'en ai plus le moindre ressentiment, et ma santä
est parfaite.
Voici 'les papiers du moment; j'ai fiE^it aussi quelques
changemens dans les gouvernemens de mes provinces.
— 39 —
Heister*) en Tyrol et Thürheim**) ont ^t^ jubil^s; k la
place du premier Sauer***) et k Linz Rottenhan****)
vont, ^tre places; des subalternes ont ^t^ chang^s aussi
dans d'autres provinces.
Adieu, mon eher frfere; je vous embrasse de tout
mon coeur; croyez-moi pour la vie votre ....
Ce 2 novembre 1786.
Tres-cher frere. Voici les papiers de la semaine ; le ^^ Leopold,
temps est tournö k la pluie, par cons^quent je doute
fort que la chasse de St. Hubert aura lieu. Mon frfere et
ma belle-soeur en veulint &tre, et il y aurait eu beau-
coup de monde. Ils me paraiasent tout engoues de TAn-
gleterre, et ils ne cessent de parier des objets curieux
et int^ressants qu'ils y ont vus, au point qu^ils me fönt
venir Peau k la bouche, de voir un jour encore cette
seule partie interessante de TEurope qui m'est inconnue,
mais Dieu sait si j'en aurai jamais le temps et Toccasion.
Pour le voyage de Cherson dont je. suis menac^,
j'attends d'un jour a Tautre des nouvelles. J'avoue que
ce ne sera que par gageure et bien malgrö moi que je
le ferai, si je ne trouve de pro texte plausible pour m'en .
d^gager, car Tamour-propre de rimp^ratrice s'y trouve
en jeu.
*) Johanu Gottfried Graf Heister.
**) Christoph Graf Thürheim.
***; WeDzel Graf Sauer.
****) Heiorich Graf Rottenhan.
— 40 —
Je suis enchant^, mon eher frere, que votre Quxion
soit passöe, et que vous alliez faire un petit tour avec
votre chere ^pouse. De Naples je n'entends plus rien, ni de
France ou d'Espagne; Ton se Qatte toujours d'un accom-
modement, mais* il tarde, et la chose deviendra encore
plus difficile, si cette premiere bonne volonte du Roi de
Naples est rebut^e par des nöuvelles chicanes.
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse, de meme
que votre chere öpouse, de tout mon coeur ....
Ce 9 novembre 1786.
an Leopold. Trfes-chcr fr^rcj Voici les ifbuvelles de la semaine.
Je vois par votre chere lettre que vous avez le mSme
froid que nous ici^ qui est aussi extraordinaire qu'il est
fächeux pour les iarbres, vignobles et champs. J'ai eu un
trfes-dösagrdable ^v^nement en Transylvanie; la peste s'est
manifestöe dans un village sur les frontieres de la Vala-
chie; mais par les bonnes dispositions prises et qu'on a
bien entourö Tendroit infect^, il n'est mort que^ vingt-six
personn es toutes ddjä infect^es au moment qu'on Ta d^cou-
vert. Cela ne fait plus de progrfes, par confiöquent il y a
tout lieu de se flatter que cela s'^teindra.
De Naples j'ai re9u la singuliere nouvelle que le
Roi d'Espagne n'avait point voulu röpondre k la lettre
dont les Franyais dtaient convenus, et que par cons^quent
toute nögociation dtait rompue, et que pfere et fils se
trouvaient dans la meme position qu'auparavant. II n'est
pas possible de sortir du d^dale de toutes les dömarches
— 41 —
de ces bonnes gens. En attendant on m'assure qu*a bon
compte de la r^ussite 'la Reine a fait faire de beaux
prdsens k Paris et que le Chevalier de Brissac a et^
avaueä, et k cette heure tout cela est nul.
Ferdinand avec son ^pouse comptent rester jusqu'k
la fin de ce mois, et ensuite retourner k Milan, en voyant
la Marianne et TElisabeth en chemin.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur. Mes
respects k votre chfere äpouse ....
Ce 16 novembre 1786.
Tres-cher frere. Je ne vous dirai rien le lendemain des t^^^Li,i
an Leopold.
voeux que mon coeur forme pour vous k chaque occa-
sion, et dont la Saint-L^opold en ^tait liier une nouvelle
occasion, mais soyez bien persuad^ que mon amitiä pour
vous est au-dessus du temps et des dvönemens. Je vous
joins ici les extraits de la correspondance ministerielle;
mais, en meme temps, je veux vous informer d'un sin-
gulier ev^nement qui pourra se rencontrer et qui exige
que vous me fassiez connaitre vos intentions. Je sais de
science certaihe que M"® TElectrice Palatino*) est malade
a la mort, et que meme eile peut d^jk ne plus exister
quand je vous öcris. L'Electeur est parti subitement de
Munich pour Mannheim, et avant son d^part il a encore
fait connaitre au baron de Lehrbach, mon ministre, qu'en
cas de mort de son ^pouse il penserait a se remarier
*) Elisabeth Auguste Prinzessin von Sulzbach, Gemalin des
Kurfürsten Karl Theodor. Sie starb jedoch erst im Jahre 1794.
— 42 —
tout de suite, et que votre fiUe Th^rfese, qu'il connaissait
de Florence, lui avait infiniment plu. Je ne vous döcrirai
ni la figure ni Tage de FEleeteur; vous le connaissez, c'est
tout dire. Sa santä est assez bonne, et il est amateur du
sexe. L'importance d'exclure par un mariage dont il naitrait
encore des gar9ons, la personne et la lign^e du duc de
Deux-Ponts, vous la sentirez vous-meme. Etre Electrice
est une belle place, en prenant soin d'un bon Etablisse-
ment en cas de veuvage, et surtout la libertö de pouvoir
en jouir Ik oü bon semblerait k votre fille, me parait
trfes-avantageux, d'autant plus que les autres Epousejirs
sont iucertains et n'ont que des espErances vagues de
parvenir a ce qu'on deviendrait tout de suite. Instruisez-
moi done, mon eher ami, apres avoir consultE votre chfere
Epouse et la Thörfese, si vous le jugez convenir, de ce
que je dois röpondre au cas que Ton m'en fasse Ouvertüre.
A tout Evönement, si quelque chose arrivait avant d'avoir
votre r^ponse, je ne donnerai aucune r^ponse, et je vous
enverrai un courrier tout de suite.
Ferdinand et son Epouse partent le 4 döcembre d'ici,
et ils verront la Marianne et TElisabeth en chemin. De
Naples le Roi et la Reine me mandent que tout est rompu
avec l'Espagne , mais la lettre que le Roi de Naples avait
Ecrite, n'est pas rendue encore, ce qui fait une singulifere
chose. Ils assurent de vouloir venir me voir aprfes Tas-
censo; le reste du voyage est encore incertain.
Adieu, mon eher frfere, je vous embrasse, de m&me
que votre chfere Epouse ....
Les pr^parations en cire viennent d'arriver; elles ont
un peu souffert par des chutes que des mulets ont faites.
— 43 —
Ce 21 novembre 1786.
Tres-cher frire. Le courrier ordinaire qui va relever ^ Leopold
Tautre k Naples me pro eure la satisfaction de vous öcrire
celle-ci, en vous joignant le peu d'extraits du moment
de la correspondance ministerielle. Je compte pour la
nouvelle ann^e arranger pour tous les jeudis oü est le
courrier assure, des extraits suffisants pour vous tenir de
semaine en semaine au courant de toutes les affaires
quelconques internes.
J'ai bien de Toccupation pour le präsent, vu le cou-
rant des affaires et les diff^rentes r^forraes que Tltalie
et les Pays-Bas sont actuellement en mouvement de subir.
La ' Hongrie m'occupe aussi beaucoup , enfin vous con-
naissez mes instrumens; il faut toujours battre six fois k
la mSme place pour öveiller ces endormis et pour plier
leur mauvaise volonte.
Les quatre archeveques d'AUemagne m'ont adressä
leurs piain tes et leurs projets pour la r^forme des abus
dans le disciplinaire que la Cour de Rome par ses nonces
s'arroge. Je leur ai r^pondu et les ai anim^s k se con-
certer avec leurs ^veques suflfragants, afin de secouer ce
joug tout d'un commun accord. Je ne sais ce qui en
arrivera, mais Rome intrigue beaucoup contre.
Je viens^de recevoir un courrier de P^tersbourg, et
Bon contenu me fait bien voir que je ne pourrai me
dispenser d'aller voir Tlmp^ratrice dans le mois d'avril
k Kiew et Cherson. Elle est tellement entichöe de cela,
et si gätöe que tout ce qu'elle d^sire r^ussisse, que,
Sans me brouiller avec eile, je ne pourrais r^tracter ma
— 44 —
promcBBC, quelquc incominodc et genant quc cela soit
pour moi.
Lo Roi et la Reine de Naples m^assurent toujours
qu'ÜB viendront aprös rascenso k Vienne. Cela viendra ä
point nommä pour nion retour de Cherson, et j'aurai vu
dans trois semainee de temps rimpäratrice de Russie et le
Roi de Näples, qui sont pourtant assez loin Tun de Tautre.
L'Electrico Palatine est enti^rement remise, ainsi il
n'en est plus question pour le präsent. Je ne comprends
rien de la Saxe. Est-ce quo Marcolini est un fripon ou
est-ce qu'il n'a pas de credit? Voilä ce que je ne pour-
rais d^finir de la marche ridicule^ .de toute cette affaire,
pourvu que vous ne manquioz le Pi^mont en attendant.
Pour ici tout reste au projet quc nous avons fait ensemble;
apr^s Päques de 1788 tout do suite le mariage de Fran-
9oi8 et de la princesse se fera, et ils partiront en droiture
pour Florence, oü ils s'arreteront tant que vous voudrez,
et reviendront de m§me sans autre tourn^e de voyage
derechef droit ici. Je croirais que de s'expatrier convien-
drait infiniment ä tous vos fils, et que plus que vous
tardez, plus ils acqucrront d'Italianisme, qui n'est pas cc
qui peut leur convenir pour leur bonheur ni utilitö future.
Vous savez, mon eher ami, que ma maison et mes soins
sont k votre disposition; ce que vous croirez comme p&re
convenir k vos enfans, faites-le, et je serai prompt a les
recevoir et k les former de mon micux, qu41 y en ait
peu ou'beaucoup, sans complimens.
Adieu, mon eher ami; je vous embrasse tendrement
et croyez-moi poiir la vie votre «...
— 45 —
Co. 23 novcmbro 1786.
Trfes-cher frere. Pour aujourd'hui je n'ai pas grand' ^n Leo^^id.
chose k vous marquer, vous ayant ^crit par le courrier.
Le temps est toujours abominable, pluie continuellc. Les
pr^parations en cire sopt arriv^es, k quelques petites
avaries pris, fort heureusement, et je les trouve tris-
belles; aussi font-elles tout rornement de rAcad^mie.
Nous avons des bals que je donne pour mon frfere. Le
premier a ^t^ uniquement pour la noblesse; aujourd'hui
il y en a uri pour la classe des nobles ^ conseillers et
secr^taires, et dimanche enfin il y aura une redoute
masqu^e gratis, pour laquelle j'ai fait distribuer trois
mille billets. Adieu ....
Ce 28 novembre 1786.
Trfes-cher frfere. J'ai recu votre tr^s-chfere lettre du ^^^^\
' an Joseph.
16 de ce mois, et les papiers qui y ätaient joints et que
j'ose vous renvoyer. J'ai 6t6 p^n^tr^, de meme que ma
femme, de la plus vive reconnaissance de vos bontds pour
ma fille Th^rese. Je m'^tais bien aper9u, lorsque l'Elec-
teur a 6ti ici la seconde fois, qu'il la recherchait et lui
parlait avec plaisir^ mais jamais je ne me serais imagin^
qu'elle lui eüt pu faire une impression aussi favorable.
Je sens bien comme vous tout Tavantage d'un pareil ma-
nage; pour peu que TElecteur vive et puisse avoir des
cnfans, la Situation de ma fiUe sera toujours bien avan-
tageuse, et Texclusion de la maison de Deux-Ponts ,de
— 46 —
cette impiortante succession serait un coup de bonheur
unique de toute fa9on. D'ailleurs r^tablissement de toutes
fa9onB est bien agr^able et avantageux, et pour le pays,
le local, etc., et c'est Tunique parti m^me qui, pour le
moment, se präsente, ceux de Saxe et de Turin ne se
d^clarant pas et me paraissant moins bons et äqüivoques
et peu sürs, en pouvant assurer a ma fille, vu Tage avanc^
de TElecteur, un Etablissement convenable en cas de
veuvage et la permission d'en jouir oü eile voudrait, con-
ditions qui n'ont pas echappe a votre sagacitd et k votre
bontE et amitiö pour nous et nos enfans. Cela est tr^s-
convenable de toutes les fa9ons, et naturellement dans le
cas que FElectricc meure, TElecteur pressera tout de suite
a se marier. J'en ai parlE selon vos ordres d'abord k ma
femme, qui vous y repond elle-meme par la lettre ci-jointe,
ensuite ensemble k ma fille. Je lui ai reprösentE toutes
les circonstances, Tage et figure de TElecteur, les autres
etablissemens qu'elle pourrait esp^rer en Saxe ou k Turin,
les avantages et desavantages de chacun d'eux et le plus
ou moins de probabilitE de leur röussite, et apres Tavoir
laissEe mürement d^lib^rer et r^fldchir, eile m'a assurd
qu'elle n'aurait pas de difficult^ du tout d'öpouser TElec-
teur, que le parti lui paraissait convenable et qu'elle Fac-
ceptait avec plaisir, ätant un parti sür et avantageux et
n'ayant rien contre sa figure et personne.
Nous remeftons donc de ce moment cette affaire
entierement entre vos mains avec notre plein consente-
ment de toutes fa9ons, connaissant vos bont^s pour nous
et sachant bien que les intdrets de ma fille ne sauraient
etre en de meilleures mains que les votres. Röpondez
— 47 —
pour nous et en notre noni; traitez, convenez^ faites des
conditions comme vous voüdrez, enfin nous nous remet-
tons pour tout ä ce qu'il vous plaira de fixer et convenir,
etant entierement d'accord sur ce point.
De Naples j'ai appris le projet du voyage du Roi
en AUemagne, et celui de France, ils veulent le r^server
a une autre ann^e. Les n^gociations avec TEspagne sont
rompues, et toute cette affaire s'est termin^e aussi singu-
lierement qu'elle avait common c^.
Ce 5 d^cembre 1786.
Tres-cher frere. Je vous rends mille gräces de votre ^n Tosopb.
chere lettre du 23 du mois pass^, et je suis enchante quo
les preparations en cire soient arriv^es heureusement ä
Vienne et que vous en ayez ^t^ content. Comme c*est
aujourd'hui la poste süre, j'ose en profiter pour vous
remercier de votre gracieuse et longue lettre du 21 du
mois pass^, que j'ai re9ue par le garde, et vous remercie
d'avance de la promosse que vous voulez bien m'y faire,
de me faire avoir dor^navant toutes les semaines Textrait
de tout ce qui se fera de plus important dans las affaires
internes, qui me sera d'une utilit^ infinie. Je puis ais(5-
ment me figurer les peines que doit vous causer Tintro-
duction des nouveaux systemes en Italic, aux Pays-Bas
et surtout en Hongrie, le travail ^tant toujours pour faire
ex^cuter les projets comme on le dösire, et contre la
mauvaise volonte des executeurs, que pour id^er les
projets.
- 48 —
Les propositions des ^veques d'Allemague me pa-
raissent de la plus grande importance et d^cision dans
ce moinent. Je crois que d^ja qu'ils sont recourus a vous,
voilk la vraie occasion de gagner toutes les Coura eccl^-
siastiques et de sccouer pDur toujours en AUemagae le
joug int^ressä et despotique de la Cour de Rome, en
soutcnant et animant les ^veques d'Allemagne, les ap-
puyant de toute votre force, en abolissant pour toujours
toutes les nonciatures en Allemagne, commen9ant par
Celle de Vienne, et les r^duisant a de simples ambassa-
deurs, comme ceux des autres puissanees, leur ötant tout
tribunal et juridiction et n'acceptant jamais d'eccl^siasti-
ques dans ces postes, et en engageant les ^veques et
princes eccldsiastiques d'Allemagne k s'assembler et former
un concile ou synode national, dans lequel, d^libärant
eux-m^mes dans leurs griefs contre la Cour de Rome,
ils revendiquent leur autoritä et se rötablissent dans tous
les droits primitifs que Rome leur a usurp^s, et auxquels
leurs pr^d^cesseurs n'ont jamais pu renoncer au pr^ju-
dice de leurs successeurs futurs, et ätablissent des maximes
uniformes pour ces mati^res, et la discipline selon Celles
que vous avez ätablies chez vous et auxquelles, per-
mettez-moi que je vous le dise, il ne manque que la sanc-
tion d'un synode national, composä de tous les dveques vos
Sujets, pour qu'elles soient stables, constantes et uniformes
partout, et qui est la seule chose que la Cour de Roine
craint au dessus de tout, ne pouvant y rien objecter. A
präsent je sais pour sür qu'il n'y a sorte d'intrigue qu'on
ne mette en oeuvre pour empecher les affaires des äv^ques
d'Allemagne et i'abolition des nonciatures, que le nonce
- 49 —
Caprara a Vienne.en est sp^cialement chargö, et qu'on
se flatte, qu'ayant beaucoup d'esprit et ^tant bien accrö-
ditd, il y r^ussira. Je crois enfin que voici le moment
döcisif pour Rome, et qu'on y fera tout pour se sauver.
Pour ce qui regarde votre voyage a Cherson, je sens
bien combien cela doit vous §tre incomraode, surtout au
raois d'avril, mais j'ai toujours ^te persuade? que Tlmpö-
ratrice de Russie, qui en est specialement flattee, n'en
demordrait pas, et qu'on risquait a se brouiller avec eile
a ne pas le faire, ce qui etait trop important pour oser
le risquer.
De Naples on öcrit toujours que le Roi et la Reine
comptent aller pour TAscension a Venise et de lä ä
Vienne, en Boheme, faire un tour eh Allemagne et revenir
en novembre a Naples, sans aller cette fois-ci aux Pays-
Bas ni en France. Les aflfaires avec TEspagne sont .rom-
pues; le Roi a eu la lettre de celui de Naples, mais n'a
pas vonlu faire la reponse promise^ et il dtait bien sin-
gulier que, sans son aveu pröventif, on ferait öcrire au
Roi d'Espagne une lettre k son fils, dont on lui pr^sen-
tait la minute, comme s41 ätait un Sedier. On assure
que le Roi insiste toujours sur le rappel d'Acton; enfin
c'est une affaire qui, consideröe de toutes les fa9ons, a
ete tres-singuliere.
J'ai vu la gu^rison de TElectrice Palatino, et j'avoue
que j'ai et^ fäch^ de perdre une. si bonne et convenable
occasion d'^tablir ma fiUe Therese, surtout puisqu'elle n'y
avait point de röpugnance. Elle a pris fort raisonnable-
raent Tune et Tautre döcision, mais pour ce qui regarde
son Etablissement, je crois qu'il serait pourt«ant nöcessaire
T. Arneth. Joseph u, Leopold. II. 4
— 50 —
qu^on füt au clair, si de Saxe il y a de Tespoir ou non. On
me fait toujours sonder sous main de Turin, et je täche
de difförer ma r^^ponse, mais il serait bien d<5sagreable
de perdre cette oecasion pour attendre les röponses de
Saxe et de Marcolini, qui peut-ltre ne viendront jamais.
Oserais-je vous prier de faire parier et sonder en Saxe
formellement, ou de me marquer si vous approuvez que
j'^crive a Marcolini pour savoir seulement ce qui en est,
et si on pense k ma Thörfese ou non, afin de pouvoir en
tout cas repondre aux propositions qu'on fait de Turin?
J'attendrai sur cela vos ordres. Je profite de cette oeca-
sion et des bont^s que vous me t^moignez pour mes
enfans pour vous recommander ma seconde fille Marie-
Anne. Elle est grande et sa figure ne lui permet pas
d'espdrer un mariage. S41 y avait moyen de pouvoir
r^tablir ou la placer dans quelque chapitre pour abbesse
aux Pays-Bas ou autre part, ce serait assur^ment un
grand bonheur pour eile.
Quant au projet du mariage de Fran9ois apr^s Päques
1788, j'en suis entierement d'accord. Je me flatte que
vous me permettrez d'y venir, laissant ici ma femme
avec ma petite famille. D'abord aprfes les noces je
pourrai mener les öpoux avec moi k Florence, et je suis
persuad^ que ce voyage leur sera fort agr^able et fort
utile pour les döpayser et leur öter les premiers embarras
et genes d'un nouveau manage. Ils y resteront tant que
vous le jugerez k propos, et pourront ensuite revenir tout
droit k Vienne. Toute autre tourn^e en Italic serait
genante pour eux, et jusqu'alors ils auront ddjk vu tous
leurs pärens d'Italie k Vienne ou a Florence.
— 51 —
Je suis on ne peut plus p^n^tr^ de tout ce que vous
me dites d'obligeant et de gracieux relativement k mes
autres enfans. Ils sont les serviteurs de TEtat et les vötres;
vous en pouvez donc disposer k votre gre, et je ne d^sire
autre chose sineferement que de combiner en tout avec
vos dösirs et intentions ; mais pour y r^ussir je vous prie
de me dire franchement vos intentions pour eux, et cela
uniquement pour les prövenir et y concourir de mon
mieux. Marquez-moi, je voas supplie^ si vous en voulez
k Vienne, quand^ combien et qui, si vous les voulez cet
^t^ ou seulement lorsque je viendrai au mariage de
Fran9ois; cela, j'ose vous le demander pour pouvoir
regier en consöquence leurs ^tudes et les plier vers la
partie k laquelle vous les destinez. Oserais-je pour cela
vous prier de me dire vos intentions pour eux, quelles
dtudes vous voudriez qu'ils aient faites ou non, si vous
voulez que quelqu'un des messieurs qui sont avec eux,
reste avec eux k Vienne ^ ou non, ou au moins quelque
valet de chambre allemand, qui les sert k present et
dont je r^pondrais, et qui retourneraient volontiers dans
leur patrie? Enfin sur tout cela j'ose vous supplier de me
donner vos ordres et de confier vos intentions, ^tant sür
que je ne les desire que pour m'y conformer en tout
et pröparer tout d'avance pour y concourir.
Mon fils Ferdinand a la sant^ beaucoup plus forte
k präsent, mais a encore besoin de beaucoup de soins
et menagemens et d'un climat doux, ätant d^licat. II a
terminä ses ätudes, au droit pres qu'il ötudie a präsent.
Son caractfere est bon, doux, mais pas capable de beau-
coup de travail assidu, sa complexion n'etant pas des
4*
- 52 —
plus fortes, d'ailleurs de caractfere franc et ouvert. Si
vous me permettez de dire mon sentiment, je crois qu'il
aurait besoin du climat d'Italie, et si Jamals avec le
temps il ^tait destin^ ä faire le gouverneur dans ce
ff
pays-ci, vous nous feriez une gräce de nous le laisser.
Charles depuis quelque temps a la santö forte, agile et
robuste; il ne manque pas de talens, a beaueoup d^appli-
cation, plein de point d'honneur; il s'est entiferement remis
en sant^, et je crois' que, si vous le prenez, vous en serez
content. II est en ^tat d'etre pris, et si jamais il se voyait
laiss^ en arriere, il en serait au dösespoir et on n'en
ferait plus rien.
Leopold, sain, fort et robuste, d'un caractere ouvert,
mais ferme et d^cide, quoique un peu rüde et violent,
fort appliqu<5, avec beaueoup de talent, surtout pour les
math^matiques, fera, je me flatte, de toutes fa9ons une
bonne r^ussite. Ces deux k präsent ^tudient, outre les
math^matiques et histoires, la philosophie, m^taphysique
et physique qu'ils termineront Tautomne prochain.
Joseph est sain, agile et fort; il ne manque pas de
talent ni de vivacit^, de caractfere plus dissimule? et moins
appliqu^ que les autres, mais il a besoin d'etre tenu en
sujötion. •
Voilk tous ceux dont j'ai cru devoir vous faire en
deux mots le caractere; ils sont a vous comme tous les
autres. Choisissez, ordonnez, faites ce que vous voudrez;
mais, je vous suppHe, faites-moi savoir vos intentions,
afin que je puisse les pröparer et diriger leurs ^tudes
Selon vos intentions^ et le temps auquel vous comptez de
les prendre, pour ne pas leur faire commencer quelque
— 53 -
etude qu'ils devraient laisser apres peu de mois, et plutot
leur faire employer ce temps pour les affermir dans des
dtudes qui leur seraient plus n^cessaires.
Pardonnez-moi ce verbiage et cette longue lettre;
ma femme, qui est entiereraent d'a-ceord avec moi, me
Charge de vous präsenter ....
Ce 7 d^cembre 1786.
Tres-cher frfere. J'ai re9U votre chere lettre et j'ai ^^ L^oyoid.
senti, comme je le dois, votre confiance et amiti^, de
m§me que celle de votre chere ^pouse, k laquelle je vous
prie de präsenter mes remerciraens. Votre fille a parfai-
tement bien juge cet Etablissement qui, pour sa Situation,
serait r^ellement le plus avantageux; mais malheureuse-
ment nous en sommes encore bien loin, car l'Electrice
est guErie et FElecteur vieillit et baisse de jour en jour,
de fayon que, si cet EvEnement n'arrive bientot, je crains
bien que cela sera trop tard. En attendant, pour tous les
Evönemens possibles, votre amitiö et confiance m'autori-
sant, je n'enverrai que dans des cas pressEs et tächerai
de he neu n^gliger d'essentieL
Je vous joins ici les objets courants de la semaine.
Nous avons le plus beau temps, ce qui est fort heureux
pour Ferdinand, qui est en route.
Adieu, mon eher ami. Pour aujourd'hui je n'ai pas
d'autre nouvelle k vous donner et vous embrasse, de mSme
que votre chfere Epou^e, de tout mon coeur. Croyez-moi
pour la vie votre ....
— 54 —
Ce 11 d^cembre 1786.
an Leopold Tr&s-cher fr&re. La poste n'est pas arriv^e, par
consequent je ne puis vous annoncer votre eh&re lettre.
De nouveau je ne sais rien k vous man der que Pheu-
reuse arrivöe du prince et de la princesse Dietrichstein.
Cette dernifere est absolument dans le m^me <5tat qu^elle
est partie, et je doute que Ton puisse esp^rer qu'elle
se r^tablisse jamais. Nous n'avons pas de froid, mais de
grands brouillards^ ce qui donne le spieen^ ce vilain mal
que vous connaissez. Le pauvre Starhemberg, fils de celle
qui a 6ii Aya chez vos enfans, unique m^me, vient de
mourir subitement d'une colique a Clagenfurt, oü il ^tait
de venu capitaine de cercle*). II donnait les plus grandes
esperances et avait esprit, activit^, application et talent;
c'est une vraie perte.
Adieu, je vous embrasse, de m^me que votre chfere
dpouse, de tout mon coeur ....
*) Nach Schwerdlings Geschichte des Hauses Starhemberg, S.
366, war die Witwe des im J. 1763 verstorbenen Grafen Guidobald
Starhemberg, Maria Innocentia, gebome Gräfin Auersperg, bis zum
Jahre 1784 Aya der Kinder des Grossherzogs von Toscftna, wonach
meine eigene Angabe : Maria Theresia und Joseph II. I. S. 323 zu
berichtigen ist. Nach dem citirten Werke aber besass diese Gräfin
Starhemberg nicht einen, sondern zwei Söhne, von denen der eine,
Joseph, am 4. Dezember 1796, der zweite, Emanuel, im Jahre 1822
als Domherr zu Raab starb. Wahrscheinlich ist hier der Erstere,
Joseph gemeint, und beruht die Angabe, dass er am 4. Dezember
1796 gestorben, auf einem Druckfehler der Jahreszahl, welche 1786
heissen soll.
— 55 ^
Ce 14 d^cembre 1786.
Tres-cher frfere. J'ai re^u votre chere et longue lettre; an^Leo^oid
je vous en suis infiniment oblig^, et en vous envoyant
les extraits de la semaine, je puis vous assurer etre par-
faitement d'aecord avec vous que c'est le moment oü
les övSques d'AlIemagne pourraient faire par leur union
un grand coup et s'affranchir k jamais des chainiss de*
la Cour de Rome; mais s'ils le feront, quoique ma reponse
les y autorise et anime, c'est ce dont je doute. La plu-
part de ces seigneurs ne savent le mot de leurs affaires ;
ils sont guid^s par des subalternes aveuglement, et ceux-la
ont diflKrents interets et vues. Un synode national ne
finirait jamais, et certainement que Ton s'y oeeuperait plus
d'autre chose que de röformes eccldsiastiques. L'exemple
de la Visitation de Wetzlar en a fait preuve, qu'il a fallu
dissoudre de vive foree, et qui pendant des ann^es qu'elle
a 6t6 arssemblee, n'a jamais fait ce qu'elle aurait du, sa-
voir revoir les proces.
Quant aux arrangemens eccl^siastiques de la monar-
chie, comme je n'ai touch^ k rien qui regardait ni le
dogme, ni le rite, ni la discipline interne, et que revenus
et emplois des individus ont iii les objets que j'ai eu
en vue et de rendre toute la hiörarchie de mes Etats
gagistes^ ce que je parviens peu k peu k obtenir, pour
cette sanction il ne me faut pas de synode, et j'avoue
que je craindrais Tassemblee gönörale de mes äv^ques,
puisqu'ils sont bien äloign^s encore d'Stre dans les prin-
cipes raisonnables et convenables, dans lesquels je les
souhaiterais.
— 56 —
Je n'ai plus rien de nouveau de Russie ni de Naplea,
mais j'ai pressd beaueoup Riehecourt, atin qu'il m'obtienne
une certitude si Leurs Majest^s viendront ou non pour
me voir cet öt^; j'en attends la r^ponse, Quant k vos
enfans, leur nombre exige, je crois, que Ton pense dfes
k präsent k ne les pas faire croire qu'ils doivent avoir
des ^tablissemens. L'iexemple de tous les princes et prin-
cesses royales fait preuve que les filles qui ne trouvent
point de mari, restent dans les maisons patemelles vie
durant, de m@me que les princes, si Ton ne trouve pas
moyen de les former k etre, seit militairement, soit civi-
lement, utiles k employer. Si ce principe leur est bien
inculqu^, ils ne trouveront que trfes-simple ce qu'autre-
ment ils regarderaient pour une injustice, pour un grand
malheur. II n'est pas dit pour cela qu'ils ne puissent, et
les filles et les gar9ons, les premieres trouver quelque
chapitre, et les seconds des commandemens, des gouver-
neraens meme dans les provinces, mais c'est leur bon-
heur et leur aisance personnelle qu*il faut seul y avoir,
en les ^tablissant, en vue, et non le titre d'archiduc,
d'archiduchesse. Par cons^quent point de Cour, point de
cavaliers ou dames de suite, car sans cela Ja d^pense
deviendrait trop onöreuse k TEtat, et on ne pourrait
penser qu*k un ou deux, sans que Tapparence et Töclat les
rende plus heureux. Je suis convaincu que vos fils dans
les objets militaires et d'administration ne peuvent qu4ci
acquörir les connaissances n^cessaires. Le plus tot dans
cet objet paraitrait le plus sür; mais comme mon absence
k Cherson, le voyage du Roi de Naples, ensuite le ma-
nage de Frangois approchent, je crois moi-mSme que
— 57 —
Ton pourra, si vous le trouvez bon, en fixer T^poque a
quand vous viendrez k Vienne. Le nombre de vos fils
que vous amfeneriez alors döpendra de vous, mais je ne
crois pas que m^me les trois, savoir Charles, Leopold et
Joseph, soient de trop. Ce dernier est plus jeune, mais
fort en äge de pouvoir etre style d^ja a ce que Ton
en voudrait faire un jour. Avec cela ils auraient la
facilit^ d'apprendre des langues nationales des pays
auxquels on les destinerait. Leur destination m^me ne
peut se d^terminer, puisqu'il faut coramencer par les
connaitre et les ^prouver. Je serai tres-charrad si vous
voulez leur laisser quelques raessieurs ou valets de
chambre, puisque Von a sans cela mille peines de trouver
des gens capables. Quant a Ferdinand, quoique cela ne
nie regardera jamais, n^anmoins, si vous croyez ä Tavan-
tage de la röunion ins^parable de la Toscane avec la
monarchie, alors il a peut-etre plus besoin qu'aucun
autre ä ^tre d^pays^, sur Tidde que certainement il a,
et qu'on lui fera venir par tous ceux qu'il est dans le
cas de voir, que la Toscane ne lui doive pas appar-
tenir un jour; si Ton nöglige ce moyen, d'heureux qu'il
se croirait d'en devenir le gouverneur, il se croira mal-
heureux.
Adieu, mon eher ami, voila mes r^flexions. Je vous
embrasse, de m^me que votre chere opouse, de tout mon
coeur. Croyez- moi pour la vie votre ....
— 58 —
Ce 28 d^cembre 1786.
an Leopold. Trfes-cher frfere. Nous n'avons pas reyu encore la
poste d'Italie; apparemment que les neiges qui viennent
de tomber en sont cause» Je vous joins ici les extraits
de la semaine et la copie de la derniere lettre d'O'Kelly,
notre ministre k Dresde. Vous verrez que Ton est sur le
point de la demande formelle a faire; on ne peut les
presser davantage, vu le caractere soupgonneux de TElec-
teur, et qui, instiguö par les Prussiens et le ministre Stut-
terheim*), croit entrevoir de la politique dans ce qui
n'est qu'un arrangement de famille. J'attendrai les nou-
velles ult^rieures avec impatience, et j'imagine qu'on
s^adressera plutot a vous qu'k moi pour cela; mais je
suis autorisö a tout evdnement par vous, et je me tien-
drai a cela exactement.
Adieu, mon eher frfere; je vous embrasse, de m^me
que votre chere ^pouse, de tout mon coeur ....
*) Der sächsische Cabiuetsminister und Staatssecretär für die
auswärtigen Angelegenheiten, Heinrich Gottlob von Stutterheim.
1787.
Ce 7 janvier 1787.
Tres-cher frfere. C'est par le retour du garde qui ^^ Joseph.
revient de Naples que j'ai Thonneur de vous ^crire cette
lettre. La Keine, je crois, vous donnera part que, sa
grossesse ^tant süre, son voyage au printemps ne pourra
plus avoir lieu ; mais il parait que le Roi a envie draller
au mois d'oetobre, aprfes ses couches, en France, Hol-
lande et Angleterre, et ensuite venir Tann^e suivante a
Vienne. Vous saurez d^jä mieux que moi que toute la
n^gociation faite en Espagne par la m^diation de la
France pour r^concilier la Cour de Naples avec celle
d'Espagne a entiferement manque. Quoique le Roi de
Naples ait ^crit et envoy^ la lettre soumise qu'on avait
exig^e de lui, le Roi d'Espagne n'a jamais voulu ^crire
la sienne et exige que, pour lui donner satisfaction et
des motifs secrets de conscience qu'il ne veut pas dire,
on äloigne du ministfere Acton. Ainsi tout est rompu, et les
choses en restent sur le mime pied qu'elles ^taient. A
Naples on pr^tend toujours qu'en Espagne le Roi veuille
changer Fordre de la succession en faveur des fiUes du
- 60 —
prince des Asturies, dont le seul tils*) a une fort mau-
vaise santö, de meme que sa mere, ce qui rend toute
cette affaire fort singuliere et embarrassante.
Pcrmettez-moi, je vous prie, que je profite de cette
occasion pour r^pondre a votre lettre du 14 du mois
passe, et a ce que vous avez bien voulu m'y raarquer
relativement k mes enfans et aux iddes pour leurs ^ta-
blissemens futurs. Je vous prie d'abord d'etre persuadö
que, bien loin d'avoir mis en tSte k mes enfans qu'ils
devront avoir des ^tablissemens tous, ou y etre avec
suite, cavaliers, etc., ou des airs d'archiduc et d'archidu-
chesse, nous avons constamment dirigö leur ^ducation et
tous nos discours et propos de fa9on qu'ils sont tous per-
suades qu^ils doivent s'appliquer et se rendre capables
pour etre employ^s avec le temps selon leur capacite, et
s'ils le seront comme de simples particuliers et serviteurs
de TEtat, qu'ils devront tout a vos bont^ et k leur ca-
pacitd, et certainement aucun d*entre eux n'a la moindre
idöe de hauteurs ou de projets sur ce point, et ils seront
trop heureux d'^tre employös de quelque fa9on vous le
jugerez a propos. Mes filles, c'est-k-dire les ainöes, qui
seules encore sont capables de ces discours et röflexions,
sont persuadees que, pour elles et leur äge, }l est presque
impossible de trouver des partis convenables. Jamals elles
n*ont pens^ k avoir des chapitres ou ^tablissemens, et
bien loin de Ik elles sont bien persuadees de devoir
rester dans leur maison et chez leurs parens et en sont
*) Der nachmalige König Ferdinand VII. Sein jüngerer Bruder,
der spätere Thronprätendent Don Carlos, wurde erst am 29. März
1788 geboren.
— 61 —
fort contentes; mais cela pourtant, a ce que vous me
permettez, n'empöche pas que nous, comme parens, ne
d(^sirerions qu'elles puissent se marier, surtout la Thörese,
et la Marie-Anne trouver place dans quelque chapitre,
et que par consöquent, oblig^ comme pere a penser k
eux, j'aie osö vous les recommander a cet effet.
Quant a mes fils, j'ose me flatter que vous n'en
serez pas möcontent, et je vous les enverrai quand vous
le jugerez k propos, pour les noces de Fran9ois, ou
quand vous le voudrez, et selon vos ordres ce sera
Charles, Leopold et Joseph, qui sera encore plus arri^rö
dans ses ötudes que les autres, mais ce sera la faute de
son äge, dtant tr&s-bien en ^tat, surtout d'ici k un an,
a faire le voyage. A son temps votfs lesverrez et pourrez
mieux que personne leur faire faire les ^tudes nöces-
saires pour les forraer, et, apres les avoir öprouvös, les
destiner k ce que vous jugerez a propos et convenable.
Des que je vous les aurai amen^s, je les remets entre vos
mains et k votre disposition, sachant bien qu'ils ne sau-
raient jamais ^tre mieux que sous vos ordres de toutes
fajons, *öt k votre disposition. J'oserai k son temps vous
proposer de me permettre de leur laisser quelqu'un des
messieurs qui les environnent et qui sont sans cela encore
a votre service actuel. Quant aux valets de chambre, j'en
ai chez eux quatre ou cinq Allemands ou Frangais qui con-
naissent, qui sont sürs et affidös pour le Service et aucune-
ment intrigants, m^me sans talens, et parmi lesquels il
n'y a Bucun Italien, que j'oserai vous prier k son temps de
me permettre de leur laisser avec eux pour les servir, ainsi
que vous me Tavez bien voulu permettre dans votre lettre.
— 62 -
Quant k mon fils Ferdinand, j'ai vu ce que vous
voulez bien -mo inarquer sur Pidee de le d^payser. Je
vous assure, promets et reponds qu'ici tout le monde,
par ce que j'ai constamment dit, et lui-meme est bien
persuad^ que la Toscane doit ^tre r^unie a la monarchie,
et qu'il n'a pas m^me Fidde d'y pouvoir rester comme
gouverneur, et que ni nous ni eeux qui Tapprochent ou
Tenvironnent, lui avons jamais donn^ de pareilles id^es
ni parl^ seulement de Tidöe d'etre etabli, ainsi que sur
ce point vous pouvez ^tre tranquille, mais que .vous
nous feriez une grande gräce, et surtout k raa femme
qui aime beaucoup ce fils, qui lui sert de compagnie,
ayant d^jk presque fini ses ^tudes, si vous le lui lais-
siez ici; surtout dans le temps oü eile perdra ses trois
autres fils grands, il lui servira de ressource et conso-
lation, d'autant plus que Tair et le climat de ce pays
sont tr^s-utiles et nöcessaires encore une couple d'ann^es
pour finir d'affermir sa santö stableinent. C'est ce que
j*ai cru devoir vous reprösenter, toujours prSt pourtant
k faire ce que vous croirez plus k propos et avantageux
pour le bien-^tre de mes enfans, qui se portent toüs,
gräce k Dieu, on ne peut pas mieux.
Ce 9 janvier 1787.
Leopold Trfes-cher frfere. J'ai recu votre tres-chfere lettre du
an Josepli. »
28 de ce mois avec les papiers qui y ^taient joints, que
j'ose vous renvoyer et vous fais mes plus humbles et
sinceres remercimens des bonnes nouvelles que vöus me
— 63 -
marquez relativomeat aux projeta d'^tablissement de ma
Therfese en Saxe. Elle devra tout a vos bont^s, et vous
pouvez bien vous figurer combien ma femme, qui me
Charge de vous remercier de sa part et de vous präsenter
ses respects, sera enchantde si cette affaire pourra r^ussir.
J'ose me flatter qu'on aura tout Heu d'etre content de
ma fille; reste k voir quand k pr^sent^t a qui on s'adres-
sera. Si c'est a vous, nos affaires ne sauraient §tre en
de meilleures mains, et vous n'avez qu'k tout arranger
pour le temps et la fagon eomme vous le jugerez le plus
convenable. Si c'est a moi, je me röglerai selon les
Instructions que vous m'avez donn^es, lorsque Marcolini
est venu ici, pour oter tout soupgon qu*on veuille m^ler
de la politique dans cette affaire, et pour le reste je ne
ferai pas un pas sans prendre vos ordres et savoir vos
intentions sur tout, voulant et par devoir et par attache-
ment döpendre entierement de vos ordres.
Mes enfans, gräce k Dieu, se portent tous k mer-
veille, et on ne parle que des pr^sens que le Pape fait
quasi faire au cardinal son neveu*), n'avan9ant les em-
ploy^s et prölats qu'en proportion des prösens quHls ont
faits,' ce qui en v^ritä est scandaleux.
Ce 15 janvier 1787.
Trfes-cher fr&re. Ce courrier en retour de celui qui -^^«^p^
^ an Leopold.
vient d'arriver de Naples, vous remettra ces lignes et en
") Der CardiualdiacoQ Komaaldo Brasclü Onesti.
— 64 —
iTieme tomps une petite caisse contenant les livres de
toutes les ordonnances publiques depuis Tann^e 1740
jusqu'a- aujourd'hui qui existent et sont en vigueur. Cest
une coUection un peu volumineuse, mais utile k s'y ra-
fraichir la memoire dans les oecasions.
Le voyage du Roi et de la Reine de Naples est
remis a Tann^e prt)ehaine; mais de la fa9on qu'ils ont
envie de le faire, il me parait sujet encore ä bien des
difficult^ö. L'arrangement avec TEspagne est fini, et dfes
que le Roi d'Espagne a pris un impegno de faire sauter
Acten Sans dire de raison, il n*y a plus qu'ä attendre
des öv^nemens de mort de Tun ou Tautre parti pour en
voir la fin.
Quant a ce que vous me marquez au sujet de vos
chers enfans, je suis convaineu que de se d^payser ferait
grand bien a Ferdinand, et que m§me le climat plus
tonique d'Allemagne contribuerait k renforcer ses nerfs
et son estomac; mais comme il n'y a rien qui presse et
que cela döpendra absolument de vos volont^s, je vous
assure seulement que, quant a Charles, Leopold et Joseph,
tout sera pret des Tautonine de cette ann^e pour les
reeevoir ici, lorsque vous trouverez bon ou de les amener
vous-m^me ou de les envoyer d'avance ici. Ils logeront
tous trois dans les appartemens qu'occupe k cette heure
Fran9ois et ceux k cot^ qu'occupait feu ma femme, puisque
Frangois au mois d'octobre pourra ddja habiter dans son
nouvel appartement, qui a it6 arrang^ pour ^tre marie.
Les messieurs que vous leur laisseriez, les valets de
chambre ou autres gens, serout regus a la Cour, et des
que vous m*cn marquerez le nombre, je pourrai faire
— 65 -
choix de ceox que je croirai encore devoir y ajouter,
s'ils n'^taient suffisants. Quant k leur destinatiön, pour
Charles sa santä en d^cidera, si l'^tat eccl^siastique, civil
ou militaire lui eonviendra dayantage, et selon eile, com-
bin^e avec son goüt, son äducation sera dirig^e. Pour
Leopold je crois qu'il veut se vouer au militaire, et c'est
dans cette partie^ et surtout ätant hussard, c'est aux
connaissances de la Hongrie et de son gouvemement que
je crois pouvoir le destiner. Joseph doit encore plus se
d^velopper^ et comme beaucoup plus jeune, on aura plus
de temps k y penser. En attendant il continuera ses
ätudes et exercices ici avec succ^s. Si Ferdinand venait,
ayant fini ses ^tudes, il pourrait etre employä k la con-
naissance d^taill^e des diff^rentes branches du gouver-
nement; voir tous les objets, et m§me coramencer avec
Fran90]S k mettre la plume en main et k avoir des opi-
nions et tracer leurs id^es sur differentes choses, soit
civil es, politiques, militaires.
Pour vos deux filles, vous savez que pour Thir^se
il y a des esp^rances de l'^tablir, mais qui trainent tant
k se d^cider que je ne sais presque plus qu'en croire;
de mon c5tä toute occasion qui rendra un Etablissement
possible, ne sera certainement pas n^glig^e.
Quant k la Marianne, il faudra aussi attendre des
öv^nemens, soit si la Princesse Cun^gonde*) venait k
mourir, ou qu'une de mes soeurs lui fasse place, savoir
de la Marianne ou Elisabeth. En attendant, eile ne peut
Stre mieux que ohez vous.
*) Von Sachsen, Aebtissin zu Essen und Thorn.
T. Arneth. Joseph u. Leopold. II. 5
— 66 —
AdieU; mon eher ami, je vous embrasse de tout mon
coeur, et croyez-moi pour la vie votre ....
Ce 25 janvier 1787.
an Leopold. Tr&s-cher frcre. J*ai regu votre chfere lettre avec les
incluses de la Reine de Naples. J'ai rhonneur de vous rea-
voyer votre lettre, et d'y joindre les pieces ci-jointes de la
semaine. Vous pouvez garder les extraits et copies, celles
de la correspondance ministerielle except^es, que je ras-
semble de toute Tann^e. Cette nouvelle histoire de Naples
est inconcevable ; je n'ai poiiit vu de lettre encore de
Richecourt, hors qu'il annonce en deux mots que la Reine
voulait prendre son secr^taire k son service et qu*il priät
qu'on lui en envoie un autre capable et sür. Par consd-
quent cet homme ^tait tout dispos^ k le c^der. Je ne
vois pas, par cons^quent, quelle dispute ils peuvent avoir
eue k ce sujet, et encore moins que Richecourt, un homme
sage et froid, ait pu s'^chauffer au point de manquer k
la Reine de respect, criant avec ind^cence et disant des
cboses aipbiguäs que la Reine rel^ve avec sa m^fiance
ordinaire au delk du probable et possible. Outre cela, ce
secr^taire Reiner n'est point arrivö de mon su ni de celui
de la chancellerie ici, comme la Reine le croit. Je comptö
donc tout uniment marquer k la Reine que cet homme
etait fort k ses ordres, et que je ne pouvais imaginer
que Richecourt, que je eonnais pour un homme sage, ait
pu s'oublier k ce point. II n'y a rien k faire dans ce
pays-la, ni avec le Roi, qui ne se soucie de ce qui
— 67 —
arrive, ni avec la Keine, qui agit par boutade et n'a con-
fiance en personne. Est-il croyable que, vu les sentimens
qu'elle et le Roi et leur Acten manifestaient au sujet
des Franyais, ils aient chang^ du tout au tout, et que ce
sont eux qui, les soufflant de conseils et leur faisant
bonne mine pour les attirer et sacrifier, les dirigent et
leur inspirent m^me ddfiance de nous, car la Reine me
soup9onne, moi, d'etre d'aecord avec le Roi d'Espagne,
Sans savoir pourquoi. Cela est piloyable, et il faut les
abandonner k leur propre sort.
Adieu, mon eher frere; je vous embrasse, de m^me
que votre chfere ^pouse, de tout mon coeur ....
Voici ma rdponse k*la Reine de Naples que je vous
prie de lüi envoyer, de meme que celle k Richecourt, oü
je lui dis simpleraent de edder k la Reine sans la moindre
difficultö son secrötaire.
Ce 8 fövrier 1787.
Trfes-cher fr&re. Je vous joins ici les objets de l^^^^l*^^,^
semaine, et en m^me temps j'annonce la bonne regue de
deux de vos ch&res lettres k la fois, la poste ayant manqud
un jour d'arriver. Tout ce que vous me marquez au sujet
de vos chers enfans me fait grand plaisir. Vos quatre
fils seront regus ici a bras ouverts, lorsque vous voudrez
bien les amener Tannde prochaine. Je suis intimement
convaincu que le sdjour d'ici leur sera utile et avan-
tageux de toute fagon, mais surtout pour les former k ce
6*
— 68 —
que, vu leur nombre, ils doivent se d^cider de devenir
un jour, et pour leur satisfaction et pour Tavantage de
l'Etat et du chef de famille*). Tous les messieurs que
vous voudrez bien leur laisser^ comme Manfredini, Wams-
dorf et autres , seront ägalement re9us et continueront
leurs fonctions. Je tächerai en attendant de faire choix
de quelques autres encore, qui pourront leur servir de
compagnons et de guides. Quant aux valets de chambre
et gar9ons de chambre, tous ceux que vous me nommez
me paraissent, sans les conuaitre, tr^s-bons, et si m§me
yous trouviez encore quelques Italiens, il n'y aurait pas
de mal et peut-etre moins d'inconv^nient que dans leur
patrie. Ainsi ceci vous I'arrangerez absolument a votre
bon plaisir. Je compte en gros que Manfredini resterait
en chef, et qu'il lui faudrait quatre cavaliers ou officiers
en sous-ordre, et en valets de chambre deux a chaque
iils, et un gar9on de chambre. Quand vous me marquerez
le deficit de chaque classe, d^duits ceux que vous pouvez
leur donner, je chercherai k remplir les lacunes par tout
ce que je pourrai trouver de mieux.
Le Roi de Prusse vient enfin de döclarer MP® de
Voss sa m^tresse en pied, et il lui a fait pour däbut
*) Am 26. Jänner hatte Leopold hierüber an Joseph' ^schrieben :
n Je crois comme vous que peut-etre Tetat eccI68iasti(}ae poorra k son
temps le plus convenir k Charles; pour Leopold le railitaire sera la
partie qul certainement lui pourra convenir le plus; il est d6cid^ snr
ce point .... La compagnie de Ferdinand, travaillant avec Fran^ois,
pourra ^re fort utile k ce dernier. Ils s^aiment beancoup, Ferdinand a
du credit sur Fran^ois, et il pourra quelquefois lui donner quelqne
bon conseil et saura toujours les donner avec tant d^^gards et pru-
dence, qu'il n'y paraitra point."
— 69 —
une assigDation de deux millions; c'est payer eher le
meme plaisir qu'on peut avoir k bien meilleur marchä.
Le prince de Ligne, arriv^ ici de Paris, m'assure que la
Reine de France eompte aller cet iti voir ma soeur k
Bruxelles; cela me surprendrait beaucoup. Mon voyage
pour Cherson reste toujours fixä pour la moitie de mars.
Adieu; c'est en vous embrassant tendrement; de
meme que votre ch^re öpouse, que je vous prie de me
croire pour la vie votre ....
Ce 15 «vrier 1787.
Tres-cher frere. J'ai re9u votre chere lettre et je ^„ Lipoid.
vous envoie ici les affaires courantes de la semaine. De
nouvelles interessantes je n'en sais point; Ton dit que la
Reine de France viendra au mois de juin a Bruxelles
pour quelques jours, voir la Marie. Ce n'est pas la grande
intimite qui r^gne entre elles qui fera faire cette visite,
mais Tenvie d'avoir un pr^texte de passer a Spaa. On
dit aussi que le Roi ira a Metz pour un grand camp
qui s'y doit tenir, mais cela n'est pas sür. L'assemblöe
fameuse des notables est retard^e par la maladie des
deux ministres Vergennes et Calonne; le premier ^tait
tr^s-mal. La gouvernante des enfans de France, M™® de
Polignac*), a donnä sa d^mission par raison de sant^;
eile a fait ses choux gras, et pourvu que celle qui la
*) Die bekannte Favorite der Königin Marie Antoinette, Yolande
Herzogin von Polignac.
— 70 —
remplace n'ait pas le m^me app^tit. De Naples ni d'Es-
pagne je ne sais rien. D^s que ce secr^taire de Riche-
court sera arrivö ici, je le renverrai k la Reine par le
premier courrier, et je vous confie que je m'occupe de
trouver quelqu'un qui puisse convenir au poste de Naples,
puisque je suis convaineu que Richecourt n'est aucune*
ment propre a une mission ätrang^re.
J'ai fait partir hier mon courrier pour m'arranger
les stations et disposer des gftes et chevaux pour ma
reute de Cherson.
Adieu, mon eher frfere; je vous embrasse tendrement,
de m^me que votre chfere ^pouse ....
Ce 22 ftvrier 1787.
Joseph Tres-cher frfere. Voiei les papiers de la semaine que
an Leopold. jt jt t.
je yous envoie. Vous y trouverez entre autres que j'ai
enfin obtenu de mon conseil aulique de faire une d^marche
sörieuse et voyante dans Taffaire des Nonces en AUe-
magne en faveur des d^sirs de mes archev^ques. Je crois
que peu k peu Ton pourra parvenir k un bon arrange-
ment pour l'archev^que de Laibach. Le Pape' me traine
d'un jour de poste k Tautre; il travaille k une d^duction
qui ne finit pas, et qui doit toucher Torthodoxie, qui i?a
rien k faire dans cette question. II faudra voir, maJs je
suis döcidö k tenir bon.
Le carnaval est fini; nous avons eu force de bals
que je n'ai point vus. Une troupe de libertins anglais
qui se trouve actuelleinent ici, a fait parier d'eux par
— 71 —
leurs d^bauches et impertinences. Ils se soulent toute la
joum^e et puis ils allaient k la redoute; on en a du
mener k la garde le dernier jour. Adieu ....
Ce 5 mars 1787.
Tr^s-cher frere ....*) Je ne vous envoie que ce ^^ Leopold
livre, qui est la continuation de la compilation des ordon-
nances; les affaires courantes je les r^serve pour jeudi,
m'ötant arrangä en cons^uence. Pour mon voyage, il
y a toujours beaueoup d'incertitude, et je crois presque
que je pourrai rester tout ce mois ici et peut-Stre ne
partir qu'aprfes Päques^ mais il faudra attendre d'ul-
tärieures nouvelles. En attendant, je suis entiferement pret,
mais je ne partirai pas d'ici que je ne sois sür de ne
pas devoir attendre inutilement dans quelque endroit.
II vient de m'arriver une singuli^re nouvelle de
Mayence par courrier. L'Electeur, ce fou enragä, vient
d'imaginer de vouloir donner un canonicat vacant au
second fils du Roi de Prusse, calviniste et ägä de treize
annöes**), et c'est pour le faire coadjuteur. On dit le
Roi de Prusse d'intelligence avec le Pape, qui lui don-
nera breve eUgibilitatis pour le convertir.
*) Erneuerte Aufzählung der schon in dem Briefe vom 8. Februar
erwähnten Begleitung und Dienerschaft der Erzherzoge.
**) Prinz Ludwig, geboren am 6. Nov. 1773, wurde 1793 Coad-
jutor des Herrenmeisterthums des Johanniterordens , und starb am
28. Dezember 1796.
- 72 -
De Saxe je n'apprends rien; cela est ennuyant et
fait bien voir combien il y a de mauvaise volonte. Ce
Stutterheim est un des plus aeham^s ennemis de la
maison; il forge, invente et r^pand partout les men-
songes les plus atroces.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur . . . .
Ce 6 mars 1787.
«7^«!. Trfes-eher frere. Je viens de recevoir votre chfere
an Joseph.
lettre du 22 du mois passö avec les papiers qui y ötaient
joints, dont j'ose vous renvoyer ceux qui regardent les
affaires ätrangferes. J'ai vu la r^solution que vous avez
prise pour les affaires des övSques d'AUemagne, mais
tant que tous ne seront pas d'aecord k soutenir et re-
vendiquer de fait les droits qu'ils ont et que Rome leur
a usurp^s ou extorqu^s, et qu'on ne prendra pas le parti
d'abolir toutes les nonciatures et ne les traiter que comme
des simples ministres ^trangers sans juridiction quelcon-
que, rien ne sera obtenu. L'obstination et Tentetement
du Pape k ne pas vouloir nommer T^veque de Laibach
archeveque, est inconcevable ; il fera faire par quelque
mauvais avocat une d^duction qui ne finira jamais pour
s'excuser, et qui, faite par le j^suite Zaccaria ou le do-
minicain Mamachi, n'aura pas plus le sens commun que
sa defense du livre d'Eybel*) qu41 a publice si solennel-
*) Joseph Valentin Eybel, früher Professor des Kirchenrechtes
in Wien, seit 1779 als Rath bei der Landesbebörde in Linz ange-
stellt. Er starb daselbst im Jahre 1805.
— 73 —
lement; mais il ferait mieux de se Souvenir^ que dans les
Premiers si^cles de I'Eglise les äv^ques ätaient Domm^s
par le peaple et les repr^sentans des diocfeses et commis-
saires des Souverains, que les M^tropolitains les consa-
craient^ et qu'ensuite ils envoyaient seulement une lettre
de reconnaissance et catholicitä k r^veque de Rome et '
puis'aux Papes, qui n'ont jamais iti que les premiers
d'entre eux et jamais leurs maitres ou souverains spiri-
tuels absolus, comme on le pr^tend a Rome, surtout avec
le serment ind^cent et absurde qu'on y fait prSter aux
dv^ques a leur sacre.
Ce 8 mars 1787.
Tres-cher frere. Voiei les affaires de la semaine. ^^ Leopold.
Votre chere lettre, je viens de la recevoir; vous avez
parfaitement raison au sujet de Richecourt. J'ai m^me
dejk fait dcrire k Thugut, qui est k Paris, pour savoir s'il
veut aeeepter ce poste. J'en attends la rdponse par le
premier courrier; il y sera trfes-propre et on ne se mo-
quera pas de lui. II pourra aussi donner de bons conseils
k la Reine, si eile veut F^couter, puisqu'il a et esprit
et connaissahces. Quant k Hadrawa*), c'est une si pauvre
espece, et il est plus au Service du Roi avec sa vieille
qu'au mien; je ne pourrai par cons^quent bonnement Ten '
retirer, mais Thugut se prendra un autre secr^taire et lui
n'aura que le nom. Du voyage pröjet^ de la Reine de
*) Norbert Hadrawa, kaiserlicher LegatioDSsecretär in Neapel.
— 74 -
France je ne sais rien encore, et je lui ai ^crit pour
en gtre inform^, mais je ne puis encore avoir la r^ponse.
Mon voyage par les derniers avis venus de Kiovie pourra
encore §tre un peu remis , et je crois que, si je pars la
troisi^me föte de. Päques, je pourrai encore ^tre avant
• Tarriv^e de Tlmpöratrice un ou deux jours k Cherson,
mais je d^pends absolument des nouvelles ult^rieures^ et
je suis tellement prSt, que je puis partir peu d'heures
apres la lettre d'avis qui m'arrivera.
Adieu, mon eher ami; je yous embrasse de tout mon
coeur, de meme que votre chfere äpouse . . . •
Ce 12 mars 1787.
Joseph Trfes-cher frfere. Pour aujourd'hui je n*ai rien k
an Leopold.
YOUS marquer d'intdressant; la neige est rcYcnue ici apr^s
que le printemps s'^tait d^ja annonc^. Les m^moires
imprim^s a Paris de Tassemblde des notables, yous les
aurez d^jk lus; ils sont singuliers, et beaucoup d'objets
sont conformes k ce que j'ai d^jk fait et ycux faire encore
ici, Sans y mettre tant d'appareil.
Adieu, mon eher ami, je yous embrasse ....
Dans ce moment je re9ois Yotre chfere lettre et yos
9
complimens pour ma f^te, de mSme que Celles de yos
chers fils. ReccYCz mes remercimens et embrassez-les, je
YOUS prie, pour leur souYcnir de ma part.
— 75
Ce 15 mars 1787.
Trfes-cher frfere. Voici les papiers de la semaine. J'ai ^^ Leopold,
regu votre chfere lettre; vous avez parfaitemeM raison
sur ce que vous dites au sujet de Tensemble qu'il fau-
drait aux dvSqrfes d'AUemagrie , mais de la fa9on que
ces places sont occupöes, on ne peut en rien esp^rer de
bon. Chacun se laisse guider ou par son int^ret ou par
ses entours, qui ont chacun ses vues, et voilk pourquoi
tout va de travers. Pour moi, je n*ai aucune nouvelle
ulterieure de Kiovie, et par consdquent je reste toujours
encore d^cid^ a ne partir qu'aprfes Päques.
Adieu , mon eher ami; je vous embrasse^ de m§me
que votre chfere dpouse, de tout mon coeur ....
Ce 16 mars 1787.
Tr^s-cher frfere. Je vous rends mille gräces pour ^'^^^^\
^ * an Joseph.
deux de vos chferes lettres que j'ai re9ues par la poste
et par le garde qui est 8,116 k Naples. Je me flatte que
vous voudrez bien nous en envoyer encore un avant
votre d^part pour Cherson, pour lequel je souhaite bien
que vous ayez beau temps, bon chemin, et que les affaires
avec les Turcs restent tranquilles..
La conduite de TElecteur de Mayence de donner
un canönicat au fils du Roi de Prusse protestant, est
inconcevable, mais encore plus celle du Pape qui le lui
accorde et lui donnera bref d'eligibilit^ et tout ce que
Tön voudra. Cela ne m'dtonne pas avec le Pape prdsent
- 76 —
qui, Ignorant et men^ par la France, g^n^ralement me-
pris^ et vendant tout pour de Targent, est enti&rement
domind par la haine qu'il a vou^e k toute notre maison,
dont lui et ses alentours ne se cacbent pas, le disant
publiquement, et le t^moignant dans toutes les affaires
d'AUemagne, Pays-Bas, Naples, et jusquedans Celles d'Es-
pagnc; oü vous aurez vu par la relation de Kageneck
que le nonce du Pape est m%\6 dans Tintrigue pour
changer Tordre de la succession et faire par Ik du tort
aux enfans du Boi de Naples, uniquement parce qu'il a
de Tamitiä pour vous.
Quant ä mes enfans, je vous rends mille gräces de
tout ce que vous voulez bien me dire de flatteur pour
eux. Je dirige leurs ^tudes de fa9on qu'au printemps de
Tannde prochaine Ferdinand aura tout fini. Charles et
LiBopold auront fini leurä ^tudes hors le droit, et Joseph
ne sera qu'a la moiti^ des cours qu'il doit faire; tous
quatre, mais surtout Ferdinand et Charles, qui craignaient
toujours que vous ne les prendriez pas, sont enchant^s
de venir qous vos ordres et en attendent le moment avec
la plus grande impatience .... *). Le marquis Manfre-
dini est on ne peut pas plus flattä de la confiance que
vous voulez bien avoir en lui, en le laissant en chef
pour r^ducation de mes fils. II leur est on ne peut pas plus
attachä et utile, ils Taiment, Testiment et ont toute leur
confiance en lui; il est droit et honn^te, et je r^ponds
qu'il leur sera fort utile et que vous en serez trfes-con-
tent. Le baron Warnsdorf est aussi enchantd de re-
^) Bedeutungslose Details über die Dienstleute der Erzherzoge.
— 77 —
toamer en Allemagne, et en subalterne il est exact k
faire son devoir et honn^te. Le capitaine Spanocchi a
iisiri de rester ici ä mon Service avec les enfans qui
me restent, de m^me que le capitaine Derichs. Je suis
fort content de tous les deux, et j'ai iti surtout bien
aise de garder ici Spanocchi, ötant d'une famille dis-
tinguöe du pays et d'un äge qui a döjk besoin d'un peu
plus de repos.
Ce 22 mars 1787.
Trfes-cher frfere. J'ai re9u votre chere lettre et suis ^^ Le7oid
charm^ que leB incommodit^s de vos enfans soient pas-
söes, et surtout le mal de gorge de Joseph. Pour ici
voici ci-joint les nouvelles du jour. Vous y verrez entre
autres qu'enfin TElecteur de Saxe s'est d^terminä ä m'an-
noncer formell ement par son resident Clemens, le mi-
nistre ^tant absent en congö, qu!il vous avait ^crit pour
vous demander votre fiUe Th^rfese en mariage pour son
fröre Antoine. II demande le secret jusqu'ä ce qu'il ait
votre r^ponse, Vous verrez la röponse que j'y ai fait
faire; ne sachant un mot des conditions, je m'en suis
rapport^ k ce que vous aurez soin de regier pour votre
fille, et me suis bornä k un compliment amical.
J'attends avec empressement vos nouvelles pour sa-
voir si vous ^tes content des conditions, et sur le temps
et la fagon que ce mariage devra se faire. Pour mon
d^part rien n'est chang^; je n'ai pas re9u des nouvelles
ultörieures de Kiovie, et si je n'en re9ois, je partirai tou-
jours la troisiöme fete de Päques.
— 78 —
Adieu ^ mon eher ami; pr^sentez mes complimens k
votre ch^re äpouse; je lai rends mille gräces pour sa
chfere lettre et je serai toujours votre ....
Ce 5 avril 1787.
an Leopold. Tr^s-cher frfere. Quoique la journöe d'aujourd'hui
soit bien remplie par les d^votions et fonctions du jeudi
Saint; n^anmoins je ne puis que me rdjouir avec vous
de la nouvelle assur^e que votre fille Thdrfese a ^t^ de-
mand^e par TElecteur de Saxe pour son fr^re, et dont
vous venez de m'envoyer la lettre. Je vois qu'il n y a
encore rien d'arrang^ ni pour son Etablissement ni pour
le temps auquel ce mariage aura lieu, et le voyage, et
je crois meme que vous aurez encore quelques mois
k Ecrire, vu les distances, jusqu'k ce que tout soit
d^cid^^ et par consEquent je serai facilement de retour
de Cherson jusqu'k ce que cela ait lieu. Je vous prie
de continuer k me donner de vos chferes et intöres-
sa,ntes nouvelles, et de me les adresser comme toujours
ici, d'oü j*ai pris des arrangemens pour qu'ils me par-
viennent promptement et sürement. Je pars toujours le
11 de ce mois et je vous joins m^me une liste de ma
marche-route. J'attendrai a LEopol d'avoir la nouvelle
positive du döpart de Tlmpöratrice de Kiow. C'est en
vous embrassant tendrement, de mime que votre chere
epouse, que je me dis pour la vie votre ....
— 79 -
Ce 9 avril 1787.
Tr&s-cher fr&re. Voici que je prends tout d« bon ^^ Leopold,
congö, partant demain soir ou apres-demain matin. Con-
tinuez-moi vos oberes nouvelles qui m'int^ressent tant,
et restez persuad^ de mon inviolable et tendre amitiä.
Remerciez aussi votre cb&re ^pouse de la lettre qu'elle
a bien voulu m'^crire pendant votre absence. Je crois
que probablement ce ne sera gu^re avant Pautomne; rien
n'^tant rögld encore, que se pourra cölöbrer le mariage
de votre fille. Si c'^tait pour la moitid de septembre,
oü il y a le camp de Prague, cela serait encore plus
beau, puisque si eile venait k Prague avec vous, vous
verriez rarmde et Ics nouvelles forteresses et le propri^-
taire Fran9ois k la t§te de ses carabiniers. Enfin arran-
gez-le tout k votre commodit^ et marquez-le moi "beule-
ment pour me regier en cons^quence. "Adieu, je vous
embrasse, de mßme que votre chfere ^pouse
L^opol, le 23 avril 1787.
Trfes-cher frfere. J'ai re9U votre chfere lettre un peu ^ ^Lia.
tard^ ayant 6ti k faire une tournde a Samosk pour y
voir diffdrents nouveaux villages qui y avaient 6i4 öta-
blis. Je Tn'empresse k r^pondre a vos questions. Le ma-
nage de votre fils Fran9oi8 avec la Princesse ne se laisse
point avancer; tout est dispose pour Päques, et ils ne
pourraient ni loger ni la Princesse aurait son trousseau
plus tot. Le niieux serait si tout se trainerait jusqu'alors,
— 80 —
et qae Th^r^se all&t & Dresde par Prague, lorsque Fran-
9oiB irait avec sa femme k Florence. Je suis persuadä
que vos fils et votre fille auront bon besoin de votre
prdsence, mais Fran9ois et la Princesse ne Tauront pas
moins, surtout pour entreprendre leur voyage, oü il est
presque absolument ndcessaire qu'ils aient quelqu'un qui
les coDseille, les döcide et les präsente. Ainsi, mon eher
fr&re, faites ce qu'il vous plaira. Pour vos fils, des que
vous me rannoncerez , il n'y aura pas de difficultä de
les loger et foumir de tout encore Y6t6 ou Tautomne,
s'ils viendraienty et k Prague surtout; si c'est en septembre
pour le temps du camp, le mariage pourra parfaitement
s'y faire. Le reste s'arrangera quand vous aurez des
nouvelles de Saxe, et que vous aurez terminä tous les
arrangemens avec r£lecteur.
Adieu; je ne sais pas encore le d^part de Tlmpä-
ratrice de Kiew; je suis par cons^quent en Fair encore
de mes dispositions. II fait depuis trois jours un froid
excessif ici; glace, neige comme en janvier. Adieu . . . .
Cherson, le 15 mal 1787.
an Leopold. Trfes-chcr fr&re. A mon arrivie ici je m'empresse
de vous äcrire ce peu de lignes pour vous assurer que
je me porte avec toute ma suite k merveille, et tr&s-
heureux a 6i6 notre voyage, sans accident, beau temps,
bon chemin, assez passables gites; enfin vous, que je
voudrais toujours avec moi, en auriez 6t6 content ^ car
c'est un genre de pays et de fa9on d'etre qui ne res-
— 81 -
semble pas k un autre connu. L'Imp^ratrice, retardde par
les vents dans sa navigätion, n'arrivera point de plusieurs
jours. Je repars toüt de suite en petit Equipage pour
Taller rejoindre.
Adieu; je vous embrasse; de meme que votre chfere
^pouse, de tout mon coeur ....
Cherson, le 16 juin 1787.
Trfes-cher frere. Me voici de retour de ma tournöe ^^^^^^
an Leopold.
dans la Crim^e avec rimp^ratriee. Je viens de la quitter;
eile retourne par Moseou et moi je suis venu ici prendre
mes gens, que j'avais laiss^s, et je pars demain par
Kaminiec, le long des frontieres turques, pour retourner
a L^opol et chez moi. II ne me faudra que quatre jours
de Cherson en Galicie par ce chemin. Je suis trfes-satis-
fait d'avoir fait cette tournöe; j'y ai vu des choses infi-
niment curieüses et interessantes. Le temps nous a par-
faitement servi; point de chaleurs excessives et beau
pourtant. Je me porte a merveille; j'ai ^t^ tres-content
de Tamiti^ de Flmp^ratrice, et eile, je crois, de moi. Je
vous ferai voir ou vous enverrai raes notates qui sont
toutes confuses, puisque je n'avais ni temps ni ^erivains
avec moi. Tout ce qu'on peut dire, c'est que c'est un beau
pays qui attend seulement des bras pour le faire valoir,
mais de cette fa9on ils n'en feront rien. J'ai trouv^ plu-
sieurs Colons et fabricans etrangers, des Toscans, un jar-
dinier de Pise et Livourne, qui y a encore ses poderi et
ses freres, et eile soupire bien d'y retourner. Adieu ....
V. Arn et h. Joseph n. Leopold. IL G
— 82 —
J*äi trouv^ ici votre chere lettre et suis bien charra^
qu'enfin le mariage avec le prince Antoine prenne couleur,
mais la großse^se de votre ch&re epouse vraiment m'affiige.
Est-il possible de ne pas m^nager davantage une ferame
si pr^cieuse pour vous et vos enfans? Si les fächeuses
histoires des Pays-Bas ne m'empechent; je serais eharm^
que rneme Tautomne le mariage puisse se cel^brer.
L^opol, le 23 juin 1787.
an Leopold.
Josep Tres-cher frfere. Dans ce moment j'arrive tres-heu-
reusement ici de Cherson en six jours de voyage par un
autre cherain plus court le long des frontieres turques.
Je me porte tres-bien ; mais j'ai ^t^ bien ^tonnö des
nouvelles ineoneevables que j'ai trouvöes ici des Pays-
Bas; vous les saurez sans doute et les appröcierez. Je
tächerai de combiner les choses de fa9on k ne pas perdre
dans votre opinion ni dans celle de Funivers. J'en suis
vraiment affecte et vous en öcrirai bientot plus au long.
En attendant je vous embrasse, de mime que votre
chere dpouse, de tout mon coeur.
Vienne, le 6 juillet 1787.
an^Leo^**id Tres-cher frfere. Je vous envoie ce courrier pour
vous mettre au fait en detail de tout ce qui vient de se
passer depuis mon absence aux Pays-Bas. C'est d'un
genre sans exemple et de la plus grande importance pour
la monarchie. II ne s'agit plus de leur Constitution ou
— 83 -
de remettre les ehoses telles qu'elles avaient it6 il y a six
mois. Non; ächauffds par la reussite vis-a-vis du gouver-
nement dans toutes leurs deraandes, voyant qu'ils sont
les maitres, ils veulent se rendre ind^pendants, ou autant
vaut; en faisant une'nouvelle Constitution et en voulant
que je donne plein pouvoir a Leurs Altesses Royales et
au gouvernement, qui n'ont fait que des sottises et qui
sont intimid^s et leurs prisonniers, de traiter lä-dessus
definitivement avec eux sous la garantie de deux puis*
sances ^trangeres qu'ils ne nomment point. Je vous laisse
juger si je pourrais jamais nie preter a une cliose pa-
reille. Vous verrez par la lettre tres-mod^röe que j'ai
ecrite aux Etats de Brabant la porte ouverte que je leur
ai laissee et que^ si^ corame il est probable, ils ne Tac-
eeptent point et n'envoient point les döputes, ils se met-
tront au moins parfaitement dans leur tort. J'ai fait en
attendant leur r^ponse les dispositions que vous trou-
verez egalement pour la marche du corps nccessaire.
Les rapports du prince Kaunitz en originaux vous infor-
meront en detail , et mes lettres. Je vous laisse juger^
inou eher ami, de ma peine. Je suis le scul qui tient
bon et qui doit tout faire. On ne se remue pas plus a
la chancellerie d'Etat que s'il n'y avait rien. D'aide je
n'en ai point , comme vous savez. Les röponses, les let-
treS; je les ai du toutes coucher moi-meme. Quelle affreuse
ehose qu'une räbelliou daus l'^loignement, et devoir perdre
en triomphant. Je me soumets ndanmoins a mon mal-
heureux sort, et j'y irai en personne pour etre a meme
de faire iinir le plus t5t possible cette malheureuse et
destructive guerre intestine. Jamais rien ne m'a accabl^
6*
^ 84 -
a un tel point; c'est une douleur mel^e d'offense qui ne
86 peut d^crire. Comme je ne puis plus m'absenter, hors
pour partir, quand Parm^e arrivera aux Pays-Bas, j'ai
aussi contremand^ tous les campS; et par cons^quent il
faut changer le projet du manage de votre fille a faire
k Prague, car je ne pourrais en Itre, et si vous ne venez
pas non plus, cela serait impossible; il faudi^a donc faire
le mariage par procuration k Florence ou le trainer
jusqu'au printemps, oü vous auriez plus de loisir et jus-
qu'oü les affaires pourront ^tre ^clair^es des Pays-Bas. II
en est de ni^me de vos quatre fils; dans cette bagarre
et mon absence ils ne pourraient venir ici; il faudra
donc tout remettre au printemps, et alors la chose devra
§tre döcid^e. Ou soumettre ou p^rir, voila ma devise,
et si les forces que je viens de Commander ne suffi-
sent pas, j'enverrai d'autres. Je souhaite, mon eher frfere,
que vous approuviez le parti que j'ai pris; il est le seul
et Tunique, si Ton ne veut faire d^tacher les Pays-Bas
de la maison d'Autriche, car les esprits sont tournes a
cela, et ils ont mis en esclavage troupes et gouverne-
ment, et sans doute qu'argent, artillerie, munition, tout
sera pris par la n^gligence et la pusillanimitä du gou-
vernement, qui n'a rien rassemble a temps et a tout
laiss^ k Tabandon. Ma Situation n'est pas k d^crire, mais
mon courage me soutient.
Adieu; pr^sentez mes complimens k votre chfere
^pouse. Si vous voulez me r^pondre tout de suite, vous
pouvez me renvoyer ce courrier au lieu de le faire
passer k Naples; les d^p^ches pour la Reine peuvent
etre envoyöes par le cgurrier d^Espagne. Adieu ....
— 85 —
Ce 9 juillet 1787.
Tres-cher fr&re. Pour aujourd'hui je ne puis que ^„ Leonoia;
V0U8 annoncer la bonne re9ue de votre chfere lettre.
Quant au mariage de votre fille^ je vous ai marque par
le courrier mes erabarras. Au mois d'octobre, de ces
trois choses il en doit arriver une : les d^putös des Etats
viendront a Vienne, je dois done m'y trouver; ils capi-
tuleront pour venir, je ne puis done m'absenter un mo-
ment d'iei^ oü je suis le seul qui tient tout ensemble; ou
enfin ils s'y refusent, ils d^clarent rind^pendance, ils
levent Fötendard de la r^volte, et alors il faut que je
me rende avec Tarm^e aux Pays-Bas. II m'est done
impossible de pouvoir esp^rer ou imaginer de me rendre
cette ann^e a Prague. Comme vous ne pouvez venir ä
cause de votre chfere ^pouse, vous sentez bien que sans
Tun des deux cela ne peut se faire. II faut done arranger
avec la Cour de Saxe, ou de faire le mariage k Flo-
rence, ce qui serait le plus naturel, en la faisant voyager
incognito avec votre Cour et la mienne jusqu'aux fron-
tieres de Saxe. II n'y aurait done que Marcolini ou un
autre ministre de sa part a envoyer comme t^moin, ou
enfin le remettre pour le printemps, ou m§me le d^ter-
miner, ce mariage, par procuration a Vienne, oü je pourrais
peut-etre etre präsent. Dans tous les cas, si cela se fait
ici, Fran9ois fera les fonctions, et a Florence ce pourra
etre Ferdinand. Je suis au ddsespoir que ces raalheu-
reuses histoires des Pays-Bas, qui me rongent sans cela
de peine, vous occasionnent aussi cette confusion, mais
- 86 —
je suis un hoiume de l'Etat, et je dois par cons^quent
me destiner avant tout a son service.
Les conditions dont vous me faites mention, je las
trouve tres-g^nöreuses' de votre part, mais la Saxe ne fait
pas de grands efForts. Dix mille florins est bien peu de
chose pour une princesse l'ann^e. J'imagine que vous
aurez^ soiri que la dot que vous lui donnez soit placke
dans quelque fonds public ou chez moi ou en Toscane,
pour qu'on ne puisse Tengager a Tavancer ou a y tou-
eher que de notre avis, car les Saxons sont d^sireux
d'argent, et pour des promesses d'un plus haut intdrSt
il ne faut pas perdre la certitude du capital, et votre
fiUe doit etre bien süre de pouvoir comme veuve revenir,
s'^tablir Ik ou bon lui semblera. Les personnes de sa
suite me paraissent trfes-bien; je ne connais pas M™® Hol-
land; mais croyez-vous que la Colloredo*) voudrait jouer
un role secondaire avec cette femme?
Quant k la route, je crois celle que vous pröförerez
ögale ; par Mantoue et le Tyrol, eile serait plus dans nos
Etats et eile verrait raes soeurs en passant. A Vienfie,
de Tune ou Tautre fagon, soit qu'elle s'y marie ou qu'elle
y arrive d^ja marine, je crois qu'il sera convenable
qu'elle s'arrete une quinzaine de jours. II faudrait done
qu'elle parte a la moiti^ de septerabre au plus tard, pour
arriver vers la fin d'octobre k Dresde. II serait pr^fö-
rable que, pour les chemins, eile parte les premiers jours
de septembre, pour arriver k la moitie d'octobre, car je
*) Maria Eleonora, geborne Gräfin Wrbna, Gemaliu des Grafen
Franz Colloredo, Ajo des Erzherzogs Franz.
— 87 —
compte a peu pres douze jours de voyage, doUze k
quinze jours de s^jour k Vienne, et au moins cinq jours
ou six pour aller de Vienne k Peterswalde , sur les
frontieres de la Saxe. Vous deduirez de la le temps
qu^elle devra partir de Florence. Marquez-moi le chemin
que vous choisirez, et le temps a peu pres qu'elle arri-
vera ou a Ala ou a Gradisca, et alors avec le nombre
de chevaux qu'elle a besoin k chaque Station, je r^glerai
le tout. J'enverrai cuisine, Service, domestiques, mascu-
lins s'entend, k mes frontiferes, et les votres, si vous le
voulez, pourront retourner ou continuer comme bon vous
semblera. Si vous envoyez d'avance des equipages ou
des malles du trousseau, ils pourront ^tre adressös k la
Bourg, oh vos vetturini pourront les d^poser, et je les
ferai passer avec süretä par des rouliers k Dresde.
Je vous envoie, mon eher ami, cette estafette pour
que vous soyez plus tot au fait de tout et puissiez vous
arranger en cöns^quence. J'en fais en meme temps pr^-
venir l'Electeur par mon ministre, savoir que, vu les
circonstances, il ne pouvait plus etre question de c^le-
brer le mariage par procuration k Prague, et qu^il fallait
choisir entre Florence, qui serait le plus convenable, ou
Vienne, et que nöanmoins eile pourrait voyager incognito,
Sans cärempiiie, ötant en famille.
Adieu, je vous embrasse et vous prie de presenter
mes faommages k votre chere epouse ....
— 88 —
Ce 19 juillet 1787-
an Leopold. Trcs-cher frere. Je vous joins ici les nouvelles de
la semaine. Celles des Pays-Bas sont encore douteuses,
quoiqu'elles s'approchent un peu plus de la raison et de
la convenance. II faut voir ce qu'ils deeideront pour les
d^put^s ; en attendant j'ai fait changer en cela avantageu-
sement par ma fermet^, entremel^e de bonte, la face des
choses, que la premiere effervescence est pass^e, que le
militaire est instruit et d^cidä a se r^unir et ä se batti^e
s'il le faut, que le gouvernement a eu un d^menti formel,
que les Etats commencent a avoir peur, lorsque aupara-
vant ils voyaient qu'on avait peur d'eux, que dans le
monde leurs fanfaronnades seront mises a döcouvert,
qu' entin la perte des caisses de rartillerie, des munitions
que le gouvernement assurait pour certaine, est mise
Sans des accidens impr^voyables en süret^. En attendant
je continue pourtant mes dispositions, et les troupes des-
tinöes ä y marcher se rassemblent en trois colonnes sur
les frontieres. J'attends dans peu un courrier ddcisif, et
je puis en attendant etre content de la Situation du mo-
ment. Quant au Pape et aux pretres et moines, je vois
bien qu'ils y influent beaucoup, mais leur tour viendra;
en attendant que j'ai un peu dispos^ les esprits fanati-
ques, il faudra avoir patienee.
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse, de in^me
que votre chere äpouse, de tout mon coeur; croyez-moi
pour la vie votre ....
— 89 —
Ce 19 juillet 1787.
Tres-cher frere. J*ai reju le 15 au matin le garde an Joseph,
que V0U8 avez bien voulu m^envoyer avec votre longue
lettre du 6 de ce mois, et les deux consid^rables et
importants paquets qui y ätaient joint^. J'ose vous ren-
voyer ci-joint ceux qui regardent les affaires dtrang^res
et les affaires des Pays-Bas, ayant gardä ä l'ordinaire les
rösolutions sur les affaires internes. Le garde ayant iii
malade en chemin, je Tai fait reposer ici quatre jours
et vous le renvoie directement a Vienne, pour pouvoir
vous renvoyer plus promptement et plus sürement ces
importants papiers, et profitant en cela de votre permis-
sion, qui m^assure qu'il n'a rien d'important pour Naples,
j'y ai envoye un de mes gens avec les ddp^ches dont il
ötait charg^, me üattant que dans peu vous voudrez bien
m'envoyer un autre courrier pour continuer ä me tenir
informe de la fagon dont les importantes affaires des
Pays-Bas finiront.
J'ai lu tous les papiers qui y sont relatifs, et j'ose
croire que toute cette affaire n'est pas Fefferveseencc du
moment, mais est une chose pr^paröe, disposde et con-
cert^e de longue main, fomentöe sous-main visiblement
par la France, qui s'est sejrvie de la guerre avec la Hol-
lande et de r^change projete des Pays-Bas, pour indis-
poser peu a peu par ses ^missaires la nation, et surtout
par la Cour de Rome, dont le Pape et le secr^taire
d'Etat Buoncompagni *) avec leurs cr^atures se vantent
*) Der Cardinaldiacon und Staates ecretär Ignazio Buoncompagni,
— 90 —
publiqueraent de la haiue qu'ils ont vouee a vous et a
notre famille, se vantant de fbmenter des soulevemens
pour vous eauser de Tembarras, et se servant a cet effet
des pr^tres et moines; mais surtout des Capucins et de
la voie Tlu confessionnal, pour ameuter le bas peuple
sous prötexte de zele de religion, tandis qu'eux sont les
Premiers a afficher publiquement de n'en avoir aucune.
Par les demandes meines des ddput^s, qui roulent sur-
tout sur le rdtablissement des öglises, confreries, jubiles,
processions, le r^tablissement des couvents supprim^s, le
retour des deux gardiens des Capucins et autres choses
semblableS; on voit quels sont les objets qui tiennent a
coeur au peuple. Rome a anim^ tout ce feu pour trou-
bler les affaires de TAllemagne et emp^cher la conti*
nuation des r^formes qu'ä votre exemple les evfeques y
voulaient faire, pour se soustraire des abus d'autorit^ de
Rome, et des eseroqueries d'argent que cette Coiir fait
continuellement. Ce qui m'a le plus ^tonn^, c'est que les
d^put^s des Etats ne demandent pas seulement le redres-
sement de quelques griefs en particulier. Ils se pl9.ignent
de tout, ils sont m^contents de tout le Systeme, de tous
les rainistres; ils croient, feignent de craindre et soup-
9onnent les choses les plus absurdes, dans toutes les
dömarches du gouvernement; meme lorsqu^on leur a ac-
cord^ et publik tout ce qu'ils voulaient, ils ne sont pas
Contents. Ils cherchent a tout expliquer en mal, a y
chercher des pr^textes pour continuer ä etre m^contents,
enfin ils cherchent querelle, surtout paraissent däcides et
rdsolus a vouloir rompre, se rendre indäpendants et cher-
jeher chicane au gouvernement et ä faire des demandes
— 91 —
toujours plus fortcs et excessives, aiin qu'on ne puisse
pas les leur accorder et quHls aient le prötexte du refus
pour autoriser leur rdvolte ouverte, ddjk concertde et
r^solue, et sur laquelle ils ne parleraient pas si haut
qu'ils le fönt, s'ils n'avaient pas des espoirs fond^s d'^tre
soutenus et prot^ges par des voisins ou prötendus alli^s.
.ravoue qu'il ii'y a pas d'exemple dans Thistoire d'une
affaire semblable. Le cumble du malheur, si cela n'a pas
et^ fait expreS; est que cette affaire a eelate justement
pendant votre voyage de Cherson, qu'^loignö a une si
grande distance de la capitale, vous n'avez pas pu donner
vos ordres a temps pour y rera^dier dfes le commence-
raent, et que le gouvernement n'a pas eu le temps ou
le courage de pouvoir remödier sur les lieux. Le pays
^tait Sans troupes, hors des r^gimens nationaux eparpill^s
dans les garnisons, composös d'etrangers et pas trop dis-
ciplin^s ni subordonn^s. La marche des troupes aurait
degarni les villes de province, exposö ä les perdre les
magasins et les caisses et aurait servi de pretexte pour
le soulevement g^n^ral. Le gouvernement a c^d^, n'osant
pas prendre sur lui de prendre des mesures capables ä
faire soulever tout le pays. Le peuple, k mesure qu'il a
vu le gouvernement dispose a ceder, a toujours 6ti pluf
insolent et a form^ de plus fortes prötentions. La chose a
pris Corps, et a prösent tous les ötats et classes de per-
Bonnes se sont unis et ont pris parti et un systßme et
des mesures cons^quentes, suivies et refl^chies, ce qui
rend toujouvs l'affaire plus s^rieuse et dangereuse, d'autant
plus qu'au cas qu'aucun accommodement ne puisse avoir
Heu, et qu'il soit necessaire de recourir k la force, les
— 92 -
Pays-Bas, par leur voisinage avec la Hollande, la France
et TAngleterre, auront tout le temps n^cessaire pour ömi-
grer avec leurs capitaux, fonds, et surtout les nägocians
pour s'ötablir dans ces autres pays et äviter les ris-
ques d'une guerre civile avec un pröjudice perpituel et-
constant pour le pays et le peuple, et les malintentionnäs
auront toujours plusieurs mois a se pr^parer pour la
räsistancc; a piller les caisses et effets royaux, et a se
procurer les appuis et secours des puissances voisines,
seit en accödant k Tunion des provinces unies, soit en
se jetant entre les bras de la France ^ et implorant son
secours pour former une seconde göniture aux fils du
comted'ArtoiS; avant que les troupes puissent y entrer en
force, lesquelles trouveraient enstdte bien de la peine ä
subsister, et devant servir dans une guerre civile, cela
n'entrainerait qu'une guerre g^närale funeste a la
monarchie, ou une guerre civile longue, tres-coüteuse et
ruineuse, et qui iinirait par reduire le pays, mais en le
d^vastant, Tappauvrissant et le ruinant pour une longue
suite d'ann^es, et obligeant m^me ensuite a y tenir tou-
jours une armöe avec de grands frais et d^penses« Tout
cela posä, il serait bien ä dösirer que cette malheureuse
affaire puisse s'accommoder convcnablement, au moins
en traitant et tridnant Taffaire en longueur, sans avoir
besoin de troupes ni de forces, pour läisser passer la
premiere effervescence du peuple. A cet eflfet je crois
Tunique moyen la lettre que vous avez ^crite aux Etats,
et la proposition que vous leur faites d'eavoyer leurs
diput^s k Vienne pour y traiter, en y faisant venir en
meme temps le prince, ma soeur et le ministre. Cette
- 93 -
d^marche sera la pierre de touche^ ä laquelle vous recon-
naitrez leurs intentions. Si cette lettre tranquillise le
public, si les d^put^s viennent et commencent ä traiter
de bonne foi et exposer leurs griefs, je me flatterai qu'ils
sont de bonne foi et que Taffaire allant en longueur, le
premier feu s'amortira et tout pourra s'aeeommoder,
mais que si, comme ä vous dire la v^ritö, je le crains,
ils ne dösirent point de s'aecoramoder, mais ne cherchent
. qu'un pr^texte pour rompre tout k fait, alors ils ne vou-
dront point envoyer des d^putös, ils exigeront qu'avant
tout vous approuviez absolument et simplement tout ce
qu'ils ont ddjk extorqu^ au gouvernement , et qu'on les
a flattes que vous approuveriez entierement , et ils ne
laisseront pas partir le prince et ma soeur, et se porte-
ront m^me k quelque violence, et alors je crains bien,
vu r^tat des choses, qu'une fois le premier pas äclatant
et violent fait, il n'y aura plus d'espoir que de les r^duire
par la force, ce que je considere de toute fa9on comme
un vrai malheur et calamit^ pour la monarchie, et une
perte, sinon totale, au moins en grande partie, par leur
dötörioration d'une si belle, riebe et importante partie de
la monarchie.
Attache comme je vous le suis personnellement, et
connaissant votre fa9on de penser, votre activitd, vos
travaux, et les peines que vous vous donnez pour faire
le* bien, faire bien aller les affaires et le bonheur de
vos sujets, vous pourrez ais^ment vous figurer combien
sincerement je partage les justes peines, chagrins et inquiö-
tudes que cette affaire vous doit causer, et Tagitation et
affliction dont je vois les expressions les plus fortes dans
— 94 —
votre lettre. Vous n'avez d'ailleurs que peu ou poin't
(remploy^s qui vous secondent dans votre esprit et vos
vues, et qui facilitent votre travail, et c'est surtout dans
ees sortes d'oecasions qu'on voit souvent qu'ils sont bien
aises, lorsqu^on est embarrass^ et qu'on a des affaires bien
d^sagräables sur les bras; enfin croyez, je vous prie, que
je connais bien tous les dösagr^mens de votre präsente
Situation, et que je la partage bien sincferement de toutes
fa9ons, considdrant surtout les suites que cette affaire
peut avoir, et pour le mauvais exemple dans les autres
provinces, et pour la consid^ration politique de votre per-
sonne et de la monarehie dans toute TEurope, et pour
Tavenir.
Oserais-je vous prier de vouloir bien continuer a me
faire informer des suites qu'aura cette importante affaire,
si le prince et ma soeur auront pu partir, si les d^put^s
viendront ou non ä Vienne, et si la marche des troupes
sera n^cessaire, et perraettez en möme temps que je vous
prie de mönager votre sant^ et sensibilite surtout dans cette
occasion, ou vous en aurez plus besoin que de couturae.
Quant a mes fils, ils seront a vos ordres quand vous
les voudrez. II est bien naturel que dans les circonstances
präsentes vous ne les vouliez qu'au printemps prochain,
et j'aurai alors moi-m^me Ic bonheur de vous les amener.
Quant k ma fille Th^rese, comme de Saxe on presse
beaucoup pour c^löbrer ce mariage au mois d'octobre,
et que tout est ddjk arrange pour ce temps, je crois
qu'il serait peu convenable de diff^rer cette affaire au
printemps prochain. Vos raisons sont trop justes pour ne
plus faire le mariage a Prague, surtout si vous n'y ^tiez
— 95 —
pas, et il serait Egalem ent alors pou convenable que ma
fille passe par Vienne. Si voüs Tapprouvez, je compterais
donc öcrire ä TElecteur pour lai proposer de faire le
mariage de ma fille k Florence, d'y envoyer son com-
missaire et la suite qu'il lui destinerait. Je la lui consi-
gnerais k Florence, et eile ferait le voyage sans fonc-
tions ni cörämonies de consignationS; etc., de la fa9on
que TElecteur le jugerait le plus convenable. Si vous
approuvez cette id^e de ma part, je vous supplie de me
le faire savoir tout de suite, pour que je puisse d'abord
le proposer a PElecteur qui, je crois, n'y fera pas de
difficult^, cela ^tant bien moins embarrassant et dispen-
dieux que de faire le voyage en public^ et la consigne
en quelque ville ou pays ^tranger.
Apres avoir öcrit ma lettre jusqu^a ce passage, je
re9ois par estafette votre chere lettre du 9 de ce mois,
qui m'est une nouveile preuve de la bont^ avec laquelle
vous vous int^ressez a tout ce qui me regarde, par la
promptitude avec laquelle, quoique accabl^ d'affaires dans
le moment präsent, vous avez d'abord voulu repondre
par estafette et en detail a ce qui regarde le mariage
de ma Thörfese. Je suis enchantö que, comme vous verrez
par ce que je vous avais d^jk ecrit sur ce point avant
de recevoir votre dernifere lettre, j'avais ddjk pr^venu
votre döcision en vous proposant de faire le mariage a
Florence, et de la faire voyager incognito par Vienne
aux confins. Je ne croyais pas alors qu'il convenait
qu'elle allät par Vienne, comme vous n'y ^tiez pas, mais
a present je suis entiferement d'accord comme vous voulez
bien me le proposer. Je vous rends bien des gräces que,
— 96 —
pour gagner du temps, vous ayez bien voulu faire faire
la mSme proposition directement k PElecteur de Saxe^
auquel j'^cris par ce meme courrier en cons^quence, et
me flatte qu'il n'y fera pas de diffieultä. Le mariage se
ferait k Florence, oü mon fils Ferdinand repr^senterait
r^poux, et TElecteur pourra envoyer un commissaire
qu'il jugera ä propos pour y assister. La fonetion pour-
rait se faire le 8 de septembre, et eile partirait le 12
ou le 15 d'ici, mettrait dix ou douze jours k aller k
Vienne, s'y arrfeterait une quinzaine de jours ou autant
que vous le jugerez k propos, mettrait cioq ou six jours
k aller jusqu'aux confins de la Boheme, et ne serait
que vers le 15 ou 20 d^octobre k Dresde, ce qui est ce
que TElecteur dösirait. En consc^quence de la permission
que vous m'accordez, que ma fille voie nos soeurs en
chemin, je lui ferai prendre la route du Tyrol, et vous
enverrai ci-joint la note des voitures et personnes de
Service qu'elle aura avec eile, et des chevaux dont eile
aura besoin, vous priant de vouloir bien permettre qu'elle
puisse aller avec mes gens de service, doraestiques, cui-
siniers jusqu'k Vienne. Cela la genera et embarrassera
moins, et ils pourront revenir de Vienne icr, d^jk que
vous voulez avoir la bontd de la faire accompagner par"
des gens k vous ensuite aux confins. Quant k son trous-
seau et k ses ^quipages, je les enverrai directement par
des agresti k Vienne, selon vos ordres.
• Quant aux personnes qui Taccompagneront, je crois
que Thurn ^'en chargera volontiers et M™® BoUand, dont
je suis persuad^ que vous serez content quand vous la
connaitrez, et quant k prier M™® Colloredo de Taccom-
— 97 —
pagner a Vienne et jusqu'aux confins, je suis persuad^
qu'elle*n'y fera pas la moindre difficult^, Ätant tres-bien
avec M"® Bolland. Quant aux conditions de mariage, il est
vrai que dix mille florins par an ne sont pas grand'
chose, mais l'Electeur a fait voir que c'^taient les radmes
conditions qu'on avait faites k la premiere ^pouse*) du
prince Antoine, fiUe du Roi de Sardaigne, et il ne m'a
pas paru de vouloir exiger davantage. -Quant au cas de
devenir veuve, il est stipulö express^ment dans le con-
trat qu'elle sera en pleine libert^ de pouvoir se retirer
et vivre oü eile voudra, et pour la dot je la lui donne
en obligations de banque de Vienne, et je tächerai d'ar-
ranger cela de fagon qu'elle puisse les y laisser pour ^tre
süre du capital, parce qu'il me parait qu'on exigeait que
la dot füt pay^e en argent comptant en Saxe.
Mft femme compte d'envoyer k Vienne seulement la
partie du trousseau et habits dont ma iille aura besoin
k Vienne et en voyage, envoyant tout le reste directe-
ment en Saxe pour ne pas §tre oblig^ k le d^paqueter
Sans n^cessit^. Quant k M™® CoUoredo/^ ma femme lui a
ddjk Äcrit pour lui proposer d'accompagner ma fille a
Vienne et de Ik aux confins avec M™® Bolland, mais nous
sommes presque sürs qu'elle Tacceptera. Oserais-je vous
prier d'ordonner que la lettre ci-jointe pour TElecteur
de Saxe lui soit envoyee sürement et promptement, con-
tenant les points sür le mariage de ma fille en consd-
quence de vos ordres?
*) Caroline, PrinzesBin von Sardinien, geb. 1764, gest. 1782.
V. Arneth. Joseph u. Leopold. II. 7
— 98 -
Au moment que j'allais envoyer cette lettre, j'ap-
prends de Rome que Ton s'y vante que, par le'moyen
des meines et surtout des ex-j^suites, on fera enti^rement
r^volter les Pays-Bas pour donner tin exemple de ce que
risquent les souverains k toucher aux meines et aux
affaires de Rome, et pour se venger du renvoi du Nonce
de Bruxelles. En attendant les courriers de Berlin k
Rome sont eontinuels, et on se vante qu'on cherche k
vous susciter des ennemis aussi de ce cöt^-lk, et le Pape
et le Cardinal Buoncompagni ont des sessions continuelles
avec le marquis Lucchesini *), et se sont mis en corres-
pondance directe avec le Roi. II y a trois jours qu'un
chasseur du Roi est pass^ ici en courrier pour Rome,
qui a 6ti arr^tä k Mantoue k son passage comme sus-
pect, s'^tant donnä pour voyageur sans passeport; il a
iti oblige ensuite de se faire connattre.
Les lettres particuli^res d'aujourd'hui des n^gocians
des Pays-Bas assurent que le 6 il y a eu une Erneute k
Bruxelles, qu^on y a arröt^ le prince et la Marie qui
voulaient partir, et que les Etats n'avaient plus d'autoritä,
le peuple faisant ce qu'il voulait, dirig^ par des meines,
et qu'ils avaient fix^ le 12 ou le 15 juillet de d^clarer
formellement leur ind^pendance et de se jeter entre les
bras de la France, qui assemble k Givet un camp de
seize mille hommes command^s par M. de Rochambeau**).
Je me flatte et souhaite bien que tout cela ne seit pas
*) Der bekannte preussische Diplomat Hieronymas Marquis
Lncchesini.
*'*') Johann Baptist Graf Rochambeau, berühmt durch seine Be-
theiligung am nordamerikanischen Freiheitskriege.
— 99 —
vrai, et d^sire ardemraent d'etre bientot tire de cette
incertitude par les nouvelles positives que vous' voudrez
bien me faire savoir de vos r^solutions et de ee qui se
sera passe^ ceci etant trop intdressant pour qui vous est
attach^ comme moi de toutes fa90iis. Ce serait bien a
präsent le moment oü la Rassie devrait et pourrait mon-
trer si soil amitiö, sincerit^ et bonne volonte pour vous
sont sinceres et efficaces.
Pardonnez a mon attachement cette longue lettre
et digressioD; et soyez persuad^ du sincfere, tendre et
respectueux attachement avec lequel je serai toute ma
vie ....
Ce 22 juillet 1787.
Tres-cher frere. J'ai re9u votre chere lettre et j'es- ^n loodom
pere que mon courrier, malgrä Taccident qu'il a eu en
Tyrol et qui Ta oblig^ de s'arrfeter aMantoue^ sera arrivö
heureusement chez vous. Rien de d^termind encore des
Pays-Bas ; j'attends un courrier a tout moment, pour sa-
voir si les d^putes que j'ai demand^s^ viendront ou non.
En attendant le gouvernement qui entasse sottise sur
sottise ; leur a encore ecrit d'un style si pitoyable que
cela tourne Testomac^ et ma soeur avec le prince et
Belgiojoso ont difföre derechef leur d^piart, de fa9on que
je ne sais plus rien de leur depart. Non plus les nou-
velles de la France sont tr^s-satisfaisantes ^ et pour la
pr^traille il est bien sür qu'elle y est pour beaucoup.
7*
— 100 —
Adieu, je vous embrasse, de meme que votre chere
^pouse
Ce 26 juillet 1787.
Joseph Tres-cher frere. J^ai recu hier le courrier que vous
an Leopold. ' ^
m'avez renvoy^. Je puis vous dire aujourd'hui que Ten-
voi des d^put^s a 6te UDanimement d^cid^ le 18 a Bnixelles^
comme vous verrez de la lettre ci-jointe de ma soeur et
du gouvemement. Elle-meme arrivera a diner ici aujour-
d'hui, ayant couch^ k St-Pölten. J'ai ^t^ enchantä de tout
Tint^r^t que vous m'avez temoign^ par votre chere lettre,
et de la justesse avec laquelle vous avez saisi tous les
objets. Je vous tiendrai exactement au courant «Je tout
ce qui se passera. Jusqu'a präsent je crois avoir encore
depuis le moment que j^ai parl^ et agi, fait tout ce qu'il
y avait de plus convenable pour le moment.
Je vous joins ici les difförentes pieces de la semaine ;
vous verrez entre autres une lettre de la Reine de France,
une du comte Mercy, qui contiennent des assurances
si positives et si naturelles que Ton ne peut oser en douter.
Le Roi de Prusse, comme vous verrez ^galement, vient
de me faire donner part du rassemblage de troupes, qu'il
a disposees au secours du Stadhouder ä Cleve. La fa9on
en est tres-amicale, et il y a a esp^rer que cette d^marche
le brouillera avec la France, ce qui sera toujours bon.
Au sujet du mariage de votre fiUe, j'ai tout de suite
fait partir votre lettre pour TElecteur par estafette, et je
vous joins ici copie de la note 'ministerielle que Stutter-
lieira a remise en r^ponse de ce que directement j'avais
— 101 —
fait parvenir a TElecteur k ce sujet. ^Les choses paraissent
donc par lä pr^tes a ^tre akvxß-ng^es. Pour le voyage et
le temps de Tarriv^e de la Th^r^se ici et pour sa suite
je trouve tout a merveille, et vous prie mutatis mutandts
de vous arranger selon votre convenance. La route du
Tyrol que vous avez choisie, fera grand plaisir ä mes
soeurs. Fran9ois sera de retour avant son arriv^e, et quel-
conque chose qui arrive, je serai encore k Vienne a la
fin de septembre ou au commencement d'octobre pour
Yj recevoir.
Adieu; presentez mes respects a votre chöre ^pouse
et croyez-moi, en vous embrassant tendrement et pour
la vie, votre ....
Dans ce moment vient d'arriver ma soeur et le prinee
en parfaite santö. Elle a bon visage et dit seulement
soufFrir de rhumatisme parfois ä la hauche. Belgiojoso
arrivera demain, et les d^put^s au nombre de quarante
dans la quinzaine.
Ce 1«»- aoüt 1787.
Trfes-cher frere. J'ai vu avec le plaisir le plus sincere ^®^p^^^
r r an Joseph.
par votre ehfere lettre du 19 du mois pass^, que les, affaires
des Pays-Bas prennent un nieilleur pli, et me flatte que
vous ne serez plus oblig^ d*y faire marcher des troupes. On
voit que votre lettre aux Etats (qui en vörite ne pouvait §tre
ni plus modör^e, ni plus convenable) a fait Teffet desir^,
qu'elle leur a ouvert les yeux et les a fait revenir du
fanatisme et aveuglemenl dans lesquels les pr§tres et les
— 102 —
moines, charg^s de la Cour de Rome, les avaient plonges.
D&s qu'ils donnent du temps^ qu'ils r^fl^chissent, voient
qu'on n'a pas peiir d'eux, qu'on peut et veut agir avec
rigueur, et qu'on s'en abstient seulement pour leur bieii;
et qu'ils sont sürs de n'^tre paß appuy^s par la France,
que les caisses sont assur^es de mSme que rartillerie, et
que les troupes sont disposees a faire leur devoir^ comme
vous me T^crivez, tout est gagnd. Je crois qu'ils ont
laissä partir tranquillement les gouverneurs, et qu'ils
sont ddjk r^solus a envoyer des d^put^s. Quand on est
parvenu a ce point, et qu'on commenee k mettre l'affaire
en d^lib^ration, le feu est passe et tout est fini, et j'ose
vous en faire mon sincere compliraent, quoique je eon-
naisse bien que l'ouvrage et les suites de cette affaire
seront longues, ennuyantes et d^lieates, pour m^nager les
esprits en les accoutumant ä l'oböissance; en ne cedant
pas sur bien des points, sur lesquels on ne peut pas c^der,
et pour d^raciner les mauvaises impressions que ces af-
faires auront laissees dans l'esprit du peuple : le fanatisme,
l'esprit de d^fiance du gouverneraent, et deraciner et
^loigner les personnes ou corps qui les auront foment^es,
et ^touffer par la le germe de toute autre affaire sem-
blable pour l'avenir^ en remettant sur le pied ordonnä
ci-devant tout ce qui a etd changä arbitrairement par le
peuple^ et leur a 6t6 aceord^ dans cette occasion.
J'ose vous prior de continuer a nie faire savoir
comment ces affaires finiront^ qui sont trop importantes
de toutes fa9ons pour ne pas m'int^resser infiniment.
J'ose vous renvoyer les papiers accoutumds^ et une copie
— 103 —
de lettre du cornte Trauttmansdorflf *), qui m'avait ^t^ en-
voy^e par m^prise.
Nous attendons toujours ici les rdponses d^ci»ives de
Saxe^ d'oü je n'ai pas eu de lettres depuis six semaines
et depuis Celles dont je vous ai rendu compte^ lorsque
V0U8 ötiez a Cherson,
De Naplcs je crois que nous aurons dans peu de
jours les nouvelles des couches de la Reine, qui a du
encore se faire saigner par pr^caution.
Le parti espagnol de Rome avec Azzara**) ä la t^te,
poussö pat le comte de Florida-Bianca, continue tou-
jours a inquieter et faire la petite guerre a la Reine et
au gönöral Acton, qui s'en inquifete beaucoup, engageant
des officiers a quitter le Service. Vous aurez d^jk su que
la princesse de Yaci, dame de Cour d'Espagne, a 6ii
arretöe, lorsqu'elle voulait y aller de Naples, et enferra^e
dans un couvent, le prince CaraiFa Colubrano, colonel
au Service d'Espagne, exil^ de Naples, son frere rais
dans un chäteau, le prince de Marsico, ministre de
Naples a Turin, rappelt et envoyö en Danemarc. Comme
tout cela intdresse les plus grandes familles de Naples,
cela fait beaucoup de bruit et du tort k la Reine. Uac-
commodement de la Cour de Naples avec celle de Rome
en affaires eccl^siastiques a manquä, et Galeppi, malgrd
sa douceur, sa bassesse et ses intrigues, retournera a
*) Graf Ferdinand Trauttmansdorff, geb. 1749, bevollmächtigter
Minister in deti österreichischen Niederlanden. Im Jahre 1805 in den
Reichsftirstenstand erhoben, starb er 1827. *
**) Joseph Nicolans d^Azzara, geboren 1731, Botschafter Spaniens
in Rom und als Kunstfreund bekannt. Er starb im J. 1804.
— 104 —
Rome, sans avoir rien conclu. A Rome le m^contentement
"est uniyersel, Thuineur du Saint-P^re est toujours pire,
et il n'y a sortes d'avanies, d'injustices^ ni de violences
qui ne se fassent pour faire avoir de Targent au neveu.
Le manque des esp^ces est g^n^ral; les marais pontins
sont dans leur premier ^tat, et le moment de la banque-
route des monts et de la chambre apostolique est bien
proche. Le Pape et le Cardinal Buoneompagni intriguent
avec la France pour les affaires de Naples, avec TEs-
pagne pour fomenter la division entre le pfere et le fils,
et avec le Roi de Prusse par le moyen du marquis
> Lucchesini, qui re9oit continuellement des courriers du
Roi avec des lettres de main propre du Roi pour le
Pape, pour vous susciter des embarras en Allemagne. Le
triomphe et la joie ind<5cente, avec laquelle k Rome on
exalte la conduite des habitans des Pays-Bas, et on se
vante de les avoir foment^s et procur^^s, pour vous cau-
ser de Tembarras, scandalise m^me les ^trangers les plus
indifferents.
Ma femme qui avance heureusement dans sa gros-
sesse, vous präsente ses respects, mais je vous prie d'^tre
persuadä ....
Ce 2 aoüt 1787.
Joseph Trfes-cher frfere. Je vous annonce la bonne re9ue de
an Leopold. *
votre chfere lettre, et je vous joins ici les objets eourants
du moment. Ma lettre au g^nöral Murray*) et sa r^ussite
*) Joseph Jakob Graf Murray, Feldzeugmeister, commandirender
General uncl damals interimistischer Statthalter der Niederlande.
— 105 —
d^cidera sur quoi il faut compter, et donnera un grand
jour sur leurs vues, projets et mauvaises ou bonnes in-
tentions. Les d^put^s arriveront ici vers le 12 ou 13 de
ce moiß. Je crois toujours qu'apres bien des criailleries
Tassemblage des troupes aura n^anmoins lieu^ car il me
parait qu'on commence a avoir peur, et c'est un moyen
dont je puis me servir avec avantage^ car si quelqu'un
tirerait avantage de rimpertinenee , on ne serait jamais
sur que cela ne recommence , mais comme cela^ s'ils se
convainquent du poids de Tautorit^^ alors ils goüteront tous
les bienfaits qu'on leur fera, et les recevront pour gräce.
Ma soeur et le prince vont et viennent ; ils fönt la
vie qui leur plait. Je löge ä P Augarten ; c'est le seul
moyen de vivre en tranquillite , et pour moi nous nous
voyons presque tous les jours, et j'evite autant que pos-
sible de parier des choses qui sont arriv^es, car les faits
ont prouv^ combien ils avaient mal vu, mal combin^ et
mal agi, et ce qu'il y aura k disposer pour Tavenir, je
ne puis le pr^voir et me r^glerai uniquement ^pres les
circonstances et la convenance de l'Etat.
Adieu; je vous erabrasse de m§me que votre chere
^pouse ....
Ce 6 aoüt 1787.
Trfes-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre et la '^^^^^^
* an Leopold.
liste des bijoux qu'aura votre fille Th^rese. En v^ritö, il
y en a une si grande quantit^, qu'il faudra vraiment
Studier pour trouver quelque chose qu'elle n'a pas. Le
- 106 —
ministre de Saxe actuellement k Vienne; M. de Schön-
feld*), est nomm^ de sa Cour pour aller k Florence et
pour accompagner ensuite votre fiUe jusqu'en Saxe. Je
suis charm^ qu'on Tait choisi; e'est an tr^s-joli homme,
sage, point chicaneur et, hors une singuli&re voix rauque,
tout k fait aimable en soci^tä. L'on assure que l'Elec-
teur n'attend votre fiUe que pour le 15 ou 16 d'octobre;
par cons^quent eile ne partirait de Vienne que le 10,
et par consequent vous rdglerez son d^part et le jour du
mariage en consöquenee, pour qu'elle arrive ici les der-
niers jours de septembre.
Des Pays-Bas il n'y a rien de nouveau; les d^put^s
arriveront le 12, les r^gimens d^filent tous sur les fron-
tieres, et tout le corps va dtre pret k partir. II parsdt
que la raison commence k reprendre, et que la peur suc-
cede k rimpertinence; il faudra voir jusqu'au bout.
Je vous em brasse en attendant, de m^me que votre
chere ^pouse, de tout mon coeur ....
Je vous joins ici un projet de voyage pour votre
fille; marquez-moi, je vous prie, si vous Tapprouvez.
Ce 7 aout 1787.
an^joseph. Trfes-chor frcro. Je viens de recevoir votre ch6re
lettre du 26 du mois passd avec les papiers y joints,
*) Johann Hilmar Adolph von Schönfeld, sächsischer Gesandter
in Wien, wurde im J. 1788 von Joseph II. in den Reichsgrafenstand
erhoben. *
— 107 -
dont j^ose vous renvoyer ceux des ministreB aux Cours
dtrangereS; comme de coutume. Les lettres de France
sont bien consolantes, et telles a devoir rassurer par-
faitement; a moins qu'ils ne veuillent absolument re-
noncer ä toute bonne foi. La d^marche du Roi de
Prusse d^assembler des troupes vers la Hollande, qui
Selon moi est bien fausse et imprudente, est tres-bonne
pour nous; eile le brouillera avec la France, et la com-
munication amicale quHl vous en a fait faire, est des plus
obligeantes.
Permettez-moi que je vous fasse mon plus sincere
compliment sur les affaires des Pays-Bas. Votre lettre
aux Etats, et la ferraet^ et activit^ que vous avez mon-
trdes ä temps, ont tout sauvd dans le moment le plus
critique, car ma soeur et le prince ätant arriv^s, Belgiojoso
de mdme, les deputes de tous les Etats et provinces ve-
nant a Vienne, Taffaire va en delib^ration et longueur,
la premifere effervescence finit, les tetes se calment et se
tranquillisent, et on s'aper9oit des sottises qu'un aveugle
fanatisme aurait pu faire faire dans le premier moment.
Je suis enchantd que ma soeur et le prince soient arriv^s
en bonne santd, et vous rends mille gräces de la bonte
avec laquelle vous voulez bien me promettre de me tenir i
au courant de la fa9on dont vous terminerez les affaires
des Pays-Bas, dont la conrfervation sera due au parti que
vous avez saisi et ex^cute dans le moment, et qui ^tait
Funique vrai, bon et possible ....
— 108
Ce 13 aoüt 1787.
an Leopold Trcs-chef fr^rc. Pour aujourd'hui je ne puis que
vous marquer que les d^putös sont tous arrivös en bonne
santö, et que dans une couple de jours probablement
ils auront leur audience. Je crois que jeudi je pourrai
vous en donner des d^tails. Les r^gimens marchent tou-
jours, et c'est le plus sür v^hicule pour les porter a ce
qu^ils doivent.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur . . . .
Ce 14 aout 1787.
Leopold Trfes-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre du 2 -de
an Joseph. '
ce mois avec tous les papiers qui y ötaient joints et dont
je vous renvoie ceux relatifs aux affaires ^trangeres, et
vous en rends mille gräces. Je suis bien curieux de voir
les propositions que vous feront les d^put^s des Pays-
Bas. Quant a rassembler les troupes, je crois qu'il n'y
aura aucune difficultö, et que personne ne s'y opposera,
mais cette circonstance est fort d^licate, car il s'agit de
montrer de la fermetö, de ne pas trop cöder, mais en
meme temps de ne pas pousser k bout ni aigrir les
esprits, et d'^viter tout ce qui, par un malentendu, pour-
rait donner occasion ä du bruit, qu'on ne serait ensuite
plus dans le cas de pouvoir d^cemment dissimuler. Je me
flatte et souhaite bien que vous sortiez bientot et soyez
d^lxvr^ de toute inquiötude sur une affaire aussi impor-
— 109 —
tante et d^Hcate, et dont on ne peut point pr^voir encore
les cons^quences.
La dispense de Rome pour le manage de ma fille
est venue, et nous nous pr^parons tout doucement pour
cette fonction et son d^part.
Ce 16 aoüt 1787.
Trfes-cher fr^re. Par ce courrier le vous envoie tous ^^®^ ,.
•^ an Leopold.
les objets du moment. Vous verrez comment tout s'est
passe jusqu'ä präsent aux Pays-Bas, et je crois que le
gros une fois fait, le reste s'arrangera aussi. C'^tait une
^pineuse oceasion, et je puis bien dire d'avoir ^te le seul
qui ait sauv^ Thonneur et la consideration de TEtat, et
cela Sans tuer jusqu'ä präsent personne. Quant aux dötails,
permettez que je me rapporte ä une lettre que j^ecris
a TElecteur mon frere et que je vous joins copi^e, n'ayant
pas le temps de röcrire toutes ces choses*).
*) Joseph an den Erzherzog Maximilian, Kurfürsten von Köln.
16 aoftt 1787.
Tr^s-cher frere. J'ai re(fu par le courrier Streins votre chere
lettre. Je vous en suis infiniment Obligo, et je sens une vraie et juste
satisfaction de Tapprobation que vous voulez bien donner aux d^mar-
ches que j*ai faites dans les fächeuses affaires des Pays-Bas; eile me
fiatte parce que j'aj une juste opinion de votre esprit et clairvoyance.
Selon raes nouvelles le rassemblage des troupes devait se faire le 11
et le 12 de ce mois; je n^al point encore des nouvelle^ de sa r^us-
site, mais Selon toutes les apparences eile se sera faite saus difficuUe.
Les d^put^s au nombre de 31 ont kXk hier chez moi ä Tau-
dience; ils m'ont. lu un grand discours rempli de verbiage et sans
excuses ou promesses pour Tavenir*, je leur ai r^pondu ce que je
— 110 -
Je vous prie de faire passer ce courrier jusqu'a
Naples pour relever celui qui s'y trouve stationn^. Quant
au mariage de votre fiUe, j'ai regu la marche-route et
suis parfaitement d'accord qu'elle arrive ici ou le 22 de
septembre ou le 26, comme je Tavais marqu^ dans mon
projet d'itin^raire. C'est ^gal, pourvu que vous me le
marquiez positivement ; nous resterions alors une couple
de jours de plus, k Laxenbourg. Quant au contrat de
vous joins 8ur cette feuille. Le courrier porte les ordres au gouver-
nement, que pour prealable tout soit remis comme cela etait au mois
d^avril de cette ann^e, et qu'avant que tout ne soit rentre dans Tordre,
je ne voulais entrer en d^liberation quelconque; cela sera un peu dur
ä dig^rer, mais il le faut. En attendant je vais demain commencer k
causer avec les d^putes snr tous les differents objets de leurs plaintes*,
ce ne sera point pour conclure quelque chose avec eux, mais senle-
ment pour m^instruire et les instruire, et pour leur faire voir clair
sur nombre de pr^juges et de fantomes qu'ils se forment. J^ai eu tant
de raisons d^etre mecontent de la marche que le gouvernement a
tenne dans cette occasion , le fait a si parfaitement contredit tout ce
qu'il avait donne pour des süretes, que j'ai trouve bon de clianger le
ministre comte de Belgiojoso, et j'ai choisi Trauttmansdorff pour prendre
sa place. Je Tai appele ici pour Tinstruire-, je crois qu^il aura au
moins le liant pour renssir dans ce pays, et le bon sens et la docilite
pour bien executer ce dont il sera charge. C'est un bomme honnete,
integre, patient; voila les qualites principales.
Je ne puis comprendre comment les gazetiers out pu imaginer
que je viendrais a Bonn sous une autre vue que de vous embrasser
et revoir, eher fröre, et que sur les frontieres je negocierais avec
mes Sujets, comme s'ils devraient me donner la permission auparavant
de me rendre chez moi, ou que j'en eusse peur. Je ne suis pas decide
moi-meme encore de ce que je ferai, puisque cela dependra de la
tournure que prendront toutes ces affaires. Si je vois qu'il y a ä faire
quelque chose de bon, alors je pourrais bien avec Trauttmansdorff
me rendre a Bruxelles pour le commencement de Thiver, et dans
deux mois on arrangerait plus de choses qiren les ecrivant en deux
ans, mais si je ne vois pas cette probabilite, je resterai chez moi.
— 111 —
mariage, je le trouve trfes-avantageux pour TEIecteur,
et en v^rit^, il traite votre fille bien mal. Faire payer
500,000 florins argent comptant sur des hypoth^ques,
c'est lui donner la facilitä de faire de bonnes affaires
avec cet argent. Le doiiaire est si modique que je ne
crois pas qu'il se seit fait jamais an contrat pareii, car
dans les 40^000 florins et dans les 30;000; si eile sort
da pays^ comprendre les rentes de sa dot, c'est ne donner
de la part de la Saxe qae lO^OOO florins d'entretien en
cas de veavage k votre fille, et eela poar toat, en n'en-
tretenant ni sa Coar, ni sa table, ni äcarie, ni rien. Le
comte Kinsky va ^pouser k cette heure la fille da grand-
^cuyer, le prince Dietrichstein*). Eh bien, il lui promet
en cas de veavage 12,000 florins de doaaire, et votre
fille n'en aara qae 10,000; c'est en v^rit^ acheter bien
eher et avec une triste perspective Thonnear d'Stre la
femme d'an prince Antoine, qui est an cagot et an
ennuyant, a ce qa'on dit. Si j'avais 6i4 charg^ de cet
arrangement, TElectear n'en aarait pas eu si bon raarchö,
et ses lettres sont si cavalieres qa'il vous (5crit, comme
si c'dtait ane gräce qa'il noas fait.
Schönfeld est an joli horame raisonnable; si par
des instractions de ce diable de Statterheim Ton ne le
force d'Stre s^cant, voas en serez content.
En attendant je n'ai rien d^commande, et les trois
colonnes, Tane en Boheme k Egra de trente escadrons,
Tautre k Schärding de seize bataillons avec toate Partil-
*) Maria Theresia, geboren 1768, vermalt am 27. August 1787
mit dem Grafen Philipp Kinsky, Josephs Reisebegleiter nach der Krim.
Die Ehe blieb kinderlos und wurde bald getrennt.
— 112 —
lerie, et la troisifeme en Tyrol a Bregenz de dix batail-
lonB avec leur artillerie sont en place döjä pr^tes a marcher
au premier ordre. Le r^giment de Bender *) est ddja
marchä k Luxembourg. Me voilk done en rhgle et je
puis attendre, surtout apr^s que j'ai sauvä aux Pays-
Bas mes r^gimens et mon artillerie^ munitions et les mil-
lions du trösor royal, tranquillement r^y^nement, mais
je crois qu'ils sont fort revenus de Tid^e de pouvoir
jouer les maitres, et que la peur qu'ils avaient inspir^e
au gouvemement, vient de passer dans les individus des
Etats. Adieu ....
Ce 23 aoüt 1787.
an Leopol«!. Trfes-cher frfere. Je vous joins iei les pieces de la
semaine ; j'ai eu deux longues Conferences de trois heures
chacune avec les döputös; ce sont pour la plupart des
gens trfes-bornös, et le peu d'instruits n'osent pas dire tout
ce qu'ils pensent devant les autres; il y en a dejk de
partis et ils se suivent de jour k autre. Les troupes sont
cnfin rassembl^es aux Pays-Bas sans bruit ni difficult^.
Je crois que tout le reste s^ensuivra aussi et constatera
que le gouvernement a tres-mal vu, mal jug6 et com-
binö, et que par ses faux rapports il a failli me prosti-
*) Joseph Blasius Freiherr von Bender, damals Feldzeugmeister,
spater Feldmarschall und Grosskrenz des Theresienordens, durch die
Vertheidlgung Luxemburgs im J. 1796 berühmt geworden. Er starb
drei Jahre später als commandirender General zu Prag.
- 113 —
tuer k Jamals et renverser tout Tordro des ehoses, sl je
n'avais seul rösistö k confirmer ce qu'il repr^sentait pour
si nöcessaire, si on ne voulait tout perdre. Les choses
ont pris une tout autre couleur, et sans troupes d'Alle-
magne je leur ai prouv^, qu^en le vouiant, on pouvait
§tre leur maitre et les faire oböir malgre leurs fanfa-
ronnades.
Les affaires des Tures avec les Busses s'embarras-
sent toujours davantage, et je ne pr^vois point comment
cela finira. Quant aux noces, je ne puis rien ajouter a
ce que je vous ai ^crit par le courrier, et en vous em-
brassant; de meme que votre obere öpouse tendrement,
je suis pour la vie. . . .
Ce 28 aoüt 1787.
Tr^s-cher frfere. C'est par cette poste süre que j'ose ^^^^^^\
* * ^ •' an Joseph.
derechef vous remercier pour votte ch^re lettre du 16
de ce mois, et tous les papiers relatifs aux affaires des
Pays-Bas, que vous avez bien voulu m^envoyer et que
j'ai OBÖ garder comme de coutume, vous renvoyant seule-
ment ci-joint les extraits des rapports des ministres aux
Cours ötrang^res. Je considfere les affaires des Pays-Bas
comme enti^rement termin^es, vu le parti que je vois
qu'elles prennent; k Theure qu*il est, tout est sürement en-
tiferement rentrö dans Tordre, et reffervescence est finie.
Je suis persuadä qu'k präsent vous pourrez arranger tout
comme vous le voudrez, et c'est k la rösolution que vous
avez prise, de raontrer toute la vigueur^ en offrant les
T. Arneth. Joseph il Leopold. 11« 8
— 114 —
voies de la douceur en mSme temps, qu'on doit ce change-
ment subit qui est d'iine si grande importance, sartout
dans le moment present, oü T^tat des affaires politiques
et surtout eelles de la Hollande peuvent donner lieu k
des combinaisons et k la röussite de projets bien avan-
tageux, vu les dispositions du Roi de Prusse et la faiblesse
de la France dans ce moment; tant dans son minist^re
que pour les affaires internes et son manque d'argent.
Quant a ma fille, öelon vos derniers ordres eile par-
tira d'ici le 15 septembre et sera rendue aVienne le 25
du m§me mois, et il est certain que TElecteur de Saxe n'a
pas fait de grandes conditions a ma fille ^ mais il faut
considörer le manque de partis pour une personne de
son äge^ et que les conditions sont les memes que Celles
qui ont 6ti faites a la fille du Roi de Sardaigne lors de
son mariage, et j'ai cru que cet argument n'avait point
de r^plique. Nous attendons ici Mr. de Schönfeld que
tout le monde assure etre un bien joli homme^ et qui,
a ce que Ton croit, sera ici le 4 de septembre.
Ma femme a vu avec bien de la reconnaissance la
permission obligeante que vous lui accordez, de venir
avec moi et mes fils ce printemps k Vienne. Elle compte
d'accoucher vers le 12 janvier, et par consdquent nous
ne pourrons partir d'ici que vers la fin de mars. Ose-
rais-je vous prior k son temps de vouloir bien nous faire
savoir a peu prfes, quand vous comptez faire cdl^brer le
mariage de mon fils Fran9oi8, combien de /temps vous
comptez de nous garder a Vienne, si vous ^tes toujours
intentionnd de faire venir avec nous a notre retour Fran-
9ois et son dpouse en Italic, quel tour que vous voulez
— . 115 —
qu'ils y faesent, combien de temps ils devront s*y arreter,
et quand vous voulez qu'ils soieat de retour k Vienne ? Tout
cela j'ose vous en prior a peu prfes, non par curiosite,
mais uniquement pour pouvoir faire a son temps ici nos
dispositioDS pour nos enfans, leurs gens, quartiers etc
Ce 30 aoüt 1787.
Tres-cher frfere. Pour aujourd'hui ayant des cour- an^Leo^oid
riers importans a expedier en France et en Russie, je
serai fort court. Je vous joins ici leis pieces de la semaine.
La guerre que ces maudits Tures viennent de d^clarer
a la Russie, et Temprisonnement du ministre Bulgakow
aux sept tours^ malgr^ toutes les menaces et instances de
raon Internonce*) et de Tambassadeur de France, me
mettent dans le cas absolu du casus foedei%Sy car ils at-
taquent la Russie. A peine avais-je un peu rapiecet^ tout
ce que dans mon absence on avait gät^ aux Pays-Bas, ne
voilk-t-il pas un bien autre embarras, une guerre a faire
dans ces maudits pays et avec toutes les maladies, la
peste, la faim, et pour peu gagner. Enfin il faut se vouer
a passer sa vie dans les troubles et les peines. Quant
au mariage et k Tarriv^e de votre fille, tout me con-
viendra ce qui vous agr^era. L^Elisabeth s'est derechef
d^cid^e k aller k Botzen la voir, ainsi cela restera aux
jourii^es marqu^es.
*) Peter Philipp Freiherr v. Herbert.
— 116 —
Adieu, je vous embrasse de m§me que votre chere
epouse de tout mon eoeur
Ce 3 septembre 1787.
an Leopold. Trfes-cher frfere. J'ai re9u votre chfere lettre et vous
en suis trfes-obligö, de meme qu'k votre chfere Epouse.
Vous aurez vu par la derniere oecasion süre les nouveaux
embarras avec les Turcs ; cela pourra nöcessiter un
cbangement total dans nos arrangemens pour le printemps,
car la guerre venaut, vos fils ne pourront venir a Vienne,
si je D*y suis pas, et le mariage de Franjois devra peut-
Stre s'anticiper, pour qu'ensuite il puisse faire la cam-
pagne, et sa femme peut-etre pourrait rester a Vienne ou
aller voir sa belle-mfere a Florence.
Quant k votre fille, je Tattends avec empressement
Ferdinand me marque qu'il viendra k Mantoue pour la
voir ; cela pourrait donc retarder son arriv^e d'un jour.
J'ose en ami, et qui dösire le bien sans autre vue quel-
conque, vous avertir de la pr^venir un peu, qu'elle ne
se Jette aveugl^ment entre les mains de notre soeur
Marie. Vous connaissez la chaleur de sa tete qui est
plutot augment^e que diminuöe. Sa fa9on d'intrigue,
d'imp^riositö , de bavardage, tout cela ne conviendrait
aucunement k votre fille k copier k la Cour et dans
le pays oü eile va. Je sais que ma soeur veut entifere-
ment la diriger, la conseiller, que m^me eile pense de
se rendre k Dresde, quoique TEIecteur, k qui eile en a
fait la proposition, Tait poliraent ^lud^. Elle croit M™®
— 117 —
BoUand toute a ses ordres, eile lui dönnera cent pr^-
ventions. Enfin gardez-la par vos conseils de s'aban-
donner aux siens ; eile a intriguö en Saxe pour faire aller
M™® Bolland a Dresde pour quelque temps ; tout cela ne
vaut rien, et les effets aupr^s de nos soeurs ont fait voir
que de pareilles complaisances ne produisent que des
inconv^nients. Voila iranchement mon avis, faites-en, mon
eher ami, Tusage que vous croirez le plus propre pour
le bien de votre fiUe. Adieu ....
Ce 6 septembre 1787.
Tres-cher frere. Je vous envoie ci-ioint les obiets «^^»«p^
*^ •'an Leopold.
de la semaine ; vous y verrez les dötails des dispositions
que j'ai faites pour Fassemblöe d'une armde en Hongrie
et sur toutes les frontiferes turques. J'attends vers le mo-
ment de Tarrivde de votre fiUe iei les premi&res räponses
de Pötersbourg. Peut-§tre que dans peu nous en aurons
de Constantinople plus döcisives, p[ienie pour nous, puis-
que rinternonce Herbert a ^t^ invitä k une audience pu-
blique, et que peut-§tre on exigera de lui des assurances
qu'il ne pourra donner, et que par consdquent on l'en-
fermera aussi peut-^tre. Des Pays-Bas j'attends k tout
moment des nouvelles " sUr Texöcution du pr^alable que
j'ai exig^, et ensuite je tächerai d'arranger la chose
promptement.
J'ai re9U votre cbfere lettre ; vous sentez bien que,
vu les eirconstances , je ne püis vous rien marquer des
objets sur lesquels vous d^sirez avoir 3es renseignements ;
— 118 ~
peut etre que cet automne encore les hostilit^s et quel-
ques entreprises auront Heu. Peut-^tre la paix se fait
rhiver, ou nous devons etre les premiers en campagne.
Enfin c'est apres ces objets primitifs que se reglera le
mariage de votre fils qui est destinö ä faire la campagne.
Si eflFectivement la guerre aura lieu pour le prrintemps,
alors j'avancerai son mariage et il pourrait se faire a la
nouvelle annäe, pour que les öpoux puissent vivre deux
k trois mois avant la campagne ensemble, ce qui apres
Päques se reduirait a peu de jours. Alors votre chere
^pouse ne pourrait point en etre, et il serait k voir si vous
pourriez venir. Quant a vos lils, comme je ne crois pas
Ferdinand en santö ni en goüt de faire le soldat^ ils ne
pourront venir a Vienne, les autres ötant trop jeunes pour
faire campagne, et moi absent, que feraient-ils k Vienne ?
II yant beaucoup mieux qu41s restent jusqu'k la paix ou
autres circonstanceB sous vos yeux a Floren ce.
Voilk jusqu'k präsent tout ce que je peux vous dire ;
il est bien fächeux de ne pouvoir faire aucun projet, qui
m'aurait fait tant de plaisir, sans le voir d^rangö par des
^vdnemens imprdvus. Adieu ....
Prösentez mes complimens k votre chere öpouse.
Quel contretemps au charmant projet de la voir ici!
Ce 10 septembre 1787.
an^Leo^oid Trfes-chor fr^rc. Je pars dans ce moment, k quatre
heures du matin, pour la Boheme. Je vais faire le tour
— 119 —
des forteresses et voir Texp^rience des mines que j'ai fait
arranger, ainsi je ne pourrai vous ^erire quelques jours
de poste. Le 20 je serai de retour et je ramenerai votre
fils Frangois avec moi. Jeudi vous aurez ies nouveautds
de la semaine. J*ai pröf^r^ ce moment, croyant ensuite
etre plus n^cessaire ici. Adieu, je vous embrasse de m§me
que votre chere epouse de tout mon coeur ....
Ce 17 septembre 1787.
Trfes-cher frere. C'est par le garde qul retourne de ^n Tompu
Naples et que j'ai os6 arrSter ici quatre jours, que j'ai
Fhonneur de vous ^crire aujourd^hui, et de vous renvoyer
Ies papiers ci-joints, en vous rdpondant en m^me temps
k vos deux tres-gracieuses lettres du 30 aoüt et du 3 de
ce mois. J'ai iti bien ^tonn^ de la nouvelle que vous
m'y donnez de la rupture des Turcs avec la Russie. II
ne parait pas que dans le moment präsent ils auraient
pu ni du faire une d^roarche aussi avanc^e et hasardöe,
surtout dans un moment oü la France par son manque
d^argent et ses troubles int^rieurs n'est pas en ätat de
Ies aider efficacement. Je souhaite seulement que, d^jk que
la Russie est oblig^e de leur faire la gueiTe, eile la fasse
avec vigueur et tout de bon, et que la premiere irrup-
tion des Turcs ne Ies surprenne pas au d^pourvu, et sur-
tout dans la Crim^e, vu la faiblesse de Parmöe russe qui
y est prdsentement, parce qu'un premier avantage con-
sidörable, obtenu des le commencement par Ies Turcs,
— 120 —
rendrait ceux-ci hardis et d^couragerait les Russes pour
la suite.
Par vos lettres je vois que vous serez oblig^ de
vous en mfeler aussi, et qu'outre le corps de troupes pro-
mis par les trait^s, vous voulez agir efficacemeni et faire
vous-m^me la campagne et la faire faire ^galement ä mon
fils Fran9oi8. Je suis persuadö que vous serez assurö des
avantages röels que cette guerre pourra produire a la
monarehie, et qui pourrait compenser les grandes de-
penses, pertes de gens, peste, maladies, etc. *auxquelles
on sera exposä, d'autant plus, qu'outre les troupes et ar-
m^es qui agiront, il en faudra un bon nombre pour faire
les cordons n^cessaires pour empeeher toute irruption des
Turcs dans vos provinces. Je crois pourtant que, la Sai-
son ^tant si avanc^e, cette ann^e se passera a faire les
pr^paratifs pour la guerre et la campagne future.
Quant aux changemens que ces circonstances pour-
ront apporter k la venue de mes fils k Vienne, c'est un
point sur lequel vous n'avez qu'k ordonner entiferement
et librement ce que vous voulez. Ils viendront quand
vous voudrez et comme vous voudrez, et si les circon-
stances ne le permettent pas cette ann^e, ce sera pour
une autrC; vous priant seulement de m'en avertir k terops,
pour pouvoir disposer leurs ^tudes en cons^quencc; si
leur venue ce printemps ne devrait plus avoir lieu.
Quant k mon fils Fran9ois, il est entierement k vos
ordres, et vous pouvez en disposer comme vous le croi-
rez le plus convenable ; faisant la campagne sous vos
yeux, il ne saurait dtre en meilleures mains. Si vous
croyez necessaire qu'il se marie avant que d'y aller, vous
— 121 —
n'avez qu'a le" faire comme vous le jugerez k propos et
ordonner ce que vous voudrez. Si je dois venir y assister,
surtout si vous voulez ensuite pendant la guerre me
laisser la princesse ici chez moi, alors je la pourrais
conduire avec möi ici. Enfin nous ferons tout ce que vous
voudrez et jugerez le plus convenable.
Quant k ma fille, tios fötes sont finies, le bagage et
trousseau est |)arti et eile partira d'ici demain, s'arr§tera
un jour k Mantoue, un k Botzen et un k Klagenfurt, et
sera le 26 a Märzzuschlag, oü eile attendra vos ordres.
Mr. de Schönfeld, dont nous avons tout Heu d'etre con-
tents, ne.nous a fait ni difficult^ ni ^tiquette. II part le
16 et sera le 23 k Vienne.
J'ai vu ce que vous voulez bien me marquer de
^prövenir ma fille sur la Marie, et n*ai pas manquä d*exä-
cuter vos ordres. Elle lui est fort attachöe, lui ayant
toujours t^moignä beaucoup d*amitiö, et lui ayant en partie
Tobligation de son Etablissement, et quoique je sois per-
suadE que ma soeur ne lui donnerait jamais des conseils
qui pourraient lui faire du tort, je puis vous rässurer
sur ce point. Le caractere de ma fille n'est certainement
pas ni de se livrer facilement, ni de vouloir intriguer
ou se m^ler d'aucune affaire. Elle pense solidement et
ne d^sire que de tächer de se rendre la vie heureuse
dans son manage, en s'adaptant k la volonte des autres,
et tächer de se faire aimer de toute la famille. Sur cela
nous lui avons assez prSchE et je lui ai renouvelö les
avertissements que vous m'avez marquEs. Quant k M"® Hol-
land, c'est TElecteur qui Ta fait inviter, de meme que
le comte de Thurn, par Mr. de Schönfeld, k venir pas-
— 122 ^
ser quelques jours a Dresde, et nous en avons ^W bien
aise pour les conseils qu'elle y pourra donner, au moins
les Premiers jours, a ma fille. Je ne sais pas si c'est ma
soeur Marie qui a manage cette afifaire; ce que je puls
vous assurer, c'est que, quoique M"® Bolland lui soit fort
attach^e, lui ayant beaueoup d'obligations et surtout celle
de Pavoir placke chez nous, M™« Bolland est d'un carac-
tfere si doux, timide et röserv^, enfin si ^loignöe detout
esprit de tracasserie et d'un si grand et solide mdrite,
que vous serez vous-mSme convaincu, lorsque vous
apprendrez & la connaitre, qu'il n'y a pas le moindre
danger qu'elle puisse intriguer ou lui donner de mauvais
conseils. Malgr^ cela en conformitö de votre lettre, je
n'ai pas manqu^ de Tavertir ^galement, ainsi que ma
fille, sur ce point, et j'ose vous r^pondre que vous n'aurez
rien a craindre d'aucun de ces c6t^s.
Ce 20 septembre 1787.
Joseph Trfes-cber frfere. Dans ce moment farrive avec votre
an Leopold. *>
fils Fran9ois de ma tournde en Boheme aux forteresses.
Je trouve votre lettre par le courrier. J'attendrai votre
fille le 27 a Laxenbourg, puisqu'elle n'arrive que le 26
a Märzzuschlag. Vous verrez les objets ramassäs k la
bäte ci-joints du moment; autre chose je ne puis vous
dire et vous ^crirai apr^s Tarriv^e de votre fille par un
courrier. Je vous embrasse, de m^me que votre chire
^pouse, de tout mon coeur ....
123 —
Laxenbourg, le 27 septembre 1787.
an Leopold.
Trfes-cher frere. Dans ce moment j'arrive ici de °^^^
Märzzuschlag avec votre tille en pärfaite sante. J'ai 8te
avec votre fils a sa rencontre, eile a tres-bien d^but^,
je ne la trouve pas embarrass^e'et pleine de courage
pour son nouvel ötat. J'ai regu par eile votre ch^re
lettre, de raeme qu'une autre par Stephani; je compte le
faire partir dimariche quand nous serons arrives en ville.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur et vous
prie de bien präsenter mes hommages a votre obere
epouse, et de lui faire agröer mes excuses que je ne lui
öcris point, mais il est impossible^ vu la brievet^ du
'®öips. Je scrai toute ma vie votre ....
Je vous joins ici les lettres de toute la famille,
Vienne, le 30 septembre 1787.
Tres-cher frere. Stephani vous remettra celle-ci et ^J**®^^,
^ an Leopold.
^^ pourra en memo temps faire les ddtails de Tarriv^e
^otre fiUe ici. Notre sejour de Laxenbourg, tres-court,
®*' tres-bien passe; la Th^rese s'en est tres*bien tiröe,
^ le monde en est content, et on la trouve meme
^ öe figure. Je me flatte qu'elle sera heureuse, puis-
" ^*1^ parait avoir d^avance le bon esprit de vouloir tout
^ pour cela.
Je vous joins ici les pieces importantes de cette
^^ine, mais je me vois oblige de vous repr^senter que,
- 124 —
si vous en faites usage et que vous commettiez les secrets
de l'Etat, corame je viens de m'en convaincre dans deux
occasions, je ne pourrai plus vous rien communiquer ;
mon devoir^ qui passe devant mon sentiment, exigera a
regret cette r^ticence. Le ministre russe Mocenigo a 4t6
informö döjk plusieurs fois par vous de choses que je
vous avais ^crites et qui n'^taient aueunement faites k
lui etre communiqu^es, et encore moins k sa Cour^ k
laquelle il n'a pas manquö d'en rendre compte. M. de
Schönfeld vient de revenir de Florence, instruit par
vous de tous les d^tails de ce que je vous avais äcrit au
sujet du contrat de mariage tr&s-mis^rable que vous aviez
fait faire k votre fille; il sait par vous toute ma lettre.
Vous lui avez en outre par une effusion de coeur dit
apparemment tout plein de choses dont il a rögalö tous
les ministres ^trangers ici^ et qui tous tendaient k les
convaincre que vous pensiez sur maints objets politiques
tout difif^remment que moi. Que cela soit.ou ne soit paS;
vous sentez bien que cela ne dörange pas ma marche,
et en ne vous faisant ni du cöt^ de la reconnaissance
ni de celle de Topinion honneur^ eile marque un carac-
tfere dont les ennemis de notre maison voudraient pro-
fiter un jour, et une dissension qui de mon su n'existe
ni dans mon coeur ni dans les actions et preuves conti-
nuelles que je ne cesse de vous donner. Enfin recevez
cet avis amical, mon eher frfere; que votre marche soit
droite, loyale, et si vous avez une opinion diffdrente,
marquez-la moi avec la plus grande franchise. J'aime la
värit^ d'un chacun, et de vous eile me sera doublement
chere, puisqu'elle rae prouvera en m^me temps votre
— 125 —
clairvoyance et amiti^; mais que le public n'imagine jamais
que nos volont^s soient dififörentes, et vous en sentirez
vous-m^me la ndcessitö, quand vous röfl^chirez a sens
rassis k ce que vous avez dit^ et a ce que vous auriez
mieux fait de taire.
Adieu y je vous embrasse tendrement et vous prie
de me croire pour la vie votre ....
Ce 8 octobre 1787.
Trfes-cher frfere. Aecoutumä a recevoir avec le plus ^^^^\
^ an Joseph.
vif empressement et le plus sensible plaisir toutes vos
lettres, tant par Tattachement que j'ai pour vous, que par
les bont^s flatteuses et les niarques d'amiti^ que j'^tais
accoutum^ k y voir de votre part, je ne saurais assez
vous exprimer combien j'ai ^t^ pen^tre, mortifi^ et afflig^
de Celle que vous m'avez ^crite par mon courrier en
date du 30 du mois pass^, taut par la chose que par le
ton et le style de möfiance, möcontentement et aigreur
de votre part, qui y rfegnent et que je ne crois pas ayoir
m^rit^, Vous me marquez que je vous cominets et les
secrets de TEtat que vous me communiquez, en Infor-
mant de ce que Vous m^^crivez daus les aflfaires, et com-
muniquant tous les detail s de vos lettres aux ministres
^trangers et nomm^ment k Mocenigo, ministre de Russie,
qui r^crit k sa Cour, et au comte de Schönfeld relati-
vement au contrat de mariage de ma fiUe, et que j'af-
fecle dans les affaires et objets politiques de t^moigner
par mes discours que je pense tout difföremment que
— 126 —
vouB, et que par cons^quent mon caractfere n'^tant pas
droit et mes d^marches pas loyales ^ vous ne pourrez
plus rien me communiquer. Attache comme je vous Ic
suis, dölicat, sensible, rdservd, aueunement port^ a me
raeler de ce qui ne me regarde pas ni oü je ne suis pas
appel^, röservö k ne jamais me m^ler de dire mon sen-
timent sur rien, k moins qu'on ne me le demande expres-
s^ment, et encore alors a regret, j'osais me flatter que
vous me eonnaissiez assez pour §tre persuad^ que je
n'^tais pas capable ni de parier des affaires que vous
me communiquiez, et bien moins de critiquer vos Opera-
tions, ou d'affecter d'avoir un sentiment contraire au vötre,
comme je vois. qu*on vous a persuad^. Je n'avais aucune
raison ou motif de le faire, combld de vos bont^s et
marques de confiance; je n^dtais pas en ätat de le faire,
car ne sachant les affaires qu'apres qu'elles sont r^solues,
et ne voyant pas toutes les pieces qui y sont relatives,
quand meme je voudrais, je ne pourrais pas en dire mon
opinion, et surtout une difförente a la r^solution.
Tout le monde peut me rendre justice sur mes dis-
cours, et tout le monde est bien persuade que je suis
toujours de votre avis, au point qu4ci en Italic et sur-
tout a Rome on me fait l'honneur de croire que c'est
moi qui vous propose ce qui sc fait en affaires eccl^sias-
tiques, et que cela m'a attir^ la haine personnelle du
Pape et de la Cour de Rome. Je sais trop ce que je
vous dois, mon coeur vous est personnellement trop
d^voud et par attachement et par reconnaissance et par
devoir, pour jamais oser de me permettre de pareils propos,
et quoique je ne compte pour rien, je sens tres-bien
— 127 —
combien une pareille conduite serait malhonn^te en moi,
imprudente, dangereuse et de mauvaise cons^quence.
Lorsque vous avez bien eru^ de vouloir me demander
mon avis sur quelque affaire, vous savez que je yous Tai
toujours marqu^ avec sincerite et vous ai dit ckiirement
mon sentiment^ et Taffaire de la dot de ma fille en a
etö une preuve. Dans toutes autres occasions j'en ferai
de meme, et vous marquerai avec la franchise et hon-
n§tetd qui, j'ose dire, fönt la base de mon caractfere^
toujours mon sentiment de meme. Quant aux papiers
que vous m'envoyez, personne ne les voit, je les ai tou-
jours sous clef moi-meme et moi seul, et ai toujours öte
sur ee point d'une mdfiance et d^licatesse extremes.
Quant k ee que vous me marquez que j'ai communiquö
au comte Mocenigo des affaires, je puis franchement vous
assurer qu'il peut bien s'en etre vante ä sa Cour, mais
que cela est faux. Öon caractere intrigant, faux et men-
teur est connu, et personne ne le connait mieux que
moi, qui en ai fait porter des plaintes plusieurs fois a
sa Cour. Je ne le re9ois pas chez moi dans aueune occa-
sion, et pas dans ma löge au theätre, et ne le vois que
quand fort rarement il a quelques etrangers a präsenter.
Depuis huit mois je ne Tai vu qu*a Toccasion du mariage
de ma fille, oii je lui ai seulement dit que la guerre
avait ^t^ d^claröe par la Porte a la Russie et M. de
Bulgakow enfermö aux sept tours, et cela en pr^sence
de ma femme, nouvelle qui n'^tait aueunement secrete,
et dont toutes les gazettes parlerent quatre joürs aprfes,
Sans y aj outer un seul mot; hors cela tout est faux
absolument.
: — 128 —
Quant ä M. de Schönfcld, je me suis cru oblig^ de lui
dire que^^vous n'aviez pas approuvä la remise des argents
de la dot de ma fille a Dresde en nature, et auriez cru
plj^s convenable de les laisser employäs a Vienne, pour
voir s'il» y avait moyen d'arranger encore cette affaire
au gvi de vos däsirs^ mais il avait des ordres positifs
sur ce point; et je n'ai point pu le faire changer. J'ai
du dire que c'^tait vous qui ne Taviez pas approuv^,
puisque dans tout le traitö avec FElecteur je n'avais
jamais touchö k cette difficult^, qui aurait paru^ apr^s
le contrat signö, singulifere de ma part. Je ne lui ai
parlö d'ailleurs absolument de rien et d'aucune affaire,
et justement expres, pour qu'il ne puisse pas me faire
des tracasseries k ViennC; connaissant comme sont ces
messieurS; et ai poussä la dölicatesse au point de ne
jamais lui parier m^me des affaires de Saxe et de ne
jamais Tavoir vu ni parlö qu'en prösence de tömoins et
de plusieurs personnes, et ne lui ai jamais nomm^ les*
affaires de Vienne.
J'ose me flatter que cette justification, les faits que
j'ai marqu^s ci-dessus et que je puis en cas de b esoin
prouver par tämoins, et plus que tout le reste la con-
naissance que vous avez depuis tant d'annäes de mon
bonn^tet^, prudence, droiture et meme räserve k parier,
et surtout de mon sincfere, tendre et respectueux atta-
chement personnel pour vous, suffiront pour dissiper tous
les soup9ons que des personnes malintentionn^es , dont
je crois qu'il y en a ici chez moi, m^me dans ma maison,
auraient pu vous faire concevoir contre mon honneur,
caractfere, prudence et attachement pour vous, car il ne
— 129 —
s'agit de rien moins dans cette affaire, et que vous voa-
drez bieii; en me rendant justice; me continuer k Tavenir
comme par le pass^ la meme confiance; bontä, amiti^
et tendre affection dont vous m'avez toujours favoris^, et
dont je me suis glorifiä en toute occasioii; et qui a fait
le bonheur de nia vie. Dans cette lettre je vous ai dit
la v^ritä toute unie; il n'y a rien de plus ni de moins;
dans une matiere aussi grave ii ne doit point rester des
soup9ons. Si vous en avez sur mon compte, marquez-les
moi; je rendrai toujours t^moignage k la vöritä., quand
ce serait meme contre moi-meme, mais rendez-moi votre
confiance et amitiä qui m'est näcessaire^ chere et precieuse
comme ci-devant; et n'äcoutez pas des rapports des per-
sonnes qui, connaissant mon attachement pour vous,
cherchent par malice, mächancetä et peut-etre d'autres
secondes fins k semer de la mäsintelligence entre nous,
en vous donnant des soup9ons envers moi, ou des lettres
de mioistres ätrangers qui; pour se faire valoir, se van-
tent de ce qui n'est pas vrai et qui sont bien mieux
informäs que moi des choses les plus secreteS; Mocenigo
et bien d'autres personnes ayant ici des lettres de Vienne
OU; k mon grand ötonnement, on leur marque bien sou-
vent un jour de poste avant que je ne les rcQoive de
vous, les nouvelles que vous m'avez quelquefois öcrites
pour les plus secrfetes, ce dont Veigl, que j^en ai averti
plusieurs fois, aura pu vous repräsenter.
Quant aux papiers et aux affaires, je vous supplie
a Tavenir, s*il vous reste le moindre doute ou soup9on,
de ne plutöt m'en plus envoyer ni communiquer du tout
Je ne suis aucunement curieux; je serai par Ik plus trän-
y. Arneth. Joseph n. Leopold. II. 9
— 130 —
quille et ne pr^tends aucunement d'etre inform^, mais si
vouß continuez a me les communiquer, soyez sür des k
präsent que, quoique je vois peu de monde et parle peu,
je serai encore plus röserv^ a Tavenir, et que quiconque
pourra se vanter de m^avoir entendu parier d'affaires ou
nouvelles, sera bien habile.
Pardonnez ce long verbiage et cette longue lettre a
Taffliction juste et foudee que m^a caus^ le soup9on que
vous aviez de mori honn^tete, caractere et attachement
pour vous, qui m'etait trop sensible pour ne pas tächer
a en dissiper jusqu'au moindre nuage. Je me flatte que
vous en serez convaincu, et voudrez bien etre persuade
du sincere, tendre et respectueux attachement avec lequel
je suis ....
Ce 11 octobre 1787.
Joseph Trfes-cher frfere. Voiei les nouvelles de la semaine :
an Leopold. '
Celles de Russie y sont contenues; Ton voit qu'ils ne
s'attendaient pas k ^tre attaquös cette ann^e. La flotte
de Sebastopol est sortie , mais des ouragans Tont toute
dispers^e et Airnktie, de sorte que le plus gros vaisseau
de 80 Canons a &ti chassö dans le canal de Constanti-
nople oü il a öt^ pris avec 600 hommes d'^quipage, un
capitaine anglais, sans coup f^rir, tout d^mäte. Voilä
une d^sagröable nouvelle ; Dieu sait encore ce qui est
arrivö des autres vaisseaux.
Votre fiUe est partie hier a huit heures et demie du
inatin avec Fran9ois et sa suite en parfaite sant^ et avec
— 131 —
une tranquillitö et courage sur son ätat fatur inconcevables.
Je souhaite de tout mon coeur, qu'en s'^pargnant tout
doute et inquietude^sur la r^ussite de son mariage, eile
trouve par le fait son bonheur v^rifi^.
Adieu, mon eher frere, je vous embrasse de meme
que votre obere ^pouse de tout mon coeur. Croyez-moi
pour la vie votre ....
Ce 18 octobre 1787.
Tres-cher frere. En vous envoyant ici les obiets'de '^^^«p**
•^ •'an Leopold.
la semaine, je puis vous annoncer en meme temps deux
de vos cheres lettres. Je suis vraiment afflig^ de la peine
que vous a fait Tavertissement amical que je vous avais
fait au sujet du secret qij^exigeaient les objets que je
vous communique, mais il m'a paru que mon devoir et
la tendre amitie qui nous lie, l'exigeaient. Je vous joins
ici pour votre seule connaissance les pieces qui m'y ont
d^terminö. EUes ne sont pas les seules ; plusieurs les ont
pr^cdd^, öt je crois que vous, mon eher ami, a ma place
auriez fait la m^me chose que moi. Que tout soit dit,
mais pour Tavenir soyez d'autant plus sur vos gardes.
Au reste, ma tendre amitie, mon attachement et ma con-
fiance vous sont connus de trop ancienne date, pour que
vous puissiez croire que rien ne puisse me faire changer
a ce sujet. Je vous aurais une Obligation infinie si, comme
moi je le fais, vous me marquiez aussi si vous apprenez
quelque chose ou quelque propos de ma part a votre
sujet qui puisse vous d^plaire. Comptez que je regarderais
9*
— 132 —
une franche sinc^rit^ pareille comme la marque la plus
BÜre de votre amitiä et du ferme däsir que vous avez,
de n'y poiut souffrir le moindre ombrage, et envisagez
donc ma dömarche sous ce meme point de vue.
Mes nouvelles de Prague de votre fils sont tres-
bonnes ; tout le monde se portait bien. La Cour de Saxe
avait d'abord disposä que le 16 votre fiUe, n'ayant qu'une
poste a faire de Lobositz a Aussig, y serait ächangde et
irait k deux postes plus loin au chäteau de Pilluitz de
TElecteur d!ner et coucher. Cela vient d'dtre changä, et
votre fille sera restde toute la journäe du 16 ä Aussig;
et seulement le 17 eile sera partie pour Pillnitz, et au-
jourd'hui se cdl4brera le mariage ä Dresde ; tout cela
pour avoir le temps non seulement de compter, mais meme
je crois de peser les ducats que vous leur payez de la
dot. Les chicaues faites ä ce sujet sont incroyables et
rövoltantes; Thurn vous en pourra faire son rapport.
J'attends Fran9ois ce soir de retour ici.
Adieu, je vous embrasse, de m^me que votre chere
äpousO; de tout mon coeur
La piece de Mocenigo a 4t6 brülle , par cons^quent
je n'ai pu vous Tenvoyer, mais je vous r^ponds de Tavoir
lue. Les autres de Schönfeld et du ministre de Prusse,
en voilk deux seulement pour ächantillons.
Quant k votre odieuse affaire avec les feudataires
d'Empire, Bardi, vous verrez ce que j'ai r^solu. Le conseil
aulique continuera sa marche juridique et vous ferez un
recours a la diite qui suspend toute ult^rieure ddmarche.
— 133 —
Ce 21 octobre 1787.
Tres-cher frere. En vous renvoyant ci-joint les pa- ^n Joseph,
piers que vous avez bien voulu me remettre avec votre
chere lettre de Tonze de ce mois, j'ose vous en re-
mercier, de m^me que de toutes les bont^s que vous
avez bien voulu avoir pour ma fille. La tranquillit^ et le
courage qu'elle a montr^s pour son ^tat futur, sont düs
k son caract^re, et je me äatte que, sachant s'adapter
ais^ment aiix volontds des autres, eile sera heureuse dans
son nouvel ^tat.
Le commencement de la campagne sur mer n'a pas
iti heureux pour les Busses, et on voit qu'ils n'^taient
pr^par^s ni dispos^s pour la guerre, ni sur terre ni sur
mer, et il est seulement ineoncevable que les Turcs
n'aient pas profite de la premifere confusion pour faire
une irruption en Crim^e, et pour attaquer la flotte.
On assure que la flotte anglaise est sortie, et si les
Fran9ais devront faire la guerre sur mer et §tre attaqu^s
aux lies et aux Indes par les Anglais, ils se trouveront
dans une position bien embarrassante, vu la fermentation
int^rieure des esprits, le manque d'argent et de ressour-
ces, et le peu de confiance et m^contentement du public
envers le gouverneraent , qui est sans tete et dans une
position bien humiliante vis-a-vis de TEurope entiere, s'ils
devront laisser finir k la Prusse les affaires de Hollande
sans pouvoir s'en m^ler, ni pour soutenir les patriotes,
ni naeme comme mödiateurs, et laisser faire la guerre ä
la Porte, sans pouvoir Tai der ni la secourir. Cela fait
voir dans combien peu de temps un aussi grand Etat,
— 134 —
qui a de si grandes rcssources, Situation et moycns, peut
perdre son credit, influence, force et pouvoir, par le
manque d'un chef capable et par le manque d'ordre.
Ce 22 üctobre 1787. ,
an Lecloid Tres-chcr frere. J'ai re9u votre obere lettre et je
puis vous annoncer Theureux retour de votre fils, qui s'est
trfes-bien acquitte de sa commission de la remise de votre
fille, oü de son arriv^e a Dresde nous n'avons pas la
moindre nouvelle encore. S'il ^tait possible de mettre plus
de mauvaise fa^on, plus d'humeur et plus d'insolence
dans des proc^d^s, la Saxe n^y aurait pas manque dans
toute cette occasion de famille et non politique. Ces
gueux ont fait voir qu'ils sont cent fois plus malinten-
tionnes que les Prußsiens meme.
Adieu, je vous embrasse, de meme que votre chere
^pouse, de tout mon coeur ....
Ce 29 octobre 1787.
Leopold Tres-cher frere. J'ai recu votre trfes-chere lettre du
au Joseph. *
18 de ce mois, et les papiers qui y ^taient joints, et que
j'ose vous renvoyer. Je ne saurais vous exprimer, com-
bien j'ai ^t^ p^ndtr^ et consol^ des expressions de bontd^
confiance et amiti^ dont vous voulez bien m'honorer. J'ose
dire que je les m^rite par le sincere, constant et parfait
attachement, respectueuse et tendre amiti^ que je vous
- 135 —
ai vouee pour toute ma vie, et qui est k toute dpreuve.
La sensibilit^ que je vous avais t^moignee dans mes
lettres sur ravertissement que vous avez bien voulu me
faire, ne venait en moi que de la crainte de perdre en
partie cette bont^ et confiance de votre part, qui fait le
bonheur de ma vie. A präsent, que par votf e chire lettre
je suis entierement rassure sur ce point, permettez-moi
que je vous dise sincerement que je trouve tres-juste et
naturel l^avertissement que vous m*avez fait, et le con-
sidfere comme une suite de votre amitiä pour moi, sur-
tout ayant vu des pieces semblables k Celles que vous
m'avez communiqu^es, dont je vous rends bien des gräces,
mais permettez-moi en vous les renvoyant, n'en ayant
fait usage vis- k- vis de personne, de vous assurer que tout
ce qui est dans celle de M. de Podewils, et qui contient des
discours que Schönfeld doit lui avoir faits, quant k moi
est faux, que ce qui est contenu dans celle de Schön-
feld, est vrai quant au discours relativement k la dot et
k la desapprobation que vous avez donnöe du voyage de
M™® de Bolland k Dresde, mais jamais dans les termes inso-
lens et la toumure maligne qu'il lui a donn^e pour s'en
faire un^mirite, mais que tout ce qui regarde les dis-
cours relatifs k d^sapprouver ce que vous faites en ma-
tifere de politique et gouvernement, ce qui regarde la
disposition de mes argents k Vienne et les finances, et
surtout ce qui regarde Tälection d'up Roi des Romains,
succession ou ränonciation , est enti&rement faux, con-
trouv^, menti, et qu'il n'en a pas iti ni question ni dit
une parole, et il faut que Schönfeld, que je commence k
croire un coquin, Tait ^crit exprfes k sa Cour, dans l'es-
— 136 —
poir et Intention que sa lettre puisse ^tre ouverte, et par
Ik vous donner des soup9ons et m^sintelligenee contre
moi, car il a dit ici k mon conseiller Seratti qu'il ne lui
envoie pas nos lettres k Vienne par Dresde, puisqu*il
savait tr^s-bien que toutes ses lettres y ätaient ouvertes,
et qu'entour^ d'espions, il ne disait et ^erivait que ce
qu'il voulait faire parvenir k votre eonnaissance.
Quant au comte Mocenigo, il y a quelque temps
d^jk que je m'^tais apergu qu'il ehercbait k intriguer, et
par des personnes de ma maison k Hre informä de ce
qui s*y parle. J'ai pris sur cela mes mesureS; et täche de
ne plus le voir, sachant qu'il est capable de tout et men-
teur de profession, surtout pour se vanter, et il est d'ail-
leurs tres-bien informi de Vienne directement par le
prinee Galitzin.
Tout ce que je puis vous assurer, c'est que pour
Tavenir je serai encore bien plus circonspect, et que vous
n'aurez plus k vous plaindre de moi sur ce point. Je suis
trop attach^; et je sais ce que je dois k vous et k TEtat,
pour lesquels je sacrifierais en toute occasion tout au monde
pour justifier la confiance dont vous m'avez honorä tou-
jours, mais ce que je vous prie pour Tavenir, c'est que si
jamais il vous revient quelque chose de pareil; que quelque
chose vous d^plaise dans ma conduite, propos etc.^ que
par des rapports de personnes ou des pi^ces interceptäes
vous appreniez derecbef des choses pareilles, vous vou-
Hez bien me faire l'amitid de me les communiquer
ydirectement et tout de suite. Je suis sincerc, vous mar-
querai tout de suite avec la plus grande veritö ce qui
en est vrai ou faux, me corrigorai volontiers, et alors
- 137 -
nous pourrons etre tranquilles tous les deux, sans donner
lieu aux malintentionn^s de tächer de semer avec malice
et secondes fins de la m^sintelHgence ou d^fiance entre
nous, ce qui serait mon malheur.
Quant h, ce que vous me marquez de vous avertir,
81 jamais j'apprenaiß quelque chose qui vous regarde, vous
pouvez Stre sür que je Faurais toujours fait tout de suite
et le ferai de meme^ si j'apprenais quelque chose, mais
cela est presqu'impossible ; je ne fr^quente que peu de
monde familiärem ent, hors pour mes affaires d'ici, je ne
parle presque jamais de pareilles mati^res, et mon juste
attachement, respect et d^vouement pour vous est telle-
ment connu dans le public et de tous ceux qui passent
ici; que personne n'a jamais osö parier ni oserait devant
moi de ce qui regarde votre personne et vos affaires.
Quant k ma fiUe Th^r^se, j'ai eu un courrier de
Dresde avec la nouvelle de son heureuse arriv^e en cette
ville ; eile par£ut fort contente du prince Antoine et de
toute la famille. II faudra en juger d'ici ä un an, car
les commencements ne prouvent rien. Je n'ai rien appris
de ce qui s'est passä a Aussig et k la consigne, Thurn
ne m*en ayant plus ^crit depuis son döpart k Vienne, et
ce ne sera qu'k son retour que je pourrai en savoir les
ddtails.
Quant k Taffaire Bardi, j'ai vu ce que vous voulez
bien m^en ^crire, et selon votre avis je ne manquerai
pas de faire k son temps un recours dans les formes a
la diite. Cette affaire, qui dans le fond ne vaut rien,
est bien longue et ennuyante ; eile ne m^int^resse aucune-
ment, mais, sans y ayoir ni intöret ni passion, je puis
1
- 138 -
vous assurer que la Toscane y a raison et que les fri-
ponneries du ci-devant r^förendaire La Solaje*) ont em-
brouill^ toute l^affaire.
Ma femme vous präsente ses respects ; eile avance,
gräce a Dieu, heureusement dans sa grosse sse, se porte
a merveille, de meme que tous mes enfans^ et moi je
vous prie d'etre persuad^ du sinc^re et tendre attache-
menty avec lequel je suis ....
Ce 1*' novembre 1787.
an Leopold. Trfes-cher frere. En vous envoyant ici les nouvelles
de la semaine^ j'ai en m^me temps k vous annoncer la
bonne regue de votre chfere lettre du 21 octobre. Ce que
vous dites des FranQais est parfaitement juste; ils sont
eux-m^mes ind^cis encore de ce qu^ils feront, ou au
moins de ce qu'ils paraitront vouloir faire. Pour moi, je
continue mes preparatifs, et cet automne il n'y aura
plus rien a faire, vu que la saison est si avanc^e et que
les Russes n'ont point encore avancä; avec cela nous
avons actuellement une crue d*eau si terrible, que la Leo-
poldstadt, la Rossau sont depuis deux jours inond^es. Le
Danube est dehuit pouces plus haut qu'aux inondations
präc^dentes, ce qui cause des dommages infinis, en arra-
chant tous les ponts, ruinant des maisons et les champs.
En bois de chauffage seul plus de vingt mille cordes
*) Karl Freiherr von la SoUaye, Hofrath und geheimer Reichs-
hofrefereDdarius für die lateinische Expedition.
— 139 —
ont et^ empörteres; le Danube ^tait couvert de bois hier
toute la journ^e. Les nouvelles de Hongrie, de Haute-
Autriche seront encore plus fächeuses peut-etre. II y a
aussi a craindre pour nos magasins et nos bateaux de
transport qui sont le long du Danube, et les troupes en
«
quartier; enfin c^est une vraie calamit^, a laquelle il n'y
a pour le moment aueun remede.
Ma sant^ depuis la mi-aoüt n'est pas bien bonne;
j'y ai gagn^ une espeee de toux sfeche et convulsivß,
comme la coqueluche des enfans, qui depuis tout ce
temps me fait enrager. J'ai ddja aval^ des drogues tout
plein, et je ne puis m'en d^faire. L'estomac, je ne sais
si c'est de la violence de la toux ou des drogues, est
gät^ aussi depuis deux jours; j'ai m^me eu de la fi^vre,
mais aujourd'hui je n'en ai plus. Je voudrais bien dtre
quitte de eela, pour la guerre au moins, car malgr^ que
je vais mon train et que je sors et travaille comme tou-
jours, et que m^me hier avec de Talt^ration, une purge
dans le corps, j'ai ^t^ plusieurs heures k cheval et dans
l'eau, je sens pourtant qu'k la longue cela me g^ne
beaucoup.
Adieu, mon eher frere, je yous embrasse, de meme
que votre chferc ^pouse, de tout mon coeur ....
Ce 5 novembre 1787.
Tres-cher frfere. J*ai re9u votre obere lettre; pour^^i^Leo^ id
*ci je re9oi8 a tout moment des nouvelles plus fächeuses
de TiiÄondation horrible et des d^vastations que le Danube
• • •
— 140 —
a Gausses. Au moment qu'on a pu passer le Dan übe,
j'ai envoyö un conseiUer de la r^gence avec 100,000 flo-
rins argent comptant pour tächer de trouver- avec les
capitaines des eercles les moyens de soulager les inond^s
et de leur fournir les moyens de subsister. C'est la seule
fa9on, vu la saison si avanc^e, de porter des secours et
de faire subsister cet hiver ces pauvres gens.
Les Russes ont remportd un avantage prfes de Kin-
burn sur les Turcs, qui avaient fait une descente; mille
Russes ont ^t^ tu^s, mais en revanche tous les Turcs,
au nombre de 4000, un seul homme exceptö, ont ^t^
massacr^s; les deux g^n^raux Suwarow et Reick ont ^t^
bless^s.
Adieu, mon eher fr&re; je vous embrasse, de m^me
que votre chfere ^pouse, de tout mon coeur ....
Recevez, je vous prie ici^ mon eher ami^ les- compli-
mens les plus vrais, les plus sinceres pour la f^te de la
Saint-L^opold, qui approche. Vous ne douterez pas de
la r^alit^ des voeux que je fais pour vous.
Ce 8 novembre 1787.
o« tÜLi^ Trfes-cher frfere. Voici les nouvelles de la semaine.
an Leopola.
Je viens de recevoir votre chere lettre; je suis enchant^
de la franchise avec laquelle vous me parlez des pi^ces
que je vous avais envoy^es, et certainement cette fran-
chise mutuelle est bien faite ä ^Carter pour toujours
toute zizanie que des ämes noires et viles voudraient
— 141 —
faire germer entre nous. Pour moi, je vous promets bien
sürement de Tobserver, et je vous conjure d'en faire de
ineme.
L'inoDdation est ^coulöe, mais eile a fait des dom-
mages tr6s-considärables dans tout le Marehfeld*). J^y
ai envoy^ tout de suite.un conseiller actif avec 100,000 flo-
rins argent comptant pour soulager les plus n^cessiteux
et veiller ä la restauration des maisons renvers^es. £n
Hongrie les d^gäts seront encore plus considörables. La
fuite du gibier existant dans les iles a 4ti teile, que
dans les faubourgs de Vienne il est enträ et mSme des
cerfs se sont r^fugi^s dans le jardin de Schönbrunn,
entrant la nuit par la porte du chäteau, puisque sur les
champs les paysans les chassaient avec des chiens.
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse, de merae
que votre chfere ^pouse ....
Ce 12 novembre 1787.
Trfes-cher frire. J'ai recu votre chhre lettre avec ^r®^\^
* an Leopold.
plaisir, et vous serez actuellement par le retour du comte
de Thurn inform^ plus en detail du voyage de votre
fiUe. Ici il n'y a rien de nouveau; pour le moment les
Fran9ais et les Anglais sont convenus de d^sarmer, par
cons^quent vana sine viribus ira, et la France a perdu
la Hollande, pour laquelle eile s'^tait donnöe tant de
peine et de soins. Le Roi de Prusse a jou^ un beau
*") „Marchtfeld^ schreibt Joseph.
1
~ 142 —
role, et si la France oublie l'avanie k laquelle il Ta sou-
mise, il faut qu'elle ait Teßtomac bon. A jeudi davan-
tage; je vous embrasse, de m^me que votre chere ^poustj',
de tout mon coeur
• • *
Ce 15 novembre 1787.
Joseph jj^j^ ^jjgj. fj,^Ye. Ce courrier va relever Tautre qui
an Leopold. ^
est k Naples, et en meme temps je vous envoie les
pieces interessantes de la semaine. II est charg^ aassi
d'ordres pour le commandement g^neral de Milan, de
tenir pr^ts les cinq bataillons qui s'y trouvent pour mar-
eher en Hotigrie a Tarmee. J'ai trouv^ cette disposition
bohne pour ne pas d^garnir la Boheme et la Moravie et
en partie TAutriche; qui ont leurs r^gimens ensemble
pour tout ev^nement. Aux Pays-Bas ils ont bien de la
peine encore a se ranger k Tordre et a nemplir les pr^ala-
bles, mais pourtant avec la patience on en viendra k
bout; c'est le clerg^ et les meines qui sont les plus re-
vöches. Pour ici je ne pourrais vous rien dire de neu-
veau; nous attendons toujours d'apprendre des äv^nemens
du cot^ de la Russie. L'arm^e doit s'etre avanc^e vers
Oezakoff; c*est le moment d^apprendre quelque affaire
d^cisive. La flotte a 6ii bien maltrait^e par un coup de
vent; et eile ne sera pas avant V6t6 prochain en ätat de
ressortir en mer. Adieu ....
— ,143 —
Ce 19 novembre 1787.
Tres-cher frfere. Je ne vous ai pas ^crit jeudi pass^, ^^ Leopow.
le courrier etant parti le meme jour, et j'ai oubli(5 bien
gauchement de vous envoyer par lui le papier ci -Joint
qui contient la minute du contrat de mariage de votre
fils avec la princesse. II est calqu^ en tout point sur le
mien avec ma premiere epouse ; il n'y a que pour la dot
et la contre-dot que j'en fais seul les frais comme pere
des deux, les parens de la princesse ne pouvant rien
lui donner. II en est de meme du trousseau que j'ai fait
faire. Je vous prie de me marquer si vous Tapprouvez
et öi vous autorisez que les ministres de Conference, sa-
voir le prince Kaunitz, Colloredo, Starhemberg et Lacy
le signent, comme on a fait aux autres, en votre nom.
Les parens de la princesse denommeront probablement
le prince Galitzin. Je leur ai fait envoyer le meme con-
trat pour avoir leur agr^ment et je crois qu^ls n'y trou-
veront rien k dire. Adieu ....
Ce 26 novembre 1787.
Tr^s-cher frfere. J*ai recu votre chfere lettre et suis ^^^^"^^
* an Leopold.
enchante des bonnes nouvelles que vous me donnez de
votre sant^ et de celle de votre ch^re Epouse. Je viens
de recevoir une lettre de FElecteur notre frere; il m'y
pronaet de venir ici vers le 20 de decembre pour donner
la b^n^diction nuptiale k votre fils. J'en suis enchante,
puisque je Taime et que je me fais une fete de le revoir.
— 144 —
II m'^crit quMI y aurait de la honte pour lui^ si sa hini-
diction ne füt aussi efficace que celle que FElecteur de
Tr^ves vous donna a Innsbruck. Pour la satififaction et
le bonheur il n'y a rien ä dösirer de mieux, mais pour
la vingti^me couche je ci'ois que Ton pourra se contenter
de beaucoup moins.
Adieu, mon eher ami; mon rhume se murit et parait
prendre congd. Je vous embrasse de meme que votre
cfaire (^pouse ....
Qe 29 novembre 1787.
Joseph Trfes-cher frere. Voici les nouvelles de la semaine.
an Leopold.
J'ai re9U votre chfere lettre et suis bien sensible k toutes
les assurances d'amitid que vous voulez bien m'y donner
et qui m'est si prdeieuse. De nouveau il n'y a rien pour
le moment; les Russes n'ont pas encore ddpassd leurs
fronti^res. Je Tavais prdvu^ parce que j'avais vu k Cherson
et en Crimde qu'ils n'^taient aueunement pr^par^s k
faire la guerre. Les vivres leur manquent et leurs rögi-
mens sont fort au-dessous du complet. Pour nous^ nous
sommes en place et prSts. Les mauvaises annöes consd-
cutives nous embarrassent beaucoup^ pour les fourrages
surtout. En farine nous sommes assez pourvus^ mais
Tavoine est d'une rarete incroyable et excessivement
chfere. Dans peu il faudra que nous nous d^clarions,
les trois mois ^coulant, qui sont stipul^s par mon trait^
däfensif avec la Russie^ apr&s lesquels Talli^ doit ddclarer
la guerre k celui qui attaque son ami. Cet hiver il n'y
— 145 —
aura plus rien k faire; si quelque coup heureux k entre-
prendre se präsente, alors tout est disposd pour ne le
pas n^gliger.
Je suis bien fächä qu'une vilaiue fluxion vous ait
empßch^ de partir pour Pise; vous y aurez une aimable
femme, qui est Milady Pen, Boheme de naissance, autre-
fois M"® Koelbel; eile est bien en mauvais ^tat de santd,
et je souhaite que sa poitrine se remette.
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse, de meme
que votre obere ^pouse, de tout mon coeur ....
Ce 6 d^cembre 1787.
Tres-cher frere. Voici les nouvelles de la semaine Jo^epii
an Leopold.
qui sont assez interessantes. Je vous envoie tout ce que
j'ai et vous verrez qu*en France*) tout est bien confus
*) Folgendes bisher unbekannte Schreiben der Königin Marie
Antoinette an Joseph vom 23. November 1787 liegt hier abschriftlich bei:
^Ce que vous me raandez snr ma soeur et son mar! me fait
grand plaisir, mon eher fr^re. Je crois bien qu'apr^s tous ces mouve-
mens vous voudrez r^tablir l'ordre avant de les renvoyer chez eu<,
et cela peut ^tre avantageux mSme pour eux; mais connaissant Tim-
patience naturelle de ma soeur, eile aura de Tinqui^tude tant qu'elle
ne verra pas de terme. J'esp^re de votre amiti6 que vous le lui an-
noncerez aussitöt que vous le pourrez.
„On a donn6 ordre de faire revenir les Fran^ais qui sont en
Tnrquie. Le Roi a M lundi au Parlement pour faire enregistrer deux
6dits; le premier pour des emprunts successifs necessaires pour rem-
bourser les emprunts qui ont une epoque fix6e pendant cinq ans. La
pluralit6 des avis a 6t6 pour Penregistrement; mais le Roi pr^side le
Parlement comme il pr^side son conseil^ sans etre astreint a conclure
k la pluralit6; en cons6quence, apres que tout le monde en a dit son
V. Arneth. Josepli n. Leopold. II. 10
— 146 —
et que, s'ils avaient plus de moyens, ils ne manqueraient
pas de mauvaise volonte. En Russie verba, mais peu
d'eflfets, et jusqu'a präsent, malgr<5 leurs gasconnades, ils
n'ont rien fait et ne feront rien de cet hiver, et peut-etre
trfes-peu au printemps. Ce prince Potemkin, tant qu41
sera chargä de cette besogne, on n'en pourra rien esp^rer,
Sans talens que pour Tintrigue et sans courage personnel,
on ne fait pas des grandes choses ä la guerre.
avis, le Roi, sans faire compter les voix, a dit: „J'ordonne Tenre-
gistrement.** Le duc d^OrUans a osi protester et dire que cette forme
6tait illegale. Le Roi etant parti avec ses fröres, fe duc d^Orl^ans est
rest6 au Parlement — c'est ce qui montre ses mauvais desseins —
a tir^ de sa poche une protestation ^crite d^avance. II n^a pu 1a
faire adopter en eutier, mais il est venu k bout de faire faire un arrSte
qui d6clare Tenregistrement illegal quant k la forme. Le Roi Ta exil6
k Villers-Cotterets avec defense de voir autres que ses parens et les
personnes de sa maison. Deux conseillers au Parlement, M. Freteau ^)
et rabb6 Sabatier, avaient parlS ind^cemment en pr^sence du Roi;
on les a conduits dans deux citadelles. Je suis fachte qu^on soit oblige
k des coups d^autorit^; malheureusement ils sont devenus necessaires,
et j^esp^re qu^ils en imposeront.
„Le second 6dit est pour donner la liberte civile des mariages
et baptemes aux protestans ; on croit qu'il passera sans difficulte. On
n*a pas eu le temps d^opiner sur cet objet. Ce qui me fait beaucoup
de peine, c'est que le Roi a annonce quMl tiendrait les Etats-66neraux
d'ici k cinq ans. II 7 a sur ce point une fermentation g^n^rale et
teile qu^on a cru que le Roi devait prevenir une demande direete, et
quVn prenant ses mesures et se rendant maitre du temps, il pourrait
empecber les inconv^niens de ces assembUes.
„Ma fille^) a la rougeole, mais si benigne et d^jä, si avanc^e
que je suis sans inqui^tude. Mes petita gar^ons^) se portent k mer-
veille. Adieu, mon eher frere, je n'ai que le temps de vous embrasser
de tout mon coeur."
^) Emannel Freteaa de Saint-Jast. Er wurde im Jahre 1794 gmllotinirt.
') Maria Theresia, geboren 1778, später Herzogin, von AngonlSme.
') Der Dauphin, welcher schon im Jahre 1789 starb, nnd sein jüngerer Bruder,
damals Herzog der Normandie, Ton 1789 Dauphin.
— 147 —
Nous avan9on8 ici au terme des noces ; dans un mois
cela va se faire. J'attends TElecteur pour le 20 ä peu
prfes. Le Prince et la Marie seront encore probablement
ici; vous verrez comment Trauttmansdorff envisage les
affaires aux Pays-Bas. Le mauvais exemple des voisins
et la pitoyable fa90ii comme s'y est pris le gouvernement
et surtout le g<5n^ral Murray, ont tourn^ les tetes, et il
faudra ou bien du temps ou une bonne occasion ä frapper
an coup d'autoritä pour les remettre.
Adieu, mon eher ami, je vous laisse juger si je suis
oceup^4 Ma toux ne me quitte pas non plus, et par con-
B^quent je mhne une vie miserable, ne sortant point,
privd de l'exercice auquel je suis habituä, k cause de
cette toux ....
Je vous embrasse, de m^me que votre chfere ^pouse,
de tout mon coeur ....
Ce 10 d^cembre 1787.
Trfes-cher frere. J'ai recu votre chhre lettre avee le ^T**^^,
» an Leopold.
contrat de mariage de votre fils que vous approuvez. Je
ne r^ponds pas de Fesprit de chicane du duc de Würt-
temberg qu'il n'y trouve quelque difficult^. Ici le temps
s'est mis au chaud, et toute la neige est partie. J'ai eu
un desagr^ment qui m'a actuellement pein^, et je vous
en parlerai tout au long jeudi. Ma sant^, k la toux con-
vulsive prfes, est bonne. Comme Fran9ois n'a pas ^t^
confirm^ encore, je crois qu*il serait convenable qu'avant
10*
— 148 —
son mariage il re9oive ce sacrement, et par cons^quent
dans les fetes de Noel il le sera.
AdieU; je vous embrasse, de meme que votre chfere
^pouse^ de tout mon coeur ....
Ce 13 d^cembre 1787.
an Leopold Trcs-chcr frfere. Voici les nouvelles de la semaine;
il y en a une qui n'y est pas contenue et dont je dois vous
informer. La guerre ^tant in^vitable, le moment que les
trois mois ätaient ^coul^s, auxquels, vu mes engagemens
avec la Russie, j'^tais obligä de ddclarer la guerre, les
Turcs en ^tant informös, je voulus par un coup d'^clat
et qui en meme temps aurait 6t6 de la plus grande
importance, la coramencer. Une intelligence que je m'^tais
depuis cinq annees m^nagöe dans Beigrade, me donnait
toute raison de croire que je pourrai surprendre cette
place importante et Temporter dans une nuit. Toutes les
dispositions furent prises en cons^quence; douze batail-
lons hongrois y furent command^s avec Tartillerie et tout
le n^cessaire, et dans la nuit du 2 au 3 cela devait
s*ex^cuter. Les barques ^taient pretes, le secret fut gard^,
rien ne transpira. J'avais outre mes affid^s dans la place
encore un officier masque; on s'embarqua eflfectivement
k Panowsce, deux lieues au-dessus de Beigrade, sur le
Danube. Les affid^s ouvrirent, comme ils en ^taient con-
venus, deux portes de la ville sans bruit pendant que
les Turcs dormaient, et il n'y avait qu'k entrer, lorsqu'une
nuit sombre avec du brouillard derangea tellement la
— 149 —
conduite des bateaux^ que non-seulement peu arriverent
ä temps au rendez-vous, mais que la plupart furent dgar^s
dans des iles k l'autre rive; enfin rien ne se fit ni se
tenta; mSme pas un coup de fusil ne fut tire, et nos affidäs,
ajant attendu vainement, passferent de ce cot^ en appor-
tant les cadenas des portes qu'ils avaient ouvertes; par
Ik les Turcs eu sont avertis^ et par cons^quent toute
esp^rance de jamais plus ravoir k temps et k si bon
marefaä cette importante place est manqu^e. J'en suis au
desespoir. Les g^n^raux de Gemmingen*), Alvintzy**)
et Nadasdy y ötaient les commandans. Cela fait, comme
vous imaginez bien, beaucoup de bruit et un bruit trfes-
d^sagr^able.
Adieu, mon eher frere, je vous embrasse, de m^me
que votre chere ^pouse, de tout mon coeur ....
Ce 17 decembre 1787.
Tres-cher frere. Je viens de recevoir votre chere ^^ Leopold
lettre. Je suis parfaitement de votre avis que le quart
de Tefficacit^ de la ben^diction du prince Clement k
votre ^gard suffirait pour Fran9ois5 au moins j'espere
que vous terminerez glorieusement vos travaux par cette
derniere couche et que vous ne courrez pas la meme
lice avec votre fils.
*) Sigmund Freiherr von Gemmingen, damals Feldmarschall-
Lieutenant; im folgenden Jahre Feldzeugmeister.
**) Joseph Freiherr von Alviiitzy, geboren 1735. Er starb im
Jahre 1810 als Feldmarschall und Grosskreuz des Theresienordens.
- 150 —
Nous avons ici le plus beau temps; point de froid
ni de neige. Je crois que le 20 arrivera TElecteur; je
Fattends avec grand plaisir; je voudrais que mes affaires
fussent ^galement agr^ables^ mais ce malheureux coup
manqu^ me met au d^sespoir. Aux Pays-Bas enfin les
choses commencent k s'arranger^ de fa9on que ma soeur
et le prince pourront y retoumer apres les noces. Adieu . . .
Ce 17 d^cembre 1787.
an Joseph. Tres-cher frere. C'est par le garde qui revient de
Naples que j*ai Thonneur de vous öcrire aujourd'hui. Je
preßte de cette m^me oeeasion pour vous remercier de
votre obere lettre du 6 de ce mois et de tous les papiers
importans qui y dtaient joints, dont je vous renvoie,
comme de coutume, la plus grande partie. Je suis tres-
föcb^ d'apprendre que votre toux continue encore; rien
n'est si desagr^able et incommode, et Tusage des opiats
et du quinquina a ^t^ le seul remfede qui m'en a d(51ivr^,
en buvant beaucoup de bouillons d'orge le matin.
Quant aux affaires des Pays-Bas, quoiqu'elles soient
termin^es, on voit que les tetes ^cbauff^es par les eccl^-
siastiques fermentent sous main, et il faudra bien du
temps jusqu'a ce qu'on pourra s'y fier entiferement, et
que la confiance rdciproque sera entiferement dtablie, On
voit que, surtout vers la fin, le gen^ral Murray s'y est
bien mal pris de toutes fa9ons.
Les affaires internes de la France sont bien singu-
liferes; le d^sordre extreme des finances, les besoins de
~ 151 —
TEtat; et le ton avec lequel les Parlemens parlent, et
la fermentation g^n^rale fönt pr^voir des cons^quences
singulieres. Les besoins de TEtat, les r^sistances des Par-
lemens ; le d^sir de convoquer les Etats- G^n^raux fönt
pr^voir peut-ötre un changement futur dans la Consti-
tution, qui ne pourra avoir lieu qu'avec beaueoup de
bruit. En attendant pour longtemps la France est hors
d'dtat de pouvoir nuire k ses voisins et ennemis, et il ne
lui reste que la mauvaise volonte et la duplicit^ qu'elle
a constamment mises en oeuvre vis-k-vis des autres Cours
et dont vous avez eu des preuves assez fr^quentes. II
est singulier que toutes les ddmarches que dans ces cir-
constances d^licates on fait ' faire au Roi, comme son
discours au Parlement, Texil du duc d'Orl^ans et de
deux membres du Parlement, sont toutes fausses, mar-
quäes au coin de la plus grande imprudence, surtout
dans le moment präsent, et aflFectant la duret^ et le des-
potisme, qui surtout dans le moment present ne sont
aueunement de saison et ne fönt que finir d'aigrir et de
lui ali^ner tous les esprits, et de les faire aller au but
qui parait dtre celui de ceux qui le conseillent d'amener
de la confusion, une rövolution et eflFervescence generale
et un changement dans la Constitution.
La d^marche inconsid^r<5e et extravagante du Roi
de Sufede dans le moment präsent est inconcevable , et
il faut avoir sa tSte pour faire une sottise pgreille.
Quant aux Russes, j'aurai toujours present ce que
vous m'avez marqu^ de Cherson du mauvais ^tat de
leur armöe, et je suis bien persuad^ qu'avec la meilleure
volonte de Tlmp^ratrice rien ne se fera cet hiver et peu
— 152 -
au printemps, par Tindolence du prince Potemkin, le
mauque de dispositions et röloignement dans lequel il
est difficile de rem^dier si vite a ce qui manque, sur-
tout en hiver. Votre declaration de guerre, le commen-
cement des hostilit^s et quelque coup que vous puissiez
encore porter aux Turcs cet hiver^ animera les Busses
et intimidera les Turcs^ toujours persuadäs que vous
n'agirez pas. Ils serout Obligos de diviser leurs forces
et perdront peut-Stre entierement Tenvie de faire la
guerre. Quant aux propositions de la France pour Tal-
liance avec les deux Cours imperiales; je crois que ce
n'est que leur impuissance präsente, Tenvie de gagner
du temps et de mieux tromper qui lui fait faire ces
propositions.
De Saxe j'ai toujours de bonnes nouvelles de ma
TWrese; eile se porte bien, est contente et se flatte
d'avoir bientot esp (Trance de succession^ et eile gagne
peu a peu sur son mari de lui oter diffdrentes d^votions
superstitieuses et inutiles auxquelles il dtait fort attach^.
Ayant vu par vos papiers que vous rappelez O'Kelly de
Saxe et que vous n'en avez pas 4t6 content, j'oserai
vous en demander les motifs, et qui sera nomm^ ä sa
place, pour ma rfegle.
Je preßte de cette occasion pour vous faire mes
tendres et respectueux complimens a Toccasion des cou-
ches de noife belle-soeur a Milan et des fStes de Noel
et de la nouvelle ann^e, vous priant de les agr^er et
d'gtre persuade du tendre attachement avec lequel je
vous soufaaite tous les bonheurs imaginables et Taccom-
plissement de tous vos d^sirs.
— 153 —
Nous avons ici M"*® Herbert*) avec sa famille, qui a
eti tr^s-fatigu^e, surtout ses petita eufans, de son voyage
sur mer, qui a 6i6 orageux, M™® Pen, que je ij'ai
pas encore vue, dtant un peu incommod^e, le baron
Fries et le chanoiDe Casti**), qui vieunent da Malte et
Sicile, et le comte de Richecourt arrivera aujourd'hui.
On attendait le comte Czernitscheff, mais on assure qu'il
a eu une esp^ce d'attaque d'apoplexie k Rome.
De Naples je ne sais rien de nouveau; les affaires
avec Rome ne s'arrangent point; le Fape ne nomme a
aucun des quarante-deux ^v^ch^s vacants, sous main y
fait susciter le peuple et surtout les grands, et la haute
noblesse par Galeppi, et le peuple dans les provinces
par les moines mendiants. On dispute sur la coUation
des abbayes que le Pape veut se r^server pour en gra-
tifier ses cr^atures, et le Roi voudrait avoir pour en
faire des commanderies militaires pour Fordre constan-
tinien, et pour Texemption des moines de la juridiction
des gdndraux a Rome. Le Pape l'aceorde pour les ordres
mendiants ; mais pas pour les moines ni les congr^ga-
tions qui possedent ou sont composc^es de noblesse* On
pense de donner sa retraite au marquis Caracciolo et de
faire le gön^ral Acten premier ministre, en lui donnant
tous les d^partemens. La Cour et le gdn^ral, qui n'est
pas aim^, sont entierement entre les mains de la France,
qui les flatte infiniment, et quoique la Reine assure qu'elle
ne se fie pas et ne d^fere pas aux conseils de cette
*) Gebome von Collenbach.
**) Der bekannte Dichter Johann Baptist Casti.
— 154 —
CouF; tous les faits prouvent le contraire; oii la flatte
de donner k son temps ses deux filles en mariage au
Dauphin et au comte de Normandie^ ce qui la flatte
infiniment. Les ofBciers fraD9ais vont commeneer k re-
monier leur miiitaire dans toutes ses parties, et quoique
j'aie plusieurs fois touch^ Farticle de ces officiers dans
mes lettres k la Reine, eile ne m'a jamais r^pondu sur
ce point. La r^forme prochaine des gardes italiennes et
des LiparotS; dont tous les officiers ^taient de la prä-
miere noblesse, rend toujours plus odieux le genöral
Acten a la no blosse. On avait rc^pandu le bruit en Italic
que la Reine comptait de donner sa fille en mariage au
prince de Farme, et qu'elle voulait le prendre chez eile
a Naples pour y finir son dducation, mais je crois ce
bruit faux.
Ce 24 d^cembre 1787.
an Leopold.
osep Tres-cher frere. J*ai regu deux de vos oberes let-
tres dont Tune par laposte et Tautre par le courrier-garde. Je
vous rends bien des gräces pour tout ce que vous me mandez;
je SUIS enchante que vous soyez content des nouvelles que
vous avez de Dresde. Le cas de votre fille Marie*) ferait
presque croire qu'on peut avoir aprfes Tinoculation encore
la petite veröle naturelle; apres que vous ia trouvez si
cbarg^e de celle qu'on appelle volante, je voudrais que
vous eussiez essaj^ de faire inoculer d'elle quelques en-
fans pour voir s'ils prendraient la petite veröle naturelle,
car pour lors la chose serait constatee.
*) Die Erzherzogin Marie Clementine, geb. 1780, gest. 1798.
— 155 —
Celui que j'envoie a Dresde k la place d'O'Kelly
est un comte Hartig*), fils unique de celui qui ^tait
ministre k Ratisbonne, un petit bossu; il a du bien, a
fait de bonnes ^tudes^ n'est pas sans connaissances; ses
fa90D8 sont un peu affect^es. II est mari^ k la fille*"")
de CoUoredo, qui est grand-maltre chez votre fils Fran9ois:
il a deux enfans; voilk tout ce que j'en sais, et je crois
qu'ils conviendront.
AdieU; mon eher frere, je vous souhaite bien une
bonne ann^e, de m^me qu'k votre chere ^pouse^ et en
vous embrassant je suis pour la vie votre ....
Ce 27 d^cembre 1787.
1q
an Leopold.
Trfes-cher frfere. Je vous joins ici les nouvelles de la ^^*^
seuiaine. Hier Fran9oi8, aprfes avoir fait pendant deux
J^Urs une retraite spirituelle et une confession g^n^rale,
^ Otö confirm^ par le cardinal comme archeveque***). II
^ ^res-bien saisi Tesprit de la chose. Le mariage reste
to^^oiirs pour le 6 janvier.
-Adieu, mon eher ami; recevez, de meme que votre
ch^r^ ^pouse, les complimens les plus sincferes pour la
noxii-v^^Ue ann^e. Je vous embrasse et vous prie de me
croi:i-^:a pour la vie . . . .
*) Franz Anton Graf Hartig, geboren 1758, gestorben 1797.
) Eleonore, geboren 1764.
"**) Cardinal Graf Christoph Migazzi, Erzbischof von Wien.
1788.
Ce 7 janvier 1788-
Joseph Trfes-cher frfere. Le colonel et adjudant g^n^ral
an Leopold. •' ^
Rollin*) vous remettra celle-ci; je Tai choisi expressä-
ment pour vous porter la nouvelle du mariage c^ldbrd
hier de votre fils, puisque, ayant 6t6 attachd a sa per-
sonne; il pourra vous donner tous les details de bouche
que vous pourrez d^sirer et qui ne sont que satisfaisants.
Les deux ^poux se conviennent, paraissent contents et
tout s'est tres-bien passe« J'ai ete tres-content de Frangois;
il s'est tres-bien tir^ de cette embarrassante cerömonie. . . .
Je suis bien fächö contre ces maudits Turcs^ qui
m'ont priv^ par leur lev^e de bouclier du plaisir de
vous voir avec votre chfere ^pouse et vos autres quatre
fils k eette ceremonie apres Päques ici. Cela aurait fait
toute ma satisfaction ; mais ainsi c'est partie remise pour
*) Franz Xaver RoUi», Oberst und Generaladjutaut des Erz-
herzogs Franz,
— 157 —
plus tard, mais jamais plus une occasion si brillante ne
se prdsentera.
L'Electeur a tr^s-bien officio, et ils sont düment et
loyalement mari^s. L'affluence du monde; tout cavaliers
et dam es, dtait prodigieuse, et comme il fait chaud au
lieu du froid que la saison comporterait, le souper, qui
n'a pas durd longtemps; a iti terrible pour la chaleur.
Enfin k sept heures la fonction a commenc^ et k huit
beures et demie les ^poux ^taient ebez eux
Ce matin k neuf beures TElecteur nous a dit la
messe accoutumde dans la cbapelle priv^e. Nous dine-
rons en famille^ et le soir il y a tb^ätre gratis et bal
pour 4000 personnes, dont 500 soupent k^la fois, tous
invit^s.
Les ^poux paraissent Contents; ils n'ont pas beau-
coup dormi, mais cela se regagnera les autres jours.
Adieu^ je vous embrasse de tout mon coeur
/
Ce 10 janvier 1788.
Tres-cber frfere. J'ai re9u votre cbfere lettre et suis ^n^Leopoid.
cbarm^ que vos enfans sont r^tablis. Ici nous avons
terrainö bier nos fetes avec un grand bal de cour tout
k fait fort bien et en ordre, et il me parait que toutes
les classes des personnes ont ^t^ satisfaites et contentes.
Votre fils "parait tres-gai et content de sa femme , eile
aussi.
Aujourd'bui il y a op^ra et redoute masqu^e. L'Elec-
teur part aprfes-demain le 12, et la Marie avec le prince
— 158 —
le 13. Nous voilk seuls derechef; cela ne durera pas long-
temps, car les derniers jours de fövrier je partirai avec
Fran9ois pour rarm^e, et pour disposer d'avance toutes
les choses pour pouvoir a la fin de mars commencer
nos Operations.
^dieu, mon eher ami, je vous embrasse, de m^me
que votre chfere ^pouse. Croyez-moi pour la vie votre • . . .
Ce 17 janvier 1788.
Joseph Trfes-cher frfere. C'est avec bien de la satisfaction
an Leopold.
que j'ai re9u hier par le courrier Giorgi votre chfere
lettre et la bonne nouvelle de Theureuse d^livrance de
votre chfere ^pouse. Que le petit Rodolphe*) fasse la
clöture de votre fertility. Dix gar9on8 vivants, dont un
ddjk marie, sont bien suffisants pour assurer la succession
de la maison.
Je vous joins ici les nouvelles de la semaine. L'hiver
est arrive enfin; depuis deux jours nous avons de la
gel^e et de la neige. Les maladie» sont si mod^r^es a
Tarmöe en Hongrie, que dans leurs quartiers^ en pleine
paix; les r^gimens en auraient eu autant. Mes ^quipages
partiront a la fin de ce mois, et moi probablement les
Premiers jours de mars. U faut que nous coramen9ions
le plus tot possible la campagne ; le 20 mars toute Tarmäe
sera rassembl^e en Peterwardein et Futak.
*) Dies war auch wirklich der Fall.
— 159 —
AdieU; mon eher ami; je suis trfes-content de Fran-
9ois dans son mariage; il n'y a rien de trop ni de trop
peu et ils s'aiment beaucoup. Vous seriez ^tonn^ du cou-
rage qu'il a pris k ce sujet.
Je vous embrasse tendrement et vous prie de me
croire pour la vie votre ....
Je vous envoie ici le contrat de mariage que j'ai
sigD^ et que je vous prie de signer de m§me; en me le
renvoyant ensuite.
Ce 24 janvier 1788.
Trfes-cher frere. Je suis bien ^tonnä de voir paTan^eo^oid
votre chfere lettre que le 14 vous n'aviez pas encore
regu mon courrier ni le colonel Rollin avec la nouvelle
des noces; les mauvais chemins ou les neiges les doivent
avoir arrSt^s. Ici il n'y a rien de nouveau; le 9 fövrier
se fera a Constantinople la d^claration dont je vous
joins copie; et par cons^quent les hostilit^s pourront com-
mencer. On avait imagin^ une nouvelle entreprise sur
Beigrade, mais lorsque les troupes ätaient toutes en place^
un ouragan de vent en a empSchä Tembarquement , et
par cons^quent chacun est retournä derechef chez soi;
Sans coup förir. Cela est fächeuX; et voyant Tesprit de
vertige^ j'ai ordonn^ que Ton ne pense plus k autre
exp^dition, et que l'arm^e elle-mSme au printemps s'en
occuperait.
— 160 —
AdieU; mon eher frire; je vous prie de faire mes
complimens a votre ch^re äpouse et de me croire pour
la vie votre ....
Ce 28 janvier 1788.
an Leopold. Trfes-chcr frfere. J'ai ^t^ enchant^ de voir paf votre
chere lettre que vous avez 4t& content de moi et de ma
fa9on d'agir vis-ä-vis de votre fils. J'avais expr^s choisi le
colonel RoUin, qui le connait, pour qu'il p^isse de bouche
vous donner tous les d^tails que Ton ne pourrait jamais
suffisamment rendre par la correspondance. Je suis sür
qu'il sera parfaitement heureux de la fa9on comme vous
avez la bont^ de le traiter, et qu'il ne pourra que rendre
la meme justice ä vos fils que leur rendent tous les
etrangers, dont j'ai vu plusieurs enthousiasm^s, surtout
de Ferdinand. Je d^sire bien de tout mon coeur que la
sant^ de Charles se raffermisse au point ä ti'avoir plus
de ces attaques; il promet infiniment, k ce que tout le
monde m'assure.
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse et vous prie
de me croire pour la vie votre ....
Le 9 fövrier 1788.
Leopold Tres-cher frfere. C'est le garde qui revient de Naples,
an Joseph. •
qui VOUS remettra cette lettre ; je ne saurais assez vous
— 161 —
remercier de tout ce que vous voulez bien me dire
d obligeant et gracieux dans votre chere lettre du 28 du
mois passö relativement ä mes fils. Le colonel RoUin^
qui ä prdsent sera ddja arrive k Vienne, pourra' vous
donner sur leur compte les notiees les plus d^taill^es,
et surtout sur la sant^ de Charles qui pr^sentement est
fort bonne. Je d^sire uniquement que, lorsque j'aurai
Fhonneur de vous les prösenter, vous en puissiez etre
content.
A la rdserve de la bonne santd de mes enfans, je
n'ai absolument rien de nouveau k vous mander. De
Naples les changemens dans le militaire, la r^forme des
Liparots et gardes italrennes, Fenvoi des gardes suisses
en Sicile, fönt beaucoup de bruit et des m^contens et
des ennemis au gön^ral Acten. On veut aussi rem^dier
aux abus dans les fitiances, ce qui ne sera pas ais^, et
abolir le systfeme par lequel le gouvernement dans Na-
ples fournit les vivres toujours au meme prix au peuple,
en commengant par Thuile. Les prix hausseront tout ä
coup, et dans une ville comme Naples la populace m^rite
d'dtre comptöe pour quelque chose.
Les affaires avec Rome, qui fönt tenir quaratite öve-
chds vacants, causent aussi du bruit. La noblesse, vu
les charges, b^nöfices, abbayes, cardinaux ^tant toute
attachöe a Rome, et le bas peuple ignorant et supersti-
tieux, soufflö par les meines qui, fort nombreux, ont
beaucoup de credit dans ce pays sur Tesprit du peuple.
La Reine parait toujours fort contente du gön^ral Acten
et soutenir haut k la main ses projets, quoiqu'il täche
de s'attacher plutot au Roi. La Reine parait k present
▼. Arneth. Joseph n. Leopold. II. ü
— 162 —
fort inquifete de la giierre avec les Turcs, croit leur de-
struction totale süre et est fort occup^e des changemens
que cet ^v^nement pourrait procurer dans le Systeme de
FEurope, et, quoique dirig^e par Acten, qui est tout k
la disposition de la France, croyant en avoir besoin pour
se soutenir en place, eile est fort m^contente de cette
Cour, et piqu^e, depuis qu'un courrier exp^diö de P^ters-
bourg par le duc de Serra Capriola*) a apportd la nou-
velle des propositions que M. deSegur**) y a fait par ordre
de sa Cour sur une esp^ce d'alliance ou Convention entre
la France et les deux Cours Imperiales sur les affaires
avec les Turcs. La Reine n'en avait ^t^ nullement in-
form^e de France et pr^tend que cette Cour, pour la
gagner, lui avait promis ci-devant de ne faire aucune
ddmarche en politique, et surtout pour les affaires avec
les Turcs, sans Ten avertir pr^alablement. La Reine croit
d'avoir ^te trompde et en est tres-piqu^e. Pour moi, je
crois que jamais la France ne lui aurait fait cette pro-
messe, mais que cette proposition aura ^t^ hasard^e et
avanc^e par Mr. de Brissac pour se faire valoir, un men-
songe ne lui coütant rien.
La Reine parait jusqu'k präsent fort contente du
Baron Thugut.
*) Neapolitanischer Gesandter in St. Petersburg.
**) Graf Ludwig Philipp S^gur, französischer Gesandter in
Russland.
— 163 —
Ce 14 fövrier 1788.
Tres-cher frfere. J'ai reju votre chere lettre par ^^ ^ ^j^
Rollin et une autre par la poste assur^e. Rollin m'a paru
dans ie peu de moments que j'ai eu roccasion de lui
parier, p^n^tr^ de toutes les bont^s que vous aviez eues
pour lui, et enchant^ de vos enfans. Le präsent pour
rArchiduchesse est de toute beaut^, de m^me que celui
pour M"® de Chanelos. J'aurais seulement souhaitd que
vous eussiez ajoutö un petit mot par äcrit qui aurait
donnd la vraie valeur au prösent de cette personne au-
cunement guid^e par Tintdr^t, mais seulement par Thon-
neur et rattachement.
Je vous joins ici les nouvelles de la semaine. Vous
y verrez le triste citat des arm^es russes. De notre cot^
ehez de Vins en Croatie les hostilitc^s ont commene^, nous
avons oecupd deux ehäteaux qu'il a fallu brüler avec perte
de quelques hommes ; dans peu Ton aura plus de nouvel-
les, comptant faire occuper toute la partie jusqu'a Tünna.
Adieu ; je vous embrasse, de meme que votre obere
^pouse, de tout mon coeur
Ce 21 «vrier 1788.
Tres-cher frere. Voiei les nouvelles de la semaine. ^^^^^^
an Leopold.
On vous les enverra r^guliferement de ma chancellerie
qui reste k Vienne, et c'est k celle-lk aussi, comme jus-
qu'k präsent, que je vous prie d'adresser toutes les lettres
11*
- 164 —
et paquets a mon adresse. Les papiers que vous me ren-
voyez apres les avoir lus, je vous prie ^e les mettre dans
un paquet ä part et votre lettre dans un autre couvert;
cette dernifere me sera envoy^e toujours tout de suite^
les papiers resteront k Vienne.
Je vous joins ici une lettre pour la Reine de Naples^
que je vous prie de lui faire passer sous votre adresse
ou par le courrier d'Espagne ou autre bonne occasion.
Ses eraintes, les cons^quences k perte de vue qu'elle
tire sur un projet d'alliance avec la France et la Russie,
sont des röves creux; d'abord, hors la France qui nous
en parle, nous n'en avons, ni Tun ni Tautre, envie, pour
ne pas jalouser les autres puissances et les engager ä
des demarches contraires ä nos int^rdts, La t^te toume
a ma soeur et eile la ferait toumer aux autres, si on
prenait pour argent comptant les cons^quences que sa
vivacitö lui fait apercevoir comme des choses existantes.
Je pars le 29 et vous joins ici ma marche-route.
Dans cette saison cela sera un peu penible, devant aux
frontiferes tout faire ä cheval. C'est pourquoi je n'ai os^
prendre votre fils avec ; il me suivra le 14 mars et se
rendra droit au quartier gön^ral k Futak, oü il m'at-
tendra.
Adieu; je vous embrasse de tout mon coeur et serai
pour la vie vötre ....
165 —
Le 25 f^vrier 1788.
Trfes-cher frfere. Je viens de recevoir votre ehere ^^^/^^^
an Joseph.
lettre du 14 de ee mois et les papiers qui y ^taient
joints dont j'ai Thonneur de vous renvoyer une partie
comme de coutume. Je suis bien charmd que vous ayez
et6 content des rapports que le colonel Rollin vous a
faits de mes enfans, et que vous ayez approuv^ le prä-
sent que nous avons envoy^. Quant k celui de M™® Chan-
elos, j'dtais intentionne de lui ^erire en mSme temps pour
la remercier de notre part de toutes les peines qu'elle
s'est donn^es, mais je craignais de Fembarrasser et que
peut-etre cela puisse paraitre une affeetation de rna part.
Ma fenime y supplöera aujourd^hui, et pour eile et pour
moi, en lui r^pondant k sa lettre.
L'^tat des arm^es russes, par ce que j'ai vu, est
bien pitoyable ; il n'est pas ä concevoir que le prince
Potemkin qui a toute autorit^ en main, ne cherche
{las ä mettre tout sur un meilleur pied et laisse p^rir
les troupes par les maladies. II est heureux qu'elles aient
k faire avec les Turcs, ne sachant profiter de leurs mau-
vaises situations et dispositions. II faut esp^rer que jus-
qu'au printemps leurs dispositions seront meilleures, que
leurs armees avanceront davantage, et que, les hostilitös
etant une fois commeneöes, on ne vous laissera pas sur
les bras a vous seul toutes les forces des Turcs.
Le rescrit de Flnip^ratrice au prince Galitzin que
je vous renvoie ci-joint, sur les propositions de la France,
me parait aussi singulierement tourn^, et cette Cour ne
s'est jamais döclar^e positivement de ne vouloir point
— 166 —
laisser profiter le Roi de Prusse a roccasion de cette
guerre, ce qui serait, je crois, le point essentiel.
De Naples vous aurez d^ja appris la nouvelle grossesse
de la Reine qui en est fort incommodee, ayant eu diffö-
rens chagrins. Le g^n^ral Salis, entierement Fran9ais,
est entierement uni avec TAmbassadeur de France^ et le
g^ndral Acton qui depuis un certain temps ne manage
plus la Reine comme ci-devant^ se voyant assurä da
cotö du Roi et appuy^ par la France, entre les bras de
laquelle il s'est entierement jeii, va plus rarement chez
la Reine, la contredit souvent, Taffecte, et meme anime
souvent sous main le Roi ä la contrarier. Les arrange-
mens militaires ont commencä par, la r^forme des ca-
detS; Liparots, gardes italiennes et gardes suisses, de
m^me que des autres quatre r^gimens suisses. Celles des
cadets et Liparots ont 6t6 ex^cut^es, les autres ne sont
encore qu'ordonndes. Comme les officiers des corps sus-
dits sont tous de la premiere noblesse, ils ont poussö
les hauts cris. Le gdn^ral Salis a eu peur et a dit p\f-
bliquement qu'il ötait bien fächd de devoir faire tant de
mal ä tant de personnes, mais que c'ötait la Reine qui
le voulait absolument. La Reine Ta su et avec sa viva-
citö accoutum^e le lundi gras au bal de Cour en public
eile a attaqud le gdn^ral Salis, lui a reproch^ ses pro-
pos et dit publiquement qu'elle dösapprouvait tous ses
projets et r^formes, et que tout cela ne venait pas de
lui. Cela a causa un grand bruit au bal, le g^n^ral
Salis a demand^ son cong^ ; soutenu par TAmbassadeur
de France il a nolis^ un bätiment pour partir. Le genö-
ral Acton a ofFert de donner sa d^mission, tout cela pour
— 167 -
animer le Roi, lequel a donnd un dispaccio par ^crit qui
a ätd publik; par lequel il approuve la conduite du g&ni-
ral Salis, eonfirme les röformes et projets qu'il a propo-
sds, et d^savoue presque formellement les propos de la
Reine. II a publiquement presque fait des excuses et
beaueoup graeieuses. Le g^ndral Salis qui; ayant obtenu
cette satisfaetioii; reste a Naples^ et comme il est ennemi
personnel du eolonel Brissae, et qu'il a soupgonn^ que
celui-ci pouvait avoir rapport^ ses propos ä la Reine, il
a engagö le göndral Acton ä le faire arreter publique-
ment et le mettre au ehäteau de FOeuf, oü il a reju Tordre
du Roi de sortir pour toujours de ses Etats. Cette affaire
devenue publique, a extremement afflig^ la Reine qui
est outr^e contre la France et parait r^solue k se rap-
procher de l'Espagne. Elle eonsidfere cette afFaire comme
un affront personnel qu'on lui a fait, et est outr^e contre
le gön^ral Acton ä. qui eile attribue toute cette afFaire.
EJle a d^clarö ne plus vouloir venir k Naples jusqu'au
mois de juin, ni ne vouloir recevoir des placets de per-
sonne pour les affaires militaires. Elle affecte publique-
ment de ddsapprouver ces r^formes, et comme le public
n'en est d^jk que trop mdcontent, il est k craindre que
la Reine ne se pröpare des chagrins ult^rieurs, surtout
si on röussit k animer le Roi contre eile et k le rendre
jaloux de Tinfluence de la Reine dans les affaires. Je
täche autant que je puis de lui öcrire et de la prier de
se mod^rer, et de la cons eiller pom* lui dviter des cha-
grins ultdrieurs, qui pourraient k la fin avoir des consd-
quences s^rieuses et reelles pour eile, mais sa vivacite
ne lui laisse pas toujours attendre qu'on la conseille.
— 168 —
J'ai cru devoir vous prevenir en dötail de toute cette
affaire qui en soi-meme est peu de chose, mais qui peut
avoir avec le temps et le caraetere violent et soup9on-
neux du Roi, et rambition dömesur^e du gönöral Acton,
des suites dösagr^ables.
Je crois devoir ^galement vous prevenir qu'une aven-
turiere qui se dit comtesse de Falkenstein et fille natu-
relle de feu S. M. TEmpereur, ägöe de 45 ans, bien
dlev^e, et qui parle bien quatre langueS; voyage en Italie
avec Equipage, domestiques et suite. Elle porte Tordre
de la eroix^ la toison d'or, et un ruban semblable a ce-
lui de Marie-Thdrfese. Elle est entour^e d'aventuriers de
toute nation, et vit de son libertinage. Je c^oifi^ que c'est
la meme qui a j^te en Espagne et en France. Elle est
a Rome ; si eile passe par ici, je tächerai de savoir au
juste qui eile est.
Ce 28 f^vrier 1788-
Joseph Tres-cher fr^re. C'est le dernier moment avant mon
an Leopold.
d^part que je vous ^cris. Je vous prie de faire parvenir
cette lettre par une occasion sure entre les mains de
Thugut. 11 y a une lettre et r^ponse k la Reine, qu'elle
ne veut pas que meme le Roi sache qu'elle Ta re9ue.
Rien ne presse ; vous pouvez attendre une occasion.
Mais une autre chose i| m'importe infiniment de vous
faire connaitre ici. Vous savez ce que c'est qu'uue guerre,
les hasards auxquels chacun est expos(S. Cette guerre avec
cela est toujours accompagnäe de nombreuses maladies
epiddmiques, et qu'en partie le climat, les mar^^is, les eaux
occasionnent. Je ne suis qu'un individu, et par consä-
- 169 —
■
quent sujet ä tous ces ^v^nemens. Pour ma personne,
je n'y pense pas et je subirai le sort de ma destin^e,
niais ma charge, mon ätat^ ma patrie me tiennent a eoeur,
j'en eonnais la composition, et je dois vous conjurer,
mon eher frere et ami, de ne pas vous arr§ter k aucune
consid^ration quelconque, raais de prendre vos arrange-
mens d'avance de fa9on ä pouvoir tout de suite k la premiere
nonvelle que vous aurez de quelconque accident qui me
sera arriv^, soit blessure ou meme maladie, fievrc etc.,
et k laquelle je ne pourrais vous öcrire moi-meme, mais
que je laisse d^jk les ordres les plus pr^cis de vous
eu instruire, partir et vous rendre ou k Tarmee ou a
Vieone sans perte de temps, car je eonnais notre com-
Position, et combien un chef est n^cessaire. Cette assu-
rance de votre part peut seule me tranquilliser et m'a-
guerrir k tous les dvdnemens. Que de petites raisons ne
vous en empechent pas, mais sacrifiez le qu'en dira-t-on
a mon d^sir, k mon amitiö qui vous en conjure, et soyez
persuad^ que, malade, je ne soupirerai qu'apres le mo-
ment de vous voir et de savoir mes affaires importantes
entre vos mains, auquel elles appartiennent, pour lequel
je travaille, et qui a tous les talents pour les bien g^rer.
La confusion qui sans cela existerait k Tarm^e et
partout, serait inexplicable, et les pertes qui cn pour-
.raient rejaillir, incalculables. J'y compte donc pour sür,
et dans cette esp^rance je pars pour ma destin^c avec
courage et tranquillitd, en vous embrassant tendrement.
Croyez-moi pour la vie votre ....
— 170
Le 10 mara 1788.
anT^ph Tres-cher frfere. Je viens de recevoir votre chire
lettre du 28 du mois passä avec les papiers qui j ötaient
joints, et que selon vos ordres j'ai renvoy^s a votre
adresse daDS un paquet k part. Quant k la lettre ä Thu-
gut que vous m'avez adressee, je n'ai pas manqu^ de
la lui faire parvenir tout de suite par une occasion süre,
Sans que cet envoi puisse se savoir ou donner du
soupjon.
Quant ä ce que vous avez bien voulu me marquer
ä roccasion de votre döpart pour Farm^e, je ne puis
que vous t^moigner toute la reeonnaissance que je vous
dois pour cette nouvelle marque d'amitiä et confiance
que vous voulez bien me t^moigner encore en cette
occasion. J'en suis p^n^tr^ et ne scns que trop a com-
bien de dangers vous allez exposer votre santä, aux
p^rils et öv^nemens de la guerre, et surtout aux mala-
dies en et^ d'un climat malsain et dangereux, et quoique
je me flatte que la Providence pr^servera votre impor-
tante santä de tout accident, je me flatte que vous vou-
drez bien r^fl^chir combien votre sant^ est essentielle,
pr^cieuse et n^cessaire k la monarchie, k FEurope et au
bien de TEtat pour lequel vous Texposez, et qu'en con-
s^quence de ces r^fiexions vous voudrez bien penser et .
tächer de vous la menager et conserver pour les occa-
sions importantes, et quoique je me flatte que certaine-
ment je ne serai jamais dans le cas de la savoir altör^e,
ndanmoins en cons^quence de vos ordres j'ai fait toutes
mes dispositions de fa9on k pouvoir partir d'ici tout de
— 171 —
suite, si jamais le besoin Texigeait. Mais quoique vous
me laissiez le choix d'aller a Vienne ou vous trouver a
Tarm^e; je me flatte qae vous voudrez bien etre per-
Buad^ que^ si inalheureusement vous ätiez malade, tout
mon empressement serait uniquement de venir vous trou-
ver et vous revoir et prendre vos ordres. Mais quoique
je me flatte que ce cas ne se donnera certainement pas^
DÖanmoins j'ose vous prier de m'informer des personnes
que vous avez chargees de m'^crire dans le cas que je doive
venir, et comment cet ordre me parviendra, pour öviter
le cas que mon empressement a vous ob^ir puisse m'engager
sur une fausse nouvelle ou quelque lettre non authen-
tique, a partir d'ici, faire une fausse d^marche qui puisse
ne pas vous plaire ou m'engager a faire sans n^cessite
un voyage et course forc^e qui, vu mes circonstances et
affaires, aussi juste qu'elle serait sans cela, serait fort
dösagreable sans n^cessitä ; enfin, pourvu que je sache
par qui et comment, le cas öch^ant, Fordre et avis devra
me parvenir pour que je puisse le croire authentique et
lägal. Vous pouvez compter pour le reste sur mon em-
pressement a vous tdmoigner mon attachement, k vous
obdir et ä servir l'Etat, et qu'aucun qu'en dira-t-on ou
raison secondaire pourra me retenir.
J'ose en meme temps vous supplier de vouloir bien
ordonner a quelqu'un de me communiquer, outre les ex-
traits des affaires dtrangeres et le protocole du conseil
d'Etat, ce qu41 y aura de nouveau dans les affaires de
la guerre, et avec la Russie et la France pour ces memes
affaires, ces objets dtant pour moi de la plus grande im-
portance, pour rester au fait et courant des affaires si
— 172 —
importantes, n'^tant sans cela dans le cas d'avoir les
nouvelles que par les gazettes.
Ma femme me charge de vous präsenter ses respects
et sc porte, gräoe a Dieu, a merveille, de m^me que
tous mes enfans.
Je viens d'apprendre que le g^n^ral Acton a donn^
des ordres ä tous les ports du royaume de Naples, et
surtout au Viceroi de Sicile, pour ne pas admettre dans
les ports plus de trois vaisseaux de guerre russes ä la
fois, et pour ne pas y permettre d'armemens d'aucune
espece, pour difHculter k leurs armateurs les ^quipemens,
et surtout aux Qrecs et Albanais^ et enfin pour emp^-
eher sous main et sans paraitre, tout ce qui peut regar-
der les armemens maritimes^ lettres de marque, et on
croit que tout cela provient de ses relations intimes avec
TAmbassadeur de France, qui dit publiquement que la
France laissera afFaiblir par deux campagnes les Cours
Imperiales, pour venir ensuite leur dicter la loi et pres-
crire la paix et ses conditions.
Futak, le 27 mars 1788.
an Leopold «^ *' TG^ix ici votro chcrc lettre en rdponse k la
mienne. Je vous rends bien des gräces de tout ce que
votre amitie se plait a m'y dire, et je suis parfaitement
tranquille par cons^quent, sachant que vous prendrez et
remplirez bien ma place k tout övdnement. Si je n'^tais
pas en ^tat de vous ecrire ou faire ecrire par un cour-
rier qu'on vous enverrait expres, je charge mes quatre
— 173 —
secr^taireS; qui sont avec moi ä Tarm^e, de vous ^crire
de la part du cabinet, et ne croyez donc pas k autres
nouvelles qu'a une qui vous parviendrait aussi lögaleinent.
Votre fils Be porte a merveille, de meme que moi,
malgrö que j'ai eu des chemins faorribles dans ma tour-
nie, mais j'ai une ^pid^mie dans mes chevaux ; il m'en
sont erev^s 63 ddjk, et il n'y a pas moyen d'en arreter
les progres. Personne n'en peut deviner la raison et le
rem&de.
Vous recevrez exactement tous les papiers de Vienne,
et en vous embrassant tendrement, de m^me que votre
chire ^pouse, je serai toujours votre ....
Le 13 avril 1788.
Trfes-cher frfere. C'est bien avec le plus vif et sen- i^eopoia
an Joseph.
sible plaisir que j'ai re9u votre ch&re lettre du 27 du
mois passö de Futak, enchant^ par Ik d'Stre rassur^ sur
votre heureuse arrivöe et sur la fatigue de la tourn^e
que vous venez de faire. Je vous rends raille gräees pour
tout ce que vous voulez bien m'y dire d'obligeant et
gracieux, et ai compris vos ordres pour tous les cas
possibles. Ici pous n'avons absolument rien de nouveau,
hors qu'k Naples on continue toujours k chicaner la
Reine qui est un peu incommodde dans sa grossesse, et
quoiqu'elle ne puisse pas douter que le g^n^ral Acten
n'ait ^t^ le moteur de tous ces chagrins, il est rentr^
chez eile en gräce et fait tout son possible pr&s du Roi
et de la Reine, pour les animer contre Tliugat et le cul-
— 174 —
bnter. II y a eu une brouillerie entre la Cour de Naples
et les V^Ditiens pour une affaire particuliere; et les n^-
goeiations avec Rome sont entierement rompues k la
suite d'une lettre ^crite au nom du Pape par le cardi-
nal Buoncampagni au ministre Caraccioli k Naples^ qui
est on ne peut pas plus grossi^re et insultante pour le
Roi; dans des termes dont on ne se sert pas d'ordinaire
entre des personnes seulement bien ^lev^es.
Je vous prie, continuez-nous vos bont^s, et soyez
persuadö du sincere, tendre et respectueux attachement
avec lequel je suis ....
Futak, le 16 avril 1788.
josepii Tres-cher frfere. J'ai recu votre obere lettre avec un
an Leopold. *
plaisir infini, et c'est par la ci-jointe que je r^ponds k
Celle de Thugut que vous avez bien voulu m'envoyer;
je vous prie de la lui faire passer*). Ici nous nous portons
*) Joseph an Thuput.
Futak, ce 12 avril 1788.
Votre lettre du 4 mars m'a 6t6 envoy^e par mon frfere le Grand-
Duc. J'y vois avec peine les desordres qui rSgnent "& Naples, et les
chagrins in^vitables qu*en doit ressentir la Reine, mais h. ce mal il
n*y a pas de rem^de, car il prend sa source dans le moral et en
grande partie dans le pbysique de la Reine. Ce serait peine perdue
que de la vouloir conseiller, et je suis trSs-d6cid6, par rexp6rieiice
que j*ai faite, de me borner simplement aux compliments d^amitie, et
de ne Ini plus parier d* affaires, par la raison qu'elle ne fait jamais
usage de mes avis, et que gdn^ralement eile ne veut plus le soir ce
qu'elle d^sirait le matin. Je vous conseille, mon eher baron^ d^agir de
— 175 —
tous bien. Apres avoir fini ma tournde des frontieres et
de toutes les places^ je pars pour Semlin oü le camp
s'assemble aujourd'hui. Peu aprfes se fera une expedition
sur SabacS; a laquelle j'assisterai avec votre fils, et ce
sera la premifere fois qu'il verra rennemi. II se porte a
merveille et parait avoir bonne envie du mötier.
Adieu
meme et de vous mettre fort sur la r^serve, car je sais trfes-positive-
ment que le Roi a ^te pr6venu contre vous, qu*il croit que vous con-
trecarrez ses arrangemens militaires, qu^en instigant d^autres vous
faites Timpossible ponr d^crier Acton et diminuer son credit, qu^
c'est vous qui mettez la zizanie entre lui et la Reine, enfin qu'il
n^est nnllement content de vous, en qui il n'anrait jaraais de confiance.
Voilä le point de vue sous lequel les intrignes, dont vous
vons plaignez tant, ont fait envisager vos d6marches. Je sens fort
bien les d^sagr^mens que vous devez en ressentir, mais il vous sera
facile d*y rem^dier. Vous avez trop d'esprit pour ne pas trouver
Cent occasions de convaincre le Roi du contraire, et d'engager la
Reine de se joindre avec vous toujours au parti le plus en credit,
par la vous deviendrez le confident de tous et serez regard6 comme
lenr partisan.
Je sens que peut-@tre le bien ne se fera pas, mais au moins
vons serez inform6 du courant, et k mSme de donner ä la Reine des
conseils propres k se tranquilliser, ce qui m^importe plus que la pros-
p6rit^ du royaume de Naples, dont il n*y aura sans cela point de
parti k tirer, tant que les cboses y existent sur ce pied.
Je vouB joins ici une lettre pour la Reine que vous lui rem et-
trez, et je vous exhorte k avoir patience et k user de tous les moyens
que vos lumi^res et votre prudence vous sugg^reront, pour captiver
la confiance du Roi et conduire la Reine dans la voie d^une parfaite
Union avec son ^poux et d'une enti^re complaisance avec ses volont6s.
Vous saurez d^jk que les Turcs ont laiss^ librement le baron
Herbert, qui vous donnera probablement bientöt de ses nouvelles. En
attendant, Tarm^e campera le 16 pr^s de Semlin, oü je vais ^tablir
mon quartier gdn^ral, pour passer ensuite la Save et commencer les
Operations aussitöt que les inondations le permettront.
Adieu ....
— 176 —
Le 27 avril (1788).
an JoM h ^^ Naples les rdformes militaires continuent ; on va
encore augmenter consid^rablement la marine. La Reine
qui est quelquefois incommodäe de sa grossesse, a essuy^
plusieurs tracasseries avec le Roi ; son credit sur son
epoux et dans le public baisse consid^rablement; et quoi-
qu'elle ait eu de bien justes et fortes raisons d'^tre m6-
contente du gdnöral Acton^ de Salis, et de TAmbassadeur de
France; ce dernier; en la flattant d'un mariage pqur une
de ses filles avec le duc d'Angoul5me, et les autres avec
des soumissions affectäes ont regagn^ entierement sa
confiance et repris credit; et surtout le gen^ral Acton
qui contredit, contrecarre et cliieane de toutes les fa9ons
le baron Thugut, pour l'obliger k s'en aller, en indispo-
sant la Reine contre lui.
Semlin, ce 28 avril 1788.
an Leopold. Trcs-chcr frcrc. A mon retour de Texp^dition ä Sa-
bacs je m'empresse de vous ^crire. Nous Tavons terminöe
heureusement ; apres* une perte peu consid^rable nous
avons empörte la palanque et le chäteau avec 800 Turcs
faits prisonniers, 17 canons, 16 drapeaux, et en tout il
n'y a eu que six hommes de tuös et onze de blessds. Le
Feldzeugmeister Rouvroy*) a eu une blessure, mais heu-
*) Theodor Freiherr v. Rouvroy, Commandeiir des Theresien-
Ordens. Er starb schon im folgenden Jahre.
— 177 —
reusement lögire, et le jeune Poniatowsky *) a 4t6 blessd
a la cuisse^ ce qui est de plus de consdquence. Votre
fils ^tait de la partie^ et tel que vous le voyez dans la
chambre il ätait Ik; le sifflement des balles ne lui fai-
sait pas cfaanger de physiognomie.
J'attends avec une impatience infinie que tout soit
arrivö, ce qui est bien loin de r§tre encore, pour pou-
voir pousser plus en avant nos opörationS; car chaque
jour est prdcieux, et si nous ne faisons vite, nous aurons
le Grand- Vizir**) et Farmde entiere sur les bras, et alors
il n'en serait plus temps.
Adieu, mon eher fr&re; je vous embrasse tendre-
ment ....
Semlin, le 13 mai 1788.
Trfes-cher frere. J'ai re9U plusieurs de vos chferes ^^ Leopold.
lettres, pour lesquelles je vous rends bien des gräces.
Vos nouvelles me sont toujours infiniment cheres et prö-
cieuses. Ici k peine venons-nous de finir k rassembler
rannte avec tout ce qu'elle exige. Les Kusses qui n'ont
point encore coramencd leurs Operations, et qui voudraient
que je fasse tout pour qu'eux n'aient rien k faire, me
mettent dans Tembarras de ne pas pouvoir me d^cider
*) Fürst Joseph Poniatowsky, damals erst fünfundzwanzig Jahre
zählend, Oberst eines österreichischen Dragoner-Regimentes. In den
Napoleonischen Kriegen berühmt geworden, ertrank er bekanntlich
im J. 1813 nach der Schlacht bei Leipzig.
**) Jussuf Pascha.
12
▼. Arneth. Joseph n. Leopold. II.
— 178 —
encore a passer la Save et a assi^ger Belgrade^ n'ayant
point le temps de le prendre jusqu'k Tarriv^e de la
grande arm^e; oü alors je serais dans une Situation plas
eritique que celle du prince Eugfene, ne pouvant avoir
des ponts sur le Dan übe k cause des inondations encore
existanteS; et par cons^quent röduit pour toute commu-
nication et retraite au pont de la Save, et me trouvant
entre une ville avec 15,000 hommes de garnison et une
arm^e de peut-^tre 150,000. Avec cela, je dois vous dire
avecpeine, que jene trouve ni volonte, ni z^e, ni Energie
dans nos g^nöraux. Tous sont au d^sespoir de faire la
guerre ; ils voudraient etre commod^ment au logis, et
personne ne va qu'autant qu'on le pousse, qu*on y est.
Chacun s'excuse sur Tautre ; point d'union, enfin on a
bien du mal, mais n^anmoins je tächerai de m'en d^brouil-
ler comme je pourrai.
Votre fils va partout avec moi ; il a trfes-bonne con-
tenance, meme quand il entend des balles, et je crois
qu'il verra juste dans cet art, au moins il parait y pren-
dre intör^t.
Adieu, mon eher ami ; pr^sentez mes respects k votre
chere ^pouse, et croyez-moi pour la vie votre ....
Ce 15 mai 1788.
Leopold Trfes-cher frfere. Je vous rends mille fi^räces de ce
an Joseph. ^
qu'au milieu de toutes vos affaires et embarras vous ayez
pu trouver le temps de m'^crire pour me donner part
de la prise de Sabacs, sur laquelle j'ai d^jk eu l'honneur
— 179 -
de vous faire mon compliment la poste passee. Je sou-
haite bien et ne doute aucunement que cette prise faci-
lite le siöge de Beigrade, avant que le Grand -Vizir, dont
la marche sera, je crois, fort retard ^e, puisse arriver vous
en empöcher. J'ai ^t^ enchant^ de ee que vous me mar-
quez que vous avez dtö content de mon fils k cette occa-
sion, et de la bont^ avec laquelle vous voulez bien m'en
donner part. II n'a fait que son devoir et ne saurait ja-
niais assez faire pour r^pondre de toutes fa^ons aux
bont^s et k la bonne opinion que vous voulez bien avoir
pour lui.
Ici nous n'avons absolument rien de nouveau. On
n'entend plus parier de la flotte russe qui, k ce qu'on
dit, doit aller dans les ports de Sicile.
Ma femme me charge de vous präsenter ses res-
pects ; eile se porte k merveille, de meme que tous mes
enfans. J'ai eu quelques jours une fluxion aux yeux, qui
a ^t^ fei commune et öpid^mique, mais j'en suis remis.
Nous sommes k la campagne, oü j'ai pris avec moi de-
puis un mois mon fils Charles tout seul, sans ses livres,
. maitres, ni aucun de ses gens. Tout ce temps il se porte
k merveille, est grandi de beaucoup, et devient fort et
robuste. II se promfene et se fatigue k cheval et k pied
six et sept heures par jour, dort et mange bien, et n'a
jamais ressenti la moindre incommoditö, et je puis bar-
diment vous assurer k prösent, qu'il est sain et fort
comme tous les autres, et que son physique n'est pas
malade. Le mddecin möme k präsent en convient, et que
ses soi-disant incommodit^s seront gu^ries, en lui ötant
quelques appröhensions et un peu de paresse et d'envie
12*
— 180 —
de ne pas s'appliquer, car ce n'est que quand il ne s'a-
TDUse pas^ qu'il dit de ressentir des incommodit^s, dont
ni son pouls ni sa machine ne se ressentent, ni donnent
de marqües, et cette demi&re maladie, je la gu^rirai moi.
Continuez-moi, je vous prie, vos bont^s ....
Ce P'juin 1788.
an Joseph. Trfes-cher frfere, Vous ne saurez croire combien j'ai
et^ enchant^ en recevant votre chire lettre du 13 du
mois pass^, d'y recevoir une marque de votre Souvenir
au milieu des embarras que vous avez sur les bras^ d'y
recevoir de bonnes nouvelles de votre sant^^ et la part.
que vous voulez bien m'y donner, que vous ^tes content
de mon fils. Ce que j*ose vous supplier, c'est, connais-
sant votre zile et aclivit^, de vous m^nager davantage^
et surtout votre pr^cieuse sant^, k präsent que les cha-
leurs doivent ^tre commencöes. C'est avec bien de la
peine que je vois que les RusseS; qui vous devraient
tant d'obligationS; bien loin de vous seconder seulement^
apris que la guefre se fait pour enx, se tiennent sur la
defensive, et sans d^tourner seulement les Turcs par une
diversion, ou le si^ge de Chotym ou d'Oczakow, vous lais-
sent tout-a-fait k vous seul toute Farm^e du Grand- Vizir
sur les brasy et un confin d'une aussi vaste ätendue k cou-
vrir des incursions des Turcs. J'avoue que leurs projets
et plan d'opörations, dans lequel ils ne promettent de
Toffensive que du c6t6 du Couban, m*a scandalis^.
— 181 —
Je sens fort bien Tembarras et Timpossibilitö dans
laquelle ces circonstances vous mettent; de passer la
Save et d'attaquer Beigrade. Votre Situation serait infini-
ment plus critique que celle du prince Eugene, qui s'est
tirö du mauvais pas oü il s'^tait mis^ par un coup de bon-
heur. Mais ce qui m'a bien ätonn^ et fait de la peine,
c'est ce que vous me marquez de la mauvaise volonte
des gän^raux a faire la guerre. Jamais je ne m'y serais
attendu, et j'aurais toujours cru qu'ils brüleraient a
Tenvi du d&ir de se faire honneur, de se distinguer et
möriter votre approbation par leur zele et activit^, sur-
tout agissant sous vos yeux. Je vous plains bien, car il
est impossible de faire tout par soi-meme, et lorsqu'on
n'est pas second^ par ceux qui doivent exdcuter les or-
dreSy et qu'ils n'agissent pas volontiers, mais qu'il faut
les pousser a tout, c'est une double fatigue, une vraie
corv^e ; on se fatigue terriblement, et on n'est pas bien
servi.
Semlin, ce 14 juin 1788.
Tres-cher frfere. J'ai regu votre chöre lettre, et sa- ^^ l^opoM.
chant que votre fils ^crit diligemment, comme c'est son
devoir, k Florence, je lui ai laisse le soin de vous don-
ner nos nouvelles. Actuellement qu'il est absent d'ici pour
faire une tourncJe le long des frontieres, je m'empresse
de vous les continuer. Nous ne faisons rien qu'attendre
ce qui arrivera et k quoi les Turcs se d^cideront. Les
arm^es russes de mon su n'ont point encore d^passö
— 182 —
leiirs irontieres, ni leurs flottes de Kronstadt ni de la
mer noine sont encore sorties des ports. Le prince Co-
bourg*) bloque, comme il peut, Chotym. II a encore un
d^tachement ä Jassy, mais qui probablement devra bien-
tot se retirer. Fabris**), en Transylvanie, occupe en
Valachie et Moldavie les entr^es des montagnes qui en-
tourent cette province. Wartensleben***) au Banat cou-
vre les entr^es au Banat par la Valachie, et d'Orsowa le
long du Danube il y a des postes jusqu'ä Pancsowa pour
couvrir le pays d'incursions^ et il y a a Weiskirchen sept
bataillons et deux r^gimens de cavalerie pour le soutien
du cordon Ik oü le besoin l'exigera. Mon arm^e est cam-
pte sur les hauteurs de Semlin qu'on a retranch^es. Le
Corps de rcJserve Test le long de la Save jusque vers
Sabacs^ qui a i\A r^parä et a une assez forte gamison.
De la commence le corps de Mittrowsky f ) qui a les for-
teresses de Ratscha, Brood et Gradisca bien pourvues,
et dans Tentre-deux son cordon pour couvrir le pays
au-delä de la Save. A TUnna commence le corps du
prince Liechtenstein ff) qui est campe vis-k-vis de Dubitza^
la riviere entre eux ; son cordon s'ötend jusqu'k la Dal-
*) Der damalige General der Cavallerie und spätere Feldmar-
schall Prinz Friedrich Josias zu Sachsen-Coburg-Saalfeld.
**) Der Feldzeugmeister und Commandant des Observationscorps
in Siebenbürgen Dominik Tomiotti de Fabris. Er starb schon im
Jänner 1789.
***) Der Feldmarschall-Lieutenant Ludwig Wilhelm Graf War-
tensleben. Er starb als Feldzeugmeister im J. 1798.
f ) Graf Joseph Mittrowsky, welcher im J. 1789 zum Feldzeng-
meister ernannt wurde und im Jahre 1808 starb.
tt) Der General der Cavallerie Fürst Carl Liechtenstein.
— 183 —
matie vdnitienne, Le long de TAdriatique depuis Zengg
jusqu'ä Aquileja le commandant-göneral de Gratz^ savoir
Langlois*), y commande, et en attendant qu'il arrive,
Gazinelli**) en fait les fonetions et il est stabil pour le
präsent k Trieste, oii on a fait dans les ports des batte-
ries et oü on a armä quelques bätiments. Voilk notre posi-
tion. Aprfes que je n'ai pu parvenir a faire passer au
mois d'avril la Save et assi^ger Belgrade^ il est naturel
qu'on ne Ta plus pu faire au mois de juin oü Ton disait
seulement tout pr^parä. II ne me reste d'autre parti k
cette heure k prendre que d'attendre tranquillement ce
que fera le Grand -Vizir, s'il se partagera ou non, oü il
se rendra^ si les Busses agiront et ce qui s'en suivra, s'il
marchera sur moi iei ou au Banat^ s'il m'attaquera ou
s'il me fournit l'oecasion de Tattaquer^ enfin de voir si
en automne, oü les armöes turques ne peuvent tenir cam-
pagne^ il sera plus faeile d'assieger Beigrade et Orsowa.
Voilk en deux mots ma Situation ; eile n'est pas
brillante, parce que tout est incertain, est douteux, mais
il faut avoir patienee et plus penser au bien g^nöral
qu'k son avantage et convenance personnelle. Du reste,
Tennui iei est terrible ; cette Situation passive me Test
aussi ; tres-peu d'activitö dans nos gönöraux et officiers;
les maladies sont encore fort moddr^es. Les chaleurs
*) Der Feldzeugmeister Peter Freiherr von Langlois. Auch er
starb, gleich Rouvroy, Fabris und Carl Liechtenstein, schon im fol-
genden Jahre.
**) Feldmarschall-Lieutenant und Interims-Commandant in Inner-
und Oberösterreich, dann dem österreichischen und ungarischen Litto-
rale. Er starb im Mai 1790.
— 184 —
ont 6t6 fortes^ mais apres quelques orages voilä quinze
jours qu41 fait charmant, et votre fils a le plus beau
temps du monde pour sa toum^e.
Adieu ; je vous embrasse tendrementy de m^me qua
votre obere öpouse. Croye25-moi pour la vie votre . . . .
Semlin, ee 25 juin (1788).
an Leopold. Tres-cher frere. Les bonnes nouvelles que vous con-
tinuez k me donner de votre bonne santö et de celle de
votre fils Charles me fönt grand plaisir. Je souhaite bien
qu'elles continuent, de m^me Fran9ois. Je I'attends dans
quatre jours de retour ici de la tourn^e qu!i\ a faite. Ses
nouvelles sont bonnes, puisqu'il se porte bien et qu'il
parait prendre int^rdt ä ce qu'il voit. Ici il n'y a rien
de nouveau, meme toutes les petites fusillades onteess^
depüis qu'une couple de fois les Turcs ont ei6 mal ac-
cueillis et renvoyös avec perte. Les Busses ne peuvent
ou ne veulent rien faire , c'est ce que j'ignore. Le Grand-
Vizir est ä Sophie, il dötache des corps qui avancent
vers Beigrade, mais le manque de vivres les empeche
d'avancer et de se joindre. La döpopulation de la Servie
est inexprimable ; nous comptons ddjk plus de 50,000
ämes et 300,000 b^tes a cornes qui sont pass^es chez
nous. On ne sait qu'en faire ; on les distribue dans les
bois, dans les habitations, comme Ton peut. Avec cela
ils ont s^vi contre les chr^tiens et en ont tu^ peut-^tre,
a ce qu'on assure, 30^000. Tout cela fait que la terre
n'est pas cultivöe, qu*ils n'ont pas de voitures pour les
— 185 —
transports. II faudra probablement que nous attendions
rautomne pour commencer notre si^ge, et jusqu'alors les
choses s'öclairciront d'une fa9on ou de Tautre.
Vous saurez d^jä que le Roi de Sardaigne m'a ^crit
et demande pour soü fils en manage la fille ainöe de
Ferdinand *) ; vous sentez bien que j'ai aeeeptö la chose
avec plaisir.
Adieu^ mon eher ami; les cfaaleurs sont excessives
et les mouches nous fönt bien enrager ; nöanmoins les
maladies sont encore fort modördes et aucunement dan-
gereuses.
Je vous embrassO; de ra^me que votre obere öpouse,
de tout mon coeur
Semlin, ce 29 juillet (1788).
Mon eher frfere. J'ai re9u plusieurs de vos oberes ^^ ^^^ j^
lettreS; pour lesquelles je vous rends des gräces infinies.
J'ai toujours attendu ä vous öcrire, espörant de pouvoir
vous donner quelque nouvelle interessante, ou que
notre Situation inactive se changeät; mais malbeureuse-
ment c'est toujours encore la m^me chose. Vous aurez
d(5jk vu par les nouvelles publiques Fincröyable ^vöne-
ment de Monsieur de Nassau**), qui avec des cfaaloupes
et batteries flottantes a brul^ sept vaisseaux de guerre
*) Maria Theresia, geboren 1773, im J. 1789 mit dem nach-
maligen Könige Victor Emanuel I. von Sardinien vermahlt
**) Carl Heinrich Prinz von Nassaa-Siegen.
— 186 — .
et pris deux aux Turcs pr^s d'Oczakow, qui tous, faute
de savoir manoeuvrer^ B^^taient ^chou^s sor des bas fonds.
Du reste^ Tarmöe du prince Potemkin est avancäe vers
Oezakow et a commencä k le canonner sans l'assiäger.
Celle de Romanzow n'a voulu passer le Pruth^ de fa9on
que nous avons du abandonner Jassy. Chez nous tont
est au mSme point. L'armöe du Grand -Vizir ^tait mar-
ch^e de Sophie k Nissa; cela avait Fapparence de venir
a Beigrade ; point du tout, eile est retourn^e k Widin
et eile n'a laissd que des corps ^pars k Nissa et Krotz-
ka. A Widin on travaille k des ponts sur le Danube, et
il menace le Banat et la Transylvanie en mSme temps.
Je me suis arrangä pour pouvoir y marefaer si j'en vois
Tapparence; car il ne faut pas prendre le change. J'ai
renfore^ le Banat et la Transylvanie k tout ^v^nement,
en Croatie la meme chose ; nous gardons nos fronti^res
et eux les leurs. Le prince Liechtenstein a du quitter
le commandement, ^tant malade de ses vieux maux^ ce
qui m'embarasse. Les maladies sont fortes^ mais pas mor-
telles encore. Nous avons pres de 7000 malades ; ces der-
niers quinze jours il nous n'en est mort que 68 hommes
qui n'est pas un de cent. J'ai seul cinquante domestiques
de malades ; moi-m^me depuis quelques jours j'ai gagnä
une toux s^che et forte qui m'incommode beaucoup, et
avec cela une diarrhde assez genante. N^anmoins je
puis faire toutes mes affaires et ne suis point alitä.
La belle aventure du Pacha de Scutari vous sera
ddjk connue. C'est la chancellerie d'Etat qui a tout gät^,
— 187 —
en envoyant tout de suite Brognard*) en n^gociateur et
donnant un äclat a la chose qui ne valait rien. Ob misö-
rable^ apres m'avoir volö mon argent, aurait au moins du
ne pas faire assassiner ces trois pauvres gens.
Votre fils est a faire sa toum^e ; il sera a cette heure
dans les environs de Kronstadt en Transylvanie. II ^vite
par la le mauvais air et les chaleurs insupportables dlci,
qui ont 6ii k 34 degrös du thermomStre de R^aumur.
Depuis trois mois il n'a pas plu, tout est brül^^
Adieu ; je vous embrasse^ de mSme que votre ch^re
äpouse
Semlin, le 13 aoüt 1788.
Tres-cher frere. J'ai re9U votre obere lettre avec Tin- ^n Leopold.
croyable histoire du Roi de Naples**). II ne faut pas
etre le plus malhonnete homme, mais en meme temps
un monstre, pour imaginer et exäcutei* de pareilles hor-
reurs. Tout est dit ; il me serait impossible de jamais
plus ^crire k un homme pareil que je m^prise.
Je. suis charm($ que votre santö et celle de vos en-
fans seit bonne ; la mienne dans ce maudit climat n'est
pas de mdme. J'ai gagnä une toux tr^s-dösagr^able qui
m'aflfecte la poitrine et me donne une respiration diffi-
cile. Voilä pres d'un mois ; cela a tout le caract^re d'un
*) Wenzel von Brognard, Official der Staatskanzlei.
**) Eine empörende körperliche Misshandlung der Königin von
Seite ihres Gemals.
— 188 —
asthma^ les nuits ätant les plus mauvaises. Depuis quel-
ques jours il s'y est Joint des acces de fi^vre qui ont le
type de quarte et qui ne sont pas fort violents, point de
frissoD; mais chaleur et abattement. Je vais pourtant mon
train, je ne suis point alitö, je ne sors qu'autant qu'il
est necessaire, je garde un regime exact dans le manger,
et prenant des sels et un th6 amer, je me flatte que je
la ferai partir ainsi.
L'arm^e est marchee hier pour passer au Banat ; je
la suis demain. Les Turcs paraissent vouloir tourner de
ce c6t^-lä leur agression ; le gen^ral Papilla *) d'une fagon
absolument inexcusable s'est laiss^ surprendre k Schupa-
neck ; il a perdu treize canons^ et deux bataillons ont
iti entierement disperses. Vous ne sauriez croire la bile
qu'on fait ; il y a trois mois qu'il a Tordre de ne pas
s'engager dans cet endroit pas tenable, et malgr^ cela
on n'est pas obei ; aussi Tai-je fait mettre aux arr^ts a
Temeswar. Du cot^ de la Croatie j'avais re9U de bon-
nes nouvelles, mais voilk soixante heures que je n*en
re9ois pas la confirmation 5 cela me fait craindre que cela
a fini moins bien que cela n'avait commenc^, car de
Vins**) avait attaqud et chassd les Turcs de leurs batte-
ries k Dubitza, mais il y avait encore une hauteur a
empörter.
*) Der Generalmajor Paul Freiherr Dlmich von Papilla, Ritter
des Theresienordens. Er starb im J. 1802 za Temeswar.
**) Der Feldmarschall-Lieutenant Joseph Nicolaus Freiherr de
Vins. Er starb im J. 1798 als Feldzeugmeister und Grosskreuz des
Theresien-Ord ms.
— 189 —
Adieu, mon eher ami ; votre fils se porte bien, il est
actuellement chez le Prince Cobourg en Galieie ou Mol-
davie. Je vous embrasse de möme que votre chere
^pouse
Je vous joins cette lettre pour Thugut et pour la
Reine; que je vous prie de lui envoyer par oecasion
süre.
Ce 16 aoüt 1788.
Trfes-cher frere. Vous ne sauriez croire le plaisir et ^^^^\^
'^ an Josepn.
la consolation que m*a causd votre chfere lettre du 29
juillet apres une si longue privation. C'est avec bien du
regret que j'y vois que les maladies^ quoique heureuse-
ment pas dangereuses, commencent k r^gner a Tarm^e,
qu'elles ont attaqu^ presque tous vos gens, et que vous-
meme vous vous en ressentiez. La dissenterie, surtout
dans ce climat et cette saison, est bien a craindre^ et les
fraicheurs des nuits. J'ose vous supplier de cohsiderer un
peu plus la ndcessite de votre personne et Timportance
de votre sant^, et de vous soigner et mdnager davantage,
et je me flatte d'apprendre par la poste prochaine de meil-
leures nouvelles de votre santö et entier r Etablissement.
Les deu^ victoires des Russes sur la mer noire sont
bien heureuses et venues k propos^ et il faut ^tre aussi
maladroits et mauvais marins que le sont les Turcs, pour
s'exposer avec leurs gros vaisseaux dans le Liman. C'est
le second tome de la bataille de Tschesme dans la guerre
pass^e. Je suis EtonnE que le prince Potemkin, n'ayant
— 190 —
plus d'obstacle a vaincre, n'ait pas commenc^ tout de
bon avec rigueur le sidge d*Oczakow, et que le mar^chal
Romanzow, ou passant le Pruth en personDe, ou envoyant
de ce c6tö un gros corps de troupes, n'ait pas assur^
Jassy et les troupes qui y ^taient. La conduite du Grand-
Vizir est bien singulifere, mais je crois qu'il est k sou-
haiter qu'il passe le Danube et vienne attaquer les plai-
nes du Banat. II donnera occasion par Ik k uue bataillc;
et je crois qu'on peut bien se flatter que, donnant ba-
taillo; il sera battu ; la campague finira pour lui et on
pourra attaquer Beigrade. Quant au Pacha de Scutari,
j'avoue que je ne m'attendais k rien de bon de sa part
et des Montän^grins, que le prince Dolgorouki qui est
a präsent k votre arm^e et qui a iti longtemps avec
eux, doit bien connattre.
Tout le monde regrette Brognard, qu'on dit avoir
4ti un sujet bien capable.
C'est avec bien du regret que je vois que vous avez
eu a Semlin les memes chaleurs que nous en Italic. Ici
il n'a pas plu depuis le 4 avril ; toutes les r^coltes ont
p^ri, tout est bröl^, et on nourrit le bdtail avec de la
paille.
Vous avez eu bien de la bontä de penser k faire
faire k mon fils la tourn^e qu'il a faite pr^sentement, qui
ne peut que lui ^tre fort agr^able et utile, et qui en
meme temps le pr^serve du mauvais air et des maladies
de Semlin.
La singuli^re rodomontade du Roi de Su^de, ses
extravagantes propositions k rimp^ratrice de Russie lui
ont attir^ une rencontre sur mer, ou sa flotte a 6t4 bat-
- 191 ~
tue. II est inconcevable quelles puissent etre les vraies
intentions du Roi en commen9ant cette guerre, surtout s'il
n'est pas sür d*8tre appuy^ de la Prusse ou de TAngle-
terre. II parait qu'il risque beaueoup. On croit que la
flotte russe ne viendra point cette annde dans la M^di-
terranöe^ quoiqu'il ne soit point encore arriv^ de contre-
ordre formel.
A Naples le Roi est derechef plus fortement incom-
mod^ de son mal, la eure palliative qu'il a prise n'ayant
fait que peu d'effet. La Reine est fort agit^e, ^t je crains
un peu pour ses couches, dont le terme est k la fin d'un
mois. Le Roi d'Espagne ayant declarä au Pape qu'il ne se
m^lerait pas de l'affaire de la chinea*) de Naples et qu'il
croyait cette fonction inutile, il n'en sera plus question.
au grand chagrin du Pape et de tout Rome.
La soi-disant comtesse de Falkenstein qui tourne
en Italic, m*a ^t^ adress^e par la Reine de Naples qui,
apres s'etre int^ress^e pour eile et Tavoir mise dans une
espfece de couvent, me Tenvoie ici, puisqu'elle avait tentd
d'^pouser k Naples un chevalier Sansevero. Cette per-
sonne que je n'avais jamais vue, est ici dans un con-
servatorio, oü eile se conduit jusqu'k präsent bien et
honnetement. Je Tai vue, eile assure et soutient d'fetre la
mdme personne qui vint d'Allemagne du temps de feu
S. M. rimp^ratrice k Vienne, ou eile fut mise aux Elisa-
*) Chinea, der weisse Zelter, welcher alljährlich am 29. Juni
reich geschirrt, nebst einer Gabe von siebentausend Ducaten, von
dem Könige von Neapel dem Papste dargebracht wurde. König Fer-
dinand hatte die fernere Beobachtung dieses Gebrauches verweigert.
— 192 —
bethines, et oü eile dit de vous avoir remis tous les pa-
piers et documens dans une cassette rouge. Elle assure
avoir 6t6 deux ans dans un couvent entre Laibach et
Gorice, d'oü eile s'est sauv^e, qu'elle vous a vu la der-
nifere fois k votre retour d'ici avec le gän^ral Kinsky
dans votre passage k Gratz, qu'ensuite eile a iti a Venise,
Turin, Lyon, Nice, Gfenes et Naples, qu'k präsent, ne
voulant plus faire Taventurüre et manquant d'argent,
eile avait r^solu de se marier, et qu'ayant trouv^ ce Che-
valier napolitain qui la voulait äpouser, et ses parens en
^tant contens, eile rae priait de vouS ^crire, pour vous
prier en son nora de lui faire remettre par mon canal
ses papiers et documens pour pouvoir se marier. Voilä
tout ce que j'en sais; j'ose vous prier de vouloir bien
me faire r^pondre par un de vos secr<^taires sur cette
femme, pour savoir qui eile est et ce qui en est, si eile
est la personne qu'elle dit d'^tre ou non, et enfin quelle
rdponse je dois lui donner, et si vous jugez k propos de
lui renvoyer les papiers ou non, car en Italic eile trou-
vera trfes-facilement k se bien marier, seulement avec sa
figure, et sans aucune pr^tention pour le nom et la pa-
rent^ qu'elle s'attribue peut-etre faussement. Enfin, je
vous prie de me faire instruire sur son histoire, pour
que je sache comment me regier et n'en sois pas la dupe.
— 193 —
Caraosebes, ce 2 septembre 1788.
an Leopold.
Tres-cher frere. J'ai un moment k moi que je voue ^^^^^
au plaisir de vous dcrire. Votre fils vient d'arriver ici de
sa toum^e en tr^s-bonne santd et tris- content de tout
ce qu'il a vu. Je vous joins pour votre satisfaction la
demifere lettre qu'il m'a dcrite de Temeswar, ou je Tavais
fait attendre deux jours, pour etre sör que le chemin
qu'il avait k prendre, füt libre et sür. Vous verrez qu'il
est capable de sentiments, et quand ils softent, comiae
il n'en est aucunement charlatan, on peut les croire. Nos
affaires ici sont encore tres-peu claires ; toute la vallde
de Mehadia et Cornia sont k Tennemi qui a brül^ tous
les villages. Les Busses ne faisant rien, nous avons
200,000 hommes sur les bras, et qui s'dparpillent seulement
pour d^vaster. Je crains bien que la belle partie du Ba-
nat le long du Danube aura le meme triste sort. En
attendant nous tenons encore ; le triste est qu'on n*en
puisse venir k une affaire, qui peut-^tre ddciderait avec
avantage la chance.
La soi-disant comtesse Falkenstein est une garce
publique qui a vol^ et trompd dans nombre d'endroits,
qui a 6i4 k la maison de force k Trieste et s'en est
sauv^e ; eile n'est aucunement la meme dont le roman
ötait si singulier. Celle-lk est morte trfes-sürement en Ca-
rinthie dans un couvent, oü je payais pour eile. J*en ai
l'attestat mortuaire. Cette fille a iti k Gratz, eile ne m'a
Jamals donnd de ses papiers, mais bien a voulu me faire
ses contes qui ne quadrent point. Je crois que vous
ferez bien de la chasser, c'est tout ce qu'elle merite.
y. Arneth. Joseph u. Leopold. II. 13
— 194 —
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse, de meme
que votre chfere ^pouse. Ma sant^ n'est pas encore bien
bonne, je tousse cruellement et je suis faible et maigre.
Croyez-moi pour la vie votre ....
lUova, ce 20 septembre 1788.
Joseph Tres-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre et suis
an Leopold. * *
touch^ de Tint^ret tendre que vous prenez k ma santö.
Elle est si d^rang^e que je ne la crois plus k remettre.
Une respiration difficile, qui au moindre mouvement me
donne des battemens de coeur et m'empeche absolument
d'agir, soit k pied ou a cheval ; une faiblesse avec cela,
qui me lasse et m'abat les jambes, le pouls jamais net,
peu de sommeil : voilk comme je suis et que je me traine
k faire campagne depuis presque trois mois. Tous les
rem^des, les plus effieaces m^me, ont dte inutiles, avec
cela rong^ de chagrin et de la douleur la plus profonde,
je d^p^ris, maigris et je m'en vais k vue d'oeil. Mais
comment quitter Tarm^e dans un pareil moment, oü tou-
tes les tetes sont perdues, oü par Timpardonnable con-
duite de nos gendraux d^tach^s Papilla, Wartensleben,
Brechainville*) et Aspremont**) nous sommes rdduits k
nous retirer, a abandonner tout le Banat k Tennemi, et
*) Ludwig Graf Brechainville.
**) Franz Graf Aspremont-Linden. Er wurde noch im J. 1788
als Generalmajor pensionirt und zö^g sich dann in sein Gehnrtsland
Lothringen zurück.
— 195 —
dans FimposBibilit^ in^me de couvrir la Transylvanie
qui sera ögalement ravagöe, et tout cela sans perte de
bataille, ou qu'aucun de ces Messieurs avait ^te forcd,
mais sans coup förir ils ont abandonn^ les positions
choisies, pr^paröes, avantageuses, sous des prdtextes fri-
voles, dont il y en a meme d'un m^sentendu de com-
mission verbale, et nous n'avons jamais pu attaquer
Pennemi.
Rien de plus terrible, de plus malheureux, de plus
honteux ne pouvait nous arriver ; lorsque j*ai formd un
projet, il est renversd par ceux qui devraient y coop^rer.
Enfin, je ne sais que vous dire, mon eher ami, sinon
que je suis le plus malheureux des ^tres, moralement et
physiquement souflFrant tout ce qu^l est possible. Je
mourrai plutot sous un arbre que dans Tdtat dans lequel
je vois les choses, les abandonner, car le mardchal*) est
si d^sesp^rö lui-meme qu'il ne sait plus quoi faire.
Enfin, mon eher frfere, aprfes vous avoir fait ce triste
tableau, voyez si vous voulez venir, car je ne puis vous
r^pondre de ma santö, eile est au point que je puis d'un
jour a Fautre tomber entierement et etre nul ; voyez alors
combien il serait important que vous fussiez k port^e de
veiller k TEtat et k votre patrimoine. Ainsi, mon eher ami,
d^cidez-vous ; ce sera le meilleur des momens possible
pour moi, celui oü je pourrai vous embrasser. Croyez-
moi pour la vie votre
Pour ne pas vous donner cette cruelle incommodit^
pour rien, arrangez-vous seulement, je vous prie, et attendez
*) Lascy.
13*
— 196 —
ponr partir ane antre lettre de ma part. Je crains plus de
vons faire partieiper k mes peines que de les sapporter seul.
Ce 22 septembre 1788.
Leopol Tres-cher frfere. J'ai iii enchantd et p^ndtrd de vos
an Joseph. '■
bontds en recevant votre chftre lettre de Caransebes du
2 de ce mois, en pensant qu'occnp^ et accabl^ d'affaires
et de soins, au moment de la marche de Tarm^e^ et ne
V0U8 sentant pas trop bien de santö, au lieu de vous reposer
votre amiti^ pour moi vous a fait trouver le temps de me
donner de vos nouvelles qui sont si interessantes pour
moiy quoique je sente moi-mSme que, surtout dans les
circonstances präsentes , cela seit diiScile et presque
impossible. J'ose vous supplier de m^nager, au moins
autant que les circonstances le permettront^ votre impor-
tante sant^. J'ose vous renvoyer ci-joint la lettre de mon
fils, que vous avez bien voulu me communiquer^ et vous
en rends bien des gräces. Les sentimens qu'il y tdmoigne
sont ceux de son devoir, et il serait indigne d'Stre ce
qu'il esiy et de tous les soins et bontds que vous avez
pour lui en toutes les occasions, s'il ne les sentait pas^
surtout dans une occasion pareille, et je suis au moins
charm^ de voir qu'il sait exprimer ce qu'il sent et doit
sentir.
Je regrette bien que les Russes n'agissent point ; ils
vous laissent toute l'armde turque sur les braS; et que
par leurs d^vastations ils ruinent ce qui a iti fait avec
tant de soins, peines et d^penses dans le Banat. Les
- 197 -
Sieges d'Oczakow et Chotym n'avancent point, et la flotte
du Capitaine-Pacha est revenue dans la mer noire avec
toute sa force. II parsdt que la guerre de Su^de, quoique
faible^ ait singuli^rement embarrass^e la Russie, et qu'elle
soit occupäe des affaires de Pologne et ne pense pas k
agir tout de bon vis-ä-vis des Turcs par manque des
dispositions et la Jalousie qui r&gne entre les deux mar^-
chaux Romanzow et Potemkin.
Je vous rends bien des grfices de ce que vous m'a-
vez marquä sur la soi-disant Comtesse de Falkenstein.
Je ne Tai vue qu'une fois k son arrivde, ayant m tou-
jours depuis dans un couvent oü eile s'est conduite sage-
ment. Elle m'a assurä avec une teile assurance que vous
saviez toute son histoire, aviez tous ses papiers entre les
mainS; et qu'elle etait la memo personne qui est naorte
au couvent en Carinthie, et qu'elle s'en dtait enfuie, en
me priant de vous en öcrire, que je n'ai pas pu me dis-
penser de le faire. A präsent, que par votre lettre je
suis öclair^ sur ce point, je ne manquerai pas de la faire
chasser d^ci.
Ma femme me charge de vous präsenter ses respects ;
eile se porte, gräce k Dieu, k merveille, ainsi que tous
mes enfans et surtout mon fils Charles qui est entiere-
ment remis et se porte k merveille* Nous avons un petit
doute de grossesse de la Thör^se, qui nous ferait bien
du plaisir.
— 198 —
LugoSy le 26 septembre 1788.
Joseph Tres-cher frfere. Apr^s que le vous avais ^crit la
an Leopold. * ^ o
douleur de räme, les circonstances impr^voyables qui
nous avaient Obligos a noos retirer d'IUova et k onvrir
par consdqaent Tentr^e dans la plaine a Tennemiy J6 De
croyais pas §tre dans le cas de devoir vous marquer que
nous ^tions encore r^serviis k de plus fäcfaeux öv^nemens
dans la retraite que nous fimes d'Iilova. Tout allait dans
le plus grand ordre, et nous serions arriv^s a Caransebes
Sans que Tennemi s'en fut meme aper9U, car c'^tait la nuit.
Dans un instant quelques malheureux Valaques ou d'un
Corps franc ä cheval que nous avons, prirent une alarme,
tirirent des coups de fusil, mirent par Ik une partie de
houssards et de dragons en confusion qui tirirent aussi,
enfin ceux-ci se jet&rent sur Tinfanterie, et toute la co-
lonne, k laquelle je me trouvais, fut dans un instant en
pleine d^route. On renversa canons, fourgons, toutes les
tentes et marmites que portaient les chevaux de bas, furent
Jettes, enfin c'dtait une horreur ; on tira les uns sur les
autres. Apres quelque temps le calme fat pourtant remis,
et heureusement que pas un Türe nous poursuivait, autre-
ment toute Farm^e ötait perdue, nöanmoins non seule-
ment toutes les tentes et marmites avec bien du bagage
furent perdues, mais aussi trois canons. Du reste, vers
le joiir les Turcs ayant poursuivi notre arriere-garde, eile
se retira en fort bon ordre, et les repoussa meme de
Caransebes avec perte. En attendant, qui eüt pu imagi-
ner que des officiers- m^me et les valets d'^quipage de
Tarm^e porteraient la frayeur jusqu'k six lieues en arriere
- 199 —
a Lugos oh ils coururent en criant que tout ^tait perdu
et qu*il fallait se sauver bien vite. Tous les habitans de
ce grand endroit, toutes les voitures et ^quipages de
Tarm^e qu'on avait laiss^s en arriere, se sauverent comme
des fous, cassferent, briserent voitures, jeterent les equi-
pages, et alors ces memes valets fuyards et autres gens
du pays se mirent k piller, et tout ce grand endroit, de
m^me que ce qui se trouvait sur la route jusqu'a Temes-
war, fut pill^, des gens de tu^s, tout bris^, cass^, enfin
une horreur que je ne puis pas vous döcrire, mais que
je sens cruellement. Une quantitd de montures venant
pour Tarmee le furent ^galement. Des que je le sus, on
envoya des troupes qui, quoique trop tard, remirent Tor-
dre et firent quelques exemples de sdv^rit^. Comme par
la retraite de Brechainville et du g^n^ral Lilien*), tou-
tes deux pr^cipit^es sans avoir vu d'ennemi, toute la
partie de la plaine est entierement au pouvoir de Tennemi,
jusque presqu'ä Temeswar, que du cot^ du Vulcan ^gale-
ment un gros corps est entre en Transylvanie et y brüle
ddjk des villages, je dois attendre ici ou derrifere la Te-
mes, que quelque part le Grand -Vizir d^bouche, pour
marcher k lui, seul moyen pour le faire sortir encore, s'il
est possible, cette campagne au moins d'une partie du
Banat. Chotym est pris par capitulation ; si cela etait
arrivö il y a h^it semaines, comme il en avait ii^ ques-
tion, alors cela nous aurait pu faire une diversion avan-
tageuse, mais k cette heure c'est trop tard, le mal est
*) Er wurde im J. 1793 zum Feldmarschall-Lieutenant ernannt
und starb 1810 als General der Cavallerie.
— '200 -
fait, cette belle province est d^truite pour un demi-si^cle.
JugeZ; mon eher ami; de ma peine et de mon ätat.
Avec cela ma santö ; obligö de camper dans cette saison,
je suis cruellement a plaindre^ et Tesprit de vertige et
de pusillanimitä qui regne partout et qui fait trembler
pour tout ce qu'ou pourrait oser entreprendre, Joint au
d^couragementy fönt une Situation, avec la mis^re et les
spectacles d'horreur qu'on a sous les yeux, qui d^chirent
Tarne. Je ne sais comment je r^siste encore, le sommeil
est entierement perdu, je ne dors pas une demi-heure et
je passe les nuits dans les r^flexionsles plus affligeantes.
Votre fils se porte bien, et heureusement qu'il ne
s'est pas ti'ouvö ä cette bagarre, ayant iti k Fautre co-
lonne. Imaginez que, pour ma saiite, j'^tais dans une
petite cal^che avec deux chevaux, suivant la colonne;
lorsque ce tapage arriva, je montais k cheval, je fis Fim-
possible pour arrdter et remettre en ordre la troupe,
mais en vain. Dans cette confusion je me trouvais tout
seul, Sans aucun de mes Messieurs, pas m^me un pale-
frenier, alors je pris le parti de courir comrae je pus en
avant pour chercher une division de cavalerie qui ötait
ä la tete^ avec laquelle je revins et retrouvai ddjä ce
d^sordre remis. J'y ai perdu deux chevaux qui se sont
sauvös, et ma lunette d'approche qu'un de mes gens
portait qui, en tombant avec le cheval, la perdit.
Vous dire, mon eher ami, ce qui arrivera, serait
chose impossible, mais que je suis malheureux pour le
reste de ma vie, et victime d'dv^nemens auxquels je ne
puis pas, et qui sont arrivds sans ma faute, c'est une
chose assur^e.
— 201 —
AdieU; je vous embrasse; qui eüt jamais pu imagi-
ner que ce fiit avec tant de peine. Croyez-moi pour la
vie votre ....
Le 4 octobre 1788.
Trfes-cher frfere. J'ai re9u par estafette votre lettre ^^j^^^^^j^
d'Illova du 20 septembre. Vous pouvez aisdment vous
figurer Teffet qu'elle m'a fait. Attache comme je vous
suis, j'ai it6 p^n^tr^ de voir et les maux que vous souf-
frez, et les peines et inquietudes que vous avez de toute
part, et que le manque de r^ussite dans vos projets et
dans vos Operations de la guerre vous causent bien
justement. Je me les ötais bien figuröes en partie,
mais jamais aussi fortes que vous avez bien voulu me
le d^tailler. Je sens ce que vous souffrez en voyant
les Turcs ravager vos provinces, mais je me flatte que
la Saison avanc^e les obligera bientöt de retrograder et
d'abandonner vos Etats, et que pendant Tbiver on pourra
traiter ou conclure la paix qui vous est absolument n^-
cessaire d&s que vous 6tes si mal soutenu et secondä
par une alli^e qui vous doit tout, pour qui vous vous
sacrifiez si g^nereusement, et qui ne veut agir aucune-
ment d'aucun cotö.
Quant a votre santä, j*ai 6t6 bien p^nötr^ de vous
en savoir si peu content. Je me flatte que, n'ayant point
de fifevre, rirr^gularit^ du pouls, le manque de force, la
toux que je crois convulsive, et le manque de sommeil
viennent tous de la cruelle tension et agitation oü vos
— 202 —
fatigues extremes et les inqui^tudes et peines cruelles oü
V0U8 ^tes, votre vivaeit^ et sensibilit^ mettent vos nerfs,
qui ordinairement causent ces eflFets et ne se guerissent
que par le calme et le repos.
Oserais-je vous prier au nom du bien de FEtat et de
la monarchie, pour laquelle vous vous sacrifiez et qui a
si besoin de votre personne, de vous eloigner de Tarmee
et de retourner a Bude ou k Vienne, oü la tranquUlite
et le repos pourront gudrir vos incommodit^s, tandis que,
restant k l'armee, vous risquez de les aigrir continuelle-
ment, et de ruiner pour toujours une santd aussi precieuse
et importante pour la monarchie, k laquelle vous rendez
dans ce moment-ci certainement un service plus essen-
tiel, en vous dloignant et cherchant k vous remettre la
santä, qu'en continuant a la ruiner.
Je ne saurais assez vous exprimer ma reconnaissance
pour tout ce que vous me tdmoignez d'amical dans votre
lettre, et la d^licate bont^ avec laquelle vous voulez bien
penser k ma sensibilitd. Mon attachement vous est connu
depuis longtemps ; j'ai fait mes dispositions selon vos
ordres pour mon voyage, et j'attendrai vos ordres ult^-
rieurs, apres lesquels je pourrai partir au cas qu'ils vien-
nent, deux jours apr&s les avoir re9us. En tout cas je
vous prie de me marquer oü vous voulez que je vienne,
et par quelle route.
Ma femme a ^te sensible et frapp^e de votre lettre ;
eile me charge de vous präsenter ses respects
— 203 —
Logos, le 7 octobre (1788).
CkO.
aa Leopold.
Trfes-cher frfere. J'ai re9u plusieurs de vos cheres ^^^^^^
lettres et vous en rends bien des gräces. Depuis ma der-
niere il ne s'est rien passä ici d'intäressant. Nous som-
mes toujours avec Tarm^e ici ; les Turcs, selon toutes
les nouvelles, quelque diffieile qu'il soit de s'en procurer,
sont encore rassembl^s aupr^s de Szlatina, savoir k peu
prfes au camp que nous avons quitt^ pr&s d'Illova; leurs
postes avanc^s sont derri&re Caransebes. Voilk seize
jüurs qu'ils ne bougent, par consdquent il est probable
que de ce cotd ils ne pensent pas de pousser leurs Ope-
rations, mais comme la saison est encore trfes-belle, il
est probable qu'ils se tirent d'un autre cot^, pour y por-
ter un coup. C'est sur Semlin et TEsclavonie que je le
suppose. La plaine du Banat, le long du Danube n'est
que d^vast^e par de petites troupes de cavalerie qui la
parcourent, et encore plus par nos propres sujets vala-
ques qui profitent de cette occasion, pour en bandes aller
voler et piller tout ce qu'ils trouvent. Nous ne pouvons
partir d'ici, que nous ne soyons assurds de leur retraite,
puisque sans cela ils perceraient, et ici et peut-^tre en
Transylvanie en avant. Ces circonstances sont bien fä-
cheuses, mais il n'y a pas moyen de faire pour le mo-
ment autrement aprfes tout ce qu'on a fait pour renverser
les meilleures mesures prises. Ma sant^ est toujours de
meme ; apres avoir pendant trois mois pris tous les re-
medes possibles sans effet, je me suis d^cid'ä k n'en plus
prendre et a me rdsoudre k garder cet asthma sec, quel-
que penible et incommode qu'il soit, puisque la respira-
— 204 —
tion est tellement emp^chde, et au moindre mouvement
cela augmente au point k vous empecher de le con-
tinuer.
AdieU; mon eher ami ; prösentez mes respects k
votre chfere ^pouse et croyez-moi pour la vie votre ....
Le 13 oetobre 1788.
an jH^ph. Trfes-cher frfere. C'est avec le chagrin le plus vif
que j'ai vu par votre chfere lettre du 26 du mois passä
les d^tails de ce qui s'est pass^ k la retraite de rarrn^e
et k la malheureuse coniusion et inconväniens qui s'en
sont suivis. J'avoue, cette affaire est inconcevabley et il
est heureux que les Turcs n'en aient pas profitä, et que
le lendemain l'arrifere-garde, en faisant son devoir, les
ait constamment repoussös. Je puis me figurer le dögät
que cette perte de bagages et pillage aura caus^, et les
d^gäts et dommages irreparables que Tinvasion des Turcs
dans le Banat et la Transylvanie devront causer, et
plus que tout le reste tout ce que vous avez du et de-
vez souffrir dans ces circonstances^ et pour le corps et
pour Tesprit, la fatigue corporelle, ayant du §tre toate
la nuit k cheval, faire ces marches^ et par le froid et
humidite de la saison prösente^ ayant du camper. Et de
devoir voir la destruction de cette province qui a tant
coütä k am^liorer, et qui ^tait dans un ^tat si florissant !
Ce que je ne saurais comprendre^ c'est comment des
officiers m^me ont pu s'enfiiir et porter Talarme^ et com-
men|; nos propres gens ont pilli^ les villages derri(^re Tar-
— 205 -
m^e. II est bien naturel que tout cela vous affecte bien
cruellement; sortout voyant partout cet esprit de vertige
et de pusillanimit^ que vous voulez bien me marquer,
et qui n'est pas propre k encourager k tenter quelque
chose de d^cisif. Si Chotym aurait pü §tre pris plus tot,
les Operations des Russes pouss^es en avant avec plus
de vigueur, cela aurait pu vous faire une diversion utile,
mais k präsent la saison est trop avanc^e, il faut esp^-
rer que la saison froide et les pluies obligeront les Turcs
k sortir du Banat, oü ils ne pourront pas se soutenir, et
surtout les Asiatiques k quitter Parm^e. Le pays n'en
sera pas moins ruinä, mais ce mal k präsent est ddjk
fait et il n'y a plus ^e rem^de, mais au moins la cam-
pagne finira, les troupes prendront des quartiers d'hiver,
se remettront, et surtout les malades, mais ce qui importe
plus que tout le reste, vous pourrez vous tranquilliser,
vous reposer, et penser s^rieusement k m^nager, remettre
et soigner votre santä. Sur ce point permettez-moi, je
vous prie, de vous dire mon sentiment. Votre personne
est ce qui importe k la monarchie, d'elle dopend tout et
de votre sant^ et puissance et force d'agir; k tous les
autres malheurs il y a remfede, quelque grands qu'ils
soient. Vos g^n^raux peuvent suppiger k Commander Tar-
m^e sous vos ordres et instructions, mais si vous tombez
malade, si votre santä se ruine, il n'y a pas de remfede,
et tout reste sans mouvement et se ruine. II est naturel
que votre santä doit avoir beaucoup souffert, mais, gräce
a Dieu, votre machine et temp^rament est trfes-robuste
et excellent. II est temps de remettre votre sant^, en
vous m^nageant davantage, vous fatigant moins, et lais-
— 206 —
sant et faisant faire et fatiguer davantage ceux qui vous
8ont subordonn^B et en qui vous pouvez mettre votre con-
iiance. Si vous vous soignez a präsent, je suis persuadä
qu'en peu de temps vous vous remettrez avec le repos et
serez en ätat d*agir ensuite avec plus de vigueur, au lieu
quO; si a präsent vous continuez a vous fatiguer ainsi, vous
risquez de vous ruiner entiferement la santd, surtout dans
la mauvaise saison, et alors le mal sera infiniment plus
grand et sans remfede, et vous faites un service bien
plus essentiel a la monarchie et k I'Etat, en vous soi-
gnant a präsent par le repos, pour vous mänager pour
Tavenir, que par tout ce que vous pourriez faire ä prä-
sent, surtout que la eampagne doi^ etre sur sa fin.
Pardonnez eette digression k nvon sine^re et tendre
attachement pour votre personne et santä et pour le bien
de TEtat et patrie qui en däpend entierement. . . .
Tomaschowatz, le 19 octobre 1788.
Joseph Tres-cher frere. J'ai recu avec bien de la reconnais-
an Leopold. *
sance votre chere lettre, et tout Tintäret que vous me
tämoignez et pour nos affaires et sur nia santä. Je crois
que nous serons, malgrä que les Kusses n'ont rien fait
du tout et ne veulent pas meme rester en Moldavie, que
nous leur avons conquise, Thiver näanmoins encote assez
heureux pour faire sortir les Turcs du Banat. II n'y a
que Mehadia qu'il serait possible qu'ils occupent et d'oü,
vu la Saison et les avantages que le local leur donne,
il n'y aura pas facilement moyen de les däloger. Pour
— 207 —
la plaine, je compte la faire vider bientot, et le 23 l'ar-
m^e sera ä Panesowa, oü quatre k einq mille hommes
doivent se trouver.
Ma sant^, malgre la respiration difficile et la toux^
depuis que je ne prends plus de remedes du tout, se sou-
tient^ et je suis en ^tat de veiller ä mes affaires et de
me tenir m^me quelques heures k cheval, malgr^S la Sai-
son qui n'y est pas propiee.
AdieU; mon eher ami ; je vous embrasse de tout
mon coeur, et je voudrais bien que vous ne soyiez pas
tourment^ des coliques. Pr^sentez mes homraages ä votre
chfere ^pouse et croyez-moi pour la vie votre ....
Semlin, le 29 octobre 1788.
Tres-cher frere. J'ai re9u avec le plus grand int^r^t an Leopold,
et reconnaissance plusieurs de vos ehferes lettres qui me
t^moignent le plus grand int^ret pour ma sante et nos
affaires. Quant a la premiere, je ne suis plus malade, je
me porte m^me bien, k la difficulte de respiration pr&s,
et k la toux qui m'incommode cruellement. Quand je
marche cent pas et -que je ne vais pas bien lentement, je
suis absolument hors d'haleine, et le coeur me bat que je
dois m'arr^ter. Je crois que ceci est un mal qui me res-
tera, aussi je ne prends plus de remfede et laisse agir la
nature, en me rdsignant k cette incommodit^.
Quant aux affaires, nous avons pourtant fait d^guer-
pir les Turcs du Banat et avons rdoccupe le Danube ;
ils ne tiennent plus que Schupaneck et la petite vallöe
— 208 —
qui s'^tend jusqu'ä Mehadia. Aprfes avoir laisse le gön^-
ral Clerfayt*) au Banat avec 22 bataillons et 14 divisions,
je suis march^ avec le reste ici^ puisqu'il me conste par
un courrier que nous avons interceptä, des ordres posi-
tifs du Grand -Vizir d'attaquer Semlin, et qu'il se trouve
eneore auprfes de Beigrade au grand camp. Je crois pour-
tant qu'ils auront bien de la peine k faire quelque chose,
au moins je les attends de pied ferme.
Vos coliques päriodiques, mon eher frfere, m'in-
quifetent; je vous conjure pour le bonheur de tous vos
enfans de vous bien m^nager, car vous devez sentir com-
bien votre conservation leur importe. Pour moi, sans
femme et enfans, je ne suis qu'un carreau de vitre cass^
que vous remplaceriez a merveille, mais pour vous, votre
nombreuse famille a besoin eneore longtemps d'un chef
et d'un pfere.
Adieu ; je vous embrasse, de mSme que votre chfere
^pouse 5 croyez-nioi pour la vie votre ....
Semlin, le 4 novembre 1788.
an^Leo^id Trfes-chcr frfere. Notre interprfete Stürmer**), retour-
nant par Florence k Pise pour aller trouver sa femme et son
*) Franz Sebastian Karl Joseph de Croix Graf Clerfayt, später
in den französischen Kriegen berfihmt geworden. Er starb im J. 1798
als Feldmarschall nnd Grosskreuz des Theresienordens.
**) Ignaz Stürmer, bis zum Ansbruch des Krieges Dolmetsch
bei der Internuntiatur in Constantinopel. Er wurde später selbst Inter-
nuntius und starb als Staatsrath bei der Haus-, Hof- und Staatskanzlei.
— 209 —
enfant, je lui donne cette lettre et j'y ajoute cette hi-
stoire vraie et succincte que j'ai fait de notre campagne*).
Vouß y verrez les hasards fächeux et impr^voyables qui
ont amen^ les ^v^nements et une partie de la ruine du
Banat. Je r^ponds que tout est vrai k la lettre, et je ne
Tai ^erit que pour moi et pour vous aussi. Vous devez
avoir la patience de le lire en minute avec ses correc-
tions, et je vous prie ensuite de me le renvoyer, car je
n'en ai point d'autre exemplaire. Les Turcs se retirant
a force et se tenant de tous les eötäs parfaitement tran-
quilles, nous allons aussi prendre les quartiers d'hiver,
la Saison devenant d^ja trfes-rude et froide. C'est en con-
s^quence que votre fils part apr^s-demain pour Vienne.
Pour moi, je resterai encore quelques jours pour regier
diffdrentes choses. Ma sant^ est toujours de m^me, la
respiration est plutöt plus difficile, mais je ne suis point
malade et je le souffre avec patience. Je ddsirerais bien
que vos coliques n'existassent plus.
Le porteur de cette lettre est un homme sage, dont
j'ai ^t^ content cette campagne et qui est bien instruit
des affaires de Constantinople.
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse et präsente
de m§me ici k votre chere ^pouse mes hommages, ^tant
pour la vie votre ....
*) Anhang.
V. Arneth Joseph n. Loopold. 11, 14
— 210 —
Semlin, le 17 novembre 1788.
an TeTdci Trfes-cher frfere. J'ai reju votre chfere lettre et ai
mille gräces k vous rendre pour le tendre int^r^t que
vouB prenez ä ma santd. Elle est bonne, k cette oppres-
sion pr^s qui probablement ne me quittera plus. Je pars
d'ici demain pour Peterwardein, puis par Essegg j'irai k
Pest, k Bude, Presbourg et Vienne, et en m'arr^tant un
ou deux jours k chaque endroit, je ne serai chez moi
que les premiers jours du d^cembre.
Ici il n'y a plus rien de nouveau ; toutes les troupes
sont entr^es en quartier d'hiver, et les Turcs paraissent
ne vouloir plus rien tenter. Toutes nos provinces sont
libres d'eux ; ils n'y ont plus un pouee de terre, et nous
en tenons quelques forts et villages. Outre Chotym les
Kusses ne peuvent ou ne veulent rien faire ; je crois le
premier, parce que leur honneur et int^röt y est trop en-
gag^. Oczakow n'est pas pris, et probablement ne le sera
pas, car on ne Tassiäge pas en rfegle. Romanzow ne sait
encore oii 11 passera Thiver, et ainsi tout est en Fair.
Adieu ; je vous embrasse, de m^me que votre chfere
^pouse
Bude, le 28 novembre (1788).
a/iiMw^id Trfes-cher frfere. Je suis ici pour arranger quelques
objets, surtout pour les vivres de Tarm^e pour la cam-
pagne prochaine. En m^me temps j'y tiens aujourd'hui
en public l'office pour Tanniversaire de la mort de S. M.
— 211 —
rimp^ratrice. Vous aurez vu par tout ce qui vous a ^t^
envoy^ par le dernier courrier assurä du jeudi les objets
importants dont il s'agit. II est incroyable d'avoir Timpu-
dence de faire de pareilles propositions, aussi les ai-je
r^pondues bien positivement et serai encore plus positif
dans leur accomplissement. Comment cette crise finira,
je ne puis Timaginer encore, mais toujours je serai trfes-
circonspect, et quoique toutes les men^es prussiennes
soient tourn^es contre moi seul, je tächerai pourtant de
lui faire ^chouer ses projets.
Adieu; je suis bien fäch^ de vous savoir encore in-
commod^. Pour moi, c'est toujours de m§me, la respira-
tion difficile reste ; je pars apres-demain pour Vienne.
Croyez-moi, en vous embrassant, de m§me que votre
chfere öpouse, votre ....
Vienne, le 8 d^cembre 1788.
Tr^s-cher frfere. Je profite de la premifere poste pour a/LeT*oid
vous annoncer mon heureuse arrivde ici, et vous remer-
cier en mime temps de votre chfere lettre et renvoi de
mon histoire sincfere de ce qui s'est pass^ cette campagne.
Ma sante a ^t^ jug^e ici par Störck et Brambilla ; devoir
se soumettre a des remfedes, et je dois prendre le matin
du lait de chlvre et boire une d^coction de Salep, tout
cela pour ma poitrine dont la respiration n'est pas libre,
et avec un peu de mouvement que je me donne, je res-
sens tout de suite des battemens de coeur.
14*
— 212 —
De nouveau il n'y a rien ; nous attendons des re-
ponses de P^tersbourg sur ce que vous avez va que j'y
ai ^crit; et qui m'a para bien positif.
Adieu ; je vous embrasse, de m^me que votre chfere
^pouse, de tout mon coeur; croyez-moi pour la vie
votre ....
Le 14 d^cembre 1788.
Leopold Trfes-cher frere. Je viens de recevoir votre chfere
an Joseph.
lettre du 28 du mois pass^ de Bude, et vous en rends
mille gräces. II est bien sür que les propositions de la
Russie sont bien singuli&res. L'id^e de se mettre sur le
pied d'une guerre defensive vis-k-vis des Turcs, et d'avoir
k faire au Roi de Prusse, peut ^tre bonne pour eux, dont
les provinces d^fendues vis-k-vis des Turcs par la mer
et par des d^serts ne risquent point une attaque ; tandis
que presque toutes vos forces peuvent ä peine suffire k
couvrir vos immenses confins de provinces fertiles et
peupl^es contre les d^vastations des Turcs, et qu'il fau-
drait en outre exposer la Boheme et la Moravie aux in-
cursions du Roi de Prusse. En vdrit^, on ne saurait juger
de ces projets, et il parait que la Russie ne cherche qu'k
vous procurer des embarras et la guerre avec le Roi
de Prusse, pour pouvoir en attendant s'arranger k son
aise en Pologne, et peut-^tre k la fin faire mime une
paix s^par^e. A votre arriv^e k Vienne vous pourrez
mieux voir et d^brouiller tout cela que personne.
- 213 —
Vous aurez d4jk appris qu'en Espagne T^pouse de
rinfant D. Gabriel, son enfant, et Tlnfant lui-m§me sont
morts de la petite veröle,*) et que les deux enfans ain^s
de la princesse des Asturies en sont atteints.
Le 16 d^cembre 1788.
Tres-cher fr^re. Par la derniere poste i'ai recu le ^®^p^^^
t o * an Joseph.
reste des papiers importans dont vous avez bien voulu
me parier dans votre dernifere lettre, et que je vous ren-
voie aujourd'hui. Je suis en tout point entiferement de
votre avis, et crois qu'il est de la dernifere importance
de ne pas se laisser engager par la Russie a une d^-
marche qui, en vous attirant de tous les cöt^s des enne-
mis sur les bras, finirait par vous engager a vous sacri-
fier pour un alli^ qui ne veut et ne peut rien faire pour
vous, les intentions de rimp^ratrice , quelques bonnes
qu'elles puissent §tre, n'etant second^es ni par ses ministres
ni par ses g^n^raux, ce dont la campagne de cette ann^e
a ^t^ une preuve bien claire et indubitable.
*) Am 3. November 1788 war die Infantin Maria Anna Victoridi
geborne Prinzessin von Portugal, Gemalin des Infanten Don Gabriel,
eines jüngeren Bruders der Grosslierzogin von Toscana, noch niclit
zwanzig Jahre alt, an den Folgen einer schweren Entbindung gestor-
ben. Der damals zur Welt gekommene Prinz Don Carlos Joseph starb
schon am zehnten Tage nach seiner Geburt, und am 23. November
auch der Vater Don Gabriel an den Blattern.
— 214 —
Ce 18 d^cembre 1788.
an Leopold. Tr^ß-cher frfere. Voici les pifeces de la semaine, fon-
ci^rement de nouveau il n'y a rien ; les nouvelles de P^ters-
bourg d^eideront. Les Kusses espferent toujours, malgrö
la Saison, de prendre encore Oezakow; j'en doute, et il
serait peut-§tre plus avantageux, si Ton veut faire la paix,
qu*ils ne prennent pas cette forteresse, ear ils auraient
bien de la peine k la rendre, tout comme les Turcs a
la leur laisser.
Adieu ; je vous embrasse, de mfeme que votre chfere
äpouse, de tout mon coeur. Croyez-moi pour la vie
votre ....
Benueei *) que vous connaissez, partant d'ici k la fin
de ce carnaval, tout Top^ra buffa cessant, m'a instamment
pri^ de vous envoyer ce petit memoire. Je lui dois la
justice qu'il s'est pendant six ans parfaitement bien con-
duit ici.
Ce 22 d^cembre 1788.
Leopold Trfes-cher frfere. J'ai recu votre trfes-ch^re lettre et
an Joseph.
les papiers y joints que j'ose vous renvoyer directement
avec cette lettre, et continuerai de m^me k Tavenir. Les
r^ponses qui viendront de Russie seront d^cisives ; c'est
*) Francesco Benucci, ebenso ausgezeichnet als Basssänger wie
als Schauspieler im komischen Fache. Für ihn schrieb Mozart den
Part des Figaro in „Le nozze di Figaro" und des Guglielmo in
„Cosi fan tutte".
- 215 —
avec bien de rimpatience que je les attends. Je com-
prends fort bien, combien il doit vous coüter k devoir
V0U8 pr^parer k tous les dv^nemens, sans pouvoir pour-
tant faire vos pr^paratifs publiquement, ce qui est double -
ment d^sagreable, mais en tout cas Thiver, qui ne fait
que de commencer, vous laissera tout le temps et les
moyens d'etre pröt pour tout ce qui pourrait arriver,
quoique je me flatte encore toujours que la Russie recon-
naitra la justesse de vos raisons, et que c'est dans son
propre avantage de suivre vos avis, au Heu de 8*embar-
quer dans une suite d'affaires, qui a la longue ne laisse-
rait pas d'^tre tr&s-embarrassante pour la Russie meme,
surtout ätant aussi mal servie, et ayant aussi peu de
moyens qu'elle en a montr^s dans cette campagne. Je
vous supplie, m^nagez cet hiver et soignez bien votre
propre sant^, qui est le plus important. Ici tant ma femme
qui me charge de vous präsenter ses respects, que tous
mes enfans se portent bien. L'hiver commence assez rude-
ment ici, et apr^s les fetes nous irons nous ätablir a
Pise. Soyez, je vous prie, persuad^ du tendre et respec-
tueux attachement avec lequel je suis . . . .
Le 25 d^cembre 1788.
Trfes-cher fr&re. Je ne vous ai pas ^crit lundi passö, Joseph
an Leopold.
ayant ^t^ incommod^ et alit^ d'une fifevre et pointe de
cötö qui m'avait pris. Je me suis lev^ aujourd^hui la pre-
mifere fois, pour entendre la messe dans ma chambre.
— 216 -
Comme la pointe est passöe au cot^, la fievre presque
aussi, mais qu'il me reste une expectoration assez forte,
et cela de matiere fort tenace, que les poumons, surtout
le gauche auprfes du coeur, sont fort affaiblis, on m'ob-
lige k un grand et long regime, esp^rant que cette r^vo-
lution de la nature pourrait me d^livrer de cette incom-
modit^ que je souffre depuis des mois d'une difficultä
dans la respiration. Je dois done me recoucher et tem-
poriser ainsi bien malgr^ moi.
Adieu; je vous embrasse^ de meme que votre ch^re
^pouse. Je vous prie de la bien assurer de toute la part
que j'ai prise a sa juste douleur de la perte cruelle et
affreuse par toutes ses circonstances qu'elle vient de
faire.
Croyez-moi pour la vie votre ....
17 89.
Ce 1«' janvier 1789.
Tr^s-cher frere. C'est hier soir qu'arriva ici la nou- ^n Leopold,
velle aussi inattendue qu'affligeante de la mort du Roi
d'Espagne. Je puis m'imaginer la juste douleur qu'en
^prouvera votre chere öpouse, et c'est pour eile que cela
me fait le plus de peine et m'inqui^te mSme pour sa
sante. Je vous prie de lui donner la lettre ci-jointe, si
vous le trouvez a propos. Votre fils, je le lui ai dit et
j'ai ^t^ tres- content de son premier mouvement, qui etait
tres-inquiet et sensible pour la peine qu'il ^tait sür qu'en
eprouverait sa m^re, Cela d^range le carnaval pour ces
jeunes gens ; ne sortant point encore, il n'y avait point
de gala aujourd^hui. Ma sant^ est remise, quant a la fievre,
douleur au cote et rhume que j'avais eu, mais malgr^
tous les m^nagemens, Tincommoditd dans la respiration
et les battemens de c.oeur qui en sont une suite, sont
rest^s, et je erois que je ne m^en deferai plus. Du reste
rien de nouveau ; j'attends les nouvelles de P^tersbourg
avec impatience et vous embrasse de tout mon coeur. . . .
— 218 —
Ce 5 janvier 1789.
an^Leo^oid Trfes-cher fr^re. J'ai regu les complimens de tous vos
filß pour la nouvelle ann^e. Soyez, je vous prie, mon
interpr§te pour les en remercier et les assurer de toute
ma tendresse. Je suis bien empress^ d'avoir de vos nou-
velles, pour savoir comment votre chfere ^pouse se porte
et si eile n'a pas 6t6 accabl^e des malheurs rdit^r^s dans
sa famille, et surtout de la perte de son p&re auquel
eile avait tant de raisons d'Stre attachde.
' Pour ici, nous venons de recevoir la nouvelle de la
prise d'Oczakow par les Busses. Ils ont empört^ cette
place par un assaut qui a 6t6 fort meurtrier. Cet ivine-
ment fera e£Fet k Constantinople, mais est plus propre a
faire continuer la guerre qu'a amener la paix.
Ma sant^ est bonne ; il n'y a que la difficult^ dans
la respiration qui reste tout comme auparavant. Je com-
mence a sortir. Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse
tendrement
Ce 8 janvier 1789.
Joseph Tr^s-cher frfere. Voiei les nouvelles de la semaine;
an Leopold, '
les plus importantes, je les attends de P^tersbourg. J'ose
vous envoyer dgalement une lettre pour Thugut, dans
laquelle il y a une pour la Reine^ que vous voudrez bien
lui faire passer par occasion, quoiqu'il n'y ait rien de
bien secret. C^est avec impatience que j'attends Teffet
que la mort du Roi d'Espagne aura causa k Naples. Je
— 219 —
pr§che beaucoup la Reine de tächer d'^tre bien amicale-
ment avec le Roi d'aujourd'hui, ce qui parattrait facile,
vu que probablement il ne voudra ni ne pourra faire
valoir la mSme autoritär qui choquait le plus dans les
petites choses que le feu Roi comme pfere croyait pou-
voir exiger de son fils. La santö de votre ch^re ^pouse
et le cruel eflfet que cette perte lui aura faite, m'inquifetent
beaucoup, et c*est de vos nouvelles a ce sujet que je
suis trfes-empress^ de recevoir.
Adieu ; je vous embrasse tendrement et vous prie
de me croire pour la vie votre ....
Ce 15 janvier 1789.
Trfes-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre et vous ^r®^^,,
* an Leopold.
en suis trfes-oblig^. L'hiver continue, et les neiges incroya-
bles qu'il y a, rendent tous les transports pour Tarm^e
d^une difficult^ horrible, et il est k pr^voir que nous
auroDB des inondations tr^s-consid^rables et tr^s-longues.
Ma santä est k peu pr^s de mSme ; je tousse toujours,
et ne suis point libre de l'oppression que je ressens k
la poitrine. Je drogue toujours, mais je commence k sor-
tir, voyant que cela n'aboutirait a rien de rester plus
longtemps enfermä chez moi.
Je vous remercie da la r^ponse favorable que vous
avez donn^e pour Benucci ; je la lui ai fait savoir, et je
ne doute point qu*il accepte vos gräces avec reconnais-
sance.
— 220 —
Les affaires de la semaine ne sont pas bien irapor-
tantes ; je vous les joins ici. II u'j a que le rescrit rosse
qui merite toute votre attention ; nous attendrons avant
de rien faire Tarrivee de notre courrier que Cobenzl an-
nonce d'un jour a Tautre.
AdieUy mon eher ami ; je vous enabrasse, de meme
que votre obere epouse, de tout mon coeur. ....
Ce 19 janvier 1789.
osep Tres-cher frere. J'ai recu votre chere lettre et suis
an Leopold. ^ *
enchänte que vous et toute votre chere famille se portent
bien, malgr^ la saison si extraordinaire de cette annöe,
et le froid violent et long qui s'est fait ressentir. Ici
nous avons depuis quelques jours le degel, mais qui va
doucement, et comme il regele la nuit, nous esperoos
que nous n*aurons point des inondations bien fortes a
craindre. En attendant, on a la plus grande peine a pour-
voir Tarmöe, les transports par les neiges si aecumulees
ötant devenus presque impossible.
Ma sant^ est au fond de meme. Cette diffieult^ de
respiration fie me quitte ni probablement me quittera
plus ; il faut de la patience et ne plus s'en plaindi'e.
Quand on est pres de cinquante ans, il faut bien avoir
des incommoditds. Je vous embrasse, de meme que votre
chere dpouse, de tout mon coeur
221
Le 21 Jan vier 1789.
Trfes-cher frfere. J'ai regu votre ch^re lettre du 8 de ^nTre^h
ce mois et vous rends mille gräces des soins que vous
voulez bien prendre de la sant^ de ma femme. Elle en
est p^netr^e et me charge de vous en rendre mille grä-
ces. Sa santö et celle de tous mes enfans; gräce k Dieu,
sont bonnes, et tous les rhumes sont finis avec le grand
froid qui, ayant ^t^ extreme, a causa beaueoup de ma-
ladies et mortalit^. J'ai envoy^ k Thugut par une occa-
sion söre le paquet que vous m'avez adress^ pour lui.
Votre lettre k la Reine ne pouvait pas venir plus k pro-
pos ; le nouveau Roi d'Espagne m'avait fait prier in-
direetement d'engager la Reine de Naples et le Roi k
se r^unir avec son fr^re, en les assurant qu41 ne d^sirait
que de vivre en union et bonne intelligence avec eux,
que du passö il n'en ferait plus mention du tout, et qu!il
dösirait seulement que de Naples on eüt pour sa per-
sonne, sa Cour et ses sujets les ^gards convenables et
reciproques, les assurant que jamais il ne penserait seule-
ment k se meler de leurs afiFaires. Je venais d'^crire tout
cela k la Reine, d^autant plus que j'ai du la privenir
que par le courrier d'Espagne d'apres-demain, le fameux
Quinones, ci-devant au Service de Naples d'oü il a ^t^
chassä, et k präsent naturalis^ Espagnol et au Service
d'Espagne, qui est k präsent ici, recevra Tordre du Roi
d'Espagne draller de sa part k Naples, complimenter le
Roi et la Reine, et leur porter les präsens que feu le
Roi leur avait destinäs k Toccasion qu^il avait tenu sur
les fonts de bapteme leur dernier fils. Je savais qu'aux
— 222 —
confins de Naples il y avait Tordre d'arrSter ce Qui-
nones^ contre lequel la Reine avait des raisons d'^tre
mecontente pour des mauvais propos qu'il avait tenus ci-
devant contre eile, ayant 6t6 m§l^ dans l'affaire de Las
Casas. Je craignais qu'un affront public, fait ä cet homme
qui peut bien Tavoir möritd, mais au moment qu*il se
präsente comme charg^ d'une commission personnelle et
d*un präsent du Roi d'Espagne pour la premifere fois,
pourrait faire naitre une division constante entre les deux
fr^res, d'autant plus que je savais que le Roi d'Espagne,
vif et empört^, y aurait 4t4 trfes-sensible. J*ai donc cru
bien faire d'envoyer un courrier k la Reine, pour Ten
pr^venir et la prier de se conduire avec la prudence
convenable, et j'y ai Joint votre lettre.
Continuez-moi, je vous prie, vos bont^s, et soyez
persuadä du sinc^re, tendre et respectueux attachement
avec lequel je suis ....
Ce 22 janvier 1789.
Joseph Trfes-cher fr^re. Pour auiourd'hui je ne puis que vous
an Leopold. •' j r ^
accuser votre chfere lettre, par laquelle vous me marquez
la perte que la Reine de Naples notre soeur a faite de son
fils*). J'avais regu par la mime poste une lettre de sa
part, par laquelle eile me marquait avoir les meilleures
esp^rances que son fils en rechapperait. J*en suis vrai-
*) Des Prinzen Januarius Carl Franz, geboren 1780, gestorben
am 1. Januar 1789.
- 223 —
ment afSig^ et crains Teffet que cela produira sur sa
sant^. Je vous prie de remercier votre chfere ^pouse de
sa lettre ; j'en ai 6t4 aussi toueh^ qu'^difi^, et je lui suis
si tendrement attach^, que certainement je prends la part
la plus vraie ä tout ce qui TafBige.
Les maladies continuent aux arm^es, et nous venons
de perdre plusieurs offieiers de distinction ; entre autres
le Feldzeugmeister Fabris qui commandait en Transyl-
vanie, y est mort d'une fiivre putride. Je le regrette in-
finiment et je viens d^envoyer Hohenlohe*) en sa place.
Adieu, mon eher frfere ; voici les nouvelles du mo-
ment. Croyez-moi pour la vie, en vous embrassant tendre-
ment, votre ....
Ce 29 Jan vier 1789.
Trfes-cher frire. J'ai re9U k la fois deux de vos ^^ Leopold.
ch^res lettres du 16 et du 21 ; je vous rends bien des
gräces de leur contenu, et suis enchantä que ma lettre
pour la Reine de Naples soit arrivde k propos, mais sur-
tont que nous nous soyons rencontr^s dans le principe
et dans les conseils que nous lui donnions. Vous avez
fait k merveille de Tavertir de Tenvoi de Quinones, et
de tächer qu'elle termine une bonne fois les disputes
ridicules qui s6parent les deux Cours.
*) Der Feldzeagmeister Fürst Friedrich Wilhelm zu Hohenlohe-
Kirchberg.
— 224 —
Ce que tous me marquez des sentimens da Roi
d'Espagne actuel, est parfaitement bien, et je desire
qu'ainsi toute d^sunion cesse. Ici le dögel est en plein ;
il n'y a pas jusqu'k präsent d'inondatioii, mais plnsieurs
arches du grand pont du Danube sont emportees et les
glagons tiennent encore pres de Nussdorf, ce qui fait
toujours craindre encore des gonflemens d'eau. Les mala-
dies sont fortes partout, meme ici a Vienne bien des gens
meurent; k l'arm^e nous venons de perdre plusieurs of-
ficiers de distinctioii; ce qui est un grand malheur, puis-
qu'ils sont rares et lents k former.
Adieu, mon eher frfere, je vous embrasse
Ce 2 «vrier 1789.
an Leopold. Tres-chcr frere. J'ai re9U votre chfere lettre, par la-
quelle vous m*annoncez que le froid a fait grand tort
aux agrumi ; c'est une vraie perte pour l'Italie. Ici je
suis incommodä depuis une couple de jours, et j'ai en-
core, outre ma toux, pris une espfece d'er&ipfele au vi-
sage, ce qui m'oblige ä rester chez moi, mais cela ne
sera point de duröe
Ce 5 f^vrier 1789.
an Leopold. Trfes-chcr fr^rc. J'ai re9u votre chfere lettre et je
ddsire bien que les choses puissent s'arranger entre les
deux freres d'Espagne et de Naples. Ces disputes sont
— 225 —
si ridicules que Ton n'y comprend rien. M^ sant^ est
meilleure ; l'^r^sipMe est pass^, mais la toux reste.
Vous verrez par les objets couraDs que je vous en-
voie ici, que j'ai gagnä une bataille k Bruxelles, et qu'k
la fin la fermet^ a fait plier ces mauvaises tetes.
De Russie, de Constantinople je ne sais autre chose
que ce qui vous a 4t6 envoyd d^jk ; cela trainera, et la
campagne est in^vitable. Les inondations ont fait bien
du ravage et les maladies continuent partout. Le prince
Charles Liechtenstein est tres-mal de meme que le prince
Schwarzenberg *).
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse, de meme
que votre chfere dpouse, de tout mon coeur ....
Ce 18 fe5vrier 1789.
Trfes-cher frfere. Pour aujourd'hui je ne puis que vous ^n h^opoxci.
annoncer la bonne reyue de votre chfere lettre. La nou-
velle que vous me donnez du nouveau malheur arriv^
encore k Naples, m'a vraiment frapp^, mais je Tavais
prövue**). La Reine, par ses boutades, est faite pour tout
gäter. Pourquoi, puisqu'un de ses fils ^tait mort de
la petite veröle, faire dans cette saison inoculer tous ses
enfans, m^me celui qui n'y 6tait pas propre par son äge;
cela est agir sans r^flexion. Son ^tat et la peine et le
*) Fürst Johann Schwarzenberg, geboren 1742, starb am 2. No-
vember 1789.
**) Durch den am 1. Februar 1789 erfolgten Tod des erst fünf
Monate alten Prinzen Karl Ludwig.
y. Arneih. Joseph a. Leopold. II. 10
— 226 —
reproche qu'elle s'en fera, me fönt vraiment de la peine
et m'inqui^tent d'autant plus que je ne vois pas de re-
m^de k ces incons^quences qui deviennent de jour en
jour plus föcheuses.
Votre fils se porte bien ; il n'a plus eu la fi^vre, et
il pourra m^me dimanche encore aller au bal. En vous
joignant ici les pi^ces de la semaine; je vous embrasse
de tout mon coeur, de m^me que votre chere äpouse . . .
Le 23 fövrier 1789.
an Leopold. Tr^s-chor frfere. J'ai re9u votre chfere lettre, et avec
bien de la reconnaissance j'y ai vu tout Tint^rlt que vous
voulez bien prendre k ma santä. II n'est plus question
d'^r^sip^le, mais la faiblesse aux poumons reste toujours.
Je tousse, je crache, et la respiration reste toujours dif-
ficile. J'ai repris l'usage de l'eau de Seltz avec du lait de
ch^vre, mais je ne trouve point que cela me serve de
quelque chose. Voilk huit mois que cela dure, que toutes
les esp^ces de rem^des n'ont pas portd le moindre change-
ment au fond du mal, et par cons^quent je crois qu'il
n'y a que patience et r^signation k avoir, et que ce qui
est, ne se changera plus.
Adieu, mon eher ami ; le mar^chal Hadik*) a eu le
commandement de la grande arm^e k la place du marö-
*) Der Feldmarschall Graf Andreas Hadik von Fatak, Gross-
kreaz des Theresienordens, Präsident des Hofkriegsrathes. Er zfthlte
damals schon 78 Jahre und starb ein Jahr später, wenige Tage nach
dem Kaiser, am 12. März 1790.
— 227 —
chal Lascy qui, pour sa sant^, s*en est excus^. Le prince
Charles Liechtenstein est mort avant-hier d*une li^vre
putride. Votre fils se porte bien, et a ^t^ cette nuit k la
redoute.
Je vous embrasse, de mime que votre ehfere
^pouse
Ce 26 f^vrier 1789.
Trfes-cher frere. J'ai reyu votre ehfere lettre, et la^^^LeToid
cruelle peine de la Reine de Naples m'a fait craindre
pour sa santö. Elle m'a ^crit des lettres en d^sesp^r^e.
L#a r^conciliation avec FEspagne cloche aussi, enfin il n'y
a rien de bon k y faire, et encore moins k la conseiller.
Cette inoculation ötait si peu r^fldchie, dans cette saison,
au moment d'une ^pid^mie, un enfant de cinq mois, Tin-
oculer ayant eu la petite veröle dans la maison ; tont
cela eile Ta oublid pour suivre sa fougue.
Ici il n'y a rien de nouveau ; de Constantinople il
n'y a point de nouvelles encore ; les maladies continuent
malheureusement ehez nous et nous enl^vent beaucoup
de monde. Le maröchal Hadik a 6t6 destinä a la place
du maröchal Lascy au commandement de la grande armde.
Laudon est encore malade et je crains beaucoup pour
lui, mime s^il se remet, quMl ne pourra soutenir les fa-
tigues d'une campagne.
Ma sante ne se remet pas ; je suis absolument, quant
ä la toux et aux obstructions et la respiration difficile,
malgrd tous les rem^des au meme point, et je crois que «
16*
— 228 —
tout est dit et que c'est un mal local aux poumons qui
n'est pas gu^rissable.
Adieu, mon eher ami; je vous embrasse, de m^me
que votre chfere ^pouse, de tout mon coeur
Ce 5 mars 1789.
Joseph Tres-cher frfere. J*ai recu votre chfere lettre et je
an Leopold.
VOUS envoie les objets de la semaine. La paix que
vous paraissez ddsirer, est encore bien ^loign^e, et par
les nouvelles venant des arm^es russes il n'y a pas la
raoindre probabilit^ qu'elles feront quelque chose de d^-
cisif cette ann^e, et nous aurons derechef toute la bou-
tique seuls sur le corps.
Ma sant^ ne va pas mieux, mSme depuis quelques
jours je suis plus iucommod^ des batteraens de coeur, de
la respiration emp^ch^e et de la toux. Je ne sors point,
j'ai cess^ le lait de chfevre avec l'eau de Seltz pour re-
prendre des decoctum, mais je vois bien que ces mes-
sieurs ne me gueriront plus et que ce vice local rae
restera.
Adieu, mon eher frfere ; la cruelle Situation de la
Reine de Naples me fait une peine affreuse. C^est en
vous embrassant, de m^me que votre chfere ^pouse, que
je serai toujours ....
229 -
Ce 9 mars 1789.
Tres-cher frere. J'ai reyu votre ch^re lettre et vous an^Leopoid.
en remercie. II est bien triste que la Reine de Naples
ait une nouvelle peine, ses fiUes ayant la scarlatine. Pour
ici, nous avons un nouvel hiver ; il a neigi et il gh\e.
Ma sant^ est toujours de meme ; Störck m'a soUieit^ ä
faire assembler quelques autres' mödeeins, je Tai fait
malgr^ moi et ils ont ^t^ ce matin chez moi, m'ont beau-
coup examin^, ont döliber^ et ont fini par dire que je
eontinue le m^me ddcoctum, et que, mes poumons etant
affaiblis et le coeur aussi, il fallait me menager dans
tous les exercices, dans le travail, et me garder de Tair
trop rüde, pour ne pas tomber dans des plus grands in-
conv^niens. Voilä le rösultat qui ne signifie rien, et que
voulez-vous qu'ils disent, quand ils ne connaissent ni le
mal ni par consöquent le remfede.
Adieu, mon eher ami; je vous embrasse de bon
coeur ....
Ce 16 mars 1789.
Tres-cher frere. J'ai recu votre chere lettre. D'ici "^^^^p^,
' an Leopold.
je ne puis vous rien dire de nouveau , tout est dans le
m^me ^tat. Le d^gel est arrivd derechef, et je crains
seulement que les dernieres gelbes auront fait du tort
aux semailles.
Les affaires de Naples sont ind^finissables, et je ne
comprends point comment on peut se chicaner mutuelle-
-> 230 —
ment poiir des choses indiflferentes, comme est un am-
bassadeur, pendant que tant de vrais interets vous r^unis-
sent. C'est sürement TefiFet de sous-ordres et mfeme mi-
nistres interessös a cette desunion, qui soufHent au feu
des deux cotös.
Ma saute reste toujours de meme. Je De sors point,
neanmoins je prends tous mes arraugemens pour la cam-
pagnc. Adieu
Ce 19 mars 1789.
Joseph Tres-cher frere. J'ai recu votre chere lettre. Les
an Leopold. - *
voeux que votre amitie veut bien faire pour le rdtablisse-
ment de ma sant^, me touchent seDsiblement^ mais ils
seront probablement aussi ineflieaces que ceux pour la
paix; il n'y a d'apparence ni pour Tune ni pour Tautre.
Nous n'avons point de reponses de Constantinople ; le
temps avance et les Prussiens, Anglais, Suödois soufflent
au feu a Constantinople avec succis, pendant que la
France et TEspagne y ont peu de credit.
Pour ma sant^, eile empire plutot que de gagner;
Yoilä trois semaines que je ne suis pas sorti. Je prends
avec la plus grande exactitude tous les rem^des, mais
sans le moindre effet jusqu'a präsent. En cela il n'y a
sürement pas la moindre faute de ma part. Les mddecins ne
sachant que dire ni que faire, me fönt toujours esp^rer
du soulagement de la bonne saison, et que des sucs d'her-
bes me feront du bien, mais je n*y tiens rien; le mal
local existe, il ne partira plus ; mille circonstances le
— 231 —
»
rendront plus insupportable ou moins, mais sans jamais
en lever la cause.
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse, de meme
que votre chfere ^pouse
Ce 23 mars 1789.
Tres-cher frere. Pour auiourd'hui le vous annoncerai ''^"p^
•' •' . an Leopold.
seulement la bonne reyue de votre obere lettre. Je suis
pris et au lit d'une fifevre qui revient tous les jours, dure
trois ou quatre heures, sans grands frissons ni grande
chaleur, mais un malaisO; abattement g^nöral ; voilk cinq
jours de suite. On la croit rhumatique, ayant un peu de
douleur vers T^paule. Du reste, tout est de mSmO; et les
Esculapes tätonnent, en changeant de m^decines, mais ils
ne gagnent pas terrain, bien au contraire. Combien cette
Situation est d^sagr^able^ je vous le laisse juger! Trois
semaines je n'ai pas mis le pied hors de chez moi, et
j'attrape fi&vre, rhumatisme. Adieu
Ce 26 mars 1789.
Trfes-cher frire. J'ai recu votre chfere lettre : le suis ^^^^^
^ ' '' an Leopold.
charmd que le rhume de votre ch^re äpouse soit gu^ri.
La fi^vre joumali&re m'a quittä, toutes les autres incom-
modit^s continuent de la m§me force, eile ne m'a donc
servi qu'k me donner beaucoup de faiblesse et me k faire
— 232 —
encore plus maigrir. Depuis hier je me Iftve quelques
heures dans la journ^e.
Adieu; Ton me fait toujours esp^rer que les sucs
d'herbes et le beau temps me remettront ; pour moi, je
trouve un tel changement dans toute ma Constitution, que
je me erois sans remission condamn^ a me trainer triste-
ment et en soufFrant, plus ou moins longtemps, c'est ce
que Ton ne peut pr^voir, mais sans jamais plus me re-
mettre.
Adieu ; je vous embrasse, de meme que votre chfere
^pouse
Ce 30 mars 1789.
Joseph Tres-cher fr^re. J'ai recu votre obere lettre et vous
an Leopold.
rends bien des gräces de Fintdret que vous prenez a ma
santä. La fi^vre m'a quitt^, mais la toux, l'expectoration
purulente et le battement de coeur et la faiblesse me
restent. On exige un menagement extreme ; je reste vers
midi au lit oü je me fais lire et dicte mos affaires. Je
me Ifeve ensuite, je ne sors point de ma chambre, et le
soir trois ou quatre hommes viennent me faire une heure
la conversation. Avant neuf heures je suis derechef au
lit. Voila Tagr^able vie que je mene et qu'on dit que,
pour me rapi^ceter, je devrai mener encore longtemps.
Adieu, mon eher fr^re, je vous embrasse de tout
mon coeur
233 —
Ce 2 avril 1789.
Tres-cher frere. J'ai regu votre chfere lettre et vous
joins ici les affaires courantes de la semaiDe. Nous atten-
dons avec impatience le retour du courrier frangais en-
voy^ k Constantinople^ de mßme qu'un de P^tersbourg
avec le projet de campagne; qui n'est point encore d^-
eidd et qui probablement sera dans le goüt de celui de
rannte pass^e. Je suis bien charm^ que les diffärends
entre PEspagne et Naples soient termin^s, et pourvu
que de nouvelles petites chicanes ne troublent plus une
Union si ddsirable dans la famille.
Ma sant^ va mieux quant aux accessoires^ mais le
fond du mal reste toujours. Je me manage prodigieuse-
ment et ne sors point de la chambre et fais mes affaires
au lit jusqu'k midi. Adieu. . . . «
Ce 9 avril 1789.
Tres-cher frere. J'ai regu votre chire lettre et j'y ai an Leopold.
vü avec bien de la peine l'incommodit^ de votre chfere
öpousC; qui m'inqui^te vraiment. J'espere que vos pre-
mi^res nouvelles seront plus rassurantes ä ce sujet, et
j'avoue que de cracher du sang pour eile qui est si
maigrC; m'inqui^te terriblement.
Je vous joins ici les objets courans de la semaine.
De Constantinople le courrier fran9ais d^cisif n'est point
encore revenu. En Sufede vous saurez d^jk tout ce qui
s'y est passä, et Taventure aimable de Copenhague. En
— 234 —
France le Roi a diclarö formellement qu'il voulait don-
ner sa parole d'honneur de faire ralliance projetie avec
la Russie, mais qu'avant Fassembl^e terminäe heureuse-
ment des Etats-G^nöraux il ^tait absolument hors d'^tat
de faire la moindre d^monstration meme. Je suis bien
curieux comment ils se tireront de ce cruel embarras
dans lequel ils se sont mis.
Ce n'est que de vous^ mon eher ami^ que j'ai appris
raecommodement si d^sirable des disputes entre les deux
freres d'£spagne et de Naples. Les ministres respectifs
n'en savent rien et croient tout le contraire. De Naples
on n'en mande rien non plus ; j'esp&re pourtant que la
nouvelle que vous en avez eue, est süre.
Ma santä est meilleure quant aux accessoireS; mais
le fond reste toujours. Je commence k sortir un peu en
voiture^ puisqu'il fait tr&s-beau temps. Je ne puis c^lö-
brer les fonctions de la semaine sainte en publiC; ndan-
moins j'ai fait seul mes Päques aujourd'hui, mais aussi
j'en ^tais rendu. Les battemens de coeur, la respiration
difficile, et des insomnies afißreuses restent toujours. Les
m^decins trouvent le pouls meilleur et les crachats d'une
meilleure esp^ce. Voilk tout ; il faudra voir s'il y aura
moyen de me rapiöceter, mais il est incroyable combien
je suis baissä de forces et tombä de chair. Je prends
des conserves d'herbes et un d^coctum. AdieU; je vous
embrasse de tout mon coeur
- 235 —
Ce 13 avril 1789.
Tres-cher frere. J^ai re9U votre chere lettre et je ne ^^ Leopold
suis pas eDCore enti^rement rassurä sur l'ötat de santö
de votre ch^re 6pouBe. Je däsire bien sinc^rement que
V0U8 puissiez m'en continuer toujours de meilleures nou-
velles. Par la lettre que vous m*avez envoy^e de Thu-
gut, et par une lettre qu'elle contenait de la Reine, j'ai
vu que malheureusement les deux fr^res ätaient plus loin
que jamais d'un accommodement, et qu'il y avait meme
beaucoup d'humeur. Je crois donc que votre nouvelle
aura ^t^ trop pr^coce, et qu'en Espagne on aura cru
avoir fait Fimaginable, pendant qu'a Naples on trouvait
tout ce qu'on demandait, et pour les objets et pour la
forme, inadmissible et impertinent, comme ils Tappellent.
Ma sant^ est toujours de meme, et d'autre nouvelle
je ne puis vous en mander non plus.
Thugut demande instamment son rappel et je le lui ai
accord^, voyant bien qu'il ne veut plus rester ä Naples.
Vienne, ce 16 avril 1789.
Tres-cher frere. Je vous envoie ce courrier pour a,, Leopold.
vous informer que Tincommodit^ qui ddja depuis neuf
mois me tourmente, a tout d'un coup d^g^n^r^ en une
espece de vomissement de sang que, du premier abord,
on a cru provenir des h^morro'ides, et on m'a applique
des sangsues, mais comme il a ndanmoins continu^ et
m^me augment^, puisque d'une fois hier j'ai vomi pres
- 236 —
de trois onces de sang k la fois, je me suis döcid^ a me
faire administrer publiquement ce matin*). Le crache-
ment de sang continue toujours, mais c'est plutot du sang
noir caill^ que du sang vif. Los autres symptomes^ on
les dit bons ; eflfectivement je n'ai point eu de douleur^
la respiration est assez libre, je ne suis pas fort affaibli
et les mddecins trouvent le pouls ^tonnamment bon.
Je vous joins ici les dispositions prealables que j'ai
faites pour tout ^v^nement ; toutes les expdditions sont
couch^es et signees ; je ne les ai point fait partir encore,
voulant voir comment la chose tournera. Vous en serez
inform^ exaetement, car que cela aille bien ou mal, ce
sera toujours une affaire de longue dur^e, hors qü'un
vomissement de sang comme fut celui d'hier, revint plus
souvent et ä plus grande force, et alors je pourrais rester
ätouffä dans le moment.
Voilk la plus exaete v^rit^, mon eher fr&re, que je
vous marque, charmä d'avoir vu par votre lettre que
votre chfere ^pouse se trouve mieux. Prösentez-lüi bien
mes respects, et croyez-moi, en vous embrassant tendre-
ment**), votre ....
Je ne vous ^cris pas de main propre, etant au lit
et condamnä k une trfes-grande tranquillitö. Tel que sera
*) Graf Rosenberg schreibt hierüber an dem gleichen Tage an
den Grossherzog : „Sa p'iM accoutum^e Ta engage k se faire admi-
nistrer publiquement ce matin, quoique les mddecins aient d^clar^
unanim^ment, quHl n*existait pas de ndcessit^ absolue, et cela dans
la journ^e d'hier, qui a M la seule critique, parce qii'effectivement
8. M. a crachö beaucoup de sang **
**) Das ganze Schreiben bis hieher ist von der Hand eines Se-
cretärs ; das Wort „votre" und die Nachschrift von Joseph selbst.
— 237 --
r^v^nement, comptez sur ma tehdre amitid jusqu'au der-
nier moment
Vienne, ce 17 avril 1789.
Trfes-cher frfere. C'est pour vous tenir au courant de ^^^ Lipoid.
mes nouvelles que je vous envoie cette estafette, Les
vomissemens de sang ne sont plus revenus, ndanmoins
les erachats sont toujours quelquefois plus, quelquefois
moins color^s. Le pouls est a peu prfes le m^me. Des
douleurs je n'en ai point, ä Texception d'un peu de serre-
ment a la poitrine. Je continue les m^mes remedes, et
le reste se verra par la suite. Toujours ce n'est gagner
que du temps pour raffermir la partie affectde des pou- -
mons, si ces vomissemens ne reviennent plus. Je suis
toujours couch^ sans oser parier ni remuer ; je dois en-
core vous ^crire par une main ^trangfere.
Adieu ; je vous embrasse tendrement, en vous priant
de präsenter mes respects ä votre obere ^pouse*), et de
me croire pour la vie votre . . . .
Vienne, ce 18 avril 1789.
Trfes-cber frfere. C'est pour vous continuer les nou- ^^ lmdow
volles de ma sant^ que je vous envoie cette estafette.
*) Vom Anfang bis hieher von der Hand eines Secretärs, die
letzten sieben Worte von Joseph selbst.
— 238 -
Les crachemens de sang ne sont plus revenus, et quoi-
que les crachats soient encore teints de sang, ils devien-
nent cependant plus päles. La nuit passäe a iti bonne,
et le pouls est aussi bon, de fa9on qu'il est k esp^rer
que, si ces vomissemens cessent tout a fait, la partie lösde
dans les poumons se gu^rira, mais ce n'est qu'avec le
temps qu'on pourra voir si une gu^rison parfaite s'en
suivra, ou s'il restera toujours une faiblesse dans cette
partie. En vous transmettant Texacte v^rit^ de mon ^tat
actuel, il ne me reste, mon tris-cher frire, qu'ä vous em-
brasser tendrement, ainsi que votre ch^re ^pouse *), et
vous prier de me croire pour la vie votre ....
Je ne compte point vous envoyer d'estafette demain
ni apr^s^ hors qu'il ne survienne quelque nouvel aeeident.
Pour lors vous en seriez informd tout de suite. Adieu.
Vienne, ce 20 avril 1789.
an Leopold. Mou cher friro. Je ne vous ^crirai pas par la poste
d'aujourd'huiy puisqu'un courrier napolitain sera charg^ de
cette lettre. Depuis ces deux jours ma santä s'est sou-
tenue k peu pres au m^me point ; les crachemens de sang
ont cesse, et mime tres-rarement on voit que dans le
crachat il y a encore quelques teintes de sang. La toux
que j'avais auparavant, et cette expectoration catarrhale
continuent. Les mödecins trouvent le pouls bon ; je n'ai
*) Vom Anfang bis liieher von der Hand eines Secret&rs. Von
hier bis zum Schlüsse von Joseph selbst.
— 239 —
point de douleurs et je vais commencer dans une couple
de jours k prendre le lait d'änesse. Du reste^ je suis en-
core continuellement au lit, et je ne prends presque
point d'autre rem^de que le repos, auquel cet ^tat apa-
thique bien ennuyant me r^dige, et je ne bois que de
la creme d'orge et du bouillon.
Adieu ; voilk exaetemement i'^tat de ma sant^. Je
vous embrasse tendrement, comme aussi votre chfere
^pouse.
Les nouvelies venues «de Constantinople de Tambas-
sadeur de France, Mr. Choiseul-Gouffier, äoignent toute
id^e de paix, les Turcs se croyant en ^tat non seulement
de ne rien c^der, mais de reprendre encore tout ce
qu'ils ont perdu et tout ce qu'ils veulent avoir*). Je se-
rai toujours votre ....
Le 23 avril 1789**).
1% . Joseph
Trfes-cher frire. Ma sant^ continue k peu prfes de an Leopold.
m^me ; je tousse et crache beaucoup, mais presque plus
de sang. Je suis tr^s-affaibli et ne puis rester qu'une
couple d'heures encore hars du lit. Quant k ma maigreur,
eile est extraordinaire ; voilk dix mois bientöt que je
souffre. Je prends le lait d'änesse, et le temps seul fera
*) Bis hieher von der Hand eines SecretXrs ; nur die letzten vier
Worte von Joseph selbst.
**) Qleicb den folgenden Schreiben, bei welchen nichts Anderes
bemerkt ist, ganz von des Kaisers Hand.
— 240 —
voir le reste, si je me remettrai entiferement ou si je
resterai ddjk en marasme et attaque des poumons.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur ; croyez-
moi, de m^me que votre chfere ^pouse, pour la vie
votre • . . .
Ce 27 avril 1789.
Josepli
an Leopold Trfes-cher frfere. Pour aujourd'hui je puis vous con-
tinuer les memes nouvelles k peu prfes de ma sant^. Je
suis la moiti^ de la joum^e lev^ ; je suis faible et fort
maigre, la toux continue avec une expectoration cuite,
le pouls est hon, je sens la poitrine serr^e et affaiblie,
je prends le lait d'änesse et point autre chose, le som-
meil est passable et Tappdtit bon , dans le manger je me
tiens beaucoup, et je ne mange presque pas de viande,
pour ne pas me gäter Festomac qui doit dig^rer le lait.
Adieu ; je suis bien fache que votre chfere ^pouse
ait encore sa vilaine toux, et en vous embrassant toua
deux, je vous prie de me croire pour la vie votre . . .
Le 30 avril 1789.
Joseph Trfes-cher frfere. Auiourd'hui le ne puis que vous
an Leopold. ** J r T.
continuer les memes nouvelles de ma santd ; je tousse,
je crache, j'ai la poitrine tr^s-affaiblie des battemens de
coeur quand je fais du mouvement, je continue le lait
d'änesse, mais je ne sors pas de ma chambre, quoiqu'il
~ 241 —
fasse le plus beau temps. Dimanche on me flatte queje
pourrai aller k la messe a Toratoire, et pour le 12 mai
je compte aller loger a Laxenbourg, uniquement pour
tÄcher k j remettre ma santd, puisque Fair y est bon et
qu'il n'y a point de poussifere. J'ai voulu y aller tout
seul, mais votre fils et son ^pouse se sont offerts si obli-
geamment de vouloir m'y accompagner, que je n'ai pu
le leur refuser. Ainsi nous ne serons que nous, M™® de
Chanclos et Rollin pour accompagner votre fils ; point
de diners ni spectacles avec des Viennois, et nous ferons
une vie bien simple.
Adieu ; je vous embrasse de tout mon coeur, de meme
que votre ch^re ^pouse
Je vous joins ici les objets de la semaine. Vous
verrez par le plan d^op^rations des Russes qu'ils ne
feront rien et, comme Tannöe pass^e, nous laisseront
seuls combattre toute Farmöe ottomane, et puis seulement
verront, s'ils pourront se procurer a Tautomne quelque
avantage.
Le 4 mai 1789.
Trfes-cher frfere. J'ai ^t^ sensiblement touchd de votre ^^^^^^
an Leopold.
chere lettre et du tendre intdr^t que vous avez bien voulu
prendre k ma sant^ ; eile ne le merite en v^rit^ point.
Comme chef vous meneriez les choses mieux que moi ;
il n'y a qu'un sincfere et fidfele ami k toute dpreuve, que
vous auriez eu de moins. Je reprends des forces ; hier
je suis sorti la premiere fois, et me suis proraen^ dans
Iß
V. Arneth. Joseph n. Leopold. IL
— 242 —
Talläe qui longe les murs du Belvddfere. Le temps est
si chaad qu'on ne peut sortir quo le soir ; la respiration
est difficile et le coeur palpite. On me fait espörer qua
le temps dissipera cela, et que dans quelques jours Ton
pourra me donner des remfedes pour renforcer les pou-
mons. En attendant je continue uniquement le lait d*^-
nesse.
ÄdieU; mon eher ami ; je vous embrasse^ de meme
que votre ch^re Äpouse, de tout mon coeur, bien fä.ch^
que cette vilaine toux ne la quitte pas encore. Croyez-
moi pour la vie votre ....
Le 7 mai 1789.
an Le<fpoid Trfes-chor fr^ro. J'ai re9u votre chfere lettre ; eile
contient de nouveau les expressions les plus flatteuses
de votre int^röt. Je suis au ddsespoir d'avoir iti la cause
que la toux convulsive de votre ch^re ^pouse ait em-
pir^. Je d^sire bien sinc^rement son entier r^tablissement,
sachant k cette heure ce que j'ai ignorä longtemps, ce
que c'est que d'ötre priv^ de la santö. A peine dtais-je
sorti une couple de fois, et cela avec tous les soins, me
gardant dans le manger, enfin n'ayant fait aucun exc^s,
n^anmoins voilk trois jours ddjä que j'ai la fi^vre, le
soir de petits frissons et puis la chaleur, surtout la nuit,
trfes-forte, et qui se termine par des sueurs, avec cela
un engorgement dans les hypocondres et surtout du
cötö du foie, qui m'incommode beaucoup et m^me pour
la respiration me la rend plus difficile. J'ai pris ä pur-
— 243 —
geVy je prends un d^coctum amer, et j'ai du abandonner
le lait d'änesse. II faudra voir combien cela durera, mais
cela me recule beaucoup en forces. Je n'ose pas manger
de viande ni puis sortir, ainsi nion s^jour k Laxenbourg
est retard^ aussi ; c'est bien d^sagr^able^ du reste la toux
et Texpectoration continuent.
Adieu, mon eher frfere , vous recevrez les objets de
la semaine, et je vous prie de vouloir bien sineferement
me dire ce que vous pensez de Tarrangement intdrimal
qua j'avais fait comme je le pensais, mais qui, vous in-
teressant principalement, doit, en ayant le temps, etre
r^gl^ k tout Äv^nement, absolument selon votre bon plai-
sir. Ainsi, eher frere, je vous prie de ne pas faire de
complimens, car l'objet est trop interessant, et de me
marquer comment vous le voulez, puisque cela m'est
egal, et je prendrai d'avance les arrangemens, seit pour
la forme comme pour les personnes, surtout comptez que
ce sera un secret impönetrable, et qui restera entre nous.
Adieu ; pr^sentez mes respects ä votre chere dpouse,
et croyez-moi pour la vie votre ....
Viojine, ce 11 mai 1789.
m^i/»^T • • Joseph an
Ires-cher irere. Je vous envoie ce courrier pour j^^^^j^,v
avoir votre d^cision sur Tobjet important qui fait le
contenu des pieces ci-jointes. Je vous prie de me les
renvoyer le plus tot possible, puisque le temps presse
*) Von der Hand eines Secretärs.
16*
— 244 —
et que je n'ai jamais voulu prendre sur moi la d^cision,
sans savoir pr^alablement vos intentions^ attendu que le
mauvais ötat de ma sant^ vous mettra probablement plus
dans le cas que moi d'en tirer des avantages. Je n'entre
point dans les d^tails qui sont clairement ddduits, et dans
les Circo nstances präsentes, auxquelles il n'y a sürement
pas autre chose k faire.
Ma sant^ est derechef si d^rang^e par une fiJvre
continue, et qui a des redoublemens^ avec une espice
d'obstruction dans le foie, que je suis d'une faiblesse
comme je n'ai jamais ete; je dois pour cela me servir
d'une main ätrang^re pour vous ^crire. L'estomac est
ögalement si affaibli qu'il ne dig^re pas^ et la respiration
est extrßmement penible. Ces fiivres m'ont du faire
quitter le lait d'änesse, et je suis continuellement au lit.
Si elles continuent, cela ne peut que ddg^n^rer dans un
marasme et consomption.
Adieu, mon eher frfere ; je ne vous ^crirai pas par
la poste d'aujourd'hui, puisque je vous envoie ce cour-
rier. Aux moindres nouveaut^s qui arriveront, vous an
serez informä par estafette.
Vous*) ne sauriez croire combien ceci me met bas,
et j'ai k peine la force de vous dire que je vous em-
brasse, de meme que votre ch^re ^pouse, ^tant pour la
vie votre
• • • •
*) Der Schlusssatz ist von Josephs Hand.
245
Le 14 mai 1789.
Trfes-cher frfere. Je puis d^ik auiourd'hui vous icrire ^^**^*^,;i
r J J an Leopold.
moi-meme, quoiqu'extremement affaibli de six accis de
fifevre et d'avoir beaucoup su^, La fifcvre qui me reprenait
tous les soirs, m'a quitt^ et il ne me reste que des res-
sentimens qui durent trois ou quatre heares et ne sont
point accompagn^s de fHssons, mais seulement de cha-
leur et d'augmentation de douleur dans Tobstruction du
foie. Je continue les m^mes m^decines ; je purge et me
fais graisser deux fois par jour les hypocondres. Si je
suis en dtat de soutenir la voiture, tous me conseillent
d'aller le plus t6t que possible k Laxenbourg; ce serait
donc pour le 18 ou 19.
Adieu, mon eher trhre ; je vous embrasse, de m^me
que votre chfere ^pouse, tendrement. Croyez-moi pour la
vie votre ....
Le 18 mai 1789.
Tris-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre et suis •'^^***^
' an Leopold.
cruellement occupä aujourd'hui k r^pondre k nombre de
lettres que j'ai re9ues. II ne me reste que le temps de
vous embrasser et en m&me temps de voüs prior instam-
ment d'dtre TinterprSte de mes tendres remereimens au-
pr^s de votre chire äpouse pour la charmante lettre
qu'elle a bien voulu m'^crire. Je suis enchant^ que sa
toux a cess^, et j'espfere que Pair de Castello la remettra
entiferement. Voudriez vous aussi remercier votre fils Fer-
- 246 —
dinand en mon nom pour tout Tint^rfet qu'il m'a Wmoign^.
Ma sant^ est bien chancelante ; je suis sorti hier la pre-
mifere foiß en voiture ; j'ai plus toussä et mon pouls
dtait moins naturel, neanmoins je vais demain k Laxen-
bourg voir si Fair peut me faire du bien. Adieu ....
Le 18 mai 1789.
Leopold Tres-cher frere. J'ai recu ä la fois vos deux lettres
an Joseph. '
du 7 de ce mois par la poste et de TU par le garde
noble polonais. Comme vous me pressez de vous le ren-
voyer, je ne Tai gardä ici qu'un jour et demi pour le
laisser reposer, et c'est par lui que j'ai Fhonneur de
vous envoyer cette lettre, en vous renvoyant ci-joint
tous les papiers que vous avez bien voulu me communi-
quer. Vous pouvez ais^ment vous figurer Fagitation que
m'a causde le contenu de vos .lettres, en voyant que vous
avez repris la fifevre, lorsqu'k peine nous commencions k
respirer de la juste inquietude que nous avait caus^e votre
maladie et raccident du 15 avril. Gräce k Dieu au moins
que la fievre a fini et que vous n'avez pas eu de crache-
ment de sang ; je veux donc bien me Satter qu'elle n'aura
6t6 caus^e que par quelque cause ^trangere au mal, et
que, quoique vous vous sentiez naturellement faible k prä-
sent, cela aura servi de erise k vous ddgager du reste de la
maladie. C'est au moins ce que je ddsire d'apprendre de
tout mon coeur, vous conjurant de ne pas vous ennuyer
du regime exact qu'on vous fait tenir k präsent, et de
ce que vous ne pouvez pas sortir. L'essentiel k präsent
— 247 —
est de de m^nager; de reprendre des forces, et de vous
mettre en ätat de pouvoir proiiter de Tair de la cam-
pagne qui, k ce que je me flatte, avec le repos pourra
vous faire beaucoup de bien.
J'ai examin^ avec toute rattention que Timportance
de Taffaire exige, les papiers ci-joints relatifs au renou-
vellement et continuation de Talliance avec la Russie.
Vous n'aviez pas besoin certainement de me demander
mon avis, ^tant plus au fait que persoDne de Tutilitä et
avantage d'une alliance que vous-meme directement avez
dirig^e et conclue. N^anmoins, puisque vous voulez bien
me demander mon sentiment, j'aurai Thonneur de vous
dire que j'en crois le renouvellement, surtout dans le
moment präsent, utile^ n^cessaire, avantageux et indis-
pensable. Les raisons ddduites dans le memoire ci-joint
du prince Kaunitz en prouvent victorieusement la n^ces-
sitö. La guerre präsente avec la Porte, le danger d'une
paix s^par^e que la Russie pourrait conclure^ en nous
laissant seuls sur les bras la Porte et le Roi de Prusse,
et peut-^tre m§me la Pologne, Timpulssance totale de la
France pour k präsent et peut-fetre pour bien des annöes,
de pouvoir nous aider efBcacement, ou meme de pouvoir
seulement en tirer des secours p^cuniaires, la mauvaise
volonte contre nous connue du Roi de Prusse, uni k la
Ligue germanique, que je ne regarde pas comme indif-
ferente, et dont l'activitd ne tarde k se d^ployer contre
nous que par la faiblesse personnelle du Roi, la mauvaise
volonte contre nous expdrimentde, surtout dans la guerre
präsente de TAngleterre, unie dans le moment präsent
ätroitement avec le Roi de Prusse et la Hollande, et
— 248 —
qui serait plus que süffisante pour tenir en ächec la
France et faire une di Version dans les Pays-Bas, toutes
ces raisons me persuadent que le renouvellement de l'al-
liance avec la Russie est n^cessaire absolument dans le
moment präsent au salut de FEtat, que c'est Tunique
moyen de contenir la mauvaise volonte du Roi de
Prusse et de la Pologne, qu'il est essentiel de renouveler
cette alliance le plus promptement et de la meilleure
grd.ce possible pour toujours plus, en fiattant Tlmp^ra-
trice, Tunir k nos int^r^ts, mais que surtout il serait d^-
sirable de tächer de gagner ^galement la jeune Cour et
d^tacher le Grand-Duc de son attachement personnel et
outr^ pour la personne du Roi de Prusse, et de leur
faire goüter les avantages de notre alliance, et que la
Russie doit la Crim^e et tous ses succ^s et avantages
contre les Turcs dans cette guerre et la derni^re ä la
gän^rosit^ et loyaut^, avec laquelle vous avez bien voulu
sacrifier argent, troupes et m^me votre propre sant^ pour
aller au-delk en leur faveur, mSme de ce que les trait^s
exigeaient, et auquel ils ont bien faiblement correspondu
par le mauvais ^tat de leurs arm^es, la mauvaise volonte
et la d^sunion de leurs g^n^raux.
Vous m'ordonnez ^galement de vous dire mon sen-
timent sur les arrangemens intdrimals que vous avez pris
pour tous les cas possibles. D'abord j'espire dans la
bont^ de Dieu, que le cas ne se donnera pas, que de
pareils arrangemens soient necessaires, mais comme vous
m'ordonnez de dire mon sentiment sans complimens, je
vous le dirai avec ma sinc^rit^ accoutum^e.
r
— 249 —
Personne mieux quo vous, qui etes sur les lieux,
qui connaissez k fond vos chefs de d^partemens, leur
capacitä, relations et caracteres, ne pouvait faire un pa-
reil projet. Je suis» donc plus que persuadä, et cela sur
mon honneur et sans complimens, que le projet que
vous en avez fait, est le meilleur des possibles^ c'est ce-
lui par lequel le cours des affaires n'est pas arretä. Les
affaires ätrangeres, dont Texp^dition prompte est n^ces-
saire^ ne sauraient etre en de meilleures mains que Celles
du prince Kaunitz, celles de Cour en Celles du comte
Rosenberg, les affaires militaires et surtout Timportante
correspondance avec les g^nöraux qui commandent les
arm^es en temps de guerre, et qui exigent la plus
grande promptitude, en de meilleures de toutes fa9ons
que Celles du maröchal Lascy, et quant aux affaires in-
ternes, on ne risque rien k les döcider selon la pluralit^
des voix du conseil d'Etat, tout ätant systömatis^ et
mont^, et les vues et systfemes connus et prescrits. Je
n'ai donc absolument rien k y ajouter, et seulement k
me flatter que le bon Dieu exaucera les prieres de la
monarchie et Celles d'un coeur qui vous est bien attachd,
et que, vous r^tablissant enti^rement en sant^, il rendra
inutiles toutes ces afäigeantes dispositions.
(Laxenbourg), le ,25 mai 1789.
Trfes-cher frfere. J'ai regn votre chere lettre par le ,/Le7poid
courrier et vous en rends bien des gräces. En consö-
quence de vos intentions que vous m*avez fait connaitre,
— 250 —
le courrier est parti tout de suite pour P^tersbourg.
Quant a ma sant^; je ne puis point vous en donner de
meilleures nouvelles encore. Voilk trois jours que j'ai
derechef tous les jours la fi^vre avec frissons et chaleur ;
cela me maigrit et m'affaiblit visiblement^ et m'emp5che
tous les rem^des comme le lait d'änesse et autres pour
la poitrine. Je me tiens^ quand il fait beau, au jardin;
j'ai m&me äprouvö d'aller sur un petit cheval au pas,
mais cela m'a causa des battemens de coeur, ainsi que
je suis absolument encore dans Tignorance de la tour-
nure que cela prendra. On ne peut me donner du quin-
quina k cause de Fobstruction sensible que j'ai au foie,
et vu la respiration sans cela difHcile«
Adieu, mon eher frfere ; portez-vous bien avec votre
ch^re öpouse; jamais je n'ai plus connu le prix de la
sant^ qu'k präsent oü j'en suis privä.
Je vous embrasse tous deux et vous prie de me
croire pour la vie votre ....
Laxenbourg, ce 28 mai 1789.
Joseph jJqjj q\^qy frere. Je dois encore me sei vir d'une main
an Leopold*).
Ätrangfere, me trouvant depuis trois jours alitä d'une fi^vre
remittente, dont les acc^s et surtout les chaleurs sont
tr^s-forts et les paroxismes si rapprochös, qu'il n'y a
quelquefois pas deux heures de reläche. Le malheur veut
que la cause principale provient de cette duretä au foie,
*) Von der Hand eines Secretärs.
— 251 -
qui s'est dtendue jusqu'aux reins, et qu'elle emp^che de
me donner du quinquina pour faire cesser la fifevre. Cela
me met extremem ent bas, de fa9on que je n'ai jamais
iti si faible et aussi miserable qu'actuellement. Les nuits
sont fort mauvaiseS; et toujours marquöes par de trfes-
grandes sueurs ; enfin je prends le vrai chemin du ma-
rasme. Aujourd'hui je n'ai point eu encore d'acc^s de
fifevre ; il faudra voir quelles seront le& suites de tout
cela. Je vous enverrai des estafettes, si le mal empirait.
Adieu, mon eher frfere ; prösentez, je vous prie, mes
respects ä votre chfere ^pouse.
Je*) suis si faible et au lit, que je ne puis que grif-
fonner ces lignes pour vous embrasser, ätant pour la vie,
longue ou courte qu'elle sera, toujours votre ....
Le P' juin 1789.
Trös-cher frere. Etant levö pour une couple d*heures, ^^^^^i^
^ * 'an Leopold.
j'en profite pour vous ^erire moi-m^me de mes nouvelles.
Le quinquina, que je vous avais marqu^ qu*on avait du
me donner, a fait son effet, et m*a öti la fievre de fagon
que me voilk deux jours sans paroxysme. Je le continue,
mais je suis si maigre, si faible que je ne puis vous le
döcrire. Aprfes peu de jours ils veulent recommencer le
lait d'änesse, et en m^me temps continuer le quinquina**).
*) Eigenhändig geschriebener Zusatz.
**) Rosenberg schreibt dem Grossherzog an dem gleichen Tage :
L^Empereur a fait hier ses dSvotions, comme il a coutume de faire
— 252 —
AdieUy mon eher ami ; je voub laisse jager quelle
vie qu'est eelle que je m^ne, pour mon activit^ Stre im-
potent !
Je vous embrasse, de m^me que votre chire
äpouse
Le 4 juin 1789.
Leopold
an Joseph. Tres-chcr frere. Aujourd'hui je puis voub continuer
a peu pres les m^mes nouvelles de ma santä. Je n'ai
plus de fi^vre, mais la toux et Texpectoration continuent;
les forces sont peu de chose ; hier j'ai ^prouv^ un mo-
ment d'aller au jardin, mais cela n'allait pas. Je continue
le quinquina et j*ai recommence aujourd'hui le lait
d'linesse.
Thugut, dont vous m'avez envoyö la lettre, me me-
nace d'une visite du Roi et de la Reine de Naples;
jugez combien cela serait insupportable dans ce moment
et dans ces circonstances. La Reine ne m'en äcrit rien
de positif; si eile vous en demandait conseil, faites-moi
Tamiti^ de Temp&cher tant que vous pourrez, car ou je
serai malade, ou gu^ri je partirai pour Tarm^e.
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse, de m§me
que votre chfere ^pouse, de tout mon coeur
tous les ans k la . Pentecöte. II a M lev^ quelque tems, et aujour-
d'hai il s^est lev^ k onze heures, ne s'^tant pas mal trouvä de^ressai
quMl en a fait hier.
253 —
Laxenbourg, ce 8 juin 1789.
Mon eher frere. Me voila derechef pris par la fi^vre ^eo^oid ^^T
avec une douleur aux reins et au foie qui la cause. Je
m'ötais tres-bien port^ ces jours-ci ; je reprenais mon lait
d'änesse et le quinquina, lorsque tout d'un coup cette
douleur m'assaillit avec la fi^vre, ce qui m'a trfes-affaibli,
au point de devoir vous ^crire derechef par la main d'un
de mes secr^taires. Dans ce moment-ci je n'ai point de
fifevre, mais je Tattends. Ces rechutes continuelles, sans
y donner la moindre cause, sont bien d^sagr^ables.
Adieu, mon eher frfere ; j'espfere pouvoir vous don-
ner de meilleures nouvelles jeudi prochain. Croyez-moi
pour la vie, en vous embrassant tendrement, de m§me
que votre ch^re ^pouse, votre**) tendre ami
Le 11 juin 1789.
Trfes-cher fr^re. La fi^vre m'ayant quitt^ a force de ^/lm^w
quinquina, me voilk en ^tat de vous öcrire moi-m^me,
quoique bien faible et d'une maigreur incroyable. Votre
filß avec son ^pouse tiennent la procession aujourd'hui
de la Fete-Dieu en ville. Le temps est vilain, un vent
froid et point de pluie, ce qui perd absolument toute la
r^colte en tout genre. Je ne sais ce que nous ferons
pour faire subsister Tarm^e et n'avoir point la famine ;
*) Von der Hand eines Secretärs.
**) Nur die letzten drei Worte von Josephs Hand.
— 254 —
c'est de cruels momens et qui me viennent lorsque je
suis si peu propre a leur r^sister.
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse avec votre
chere ^pouse de tout mon coeur
Le 15 juin 1789.
an^Ler\d. Trfes-cher frfere. Depuis la demifere lettre que je
vous ai ^crite, je n'ai plus eu de fievre, mais j'ai ^t^
tourment^ un jour de violentes douleurs aux reins, ou pour
m'expliquer plus clairement, in der Niere*). A force de lave-
menS; cataplasmes et autres remfedes cela a diminu^, je
me l^ve, mais j'ai toujours mal encore a cette place et
j'y ai un emplatre. C'est une vraie misfere de ne pou-
voir avancer en rien. J*observe le regime le plus strict,
je ne mange ni viande, ni verdure, ni laitage, et par
cons^quent de la soupe et du riz fönt toute ma nourri-
ture ; je ne sors point de la chambre^ je n'ouvre pas de
fen^tre, je suis habill^ comme quand j'allais autrefois en
traineau. Je me leve k onze heures et je me recouche
vers six heures au lit, et avec tout cela Tusage du quin-
quina en extrait, dont je prends une demi-once par jour,
je ne puis m'assurer encore des rechutes de la fiSvre.
Adieu, mon eher ami ; je souhaite bien que vous et
votre chfere ^pouse se portent bien, et croyez-moi, en
vous embrassant^ pour la vie votre ....
^) niiirn*^ schreibt der Kaiser.
— 255 —
Le 18 juin 1789.
Trfes-cher frfere. Je vous loins ici les nouvelles de r^^^iA
J an Leopold.
la semaine. Le Dauphin a enfin succombä; il.est mort.
Ma sant^ va assez passablement ; je n'ai pas eu de re-
ehute de fi^vre^ la douleur aux reins a diminuä; et peu
k peu je täche k regagner un peu de force. J'ai d^jä
^te deux jours promener au jardin^ et cela commence k
aller. Je continue toujours le quinquina et mon strict
regime. On m'assure que le racommo dement entre le Roi
d'Espagne et celui de Naples s'est fait, dont je suis bien
charm^. Ce que deviendront les Etats-G^n^raux, il est
impossible de le deviner. Toujours le Roi s'est mis dans
une triste Situation^ dont il ne sortira pas facilement avec
honneur. De Russie on ne peut point avoir de r^ponse
encore au dernier courrier. Des arm^es je n'ai pas la
moindre nouvelle ; Laudon a abandonn^ le projet d*as-
si^ger Bihäcs ou Czettin en Croatie ; il marche en Escla-
vonie pour attaquer Berbir vis-ä-vis de Gradisca. La
tr^ve dure toujours en Servie, et les Turcs comme nous
Tobservons exaetement. Du prince Cobourg et de la
Transylvanie il n'y a rien du tout.
Adieu; je vous embrasse, de meme que votre chfere
^pouse; de tout mon coeur ....
Le 22 juin 1789.
Trfes-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre et vous ^^^^^^
* an Leopold.
rends bien des gräces de tout Tint^ret que vous l^moi-
— 256 —
gnez prendre ä ma sant^. J'^tais onze jours sans tievre
et prfes de huit jours si bien, que je me promenais dans
le jardin, et cela assez longuement^ quand hier tout a
coup une nouvelle douleur aux reins et au foie m'a
attaqu^^ et m'a occasionn^ un acc^s de fi^vre qai
m'a ienu hier toute la journöe alit^. Aujourd'hui je n'ai
plus de fievre , la douleur est moindre, mais existe en-
core, et je suis actuellement lev^. Ce sont des attaques
bien d^sagr^ables, et qui vous reculent toujours dans la
guörison.
Adieu, mon eher frfere ; je vous embrasse de tout
mon coeur, et je vous prie de me croire pour la vie
votre ....
Le 28 juin 1789.
Leopold Trfes-cher frere Que le raecommodement entre
an Joseph.
les Rois d'Espagne et de Naples ait eu lieu, il serait k
souhaiter ainsi qu'on vous Ta marque, mais je crains
le contraire et qu'il ne sera jamais stable, les deux
Reines ayant, on ne sait pas pourquoi, une antipathie
r^ciproque, et les ministres Monino et Acton tächant
d'entretenir cette d^sunion, n^anmoins les apparences soht
sauv^es, la flotte espagnole k Naples a ^t^ tres-bien
accueillie et combl^e de politesses, et les deux Cours
vont s'envoyer des ministres respectifs. La correspon-
dance entre les deux Rois n'est pas brillante ; le Roi
d'Espagne se m§le continuellement des affaires de celui
de Naples, en exigeant de lui toute sorte de complai-
(
— 257 —
sances, ou recomraandant difF^rentes personnes, dont on
a lieu d'§tre mecontent, et parlant toujours d*un ton fort
haut et inena9ant. Le Roi de Naples r^pond trfes-poli-
ment, mais ferme, ^vitant de parier sur les recomman-
dations qu'on lui fait.
Les affaires de France me paraissent dans une teile
confusion, par le manque dWgent, Texaltation des tetes,
et i'esprit de parti, qu'une crise violente doit avoir lieu,
qui pourra la mener ou a une Constitution plus forte,
solide et vigoureuse de la presente qui, en la rdgen^rant,
la fera devenir le premier Etat de TEurope pour sa
force, son energie et ses moyens, comme eile Fest deja
par sa Situation, ou k un bouleversement total et une
confusion qui la rendra incapable de rien entreprendre,
peu dangereuse k ses ennemis, peu utile k ses amis, et
nulle pour bien des ann^es. Je crois que le Roi et ses
ministres doivent se trouver bien embarrass^s dans ces
circonstances, dont ils n'ont point pr^vu les cons^quences,
ni calcul4 les suites. Quant k la guerre, il parait que
les Turcs attendent que la saison soit plus avancöe pour
rassembler leurs troupes et agir, ou l'arrivee du Grand-
Seigneur k Tarm^e. En attendant il est bien^ singulier,
qu'agissant partout, ils continuent k tenir la tr^ve dans
la seule Servie ; Tissue de cette campagne sera d'autant
plus interessante, que probablement eile d^oidera de la
possibilite de la paix.
V. Arneth. Joseph n. Leopold. IL 17
— 258 —
Le 29 juin 1789.
anLeooid Trfes-chcr frerc. J'ai re9U votre chfere lettre. Quant
k ma sant^, j'ai encore eu hier une attaque de mes dou-
leurs aux reins et au foie, qui m'a donn^ un peu de
fievre et qui m'a oblig^ de rester toute la journöe au
lit. Aujourd'hui c'est un peu mieux, quoique les douleurs
existent encore. Vous ne sauriez croire combien cela
fait souffrir ; a chaque respiration, k chaque mouveraent
des ^lancemens de douleur. J'ai mis des cataplasmes^ je me
graisse avec un onguent, je porte un emplätre, je prends
des medecines analogues, mais jusqu'a präsent sans effet
suivi. Adieu ....
Le 2 juillet 1789.
Joseph Trfes-cher frere. Vous recevrez les pifeces de la
an Leopold.
semaine, et vous y verrez qu'aux Pays-Bas il a fallu en
venir pour les Etats de Brabant et le Conseil k la Cas-
sation, ce qui s'est trfes-bien ex^cut^ par Trauttmansdorff,
qui est veritablement k cette heure un des meilleurs sujets
pour etre pouss^s, que je connais. L'Imp^ratrice de Russie
a aussi renouvel^ avec beaucoup d'empressement et de
la meilleure gräce du monde le trait^ d'alliance. Laudon
a commenc^ le sidge de Gradisca; du reste, hors que le
Sultan ne veut rien entendre k la paix, il n'y a rien de
nouveau.
Ma sant^ va depuis deux jours un peu mieux, la
douleur au cot^ diminue, il faudra voir si cela sera
— 259 —
de dur^e ; en attendant je sais toujours au grand regime.
Adieu, je vous embrasse de meme que votre ch^re
^pouse
Le 6 juillet 1789.
Tres-cher frfere. J'ai re9U votre chere lettre et vous »n lmpow.
en rends bien des gräces. Ma santö va a peu pres de
m§me ; hier encore j'eus un accfes de douleurs aux reins
et au foie avec un peu de fifevre, mais moindre que les
autres acces etaient. C'est singulier, voilk quatre dimanches
que toujours a la meme heure ils me prennent ; cela
m'affaiblit pour quelques jours. Nous avons k präsent le
plus beau temps du monde ; quand je puis, je vais m'as-
seoir au j ardin, y travailler dt diner sous les grands ma-
ronniers que vous connaissez, devant la salle. Votre fils
vous informera, je crois, d'une tres-naissante esperance
de grossesse de son ^pouse ; eile exige encore du temps
pour la constater, mais la probabilit^ y est. Du reste
rien de nouveau des armöes ; le maröchal Laudon a
commenc^ le si^ge de Berbir. Adieu
Le 9 juillet 1789.
Tres-cher frere. J*ai re§u votre chere lettre ; je suis ^^ Leopold
bien fächd que raccommodement entre Naples et Madrid
ne soit pas fait ni probable k r^ussir. II est inconcevable
que cela puisse exister ; c'est une si parfaite d^raison,
17*
— 260 —
qu'on ne comprend point comment purement des vues
d'intrigans qui y trouvent leur compte, puissent se sou-
tenir si longtemps.
Les reflexions que vous faites sur Tetat de la France,
sent parfaitement justes quant a Tautorit^ royale. Je la
crois perdue pour longtemps, et le Roi devra souscrire
a tout ce que les Etats voudront. Je soup9onne furieuse-
ment Necker d'^tre un fripon et une espece de Crom-
well, qui se fera d^clarer premier ministre et en qui la
nation mettra sa conliance et son pouvoir pour contenir
Tautorit^ royale. II restera donc un temps Tarbitre, le Roi
ne sera pas le maitre de s*en d^faire, hors que la legerete
de la natfon ne fasse arriver quelque ^vönen:ient imprevu.
Ma sant^ est k peu prfes de merae ; les forces ne
reviennent pas, et le quinquina que je prends, meme
m§l^ en substance avec Textrait, me constipe terrible-
ment, ce qui m'incommode et m'affaiblit beaucoup. Les
medecins veulent tächer de prevenir cette espece de
paroxysme, qui me revient tous les dimanches.
Adieu, raon eher fr^re ; je vous embrasse, de meme
que votre chere ^pouse, de tout mon coeur
Le 13 juillet 1789.
Joseph Trfes-cher frfere. Pour auiourd'hui le suis d^pourvu
an Leopold. *t ü z
de nouvelles. Ce qui se passe en France, vous sera connu.
Le doute de grossesse chez Tarchiduchesse se soutient.
Pour ma santö, j'ai passe T^poque du dimanche, qui a
^t^ hier, sans attaque de douleur ni de fifevre, n^anmoins
— 261 —
je n'en suis pas quitte et la toux est plus forte avec
l'expectoration, la respiration un peu plus emp^chäe^ et
je crois que cela provient du quinquina et des rem^des
que j'ai du prendre. Pour les douleurs aux reins, nous
avons depuis quatre jours de trfes-fortes chaleurs qui
abattent et ne donnent pas des forces k un malade; n^an-
moins je continue le quinquina en moindre dose, et j*ob-
serve toujours le regime le plus strict Adieu. . . .
Le 16 juillet 1789.
Joseph
Trfes-cher frfere. Vous recevrez les objets courans an Leopold,
de la semaine. Le mar^chal Laudon a pris Berbir, mais
la garnison s'en ötait sauvde la nuit. Je ne puis vous en
dire davantage, ayant derechef repris un acefes de raes
douleurs aux reins et au foie ; au Heu du dimanche cela
est venu jeudi, et est d'une incommodit^ affreuse.
Adieu ; je vous embrasse de m^me que votre chere
^pouse
Le 20 juillet 1789.
Trfes-cher frfere. J*ai re9U votre chfere lettre avec Jo^^p^
an Leopold.
bien du plaisir. La nouvelle attaque de mon incommo-
dit^, que je vous avais annonc^e jeudi pass^, est dimi-
nuee, mais les douleurs sourdes et la tension n'ont pas
c6ii encore tant aux rognons qu'au foie, malgr^ les
remfedes externes et internes que j'emploie. Nöanmoins
— 262 —
mes Escalapes veulent presque que je me force a faire
de Texercice k pied, et en voiture quand il ne fait pas
assez beau temps. Cette derni^re me fait m^me sur le
meilleur chemin fort mal aux reins et meme ma poitrine
s'en ressent^ quelque douce que soit la voiture et que
je ne chemine que bien doucement.
Des arm^es rien du tout de nouveau ; aux Pays-Bas
tout va k souhait Adieu
Le 23 juillet 1789.
an Leopold. Tres-cher frere. Vous recevrez les pi^ces courantes
de la semaine ; aux Pays-Bas tout est tranquille, et le
grand coup port^ a fait un trfes-bon effet. De ma sant^
je ne puis vous rien dire de nouveau ; voilk quatre jours
que je n'ai pas eu d'attaque ; je continue les remedes, le
regime, mais les forces et les chairs ne reviennent point
encore. Je souflfipe aux reins du mouvement de la voiture,
m^me sur le meilleur chemin; d'aller a cheval serait
impossible, et k pied la poitrine souvent par la respira-
tion emp^ch^e, me g^ne de marcher. Le sommeil est
interrompu^ Tapp^tit assez bon.
Adieu, mon eher frere ; je vous embrasse, de m^me
que votre chfere ^pouse, de tout mon coeur. Croyez-moi
pour la vie ....
— 263 —
Le 27 juillet 1789.
Trfes-cher frere. Pour aujourd'hui le n'ai point d'autres ^r*^^,^
J . >f r an Leopold.
nouvelles a vous marquer, que je continue a me mieux
porter, et que je n'ai plus eu de rechute voila douze
jours. La toux va encore son train et les poumons sont
faibles, la respiration courte, quand je marche un peu
vite ou si je veux monter un escalier. Des arm^es il n'y
a rien encore, de France vous saurez les incroyables
^v^nemens qui s*y sont passes, et le role aflFreux que joue
le Roi.
Je viens de recevoir la nouvelle que le comte d'Ar-
tois avec ses enfans, les princes de Cond^, de Bourbon
avec les leurs, le prince de Conti se sont sauv^s aux
Pays-Bas, sans ^quipages ni chemises. Directement je
n'ai point de nouvelles de Paris ; apparemment que le
comte de Mercy ne peut envoyer de courrier. La Reinfe
m'inquifete vraiment ; eile sentira vivement cette honte et
avilissement.
Adieu, mon eher frere ; je vous embrasse, de m^me
que votre chfere epouse, de tout mon coeur
La seconde revolution dtant passde, votre belle -fille
se portant bien, ayant bonnes couleurs, je ne doute plus
de sa grossesse.
Le 30 juillet 1789.
Tres-cher frere. Aujourd'hui je ne puis que vous ^^ Leopold.
envoyer le peu d'objets de la semaine. Des incroyables
— 264 —
affaires en France je ne vous envoie rien, puisque jus-
qu'k ce moment je ne sais pas le mot du comte de
Mercy, ni par consöquent de la Reine, ce qui m^inquifete
beaucoup, mais seulement des Pays<Bas les nouvelles et
lettres qui y parviennent avec les r^fugiis qui sont le
comte d'Ariois avec ses deux fils, le prince de Cond^,
le duc de Bourbon, le duc d'Eughien et nombre d'autres.
Tout cela s'est sauvä, sans bagage, sans chemises ni
babits que ce qu'ils portaient, toute la famille Polignac
et ses adh^rens; tous les nouveaux ministres^ le prince
Lambesc, tout s'est enfui. Je vous laisse juger de Teffet
que m'a fait le röle ex^crable et honteux qu'on a fait
jouer au Roi, en le faisant aller comme captif presque a
Paris, pour y signer tout ce qu'on voulait, et lui faire
mettre la cocarde sur son chapeau, signe des r^volt^s.
On ne croira pas que sans coup f^rir, sans une n^cessit^
absolue, un jour dans Thistoire, que ce qui vient d'arri-
ver, soit vrai.
Je suis charm^ que vous ayez fait la connaissance
du Cardinal de Brienne *) ; vous en aurez ^t^ content ;
pour moi, le peu que je Tai vu, il m'a trfes-satisfait par
les connaissances qu'il a.
Ma sant^ est meilleure ; voici quinze jours que je
n*ai plus eu de ressentiment de cette douleur aux reins,
*) Etienne Charles Lom^nie de Brienne, geboren im J. 1727,
wurde im J. 1763 Erzbischof von Toulouse, 1787 aber Generalcontrolor
und hierauf Premierminister. Im folgenden Jahre durch Necker ersetzt,
erhielt er den Cardinalshut und starb 1794.
— 265 —
je reprends des forces, mais la toux reste et la respira-
tion pour monter un escalier, est trfes-difficile. Adieu . . .
Le 3 aoüt 1789.
Tres-cher frere. Las nouvelles de France vous seront ^^ Leopold
saDs doute d^ja connues dans toute leur ätendue ; elles
continuent a ^tre d'un genre incroyable, et Ton na peut
prdvoir comment 'tout cela finira. J'ai enfin eu une lettre
de la Reine qui est p^n^tr^e de douleur et qui sent les
humiliations qu'on a fait ^prouver au Roi ; ndanmoins
eile se porte bien et parait avoir pris le seul parti qui
lui convenait, savoir de rester fort retir^e et tout occup^e
de ses enfans.
Ma sant^ continue k aller assez bien ; je n'ai plus
eu de rechute^ mais la toux m^incommode beaucoup. Je
vais recommencer le lait d^Hnesse pour la dissiper, sans
discontinuer le quinquina que je prends. Comme pro-
bablement k la fin de ce mois ou au commencement de
Tautre Tentreprise et le si^ge de Beigrade auront lieu,
je compte ne pas faire manquer cette brillante et inte-
ressante occasion de s^nstruire k votre fils, et il par-
tira le 19 k peu pres de ce mois pour Tarm^e. Adieu ....
Le 6 aoüt 1789.
Trfes-cher frere. Les objets de la semaine, vous les ^^ ^eTpoid
recevrez. Les aflFaires en France continuent d'aller dans
— 266 —
un d^sordre dont on ne peut prdvoir Tissue ; malheureuse-
ment tous ces transfuges qui yiennent aux Pays-Bas^ et
tout le pillage qui se commet sur les frontiferes, excitent
aussi les mauvaises tStes chez nous^ et il y a d^jä eu a
Tirlemont et a Louvain une espfece d'^meute, meme des
Li^geois venaient pour piller des maisons dans Louvain.
Le militaire, en cassant la t^te k quelques-uns de ces
coquins, a remis Fordre. II faudra voir ce qui arrivera
encore, mais Fexemple est bien mauvais et pernicieux.
Des armees rien ; le mar^ehal Hadik^ yu sa sant^
si affaiblie, a du quitter l'arm^e ; j'ai donnd le commande-
ment au maröehal Laudon de toute Tentreprise sur Bei-
grade ; il va y arriver incessamment.
Ma sante continue a se remettre ; voila trois semaines
que je suis sans ressentiment aux reins ni fievre. Je
tousse et expectore encore, mais je commence ä reprendre
des chairs, ndanmoins j'ai recommenc^ aujourd^hui le lait
d'änesse et je continue le quinquina, mon estomac etant
a cette heure fortifiö.
Adieu ....
Le 10 aoüt 1789.
Joseph Tres-cher frere. Depuis trois jours le n'ai poi^*
an Leopold. ^ J J '^
d'ultdrieures nouvelles des Pays-Bas ni de France. Je ^^
flatte que la tranquillitö y aura reprise, et que les pil-
lages exercös dans toutes les provinces auront ce^sö. Ici
— 267 —
je viens de recevoir le rapport que les Turcs, sans di-
noneer rarmistice, 8ont entr^s vers Mehadia au Banat,
mais le gdn^ral Vecsey*) les a repoussös avec perte, ainsi
cela va recommencer. Les Russes restent inactifs comme
Fannäe pass^e.
Votre fils partira le 19 ; son ^pouse continue dans
ses apparences de grossesse. Ma sant^ continue de mSme^
eile ne fait pas des progres aussi rapides que je le d^-
sireraisy mais eile se soutient. La toux et Texpectoration
existent toujours, les obstructions aux hypocondres ne
sont point entierement parties, et les forces ne sont en-
core point au point oü je les dösirerais, pour pouvoir me
flatter de pouvoir aller au commencement de «eptembre
k Tarmde. Je n'ai point encore essaye d'aller ä cheval.
Adieu, mon eher frfere ; je vous embrasse, de mime
que votre chfere ^pouse, de tout mon coeur
Le 13 aoüt 1789.
Josöph
Tr^s-cher frfere. J'ai re9U votre chfere lettre qui ^ Leopold,
m'annonce votre d^part pour Livourne pour y voir la
flotte espagnole ; c'est une attention du Roi, et je crois
qu'elle a pour objet de faire ombre a ce qui s'est passö
avec la flotte k Naples.
*) Sigbert Freiherr Vecsey von Hajnäcskeö, damals General-
major. Er starb im J. 1802 als Feldmarschall-Lieutenant.
— 268 —
Vous avez 4i6 frappd et indign^ comme moi des
^y^nemens en France ; cela n'est pas fini encore, et lea
excfes, vols et cruaut^s dans toutes les provinces conti-
nuent toujoars.
Ma sant^ serait assez bonne^ si un nouvel accident
ne me g^nait beaucoup. II m'est venu une duretä aux
hömorroides dolente qui menace de faire absc^s ; je
suis done röduit k mettre des cataplasmes ömoUiens toute
la journ^e, et par consöquent a ne pouvöir marcher.
Les details de la victoire qu'a remport^e le prince
Cobourg, et les succfes du prince Hohenlohe en Transyl-
vanie vous sont envoyös par cette poste. La chose peut
^tre avantageuse m^me au grand projet pour le si^ge
de Belgradc; mais malheureusement que le marechal
Laudon m'annonce d'^tre malade; cela serait un grand
contretemps, et Hadik a du quitter Tarmöe, n'ayant pu
se remettre de la maladie qu'il a faite.
Adieu, je vous embrasse, de meme que votre chere
^pouse . . .
Laxenbourg, ce 17 aoüt 1789»
josephan j^^^^ trfes-chcr frferc. Je dois derechef me servir
Leopold ).
d'une main *ötrangfere pour vous donner des nouvfelles de
ma sant^, n'osant pas me lever du lit et pas mem« ray
asseoir. La duretö que je vous avais annonc^e setre
manifestde a Tanus, a ddgdn^r^ en absces que j'ai f^^*
•) Von der Hand eines Secretärs.
— 269 —
ouvrir samedi le 15 par deux incisions. II y avait de la
matifere, et comme il se präsente encore au m^me en-
droit un sinus qui va vers rorifice et le sphincter, je suis
condamn^ k me soumettre demain k une seconde Ope-
ration par laquelle le sphincter tn^me doit Stre fendu.
Je vous laisse jnger combien cela est douloureux, mais
cela ne serait rien, si la longueur de la eure et la neces-
site de rester au Ht sans bouger pendant si longtemps,
sans espdrance de pouvoir sortir de la chambre avant,
quatre semaines pour prendre l'air, n'etaient insuppor-
tables. C'est un vrai martyre anquel je ne m'attendais
pas apres treize mois de souffrance, d'autant plus que je
n'ai pas fait le moindre excfes, que je n'ai point ^t^ a
cheval, que je ne me suis point dehauff^, que j'ai tenu
regime et que je suis encore dans les remfedes. Du reste
je n'ai pas encore eu de fifevre, mais il faut voir ce qui
m'arrivera apres la grande Operation. Je continue le
matin a boire un verre de lait d*&nesse et j'observe une
stricte diete, n'osant manger que de la soupe pour tächer,
s'il es possible, d'^tre constipö les quatre a cinq premiers
jours et de ne pas irriter la plaie.
J'^tais döjk si bien, que je me flattais pour sür de
pouvoir partir les premiers jours de septembre pour Tar-
m^e, et me voila cruellement döchou^ de mes esp^rances,
car il me faudra- bien du temps, memo gu^ri, pour me
remettre de nouveau en forces, que Ton perd certaine-
ment k rester longtemps au lit, a souffrir et k ne pas
manger.
Adieu, tr^s-cher fr^re ; presentez mes hommages k
votre chere ^pouse, et croyez qu'en vous embrassant
— 270 —
tendrement je suis pour la vie votre*) tendre frfere et
ami
Laxenbourg, ce 20 aoüt 1789.
Joseph an
Leopold.**) Mon eher frere. Je suis dans le meme cas encore
aujourd'hui de ne pouvoir vous ^crire de main propre.
L'op^ration de la taille de la fistule k Tanus, que je
vous ai annoDC^e lundi pour le lendemain, s'est faite.
Brambilla Taind Ta tres-bien ex^cut^e, et le sphincter a
4i4 coup^ en deux. Quoique Topdration soit tres-doulou-
reuse, surtout puisque j'avais ces parties-lk extrem ement
endurcies, pour avoir ^t^ taut k eheval, que le bistouri
pouvait k peine les couper, ndanmoins les pansemens et
le regime de la eure sont encore plus insupportablesrles
Premiers sont douloureux et le second d'une gene et
ennui terrible. Je ne puis bouger du lit, et ainsi couche
de cot^, ne mangeant que de la soupe et un peu de
panade, j'en ai au moins pour quinze jours, et pour
quatre semaines pour etre gu^ri, si tout va k souhait.
La toux qui ne me quitte pas, augmente beaucoup les
douleurs qui se renouvellent surtout chaque fois que je
tousse. Les nuits sont terribles, ne dormant presque
point. L^ennui que cela cause! Cependant on m^assure
que la plaie va bien, et je n'ai point de fievre jusqu*a
präsent. Si au moins c'etait fini par Ik, j'en serais con-
tent, mais je suis si fort accoutum^ depuis quatorze mois
*) Die fünf letzten Worte von Josephs Hand.
**) Von der Hand eines Secretärs.
— 271 —
que je suis malade, d'avoir a tout moment de nouvelles
incommoditds inattendues, que je n'ose m*en flatter.
Vous recevrez ici les pi^ces de la semaine. Je ne
sais rien de la France ni de la Reine, que Ton dit ^tre
incommod^e, que par les gazettes.
Adieu, je vous embrasse tendrement; pr^sentez mes
hommages k votre chere dpouse, et croyez-moi pour la
vie votre*) loyal ami ...
Laxenbourg, ce 27 aoüt 1789.
Mon tres-cher frfere. Je suis encore au lit, et par l^^^o^^i^^Iv
cons^quent hors d'ötat de vous ^crire moi-meme. Ma
santä va assez bien ; on est content de la plaie et eile
commence k se cicatriser, mais il faut ce strict regime
que je continue, puisqu'en faisant seulement quelques
pas, je risquerais de la rouvrir.
Apr^s trois jours de pluie continuelle nous avons
eu hier une inondation k Laxenbourg; tout ^tait dans
Feau, le rez-de-chaussöe, les cuisines et dcuries; eile s^est
^coulöe cette nuit, mais il en restera beaucoup d'humi-
dit^, de maniere qu'il sera impossible pendant quelque
temps de jouir dö la promenade. Votre belle-fiUe rentrera
donc demain ou aprfes-demain en ville et demain grand
matin votre fils partira pour Tarmöe. ' Pour moi, je ne
puis bouger d'ici, dont bien me fache; au moins me
*) Nur die drei letzten Worte von Josephs Hand.
**) Von der Hand eines Secpefera.
— 272 —
faudra-t-il encore quinze jours^ k ce qu'on dit, pour etre
en ätat de sortir.
AdieUy mon trfes-cher frfere; rien de noiiveau des
armöes. Je vous embrasse tendrement et vous prie de
presenter mes hommages k votre chfere dpouse et*) de
me croire pour la vie votre . . ,
Le 31 aoüt 1789.
Joseph Trfes-cher frfere. Sorti du lit, le puis avoir le plaieir
an Leopold. ^ J J t r
de vous ^crire moi-meme. Ma sant^ est bonne, un peu
affaibli du lit et du regime; la plaie de Fop^ration se
cicatrise et Ton croit que dans dix ou douze jours-elle
pourra Tetre enti^rement, alors il faudra seulement la
menager, parce qu'elle sera trfes-subtile, n^anmoins je
vais partir d'ici le 3 septembre, si je puis soutenir la
voiture, puisque une inondation, suite des fortes pluies, a
tellement submerg^ Laxenbourg, que tout le bois, les
jardins et les rez-de-chauss^e ont 6t6 gät^s et soBt pleins
de limon et d'humidit^, ce qui pourrait ^tre fi^vreux.
m
Votre fils est parti vendredi et sera demain k Peter-
wardein; son ^pouse, vu Tinondation, est rentröe en
ville, et moi j'irai finir la bonne saison k Hetzendorf.
De nouvelles il n'y a rien; Texemple de la France
exalte beaucoup les esprits aux Pays-Bas, d*autant plus
que les Li^geois ont reprösent^ avec leur Prince la
m&me farce que les Parisiens. Les patriötes en Hollande
^) Nur die letzten acht Worte von Josephs Hand.
— 273 —
sont aussi sur le qui vive, et en Allemagne, a Cologne,
dans rOrtenau qui m^appartient, dans le Palatinat, aux
Deux-Ponts il y a eu des ^motions populaires, mais sans
exces ou malheur. J^attends des nouvelles de Laudon,
et en attendant je vous envoie les pifeces de la se-
in aine.
Croyez-moi pour la vie, en vous embrassant tendre-
ment, de mime que votre* chere ^pouse, votre . . .
Le 3 septembre 1789.
Trfes-cher frfere. Vous recevrez les objets courants an Leopold,
de la semaine. Le Feldzeugmeister Clerfayt a attaquä les
Turcs pres de Scbupanek, les a battus, leur a pris cinq
pi^ces de canon, des drapeaux et des prisonniers. Ceci
facilite les Operations vers Beigrade. Ma santö est k peu
pres comme avant cette Operation ; les poumons sont tou-
jours fort affaiblis et la toux et Texpectoration continuent.
La plaie va tres-bien; mime ce matin eile ne donnait
plus de matifere et eile sera dans peu de jours cicatris^e.
Je pars cette aprfes-din^e d'ici pour aller loger k Hetzen-
dorf, Tinondation ayant gät^ toutes les promenades, et
donnant par le limon qu'elle a d^pos^, de mauvaises
exhalaisons.
Adieu, mon eher frfere, je vous embrasse tendrement
et je vous prie de me croire pour la vie, de mime que
votre obere öpouse ....
T. Arneth. Joseph n. Leopold. II. lo
— 274
Le 10 septembre 1789.
Joseph Trfes-cher frfere. Vous recevrez les obiets courants
an Leopold. **
de la «emaine. Les Kusses ont remportö avec leur flottille
de galferes une victoire sur celle des Su^dois. Des arm^es
rien de nouveau; les Turcs, döfaits par Clerfayt, ont
abandonn^ le Banat et ont meme repassö le Danabe.
Laudon est k Semlin et tout* se pr^pare a passer dans
quelques jours la Save; votre fils y est aussi. Ma sant^
est de m§me, la plaie est guörie, il ne faut que conso-
lider la cicatrice, du reste je tousse comme auparavant
et ne puis monter d'escalier sans battement de coeur.
Le temps est süperbe et je vis doucement dans mon
Hetzendorf sans recevoir personne.
Adieu, je vous embrasse tendrement, de ipeme que
votre obere öpouse ....
Le 14 septembre 1789.
Joseph Trfes-cher frfere. Pour auiourd'hui toutes nos nou-
an Leopold. «^
volles consistent k attendre Celles qui parviendront de
Farmee, qui va passer la Save et probablement sera
d^jk aetuellement avancee vers Beigrade. Tout d^pendra
des secours que les Turcs seront dans le cas d'y envoyer
et si la Saison nous favorise un peu. Pour iei nous avons
aetuellement le plus beau temps du monde; j'en profite
a me promener, mais malgr^ toute Texaetitude de mon
regime, et sans y donner la moindre raison, j'ai eu cette
nuit la fifevre, frissons et chaleur, ce qui est bien insup-
— 275 —
portable, voyant que rien ne se consolide et que malgr^
l'usage continu^ du quinquina ce germe fi^vreux n'est
pas d^truit. Adieu . . .
Le 17 septembre 1789.
^Trfes-cher frfere. Pour aujourd^hui je ne puis vous ^^ Leopold
donner encore des nouvelles positives de notre passage
de la Save, ni de ce que rarmee a entrepris en avant
vers Beigrade, puisque je n'ai point reyu de rapport.
Le mar^chal Laudon n^aime pas k öcrire et il se contente
d'annoncer les faits prineipaux. Quant a ma sante, je
n'en suis pas content. Dimanche au soir j^ai eu une nou-
velle attaque de fievre qui m^a durö toute la nuit; les
douleurs aux reins, au foie se sont derechef faites sentir,
et depuis la poitrine est beaucoup plus chargöe et la
toux frdquente et vielen te, surtout la nuit, quoique le
temps soit trfes-beau et que je n'aie pas fait le moindre
excfes.
Adieu, les objets de la semaine sont ici joints. Je
vous embrasse, de m^me que votre cli^re ^pouse . . .
Le 21 septembre 1789.
Tres-cber frtre. J'ai recu votre chere lettre et suis en- •^J*^«^^
* ^ an Leopold.
chant^ de vous savoir bien portant. De nouvelles de
Tarmde, je n'en ai pas d'autres que Celles du passage de
la Save, et qu'elle ötait campte vis-k-vis de Beigrade;
18*
— 276 —
j'attends d^ult^rieures nouvelles d'un moment k Tautre.
Ma sant^ est k peu pres de meme ; une espece de nou-
veau rhume s'est jointe k Tancien, et j^ai la poitrine plus
oppresBÖe; un jour j'ai m^me crach^ un peu de sang,
mais cela a cessd. Adieu . . .
Le 24 septembre 1789.
an Leopold. Tres-chcr frere. Les Operations au si^ge de Beigrade
vont leur train, mais plus lentement qu'on ne croyait,
puisque il s'est trouve que les faubourgs doivent etre
egalem ent attaquds, qu^on croyait pouvoir attaquer et
empörter de vive foree. Pourvu que le temps reste beau
et qu^il ne survienne d^autre ^v^nement, je me flatte
pourtant que nous l'aurons. Manfredini est arrivö et je
lui ai envoye la patente de gönöral par votre fils, pour
qu*il soit un volontaire plus distingu^.
Ici il n'y a rien de nouveau; en France cela va tou-
jours son train, et comme les Etats- G^n^raux vont ^tre
permanents, je suis bien curieux comment k la fin ils
iiniront k trouver Targent nöcessaire k tout cela.
Les objets courants de la semaine, vous les trou-
verez ci-joints. Ma sant^ est toujours de m^me, tousser
et cracher; je crois que je n'en serai plus quitte de
ma vie.
Adieu, je vous embrasse^ de meme que votre chere
^px)use, de tout mon eoeur . . .
— 277
Le 1 octobre 1789.
Tres-cher frere. Vous verrez par le bulletin imprimö ^^^^^
* &n Leopold.
rheureuse et inattendue nouvelle que je viens de rece-
voir du prince de Cobourg.*) Elle est de la plus grande
importance^ et pourra peut-^tre nous faire obtenir la
paix. Le si^ge de Beigrade continue, mais les ouvrages
contrarias par des pluies continuelles avancent bien plus
lentement qu'on aurait du Tesp^rer, n^anmoins j'espere
que nous nous en tirerons encore bien,
La sant^ de votre fils est bonne, mais les malades
sont extremem ent nombreux, sans etre heureusement
dangereusement attaquäs. Ma sant^ n'est pas teile que
je la d^sirerais; la faiblesse aux poumons dure toujours.
Adieu, je ne puis vous en dire davantage aujour-
d'hui, et je vous embrasse tendrement. Croyez-moi, de
rneme que votre chere ^pouse, pour la vie votre . . .
Le 5 octobre 1789.
Tres-cher frere. A peine la poste etait-elle expödi^e ^^^^^^
t r i^ an Leopold.
jeudi, quWriva la nouvelle que le mar^chal Laudon
s'^tait emparö par assaut des faubourgs de Beigrade avec
tout le succes, et les troupes s'y sont distingu^es par
leur bravoure. On va k cette heure commencer Tattaque
de la place. Quant au secours qui doit y arriver, on le
*) Coburgs Sieg vom 22. September bei Martineschti am Rimiiik
über den Grosswesir.
— 278 —
sait au-delk de la Morava^ mais on varie beaucoup sur
sa force, et je le crois peu de chose.
Pour moi, j'ai encore eu le d^sagr^ment de reprendre
ces douleurs aux reins, qui ddjk m'avaient tant tour-
mentä k Laxenbourg, suivis toujours de la fievre jour-
nali^re. J'en ai eu trois acc^S; et comme on me donne
toutes les deux heures le quinquina, je n*ai eu qu*un
l^ger ressentiment aujourd'hui; n^anmoins le temps s'^tant
mis k la pluie, je quitte Hetzendörf et je vais loger en
ville que j'avais quitt^e il y a six mois, pour me rötablir
a la campagne et dans la bonne saison, et j'y reviens
aussi peu gu^ri que j'en suis parti.
Adieu, mon eher frere, je vous embrasse^ de meme
que votre chfere dpouse, croyez-moi pour la vie votre . .
Le 8 oetobre 1789.
Joseph Trfes-cher frfere. Voici les nouvelles de la semaine.
an Leopold.
Le mauvais temps qui m'a fait rentrer en ville, s'est
remis au beau; je souhaite la continuation pour les assid-
^ geants de Beigrade, dont je n'ai plus un inot depuis
la derniere nouvelle pröalable de la prise des faubourgs.
J^ai re9u votre chere lettre et j'ai ^tö afflige comme
vous de toutes les horreurs qu^on imprime et r^pand
contre la Reine de France, mais que faire avec des inso-
lents et des fous. On ne revient pas non plus de Tidöe
que ma soeur m'a envoy^ secretement des millions, pen-
dant que je ne sais ni le pourquoi ni comment j'aurais
— 279 —
pu les demandery ni eile me les faire tenir; je n'ai ja-
mais «vu un sou de la France.
Quant k ma sant^, la fi^vre est passäe, mais la
poitrine est plus oppressäe que jamais. Je tousse terrible-
ment et crache beaueoup, et la respiration est difficile,
des battemens de coeur au moindre mouvement, enfin
je suis un corps ruinä et qui ne peut que trainer une
vie souffrante et malheureuse tant que la providence
Yj condamnera. Les mödecins ne savent plus que faire
ni que dire, tous pourtant conviennent que je pourrai
etre soulagä, mais plus guäri.
Votre belle-fille sera saignäe aujourd'hui, Störck
trouvant cela näcessaire. Adieu, je vous embrasse, de
meme que votre chere äpouse ; croyez-moi pour la vie
votre . . .
Le 12 oetobre 1789.
Trfes-cher frfere. Dans ce moment le recois la nou- ^^^\
*f » an Leopold.
velle de la prise de Beigrade paf capitulation. Trois
Cents pieces de canon sont a nous, et la garnison obtient
des bäteaux avec femmes, enfants et bagages pour ^tre
transportde a Orsowa. Cet heureux övönement, qui nous
a si peu coütä, m'est annoncö par le geJnäral Klebeck,*)
*) Wilhelm Freiherr v. Klebeck, gleich Laudon ein Liefländer,
im Jahre 1729 geboren. Für seine Verdienste bei der Eroberung von
Belgrad zum Feldmarschall-Lieutenant und Commandeur des There-
sienordens ernannt, dessen Ritterkreuz er schon besass, starb er als
Feldzeugmeister im Jahre 1811.
— 280 —
neveu du mar^chal. II entre avec vingt quatre postillons,
et apres -demain il y aura le Te Deum k SaiDt-Etienne.
Ma sant^ est passable, et je vous embrasse, n'ayant
qu'un moment, de tout mon coeur . . .
Ce 15 octobre 1789.
an Leow)id Tres-cher frere. Je ne puis que vous continuer de
bonnes nouvelles. Le prince Hohenlohe a battu les Turcs
en Valachie, comme vous verrez par la feuille ci-jointe.
Hier nous c^l^brämes le Te Deum pour Beigrade en
public a Saint -Etienne. J'y fus aussi par une foule
incroyable et une joie dont je n*ai pas vue la pareille
encore; eile a dur^ toute la nuit; toutes les maisons
presque ont ^t^ eclair^es et des bandes de musique se
sont promenöes. Pour moi, incapable. par mon etat
misörable de jouir de quelque chose, je me suis couche
a huit heures, sans pouvoir dormir ä force de tousser,
et voila comme je passe ma vie mis^rablement ; pas un
moment sans douleur et difFicult^ de respirer, aussi je
ne sens aucun plaisir, ma peine physique ^touffe tout
autre sentiment.
Adieu, je vous embrasse, de m^me que votre chere
epouse . . .
— 281 —
Le 19 octobre 1789.
Pour auiourd'hui le n'ai point d'autres nouvelles que \^»^ff\
o J r ■*• an Leopold.
la reddition de Semendria k vous annoncer, de m^me
que Beigrade par capitulation. Pour ma sant^, la fi^vre
qui m'a tenu deux jours, m'a quittö ; pour le reste tout
est Fancienne misere. Les derniferes nouvelles de France ^
sont affreuses; vous les saurez sans doute; je tremble
pour la Reine. Apres que ces forcen^s, ayant les poissardes
k leur t§te, ont forc^ le Roi, töute la famille royale, tous
les ministres et les Etats- Gänäraux k venir habiter Paris
et a promettre d'y rester, c'est les rendre otages de
tout ce qu^ils voudront faire, et la racaille de Paris va
^tre le despote de toute la France. II faut que la guerre
civile en naisse, et peut-^tre est-ce le seul moyen de
remettre Tordre.
Adieu, mon eher ami, je vous embrasse, de m&me
que votre chere ^pouse, de tout mon coeur . . :
Le 22 octobre 1789.
Trfes-cher frere. Vous recevrez auiourd'hui les obiets Jo^^p^
'' '' an Leopold.
de la semaine. Aux Pays-Bas on est toujours sur le qui
vive; on annonce toujours une arm^e pätriotique de r^volt^s,
raais rien n'arrive, nous contenons tout par la vigilance
et la fid^lit^ du militaire; en attendant cet ^tat fait
beaucoup de mal, puisque tout est en suspens, en crainte,
et que le commerce languit, n^anmoins il n*y a pas
moyen d'y remödier jusqu'a ce que les esprits soient
— 282 —
plus calmes et les circonstances de nos voisins plus
däeid^es.
En France k cette heure, que toute la famille
royale et les Etats- G^n^raux sont comme enferm^s dans
Paris, k la merci de sa populacc, le calme est remis
et meme on commence ä revenir un peu de toutes les
ex^crations qu'on vomissait contre la Reine et notre
systfeme.
Pour ma sant^, eile est de m^me toujours, toussant
beaueoup, et la respiration fort difficile et deä battemens
de coeur si je marche ou surtout monte des escaliers.
Des arm^es j'attends ce que le mar^chal Laudon
fera, si et comment il tentera quelque chose sur Orsowa;
cela d^eidera du retour de votre fils qui se porte a
merveille. Adieu. . .
Le 26 oetobre 1789.
oseph Tr^s-cher frere. J'ai recu votre chere lettre; c^est
an Leopold. * '
de grandes inondations qui ont etö dans le Tyrol, qui
auront enipeche le passage des postes. Ici nous avons
toujours le temps le plus constant et beau, tout est du
plus beau verd, les arbres meme ne perdent pas leurs
feuilles encare. Des arm^es rien de nouveau; j'attends
ce qui arrivera encore, si Ton songer a a tenter quelque
chose sur Orsowa ou non. Le mar^chal Laudon ne
m^en parait pas avoir envie. Des Pays-Bas Pexemple du
voisinage rend toujours les troubles plus serieux; il
— 283 —
I
faudra voir s'ils ^clateront et s'ils trouveront un appui
dans r^tranger.
Pour ma sant^, eile est toujours de mSme, et je vous
embrasse, raon eher ami, de meme que votre obere
epouse de tout mon coeur ....
Le 29 octobre 1789.
Tr^s-cber frere. Vous recevrez ici les objets courants Jo8«p^
an Leopold.
de la semaine. Pour Fexp^dition sur Orsowa la meme
incertitude existe encore, et Ton ne sait point si le
mar^chal Fentreprendra ou non. Du reste aux Pays-Bas
la fermentation continue et le moment parait arrivö oü
il se devra faire quelque ebose qui d^eide. Pour ma sante,
eile est de m^me toujours cbancelante. Les nouvelles de
France sont plus rassurantes, et il parait que la populace
se tranquillise, en voyant le Roi et sa famille avec les
Etats-G^n^raux dans la ville de Paris; ce qui se d^cidera,
et comment ils mettront ces moyens en ex^cution, c^est
ce que le temps nous fera voir.
Adieu, je vous embrasse, de meme que votre cb^re
Epouse de tout mon coeur . . .
Le 2 novembre 1789.
Tres-cber frfere. Pour aujourd^bui le ne puis que *^°*®*'^
•^ "^ '^ ^ an Leopold.
vous mander que le mar^cbal Laudon est parti de
Beigrade avec votre fils pour aller voir s*j1 y aura
— 284 —
moyen de tenter quelque chose sur Orsowa. J*en attends
dans une huitaine la nouvelle de ce qu'il pense faire.
Abdi Pacha en attendant s'est sauv^ k Nissa et a aban-
donn^ ODze pi^ces de canon et son magasin a Czupria^
oü il ^tait; d'une terreur panique^ car il n'^tait pas
question de Tattaquer.
Des Pays-Bas j 'attends a tout moment des nouvelles
d^cisives. On a ^ventd un complot qui se tramait a
Bruxelles, et qui ^tait con9U avec esprit et malice. II y
a des personnes arrfet^es, et reste a voir ce qui arrivera
encore, et si ces miserables soi-disant patriotes, qui se
sont röunis pr^s de Breda au nombre a peu pres de
trois mille, tenteront quelque chose avant de moürir de
faim ou de se s^parer, car les deux abb^s qui les paient
et qui sont avec eux, n*en ont plus les moyens.
AdieU; je vous embrasse. Ma sante est toujours de
m^me. Croyez-moi, de m^me que votre chere ^pouse, pour
la vie votre . . .
Je rouvre ma lettre pour vous remercier de la
votre qui contient la part que vous me marquez prendre
a la prise de Beigrade. Je vous en remercie et vous
prie en m^me temps, faute de temps, de vous charger de
mes remercimens aupres de votre chere öpouse et
votre fils Ferdinand, qui m'ont ögalement ^crit. Adieu . .
Le 5 novembre 1789.
Joseph Tres-cher frere. Voici les nouvelles de la semaine.
an Leopold.
D'Orsowa je ne sais rien, quoique le marechal y soit. En
— 285 —
Croatie les Turcs ayant ^t^ trfes-renforc^s par le Pacha
de Scutari, nous nous attendons a une attaque tous les
jours, et qui pourra ^tre forte et dangereuse, vu Texten-
sion de notre cordon. Aux Pays-Bas la bombe a crev^;
la d^couverte d'un complot a acc^l^r^ Tentr^e dans le
Brabatit de cette soi-disant arm^e patriotique^ oü mal-
heureusement le g^n^ral Schroeder*) a fait une sottise
avec deux bataillons^ et a ^t^ obligä de se retirer avec
perte d'une attaque qu'il avait faite a Turnhout, oü ils
^taient barricad^s dans des maisons et des caves. Le car-
dinal de Malines**) et Tdveque d'Anvers se sont sauv^s,
on ne sait oü; cela est bien signifiant, aussi ces mise-
rables mettent toujours la cause de la religion en avant.
Enfin la Situation est critique et fächeuse, le temps pourra
seul Feclaircir.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeur. Vous
jagerez bien que de pareilles choses ne sont pas fort
utiles k ma sant^. Croyez-moi, de m§me que votre chere
^pouse, pour la vie . . .
Le 12 novembre 1789.
Trfes-cher frere. Pour auiourd'hui le suis dans le •[<>^«p^
*f »f an Leopold.
meme cas de Tautre jour; il ne me conste rien de nou-
veau ni des arm^es ni des troubles aüx Pays-Bas. On a
*) Gottfried Johann Freiherr von Schröder, damals General-
major. Er starb als Feldmarschall-Lientenant im Jahre 1807.
**) Johann Heinrich Graf Frankenberg, Cardinal-Erzbischof
von Mecheln.
— 286 —
commencä k bombarder Orsowa, et les Turcs, assenibl^s
en Croatie, menacent toujours une forte attaque.~
J^espfere que je recevrai de meilleures nouvelles de
la sant^ de vos deux fils malades. Ma soeur Marianne^
qui Tavait it6 m^me au point de faire craindre, est
mieux. Pour moi cela reste toujours au meme point; je
ne prends plus de m^decine, en ayant tant pris, et je
ne trouve pas de difference. L'ouvrage multipli^, les
circonstances, la bile qu'on se fait, les vives inquietudes,
et la peine des sottises d'autrui me rendent la vie bien
dure, Joint a une sant^ delabr^e oü tout coüte davantage
et qu'on n'a pas la force de corps de vaincre et sur-
.monter tous les embarras, comme quand on se porte bien.
Enfin il faut me soumettre k ma destin^e et faire tout
ce qui est humainement possible pour tirer TEtat des
embarras dans lesquels il se trouve.
Adieu , je vous embrasse et vous prie de me
croire . .
Le 16 novembre 1789.
Joseph Tres-cher frere. Devrais-je vous r^pöter les voeux
an Leopold.
tendres et sinc^res que j^ai formes hier, jour de votre
nom, pour votre bonheur et satisfaction ? Tous les jours
de rannte sont marqu^s des memes sentimens, et j'esp^re
que vous en ^tes bien jfersuadö. Ici rien de nouveau;
des armees des Pays-Bas je viens de recevoir la nou-
velle, que les soi-disant patriotes sont sortis hors du
pays, et qu^ils sont a Tapproche des troupes retourn^es
— 287 —
vers Breda en Hollande. II faudra voir s'ils reviendront
ou si ou De pourra les en empecher.
Ma sant^ dans cette saison perd; la respiration
devient plus difficile, je tousse davantage, mais je ne
maigris point et je suis sans fievre. Cela est bien incom-
mode, perdant meme la voix pour peu que je parle.
Adieu. . .
Le 19 novembre 1789.
Trfes-cher frfere. La pluie, le mauvais temps ont ua^^^^^J ,^
peu d^rang^ nos esp^rances pour la prise d'Orsowa. Les
transports d^artillerie embarquös a Beigrade n'ont pu
avancer, et ils sont toujours arret^s a Ujpalanka; cela
fait que le mardchal Laudon, apres avoir fait occuper
Cladowa et Czernetz, continuera ä bioquer meme Fhiver
cette place, qui probablement tombera. En attendant
Cobourg et Hohenlohe avancent en Valachie, et proba-
blement ils Poccuperont toute enti^re et y pourront
hiverner. Le Pacha de Scutari, ou au moins de ses
troupes, qui ^taient venues pour soutenir les Bosniaques
et qui pendant quelques semaines mena9aient la Croatie
d'une Invasion, apres avoir tenti en plusieurs endroits,
Sans pouvoir r^ussir, ils s'en sont retourn^s chez eux, et
nous en sommes quittes. Aux Pays-Bas les soi-disant
patriotes se sont sauves en Hollande, oü probablement
ils seront oblig^s de se s^parer, n'ayant plus d^argent,
et par Ik il faut espörer que peu ä peu Tordre . et le
calme se rätabliront.
— 288 —
Quant k ma sant^^ c'est toujours la m§me chose.
Vous recevrez les pifeces de la semainey et je vous
embrasse^ de mSme que votre ch^re ^pouse, de tout
mon coeur . . .
Le 23 novembre 1789.
Joseph Tres-cher frfere. Vous aurez recu mon estafette d'hier
an Leopold. '
qui vous annon9ait la mort de notre soeur Marianne ;
je n'en ai pas de detail ni la moindre connaissance
de ses dispositions. Les nouvelles des arm^es sont
bonnes; nous avons oceup^ toute la Valachie; mais aux
Pays-Bas les choses vont mal; on fait sottises sur sottises.
Pendant qu'on courait avec les troupes jusqu'aux fron-
ti^res d'Hollande apr^s ces soi-disant patriotes, ils se
moquaient de nous^ et prenant un autre chemin^ ils
toumferent le Gön^ral d'Arberg et entrferent en Flandre,
et meme oecup^rent la Tille de Gand, avant que les
troupes y purent arriver. Cela met cette importante
province, qui ne s^^tait m^l^e de rien, en feu, et j'attends
ä-tout moment des nouvelles d^cisives de ce qui s^ sera
pass^^ quand le g^n^ral d'Arberg y sera arriv^ avec la
tronpe. En attendant cette dösolante histoire, et qui est
si nuisible que honteuse, me cause le chagrin le plus
cuisant^ et k cette distance on ne peut rien ordonner ni
disposer. Malfaeureusement que le gouvernement et le
commandement gen^ral sont brouill^s et fönt mille choses
de travers. Si cet orage passe^ je devrai prendre d'autres
mesures pour que cela n'arrive plus. Adieu. . ,
— 289 —
Le 26 novembre 1789.
Trfes-cher frfere. Vous recevrez les obiets de la f®^ „
•^ an Leopold.
semaine, qui, hors les malheureuses affaires aux Pays-Bas,
ne sont pas bien interessantes. Celles-ci ont pris par Pin-
6oncevabIe sottise des deux g^n^raux Schroeder et d'Arberg,
et les mauvaises dispositions du commandant g^n^ral*),
une tournure d^sesp^rante et honteuse. Le premier comme
un fou a attaqu^ Turnbout, y a fait tuer du monde et
y a perdu trois canons vis-k-vis d'une racaille comman-
dee par des prltres et un certain Vandermersch**) qui
avait la pension et le titre de colonel. Le second n^glige
la ville de Gand, s'y laisse pr^venir par ces rebelles, oü
il n'y avait qu'un bataillon, qui s'est barricade daus les
casernes. Loin d'aller le d^livrer il entre d'un autre
cote, allume des maisons, n'effectue et ne tente rien,
et ce bataillon est obligö. de capituler et de se rendre
prisonnier k ces miserables. Les t^tes sont toutes per-
dues, le ministre qui ne prövoyait pas pareille chose,
ne sait pas non plus que faire, Leurs Ältesses sont
parties pour Coblence ou Bonn, enfin d^un rien, d'une
assembl^e de 2400 manans et pas plus, plusieurs sans
armes, sans canons, sans cavalerie, tout cet ^venement,
la perte de la meilleure province et de celle qui etait la
plus tranquille, arrive, savoir la Flandre, qui est actuelle-
ment entierement abandonnee, toutes les troupes s^etant
*) Der Feldzeugmeister Richard Graf d'Altoi).
**) Johann Andreas van der Mersch, Befehlshaber der nieder-
ländischen Insurgenten. Geboren im J. 1734, starb er 'im J. 1792.
T. Arneth. Joseph o. Leopold. II. 19
— 290 —
repli^es sur Bruxelles et Anvers. Je vous laisse juger de
la peine cruelle que j^^prouve, et k cette distance on ne
peut rien disposer qui soit a propos. Je compte envoyer
Cobenzl comme commiBsaire^ pour seulement ^tre au fait
des vraies circonstances^ et en m^me temps il sera muni
de plein-pouvoirs tr^s-illimit^s pour tächer de remettre
le calme d'une fa9on ou de Tautre. Je compte aussi
changer le eommandant g^ndral, puisqu'il y est d^ja trop
hal et que ses arrangemens ont 6ti impardonnables, car
il n'avait pas mdme des munitions a la main, et a iii
huit jours a devoir les attendre de Luxembourg. Je vous
laisse juger combien tout cela influe sur ma sant^,
Sans cela toujours encore d^Iabr^e. Le sommeil est perdu,
et quand on passe les nuits k rever sur des objets aussi
sensibles que fachen::^; cela ne repose pas.
Votre fils reviendra ici, je crois, apres-demain ; il
doit §tre aujourd'hui a Pest. Adieu, mon eher ami ; je
vous embrasse et vous prie de me croire pour la vie,
de m§me que votre ch^re ^pouse, votre ....
Le 30 novembre 1789.
Joseph Tres-cher frere. J'ai recu votre lettre et suis charm^
an Leopold. '
de savoir que vous vous portez bien avec votre chfere famille.
Pour moi, j*ai encore repris ma 'douleur au foie et eile
m*a donn^ comme toujours la fifevre, que j'ai eue hier
soir et toute la nuit. A cette heure eile est pass^e, mais
la douleur reste encore, Tacces ätait m^me plus violent
et dans le frisson j'ai beaucoup vomi. La chose n'est
— 291 —
pas ^tonnante, T^tat d^nqui^tude et violent dans lequel
je me trouve, ne peut §tre sain.
Cobenzl vient de partir pour les Pays-Bas ; il faudra
voir s*il sera k m^me d'arranger quelque chose. Les sot-
tises du g^n^ral d 'Alton et de ceux qu'il emploie, sur-
passent tout ce qu'on peut imaginer.
Votre fils est arriv^ bien portant, un peu maigri, et
Manfredini aussi, que je n'ai point encore vu,, ayant ^t^
au lit toute la journ^e. Adieu , je vous embrasse, de
meme que votre chfere ^pouse ; croyez-moi pour la vie
votre ....
Le 3 dcScembre 1789.
Tres-cher fr^re. Vous recevrez les objets de la ^^ Leopold
semaine, qui ne sont interessantes que par la continuation
et le d^sordre des affaires aux Pays-Bas. Vous remarque-
rez la d^sunion honteuse et nuisible qui existe entre le
ministfere et le commandant göndral, oü chaeun veut
jeter la faute sur Tautre, et oü le service seul perd. Je
ne puis avoir aucun renseignement clair de ce qui est
arriv^, ou de T^tat des choses. II parait qu'k Bruxelles
meme les tetes sont si tournöes, les nouvclles si contra-
dictoires, qu'on fait expres pour les embarrasser, que Ton
y est dans la m^me ignorance de tout ce que ces soi-
disant patriotes fönt en Flandre et autre part. J'ai en
attendant fait partir le vice-chancelier Cobenzl comme
commissaire royal. D* Alton sera relevö par le g^nf^ral
19*
— 292 —
FerrariB*), s'il Taccepte. Vous trouverez ces dispositions;
je croisy n^cessaires^ puisqu'il faut absolument mettre un
nouveau plan eher, si on veut espörer quelque r^ussite.
Vouß verrez dans les pifeces ci-jointes entre autres
une pi^ce remarquable qui est Tinstructioii donViee par
la Cour de France au duc d^Orleans, qunnd il alla en
Angleterre, et qu'elle nous communiqua. La chose est
d'un genre si extraordinaire qu'on ne sait qu*en penser;
en attendant il est de fait qu*il fomente les troubles, que
le Roi de Prusse y est pour beaucoup et les Hollandais,
et que, vu cette influence et Tincroyable gaucherie et
b^tise de toutes les dispositions eiviles et militaires, on
parviendra avec bien de la peine ä faire cesser ces
troubles et a faire un arrangement döcent.
Ma sant^ est toujours trfes-d^rang^e. La douleur con-
tinue eneore, et j*ai Testomac si enflö que cela m'em-
p^che de respirer, de dormir et de manger, outre la toux
habituelle. Je ne puis sortir de ma chambre et je ne
vois personne, ayant de la peine a faire la conversation^
par cons^quent seul ä mes affaires et a mes pensöes qui
ne sont pas gaies. Je vous laisse juger de Tagr^ment de
ma vie. Cela ne serait rien, pourvu que nos affaires
allassent bien ; ma personne est peu de chose, mais pour
celles-lä je dois vous avouer que je vois tres-noir. La
partie du Roi de Prusse, uniquement dirig^e contra nous,
est si forte que la paix avec la Porte par eile devient
trfes-douteuse, m^me avec tous les sacrifices. Une guerre
*\ Joseph Johann Graf Ferraris, damals Feldzeugmeister. Er
starb im J. 1814 als Feldmarschall.
— 293 —
donc au printemps contre les Polonais et les Prussiens
tres-probable, avec cela la nullit^ de la France et m^me
sa mauvaise volonte, l'^puisement de la Russie, la r^volte
aux Pays-Bas, le m^me esprit suscit^ par les Polonais
en Galicie et m^me Hongrie, enfin notre ^puisement, tout
cela fait trembler^ et il faudra un miracle^ si nous nous
en tirons sains et saufs.
Adieu, je vous embrasse de m§me que votre chfere
dpouse ; croyez-moi pour la vie votre . . . i
Le 6 d^cembre 1789.
Trfes-cher frere. C'est par le g^n^ral Manfredini que je ^n Leopold,
vous ^cris ces lignes. II n'a ^t^ que peu de jours k Vienne;
Bon zMe k retourner k son poste ne lui a pas permis
une plus longue absence. II vous doiinera, j'espere, les
nouvelles les plus satisfaisantes de votre fils et de son
öpouse. Quant k noa affaires, autant que je sais, tout va
au plus mal aux Pays-Bas. Le ministre a ddjk aecordö
tout ce qui est possible, et je crois non seulement
Sans bon, mais je erains avec un mauvais effet, puisque
cela ne fait que les enhardir. Le commandant g^neral
a perdu la tete ; les dispositions qu'il a faites dtaient mal
vues, encore plus mal ex^cut^es; k cette heure il s'est
concentr^ aupres de Bruxelles, en abandonnant tout le
reste. Vous verrez qu'il n'y tiendra pas, et y sera ou
forc^, ou bloqu^ pour les vivres, enfin comme la France
les Prussiens y ont la main. Comme cette folie de libert^
existe, vous verrez que ces gens voudront former une
— 294 —
Constitution dans le goüt de la fran9aise^ et feront des
pr^tentions inadmissibles.
Ces circonstances, fächeuses et j'ose dirie honteuses,
par leB mauvaises dispositions faites, Tesprit de pillage
de la troupe, me mettent au desespoir et ne contribuent
pas peu a miner enti^rement ma sant^. Avec cela notre
paix a faire avec la Porte devient tous les jours plus
incertaine, au Heu que Tagression de la part du Roi de
Prusse et des Polonais pour le printemps est süre, si
nous ne rendons la Galicie, chose impossible. Voilk des
circonstances qui exigeraient une grande activit^, une
force d'ä?me et du courage. Je fais avec effort plus que je
ne puis, mais je suis si d^chu de forces et si incommod^,
que je suis bieq ^loign^ d'^tre ce que j'^tais autrefois,
ou de ce que je devrais §tre pour ces d^sastreuses cir-
constances. Avec cela vous savez avec quelles gens je
dois g^rer les affaires, et combien peu de ressource il y
a en eux, enfin ibant qua poteruntj je ferai tous les efforts,
et si je succombe, je suis tranquille, sachant d'^tre mieux
remplace pour le bien de TEtat par vous, que je ne vaux
moi-m^me.
Adieu, je vous embrasse ; croyez-moi pour la vie
votre .
* • •
Le 7 döcembre 1789.
Joseph Tr^s-cher fr^re. J'ai Yecu votre ch^re lettre et vous
an Leopold. '
ayant ^crit au long et envoye toutes les pieces du mo-
ment par le genöral Manfredini, qui est parti cette nuit,
— 295 —
je ne puis que me rapporter a elles. Je vous rends mille
gräces de Tint^r^t que vous prenez k ma santö. Le fond
est toujours le m6me ; les fifevres et douleurs sont des
accessoires qui viennent et disparaissent derech ef apr^s
quelques jours.
Je suis bien fäch^, que Tespörance que la retraite
des rebelles aux Pays-Bas avait donn^e de la fin des
iroubles, s*est trouv^e si cruellement ddjouöe. Ils ont
quittä le Brabant; nous ont fait courir apr^s eux pen-
dant que d'un autre cöt^ ils ont envahi la Flandre et
fait tout le mal dont vous avez ddja les d^tails. Je n'en
sais pas davantage du dcpuis^ et je ne serai aucunement
^tonne s'ils forcent meme Bruxelles. Le temps seul pourra
nous ^claircir ; on a tout fait en attendant pour les cal-
mer, mais je crains que leur parti est trop lie avec la
Prusse et les Frangais, pour pouvoir espörer de leur part
la soumission h, dc6 conditions raisonnables.
Adieu, mon eher ami ; je vous embrasse, de meme
que votre chfere epouse, de tout mon coeur. Croyez-moi
pour la vie votre ....
Le 10 d^cembre 1789.
Trfes-cher frere. Pour auiourd'hui le ne puis vous J^«®p^
•' *f r nn Leopold.
envoyer que les nouvelles courantes. Des Pays-Bas je
suis plusieurs jours sans en apprendre quelque chose.
Je crois qu*on a pris des estafettes, et comme tout
s'adresse a Cobenzl qui est en route, cela va aussi plus
lentement. Le Roi de Prusse en a fait une bonne ; ex-
— 296 —
cito par la chambre de Wetzlar a assister le prince de
Li^ge contre ses sujets rebelies, il a acceptä avec l'Elec-
teur de Cologne et Palatin conjointement Fex^cution des
mandats de la chambre. Au moment que tous trois fai-
saient marcher leurs troupes, il est entrö seul et d'avance
dans Li^ge, et au lieu d'ex^cuter les d^crets de la
chambre et remettre le prince de Liöge dans ses droits,
il s'est d^clare contre lui, et comme protecteur des re-
belles ou soi-disant patriotes, ce qui a mis les deiix
autres Electeurs dans le cas de retirer leurs troupes et
de le laisser faire seul. La raison en est claire, c'est
qu'il veut par la faire esp^rer aux patriotes des Pays-
Bas la meme protection.
Ma santd est fort derang^e ; voila quelques jours
que j'ai pris une pointe au cot^ droit de la poitrine, qui
m'emp^che de respirer et qui me donne de Taltdration,
surtout le soir. Quelle miserable vie ! %Voila dix-huit mois
que je traine et suis dans les rem^des sans fruit, et le
mal augmente. Une fin quelconque serait te glus grand
bonheur.
Dans ce moment je regois ces rapports des Pays-Bas
que je vous envoie, aussi dösagr^ables qu'ils sont, de
m^me que la copie du testament et des codicilles de
notre soeur Marianne ; vous y verrez qu'elle ne rend pas
ses h^ritiers bien riches, par les charges qu'elle leur im-
pose. Adieu
— 297 —
Le 14 döcembre 1789.
Trfes-cher frere. J'ai recu votre chere lettre et suis ^^^ ,,
* an Leopold.
charmö de vous savoir avec votre famille bien portant.
Pour moi, depuis peu de jours je suis trfes-incommod^,
et cela d'un genre qui, si les symptomes n'en cessent
bientöt, ne me laisse plus de doute sur ce qui m'attend,
savoir probablement une hydropisie de poitrine. Voilk
quatre jours que ni jour ni nuit j^ai une minute la res-
piration libre^ les nuits surtout pas un instant de som-
meil, puisque, quoique je sois couche trfes-haut avec la
tete^ D^anmoins a chaque aspiration un sanglement qui
est suivi toujours d'une toux affreuse, sans presque d'ex-
pectoration, m'empeche de m'endormir. Levö, je suis un
peu soulagö, mais tres-faible, et je tombe des cbairs
derechef ; pas möme sur un canap^ je puis mettre les
pieds en haut, sans que tout de suite ces -etouflfemens
de la nuit me reprennent. On ne peut croire, sans
Teprouver, combien terrible et penible est cette Situation.
On m'a chang^ les remfedes, et quelques jours devront
faire voir, si c'est un engorgement passager des poumons
et de lä poitrine, ou si le mal y prend racine. Dans ce
dernier cas je suis perdu, et ne pourrai que tratner en-
core quelque temps une vie misörable.
Adieu^ mon eher frfere ; dans tous les cas je serai
jusqu'au bout de ma carri^re votre fid^le ami. Mes com-
plimens ä votre chere öpouse. Croyez-moi toujours
votre ....
— 298 —
Le 14 d^cembre 1789.
Leopold Tres-cher frere. Je viens de recevoir la lettre que
an Joseph. ^
vous avez bien voulu m*^crire du 3 de ce mois, avec
tous les papiers qui y ^taient joints et que j'ose vous
renvoyer. C'est avec une peine infinie, que j'ai vu
que vous eontinuez a ^tre m^content de votre sant^ et
que, quoique la fifevre ne continue point, la faiblesse vous
oblige de ne pouvoir voir personne, ce qui doit, surtout
dans les circonstances präsentes, vous ^tre bien d^sagre-
able. J'ai pareillement vu avec bien de la peine ce que
' vous me marquez de la Situation critique des affaires de
la monarchie, qui doivent bien vous faire de la peine et
vous causer des embarras. II est bien malheureux que,
malgrö la glorieuse campagne de cette annöe, on ait pu
persuader aux Turcs de ne point vouloir faire la paix ;
la Russie est ^puis^e d'hommes, d'argent et de tous les
moyens possibles de la continuer avec vigueur, ce qu'on
a vu bien clairement par la faible campagne qu'elle a
fäite cette annde, et les grandes ddpenses que lui coüte
la guerre avec la Sufede, vis-k-vis de laquelle m§me eile
n'a pas pu d^ployer des moyens bien vigoureux.
II parait que le Roi de Prusse par toutes ses dispo-
sitions veut se meler au printemps prochain des affaires
de Pologne contre la Russie, animer les Polonais contre
vous, et se servii; du credit qu'il a en AUemagne, pour
vous y causer des embarras, en se m^lant des affaires
des Pays-Bas par ses troupes qu'il envoie a Li^ge, et
faisant appuyer les insurgens de Fargent de la Hollande.
— 299 —
J'avoue que rinstruction donn^e par la Cour de
France au duc d'Orleans, est le eomble de Tiniquit^ et
de la faussete, surtout chargeant un homme aussi d^cr^-
ditd d'une pareille mission au moment oü le Roi ne peut
pas avoir de confiance en lui, oü lui-meme est Tauteur des
revolutions en France, et a tent^ d'enlever au Roi sa cou-
ronne et peutetre la vie a la Reine et a sa famille, mais
cela fait voir que dans ce moment-ci en France, avec un
Roi nul, le ministere de cröation du parti d'Orleaus do-
minant dans Tassembl^e nationale, prdfere de servir a la
haine personnelle de cette nation et cabinet contre votre
personne et famille plutot que de penser k ses vrais in-
t^r^ts, et ä cet efFet se sert du duc d'Orl^ans, Tunit a
TAngleterre, anime l'Espagne ä s^unir avec la Prusse,
souffre tout, renonce a tout principe, liaison, alliance,
bonne foi et honnetete, pourvu qu'ils puissent parvenir
a vous faire du mal. L^Espagne est ^galement dans les
sentimens les plus cont'raires et hostiles ; je le sais de
science certaine, et le comte de Florida-Bianca, ministre
despotique sous un Roi incapable entiferement et nul, et
une Reine qui ne pense qu'k se divertir et a laisser vendre
les emplois ä ses favoris, sans talent ni capacitä, hors
d'etre vindicative, a une correspondance suivie avec les
ministres de Berlin et de Londres, leur est entierement
vendu, et ne cache pas meme en public et dans ses dis-
c3ours la haine qu^l porte a tout ce qui vous regarde
et votre famille.
Quant aux affaires des Pays-Bas, a präsent, gräce a
vo^ bont^s et aux deux envois de papiers relatifs que
vous avez bien voulu me faire, et dont j'ose vous ren-
— 300 —
voyer le second, je comprends ais^ment le vrai ^tat des
choßes, dont ci-devant je n'avais pu que me former une id^e
tres-confuse. Je vous supplie de vouloir bien ordonner
qu*on continue k me les envoyer, ces affaires ^tant h
prösent de la plus grande importance. Je ne comprends
pas comment tout cela est all^^ et pourquoi on a eu si
peur de cette troupe de patriotes, repr^sentie sans ordre
ni r&gle; et en si mauvais Hat? II me parait que les
dispositions militaires ont iii bien mal faites, et Tindisci-
pline fort grande dans ces r^gimens. II parait qu'on a
trop longtemps m^pris^ les soi-disant patriotes, qu'on a
trop compt^ sur le militaire, et qu'ensuite on a d'abord
cru tout perdu, et que tout le monde a eu trop peur. II
parait que les yiolences, arr^ts ill^gauX; visitations mal a
propos du militaire ont indispose tous les esprits et beau-
coup aigri. La m^sintelligence entre le ministre et le
commandant g^n^ral a fait ^galement beaucoup de mal.
Je crois que le rappel de ce dernier fera beaucoup de
plaisir au public, ^t je souhaite que la sant^ du g^n^ral
Ferraris lui permette d'accepter un poste aussi d^licat et
dangereux dans un pareil moment. Les d^clarations que
le ministre a publikes, quoique fortes et meme humiliantes,
feront quelque effet, si la confiance se r^tablit et si le
public ne les considere pas comme caus^es par la peur
qu'on a des patriotes, car dans ce cas, et surtout si on se
mettait a traiter directement et comme d'^gal a igsA avec
leurs chefs, il est a craindre que leurs pr^tentions seront
exorbitantes, et qu'on veuille de leur part la garantie de
la Prusse, Hollande et Angleterre, ce qui serait trfes mal-
heureux dans ce moment, et leur fournirait une occasion
— 301 —
qu'ils d^sirent depuis longtemps, de se m^Ier de ces af-
faires. Enfin je crois que Fenvoi du comte de Cobenzl
sera utile, pour que vous soyez au moins inform^ du vrai
^tat des choses et des mesures a prendre. Je crois qu'il
est absolument n^cessaire que ces affaires se terminent
le plus tot possible, pour que d'autres Cours n'aient pas
le temps de s'en meler, ni Feffervescence qui r^gne en
France, le temps de se communiquer aux tetes-flaman-
des, qu'on ne peut plus compter sur la force qui ä prä-
sent est impossible et a toujours mal röussi partout, et
que Fessentiel est de persuader le public de vos vraies
intentions pour leur bien, en eloignant toutes les choses
ou personnes qui peuvent leur etre suspectes de quel-
conque fagon, et tout ce qui dans les d^clarations k don-
ner, pourrait laisser des doutes ou des interprötations
aux malintentioniK^s. Je d^sire bien ardemment et de
tout mon coeur, que tout s'arrartge bientot et que vous
ayez des nouvelles plus satisfaisantes de cette importante
province, car je rae flatte toujours qu'en Hongrie et Ga-
licie, malgr^ les insinuations des emissaires prussiens et
polonais, il n'arrivera jamais de rumeurj surtout h, prösent,
qu'il y a tant de troupes, mais si jamais, comme vous
me le marquez, i-1 y avait quelque chose ä craindre, je
crois qu'il serait de la dernifere iraportance de rechercher
les causes possibles de leur inecoDtenteraent, et de les
prevenir, en y remcdiant et les contentant, si cela ötait
possible, pour prevenir une explosion quelconque, tou-
jours malheureuse.
— 302 —
Le 17 d^cembre 1789.
osep Tres-cher frfere. J'ai recu votre chfere lettre avec toutes
an Leopold. *
les pieces que vous avez bien voulu me renvoyer. Pour
aujourd'hui je ne puis que ine rapporter k Celles que
vous recevrez. J'attends d'un moment a Tautre des nou-
velles de Tarrivöe de Cobenzl k Bruxelles, et de ce que
le Grand-Vizir aura ^crit au mar^chal Laudon. Pour
moi, ma penible et cruelle Situation coutinue toujours;
pas une aspiration libre, et voila six jours que je n'ai
pas dormi une minute. Je ne puis ^tre qu'assis au lit;
cela m'affaiblit, me maigrit et me met dans un tel
an^antissement que je ne puis rien faire. Le jour leve,
a peine puis-je marcher dans la chambre; je toüsse
avec grande violence, et ce n'est que des glaires que je
crache. Je ne puis presque pas parier pour la toux et
par cette respiration empech^e, qui est d'un inqui^tant
terrible. Les m^decins ne trouvent pas pour le präsent
mon ^tat dangereux, mais il est encore plus malheureux,
que pour le gu^rir ils ne savent pas de remedes.
Adieu; plaigriez-moi, car je le suis bien sous tous
les points de vue. Mes complimens a votre chere öpouse,
et croyez-moi, en vous embrassant tendrement, votre . •
Le 21 d^cembre 1789.
Joseph Tres-cher frere. J*ai recu votre chere lettre- Les
an Lieopoia. ^
nouvelles des Pays-Bas sont des plus fächeuses. Cobenzl
n'y ^tait point encore, s'^tant arret^ plusieurs jotirs k
— 303 —
Coblence. Je crois qu'il faut regarder pour le moment
ces provinces perdues. Le Roi de Prusse les soutient et
dirige. II est impardonnable tout ce qu'on a fait, et le
politique comme le militaire sont ^galement tres en faute.
Selon des nouvelles partieuHferes ils doivent avoir vid^
meme Bruxelles, et le militaire tout comme le gouverne-
ment s'§tre retir^s k Namur, mais je n'ai aueun rapport,
car ils n'en donnent plus. Enfin c'est un malheur qui me
tue vraimeut de peine. Ma sant^ est miserable, la toux,
la difficult^ terrible k respirer continuent que je ne puis
faire le moindre mouvement et dois ^tre assis au lit
sans pouvoir ^tre couch^ un instant. A cela j'ai encore
repris mon acc^s de douleurs aux reins qui m'a donn^
pour toute une joum^e la fiövre tr^s-forte. Les nuits je
ne puis dormir, et enfonc^ dans les tristes röflexions
de tous mes malheurs personnels et ceux de TEtat, avec
une sant^ qui m'empeche tout soulagement, qui me rend
le travail encore plus penible, je suis, je crois, actuelle-
ment le plus malheureux mortel qui existe* Patience et
r^signation, voilk ma seule d^vise.
Je vous embrasse de tout mon coeur, de meme
que votre chfere ^pouse. Croyez-moi pour la vie
votre. . . .
Le 24 d^cembre 1789.
Trfes-cher frere. Vous verrez par les nouvelles de Joseph
an Leopold.
la semaine, a quoi nous en sommes. Les lettres ci-jointes
n'ayapt point de rapport formel encore, vous mettront
— 304 —
au fait de Tincroyahle ^vönement du 12 a Bruxelles*)
et de ses suites; c'est le comble du malheur et de Tigno-
minie, et je ne vois pour le präsent point de rem^de.
Jugez de ma peine, eher frfere; vous savez mon fanatisme,
dirai-je, pour le bien de TEtat, auquel j'a.i tout sacrifiä;
le peu de r^putation que j'avais, et la consid^ration en
politique que la monarchie avait aequise, tout est a vau-
Teau, et cela par rex^cution de mesures, les unes plus
betes que les autres.
Je viens de recevoir votre obere lettre avec les pa-
piers que vous m'avez renvoyes de Cobenzl. Je ne sais
point ce qu'il soit arrivö encore k Luxembourg. Tout ce
qu*il faudra tächer pour le präsent, c'est de conserver
cette province et d'avoir par Ik un point sür, duquel
nous puissions un jour reto urner avec une armäe aux
Pays-Bas, pour les reconquörir, mais aussi a cela je pre-
vois mille difficultäs, surtout pour les subsistances.
Quant k ma santä, je vous laisse juger si eile peut
s'amäliorer. Je suis vraiment misörable^ point de respira-
tion, devant etre assis toute la nuit, pas en ätat de me
coucher un instant, la toux tres-forte et bien de la peine
k expectorer. Imaginez que j'ai fait aujourd'hui mes de-
votions dans Foratoire, et que, marchant pas k pas, je
n^ai pu arriver de ma chambre k Foratoire, oü on ne
passe que les antichambres^ que hors d'haleine et avec
un battement de coeur affreux. Je ne puis donc rien
faire, ni prendre Fair, parier m'est ägalement impossible,
je suis dans toutes les vingt-quatre heures abandonnä k
*) Die Räumung Brüssels von Seite der kaiserlichen Truppen.
— 305 —
mes soufFrances et k mes peines et chagrins. Plaignez-
moi, mon eher frfere, et que Dieu vous pr^serve k
jamais d'une pareille Situation ! Je vous embrasse, de
m§me que votre chöre ^pouse ; croyez-moi pour la vie
votre ....
Le 28 d^cembre 1789.
Tres-cher fr^re. Pour auiourd^hui le ne puis vous ^r*®^\,
** J r an Leopold.
donner autre nouvelle, sinon que ma sant^ est toujours
de meme, et que je n'ai pas une seconde dans la jour-
n^e Sans souffrance, vu cette diflficulte k respirer qui
ne c^de k aucun remfede, et k laquelle faiblesse et
battement de coeur se joignent. Des Pays-Bas aueune
nouvelle, tout y est perdu, abandonn^, et il y aura du
bonheur si Ton pourra, faute de subsistances et de trou-
pes, qui d^sertent par compagnies, se soutenir dans
Luxembourg. Dans tous ces d^sastres il n'y a pas la
moindre lueur encore d'esp^rance pour un accommode-
ment quelconque. Voilk ma triste Situation, dont la plume
se refuse k vous d^tailler l'^tendue.
Adieu, je vous embrasse et vous prie de nie croire
pour la vie votre ....
Le 31 d^cerabre 1789.
Trfes-cher frfere. Pour aujourd'hui vous recevrez les ^^ Leopold,
nouvelles de la semaine aux Pays-Bas. Tout est dit, et
vous verrez avec quels gens on a k faire. Cobenzl s'est
▼. Arneth. Joseph n. Leopold . II. 20
306 -
' sauvä de Luxembourg, puisqa'a seize lieues il s'^tait
; montr^ des patriotes. Toutes les totes sont renvers^es,
J et je tremble pour Luxembourg, puisqu*ils ne sont pas
I fournis de vivres. Des evönemens pareils paraissent des
r^ves, et on aura peine k les croire. Ils ne sont pourtant
pas malheureusement que trop r^els. Je suis derechef
bien miserable; hier j'ai eu toute la journ^e la fievre, et ce
mal aux rognons qui me la donne toujours ; outre k
reste qui ne change pas, toujours la toux et la respira-
J tion difficile, k ne pouvoir §tre couchd un instant, mais
^ devant etre toute la nuit assis. Joignez a cela la faiblesse,
le malaise que cela donne^ et les importantes oecupations
du moment; et les peines dont on est affaiss^. Je puis
, a peine encore avec tous les efforts y r^sister, et suis le
plus malheureux des etres.
Adieu, je vous embrasse de tout mon coeuFj de
m^me que votre chere ^pouse. Croyez-moi pour la vie
votre ....
Faites, je vous prie, k vos fils mes remereimens
pour leurs lettres, et assurez-les de toute mon amiti^.
1790.
Le 4 Jan vier 1790.
Tres-cher frfere. J'ai re§u votre lettre et suis charm^ ^^ Leopold
que votre fils Rainer ait une petite vörole naturelle si
benigne. J*espfere que le sang, que parfois crache votre
chere ^pouse, ne sera d'aucune consöquence. Pour moi,
je suis toujours de m^me, je drogue k force, mais sans
effet. J*ai encore eu hier une attaque de douleurs aux
rognons, qui deviennent plus fr^quentes ; la respiration
m'emp^che toujours d*§tre couch^ et de pouvoir bouger
m^me pour aller h, T^glise je ne suis plus en ^tat, et les
fötes et dimanches j'entends la messe dans ma chambre.
Quant aux affaires, elles sont raalheureusement dans une
Situation extr^mement critique. Les Pays-Bas sont perdus,
j'ai des nouvelles certaines que les revolt^s se sont
engag<$s par ^erit vis-k-vis du Roi de Prusse, d'accord
avec FAngleterre et THoUande, de n'entrer en aucune
nögociation avec moi, mais de former et soutenir leur
ind^pendance comme une nouvelle republique garantie
par ces puissanees. La paix avec la Porte a une appa-
rence encore ^loign^e et meme douteuse ; que le Roi de
20*
— 308 —
Prusse nous attaquera an printemps, je le crois sür;
qu'il a fait une alliance avec la Pologne, est un fait;
qu'il suscite des troubles et en Oalicie et en Hongrie,
c'est constatä, ainsi voilk en quoi en sont les choses, et
je ne puis remuer, le travail me coüte doublement, et si
Ton ne pense et poasse a tout; vous savez que rien ne
va chez nous. Enfin je ferai certainement tout ce que
je pourrai, et en vous embrassant tendrement, je vous
prie de me croire, de m^me que votre chfere dpouse,
votre . . .
Le 7 janvier 1790.
an Leopold. Tr^s-chor frfere. J'ai re9U votre chfere lettre, et suis
charmä que votre fils se porte si bien avec sa petita
veröle. De nouvelles il n'y en a point des Fays-Bas,
tout y est en pleine r^bellion, et Ton commence ddjk a
se disputer sur la forme du gouvernement. Pour Luxem-
bourg nous gagnons en attendant du temps pour Tappro-
visionner tant bien que mal, car la chert^ est terrible,
et la defense d'exportation presque gän^rale. Les Turcs
viennent de tenter une entreprise sur Cladowa, pour nous
obliger k lever le blocus d'Orsowa. Je ne sais point ce qui
est arriv^, mais j'en attends k tout moment la nouvelle,
cela influerait infiniment sur la pacification. Si nous ^tions
assez heureux de les repousser, je crois qu'Orsowa
alors capitulerait, au lieu que, s'ils r^ussissent, nous
sommes mal de ce cot^-lk. Les vues hostiles du Boi de
Prusse continuant, je me vois oblig^ de faire marcher
— sca-
nne partie de rarm^e en Boheme et Moravie; le mar^-
chal Laudon en aura le commandement.
Quant k ma sant^, c'est toujours de m^me. La diffi-
cultd dans la respiration ne diminue point, ce qui me
rend extrSmement la vie dure, puisque jour et nuit je
n'ai pas un moment sans gdne et peine.
Adieu, je vous embrasse de mime que votre chfere
^pouse de tout mon coeur. Croyez-moi pour la vie
votre . . .
Le 11 Jan vier 1790.
Trfeß-cher frfere. J'ai recu votre chere lettre; vous ^^^"^^
* ' an Leopold.
aurez vu depuis qu'aux Pays-Bas il n'y a plus rien k
faire, et qu'il faut attendre du temps et des circonstances
des dv^nemens dont on puisse profiter pour s'y remettre
en possession. Ici je suis fort inquiet pour le blocus
d'Orsowa; les Turcs ont assemblä dix mille hommes et
attaquent Cladowa; s'ils y r^ussissent, Orsowa sera
secouru par eux, et nous risquons de perdre dans cette
Saison toute notre artillerie et beaucoup de monde.
Quant k ma sant^, eile est toujours de mime;
avant-hier je fus encore toute la journöe accabW de la
fifevre et de mes douleurs aux reins; je maigris prodi-
gieusement et souffre ddjk beaucoup des os sans chair,
sur lesquels je dois Itre assis toute la journ^e et la nuit.
Adieu, pr^sentez mes respects k votre chfere öpouse,
et croyez-moi, en vous embrassant tendrement, pour la
vie votre . . .
— 310 —
Le 14 janvier 1790.
an Leopold. Trescher frere. Vous recevrez aujourd'hui les objets
de la semaine^ qui ne sont pas bien iuti^ressants. De
Cladowa je ne sais autre chose que ce que Liptay*) est
march^ a rennemi^ mais comment cela aura r^usei, je
rignore. Des Pays-Bas point de nouvelles; tous les
grand-seigneurs quittent, comme Gavre, d'ürsel, Grim-
berghen etc. Quant k ma santä, c'est a peu pres de
m^me; voilk plusieurs fois que tous les seconds jours
j'ai un mouvement febrile, grand abattement et des dou-
leurs aux reins et tout alentour aux hypocondres, ce
qui rend la respiration encore plus courte. Je maigris
et pourvu que je visse un espoir d'une fin quelconque,
je me coirais bien heureux, car de vivre pour souffrir
et (pour Stre**) deshonor^, est au-dessus de tous les
martyres.
Adieu, j'embrasse votre chere ^pouse. Croyez-moi
pour la vie votre . . .
Le 18 janvier 1790.
an Leopold. Tres-cher frere. Pour aujourd'hui la m^me s^cheresse
de nouvelles existe. Les Turcs qui ätaient venus attaquer
Cladowa, ont ^te repoussös par le colonel Liptay avec
*) Anton V. Lipthay. Er starb im Jahre 1800 als Feldmar-
schall-Lieutenant.
♦*) Diese beiden Worte sind von Josephs Hand durchstrichen.
— 311 —
perte de 200 hommes.*) Du reste Orsowa tient encore.
Pour moi j*ai encore eu, malgr^ le quinquina, hier soir
et cette nuit la fievre avec une toux seche, convulsive,
qui m'a tout an^anti. Je viens de me lever et la tete
me tourne encore; avec cela Testomac est gäte et j'ai
un vrai dögoüt pour le manger.
Adieu, je vous embrasse et vous prie de me croire
pour la vie, de m^me que votre chfere ^pouse votre . .
Le 21 janvier 1790.
Tres-cher frere. Les nouvelles de la semaine, vous •^»««pi»
an Leopold.
les recevrez ci-jointes. II n'y a plus de doute que le
Roi de Prusse röussira k faire une alliance avec la Porte,
et qu41 nous attaquera en consöquence de celle-la au
printemps; c'est pourquoi il a fallu tendre toutes les
ressources, et nous partager d'une fa9on, non süffisante,
mais pourtant qui puisse nous mettre k couvert autant
*) An dem gleichen Tage schrieb Rosenberg an den Gross-
herzog: „y. A. R. me fait Thonneur de me dire dans sa derniöre du
4., que je dois tächer de persuader TEmpereur de se dissiper. C^est
bien ce que nous souhaiterions tous, mais h^las, tous nos efforts
sont inutiies, tandis que toutes les causes physiques et morales sem-
blent concourir a lui rendre la vie insupportable. II n'y a que ceux
qui Tapprochent, qui peuvent juger du degre de soufirances qui
affectent continuellement son esprit et son corps. Nous avons re^u
hier la nouvelle de Tavantage que Lipthay a remporte sur les Turcs,
qui voulaient secourir Orsowa. Cette affaire, qui dans le moment
präsent est de tr^s-grande cons^quence, n'a pas r^pandu la moindre
s^r^nitd dans son ame/
— 312 —
que possible des deux cöt^s. Ce que celk deviendra
il n'est pas facile de le pr^voir, mais toujoars notre
Situation est tr^s-critique, et je crois que bien des ann^es
la monarchie ne s'est trouvee dans un si grand danger.
Avec cela ma miserable santd, qui ne me permet qu'avec
les plus grands efforts ä vaquer encore aux affaires,
mais qui m'ote toutes les facultas du corps pour y suffire
tel que le moment et son importance Texigeraient. Avec
cela, je vous Tavoue, qu'avili par ce qui vient de m'arriver,
voyant que je suis malheureux dans tout ce que j'entre-
prends, Tingratitude affireuse, avec laquelle mes bons
arrangemens sont envisagäs et qu'on me traite, car il
n'y a plus a imaginer d'insolence et d'ex^cration que
Ton ne se permette publiquement sur mon compte, tout
cela me rend douteux, je n'ose plus avoir d'opinion et
la faire ex^cuter, je me laisse aller a Tavis, meme que
je ne crois pas le meilleur, des ministres, puisque je
n'ose soutenir le mien et que m§me je n'ai plus la force
de le faire exäcuter et de me disputer. Enfin voilä une
triste Position. Pour ma santä c'est de m§me; j'ai une
petite fievre tous les soirs, j'expectore beaucoup et cela
m'affaiblit la poitrine; la respiration est toujours de
m^me, je ne puis point ^tre couchä ni faire le moindre
mouvement; pour parier et pour dicter il me faut une
peine infinie, toussant d'abord quand je parle et ayant
la voix Steinte. Adieu . . .
— 313 —
Le 25 janvier 1790.
Trfeß-cher frfere. J'ai re9a votre chere lettre et suis an Leopold
parfaitement de votre avis, que dans ce moment il n'y
a pas d'autre parti a prendre que de cöder vis-a-vis de
nombre de demandes, que fönt les Hongrois et qu'ils
augmenteut a mesure qu'ils voient qu'on a peur. Voüs
verrez que la triste Situation de ma sant^, Tätat critique
de la monarchie, la malheureuse r^volte des Pays-Bas^
et la premi^re condescendance qu'on a ddja eue, les
rendront insolents au point de vouloir tout renverser, ce
qui s'est fait, et qu'ils ne sauront plus oü arr^ter leurs
d^sirs. Je souhaite que je me trompe. Pour moi, je suis
toujoure ^galement miserable, et les poumons sont döja
si affaiblis, que j'ai bien de la peine a parier quelques
mots de suite.
Adieu, je vous embrasse, de mSme que votre chere
epouse ...
Le 28 janvier 1790.
Tres eher frfere. Vous recevrez les obiets divers et Jo««p^
** an Leopold.
importants de la semaine. Rien ne nous r^ussit, et nous
avons bien du guignon, mais aussi en sommes-nous en
grande partie cause, puisque je ne puis pas obtenir du
prince Kaunitz qu'il s'explique davantage. Nous aurions
d'abord liommö quelques conditions raisonnables pour la
paix; point du tout, je n'ai pu Temporter, et par notre
fa9on vague de parier, tout le monde reste m^fiant. Si
— 314 —
le temps se perd et le Roi de Prasse avance dans ses in-
trigues, ralliance avec la Porte doit etre d^ja sign^e,
ainsi plus d'esp^rance d'^viter la guerre des deux cot^s.
Cruelle perspective! Tout cela yient en partie de ma
malheureuse maladie, et de ce que je ne suis plus en
^tat de faire par moi-m^me. Dieter est impossible^ et
tout äcrire aussi, ^insi bien des choses, je les dois laisser
faire, quand meme je les dösirerais autrement. La respi-
ration devient depuis quatre jours plus courte, plus
diflFicile encore que ce n'^tait, et a cela se Joint le desa-
gröment que les pieds m'enflent. Point d'app^tit du tout,
forte toux et expectoration copieuse. Adieu, je vous
embrasse de meme que votre chere ^pouse. Croyez-moi
pour la vie votre . . .
Le 4 f^vrier 1790.
Joseph Tres-cher frere. Vous recevez par la poste süre les
an Leopold. * ^
objets de la semaine. II y en a deux de quelque impor-
tance, savoir que j'ai rötabli la Conference pour les objets
majeurs de politique qui actuellement ätaient trait^s par
le seul reförendaire Spielmann*), Cobenzl absent, et le
prince Kaunitz qui, quoiqu'avec une trfes-bonne judicature,
est dans la 80®"® annee et baisse de memoire, mais sur-
tout a adoptö une fa9on de vivre qu'il ne ddrange pas,
et qui ne laisse aux affaires que peu de momens dans
la journöe. Croiriez-vous possible que je ne Tai ddja pas
*) AntoD von: Spielmann.
— 315 —
vu presque deux ans. Depuis que je suis revenu malade
de rarm^e, je n'ai pu aller chez lui, et d'appr^hensiou
il ne veut pas venir chez moi, ainsi il n'y a pas moyen
de discuter une affaire. Ma miserable sante ne me
permet non plus de changer et d'arranger par moi-m^me
les exp^ditions, ainsi la Conference ^tablie et compos^e
du prince de Starhemberg, mar^chal Lascy et Rosenberg
s'assemblera; Spielmann proposera les objets, ils diront
leurs avis; on en formera un protocole que le prince
Eaunitz verra et auquel il ajoutera le sien, et ainsi
cela sera port^ ä ma d^cision. Si je puis; j'assisterai moi-
mSme a ces conförences.
Pour les affaires d'Hongrie, les troubles y ont pris
une couleur trfes-dangereuse. Assembler a cette heure
une diete, eüt 6i6 mettre tout en confusion. N'accorder
que quelques demandes, n'^tait pas süffisant, je me suis
donc ex^cut^, non sans peine, ä retirer toutes mes ordon-
nanceS; et a tout remettre sur le pied, sur lequel c'ötait
du temps de feu mon auguste mere; cela coupe court
a tout, et il faudra voir Teffet que cela fera.
Le süperbe prösent de votre chere ^pouse a Tarchi-
duchesse, contenant toute la layette pour Tenfant, est
arrivö hier ici en trfes-bon ^tat. Tout le monde l'admire,
et je vous prie de lui en faire mes remercimens. Quant
a ma sant^, j'ai encore eu trois nuits horribles, oü k
force de tousser, expectorer et beaucoup de chaleur, je
n'ai pas pu dormir un instant; les forces diminuent.
Adieu. . . .
— 316 —
Le 6 fövrier 1790.
an Leopold Trcs-cher frere. Je profite de votre valet de cham-
bre, afin de faire moins de bruit; pour vous prier
instamment de prendre en müre consid^ration rimportance
de l'objet. Voyant ma sant^ d^pörir de jour en jour,
j'ai assemblö les m^decins qui me traiteut, et ai exigd
d'eux par ^crit une d^claration de ce qa'ils jttgeaient
de mon ötat. Voici roriginal signö par eux« que je vous
envoie.*) Vous voyez donc que le danger et m^me
rimpjossibilitä de gu^rir existe, mais que mSme il peut
mener k une prompte fin. Or dans les circonstances dans
lesquelles se trouve TEtat, toute Stagnation a prendre
des partis döcisifs pourrait §tre du plus grand malheur,
et comment pourrait-on en prendre^ si je n'existais plus
ou ne fus plus en ötat de rien decider. Dans votre ab-
sence envoyer des courriers pour avoir vos ordres, est
un retard qui pourrait etre tr^s-nuisible. Je vous conjure
donc, mon eher hkre, et par amiti^ pour moi et par
devoir, ce que vous devez aux Etats qui vont vous appar-
tenir, et au patrimoine de nos pferes, et celui de vos
enfans, qui a besoin dans ces critiques circonstances
du plus prompt secours, de vous rendre le plus tot que
vous pourrez ici. Cela est essentiell et je ne pourrais
mourir content, que si je sais TEtat pourvu de son chef.
J'entre parfaitement dans les difficult^s et d^licatesses
qui peuvent vous rendre cette arriv^e ici dans ces cir-
constances genante, mais vous avez a faire b moi, k
*) Fehlt,
— 317 —
un ami et a un homme qui regarde Tapproche de sa
dissolution comme un vrai bonheur, et puis les grandes
raisons d'Etat doivent pr^valoir, jointes au devoir. Je
compte done pour sür, mon eher frere, que vous viendrez
ici le plus tot que faire se pourra, puisqu'il ne faut rien
mettre au hazard dans des mati^res si importantes. La
maiBon est k vous et k vos ordres; vous pourrez loger
oü bon vous semblera. Peut-etre que rappartement du
Pape ne vous conviendrait point par mon mauvais voisi-
nage^ et alors les chambres de la Marie ou ceux k
VAlte Hof au premier ätage pourraient vous arranger.
Marquez-en d'avance seulement un mot; ils sont tous
meubläs et pr^ts. Vous connaissez mon coeur, mon
amitiä pour vous ; jugez de la consolation que j'^prou-
verai de pouvoir encore vous voir avant ma mort. Je le
r^pfete, on ne peut rien assurer, mais il n'y a pas de
temps k perdre; le mois de mars est traitre aux mala-
dies. A cette heure, que j'ai tout fait ce que je devais
pour mon Etat, je vous le donne sur votre conscience,
si des doutes ou diflFicult^s vous arr^tent.
Adieu; je vous embrasse et espere de vous voir
bientöt. Pr^sentez mes respects k votre ^pouse et excusez
que je ne lui ^cris point, mais cette lettre m'a d^jk
tant fatigu^ que je ne le puis. Croyez-moi pour la vie
votre tendre frere et ami
Joseph.
— 318 —
Le 8 fövrier 1790.
1 Leopold. Tres-cher frere. Je soppose que votre valet de
chambre sera arriv^ heureusement et voas aura renÜB
ma lettre importante. Je ne puis rien y ajonter; les cir-
constances de ma sant^ sont tonjoars les memes et mes
d^sirs de vous revoir ici. Adieu, je vons embrasse, pr^-
sentez mes respects a votre obere ^poose et croyez-moi
pour la vie votre. . . .
J'ai oubliä de vous marquer que j'ai tout fait pr^-
parer & la chanceUerie d'Etat pour que, des que je
saurais que vous venez ici, je puisse expedier les d^ela-
rations nöcessaires qui vous döclarent mon Coregent tout
comme rimp^ratrice m'avait nommä le sien. Par lä vous
etes d'abord en plein droit de tout ordouner, et votre
signature a ^gal effet au dehors comme au dedans
comme la mienne.
Le 16 Kvrier 1790.
an Joseph. Trescher frere. J'ai regu a la fois vos deux lettres
du 4 et du 6 de ce mois, Tune par la poste et Fautre
par le retour de mon valet de chambre, arriv^ ici le 14.
Vous pouvez bien vous figurer combien j'ai ^t^ frapp^
et p^n^trö de ce que vous voulez bien m'y ^crire, et
du triste et d^plorable ^tat de votre sant^, de tout ce
que vous voulez bien m'y dire de T^tat des affaires de
la monarchie, et p^n^tr^ de toutes les marques d'amiti^;
bont^ et confiance dont vous voulez bien m'y combler.
— 319 —
Vous savez que toujours et toute ma vie j'ai toujours
iii k vos ordres et h, votre disposition en tout et pour
tout. Je sens bien tout F^tat des circonstances et leur
poids; et pourvu que je puisse vous servir, vous ^tre
bon k quelque chose, vous assister et soulager autant
que je puis, vous pouvez bien ^tre assur^ que je le
ferai toujours avec le plaisir le plus sensible k quelcon-
que prix. Dieu veuille seulement que je puisse vous ötre
bon k quelque chose. Vous etes trop bon de penser
m§me k mon logement; je suis ägalement bien partout,
et pourvu que je puisse vous ob^ir et rendre Service,
tout endroit m'est bon et ägal. Je serais parti tout de
suite pour me rendre k vos ordres, si la secousse que
cette nouvelle impr^vue a donn^e k mes nerfs tres-
sensibles, ne m'avait pas tenu incommod^ une couple
de jours, et si j'avais pu partir sans devoir faire iei des
dispositions pour mes affaires ici et Celles de ma famille
si nombreuse. J'ai travaillä nuit et jour et je pars pour
Florence oü je m'arreterai deux jours pour prendre mes
dispositions et arranger mes papiers, et j'espere de
partir le 22 de ce mois, et pour peu que les neiges en
Tyrol et les boues en Lombardie, car la saison est
justement k präsent des plus mauvaises, ne m'arr^tent
pas, je me flatte d'^tre k vos pieds le 1*' de mars. Je
sens combien mon coeur sera dächirä en voyant le
triste ätat de votre santä, mais ma consolation sera
bien grande au moins de vous revoir, de vous tämoigner
mon empressement k vous obäir, et surtout si, pouvant
vous ^tre bon k quelque chose, cela pouvait contribuer
de quelque fayon k vous faire du bien k la santä.
— 320 —
Je V0U8 envoie cette lettre par un homme a moi,
qui va en courrier et restera k Vienne pöur m'y attendre.
Si jamais vous aviez d'autres ordres k me faire parvenir,
je vouß prie de me les envoyer par courrier, et je
prendrai la ronte du Tyrol, et si jamais par quelqu'ac-
cident impr^vu de maladie je me voyais emp^ch^ de
partir le 22, ou arr§t^ en chemin, je vous le ferai sa-
voir par estafette.
J'ose vous renvoyer les papiers ci-joints, et crois
que vous avez fait une glorieuse et excellente r^solution
pour les affaires d'Hongrie, qui seule sera capable de
remettre la näcessaire et importante tranquillit^ dans
öette belle province, surtout dans les circonstances prä-
sentes. Dieu veuille que cela y paeifie les troubles, et
qu'une paix puisse se faire avec les Turcs, qui empSche
et pr^vienne la guerre avec le Roi de Prusse.
Je compte mener . avec moi le ' g^n^ral Manfredini,
un valet de chambre, un domestique et un garQon de
cuisine; j'ose vous en pr^venir. C'est avec la plus vive
impatience que j'attends le moment d^etre k vos pieds.
Le 24 f^vrier 1790.*)
a^j?Be\ Trfes'cher frere. Figurez-vous combien j'ai iii frappö
en recevant hier le courrier que j'ai Thonneur de vous
renvoyer aujourd'hui, avec la nouvelle de Taccouchement
*) Am nächsten Tage, dem 25., kündigt Leopold seinem Sohne
Franz das Eintreffen des Couriers mit der Nachricht vom Tode de«
Kaisers an.
— 321 —
raalheureux et de la mort aussi impr^vue de ma beHe-
fille. Quoique je n'aie eu qne peu de jours le plaisir de
la connaitre^ je lui ^tais bien attach^ par toute Famiti^
qu'elle nous t^moignait- dans ses lettres, et puisqu'elle
faisait le bonheiir de mon fils. Je pr^vois que l'enfant
ne vivra pas non plus, et ayant vu toutes les bont^s
qu'en toutes les oecasions vous aviez pour eile, je puis ais^-
ment me figurer quelle nouvelle inqui^tude cela aura
ajoutö a votre santd, malheureusement ddjä en si mau-
vais ^tat. A toutes ces si justes inqui^tudes de ma part,
se joiiit eneore Timpatience extreme,, avec laquelle j'attends
le moment de vous revoir et d'etre a vos pieds. Aprfes
la re9ue du premier courrier, et vous avoir envoy^ le
mien, je finis toutes mes affaires k Pise et en partis
tout de suite pour Florence, d'oü, apr^s un jour pour
arranger mes papiers, je comptais partir le 20 ou 21
pour aller par la route du Tyrol, mais j'ai 6ti attaqu^
d'un trfes-gros rhume de poitrine, mal de gorge et fifevre
avec des maux de tete, insomnies, des attaques r^pöt^es
de nerfs, qui chez moi m'ont ^t^ d^ja d'autres fois tres-
s^rieuses, et des coliques nerveuses qui m'ont absolument
empech^ de partir. J'ai d'abord pris tous les remedes
plus prompts et forts pour me d^pöcher des nerfs et
coliques; je suis mieux, mais la toux et la fifevre me
continuent, et malgr^ tous les soins, mänagemens et
medicamens je crains qu'il me faudra eneore trois ou
quatre jours avant de pouvoir partir, sans risquer de
devoir rester en route dans quelque mauvais endroit,
Selon que vous le pourrez voir par Tattestat du mödecin
Störck que je vous envoie ci-joint, Lagusius ^tant avec
T. Arneth. Joseph o. Leopold. II. 21
— 322 -
mes enfans k Pise, pour ma justification. Figurez-vous
mes inqui^tudes et mon impatience. J'ai ma voiture
charg^e a ma porte, et des le premier moment que je
pourrai seulement me tenir en voiture sans fievre, je
partirai tout de euite.
J'ose vous envoyer ci-joint les papiers que vous
avez bien voulu me^ communiquer. Puissiez-vous me don-
ner des meilleures nouvelles de votre sant^, et moi en-
suite avoir le bonheur de vous trouver r^tabli, ce serait
la meilleure m^decine possible pour mes maux.
ANHANG.
-*-:^t>-«-
21*
Note
de,S. M. TEmpereur Joseph sur la campagne de Tannee 1788*).
La guerre avec la Forte fat une consequence necessaire
des engagemens pris dans le traite d'alliance qui a ete conclu
entre rEmpereur et rimperatrice de Bussie. Ce traite obligeait
les deux parties que dans le cas que l'une fdt attaquee, que
Tautre trois mois apres declare la guerre a rennemi agresseur
de l'autre, nou avec un nombre stipule de troupes auxiliaires,
mais avec toutes ses forces.
Or le cas de Tagression etait clair. La Porte avait declare
la guerre a la Eussie, avait enferme son ministre, refuse toute
mediation et attaque les Busses a Kinburn ; VEmpereur ne
pouyait donc, sans ^tre parjure a ses engagemens, se refuser
de declarer la guerre ä la Forte.
L'etendue de ses frontieres depuis la mer adriatique jus-
qu'au Dniester rendit la defense de ses provinces, la plupart
peuplees, riches et fertiles, aussi interessante que difficile. II
s'agissait de faire la guerre a toute une nation qui, n'ayant
rien ä perdre, ne cherchait qu'a piller et a saccager la oü la
moindre occasion lui en presentait les moyens. Abandonner
une partie de ces frontieres sans defense pour se renforcer dans
*) ^. pag. 209.
— 326 —
un point, et se porter en pays ennemi, c'etait perdre cent
pour ne gagner que cinq, et c'etait en meme temps se pri-
ver de ses subsistances et du chariage, car tout ce qu'on anrait
abandonne, eüt ete saccage, tandis que la Bosnie et la Servie
n'offraient rien qui püt servir d'equivalent aux pertes qu*on
aurait essuyees en tout genre. Or la guerre etant devenue ne-
cesöaire, rintelligenoe secrete qu'on s'etait m^nagee depuis quel-
ques annees a Beigrade, faisait esperer avec probabilite qu'au
commencement de cette guerre on emporterait d'emblee cette
importante place. La chose etait pres de reusair et paraissait
immanquable, lorsqu'une oonfusion parmi les bateaux qui trans-
portaient les troupes, jointe ä un defaut de decision de la part
des chefs, fit avorter le projet qu'on avait fait d'entrer la nuit
par les portes ouvertes et gard^es par nos affides.
Ce Premier malheur fut presque le signal de tous les
autres qui s'en suivirent.
La guerre declaree, presque tous ceux qui commandaient
sur les frontieres, voulurent se signaler par des entreprises sur
des chateaux qu'ils attaquerent sans dispositions prealables et
saus les moyens n^cessaires, aussi furent-ils repousses. II n'y
eut que le oolonel Beharnik qui eut Tadresse de s'emparer de
Dresnik, sans sacrifier mal a propos du monde*
A Sturlioh, Novi, Dubitza, Gradisca et Semendria on
donna en partie des assauts et en partie on y fit des especes
de Sieges, tous avec perte et sans le moindre fruit.
Tout cela n'etait point fait d'encourager la troupe, aussi
a la jactance des commandans succeda-t-il une inertie qui ^t
qu*on n'osat plus rien entreprendre, hors quelques legeres
escarmouches.
C'est ainsi qu*on parvint au printemps ä la fin de mars.
L*objet principal de l'ouverture de la campagne devant etre le
siege de Beigrade, on preparait tout ä cet eflfet. Une digue
immense fut commenc^e ä Beschania, une autre ä Ferlaswaros et
une troisieme ä Oppova, toutes choisies et tracees par le gene-
— 327 —
ral Zechenter. La preuiiere fut malheureusement prise tout ä
rebcurs de Tobjet auquel on Tavait destinee ; il la fit commen-
cer trop loin de Semlin et par consequent de sa ligne de de-
fense, outre que son profil et sa largeur ^taient colossales, de
fa<;on qu'en en retranchaot la moitie, il en restait eocore une
largeur plus que suMsante. II en etait de m^me des ponts. Cet
ouvrage ne put se terminer que tard et encore ne fut-il point
acheve. £n outre cette digue allait aboutir a la Save, hors
de la Position comme des lignes du prince Eugene, et exigeait
par consequent un Corps detache sur la montagne nommee
Dedina, pour y couvrir les ponts de communication.
Celle de Perlaswaros, apres quelques remuemens de terre,
fut entierement abandonnee et on dut changer la direction a
la digue d'Oppova, autrement on n'aurait pas pu l'achever, et
encore cet ouvrage a dure toute la campagne.
Une autre petite digue et un pont furent construits pres
de Surczin par-dessus les marais. On prit poste a Zabracs de
lautre cote de la Save, en y faisant une redoute pour couvrir
les bateaux qu'on avait sur la Save et qui etaient destines
pour les ponts.
A la fin de mars les Turcs firent de Beigrade la prerui^re
attaque sur les travailleurs de cetle digue. Le general Zechen-
ter fit passer une division d'Esterhazy au travers d'une fLaque
d'eau qui Tempecha d'arriver ä rennemi en ordre; eile perdit
du monde et une vingtaine de houssards rechasserent les Turcs.
Les generaux Zechenter, Gemmingen et Alvintzy etaient pre-
sents et furent etonues, sans faire autre disposition.
A la mi-avril Tinfanterie de l'armce marcha au camp de
Semlin et la cavalerie ä celui de Fanowsce, excepte le corps
destine pour Sabacs qui s^ rendit de ses quartiers, et apres
que les generaux Bouvroy, Mittrowsky, Zechenter, Mikovini*)
*) Ludwig Mikowiny von Breznobinya, erhielt 1790 den The-
resieuorden und starb zwei Jahre spater als Generalmajor.
— 328 —
et Steinmetz*) avaient ete reconuaitre cette place, en pas-
sant avec quelques bataillons et un regiment de cavalerie de
Tautre cot^ de la Save, et quHls Teuren t jugee -tres-difficile, si-
non impossible ä attaquer, son attaque fut neanmoins resolue.
On passa la Save, on investit la Palanque; il y eut quelques
difPerends au sujet de Templacement des batteries. Cependant,
des le Premier jour qu'elles jouerent, le feu ayant ete mis aux
maisons, Ton fit avancer deux bataillons qui, le long de la
Save, remplirent le fosse. d'eau qui etait devant la Palanque;
ils monterent sur les parapets et ouvrirent la porte. Les Turcs
qui s'etaient refugies dans la seconde enceinte, oapitulerent
ainsi que le chateau et se rendirent prisonniers de guerre. Ceci
arriva le 24 avril.
C'etait le moment oü il aurait fallu continuer les Opera-
tions offensives. Beigrade etait mal pourvu de vivres et de
garnison, les habitans de la Servie s'etaient revoltes et decla-
res pour nous, Tarmee turque avait a peine quitte Constanti-
nople, enfin tout paraissait favoriser le siege et la prompte
prise de Beigrade, Le projet etait de faire tout de suite des-
cendre le pont qu*on avait sur la Save pres de Säbacs et de la
passer ä Surczin, oü la petite digue et le pont sur la Petraz-
bora ^taient acheves. Mais on objeeta que la grande digue a
Beschania n'etait point finie, que les ponts sur la Save et le
Danube n*^taient point tous acjieves, que les bataillons venant
d' Antriebe n'etaient point arriv«^s, que Parmee ne s'etait point
encore exeroee avec les chevaux de frise, ni dans la formation
des carr^, enfin qu'il fallait attendre encore.
Pendant le peu de jours que dura l'expedition de Sabacs,
les Turcs firent une attaque sur la digue de Beschania. Le
*) Nicolaus Freiherr von Steinmetz hatte schon im J. 1761
Oberstlientenant das Theresienkreuz erhalten. Er starb im J. 1798
als Feldmarschall-Lieutenant.
— 329 —
general Staader*) qui y oommandait, pla9a le regiment d' Alton,
infanterie, avec tous ses canonR sur la digue au-dela du pont,
et fit attaquer par un detachement d'uhlans les Turos Caches
dans des broussailles et des excavations. Cette cavalerie ayant
et« repoussee sur Tinfanterie, y mit le desordre et Ton se sauva
par le pont qui, devenu trop etroit par tant de chariage qui
i'embarrassait, les garde-fous casserent et beaucoup de monde
fut jete en bas dans Teau. Peu de Turcs qui poursuivirent les
fuyards, en tuerent et en prirent et s'emparerent de quatre
pieces de canons, et sans une vigoureuse attaque qu'une divi-
sion de Samuel Giulay fit sans tirer, seulement avec la bayon-
nette sur les Turcs qui passaient deja le pont, on aurait perdu
plus de canons et de monde. Ils furent forces par la de se
retirer.
Apres cet evenement Ton ne s'occupa plus qua defendre
la tete des ponts de la digue moyennant differentes redoutes,
fleches et grands tambours en palissades qu'on y a faits. L'ou-
vrage m^me n'y fut plus conti nue,
En Croatie le prince de Liechtenstein avait commence ses
Operations pour assieger Dubitza. Parvenü a donner Tassaut
par une breche qui a ete faite, les dispositions furent si roau-
vaises que non seulement ceux qui donnerent Tassaut, furent
repousses avec perte, mais que nous y perdimes m^me deux
canons et que les Turcs, par une sortie s'etant rendus maitres
de nos batteries pour peu de temps, y briserent tous les
refouloirs et instrumens pour charger, et arracherent de la
batterie meme les gabions et saucissons, presqu'en meme temps
qu*une troupe de cavalerie turque accourtit au secours de Du-
bitza, y porta un renfort et en fit sortir en notre presence
les femmes et les enfans, parce que la ville n'avait point et^
*) Joseph Staader Freiherr von Adelsheim. Er starb im J. 1808
als Feldzeugmeister und Commandeur des Theresienordens.
— 330 —
entouree et qu*on n'y avait pas fait de lignes de circoQ-
vallation.
De la cette ca Valerie vonlut brüler le pont sur l'Unna,
mais eile trouva nne division de Graßven, houssards, qu'elle
attaqua et fit plier. Ils vinrent p^le-m^le ee jeter sur le parc
d'artillerie qui, au lieu de tenir ferme et de tirer, se mit en
marche, dont s'ensuivit beaucoup de confusion. La cavalerie
turque repartit enfin, et passant devant notre infanterie sans
la charger, retourna sur les hauteurs qu'elle avait occupees
auparavant.
Le prince de Liechtenstein se croyant battu et hors d'etat
de continuer le siege de Dubitza, repassa l'Ünna et y laissa
seulement le pont avec un retranchement occupe par nos
troupes.
Dans cette position les Turcs campes pres de Dubitza,
nous au delä de l'Unna et la t^te du pont soutenue et disputee
parfois par differentes petites escarmouches insignifiantes, les
choses en resterent plus de trois mois en Croatie, quoique le
prince de Liechtenstein ait requ un renfort de huit bataillons
et un regiment de cavalerie, et m^me rien de signifiant ne s'y
passa plus le long de toute la frontiere.
II en fut de meme en Esclavonie, oü Ton tirait souvent
assez inutilement beaucoup de coups de canon de notre forte-
resse de Gradisca sur la forteresse turque qui est vis-a-vis,
mais il ne s'y passa rien d'interessant, non plus que sur toute
la frontiere.
Tout etait egalement tranquille au Banat. Les corps francs
et les Serviens faisaient des incursions en Servie et y em-
p^chaient les Communications et les transports des vivres quon
destinait pour Beigrade. Toute la partie de la Walliova qui
environne Beigrade, fut egalement ravag^e et beaucoup d'habi-
tans en emigrerent.
Hormis quelques incursions en Valachie assez insignifiantes
tout fut aussi tranquille en Transylvanie, et le prince Cobourg
— 331 —
ayaD<^a de son cot^ vers Chotym et commen^a par investir en
partie cette place.
Teile etait la Situation dans laquelle on resta depuis la
fin d'avril jusquau 26 mai. On s'oocupa seulement a faire un
retranchement tres-considerable autour de Semlin et un autre
8ur la hauteur de Beschania, qui. par les differentes augmen-
tations et l'elevation du profil qu'on en exigea, ne put etre
acheve que plus tard.
A cette epoque et apres bien de la peine tout se trouya
enfin pret pour passer la Save et commencer le siege de Bei-
grade. Selon les dispositions Tarmee devait passer sur deux
ponts la Save ä Zabresch et se porter en trois jours dans les
lignes du prince Eugene.
Bans la disposition et opinion que donna le marechal de
Lasey par ecrit et qui fut connue des generaux, il regarda
cette entreprise comme tres-hazardeuse et de laquelle il y avait
plus de probabilite pour la non-reussite que pour un succes
heureux. II conipara nos forces avec Celles du prince. Eugene,
il releva que nous ne pouvions avoir que tres-precairement un
pont sur le Danube, vu que par les marais rien n'avait ete
prepare, que la digue mal faite et mal tournee nous obligeait
ä occuper une plus grande etendue de terrain que le prince
Eugene qui avait plus de troupes, que la construction des
ligues de circonvallation devait etre faite avec tant de soins
qu'elle exigerait seule un travail de quelques semaines avant
qu'on püt songer ä entreprendre le siege, qu'enfin la saison
dejä avancee rendait plus que probable qu'avant de pouvoir
achever le siege, le Grand -Vizir viendrait au secours de la
place, que nous serions alors entre deux grandes rivieres avec
les seuls ponts de la Save, separes et hors de nos lignes, que
nous auriona une forteresse au dos et toute son armee au
front, que le hasard ^tait trop grand pour n'etre qu'allie, que
rien ne s'etant encore fait du cote des Busses, il n'y avait
aucune di Version, que si l'on remettait ce siege ä l'automne,
— 332 —
il etait plus qne probable que celui d'Oczakow serait termine,
que Chotym tomberait et qae les Rasses avanceraieot vers le
Dannbe avec le prince de Cobonrg, et qne, Joint an corps de
la TransylTanie, cela obligerait le Grand -Vizir a se partager,
qne dans l'arriere-saison les Tnrcs desertaient, qne, les chalenrs
passeesy nons anrions moins de malades, qn'enfin on ponrrait
encore augmenter Uarmee de quelques bataillons pour rendre
le siege plus sür, que les secondes inondations du mois de jnin
nous derangeraient, pendant qn'en septembre il n'y en avait
plus a craindre, qu'il y avait tont lieu d'esperer qne la flotte
Tusse viendrait pour l'automne dans T Archipel, et que tont
cela nous donnerait des facilites, tandis qn'a present il n'y
avait que des difficultes et des risques.
Tonte la gcneralite fut de cet avis d'un oommun cri. On
pretendait qu*un mois etant deja perdn depuis Sabacs, on n'etait
plus a temps dVntreprendre le passage de la Save et le siege
de Beigrade.
La nouvelle qui arriva dans ces entrefaites, qne le mare-
chal Romanzow, loin d'avancer, avait meme repris les quatre
bataillons envoyes au prince de Cobourg pour le blocns de
Chotym, Joint ä toutes les nouvelles politiqnes et Celles de
Constantinople qui constataient que le Grand -Vizir se portait
avec toutes ses forces sur nous, qn'il etait deja arrive a Sophie
et se preparait ä marcher ä Nissa, tout cela fit enfin prendre
la resolution de suspendre la marche et le si^e et d'attendre
ainsi les evenemens et Tautomne.
C'est ainsi que depuis le 26 mai jusqu'au 1 2 aoüt Tarmee
resta dans l'inaction au camp de Semlin. Elle detacha seule-
ment quelques bataillons et deux regimens de cavalerie au
Banat pour renforcer le general Wartensleben.
Les petites attaques sur la digue de Beschania etaient peu
importantes et rien ne se passait egalement en Croatie, a quel-
ques escarmouches pres, de meme qu'en Transylvanie, et le
prince de Coboui^ restait aupres de Chotym qui reoevait des
— 333 —
vivres de la Fologne, jnsqu'a ce qu'enfin le oorps russe sous
le general Soltikow yint se joindre a celui, et alors le blocus
meme da c6te de la Fologne devint plus serieux.
Le general Fabry *), avec un detachement pen considerable,
eut le bonheur de repousser un corps turc et, en occupant
Jassy, d'y prendre le prince de Moldavie, mais ensuite le
Chan s'etant renforc^ et approche, Fabry se retira derechef
de Jassy.
La Suede attaqua en attendant la Eussie par mer et par
terre en Finlande, ce qui fit que la flLotte qui en partie etait
dejä a Copenhague, pour se rendre dans T Archipel, resta pour
cette campagne dans la Baltique.
Le prince de Nassau remporta dans le Liman plusieurs
avantages sur la flotte du Capitaine-Facha, ce qui determina
enfin le prince Fotemkin d'avancer vers Oczakow, et le mare-
chal Komanzow passa le Dniester.
Le mois d'aodt fut Tepoque qui rendit la campagne plus
active.
Le Grand -Vizir, apres avoir fait differens d^tachemens
en Yalachie coutre la Transylvanie, apres avoir repousse les
Tolontaires des defiles qu'ils occupaient sur les avenues de Bei-
grade, et avoir fait parvenir des troupes et des vivres dans
cette ville, se porta avec toutes ses forces de Nissa a Widin
et avanqa un corps ä Cladowa et k Gzernetz sur les deux bords
du Danube, ayant Orsowa devant lui.
A mesure qu'on apprit ä Tarmee que les Turcs rassem-
blaient leurs forces ä Widin, ce qui fut longtemps douteux,
les nouvelles etant fort contradictoires et n'etant pas aise d'en
avoir de süres, Ton fit passer plusieurs bataillons au Banat et
des regimens de cavalerie qui renforcerent par echelons le corps
du general Wartensleben, qui de son Icote fit marcher quatre
*) Michael von Fabri, 1739 geboren, erhielt 1790 das Theresien-
kreuz und starb im J.~ 1809 als Feldmarschall-Lieutenant.
— 334 —
bataillons et un regiment de cavalerie en Transylvanie, pour
mieux couvrir la vallee de Hatzegg qui ^tait la plus menacee
des le commencement d'aoüt. LVnneini tenta ensuite d'attaquer
presque toutes les entrees de la Transylvanie; dans plusieurs il
repoussa les Imperiaux avec avantage, leur prit des canons et
fit des prisonniers, mais de chaque entree, hormis de celle du
Vulcan qu'il trouva delaissee au mois de septembre, il se re-
tira apres Pattaque, soit quMl ait eu de Tavantage ou qu'il alt
ete repousse avec perte.
Le 7 aoüt la tete de Tarmee du Grand -Vizir entra de
Czernetz sur Schupaneck. Cet ev^nement qui decida la cam-
pagne, exige un detail.
Pour defendre le Banat du cote de la Valachie et d'Or-
sowa, le general Zechen ter, envoye expres en 1783 pour en
examiner les avenues et positions, en choisit une au con-
fluent des petites rivieres Czerna et Bellareca. Le lieutenant-
colonel Turati fut charg^ d'en faire le plan et les details ; le
tout fut remis au g^n^ral "Wartensleben, qui des le mois d'avril
occupa oette position jusqu'au mois d'aoüt, d'abord avjec quatre
bataillons et trois divisions d'houssards seulement. II y fit dif-
ferens changemens, croyant de l'am^liorer, mais en oocupant
avec un tambour en simples palissades une grande hauteur qui
se trouvait devant Taile gauche de la position, et en appuyant
k cette hauteur, qui ^tait un hors d'oeuvre, une traverse en
batterie qui fermait toute la vallee, et en ne la fermant point
en arriere dans la position m^me, celle-ci fut toute soumise
au aoutien de ce seul tambour, isole de tout autre soutien, fait
en pures palissades sans foss^, et ppuvant seulement contenir
une division d'infanterie.
Le Corps de Wartensleben s'accrut peu ä peu dans la
vallee de Mehadia a onze bataillons, avec tout le regiment des
Valaques, les chasseurs et tireurs de tout le Banat, et six divi-
sions de cavalerie. Outre cela un bataillon avait ete plac^ par
Wartensleben sur la montagne au-dessus de la caverne de
— 335 —
Veteran! qui avait ete retranchee et arrangee pour des batte-
riea, afin de fermer aux Turca et a leurs bateaux le passage
du Danube.
Schupaneck et Vieux - Orsowa, un village au Danube,
avaient toujours ete regardes comme impossibles a soutenir
contre une attaque, et ils ne füren t occupes au printemps que
pour retenir les petites parties qui auraient voulu faire des in-
cursions de la forteresse d'Orsowa. Avant que l'arm^e n*en fut
approchee, lee ordres les plus precis, le plus souvent reiter^
destinaient le r^giment des Valaques et le bataillon de de Vins
qu'on y avait plac^s, ä ne s'engager ä rien dans cette souri-
ciere, mais ils devaient etre places dans les montagnes et les
bois de TAlmas, afin d'emp^cber derriere de bons abatis dans
ce terrain, sans cela tres-difficile, aux Turcs a y percer, et par
la ä ne pas tourner la position du gen^ral Wartensleben, ni
le bataillon place sur la montagne qui tenait ä la grotte.
Ces ordres, loin d'etre observes, furent entierement negli-
ges, et rien ne fut prepare d^avance dans les bois et les mon-
tagnes de r Almas. Le general Wartensleben ne tint point la
main a ce que le general Papilla executait les ordres qu'il
avait ; il vit sous ses yeux faire des retranchemens ä Vieux-
Orsowa, absolument contraires au bon sens et a Tobjet. II vit
la maison de quarantaine arrangee avec des echafaudages, lors-
qu'elle devait etre delaissee ; enfin il vit entasser un maga-
sin assez considerable, etablir des fours ä Scbupanek, lors-
qu'il etait defendu de soutenir cet endroit. La veille memo
eucore, sachant un gros corps turc deja rassemble a Czernetz
et voyant beaucoup de bätimens armes arrives ä la forteresse
d*Orsowa, il y fut et ne fit point des dispositions analogues
aux ordres qu'il avait, ou il les abandonna au general Papilla,
un vieillard imbecile.
Enfin le 4, au matin, Papilla fut canonn^ de trois batte-
ries turques a la pointe du jour, et malgre cela il ne prit
point öncore son parti, mais se contenta ä renvoyer les canons.
— 336 —
Une troupe de cavalerie turque arriva ; il fit defiler rinfanterie
par deux hommes sur un sentier le long des yignobles. L'in-
fanterie turque passa le Danube en sa presence avec des
bateaux, il defendit de tirer sur eile et, loin de prendre le
chemin des montagnes et des bois de 1' Almas qui etait conforme
a l'ordre qu'il avait, il enfila toute sa troupe dans des defiles
qui menent vers Mehadia. Elle fut attaquee, entouree et reo-
versee ; on perdit treize cauons, nombre d'officiers et de sol-
dats. Le regiment de Eeisky qui se trouvait place sur le che-
min de Mehadia entre Schupaneck et la position du corps de
Wartensleben, voyant cette deroute, lächa egalement pied et
s'en vint courant ä une division de cavalerie de Württem-
berg qui arreta les poursuites des Turcs et fit railler derriere
eile les fuyards.
Cette affaire fut la premiere cause des evenemens facheux
qui suivirent. L* Almas etait ouverte, et la montagne au-dessus
de la grotte de Veterani, ou etait le bataillon de Brechain-
ville, n'avait plus son flanc couvert. Aussi les Turcs firent-ils
tout de suite remonter un assez grand nombre de leurs bäti-
mens armes, mais se trouvant repousses par les batteries de la
grotte, ils resolurent de Temporter ä tout prix, et pour y
parvenir, ils se deciderent d'attaquer le bataillon de Brechain-
ville qui occupait le sommet de la montagne. On y avait fait
un abatis, mais comme sa capacite etait grande, le general
Wartensleben y avait fait construire plusieurs redoutes et tam-
bours qui allerent jusqu'au nombre de onze, de faqon que tout
le bataillon etait morcele et qu*il n'y avait de vraie force
nulle part ; aussi Tevenement prouva-t-il que tous cea petits
tambours durent se replier et que dans un des plus granda,
oü toute une division se porta, eile y fut forcee et hachee en
pieces apres une longue resistance. Les * deux autres divisions
eloignees dans une autre redoute prirent le parti de descendre
le sentier dans la grotte avec le major Stein. L'etinemi neue
y prit sept canons.
— 337 —
Le prince de Liechtenstein ayant et^ oblige par' maladie
de quitter le commandement du corps en Croatie, le mar^hal
Laudon en fut charge, et avant son arriv^e le general de Vins
passa rUnna ä Dubitza, attaqua le camp turc qui fut pris,
de meme que leura batteries, desquelles Tennemi fut reppusse.
Neanmoins ceux qui campaient sur la montagne, nomm^e
TAgino Berdo, y resterent, ce qui fit qu'on ne put entreprendre
le si^ge de Dubitza. Ils tenterent mßme une attaque, pü, une
division de Waldeck, cavalerie, ayant lache pied, on perdit
deux Canons.
Le marechal Laudon ä son arrivee ordonna de commencer
le siege qui a eu du succes, car apres avoir fait sauter une
mine, les Turcs capitulerent et se rendirent prisonniers de
guerre, ce qui entraina aussi la retraite de ceux qui etaient
sur l'Agino Berdo. Le marechal Laudon se decida ensuite
d'aller assieger ITovi, en meme temps que, pour faire une
diversion, il fit passer la Save au colonel Quosdanovich qui
attaqua et chassa un petit camp turc qui ^tait a Gradisca.
La nouvelle etant parvenue ä la grande armee campee a
Semlin, que les Turcs sont entr^s au Banat, et que, par la
defaite du general Papilla, le plan de la defense y avait ^t^
entierement derang^, il fut resolu de marcher avec une partie
de Tarm^e au Banat. Apres quelques jours qu'exigerent les
dispositions pour les vivres, Tarmee se partagea ; 21 bataillons,
3 regimens de cavalerie, 3 divisions de houssards et autant
d'uhlans resterent ä Semlin, Beschania et ^Boliefze ; le reste
consistant en 14 bataillons de fusiliers, 7 bataillons de grena-
diers et en 5 regimens de cavalerie avec une division de hous-
sards, se rendit au Banat, oü dix autres bataillons, venant
d' Antriebe par eau, suivirent successivement. La marche fut
acc^leree et on atriva ä Weiskirchen apres ävoir fait un seul
sejour ä Kubin.
Dans cette position et plus avant vers Saska, tenant les
gages des debouch^s de T Almas et de la Clissure avec le Da-
T. Arneth. Joseph n. Leopold. II. 2^
— 338 -
nube, l'annee voulait rester, rafralchir, degager la groite de
Veteran! , peut-etre m^me en attaquant les Turcs qui occupaient
le sominet de la montagne, d'ou ils ne cessaient de rouler des
pierres, des bombes et des mati^res combnstibles snr les batte-
ries et sur le retranchement de la grotte. On pensait d'envoyer
qnatre bataillons de renfort au general Wartensleben, qui
m^me etait dejä en marche, et comme le principal objet des
Turcs devait etre de se procurer la navigation du Danube et
de percer dans la plaine, on croyait d'eventer plus sürement
leurs projets en y restant en force. Outre cela la position du
general Wartensleben ^tait reput^e inattaquable et lui-meme
la jugeait teile. Apres qu'il eüt soutenu et repousse une attaque
des Turcs, composes pour la plupart de cavalerie, mais qui fut
plut6t une reconnaissance qu*autre chose, il donnait les assu-
rances les plus positives de ne jamais penser a la retraite et
que m^me il ne le pouvait pas, vu sa position, ayant un grand
defil^ dans Mehadia au dos. Quelque peu de jours s*etant ecou-
l^s et les Turcs se renfor^ant toujours dans la vallee de Schu-
paneck, le general Wartensleben ne cessa de soUiciter qu'on
marchat avec toute l'armee ä lui, et il promettait meme les
avantages les plus sürs d'une attaque qu'on pourrait faire sur
le Grand -Vizir, mais sans en expliquer la possibilite ; il declarait
que tout renfort ^tait inutile et qu'il y fallait toute Tarmee.
Les quatre jours qu'on passa pour faire les arrangemens
des vivres a Weiskirchen, donn^rent occasion de bien recon-
naitre en ayant les d^bouch^s des montagnes et le chemin qui
longe le Banube. On trouva que moyennant des abatis et quel-
ques ouvrages, un petit corps m^me pourrait s'y soutenir contre
une armee. Apres les sollicitations si yiyes de la part du
general Wartensleben on se d^cida enfiü ä laisser le lieutenant-
general Brechainyille avec neuf bataillons et quatre divisions
de cavalerie dans ces gorges, et le reste de l'arm^e qui avait
d^jä fait marcher deux bataillons de renfort au corps de War-
tenslejben, se mit en marche au travers des montagnes par le
— 339 —
plus court chemin, non sans devoir surmonter bien des difd-
cultes, pour arriver ä Caransebes et de la se porter en avant
yers Mehadia. On crut pouvoir le faire ayec d'autant plus de
sürete, que du temps que Tarmee ^tait a Weiskirchen, eile
avait fait ravitailler sans peine la grotte de Veteran! tant en
vivres qu'en munitions ; il fallut six jours pour cette marche.
Pendant ce temps les Turcs renouvelerent pendant deux jours
de suite leurs attaques sur le tambour, comme on l'a dit plus
haut, qui etait sur la hauteur ä gaucbe en avant de la posi-
tion de Wartensleben. La defense qu'y fit un detachement du
regiment de Lattermann, fut belle toutes les deux fois, enfin
les palissades ayant ete ruinees, on fut oblige, de Tabandonner.
Par lä les Turcs purent prendre en dos la traverse qui s'ap-
puyait a cette montagne, et quoiqu^ils canonnaient et bom-
bardaient depuis quelques jours le camp sans effet, cette prise
derangea tout, et comme on avait rendu toute la position d^-
pendante de ce seul tamböur et de la traverse, les bras tom-
berent et la decision si souvent annoncee de vouloir s'y d^fendre
jusqu'au dernier homme, cbangea tout d'un coup dans Tid^e
de devoir, en se retirant, sauver au moins une partie, puis-
qu'on s'y croyait sacrifie. Avec cela la troupe avait ete tenue
conti nuellement pendant plusieurs jours sous les armes.
Ce changement fut si subit que dans le rapport que le
g^neral Wartensleben envoya le matin par son adjudant Mer-
veldt*), il ne parlait que de vaincre ou mourir ; il voulait
meme faire venir de Temeswar des pieces de batteries pour
faire taire Celles de l'ennemi, et le m^me jour Vaprfes-din^e il
annonqa sa retraite decidee pour le m^me soir ä l'entree de la
nuit. Ce changement inattendü et qu'on ne pouvait prevoir,
fut d'autant plus frappant que Parmee n'avait plus que deux
*) Maximilian Graf Merveldt, damals Rittmeister, erhielt im J.
1794 als Oberstlieutenant das Theresienkreuz und starb im J. 1815
als General der Cavallerie und Botschafter in London.
22*
— 340 —
marches a faire ponr arriTer dans 1a yallee a Caransebes,
qu'elle etait enfourree dans les montagnes, que le general
Wartensleben annonqait sa retraite pour tres-dangerense, et
que peut-etre il serait detruit avec son corps ; et cette nouvelle
ne parvint a Tannee que lorsque la chose etait faite.
Par bonheur que la retraite de Wartensleben fut assez
heureuse, et que son arriere-garde, composee du regiment de
Württemberg dragons, de trois divisions de houssards de GrsB-
yen et du bataillon de Stein, tint bon a plusieurs attaques de
la cayalerie turque et les repoussa, pendant que le corps
gagna le pont et la hauteur de Feniscb, oü il se forma ud
quarre et y resta trois jours sans ^tre attaque.
Cet evenement inattendu derangea pour la seconde fois
les projets de l'armee. Elle etait Tenue dans la vallee de Me-
hadia croyant trouver le corps de Wartensleben dans sa posi-
tion. Cetait uniquement dans cette vue qu'elle ayait quitte
l'objet si essentiel du Danube, et presqu'au moment ou
eile devait arriver, Toila la position abandonnee, la vallee
ouTerte, TAlmas abandonnee et par consequent toutes les me-
sures devenues inutiles. II fallut donc reoourir ä un troisieme
projet, et apres avoir reconnu le terrain et sojourne dem
jours a Caransebes par rapport aux vivres et autres disposi-
tions, l'armee se rendit sur les hauteurs entre Illoya et derriere
le rayin d' Armenisch, tenant aux deux parties des bautes moü-
tagnes, et fermant ainsi les chemins assez difüciles qui passent
entre elles. Le corps de Wartensleben se joignit a l'armee, et
moyennant qu*on occupa ayec grand soin tout«8 les montagnes
les plus inaccessibles, on paryint a reformer une nouyelle
ligne de defense qui, conjointement ayec le general Brecbain-
yille, aurait contenu l'ennemi dans les montagnes, couyert les
ayenues de la Transylyanie, les mines, la piain e et le Danube.
Le Grand -Vizir ainsi resserre n'aurait pas pu subsister, puis-
qu'il faisait brüler toutes les habitations et les fourrages.
— 341 —
Les deux premiers jonrs que Farmee r^unie avec le Corps
de Wartensleben occupait cette position» on n'ayait auoune
nouvelle de l'ennemi qui etait encore tout concentre a Mehadia
et Schnpaneck. On forma le projet de marcher a lui et de pas-
ser les defiles de Terregova et de se poster au pont de la
Bellareca ä une lieue de Mehadia, ou de Fattaquer dans Meha-
dia meme, mais les geoeraux Wartensleben et Vezay ainsi
que Zechen ter qui conuaissaient en detail le terrain, d^clarerent
tous rimpossibilite d'une pareille attaque, vu qu'il fallait pas-
ser par le defile de Mehadia et qu*il n'y avait pas moyon de
le tourner d'aucun cote, ni d*en deboucher eu presence de
Tennemi. On dut dono renoncer a ce projet. Peu de temps
apres Tennemi parut avec environ six mille hommes, tous ä
cheval ; il reconnut notre position, et a cette occasion il y eut
une petite escarmouche entre les avant-postes. II se campa
au dela du second ravin vers Fenisch. On projeta de l'y atta-
quer ; toute la disposition etait faite pour le lendemain, et
m^me tous les g^neraux se trouvaient assembles sur une hau-
teur oü Ton fit voir ä un chacun ce qu'il aurait a faire, lors-
que dans le meme moment et en leur presence Tennemi chan-
gea sa position ; il lui arriva en meme temps un gros corps
d'infanterie avec du canon ; il se posta plus en avant et occupa
les hauteurs qui dominent le ravin d' Armenisch et sur les-
quelles on avait voulu se former. Cela fit suspendre Tattaque
projet^e jusqu'au lendemain ; les circonstances ^tant changees,
elles exigeaient d'autres dispositions.
Sur ces entrefaites arriva la nouvelle que la grotte de
Veterani avait capitule aprfes 21 jours de defense et, quoique
desarm^e, la troupe n'avait point ete faite prisonniere de guerre,
mais eile revenait libre ä l'arm^e.
Le general Brechainville qui avait eu la commission de
tacher de la ravi tailler par le Danube en vivres et en muni-
tions, et m^me de d^loger l'ennemi de la montagne avec les
forces qu'il avait, jointes aux 1600 hommes du corps franc
— 342 —
qui lul avaient ete enyoyes, non seulement il n'y paryint
point, mais il ne le tenta pas meme, qudiqu'il etait inform^
des besoins urgens de la garnison de la grotte, qui, se yoyant
Bans secours, dut abandonner ce poste avec neuf pieces de ca-
non qui y ^taient.
Le Danube etait par cons^quent ouvert aux bätimens
arm^s de l'ennemi jusqu'ä la montagne, nommee TAlibek qui,
occup^e par le regiment de Vins, en d^fendait encore le
psissage. Le colonel Lauer*) des ingenieurs^ charg^ des ouvrages
en abatis et retranchemens ä faire aupres du general Brechain-
ville, avait propos^ la • oonstruotion d'une forte batterie pres
d'un endroit, nomme Papagay, ou le Danube est fort serre et
dtroit entre des rochers, mais le general ne la youlut point
et renyoya mSnie les pieces de batterie qui etaient a TJjpalanka
et qu'on y destinait.
Cette d^sagr^able nouyelle fit reit^rer les ordres au gene-
ral Brechainyille de defendre les postes qu'il ayait ; il r^pon-
dit de m^me que le colonel Lauer, que l'ennemi ayant laisse
le temps de former les abatis et retranchemens necessaires, il
pouyait attendre Tattaque d'un ennemi fort superieur en nombre,
qu*il le receyrait m^me ayec ayantage dans ces postes, et que,
hormis qu'un corps turc longeant la riye droite du Danube,
ne trouydt moyen de le passer derriere lui, ou que l'armee se
retirät et donne par lä ^galement jour a l'ennemi de yenir
sur leurs derri^res, il ne craignait rien d'une attaque en front
dans sa position.
Dans cette assurance Tarmee restait tranquille a lUoya.
Les Turcs essay^rent un matin de percer par le jQ.anc droit
de la Position le long de la Temes ; ils grimperent ayec leur
cayalerie les plus hautes montagnes, la canonnade fut forte et
*) Franz Freiherr von Lauer, später Commandeur des Theresien-
ordens, £r starb 1803 als Feldzeugmeister,
— 343 —
les'houssards attaquerent la cavalerie turque qui, apres quelque
perte, fut obligee de se retirer. Pendant cette attaque les Turcs
canonnaient et fusiliaieht sur le corps de Wartensleben^ et un
gros Corps de cavalerie ayait l'air dans l'eloignement de vouloir
tenir l'arm^e et surtout sa gauche en echec.
Depuis ce jour l'ennemi qui se renfor^ait tous les jours,
forma trois batteries qui dans nne tres-grande distance et a
tonte volee canonnerent et bombarderent pendant plusieurs
jours notre droite qui formait le corps de Wartensleben, et
malgre l'eloignement il y ent pourtant journellement des sol-
dats tues et blesses an camp. On fit quelques traverses, mais
elles servirent peu, puisque tous les coups etaient tir^s en
parabole. Ce fut alors qu'on forma un nouveau projet d'at-
taque et que Ton y disposa m^me tont ; pres de l'executer, les
gen^raux qui en etaient chargäs, ddclarerent dans un conseil
qu'ils ne yoyaient de possibilite d'y reussir par les raisons
suivantes :
D'abord il n'y ayait qu'un seul ohemin qui traversait le*
rayin d'Armenisch ; il le fallait passer en presence de l'ennemi
en defilant six hommes de front. Paryenu a l'autre cote, on
ne pouyait arriyer sur les montagnes oü Etaient les batteries
de Tennemi, que par derriere. On ne pouyait opposer de notre
cote des batteries pour faciliter le passage ayec effet, puis-
qu'elles auraient du tirer de trop bas en haut, ce qui les rend
presque nuUes. La formation de Tautre c6t^ du rayin etait
encore entrecoupee d*un grand fond, et il fallait commencer
par en chasser l'ennemi qui y ^tait.
C'etaient la les difficultes qu'aurait eues la colonne de
l'armee, oommandee par le marechal Lascy lui-m^me, qui de-
clara neanmoins qu'il ferait l'impossible, mais qu'assaillie pen-
dant ce defilement par la nombreuse cavalerie turque sous le
feu de leurs canons, il ne pouyait repondre de ce qui en arri-
verait.
— 344 —
Les grenadiers deyaient attaquer sur la gauche, mais poor
les faire passer aveo de Tartillerie, ii aurait fallu trayailler au
moins trois heures a la t^te de la colonne et en face de Ten-
nemi, pour leur frayer une descente et une montee hors du
ravin.
Le Corps de Wartensleben qni deyait faire la colonne de
la droite, ce g^neral d^clara ^tre dans Timpossibilite de mon-
ter a Pendroit indiqu^, qu'il ne pouvait attaquer la batterie
qui lui ^tait opposee, puisqu'il aurait le gros de l'ennemi en
flanc, qu'attaquant la ligne de Tennemi, il serait enfile par la
batterie turque, qu'il devait donc attendre ce que ferait la co-
lonne du centre, et qu'il ne pouvait avancer que lorsqu'elle
aura repouss^ Tennemi des hauteurs.
La difficult^ du defil^ avait äejk fait d^cider de laisser
la plus grande partie de l'artillerie en arriere, vu le train
qu'elle exige ; il fallait y laisser trois bataillons de garde. On
ne savait ^galement quel usage on devait faire de la cavalerie;
pour la faire passer en avant, c'etait non seulement Texposer
toute seule dans un defile, mais on devait craindre que, rejet^,
eile ne renverse Tinfanterie qui devait le passer. La laisser en
arrifere, c'etait s'en priver, et avec cela le terrain etait si peu
favorable k ses Operations, qu'except^ des Turcs, dont chacun
agit pour soi, une masse de cavalerie ne pouvait y manoeuvrer
en Corps.
Toutes ces di£fi.oult^ ne ürent que retarder la decision
pour une attaque, et on resta toujours r^olu n^anmoins de
Tentreprendre a tout prix, d'autant plus que Tennemi com-
men^a a prendre poste de notre c6te du ravin, ce qui en
aurait facilite Texecution, et lorsqu'on y ^tait decide pour la
troisieme fois, arriva la nouvelle aussi inattendue qu'imprevue,
que par un m^entendu de commission verbale le major O'Keilly *)
et le g^neral Aspremont avaient quitte leurs postes le long da
*) Andreas Graf O'Reilly. Er starb, neunzig Jahre alt, 1832 als
Qeneral der Cavallerie.
— 345 —
Danube, et cela sans yoir approcher l'ennemi ou avoir tir^ un
coup de fusil.
Le general Brechainville, sans y porter remMe et annon-
^ant en meme temps que ce n'^tait qu'une tneprise, quitta
neanmoins ses postes et se retira dans la plaine ä Weiskirchen,
comme si la necesslte I'eüt exige, tenant encore Ujpalanka et
les avenues de Moldava.
Cet ev^nement renversa tout d'un conp le plan qn*on
avait pris. Le Danube ^tait libre, les ddbouches etaient ouverts
k Tennemi, les mines abandonnees en m^me temps qu'il pou-
vait se porter ä Caransebes sur les derrieres de Tarmee et lui
interoepter les vivres et toute communication par la vallee de
Caraschowa ou Tarmee venait de passer.
On ordonna tout de suite au general Brechainville de ta-
cher de reprendre sa position, d'attaquer le peu d'ennemis qui
s' Etaient portes ä Moldava. Mais loin de le faire, il resta cinq
jours sans donner de rapport. II ne tenta rien, n'examina rien
et laissa Parm^e dans l'ignorance et dans Vembarras cfuel de
ne pas savoir ce qu'il ^tait devenu, et de devoir craindre que
rennemi avait dejä pris poste entre lui et Tarm^e etintercep- '
tait ses rapports ; mais point du tout ; il n'y avait point d^
Turcs a voir et il avait seulement neglige d'ecrire. Le prince
de Reuss*), adjudant de S. M., fut m^me envoye par Temes-
war pour tdcher d'avoir de ses nouvelles ; il le trouva a Weis-
kirchen, ou dans la crainte, comme il disait, d'^tre entour^,
il ^tait d^cidd ä rassembler ses troupes et a marcher ä Wer-
schetz et de la^ä Temeswar, si l'ennemi le poursuivrait.
Ce triste ev^nement renversa tout et mit les Turcs sans
coup f^rir en possession de la moitie et de la plus belle partie
du Banat, de meme qu il leur ouvrit le Danube et par conse-
quent les moyens d'amener a Beigrade tout ce qu^ils voulaient,
et d'y envoyer un armement considerable de bateaux.
*) Heinrich XV., Fürst zu Reuss-Plauen, damals Oberst, Er
starb als Feldmarschall im J. 1825.
— 346 —
Le general Lilien, plac^ a Pancsowa, et qui avait 868
troupes jusqu'a Dubowatz , se retira egalement a cette nou-
velle, quoiqu'il n'y avait pas encore d'ennemi dans la plaine,
mäis la retraite du general Breohainville lui en feiisait sup-
poser un nombre tr^s-considerable ; 11 marcha a Oppova et de
la se porta derri^re la Temes a Padosch.
Comme il n'y avait plus de remede, que huit jonrs etaient
^coul^s depnis que les debouch^ avaient ete abandonnes, et
que par consequent Tannee ne pouvait plus sans risque rester
plus longtemps a lUova, on se d^cida de se retirer sur Caran-
sebes, quoique la question füt encore mue, s'il ne fallait pas
pour un demier remede risquer d'attaquer le Grand -Vizir.
Mais par la raison que^ si on le battait, on devrait n^nmoins
marcher en arriere, et que, si on l'etait, vu la difficulte de
l'attaquer, la retraite eüt ^t^ tres-difficile, Ton renon^a ä ce
projet, et ce fut du 20 au 21 septembre le soir que l'armee
marcha sur deux colonnes en arri^re* A l'une les grenadiers
et cinq regimens de cavalerie formalen t Farri^re-garde, et a
l'autre le corps de Wartensleben avec deux regimens de cava-
lerie. On parvint en bon ordre et sans que Tennemi s'en füt
aperqu, jusque dans la plaine sur le grand chemln. Alors une
des colonnes arr^t^e, il s*eleva un bruit ä Parriere-garde du
Corps de Wartensleben ; on tira quelques ooups, une division
de Württemberg fut par lä mise en . desordre et se jeta sur
Tinfanterie ; le desordre devint general parmi cette colonne ;
on depassa le chemin a gauche vers les montagnes ; tout fut
p^le-m^le, criaillerie, et des coups de fusil qu'on tirait partle
en Tair, partie les uns sur les autres, aoheverent de rendre
toute voix qui voulalt remettre Fordre, Infructueuse ; il fut
meme tir^ un coup de canon au travers de oette masse d'hom-
mes. Pen a peu on rallia partout la troupe, mais Partillerie,
les bagages, tentes et marmites de l'armee, les voitures des
chevaux de frise furent renvers^ en pleine deroute, casses et
perdus en grande partie sur le chemin, La moitie des tentes
— 347 —
et marmites de toute Tarmee a et^ ^gar^ et perdue avec trois
Canons et douze caissons.
Le bruit de ce d^sordre parvint aussi a la seconde co-
lonne ; il y eut bien quelques arrets dans la marcbe, car des
bataillons formerent des carr^s, mais il n'y eut point de oon-
fusion comme k la premiere, et la marcbe fut ensuite con-
tinuee.
Malgr^ les peines qu'on s'est donnees, il a ete impossible
de parvenir k decouvrir d'oü est venue cette fausse alarme. II
est probable que le corps franc et les Yalaques, meme en
tirant sur nos postes et patrouilles, en ont ete la premiere
cause.
Le peu de discipline qui regne dans la troupe, surtout
au regiment de Durlach qui a et^ le premier a fair et a tirer,
et qui a eu le plus de monde egar^, Joint aus embarras de
la nuit, d'une retraite et des bagages qui' n'ayaient pas pris
assez t6t les devants et embarrassaient les colonnes, tout cela
ensemble a occasionne cet eyenement aussi facheux qu'impre-
voyable, et dont les suites ont ete encore plus affligeantes.
On arriva enün au camp pres de Caransebes. Cette colonne
ne fut point harcelee; Tautre, oü etaient les grenadiers, fut
poursuivie, mais eile se retira en bon ordre, sans que Finfan-
terie ait et^ entamee. La cavalerie attaqua et fut attaquee a plu-
sieurs reprises par rennemi, mais eile continua sa marcbe, et
quoique par les derniers qui entrerent un peu en d^sordre a
Caransebes, Tendroit fut allume par les Turcs qui les suivaient,
ils n'oserent poursuivre plus loin et se retirerent le meme soir
k Szlatina.
Le lendemain, avant le jour, Tarmee marcba ä Sakul sans
plus voir d'ennemi ; eile y fit sejour et se rendit de lä au
camp devant Lugos sans ßtre poursuivie, laissant ses avant-
postes a Sakul, oti Tennemi yint une fois les reoonnaitre sans
les pousser.
— 348 —
£n attendant le marecbal Laudon oontiniiait le si^e de
Noyi et, malgre une breche falte et des mines aautdes, la gar-
nison repoussa avec perte an assaut qa*il avait fait donner,
de fa^n qu'il faliat continuer le siege, en faisant de nouTelles
batteries et des mines, et il rechassa nn petit corps tnrc qni
youlait yenir au secoars de la place. Enfb, apres un second
assaut et qu'on se füt löge sur la breche, la gamison se ren-
dit ä discretion.
Le prince de Coboni^ yit enfin cooronn^e sa patience ä
bioquer et a canonner Chotym. La gamison qui capitula, ne
fut pas meme falte prisonniere de guerre, et on lui aocorda
toutes les condltlons qu'elle pouyalt desirer, m^me de rester
encore dix jours dans la place.
Cet eyenement fut amene par la reprlse de Jassy que le
lleutenant-colonel Köpiro obtlnt en repoussant un corps turc
qui couyrait cette yille, et par la famine qui etait a Chotym
ou le feu ayalt consum^ ayant sept semaines les magaslns de
ylyres. Des lors, si l'on n'ayalt pas tant marchande ayec ces
gens-la, 11 aurait et^ probable qu'lls se seraient rendus, mals des
tr^es relt^r^ qu'on leur accorda, les mirent en ^tat de re-
contlnuer leur defense, car IIb eteignirent le feu et en sauyerent
encore beaucoup de gralns a moltie brüles seulement, dont lls
ont y^cu tont ce temps. Si Ton edt occupe Chotym a la fin
de julllet, oü cet Incendle arriya et que toutes ces trdyes
s'ensuiylrent, l'ayantage edt ^te bleu plus consid^rable, pulsqne
le Corps du prince de Cobourg et peut-^tre les Busses m^mes
se seraient ayances yers le Danube, et le Grand -Vlzlr aurait
du renoncer a tourner toutes ses forces contre le Banat et la
Transylyanie. On prit ä Chotym 182 pleces de canon ayec
quelques mortlers et beaucoup de poudre. II fut ordonne aa
prince de Coböurg d'offrir au marechal Bomanzow de marcher
ayec lui a Bukarest, Foksan et ainsi yers le Danube, ou en
cas de refus du mar^hal, en ne lalssant a Chotym et dans la
— 349 —
Bukowina que les troupes necessaires, de se rendre avec le
reste de son corps an Transylvanie.
A la fin de septembre les attaques devinrent moins fre-
quentes en Transylvanie snr les confins dans la vallee de
Hatzegg. Le Yulcan ayant ete abandonne par le general Staa-
der, les Tnrcs y firent quelques degats et s'approchant m^me
de Hatzegg oü ce general etait poste, il les for9a par une canon-
nade et une attaque de oavalerie de se replier.
Tout a ete parfaitement tranquille a Semlin, mais apres
■ que quelques troupes fraiches de Tennemi arriverent a Beigrade,
ils s'aviserent de passer la Save avec de Tinfanterie et de la
cavalerie, de placer ,du canon dans Tile, et de canonner la ville
de Semlin. Mais notre oavalerie les ayant attaques, ils füren t
repousses vers la Dunowatz et retoumerent avec leurs canons
a Beigrade.
II ne s'est plus rien pass^ depuis, et la gamison de Bei-
grade passe en grand nombre au Banat pour y piller, trouvant
tout abandonn^. Pancsowa et plusieurs endroits ont dejä ete
entierement brüles. Les batimens arm^s remonterent le Danube
et arriverent a Beigrade au nombre de cinquante-un, partie
des Tschaiks et partie des petites galiotes.
La Position de Uarmee fut au commencement d'octobre
devant Lugos oü eile campa en deux carres, ayant de l'autre
cot^ de la Temes trois bataillons et deux regimens de cavalerie
avec plusieurs ponts de pontons et sur chevalets.
Le Corps de Brechainville ^tait a Wermes patrouillant
vers l'armee et ayant ses houssards jusque vers "Werschetz en
avant et a Denta une division de cavalerie.
Le general Lilien etait derriere la Temes ä Padosch,
ayant de sa caval^ie ä Czakovar qui patrouille avec celle de
Brechainville.
Le pont de Surdok a et^ ouvert, mais celui de Titel res-
tait encore.
— 350 —
On desira beauconp que Tennemi, qui depuis hnit jours
restait campe a Szlatina, ayant seulement an Corps de caya-
lerie yeis Caransebes, yonlüt de nonveau ayanoer, pour marcher
a lui et engager nne affaire, mais on dat y renoncer, parce
que Tarm^e ä peine put subsister a Lngos, tous les paysans
s'etant sany^ et ayant amene leors yoitnres, outre que les
pluies ayaient gate les chemins. On proposa alors de laisser nn
Corps et de marcher yers Brechainyille et de reoccuper la
plaine et le Danube, mais les memes difßcultes s'y opposerent
encore, Joint a ce qu'on aurait expose cette partie du pays et
le grand chemin de la Transylyanie, si les Turcs ayan^iient
et faisaient reculer Wartensleben. Enfin l'idee d'enyoyer un
Corps dans la plaine, fat remise a des dispositions prealables
pour les yiyres, et comme on n'apprit point qu'on corps turc y
eüt pris pied encore, mais que ce n'elait que de la cayalerie qui
parcourait le pays en le saocageant, on ne pouyait esperer de
pouyoir les rejoindre pour les battre, le mal etant fait ayant
qu'on ne puisse y porter remede. Ceci, Joint a ce que la mpitie
de Tarmee etait saus tentes et marmites, a fait decider d'at-
tendre a Lugos les eyenemeus, et de tacher de se pouryoir en
attendant du necessaire, d*autant plus que les prisonniers
et toutes les nouyelles des Valaques fuyards constataient
que l'armee du Grand -Vizir retoumait au dela du Danube
et prendrait ses quartiers dliiyer en Yalachie, en ne laissant
qu'un Corps a Mehadia. Le long du Danube ils doiyent se
trouyer ayec un pe^it camp a Ujpalanka, un autre plus grand
ä Kubin, et ayec un corps ä Pancsowa qu'on suppose de pres de
douze mille hommes. Mais apres des recherches plus exactes
il se decouyrit que le soi-disant camp a Pancsowa ayait passe
presqu'en entier le Danube, et que Ton yoyait hors de Beigrade
un camp. A Ujpalanka il etait reste un petit detachement, et
jusqu'a Terregoya on ne yoyait plus d'ennemi. LJi-dessus on
resolut enfin de laisser au general Wartensleben onze batail-
lons et six diyisions de cayalerie dans la yallee, de reoccuper
— 351 —
Caransebes et de se porter en avant autant que les circon-
stances et les subsistances le permettraient dans un pays tout
devaste. L'armee marcha donC le 12 ootobre le long de la
Temes et arriva en trois marches a Schebel ä trois lieues de
Temeswar, ayant fait avancer le gen^ral d' Alton qui avait pris
le commandement du corps de Breohainville, vers Bogscban,
et le general Harrach*) avec les boussards vers Werschetz,
L'arm^e prit sa route le long de la Temes pour arriver au
Danube a Pancsowa, et eile renfor9a le corps du gendral Har-
rach de quatre bataillons^ afin d'avancer tous ensemble vers
le Danube et en deloger Tennemi qui s'y trouvait encore. La
nouvelle arriva en m^me temps du prince Cobourg, comme
quoi le marecbal Eomanzow sur Talternative qui lui avait
^te propos^e, avait repondu par ecrit, qu'il ne pouvait plus
avancer oette annee, et qu'il regardait la campagne pour lui
comme finie, et il conseilla m6me au prince de Cobourg de
prendre son parti et de marcher avec son corps en Transyl-
vanie, sans assurer meme qu'il resterait et prendrait ses quar-
tiere d^hiver en Moldavie, objet de la plus grande importance,
puisque, s'il retournait en Pologne, la Bucowina et la Galicie
se trouveraient derechef exposees, et il faudrait qiie le corps
ou au moins la plus grande partie de celui du prince Cobourg
y reste, et Tävantage de concentrer ses forces au Banat et en
Transylvanie, que la prise de Chotym et de Jassy donnait,
serait annule,
üne attaque que les Turcs tenterent en Transylvanie au
passage de la Temes, fut repouss^e avec avantage, de m^me qu'a
une seconde tentative qu'ils firent vers Hatzegg, le general
Staader avec la cavalerie les rechassa et reprit sa position
vers la vall^e de Schil.
*) Ferdinand Johann Graf Harrach, 1740 geboren, starb 1796
als P^ldmarschall-Lientenant und Ritter des Theresienordens,
— 352 —
Le lieutenant-general Splenyi*) etait arrive avec son
Corps en attendaot vers Boman pour entrer en Transylvanie,
et le prince Cobourg le suivait, lorsque ce premier fut attaque
sissez vivement par des Tnrcs qui etaient venus de Foksan,
mais il les reponssa avec perle, et l'eDnemi ayant ^galement
repasse le Vulcan, les troupes, vn la rigueur de la saison, en-
trerent en cantonnement.
La grande armee en attendant continnait sa marche ä la
pointe du jour. Avant d'arriver an camp a Tomaschowatz, oh.
on avait fait jeter pour la facilite des transports un pont de
pontons sur la Temes, une troupe de Turcs a cheval se pre-
senta, et n'ayant point trouve le pont garde, comme il aurait
du Tetre par le corps du general Lilien, qui etait ä une demi-
heure de la a Botosch, les Turcs sabrerent quelques ponton-
niers, quelques soldats du regiment de Lascy, qui aidaient a
la construction du pont, des voituriers et plusieurs arquebusiers
qu'on y envoya avec un capitaine sur la premiere nouvelle,
et ensuite ils reiourn^rent vers Pancsowa.
L'armee ayant reuni ä eile le corps de Lilien, marcha
jusqu'ä Jabuka, ä une demi-marche de Pancsowa, decidee d'at-
taquer le lendemain les Turcs qui s'y trouvaient, mais des la
pointe du jour on ne marcha point, il y eut quelques diffi-
cultes pour les vivres, et on voulut attendre le lendemain. En
attendant on vit brüler Pancsowa et les Turcs pjisser en foule
la Temes et s*en aller vers la Borcsa, pour passer ensuite le
Danube ä Beigrade. Quelques houssards de Wurmser qui les
suivirent, firent plusieurs prisonniers dans Pancsowa, et ä la
poursuite le Seraskier Memisch Pacha perdit la vie, et son
cheval bien equipe fut pris, mais s'etant un peu trop aven-
ture dans les roseaux, ils y perdirent une trentaine d'houssards
avec un capitaine.
*) Gabriel Freiherr Splenyi von Mihäldy, 1734 geboren, Ritter
des Theresienordens, starb im J. 1818.
— 353 —
Le general Harrach etait en meme temps avance jusqu'a
Ujpalanka d'oii il delogea de vive force Tenneini, fit un cour-
rier iure prisonnier avec des depeches importantes et qui con-
teDaient surtout un ordre positif au commandant de Beigrade,
de faire une attaque sur Semlin. Les Turcs s'etant refugies
dans la redoute, apres que le general Harrach avait perdu une
centaine d'hommes, en voulant Tescalader, ils y capitulerent et
en sortirent libres. Cet avantage fit evacuer aux Turcs toute
la plaine et meme Moldava, vers oii le general d' Alton avanqa.
L'arm^e voyant qu'elle avait rempli son but au Banat, et
Semlin etant encore menace, s'y mit en marche par Oppowa
et Panowsce, et le lieutenant-general Clerfayt resta au Banat
avec vingt-un bataillons et treize divisions de cavalerie. Le
general d'Alton et Harrach lui furent assignes ; il reprit les
postes au Danube.
Le marechal de Laudon, apres la prise de Novi, fit toutes
les dispositions pour assi^ger Gradisca, mais les bruits ridicules
qu'on repandit, comme si l'ennemi entrerait en Esclavonie, et
que le corps de Semlin se retirait, Vengagerent d'envoyer des
troupes vers ce cote au secours, mais ayant ^te detromp^, il
les fit retourner. Par lä la saison qui avanqait, lui fit craindre
de ne pouvoir achever le si^ge de Gyadisca, et il y renonqa
pour cette campagne.
L'armee arriv^e ä Semlin, vit bientöt disparaitre les Turcs
camp^s aupres de Belgrads ; meme un grand nombre de leurs
barques et bätimens armes redescendit le Danube, et en devant
passer TJpjalanka que nous occupons, ils y perdirent une ving-
taine de bateaux qui furent pris ou coules au fond, sur les-
quels il se trouvait aussi trois canons, enfin les Turcs etaient
rencognes ä Mehadia.
Le general Clerfayt ayant re<5u les ordres r^iteres de
tenter par les montagnes de 1' Almas ä inquieter au moins les
Turcs qui se tenaient encore dans des retranchemens qu'ils
avaient faits ä Mehadia et Schupaneck, il y detacha le colonel
▼. Arneth. Joseph n. Leopold. IL 23
— 354 —
BoroBS *) de Wurmser houssards qui ayan^ jnsque vers Mehadia.
D^que les Turcs en farent instmits, ils mirent le fen a Tendroit
et 8e retirerent au delä de Schupaneck a Orsowa, et oomme il
ne restait plus d'ennemi dans le Banat ni sur le terrain antri-
chien, Ton commen^a a separer les troupes pour prendre les
quartiere d'hiver, et la campagne fai finie. Les Turcs firent
du butin en betail et meme en hommes, presque tous Valaques
qu'ils emmenerent, et ils brülerent nombre de villages. La
maison d' Antriebe fit l'acquisition de Chotym avec le * terrain
y appartenant de cent-cinquante villages, de Sabacs avec son
district, de Dubitza et Novi avec tont ce que renferment les
montagnes nommees Kozaras et de Dresnik, outre que de la
Seryie plus de cent mille ämes emigrerent avec leurs effets et
b^taily et se trouyent encore repandues dans nos provinces.
*) Adam Boros de Bakos. Er wurde im J. 1790 Generalmajor
und erhielt 1795 den Theresienorden.
INHALT.
17 8 6.
Seit«
I
Joseph an Leopold. 6. Jänner 1786 1
Beise der Erzherzogin Marie. Die Nachrichten aus Neapel.
Das Unwohlsein des Grossherzogs.
— — — 14. Jänner 1786 2
Die Einführung des neuen Contributionssystems in Ungarn.
Circulardepesche als Antwort auf eine Erklärung Preussens.
Leopold an Joseph. 16. Jänner 1786 3
Die Ereignisse in Neapel.
Joseph an Leopold. 26. Jänner 1786 4
Die Ereignisse in Neapel. Die Erzherzogin Marie.
— — — 23. Februar 1786 ö
Die Königin von Neapel. Ihre Heiratsprojecte^ für ihre
Töchter.
— — — 2, März 1786 6
Abnahme der Lebenskräfte des Königs von Preussen. Die
Regierungsmassregeln in Ungarn. Die Erzherzogin Marie. Die
Königin von Neapel.
_ «. _ 23. März 1786 7
Beise der Erzherzogin Marie. Sächsische Heiratsprojecte.
_ _ -_ 26. März 1786 ......'. 8
Die Grund Vermessung in Ungarn. Nachrichten aus Neapel
und Spanien.
— — — 6. April 1786 9
Bericht aus Dresden über den Plan einer Verheiratung des
Prinzen Anton mit der Erzherzogin Therese. Die Sendung des
Orafen Marcolini. Die Königin von Neapel.
— — — 10. April 1786 10
Die Erkrankung der Königin von Neapel.
23*
— 356 —
Seite
Joseph an Leopold. 13. April 1786 10
Das sächsische Heiratsproject. Besserung in dem Zustande
der Königin von Neapel.
Leopold an Joseph. 18. April 1786 11
Die sächsischen Heiratsprojecte. Die Königin von Neapel.
— — — 25. April 1786 13
Die Zustände und Ereignisse in Neapel.
Joseph an^eopold. 27. April 1786 15
Das Heiratsproject. Aufenthalt im Augarten.
_ _ _ 4. Mai 1786 16
Die Königin von Neapel.
— — — 11. Mai 1786 16
Baldige Uebersiedlung nach Laxenburg.
— — — 14. Mai 1786 17
Die Regierungsmassregeln in Ungarn. ^ Der König von
Prjeussen.
— — — 18. Mai 1786 18
Feindselige Erklärungen des spanischen Ministers Grafen
Florida Bianca.
Leopold an Joseph. 22. Mai 1786 19
Die Hegiernngsmassregeln in Ungarn. Das sächsische
Heiratsproject. Die Königin von Neapel. Die dortigen . Ereig-
nisse. Die Familie des Grossherzogs.
Joseph an Leopold. 25. Mai 1786 22
Der Aufenthalt in Laxenburg. Erzherzog Franz. Prinzessin
Elisabeth. Zeitpunkt für ihre Vermählung.
Leopold an Joseph. 28. Mai 1786 23
Die Erklärungen des Grafen Florida Bianca.
Joseph an Leopold. 1. Juni 1786 24
Die Königin von Neapel. Ihre Heiratspläne. Die dortigen
Verhältnisse.
Leopold an Joseph. 5. Juni 1786 25
Der Zeitpunkt der Vermählung des Erzherzogs Franz.
Wunsch des Grossherzogs, dann einige seiner jüngeren Söhne
nach Wien zu geleiten. Die Heiratsprojecte für die Erzher-
zogin Therese.
Joseph an Leopold. 8. Juni 1786 27
Die Erklärungen des Grafen Florida Bianca. Der Aufent-
halt in Laxenburg. Erzherzog Franz.
Leopold an Joseph. 11. Juni 1786 28
Die Königin von Neapel. Sardinische Heiratsprojecte. Mar-
colinfs Ankunft. Seine Erklärungen.
Joseph an Leopold. 23. Juni 1786 32
Die Heiratsprojecte. Abreise des Kaisers nach Croatien. .
— 357 —
Seite
Joseph an Leopold. 28. August 1786 33
Josephs Rückkehr nach Wien. Sein Gesundheitszustand.
Erzherzog Franz. Der Tod des Königs von Preussen. Sein
Nachfolger. Das Project einer Reise nach Cherson. Die Königin
von Neapel. Ankunft der anatomischen Präparate. Bevor-
stehende Abreise des Kaisers nach Mähren und Böhmen.
— — — 4. October 1786 36
Die Vorgänge in Neapel. Das Ausbleiben fernerer Mitthei-
lungen aus Sachsen.
— — — 23. October 1786 ! . . . 38
Ankunft des Erzherzogs Ferdinand und seiner Gemalin.
— — — 26. October 1786 38
Neue Ernennungen.
— — — 2. November 1786 39
Erzherzog Ferdinand und seine Gemalin. Die Eindrücke
ihrer Reise nach England. Wunsch des Kaisers, dieses Land
zu besucheo. Die Reise nach Cherson.
— — — 9. November 1786 . . . • 40
Die Pest in Siebenbürgen. Nachrichten aus Neapel. Erz-
herzog Ferdinand.
— ~ — 16. November 1786 41
Glückwunsch zum Namenstage. Schwere Erkrankung der
Kurfürstin von der Pfalz. Vorschlag einer Vermählung des^ Kur-
fürsten mit der Erzherzogin Therese. Nachrichten aus Neapel.
Die anatomischen Präparate.
— — — 21. November 1786 43
Reformen in Italien, den Niederlanden und Ungarn. Be-
schwerden der deutschen Erzbischöfe gegen den heiligen Stuhl.
Die Antwort des Kaisers. Die Reise nach Cherson. Der König
und die Königin von Neapel. Wiedergenesung der Kurfürstin
von der Pfalz. Das Verfahren des sächsis^^hen Hofes. Heirats-
termin für den Erzherzog Franz. Die Brüder desselben.
— — — 23. November 1786 . . 4ö
Die anatomischen Präparate. Hoffeste für den Erzherzog
Ferdinand.
Leopold an Joseph. 28. November 1786 45
Das Project einer Verheiratung der Erzherzogin Therese
mit dem Kurfürsten von der Pfalz. Nachrichten aus Neapel.
— — — 5. December 1786 47
Die Reformen in Italien, den Niederlanden und Ungarn.
Die deutschen Bischöfe. Nothwendigkeit einer Abschüttlung des
römischen Joches. Vorschlag zur Berufung einer deutschen
Nationalsynode. Die Reise nach Cherson. Der König und die
Königin von Neapel. Die Wiedergenesung der Kurfürstin von
— 358 —
Seite
der Pfalz. Die Erzherzogin Therese. Das sächsische Heirats-
project. Die Erzherzogin Marianne. Der Hetratstermin für den
Erzherzog Franz. Die übrigen Söhne des Grossherzogs.
Joseph an Leopold. 7. December 1786 53
Das Scheitern des pfälzischen Vermählnngsplaues.
— — — 11. December 1786 54
Die Fürstin Dietrichstein. Bedauern über den Tod des
Qrafen Joseph Starhemberg.
— — — 14. December 1786 55
Die deutschen Bischöfe. Zweifel an ihrer Energie. Der
Kaiser ist gegen die Berufung einer Nationalsynode. Die kirch-
lichen Einrichtungen in der Österreichischen Monarchie. Die
zukünftige Stellung der Kinder des Grossherzogs.
— — — 28. December 1786 58
Das sächsische Heiratsproject.
1787.
Leopold an Joseph. 7. Jänner 1787 59
Nachrichten aus Neapel. Die Bestimmung und künftige
Stellung der Kinder des Grossherzogs. Toscana's dereinstige
Vereinigung mit der österreichischen Monarchie.
— — — 9. Jänner 1787 62
Das sächsische Heiratsproject. Papst Pins YI.
Joseph an Leopold. 15. Jänner 1787 63
Der König und die Königin von Neapel. Die Kinder des
Grossherzogs.
_ _- — 25. Jänner 1787 . 66
Die Nachrichten, aus Neapel. Das Benehmen des Grafen
Bichecourt.
— _ _ 8. Februar 1787 67
Die Söhne des Grossherzogs und ihre Uebersiedlung nach
Wien. Der König von Preussen. Fräulein von Voss. Der Fürst
de Ligne. Die Reise nach Cherson.
_ -. — 15. Februar 1787 69
Die Königin von Frankreich. Ihr beabsichtigter Besuch bei
der Erzherzogin Marie in Brüssel. Die Versammlung der Nota-
blen. Die Herzogin von Polignac. Graf Richecourt. Die Reise
nach Cherson.
— — — 22. Februar 1787 70
Zwistigkeiten mit Rom. Ende des Carnevals. Ausschweifun-
gen junger Engländer.
— 359 —
Seite
Joseph an Leopold. 5. März 1787 71
Die Reise nach Cherson. Der Kurfürst von Mainz. Der
sächsische Minister Statterheim.
Leopold an Joseph. 6. März 1787 72
Die kirchlichen Angelegenheiten.
Joseph an Leopold. 8. März 1787 73
Die Verhältnisse in Neapel. Die Reise nach Cherson.
— — — 12. März 1787 74
Die Vorgänge in Frankreich.
— — — 15. März 1787 76
Die deutschen Bischöfe.
Leopold an Joseph. 16. März 1787 75
Der Kurfürst von Mainz. Der Papst. Des Letzteren Hass
gegen das Haus Oesterreich. Die Söhne des Grossherzogs.
Manfredini. Warnsdorff. Derichs. Spanocchi.
Joseph an Leopold. 22. März 1787 77
Der Kurfürst von Sachsen begehrt *die Hand der Erz-
herzogin Therese für den Prinzen Anton.
_ _ _ 6. April 1787 78
Die sächsische Heirat. Die Reise nach Cherson.
— - — 9. April 1787 • 79
Bevorstehende Abreise nach Cherson. Die Heirat der Erz-
herzogin Therese.
_ _ _ 23. April 1787 79
Der Heiratstermin für den Erzherzog Franz. Die Erzher-
zogin Therese. Die jüngeren Söhne des Grossherzogs.
— — — 15. Mai 1787 80
Ankunft in Cherson nach einer sehr glücklichen Reise.
_ _ — 16. Juni 1787 81
Rückkehr von der Rundreise durch die Krim nach Cherson.
Zufriedenheit mit der Reise. Die Kaiserin von Russland. Italie-
nische Ansiedler in der Krim. Die Heirat der Erzherzogin
Therese. Die Schwangerschaft der Grossherzogin.
_ _ __ 23. Juni 1787 82
Rückkunft von Cherson. Schmerzliche Ereignisse in den
österreichischen Niederlanden.
_ _ -_ 6. Juli 1787 82
Die Ereignisse in den Niederlanden. Das Streben der Auf-
ständischen nach Unabhängigkeit Die Entschlüsse und Mass-
regeln des Kaisers. Dessen Schmerz über sein unglückliches
Schicksal. Obsiegen oder Untergehen, so lautet seine Devise.
Hoffnung auf Zustimmung des Grossherzogs zu den getroffenen
Vorkehrungen.
— 360 —
Seite
Joseph an Leopold. 9« Juli 1787 85
Die Heirat der Erzherzogin Therese. Ihre Reise durch
Oesterreich nach Sachsen.
— — — 19. Juli 1787 88
Die Nachrichten aus den Niederlanden. Verderbliche Ein-
flussnahme des Papstes und des Clerus.
Leopold an Joseph. 19. Juli 1787 89
Die Ereignisse in den Niederlanden. Dieselben sind durch
Frankreich, sowie durch den Papst und den Clerus veranlasst.
Gefährlichkeit des Aufstandes. Wunsch nach seiner Beschwich-
tigung. Zustimmung zu den Schritten des Kaisers. Bedauern
über die Lage desselben. Die Heirat und Reise der Erzherzo-
gin Therese. Die Haltung des heiligen Stuhles.
Joseph an Leopold. 22. Juli 1787 99
Die Ereignisse in den Niederlanden.
— — — 26. Juli 1787 100
Absendung von Deputirten aus den Niederlanden. Die
Rückkehr der Erzherzogin Marie nach Wien. Zusicherungen
Frankreichs. Der König von Preussen. Die Heirat der Erz-
herzogin Therese.
Leopold an Joseph. 1. August 1787 101
Die niederländischen Angelegenheiten. Ereignisse in Neapel.
Die Zustände in Rom.
Joseph an Leopold. 2. August 1787 104
Nachrichten aus den Niederlanden. Die Erzherzogin Marie
. und Prinz Albert.
— — — 6. August 1787 106
Die Ausstattung der Erzherzogin Therese.
Leopold an Joseph. 7. August 1787 106
Die Zusicherungen Frankreichs. Der König von Preussen.
Glückwunsch zur Beschwichtigung des Aufstandes in den
Niederlanden.
Joseph an Leopold. 13. August 1787 108
Die Ankunft der niederländischen Deputirten.
Leopold an Joseph. 14. August 1787 108
Die niederländischen Angelegenheiten.
Joseph an Leopold. 16. August 1787 109
Die Ereignisse in den Niederlanden. Schreiben des Kaisers
an seinen Bruder Maximilian. Ungünstiger Heiratscontract der
Erzherogin Therese. Der sächsische Abgesandte Schönfeld.
Zusammenziehung von Truppen.
_ _ _ 23. August 1787 112
Conferenzen mit den niederländischen Deputirten. Con-
flicte zwischen Russland und der Pforte.
— 361 —
Seite
Leopold an Joseph. 28. August 1787 113
Der Grossherzog hält die Unruhen in den Niederlanden
für beigelegt. Die Heirat der Erzherzogin Therese. Die Gross-
herzogin.
Joseph an Leopold. 30. August 1787 115
Türkische Kriegserklärung gegen Russland. Verwicklung
Oesterreichs in diesen Kampf.
— - — 3. September 1787 116
Der bevorstehende Krieg gegen die Pforte. Die Heirat des
Erzherzogs Franz. Die erwartete Ankunft der Erzherzogin
Therese. Warnung derselben vor der Erzherzogin Marie.
_ _ — 6. September 1787 117
Ansammlung einer Armee in Ungarn. Die Heirat des Erz-
herzogs Franz. Die jüngeren Brüder desselben.
_ _ _ 10. September 1787 118
Des Kaisers Abreise nach Böhmen.
Leopold an Joseph. 17. September 1787 119
Der bevorstehende Krieg gegen die Pforte. Der Erzherzog
Franz und dessen Brüder. Die Erzherzoginnen Marie und
TherQse. Madame BoUand.
Joseph an Leopold. 20. September 1787 122
Rückkehr aus Böhmen.
_ _ _ 27. September 1787 123
Ankunft der Erzherzogin Therese.
_ __ _ 30. September 1787 1^3
Die Erzherzogin Therese. Vorwürfe wegen Mittheilung von
Staatsgeheimnissen an fremde Gesandte.
Leopold an Joseph. 8. October 1787 125
Schmerz über die Vorwürfe des Kaisers. Rechtfertigung
seines Verfahrens.
Joseph an Leopold. 11. October 1787 130
Unfall der russischen Flotte im schwarzen Meere. Abreise
der Erzherzogin Therese.
— — — 18. October 1787 . 131
Die Mittheilung von Staatsgeheimnissen. Die Erzherzogin
Therese. Die Reichslehensträger Bardi.
Leopold an Joseph. 21. October 1787 133
Die Erzherzogin Therese. Die russische Flotte. Verfall der
Macht Frankreichs.
Joseph an Leopold. 22. October 1787 134
Rückkehr des Erzherzogs Franz. Tadelnswerthes Verfahren
Sachsens.
— 362 —
Seite
Leopold an Joseph. 29. October 1787 134
Die Mittheilnng ' von Staatsgeheimnissen. Dank für des
Kaisers freundschaftliche Worte. Wiederholte Rechtfertigung
seines Verfahrens. Versprechen grösserer Vorsicht für die Zu-
kunft. Die Erzherzogin Therese. Die Angelegenheit der Reichs-
lehensträger Bardi. Schwangerschaft der Grossherzogin.
Joseph an Leopold, l. November 1787 138
Der Verfall Frankreichs. Des Kaisers Vorbereitungen zum
Kriege. Ueberschwemmun g der Wiener Vorstädte, /Unwohlsein
des Kaisers.
— — — 5. November 1787 139
Die Ueberschwemmung. Sieg der Russen bei Kinburn.
Glückwunsch zum Namensfeste des Grossherzogs.
_ _ _ 8. November 1787 140
Freundschaftsversicherungen. Verwüstung des Marchfeldes
durch die Ueberschwemmung.
— — — 12. November 1787 '. . . 141
Frankreich, England und Preussen.
__ _ _ 15. November 1787 142
Zusammenziehung der Truppen. Die Niederlande, Nach-
richten aus Russland.
~ — - 19. November 1787 143
Der Heiratscontract des Erzherzogs Franz.
— _ _ 26. November 1787 143
• Erzherzog Maximilian wird den Erzherzog Franz trauen.
— — - 29. November 1787 144
Die bevorstehende Kriegführung. Geringe Erwartungen
von den Russen. Bereitschaft der österreichischen Armee.
Lady Pen.
— — — 6. December 1787 146
Mittheilung eines Briefes der Königin Marie Antoinette.
Die Zustände in Frankreich. Russische Grosssprechereien. Fürst
Potemkin. Die bevorstehende Trauung des Erzherzogs Franz.
Die niederländischen Angelegenheiten. Tadel des Generals
Murraj. Unwohlsein des Kaisers.
— — — 10. December 1787 147
Der Heiratscontract des Erzherzogs Franz. Dessen be-
vorstehende Firmung.
— — - 13. December 1787 148
Misslungener Anschlag auf Belgrad.
— — ~ 17. December 1787 149
Die Heirat des Erzherzogs Franz. Der Anschlag auf
Belgrad. Die niederländischen Angelegenheiten.
— 363 —
Seite
Leopold an Joseph. 17. December 1787 150
Der Gesandheitszastand des Kaisers. Die niederländischen
Angelegenheiten. Die Zustände in Frankreich. Der König vob
Schweden. Russland und die Türkei. Die Erzherzogin Therese.
O'Kelly's Abberufung aus Dresden. Frau von Herbert. Lady
Pen. Nachrichten aus Rom und aus Neapel.
Joseph an Leopold. 24. December 1787 154
Die Erzherzogin Marie. Absendang des Grafen Hartig
nach Dresden.
— — — 27. December 1787 155
Firmung des Erzherzogs Franz.
1788.
Joseph an Leopold. 7. Jänner 1788 -. . 156
Absendung des Obersten Rollin mit der Nachricht von der
vollzogenen Vermählung des Erzherzogs Franz. Festlichkeiten.
— — — 10. Jänner 1788 157
Beendigung der Vermählungsfeste.
— — — 17. Jänner 1788 158
Glückwunsch zur Gebu^^t des Erzherzogs Rudolph. Be-
friedigender Gesundheitszustand der Armee in Ungarn. Vor-
bereitungen zum Feldzuge. Erzherzog Franz.
— — 24. Jänner 1788 169
Misslingen eines zweiten Anschlages auf Belgrad.
_____ 28. Jänner 1788 160
Die Sendung des Obersten Rollin nach Florenz. Die Erz-
herzoge Ferdinand und Karl.
Leopold an Joseph. 9. Februar 1788 160
Wohlbefinden seiner Söhne. Nachrichten aus Neapel.
General Acton. Zwiespalt mit Rom. Die Königin Caroline.
Joseph an Leopold. 14. Februar 1788 163
Oberst Rollin. Des Grossherzogs Geschenke für die Erz-
herzogin und die Gräfin Chanclos. Schlechter Zustand der
russischen Heere. Beginn der Feindseligkeiten in Croatien.
— — — 21. Februar 1788 163
Uebersendung eines Briefes an die Königin von Neapel.
Bevorstehende Abreise des Kaisers zur Armee.
Leopold -an Joseph. 25. Februar 1788 r • • • 165
Die russischen Heere. Fürst Potemkin. Nachrichten aus
Neapel. Die Königin. Die angebliche Gräfin Falkeustein.
— 364 —
Sehe
Joseph an Leopold. 28. Februar 1788 . 168
Die Abreise des. Kaisers. Vorkehrnngen für den Fall ihn
ein Unglück träfe.
Leopold an Joseph. 10. März 1788 170
Ueber die vx)m Kaiser getroffenen Anordnungen. Erzherzog
Carl. Qeneral Acton.
Joseph an Leopold. t>7.' März 1788 . ' 172
Die Vorkehrungen für den Fall eines Unglückes. Erz-
herzog Franz.
Leopold an Joseph. 13. April 1788 173
Nachrichten aus Neapel. Die Königin. General Acton.
Erzherzog Carl.
Joseph an Leopold. 16. April 1788 174
Uebersendung eines Briefes an Thugnt Wohlbefinden des
Kaisers. Erzherzog Franz.
Leopold an Joseph. 27. April 1788 176
Nachrichten aus Neapel.
Joseph an Leopold. 28. April 1788 176
Glückliche Unternehmung auf Sabacz. Verwundung des
Feldzeugmeisters Rouvroy und Poniatowsky's. Wackere Haltung
des Erzherzogs Franz.
— - — 13. Mai 1788 177
Unthätigkeit der Russen. Unzufriedenheit mit den eigenen
Generalen. Lob des Erzherzogs Franz.
Leopold an Joseph. 15. Mai 1788 178
Glückwunsch zur Einnahme von Sabacz. Dank für die Be-
lobung des Erzherzogs Franz. Erzherzog Carl.
— — — 1. Juni 1788 180
Die Unthätigkeit der Russen. Die Lage des Kaisers.
Joseph an Leopold. 14. Juni 1788 181
Die kriegerischen Unternehmungen.
-« _ — 25. Juni 1788 184
Die Erzherzoge Carl und Franz. Unthätigkeit der Russen.
Die Entvölkerung Serbiens.
_ _- _ 29. Juli 1788 185
Seesieg des Prinzen von Nassau im schwarzen Meere.
Bewegungen der Türken. Krankheiten im kaiserlichen Lager.
Der Pascha von Scutari.
_ _ _ 13. August 1788 187
Der König von Neapel. Uebler «Gesundheitszustand des
Kaisers. Schlappe des Generals Papilla. Günstigere Ereignisse
in Croatien.
— 365 —
Seite
Leopold an Joseph. 16. Augnst 1788 . 189
Er beklagt die Krankheiten bei der Armee. Die Erfolge
der Russen. Die Bewegungen der Türken. Der König von
Schweden. Seine Schilderhebung gegen Russland. Der König
und die Königin von Neapel. Die angebliche Qräfin Falken-
stein.
Joseph an Leopold. 2. September 1788 . 193
Erzherzog Franz. Die Begebenheiten auf dem Kriegsschau-
platze. Die angebliche Gräfin Falkenstein.
— — — 20. September 1788 195
Uebler Gesundheitszustand des Kaisers. Unverantwortliche
Haltung österreichischer Generale. Klagen des Kaisers über
sein unglückliches Schicksal. Die etwaige Berufung des Gross-
herzogs zur Armee.
Leopold an Joseph. 22. September 1788 197
Er beschwört den Kaiser, seine Gesundheit zu schonen.
Die Kriegsereignisse. Die vermeintliche Gräfin Falkenstein.
Die Gemalin und die Kinder des Grossherzogs.
Joseph an Leopold. 26. September 1788 199
Unglücklicher Vorfall während des Rückzuges der Armee
nach Lugos. Bedauerliche Folgen desselben. Schlechter Ge-
sundheitszustand des Kaisers. Schmerz über sein Miss-
geschick. *
Leopold an Joseph. 4. October 1788 201
Mitleid mit der Lage des Kaisers. Aufi'orderung zur
Schonung seiner Gesundheit. Bereitwilligkeit zur Reise nach
Ungarn.
Joseph an Leopold. 7. October 1788 203
Die Stellung des österreichischen und des türkischen
Heeres. Die Gesundheit des Kaisers.
Leopold an Joseph. 13. October 1788 204
Der Unfall bei Lugos. Unerlässliche Nothwendigkeit dass
der Kaiser sich schone.
Joseph an Leopold. 19. October 1789 • 206
Dank für dessen Theilnahme. Die Kriegsuntemehmungen.
Besserung seiner Gesundheit.
— — — 29. October 1788 207
Die Gesundheit des Kaisers und des Grossherzogs. Die
Kriegsereignisse.
— — — 4. November 1788 208
Der Dolmetsch Stürmer. Die Kriegsereignisse. Abreise des
Erzherzogs Franz. Die Gesundheit des Kaisers.
— 366 —
Seite
Joseph an Leopold. 17. November 1788 210
Der Gesundheitszustand des Kaisers. Dessen bevorstehende
Abreise nach Wien. Abzug der Türken aus Österreichischem
Gebiete. Unthätigkeit der Russen.
— — — 28. November 1788 210
Aufenthalt des Kaisers in Ofen. Zurückweisung der aus
Russland eingelangten Vorschläge.
— — — 8. December 1788 211
Glückliche Ankunft in Wien. Des Kaisers Gesundheits-
zustand.
Leopold an Joseph. 14. December 1788 212
Die russischen Vorschläge. Todesfälle am spanischen Hofe.
— — — 16. December 1788 213
Die Anträge Russlands.
Joseph an Leopold. 18. December 1788 214
Hoffnung der Russen auf die Einnahme von Oczakow.
Empfehlung des Sängers Benucci.
Leopold an Joseph. 22. December 1788 . . . • 214
Die russischen Vorschläge.
Joseph an Leopold. 25. December 1788 215
Neuerliche Erkrankung des Kaisers.
17 89.
Joseph an Leopold. 1. Jänner 1789 217
Der Tod des Königs von Spanien. Erzherzog Franz. Der
Gesundheitszustand des Kaisers.
— — — 5. Jänner 1789 .218
Die Einnahme von Oczakow.
— - — — 8. Jänner 1789 218
Einfluss des Todes des Königs von Spanien auf den neapo-
litanischen Hof.
— — — 15. Jänner 1789 219
Der Gesundheitszustand^ des Kaisers.
— — 19. Jänner 1789 220
Thauwetter. Des Kaisers Gesundheit.
Leopold an Joseph. 21. Jänner 1789 221
Die Königin von Neapel. Das Verhältniss des dortigen
Hofes zu dem von Madrid.
Joseph an Leopold. 22. Jänner 1789 222
Der Tod eines neapolitanischen Prinzen. Die Königin Caro-
line. Krankheiten bei der Armee. Tod des FZM. Fabris.
— 367 —
Seite
Joseph an Leopold. 29. JSnner 1789 - . . . 223
Die Königin von Neapel. Der König von Spanien. Thau-
wetter. Ueberschwemmungen und Krankheiten.
— — — 2. Februar 1789 224
Frostschaden in Italien. Uebler Gesundheitszustand des
Kaisers.
— — — ö. Februar 1789 224
Die Streitigkeiten zwischen dem spanischen und dem neapo-
litanischen Hofe. Des Kaisers Gesundheitszustand. Die Ereig-
nisse in Brüssel. Ueberschwemmungen. Erkrankung der Für-
sten Carl Liechtenstein und Schwarzenberg.
— — — 18. Februar 1789 225
Todesfall am neapolitanischen Hofe. Die Königin. Erz-
herzog Franz.
— — — 23. Februar 1789 226
Schlechter Gesundheitszustand des Kaisers. Uebernahme
des Armeecommando's durch Feldmarschall Graf Hadik. Tod
des Fürsten Carl Liechtenstein.
— — — 26. Februar 1789 227
Die Königin von Neapel. Krankheiten bei der Armee.
Erkrankung des Feldmarschalls Laudon. Ueble Gesundheit
des Kaisers.
— — — 5. März 1789 . 228
Keine Hoffnung auf Frieden. Die Krankheit des Kaisers.
Die Königin von Neapel.
__ ^ _ 9. März 1789 229
Die Krankheit des Kaisers.
__ _ _ 16. März 1789 229
Die neapolitanischen Angelegenheiten.
— — — 19. März 1789 230
Dank für die Glückwünsche des Grossherzogs. Verschlim-
merung des Gesundheitszustandes des Kaisers.
__ _ __ 23. März 1789 231
Die Krankheit des Kaisers.
__ _ _ 26. März 1789 231
Die Krankheit des Kaisers.
__ _ _ 30. März 1789 232
Des Kaisers Gesundheitszustand.
— — — 2. April 1789 233
Angebliche Beendigung des Zwistes zwischen Spanien und
Neapel. Besserung des Gesundheitszustandes des Kaisers.
— — — 9. April 1789 233
Das Unwohlsein der Grossherzogin. Frankreich und Russ-
land. Die Gesundheit des Kaisers.
— 368 -
Seite
Joseph an Leopold. 13. April 1789 235
Fortdauer des Zwistes zwischen Spanien und Neapel.
— — — 16. April 1789 235
Erkrankung des Kaisers an heftigem Blutbrechen. Er
nimmt die Sterbesacramente. Anordnungen für den Fall
seines Todes.
— - — 17. April 1789 237
Die Krankheit des Kaisers.
~ — — 18. April 1789 237
Nachrichten über den Gesundheitszustand des Kaisers.
— — — 20. April 1789 238
Die Krankheit de<) Kaisers.
— - — 23. April 1789 239
Des Kaisers Gesundheitszustand.
— — — 27. April 1789 240
Nachrichten über das Befinden des Kaisers.
_ _. _ 30. April 1789 240
Des Kaisers Gesundheitszustand. Beabsichtigte Umsiedlung
nach Laxenburg. Erzherzog Franz und dessen Gemalin. Der
russische Operationsplan.
_ _ _ 4. Mai 1789 . . 241
Erster Ausgang des Kaisers.
_ _ _ 7. Mai 1789 242
Die Gesundheit der Grossherzogin und des Kaisers.
— — — 11. Mai 1789 243
Joseph verlangt des Grossherzogs Entscheidung über die
Frage der Erneuerung der Allianz mit Russland. Verschiim-
merung seines Gesundheitszustandes.
— — — 14. Mai 1789 245
Josephs Krankheit.
— — — 18. Mai 1789 245
Die Grossherzogin von Toscana. Erzherzog Ferdinand.
Leopold an Joseph. 18. Mai 1789 246
Die Krankheit des Kaisers. Die Erneuerung der Allianz
mit Russland. Er hält sie für nothwendig. Zustimmung zu
den Vorkehrungen für die Besorgung der inneren Angelegen-
heiten.
Joseph an Leopold. 25. Mai 1789 . • 249
Mittheilung an Russland wegen Erneuerung der Allianz.
Die Krankheit des Kaisers.
— — — 28. Mai 1789 250
Des Kaisers Krankheit.
— _ — 1. Juni 1789 251
Die Krankheit Josephs.
— 369 —
Seite
Joseph an Leopold. 4. Juni 1789 252
Die Krankheit des Kaisers. Furcht vor einem Besuche des
Königs und der Königin von Neapel
— — — 8. Juni 1789 253
Verschlimmerung der Krankheit.
— — — 11. Juni 1789 —
Die Krankheit des Kaisers.
— — — 16. Juni 1789 254
Des Kaisers Krankheit und Lebensweise.
— — — 18. Juni 1789 265
Tod des Dauphin. Des Kaisers Gesundheitszustand. Die
angebliche Aussöhnung zwischen den Königen von Spanien
und Neapel. Die- Zustände in Frankreich. Bewegungen bei
der Armee.
— — — 22. Juni 1789 —
Der Krankheitszustand.
Leopold an Joseph. 28. Jani 1789 256
Der Zwiespalt zwischen den Höfen von Madrid und Neapel.
Die Ereignisse in Frankreich.
Joseph an Leopold. 29. Juni 1789 268
DeB Kaisers Gesundheitszustand.
— __ — 2. JuU 1789 —
Die Vorgänge in den Niederlanden. Erneuerung der rus-
sischen Allianz. Beginn der Belagerung von Gradisca. Josephs
Gesundheit.
— — — 6. Juli 1789 259
Der Gesundheitszustand des Kaisers. Die Erzherzogin Eli-
sabeth. Belagerung von Berbir.
— — — 9. Juli 1789 —
Fortdauer des Zwiespaltes zwischen Spanien und Neapel,
^ie Zustände in Frankreich. Necker. Des Kaisers Gesundheit.
— — — 13. Juli 1789 260
Die Ereignisse in Frankreich. Erzherzogin Elisabeth.
Josephs Gesundheit.
— — - — 16. Juli 1789 261
Eroberung von Berbir. Die Krankheit des Kaisers.
— — — 20. Juli 1789 —
Josephs Krankheitszustand. Die Niederlande.
— — — 23. Juli 1789 262
Beruhigung der Niederlande. Des Kaisers Krankheit.
— — — 27. Juli 1789 263
Die Krankheit des Kaisers. Die Ereignisse in Frankreich.
Die Flucht der Prinzen.
V. Arneth. Joseph n. Leopold. II. 24
— 370 —
Seite
Joseph an Leopold. 30. Juli 1789 263
Die Vorgftnge in Frankreich. Die Emigrirten. Der Car-
dinal von Brienne.
— — — 3. August 1789 265
Die Ereignisse in Frankreich. Die Königin Marie Antoi-
nette. Besserung der Gesundheit des Kaisers. Erzherzog Franz.
— — — 6. August 1789 —
Die Vorgänge in Frankreich. Ihre Rückwirkung auf die
Niederlande. Feldmarschall Hadik. Laudon übernimmt das
Commando. Allmälige Erholung des Kaisers.
-_ — — 10. August 1789 266
Die Niederlande. Zurückweisung der Türken aus dem
Banale. Unthätigkeit der Russen. Bevorstehende Abreise des
Erzherzogs Franz nach dem Kriegsschauplatze. Die Erzherzogin
Elisabeth. Besserung der Gesundheit des Kaisers.
_ __ — 13. August 1789 267
Die spanische Flotte in Livomo. Die Ereignisse in Frank-
reich. Die Gesundheit des Kaisers. Sieg des Prinzen Coburg.
Erfolge des Fürsten Hohenlohe in Siebenbürgen. Die beab-
sichtigte Belagerung von Belgrad. Laudon und Hadik.
— — — 17. August 1789 268
Operation der sich der Kaiser unterziehen muss.
— — — - 20. August 1789 ... 270
Die Operation.
— — — 27. August 1789 271
Allmälige Besserung. Ueberschwemmung in Laxenburg.
— — — 31. August 1789 272
Besserung der Gesundheit des Kaisers. Die Ueberschwem-
mung in Laxenburg. Abreise des Erzherzogs Franz. Die Erz-
herzogin Elisabeth. Uebersiedlung des Kaisers nach Hetzen-
dorf. Rückwirkung der Ereignisse in Frankreich auf die
Niederlande. Vorfalle in Lüttich. Volksbewegungen in Deutsch-
land.
— — — 3. September 1789 273
Clerfayt^s Sieg bei Schupaneck. Die Gesundheit Josephs.
Dessen Uebersiedlung nach Laxenburg.
__ _ — 10. September 1789 274
Seesieg der Russen über die Schweden. Rückzug der Tür-
ken aus dem Banat.
— — — 14. September 1789 —
Die Unternehmung gegen Belgrad.
— — — 17. September 1789 275
Mangel an Nachrichten von der Armee.
— 371 — ,
. Seite
Xoseph an Leopold. 21. September 1789 276
Uebergang der Armee über die Save.
— -— — 24. September 1789 276
Beginn der Belagerung von Belgrad. Manfredini's Ankunft.
— — - 1. Octöber 1789 . 277
Sieg des Prinzen von Coburg. Die Belagerung von Bel-
grad. Krankheiten bei der Armee.
— — — 5. October 1789 —
Einnahme der Vorstädte von Belgrad. Des Kaisers Gesund-
heitszustand. Rüekkehr nach der Stadt.
— — — 8. October 1789 .... 278
Die EreignisHe in Frankreich. Falsche Anklagen wider die
Kö.nigin. Josephs Gesundheit. Die Erzherzogin Elisabeth.
— — — 12. October 1789 -. . .279
Belgrads Eroberung.
— — — 15. October 1789 280
Sieg des Prinzen Hohenlohe in Her Walachei. Freuden-
feste in Wien.
— — — 19. October 1789 281
Die Einnahme von Semendria. Furchtbare Nachrichten
aus Frankreich.
— — — 22, October 1789 —
Die Niederlande. Die Zustände in Frankreich.
— — — 26. October 1789 282
Ueberschwemmungen in Tirol. Die Niederlande.
— — — 29. October 1789 283
Aufregung in den Niederlanden. Nachrichten aus Frankreich.
— — — 2. November 1789 —
Laudons Abreise von Belgrad. Rückzug der Türken nach
Nissa. Die Vorfälle in den Niederlanden.
_ _ — 5. November 1789 . . 284
Ereignisse auf dem Kriegsschauplatze und in den Nieder-
landen.
— — — 12. November 1789 286
Bombardement von Orsowa. Erkrankung der Erzherzogin
Marianne. Gesundheitszustand desr Kaisers.
— — — 16. November 1789 286
Glückwunsch zum Namenstage des Grossherzogs. Nach-
richten aus den Niederlanden.
— — — 19. November 1789 287
Verzögerung der Einnahme von Orsowa. Vorrückung in
der Walachei. Der Pascha von Scuta,ri. Die Ereignisse in den
Niederlanden.
24*
. — 372 -
Seit«
Joseph an Leopold. 23. November 1789 288
Tod der Erzherzogen Marianne. Gute Nachrichten vom v
Kriegsschauplatze. Ungünstige Vorfälle in den Niederlanden.
Besetzung der Stadt Gent durch die Insurgenten.
— — — 26. November 1789 289
Ueble Nachrichten aus den Niederlanden. Der Verlust von
Gent Abreise der Generalstatthalter. Bevorstehende Entsendung
des Grafen Cobenzl als bevollmächtigter Commissär. Rück-
wirkung dieser Ereignisse auf den Kaiser.
— — — 30. November 1789 290
Der Gesundheitszustand des Kaisers. Cobenzls Abreise.
Feldzeugmeister Graf d\Alton.
— — — 3. December 1789 .291
Die Ereignisse in den Niederlanden. D*Alton wird durch
den Grafen Ferraris ersetzt Die Haltung Frankreichs, Preus-
sens und Hollands. Der Gesundheitszustand des Kaisers. Wahr-
scheinlichkeit eines Krieges gegen Polen und Preussen.
— — — 6. December 1789 293
General Manfredini. Die Ereignisse in den Niederlanden.
Graf d* Alton. Ungewissheit des Friedens mit der Pforte. Feind-
selige Haltung Preussens und Polens. Des Kaisers Gesundheit.
— — — 7. December 1789 294
Die Niederlande.
— — — 10. December 1789 296
Das Verfahren der Preussen in Ltittich. Die Krankheit
des Kaisers. Sehnsucht nach baldigem Ende. Die letztwilligen
Anordnungen der Erzherzogin Marianne.
— — — 14. December 1789 297
Die Krankheit des Kaisers.
Leopold an Joseph. 14. December 1789 « . 298
Theilnahme an der peinlichen Lage des Kaisers. Die Er-
eignisse in Frankreich. Die Haltung Spaniens. Die Nieder-
lande.
Joseph an Leopold. 17. December 1789 302
Verschlimmerung seines Gesundheitszustandes.
— -— — 21. December 1789 —
Höchst ungünstige Nachrichten aus den Niederlanden. Die
Krankheit des Kaisers. ,,Geduld und Ergebung'^ ist seine Devise.
— — — 24. December 1789 803
Die Räumung Brüssels. Verzweiflung des Kaisers hierüber.
Sein Krankheitszustand.
— — — 28. December 1789 806
Die Krankheit des Kaisers. Die Ereignisse in den Nieder-
landen.
- 373 ~
Seite
Joseph an Leopold. 31. December 1789 305
Die Niederlande. Joseph nennt sich „den unglücklichsten
der Menschen. **
1790.
Seite
Joseph an Leopold. 4. Jänner 1790 307
Günstiger Verlauf der Blatternkrankheit des Erzherzogs
Rainer. Josephs eignes Uebelbefinden. Er hält die Nieder-
lande für verloren. Unwahrscheinlichkeit eines Friedens mit
der Pforte. Gewissheit eines baldigen Krieges gegen Preussen.
— — — 7. Jänner 1790 308
Die Niederlande. Ereignisse auf dem Kriegsschauplatze.
Feindliche Absichten des Königs von Preussen. Josephs
Krankheit.
— — -- 11. Jänner 1790 309
Die Niederlande. Die Blocade von Orsowa. Die Krankheit
des Kaisers.
— — — 14. Jänner 1790 310
Unternehmung des Obersten von Lipthay. Die Niederlande.
Die Krankheit des Kaisers.
— — — 18. Jänner 1790 —
Erfolg des Obersten von Lipthay. Die Blocade von Or-
sowa. Die Krankheit Josephs.
— — -— 21. Jänner 1790 311
Wahrscheinlichkeit einer Allianz Preussens mit der Pforte.
Gefahr für die Monarchie. Josephs persönliche Stimmung.'
— — — 26. Jänner 1790 . 313
Entschluss zur Nachgiebigkeit gegen Ungarn.
— — _ 28. Jänner 1790 —
Unentschlossenheit des Fürsten Kaunitz. Wirkungen der
Krankheit des Kaisers.
— — — 4. Februar 1790 314
Einsetzung der Conferenz für die politischen Geschäfte.
Fürst Kaunitz. Der Kaiser hat ihn fast zwei Jahre nicht
gesehen. Die ungarischen Angelegenheiten. Prächtiges Geschenk
der Grossherzogin für ihre Schwiegertochter. Abnahme der
Kräfte des Kaisers.
— — — 6. Februar 1790. 316
Arge Verschlimmerung der Krankheit des Kaisers. Drin-
gende Bitte an den Grossherzog, sich baldigst nach Wien
zu begeben. Joseph erklärt, nur dann ruhig sterben zu kön-
nen, wenn er den Staat in den Händen seines Oberhauptes
zurücklässt.
— 374 —
Seite
Joseph an Leopfid. 8. Februar 1790 318
Erneuerung seiner Bitte. Absicht den Qrossherzog zum
Mitregenten zu erklären.
Leopold an Joseph. 16. Februar 1790 —
Schmerz über die empfangenen Nachrichten. Bereitwillig-
keit zur Reise nach Wien. Vorbereitungen hiezu. Freude
über die Nachgiebigkeit des Kaisers gegen Ungarn. Wunsch '
nach Frieden mit der Pforte und Vermeidung des Krieges
gegen Preussen.
— — — 24. Februar 1790 320
Trauer 'über den plötzlichen Tod der Erzherzogin Elisa-
beth. Erkrankung des Grossherzogs.. Dessen baldigste Abreise
nach Wien.
Anhang. Note de S. M. VEmpereur Joseph sur la campagne de
1788 . 325
i
NAMENREGISTER.
Abdil Melak, Gesandter von Marokko, I, 149, 154, 162.
Acton, Joseph, neapolitanischer Minister, I, 226, 235, 260, 296, 303,
304, 310, 312, 314, 315, 319, 320. H, 1, 14, 36, 49, 59, 64, 67,
103, 153, 154, 161, 162, 166—168, 172, 173, 175, 176, 256.
Albani, Monsignor, I, 252.
Alvintzy, Joseph Freiherr v., General, II, 149, 327.
Amerika, I, 113, 128, 146, 249.
Anjejar, Marquis, I, 170.
Antwerpen, Bischof von, II, 285.
Aosta, Victor Emanuel, Herzog von, I, 187. II, 27, 29.
Arberg, Graf, General, II, 288, 289.
Armfeldt, Gustav Moriz von, I, 192.
Artois, Graf von, II, 92, 263, 264.
Aspremont-Linden, Franz Graf, Generalmajor, II, 194, 344.
Astnrien, Karl Prinz von, II, 23, 60.
Asturien, Marie ' Louise, Prinzessin von, I, 304, 315, 328. II, 23,
213.
Auersperg, Heinrich Graf, Hofkanzler, I, 129.
Auersperg, Joseph Franz Anton Graf, Bischof von Passau, I, 176.
Azara, Joseph Nicolaus, spanischer Gesandter in Rom, I, 304. II, 103.
B.
Baiern, I, 214, 216, 233, 237, 250, 253, 256, 258, 259, 260, 262,
264, 265, 267, 271, 276, 278, 283.
Baiern, Karl Theodor, Kurfürst von; v. Pfalz.
Bakunin, russischer Staatsbeamter, I, 119.
Barczow, russisches Hoffräulein, I, 338.
rt
— 376 —
Barczay, Gardist, I, 276.
Bardi, II, 132, 137.
Batthyany, Joseph Graf, Primas von Ungarn, I, 91, 102, 104—106.
Becker, Wilhelm Gottlieb, Professor, I, 273, 279.
Bedsborodko, russischer Staatsbeamter, I, 119.
Beharnik, Oberst, 11, 326.
Belgiojoso, Ludwig Karl Graf, I, 236, 236, 246, 256, 262, 314.
n, 99, 101, 107, 110.
Benkendorff , russischer Oberstlieutenant, I, 338.
Benkendorff, Frau von, I, 338.
Benucci, Francesco, Sänger, 11, 214, 219.
Bernis, Joachim Franz Graf von, Cardinal, I, 197.
Böhmen, I, 49, 129—131, 207.
BoUand, Madame, II, 86, 96, 97, 116, 121, 122, 135.
Boltz, Wilhelm, Oberstlieutenant, 1,31,34—38, 47,50, 87, 108, 115,
122—124, 160, 304, 306.
Borck, Frau von, I, 121, 341, 342.
Borkens, I, 123.
Bor OS de Rakos, Adam, Oberst, II, 354.
BouilU, Franz Marquis von, I, 226.
Bourbon, Herzog von, II, 263, 264.
Brambilla, Johann Alexander, Leibchirurg, I, 67, 272. U, 211, 270.
Brasilien, Joseph Prinz von, I, 174.
Brasilien, Benedicta Prinzessin von, I, 174.
Braunschweig-Lüneburg-Bevern, Karl Friedrich Ferdinand
Herzog von, I, 246, 258, 298.
Brechainville, Ludwig Graf, Generalmajor, II, 194, 199, 338, 340,
342, 346, 346, 349, 361.
Brdme, Louis Joseph Arborio Gattinara Marquis de, II, 29, 33.
Breteuil, Ludwig August Baron von, französischer Botschafter, 1,99.
Brienne, Cardinal von, II, 266.
Brissac, M. de, U, 14, 21, 41, 162, 167.
Brognard, Wenzel von, Official der Staatskanzlei, H, 187, 190,
Browne, Graf, I, 266, 270.
Bulgakow, russischer Gesandter, II, 115, 127.
Buoncompagni, Cardinal, I, 112. II, 89, 90, 98, 104, 174.
Calonne, Karl Alexander von, französischer Minister, II, 69.
Caprara, Johann Baptist, Nuntius, I, 262, 263. II, 49.
Caprara, General, I, 262.
Caraccioli, Domenico Marchese, II, 3, 14, 163, 174.
Carafa-Colubrano, Fürst, II, 103.
— 377 —
Cariati-Spinelli, Fürst, U, 21.
Casti, Johann Baptist, Dichter, ü, 153.
Chahlais, Benedict Moriz Herzog von, I, 202.
Chanclos, Josepha Gräfin, I, 121, 130, 220, 342. n, 22, 163, 165,
241.
Choiseul-Gouffier, Graf, I, 256, 262, 267, 278. II, 115, 239.
Clemens, sächsischer Resident, II, 77.
Clerfayt, Graf Franz Karl, Feldzeugmeister, n, 208, 273, 274,
353.
Cobani, Arzt, I, 201.
Cobenzl, Johann Ludwig Graf, Gesandter in Russland, I, 10, 13,
15, 118, 119, 166, 170, 180, 191, 235, 238, 254, 275, 326, 327.
Cobenzl, Johann Philipp Graf, Vicekanzler, I, 81, 82. II, 290, 291,
295, 301, 302, 304, 305, 314.
Cobenzl, Gräfin, I, 118.
Coburg, Prinz Friedrich, Feldmarschall, II, 182, 189, 255, 268, 277,
287, 330, 332, 348, 351, 352.
Colloredo, Franz Graf, I, 210, 217, 352, 353. II, 155.
Colloredo, Maria Eleonora Gräfin, II, 86, 96, 97.
Colloredo, Fürst Rudolph, U, 143.
Cond6, Prinz von, II, 263, 264.
Consoli, Sänger, I, 201.
Conti, Prinz von, II, 263.
Cottulini, Sängerin, I, 282.
Crequi, Marquis de, II, 14.
Czernitscheff, Graf, II, 153.
Dänemark, I, 10, 152, 327. II, 233. •>
Dänemark, Christian VII., König von, I, 325.
Dänemark, Caroline Mathilde, Königin von, I, 303. II, 23.
Dänemark, Friedrich, Kronprinz von, I, 325.
D'Alton, Richard Graf, Feldzeugmeister, II, 289->291, 293,300,351,
353.
Derichs, Hauptmann, U, 77.
De Vins, Joseph Nicolaus Freiherr, Feldzeugmeister, II, 163, 188,
337.
Diesbach, Johann, Abb6, I, 266, 270.
Dietrichstein, Johann Karl Walther Fürst, Oberststallmeister,
II, 27, 54, 111.
Dietrichstein, Marie Christiane Josepha Fürstin, U, 27, 54.
Dolgoruki, Fürst, H, 190.
Doria, Monsignor, I, 80.
— 378 —
Durazzo, Ernestina Aloisia Marchesa, I, 201.
Durienx, Barbara, Kammerfrau, I, 130.
E.
Edling, Graf, Erzbischof von Görz, I, 175.
Elisabeth, Erzherzogin, I, 1, 21, 27, 29, 32, 130, 161. U, 41, 42,
65, 116.
Elisabeth, Erzherzogin, Gemalin des Erzherzogs Franz; v. Würt-
temberg.
Enghien, Herzog von, II, 264.
England, I, 6, 112, 113, 127, 128, 144, 149, 151, 152, 185, 243,
249, 283. II, 133, 141, 230, 247, 299, 300, 307.
England, Georg in., König von, I, 146.
Erthal, Friedrich Karl Joseph von, Erzbischof von Mainz, 11,71, 75.
Esterhazy, Franz Graf, ungarischer Hofkauzier, I, 262, 300.
Eugen von Savoyen, Prinz, II, 331.
Eybel, Joseph Valentin, Professor, II, 72.
F.
Falkenstein, angebliche Gräfin, II, 168, 191^193, 197.
Fabri,. Michael von, Generalmajor, II, 333.
Fabris, Dominik Tomiotti de, Feldmarschall- Lieutenant, I, 242.
II, 182, 223.
Ferdinand, Erzherzog, I, 54,65, 83, 157, 161, 202, 206, 285. II, 38,
39, 41, 42, 45, 53, 116.
Ferdinand, Erzherzog (Sohn Leopolds), I, 55, 56. II, 4, 5, 12, 20,
24, tl, 57, 62, 64, 65, 68, 76, 85, 96, 118, 160, 245, 246.
Ferdinand, Erzherzog (Sohn Ferdinands), I, 203.
Ferraris, Joseph Johann Graf^ Feldzeugmeister, II, 292, 300.
Fersen, Axel Graf, I, 192. *
Firmian, Leopold Ernst Joseph Graf, Bischof von Passau, I, 102,
104, 156.
Florida-Bianca, Graf; v. Monino.
Fontana, Feiice, I, 207.
Forgach, Nicolaus, Graf, I, 240.
Fox, Charles James, englischer Minister, I, 127.
Frankenberg, Graf Johann Heinrich, Cardinal, Erzbischof von
Mecheln, II, 285.
Frankreich, I, 6, 112, 127, 128, 132, 133, 140, 142, 144, 145, 148, 152,
153, 158, 163, 165, 167—169, 176, 178, 180, 184, 190, 191, .204,
209, 210, 214, 228, 232-2.34, 236, 239, 243, 244, 246—248, 250,
— 379 —
253, 264, 266, 260, 261, 264, 266, 268, 270. 276, 281—284, 297,
299, 301, 302, 360. II, 36, 40, 98, 99, 104, 106, 114, 119, 133,
138, 141, 142, 146, 160—163, 164, 172. 230, 234, 247, 265, 267,
260, 263—268, 271, 276, 281—83, 292, 293, 295, 299, 301.
Frankreich, Ludwig XVI., König von, I, 2, 172, 173, 185, 237,
238, 249, 258, 259, 262, 266, 267, 271, 278, 296, 298. II, 14, 69,
145, 146, 161, 234, 266/267, 260, 263-266, 281, 283, 299.
Frankreich, Marie Antoinette, Königin von, I, 60, 61, 172, 180,
184, 186, 224, 237, 288, 249, 261, 262, 266, 298. II, 69, 73, 100,
145, 146, 263—266, 271, 278, 281, 282, 299.
Frankreich, Dauphin von, I, 60, 99, 100. II, 146, 164, 265.
Frankreich, Elisabeth, Prinzessin von, II, 29.
Frankreich, Marie Therese, Prinzessin von, II, 146.
Franz, Erzherzog, I, 11, 13—16, 20, 40, 48—60, 54, 67, 58, 66, 71,
76—79, 86, 89, 94, 99, 115, 120, 134, 171, 206, 208, 210, 213,
216-221, 223, 224, 228, 234, 257, 262, 263, 269, 270, 284, 286,
325, 327—331, 341, 342, 344-366. II, 2, 4^ 16, 16, 19, 22, 24—26,
28, 34, 44, 60, 61, 66, 61, 64, 65, 68, 79, 80, 85, 101, 114, 116,
118, 119, 120, 122, 132, 134, 142, 147, 149, 165—160, 172,
177—179, 181, 184, 187, 190, 193, 200, 217, 226, 227, 241, 265,
267, 272, 274, 276, 277, 283, 290, 291, 293.
Franz, Erzherzog (8ohn Ferdinands), I, 203.
Freteau, Emanuel, II, 146, 151.
Fries, Freiherr von, II, 153.
Gr.
Gabrielli, Sängerin, I, 252.
Qaleppi, Lorenzo Conte, Uditore der Nuntiatur, I, 253. II, 103, 153.
Galitzin, Fürst, russischer Gesandter, II, 136, 166.
Galizien, I, 320. II, 293, 294, 301, 308.
Gallo, Marzio Mastrilli Marchese di, II, 8.
Garampi, Giuseppe, päpstlicher Nuntius in Wien, I, 80, 91.'
Gavre, Herzog von, II, 310.
Gazinelli, Feldmarschall-Lieutenant, II, 183.
Gemmingen, Sigmund Freiherr von, Feldmarschall -Lieutenant,
II, 149, 327.
Giorgi, Courier, I, 172, 183. O, 158.
Giraud, Bernardino, Cardinal, I, 112.
GoösB, Johann Karl Graf, I, 146.
Gravina, II, 3.
Greppi, II, 14.
Griechenland, I, 113, 133, 145, 210'.
Grimberghen, Fürst von,* II, 310.
— 380 -
Günther, Johann Valentin, I, 125, 126, 181.
Guttenberg, Josepha von, Kammerdienerin, I, 2.
Hadik, Graf Andreas, Feldmarschall, II, 226, 227, 266, 268.
Hadrawa, Legatioossecretär, 11, 73.
Halil Hamid Pascha, Grosswesir, I, 173.
Hatrach, Graf Johann von, Generalmajor, II, 361, 353.
Hartig, Graf Franz Anton, II, 155.
Hartig, Gräfin Eleonora, 11, 155.
Hassan Pascha, Kapadan Pascha, später Gross wesir, I, 173. H,
302, 333.
Hay, Johann Leopold, Bischof von Königgrätz, I, 70.
Heister, Johann Gottfried Graf, II, 39.
Herberstein, Graf, Bischof von Linz, I, 156.
Herbert, Freiherr von, Internuntius, I, 209. II, 115, 117, 175.
Herbert, Freifrau von, 11, 153.
Hertzberg, Graf, preussischer Minister, U, 35.
Hoensbroech, Bischof von Lüttich, U, 272, 296.
Hohenheim, Franziska Gräfin von, I, 108 — 111.
Hohenlohe-Kirchberg, Fürst Friedrich Wilhelm, Feldzeugmeister,
n, 223, 268, 280, 287.
Holland, I, 37, 128, 140, 148, 154, 209, 227, 230—233, 236—239,
245-248, 253, 258, 259, 262, 267, 268, 274—277, 279, 281,
282, 288, 291, 292, 293, 295—302, 313, 316. II, 133, 141, 247,
272, 292, 298, 300, 307.
Holstein-Oldenburg, Friederike Elisabeth Amalie Prinzessin von,
I, 320, 324.
Holstein- Oldenburg, Peter, Herzog von, I, 324.
Hont heim, Johann Nicolaus, Weihbischof von Trier, I, 252.
Horjah, Insurgentenführer, I, 230, 241, 261, 264.
Hrzan, Franz Xaver Graf, Cardinal, I, 81, 88, 107, 112.
Hussey, I, 112.
Italien, I, 113, 133, 144, 186, 189. II, 43, 47.
J.
Johann, Erzherzog, I, 76.
Joseph, Erzherzog, I, 24, 29, 30. II, 26, 52, 57, 61, 64» 66, 76, 77. ^
— 381 —
Ju88uf Pascha, Grosawesir, II, 177, 179, 180, 183, 184, 186,
199, 208, 331—384, 338, 340, 346, 348, 350.
Jnssupuff, Fürst, I, 338.
K.
Kagenegg, Friedrich Graf, Gesandter, I, 177. II, 76.
Kagenegg, Gräfin, I, 177.
Karl, Erzherzog, 1,223. II, 26, 62, 57, 61, 64, 65, 68, 76, 160, 161,
179, 184, 197.
Kaunitz, Graf Franz Wenzel, Feldzeugmeister, I, 285.
Kaunitz, Wenzel Fürst, I, 47, 102, 165, 169, 198, 205, 208, 238,
248, 272, 274, 283. H, 3, 35, 36, 83, 143, 247, 249, 313—315.
Kinsky, Graf, General, I, 182.
Kinsky, Graf PhiHpp, U, 111.
Kinsky, Gräfin Maria Theresia, II, 111.
Kleb eck, Wilhelm Freiherr von, Feldmarschall-Lieutenant, 11, 279.
Klocska, Iwan, I, 261, 264.
Köln, Kurfürst von; v. KOnigsegg.
Köln, Kurfürst von; v. Maximilian, Erzherzog.
Königsegg-Rothenfels, Maximilian Friedrich Graf, Kurfürst von
Köln, I, 208, 237.
Köpiro, Oberstlieutenant, II, 348.
Kray, Paul von, Feldmarschall-Lieutenant, I, 261.
Kruse, russischer Leibarzt, I, 339.
Kurakin, Fürst, I, 122, 338.
Kurland, Prinz Karl von Sachsen, Herzog von, II, 7.
- L.
Lagusius, Georg Hasenöhrl von, Leibarzt, I, 223. II, 1, 2, 321.
Lambesc, Prinz von, II, 265.
Langenau, Alois, Abb6, I, 71, 111, 134, 342, 343.
Langlois, Peter Freiherr von, Feldzeugmeister, II, 183.
Las Casas, I, 303, 306, 307, 309, 312, 314, 315, 317. II, 3, 222.
Lascy, Franz Moriz Graf, Feldmarschall, I, 216, 223, 294. II, 143,
195, 227, 249, 315, 331, 343.
La Sollaye, Freiherr von, Hofrath, II, 138.
La Tour, französischer Offizier, I, 191.
Laudon, Ernst Gideon Graf, Feldmarschall, I, 294. XI, 227, 258,259,
261, 266, 268, 273—275, 277, 280, 282—284, 287, 309, 337, 348,
353.
Lauer, Franz von, Oberst, II, 342.
— 382 -
Laveran, Zahnarzt, I, 340.
Lebzeltern, Adam, bevollmächtigter Minister in Lissabon, I, 170.
Lehrbach, Franz Sigmund von, I, 215, 267. II, 41.
Leopold, Erzherzog, I, 66, 202. II, 26, 62, 57, 61, 64, 65, 68, 76.
Leopoldine,. Erzherzogin, I, 203.
Leyden, Baron, I, 292.
Liechtenstein, Franz Joseph Fürst, I, 46.
Liechtenstein, Karl Fürst, I, 177. 11,182, 186, 225, 227, 329, 830,
337.
Liechtenstein, Leopoldine Fürstin, I, 46.
Ligne, Fürst de, U, 69.
Lilien, Freiherr von, Generalmajor, II, 199, 346, 349, 352.
Linguet, Simon Nicolaus Heinrich, I, 243, 254.
Lipthay, Anton von, Oberst, II, 310, 311.
Löhr, Johann Friedrich, Freiherr von, I, 114.
Lombardie, I, 203, 205, 206.
Lncchesini, Hieronymus, Marquis, II, 98, 104.
Lüttich, Bischof von; v. Hoensbroech.
M.
Mähren, I, 49.
Mailand, Erzbischöf von; v. Visconti.
Maillebois, Yves Marie Graf von, französischer Generallieutenant,
I, 298.
Mainz, Kurfürst von; v. Erthal.
Mamachi, Dominicaner, 11, 72.
Manfredini, Friedrich Ferdinand, Marquis, I, 205, 210, 353. II, 68,
76, 276, 293, 294, 320.
Marchesini, I, 292.
Marcolini, Graf, 1, 188, 279. 11,9,11—14, 19, 20, 26,27, 29—32,37,
44, 50, 63, 85.
Marianne, Erzherzogin, I, 1, 21, 27, 29, 32, 87, 130, 150, 161. 11, 6,
41, 42, 65, 286, 288, 296.
Marianne, Erzherzogin (Tochter Leopolds), II, 33, 50, 61, 65.
Maria Beatrix von Este, Erzherzogin, I, 54, 124, 157, 161. II, 38,
39, 41, 42, 152.
Marie Clementine, Erzherzogin, I, 24, 29, 30. II, 154.
Marie Christine, Erzherzogin, I, 1, 4, 5, 8, 21, 27, 29, 30, 32, 37,
38, 130, 292, 323. II, 1, 3—7, 9, 69, 93, 98—101, 105, 107, 116,
117, 121, 122, 145, 147, 289, 317.
Maria Theresia, Kaiserin, I, 1, 5—8, 20, 240, 316. II, 191, 210,
211, 318.
Maria Theresia, Erzherzogin (Tochter Ferdinands), I, 202. II, 185.
— 383 —
Markoff, Graf, russischer Gesandter, I, 119, 209, 210.
Marokko, Kaiser vod, I, 162.
Marsico, Fürst, II, 103.
Martini, Karl Auton Freiherr vod, I, 114.
Marulli, I, 196.
Maximilian, Erzherzog, Kurfürst von Köln, I, 1, 7, 20, 21, 28, 80,
82, 91, 92, 102, 104, 105, 114, 161—167, 161, 199, 208, 220, 235—237,
245, 292, 296, 306—307, 313. II, 109, 143, 144, 147, 150, 157, 296.
Maximilian, Erzherzog (Sohn Ferdinands), I, 203.
Mayer, Albert Edler von, I, 98.
Memisch Pascha, Seriasker, II, 362.
Mercy d'Argenteau, Graf, Botschafter, I, 149, 166, 168, 173, 198,
228, 236—238, 248, 250, 261, 262, 268, 272, 295, 296. II, 100,
263, 264.
Marsch, van der, Johann Andreas, 11, 289.
Merveldt, Maximilian Graf, Rittmeister, II, 339.
Metzburg, Franz Leopold Freiherr von, Geschäftsträger, I, 274, 280,
281.
Migazzi, Christoph Graf, Erzbischof von Wien, I, 147, 342. II, 156.
Mikowiny, Ludwig von, Generalmajor, II, 327.
Mittrowsky, Graf Joseph, Feldzeugmeister, II, 182, 327.
Mocenigo, Graf, I, 247. II, 124, 125, 127, 129, 132, 136.
Monino, Franz Anton, Graf von Florida-Bianca. I, 310, 316. II, 18,
19, 23, 24, 27, 103, 256, 299.
Montenegro, II, 190.
Montoja, General, I, 79.
Murray, Joseph Jacob Graf, Feldzengmeister, II, 104, 147, 150.
Nadasdy, General, II, 149.
Nagels, I, 123.
Nassau-Siegen, Karl Heinrich, Prinz, II, 185, 333.
Neapel, I, 156—157, 186, 260, 263, 268, 304, 306, 308, 318. II, 1,
24, 25, 28, 103, 104, 153, 154, 161, 229, 233, 259, 267.
Neapel, Caroline, Königin von, I, 36, 121, 164, 170, 194, 198, 199,
217, 225-227, 234, 235, 249, 255, 275, 284—286, 289—291,
295-297, 303—320. U, 3, 6, 8—16, 20, 21, 23—26, 27—29, 31,
35-37, 41, 42, 44, 49, 56, 59, 64, 66, 67, 73, 103, 153, 164, 161,
162, 164, 166—168, 173-176, 187, 191, 218, 219, 221—223,
225—229, 235, 252, 256.
Neapel, Ferdinand, König von, I, 160, 197—200, 217, 226, 227,' 235,
275, 284, 286, 291, 295—297, 299, 303, 305, 307, 309—317, 319,
320. II, 6, 8, 13—16, 21, 35, 36, 37, 40, 42, 44, 47, 49, 66, 59,
— 384 —
64, 67, 76, 163, 161, 166—168, 173-176, 187, 191, 219,221,
224, 234, 236, 262, 266-267.
Neapel, Prinz Franz von, I, 316.
Neapel, Prinz Jannarins yon, U, 222.
Neapel, PrinzeMin Louise von, II, 6, 31.
Neapel, Prinz Lndwig von, 11, 226.
Neapel, Prinzessin Maria Theresia von, II, 6, 9, 12, 20, 24, 29, 31.
Necker, Jacob, französischer Minister, I, 19, 23, 24. II, 260.
Nelidoff, rassisches Hoffränlein, I, 338.
Nicolai, Ludwig Heinrich, Schriftsteller und Bibliothekar, I, 122, 339.
Niederlande, I, 21, 33, 34, 36—38, 212, 214, 216, 228, 233, 236,
237, 243, 246, 250, 253, 266, 260, 262, 264, 266, 267, 271,
276—279, 282, 286, 302, 306. II, 17, 43, 47, 82—86, 88—94,
98—102, 104—110, 112—116, 117, 142, 146, 147, 160, 268, 262,
266, 272, 281—296, 298—310, 313.
Noailles, Emanuel Marquis von, französischer Botschafter, I, 238,
247.
Normaudie, Herzog von, H, 146, 154.
Noronha, Marquis von, I, 170, 171, 187.
o.
O'Kelly, J. Dillon Graf, Gesandter, II, 9, 11, 16, 30, 68, 152, 164.
Onesti, Monsiguor, I, 80, 103, 106. II, 63.
0*Reilly, Andreas Graf von, Major, II, 344.
Orleans, Herzog von, U, 146, 161, 292, 299.
Osnabrück, Prinz Friedrich, Bischof von, I, 218, 220—226, 227.
Ostgothland, Herzog Friedrich Adolph von, I, 179.
Pachta, Grftfin, I, 263.
Panin, Nikita Graf, russischer Minister, I, 118, 326.
Papilla, Paul Freiherr von, Generalmajor, EL, 188, 194, 335—337.
Parhamer, P. Ignaz, Director des Waisenhauses, I, 98.
Parma, Amalie Herzogin von, I, 161, 179, 182, 192, 194, 196—199,
213, 214, 276, 296. H, 7.
Parma, Ferdinand, Herzog von, I, 193, 344, 361.
Parma, Prinz Ludwig von, U, 164.
Pas sau, Bischof von; v. Auersperg und Firmian.
Pen, Ladj, gebome Kölbel, II, 146, 153.
Peretti, Oberst, I, 171, 172, 186.
— e385 —
Pfalz, Elisabeth Auguste, Kurfürstin von der, II, 41, 44, 46, 49, 53.
Pfalz, Karl Theodor, Kurfürst von der, I, 212, 221, 228,233. II, 41,
45, 46, 53, 296.
Philippi, Alois Moriz Graf, Major, I, 59.
Piccolomini, Graf, I, 209.
Piemont, Adelheid Clotilde, Prinzessin von, I, 124. II, 29.
Pignatelli, Francesco, I, 303, 304, 307, 310, 313, 315, 317, 319.
II, 3.
Pius VI., Papst, I, 12, 69, 70, 75, 78—82, 84, 86-112, 124, 133,
136, 151, 156, 158, 160, 176, 181, 189-191, 194, 196, 252. 11, 63,
70, 72, 73, 75, 76, 88, 89, 90, 98, 103, 104, 126, 153, 174, 191,
317.
Pleschief, russischer Oberst, I, 122, 338.
Podewils, Graf, preussischer Gesandter, II, 132, 135.
Polen, II, 197, 212, 247, 248, 293,. 294, 298, 308.
Polignac, Herzogin von, II, 69, 265.
Pouiatowsky, Fürst Joseph, II, 177.
Portugal, I, 170, 171, 174, 188.
Portugal, Johann Prinz von, I, 170.
Portugal, Maria Anna, Königin von, I, 328.
Posch, Johann Adam Freiherr von, I, 69, 97.
Potemkin, Gregor, Fürst, I, 119, 169. II, 146, 152, 165, 186, 189,
197, 333.
Pozzi, Sängerin, I, 207.
Prestanti, Courier, I, 257.
Preussen, I, 85, 233, 261, 271. II, 98, 230, 247, 293, 295, 299, 300.
Preussen, Friedrich IL, König von, I, 2, 9, 10, 11, 13, 14, 33, 37,
38, 125, 127, 140, 142, 144, 146, 165, 168, 169, 173, 181, 184,
186, 232, 239, 247-249, 258, 259, 264, 267, 268, 283, 301,
325—327, 350. II, 6, 18, 34, 35.
Preussen, Friedrich Wilhelm IL, König von, I, 117, 326. II, 18,
35, 68, 71, 98, 100, 104, 107, 114, 133, 141, 212, 247, 248, 292,
294-296, 298, 303, 307, 308, 311, 314, 320.
Preussen, Friedrich Wilhelm, Prinz von, I, 326, 342.
Preussen, Heinrich, Prinz von, I, 115 — 117.
Preussen, Ludwig, Prinz von, II, 71.
Proli, Grafen, I, 35, 38, 123.
Q.
Quinones, I, 304, 309, 315. 11, 221, 222, 223.
Quosdauovich, Oberst, II, 337.
V. Arnoth. Josepb und Leopold. II. 25
- 380
Rainer, Erzherzog, II, 307, 308.
Rasumowskj, Andreas, I, 235, 251, 252.
Reich, Hofgärtner, I, 269, 294.
Reick, russischer General, II, 140.
Reiner, Secretär, II, 66, 67, 70.
Repnin, Fürst, I, 118.
Reu SS, Fürst Heinrich XV., Oberst, II, 345.
Revitzky, Karl Freiherr von, Gesandter, I, 181, 238.
Richecourt, Karl Graf, Feldmarschall- Lieutenant, I, 307 — 309,
311-313. II, 3, 6, 66, 66, 67, 70, 73, 153.
Richecourt, Grä6n, I, 307, 311.
Riedl, Professor der Mathematik, I, 223.
Rochambeau, Johann Baptist, Graf, II, 98.
Roh an, Louis Fürst, Cardinal, I, 297, 298, 302.
Rollin, Franz Xaver, Oberst, II, 156, 159—162, 165, 241.
Rom, II, 43, 48.
Romanzow, Peter Graf, I, 221, 257, 261, 264, 277. II, 186, 190,
197, 210, 332, 333, 348, 351.
Rosenberg, Franz Graf, Oberstkämmerer, I, 104, 114, 216, 249,311,
315.
Rotten hau, Heinrich Graf, II, 39.
Roüvroy, Theodor Freiherr von, Feldzeugmeister, II, 176, 327.
Rudolph, Erzherzog, II, 158.
Russland, I, 6, 12, 19, 27, 32, 33, 113, 141, 146—150, 160,
163—165, 178, 180, 181, 183, 190, 191, 209, 210, 212, 215, 228,
232—234, 251, 252, 254, 258, 262, 265, 270—272, 275, 277, 283,
284, 302, 324, 325, 328, 333, 339, 350. II, 56, 99, 113, 115, 117,
119, 120, 127, 130, 133, 138, 140, 142, 144, 146, 148, 151, 152,
163, 165, 177, 179, 180, 181, 183, 184, 186, 189, 190, 193, 196,
197, 205, 206, 210, 212—215, 218, 220, 225, 234, 241, 243,
247—249, 255, 267, 274, 293, 298, 325, 331 -333, 348.
Russland, Katharina IL von, I, 2, 9-11, 13, 26, 30, 37—39, 43,
48, 54, 56, 62, 64, 107, 116, 117, 119, 121, 128, 133, 139, 140,
142-145, 152-154, 157, 158, 166—170, 172, 173, 176,185,204.
235, 238, 246, 247, 249, 257, 274, 277, 288, 293, 308, 323, 326,
338, 341. n, 35', 39, 43, 44, 49. 74, 78, 80, 81, 151, 165, 190,
213, 248, 325.
Russland, Paul, Grossfürst von, I, 9, 14, 39-43, 46 -48, 51, 56, 60-62,
67, 68, 72-77, 80, 82-86, 89, 91, 94, 98, 99, 101, 103, 104, 108,
115—120, 122, 124, 125, 128, 130, 131, 133—136, 170, 238, 247,
316, 323—327, 332—339, 341. TI, 248.
— 387 —
Riisslaod, Marie Feodorowna, Grossfürstin von, I, 9, 10, 13, 14,
39-45, 47, 48, 51, 53, 64, 56, 60-64, 67, 68, 72-77, 80, 82—86,
89, 92, 94, 98, 99, 101, 103, 104, 108, 116-122, 124, 126, 130,
131, 133, 135, 136, 170, 238, 247, 316, 323-327, 332-339, 341,
342. II, 4.
s.
Sabatier, Abb^, II, 146, 161.
Sachsen, I, 281. II, 9, 12, 23, 27, 37, 44, 46, 50, 72, 85, 86, 94,
103, 132, 134.
Sachsen, Amalie, Kurfürstin von, I, 273.
Sachsen, Anton, Piinz von, I, 188, 273, 279—281. II, 6, 7, 18, 77,
78, 82, 97, 111, 137, 162.
Sachsen, Caroline, Prinzessin von, II, 31, 97.
Sachsen, Friedrich August, Kurfürst von, I, 188, 273, 279, 280.
II, 7, 11, 18, 30—32, 68, 77, 78, 80, 87, 94-97, 106, 111, 114,
116, 121, 128, 132.
Sachsen, Kunigunde, Prinzessin von, II, 66.
Sachsen, Maximilian, Herzog von, I, 280. II, 7, 12, 31.
Sachsen-teschen, Albert, Prinz von, I, 4, 27, 38, 228, 236—237,
246, 266, 262, 323. II, 3, 4, 6, 93, 98-101, 106, 107, 146, 147,
289.
Salis, neapolitanischer General, II, 166, 167, 176.
Sambuca, Marquis de la, I, 1'35, 303, 304, 312, 314, 319. II, 1, 3.
Sandoz de Kollin, preussischer Gesandter, II, 18, 23.
Sansevero, Chevalier, II, 191.
Sardinien, II, 29, 33, 44, 46, 60.
Sardinien, Victor Amadeus III., König von, I, 186, 188, 281. If,
114, 186.
Sardinien, Maria Antouia, Königin von, I, 188, 279.
Sarti, Giuseppe, Coinpositeur, I, 292.
Sauer, Wenzel, Graf, II, 39.
Schabbas Girai, Chan der Tartareii, II, 333.
Schönfeld, Graf, sächsischer Gesandter, II, 106, 111, IN, 121, 124,
126, 128, 132, 135, 136.
Schröder, Gottfried Freiherr von, General, II, 285, 289.
Schulz, Oberstlieutenant, I, 243.
Schwarzen berg, Fürst Johann, II, 225.
Schweden, I, 152. II, 197, 230, 233, 274, 333.
Schweden, Gustav III., König von, I, 177—179, 182, 191, 192,
194—197, 210. II, 151, 190, 191.
Schweden, Sophie Magdalene, Königin von, I, 177.
Scutari, Pascha von, II, 186, 190, 285, 287.
Seddeler, Freiherr von, Logationsratli, I, 288, 293.
25*
— 388 —
Scgur, Ludwig Philipp Graf, französischer Gesandter, 11, 162.
Sei im m., Suiten, n, 257.
Serra Capriola, Herzog, neapolitanischer Gesandter, II, 162.
Seratti, II, 136.
Siehenbflrgen, I, 129, 230, 231, 240-242, 250, 261, 254, 256,
269—261, 264. II, 17, 40.
Skayronskj, Graf, I, 234.
Soltikoff, rassischer General, I, 122, 338. II, 333.
Somma, Tomaso, neapolitanischer Gesandter in Wien, II, 8.
Spanien, I, 132, 186, 260, 263, 268, 296, .303, .305, 307, 314. II, 8,
35, 42, 47, 104, 227, 230, 233, 259, 299.
Spanien, Karl III., König von, I, 56, 68, 64, 112, 113, 171, 217,
226, 227, 235, 304, 310, 315, 317, 319, 320, 344. II, 3, 14, 18,
19, 21, 23, 24, 27, 36, 37, 40, 49, 59, 64, 191, 217—219.
Spaniea, Karl IV., König von, II, 219, 221, 222, 224, 234, 235,
255, 256, 267, 299. v. Asturien, Prinz von.
Spanien, Maria Louise, Königin von, II, 266, 299. v. Aatarien,
Prinzessin von.
Spanien, Infant Don Carlos, II, 213.
Spanien, Infant Don Ferdinand, II, 60.
Spanien, Infant Don Gabriel, II, 213.
Spanien, Infantin Maria Anna Victoria, II, 213.
Spanocchi, Hauptmann, I, 210—212, 214—216. II, 77.
Spanocchi, Senator, I, 211.
Sparre, Karl Freiherr, I, 192.
Spielmann, Anton von, Hofrath, II, 314, 315.
Spinelli, Ferdinand, Cardinal, II, 3.
Spl^nyi, Gabriel Freiherr von, Feldmarschall-Lieutenant, ü, 352.
Staader von Adelsheim, Joseph Freiherr von, Generalmajor
n, 329, 349, 351.
Starhemberg, Fürst Georg Adam, II, 143, 315.
Starhemberg, Graf Joseph, II, 64.
Starhemberg, Gräfin Maria Innocentia, II, 64.
Steckhoven, Hofgärtner, I, 100.
Stein, Major, II, 336.
Steinmetz, Nicolaus Freiherr von, Generalmajor, II, 328.
Stephani, Courier, II, 123.
St^rnberg, Graf, Kämmerer, I, 109.
Störck, Anton Freiherr von, Leibarzt des Kaisers, II, 2, 211, 229, 279.
Störck, Matthäus Freiherr von, Leibarzt des Grossherzogs, II, 321.
Störck, Frau von, I, 67, 68, 71, 76, 77.
Streins, Courier, II, 109.
Stuart, Kari Eduard von, I, 160, 161, 191.
Stürmer, Ignaz, Dolmetsch, U, 208, 209.
— 389 —
Stutterhoim, Heinrich Gottlob von, sKolisiscIier Minister, II, 58,72,
100, 111.
Sussini, Modellateur, I, 272.
Snwarow, Alexander, russischer General, II, 140.
Therese, Erzherzogin, I, 72, 170, 171, 174, 187, 188, 273, 274,
279—281. II, 7, 9, 11, 12, 13, lö, 27, 29-32, 42, 45, 46, 49,
50, 63, 61, 63, 65, 77—80, 82, 84—87, 94—97, 100, 101, 105,
106, 109, 110, 114-117, 121 — 124, 127, 130—133, 137, 152, 154,
197.
Thürheim, Christoph Graf, II, 39.
Thugut, Freiherr von, Gesandter, II, 73, 162, 168, 169, 173-176,
189, 218, 221, 235, 252.
Thurn, Franz Graf, Feldmarschall-Lieutenant, I, 138, 141. II, 96,
121, 141.
Toscana, I, 205, 206, 208, 209, 344. II, 57, 62.
Toscana, Marie Louise, Grossherzogin, I, 3, 4, 6, 11—14, 16 — 18,
24, 33, 34, 44—47, 49, 51, 52, 54—56, 61, 64, 66-69, 72, 75,
76, 81, 83, 84, 89, 93, 115, 132, 135, 139, 141, 155, 162, 170,
177, 188, 198, 200, 212, 222, 228, 234, 255, 260, 274, 279, 291,
295, 307, 311, 312, 317, 320, 331, 337, 352, 354, 355. II, 13, 15,
18, 19, 21—24, 26, 29, 33^ 37, 38, 40, 42, 45-47, 63, 82, 97,
104, 114, 118, 138, 166, 172, 179, 197, 202, 215—219, 221, ^23,
236, 242, 245, 315.
Trauttmansdorff, Graf Ferdinand, II, 103, HO, 147, 258, 293,
300.
Türkei, I, 113, 117, 128, 133, 140-142, 144—147, 149, 153, 165,
267-170, 173, 180, 181, 183—186, 208—210, 232, 233, 236,244,
247—249, 256, 258, 268, 277, 283, 301. II, 113, 115—117, 119,
127, 133, 140, 148, 152, 156, 159, 165, 178, 180—184, 186—189,
193, 196—199, 201, 203-212, 218, 225, 227, 230, 239, 241, 247,
248, 256, 257, 266, 273—275, 280, 284—287, 292, 294, 298,
307—311, 314, 320, 326—364.
Turati, Oberstlieutenant, II, 334.
u.
Ungarn, I, 106, 129, 162, 230, 231, 234, 239, 242, 244, 250, 251,
266, 262, 266, 269, 270, 276, 281, 293, 296, 298—300, 302, 320.
II, 2, 6, ,8, 17, 20, 43, 47, 139, 141, 293, 300, 308, 313, 315, 320.
Ursel, Herzog von, II, 310.
- 390 —
V.
Vecsey, Sigbert Freiherr von, General, II, 267, 341.
Veigl, Joseph, Geechäfteträger, I, 47, 172, 186, 264, 272. II, 10.
Venedig, I, 12, 133, 140, 143, 144, 186. H, 174.
Vergennes, Graf, französischer Minister, I, 127, 149, 168, 172, 173,
185, 204, 269, 267, 278, 298. II, 14, 69.
Visconti, Filippo, Erzbischof von Mailand, I, 176, 189, 190.
Voss, Fräulein von, II, 68.
w.
Walkofsky, I, 339.
Warnsdorf, Friedrich Baron, I, 69, 87. II, 68, 76.
Wartensleben, Ludwig Wilhelm Graf, Feldmarschall -Lieutenant,
II, 182, 194, 332—336, 338-341, 343, 344, 346, 350.
Wassenaer, Graf, I, 29->.
Wolkonsky, Fürst, russischer Oberst. I, 2.
Woronzow, Alexander, Graf, I, 119, 247.
Woronzow, Simon Graf, I, 119.
Württemberg, Elisabeth, Prinzessin von, I, 13-15,26,33,37—44,
46, 48, 49, 52-55, 57, 58, 01—66, 68, 70, 71, 76, 76, 93, 94,
108, 111, 115, 118, 120—122, 130, 134, 136, 137, 147, 216, 217,
220, 223, 262, 263, 269, 284, 285, 320, 324—332, .339—343, 349,
353. II, 2, 4, 16, 22, 24-26, 44, 50, 79, 80, 166-159, 163, 241,
259, 260, 263, 267, 271, 272, 279, 293, 315, 321.
Württemberg, Engen, Herzog von, I, 116, 116.
Württemberg, Ferdinand, Prinz von, I, 61, 108, 285.
Württemberg, Friederike Dorothea Sophie, Prinzessin von, I, 14,
37-44, 46, 49, 62—64, 68, 61, 64, 65, 108, 121, 324, 325, 327,
329-332, 341—343.
Württemberg, Friedrich Eugen, Herzog von, I, 10, 14, 26,37—43,
46, 48, 62-54, 68, 61, 63, 65, 68, 70, 108, 325, 327, 329—332,
341-343.
Württemberg, Karl, Herzog von, I, 49, 54, 64, 68, 108-111, 329.
II, 147.
Württemberg, Ludwig, Herzog von, I, 116, 116.
Württemberg, Wilhelm, Hei zog von, I, 115, 116.
Yaci, Fürstin, I, 304. II, 21, 103.
Yorck, Herzog von, Cardinal, I, 160, 161.
Ypsilanti, Alexander, Hospodar der Walachei, I, 108. II, 333.
— 391 —
Z.
Zaccaria, Jesuit, 11^ 72.
Zehentner, Joseph von, Generalmajor, I, 237. TI, 327, 334, 3H.
Ziegenhaim, Zuckerbäcker, II, 10.
Zinzendorf, Karl. Graf, I, 21—23, 150.
Zweibrücken, Karl, Herzog von, I, 212, 220, 221, 228, 250, 256,
259, 261, 264, 265, 274, 277. II, 42.
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Druck von Ad'lf Holzhuusen in Wivn
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